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Fascicule IV
IMPRIMÉRIE OBERTHUR
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Pc 4 LTODES
DE
LÉPIDOPTÉROLOGIE
COMPARÉE,
CHARLES OBERTHUR
Fascicule IV
& G ex \È /
SE MATIN NAS
RENNES
IMPRIMERIE OBERTHÜR
Avril 1910
À mon cher petit-fils HENRT OBERTHUR,
a Paris.
C’est à toi que je dédie ce Livre.
Tu es l’aîné de mes petits-fils et tu as le goût inné de
l'Histoire Naturelle. Plusieurs fois, déjà, tu as été mon
aimable compagnon de chasse aux Papillons, dans les
landes de Monterfil, sur les falaises des côtes bretonnes,
dans nos champs et dans nos bois. De même que jadis
— il y a de cela plus d’un demi-siècle — mon cher grand-
père m'initiait à l'Entomologie dont la pratique a charmé
ma vie, ainsi Jéprouve à mon tour une Joie très douce à
te faire connaître, selon la mesure de mes moyens, au
cours des excursions que nous faisons ensemble, ce que
J'ai appris moi-même des choses de la Nature.
Aussi bien les ouvrages d’'Entomologie que je me plais
à publier au déclin de mon âge, prennent, dans ma pensée,
un caractère plus intime. Je me trouve heureux d'offrir à
mes amis et à mes collaborateurs, un nombre d'exemplaires
plus grand que je n’en livre à la Librairie, pour des lecteurs
inconnus. Sans négliger le côté scientifique, but essentiel
de mes travaux, je recueille volontiers mes souvenirs et
j'aime à rendre hommage à la mémoire d’amis qui ne sont
8 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
plus. Puis, lorsque je compare entre elles les séries de
papillons rangés dans mes boîtes, si j'ai devant les yeux
un exemplaire récolté par moi-même, aussitôt, grâce à une
association des idées qui se pressent dans mon esprit, non
seulement, je me représente, en même temps que l’insecte,
l’image du pays où je lai capturé, mais encore la vision
de mes compagnons de chasse vient agréablement animer
le souvenir de ce paysage et le compléter.
C’est ainsi qu'en écrivant la notice concernant la
Lycaena Ægon, je me suis immédiatement reporté aux
jours heureux du dernier été. Vers la fin de juillet 1909,
nous nous trouvions à Cancale ensemble, mon cher petit-
fils, et tu m'accompagnais souvent à la chasse aux
Papillons. Une fois, un peu avant le soir d’une journée
qui fut pleine de soleil, nous trouvant, tous les deux, sur
la haute falaise, au voisinage de la pointe du Grouin,
marchant, l’un auprès de l’autre, pour faire lever les Pha-
lènes abritées dans les touffes de bruyère et d’ajonc, nous
pénétrâmes dans une lande dont l’aspect me parut propice
à l'habitat de la Zycaena Ægon. Te souviens-tu que je
te fis part de mon impression, tout en observant que jamais
encore, sur la côte de la Manche, je n’avais rencontré cette
espèce pourtant si abondante dans les bois et les landes
de l’intérieur du pays, ainsi que sur la côte méridionale
de la presqu’ile armoricaine? Quelques instants plus tard,
un petit papillon bleu, dérangé par nos pas, s’envolait
devant nous. La brise était un peu forte et le souffle du
« Noroï » emportait la légère et fragile Zycaena. Tu pus
cependant la capturer, avant qu'elle ne réussit à s’enfoncer
dans un massif de grands ajoncs sur lesquels elle venait
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 9
enfin de se reposer. C'était bien la Lycaena Ægon et ma
prévision basée sur l'aspect de la localité, n'avait pas été
une illusion.
Les jours suivants, nous revinmes au même lieu d'où
l’on domine la mer d'émeraude que parcourent sans cesse
les bateaux aux blanches voiles des hardis pêcheurs can-
calais. Nous capturâmes de nouveau des exemplaires de
la Lycaena Ægon et la première femelle bleue que nous
recueillimes, se trouve représentée sur l’une des Planches
de cet ouvrage.
Nous avons soigneusement exploré ensemble toute
cette pittoresque falaise qui était couverte de bruyères et
d’ajoncs en fleurs. Quelquefois, nous nous arrêtions dans
notre chasse et nous contemplions le superbe et immense
panorama que dominaient nos yeux. Vers le Nord, ce
sont les îles Chausey dont le nombreux Archipel limite
l’horizon ; du côté de l'Orient, tout près de la côte, c’est
le chaos rocheux de l'ile des Landes; plus au loin le phare
de la Pierre et enfin la côte normande avec Granville et
Saint-Pair; vers le Sud-Est, le fort et les rochers de
Cancale apparaissent près de la pointe des Rimains, tandis
qu’au fond de la baie, Tombelaine et le Mont Saint-Michel
semblent dresser leur masse de pierre au milieu des flots.
Au couchant qui s'empourpre si magnifiquement des feux
du soir, la côte se trouve découpée par ses nombreux
promontoires d'aspect sévère et ses grèves de sable d'un
jaune rosé, toujours frangées d’écume blanche. Et tout au
loin, au delà de la contrée malouine et dinardaise, la masse
imposante du Cap Fréhel, aux parois verticales, changeant
de couleur avec les heures du jour, tantôt grise ou bleue,
10 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
tantôt violette ou noirâtre, est la dernière terre que l’on
puisse apercevoir.
Nous avons également, l’un et l’autre, foulé de nos pas
le plateau de ce Cap aride et nous avons respiré le parfum
du serpolet qui couvre de ses fleurs couleur de lilas, les
bords pierreux des sentiers. Sur ces grands espaces où le
vent s'oppose à la végétation des arbres, mais que les {/lex
europœus et nanus mélangés à nos quatre espèces de
bruyères: ciliaris, Letralix, cinerea et vulgaris, couvrent
d’une verdure persistante si gracieusement fleurie de jaune
d'or et de violet rose depuis la fin du printemps jusqu'aux
premières semaines de l'été, nous avons récolté le Satyrus
Semele dont je te faisais remarquer les intéressantes
variations, ainsi que les grandes Argynnes nacrées souvent
nombreuses au bord de la mer.
« En ce monde où tout change sans cesse », comme un
de nos Poètes l’a dit avec tant de vérité, les plaisirs de
l'été passent rapides et le mélancolique automne sépare
les familles que les beaux jours de l’année avaient réunies.
Tu as repris à Paris le cours de tes études sérieuses, en
vue de préparer ta carrière. Je pense affectueusement à
toi, mon cher petit-fils, avec l’espérance que tu transmettras
aux petits enfants qui naïîtront plus tard, lorsque je ne
serai plus, la tradition familiale que m'ont laissée nos
ancêtres, ceux dont tu n'as pu connaître les sentiments
que par la communication de mes souvenirs pieusement
conservés dans mon cœur.
Je souhaite que les circonstances te permettent de rester
toujours un Entomologiste fervent. Au milieu des diff-
cultés incessantes de la vie, 1l est bien doux de pouvoir
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE II
se concentrer parfois dans une étude qui nous repose,
en nous faisant momentanément oublier les noirs soucis.
L'Entomologie nous vaut des amitiés fidèles ; cest
une consolation qui réconforte puissamment aux Jours
d’épreuve. Elle nous porte à apprécier et à aimer toujours
davantage la Nature, œuvre du Très-Haut.
J'ai appris de mes parents et des maitres qu'ils m'ont
donnés dans ma jeunesse, qu'il n’y a point d'effet sans
cause et que la Création dont nous sommes les témoins,
est l'effet de la puissance infinie de Celui-là seul qui
résume en lui-même toutes les perfections, qui n'a Jamais
commencé et qui ne finira jamais. Ce que nous étudions
dans ces papillons si délicats, si charmants et si variés,
c’est une partie infime sans doute, mais cependant mer-
veilleuse de l’œuvre de Dieu, seul Auteur de la vie,
Ordonnateur, Classificateur et Législateur de tous les
Mondes. C’est le plan divin de la Création dont nous
essayons de percevoir quelque parcelle. Regarde le Sys/era
Nature, chef-d'œuvre du grand Linné, dont l'esprit syn-
thétique a inventé la méthode qui reste toujours la base du
progrès accompli depuis un siècle et demi dans les sciences
naturelles. Ouvre ce livre si estimable dans sa simplicité
et dans la rectitude de son ensemble et glorifie avec Linné,
le Seigneur, notre Dieu, source de tout bien, de tout
dévouement, de toute noble inspiration, de toute haute
pensée.
« Finis Creationis telluris est gloria Dei » est-il dit dans
V/ntroitus de la X° édition du Systema Nature. Je pense,
à ce point de vue, comme pensait Linné; nos ancêtres
pensaient de même. Garde nos convictions ; que ta pensée
12 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
reste toujours libre et indépendante, sans se laisser impres-
sionner par les erreurs en vogue dans le moment. Car il y
a une mode pour les faux systèmes, pour les préjugés,
comme pour autre chose.
Jignore s’il me sera donné de terminer l’œuvre d’'Ento-
mologie que J'ai entreprise ; je voudrais achever de publier
ce que je sais, d’après les documents que j'ai recueillis,
sur les Lépidoptères français et algériens, comparés dans
leurs formes et dans leurs races, aux exemplaires de même
Espèce répandus plus ou moins abondamment çà et là,
en certaines parties de l’Europe, de PÂsie, de l'Afrique et
même de l'Amérique du Nord. Je compte du moins consa-
crer à ce travail tous mes loisirs de lhiver. Mais quand
reviendront les beaux jours, je désire encore goûter le
plaisir de chasser les Papillons avec toi. Lorsque nous nous
reposerons en face d’un site grandiose, jouissant d’une vue
lointaine qui s’étendra devant nous, je remercierai Dieu,
Créateur et Père, qui me donnera encore la joie d'admirer
les beautés de la Nature, en compagnie de l’un de ceux
qui me sont si chers et qui continueront et garderont
fidèlement, je l'espère, avec une conviction profonde et
une fermeté inébranlable, les saintes croyances et les res-
pectables traditions des aïeux.
Rennes, 19 Décembre 1900.
CHarLes OBERTHÜR.
LÉPIDOPTEROLOGIE
COMPARÉE
Notes pour servir à établir la Faune Française
et Algérienne des Lépidoptères
(Suite).
(Voir, pour le commencement, la livraison IT).
R'HOPAEOICGER*
Cœnonympha Iphis, Huebner.
Espèce de plaine et de montagne; affectionne les prairies;
manque en Angleterre; ne se trouve ni dans l'Ouest de la France,
ni en Algérie; répandue depuis la Champagne, la Franche-Comté
et la Bourgogne jusqu'en Sibérie; habite les Alpes françaises où
elle s'élève à une altitude de plus de 2,000 mètres et les Pyrénées-
Orientales, notamment autour de Montlouis-sur-Tet et de Mantet,
entre 1.500 et 1,700 mètres.
La forme champenoise d'/phis m'est connue par des exemplaires
que M. H. Powell a recueillis le 18 juin 1909, aux environs de
Lusigny (Aube). D'après ce que M. H. Powell m'a mandé au sujet
d'Iphis et de la localité où il a rencontré cette espèce, Lusigny est
16 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
un village situé au milieu d’un terrain plat et riche, parsemé de
villas, entrecoupé de forêts et de prairies souvent humides et maré-
cageuses. C’est dans l’un de ces prés, très fleuri de marguerites,
à la sortie de Lusigny; un peu après la traversée de la rivière, que
volait Cænonympha lphis. Dans la race champenoise, le dessous
des ailes inférieures, même chez le GC, est bien ocellé et la liture
plombée submarginale se trouve très apparente.
En Bourgogne, d’après les documents contenus dans la collec-
tion Bellier, Zphis est de grande taille, d’un brun rougeûtre clair
en dessus, bien ocellé en dessous; les © ont même un ocelle noir
cerclé de jaune et pupillé d'argent vers l’apex des ailes supérieures;
mais la liture submarginale argentée n'est bien indiquée que chez
les ©. Malheureusement Bellier a négligé de faire connaître de
quelle partie de la Bourgogne proviennent ses /#kis et je ne puis
que regretter l'absence de ce renseignement essentiel.
La forme d’/#his que je possède de Morteau (Doubs), ressemble
beaucoup à celle de Lusigny; mais on rencontre en Franche-Comté,
sans doute par aberration, des /pkis G absolument dépourvus en
dessous de toute ocellation et privés de la liture submarginale
argentée. Le fond des ailes inférieures, en dessous, est brun rou-
geâtre vers la base et gris vers le bord extérieur, éclairé seulement
de quelques macules médianes blanches.
Dans les Pyrénées-Orientales, / pis a généralement les ailes infé-
rieures en dessous, pourvues de six ocelles noirs cerclés de jaune
et pupillés de blanc; celui qui est le plus voisin du bord costal
est le plus gros de la série; le second est plus petit; les trois autres
sont de taille assez égale; le dernier, près de l’angle anal, est très
petit et souvent semblable au second.
Iphis vole depuis la fin de juin jusqu’au 20 juillet environ, dans
les prairies élevées autour de Montlouis, notamment au sud du
village de la Cabanasse, en lisière de la forêt qui s'élève sur les
pentes de la montagne du Cambrès d’Ase. Chez certaines Q pyré-
néennes, les ailes inférieures, en dessus, sont ornées de petits ocelles
fauves ressortant sur le fond gris noirâtre des ailes et transpa-
raissant du dessous. La figure 250 donnée par Huebner contient
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 17
cette particularité. D'ailleurs les papillons représentés par cet Ico-
nographe (©, n° 249; © n° 250 et 251) semblent bien conformes
aux /phis des Pyrénées-Orientales.
C'est dans les Alpes françaises que la race d’/phis se distingue
par l'absence de toute ocellation et la suppression de la liture
submarginale argentée. Guenée, dans sa collection, avait appelé
Belisaria la forme aveugle d'Zphis qu'il avait capturée aux environs
de La Grave (Hautes-Alpes), en 1850. J'ai observé cette race Beli-
saria sur les prairies alpestres du Lautaret, du 15 au 21 juillet
1006; le Cænonympha Iphis était assez commun au milieu des
pelouses du Lautaret dont le charme est rendu si sensible par
l'abondance et la variété des fleurs. Le col du Lautaret est, depuis
la fin de juin jusqu'à la fin de juillet, le plus délicieux jardin
naturel alpin que nous offrent nos montagnes et je ne sais rien
de plus joli et de plus attrayant que cette succession de pelouses
ondulées au milieu desquelles des tapis de fleurs aux couleurs les
plus variées ne cessent de solliciter l'admiration du voyageur.
Les papillons volent en foule au travers de ces prés dont le sol
tantôt sec et escarpé, tantôt arrosé par des ruisseaux qui s’entre-
croisent, convient à une faune presque aussi variée que la flore.
Le Cœnonympha Philea-Satyrion sy trouve dans les mêmes
lieux que son congénère / pis. Sans doute les deux espèces doivent
s'hybrider; mais je n'ai cependant vu aucun accouplement de
papillons des deux espèces, bien que je me sois préoccupé d'en
rechercher. |
La var. carpathica, Hormuz : « alis non ocellatis, vel al. post.
ocellis subnullis; plerumque minor », suivant les termes du Catalog
Staudinger et Rebel 1001, paraît, d'après la diagnose ci-dessus
rapportée, être la même que la variété aveugle du Lautaret. Cepen-
dant je n'ai pas eu occasion de voir /phis des montagnes de la
Bucovine et j'ignore s'il y a quelque particularité susceptible de
le distinguer de celui de nos Alpes.
Le D" Siépi a rencontré /phis aux environs du Monetier-de-
Briançon et M. Powell l’a trouvé au Mont-Pelat (Basses-Alpes),
le 27 juillet 1906, et sur les pentes du Lausson (Alpes-Maritimes),
D
18 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
le 4 août 10906. Les chasseurs Coulet, de Digne, ent pris également
Iphis à Enchastrayes, en juillet 1806 et à Larche, en août 1806
et en juillet 1807; mon frère l’a rapporté d'Ecclepans, en Suisse.
Dans les départements des Hautes et Basses-Alpes et des Alpes-
Maritimes, /#his est semblable à la variété carpathica, Hormuz
(Belisaria, Guenée, i7 Mus. du Lautaret). Je possède un seul G
d'Ecclepans dont l’ocellation est plus accentuée; mais je ne suis
pas assez documenté sur la forme de cette localité, pour en disserter.
L'ocellation est extrêmement apparente chez la variété 7 picles,
SET, 10e S1IDÈNE:
Quant à Mahometana, Alph, que j'ai reçue du Fort-Naryne
(Prov. Semirechgensee), dans le Turkestan oriental, le dessous est
très peu ocellé; mais la teinte générale gris clair du dessous des
ailes et uniformément brun noirâtre du dessus, avec une frange
d'un blanc assez pur, la caractérise tellement que je suis porté à
considérer Mahometana, non comme une variété, mais comme une
espèce spéciale et distincte d’Zphis.
Cœnonympha Iphioides, Ster.
Répandue en Espagne centrale, à Cuenca, à Brañuelas, à la
Granja où MM. George Charles Champion et D' Thomas
Algernon Chapman l'ont trouvée à une hauteur de 5,000 à
6,500 pieds, depuis le 23 juillet au 3 août 1004. Avant ces dis-
tingués Entomologistes anglais, leur intrépide compatriote,
M° de la Bâtie Nicholl, voyageant en Aragon et en Castille,
pendant les mois de juin et juillet 1897, avait capturé la Cæno-
nympha Tphioides « fying over a wet field in the Tagus valley
in some numbers ». M"* de la Bâtie Nicholl ajoute les observations
suivantes (7 ransactions of the entomological Society of London,
1897, p. 428) : « This was described by D' Staudinger as a
variety of C. Zphis, W. V. (= Amyntas, Poda, wich is the older
name); it differs however, from C. Awynthas (Iphis) in having
the ocelli on the underside of the hindwimg evenly disposed,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 19
whild in that species the ocellus above vein 3 1s displaced inwards;
also there are no white blotches in the inner side of the series of
ocelli; these differences seem perfectly constant, and there can be
little doubt that it is a distinct species. It is also closely allied to
C. Leander, Esp., from Russia and Hungary, but differs from it
in having an orange terminal line on the underside of the
forewing, and in having a silvery line on the inner side of the
terminal orange line of the hindwing instead of one the outer
side. »
Voici la traduction française de ces observations, dont Je suis
redevable à M. Harold Powell :
« À été décrite par le D' Staudinger comme variété de C. Zp/us,
W. V. (= Amyntas, Poda, qui est le nom le plus ancien); elle
diffère cependant de C. Awyntas (Iphis) par la disposition égale
des ocelles sur l’aile inférieure en dessous, tandis que dans cette
espèce (Awyutas) l’ocelle qui se trouve au-dessus de la veine 3
est déplacé vers l’intérieur ; de plus, il n'y a pas de taches blanches
du côté intérieur de la série d’ocelles; ces différences paraissent
parfaitement constantes, et on ne peut guère douter que l'espèce
soit distincte. Elle est également très voisine de C. Zeander, Esp.
de Russie et de Hongrie, mais elle en diffère par la présence d’une
ligne orangée terminale sur le dessous de l'aile supérieure, et d'une
ligne argentée qui, au lieu d’être du côté extérieur de la ligne
orangée terminale de l'aile inférieure, se trouve du côté intérieur
de cette ligne. »
Cœnonympha Arcanioïdes, Pierret.
C'est dans les Annales de la Société entomol. de France,
année 1837, que Pierret a figuré sous le n° 5 de la PI 12 et décrit
aux pages 306 et 307, le Satyrus Arcanioïdes, d'après un exem-
plaire d', seul sexe qu’il connût alors, provenant d'Oran, en Bar-
barie.
20 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
L'espèce est répandue en Algérie et en Tunisie, notamment près
du littoral méditerranéen; elle éclôt une première fois depuis la
fin de l'hiver jusqu'au commencement de l'été, plus tôt ou plus
tard, suivant l'altitude, et une seconde fois à la fin d'août et en
septembre. M. Holl a observé à Maison-Carrée la seconde appa-
rition du Cænonympha Arcanioïdes et a bien voulu m'offrir
quelques exemplaires de la génération de fin d'été. Les papillons
sont plus petits et plus obscurs en septembre qu'au printemps; sur
les ailes supérieures en dessus, l’espace fauve se trouve très réduit
et le dessous des ailes est plus foncé. J'ai distingué la seconde
génération d’'Arcanioïdes sous le nom de Æolli.
Ma collection contient des Aycanioïdes provenant des localités
suivantes : Cap Aokas (Dayrem; avril 1909); Hamman-Rhira
(Dayrem; mai 1909); Philippeville (Merkl; avril 1884); Bône
(D' Vallantin et Merkl; juin 1884); Djurjura (Merkl; juillet
1884); Rovigo (Holl; mai 1007); Lambèze (avril et juin 1884);
Nemours (Gaston Allard, en avril); Arzew (fin de mars); Sebdou
(Powell; mai 1907); Tunisie (V. Faroult); Oran (D' Codet; fin
février 1870); Maison-Carrée (Holl; 31 août, 4 et 18 septembre
1008). De plus, les collections Boisduval, Guenée, de Graslin,
Kuwert renfermaient des exemplaires d'Alger et probablement de
Collo.
L'ocelle apical noir de l’aile supérieure, en dessous, est relati-
vement très gros chez Acanioïdes. T1 est cerclé de jaune et pupillé
de blanc. Aux ailes inférieures, en dessous, la tache ocellée qui,
chez A7canius, se remarque isolée, près du bord costal, manque dans
Arcanioïides. On remarque seulement chez le Cenonympha algérien,
une série de 5 petits ocelles intranervuraux, de taille assez égale,
régulièrement rangés entre la liture submarginale argentée et
l'éclaircie blanche médiane laquelle est de forme plus ou moins
irrégulière et quelquefois presque linéaire, descendant sinueuse du
bord costal au bord anal des ailes inférieures, en dessous. Sur le
dessus des mêmes ailes, on voit parfois transparaître du dessous
une série d’ocelles jaunes pupillés de noir.
L’ocelle apical noir du dessous des ailes supérieures peut se
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 21
trouver, mais très rarement, suivi un peu plus bas d’un second
ocelle noir plus petit, mais également cerclé de Jaune et pupillé
de blanc. Cette variation &zocellata atteint les deux sexes. Je
possède une Q de Lambèze chez laquelle la biocellation ne se
remarque que d’un seul côté des ailes.
Dans le Catalogue of Diurnal Lepidoptera of the family Saty-
ride in the Collection of the British Museum by Arthur Gardiner
Butler (London, 1868), l’auteur anglais qui fut, comme l'on sait,
très fécond, insère à la page 41, dans la mention relative à Cæno-
nympha Arcanioides, la notice suivante : « Local form. ? Papilio
(Hipparchia) arcanoides (sic), Freyer, Neuere Beitraege, V, p. 125;
n. 816, tab. 457, n. 1 (1845). Switzerland (Freyer). B. M. It is
quite likely that the Swiss specimens may be a race of arcanioïdes;
they do not, howewer, agree with the figure of that species in all
respects. We have an insect from Algeria, which Mr. Adam White
had labelled as this species; but it more nearly resembles A7cania,
and is probably distinct from both. ».
Il est aisé de voir d’après les lignes qui précèdent que Butler ne
connaissait point, avec certitude, le véritable Arcamoïdes. Il ne
l'indique du reste pas dans la collection du British Museum, comme
venant d'Algérie, contrée qui est la patrie exclusive d’Arcantoides,
mais comme originaire de Suisse. L'opinion que vraisemblablement
les spécimens de Suisse peuvent être une race d'Acantoïdes est
tout à fait erronée; d’ailleurs Butler reconnaît que les spécimens
de Suisse ne concordent pas sous tous les rapports avec la figure
d'Arcanioïdes; quant à l’insecte d'Algérie (ou supposé algérien ?)
et étiqueté Arcanioïdes par M. Adam White, Butler dit qu'il res-
semble davantage à A7cania, dont il est plus voisin, tout en étant
probablement distinct des deux. La question semble donc être
restée bien confuse pour M. Butler et l'erreur d'indication de localité
commise par Freyer a contribué à cette confusion.
En Suisse, on trouve les Cæenonympha Arcanius, Darwiniana et
Philea-Satyrion. Mais ces Satyridæ sont certainement spécifique-
ment distincts d'Arcanioides et aucun d'eux ne peut être considéré
comme une race de l'espèce algérienne. Freyer, cité par Butler,
[e)
[ee
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
comme il est dit ci-dessus, figure sous le n° 1 de la Tab. 457, un
véritable Ayrcanioïdes, qu'il appelle à tort Arcanoides. Dans son
texte, on lit (p. 125) que M. von Weissenborn à qui Freyer est
redevable de communications si intéressantes, lui a envoyé les
deux sexes du papillon dont il est cas, en observant qu'il avait
reçu de Suisse, deux paires semblables, sous le même nom.
L'erreur de localité, relatée par Freyer, est évidente et elle a
contribué comme je le dis ci-dessus, à mettre Butler dans l'embarras;
mais ledit Freyer est coutumier du fait et il ne convient d'attribuer
qu'une confiance modérée à ses assertions, en ce qui regarde la
provenance des papillons qu'il figure. Freyer a pour excuse de
n'avoir pas attendu pour venir au monde, l'époque fortunée où
chaque Allemand, en naissant, est déjà professeur de géographie.
C'est en effet le même Freyer qui prétend dans ses VWeuere Batrege
(vol. V; p. 76) que la Zygæna Favonia dont il donne la figure
sous le n° 1 de la PL 428, a été trouvée en Turquie par le
D' Wagner. Ceci est encore une méprise que je ne suis pas seul
à avoir constatée. En effet, feu Otto Staudinger, après son voyage
en Algérie, publia dans Berliner entom. Zeits. (Bd. XXXT; 1887;
Heft I, p. 29-42) un travail sur quelques nouvelles Espèces et
Variétés des Genres Sesia et Zygæna; et s'occupant dans cet
opuscule de la Zygæna Favonia que Freyer, le premier, a figurée
et décrite, Staudinger à propos de l'indication erronée de localité
donnée par Freyer, sut trouver une raison tout au moins originale,
pour excuser Freyer qui avait donné la Turquie, pour patrie à cette
Zygæna, au lieu de l'Algérie. Le vieux honorable M. Freyer, dit
Staudinger, à cause de la même religion mahométane des deux
pays en question (Turquie et Algérie) a fait à leur endroit une
confusion. « und wird der alte ehrenwerthe Herr Freyer, der
gleichen muhamedanischen Religion der betreffenden Laender
wegen, hier dieselben verwechselt haben ».
Le docteur Moritz Wagner, qui a découvert la Zygæna Favonia
en Algérie, avait effectué un voyage dans cette contrée pendant
les années de guerre et de conquête; 1836, 1837 et 1838. Wagner
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 23
était un historien et un naturaliste; 1l écrivit une relation de son
voyage qui fut publiée à Leipzig en 1841 et porte une dédicace
à Son Altesse Royale Ferdinand-Philippe-Louis, Duc d'Orléans
(Seiner Kæniglichen Hoheit Ferdinand Philipp Ludwig, Herzog
von Orleans, etc., etc., etc.). On peut y lire le récit de l'expédition
vers Constantine et de la prise de cette ville en 1837, des détails
sur la mort du général Damrémont et du colonel Combes, une
foule de considérations ethnographiques et militaires, des notices
biographiques sur des chefs arabes, ainsi que des aperçus sur la
faune de la Barbarie. On trouve, entre autres documents d’histoire
naturelle, dans l'ouvrage intitulé : Xetsen in der Regentschaft
Alger von D. Moritz Wagner et sous le titre : Ueber die Schmetter-
linge der Regentschaft Algier mit besonderer Beruecksichtigung
threr geographischen Verbreitung (p. 195-210) une notice sur les
papillons observés en Algérie par l’Auteur. Les fautes de déter-
mination sont nombreuses. On en jugera pour les Zygæna par les
lignes suivantes (p. 205) : « Eine seltene und schœne Art der den
Uebergang von den Tagfaltern zu den Schwaermern bildenden
Gattung Zygæna ist Z. Milaris, welche Graf von Hoffmansege in
Portugal gefunden. Z. Sarpedon hat die Regentschaft Algier mit
Italien, Sudfrankreich, Spanien und die bekanntere Meliloti mit
dem ganzen gemaessigten Europa gemein. »
Pas plus Æilaris que Sarpedon et Meliloti ne se trouvent en
Algérie et c’est cette fausse Sarpedon, plus tard reconnue pour être
une espèce spéciale et distincte, que Freyer a distinguée sous le
nom de Favonia, en la comparant d’ailleurs à Sarpedon et en lui
donnant la Turquie, au lieu de l'Algérie, pour patrie!
Cœnonympha Arcanius, Linné.
Décrit par Linné, dans les termes suivants qui sont bien
sommaires, mais n'ont cependant pas donné lieu à synonymie :
« A7cantus, 242. P. alis integerrimis ferrugineis : subtus anterio-
ribus ocello unico ; posterioribus quinis : primo fascia remoto.
Habitat in Europæ pratis silvaticis. Larva viridis : lineis dorsa-
24 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
lhbus obscurioribus lateralibus flavis, cauda bidentata. » (Carol
a Linné Systema Naturæ. Tom I. Pars V, p. 2.286).
L'espèce manque en Angleterre; elle est généralement commune
en France où on la voit voler depuis la fin de mai jusqu’à la fin
de juillet, suivant les années et les localités. Ma collection contient
des exemplaires provenant de la forêt de Rennes où elle fréquente
les clairières et les allées herbues, à la fin de juin, de Bourg-des-
Comptes (Ille-et-Vilaine) où je l'ai trouvée dans les champs
d'ajonc; de Cancale, sur les bords de la Manche; des landes de
Milly (Maine-et-Loire); de Charroux (Vienne); de Dompierre-sur-
Mer (Charente-Inférieure); d'Angoulême, où elle paraît dès la fin
de mai, mais est surtout abondante en juin; de Samoussy (Aisne);
de Lusigny (Aube); de Montigny-Beauchamps, de Lardy et des
bois situés entre Sèvres et Versailles (Seine-et-Oise); d'Evreux; du
Saut-du-Doubs; d'Uriage (Isère); de Florac (Lozère); d’Aix-les-
Bains (Savoie); du Mont Gourdon, de Garamagne, d'Entrevaux et
de Digne (Basses-Alpes); de Menton, Puget-Théniers, Escarène et
Levens (Alpes-Maritimes); de la Sainte-Baume (Var); des envi-
rons de Marseille; de Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales); de
Cauterets (Hautes-Pyrénées).
Je possède aussi des exemplaires de Coburg, de Silésie; de
Bohême; d'Autriche; de Florence, où je l’ai prise en juin 1007,
dans les petits bois de chêne voisins de la Poudrière; de l'Italie
méridionale; de Grèce; de Broussa, en Asie-Mineure; de Crevola,
où se trouve la plus grande race jusqu'ici connue et appelée :
insubrica, Raetzer. J'ai figuré cette variété qui habite Crevola et
le versant méridional du Simplon, près de Laquinthal, dans la
1e livraison des Ætudes de Lépidoptérologie comparée, d'après
des documents dont je suis redevable à feu mon ami le chanoine
E. Favre, l’auteur de la Faune des Macro-Lépidopières du Valais,
ouvrage publié en 1800, avec la collaboration d’Arnold Wull-
schlegel.
Arcanius est une espèce des plaines et des basses montagnes.
Esper a figuré sous le n° 4 de la Tab. XXI, la forme la plus
ordinaire, c’est-à-dire celle dont les ailes inférieures, en dessus,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 2
Un
sont uniformément d'un gris noirâtre, sans aucune éclaircie médiane
de couleur fauve; mais Huebner a figuré sous le n° 240, un Ayca-
nius dont les ailes inférieures, en dessus, montrent une tache fauve
médiane assez grande et très caractérisée.
Cet Arcanius 3 figuré par Huebner, se rencontre à ma connais-
sance, surtout aux environs de Samoussy (Aisne) où M. Harold
Powell et mon frère, en compagnie de M. Henry Brown, le captu-
rèrent, le 13 juin 10009. Cependant, bien qu'une dizaine de Œ' pris
à Samoussy soient pourvus de cette éclaircie fauve plus ou moins
accentuée, sur le disque des ailes inférieures, en dessus, un nombre
plus grand d'Arcanius ©, également trouvés le même Jour, à
Samoussy, sont dépourvus de cette tache fauve et montrent le
dessus de leurs ailes inférieures entièrement et uniformément noi-
râtre. Il résulte de cette constatation qu'à Samoussy, les exemplaires
Œ d’Arcanius, dont l'aile inférieure est maculée de fauve, peuvent
être considérés comme l'expression d’une variété plus ou moins
abondante et non comme la forme géographique normale du lieu.
J'ai désigné sous le nom de Æuebneri, la variété C' portant une
éclaircie fauve sur le disque des ailes inférieures, telle que l'a
figurée Huebner; mais j'ignore d'où provient le C' figuré par
Huebner, sous le n° 240. Est-ce un exemplaire aberrant? Est-ce
plutôt le représentant d'une race locale offrant le plus généralement
la particularité d’être maculée de fauve sur la partie médiane des
ailes inférieures, en dessus ? Je ne puis le savoir. Toutefois, Je
remarque dans ma collection que cette variété Azebneri peut s'ob-
server dans des localités très distinctes. En effet, j'ai sous les yeux
un Azcanius ©, pris au cours d’une chasse à Roccaraso et Palena,
dans l'Italie méridionale, à la fin de juillet 1907, par M. Fabresse
et un autre G capturé aux environs de Menton, dans les Alpes-
Maritimes, en 1907, par M. Decoster, présentant l’un et l’autre une
éclaircie fauve peu développée, mais très apparente sur le disque
des ailes inférieures, en dessus. Ces deux A7canius peuvent être
rattachés à la variété Huebneri. Par ailleurs, je n’ai jamais observé
d'Arcanius tendant à la variété Huebneri. En Bretagne et à Cau-
terets, Arcanius a la couleur fauve plus foncée et plus brune que
26 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
dans les autres localités, notamment qu'aux environs de Paris, en
Charente et dans les Pyrénées-Orientales; mais cet assombrissement
général de la teinte fauve aux environs de Rennes et de Cauterets,
bien qu'il soit parfois tel que sur la surface des quatre ailes, il
reste à peine, aux supérieures, une faible éclaircie fauve, près de la
base, ne me semble pas mériter d’être l'objet d'une appellation
particuhère. Les Naturalistes de l'Ecole Fruhstorfer en jugeront
peut-être autrement; mais Je leur laisse le soin de créer un quali-
ficatif nouveau pour désigner la race obscure de Cæenonympha
Aycanius à Rennes et à Cauterets, si cela leur est agréable.
On trouve exceptionnellement çà et là des exemplaires d’un
fauve pâle; mais il existe une Aberration dans laquelle la couleur
fauve est remplacée par une teinte d'un blanc jaunâtre très clair;
les deux sexes d'Arcanius peuvent être atteints de cet albinisme et
ma collection contient de l’Aberration que j'appelle Dupuyi, en
l'honneur de mon ami Gabriel Dupuy qui l’a trouvée plusieurs fois
a Angoulême, 5 individus venant de Silésie, de Bohème, de Breslau
et de la Charente, c'est-à-dire de contrées bien éloignées les unes
des autres, mais où se reproduit exactement la même variation. Je
fais figurer (PL XXXVII; fig. 233 et 234) deux échantillons GO
et Q de l'Ab. Dupuy.
Par ailleurs, c’est dans l’ocellation de ses ailes que varie Ay7ca-
nus.
D'après Linné, la forme qu'il décrit et qui est par conséquent la
forme type, a un ocelle apical aux ailes supérieures en dessous et
cinq ocelles aux inférieures, dont le premier est éloigné des autres.
Il est fréquent de trouver des Aycanius privés de l’ocelle apical;
ainsi dans la Charente, l'absence de cet ocelle apical des supérieures
n'est pas rare. Inversement l’ocelle apical peut être suivi d’une
seconde tache ocellée contiguë à la première, et même d’une troi-
sième; celle-ci très réduite généralement. Une Q d'Allemagne
(Collection Kuwert) possède 3 taches ainsi définies.
Aux ailes inférieures, la série des quatre ocelles qui est plus
souvent portée à cinq, peut se trouver réduite à trois et même à
deux. Lepelletier de Saint-Fargeau publie sous le n° 5 de la PI. 7,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 27
le dessous d'un A7camus dont les ailes inférieures présentent, en
outre de l'ocelle costal, deux gros ocelles de la série submarginale,
situés entre deux très petits. Tous les ocelles peuvent même dis-
paraître, comme dans l'Ab. cœca dont je publie la figure
(PI. XXXVIT, fig. 235) d'après une © venant de Vienne, en
Autriche. L'ocelle supérieur et isolé des ailes inférieures, en dessous,
peut aussi manquer, alors qu'une série des ocelles submarginaux
subsiste. Je possède un C' pris à Crevola (PI. XXXVIT; fig. 232),
chez lequel manquent l’ocelle apical des supérieures et, ce qui paraît
extrèmement rare, le gros ocelle costal des inférieures; mais 1l reste
aux inférieures une série de 3 ocelles submarginaux, contigus, de
grande dimension.
Tous les ocelles du dessous peuvent transparaître en dessus, sous
forme d’un petit anneau fauve centralement ponctué de noir. La
figure d’Acanius © donnée par Huebner, sous le n° 242, représente
cette particularité. Elle est plus fréquente dans les régions chaudes
et méridionales. Le GO est ordinairement moins favorisé que la ©,
au point de vue de la reproduction en dessus des taches ocellées
du dessous et le plus souvent, on ne voit ressortir chez le G' que
la tache ocellée apicale des ailes supérieures. Cependant je possède
un © de Grèce, présentant sur les inférieures, en dessus, une série
de 4 ocelles submarginaux transparaissant du dessous. Ce sont sur-
tout les Q qui montrent, en dessus, une reproduction plus complète
et mieux marquée des taches ocellées du dessous.
Je possède des Q capturées dans la Lozère, les Pyrénées-
Orientales, la Savoie et la Charente conformes à la figure 242 de
Huebner.
La liture marginale argentée fait quelquefois défaut, surtout
aux ailes supérieures, chez les ©.
Le P. Engramelle a publié la figure de l’Arcanius, sous le nom
de Céphale (PI. XXIX; fig. 57a et 57 6). Le papillon qu'il indique
comme variété de Céphale, sous les n° 57c et 57 d est l'Iphis.
28 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Cœnonympha Darwiniana, Ster.
Mon frère a rapporté de Fusio, où il avait trouvé Darwiniana,
du 10 au 14 juillet 1907, volant dans de hauts pâturages, fré-
quentés par la Colias Phicomone, une longue série d'exemplaires
conformes aux figures données par Herrich-Schaeffer, sous les
n°* 180 et 187, avec le nom d’Arcanius var. M. Wullschlegel m'a
envoyé une série d'exemplaires capturés en 1909 dans la vallée de
Saas, au Valais. Lang a représenté le même Cænonympha, mais
avec une coloration beaucoup trop pâle, sous le n° 5 de la
PI LXXV et avec le nom de var. Darwiniana, Stgr. La bande
blanche du dessous des ailes inférieures est très réduite chez Darwri-
niana; les taches ocellées d’un noir vif, centralement pupillées de
blanc, sont entourées d’un cercle jaune plutôt qu'orangé et l’ocelle
costal des inférieures paraît plus rapproché de la série des 4 ou
5 ocelles submarginaux que chez l'Arcanius de nos plaines ou de
nos basses montagnes. Il y a chez Darwiniana, comme chez
Aycanius, une variété oôsoleta, Tutt, caractérisée par « disappear-
rance of apical spot un. s. f. w. », suivant George Wheeler, dans
the Butterflies of Switzerland (p. 118). Le nombre des taches
ocellées aux ailes inférieures en dessous, est, tout compris, de 5
ou 6; mais certaines taches, surtout les n° 2, 3 et 6, peuvent être,
proportionnellement aux autres, très réduites et même annihilées.
Dans sa collection, Guenée considérait Darwiniana, comme une
espèce distincte d'Arcamius. Je ne suis pas éloigné de partager cette
opinion. En France, Darwiniana se trouve à Allos et à Enchas-
trayes, dans les Basses-Alpes, où les chasseurs de Digne l'ont
récoltée en juillet 1896 et 1897; mais dans les Basses-Alpes fran-
çaises, la forme est moins colorée et moins grande qu'à Fusio.
Il est intéressant d’observer la présence d’Arcanius insubrica, qui
est la forme agrandie d’Arcanius, au Simplon, dans le voisinage
de Darwiniana qui est généralement de plus petite taille que la
forme normale d’A7cantus.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 20
Cæœnonympha Philea, Huebner.
George Wheeler, dans son ouvrage 74e Butterflies of Suwitzer-
land, publié à Londres, en août 1903, établit (p. 118) PArlea,
Freyer, comme une aberration d’Aycanius et érige en espèce dis-
tincte Sa/yrion, Esper (PAilea, Huebner).
En comparant entre elles les figures de PAilea et de Satyrion
données par les auteurs, je n'arrive pas à trouver de différence
spécifique possible entre PAilea et Satyrion.
Esper (Tab. CXXII; fig. 2) a figuré un Satyrion dont le disque
des ailes supérieures est d’un rouge orange invraisemblable; mais
il faut reconnaître que sa diagnose (p. 24) atténue sérieusement
la magnificence de cette couleur orangée; en effet, on lit : swpe-
rioribus ochracets.
Passant à l'ouvrage de Freyer, je vois, sur la Tab. 367, Safyrion
figuré avec les n° 1 et 2 et PAilea avec les n° 3 et 4. Je cherche
en vain, en comparant ces figures entre elles, un motif sérieux de
séparation. Je me reporte au texte (p. 137 et 138); Safyrion aurait
la couleur du fond plus claire et plus pâle « doch ist die Grund-
farbe um vieles heller und blaesser ». De plus l’éclaircie blanche
serait plus large et l’ocellation plus atténuée sur les ailes infé-
rieures en dessous; mais ces différences telles qu’elles sont indiquées
sur les figures, sont bien peu sensibles.
Herrich-Schaeffer figure Sa/yrion Œ' sous les n°* 289 et 290. La
couleur du fond (Grundfarbe) du dessus des ailes et d’un brun
noirâtre uni et le disque n’est pas fauve. Huebner, qui a sans doute
la priorité du nom, a figuré PAilea Q assez obscure sous Îles
n*“ 264 et 255. Mais la Q n'offre pas de caractères différentiels
aussi intéressants que le O. Quant à Lang, il figure, malheureu-
sement grossièrement, Sa/yrion d', sous le n° 6 de la PI LXXV.
En résumé, il y a deux formes de O' et deux formes de ©. Chez
l’une, le G a les ailes, en dessus, uniformément d’un brun clair et
chez l’autre, on voit, à partir de la base des supérieures, une éclaircie
fauve s'étendre jusqu’à la bordure brun noirâtre. Comparant les
30 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
A ne SN ee à
Q, l’une a les ailes supérieures d’un fauve rougeatre clair, avec une
bordure brunâtre faiblement indiquée et traversée par une liture
de la couleur du fond parallèle au bord marginal; l’autre est plus
obscure, présente une bordure brun noirâtre assez large; mais il
y a des exemplaires de transition et, au même lieu, on trouve quel-
quefois les deux formes.
Je crois qu’on peut donner le nom de Sazyrion, H.-S. (289-200)
à la forme dont le © est le plus uniformément brun noirâtre, et
le nom de Pilea, Freyer (PL 367; fig. 3, 4) à la race dont le
dessus des ailes, chez le ©, est plus rougeâtre vers la base et plus
rapprochée de Darwiniana.
C'est ainsi que Staudinger et Rebel ont défini la question dans
leur Catalog 1901 ; ces auteurs attribuent à PAilea, Freyer, le
Cænonympha figuré sous ce nom par Godart (PL XX; fig. 1, 2).
Il ne faut pas cependant s’en rapporter à la figure donnée par
Godart, pour cette attribution de nom; car le dessus des ailes, dans
le papillon figuré, est entièrement et uniformément brun noir; mais
bien plutôt à la description où il est dit (Tableau méthodique,
p. 30) : « ailes entières, d’un brun noirâtre en dessus, avec le disque
des supérieures roussâtre... »
C’est en somme le disque des supérieures roussdtre qui caractérise
Philea et le dessus des ailes uniformément d’un brun noirâtre qui
convient à Sa/yrion.
Mais PAilea et Satyrion sont certainement les deux termes d’une
même unité spécifique, unis par les plus insensibles transitions.
J'ai pris PAlea et Satyrion au Mont Revard, en Savoie, pendant
les mois de juin et juillet 1906; au Lautaret (Hautes-Alpes), en
juillet 1006; à Chamounix, en juillet 1802; au Ryffelalp, en
juillet 1864, 1866, 1802 et 1808; J'ai reçu PAilea des environs de
Digne; quant à Sa/yrion secundum Herrich-Shaeffer, je lai trouvé
dans l'Oberland bernois à la fin de juin 1808 et Je l’ai reçu, plus
caractérisé, d'Arolla où il avait été pris en Juillet 1906. PA1lea peut
avoir comme Aycanius une Ab. cæœca que Je fais représenter
(PL XXXVII; fig. 236). J'ai déjà fait figurer deux curieuses
Aberrations de PAilea, sous les n° 104, Q impunctata, Obthr., et
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 31
105, © melania, Obthr., dans la XX° livraison des Æ/udes d'Ento-
mologie.
Philea et Satyrion se plaisent dans les prairies alpestres; leur
vol est sautillant, court et peu élevé. Généralement ce sont des
papillons abondants là où ils habitent. Darwimiana, Phuilea et
Satyrion semblent être exclusivement alpins et manquent dans les
Pyrénées.
Pour considérer Satyrion, Esper, comme une espèce distincte
de PAilea, Fr, M. Wheeler disposait sans doute d’un « #aterial »
tout à fait différent de celui que je possède, car à mes yeux, PArlea
et Satyrion, tels que je les connais et que Je l’expose ci-dessus, sont
à peine distinguables l’un de l’autre, même comme variété.
Cœnonympha Dorus, Esper.
Esper a, le premier, décrit et figuré Dorus (Tab. LXXVIIT,
fig. 1) d'après un envoyé par M. de Villers, qui l’avait découvert
sur les montagnes du Languedoc (*). Linné avait établi l'usage
de chercher dans la Fable, les noms pour désigner les papillons.
Dorus était donc, selon la Fable, fils de Neptune et d’Alope. Il
quitta la Phtiotide où régnait son père et vint fonder au pied du
Mont Ossa une colonie qui, de son nom, fut appelée la Doride.
Le Cœnonympha Dorus est un papillon d’assez petite taille, de
contexture un peu délicate, répandu en France dans les départe-
ments les plus méridionaux, en Espagne et en Algérie. Voici
(*) En lisant l’article consacré par Esper à la nouvelle espèce Dorus, j'ai
trouvé en note une correction qu'Esper se faisait à lui-même à propos de
Pasiphaë, d’abord signalé par lui, à tort, comme pris aux environs de Paris,
puis indiqué avec plus de raison comme venant d'Antibes, en Provence. L’Auteur
ajoute, en parlant de Pasiphaë : « Er enthaelt sich auf den Pyrenacen ». Si
j'avais pris connaissance plus tôt de cette note imprimée à la page 130 du
2° volume de l’ouvrage intitulé : Der europaeischen Schmetterlinge ersten Theils
zweyter Band welcher die Fortsetzungen der Tagschmetterlinge enthaelt (sans
date), j'en aurais fait mention à la page 393 de la 3° livraison des Z/udes de
Lépidoptérologie comparée.
32 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
d’ailleurs le relevé des localités où les Dorus de ma collection ont
été capturés : Marseille; Pont-du-Gard; Cette; Florac; La Turbie
près Nice, Castillon, Puget-Théniers, dans les Alpes-Maritimes;
Digne, Allos, Entrevaux, Mont-Gourdon, Saint-Martin-d'En-
traunes, dans les Basses-Alpes; Millau, dans l’Aveyron; Vernet-
les-Bains, dans les Pyrénées-Orientales; Albarracin, Escorial,
Grenade, Sierra de Alfakar, en Espagne; Nemours, dans la pro-
vince d'Oran. J'ai sous les yeux environ 200 exemplaires provenant
des différentes localités précitées.
En France, Dorus Ga généralement les ailes supérieures, en
dessus, d’une teinte brune unie avec un reflet soyeux et un peu
chaud. Un ocelle, le plus souvent unique, subapical, noirâtre,
cerclé de fauve, transparaît du dessous. Cet ocelle, pupillé de
blanc d'argent en dessous, est aveugle en dessus. On voit, mais
rarement, au-dessous de la tache ocellée subapicale des ailes
supérieures, sur le dessus des ailes, comme dans la figure publiée
par Esper, deux autres petits ocelles noirs, cerclés de fauve, for-
mant avec l’ocelle supérieur ordinaire une petite série de trois
taches alignées le long du bord marginal. Plus généralement, au
lieu d’ocelles bien formés, on voit une éclaircie d’un fauve jaunâtre
plus ou moins vaguement indiquée. Les ailes inférieures, brunes
vers la côte, d’un fauve orangé sur le disque et près du bord anal,
bordées d’une fine liture fauve, sont généralement marquées de
3, 4 où même $ points noirs plus ou moins gros et accentués,
transparaissant du dessous.
La © diffère du O' en ce qu’elle est entièrement d’un fauve
orangé, en dessus, plus ou moins clair ou foncé, avec la bordure
des ailes d’un brun noirâtre, traversée parallèlement au bord mar-
ginal par un fin liséré fauve. Chez certaines ©, la base et le bord
costal des ailes inférieures se rembrunit et la bordure des supé-
rieures s’élargit (PI. XLVIII, fig. 389); mais comme le dessus des
ailes supérieures de quelques G' s’éclaire un peu plus largement de
fauve, le long du bord marginal des supérieures au-dessous de
l’ocelle subapical, il en résulte que si, dans la majorité des exem-
plaires, les O' et © sont très différents, il se présente cependant
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 33
parfois des O' aussi bien que des © dont l’analogie est remar-
quable.
En dessous, chez les deux sexes, l’ocellation est ordinairement
très accentuée. Les taches ocellées sont d’un noir vif, cerclées de
fauve, pupillées d'argent. Un liséré d'argent descend, un peu
sinueux, le long du bord marginal des ailes, depuis l’apex des
supérieures Jusqu'au bord anal des inférieures. Aux ailes supé-
rieures, il y a généralement un seul ocelle et une série de six aux
inférieures.
Mais cette série n'est point alignée droit; elle est pour ainsi
_ dire formée de 3 groupes, d'abord un ocelle détaché des autres et
comme isolé près de la côte, puis 2 ocelles juxtaposés et enfin 3 en
ligne. Les 5 derniers ocelles sont le plus souvent de taille assez
sensiblement égale dans le même exemplaire; mais lorsque la
dimension varie, les ocelles médians sont plus gros que les deux
extrêmes.
La couleur jaune du dessous des ailes est assez variable; elle
tend à être plus uniformément jaune foncé chez les Doyus de la
Lozère et de l'Aveyron, tandis que dans les Pyrénées-Orientales
et dans les Alpes-Marifimes, le dessous est plus nuancé de jaune
foncé et de jaune nankin. De plus, les Dorus de la Lozère et de
l'Aveyron ont l’ocellation bien plus petite et moins accentuée que
dans les départements plus méridionaux. Un © pris à Millau par
mon frère (PI. XLVIII, fig. 388) n’a plus qu'un seul tout petit point
noir sur le dessus des ailes inférieures et les ocelles du dessous
sont extrêmement petits. J'ai fait figurer dans la XX° livraison
des Etudes d'Entomologie, sous le nom de Ab. fulvia, Obthr.
une variété Q de la Lozère dont le dessous des ailes inférieures
est d’un brun grisâtre et soyeux unicolore. J'ai appelé »2cr0ph-
thalma la race de l'Aveyron et de la Lozère.
Une © des Bouches-du-Rhône, dont je suis redevable à l’obli-
geance de M. Gédéon Foulquier, est remarquable par l’ocellation
de ses ailes supérieures, formée d’une série de trois taches intra-
nervurales, contiguës, en dessus, comme en dessous. Une autre Q
3
34 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
de Puget-Théniers est de même /riocellata, mais les ocelles sup-
plémentaires sont, dans cet exemplaire, plus fortement dessinés
en dessous qu'en dessus. Le ' figuré par Esper est au contraire
triocellé en dessus seulement; en dessous, il est uniocellé.
À Albarracin, en Espagne, la race n’est pas sensiblement diffé-
rente de la forme des parties méditerranéennes du midi de la
France. M. Fabresse a capturé au cours de son voyage pendant
les mois de juillet et août 1007, dans les environs d’Albarracin,
un curieux Dorus Œ ayant en dessous une série de 3 ocelles super-
posés aux ailes supérieures (PI. XLVIII, fig. 387). Sur l’une des
ailes, 1l y a même un quatrième petit ocelle immédiatement juxta-
posé en dessous de l’ocelle subapical qui reste toujours le plus gros.
Cette variété /riocellata existe donc en des contrées très diverses.
Dans l’/ris-Dresden (Band XIX, 1006), Carl Ribbe distingue
(p. 243) la race d’Andalousie sous le nom d’Ardalusica ; en effet,
la forme de Dorus à Grenade et à la Sierra-de-Alfakar est tout
à fait particulière, et c’est avec raison que Ribbe lui a donné un
nom spécial qu’elle mérite à tous égards (PI. XLVIIT; fig. C' 300,
Q 391).
L’entomologiste allemand désigne sous le nom d’Ab. exoculata
la variété de Dorus relativement assez fréquente en Andalousie
et qui est privée de toute ocellation en dessous. M. C. Ribbe
ignorait sans doute que J'avais déjà figuré, avant qu'il ne la
dénommät, cette Aberration aveugle, avec le nom de Cæca, sous
le n° 102 de la PI. VI de la XX° livraison des Etudes d'entomo-
logie.
La race de Dorus à l'Escorial paraît conforme à celle de Gre-
nade. Les G' et les © sont plus obscurs que dans le type de
France; très peu ponctués en dessus comme en dessous, certains
exemplaires ressemblent beaucoup à Cænonympha Fettign. Mon
frère a pris à la Sierra de Alfakar, en juillet 1870, avec
d’autres exemplaires plus faciles à distinguer de Feffigu, une
Q qui, en dessus comme en dessous, peut être facilement confondue
avec ce dernier Cœnonympha (PI. XLVIII, fig. 392).
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
[#2]
Un
J'ai désigné sous le nom d’Azstautr (PI. XLVIIT, fig. 386) la race
de Dorus qui habite aux environs de Nemours, en Algérie orien-
tale. Sur les ailes inférieures, en dessous, l’espace blanc est plus
étroit et intérieurement il est limité par une ligne plus droite; Îles
points ocellés, sans être en série rectiligne, chevauchent moins que
dans les Dorus du Midi de la France. Le ©, en dessus, montre une
large éclaircie fauve aux ailes supérieures. J'ai signalé la var.
Austauti, pour la première fois, dans la VI° livraison des Etudes
d'Entomologie (p. 59-60).
Huebner a figuré le © Dorus, avec le nom fautif de Dorion,
sous les n° 247 et 248. Il semble avoir représenté un exemplaire
du littoral méditerranéen français.
Une race de Dorus extrêmement curieuse et très différente du
type, est celle du Nord-Ouest de l'Espagne, appelée : Warhewi.
MM. T.-A. Chapman et G.-C. Champion ont publié dans les
Transactions of the entomological Society of London, 1907, un
travail assez bref, mais du plus haut intérêt, sous le titre : Æxzo-
mology in N. W. Spain (Galicia and Leon). Dans cette notice se
trouve décrit le Cœnonympha Dorus-Mathewi, Tutt (p. 152-155)
et d'excellentes et nombreuses figures (PI. V, fig. 1-12) représentant
avec ses variations la nouvelle variété géographique très remar-
quable de Dorus. Je dois à l’obligeance de M. T.-A. Chapman la
possession de 9 exemplaires du Cœnonympha Mathewi provenant
de Pontevedra, Brañuelas, Casayo et Vigo. M. T.-A. Chapman
considère ]/athewi seulement comme une race locale de Dorus et
dit qu'il n’y a probablement pas grande différence entre Mathewi
et le Cœnonympha Bieti (recte Bieli), Stgr, du Portugal. Je ne
puis mieux faire que d'inviter le lecteur à se reporter aux rensei-
gnements publiés par MM. Chapman et Champion. La méthode
qui consiste à donner la figure d’un grand nombre d'exemplaires
variant entre eux est d’ailleurs excellente et s’imposera désormais,
comme un progrès très précieux, en vue de fournir une connais-
sance vraiment complète des Espèces.
Le Cœnonympha Mathewi varie beaucoup pour l’ocellation. Les
figures exécutées d’après des exemplaires très judicieusement
36 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
choisis, présentent une documentation extrêmement utile et per-
mettant d'apprécier exactement la variation qui atteint dans le
Nord-Ouest de l'Espagne ce joli Cœnonympha. Je serais, pour ma
part, tenté de le considérer plutôt comme une espèce distincte et
séparée que comme une race géographique de Dorus, si certains
exemplaires ne formaient pas une transition qui justifie le ratta-
chement à Doyus. Les ocelles, chez Mathewi, sont généralement
plus accentués en dessus qu’en dessous, ce qui, comparativement
à la race méditerranéenne française, est l'inverse de ce que nous
pouvons constater.
Le Cœnonympha Dorus se plaît dans les garrigues calcaires,
sèches et chaudes du Midi de la France, où on le voit voltiger en
abondance depuis la fin de juin jusqu’au 25 juillet environ. Il se
pose volontiers sur les touffes de thym, de dorycnium, d’origan,
même sur le sol rocailleux, entre les buissons et les grosses pierres.
En toute saison, le vent peut souffler violemment et souvent
avec la plus fatigante continuité sur les collines pelées du Rous-
sillon, du Languedoc et de la Provence. Aussi le C. Dorus serait
vite emporté par le mistral fougueux, s’il n'avait pas la précaution
de se blottir, généralement par petits groupes d'exemplaires très
rapprochés les uns des autres, à l'abri de quelque pan de mur, ou
simplement de gros rochers, au milieu de broussailles protectrices.
Lorsque parfois le vent s’apaise, on jouit de matinées calmes, qui
sont vraiment délicieuses, durant les beaux jours de l'été, dans la
région voisine de la Méditerranée. Alors les papillons méridionaux,
sans crainte d’être enlevés par l’impétuosité de l’aquilon, peuvent
voitiger à leur aise, au milieu des sites agrestes tout imprégnés de
l'odeur des plantes balsamiques qu’ils affectionnent.
Il y a dans les Pyrénées-Orientales, entre Prades et Vernet-
les-Bains, un plateau assez fortement ondulé que j'ai entendu
appeler Trancada d'Ambouilla. On s’y rend de Vernet par Cor-
neilla-de-Conflent et il faut, à partir de ce village, monter assez
longtemps, d’abord près d’une haie de grenadiers dont les fleurs
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
5
=>:
rouges réjouissent toujours la vue, puis au travers d’une campagne
d'aspect très aride et dépourvue d’arbres, avant de parvenir au
plateau. Pendant les chaudes journées de juillet, 1l est avantageux
de se mettre en route, de très bonne heure le matin, afin de gravir
la pente raide et ardue, tant que le soleil ne se trouve point encore
très élevé sur l'horizon. Après l'effort qu'il a fallu produire pour
atteindre le plateau désiré, c’est, pour un entomologiste, un charme
exquis de voir à Ambouilla, par une brillante et calme matinée
d'été, le Cœnonympha Dorus posé en grand nombre sur les fleurs
d’origan, ou bien se mouvant de son vol sautillant, répété, pas
très rapide, assez près de terre, entre les plantes parfumées et les
rochers calcaires; avec lui, tous les autres Sa/yride, ses compa-
gnons ordinaires, plus robustes, moins délicats et de plus grande
taille, voltigent souvent très nombreux en cette localité particu-
lièrement chaude et méridionale.
Ordinairement les Dorus sont très abondants; la récolte en est
facile et d’ailleurs le papillon, très joli et gracieux, sollicite
l'attention du chasseur. Lorsqu’arrive le milieu du Jour, si l’atmos-
phère reste calme, on voit s'élever du sol que calcinent les rayons
du soleil, comme des colonnes d’air vibrantes, lumineuses et
mobiles, montant en incessantes spirales vers le ciel. À l’ombre
trop claire de quelque arbre rabougri, assis sur une pierre où l'on
se repose en prenant le repas de midi, c'est un plaisir de voir
constamment autour de soi voleter le Cœnonympha Dorus et les
autres Satyres assez familiers et qui semblent tenir à l’homme
aimable compagnie.
Dans l'intimité du souvenir d’un paysage qui m'est cher, 1l me
plaît d’unir dans la vision que mon esprit évoque si volontiers,
le Cænonympha Dorus, papillon si petit et si fragile, aux splen-
deurs admirables d’une nature à la fois méridionale et alpestre
dont rien ne surpasse peut-être la poésie et la beauté. En face de
soi, directement vers le Sud, se dresse, sombre et massive, la haute
montagne du Canigou, dont les flancs déchirés et d'aspect noirûtre,
surmontés d’un front étincelant de neige qui tranche vigoureu-
sement sur l’azur du ciel, constituent un si imposant décor.
38 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
À droite, vers l'Ouest, les crêtes des Pyrénées profilent leurs
multiples sommets autour et au delà de Montlouis. À gauche, du
côté de l'Orient, ce sont les basses montagnes et l'horizon lointain
vers la Méditerranée, paraissant d’un2 profondeur infinie, avec ses
couleurs changeantes suivant les heures du jour, passant du gris
argenté au violet purpurin par une teinte bleue d’une mcomparable
douceur.
Partout, sur le sol rocheux du plateau, au milieu des pierres
éparses, comme dans les petites murailles qui séparent les héri-
tages, les touffes de thym croissent et fleurissent, mêlées à d’autres
herbes odoriférantes. Sous les pas qui les foulent, ces plantes
répandent leurs parfums dont on se trouve délicieusement enve-
loppé et pénétré; senteurs exquises de la flore naturelle qui
embaument et dont on ne jouit nulle part en France avec autant
d'intensité que dans les chaudes contrées du Midi.
Parmi tant de sites pyrénéens si variés, tantôt riants et tantôt
sévères, 1c1 boisés et ailleurs complètement découverts, quelquefois
arides ou bien au contraire si largement arrosés par les eaux les
plus vives, les plus fraiches et les plus pures, la Trancada d’Am-
bouilla, habitée par le Cœnonympha Dorus, malgré sa sécheresse,
ses rudes rocailles et son extrême chaleur, a toute ma prédilection.
Cœnonympha Fettigii, Obthr. (PI XLVIII fig. 398, Q 309).
Le Cœnonympha que je dédiai à l’abbé François-Joseph Fettig,
et dont la figure a déjà paru dans la 1" livraison des Æudes
d'Entomologie (PI. I, fig. 4 a, b), fut découvert par Gaston Allard,
dans l'Algérie orientale, en 1870.
L'abbé Fettig était alors curé de la Vancelle, dans la vallée de
Sainte-Marie-aux-Mines, au diocèse de Strasbourg; plus tard, il
fut nommé curé de Matzenheim, près Benfeld, et c’est dans cette
localité qu’il rendit son âme à Dieu, le 5 mai 1906, dans la
81° année de son âge. Il était né le 16 juillet 1824.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 39
C'était un prêtre vénérable, se conciliant naturellement l’uni-
versel respect. Son extrême simplicité et sa modestie étaient les
deux premières qualités qu'on distinguait en lui. Il possédait un
noble cœur, plein de générosité, essentiellement charitable et bon.
Il jouissait d’un jugement très droit et savait toujours rester calme
et parfaitement mesuré. Sa conversation était aimable; son visage
était doux; toute sa personne attirait la confiance et inspirait la
sympathie. On l’affectionnait autant qu’on le respectait.
Grâce à Dieu, au cours de ma carrière, j'ai largement goûté le
charme si précieux que procure l'amitié; mais parmi tous les chers
défunts dont je regretterai toujours la perte, mon ami Fettig, si
loyal, si franchement et si cordialement dévoué, méritant à un si
haut degré qu'on l’estimât, comptera au nombre des meilleurs qu'il
m'a été donné de connaître et d'aimer.
Jusqu'à mon dernier jour, mon souvenir lui restera affectueu-
sement fidèle.
Ce fut une belle vie, celle de l’abbé Fettig, exclusivement
consacrée à l’accomplissement du devoir, sans ambition, sincère-
ment humble, laborieuse, constamment préoccupée de la gloire de
Dieu et du salut des âmes. Hélas ! elle fut attristée par de mul-
tiples épreuves. L'abbé Fettig en a connu d’exceptionnellement
cruelles : celles auxquelles ont été soumis tous les Alsaciens de
notre temps. Cependant il trouvait dans l'étude de la Nature,
œuvre du divin Créateur, un adoucissement à bien des peines, un
puissant et incessant réconfort, une consolation douce et sereine.
Toute sa vie, l'abbé Fettig a travaillé à étendre et à élargir la
connaissance de la faune entomologique de son cher pays. Son
patriotisme trouvait une satisfaction très sensible et très délicate
dans chaque découverte qui venait enrichir l'inventaire de la faune
alsacienne et en faisait ressortir la richesse et la variété.
Aussi, avec une activité inlassable et que le poids des années
ne parvenait point à atténuer, l'abbé Fettig, pendant toutes les
heures de liberté que pouvait çà et là lui laisser l’accomplissement
des devoirs de son saint ministère, cherchait, observait, étudiait,
écrivait. Tous ses travaux sont empreints d’une clarté, d’une netteté
40 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
et d’une sincérité qui reflètent le caractère de l’auteur et leur valent
une incontestable et durable autorité.
L'esprit très scientifique de l'abbé Fettig envisageait très volon-
tiers les problèmes de philosophie entomologique; tels ceux qui
résultent de la variabilité et de la dispersion des Espèces. Mais
mon ami avait le sens des services pratiques que ses connaissances
lui permettaient de rendre à ses concitoyens, et c’est avec un égal
intérêt qu'il se livrait à la méditation des questions purement
spéculatives et à l'observation attentive des insectes pouvant être
utiles ou nuisibles aux champs et aux jardins. Les études d'histoire
naturelle sont d’ailleurs le seul délassement que l’abbé Fettig
ait jamais cherché. Après avoir obtenu la connaissance exacte
d'un dommage causé par une espèce d’insecte à quelque plan-
tation, il se plaisait à distribuer autour de lui les conseils judicieux
pour combattre efficacement les ravages d'un ennemi dont il avait
patiemment découvert l’histoire. C’est ainsi que l'abbé Fettig
publia en 1876 un Æssai d'Entomologie générale appliquée,
excellent livre énumérant avec détail les /nsectes nuisibles de
l'Alsace avec un aperçu des Insectes utiles.
Les entomologistes alsaciens qui ont pu connaître et apprécier
l'abbé Fettig et qui liront ces lignes s’associeront, j'en ai la con-
fiance, à l'hommage que je rends à la mémoire de leur excellent
et si respectable compatriote.
Je tiens à honorer dans le présent ouvrage auquel mon intention
est de consacrer le travail de mes dernières années, tant qu’il plaira
à Dieu de m'en laisser les moyens, le souvenir d’un ami toujours
cher; mais avant tout, je tiens à écrire la vérité qui ne cesse jamais
d'être mon but.
Ce fut au mois de juin de l’année 1863 — il y a de cela plus
de 46 ans — que je goûtai pour la première fois le charme de
l'hospitalité au presbytère de la Vancelle. J'étais allé, cette année-
là, en Alsace, avec ma famille, rendre visite à mon grand-père
paternel qui demeurait à Strasbourg.
Je profitai de mon séjour en Alsace pour aller à Schlestadt, et
là, je pris la voiture qui, à cette époque, conduisait les voyageurs
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 41
vers Sainte-Marie-aux-Mines. Pour atteindre la Vancelle, village
situé sur la montagne, à mi-côte, au milieu de belles prairies et à
l'entrée de la grande forêt de hêtres qui s'élève jusqu'au Fran-
kenbourg, on s’arrêtait à Lièpvre, dans le fond de la vallée.
L'Aroynnis Daphne, dès les premiers jours de juillet, voltigeait
sur les buissons de ronces et un peu plus haut la Zycæna Euplemus
habitait les prairies. D'ailleurs, par les belles journées d'été, la
faune entomologique était riche et les insectes, variés et nombreux,
animaient très agréablement pour nous la montagne et la forêt.
De l’autre côté de la vallée, au sud et juste en face de la Vancelle,
se trouvaient les ruines si pittoresques de l'antique château de
Hohkænigsbourg. Je les ai parcourues en l’aimable compagnie de
l'abbé Fettig et dans mon souvenir s’est gravé le beau et riant
paysage qui se présentait devant nous : d’abord la riche plaine
d'Alsace, parsemée de villes et de villages, étendant jusqu’au Rhin
le vert tapis de ses prés alternant avec la teinte sombre des bois
et la couleur plus claire des moissons jaunissantes; vers le Nord,
la flèche de la cathédrale de Strasbourg élançant vers le ciel sa
haute aiguille de pierre; puis le ruban argenté du grand fleuve
aux eaux rapides; et au delà, limitant la plaine du pays de Bade,
les sombres montagnes de la Forêt-Noire déroulant leur longue
chaîne dont la crête se profile si nette et termine l'horizon.
En juillet 1865, revenant de Dalmatie, par Vienne et l'Allemagne
du Sud, Gaston Allard et moi, nous séjournâmes ensemble au
presbytère si hospitalier de la Vancelle. Lorsque plus tard, de
nouvelles découvertes, réalisées en Algérie, nécessitèrent des noms
nouveaux dans la nomenclature des Lépidoptères, d'accord avec
Gaston Allard, le nom de l’abbé Fettig fut attribué au joli
Cœnonympha algérien dont je vais ci-dessous compléter l’histoire,
au moyen des chasses plus récentes du docteur Codet, de
M. Harold Powell et de M. Holl. Un peu avant sa mort, l’abbé
Fettig, curieux de voir en nature le Sa/yride qui portait son nom
et qui était pour lui un témoignage de notre amitié, me pria de
lui transmettre pour sa collection un spécimen de l'espèce. Je fus
42 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
heureux de causer à mon ami cette satisfaction entomologique, la
dernière que j'aie pu lui donner ici-bas.
Le Cœnonympha Fettisü ne paraît pas rare, au mois de juillet
et au commencement d'août, aux environs de Sebdou. M. H. Powell
en a capturé de nombreux exemplaires, en 1907, dans les localités
suivantes : Sidi-Vahia, Mirzab et route de Sebdou à Mirzab,
Misseghenin, Djebel-Ouargla, Tagemout (Telagh), Daya, Sebdou
à Aïn-Kitsa et Aïn-el-Hamar. C'est dans la province d'Oran que
se trouve la forme-type de Ferfigu. Le Set la ©, en dessus, sont
généralement chaudement colorés de fauve sur un fond brun plus
ou moins étendu. Le dessous des ailes supérieures est d’un fauve
clair et vif et les ailes inférieures sont d’un gris un peu jaunâtre;
les 4 ailes sont finement lisérées d'argent; l’ocelle des ailes supé-
rieures, noir, cerclé de jaune paille et pupillé de blanc, est très
vif; aux ailes inférieures, l’ocellation est généralement très faible
ou presque nulle. Sur les ailes inférieures, 1l y a une ligne brunâtre,
un peu sinueuse, rarement complète, descendant du bord costal au
bord anal, ordinairement extérieurement accompagnée d’une petite
éclaircie d’un blanc jaunâtre; mais cette éclaircie peut faire quel-
quefois défaut.
M. Holl a pris à la Glacière de Blida, vers la mi-juillet, une
race de f'e//igu que j'appelle Æolli, qui est de plus petite taille
que l'ettigu de Sebdou, d’une teinte fauve moins vive et dont le
dessous des ailes inférieures est d’un gris plus jaunâtre, avec
l'éclaircie plus étendue et les petits ocelles noirs, cerclés de fauve
et pupillés de blanc, mieux indiqués. Le Cœnonympha Fettigi
et sa var. Æoll; C sont bien distincts en dessus de Dorus-anda-
lusica par l’accentuation de leurs taches fauves; les © de Fertigü
et de Dorus-andalusica se ressemblent davantage en dessus. Pour
le dessous des ailes, les Dorus-andalusica ont la partie marginale,
située au delà de la ligne sinueuse-transverse extracellulaire, teintée
de jaune nankin pâle, tandis que chez Fettigii et même chez Æoll,
on perçoit une éclaircie beaucoup plus limitée et moins accentuée,
sur le fond gris des ailes. L’ocellation, chez Dorus-andalusica, est
généralement bien plus fortement accusée; mais mon frère a pris
LÉPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE 43
à la Sierra de Alfakar, en juillet 1870, avec d’autres exemplaires
bien plus rapprochés de Dorus, une © très voisine de Z'erligu.
Si l’on compare une boîte pleine de Dorus français à une autre
boîte de Æet/igu, aucune confusion n’est possible entre les deux
Cœnonympha et la séparation spécifique ne peut faire aucun
doute; mais la race andalusica offre des exemplaires qui, comme
le prouve la Q signalée plus haut, paraissent former une transition
suggestive entre les Dorus de la France méridionale et les Ferrigu.
Il faut observer toutefois que Fetigu ne vit pas seul en Algérie
et à l'exclusion de Doyus; témoin la race Awstauti, de Nemours.
En l'état actuel de nos connaissances, relativement à Dorus-
andalusica, je déclare rester encore hésitant quant à la question
de savoir s1 lettigu est, ou non, une unité spécifique bien vala-
blement distincte de Dorus; mais comme la question me semble
pleine d'intérêt, J'ai cru devoir, pour en faciliter l'étude et la
solution, ajouter à la figuration des Aberrations cœca et fulvia
de Dorus qui a déjà paru dans la XX®° livraison des Æ/udes
d'Entomologie, la représentation des documents suivants concer-
nant plus spécialement Doyrus et Fettigu.
12I0SCBAVA UE
N° 386. Cœn. Dorus-Austauti, S, Obthr. — Nemours (Oranie).
387. — Dorus-triocellata G, Obthr. — Albarracin (Espag.).
388. — Dorus-microphthalma S, Obthr. — Millau (Avey-
ron).
380. — Dorus, Esper, © (rembrunie). — Vernet-les-Bains
(Pyrénées-Orientales).
390. — Dorus-andalusica S, Ribbe. — Grenade (Anda-
lousie).
301. — Dorus-andalusica ©, Ribbe. — Grenade (Anda-
lousie).
302. — Dorus-andalusica ©, Ribbe (var. trans. ad Fertigu).
Sierra-de-Alfakar (Andalousie).
306. — Feitigu-Holli G, Obthr. — Glacière de Blida
(Algérie).
44 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
N° 307. Cœn. Fettigü-Holli ©, Obthr. —— Glacière de Blida
(Algérie).
308. — Feltigiü S, Obthr. — Route de Sebdou à Mirzab
(Oranie).
390. — Fettigu ©, Obthr. — Sidi-Yahia (Oranie). Variété
quadri-ponctuée aux ailes supérieures en dessus.
Cœnonympha Corinna, Huebner.
Petit Sa/yride spécial à la Corse, à la Sardaigne et à la Sicile
où 1l fut découvert par A. Lefebvre, mais où personne ne l’a
retrouvé depuis le voyage de cet entomologiste français. La col-
lection Guenée contient un des exemplaires de Corinna rapportés
de Sicile par Lefebvre. Mon frère l'a communiqué à M. Enrico
Ragusa qui, dans le journal Nafuralista siciliano, 1008, lui a donné
le nom de Zefebvrei. Je le fais figurer sous le n° 304 de la
PI XLVIIT du présent ouvrage. On remarquera combien l’ocel-
lation des ailes supérieures et inférieures, en dessous, du Corinna
de Sicile, est prononcée, comparativement à la race de Corse et
de Sardaigne.
Corinna n'est pas rare dans ces îles. Feu Damry en a récolté de
nombreux exemplaires à Sassari, en Sardaigne. Bellier de la Cha-
vignerie, Rambur, et plus récemment H. Powell et Decoster en ont
rapporté des séries considérables, notamment de Vizzavona et
Saint-Pierre-de-Venaco. L'espèce varie pour l’accentuation et l’en-
vahissement, ou inversement pour l’atténuation de la teinte noirâtre
sur le dessus des ailes et par la présence ou l'absence, à l’apex des
supérieures et le long du bord marginal des inférieures, en dessus,
de points noirs cerclés de fauve. En dessous, les petits ocelles des
ailes inférieures figurent quelquefois au nombre de six; mais leur
nombre est souvent réduit à deux ou trois, ou même ils sont
complètement supprimés, à l'exception cependant de l’ocelle costal
qui paraît plus tenace. Les ocelles du dessous des ailes inférieures
sont noirs, pupillés d’argent et entourés d’un cercle fauve. Exté-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 45
rieurement à la ligne très sinueuse, extracellulaire, descendant du
bord costai au bord anal, il y a une éclaircie blanchâtre ou jau-
nâtre, de dimension variable. [1 y a une liture marginale d'argent
moins généralement interrompue aux inférieures qu'aux supé-
rieures. Parfois l’ocelle apical est double; je n'ai pas vu, dans une
centaine d'exemplaires que contient ma collection, un seul spécimen
à qui l’ocelle apical des supérieures, en dessous, fait défaut. La
figure donnée par Huebner, sous les n° 536 et 537, me paraît mal
coupée, les ailes étant représentées trop arrondies. Cependant le
Corinna de Huebner est parfaitement reconnaissable et 1l n'y a
nulle hésitation pour l'identification des exemplaires naturels avec
la figure publiée par cet iconographe.
Tout récemment j'ai reçu un Cœnonympha Corinna albinisant.
La couleur fauve normale est remplacée par une teinte uniforme
Jaune paille.
Cœnonympha Vaucheri, Blachier.
Une des plus jolies espèces nouvellement découvertes au Maroc.
M. Blachier, le savant et distingué lépidoptériste genevois, a décrit
le Cœnonympha Vaucheri dans le Bulletin de la Société entom.
de France, 1905, p. 213, et donné le nom de gemimipuncta à une
curieuse Aberration ' dont l’ocelle apical des ailes supérieures, en
dessus, est remplacé par 2 points, tandis que les 4 gros points des
inférieures sont remplacés par 3 petits; le dessous restant conforme
au type. Le Cœnonympha Vaucheri et V'Ab. geminipuncta ont été
figurés par les soins de M. Blachier, dans les Annales de la Soc.
ent. de France, 1908, sous les n° 1, 2, 3 et 4 de la PI. 4.
L'espèce avait été préalablement figurée dans les Transactions
of the entomological Society of London, 1905, sous les n°* 1 et 2
de la PL XIX, à l'appui d’un travail de M. E. G. B. Meade-Valdo
publié dans les mêmes T7ansactions (p. 369-303), avec le titre :
On a Collection of Butterflies made in Marocco in 1000-01-02.
L'auteur fait une revision critique des diverses espèces de papillons
46 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
capturés au cours d’un voyage au Maroc où il était, dit-il, accom-
pagné par M. Henri Vaucher, de Tanger, comme taxidermiste et
interprète. J'ai vu à Genève la collection de papillons du Maroc
formée par M. Vaucher, de Tanger, et possédée par son frère
M. Alfred Vaucher. J'ai été frappé de la beauté des formes de
Lépidoptères marocains. Lorsqu'il sera permis aux Européens de
circuler au Maroc avec un peu de sécurité, je pense qu’il sera pos-
sible aux entomologistes d'y réaliser encore de surprenantes
découvertes.
Cœnonympha Pamphilus, Linné.
Décrit dans le Systema Nature (Edit. X, portant la signature :
Vpsaliae, 1757. d. 24 Maï, et la date d'impression MDCCLX),
avec les termes suivants : «( p. 472) Pamphilus. 86. P. D. alis
integerrimis fulvis; subtus primoribus ocello unico; posticis fascia
alba. Habitat in Europa. Sexus alter minor. Alis posticis subtus
ocellis 6 : primo maiore ».
Linné avait préalablement décrit Pamphilus dans la Fauna
suecica, imprimée à Stockholm en 1746, sans lui donner de nom,
ainsi que cela a généralement eu lieu pour l'ouvrage Fauna suecica.
Je copie textuellement l’article entier, avec tous les commentaires,
de ce dernier ouvrage relatif à Pamphilus. « 780. Papilio tetrapus;
alis rotundatis fulvis : primariis subtus ocello unico; secundariis
subtus albo fasciatis. —— Petit mus. p. 34 n. 311. Papiliunculus
aureus oculatus in ericetis frequens. — Raj. ins. 125. n. 10. Papilio
parva e fulvo et fusco bicolor, fulvo mediam alam, fusco oras
extremas occupante, cum ocello ad extimum angularum alarum
exteriorum. Habitat in ericetis. — Descr. Raji descriptio bona est :
Alae supra fulvae, subtus cinerascentes. Ocellus in ala primaria
subtus unicus est et niger puncto albo circuloque nigro. Alae
secundariae carent ocellis et fascia pallidiore notantur. Variat
major ocello obsoleto. »
Dans toutes ces diagnoses, il y a des points contradictoires;
ainsi Linné dit d’une part, dans le Systema Nature, que les ailes
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 47
inférieures, en dessous, ont six ocelles et que le premier est plus
grand, et ailleurs, dans le commentaire de la launa suecica, que
les secondes ailes manquent d'ocelles. La vérité, c'est qu'on peut
constater sur le dessous des aïles inférieures, aussi bien l’absence
de tout ocelle que la présence de six ocelles; mais je n'ai pas
observé que dans le cas des six ocelles, le premier füt plus grand
(primo maiore), ainsi que le dit Linné. Quoi qu'il en soit, les
auteurs anciens ont été assez d'accord pour attribuer le nom de Pam-
philus au vulgaire petit Satyride que nous désignons toujours
nous-mêmes sous ce vocable. Seul Huebner l’a figuré sous le nom
de Nephele (fig. 237, 238 et 230). Pamphilus est une espèce sem-
blant s’accommoder des plaines et des montagnes, du Nord et du
Midi. Ce Cœnonympha éclôt au printemps et en été; il est répandu
en Angleterre et en Irlande, en France, en Espagne, en Algérie et
à travers l'Europe, jusqu'en Asie-Mineure, le Turkestan oriental
et la Sibérie.
Quoique, d’après Linné, Pamphilus soit oculé en dessous
(subtus) et que le vieux maître suédois ne fasse pas mention de
l’ocellation sur le dessus des ailes supérieures, à l'angle apical,
cependant les exemplaires chez lesquels locellation n'est pas
apparente en dessus et existe seulement en dessous, sont les plus
rares chez nous. Il n’en est pas moins vrai que d’après les descrip-
tions de Linné qui sont formelles, aussi bien dans launa suecica
que dans Systema Nature, c'est cette forme aveugle en dessus,
oculée en dessous, qui est le type de l'espèce.
Charles Barrett dit de Cœnonympha Pamphilus (Vol. I, p. 266) :
« One of the most universally common of butterflies, occurring
almost everywhere in grassy places, and even inhabiting the
higher portions of the mountains, where, 2.000 feet above the sea,
it shares with C. Davus and Erebia Cassiope the honour of being
the only resident butterflies. » Sous le n° 2 c de la PI. 36, Barrett
figure une © de la collection du D° P.-H. Mason, qui, confor-
mément à la description du Systema Nature, n’a de tache ocellée
qu’en dessous et en manque totalement en dessus. Sous le n° 20
48 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
de la même Planche se trouve représentée une © de la collection
Webb, dont les 4 ailes sont d’un fauve plus pâle en dessus.
Mosley figure aussi « a very pale specimen taken by Mr. J.
Firth, at Bradford ». Je possède moi-même 3 exemplaires très
pâles : un C' d’un blanc jaunâtre portant l'étiquette « Spain » et
faisant partie de l’ancienne collection Ward d'Halifax; un autre S
pris à Besançon par M. Fritsch, en mai 1895, et une Q capturée
par mon frère à Vernet-les-Bains, en juillet 1801. C’est l'Aber-
ration pallida, Tutt. Esper la figure sous le n° 4 de la
Tab. LXXVIII d’après un exemplaire qui fut trouvé, avec plu-
sieurs autres, aux environs de Francfort-sur-le-Mein; cette Azsart
de Pamplilus appartenait à Gerning.
M. George Wheeler (T%e Butterflies of Switzerland, p. 119)
signale l’Aberration bipupillata, Cosmovici, « in wh. it is large
and distinctly double-pupilled ».
Ma collection contient 4 O' bipupillata, dont 2 pris par mon
frère : l’un à Rennes, au printemps 1907, et le second à Charroux
(Vienne); le troisième exemplaire fut récolté à Lectoure (Gers)
par M. Dayrem, en mai 1007, et le quatrième à Akbès, en Syrie,
en 1891. Ces 4 Cœnonympha sont bipupillés en dessus et en des-
sous; mais il serait plus exact de dire qu'ils sont biocellés; chaque
ocelle, aveugle en dessus, est, en dessous, pupillé de blanc. Chez
l'exemplaire de Charroux, la biocellation, en dessus, se trouve
faiblement indiquée; mais sur la face inférieure des ailes, 1l y a
un troisième point noir supplémentaire situé au-dessous du double
ocelle.
J'ai fait figurer sous le n° 106 de la PI. VI de la XX® livraison
des Etudes d'Entomologie une Q cæca, de la collection Boisduval,
et non Bellier, comme je l’avais fait imprimer par erreur, qui est
sans doute la même que l’Ab. obsoleta, Tutt, chez laquelle toute
ocellation à l’angle apical des ailes supérieures, sur les deux faces,
a disparu.
Pamphilus produit une très Jolie variété géographique méri-
dionale et estivale figurée par Esper, d’après un exemplaire du
Portugal, sous le nom de Zyllus; mais la représentation de Zyllus
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 49
(PI CXXII, fig. 1) est grossière et n'est pas satisfaisante. Les
figures données par Huebner sous les n°* 557 et 558 sont au con-
traire très bonnes. Zyllus est quelquefois orné d’une liture margi-
nale argentée; il est d’ailleurs très variable et les formes les plus
accentuées de Zyllys se lient à Pamphilus par une série d’insen-
sibles transitions; ainsi 7 2yrsis, de Crète, qui est certainement un
Pamphilus Lyllus.
Quelquefois les ailes supérieures, en dessous, de Zyllus sont
marquées d’une série de points noirs situés en ligne droite au-
dessous de l’ocelle apical. Généralement l’ocelle inférieur est plus
gros que le (ou les) point noir intermédiaire. Herrich-Schaeffer a
représenté cette Ab. sous les n*% 430 et 431 et avec le nom de
Lyllus. Staudinger et Rebel, dans le Catalog 1901, ont distingué
cette Aberration sous le nom de 7'.yrsides. Te fais figurer sous
le n° 303 de la PI. XLVIII du présent ouvrage une Q très accentuée
de cette Ab. TAyrsides, capturée à Khenchela (province de Cons-
tantine) en Juillet 1008.
Je possède des Zyllus superbes, principalement d’Akbès, d’AI-
gérie, de Sicile, d'Andalousie et de l’Escorial. Il y en a qui
ressemblent en dessus à Dorus ©. Quelques exemplaires ont les
ailes inférieures assez fortement ponctuées en dessous et même
en dessus; ils appartiennent à l’Ab. ocellata, Tutt, « a distinct
row of eye-spots un s. h. w. ». L’Ab. ocellata n’est pas rare à
Akbès. L’Ab. wnicolor, Tutt, « in wh. it is entirely reddishbrn »
se lie si intimement aux formes plus claires qu'il paraît difficile
de trouver le point séparatif.
Quant à l’'Ab. marginata, Ruehl, elle existe aussi avec des
transitions chez Pamphilus, comme chez Zyllus; elle est fréquente
en Algérie et elle se combine dans les mêmes exemplaires avec
T'hyrsides et ocellata.
Cœnonympha Typhon, Rott.
Typhon est une espèce très variable. Elle se trouve en Irlande,
en Angleterre et en Ecosse; sur le continent, elle est répandue en
+
50 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Laponie, en Allemagne (Glogau, Posen, etc.), en Russie, en Suisse,
principalement dans le Jura. Pour ce qui concerne la France, Je
ne connais d’autre localité que Morteau, dans le Doubs, où 7 yfAon
ait été authentiquement capturé. 7 yphon se plaît dans les maré-
cages et dans les tourbières; sa chenille, que les entomologistes
anglais connaissent bien, vit sur les KXynchospora et les É710-
phorum. Dans le Royaume-Uni, il y a deux races très distinctes
de Typhon : 1° scotica, Stgr, figurée par Barrett, sous les n° 14
et 1 e de la PI 36. Cette scofica a le dessus des ailes d’un fauve
clair et soyeux avec le bord marginal grisâtre; en dessous, elle
est très peu ocellée. Je l’ai reçue de M. W. Ried, un habile chasseur
écossais qui la récoltait dans les pays de Perth et d’Aberdeen.
Les collections Sheppard, vendue à la salle Stevens, à Londres,
les 25 et 26 mars 1880, et Howard-Vaughan, vendue les 22 et
23 avril 1800, contenaient de bonnes séries qui m'ont instruit et
documenté sur la variabilité et l'habitat de T'ypAon en Grande-
Bretagne. La forme scofica se trouve aux îles d’Arran, de Hoy,
de Lewis et dans les montagnes du Nord de l’Ecosse, tandis que
la forme Piloxenus, figurée par Esper : la © sous le n° 3 de la
Tab. LIV et le O' sous le n° 3 de la Tab. LXXVIII, d’après des
exemplaires trouvés dans les prairies, aux environs montagneux
de Wohnsiedel, a été capturée dans le Westmoreland, notamment
à Meathop-Moss, en 1883, par H. Goss. Barrett figure cette forme
avec le nom de Rozhliebu, sous les n° 1 & et 1 d de la PI. 36.
Philoxenus est très différent de scofica; on peut dire qu'il est
aussi largement ocellé que scorica l’est peu. En dessus, PAilo-
xenus © est d'un fauve brun et on voit transparaître du dessous
l’ocelle apical des ailes supérieures, ainsi que la série des autres
ocelles qui souvent accompagne cet ocelle apical. De plus, les
ocelles des ailes inférieures transparaissent, entourés de leur cercle
plus clair. En dessous, l’ocellation est nombreuse, formée de points
noirs assez gros, cerclés de jaune paille et pupillés de blanc; le
fond des ailes est d’un brun plus ou moins rougeâtre, traversé aux
supérieures par une ligne extracellulaire extérieurement éclairée de
blanchâtre. Cette éclaircie blanchâtre se prolonge sur les inférieures
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE SI
où elle présente des contours assez sinueux. Il y a dans le West-
moreland des variations très intéressantes pour l’ocellation du
dessous des ailes, et je trouve que le 7'yphon Phuiloxenus de cette
localité est une des plus jolies formes de l'espèce. Dans la col-
lection Boisduval, je remarque une petite série de 4 exemplaires
portant l'étiquette Marsyas, Eversmann. J'ignore si ce nom a été
publié quelque part. Ces Marsyas sont des PAiloxenus provenant
sans doute de quelque contrée de la Russie, dont les ailes sont
plus allongées et moins arrondies que chez les exemplaires alle-
mands et dont l’ocellation, surtout chez la ©, est très fortement
accentuée.
Huebner représente sous les n° 243 et 244 et avec le nom de
Tullia, la forme ordinaire © du Jura bernois, et Borkausen avec
le nom de Zaidion figure un O' entièrement fauve clair en dessus,
très peu ocellé en dessous, comme on en trouve dans le même pays.
Godart (PI. XXI, fig. 1, 2) représente avec le nom de Davus la
forme qu'il dit très commune dans l'Est de la France et qui est
en effet assez conforme à celle de Morteau. Quant à Lang, sur sa
PI. LXXVII, il figure, sous les n° 2, le O' et la © du Z'yfhon
de l’Europe centrale, et sous les n° 3, le G'et la © du PAiloxenus
anglais. Il dit que cette forme lui paraît être particulière (peculiar)
au Nord de l'Angleterre, principalement au Durham, Cumberland
et Vorkshire où elle fréquente les marécages. Staudinger, ajoute
Lang (p. 312), mentionne le Sud-Holstein comme une localité pour
Philoxenus ; mais Lang répète qu'il est extrêmement probable que
Philoxenus est spécial au Nord de l’Angleterre et 1l trouve pos-
sible qu'il soit une espèce distincte. « It is probably a distinct
species. » L'opinion de Lang est évidemment sur ce point erronée.
La race lapone est petite et ressemble assez à Pamphilus. Aussi
Freyer, en figurant et décrivant son Demophile de Laponie
(Tab. 430, fig. 3, 4, p. 97), qui paraît être le 7 ypkon du Nord,
appelé /sis par Thunberg, écrit-il les observations suivantes : « Ich
vermuthe, dass dieser Falter nur eine Lokal-Abaenderung ohne
Augenflecken in den Hinterfluegeln, von P. Pamphilus sem
52 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
duerfte dem er sehr aehnlich sieht ». Il ajoute, il est vrai : « Er
hat jedoch die Groesse von ?. Davus. »
Je crois cependant que Freyer se trompe en présumant que son
Demophile pourrait être une locale variété, sans taches ocellées
sur les ailes inférieures, de Pamphilus auquel il paraît très sem-
blable. Ce Demophile, qui a d’ailleurs la grandeur de Davus
(Typhon), est très vraisemblablement une variété locale de ce
dernier Cœnonympha.
Libythea Celtis, Esper.
Curieuse espèce d'aspect original avec ses ailes découpées, ses
palpes allongés et ses antennes courtes et épaisses; unique repré-
sentant en Europe de la peu nombreuse famille des Zzbytheide.
Celtis est répandue dans le midi de la France, à Digne, à Vernet-
les-Bains, à Montpellier; elle se trouve à Grenade, en Sicile, en
Syrie; n’est commune nulle part. Je ne l’ai jamais vue volant que
par exemplaires isolés. La Zzbythea Celtis habite aussi l'Algérie
où elle a été prise par M. Holl à la Glacière de Blida, en juin et
juillet. Seule la © a la première paire de pattes complètement
développée.
Le docteur A. Pagenstecher, de Wiesbaden, a écrit dans das
Tierreich (1901), une Etude monographique sur les Ziôytheide.
Je ne puis que renvoyer le lecteur à ce travail. L'auteur, en dressant
l'inventaire des espèces de la famille en question, constate l’exis-
tence de 10 espèces.
Certaines de ces espèces offrent de nombreuses variétés. Toutes
habitent les parties chaudes ou tropicales du globe. Dans le Genera
Insectorum publié par P. Wytsman, le même docteur A. Pagens-
techer (1902) a donné une nouvelle édition de la monographie des
Libytheidaæ qu'il répartit en 3 sous-genres, comme suit :
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE me
u +R
1% sous-genre : LIBYTHEA, Fabr.
Celtis, Fuessly. Midi de l'Europe; Asie-Mineure; Algérie.
Var. Lepita, Moore. Chine; Japon; Inde; Bornéo.
Var. Lepitoides, Moore. Nilgiris.
Myrrha, Godart. Continent et Archipel indien.
Var. Rama, Moore. Ceylan; Inde mérid. |
Var. Vicevillei, Oliff. Nouv.-Guinée; Nord-Australie.
Var. sanguinalis, Fruhst. Malacca; Himalaya.
Var. myrrhina, Fruhst. Sumatra; Bornéo?
Narina, Godart. Inde; Archipel malais; Philippines.
Var. Rohini, Marshall. Inde.
Zibera, Nicév. Bornéo.
hybrida, Martin. Sumatra.
Geoffroyi, Godart. Archipel malais; Philippines.
Var. sumbensis, Pagenst. Sumba.
Var. autipoda, Bdv. Nouv.-Calédonie.
Var. plilippina, Ster. Philippines.
Var. celebensis, Stgr. Célèbes.
Var. ceramensis, Wall Amboine; Ceram.
Var. batchiana, Wall. Batchian; Halmahera.
Var. pulchra, Butl. Nouv.-Bretagne.
Var. ortentalis, Godm. Iles Salomon.
Var. guadrinotata, Butler. Lifu, Ile Loyalty.
Var. Hauxwell:, Moore. Inde.
Var. alompra, Moore. Tenasserim.
2° sous-genre : HYPATUS, Huebner.
Carinenta, Cramer. Amériq. tropic.
Var. Bachmanni, Küirtl. Etats-Unis.
Var. larvata, Streck. Texas.
Var. #otya, Bdv. Cuba.
Var. terena, Godart. Haïti.
54 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
3° sous-genre : DICHORA, Scudd.
8. Labdaca, Westw. Afrique tropicale occident.
Lajus, Trimen. Natal.
Var. {siandava, Gr. Sm. Sud-Ouest Madagascar.
10. Cinyras, Trimen. Ile Maurice.
Var. ancoata, Gr. Sm. Nord-Ouest Madagascar.
Nemeobius Lucina, Linné.
C'est en Europe la seule espèce qui représente la nombreuse
famille des Erycinide, si largement répandue dans la région tro-
picale américaine où elle se distingue, entre toutes, par la richesse
du coloris, la variété des formes et la grâce exquise des papillons
qui la composent.
Lucina se rencontre en Angleterre et même en Ecosse, près
Dumfries. On la trouve principalement dans les bois de la moitié
méridionale de la grande Ile et notamment dans New-Forest.
En Bretagne, elle m'a paru généralement très peu commune.
On peut en capturer çà et là des exemplaires isolés dans les forêts
dés environs de Rennes, en mai et juin. La seule localité d’Ille-
et-Vilaine où j'ai vu la Vemeobius Lucina en quelque abondance,
c'est le côté oriental de la falaise de Cancale qui fait face à la
côte normande du département de la Manche, depuis la pointe
des Rimains jusqu’à l’anse sablonneuse de Port-Mer, un peu avant
l'extrémité du cap du Grouin. La falaise, en cette partie, est assez
haute: au-dessus de son assise rocheuse constamment battue par
les flots mouvants de la mer, elle est recouverte d’une épaisse
couche de terre végétale et ornée d’une flore vigoureuse et assez
variée. Les grands ajoncs dominent et forment des touffes impé-
nétrables, puissantes et serrées; mais ils laissent des places libres
pour les primevères qui servent de nourriture à la chenille de
Lucina, pour les narcisses, les jacinthes, les violettes, les euphorbes,
les silènes, les centaurées, les chèvrefeuilles, les prunelliers, etc., etc.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 55
dont les fleurs se succèdent avec les saisons et forment des parterres
agrestes au milieu desquels butinent de nombreux insectes. Un
étroit sentier, pour le service ordinaire des douaniers, serpente sur
la corniche de la falaise et parfois descend plus ou moins bas, sur
le flanc fortement incliné de la colline. Alors, à l'abri de quelque
talus protecteur du vent, on rencontre à mi-côte, notamment au-
dessus de la grande grève de sable de Port-Mer, quelques petits
placis bien exposés au soleil du matin. C'est là, et également près de
la crête du plateau des Rimains, que, par une belle journée de prin-
temps, à l'époque des fêtes de la Pentecôte, on peut voir Luca vol-
tiger avec vivacité, s'écartant d’ailleurs fort peu de son heu d'origine
et aimant à se reposer de temps en temps, en compagnie de 7 Xecla
zubi sur les fleurs ou les feuilles des plantes, principalement de
l'Euphorbia amygdaloïdes qu'elle affectionne à Cancale comme en
Angleterre. Dans notre pays, je crois que Zucina éclôt une seule
fois par an; du moins je n'ai encore jamais vu se produire ni à
Cancale, ni à Rennes, une seconde éclosion en août. Cependant le
Decteur-Professeur Reverdin, de Genève, a constaté au mois d'août
1000, l'existence de Lucina Œ en bon état, à Allevard (Isère) et
Charles Barrett qui, avant l'observation de M. Reverdin, avait
entendu parler de cette apparition estivale de Zucina, en fait men-
tion comme suit (Vol. I, p. 103) : « On the Continent, it 1s said
to be double-brooded, the second emergence taking place in
August. »
J'ai pris très fréquemment Zucina à Vernet-les-Bains, en mai,
juin et même aux premiers jours de juillet; mais dès la mi-juin, les
exemplaires frais deviennent fort rares. Pour capturer Lucina dans
toute sa fraîcheur à Vernet-les-Bains, c’est en mai qu'il faut la
chasser. Elle est assez commune aux environs immédiats du village
de Vernet et à Saint-Martin-du-Canigou où elle voltige vivement
dans les prés qui s'étagent en gradins, au-dessous de l’ancien
monastère. Jamais nous n’avons rencontré Lucina en août, dans les
Pyrénées-Orientales, pas plus que dans les autres localités que
nous avons fréquentées.
La Vemeobius Lucina est assez abondante dans la forêt de
56 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Chantilly (Oise) et dans les Basses-Alpes, aux environs de Digne;
la Q y donne quelquefois une variété assez claire, à cause de la
réduction des dessins noirs normaux qui sont envahis par la teinte
fauve. J'ai pris cette même forme © à Vernet. M. Gabriel Dupuy
a trouvé Lucina dans la Charente et mon frère en a rapporté un O
de La Granja, en Espagne. Zucina n'a pas été observée en Algérie.
Herrich-Schaeffer figure sous le n° 156 une Aberration méla-
nienne de Zucina, très obscurcie sur le dessus des ailes, dépourvue
en dessous, sur les ailes inférieures, de la bande maculaire blanche
extracellulaire normale et présentant, sur les ailes supérieures, un
joli rayonnement de taches noires intranervurales.
Dans l'Asie centrale, on a découvert quelques espèces d’un genre
d'Érycinidæ que Staudinger a appelé Polycæna.
J'ai décrit, sous le nom de Carmelita (Bulletin Soc. Ent. France,
1903; p. 268-70), une nouvelle espèce de Polycæna provenant de
Moupin, Siao-lou, Tâ-tsien-lou et Tien-tsuen, aux frontières OCCI-
dentales du Su-Tchuen. Carmelita n'ayant pas encore été figurée,
je profite de la publication du présent ouvrage pour combler cette
lacune sous le n° 400 de la PI XLIX et rendre ainsi valable le
nom que J'avais proposé pour cette espèce.
Jamides roboris, Esper.
Il paraît que la collocation dans un genre spécial, de l'espèce de
Lycénide désignée sous le nom de 7oboris, Esper (Evippus, Hbn),
s'impose, à cause des caractères spéciaux de l’espèce en question qui
n’a pas d’analogue en Europe. Rambur fut de cet avis et inventa
le genre Læosopis, dans le Catalogue systématique des Lépid. de
l'Andalousie (p. 33). Mais Staudinger et Rebel qui ont adopté ce
nom de genre Læosopis, ne furent pas conséquents avec eux-mêmes,
puisqu'ils ont pour règle, disent-ils, de mettre le principe de la
priorité au-dessus de toute autre considération. En effet, Huebner
avait déjà créé le genre /amides pour son Evippus, dans le Verzez-
chniss bekannter Schmetterlinge (p. 71) qui fut imprimé à Augs-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
(Wat
D:
bourg,
primé par l’autre et dait lui céder la place.
en 1810. Dès lors le nom Zæosopis qui date de 1858 est
Esper a figuré d’une manière très reconnaissable, avec le nom
de robonis, sous le n° 5 de la PI. CIIT, la Zycænide que Huebner
a figurée un peu plus tard avec le nom d'Evippus, sous les n° 366
et 307. Il est dommage qu'Esper ait donné le nom de 7oborts à
une espèce qui vit sur le frêne et non sur le chêne. Esper dit que
roboris lui a été communiquée par Gerning, ce que je ne songe pas
à contester; mais cet auteur ajoute que le papillon a été trouvé dans
les environs de Francfort-sur-le-Mein, ce qui n’est certainement pas
exact. Le /amides roboris est une espèce méridionale, speciale aux
Pyrénées-Orientales, au Languedoc, à la Provence et à l'Espagne.
Nous avons pris roboris à Vernet-les-Bains, en juillet; Victor Cotte
l'a trouvé en juin 1904, dans les Alpes-Maritimes, à Escarène,
Levens et Lantosque. Mon frère l’a capturé à La Malène et
M. Dayrem à Florac (Lozère). Je le possède de l’Escorial où 1l
fut capturé, encore très frais et en nombre, les 20 et 30 juillet 1870.
Feu le colonel Duro me l’a envoyé de Madrid. La Q est géné.
ralement plus grande que le G'; mais à l'Escorial, elle est de taille
relativement considérable.
La teinte bleu foncé est toujours plus largement répandue sur la
surface des ailes du ©. Cependant en France, les © conservent
une tache bleue encore très apparente, tandis qu’à l’Escorial, 11 y a
des Q absolument unicolores, chez lesquelles le fond des ailes est
tout noir et entièrement dépourvu de teinte bleue. Pour cette cause,
ainsi que pour la taille sensiblement plus grande de la © espa-
gnole, comparée à la forme du midi de la France, j'ai cru devoir
distinguer la race de l’Escorial, sous le nom de escortalensis.
Je ne connais pas la var. lusitanica, Stgr.
Zephyrus quercus, Linné.
L'espèce est décrite dans le Sys{ema Nature (p. 482), comme
suit : « Quercus, 148, P. P. alis subcaudatis supra cæruleis, subtus
anereis linea alba, puncto ani gemino fulvo. Habitat in Quercu. »
58 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Huebner l'a figurée sous les n° 368 O, 369 of et 370. Esper en
a donné de moins bonnes figures sous les lettres à et c de la
Tab. XIX. Le Zephyrus quercus est répandu en Angleterre, en
Irlande, en France, en Italie, en Espagne, en Algérie et dans presque
toute l'Europe, ainsi qu'en Arménie et en Asie-Mineure.
Barrett représente la 7'Xecla quercus sous les n° 3, 3a et 30
de la PI 8 de son ouvrage. Il cite de singulières Aberrations exis-
tant dans les collections anglaises; mais 1l n’en figure pas. Mosley
donne l’image d’un hermaphrodite faisant partie de la collection
S. Stevens; le côté gauche est G'; le côté droit est © (*).
J-W. Tutt, dans le vol. IX de l'ouvrage si considérable qu’il
rédige avec tant de compétence, intitulé : À Natural History of
the british Lepidoptera, donne sur le Bithys Quercus, une planche
photographiée (PI. X) montrant l’œuf, la chenille sur sa plante
nourricière, la chrysalide et le papillon. [1 accompagne cette 1llustra-
tion d’un copieux, minutieux et savant commentaire qui occupe près
de 40 pages (p. 234-273), et il publie une seconde planche photo-
graphiée (PI. XVII) représentant « larval Hairs and Spiracle of
Bithys quercus ». La figure 1 de cette PI. XVII est consacrée aux
« airs of fullgrown Larva x 100 et la figure 2 au « Speracle of
4 th abdominal segment of Larva x 200 ». Après une étude aussi
approfondie que celle consacrée par Tutt à l’histoire des espèces
de papillons anglais, il devient difficile d'ajouter quelque chose qui
soit digne d'intérêt.
(*) Charles Barrett cite cet hermaphrodite (p. 52) comme suit : «... Mr. S. Ste-
vens à gynandromorphus exemple in which the right side is male ». Tutt dit
également que le côté droit de cet hermaphrodite est ' : « Right side C, left
side Q. Sold with the Stevens collection, March 27th 1900. 3.15. (Æntom.
XXXIIT, p. 157). This example was figured by Mosley (Z/7us. Vars. Brit. Le.
Thecla, pl. I, fig. 4, 1880) ». J'ai sous les yeux l’ouvrage de Mosley et je vois
dans le livre que je possède, la TAecla Quercus hermaphrodite figurée avec
côté gauche C' et côté droit ©, juste au contraire de ce que disent Barrett
et Tutt. L’hermaphrodite figuré dans l’Zris est, comme celui d’Angleterre
côté gauche O, côté droit Q. Il y a un malentendu de la part de Barrett et
de Tutt que je ne puis expliquer. Dans l’ouvrage de Verity, le côté gauche
est représenté droit et inversement, parce que les reproductions photographiques
n’ont pas été retournées. Mais dans le livre de Mosley, la photographie ne
semble pas être intervenue, ni avoir joué aucun rôle.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 50
Tutt cite un hermaphrodite de Qzercus qui est figuré dans l’/r25-
Dresden (Bd. XVIII; Taf. 1; fig. 6) et qui porte la légende sui-
vante sur l’Erklærung zu Tafel T : 26 juni 1902; aus einer bei
Lauterbach bei Crimmitschau gefundenen Raupe erzogen von
Junkel. »
Comme l'hermaphrodite de la collection Stevens, le gwercus-
Zwitter de Lauterbach est représenté avec le côté gauche GC et le
côté droit Q.
L’Aberration Q Pellus, figurée par Huebner, d’abord sous le
n° À de la Taf. I (II Band; IV Theil) de Beztrege zur Geschichte
der Schmetterlinge, 1700; puis sous le n° 621 de la grande Icono-
graphie, et par Gerhard sous le n° 2 de la PI. 4, porte 2 ou
3 taches d’un jaune orangé vif sur les ailes supérieures, au delà
et au-dessous de la tache basilaire bleue. Mon petit-fils Henri
Oberthür a pris un exemplaire de cette Aberration à Monterfil
(Ille-et-Vilaine), en août 1007; elle a été observée en Hongrie, en
Angleterre (Colchester district, Harwood et Drayton Drury, Nor-
gate); en Allemagne, en Suisse, en Roumanie et en France éga-
lement, par M. Delahaye qui l’a capturée dans le département de
Maine-et-Loire.
La race d'Algérie diffère de celle d'Europe, ainsi que je l’a
observé dans la 1° livraison des Æzudes d'Entomologie (p. 19)
« par la teinte du dessous qui est plus pâle, plus grise et plus
effacée. » Cette différence étant constante, Staudinger a eu raison
de distinguer par le nom 6erica, le Zephyrus quercus d'Algérie et
aussi d'Espagne; mais je dois dire que la forme espagnole de
Zephyrus quercus m'étant jusqu'ici restée inconnue, Je ne puis
apprécier si elle est conforme à la race algérienne.
Le Zephyrus quercus éclôt une seule fois par an, en juin, Juillet
et août, suivant les localités; il est commun dans presque tous les
départements français. On le voit voltiger par troupes autour du
sommet des grands chênes. En Bretagne, le papillon descend fré-
quemment des arbres qui bordent les haies des champs pour se
reposer sur les fleurs de blé noir où il est aisé d’en faire une ample
récolte durant les beaux jours d'été.
60 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
La chenille est commune en mai et au commencement de juin,
dans les chênes. On l’obtient aisément en battant les branches au-
dessus d'un parapluie. D'une larve ainsi recueillie à Monterfil, j'ai
obtenu une belle Aberration que j'appelle albovir gata.
Comme l’Aberration de W. album figurée par Tutt (oper. cit.
Vol. IX; PL I, fig. 4), à laquelle Tutt a donné le nom d'albovirgata,
l'Aberration de Quercus se distingue par une éclaircie blanche,
assez large, se développant tout le long de la ligne sinueuse trans-
verse du dessous des ailes inférieures, entre cette ligne et la ligne
submarginale, formée de demi-lunules grisâtres, qui part du bord
costal et aboutit au-dessus de la petite tache jaune anale.
Depuis le bord costal jusqu'aux approches du bord anal, il y
a donc une longue bandelette blanchâtre qui est élargie vers le
milieu.
Les Zephyrus quercus français de ma collection proviennent de
Huelgoat (Finistère); Rennes, Cancale (Ille-et-Vilaine); Charroux
(Vienne); Montmorency (Seine-et-Oise), Vernet-les-Bains (Pyré-
nées-Orientales); Madone de Fenestre à Lantosque (Alpes-Mari-
times); Les Châtelliers près Châteaudun (Eure-et-Loir); Château-
du-Loir (Sarthe); Lectoure (Gers). Je possède des exemplaires de
Coburg (collection Kuwert), de Cerchio (Abruzzes), d'Angleterre
(collection Sheppard et Tugwell). D’Algérie, j'ai reçu une longue
série d'exemplaires de la var. 4erica, pris à Boghari, Djebel-
Ouargla (Oran), Daya (27 juillet 1907), Misseghenin (23 juillet
1907), Khenchela (juin 1008), Glacière de Blida (19 juillet 1005),
Sebdou à Aïn-Kitsa et à Aïn-el-Hamar (3-5 août 1907). Dans la
var. ‘berica, les G' ont un reflet plus ou moins bleu ou verdâtre. Je
possède un © de Khenchela dont les ailes en dessus reflètent une
couleur franchement verte. Sur plus de 150 Zephyrus quercus que
J'ai sous les yeux, le G' le plus brillant est celui que J'ai pris à
Huelgoat (Finistère), le 10 juillet 1900; la couleur bleu d'acier
est d’un éclat très vif.
Si j'avais récolté à Huelgoat un plus grand nombre d'exemplaires
de Zephyrus quercus et s'ils s'étaient tous trouvés d’un bleu d'acier
aussi brillant que le seul C' rapporté par moi d’une excursion ento-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE O1
mologique, entreprise en Juillet 1900 dans les Monts d'Arrée, je
n'hésiterais pas à distinguer, par un nom, la variété O' étincelante
du Finistère.
Zephyrus betulæ, Linné.
Se trouve en Angleterre, en Bretagne, dans presque toute la
France et se rencontre jusqu'aux frontières occidentales du Thibet.
Je ne crois pas que beule ait été observé en Algérie. Je n'ai vu
aucun exemplaire provenant d'Espagne. Barrett figure la 7'kecla
betulæ, dans ses divers états, sous les n° 2, 2a, 2 et 2c de la
Pi. 7 de son ouvrage : 74e Lepidoptera of the british Islands.
Il consacre à cette espèce une notice qui est imprimée sur les pages
42 à 45 du Vol. IL. Tutt publie une étude très complète de l’espèce,
dans le Vol. IX de À nat. hist. of the brit. Lepid., depuis la
page 273 jusqu’à la page 310, et il publie sur la PI XI, les photo-
graphies des œufs, des larves avec et sans parasitisme, des chry-
salides et du papillon. De plus, sur la PL XIV, Tutt figure
photographiquement « Portion of cremaster of pupa X 100 ».
Enfin, sur Ja PL I, où sont figurées toutes les espèces anglaises de
Thecla, chacune avec un nom de genre spécial, Ruralis betulæ se
trouve représenté sous les n° 12 (O'), 13 (Q), 6 (dessous), 7 (S
major), 14 (Q major).
Mosley figure une Aberration sous le n° 2 de la PI. I des 7'Æecla,
avec la notice suivante : « In the late F. Bond's collection (now
Webb's), who it might be a hybrid between be/zle and guercus. »
J'ai toujours observé que le Zephyrus betulæ était un papillon
relativement rare. J'en ai rencontré çà et là de petites colonies,
notamment à Cancale, dans mon jardin, où j'ai vu, pendant quelques
années de suite, des Zephyrus betulæe voltiger sur les ormeaux. Ils
se tenaient généralement au-dessus des têtes des arbres ou des
hautes branches, voltigeaient au soleil avec vivacité et aimaient à
former des groupes de deux ou trois exemplaires se jouant en-
semble durant quelques instants; puis ils se séparaient rapidement
62 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
pour se reposer sur les feuilles des arbres. Les Q semblent descendre
plus volontiers que les @ du haut des ormes ou des chênes et
restent quelquefois posées assez longtemps sur les feuilles des
arbustes, dans les jardins, ou bien sur les fleurs de blé noir, dans
les champs, à l'instar de Zephyrus quercus. Je crois que les plantes
nourricières de la chenille de Zephyrus betule, en Bretagne, sont
principalement : #lmuSs campestris, quercus sessiflora et pedunculata.
Tutt, en faisant le recensement des « foodplants » de Ruralis
betulæ, d’après les indications des auteurs, ne cite pourtant ni le
chêne, ni l’ormeau; mais il relève les noms d'arbres et d’arbustes
que Je transcris comme suit : Prunus spinosa, prunus domestica,
Prunus padus, betula alba, corylus, amygdalus nana (cum flore
pleno), le chêne (oa#), le peuplier (poplar), l'aune (alder), le ner-
prun (buckthorn), l'abricotier (apricof), le cerisier (cherry), le
pêcher (feach). Il a omis de nommer l’épine-vinctte indiquée par
le P. Engramelle et le tilleul cité par Esper.
Le Zephyrus betulæ est un papillon charmant, l’un des plus jolis
qu'on puisse voir dans nos contrées. La Q avec sa tache d’un rouge
orangé très riche, sur le dessus des ailes supérieures, est beaucoup
mieux décorée sur cette face que le O'; mais les deux sexes pré-
sentent sur le dessous de leurs ailes, un fond d’un brun Jjaunâtre,
très agréablement nuancé de rouge orange et sur lequel les lignes
d'un blanc pur, soulignées de brun noirâtre, ressortent très agréa-
blement.
Le GO‘ varie pour ses ailes antérieures, en dessus, qui, tantôt sont
entièrement d’un brun noirâtre uni et tantôt sont ornées de taches
extra-cellulaires d’un jaune orangé pâle. Ces taches ne paraissent
pas dépasser le nombre de 3. Gerhard, dans un ouvrage intitulé :
Versuch einer Monographie der europ. Thecla, etc, publié en 1853,
a représenté, sous le n° 2 de la PI. 3 et avec le nom de s#znose,
une variété O qui se distingue par la présence, sur ses ailes supé-
rieures, de 3 taches extra discoidales : la première grande, contiguë
au trait noir cellulaire, les deux autres allongées, situées dans les
espaces intranervuraux au-dessous de la première tache. Cependant
on doit observer que les 3 taches en question, caractéristiques de la
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 63
var. spinosæ, sont colorées non pas en orangé pâle, mais en rouge
orangé vif. Je n'ai jamais vu d'exemplaire de Zephyrus betule G
montrant des taches d'une couleur rouge orange aussi accentuée. Est-
ce une exagération du peintre? Je ne saurais le dire. Toutefois l'expé-
rience m'a plusieurs fois appris que de telles erreurs de coloration
sont généralement rares et qu'il convenait, jusqu'à preuve du con-
traire, de considérer comme à peu près exactes les figures qui sont
publiées par les différents auteurs. D'ailleurs, dans le Catalogue des
Lépid. du Jura Neuchâtelois, 1 est dit (p. 16) que M. de Rou-
gemont possède une Aberration de be/ulæ , sur les ailes duquel
les taches rouges commencent à apparaitre. Cette observation me
paraît mériter quelque attention.
Si donc j'accorde créance à la coloration donnée à la var. spt-
nosæ dans la Monographie de Gerhard, je déclare que je ne possède,
ni ne connais cette variété; si au contraire, comme le fait Tutt,
je fais bon marché de la couleur orangé vif qui serait alors consi-
dérée comme outrée, et si je n’attache d'importance qu’à l'existence
des 3 taches, même de couleur orangé pâle, je puis attribuer le
nom de spinosæe, Gerhard, à des papillons notablement différents
de la figure donnée par cet auteur.
J'ai fait des recherches bibliographiques en vue de savoir Si
d’autres auteurs que Gerhard, avaient représenté des bc/ule ©
avec des taches sur les ailes supérieures et quelle coloration ils
avaient fait donner à ces taches; mais le résultat n’a pas été
concluant, ainsi qu'on le verra ci-dessous : Ræœsel (Tab. VI, fig. 3
et 4) n'a peint que la Q en dessus et en dessous; Sepp, vers
l'an 1800 (Vol. III, PI XII); représente le O' tout noir sous les
net go et la © sous les n° 6 et 8. De plus, la © ôetule est
reproduite sur le frontispice de l'ouvrage De vonderen Gods; le
nom vulgaire hollandais de be/ule est Berke-page (p. 45).
Le G' figuré par le P. Engramelle (PL XXXV; mn 70 a)hest
presque unicolore; cependant la description fait mention de
quelques taches plus claires interrompant, dans les ailes supérieures,
la couleur du fond chez le O' du Porte-Queues à bandes fauves.
64 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Esper représente la Q seulement, la chenille et la chrysalide
(Tab. XIX, fig. 1); Huebner figure les deux sexes, sous les n°° 383,
384, 385; mais le GO (383) est entièrement unicolore en dessus.
Lang, comme Huebner, donne l’image d’un C' unicolore (PI. DC\VALIES
fig. 1). Godart se borne à figurer la Q, de sorte que, si je m'en
rapporte aux observations relatées ci-dessus, je puis dire que la
forme du ' qui est pourvue de 3 taches orangé pâle, reste à figurer.
Le Zephyrus betulæ éclôt une seule fois par an, de la fin de
juillet à la fin d'août et même au commencement de septembre,
suivant les localités et les années.
Ma collection contient des Zephyrus betulæ provenant de Can-
cale (août 1801, 1802 et 1893); Rennes; Digne; Vernet-les-Bains
(août 1808, septembre 1908); Les Châtelliers (Eure-et-Loir) de la
coll. A. Guenée: Cassel, de la coll. Kuwert; Prusse; Angleteïre,
des coll. Tugwell et Sheppard. J'ai observé berule à Beg-Meil
(Finistère); j'ai pris, dans cette localité, le 18 août, une © très
grande, encore fraîche, malheureusement ayant les ailes inférieures
mutilées. Il paraît que be/ule est considéré comme très rare dans
le département du Finistère.
Aux environs de Tâ-tsien-lou, sur la frontière occidentale de
la Chine et tout près du Thibet, le Zephyrus betulæ est représenté
par une race de très grande taille, presque double des exemplaires
anglais. Il ne me semble pas qu'il y ait entre les be/ulæ-crassa,
Leech, de Tien-Tsuen, Siao-lou, etc. et ceux de Grande-Bretagne,
de France et d'Allemagne, d'autre différence appréciable que la
dimension des ailes et la longueur des queues aux ailes inférieures.
Le Zephyrus betule paraît rare sur la frontière du Thibet; car J'ai
reçu seulement 2 et 8 © Crassa, dans l’espace de 30 années.
Leech a figuré avec le nom Ælwesi (PI XXVIIT; fig. 8) une autre
variété chinoise de be/ulæ dont la Q est rouge orange en dessus;
l'aile supérieure étant seulement bordée de noir. Le dessous des
ailes est semblable à Ge/ulæ-crassa. J'ignore cependant si Ælwesi
est ou n'est pas une espèce distincte. Ma collection en renferme
seulement 3 © et 3 © de Mou-pin, Tien-Tsuen et Siao-lou.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 65
Tutt signale qu'on a observé deux cas d’hermaphroditisme chez
betulæ; 1° S côté droit, © côté gauche; obtenue d’éclosion à Ham-
bourg, en 1897; 2° O' côté gauche, Q côté droit; obtenue à Eperjes,
en Hongrie (11 août 1876).
Au sujet de la variation, Tutt pousse l'analyse jusqu'à ses
extrêmes limites; bien que son ouvrage soit très connu et très
apprécié, comme il n’est peut être pas dans toutes les mains, Je
crois intéresser les Entomologistes, en transcrivant ci-dessous le
tableau des variations pour les deux sexes de Zephyrus (Rurals)
betulæe, tel que Tutt l’a conçu et établi.
1° MALES.
1. Entirely fuscous with no pales patches on forewings, — wxi-
60107, 0 40:
[D]
Entirely fuscous except for a pale orange shade on the outside
of the discoidal lunule — ab. swbunicolor, n. ab.
Fuscous with pale orange shade outside discoidal lunule and
[e2)
continued series (two) of pale orange interneural dashes
below — ab. spinose, Gerh.
4. As in 3, but the paler areas faintly yellowish — ab. lwrea,
n. ab.
UT
As in 3, but the paler areas faintly grey — ab. grisea, n. ab.
6. As in 3, but the paler areas whitish = ab. pallida, Tutt.
Ainsi suivant la méthode analytique de Tutt, Zephyrus betule ©
offre six formes caractérisées comme suit
1. znicolor; entièrement brun.
LD
subunicolor; entièrement brun, excepté une ombre couleur
orangé pâle, située en dehors de la lunule discoiïdale.
3. spinosæ, Gerh.; comme 2, mais avec 2 traits d'un orangé pâle
en dessous de la tache ou de l'ombre extracellulaire.
4. lutea, comme 3; mais les espaces plus pâles, sont faiblement
jaunâtres,
66 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
g. grisea, comme 3; mais les espaces plus pâles sont faiblement
OTIs.
G. pallida, comme 3; mais les espaces plus pâles sont blanchâtres.
Tutt ne tient pas compte de la coloration en rouge orangé vif,
dans la figure de spinosæ donnée par Gerhard. Il attribue ce nom
de spinosæ à une couleur « pdle orange » et il subdivise la variété
qu'il admet comme s#inose, en 4 sous-variétés pourvues d’un nom,
chacune : à l'orange pâle, Tutt réserve le nom de sxnose; à la
teinte plus jaune, il donne le nom de /w/ea; à la teinte grise, le
nom de grisea; à la teinte blanche (aberration très rare, dit Tutt),
le nom de pallida.
2° FEMALES.
1. With narrow orange patch crossed by black nervures = ab.
restricta-lineata, n. ab.
2. With broad orange patch crossed by black nervures = ab.
lata-lineata, n. ab.
With narrow orange patch not crossed by black nervures =
[®2]
ab. estricta, n. ab.
4. With broad orange patch not crossed by black nervures —
ab. lafa, n. ab.
s. The orange markings yellowish in colour — ab. #som,
Wheeler.
6. With submarginal series of interneural orange streaks in hind-
wings pointing towards base = ab. cuneata, n. ab.
Aïnsi les 4 premières variations de Q se distinguent par la
largeur ou le rétrécissement de la tache orangée, traversée, ou non,
par les traits noirs des nervures.
1. 7estricta-lineata; tache orangée étroite, traversée par les nervures
noires.
2. lata-lineata, comme n° 1, mais la tache orangée est large, au
FE
lieu d’être étroite.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 67
—__—
3. restricta, la tache orangée est étroite; mais non traversée par
les nervures.
4. lata, comme n° 3, mais la tache orangée est large, au lieu d'être
étroite.
fisoni, la tache est jaunâtre, au lieu d’être orangée.
Ur
6. cuneata, il y a, sur les ailes inférieures, une série submarginale
de traits intranervuraux orangés dont la pointe est tournée
vers la base.
Naturellement ces variations peuvent s'amalgamer; cuneala peut
aller avec lata ou Lata-lineata; fisoni peut être lata ou restricta; elle
peut être aussi /neata.
On se rend compte après cette étude, des séries énormes d'exem-
plaires qui deviennent nécessaires aux Entomologistes adonnés à
l'analyse des espèces. Nos prédécesseurs n'avaient point égard à
de pareilles minuties. Cependant personne ne peut contester que la
camparaison méticuleuse de très nombreux papillons est indispen-
sable pour obtenir la connaissance des variations qu'on peut appeler
régulières et naturelles pour les caractériser exactement. Il est juste
de dire que Tutt apporte à son travail analytique un esprit de
méthode qui contribue singulièrement à rendre claires et intelli-
gibles les observations dont on lui doit la publication.
Thecla Spini, Huebner.
La T'Aecla Spini ne se trouve ni en Angleterre, ni en Bretagne;
elle n'a pas été rencontrée jusqu'ici en Algérie; elle habite en
France, surtout la région méridionale; mais elle remonte jusqu’en
Charente du côté de l'Ouest; elle atteint le département du Doubs
vers notre frontière orientale et même l'Alsace. La Thccla Spin
a été authentiquement récoltée dans les localités suivantes, d’après
les documents contenus dans ma collection : Angoulême, fin
juin 1908; Vernet-les-Bains, depuis la fin de mai jusqu'aux pre-
miers jours de juillet; Florac (Lozère), en juin et juillet ; Grenoble;
OS LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Digne, Larche, Saint-Martin-d'Entreaunes (Basses-Alpes), en
juillet; La Grave (Hautes-Alpes), fin juillet 1906; Col de Cas-
tillon, La Turbie (Alpes-Maritimes), en juin 1807 et 1006; Mar-
seille, Saint-Pons (Bouches-du-Rhône); Aix-en-Savoie ; Saut-du-
Doubs; Vallée du Rhône près Vernajaz et Vallée de Zermatt en
Suisse; Wurtemberg ; Prusse; Grenade, Sierra de Alfakar, Cadix,
Vallée de Ronda, en Andalousie: Roccaraso et Palena, en Italie
méridionale; Akbès, en Syrie.
La Z'Aecla Spini, comme la plupart de ses congénères, affec-
tionne les arbres buissonneux et les arbustes autour desquels elle
voltige avec vivacité. Elle aime à se reposer sur les feuilles; elle
se plaît aussi dans le Midi, sur les touffes de thym et de doryc-
nium. C'est une espèce d'un aspect brun et un peu sombre, cepen-
dant très élégante dans sa forme et présentant de fort jolis
détails. Les ailes du ©‘ sont brun foncé en dessus; celles de la Q
sont un peu plus claires. Le G‘ porte aux ailes supérieures une
tache cellulaire ovale, d'un gris foncé mat. Aux ailes inférieures,
on voit une tache jaune orangé de chaque côté de la queue qui est
noire et terminée par une houpette très fine d’un blanc pur. Quel-
quefois ces taches jaunes sont très faiblement indiquées chez le Gr;
mais les Q sont généralement ornées de taches plus larges, plus
accentuées et qui forment parfois, à partir de l’angle anal et en
remontant vers le bord costal, tout le long du bord marginal, une
série plus où moins confluente et prolongée. En dessous, les quatre
ailes sont d'un brun bronzé, traversées, du bord costal des supé-
rieures au bord anal des inférieures, par une série non interrompue
de taches blanches intranervurales, intérieurement soulignées de
brun plus foncé. De plus les ailes inférieures sont décorées, près
de l'angle anal, d'une tache noire veloutée, ronde, précédée d'un
semis d'atomes bleuâtres du plus joli effet. Au-dessus de cet
espace bleuâtre, entre la ligne extracellulaire de taches blanches
et le liséré blanc marginal, il y a une série de taches jaunâtres ou
rougeâtres, en forme de chevron, allant en décroissant de grosseur
à partir de la tache bleue et à mesure qu'elles remontent vers le
bord costal, Ces taches orangées sont surmontées d’un croissant
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 09
————
noir et inférieurement soulignées de noir d’abord et de blanc enfin.
Les antennes sont très joliment annelées de blanc et de noir et
terminées par une massue noire. Les poils du dessous du thorax
sont d’un gris bleuâtre, comme les pattes dont le dernier article
est annelé de noir et de gris; le dessous de l’abdomen est blan-
châtre.
La race des Alpes-Maritimes est sensiblement plus grande que
celle des autres pays; je l’ai appelée : #ajor. J'ai reçu d'Akbès
une Aberration © chez laquelle les ailes inférieures, en dessous,
sont ornées d’une série de taches blanches cunéiformes, le long du
bord marginal; les taches blanches en question résultent d'un
développement anormal de la ligne blanche moniliforme ordi-
naire. J'ai appelé cette Aberration : albosparsa et je la fais repré-
senter sous le n° 408 de la PI. XLIX de la présente livraison. Je dois
ajouter que sur les ailes supérieures, en dessus, d’albosparsa, 1
s'est fait un développement de 4 taches intranervurales fauves,
dans l’espace submarginal.
Je possède une © de Vernet-les-Bains dont les ailes supérieures,
en dessus, présentent des éclaircies fauves, intranervurales, extra-
cellulaires. En Andalousie, les spini Q diffèrent des exemplaires
des autres pays parce que les ailes supérieures, en dessus, sont
marquées d’une grande tache fauve qui occupe tout le disque; sur
les ailes inférieures, la couleur fauve se trouve plus où moins lar-
sement développée le long du bord marginal. Chez les o, les
taches orangées submarginales, du dessous des ailes inférieures,
sont plus petites et un peu carminées. Huebner a figuré sous les
n* 674 et 675 et avec le nom de Lynceus, la Q de la race anda-
louse de spini, et sous les n° 602 et 693, le Œ' Lynceus. On trouve
en Espagne la var. spini-Lynceus en Andalousie et à l'Escorial,
mais non à Albarracin où spini est conforme à la race des P yrénées-
Orientales. Feu de Graslin, Ribbe, mon frère et M. Fabresse ont
capturé les exemplaires de spini-Lynceus que contient ma
collection.
70 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Thecla W album, Huebner.
Est répandue dans diverses parties de la France, de l'Angleterre
et de l'Allemagne. Ma collection contient des exemplaires pro-
venant d'Alsace; de l'Aube (Lusigny); de lAisne (Villers-
Cotterets); de Seine-et-Oise (Bondy); d'Eure-et-Loir (Château-
dun); de la Sarthe; d’Ille-et-Vilaine (Rennes et Cancale); de la
Charente-Inférieure (Dompierre-sur-Mer); des Alpes-Maritimes
(Col de Castillon); du Wurtemberg. Je possède 17 échantillons
anglais ayant fait partie des collections Sheppard et Tugwell.
L'espèce éclôt en juin et juillet, suivant les localités. La chenille
vit sur l’orme où je lai trouvée au mois de mai. La 7'Lecla W album,
dans les jardins potagers, aime à se reposer sur les fleurs d'oignon
où je l'ai souvent observée; mais c’est toujours une espèce assez
rare et je ne l’ai jamais capturée en grande quantité.
Le d, comme chez spini, porte une petite tache ovale, grisâtre,
mate, dans la cellule, près du bord costal de l'aile supérieure.
L'aspect de la Z'Aecla W album est sombre; le dessus des ailes
étant d'un brun noir uni et le dessous d’un brun bronzé obscur.
La ligne blanche descendant du bord costal des ailes supérieures
vers l'angle anal des inférieures où elle forme la lettre W, ainsi
que la bordure marginale rouge orange des ailes inférieures,
tranchent agréablement sur la couleur un peu obscure du fond des
ailes.
Tutt a cru devoir créer pour la Tecla W album un nouveau
genre : Edwardsia. L'analyse poussée aussi loin que Tutt a cou-
tume de le faire, est évidemment excellente, puisque, pour chaque
espèce étudiée avec une aussi scrupuleuse attention, elle donne lieu
à un historique complet. Tout ce qui a été observé et publié sur
une espèce se trouve rassemblé, coordonné, apprécié, contrôlé et
condensé, par Tutt, dans une mise au point presque parfaite où se
résument toutes nos connaissances actuelles jusqu'ici dispersées.
C'est donc une œuvre louable et utile que Tutt accomplit ainsi.
Mais il paraît qu’à force d'analyser, on ne perçoit plus exactement
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 71
la synthèse, et en fouillant jusqu'aux plus menus détails, on peut
perdre la claire vision des caractères généraux. Le Genre est
pourtant une réalité Un ensemble de caractères communs lie
incontestablement certaines Espèces à d’autres Espèces qui sont
cependant spécifiquement bien distinctes les unes des autres.
Les Thecla spini, W. album, pruni, ilicis, Fixseni, eximia,
ornata, V. album, patrius, etc, sont unies par des affinités évi-
dentes; on sent instinctivement qu’elles sont plus rapprochées les
unes des autres que d’Ayton, de Cyllarus, de Corydon, de Bel-
largus qui sont pourtant des Espèces appartenant à la même
famille des Zycænide. Il faut donc, tout en pratiquant l'analyse,
conserver la saine notion de la synthèse et se garder de la création
immodérée et non justifiée de Genres nouveaux. Cette multiplicité
des Genres serait une cause de désordre et d’anarchie. En classant
chaque Espèce dans un Genre spécial, on détruirait la méthode
linnéenne binominale, pourtant appuyée sur une réalité naturelle
évidente, base d’une classification excellente, à laquelle est dû un
essor d’admirable progrès. Un Genre pour chaque Espèce, c'est
l'instauration de la méthode uninominale, c’est-à-dire l'organi-
sation du chaos à la place de l’ordre. Je crois devoir protester
hautement contre la tendance à laquelle Tutt s’est laissé entraîner.
Ne multiplions pas les Genres avec excès. Conformons-nous à ce
que la Nature elle-même nous enseigne et ne rejetons pas les
inspirations résultant pour nous de l'observation sincère des êtres
vivants. N’élevons pas de barrières plus hautes que celles résultant
de la séparation spécifique, entre des insectes visiblement liés et
uns entre eux par tout un ensemble de caractères qui imposent,
dans la classihication des Espèces, l'unité générique de groupe-
ment. Je demande aux entomologistes de réagir contre l'abus que
je me fais un devoir de signaler. Cette critique étant une fois
formulée contre la création du genre Edwardsia pour W album,
aussi bien que du genre Felderia pour eximia (Tutt, p. 151), je
rends de nouveau hommage au talent dont Tutt a fait preuve en
écrivant l’histoire de W album depuis la page 144 à la page 192
du vol. IX de À Natural History of the British Lepidoptera, et
72 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
je résume très sommairement ci-dessous les observations relatives
à la variation de l’Espèce.
Sur la PL I, Tutt a figuré sous le n° 4 et avec le nom d’albo-
vtrgata, une Aberration de W album dont Bellier, d’après une Q
prise à Bondy, en juin 1857, par Blondel, a publié une excellente
figure (Awx. Soc. ent. France, 1858, PI. 14, fig. 2). Je possède
encore le papillon qui se trouvait dans la collection de feu Bellier.
Bien qu'il soit âgé de plus d’un demi-siècle, il est encore parfai-
tement conservé.
Dans la revision des autres variations de W album — variations
beaucoup moins importantes assurément — Tutt propose le nom
de : #72n07 pour tous les exemplaires ayant une expansion infé-
rieure à 28 millimètres et de : z7ajor pour tous ceux qui ont plus
de 35 millimètres. En outre, cet auteur appelle : obsoleta la varia-
tion caractérisée par l'absence de la petite tache anale rougeûtre
du dessus des ailes; 1l signale les variations résultant de diffé-
rences dans la nuance de la teinte du fond en dessous, « from
fuscous-brown to fawn-brown »; la largeur de la ligne blanche
transverse; l’oblitération de la lettre W sur les ailes inférieures
en dessous (Ab. Butlerowi, Kroulikowsky); la largeur et l'intensité
de la couleur de la bande orange et l’importance de la bordure
noire des lunules orangées.
Thecla Ilicis, Esper.
C'est en France la plus abondante des 7 ecla. Il est surprenant
qu'on ne la trouve pas en Angleterre. Elle éclôt chez nous en juin
et juillet; elle est très commune en Bretagne, notamment à la forêt
de Rennes et à Monterfil; à Charroux (Vienne); à Digne; à Cau-
terets ; à Florac; dans les Pyrénées-Orientales; à Hyères; à Saint-
Germain-en-Laye, à Lardy (Seine-et-Oise); à Châteaudun; à
Angoulême; à Lectoure (Gers); dans les landes de Milly (Maine-
et-Loire) ; au col de Castillon (Alpes-Maritimes). Je l’ai reçue de
Genève; M. Wullschlegel me l’a envoyée de Martigny (Valais);
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
DT
OC
la collection Kuwert m'a fait connaître quelques exemplaires
d'Allemagne; enfin je l'ai prise à Florence, en juin 1907, et à
Potes (Asturies), en juillet 1882. Mon frère l’a récoltée à Naples;
Bellier l'a trouvée en Sicile. C’est une espèce assez grande, aux
ailes arrondies, d’un brun chaud, soyeux et brillant en dessus, et
d'une teinte de bronze en dessous.
Le Œ est tantôt d’un brun foncé, uni, en dessus; tantôt ses ailes
supérieures sont ornées d’une tache de teinte fauve orangé. Chez
les © de France, cette tache est plus développée; les nervures la
divisent finement en 4, 5 ou même 6 parties. Une petite tache
fauve orangé se trouve à l'angle anal en dessus, chez les C' comme
chez les ©; sur les ailes inférieures de ces dernières, également
en dessus, on voit souvent, le long du bord marginal, se dérouler
une série de taches fauves. En dessous, les ailes sont traversées
du bord costal au bord anal, par une ligne de petits traits blancs
plus accentuée aux ailes inférieures; une rangée intranervurale de
taches rouges surmontées d’un croissant noir et suivies d’une ombre
noirâtre se développe, le long du bord marginal des ailes imfé-
rieures, au-dessus d’un fin liséré blanc. Dans certains pays, la
tache fauve orangé des ailes supérieures du Of est souvent nulle,
tandis que dans d’autres contrées, elle est très accentuée. À Flo-
rence, à Naples, en Sicile, à Genève, aux environs de Paris, en
Allemagne, les G' sont généralement presque unicolores. Dans la
Lozère, dans les Alpes-Maritimes et les Basses-Alpes, la tache
fauve orangé est ordinairement très largement développée chez
les G. En Bretagne et en Poitou, dans les Asturies, en Malarsset
dans les Pyrénées-Orientales, on trouve des G' qui forment la
transition entre la race brune unicolore et la race qui est ornée
d'une macule fauve comme la ©. Mais les Q elles-mêmes varient
pour la dimension et l'intensité de la macule fauve qui décore
leurs ailes supérieures en dessus, et j'ai sous les yeux des exem-
plaires chez lesquels la macule en question est fort peu développée,
ou même à peine indiquée. D'ailleurs dans les Basses-Alpes, où
les sont généralement fortement maculés, on en rencontre qui
le sont fort peu, de sorte qu’il faut juger, au point de vue de la
7A LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
tache fauve du dessus des ailes supérieures, en tenant compte de
la majorité des exemplaires observés dans une localité, mais non
pas de la totalité.
Esper publie, comme z/icis ©, une Q sous le n° 1 à de la
PI XKXIX (la citation de cette figure est omise dans le Catalog
Staudinger et Rebel 1001). Huebner représente sous les n° 378
et 370 la Q slicis, et sous les n° 863 et 864, avec le nom Cerri,
le G de la forme qui a les ailes supérieures maculées de fauve;
sous les n° 865 et 866, Huebner donne l'image de la Q.
C’est par erreur que Staudinger et Rebel rapportent à Cerni,
dans leur Catalog 1001, la Tecla figurée par Huebner, avec le
nom esculi, sous les n°* 600 et 601. Cette 7 Zecla escul: se rapporte
comme variété à esculi n® 559 et 560, absolument comme Zyx-
ceus Q 674 et 675 se rapporte à spi.
Gerhard a figuré z/2c1s, avec le nom de Zynceus, sous les n° 2 a,
2det2c de la PI 2, et la variété dont le O' est maculé de fauve,
avec le nom correct de cerri, sous les n® 1 a et 1 & de la PL 4.
Lang a grossièrement représenté 2/:c2s sous les n° 4 de la PI. XVI];
dans son texte, il cite la var. cerri avec la mention : « Has the
orange patch on the fore wings larger than in the common form
of the female ». Mais il a, par erreur sans doute, fait suivre le
nom cerri du mot : female, au commencement de son article; c’est :
male qu'il aurait fallu dire.
Freyer figure sur la PI 529 la Q iicis, avec la chenille et la
chrysalide, et sur la PI 580, le @' 1/cs, avec les ailes unicolores
en dessus. Freyer représente de nouveau sur la PI. 589 consacrée
au Œ, la chenille et la chrysalide dont l’image se trouve déjà
jointe à celle de la ©.
M. Gabriel Dupuy a pris à Angoulême une Ab. albosparsa que
je fais figurer sous le n° 401 de la PI. XLIX. Cette Aberration tout
à fait conforme à celle de spini que j'ai appelée du même nom :
albosparsa, est, une fois de plus, la preuve d’une Loi d’après
laquelle, dans un Genre, se constituent les variétés et Aberrations.
M. Dupuy a eu l’obligeance de me faire connaître aussi l’Ab.
bialbolineata, chez laquelle les taches fauves submarginales des
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Gi
ailes inférieures, en dessous, sont surmontées d'une ligne de che-
vrons blancs parallèle à la ligne blanche extracellulaire normale.
Par inversion, je pense qu'on doit trouver des exemplaires de
Thecla ilicis complètement dépourvus en dessous de toute ligne
blanche: car M. Dupuy m'a envoyé un G' d'Angoulême chez lequel
la ligne blanche commune normale n'existe qu'à l'état de vestige.
En Asie-Mineure, habite la variété Bischofhi, Gerh. (PI. 2,
fig. 4 a, b, c), dont j'ai reçu de nombreux exemplaires de Broussa
et d'Akbès. M. Holl signale la 7'Xecla Ilicis-Cerri, Huebner, du
Camp des Chênes, en juin, et de Blida-Glacière, en juillet (pro-
vince d'Alger).
Thecla esculi, Huebner.
Espèce tout à fait distincte d’#/icis dont elle n’est certainement
pas une variété comme le prétend, à tort, le Cafalog Staudinger
et Rebel 1901. Æsculi habite avec /icis dans le Midi de la France;
mais ses mœurs sont tout autres. D'ailleurs la forme des ailes et
un, ensemble de caractères très tangibles différencient complètement
esculi d'ilicis, au point de vue spécifique. Feu Guenée partageait
ma manière de voir au sujet de la distinction d’esculi, Huebner,
en espèce spéciale et indépendante d’7ices.
Guenée avait logé presque toute sa collection dans des petites
boîtes hermétiquement closes, chaque boîte étant consacrée à une
seule Espèce. Sur le côté de la boîte, Guenée avait collé une feuille
de papier où il avait retracé de son écriture si fine et si serrée qu'il
faut quelquefois la lire au moyen d’une loupe, les observations
synonymiques et biologiques que lui avait suggérées chaque
Espèce. Je transcris textuellement, comme suit, la notice écrite
sans doute vers 1863 et consacrée par Guenée à la 7'4ecla esculi :
« Thecla Æsculi, Hb. 550, 560. ; Och.; God. Enc. p. 649; De V.
et Gn. p. 40 — pris par moi au Vernet en 1850; juin et Juillet.
Croirait-on que cette espèce si distincte n’est pas admise par les
auteurs allemands, même les plus modernes, qui veulent y voir
76 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
une variété de ZLynceus, Fab. (ilicis) ! Il est aussi commun à
Montpellier que le Zynceus (ilicis) chez nous, et ce dernier sy
trouve aussi et ne se mêle point avec lui. La var. Cerri d'ailleurs
à laquelle se rapportent presque tous les individus du Midi, est
exagérée en sens contraire de l’Æsculi. La coupe d’aile, l'absence
complète de taches fauves dans les deux sexes — (Guenée ignorait
la forme d’Andalousie et d'Algérie), — la forme de la ligne
blanche des inférieures et de leurs lunules fauves, l’absence du
liséré terminal, la massue des antennes, etc, ne devraient pas
même laisser de doute sur sa validité. La chenille vit sur l’yeuse
et ressemble beaucoup à celle du ZLynceus (ilicis) : j'ai élevé la Q
n° 4; la chrysalide est à côté. »
Gerhard, dans sa Monographie des Lycænide, considère aussi
la T'hecla esculi comme espèce distincte. Cependant j'avais lieu
de me documenter convenablement pour fixer définitivement mon
opinion sur la question de la distinction spécifique d’esculi et J'ai
réuni dans ce but 374 exemplaires provenant des Alpes-Maritimes,
des Pyrénées-Orientales, des Bouches-du-Rhône, de l'Hérault,
d'Andalousie (Grenade, Sierra de Alfakar, vallée de Ronda,
Sierra-Nevada), de Tanger et d'Algérie (Sebdou, Khenchela,
Vakouren, Lambèze, Djurjura, Magenta, El Haçaiba). La forme
esculi, Huebner (, 550, 560), est celle de la France méridionale.
Les deux sexes sont brun foncé en dessus. Assez rarement, on voit
chez la Q une faible éclaircie fauve sur les supérieures et quelques
macules de même nuance le long du bord marginal des ailes
inférieures, en dessus.
En Espagne, en Algérie et dans les Pyrénées-Orientales, aux
environs de Collioure, on trouve, en même temps que la forme
type, la variété dont Huebner a figuré la ©, sous les n°* 690 et 691,
avec le même nom esculi, déjà donné au papillon GO‘ représenté
sous les n° 550 et 560. C’est cette esculi (Q 690 et 691) que Stau-
dinger et Rebel rapportent par erreur à Cerr, comme synonyme
(Catalog 1901). Dans cette variété esculi, Huebner (Q 690 et 691),
le d est unicolore en dessus; mais la Q est ornée sur l’espace
extracellulaire de l'aile supérieure d’une large tache fauve, et le
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Pé
long du bord de l'aile inférieure, d’une bordure très développée,
formée de taches confluentes également fauves. Gerhard a donné
(PI. 4, fig. 4) une figure de cette variété © d’esculi et il lui a
imposé le nom de waculatus. J'ignore pourquoi cette variété
maculatus, Gerhard, n’est pas recensée dans le Catalog Staudinger
et Rebel 1901. Une fois de plus, je constate combien ce Catalog
a été dressé sans soins et à la légère.
Feu de Graslin avait capturé dans la Sierra-Nevada, le
16 juillet 1835, une Aberration O' d’esculi dont les ailes inférieures,
en dessous, présentent un curieux amalgame des taches rouges
submarginales, des points noirs qui les surmontent et de la ligne
blanche ordinaire, laquelle se trouve transformée en petits traits
blancs accompagnant sur chaque côté les taches rouges et noires
qui ont subi un extraordinaire allongement. J'appelle cette Aber-
ration : Graslini et je la fais représenter sous le n° 402 de la
BEXLIX
Gerhard figure avec le nom d’ilicioides, sous les n° 54, Sbetsc
de la PI. 4 de sa Monographie des Lycænide, une grande forme
d’esculi dont la © est d’un brun unicolore comme le ©, mais
montre quatre lunules rouges, le long du bord marginal des ailes
inférieures, en dessus, à partir de l’angle anal. En dessous, l'aile
supérieure est dépourvue de ligne blanche. Dans son texte,
Gerhard érige 1/2cioides en espèce séparée, après esculi, et rattache
maculatus à iicioides ; il fait connaître qu'il en a reçu plusieurs
exemplaires de Lederer, comme provenant de Ronda. Pour moi,
ilicioides est une forme d’esculi voisine de wauretanica, Stgr., un
peu plus grande que cette dernière et avec les taches rouges du
dessus et du dessous des ailes inférieures plus accentuées.
Staudinger désigne en effet sous le nom de wauretanica la race
d'Algérie, plus petite, dit-il, en dessous plus obscure et presque
unicolore. Je fais figurer un C' mauretanica, pris à Sebdou, en
juin 1007, sous le n° 405 de la PI. XLIX. Mais il y a une autre
race en Algérie que Gerhard et Staudinger ont ignorée et dont
je fais figurer les deux sexes sous les n° 403, 404 de la PI. XLIX.
Cette race est remarquable par le développement, en dessus, chez
78 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
le G' comme chez la ©, de l'éclaircie fauve sur les quatre ailes.
D'ailleurs, en Algérie, esculi varie selon les lieux : à Vakouren,
les deux sexes de esculi sont, en dessus, d’un brun foncé presque
unicolore; mais par le dessous, ils ressemblent aux exemplaires
du Midi de la France; par conséquent ils n’appartiennent pas à
la variété #auretanica, mais plutôt à z/cioides, Gerhard, tandis
qu'à Sebdou, à Khenchela, on rencontre des esculi-mauretanica
analogues à celui qui est figuré dans le présent ouvrage, c’est-à-
dire d’un brun noir sans taches en dessus, mais dont le dessous
présente assez bien les caractères indiqués dans la diagnose de
Staudinger. Avec ces esculi-mauretanica, 6n trouve la race lar-
gement lavée de fauve sur le dessus des quatre ailes, dont Je fais
ci-dessus mention et que j'appelle Powell:; en outre, on peut
observer toutes les transitions entre les individus unicolores, entiè-
rement noirâtres en dessus, et ceux qui sont si largement lavés
de fauve. La proportion des échantillons lavés de fauve par
rapport aux unicolores, est même très grande à Sebdou et à
Khenchela.
On distinguera aisément la variété #aculatus, d'Andalousie et
de Collioure. Le dessus des ailes du GO semble rester toujours
unicolore, d’un brun noirâtre foncé; seule, la Q a les ailes mar-
quées de fauve, mais d’une façon bien moins diffuse que chez
Powelli.
Pour établir la nomenclature des diverses races et variétés
d'esculi, je décompose la synthèse de 7'Zecla esculi, Huebner, du
Midi de la France, d'Espagne, de Portugal et d'Algérie, en
5 formes ou variétés analysées comme suit :
1. — ct Q quasi-unicolores en dessus.
Esculi, Huebner (©, 550, 560). — Midi de la France.
Æsculi, Gerhard (PI 2; fig. 14, 1 6, 16). — Portugal
2. — unicolore en dessus; Q maculée de fauve aux 4 ailes.
Maculatus, Gerhard (PL 4; © fig. 4). — Andalousie;
Collioure.
Esculi, Huebner (© 690, 691),
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 79
A6. Graslini, Obthr. (SG, Lépid. comparée; IV, PI XLIX,
fig. 402). — Sierra-Nevada.
3. — Unicolore en dessus; teinte noirâtre foncée, assez grand;
les taches rouges bien apparentes.
Ilicioides, Gerhard (PI 4; fig. 5a, 5b, 5c). — Ronda;
Vakouren.
4. — Les taches rouges du dessous plus effacées; le dessous
plus unicolore.
Mauretanica, Stgr., Obthr. (Lépid. comparée, IV. PI XLIX ;
Œ fig. 405). — Algérie (Sebdou, Khenchela, etc.).
5. — Le dessus des ailes largement lavé de fauve orangé.
Powelli, Obthr. (Lépid. comparée; IV. PL XLIX; ©, ©,
fig. 403, 404). — Algérie (Sebdou, Khenchela).
Thecla pruni, Linné.
Ainsi décrite par Linné, dans Systema Nature, Edit. X;
p. 482: « Pruni. 147. P. P. alis subcaudatis supra fuscis, subtus
fascia marginali fulva utrinque nigro punctata. Habitat in pruno
domestica. »
La TAecla pruni se trouve en Angleterre, et d’après les éléments
de ma collection, en Alsace, en Saxe, en Nassau, en Wurtemberg
et à Ecclepans, en Suisse, où mon frère l’a capturée en Juillet 1907.
Les exemplaires anglais que je possède faisaient partie des col-
lections Sheppard et Tugwell; l’un d’eux porte létiquette de
localité : Northamptonshire.
Je n'ai jamais vu la 7 Xecla pruni en Bretagne, ni en Charente,
ni dans les contrées du Midi où j'ai chassé les Lépidoptères. C’est
une espèce très localisée qui, en France, n’a pas été trouvée dans
un grand nombre de places. J'ai appris qu’on la rencontre, géné-
ralement en petit nombre d'exemplaires, dans quelques bois des
environs de Paris, à Chantilly, à Compiègne, en Seine-et-Oise,
dans l'Aube, la Marne et la Haute-Marne. Feu de Graslin n'avait
trouvé la T'Xecla pruni ni dans la Sarthe, ni dans la Vendée.
80 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Guenée ne possédait dans sa collection que des exemplaires
d'Allemagne; les échantillons de Prum, dans les collections
Boisduval et Bellier, n’ont aucune indication de localité.
Comme la T'Xecla pruni habite l'Angleterre, Tutt lui consacre
une étude approfondie, depuis la page 192 à la page 226 du
vol. IX de À Natural History of the British Lepidoptera. Chaque
espèce anglaise de 7'ecla faisant partie d’un genre spécial, pruni
est incorporée par Tutt dans le genre S#ymon.
La PI IX est consacrée à la reproduction par procédés photo-
typographiques de l’œuf, de la chenille sur sa plante nourricière,
de la chrysalide et du papillon posé sur une petite branche de
prunier. En outre, la PI. I représente sous les figures 15, 16, 17,
18 et 10 la 7'Xecla (Strymon) pruni, à l'état parfait, en dessus et
en dessous.
La Thecla pruni est une espèce très reconnaissable et facile à
distinguer. Tutt a observé des variations pour l'appréciation
desquelles j'invite à se reporter au travail extrêmement complet
de cet auteur. Huebner figure sous la lettre T de la PI. IIT du
2° volume (III° partie) de l'ouvrage intitulé : Beträge zur
Geschaichte der Schmetterlinge, imprimé à Augsbourg, en 1700,
une très belle Aberration de fruni, appelée : semialbofasciata pax
Tutt, chez laquelle les ailes inférieures sont traversées du bord
costal au bord anal par une bande de taches intranervurales
confluentes, d’un blanc pur. Cette Aberration superbe faisait
partie du Cabinet de Gerning, à Francfort-sur-le-Mein. Elle avait
été prise à Francfort.
Huebner constate à cette occasion que la forme ordinaire de
pruni a été depuis longtemps et plusieurs fois décrite et figurée.
« Der gewühnliche Falter ist laengst und mehrmalen beschrieben
und abgebildet worden. »
En effet, la 7 4ecla pruni a été figurée tout d’abord par Roesel
qui a dû achever le dessin et la gravure sur cuivre vers 1744; mais
la publication en fut faite un peu plus tard. C’est sur la Tab. VIT
que l’on peut voir la figure de la larve (fig. 1), de la chrysalide
(he )ier de l'imaso (fes res,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE BI
August Iohann Roesel von Rosenhof était peintre de minia-
tures, « Miniatur-Mahler », comme mon grand-père le fut aussi.
Roesel était né en 1705 et il mourut en 1750. Son portrait, dessiné
par son gendre Kleemann, lui aussi peintre de miniatures, et
d'après la peinture de von der Smissen, a été gravé sur cuivre
par J. W. Windter et orne le commencement de l'ouvrage lon-
guement intitulé : Der monatlich-herausgegebenen Insecten-
Belustigung erster Theil, in welchem die in sechs Classen ein-
getheilte Papilionen, mit ihrem Ursprung, Verwandlung und
allen wunderbaren Eigenschaften, aus eigener Érfahrung bes-
chrieben, auf 78 Kupfertafeln, welche 121, mit Farben auf das
natürlichste illuminirte Tabellen enthalten, nach dem Leben
abgebildet worden von dem vortreflichen Naturforscher und
berühmten Mignaturmahler August Iohann Roesel von Rosenhof,
mit einer Vorrede, in welcher von dem Nutzen der Insecten
gehandelt, was sie seyen gezeiget, und von der Einthealung
derselben Nachricht gegeben wird, von dem Roeselischen Eidam
und Mignaturmahler C. F. C. Kleemann mit vielen neuen
Beobachtungen und Anmerkungen hin und wieder vermehrt und
verbessert. Nürnberg, zu finden in der Naspischen Buchhandlung.
Au bas du portrait de Roesel sont gravées ses armes, et le
Doctor Huth, qui a signé une petite pièce de vers imprimée au
revers du titre et finissant ainsi : « Wie gross Gott auch im
Kleinen sey » (Combien Dieu est grand même dans ce qui est
petit), a fait insérer au pied du portrait ces mots auxquels il a
cru donner une tournure plaisante et qu’il a également fait suivre
de sa signature : « So sah Herr Roesel aus Dem, nach dem Tod,
das Leben Gewürme, Früsch, und Krôten geben »; ce qu'on peut
traduire comme suit : « Ainsi parut Monsieur Roesel, donnant,
après sa mort, la vie à des vers, grenouilles et crapauds. » En
face du portrait de Roesel se trouve, suivant l’usage du temps,
un frontispice gravé sur cuivre et colorié à la main, représentant
des figures allégoriques et cette sentence de Pline inscrite sur le
piédestal de la statue qui semble, au milieu du tableau, person-
6
82 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
nifier la Nature. « Rerum natura nusquam magis quam in minimis
tota est. Pin ESC NEED CE
Les figures des papillons publiées dans l’ouvrage posthume de
Roesel, par les soins de son gendre Kleeman, sont généralement
d’une exécution excellente; les chenilles, les chrysalides, souvent
même les œufs sont reproduits en même temps que les insectes
parfaits, et le dessin, la gravure et le coloriage sont traités avec
un talent supérieur. Le vieux maître hollandais Sepp a seul
montré plus de perfection et plus de finesse encore que Roesel,
dans le dessin et la gravure de certaines Planches de papillons.
Je m'associe donc complètement à l'éloge que Guenée fait des
travaux iconographiques de Roesel, à la page LI de la Préface
de l’Aistoire Naturelle des Insectes; Species général des Lépi-
dopières dans les Suites à Buffon; Noctuélites; tome I; 1852, et
je ne saurais exprimer en termes meilleurs mon admiration pour
des figures qui, malgré leur ancienneté, sont encore, comme le dit
Guenée, restées sans rivales.
Si l’on compare les figures données par Lang en 1884, ou même
celles en lithographie publiées par Barrett à partir de 1893, ou
encore celles de Seitz à l’époque actuelle, aux images gravées vers
le milieu du XVITT* siècle par Roesel, à Nuremberg, et par Sepp,
à Amsterdam, combien apparaît haute la supériorité des vieux
Maîtres! Puisse le très remarquable talent de mon collaborateur
artistique actuel J. Culot valoir à mon présent travail un mérite
analogue à celui que les Anciens, dont je me plais à évoquer le
souvenir digne d’admiration, ont su si parfaitement acquérir!
Tel est mon plus vif désir. On trouvera juste en tout cas que ma
plume rende un légitime hommage aux fondateurs de notre
Science, à ces fervents amis de la Nature qui vivaient à l’avant-
dernier siècle, à une époque où se dessinait un si magnifique essor
scientifique. La Révolution française arrêta le progrès, qui
s’annonçait si brillant et si rapide, dans les diverses branches de
la Science; lors de cette époque si malheureuse et si tourmentée,
la vie d’un Lavoisier n'était même pas respectée par la hache
révolutionnaire. Cependant la flamme ne s'était pas complètement
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 83
D —
éteinte dans l'insécurité de ces temps troublés. Sous le premier
Empire, en 1805, Jacob Huebner, d’Augsbourg, commençait la
publication de son incomparable Iconographie : Sammlung
europaeischer Schmetterlinge, et c'était la collection d’un amateur
strasbourgeois, Franck, qui fournissait des matériaux pour servir
de modèle aux admirables Planches que publiait Jacob Huebner.
Dans la XX° livraison des Etudes d'Entomologie, à la page 64,
à propos des variations de CÆelonia Caja, j'ai été amené à parler
de la collection Franck dont tant de fois, jadis, m'a entretenu
mon grand-père qui l'avait bien connue. Précédemment, j'ai déjà
écrit que sur la noble terre d'Alsace, l'étude des Sciences a
toujours été en grand honneur et n'a jamais manqué d’adeptes.
Mais on ne doit pas craindre de dire encore qu'aucune autre
province n’a fourni dans la spécialité à laquelle je me suis
consacré, un plus grand nombre d'amateurs éclairés dont le com-
merce fut toujours aimable et le zèle toujours ardent. Il en a été
de même pour toutes les autres branches des connaissances
humaines où apparaît la haute culture de l'esprit, où s’afhrment
la rectitude et la solidité du jugement, l'amour de la Nature, le
coût sûr et distingué des Arts, la constance pour le travail, la
probité et la sincérité dans les recherches de l'Histoire.
J'ai toujours admiré le talent des nombreux artistes et les
vastes connaissances de tant d'hommes érudits dont l'Alsace a
si justement le droit de se montrer fière. Aussi m'honorerai-Je
toujours grandement des liens qui m’attachent à ce noble pays.
Thecla acaciæ, Huebner.
N’existe ni en Angleterre, ni en Algérie; est très abondante
dans la France méridionale, notamment à Florac (Lozère), où je
l'ai prise en juillet 1863; aux environs de Vernet-les-Bains
(Pyrénées-Orientales) ; à l'Escarène et Levens (Alpes-Maritimes),
où l'éclosion a lieu en juin; à Lectoure (Gers); à la Montgie
(Puy-de-Dôme). L'espèce remonte vers le Nord jusqu'a Rennes
84 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
où Je l'ai capturée dans le jardin potager de Mesneuf (commune
de Bourgbarré), reposée sur les fleurs d’oignon, et à Châteaudun
(Eure-et-Loir), où feu Guenée l’a élevée de la chenille et l’a
observée voltigeant avec z/icis, sur les fleurs de ronces. Dans la
collection Kuwert, 1l y a des T'Lecla acaciæe avec l'étiquette :
Ungarn. I] ne semble pas que les acaciæ hongrois soient différents
de ceux de France. La Q se distingue aisément des autres espèces
de 7’Aecla françaises par sa petite touffe anale de poils noirs,
ras et veloutés, comme chez R£ymnus de l'Oural et T'engstroemi
du Turkestan.
En dessus, les deux sexes sont d’un brun canelle uni, avec
quelques taches d’une teinte orangé pâle, en remontant depuis
l'angle anal, le long du bord marginal des ailes inférieures, géné-
ralement jusqu’au-dessus du petit appendice caudal dont l’extré-
mité est blanche.
Le dessous est bronzé, traversé du bord costal des ailes supé-
rieures au bord anal des inférieures, par une ligne blanche non
interrompue, formée de petites taches intranervurales, en forme
de rectangle allongé. Le long du bord terminal, il y a un liséré
noir surmonté d’un mince filet blanc, sur lequel se trouve assise,
aux ailes inférieures, une série de taches d’un rouge orangé; ces
taches rougeâtres sont en forme de croissant; elles sont marquées
d'un point noir dans l’espace concave; un arc noir précédé d’un
arc blanc entoure leur sommet. La 7'Lecla acaciæ est vive; elle
aime dans le Midi à se poser sur les buissons et sur les fleurs de
thym et de dorycnium.
Huebner a figuré la T'Lecla acacie sous les n°° 743, 744, 745
et 746. Gerhard en a donné des figures très inférieures sous les
n® 44, Ab et 4c de la PI I. La forme orientale abdominalis,
Gerhard (PI 4; fig. 3a, 36), paraît commune à Akbès et à
Broussa, en Asie-Mineure. La forme Gerkardi, Stgr, de Mesopo-
tamie, est remarquable par la blancheur de son abdomen, en
dessous, et par l’accentuation de la touffe noire anale chez la ©.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 85
Callophrys rubi, Linné, et Avis, Chapman.
La Thecla (Callophrys, Bilberg) rubr, Linné, est une délicieuse
petite créature, infiniment gracieuse dans chacun de ses mouve-
ments et charmante à voir, en avril, posée sur les feuilles naissantes
de ronce ou d’aubépine, dans les sites abrités et un peu chauds
qu’elle affectionne. Linné l’a décrite dans le Sys/ema Nature,
édit. X, p. 483, en termes exceptionnellement concis : « Kubr;
154. P. P. alis dentato-subcaudatis : supra fuscis, subtus viridibus.
Habitat in Xubo aculeato ». La Thecla rubi est répandue en
Angleterre, dans toute l'Europe continentale, en Algérie et en
Asie-Mineure. Tutt a consacré près de 50 pages de À Natural
History of the British Lepidoptera à l'étude de Callophrys rubr.
La PI IV de l'ouvrage anglais représente, d’après les procédés
phototypographiques, les œufs, les chenilles sur la plante légu-
mineuse nourricière, les chrysalides et le papillon. Guenée a
remarqué que la chenille de 7wbi ne vit point sur la ronce, mais
sur le Genista sagittalis, du moins aux environs de Châteaudun.
Tutt énumère (p. 109) une considérable série de plantes nourri-
cières (food plants) pour la chenille de Callophrys rubr. Je citerai,
d'après Tutt, Xwbus aculeata (Linné); bourgeons de Xubus
fruticosus (Wilkes); Rubus idœus (Richter); fleurs et fruits verts
de Cornus sanguinea (Schmid); graines immatures de X£amnus
catharticus (Prideaux); Rhamnus frangula (Glitz); les fleurs de
Vaccinium vitis-idæa (Zeller); Vaccinium myrtillus (Freer);
fleurs d’Ærica tetralix (Wolfe et Chapman); Æyrica arborea; Ilex
aguifolium (Minà-Palumbo); Helianthemum vulgare (Frey);
Rumex (chenille élevée à maturité; Stange); les diverses espèces
de trèfles; Medicago lupulina; Lotus corniculatus; les Genista
anglica, tinctoria, germanica, sagittalis; les Ulex nanus et euro-
pœus; les Spartium scoparium et junceum; diverses espèces de
Cytisus; les fleurs de Calycotome spinosus et d'Onobrychis
sativa; l'Hedysarum onobrychis. Suivant les lieux, la chenille de
Thecla rubi dévore telle ou telle plante; à la Riviera, c’est le
86 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Calycotome; dans l'Argyllshire, c'est l'ajonc (#lex); mais suivant
Chapman et d'accord avec Guenée, les plantes le plus généra-
lement préférées par 702 seraient encore et partout les arbrisseaux
de la famille des Légumineuses ou Papilionacées à laquelle
appartiennent d’ailleurs l’Ulex et le Calycotome.
Pour la variation, on constate que la marque androconiale est
tantôt d’un gris brun, tantôt d’un jaune paille extrêmement pâle;
d'autre part, la couleur du dessus des ailes varie du brun noirâtre
(environs de Moscou) au brun rougeâtre clair (Algérie). Stau-
dinger a donné le nom de fervida à la forme algérienne dont le
dessus des ailes est d’un brun rougeûtre clair; sur le dessous des
ailes, la teinte verte est un peu variable; de plus, tantôt les quatre
ailes sont unicolores, tantôt elles sont traversées par une ligne de
taches blanches qui descendent du bord costal des premières
ailes au bord anal des inférieures. Ces taches sont intranervurales;
elles ont la forme de petits rectangles allongés.
Tutt désigne sous le nom de punctata la forme de Tkecla rubr
qui a la série des taches blanches très développée sur les quatre
ailes; ordinairement trois aux supérieures et sept aux inférieures,
dit-il Je possède une Q punctata, de Digne, avec 5 taches
blanches aux supérieures et 8 (y compris la tache anale cependant
moins apparente que les 7 autres) aux inférieures. La forme qui
a une série de taches blanches bien développée aux ailes infé-
rieures seulement a reçu le nom d’zferopunctata, Vutt.
La série incomplète de taches blanches sur les ailes inférieures
est nommée 2#completa, Tutt.
Deux taches blanches seulement sur les ailes inférieures, une
à la côte, l’autre vers le centre de la bande ordinaire, valent le
nom de Otpunctata, Tutt.
Une seule tache blanche sur les ailes inférieures, près de la
côte, c’est 7wb1, Linné.
Sans aucune tache blanche sur les ailes inférieures, c’est cæcus,
Geoff.
Ma collection contient toutes ces différentes formes; mais
punctata et cæcus me paraissent les plus rares. Il y a des inter-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 87
médiaires entre les formes ci-dessus analysées et elles ont reçu
des noms (Voir Tutt; p. 92, 03).
Le dessous des ailes inférieures peut être brun bronzé, au lieu
d’être vert (Ab. brunnea, Tutt).
Barrett constate que l’insecte, au moment où il émerge de la
chrysalide, ne paraît pas avoir de trace de vert sur le dessous
des ailes, cette surface étant d’un brun doré (golden-brown)
comme le dessus. La couleur verte se caractérise à mesure que les
ailes se développent.
M. Blachier possède de Digne une Aberration remarquable; le
dessous des ailes est d’un gris olivâtre uniformément très obscur
et noirâtre. Cette Aberration dite : olivacea, Blachier, est décrite
et figurée (p. 370, PL 0, fig. 10) dans le fasc. 4 du Vol. 1 du
Bulletin de la Société lépidoptérologique de Genève.
Dans les Annales de la Soc. ent. de France (1887) se trouve
imprimée, à la page 216, la description par Millière d'une Aber-
ration de Z'kecla rubi, prise le 5 avril 1887, à Cannes, près de
l'Hôtel des Pins, par M" Texier. « Les ailes, en dessus, sont
d’un jaune fauve uniforme très chaud, moins la base et le dessous
de la côte qui se montrent pointillés de gris. La frange est très
blanche aux quatre ailes. Tout le corps, en dessus, participe de
la couleur anormale des ailes. Celles-ci, en dessous, seraient d’un
carné vif, si elles n'étaient lavées de vert d’eau pâle chatoyant,
à la base surtout. Les franges sont ici d’une teinte aurore assez
indécise. Sur les ailes inférieures, on aperçoit trois points blancs
très petits, à peine visibles, placés au centre et en hpnenlfes
antennes sont annelées de blanc et se terminent en massue
allongée d’un pourpre obscur; le ventre et les pattes sont d'un
gris blanchâtre ». Tutt a appelé pa/lida cette Aberration décrite
par Millière, mais non dénommée par ce dernier.
Mosley figure très grossièrement, .en dessus seulement, une
Aberration de Tkecla rubi faisant partie de l’ancienne collection
Gregson, qui devint la propriété de M. Webb. Une autre Aber-
ration remarquable par une large éclaircie brun clair, le long du
88 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
bord terminal des ailes inférieures, prise en mai 1903, à Plauen,
est figurée sous le n° 3 de la PI. 1 de l’/25s, XVIII, 1005.
Ma collection contient des exemplaires de Tkecla rubi recueillis
à Digne (mars et avril 1807) ; à Hyères (20 mars 1906) ; en Corse;
à Cannes et dans diverses autres localités des Alpes-Maritimes,
à Marseille; à Vernet-les-Bains, en avril et mai; à Cauterets, en
juillet 1883; à Cancale et à Rennes, en avril, mai et quelquefois
commencement de juin; à Lectoure (Gers); à Châteaudun (Eure-
et-Loir); dans le North-Devon (Angleterre); dans le Sud de
l'Irlande; à 35 kilomètres au Nord-Est de Moscou; à Tokat et
à Broussa, en Asie-Mineure; à Lambèze (avril 1884); Alger;
Sebdou; Khenchela (mai 1908); Méchéria (mars 1886), en
Algérie. M. Holl me mande qu'il a pris Z'kecla rubi à Zeralda,
en mars; à Bouzaréa, en avril, et à Blida-Glacières, en juin.
Les entomologistes, chaque printemps, aiment à voir réappa-
raître la 7 Lecla rubi et ses compagnons ordinaires, les Ax#hocharis
cardamines, Lycæna argiolus, Pararge Ægeria, Rhodocera
rhamni, qui sont dans nos contrées, après les rigueurs et les tris-
tesses de l'hiver, les messagers des beaux jours. Lorsque, vers la
fin d'avril, paraissent dans les bois les fraiches frondaisons
nouvelles, c’est une jouissance exquise de voir, avec la résurrection
de la Flore, les espèces précoces d’Insectes renaître et animer de
nouveau la campagne. Le plaisir d’apercevoir alors quelques
T'hecla rubi voltigeant autour des premiers buissons verts est aussi
aimable que la jouissance d’aspirer le parfum des premiers lilas.
Chaque année n’apporte qu'une fois avec elle ce charme délicieux,
mais, hélas! si passager, d’une apparition si rapide, si courte et
si tôt finie.
La Thecla rubi est une espèce heureusement abondante et
commune en très différents lieux. On peut, sans longues et
patientes recherches, plusieurs fois la rencontrer au cours d'une
promenade, et l’admirer dans sa grâce et sa délicatesse, quand
elle se repose sur les feuilles nouvelles avec lesquelles la couleur
verte de ses ailes la confond aisément. Qu'on se trouve sur la
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 89
lisière des bois, ou le long d’une haie ensoleillée dans la campagne,
ou encore dans les allées d’un parc près d’une habitation, aussi
bien en Algérie que dans les Iles britanniques ou en Russie, tant
sur le haut des falaises couvertes d’ajonc et le long des grèves
de la Côte d'Emeraude que dans les sites agrestes et parfumés
au pied desquels la Méditerranée ne cesse avec fracas de dérouler
ses flots bleus, lorsque commence à paraitre le printemps, on a
fréquemment l’occasion d’apercevoir la 7'Lecla rubi, qui constitue
un si Joli régal des yeux.
Existe-t-il cependant des entomologistes qui seraient dédai-
gneux de cette charmante /ycænide, comme de bien d’autres
espèces communes, sous prétexte qu'étant vulgaires et partout
répandues, elles se trouvent tarifées, comme article d'échange, à
un nombre de Pfennig si petit que la récolte en devient, à cause
de cela, indifférente.
Le négoce est dans le Monde une nécessité et je ne médirai
point des relations commerciales au moyen desquelles les peuples
se font mutuellement profiter des produits les plus divers. Mais
je plaindrai toujours, dans toute la sincérité de mon cœur, les
amateurs de papillons, nos chers et certainement très distingués
confrères, qui possèdent des dispositions commerciales tellement
développées que leur satisfaction entomologique se mesure à la
valeur marchande de leurs captures. [ls s'intéressent principale-
ment aux Espèces qui, le plus souvent, grâce à un savoir-faire
dépourvu de toute considération scientifique, ont conservé sur les
Catalogues qu'ils honorent de leur confiance, un prix fabuleux,
tandis que les papillons dont la tarification est insignifiante ne
paraissent pas mériter la faveur de leur savante attention. De
quelles précieuses jouissances ne se privent-ils pas? Mais dans
l'Entomologie, comme ailleurs, on peut dire, en parlant des
hommes qui sy adonnent, « tot capita, tot sensus! » Aussi
existe-t-il encore, grâce à Dieu, un grand nombre de naturalistes
dont la conception et l'objectif, dans leurs études entomologiques,
ont une direction tout autre, et qui, sans se soucier de la hausse
90 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
et de la baisse à l’/sectenboerse, trouvent leur joie dans l’étude
patiente et consciencieuse de la Nature.
Ils s’attachent même davantage aux espèces les plus abon-
damment représentées, ne serait-ce qu'à cause des chances plus
grandes d'obtenir des sujets variés qui constituent toujours une
documentation scientifique précieuse et de l’observation facilitée
par la grande quantité des exemplaires.
M. le D' Thomas Algernon Chapman, de Reigate, est l’un de
ces chercheurs avisés à qui échoit parfois une récompense bien
méritée, sous forme d’une intéressante surprise. C’est en observant
minutieusement et avec continuité la Jolie, mais très commune
T'hecla rubi, que le D' Chapman a trouvé dans le Sud de la
France une nouvelle espèce très voisine sans doute de 7402, mais
paraissant distincte, et qu'il a appelée Azzs. C'est une découverte
vraiment sensationnelle! Ainsi fut-1l de la Pieris Mann, naguère
ignorée en France et confondue avec sa congénère ape; main-
tenant elle est justement distinguée et considérée comme appar-
tenant à une unité spécifique distincte et spéciale. Une nouvelle
espèce de Pieris est donc venue très tardivement enrichir l’inven-
taire de la Faune française.
Demain il en sera de même pour Æpinephele Rhamnusia, qui
ne tardera guère à être admise désormais, sans conteste, comme
une espèce bien distincte d'Exdora.
Le docteur T. A. Chapman a publié dans 74e Entomologisrs
Record (Vol. XXI, n° 6, June 15% 1000, p.130, 131), sous lle
titre de : Callophrys Avis-a new butterfiy from Southern France,
la notice suivante, que je transcris textuellement :
« Much resembles Callophrys rubi. C. Avis is larger 32 mm.
to 36 mm. in expanse. C. rub1 rarely exceeds 32 mm. It has hardly
any trace of tails. The upper surface has a ruddy tint, in excess
usually of that of C. rubz var. fervida, and the venation is often,
especially veins three, four and five of the upperwing in the ©,
marked by rather broad dark lines as if raised, differing from
the narrower flatter lines seen in C. 7#bi. À marked character is
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE OI
a
that the head has a long ruddy fur, replacing all trace of the
silber lines round the eyes so conspicuous in C. rubz. The andro-
conial brand on the © forewing is triangular, perhaps a shade
broader than in C. 7ubi, but of only about half the length along
the line of the veins, that it has in C. ruba, in which it is oval
or fusiform. The club of the antenna is red or fleshcolour, all
along the lower inner side, a colour confined in C. rubz to a few
terminal joints of the club, and the same on all aspects of the
antenna. There is rather a different shade of green on the
underside, and the white line has quite a different character from
that in C. rubi. It is narrow, but continuous; it is, in fact, usually
broken by each vein, but looks continuous compared with C. rubr,
in which the line breaks up into spots, rather than become narrow
as in C. avis. Either really, or as an effect cf its narrowness, it
has a suggestion of being faintly tinted green. It is entirely
without the dark scales along its inner margin that are so constant
in C. subi. The portion in each interneural space is curved. It
occupies all the spaces on each wing, from the costa to the space
in front of vein two, but is bright towards the costa (space
between six and seven), and fades towards the inner part of the
wing. The row of spots in C. rubi is much more irregular. The
first spot on the hindwing slopes inwards, in C. rubi it slopes
outwards, giving the second spot the appearance of being dis-
placed inwards in C. zubi, outwards in C. avis. The G appendages
have only slight differences. I have not examined sufhciently
numerous specimens to be able to assert that these are constant.
It specialises in its foodplant, instead of being quasi omnivorous
like C. rubi.
Habitat, Southern France (Var and Pyrénées-Orientales),
Morocco (Tangier). The only specimen I have seen, not in my
possession, is one of the Brit. Mus. Collection, ranged with C. rubt
var. fervida, and labelled « Tangier, Elwes Coll. »
Dans les Transactions of the entomological Society of London,
1900 (Proceedings, Wednesday, June 2%, p. XXIX), on lit sur le
même objet ce qui suit : « New Palaearctic Species of Callophrys.
02 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
— D'T. À. Chapman exhibited specimens of Callophrys avis,
a new species from the South of France, first taken by him at
Hyères three years ago, and in the following year, and now
obtained by him this year from the Pyrénées-Orientales. It is very
closely allied to C. 7ubr, but distinguishable by its larger size,
ruddier colour, red hairy face without silver lines round the eyes,
the very different form of the androconial band, the red underside
to the club of the antennae, the different tone of the green of the
underside and the different character of the white line.
It has probably been passed over in the field as merely #1,
but could hardly be so in the collection, though the only specimen
seen by the exhibitor, and not in his own possession, is one in
the Natural History Museum at South Kensington, series of
C. rubi, labelled « Tangier, Elwes coll. » The species is doubtless
scarce and local. D' Chapman said he hoped to submit later a
paper on the species giving some details of habits and life history;
he thought it better not at present to forestall any interest that
communication might possess.
He ventured to say, however, in case the present exhibit left
any doubt as to whether C. avis might not be merely a variety
of C. rubi, that there were great differences in the larvae, of
which also he exhibited examples in the last instar. The most
remarkable was perhaps in the first stage. In two species, so closely
allied, one rather expected there would be no appreciable diffe-
rence between them in the first stage. There were, however, not
only differences of colour and markings, but notable differences
in the development of the hairs. »
Il sera agréable aux Entomologistes français de lire la tra-
duction des observations qui précèdent. Je dois cette traduction
à l’obligeance de M. Harold Powell, aussi habile à s'exprimer en
français qu’il l’est en anglais, sa langue maternelle.
« Ressemble beaucoup à Callophrys rubi. C. avis est plus
grande : 32 "/" à 36 "/" d'envergure. C. 7ub1 n'excède que rarement
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 03
32 "/", Elle n’a presque pas trace de queues. La surface supérieure
a une teinte rougeâtre généralement en excès de ce qu'on remarque
chez C. rubi, var. fervida, et les veines, surtout les veines n°* 3, 4
et 5; de l'aile supérieure chez les mâles, sont souvent marquées par
des lignes assez larges et foncées paraissant en relief, différant
des lignes plus étroites et plus aplaties que l’on voit chez C. 74b:.
Un caractère marqué est la présence sur la tête d’une fourrure
longue et rougeâtre, remplaçant toute trace des lignes argentées
autour des yeux.
La marque androconiale de l’aile supérieure chez le O' est trian-
gulaire, peut-être une idée plus large que chez C. rub1; mais elle
n’a que la moitié de la longueur, environ, le long de la ligne des
veines, de celle de C. rubi, chez laquelle elle est ovale ou fusiforme.
La massue de l'antenne est rouge ou couleur chair, tout le long
du côté intérieur en dessous, couleur restreinte dans le cas de
C. rubi à quelques anneaux terminaux de la massue, et entourant
l'antenne. Il y a en dessous une teinte de vert un peu différente,
et la ligne blanche a un caractère tout autre que chez C. rubr.
Elle est étroite, mais continue; elle est, en fait, généralement
brisée par chaque veine, mais elle a l’aspect d’être continue en
comparaison avec celle de C. rubi qui se divise en taches plutôt
que de s’amincir comme chez C. avis. Soit en réalité, soit par
l'effet de son étroitesse, elle donne l'impression d’être faiblement
teintée de vert. Elle est entièrement dépourvue des écailles foncées,
le long de sa marge intérieure, si constantes chez C. rubr. La
portion contenue dans chaque espace internervural est courbe. Elle
occupe tous ces espaces sur chaque aile, depuis la côte jusqu'à
l’espace précédant la veine 2, mais elle est brillante vers la côte
(espace entre les veines 6 et 7), et diminue d'éclat vers la partie
intérieure de l'aile. La rangée de taches est bien plus irrégulière
chez C. rubi. La première tache de l’aile inférieure est inclinée
vers l’intérieur; chez C. rubi elle est inclinée vers l’extérieur, ce
qui donne à la seconde tache l'apparence d’être déplacée vers
l’intérieur chez C. rubi et vers l'extérieur chez C. avis.
Les appendices Œ ne présentent que de faibles différences. Je
04 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
n'ai pas examiné assez d'exemplaires pour pouvoir déclarer qu’elles
sont constantes.
Au lieu d’être quasi-omnivore comme C. 7ubr, cette espèce se
spécialise quant à sa plante nourricière. Habite la France méridio-
nale (Var et Pyrénées-Orientales), le Maroc (Tanger). Le seul
exemplaire vu par moi, qui n’est pas en ma possession, est dans
la collection du British Museum rangé avec C. rubi var. fervida
et portant étiquette « Tanger, Elwes coll. »
Dans les 77ansactions of the Entomological Society of London,
1000, Proceedings, Wednesday, June 2", p. XXIX), on lit sur le
même objet ce qui suit :
« Une Espèce Paléarctique nouvelle de Callophrys. — Le
D' T. A. Chapman exhiba des specimens de Callophrys avis,
espèce nouvelle de la France méridionale, capturée par lui pour
la première fois à Hyères, il y a trois ans, et l’année suivante, et
prise par lui cette année dans les Pyrénées-Orientales. Cette
espèce est très voisine de C. 7#bi, mais elle en est séparable par
sa plus grande taille, sa couleur plus rougeâtre, sa face poilue
rouge sans lignes argentées autour des yeux, la forme très diffé-
rente de la bande androconiale, le dessous rouge de la massue de
l'antenne, le ton différent du vert du dessous et le caractère
différent de la ligne blanche. Confondue avec 741, la C. avis est
restée probablement méconnue à la chasse, mais elle ne pourrait
guère l'être en collection, quoique le seul spécimen vu par l'expo-
sant et ne lui appartenant pas, est un exemplaire dans le Natural
History Museum à South Kensington, série de C. rubi, étiqueté
« Tangier, Elwes coll. »
L'espèce est sans doute rare et localisée.
Le D' Chapman dit qu'il espérait soumettre plus tard une
étude sur l’espèce, donnant des détails de ses mœurs et premiers
états.
Il estima qu'il valait mieux pour le moment ne pas anticiper
sur l'intérêt que cette communication pourrait offrir. Il osa dire,
cependant, pour le cas où les spécimens exhibés laisseraient sup-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 95
poser que le C. avis ne soit qu'une simple variété de C. 7462, qu'il
existait de grandes différences entre leurs chenilles, et il en
montra des spécimens dans leur dernière livrée. Il dit que la diffé-
rence la plus remarquable était peut-être dans la première phase
larvaire. Chez deux espèces si rapprochées, on s’attendrait à ne
trouver aucune différence appréciable dans la première livrée. I]
existait, cependant, non seulement des différences de couleur et
de dessin, mais aussi des différences notables dans le dévelop-
pement des poils. »
J'ai reçu de M. Chapman, à la courtoisie et à la générosité de
qui je ne saurais rendre un hommage assez reconnaissant, des
exemplaires authentiques de C. avis. Je me suis alors facilement
rendu compte que je possédais déjà C. avis, de Khenchela et de
Tunisie, et j'ai appris que l'espèce avait été trouvée en outre à
Bussaco, en Portugal. Je fais figurer sur la PI L du présent
ouvrage une série de Callophrys rubi et avis, et j'espère, au moyen
de cette illustration, faciliter la connaissance de la nouvelle
Espèce.
Sous les n° 417 et 418, sont représentés deux 7#b1-suaveola,
d'Akbès: sous les n° 410 et 420, deux avis, d'Amélie-les-Bains
(Pyrénées-Orientales), et un de Tunisie; sous le n° 421, un 7#b1t-
fervida, d'Algérie, et sous le n° 422, un 7ub4, de Moscou, où Ja
race géographique est, en dessus, d’un brun noirâtre différent du
brun toujours un peu plus rougeâtre des 7wbi de l'Europe occi-
dentale.
Thestor mauritanicus, Lucas.
Décrit dans l'Explorafion scientifique de l'Algérie, pendant les
années 1840, 1841, 1842, par H. Lucas, du Muséum d'Histoire natu-
relle, membre de la Commission scientifique de l'Algérie, etc.
Cet auteur, à la page 360 du Tome III, termine la notice con-
cernant le Polyommatus mauritanicus, par la phrase suivante
« Je n'ai rencontré qu’un seul individu Q de ce curieux Polyommate
96 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
que j'ai pris dans les premiers jours de mai, aux environs de
Bougie, sur les bords de la route qui conduit au Gouraïa; quant
au mâle qui habite les environs d'Alger, il m’a été communiqué par
M. Pierret. » Lucas ne semble pas s'être demandé comment la
reproduction de l'espèce pourrait se perpétuer, si le O s’obstinait
à habiter les environs d'Alger, tandis que la Q serait en villégiature
à Bougie.
Quoi qu’il en soit, le T'Aestor mauritanicus s'est arrangé pour
perpétuer son espèce et on le trouve encore de nos jours à Alger,
et à Maison-Carrée, où il vole en février et mars; à Birmandreïs,
où il a été trouvé dès la fin de février 1007; à Kouba; à Tlemcen;
à sebdou.
Ainsi que je l'ai déjà exposé à la page 49 de la Livraison VI
des Ætudes d'Entomologie, le Œ varie de plusieurs façons. La
teinte du fond des ailes qui est généralement d'un gris brun uni-
forme, est parfois sablée d'atomes jaunes : Ab. sabulosus Obthr.;
les ailes supérieures du © peuvent être ornées d'une éclaircie
orangée assez large, mais moins grande et de couleur moins vive
que chez la © : var. Boisduvali, Obthr.; les ailes inférieures
peuvent être immaculées en dessus (forme type); ou bien décorées
près du bord anal et le long du bord marginal, de deux ou trois
taches orangées plus où moins grosses : #adulatus Gerhard. Ces
taches submarginales des ailes inférieures, chez le ©, sont d'un
rouge où d'un jaune orangé. En dessous, aux ailes supérieures, les
petites taches qui sont d’un noir si vif, varient passablement de
nombre et de direction. Guenée a observé que dans auritanicus,
les tibias de toutes les pattes chez le G' et des pattes antérieures
chez la ©, sont très renflés; les pattes sont ponctuées de jaune
paille; la frange est formée par des écailles épaisses et serrées.
Lucas a représenté le ©‘ sans aucune tache en dessus, sous le
n° 9 de la PL I des Lépidoptères de l'Exploration scientifique de
l'Algérie. Le dessous du ' est figuré sous le n° 9a; et la ©, en
dessus et en dessous, sous les n° 0 à et oc. Gerhard a donné sous
le nom d'uxdulatus (PI 5; fig. 2 a, 2 &) l'image de wauritanicus ©,
variété avec 3 points rouge orange le long du bord terminal des
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 07
ailes inférieures, en dessus. À tort, Gerhard a cru que ce Polyom-
matus dont il avait reçu, dit-il, trois exemplaires d'Anderrego, était
une variété de Ballus originaire du Sud de la France et sa courte
notice est tout à fait fautive. Néanmoins le nom d'yrdulatus peut
être conservé pour désigner la variété C' tri-ponctuée par compa-
raison au O' type qui reste, comme je le constate plus haut, d’une
teinte uniforme brunâtre et immaculée.
À part les différences de taille, je n’ai point vu dans la ©, de
variation valant d'être signalée. Mais par analogie à l'Ab. Crosi ©
de Pallus, on doit trouver des Q aurttanicus albinisantes, quant
à la couleur de leur tache orange du dessus des ailes.
Thestor Ballus, Fabr.
Charmante Zycænide dont le dessous des ailes est très agréa-
blement décoré de vert, de brun et de rouge-orange et marqué de
points noir vif finement soulignés de blanc. Se trouve à la fin de
l'hiver et au premier printemps à Hyères (Var); à Malaga; à Bar-
celone et à Villaviciosa-de-Odon en Espagne; en Tunisie et dans
beaucoup de localités d'Algérie : à Alger (fin janvier, 20 février
1907, 22 mars 1008); Maison-Carrée (3 avril 1908); Kouba
(1® avril 1908); Tlemcen; Collo; Lambèze (avril 1868 et 1884,
juin 1885); Mecheria (fin mars 1886); je possède aussi Ballus
de Grèce. La chenille vit sur le lofus hispidus; on la trouve au
mois de mai, à Hyères, selon Guenée.
J'ai fait figurer une Jolie Aberration sudfus-partim-confluens de
Ballus, sous le n° 82 de la PI 5 de la XX° Livraison des Æfudes
d'Entomologie. Les ailes supérieures en dessous, dans cet exem-
plaire aberrant, ont le fond très pâle et les points noirs médians
sont partiellement confluents. Huebner a figuré la Q sous les
n% 360 et 361, et le O', mais avec une coupe d'ailes très défectueuse,
sous les n° 550. Ce Ballus Œ a les ailes inférieures, en dessus,
marquées de deux petites taches rouge orange. Boisduval, dans
l'Icones, a représenté la Q en dessus, sous le n216 dela Pl urotet
le G' en dessous, sous le n° 7 de la même Planche. Boisduval dit
7
98 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
(Zcones; p. 48) que M. de Cerisy a pris Ballus, en 1824, aux envi-
rons de Perpignan. Cet auteur ajoute : « il paraît que Dahl la
aussi trouvé en Sicile. » Duponchel a donné d'assez bonnes figures
ducret de la Q Ballus, en dessus et en dessous, sous les n° 1,
21eti3 dela Pl VII du Supplément. Quant à Gerhard, il a figuré
des Ballus de grande taille, sous les n° 1 4, 1 & et 1 c de la PL. 5,
avec l'Espagne comme indication de patrie. M. L. Dupont a décrit,
dans le Bulletin Soc. Ent. France; 1008; p. 319, une variété de
coloration de 7’Xestor Ballus ©, chez laquelle la couleur rouge du
dessus est remplacée par une teinte or très pâle. Cette Aberration
albinisante a été trouvée à Mascara par le D' Cros et M. Dupont
l'a appelé Cros. Le Thestor Ballus Gest, en dessus, tantôt uni-
colore, tantôt orné près du bord marginal, de petites taches rouge
orange comme la var. wrdulatus de mauritanicus. La description
de Fabricius ne fait pas mention de ces petites taches rouges mar-
ginales. Je lis en effet « alis integris, fulvis (feminæ fuscis) margine
fusco; subtus anticis nigro punctatis, posticis viridibus, margine
fusco : habitat in Hispania. » Dès lors, le type O' est la forme
unicolore de l'espèce et je donne le nom zadulatus à Ballus Œ qui a
les points marginaux rouge orange aux ailes inférieures, comme
Gerhard l’a attribué au auritanicus semblablement maculé.
Dans le Bulletin de la Soc. ent. de France, 1000, p. 228 et 220,
M. E. Holl décrit, avec le nom d’Oberthüri, une Ab. © albinisante
de Ballus, et avec le nom de Weberi, une Ab. (@) mélanisante de
la même espèce. Chez Oberthüri, une teinte crème remplace la
couleur or rouge des ailes, et chez Weberi, l'aspect des ailes infé-
rieures, entièrement envahies par le brun foncé, est très sombre.
Les deux Ab. Oberthiüri et Weberi viennent des environs d'Alger.
Oberthiri serait une exagération de C7os1.
Polyommatus Phlæas, Linné.
J'ai publié dans la XX° Livraison des Ætudes d'Entomologte,
sous lesin® 70,71, 72, 73, 74175, vOlet 77 ide la DIS MES ue tree
de toute une série de variations du Polyommatus Phleas, qui ont
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 09
été gravées avec un réel talent par M. Dallongeville. Cet artiste a
fait également les modèles de coloriage; mais dans sa conscience
scrupuleuse, il craignait tellement de dépasser le ton que presque
toujours, bien loin d'exagérer la couleur, 1l restait au-dessous de
la réalité. Cette critique à part, le travail de gravure ayant été
exécuté avec les modèles en nature sous les yeux et en s'aidant de
photographies préalablement obtenues, je puis dire que la repro-
duction de la forme des ailes et de l'emplacement des nervures et
taches diverses est irréprochable. Tutt, dans le VIII" volume de
À Natural History of the british Lepidoptera (pages 326 à 414)
traite fort en détail l’histoire de Rumzcia Phlæeas; en se servant
des figures que j'ai publiées pour définir certaines variations de
l'espèce, Tutt rend un légitime hommage à l'excellence du travail
artistique de la XX° Livraison des Etudes d'Entomologie. Tout
l'honneur en revient à M. Dallongeville et c'est justice que Je le lui
attribue, puisque s'en présente l’occasion.
Le lecteur a remarqué ce nom générique de Rwricia inventé par
Tutt pour le seul Polyommatus Phleas. Je désapprouve absolument
la création du genre Rwmicia, une pareille méthode, si elle se géné-
ralisait, devrait forcément entraîner la suppression même du nom
de genre, à cause de sa multiplicité abusive, sans raison valable,
ainsi que je l’ai déjà exposé dans la notice consacrée à T'hecla
W album.
Le Polyommatus Phlæas paraît être une espèce douée d'une
vigoureuse résistance et d’une ténacité vitale hors ligne; car elle
s’est répandue sur presque toute la surface de l'Europe, en Asie, Jus-
qu'au Japon, en Afrique, sur la côte méditerranéenne et jusqu'en
Abyssinie, ainsi que dans l'Amérique du Nord. Elle paraît abon-
dante en Angleterre; elle est commune dans toute la France et en
Algérie. Elle fournit les plus intéressantes variations. J'en ai déjà
rendu compte aux pages 12-14 de la XX° Livraison des Etudes
d'Entomologie.
Je signale ici tout d’abord la forme Huebneri, Obthr. dont le
fond des ailes est blanc au lieu d’être noirâtre, alors que les parties
rouge feu restent normales. J'ai traité dans le Bulletin Soc. Ent.
100 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
France; 1005; p. 55, 56, de la question des variations albicantes
de PAlæas et J'ai établi que les variations admises sous le même
vocable de Schmidtiü, dans le Catalog Staudinger et Rebel, 1901,
s'apphquaient à des variétés non seulement bien distinctes, mais
par le fait opposées. Ainsi Fuebneri (Huebner, 736, 737) est l’in-
verse de Schmidt, Gerhard, qui conserve la couleur noirâtre du
fond des ailes et transforme la teinte rouge feu en blanc argenté.
Ma collection contient actuellement 1 G' Æuebneri, de Berlin, ayant
fait partie, Je pense, de l’ancienne collection Wiskott, et 5 C'et 1 Q
Schmidtu, provenant d'Angleterre (', ex coll. Sheppard; &, de
Chislehurst (juillet 1892), ex coll. J. A. Clark; ©, de Tilgate,
extcoll Musvell) de DisnestderBerlincettde Saxe Sn
aussi la transition entre Schmidtü, où l'or feu est remplacé par
le blanc argenté, et la forme type rouge feu; cette variété formant
passage a été appelée cuprinus par H. de Peyerimhoff, dans le
Catalogue des Lépid. d'Alsace (1° Public. Colmar, 1862, p. 13).
La teinte normale rouge feu y est remplacée par une teinte or
jaune.
Ma collection renferme 1 © cuprinus pris à Hyères, en avril
1908 ; 2 G'et 2 Q d'Angleterre (ex coll Howard-Vaughan, ex
coll. J. À. Clark (Hackney; mars 1877); ex coll Maddison);
un © pris par mon frère, à Charroux (Vienne), en septembre 1006.
Ce dernier PAlæas, tout en étant cuprinus, est aussi un peu /#rc1cus,
c'est-à-dire assombri par un semis plus épais d’atomes noirs. Dans
plus de cent PAleas anglais que j'ai sous les yeux et ayant fait
partie des anciennes collections John Sang de Darlington, Tugw2ll,
Howard-Vaughan, Sheppard, Briggs, Maddison, Clark, Je re-
marque un certain nombre d'exemplaires avec une seule aile
claire; ce sont des cas pathologiques dont il n’y a pas lieu de
faire état.
Tutt désigne sous le nom d’obliterata, Scudd. l'Aberration que
j'ai représentée sous le n° 72, venant de Cancale, et il donne le
nom de #ipunctata, Tutt, à l'Aberration n° 73, presque semblable
au n° 72, mais plus accentuée encore dans le sens « suprà-minus-
punctata », prise à Vernet-les-Bains. Les 2 © figurées sous les
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 101
n*“ 72 et 73 de la XX° Livraison des Æ#udes d'Entomologie, sont
remarquables parce que l'éclat de la couleur or feu est également
éteint chez ces deux spécimens, qui prennent ainsi un aspect mat
et terne très différent des PAlæas normaux; elles ont en outre le
même dessous des ailes et dérivent du même principe de variation;
les 2 n° 72 et 73 auraient dû porter le même nom. Autrement il
faudrait un nom spécial à chaque papillon aberrant, puisque deux
sujets quelconques et surtout les anormaux, sont si rarement abso-
lument pareils entre eux.
La véritable A. bipunctata, chez laquelle la teinte or rouge feu est
restée naturelle et par conséquent bien différente du spécimen figuré
sous le n° 73, dans la XX° Livraison des Etudes d'Entomologte,
se trouve, à mon avis, être le papillon représenté sous la fig. 2 4
de la PL 9 de l'ouvrage de Charles Barrett. TLe Lepidoptera of
the british Islands. Je possède 2 exemplaires de cette A0. bipunctata,
figurée par Barrett; tous les deux anglais; l’un © de la coll. Shep-
pard; l’autre également Q de la coll. Briggs, portant l'étiquette
(difficile à lire) : « Meek Standish habt 1896 » et le n° 1082.
Qu'on me permette de faire observer à cette occasion combien il
est regrettable que les papillons des collections anglaises, si géné-
ralement dispersées, après la mort de leurs propriétaires, à la salle
Stevens, à Londres, au hasard des enchères publiques, manquent le
plus souvent des étiquettes détaillées indiquant la localité et la
date de capture. La plupart du temps, les papillons anglais,
d'ailleurs épinglés si bas et que l’on doit toujours faire préparer de
nouveau, lorsqu'ils parviennent sur le Continent, sont dépourvus
de toute étiquette intéressante.
Les Ab. wnipunctata Tutt et wnpunctata, Tutt, dont je n'ai pas
vu les dessins, me paraissent rentrer dans le même cadre que :
obliterata et bipunctata.
Tutt appelle remota, le Phlæas dont le O' se trouve figuré sous
le n° 75 de la PI $ de la XX° Liv. des Etudes d'Ent. Cette Ab.
remota, Tutt, avait été désignée par moi comme suit : «€ punctis
nigris remotis ». Le spécimen figuré vient d'Angleterre (ex. coll.
Howard-Vaughan).
io2 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Tutt signale encore les Aberrations suivantes :
1° L'Ab. parvipuncta, Strand ; elle est définie comme suit
(p. 361) « With very small and videly separated spots in the tra-
verse row, sometimes only indicated by indistinct points ». Je
possède 2 G' de la coll. anglaise Briggs.
2° L'Ab. magnipuncta, Tutt. « The black spots in the submar-
ginal transverse row crossing the forewings much larger than usual,
but not actually united ». Je pense que je possède 4 exemplaires
de cette Aberration, venant de Châteaudun, Silésie, Bernstadt et
d'Angleterre (Abbot's Wood, 1892), ex coll. J. A. Clark.
3° L'Ab. juncta, Tutt. « The spots, forming the transverse sub-
marginal row that crosses the forewing, large, but quadrate,
united to each other directly, or by short dark streaks, along the
nervures, so as to form an united zigzag band accross the fore-
Wings. »
4° Kochki, Strand. C'est l’Aberration que j'ai figurée sous le
n° 74, avec la mention « szpra-radiata ». Mon exemplaire a été
pris à Vernet-les-Bains, en juillet 1804. Je possède un autre exem-
plaire d'Angleterre (ex coll. Briggs). Il est remarquable qu'en
Amérique, les ?Aleas (Hypophlæas, Bdv.) aient une tendance très
fréquente à l'Ab. Kochi (supra-radiata); ma collection renferme
6 exemplaires Xochi provenant de Milton (Mass.), de Dorchester
(Mass.) et de Brooklyn (N. Y.).
s° extensa-conjuncta, Tutt. With the black spots of the trans-
verse submarginal row on the forewings, enlarged as in Ab. ex-
tensa, but, in addition, the 2" and 3" united to the discoidal spot.
6° centriconjuncta, Tutt. The spots of the submarginal transverse
series of the forewings enlarged and moved up closely to the dis-
coïdal spot, and united directly therewith and with each other,
forming a large and central seriated blotch accross the middle of
the wing.
7° fasciata, Strecker, variété de Floride (Etats-Unis).
8 Zatomarginata, Tutt. The black outer marginal border of the
forewings considerably extended towards the centre of the wings.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 103
0° egroaprcata, Tutt. Having a broad black band extending all
along the outer margin of forewings, and much intensified at the
apex, where it runs inwards, enclosing the three black spots there
situated.
10° selanophlæas, Guenée et de Villiers. C'est la variété très
noircie que Jai fait figurer sous le n° 76 de la PL 5 de la
XX° Livraison des Etudes d'Entomologie, d'après un G, de Paris.
Elle semble l'exagération d'Æleus.
11° cæruleo-punctata, Stgr., variété assez fréquente chez laquelle
les ailes inférieures sont marquées en dessus de points bleu brillant.
Barrett figure cette variété sous le n° 2 de la PL 0. On peut la
rencontrer dans toutes les localités, au Nord comme au Sud.
12° oôsoleta Tutt et radiata Tutt (transitus ad obsoleta), variété
figurée sous le n° 77 de la PI. 5 de la XX®° Livraison des Etudes
d'Entomologie, dépourvue de la bande marginale or rouge feu des
ailes inférieures, en dessus. Tantôt la bande or feu manque abso-
lument (oésoleta); tantôt les nervures sont marquées d’un trait fin
doré (radiata). Cette variété paraît être spéciale à l'Angleterre d'où
J'en possède actuellement 8 exemplaires des deux sexes.
Il convient encore d'observer que les PAlæas subissent surtout
en été et principalement dans le Midi, un mélanisme à la suite
duquel les parties rouge feu des ailes sont quelquefois très enfu-
mées par un semis d'atomes noirs.
Je pense qu'on peut appeler cette variété mélanienne : Æleus,
d'après la description que Fabricius a insérée aux pages 430 et 431
du Supplementum Entomologie systematice (Hafniæ, 1708).
Voici comment cette description est conçue : « Æleus. 180 — 1 H. R.
alis emarginatis fuscis : anticis utrinque disco fulvo nigropunc-
tato, posticis fasciola fulva, subtus cinereis nigro punctatis. Habitat
in Germania. Affinis certe H.' elle at omnino distincta. Antennæ
fuscæ, albo annulatæ, clava oblonga nigra, apice ferruginea. Alæ
anticæ fuscæ disco fulvo, nitido punctis majoribus nigris, subtus
cinereæ disco fulvo punctis subocellaribus atris. Posticæ valde
emarginatæ et fere bicaudatæ fuscæ, nitidæ fascia abbreviata,
104 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
dentata, fulva, subtus cinereæ punctis minutis nigris strigaque pos-
tica obsoleta fulva. »
Eleus, selon Fabricius, habiterait en Allemagne. Quoique la
forme mélanienne de PAlæas que nous rapportons à cet Æleus se
rencontre surtout en Algérie et dans l'extrême sud de la France,
elle se trouve aussi, mais plus rarement, dans les contrées plus
boréales du Continent européen. C’est ainsi que j'ai pris à Cancale,
au bord de la Manche, la forme Æleus aussi caractérisée qu’à Vernet-
les-Bains, à Sebdou, en Corse ou à Digne. Je la possède d’An-
gleterre encore bien plus nettement accentuée; c’est une GNde la
coll. J. A. Clark, prise à New-Forest, presque entièrement noire
en dessus; elle n’a conservé qu'une lueur d'un rouge doré près de
la base des supérieures; en outre, j'ai trouvé dans les collections
dont J'ai fait mention ci-dessus, quelques individus @' faisant
une transition à Æleus et s'en rapprochant assez sensiblement.
Stygianus, Butler (P. Z. S. of London, 1880; PL XXXIX,
fig. 5), est assez différent d'Æleus; c'est la forme obscure du nord-
ouest de l'Himalaya.
Je dois observer encore que partout la génération printanière de
Phlæas paraît distincte de la génération d'été. PAlæas-vernalis n’a
pas de caudature aux ailes inférieures et PAlæeas-æstivus est bi-
caudé; de plus PAlæas-vernalis a les ailes d’une couleur rouge feu
bien plus vive et plus claire que PAleas-æstivus; celui-ci tend au
mélanisme et devient le plus souvent Æleus.
Il y a éncore la race #rcicus, Gerhard’ (Pl 5: Ge na 00,16)
qui se trouve fréquemment en Grèce et à Akbès. Je considère /#r-
cicus, comme bien intimement lié à Æleus. Mais je dois dire que
les figures de Gerhard, grossièrement exécutées comme toutes celles
données par cet auteur, ne cadrent pas absolument avec ce que Je
désigne sous le nom de /wrcicus.
Tutt signale enfin les variations du dessous des ailes auxquelles
il donne les noms de : zfraextensa, discojuncta et infraradiata.
La chenille dévore les diverses espèces de 7#/71ex, ce pourquoi
Tutt a créé le genre Rwmicia. Dans l’ouest de la France, on voit
voler le papillon depuis les premiers beaux jours d'avril jusqu’à la
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 105
fin d'octobre; 1l paraît un peu plus tôt et finit un peu plus tard
selon les localités. Il se pose volontiers sur le sol et sur les fleurs
des plantes qui ne sont pas très élevées au-dessus de terre.
Je juge inutile d'indiquer la patrie des PAlæas rangés dans ma
collection au nombre de plus de mille exemplaires. J'ai déjà dit
sur quelle énorme surface de la terre ce joli Polyommatus se trou-
vait répandu. C’est une espèce dont l'extinction ne paraît pas devoir
être prochaine.
Polyommatus Xanthe, Fab.
N'existe ni en Angleterre, ni en Algérie; généralement très
commun au printemps et en été, dans les plaines de l'Europe
continentale; habite aussi les hautes montagnes où 1l éclôt une
seule fois par an, en juillet et août.
Ma collection contient des exemplaires provenant de Rennes et
Cancale; Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales); Digne; Uriage
(Isère); Charroux (Vienne); Ozoir-la-Ferrière (Seine-et-Marne);
forêt du Dom et Hyères (Var); Entrevaux (Basses-Alpes); Angou-
lème; Nice; Dordogne; Lozère; Maine-et-Loire; Locarno (Suisse);
Italie méridionale; environs de Madrid; Escorial (Espagne);
Silésie; Halle-sur-Saale (Allemagne); Cauterets, Gèdre (Hautes-
Pyrénées); Larche; Lanslebourg (Savoie); Chamonix; Levens et
Madone-de-la-Fenestre (Alpes-Maritimes); prairie du Mont-Pelat
et lac d’Allos.
Il y a en Europe trois races principales de Xanthe.
1° La race espagnole que j'ai appelée Bleusei. Le , au prin-
temps, n’a pas les ailes inférieures caudées; 1l présente, sur le dessus
de ses ailes supérieures, une large tache d'un jaune orangé vif,
comme on le remarque sur les Q de nos plaines. Les 2 sexes, en
été, ont les ailes caudées comme ?PAleas estival; le O' et la Q
ont le fond des ailes supérieures en dessus, jaune et non brun.
J'ai fait figurer sous les n°° 66, 67 et 68 de la PI. 5 dela XX° Liv.
106 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
des Æ£/udes d'Éntomologie, le G' et la Q Bleusei-æstivalis, d'après
des exemplaires pris à l'Escorial à la fin de juillet 1870 et le &
de Pleuser-vernalis, d'après un exemplaire pris par moi, en avril
1807, aux environs de Madrid, près de la route qui conduit au
village d'El Pardo, alors que je chassais en compagnie de mes amis
Gaston Allard, D. Laureano Perez Arcas et Serafin de Uhagon.
2° La race des hautes altitudes, chez laquelle le fond des ailes
supérieures est noir en dessus, pour le C', comme pour la Q:1Cette
race alpine a été appelée Montana, Meyer-Dürr et la Q a été
figurée, sans nom, par Bellier de la Chavignerie, dans les Awnales
Soc. ent. France (1859; PI 5; fig. 3), d'après un exemplaire pris
à Larche (Basses-Alpes) et que J'ai sous les yeux. Voici ce que
Bellier dit au sujet de ce Lépidoptère (/oc. cr. p. 188, 180) :
« Taille de ?. Eurydice. Les quatre ailes d'un brun violacé et
brillant sans aucune apparence de taches fauves. Les points noirs
disposés comme chez le type, mais plus petits, plus arrondis et
paraissant à la loupe très finement cerclés de jaune. Côte des ailes
supérieures Jaune; frange des quatre ailes d’un blanc très pur nul-
lement entrecoupée. Dessous d’un jaune grisâtre. Les points y sont
également plus petits et il n'y a presque pas de lunules fauves.
Je n’ai point vu à Larche le Xanthe ordinaire. Il semble y être
remplacé par ce type qui est rare. Il paraît en même temps qu'£wry-
dice et habite les mêmes localités. Je n'ai pris que des Q et Je ne
puis malheureusement parler du Œ. La connaissance des deux
sexes motiverait peut-être pour ce Polyommate, la création d'une
espèce nouvelle; mais dans le doute, je préfère le rapporter comme
variété de race à notre Xax/e, en appelant toutefois sur lui l’atten-
tion des Lépidoptéristes. »
Le oO que Bellier ignorait en 1850, a le fond des ailes unifor-
mément brun noir en dessus, avec des points d’un noir plus vif qui
ressortent sur le fond très obscur des ailes et une frange d’un blanc
très pur.
Le Xanthe montana se trouve en Savoie, dans les Hautes et
Basses-Alpes et les Alpes-Maritimes à partir de 1,600 à 1,800 mètres
d'altitude. Il n’a pas de caudature aux ailes inférieures.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 107
3° La race des plaines chez laquelle les deux sexes sont différents,
tandis qu’en Castille et dans les Alpes, ils sont semblables entre
eux. Mais on constate dans la race des plaines de l'Europe cen-
trale comparée à celle de Castille et des hautes montagnes alpines,
la particularité suivante : Le GO‘ des plaines ressemble à la ©
alpine et la Q des plaines ressemble au O' castillan.
Voici pour le Xanthe de l'Europe centrale, la description de
Fabricius, dans Mantissa Insectorum, Hafniæ, 1787. Glossata, Clas.
VI, p. 81 : « 731 P. P. K. X'anthe alis subintegris fuscis nigro
punctatis : fascia marginali fulva, subtus lutescentibus : punctis
numerosis. Papilio Xanthe Wien. Verz. 181. 6. — Papilio Phocas,
Esp. pap. tab. — fig. — Habitat in 7wwmice acetosa Dom.
Schiffermyller. Minor. Alæ omnes fuscæ nigropunctatæ margi-
neque tenuissime albo et ante marginem fasciola fulva nigro punc-
tata. Subtus virescentes punctis numerosis ocellaribus nigris : an-
ticis disco fulvo, posticis fasciola fulva, apice subemarginatis.
Fœmina alis anticis supra disco fulvo nigro punctato. »
La race Xanthe des plaines d'Europe n’a pas les ailes plus
caudées en été qu’au printemps; il n’y a donc que la race Bleuser-
æstivalis de l'Escorial qui offre ce caractère.
La Q Xanthe a deux formes dans les plaines : 1° le fond des
ailes supérieures en dessus est entièrement d’un jaune orangé vif;
2° Je fond des ailes est obscurci par un semis plus ou moins serré
d’atomes noirs.
Chez nous, en Bretagne comme dans les Pyrénées-Orientales,
comme à Digne, on trouve les deux formes Q, mais la forme à
fond des ailes jaune orange est beaucoup plus abondante que la
forme obscurcie.
Esper a représenté sous la fig. 2 de la Tab. XXXV, avec le nom
de PAocas, la Q dont le fond des ailes supérieures, en dessus, est
orangé et sous la fig. 1, le ©, dont les ailes en dessus, sont bordées
d’un liséré orange; mais Esper intervertit les sexes et dans son
texte, comme sur la figure 35, il appelle O' ce qui est la Q
et vice-versa. Huebner sous les n° 334, 335 et 336, figure avec le
nom de Circe, le G un peu plus obscur que le G (supposé Q)
108 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
représenté par Esper et la © dont le fond des ailes est très obscurct.
La race obscure Q de Xanthe doit donc être distinguée de la
race © jaune, par le nom de Cerce, secundum Huebner. Freyer
donne, avec le même nom Czrce, sous les n°“ 3 et 4 de la Tab. 157,
la figure des mêmes formes que Huebner a représentées, c'est-à-
dire la Q obscurcie par le semis des atomes noirs. Lang figure très
grossièrement, sous le nom de Dorilis, Hufnagel (PL XXI, fig. 3,
3, 3) le O' en dessus et en dessous et la Q jaune non obscurcie de
noir, en dessus. Gerhard (PI. 10; fig. 1 4, 1 à, 1 c) représente le C
et la © jaune, non obscurcie, avec le nom de Xan/e et (PI ro;
fig. 2) il figure le dessous des ailes, d’une variété Canidia, Stentz,
venant de Dalmatie, se distinguant par la teinte verdâtre du
dessous des ailes. « Diese Var. unterscheidet sich durch die gruen-
liche Unterseite, sonst ist sie ganz gezeichnet wie Xanthe. »
Xanthe offre les aberrations suivantes qu'on pourrait appeler
régulières, puisqu'elles émanent d'une loi qui atteint les diverses
espèces du genre Polyommatus.
1° 7adiala.
J'ai pris dans une prairie, en mai, tout près de l'étang des an-
ciennes forges dites : de la Vallée, non loin de la forêt de
Rennes, un Œ' rayonné en dessous et J'ai acquis une © de Silésie,
également rayonnée. Je fais figurer ces deux A0. radiata sous les
n% 332 et 333 de la PI XLIII du présent ouvrage.
Je possède une Q de Breslau, subradiata, ayant, en dessous,
tous les points noirs plus gros et plus allongés et formant de chaque
côté des ailes et sur chaque aile, une série arquée de points noirs
très prononcés. Aux ailes inférieures notamment, les 2 rangs de
points noirs submarginaux confluent dans le sens de la longueur :
celui qui surmonte les taches rouges intranervurales marginales se
joignant à la rangée extracellulaire.
2° purpureo punctata, Wheeler.
Comme ?Alæas, Xanthe peut offrir sur le dessus de ses ailes
inférieures, une rangée submarginale de points bleuâtres.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 109
3° cuneifera.
Les taches noires des ailes supérieures en dessus, peuvent se
développer en longues larmes dont la pointe est dirigée vers la
base des ailes. J'ai pris à Rennes, en été, une Q cuneifera et à
Cancale un G' présentant la même variation (©, PI XLIIT,
fig. 335).
En outre de ces Aberrations, les ailes du dessus chez le
peuvent être plus ou moins lisérées d’orangé; la teinte du dessous
des ailes peut être plus ou moins vive et les taches noires plus ou
moins développées.
Il me reste à faire connaître les variations en sens opposé aux-
quelles le CG Xanthe peut être soumis, aux environs de Rennes. Je
n'ai pas remarqué dans les autres localités où J'ai recueilh Xaufke,
la même variabilité. Il peut donc arriver à Rennes que le G' ait
le disque des ailes supérieures assez fortement lavé de Jaune, se
rapprochant ainsi de Bleusei et inversement que le G' ait le fond
des ailes d’un brun noirâtre très profond, avec la frange très
blanche, se rapprochant alors de #ontana. Toute bordure orangée,
dans ce cas, a disparu sur le dessus des ailes. J'ai appelé la variété
d' à fond des ailes jaunâtre : Monterfilensis, du nom du pitto-
resque pays où je l’ai plusieurs fois capturée (PI. XLIIT; fig. 334).
Quant à l’autre, rien ne la distingue effectivement de #ontana qui
conserve pourtant le fond de ses ailes, en dessus, d’une teinte
noire plus pure et un peu moins rembrunie.
M. de Peyerimhoff, dans l’Appendice à la 1° publication du
Catalogue des Lépidoptères d'Alsace, a décrit l'Ab. Xanthoides,
chez laquelle les taches noires, sur le disque des ailes, sont beau-
coup plus marquées et le fond du dessous est d'un gris mat, au
lieu d’être d'un gris jaunâtre. La capture de Xanthoïdes fut faite
fin de mai au Kastenwald.
De tout ceci, il résulte que la nomenclature du Polyommatus
Xanthe peut être établie comme suit
110 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Xanthe, Fab. (Phocas, Esper). Plaines et montagnes de l’Europe
centrale.
1° forma geographica alpina :
montana, Meyer-Dürr : S' Q supra alis totis nigris, Alpes,
au-dessus de 1,600 mètres.
2* forma geographica castillana :
Bleuser, Obthr, Castille.
vernalis, G' alis super. supra aurantiacis; |
æstivalis ©, Q alis super. supra flavescentibus; O, © alis
inferior. caudatis.
Ab. 1° Q obscurior : Czrce, Huebner (335, 330).
2° © subtus griseoviridescens : Canidia, Stentz;, Gerhard,
Dalmatie.
3° d' maculis nigris supra bene notatis;, subtus grisescens :
Xanthoides, de Peyerimhoff, Alsace.
4° d, Q subtus radiata, vel subradiata :
radiata, Obthr.
subradiata, Obthr.
5° d, Q alis infer. supra punctis minutis cærulescentibus :
purpureo punctata, WNheeler.
6 d, Q maculis nigris alar. super. guttato-elongatis : cunei-
fera, Obthr.
7° Œ' alis super. supra flavescentibus : Monterflensis, Obthr.
Env. de Rennes.
Les exemplaires d'Asie-Mineure que je possède, ne me semblent
pas mériter un nom spécial : orientalis Stgr. Ils ne diffèrent pas
des exemplaires européens. Les Q orientales appartiennent tout
simplement à la forme Czrce, Huebner.
Le Polyommatus Xanthe est un papillon très vif, qui affectionne
les prairies; il aime à voltiger au-dessus des fleurs des prés, sur
lesquelles il se repose de temps en temps. Il ne s'éloigne guère des
lieux où il est né. Partout où j'ai chassé en France, j'ai trouvé
Xanthe; à Cauterets, il n'y éclôt sans doute qu'une fois par an,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE TI
en Juillet; la race de Cauterets n'appartient pas à la forme #ou-
tana; sur les flancs de la montagne du Péguère où Jje l’ai capturée,
elle est semblable à la forme des plaines.
Il est surprenant que X'anfhe ne se rencontre pas en Angleterre,
alors qu'il habite vis-à-vis, sur les falaises de la côte malouine, et
qu'il s'avance dans l'Allemagne, assez loin vers le Nord. Sans doute,
Xanthe aura habité jadis l'Angleterre? Mais il y aura été détruit,
comme tant d’autres espèces de Lépidoptères l'ont déjà été ou le
seront un peu plus tard dans la grande Ile. En France, c'est encore
une espèce très abondamment et très généralement répandue.
Polyommatus Amphidamas, Esper.
L'Amphidamas a été figuré par Esper, sous le n° 4 de la
Tab. LVIIL Il a été aussi représenté par Iluebner, avec le nom
de elle, sous les n° 331, 332 et 333. Ce n’est point une espèce de
l'Europe occidentale; Amphidamas habite la Sibérie, la Laponie,
la Prusse, la Saxe; cependant on l'a rencontré dans le Jura bernois
et en France, dans le département du Doubs. Je suis redevable à
M. François Jeunet, de Besançon, de deux exemplaires français de
cette gracieuse petite espèce.
La Franche-Comté qui avoisine l'Alsace est, comme cette pro-
vince, extrêmement intéressante pour ses productions naturelles,
notamment pour sa faune entomologique qui est fort riche; et de
même qu'en Alsace, il y a en Franche-Comté, un assez grand nombre
d'amis très ardents de l'Histoire naturelle. À Besançon, notamment,
résident plusieurs Lépidoptéristes très zélés qui ont attentivement
exploré leur pittoresque pays. Ils ont d’ailleurs le mérite d'apporter
dans leurs recherches, une persévérance laborieuse et une sagacité
qui ne pouvaient manquer de leur valoir le succès. MM. François
Jeunet et René Fritsch sont au premier rang de ces chasseurs
consciencieux qui ne reculent devant aucune fatigue, ni aucun
effort. Ils sont fort obligeants et je leur porte une gratitude très
sincère pour les communications utiles dont je leur suis redevable.
112 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Le Polyommatus Helle du département du Doubs, ressemble
tout à fait à celui du Jura bernois. Le Œ présente deux formes,
l'une qui a le fond des ailes supérieures d’un violet à peu près
uniforme, et l’autre qui présente sur le disque des ailes supérieures
une éclaircie d’un rouge aurore sur laquelle se détachent très bien
les points noirs cellulaires et la rangée courbe extracellulaire des
petites taches intranervurales noirâtres qui transparaissent du
dessous. Cette forme du GO‘ à disque aurore, se rapproche de la
forme © normale.
J'ignore si elle a été distinguée par un nom; J'ai été inhabile à
le découvrir. Wheeler dit qu'Amphidamas est une espèce de mon-
tagne; 4l lui donne pour localités en Suisse, la pente occidentale
du Moléson, dans les prairies marécageuses, en juin; Villard-sur-
Clarens; la pente des rochers de Nayes, près Caux; la vallée de
Tinière et Villars-sur-Gryon;, Stockhornthal; Pas-de-Cheville;
Tramelan; Hasliberg; Justisthal; Pilatus; l'Alp d'Emsig; Ober-
Gurnigel.
M. Frédéric de Rougemont, dans le Catalogue des Lépidoptères
du Jura neuchâätelois, dit (p. 19) que M. Guédat trouve elle
(Amplidamas) en grande quantité, à l'étang de la Gruyère, au
commencement de juillet et qu'on le rencontre aussi dans tous les
marais avoisinant Tramelan.
Feu le chanoine Favre ne signale Awphidamas qu'au col de
Cheville et dans les environs de la Gemmi; mais il déclare n’avoir
jamais rencontré l'espèce dans ses chasses. Il en est ainsi pour moi;
jamais je n'ai vu le Polyommatus Amphidamas vivant.
Polyommatus Gordius, Sulzer.
Dans l'ouvrage publié à Winterthur, en 1776, sous le titre :
Dr Sulzers abgekuerste Geschichte der Insecten nach dem Linneis-
chen System, se trouve figurée sous les n° 7 et 8 de la Tab. XVIII,
avec le nom de Gordius, une Q dont la taille est extraordinairement
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 112
développée. Jamais je n'ai vu un exemplaire de Gordius aussi
grand (*).
La description est ainsi conçue : « Gordius. Etwas gezaehnte
rothgelbe Fluegel, mit schwarzem Saume und Flecken, die unten
einen grauen Rand haben. Die Hinterfluegel sind unten grau, der
hinter Rand gelb. Aus Buendten. » Cette diagnose est bien courte
et bien abrégée; sans la figure à l'appui, elle serait lettre morte;
mais la représentation de Gordius, donnée par Sulzer, malgré une
coupe d'ailes inexacte, ne laisse pas de doute, quant à l'identifica-
tion de l'espèce. Huebner a donné des figures passables sous les
n® 343 O, 344 et 345 Q. Quant à Esper, il a copié la figure de
l'ouvrage de Sulzer, sous les n° 34 et 3% de la Tab. XXX.
D'ailleurs il a la probité de dire qu'il a fait un emprunt à l’ou-
vrage de M. Sulzer (p. 327) : « Ich habe ihn aus dem Werke des
Herrn Sulzers entlehnt. » Le dit Esper ne représente une Q vue
par lui en nature, que sous le n°4 de la Tab. LXXVII et le ©, sous
la fig. 4 de la Tab. XCIV. Gerhard a figuré Gordius Set ©,
sous les n°4, 10, 1c dela PI. 0;
Dans la XX° livraison des Etudes d'Entomologie, J'ai moi-même
fait paraître sous les n° 78 et 70 de la PL 5, des figures très bien
exécutées par M. Dallongeville, représentant en dessous, un C'
subtus-fere-radiata et une © subtus-minus-punctata. Aux pages
10 et II, j'ai écrit une notice sur diverses variations de Gordius;
puis dans le Bulletin Soc. ent. France, 1906, p. 25 et 26, j'ai ajouté
quelques Observations sur les variations du Polyommatus Gordius.
(#) Gordius, père de Midas, avait un chariot dont le joug était attaché au
timon par un nœud d'écorce de cornouiller si artistement entrelacé qu’on n’en
- pouvait découvrir les houts.
Un oracle avait déclaré que celui qui pourrait le délier aurait l'empire de
l'Asie. Alexandre-le-Grand, roi de Macédoine, se trouvant en Phrygie, dans
la ville de Gordine, ancien séjour du roi Midas, eut envie de voir le chariot
où était attaché le nœud gordien; et, s'étant persuadé que la promesse de l’oracle
le regardait, il fit plusieurs tentatives pour le délier; mais n'ayant pu y réussir
et craignant que ses soldats n’en tirassent un mauvais augure, il n'importe, dit-il,
comment on le dénoue; et l’ayant coupé avec son épée, il éluda ou accomplit
l’oracle (Diciion. de la Fable, par Fr. Noël. Paris, An XIII-1805).
8
114 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
J'ai cité un Gordius Œ, à fond des ailes blanchâtre, portant l’éti-
quette : Graubiinden, ce qui est la désignation allemande du canton
des Grisons, en Suisse. Je fais représenter ce papillon sous le
n° 247 de la PI XXXVIII de cet ouvrage, avec le nom : albescens.
Il faisait, je pense, partie de la collection Wiskott.
De plus, je constate la fréquence à Digne d’une variété à ten-
dance définitive et se renouvelant chaque année, caractérisée par
l'absence de points noirs en dessous; j'ai appelé cette variété
diniensis; elle est également figurée sous le n° 245 de la
PI XXXVIII.
Au contraire de ce qui se passe dans les Basses-Alpes, on
remarque aux Pyrénées la tendance du Polyommatus Gordius
à avoir les taches noires très développées. Je fais figurer avec le
nom de Rondoui, sous le n° 246 de la PL XXXVIII, un très bel
exemple de rayonnement des taches noires, provenant de Gèdre
(Hautes-Pyrénées). Je suis redevable de cet exemplaire magnifique
à la générosité de mon ami Rondou.
J'ai fait figurer en outre, sous le n° 248, un Gordius ©, de la
Sierra-Nevada, que j'appelle Mevadensis et une paire de Gordius,
pris en Sicile, dans les Monts Madonie, par Bellier, et que je désigne
sous le nom de Bellieri (PL XXXVIII; fig. 249 et 250).
Gordius se trouve dans le Valais; M. Fabresse l’a rapporté de
son voyage dans l'Italie méridionale. I] a pris 2 Q au Mont Majella,
au commencement d'août 1007.
J'ai déjà cité dans le Bulletin Soc. ent. France, 1006, les localités
françaises d’où j'ai pu obtenir Gordius; ce sont : Limoges; Florac;
Pont-du-Gard; Hyères; Vernet-les-Bains; Cauterets; Gèdre;
Digne; Larche; Uriage; Marseille et quelques points des Alpes-
Maritimes où la race est magnifique. Gordius n'existe ni en Angle-
terre, ni en Algérie. Je l’ai pris dès la fin de mai, à Vernet-les-
Bains, mais exceptionnellement, à cette date précoce. L’éclosion de
Gordius a surtout lieu en juin et juillet. C’est une très jolie espèce,
mais que je n'ai jamais vue très abondante en individus.
Vers l’est, Gordius modifie ses couleurs en les assombrissant ;
il revêt alors la forme Ætere, Fabr. qui habite en Alsace les pâtu-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 115
rages élevés des Vosges et les bois arides de la plaine (Cazal. de
Peyerimhoff; p. 14) et dans les Vosges, à Plombières, où feu
de Graslin l’a pris le 11 juillet. Esper a figuré Æ2ere, sous le nom
de 2520106 (Tab. LXII ©, fig. 2; Tab LXXVIIL ©, ñg. 6).
Le même auteur avait déjà figuré le G' avec le nom d'7:ppothoë
var. sous le n° 5 de la Tab. XXXV. Quant à Huebner, il a bien
figuré les deux sexes en dessus et en dessous, avec le nom de
Lampetie, sous les n* 356, 357, 358 et 350.
Les Q Aüiere varient pour le dessus de leurs ailes qui sont tantôt
d'un brun uniforme en dessus, avec une simple ligne maculaire
orangée, le long du bord des inférieures, et tantôt avec une éclaircie
fauve orangé plus ou moins étendue sur les supérieures, dans
l’espace cellulaire et au delà vers le bord terminal, var. z#/ermedia,
Stefanelli. La liture maculaire, submarginale, orangée, des ailes
inférieures est quelquefois surmontée d'une rangée d’atomes bleus.
Quant aux ©, la variation en dessus, porte surtout sur les ailes
inférieures qui offrent le plus souvent, près du bord costal, une
éclaircie d’un rouge aurore plus ou moins étendue et prononcée.
Enfin les taches noires du dessous varient beaucoup de grosseur.
Hiere donne une variété dépourvue de points noirs en dessous,
conforme à la Déniensis de Gordius. J'en possède une © d'Alle-
magne. Herrich-Schaeffer a figuré, sous le n° 356, un C' de cette
variété. Je lui ai donné le nom d'Æerrichi. Gerhard a copié la
figure publiée par Herrich-Schaeffer; mais il l’a changée de côté.
Son coloriage est mal réussi. Il a représenté Azere C' et Q sous
les n° a 4,b4 et c 4 de la PI 8.
Staudinger a donné le nom de Welibœus à la race de Grèce et
d'Asie-Mineure. Melibœus est très commun à Akbès. IT y a une
autre forme géographique très grande que G. S. Akulin m'a envoyée
du Fort-Naryne, dans la province Semirechgensee, au Turkestan
oriental. Je fais figurer la Q qui est très obscure en dessus, avec
une bordure marginale de croissants blanchâtres aux ailes infé-
rieures en dessus, sous le nom de Waryna (PI. XLIX; fig. 407),
116 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
NU Te TS SR
Polyommatus Chryseis, Bergstraesser.
En 1778, le professeur de Philosophie Joh. Andr. Benignus
Bergstraesser, Recteur de l'Ecole évangélique-luthérienne-latine
de Hanau et membre d'honneur de la Société des Amis de l'étude
de la Nature de Berlin, entreprenait, avec l'appui et la souscription
de plus de 250 notabilités d'Allemagne, de Hollande, de Dane-
mark et même de Russie, la publication d’un livre qu'il intitulait :
Nomenclatur und Beschreibung der Insecten in der Grafschaft
Hanau-Miünzenberg wie auch der Wetterau und der angraensenden
Nachbarschaft dies und jenseits des Mains, mit erleuchteten
Kupfern.
La faune du comté de Hanau, de la Vetteravie et des pays
voisins, en deçà et au delà du Mein, est certainement riche et
variée. De plus, à Francfort-sur-le-Mein, il y avait, à la fin du
XVIII siècle, la célèbre collection Gerning qui renfermait une
abondance de documents telle que, si elle existait de nos jours,
elle se trouverait encore au premier rang. Bergstraesser, comme
Esper, pouvait compter sur l’utile concours de Christian Gerning et
tous les deux ont profité des trésors entomologiques qui se trou-
vaient à leur portée et à leur disposition. Malheureusement, toutes
les Planches de l'ouvrage de Bergstraesser ne sont pas parfaites
et beaucoup d'espèces délicates de papillons, surtout parmi les
Lycæna, ne sont pas spécifiquement reconnaissables; mais s'il y a
des inégalités considérables dans la valeur des cuivres gravés, il
est cependant possible d'identifier avec certitude un assez bon
nombre d'espèces, surtout celles qui sont de grande taille et qui
présentent des caractères saillants. En tout cas, l’ouvrage, dans son
ensemble, n’est pas sans valeur, et on y peut trouver des documents
et des renseignements utiles.
Bergstraesser figure sur la Tab. 68, deux espèces de ces papillons
à couleur rouge feu, que les Allemands appelaient autrefois
gold glaensende Falter, ou feuerfarbschimmerende Tagvoegel. Les
n® 4, 5, 6, 7, 8 sont consacrés à la représentation de C#ryses,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE ia 4
tandis que les n° 1, 2 et 3 figurent /2ppothoë; mais qu'est-ce exac-
tement que CArysers et Hippothoë, où plutôt laquelle des deux
espèces doit porter le nom linnéen d’A1ppothoë? Dans les trois
espèces de Polyommatus rouge feu de l'Europe occidentale, une
seule espèce, Virgaureæ, Linné, ne donne pas lieu à confusion. La
synonymie des deux autres est très embrouillée et le trouble ne
date pas d’hier; car, dès la fin du XVIII siècle, on n'était déjà
pas d'accord sur l'espèce à laquelle on devait appliquer le nom
d'Aippothoë, donné par Linné, à un feuerfarbschimmerende
Tagvogel.
Pour essayer de voir clair dans cette partie confuse de la Nomen-
clature entomologique, J'ai placé devant mes yeux deux 1ppothoë
et deux CAryseis ', en dessus et en dessous, et J'ai remonté aux
sources.
J'ai ouvert la Fauna Suecica Caroli Linnei, Equitis aurati de
Stella Polari; Archiatri Regu Med. et Botan. Profess. U psal. etc.
Editio altera, auctior. Stockholmiæ 1761, et à la page 274,
art. 1046, d'{nsecta Lepidoptera Papilio (Helicont), j'ai lu ce qui
suit : » Papilio Hippothoë, alis integerrimis : supra fulvis imma-
culatis, subtus cinerascentibus punctis ocellaribus numerosis.
Habitat apud nos rarissime. Descr. Statura P. vgauree. Alx
supra omnino fulvæ immaculatæ, subtus luteo-cinerascentes. Pri-
mores subtus punctis nigris iride alba : 3 majoribus intra marginem
exteriorem; 7 minoribus fere transversim positis, 6 minutissimis
ad marginem posticum. Secundariæ subtus cinerascentes punctis
ocellaribus circiter 17, præter fasciam ad marginem posticum
fulvam, antice nigropunctatam. »
Donc les ailes sont très entières; elles sont en dessus fauves
(fulvis), immaculées; en dessous elles sont de couleur cendrée, avec
de nombreux points ocellés. Ce premier signalement peut s’appli-
quer aussi bien à Æippothoë qu'à CAryseis, mais il n’est complè-
tement satisfaisant pour aucune des deux espèces en question. En
effet. les ailes en dessus ne sont pas /#/lvis, mais rouges (7#b1dis).
Elles ne sont pas immaculées, puisqu'il y a dans chaque espèce, aux
ailes supérieures, en dessus, un point noir pour clore la cellule; enfin
118 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
elles sont entourées d’une bordure noire dont Linné ne fait pas
mention.
Dans la description plus détaillée qui suit la diagnose, la phrase
« subtus luteo cinerascentes » convient sans doute mieux à CAryseis
qu'à Æippothoë; quant à la ponctuation, elle convient également
aux deux espèces; mais les mots « præter fasciam ad marginem
posticum fulvam, antice nigro punctatam » s'appliquent à Aippo-
thoë, plutôt qu'à CAryseis. En effet, on remarque chez Zippothoë,
une bande fauve, près du bord inférieur, surmontée d’une ponc-
tuation noire, tandis que CAryseis est presque dépourvue de cette
bande fauve (fascia fulva).
Linné a placé son Æippothoë entre Arcania et Hero. Virgauree
qui figure dans les Plebeÿ, est au n° 1070, très loin d’Arppothoë
qui est colloqué dans les Æeliconu. Les Plebej: sont séparés des
Heliconti par les Nymphales. Ce sont les ÆEquites ou Chevaliers qui
commencent la série des Lepidoptera, avec Machaon, seul repré-
sentant de la noblesse lépidoptérologique en Suède.
S'il existait une figure de l’Jippothoë, de Linné, on ne serait
pas si embarrassé. Le Suédois Charles Clerck, membre de la Société
royale des Sciences d'Upsal, a publié à Stockholm, en 1759,
lZcones Insectorum rariorum cum nominibus eorum trivialibus,
locisque e C. Linnei Arch: R:et Equ: Aur: Syst: Nat : alle-
gatis (*); mais Fippothoë n'est point compris parmi les pièces rares
(*) On ne lira peut-être pas sans intérêt la page suivante, manuscrite en
tête de l’exemplaire de ma Bibliothèque, qui porte en outre, en seconde page,
cette indication : « Donné par M. le Chambellan Jenning, en 1769 ».
« Note mise en tête de l’exemplaire qui a appartenu à M. Mariette. — Ce
livre joint au mérite de la plus parfaite exécution celui d’une extrême rareté.
M. Charles Clerck, Suédois et membre de l’Académie d’Vpsal, qui en est l’auteur,
s'était réservé le soin de peindre lui-même les exemplaires qu’il se proposait
de répandre dans le Public; mais à peine en eut-il formé le projet qu’il mourut ;
et l’on assure qu’il n’en avait pu achever que dix, sans espérance de pouvoir
rencontrer quelqu'un qui eût le même zèle et le même talent : à quoi il faut
ajouter que les planches qu'avait gravées ce savant Naturaliste et qui ont servi
à guider son pinceau, ne subsistent plus. On me la ‘du moins fait entendre.
Un Suédois qui avait acheté des héritiers de M. Clerck le peu d'exemplaires
qui leur restaient, étant venu à Paris en 1768, fit présent de celui-ci à
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 19
figurées par Clerck. Pourtant Linné dit qu'il se trouve très rarement
dans son pays et la représentation de cet Æ/2ppothoë eût été bien
utile.
Voyons comment les auteurs de la fin du XVII[ siècle ont
apprécié la question.
Tout d’abord il convient d'observer que la priorité réelle entre
les vieux auteurs est quelquefois difficile à établir exactement. En
effet, très souvent la date de la publication reste fort incertaine à
quelques années près.
Dans la 3° partie de la Recréation provenant d’une publication
mensuelle sur les Insectes (Der monatlich-herausgegebenen Insecten
Belustigung Dritter Theil) du peintre en miniature Roesel von
Rosenhof continuée par Kleeman, gendre de Roesel et peintre en
miniature comme son beau-père, on trouve sur la Tab. XXXVII
Suppl. Classis IL. Papilionum diurnorum, la figure de la forme
alpine de CAryseis ©, dite : Eurydice très finement représentée
sous les fig. 6 et 7.
Il est bien certain que le papillon figuré par Roesel est un
Chryseis-Eurydice; mais cherchant dans ma collection à identifier
la figure de Roesel avec quelqu'un des exemplaires d'Ewrydice qui
y sont conservés, je dois dire que je ne possède aucun échantillon
semblable. Les différences portent sur la tache noire cellulaire des
ailes supérieures, en dessus, plus accentuée dans la fig. 7 de la
Mad. Geoffrin, qui m’honore de son amitié et qui, croyant que ce livre me
plaisait, s’en est bien voulu priver en ma faveur, et m’accorder ce nouveau
gage de son estime et de sa bienveillance. Ce livre relié en mar. violet... doubl.
de... a été vendu 720 à la vente de M. Camus de Limarre en 1786. »
« J'ai acheté le présent exemplaire à Paris, en l’an 3, 4000, les assignats
à 15 p. o/o. Signé : Huzard. »
(II y a deux mots illisibles; j'ai dû les laisser en blanc; la signature, diffi-
cile à déchiffrer, pourrait cependant ne pas être Huzard. Cet Huzard était un
membre de l’Institut, possesseur d’une Bibliothèque scientifique dont quelques
pièces sont venues entre mes mains; notamment l’ouvrage : Genera Insectorum
Linnaei et Fabricii Iconibus illustrata a Joanne Jacobo Roemer. Vitoduri Helve-
torum 1789, qui porte très distinctement la griffe : Huzard, de lInstitut. —
Ch. Obthr.)
120 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
PI XXXVII de Roesel et dans la ponctuation du dessous où se
trouve plus fortement indiquée la série des points marginaux des
ailes supérieures comme des inférieures, tandis que tous les points
plus éloignés du bord terminal sont au contraire moins nombreux
et partiellement plus absents chez l’exemplaire de Roesel que chez
les miens.
Dans le texte (p. 230 et 231), il y a seulement le nom allemand
vulgaire que J'ai cité plus haut qui veut dire : brillant d’or
(gold glaensend), ou : couleur de feu reluisant (feuerfarbschimme-
rend). Mais en note, on lit que, d'après M. von Rottemburg, la
figure donnée par Roesel sous les n°* 6 et 7, représente A2ppothoë,
Linné. J'ai inutilement recherché la date de cette publication; je n’ai
pu découvrir que la suivante : Nuernberg, den 12 september 1755;
cette date se trouve imprimée après un avant-propos (Vorrede)
signé de August-Johann Roesel von Rosenhof. Mais l'édition a
certainement paru un peu plus tard, sans doute avant 1757,
date de la X° Edition du Systema Nature, puisque Linné y fait
mention de l'ouvrage de Roesel.
Quoi qu'il en soit, CAryseis des montagnes, ou Æwrydice se
trouve rapporté à Æ/ippothoë, Linné, dans l'ouvrage de Roesel,
ce qui est évidemment une erreur; car en Suède, on ne trouve pas
la forme alpine Æwrydice représentée par Roesel.
J'ai déjà dit que les figures étaient magnifiquement exécutées;
j'ajoute que le texte a été supérieurement imprimé par Johann
Joseph Fleischmann, de Nuremberg.
Si maintenant je cherche ce qui a été fait par Esper dont l’ou-
vrage : Die Schmetterlinge in Abbildungen nach der Natur mit
Beschreibungen von Eugenius Johann Christoph Esper, a paru
à Erlangen, en 1777, je trouve sur la Tab. XXII, le Ckryseis ©
représenté sous la fig. 3, avec le nom d'Appothoë et si je me
reporte au texte (p. 202 et 293), je lis le nom d'Æippothoë, Linné,
attribué à ce papillon, avec copie de la description linnéenne qui
est rapportée comme ci-dessus : alis integerrimis supra fulvis imma-
culatis, subtus cinerascentibus, punctis ocellaribus numerosis.
En outre, Esper reconnaît dans sa notice descriptive, qu’il a par
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE F2]
erreur appelé Æurydice, la Q d'Aippothoë figurée sous la fig. 3
de la Tab. XXXI; aux pages 320 et 330, il confirme pour le nom
de cette ©, la correction qu'il juge déjà à propos d'indiquer quelques
pages auparavant. Seulement le même Esper semble être bien mal
fixé sur la valeur spécifique relative de Æippothoë et Chryseis,
attendu qu'après avoir figuré comme #/ippothoë, le Chryseis ,
sur la Tab. XXII et le CAryseis Q, sur la Tab. XXXT, il figure
comme var. d'Aippothoë, et non pas comme espèce séparée, l’Z7p-
pothoë Dispar S et ©, représenté sous les n°” 1 a et 1 b de la
Tab. XXXVIIT.
Les figures sont excellentes et ce sont les premières qui repré-
sentent le dispar anglais actuellement éteint. Pourtant Esper ne
s'est pas rendu compte de la différence spécifique si grande qui
existe entre son Aippothoë (Chryseis) et sa variété d'Aippothoë !
Cette confusion enlève de la valeur à la détermination de
Chryseis, comme Hippothoë, secundum Linné, par Esper, et
démontre avec quelle légèreté s'est faite parfois l'étude, la compa-
raison et la dénomination des espèces, même chez les Anciens.
Je reviens maintenant à Bergstraesser dont j'ai parlé au début
de cette Notice.
Que dit-il lui-même? Il affirme que son Æippothoë (lg. 1, 2 et
3 de la Tab. 68) est bien celui de Linné. Il discute la question de
façon à démontrer que sa conviction est absolue et 1l figure avec
le nom encore nouveau à cette époque, de CAryseis, sous les n° 4,
5 (S), 6, 7 (Q) et 8 (Ab. confluens), le Polyommatus a) qui Je
crois devoir définitivement maintenir ce même nom.
Moritz Balthazar Borkausen, dans Waturgeschichte der euro-
peischen Schmetterlinge (erster Theil-Tagschmetterlinge; p. 143,
144), admet comme valable ce que propose Bergstaesser.
Il dit en parlant d'Ayppothoë (sic), Bergstraesser; Tab. 68;
fig. 1, 2, 3 « Dieser Falter ist unstreitig die ware Hyppothoë des
Ritters ». Ce papillon est incontestablement le véritable 7 yppo-
thoë du Chevalier.
Remarquons en passant que Bergstraesser emploie cette même
désignation : Riter-Chevalier, pour désigner Linné, Chevalier de
122 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
l'Etoile Polaire et la phrase de Bergstraesser (p. 43), est sensi-
blement la même que celle de Borkausen (p. 143) : « Der Falter
den wir hier vor uns haben, ist die ware Hippothoë des Rüitters ».
Le papillon que nous avons devant nous, est le véritable Fzppothoë
du Chevalier. Seulement Bergstraesser écrit correctement Æ/1#po-
thoë, comme le Chevalier Linné l’a écrit lui-même et Borkausen
commet une incorrection en écrivant À yppothoë.
Les auteurs du Systematisches Verzeichniss von den Schmetter-
lingen der Wiener Gegend (Braunschweig; 1801; II er Band)
partagent la même opinion (p. 253). Ils admettent comme //1ppo-
thoë, le dispar qu'Esper a figuré comme variété d’Azppothoë, sous
les fig. 1 a et 1 à de la Tab. 38, et ils considèrent comme Crysess,
l'Zippothoë, Esper (Tab. XXII, G''hg. 3); mais il y a plus, le
Doct' Jo. Frid. Gmelin, dans l'édition 13° du Systema Nature
de Linné, augmentée et corrigée (Tom. I; part. V; 1788; Lepidop-
lera; p. 2350), distingue Cryseis et Hippothoë et les décrit
comme suit : |
1° « Chryseis 815. P. alis aureis : margine cærulescente, poste-
rioribus subdentatis, subtus obscure griseis : punctis ocellaribus
numerosis. Habitat in Austria, Zippothoæ nimis affinis, Eurydice
Esperi. »
2° « Aippothoë 254. P. alis integris : margine albo, subtus
cinereis : punctis ocellaribus numerosis. Systema Nature XIL 2 p.
703, n° 254; Fauna suecica 1046. Papilio alis integerrimis supra
fulvis immaculatis, subtus cinerascentibus : punctis ocellaribus
numerosis (Roesel; Tab. 37; fig. 6, 7. — Esper; T. 38; fig. w):
Habitat in Europæ pratis. »
Le D' Gmelin, dans la 13° édition de l’œuvre linnéenne, considère
donc CAryseis comme valable et le décrit d'une manière qui le
caractérise très bien et le distingue d’A/:ppothoë. Mais comment
se fait-il que Gmelin, cependant averti, dans l’état synonymique
qu'il dresse, confonde en une même unité spécifique, 7 1ppothoë,
Roesel (Tab. 37; fig. 6, 7) qui est un Chyseis-Eurydice, et la
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 123
variété d'Hippothoë, Esper (Tab. 38; fig. 1 a, 16) qui est le
dispar anglais ?
Ces confusions se rencontrent souvent chez les Entomologistes,
même les plus qualifiés. Esper, comme je le remarque ci-dessus,
est coupable d’une faute, en considérant sa variété d'Hippothoë
(Tab. XXXVIII, fig. 14, 10) comme appartenant à la même
unité spécifique que ses autres Æ2ppothoë qui sont des Chryseis
MÉPEXIl otS etlTab XXI N O3):
Cependant les erreurs qui subsistent effectivement rendent bien
précaire la base sur laquelle les gens de bonne foi essayent d'asseoir
la nomenclature entomologique et nul ne peut dire après tout cela
que nous jouissons d’une certitude tout à fait satisfaisante pour
notre esprit. Un doute reste et restera définitivement.
Cependant, j'ai tenu à faire part des recherches longues aux-
quelles il est nécessaire de se livrer si on veut essayer de connaitre
la vérité, et j'ai cité plusieurs vieux livres dont il faut étudier les
textes et comparer les Planches, si on veut connaître tous les élé-
ments de la cause. Bibliophile par état, je n'ai pas à me plaindre
de l’occasion qui m'est offerte de feuilleter les ouvrages des anciens
auteurs et d'apprécier le savoir-faire des imprimeurs de l'avant-
dernier siècle.
La combinaison de l'Entomologie et de la Bibliophilie consti-
tuent une double délectation pour mot.
Après les Entomologistes du XVIIT siècle, ceux du siècle der-
nier ont généralement adopté la nomenclature de Bergstraesser qui
s'appuie sur des figures imparfaites, mais sûrement identifiables.
Huebner a figuré CAryseis, sous les n° 337, 338, 355 et Euridice,
forme alpine de CAryseis, sous les n° 339, 340, 341 et 342.
Quant à Hippothoë, il se trouve représenté sous les n°* 352, 353
et 354 et sa variété dis par, sous les n°° 066, 967 et 968 de l'ouvrage
de Huebner.
Gerhard a figuré Hippothoë et dispar sous les n° TA, 1 PAC
et2a,2bet2c de la PL 7, Chryseis sous les n° 4a, 40 et 4c et
la variété alpine Æwrydice, sous les n° 34, 38 et 36. De plus
124 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
les Ab. confluens de Chryseis ont été représentées copieusement
Sous les ne 1 2010 cn dde laps.
Boisduval, dans l’?ndex Methodicus, 1840, adoptait la nomencla-
ture à laquelle je crois devoir me rallier; c’est-à-dire qu’il attribuait
à l’Æippothoë, Linné, et au CAryseis, les mêmes unités spécifiques
que Bergstraesser fixe d'un manière certaine, au moyen des figures
qu'il a publiées en 1778.
Tout récemment Tutt (British Lepid. vol. VIII), à propos de
Chrysophanus dispar, expose que déjà Wallengren a fait connaître
dans ses Lepidoptera Scandinavie Rhopalocera, 1853, que le nom
d'Æppothoë Linné doit se rapporter à CÆryseis, parce que CAryseis
se trouve en Suède et que l’autre espèce n’y a pas été rencontrée.
C'est une raison sériense. Cependant il faudrait pour que cette
observation fût déterminante, qu’il fût démontré que Linné, en
traitant de la Fauna Suecica, n'a eu effectivement sous les yeux
que des animaux réellement récoltés en Suède. Or, comme les éti-
quettes précises de localité n'étaient guère usitées, 1l y a 150 ans,
il est fort possible qu'à des papillons effectivement capturés en
Suède, aient été adjoints par erreur d’autres papillons de prove-
nance étrangère.
En écrivant ces lignes, je pense aux deux Editions de la Fauna
Suecica et aux différences qu'il est aisé d'y remarquer. Ainsi dans
l'Edition de 1746, Linné indique (p. 241) sous le n° 702, le Papilio
Podalirius et dans l'Edition de 1761, il n'y a plus que le Papilio
Machaon. Linné aura sans doute reconnu que Podalirius n'avait
pas lieu d’être maintenu dans la Fauna Suecica. L'exemplaire de
Podalirius qui avait été considéré comme suédois en 1746, avait
peut-être perdu de son authenticité en 1761 et dès lors la probité
scientifique de Linné a fait exclure le Podalirius de la nouvelle
Edition de la Fauna Suecica. Mais 1l n’en reste pas moins la preuve
d'une erreur commise en 1746 et reconnue en 1761.
D'autre part Fippothoë, où du moins l'espèce que j'appelle ainsi,
d'accord avec Bergstraesser et tant d’autres auteurs, semble avoir
une tendance à s'éteindre en bien des lieux. Est-il téméraire de
penser qu’elle a habité autrefois en Suède et qu’elle s’y est éteinte ?
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 125
Je reconnais volontiers ce que cette proposition a de problématique;
mais quelle que soit la valeur des observations de Wallengren,
je ne me sentirais convaincu par elles, que si nous pouvions dis-
poser encore de l'exemplaire dont Linné s’est servi pour sa descrip-
tion, ou bien si nous avions une figure tenant lieu du spécimen
fragile et exposé à la destruction par un si grand nombre de causes.
La nomenclature entomologique, sans bonnes figures à l'appui
des descriptions, est une illusion; je ne dois pas me lasser de
proclamer cette vérité. On peut lire dans le Compte rendu des
séances du Congrès international de Zoologie, tenu à Paris en
1880, que non seulement le premier, j'y ai proposé la substitution
de la nomenclature trinaire à la nomenclature binaire (p. 474), ce
qui fut adopté par le Congrès; mais que « la plupart des descrip-
tions sur lesquelles est basée la nomenclature actuelle étant défec-
tueuses où insuffisantes » j'ai proposé aussi de décider (p. 472),
qu’ « une bonne figure à l'appui d’une description est indispensable
pour que le nom soit valable. »
Il serait urgent de faire prévaloir cette règle qui sauverait la
Nomenclature entomologique du Chaos où elle pourra sombrer;
mais il faudrait pour cela, obtenir que beaucoup d'Entomologistes
fassent sur l'Autel de la Science, le sacrifice de sentiments per-
sonnels résultant plutôt de la vanité qui est au fond du cœur de
tous les hommes, que de l'amour pur et désintéressé de la Vérité
scientifique. Aussi faut-il s'armer de patience et de persévérance,
pour ne pas cesser d'essayer de triompher officiellement du fléau
des descriptions sans figures. Il n'en est pas moins vrai que c'est
faute d'une figure, pour éclairer le texte linnéen, que depuis
150 ans, les Entomologistes se demandent à quelle espèce convient
exactement la description de l’illustre Chevalier. Aussi avec les
erreurs des uns et des'autres, celles d'Esper et de Gmelin — erreurs
dont seules les figures publiées permettent de se rendre compte —
aujourd'hui, si nous voulons nous entendre à l'abri de toute confu-
sion, nous sommes obligés de laisser pour ce qu'elle vaut la des-
cription de Linné; il nous faut faire commencer la nomenclature,
en ce qui concerne Æippothoë et C hryseis, à l'ouvrage de Bergs-
126 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
traesser, à cause des figures publiées par cet auteur. En effet,
seules ces figures fixent, sans laisser place à aucun doute, les noms
de deux espèces assurément voisines, mais tout à fait distinctes de
Polyommatus d'Europe, du groupe des rouge feu ou feuerfarb-
schimmerende Tagvoegel.
On me permettra de remettre sous les yeux du lecteur ce que
J'écrivais en 1889 — il y a de cela 20 ans — et qui a été imprimé
aux pages 472 et 473 du Compte rendu des Séances du Congrès
intérnational de Zoologie de Paris. « Quiconque a cherché à déter-
miner un être orgamisé dont il na pas encore été publié une
figure suffisamment bien exécutée, ne parvient que bien rarement
à sortir d'un à peu près qui est la négation même de la Science,
puisque la Science est la Vérité et que la Vérité, tant qu’elle n’est
pas certainement obtenue, n'existe réellement pas encore.
Pourquoi la Vérité, dans ces conditions, ne s’obtient-elle pas
aisément et reste-t-elle le plus souvent indécise? C’est que les des-
criptions ne sont pas toujours différentielles; que trop souvent elles
font un portrait non pas comparatif, mais positif; que ce portrait
peut quelquefois s'appliquer à plusieurs êtres différents, d’autant
plus qu'au moment où la description est écrite, l’auteur ignore les
êtres dont la découverte reste à intervenir et auxquels sa descrip-
tion pourrait éventuellement convenir.
Dès lors ne faudrait-il pas baser toute description sur une
comparaison établie avec des êtres très généralement et exactement
connus, faire ressortir les caractères différenciant l'être qu’on décrit
de tous ceux connus appartenant à des formes voisines, indiquer
très exactement la provenance et ne pas se contenter de données
vagues et générales pour l'indication de patrie; mais surtout la
nécessité d’une bonne figure ne s’impose-t-elle pas ?
Avec un dessin bien exécuté, tous les doutes sont levés, parce
que toutes les proportions relatives sont indiquées dans la figure,
plus nettement que dans aucune description.
En Entomologie, où les êtres sont plus nombreux et les carac-
tères différentiels souvent moins saillants, les déterminations sont
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 12
De:
douteuses à peu près toutes les fois qu’une bonne figure n’a pas
été publiée.
On peut même dire que toute certitude de détermination est
irrémédiablement perdue, lorsque l'échantillon original est perdu
lui-même et que l'identification cesse, par là même, d’être possible,
à moins toutefois qu'une bonne figure n'ait été publiée.
Les descriptions non accompagnées de figures restent absolu-
ment livrées à l'appréciation fantaisiste de chacun, ou à une sorte
d'accord traditionnel transmis par certaines collections, mais sans
qu'il soit possible cependant d'obtenir aucune certitude; tandis
que, grâce à l’Iconographie de Huebner, par exemple, le doute
subsiste rarement sur l'identification des Insectes lépidoptères
publiés par cet auteur. Donc supériorité indiscutable du dessin
sur la description seule.
J'émets le vœu, d'une part qu'il soit admis que la priorité du
nom appartient au premier iconographe plutôt qu'au premier des-
cripteur, opinion que je résume ainsi : Pas de bonne figure à
lappui d'une description, pas de nom définitivement valable. »
Ce que j'ai pensé et écrit en 1880, je le pense tout aussi bien
en 1900, et il me semble que tout ce que j'ai exposé ci-dessus se
trouve bien justifié par la question même de l'attribution des
noms : /ippothoë et Chryses.
La description linnéenne nous laisse un doute que nous sommes
impuissants à lever; la possession de la vérité est impossible à
obtenir avec la seule description de Linné, tandis que les figures
de Bergstraesser nous donnent le moyen de raisonner d’après une
base certaine et nous permettent de savoir exactement ce qu'est
Hippothoë et ce qu'est CAryseis, tout au moins d’après Bergs-
traesser.
C'est donc du Polyommatus Chryseis, secundum Bergstraesser,
qu'il va être question plus loin.
Le Polyommatus Chryseis est une espèce de plaine et de mon-
tagne. Elle manque en Angleterre et dans l'Ouest de la France;
mais on la trouve assez près de Paris, dans la forêt de Compiègne
(Oise); à Villers-Cotterets et à Samoussy (Aisne); à Morteau,
128 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
dans la Franche-Comté; en Auvergne (Lioran et Mont-Dore);
dans les Hautes-Pyrénées où nous l'avons capturée à Cauterets et
près de la chapelle Notre-Dame-d'Héas, à une petite distance de
Gèdre; à Aix-en-Savoie; dans les Pyrénées-Orientales, où elle
vole à la fin de juin et au commencement de juillet, dans la vallée
d'Eyna et à l'entrée de la forêt de Randai, vers 1,500-1,600 mètres
d'altitude. Dans toutes les localités précitées, CArysers appartient
à la même forme. Le G' a les ailes partiellement obscurcies, prin-
cipalement le long de la côte des supérieures et du bord anal des
inférieures et la Q a le fond des ailes brun, avec une éclaircie d’un
fauve orangé plus ou moins étendue sur le disque des supérieures,
et une liture submarginale de même nuance fauve, le long du
bord terminal des ailes inférieures. La même forme CÆrysers se
trouve en Allemagne (Cassel) et dans l'Oberland Bernois où je
l'ai capturée abondamment à la fin de juin 1808, notamment dans
les prairies voisines d’Interlaken.
À Chamounix (Haute-Savoie); à Prémolles, au-dessus de Vaul-
naveys, près Uriage (Isère); dans les Alpes-Maritimes. aux envi-
rons de Saint-Martin-de-Vésubie,; j'ai trouvé une forme intermé-
diaire entre CAryseis et Eurydice, c'est-à-dire dont le GO‘ est d’un
rouge feu beaucoup plus brillant et moins obscurci que le CAryseis
des Pyrénées, des forêts de Picardie, et des prairies de Franche-
Comté; mais dont la Q est encore brune et non noirâtre, et avec
une éclaircie fauve plus ou moins développée sur les ailes supé-
rieures et une bordure marginale fauve sur les inférieures. Il en
est de même dans les Hautes-Alpes, à la Grave; dans les environs
de Larche et la prairie du Mont-Pelat (Basses-Alpes); à Fusio
(Tessin); à la Certosa di Pesio (Piémont), où, comme à Fusio, la
forme est extrêmement grande et belle.
Dans le Valais, depuis Zermatt et jusqu'à Ryffelalp, c'est au
contraire la véritable forme alpine dont le G' est d’un rouge feu
extrêmement brillant et semble étinceler dans la prairie, lorsqu'il
est posé sur une fleur ou qu'il vole au-dessus des herbes; au con-
traire, la Q entièrement noire n'a plus aucun vestige de fauve, en
dessus et elle est aussi sombre que le C' est resplendissant.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 129
Plus on s'élève à une haute altitude, en Valais, plus la forme
Eurydice s'accentue; je l'ai vue à son maximum d’expression, au-
tour de l'hôtel Ryffelalp et dans les prairies de Fluelen.
Le Polyommatus Chryseis se trouve en Laponie où M. Wilhelm
Mau a trouvé en juin et juillet 1008, à Kvickjock, Mont Sutilelma
(Lulea-Lappmarken), une race, assez brillante, un peu moins rouge
et généralement plus petite, me semble-t-il, que la race de l'Europe
centrale. C’est la variété géographique Szeberi, Gerhard. Cependant
les exemplaires de ma collection sont d’un rouge moins jaune que
le Szeberi, figuré par Gerhard, sous les n°® 1 4 et 1 & de la PI 35
et ils n’ont pas le thorax et l’abdomen jaune orangé, mais brun
noirâtre. M. Neuschild a trouvé une race petite et obscure de
Chryseis à Tlemcen, en Oranie.
Une belle variété géographique est celle de Turquie, appelée
candens et figurée par Gerhard sous les n° a 3, b 3 et « 3 de la
BI.
Chryseis présente fréquemment des exemplaires appartenant à
l'Ab. confluens, généralement asymétriques, chez lesquels les points
noirs du dessous des 4 ailes, le long du bord extérieur, se
rejoignent dans le sens des nervures et forment des lignes noires
plus ou moins épaisses. J'ai fait figurer sous les n* 80 et 81 de
la PL 5 des Ztudes d'Entomologie, XX° livraison, deux exemplaires
d'et © confluens. La © figurée est surtout remarquable pour la
symétrie et l’accentuation de la confluence dont elle est atteinte.
Le G' est asymétrique.
Je prie le lecteur de se reporter aux pages O et 10 de la
XX®° livraison des Etudes d'Entomologie pour quelques détails
qu’il est inutile de répéter ici. Inversement à l'Ab. confluens, il y
a l'Ab. subtus impunctata, dont je possède un G' du Tyrol et un
autre G de Turin. Chez cet Æuwrydice, il reste seulement les points
noirs cellulaires, les autres ont disparu.
Les © Cryseis ont quelquefois, principalement dans lAltaï,
une bordure de points bleus au dessus de la liture marginale des
ailes inférieures. En dessus, sur les ailes supérieures, la ligne extra-
9
130 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
cellulaire de points noirs, chez la ©, peut disparaître ou bien être
transformée en taches allongées ayant la forme de larmes. Les G
Chryseis ont constamment un trait noir qui clôt l'extrémité de la
cellule; les © Eurydice perdent souvent ce trait noir et montrent
alors une surface or rouge feu immaculée, entourée d’une bordure
noire que relève une frange d’un blanc pur.
Le Polyommatus CÆryseis est un des plus jolis Rhopalocères
de la faune européenne.
J'ai donné le nom de ziolacea à l'Ab. CAryseis Œ prise à Cau-
terets, en juillet 1883 et que j'ai déjà signalée précédemment.
C'est un papillon relativement très sombre, mais d’un coloris très
riche et très brillant. Il est figuré sous le n° 406 de la PI XLIX
du présent ouvrage. Il semble que dans les Hautes-Pyrénées,
Chryseis ait une tendance à être plus obscur que dans la Picardie
et l'Est de la France.
J'ai reçu de Silésie un @ chez qui la couleur rouge feu, en
dessus comme en dessous, est remplacée par une teinte d’or pâle,
tout comme dans certaines Aberrations de PAlæas; mais le fond
des ailes conserve un reflet un peu rose assez spécial. J'ai donné
à cette Aberration pâle, qui est très jolie, le nom de Æermat}on,
second fils de l’Aurore. La mort d'Hermathion, dit la Fable, fut
si sensible à la déesse Aurore, sa mère, qui ouvrait les portes du
Jour, que ses larmes abondantes produisirent la rosée du matin.
L'Ab. Hermathion est figurée sous le n° 473 de la PI LV.
Polyommatus virgaureæ, Linné.
Décrite par Linné, dans le Systema Nature, Edition X, 1757,
à la page 484, comme suit : « Vérgaureæ, 161, P. P. alis suban-
gulatis fulvis margine fusco, punctis atris sparsis. Habitat in
Solidagine virgaurea Europae, Africae. Sexus alter alis omnibus
supra fulvis immaculatis; subtus flavis : primoribus punctis
fuscis; posticis serie punctorum albidorum. — Alter alis supra
primoribus fulvis : maculis sparsis aîris; posticis fuscis fascia
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 131
postica fulva dentata. Subtus primores maculis sparsis atris mar-
gine albo ocellatis; posticæ cinerascentes punctis nigris obsoletis. »
Linné cite comme synonymie : 1° sa Æauna Suecica, 807, 808,
édit. 1746, où l’auteur dit que le papillon appelé vulgairement
Butyracea vulgaris vole sur les prairies de la Westmannie;
2HiRoesel- ab ON VIRE 6, 7, et cab XEV;: fe, 6;
édit. 1756? Cependant l'espèce figurée par Roesel sur la
Tab. XXXVII est Chryseis-Eurydice, ainsi que je l’ai exposé à
l’article précédent, et l'espèce figurée par l2 même Roesel sur la
Tab. XLV est PAlæas. Linné confond donc d’une part vrgau-
reæ S avec Chryseis-Eurydice, et, d'autre part, vzrgaureæ Q avec
Phlæas. Bergstraesser s'est bien rendu compte de cette méprise, et
sa notice écrite en 1770 (Tom. III, p. 37) sur le Goldruthenfalter
est curieuse à lire: « Der Papilio Phleas, virgaurea, und Hiÿ-
pothoë sind bisher von den meisten Autoren verwechselt worden »,
c'est-à-dire : Les papillons PAleas, virgaurea (sic) et Hippothoë,
ont été jusqu'ici confondus par le plus grand nombre des auteurs.
Décidément l'étude des ouvrages anciens est fertile en ensei-
gnements. Nous avons la preuve que Linné a fait une double
confusion en identifiant son z#7gaureæ © au Chryseis-Eurydice,
figuré par Roesel, et son virgaurece Q au PAlæeas, parfaitement
représenté par le même Roesel. Les anciens auteurs manquaient-ils
de l'attention et de l'expérience sans lesquelles il est difficile
d'apprécier les différences spécifiques et d'établir les distinctions
nécessaires entre des espèces voisines? Il le semblerait. Toujours
est-il qu'en dehors des figures qui nous renseignent plus exac-
tement, lorsqu'elles ne sont pas trop grossièrement exécutées, nous
n'avons rien à attendre, qui soit exact et précis, des descriptions
seules. En outre, il faut observer que souvent les anciens ont eu
sous les yeux plusieurs espèces voisines et ne voyant pas leurs
différences spécifiques, en ont décrit les exemplaires, pourtant
distincts entre eux, sous un même vocable. La figure seule, quand
elle existe, nous permet d’attribuer à l'espèce qu’elle représente un
nom valable. Si la figure fait défaut, la description est incapable
d'y suppléer. La légion des descripteurs sans figures compte
132 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
encore de nos jours un effectif important. De quel chaos toujours
plus grand ne sera-t-elle pas responsable ?
Il est curieux de constater que Cuvier, en 1700, s'était rendu
compte, comme Bergstraesser en 1770, des multiples erreurs
commises par Linné dans la synonymie; aussi s’alarmait-il déjà
du désordre devenu inévitable dans la Nomenclature entomolo-
gique. J'ai trouvé de curieux documents à cet égard dans la Revue
entomologique, imprimée en 1833 chez M"° veuve Silbermann,
place Saint-Thomas, 3, à Strasbourg, et publiée par son fils, Jeune
alors, entomologiste plein de zèle, plus tard l’un de nos plus
éminents confrères imprimeurs et l’un des premiers typographes
français qui ait imprimé en couleurs avec une réelle perfection.
Mon grand-père François-Jacques Oberthür, mon premier initia-
teur à l’entomologie, graveur et dessinateur excellent, imprimeur
lui-même à Strasbourg et collaborateur d’'Aloys Senefelder,
inventeur de la lithographie, a gravé quelques Planches de la
Revue Entomologique et précisément une Planche de Coléoptères
et d'Hyménoptères dessinée par Cuvier et se rapportant à une
des Lettres écrites sur l’'Entomologie par cet illustre naturaliste,
lorsqu'il n’était encore âgé que de 21 ans. Ces lettres sont rédigées
en langue allemande et en latin; elles étaient adressées par Cuvier
à son ami Hartmann, médecin distingué dans le Wurtemberg, et
elles ont été communiquées à Silbermann par M. le professeur
Duvernoy, doyen de la Faculté des Sciences de Strasbourg. Les
lettres de Georges Cuvier, dit Silbermann, sont un monument
historique de l’état de la Science vers la fin du XVIIT* siècle et
montrent que dès sa jeunesse Cuvier a donné des preuves de ce
profond talent d'observation qu'il porta plus tard dans l’étude
des Sciences naturelles. Silbermann s’est attaché à les traduire
d'allemand en français avec la plus grande fidélité, en laissant
toutefois subsister les phrases latines qui y sont intercalées. Dans
chaque lettre se trouve un certain nombre de dessins à la plume
ou à la mine de plomb; ils sont faits avec beaucoup de soin.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 13
Où
Ce sont ces dessins qui furent confiés à Silbermann et que mon
grand-père, ainsi que je le dis plus haut, reproduisit en gravure
sur cuivre et signa comme suit : « Oberthür sculpsit Argenti-
nensis 1833. » Selon M. Duvernoy, qui avait souvent vu dessiner
Cuvier, ces dessins étaient tracés avec la plus étonnante rapidité.
Dans la première lettre de Cuvier, datée de Caen, 18 novembre
1700, et adressée à Hartmann, je copie le passage suivant, bien
d'accord avec ce que je pense et ce que J'écris aujourd’hui, à
Rennes, le 15 octobre 1909 : « Ce que vous me dites de l'ouvrage
de Gmélin ne m'étonne pas et me persuade davantage qu'il est
nécessaire de retravailler l’'Entomologie en entier.
Depuis la mort de Linné, l’histoire naturelle n’a pas de légis-
lateur; chacun marche à sa guise, et si cette anarchie dure encore
longtemps, la Science deviendra un labyrinthe inextricable. Du
reste, Linné a fait lui-même beaucoup de fautes dans la syno-
nymie, ce qui vous sera démontré clairement dans mon mémoire
sur les Crustacés (que j'enverrai sous peu à notre Société). J'y ai
décrit et figuré 32 espèces et J'ai eu occasion, à la Bibliothèque
de cette ville, d'en débrouiller assez bien la synonymie. Vous ne
pouvez vous imaginer quelles fautes ridicules Linné a commises
sous ce rapport. Souvent il cite la même figure pour trois ou quatre
de ses espèces; plus souvent encore il cite trois ou quatre figures
différentes à propos d’une seule de ses espèces (*). Fabricius a
encore augmenté cette confusion et n’a pas même bien connu les
noms de Linné... »
Ce qui était vrai en 1700 l’est encore aujourd’hui. Malheureu-
sement l'anarchie, conformément à l'expression de Cuvier, ne s’est
pas cantonnée dans le paisible champ de l’histoire naturelle, et
de même qu’en 1700, on pouvait redouter ses conséquences dans
des domaines bien différents, ainsi en 1000, des signes précurseurs
analogues font présager de semblables perturbations. Mais ainsi
(*) Comme on l’a vu plus haut, Linné cite à tort 2 espèces différentes à
propos de virgauree.
134 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
qu'Engramelle, à la veille d'événements tragiques, poursuivait,
sans se laisser arrêter par les bruits du dehors, le cours de ses
travaux entomologiques, continuons nous-mêmes nos tranquilles
études sur les papillons, en dehors de toutes les agitations
humaines.
Le Polyommatus virgaureæ est une espèce extrêmement bril-
lante, un des plus beaux Feuerfarbschimmerende Tagvoegel qu
existent. Contrairement à ce que dit Linné, 1l n’habite point dans
les prairies d'Afrique, mais seulement d’une certaine partie de
l'Europe. II manque en Angleterre, en Bretagne et généralement
dans tout l'Ouest de la France. Ma collection contient des exem-
plaires pris en Alsace; en Franche-Comté; à Chamounix (Haute-
Savoie); à la Chartreuse de Prémolles (Isère); à Digne, Colmars,
Allos, Larche, Enchastrayes et Saint-Martin-d'Entraunes (Basses-
Alpes); au Lautaret, à la Grave et au Monetier-de-Briançon
(Hautes-Alpes) ; dans le vallon de Vallorgues, près Saint-Dalmas
(Alpes-Maritimes); à Gèdre et à Cauterets (Hautes-Pyrénées) ; à
Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales); dans la Vieille-Castlle ;
aux environs de la route du Simplon et dans la vallée de Zermatt
(Valais); à Fusio (Tessin); à la Certosa-di-Pesio et à Grissolo
(Piémont); à Roccaraso et Palena (Italie méridionale); en Saxe;
en Esthonie; en Laponie; en Sibérie, dans la région du lac Baïkal
et aux environs d’Irkust; dans les Balkans et à Mersina.
Les variétés géographiques de vigaureæ sont nombreuses. Je
ne connais pas la forme de la Westmannie où se trouve le type
de l'espèce, puisque les premiers exemplaires décrits par Linné
proviennent de cette contrée.
Bergstraesser figure grossièrement les deux sexes de v7gaureæ
sous les n°“ 1, 2, 3 et 4 de la PI. 65; Esper représente vz7gaureæ
Get © sous les n°” 2 a et & de la Tab. XXII. Huebner donne
d'assez bonnes figures sous les n° 349, 350 et 351; puis il fait
connaître une variété que je déclare ne point avoir vue en nature,
sous les n° 884, 885, 886 et 887. Le O' a la bordure des ailes
inférieures fortement ponctuée et les points noirs très détachés de
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 135
la bordure noire; la forme des ailes inférieures, chez les deux
sexes, est plus entière et moins subcaudée; enfin la Q a un faciès
tout à fait spécial. J'ignore d'où provient cette forme.
Dans le Bulletin Soc. ent. France, 1005, p. 56, je signale
l’Aberration blanche de v#rgauree Œ que j'appelle : virginalis, et
l'AB. or jaune également G' que je désigne sous le nom de Ckryzon.
Je fais figurer sous le n° 244 de la PL XXXVII du présent
ouvrage l'Ab. verginalis, d'après un ©, de Silésie; et sous le
n° 237, l'Ab. CÆryzon, d'après un O' de Francfort-sur-le-Mein.
Les variétés géographiques de v#gaureæ sont, à ma connais-
sance, les suivantes :
1° Oranula, Freyer (Tab. 455; O fig. 1; © fig. 2), plus petit;
les ailes inférieures, chez la Q, sont plus sombres; Laponie.
Freyer dit qu'il a devant lui 5 exemplaires communiqués par
Kretschmar, de Berlin, parmi lesquels il a choisi les plus petits
pour les faire figurer.
2° Zermattensis, Fallou. Les Q sont obscures; le dessus des
quatre ailes, au lieu d’être d’un fauve orangé à reflets dorés, est
d'un brun bronzé. Toutes les © que j'ai vues et prises à Zermatt
sont ainsi; l'appellation spéciale est donc parfaitement justifiée.
Je possède de Zermatt 4 © Ab. cuneifera, avec les points noirs
des ailes supérieures allongés en forme de larmes dont la pointe
est tournée vers la naissance des ailes. La plupart des Q Zermat-
tensis appartiennent à l’Ab. cæruleopunctata; elles portent sur les
ailes inférieures, en dessus, une série de points bleuâtres disposés
parallèlement au bord marginal. Zermattensis est abondant dans
les prairies qui entourent le village de Zermatt.
3° Miegu, Vogel; la race est grande; aux ailes supérieures, en
dessus, le G' a un point discoïdal et quelquefois un point cellulaire
noir et Jusqu'à 5 points noirs extracellulaires, avec l’apex et le
bord terminal largement noircis. Les © ont le fond des ailes, en
dessus, doré, avec les points très gros. Vieille-Castille.
4° Aureomicans, Heyne. Très jolie race de Mersina; les deux
sexes sont d’une couleur or feu plus jaune et moins sombre que
130 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
chez les autres formes; le O' a les ailes, en dessus, finement lisérées
de noirâtre; les 4 ailes de la © ont le fond d’une même teinte
jaune doré unie. En dessous, le G' est d’un fauve orangé uni, sans
taches aux inférieures, avec quelques points noirs aux supérieures.
La Q a deux points blancs aux inférieures, en dessous; je possède
une seule paire prise en 1807, par Holtz, à Mersina, en Asie-
Mineure.
En Alsace, les © vzgaureæ ont le fond des ailes d’un or plus
rouge que dans les Alpes et que dans les Pyrénées. Près de
Vernet-les-Bains, virgaureæ vole assez abondamment dans les
prés, au delà du village de Casteil, du côté de la vallée de Cady,
et s'élève jusqu'à 1.800 mètres d'altitude, dans la vallée de
Lipaudère, entre Mariailles et le Col Vert. Mon frère a pris dans
les Pyrénées-Orientales le G' avec des points noirs extracellulaires
très nettement marqués sur le dessus des ailes supérieures; c'est
une transition à Mzegi. Nous avons capturé fréquemment dans le
même pays des © très grandes et tout à fait semblables aux Q
Miegii. Le dessous des ailes des Q vgaureæ, dans les Pyrénées-
Orientales, est d’une teinte plus Jaune et un peu moins rouge que
dans les Basses-Alpes. À Cauterets, comme au Vernet, les 77-
gaureæ d' ont assez souvent une tache noire fermant la cellule des
ailes supérieures, en dessus; nous avons trouvé au Vernet l’Ab. ©
cuneifera ; mais nous n’y avons encore jamais vu l'Ab. Q cæruleo-
punciata.
Le Catalog Staudinger et Rebel 1901 indique dans l'Italie
centrale une variété Q Apennina et la définit diurior. Je ne
connais virgaureæ de l'Italie centrale que par les récoltes de
M. Fabresse qui chassait pour nous en ce pays, durant toute la
belle saison 1007. J'ai sous les yeux des vgaureæ pris en Juillet
et août à Roccaraso, par 1.300 mètres d’altitude environ, et à
Palena, au commencement de la chaîne de montagnes de Majella.
Roccaraso se trouve sur la ligne entre Isernia et Sulmona, à
environ 53 kilomètres de cette dernière ville. Quant à la gare de
Palena, elle se trouve à environ 44 kilomètres de Sulmona. Je ne
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 137
vois point de différence entre les v#gaureæ de Roccaraso et
Palena et ceux des Alpes françaises.
Le même Catalog signale la variété Æstonica, Huene. Cette
prétendue variété m'est connue par 2 O'et 2 Q que J'ai achetés à
Staudinger. Il ne me semble pas que les caractères spéciaux de
cette variété soient bien tangibles. La race Æs/onica me parait
petite. La race de vérgaureæ à Chamounix et au Lautaret pourrait
aussi bien s'appeler Æstonica que la forme d’'Estomie. Il ne me
semble pas que le nom Æs/onica puisse être définitivement
maintenu.
Une race géographique superbe me paraît être celle de Fusio;
mais j'en possède trop peu d'exemplaires pour pouvoir en disserter
en parfaite connaissance de cause.
Polyommatus Hippothoë, Linné.
Très belle espèce; jadis habitant l'Angleterre où elle donnait
la superbe variété Dispar qui était bien la perle des Lépidoptères
anglais; actuellement encore habitant à ma connaissance les
environs d'Uriage (Isère) où je l’ai capturée en juin 1895, quelques
localités de la Gironde, de l'Aube, de l'Alsace, de l'Allemagne,
de l'Italie et de la Sibérie. On m'a affirmé qu’Æ/ippothoë avait été
rencontré en Algérie; je n'en ai pu obtenir aucune preuve.
Autrefois une forme très grande d’Aippothoë, aussi belle que
Dispar, mais distincte par la couleur plus grise et non bleuâtre
du dessous de ses ailes inférieures, se trouvait dans l'Aisne, près
Saint-Quentin. J'en avais reçu de très grands exemplaires pris
par feu Gronier, entomologiste de Saint-Quentin. J'ai voulu savoir
si Hippothoë vivait encore en Picardie et j'ai organisé, avec le
dévoué et intelligent concours de M. Harold Powell, une explo-
ration des marais de l'Aisne, en juin 1900. Le succès n’a point
couronné nos efforts et nous croyons que le Polyommatus Hig-
pothoë, éteint en Angleterre, se trouve également éteint aujourd’hui
dans les marais des environs de Saint-Quentin. M. Powell a tenu
138 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
un journal de ses chasses. J'en extrais les renseignements con-
cernant //1ppothoë.
« Je suis arrivé à Paris le 10 juin à 11 heures. À Paris, Je suis
allé voir M. Henry Brown. À propos de CArysophanus dispar,
qu'il est allé lui-même chasser à Saint-Quentin, M. Brown me dit
qu'il y a bien peu d'espoir de trouver cette espèce désormais,
attendu qu’elle n’a pas été vue depuis 4 ans. Sa localité était dans
les marais de Rouvroy. M. Brown pense qu’on doit chercher une
autre cause que les cultures, pour expliquer la disparition de dis par
à Saint-Quentin, puisque les marais de Rouvroy sont en grande
partie une propriété réservée pour la chasse et la pêche et non
cultivée. On y trouve la Lifhosia muscerda, et des chenilles de
Nonagria dans les joncs en août.
Je me suis entendu avec M. Brown et par téléphone avec
M. René Oberthür, pour les rejoindre samedi soir à Laon, afin
d’aller chasser à Samoussy, dimanche, endroit connu et recom-
mandé par M. Brown.
Départ le soir du 10 juin pour Saint-Quentin, où je suis arrivé
AND 30:
11 Juin. — Temps assez beau, nuageux parfois. Vent N.-O.;
forte brise; température fraîche, même froide. Jusqu'à 11 heures
je me suis occupé de trouver le fils de M. Gronier, entomologiste,
qui prenait autrefois le dispar à Saint-Quentin.
Il y a six MM. Gronier ici. Le quatrième que j'ai visité était le
bon, mais il n’était pas chez lui et je ne pourrai le voir avant
8 heures demain matin.
Aussitôt après le déjeuner je suis parti pour Rouvroy. On
prend le train jusqu’à Remicourt et on descend ensuite le chemin
jusqu’au canal. I] faisait beau, mais très frais. Le pays est ondulé,
cultivé partout : blés, betteraves, quelques pâturages. Assez peu
d'arbres. Ressemble à certaines parties de l'Angleterre et ne paraît
_pas être bien bon, au point de vue : papillons. De tout l'après-midi
(j'étais sur le terrain à 1 h.), je n'ai pas vu un seul papillon
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 139
diurne, ni ape, ni brassicæ, ni l’anessa. Dans les marais, Jai
pris une seule Pyrausta. Sur une haie d’aubépines j'ai pris une
chenille de Porthesia similis. Elle est assez voisine de
Chrysorrhæea.
Les marais commencent de l’autre côté du pont et s'étendent
en largeur jusqu'au village de Rouvroy. Le chemin les traverse
avec des haies de chaque côté et il y a grande quantité d'affiches
défendant l'entrée des marais, avec annonces d’avertisseurs
chargés à plomb! Du côté droit, le marais est sous-loué à de
nombreux petits locataires qui cultivent des légumes. I y a de
ce côté une assez grande partie inculte que j'aurais voulu visiter,
mais le propriétaire était absent de sa maison et je n'ai pas pu
lui demander autorisation. Du côté gauche, le grand marais est
inculte. Le propriétaire en a 7 hectares. Je me suis adressé à la
maison du garde. Sa femme m’a donné le permis de circuler et
m'a prêté un bateau plat, sans lequel je n'aurais pu aller bien loin,
car la terre sèche est divisée en lanières séparées par des canaux
larges qui sont envahis par des plantes aquatiques. La terre
ferme est couverte de roseaux, joncs, saules, peupliers, orties, etc.
Chaque année, on doit raser méthodiquement un certain nombre
de ces lanières de terre. Il y en a où la végétation est très dense;
d’autres sont fauchées. Je n’y ai point vu le grand Rwmex, qui
pousse cependant autour de la maison du garde et aux bords du
canal de la Somme, et aussi dans quelques-unes des propriétés à
droite de la route de Rouvroy. J'ai parcouru en bateau et à terre
une srande partie de ces marais privés; mais Je n'ai pas vu trace
de dispar, ni même d'autre papillon.
Je suis rentré le soir à 7 heures. Il faisait alors froid.
12 Juin. — Pendant la matinée une pluie froide et triste n'a
cessé de tomber. Je suis allé voir M. Henry Gronier, 07, rue Saint-
Thomas, à 8 heures. C’est le fils de l’entomologiste décédé il y a
deux ans. Il n’a très bien reçu. Il s'intéresse lui-même à l'ento-
mologie et la question de dispar l'occupe spécialement. Il croit
que dispar est éteint à Saint-Quentin. Son père, autrefois, Île
140 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
prenait dans les marais de Rouvroy, jamais en grande abondance
et en nombre très variable selon les années.
Le papillon volait bien, pendant les temps chauds et orageux.
Il se posait sur les grandes fleurs blanches des marais (Spiræa ?),
et aussitôt posé, fermait les ailes. L’éclosion ne durait qu'une
quinzaine de Jours, et le papillon s’abimait rapidement.
M. Gronier père en a pris un une fois le 31 mai; mais cette date
est exceptionnelle. Depuis bien des années le papillon diminuait
en nombre et a fini par disparaître M. Henry Gronier me dit
qu'il y a plus de quatre ans qu'on n’en a point vu. Son père
employait un homme qui pendant un mois passait ses Jours dans
les marais, chaque année, pour signaler une apparition du
papillon. Depuis plus de deux ans avant la mort de son père,
aucune n’a été signalée. M. Henry Gronier lui-même l’a cherché
chaque année depuis, sans succès. De son côté, M. Gronier pense
que le travail qu'on a fait dans les marais : cultures, coupes régu-
lières et comblages, a détruit dispar. Autrefois on ne les cultivait
pas et ne faisait que des coupes irrégulières. Les marais protégés
maintenant pour la chasse, n’appartiennent que depuis deux ans
au propriétaire actuel. Dispar devait en être disparu avant ce
moment-là ; sinon il aurait pu se maintenir avec la protection qui
existe seulement depuis deux ans.
Il y a d’autres marais le long de la Somme où /ispar a été pris
autrefois. D'après M. Gronier, il n’y en aurait plus, les marais
ayant subi les mêmes malheurs qu'à Rouvroy. Il me conseille de
voir les marais de Laon qui sont encore en grande partie intacts.
Il m'a donné un mot de recommandation au propriétaire qui est
un de ses amis. M. Gronier est en possession des notes de son
père sur dispar et autres espèces. Il a l'intention, dit-il, d’éditer
les notes concernant dispar cet été, et de les publier dans le
Bulletin de la Société Entomologique, de laquelle il a l'intention
de devenir membre. M. Henry Brown me cite Lusigny, près
Troyes, comme localité pour d1spar.
Je verrai ce soir M. René Oberthür et M. Brown à Laon, et
nous pourrions faire une chasse aux marais peut-être, aussi bien
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 141
que la chasse dans la région de Samoussy. Mais à Lusigny, ce
ne doit pas être le grand dispar comme jadis en Angleterre. J'ai
lieu de penser que la race y est plus petite.
Laon est une ville perchée sur une colline très raide. Nous y
avons passé la nuit à l'Hôtel de la Bannière.
13 juin. — Matinée fraîche avec brouillard. Le brouillard s’est
dissipé, mais le temps est resté couvert avec quelques éclaircies,
et une averse vers midi et demi. Nous sommes partis en voiture
pour Samoussy et sommes arrivés à l'auberge vers 8 heures. De
là, M. Brown nous a conduits au Sud-Ouest, dans une prairie un
peu marécageuse où pendant quelques moments de soleil volaent
des CArysophanus Chryseis très frais; mais il y en avait bien peu.
Sur le même terrain, on a pris quelques Ærebta medusa pas
fraîches et quelques /0 globularie. Cænon. pamphilus était
assez abondant, avec Æuclidia glyphica, et un peu plus loi, sur
un terrain sablonneux, M. Brown a pris Syrichthus carthami frai-
chement éclos, sur une touffe de Potentilla. M. Oberthür l’a pris
aussi. À la lisière de la forêt, nous avons rencontré les premiers
Argynnis Ino et Cæœnon. Arcania, suivis bientôt de Melitea
Athalia, Dictynna et Aurelia fraîches et M. Aurinia passée,
M. Cinxia assez rare et abimée. M. Brown nous avait annoncé
M. Maturna à Vétat de chenille, chrysalide et papillon, et en effet
il eut bientôt trouvé une chrysalide sur un tremble, et M. Oberthür
une chenille adulte se préparant à se chrysalider. La chenille de
cette espèce est très belle, jaune et noire; la chrysalide a de la
ressemblance avec celle de A. didyma. La plante nourricière est
le chèvrefeuille. Sur le tremble, on a trouvé des peaux de jeunes
chenilles de Zymantria dispar avec, devant la tête de chacune, un
relativement gros cocon oblong-ovoide d'un A'ymenopière parasite.
Ce cocon est blanc et noir.
Bientôt après, j'ai pris une M. Maturna papillon, et d'autres
ont été prises ensuite sur les feuilles, au bord du bois. A7g. 770
se trouvait ici également, surtout dans les prairies humides, vers
le marécage. À poria cratægi très frais mais peu abondant.
142 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Dans les prairies ont été pris : Æuchelia Jacobeæ; Nemeo.
russula; Lycæna semiargus, icarus (les Q très bleues); Æyrastria
argentula; Chrysophanus Chryseis (1 ©); Zygœena trifolu et
flipendule.
Ces prairies s'étendent le long du bois jusqu'à la ferme; mais
arrivés là, on nous a priés de ne pas y aller, à cause des fourrages.
Dans les allées et clairières de la forêt il y avait quelques
Abraxas Ulmata, ressemblant beaucoup aux Pantaria du Midi, en
plus noir; c'est-à-dire que les taches sont agrandies. Une Sesza a
été trouvée par M. Brown sur un tas de fagots.
Les Zimenitis et A patura, qui volent certainement 1c1, n'étaient
pas encore éclos. S'il avait fait beau, nous aurions pu voir cepen-
dant des individus précoces. Dans un petit fossé allant dans le
marais, il y avait des grands Àumex de l'espèce qui nourrit d2s par.
Mais dispar n'a pas paru. J'ai pris une WMemoria d'un vert mat
assez foncé, dont les ailes inférieures sont anguleuses; A cidalia
decorata et quelques autres Phalènes du marais.
Les chenilles d’une Plusia (verte; ligne stigmatale blanche,
ombrée de noir) étaient très abondantes, dans leurs « tentes »
(une par tente), sur diverses plantes. I] y en avait beaucoup sur
le framboisier. Nous avons pris des chenilles de plusieurs pha-
lènes, y compris Aimera pennaria, la chenille d'A cronycta rumicts,
et d’un autre Acronycta, noire, avec tubercules et poils jaune brun,
sur framboisier.
L'après-midi, nous avons suivi le bord du chemin de fer avant
et après la gare. Sur les barrières, des deux côtés, poussent des
chèvrefeuilles, et M. Brown nous a montré des chrysalides de
M. Maturna suspendues au bois. Nous avons pris encore 2 CAryseis
ici, et M. Brown une jolie Cucullia. Anaïtis plagiata était com-
mune sur les barrières et les troncs d'arbres. La barrière portait
beaucoup de fourreaux de Psyche (3 espèces au moins). La forêt,
de ce côté, est très belle. Il y a des allées qui la traversent en ligne
droite, et dans ces allées volent des Wemeophila plantagins.
Malgré le temps couvert, nous avons vu et pris plusieurs mâles
d'un même type de plantaginis à ailes inférieures Jaunes, cet
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 143
_——
après-midi. Le vol est très rapide. Dans ces allées, plus tard, vole
Limenitis populi. Nous avons vu plusieurs Bombyx rubi sans
ouvoir les prendre. Le soir, nous sommes allés à Paris.
P
14 Juin. — J'ai vu M. Howard dans la matinée, relativement
à la lutte entreprise en Amérique contre la propagation des
Liparis chrysorrhæea et dispar, et je suis retourné à Saint-Quentin
l'après-midi. Temps couvert pendant une bonne partie de la
journée, avec forte averse à Paris, vers 1 heure. Assez beau à Saint-
Quentin, le soir; mais plus froid qu'à Paris.
15 fuin. — Je suis allé de bonne heure chez M. Gronier, ce
matin, mais il n'était pas chez lui. Ensuite chez M. Azembre, qui
m'a été nommé comme entomologiste. Il a une assez Jolie col-
lection de papillons bien conservés. Il possède les Phalènes (en
partie du moins) de la collection Constant, et beaucoup d’exotiques.
Ses papillons d'Europe et Asie portent généralement des détails
de localité, etc., et sont bien conservés. Il n’a que 3 CArysophanus
dispar dans sa collection et pas un de Saint-Quentin. Ce sont des
rutilus d'Allemagne. Il n’a jamais pris déspar ici, mais il est allé
plusieurs fois à sa recherche. Il m'a parlé d’un autre entomologiste
saint-quentinois, M. Passay, qui a dû prendre le dispar, dans Île
temps, et aurait pu donner quelques renseignements. lInesthennce
moment à son château de la Ferrière, à Capelet.
M. Azembre m'a donné l'adresse d’une dame Veuve Desprez,
dont le mari chassait le dispar, il y a 40 ou 50 ans. M°° Desprez
m'a montré des cadres suspendus aux murs de son salon, et con-
tenant en tout une quarantaine de dispar de Saint-Quentin, avec
quelques exotiques. La couleur cuivrée de ces dispar est bien
conservée; mais les papillons eux-mêmes n’ont pas été très bien
préparés. Il manque des antennes dans bien des cas. Tous sont
étalés de face, et comme M"° Desprez n’a pas voulu que je défasse
les cadres, je n’ai pas pu voir le dessous. La taille ne me parait
pas bien grande, guère plus que celle des 7urilus d'Allemagne.
M, Desprez était peintre, Il chassait beaucoup le dispar dans le
144 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
marais de Rouvroy, à droite de la route, en allant vers Rouvroy,
après avoir traversé le canal. Il le prenait aussi dans un marais
de l’autre côté de Saint-Quentin; mais ce marais a été comblé et
on a bâti dessus.
M'* Desprez ne veut pas se défaire de ses dzspar. Elle les garde
en souvenir de son mari.
Le temps est resté couvert presque toute la journée. En quittant
M Desprez, je suis allé à Rouvroy. Le plus grand propriétaire
du côté droit est un M. de Laporte, qui reste rue du Gouver-
nement, à Saint-Quentin. Il loue la chasse et la pêche. Justement
le locataire, avec des amis, chassaient la poule d’eau, et le garde,
que j'ai pu voir quelque temps après, ne pouvait pas me laisser
pénétrer dans la propriété aujourd’hui; mais il est entendu que
J'irai demain matin.
Pendant 20 minutes il a plu fortement. Ensuite J'ai remonté
le long du canal. Il y a beaucoup de grands Rumex au bord du
sentier; mais ce n’est pas l'espèce de dispar. Au premier pont en
amont (moulin brûlé), une route traverse les marais vers l'Est. Ici
j'ai trouvé le vrai Rumex de dispar poussant dans les fossés;
mais jamais trace du papillon lui-même. Il y en avait surtout
autour d’un petit champ de tir.
Ce qui est remarquable à Saint-Quentin, c’est le manque à peu
près complet des Lépidoptères dans ces marais. Comme diurnes
il n’y a rien, rien. Cependant j'ai vu des chenilles de Vazessa
urlice.
16 Juin. — Matinée brumeuse et froide. Je suis descendu à
Rouvroy, à 8 heures, où j'ai rencontré le garde, et nous avons
pénétré dans le marais. Ce marais a été aménagé par moyen de
canaux. Aux bords des canaux, non loin de la route, le grand
Rumex pousse, même dans l’eau; mais il n'y en a pas grande
abondance. Plus loin, dans le marais, qui est assez boisé de peu-
pliers, trembles et saules, il y en a davantage. Il y a quelques
coins humides exposés au soleil où poussent de grandes valérianes,
et c’est ici que j'espérais trouver le dispar. Il y avait aussi trois
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 145
longues lanières de terre tourbeuse, séparées par des canaux.
Beaucoup de fleurs, valérianes et autres, sont sur ces terres. Je suis
resté dans le marais toute la matinée, le garde me faisant tra-
verser les canaux en bateau. À partir de 9 heures le soleil a paru
et il a fait chaud et lourd. Le vent venait du Nord, mais les
arbres, au Nord, protégeaient le marais dans ses endroits décou-
verts. En somme, les conditions atmosphériques étaient bonnes et
la localité exacte selon les indications de M"° Desprez, et selon
son aspect, mais il n’y avait rien, ni dispar, ni autre diurne. Seu-
lement j'ai trouvé quelques Phalènes du marais, et encore bien
peu.
Le garde (c'est le fils du garde actuel, mais il est garde aussi)
m'a dit avoir vu au mois de mai un papillon aux reflets cuivrés,
dans le marais, mais on ne peut conclure sur ce témoignage que
c'était dspar. Il me semble éteint.
L'après-midi, je suis parti pour Troyes pour chercher le dzspar
à Lusigny, où M. Brown dit qu'il est signalé. Je suis arrivé à
Troyes à 11 heures du soir. Autour des lampes à arc de la gare
volaient des masses de papillons blancs. Je suis allé prendre ces
papillons blancs sur les poteaux des lampes en dehors la gare.
On aurait dit de la neige, vu d’un peu loin. La proportion des Q
était grande. C’est, je pense, la Salicis. Il paraît que les saules
ont été dévorés dans la région... »
Voilà donc le résultat négatif des recherches effectuées par
M. Harold Powell dans la région de Saint-Quentin. J'ai reproduit
ces notes telles que M. Powell les a rédigées chaque soir; elles ont
un caractère de sincérité qui donne aux observations une réelle
valeur. Je les considère comme importantes au point de vue de
l’histoire du Polyommatus dispar, et je remplis un devoir de
justice — devoir qui m'est d’ailleurs fort agréable — en exprimant
à M. Powell toute ma gratitude pour son zèle scientifique. Je le
remercie aussi d’avoir bien voulu traduire en français les notices
publiées par M. Charles Barrett et par M. Tutt, relativement au
Polyommatus dispar anglais, éteint lui-même en Angleterre, et
10
140 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
depuis longtemps. M. Harold Powell possède aussi bien la langue
française que sa langue maternelle et sa traduction a le mérite
d'une parfaite fidélité.
Grâce à sa connaissance si précieuse des langues française et
anglaise, M. Harold Powell mettra les Entomologistes français
à même de se rendre un compte très exact de ce que les Entomo-
logistes anglais contemporains ont écrit au sujet du plus beau
papillon diurne de l'Angleterre, dont tout le monde regrette la
disparition.
Dans son Aistoire des Papillons anglais, à l’article consacré au
Pol. dispar, Barrett s'exprime ainsi, aux pages 57, 58, 50 et 60
du Volt
« CHRYSOPHANUS DISPAR. — On lit dans 7%e Entomologist,
année 1883, une histoire curieuse de la découverte de cette espèce
en Angleterre, par H. J. Harding, le marchand d’insectes bien
connu. Il dit : « Il y a quarante ans environ, Mr. Benjamin
Standish (le grand-père) entendit dire que Wdispar avait été vu
dans les marais (fens). [1 obtint un dessin du papillon, colorié
par son père, et s’en alla aux marais. Il montra son dessin à un
homme qui travaillait dans les marais et qui lui dit en avoir vu
le jour même. Standish lui offrit cinq shillings pour quil le
conduisit à l'endroit: mais l’homme refusa, en disant qu'il avait
l'intention d'en porter lui-même une quantité d'exemplaires à
Londres. Cependant, Standish découvrit l'endroit où travaillait
l’homme, et il prit une belle série du papillon.
Il ne tarda pas à être connu des habitants du marais que Îles
papillons valaient deux shillings pièce, à Londres; deux hommes
vinrent alors de Cambridge et s’emparèrent d'un grand nombre
d'échantillons qu’ils emportèrent dans des boîtes à Londres, et 1ls
vendirent chaque exemplaire six pence. J'y suis allé trois ans plus
tard et j'y ai trouvé des chenilles. Elles paraissaient très localisées,
plus nombreuses là où leur plante nourricière — le water-dock —
était le plus abondant. Les chenilles étaient chassées par tout le
monde, vieux et jeunes. Jen ai acheté deux douzaines à une vieille
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 147
femme pour neuf pence, desquelles J'ai obtenu, par élevage, des
spécimens très beaux que J'ai vendus un shilling chaque.
M. Cole, à Holme Fen, en prit un grand nombre. La cour de
sa maison était tout près de leur localité. La dernière fois que j'y
étais, M. Cole me dit qu'il n’en avait pas vu un seul spécimen
depuis plusieurs années. La plante nourricière était au même
endroit en abondance, mais pas de chenilles. On les avait trop
chassées. »
En 1850, dans une lettre adressée à M. H. T. Stainton (qui a
été publiée dans 7%e Intelligencer de cette année-là), le
Rev EN CR Jenkins dit:
« Je vais vous faire un récit de ce qui est arrivé à ma connais-
sance personnelle, relativement à ce bel insecte, qui était, 1l y a
environ trente ans, tellement abondant dans les marais non
exploités autour de Whittlesea Mere, que je ne m'attendais Jamais
à apprendre qu'il avait été totalement exterminé. Je n'oublierai
jamais son éclat brillant au soleil pendant le vol, et le voir posé
sur la fleur de l'Eupatorium cannabinum, montrant le dessous de
ses ailes, était une chose inoubliable. J'en ai pris seize, une fois,
dans l’espace d'une demi-heure environ, dans un endroit spécial,
où la plante sus-nommée était très abondante; mais ils étaient
difficiles à trouver quand le soleil n'était pas très brillant. Dans
ce temps-là, la chenille était inconnue, et Jj'attribue la disparition
du papillon à la découverte de la chenille, aux attaques incessantes
des collectionneurs et à la destruction par le feu de la végétation
basse des marais, qui est pratiquée en temps sec quand on doit
les exploiter. »
Cette lettre fut suivie une semaine plus tard par une autre de
M. J. W. Douglas, dans laquelle il dit :
« Je crois que l'extinction du papillon n’est due ni aux collec-
tionneurs, ni à l’incinération de la végétation basse, Jusqu'à une
certaine date, que je ne connais pas au juste, mais il doit y avoir
quatorze ou quinze ans, l'espèce avait survécu à toutes les influences
148 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
contraires et n'était pas du tout rare, puisqu'on pouvait en acheter
presque n'importe quelle quantité chez les marchands de Londres.
Mais subitement advint une inondation au moment où l’insecte
était à l’état de larve; toute la génération fut noyée et, à la suite,
il ne resta pas un seul spécimen pour réjouir les yeux d’un collec-
tionneur. J'ai fait un pèlerinage à Whittlesea Mere en 1841, exprès
pour voir le bel insecte vivant, mais il a plu chaque jour pendant
la semaine que J'y étais, et je n’ai vu qu'un seul spécimen, qui osa
ouvrir ses ailes pendant un rayon de soleil passager. »
Ces notices, écrites par des Entomologistes qui ont eu une
connaissance personnelle de l’insecte, paraissent bien mériter d’être
conservées, ainsi qu'une notice sur ses habitudes par M. Frederick
Bond, citée par M. Stainton dans son Manual of British Butterfhes
and Moths comme :l suit :
« Tout ce que je puis vous dire de leurs habitudes est ceci :
qu'ils étaient très actifs et timides, ne volant que lorsque le soleil
brillait. Ils se posaient toujours sur un chardon fleuri quand ils
pouvaient en trouver un, s’envolant pour attaquer n'importe quel
insecte qui pouvait passer près d’eux, mais ne retournant pas tou-
jours au même endroit, s'en allant généralement prendre place
ailleurs. Si on les manquait du premier coup de filet, il était très
peu utile de les suivre, car ils s’en allaient comme le vent et
n'offraient que rarement une deuxième occasion de les prendre;
ils étaient en vérité peu commodes à suivre parce que c'était assez
difficile de les tenir en vue et en même temps d'éviter les endroits
marécageux. »
M. C. W. Dale, dans son History of British Butterflies, cite
un récit que M. Haworth fit au Rev. W. T. Bree et qui parut dans
Londons Natural History, en 1834 (que je n'ai pu consulter),
disant qu’à la suite d’une saison pendant laquelle l’Espèce avait
été prise en abondance, il arriva que l'hiver suivant fut très plu-
vieux, et le terrain où les cuivrés avaient été trouvés fut complè-
tement et entièrement inondé, et resta sous l’eau pendant un temps
considérable. Les Entomologistes jugèrent que l'inondation
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 149
détruirait sûrement les czivrés et que la race disparaîtrait dans
ce coin du pays. L'été suivant, cependant, les papillons furent
retrouvés exactement au même endroit, et en aussi grand nombre
qu'auparavant.
Ensuite ce terrain fut soumis à l’action du feu; toute la surface
fut brûlée en vue d'améliorations agricoles. Après cette opération
on ne trouva plus les cuivrés dans cette localité particulière. »
Donc, les opinions diffèrent quant à la cause de destruction,
mais aucun doute ne paraît exister que, soit avant, soit aux
environs de l’année 1851, quand le Whittlesea Mere fut définiti-
vement drainé, cet insecte disparut de chez nous.
Les seules localités bien connues semblent être Whittlesea Mere,
Vaxley Fen et Holme Fen dans le Cambridgeshire et le
Huntingdonshire. M. Dale raconte que M. Haworth prit cinquante
exemplaires en un seul jour, en 1827, à Bardolph Fen, Norfolk,
et que quelques-uns furent pris à Benacre, Suffolk. Il ajoute que
les dernières captures paraissent être de cinq exemplaires à Holme
Fen en 1847 ou 1848. Le papillon habitait autrefois, en toute
probabilité, bien des parties des marais, non drainés alors, qui
s'étendaient depuis le Huntingdonshire jusqu'au Lincolshire, et 1l
est tout Juste possible qu'au moment de la destruction des derniers
repaires de l'espèce, quelques individus se soient répandus dans
le pays, maintenant ainsi l'espèce pendant quelques années, dans
des endroits favorables. En 1856, Richard Weaver déclara qu'un
male et une femelle avaient été capturés l’année précédente, en
Staffordshire; en 1857, M. W. D. Crotch annonça la capture d’un
exemplaire en Somersetshire; et, en 1860, le Rev. Joseph Green
enregistra une capture en Suffolk.
De plus, il est dit qu’en 1865, un spécimen qu'on déclara avoir
été ramassé sur des laiches à Slapton Lea, fut exhibé à l’Exeter
Naturalists Club.
Quoi qu’il en soit, 1l n’y a pas lieu de croire que l'espèce existe
encore quelque part chez nous.
Il y a une série magnifique dans la collection du Musée de
Cambridge; et d’autres belles séries, comprenant des exemplaires
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
va
©
d'élevage, se trouvent dans les collections de feu MM. H. Dou-
bleday, F. Bond et J. C. Dale, et dans toutes les primer
pales collections appartenant aux Entomologistes vivants. Quoi-
qu'éteinte, l'espèce est toujours considérée comme étant un des
plus riches bijoux de la faune britannique. »
Mais les Entomologistes anglais n’ont pas abandonné l'espoir
de voir ressusciter le Polyommatus dispar dans leur pays, et la
note reproduite ci-dessous et parue dans « 74e Entomologists
Record, Vol. XXI, p. 154 », sous la signature de M. G. H. Verrall,
F. E.S. indique les efforts déjà faits et invite les Entomologistes
anglais à être discrets dans la récolte éventuellement possible du
nouvel Æippothoë dont l’acclimatation a été essayée :
« Comme il n’y a aucun exemple prouvé de l'existence de cette
espèce en Grande-Bretagne depuis 1848, je ne pense pas que l’on
puisse m’accuser d'agir d’une façon non-scientifique en tentant de
la réintroduire au moyen de sujets continentaux.
En conséquence, avec la bienveillante assistance de M. J. W.
Tutt, j'ai mis en liberté de nombreuses larves de la forme 7##lus
à Wicken Fen, et je demande à tous les Entomologistes leur
concours pour empêcher la capture d'exemplaires pendant quelques
années, afin de se rendre compte si cette belle espèce peut être
établie de nouveau. D’autre part, il sera intéressant de voir si,
dans le courant de quelques générations, une reversion vers la
forme britannique ancienne pourrait se produire.
J'apprends qu’on essaye aussi d'introduire l’autre « dispar »
(Lymantria) au même endroit, de sorte que les captures que l’on
pourra faire de cette espèce resteront également sans valeur, au
point de vue de la faune britannique. »
Ainsi que je l’expose à la page 8 de la XX° livraison des
Etudes dEntomologie, ma collection contient quelques exem-
plaires anglais et picards du large Copper, actuellement éteint
aussi bien en Angleterre qu'en Picardie. Je fais figurer sous les
n® 328 et 320 de la PI. XLIII de cet ouvrage un O' et une Q
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 151
dispar, pris jadis à Saint-Quentin, et sous les n° 330 et 331, une
paire provenant d'Angleterre. J'ai acquis dernièrement quelques
dispar qui furent vendus à Londres, notamment une belle paire
faisant partie de la collection de feu J. A. Clark. La première
portion de cette collection Clark a été dispersée aux enchères
publiques, les 2 et 3 novembre 1909. Dans cette partie, se trou-
vaient, sous les n° 00, 91, 02, 03, 94, 05, 06, 07 et 08, O dispar
qui furent adjugés un par un, chaque exemplaire formant un lot.
À ma connaissance, deux échantillons O' et Q furent vendus
comme suit : 1° « À magnificent specimen, very large and rich
colour Œ » (lot o1) atteignit le prix de 11 livres 10 shillings, ce
qui fait, avec les frais divers s’élevant à 10 %, à peu près
316 francs; 2° « À magnificent specimen and very large Q »
(lot 95) arriva seulement à 6 livres 10 shillings, soit, avec les frais,
178 fr. 75. D'ailleurs, les papillons anglais « now extinct » ou
aberrants atteignent souvent des prix très élevés en vente publique,
alors que les boîtes contenant des quantités d'exemplaires en état
d'excellente conservation, appartenant à des espèces même rares,
mais existant encore en Grande-Bretagne et ne présentant pas
d'anomalie sérieuse, sont adjugés à des prix quelquefois infimes.
Quoi qu'il en soit, j'ai réussi à réunir Jusqu'ici 17 dis par
anglais, et c’est avec ces éléments de comparaison que Je puis
établir les caractères distinctifs de cette race vraiment merveilleuse.
La taille des spécimens anglais est généralement grande. Les Q
sont, en dessus, d’un rouge métallique mat, très chaud et plus
foncé que dans les autres races; les points noirs discoïdaux et la
bordure noire des ailes sont très accentués; la frange est blanche,
courte, mais bien serrée et très apparente. Les © sont d'un rouge
un peu fauve avec les points noirs plus gros que dans les autres
formes géographiques de l'Espèce; mais ce qui est très particulier,
c'est la teinte gris bleu du dessous des ailes inférieures, du bord
des supérieures, du thorax, des pattes et de l'abdomen; cette teinte
bleuâtre reste caractéristique du dispar anglais. Les points noirs,
dans les deux sexes, sont gros, en dessous, et agréablement cerclés
de blanchâtre.
152 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Les dispar de Saint-Quentin, dont ma collection et celle de feu
Bellier contenaient ensemble six exemplaires envoyés jadis par
feu Gronier, sont aussi grands que les dispar anglais; mais la
teinte rouge feu du dessus des ailes des d'est moins vive et plus
claire; les points noirs, sur le dessus des ailes supérieures de la ©,
sont moins gros, et surtout le dessous des ailes inférieures est
plus gris et non bleuâtre, comme chez les dispar anglais. J'ai sous
les yeux de très beaux Æippothoë (rutilus) de l'Allemagne du
Nord (Berlin, Magdebourg, etc.); on peut dire que la race éteinte
de Picardie est intermédiaire entre la race détruite d'Angleterre
et les plus beaux spécimens du Nord de la Germanie. En Alsace,
en Dauphiné, dans la Gironde, Hippothoë est relativement plus
petit que dans l’Allemagne du Nord, tandis qu'en Dalmatie,
Hippothoë paraît être plus grand et bien vivement coloré, se
rapprochant de l’ancienne forme picarde et de la race germanique
actuelle.
En France, Hippothoë éclôt deux fois par an, au printemps et
en été. M. Charles Rothschild essaya, il y a quelques années,
d’ensemencer de nouveau Hippothoë en Angleterre, agissant avec
le même sentiment et animé des mêmes intentions que M. Verrall
réalisa plus tard, comme on l’a vu ci-dessus. L’excellent docteur
Macker, de Colmar, eut l’obligeance de me procurer une Q vivante
qu'il prit en août et que j'envoyai à M. Charles Rothschild,
amateur très passionné de la faune lépidoptérologique anglaise.
Malheureusement, la première tentative d’acclimatation d'Æ:pp0-
thoë en Angleterre ne réussit pas.
J'ai publié sous le n° 69 de la PI. 5 de la XX* livraison des
Etudes d'Entomologie la figure d’une belle Aberration 7adiata
d'Hippothoë Œ. John Curtis, dans son bel ouvrage : British
Entomology,; being illustrations and descriptions of the genera
of Insects found in Great Britain and Ireland; Lepidoptera, à
publié sur la PI. 116-12, de très belles figures de Zycæna dis par
(the large Copper Butterfly). L'auteur anglais donne des détails
intéressants sur ce joyau magnifique de la Lépidoptérologie bri-
tannique et cite notamment les remarques suivantes sur les pre-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 15
(SS
miers états, communiquées par M. Henderson, of Milton
« Messrs. Whybray and Wood found the caterpillars in May
and June 1826. Mr. Wood says that they are found in the greatest
plenty the first three weeks of June, about which time they change
to Chrysalides, and remain in that state about three weeks : it
is supposed that the eggs remain through the winter, and are
probably hatched about the latter end of May. The capillar feeds
on the Rumex aguaticus, and other docks found in the fens, and
the chrysalis is attached to the back of the leaf-stalk near the
bottom. »
John Curtis ajoute quelques renseignements; Je les traduis
comme suit : « Ce splendide papillon a été découvert dans le
pays de Galles (Wabs) par le célèbre botaniste Hudson. Le
docteur Skrimshire le captura, pendant plusieurs années, dans le
marais Bardolph, en Norfolk. Ces dernières années, 1l apparut en
orande abondance à Whittlesea Mere, dans le Huntingdonshire,
où on le trouvait du 25 juin au 10 août. Au commencement de
juillet, la chenille, la chrysalide et le papillon ont été trouvés
vivants, le même Jour. »
Curtis ne dit pas que l’Espèce soit disparue; mais Je crois que
la 1° édition de son ouvrage date de 1823 à 1840, époque où le
dispar n'était pas encore éteint; c’est du moins Guenée qui fournit
ce renseignement de date bibliographique. [L'’exemplaire de
l'ouvrage de Curtis qui existe dans ma bibliothèque n’est précédé
d'aucun avertissement ni d'aucune préface. Il porte la mention
éditoriale : Lovell Reeve & C°, Henrietta Street, Covent Garden;
1862. J'ai lieu de croire que c'est une réédition de l'ouvrage de
Curtis. Pourtant, contrairement à l’usage, le titre est dépourvu de
toute autre indication capable de renseigner le lecteur.
Les chenilles, les plantes et les papillons sont admirablement
gravés dans cet ouvrage de Curtis; le coloriage et l’impression du
texte, dans l'édition que je possède, sont excellents; mais ce n’est
évidemment pas, vu la date 1862, l’édition originale.
Guenée avait été favorisé par son ami Doubleday d’une très
importante documentation sur la faune des Lépidopteres anglais,
154 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
et 1l avait notamment recu de M. Doubleday 4 dispar; Guenée
les a pourvus de l'indication suivante, qui a dû être écrite vers
1860 : « Nord de l'Angleterre; 1l paraît que cette superbe variété
a progressivement disparu d'Angleterre. »
Il y avait 5 exemplaires dans la collection Boisduval et ils sont
magnifiques. Chacun porte à son épingle une étiquette sur laquelle
on lit : « Hope, 1820 ». Le papier est vieux et l’encre est Jaume
par le temps. On peut voir dans l’/cones une excellente figuration
de dispar anglais, sous les n° 1, 2 et 3 de la PI. 10. Boisduval a
parfaitement observé le caractère des ailes inférieures, en dessous,
car 1l remarque (p. 44) « que le dessous des inférieures est d’un
gris blanc lavé de bleu ». Duponchel a donné de bonnes figures
du dispar, sous les n°2 "et 416); 5'et 6 (0)de Ja PISTE
Supplément. I n'y avait pas de dispar anglais dans la collection
Bellier ; il existait une seule © avec la mention : « Donnée par
Pierret », dans la collection de Graslin. Sans doute Pierret a
possédé une superbe série de dispar anglais; mais qu'ont-ils pu
devenir et en quelles mains sont-ils passés? Feu Depuiset a
revendu en détail la collection Pierret qu'il avait achetée en bloc,
et il m'a souvent dit que cette opération fut le commencement de
sa fortune. Il la fit d’ailleurs très honorablement, joignant au
mérite d’un fin connaisseur celui d’avoir toujours été d’une labo-
rieuse activité et d’une parfaite loyauté.
C'est à Depuiset que je suis redevable de la collection des dessins
originaux de l’/cones. Depuiset eut la bonté de me les offrir en
amical souvenir. Les peintures de dispar, dues au pinceau de
Dumesnil, y sont de véritables chefs-d'œuvre; les papillons, en
dessus, sont coloriés d’un seul côté; il incombait au graveur et
au coloriste de reproduire le côté manquant, conforme au côté
achevé.
Cette méthode était basée sur la conviction que les deux côtés
de tous les papillons sont rigoureusement symétriques. Cela est
exact pour certains groupes; mais J'ai déjà fait observer, au cours
de mes précédents travaux, que pas un seul exemplaire de
Cydimon, Urania, Chrysiridia, etc, n’a les deux côtés des ailes
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE I
UT
UT
symétriques. L'aspect général n'indique pas de différence saillante
entre les deux côtés; pourtant la disposition des taches est tout
autre. Le peintre E. Blanchard, travaillant comme Dumesnil, ne
s’est pas rendu compte que l’Urania Ripheus est asymétrique; et,
dans la Faune entomologique de Madagascar, par Boisduval
(Paris, 1833), dont je possède aussi les peintures originales, un
seul côté du magnifique papillon Ripheus ayant été figuré en
couleur, le graveur, contrairement à la réalité, a représenté les deux
côtés des ailes absolument pareils. Cela ne s’est pourtant jamais
vu. Îl est étonnant que le peintre, obligé d'observer de si près tous
les détails, pour les représenter sur le papier, ne se soit pas rendu
compte de cette particularité. Je n'ai pas vu que Guenée, généra-
lement si méticuleux et observateur si attentif des petites choses,
ait remarqué cette intéressante bizarrerie. Du moins J'ai été inhabile
à en trouver la mention dans le tome I des l/ranides et Phalénites,
Species général des Lépidoptères, IX; Paris, édit. Roret, 1857.
Lycæna boetica, Linné.
Charmante espèce répandue dans l'Australie; le Japon, la
Chine; l'Inde; à Madagascar; aux Comores; en Abyssinie; à l’île
Bourbon ; à Zanzibar; à Natal; au Sénégal; en Algérie (Lambèze,
Bône, Djurjura, Biskra, Laghouat, Blida, Sebdou); en Italie
(Castellamare-di-Stabia) ; en Espagne (Grenade, Sierra de Alfakar,
Sierra de Ronda, Vittoria, Alsasua, Barcelone); en France (Au-
vergne, Vichy, Chartres, Gavarnie, Pyrénées-Orientales, Basses-
Alpes, Marseille, Charroux, Rennes, Cancale, Var, Alpes-Mari-
times), et en Valais. On rencontre occasionnellement boefica en
Angleterre, le premier exemplaire observé dans la grande Ile fut
pris en 1850, à Brighton.
L'Espèce est variable; les sont en dessus, d’un bleu lilas plus
ou moins clair ou foncé, transparent ou opaque; avec la bordure
brunâtre des ailes amincie ou élargie; la tache marginale ocellée
qui est en dehors de la petite queue, est entourée d'une auréole
156 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
aurore, plus ou moins visible. En dessous, les dessins d’un blond
doré sont plus ou moins confluents et les deux ocelles noirs, de
chaque côté de la queue, sont surmontés d’un arc orangé et sou-
lignés d’atomes bleu ou vert d’or d’une accentuation très variée.
Il y a deux types de © et tous les passages entre les deux formes
extrêmes existent : d’abord la forme qui, chez nous, est plus ordi-
naire, elle a le fond des ailes brun, avec la base saupoudrée d’un
semis d’atomes bleus s'étendant jusqu'au delà du milieu; puis
l’autre forme dont les ailes inférieures sont traversées, du bord
costal aux approches du bord anal, par une bande maculaire
blanche quelquefois très nette : albovittata, Obthr. Les taches
ocellées marginales, intranervurales sont aussi plus ou moins
accentuées aux ailes inférieures. En dessous, les linéaments et taches
blond doré des Q sont agréablement mélangées de blanc. La taille
est aussi très différente; il y a des exemplaires très grands;
d’autres très petits. Il ne paraît pas qu'il y ait de variétés géogra-
phiques, malgré la diversité des pays habités par la Lycæna boctica.
Je n'ai cité dans l'indication des localités ci-dessus relatées que les
contrées d’où proviennent les exemplaires de ma collection; mais
Je ne doute point que la Zycæna boctica n'habite presque toute la
France, notamment le Centre et l'Ouest, étant cependant plus rare
dans le Nord et l'Est.
La Zycœna boetica vole en juillet et août dans les Pyrénées-
Orientales; en mai et juin en Algérie; en août, septembre, octobre et
même commencement de novembre, à Rennes. Je l'ai trouvée à Can-
cale, en août; la chenille, aux bords de la mer de la Manche, doit
vivre sur les genêts et les ajoncs; dans les jardins, elle affectionne le
baguenaudier. Je crois que la Zycæna boetica, en Bretagne et en
Angleterre, est un papillon non indigène, mais se renouvelant
chaque année par des exemplaires émigrant du Sud vers le Nord,
comme les Colas Edusa et Hyale et plusieurs autres espèces. Je
l'ai vue très commune dans les jardins publics de Paris, en sep-
tembre, il y a une cinquantaine d'années. Je ne me suis pas trouvé
à même de l’observer de nouveau nulle part, dans de semblables
conditions d’abondance.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Do
M. Powell a obtenu d’'éclosion, à Hyères, une Q sans queue.
Il m'a envoyé cet exemplaire avec une notice qui authentife cette
sorte de variation que j'appelle ecaudafa.
La Lycæna boelica est une espèce connue de tous les Entomolo-
gistes, ne donnant lieu à aucune confusion et ayant été figurée par
un très grand nombre d'auteurs.
Lycæna Telicanus, Huebner.
Espèce méridionale; je ne l'ai jamais vue nulle part abondante;
elle habite, d'après les documents que je possède, Tanger (Maroc);
Bebdou, Alger (Algérie); Malaga, Grenade, Sierra-Nevada, côté
de Lanjaron (Espagne); la Corse; la Sicile; Menton (Alpes-Mari-
times); Millas, Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales); Digne
(Basses-Alpes).
Je ne crois pas que la Zycæna figurée avec le nom de Telicanus,
sous les n° 8 et o de la PI. 26 de l’Aistoire de Madagascar, par
Alfred Grandidier, Paris, 1885, appartienne à la même unité spéci-
fique que notre Z'elicanus de la région méditerranéenne occidentale.
Les Lycæna pulchra et rabefaner de Madagascar, dont les frères
Perrot nous ont envoyé jadis d'importantes séries, sont des espèces,
à notre avis, distinctes de Z'elicanus et doivent en être spécifique-
ment séparées. La Lycæna Telicauus a été figurée par beaucoup
d'auteurs. Millière l’a représentée avec sa chenille et sa chrysalide,
sous les n° 10 à 13 de la PL 108 de son artistique Iconographie.
D'après Millière, la calluna vulgaris serait une des plantes dont
se nourrit la chenille de Z'elicanus. Le papillon éclôt depuis le
mois de juin jusqu'à l'automne.
Lycæna Theophrastus, Fabr.
La description de Fabricius est ainsi conçue à la page 281
de l'Entomologia systematica; Hafniæ; 1793 : « H. KR. alis cau-
datis fuscescentibus subtus albis nigromaculatis : posticis punctis
158 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
quinque marginalibus aureis. Habitat in Marocco; Mus. Dom. de
Sehestedt. Parva. Alae anticæ fuscæ basi lineis duabus cærulescen-
tibus, disco macula flavescente obsoleta, atromaculata. Posticæ
fuscæ cinereo undatæ. Cauda nigra, apice alba. Subtus albæ strigis
plurimis e punctis lineolisque transversis, atris. Striga marginalis e
punctis quinque aureis, quorum secundum puncto atro notatum. »
(H et R en tête de la description concernant la ©, ci-dessus
transcrite, signifie : Æesperia. Rurales, termes qui correspondent à
une classification de Fabricius).
Vit sur le jujubier; éclôt deux fois par an, au printemps et en
été. Répandue en Algérie où elle a été capturée à Sebdou et à
Zebch, en mai et en août; à Biskra, en mai; dans le Djurjura, en
juillet ; à Bou-Saâda, en mai; à Aïn-Sefra, en avril; à Laghouat,
en avril; à Rovigo, en mai; à Littré, en mai.
La forme 7'Leophrastus a été parfaitement représentée par
Herrich-Schaeffer, avec le nom de Psiftacus, sous les n° 220, 221,
222 et 223. Les figures données par Lucas, dans l’Exploration
scientifique de l'Algérie, sous les n° 6 et 6a de la PI. 1, sont
beaucoup moins bien exécutés. Freyer a représenté la variété Balka-
rica, de Turquie, de Syrie de l'ile de Chypre, sous les ne
de la PI 421. Cette variété Balkanica dont il me semble que
Staudinger et Rebel, dans le Catalog 1001, font à tort une espèce
distincte de Z'zeophrastus, est caractérisée par les taches brunes,
transparaissant du dessous et très visiblement indiquées sur le
dessus des ailes, par le ton d’un lilas plus rosé et moins bleuâtre
du dessus des ailes chez le O' et par les dessins noirs du dessous
des ailes qui sont plus fins, tout en étant sensiblement les mêmes
que ceux de 7'.eophrastus. Il y a d’ailleurs des exemplaires de tran-
sition; certains échantillons algériens, notamment ceux qui appar-.
tiennent à l’Ab. rosacea, Austaut, sont d’un lilas rose comme la
variété Balkanica; d'autre part je possède un © pris à Biskra et
chez lequel on voit, sur le dessus des ailes supérieures, des taches
brunes transparaissant très distinctement du dessous; enfin pour
le dessous des ailes, comme il y a des petites différences chez
chaque individu, je ne crois pas qu’on puisse trouver chez Balkanica
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 159
un détail assez constant et assez saïllant pour qu’on puisse l'invoquer
à titre de valeur spécifique différentielle. La forme du Haut-
Sénégal qui a été rapportée des Kayes par le D' Charles Nodier,
en 1881, fait un passage excellent « transitus egregius » entre
Balkanica de Turquie et 7 eophrastus d'Algérie. Je possède Teo-
phrastus référable à la forme algérienne, provenant de Solan, près
Simla (N.-O. de l'Inde) où il fut pris par le Lepcha Lakatt en
1806; de Ceylan; des jungles de Noatoli; de Trichinopoly (Sud
de l'Hindoustan); de Karrachee; de la frontière Gangpur et Sam-
balpur; de Kulu; de Sikkim; Punjab et Nepaul, en Asie; et d'Abys-
sinie, de Kimberley et Freetown (Sierra-Leone), en Afrique. Je
suis convaincu que Sybaris, Hopf. alteratus, Moore, venosus, Moore
désignent la même unité spécifique qui est appelée TXeophrastus.
Ananda, de Nicéville, me paraît être une espèce voisine, mais tout
à fait différente.
La Zycœena Theophrastus est donc répandue dans une vaste
étendue de pays, en Afrique, en Asie et dans le Sud-Est de
l'Europe où elle donne la variété Balkanica. M. Aigner-Abañ
a figuré dans Schmetterlings-Aberrationen aus der Sammlung des
Ungarischen national Museums, une jolie Ab. Frivaldszkyi, de
Balkanica, sous le n° 4 de la PI. XIV.
Les Q sont assez variables; plusieurs capturées en Algérie,
concordent parfaitement avec les figures 222 et 223 de Psittacus,
Herrich-Schaeffer; c’est-à-dire que tout le fond des ailes est noi-
ratre avec les dessins noirs transparaissant du dessous, plus foncés.
Dans l'Inde, le fond des ailes est blanc, au lieu d’être noirâtre
et les taches noires se détachent très nettement. Certaines © algé-
riennes, montrant une éclaircie blanche dans l’espace post-cellulaire,
font le passage entre les formes extrêmes, la plus obscure et la
plus claire.
M. H. Powell a pris à Sebdou, en mai 1007, une Aberration
radiata que je fais figurer sous le n° 410 de la PI. XLIX, et à
Zebch, près Sebdou, en août 1907, une © très curieuse ayant le
côté gauche noirâtre et normal et le côté droit semé d’atomes bleu
160 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
brillant, Ab. wzcærulescens qui est représenté sous le n° 409 de
IP PONIEIEXe
Le dessous des ailes inférieures, ainsi que je l’expose ci-dessus,
étant assez variable, je fais figurer un G' du Sud-Algérien pris par
M. Gaston Allard, une © de Bou-Saâda, très obscure en dessous,
prise par mon frère, en 1875, et une Q de Zebch, prise par M. Powell
en août 1907, à dessins normaux, mais ornée d’une série de taches
vert d'or extrèmement brillantes, le long du bord terminal des
ailes intérieures (NES ho ANT, 412, 413, 444)
Lycæna Coretas, Ochs.
Je suis convaincu que Coretas est une espèce à part d’Ayntas
et tout à fait distincte. J'ai observé Coyelas aux environs de
Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales) où elle éclôt deux fois par
an en mai et en Juillet, et dans la Dordogne, au sud de Bergerac,
où elle vole en juillet, et sans doute aussi au printemps, dans des
petits bois secs et montueux où elle ne paraît pas bien rare. Je l'ai
aussi reçue de Digne. Jamais je n'ai pris Ayntas à Vernet-les-
Bains. Dans la Dordogne, je n'ai vu Azynlas commencer qu’au
nord de Périgueux. Parcourant en automobile la route de Cauterets
à Rennes, en 1008, je me suis arrêté à chasser dans plusieurs forêts
que je rencontrais; c’est ainsi que J'ai exploré, malheureusement
trop rapidement, quelques bois entre Périgueux et Angoulême, en
passant par Brantôme et la Roche-Beaucourt. J'ai observé, çà et là,
Amyntas voltigeant sur les bruyères, dans les clairières sylvatiques,
comme jamais je ne l'avais vu aussi nombreux nulle part; mais
il était seul, sans Coretas, à partir de Bergerac et en remontant
vers le Nord; de même que Coretas se trouvait sans Awyntas
dans la région plus au Sud.
J'ai fait figurer Coretas sous les n* 75 et 76 de la PI XX qui
a paru avec la III° livraison des Æ/udes de Lépidoptérologie
comparée. La Q est toujours noire, en dessus. Jamais il ny a,
pas plus chez le G' que chez la Q, aucun vestige de tache jaune,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 161
le long du bord marginal des ailes inférieures, en dessous. Huebner
a figuré Corefas, avec le nom de 7 zresias, sous les n°5 319, 320 et
321. On trouve Coretas dans quelques parties de l'Autriche, notam-
ment en Croatie.
L'Espèce n'est pas bien commune au Vernet; la place où j'ai vu
le plus d'exemplaires, était sur le flanc oriental de la montagne
dite : de Feuilla, au-dessus du château de Manfred, entre Vernet-
les-Bains et: Villefranche-de-Conflent, avant d'arriver à une ferme
que J'ai entendu appeler Badebagne par les gens du pays; mais
cette localité à été bouleversée. On trouve aussi Coretas à Saint-
Martin-du-Canigou; mais pour recueillir 25 exemplaires de Coretas
dans une année, À Vernet, il faut être favorisé par des circonstances
heureuses. En 1900, J'ai chassé au printemps et mon frère en été,
aux environs de Vernet-les-Bains. En tout, nous avons à peine
capturé dix exemplaires. L'Espèce est délicate: la Q surtout est
facile à détériorer. Il est extrêmement rare de la posséder parfai-
tement intacte. Les deux générations vernale et estivale ne semblent
pas différer l’une de l’autre. Coretas est resté Jusqu'ici une espèce
généralement méconnue des Lépidoptéristes français.
Ochsenheimer, auteur de l'ouvrage sans figures : Die Schmetter-
linge von Europa, publié à Leipzig, en 1808, n'était pas éloigné de
croire que Coretas, dont il paraît qu’il fut le premier observateur,
constitue une espèce séparée; car il dit à la page 60 de la 2° partie
du 1* volume : « In der Schiffermuellerschen Sammlung sah
Ich eine Abart (vielleich Art) unter dem Namen L. C oretas, welcher
die rothgelben Flecken und Silberpunkte gaenzlich fehlten. » ce
que Je traduis ainsi : J'ai vu dans la collection de Schiffermueller
une variété (peut-être Espèce) sous le nom de Coretas à
laquelle les taches d’un Jaune rouge et les points d'argent man-
quaient complètement.
La collection Schiffermueller se trouvait à Vienne. Schiffer-
mueller était avec Denis, professeur au Collège impérial des Thé-
résiens, à Vienne. Denis et Schiffermueller furent ensemble, en
1776, les auteurs du Wiencrgegend Verseichniss. Les Thérésiens
ont mérité les éloges de Guenée pour la classification qu'ils ont
11
162 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
imaginée et Guenée les appelle « les vrais fondateurs de la Méthode
naturelle ». Quant à Ferdinand Ochsenheimer, il était acteur au
Théâtre Impérial royal de la Cour à Vienne « Schauspieler bey
dem kaiserl. koenigl. Hoftheater in Wien ». M. Arnost Grund,
d'Agram, qui a fait des observations sur Corefas, est aussi lui
comédien, profession qui exige une vive intelligence, un grand esprit
d'observation et beaucoup de mémoire.
I1 remplit les fonctions de premier comique et de régisseur du
théâtre croate. Sa collection composée uniquement de papillons de
Croatie et de Dalmatie contient beaucoup de pièces fort intéres-
santes, capturées dans des localités jusqu'ici inexplorées. M. Arnost
Grund pense, comme moi, qu'Aryntas et Coretas sont des espèces
distinctes; de plus, il paraît croire que decolorata, Stgr. serait aussi
une espèce. Je suis redevable d’une paire de decolorata Cet Q
à l’obligeance de M. Grund qui est un Entomologiste très docu-
menté et parfaitement au courant de la Science; mais je déclare
que je ne puis avec un si petit matériel, me former une opinion
personnelle, c’est-à-dire me rendre compte des différences spéci-
fiques pouvant exister entre Coretas et decolorata; tandis que pour
la distinction entre Awyntas et Coretas, que j'ai vus tous les deux
maintes fois vivants et que je me suis trouvé à même d'observer
depuis longues années dans la Nature, ma conviction, comme Je
le dis au commencement de cette notice, est fermement établie.
Coretas est aussi bien une espèce différente d’Ayntas, qu'_Ægon
est différent d'Argus, que Bellargus (Adonis) est différent d'carus
(Alexis) et de Corydon.
Lycæna Tiresias (*), Esper (Awyuntas, Huebner).
La synonymie de cette Espèce, répandue dans diverses contrées
de l'Europe, de l'Asie et de l'Amérique, est assez difficile à bien
(#) Tirésias, l’un des plus célèbres devins de l'Antiquité, était fils d’'Evère
et de la nymphe CAariclo. Ayant rencontré sur le mont Cyllène deux serpents
qui frayaient ensemble, il les sépara avec un bâton et aussitôt devint femme;
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 103
établir. Le premier auteur à qui nous sommes redevables de figures
permettant de la bien reconnaitre, est Esper qui a représenté, avec
le nom de 7?resias, d'après des exemplaires de la collection Herr-
mann, de Strasbourg, sous les n° 1 et 2 de la PL XXXIV, la
forme estivale et OPEtroustle nez de la PI XEEX 12 formée
vernale ©. L'ouvrage d'Esper : Die Schmetterlinge in Abbildungen
nach der Natur, a paru à Erlangen, en 1777, ainsi que j'ai déjà
eu occasion de le rappeler au cours du présent ouvrage.
Johann-Andreas-Benignus Bergstraesser, dans : Nomenclatur
und Beschreibung der Insecten in der Grafschaft Hanau, etc,
imprimé en 1778, a publié sous les n° 3, 4 et 5 de la PI. 44, avec
le nom de Polysperchon, la génération printanière de 7iresias et
sous les n° 1, 2, 3 et 4 de la PI. 45, mais cette fois avec le nom
de 7resras, la génération d'été. Les figures de Bergstraesser sont
très grossièrement exécutées. Le même auteur représente sous les
n° 3 et 4 de la PI. 54, une variété © de Ziresias que le P. Engramelle
a appelée : le Myrmidon.
Jacob Huebner, en 1805, a donné, avec le nom d'Awyntas, sous
les n° 322, 323 et 324, la figure de la forme d'été de Tiresias,
secundum Esper, réservant le nom de 7?resias au Coretas, Ochs.
ou peut-être à decolorata? ce qui serait possible à cause de la
teinte bleue un peu verdâtre qui a été employée pour le coloris
UC fe.n 310.
Esper, Bergstraesser et Huebner sont des iconographes; sachons-
leur gré des figures qu'ils ont pris la peine de publier. Un de leurs
contemporains qu’on peut presque ranger parmi les descripteurs sans
figures, car il n’a, en tout, produit que deux Planches, pour cinq
mais, au bout d’un certain temps, il les rencontra encore dans la même position
et reprit son premier sexe. Choisi pour juge d’un différend qui s’éleva entre
Jupiter et Junon, Tirésias prononça contre la Déesse qui en fut si irritée qu’elle
l’aveugla; mais il en fut dédommagé par le don de prophétie qu’il reçut de
Jupiter et par une vie sept fois plus longue que celle des autres hommes.
Tirésias fut honoré à Thèbes comme un Dieu, et eut à Orchomène un oracle
longtemps fameux (Dict. de la Fable, par Fr. Noël. Paris, An XIII-1805).
164 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
volumes, Moritz-Balthasar Borkhausen (Francfort, 1788) a écrit
(Tom. I, p. 166), une notice sur 7'iresias où je remarque le rensei-
gnement suivant : « Man findet diesen Falter schon in Mai, am
oeftersten aber im Julius und August, oft auch noch im Sep-
tember auf bebluemten Wiesen und in grasigten Waeldern. »
c'est-à-dire « qu’on trouve ce papillon d’abord en mai, mais le
plus souvent en juillet et août, quelquefois aussi encore en sep-
tembre, sur les prairies émaillées de fleurs et dans les forêts
herbues ».
Je lisais ce renseignement, le 18 octobre 1900, au moment même
où M. Gédéon Foulquier, de Marseille, me communiquait quatre
exemplaires de Lycæna Tiresias, pris par lui, le 26 septembre 1900,
dans le pays si curieux et si peu connu qu'on appelle : la Crau.
Je n'ai jamais, pour ma part, vu voltiger Zéresias qu'au printemps
d'abord et en juillet et août ensuite. J'ignorais qu'une 3° éclosion
pût avoir lieu en septembre et je m'en suis trouvé informé, en
même temps, par M. Foulquier qui l’a constatée dans la Nature,
et par la lecture des lignes ci-dessus rapportées de l'ouvrage de
Borkausen, datant de 117 ans.
Le P. Engramelle a figuré sous les n° 78 a, b, c, d et 70 a, b
de la PL XXXVII, le pezi Porte-queues, suivant son habitude, 1l
a pris la © pour le 'et vice versa. Il dit que « ce papillon paraît
tout l'été, mais en petite quantité. On le trouve dans les bois fleuris
et les prés qui les avoisinent. » Il signale une très petite Q (qu'il
prend aussi pour le ©‘), se trouvant aux mois d'août et de septembre,
dans les mêmes endroits que le précédent. Quant à la forme prin-
tanière, dont la © est différente de Polysperchon Q, et qui est
figurée sous les n° 70 & bis, b bis, c bis et d bis, de la PL LXXXIT,
Engramelle l'appelle : le Myrmidon, et prétend l'avoir copiée du
cabinet de M. Gerning. J'ai conservé ce nom de WMyrmidon, pour
désigner la seconde forme © de Polysperchon.
Les Thérésiens, c’est-à-dire Denis et Schiffermueller, les auteurs
du Systematisches Verseichniss von den Schmetterlingen der
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 105
Wiener Gegend, qui signent modestement le titre de leur ouvrage,
comme suit : « Herausgegeben von einigen Lehrern am kaiserl.
koenigl. Theresianum in Wien », décrivent dans l'édition de 1801,
sous le nom d’Ayntas, en reproduisant tout d’abord la phrase
latine de Fabricius qui s'applique au ' seul, la race printanière de
Tiresias. I] ne semble pas que les Thérésiens aient eu connaissance
de la figuration donnée par Bergstraesser.
J- Chr. Fabricius, dans Mantissa Insectorum (Hafniae, 1787), à
la page 70 du vol. If, a maintenu le nom d'Awyutas dont il fait
remonter l'origine à la première édition (1776) du Catalogue des
Papillons des environs de Vienne par Denis et Schiffermueller,
et fait tomber en synonymie le Zéresias, Esper (Tab. 49; fig. 2)
qui est une © du printemps. Il en résulterait que les Thérésiens
auraient la priorité du nom Ayryntas pour la forme vernale et
Esper la priorité du nom 7%esias pour la forme estivale.
Mais avec les descriptions sans figures, on risque trop de
commettre des erreurs d'identification. Exemple : la description
d'Argrades, donnée par Fabricius, 6 pages plus loin que celle
d'Arzyntas (p. 76) et qui me paraît bien difficile à rapporter à
autre chose qu'à une sorte de Zzresias acaude et ayant le dessous
des ailes très foncé : « alis.. subtus fusco cinereis ». Je déclare
ne pas reconnaitre ce papillon. Dès lors je crois que le mieux, en
la circonstance, est d'appliquer la formule : « Pas de bonne figure
à l'appui d'une description, pas de nom valable » et de s’en tenir
aux iconographies d'Esper et de Bergstraesser, pour fixer la
nomenclature de l'espèce de Zycæna dont il est cas. Au moins
nous disserterons sur une base qui ne peut donner lieu ni à erreur,
ni à confusion et nous raisonnerons d'après des déterminations se
rapportant à des papillons dont la connaissance nous est nettement
acquise.
J'établis donc la Nomenclature de la Zycæna Tiresias, d’après
les Iconographies, comme suit :
1606 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Lycæna Tiresias, Esper. France, Allemagne, Italie, etc.
1° forma æstivalis; juillet, août, septembre.
Tiresias, Esper; Tab. XXXIV; Gp. 2, 0er
— Bergstraesser, Tab°45, Or hg. 12, 0h02
Amyntas, Huebner; G' 322; Q 323, 324. — Obthr.
Lépid. compar. II; PL XX; C'fig. 81; © fig. 82.
2° forma vernalis; mai.
Polysperchon, Bergstraesser; Tab. 44; O' fig. 3, 4;
Q üg. 5. — Obthr. Lépid. compar. III; PL XX;
O' fig. 83; Q fig. 8.
Amyntas (vernalis), Herr. Schaeff. n° 645 (dessous
des ailes).
Tiresras AE Sper Mab REX otee
ue forma.
79 c bis et 70 d bis. — Obthr. Léprid. compar. IN;
PANNE EE 602
Tiresias, Bergstraesser;, Tab. 54; fig. 3, 4.
©122 forma.
| Myrmidon, Q Engramelle; PL LXXXIII; fig.
Dans la circonstance, je laisse de côté les races asiatique et
américaine et m'intéresse seulement aux formes de l'Europe que Je
suis arrivé à connaître.
Tiresias a été trouvé en Angleterre, mais fort rarement. C'est
sans doute une espèce tendant à émigration, malgré sa délicatesse.
La grande étendue de pays qu’elle habite actuellement semble le
prouver. Il est possible que les rares exemplaires qui ont été trouvés
jusqu'ici en Angleterre, proviennent d’une émigration de l'Espèce
vers le Nord-Ouest ?
Voici la traduction française, due à M. Harold Powell, de la
notice publiée dans le 1‘ volume de son ouvrage sur les papillons
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 167
anglais, par Charles Barrett, aux pages 68 et 60, relativement à
la présence de 7'zresias en Angleterre :
« Deux exemplaires, mâle et femelle, ont été capturés sur
Bloxworth Heath (Lande de Bloxworth), Dorset, les 18 et
20 août 1885, par les deux fils du Rev. O. Pickard, de Cambridge.
Ils volaient dans un endroit gazonné de la lande, au milieu de
nombreux Polyommatus Alexis et Ægon dont on ne pouvait les
distinguer au vol. Des recherches répétées dans la même localité
n'ont pas amené la découverte d’autres exemplaires.
La même année (1885) le Rev. J. S. St. John acheta une petite
collection faite par un Dr. Marsh, habitant alors Frome, Somerset,
et 1l y trouva deux mâles de cette espèce.
L'auteur de la capture se rappela les avoir pris en 1874, à
proximité d’une petite carrière, dans les environs de Frome. Ces
spécimens ont été exhibés par M. St. John à une réunion récente
de l’Entomological Society de Londres. Par la bonté de
M. Cambridge, j'ai pu également examiner les deux exemplaires
de Bloxworth, et je puis comprendre combien 1l est facile de
laisser passer cette espèce inaperçue. La capture d’un autre exem-
plaire à Bournemouth, par M. P. Tudor, est enregistrée par
M. Cambridge dans 7’ Le Entomologist, 1885. Dans 7e Young
Naturalist pour 1880, M. J. Chappell, de Manchester, dit qu'en-
viron vingt-cinq ans plus tôt, M. J. Clegg, de Oldham, en chassant
P. Alexis, à Blackpool, prit un spécimen ayant des quenes. Celui-ci
devint la propriété de M. Chappell, fut classé comme Z. Bætca,
et n’a été reconnu que récemment. S'il n’y a eu aucun déplacement
accidentel de spécimens, cette capture est vraiment remarquable
et difficile à expliquer. Ces exemples sont nos seuls pour cette
espèce. Les localités dans lesquelles elle a été prise semblent
écarter l'hypothèse d’une introduction accidentelle avec des
plantes, et 1l est possible qu’une localité permanente pour l'espèce
soit découverte un jour sur les grandes landes s'étendant depuis
le Surrey à travers le Hants et le Dorset. »
En Bretagne, Zzresias n'est pas rare au printemps et en été.
168 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Mais J'ai observé une particularité de diversité d'habitat selon la
saison, et il me paraît intéressant de la signaler.
J'ai constaté en effet qu’en Ille-et-Vilaine, au printemps, Tresias-
Polysperchon vivait assez fréquemment dans les allées herbues des
bois et dans les prairies basses, un peu humides, émaillées de fleurs
« auf bebluemten Wiesen und in grasigten Waeldern », comme
Borkausen l’a observé lui-même; mais en été, il ne reste plus un
seul Z?resias dans les prairies où l'Espèce voltigeait au printemps.
D'ailleurs l’herbe a été coupée et fanée au mois de juin et les
bestiaux ont été amenés dans les prés pour y pacager, après la
récolte des foins. En été, c'est dans les landes, là où l’humus un
peu plus épais permet aux bruyères de végéter vigoureusement, qu'il
faut chercher Z'zresias. Lorsque les Æyica ciliaris deviennent hautes
et qu'elles poussent mélangées à l’£yica tetralix, aux Ulex europeus
et surtout xanus et au Genista anglica, plantes sur lesquelles doit
vivre chez nous la chenille de Zzresias, c'est une bonne localité pour
trouver le papillon, depuis le 10 juillet jusqu'aux premiers jours
d'août.
En lisant la Contribution à l'étude des Lépidoptères du Mor-
bthan, par ]. de Joannis (Ann. Soc. ent. France; 1000), je vois que
pour Baton (A ylas), il en est dans le Morbihan, exactement comme
pour Ziresias, en Ille-et-Vilaine : « Première éclosion à la fin de
mai, et le papillon se prend alors dans les prairies; deuxième
éclosion fin de juillet à septembre, le papillon se trouve alors dans
les landes ». Pourquoi cette différence d'habitat de la génération
de printemps et de celle d'été, commune à 2 espèces de Zycæna,
dans deux pays très voisins l’un de l’autre? J'ai cependant observé
qu'en Ille-et-Vilaine, la Lycæna Baton ne se trouve que dans les
landes sèches et arides, au printemps aussi bien qu’en été; Jamais
je ne l’ai vue dans les prairies; c’est donc pour Baton très différent
en Ille-et-Vilaine, comparativement à ce qui a lieu dans le Mor-
bihan.
Pourquoi encore cette différence de mœurs, en ce qui concerne
Baton, en Ille-et-Vilaine et en Morbihan? Je ne sais que répondre.
Mais le fait est curieux et devait être porté à la connaissance des
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 109
Entomologistes. J'aurais désiré faire, cette année 1909, des obser-
vations nombreuses sur 7Zresias, en vue de l'ouvrage que J'écris
présentement. Mais la température a été très souvent contraire
pendant le printemps et l'été 1909, en Bretagne. Aussi ai-je été
empêché de chasser comme j'en avais l'intention. Cependant au
mois de mai, profitant de quelques journées où les rayons du soleil
n'étaient pas trop souvent empêchés par l’amoncellement des nuages
de réchauffer la terre et d'animer les papillons, M. Prosper Boulé,
mon frère et moi, nous avons recherché Zzresias-Polysperchon à la
forêt de Rennes où nous en avons trouvé quelques jolis exem-
plaires. M. Boulé a capturé de son côté Polysperchon Œ très abon-
damment, le 10 mai, dans la grande lande de Caden (Morbihan)
et le même mois, dans les environs de Laillé et Bourg-des-Comptes.
Je suis allé à Monterfl en mai, pour voir si Polysperchon volait
dans la lande dite de Grosse-Roche, en la vallée de Roc-Huel, où
on le voit habituellement en été et où j'ai effectivement capturé,
cette année même, la forme estivale 7%restas, en juillet et en août.
Mais malgré mes investigations, je n'ai pu y apercevoir en mai,
un seul Polysperchon; j'ai seulement vu Baton (Hylas) au même
lieu où je l'ai retrouvé le 7 août, alors que J'avais le plaisir, en
l’'aimable compagnie de M. Fernand Le Cerf, le très compétent
connaisseur en Sesia, de chasser l'Uroceriformis armoricana dont
il réussit à capturer quelques exemplaires. Zéresias était assez abon-
dant dans la lande, un peu au-dessous de l’arête rocheuse, presque
au pied de la colline, sur les Ærica ciliaris, tandis qu'au printemps,
comme je le dis plus haut, je n'étais pas parvenu à en voir un seul
échantillon au même lieu.
En Bretagne, Ziresias présente deux formes saisonnières bien
accusées et il est intéressant, comme je l'expose ci-dessus, d'observer,
outre la différence d'habitat de l'Espèce, au printemps compara-
tivement à l'été, la différence des caractères extérieurs du papillon.
Polysperchon ou Tiresias vernal, éclôt en mai; je lis les dates
O, 10, 23 mai inscrites sur les étiquettes de mes exemplaires; le
comparativement à la forme d'été, est plus petit, d'un bleu plus
clair; la bordure noire qui entoure les ailes est plus fine. La Q
1 70 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
toujours plus petite que celle d'été, est généralement sablée, en
dessous, d’atomes bleu pâle, comme l’exemplaire figuré sous le
n° 84 de la PI. XX qui fut pris à la forêt de Rennes, dans une
allée herbue. Il y a aussi des échantillons plus obscurs et moins
bleuâtres; mais il existe une seconde forme de © vernale, très
caractérisée et fort jolie, que je désigne sous le nom de Wyrmidon,
déjà donné par Engramelle; c'est celle que je fais figurer sous le
n° 302 de la PL XLI, d’après un spécimen que J'ai capturé à
la forêt de Rennes, cette année même, dans l'allée de la ligne des
eaux, au commencement de mai. C’est bien cette forme que Bergs-
traesser représente, avec le nom de 77resias variété, sous les n° 3
et 4 de la Tab. 54 et dont Engramelle donne également la figure.
À Saint-Mariens, localité très intéressante et très riche du nord
du département de la Gironde, on trouve au printemps Polysper-
chon, avec la même © que j'ai fait représenter sous le n° 84 de
la PL XX. En Prusse, on trouve aussi la même forme de Polys-
perchon © et ©, et dans les Basses-Alpes, à Digne, seule localité
où, d’après les documents dont je dispose, les Zycæna Coretas et
Tiresias vivraient en proche voisinage, on rencontre la Q Wyr-
nudon.
Je possède la forme estivale Ziresias provenant de Monterfil et
Pipriac (Ille-et-Vilaine); d'Entrevaux, au-dessus de Neigeas
(Basses-Alpes), 4 juillet 1906; de Charroux (Vienne); du Piémont;
de Châteaudun (Eure-et-Loir), d'Angoulême et des forêts entre
Périgueux et la Roche-Beaucourt. En Charente, Zirestas à des
mœurs et un habitat tout autre qu’en Bretagne. Je lai capturée
dans un champ de luzerne de la vallée des Eaux-Claires et sur
des pentes de collines calcaires où abondent les papillons de
diverses espèces. Aux environs d'Angoulême, Tiresias ne doit pas
être rare; je ne connais pas Polysperchon, ou Tiresias vernal, de
la Charente ni du Poitou et j'ignore si, comme en Bretagne, on
les rencontre en ces pays dans des lieux différents, selon les saisons
où se fait l'éclosion de l’Espèce.
Entre Périgueux et la Roche-Beaucourt, j'ai pénétré dans des
forêts que traverse la grande route. Tÿresias voltigeait en grande
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 171
quantité sur les bruyères, dans les clairières des bois. On aurait pu
en recueillir des centaines d'exemplaires. Malheureusement, c'était
le 20 juillet 1008 et les papillons étaient déjà un peu usés par le
vol. On ne trouvait presque plus d'exemplaires frais. Mais jamais
Je n'ai vu 77resias aussi abondant que dans cette région forestière
du centre occidental de la France.
Le Zÿresias estival est grand; le G' est en dessus d’un bleu
violacé assez foncé avec une bordure noire pas très large, mais
assez accentuée et des points noirs le long du bord des inférieures;
la frange est bien blanche. En dessous, le fond des quatre ailes
est d’un gris un peu bleuâtre, clair, avec les points noirs petits, mais
généralement bien marqués et deux ou trois taches jaune orangé, près
du bord terminal des ailes inférieures. Ces taches jaunes sont sur-
montées d’un petit croissant brun et à leur extrémité, du côté du
bord terminal, elles sont centralement finement ponctuées de noir
vif. La © est noire en dessus; quelquefois avec un ou deux points
Jaunes très vifs aux ailes inférieures, à partir du côté extérieur de
la petite queue. Certaines Q sont saupoudrées d’atomes bleus près
de la base des ailes supérieures et le long du bord terminal des
ailes inférieures. En dessous, elles ressemblent aux G'; mais les
points noirs sont plus accentués et le bord des ailes supérieures est
légèrement teinté de brun.
Lorsque le temps est beau, au mois de juillet, les Zzresias C
voltigent assez rapidement au-dessus des bruyères bretonnes et à
cause du dessous gris blanchâtre de leurs ailes, ils sont faciles à
distinguer des autres LZycæna. Les Q sont moins actives et elles
se trouvent fréquemment posées sur l'extrémité des tiges de la
molle et tendre Æyica ciliaris dont les fleurs sont d'une si jolie
couleur rose. En marchant dans les bruyères, on fait lever les ©
qui produisent un vol généralement assez court. Mais si elles se
sentent de nouveau menacées, elles s'enfoncent rapidement dans
les touffes épaisses de la bruyère dont la hauteur attemt parfois
40 à 50 centimètres. Comme la couleur noire du dessus de leurs
ailes est extrêmement délicate et fragile, les © du moment qu’elles
ont cherché à se cacher dans les bruyères, se trouvent presque
1 72 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
toujours défraichies. Cette bruyère appelée : Æyica ciliaris par
Linné, varie passablement pour la teinte rose de ses fleurs qui est
plus ou moins purpurine pâle ou foncée. Çà et là, on trouve une
touffe d'un blanc très pur. Cette variété albine est du plus agréable
effet.
L'année 1909 fut exceptionnellement humide, et à cause des
pluies incessantes en juillet, la chasse aux papillons fut très contra-
riée. Je compte, l'an prochain, s'il plaît à Dieu, étudier tout parti-
cuhèrement la question de la diversité de l'habitat de la Zycæna
Trrestas, en Bretagne, à l'éclosion du printemps, comparativement
a celle d'été; puis instruit par M. G. Foulquier et par Borkausen,
Je me propose d'aller, vers la fin de septembre, voir dans les landes
où /7resias à été abondante au mois de juillet, si une troisième
éclosion y paraîtra au commencement de l'automne, comme dans
la Crau.
Lycæna Argus (*), Linné; Huebner (316, 317, 318),
et Lycæna Ægon, W. V.; Huebner (313, 314, 315).
J'appelle Argus, Linné, ce que Staudinger et Rebel (Catalog
1901), appellent Argyrognomon et j'appelle Æzgon, W. V. ce que
les mêmes auteurs, dans le même Ca/alog, appellent A7gus.
Argus et Ægon se trouvent en Scandinavie; mais je crois que
la description de Zinné s'applique juste au contraire de ce qui est
indiqué dans le Catalog de Staudinger et Rebel; édit. 1001.
Voici la description de Linné, à la page 483 du Systema Nature,
édit. X; Upsaliæ 1757; impr. 1760 : « Papilio Argus alis ecau-
datis cæruleis; posticis subtus limbo ferrugineo ocellis cæruleo
(*) Argus était fils d’Arestor; il avait cent yeux dont cinquante étaient
ouverts, pendant que le sommeil fermait les cinquante autres. Junon lui confia
la garde d’Zo qu'elle venait de changer en vache; mais Mercure l’endormit
complètement au son de sa flûte et lui coupa la tête. Junon prit ses yeux et les
répandit sur la queue du paon, ou le métamorphosa en cet oiseau (Dictionn. de
la Fable, par Fr. Noël. Paris, An XIII-1805).
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 17
Q9
argenteis. Habitat im Rhamno Europæ, Africæ ». L'indication
Afrique est certainement erronée; n1 A7gus, ni Ægon n’ont été jus-
qu'ici rencontrées en Afrique.
Pour moi, les mots « ocellis cæruleo argenteis » fixent la ques-
tion, autant qu'une description peut la fixer, attendu que l’Argus
de Scandinavie a bien les points marginaux des ailes inférieures,
en dessous, d'un bleu métallique, tandis qu'Ægon, du Nord, ne
présente pas cette particularité au même degré. C’est seulement
dans les pays méridionaux qu’Æzon a les points des ailes infé-
rieures métalliques, en dessous. Toutefois je reconnais que la
question reste incertaine; car, d’une part, il ne faut pas oublier
que Linné confond facilement les espèces voisines, et, d'autre part,
on ne doit pas perdre de vue combien Linné apportait peu d’at-
tention aux détails spécifiques pourtant essentiels; ainsi, dans la
synonymie que Linné établit pour son A7gus dont la caractéris-
tique consiste dans « ocellis cæruleo argenteis », 11 cite Roesel,
ab XVII ne 5 Orlessñe 2er 5 de Roeselireprésentent
Icarus (Alexis); la fig. 4 représente Acis (Semiargus). Aucun de
ces Zycæna n’a les ocelles d’un bleu argenté. Donc l'établissement
de la synonymie par Linné, dans la présente circonstance, est
absolument faux.
Dans la Fauna Suecica, Upsaliæ, 1761, Linné ajoute les indi-
cations suivantes : 1074. Papilio hexapus : alis rotundatis integer-
rimis cæruleis : subtus ocellis numerosis. —- Ray. Ins. p. 31; n° 11.
Papilio parva, alis superne purpureo cæruleis, subtus cinereis
maculis nigris circulo purpurascente cinctis, punctisque nigris
pulchre depictis — Habitat in Rhamno — Descr. Alæ supra
cæruleæ, subtus ocellis numerosis nigris, et in alis secundariis sub-
tus maculis marginalibus fulvis confertis in fasciam pupillis
cæruleo argentatis.
La description ci-dessus rapportée s'applique au G‘ Linné, décrit
la ©, avec le nom de /das et dans les termes suivants : 1075;
Papilio Idas alis ecaudatis cæruleis : posticis fascia terminali rufa
ocellari : subtus pupillis cæruleo-argenteis. Papilio hexapus, alis
rotundatis integerrimis nigro fuscis : subtus ocellis numerosis.
1 74 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Habitat in Ericetis. — Descr. : Facies, magnitudo et color omnino
præcedentis, a quo differt alarum lateris superioris colore, qui non,
ut in illo, cæruleus, sed omnino nigro fuscus; Alæ secundariæ pos-
tice supra fascia obsoleta ex ocellis ferrugineis pupilla nigra.
Subtus omnes alæ similes præcedenti, sed pallidiores et fascia
albida ante posticam ruffam (sic) ex ocellis cæruleo argenteis. An
solo sexu a prioris diversus ?
Linné se demande si /das n’est pas l’autre sexe de l'espèce précé-
dente qui est Argus. Il est évident que Zdas n’est autre chose que
la © d’Argus. Il faut tenir compte des mots fascia albida; en effet
dans l'Argus Q scandinave, on remarque cette fascie blanche sur
les ailes, en dessous, où elle est très distincte.
Les Thérésiens, en 1775, semblent avoir eux-mêmes fixé la
question, comme je crois juste de la définir, en appelant Argus
ce que Staudinger et Rebel désignent sous le nom d’A7gyrogno-
mon et en créant pour l’autre espèce voisine le nom d’Ægon.
Il est donc entendu, comme je l'ai dit plus haut, qu'au cours
de toute la présente notice, j'appellerai Argus, Linné, ce que Stau-
dinger et Rebel ont eu la fantaisie d'appeler A7gyrogromon, et
j'appellerai Ægon ce que ces auteurs appellent Argus.
Je n'ignore pas quelle obscurité et quelle confusion existent au
sujet de la nomenclature des deux espèces : Argus et Ægon. Mais
il faut pouvoir se comprendre clairement et tout en cherchant a se
rapprocher le plus possible de la vérité, demeurer d'accord avec
le bon sens.
Je crois fermement que Staudinger et Rebel ont eu grand tort de
proposer cette appellation Argyrogromon pour désigner l'Argus
linnéen. Argyrognomon peut désigner une des formes Q d'Argus;
mais rien de plus. J'ignore à quel mobile Staudinger et Rebel ont
pu obéir. Ils ont eu une conception étrange, et dont je n'avais encore
jamais rencontré l’expression nulle part; c'est de donner au même
exemplaire deux noms différents; un pour son endroit et un pour
son envers, comme tout le monde peut aisément s’en rendre compte.
Staudinger, étant mort, ne peut plus rien répondre; mais Rebel
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 175
aura probablement l’obligeance de nous renseigner. Je lui en serais
pour ma part, fort reconnaissant.
Voici donc ce que l'examen du texte même du Catalog 1001
permet de constater :
Staudinger a inventé un nom tout nouveau : Callarga, pour
désigner seulement le DESSUS des ailes d’'Argyrognomon (Bergs-
traesser; Tab. 46; fig. 1). I1 faut en effet remarquer que c’est seule-
ment le DESSOUS des ailes du même A7gyrognomon (Bergstraesser,
Tab. 46; fig. 2) qui est consacré, en tête de l’article 544, à asseoir
la nomenclature de l'Espèce; ce n’est qu’en second lieu qu'est citée
l'autre Argyrognomon © (Bergstraesser; Tab. 51; fig. 7 et 8);
celle qui n'est pas coupée en deux, comme la première, puisque
Staudinger et Rebel veulent bien l’admettre dans leur Catalog,
pour l'intégralité de ses deux faces, au même article 544. Pourtant
ce nom nouveau Callarga ne doit pas désigner seulement le DESSUS
des ailes d'Argyrognomon (Bergstraesser; Tab. 46; fig. 1); en
effet il a une autre mission; c'est de remplacer aussi le nom Calliofis
(Boisduval; Zcones; PI 15; fig. 4); mais toujours pour le DESSUS
des ailes seulement. En ce qui concerne le DESSOUS des ailes du
même papillon Calliopis (Boisduval; Jcones; PI. 15; eo) ae
nom Calliopis est conservé par Staudinger, mais pas franchement,
parce qu'aucun alinéa spécial n’est constitué pour Calliopis et que
ce nom se trouve bloqué au milieu de tout le mélange synonymique
de l’art. 544. Voilà donc deux papillons du genre Zycæna : A7gy-
rognomon, Bergstraesser et Calliopis, Boisduval, que Staudinger et
Rebel coupent moralement en deux, dans un sens où il ne serait
pas aisé de les couper pratiquement, vu la mince contexture de
leurs ailes, et à moins de s'être longtemps exercé à l’art difficile
de couper un cheveu en quatre, dans le sens de l'épaisseur. Il est
curieux de voir deux papillons recevoir en même temps deux noms,
un pour le DESSUS de leurs ailes et un pour le DESSOUS. Le Cal-
liopis, spécimen typicum de Boisduval, existe encore dans ma
collection; c’est bien le même échantillon dont le dessus et le
dessous ont été reproduits dans l’/cones PINS He teta0)
176 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Comment Staudinger et Rebel ont-ils pu avoir l'idée de donner
deux fois, dans le même article 544, pour Argyrognomon et Cal-
lopis, deux dénominations différentes à un même exemplaire;
c'est-à-dire créer une dénomination spéciale et différente pour chaque
face ou pour chaque côté des aïles; comme si le devant et le derrière
du même individu pouvaient porter deux appellations personnelles
distinctes!
Pour essayer de tirer au clair la question actuellement très
embrouillée d'Argus et Ægon qui sont deux espèces tout à fait
distinctes l’une de l’autre, mais souvent confondues, j'ai réuni sur
les deux espèces le plus de documents que J'ai pu, les comparant
l’une à l’autre dans la même localité, lorsque Argus et Ægon font
partie de la même faune. Mais il convient d’abord de se rendre
compte de ce que les divers auteurs anciens et modernes ont publié
sur cette question.
Il n’est pas indifférent d'observer que Bergstraesser, en 1778,
connaissait parfaitement l’Argus linnéen. I] l'appelle « Der Stech-
ginsterfalter », c'est-à-dire le papillon du genèt-qui-pique, ou
l'Argus de Linné : « oder des Linne Argus ». Comme Je l’ai déjà
fait observer précédemment, presque toutes les figures publiées par
Bergstraesser en 1778 et 1770, dans son ouvrage : Nomenclatur und
Beschreibung der Insecten in der Grafschaft Hanau-Muenzen-
berg, etc, sont malheureusement exécutées très grossièrement et
difficiles à identifier avec certitude, du moment que l'espèce figurée
offre des détails ou des caractères un peu délicats. Cependant sous
les n° 3 et 4 de la PI. 52, on reconnaît assez bien la Q A7gus avec
sa fascie blanche sur le dessous des ailes, comme le décrit Linné.
Le ' représenté sous les n° 1 et 2, est plus énigmatique; s'il n'avait
pas les points argentés du dessous des ailes inférieures qui sont
caractéristiques, on pourrait aussi bien prendre l’Argus Œ, secundum
Bergstraesser, pour Adonis (Bellargus) S', d'autant plus que dans
la figure 1, la frange blanche est violemment traversée par les
nervures noires. Quoi qu'il en soit, Bergstraesser a connu non seu-
lement l’Arsws de Linné, mais aussi l’Ægon; car dans la descrip-
tion d'Ayrgus (3 ter Jahrg. p. 7), il dit : « Schon oben habe Ich
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 177
mich geaeussert, das der Azgyrotoxus und die Argyra jener Ægon
der angefuehrten Entomologen sein koennte », ce qui signifie en
français : « Déjà ci-dessus, j'ai exprimé mon opinion que les
Argyrotoxus et Argyra pourraient bien être l'Ægon des Ento-
mologistes cités. »
En effet, à la page 78 (2 /er Jahrgang), Bergstraesser en décri-
vant A7gyra, s'exprime en ces termes : « Wahrschenlich das
Weibchen des vorhergehenden und der wienerischen Entomologen
Ægon weiblichen Geschlechts. Vom A7gus unterscheidet er sich
sehr merklich durch die Groesse. ». Voici la traduction de cette
phrase : « Argyra est vraisemblablement la © du précédent (Argy-
rotoxus) et lÆgon Q des Entomologistes viennois. Il se distingue
très visiblement par la taille. »
Donc Bergstraesser connaissait Argus et Ægon et il semble bien
avouer par les lignes ci-dessus reproduites, qu'il sent son tort
d'avoir créé un A7gyra qui est la Q d'un Aygyrotoxus; d'autant
plus que tous les deux : Argyra et Argyrotoxus lui paraissent être
simplement les deux sexes d’une espèce appelée Ægon et déjà
considérée comme étant distincte d'Argus.
Mais qu'est-ce donc que ce fameux Argyrognomon? C'est une
Lycæna Q assez grande, dont les 4 ailes en dessus sont recouvertes
(dans la fig. 1 de la PI. 46, que j'ai là, ouverte devant moi), d’une
épaisse couche de bleu cobalt, avec le bord terminal des ailes
inférieures marqué de 6 gros points noirs surmontés d’une ligne
rouge orangé; quant au dessous, ce serait celui d’/carus (Alexis),
s'il n'était pas entendu qu'il a des points argentés. Avec cette ©
un peu anormale et très grossièrement dessinée et enluminée, sont
figurées trois autres Q de Zycæna, en dessus et en dessous; elles
sont affublées des noms suivants : Argyrocapelus (n*% 3 et 4);
false 2 et 3/mitexto)) A727yr0ela (ns et10); Arryrocopus (n°7
et 8). Toute cette nomenclature est donc à base d'argent! IT est
clair que par cette argenterie même, cette collection d'Argyrogno-
mon, Argyrocapelus, Argyroela et Argyrocopus représente (très
grossièrement, hélas !) une série de variétés d’Argus, dont le carac-
12
178 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
tère spécifique est d’être, en dessous, pourvu de « pugpillis infra
cærulescenti-arsenteis. »
Mais Argyrognomon n'est, comme je l’ai déjà fait observer,
qu'une © supra cœrulea d'Argus. L'idée des D" en Philosophie
Staudinger et Rebel est tout de même bizarre. Ils ont bouleversé
toute la nomenclature, telle qu’elle était couramment admise par nos
auteurs les plus justement considérés : les Thérésiens, Huebner,
Ochsenheimer, Godart, Freyer, Boisduval, etc.; ils ont contre toute
raison, transposé les noms d'Ægon et d'Argus, appelant Argus ce qui
est Æ gon, et ils ont proposé à l'adoption du Public entomologique
qui s'est bien gardé de protester jusqu’ci, le nom d’Argyrognomon,
pour remplacer le nom linnéen d’Argus, alors que ce nom d’Argy-
rognomon ne primait nullement A7gws, et est simplement employé
pour désigner une forme de Q bleue d’Argus. Encore tout ce
charivari entomologique, comme dirait Fruhstorfer, est-il basé
(on ne saurait assez le dire) sur un seul côté des ailes d’un papillon
très grossièrement figuré et dont le specimen typicum est depuis
longtemps perdu; l’autre face du même papillon recevant une autre
dénomination.
Voilà d’ailleurs ce que Bergstraesser, fondateur de toute cette
collection de noms argyresques, écrit, à la page 76 de son ouvrage,
au sujet d’Argyrognomon :
« Sollte dieser schoene Falter der wienerischen Entomologen
Adonis sem? Meines Wissens kommt er nirgendswo noch in einer
Abbildung vor, und auch im Systeme nicht, wenn er jener Adonts
nicht ist. Es sind die wenigen Exemplarien, die hier vorkommen,
im vorigen Sommer von den hiesiegen Insectenfreunden in dem so
genannten Bruchkoebler Walde gefangen worden. Fast alle hieher
cehoerige Stuecke aus der hiesigen Gegend besitzt nun der grosse
Sammler Herr Gerning zu Frankfurt. Man vergesse nicht, dass
er gleich dem Argus und Æzgon des wienerischen Verzeichnisses
silberne Pupillen auf den Hinterfluegeln der untern Seite hat. Also
machen diese ohnefehlbar kein wesentliches Kennzeichen des Argus
aus ».
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 179
Je donne la traduction française littérale de ce texte, comme suit :
« Ce beau papillon serait-il l'Adoxis des entomologistes vien-
nois? À ma connaissance, son dessin n’a encore paru nulle part et
pas davantage dans le Système (ou Classification), s'il n'est pas
l'Adonis en question. Les rares exemplaires qui paraissent ici, ont
été capturés, l'été passé, par les amateurs d'insectes dans la forêt
de Bruchkoebl. Presque toutes les pièces de la contrée d'ici sont
en possession maintenant du grand collectionneur M. Gerning, de
Francfort. Qu'on n'oublie pas que pareillement à l’Argus et à
l’Ægon du Catalogue viennois, il possède des pupilles en argent
en dessous des ailes postérieures. Ainsi celles-ci ne font sans aucun
doute pas un signe caractéristique essentiel de l'Argus. »
Comme il est facile de s’en rendre compte, Bergstraesser ne sait
pas au juste à quoi rapporter son Argyrognomon. Le dessus bleu
des ailes le fait penser sans doute à la © bleue d'Adoms; mais
les taches d'argent du dessous s'opposent à ce rapprochement.
L'hésitation de Bergstraesser reste visible. Il connaît A7gus et
Ægon; mais il n'ose pas faire de son Ayrgyrognomon un A7gus,
comme 1l s’est cependant presque résigné en ce qui concerne ses
Argyrotoxus et Argyra, à les reconnaître pour Ægon.
J'ai déjà donné dans la XX° livraison des Etudes d'Entomo-
logie, aux pages 26, 27 et 28, des renseignements sur Argus et
Æ gon et j'ai publié dans le même ouvrage, sur les PI. 4 et 5, de
nombreuses figures d’Argus et d'Ægon que Dallongeville a gra-
vées avec un véritable talent.
létrappelle quelles n52,563, 64565, 56, 57et 59 représentent
des Zycæna Argus, soit comme Aberrations, soit comme races
géographiques de la Sierra-Nevada, de Rennes, des Hautes-Pyré-
nées et du Valais. Les n* 50, 60, 61, 62 et 63 représentent des
Ægon de la Sierra-Nevada, de Vernet-les-Bains, d'Angleterre et
des Hautes-Pyrénées. Sous les n°° 64 et 65 de la PL 5, sont figurés
Calliopis, Bdv., G'et ©, pris par moi à Uriage (Isère) et référables
à Calliopis, dont les types que renferme ma collection, proviennent
180 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
également de l'Isère. Le D' Boisduval avait recueillis ses Callioprs,
dans le polygone de Grenoble.
Je prie donc le lecteur de vouloir bien se reporter pour l'histoire
d'Argus et d'Ægon à ce que J'ai écrit dans la XX° livraison des
Etudes d'Entomologie; 11 y trouvera quelques renseignements que
je ne crois pas devoir répéter ici.
J'avais signalé dans mon ouvrage précité (p. 27) deux erreurs
commises par Staudinger dans son Ca/alog, édition 1871; 1° lors-
qu'il attribua à Argus, comme variété, la Lycæna Hypochona,
Rambur qui est effectivement une race géographique d’Ægon;
2° lorsqu'il rattacha à Ægon comme variété géographique, della,
H. S. qui est réellement référable à Aygus. Il est vraiment
dommage que Staudinger ait constamment vu de travers et se soit
généralement trompé en ce qui concerne Argus et Ægon. Je dois
reconnaître cependant que dans l'édition 1901 de leur Catalog,
Staudinger et Rebel se sont décidés, conformément à mon redres-
sement, à attribuer Æypochiona à ce que j'appelle Ægon,; mais
ils ont probablement cru que leur dignité les obligeait à imprimer
entre parenthèse et avec un point de doute, ces mots : (ax Argyro-
gnomon var?) ce qui n'est pas soutenable. Quant à Bella, ils se
sont entêtés à la laisser comme variété € de mon Ægon qui est
devenu leur Argus. La vérité scientifique, seule considération que
j'aie à cœur de faire prévaloir, m'oblige à dire que toute cette obsti-
nation n’est pas raisonnable. Bella, Herr.-Schaeffer (O' 227, 228)
est une forme d'Argus (Argyrognomon, sec. Stgr. et Rebel, 1901)
et non d'Ægon (Argus, sec. Stgr. et Rebel, 1901). De même pour
la var. Corsica d'Ægon qui est si curieuse avec les taches ocellées
du dessous des ailes, brunes au lieu d’être noires, et que Staudinger
avait omis de citer dans son Catalog, édition 1871, ce que J'ai fait
observer à la page 20 de la XX°* livraison des Æ/udes d'Entomo-
logie, pourquoi, dans le Catalog 1901, dire « vix nominanda »,
alors qu'il est manifeste que Corsica, Bellier, est une des variétés
géographiques les plus remarquables et par conséquent les plus
dignes d'être distinguées par un nom. Tout cela semble résulter
d'une mauvaise humeur qui pourrait paraître enfantine et d'un
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 181
amour-propre blessé; mais non du souci pur et simple de la
recherche et de l'établissement de la vérité.
Pour toutes ces raisons, J'ai cru devoir apporter dans cet ouvrage,
un copieux faisceau de documentation sur la question A7gus et
Ægon, en plus de ce que J'ai déjà publié dans la XX® livraison
des Ætudes d'Entomologie, en mai 1806, et dans divers autres
écrits. Aussi ai-je fait figurer dans cette IV° livraison des Æ/udes
de Lépidoptérologie comparée un certain nombre d'exemplaires de
provenances diverses qui Jjetteront, je l'espère, un peu plus de
lumière dans la confusion que feu Staudinger et I. Rebel semblent
s'être complu à parachever.
Mais avant de fournir les explications nécessaires sur les races
et variétés d’Argus et d'Ægon dont je publie la figure dans le
présent ouvrage, Je crois utile de passer en revue et de citer les
observations et les figures données, par les principaux auteurs dont
je n'ai point encore parlé jusqu'ici, au sujet d'Argus et d'Ægon.
Jacob Huebner, dans Peitrege sur Geschichte der Schmetterlinge
(Vol. I; Augsbourg, 1786), figure sur la Taf. III, d'une manière
très reconnaissable et avec infiniment plus de finesse et de vérité
que Bergstraesser, le Cet la ©, en dessus et en dessous, la chenille
et la chrysalide de Lycæna Argus, mais avec le nom de Papulio
Asus, erreur de dénomination que le texte même écrit par Huebner
rend difficile à expliquer. Plus tard, dans Sarmlung europæischer
Schmetterlinge, Huebner a très correctement figuré Ægon, sous les
nn, su etarsiet Ares, sousles n°%310,,31/7 318, dinsi que
je l’établis déjà, en tête de cette notice.
La forme d’Argus que Jacob Huebner représente sous le nom
d'A /sus est assez voisine de celle qui vole dans les Alpes. Borkausen,
dans Naturgeschichte der europæischen Schmetterlinge (Vol. I;
1788) décrit à la page 152, l'Argus ou Stechginsterfalter, conforme
Mrs Berestraessen (lab 52; fig. 1,,2,.3, 4). Il décrit aussi
Ægon, à la page 154; il lui donne comme synonymes : A7gyro-
toxus, Argyra et Argyrophalara, Bergstraesser.
Le même auteur érige Argyrognomon, Bergstraesser, en espèce
distincte, parce que dit-il elle était toujours solitaire « einsam »
182 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
et qu'elle parut à une époque où A7gus était déjà passé « verflogen ».
Il considère comme Spzelarten où Aberrations d’Argyrognomon,
à moins que ce ne soit de la Q d’Aygus, Argyrocapelus, Argyro-
copus, Argyrophylax, Argyroela, Argyrobius, Bergstraesser.
Les Thérésiens, dans Sysfematisches Verzeichniss von den
Schmetterlingen der Wiener Gegend, édit. 1801, citent (p. 272) :
1° A7gus, Linné, dont la © a été appelée /das par le même
auteur. Ils lui donnent comme synonyme A7gyrognomon, Bergs-
traesser et 1ls indiquent comme plante nourricière de la chenille,
Genista Germanica, Linné, ou genêt épineux.
2° Ægon, dont ils font connaître le nom vulgaire : Gerssklee-
falter.
La chenille vit, disent-ils, sur Cytisus austriacus qui s'appelle en
allemand : Geissklee. Ils ajoutent cette observation qui prouve
l'intérêt qu'inspirait, il y a un siècle, aux Entomologistes, la ques-
ton Ayrgus-Ægon : « Die Rechte dieser Art sind von so vielen
vorzueglichen Entomologen in Schutz genommen, dass unsre Ver-
theidigung derselben nur anmassung seyn wuerde. » ce qui signifie
littéralement en français : « Les raisons d’être de cette Espèce sont
prises en considération par un si grand nombre d'Entomologues de
haute distinction que l'apologie que nous pourrions faire de ces
raisons, serait de notre part une prétention superflue. »
Fabricius, dans Mantissa Insectorum, 1787 (p. 74; n° 600), con-
fond Argus et Ægon dans une même unité spécifique; il dit
d'Ægon qu'il réunit à A7gus, « vix differt, quamvis minor. » sans
doute il ne connaissait pas bien les deux espèces, ou 1l les avait
mal étudiées.
Esper, dans Die Schmetterlinge in Abbildungen nach der Natur,
1777, figure sur la Tab. XX, l'Argus (O' fig. 4) et l’'Argus (Q
Idas, fig. 5). Les figures sont grossières et tout aussi bien appli-
cables à Æ gon qu'à Argus. Le même auteur représente avec le nom
de Leodorus, sous les n° 1 et 2 de la Tab. LXXX, comme C et
O, 2 Q : l’une, avec le dessus des ailes bleu, l’autre avec le dessus
des ailes brun, de lÆgon méridional. « Ces papillons viennent de
nos localités franconiennes, dit Esper; je les ai reçus semblables,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 183
du Sud de la France; ils existent aussi dans les montagnes du
Tyrol... »
Pourtant les races d’Ægon en Franconie, au Tyrol et dans la
France méridionale sont très différents. Mais Esper n'avait peut-
être pas sous les yeux des exemplaires dont la provenance était
très exactement indiquée; ou bien il aura manqué de se livrer à un
examen attentif, comme il a fait pour Déspar qu'il appelle //:p-
pothoë varietas et qu'il réfère à la même unité spécifique
désignée auparavant par lui sous le même nom d’///ppothoë.
Gb SOMME ne, 12; Tab KIT 23):
Esper figure encore des Ægon ou des Argus, sous les n° 3 et 4
de la Tab. CI et avec le nom A/sus; sous le n° 5 avec le nom A7gus
et sous le n° 6 avec le nom Aygiades. Les figures sont très gros-
sières. Je considère qu'il est très difficile d'identifier avec quelque
certitude ces figures à Argus plutôt qu'à Ægon et vice versa; j'a
beau les regarder; elles me laissent dans le doute et je ne crois
pas que personne puisse dire exactement à laquelle des deux espèces,
elles s'appliquent réellement.
Freyer, dans Veuere Beitraege zur Schmetterlingskunde, 1830,
figure Ægon sur la Tab. 175 et Argus sur la Tab. 160. Je crois
que Freyer a fait des déterminations exactes,
Lang (The Butterfies of Europe; 1884), représente sous le
n° 1 de la PI XXIIL Æzon, et sous le n° 2, Argus, les figures
dont la couleur est obtenue par des procédés chromolithographiques
dépourvus de toute finesse, sont méconnaissables.
Gerhard (Versuch einer Monographie der eur. Thecla, Polyom-
matus, etc.; 1853) figure sous les n° 2 a, 2 6, 2 c de la PI 23, Ægon,
Hbn.'et Q ; sous les n° 34, 36, 3c, avec le nom de Zeodorus, Hbn,
une prétendue variété d'Ægon, ne semblant différer en rien du pré-
cédent et sous les n° 4 4, 4 à, 4 c, avec le nom d’Ægidion, Meissner,
et la mention de provenance : « Suedl. Europa », un petit Ægon
dont l’auteur dit ce qui suit (p. 13) : « Diese Var. zeichnet sich
besonders durch die Kleinheit und hellere Faerbung aus. Sie wurde
mir durch die Guete des Herrn Superintendent D' Heydenreich in
Weissenfels mitgetheilt. » ou, en français « Cette variété se dis-
184 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
tingue surtout par la petitesse et la couleur plus claire. Elle m'a
été communiquée par la bonté de M. l’Intendant supérieur
D' Heydenrich à Weissenfels ». Evidemment, cet Ægidion
rattaché à Ægon et venant du Sud de l’Europe, n’est pas le même
Ægidion que celui de Meissner, originaire des Alpes et considéré
comme une forme d’Argus, ou bien il y a, de la part de Gerhard,
confusion entre Argus et Ægon.
Sur la Pl 24, Gerhard figure A7gus, Linné sous/les nr,
16, 1c; Acreon, Fabr, sous les n°® 24, 26, 2c, puis /smenias,
Bksen, et Zyczdas, Bksen, tous les deux du Sud de l'Europe, sous
les n° 3 a, 3 6, 3 c, 3 d'et 4 a, 4 b, et comme des variétés d'Argus. Les
figures sans être absolument mauvaises, sont coloriées sans aucune
délicatesse; de plus, l’auteur ne donne aucune précision aux loca-
ktés d’où proviennent les papillons qu'il représente. Dans ces condi-
tions, Je considère que les figures publiées par Gerhard sont pour
la circonstance, sans utilité et ne peuvent être identifiées avec certi-
tude. Cependant je crois que A7gus et Acræon, selon Gerhard,
pourraient se rapporter plutôt à la race d’Argus que J'ai appelée
ligurica, qu'à toute autre.
Herrich-Schaeffer, le véritable maître des Iconographes, a figuré
sous les n° 22; et 228 Bella, forme géographique d'A7gus et sous
le n° 247, une superbe variété à ailes inférieures rayonnées d’A7gus.
L'Ægon, selon Huebner (n* 313, 314 et 315), selon Barrett
(Lepid. bnit. Islands} Plancher re, 12,16), habiteseulien
Angleterre. L'Argus ne se trouve pas dans les Iles anglaises.
On rencontre /Æ gon dans toute la moitié sud de l'Angleterre et
dans le pays de Galles. Suivant Barrett, il est surtout abondant
dans les bruyères de Dorset, Hants, Surrey et Berkshire; 1l est
commun en Norfolk et en Suffolk; rare au Gloucestershire et au
Somersetshire; il s'étend au Yorkshire et au Lancashire; récem-
ment il a été signalé au delà de la Pass de Killiecrankie et aussi de
Rannoch, en Perthshire. En Irlande, il parait être très rare et
local. M. Birchall le signale de Murrough of Wicklow et de Ros-
trevor.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 185
J'ai sous les yeux une longue série d’Æ gon anglais, provenant
des anciennes collections John Sang, de Darlington, et Howard-
Vaughan; plusieurs sont étiquetés : Epping.
La forme anglaise ressemble pour le G' à la race bretonne; mais
les Q anglaises ont souvent les ailes, en dessus, plus ou moins
saupoudrées d’écailles bleues, à la base des supérieures et sur le
disque des inférieures, ce qui ne se voit que rarement chez les exem-
plaires de la péninsule armoricaine. J'ai fait figurer sous le n° 62
de la XX° livraison des Ætudes d'Entomologie, une © anglaise
A6. radiata, quant aux points noirs des ailes en dessous. Je possède
une autre © Ab. radiata de l’ancienne collection Prest, d'Vork.
En Bretagne, on trouve les deux espèces Argus et Ægon; mais
elles ne cohabitent pas dans toutes les localités. Le plus souvent
Ægon est seul, sans Argus qui se rencontre seulement çà et là,
généralement en petites colonies, et affecte des mœurs un peu
spéciales et une époque d'apparition différente d’Ægon.
Dans le Finistère, j'ai capturé Æzon, le 10 juillet 1900, au pied
du mont Saint-Michel qui se trouve entre la Feuillée et Brasparts,
au milieu des bruyères, sur le côté occidental de la grande route.
Je l'ai vu aussi en grande abondance, au milieu de juin, sur la
lande sauvage qui précède le chaos rocheux du Bec-du-Raz-de-Sein
J'en possède une Q très intéressante de la forêt de Quimperlé, où
elle fut prise par le lieutenañt Mathieu. Je n'ai jamais vu A7gws
dans le Finistère.
Ægon paraît vivre seul, c’est-à-dire sans la compagnie d’A7gus,
dans les clairières fleuries de serpolet, d’Aelichrysum ‘stæchas, de
rosa pimpinellifolia et de dianthus gallicus, dont le parfum a tant
de suavité, au milieu de la forêt de pins qu'on a réussi à faire
pousser dans les sables à la base de la presqu'île de Quiberon,
du côté ouest de la route qui va de Plouharnel au Fort-Penthièvre.
Nous avons plusieurs fois chassé en 1909, dans ce site d'aspect
assez méridional, à cause des nombreux pieds d'Aelichrysum qui
tapissent le sol. Les pins forment de précieux abris contre les vents
et il y a entre les massifs d'arbres, des places un peu découvertes,
très fleuries dans lesquelles on voit voltiger les Zycæna Ægon.
186 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
L'Argynnis Pandora n'est pas rare dans cette localité et elle est
d'un bel effet, lorsqu'elle vole un peu haut, au-dessus des branches
de pins, ou bien quand elle se pose sur le sable, chauffé par le
soleil, étalant ses ailes de façon à ne pas souffrir des coups de
vent. C’est seulement au printemps, les 4, 5 et 6 juin que la Zycæna
Æ gon fut trouvée en grand nombre. Aux premiers jours de juillet,
le nombre m'en parut beaucoup moins grand et vers le 10 août,
on ne voyait plus que de rares exemplaires complètement déflorés.
Ma collection contient une série de plus de 400 échantillons, dont
le plus grand nombre fut récolté par M. P. Boulé, au commence-
ment de Juin.
La race à Plouharnel est petite; le O' est gris de lin en dessous;
quelquefois ses ailes inférieures en dessus sont ornées de taches
marginales aurore; assez souvent il y a une grosse tache noire en
forme de barre sur le milieu des ailes inférieures en dessous; Je
possède ainsi 7 exemplaires semblables, pris en 3 jours de chasse.
J'ai fait figurer le O' et la Q de cette Aberration sous les n° 252
et 253 de la PL XXXVIII de cet ouvrage. J'ai donné à cette
Aberration, le nom de Plouharnelensis. Exceptionnellement, on
trouve de superbes rayonnements, tel le n° 251 qui paraît un des
plus beaux spécimens connus de l'Ab. adiata. Les Q sont très
obscures; sur 100 exemplaires que j'ai sous les yeux, 5 exemplaires
ont quelques atomes bleus surmontant la bande marginale orangée
des ailes inférieures, en dessus. Chez un peu plus de la moitié des
100 exemplaires, cette bande marginale orangée s'étend plus ou
moins largement le long du bord terminal des ailes supérieures.
Généralement, elle n’est pas très accentuée. Une seule Q est
presque unicolore d’un brun profond, un peu doré, sans aucune trace
de tache orangée. Ægon vole aussi en exemplaires isolés, mais
fréquents dans les landes de Carnac, sur les bruyères et les aJoncs
qui croissent entre les alignements des pierres druidiques.
Cette année 1900, j'ai trouvé pour la première fois au mois de
juillet, depuis près de cinquante ans que je chasse dans ces parages,
la Lycæna Ægon, sur la côte nord de Bretagne, dans des landes
de bruyère et d’ajonc, sur la falaise du côté ouest de la pointe
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 187
du Grouin, près Cancale. Le vent du nord-ouest y arrive du large,
souvent violent et brutal. Semblant s'élever de la mer comme pour
monter à l'assaut de la falaise, son souffle impétueux oblige toutes
les herbes qui en tapissent les pentes, à s’incliner dans le même
sens, sous l'effort de son habituelle furie. Il semblerait que les
papillons devraient être chassés et repoussés au loin par ces rafales
chargées, comme une pluie fine, de parcelles de l’écume salée. Il
n'en est cependant rien, et au commencement de l'été, on voit ordi-
nairement un grand nombre de Lépidoptères appartenant princi-
palement aux Argynnis, Satyride, Lycenide, Hesperidæ voltiger
ensemble sur ces falaises d’ailleurs très fleuries. La Lycæna Ægon
ne semble pas autant redouter l’aquilon que la Lycæna Argus;
celle-ci se plaît, en effet, dans des sites plus abrités.
La Lycena Ægon, à Cancale, m'a donné une Q supra cærulea,
dont les ailes supérieures sont assez largement recouvertes d'un
semis épais d’écailles d’un bleu métallique foncé.
Dans l’intérieur des terres, j'ai rencontré Ægon et Argus, coha-
bitant à la forèt de Rennes, où les deux espèces volent presque à
la même époque, dans les allées herbues, sur les relais des routes
qui sont pourvus d'une végétation abondante et dans les clairières
où poussent les bruyères spécialement l’Erica tetralix et le Genista
anglica. Argus, dans la forêt, paraît rare, isolé et comme erratique,
tandis qu'Ægon y est beaucoup plus commun.
Argus n’est pas rare à Laillé, près Rennes. J'ai capturé Argus
à Bourg-des-Comptes, dans les prés un peu humides, sur les bords de
la rivière du Canut. M. P. Boulé a trouvé Ægon, en grand nombre,
dans l'arrondissement de Redon, notamment à Pipriac; mais
chassant plus souvent à Monterfil qu'ailleurs, en lile-et-Vilaine,
c'est dans ce pittoresque pays que nous avons trouvé plus d'occa-
sions d'observer les deux Zycæna Argus et Ægon, de les comparer
et de noter leurs différences biologiques.
Ægon éclôt à Monterfil une seule fois, en juillet; Argus y
paraît d’abord en juin, puis en août et septembre. Cette année 1900,
j'ai pris, le 2 juillet, les deux espèces : Argus finissant et Ægon
commençant. Ægon se plaît sur les plateaux et sur les sommets
188 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
pierreux, secs et arides des landes, où la végétation est maigre et
représentée surtout par des touffes d’ajonc et de bruyère cendrée.
Au contraire A7gus aime à vivre par colonies, dont les membres
ne s'éloignent guère du lieu qui les a vus naître, sur les pentes des
collines ou bien dans le fond des vallées, là où l’humus plus pro-
fond permet aux bruyères molles (Ær2ca ciliaris) de se développer
largement, en mélange avec les ajoncs et les genèts, dans lesquels
j'ai lieu de croire que vit chez nous la chenille de Zycæna Argus.
Au bas de la lande de Roveny dont le sommet est décoré d’une
belle croix de granit élevée tout récemment par la population entière
de Monterfil ainsi qu'au temps des ancêtres, il y a, le long du petit
ruisseau qui coule au fond du thalweg entre les pierres et les
osmondes royales, un espace plan assez large, planté de quelques
arbres, couvert de genêts, de bruyères communes et de fougères.
Un peu plus loin, s'étendent dans un site découvert, entre le ruisseau
et le sentier qui serpente au bas du coteau, de vigoureuses touffes
d'Érica ciliaris. Ce fut pour moi un véritable plaisir de récolter,
le 22 juin 1900, les Argus qui voltigeaient assez nombreux dans
cette vallée chaude abritée du vent et formant un paysage très
agreste, riant et fleuri. Les © se reposaient principalement sur
les branches de genêt, ou près de terre, sur les touffes de bruyère.
il y en avait de superbes, d'une teinte brun noirâtre un peu mor-
dorée, en dessus, et d’une couleur très foncée en dessous, rehaussée
par la bordure marginale rouge orange des ailes et la rangée de
petits points métalliques d’un bleu argenté si brillant, près du
bord terminal des inférieures.
Les ©, d’un bleu violacé en dessus et d’un brun plus foncé et
plus ocreux en dessous que dans aucune autre région, généralement
grands et très actifs, tant que brillaient les rayons du soleil, volti-
ceaient et se reposaient alternativement dans le vallon de Roveny,
sur une longueur d'une centaine de mètres qu'ils ne dépassaient
guère, s’offrant comme une proie facile; car ils revenaient toujours
autour des plantes qui leur plaisaient. Me trouvant sur le sentier
d'où je pouvais dominer les bruyères au bas du vallon, Je m'arrêtai
plusieurs fois et j'interrompis momentanément ma chasse, pour jouir
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 189
du charmant spectacle que m'offraient ces jolis papillons, les uns
produisant un vol si animé, les autres posés et étalant leurs ailes
bleues sur les touffes d’'Æyica ciliaris dont les fleurs roses et pur-
purines étaient alors dans toute leur fraicheur.
J'ai donné à la Lycæna Argus de Monterfil et de Bourg-des-
Comptes où la race paraît être la même, le nom qui me paraît bien
justifié d'Armoricana.
L'Argus armoricana se trouve çà et là, dans les plaines du centre
et de l’ouest de la France, plus ou moins caractérisé; je la possède
de Belle-Isle-en-Mer (Morbihan) où elle vole en mai; de Dax
(Landes), de Fontainebleau; de St-Germain-en-Laye; de la forêt
de Livernant, en Charente; mais nulle part, je n'ai vu des exem-
plaires plus beaux et méritant mieux d'être distingués par un nom
géographique, que ceux des environs de Rennes.
On peut même rattacher à l'Arworicana, Argus de Fusio
(Tessin), où mon frère en captura une douzaine d'exemplaires, du
10 au 14 juillet 1907. Les © de Locarno (16 juillet 1907) appar-
tiennent encore à la race armoricana, comme celles de la forêt de
Livernant, auxquelles elles ressemblent surtout; mais les c de
Locarno, en dessous, sont plus gris et moins bruns que les nôtres,
ainsi du reste que ceux de Livernant. Ils font la transition de la
race Armoricana dont le maximum d'intensité se trouve dans la
presqu'île armoricaine, aux autres races qui vont faire plus loin
l'objet de nos observations.
Ægon, à Monterfil et à la forêt de Rennes, quoique souvent de
taille égale, est très différent d'Argus. Le CG Ægon a les ailes, en
dessus, d’un bleu plus clair, quelquefois assez largement Lordé de
noir, tandis que le G' Argus est d'un bleu violacé, avec une bordure
noire très fine. En dessous, Ægon Ga le fond des ailes gris de lin,
sans points métalliques brillants aux inférieures, alors qu'Argus Œ
est, sous ce rapport, très bien orné. Les Q Ægon sont d'un brun
sombre en dessus, comme en dessous; mais présentant un aspect,
surtout en dessous, tout autre que celui des Q Argus, à cause de
leur bordure orangée moins accentuée et de leurs points bleus métal-
liques moins éclatants. De plus, les points noirs qui constellent le
100 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
dessous des ailes des deux espèces sont, chez Ægon ©, finement
cerclés de blanc, ce qui n’a pas lieu chez A7gus. Enfin ces points
noirs sont plus gros chez l'Ægon que chez l’Argus breton. Argus,
chez nous, tend quelquefois à avoir les points noirs du dessous des
ailes allongées, de façon à former un rayonnement. Cette disposi-
tion existe aussi chez Ægon, mais plus rarement.
En Maine-et-Loire, je ne connais pas A7gus, J'ai seulement sous
les yeux une assez longue série d'Ægon qui furent pris par
M. P. Boulé, dans les landes de Milly, en juin 1900. La race
d'Ægon, à Milly, est beaucoup plus petite qu'aux environs de
Rennes; comme à Rennes, le &, en dessous, a les points bleus
métalliques très peu développés et souvent nuls, Les © sont obscures
et je n’en ai pas vu ayant des atomes bleus sur le dessus des ailes.
Argus et Ægon sont des espèces de plaine et de montagne;
elles sont répandues aussi bien en Laponie qu’en Andalousie, c'est-
à-dire à l'extrême Nord, comme à l'extrême Sud de l'Europe; de
plus de l'Ouest à l'Est, Argus et Ægon se rencontrent depuis les
confins de la péninsule armoricaine jusqu'aux bords de la mer du
Japon. Dans des altitudes si différentes et des climats si divers,
il n’est pas surprenant que des races très tranchées se soient pro-
duites.
L'une des formes géographiques les plus remarquables est celle
de Corse. Argus, notamment à Bastelica (Powell) et dans les
montagnes de l’île (Bellier) est généralement de grande taille.
Le c'est, en dessus, d’un bleu violet un peu sombre, presque comme
Acis (Semiargus), avec une bordure noire nette et assez large. En
dessous, le fond des ailes est gris; les points noirs sont gros et
cerclés de blanchâtre; les taches bleu métallique du dessous des
ailes sont peu apparentes chez le ©, un peu plus accentuées chez
la ©. La couleur fauve orangé qui surmonte les taches bleu métal-
lique, le long du bord terminal des ailes inférieures, en dessous,
est tellement pâle chez le G', qu’elle paraît à peine se distinguer
de la teinte grise du fond. Chez la ©, la couleur fauve orangé
est plus prononcée. Le dessus des aïles de la Q est d'un brun
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE IOI
noirâtre uni, avec les points noirs marginaux des inférieures plus
foncés; un lavis bleuâtre s'étend près de la base et vers le bord
inférieur des ailes; on ne voit pas de taches fauves le long du bord
terminal des secondes ailes.
Guenée regardait la forme corse d’Argus comme une espèce dis-
tincte; il lui avait donné le nom de Be/lieri que je lui maintiens.
Ma collection contient 2 exemplaires d’Argus-Bellieri avec les
taches noires du dessous des ailes transformées en taches longues
rayonnantes et une trentaine d'individus normaux.
Une autre race d'Argus dont le G seul se rapproche de Bellieri,
est celle que mon frère a prise dans la Sierra-Nevada d’Anda-
lousie, en juillet 1870. Bien que j'aie déjà fait figurer un Argus
nevadensis G, sous le n° 54 de la PL 4 de la XX® livraison des
Etudes d'Entomologie, je fais encore représenter sous les n°% 259
et 260 de la PI. XXXIX du présent ouvrage, un G' et une Q de
cette forme si remarquable Elle est extrêmement belle, grace sur-
tout au développement et à l'éclat exceptionnels des points bleu
métallique, le long du bord terminal des ailes inférieures, en
dessous. Par le dessus, le G se distingue peu d’Argus Bellieri 5;
cependant le bord des ailes inférieures est un peu dentelé
chez Nevadensis; le dessous de Nevadensis est d'un gris café au
lait clair, avec les parties fauves marginales assez accentuées et les
points bleu brillants très gros et d’un éclat très vif. Les points
noirs du dessous sont à peu près comme chez Bellieri. La Q Neva-
densis, en dessus, est brune avec le bord marginal fauve aux quatre
ailes. Le dessous est couleur café au lait, avec les points marginaux
bleu brillant des inférieures, exceptionnellement grands et éclatants.
En Corse, comme en Andalousie, les Ægon présentent des varia-
tions géographiques aussi intéressantes que les Argus des mêmes
contrées. Bellier a appelé corsica la forme d'Ægon de l'ile de
Corse et a publié dans les Annales Soc. ent. France, 1862, sous le
n° 5 de la PI. 14, la figure du dessous des ailes de la © Ægon-
Corsica; il a décrit la variété en question à la page 615 des mêmes
Annales. La Q Ægon-Corsica a le fond des aïles brun en dessus,
avec les disques saupoudrés d’un épais semis d’atomes bleus,
102 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
s'étendant plus ou moins largement; mais, en dessous, chez les
deux sexes, les points noirs ordinaires sont d’un ton brun à peine
plus foncé que le fond sur lequel ils se détachent pourtant très
nettement, au moyen du cercle blanc qui les entoure. Outre les
types de la collection Bellier, je possède de beaux échantillons
pris par M. Powell, en juin 1803. Le papillon est commun dans
les montagnes de la Corse, où sa chenille vit sur une espèce d’As-
tragale, selon Bellier.
En Andalousie, Ægon présente sa magnifique forme /7ypo-
chiona, Rambur, décrite dans le Catalogue systématique des Lépi-
doptères de l'Andalousie, aux pages 35-37. Rambur cite aussi
Ægon comme se trouvant, mais rarement, dans les montagnes de
la Sierra-Nevada et il indique les montagnes des environs de
Grenade, comme patrie de son ÆZypochiona, qu'il érige au rang
d'espèce spéciale. Je possède une assez grande quantité d'A ypo-
chiona andalous; les uns ayant fait partie de la collection de
Graslin qui les avait capturés, en compagnie de Rambur, à Grenade
et à Alfakar, d'après les étiquettes encore attachées à l’épingle des
papillons; les autres de la collection Rosenhauer (ze There
Andalusiens); et enfin la plus grande quantité et les plus beaux
exemplaires pris par mon frère, en juillet 1870, dans la Sierra-
Nevada, du côté de Lanjaron, à la Sierra-de-Alfakar et aux envi-
rons immédiats de Grenade. Ce qui caractérise 7 ypochona, c'est
la couleur blanche un peu bleuâtre, mais très vive et très éclatante
du dessous des ailes, chez le G', ainsi que la teinte café au lait clair
du dessous des ailes, chez la Q; de plus les points bleu brillant
du dessous des ailes, chez la © surtout, sont magnifiquement
métalliques. Le ' est d’un bleu un peu transparent et comme
rosé, en dessus, avec la frange longue et très blanche; les points
noirs marginaux des ailes inférieures, en dessus, très développés
et gagnant même le bord des ailes supérieures, où l’on compte,
chez certains exemplaires, autant de points qu’il y a d'espaces intra-
nervuraux. La largeur de la bordure noire est variable chez les O;
én dessous, les points noirs sont gros, vifs, et comme dit Rambur,
la ligne médiane des points noirs est anguleuse après son milieu.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 103
Les ©, en dessus, sont tantôt brunes, tantôt plus ou moins large-
ment lavées de bleu, surtout près de la base des ailes; le bord
marginal des quatre ailes, chez la ©, est orné d’un feston fauve
orangé, en dessous, servant à accompagner, mais du côté intérieur
des ailes seulement, la rangée de points noirs intranervuraux.
Déjà, j'ai fait figurer sous les n° 50 et 60 de la PI 4 de la
XX® livraison des Etudes d'Entomologie, les deux sexes d'A yp0-
chiona; mais grâce à l'influence exercée sur les Entomologistes de
notre temps par le Catalog Staudinger et Rebel, dont les assertions
sont, par tant de nos confrères, acceptées comme l'expression d’une
infailhibilité absolue, bien peu nombreux sont les Lépidoptéristes
qui attachent à Æypochiona et aux variations diverses d’Argus
et d’'Ægon — dont il semble que le Catalog en question se soit
complu à diminuer l'importance — l'intérêt que pourtant ces races
géographiques méritent si légitimement et à un si haut degré. Dès
lors, J'ai cru devoir, comme pour Argus-Nevadensis, faire repré-
senter de nouveau et sur la même planche, en vis-à-vis, Ægou-
Hypochiona. On pourra alors aisément, par cette comparaison
dont les termes sont si voisins, se rendre exactement compte des
différences si grandes qui distinguent A7gus et Ægon dans le
même pays, et aussi des différences qui distinguent les Argus entre
eux et les Ægon entre eux, suivant les pays d’où ils proviennent.
C'est dans les parties peu élevées de la Sierra-Nevada et dans
les environs de Grenade, que se trouve la plus belle forme d’77y0-
chiona; je ne connais pas l'Ægon des grandes hauteurs de l’Anda-
lousie; mais, comme dans les Pyrénées-Orientales, où les deux
formes d’Ægon se trouvent : l’une, Fypochiona, en bas, dans les
parties chaudes; l’autre, alpina, en haut, dans les régions alpines,
on doit rencontrer à la Sierra-Nevada, sur les pâturages alpestres,
une race d'Ægon qui, par les ailes du O' : « violaceo-cæruleis,
marginibus externis latis nigris », comme dit Rambur (loc. cit,
p. 37), ressemble certainement beaucoup à celle des hautes mon-
tagnes des Pyrénées-Orientales. Malheureusement, je n'ai pas
encore vu en nature cet Ægon alticole de l’Andalousie.
15
104 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
La forme }ypochiona des contrées chaudes du midi de l'Es-
pagne, se retrouve avec ses caractères essentiels, mais plus ou moins
atténués, dans la Catalogne, en Castille, dans les Pyrénées-Orien-
tales, le Languedoc méditerranéen et jusqu'à Celles-les-Bains
(Ardèche).
Guenée avait rangé dans une des petites boîtes de verre qui
contenaient sa collection, une série d'Ægon qu'il avait pris ou
élevés de la chenille à Celles et il avait rattaché ces Ægon au
Leodorus, Esper (Tab. LXXX,; fig 1). Les Q Ægon, à Celles,
sont sablées sur le dessus des ailes, de bleu pâle, avec une ligne
blanche autour de la partie inférieure des points noirs marginaux
des secondes ailes. La chenille vit sur le Dorycnium suffruticosum
et suivant Guenée, elle diffère de celle figurée par Huebner.
Guenée ajoute que les chenilles d'Ægon, à Celles, sont cannibales;
elles se dévorent entre elles et mangent aussi leurs chrysalides.
Guenée ne connaissait pas l’Æypochiona d'Andalousie.
Nous avons pris, mon frère et moi, un nombre considérable
d’Ægon dans les Pyrénées-Orientales. Sur la montagne aride qui
sépare la vallée du Vernet de celle de Feuilla, l'Ægon est commun
depuis le mois de juin. Là, poussent en touffe, les Dorycrium, des
cistes et des thyms; en outre, quelques chênes un peu rabougris,
des pins souvent dévorés par les Cnethocampa pityocampa, des
ronces, des chèvrefeuilles et des prunelliers, quelques restes de
vigne constituent la végétation principale de cette petite montagne.
La race des Ægon qui l’habite, est l'Jypochiona; mais moins
accentuée qu'en Andalousie, plus petite, avec le dessous des ailes
du &œ d’un blanc moins éclatant. J'ai fait figurer sous le n° 61
de la PI. 4 des Etudes d'Entomologie (KX° liv.), une Q Ægon-
Hypochiona, de Vernet-les-Bains, capturée à une faible altitude,
dans la région chaude de la vallée.
On trouve dans cette localité la variété c rufomaculata, Reverdin,
chez laquelle les points rouges marginaux du dessous des ailes
inférieures transparaissent en dessus. C’est ainsi qu’en Juin IOO1,
j'ai capturé au pied du col de Feuilla, 2 G' dont l’un présente
3 lunules rougeñtres et l’autre 2, surmontant, le long du bord mar-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 105
ginal des ailes inférieures, les points noirs ordinaires. Je me
souviens d'avoir remarqué chez l’un des exemplaires, une rougeur
sur le dessus des ailes, tandis qu’il volait devant moi, et quoique
les taches rouges soient bien nettes, je fus déçu, lorsque le papillon
fut piqué dans ma boîte; parce que en le voyant voltiger,
Je croyais les taches rouges bien plus développées. MM. Chapman
et Champion, pendant un voyage effectué en 1906 dans la province
de Galice, au Nord-Ouest de la Péninsule Espagnole, ont découvert
dans la vallée de Casayo une forme d’Ægon, appelée par eux
Argus, en conformité du Catalog Staudinger et Rebel 1901,
remarquable par le développement des taches rouges aux ailes
inférieures du ©, en dessus. Cette variété a été désignée sous le
nom de casaiacus; elle est décrite et figurée dans les Transactions
of the entomological Society of London, 1907, p. 158, 159 et
PI V, © fig. 16, 17 et 19; Q fig. 18. Grâce à la bienveillance de
MM. Chapman et Champion, je possède 3 © de casaiacus pris à
Casayo, du 2 au 8 juillet 1908; un seul de ces casaiacus a deux
croissants rouges bien apparents; chez les deux autres, ils sont très
faiblement indiqués. Les 2 Ægon que j'ai pris au Vernet sont plus
vivement marqués de rouge que le plus caractérisé des casatacus;
mais je pense que les casaiacus recueillis par MM. Chapman et
Champion n'étaient pas tous aussi bien marqués de rouge aux ailes
inférieures et que les exemplaires les plus fortement décorés sous
ce rapport, ont eu les honneurs de la figuration sur la PI V des
Transactions de 1007.
Dans les plaines accidentées du midi de la France, à Cannes,
à Marseille, à Montpellier, on trouve en juin de superbes Æ go.
Les G' sont en dessus d’un bleu clair, légèrement violacé; les ©
sont largement bordées de rouge orangé, avec des traits blancs
comme à Celles-les-Bains, soulignant les points noirs, le long du
bord marginal des ailes inférieures, en dessus; et elles ont souvent un
lavis bleu sur le fond brun des ailes. La frange est souvent blanche
à l’apex et brun clair autour des ailes. En dessous, le C'est blanc
bleuâtre vif et la Q café au lait clair; les points vert brillant sont
petits, mais fréquents.
106 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
De plus, il y a à Casayo et à Vernet-les-Bains, ainsi que je viens
de l’exposer, une tendance au développement des taches rouges sur
le dessus des ailes inférieures du G'; comme si ces G' participaient
à une ornementation dont les © sont plus normalement l’objet.
Si nous passons maintenant à l'examen des Ægon de Digne,
nous constatons une race assez intermédiaire entre l’Zypochtona
et l'Alpina; mais dans les Basses-Alpes aussi, la forme change avec
l'altitude des lieux. Dans les localités chaudes et relativement
basses, les Æzgon S ont le dessus des ailes d’un bleu violâtre clair,
tandis que la teinte est d’un bleu violacé plus sombre dans les
hauteurs. En dessous, la forme des hautes altitudes est d’une teinte
sombre, grise, un peu brunie; tandis que dans les lieux plus bas
et plus chauds, le fond du dessous des ailes est d'un gris blan-
châtre clair, avec la base bleuâtre. Aussi les points métalliques du
dessous apparaissent plus fréquemment dans la race méridionale
et ne se montrent pour ainsi dire jamais dans la forme alpine.
Je possède de Digne un Æ gon Œ presque complètement dépourvu
des points noirs ordinaires en dessous et une © admirablement
rayonnée, surtout aux ailes inférieures.
Dans les Alpes françaises, dans les Pyrénées-Orientales et les
Hautes-Pyrénées, on trouve une race d’Argus tout à fait différente
de celle des plaines de l'ouest et du centre de la France, de la
Corse et de l'Andalousie. Cette race semble être celle que Huebner
a figurée avec le nom d’A/sus, sous les n°° 3 a, 6, c, d (N) de la
Taf. III de son ouvrage Beitraege sur Geschichte der Schmetterlinge
(Augsbourg, 1786).
Les exemplaires figurés par Huebner seraient la forme géogra-
phique d'Augsbourg; car il termine sa notice explicative par ces
mots : « In der Augsburgergegend nicht selten ».
Cette race géographique d'Argus me paraît être à peu près la
même à Cauterets et Gavarnie dans les Hautes-Pyrénées; au plateau
gazonné de Mariailles, vers 1,600 à 1,800 mètres dans les Pyrénées-
Orientales; à la Grave, au col du Mont-Genèvre, au Lautaret, dans
les Hautes-Alpes: au Mont-Pelat, à Saint-Martin-d'Entraunes, à
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 107
Larche, à Allos, à Enchastrayes, dans les montagnes autour de
Digne (Basses-Alpes); aux environs de la route du Simplon, à
Arolla, à Ryffelalp, en Suisse. J'ai fait figurer sous les n° 57 et
58 de la PI 4 de la XX° livraison des Etudes d'Entomologie, le
dessous des ailes de deux © Argus des Hautes-Pyrénées et du
Valais.
Les points noirs du dessous sont petits; la couleur du dessous
des ailes est d’un gris un peu brun, terne, pas très foncé, même
chez la ©. Les C' sont, en dessus d’un bleu violet, avec une bordure
noire étroite; mais cette bordure noire semble fusionner avec les
nervures qui deviennent noires au contact du bord terminal. Huebner
représente assez bien, dans la fig. 3 4, une sorte de pli intranervural
qui se produit, près du bord des ailes, parallèlement aux nervures.
La race A/sus, Huebner se rapproche beaucoup de celle de Scandi-
navie; je crois qu'Ægidion, Meissner, n'est qu'un synonyme d’A/sus
et qu'Alsus n'est autre chose que l'Azgus linnéen. Il n’y a donc
pas lieu de maintenir les noms d'Ægidion et d’Alsus ; ils ne
désignent rien d'autre que l'Argws, Linné, de Scandinavie, des
Alpes et des Pyrénées.
Les © sont plus variables que les G'; il y en a de brunes, il y
en a de bleues; il y en a de plus ou moins bordées de fauve orangé
en dessus. La © figurée par Huebner, sous le n° 3 c, a la base des
ailes lavée de bleu verdâtre et un beau développement des ocelles
et croissants fauves sur le bord des quatre ailes.
Comme je l’expose ci-dessus, les Q Aygyrognomon, Argyro-
capelus, Argyrocopus, Bergstraesser, sont probablement des Q
bleues d'Argus; mais à cause de la grossièreté du dessin et du
coloriage des figures, il est impossible d'identifier à quelque pa-
pillon qui soit exactement conforme, les figures et par conséquent
les noms que Bergstraesser a inventés pour les figures en question.
J'ai fait figurer dans la 1° livraison des Ætudes de Lépidopt.
comparée, des Q Argus que j'ai appelées valesiaca.
Certains Entomologistes penseront peut-être que ce sont des
Argyrognomon, des Argyrocapelus ou des Argyrocopus? Comme
108 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
les valesiaca sont variables, 1l est possible qu’on cherche à utiliser,
pour les désigner, les noms de Bergstraesser; malheureusement la
fantaisie tiendra toujours une large place dans cette identification
et à cause de l'impossibilité de les appliquer exactement, mon opi-
nion est d'en abandonner l'emploi purement et simplement.
Calliopis, Bdv. (lcones; PI. 15; fig. 4 et 5) est une intéressante
spécialité; j'ai fait figurer sous les n° 64 et 65 de la PI. 5 de la
XX" livraison des Ætudes d'Entomologie, un C' et une Q Calhopis
que j'avais pris à Uriage (Isère). En Dauphiné, Calliopis a les
points noirs du dessous des ailes très réduits et Je n'ai pris nulle
part ailleurs cette forme. Il y a lieu d'observer, comme Je l’ai du reste
déjà dit à la page 28 de cette XX° livraison, qu’en outre de Cal-
liopis, on rencontre aux environs d’Uriage une autre forme d’A7gus
dont je parlerai plus loin.
Les mœurs de ces Argus linnéens sont bien différentes de celles
de l'Argus-Ayrmoricana et elles changent aussi avec les localités.
Dans les Hautes-Alpes, en montant de Briançon pour aller à Cla-
vières, en Italie, par la route du col du Mont-Genèvre, Argus d' se
trouve en grande quantité, près du col, mélangé à d’autres espèces
de Lycæna et à des Hespéries, posé sur la terre un peu fraîche des
talus qui s'élèvent sur les côtés du chemin. Lorsqu'on inspecte ces
talus, on aperçoit de temps à autre, sur la terre humide, une de ces
réunions. Les Zycæna se trouvent serrés très près les uns des
autres et il est facile, en mettant le filet sur un bon coin, de cap-
turer à la fois trente ou quarante exemplaires, quelquefois même
davantage. Comme ils s’agitent dans le filet, il y a toujours des
échantillons qui sé gâtent, avant qu'on ne réussise à les faire
pénétrer dans le flacon chargé de cyanure ou de chloroforme; mais
on peut aisément discerner les espèces entre elles et Je me souviens
qu'Argus, en juillet 1906, était au col du Mont-Genèvre, de beau-
coup le plus abondant des Zycæna. Donseli qui arrivait sans
doute des forêts de mélèzes voisines, était le plus rare de tous.
Dans les Hautes-Pyrénées, c'est sur les pelouses rases où poussent
les lotus et les thyms herbacés, en mélange de fines graminées, que
l'on voit voltiger Argus, généralement assez près de terre et en
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 199
petit nombre d'exemplaires. Il y a sur la montagne du Péguère,
à Cauterets, le long du chemin qui mène à la Glacière et aussi un
peu plus bas sur le sentier, au-dessus de la maison hospitalière,
de bonnes places pour trouver A7gus. À Gavarnie, quand on sort
du village dans la direction de la célèbre cascade, il est fréquent,
pour peu que le soleil brille au firmament, de rencontrer des
groupes de Lycæna et d'Aespéries posés sur les parties humides
de la route, le long du ruisseau, à partir d’un gros rocher dans les
fentes duquel pousse la jolie Ramondia pyrenaica, aux fleurs d'un
violet si tendre.
De nombreux touristes ne cessent de passer, à pied ou à cheval,
sur le chemin, et les papillons sont fréquemment dérangés dans leur
tranquillité. Les Syrichthus, Hesperia et Carcharodus agiles et
pleins de vivacité vont et viennent d’un vol rapide; mais les
Lycæna, parmi lesquels figurent Argus, Ægon, Acts, minima,
pyrenaica, etc, reviennent généralement le plus promptement pos-
sible aux flaques de boue qui, durant les jours chauas de l'été, leur
offrent un si irrésistible attrait. Maintes fois, sur ce chemin que Je
suis toujours heureux de parcourir, j'ai observé les Zycæna Argus
avec leurs congénères; ils se présentent cependant bien moins
nombreux que les Ægon, au filet de l’'Entomologiste. Mais pour
venir se rafraîchir sur la boue des sentiers où les chevaux et les
mules laissent si souvent de leurs traces, dont les papillons d'appa-
rence si délicate semblent pourtant très friands, les O' seuls
quittent le lieu qui les a vus naître, c'est-à-dire leur véritable patrie,
celle à laquelle les Q restent plus fidèlement attachées.
Plus loin, en continuant la route vers le Cirque de Gavarnie, on
rencontre une vaste pelouse rase où l'Erebia Tyndarus paraît
nombreuse, en même temps que la Zycena Ægon, à gauche de la
large grève au milieu de laquelle s’écoulent les eaux du torrent et
avant d'atteindre la montagne boisée, si admirablement décorée par
la magnifique floraison bleue de l’Zris Xiphioides qui croît en touffes
nombreuses, dans les clairières, au milieu des pins. On trouve quel-
quefois des Ægon en gravissant la pente rude et escarpée de cette
montagne au delà de laquelle on parvient enfin au but désiré;
200 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
mais la Zycæna la plus abondante en ce lieu me paraît être Acis
(Serzargus), plutôt qu'Ægon.
Dans la pelouse qui s'appelle, je crois, la prade Saint-Jean, la
Lycæna Ægon est d'une forme bien différente de l'Æypochiona,
d'Andalousie ou des parties chaudes du Roussillon et du Lan-
guedoc. C’est un papillon plus petit; le Gest d’un bleu plus foncé en
dessus, avec une bordure noire élargie; le dessous est gris et non
plus d’un blanc éclatant; les points métalliques sont éteints, sauf
chez la Q où ils existent encore, mais sans être bien larges, ni
brillants. Telle est la forme de la Norwège où l’a prise mon fils,
le D° J. Oberthür, des Alpes et des parties élevées des Pyrénées.
J'ai déjà fait figurer sous le n° 63 de la PI. 5 de la XX° livraison
des rudes d'Entomologie, une Q de Gavarnie. Il y a une certaine
variabilité individuelle parmi ces Ægon, mais du moment qu’ils
proviennent d'une certaine altitude alpine ou pyrénéenne, ils
appartiennent bien à une même race qui est appelée a/pina, Berce,
dans 7’Xe Butterfies of Switzerland, par George Wheeler (p. 42).
Il reste à examiner une dernière race européenne d’'Argus; c'est
celle qui, d'après ce que je connais, a son maximum de dévelop-
pement et de beauté à Cernobbio, sur les bords du lac de Côme,
où elle vole à la fin de mai et au commencement de juin, dans les
prés qui s'élèvent en gradins sur le côté de la route qui longe le
lac. En dessus, le ' est d’un bleu violet, avec la bordure noire
assez large et nette; le dessous est gris de lin avec les points d’un
noir vif, cerclés de blanc et une bordure marginale rouge orange
se développant du bord costal des supérieures au bord anal des
inférieures. Cette ligne orange est intérieurement surmontée de
chevrons noirs; elle encadre la moitié supérieure des points noirs
qui sont légèrement pupillés de bleu métallique et dont l’autre
moitié inférieure est bordée de demi-cercles blancs, de telle façon
qu'au contact de l’extrémité de chaque nervure avec le bord terminal,
il y a un petit triangle noir.
La © est brune en dessus; il y a assez souvent des exemplaires
lavés de bleu. Je crois que cette race se lie intimement à celle du
Japon que Leech a figurée sous le nom d’ensularis (Butterflies from
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 201
China, etc, PL XXXI; C' fig. 8; Q fig. 5); mais elle ne cadre
cependant pas absolument avec cet A7gus-insulars du Japon.
Ægon se trouve d’ailleurs aussi au Japon, où il paraît être simple-
ment une forme agrandie de l'Ægon des environs de Rennes.
À l'Argus de Cernobbio, que j'appelle Zzguwrica, lui conservant
le nom sous lequel j'ai reçu de Cassarate un forme ana'ogue, 1l
faut joindre comme faisant partie de la même race, celui de Ver-
soix, de Veyrier, en Suisse, de Majella, dans les Abruzzes; de
Vichy (Allier); d'Uriage (Isère); de Sidemi (Mandschourie) et
des régions du Nord de la Chine. La teinte bleu violacé du ©
est lisérée très finement de noir; les points noirs marginaux des
ailes inférieures sont tantôt nuls, tantôt apparents et même bien
détachés; la frange paraît très blanche. Le dessous des ailes, chez
le S, est gris bleuâtre très clair, avec la bordure rouge orange vive
et les points noirs marginaux bien marqués, depuis le bord costal
des supérieures. Il y a, aux inférieures, 2 ou 3 points bleus métal-
liques. Les Q sont brunes, avec ou sans lavis bleuâtre; les taches
orangées en dessus sont généralement bien accusées; le dessous des
Q est café au lait très clair avec une éclaircie blanche, qui existe
aussi chez le O', plus où moins accentuée, entre la bordure orange
et la ligne de points noirs qui descend du bord costal au bord
anal. À Cernobbio, où la race est plus grande, la bordure marginale
noire, chez les ©, est plus large qu'à Versoix, Veyrier, Uriage,
Vichy, Sidemi, où elle est très fine.
La race de Marseille et de Péone (Alpes-Maritimes; H. Powell;
3 septembre 1906) est voisine de cette race d'A7gus-ligurica.
Cependant je dispose de trop peu d'exemplaires pour pouvoir
établir mon opinion. Je possède environ 2.500 exemplaires des
Lycœna Argus et Ægon présentement classés dans ma collection.
Ils proviennent de localités bien diverses; mais je ne me dissi-
mule pas les nombreuses et importantes lacunes de ma documen-
tation, notamment pour la faune de l'Allemagne, de l'Autriche et
de la Hongrie, qui est trop peu représentée dans mes boîtes. De
combien d'exemplaires devront être composées les collections de nos
successeurs, lorsque le progrès de la Science exigera une analyse
202 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
—
poussée toujours plus loin et des éléments de comparaison infi-
niment plus étendus!
Voici, en attendant et conformément aux observations ci-dessus
rapportées ainsi qu'aux figures publiées dans le présent ouvrage,
comment 1l me semble que les races d’Argus et Ægon doivent être
présentement classées :
Argus, Linné, Scandinavie; Alpes (Larche), Digne; Pyrénées.
Var. Calliopis, Bdv. Grenoble, Uriage.
Var. Armoricana, Obthr. Bretagne, Dax, Fontainebleau, Angou-
lême, Fusio.
Var. Bellieri:, Obthr. Corse.
Var. VNevadensis, Obthr. Andalousie.
Var. Lgurica, Obthr. Lac de Côme, Sidemi, Chine-Nord, Vichy,
Isère.
Var. 2nsularis, Leech. Japon.
Var. Ægina, Leech. Tâ-tsien-Lou.
Æ gon, Huebner. Angleterre; Bretagne (Plouharnel, Huelgoat,
Quimperlé, Rennes, etc.); Japon.
Var. alpina, Berce. Simplon, Cauterets, Larche.
Var. corsica, Bellier. Corse.
Var. 2ypochiona, Rambur. Andalousie; Vernet-les-Bains; Lan-
guedoc.
Var. casaiacus, Chapm. Casayo.
Des observations sur Argus et Ægon ayant récemment paru
dans les 7'7ansactions of the entomological Society of London,
1909, aux pages XII-XVIII, j'ai cru devoir porter à la connais-
sance du Public entomologique l'opinion de M. J. W. Tutt et de
M. Chapman, exprimées au cours de deux séances de l’honorable
Société. La traduction était difficile à faire; il était nécessaire de
connaître parfaitement les deux langues anglaise et française et
d’être un entomologiste très au courant de la Science contempo-
raine. J'ai eu recours pour cela à l’obligeance de M. Harold
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 20
CD
Powell et je le remercie cordialement de son concours savant et
très apprécié.
M. Tutt se range, pour la nomenclature, à l’avis de Staudinger;
on a pu voir les raisons qui m'ont fait adopter une opinion
opposée. Quant au reste, Je le considère comme une exposition très
curieuse de constatations savantes et d’hypothèses très hardies.
Cependant et quelle que soit la doctrine de chacun, la lecture
des documents insérés dans les .7'ransactions of the entomological
Society of London paraîtra à tout le monde du plus haut intérêt.
Extrait des Transactions of the Entomological Society
of London, 1909
(Pages XII, XIII, XIV, XV, XVI, XVII et XVII)
Séance du Mercredi 17 Mars 1900.
DISCUSSION SUR LES DEUX ESPÈCES SIMILAIRES //eberus
Argus (-Ægon) Er PF. Argyrognomon.
M. J. W. Tutt ouvrit une discussion sur les affinités des deux
espèces paléarctiques : Plebeius Argus, L. (Ægon, Schiff.;, Argy-
rotoxus, Brestr.), et P. Argyrognomon, Brgstr. (Argus, À uctorum).
Après avoir dit qu'il y avait eu grande confusion entre les deux
espèces, à partir de la première description et plus tard, il cita
les Autorités suivantes :
1758. Linné, Sysiema Nature, 12° édition, page 483 A7gus,
papillon bleu avec taches bleu argenté en dessous. Aussi
Idas, p. 488, une espèce indienne.
1761. Linné, Fauna Suecia, ? édition, page 283 — Argus, avec
les mêmes références. Aussi /das, p. 284, en la suggérant
comme © de l'Argus (par conséquent pas l’/das de la
10° édition).
204 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
1767. Linné, Systema Nature, 12° édition, pages 789-090 — Argus,
avec la même description, mais avec /das référée à la
même espèce comme ©.
1775. Schiffermüller, Wien- Verz., page 183 (note), référa l’Argus
de Linné à l’espèce non-britannique connue maintenant
sous le nom d’Argyrognomon, et décrivit Ægon comme
une autre espèce, l'identifiant clairement à l'espèce que
nous connaissons sous le nom d'Ægon.
1788. Borkhausen, Sys£. Besch., p. 154 us
é suivirent Schiffermüller.
1787. Schneider, Sys2 Desk p. 252
Hübner, Illiger, Laspevyres, Herbst, Ochsenheimer, Oken, Godart,
Boisduval, Duponchel, Freyer, Herrich-Schäffer, et toute une
armée d’autres Auteurs connus adoptèrent sa conclusion, appelant
notre espèce anglaise Ægon et l'espèce non-britannique Argus.
Fabricius, Lewin, Haworth, Stephens, Curtis; Wood, West-
wood, etc. maintinrent le nom linnéen A7gus pour Ægon.
Stephens confirma ceci, en faisant observer que dans la « Col-
lection linnéenne », à Burlington-House, l’Argws reconnue des
entomologistes du continent ne se trouvait pas.
En 1853, Wallengren (ne connaissant évidemment qu'une
espèce, la nôtre britannique), dit que c'était l’Argus de Linné.
Ensuite, ayant connaissance des deux, il maintint notre insecte
britannique comme A7gus.
En 1871, Kirby, dans son Syronymic Catalogue, appela notre
espèce Argus.
En 1882, Schüyen écrivit une revision critique (Ænr. Tads., 1,
p. 34, 100), concluant que l’Argus de Linné était notre Ægon.
En 1001, Staudinger suivit les conclusions des Scandinaves, et
depuis ce moment, chacun a suivi Staudinger. D’après les des-
criptions, nous aurions suivi Schiffermüller.
Sur le fait qu'il existe encore dans la collection linnéenne, à
Burlington-House, outre quatre exemplaires d'Ægon étiquetés
comme anglais, de la main de Smith, et un sans étiquette, deux
spécimens, un mâle étiqueté « 1074 », le numéro de l’Argus de
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 205
Linné dans la Faun. Suec. et une © portant étiquette « 1075,
[das », le numéro de l’/das de Linné dans la Faun. Suec., nous
sommes portés à admettre l'utilité, maintenant que le changement
est accepté, de maintenir Argus pour notre Ægon, et Argyrogno-
mon pour l'insecte continental connu si longtemps sous le nom
d'Argus.
M. Tutt attira ensuite l'attention sur la distribution et les races
locales remarquables de notre Plebeius Argus britannique (Ægon),
démontrant qu'en Grande-Bretagne nous avons trois formes dis-
tinctes : une forme des collines calcaires, puis une forme des
landes à bruyère, enfin une forme des tourbières ou des marais.
Sur le continent, dans l'Europe septentrionale (excepté l’extrême
nord) et centrale, le type était la forme des plaines. Dans les
Hautes-Alpes, c'était la race pailonomus, Brastr. (= Ægidion,
Meissner) ; Æ giades, Gerh., se trouvait en Europe centrale sur les
landes: la variété corsica, Bellier, était restreinte à la Corse, et
plus à l’est, dans l’Asie-Mineure, c'était la forme ortentalis, avec
son Ab. bella, H.-Sch. De l’ouest à l’est de la région paléarctique,
les principales formes raciales de l'Argus étaient distribuées
comme 1l suit :
pyrenaica, Tutt. )
PVRÉNÉENNE AO
hypochionoides, Tutt. \
Pyrénées françaises.
bejarensis, Chpmn.
ESPAGNOLE casaiacus, Chpmn.
brañuelasensis, Tutt.
vigensis, Tutt.
ortentalis, Tutt.
ASIATIQUE sifanicus, Grm.-Grshm.
ongodai, Tutt.
koreana, Tutt.— Grande taille, comme bejarensis.
micrargus, Butl. — Petite taille (sans taches mé-
JAPONAISE
| Xypochiona, Ramb. — Dessous blanc.
| talliques).
pseudæegon, Butl. — Forme de montagne.
206 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
P. Argyrognomon a une distribution presque identique dans
la région paléarctique. Sa variation est également presque parallèle
à celle de ?. Argus; la grande race orientale du Japon égalant
comme taille la var. £oreana. Les formes corses des deux espèces,
avec beaucoup de ressemblance en dessus, sont très distinctes en
dessous; P. Ayrgyrognomon var. corsica avec taches ocellées à
centres noirs, ?. A7gus var. corsica avec ces centres gris ou brun
pale (l'aile de la couleur du fond). De même, la race alpine est plus
petite, les races méridionales plus grandes, de sorte que les deux
espèces paraissent présenter une portée de variation parallèle en
montagne, en plaine, et chez les races méridionales respectivement.
Considérées superficiellement et au point de vue de la structure,
les deux espèces offrent plusieurs différences marquées.
Par exemple :
a) Chez Argyrognomon Vépine sur la partie avant du tibia
est absente;
b) La forme des ailes chez A7gus est plus arrondie;
c) La frange des ailes est plus large;
d) Chez A7gus le fond des ailes en dessous varie du pâle au
blanc, chez Argyrognomon la couleur est plus uniformément grise;
e) Il y a une différence d’angle dans la rangée de taches trans-
versales des dessous des ailes supérieures, celle d’Argus étant
plus courbée en dessous de la lunule discoïdale;
f) Les androconia chez Argus sont prolongés (8 à Oo rangées
de points traversent chacun), dans Argyrognomon ils sont arrondis
(10 à 12 rangées de points);
g) Les poils écailleux blancs, tant en évidence chez Argyro-
gnomon, manquent chez Argus;
}) Les organes génitaux présentent des différences notables
dans les deux espèces;
Et finalement 7) les premiers états et l’histoire naturelle (l’évo-
lution) sont entièrement différents, et tandis que Argyrognomon
a deux éclosions par an, Argus n’en a qu’une seule.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 20
NI
Le docteur T. A. Chapman fit ensuite des projections lumineuses
montrant des préparations de chenilles de P. Argus (Ægon) de
diverses tailles à diverses époques de leur existence, de celle
d'Argyrognomon dans sa première livrée, pour comparaison, et
de divers points de l'anatomie extérieure de la larve et de la
nymphe, et des accessoires sexuels d’Argus, d'Argyrognomon et
d'autres espèces pour comparaison, et des tibias de ces espèces,
pour démontrer combien elles différaient dans ce qu'on appelle
l'épine tibiale. Parlant de ces espèces, 1l dit :
« En examinant les épines tibiales d’Argus et d'Argyrognomon,
j'ai noté une réversion curieuse chez un spécimen d’Aygus de
l'Espagne; le tarse est normalement (dans le mâle) en une seule
pièce ; tous les articles et l’ongle terminal étant fusionnés ensemble
sans trace d'articulation. Cependant, le premier exemplaire
espagnol que j'ai examiné avait le tarse divisé en trois articles.
Je me demandai, naturellement, si ceci pouvait être un caractère
des races espagnoles, mais je n'ai pu trouver un exemplaire pareil,
ceux d'Espagne et d’ailleurs étant parfaitement conformes. Il y a
ambiguité à appeler ceci l'épine tibiale, c’est l'extrémité du tibia
même. Ce qu'on appelle généralement l’épine tibiale est une
protubérance à part qui n’est pas présente dans ces espèces.
» L'extrémité pectiniforme des pinces génitales présente des
variations inattendues: le nombre total des dents variant dans des
limites considérables, et la présence ou l'absence d’une ou de plu-
sieurs dents moins importantes ou mal développées à l’un ou à
l’autre bout de la série, étant un autre point qui offre une grande
inégalité suivant les individus.
» Les pinces opposées d’un même individu diffèrent très souvent
et le nombre des dents du peigne peut varier chez les exemplaires
d'une même localité. Il y a probablement quelque variation géo-
graphique également, mais je ne l'ai pas démontré.
» Nous pouvons conclure que des différences considérables dans
cette partie des pinces n’interfèrent pas avec la syngamie complète
chez l'espèce.
» La tendance à la variation est évidemment assez forte pour
208 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
établir facilement une espèce nouvelle, si une partie de la présente
espèce pouvait être isolée par ségrégation, pour une période rela-
tivement courte.
» Nous pouvons de plus conclure que ces organes spéciaux et
« formidables » ne correspondent à aucune portion des appendices
de la femelle différenciée d’une manière semblable, parce que, dans
ce cas-là, quatre dents au peigne ne pourraient posséder la même
utilité que cinq, six, sept ou huit.
» La grande différence qui existe entre les genitalia de l’Argus
et de l’Argyrognomon m'a suggéré la question : Est-ce que ces
deux espèces sont en réalité aussi étroitement alliées que nous le
supposons ? Il nous est permis de supposer qu’elles sont dérivées
de différentes portions de la souche Plebeiide qui se sont rap-
prochées par mimétisme ; ou bien, puisque les deux sont abondantes
(mais rarement, peut-être jamais, abondantes ensemble), qu'elles
se sont rapprochées par le fait qu’elles se trouvent dans des con-
ditions très similaires, et, étant donné une légère variation de ces
conditions, chacune capable de prendre la place de l’autre.
» Nous trouvons que chez ces Zycænidæ l’armature dorsale
diffère beaucoup et possède une valeur générique plutôt que spé-
cifique. En prenant Zcarus ou Bellargus comme représentant en
moyenne les Plebeiides nous trouvons chez Aygus que chaque
membre latéral de l’armature dorsale est long, mince, courbé et
faiblement crochu à l'extrémité. Le crochet accessoire est fortement
courbé, la partie terminale longue, droite et mince, sauf la pointe
qui est légèrement courbée et crochue. Par contre, Argyrognomon
diffère d’Zcarus de façon opposée; chez Argyrognomon, l'appen-
dice latéral est court, large et émoussé, et l’accessoire présente une
courbe prolongée; ce qui le fait paraître courbé d’un bout à l’autre,
et quoique ayant une légère courbe ou crochet terminal, comme
Argus, il diffère par sa forme plus large et plus robuste.
» Quand nous comparons les extrémités des pinces, la différence
est immense; tandis que Argus a quelques longues dents un peu
de côté de l’appendice dur, Argyrognomon a un nombre de dents
très fines (petites) sur l'extrémité un peu large de l’appendice.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 209
Celles-ci donc semblent être des formes d’appendice presque sans
parenté (dans le groupe de Plebendes. Pour les accepter comme
étant étroitement alliées, je suis obligé de prêter une valeur un peu
exagérée à une considération qui a beaucoup d'importance dans
l'étude de ces genitalia.
» Les genitalia se trouvent, au point de vue de la sélection, dans
des conditions totalement différentes de celles des caractères
externes que nous examinons le plus ordinairement.
» Ces caractères externes sont soumis à une sélection continue
en rapport avec les circonstances de l'entourage, telles que les
ennemis, le climat, la plante nourricière, etc.
» Les genitalia, quoique tout autant sujets à varier, et proba-
blement en réponse à des éléments perturbateurs similaires de
l’environnement, ne sont soumis à aucune force sélective exercée
par l’environnement.
» Dans les limites d’une espèce il ne faut pas que la déviation
de la valeur moyenne aille suffisamment loin pour empêcher
l'individu de trouver une compagne, mais la valeur moyenne peut
se modifier graduellement dans n'importe quelle direction.
» Tant qu'un groupe d'individus est syngamique (c’est-à-dire
est une espèce) les genitalia peuvent varier similairement d'un
bout à l’autre du groupe, mais sans former de variétés définies.
Cependant, quand un tel groupe est divisé en deux parties ou
groupes par ségrégation géographique, saisonnière ou autre, chaque
partie doit conserver une forme constante des appendices pour
toute cette partie, mais s'éloignant probablement de ceux de
l’autre groupe, qui peuvent être en voie de varier dans une autre
direction.
» Quand une telle différenciation a été poussée assez loin, les
deux groupes ne sont plus syngamiques et agissent l’un envers
l’autre comme des espèces distinctes, dans le cas où se présente
une occasion de se mélanger.
» Il paraît très probable qu'une séparation de ce genre puisse
se produire très rapidement considérant les nombreux cas que
nous connaissons de deux ou trois espèces, très distinctes quant
14
210 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
aux organes génitaux, tout à fait asyngamiques, et cependant très
ressemblantes quant aux caractères externes et difficiles même à
différencier.
» Il est très probable que de telles paires d’espèces se sont
éloignées l’une de l’autre quant aux caractères externes pendant
leur ségrégation, mais qu'une fois assujetties de nouveau au même
environnement, elles sont arrivées à se ressembler de nouveau très
intimement, toute question de mimétisme mise à part.
» L’armature dorsale des genitalia d’Argus et d'Argyrognomon
me paraît infirmer une pareille hyothèse; mais cela est néanmoins
possible, et c'est même l'hypothèse généralement admise que ces
deux espèces dérivent d’une souche commune d’une des façons
que Je viens d'indiquer.
» Le point sur lequel je désire attirer l'attention comme ayant
une portée dans des cas pareils, est que si une portion relativement
petite d’une espèce est entièrement ségrégée, elle peut varier plus
ou moins quant aux caractères externes, adoptant une position
appropriée à son environnement nouveau et restreint et demeurant
constante ensuite, mais que les genitalia ne subissent aucune res-
triction, étant libres de varier à n'importe quel degré, à la condition
que tous les individus du groupe varient ensemble.
» Quand le groupe ne renferme qu’un petit nombre d'individus,
une tendance à varier aura plus de chance d'amener un change-
ment, puisqu'il n’y aura pas une foule d'individus pour absorber
des tendances contraires, et par son inertie, empêcher le change-
ment.
» Donc, tandis que dans les genitalia, peu ou point de chan-
gement n'aura peut-être lieu dans certains cas, ou dans la majorité
des cas, au contraire, dans d’autres cas, un changement considé-
rable s'effectuera probablement avec rapidité.
» Il est à noter qu'il y a bon nombre d’espèces dont les appen-
dices paraissent être plus ou moins intermédiaires entre ceux
d'Argus et d'Argyrognomon, et je vous montre sur l’écran des
photographies de cinq de ces espèces ressemblant le plus à Argus
par la présence de grandes épines.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 211
» Il est à noter que toutes ces espèces intermédiaires (intermé-
diaires quant aux genitalia) sont, par leurs caractères externes,
abondamment différentes d’Argus et d'Argyrognomon. Argus et
Argyrognomon sont les seules espèces européennes de ce groupe
(à l’exception de la très locale P. Zephyrus et sa var. Lycidas),
et elles se ressemblent mutuellement plus en Europe qu'ailleurs.
Cette circonstance semble indiquer qu’elles ont été assez largement
séparées dans leur petit groupement particulier, mais que là où
elles ont de nouveau occupé des habitats semblables, elles se sont
rapprochées dans leurs caractères externes. »
Séance du Mercredi 7 Avril 1900.
Le Président ayant invité M. Tutt à répondre sur la discussion,
M. Tutt dit que, selon lui, la ressemblance entre les deux espèces
n'avait pas le mimétisme pour cause. Il considérait les deux
espèces en vérité étroitement alliées, et que les grandes diffé-
rences observées dans les appendices ancillaires ne dénotaient
peut-être pas une division aussi importante qu'on pourrait le
supposer. Il attira l'attention sur le fait que les premiers états
(histoire de la vie) des deux espèces étaient tout à fait distincts
et connus depuis au moins 135 ans.
Quant à l’apparition des deux espèces ensemble, 1l fallait se
rappeler que, dans les régions basses, Argyrognomon avait deux
générations et Argus n'en avait en général qu'une seule, et ceci
n’admettait aucun chevauchement réel, quoiqu'il en existât jusqu'à
un certain point; il était vrai que dans les montagnes, les deux
espèces apparaissaient plus ou moins à la même époque, Argy-
rognomon, cependant, généralement bien en avance sur A7gus
dans ces régions. Aucun doute ne pourrait exister quant à la
distinction de ces espèces; l’idée de M. Marshall, selon laquelle
les deux formeraient une espèce, dimorphe, ne s’appuyait abso-
lument sur rien.
22 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Lycæna Hesperica, Rambur
et Lycæna Lycidas, Trapp.
J'ai publié dans la 1° livraison des Etudes de Lépidoptérologie
comparée, des figures de ZLycidas (PI. 2; fig. 17 et 18) et d'Æespe-
Call 2/25 ete);
Je prie le lecteur de vouloir bien se reporter à ce que J'ai écrit
relativement à ces Lycæna, dans l'ouvrage précité. Lycidas se
trouve sur la route du Simplon, au voisinage du Refuge n° 2, à la
fin de juin et au commencement de juillet; je l'ai aussi pris à Viège,
à l'entrée de la vallée de Zermatt, en 1864 et 1866, alors que Je
me trouvais en compagnie de MM. Guenée, Fallou, Constant et
Jourdheuille.
Hesperica se trouve en Andalousie où il a été découvert par
Rambur et de Graslin. Rambur a fait paraître de bonnes figures
d’Æesperica sous les n° 1, 2, 3 et 4 de la Faune entomologique de
l'Andalousie, ouvrage imprimé en 1830. Æesperica y est décrite
aux pages 270 et 271. Je remarque que l’un des O' pris par de
Graslin, il y a près de 75 ans, a des éclaircies de couleur aurore, le
long du bord terminal des ailes inférieures, un peu comme chez la
Lycæena Ægon-casaiacus.
Lycæna Escheri, Huebner.
Espèce voisine de Zycidas et d’ÆHesperica, près desquelles elle
vit dans le canton du Valais, aussi bien qu'en Andalousie; mais
restant toujours bien distincte de Zycidas et d'Hesperica par le
dessous de ses ailes inférieures qui porte, près du bord marginal,
vers le milieu, une éclaircie blanche, de forme presque triangulaire,
tandis que Zycidas et Hesperica présentent une longue bande
blanche, se développant depuis le bord costal jusqu’au bord anal
des inférieures, au-dessus de la série marginale de lunules fauve
orangé.
[SS)
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 21
Huebner a figuré Escheri G' sous les n° 709 et 800 et Escherz ©,
sous les n°° 867 et 868, d'après des exemplaires qui, selon Boisduval,
lui furent envoyés par M. Escher.
En l’année 1832, date de l'impression de l’Zcones et du Supplé-
ment aux Tomes I et II de l’Aistoire naturelle des Papillons de
France, par Godart, Boisduval et Duponchel publièrent, simulta-
nément et chacun de son côté, la figure de Lycæna Escheri; Bois-
duval, sous les n°° 4, 5 et 6 de la PL 12, et Duponchel, sous les
n® 3, 4, 5 et 6 de la PI 11. Les figures données par Huebner,
Boisduval et Duponchel, sans être mauvaises, laissent à désirer; le
coloriage ne semble pas avoir été soigneusement surveillé. Dans les
exemplaires de ma Bibliothèque, les franges des ailes des Q sont
restées blanches, tandis que, d’après les descriptions, elles devraient
être grises. Boisduval dit que « cette espèce est assez commune
dans plusieurs de nos départements méridionaux, pendant une
grande partie du mois de juin et qu'il ne croit pas qu’on l'ait trouvée
jusqu’à présent ailleurs qu'en France ». Duponchel prétend (p. 72)
qu’il a trouvé, le premier, ce Polyommate dans le département de la
Lozère, mais qu'il ne l'avait pas distingué d'Alexs. Cet auteur
ajoute que M. Alexandre Lefebvre l’a pris depuis dans les environs
de Toulon et que M. de Saporta l’a découvert également dans une
de ses terres, près la Sainte-Baume (Var).
Tout cela me donne à penser que les individus figurés par Bois-
duval et par Duponchel proviennent de Provence. Mais il est bien
regrettable que ces auteurs, et tant d’autres avec eux, aient si géné-
ralement négligé de faire connaître l'origine exacte des papillons
qu'ils faisaient représenter. Il est si intéressant de savoir quelle est
la race-type de l'Espèce, c’est-à-dire la plus anciennement décrite.
Chaque auteur figurant un papillon devrait avoir soin d'indiquer
sa provenance exacte.
D’après ce que je connais de la Zycæna Escheri, c'est une espèce
méridionale dont la station la plus avancée vers le Nord-Ouest, est
jusqu’à présent Dompierre-sur-Mer (Charente-Inférieure). Æschert
se trouve dans les Pyrénées où elle monte jusqu’à une assez grande
altitude; en Espagne; en Languedoc; en Provence; dans la vallée
214 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
du Rhône, jusqu'auprès de Bérisal, sur la route du Simplon; à
Zermatt; en Dalmatie; en Grèce; et dans quelques parties de
l'Italie.
J'ai fait figurer sous les n° 78 et 79 de la PI XX de la
3° livraison des Æfudes de Lépidoptérologie comparée, le G' et la Q
de la race des Bouches-du-Rhône. Le G' est très grand, d’un bleu
clair soyeux et chatoyant en dessus, d’un gris blanchâtre éclatant en
dessous, avec les points d’un noir très vif, cerclés de blanc. La Q
est brune, mordorée, quelquefois avec un trait noir à l'extrémité de
la cellule des ailes supérieures; elle a une large bordure fauve
orangé aux quatre ailes; la frange est brune jusqu’à l’apex où elle
devient d’un blanc pur. Le dessous de la Q est d’une teinte café
au lait clair.
Sous le n° 80 est figurée une Q radiata de la plus grande beauté.
J'en suis redevable au D’ Siépi qui l’a capturée à Saint-Pons et
a fait mention de cette magniñique Aberration, dans le Catalogue
raisonné des Lépidopières du département des Bouches-du-Rhône
et de la région de la Sainte-Baume (p. 40).
On trouve dans les environs de Saint-Zacharie, non loin du
château de Montvert, en juin et au commencement de Juillet, de
superbes Q Æscheri. C'est à M. Gédéon Foulquier, l’habile et
ardent chasseur qui explore si soigneusement les environs de Mar-
seille, que je suis redevable de la connaissance de ces intéressants
Lépidoptères. Chez certaines Q d'une variété que j'appelle : Foul-
guieri, et qui est fréquente en Provence, rare ou nulle ailleurs, la
rangée intranervurale des taches marginales fauve orangé aux ailes
supérieures, commence au bord costal, comme dans l’exemplaire
figuré sous le n° 5 de la PI. 12 de l’/cones, de telle sorte qu'il y a
6 taches contiguës, presque carrées et très bien marquées. Chez
d’autres ©, la couleur brune du fond semble se fondre avec la teinte
fauve orange des taches marginales, aux ailes supérieures; enfin
quelques © montrent près du corps, des atomes bleus. La teinte
fauve orangé est généralement très vive; accidentellement les taches
marginales qui décorent le dessous des ailes de la © Escheri sont
d’un jaune pâle.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 215
Je possède des Lycæna Escheri recueillies à Grenade et à la
Sierra-de-Alfakar, par feu de Graslin et par mon frère, en Juillet
1879; à Vittoria; à Albarracin et à Barcelone; notamment une
Aberration O' subtus-tmpunctata, venant de Catalogne et figurée
sous le n° 25 de la PI. 3 de la XX° livraison des Ezudes d'Ento-
mologie.
Les Æscheri S' d'Espagne ont le fond des ailes rosé, en dessus,
et plus transparent que les échantillons des autres pays. Si on
éclaire, au moyen de l'électricité, une boîte contenant des Æschert G
espagnols, piqués à côté d’Æscher: de Provence, de Dalmatie, des
Alpes, des Pyrénées-Orientales, etc, on constate une différence
très sensible dans la couleur du fond des ailes. De plus, la bordure
noire est extrêmement fine; J'ai désigné la race espagnole d'Æscher:,
par le nom de roseonitens. Le dessous du GO, en Andalousie, est
d’un gris blanc vif, avec les points noirs très gros. Les Q ont le
dessous d’une teinte café au lait clair, encore plus vive que dans
la race provençale. La bordure fauve orangée est d'une couleur
tantôt fauve rouge, tantôt jaune; plus ou moins large, atteignant,
ou non, le bord costal aux supérieures. Les © sont donc variables;
mais le caractère rosé des ailes des GC en dessus, parait commun
à tous les individus.
En outre, la race d'Andalousie paraît être généralement de plus
grande taille que la forme des Bouches-du-Rhône qui est pourtant
très développée. Dans les Pyrénées-Orientales, je n'ai pas remarqué
qu'Escheri s'élevât à une grande altitude. Je l'ai toujours observée
dans les localités chaudes et plutôt assez basses. La forme qui vole
aux environs de Vernet-les-Bains, ne diffère guère de celle de
Provence que par sa taille un peu réduite. Dans les Hautes-Pyrénées,
on voit la Lycæna Escheri Œ voltiger dans les vallées chaudes,
avec les autres espèces de Zycæna et se reposer au milieu de ses
congénères, sur les parties humides des routes, notamment aux
abords de Luz. On la trouve aussi plus haut, à Cauterets et sur
les pentes de la montagne du Péguère; mais Æscheri monte jusqu'à
près de 2,000 mètres d'altitude et je l'ai capturée au bout du lac
de Gaube, sur une pelouse rase parsemée d'énormes blocs de rochers
210 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
isolés et plantée çà et là de groupes de pins. Je veux désigner la
sorte de prairie où l’on aborde, lorsqu'on traverse le lac de Gaube,
en bateau, pour marcher ensuite dans la direction du Vignemale.
La race de Lycæna Escher: qui vole sur ce gazon alpestre, en com-
pagnie d'Æros, Acis (Semiargus), Adonis (Bellargus), Orbitulus-
Oberthüri, Arion, présente des caractères spéciaux et je lui ai donné
le nom de Londoui, en l'honneur de mon honorable ami Rondou,
l'excellent Naturaliste et Instituteur de Gèdre.
Puisque la Lycæna Escheri habite dans les Pyrénées, les vallées
chaudes et qu’elle s'élève graduellement depuis les altitudes faibles
jusqu'à près de 2,000 mètres, elle doit offrir, dans les différentes
localités où elle vit, des formes très distinctes, si l’on compare les
individus qui proviennent des points extrêmes; mais si l’on envi-
sage une série d'exemplaires capturés dans des localités intermé-
diaires, on doit trouver des formes transitionnelles. Dans la réalité,
il en est effectivement ainsi. Dès lors, pour fournir une histoire plus
complète de l'Espèce, j'ai fait figurer sous le n° 72 de la PI XX,
le SG des Hautes-Pyrénées, pris à Cauterets et faisant la transition
entre la race provençale et celle du lac de Gaube. Cette forme de
Cauterets est moins grande que la forme des Bouches-du-Rhône
et le bleu du dessus des ailes, chez le ©, est d'aspect moins trans-
parent. Quant à la var. Rondoui, elle est caractérisée en ce qui
concerne la © (fig. 73), par des atomes bleus à la base des ailes
et la frange de ses quatre ailes entièrement blanche et non brune
avec l’apex blanc, comme partout ailleurs. Le G' Rondoui est plus
petit, en dessus d’un bleu qui présente, regardé dans un certain Jour,
un léger reflet un peu verdâtre, tandis qu'en dessous, le fond des
ailes est d’un gris uni avec les points noirs très petits, — souvent
beaucoup moins accentués même que dans la fig. 71. Il faut remar-
quer encore l'absence presque complète de tache triangulaire
blanche, le long de la bordure marginale de taches fauves, aux ailes
inférieures. On peut trouver partout l’Ab. radiata; témoin la superbe
Q (fig. 74), prise à Gèdre (Hautes-Pyrénées), en 1906 et dont
M. Rondou a eu la générosité de me faire cadeau. J'ai décrit aux
pages 57 et 58 du Bulletin de la Soc. ent. de France, 1906, la nou-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 21
ÈT
velle variété Rondoui que j'avais capturée en juillet 1905, aux
abords du lac de Gaube. C'était par une journée incertaine, avec
intermittence de brouillard et de rayons de soleil. Le temps ne
tarda pas à se gâter tout à fait et cette circonstance m'empêcha
de récolter un grand nombre d'exemplaires, ainsi que Je le désirais.
J'avais pris tout d’abord la Zycæna Escheri-Rondoui pour Lycidas,
à cause de la taille réduite et de l'absence — ou tout au moins de
l'oblitération — de la tache blanche triangulaire aux ailes infé-
rieures en dessous.
Dans la montagne du Péguère, on trouve parfois des Q petites,
très obscures, dépourvues de taches fauve orangé aux supérieures
en dessus et frangées de blanc pur. Mais on en trouve aussi qui
ont les franges grises ou d’un brun très clair et qui établissent la
transition. Mon frère a pris, en passant de Cauterets à Gavarnie,
en juillet 1882, une © Rondoui presque complètement unicolore en
dessus: il lui reste seulement quelques vestiges de taches fauve
orangé aux ailes inférieures. J'ai pris moi-même à Gavarnie un
Escheri-Rondoui d très analogue à ceux des bords du lac de
Gaube.
Dans les Alpes, la ZLycæna Escheri s'élève à une altitude peut-être
plus grande encore qu'aux Pyrénées; non seulement je l'ai prise
abondamment sur la route du Simplon, un peu au-dessous de Béri-
sal, du 18 au 23 juillet 1002, mais je l'ai rencontrée aux environs
de Ryffelalp, à plus de 2,000 mètres. Il y a des exemplaires O' de
Ryffelalp qui, par leur petite taille et leur teinte bleue en dessus,
ne sont pas distinguables de la var. Rondouï; en dessous, ils me
paraissent également être assez semblables à Rondoui; malheu-
reusement je n'ai pas pris la Q Æscheri à Ryffelalp et j'ignore
comment est sa frange. Si elle est blanche, la race de Ryffelalp
pourrait être appelée Rondoui, ainsi que la forme des bords du lac
de Gaube. Dans la Lozère, à Florac, la Zycena Escheri O' est de
plus petite taille qu'en Provence; elle est en dessus, du même b'eu
que dans les vallées pyrénéennes; en dessous elle a les points noirs
plus vifs; quant à la Q Æscheni, dans la Lozère, elle est grande
et tout à fait analogue à celle de la Côte d'Azur. J'ai pris, en 1803,
218 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
à Florac, un © Æscheri curieusement coloré; 1l est, en dessus, d’un
bleu grisâtre, avec une bordure brun clair assez large; c'est un
exemplaire d’un faciès anormal; il était du reste très frais lorsque
je le capturai, il y a plus de 46 ans; je l’étalai sur le vif, sans le
ramollir et sa couleur n’a pas changé; pas plus d’ailleurs que la
teinte bleu des Æscheri récoltés à cette époque déjà éloignée et
préparés immédiatement après leur capture. Dans les Alpes-Mari-
times, il y a de superbes Æsckeri; les plus grands et les plus beaux
exemplaires sont ceux des montagnes les plus voisines de la côte.
Je possède une série d'échantillons récoltés à Castillon; l’'Escarène;
Levens; Lantosque; N.-D. de Fenestre; vallon de Rabuans, près
Saint-Etienne-de-Tinée; Venanson.
Le long de l'Océan, dans les plaines calcaires de la Charente-
Inférieure, la Lycæna Escheri se trouve à Dompierre-sur-Mer où
M. P. Boulé en a récolté 8 O' et 5 Q, en juin 1907 et du 5 au
12 juin 1900. L'Espèce ne doit pas être rare à Dompierre, mais
M. Boulé, de même que Duponchel, dans la Lozère, en 1817,
ne s’aperçut pas, en la capturant, qu’elle différait d’A/exis, ce qui
explique pourquoi il n’en a pas récolté davantage. En dessous, le
d'est d’un gris foncé, presque brun, ce qui distingue la race de
Dompierre de toutes les autres formes. La © est très obscure en
dessus, d’une nuance brune, chaude et riche; en dessous, elle est
d'un gris un peu plus brun que le G'; mais très distincte aussi des
autres races qui ont le fond des ailes café au lait plus ou moins
clair; c’est-à-dire comme s'il y avait une proportion variable de lait
par rapport au café.
Je prends la liberté de dédier cette jolie Zycæna, dont la pré-
sence dans la Charente-Inférieure était naguère encore insoup-
connée, à M'° Hélène Vigé, et je l’appelle Felene.
La variété Dalmatica, Spr. diffère légèrement de la race pro-
vençale par la largeur un peu plus grande de l'ombre noirâtre
qui longe le bord terminal des ailes, en dessus, du moins si j'en
juge par les six que contient ma collection. Un de ces exemplaires
dalmates a la cellule aux ailes supérieures close par un trait noir
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 219
fin, mais vif; c’est le seul O' que je possède ainsi Les autres
exemplaires n’offrent pas une semblable particularité.
La Lycæna Escheri éclôt une seule fois par an en juin et Juillet.
On ne l’a pas trouvée en Algérie.
Lycæna Icarius, Esper.
Le G' a été figuré par Esper, mais assez grossièrement, sous
le n° 4 de la Tab. XCIX, d’après un exemplaire venant des pro-
vinces qui étaient dites : suédoises, en ce temps-là, et que lui avait
communiqué l'avocat Schneider, de Stralsund, comme une pièce
très précieuse « als ein sehr schaetzbarer Beytrag ». Huebner a
figuré avec le nom d’'Adntus (sic), sous les n° 283, 284, 285, une
race spéciale avec la Q (284) très largement bleue en dessus et
dont je n’ai encore jamais vu un semblable échantillon en nature
(j'appelle cette © bleue : Huebneri); puis avec le nom d’Awandus,
et sous les n°% 752 et 753, le O', et sous les n° 754 et 755, la ©
brune en dessus et conforme à la race de l’Europe orientale.
Boisduval, dans l’/cones, a représenté Zcarius sous les n° 1, 2 et 3
de la PI. 12, et Gerhard figure le même /carius sous les n°* 4 a,
ANAict Ar cde la PIN 20;
La ZLycæna Icarius n'a jamais été trouvée en Angleterre, n1
dans la France occidentale, boréale et centrale, ni en Algérie. En
France, d’après les documents que renferme ma collection, elle
habite les Pyrénées-Orientales, où je l'ai prise bien des fois à
Saint-Martin-du-Canigou et au delà de Casteil, aux mois de juin
et de juillet; les Hautes-Pyrénées, où on la voit paraître au mois
de juillet, à une altitude relativement assez faible, dans la mon-
tagne du Péguère et sur le chemin qui va des bains de la Raillère
à Cauterets. Souvent, par une belle matinée d'été, /carius voltige
sur les parties humides de cette route; il est facile de reconnaître
Icarius des autres espèces de Zycæna par le bleu clair et éclatant
du dessus des ailes du ©‘. Il se trouve aussi à Venanson, au Mont-
Castel-de-Brans, vers la fin de juin, et au Mont-Pacanaglia, dans
[ee
WŸ
©
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
les premiers jours de juin (Alpes-Maritimes); à Entrevaux, au
Mont-Gourdon, Garamagne (Basses-Alpes), à la mi-juillet. Je le
possède en outre de Scandinavie; de Hongrie; du Valais; du
Fort-Naryne, dans le Turkestan, où /carius donne la variété Zydia,
Krulik; de Syrie et d'Andalousie. Feu de Graslin avait dans sa
collection 4 et 5 Q portant l'étiquette : Grenade et Sierra-
Nevada. Les © andalouses ont généralement la base des supé-
rieures assez largement sablée d'atomes bleus. De plus, le bord
terminal des ailes inférieures porte des ocelles noirs, surmontés
d'un large croissant fauve orangé. Dans les Pyrénées, les Q
paraissent être généralement très obscures. /carius, en France, ne
m'a Jamais semblé être un papillon abondant, et je l’ai presque
toujours recueilli par exemplaires isolés.
Je fais figurer sous Mletn 205 de la Pl XEMduprsent
ouvrage une superbe Aberration © de Hongrie, que J'ai appelée :
A viator.
Lycæna Martini, G. Allard.
Très jolie Zycæna, spéciale à l'Algérie centrale et orientale;
abondante à Lambèze, Batna, Khenchela; trouvée à Rovigo et au
Camp-des-Chênes, par M. Holl; elle vole en mai et juin.
Le GO‘ est d'un bleu pâle, un peu violacé; les ailes ont une
contexture délicate, d’où résulte un aspect légèrement transparent;
elles sont finement lisérées de noir et frangées de blanc. Quel-
quefois la cellule des supérieures se trouve close par un trait noir
fin ; assez souvent, on voit des points noirs intranervuraux, le long
du bord terminal des inférieures. En dessous, le fond des ailes est
gris; les points noirs sont petits et ont une tendance à l’oblité-
ration. Les © sont brunes en dessus; mais la teinte brune n’est
pas très foncée ; souvent la base des quatre ailes est plus ou moins
largement lavée de bleu pâle. Les points noirs, généralement assez
gros, qui se trouvent le long du bord terminal des inférieures, sont
M
surmontés d’un croissant fauve orangé assez souvent souligné de
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 20)
blanc. En dessous, les © sont d’un gris plus brunâtre que les ©.
Chez les deux sexes, les petits points marginaux bleu brillant
sont surmontés de fauve orangé, d’un sourcil noir et d’une éclaircie
blanche: ils sont finement soulignés de blanchâtre. Les points
noirs du dessous des ailes sont cerclés de blanc. Une Q prise à
Lambèze par mon frère, en 1875, porte, le long du bord externe
des ailes supérieures, une rangée de taches fauve orangé, formant,
vers le bord costal des ailes supérieures, la prolongation des
taches marginales ocellées, surmontées de fauve, des ailes
inférieures.
La Zycena Martini fut dédiée par Gaston Allard à feu notre
digne ami Emmanuel Martin, qui voulut bien me servir de parrain
à mon entrée dans la Société entomologique de France, où je fus
admis à la séance du 28 août 1861. Emmanuel Martin était un
parisien plein de finesse, extrêmement dévoué à ses amis; son
cœur était enthousiaste et généreux; on l’a toujours vu très arrêté
et très ferme dans ses convictions; il était doué d’une bonhomie
très douce: mais il se laissait assez facilement entraîner à quelque
pointe d'ironie; d’ailleurs il savait manier la plaisanterie avec
aisance et délicatesse et il ne dépassait point la bonne mesure;
il semblait être né observateur; son caractère était gai; sa conver-
sation agréable, aimable et enjouée.
Il m'a traité, au temps de ma jeunesse, avec la plus affectueuse
bienveillance, et je conserverai toujours la plus sincère reconnais-
sance pour ses conseils excellents et sa bonté pour moi qui ne s’est
jamais démentie.
Emmanuel Martin possédait, vers 1862, une collection de
papillons admirablement rangée et parfaitement tenue; il avait
la prescience de l'importance des variations géographiques chez
les Lépidoptères. Aussi les échantillons qu'il conservait de chaque
espèce, quoique peu nombreux — faute de place pour les loger, —
étaient bien choisis dans des provenances diverses et pourvus
d'étiquettes où se trouvait inscrite l’indication précise de la localité
d’origine, ce qui était rare à cette époque et est encore trop peu
pratiqué aujourd’hui. Pourtant un papillon sans indication exacte
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
[S)
[es]
[S)
de provenance est une non-valeur; tel un corps sans àme. I] s’inté-
ressait surtout aux Geometre, dont il avait réuni un grand nombre
d'espèces; 1l les connaissait fort bien et en avait étudié plusieurs
depuis leurs premiers états. Ses chasses annuelles dans les mon-
tagnes lui avaient permis de réaliser des captures du plus grand
intérêt. En outre, il avait parcouru très fréquemment les forêts des
environs de Paris, dont la faune est si riche et si variée, et il avait
trouvé notamment dans les bois de l'Oise, entre Compiègne et
Chantilly, une grande quantité de pièces remarquables, entre
autre un hermaphrodite de Bupalus piniarius qu'il avait aperçu
au moment où il venait d’éclore sur le tronc d’un pin sylvestre,
près de Creil; il avait assisté, nous dit-il, au complet dévelop-
pement de cet exemplaire qui est demi-mâle et demi-femelle. Ce
fut M. Fallou qui posséda en dernier lieu cette insigne rareté. Elle
doit se trouver maintenant au Muséum national de Paris.
Lorsqu'Emmanuel Martin chassait, son attention était toujours
en éveil ; il avait l'œil très expérimenté et il se plaisait à inspecter
les rochers et les troncs des arbres. Combien de fois l’ai-je vu
découvrir des Noctuelles ou des Phalènes endormies au milieu des
lichens avec lesquels leurs couleurs les confondaient exactement.
Cette ressemblance si parfaitement mimétique n’avait pourtant pas
suffi à les protéger contre la vue perçante du chercheur habile entre
tous, qui fut l’un de mes meilleurs maîtres et de mes amis les plus
affectionnés.
Emmanuel Martin vivait au temps où florissaient les Boisduval
et les Guenée, les Bellier de la Chavignerie et les de Graslin, les
Millière et les Constant, les Fallou et les Lafaury, les Guillemot
et les Laboulbène. Il a chassé avec eux tous et a été leur ami.
Plusieurs fois, la Société entomologique de France a publié les
intéressants Rapports que Martin écrivait à la suite des Excursions
et des Congrès provinciaux; je les consulte toujours avec plaisir
et profit. Je me souviens des marches prolongées en montagne que
Martin, malgré sa frêle apparence, accomplissait si vaillamment.
J'ai eu le plaisir d’être maintes fois son compagnon et j'admirais
toujours la persévérance et la continuité de son effort entomolo-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 22
[e2)
gique. Toujours prêt à saisir un papillon, en toutes circonstances,
et son attention ne souffrant jamais de défaillance, il réalisait
ainsi des captures souvent excellentes et là où elles étaient parfois
plus imprévues.
En compagnie d'Emmanuel Martin, j'ai fait les excursions
organisées par la Société entomologique de France : l’une en 1862,
dans les Pyrénées-Orientales; l’autre en 1863, dans la Lozère.
Gaston Allard faisait aussi partie de ce voyage qui fut extré-
mement agréable. Je me rappelle le soin méticuleux que les Ento-
mologistes parisiens de ce temps-là apportaient à la préparation
de leurs papillons. Après la chasse, ils avaient l’habitude de ne
prendre aucun repos; ils se mettaient incontinent à préparer les
papillons capturés durant la journée et maintenus frais dans la
boîte de chasse, au moyen d’une éponge imprégnée d’eau. Il est
certain que les Zycæna qui n’ont pas subi l'opération dite : du
ramollissage restent d’une nuance bien plus pure que les autres.
Jules Fallou et Emmanuel Martin, tous deux habitant Paris,
étaient unis par les liens d’une vieille et solide amitié. Entomo-
logistes également ardents, ils rivalisaient de savoir-faire, aussi
bien à la chasse que dans l’art d’étaler les Lépidoptères. Que de
fois j'ai admiré la préparation irréprochable de leurs papillons, au
moment où ils les retiraient des étaloirs et les rangeaient dans
leurs boîtes !
À partir de 1863, Emm. Martin alla passer les hivers à Hyères,
en compagnie de sa respectable mère, tant qu’elle vécut, et l'été,
il habitait avec elle la ville de Creil où 1l finit par se faire bâtir
une maison, au haut d’une côte dominant l'Oise, d’où l’on jouissait
d’une jolie vue sur les collines opposées. Bien des fois, je suis allé
avec Jules Fallou visiter Emm. Martin dans son cottage, et
ensemble, après avoir admiré ses cultures auxquelles il donnait
tous ses soins, nous faisions de longues promenades dans les bois
environnants. Malheureusement la nouvelle maison d'Emmanuel
Martin, à Creil, n'était pas sèche comme son appartement de la
rue de Sèvres, 111, à Paris. Emm. Martin eut le chagrin de cons-
tater le développement de la moisissure dans ses boîtes et :1l
224, LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
remarqua que ses chères Géomètres se ramollissaient et perdaient
leur magnifique rigidité. Dès lors il ne voulut plus revoir sa
collection, ni la montrer à personne. Après en avoir extrait les
pièces essentielles qu'il partagea entre Jules Fallou et moi, 1l
abandonna ses papillons à la destruction. Grâce à l'humidité du
lieu où elles étaient déposées, le désastre fut rapide et irrémédiable.
Ainsi périt malheureusement le fruit de plus de trente années d'un
labeur considérable, accompli avec une compétence et une intelli-
gence supérieures. Je n'aurais jamais cru qu'un tel sort pût être
réservé au résultat de tant de travaux.
Mon pauvre ami Emmanuel Martin s’est éteint en 1897, à l'âge
de 70 ans. Il avait toujours semblé d’une complexion délicate et
d'une santé fragile; mais les chasses entomologiques sont une
précieuse thérapeutique. La vie au grand air, les promenades fré-
quentes dans les bois et dans les champs, l’activité intellectuelle
toujours éveillée, mais généralement exempte des soucis doulou-
reux qui accablent si souvent les hommes, constituent une panacée
à laquelle beaucoup d'entomologistes ont dû leur longévité.
Emmanuel Martin était un amateur éclairé d’horticulture, en même
temps qu’un fervent collectionneur d'objets préhistoriques ; 1] cul-
tivait volontiers les lettres latines et l’apologétique religieuse.
Chrétien convaincu, d’une charité inlassable, les espérances 1m-
mortelles soutinrent toujours son courage.
Ce n'est pas sans une émotion profonde qu'ayant tant de fois
éprouvé le bienfait d’une si dévouée amitié, je fais renaître dans
ma pensée, avec Ja vivacité d'un souvenir toujours fidèle, la loyale
et sympathique figure de mon ami Emmanuel Martin. Combien
de fois à Rennes, où il me visitait presque chaque année, en ins-
pectant ensemble les boîtes de ma collection dont il aimait à suivre
les progrès, avons-nous devisé sur les questions entomologiques
où sa haute expérience de chasseur exceptionnellement habile et
d’observateur judicieux apportait tant d'intérêt et était pour moi
si instructive! Il fut membre de la Société entomologique de
France pendant 42 ans; il méritait bien que son éloge biologique
fût imprimé dans les Awxales. Mais un silence inexplicable fut
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE DD
gardé par les dirigeants de cette Société. J'ai suppléé de mon
mieux, dans le présent ouvrage, à l’oubli regrettable dont mon
cher ami Emmanuel Martin fut l’objet de la part de ses collègues
parisiens, et je rends un juste tribut d'estime et d'affection à une
mémoire qui me restera toujours chère.
Lycæna Allardi, Obthr.
Une des plus jolies espèces du genre Zycæna. Elle n'a encore
été trouvée que dans l'Oranie. Gaston Allard l’a découverte à
Daya. Le D" Codet et Harold Powell l'ont capturée à Sebdou où
elle vole au mois de mai. En dessus, le © de Zycæna Allardi
ressemble beaucoup à Martini; mais la Q est toujours beaucoup
plus obscure; le dessus de ses ailes est plus noirâtre que brun. En
dessous, la disposition des ocelles est analogue à celle de Wartini;
mais les points noirs beaucoup plus gros, cerclés de blanc pur,
ressortent vigoureusement sur le fond des ailes qui est d’un brun
chaud et un peu doré dans les deux sexes, chez Af/ardi. C'est
évidemment de Martini qu'Allardi se rapproche le plus. Lorsque
Staudinger et Rebel, dans le Catalog 1901, impriment à lar-
ticle 553, à propos de Zycærna Allardi, ces mots : « praeced. forma
Darwiniana? » — (l'espèce précédente étant Zephyrus avec les
formes Zycidas, Hesperica, etc.), on se demande quelle mauvaise
plaisanterie les auteurs dudit Ca/alog ont voulu servir à leurs
lecteurs. La vérité, c'est qu'Allardi est une espèce spéciale, ne
pouvant être confondue avec aucune autre européenne. Allardi est
plus voisine de Martini que de toute autre espèce. En serait-elle
même la forme orientale algérienne, tandis que Martini resterait
l'expression occidentale d’une même unité spécifique ? lepnenle
crois pas; tous les exemplaires étant si facilement et si nettement
distincts les uns des autres; mais on pourrait à la rigueur
exprimer une opinion dans ce sens. Ce ne serait pas, en tout cas,
aussi paradoxal et contraire à toute vraisemblance que le ratta-
chement envisagé par Staudinger et Rebel d’A/ardi à Z ephyrus.
15
226 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Quoique le Catalog 1001, véritable tissu d'erreurs, nous ait presque
habitué à y trouver la note fausse et que, dès lors, je devrais à
peine insister sur des méprises dont il est si aisé de se rendre
compte et de faire bonne justice, je crois devoir signaler cette fois
encore une assertion pleine de fantaisie, afin de mettre en garde
contre elle les entomologistes à qui la Zycæna Allardi ne serait
pas encore connue en nature. A/lardi paraît beaucoup moins abon-
dante que Martini. J'ai réuni jusqu'ici une trentaine d'exemplaires
d’Allardi contre plus de 150 Martini. Les © Allardi varient un
peu pour l’accentuation des taches jaunes, le long du bord marginal
des ailes inférieures, en dessus; les d, comme ceux de Martini,
ont parfois un trait noir cellulaire aux ailes supérieures, en dessus;
mais, à part ces légères différences individuelles, tous les exem-
plaires présentent bien les mêmes caractères essentiels, et tandis
que chez Martini, il y a tendance manifeste à l’oblitération des
taches noires ocellées du dessous des ailes, c’est tout à fait l’in-
verse dans A/lardi. Te possède des exemplaires superbes, avec les
taches noires relativement énormes, d’une teinte très vive, entourées
d'un liséré blanc, produisant un effet qu’on pourrait qualifier
d'étincelant sur le fond des ailes qui est d’une couleur brune riche
et chaude. Il est malheureusement difficile de rendre exactement,
par le coloris sur papier, le bel effet brillant que produit le dessous
des ailes de la © Allardi.
Les Zycæna Martini et Allardi n’ont été jusqu’à ce jour ren-
contrées nulle part ailleurs qu’en Algérie.
Lycæna Dorylas, W. V.
La première édition du Systematisches Verzeichniss der Schmet-
terlinge der Wienergegend, par quelques professeurs du There-
sianum, a paru à Vienne, en 1776. C’est un beau livre, grand in-4°,
avec un superbe frontispice en couleurs représentant des Amours
ailés, l’un comme A pollo, l’autre comme A glia Tau, un troisième
à peu près comme Cardamines ; ils regardent une boîte ronde, ainsi
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 227
qu'on en avait en ce temps-là, contenant des papillons. Ces trois
amours sont au premier plan, sur une élévation gazonnée d’où
s'élève, en forme d'encadrement, d’un côté un Convolvulus à fleurs
bleues et de l’autre un Pzgnonia à fleurs rouges. Des papillons
variés européens et exotiques, même un petit oiseau, butinent sur
ces fleurs. Du haut du terre-plein sur lequel sont figurés les amours
ailés, s'étend en perspective dans le lointain une avenue dessinée
en jardin à la française, bordée de charmilles taillées et d'arbres;
au fond de l’avenue s'élève une grande habitation. Cela rappelle
à mon souvenir une vision de la résidence impériale de Schæn-
brunn, près Vienne; à la dernière page (322) de ce livre se trouve
nommé, pour la première fois par ordre de date, le P. Dorylas,
« Vielaeugigte Falter, Feinblauer, silberglaenzender. » C’est en
effet un papillon pourvu de beaucoup d’ocelles, d’un bleu délicat,
argenté, brillant.
La description n’est pas longue; mais aux temps anciens, on
ne décrivait pas toujours minutieusement les caractères divers
d’une espèce.
Esper, un an plus tard, en 1777, a figuré Dorylas avec les noms :
1° de T'Aetis (Q, Tab. XXXIII, fig. 3); 2° d’Aylas (S, Tab. XLV,
fig. 3); 3° encore d’Aylas (Q, Tab. LV, fig. 1). Il est bon d’ob-
server, à propos du premier nom 7'4efis relevé dans Esper, que le
Thetis , secundum Esper (Tab. XXXII, fig. 2), est une © cœru-
lescens d’'Alexis (Icarus).
Une seconde édition du Systematisches Verseichniss von den
Schmetterlinge der Wienergegend, avec synonymie et remarques
diverses, a paru en 1801, à Vienne; mais cette fois en deux volumes
et modestement imprimée sur format petit in-octavo.
Dorylas s'y retrouve indiqué à la page 270 du vol. IT, avec
rappel de l'édition de 1776; le nom d’Aylas, Esper et Borkausen,
y tombe en synonymie.
Jacob Huebner a figuré Dorylas sous les n° 280, 200 et 201;
Boisduval, dans l’Zcones (PI. 14; fig. 1, 2, 3), a donné des figures
du même Dorylas; ainsi que Duponchel, dans le Sypplément
(PINS; Gen).
228 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
La Zycæna Dorylas éclôt à la fin du printemps et en été. Elle
a deux éclosions par an, ou plutôt, je pense, une série d’éclosions
consécutives de juin à août. Je l'ai trouvée abondante en juin, aux
environs d’'Uriage (Isère). Nous l'avons capturée dans les Pyrénées-
Orientales en Juin, juillet et août; je la possède des Basses-Alpes,
des Alpes-Maritimes, où J'ai pris une belle Ab. © subtus-radiata,
à Saint-Martin-de-Vésubie, en juin 1806; je l’ai fréquemment ren-
contrée aux environs de Zermatt, dans le Valais; en Savoie: dans
la Lozère; à Cauterets (Hautes-Pyrénées); mon frère l’a prise à
Eclepans et à Fusio, en Suisse.
Je l’ai reçue d’Akbès, en Syrie; des Abruzzes; de Cassel, en
Allemagne; de Franche-Comté, d’où M. René Fritsch a eu l’obli-
geance de me faire cadeau d’un C' bien curieux; aux ailes supé-
rieures, en dessous, cet exemplaire n’a gardé que le point cellulaire,
tandis que les ailes inférieures sont très bien rayonnées. Ma col-
lection contient un G' de Lombardie richement rayonné aux quatre
ailes. J'ai fait représenter sous le n° 37 de la PI 3 de la
XX" livraison des Æ£/udes d'Entomologie un G' bien rayonné, mais
aux ailes supérieures seulement, venant des Basses-Alpes. Mon
frère a pris une © presque semblable à Vernet-les-Bains.
L'espèce varie en dessus pour le ton du bleu, chez le G', et pour
le nombre des taches fauve orangé chez la ©. On trouve des ©
très obscures; d’autres ont, aux ailes inférieures, deux ou trois
taches fauves, le long du bord terminal, et chez certains échan-
tillons, les ailes supérieures, en outre des inférieures, sont éga-
lement bordées de taches fauves. En dessous, la nuance grise du
fond varie beaucoup, ainsi que les taches diverses, pour leur accen-
tuation et leur développement. Les © ont tantôt la frange tout
entière d’un blanc pur, et tantôt la frange partiellement brune;
le O a les ailes bordées par un liséré noir très fin, quelquefois,
cependant, la bordure noirâtre s’élargit et les nervures, au contact
du bord terminal, deviennent noirâtres, ainsi que le pli intra-
nervural. L'espèce présente aussi des différences de taille notables.
J'ai fait figurer sous le n° 77 de la PI XX du présent ouvrage,
avec le nom de Gabrielis, une Q prise à Angoulême, dont les
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 229
quatre ailes sont ornées, en dessus, d’un semis assez abondant
d’écailles d’un bleu brillant. Je possède une © analogue prise
dans les Bouches-du-Rhône, par le D’ Siepi. Le GO de la var.
Gabrielis a le bord terminal des ailes inférieures nettement ponctué
de noir. J'ai été heureux de dédier à mon digne et excellent ami
Gabriel Dupuy, d'Angoulême, cette variété concernant les deux
sexes de Zycæna Dorylas, Aeuron charmant de la faune lépidop-
térologique charentaise, où ont été réalisées de si intéressantes
découvertes. Je pense que Dorylas ne dépasse pas Angoulême du
côté du Nord-Ouest; j'ai été agréablement surpris de connaître
authentiquement sa présence dans cette localité d’ailleurs si privi-
légiée. J'avoue que je n'aurais pas osé prévoir que Dorylas fût une
espèce charentaise.
La var. espagnole zivescens, Keferstein, très bien figurée par
Rambur, sous les n° 8, 0 et 10 de la PI. 10 de la Faune entomo-
logique de l'Andalousie, habite les parties chaudes et pas très
élevées des environs de Grenade, de Tijola (Almeria), d'Albar-
racin et de Sierra-Alta. Mon frère l’a prise en juillet à la Sierra-
de-Alfakar. Dans la Sierra-Nevada, on trouve une forme de C
bleu et de Q brun foncé, très peu maculée de fauve. Feu de
Graslin avait pris, le 24 août, peut-être par un temps d'orage, un
d' d’un violet gris en dessus, que j'ai fait représenter sous le n° 38
de la PL 3 de la XX® livraison des Æzudes d'Entomologie.
Dorylas n’a pas été trouvée en Algérie; mais 1l y a au Maroc une
superbe forme géographique appelée atlantica, Elwes, et dont les
deux sexes sont figurés dans les 7'7ansactions Ent. Soc. London,
1905, sous les n* 5 et 6 de la PL XIX. Dans les Alpes et les
Pyrénées, Dorylas G' se plaît sur les routes avec les autres espèces
de ZLycæna et les Hesperide. I] se repose en compagnie de ses
congénères sur les parties humides des chemins, pendant les
journées chaudes. Dorylas est facile à distinguer des autres
Lycæna, par son incomparable couleur bleu céleste, d’un brillant
argenté si délicat : « Vielaeugigte Falter, Feinblauer, silberglaen-
zender. »
230 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
PE
Lycæna Tithonus, Huebner (Æros, Ochs, etc.).
La Zycæna qui doit régulièrement s'appeler Tihonus, c'est
l'espèce que depuis un siècle les entomologistes appellent commu-
nément Æ7os.
C’est vraiment une bizarre chose, la nomenclature entomolo-
gique! Il semble que la plupart des lépidoptéristes qui écrivent
des livres sur l’'Entomologie ne se préoccupent nullement de savoir
si les noms par lesquels ils désignent les diverses espèces de
papillons sont justifiés ou non. Il y a des règles de priorité dont
ils négligent de tenir compte; sans doute ils évitent de remonter
aux sources et de lire ce qui a été imprimé avant eux. Alors les
erreurs qu'ils publient s’accréditent; et nul, parmi les amateurs,
ne prend la peine de contrôler les assertions des auteurs.
Huebner a figuré, en 1805, la Lycæna Tithonus sous les
n® 555 et 556.
Ochsenheimer, dans son ouvrage : Die Schmetterlinge von
Europa, publié en 1808, a changé le nom de Z'##Aonus pour celui
d'Æros, sous prétexte (vol. II, p. 42) que le nom de 7 #Aonus
ayant déjà été donné par Linné, 1l y a lieu de désigner ce papillon
par le nom d’Æyros, sous lequel 1l l’a d’abord reçu.
« Der Name 77Aonus schon von Linné vergeben ist, so nenne
ich diesen Falter ?. Æ7ros, unter Welchem Namen ich 1hn zuerst
erhielt. » Il existe en effet un Satyride du nom de 7 z/honus; mais
ce n’est point une raison pour qu'une Zycæna ne puisse pas s’ap-
peler également Z'#honus. Il y a bien un Ormithoptera Tithonus,
et personne ne songe à changer ce nom en un autre nom, sous le
prétexte qu'invoque Ochsenheimer. Plusieurs espèces de Rhopa-
locera portent le nom de S/audinger:. Parce qu'il existe un Sazyrus
Staudingeri, Bang-Haas, cela n'empêche pas qu'il y a aussi une
Lycæna Staudingeri, Christoph.
Le nom 7Z7honus, Huebner, 1805, est donc antérieur au nom
Eros, Ochs., 1808. La chose ne peut être contestée. Cependant
Boisduval, Duponchel, Herrich-Schaeffer, Gerhard, Staudinger et
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 231
Rebel ont adopté et popularisé le nom d’Æros, qui est d’ailleurs
court, harmonieux et tout à fait mythologique, puisque Æ7os est
le Cupidon céleste, fils de Jupiter et de Vénus. Mais comme :1l est
postérieur au nom de 7 2/%onus, il faut renverser l’ordre de choses
généralement admis jusqu'à présent, afin de rétablir Z'2/konus à
la place d’Æros, conformément à la règle. Je m'y résigne avec
peine et en disant : dura Lex, sed lex; car il est toujours malheu-
reux de troubler une tradition universellement acceptée. Pourtant,
si Boisduval, Duponchel, Staudinger et les autres s'étaient donné
la peine d'ouvrir le livre d'Ochsenheimer, il y a longtemps que
l'erreur eût été corrigée et que les entomologistes auraient modifié
leurs étiquettes.
Voici donc le Cupidon Æros déchu de son usurpation et c'est
Tithonus, époux de l’Aurore (*), dont le nom désignera désormais
et de nouveau la jolie Zycæna dont je viens d'étudier l’état civil.
La Zycena Tithonus, Huebner (Eros, Ochs. etc.), est une très
jolie espèce dont le ©, d’un bleu argenté clair (Duennblauer
Falter), scintille au soleil beaucoup plus vivement que les autres
Lycæena. La Q, généralement brune en dessus, est plus rare que
le S, et tandis que celui-ci abonde parfois en Juillet, sur les grèves
sablonneuses des torrents ou dans les prairies alpestres, notam-
ment à Zermatt, à Ryffelalp et au ravin de Findelen, la Q sem-
blant moins active et plus cantonnée dans son lieu d’origine, reste
ainsi plus difficile à découvrir. La ZLycæna Tithonus est une espèce
des hautes altitudes. Dans les Pyrénées, on ne la trouve guère à
moins d'atteindre une hauteur d’environ 1,800 mètres. Dans les
Alpes, je l’ai rencontrée à partir d’environ 1,600 mètres. En
Europe centrale, nous avons capturé Tonus (Eros) dans les
Pyrénées-Orientales, près de Montlouis-sur-Têt; dans les Hautes-
(*) Zithonus, dont le nom me paraît d’une euphonie moins agréable qu’Æros,
trouve aussi lui sa place dans la Fable. Il est fils de Laomédon et frère de
Priam. L’Aurore l’aima et l’enleva dans son char. Tithon obtint de Jupiter
l’immortalité, à la prière de l’Aurore; mais ayant oublié de demander qu’il ne
vieillit pas, il devint caduc et souhaita d’être changé en cigale, ce qu’il obtint
(Noël, Dictionn. de la Fable. Paris, An XIII, p. 615).
232 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Pyrénées, sur les pelouses rases au delà du lac de Gaube, dans
la direction du Vignemale; en Savoie, au-dessus de Lanslebourg
(D' J. Oberthür, Juillet 1894); au Lautaret et à La Grave
(Hautes-Alpes); en Valais, aux environs de Ryffelalp et de
Zermatt. Les chasseurs de Digne, que nous employions en 1806
et 1897, ont pris Z'#Aonus à Larche, à Enchastrayes, au Cheval-
Blanc et à Allos. M. H. Powell l’a récoltée à la Cayolle, à la
prairie du Mont-Pelat, au lac d’Allos et dans la vallée du Rou-
bion. Le comte Turati m'a envoyé des exemplaires de l'Italie
centrale (Gran Sasso, Mont Majella).
Cette Zycæna est extrêmement commune dans les montagnes
de Tâ-tsien-lou, sur la frontière orientale du Thibet, où elle est
plus grande que dans nos Alpes et où elle appartient à la forme
Froides ESC M2 6)
Tithonus vole communément en juillet; mais je l’ai trouvée
encore fraiche en Savoie, après la mi-août, voltigeant isolément
autour des fumiers qui sont dressés dans les villages, près des
étables. Elle nous a paru très rare dans les Pyrénées-Orientales ;
elle est plus abondante dans les Hautes-Pyrénées, mais dans une
proportion toujours bien moindre qu’en Savoie, en Valais ou aux
Basses-Alpes. Il y a plusieurs formes de © : la forme brune, sans
bordure fauve accentuée, qui est la plus ordinaire; la forme brune
qui présente le long du bord externe des quatre ailes une série de
taches fauves surmontant des points noirs intracellulaires, infé-
rieurement soulignés de blanchâtre; la forme bleue, que J'ai appelée
cærulescens et fait figurer sous le n° 4 de la PI I de la
VIII° livraison des Ezudes d'Entomologie.
La première forme, dont j'ai sous les yeux plus de 80 exem-
plaires, est celle qu'on voit le plus souvent dans les Alpes et les
Pyrénées-Orientales; la seconde forme, avec sa bordure fauve plus
développée, que j'appelle #alica, est celle des Monts Apennins;
la forme cærulescens se trouve dans les Hautes-Pyrénées, plus ou
moins caractérisée. Rarement on rencontre à Larche (Basses-Alpes)
une forme que je rattache à cærulescens, pour ne pas multiplier
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 233
2 0 AN EL 1 RENTE NONERENEESRSEE CRE
indéfiniment les noms de variété, et qui est d'un gris argenté
légèrement bleuûtre.
Enfin la Q Eroides est d'un brun noirâtre sombre; à Tà-tsien-
lou, elle a généralement des taches marginales d'un fauve orangé
vif sur les ailes inférieures et quelquefois sur les supérieures,
jusqu’auprès du bord costal. Je possède quelques Q sino-thibé-
taines légèrement sablées d’atomes bleus; d’autres sont très obs-
cures et sans bordure de taches fauves. Ordinairement, à Tâ-tsien-
lou, les & Æroides sont plus grands et d’un bleu moins argenté
que les G Z'ihonus de nos Alpes ou de nos Pyrénées; mais j'ai
reçu des exemplaires exactement conformes à ceux des montagnes
de l’Europe occidentale.
Souvent la Lycena Tithonus a les taches noires du dessous des
ailes inférieures transformées en rayons; tel le G' du Valais que
j'ai fait figurer sous le n° 39 de la PI. III de la XX° livraison
des £tudes d'entomologie. Inversement les taches noires du dessous
peuvent disparaître; ainsi est le G' Æroides, du Thibet, représenté
sous le n° 40 de la PI. III de l'ouvrage précité.
Tithonus (Eros) varie un peu pour la taille, pour la largeur
de la bordure noire du dessus des ailes chez le d, pour la ponc-
tuation intranervurale du bord terminal des ailes inférieures, pour
la nuance grise du dessous des ailes et la grosseur des taches noires
ocellées.
La race des Pyrénées-Orientales paraît être exceptionnellement
petite; mais je possède trop peu d'échantillons de cette provenance
pour pouvoir donner une indication précise. Les Tithonus Œ qu'on
ramollit pour les étaler sont exposés à perdre de leur éclat et à
se tacher; comme le dit Donzel, le mieux, pour conserver Tithonus
(Eros) dans toute sa beauté, c'est ’étaler ses ailes, peu de temps
après sa mort, alors qu’elles n'ont pas encore perdu leur souplesse.
Il a été publié d'assez bonnes figures de Zithonus © par
Huebner, sous les n°“ 555 et 556; par Boisduval, dans l’Zcones,
avec le nom de Zros, sous les n°“ 4, 5 et 6 de lle TAT#par
Duponchel, dans le Sypplément, sous lésn rebOide la Pl°#72
Herrich-Schaeffer a très bien représenté la Q brune normale, tou-
234 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Jours avec le nom de Z7os, sous les n° 212 et 213. Je fais figurer
dans le présent ouvrage la © cærulescens, de Larche, plus
argentée et moins bleue que celle des Hautes-Pyrénées; la Q
alica, du Mont-Majella, dans les Abruzzes; les © Æroides, de
Tâ-tsien-lou, normale et su0tus-radiata.
J'ai conservé dans mon souvenir et J'évoque comme une bien
agréable réminiscence la vision déjà lointaine des jours heureux
que J'ai passés à Zermatt, en 1864 et 1866, avec de chers et aimables
compagnons que, sauf un seul, Dieu a maintenant rappelés à Lui.
La Zycæna Tithonus est intimement liée à la mémoire de toutes
les chasses auxquelles nous nous livrions si joyeusement ensemble
dans ces montagnes superbes et ces prés si fleuris.
Par les belles journées de juillet, le torrent dont les eaux des-
cendent du glacier du Gorner est moins gonflé le matin que dans
le milieu du jour; la fonte des neiges et des glaces étant plus
abondante sous l'influence des rayons solaires que durant la frai-
cheur de la nuit. Dans la matinée, le long du torrent, il reste donc
des grèves de sable que les eaux recouvrent tous les après-midi,
mais qui, Jusqu'au milieu du jour, se trouvent assez largement
découvertes; elles conservent l'humidité, quoique chauffées par les
rayons ardents du soleil. Sur ces grèves sablonneuses se trouvaient
çà et là quelques grosses pierres enfoncées plus ou moins profon-
dément et que la violence des eaux, à certaines heures, déplace st
facilement, malgré leur énorme poids. À côté de ces pierres, 1l y a
des places un peu plus creuses, formant comme l'ouverture d’un
entonnoir et dont les parois étaient particulièrement affectionnées
par les Zycæna.
En s'avançant vers les bords du torrent, nous dérangions les
Lycæna souvent posées en grand nombre sur le sable humide et
chaud. Nous étions alors comme enveloppés dans un tourbillon
de petits papillons bleus, parmi lesquels les 7%onus (Eros)
semblaient les plus nombreuses. Une fois troublées et déplacées,
ces Zycæna voltigeaient pendant quelque temps avant de se
reposer de nouveau à terre, formant comme un petit nuage brillant,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 235
agité et délicieux à contempler. Il en était de même le long du
ruisseau, au pied du village de Findelen. Mais au grand soleil
de l'après-midi, les Zycæna T'ithonus, chassées des grèves sablon-
neuses par la crue des eaux, se retrouvaient, volant actives et ani-
mées, sur les prairies alpestres, à la hauteur de Ryffelalp; le bleu
argenté de leurs ailes contrastait avec la couleur rouge feu des
Polyommatus Eurydice qui leur tenaient compagnie.
Dans ce magnifique paysage, la haute pyramide du Cervin se
dresse avec une incomparable majesté; telle la sentinelle avancée
de toute cette quantité de pics neigeux et glacés dont les cîmes,
en arrière du Cervin et des deux côtés de la vallée, se profilent
sur le ciel bleu. Lorsque nous chassions au milieu de la prairie de
Ryffelalp d’où les yeux dominent le glacier encadré par la verdure
sombre des pins aroles et la teinte plus claire des melèzes, ayant
toujours la vue du Cervin dressé sur son énorme base, nous jouis-
sions d’un contraste charmant que nous offrait le spectacle si
grandiose de cette scène de la Nature et la grâce délicate des
papillons fragiles voltigeant nombreux sur les fleurs alpines.
Lycæna Icarus, von Rottemburg.
Sous le n° 4 de la Tab. XXXII, Esper a figuré, en 1777, une
Lycæna S' avec le nom d’/carus. La figure est grossièrement exé-
cutée; cependant l'identification peut être admise à la rigueur entre
la figure publiée par Esper et l'espèce qu'on peut qualifñer de la
plus commune et de la plus répandue des Zycæna européennes.
Sur la même Planche XXXII, Esper a figuré sous le n° 2, avec
le nom de 7’Xefis, une Q cærulescens de l'espèce Zcarus; et sur la
Tab. L, le même auteur a figuré avec le nom de Polyphemus 2 ©
brunes et assez normales de la même /carus. Huebner, sous les
n° 202, 293 et 294, a représenté avec le nom d’Alexis, mais d’une
manière plus exacte qu'Æsper, les deux sexes de la même Zycæna.
C’est sous ce vocable d’Alexis que Ochsenheimer, qui connaissait
parfaitement les figures données par Esper et en a établi une très
bonne synonymie, a désigné la Zycæna qui nous occupe actuel-
236 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
lement, aux pages 38, 30, 40 et 41 de son ouvrage : Die Schmet-
terlinge von Europa. L'Espèce n'était pas restée inconnue aux
Thérésiens. À la page 184 de leur ouvrage : Systematisches Ver-
zeichniss der Schmetterlinge der Wienergegend, portant la date
de 1776, en passant en revue les papilions qu'ils appellent :
Polyophthalmi (Vielaeugichte Falter), ces auteurs nomment
Alexis : l’Argus bleu et l’autre sexe l’Argus brun de Geoffroy.
Suivant les Thérésiens, la chenille d’Alexis vit sur Onoms
spinosæ. Mais, dans un journal scientifique intitulé Der Natur-
forscher, imprimé à Halle, depuis 1774 jusqu'à 1802, à la page 21
du « Sechstes Stueck » portant la date de 1775, S. A. von Rot-
temburg, sous le titre : « Awmerkungen zu den Hufnagelischen
Tabellen der Schmetterlinge », donne le nom d’/carus à la
Lycæna dont Kleemann a publié une excellente figure sous le n° 5
de la PI 37 de la 3° partie de l’ouvrage posthume de son beau-père
Roesel von Rosenhof.
S. À. von Rottemburg comprend le n° 3 de la PI. 37 du vol. III
de Kieemann (Roesel), qui est figuré en dessus, sous le même nom
d’Zcarus que le n° 5, lequel est figuré en dessous et semble seul
parfaitement reconnaissable. Je crois que le n° 3 ne peut pas être
considéré avec certitude comme le dessus de la même Zycæna qui
porte le n° 5; mais le n° 5 reste acquis et l'identification n’est pas
douteuse. Seulement von Rottemburg décrit à la page 22, avec le
nom d’A/exis, une Zycæna Q qui me semble être une À gestis, qu'à
la page 10, le même auteur appelle Medon. Qu'on en Juge :
« O. Pap. Alexis. Plebejus ruralis. Von diesem Vogel Kenne ich
nur das eine Geschlecht, nemlich das Weibchen, das Maennchen
soll wie mir ein Freund berichtet, oben blau seyn, wie fast bey
allen Argusarten. Das Weibchen ist auf der Oberseite dunkel-
braun, am Rande mit orangefarbenen Flecken eingefasst. Diese
Einfassung gehet bey den mehresten um alle vier Fluegel, bey
einigen aber fehlet sie an den Oberfluegeln. Diese Flecke sind
weit rothgelber und viel schoener und lebhafñfter, als bey den
Weibchen vom Aygo und /caro. In der Mitte der Oberfluegel ist
ein kleiner schwarzer Fleck. Auf der untern Seite ist er ganz
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 237
hellgrau. Die schwarzen Augen stehen in einer etwas andern
Ordnung, als bey A7go und Zcaro, und einige derselben haben
ausser der weissen Einfassung noch einen weisslichen Schatten.
Dieser Vogel zeiget sich im Junio in den Gaerten, und ist nicht
haeuñig. »
Dans ces conditions, on peut se rendre compte de la confusion
qui existait déjà dans la Nomenclature entomologique, à la fin
du XVIIT® siècle.
Conrad Christoph Jung, en 1782, jJugea à propos de publier, à
Francfort-sur-le-Mein, le Verzeichniss der meisten bisher bekannten
europæischen Schmetterlinge mit ihrer Synonymen in Alphabe-
fischen Ordnung verfertigt. Dans ce « Catalogue de la plupart
des Papillons d'Europe connus jusqu'ici, avec leur synonymie
dressée en ordre alphabétique », je trouve Alexis à la page 6 et
Icarus à la page 70.
Je copie les deux articles comme suit : Alexis, Pleb. rur. s. V.
Fam N° n°12 p.184 Scop. n. 461, var. 2 Esp t 32 f T7 MeZor.
Hufn. n° 41. WMedon. Naturf. 6 St. p. 10 und p. 22. n° 0. Alexis
NB. Pode Alexis ist der Wiener Dameætas. Pap. d'Eur. PL 30.
NON a C2r4s, Pap Eép 022) 1 410656 05 Naturi OISE
HerRoesMl et 7 10 Pap d'éuropetbls8 nN80. ur
D'après cela, c’est l’espèce appelée À gestis par Boisduval et tous
nos auteurs français qui serait A/exis. Voici d’ailleurs ce que Jung
dit à propos du nom Agestis (p. 4): « Agestis, Pleb. rur. S. V.
pDap Ham Nn 15/p 194 Scop n 401 Aer var. [>
Le nom As/rarche, Bergstraesser, qui désigne A geshis dans le
Catalog 1901 par Staudinger et Rebel, n’est pas relevé par Jung.
J'ai cru devoir mettre sous les yeux des entomologistes contem-
porains tout ce grimoire confus, afin de montrer avec pièces à
l'appui non seulement combien la base de notre Nomenclature
présente aujourd’hui d'incertitudes, mais dans quel état troublé se
trouvait déjà la désignation des espèces de Lépidoptères, à la fin
de l’avant-dernier siècle.
238 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
La citation de la synonymie de Jung manque un peu de clarté
pour tout le monde et surtout pour ceux qui n’ont pas la clef des
abréviations employées; mais J'ai cru devoir copier le Verzeichniss
tel qu'il est imprimé et sans y changer une virgule.
Quoi qu'il en soit, il faut actuellement s'entendre, et Je crois
qu'on peut désigner sous le nom d’/carus, en toute sécurité de
savoir exactement de quelle espèce il s’agit, le papillon figuré en
dessous par Kleemann-Roesel (vol. IIT, PI. XXX VIT, fig. 5). C’est
la même espèce qu'Ochsenheimer, Huebner et Boisduval ont
appelée Alexis. Elle est répandue dans les plaines et dans les
montagnes; elle habite depuis les bords de l'Océan Atlantique
jusqu’au Turkestan oriental et depuis le nord de l’Ecosse jusqu’au
Sahara algérien. La Zycœna Tcarus (Alexis) offre en Angleterre
une race spéciale et distincte des formes continentales. J'ai donné
le nom de Z'afti à la Lycæna Tcarus anglaise, voulant ainsi honorer
le nom d’un Lépidoptériste très laborieux, auteur très fécond et
aussi estimable par la quantité que par la qualité de la documen-
tation dont il fait part au monde entomologique dans d’incessantes
publications. Je dispose, pour apprécier la question des formes
géographiques de la Zycæna Icarus, d'un nombre d’exemplaires
très considérable. C’est ainsi que ma collection contient environ
150 spécimens britanniques provenant de Rannoch, au Nord de
l'Ecosse (Ried), Dover, Cheshire, North-Devon (Mac Arthur),
comté de Kerry, en Irlande (Salvage), North-Kent, Glengariff,
Folkestone, New-Forest, des collections Prest d’Vork, Howard-
Vaughan et Maddison.
Ce qui différencie la race anglaise 7'wt/i des formes continen-
tales, c’est que 7'u/t1 a les ailes supérieures sensiblement plus
élancées et moins arrondies; de plus, le dessous des ailes des Œ
est d’une teinte grise plus sombre, tandis que le dessus est d’un
bleu un peu plus transparent avec un fond plus rosé; les ©Q Tur#
sont généralement bleues, avec une bordure de taches intraner-
vurales orangées, inférieurement ponctuées de noir, surtout aux
inférieures; elles se distinguent par une éclaircie blanchâtre,
notamment près de l’apex des supérieures et au-dessus de la
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 239
bordure maculaire orangée. Les © cærulescens de France n'ont
pas le même aspect que celles d'Angleterre; les nôtres manquent
de ces traits pâles et de ces larges éclaircies d’un blanc bleuâtre
qui sont la caractéristique spéciale d’un grand nombre de Q /carus
anglaises.
Les Hermaphrodites ne sont relativement pas très rares chez
Icarus; je possède un Hermaphrodite complet G' côté gauche,
© cærulescens côté droit, portant l'étiquette suivante : taken by
J. D. Malton at Beverley, 21/7 1800. Cet Hermaphrodite faisait
partie de la collection Maddison. J'ai aussi, venant de la même
collection, une Q subtus-radiata portant au Catalogue de la vente
l'indication suivante : « very fine underside, all the wings with
large spots and streaks, Dover, Chatwin, 1870. » Par ailleurs, les
Icarus-Tutti varient comme ceux de tous les pays, par la confluence
de certaines taches noires du dessous des ailes qui se rejoignent
et forment un gros trait courbe allongé, notamment près du bord
costal des inférieures et du bord interne des supérieures; aussi
par l'absence plus ou moins totale des ocelles noirs. La plupart
des © Tutti sont cærulescens; il y en a cependant qui ont le fond
des ailes brun, mais toujours avec des parties claires près de l’apex
des supérieures, le long du bord terminal des inférieures, et des
atomes d’un bleu argenté pâle plus ou moins serrés, répandus près
de la base des ailes.
En Bretagne, la Lycœena Tcarus est commune partout, dans Îles
jardins, sur les gazons, dans les bois et sur les dunes du littoral
de la Manche. Elle éclôt d’abord au mois de mai et on la voit
voltiger presque sans interruption jusqu'en octobre. J'ai fait
figurer dans la XX®° livraison des Ærudes d'Entomologie, sous
les n° 41, 42, 43, 44, 45, 46 et 47 de la PI. 4, des Aberrations
diverses, en dessous : #inus-punctata, de Cancale; transitus ad
radiatam, de Cancale; radiata, de Besançon; maculis extensis, de
Chartres; obscurior, de Cancale; en dessus cærulea, de Lambèse,
et Hermaphrodite côté gauche cet côté droit 2/3 Q et 1 LEO
de la collection Boisduval. J'avais déjà figuré une Q 7wfina, de
240 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Bône, sous le n° 52 de la PI. 6 de la XIX° livraison du même
ouvrage.
Pour les explications accompagnant les figures précitées, que Je
ne répéterai pas ici, Je prie le lecteur de vouloir bien se reporter
aux pages 22, 23 et 24 de la XX® livraison.
Je fais figurer dans le présent ouvrage quelques Aberrations
d'Zcarus, notamment : 7adiata, de Berlin; ämpunctata, de Vienne;
cæca, de Dusseldorf; cærulescens, de Bourg-des-Comptes (IIle-et-
Vilaine); Zmpunctata, d'Angleterre et de Digne, et enfin un
Hermaphrodite de Digne.
N'est-il pas curieux de constater l'existence d’une Aberration
d’Zcarus tout à fait analogue à la var. écossaise d’A ges#is, connue
sous le nom d’Ayfaxerces, privée de toute tache noire au milieu
de l’ocelle blanc? (PI XLIIT; fig. 323).
Feu de Graslin et mon frère ont pris en Andalousie la var.
Celina, Austaut, de taille extrêmement petite; le G' est souvent
punctiger, en ce sens qu’il a le bord terminal des aïles inférieures
ponctué de noir dans les espaces intranervuraux. Les © brunes
ou légèrement sablées de bleu sont bien plus nombreuses que les
© cærulea, dans les Pyrénées-Orientales, dans les Basses-Alpes,
en Espagne et en Algérie. On trouve parfois dans cette dernière
contrée des © dont les quatre ailes sont bordées de taches orangées
extrêmement grosses, depuis le bord costal des supérieures jusqu’au
bord anal des inférieures. Je possède quelques Q superbement
bordées de taches orangées prises à Hammam-Rhira en mai 1909
et à Lambèse en juin 1885.
Bellier avait rapporté de Corse une très belle race d’/carus chez
laquelle le dessous des aïles inférieures du GO‘ est d’une couleur
blanc jaunâtre carné, avec les taches orangées très vives; le tout
donnant un effet très brillant. Les ©, brun foncé en dessus, avec
les taches marginales d’un rouge orangé vif, sont, en dessous, d’une
nuance café au lait clair. Le même entomologiste avait trouvé dans
les monts Madonie, en Sicile, des G' très punctiger en dessus et
d’une couleur riche et chaude en dessous.
RE
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 241
Dans les Hautes-Alpes, on trouve des /carus G d’un gris clair
et mat en dessous, avec les taches marginales non pas orangées,
mais d’un jaune très pâle tranchant à peine sur la couleur du fond.
En résumé la Zycæna Icarus est fort variable. La race anglaise
est spéciale et ses caractères la distinguent bien nettement; mais
les formes continentales et insulaires méridionales, quoique pré-
sentant des exemplaires très différents les uns des autres, sont trop
intimement liées entre elles par d’insensibles transitions pour qu'on
puisse raisonnablement les classifier séparément. Les G' sont
grands ou très petits; ils sont, en dessus, ponctués aux ailes infé-
rieures ou totalement dépourvus de points. En dessous, la couleur
de leurs ailes varie du gris clair au blanc jaunâtre carné, quel-
quefois assez foncé aux inférieures. Les © sont brunes ou bleues
en dessus, avec la bordure des taches orangées plus ou moins large
et accentuée; il y a des exemplaires où les taches en question sont
d'un jaune paille presque blanc, d’autres où elles sont d'un rouge
orange vif. Quant à la transition du brun au bleu, elle s'établit
au moyen d'individus plus ou moins sablés d’atomes bleus, depuis
quelques écailles vers la base jusqu’à l’envahissement total par le
bleu. I] y a aussi des O© entièrement ou presque entièrement brunes,
chez qui les taches marginales orangées ont disparu. Quant à
l’ocellation du dessous des ailes, elle est aussi variée que possible.
Il y a des Zcarus chez qui les points sont très gros et cerclés de
blanc, d’autres chez qui ces points sont presque nuls. Cette variation
s'exerce généralement sur une partie plutôt que sur la totalité des
taches ocellées. Enfin il y a les taches noires transformées en
rayons. C’est donc, malgré la vulgarité d’Zcarus, une invitation
aux chasseurs-entomologistes de capturer des séries suffisamment
nombreuses de cette Zycæna pour pouvoir en apprécier les varia-
tions extrêmes reliées entre elles par d’insensibles passages.
Il y a des formes orientales très intéressantes. J'ai reçu du fort
Naryne une grande quantité d’carus remarquables par leur taille
très développée, la teinte générale des G' un peu pâle, en dessus
comme en dessous. Groum Grshimailo m'a envoyé des Monts
Hissar, avec le nom de Kashgharensis, des Tcarus dont les © sont
16
242 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
d'un bleu argenté brillant; mais je ne me sens pas assez docu-
menté sur les formes d’/carus de l'Asie occidentale pour apprécier
avec quelque exactitude les races et les variations de l'espèce dans
cette région.
Herrich-Schaeffer a figuré sous le n° 246 une © Alexis manquant
du point noir à la base des ailes supérieures en dessous. Cette
Aberration est très fréquente. C’est l’/carinus, Scriba, selon Stau-
dinger et Rebel. Herrich-Schaeffer a représenté en outre sous le
n° 362 une © très curieusement 7adiata aux ailes supérieures, en
dessous. Gerhard a copié sous les n°* 8 et 9 de la PI. 38 les deux
figures 246 et 362 données par Herrich-Schaeffer, ainsi que beau-
coup d’autres d’ailleurs, mais en changeant les dessins de côté.
Le même Gerhard figure Alexis G'et © sous les n° 4a, 40 et4c
deal 7
La PI 28 de l'ouvrage Versuch einer Monographie der euro-
paeischen T hecla, etc. est tout entière consacrée à la figuration
de variétés d'Alexis. Les fig. 1 a, 1 6, 1 c représentent une variété
lphis; le Œ Iphis semble être d’un bleu lilas plus pâle que la
forme normale: sous les n°“ 24,2bet 26, c’est la variété 7 kersites
({carinus), chez laquelle manque le point noir basilaire des ailes
supérieures, en dessous. Les n°% 3 a, 3 6 et 3 c représentent, sous le
nom de pusillus, de très petits exemplaires Get Q de la forme
normale; le n° 4 représente la © bleue d’Alexis, les n° 5 a et 5 à
donnent la figure d’un Alexis G de petite taille rapporté d'Es-
pagne par Lederer, et pouvant probablement être rapporté à
Celina. Le n° 2 de la PL 35 représente un Hermaphrodite partiel
d’Alexis communiqué par le capitaine Ver-Huell, d'Arnheim.
Dans l'ouvrage hollandais de Jan Christiaan Sepp, qui, com-
mencé en 1762, se continue encore de nos jours, sous le titre :
Beschrijvingen en Afbeeldingen van Nederlandsche Vlinders
bijeengebragt door Mr. S. C. Snellen van Vollenhoven, se trouvent
figurés sur les PL. XIII et XIV du vol. IT de la 2° série, les pre-
miers états et les insectes parfaits de la Zycæna Alexis; la chenille
est représentée sur Ononis spinosa et il me semble que les chry-
salides figurées de face et de profil, sont attachées à une branche
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 243
de genista anglica. I] y a deux formes de © : la bleue peinte sous
le n° 17 et la brune sous le n° 18.
L'article est signé A. Brants et daté d’Arnhem, Sept. 1865.
Au sujet de cet ouvrage hollandais dont la publication se
poursuit depuis près d’un siècle et demi, Je crois intéresser les
entomologistes en imprimant ici une notice biographique sur Jean
Sepp; elle fut originairement écrite en allemand, par C. von
Heyden, et publiée dans l’Entomologische Zeitung (1855, p. 16);
la traduction française a été faite par feu H. Jekel et le document
que je livre au public faisait partie des papiers entomologiques
de feu À. Guenée.
« Le 19 décembre 1853 mourut à Amsterdam ie hbraire et
entomologiste Jean Sepp. Il était né dans cette même ville, le
18 septembre 1778, et connu comme continuateur de plusieurs
ouvrages publiés sur l’histoire naturelle et plus particulièrement
de ceux entomologiques entrepris par son grand-père Christian
Sepp, né à Goslar, mort à Amsterdam, et son père, Jean Christian
Sepp, né le 8 novembre 1730, mort le 20 novembre 1811. Dans
une communication verbale que me fit le sieur Jean Sepp, actuel-
lement décédé, lors d’une visite que je lui fis à Amsterdam en 1835,
il m'apprit que son grand-père travailla d’abord seul au premier
volume de son ouvrage sur les Papillons néerlandais jusqu'à la
planche 30, puis, jusqu’à la fin, avec la collaboration de son fils.
» C’est certainement un fait rare de voir se continuer cet ouvrage
qui date déjà d'environ un siècle, car bien que le titre du premier
volume soit de l’année 1762, il est certain qu’une grande partie du
travail en avait été commencé beaucoup plus tôt.
» Actuellement il a paru du 7° volume jusqu’à la page 108 et
la planche XLVI (Mamestra Chenopodu, F), et l'ouvrage va être
continué par un fils du défunt. Des Entomologistes néerlandais
distingués, tels que Snellen, van Vollenhoven, Ver-Huell, Van
Eyndhoven, de Graaf, Trapp, van Medenboch de Rooy, d’Ailly,
Herklots, etc., y joignirent leurs observations et fournirent même
parfois tout le texte de certaines espèces. Les figures, surtout celles
244 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
dans les premières parties qui proviennent encore de Christian
Sepp, surpassent manifestement celles de Roesel, et il est frappant
que, même la continuation de cet ouvrage soit si peu connue en
dehors de la Hollande. Les espèces qui y sont contenues sont à
peine citées dans les autres ouvrages entomologiques, ce qui tient
probablement à ce qu’il est écrit en langue hollandaise et est d’un
prix élevé. D’autres ouvrages remarquables sur l'Entomologie, tels
que ceux de Cramer, Stoll et Voet, font également partie du fond
de la Librairie Sepp, de sorte que cette famille, en plusieurs géné-
rations, s’est rendue très utile à l’'Entomologie, sans parler des
autres branches de l'Histoire naturelle. »
Lycæna Agestis, W. V.
On lit dans l'ouvrage Die Schmetterlinge von Europa, 1808, de
l'acteur Ferdinand Ochsenheimer, à la page 46 de la 2° partie du
1* volume, la notice suivante concernant À gesfis : « Dass dieser
Falter der ?. Agestis des Wien. Verz. sey, davon habe ich mich
durch den Anblick der Schiffermueller'schen Sammlung ueber-
zeugt und die Anmerkung der Verfasser S. 183.; in welcher sie
das Weib des ?. Alexis von dem P. À gestis unterscheiden, bestae-
tigt dasselbe. »
Voici la traduction française littérale de cette observation : « De
ce que ce papillon est le P. Agestis du Catalogue de Vienne, je
m'en suis convaincu par l'examen de la collection de Schiffer-
mueller; et la remarque des Auteurs (p. 183) dans laquelle ils
distinguent la femelle du P. Alexis du P. Agestis confirme cela. »
En effet, à la page 183 du Systematisches Verzeichniss der
Schmetterlinge der Wiener gegend, publié à Vienne en 1776, 1ly a
une courte remarque pour séparer les unes des autres les espèces
de Papiliones polyophthalmi qui sont nos Zycæna actuelles.
La © d’Alexis (Jcarus) a toujours un peu de poussière bleue
sur le dessus des ailes et cela la distingue d’Ageszis; mais 1l s'en
faut encore de beaucoup pour que Agestis, dont le O' est brun
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 245
comme la ©, ait été nettement distingué en ces temps-là. Quoi
qu'il en soit, par ordre de date, je crois que le premier nom est
A gestis et, dès lors, ce nom prime, par ancienneté, l’As/rarche de
Bergstraesser, dont l'ouvrage date de 1770. D'ailleurs ledit
Bergstraesser se doutait bien que son As/rarche n'était qu'un
synonyme d’A ges/is, puisqu’au bas de la page 4 du vol. III (Dritter
Jahrgang) de l’ouvrage WNomenclatur und Beschreibung der
Insecten in der Grafschaft Hanau-Muenzenberg, Vauteur imprime
en note : A gestis (femina) W. Sch. 184 13?, et pour son papillon
Salacia qui semble, d’après les fig. 1 et 2 de la Tab. 50, être, à
cause du lavis bleu à la base des ailes, une © d’Alexis (Jcarus),
ces mots : « Medon, Esp. Tab. 32, fig. 1 ». Bergstraesser connais-
sait donc l'ouvrage d’'Esper paru en 1777 comme il connaissait
l'ouvrage des Thérésiens paru en 1776; or, le nom de Wedon
primerait encore le nom d’Assrarche; mais Medon n'est1l pas un
nom applicable à une © d’Alexis (Icarus) plutôt qu'à À gesris ?
Je ne puis le dire avec certitude, vu le peu de perfection dans
l'exécution de la figure. La question reste donc bien obscure. Il
semble toutefois qu'Ochsenheimer distingue bien Agestis. Il sait
que les ailes sont brunes chez le G' comme chez la © ; et du moment
qu’il a vu la collection Schiffermueller, ce qui a fait sa conviction,
dit-il, je crois qu’on peut partager cette conviction et garder le
nom d'A gestis 1776, préférablement à celui d’As/rarche 1770, dont
la figure, d’ailleurs extrêmement grossière, ne fait guère honneur
à ceux qui l'ont publiée.
L’A gestis est répandue en Angleterre, en France et dans une
grande partie de l'Europe, ainsi qu'en Algérie et en Asie; elle est
généralement assez abondante, mais beaucoup moins qu'A/exis
(Zcarus).
En Ecosse, on trouve la variété géographique Aytaxerces, Fabr.,
dont Boisduval a donné dans l’/cones une assez bonne figure sous
les n* 7 et 8 de la PL 14 Duponchel a très bien représenté
Artaxerces sous les n° 3 et 4 de la PL IX du Supplément. Guenée
possédait des Aytaxerces que lui avait envoyés Doubleday, en
l'informant que la chenille identique à celle d’Ageszis vit sur
246 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
l’'Helianthemum vulgare. En dessus, chez Artaxerces, le point dis-
coidal aux ailes supérieures est blanc; généralement la bordure
de taches rouges n’est pas très accentuée en dessus, en ce sens que
les taches rouges sont plutôt petites; quelquefois elles sont appa-
rentes sur les ailes inférieures seulement; d’autres fois, on en voit
3, 4, 5 ou 6 le long du bord des supérieures. En dessous, les ocelles
sont aveugles, c’est-à-dire tout blancs sans ponctuation centrale
noire; mais il y a tous les passages entre la variété Ay/axerces la
plus caractérisée et la forme normale À ges/is qu’on trouve au sud
de l'Angleterre. Cette transition est fournie par la variété Salmacis,
Stephens, qui a les taches blanches du dessous des ailes finement
ponctuées de noir. Je possède une longue série d’Ayfaxerces prises
dans le nord de l’Ecosse, par Ried, ou ayant fait partie des
anciennes collections John Sang de Darlington, Prest d'Vork,
Sheppard, Briggs, Doubleday (in coll. Guenée et de Graslin), etc.
Les exemplaires écossais sont généralement de plus petite taille
que ceux du Continent.
Je crois intéressant de présenter aux Entomologistes français la
traduction de la notice consacrée à Agestis par Charles Barrett,
à la page 76 de son important ouvrage contenant une histoire très
complète des papillons anglais.
Je suis redevable de cette traduction à M. Harold Powell.
Il s'agit de l'étude comparée des formes anglaises À ges/s,
Salmacis et Artaxerces.
M. Barrett s'exprime en ces termes :
« Une longue polémique eut lieu, il y a quelques années, au
sujet de la plante nourricière de la chenille d’A gestis; la supposée
restriction de la forme méridionale à l'Ærodium, et de la forme
septentrionale à l’Æelianthemum, étant admise comme évidence
puissante de la distinction spécifique des deux formes : A gestis et
Artaxerces. Ceci, cependant, a été réfuté par feu M. W. Buckler,
qui se procura par l'intermédiaire de M. W. R. Jeffrey, d’Ashford,
des œufs d'A gestis sur Helianthemum, et éleva les chenilles jusqu'à
la maturité; d'autre part, des chenilles sur la même plante, reçues
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 247
de M. Robson, lui donnèrent les trois formes. Il ressort cependant
des observations de M. Robson que les formes septentrionales :
Salmacis et Artaxerxes, sont produites seulement par des chenilles
ayant hiverné, et que plus au nord, où l’Agestis type ne se trouve
pas, il n’y a qu’une seule génération dans l’année.
» Ce papillon ne montre pas beaucoup d'activité. II voltige pai-
siblement dans les creux chauds des coteaux, dans les champs,
ou sur les pentes abritées des dunes, et on peut facilement le
confondre avec la femelle d’une des autres espèces. Il aime bien
à se reposer et à dermir sur les tiges de grandes graminées,
surtout sur les feuilles enroulées du Marram-grass (Awmoplhila
arundinacea).
» La forme typique abonde dans la moitié sud de l'Angleterre
__ sur les collines crayeuses au milieu des Æelianthemum, sur les
dunes de la côte et les endroits sablonneux de l'intérieur, là où
l’'Erodium pousse communément. M. À. H. Clarke m'assure que
ce papillon était autrefois abondant à Wormwood Scrubbs, près
de Londres. Je l'ai trouvé en masse dans le com occidental
extrême du sud du pays de Galles. Dans les comtés du centre il
devient plus localisé, et est rare, ou bien il manque dans bien des
régions; mais il est commun dans le Dovedale en Derbyshire, et
se trouve aussi à Scarborough; à Grange Silverdale et Chatmoss
en Lancashire: et est même signalé aussi loin vers le nord que
Dumfries. Mais, au sud de cette région, l'espèce se montre en
général sous la forme Sa/macis, comme à Richmond, Yorkshire;
et dans le Cumberland; tandis que la variété A7/axerces est, ou
du moins était, abondante sur les Pentlands, remontant la côte
Ecossaise dans l’est presque jusqu'à Aberdeen, et dans l'ouest
jusqu’à la région de la Clyde.
» Dans le Roxburgshire, juste de l’autre côté de la frontière,
M. Adam Elliott la trouva dans les clairières d’un bois de pins,
se posant sur les fleurs de la Centaurea nigra. Dans cette localité,
l'individu le plus précoce a été vu le 19 juin. D’habitude l'espèce
y volait en juillet; la seule éclosion durant jusqu'à la fin de ce
moIs.
248 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
» En Irlande on ne paraît avoir observé que la forme typique
— et son existence dans ce pays semble même douteuse. M. Birchall
l'a signalée en effet dans le comté de Wicklow et près de Dublin,
et également dans les Mourne Mountains, près Rostrevor; mais
il a exprimé ensuite des doutes sur ces records. »
En Bretagne, Agesfis paraît localisée; elle n’est pas rare à
Cancale, sur les pelouses de mon jardin, où Je la vois éclore deux
fois par an, en mai et en août; elle est au contraire très rare à
Rennes; mais elle est très abondante dans les bois de pins à l’ouest
de Plouharnel, près de l'endroit où le chemin de fer qui va de la
gare de Plouharnel à Quiberon coupe la grande route de Plou-
harnel à Quiberon. J'ai vu en août 1000, sur des genêts qui crois-
saient dans les sables, au milieu des clairières de la forêt, de véri-
tables essaims de Zycæna Agestis. En frappant avec un bâton
les branches de genêt, on faisait lever de grandes quantités
d'A gestis qui ne s'écartaient point des genêts et revenaient se poser
sur ces papilionacées dès que le mouvement qui les avait troublées
paraissait terminé. La Lycæna Agestis est une espèce de plaine
et de montagne; je relève dans ma collection les localités suivantes
où elle a été recueillie, en outre de celles déjà citées : Charroux
(Vienne); Dompierre-sur-Mer (Charente-Inférieure); Savoie et
Haute-Savoie; Alpes-Maritimes; Isère; Hautes-Pyrénées, à des
altitudes diverses, en juillet; Vernet-les-Bains (P yrénées-Orien-
tales); col du Mont-Genèvre; Lautaret; Monetier-de-Briançon
(Hautes-Alpes); Larche (Basses-Alpes), juillet 1807; Digne;
Bouches-du-Rhône; Paris (ex-coll. Bellier) ; Les Châtelliers (Eure-
et-Loir); Nantes; Vendée; Cette (Hérault); route du Simplon,
Ryffelalp, Zermatt (Valais), en juillet, Fusio (juillet 1907); Jura
bernois; Vittoria et Mont Gorbea; Barcelone; Sierra-Nevada,;
Grenade et Sierra-de-Alfakar: Sierra-de-Ronda, Jimera à Benoa-
jan, 12-13 mai 1894; Cordoue, juin 1880; Castille; Corse; Sicile
(Bellier); Sulmona (juillet) ; Paternopoli; Castellamare-di-Stabia ;
Rome: Catanzaro (Italie); Sebdou; Lambèse (avril et juin 1884);
Djurjura (juillet 1884); Biskra (mai 1885); Géryville (mai 1886);
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 249
Magenta (juin 1886); Daya (Algérie); Fort Naryne (Turkestan) ;
Tokat (Asie-Mineure) ; Larnaca (Ile de Chypre); Akbès (Syrie);
Caucasie; Sibérie; Simla (N. W. Inde); Sikkim; Nord de la
Chine.
Partout le G et la Q sont, en dessus, d’un brun foncé un peu
brillant, sans aucun atome bleu; dans les plaines de la France,
les ailes sont ornées, en dessus, d’une bordure marginale bien
accentuée de taches intranervurales rouge orangé vif. Un point
noir clôt la cellule aux ailes supérieures. En dessous, le fond des
ailes varie du gris blanchâtre au brun, avec les points noirs ordi-
naires cerclés de blanc et une éclaircie blanche sur les ailes infé-
rieures, au contact du milieu de la bande marginale rouge orangé;
cette bande surmonte une série de points noirs intranervuraux qui
sont presque contigus au bord terminal. Ces points sont souvent
visibles en dessus, étant, comme le point cellulaire, d’un noir plus
foncé que le fond brun noirâtre des ailes. La frange est blanche
mélangée de brun clair.
Dans les montagnes alpines et pyrénéennes, les taches rouge
orangé du bord des ailes, en dessus, disparaissent quelquefois
totalement ; le plus généralement, elles sont seulement rétrécies et
plus ou moins réduites; la frange paraît plus blanche.
L’A gestis est de taille relativement très grande à la Sierra-de-
Alfakar et à la Sierra-Nevada, en Andalousie; les taches rouge
orange du bord des ailes sont très réduites, comme dans les Alpes
de France et de Suisse, tandis qu’en Castille, dans la vallée de
Ronda et aux environs de Grenade, la Zycæna A gestis ne semble
pas différer de la forme normale de la France centrale et méri-
dionale. En Algérie et en Corse, on trouve parfois des exemplaires
Q ayant les taches rouge orange extrêmement développées, aussi
bien en dessus qu’en dessous; les ©, en Corse, ont le dessous des
ailes d’un brun roux; les O' sont gris de lin, en dessous; c'est la
variété calida, Bellier.
A gestis est donc une espèce très variable suivant les lieux et les
altitudes, et je crois pouvoir établir comme suit le tableau assez
complet des variations :
250 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
1° Artaxerces,; ailes du C' un peu élancées; les taches orangées
marginales réduites; la tache cellulaire des ailes supérieures
blanche; toutes les taches du dessous des ailes blanches et privées
de pupillation noire; Nord de l’Ecosse.
L'Ab. quadripunctata, Tutt, a en outre deux points blancs sur
le disque des ailes inférieures.
2° Salmacis; passage d’Artaxerces à A gestis; le point cellulaire
blanc des ailes supérieures, en dessus, est ponctué de noir; les
points blancs du dessous sont finement pupillés de noir; Nord
de l’Angleterre.
3° Allous, Huebner; O' 980, 090; Q 991, 092; le G' est abso-
lument tout noir en dessus; en dessous, les deux sexes sont d’un
gris noirâtre analogue à Eumedon, et les taches, au lieu d’être d'un
rouge orangé, sont d’un jaune clair. Je possède 3 c' conformes
aux figures 080 et 090 données par Huebner; ils ont été pris en
mai 1903, à 45 kilomètres à l'Est de Zlaoust, dans l’Oural
méridional.
4° Nevadensis, Obthr.; diffère d’Allous, Huebner (088), par sa
taille sensiblement plus grande et la couleur jaune crème un peu
carnée du dessous des ailes chez le G. La Q a le dessous des ailes
roux et une bordure de taches rouges aux quatre ailes. Vole en
juillet dans la Sierra-Nevada et la Sierra-de-Alfakar; je possède
16e 310, 1les uns pris par mon frère en Juillet 1870, les autres
provenant des collections de Graslin, Boisduval et Bellier.
Rambur parle de cette variété, sans lui donner de nom, à la
page 266 de la laune entomologique de l'Andalousie et à la
page 38 du Catalogue systématique des Lépidoptères de l'A nda-
lousie. Boisduval avait dans sa collection, sous le nom inédit de
Morenae, un S de taille plus grande encore que Wevadensis, dont
le dessous des ailes est plus gris et moins jaune paille carné que
Nevadensis. On trouve aux environs de Vernet-les-Bains, suivant
l'altitude des lieux où l’on chasse, des exemplaires qui sont bien
conformes à Vevadensis des montagnes d’Andalousie.
s° Agestis, Huebner. Sous les n° 303, 304, 305 et 306, avec le
nom d'A gestis, et sous le n° 088, avec le nom d'Allous, Huebner
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE DE
figure l'A ges/is de nos montagnes alpines et pyrénéennes. Le Ca
seulement 4 taches rouges aux ailes inférieures, en dessus; les
taches du dessous des ailes sont de couleur rouge plus accentuée
que chez l’Allous 989 et 092; le fond de la teinte, en dessous, est
gris chez le G' et roux chez la ©; c'est la forme que nous trouvons
au Lautaret et au col du Mont Genèvre, dans les Hautes-Alpes;
dans le Jura bernois, aux environs de Fusio, de Larche, d'Uriage,
de la Madone de la Fenestre (Alpes-Maritimes); de Lanslebourg
et dans quelques parties des Pyrénées, notamment à la haute vallée
de Cady, au-dessus de Casteil (Pyrénées-Orientales). Dans les
Hautes-Pyrénées (Cauterets, Gavarnie), la forme tend à Gallica,
comme aux environs de Vernet-les-Bains, dans les parties peu
élevées et chaudes. Les figures données par Gerhard sous les
n® 14, 14,1cet 2 de la PI. 26, avec leurs taches rouges petites
mais vivement colorées chez les O', conviendraient pour représenter
certaines formes d’Agestis pyrénéennes. En donnant le nom
d’Albus à la Q 2, Gerhard commet évidemment une erreur.
Le papillon figuré par Freyer comme Ages#s, sous le n° 1 de
la Tab. 235, ressemble pour la taille et le dessus des ailes à
Nevadensis; mais en dessous il est d’un gris un peu plus blanc
jaunâtre et non pas d’un jaune clair carné; cependant l’Ages/s
de Freyer, pas plus que l’Agesiis de Huebner, ne représentent
l’'Agestis des environs de Paris. Je ne connais malheureusement
pas la forme allemande d’A gestis, et les Entomologistes allemands
ne paraissaient pas autrefois connaître la forme française de la
même Zycæna. Cela tient au dédain professé par tant d'amateurs
pour les espèces de papillons réputées vulgaires. La recherche
exclusive des espèces considérées comme rares ou ayant une haute
valeur en Pfennig n’a tout de même rien de scientifique. Le mer-
cantilisme que certains Lépidoptéristes envisagent comme le but
suprème de l’'Entomologie est, à mon sens, une conception fausse
et contraire aux progrès scientifiques; mais je ne me fais point
l'illusion de pouvoir changer quoi que ce soit à un système auquel
sont cramponnés tant d'excellents confrères. Aussi je me garde
d’insister; et revenant à la question d’A gestis, je constate que notre
252 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
forme française des plaines parisiennes, analogue à la forme bre-
tonne et poitevine, n’a pas encore été figurée; en effet, Godart a
représenté le dessous seulement d’A ges/is, ce qui est insuffisant.
Je décris donc cette forme inédite sous le nom de gallica.
6° Gallica, Obthr, intermédiaire entre Agestis, Huebner, et
calida, Bellier ; la bordure des taches rouge orangé est, en dessus,
de couleur très vive; chez les ©, les taches rouges sont moins
grandes que chez les © ; elles n’arrivent pas toujours à Joindre le
bord costal des ailes supérieures ; mais très fréquemment chez les G
et toujours chez les ©, la bordure de taches rouges commence
auprès du bord costal des supérieures et descend jusqu’au bord
anal des inférieures. Le dessous des Cest gris et le dessous des Q
est roux. Environs de Paris; Bretagne; Poitou, et certaines parties
des Pyrénées.
7° Calida, Bellier; c'est l’exagération de gallica; les taches
rouges, chez les G' comme chez les ©, sont plus grandes et de
couleur très vive. Chez certaines ©, les taches rouges confluent en
une large bande et prennent un développement considérable. Les
Q sont, en dessous, tantôt d’un brun roux très chaud, comme dans
le type calida, tantôt grises, comme dans la sous-variété ornata,
Ster. de la variété calida, Bellier.
Je possède Calida de Corse (les types), de Rome, de Grenade
et de diverses localités d'Andalousie. J'ai des Ornata de Lambèse,
de Magenta et de Daya. Il y a d’ailleurs tous les passages depuis
le fond gris des ailes jusqu’au roux foncé, c’est-à-dire depuis
Calida jusqu'à Ornata. D'après Staudinger et Rebel (Catalog,
1001, p. 83), Orna/a serait vernale et Calida serait estivale. C'est
une erreur; Car j'ai pris moi-même, le 12 mai 1894, dans la vallée
entre Ronda et Algésiras, une © Calida très rousse en dessous.
Dans l'ouvrage Æntdeckungs-Reise in die Sued-See und nach
der Berings-Strasse zur Erforschung einer nordoestlichen Durck-
fahrt, unter dem Befehle des Lieutenants der Russisch-Kaiserli-
chen Marine Otto von Kotzebue, publié à Weimar en 1821, se
trouve décrite à la page 217 du 3° volume et figurée assez grossiè-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 253
— —
rement sous les n° 264 et 266 de la PI X, avec le nom de
Cramera, la forme d'A gestis, rencontrée à Ténériffe. Les descrip-
tions des papillons imprimées dans cet ouvrage sont leuvreide
Friedrich Eschscholtz. M. Blachier, dans les Arales de la Soc.
ent. de France, 1880, a figuré avec le nom de Canartensis, sous
les n°° > et 8 de la PI. 4, la même forme d’A ges/is venant également
de Ténériffe. Le développement considérable de la bordure de
taches rouge orange aux ailes supérieures, comme aux ailes infé-
rieures du ©, indique que Cramera (Canariensis) est probablement
l'expression extrême dans le sens du développement des taches
orangées en dessus, de la Zycœna Agestis. Calida serait la tran-
sition entre gallica et Cramera (Canariensis).
8 Chinensis, Murray; le bord des ailes est plus dentelé; le
dessous des © est plus gris et le bord des ailes entre le liséré
terminal noir et les points noirs qui sont à l'extrémité de la bande
rouge est blanc. Chine du Nord.
Par aberration : 1° les taches rouge orangé peuvent être Jaune
pâle, Ab. pallidior, Obthr.; 2° tous les ocelles noirs du dessous
des ailes peuvent disparaître. J'ai fait figurer dans la Feuille des
Jeunes Naturalistes (n° 18; 1900) une Q prise par Austin à
Folkestone, de l’ancienne collection Briggs, qui n’a conservé en
dessous que les 4 points noirs cellulaires. Ab. z#punctata, Obthr.;
3° les ocelles noirs peuvent former des traits noirs; j'ai fait repré-
senter une remarquable Ab. radiata d'Auvergne, sous le n° 51 de
la PL 4 de la XX° livraison des Æ/udes d'Entomologie.
Il y a des exemplaires © extrêmement ambigus et embarras-
sants: sont-ce des Zcarus (Alexis); sont-ce des A gestis? de même
entre Adonis (Bellargus) © et Corydon Q,1lya quelquefois une
telle ressemblance que l'attribution exacte de certains exemplaires
à l’une des espèces plutôt qu’à l’autre est bien difficile et souvent
impossible à résoudre exactement. Cela n'empêche pas À ges/is
d’être une espèce très distincte d’/carus (Alexis), aussi bien que
Corydon est une espèce très distincte d'Adonis (Bellargus).
Toutes les © qui ont des atomes bleus sur le dessus des ailes sont
des Zcarus (Alexis), non des Agestis; mais il y a, surtout en
254. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Tunisie et dans l'Italie méridionale, des échantillons quelquefois
bien embarrassants.
Lycæna Eumedon, Esper.
Chez la Zycæna Eumedon, comme chez À gestis, le et la Q
sont, en dessus, de la même couleur. Les deux sexes d’A ges/is sont
bruns; les deux sexes d’Eumedon sont noirs.
Esperheuretsous les n#2/et > de la Tab PNA oO MePMIEnS)
d'après des exemplaires recueillis « dans la forêt, au mois de
mai ». Je suppose que cette forêt se trouve près d’'Erlangen, ville
où fut édité l'ouvrage d’'Esper, en 1777. Huebner a très bien figuré
Eumedon S' sous les n* 301 et 302. L’exemplaire représenté en
dessous (302) porte aux ailes inférieures la bandelette blanche,
comme l'exemplaire Q figuré en dessous sous le n° 7o1. La
figure 700 représente la © en dessus; elle a trois points fauves
le long du bord terminal des ailes inférieures et deux aux supé-
rieures, près de l’angle interne.
La Zycæna Eumedon est en France une espèce de montagne;
elle habite à une altitude d'environ 1,500 à 1,700 mètres; elle
manque en Angleterre, en Algérie et dans toutes les plaines fran-
çaises ; mais elle se trouve en Sicile où Bellier l’a capturée, pendant
son voyage d'exploration entomologique en 1850. Dans ma col-
lection, il y a des exemplaires d'Exmedon provenant des localités
suivantes : forêt entre Zermatt et Ryffelalp, en juin, juillet; Béri-
sal; Pieracave, dans les Alpes-Maritimes, en juin; Lanslebourg
(Savoie); forêt de l’'Oursière, au-dessus de Saint-Martin-d'Uriage
(Isère); Larche (Basses-Alpes); plateau du Revard, au-dessus
d’Aix-en-Savoie; Jura bernois; forêt de Randaïi, au-dessus de
Vernet-les-Bains; Cauterets (Hautes-Pyrénées); Bosmie; Prusse;
Wiesbaden; Broussa (Asie-Mineure); Fort Naryne (Turkestan
oriental); Koukounoor; Oural méridional; Sicile. Rambur dit
avoir pris un exemplaire dans la Sierra-Nevada; mais je n'ai
jamais vu d’Eumedon récolté en Espagne. |
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 255
La Lycæena Eumedon éclôt d'assez bonne heure dans la saison,
généralement en juin; elle est souvent complètement passée au
mois de juillet ; elle fréquente les forêts de melèzes dans les mon-
tagnes ; on la voit voler sur les touffes de Geranium, en compagnie
d'A cis (Semiargus) et de Donselii. On la trouve par petits groupes
et elle s'éloigne fort peu du lieu qui l’a vue naître.
Elle varie pour la couleur du dessous des ailes qui est plus ou
moins grise ou brune; pour l'absence ou la présence de la bande-
lette blanche sur le dessous des ailes inférieures. On peut trouver
au même lieu des Ermedon avec bandelette et des Eumedon sans
bandelette blanche; ainsi, dans la forêt de melèzes et de pins
aroles entre Zermatt et Ryffelalp et au Fort Naryne, on trouve les
deux formes: celle qui n’a pas de bandelette a reçu le nom de
Fylgia, Spgbg; la forme intermédiaire, où la bandelette est plus
ou moins apparente, s'appelle Speyeri, Husz. Il y a aussi la belle
Ab. radiata dont j'ai fait figurer un exemplaire C' sous le n° 50
de la PL 4 de la XX® livraison des Æzudes d'Entomologie; et
l'Ab. inverse : subtus-impunctata, qui n’est pas très rare. En
Prusse, la race semble grande et presque toujours v#//ata. En
Sicile, elle paraît petite et également vi//ata. Dans les Alpes-
Maritimes, j'ai pris un superbe G' dont la teinte, en dessous, est
tout à fait particulière. Le développement des taches rouges mar-
ginales du dessous des ailes est aussi très variable. Il y a des G
au Fort-Naryne chez qui ces taches rouges sont très accentuées,
s'étendent aux quatre ailes et atteignent presque le bord costal
des supérieures. Au Koukounoor, le fond des ailes est brun roux,
en dessous, au lieu d’être gris comme en Savoie. Les © sont quel-
quefois entièrement noires en dessus, comme les d. Elles peuvent
aussi montrer des taches jaune orange en dessus, le long du bord
des ailes inférieures et même près de l'angle interne des supé-
rieures. La frange des quatre ailes est généralement bien blanche
et l'encadrement qu’elle donne aux ailes contraste avec leur couleur
d'un noir profond. J'ai fait figurer sur la PI. XLII du présent
ouvrage quelques exemplaires d'Eumedon qui m'ont paru offrir
de l'intérêt.
256 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Lycæna Idas, Rambur.
Espèce jusqu'ici exclusivement espagnole; figurée par Rambur
sous les n® 5 et 6 de la PL 10 de la Faune de l'Andalouste. Elle
fut trouvée sur des parties très élevées et légèrement arides de la
Sierra-Nevada, à plus de 2.000 mètres d’élévation. Rambur dit
avoir pris une variété dans les localités moins élevées de la Sierra-
Prieta, chez laquelle les points noirs des ailes inférieures ont
presque entièrement disparu (PI. 10, fig. 7). {das se montre au
mois de juin, voltige très près de terre et se pose sur les plantes
basses. Ma collection contient une série d'échantillons pris par de
Graslin qui fut, comme l’on sait, le compagnon de Rambur. Je lis
sur les étiquettes écrites par feu de Graslin : « Sierra-Nevada,
17 juillet et 15 août ». Donc l’'Espèce n'apparaît pas seulement
au mois de juin. Le docteur Thomas Algernon Chapman a trouvé
Idas à Casayo, dans le Nord-Ouest de l'Espagne, du 2 au
8 juillet 1906. Il ne me semble pas que les /das de Casayo
diffèrent de ceux de la Sierra-Nevada. Le D' Chapman a publié
de bonnes figures sous les n° 13, 14 et 15 de la PI. V des 77ans.
ent. Soc. London, 1007. L’Espèce varie pour le développement de
la tache discoïdale des ailes supérieures, en dessus.
Lycæna Donzelii, Boisduval.
Découverte par Boisduval en 1825, aux environs de Briançon,
et dédiée par lui à son ami Donzel, de Lyon, « dont le zèle et
le talent observateur nous ont fait connaître plusieurs espèces
nouvelles ». Boisduval a bien figuré Donzelu, dans l’/cones, sous
les nr, 2tet3 dela Pleure
La Lycena Donselii n’est pas rare dans la forêt de melèzes
entre Zermatt et Ryffelalp; mon fils, le docteur J. Oberthür, l’a
prise aux environs de Lanslebourg, en Savoie. Elle a été capturée
à Enchastrayes et à Larche (Basses-Alpes); je l’ai rencontrée au
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Dur
col du Mont-Genèvre, le 18 juillet 1006, et à la Grave, du 21 au
28 juillet de la même année. Mon frère l’a observée pour la pre-
mière fois, dans les Pyrénées-Orientales, à la forêt de Randai, en
juillet 1006; depuis cette époque, elle a été retrouvée en Juillet 1908
et 1909 dans la même forêt, entre Randaï et le plateau gazonné
de Mariailles.
La forme pyrénéenne, d’après 14 exemplaires que J'ai sous les
yeux, ne paraît pas différer de celle des Alpes. En Finlande et
dans l'Oural méridional, on a trouvé une race de Donzeli appelée
septentrionis. Le Œ a le dessus des ailes d’un ton verdâtre plus
clair et la bordure noire est plus étroite et plus nettement définie
sur le dessus des ailes.
Je crois qu'Ayacinthus, Herrich-Schaeffer, est une forme de
Donzelii privée de bandelette sur le dessous des ailes inférieures
et présentant un développement plus accentué des taches margi-
nales qui sont d’un fauve orangé vif. Ayacinthus a été prise par
Kindermann aux environs d'Amasieh. Herrich-Schaeffer en a
donné de bonnes figures sous les n° 345, 346, 347 et 348.
Lycæna Rippertii, Boisduval.
M. Rippert, de Beaugency, qui fut jadis un entomologiste très
ardent, découvrit cette Zycæna, dont les deux sexes sont également
d'une couleur brune, en 1820, aux environs de Digne. Boisduval a
figuré la Lycæna Rippertii sous les n°* 4, 5 et 6 de la PI. 16 de
l’Zcones, et il en a publié la ‘description aux pages 68 et 69 de
cet ouvrage, en 1832. L'espèce fut également figurée sous les
n*% 058, 059 et 060, par Huebner, avec le nom de Ripertu. On
remarquera qu'il y a chez l’auteur allemand une faute dans
l'orthographe du nom Rippert.
Duponchel a figuré Réppertii dans le Supplément, sous les n° 1
et 2 de la PI X, et il a décrit l'Espèce aux pages 61 et 62.
Duponchel se trompe certainement en disant qu'il a trouvé Rippertii
dans la Lozère, en 1817. D'après ce que Boisduval et Duponchel
17
258 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
lui-même nous font connaître, il s'agit non pas d’un O, seul sexe
pourvu de caractères spécifiques facilement distinctifs et très
tangibles, mais d'une © qui fut capturée par Duponchel, que cet
auteur a d'abord appelée Damon et qu'ensuite il a cru devoir
rapporter à Rippertü. Mais Damon se trouve dans la Lozère aussi
bien que Dolus, tandis que Rippertii n'a jamais encore été ren-
contrée dans ce département. Comme les Q des trois Zycæna
Damon, Dolus et Rippertii sont à peu près semblables entre elles
et très difficiles à distinguer spécifiquement les unes des autres,
l'erreur de détermination est facile à commettre; il n’est cependant
pas vraisemblable qu’une seule © de Réppertii ait été trouvée dans
la Lozère à l'exclusion du Œ' qu’on n'y a encore jamais vu. Dès
lors je suis convaincu que Duponchel a donné à tort, plus tard, le
nom de Rippertii à une © qu'il avait d'abord rapportée à Damon.
La première idée de Duponchel devait être la bonne.
Quant à Ripartü, Freyer, c'est un nom qu'il me paraît à propos
de supprimer de la Nomenclature, à cause de son évidente incor-
rection et de l'impossibilité où l'on se trouve de l’attribuer avec
certitude à l’une des trois espèces : Damon, Dolus ou Rippertu.
Freyer, avant de publier l'ouvrage : Meuere Beitraege, etc. Augs-
burg, 1833, a fait imprimer sur un format minuscule, à Augsburg,
en 1830, un premier travail entomologique intitulé : Bettraege zur
Geschichte europaeischer Schmetterlinge.
Dans ce petit livre, aux pages 128 et 120, Freyer décrit une
Lycena dont il figure la Q seulement, sous le n° 3 de la Piles
avec le nom de Ripartü. Freyer dit que l’exemplaire lui a été
communiqué par le Baron Von Vimmer, de Prague. C'est une O;
elle est très voisine de Damon Q et comme Damon ©, elle a un
trait blanc sur les ailes inférieures, en dessous. Les deux sexes,
dit Freyer, sont, en dessus, d’un brun obscur et, en dessous, d’un
gris brun avec les ocelles ordinaires noirs, bordés de blanc. Tou-
tefois, Freyer ne parle nullement des caractères distinctifs du ©
c'est-à-dire de cet espace soyeux si caractéristique qui existe sur le
dessus des ailes supérieures de la Zycœna Ripperti Œ. Je pense
que Freyer n'aurait pas manqué de signaler ce caractère, s’il avait
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 259
D —
été à même de l’observer. Je suis donc porté à croire que Freyer
n’a réellement connu que la ©, seul sexe dont il a donné la figure
et dès lors il est impossible de savoir à quelle espèce il convient
de rapporter cette Q; car, ainsi que Je le constate plus haut, il
n'y a aucune distinction vraiment appréciable entre lESMO des
trois espèces : Damon, Dolus et Ripperti.
Freyer dit que Ripartä vient d'Espagne. En effet, la Lycæna
Rippertii a été trouvée en Espagne; mais Damon y a été trouvée
aussi et au même lieu que Rippertü. D'ailleurs est-ce bien d'Es-
pagne que vient le Répartii de Freyer ? On sait, par l'histoire de
la Zygœna Favonia, qu'en fait de géographie, Freyer a des idées
qu'on pourrait qualifier de très larges. Puis, d'où vient ce nom de
Ripartii ? L'ouvrage de Freyer est daté de 1830; la découverte de
l'Espèce par feu Rippert, date de 1820. Ne serait-ce point un
papillon de Digne plutôt que d'Espagne, qui aurait été déjà répandu
sous le nom de Ripperti, nom que Freyer aurait estropié et changé
en Æipartü, comme il a changé, dans une autre circonstance,
l'Algérie pour le pays des Turcs.
Toujours est-il qu’il semble fort probable d'une part que le nom
Ripartii n'est que la dénaturation du véritable nom Rippertu, et
d'autre part rien n'indique que Freyer ait réellement eu en vue la
vraie Ripperti, dont il aurait vraisemblablement fait figurer lete
plutôt que la ©, si réellement le G' avait été mis à sa disposition.
Pour toutes ces raisons, je pense que le nom correct de A2ppertu,
donné par Boisduval, doit être préféré et maintenu; car seul, ce
nom s'applique exactement à l'espèce dont 1l est cas. C'est donc
avec cette désignation que je vais parler de cette Lycæna.
Elle est très abondante à Digne où elle vole en été; ma collec-
tion contient environ 400 exemplaires capturés aux environs de
Digne et au col de Lure, par les chasseurs Cotte et Coulet, à la
fin de juin, en juillet et même au commencement d'août 1806, 1807,
1904. J'ai reçu des Basses-Alpes deux belles Aberrations radiata,
prises en 1904 par Victor Cotte : un O* chez qui les ocelles des
quatre ailes, en dessous, sont transformés en rayons et une Q qui
porte, aux ailes supérieures seulement, un rayonnement large et
260 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
épais. Tous les individus que j'ai vus montrent en dessous, sur les
ailes inférieures, la bandelette blanche; mais elle est moins appa-
rente chez les O' que chez les O, à cause du fond plus clair des
ailes des G. La bandelette blanche en effet ressort plus vivement
sur les ailes inférieures des Q qui sont d’une couleur plus brune
et plus foncée.
La Lycæna Rippertii se trouve aussi dans les Alpes-Maritimes
d’où j'ai reçu une centaine d'exemplaires recueillis par M. Decoster,
en juin et juillet 1006, surtout au col de Castillon. Il ne semble
pas que les Rippertii des Alpes-Maritimes diffèrent de celles des
Basses-Alpes; cependant les © ont une tendance à avoir aux ailes
inférieures, en dessus, le long du bord terminal, une série de 2, 3
ou 4 petites taches rougeâtres; ce que je n'ai constaté chez
aucune © des Basses-Alpes. Dans les environs de Menton, il y a
de très grands exemplaires d, mais aussi des spécimens plus petits
et la bandelette blanche est généralement bien accentuée.
M. Fabresse a trouvé à Albarracin, en juillet et au commencement
d'août 1907, en même temps que Damon, une forme géographique
nouvelle que j'appelle Fabressei. Le O' est relativement petit; 1l
n'est pas très foncé en dessus; mais il est, en dessous, plus brun
et moins gris que les exemplaires français; de plus, il est dépourvu
de bandelette blanche, tandis que la ©, d’un brun plus rougeâtre
que celle de France, est ornée d’un trait blanc assez vif et net, sur
le dessous des ailes inférieures. Enfin, le G' a les points noirs très
marqués, le long du bord terminal des ailes inférieures, en dessus,
et ces points noirs sont surmontés d'un croissant rougeâtre. La
même race se trouve en Crimée.
Le d de Fabressei se rapproche donc beaucoup d’Admetus,
Esper (Tab. LXXXII: Ge 5; 0 fig. 4)ettluebne(os se
Q 308 et 309); mais le O' Admetus est plus grand que le G' Fa-
bressei; il est, comme ce dernier, toujours privé de bandelette
blanche sur le dessous des ailes inférieures qui est plus foncé chez
Fabressei; la © Admetus présente des croissants rougeâtres, le
long du bord terminal des ailes inférieures, en dessus, mais ces
croissants sont plus accentués chez Admetus Q que chez Fabres-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 261
sei ©. De plus, bien qu’on puisse voir quelquefois un soupçon de
bandelette blanche sur le dessous des ailes d'Adinetus ©, très
généralement Admetus Q est aussi bien privée que le G' de cette
bandelette; et en tout cas, je n'ai jamais vu d’exemplaire
d'Admetus Q chez qui l’accentuation de ladite bandelette soit
aussi nette que chez l'abresser Q.
Au Fort-Naryne, dans la province Semirechgensee, S. Akulin
a pris en grand nombre la Lycæna Rippertu, conforme à la race
des Basses-Alpes. La bandelette blanche est aussi nettement indi-
quée chez les Ripperti du Turkestan oriental que des environs de
Digne. J'ai reçu, de M. S. Akulin, deux belles Aberrations
Subtus radiata.
Lycæna Dolus, Huebner.
Si le principe de mathématiques : « Deux quantités égales à
une troisième sont égales entre elles », est vrai, dans l'Histoire
naturelle, les Zycæna Dolus et Rippertii S, l'une blanche, l’autre
noire, dont les Q semblables, semblent être égales entre elles,
seraient pareillement spécifiquement égales et constitueraient alors
simplement les deux termes extrêmes d’une même espèce. Mais
la question, très intéressante théoriquement, ne peut trouver une
solution que dans l'étude comparative de l'œuf, de la chenille et
de la chrysalide des deux Lycæna en cause : Dolus et Rippertu,
travail qui reste à accomplir.
De même qu'il y a deux formes de Rippertii, l'une sans bande-
lette blanche, appelée : Admetus et l'autre avec bandelette blanche,
dite : Rippertu, il y a deux formes de Dolus, sans bandelette et
avec bandelette: j'ai appelée cette dernière vi//ata et je l'ai figurée
sous le n° 48 de la PI. 4 de la XX* livraison des Etudes d'Ento-
mologie, tandis que je figurais l’autre, celle qui n’est pas v//afa,
sous le n° 49 de la même PL. 4. J'ai publié aux pages VIII et X
du Bulletin de la Société ent. de France, 1892, une notice détaillée
sur la Zycæna Dolus et sa forme vittata. Je prends la liberté de
262 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
prier le lecteur de vouloir bien se reporter audit Bulletin, comme
aussi à la courte notice qui a été imprimée dans la XX® livraison
des Etudes d'Entomologie, à la page 17.
Je me contente d'ajouter les observations suivantes à celles que
J'ai déjà signalées.
Depuis 1802, la documentation que renfermait ma collection
relativement à la Zycæna Dolus, s'est beaucoup augmentée; Je
possède actuellement rangés dans mes boîtes plus de 800 Dolus et
je puis avec ces éléments d'étude, donner quelques nouveaux rensei-
gnements. La Lycæna Dolus semble avoir sa localité la plus occi-
dentale, du moins parmi celles aujourd’hui connues, dans l'Aveyron,
aux environs d'Aguessac, c'est-à-dire sur les bords du Tarn, un
peu au-dessus de Millau. M. Dayrem a capturé à Aguessac, une
centaine de Dofus, en juillet 1906. La race à Aguessac est vz//afa,
comme à Florac; généralement les G' sont de taille moyenne; Je
n'en ai pas vu d'aussi grands que certains exemplaires de Provence;
ils sont le plus ordinairement moins bleuâtres et quelques mdividus
sont tout blancs, sans apparence de couleur brune sur le duvet des
ailes supérieures et sans reflet bleu. Cependant les Q, à Aguessat,
sont au moins aussi grandes qu'en Provence. En dessous, elles ont
les ocelles des ailes supérieures très gros et le fond des aïles de
couleur café au lait, avec la bandelette blanche très nette.
En France, Dolus se trouve, comme on le sait, dans la Lozère
et dans certaines parties des Bouches-du-Rhône, du Var et des
Alpes-Maritimes. M. Gédéon Foulquier récolte chaque année la
Lycæna Dolus, en juillet dans le vallon de Saint-Pons; la race
y est en général plus grande et plus bleuâtre que dans la Lozère
et l'Aveyron; mais comme il y a dans chaque contrée des variations
individuelles notables, il faut envisager comparativement un
ensemble d'individus des diverses provenances, pour fonder son
opinion. Dolus ne paraît pas rare dans les Alpes-Maritimes, au
col de Castillon. Le G' est ordinairement grand et d’aspect robuste.
Il est orné d’un très joli glacis bleu pâle qui produit une coloration
très délicate sur le fond soyeux et brillant des ailes. En dessous,
il y a beaucoup d'exemplaires des deux sexes, sans aucune bande-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 263
lette blanche et d’autres avec cette bandelette très caractérisée. Tous
les passages existent donc entre les formes extrêmes. Les aïles infé-
rieures portent quelquefois une ocellation très fine, mais plus géné-
ralement des taches noires bien nettes, cerclées de blanc et
ressortant assez vivement sur un fond gris. Les Q semblent avoir
l'ocellation des ailes supérieures plus accentuée que les ©. La
Lycæna Dolus est aussi très répandue en Italie méridionale,
notamment à Sulmona, où M. Fabresse a récolté plus de 350 exem-
plaires pendant l'été 1908. Ce qui caractérise la race italienne de
Dolus, c’est l'absence du reflet bleuâtre sur le disque des ailes, chez
le S. Il ne reste chez les Dolus italiens, un vestige de bleu que
vers la base, à peu près comme dans la race d'Amasieh, appelée
Menalcas, Freyer. La race italienne n'est pas de si grande taille,
n1 d'apparence aussi robuste que celle des Alpes-Maritimes. Les ©
ont le plus souvent des chevrons de couleur orangée surmontant les
points noirs près du bord terminal des ailes inférieures et les
montrent également une série de taches brunes intranervurales,
faisant l'effet d’une ponctuation le long du bord terminal des
mêmes ailes. La forme Menalcas d'aspect général plus jaunâtre et
encore moins bleuâtre que la race italienne, est vi//ata,; tandis qu’en
ltalie, la Lycæna Dolus est sans bandelette. J'ai distingué la forme
italienne de Dolus sous le nom de Virgilia. Il y a donc actuelle-
ment de l'espèce Dolus, envisagée à part et sans intervention de
Rippertii ni d'aucune autre espèce ou même race voisine ou alliée,
les quatre formes suivantes :
1° Dolus, Huebner. Bouches-du-Rhône, Var et Alpes-Maritimes.
2° vittata, Obthr. Lozère, Aveyron.
3° Vargilia, Obthr. Italie méridionale.
4° Menalcas, Freyer. Amasieh.
Lycæna Damon, W. V.
Habite en France, la Lozère et les départements alpins, depuis
la Haute-Savoie jusqu'aux Alpes-Maritimes; n'a jamais été trouvée
dans les Pyrénées, ni dans les régions boréales occidentales de la
264, LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
France. J'a1 pris Damon, en 1863, sur le chemin de Sainte-Enimie
(Lozère), le long du Tarn, et M. Dayrem a retrouvé Damon en
1008, aux environs de Florac.
La Zycæna Damon éclôt une seule fois par an, en juillet et au
commencement d'août; elle abonde dans certaines localités des
Hautes et des Basses-Alpes et, ainsi que Je le fais ci-dessus
connaitre, Damon a été capturée à Albarracin, en Espagne, par
Fabresse.
La Zycæna Damon a toujours une bandelette blanche sur le
revers des ailes inférieures. Le G' est en dessus d’un Joh bleu clair
brillant, satiné, avec une bordure brune assez large; la côte est
blanche; la frange généralement grise au contact de l'aile supé-
rieure est blanche à son extrémité; quelquefois elle est entièrement
blanche. Damon G' manque du feutrage soyeux qu'on remarque
sur les ailes supérieures, en dessus, de Dolus et de Rippertu. Je
possède des exemplaires qui, par le dessous de leurs ailes, appar-
tiennent à l’Aberr. radiata. M. le Docteur-Professeur Reverdin a
fait connaître dans le fascicule IV du Bulletin de la Société
lépidoptér. de Genève, une Aberr. © #“aculata (PI. 10, fig. 4)
remarquable par quelques taches d’un gris blanchâtre situées près
du bord des ailes inférieures, en dessus, non loin de l’angle anal.
L’exemplaire figuré par M. Reverdin a été pris à Bérisal, le
11 août 1908. Je possède trois © de cette Aberration 71aculata,
dont un exemplaire fut recueilli par moi-même, à la Grave (Hautes-
Alpes), en juillet 1906. Un autre exemplaire vient de Digne, le
troisième fut pris au Sappey, par feu de Graslin. Généralement
Damon Q est entièrement brune en dessus; mais à Larche, on
trouve parfois des Q dont la base des quatre ailes est saupoudrée
d'un semis d’atomes bleus qui s'étend principalement le long du
bord anal des ailes inférieures. J'ai appelé cette forme de Q
cærulescens. La Lycæna Damon, dans certaines localités des Alpes
françaises, est extrêmement abondante; elle est plus rare dans la
Lozère. Elle varie beaucoup pour la taille. En dehors de la France
et de l'Espagne, je possède la Zycæna Damon de Gœættingue et
de Gallicie (ex coll. Kuwert).
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 265
Lycæna Meleager, Esper.
Grande et belle espèce répandue dans les Cévennes méridionales
et dans les Alpes françaises, en Valais, Hongrie, Gallicie, Tyrol,
Crimée, Italie méridionale, Transcaucasie, Turquie, Asie-Mineure,
Mésopotamie.
En France, la ZLycæna Meleager se trouve répandue dans la
Savoie, les Basses-Alpes, les Alpes-Maritimes, la Lozère et
l'Aveyron. Mon frère a trouvé l'espèce assez abondante à Millau;
M. Dayrem l’a recueillie à Aguessac et dans la Lozère. Je l'ai pris:
jadis à Florac; elle vole en juillet; elle a en France deux formes
de Q; une forme rayonnée de bleu qui parait se trouver seule
dans les Cévennes, et une forme noire appelée Szevenu, Huebner,
et qui se rencontre avec la forme bleue considérée comme type,
dans les Basses-Alpes et dans les Alpes-Maritimes. En Mésopo-
time, ‘lo a une 2 forme der OQ, à fond blanc mat avec les
nervures noires et un semis assez clair d’atomes bruns. Cette forme
a été appelée ignorata par Staudinger; elle se trouve aussi à Akbès.
J'ai pris la forme noire Szevenii seule, dans la vallée de Ia Viège,
canton du Valais.
En Crimée, on trouve les deux formes ©, la bleue et la noire.
Dans le sud de l'Italie, à Castellamare-di-Stabia, M. Fabresse,
en juillet 1907, n’a trouvé que la forme bleue.
Meleager SG a le vol assez rapide; la Q se repose volontiers sur
les fleurs, dans les montagnes sèches, arides et parfumées des
Cévennes; c'est un papillon charmant avec ses ailes inférieures au
contour si découpé et si gracieusement frangé de blanc. Le O est
d’un bleu pâle, en dessus, avec une bordure noire assez fine et une
frange blanche; ses ailes inférieures sont beaucoup moins profon-
dément dentelées que celles de la Q. En dessous, Meleager Gest
gris clair avec les points noirs ordinaires cerclés de blanc. Ces
ocelles sont assez petits. En dessous, la Q est d’un brun caïé au
lait, avec une éclaircie blanche au milieu des inférieures, près du
bord, et les points noirs sont généralement plus gros et mieux
266 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
marqués que chez le C'; le long du bord extérieur des ailes, il y a
des points surmontés de chevrons, d'un brun plus foncé que le
fond des ailes. Sur les ailes inférieures, en dessus, chez la Q bleue,
on remarque, le long du bord terminal, une série de croissants
blancs, intranervuraux, du plus joli effet. Ces croissants blancs
surmontent la ligne de chevrons noirs qui, comme les sourcils au-
dessus des yeux, accompagnent les ocelles marginaux.
Esper a figuré sous le n° 2 de la Tab. XLV, la Q bleue, avec le
nom de Meleager et le O', sous le n° 1 de la Tab. LXII. Huebner
a figuré la Q bleue, avec le nom de Daphnis, sous les n° 281 et
282, et le ©, sous le n° 280; le même auteur a figuré la Q noire
Stevenu, sous les n° 094 et 005. Bergstraesser a représenté, d’une
façon très reconnaissable, la Q bleue de Meleager, sous les n° 3
et 4 de la Tab. 55. Meleager est d'ailleurs une des espèces de
Lycæna qui sont les plus faciles à reconnaître et elle ne peut être
confondue avec aucune de ses congénères. Elle n’a été trouvée
Jusqu'ici ni en Algérie, ni en Espagne, ni dans les Pyrénées.
Les © bleues et noires sont, chacune, assez variables; plus ou
moins claires ou foncées; il y a des Q bleues assez rembrunies;
mais Je n'ai pas vu d'exemplaire faisant une transition satisfai-
sante entre les deux races.
Lycæna Bellargus, Esper (Adonis, Huebner).
C’est une Zycæna charmante entre toutes. Le bleu incomparable
de ses ailes brille du plus doux éclat au milieu des clairières des
bois et dans les campagnes des régions calcaires du sud de l’An-
gleterre, de l'Europe continentale moyenne et méridionale, de
l'Algérie et de l'Asie-Mineure où l'espèce se trouve répandue. La
Lycæna Bellargus vole au printemps et en été, depuis le mois de
mai Jusqu'en septembre, et la vue de ce délicieux papillon, parfois
très abondant dans les sites qu'il affectionne, est toujours aimable
pour les yeux. Sa présence un peu nombreuse ajoute aux paysages
un inexprimable charme auquel se montrent sensibles beaucoup de
personnes même étrangères à l’'Entomologie.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 26
NV
Je conserverai toujours en mon souvenir l'agréable vision des
Lycena Bellargus que j'ai observées dans les plaines ondulées de
la Vendée et des Charentes, notamment dans les terrains incultes
et couverts de leur flore naturelle, près de Dompierre-sur-Mer, sur
les plateaux boisés de chênes et les pentes des collines sèches et
chaudes au sud de la ville d'Angoulême, et près de Fontenay-le-
Comte, au Prieuré d'Auzay, propriété de M. le Colonel Sabouraud,
beau-père de M. Daniel Lucas.
Là, dans une petite vallée qui était alors conservée sans culture
et que j'ai appelée : le vallon des Adonis, j'ai amplement goûté,
en août 1905 et 1907, tout l'agrément de voir voltiger en grand
nombre la Zycæna Bellargus.
Du côté du Sud et de l'Orient, le vallon des Adonis est abrité
par une épaisse futaie de grands chênes. Au Nord, une vigne
semblant très prospère, plantée sur le plateau, montre son opulent
feuillage, d'un beau vert sombre. Vers l'Occident, l'horizon est
largement découvert et les derniers rayons du soleil couchant
viennent atteindre une partie du vallon. Si l’on sort du bois par
l'angle Nord-Est, on commence à descendre sur une pente herbeuse
et glissante d'où s'élèvent par touffes plus ou moins épaisses, de
hautes graminées. Leurs tiges ont été complètement desséchées par
le grand soleil de messidor; d’ailleurs, au mois d'août, les récoltes
des céréales sont terminées aux environs d'Auzay; le sol est devenu
très sec et en dehors des diverses espèces de graminées, seuls, des
buissons de ronces, de genêts et de prunelliers, avec quelques
ombellifères, végètent maigrement dans la terre calcaire, entre les
pierres éparses et les rochers qui paraissent former le soutènement
des côtés du vallon.
Dès les premiers pas qu’on fait en avançant au milieu des herbes,
surtout si c'est vers le soir, les Adonis qu'on dérange au commen-
cement de leur repos, s'enlèvent et voltigent en foule; mais sans
s'éloigner; ils attendent la cessation du danger qui les a troublés,
pour se reposer de nouveau, les uns auprès des autres, sur les touffes
de graminées un peu hautes qui s'élèvent pêle-mêle au milieu des
buissons. Si on s'écarte du lieu où reposaient les Adonis, on les
268 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
voit peu à peu reprendre possession des brins d’herbes sur lesquels
ils comptent jouir du repos de la nuit; cependant ils ont quelque
peine à se remettre à l’aise pour leur sommeil qu'ils prennent, la
tête dirigée vers le sol; ils s’agitent un peu, tant qu'ils n'ont pas
retrouvé la bonne position qui deviendra définitive. Quand enfin
ils se sont fixés sur la paille qui deviendra leur gîte, avant de
fermer hermétiquement leurs ailes, ils les ouvrent parfois et immo-
biles, ils les tiennent un peu de temps exposées aux derniers
rayons du soleil couchant.
C'est ainsi que pour la première fois, J'ai vu apparaître vivante
la jolie Q bleue que J'ai appelée cælestis. Eclairée par les derniers
feux du jour, au déclin d’une chaude journée d'été, elle montrait
le dessus de ses ailes d’un azur si pur, se fondant en une teinte
d'un blanc argenté, le long du bord costal des supérieures, et ornées
de taches rouge aurore du plus joli effet, sur le bord des inférieures.
Dans ce site pittoresque et au milieu de cette végétation sauvage,
les papillons abondaient et, les contempler ainsi, était pour moi
une jouissance exquise dont J'étais redevable à mes si aimables
hôtes.
J'ai publié la description différentielle de la forme Q cæœlests
de la Lycæna Bellargus, aux pages 23, 24, 25 et 26 du Bulletin de
la Soc. entom. de France, 1008. Je n'ai rien à modifier au texte de
cette notice; mais sachant fort bien que la description n'est pas
suffisante pour rendre un nom valable dans la Nomenclature ento-
mologique, j'ai consacré la PI. XIX, dans la IIT° livraison des Ær.
de Lépidopt. comparée, à la représentation de la Lycæna Bellargus
et notamment des Q cælestis, sous les n° 65, 66, 67 et 68.
En outre des © cæleshs, J'ai fait figurer sous les n° 57, 58, 50,
60 et 61 de cette même PI. XIX, les deux sexes de la race géogra-
phique algérienne que j'ai appelée : punctifera. Le Œ n° 57 est, en
dessus, 7ubro-maculata, c'est-à-dire que, le long du bord terminal
de ses ailes inférieures, en dessus, des taches rouge aurore sur-
montent les points noirs ocellés.
La variété algérienne punctifera est de grande taille et d'aspect
robuste. Les © 58, 59 et 60 ont, en dessus, le fond brun des ailes
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 269
supérieures plus ou moins largement sablé d’atomes bleus. Cette
variété © Ceronus n’est pas rare en Algérie.
J'ai pris aux environs du lac de Côme, au mois de juin 1907,
de magnifiques Zycæna Bellargus, grands et robustes. Le G' est
quelquefois punctiger; mais sa ponctuation noire est pourtant loin
d'être aussi accentuée que chez la forme algérienne punctifera.
Toutes les Q que j'ai prises à Cernobbio, sur le côté Nord du lac
de Côme, sont brunes avec une superbe maculature d’un rouge pon-
ceau, le long du bord terminal des quatre ailes.
À Florence, la Zycœna Bellargus est abondante avec Corydon,
à la fin de mai et au commencement de juin. Elle se trouve mêlée
à Corydon sur les collines qui s'élèvent autour de la si belle et si
célèbre cité. En compagnie de M. Verity, j'ai recueilli dans les
bois montueux et très accidentés qui couronnent les hauteurs sur
le flanc desquelles est bâtie Fiesole, quelques exemplaires très bien
rayonnés en dessous. Les Zycæna Corydon présentaient la même
tendance à la transformation des points noirs ordinaires du dessous
des ailes supérieures, en rayons. J'ai fait figurer sous le n° 62 de la
PI. XIX, une Q florentine Ab. adiata. La forme normale de la
Lycæna Bellargus ©, à Florence, est représentée sous le n° GI.
On remarquera la belle série de macules rouges qui borde les quatre
ailes. Les Œ, à Florence, sont moins grands et d'aspect moins
robuste qu'à Cernobbio. Je n'ai pas plus trouvé la © Ceronus à
Florence qu'à Cernobbio; je ne sais si elle y existe; en tout cas,
elle y paraît fort rare; car je l'ai cherchée soigneusement, sans la
rencontrer.
En Asie-Mineure, à Tokat, la race est aussi fort belle, grande et
d'aspect vigoureux. Il en est de même dans les Alpes-Maritimes
et aux environs de Marseille où se trouve la forme Ceronus,
conforme à la figure donnée par Esper, sous le n° 2 de la PI XC.
Mais aucune forme, ni aucune variété de Bellargus n'égalent en
grâce et en beauté la © cælestis. Celle-ci est d’ailleurs fort variable;
quoique, si on les considère dans leur ensemble, les exemplaires
paraissent parfaitement référables à une même unité de forme ou
de race. J'ai sous les yeux, un très grand nombre d'échantillons de
270 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
la Zyceæna Bellargus Q cœælestis, pris par MM. Gabriel Dupuy,
Vigé, P. Boulé, Dayrem, par mon frère et par moi-même. Je cons-
tate de grandes différences dans le ton de la teinte bleue; d’autre
part, les © Caælestis sont, les unes, entièrement bleu céleste avec
un chevron discoïdal noir cerclé ou non de blanc aux ailes supé-
rieures, tandis que chez d’autres exemplaires, ce croissant noir est
à peine perceptible. La frange tantôt d'un blanc pur, tantôt bru-
nâtre, se trouve toujours traversée, suivant le prolongement des
nervures, par de petites touffes noirâtres qui entrecoupent régu-
lièrement et très élécamment la frange en question; le long du
bord des quatre ailes, on remarque parfois une simple série de
taches noires intranervurales dont les plus rapprochées du bord
anal, aux ailes inférieures, ‘sont surmontées d'un croissant rouge
ponceau; le plus souvent les taches rouges se développent grandes,
en forme de triangle, surmontant les ocelles noirs marginaux qui
sont eux-mêmes soulignés de bleu plus pâle que le fond des ailes,
ou de blanchâtre. Cette décoration rouge ponceau remonte le long
des ailes supérieures et quelquefois même arrive jusqu'à la ren-
contre du bord costal des mêmes ailes, ce qui est d’un aspect très
agréable.
Il est remarquable de constater combien sont relativement fré-
quents les cas d’hermaphroditisme dans la Zycæna Bellargus. Les
n° 69 et 70 de la PI. XIX montrent cette sorte d’hermaphroditisme
dont je possède 17 exemplaires, tous différents les uns des autres,
mais semblant émaner d’un même principe : c'est-à-dire la trans-
formation en apparence de ©, d’une partie plus ou moins impor-
tante d’un des côtés des ailes de la ©.
Le n° 69 vient de Dompierre-sur-Mer, ainsi que la plupart des
autres hermaphrodites; le n° 7o a été capturé à Digne, par V. Cotte.
Ces 17 papillons anormaux sont très curieux à observer et ils méri-
teraient d’être tous représentés en couleurs, quoiqu'il soit impossible
de reproduire exactement l’inimitable couleur bleue de l'Adonis.
Un curieux cas d’albinisme est celui que fournit le n° 63 de la
PI XIX, avec ses ailes entièrement fauve clair. Ce n’est point un
cas pathologique tel que la plupart des albinos.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 271
Le papillon paraît être aussi vigoureusement et symétriquement
constitué que tous les exemplaires normaux. Un autre cas fréquent
d’albinisme est celui qui résulte de la transformation en une teinte
jaune clair de la couleur rouge des taches qui bordent les ailes,
chez la @. Cette mutation en jaune de la couleur rouge est conforme
à une règle générale qui s'applique à tous les êtres organisés.
Je n'ai vu la forme © cælestis, nulle part ailleurs qu? dans les
plaines de la région calcaire de l'Ouest et du Sud-Ouest de la
France; dans les montagnes des Pyrénées, Cælestis n’a pas été
rencontré jusqu'ici, du moins à ma connaissance, C’est ainsi que
dans les environs de Gèdre, on rencontre comme forme bleue ©
de Bellargus, le papillon que je dois à l’obligeante générosité de
M. Rondou et qui est figurée sous le n° 64 de la PI XIX. On
trouve à Vichy une forme assez analogue; mais ces © bleuâtres
sont très rares dans les Hautes-Pyrénées, aussi bien que dans
l'Allier, tandis que Cælestis est très abondante dans les plaines
de la France occidentale.
Les Ab. radiata ne sont pas très rares chez Bellargus; j'ai repré-
senté sous le n° 28 de la PI. 3 de la XX® livraison des Æ/udes
d'Entomologie, un très beau © radiata, quant au-dessous des ailes
supérieures, pris à Villeneuve-de-Blaye (Gironde); ma collection
contient plusieurs autres exemplaires de cette Ab. radiata, entre
autres un beau Œ\ pris le 13 mai 1006, dans les Bouches-du-Rhône,
sur les bords de l'Arc, près de Velaux, par le D' Siépi; une ©
prise à Larche (Basses-Alpes) par A. Coulet, en août 1807.
Je prie d’ailleurs le lecteur de vouloir bien se reporter pour un
complément de documentation, aux observations que j'ai écrites au
sujet de la Zycœna Bellargus (Adonis) aux pages 18 et 19 de la
livraison précitée des Etudes d'Entomologie. J'a désigné dans cet
ouvrage, avec le nom de zolaceo-grisescens, l'Aberration G' qui
fut prise par un jour d'orage, dont les ailes, en dessus, sont d’un
gris violet et qui est figurée sous le n° 26 de la PI. 3; j'ai appelé:
subtus-impunctata, la Q d'Angleterre figurée sous le n° 27 de la
même PI. 3. J'ai fait figurer aussi, par reproduction photographique,
dans la Feuille des Jeunes Naturalistes (n° 22, année 1900), une
272 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
jolie Aberr. anglaise de Bellargus privée de toute ponctuation noire
aux ailes inférieures, en dessous; c’est un curieux papillon différant
de Cinnides, Stgr. (Adoms ©, Huebner, 645-646), parce que le
fond de ses ailes inférieures, en dessous, est blanchâtre et non
brun, ainsi que les exemplaires ordinaires de la variété Cinnides,
Stgr. (alis posticis brunneis, subtus non ocellatis). Cette variété
Cinnides atteint les deux sexes et j'en ai réuni 13 exemplaires,
dont une © cælestis, de Dompierre-sur-Mer, a été reproduite photo-
graphiquement elle aussi, sous le n° 23 de la Feuille des Jeunes
Naturalistes (année 1900).
En Angleterre, la Zycæna Bellargus © est fréquemment sau-
poudrée d’atomes bleus et certains exemplaires cærulescents sont
assez analogues à la © de Gèdre reproduite sous le n° 64 de la
PI. XIX du présent ouvrage. Cependant les Q anglaises sont
presque toujours d’un aspect plus sombre et plus foncé que cette ©.
J'ai pris une fois, tout près de Rennes, dans une prairie, une Q
Bellargus; elle était très fraîche; mais il y a longtemps de cela
et Je ne me rendis compte de l'authenticité de l'espèce qu’en retirant
le papillon des étaloirs. Il y a bien, aux environs de Rennes, une
localité calcaire appelée Saint-Jacques-de-la-Lande; les Botanistes
y récoltent une assez grande quantité de plantes spéciales au cal-
caire et qui ne se rencontrent pas dans les autres champs d’Ille-
et-Vilaine dont le sol est schisteux ou granitique; mais Jai
malheureusement très peu chassé jusqu'ici les Lépidoptères à Saint-
Jacques-de-la-Lande et ce n’est point dans cette localité calcaire
que J'ai trouvé Bellargus. Depuis cette époque déjà éloignée, je n’ai
Jamais eu l’occasion d'observer de nouveau Bellargus en Bretagne
et Je ne m'explique pas comment j'ai pu capturer tout près de
Rennes, un seul exemplaire fraîchement éclos d’une Zycæna qui
est très abondante là où elle existe, ou bien qui fait totalement
défaut. J'ai souvent observé que des papillons entraient dans les
wagons de chemins de fer et se laissaient ainsi transporter bien
loin de leur lieu d’origine. Mais tel ne peut être le cas pour la seule
Lycæna Bellargus © prise à Rennes, loin des voies ferrées. L'échan-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 273
tillon a les ailes brunes; il est de petite taille, mais très nettement
caractérisé.
De même que certaines © d’/carus (Alexis) et d'A ges/is sont
parfois difficiles à distinguer spécifiquement entre elles, quoique
les G' soient si nettement différents, ainsi il n'est point aisé de
discerner les unes des autres, certaines © de Bellargus et de
Corydon. Il est cependant facile de déterminer avec certitude
les Bellargus Q dont les ailes sont saupoudrées de bleu vers la
base, en dessus, et qui ont la bordure de taches rouge ponceau large
et très développée; mais les © Bellargus, dont l’aspect est sombre,
sont bien faciles à confondre avec les © Corydon. Dans le centre
de la France, Bellargus éclôt seule en mai et juin, tandis que
Corydon n'éclôt généralement qu'en été; dès lors, les Q printa-
nières sont des Pellargus et la difficulté reste confinée à la géné-
ration estivale des deux espèces qui volent ensemble aux mêmes
lieux; mais dans le sud de la France et en Italie, Corydon et
Bellargus éclosent toutes les deux au printemps, comme en été.
Dès lors la distinction spécifique est difficile à établir. C'est
tellement vrai qu'aux environs de Florence où les deux Zycæna
s’entremêlent au printemps, dans les mêmes localités, Je me sou-
viens d’avoir essayé de faire le triage sur place, au moment même
où je réalisais mes captures; mais Je ne parvenais pas à obtenir
un résultat qui me satisfit. J'ai pourtant soigneusement étudié les
deux espèces, à l'état parfait tout au moins, et ma documentation
se compose d'environ 2.500 exemplaires de Zycæna Bellargus et
de 3.000 Corydon. Lorsque nous serons plus avancés dans l'étude
analytique des insectes, c’est par quantités d'exemplaires considé-
rables qu'il faudra constituer les collections. Ce qui est en effet
nécessaire pour obtenir la connaissance d’une espèce, c'est un
nombre suffisant d'individus récoltés en des lieux différents et
à des saisons différentes dans la même année, et dans des années
successives. Cela mène un peu plus loin que les quatre exemplaires
de chaque espèce dont se contentaient nos devanciers !
18
274, LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Lycæna Corydon, Esper.
Existe en Angleterre et en Irlande, dans les parties calcaires de
la France, de l'Espagne, de l'Italie, de l'Allemagne et de la région
caucasique, mais manque en Algérie, où Bellargus reste seule, sans
Corydon qui l’accompagne ordinairement en Europe. Corydon est
un papillon des plaines, des basses et moyennes montagnes; Je ne
l'ai jamais vu à une très crande altitude.
En Angleterre et en Irlande, autant que je puis en juger, par
une série de plus de 300 exemplaires que j'ai sous les yeux, pris sur-
tout à Dover, dans le North Kent, à Brighton et dans le comté de
Kerry, et avant fait partie des anciennes collections Prest, d’Vork;
Howard-Vaughan, Battershell-Gill, Maddison, ou bien récoltées
par W. Salvage, la Lycæna Corydon Gest en dessus, d’un gris bleu
argenté pâle, avec une bordure noire plus ou moins large aux
ailes supérieures et une ponctuation noire bien accentuée, le long
du bord terminal des inférieures. En dessous, le fond des ailes
supérieures est généralement d’un gris blanchâtre clair et le fond
des inférieures est un peu plus brun. Les ocelles noirs sont cerclés
de blanc; les points noirs qui bordent les ailes inférieures sont sur-
montés d'une tache rouge orange et d’un sourcil noir; en outre,
il y a une éclaircie blanche vers le milieu et au-dessus du bord
terminal des ailes inférieures; cette éclaircie est contiguë à la série
marginale ocellée. Les © Corydon, en Angleterre et en [Irlande sont
généralement brunes en dessus, avec les points noirs surmontés de
rouge orange, le long du bord terminal des ailes inférieures, et en
dessous, elles diffèrent du © par une teinte brune plus foncée sur
les quatre ailes. Les © varient pour la bordure noire des ailes
supérieures qui est plus ou moins large, quelquefois absente et alors
remplacée par du blanc argenté ou bien par des points intraner-
vuraux qui paraissent plus ou moins noirs au milieu d’un entourage
plus ou moins clair. En dessous, la variation est plus considérable
encore; aux ailes supérieures, les taches noires, le long du bord
interne, confluent souvent en arc, chez les deux sexes et forment
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 278
une sorte d’accent circonflexe, comme dans 77#%ys, Esper (Tab. LI;
fig. 4) et dans parisiensis, Gerhard (PI. 32; fig. 4). D'autres taches
confluent aussi, se rejoignant par paires, surtout dans l’espace cellu-
laire des supérieures et le long du bord anal des inférieures.
Les points noirs ocellés du dessous des ailes, également chez les
deux sexes, manquent parfois plus ou moins complètement sur les
quatre ailes et il n’est pas très rare d'en voir le nombre réduit aux
seuls points discoïidaux, comme dans l’Aberration Cznnus, Huebner,
figurée par cet auteur, sous les n° 830 et 831. J'ai fait figurer moi-
même, sous les n° 30 et 31 de la PI. III de la XX livraison des
Etudes d'Entomologie, 2 Q Cinnus provenant d'Angleterre et J'ai
fait représenter un © Cinnus, pris à Saint-Georges, près Royan,
sous le n° 33 de la même Planche. En outre, J'ai fait figurer au
moyen de la photographie, dans la Feuille des Jeunes Naturalistes
(n° 29; année 1900), une © Cinnus, très belle, de la collection
Battershell-Gill, portant l'étiquette : South Foreland. Sept. 20 1870.
Gerhard a figuré une Q Cinnus, mais variant quant aux ailes infé-
rieures seulement, sous le n° 2 & de la PI. 32. Inversement à l’Aber-
ration Cinnus, les points noirs, des ailes supérieures surtout, peuvent
être transformés en rayons. La teinte du fond des ailes est, en
dessous, très variable, surtout chez les © et d’un brun plus ou
moins clair ou foncé. Les Q anglaises, en dessus, sont tantôt
obscures, tantôt sablées d'atomes d’un bleu argenté pâle, ce qui
est plus fréquent en Angleterre que dans aucun autre pays; mais
ce lavis bleu argenté peut n'être pas toujours symétrique et les
Q montrent parfois, sur une de leurs ailes seulement, ce semis
d’atomes argentés. De même l’oblitération des ocelles noirs qui
caractérise l'Ab. Cinnus, n'est pas toujours symétrique; la ©
anglaise Cinnus, figurée sous le n° 31 de la PI II de la
XX® livraison des Etudes d'Entomologie, en est la preuve. Cette
Ab. Cinnus ne'paraîït pas bien rare en Grande-Bretagne, car J'ai
réuni dans ma collection, 12 G'et 15 © Cinnus provenant d’Angle-
terre; c'est-à-dire presque autant que la quantité obtenue jusqu'ici
des autres pays.
Huebner a figuré sous le n° 742, une variété © de Corydon qui,
276 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
par rapport à cette espèce, est exactement analogue à la variété Q
de Pellargus (Adonis) appelée Cælestis. Cette variété © de Cory-
don, ayant le fond des quatre ailes d’un gris argenté en dessus, à
peu près comme le C, a reçu le nom de syrgrapha, Keferstein.
J'en possède une seule © anglaise, malheureusement sans éti-
quette de localité et faisant autrefois partie de la collection Howard-
Vaughan. Sans doute la variété syngrapha est très rare en Angle-
terre. Elle est au contraire assez commune aux environs de Rouen,
de Paris, d'Angoulême, de la Roche-Beaucourt et de Hautefort
(Dordogne), de Royan et de Dompierre-sur-Mer (Charente-Infé-
rieure). Millière a figuré sous le n° 3 de la PL 4 de l’/conographe
(2° livraison), avec le nom de semzbrunnea, une Ab. © qui fait le
passage de syngrapha à la forme brune normale. Chez semzibrunnea,
les espaces intranervuraux, en dessus, sont rayonnés de brun sur
un fond gris argenté. Millière dit que le papillon figuré par lui,
avec le nom de semibrunnea vient de la Pape, localité située au
Nord-Est de Lyon.
Ma collection contient quelques exemplaires de l’Ab. semibrunnea,
Millière; ils ont été pris à Angoulême, à Saint-Georges près Royan,
à la forêt de Chizé (Deux-Sèvres), à Dompierre-sur-Mer. Sei-
brunnea vole dans les Charentes, avec la © brune et avec la Q syn-
grapha que Gerhard appelle ariscolore et qu'il figure sous le
n° 3 » de la PI. 32, comme venant de France; mais semibrunnea,
qui est une forme transitionnelle entre syrgrapha et Corydon Q
entièrement brune, est plus rare que les deux formes extrêmes de
l'espèce. A la forêt de Chizé, mon frère et moi, chassant le 31 août
1007, nous avons trouvé, voltigeant ensemble, les trois formes Q
de Corydon : syngrapha, semibrunnea et le type ordinaire de
l'espèce, entièrement brun.
Il ne faut pas confondre la Q seribrunnea avec les Q anglaises
de Corydon dont le fond des aïles est brun, mais saupoudré d’un
semis plus ou moins serré d'écailles d'un gris bleuâtre argenté.
Cette forme anglaise de Corydon Q que j'ai déjà signalée plus
haut, en disant qu’elle se trouve, à ma connaissance, plus souvent
en Angleterre que partout ailleurs, est tout à fait différente de
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 277
semibrunnea, de syngrapha et de la © entièrement brune qui se
trouve aussi en Angleterre et partout en France, tantôt seule et
tantôt mélangée à syngrapha et semibrunnea, suivant les régions.
J'ai donné à cette Q anglaise qui est saupoudrée d’atomes d’un
gris bleuâtre argenté le nom de Anglica, pour indiquer qu’elle est
surtout spéciale à l'Angleterre. Les deux seuls exemplaires que j'aie
vus de Corydon Q anglica, pris en dehors de la Grande-Bretagne,
furent capturés en août 1909, dans la Dordogne et à Dompierre-
sur-Mer. On ne lira pas sans intérêt la traduction faite par
M. Harold Powell, de la notice consacrée par Charles Barrett, aux
pages 87 et 88 de son ouvrage : 7%e Lepidoptera of the british
Islands, à la Lycæna Corydon, d'Angleterre, comme suit :
« Un très bel insecte, d’une couleur difficile à décrire ou à repro-
duire par la peinture et rarement observée dans la nature! J'ai
vu la même couleur dans le ciel, au crépuscule d'un jour d’orage,
représentée par les taches bleu pâle visibles entre de gros nuages;
mais elle ne se trouve dans aucune fleur et très peu d’autres insectes
paraissent la posséder.
Son caractère particulier tient en grande partie sans doute à la
présence des poils blancs, déjà mentionnés, sur le dessus des pre-
mières ailes, poils qui sont plus abondants chez cette espèce que
chez aucune autre, exception faite du très curieux ?. Dolus de
l'Europe méridionale. Corydon est un papillon très actif, au vol
rapide, fréquentant principalement les terrains crayeux, mais s’en
éloignant beaucoup parfois, comme dans le cas d'un individu égaré,
pris dans le Ladbroke Square, Notting Hill, Londres, en août 1864,
par M. À. H. Clarke!
L'espèce est abondante sur les pentes des collines crayeuses des
comtés de Kent, Sussex, Surrey, Berks, Bucks et Oxfordshire; dans
le Cambridgeshire et sur une colline crayeuse du comté de Norfolk;
sur l’oolithe aussi bien que sur la craie en Wilts, Dorset, Glouce-
stershire et Somerset; et sur le calcaire à Grange et à Silverdale
dans le nord du Lancashire, en Lincolnshire, Westmoreland et
Cumberland. On la trouve, ou du moins on l’a trouvée, en Essex,
Hants, Cornwall, et dans une localité du Glamorganshire.
[LS]
NY
CO
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Les exemplaires rencontrés ailleurs ne seraient que des individus
égarés.
L'insecte est abondant et largement répandu sur le continent
d'Europe, ne se limitant nullement aux régions crayeuses. On le
trouve en abondance de mai à septembre, dans les champs, les
pâturages et sur les coteaux, indépendamment de la formation
géologique. Se trouve aussi en Asie occidentale.
I] y aurait peut-être intérêt à faire remarquer que les cinq der-
nières espèces de Zycæna présentent à un degré considérable les
mêmes phases de variation. On trouve ‘des mâles de toutes ces
espèces de Zycæna; plus ou moins pâles, foncés ou diaphanes;
des femelles (excepté chez Ageszis) teintées ou envahies de bleu
en dessus; des dessous enfumés, ou bien avec les taches allongées,
confluentes, ou parfois manquantes. Dans ces cas, je pense que la
tache centrale des ailes supérieures reste toujours intacte ».
Il est bien intéressant de rapprocher les lignes qui précè-lent,
et d’après lesquelles sur le continent Corydon ne se limiterait pas
aux régions calcaires, des observations faites dans les départements
du Morbihan et de la Loire-Inférieure où fut trouvée la Zycæna
Corydon; c'est-à-dire à Lantillac (J. de Joannis. Lépid. du Mor-
bihan; Ann. Soc. ent France, 1908, p. 601, 605 et 705) et aux
environs de Nantes, où je ne crois pas que le terrain soit calcaire.
Cependant Corydon est certainement bien plus abondant dans les
régions calcaires que dans les autres où il n’a été observé qu'à l'état
de très rare exception. Jamais encore je n'ai trouvé Corydon en
Ille-et-Vilaine; mais il est possible que l'espèce existe quelque part,
au mois d'août, notamment sur le territoire calcaire de Saint-
Jacques-de-la-Lande, près de Rennes; je regrette de n'avoir pas
encore eu l’occasion de rechercher Corydon dans cette localité,
pourtant si voisine de ma résidence ordinaire.
Relativement à Lantillac, localité où, suivant le P. de Joannis,
une vingtaine d'exemplaires de Corydon ont été pris par
M. Chabot, il n’y a pas un atome de terrain calcaire dans la
commune. Les terres de Lantillac, contrée que l’un de nous a
occasionnellement traversée et sur quoi nous avons reçu quelques
LÉPIDOPIEROLOGIE COMPARÉE 270
renseignements, ne contiennent d'autre chaux que celle employée
comme engrais par les laboureurs. Cet amendement y fait du
reste merveille, précisément parce que la chaux apportée comble
une lacune dans la constitution organique et naturelle du sol.
D'ailleurs, le P. de Joannis ne dit point que lui ou son respectable
frère a pris la Lycæna Corydon à Lantillac et il engage la res-
ponsabilité de M. Chabot. Je ne voudrais en quoi que ce soit
suspecter la véracité de personne; mais d’après l'aspect du pays,
la présence de Corydon à Lantillac constituerait, à mes yeux, un
fait entomologique très remarquable. Il serait essentiel que la
présence de Corydon à Lantillac fût de nouveau constatée et que
la forme de Corydon, dans ce pays, fût définie.
Corydon offre, en outre des Aberrations déjà signalées ci-dessus,
un certain nombre de curieuses variations. Ainsi il y avait, dans
la collection Boisduval, une Q tout à fait semblable au c'; elle
est entièrement gris argenté en dessus, avec la bordure des ailes,
supérieures large, mais claire et formée d'une série marginale
d’ocelles bruns intranervuraux, séparés, par une ligne gris argenté,
d’une autre ligne brune qui descend du bord costal jusqu'au bord
terminal: les inférieures sont bordées par une série moniliforme
de points bruns intranervuraux, cerclés de gris argenté, puis de
brun, surmontés de rouge aurore. Aux supérieures, on voit deux
points discoïidaux noirs, petits, auréolés de blanchâtre. Je n'ai Jamais
vu d'autre exemplaire Q semblable. Je lui ai donné le nom de
Ab. Boisduvali.
On trouve souvent chez les , notamment à Digne, cette même
ligne gris argenté qui se remarque dans l’'Ab. Q Boisduval, et
qui coupe en deux parties, la bordure marginale noirâtre, parallè-
lement au bord externe.
J'ai déjà traité dans la XX° livraison des Ezudes d'Entomologie,
aux pages 10-22, des variations de la Lycæna Corydon et jai fait
figurer sous le n° 29 de la PI. 3 de l'ouvrage précité, une superbe
Aberration d de Corydon, prise par moi à Vernet-les-Bains, ayant
le dessus des quatre ailes d’une belle nuance bleue très légèrement
verdâtre, conforme au papillon représenté par Herrich-Schaeffer,
280 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
avec le nom de Polona, sous les n°® 432 et 433. Mon frère a pris,
à Cauterets, un semblable exemplaire GO.
Staudinger et Rebel, en rapportant Polona comme variété à
Bellargus (Adonis), ont ajouté une erreur de plus à toutes celles
dont leur Catalog 1001 se trouve émaillé. On ne peut réellement
identifier qu'à ce Polona, Herr.-Sch,, les Corydon G' bleus des
Pyrénées.
Dans le Taurus et l'Eden, on trouve une forme analogue à celle
de Vernet et de Cauterets; mais en Asie, il semble que Polona soit
plutôt la règle, tandis que dans les Pyrénées, c’est l'exception.
Lederer a distingué une variété bleue de Corydon, sous le nom
de caucasica. Dans la XX* livraison des Æzudes d'Entomologie,
J'avais rapporté à tort à Caucasica, V Aberration pyrénéenne bleue
de Corydon; mais comme Lederer n’a pas figuré caucasica, il est
difficile de se faire une idée très exacte de la variété caucasica
en question. Je possède cependant quelques exemplaires étiquetés :
caucasica. Ce sont des Corydon bleus pris à Borshom et d’autres
que feu de Graslin avait reçus de Lederer lui-même. Ceux-là ont
quelque chance de représenter la vraie Caucasica. La différence
entre caucasica et polona, serait alors comme suit : caucasica est
d’un bleu plus terne et moins brillant, avec le feutrage soyeux des
ailes supérieures, en dessus, plus pâle; la bordure noire des supé-
rieures est beaucoup moins large chez caucasica, Lederer, que chez
polona, H.-S. (432).
En Italie, Corydon présente une forme appelée apennina; je juge
sur 300 exemplaires environ dont le plus grand nombre provient
des hauteurs de Roccaraso et Palena. Sur la ligne de chemins de
fer qui relie Naples à Rome, à 70 kilomètres de Naples, se trouve
la station de Caianello d'où part une autre ligne passant à Isernia
(46 kil. de Caianello), à Sulmona (120 kil. d'Isernia), à Aquila, etc.
C’est sur cette ligne, entre Isernia et Sulmona, à 53 kil. de cette
dernière ville, que se trouve Roccaraso dont l'altitude est d'environ
1.300 mètres. La gare de Palena est à 44 kilomètres de Sulmona
et les hauteurs voisines de la station ont été, avec les environs de
Roccaraso, le théâtre des chasses de M. Fabresse, en juillet et
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 281
août 1908. C'est donc vers le commencement de la chaîne de la
Majella dont ces montagnes font sans doute déjà partie, que les
Lycæna Corydon apennina, dont j'ai une série sous les yeux, ont
été recueillis; les exemplaires paraissent plus petits que ceux de
France; les G' sont, en dessus, d'un gris bleu argenté pâle; les
quatre ailes sont fréquemment bordées d’une ponctuation intra-
nervurale, noire. Les Q sont brunes, en dessus, avec quelques ocelles
surmontés de rouge, le long du bord des ailes inférieures. Le
dessous des ailes des o' est pâle et celui des Q, quoique d'un brun
café au lait assez vif, semble moins obscur que chez les Corydon
français.
Aux environs de Florence, dans tous les bois et les endroits
incultes, ainsi que je l'ai déjà fait connaître dans la notice consacrée
à Bellargus, Corydon äbonde avec Bellargus (Adonis), à la fin de
mai et au commencement de juin. J'ai été très étonné de trouver,
dans les environs de Florence, une proportion relativement si
grande de Corydon ayant, en dessous, spécialement sur Îles ailes
supérieures, les taches noires ordinaires transformées en rayons.
Je capturai une dizaine de Corydon-radiata, alors que J'avais le
plaisir de parcourir des bois extrêmement pittoresques où les yeux
jouissaient souvent d’un plaisir charmant. Des vues magnifiques,
sur des vallées verdoyantes, s'ouvraient au fur et à mesure qu'on
s'élevait au-dessus de la montagne sur le flanc de laquelle se
trouve bâtie la petite ville de Fiesole. Je serai toujours recon-
naissant à M. Roger Verity des jolies excursions où il voulut bien
me diriger et m'accompagner aux environs de la belle cité florentine,
aussi intéressante par son histoire et ses monuments que délicieuse
par le charme de ses beautés naturelles. Florence est, sur cette terre,
un véritable Paradis, aussi bien pour l’Artiste et l’Archéologue que
pour le Curieux de la Nature.
La race de Corydon, aux environs de Florence, diffère un peu
de la race estivale de Roccaraso, Palena, Sulmona, Castellamare-
di-Stabia (fin juillet 1908) et Monte-Majella où parvint enfin
M. Fabresse, les 5 et 6 août 1908. Je suis redevable à M. le Comte
Turati de quelques Corydon-apennina, pris en juillet 1907, au
282 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Gran-Sasso; ils ne diffèrent guère des exemplaires pris par
M. Fabresse.
Quant à la variété Rezniceki, Bart. prise au printemps, à Gènes,
et dont je suis redevable à l’obligeance de M. le Comte Turati,
elle est plus grande et plus robuste qu’'Apennina; le bord des ailes,
en dessus, chez les ©, est plus fortement ponctuée de noir et les
ocelles du dessous des ailes sont plus vigoureusement accusés. Les
exemplaires qu'on trouve à Florence, au printemps, font assez bien
la transition entre apennina et Rezniceht.
Mais c'est en Espagne que les variations géographiques de
Corydon sont plus sensibles. Dans les parties chaudes et relative-
ment peu élevées de l’'Andalousie, à Grenade et à la Sierra-de-
Alfakar, on voit voler en juillet, une race de Corydon, dite albicans,
Herr.-Sch. (494, 405), figurée aussi par Gerhard, sous les n° 1 4,
1 6, 3 a, 3 d de la PI. 31; cette variété albicans est remarquable
par la disparition de toute teinte ou reflet bleuâtre sur le dessus
des ailes du ©, par l’oblitération fréquente de toute bordure noire
des ailes, en dessus, et par la teinte brun clair, sans aucun vestige
bleuâtre ou argenté, en dessus, de la ©. Dans la Sierra-Nevada, à
une certaine altitude, les Corydon d, sans être teintés d’un bleuâtre
aussi prononcé qu'en Italie ou dans le sud de la France, sont
cependant bien différents des albicans de la région andalouse plus
basse et que calcinent les rayons du soleil de l'été. À l’Escorial,
il y a une race de Corydon plus petite qu'en Andalousie, où cer-
tains exemplaires atteignent une très grande taille. Mais cette race
de l’Escorial est d’un gris argentin dépourvu de reflet bleuâtre et
d’un ton plus jaunâtre peut-être qu’à la Sierra-Nevada.
Pour la couleur du fond, la race de Corydon, à l'Escorial, consi-
dérée dans l’ensemble de ses exemplaires, me paraît à peu près
intermédiaire entre l’albicans de Grenade et Corydon des hauteurs
au-dessus de Huejar.
Herrich-Schaeffer a figuré avec le nom d’#ispana, sous les n°* 500
et so1, une petite race de Corydon que M. Fabresse a prise à
Albarracin, en juillet et août 1907.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 283
Albarracin, localité espagnole, célèbre dans les fastes entomo-
logiques de la péninsule, se trouve situé à une trentaine de kilomètres
à l’ouest de Teruel. La rivière Guadalaviar (ou bien : el Turia)
qui passe à Valencia, à Teruel et Albarracin, se continue dans la
direction ouest de cette localité. C’est en remontant cette rivière,
c'est-à-dire en se dirigeant vers l’ouest et en remontant un peu
vers le nord, qu’on arrive à la Sierra-Alta. Cela se trouve à environ
25 kilomètres d'Albarracin. La région nommée Sierra-Alta, se
trouve entre deux villages, dont l’un s'appelle Bronchales. L’alti-
tude de Sierra-Alta atteint jusqu'à 1,600 mètres. M. Fabresse a
pris, dans ce pays, une cinquantaine de Corydon qui appartiennent
à la même race 2spana que les Corydon d'Albarracin.
La race Zispana est plus blanche et moins bleuâtre que la race
ordinaire des Pyrénées françaises et espagnoles (Vernet-les-Bains,
Cauterets, Potes). Elle a le bord brun des ailes supérieures souvent
divisé en deux bandes égales, par une ligne de la couleur du fond,
qui descend du bord costal au bord interne; de plus, elle se dis-
tingue par sa belle ponctuation intranervurale, le long du bord
terminal des ailes inférieures et même des ailes supérieures, en
dessus; elle se trouve non seulement en Espagne, mais aussi en
France à Saint-Paul-de-Fenouillet où mon frère a trouvé, en
Juillet 1904, une race remarquable, très distincte des autres races
françaises et ne se différenciant réellement d’Æispana que par une
taille plus grande. À Tijola (Almeria), Corydon est semblable à la
race de l’Escorial. En Catalogne, Corydon se rapproche de la forme
de Vernet-les-Bains, dans les Pyrénées-Orientales. En Castille,
aux environs de Madrid, les © Corydon tendent à avoir le fond
des ailes, en dessus, plus clair, comme si la teinte brune était fugace
et laissait paraître, sur le disque des ailes, des espaces ou des
stries blanchâtres. Les ocelles marginaux chez la Q castillane sont
parfois très largement surmontés d'orangé; le O' aux environs de
Madrid est d’un blanc jaunâtre, comme à Grenade et à l’Escorial,
c'est-à-dire : albicans, mais d’un faciès différent.
Les figures d’Arragonensis données par Gerhard sous les n° 1 4,
1 0, 1 c, 1 d de la PI 32, me paraissent, quoique dessinées et enlu-
284 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
minées sans finesse, se rapporter à peu près à la race de Corydon
de l’Escorial.
La figure de Corydonius, H. S. (595, 596) grande et d’un bleu
clair chatoyant chez le G', représente la race d'Amasieh.
Feu Alexandre Constant avait autrefois trouvé à Saint-Tropez,
en mai, une race de Corydon dont je me souviens d’avoir vu chez
lui, en sa villa Niobé, à Golfe-Juan, une très nombreuse série
d'exemplaires. J'avais été frappé, en examinant ces Corydon prin-
taniers de Saint-Tropez, par la vigueur de la teinte rouge orange
qui, chez la plupart des Œ, surmontait les taches ocellées, intraner-
vurales, le long du bord terminal des ailes inférieures, en dessus.
Cette couleur rouge orange est pourtant un ornement formant plutôt
l'apanage des © que des G'; on peut trouver partout des Cory-
don Œ avec un soupçon de rouge près des ocelles marginaux des
ailes inférieures, comme on rencontre des Ægon-rufolunulata; mais
à Saint-Tropez, il semble que la coloration rouge soit la règle
plutôt que l'exception, chez les Corydon qui y éclosent au prin-
temps et y ont par conséquent deux générations par an; alors qu'il
y a pour Corydon une seule éclosion d'été dans les plaines et les
montagnes des autres régions de la France. M. le Docteur-Professeur
Reverdin, de Genève, a retrouvé à Pardigon, dans le Var, en
avril 1908, la même forme avec ocelles des ailes inférieures sur-
montés de rouge, que feu Constant avait prise jadis à Saint-
Tropez. Certains G' de cette variété remarquable ressemblent, en
dessus, aux © syngrapha (mariscolore) et surtout à la Q que j'ai
appelée Porsduvali.
Le dessous des ailes, chez les ©, est d’un gris beaucoup plus
foncé que dans les autres races. M. Reverdin mentionne la cap-
ture des Corydon faite par lui, dans le Var, aux premiers jours
d'avril, à la page 280 du Bulletin de la Société lépidopt. de
Genève.
De son côté, M. H. Powell a récolté un grand nombre d’exem-
plaires de la même race de Corydon, dans la forêt du Dom (Var),
au commencement du mois de mai 1900. Non seulement cette race
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 285
est remarquable, ainsi que je l'expose ci-dessus, par la coloration
rouge orange qui dans quelques exemplaires O' surmonte les ocelles
intranervuraux, le long du bord externe des ailes inférieures, en
dessus, mais encore par la teinte gris foncé du dessous des ailes.
Cette teinte gris foncé du dessous des ailes est encore plus carac-
téristique que la coloration rouge orange qui accompagne, en dessus,
les ocelles marginaux des ailes inférieures, parce qu’elle est cons-
tante pour tous les Corydon G pris à la forêt du Dom et dont
j'ai 38 exemplaires sous les yeux.
Je possède 14 Q de la forêt du Dom; elles sont brunes avec une
coloration orange plus ou moins accentuée, le long du bord externe
des quatre ailes, mais surtout des inférieures, en dessus. Le dessous
est d’un brun assez obscur.
La race de Marseille et Saint-Zacharie, sensiblement plus grande,
également ornée parfois d’une coloration rouge orange chez Îles of
le long du bord externe des ailes inférieures, en dessus, quoique
habitant une région bien voisine de la forêt du Dom et de Par-
digon, mais éclosant en Juillet et août, est, en dessous plus encore
qu'en dessus, tout à fait distincte de la forme printanière du
département du Var.
On trouve en France de fort belles races de Corydon dans les
Alpes-Maritimes; à Vernet-les-Bains; dans le Lot-et-Garonne, dans
l'Hérault, etc. Je connais aussi Corydon de la Lozère, de l'Isère,
de l'Aveyron, des Hautes et Basses-Alpes, de la Savoie, de
l'Ariège, des Hautes-Pyrénées, de la Dordogne, des Charentes,
du Doubs.
Dans toute la région qui est au sud de la Garonne et à l'est du
Périgord, il me semble que les Corydon Q sont très généralement
brunes, en dessus, sans aucune trace de bleu argenté et sans donner
la variété syxgrapha. La forme © syagrapha paraît donc limitée
au bassin de la Seine (Rouen, Paris) et aux départements de
l'Ouest jusques et y compris la Dordogne et la Gironde. Cependant
cette limitation est actuellement très difficile à définir exactement
et on comprend que je ne puisse donner à cet égard qu'un rensei-
286 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
gnement général, puisque l'exploration entomologique d'un si grand
nombre de départements français reste encore à faire sérieusement.
Corydon est une des plus jolies Lycæna qui égayent, pendant
l'été, les campagnes sèches et calcaires de la France et le bord
des chemins dans les montagnes. C’est toujours pour moi un
plaisir délicieux de voir en juillet et août, Corydon © voltiger,
en nombre quelquefois si considérable, le long des chemins, près
des fossés où coule un ruisseau d'arrosage. S'il y a une flaque
humide sur le sentier, Corydon Sy repose quelquefois en masse;
de même dans les villages, autour de la fontaine d’où chacun, en
allant puiser l’eau nécessaire, laisse tomber sur la place publique
de quoi produire un élément permanent d'humidité. Alors les
Corydon se pressent en foule durant les jours chauds de l'été,
- autour du sol fraîchement mouillé. Mais on les voit aussi en grande
quantité, reposés ou voltigeant sur les fleurs de sedum et d’origan,
leur abondance jointe à leur grâce et à leur beauté, donne au
paysage une animation dont je me trouve toujours heureux d’être
le témoin.
Lycæna Bavius, Eversmann.
Espèce de Russie, représentée en Algérie par la race que j'a
décrite et figurée dans la XII[° livraison des Æzudes d'Entomologie,
avec le nom de Fatma, d'après deux exemplaires représentés sous
les n° 50 et 51 de la PI. 7 et que feu Staudinger avait capturés en
1887, dans le Djebel-Aurès.
Je ne crois pas que Fatma ait été retrouvée depuis le voyage
de Staudinger dans la province de Constantine.
Lycæna Orion, Pallas.
La jolie Lycæna Orion ne se trouve en France, d’après ce que
Je connais, qu'aux environs de Thiers (Puy-de-Dôme), de Vernet-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 287
les-Bains (Pyrénées-Orientales) de Draguignan, de Nice et La
Turbie (Alpes-Maritimes), où elle vole en mai et juin. M. Arnold
Wullschlegel me l’a envoyée de Martigny (Valais) où il paraît
qu’elle a deux générations, la première au printemps et l’autre en
été. Je l'ai prise au bord du lac de Côme, dans le jardin de la
villa d'Este, en juin 1907, et mon frère l’a observée à Fusio
(Tessin).
Aux environs de Vernet-les-Bains, Orion éclôt seulement au mois
de mai et au commencement de juin; je ne l’ai jamais rencontrée
en été. Elle vit par groupes d’un petit nombre d’exemplaires,
notamment dans les terrains ferrugineux ou dans les schistes. Je
l'ai vue dans le bois que feu de Graslin appelait : Pinats, mais
qui porte, je crois, actuellement un autre nom. D'ailleurs ce bois,
localité excellente pour les papillons, a été bien diminué et changé
d'aspect, depuis que je le connais, par la ligne ferrée qui le tra-
verse et par les excavations nombreuses pratiquées çà et là en vue
de la recherche des mines. J'ai aussi trouvé Oyion, dans les Pyrénées-
Orientales, près de Villefranche-de-Conflent, vers la vacherie du
parc de Vernet et le long du chemin en lacet qui conduit à l’ancien
monastère de Saint-Martin-du-Canigou.
Il y a chez Orion plusieurs races très distinctes : d’abord celle
des Pyrénées-Orientales qui est relativement petite et chez laquelle
les deux sexes sont ornés d’un semis d'écailles bleu foncé formant
une guirlande submarginale et répandues par places sur le dessus
des ailes. La race des Alpes-Maritimes est à peu près semblable à
celle des Pyrénées-Orientales; mais celle d'Auvergne semble être
plus grande; malheureusement je ne possède du Puy-de-Dôme
qu’une seule paire qui fut prise à Thiers, par feu Guillemot, il y a
bien longtemps, et je ne me trouve pas assez documenté pour pou-
voir disserter sur l’O7ion de l'Auvergne.
Une seconde race chez laquelle les ailes des deux sexes sont en
dessus, entièrement noires, se trouve au Valais. Enfin dans la
Haute-Italie, il y a une forme intermédiaire entre celle des A:pes-
Maritimes et la race noire valaisanne. La base et le bord marginal
des ailes y sont ornés d’atomes bleus, en quantité moindre que
288 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
dans les Alpes-Maritimes et que dans les Pyrénées, mais en quan-
tité plus grande qu'aux environs de Martigny. En outre de ces
formes européennes, il y a en Mandchourie, à l’île Askold et à
Sidemi, une forme à laquelle Staudinger a donné le nom
d'ornata et qui se distingue par le semis plus abondant et surtout
par la couleur plus claire des atomes bleus qui sont saupoudrés sur
le dessus des ailes. Orion habite aussi l'Autriche et la Hongrie;
mais ma collection contient un très petit nombre d'exemplaires de
ces contrées et sans localité précise.
Esper, quoique connaissant la description d’'Orion par Pallas,
a figuré avec le nom de 7elepha, sous le n° 2 de la Tab. XLI,
un © avec du bleu à la base des ailes, et sous le n° 5 de la
Tab. XCIV, une Q noire. Huebner de son côté, représente avec
le nom de Battus, sous les n° 328, 320 et 330, les deux sexes, avec
un semis d’atomes bleus, comme on le remarque chez la race de
Vernet-les-Bains, et sous les n° 8or et 802, avec le même nom
de Battus, la forme noircissante, telle qu'on la remarque aux bords
du lac de Côme.
Si on donne le nom de Oyion à la race observée par Pallas, en
mai € in campis aridis circa Sisranum » et qui, en dessus, a les ailes
poudrées de bleu (alæ supra fuscæ; disco cæruleo pulveratæ..…),
je crois, bien que la figure manque pour nous fixer avec certitude,
qu'on peut appliquer ce nom également à la forme des Pyrénées-
Orientales et des Alpes-Maritimes; cependant le nom de Pañfus,
Huebner (328, 320 et 330) lui conviendrait écalement et d'autant
mieux que la figure existe, fort bien exécutée, pour nous éclairer.
Le nom de Telephi, Esper conviendrait à la race chez laquelle
la © (ig. 5; Tab XCIV)estnoratre et le(Ci (he 2h ES EN
est poudré de bleu. Et quant au nom de Baftus, Huebner (807 et
802) bien que s'appliquant parfaitement à la race sombre des bords
du lac de Côme, il est plus difficile d’en tirer parti, puisque le
même nom a déjà été employé pour les n°“ 328, 329 et 330 qui
constituent une race différente.
Wheeler, dans Te Butterflies of Switzerland, appelle var. #1gr9,
la race valaisanne entièrement noire chez les deux sexes. Pour ceia,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 289
il n'y a pas d'hésitation; mais pour le reste, quelle confusion
sommes-nous encore obligés de constater dans la nomenclature !
Il faut cependant pouvoir désigner, en évitant tout malentendu,
les diverses races d’Orion et voici comment Je propose d'établir les
noms distinctifs de ces races diverses de l'Europe occidentale.
\ Orion, Pallas.
Battus, Huebner (328, 320, 330); les deux sexes poudrés de bleu
| foncé; Pyrénées-Orientales, Alpes-Maritimes.
Melephe, Esper (OU Tab. XL; fig 2: O Tab" XCIV; fe L);
le C' poudré de bleu, la Q noirâtre; Autriche.
Battus, Huebner (801, 802); les deux sexes plus obscurs et plus
grands que chez Telephü,; Cernobbio (Haute-Italie).
Nigra, Wheeler (Buft. Switz; p. 40) « the blue has almost, often
quite, disappeared; © much larger and rather browner
than O' »; Martigny (Valais).
Lycæna Abencerragus, Pierret.
La Lycæna Abencerragus d'Algérie, est à l'espèce européenne
Baton ce que Cœnonympha Arcanioïdes, Pierret, également d'Al-
gérie, est à Cænonympha Arcanius, Linné, d'Europe. On trouve
Abencerragus dans les trois provinces d'Alger, de Constantine et
d'Oran, en avril, mai et juin. Abencerragus éclôt même quelquefois
dès la fin de mars. Je l'ai prise à Lambèse, en avril 1867; Je
possède des exemplaires recueillis à Khenchela, Alger, Daya,
Sebdou. En dessus, le G' a les ailes saupoudrées d'un semis plus
ou moins épais d’écailles bleues; la Q est généralement beaucoup
plus obscure et plus grande; le fond de ses ailes est noirâtre; elle
présente généralement un feston de croissants bleus intranervuraux,
le long du bord extérieur des ailes, et vers la base, elle est fré-
quemment poudrée de bleu. Les taches ocellées noires sont très
réduites sur le dessous des ailes inférieures dont le fond est gris
clair.
19
200 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Lycæna Baton, Bergstraesser.
Sur la Tab. 60 de son ouvrage : Nomenclatur und Beschreibung
der Insecten in der Grafschaft Hanau-Muensenberg etc, publié
en 1770, le Professeur de Philosophie et Recteur de l'Ecole évan-
gélique luthérienne latine de Hanau, Joh. Andr. Benignus Berg-
straesser a figuré d’une manière très reconnaissable avec le nom de
Baton, l'espèce de LZycæna que Huebner a représentée, un peu plus
tard, mais avec infiniment plus de finesse, sous les n° 325, 326 et
327 et à laquelle il a donné le nom de //ylas adopté ensuite par
Boisduval, Godart et Duponchel.
Baton n'existe pas en Angleterre, ou bien elle n’y existe plus
depuis très longtemps; car il ne semble pas que les plus anciens
auteurs anglais en aient gardé quelque souvenir.
Wood, dans son livre pourvu de figures si intéressantes : /ndex
entomologicus or a complete illustrated Catalogue of the Lepidop-
terous Insects of great Britain, London 1845 et 1855, cite bien le
Polyommatus Chryseis (Purple-edged-Copper), capturé autrefois
dans les marais d'Essex et de Sussex, le Cœnonympha Hero
(Silver-bordered-Ringlet) trouvée jadis à Ashdown-Forest, et tant
d’autres Lépidoptères maintenant éteints en Angleterre, mais plus
ou moins vraisemblablement habitants de la Grande-Bretagne,
il y a bien longtemps, avant l'extinction de Polyommatus dispar;
Wood ne mentionne cependant Baton d'aucune manière. Pourtant
Baton se trouve en Bretagne (Morbihan et Ille-et-Vilaine) dans
des places dont la flore et le climat, comparativement à la grande
Ile qui nous avoisine, ne doivent pas être très sensiblement
différents.
Baton a été fréquemment observé par nous en mai et en août,
à Laillé et à Monterfil (Ille-et-Vilaine) et à Caden (Morbihan).
M. de Joannis cite l'espèce des environs de Vannes (Contribution
à l'étude des Lépid. du Morbihan; Ann. Soc. ent. France, 1008)
dans les termes suivants : « Première éclosion à la fin de mai, et
le papillon se prend alors dans les prairies; deuxième éclosion,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 201
fin de juillet à septembre et se trouve alors dans les landes.
Commun certaines années ». En outre des localités bretonnes, ma
collection contient des exemplaires recueillis à Digne, Cauterets,
Charroux (Vienne), Dompierre-sur-Mer (Charente-Inférieure),
Angoulême, Uriage (Isère), Paris, Cannes, la Turbie et diverses
localités des Alpes-Maritimes, Hyères, Vernet-les-Bains, Vallon de
Saint-Pons (Bouches-du-Rhône), Aix-en-Provence, Lioran (Cantal),
Ryffelalp, Jura bernois, Corse, Sicile, Cerchio (Abruzzes), Villa-
viciosa-de-Odon, Madrid, Barcelone, Grenade, Akbès, Broussa
(Asie-Mineure), Nord-Cachemire, Turkestan.
On peut distinguer trois races de Baton; celle de l'Europe cen-
trale; celle d'Espagne et celle de Turkestan.
En France, en Suisse, en Corse et en Sicile, le © est d’un bleu
clair, en dessus, avec un trait discoïdal noir sur chaque aile, une
bordure de taches ocellées noires, intranervurales, très fines, le long
du bord externe des ailes et un liséré marginal noir; la frange
est blanche, entrecoupée de noir. En dessous, les ailes sont gris
clair, parsemées de taches noires assez grosses; les inférieures sont
bordés de taches jaune orange comprises, chacune, entre deux points
noirs. La Q a le dessous des ailes noirâtre, plus ou moins parsemé
d’atomes bleus. Les ocelles noirs, le long du bord externe des ailes
sont plus foncés que la teinte du fond et quelquefois surmontés
aux inférieures de croissants gris bleuâtre, blanchâtres ou même
jaunes. Les taches noires du dessous des ailes se transforment
parfois en rayons; je possède un GC très bien rayonné, pris par
A. Coulet, aux environs le Digne, pendant le printemps 1901 et
nous avons capturé un Œ analogue à la Trancada d’Ambouilla
(Pyrénées-Orientales), en mai 1886.
En Espagne, la variété géographique Panoptes, Huebner (670,
671, 672, 673) se distingue par la suppression des taches jaunes
comprises entre les points noirs, le long du bord externe des ailes
inférieures et par la couleur plus foncée, en dessous. De plus, la ©
Panoptes a généralement le fond des ailes plus noir et moins
bleuté, en dessus, que la forme Baron. À Vernet-les-Bains, on trouve
202 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
des exemplaires référables à Panoptes; mais la grande majorité
a les taches jaunes qui caractérisent Baton.
Quant à la race du Turkestan, elle est en dessous d'un gris
plus blanchâtre et en dessus d’un bleu plus pâle et plus grisâtre
qu'aucune des autres races. Staudinger a désigné la forme de
Samarcand avec le nom de clara.
Baton est un gracieux petit papillon qui aime à voler près de
terre et à se reposer sur les fleurs de thym. Dans les landes de
Monterfl, Baton est très localisé; son vol y paraît plus vif et plus
rapide que dans les garrigues des Pyrénées-Orientales où les touffes
nombreuses de Dorycnium suffruticosum et de Thymus vulgaris
le sollicitent à de fréquents repos.
En Ille-et-Vilaine, Baton affectionne les parties élevées, sèches
et arides des landes et je ne l’ai jamais vu dans les lieux où la
végétation des bruyères est puissante et bien fournie, tandis que
Argus et Tiresias préfèrent ces localités pour y élire domicile.
Baton vit chez nous aux mêmes lieux que Sesza urocertformis-
armoricana et sa chenille doit également vivre dans les lex.
À propos de la Zycæna Tiresias, Jai exposé l'intérêt qu'offrait
la comparaison de l'habitat printanier et estival de 7%restas et de
Baton, en Ille-et-Vilaine et en Morbihan. Je prie le lecteur de
vouloir bien s’y reporter.
Une bien jolie Zycæna thibétaine que j'ai appelée Zanfy, semble
être une race magnifiquement agrandie de Baton. Feu Monsei-
gneur Biet, lorsqu'il m'a fait jadis l'honneur d'être mon hôte à
Rennes et à Cancale, m'a souvent parlé de la flore des montagnes
de Tâ-tsien-Lou, comparée à celle des Alpes d'Europe. Un des
membres éminents de la Mission catholique du Thibet, — la
seule mission chrétienne qui ait d’ailleurs réussi à s'implanter sur
cette terre barbare et inhospitalière, — était le Père Soulié, bota-
niste de la plus grande compétence à qui le Muséum national
d'histoire naturelle de Paris est redevable des plus précieuses
collections. Le Père Soulié, d'après ce que m'a souvent dit
Monseigneur Biet, a remarqué maintes fois, la différence remar-
quable du développement de certaines espèces de plantes thibé-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 203
taines, comparativement à ce qui se présente pour elles dans les
Alpes de Suisse et de France. |
Il en est de même dans les Lépidoptères pour le Zeplyrus
betule et pour la Zycena Baton-Lanty. Staudinger et Rebel ont
transformé dans leur Catalog 10901 le nom de Zauty en Lantyr,
comme celui d'Orleans en Orleansi, sous le fallacieux prétexte
de correction grammaticale. Pourquoi les mêmes auteurs ont-ils
donc laissé subsister le nom Goante qui désigne un homme, et ne
l'ont-ils pas habillé en Goantei? Tant qu'à faire, il faut être
conséquent avec soi-même et étendre le bénéfñce de ses savantes
corrections jusqu'aux temps les plus reculés, même jusqu'à Esper,
s’il y a lieu.
Lycæna pyrenaica, Boisduval.
C’est une espèce absolument distincte d'Orbitulus; aussi diffé-
rente de cette dernière qu'A7gus est différente d'Ægon, que
Bellargus (Adonis) l'est de Corydon, qu'Euphemus Vest d'Alcon
ou d’Arcas (Erebus), que Cyllarus l'est de Melanops. Je me demande
au moyen de quel sentiment que la bonne foi, en tous les cas, ne
paraît pas suffisamment guider, Staudinger et Rebel, dans leur
Catalog 1901, se sont obstinés, malgré toutes les raisons péremp-
toires qui leur avaient été préalablement servies, à rattacher pyre-
naica comme variété à Orbitulus. S'entêter à soutenir une opinion
évidemment fausse n’a jamais été la preuve de la rectitude du
jugement, ni de l'élévation du caractère. Commettre une mesqui-
nerie est une faute; car les imprescriptibles droits de la vérité et
de la saine raison finissent toujours par prévaloir et par triompher.
Je prie le lecteur de se reporter aux figures comparatives d'Orbz-
tulus et de pyrenaica que j'ai publiées dans la VIIT* livraison des
Etudes d'Entomologie.
Il y a deux races distinctes de pyrenaica, celle des Hautes-
Pyrénées françaises et celle des Pyrénées espagnoles, aux Picos-de-
Europa. Le d de la race espagnole que j'ai appelée As/wriensis,
204. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
se distingue par la série des éclaircies intranervurales blanchâtres
sur le fond gris, qui longent le bord marginal des quatre ailes, en
dessus. Le fond des ailes, chez la race des Hautes-Pyrénées
(Gavarnie et Cauterets) est depuis la base jusqu’au bord terminal,
d'un gris beaucoup plus uniforme. De même la ©, dans les Pyré-
nées françaises, est très obscure et presque sans éclaircie; on voit
seulement le point noir discoïdal des supérieures se détacher
nettement sur le fond brun noirâtre des ailes et l’on aperçoit quelque
légère pulvérulence d’un blanc grisâtre, le long du bord terminal
des ailes inférieures en dessus. Dans la race espagnole, le bord des
quatre ailes est orné de macules ou de chevrons blanchâtres et le
point noir discoïdal des supérieures est finement cerclé de blanc;
le point discoidal des inférieures est apparent et souvent lui-même
liséré de blanchâtre, ainsi que l'indique la figure 10 de la PI. I de
la VIII livraison des Etudes d'Entomologie.
Le dessous des ailes inférieures est d’un brun plus foncé chez
les Q que chez les Œ, où il reste habituellement d’une nuance
ocracée très pâle. Il n’y a généralement aucune apparence d’ocelle
noir au mulieu des éclaircies blanches du dessous des ailes infé-
rieures, chez la Lycæna pyrenaica; au contraire, l’ocellation noire
du dessous des ailes supérieures est très accentuée. Dans les Asturies,
pyrenaca est très abondante sur les gazons ras entremêlés de
petites pierres, de même que M. P. Rondou l’a observé dans les
Pyrénées françaises. Nous n'avons jamais vu la Lycæna pyrenaica
dans les Pyrénées-Orientales où nous croyons qu'Orbifulus vit seul,
tandis que dans les Hautes-Pyrénées, les deux espèces ne se trouvent
pas très éloignées l’une de l’autre, tout en ayant, chacune, un
habitat spécial.
Lycæna Orbitulus, Esper.
N’existe pas en Ecosse où vivent cependant la Zygæna exulans
et l’Anarta melanopa qui, dans les Alpes se rencontrent à peu près
dans les mêmes localités que la Lycæna orbitulus et même un peu
plus haut.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 295
Très répandue dans les Hautes-Alpes, à une altitude d'environ
1.800 à 2.600 mètres; commune à Ryffelalp (Valais), à Larche, au
col du Mont-Genèvre, au Lautaret, à Beauvezer, à Enchastrayes, à
Allos, à la prairie du Mont-Pelat, au col de Lure, etc., dans les
Alpes françaises; plus rare dans les montagnes au sud de Mont-
louis-sur-Têt, appelée Cambrès-d'Ase; près de l’arête nord du
Mont-Canigou et à Pla-Guilhem (Pyrénées-Orientales); assez
abondante dans certaines places des Hautes-Pyrénées, notamment
aux environs de Gavarnie et autour du lac de Gaube; se trouve
aussi en Herzégovine, en Laponie, et dans l’Amérique polaire.
Les Lycæna américaines 7#s/1ca, Edwards; Vestos, Boisduval ;
Podarce, Felder, ne me semblent pas être spécifiquement distinctes
d'Orbitulus. Huebner a figuré Orbitulus d, des Alpes, avec le nom
de Meleager, sous les n° 761 et 7062.
L'Espèce varie comme toutes les Zycæna par la transformation
en rayons noirs des ocelles des ailes supérieures, en dessous. En
outre, certains exemplaires ont le dessous des ailes inférieures entiè-
rement privé de ponctuation noire; le fond des ailes reste alors
uniformément d’un brun jaunâtre plus où moins clair ou foncé sur
lequel la tache discoïdale ordinaire et le bord des ailes se détachent
généralement en blanc. Huebner a figuré sous le n° 841, un exem-
plaire de cette Aberration qui est analogue à Cénnus. Le O' a le
dessus des ailes saupoudré d’atomes d’un gris argenté bleuâtre, sur
un fond brun noirâtre; la Q est brune, avec la frange blanche et
le point discoidal noir, quelquefois liséré de blanchâtre. À Zermatt,
et dans les Basses-Alpes, on prend parfois des Q montrant une
série extracellulaire, légèrement courbe, de taches intranervurales
blanchâtres sur le dessus des ailes supérieures.
La forme est à peu près la même dans les Pyrénées-Orientales
et dans les Alpes; mais dans les Hautes-Pyrénées, 1l y a une race
sensiblement plus grande et d'aspect plus robuste; Staudinger l'a
appelée : Oberthiüri. J'ai sous les yeux plus de deux cents Oôer-
thüri et plus de trois cents Orbitulus. Il est évident qu'il y a des
Oberthiüri tout à fait semblables à des Orbitulus; mais il est évident
206 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
aussi que la race Oberthuri, considérée dans son ensemble, est très
distincte des autres formes alpine et pyrénéenne d’'Orbitulus.
Orbitulus présente souvent le long du bord terminal des ailes
inférieures, en dessus, une jolie rangée de taches arrondies, intra-
nervurales, de couleur plus claire que le fond, centralement ponc-
tuées de noir; les Q paraissent moins nombreuses que les Œ et
lorsqu'une © se trouve quelque part posée sur une petite plaque
de terre humide, pendant les heures chaudes du jour, il y a quel-
quefois tout un essaim de © autour d'elle. Plusieurs fois, sur le
bord du lac de Gaube, le long du sentier que suivent les bêtes de
somme pour aller dans la direction du Vignemale, j'ai recouvert
de mon filet un petit espace de terrain sur lequel un nombre
souvent considérable d'exemplaires d’Oybrtulus-O berthiri se tenait
reposé. Je me souviens d’en avoir ainsi capturé, d’un seul coup, une
cinquantaine d'individus. Il se trouvait une seule © dans ce nombre.
Fréquemment, les G' offrent d'intéressantes variations, telle que
celle représentée sous le n° 200 de la PI XL. Orbitulus éclôt une
seule fois par an et vole en juillet et au commencement d'août,
comme pyrenaca. Je crois que les Orbitulus du côté de Gavarnie
sont de moins grande taille qu'autour du lac de Gaube et c'est
dans cette localité très restreinte que J'ai pris les exemplaires les
plus développés.
Je considère, en effet, parmi les échantillons qui sont rangés dans
ma boîte, certains spécimens remarquablement grands; ils pro-
viennent tous des bords du lac de Gaube.
J'a publié de bonnes figures d’'Orbitulus-Oberthiri sous les
n® 8 et o de la PI. I, de la VIII° livraison des Etudes d'Ento-
mologie et comme je le rappelle dans la notice relative à pyrenaica,
J'ai écrit une courte étude sur Orbitulus et pyrenaica comparées ;
ces observations se trouvent imprimées aux pages 16 et 17 de cette
VIIT* livraison. Je juge inutile d’en reproduire ici les termes aux-
\
quels je n’ai du reste rien à changer.
te qu
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 207
Lycæna Pheretes, Huebner.
Huebner a figuré Peretes, qu'il avait d’abord décrite sous ce
nom, avec le nom nouveau d’A/ys, le G' sous les n° 495 et 496,
la Q sous les n° 548 et 549.
C’est au Thibet que la Zycæna Pheretes, Huebner, parait être plus
abondante, plus grande et plus robuste. Les chasseurs chinois et
thibétains des environs de Tâ-tsien-Lou récoltent chaque année
une assez grande quantité de Peretes qui ne diffèrent de ceux des
Alpes d'Europe et de Laponie que par leur dimension un peu
plus grande. Pheretes s'élève très haut dans les Alpes; Je l'ai prise
au Ryffelberg, aux environs de 2.800 mètres et au Lautaret; jen
possède des exemplaires capturés près de Larche, d'Enchastrayes,
d'Allos et du Mont-Pelat dans les Basses-Alpes. PAeretes n'a pas
été trouvé dans les Pyrénées. Les Of, en dessus, sont d'un joli
bleu céleste, avec un fin liséré noir terminal et la frange blanche.
Dans les montagnes thibétaines, la bordure noire est plus accentuée,
surtout aux ailes inférieures qui paraissent avoir des points ou des
chevrons noirs intranervuraux, soudés à la bordure. Les ©, au
Thibet, sont d'un noir profond, en dessus, tandis que dans les Alpes
d'Europe, leur teinte est moins foncée et se trouve parfois atténuée
au moyen d’une pulvérulence bleuâtre près de la base des ailes.
En dessous, les points blancs des ailes inférieures sont aveugles;
mais les ailes supérieures gardent ordinairement une série droite de
petits points noirs cerclés de blanc; ces points noirs peuvent cepen-
dant faire complètement défaut. L'Aberration waloyenses n'a plus,
sur le fond uni du dessous des ailes, que les points discoïdaux :
noir aux supérieures et blanc aux inférieures. PAeretes éclôt une
seule fois par an, en juillet. L'espèce se plaît sur les gazons ras
entremêlés de pierres.
La race de Pheretes, au Thibet et au Vunnan, a souvent le
dessous des ailes inférieures d’un blanc verdâtre ou jaunâtre, sur
lequel les taches blanches ordinaires se détachent à peine. Leech
208 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
a observé aussi que PAeretes en Asie diffère un peu de la race
européenne. Je distingue Peretes de Tà-tsien-Lou par le nom de
tatsienluica.
Je profite de la publication du présent ouvrage pour faire
connaître deux nouvelles Zycæna du Thibet, dont l’une se place
au proche voisinage de PAereles. Ces deux espèces nouvelles sont
figurées sous les n° 300 et 303 de la PI. XLI du présent ouvrage;
elles appartiennent toutes les deux à la faune paléarctique.
Lycæna Amphirroë, Obthr. (PI. XLI; fig. 300).
Taille de Peretes; les deux sexes sont entièrement d’un brun
noir uniforme en dessus, avec la frange longue et blanche et les
quatre points discocellulaires blancs. Le fond du dessous des ailes
inférieures est blanc, avec une bande médiane d’un brun ocracé qui
traverse les ailes, depuis le milieu du bord anal jusqu’au bord
costal; 2 taches ovalaires blanches, de la couleur du fond, se trouvent
entourées par la couleur ocracée; l’une est contiguë au bord costal,
l'autre est immédiatement au-dessous de celle-ci. La base et le
milieu des supérieures est d’un brun très pâle, avec le point disco-
cellulaire blanchâtre; une série d’ocelles gris cerclés de blanc, plus
ou moins nettement écrits, descend du bord costal et forme une
ligne brisée dans l’espace extracellulaire; le bord terminal est lar-
gement teinté de blanc avec quelques taches grisâtres situées en
série assez droite, parallèlement au bord terminal. Le bord externe
des ailes inférieures est légèrement ondulé. Le corps est noir en
dessus, blanc en dessous; les pattes sont blanches; les yeux sont
cerclés de blanc. La Zycæna Amphirroë vole aux environs de
Tâ-tsien-Lou; elle est très jolie dans la simplicité de sa teinte et
de ses dessins. Je lui ai donné le nom mythologique d’une des
Nymphes de l'Océan. Je crois qu’elle est rare. Je possède seulement
17 exemplaires.
k
|
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 209
Lycæna Lamasem, Obthr. (PL XLI;, fig. 303).
Le Dalai-Lama ou Lama-Sem, connu sous le nom de grand
Lama, est le chef de la religion des Tartares idolâtres qui le
considèrent comme leur dieu vivant. Il habite un couvent célèbre
situé sur le sommet d’une haute montagne. Les environs sont
peuplés d'une prodigieuse quantité de prêtres de cette prétendue
divinité, nommés Lamas. Le grand Lama n’expose pas sa dignité
au grand jour; il sort rarement de son palais et se tient renfermé
dans le temple où il reçoit des Lamas les hommages dus à l’Etre-
Suprême. La petite Lycæna que j'ai appelée Larmasem habite dans
les hautes montagnes du pays thibétain soumis à l'influence des
Lamas. C’est une espèce très délicate, d'aspect sombre en dessus,
et décorée, en dessous, d’ocelles blancs dépourvus de pupillation
noire.
Chez les deux sexes, le dessus des ailes est noir; la frange est
blanche, entrecoupée de ‘brun; un glacis soyeux et présentant un
reflet un peu bleuâtre ou violacé, se remarque à la base des ailes.
En dessous, le fond des ailes est d’un brun grisâtre; un trait
blanc en forme de clou, occupe chaque espace cellulaire; le bord
des ailes est orné d’une série intranervurale de points blancs dont
la forme est arrondie; et, entre les espaces cellulaires et cette série
marginale de macules blanches, on voit une série de points blancs,
ovales, décrivant une sinuosité sur chaque aile, et descendant du
bord costal des supérieures au bord anal des inférieures. Le dessus
du corps est de la couleur foncée des ailes; le dessous est d’un gris
blanchâtre.
L'espèce est rare; ma collection contient seulement 14 exem-
plaires recueillis par les chasseurs thibétains à Ta-Ho, au Thibet,
et par les collecteurs de Tâ-tsien-Lou, sans doute dans les mon-
tagnes voisines de cette ville frontière de la Chine, à l'entrée orien-
tale du Thibet.
300 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Lycæna Optilete, Knoch.
August Wilhelm Knoch a publié à Leipzig, de 1781 à 1783,
sous le titre de Peztraege zur Insektengeschichte, un ouvrage sim-
plement, mais correctement imprimé, avec un frontispice suivant la
mode du temps, gravé sur cuivre, non colorié, et d'excellentes
planches dessinées par l’auteur A.-W. Knoch et gravées par
À. Schmidt. Il y a 3 petits volumes contenant en tout 19 planches
coloriées, dont 17 consacrées aux Lépidoptères et 2 aux Coléoptères.
C’est sur la PL V du 1° volume que se trouve représentée pour la
première fois sous les n°” 5 et 6, la Zycæna Optlete ©. L'espèce
est décrite sur les pages 76 et 77, avec le nom populaire Gelbauge
(œil jaune) ajouté au nom latin : Papilio plebejus ruralis O ptilete.
Ce nom d’oplilete est un des surnoms de la déesse Minerve;
optilos, en dialecte dorique, veut dire : azl et optiletis peut signi-
fer : qui garde ou qui conserve les yeux.
Knoch dit que l'espèce se trouve dans les environs de ce pays-c1 :
(Diese Art findet sich in hiesiger Gegend); c’est-à-dire de Bruns-
wick, puisque l’Avis au Lecteur (An den Leser) est daté comme
suit : Geschrieben im Kollegium Carolinum; Braunschweig, den
8 Hornung 1781. Le mot Æornung est, je crois, peu employé; il
désigne le mois de février et a pour racine l’ancien terme allemand
Hor qui signifie bouc.
En France, Optilete ne se rencontre que dans les hautes mon-
tagnes des Alpes; mais en Allemagne, ÜUprilete habite sans doute
les plaines du Nord.
En Laponie, l'espèce n'est pas rare et j'en possède une longue
série prise par M. W. Mau, à Kvickjock (Lulea-Lappmarken) en
Juin et Juillet 1908. J'ai capturé Oprilete à Ryffelalp et tout près
de l'hôtel du Montanvers, en face du passage de la mer de glace,
dans la région au-dessus de Chamounix-Largentière. Mon fils, le
D' J. Oberthür, a récolté Oprilete au-dessus de Lanslebourg
(Savoie), en juillet 1804.
Je l’ai reçue de l'Oural méridional (40 kilom. au Sud-Est de
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 301
Zlatoust), où il me semble que la race a les couleurs bleue du
dessus et brune du dessous beaucoup plus foncées que dans nos
Alpes. La collection Bellier contenait une belle série d'exemplaires
de Prusse, de grande taille, et dont un œ est subtus-radiata.
Les Q varient beaucoup pour le dessus de leurs ailes qui est plus
ou moins saupoudré d’atomes bleu foncé. En dessous, les ailes
inférieures ont, près de l'angle anal, des petites taches d’un bleu
métallique surmontées d'une tache rouge orange relativement
large, laquelle se trouve comprise entre ces points bleu brillants
et le sourcil noir qui surmonte le ge/bauge. Huebner figure sous les
n% 654, 655, 656 et 657, avec le nom de cyparissus, une petite race
qui diffère par l'ocellation noire relativement fable du dessous
de ses ailes, des formes que je suis parvenu à connaître.
Lycæna Lysimon, Huebner.
Figurée par Huebner, sous les n° 534 et 535. En Europe, on
trouve Lysimon en Andalousie, notamment aux environs de Gre-
nade, où elle vole en mai et en juillet. On m'a assuré que Zysimon
avait été capturée à Montpellier et à Marseille; mais je nen ai
jamais vu la preuve. En Algérie, Zysimon est très répandue
pendant le mois de mai, à Biskra, Sidi-Okba, Omach, dans le
Djebel-Aurès, à Collo, et en juillet dans les montagnes du Djur-
jura. Lysimon paraît être surtout une espèce de l'Afrique tropicale.
Ma collection contient des exemplaires de Sénégal, Sierra-Leone,
Bénin, Natal, Abyssinie, Mayotte, Madagascar, Bourbon.
Le d varie pour la largeur de la bande marginale brune qui
entoure la couleur bleu violacé du dessus des ailes et aussi pour
le ton de cette couleur. En Andalousie, cette bande marginale semble
être toujours plus large qu'en Algérie, et, à cause de cela, j'ai appelé
la Lysimon de Grenade : vandalusica. La Q est généralement
entièrement brune en dessus; mais en Abyssinie, la Q a la base
des ailes largement teintée de bleu clair dont l'aspect est assez
brillant.
302 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
En dessous, la ponctuation des ailes est également très variable;
certains exemplaires ont les ocelles des supérieures relativement
gros; chez d'autres ils sont beaucoup moins accentués. Boisduval
a fait représenter sous les n°* 7 et 8 de la PL 17 de l’Zcones, le
dessus et le dessous d’une Zycæna qu’il appelle : Argus Lysimon.
Je n’ai pas trouvé dans la collection Boisduval l’exemplaire qui a
pu servir de modèle à ces figures; mais le dessous n° 8 ne repré-
sente nullement la Zysimon d'Espagne ou d'Algérie. Par les gros
ocelles noirs submarginaux des ailes supérieures, ainsi que par la
tache discoïdale des mêmes ailes, ce n° 8 semble plutôt se rapporter
à une Zycæna de Madagascar encore inédite et que J'ai reçue de
la partie centrale de l’île (N.-D. de Lourdes, près Tananarive).
Sans rendre très exactement l'espèce, les figures 28 et 20 d'Herrich-
Schaeffer sont cependant plus rapprochées de la Zycæena Lysimon,
telle que je la connais. Duponchel, dans le Supplément (PI VIIT,
fig. 6 et 7), représente fidèlement le G' de la race algérienne de
Lysimon qui a la bordure noirâtre des ailes étroite en dessus. II
est probable que l’exemplaire figuré par Duponchel vient d'Egypte;
mais cet auteur s’abstient de donner le renseignement pourtant
essentiel de la provenance du papillon qu'il a fait figurer. C'est
une lacune fâcheuse et que les écrivains entomologiques de l’époque
contemporaine devraient prendre grand soin d'éviter. Les figures
données par Lang (PL XXIV; fig. 3, 3, 3) sont très grossières.
La fig. 2 c de la PI. 15 dans l'ouvrage de Gerhard me paraît appli-
cable au-dessous de Lysämon; mais les figures 2 a, 2 bd et 2 d
représentent des Zycæna quelconques; 2 a n’est certainement pas
référable à ZLysimon. Cette petite Lycæna Lysimon n'a pas de
synonymie embrouillée comme tant d’autres espèces du genre; mais
elle attend encore, pour la forme européenne tout au moins, une
bonne figuration.
Lycæna minima, Fuessli.
Bien représenté par Esper, avec le nom de inima, sous la
figure 3 de la Tab. XXXIV, et avec le nom d’Alsus par Huebner,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 30
[SS]
sous les n°° 278 et 270. Les deux sexes ont le dessus des ailes noir
et le dessous d’un gris très délicat, avec une ocellation de petits
points d’un noir très vif, cerclés de blanc. Le O' présente générale-
ment sur le dessus des ailes et près de la base, un semis peu
abondant, pulvérulent d’écailles paraissant verdâtres. La Zycæna
minima se trouve en Angleterre, d’où je possède une série d’échan-
tillons ayant fait partie de la collection Sang; mais Je ne l'ai
jamais vue en Ille-et-Vilaine; elle est pourtant signalée aux
environs de Vannes et de Plouharnel, dans le Catalogue des
Lépidopières du Morbihan par J. de Joannis (Aww. Soc. ent.
France, 1008; p. 705).
Ma collection contient des Zycæna minima prises à Cauterets et
Gavarnie (Hautes-Pyrénées) en juillet; dans les Alpes-Maritimes,
à la fin de juin, en juillet et août; dans l'Oberland bernois, du
28 juin au 2 juillet 1808; à Ryffelalp et Zermatt (Valais), en
juillet; à Uriage (Isère), en juin; à Lanslebourg (Savoie) et Cha-
mounix (Haute-Savoie), en juillet; à Larche, Enchastrayes, Allos
(Basses-Alpes), en juillet; à Digne, en avril, mai et juillet; au
vallon de Saint-Pons (Bouches-du-Rhône); à la Sainte-Baume et
au col de Bretagne (Var), en mai; à Potes (Asturies), en Juillet;
à Vernet-les-Bains et à la vallée d'Eyna (Pyrénées-Orientales),
en été; au Lautaret (Hautes-Alpes), en juillet; aux bords du lac
de Côme, en juin; à l’île de Capri, à Naples et à Castellamare-di-
Stabia, en mai; en Saxe; à Tâ-tsien-Lou (frontière orientale du
Thibet); dans l'Oural méridional (45 kilomètres à l'Est de Zla-
toust); à Châteaudun (Eure-et-Loir); à Samoussy (Aisne); à
Lectoure (Gers); à Dompierre-sur-Mer (Charente-Inférieure), en
mai et Juin 1900.
Les points noirs du dessous des ailes peuvent être absents, ainsi
que cela arrive dans toutes les Zycæna. Je n'ai pas vu d'exemplaires
de ninima ayant les points noirs transformés en rayons; il doit
en exister cependant.
La variété Lorquini, Herrich-Schaeffer (442, 443, 444), chez
laquelle le d' a le dessus des ailes d’un bleu violacé semble rem-
placer winima, en Algérie, et peut-être aussi aux environs de
304 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Grenade. Augustin Coulet a pris un très beau et très authentique G
de Lorquini, à Digne, en 1806.
C'est donc aussi une forme française; mais peut-être à l'état
accidentel; car je n’ai jamais vu que ce seul exemplaire français
pris dans les Basses-Alpes.
Je dois ajouter que j'ai acheté à un marchand allemand une
minima ©, indiquée comme venant de Suisse et saupoudrée sur
le dessus des ailes d’une pulvérulence bleue et non verdâtre, de
telle façon que l’exemplaire en question semble former la transition
entre zrinima et Lorquini. On peut donc penser que la forme Zor-
guini peut se retrouver quelque part en Europe et sans doute sur le
côté oriental de la vallée du Rhône, au pied des Alpes.
Lorquini paraît d’ailleurs assez rare généralement; je possède des
exemplaires d'Andalousie; de Sebdou (mai 1907); de Mécheria
(19-30 mars 1886); de Géryville (mai 1886) et du col de Taza;
mais nulle part, on ne l’a observé en abondance.
L'ocellation semble plus petite, en dessous, chez Zorquini que
chez winima. Je ne crois pas que 7inima se trouve en Algérie;
cependant j'en ai reçu quelques exemplaires avec Bône, pour indi-
cation de localité; n'ayant pas une certitude suffisante de l’exac-
titude de ce renseignement, je le considère provisoirement comme
non existant.
Lycæna Sebrus, Boisduval.
Décrite et figurée dans l’/cones, sous les n° 1, 2 et 3 de la PI. 17.
Duponchel a figuré la même espèce avec le nom de Saporte, dans
le Supplément (PL IX; fig. 5, 6 et 7).
La Lycæena Sebrus est fort délicate. Le G' est, en dessus, d’un
bleu violet assez obscur, avec une bordure noire nette et fine et une
frange blanche; la ©, en dessus, est tantôt d’un noir obscur, tantôt
plus ou moins couverte près de la base des supérieures et le long
du bord des ailes inférieures, d’une pulvérulence bleuâtre. En
dessous, les deux sexes sont d’un gris clair, avec les ocelles noirs,
petits et cerclés de blanc; la base des aïles inférieures est légèrement
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 305
bleuâtre. On trouve la ZLycæna Sebrus en France, sur le côté oriental
du cours du Rhône et en Suisse, dans le canton du Valais, c’est-
à-dire toujours dans le bassin du Rhône. J'ai pris Sebrus à Uriage,
en Juin 1805, à Aix-les-Bains, du 22 juin au 12 juillet 1906, au
Lautaret, en juillet et aux environs de Florence au commencement
de juin 1007.
Sebrus ne semble pas rare dans les allées herbues d’une pro-
priété dont le sommet est boisé, un peu au-dessus de Fiesole. Je
possède des exemplaires de Sebrus récoltés dans les localités
suivantes : Digne (mai 1806); Enchastrayes; Larche; Marseille;
Celles-les-Bains (Ardèche); Col de Brans, La Turbie et Mont-
Pacanaglia (Alpes-Maritimes); Albarracin (Espagne); Martigny
(Valais) où elle vole en avril et mai, puis en juillet; Macédoine et
Turkestan (Fort-Naryne et Namangan).
Sebrus varie pour la dimension des ailes et pour la teinte plus
ou moins foncée du bleu, chez le G.
On pourrait distinguer par un nom, les © qui sont en dessus
d’un noir obscur, de celles qui sont poudrées de bleuâtre; mais il
y a des transitions qui relient intimement les exemplaires appar-
tenant aux deux formes extrêmes, de sorte qu'il me paraît difficile
de les limiter très exactement.
Cependant c’est une © entièrement noire que Boisduval a figurée
avec le nom de Sebrus et une © saupoudrée de bleuâtre que
Duponchel a représentée avec le nom de Saporte; dès lors il me
semble que les © bleuâtres peuvent être désignées sous ce nom de
Saportæ, conformément à la figure donnée par Duponchel et à la
dénomination attribuée par cet auteur.
Je n'ai jamais vu d’Aberration de Sebrus. Cependant l'espèce
ne peut échapper à la règle des variations qui régit le genre
Lycæna.
Lycæna Semiargus, Von Rottemburg (Acis, Den et Schiff.).
Comme le dit S. A. von Rottemburg, dans : Awmerkungen zu
den Hufnagelischen Tabellen der Schmetterlinge (Der Natur-
20
306 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
forscher, Sechstes Stück, Halle, 1775; p. 20), Roesel a parfaite-
ment représenté cette Zycæna sous le n° 4 de la Tab. XXXVII du
vol. IIT; mais sans lui donner aucun nom qui la différenciàt spéci-
fiquement du n° 5, figurant /carus,; les Lycæna n° 3, 4 et 5 sont
en effet comprises par Roesel, sous le commun vocable : « Der
kleine besonders schoene, hochblaue Tagpapilion der zweyten
Classe ».
S. À. Von Rottemburg fait seulement remarquer que Roesel a
oublié de figurer le petit trait noir discoïdal aux ailes inférieures,
sur le dessous des ailes, qui est d’ailleurs le seul côté représenté;
mais il y a des exemplaires où ce petit trait noir est oblitéré et à
peine indiqué. Von Rottemburg s'exprime ainsi : « Nur hat er
(Rœsel) bey seiner Abbildung, den Kleinen schwarzen Strich ver-
gessen, so dieser Vogel in der Mitte der Unterfluegel fuchret ».
La Lycæna Semiargus, Von Rottemburg, 1775 (Acts, System. Verz.
der Schmetterlinge der Wienergegend; 1776), est répandue dans
les plaines et les montagnes de la France, en Angleterre où elle
semble se raréfier de plus en plus et annoncer une extinction pro-
chaine, en Suisse, en Allemagne et dans le Nord de l’Asie; elle
manque en Algérie. Autrefois nous trouvions assez abondamment
la Semiargus aux environs de Rennes, à Monterfl et même à
Cancale. Mais de même qu’en Grande-Bretagne, cette espèce semble
tendre à devenir rare dans le Nord du département d’Ille-et-
Vilaine et depuis longtemps, je n'ai plus vu Seriargus qu’au Sud
de Rennes, vers Pont-Réan et Bourg-des-Comptes où elle est
encore assez abondante. Ma collection contient des Seriargus
anglais, de la collection John Sang, de Darlington, et d'assez nom-
breuses séries d'échantillons pris en Ille-et-Vilaine; à Samoussy
(Aisne), à la mi-juin 1909; à Cauterets et Gavarnie (Hautes-
Pyrénées), en juillet; à Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales), au
printemps et en été; à Lanslebourg et à Aix-les-Bains (Savoie); à
la Grave et au Lautaret (Hautes-Alpes), en juillet; à Chamounix
(Haute-Savoie); à Digne, à Entrevaux, au lac d’Allos et à la
prairie du Mont-Pelat (Basses-Alpes) ; à la Chartreuse-de-Prémolles
et à Uriage (Isère); à Pieracave, à Castel-de-Brans, au mont Paca-
DE
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 30
naglia, à la Turbie et Laghet (Alpes-Maritimes); à Hyères et à la
forêt du Dom (Var); à Ryffelalp, à Fusio et à Eclepans (Suisse);
à Grenade (Andalousie); à la Granja (Castille); en Hongrie; en
Laponie; à la Certosa-di-Pesio (Piémont); à l'ile Askold, en
Mandschourie; en Turquie; en Grèce; en Asie-Mineure; en Syrie.
Toutes les Q que j'ai vues jusqu'ici de Serargus provenant
d'Europe occidentale sont noires; je n’en connais point de bleues
qui aient été rencontrées en France ou en Suisse. Dans les Alpes,
surtout aux alentours du lac d’Allos, à la Grave et au Lautaret,
Semiargus est de plus petite taille que dans les localités de plaine
et appartient à la variété #ontana, Meyer-Duer.
L'Aberration cæca (alis subtus non ocellatis) n’est pas très rare
et j'en possède plusieurs exemplaires partiellement ou totalement
aveugles, en dessous, venant de Hongrie, de Cauterets, du lac
d'Allos et de Zermatt.
Dans les Pyrénées, les ocelles noirs du dessous des aïles sont
parfois relativement très gros; mais je ne possède pas l’Aberration
radiata qui existe cependant.
Les © varient beaucoup pour l'intensité de la pulvérulence bleue
qui recouvre le dessus des ailes. Les écailles bleues sont plus ou
moins claires ou foncées et plus ou moins étendues à partir de la
base jusqu’au bord des ailes, de sorte que la teinte brune du fond
des ailes est tantôt assez élargie et tantôt rétrécie près du bord
externe.
Dans les plaines, Sewiargus paraît deux fois par an, au prin-
temps, puis en été; dans les montagnes, elle vole une seule fois,
en juillet.
Huebner a représenté avec le nom de Aygiolus, la forme euro-
péenne de Semiargus, sous les n° 260, 270 et 271.
En Orient, la Lycæna Semiargus donne les variétés géogra-
phiques suivantes : Bellis, Freyer (Tab. 308; fig. 1, 2) chez
laquelle le G présente quelques points rouges, le long du bord des
ailes inférieures en dessous, au voisinage de l'angle anal; la ©
est ornée de points jaunes, même sur le dessus des ailes. Bellis ne
308 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
semble pas rare en Turquie où elle fut prise jadis par feu Kin-
dermann.
Parnassia, Ster., de Grèce, est une forme un peu atténuée de
Bellis; elle fait la transition entre Bellis et Semiargus.
Anthiochena, Lederer, de Syrie, est l'exagération de Bellis; je
possède une assez bonne série récoltée à Akbès; parmi les ©, il
y en a une que J'appelle : cærulescens, ayant le dessus des ailes
saupoudré d’écailles bleues.
À Akbès, on rencontre l'Ab. © ayant des points d'un rouge
aurore, le long du bord des ailes inférieures, en dessus. C’est l’Aber-
ration analogue à 7#fomaculata, Reverdin, d'Ægon.
La Lycæna figurée sous le nom de cælestina, par Millière (Icono-
graphie, PI 154; fig. 3) est certainement une Sewzargus et non une
Cyllarus.
Lycæna Cyllarus, Von Rottemburg.
Une des plus jolies espèces de Zycæna, remarquable chez le &,
par la teinte bleu céleste qui caractérise le dessus des ailes, et chez
les deux sexes, par la couleur vert brillant qui orne généralement
le dessous des ailes inférieures, vers la base. Le nom de Cyllarus
a servi dans la Fable à désigner un fameux cheval appartenant à
Pollux, ainsi qu'un Centaure qui fut passionnément épris de la
nymphe Hylonome; celle-ci se tua de désespoir, en apprenant la
mort du Centaure Cyllarus. |
J'ignore si von Rottemburg, en donnant le nom de Cyllarus à
la Lycæna qui nous occupe et qu’il a décrite aussitôt après Sewz-
argus et dans le même travail, a voulu plutôt rappeler le cheval de
Pollux ou bien le Centaure, monstre demi-homme et demi-cheval.
L'auteur ne le dit point; il nous apprend seulement que lui-même
n’a jamais pris le papillon en question et qu'il a reçu du Prediger
Hufnagel le seul exemplaire O' qu'il possède.
La ZLycæna Cyllarus ne se trouve pas en Angleterre; elle se
rencontre aux environs de Rennes; mais elle y est rare et Je n'y ai
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 309
jamais pris que des exemplaires isolés; elle est plus commune dans
certaines contrées du Midi; on l’a observée en Espagne, en Algérie,
en Autriche, en Italie, en Syrie, dans le Turkestan, etc. La Zycæna
Cyllarus éclôt en avril, mai ou juin, suivant la température des
lieux qu’elle habite; je n'ai pas pris d'exemplaires d’une seconde
génération, à la fin de juillet ou au commencement d’août et j'ignore
si Cyllarus éclôt réellement deux fois par an.
Voici le relevé des localités où la Zycæna Cyllarus a été
authentiquement capturée, bien entendu d’après les documents
que je possède; car je n'ignore point qu'on peut trouver l'espèce
en infiniment d’autres lieux : Lusigny (Aube), 20 Juin 1009;
Samoussy (Aisne), juin 1909; forêt de Carnelles (Seine-et-Oise),
O mai 1009; Rennes, en mai; Angoulême, en mai et juin; Dom-
pierre-sur-Mer (Charente-Inférieure), en mai; Lectoure (Gers), en
mai; Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales), en avril, mai et juin;
La Voulte-sur-Rhône (Ardèche), en avril; Digne, en avril, mai et
juin; Alpes-Maritimes, en avril, mai et juin; Besançon; Château-
du-Loir (Sarthe); Hyères et forêt du Dom (Var); Corse; Sicile;
Valais; Brindisi (Italie méridionale), en mai; Florence en juin; La
Granja (Espagne centrale), en juin; Lambèse; Aflou, Khenchela
(Algérie); Tokat (Asie-Mineure); Akbès (Syrie); Fort-Naryne
(Turkestan).
La ZLycæna Cyllarus présente de nombreuses et intéressantes
variations. Tout d’abord elle offre des exemplaires très différents
pour la taille. C’est ainsi que Millière a figuré sous les n* 5 et 6
de la PL 108 de l’/conographie et description de Chemilles et
Lépidoptères inédits, 1860, une petite race de Cyllarus G, de
Cannes, ayant la bordure noire des ailes relativement assez large
en dessus, le fond des ailes, en dessous, gris de souris et les points
noirs ocellés intranervuraux bien accentués, mais suivant la règle
normale sensiblement plus gros aux supérieures qu’aux inférieures.
Millière dit (page 73) : « Par sa petite taille, ce Cyllarus O' se
rapproche tellement de Welanops qu’on le prendrait volontiers pour
un hybride de Cyllarus et de Melanops. J'avoue même que Je ne
suis pas absolument certain qu'il n’en soit pas un. Je n'ai pu
310 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
encore rencontrer la Q dont la vue trancherait sans doute la ques-
tion. Quoi qu'il en soit, cette race méridionale paraît constante par
son exiguité relative ».
L'opinion de Millière concernant l’hybridation de Cyllarus et
de Melanops est, dans le cas dont il s’agit, absolument inadmissible.
En Provence, il y a des petits exemplaires de Cyllarus semblables
à celui figuré par Müllière; mais il y en a de beaucoup plus grands
dans les mêmes localités; les petits échantillons ne sont nullement
le résultat d’une hybridation quelconque; ce sont de purs Cyllarus
comme les grands, et Millière s’abuse en invoquant la constance de
la petite taille, après avoir eu soin de déclarer en tête de sa notice,
qu'il n’a recueilli que trois sujets; ce n’est pas avec un si petit
nombre de spécimens que sa religion pouvait se trouver éclairée.
La vérité, c'est qu'il y a des petits et des grands exemplaires de
Cyllarus, en Provence. Les petits exemplaires sont peut-être rela-
tivement plus fréquents en Provence que dans les autres contrées
de la France; mais il ne faut pas aller au delà de cette observation,
si l’on veut rester véridique.
Chez la Lycæna Cyllarus, les G' ont le dessus des ailes d’un joli
bleu clair; elles sont entourées d’un liséré noir de largeur variable,
mais généralement étroit et assez net.
Les © ont ordinairement la base des ailes bleue et le bord très
largement noirâtre; mais suivant les individus, cette teinte bleue
est plus ou moins développée et quelquefois même absente. J'ai vu
des exemplaires sur lesquels la teinte bleue forme comme un
rayonnement d’un effet très gracieux. Chez certains échantillons,
le bord des ailes inférieures se trouve orné d’une série de chevrons
bleus, le long du liséré terminal noir qui est frangé de blanc pur.
En dessous, la ponctuation noire des ailes supérieures est le plus
souvent formée d’une série de taches assez grosses, fréquemment
contiguës, décrivant un arc de cercle; les taches qui avoisinent le
bord costal sont plus petites que les autres. Sur les ailes inférieures,
l'ocellation, moins grosse que sur les supérieures, décrit aussi une
courbe, mais souvent moins régulièrement ordonnée qu'aux supé-
rieures. Toutes ces taches noires ocellées sont cerclées de blanc,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE ci
sur un fond dont la teinte varie depuis le gris perle au gris de
souris. Ainsi que cela se constate chez toutes les espèces du genre
Lycæna, les taches normales du dessous des ailes peuvent s’atté-
nuer, disparaître, ou inversement s’amplifier sous forme de rayons.
J'ai fait figurer sous les n®* 31 et 32 de la PL 3 de la
XX° livraison des Etudes d'Entomologie deux Œ de la Granja
dont le dessous est plus ou moins complètement dépourvu d’ocel-
lation noire (Ab. subtus-impunctata et Ab. subtus-partim-punctata).
J'ai fait représenter aussi sous le n° 33 de la même PI. 3 l’Aber-
ration subtus-radiata, d'après un ' venant d'Autriche. J'ai donné,
à la page 16 de l'ouvrage précité, les indications relatives à ces
Aberrations.
Les variations des Q ont été distinguées jusqu'ici comme suit :
la © de Cyllarus entièrement noire, en dessus, a été appelée
Anderreggi par Rühl. Je l’ai prise aux environs de Florence et
M. Wullschlegel me l’a envoyée de Saillon, aux environs de Mar-
tigny (Valais). Je la possède aussi des Alpes-Maritimes et du
Turkestan.
Millière a décrit et figuré dans les Annales Soc. ent. de France,
1887, avec le nom de Blackieri, sous les n°% 8 et Oo de la PL 5,
une variété de Cyllarus © remarquable par l’accentuation de son
ocellation noire du dessous des ailes: cette ocellation transparaît
en dessus, aux supérieures comme aux inférieures. Blachieri fut
trouvée en avril et mai, au pied du Mont Salève, près Genève.
Millière la dédia à M. le professeur Blachier, qui joint au mérite
d'une aménité si parfaite celui d'une connaissance très approfondie
des papillons en général et de ceux de la Suisse en particulier.
De son côté, M. Gouin a donné le nom de punctata à une même
variété © de Cyllarus qui est décrite et figurée, d’après un échan-
tillon pris à la Sauve, le 1° juin 1003, dans les procès-verbaux
de la Société linnéenne de Bordeaux (Séance du 9 mars 10904);
l’'Ab. Punctata est caractérisée comme suit : « Alis posticis, supra,
quatuor punctis nigris notatis ». Ainsi que le dit M. Gouin, ma
collection contient un exemplaire de cette Aberration punctata,
pris à Aflou (Oranie du Sud). En dessous, ce spécimen est tout
312 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
à fait remarquable par l’accentuation de tous les ocelles noirs
entourés de blanc, qui forment, sur chaque aile, comme un brillant
quart de cercle transparaissant d’ailleurs en dessus. Il en est de
même, au dire de M. Gouin, chez l'échantillon qu'il a décrit et
figuré avec le nom de functata.
Blachieri, Millière, et punctata, Gouin, représentent donc une
même forme © de Cyllarus; punctata paraissant cependant être
encore plus accentuée dans le sens de sa variation que Blachier:.
Mais il se présente une confusion due à la notice que Millière
écrivit pour accompagner dans les Annales Soc. ent. de France la
figure de la © Blachier:.
Feu mon cher ami Millière était doué d’un tempérament très
artistique; il aimait beaucoup l'étude des sciences naturelles et 1l
chassait avec un incontestable talent; cependant il paraissait privé
de la vision nette des choses et ses écrits portent trop souvent
l'empreinte des tendances nuageuses et incertaines de son esprit.
Les Entomologistes qui liront attentivement ce que Millière a écrit
au sujet de Cyllarus d, des environs de Cannes, à la page 73 du
3° volume de l’/conographie, 1860, et à propos de Cyllarus var.
Blachieri, dans les Ann. de la Soc. ent. de France, 1887, se ren-
dront compte du manque de clarté, de l’irrésolution et de l’indé-
cision de l’auteur.
L'article de Millière, que j'ai lu et relu, me paraît en effet assez
incohérent. Millière veut rattacher à la forme Blachieri Q du Mont
Salève la petite race dont il avait jadis récolté 3 G' à Cannes et
dont il semble que la Q lui soit restée inconnue.
La vérité, c'est qu'en Provence les © peuvent par Aberration
très rare, être Blachieri ou punctata; mais les Cyllarus Q normales
de Provence n’ont pas sur le dessus des ailes la transparence des
taches ocellées du dessous, parce que les taches ocellées en question
ne sont généralement pas assez accentuées en dessous pour trans-
paraître vivement en dessus.
Je reconnais ne pas SAVOI SIND NO Blachieri, Millière
(punctata, Gouin) est ou n’est pas la forme la plus fréquente au
pied du Mont Salève. Je pense que s’il est vrai que les C yllarus ©,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 313
—
auprès du Mont Salève, tendent plutôt à y devenir Blachieri-
punctata, il doit y avoir aussi dans cette localité des exemplaires
normaux et d’autres qui font la transition entre les deux races.
Ce ne doit être qu'à titre exceptionnel, aux environs de Genève
comme ailleurs, mais peut-être à Genève plus souvent qu'ailleurs,
qu’on trouve des Blachieri Q très caractérisées. M. Charles Blachier
pourra nous renseigner savamment à cet égard. Toutefois, à mon
avis, il n’y a nullement lieu d'appliquer aux © si petits soient-1ls,
le nom de Blachieri. Laissons les O‘ en dehors de cette appellation
et réservons-la aux Q qui sont pourvues sur le dessus des ailes
d'une transparence très accentuée de l'ocellation amplifiée du
dessous.
J'ai reçu de M. Arnold Wullschlegel, de Martigny, des Cyl-
larus © intitulés Blachieri; mais pas de Q Blachieri-punctata.
J'en conclus que celles-ci sont rares dans le Valais, d'où J'ai seu-
lement reçu plusieurs fois la Q noire Anderreggt.
Quant à la forme æruginosa, Stgr. (alis posticis subtus fere
totis virescentibus), c’est la forme ordinaire à Akbès; mais à titre
d’aberration, on la trouve à Besançon, d’où M. Fritsch m’a envoyé
un superbe exemplaire ' pris en 1806.
Dans la forme ærwginosa, les ailes inférieures, presque entie-
rement couvertes d’une belle teinte bleu verdâtre brillant, sont à
peu près totalement dépourvues d’ocellation noire. De plus, aux
ailes supérieures, le nombre des ocelles ovalaires noirs cerclés de
blanc est réduit ordinairement à trois ou quatre. La Q æruginosa
de Syrie est tantôt noire en dessus, comme Awderreggt, tantôt
saupoudrée d’atomes bleus sur le disque des ailes.
Gerhard a grossièrement figuré Cyllarus sous les n° 3 4, 3 b,
3c, 34 de la PI. 15. La var. #ristis figurée sous les n°” 4a et 4 d
de la même PI. 15 vient de Turquie. Je ne vois pas bien en quoi
elle se caractérise. On trouve en France çà et là des Cyllarus qui
me paraissent référables à #ristis. Huebner a représenté Cyllarus,
avec le nom de Dametas, sous les n° 266, 267 et 268. La Q qu'il
figure est noire avec la base seulement des ailes supérieures bleue.
314 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Lycæna Melanops, Boisduval.
Il est bien agréable de voir voltiger Welanops sur les thyms et
les dorycnium de Provence ou du Roussillon, aussitôt que
reviennent, après la longue stérilité entomologique de l'hiver, les
premiers Jours plus féconds du printemps. La Zycæna Melanops,
dans le Sud de la France, ne produit généralement pas un vol
bien haut, n1 bien soutenu; on la voit dans les localités chaudes
et arides qu’elle affectionne, toujours assez près de terre, se reposer
sur les plantes parfumées qui l’attirent, puis quitter la touffe sur
laquelle elle s'est tenue quelque temps pour chercher non loin de
là une autre place à son gré.
En Andalousie, la Lycæna Melanops semble plus agile; je me
souviens de l'avoir observée dans les montagnes voisines de
Cordoue, notamment dans les campagnes d’'Almodovar où elle
volait rapidement, en avril 1867, au-dessus des massifs de Cistus
ladaniferus dont les pétales blancs jonchant le sol ressemblaient
par leur grand nombre à la neige fraîchement tombée. Ces Cis/us,
à l'odeur si pénétrante, forment le sous-bois des forêts de Quercus
ilex et de Quercus suber. Melanops avait, dans cette région, une
allure bien plus active qu'en Provence. Il en était de même, en
avril 1868, aux environs de Lambèse, dans les plaines ondulées
qui s'étendent du pied du Djebel-Aurès jusqu’à la ville de Batna,
partout hérissées de pierres romaines et couvertes d’un gazon qui
devient, à la fin du mois de mai, une herbe si haute. La même
Espèce de Lépidoptère affecte quelquefois des mœurs différentes
dans les lieux différents qu’elle habite.
Melanops est une Zycæna de petite taille, fragile et délicate,
exclusivement méridionale, confinée dans quelques localités du
Sud de la France, de l'Espagne et de l'Algérie. Elle éclôt une
seule fois par an. On la trouve assez communément dans les
Basses-Alpes, les Alpes-Maritimes, le Var, les Pyrénées-Orientales,
la Catalogne, l’Andalousie et la partie non désertique de l'Algérie.
Les variations pour la forme, le développement ou l'absence des
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 315
taches noires ocellées du dessous des ailes sont nombreuses et
intéressantes.
Boisduval a donné de bonnes figures de l’'Argus Melanops sous
les n° 4, 5 et 6 de la PI. 17 de l’/cones. La découverte de Melanops,
réalisée en 1823, est due au comte de Saporta, « qui nous a fait
connaître, dit Boisduval, une foule d'Espèces nouvelles propres
au département qu'il habite ». Il s’agit du département du Var,
où le comte de Saporta possédait le château de Montvert, près
de Saint-Maximin. Un autre entomologiste provençal, M. Boyer
de Fonscolombe, dont la propriété se trouvait aux environs d’Aux,
rivalisait de zèle et d’ardeur pour l'Entomologie, avec le comte
de Saporta. Je dois à l’obligeance de M. Gédéon Foulquier, de
Marseille, de connaître la photographie du château de Montvert,
auquel Duponchel a fait une si juste célébrité dans les fastes de
la Lépidoptérologie française. M. G. Foulquier s'intéresse non
seulement à la connaissance de la faune entomologique actuelle
de son beau pays, mais encore à l’histoire de la Lépidoptérologie
provençale et des Lépidoptéristes qui ont contribué aux progrès
de la Science par leurs recherches et par leurs travaux dans le Var
et les Bouches-du-Rhône. C’est en effet un côté très attrayant des
études entomologiques. Duponchel était en relations suivies avec
MM. de Fonscolombe et de Saporta; il fut même leur hôte et 1l
chassa avec eux, aux environs de leur résidence. Aussi, dans le
Supplément à l'Histoire naturelle des Pagillons de France, par
J.-B. Godart, dont P. A. J. Duponchel fut le continuateur, est-1l
fréquemment donné de lire le récit des découvertes si importantes
qui se faisaient incessamment dans les régions méridionales de la
France. Au point de vue entomologique, la Provence ne commença
d'être sérieusement explorée qu'à partir de l'année 1820. Ce fut
pendant environ un quart de siècle à dater de cette époque que
les Bouches-du-Rhône et le Var devinrent, entomologiquement
parlant, l’objet des recherches les plus productives et les plus sui-
vies. Dardouin, peseur public du Commerce à Marseille, joignit
ses efforts à ceux du comte Adolphe de Saporta dont il était le
contemporain. Marloy, ex-chirurgien de navires, établi comme
316 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
médecin à Auriol, était aussi, vers 1835, un lépidoptériste pas-
sionné; de même Meissonnier-Valcroissant, homme de lettres, à
qui Guenée dédia l'Æadena Meissonnieri, et Théodore Aurran,
propriétaire, habitant tous deux la ville d'Hyères, se livraient à
l'étude des papillons du littoral méditerranéen. L'avocat Louis-
Prosper Cantener, ancien professeur à la célèbre école de Sorèze,
était l’auteur d’un catalogue des Lépidoptères du Var qui a paru
dans la Revue entomologique de Silbermann. D’autres entomolo-
gistes plus ou moins connus, tels que Ginette, employé à la Pré-
fecture de Draguignan; Eymond d’Esclevin, capitaine-comman-
dant au corps royal d'artillerie de marine, à Toulon; Isoard, à
Salernes, près Draguignan; Léautier, capitaine instructeur au
Collège de Marseille, qui découvrit la chenille de la Xylna
Leautieri, Bdv.; Solier, capitaine du génie à Marseille, surtout
coléoptériste, mais aussi amateur de papillons, coopéraient à la
même époque, c’est-à-dire vers 1835, à l'étude des Lépidoptères de
Provence. Cependant, si les chasseurs de ce temps-là étaient
ardents à la recherche des papillons à partir du premier printemps
et pendant les beaux jours de l'été, ils cessaient leurs recherches
à l'approche de l’automne, et ce n'était que par hasard qu'ils
capturaient une Noctuelle ou une Phalène en octobre ou en
novembre. C’est cet abandon de toutes investigations à la saison
même où les Noctuelles semblent cependant être plus nombreuses
qui a empêché les Entomologistes de la première moitié du
XIX: siècle de soupçonner l'existence de l’'Orfosia Witzenmanni,
de l’Orrhodia Staudingeri, si fertile en variétés, de l’A gros
Constanti, pourtant assez abondamment répandus dans la région
méridionale de la France.
Feu mon ami Emmanuel Martin, dont J'ai rappelé le sympa-
thique souvenir dans la notice consacrée à la Zycæna algérienne
qui porte son nom, se livrait très assidûment, pendant les saisons
d’hiver et de printemps qu'il passait à Hyères, à la récolte des
chenilles ; il fit lui-même des captures remarquables et contribua
à enrichir de plusieurs découvertes l'inventaire de la faune des
Lépidoptères du Var. Je lui dois, entre autres papillons des envi-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE eu
rons d'Hyères, de très beaux exemplaires de la Zycena Melanops,
étalés tout frais et sans ramollissage des aïles, c’est-à-dire conservés
dans toute la pureté de leur couleur bleu céleste si sensible et
facile à détériorer.
Le cd est, en dessus, d’un bleu plus ou moins clair, avec une
bordure noire assez nette, pas très large, surtout aux inférieures;
la frange est blanche. La Q a le fond des ailes d’un brun noirâtre
avec le disque plus ou moins saupoudré d’écailles bleues. Certaines
Q sont cependant presque unicolores, c’est-à-dire brunes avec un
léger reflet gris bleuâtre près de la base des ailes; d’autres — et
c'est le plus grand nombre en Provence et dans les Pyrénées-
Orientales — sont assez largement poudrées de bleu. Quelques Q
présentent, le long du bord extérieur des ailes, une sorte de liséré
bleuâtre qui se détache et ressort nettement sur la teinte brun noï-
râtre du fond des ailes.
En dessous, la variation produite par les différentes formes des
taches noires, ou bien par leur disparition totale ou partielle, est,
ainsi que je le dis plus haut, très considérable et pleine d'intérêt.
J'ai fait figurer sous les n° 34, 35 et 36 de la PS ederla
XX: livraison des Etudes d'Entomologie :
1° L’Aberration sans taches noires appelée Marchandii et figurée
dans la Revue entomologique de Silbermann (tome Il, 1834, PI. 27,
Ho INEtI2).
2 L'Ab. subtus-partim-impunctata, où les taches noires sont
absentes des ailes inférieures et limitées aux supérieures.
3° Enfin l’Ab. subtus-radiata, où les taches noires extrêmement
développées forment, sur les ailes supérieures, de grosses larmes,
et, sur les inférieures, une ponctuation arrondie, mais également
très grosse relativement.
M'étant occupé un peu spécialement de la recherche des varia-
tions de Melanops, j'ai réuni une série d’une quarantaine d’indi-
vidus aberrants. L'étude de ces spécimens serait très intéressante
à publier, accompagnée de figures explicatives; car la plume est
impuissante à décrire intelligiblement toutes ces variations formées
318 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
par un excès ou une absence de ponctuation noire sur le dessous
des ailes. En attendant que je puisse réaliser ce travail iconogra-
phique, je prends comme termes de comparaison les trois figures
34, 35 et 36 de la PI. 3 de la XX°® livraison des Etudes d'Ento-
mologie et je constate que l’Ab. WMarchandii, Boisduval, paraît être
la forme extrême, au point de vue du manque de ponctuation, sur
le dessous des ailes. Je possède le specimen fypicum décrit par
Boisduval dans la Revue entomologique, aux pages 121 et 122
du tome II. L’Ab. Warchandii, Bdv., fut découverte le 10 mai 1833,
par Cantener, dans les bois de pins du Mont Serrat, aux environs
de Barcelone; Boisduval en fit la dédicace à M. Marchand, de
Chartres.
Ce M. Marchand possédait une des plus belles collections de
Lépidoptères indigènes et exotiques, ainsi que de Coléoptères. T1
avait acquis la collection de feu Godart. Le Cabinet de M. Mar-
chand, comme on disait dans ce temps-là, avait cela de remar-
quable qu’à côté de chaque espèce de Lépidoptère se trouvait la
chenille moulée en cire et la chrysalide. M. Marchand demeurait
place Marceau, à Chartres; l’un de ses descendants est devenu un
ornithologiste très distingué. Le célèbre entomologiste Bellier de
la Chavignerie était, je crois, le neveu de M. Marchand.
Une Aberration assez fréquente est conforme à Warchandu
pour les ailes inférieures, mais possède sur les supérieures
quelques taches noires. L’exemplaire figuré n° 35 présente une
série de quatre taches; j'en possède plusieurs qui ont deux taches
seulement. D’autres ont trois taches; quelques-uns en ont cinq.
Il y a aussi des WMelanops qui montrent une toute petite tache
noire, ronde, cerclée de blanc, près de la base, dans l’espace cellu-
laire des supérieures; puis on trouve toutes les transitions depuis
les exemplaires dont les ailes inférieures sont dépourvues de toute
ponctuation noire jusqu’à ceux qui ont les taches en question aussi
accentuées que dans l’exemplaire n° 36; ce Lépidoptère n° 36 fut
pris en Catalogne, tout comme l’Ab. inverse Marchand.
Les deux points noirs situés le long du bord costal des ailes
supérieures confluent parfois et forment une tache noire allongée.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 319
Souvent les ailes supérieures sont marquées de taches noires
arrondies, grosses, contiguës.
Très rarement ces taches, qui occupent chacune un des espaces
intranervuraux, confluent en passant par-dessus la nervure et en
formant ainsi un gros paquet noir qui occupe, sans aucune appa-
rence de séparation, deux espaces intranervuraux. L’Ab. 7adiata
aux ailes supérieures ne paraît pas fort rare. J'ai plusieurs exem-
plaires très accentués sous ce rapport; mais aucun de ceux que Je
possède ne semble offrir un plus gros rayonnement que le n° 36.
A Tijola (Almeria) et à Malaga, Melanops est de taille plus
grande qu'à Digne, Cannes et Vernet-les-Bains. En Algérie, on
prend à Lambèse et à Sebdou des exemplaires également plus
grands qu’en Provence et en Roussillon. Les © algériennes se
distinguent fréquemment par la bordure de croissants d’un blanc
bleuâtre qui descend le long du bord externe des ailes, presque
depuis le bord costal des supérieures jusqu'au bord anal des infé-
rieures. La race algérienne de Melanops mérite parfaitement le
nom spécial d’Algirica, Heyne-Rühl; Staudinger et Rebel, dans
leur Catalog 1001, se trompent une fois de plus en disant de cette
race algérienne « non differt » C’est à croire qu'ils ne l'ont pas
vue. La race andalouse de Welanops paraît assez conforme à la
race A/girica; cependant je n'ai pas vu de © espagnole semblable
à la Q algérienne ci-dessus décrite; il est vrai de dire que toutes
les © algériennes ne sont point ainsi et J'ai sous les yeux une ©
prise à Sebdou par le D' Codet, deux Q prises à Malaga et une
autre prise à Tijola qui sont conformes entre elles.
Huebner a figuré Welanops, avec le nom de Saporte, sous les
n% 022, 023, 024 et 025; mais la figuration du dessous des ailes
est mal réussie.
I1 semble que les contrées où les Aberrations de Welanops se
rencontrent plus fréquemment, sont les environs de Digne et le
Mont-Serrat, en Catalogne. C’est à Digne qu’on trouve plus sou-
vent les Aberrations figurées par Gerhard, sous les n* 14 et 10
de la PI. 15, avec le nom erroné de Marchandu. Comme je l’expose
320 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
ci-dessus, le nom de Warchandi s'applique à l'Ab. svbtus absque
ocellis, ou cæca, tandis que les papillons figurés par Gerhard sont,
au contraire, pourvus de taches ocellées d'une grosseur au-dessus
de la moyenne.
Lycæna Iolas, Freyer.
Freyer a figuré Pap. lolas d'abord sous les n°% 2 et 3 de la
Tab. 110 de Bestrege zur Geschichte europæischer Schmetterlinge;
à la page 60 du 3° volume, Freyer dit qu’en dehors de la Hongrie,
il ne connaît pas d’autre patrie pour ce papillon. Le même Freyer
a figuré de nouveau Zolas à l’état de chenille, de chrysalide et
d'insecte parfait, mais la Q seulement, sur la Tab. 07 de Neuere
Beitrege. L'auteur fait connaître que le D' Em. Frivaldsky, de
Pesth, a découvert la chenille qui vit dans la gousse de Colutea
arborescens, plante de la famille des Papilionacées, croissant
spontanément sur les coteaux calcaires de l'Europe centrale et
méridionale, de l’Asie occidentale et de l'Algérie.
Huebner a admirablement représenté Zolas, avec le nom erroné
de Zolaus, sous les n° 870, 880, 881 et 882. Boisduval, dans
l’Zcones, sous les n*% 1, 2 et 3 de la PI. II, a figuré une forme
de C' un peu différente de celle que représente Huebner. Boisduval
dit que ce bel Argus a été découvert en Dalmatie, en 1818, par le
comte Dejean, et presque à la même époque aux environs de Bude,
en Hongrie. Boisduval ajoute que l'espèce a été prise, il y a une
dizaine d’années, en Provence, par le comte de Saporta, et qu’on
dit aussi qu'/olas habite les environs de Rome.
Duponchel, dans le Szpplément (p. 46 et 47), informe que /olas
a été découverte dans les environs de Toulon et que le comte de
Saporta lui a mandé, dans une lettre du 26 octobre 1826, qu'il
l'avait prise, cette année même, dans son Jardin du château de
Montvert, près de Saint-Maximin, département du Var. D’après
Duponchel, /olas paraît en juillet. Duponchel donne des figures
semblant assez médiocres sous les n° 4, 5 et 6 de la PI. VII.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 321
Tolas se trouve aux environs de Digne, d’où j'en possède
27 exemplaires récoltés en avril et mai. M. Wullschlegel m'a
fourni 14 individus pris aux environs de Martigny (Valais) en
juin. J'en ai reçu un assez grand nombre d'exemplaires de Hongrie
et de Tokat (Asie-Mineure). M. Gédéon Foulquier a capturé Zolas
dans les Bouches-du-Rhône, mais rarement, Je crois, et M. Gaston
Allard a trouvé cette belle et grande espèce en Algérie où elle
paraît avoir été trouvée en très petit nombre d'exemplaires Jjus-
qu'ici. II semble que la © du Valais est plus obscure et moins
largement saupoudrée de pulvérulence bleue que celles de Digne
et de Hongrie.
Lycæna Arion, Linné.
Habite l'Angleterre, la France, la Corse, l'Autriche, l'Allemagne,
la Suisse, l'Italie, l'Asie; manque en Algérie.
C’est une grande espèce, probablement la plus grande des
Lycæna européennes après Zolas. Elle se trouve en Bretagne, dans
les landes de Monterfil et de Bourg-des-Comptes; mais à Mon-
terfil, elle semble se raréfier depuis quelques années, aussi bien
qu'en Angleterre où son extinction est considérée comme désormais
prochaine.
Charles Barrett traite de la question de la disparition d’Arzon
de l'Angleterre aux pages 08, 00 et 100 de son Histoire des
Papillons anglais. Je suis redevable de la traduction de cette notice
à l’obligeance et à la compétence de M. Harold Powell. On verra
que les années pluvieuses paraissent très peu favorables à la
reproduction de la Zycæna Arion en Angleterre. L'espèce n’a été
abondante en Angleterre que dans les étés chauds et secs. [Il me
semble bien qu'il en est de même en Ille-et-Vilaine. L'année 1909
fut très humide chez nous; l'été fut frais et pluvieux. J'ai chassé
à Monterfil à la fin de juin et au commencement de Juillet, c'est-
à-dire à la bonne époque de l’éclosion d’Ayion qui ne paraît qu'une
21
222 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
fois par an, à partir de la saint Jean et jusqu’au 20 juillet environ.
Je ne vis pas un seul exemplaire, bien que j'aie soigneusement
cherché l'espèce dans ses localités ordinaires. Je ne crois cependant
pas qu'A7on soit éteinte à Monterfl où elle donne une forme très
particulière et dont je parlerai plus loin; aussi j'espère encore revoir
Aion voltiger dans les landes de mon pays, au cours d’un bel été
sec et chaud, s’il plaît à Dieu.
Charles Barrett s'exprime comme suit :
« Encore une espèce en train de disparaître rapidement de ce
pays. Elle fut jadis répandue, ayant été vue sur les falaises près
de Douvres, à Winchester, à Bedford et même dans le Nord du
Pays de Galles, ainsi qu'à Marlborough Downs et dans d’autres
localités du Wiltshire. On l’a signalée également sur les collines
des environs de Bath. Cependant, pendant bien des années, sa
localité la mieux connue était à Barnwell Wold et les parties
adjacentes du Northamptonshire, où elle fut découverte par le
Rev. W. Bree de Polebrook, avant l’année 1840.
M. C. À. Briggs m'a dit qu’elle s’y trouvait encore en 1850, et
que l’Archdeacon Bree connaissait bien diverses localités de la
région où l'espèce n'avait pas été chassée à outrance — comme
elle l'avait certainement été à Barnwell Wold, — mais que la
saison extrêmement pluvieuse de l’année 1860 paraît l’avoir exter-
minée partout dans cette région puisqu'elle n'y a pas été rencontrée
depuis. Une localité de découverte plus récente était sur les
Cotswold Hills (Collines Cotswold), en Gloucestershire, où les
entomologistes de Gloucester l’ont prise en quelque nombre.
M. Herbert Goss raconte aussi, dans Te Entomologisfs
Monthly Magazine, comment il fit sa connaissance dans cette
localité en 1876, d’abord dans une vieille carrière abandonnée,
ensuite dans les clairières d’un grand bois de hêtres, parsemées
abondamment de fleurs, surtout de thym sauvage. A7ion y était
relativement commune. Il dit qu'on ne pouvait la prendre pour
une autre espèce, sa taille plus grande, sa couleur bleu fer et son
vol un peu lourd et vacillant la distinguant suffisamment.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 323
I] dit également que A7ioz vole plutôt à la façon de l’Epinephile
Tithonus où hyperanthus que comme ses congénères, mais que,
poursuivie ou effrayée, elle a le vol assez fort. Elle aime bien à
se reposer sur le thym sauvage et à extraire le nectar des fleurs
de cette plante.
En 1877, M. Goss la trouva encore communément; mais en 1883,
des recherches poursuivies pendant douze jours n’ont pas donné
un seul exemplaire, et l’espèce fut considérée alors exterminée dans
la région de Cotswold. On a attribué cette extermination aux
fermiers, qui ont l'habitude de brûler le gazon mort sur les collines,
au premier printemps; mais M. Goss fait remarquer que cette
coutume de brûler le gazon mort remonte aux temps immémoriaux
et ne peut guère être la seule cause de sa destruction. Du reste, il
trouva de nouveau le papillon en très petit nombre dans la même
localité à la fin juin 1800, et on ne doit pas encore désespérer de
l'y retrouver.
M. Herbert Marsden contribua à la publication, qui eut leu
en 1884, d'intéressantes notes sur l'Espèce dans cette localité,
démontrant combien était grande la fluctuation en nombre d’indi-
vidus suivant les conditions atmosphériques. En 1868 et 1800,
pendant les belles saisons, l'augmentation était grande, et l'année
1870 fut la plus prolifique qu’on ait connue; on aurait pu prendre
un millier d'exemplaires. Les saisons 1876-77 furent bonnes, mais
pendant les années pluvieuses qui suivirent, l'espèce était en
décroissance régulière, et il avait alors vu les derniers individus
en 1880.
Le major Still me dit qu’elle était une fois commune dans
quelques localités très restreintes des environs de Langport,
Somerset, et qu’elle y fut prise par feu M. J. C. Dale, mais ilnya
aucun rapport récent pour cette région. Les collines incultes de
la côte du South Devon près Kingsbridge, Bolt Head, etc. furent
pendant longtemps des repaires préférés pour cette espèce. Dans
The Entomologist, M. H. Nicholls signale son abondance dans
cette localité de 1856 à 1875, et raconte que le papillon effrayé
avait l'habitude curieuse de se précipiter dans un des nombreux
324 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
buissons de l'Ulex Europœus, au milieu desquels il se cachait.
IT était alors impossible de le faire quitter ce refuge sûr.
M. G. C. Bignell, qui l’a pris abondamment dans la même
région, dit: « Il est remarquable au vol à cause de sa couleur
foncée. Les femelles ont une prédilection notable pour les fleurs
du thym sauvage, sur lesquelles elles déposent leurs œufs et dont
elles sucent le nectar. La coutume qu'ont les fermiers de brûler
chaque année l’ajonc (Ulex Europæus) a eu comme résultat
l’extermination du papillon dans sa vieille localité, sur le Bolt
Head ».
On dit cependant que l'espèce existe encore dans quelques loca-
lités du South Devon et du North Devon, et elle a été prise l’an
dernier (1891) dans le comté de Cornwall. Les auteurs de ces
captures de Cornwall, MM. Waterhouse, ont exhibé à une réunion
de l’'Entomological Club une boîte contenant de très beaux spé-
cimens provenant de ce comté. Il va sans dire que les localités
exactes des captures récentes n’ont pas été divulguées. Pour cette
raison, et à cause de l’existence de vastes terrains incultes et favo-
rables dans l'extrême sud-ouest où l'espèce paraît maintenant se
réfugier, 1l y a lieu d’espérer que A7ion, notre plus grand Polyom-
matus, ne sera pas, d'ici quelques années au moins, finalement
exterminé dans ce pays. »
Ma collection contient 8 exemplaires d’Arion jadis pris en
Angleterre et ayant fait partie de la collection Prest d’Vork, qui
fut vendue à Londres, il y a déjà bien longtemps. Faisant suite
à ces A7zon d'Angleterre, je considère dans ma boîte 10 Aion
de Monterfil, de Laillé et de Bourg-des-Comptes (Ille-et-Vilaine),
et Je constate la très grande conformité de la Zycæna Arion en
Grande-Bretagne et en Ille-et-Vilaine. Les &, dans les deux pays,
ont les taches noires des ailes supérieures, en dessus, de dimension
relativement réduite, sur un fond d’un bleu grisâtre assez clair,
mais un peu éteint. Les © ont les taches noires plus grosses et la
bordure noirâtre est plus développée; la teinte bleue ressort peut-
être plus vivement chez les Q que chez les . Le dessous des ailes
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 32
Ur
est le même dans les deux races : anglaise et bretonne; la couleur
du fond est de la même teinte brun ochracé clair, avec les ocelles
noirs cerclés de blanc jaunâtre; de plus, le semis d’atomes bleus
ou verdâtres près la base des inférieures est moins abondant et
moins accentué que dans la race du Midi de la France, notamment
des Pyrénées-Orientales; cette race a elle-même le fond des ailes
plus gris. En Bretagne, il y a des Of, tel que celui figuré sous le
n° 10 de la PI. 3 des Etudes d'Entomologie, dont la ponctuation
noire, sur le dessus des ailes, est très oblitérée; mais il convient
d'observer que cet exemplaire n° 10 est l’exemplaire le plus carac-
térisé que je possède dans le sens : s#pra impunctata. Cette même
tendance existe à Angoulême d’où mon ami Gabriel Dupuy m'a
envoyé 2 C' appartenant, comme celui de Monterfil n° 19, à VAR. :
supra non maculata, indiquée avec le nom d'Uiscolor, dans le
Catalog Staudinger et Rebel 1901. En Limousin, les taches noires
sont plus développées chez Arion qu'en Angleterre et en Bretagne,
et la teinte bleuâtre paraît plus violacée. Dans les Pyrénées, la
race est superbe, généralement grande, avec de grosses taches
noires en dessus, même sur les ailes inférieures, et une large bordure
noire. Le dessous des ailes a la base teintée de bleu argenté clair;
tantôt les taches noires sont très développées; tantôt, par variation
inverse, elles sont nulles.
Dans la XX® livraison des Ætudes d'Entomologie, Jai fait
figurer le dessous des ailes de ces deux formes d’après des exem-
plaires de Vernet-les-Bains; celle qui est dépourvue de points noirs
est représentée sous le n° 20 et avec la mention : sxd/us-1mpunctata,
et l’autre, sous le n° 20’, avec la mention: sxbtus-maculis-extensis.
Dans les Alpes-Maritimes, il y a une race superbe d’Ayzon que
J'ai reçue sous le nom de /igurica. J'ignore où ce nom a pu être
publié. Le fond des ailes, en dessus, est d’un bleu vif, très clair,
chez les © surtout; les taches noires sont très développées, princi-
palement aux ailes supérieures où elles forment quelquefois une
sorte de large et épais faisceau de pointes de flèche dirigées vers
la base.
Aux environs de Digne, A7ion paraît être très variable, aussi
326 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
bien pour la taille que pour l’extension des taches noires, pour leur
confluence, pour le développement de la bordure noirâtre des ailes
et la pureté de la teinte bleue.
À Zermatt, Aion, en dessus, est remarquablement obscur
presque autant que dans l’Oural, où les exemplaires appartiennent
à la race géographique : obscura.
En outre des localités ci-dessus désignées, je possède A7zon du
Tyrol, de Fusio, de Stresa, de Grèce, de l’Oberland bernois, du
Jura bernois, de Savoie, de la région du lac Baïkal, de Corse, de
la Lozère, de la Gironde, de la Charente, des Hautes-Alpes, du
Doubs, du Turkestan oriental.
L'examen des A7ion de ces diverses localités démontre qu'il y a,
dans chacune, une race dont le faciès ou aspect général est assez
spécial; mais avec un mélange d'exemplaires rappelant ceux qui
forment la majorité dans les autres endroits. C’est ainsi que partout
où vole Ayion, il y a des petits et des grands exemplaires, des
individus à taches très réduites ou très développées en dessus et
ayant la teinte bleue plus claire ou plus grise; en dessous, l’ocel-
lation noire ordinaire est plus ou moins accentuée, avec la teinte
brune du fond ochracée ou grisâtre et la pulvérulence bleu verdâtre
plus ou moins largement répandue à partir de la base des ailes
inférieures et vers le milieu. Il faut donc juger une race locale
sur un ensemble d'individus. C’est ainsi qu'une série d’Ayion
ligurica comparée à une autre série d’A7ion des Pyrénées Orientales
paraîtra, envisagée d’une manière générale et synthétique, très
distincte. Cependant, au milieu des A7zon de Vernet, on trouvera
des exemplaires d’un bleu plus clair, pourvus de taches noires
très larges, très noires, avec une rangée d’ocelles blanchâtres,
pupillés de noir, intranervuraux le long du bord externe des ailes
inférieures. Ces Aion pyrénéens ne seraient point disparates dans
la colonne des Aion de Menton ou du Mont Pacanaglia. Pourtant
la race pyrénéenne d’Ayion est, dans sa généralité, bien plus obs-
cure. La race de Saint-Pierre-de-Venaco (Corse) semble référable à
la race ligurica. 11 me paraît nécessaire de disposer d’un nombre
considérable d'exemplaires pour émettre, au point de vue des races
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 327
locales d’'Arion, un avis motivé. C'est ainsi que le plus grand
exemplaire d’Ariox que je possède vient d’Atzwang, près Botzen;
mais j'ignore s’il n'y a pas dans ce lieu des exemplaires de taille
moyenne et même petite et comment est la race normale de ce
pays. Dès lors, faute de documents, je m'abstiens de tout com-
mentaire.
En Haute-Savoie, près de Chamounix, Arion n'est pas si obscur
qu'à Zermatt, mais de taille médiocre et sans grand éclat ; 1l y a
à Chamounix des exemplaires qui paraissent très peu différents
des Arion bretons; cependant, comparées dans leur ensemble, les
deux races ne sont pas semblables.
Dans les Hautes-Alpes, au Lautaret, ainsi que dans certaines
localités très élevées des Basses-Alpes, on trouve une race d'Ayion
très petite, ayant le faciès d'Alcon ou d’Erebus, à nuances éteintes
et formant un contraste curieux avec la race /2gurica.
A Entrevaux, au Mont Gourdon, à Garamagne, dans la vallée
du Roubion, c’est-à-dire à la frontière des Alpes-Maritimes et des
Basses-Alpes, M. Harold Powell a capturé, en juillet 1906, une
série de variétés d’Arion extrêmement curieuse à cause des diifé-
rences extraordinaires de taille, de maculature, d'éclat de la teinte
bleue qui caractérisent les exemplaires. A côté d’un G' d'Entrevaux,
tout à fait pareil à ligurica, il y a des exemplaires extrêmement
sombres.
Je devrai sans doute consacrer une Planche entière, dans l’une
des livraisons du présent ouvrage, à la figuration des diverses
races françaises d’Ayion. Il y a dans ma collection des spécimens
si opposés par certains de leurs caractères et appartenant cependant
très authentiquement à la même unité spécifique : Aion, que la
représentation de ces variétés me paraît très digne d'intérêt. Je
profiterai de cette figuration d’A7ion pour faire connaître une race
nouvelle et encore inédite de Tà-tsien-Lou. Le ', en dessus, est
tout bleu, sans taches noires; la Q est obscurcie par la teinte
noirâtre et elle est ponctuée de noir sur le dessus des ailes supé-
rieures. En dessous, les ailes inférieures sont très largement cou-
328 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
vertes d’une pulvérulence verdâtre et les points noirs ordinaires
sont très petits. Leech n’a pas connu l’Ayrion tatsienluica.
Cyanecula est la race d’Ayrion, au Fort Naryne, dans le Tur-
kestan; c’est une des races les plus constantes que je connaisse.
Arionides, Stgr, de Mandchourie, me paraît être également une
variété géographique d’A7ion qui se rapprocherait de ligurica.
Il y a des Aberrations albinisantes, notamment pour le fond
brun des ailes qui, chez certains individus, s’est changé en un gris
très pâle. Je possède un échantillon atteint de cet albinisme et
capturé à Villeneuve-de-Blaye (Gironde), par mon vénérable ami
l'abbé Mège.
Herrich-Schaeffer a publié, sous les n° 519 et 520, la figure
d'une magnifique Aberration qu’on pourrait appeler lacrymosa, à
cause de la transformation en énormes gouttes noires, ayant la
forme de larmes, des taches noires ordinaires, sur le dessus comme
sur le dessous des ailes.
Gerhard a copié les figures données par Herrich-Schaeffer, sous
les n* 3a et 36 de la PI. 38. Il a de même copié les figures
d'Arion publiées par Herrich-Schaeffer sous les n° 517 et 518;
mais sous le n° 24 de la PI. 38, Gerhard a représenté le côté
gauche du dessous des ailes d'Ayion, au lieu du côté droit, ainsi
que cela est représenté dans l'ouvrage d’Herrich-Schaeffer.
Les auteurs, même très modernes, qui tiennent à sembler tout
connaître et ne rien ignorer de ce qui a été publié en dehors d’eux,
ne se font pas faute de copier les figures des papillons qu’ils n’ont
Jamais vus en nature, mais qui ont paru dans des ouvrages divers.
Comme la copie est toujours une altération plus ou moins grande
de l'original, ces sortes d'opérations méritent quelque critique,
d'autant plus que très rarement le plagiaire a l’honnêteté d’avouer
son plagiat et de faire connaître au lecteur que jamais il n’a vu
le papillon qu’il représente. Je crois utile de signaler cette méthode
dénuée de scrupule mais toujours à la mode. Elle n’est tolérable
qu'à la condition de faire sincèrement connaître la source où le
modèle existe et a été copié.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 329
Le nom d’Arion a été donné par Linné (Systema Nature,
édit, X, p. 483, n° 151) dans les termes suivants : « P. P. alis
ecaudatis : supra fuscis disco cæruleo maculis atris : subtus canis
punctis ocellaribus ; Habitat in Europa; Statura sequentis (A7gus),
sed duplo major. Alae posticae subtus ocellis 10, praeter puncta
marsinalia Roesel. Ins. 3. Suppl. Tab. XLV, fig. 3, 4 »
La citation des figures données par Roesel ne laisse aucun doute.
Linné avait emprunté le nom d’Ayion à la Fable. Arion dési-
gnait ou bien un cheval que Neptune fit sortir de la terre, d'un
coup de trident;, ou encore un fils de Neptune et de Cérès; ou
enfin un poète lyrique, habile joueur de luth, né dans la ville de
Méthymne, en l’île de Lesbos. S'étant précipité à la mer, apres
avoir fait retentir l'air des accords les plus touchants, 1l fut sauvé
par un dauphin qui, sensible aux charmes de sa mélodie, était
arrivé pour l'entendre.
Lycæna Euphemus, Huebner.
Manque en Angleterre et en Algérie; répandue en Allemagne
et vers l'Orient jusqu’au Japon; habite l'Alsace et quelques parties
de la France, notamment les environs d'Angoulême.
Huebner a figuré Euphemus sous les n°% 257, 258 et 250;
Boisduval, dans l’/cones, a représenté la même Zycæna sous les
n®% 4, 5 et 6 de la PL 13; de plus, sous les n°* 7 et 8, le même
auteur a publié la figure d’une variété supposée d'£vphemus,
dépourvue, en dessus, de toute autre tache noire que le croissant
discoidal à chaque aile; et, en dessous, privée de la série d’ocelles
noirs cerclés de blanc qui descendent du bord costal des supé-
rieures au bord anal des inférieures, entre les croissants cellulaires
et les taches submarginales. Cette variété d’Argus (nom de genre
adopté par Boisduval pour les Zycæna), nous a été communiquée,
dit Boisduval, par M. Donzel, de Lyon, et nous croyons devoir
la rapporter à Evphemus. Toutefois, en terminant la notice con-
sacrée à Æuphemus, l'auteur croit devoir prévenir qu'il ne peut
330 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
assurer que cette variété appartienne réellement à cette espèce. Si
cependant la variété en question peut se référer à Æphemus, on
peut dire qu’elle est à Æwphemus exactement ce que la variété
figurée sous le n° 20 de la PI. 3 de la XX* livraison des Ævudes
d'Entomologie est à Arion. Duponchel a bien figuré £uphemus
sous les n° 4, 5 et 6 de la PI. L du Supplément. Aux pages 85,
86, 87 et 88 de cet ouvrage, Duponchel expose très judicieusement
la question de séparation spécifique d'Euphemus et d'Alcon:; les
observations que cet auteur a écrites sont intéressantes à consulter.
La chenille d'Exphemus vit sur une plante de la famille des
rosacées appelée Sanguisorba ofhcinalis, Linné. Cette plante vivace
de 40 centimètres à 1 mètre de hauteur, se plaît dans les lieux
humides; elle fleurit en été; on la trouve près d'Angoulême, dans
la Jolie vallée des Eaux-Claires, et c’est dans les prés tourbeux et
marécageux, non fauchés, qu’on voit voler Ephemus en juillet,
près de la Sangauisorba qui y croît en quantité et dresse sa tige
souvent rameuse, peu feuillée, terminée par des fleurs hermaphro-
dites, d’un pourpre foncé, au-dessus des autres herbes de la
prairie. La Sanguisorba ofhcinalis, d'après l'abbé H. Coste
(Flore descriptive et illustrée de la France, vol. II, p. 60; Paris,
1903), a des propriétés vulnéraires, et son nom lui est venu du
latin : sanguis, sang, et sorbere, boire, par allusion à son utilisation
médicinale. Le fruit de la Sanguisorba est sec, tétragone, à angles
ailés, à faces lisses et a un seul carpelle renfermé dans le tube
endurci du calice. L'abbé Coste, dans son excellent livre, place le
genre Sanguisorba entre les Pimprenelles (Poferium), dont il cite
trois espèces françaises, et les A/ckemilla, dont il énumère douze
espèces croissant spontanément en France. Le genre Sanguisorba
contient la seule espèce française : ofhcinalis.
Mon ami Gabriel Dupuy m'a procuré à deux reprises différentes,
alors que je me trouvais à Angoulême, au mois de juillet, le plaisir
de capturer la Zycæna Euphemus, qui me rappelle, ainsi que Je
l'a déjà fait connaître dans la Préface de la III° livraison, de
chers souvenirs d'Alsace.
Lorsqu'on sort de la ville d'Angoulême par la partie Sud et
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 331
qu'on est parvenu au sommet de la première côte, on chemine
d’abord sur un plateau que traverse, perpendiculairement à la
grande route, le chemin se dirigeant du côté de l'Est vers Puy-
moyen. Avant de descendre la pente assez rapide du revers méri-
dional de ce plateau, ayant à sa droite comme à sa gauche un
flanc de colline calcaire d’aspect sec et chaud, on voit se dérouler
devant soi le fond d’une vallée plus longue que large, arrosée par
des eaux vives et claires d’où la vallée en question a pris son nom.
La fraîcheur des prairies de la vallée des Eaux-Claires contraste
avec la sécheresse du penchant de la colline que décorent pourtant,
du côté de l'Orient, de jolis et nombreux bouquets de chêne vert.
Leur sombre verdure a du moins le grand mérite d’être persistante
et de ne jamais laisser le paysage attristé par le dépouillement
automnal des branches. L'autre côté de la vallée des Eaux-Claires,
— celui qui fait vis-à-vis, — est formé par un relèvement assez
brusque du sol, paraissant moins sec que le côté du Nord, car la
pente et le plateau sont couverts de buissons et de touffes de
chênes blancs, en mélange avec des arbrisseaux d’essence diverse.
Pendant la belle saison, les Quercus pubescens joignant leur fron-
daison d’un vert un peu grisâtre aux autres verdures variées, pro-
duisent à l'horizon un effet très agréable.
Des arbres divers, au tronc élevé et au feuillage vigoureux, grâce
à l'humidité du thalweg, ombragent la route qui traverse la vallée
et forment des rideaux ou des groupes, le long des champs et des
prés qu’ils bordent et séparent. Vus du haut de la colline, ces
grands arbres impriment à la campagne un caractère de richesse
et constituent un très beau et majestueux décor. Si on pénètre dans
la vallée parcourue par de nombreux cours d’eau, on rencontre des
terrains moins fertiles que la vue d’en haut ne le faisait supposer.
Il y a bien çà et là des champs de luzerne très fournis où s’ébattent
des quantités de papillons, des terres en culture et des prés très
plans, où l'herbe a été nivelée par la faux; mais il y a aussi de
vastes espaces, très verts, sortes de tourbières où l'eau jaillit sous
les pieds qui foulent le gazon. Des canaux pleins d’eau les tra-
versent ou les entourent. Depuis longtemps, on ne les fauche pas;
332 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
sans doute parce que l'herbe qui pousse dans ces sortes de maré-
cages est de qualité inférieure et ne vaut pas la peine d’être coupée
et fanée; ces prés humides sont le refuge des Zycena Euphemus.
Les plants de sanguisorba ÿ poussent, y fleurissent et y fructifient
sans dommage; aussi les générations de papillons se succèdent
nombreuses d’un été à l'été suivant. Mais que les propriétaires de
ces prés tourbeux s’avisent de tirer quelque parti de leur herbe, et
il en sera sans doute de la Zycœna Euphemus à Angoulême
comme d’'A7zon en Angleterre.
À l'abondance actuelle des papillons si jolis à voir voltiger au
grand soleil de juillet et si agréables à récolter dans la vallée des
Eaux-Claires, succéderait la stérilité, et il ne resterait aux Ento-
mologistes que le triste souvenir d’une très jolie espèce jadis repré-
sentée par de nombreux individus, désormais très réduite ou même
en voie d'extinction, ainsi que cela a déjà eu lieu en tant de places
diverses, partout où la Nature a été bouleversée, où la Flore
sauvage a été détruite.
Combien de localités excellentes, véritables placers pour le
Naturaliste, ont été à tout jamais détruites par l’activité soi-disant
industrieuse, mais souvent, hélas! écoiïste et brutale, des hommes,
qui sont trop peu soucieux, en tous pays, de la conservation d’une
faune et d’une flore généralement considérées avec l’ironique
dédain qu’engendre l'ignorance !
Quoi qu'il en soit, le souvenir des belles et douces journées de
la fin de juillet 1007 et du 26 juillet 1008, dont je suis redevable
à M. Gabriel Dupuy, reste fixé dans mon cœur, et je le conserve
précieusement, en l'évoquant avec un sentiment de reconnaissante
amitié.
La Zycœna Euphemus est très variable de taille; il y a des
exemplaires dont les taches noires ordinaires du milieu des ailes,
en dessus, sont très réduites et même absentes; d’autres où les
mêmes taches sont allongées. La race d'Angoulême paraît un peu
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 333
plus claire que celle d'Alsace et d’'Eclepans, en Suisse, la bordure
marginale des taches intranervurales blanchâtres semblant plus
accentuée à Angoulême que dans les autres localités. IT est juste
de dire cependant que certains échantillons provenant de Stras-
bourg sont tout à fait analogues à d’autres d'Angoulême. Une Q
présentant une curieuse variation fut prise en ma présence, le
26 juillet 1908, par M. Gabriel Dupuy, qui eut l’obligeance de me
l'offrir; elle est entièrement grise en dessus; les taches ordinaires
sont éteintes et une pulvérulence bleue peu abondante et très légère
se trouve répandue sur le disque des ailes. Le dessous est sim-
plement un peu plus pâle. J'ai donné à cette Aberration le nom
de Sanguisorbæe, pour rappeler la plante nourricière de l'espèce.
J'en publie la figure, sous le n° 472 de la PI LV.
En Extrême-Orient, il y a une race Euphemia, Stgr., représentée
sous le n° 6 de la PI. XIII du Vol. III des Mémoires de Romanoff.
Cette race £uphemia est plus obscure que la race française. Il y a
une autre forme dont le Œ est entièrement brun noirâtre en dessus
et qui a été appelée Kazamoto par Druce. J'ai reçu Euphemia du
Nord de la Chine et de Sidemi en Mandchourie, et Kazamoto, de
Yokohama, au nombre de 57 exemplaires. Dans l’Oural méridional,
à 40 kilomètres à l'Est de Zlatoust, il y a une race très obscure,
mais dont le Œ conserve une pulvérulence bleue plus accentuée
que chez Euphemia. Est-ce cette race que Staudinger a appelée
obscurata ?
Comme le nom d’Arion, celui d'Euphemus a été emprunté à la
Fable. Euphémus était fils de Neptune et d'Europe; Argonaute,
léger à la course, habile à conduire les chars, il remporta le prix
de la course aux jeux funèbres célébrés par les Argonautes à la
mort de Pélias qui était lui-même fils de Neptune et de la nymphe
Tyro. Après la mort de Typhis, fils de Neptune aussi lui et qui
conduisit le vaisseau des Argonautes, Euphémus devint le pilote
des dits Argonautes. Le nom d'Euphémus désigne aussi le fils de
Trazénus; il mena les Ciconiens au secours des Troyens contre
les Grecs {Dictionn. de la Fable, par Noël; Paris, An XITIT—1805).
334 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Lycæna Arcas, von Rottemburg.
Pap. Arcas (Plebejus ruralis) est décrit aux pages 25 et 26 de
Anmerkungen zu den Hufnagelischen Tabellen der Schmetter-
linge, dans le Sechstes Stück du journal Der Naturforscher, publié
à Halle, en 1775. S. A. von Rottemburg dit en parlant d’Arcas :
« In hiesiger Gegend wohnt dieser Vogel gar nicht », ce que je
traduis comme suit : « Dans les environs d'ici, ce papillon n’habite
pas. » J’ignore de quels environs d'ici S. À. von Rottemburg veut
exactement parler; mais sil s’agit des environs de Halle, A7cas
y habite, car je l’ai reçu de M. Franz Bandermann, de Halle,
comme capturé près de cette ville. La Zycæna Arcas se trouve en
Alsace et aussi, dit-on, en Bourgogne, près de Dijon; elle est
répandue dans diverses parties de l'Allemagne, à Eclepans,
Bienne, Divonne et Yverdon, en Suisse.
August-Wilhelm Knoch a très bien figuré la ©, avec le nom
d’ÆErebus, sous les n° 6 et 7 de la Tab. VI du II Stück de l’ou:
vrage Beitraege sur Insektengeschichte, publié à Leipzig, en 1782.
Knoch dit que l’Erebus a été trouvé dans les environs de
Leipzig. Il différencie son Z'rebus d’Arcas, Esper (Tab. XXXIV;
Suppl. X; fig. 4 et 5), qui, en effet, ne semble pas être Aycas, mais
est peut-être A/con. C'est surtout sous le nom d’Ærebus qu'Arcas,
d’ailleurs assez bien décrit par S. A. von Rottemburg, a été figurée.
Huebner représente Ærebus sous les n° 260, 261, 262; mais ses
figures sont médiocres. Boisduval, dans l’/cones, publie une meil-
leure figuration d’'Erebus sous les n° 4, 5 et 6 de la PI. IT; cepen-
dant la couleur bleue est trop claire sur le dessus des ailes du
n° 6. Duponchel figure Ærebus dans le Supplément, sous les n°% 1
(S' dessus) et 2 (Q dessous) de la PI. XTIT; cet auteur rapporte
que « ce Polyommate que l’on croyait étranger à la France et que
les amateurs faisaient venir d'Allemagne à grands frais, a été
découvert aux environs de Dijon, il y a 7 ou 8 ans, par le docteur
Lorey, et, depuis lors, il est devenu très commun dans les collec-
tions de Paris. On le trouve aussi dans les environs de Colmar.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 335
M. Alexandre Lefebvre l’a pris sur le revers du grand Salève,
dans une prairie qui regarde Genève. Son apparition a lieu dans
le mois de juillet. »
Ma collection contient une belle © Aberration : cæca. Le dessous
de ses quatre ailes n’a plus aucun ocelle et est d’un brun foncé uni.
Cette Ab. cæca vient de Dusseldorf. Généralement les ailes de la
Q sont en dessus d’un brun foncé mordoré uni; quelquefois
cependant on voit, sur les supérieures, quelques traits sagittés noirs,
d’une teinte plus obscure que le fond.
Comme Æuphemus, Arcas (Erebus) vit sur la Sanguisorba
ofhcinalis.
Le nom d’Arcas est, comme les noms d’Ayzon et d'Euphemus,
emprunté à la Fable. Aycas sert d’ailleurs à désigner des person-
nalités très différentes, telles que : 1° le fils de Jupiter et de Calisto
qui donna son nom à l’Arcadie et apprit à ses sujets à semer du
blé, à faire du pain, à fabriquer de la toile, etc. Cet Arcas fut
changé en ours avec sa mère Calisto; la mère et le fils forment les
constellations de la grande Ourse et de la petite Ourse; 2° le fils
d'Evandre; 3° Ancée, fils de Lycurgue, qui est appelé Arcas par
Ovide; 4° un des chiens d’Actéon; 5° Mercure, surnommé
Arcadien, parce qu’il avait été nourri sur le mont Cyllène, en
Arcadie.
Linné, dont l’admirable génie, fortifié par la plus haute culture
des lettres grecques et latines, se trouvait pénétré des légendes
poétiques de l'Antiquité, avait largement puisé dans la Fable, afin
d'y trouver les noms qu'il distribuait, pour la premuère fois, aux
espèces de papillons. Les héros de la guerre de Troie avaient été
mis à contribution, en même temps que les dieux et les demi-dieux
de l'Olympe. Les successeurs de Linné, glanant après lui, mais
s'inspirant de ses exemples, continuèrent à faire revivre sur les
ailes des Lépidoptères les souvenirs mythologiques. D'ailleurs,
puisque la langue latine est l’idiome scientifique admis par toutes
les nations du Globe, n'est-il pas naturel que les auteurs, en quête
de noms pour distinguer les êtres qu'ils décrivent, s'adressent à
l'antiquité latine et grecque si intimement associées l’une à l’autre,
336 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
afin d'y trouver, avec des consonances harmonieuses, des dési-
gnations qui rappellent à chacun
Ce le temps où le ciel sur la terre
Marchait et respirait dans un peuple de dieux ;
Où Vénus Astarté, fille de l’onde amère,
Secouait, vierge encore, les larmes de sa mère,
Et fécondait le monde en tordant ses cheveux...
Où le monde adorait ce qu'il tue aujourd’hui ;
Où quatre mille dieux n’avaient pas un athée;
Où tout était heureux excepté Prométhée,
Frère aîné de Satan, qui tomba comme lui...
Lycæna Alcon, Huebner.
Le nom d’A/con a désigné un graveur habile dont Ovide vante
les ouvrages dans le 13° livre des Wétamorphoses. Ce nom fut aussi
appliqué au fils d'Erecthée, au fils de Mars, au fils d'Amycus et
au fils d'Hippocoon. Il distingue maintenant une charmante
Lycæna d’un bleu un peu pâle dont la chenille vit aux dépens de
la Gentiana Pneumonanthe, plante vivace, à grandes fleurs d’un
bleu vif, qui croit dans les landes et pâturages marécageux de
presque toute la France, en dehors de la région du littoral médi-
terranéen. Les Gentianes sont répandues au nombre de près de
300 espèces, dit l'abbé Coste, dans les parties froides de l’hémis-
phère boréal, jusqu’à la limite des neiges éternelles; elles tirent
leur nom du roi d’Illyrie Gentius, le premier, d’après Pline, qui
utilisa les propriétés de la Gentiane. Les Gentianes font partie de
la famille des Gentianées qui contient 7 genres seulement de
plantes appartenant à la Flore française.
George Wheeler dit que la chenille d’Alcon vit aussi sur Cyisus
sagittalis. L'abbé H. Coste ne mentionne cependant pas l’espèce
sagittalis dans le genre Cyfisus; mais je vois dans la Flore
descriptive et illustrée de la France qu'il y a un Genista sagittalis
ou Genêt herbacé. Le genre Gexista appartient comme le genre
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 337
Cytisus aux Papilionacées, et dans la classification, les deux genres
sont placés très près l’un de l’autre. Je pense donc que c'est le
Genista sagittalis, selon H. Coste, que Wheeler a voulu désigner,
dans 7’Le Butterflies of Switzerland, comme plante pouvant servir,
avec la Genhana Pneumonanthe, à la nourriture de la chenille de
la Zycæena Alcon.
La Zycæna Alcon n'a pas été trouvée en Angleterre, ni en
Algérie; elle se rencontre en Bretagne, notamment au bois de Cicé,
près Rennes; à Pipriac, dans l’arrondissement de Redon; à Nozay
(Loire-Inférieure) ; à Vannes. Je la possède aussi d'Enchastrayes
et de Larche (Basses-Alpes), où elle fut prise en juillet 1807;
d'Angoulême; de Beauchêne et de Neuillé (de Graslin, en août);
du Simplon où je l’ai prise du 18 au 23 juillet 1002, me trouvant
en compagnie de feu mon ami Emile Favre, chanoine du Grand
Saint-Bernard; du Jura bernois; de Chantilly (ancienne collection
Guenée; avec la mention des noms de Pierret, Lemée, Roinville
et Guenée qui y capturèrent A/con ensemble).
Le 5 d’A/con est, en dessus, d’un bleu grisâtre un peu violacé,
d'un aspect pâle, avec une bordure noirâtre et une frange blanche,
sans autre tache que le croissant cellulaire aux supérieures. Encore
ce trait discoïdal est-il parfois à peine visible. La Q est ordinai-
rement d'un brun noirâtre, avec un semis d’atomes bleus près de
la base des supérieures et une série très visible de macules noires,
sagittées, intranervurales, traversant le milieu des ailes, au delà de
l’espace cellulaire, depuis le voisinage du bord costal des supé-
rieures et s'étendant sur les inférieures. On perçoit aussi sur cer-
tains exemplaires une seconde série maculaire, intranervurale, entre
la série médiane et le bord terminal des ailes. Il y a des Q
dépourvues de toute teinte bleue sur le dessus des ailes: elles
paraissent entièrement brunes ou grises. En dessous, le fond des
ailes est brun clair avec les points noirs ordinaires cerclés d’ocre
clair.
Alcon a été décrite comme suit, par Joh. Christ. Fabricius, dans
Mantissa Insectorum; Hafniae; 1787; p. 72 : « Alis integerrimis
coeruleis : margine fusco, subtus fusco cinereis : punctis numerosis
22
338 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
ocellaribus. — Pa. Alcon, Wien. Verz. 182. 4. — Pagilio Arcus
(szc) Esper. pap. tab. 34. fig. 4. 5. Habitat in Austria. Mus. Dom.
Schieffermyller. Statura P. Arzon. Mas alis omnino coeruleis mar-
gine tantum nigricante cilusque albis. Faemina obscurior punctis
obsoletis obscurioribus. Subtus omnes fusco cinereae punctis atris
numerosis annulo pallido cinctis. »
Huebner a donné sous les n° 263, 264, 265 des figures médiocres,
mais reconnaissables; 1l a représenté la forme de © entièrement
noire. Boisduval, dans l’/coxes, a figuré Alcon sous les n° 12
et 3 de la PI 13. A/con ©, selon Boisduval, a le milieu des ailes
teinté de bleu. À la page 82 de l’/cones, Boisduval donne les ren-
seignements que je transcris comme suit : « A/con se trouve à la
fin de juin et au commencement de juillet dans les clairières des
bois, sur les bruyères et dans les prairies sous-alpines. Il est plus
répandu en France que l'Euphemus. Aux environs de Paris, il est
assez commun dans les forêts de Saint-Germain et de Sénart.
M. Pierret fils, qui joint à un grand zèle des connaissances posi-
tives en Entomologie, l’a trouvé abondamment dans un petit bois
entre Luzarche et Chantilly ». Duponchel a figuré sous les n° 1,
2 et 3 de la PI. L du Supplément le , en dessus et en dessous,
et la Q, avec le milieu des ailes teinté de bleu, en dessus. Ainsi
que je l’ai déjà rapporté au cours de la notice concernant
Euphemus, Duponchel a écrit des observations très exactes sur
Euphemus et Alcon comparées, aux pages 85-88 du Szpplément.
Il termine ainsi son article : « Il n’est pas à notre connaissance
que l’Euphemus ait jamais été pris aux environs de Paris : tous
ceux qui existent dans les collections de Paris viennent d’Alle-
magne et de l'Est de la France. Quant à l’Acon, M. Pierret fils,
jeune entomophile plein d’ardeur, que nous aurons souvent occasion
de citer, l’a trouvé abondamment dans les premiers jours de Juillet,
entre Luzarche et Chantilly, dans une clairière humide et boisée
au bas d’une montagne; mais la plupart des mâles qu’il a recueillis
étaient fanés, d’où il pense que pour avoir ce Polyommate en bon
état, il faudrait le chercher huit jours plus tôt, c’est-à-dire vers
le 26 ou 27 juin.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 330
La localité dans laquelle il volait, et dont il ne s’écartait pas,
n'avait pas plus d'un demi-arpent d’étendue. M. Pierret soupçonne
qu’il était attiré par la plante dont la chenille se nourrit. Du reste,
il l'a vu rarement se reposer : il voltige comme l’Argzolus autour
des arbustes et des buissons. Son vol est lourd et ressemble à celui
de l’Hespérie miroir. »
Ces observations ont été imprimées en 1832, la même année où
a paru l’/cones de Boisduval, publication qui avait pour but de
concurrencer le Supplément de Duponchel. La rivalité entre
Duponchel et Boisduval avait pris un caractère d’aigreur dont
l'Avis de l'Auteur, dans l’/cones, signé : « Le Docteur Boisduval,
rue Mouffetard, n° 76 », porte l'empreinte. Quoi qu'il en soit, les
observations de Duponchel confirment et développent celles
données par Boisduval. J'ignore si la Zycæna Alcon se trouve
encore entre Luzarche et Chantilly, ainsi que dans les bois de
Sénart et de Saint-Germain. En Bretagne, A/con vole au mois
d'août; un Œ' pris au bois de Cicé, près Rennes, porte la date du
10 août 1884. Tous les exemplaires pris dans la Sarthe et faisant
partie de l’ancienne collection de Graslin, au nombre de 7, portent
la date des 3 et 19 août. L'année n’est pas indiquée. À Pipriac,
3 échantillons ont été pris en août 1909. Chez nous, la Q est uni-
colore, grise. À Angoulême, on trouve les deux formes ©, l'uni-
colore et celle qui présente une pulvérulence bleue. Il en est de
même dans les Basses-Alpes. Je n'ai jamais vu A/con, Euphemus,
ni £rebus dans quelque partie des Pyrénées. Mon ami Rondou cite
Alcon du Mont-Cagire, dans la Haute-Garonne, mais d’après le
catalogue de von Caradja. On connaît mon scepticisme à l'égard
des assertions qui sont imprimées dans les catalogues locaux, et
notamment dans celui de la Haute-Garonne dont j'ai eu déjà
occasion de m'occuper.
Lycæna Argiolus, Linné.
Une des Espèces qui sont répandues sur une plus grande
étendue de l'Europe, de l'Asie, sinon même de l'Amérique du
340 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Nord. On trouve A7giolus en Irlande et au Japon, en Scandinavie
et en Algérie, et dans l’espace compris entre ces contrées extrêmes.
C’est un papillon d’un bleu tendre et délicat en dessus, d’un blanc
bleuâtre en dessous.
En France, il éclôt deux fois par an : en avril et mai d’abord,
puis en Juillet et août. On le voit voltiger aussi bien dans les
Jardins, autour des buissons que forment les divers arbustes, que
dans les haïes, en bordure des champs. La Q diffère du d' parce
qu'elle a les ailes, en dessus, plus ou moins largement bordées de
noirâtre. Au printemps, elle est, en Bretagne, moins obscure qu'en
été. En dessous, Argiolus varie pour le développement ou l’atté-
nuation de la ponctuation noire qui est généralement très fine. J'ai
fait figurer sous le n° 24 de la PI 3 de la XX® livraison des
Etudes d'Entomologie une belle Aberration © subtus-radiata que
J'ai prise à la forêt de Rennes, au mois d’avril. Inversement à cette
Ab. radiata, on trouve des exemplaires à peu près dépourvus de
toute ponctuation noire, en dessous. Linné a décrit Argiolus, dans
le Systema Nature, édit. X, 1770, comme suit : « Alis ecaudatis :
supra caeruleis margine nigris; subtus caerulescentibus punctis
nigris dispersis. Habitat in Europa. Praecedenti (Argus) similis,
sed minor; subtus puncta pauciora dissita absque ocellis nigris. »
On remarque partout des exemplaires de taille très différente.
Je possède une paire d’Argiolus très petits, venant de Dalécarlie
(ex coll. Boisduval); mais je ne puis savoir si dans ce pays-là
Argiolus est toujours aussi petit. Je vois en effet des Argzolus pris
à Akbès, à l’île Askold, en Angleterre, à Rennes, dans les Pyrénées,
en Corse, en Sicile, dans le Djurjura, à Alger, etc., et Je constate
dans chaque localité une grande inégalité de taille. Les Q ont
généralement le bord des ailes inférieures, en dessus, marqué, dans
chaque espace intranervural, par un ocelle blanchâtre centralement
ponctué de noirâtre. Argiolus est une espèce très commune et qui
fait l'agrément des jardins, en animant les bosquets de son vol, à
partir des premiers beaux jours du printemps. Souvent on voit
plusieurs A7giolus voltigeant ensemble, puis se reposant sur les
feuilles et reprenant bientôt leur vol, tant que brillent les rayons
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 341
du soleil, et sans s'éloigner des lieux où ils sont nés. D’après
George Wheeler, la chenille vit sur le lierre, sur le houx et sur le
Rhamnus frangula où bourdaine, arbrisseau à feuilles caduques,
croissant dans les haies et les bois de presque toute l’Europe et
de l'Asie occidentale. Argiolus ne s'élève pas dans les montagnes
à une grande altitude. Du moins je ne l’ai jamais vu dans la
région dite alpine, ni dans les Alpes, ni dans les Pyrénées.
Relations des LYCÉNIDES et des FOURMIS
En terminant l'étude des Zycénides de l'Europe occidentale
et de l'Algérie, je crois intéressant pour mes Lecteurs de leur
offrir la traduction en français d’un article de M. Viehmcyer, de
Dresde, dont j'ai eu connaissance par un Sonder-Abdruck aus
dem XXIV lahrgang (1907) des « ÆEntomologischen Wochen-
blattes » (Insekten-Boerse) que m'a très complaisamment envoyé
l'auteur.
J'ai ajouté aux noms d’Espèce imprimés dans l’article de
M. Viehmeyer, ceux que lui-même avait eu l’obligeance d'ajouter
à la main, dans la copie qu'il voulut bien m'adresser. On remar-
quera qu'aux Zycénides s'ajoutent des Ærycimides.
M. Charles Janet a fait paraître en 1897, sous le titre de :
Etudes sur les fourmis, etc. (note 14), une revision des Kapports
des animaux myrmécophiles avec Les fourmis, du moins pour ce
qu'il lui a été possible d’en connaître.
On trouvera résumée, à la fin de l’article de M. Viehmeyer,
dont l'excellente traduction est due à M. Baumann, professeur
au Lycée de Rennes, la notice savante et documentée de
M. Charles Janet sur les rapports des Zycenide et des fourmis.
Je saisis avec empressement l’occasion qui m'est offerte d’ex-
primer ici à M. Baumann ma plus vive gratitude pour le nouveau
service qu'il a bien voulu rendre à l’Entomologie, avec tant
d’obligeance et de compétence. Déjà, il avait bien voulu traduire
342 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
avec une maitrise à laquelle on ne saurait rendre un hommage
assez mérité, les savantes Observations du D’ Prof. Max Standfuss,
de Zurich, sur les mutations d'A glia Tau.
Je devrai à M. Baumann de pouvoir fournir aux Entomologistes
français des renseignements très curieux sur une question encore
neuve et susceptible de donner, quelque jour, sur l’histoire des
fourmis et des papillons, les résultats les plus inattendus. Les
vérités les plus surprenantes peuvent nous être révélées plus tard
par quelque observateur à la fois très patient et très heureux, et
il en résultera un nouveau faisceau d'observations qui rendra
l'étude de l’Entomologie toujours plus intéressante et plus chère.
I. — REMARQUES PRÉLIMINAIRES SUR LA MYRMÉCOPHILIE
DES CHENILLES DE LYCÉNIDES
Par H. VIEHMEYER, Dresden — A. 16.
Traduit de l'allemand par M. BAUMANN, Professeur au Lycée de Rennes.
C’est un fait plus ou moins connu, que certaines chenilles de
Lycénides portent sur le troisième avant-dernier segment du
corps une fente transversale, par où elles sécrètent un suc que les
fourmis affectionnent comme nourriture. C’est pourquoi celles-ci
recherchent les chenilles sur leurs plantes nourricières, et, comme
elles font pour les pucerons, les caressent de leurs antennes pour
provoquer des sécrétions. À ces chenilles les fourmis, en revanche,
offriraient une certaine protection contre leurs divers ennemis et
fourniraient dans leurs nids, aux chenilles adultes, un milieu
favorable à la chrysalidation. En dehors de cette fente sur le
11° segment, les chenilles en question possèdent encore sur le
12° segment, 2 petits tubes caractéristiques, à la fois extensibles
et rétractiles, portant à leur extrémité une fine touffe de poils.
Sur le rôle de ces organes on ne sait encore rien de certain; on
les considère comme des organes défensifs ou des moyens de
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 343
séduction, peut-être aussi comme des préservatifs contre l’impor-
tunité de certaines fourmis. Pour Thomann, fente et tubes sont
des organes d'adaptation, en vue de la visite des fourmis. En ce
qui concerne la fente, la preuve est faite Faut-1l également
considérer les tubes comme des organes d'adaptation? Pour cela
il faudrait savoir s'ils n'existent qu'en corrélation avec la fente.
Or, d’après certaines indications bibliographiques, ceci ne semble
pas être le cas. Dans quelle mesure ces indications sont-elles
exactes ? Il est impossible à cette heure de l’établir. Quoi qu'il en
soit, les deux organes en discussion sont assez petits, pour qu’à
bien des observateurs ils aient passé complètement inaperçus ou
aient partiellement échappé. Tous les sujets par moi observés ont
ou constamment présenté les deux caractères, ou n’ont présenté
ni l’un ni l’autre; chez quelques chenilles seulement du genre
Thecla je n'ai pu arriver à aucune certitude. Les chenilles soufflées
semblaient avoir une fente, mais point de tentacules. Pour se
prononcer, il faudra attendre les résultats des recherches sur des
chenilles vivantes ou conservées dans l’alcool. Erronée, à coup
sûr, est l'opinion de Brant et d'autres, qui prétendent voir dans
la fente et les tubes, des caractères de différenciation de certains
groupes de chenilles de cette famille, par exemple, des TXeclidi
et des Zycænidi. Un coup d'œil sur la bibliographie montre que
ces caractères apparaissent dans les groupes les plus différents
des Zycénides; le plus fréquemment, sans contredit, dans le
groupe Zycæna. Mais on ne peut pas dire, en appliquant cette
formule au genre tout entier : les chenilles des Zycænidr où
seulement les chenilles du genre Zycæna sont toutes myrméco-
philes; car, même dans ce genre, à côté d’un grand nombre de
chenilles incontestablement munies d'organes d'adaptation myr-
mécophiles, nous en trouvons aussi chez lesquelles ces caractères
font défaut. La bibliographie fournit plusieurs indications à ce
sujet. Quel crédit méritent-elles? Il est impossible de se pro-
noncer. Pour me borner à mes observations personnelles, je n’en
veux citer, comme preuve, qu'une chenille du genre Zycæna
Lyc. optilete, Knoch. C’est en examinant la collection de chenilles
344. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
de feu D' ©. Staudinger (*) que j'ai fait cette découverte. Sur
13 espèces du genre, J'ai pu, de manière indubitable, déterminer
la présence de la fente et des tubes. Chez les individus adultes et
bien soufflés, on peut les reconnaître d’une manière relativement
facile et même à la simple loupe. La fente avec ses deux lèvres
se boursoufle ordinairement en forme de cône ou de durillons;
il n’est pas rare de voir les tubes allongés, et même les petites
touffes de poils sont parfois éventaillées. Lorsque les sujets ne
sont pas soufflés à plein, il y faut déjà regarder de très près. Les
tubes non déployés apparaissent alors habituellement sous forme
de petites taches rondes claires, un peu en dehors et en arrière de
la dernière paire de stigmates. Mais la chose devient tout à fait
contestable lorsque les segments postérieurs de l'abdomen, comme
cela peut arriver facilement, sont ou écrasés ou recroquevillés.
Même chez des individus conservés dans l’alcool les deux carac-
tères se peuvent aisément déterminer.
Comme nous l'avons dit, Zyc. optilete fut l'unique espèce du
Genre chez laquelle ces caractères étaient absents. Il m’en coûta
énormément de ne pas croire à une erreur, à une confusion; mais
le type de chenilles, le grand nombre d'exemplaires (15, et tous
soufflés dans la perfection), le nom du collectionneur, la scrupu-
leuse conscience du défunt propriétaire, tout cela devait finir par
me convaincre d'un fait qui, à le considérer de près, n’est pas
pour surprendre. Les pucerons n’offrent-ils pas à cet égard des
particularités analogues ?
Fente et tubes n’appartiennent donc pas à tous les individus
sans exception d’un Genre. D'où deux conséquences : d’abord, :il
faudra examiner toutes les espèces de chenilles de la famille des
Lycénides à ce point de vue; en second lieu, ce n’est pas seulement
la présence positive, c’est-à-dire la constatation de l'existence,
(*) M. A. Bang-Haas, Blasewitz près Dresden, propriétaire de la firme
Dr ©. Staudinger et A. Bang-Haas, m'a aimablement autorisé à examiner la
collection et à mettre à profit la riche bibliothèque. Je lui en exprime ma plus
sincère reconnaissance, — H, Viehmevyer,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 345
mais aussi l’absence de ces organes qui a sa très grande impor-
tance. Etant donnée la richesse en espèces de la famille des
Lycénides d'une part, et la manière de vivre extrêmement cachée
de leurs chenilles d'autre part, le premier champ d’investigations
est nécessairement très restreint. Dans la collection Staudinger,
j'ai pu examiner 45 chenilles de Zycénides, appartenant toutes à
la faune paléarctique, et, si j'en juge par une longue expérience
personnelle, il me faut reconnaitre que J'ai eu sous les yeux l’une
des plus grandes collections de chenilles, si ce n'est la plus grande.
La collection bien moindre que M. J. Griebel, professeur au
Gymnase, à Spire (*), a eu l’amabilité de m'envoyer aux fins
d'examen, contenait cependant encore 6 autres espèces, qui ne
figuraient pas dans la première collection. Au total, et en comptant
toutes les espèces indiquées dans la bibliographie, on arrive alors
à environ 85 exemplaires, nombre insignifiant, vu la richesse en
Espèces, de la famille. On voit par là combien précieux serait
tout apport nouveau, l'accroissement ne füût-1l que d'une seule
espèce. C’est, particulièrement, pour les espèces extra-européennes
que nous en sommes réduits presque exclusivement aux indications
bibliographiques. Or, c’est ici précisément qu'il importerait d’avoir
des sujets de comparaison.
Peuvent à présent être considérées comme indubitablement
myrmécophiles les espèces suivantes (**) :
LYCÆNIDÆ.
Thecla Tengstræmi, Ersch.!
Rapala Schistacea, Moore.
Lycena Admetus, Esper!
— Amanda, Schn.!
EE —— — — — " ———"— ————…—" ———
(*) A M. Griebel, j’exprime ici pour son amabilité ma profonde gratitude.
#) Ce tableau des espèces, je le dois à l’obligeance de M. le Prof. Dr Cour-
voisier, Bâle. Il a pour base ses études sur la nervation des ailes de cette
famille. — Chez les espèces marquées d’un ! j'ai pu en partie constater, en
partie contrôler l'existence de la fente et des tubes. — H. Viehmeyer.
340
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Lycæna Arcas, Rott.!
Argyrognomon, Bergstr.!
var. Ægidion, Meissn.
Argus, Linné (Æ gon, Schiff) !
Arion, Linné.
Astrarche, Bergstr.
Baton, Bergstr.!
Bellargus, Rott.!
Corydon, Poda.!
Cyllarus, Rott.!
Damon, Schiff !
Escheri, Huebner !
Eumedon, Esper!
H ylas, Esper (Dorylas, Huebner\.
Icarus, Rott.!
Jolas, Ochs.!
Melanops, Bdv.!
Melissa, Edw.
Minimum, Fuessl.!
Anna, Edvw.!
Sepiolus, Bdv.!
Orion, Pallas!
Scudderi, Edw.!
Sebrus, Bdv.!
Zasera Lysimon, Huebner.
Cyaniris Argiolus, Linné!
Pseudargiolus, Bdv.-Lec.
Chilades Lajus, Cramer.
Trochilus, Fr.
Lycænesthes Emolus, Godart.
Catochrysops Cnejus, Fabr.!
Pandava, Horsfñeld.
Polyommatus Baæticus, Linné!
T'arucus
Parsimon, Fabr.
T'heophrastus, Fabr.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 347
D —— —
Lampides Ælianus, Fabr.
—- Telicanus, Lang!
Everes Comyntas, Godart.
Aphnœeus Vulcanus, Fabr.
Jalmenus Evagoras, Donovan.
— Ictinus, Hewitson.
Ogyris Genoveva, Hewitson.
Gerydus Symethus, Cramer.
Amblypodia Meander, Bdv.
Phasis Aranda, Wallengren ?
— Thyra, Godart?
ERYCINIDÆ.
Nymphidium Molpe, Huebner.
Theope Eudocia, Doubleday-Hewitson.
— Foliorum, Bates.
Il existe, en outre, encore un petit nombre de chenilles à propos
desquelles la question ne peut être tranchée à présent, parce qu'on
n'a pu encore déterminer avec certitude si elles possèdent les
organes en question, ou parce que les indications bibliographiques
étaient contradictoires. De la plupart des chenilles citées on ne
sait rien de certain, si ce n’est qu'elles vivent en symbiose avec
les fourmis. De quelles espèces de fourmis s'agit-il ici? Dans la
presque totalité des cas on l’ignore. À de Nicéville seul nous
devons à cet égard des indications plus étendues. Tout collec-
tionneur de papillons qui ramasse des chenilles de Z ycénides ne
devrait pas manquer en même temps de surveiller quelles sont
les fourmis qui les fréquentent, d'observer de quelle manière
s'opère cette fréquentation, de prélever et de conserver un certain
nombre de ces fourmis dans l'alcool, et de publier, si l’occasion
s'en présente, les noms rigoureusement déterminés des deux sym-
348 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
biotes. Il ne suffit absolument pas de dire : « fréquentée par une
petite fourmi Jaune », ou encore : « en compagnie des fourmis
noires ordinaires ». Le plus souvent, il n’est pas nécessaire de
chercher bien loin les fourmis, car il n’est point rare de trouver
la fourmilière au pied de la plante nourricière. En fouillant ces
fourmilières, on acquiert aussi parfois la preuve de la vie en
commun de chenilles et de fourmis. Chez toute une série de che-
nilles d'Argus, en effet, la transformation en chrysalide, semble-
t-1l, s'opère dans le nid de leurs visiteuses. Peut-être l’hivernage
de certaines espèces a-t-1l lieu également au même endroit; mais
on n’a point, jusqu’à présent, fait d'observations à ce sujet. C’est
principalement le point de savoir dans quelle mesure existe
effectivement la prétendue protection des fourmis, qui serait
éclairci par des recherches de ce genre. I1 faudrait aussi consacrer
une attention particulière à la manière dont se comportent les
fourmis vis-à-vis des papillons éclos dans leurs nids. Nous man-
quons, d’ailleurs, de recherches systématiques sur l'attitude des
espèces de fourmis vis-à-vis de telles et telles chenilles qu’elles
ne fréquentent pas de façon normale, sur « les relations inter-
nationales » des chenilles de Zycénides, pour établir si l’amitié
des fourmis et des chenilles se limite à des espèces mutualistes
tout à fait déterminées, ou si cette amitié, comme c’est le cas chez
les pucerons et les cochenilles, a un caractère plus international.
Jusqu'à présent, les indications phylogéniques sur les organes
d'adaptation myrmécophiles font presque complètement défaut,
et 1l n'existe ni examen anatomique de ces organes, ni analyse
chimique de la gouttelette du suc sécrété.
La solution de bon nombre de ces énigmes est amorcée; malheu-
reusement la plupart des recherches échouent faute de matériaux
nécessaires. C’est pourquoi je prends la liberté d’invoquer le
concours aimable de tous ceux en état de me rendre service. Ce
concours pourrait s'effectuer :
1° Par l'envoi de chenilles de Z ycénides, rigoureusement déter-
minées (soufflées ou conservées dans l'alcool, formol, etc.), et,
particulièrement, par l'envoi de sujets exotiques;
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 349
2° Par l'envoi de fourmis observées en compagnie de chenilles
ou de chrysalides, ou par la communication des noms rigoureu-
/ Q LA
sement déterminés ;
3° Par la communication d’autres observations et recherches
personnelles, jusqu'ici inédites, et rentrant dans le cadre de cette
étude.
II. — LISTE DES ANIMAUX AVANT DES RAPPORTS
AVEC LES FOURMIS
LYCÆNIDÆ
(Extrait de l'étude de M. Charles JANET; Limoges, Ve Ducourtieux,
1897, p. 29, 30 et 31.)
« Guenée a observé des organes spéciaux qui se trouvent sur
les 10° et 11° anneaux postcéphaliques des chenilles de Zycænide.
Il décrit les parties extérieures de ces organes chez le Zycæna
bætica dont la chenille passe sa vie entière dans les siliques du
Colutea arborescens (Baguenaudier), dont elle ne mange que les
graines.
Scudder a examiné ces organes sur les chenilles d’une Zycænide
américaine, le Cyaniris Pseudargiolus.
Organe évaginable du 10° anneau postcéphalique. — Sur le
milieu de la région dorsale du 10° anneau postcéphalique se
trouve, suivant Guenée, une ouverture impaire, transverse, bordée
d'un bourrelet saillant autour duquel les granulations qui
couvrent tout le corps de la chenille s'accumulent particulie-
rement. Par cette sorte de boutonnière, sort, à la volonté de la
chenille, une espèce de vésicule hémisphérique, transparente, qui
donne passage à une sérosité, assez abondante pour former une
grosse gouttelette, laquelle se reproduit quand on l’a enlevée. La
chenille ne sécrète cette sérosité que quand elle est inquiétée.
350 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Scudder pense que cet organe doit exister chez toutes les che-
milles des genres 7'Lecla, Ballus (*) et Lycæna.
Organes évaginables du 11° anneau postcéphalique. — Sur le
11° anneau postcéphalique, anneau qui porte la dernière paire de
stigmates, se trouve un autre organe qui, lui, est pair. Cet organe
apparaît extérieurement sous forme de deux petits orifices situés
du côté anal et ventral des stigmates et peu éloignés d'eux. Ces
orifices ont, à peu près, la même dimension que les stigmates, près
desquels ils se trouvent, et leur ressemblent passablement. Par
chacun de ces orifices sort, lorsque l’animal est inquiété, un petit
appendice évaginable dont l'extrémité est garnie de petites
pointes charnues, elles-mêmes hérissées. La chenille possède la
faculté de faire sortir ces organes à volonté, soit isolément, soit
simultanément. Elle les dévagine alors comme les chenilles des
Papilio Machaon le font pour les osmatéries rougeûtres, bifur-
quées de leur prothorax.
Scudder a observé ces organes pairs chez la chenille du Cyanaris
Pseudargiolus. Chacun d’eux consiste en une caroncule extensible,
cylindrique, portant à son extrémité un groupe de soies qui,
d'abord disposées parallèlement les unes aux autres, en un
faisceau, prennent la forme d’un bouquet divergeant lorsque
l'organe est en complète extension.
Visites des fourmis aux chenilles de Lycænide. — La chenille
de Zycæna Argus que l’on trouve en mai et juin, par exemple sur
les Aelilotus et les Lotus, cachée tout à fait au bas de la plante
près du sol, est fréquemment entourée d’un groupe d’une dizaine
de fourmis (Freyer).
Mac-Cook (74e Mound-making ants of the Alleghanies, 1877)
a observé près de Philadelphie une formica subsericea qui, sur le
Cimicifuga racemosa, caressait avec ses antennes les derniers
anneaux d’une chenille de Zycénide, à la façon dont les fourmis
(*) Il n’y a pas de genre PBa/lus; c’est probablement 7'Aestor que l’auteur a
voulu dire. (Ch. Obthr.)
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 351
caressent les Aphidiens pour obtenir le rejet d’excréments sucrés.
La fourmi interrompit plusieurs fois ses caresses pour circuler
sur la plante, mais elle ne tardait pas à revenir et recommençait
ses sollicitations. Mac-Cook a constaté que la fourmi appliquait
ses organes buccaux sur la chenille; mais 1l ne vit pas de sécrétion
hquide ».
M. Janet cite les témoignages d'Edwards, Moore, Doherty,
Nicéville, confirmant l'observation des rapports entre les fourmis
et les chenilles de Zycémides. Il ajoute que d’après Rogenhofer,
la chenille de la Zycæna H ylas (Dorylas) se trouve presque tou-
Jours en compagnie des fourmis sur l'An/kyllis vulneraria.
€ Enfin Aurvillius a publié une note sur la présence des
nymphes de Zycæna Argus dans les nids de Zasius niger; mais
les rapports des Zycænidæe avec les fourmis seraient de même
catégorie que ceux des ApAide et ne constitueraient pas un véri-
table cas de myrmécophilie. La présence des nymphes de
Lycæna Argus dans les nids de Lasius niger s'expliquerait par
ce fait que les chenilles de Zycæna Argus font leur chrysalide
dans la terre, près des plantes qui les ont nourries, et que les
Lasius niger, espèce extraordinairement commune, peuvent être
attirées vers ces mêmes plantes, précisément par la présence de
ces chenilles. »
Guenée a décrit, avec figures à l’appui de sa description, dans
les Axnales Soc. ent. France, 1867, l'organisation spéciale des 10°
et 11° anneaux postcéphaliques dans la chemille de Zycæœna
bætica. C'est probablement à Guenée que revient l'honneur d’avoir,
le premier, découvert cet organe curieux de la Zycæna betica et
de l’avoir révélé au monde entomologique. Mais Guenée se garde,
dans son article, d'émettre la moindre hypothèse sur l'usage pra-
tique de l'organe en question; il se borne à en constater l’existence
et à en étudier la structure, ouvrage qu'il semble d’ailleurs avoir
parfaitement accompli.
352 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
”Heteropterus Morpheus, Pallas.
Hespéride plus connue dans les collections françaises sous le
nom de S/eropes Aracynthus, que Boisduval avait adopté dans
le Genera & Index methodicus 1840. Le © a été bien figuré par
Huebner, avec le nom de Szeropes, sous les n° 473 et 474. La
Morpheus (Aracynthus), dont le nom vulgaire français est le
Miroir, éclôt une seule fois par an, vers la saint Jean; elle vole
jusqu’à la fin de juillet et dure plus ou moins longtemps, suivant
les lieux et la température; elle manque en Angleterre et en
Algérie. L’ÆHespérie Miroir est commune à la forêt de Rennes, à
la forêt de Paimpont, et on la trouve même dans les petits bois,
le long des fossés herbus et humides, à Mesneuf, dans la commune
de Bourgbarré, près Rennes. On rencontre parfois des Aberrations
intéressantes pour les taches ovales du dessous des ailes infé-
rieures, tantôt élargies ou rétrécies, quelquefois remplies par le
développement de la couleur noire du cercle qui les entoure. J'ai
capturé l'es périe Miroir dans les marais de la forêt de Livernant,
en Charente, en même temps que Cœnonympha Œdippus. Je Vai
prise aussi à Biarritz. Je possède des exemplaires de Hongrie qui
semblent peu différents de ceux de Bretagne. Le € éclôt plusieurs
jours avant l’apparition de la Q et j'ai remarqué plusieurs fois
que la plupart des O' étaient usés par le vol au moment où les Q
étaient dans toute leur fraicheur.
L’Hespérie Miroir a un vol très particulier, sautillant et par
bonds. Elle se plaît dans les clairières herbues des forêts et elle
aime à se reposer sur les tiges d’herbe et les fleurs de composées.
Elle voltige depuis O heures du matin jusqu’à la fin de l’après-
midi. Il me semble que l’Espèce est moins abondante à la forêt
de Rennes, maintenant, qu'elle n'était 1l y a une cinquantaine
d'années. Cependant J'en ai encore vu des exemplaires assez
nombreux en 1800, 1005, 1006 et 1900, d’après les documents que
me présente ma collection. Mon frère l’a prise à Chantilly, en 1903,
et M. P. Boulé l’a rencontrée dans la Loire-Inférieure, à la forêt
du Cellier, au commencement d’août 1007.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 353
Carterocephalus Palæmon, Pallas.
De même que Æeteropterus Morpheus, Pallas, est pius commu-
nément appeiée Szeropes Aracynthus par les Entomologistes de
France, de même Carterocephalus Palæmon, Pallas, est plus sou-
vent désignée chez nous par le nom de Paniscus, Fabr., adopté
par Boisduval, dans le Genera & Index, 1840.
Huebner a représenté l'Éspèce avec le nom de Érontes, sous les
n*® 475 et 476. Le nom vulgaire français de Palæmon (paniscus)
est l’£chiquier.
Le P. Engramelle dit que l'Espèce est très rare; que cependant
M. Gigot d'Orcy en a trouvé une très grande quantité à la fois,
dans la forêt de Sénart, près Paris. Engramelle ajoute ce qui suit :
« Ce papillon ne paraît qu'une fois l’année, au mois de mai, dans
les bois; mais nous en avons trouvé dans les mois d’août et de
septembre une variété qui est représentée en dessus, figure 96 c.
Ses couleurs sont les mêmes que celles de l'espèce. Les taches de
ses ailes supérieures sont disposées à peu près de même, mais
celles du milieu des ailes supérieures sont plus allongées, et 1l
n’y en a point au bord. Son dessous, fig. 06 4, a le fond des ailes
supérieures plus terne, et celui des ailes inférieures moins couvert
de brun. »
Esper figure Paniscus sous le n° 2 de la Tab. XXVIIT ; le même
auteur figure une très belle Aberration O', dont l'aile supérieure
est entièrement noire, sous le n° 5 de la Tab. XCV.
Ce remarquable échantillon faisait partie de la fameuse col-
lection Gerning, avec laquelle 1l semble que bien peu de collec-
tions actuelles pourraient rivaliser. J'ai vu une très curieuse
Aberration de Palemon (paniscus) entre les mains d’un Jeune
amateur de Genève, qui en fit l’exhibition devant les membres
de la Société lépidoptérologique de cette savante Cité, le soir du
12 novembre 1908, où J'avais le plaisir d’assister à une réunion
de l’honorable Société lépidoptérologique. Je n'ai encore vu
paraître ni la description, ni la figure de cette Aberration. Elle
me semble pourtant bien digne d’être publiée. Freyer figure sous
23
354 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
le n° 1 de la Tab. 513 une belle Aberration de Pamiscus, prise à
Vienne.
L'Echiquier se trouve en Angleterre; je possède une série
d'exemplaires portant l'étiquette : Northampton, et ayant fait
partie de la collection Howard Vaughan. L’Espèce est commune
à la forêt de Rennes où elle vole en mai; jamais je ne l'ai vue
paraître de nouveau en été. Elle aime à se reposer sur les fleurs,
dans les allées sylvatiques, sur les composées, les graminées et
notamment sur la Bugle (Ajzga reptans, Linné), plante vivace
de la famille des Labiées, à fleurs d’un bleu violacé. L’Æchiquier
se trouve dans la forêt de Saint-Germain-en-Laye; je l'ai prise
à la fin de juin 1898 dans l’Oberland bernois et à Chamounix
(Haute-Savoie), au commencement de juillet 1802. Mon frère l’a
capturée à Ozoir-la-Ferrière et à Chantilly, en mai. Il y avait
dans la collection Kuwert des Palemon (paniscus) de Hongrie
et du Harz. M. Elwes m'a donné un G' semblable à ceux d'Europe,
rapporté de Laggan Alberta, où il fut recueilli en juillet 1803.
La collection Boisduval possédait aussi l’'Espèce de l'Amérique
du Nord. A l’île Askold et en Sibérie, il y a une race plus obscure
appelée Brontiades par Staudinger, 2# litt. C'est sans doute Îla
même que albigutta, Christ.
L'Æchiquier varie passablement à Rennes, pour la couleur plus
ou moins foncée des taches jaunes, en dessus; l'extension par
confluence, et inversement le rétrécissement desdites taches jaunes;
l'accentuation ou la suppression de la bordure submarginale des
petits points jaunes intranervuraux, aussi bien aux ailes supé-
rieures qu'aux ailes inférieures, en dessus; mais je n'ai Jamais été
assez heureux pour rencontrer des Aberrations notables, comme
celle figurée par Esper, ou pour trouver les autres variations qu'on
pressent et qui doivent nécessairement se présenter, par exemple
par confluence et confusion de toutes les taches jaunes en dessus,
des ocelles jaune nankin en dessous, etc.
Silvius, Knoch, très bien figurée sous les n° 1 et 2 de la Tab. V
du vol. I de Beitraege, est une espèce différente de Palemon
(paniscus). C’est une Hespérie très jolie, spéciale à la Germanie,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 355
à la Scandinavie et à la Russie d'Europe, d'Asie. Elle n’a jamais
été trouvée dans aucune localité de l'Europe occidentale.
Il y a au Thibet et dans les parties de la Chine qui en avoi-
sinent la frontière orientale, quelques très jolies espèces de Carte-
rocephalus; mais bien que plusieurs espèces européennes de
Lépidoptères se rencontrent au Thibet, je ne crois pas que
Palæmon (paniscus) y ait été jusqu'ici rencontré.
Wheeler dit que la chenille vit sur les plantains et les gazons;
mais Je ne l'ai jamais vue en nature.
Hesperia Lineola, Ochsenhermer.
Boisduval, dans l’Zcones, a figuré la Q, en dessus, sous le n° 4
de la PI. 47, et sous le n° 5, il a figuré le dessous. Il décrit
l'Espèce, dans sa diagnose latine, à la page 243, comme suit :
« Alis divaricatis fulvis concoloribus, feminae immaculatis, maris
lineola nigra tenui; antennarum clava subtus apice nigerrima;
fimbria albida ». J'ai publié une bonne figure du Œ dans la
1 livraison des Ætudes d'Entomologie (Algérie; PI. 3; lg. 3);
mais la forme algérienne est peut-être un peu différente de celle
de l’Europe, et Staudinger lui a donné le nom de semicolon. Cet
auteur caractérise la race algérienne de Zineola comme suit, dans
le Catalog 1901 : « dilutior, androconiis distinctioribus. » Les
ailes, en dessus, sont en effet d’une nuance moins obscure, plus
dorée, avec la bordure marginale noire plus étroite.
Chez les d' en bon état de conservation, on distingue aisément
sur les ailes supérieures un point noir nettement séparé du trait
noir qui recouvre une partie de la nervure médiane. Ce point noir
se trouve placé immédiatement à la base de ce trait nervural
médian, c’est-à-dire près de la base de la dernière nervule, au-
dessus de la nervure sous-médiane. Le dessous des antennes est
blanc jaunâtre avec la massue noire. L’Æesperia lineola éclôt une
seule fois par an, en juillet; elle se rencontre en Angleterre; à
Béville (Manche); en Bretagne, notamment sur les falaises de
350 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Cancale et à Monterfil; à Larche, à Allos, à Digne, à Entrevaux,
dans les Basses-Alpes; à Chamounix; à Zermatt; au Mont-
Genèvre et à la Grave (Hautes-Alpes); à Puget-Thémiers, à
Levens (Alpes-Maritimes); à Madrid; en Sicile; au Fort-Naryne,
dans le Turkestan oriental; à Lambèse (Algérie); à Broussa
(Asie-Mineure); à Irkust.
J'ai fait figurer sous le n° 243 de la PL XXXVII du présent
ouvrage une © albinisante par la couleur plus claire du fond
des ailes; Je l'appelle ardens.
La race de Chamounix est plus noircie sur le bord des ailes
que la race des plaines. C’est sans doute cette forme des mon-
tagnes qui est désignée par le nom de Zudovicie. Duponchel n'a
pas figuré le G' de Lineola. Sous le n° 1 de la PI XLI du Su-
plément, il a figuré les ailes de la Q; le n° 2 est également une
Q; mais j'ignore si c'est bien de Zineola. La fig. 3 représente
bien le dessous de Zineola, mais sans qu’il soit possible de préciser
le sexe.
Hesperia Thaumas, Esper.
Voisine de Zineola; mais généralement plus grande. Très
commune en Angleterre; aux environs de Rennes et de Cancale;
en Savoie; dans les Basses-Alpes; les Hautes-Pyrénées; les
Pyrénées-Orientales; l'Isère; les Alpes-Maritimes; à Lardy
(Seine-et-Oise): en Poitou; aux environs de Châteaudun, où
Guenée a élevé la chenille; en Corse; en Grèce; au Djurjura
(Algérie); en Italie (Florence); en Espagne; à Akbès et Broussa,
en Asie-Mineure.
L'éclosion se fait une seule fois par an, en juin et juillet.
Esper représente l’Æesperia T'haumas sous les figures 2 et 3 de
la Tab. XXXVI. Engramelle figure, avec le nom de lPA7denr,
sous les n° 05 a bis et 05 b bis de la PI. LXXIV, une Aberration Q
blanche, en dessus et en dessous, qui faisait partie de la collection
Gerning. L'Ardent paraît être, dans son genre, une Aberration
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 257
analogue à celle de Zineola, figurée sous le n° 243 du présent
ouvrage, que J'appelle également ardens, mais encore plus accen-
tuée, me semble-t-il. Je possède une Aberration albinisante de
T'haumas; c'est un O' que je fais figurer sous le n° 242 de Ja
PI. XXXVII de ce livre; mais l’albinisme respecte la teinte fauve
doré et n’atteint que les parties normalement noires. C'est l'inverse
de l’Ardent. Je possède une © très curieuse, prise au Bois de
Boulogne; elle se trouvait dans la collection Bellier. Cette Q est,
en dessus, d’un brun très obscur, plus foncé que la teinte du fond
des ailes des exemplaires ordinaires.
Le & de Thaumas porte sur les ailes supérieures un trait noir
plus épais que chez le G' de Lineola; ce trait noir n'est pas sou-
ligné chez 7'aumas par un point séparé, comme chez Zineola.
En dessous, la massue des antennes n’est pas noire comme dans
Lineola; mais entièrement jaunâtre dans T’kaumas. La chrysalide
repose dans une feuille enroulée. L'Espèce vole dans les allées
des bois et le long des champs, dans les sentiers où l'herbe est
drue et un peu haute. La forme d'Algérie et d’Asie-Mineure est
de couleur plus claire que celle de France et d'Angleterre.
La frange paraît être moins blanche chez T#aumas que chez
Lineola.
Dans la première édition (1776) du Systematisches Verseichniss
der Schmetterlinge der Wienergegend, les Thérésiens, à la
page 160, appellent Zirea, Mueller, l’Æesperia Thaumas, selon
Esper, dont l’ancien nom vulgaire français, reproduit par Engra-
melle, était la bande noire, selon Geoffroy. D’après les Thérésiens,
la chenille vit sur une graminée du genre Aÿa, à laquelle ils
donnent le nom spécifique de #ontana. I] n’y a pas d’Ara mon-
tana dans la Flore de l’abbé H. Coste, mais une Avena montana,
graminée croissant dans les pelouses rocailleuses des montagnes.
Probablement la chenille de l’'Æesperia Thaumas vit sur plusieurs
espèces de graminées dont elle s’accommode également bien.
D’après mon expérience, les Hesperia Thaumas et Lineola ne
s'élèvent pas à une très grande altitude; Zineola, dans le Valais,
voltigerait cependant plus haut que T'aumas et arriverait bien à
358 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
près de 2,000 mètres. Huebner a bien figuré les deux sexes de
l’'Æesperia T'haumas, avec le nom de ZLinea, sous les n°° 485, 486
et 487.
Hesperia Hamza, Obthr.
J'ai fait figurer cette nouvelle espèce sous les n® 24, 26 et 2c
de la PI IIT de la 1° livraison des Æudes d'Entomologie (1876).
L’Espèce est décrite à la page 29 de l’ouvrage en question.
L’Æesperia Hamza n'est pas rare dans la province d'Oran, aux
environs de Sebdou, de Nemours, de Magenta, Méchéria, Géry-
ville; je la possède également de Tanger et de Constantine. Dans
le Sud, on la prend dès le mois de mars; à Sebdou, l’Æesperia
Hamza vole en mai et juin. Le G' est toujours plus foncé que la Q.
Je n'ai pas reçu de variété méritant d’être signalée. L’Æesperia
Hamza paraît être une espèce assez fixe; c’est une spécialité de
la Barbarie.
Hesperia Acteon, von Rottemburg.
Décrite par S. A. von Rottemburg aux pages 30 et 31 de
Anmerkungen zu den Hufnagelischen Tabellen der Schmetterlinge
(Der Naturforscher; Sechstes Stück; Halle; 1775). L'auteur com-
mence par dire que ce papillon a beaucoup de ressemblance avec
Thaumas, Hufnagel, ou Sylvestris, Poda; il ajoute qu'il ne la
jamais pris lui-même, mais qu'il en a reçu récemment deux exem-
plaires d’un ami de Landsberg-sur-la-Warthe. Esper a figuré
une Q bien pâle sous le n° 4 de la Tab. XXXVI, et Huebner a
médiocrement figuré les deux sexes sous les n° 488, 489 et 490.
L'Hesperia Acteon se trouve en Angleterre; en Bretagne, où
elle n’est pas rare aussi bien aux environs de Rennes que sur les
falaises de Cancale, en juillet et au commencement d'août; dans
la Sarthe (de Graslin); dans les Pyrénées-Orientales, où je l'ai
prise à Port-Vendres et à Vernet-les-Bains, en juin et juillet; dans
les Alpes-Maritimes, où je l'ai trouvée à la fin de juin; à Charroux
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 359
(Vienne); aux environs de Digne; à Aix-les-Bains (Savoie); au
vallon de Saint-Pons (Bouches-du-Rhône); dans le val du Fier
(Haute-Savoie); en Sicile; à Bordighera, Florence et Pompei
(Italie); à Uclès, Bilbao et Grenade (Espagne); à Beyrouth; à
Tanger, Lambèse, Oran, Sebdou, Alger, Bône (Côte de Barbarie).
L’Espèce n’a qu’une éclosion par an; mais, suivant les latitudes,
elle éclôt au commencement de juin, en juillet et même au
commencement d'août. La race de Beyrouth semble plus grande
et plus claire que les autres. Il y a des G' qui ont, comme les ©,
au delà de l’espace cellulaire des ailes supérieures, une série de
petites taches contiguës d’un jaune d’ocre plus clair que la teinte
du fond et décrivant un arc; de plus, on aperçoit une tache
également plus claire, occupant la plus grande partie de l’espace
cellulaire. D’autres © sont d’un ton plus uniformément obscur.
L’Æesperia Acteon paraît plus localisée et moins abondante que
T'haumas; celle-ci semble être en France la plus répandue et la
plus commune du genre Æesperia. Le nom d’Acteon est mytho-
logique.
Actéon était fils d’Aristée et d’Autonoé, fille de Cadmus. Il
était grand chasseur. Un jour, il surprit Diane qui se baignait
avec ses nymphes. La déesse indignée lui jeta de l’eau au visage,
le métamorphosa en cerf et ses propres chiens le dévorèrent. Ce
malheureux prince fut pourtant reconnu après sa mort pour un
héros, par les Orchoméniens, qui élevèrent des monuments en son
honneur. — Actéon désigne encore un des chevaux qui condui-
saient le char du Soleil, dans la chute de Phaéton (Dricionn.
Fable, par Fr. Noël; Paris; An XIII-1805).
Augiades Sylvanus, Esper.
Extrêmement répandue en Angleterre, dans toute la France, la
Sicile, l’Asie-Mineure. J'ai trouvé Sylvanus partout où j'ai chassé
en France et je ne crois pas utile de donner la nomenclature des
localités d’où je possède authentiquement l’Espèce. Huebner a
360 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
représenté les deux sexes de Sylvanus, sous les n° 482, 483 et 484.
Esper avait fait figurer seulement la Q, sous le n° 1 de la
Tab. XXXVI. L’Æesperia Sylvanus présente une variété que le
comte Tlurati a décrite et figurée comme espèce distincte, avec le
nom d'Awgiades faunus, dans Naturalista Siciliano; XVIII:
Tav. Vi he'erlo et l'av MTS Re:
Cette Aberration faunus, dont je publie la figure sous le n° 239
de la PI. XXXVII du présent ouvrage, diffère du type parce que
les taches plus claires des ailes inférieures, principalement accen-
tuées sur le dessous des ailes, mais bien apparentes aussi en
dessus, sont allongées, remplissent entièrement les espaces intra-
nervuraux depuis l’espace cellulaire jusque plus ou moins près du
bord marginal et forment par leur confluence une grosse et large
tache plus claire que les bords, ainsi que cela a lieu dans l’Aber-
ration de Comma que j'ai fait figurer sous le n° 85 de la PI 6
de la XX° livraison des Etudes d'Entomologie. Je possède huit
exemplaires de l’'Ab. faunus, tous Œ, que nous avons pris par
hasard, c’est-à-dire sans les chercher spécialement, dans les Pyré-
nées-Orientales, aux environs de Digne, dans l'Isère, à Rennes
et à Moidrey (Manche), en face du Mont Saint-Michel. Ma
collection contient en outre plusieurs exemplaires semblant former
la transition entre l’Ab. faunus et le type. J'ai acquis, de Meek,
une curieuse Aberration anglaise, dont les ailes inférieures sont
d'un jaune d’or uni, sans parties plus claires, ni plus foncées, tant
en dessus qu'en dessous. Les ailes supérieures ont aussi le fond
plus clair. C’est un sujet remarquablement albinisant.
L’'Espèce éclôt une seule fois par an, en juin et juillet. Elle
est extrêmement abondante dans les allées des bois et sur la lisière
des champs.
Augiades Comma, Linné.
Décrite comme suit par Linné, dans Sys/ema Nature, Edit. X;
1760; p. 484 : « Comma, 162. P. P. alis integerrimis divaricatis
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 361
fulvis : punctis albis lineolaque nigra. /#. Sec. 793. Habitat im
Europa. » Si je me reporte à la l'auna suecica, Editio altera,
auctior: Stockholmiae 1761; je lis à la page 285, sous le n° 1080,
en outre de la diagnose du Systema Nature qui y est reproduite
comme elle est rapportée ci-dessus, les renseignements complé-
mentaires suivants : « Papilio alis erectis ovatis integerrimis
testaceo-griseis, tesserulis albis linea nigra sub superioribus.
Habitat in Pratis. Descr. Alae primores concolores, flavae, apice
fuscescentes maculis pallidis : litura nigra linearis margine nuda
subargentea in medio paginae superioris. Secundariae supra flavae,
pallidius maculatae margine fuscescentes. Subtus griseae maculis
albidis quadratis. » Comma est donc l’une des 52 espèces de
Lépidoptères diurnes recensées dans la Ælora suecica, édit. 1761.
Je prie le Lecteur de vouloir bien se reporter à ce que J'ai déjà
écrit sur Comma dans la XX° livraison des Etudes d'Entomologie,
aux pages 38 et 30. J'ai fait figurer sous les n° 85 et 86 de la
PI. VI de l'ouvrage précité, deux Aberrations G' se produisant en
sens inverse; c’est-à-dire :
1° L’Aberration chez laquelle les taches blanches du dessous
des ailes inférieures confluent en une seule large tache blanche,
centralement teintée d’un peu de jaunâtre; cette Aberration est
pour Comma ce que V'Ab. Faunus, Turati, est pour Sy/vanus. Mon
frère a capturé à Gavarnie (Hautes-Pyrénées), le 23 août 1908,
un second semblable à celui qui a été figuré sous le n° 85 et
qui provient de Sologne; j'ai désigné cette Aberration sous le
nom de Faunula.
2 L’Aberration presqu’entièrement obscure sur le dessous des
ailes inférieures, prise à Cauterets, et que j'ai appelée Guernisact.
Sous les n° 240 et 241 de la PI. XXXVIT du présent ouvrage,
j'ai fait figurer deux Aberrations : 1° Dupuyi (240), , remar-
quable par l'absence partielle des taches blanches ordinaires sur
le dessous des ailes inférieures; 2° albescens (241), G, analogue
pour la direction de l’albinisme à la 7T'zaumas (242);
L'Augiades Comma est une des espèces qui habitent une plus
grande étendue de la terre palaé- et néoarctique et qui s'accom-
362 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
modent de toutes les altitudes; elle se reproduit en effet avec
autant de continuité en Laponie qu'en Algérie, où Comma se
rencontre, malgré l'affirmation contraire de Staudinger et Rebel
(Catalog 1001); on trouve Comma en Europe, en Asie, dans
l'Amérique du Nord, au bord de la mer comme dans les hautes
montagnes; elle présente des variations locales ou formes géo-
graphiques; mais elle offre aussi, dans les diverses localités qu’elle
fréquente, d’intéressantes variations ou Aberrations individuelles.
Une des stations où j'ai été à même d'observer Comma en plus
grand nombre d'exemplaires à la fois est la dune dite de Miel-Pot
et de la Guimarais, entre Saint-Malo et Cancale (Ille-et-Vilaine).
Cette dune est exposée au Nord; la mer près de la plage est
rocheuse, et devant la côte sablonneuse, on voit s'élever du sein
des flots les énormes rocs dits : Grand et Petit Chevreuil; ces
rochers ne sont point nus, mais au contraire couverts de végétation.
On peut accéder au Petit Chevreuil, à pied sec, pendant que la
mer est basse. Le Grand Chevreuil est toujours entouré d’eau.
Ces rochers ressemblent, au mois de mai, à un véritable parterre
de fleurs qui forment un assemblage tricolore; les fleurs blanches
d'une Caryophillée forment des massifs entre les fleurs bleues de
la Liliacée : Endymion nutans, la vulgaire Jacinthe, et les fleurs
roses de Ja Plombaginée : Armeria maritima, communément
appelée : jonc marin. Dès que le sable est à l'abri du flux jour-
nalier des flots salés, une abondance de carex et d’ÆEryngtum
maritimum pousse sur les flancs et la crête du talus qui forme
comme la bordure de la dune, du côté de la mer. Un peu plus
à l’intérieur, le sol très mouvementé, est gazonné et tapissé de
plants de la rose pimprenelle, arbrisseau nain et à souche lon-
guement traçante dont les fleurs blanches, grandes et solitaires,
si nombreuses et si éclatantes en juin, sont remplacées, lorsqu’éclôt
l'Augiades Comma, par de gros fruits d’un rouge noirâtre. Çà
et là, au pied des relèvements rocheux de la dune, on aperçoit
des massifs de fougères, et sur la hauteur, se trouve un abri formé
par un bois d’'érables et de peupliers dont le vent marin tourmente
la bordure, mais dont le milieu est assez épais et fournit une
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 363
Re RER
végétation relativement vigoureuse. C’est dans ce site que l'Ay-
giades Comma voltige en grand nombre du 12 au 18 août; elle
se pose sur les fleurs de composées et préférablement à terre, et 11
est aisé d’en faire une abondante récolte. La chasse en est d'autant
plus intéressante qu'à cet endroit, l'Awgiades Comma est très
fertile en variétés. Il m'est arrivé, certains jours, de recueillir une
quantité assez considérable d'échantillons d’une parfaite fraîcheur.
En dessus, ils sont plus ou moins clairs ou foncés, cependant
jamais d’un fauve aussi doré qu'au Taurus, ni jamais aussi
obscurs qu’en Sibérie ou en Savoie. En dessous, les taches blanches
normales sont tantôt petites, tantôt plus grosses, quelquefois d’un
jaune seulement un peu plus pâle que la couleur du fond. Certains
individus ont l’apex des supérieures et le fond des inférieures
crisâtre en dessous; d’autres — et c’est le plus grand nombre —
ont ces parties des ailes d’un jaune verdâtre. Rarement, les taches
blanches des ailes inférieures, en dessous, sont surmontées de
traits noirâtres qui les font vivement ressortir sur le fond verdâtre
clair des ailes. D’après une longue série de Comma d'Angleterre
que j'ai sous les yeux, la forme de cette Espèce en Grande-
Bretagne ne diffère guère de la forme normale du département
d'Ille-et-Vilaine. Les plus grands exemplaires de Comma que Je
possède viennent du Fort-Naryne, en Turkestan. La chenille gri-
sâtre, avec la tête noire, n'était pas rare en 1864 et 1866 sur Île
plateau du Ryffel, en Valais.
Pamphila borbonica, Boisduval.
M. Eugène Holl, adjoint de 1"° classe du Génie en retraite, à
Hussein-Dey (département d'Alger), a découvert à Hussein-Dey,
où elle vole à la fin du mois d'octobre, une intéressante forme de
la Pamphila borbonica, Boisduval. Cette trouvaille imprévue et
insoupçonnée enrichit d’une unité spécifique très intéressante le
Catalogue des Lépidoptères d'Algérie.
La Pamphila borbonica fut initialement décrite par Boisduval,
à la page 65 de la Faune entomologique de Madagascar, Bourbon
364 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
et Maurice, Paris, 1833, et figurée sous les n* 5 et 6 de la PI. o
du même ouvrage.
Comparant aux peintures originales que je possède, signées par
E. Blanchard, les figures gravées et coloriées d’après ces modèles,
je trouve l'exécution de la gravure et du coloriage un peu gros-
sière et Je crois devoir en prévenir le Lecteur. Des figures meil-
leures de Pamphila borbonica ont paru dans l'Histoire physique,
naturelle et politique de Madagascar, par Grandidier; Paris, 1887.
Les Lépidoptères forment le XVIII® volume de cette Æis/oire de
Madagascar. La Pamphila borbonica y est décrite à la page 360
et figurée sous les n* 5 et 6, 6a de la PI. 55. La Pamphila bor-
bonica de Hussein-Dey diffère seulement de la même espèce de
Madagascar, Bourbon et Sierra-Leone dont j'ai sous les yeux de
nombreux et très beaux exemplaires, ainsi que les types même de
l’'Espèce (22 coll. Boisduval), par la taille un peu plus petite et
la réduction des trois points blancs cerclés de noir qui se
remarquent sur le dessous des ailes inférieures.
Comme chez borbonica type, la borbonica-Holli, Obthr. est, en
dessus, d’un brun noirâtre très obscur. Les ailes supérieures sont
allongées et les inférieures ont le bord externe sinué avec l’angle
anal un peu proéminent. Aux supérieures, en dessus, il y a d’abord
près de l’angle apical et presque contigus au bord costal, trois
tout petits points transparents, serrés les uns contre les autres et
formant une petite série maculaire droite. On les perçoit de même
en dessous, aussi bien que trois autres taches transparentes, sépa-
rées les unes des autres, et de forme presque carrée; celle du
milieu étant plus grosse que les deux autres. Enfin, pour achever
la série qui forme une ligne maculaire oblique, on voit une tache
Jaune opaque. Les ailes inférieures, en dessus, sont immaculées.
Le dessous des ailes est d’un jaune olivâtre, avec la base des
supérieures largement lavée de noir mat. Sur les inférieures, on
distingue les traces des trois points blancs cerclés de noir qui sont
beaucoup plus gros et plus accentués dans la forme type de
Madagascar et Bourbon. Les deux sexes ont les ailes semblables.
Il semble que la pulvérulence jaune olivâtre du dessous des ailes
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 365
inférieures est très fugace; car elle ne persiste pas longtemps et
on ne la trouve que dans les exemplaires frais. Chez ceux qui ont
un peu volé, la teinte jaunâtre a disparu et 1l ne reste que le fond
des ailes d’un gris noirâtre uniforme.
Pamphila Lefebvrii, Rambur,
et Pamphila Nostrodamus, Fabricius et Herrich-Schaefter.
Voici comment Fabriaus décrit VNostrodamus, nom qui, après
lui, a presque toujours été transformé en WNostradamus : « Alis
divaricatis, fuscis; anticis supra fascia maculari albida; posticis
subtus cinereis : habitat in Barbaria. »
Les deux Æesperies : Lefebvru et Nostrodamus constituent
certainement deux unités spécifiques distinctes; pourtant, dans le
Catalog 1901, Staudinger et Rebel gardent un silence absolu sur
l’'Æesperia Lefebvru. Dussé-je une fois de plus contrister les
dévots du Catalog 1901, le souci de la vérité entomologique, seule
considération à envisager, m'oblige à apporter de nouveau une
rectification, sous forme d’addition d’une unité spécifique, à un
ouvrage qui semble malheureusement rédigé à la légère, sans étude
suffisante de la bibliographie et même avec un parti-pris facile à
percevoir en maintes circonstances. Pourtant combien d'Entomo-
logistes pleins de confiance dans la perfection de l’œuvre et la
science infailhble des auteurs, sont tout disposés à accepter, sans
contrôle, toutes les assertions contenues dans le Catalog ! Ne me
trouvant retenu par aucun respect fétichiste envers le Catalog
allemand, je signale les fautes lorsque je les trouve, et j'invite
mes contradicteurs, s'il y en a, à faire valoir leurs raisons.
Donc Lefebvrii, omise dans le Catalog Staudinger et Rebel,
1001, est une espèce bien valable et distincte de sa congénère
Nostrodamus, n° 680 du Catalog précité.
C'est Rambur qui a distingué Zefeburu, et j'invite le Lecteur
à se reporter aux pages 00 et 01 du Catalogue systématique des
Lépidoptères de l'Andalousie, Paris, 1858.
366 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Nostrodamus © est hgurée par Herrich-Schaeffer sous les n° 35
et 30 des Æesperides Europ, Tab. 6, et la légende porte bien
Nostradamus. C'est une espèce à laquelle Rambur (Loc. cit, p. 80,
90 et 91) consacre aussi une description détaillée. Rambur cite
avec raison les figures données par Duponchel dans le Supplément
(PI XLI, fig. 4, 5 et 6), avec le nom de Wostradamus, comme
se rapportant à Lefebvru. Il désigne encore les figures 458, 450
et 460 données par Huebner, avec le nom de pygmaæus, comme
représentant Lefebvru. Je pense que c’est en effet très probable.
Ésper, sous le n° 3 de la Tab. XCIX, a également figuré, je crois,
Lefebvri , avec le nom de Pigmaæus. Freyer, sous les n° 2 et 3
de la Tab. 513, a vraisemblablement représenté, avec un coloriage
qui manque de finesse, la Wostrodamus qu'il appelle Pumilio.
Dans les Proceedings of the Zoological Society, 1874, Moore a
sans doute représenté le © de Wostrodamus, avec le nom de
Karsana. Boisduval, dans l’Zcones, a figuré Lefebvru, sous le
n° 3 de la PI. 47, avec le nom de Nostradamus.
De tout ceci, il résulte que d’une part l’Æespérie distinguée par
Rambur avec le nom de Zefeburs a été figurée par Esper comme
Pigmæus; par Huebner, comme Pygmeus,; par Duponchel et par
Boisduval, comme Vostradamus, et que d’autre part Vostrodamus,
secundum Fabricius, a été figurée par Herrich-Schaeffer comme
Nostradamus, par Freyer, comme Pumilio; par Moore, comme
Karsana.
La Pamphila Lefebvrz, Rambur, est un peu plus petite que
Nostrodamus,; les ailes supérieures de Nostrodamus ont l’apex
allongé, tandis que les mêmes ailes, chez Zefebvrä, sont plus
courtes et ont le sommet moins proéminent. La couleur du fond
des ailes est sensiblement plus foncée dans Zefebvrii que dans
Nostrodamus, aussi bien en dessus qu’en dessous et pour les deux
sexes. En dessus, Lefebvru est d’un brun noirâtre; VMostrodamus
est d’un brun un peu fauve; en dessous, Lefebvri est d’un brun
noirâtre, uniforme, sauf chez le G' qui a la première moitié des
ailes supérieures plus foncée; VNostrodamus est plus pâle et la Q
surtout paraît d’un gris presque blanchâtre; certains exemplaires
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 307
ont le bord anal des ailes inférieures à peu près blanc. La frange
est plus brune chez Lefebvru. Les ©, chez ZLefebvru, ont, en
dessus, les taches des ailes supérieures d’un jaune ochracé clair;
ces taches sont blanchâtres et plus grandes dans Wostrodamus.
Aux ailes supérieures du ©, en dessous, les points blanchâtres, non
visibles en dessus, paraissent différemment placés dans les deux
espèces, et aux ailes inférieures, Lefebvri G' présente cinq à six
points formant une ligne courbe; ces points sont mieux indiqués
chez la Q et ils sont parfois surmontés d’atomes noirâtres.
Nostrodamus se tient volontiers sur la poussière des chemins,
dont elle a la couleur, et dans le lit desséché des torrents. Suivant
Bellier, qui a pris Lefebvrü, en Sicile, « aux heures où la chaleur
a le plus d'intensité, on la rencontre immobile sur les sentiers
poudreux ou sur quelque pierre brûlante. Rarement elle se pose
sur les végétaux qui sont à sa portée. Son vol est très rapide;
elle rase constamment la terre, de sorte qu'on la perd facilement
de vue; mais quand on l’a manquée, elle revient presque toujours
se poser à la place même d'où elle était partie ». Elle parait en
Sicile depuis le mois d'avril jusqu'à la fin d'août, toujours
rarement et presque isolément. M. Holl a pris les deux espèces :
Lefebvri et Nostrodamus, aux environs d'Alger, en juin, sep-
tembre et octobre. Cet habile chasseur pense comme moi que
Lefebvri et Nostrodamus sont deux espèces très distinctes.
Je possède Wos/rodamus des localités suivantes : Dalmatie;
Barcelone; Grenade (de Graslin, juin et septembre); Solfatare,
près Naples; Hussein-Dey, Maison-Carrée (Holl, août et sep-
tembre) ; Sidi-Okba, Biskra (R. Oberthür; J. Merkl, mai); Sebdou
(D' Codet et Powell, en août).
Et Zefebvru de Sicile (Bellier); de Hussein-Dey (Holl,
octobre); de Collo (D' Seriziat); de Menton (Alpes-Maritimes),
où Decoster en a capturé plusieurs exemplaires des deux sexes, et
de Formia (Prov. de Caserta) dans l'Italie méridionale, d'où me
l'a envoyée M. Orazio Querci.
Le nom de Zefebvri est évidemment postérieur à Pigmeus,
Esper, et à Pygmæus, Huebner, et il y aurait sans doute lieu, à
3068 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
cause de la loi de priorité, de rétablir le nom le plus ancien :
Pigmaæus, au lieu du nom plus récent : Lefebvru, Rambur.
Cependant, bien que les figures données par Esper et Huebner
semblent bien se rapporter à Lefebvru, 11 est incontestable que
c'est Rambur, en créant cette Lefebvru, qui a été le véritable auteur
de la distinction entre deux Espèces jusqu'alors mélangées et
maintenant encore confondues, grâce à Staudinger et Rebel, qui
n'ont pas su ou voulu prendre le temps de les discerner. En
adoptant le nom de Zefebvra donné par Rambur, je suis donc
sûr de désigner très exactement au moins avec ce nom, l’Espèce
qui n’est pas actuellement reconnue par tout le monde, comme
distincte de VNostrodamus. C’est cela qui a dicté ma résolution.
Boisduval, dans le Genera et Index methodicus, 1840, avait
bien senti qu'il y avait deux espèces distinctes et 1l avait inscrit
à la page 35, sous le n° 286, une Æesperia Ætna, de Sicile, à
laquelle 1l avait donné comme synonyme la Nostradamus, Bois-
duval (/cones). Il plaçait sous le n° 287 Nostradamus, Fabr.;
mais 1l établissait ensuite pour Vostrodamus, Fabr., une syno-
nymie fautive.
Carcharodus Alceæ, Esper.
Figurée sous le n° 3 de la Tab. LI et décrite aux pages 4, 5
et 6 du vol. II de l'ouvrage : £uropæisch. Schmetterlinge. Le nom
vulgaire allemand donné par Esper est : Der Falter der Garten-
malve. L’Alceæ éclôt chez nous deux fois par an : au premier
printemps et à la fin de l'été. Nous ne voyons jamais le papillon
très abondant. Il fréquente volontiers les jardins et c’est ainsi
que J'en récolte chaque année quelques exemplaires dans les allées
ou sur les pelouses, à Cancale et à Rennes. Je possède AZceæ de
Saint-Pons (Bouches-du-Rhône); de Florac (Lozère); de Char-
roux (Vienne); de Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales); de
Digne; des Alpes-Maritimes; de Châteaudun (Eure-et-Loir), où
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 369
Guenée l’a élevé de la chenille; de Saint-Germain-en-Laye (Seine-
et-Oise); de Hyères (Var); de Corse; de Brindisi, en mai; de
Sicile; de Grèce; de la vallée de Ronda (Andalousie), en juin;
d'Algérie : Alger; Biskra, en mai; Magenta, en juin; Géryville,
en mai; Lambèse, en avril et juin; Sebdou, en mai; Khenchela,
en juin; de Tanger, au Maroc; de Larnaca, dans l’île de Chypre;
de Broussa et de Tokat, en Asie-Mineure; de Beyrouth et d'Akbès,
en Syrie; du Fort-Naryne, dans le Turkestan oriental, et Siao-
Lou, aux frontières occidentales de la Chine, tout près du Thibet
oriental.
En Syrie, Alceæ donne la variété australis qui est généralement
petite et d’un brun roussàtre et un peu jaunâtre.
L'Espèce varie un peu pour la taille et pour la couleur plus
ou moins claire ou foncée du fond des ailes, aussi bien en dessus
qu'en dessous. Les dessins bruns du dessous sont plus ou moins
visibles sur le fond des ailes et les taches transparentes des ailes
supérieures, ainsi que les taches blanc jaunâtre des ailes inférieures,
sont plus ou moins développées, en dessus, comme en dessous.
J'ai toujours pensé qu'Alceæ se trouverait quelque jour en
Angleterre. En effet, c’est une espèce qui semble voyageuse et qui
aime à errer assez loin de son point d’origine. Tous les ans, Je
vois des exemplaires voltigeant isolément dans mon jardin à
Cancale, et je suis amené à penser qu'une Espèce petite, mais
d'apparence relativement robuste, répandue depuis le Sahara
algérien jusqu'aux bords de la Manche, pourrait bien se rencontrer
sur les côtes du Sud de l'Angleterre, où croissent quelques-unes
des espèces de Malva : notamment woschata, sylvestris et rotun-
difolia, sur lesquelles peut vivre la chemille qui est grise, finement
poilue, avec la tête noire. La chrysalide se fait dans une feuille
de mauve enroulée.
Huebner a figuré la Q avec le nom de walve, sous les n° 450
et 451, et la chenille ainsi que la chrysalide sous les n° 1 à et à
de la collection des Zarve (Pagiliones, Il; Gens, E, a).
24
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
(2)
DS!
©
5 Carcharodus lavateræ, Esper;
2 Carcharodus altheæ, Huebner;
et Carcharodus bæticus, Rambur.
Si l’on considère une paire bien caractérisée et normale de ces
trois Carcharodus, c'est-à-dire si l’on compare lavatere, des envi-
rons de Digne, à A/fheæ, de Paris ou de Rennes, et à bæticus,
d'Espagne ou de Martigny (Valais), on aura la conviction que
lavatere, altheæ et bæticus représentent des unités spécifiques
bien distinctes; mais si, au lieu d'envisager un petit nombre seu-
lement d'exemplaires appartenant à des formes bien caractérisées
de lavatere, altheæ et bæticus, on étudie un matériel plus impor-
tant composé d'échantillons provenant des localités les plus
diverses, on est obligé de constater que des liens très intimes
existent entre /avatere, altheæ et beticus; ces liens sont établis
par des exemplaires de transition que je me considère comme
personnellement incapable de rapporter avec certitude à l'une
plutôt qu'à l’autre des unités précitées. Je ne connais, Je dois
l'avouer, ni les œufs, ni les larves, ni l'anatomie des genitalia; Je
juge donc d’après les seuls caractères extérieurs; mais je ne puis
cacher l'impression que je ressens d’après ce que Je vois, et croyant
que le plus élémentaire souci de la probité scientifique me fait
un devoir d'exposer simplement ce que je présume être la vérité,
au risque de grandement étonner mes lecteurs, je me trouve amené
à penser et à dire que lavatere, altheæ et beticus sont trois termes
d’une seule et même unité spécifique. Bæticus forme le passage et
le lien entre lavatere et altheæ. Je livre cette opinion aux critiques
et aux recherches ultérieures; il est possible que létude plus
approfondie des premiers états et des caractères anatomiques
démontre qu'il y a réellement deux, trois ou peut-être même
quatre Espèces, tandis que je me sens porté à n’en admettre qu'une
seule. Je m'inclinerai bien entendu devant la vérité qui me sera
démontrée; mais j'espère que certains Entomologistes se trouve-
ront incités par l'intérêt de cette énigme à essayer de soulever le
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 371
voile qui nous cache encore un des secrets de la Nature. Je
souhaite vivement que le travail d’où procédera la lumière soit
publié le plus tôt possible. En attendant, je traite l'histoire de
chaque Carcharodus comme si les trois : lavatere, Altheæ et
bæticus étaient spécifiquement distincts; mais J'exposerai au cours
de chaque notice comment il me semble que le passage s'établit
de l’une à l’autre des trois Formes, ou peut-être Espèces distinctes
de Carcharodus; Alceæ restant en dehors et paraissant une Espèce
nettement différente des autres.
io Carcharodus lavateræ, Esper.
Assez grossièrement figuré par Esper, sous le n° 4 de la
Tab. LXXXII, avec le nom mal orthographié de Zavathere, et
décrite d’après des exemplaires venant de France et de Suisse,
qui furent communiqués à Esper par Gerning. Esper dit qu'on
n’a pas encore découvert l'Espèce dans ses environs, c'est-à-dire
autour d'Erlangen.
Huebner a donné une meilleure figure de la © sous les
n® 454 et 455 et avec le même nom fautif de Lavarheræ. Godart
a représenté l’'Hespérie de la Lavatère, avec un dessin exact, mais
un coloris très sombre, sous les n°* 7 et 8 de la PI XXVIITI du
Vol. II de l’AÆistoire naturelle des Papillons de France. « Lava-
tère, dit Godart (p. 232, vol. IL), est un genre de plantes de la
famille des #alvacées, dédié à Lavater, médecin et botaniste
suisse. »
Le Carcharodus lavateræ est une espèce assez vive, d’allures
souvent rapides, éclosant depuis le commencement du printemps
jusqu'au milieu de l'été, habitant l'Algérie, l'Espagne et les
régions subalpines de la France; il s'élève assez haut dans les
montagnes, puisqu'il dépasse dans les Hautes-Pyrénées le village
de Gavarnie et dans les Alpes celui de La Grave. Il n’est point
rare de voir, au mois de juillet, quelque lavateræ voltiger, avec
les Syrichthus et les Lycæna, sur les chemins boueux ou sur les
S 2 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
fumiers frais et les parties humides des sentiers dans les Hautes-
Pyrénées, dans les Alpes et dans les Cévennes.
On distingue facilement lavateræe des autres Lépidoptères qui
l'accompagnent à sa couleur générale blanc verdâtre.
Ma collection contient des lavaleræ capturés dans les localités
suivantes : Cauterets et Gavarnie (Hautes-Pyrénées), en juillet;
La Grave (Hautes-Alpes), en juillet; Aix-les-Bains (Savoie), en
juin; Vizille (Isère), en juin; Florac (Lozère), en juillet; route du
Simplon, à partir du Refuge n° 2, en montant vers Bérizal et
Zermatt (Valais), en juillet; Digne, en mai et juin; Samt-Pons
(Bouches-du-Rhône), en mai; La Montgie (Puy-de-Dôme);
Bourg-d'Oysans, Montpellier et Vernajaz (collection Guenée);
Bordighera, en mai; Nice, en juin; Hongrie (collection Kuwert);
Naples (collection Bellier); Grenade (Andalousie), en mai (col-
lection de Graslin); Algérie : Sebdou, en juin; Lambèse, en juin;
Méchéria, à la fin de mars; Sicile (collection Bellier);, Akbès et
Bérut-Dagh (Taurus), en juillet.
La chenille, suivant Guenée, a été décrite par Hornig. Elle vit
à la fin d'avril, à la manière de Malvarum (Alceæ), sur le Szachys
recta, plante vivace de la famille des Labiées, à feuilles poilues
et vertes sur les deux faces, et à fleurs d’un blanc jaunâtre, qui
croit sur les coteaux calcaires de l’Europe centrale et méridionale.
La larve en question est d’un gris bleuâtre, avec la stigmatale
jaune et la tête noire.
Les exemplaires de Sicile, d'Espagne et d'Algérie ont généra-
lement le dessus des ailes d’une couleur plus foncée que ceux des
Pyrénées, des Cévennes et des Alpes. Les © surtout sont tachetées
de brun roussâtre, ce qui leur donne un aspect plus obscur. En
dessous, les ailes inférieures ne sont pas toujours d’un blanc Jjau-
nâtre ou verdâtre uni; mais les mêmes maculatures que dans
bæticus commencent à apparaître. En Sicile, la transition de
lavatere à beticus est parfaite. Il en est de même en Syrie.
D'ailleurs les bæzicus d'Algérie et d'Espagne sont eux-mêmes de
nuance plus claire que ceux de Martigny en Valais et ainsi se
présente un /ransitus egregius entre lavatere et bæticus. J'ai sous
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 373
les yeux exactement 119 exemplaires de lavatere rangés dans la
même boîte, par localité, à côté de 05 bæticus. Je considère que
sur cette quantité une douzaine d'exemplaires sont fort embarras-
sants et aussi bien référables à lavateræe qu'à beticus. Les lavatere
de France, de Suisse et de Hongrie sont hors de cause, comme
les éæticus de France et du Valais; mais Je ne vois aucune
possibilité de faire, au moyen de quelque caractère différentiel
extérieur tiré de l'insecte parfait qui puisse donner satisfaction,
l'attribution à lavatere plutôt qu'à beæticus de certains individus
algériens, syriens et siciliens. Je ferai observer que jamais nous
n'avons observé lavatere dans les Pyrénées-Orientales, n1 dans
les plaines de l'Ouest de la France. Zavatere, sans être rare, n'est
pas très abondante généralement et on la capture le plus souvent
par échantillons isolés; cependant, depuis le temps que nous
chassons dans les Pyrénées-Orientales, si lavateræ y existait, Je
crois que nous l'y aurions rencontrée.
20 Carcharodus bæticus, Rambur.
La © est figurée dans la Faune entomologique de l'Andalouste,
sous les n° 3 et 4 de la PI. 12, et l'Espèce est décrite aux pages
8o, 81 et 82 du Catalogue systématique des Lépidopières de
l'Andalousie. Je ne puis qu'inviter le Lecteur à se reporter à cette
description publiée en 1858 et à la figure qui date de 1830. Cette
figure est du reste bien exécutée. Rambur commence sa description
par ces mots : « Nous n'avons pas à prouver lauthenticité de
cette espèce, elle est évidente; nous sommes donc surpris que
M. H. Schaeffer l'ait méconnue dans ses suppléments à Huebner. »
Pour parler ainsi, Rambur ne devait pas avoir étudié attentivement
les affinités de bæticus et de lavateræ, d'une part, et de bæñicus
et d'Al/fheæ, d'autre part.
Herrich-Schaeffer a figuré bæficus, sous les n° 14 et 15, avec
le nom de #alvarum var. marrubü, et c’est contre ce rattachement
de marrubii à malvarum comme variété, que Rambur croit devoir
3/74 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
protester. Pour apprécier la raison d’être de ce nom : #arrubü, il
faut savoir que ce nom avait d’abord été donné par Rambur à
bæticus, mais #n litteris seulement. Rambur avait découvert bæficus
à Montpellier, en 1827, et il avait répandu sa nouvelle Æespérie
dans les collections de son temps, en l'appelant : warrubi. C’est
ainsi que dans les collections Boisduval, Guenée, de Graslin,
Bellier, bæricus a toujours été étiqueté : #arrubü, Rambur. C’est
après son voyage d’Espagne que Rambur, en figurant bæficus,
abandonna le nom ?x litteris de marrubü.
La chenille vit à Grenade sur le #arrubium hispanicum dont
elle lie les feuilles pour se renfermer. On trouve dans l’Europe
centrale deux espèces de wearrubium : vulgare et peregrinum,
plantes de la famille des Labiées, dont se nourrit, je pense, la
chenille de bæticus en Suisse et dans le midi de la France.
Guenée avait dans sa collection 3 exemplaires de #arrubi qu'il
dit tenir de Rambur lui-même.
Voici le relevé des documents dont je me trouve disposer
actuellement : 7 warrubu, dont 2 de Marseille (coll. Bellier);
4 de Grenade, pris en mai (coll. de Graslin); 4 sans localité (coll.
Boisduval); 3 d'Andalousie, donnés par Rambur, et 1 de Cata-
logne (coll. Guenée); 2 © prises au Pardo, près Madrid, par
moi-même, en avril 1867; 1 Q capturée à la Sierra-Nevada, côté
de Lanjaron, en juillet 1870, par mon frère; 6 des Pyrénées-
Orientales, récoltées en mai et en juillet; 1 de Sicile coll. Bel-
lier); 20 de Martigny (Valais), élevés de la chenille par Arnold
Wullschlegel, qui a obtenu l’éclosion en juillet; 1 de Khenchela,
pris en mai; 4 de Lambèze, pris en avril et juin; 14 d'El-Kantara,
dans la province de Constantine, recueillis par mon frère en mai
1875; 2 de Magenta (1* Lahaye, juin 1886); 12 de Sebdou
(L' Lahaye, D' Codet et Harold Powell, mai et juin); 7 de
Beruth-Dagh, au Taurus (Delagrange, juillet 1800); 6 d’Akbès,
en Syrie.
Je compare entre eux les lavatere et les bæticus (marrubti) des
mêmes localités, c'est-à-dire du Valais, d'Espagne, de Sicile,
d'Algérie. Je constate que les lavateræ et les bæticus sont très
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 375
RE
distincts, au Valais, et ne peuvent être confondus. Mais si J'essaie
de séparer les lavatere et les bæticus de Syrie, je n'y puis par-
venir: certains inclinent plus vers lavateræ, d’autres paraissent
être plutôt des bæicus; toutefois, il est impossible de les distinguer
spécifiquement les uns des autres, et non seulement ces exemplaires,
constituent entre eux une transition parfaite, mais encore ils
forment entre les vrais lavatere et les véritables bæ/icus un
passage insensible et par conséquent excellent.
3° Carcharodus altheæ, Huebner.
La © est bien figurée par Huebner, sous les n° 452 et 453, et
le d est représenté très fidèlement par Godart, sous les n°* 5 et (6
de la PL XXVIII du tome II de l’Aistoire naturelle des Papillons
de France. L'Hespérie de la Guimauve, ainsi que l'appelle
Godart, est décrite aux pages 230 et 231. Je possède alfheæ, au
nombre de 83 exemplaires, des localités suivantes : Vernet-les-
Bains, en mai et juin, puis en Juillet; Cauterets, en juillet; Saint-
Pons (Bouches-du-Rhône), en juin; Uriage (Isère), en juin alea
Grave et le Lautaret (Hautes-Alpes), en juillet; Basses-Alpes;
Saint-Martin-d'Entraunes (Alpes-Maritimes), en juillet; Auzay
(Vendée), à Ja fin d'août; Rennes, dans mon jardin, en sep-
tembre; environs de Paris et Sicile (collection Bellier); Chartres,
Bourg-d'Oysans, Vernet (coll. Guenée); Vernet et « reçu de
Pierret » (coll. de Graslin); sans localité, dans la coll. Boisduval;
vallée de Ronda, en Andalousie, au mois de juin; Broussa, en
Asie-Mineure.
On remarquera qu’altheæ habite au Vernet avec beticus,; à
Cauterets, où lavatere se trouve également; dans les Alpes-
Maritimes, où vit lavatere,; en Andalousie où se rencontrent
lavatere et beticus; à La Grave, où lavateræ vole à la même
époque; en Sicile, où lavateræ et bæticus ont été pareillement
récoltés.
Althee est seul, c'est-à-dire sans lavatere, ni bæticus, à Paris,
à Rennes, en Vendée, à Chartres. Ainsi que Je l’expose ci-dessus,
376 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
dans la notice consacrée à lavatere, celle-ci n’a jamais été observée
par nous dans les Pyrénées-Orientales; pourtant Zavatere se
trouve en Catalogne, à Montpellier, dans les Hautes-Pyrénées,
c'est-à-dire tout autour du Roussillon et de la Cerdagne; cepen-
dant, si lavatere manque dans les Pyrénées-Orientales, a/tkeæ est
assez fréquente au printemps et en été, aux environs de Vernet;
bæticus y est plus rare; mais ce sont les al/heæ des Pyrénées-
Orientales qui se relient, par une transition parfaite, aux bæricus
de la même région. Chez bæricus, les dessins olivâtres du dessous
des ailes inférieures sont plus fins; ces dessins forment comme
4 bandes principales descendant du bord costal vers le bord anal,
parallèlement au bord externe et séparées les unes des autres, par
des espaces blanchâtres, tandis que chez altheæ, les dessins en
question sont moins nets, plus confus et surtout les deux dernières
bandes confluent au voisinage du bord extérieur, de telle sorte
qu'on voit chez al/heæ une sorte de rayonnement figurant comme
les doigts d’une main étendue dont l'extrémité aboutit au bord
terminal; mais il y a des passages entre les formes extrêmes et
ces transitions sont telles qu’on ne peut véritablement faire aucune
coupure, mn établir aucune séparation entre al/heæ très caractérisé
et éæñcus. D'un autre côté, j'invite les Entomologistes que la
question intéresse à piquer sur le bord d’une planche d’agave une
série d'exemplaires de lavatere et d’althee et à regarder les
papillons dont tous les dessins et toutes les taches transparaissent
alors parfaitement, en les plaçant devant la lumière d’une lampe
électrique. On constatera la parfaite similitude de toutes les taches
et dessins de lavateræ et d'altheæ. Lavatere est la forme albine
et altheæ la forme mélanienne d’une même unité spécifique. Telle
est ma conclusion, sauf à connaître ce que l'étude des premiers
états et des genitalia pourra révéler.
Je publierai sans doute dans la V® livraison des Etudes de
Lépidoptérologie comparée une Planche explicative des transitions
de lavatere, beticus et altheæ. Si je publiais cette instructive
Iconographie dans la IV® livraison, je retarderais la publication
de l'ouvrage plus qu’il ne convient,
SN
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 7
—— rm
Syrichthus Proto, Esper.
Ne paraît pas rare en Algérie, en Espagne, en Syrie; moins
abondante en Provence. M. Harold Powell a élevé la chenille de
Proto à Sebdou et les papillons provenant de cette éducation sont
éclos en septembre 1907.
La chenille de Proto vit sur les PAlomis, plantes de la famille
des Labiées, croissant dans les lieux stériles, secs et rocailleux du
Midi de la France, de l'Espagne et de l'Algérie. Je crois que dans
les environs de Sebdou, Pro1o mange les feuilles de la P#Alomis
Lychnitis, sous-arbrisseau d’un aspect cotonneux blanchâtre, à
fleurs jaunes. Les feuilles sont pubescentes en dessus, blanches
tomenteuses en dessous, fortement nervées-réticulées, comme le dit
très bien l'abbé Coste (Flore illustrée France, vol. III, p. 123).
La chrysalide repose entre les feuilles, à l'extrémité des tiges,
et elle est couverte d’une poussière blanche. M. H. Powell m'a
envoyé des chrysalides, avec la plante dans laquelle elles se sont
formées.
Proto est une espèce très variable pour le dessous des ailes
inférieures; tantôt les taches qui les décorent ressortent en ocre
jaune pâle sur le fond blanchâtre des ailes, tantôt en rouge brique;
ces taches sont de dimension variable. Le dessus des ailes est lui-
même très variable; les taches blanches ordinaires sont parfois
ochracées, et il semble que tout un lavis jaunâtre soit répandu sur
toute la surface des ailes; de plus, les taches peuvent être réduites
ou élargies. Proto se trouve en France aux environs de Marseille
et de Montpellier; l’'Espèce est répandue en Syrie (Akbès et
Berut-Dagh, au Taurus); en Espagne (Grenade, Sierra-Nevada,
vallée de Ronda, Cordoue, en juillet; Carthagène, en Jjum;
Madrid, d’où me l’envoyait jadis feu Aurelio Vazquez, habile
chasseur, décédé le 5 janvier de cette année 1910, à Guadalajara) ;
en Algérie (Vakouren, en juillet 1007; Djurjura, en juillet 1884;
Alger, chemin des Aqueducs, en juin 1883; Sebdou, Terny et
378 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Sidi-Vahia, en juin, juillet, septembre et octobre 1907; Tala-rana-
Maillot, en juin 1900).
Esper a grossièrement figuré, sous les n° 5 et 6 de la
Tab. CXXIII, le Proto, primitivement décrit par Ochsenheimer,
d’après un exemplaire du Portugal; Boisduval, dans l’/cones, n'a
pas donné une excellente représentation de Proto; cependant
l'Espèce est reconnaissable sous les n° 4 et 5 de la PI. 46;
Duponchel n’a guère mieux réussi à figurer Proto sous les n° 7 et 8
de la PI XLII du Supplément. Aux pages 262 et 263, Duponchel
décrit Proto et donne, d’après Rambur, qui, le premier, avait
trouvé la chenille aux environs de Montpellier, une histoire des
premiers états concordant parfaitement avec les observations de
M. Harold Powell. La chenille relie, avec des fils de soie, les
feuilles du sommet de la P/Ælomis Lychnitis, et forme avec ces
feuilles agglomérées un abri au milieu duquel elle se tient cachée,
rongeant surtout l'extrémité de la jeune tige. C'est dans ces
feuilles liées entre elles que la chenille opère sa transformation
en chrysalide. Frever, sous le n° 5 de la Tab. 361, semble figurer
avec le nom de Proto le dessous de Carcharodus bæticus et le
dessus d’un Syrichthus qui est peut-être Proto. Les meilleures
figures de Proto sont probablement celles de lIconographie de
Huebner (n° 918, 010, 9020 et 921). Elles ne sont cependant pas
la perfection. Quant à celles de Lang (figures 4 de la
PI. LXXVIII), elles sont tout à fait mauvaises. La chromolitho-
graphie économiquement pratiquée sur des dessins à la plume et
au crayon n'arrive généralement pas à la finesse nécessaire pour
représenter convenablement des Syrichthus. Le Rév. Henry-
Charles Lang, auteur de l'ouvrage 7’%e Butterflies of Europe,
« Vicar of All Saints Church », est mort le 20 décembre 1900,
à l’âge de 59 ans. Sa collection de Lépidoptères paléarctiques
avait été vendue, peu de temps avant sa mort, aux enchères
publiques.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 379
EE _— ————— " — — — — .…" — ——"——.…—""—————————————…—…—….’…’.…_ ’_—…_—_
- Syrichthus Mohammed, Obthr.
(54
Je possède 12 exemplaires que je compare à 05 Proto, près
desquels ils se trouvent alignés dans la même boîte. Ce qui me
fait considérer Mohammed comme une Espèce à part et différente
de Proto, c'est le dessous des ailes inférieures. Chez Mohammed,
les taches blanches du dessous des ailes inférieures sont porce-
lanées, tandis qu’elles sont mates chez Proto. Les ailes de
Mohammed, en dessus, ont les taches blanches plus divisées; ces
taches sont alignées moins droit sur les ailes inférieures; de plus,
le contour des mêmes ailes inférieures, chez Mohammed, est plus
dentelé et profondément sinué, avec prolongement aigu des ner-
vures sur la frange des quatre ailes qui est plus longue chez
Mohammed. J'ai publié de bonnes figures de Mohammed dans
la XII° livraison des £tudes d'Entomologie, sous les n* 23 a et
23 d de la PL V. Je prie le Lecteur de vouloir bien s’y reporter.
Je me demande pourquoi feu Staudinger prenait plaisir à affubler
les noms propres d’un génitif; il a satisfait sa manie, en rectifiant
Mohammed en Mohammedi. Mohammed est un nominatif qui ne
comporte nullement la même déclinaison latine que le mot
Dominus. Pour être conséquent avec lui-même, Staudinger aurait
dû pourvoir d’une désinence indiquant le génitif tous les noms
propres que Linné et les autres Auteurs ont employés au nomi-
natif : Arion, Euphemus, Arcas, Cyllarus, Damon, Priamus,
Hector, Æneas, Polymnestor, Apollo, Machaon, Podalirius,
etc, etc. On objectera que Mohammed est un mot barbare; mais
je demanderais si les noms suivants appliqués à des Æespéries
américaines ne sont pas plus barbares encore : Iowa, Scudder;
Delaware, Edwards: Hobomok, Harris; Ottoe, Edwards; Huron,
Edwards: Orono, Scudder; Egeremet, Scudder ; Mystic, Scudder;
Metacomet, Harris: Panoquin, Scudder, etc. etc. J'ai donné à un
Syrichthus d'Algérie qui m’a paru nouveau le nom de Mohammed,
comme j'ai donné à un autre le nom d’Ali, et ces noms resteront
tels quels. Pourquoi Staudinger, tant qu'il y était, n'a-t-1l pas orné
380 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
d’une désinence latine le nom arabe A/3 et formé le génitif A/,
qu'il aurait fait dériver du nominatif As? Cela aurait bien
valu Mohammedus, Mohammedi, etc. Mohammed (et non Moham-
medi) a été pris à Sebdou, en mai et en octobre 1007; à Jambèse,
en mai et en août; à Constantine, d’où feu Olivier m'a envoyé
des exemplaires superbes.
Le dessous des ailes inférieures varie pour l'interruption
(fig. 23 a) ou la continuité sans interruption (fig. 23 &) de la
bande blanchâtre médiane; mais ce genre de variation est commun
à presque toutes les Espèces de Syrichthus.
Syrichthns leuzeæ, Obthr.
Figurée sous le n° 10:de la PI. IIT de la VIlhivraison des
Etudes d'Entomologie et décrite à la page 60 du même ouvrage.
Je ne puis qu'inviter le Lecteur à se reporter à ce que J'ai précé-
demment écrit, relativement à Zeuzeæ. L'Espèce est très tranchée
et ne peut être confondue avec aucune autre. Elle paraît rare. J'en
possède en tout 6 exemplaires : le type, de Mascara (coll. Bois-
duval); 1 © prise à Sebdou par le D' Codet; 3 G' capturés à
Sebdou en mai 1007 par Harold Powell; 1 G pris par J. Merkl,
dans le Djurjura, en juillet 1884.
Le nom de ZLeuzeæ donné par Boisduval et que j'ai maintenu,
dédié à Deleuze, naturaliste français, désigne une plante de la
famille des Composées, à fleurs purpurines, appelée Leuzea cont-
fera, D. C. Le genre Leuzea, très voisin du genre Centaurea,
contient dans la Flore de H. Coste une seule Espèce qui croît sur
les coteaux pierreux et les garrigues de la France méridionale, de
l'Espagne, de l'Italie et de l'Algérie.
Je ne crois pas que Boisduval ait connu la plante dont a pu
se nourrir la chenille de son Syrichthus Leuzeæ,; mais par analogie
avec les plantes sur lesquelles vivent ordinairement les Syrzchthus,
Boisduval s’est servi du nom d’une Centaurée, préjugeant ainsi
un état de choses qu'il ne connaissait probablement point.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 381
Syrichthus Sidæ, Esper.
Une des Espèces les plus faciles à distinguer dans le genre
Syrichthus, à cause du dessous des ailes inférieures orné de deux
larges bandes jaune d'or. J'ai pris Sz/æe, en mai 1895, dans
l'Esterel, près Cannes, en compagnie de feu mon ami Alexandre
Constant. J'ai trouvé Szdæ à Florence, en juin 1907. M. H. Powell
m'a envoyé des exemplaires récoltés dans la forêt du Dom (Var),
en mai 1906, et au mont Pacanaglia (Alpes-Maritimes), en juin
1906. M. Gédéon Foulquier a recueilli Sz/æ dans le vallon de
Saint-Pons (Bouches-du-Rhône), en juin; feu mon ami Emmanuel
Martin avait rapporté d'Hyères (Var) des exemplaires nombreux
et très beaux de Szde. M. Orazio Querci a trouvé Szdæ à Forma,
dans la province de Caserta (Italie méridionale). Je possède
l'espèce d’Akbès, de Tokat et de Broussa (Asie-Mineure); de
Constantinople et de Russie méridionale. Huebner à donné, sous
le n° 468, des figures meilleures que celle publiée par Esper sous
le n° 3 de la Tab. XC. La Sida Abutilon, Linné (Abztuion
Avicennæ, Gaertn.), est une Malvacée qui pousse sur le bord des
champs et des fossés humides dans l’Europe méridionale et donne
des fleurs jaunes. Szdæ a été découvert par le Hofrath Boeber,
aux environs du Volga.
= Syrichthus Carthami, Huebner.
Encore une Espèce généralement facile à distinguer des autres
par les deux faces de ses ailes inférieures, mais qui n'a Jamais
encore été l’objet d’une excellente figuration. Je trouve cependant
que les n° 720 et 723 de Huebner représentent assez bien Car-
thami; mais les n° 721 et 722, quoique figurés avec le même nom
de Carthami, ne me semblent pas pouvoir être considérés comme
représentant cette Espèce. Rambur, dans la Faune de l'A ndalouste,
1830, a représenté Carthami sous le n° 8 de la PI. 8; mais cette
figure, peinte par lui-même, est mal réussie. La figure donnée par
382 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Freyer sous le n° 3 de la Tab. 340 n'est pas très satisfaisante;
celle du Supplément, par Duponchel (PL XLII fig. 3 et 4), ne
me semble pas représenter le vrai Carthanu. Lang, sous les n° 9
de la PI LXXVIII, n’a rien fait qui fût bien reconnaissable. Dès
lors c'est encore aux n° 720 et 723 de Huebner qu'il convient de
se reporter pour identiñer l’Espèce. Car/ham est cependant très
variable, et bien qu'il soit relativement facile à discerner par son
faciès un peu spécial, il faut apporter une grande attention dans
l'examen des exemplaires pour ne commettre aucune faute de
classification.
Le nom de Carthami vient d’un Genre de plantes de la famille
des Composées qui comprenait autrefois les Espèces : /anatus,
Linné, à fleurs jaunes, et Cæruleus, Linné, à fleurs bleues. Dans
le vol. IT de la Flore descriptive et illustrée de la France, par
l'abbé Coste, le Genre Carthamus (page 398) a fait place au
Genre Centrophyllum. Les Carthamus où Centrophyllum sont des
plantes à feuilles pubescentes et épineuses, croissant dans les lieux
incultes, au bord des chemins, dans les terrains calcaires; cæruleus
est plus spécialement méridional que lanatus. J'ai réuni près de
250 exemplaires de Syrichthus Carthami venant des localités
suivantes : Samoussy (Aisne), juin 1909; Mende et Florac
(Lozère), juillet; Gavarnie et Cauterets (Htes-Pyrénées), juillet;
Angoulême, juin; Alpes-Maritimes, Isère et Basses-Alpes, juillet;
Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales), mai, juin, juillet; Vichy;
Paris; Châteaudun; Mont-Dore, en Auvergne; le Lioran et Gar-
rabit (Cantal), juillet; Cassel (Allemagne); Hongrie; Valais;
Madrid; Sierra-Nevada; Sierra-de-Alfakar (Espagne); Sarepta
(Russie méridionale). Je n'ai jamais vu Carthami en Bretagne.
Il n’a pas été trouvé en Angleterre, ni en Algérie. Dans le Valais
(Viège; route du Simplon, depuis Brigue), on trouve la forme
Valesiaca, Ruehl, caractérisée par la réduction des taches blanches
sur les ailes inférieures et le fond plus noir des ailes; mais tous
les exemplaires du Valais n’appartiennent pas à la variété
Valesiaca. En Russie méridionale, à Sarepta, la variété Mæschleri,
Herrich-Schaeffer (fig. 37 et 38 de la Tab. V Æesperides Europ.),
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 383
semble remplacer le type. Les figures d'Herrich-Schaeffer sont
très bonnes; mais il semble que les points orangés représentés sur
le dessus des ailes inférieures (fig. 37) ne se montrent que
rarement; car sur 15 individus de Sarepta contenus dans ma
collection, 2 seulement présentent ces taches d’un fauve orangé
clair situées entre les deux lignes de taches blanches des ailes
inférieures. J'ai pris à Uriage (Isère), en juin 1895, la même
variété Maæschleri dont les quatre ailes plus largement saupou-
drées de blanchâtre, ont, en outre, les taches blanches plus déve-
loppées, aux ailes inférieures notamment. Valesiaca et WMeschler
sont les termes extrêmes de la variation, par albinisme d’un côté
et mélanisme de l’autre, de Carthami. Mon frère a pris à
Samoussy, le 13 juin 1900, une jolie Aberration de Cartamt ®,
que j'appelle véfatus, chez laquelle la série extracellulaire et
coudée des taches blanches des ailes supérieures, en dessus, est
composée de macules extraordinairement grosses, formant une
bande continue de taches étroitement contiguës et que divisent
seulement, mais très finement, les nervures noires. Le dessous des
ailes inférieures est également un peu aberrant.
Rambur publie aux pages 65, 66, 67 et 68 du Catalogue systé-
matique des Lépidopières de l'Andalousie, une description très
détaillée de Carthami et je lis, au cours de cette description, les
lignes suivantes : « Les individus recueillis dans la Sierra-Nevada
diffèrent un peu de ceux de France, surtout par le dessous des
ailes inférieures, dont le bord externe présente une nuance d’un
roussâtre obscur, mais ne s'unissant pas complètement avec le
dessin des ailes comme chez l’Alveus,; la tache de la massue des
antennes est obscure ou noirâtre. Ils se rapprochent beaucoup de
la variété de l’Alveus de la même localité, mais ils s’en distinguent
nettement d’après les caractères énoncés, et surtout par les diffé-
rences très grandes des parties génitales ». Mon frère a pris, en
juillet 1870, 5 exemplaires de Carthami dans la Sierra-Nevada,
côté de Lanjaron; je possède aussi l’exemplaire Q de 7Atere
Andalusiens, étiqueté à tort Cynaræe. Dans Îles collections de
Graslin et Boisduval, il y avait aussi des Carthami d'Andalousie.
384 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
J'estime donc, d’après ces documents, que Rambur a fait une
observation exacte à l'égard de Carthami andalous; aussi je
distingue le Carthami de la Sierra-Nevada par le nom de Meva-
densis qui lui convient autant que celui de Valesiacus est appro-
prié à certains Carthami valaisans et celui de Mæschler: aux
Carthami de Sarepta et à certains individus de France.
Dans le but de bien fixer la nomenclature des Syrichthus, je
fais figurer sur la PI. LV un C'et une Q Carthami pris à Angou-
lème, par mon frère, les 4 et 5 juin 1906 (n° 475 et 478), une ©
Carthami-nevadensis (n° 474), prise en Juillet 1870, également
par mon frère, dans la Sierra-Nevada; une © Carthami-Valesiacus
(n° 476), capturée par moi-même à Viège en Valais, en juillet, et
enfin le Œ Ab. : vittatus (n° 477), pris à Samoussy (Aisne), ainsi
que Je le dis plus haut, le 13 juin 1900.
Syrichthus Sao, Huebner.
Les figures données par Huebner sous les n° 471 et 472 sont
reconnaissables parce que l’Espèce est relativement très tranchée;
mais elles sont loin de pouvoir compter parmi les meilleures de
l'Iconographie de Huebner.
__ Sao manque en Angleterre. Je ne l’ai jamais trouvé en Bre-
tagne. Il n’est point rare dans les localités suivantes d’où Je le
possède authentiquement, et sans doute dans bien d’autres où Je
n’ai pas eu l’occasion de le rechercher : Vernet-les-Bains (Pyrénées-
Orientales), en mai, juillet et août; Villeneuve-de-Blaye (Gironde);
Cauterets et Gavarnie (Hautes-Pyrénées), en juillet; Basses-
Alpes; Alpes-Maritimes; Bouches-du-Rhône; Charente; Lozère;
Savoie; Var; Gers; forêt de Carnelles (Seine-et-Oise); Isère;
Hongrie; Valais; Schwalbach; Castille; Andalousie, où nous
l'avons pris en mai et en Juillet.
Sao varie beaucoup pour le dessous des ailes inférieures, géné-
ralement rouge, mais pouvant être ocre jaune, et présenter un
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 385
développement plus ou moins grand des taches blanches. D'ail-
leurs, sur le dessus des ailes dont le fond est d’un brun noir un
peu bronzé, les taches blanches varient beaucoup pour leur degré
d’accentuation. J'ai réuni plus de 200 individus de France. J'ai
obtenu quelques intéressantes variations ; mais tous les exemplaires
sont faciles à identifier et il n'y a aucune difficulté pour leur
détermination.
On trouve en Corse une petite race géographique à taches des
ailes supérieures toujours jaunes, au lieu d’être blanches comme
sur le continent européen. Cette race a été longtemps considérée
comme Espèce distincte, ainsi que Z'igelius et Corinna. En fait,
au sens qui est attribué actuellement au mot Æspèce, le Syrichthus
T'herapne, Rambur, de l'ile de Corse, peut être considéré par bien
des Entomologistes comme étant Espèce valable. Il en est de
même de la race algérienne et marocaine que J'ai appelée AZ et
dont il y a deux formes, l’une à taches blanches et l’autre à taches
jaunes, et de taille plus petite, que je désigne sous le nom de
Therapnoides (PI. LIV; fig. n° 448). Le Syrichthus Al a été
trouvé à Lambèse, à Sebdou, à Constantine, en mai, 7 Lerapnoides
vole en juillet et août à Khenchela, à Sebdou et à Zebch, près
Sebdou. Il m'a été aussi envoyé de Tumisie par M. Faroult, et
mon frère l’a pris en juin à Tetuan.
Chez 7'erapnoides, le dessous des ailes inférieures est généra-
lement moins chargé de rouge brique et les taches du dessus sont
d’un jaune moins foncé que dans Z'.erapne, de Corse. Ce dernier
a aussi le fond des ailes plutôt brun que noir, ce qui est le contraire
chez 7’ herapnoïdes. Je crois que 7'Lerapnoïdes est la forme estivale
et Az la forme vernale de la race algérienne de Sao. Dans aucune
partie de la Barbarie, on n’a trouvé jusqu'ici la forme européenne
de Sao.
La chenille vit sur le framboisier, la potentille et le fraisier
sauvage.
Herrich-Schaeffer a donné de 7 Lerapne, sous les n° 16 et 17
de la Tab. 3 des Æesperides Europ., une représentation inexacte,
au moins quant à la couleur des taches du dessus des ailes. Dans
29
386 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
l’'exemplaire de ma bibliothèque, les taches en question sont
restées blanches, tandis qu’elles devraient être d’un jaune accentué.
La figure donnée par Duponchel, sous les n° 9 et 10 de la
PI. XLII du Supplément, pêche par l'excès opposé.
Sytrichthus Fritillum, Huebner.
Le Æritillum figuré par Huebner, sous les n°° 464 et 465, paraït
être une Espèce fort peu connue. Car, 1l y a peu de temps encore,
M. le docteur Reverdin, professeur à l'Université et président de
la Société lépidoptérologique de Genève, s'intéressant à la question
des Syrichthus, demandait en vain qu’on le mit à même de faire
la connaissance en nature de }ritiilum; il ne pouvait trouver de
correspondant qui fût à même de lui envoyer l’Espèce Je crois
avoir été seul assez heureux pour le satisfaire, et me trouvant à
Vernet-les-Bains, au printemps de 1900, je capturai à son intention
quelques exemplaires qu'il put recevoir frais. Je sais que le
D' Reverdin s'est livré à une savante étude comparative des
genitalia de Fritillum et je partagerai bientôt, je l'espère, avec
beaucoup d’autres Lépidoptéristes, le plaisir de lire le résultat des
observations, toujours si consciencieusement réalisées et exposées
d’une façon si instructive par l'honorable Président.
Le Syrichthus Fritillum n'est pas une espèce commune, quoi
qu'en dise Rambur qui, aux pages 74, 75 et 76 du Catalogue
systématique des Lépidoptères de l'Andaloustie, décrit Fritillum
très en détail, après avoir, quelques années plus tôt, figuré le
dessous des ailes, sous le n° 14 de la PL 8 de la Faune de
l'Andalouste.
La question n’est du reste pas très simple à résoudre; car on
trouve dans les Pyrénées-Orientales deux Espèces de Syrzchthus,
l'une assez rapprochée de walvæ (Alveolus), que j'ai appelée
fritillans, et l'autre beaucoup plus éloignée. Cette dernière est
relativement grande, comme celle dont Huebner donne la repré-
sentation; en dessus, la Q est obscure, toujours comme # ritillum,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 387
fig. 464, de Huebner; en dessous, le fond des ailes supérieures
est noirâtre et les ailes inférieures sont rouges, avec de faibles
éclaircies blanches.
Le Syrichthus qui répond à ce signalement se rencontre, tou-
jours par exemplaires isolés, au printemps, puis en été, depuis
Villefranche-de-Conflent jusqu'un peu au-dessus du village de
Casteil. Il a le vol rapide; on le voit sur les chemins; 1l aime à
se reposer un moment sur la terre humide; il affectionne aussi
les réserves de fumier déposées dans les jardins et les champs.
Je ne crois pas qu'il s'élève très haut dans la montagne.
Fritillum est donc rare; car mon frère et moi, dans toutes les
chasses que nous avons faites depuis tant d'années aux environs
de Vernet-les-Bains, nous n’avons guère réussi à en capturer plus
de 35 exemplaires, dont 27, en excellent état de conservation et
de fraîcheur, sont encore dans ma collection. Æ72/1llum éclôt une
première fois au mois de mai, une seconde fois en Juillet et août.
Il paraît être bien plus abondant en été qu’au printemps.
Fritillum est généralement plus grand que #alve ; il a un faciès
très différent. Les taches blanches des ailes supérieures, en dessus,
sont chez le Œ plus grosses que dans #alvæ; mais elles n'ont
pas de tendance à s’élargir comme dans walve-Taras et celles des
inférieures sont fréquemment très atténuées, surtout chez les ©.
Le dessous des ailes supérieures a le milieu noirâtre; la côte et
le bord extérieur sont de couleur blanchâtre ou ocre rouge. Le
dessous des inférieures est d’un rouge brique, avec les dessins
blancs ou Jaunâtres assez réduits, surtout le long du bord externe
des ailes de la ©. Le bord abdominal est blanchâtre ou rou-
geatre dans 25 exemplaires, mais grisâtre chez 2 ©, notamment
chez celui que je fais figurer sous le n° 455 de la PL LIV, en
même temps que 6 autres spécimens, afin de donner une idée très
exacte et complète de l’Espèce.
La série médiane des taches blanches, interrompue dans la
figure 465 de Huebner, non interrompue dans la figure 14 de
Rambur, est, d’après la description de Rambur et selon mes
observations personnelles, presque toujours continue chez /'r##11-
388 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
lum de Vernet, ainsi qu’on peut le constater chez 4 des Fr2/llum
dont je fais représenter le dessous dans le présent ouvrage. La
série des taches médianes du dessous des ailes inférieures n'est
interrompue, conformément à la figure 465 donnée par Huebner,
que chez le G' représenté sous le n° 455 dans le présent ouvrage.
Il paraît que les parties génitales de Æ724llum sont très différentes
des autres espèces de Syrichthus. Rambur en donne l'explication
à la page 75 du Catalogue systématique.
Jamais je n’ai vu de Syrichthus Fritillum en dehors des exem-
plaires pris par mon frère et par moi dans les Pyrénées. Ni lui,
ni moi, nous n'avons trouvé l’Espèce en Andalousie, comme cela
est arrivé à Rambur, ni dans aucune autre partie du Midi de la
France que nous ayons visitée en outre des Pyrénées. Les collec-
tions françaises Boisduval, Guenée, de Graslin, Bellier de la
Chavignerie que je possède, ne renfermaient pas Ære1llum. La
collection allemande Kuvert, que je possède également, ne con-
tenait point cette Espèce.
Je me demande pourquoi Rambur a teinté avec la même couleur
brune qui recouvre le fond des ailes, tout le bord anal de l'aile
inférieure de lritillum qu'il figure sous le n° 14 de la PI. 8, alors
que le même Rambur, à la page 77 du Catalogue systématique,
dit que Alveolus est distingué de Fritillum « par la couleur, en
grande partie noirâtre, du bord abdominal », ce qui indique évi-
demment que, d’après l'observation de Rambur, le bord abdominal
de Fririllum ne peut être noirâtre comme celui d’'Alveolus (malve),
dont il est, pour ce détail, différent.
Sur la PI. LIV du présent ouvrage, j'ai fait figurer, du n° 440
au n° 455 inclus, 7 Fritillum, tous pris dans les Pyrénées-Orien-
tales, aux environs de Vernet-les-Bains. Les n° 440 et 450 repré-
sentent le G' et la ©, en dessus, d’après des exemplaires pris en
juillet et août; les n° 451 et 452 représentent le O' et la ©, en
dessous, également d’après des spécimens pris en été; les n°° 453,
454 et 455 sont la figuration, en dessous, d'individus graduel-
lement plus clairs, de façon à donner une idée complète de l’aire
de variation dans laquelle se meut l’Espèce : Fr2411lum, du moins
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 380
pour ce que je connais. Les n°° 453 et 454 ont été récoltés en été;
le n° 455 a été capturé par moi-même au printemps 1000.
Je n'ai pas hésité à faire figurer ce C' 455; il a, comme Je le
dis plus haut, le bord anal des ailes inférieures gris et non blan-
châtre, ainsi que les autres /r4#1llum; je crois cependant que c’est
un /‘rohillum; mais je ne me dissimule nullement que cet exem-
plaire peut paraître discutable, surtout comparé aux walvæ-fritil-
lans, c'est-à-dire ayant le dessous des ailes inférieures rouge, figurés
sous les n° 461 et 462, de Vernet-les-Bains. [Il eût été simple de
supprimer la figuration de ce spécimen 455 intermédiaire et
embarrassant; la discussion eût gagné en clarté et l’unité spéci-
fique de Æritillum eût été mise en lumière, sans contestation
possible. Mais pour moi, il y a un intérêt suprême qui m'est plus
cher que tout : la vérité Dès lors, confiant dans le talent de
M. J. Culot pour rendre exactement la figuration des papillons
que je lui remets, je n'hésite pas à exposer à mes chers confrères
en Entomologie la question telle que je la vois, avec ses incerti-
tudes et ses Zoutances. Il est bon de ne pas perdre de vue que ce
Fritillum 455 a été récolté en mai, tandis que tous les autres ont
été recueillis en août. Je possède un seul autre Æritillum de
l'éclosion de printemps. Je l’ai pris en mai ou au commencement
de juin de 1900. Il est pareil à l’exemplaire 455, c’est-à-dire qu'il
a le bord anal des ailes inférieures gris en dessous, et non
blanchâtre; mais 1] n’a pas la bande médiane maculaire blanche
interrompue, comme cela se remarque dans le n° 455; sous ce
rapport, 1l est semblable au n° 454 C'est pourtant bien un
Fritillum; le dessus de ses ailes avec les taches blanches des
supérieures plus grosses que chez walvæ et les inférieures bien
pareilles au n° 449, c’est-à-dire avec une partie plus noire que le
fond, au delà de la tache blanche discoïdale (ce qui a lieu aussi
chez le n° 455), plaident pour l'attribution de ce spécimen vernal
à Fritillum plutôt qu'a walvæe (Alveolus). Alors la race vernale
et la race estivale de Fritillum différeraient par la couleur du
bord anal des ailes inférieures, en dessous. Je regrette de n'avoir
pas pu réunir une documentation plus abondante. Cela tient à la
300 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
rareté de }ritillum et aussi à la vivacité de son vol. On laisse
échapper un certain nombre d'exemplaires qui disparaissent
presque aussitôt qu’on les a aperçus. Il y a du reste longtemps
que J'ai remarqué à Vernet-les-Bains ce Syrichthus spécial, et j'ai
recherché les Syrickthus, avec la plus grande attention, partout
où J'ai chassé, capturant toujours le plus grand nombre d'individus
que je pouvais, et ne perdant pas la préoccupation de Fritillum.
Je ne l'ai pas en vain recherché dans les Hautes-Pyrénées, où
j'espérais bien le rencontrer; mais je n'ai réussi à y prendre qu’un
seul exemplaire, un peu usé par le vol, aux environs de Cauterets,
en Juillet 1005.
, _Syrichthus malvæ, Linné.
Je fais figurer 14 exemplaires sous les n°* 456 à 460 inclus
de la PI LIV de ce livre, afin de faciliter la connaissance de
l'Espèce et de ses variétés.
Linné, dans le Systema Nature, Edit. X, 1760, décrit malve
comme suit : « P. P. alis denticulatis nigris albo maculatis. »
Il cite entre autres, à l'appui de sa description, la figure 7 donnée
par Roesel (Cassis 11 Papilionum diurnorum; Tab. X; Vol. D).
Le dessus seulement est représenté, par Roesel, plus grand que
nature; mais à part cette circonstance, le papillon paraît exac-
tement dessiné et spécifiquement reconnaissable.
Barrett, sur la PL. 37 de son ouvrage : 74e Lepidoptera of the
British Islands, donne plusieurs figures du Syrichthus malve
qu'il appelle Alveolus, nom avec lequel Huebner le figure sous
les n° 466 et 467 de son Iconographie. Barrett ne représente pas
le dessous de la forme normale anglaise, mais seulement le
dessous d’une Aberration plus claire, sous la figure 1 4. Le
dessous de la © figurée par Huebner, sous le n° 467, représente
un individu exceptionnellement grand, avec le fond des ailes
inférieures d’un brun obscur. Rambur, sous le n° 15 de la PI 8
de la Faune de l’'Andalousie, 1830, donne la figure du dessous
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 301
d'Alveolus, avec le fond des ailes inférieures brun notrâtre, non
rougeâtre; la description d’A/veolus, imprimée aux pages 7O1eti77
du Catal. systématique, 1858, mentionne : « le dessous des ailes
inférieures variable pour la couleur du fond qui est toujours
assez foncée et même noirâtre, mais ordinairement d’un brun
olivâtre, un peu jaunâtre, sur lequel tranchent les taches, lignes
et points blancs jaunâtres et toujours d’une manière assez vive ».
De son côté, Barrett définit la couleur du dessous des ailes infé-
rieures d’Alveolus, à la page 268 du Vol. I, comme suit : « Of
hind wings dark ochreous tinged with grey or clouded with
olive-grey; with spots as on the upper side, but much larger;
and with two or three additional small spots near the base ».
Freyer, sous les n° 2 et 3 de la Tab. 361, figure Alveolus avec
sa variété Taras que Huebner représente également sous le n° 507.
J'en parlerai bientôt. Je signale pour le moment le dessous des
ailes inférieures d'Alveolus, selon Freyer (Tab. 361; fig. 2),
représenté d’un gris olivâtre. Dans la description, je lis (p. 127)
« Die Unterseite ist graugelb mit veissen Flecken und Punkten
und sehr hellen weissgelben Adern auf den Hinterfluegeln. »
Dans Berliner ent. Zeits. 1886, Bd. XXX, Johannes Schilde,
de Bautzen, a fait paraître un article intitulé : Berrachtungen
ueber die Variabilitaet in der Schmetterlings-Gattung Pyrgus.
Plusieurs figures en noir ont paru sur la Taf. IT et Îa Notice
occupe les pages 30 à 62. Schilde figure d’une manière très
agrandie, sous les n°® 8 et 10, une paire d’ailes en dessus et en
dessous de malve, et sous les n° 7 et Oo, les ailes en dessus et
en dessous de l’Aberration T'aras. Les figures semblent bonnes
et doivent rendre assez exactement les papillons pris pour modèle.
Le Syrichthus malvæ est une espèce de plaine et de montagne;
en Bretagne, il éclôt en mai, et il n’est pas rare dans les allées
des bois, les landes, les pâtures et les jachères où il y a de l’herbe
rase; je ne l’ai jamais trouvé en août. On dit cependant qu'il a
parfois une seconde éclosion estivale, en Angleterre; mais J'ai
302 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
lieu de croire que cette seconde éclosion y est fort peu abondante;
en tout cas, en Bretagne, elle est nulle. Autrement, je l’y aurais
certainement constatée. J'ai pris #alvæ en juin, dans les parties
élevées des Alpes-Maritimes et de l’Isère où je l'ai rencontré à
plus de 2,000 mètres d’altitude. Dans les Hautes-Pyrénées, je l’ai
recueilli à la fin de juin et au commencement de juillet; dans les
Pyrénées-Orientales, nous avons trouvé #alvæ au printemps et
en été.
J'ai observé des variations locales intéressantes; mais je crois
d’abord utile de donner la nomenclature des localités d’où pro-
viennent authentiquement les Syrichthus malvæe de ma collection :
Angleterre (collection Prest, d’Vork); Paris (coll Bellier);
Rennes, en mai; Ryffelalp, en juillet; Besançon; Chamounix, en
juillet; Aix-les-Bains et Mont-Revard, en juin; Lectoure (Gers),
au printemps; forêt du Dom (Var), en mai; Uriage (Isère), en
juin; Alpes-Maritimes, dans les hauteurs de Saint-Martin-de-
Vésubie, en juin; Fusio (Tessin), en juillet; Lautaret (Hautes-
Alpes), en juillet; Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales), en mai
et Juin, puis en juillet et août; Cauterets (Hautes-Pyrénées), en
juillet; Biarritz, en juillet; Digne, en mars, avril et mai; lande
de Caden (Morbihan), en mai; Grèce; Sicile (Bellier); Kassel
(coll. Kuwert); Fort-Naryne (Turkestan oriental); Tokat (Asie-
Mineure); lac de Come (Italie), en juin; La Granja (Espagne
centrale), en juin; Zumarraga et Alsasua (Espagne du Nord),
en juin; Moscou (Russie centrale), au mois de mai.
En Angleterre, en Bretagne, à Paris, le dessous des ailes infé-
rieures est teinté de brun un peu olivâtre, sur lequel ressortent
vivement non seulement les taches et points blancs, mais encore
les nervures qui sont plus claires. Les exemplaires de la lande de
Caden, figurés sous les n°% 466 et 467, représentent la forme
normale anglaise et française. Le n° 465 est la figuration d’un ©
que J'ai pris au Mont-Revard, en Savoie, au printemps 1006, et
le n° 464 donne l’image d’une Aberration d' que j'ai prise à
Cauterets, à la fin de juin 1800, et qui, par son semis de points
blancs, le long du bord externe des ailes inférieures, en dessus,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 303
rappelle l’Aberration de Side figurée par Herrich-Schaeffer, sous
le n° 31 de la Tab. 6 des Æesperides Eurog.
Une race différente est celle d'Alsasua (O, en dessus, n° 458,
et O, en dessous, n° 459). Cette race d’Alsasua, comme celle de
Cauterets (Q, en dessous, n° 460), diffère de la race de l’Angle-
terre et du Nord de la France par la couleur plus rougeâtre du
dessous des ailes inférieures et le développement de la couleur
brune au détriment des taches blanches, particularité qui se
remarque sur le n° 465 du Mont-Revard, mais sans que la couleur
du fond des ailes de ce dernier incline vers le rougeâtre, ainsi
que cela a lieu chez les n° 458, 459 et 460. La race de Vernet-
les-Bains, dont j'ai déjà parlé dans la notice relative à Fritillum,
a quelquefois le dessous des ailes plus rouge encore, et cette
couleur rouge, moins envahissante, laisse les parties blanches plus
larges que dans la forme d’Alsasua et de Cauterets. Les n°* 461,
462 et 463 représentent, en dessous et en dessus, le Syrichthus
malve-fritillans de Vernet-les-Bains où il vole ordinairement au
printemps, depuis le mois de mai jusqu'aux premiers Jours de
juin; mais #alve a aussi à Vernet-les-Bains une éclosion d'été,
et contrairement à ce que j'ai observé à Rennes où jamais je n’ai
vu zalve en juillet et août, nous l’avons maintes fois capturé en
été dans les Pyrénées-Orientales.
Cette forme #ririllans, à dessous des ailes inférieures rouge, de
Vernet-les-Bains, est facile à confondre avec certains exemplaires
de Fritillum; en effet, il y a vraiment peu de différence entre le
dessous des ailes de #alve ©, n° 462, que j'ai prise au cours de
mes chasses depuis la fin de mai jusqu’au commencement de
juin 1000, et le n° 454 qui est un Æritillum G' capturé par mon
frère à Vernet, en juillet 1894. Mais le n° 454 a le bord anal des
ailes inférieures blanchâtre, et chez le n° 462, cette partie des ailes
est couverte d’un semis d’atomes noirs qui lui donnent un aspect
cris foncé.
Les #alve, à Vernet-les-Bains, ne sont pas très communs; nous
en avons pris en tout une trentaine d'exemplaires; pas un n’inclme
vers l'Ab. Z'aras; quelques-uns sont analogues aux n° 458, 459
304 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
et 460, et il y en a d’autres en très petit nombre, comme les
n® 461 et 462. La Q malve n° 463 de Vernet-les-Bains, repré-
sentée en dessus, a le dessous un peu moins rouge que les #alvæ-
fritillans 461 et 462 qui sont très caractérisés. En Grèce, le dessous
est gris ohvâtre et les taches blanches sont très réduites: la taille
est plus grande. J'ai fait représenter une grande © en dessus,
sous le n° 468, et sous le n° 460 un € en dessous de cette forme
£LT@CA.
L’Aberration T'aras n’est pas très rare dans certaines localités;
nous la trouvons assez fréquemment à Rennes; le n° 456 a été
pris par nous à Mesneuf, en Bourgbarré, près Rennes, en mai 1882,
et le n° 457, intermedia, vient aussi des environs de Rennes où
nous l’avons capturé au printemps de 1006.
Par ailleurs, ma collection contient 6 intermedia de Rennes,
2 d'Angleterre et 19 Ab. Taras de Rennes, d'Angleterre, de
Besançon, de Sologne, du Mont-Revard, en Savoie, de la lande
de Caden et de Châteaudun. Cette Aberration 7'aras a d’abord
été nommée et figurée par Bergstraesser sous les n° 5 et 6 de la
Tab. o1 de Nomenclatur und Beschreibung der Insecten in der
Grafschaft Hanau-Miünzenbers, etc. L’Aberration Zaras n'est pas
seulement remarquable par le dessus de ses ailes; le dessous des
inférieures est lui-même très intéressant à cause de la confluence
envahissante de la couleur brune du fond.
De toute cette étude, il résulte qu'à Vernet-les-Bains on trouve
des Fritillum très distincts et très caractérisés, tels les n° 451,
452, 453 de la PI. LIV ; d’autres qui sont ambigus, tel le n° 455,
et des #alve-fritillans ayant un air de Fritillum, surtout à cause
de la couleur rouge du dessous des ailes inférieures; mais ces
malvæ-fritillans se lient si intimement à d’autres malve indis-
cutables qu’il ne semble pas possible de les coasidérer autrement
que comme une variété de coloration de #alve.
Je pense que le Syrichthus appelé par moi Fritillum est bien
conforme spécifiquement au #ri#illum de Rambur, venant d’An-
| 7
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 305
dalousie et de France méridionale; mais le Æritillum de Rambur
est-il le même que le Frifillum de Huebner et dès lors ce que Je
considère comme Ær1#illum, Huebner (n° 440, 450, 451, 452, 453,
454, 435 de la PI LIV), est-ce exactement identiñé? J'ignore
d’ailleurs la patrie du Fritillum, nommé et représenté par
Huebner, ce qui serait très essentiel pour bien l’apprécier, et Je
sais que les avis sont très partagés sur ce que peut être Ær1/lum.
Ainsi Johannes Schilde écrit (Berliner Entom. Zeitschrift, KXX,
1886, p. 30) : « Was Hr. Pf. Fuchs mir davon ueberliess war
P. Fritillum, fast genau in der Form wie H. Sch. Fig. 33, 34.
Cirsii abbildet. » J'ai sous les yeux les fig. 33 et 34 dans lesquelles
Herrich-Schaeffer (Wesperides Europ., Tab. 6) représente Corsu,
avec les dessins du dessous des ailes brun et non rouge, la ligne
médiane blanche continue et non interrompue comme dans la
fig. 465 de Huebner. Je compare les figures initiales 464, 465 de
Huebner aux figures 33 et 34 d'Herrich-Schaeffer. Il est vrai
que Huebner représente la © et Herrich-Schaeffer représente le ©;
mais, à mon sens, la tache blanche près la base des ailes infé-
rieures, en dessous, chez Cirsii 34, suffit à rendre impossible toute
identification spécifique avec Fritillum, Huebner, 465, qui, au lieu
d’une tache blanche longue, séparée de la base par un espace brun,
montre tout près de la base, dans chaque espace intranervural,
des taches blanches en forme de larme. Il n’y a aucune similitude
entre les ailes inférieures de ces deux papillons. Or le Pfarrer Fuchs
et Schilde étaient presque des spécialistes pour l'étude des Hespé-
rides d'Europe. Dans ces conditions, l'accord relatif à Æritillum
n'est pas encore fait. Quoi qu’il en soit, je me suis efforcé de
mettre sous les yeux du Lecteur toutes les pièces de la procédure.
Il pourra consulter les Auteurs que j'ai cités, examiner aussi les
figures que je publie, et surtout étudier le grand livre de la Nature.
Il est toujours ouvert et à la disposition de tout le monde. Chaque
année, Æritillum naît de nouveau à Vernet-les-Bains, et sans doute
dans bien d’autres lieux que je ne soupçonne pas. J'ai dit le peu
que je sais. À d’autres d'ajouter à nos connaissances des faits
nouveaux et d'élever comparativement, si possible, une ponte de
396 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
ce que j'appelle Fritillum et de malve, à ailes inférieures rouges,
en dessous, que J'ai distingué sous le nom de Ær#1llans. Je me
flatte tout au moins — et c’est à l’honneur de M. Culot — que
les figures du présent ouvrage seront trouvées assez exactes pour
qu'il soit toujours aisé de savoir avec certitude et précision sur
quels papillons j'ai disserté.
La chenille du Syrichthus malvæ vit sur le framboisier (Lubus
dœus), le fraisier des bois (Fragaria vesca), plante sur laquelle
nous l'avons élevée, la Æragaria sterilis et la quintefeuille (Poten-
tlla reptans), toutes de la famille des Rosacées.
J'ai fait figurer sous le n° 238 de la PI XXXVII de cet ouvrage
une curieuse Aberration albine chez laquelle le fond des ailes et
le corps sont d’un gris très pâle, au lieu d’être d’un brun noirâtre
foncé. Cette Aberration peut atteindre toutes les Espèces de
Syrichthus.
Syrichthus cacaliæ, Rambur.
Figuré par Rambur sous les n° 6 et 7 de la PI. 8 de la Faune
de l’'Andalouste, 1830, et décrit par le même auteur, avec le nom
de Scelotrix cacalie, à la page 77 du Catal. systématique des
Lépid. de l'Andalousie, 1858. C'est bien cacalie que Boisduval a
figuré dans l’/cones, avec le nom d’Alveus, sous les n° 1, 2 et 3
de la PI. 46. Herrich-Schaeffer a donné d'excellentes figures de
cacaliæ sous les n°% 23, 24 et 25 de la Tab. 4 des Æesperides
Europ. C'est une Espèce très reconnaissable par sa teinte semblant
grisâtre, à cause de sa villosité plus accentuée que chez les autres
espèces; par la réduction de la taille des taches blanches aux
ailes supérieures, en dessus; par l'absence totale de taches
blanches sur le dessus des ailes inférieures, et par les dessins des
ailes, en dessous, qui sont pâles, un peu nébuleux, comme dit
Rambur, sur un fond gris, aux supérieures, et d’un ocre verdâtre,
sur le fond blanc des inférieures. La Cacalia alpina est une
plante vivace de la famille des Composées, à feuilles un peu
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 307
épaisses, vertes et glabres, profondément et régulièrement den-
tées, ayant des capitules de fleurs purpurines en corymbe terminal
(Abbé Coste, Ælore France, I, p. 285). C'est une plante qui croît
dans les rochers des montagnes.
J'ignore si la chenille de Syrichthus cacaliæ vit sur la plante
à laquelle le Lépidoptère doit son nom. J'ai capturé fréquemment
le Syrichthus cacalie sur les pelouses de Ryffelalp où 1l vole en
juillet et aime à se reposer sur les fleurs de Szene acaulis.
M. Harold Powell l’a trouvé au lac d’Allos, du 21 au 27 juillet
1906; au Mont-Pelat, le 27 juillet 1906, dans les Basses-Alpes.
Bellier l’avait pris à Larche. Le Get la Q ont les ailes semblables.
En France, il n’est pas à ma connaissance que le Syrichthus
cacalie ait été trouvé jusqu'ici ailleurs que dans les hautes mon-
tagnes des Alpes. Je n'ai jamais vu un seul exemplaire de
cacaliæ provenant authentiquement des Pyrénées. Je suis obligé,
dans le présent ouvrage, de tenir compte des erreurs de déter-
mination faciles à commettre, surtout lorsqu'il s’agit d'espèces
souvent litigieuses et susceptibles d’être confondues entre elles;
l'expérience m'ayant appris qu'il était très dangereux de s'en
rapporter à la plupart des catalogues locaux.
Je ne suspecte cependant la bonne foi de personne et je prie
mes Lecteurs de vouloir bien observer que, tenant essentiellement
à écrire des observations exactes, je me borne, dans le présent
ouvrage, à ne citer que les faits dont je me trouve absolument
certain. Je ne prétends donc ni nier, ni même mettre en doute les
assertions et les affirmations diverses émanant de plusieurs Ento-
mologistes qui ont relaté des faits que j'ignore. Mais je tiens à
faire une œuvre vraie, en vue de préparer l'établissement d'une
Faune lépidoptérologique française et algérienne plus complète
et réellement exacte; alors je m’abstiens de parler de ce que je
ne connais pas.
C'est ainsi que l’un des plus habiles et ardents chasseurs de
Papillons de l'époque contemporaine, M"° de la Bâtie Nicholl,
m'a écrit qu’elle avait trouvé le Syrichthus Andromede dans les
ES
LENS
(a
> à
308 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Hautes-Pyrénées. En ce qui me concerne, je n'ai jamais vu
d'exemplaires pyrénéens; J'ai pris l’'Espèce dans l’Oberland ber-
nois, à la fin de juin 1808; mais Je ne crois même pas qu'on l'ait
authentiquement rencontrée jusqu'ici dans les Alpes françaises.
Il ne s’en suit pourtant nullement que le Syrichthus Andromede
ne puisse pas être une Espèce pyrénéenne, ainsi que M”*° de la
Bâtie Nicholl en parait convaincue. Quoi qu'il en soit, je m'abs-
tiens de disserter sur l'Espèce en question, me trouvant privé des
documents nécessaires pour apprécier les caractères de la race
pyrénéenne et dès lors impuissant à émettre une opinion quel-
conque à son endroit.
Syrichthus serratulæ, Rambur.
Les Serratula ou Sarrettes (du latin : serra, scie, par allusion
aux dentelures des feuilles) sont des plantes de la famille des
Composées, dont l’abbé H. Coste relate trois Espèces dans la
Flore descriptive et illustrée de la France : tinctoria, à aigrette
roussâtre et à fleurs purpurines, répandue dans les prés, les bois,
les landes de toute la France et donnant, dans les montagnes, une
variété monticola; heterophylla, plante vivace à fleurs purpurines,
croissant dans les prairies des Hautes-Alpes et des Alpes-Mari-
times; #xdicaulis, dont la fleur ressemble à celle d’Leterophylla,
répandue dans les prairies des montagnes. C'est ce genre de
plantes que Rambur a envisagé pour distinguer, par le nom que
lui ont donné les Botanistes, le Syrichthus qu'il a figuré sous le
n° Oo de la PI. 8 de la Faune de l'Andaloustie, 1830.
Cependant, d’après Wheeler, dans l'ouvrage qu'il a publié à
Londres, en 1903, et qui paraît bien documenté, intitulé : 7 Ze
Butterflies of Switzerland and the Alps of Central Europe, le
Syrichthus serratule, Rambur, vivrait à l’état de chenille sur Azra
montana et Potentilla frigida, de même qu'Alveus, selon Emile
Favre. Les Azra (du grec : aira, ivraie) sont des Graminées; la
montana, placée par H. Coste dans le genre Avewa, est une plante
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 399
vivace qui est répandue sur les pelouses rocalleuses des hautes
montagnes, dans les Alpes, les Cévennes, l'Auvergne, les Pyrénées.
Les Pontentilla sont des Rosacées et la frigida est une plante
vivace, d’un vert sombre, très velue, un peu visqueuse, a petites
fleurs jaunes, croissant dans les pâturages rocheux des hautes
montagnes. |
Comme la forme type de serratulæ n'habite pas seulement à de
grandes altitudes, mais, d’après les documents de ma collection,
se trouve aussi dans des parties peu élevées et même dans des
plaines, ainsi : à Lectoure (Gers), à Charroux (Vienne), en
Vendée, à Cauterets et à Gavarnie, à Vernet-les-Bains, à Aix
(Savoie), à Lanslebourg (Haute-Savoie), dans les Alpes-Mari-
times, à Larche, au lac d’Allos et à la prairie du Mont-Pelat
(Basses-Alpes), au col du Mont-Genèvre et au Lautaret (Hautes-
Alpes), dans la vallée de Zermatt, au Mont-Dore, au Lioran, à
la Bourboule (Auvergne), de Vittoria au Mont Gorbea, dans la
Sierra-Nevada, en Allemagne, il est certain que si la chenille
s'accommode d'Aira montana et de Potentilla frigida dans les
hautes montagnes, elle doit se nourrir d’autres plantes dans les
régions plus basses qu’elle fréquente également.
La description détaillée de serratulæ est imprimée aux pages 71
et 72 du Catal. systématique des Lépid. de l'Andalouste, 1858.
Herrich-Schaeffer en a publié d'excellentes figures sous les n° 18,
10, 20, 21 et 22 de la Tab. 4 des Æesperides Europ. Schilde à
figuré le dessous de l'aile inférieure de serratule sous les n° 5 et 6
de la PL II du Bd. XXX de Berliner entom. Zeitschrift, 1886.
L'Espèce, comme on l'a vu dans le relevé des localités d'où
proviennent les exemplaires de ma collection, est répandue en
France, surtout au sud de la Loire; elle n’a encore été trouvée n1
en Bretagne, ni en Angleterre. Elle est facile à reconnaitre, étant
de taille moyenne, peu largement ponctuée de blanc en dessus;
les ailes inférieures sont d’une teinte olivâtre plus où moins
jaunâtre ou verdâtre, traversées par 3 séries maculaires blanches :
d’abord près de la base; puis au travers du milieu; enfin, d’une
manière plus indécise, le long du bord externe. Les nervures noires
400 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
sont très apparentes, lorsqu'elles traversent l’espace plus clair
médian, sur le dessus des ailes inférieures. Guenée dit que
serratulæ est la plus commune des espèces de Syrzchthus; elle
est, dit-il, très abondante dans toutes les montagnes secondaires,
mais plus rare dans les plaines, remontant cependant jusqu'aux
environs de Paris. Guenée ajoute dans la notice autrefois collée
sur la paroi de la boîte vitrée contenant sa série de serratulæ et
maintenant piquée à l'épingle d’un des exemplaires, les observa-
tions que je transcris comme suit : « On distingue serratuleæ
d’'Alveus, le seul avec lequel on le puisse confondre, en ce qu'il
est plus petit ; que les taches blanches du dessous sont très arrêtées,
séparées, celles entre 1 et 4 arrondies; que la massue des antennes
est d’un rouge brun foncé; que la gouttière est entièrement grise.
Il est probable que c’est le plain-chant d'Engramelle; mais rien
de sür. »
Dans les collections Boisduval, Guenée, Bellier, de Graslin,
Kuvwert, les mêmes Syrizchthus sont appelés serratule,; VY'Éspèce ne
semble donc pas donner lieu à grande confusion, grace sans doute
aux excellentes figures publiées par Herrich-Schaeffer. Boisduval
et de Graslin possédaient chacun un exemplaire pourvu d’une
étiquette paraissant écrite par Rambur lui-même. L’exemplaire de
la coll. Boisduval a la bande maculaire médiane des ailes infé-
rieures, en dessous, non interrompue, tandis que dans la figure 9
de la PI 8 de la Faune de l'Andalousie, 1839, la bande médiane
en question est représentée interrompue.
La description imprimée aux pages 71 et 72 du Catalogue
systématique, 1858, mentionne également l'interruption des bandes,
mais en apparence plutôt qu'en réalité. Je lis en effet ce qui suit :
« Ces taches, plus ou moins grandes, forment parfois comme des
bandes interrompues; il y en a trois avant la base, toujours enve-
loppées par la couleur du fond : celles du milieu forment une
bande interrompue, dont la moitié antérieure très large, est divisée
par les nervures en cinq taches, dont l’antérieure très étroite, plus
longue, mais pouvant disparaître, la troisième souvent plus petite
et plus courte, les deux autres réunies, peu ou pas échancrées
ral
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 4OI
postérieurement ; puis viennent deux petites, dont la première plus
reculée et la seconde pouvant manquer; enfin, une dernière tou-
chant le bord abdominal qui est plus ou moins brunâtre. »
Rambur dit que « celles du milieu forment une bande inter-
rompue », mais il cite une nomenclature de taches qui occupent
tous les espaces intranervuraux; il y a donc réellement une série
non interrompue de taches pour occuper tous ces espaces et la
description contient ainsi une contradiction. La vérité, c'est que
tantôt la ligne maculaire médiane est interrompue par l’oblité-
ration des petites taches blanches intranervurales qui sont entre
la grosse tache du milieu et celle qui est plus près du bord anal,
et que tantôt la ligne médiane se continue sans interruption, par
l’accentuation plus prononcée de toute la série des taches blanches.
On prend à Charroux (Vienne) et dans la forêt de Vouvant,
en Vendée, une très belle race de serratule, plus grande que les
autres races françaises, et égalant presque, par la taille, la variété
major, Stgr., de Syrie. Je suis redevable à M. Daniel Lucas de
3 exemplaires C' qu'il a pris en mai 1003, dans cette forêt ven-
déenne, très pittoresque et rendue célèbre par l’oratoire rustique
qui subsiste encore du bienheureux Grignon de Montfort, person-
nage d’une haute sainteté, Breton d’origine, et qui évangélisa au
commencement du XVIII° siècle, les campagnes de la Vendée.
En Grèce et à Amasia, serratulæ présente aussi une race plus
grande que dans les montagnes de l’Auvergne, des Pyrénées et
des Alpes. Je fais figurer dans le présent ouvrage, sous les
n* 480-483 de la PI. IV, serratulæ O', de la forêt de Vouvant
(n° 480); serratulæ ©, de Charroux (Vienne) (n° 481); serra-
tule G, plus petite race, de Cauterets (n° 482), et serratule-
major S, d'Akbès (n° 483).
Freyer figure avec le nom de cæcus, sous les n° 3 et 4 de la
Tab. 403 de Neuere Beitraege zur Schmetterlingskunde, un
Syrichthus que Staudinger et Rebel, dans leur Catalog 1001,
rattachent, comme variété, à serratule. Freyer dit que les exem-
plaires dont il donne la figure ont été pris par le D* Nickerl,
dans les Alpes du Tyrol, en juillet. Malheureusement, les figures
26
402 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
publiées par Freyer sont grossièrement exécutées; dans un genre
aussi ambigu que celui des Syrichthus, une figuration exception-
nellement fine et soignée est pourtant indispensable pour la certi-
tude de l'identification spécifique. Dès lors, 1l me paraît impossible
de savoir exactement à quoi référer le cæcus de Freyer; à serratuleæ
ou à carlinæ ? Toutes les conjectures sont permises et finalement
le nom de cæcus ne répond à aucune désignation précise.
Ma collection contient plus de 300 serratulæ. Aucun spécimen
ne me parait d’une détermination douteuse et Je crois que serratulæ
est une Espèce bien distincte et bien tranchée.
Syrichthus Alveus, Huebner.
A-t-on affaire à une Espèce polymorphe, très variable non
seulement selon les lieux, mais encore dans le même lieu ? Ou bien
Alveus, Carline, Cirsu, Onopordi sont-ils des Espèces distinctes,
liées entre elles par des exemplaires transitionnels quelquefois
difficiles à identifier et à rapporter exactement à l’une plutôt qu'à
l’autre des Espèces, Variétés ou Races? Voilà une question sur
laquelle l’accord n'est pas encore près de se faire; “les “deux
Opinions opposées me paraissant également défendables et raison-
nablement soutenables dans l'état actuel de nos connaissances.
Il n'y à rien d'assez indicatif, dans un sens ou dans l’autre, pour
donner à l’une des opinions une raison qui soit décisive et qui la
fasse prévaloir. Cependant, si on envisage non pas les exemplaires
extrêmes, mais ceux qui représentent la moyenne de chaque unité
d'Espèce ou de Race, on constate sans peine des différences cons-
tantes et importantes qui permettent généralement de classer les
Espèces ou Races, sans les mélanger, pour peu qu'on y apporte
l'attention suffisante. Dès lors, en m'aidant d'une figuration
copieuse et soignée, sans laquelle je considérerais toute argumen-
tation comme plutôt nuisible qu'utile, je compte donner une idée
exacte de la faune française des Syrichthus du groupe d’Alveus,
conformément à la documentation dont je dispose et aux éléments
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 403
d'information contenus dans les ouvrages que J'ai consultés. Ce
qui manque, c'est la connaissance comparative des premiers états.
Là se trouve la clef du mystère, et tant que nous ne la posséderons
pas, nous manquerons de la base indispensable. Je pense cependant
que des figures des papillons, en quantité suffisante, bien exécutées,
avec des indications de localité très précises, peuvent apporter un
peu d’ordre dans le classement et la nomenclature des Syrichthus,
améliorer la situation présente pleine de confusion, inciter les
Entomologistes à la recherche et à l'étude des Syrichthus en
question et préparer la mise au point de l'Histoire naturelle de
ce groupe de Lépidoptères. J'étudie donc chaque Espèce (ou
Race?) séparément et comme suit :
1° Alveus, Huebner (G' 461; Q 462; dessous 463); Rambur
(Faune Andal., PL 8, lg. 3);
Ce Syrichthus assez commun habite en France, d'après ce que
je sais, les environs de Herblay (Seine-et-Oise), d’Angoulème, de
Cauterets et de Gavarnie (Hautes-Pyrénées), de Vernet-les-Bains
(Pyrénées-Orientales), les Basses-Alpes, le Var, les Bouches-du-
Rhône, les Alpes-Maritimes. A/veus se trouve aussi à Alsasua, en
juin ; à Florence, en juin; en Norvège (coll. Boisduval); dans la
vallée de Zermatt et dans la Sierra-Nevada.
Alveus présente sur le dessus des ailes inférieures une éclaircie
correspondant par transparence aux parties blanches du dessous
des mêmes ailes. L'Espèce est robuste, relativement assez grande
dans les Pyrénées; plus petite à Florence; de taille encore plus
réduite en Norvège. Le dessous des ailes inférieures est mélangé
de blanc assez pur et d’ocre jaune; la bande maculaire blanche
centrale est tantôt interrompue et tantôt continue; les bords des
ailes supérieures, en dessous, sont blanchâtres; seule, la parte
médiane des ailes supérieures est plus ou moins noirâtre. Rambur
décrit en détail A/veus aux pages 60, 70 et 71 du Catalogue
systématique. Cet auteur fait connaître qu'il possède un individu
de la Norvège, venu sans doute de Dowre, en même temps que
les 4 spécimens qui existent encore de la collection Boisduval.
404 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Il y a fréquemment dans les Basses-Alpes, notamment aux
environs de Larche, et parfois dans les Pyrénées-Orientales, une
variété d’Alveus chez laquelle les bandes ocre jaune des ailes
inférieures, en dessous, sont très réduites d'épaisseur. J'ai appelé
cette variété, qui est constante, Bellier:, en souvenir de l'Entomo-
logiste qui possédait l’un des exemplaires que je fais figurer dans
le présent ouvrage et qui vient de Larche.
Le Carthami, Duponchel (Szppl., PI. XLIT, fig. 3 et 4), appelé
plus correctement Alveus dans le texte (pages 250 et 260), figuré
et décrit d’après un exemplaire envoyé jadis à Duponchel par le
comte de Saporta, présente, sur le dessus, des taches noires res-
sortant vigoureusement sur le fond gris jaunâtre des ailes; c’est
une forme de Provence que je distingue sous le nom de l‘oulquier:.
Plusieurs exemplaires de cette variété ont été pris à Saint-Pons
et à Saint-Zacharie, non loin de Marseille, par M. Gédéon
Foulquier, à l’obligeance de qui j'en suis redevable.
D’autres échantillons semblables ont été capturés à Digne.
A Lambèse, dans la province de Constantine, en Juin et en
août, on trouve une race très intéressante d’Alveus, ressemblant,
par le dessous de ses ailes inférieures, à C'ynare; j'ai désigné cette
race géographique sous le nom de umida.
Je fais figurer Alveus-numida sous les n°* 484, 485 et 486 de
la PI LV du présent ouvrage; sur la PI. LVI se trouvent repré-
sentés les Syrichthus Alveus, comme suit : n° 487, Alveus-Foul-
quieri Œ (Entrevaux à Mont-Gourdon, Basses-Alpes; juillet 1906;
H. Powell); n° 488, Alveus-Foulquieri © (Saint-Zacharie, Var;
10 août 1000; Gédéon Foulquier); n° 480, Alveus-Foulquieri S,
passage à Pellierr (Bouches-du-Rhône; G. Foulquier; 1905);
n° 400, Alveus-Bellieri S (Larche; coll. Bellier); n° 491, Alveus-
Bellier: © (Zermatt à Ryffelalp, Valais; fin Juillet 1902); n° 492,
Alveus CG forme type (Cauterets;, fin Juillet 1905); n° 493,
Alveus © forme type (Vernet-les-Bains ; été 1895); n°* 494 et 495,
Alveus-ballotæ (Dowre, Norvège; de la collection Boisduval).
Je maintiens le nom de ballotæ donné par Boisduval dans sa
k
\k y N
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 405
collection mais non encore publié. Les Ballota sont des plantes
de la famille des Labiées, à odeur repoussante, dont 25 espèces
environ habitent l'Europe et l’Asie tempérées, l'Afrique boréale
et australe. Il y a en France deux Espèces, dont l’une : #2g7a, à
odeur fétide, porte le nom vulgaire de : marrube noir.
Les taches du dessous des ailes inférieures, chez Alveus et ses
variétés : #umida, Foulquieri, Bellieri, ballotæ sont toujours d’un
jaune ocreux, d’une nuance plus ou moins jaune ou brunâtre, mais
n'ayant nulle tendance à la teinte rouge. L'Espèce est assez com-
mune, surtout dans les basses montagnes; elle vole d’abord à la
fin du printemps, puis en juillet et août. Elle aime à se reposer
sur les fleurs, sur le sol humide, et elle voltige volontiers autour
des fumiers. Dans les Hautes-Pyrénées, elle n’éclôt qu'une fois
par an, en été; elle n’est pas rare à Cauterets et à Gavarnie. Je
possède un G' albinos de Vernet-les-Bains. Il a le dessus des ailes
cris, dans le genre du Syrichthus malve que j'ai fait figurer sous
le n° 238 de la PL XXXVII Les © possèdent un épi de poils
noirâtres, formant comme un pinceau, à la première articulation
de la troisième paire de pattes; ce pinceau est figuré sous la
lettre Z de la PI. 8 de la Faune de l'Andalousie et on le voit sur
le n° 480 de la PI. LVI du présent ouvrage.
À Zermatt et jusqu’à Ryffelalp, mais pas beaucoup au-dessus,
se trouve une race particulière et ambiguë que Je représente avec
le nom de Ryffelensis, sous les n° 470 et 471 de la PI. LIV. J'en
possède un certain nombre d'exemplaires que j'ai pris en Juillet
et au commencement d'août des années 1864, 1866, 1898 et 1902.
Sur le dessus des ailes supérieures, la maculature blanche est très
réduite et le fond des ailes du & est couvert d’une pulvérulence
jaunâtre un peu comme chez cacaliæ, avec lequel on ne peut
cependant le confondre, quoi qu’il lui ressemble; notamment il
est toujours d’un aspect plus foncé; le dessous de ses ailes est
disposé comme chez Alveus dont il est peut-être la forme monta-
gnarde depuis Zermatt jusqu'à Ryffelalp. La différence est
cependant bien grande entre Ryffelensis et Foulquierr, s'il est vrai
qu'ils appartiennent à la même unité spécifique. On ne doit pas
406 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
perdre de vue qu’on trouve aux mêmes lieux, dans la même mon-
tagne, l’Alveus Bellieri.
D'autre part, on rencontre depuis Zermatt jusqu'aux hauteurs
de Ryffelalp des Syrichthus qui constituent une excellente tran-
sition entre Xyffelensis et carline des Alpes françaises. J’ai sous
les yeux une quinzaine de *yffelensis bien caractérisés et nette-
ment séparables; mais d’autres sont plus incertains; ils inclinent
vers carline,; enfin le plus grand nombre des Syrichthus des
montagnes qui entourent le village de Zermatt et que je possède
dans ma collection sont tout à fait conformes aux carline des
Alpes françaises.
J'ai indiqué un peu plus haut l’analogie d'aspect des Syrichthus
Ryffelensis et cacalie.
Ce Syrichthus Ryffelensis forme donc un passage ou une
liaison entre plusieurs unités très différentes, et il ajoute une
difficulté de plus à l'établissement de la nomenclature et de la
classification des Syrichthus.
J'ai connu un Entomologiste de grande réputation, fort respec-
table d’ailleurs, avec qui j'entretenais des relations excellentes.
Un jour, nous promenant ensemble, je lui demandais ce que, dans
ses travaux descriptifs et dans la classification des Espèces, telle
qu'elle était établie dans ses Monographies, il faisait de tous les
exemplaires douteux ou embarrassants qu'on rencontre si fré-
quemment dans certains groupes de Coléoptères, spécialité de mon
interlocuteur. On ne sait en effet pas aisément à quelle Espèce les
rapporter exactement, tant 1ls semblent également et intimement
alliés à plusieurs Espèces ou prétendues Espèces différentes.
Dans certains cas, il semble que la même Espèce produise des
variations dans des sens différents, de telle façon que l'expression
extrême de ces variations, qu'on pourrait qualifier d’opposées,
donne des échantillons très dissemblables, difficiles, dans l’état
actuel de la Science, à rattacher exactement à une souche d’où
l'on puisse avoir quelque présomption fondée qu'ils dérivent
réellement. Peut-être aussi y a-t-1] beaucoup plus d'Espèces qu’on
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 407
ne le croit? les Espèces en question étant séparées les unes des
autres par des caractères très réels, mais très subtils et d’une
appréciation malaisée pour nous. En tout cas, l'esprit de l’obser-
vateur reste 1rrésolu et ne perçoit rien d'assez important et d'assez
stable pour fixer son opinion, d'une manière qui le satisfasse.
La réponse, que je n'ai point oubliée, fut la suivante : « Jai en
effet rencontré bien souvent ces exemplaires ambigus, embarras-
sants, et dont le classement plein d'incertitude laisse la porte
ouverte à tous les doutes. Comme ces sujets m'ont paru très
gênants, J'ai cru devoir les supprimer, pour plus de clarté et de
simplification, et dès lors je n'ai pas eu à en tenir compte. »
J'avoue que l’aveu sincère de la mise en pratique d’une pareille
théorie me causa un profond étonnement; car est-il rien de plus
contraire à la Science que cette manière de redresser la Nature!
Je suis loin, pour ma part, de partager un semblable parti-pris
consistant à mettre de côté les exemplaires qui viennent comme
à plaisir embrouiller une question. Je voudrais bien produire dans
les questions litigieuses une vision nette et claire; mais pas au
détriment de la réalité. Aussi, comme Je l'explique déja plus haut,
à propos de /‘rifillum, est-ce en parfaite connaissance de cause
que je mets sous les yeux de mes Lecteurs les sujets qui créent
des embarras, au lieu de donner la simplification désirée. Je dis
ce que Je sais, en regrettant de ne pas disposer moi-même d'une
lumière plus éclatante et plus sûre pour en faire profiter les autres;
mais Je ne cache rien de ce que je connais. Il y a des faits contra-
dictoires qu’on ne peut nier; par exemple, en Algérie, on trouve
le Syrichthus Alveus-numida. et le Syrichthus Onopordi. Si
Onopordi est seulement une forme d’'Alveus, comment expliquer
la coexistence, dans le même pays, de ces deux formes si diffé-
rentes, alors qu'en Algérie, tout au moins, aucune transition ne les
relie l’une à l’autre. D'autre part, on trouve à Angoulême, c'est-
à-dire au même lieu, Alveus-type et cirsu; à Zermatt, on trouve
Onopordi-conise, Ryffelensis et Alveus. Si Alveus-numida et
Onopordi, si Alveus et cirsu, si Onopordi-conize, Ryffelensis et
Alveus étaient simplement des formes d’une même unité spéci-
» ?
408 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
fique, on trouverait sans doute au même lieu tous les passages qui
relient les formes entre elles: mais ces passages, c’est dans
d’autres lieux qu’on les rencontre. J’appelle donc sur ce côté de
la question l'attention des Entomologistes.
IT peut se faire que certaines formes considérées généralement
aujourd’hui comme des variétés d’Alveus le soient réellement et
que d’autres ne le soient pas. Par exemple carlinæ peut être une
variété d’Alveus et onopordi une Espèce à part? Mais je déclare
ne pouvoir formuler encore aucune opinion fondée à cet égard et
je pense que je dois me borner à un simple exposé de tous les
faits que je suis arrivé à connaître, laissant à d’autres ou remettant
à plus tard le soin et le moyen de conclure.
2° Carlinæ, Rambur.
Le dessous est figuré sous le n° 11 de la PI. 8 de la Faune de
l’'Andalousie et décrit en note, à la page 72 du Catalogue
systématique.
Carline est assez variable; tantôt le dessus des ailes inférieures
du © reste presque dépourvu d’éclaircies (n° 400); tantôt il est
moins obscur (n° 406), par le fait que les parties blanches du
dessous transparaissent en dessus. Aux ailes inférieures, en des-
sous, les macules sont : ou bien de couleur rouge brique (n*% 500
et 501), ou bien de teinte brun olive (n° 407 et 408). Ces taches
rouge brique où brun olive du dessous des ailes inférieures sont
très nettement détachées sur le fond blanc; cependant elles
gardent un aspect plus flou, avec les contours semblant moins
arrêtés que chez Alveus. Cela tient en partie à une villosité plus
épaisse et plus longue dont il semble que les ailes sont couvertes;
les bandes maculaires rougeâtres ou brun olive du dessous des
inférieures sont plus larges et plus confluentes que chez Alveus;
le bord anal est d’un gris noirâtre chez carlinæ et non blanchâtre
comme dans A/veus, Les traits noirs qui coupent les franges sont
aussi plus épais que chez Alveus; l'extrémité abdominale des ©
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 409
est garnie de poils blonds formant un éventail, ainsi qu'on peut
le voir dans le n° 500. Carlinæ habite les Alpes; je l'ai pris au
col du Mont-Genèvre, à La Grave et au Lautaret (Hautes-Alpes),
en juillet 1006; au Mont-Revard, au-dessus d’Aix-en-Savoie, en
août 1002 et en juillet 1006. Bellier l’a pris à Larche (Basses-
Alpes); Harold Powell l’a rencontré à la forêt d’Entraunes, du 7
au 9 août 1006, et dans la prairie du Mont-Pelat, le 1° août 1006.
Le D" Siepi me l’a envoyé du Monetier-de-Briançon (Hautes-
Alpes), Coulet l’a capturé aux environs de Digne, en mai et en
août 1807.
Les figures n° 406 et 407 représentent deux Œ pris à La Grave
du 21 au 28 juillet 1006; la fig. 408 est faite d’après un © pris
au mont Revard au commencement d’août 1002; le n° 409 est la
figure d’un Œ pris à Larche par Bellier; en dessous, il a les taches
des aïles inférieures de couleur rougeâtre comme le n° 500 éga-
lement capturé à Larche, par Augustin Coulet, en août 1806; la
© des Basses-Alpes est représentée sous le n° 501.
Tous ces Syrichthus appartiennent bien à la même unité
carline, dont le type, figuré par Rambur, a les taches du dessous
des ailes inférieures de couleur rougeâtre; j'ai appelé olivacea la
forme à couleur brun olive, comme les n°* 407 et 408.
Les Carlina sont des sortes de chardons de la famille des
Composées. Elles poussent généralement dans les lieux incultes,
secs et rocailleux. La Carlina vulgaris croît dans toute la France;
les autres Carlina sont plutôt répandues dans la région méditer-
ranéenne et dans les montagnes du Centre et de l'Est de la
France.
3° Cirsii, Rambur.
La chenille, d’après Emile Favre, vit sur Poly gala chamæbuxus,
qui est une plante vivace de la famille des Polygalées, à souche
ligneuse, rampante, et à fleurs roses ou jaunâtres, croissant dans
les bois et parmi les herbes, au milieu des sites rocheux des mon-
410 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
tagnes. Comme le Syrichthus Cirsu habite en France non seu-
lement les environs de Digne, mais encore ceux de Paris, d’An-
goulême, de Dompierre-sur-Mer, c’est-à-dire aussi des localités de
plaine, la chenille vit nécessairement sur d’autres plantes que celle
indiquée dans la Faune des Macrolépidoptères du Valais.
Rambur a figuré le dessous de Czrsù sous le n° 12 de la PI 8
de la Faune de l'A ndalouste, et il l’a décrit en note aux pages 73
et 74 du Catalogue systématique. Cirsi a les dessins et les taches
du dessous des ailes inférieures d’un rouge rouillé un peu vineux.
Les taches sont nettement limitées, les contours étant très arrêtés.
En dessus, les taches blanches des supérieures sont assez larges,
et sur les ailes inférieures, les parties claires par transparence des
espaces blancs du dessous, sont indiquées en blanc jaunâtre bien
plus accentué que chez aucun des autres Syrichthus du groupe
d'A lveus.
Je fais figurer sous les n° 502, 503 et 504 Csrsu Onet ©
d'Angoulême; sous le n° 505, Cérsi G de Sicile, et sous les
n* 506 et 507, Cirsii Cet O des environs de Digne et de Belesta
(Arièce). Le n° 508 représente un C#rsa, de Digne, variété ayant
les dessins et taches du dessous des ailes inférieures de couleur
brune, sans vestige de rouge, un peu comme dans la figure 34 de
Cirsii publiée par Herrich-Schaeffer, sur la Tab. 6 des Æespenides
Europ. J'ai désigné cette variété sous le nom d'Æerrichu, elle est
plus fréquente à Digne que la forme typique, à ailes inférieures
rouges en dessous, de C?7521.
Les collections Boisduval et Bellier possédaient une série de
Cirsu pris à Paris. L'un des exemplaires de Boisduval est pourvu
d’une étiquette semblant écrite par Rambur. Bellier avait pris
Cirsii en Sicile; le type, dans cette île, paraît être de moins grande
taille qu'en France et avoir les parties claires (blanches et jau-
nâtres) du dessus des ailes rétrécies et relativement peu accentuées.
Harold Powell a trouvé Czrsü-Herrichii à Méounes (Var), en
septembre, et à Entraunes (Basses-Alpes), en août. V. Cotte a pris
Cirsii à Digne, en août 1806. Nous avons rencontré Cz#s1 en sep-
tembre, à Angoulême, et P. Boulé l’a capturé, à la fin d’août, à
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE AIT
Dompierre (Charente-Inférieure). La collection Kuwert contenait
des Cirsi étiquetés Schwalbach et Rhein. Csz ne doit pas être
rare dans les Charentes. H. Powell a trouvé, en septembre 1900,
un exemplaire Q à Bélesta (Ariège). Le dessous de l'abdomen
est blanc; mais chez la Q; les côtés en sont teintés de rose. C2rs22
est un des plus jolis Syrichthus. Il est bien différent de carline
et facile à distinguer des autres Variétés d’Alveus, ou Espèces
alliées.
Je n'ai jamais trouvé Cérsi en Bretagne, et je suis porté à croire
que l’Æesperia Cirsü, Rambur, signalée par M. le P. de Joannis,
comme faisant partie de la faune morbihannaise, est le Syrzchthus
que j'appelle armoricanus et auquel je consacre la notice suivante.
4° Armoricanus, Obthr.
Eclôt deux fois par an : d’abord en mai et juin, puis en août
et au commencement de septembre; se trouve aux environs de
Rennes dans les prés et les pâtures. À l’arrière-saison, il aime à
se poser sur les fleurs de Composées et n’est pas très rare sur les
pelouses des parcs et des grands jardins. Il habite aussi les dunes
de Miel-Pot et de la Guimarais, entre Saint-Malo et Cancale, et
les clairières entre Plouharnel et Kerostin (Morbihan). Il descend
le long des côtes de l'Océan, se trouve en Vendée et jusqu'à
Dompierre-sur-Mer (Charente-Inférieure), et peut-être plus au Sud.
C'est un Syrichthus de petite taille, plus voisin de Carlinæ que
de Cirsü, ayant les parties claires du dessus des ailes moins accen-
tuées que chez Cirsi, mais plus prononcées que dans Carline,
et sur un fond plutôt brun bronzé que noir. Les taches du dessous
des ailes inférieures varient comme chez Carline, depuis la teinte
brun roux ou même rougeâtre jusqu'à la couleur ocre jaunâtre ou
verdâtre. La tendance au rougeâtre se remarque sur les bords de
la mer et vers le Sud: la tendance au verdâtre est plus accentuée
à Rennes qu'ailleurs.
Il y a longtemps que j'observe ce Syrichthus. J'ai lieu de penser
qu’il est surtout répandu en Bretagne, où il est d'ailleurs, avec
412 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
malve, le seul Syrichihus que j'aie jamais vu. Je sais que Guenée
l'avait capturé à Châteaudun et j'ai trouvé dans sa collection trois
échantillons mis à part avec la note que je transcris comme suit :
« Caractères : taille moyenne, taches blanches bien marquées; la
cellulaire des inférieures grise, mais bien visible, ainsi que les
points qui la suivent; l’angle anal des inférieures prolongé; les
dessins du dessous très nets, un peu semblables à Alveus,; les
nervures des inférieures d’un jaune olivâtre ou carné; toujours
plus petit que l’Alveus. »
Je crois qu'armoricanus est le Fritillaire, Godart (PI KXVITT;
fig. 1 et 2). La disposition de la ligne maculaire extracellulaire
des ailes supérieures en dessous, d’une accentuation évidemment
exagérée dans la figure 2 publiée par Godart, n’en est pas moins
très indicative. Je remarque en effet dans quelques exemplaires
du Syrichthus armoricanus que J'ai devant moi, la même direction
linéaire suivie pour l’ensemble des macules extracellulaires. Dans
le texte (vol. II, p. 223-226), Godart semble émettre des idées
synonymiques assez confuses. Je fais figurer sous les n° 509 et 510
de la PI LVII armoricanus de Rennes (printemps 1907); sous
les n° $11 et 512, le même Syrichthus des dunes de la Guimarais
(août 1884); sous les n°* 513 et 514, la forme provenant des dunes
entre Plouharnel et Kerostin (commencement de juin 1909); sous
les n° 515 et 516, une paire prise à Dompierre-sur-Mer, par
P. Boulé, du 8 au 15 juin 1000; enfin, sous le n° 517, un C faisant
partie des captures que nous fimes en Vendée, mon frère et moi,
à la fin d’août 1007.
Je rapporte à l’armoricanus, comme variété géographique que
j'appelle : ÆFabressei, les Syrichthus pris à Sierra-Alta, par
P. Fabresse, en août 1007. Il me semble que Fabressez est une
forme agrandie et exagérée dans ses caractères du Syrichthus
armoricanus. Les n° 510 et 520 représentent Fabressei, et le n° 518
donne la figuration de la même race Fabresser, d’après un exem-
plaire que je pris à Florac (Lozère), en juillet 1863. Ces Fabresset
forment une transition vers Oropordi du Sud de l'Espagne et
d'Algérie, et le Syrichthus Œ, de Vernet-les-Bains, figuré sous le
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 413
n° 528, représente un des termes consécutifs de cette transition ;
j'ai donné le nom d'armoricanus, bien que le Syrichthus auquel il
est appliqué se trouve ailleurs que dans l’ancienne Armorique;
mais parce qu'en Bretagne la forme dite : armoricanus existe seule
et sans mélange avec aucune autre; ce qui n'est pas le cas dans
les autres pays où il y a des transitions quelquefois bien difficiles
à attribuer à une race plutôt qu'à une autre.
Q, 5° Onopordi, Rambur.
Figuré sous le n° 13 de la PI. 8 de la Faune de l’'Andalouste.
Extrêmement commun en Algérie d’où j'en ai reçu des centaines
d'exemplaires, Onopordi vole à Lambèse, à Sebdou, à El-Biar, à
Hussein-Dey, c’est-à-dire dans les trois provinces, depuis avril
jusqu’à septembre. Je fais figurer sous les n° 524, 525, 526 et 527
la race algérienne d'Oropordi. Il habite aussi l'Espagne, les
Pyrénées-Orientales, d'où proviennent les n° 528 et 520, et diverses
parties du Languedoc et de la Provence. Dans les plaines cal-
caires du Centre de la France et dans les montagnes de la Savoie
et du Valais, Onopordi donne la race que Guenée a décrite dans
les Petites Nouvelles entomologiques, sous le nom de cony:e,
d’après des exemplaires qu'il avait trouvés en Savoie.
Lorsque je devins acquéreur de la collection Guenée, il restait
six exemplaires de conyzæ dans sa boîte. Sur la demande de feu
Staudinger, je lui communiquai deux de ces conyze, afin de lui
permettre d'apprécier la valeur de l’'Espèce pour son Catalog 1901,
établi en collaboration de H. Rebel. Jamais ces deux conyzæ n'ont
repris le chemin de Rennes. Je possède donc encore quatre
spécimens de conyze. Deux servent de modèle pour la figuration
des n% 530 et 531 de la PL LVII; deux autres ont été étudiées
au point de vue de leurs genitalia, par M. le Prof. D' Reverdin,
et leur abdomen a été sacrifié aux nécessités scientifiques.
Conyzæ présente quelque analogie de couleur et de disposition
de taches avec centaureæ : une exacte iconographie permettra de
se rendre compte de ce qu'est réellement le Syrichthus contze,
414 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
auquel feu Guenée crut, bien à tort, devoir faire les honneurs
d'une spécification; ce n'est bien qu'une forme d’Onopordi.
M. Reverdin et M. Blachier se proposent de rechercher conyze
là même où 1l fut découvert, au lieu dit, je crois, la Charnée, et
de compléter, au moyen de la documentation qu'ils espèrent
obtenir, l’histoire de ce Syrichthus; mais je crois que conyzæ
n'est pas une grande rareté; il doit se rencontrer dans toute la
partie méridionale de la Suisse; je l’ai pris dans la vallée de
Zermatt et je fais figurer sous le n° 523 un conyzæ de cette
localité.
Le Genre conyza, qui tire son nom d’un mot grec qui veut dire :
gale, par allusion à une prétendue propriété des plantes de ce
genre, appartient à la famille des Composées. L’abbé Coste cite
deux Espèces, dans la #/ore française : ambigua et Naudini,
cette dernière paraît spéciale aux Pyrénées-Orientales; l’autre :
ambigua, habite les lieux incultes, les sables des rivières dans le
Midi de la France; elle remonte jusqu'à Bordeaux; c'est une
plante annuelle, d’un vert cendré, à fleurs blanches ou fauves.
Guenée n’a point connu la chenille du Syrichthus qu'il a appelé
Conyze et il a choisi le nom d’une plante de la famille des
Composées, sans savoir même si la chenille de son Syrzchthus
s'en accommoderait, imitant en cela l'exemple de Rambur, auteur
de Syrichthus cacalie, etc.
Le Syrichthus Onopordi-conyzæ se rencontre aussi dans les
plaines calcaires du Poitou et les n° 521 et 522 ont été capturés
par mon frère à Charroux (Vienne), en mai 1882.
Les Onopordum, comme les Conyza, sont des Composées. On
les appelle vulgairement pe/ d'âne; ce sont des chardons épineux
dont les Botanistes connaissent un certain nombre d’Espèces. On
trouve des Onopordum dans toute la France, mais surtout dans
le Midi.
Les Syrichthus Onopordi forment en Algérie une race assez
spéciale par la netteté du contour des taches des ailes inférieures,
en dessous. Dans le Midi de la France, à Nîmes, à Celles-les-Bains
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 415
(Ardèche), à Digne, dans les Alpes-Maritimes, le Var, les Bouches-
du-Rhône, le Gers, les Pyrénées-Orientales, on trouve des
Onopordi de la race méridionale formant une transition entre
Onopordi et armoricanus, d'un côté, et entre Onopordi et conyze,
de l’autre. Il semble, d’après les taches du dessous des ailes infé-
rieures, que conyzæ ferait plutôt partie de la même unité que
l'Onopordi algérien, tandis que la forme du Languedoc, de la
Provence et du Roussillon se rapprocherait d’armoricanus.
Ma collection contient plus de 1,000 exemplaires du Syrichthus
Alveus et des Races, Variétés ou Espèces alliées. Si j'avais moins
de documents, je serais peut-être mieux fixé sur la valeur relative
de toutes ces formes; mais je suis plutôt disposé à m'orienter
dans l’autre sens. Je tâcherai de réunir une quantité plus consi-
dérable de documents provenant des provenances les plus diverses,
et notamment de celles d’où je n'ai encore obtenu aucuns sujets
d'étude. J'espère plus tard reprendre la question; cependant Je
me plais à penser que les figures publiées sur les Planches LIV,
LV, LVI et LVII du présent ouvrage resteront, par leur exac-
titude, une base toujours utile à consulter.
En résumé, les Syrichthus Alveus, carline, cirsu, armoricanus,
onopordi, envisagés dans leurs formes typiques, pourraient sem-
bler représenter, chacun, une unité spécifique distincte; maus,
considérés avec les exemplaires de transition que fournit chaque
unité, ils paraissent spécifiquement inséparables les uns des autres,
si grandes que soient les différences qui caractérisent chaque
forme typique, comparativement aux autres formes.
Charles Barrett a figuré sous le n° 2 de la PI. 37 un Syrichthus
Alveus, de la collection du Rev. T. H. Marsh, pris en Norfolk
(p. 272, 273, 274). Malheureusement Barrett n’a représenté que le
dessus des ailes. Mais tout porte à croire que l’Alveus anglais
« captured in a narrow valley at the edge of a wood in Norfolk
by the Rev. T. H. Marsh, at the end of May or beginning of
June, in one season only, in or about the year 1860 », pouvait se
rapporter à l'armoricanus.
416 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Thanaos Tages, Linné.
Décrit par Linné, dans le Systema Nature, Edit. X; 1760),
comme suit: « Z'ages. 168. P. P. (Papilio-Plebeius), alis denti-
culatis divaricatis fuscis obsolete albopunctatis. Habitat in Eu-
ropa. Sinulis P. Malve, sed magis fuscus. »
Le T'hanaos Tages est une Hespérie très commune, qui habite
l'Angleterre, mais non l’Algérie. Je l’ai observé dans toutes les
parties de la France où J'ai recherché des Lépidoptères. On voit
Tages éclore abondamment en avril et mai, dans les plaines de
France; elle paraît en juin et juillet dans les montagnes jusqu'à
une altitude de 1,800 mètres. Charles Barrett dit qu'il y a dans
le Sud de l’Angleterre une seconde éclosion de Z'ages, en août.
Je n'ai pas trouvé 7 ages en Bretagne, au mois d'août; bien qu'il
y soit abondant au printemps; mais Je l'ai pris à Vernet-les-Bains,
en août; non pas dans la haute montagne, mais à une altitude
relativement faible, près du village. 7'ages est une Espèce très
variable, tantôt d’un brun grisâtre avec des dessins un peu plus
foncés, un semis d’atomes blanchâtres et des petits points blancs;
le tout ressortant d’une façon peu apparente sur le fond des ailes;
tantôt beaucoup moins unicolore, ayant le fond des ailes presque
gris, une série marginale de points blancs en grains de collier,
très nettement indiquée, et toutes les autres taches brunes et blan-
châtres très distinctes et très apparentes. Cette forme, assez voisine
de Popovianus, d'Asie centrale et boréale, est le contraire de la
forme wricolor, de Syrie. La variété Cervantes, de Graslin, se
trouve en Andalousie et à Valladolid, dans le Nord de l'Espagne.
Elle vole en mai et juin. Dans la position du repos, ce que les
Anglais appellent s/eeping posture, le Thanaos Tages a les ailes
rabattues comme une Noctuelle. Charles Barrett figure, sous le
n° 2c de la PI. 40, T'ages endormi sur le côté d’une fleur de
graminée. 7 ages a un vol assez rapide; mais 1l se repose souvent
sur les fleurs, dans les allées des bois, dans les pâtures, au bord
des routes et dans les prairies. Je n’ai pas vu d’Aberration notable
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 417
de Z'ages; mais il existe certainement des exemplaires chez les-
quels les taches brunes submarginales des ailes supérieures, en
dessus, forment des traits allongés venant confluer avec la rangée
maculaire médiane et même basilaire, et où la rangée extracellu-
laire de petites taches blanches, aux inférieures, se rejoint d’un
côté à la série moniliforme marginale, de façon à former de longs
traits blanchâtres, et, de l’autre côté, s'étend vers le trait blanc
cellulaire. Jusqu'ici J'ai recherché, sans succès, des Aberrations,
suivant les directions que j'indique ci-dessus. J'espère que des
Entomologistes plus heureux pourront vérifier l’exactitude de mes
prévisions, relativement aux Aberrations qui sont susceptibles
d'atteindre le Z'anaos Tages.
27
II. — HETEROCERA
I. — ZYGÆNIDÆ
Déjà il a été beaucoup écrit sur les papillons du Genre
Zygœna. Un grand nombre d'espèces ont été décrites et figurées
par les Auteurs qui, depuis le XVIII siècle, ont fait paraître
des ouvrages sur les Lépidoptères.
Je ne crois pas devoir répéter au sujet des Zygæna les géné-
ralités qu’il est aisé de trouver exposées dans divers livres
d'Entomologie. Je me bornerai à une étude critique des Espèces
du Genre Zygæna, comme je l'ai fait ci-dessus pour les X/0pa-
Locera, et à la description de plusieurs variétés ou formes qui
m'ont paru inédites.
Le D' Ad. Seitz, dans l'ouvrage : Les Macrolépidoptères du
Globe, prétend que les Zygæna sont des Papillons frotégés.
Il dit : « Comme les autres Zygénides, ils ont le corps saturé
d'un liquide huileux jaune, âcre, les rendant incomestibles et les
défendant ainsi contre leurs ennemis, non seulement parmi les
vertébrés, mais même parmi les insectes meurtriers, par exemple
les Asilides. Comme tous les insectes bénéficiant ainsi d'une
protection interne, 1ls ont la vie excessivement dure, etc... »
J'ignore jusqu’à quel point certains groupes de Lépidoptères
peuvent jouir d’une réelle et efficace protection. Je suis porté à
croire qu’il y a, dans la théorie des Espèces protégées, une grande
420 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
part à faire à l'illusion, et J'ai exposé dans la XX° livraison des
Etudes d'Entomologie comment une espèce sécrétant, elle aussi,
un liquide huileux et odorant, la Callimorpha Hera, a été dévorée
devant moi par une hirondelle. Je puis, à propos de Zygæna,
relater le fait suivant : pendant l’année 1008, au commencement
de juillet, nous nous trouvions dans les Hautes-Pyrénées. Lors
d'une excursion au-dessus de Cauterets, vers le Lac-Bleu, la
Zygœna anthyllidis fut observée extrêmement abondante sur des
gazons, au milieu de pentes pierreuses. Ce jour-là, les Zygæna
anthyllidis étaient très fraîches et ne paraissaient point avoir
d’ennemis. Mais le lendemain, le temps se trouvant encore favo-
rable, la matinée fut employée de nouveau à la chasse aux
anthyllidis, et à la même place où elles étaient la veille en si
grand nombre. La situation se trouva alors tout à fait changée.
Des petits oiseaux, et surtout des corneilles qui n'avaient pas été
vues la veille, étaient arrivés en grande quantité et, faisant la
chasse aux an/hyllidis, qui était la seule espèce de papillon abon-
dante en cette localité, au-dessous du Lac-Bleu, ces oiseaux
avaient déja singulièrement raréñé la Zygæna.
De plus, j'ai fréquemment observé dans l'avenue de la Hublée,
près Rennes, où je récoltais jadis en grand nombre la Zygæna
palustris, d'une part les poules d’une maison voisine me faire la
concurrence, et, d'autre part, les fourmis attaquer les Zygæna qui
se trouvaient posées sur les tiges d’herbe. Les fourmis saisissaient
les papillons par les antennes.
Je possède dans ma collection deux exemplaires de la Z. palus-
tris-sexmaculala, capturés par moi-même au moment où ces
papillons étaient aux prises avec une fourmi qui était accrochée
à une de leurs antennes. L'’extrémité de l'antenne de ces deux
Zygæna se trouva coupée par les fourmis.
Les poules sont très friandes des Lépidoptères. Non seulement,
comme je le dis plus haut, je les ai vues chercher les Zygæna
palustris dans l'avenue de la Hublée et en faire une grande
consommation; mais j'ai observé, dans la cour de l'auberge installée
près des ruines de la Chartreuse de Prémolles (Isère), les volailles
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 421
de l'établissement essayant de capturer des Zimenitis populi qu
venaient pour se reposer sur le sol de la cour humide et parsemé
de matières diverses en décomposition. C'était un spectacle curieux
offert par le papillon qui, cédant à l'attrait des matières odorantes,
y revenait sans cesse, malgré le danger quil courait de la part
des poules. Celles-ci se précipitaient sur lui dès qu'il s’approchait
de la terre pour se reposer.
De ces observations, je crois qu’il faut conclure que la protection
dont seraient favorisées les Zygæna en général laisse quelque peu
À désirer, surtout si l’on considère le parasitisme des Diptères et
des Hyménoptères beaucoup plus meurtrier pour les Lépidopteres
que l'appétit des Vertébrés.
I1 suffit en effet de récolter les coques contenant les chrysalides
des Zygæna pour constater de quelle quantité et de quelle variété
de parasites invertébrés les Zy.gæna ont à souffrir. Rien n’est plus
aisé, comme chacun le sait, que de recueillir les coques formées
par les chenilles de Zygæna, au moment où elles se chrysalident :
ces coques se trouvent attachées à des brins d'herbe, à des tiges
de bruyère, à des feuilles d'erpngium, etc, etc. De ces coques,
placées dans des boîtes d'éclosion, sortent soit des papillons, soit
des mouches. Chaque espèce est parasitée par un nombre plus où
moins grand d'espèces de Diptères et d'Hyménoptères. A Dom-
pierre-sur-Mer (Charente-Inférieure), M. Vigé a obtenu 3 espèces
différentes d'Hyménoptères et une espèce de Diptères qui sont
sorties des chrysalides de la Zygæna hippocrepidis-occidentalis;
moi-même, j'ai obtenu des coques de la même Zygæa, ramassées
à Auzay (Vendée), dans la charmante « vallée des Adons »,
chez mes aimables hôtes M. le colonel Sabouraud et M. D. Lucas,
une espèce d'Hyménoptère tout à fait différente de celles trouvées
à Dompierre, mais aucune des espèces de Dompierre. Les espèces
de parasites sont donc variées pour la même espèce de Zygæna,
suivant les lieux et à une bien courte distance. Dès lors, comment
peut-on prétendre que les Zygæna « bénéficient d'une protection
interne », et quelle fantaisie que cette prétendue protection, alors
que la plus simple expérience démontre l'effroyable hécatombe
422 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
résultant pour les Zygæna du parasitisme des Hyménoptères et
des Diptères. Ce que les oiseaux consomment de papillons n’est
rien, comparativement à la destruction occasionnée par les
mouches diverses, parasites des chenilles. C’est une vérité connue
de tous.
Quoi qu'il en soit, les Zygæna se trouvent souvent en assez
grande abondance dans les lieux qu'elles habitent, et comme elles
sont susceptibles de nombreuses variations, elles constituent pour
le chasseur-entomologiste un agrément auquel je suis pour ma
part très sensible. De plus, certains exemplaires sont fort ambigus
et difficiles à rapporter avec certitude à une espèce bien définie.
En outre, les hybridations naturelles paraissent plus fréquentes
chez les Zygæna que dans d’autres groupes de Lépidoptères.
Toutes ces circonstances contribuent à rendre très intéressante
l'étude des Zygæna. Ma collection contient environ 20,000 exem-
plaires classés. C’est avec ces documents que je publie les obser-
vations suivantes :
Zygæna rubicundus, Huebner, 137.
La figure donnée par Huebner ne cadre, comme couleur des
ailes supérieures, avec aucun des exemplaires que j'ai vus. Freyer
(Neuere Beitre ge, UT, p. 13) ne semble pas être lui-même satisfait
de la figure publiée par Huebner, quoiqu'il n’y ait, d’après son
opinion, aucun doute sur l'identification de l'espèce. « Es ist kein
Zweifel, dass sie Hübners Sp. rubicundus ist, obgleich das
Hübner'sche Bild nach einem sehr verloschenen Exemplare
gefertigt worden zu seyn scheint und deshalb blaesser und heller
als meine nach einem frischern Exemplar gefertigte Abbildung
ist. » Mais la figure 3 de la planche 200 des Neuere Beitrege est
encore bien inférieure à celle de l'ouvrage de Huebner. La critique
de Freyer, pour être vraie, est cependant déplacée, puisqu'il n’a
pas su faire même aussi bien.
Boisduval a figuré la Zygœna rubicundus sous le nom
d’erythrus, d'abord dans l'Essai sur une Monographie des Zygé-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 42
e2)
nides (PI. 1, fig. 6); puis dans l’/cones historique (PI. 52, fig. 1).
Duponchel la représente également sous le nom d’ery/hrus (Suppl.
Crépusc., PL IV, fig. 1). Enfin, tout récemment, M. Renato Perlimi,
dans son travail intitulé : orme di Lepidotteri esclusivamente
italiane, donne une bonne reproduction en couleurs de la Zygæna
rubicundus d’après les procédés chromophototypiques (Tav. IT,
fig. 10). La Zygœna rubicundus est en effet exclusivement ita-
lienne, et pour cette espèce, M. Perlini est d'accord avec le titre
de son ouvrage.
J'ai reçu la Zygæena rubicundus de Cerchio (Abruzzes), où
elle a été recueillie par M. G. Leoni; de Monte-Castello, où
M. Fr. Zickert l’a capturée par une altitude d’environ 600 mètres,
à la fin de juin 1907, et de Polleca, sur les monts Aurunci, où
M. Orazio Querci a récolté de superbes exemplaires en Juin 1000,
également par 600 mètres d'altitude.
Duponchel dit que erythrus (rectè rubicundus) a été prise en
Sicile, près de Randazzo, par À. Lefebvre. I] paraît que l'espèce
n'a pas été retrouvée en Sicile depuis cette époque.
Dans Berlin. entom. Zeitschrift (Band LIT, 1008), M. Clemens
Dziurzynski, de Vienne, auteur d’un travail intitulé : Die pale-
arktischen Arten der Gattung Zvgaæna, donne pour patrie à
rubicundus, en outre de l'Italie, « mittel-und süd-Frankreich ».
Jamais rubicundus n'a été rencontrée dans le centre, n1 dans le
midi de la France.
Le specimen typicum erythrus de Boisduval existe encore dans
sa collection; mais Boisduval avait remplacé l'étiquette ery#hrus
par celle plus exacte de 7ubicundus.
Zygæna Erythrus, Huebner, 87.
C'est bien l'Erythrus, de Provence, qui a été décrite et figurée
sous le nom de Saportæ par Boisduval (Zcones, PI. 52, lg. 2 et 3,
pages 38 et 39) et par Duponchel (Suppl. Crépusc., PI IV, 10202)
pages 34-37). Mais il convient de lire ce que Duponchel écrit à
424 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
la page 147 du Szpplément, relativement à l'erreur de détermi-
nation dont 1l s'était fort bien rendu compte.
La Zygœna Erythrus vole depuis la fin de juin jusqu’à la fin
de juillet a Gen Sicile, a généralement le fond des ailes
supérieures d’un gris plus ou moins jaunâtre et plus clair que dans
les autres localités. Cependant une © prise à Rome, près la Via
Appia, présente le même caractère.
Ma collection contient la Zygæna Erythrus des localités sui-
vantes : Rome (R. Obthr.); Cerchio, dans les Abruzzes (G. Leoni) ;
Monte-Castello (Zickert); localités diverses dans la province
d'Avellino (Fabresse); Bordighera (H. Powell); Palerme (Bel-
lier); Col de Castillon, dans les Alpes-Maritimes (Decoster);
Hyères, dans le Var (Emm. Martin et H. Powell); environs de
Saint-Zacharie, de Marseille et d'Aix (Gédéon Foulquier); bords
du Drac, près Grenoble (Guenée); La Penne (8 juillet 1906;
DASiept):
La chenille de la Zygœna Erythrus vit sur l'Eryngium cam-
pestre; elle mange aussi le serpolet; la coque est luisante et d’un
blanc grisâtre. Plusieurs espèces de Diptères-Tachinaires sont
parasites de la Z Æyythrus. Je regrette de n'avoir pu en obtenir
la détermination spécifique. Le papillon varie beaucoup pour la
taille. À Grenoble et à Marseille, on trouve des individus souvent
très petits.
Ab. citrina, Obthr.
Il y avait un exemplaire de cette variété, sans indication de
localité, dans la coll. Kuwert, maintenant jointe à la mienne.
Il est aisé de distinguer Æyythrus de purpuralis (Minos) par
le caractère suivant : chez Æyythrus, l'espace costal basilaire infé-
rieur des ailes supérieures est toujours rouge, tandis qu'il est
bleuâtre chez purpuralis. T1 s'agit de l’espace compris entre la
nervure sous-médiane et le bord interne des ailes supérieures.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 425
M. Fritz Zickert, de Naples, a décrit dans Eng. Zeits., n° 20,
Guben, 1005, une Ab. /rpina, d'Erythrus, provenant de Paternopoli
(Avellino). Je ne connais pas cette Aberration où du moins Je n'ai
pas réussi à la reconnaître d’après la description.
Zygæna purpuralis, Bruennich.
Charles Barrett a figuré la Zygœna purpuralis avec le nom de
Minos, à l'état de larve et d’imago, sous les n* 4, 4a et 40 de
la PL 8 du Vol. II de The Lepidoptera of the British Islands.
L'Espèce se trouve en Grande-Bretagne, où elle fut pour la pre-
mière fois rencontrée, en 1853, dans les endroits incultes et cal-
caires du comté de Galway (Irlande occidentale), principalement
près de la côte. Plus tard, elle fut trouvée dans d’autres places
de l'Irlande. En Ecosse, la Zygæna Minos a été capturée dans les
environs de Loch-Etive, dans l’Argyleshire et sur la côte de
Forfarshire. Au Pays de Galles, elle fut récoltée près d’Abersoch,
sur les bords de la baie de Cardigan, où on la remarqua abon-
dante, dit Barrett, en 1887 et en 1880.
Ma collection contient un grand nombre d'exemplaires irlandais,
écossais et gallois. Ils diffèrent de ceux du continent par une
taille un peu plus petite et la couleur plus claire des parties bleu
d'acier des ailes supérieures. Le corps est très velu, comme dans
nos montagnes. C’est la forme xwbigena, Birchall. La chenille,
dans les Hes Britanniques, vit sur le 7’ 2ymus serpyllum, en avril
et mai.
D’après Barrett, elle se nourrit, en outre, des plantes suivantes :
Polygala vulgaris, Pimpinella saxifraga, Beronica ofhcinals,
Trifolium et Genista tinctorta.
En France, la Zyg. purpuralis est surtout une espèce de mon-
tagnes; mais on la trouve aussi dans les plaines, notamment à
Brosville et à Pont-de-l'Arche, en Normandie (I. Dupont); aux
environs de Paris (Bellier); à Chartres (Guenée). La race des
plaines de la Beauce est caractérisée par une villosité abdominale
très faible, par la tache rouge du milieu des ailes supérieures
426 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
échancrée postérieurement et ne s’avançant pas, du côté, interne,
plus loin que la tache costale. Ce caractère est curieux : de la
base des ailes supérieures partent en éventail une tache rouge
costale courte et une tache rouge longue, celle-ci occupant l’espace
compris entre les nervures médiane et sous-médiane. La tache
rouge qui se trouve plus allongée que les deux autres, dans
l'espace cellulaire, n’est pas jointe par son pédoncule aux deux
taches qui partent de la base, et cette tache longue se trouve, à
sa naissance, bien plus séparée des autres taches, par un espace
bleuâtre de la couleur du fond, que dans les autres races de
purpuralis. De plus, les ailes inférieures rouges sont très finement
lisérées d’indigo. Dans la var. tyrolienne znferrupta, Stgr., se
trouve accentué le caractère distinctif de la race chartraine.
Pur puralis est commune à Boujailles (Doubs) ; à Fusio (Tessin) ;
à Stuttgart; sur la route du Simplon et dans la vallée de Zermatt
(Valais); à Innsbruck (Tyrol); à Cerchio (Abruzzes); en Pié-
mont, notamment à Grissolo; au Lautaret (Hautes-Alpes); à
Eclepans (Suisse); à Ax (Ariège); à Gavarnie et à Cauterets
(Hautes-Pyrénées) ; à Digne, Entrevaux et Allos (Basses-Alpes);
à Aix-les-Bains et Lanslebourg (Savoie), à ChamouniX (Haute-
Savoie); à la Chartreuse de Prémolles (Isère); dans les Alpes-
Maritimes (Moulinet, Vallée du Roubion). Elle existe aussi à
Panticosa (Espagne); en Grèce; dans quelques parties des
Pyrénées-Orientales, notamment à la vallée d'Eyna, mais où elle
m'a paru rare; à Stettin, en Prusse; en Autriche.
Habitant des localités si différentes, notamment par l'altitude,
il est aisé de croire que la Zygæna purpuralis présente des formes
également différentes selon les lieux. C'est ainsi que dans les
parties sèches des pelouses du Lautaret, pwrpuralis est de taille
relativement petite et d'aspect plus transparent, tandis que dans
les Alpes-Maritimes, pur puralis est grande, d’un rouge vif et d’un
faciès opaque. On pourrait distinguer ces races par des noms;
mais elles sont liées entre elles par des transitions si intimes et,
au même lieu, on trouve parfois des individus si dissemblables,
que je juge tout à fait inutile de surcharger la nomenclature.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 427
Pluto, Bdv. (Zcones, PI. 52, fig. 4), est une purpuralis analogue
à la race des Alpes-Maritimes et du Piémont; Winos (lcones,
PI 52, fig. 5) représente la forme de Franche-Comté; malheu-
reusement Boisduval n’a pourvu d'aucune indication de localité
les Zygæna Minos de sa collection. Je possède des Zygæna éti-
quetés : Mont-Rose et Piémont, Feisthamel; mais il est impossible
de savoir s'ils sont des Pluto, selon Boisduval; car cet auteur
paraît très hésitant. Voici, en effet, comment Boisduval termine
la notice qu'il a écrite sur Pluto : « M. le colonel Feisthamel a pris
à Domo d’Ossola et au Mont-Rose une grande quantité de
Zygæna parmi lesquels se trouvent plusieurs individus que Je
crois appartenir à cette espèce (Pluto); mais ils sont tellement
intermédiaires entre elles, Wiros et Saporte, qu'à moins de les
avoir élevés de la chenille, il est presque impossible de dire s'ils
sont plutôt des variétés de l’une que de l’autre. Il se pourrait
même que quelques-uns ne fussent que des hybrides ». Je crois
devoir observer que jamais le colonel Feisthamel n’a pu prendre
une Zygœna sur le Mont-Rose, massif de neige et de glace sur
lequel aucun papillon ne peut séjourner. Le colonel Feisthamel,
établi à Domo d'Ossola, a pu chasser sur des montagnes très
éloignées du Mont-Rose, mais d’où on pouvait en apercevoir les
cimes. Il me semble que c’est ainsi qu'il faut entendre l'expression :
Mont-Rose, employée par Boisduval. Je n'ai jamais vu parpuralis
dans les Charentes. L'Espèce ne se trouve ni en Bretagne, n1 en
Algérie. L'Ab. /utescens existe pour purpuralis (Minos) comme
pour toutes les Zygæna; mais je ne l’ai encore Jamais vue.
Zygæna gallica, Obthr.
J'ai décrit dans le Bulletin Soc. ent. France, 1808, p. 21, cette
forme française de la Zygæna Corycia, d'après un certain nombre
d'exemplaires pris à Digne, en juin 1897. Pour rendre cette
description valable, j'ai fait figurer gallica sous le n° 173 de la
PL XXXVIII du Vol. III des Etudes de Lépidoptérologie
428 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
comparée. Gallica est d’un aspect frêle et d’une contexture déli-
cate; elle doit être très rapidement déflorée par le vol. Je n’ai vu
aucun nouvel exemplaire depuis ceux que J'avais reçus, il y a
douze ans, lorsque J'employai les chasseurs de Digne, durant toute
la saison. Peut-être gallica est-elle très localisée aux environs de
Digne? Augustin Coulet avait pris un premier exemplaire en
1806; c'est le seul que J'ai vu en dehors de la série capturée
en 1807.
Comme c'est une Zygæna de peu d'apparence, il est possible
qu'elle n'ait pas retenu l'attention des chasseurs et qu’ils n’aient
pas pris soin de noter le lieu où ils l’avaient rencontrée. Mais
l'intérêt offert par cette forme française d’une Espèce orientale
n'échappera à personne; jusqu'à présent la Zysgæna gallica n'a
été observée en France qu'aux environs de Digne. Il est possible
qu'elle habite quelque partie des Alpes-Maritimes ou de Vaucluse,
et 1] me paraît utile de la signaler à l'attention des Entomologistes
qui chassent dans le Sud-Est de la France.
Zygæna Cynaræ, Esper.
Esper a publié avec le nom de cynare, sous les n°° 2, 3 et 4
de la Tab. XXXWVII, la figure d’une espèce de Zygæna dont le
type n'a pas été trouvé en France jusqu'ici. Les exemplaires qu'il
a représentés avaient été trouvés par le Haushofmeister Rummel,
pendant son séjour à Lemberg, en Gallicie, dans un bois de
chênes, de noisetiers et de hêtres, près d'un lieu désigné sous le
nom de Winiky. L’abdomen de Cynaræ est fortement annelé de
rouge; le fond des ailes est d’un bleu verdâtre assez clair et les
parties rouges sont d’un vermillon vif. Feu Millière avait ren-
contré dans les Alpes-Maritimes une forme géographique de
Cynaræ, généralement dépourvue d’anneau abdominal rouge,
aux ailes d’une couleur plus sombre, les parties bleues étant d’une
teinte ardoisée, et les parties rouges étant elles-mêmes d’un
carmin vif, mais un peu vineux. [l m'avait donné quelques exem-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 429
plaires qui portent encore l'étiquette écrite de sa main, à l'encre
rouge, et ainsi lhibellée : « dahurica, Cannes. »
Le même Millière avait envoyé 5 exemplaires de la Zyzgæna
en question à son ami Guenée, dans la collection de qui je les ai
retrouvées, semblablement dénommées. Je ne crois pas que cette
Zygæna ait été de nouveau observée à Cannes. Il est vrai que
depuis le temps où vivait Millière, le pays de Cannes a été bien
transformé par des constructions diverses et des jardins qui ont
pris des places jadis occupées par des plantes sauvages. Mais si
cette Zygæœna dahurica (selon Millière) n'a pas continué à être
capturée aux environs de Cannes, du moins à ma connaissance,
elle a été prise en certaine quantité à Bordighera, par MM. Harold
Powell, Decoster et Balestre. C’est ainsi que j'ai sous les yeux
plus de 100 individus recueillis à Bordighera, presque tous,
depuis le 15 jusqu'au 20 juin, pendant les années 1906 et 1907.
La coque est d’un gris jaunâtre brillant, en forme de bateau assez
profond, dont les extrémités ne sont point prolongées, mais
obtuses ; on la trouve collée sur les tiges de graminées.
Millière avait référé la Zygæna trouvée par lui à Cannes à
Dahurica, Boisduval (/cones, PI. 54, fig. 7), et Duponchel (Zyg.
Supplém., PL XII fig. 3). C'est d’ailleurs exactement le même
papillon que Boisduval et Duponchel ont figuré; Duponchel dit
en effet (p. 135) que l'individu figuré lui a été communiqué par
M. Boisduval. Je dois observer ici qu'il y a, dans l'ouvrage de
Duponchel, une transposition des chiffres 2 et 3 sur la PI XII
Emdansile texte Cestile n°3 (non le n22)/de la Pl XIT qui est
effectivement dakurica.
Cette Zygæna dahurica ‘existe encore dans l’ancienne collection
Boisduval; la figure donnée par Duponchel est plus exacte que
celle donnée par Boisduval; mais le papillon est unique; c’est
un ©, et sa référence à C'ynaræ est, pour moi, incertaine. Je crois
que Guenée, dont la collection contenait une Q étiquetée dakurica,
malheureusement sans indication de provenance, mais en effet
assez conforme aux Zygæna prises par Millière et à celles récoltées
à Bordighera, a communiqué à Millière le nom que celui-ci avait
430 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
adopté; Je ne doute point que Guenée n'ait été de très bonne foi
en identihiant sa © au dahurica O' de Boisduval. Mais ayant
devant moi les deux papillons, le G' dahurica, Bdv., et la Q
dahurica, secund. Guenée, j'ai la conviction que l'identification
de dahurica Boisduval et Duponchel à la forme de Cynaræ de
la Riviera est tout ce qu'il y a de plus contestable, parce que la
forme des ailes supérieures est notamment tout autre.
Dès lors, 1l faut, à mon avis, abandonner la dénomination
dahurica pour la forme Cynaræ de la Côte d'Azur française et
italienne.
J'ai écrit toute cette dissertation en vue de renseigner les
Entomologistes, assez nombreux encore, à qui Millière montrait
sa collection et communiquait des dénominations que je sais du
reste conservées telles quelles dans plusieurs collections françaises
et étrangères.
De son côté, Herrich-Schaeffer a figuré avec le nom de dakurica,
sous le n° 68, une Zygæna à abdomen marqué de rouge, de teinte
un peu moins sombre que les Cyxare de Cannes et de Bordighera,
« Welche vollkommen zur Abbildung und Beschreibung von
Boisduvals Dahurica aus Sibirien passt »; mais à la page 35 du
texte, on lit qu'Herrich-Schaeffer adopte plutôt le nom de geste,
sous lequel 1l avait reçu de MM. v. Weissenborn et Heydenreich
les deux sexes de l’Espèce, et notamment la © figurée sous le
n°06:
Malheureusement, j'ai été inhabile à trouver dans Hernich-
Schaeffer l'indication de la localité d’où provient sa gemistæ (p. 35)
— dahurica (fig. 68). En tout cas, cette gewistæ-dahurica, H.-S,
n’est pas exactement conforme à la Zygæna cynare de Bordighera
et de Cannes (olim) dont voici la description caractéristique :
ailes supérieures larges (tandis qu’elles sont étroites dans dahurica,
Boisduval), en dessus, d'un bleu ardoisé sombre, mais peu opaque,
avec 2 taches basilaires et 3 taches punctiformes nettement sépa-
rées, assez arrondies, d’un rouge carmin vif, mais un peu vineux
et sans aucune tendance à la teinte vermillon; ailes inférieures,
en dessus, assez largement bordées de bleu ardoisé pâle et trans-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 431
parent, ayant le centre d'un rouge carmin, non opaque, quoique
de nuance assez vive dans les exemplaires frais. Corps et abdomen
d'un bleu d’acier très sombre, sans anneau rouge chez le G, géné-
ralement marqué de rouge sur les côtés ou même finement annelé
de carmin chez la ©. Dessous des ailes, comme le dessus, mais
plus pâle, surtout pour le fond bleu ardoisé qui est luisant, parait
dépourvu d'écailles et ne semble coloré que par la transparence
des écailles du dessus. Les franges sont fines et d’un brun noirâtre.
Ce n'est peut-être pas absolument la forme appelée 7'wratii par
Standfuss; mais il me semble que les Zygæna de Bordighera
sont cependant plus voisines de cette 7 wratu que de toute autre
forme. C’est donc présentement sous ce vocable qu’elles peuvent
être plus exactement désignées. Je compte faire figurer les deux
sexes de la Zygœna Cynaræe-Turatn dans le V° volume des
Etudes de Lépidoptérologie comparée, a représentation n'en
ayant encore paru nulle part.
On n'a trouvé Cynaræ jusqu'ici m1 en Angleterre, n1 dans
d’autres parties de la France que les Alpes-Maritimes, ni en
Espagne, ni en Algérie. C'ynaræ paraît être une Espèce de l’Europe
orientale qui, vers l'Ouest, ne dépasse pas les Alpes. Elle se trouve
dans la Russie méridionale avec le nom de centaureæ, en Hongrie,
en Gallicie, en Dalmatie (Zara), en Allemagne méridionale, en
Piémont.
Zygæna scabiosæ, von Scheven.
En France, scabiosæ est une espèce de basse montagne; elle
habite les Cévennes, les Pyrénées et les Alpes. En dehors de la
France, scabiosæ se rencontre en Italie, en Sicile, en Espagne, en
Allemagne, en Suisse, en Scandinavie, en Sibérie. Elle manque
actuellement en Angleterre, où 1l est possible qu’elle ait jadis
existé, et en Algérie.
Dans la dixième partie du journal Der Naturforscher, publié
à Halle, en 1877, le Pasteur von Scheven a fait insérer, sous le
432 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
titre de: Beytraege zur Naturgeschichte der Insekten (Erstes
Stueck), un article où, de la page 88 à la page 101, ledit Pasteur
fait part d'observations qui m'ont semblé très judicieuses sur les
Lépidoptères. À la page 07, von Scheven dénomme le Spznx
scabiosæ comme suit : « 7—Sp. Scabiosæ. So nenne ich denje-
nigen, welcher drey lange rothe Flecken auf den Oberfluegeln
hat ». C'est-à-dire en français : « Je nomme ainsi celui qui a trois
longues taches rouges sur les ailes supérieures. » Cette simple
phrase fixe la question. La Zygæna scabiosæ, avec 3 longues
taches rouges sur les ailes supérieures, c’est la forme normale de
l'Allemagne et des Pyrénées; mais ce n’est pas la forme qu'on
trouve ordinairement dans les Cévennes, les Alpes françaises et
italiennes où les 3 longues taches rouges, généralement divisées
par une interruption qui atteint la médiane, ou la sous-médiane,
ou même les deux, présentent plutôt 5 taches courtes que 3 longues.
La Zygœna Scabiose est en effet une Espèce fort variable sur
laquelle Calberla a écrit dans le Vol. VIII de l’/715, sous le titre :
Ueber einige transalpine Zygœnen (pages 203 à 213), de copieuses
observations. Il les a résumées en une sorte de Tableau où :1l
s'efforce de mettre les choses au point, pour l’époque (1895) où
il l’a établi; ce tableau est dressé seulement en ce qui concerne
les races sudalpines et italiennes; nullement en ce qui regarde les
races françaises à l'étude desquelles je vais procéder plus loin.
Esper a figuré scabiose, assez grossièrement, sous les n° 3 a et
30 de la Tab. XXIV; Huebner a représenté scabiosæ sous les
n° 6 et 86; Boisduval, sous les n°* 1 et 2 de la PI. 53 de l’Zcones;
Duponchel, sous les n°” 5 a et 5 de la PI. IV du Supplément.
Herrich-Schaeffer, sous le n° 3, avec le nom de Orion; sous les
n° 7,0, 10, 11, avec le nom de 7 riptolemus, sous les n° 48 et 49,
avec le nom de Celeus; et sous le n° 03, avec le nom de P/uto.
De son côté, le très distingué et très respectable botaniste et
entomologiste de Bâle, docteur H. Christ, a publié dans Mirthei-
lungen der Schweizer. entomolog. Gesellschaft (Decemb. 1880),
une intéressante étude intitulée : Die Zygænen unserer Südalpen,
qu’il a accompagnée d’une Planche où il représente, sous les n° 1
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 433
à 5, des scabiosæ provenant d'Andlau (Alsace), du pays de Bade,
de Moravie et de Hongrie, et sous les n° 6 à 10, des 77iptolemus
capturées à Perrero, en Piémont; 7zp1olemus étant considérée
comme une forme sudalpine de scabiosæ reliée à celle-ci par
d'insensibles transitions. Bien que je possède dans ma collection
plus de 700 exemplaires de la Zygæna scabiosæ de provenances
très diverses, Je sens que mon matériel comporte encore bien des
lacunes, notamment en ce qui concerne l'Allemagne. Mais Je
m'efforcerai, pour l’Europe occidentale tout au moins, d'analyser
exactement les races locales que je suis parvenu à connaître.
1° Hautes-Pyrénées. —— Scabiosæ n'est pas très rare tout
auprès de la ville de Cauterets, le long du chemin qui, descendant
des bains de la Raillère, passe un peu au-dessus de la maison
hospitalière. C’est une Espèce un peu molle, facilement défraichie,
qui se plait dans les pelouses entourées de bois et dans les allées
sylvatiques et ombragées où il est facile de la capturer posée sur
les fleurs. Vers 11 heures du matin, lorsque le soleil est ardent,
elle vole rapidement au-dessus des prés, dans les vallées boisées,
ou sur les flancs de la montagne calcaire appelée : Péguère.
Autrement elle paraît moins active. Sa coque est d’un blanc gri-
sâtre argenté et luisant; elle est un peu allongée et on la trouve
fréquemment fixée sur les brins de bruyère où il est aisé de la
récolter, tout le long des chemins qui sont tracés entre les bains
de la Raillère et la ville de Cauterets. La forme ordinaire, dans
les Hautes-Pyrénées, est celle que Boisduval a représentée sous
le n° 1 de la PI. 53 de l’Zcones; c’est-à-dire la forme qui présente
sur les ailes supérieures trois taches allongées, rouges : 1° la
costale, qui est la plus courte; 2° la médiane, longue et se dilatant
vers son extrémité, 3° la sous-médiane, longue aussi et légèrement
courbée en arc de cercle; chacune de ces trois taches, dans la
majorité des exemplaires, est continue, sans séparation; mais on
trouve quelquefois des individus chez lesquels la tache médiane
est amincie, terminée par un bouton généralement réuni au moyen
d'un mince trait rouge à son pédoncule. Il arrive parfois, mais
28
434 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
rarement, que les deux extrémités des taches rouges médiane et
sousmédiane sont nettement détachées de leur base. Boisduval a
figuré sous le n° 2 de la PI. 53 de l’/cones, une Q ayant la tache
médiane cellulaire divisée en deux parties. Cette division partielle
ou totale est plus fréquente chez la Q que chez le G, dans les
races où normalement les trois taches longues sont entières.
2° Pyrénées - Orientales. -_ [a scabiosæ des Pyrénées-
Orientales ne diffère presque point de celle des Hautes-Pyrénées.
Les exemplaires avec les trois taches rouges non interrompues
constituent la règle. La scabiosæ ne vole pas au Vernet même,
mais à une altitude un peu plus grande. Pour la trouver, 1l faut
aller plus haut que le village de Casteil; on aperçoit les premières
Zygæna scabiosæ dans le ravin frais et boisé, au revers de la
montagne de Saint-Martin-du-Canigou, et en s’élevant dans la
haute vallée du Cady, jusqu’à la forêt de Randaiï et à la prairie
alpestre de Mariailles. Dans les Pyrénées, le fond des ailes de
scabiosæ d'est plus opaque, tandis que celui de la © est plus
clair et plus transparent. Chez les individus bien frais, les teintes
rouge et gris indigo sont assez vives; les antennes du O° sont
longues et paraissent flasques ; l'abdomen noir paraît un peu velu,
tandis que la © a les antennes très fines, un peu plus courtes et
l'abdomen presque sans villosité. Je n'ai jamais vu un exemplaire
pyrénéen ou autre de Zygæna scabiosæ ayant l'abdomen annelé
de rouge; dans les Pyrénées, je n'ai constaté aucune tendance à
l’'envahissement des ailes inférieures rouges par la teinte indigo
clair de la bordure. La taille des scabiosæ pyrénéennes est relati-
vement grande. J'ai fait figurer sous le n° 140 de la PI. VIII des
Etudes d'Entomologie une Zygena qui, par ses antennes longues
et une teinte rouge diffuse sur le dessus de ses ailes supérieures,
pourrait être considérée comme un produit hybride de scabiosæ
et de loxicere, à moins que ce ne soit de dyba. Cependant nous
n'avons à cet égard aucune certitude; c'est une simple impression
dont J'ai fait part; rien de plus.
M. H. Powell, chassant pour moi, en 1900, dans les Pyrénées-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 435
Orientales, a capturé 106 Zygæna scabiosæ, d’une parfaite frai-
cheur, pendant le mois de Juillet et le commencement d'août, en
la haute vallée de Cady, à Randaï et Mariailles, entre 900 et
1,700 mètres d'altitude. Parmi ces 106 exemplaires, 1l y en a 103
avec les ailes allongées; les 3 taches rouges des supérieures, en
dessus, sont longues, plus ou moins épaisses, continues et non
divisées; mais deux GO‘ et une © capturés avec les 103 autres
exemplaires ont les ailes plus courtes; la teinte rouge est un peu
moins vive; un O'et la Q ont la tache médiane nettement divisée
en deux parties; l’autre O' a les taches médiane et sousmédiane
divisées, de façon à montrer 5 taches, comme Xoweo, de Sicile,
ou Veapolitana, de la province d’Avellino. Ces deux C' et cette ©,
bien authentiquement pyrénéens, seraient tout à fait à leur place
avec les formes sudalpines. Ceci est une preuve de l’unité de
l'Espèce scabiosæ pyrénéenne, provençale et italienne, et la
démonstration que dans une même unité spécifique, une race locale
normale, différente d’une autre, peut toujours paraître chez cette
autre à l’état aberrant. Du reste, la scabzosæ des Cévennes confirme
cette proposition.
. 3° Cévennes. — M. Dayrem a recueilh, en juin et Juillet 1908,
29 exemplaires de scabiosæ qu’il a trouvés aux environs de Florac
(Lozère). Sur ces 29 individus, 5 O' sont avec 3 longues taches
rouges non interrompues sur les ailes supérieures; mais chez ces
5 ©, la tache médiane, amincie en son centre, se termine par une
sorte de bouton, comme dans les figures 4 et 8 du travail déjà
cité du D’ Christ: Die Z'ygœner unserer Suedalpen. Chez les
24 autres échantillons des deux sexes, la tache longue sous-
médiane reste continue; mais la tache médiane est divisée en deux
parties : 1° un petit triangle rouge à la naissance de la cellule,
2° une tache rouge arrondie, semblant parfois plus foncée au
centre que sur ses bords, à l'extrémité de l’espace cellulaire. Telles
sont les figures 5, 9 et 10 données par le D' Christ. Ces Zygæna
scabiosæ de Florac sont donc en grande majorité des 7 71p{0-
lemus ; elles ne sont cependant pas, dans leur ensemble, semblables
430 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
aux /'riplolemus des Alpes provençales, en ce sens que la teinte
rouge est un peu plus vermillon dans la Lozère et que les ailes
inférieures y sont moins largement bordées d’indigo. De plus, sur
les ailes supérieures, les parties rouges sont généralement plus
larges, ce qui modifie légèrement l'aspect.
Il y a donc entre les scabiosæ des Pyrénées une analogie plus
grande avec les formes d'Allemagne : Brunswick, Thuringe,
Wurtemberg, et même de certaines parties du Piémont, notamment
de Grissolo, qu'entre les mêmes scabtosæ pyrénéennes et les sca-
biosæ provençales, ainsi que l'étude des races de la région sud-
orientale de la France le démontre aisément.
4° Basses-Alpes, Var et Alpes-Maritimes. — Plusieurs
races ont été capturées dans la région de Digne, Entrevaux,
Puget-Théniers, Mont-Gourdon-Garamagne, Cascade de Neigeas
en la vallée du Var, Venanson, Bonson, Sainte-Baume, Le Lauzet,
Enchastrayes, Vallée de Roubion, La Turbie, Moulinet, Vence,
Levens et Madone de Fenestre, Castillon, Tourette-sur-le-Loup,
toutes localités sur lesquelles les chasseurs de Digne, M. Gieseking,
M. Harold Powell, M. Gédéon Foulquier et M. Decoster, m'ont
assez largement documenté.
Ces races provençales se relient aux formes italiennes et, si l’on
trouve parmi elles quelques exemplaires conformes à la race ordi-
naire pyrénéenne, ainsi que cela a lieu à Digne, le plus souvent
on constate dans le Sud-Est de la France l'existence de races de
scabiosæ bien différentes de celles de la région montagneuse des
Pyrénées-Orientales et des Hautes-Pyrénées.
Je crois que la forme la plus répandue dans les Alpes de
Provence est celle que Herrich-Schaeffer a figurée avec le nom
de Z'riptolemus, sous les n* 7 et 11 de la Tab. IT des Zygænides
Europ., après que Freyer avait donné lui-même, sous les n° 1 et 2
de la Tab. 164 des Neuere Beitrege zur Schmetterlingskunde
(Vol. Il), la figure de la même Zygæna Triptolemus, qui ne me
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 437
semble cependant avoir aucun rapport spécifique avec la 771pt0-
Lemus de Huebner (n° 06 et 97).
Chez Triptolemus , H.-S. 7, la tache rouge médiane des ailes
supérieures est divisée en deux points rouges, éloignés l’un de
l’autre, l’un restant à la base de l’espace cellulaire, l’autre, de
forme arrondie, à l'extrémité. La tache rouge submédiane reste
formée par un trait long un peu aminci à son centre, par rapport
à la dilatation de ses extrémités.
Orion, H.-S., figuré sous le n° 3 de la Tab. I des Zygænides
Europ., ressemble beaucoup à Zriptolemus n° 7. Orion a la bordure
bleue des ailes inférieures un peu plus large et l’amincissement
du milieu de la tache rouge sousmédiane un peu plus prononcé;
mais ces insignifantes différences, plus ou moins sensibles d’ail-
leurs selon le coloriage des Planches, sont individuelles et ne
justifient pas un nom distinctif.
Pluto, H.-S., représentée sous le n° 03 de la Tab. 13 des
Zygenides Europ. est une petite forme qu'on rencontre dans Îles
Alpes-Maritimes et qui diffère de scabiosæ des Pyrénées, à
3 longues taches rouges, par sa contexture plus grêle et la forme
de ses ailes plus rétrécie. Pluto, H.-S., 03, présente en effet 3 taches
rouges sur les ailes supérieures, et non 4, comme Triptolemus-
Orion, où 5, comme Romeo; je possède des exemplaires tout à
fait semblables au n° 03 de Herrich-Schaeffer, lequel n° 93 parait
absolument différent du n° 107 portant cependant le même nom
de Pluto.
La synonymie des Zygæna est bien difficile à établir, puisque
le même nom donné par le même auteur s'applique à des unités
si différentes et qu’une foule de confusions, jadis commises, sont
impossibles à redresser aujourd'hui, puisque la provenance des
papillons figurés reste généralement ignorée.
Cependant les noms de Zriptolemus, Freyer, Tab. 164; fig. 1
et 2, et HS. 7 et 11 (Orion, H.-S, 3) me paraissent devoir très
exactement désigner la race ordinaire de la Zygœna scabiose des
Alpes de Provence; le nom de Pluto, H.-S., 03 (nec 107) s'ap-
plique, comme je l’expose ci-dessus, à une variété de Triptolemus
438 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
qu'on rencontre dans les Alpes-Maritimes. On trouve aussi dans
les Alpes-Maritimes une autre variété de scabiosæ chez laquelle
les taches rouges des ailes supérieures sont divisées comme chez
Romeo, de Sicile, et Neapolitana, de l'Italie méridionale, c’est-
à-dire de façon à former $ taches distinctes.
Ces exemplaires semblent exactement référables à Triptolemus,
Freyer (Tab. 14, fig. 4), des Alpes du Tyrol. Il ne faut pas.
confondre cette forme de 77iptolemus avec la Triptolemus du
même auteur (Tab. 164; fig. 1 et 2), dont J'ai fait mention plus
haut.
s° Sicile. -— Dans cette île, on trouve Romeo, Lefbv., figurée
par Duponchel (Supplément; Zygénides; PI. XII, fig. 1), et dont
je possède, d’après la note écrite par Guenée, l’exemplaire même
qui a servi de type à Duponchel.
Au sujet de Romeo, Duponchel dit (p. 132) : « M. Alexandre
Lefebvre a trouvé cette Zygène à Randazzo, en Sicile, au pied
nord de l’Etna, en juin 1824, et il l’a dédiée à M”*° la baronne
Romeo, dont il a reçu le plus obligeant accueil à Randazzo
même. »
Romeo est donc, comme Goante, comme Orleans, un nom de
personne. Pourquoi Staudinger et Rebel, qui se sont donné tant
de peine pour faire accepter Oyleansi, au lieu d'Oyleans, nom que
J'ai donné à un magnifique Parnassius du Thibet, n’ont-1ls pas
ajouté un i au nom de M" Romeo? Romeot eût été une Jolie
consonance; trois voyelles différentes de suite, n'est-ce pas un
record d’euphonie ?
Romeo a les taches, rouges, en dessus, divisées en 5 parties,
sur les ailes supérieures, comme 77iptolemus, Freyer (Tab. 14;
fig. 4); elle a les taches rouges en question d’une teinte un peu
vermillon, au lieu de la couleur carmin vineux que présentent les
autres races françaises et italiennes de scabiosæe. Aux ailes supé-
rieures, en dessous, les taches si nettement divisées en dessus,
tendent parfois à confluer, surtout chez les G. Romeo se rapproche
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 430
beaucoup de Vevadensis. Celeus, Herrich-Schaeffer, n° 40, est sans
doute assimilable à Vomeo.
6° Neapolitana, Calberla. — Figurée par Renato Perlini
(comme ©, alors que le spécimen représenté est certainement un
d'), sous le n° 15 de la Tav. IV de l'ouvrage intitulé : Forme di
Lepidotteri esclusivamente italiane. La Zygena Neapolitana à
les taches rouges des ailes supérieures, en dessus, divisées en
5 parties; de plus, elles sont généralement réduites; leur teinte
n’est pas très vive; les ailes inférieures sont largement bordées
de bleu indigo:; l’aspect général est assez sombre, autant à cause
du rétrécissement et du peu d'éclat des parties rouges que du ton
noirâtre du bleu. J'ai, sous les yeux, un grand nombre d’'exem-
plaires récoltés par M. Zickert au Mont S. Angelo (900 mètres),
le 1° juillet 1007; au Monte-Castello (400 à 600 mètres), les 20
et 21 juin 1007, et à Bagnoli Irpino, le 25 juin 1007.
Les ailes inférieures peuvent devenir entièrement envahies par
la teinte sombre de la bordure, plus noirâtre que bleue; c’est alors
VAb. Æoffmanni, Zickert, figurée sous le n° 12 de la Tav. III de
l'ouvrage précité de Renato Perlini. Je possède 15 exemplaires
de cette Ab. Æoffmanni, que m'a envoyés M. Zickert. Il les avait
récoltés au Monte-Castello, dans la province d’Avellino, avec les
Neapolitana, les 20 et 21 juin 1907. Parmi ces 15 Æoffmann, se
trouve l’exagération nigerrima, Zickert, décrite dans Ærx/om.
Zeits., n° 20; Guben, 1005.
M. Zickert a trouvé au Monte-Castello (Avellino) l'Ab. à
taches jaunes #aveola, de la Zygæna Scabiosæ-Neapolitana.
On trouve dans les Alpes de Provence des exemplaires de
Triptolemus conformes à Neapolitana; mais si on range tous les
exemplaires de chaque localité ensemble, on constate que l'aspect
général de la race est différent pour les scabiosæ provenant de
l'Italie méridionale comparativement à celles qui ont été récoltées
dans le Var et les Alpes-Maritimes. M. H. Powell a pris au col
de Bartagne, dans la montagne de la Sainte-Baume, une scabtoseæ
cadrant parfaitement avec Neapolitana; ce qui constitue un fait
440 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
analogue à celui que J'ai constaté pour la scabiosæ des Pyrénées-
Orientales, c’est-à-dire l'existence, à titre d’Aberration plus ou
moins rare dans une localité, d'exemplaires différents de la forme
normale de cette localité et semblables à la forme qui est normale
dans d’autres localités.
7° Nevadensis, Rambur. — Figurée sous le n° 10 de la PI. I
du Catal. systémat. des Lépid. de l'Andalousie; ne paraît pas
rare à la Granja où mon frère l’a prise au mois de juin; à la
Sierra-de-Alfakar (juillet 1870) et à la Sierra-Nevada. Feu de
Graslin avait capturé plusieurs exemplaires, dans les montagnes
de Grenade, en même temps que le D' Rambur y capturait les
types de sa Wevadensis. M. Chapman a trouvé WNevadensis à
Casayo.
Je pense que la Dalmatina, Boisduval (/cones, PI. 54, fig. 2),
dont je crois avoir le type sous les yeux, est la même Zygæna
que Wevadensis. Dans ce cas, le nom de Dalmatina serait plus
ancien. Mais il me paraît impossible de savoir si le papillon de
la collection Boisduval provient réellement de Raguse, ainsi qu'il
est dit à la page 45 de l’/cones (Vol. IT). Rambur a, pour Bois-
duval, une phrase bien sévère dans la note de la page 166 du
Catal. systemat. de l'Andalousie; 11 se trompe d’ailleurs en disant
que Boisduval n’a figuré qu'une Punctum.
M. Abeille, de Marseille, donne des renseignements intéressants
sur les premiers états de la scabiosæ provençale, dans le n° 1 des
Mémoires de la Société linnéenne de Provence, paru en décembre
1900. La chenille, dit-il, vit sur le Zathyrus pratensis, plante de
la famille des Papilionacées, répandue dans les prés et les bois
de toute la France, très abondante dans la région de la Sainte-
Baume, et aussi sur l’Azppocrepis comosa, qui est également une
Papilionacée. M. Abeille a élevé la chenille de scabiosæ,; mais il
n'en a pas obtenu les parasites. Il attribue le manque de parasites
de la chenille au soin extrême avec lequel elle se cache pendant
le jour. Je crois pourtant bien avoir obtenu à Cauterets des para-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 441
sites sortis des chrysalides de scabiosæ qui étaient des Diptères;
mais j'ai eu le tort de ne pas les conserver.
Les Scabiosa sont des plantes de la famille des Dipsacées; le
genre scabiosa tire son nom du mot latin scabies, qui signifie gale,
par allusion à de prétendues propriétés médicales de la plante;
il contient un grand nombre d'Espèces. On en compte environ 80
dans la Flore européenne.
Les Zygœæna, en général, se reposent sur les Scabieuses, comme
sur les Ombellifères et les Composées; mais leurs chenilles ne se
nourrissent point de la scabieuse et von Scheven aurait pu mieux
choisir le nom qu’il a attribué à la Zygœæna « welche drey lange
rothe Flecken hat. »
J'ai pris à Cauterets, en juillet 1908, un bizarre exemplaire de
scabiose. Les ailes inférieures sont complètement hyalines, c'est-
à-dire dépourvues d’écailles rouges, sauf le long du bord anal.
Le liséré marginal indigo est resté normal. Les supérieures sont
un peu plus pâles que chez les exemplaires normaux. Cette Aber-
ration hyaline atteint un ' de grande taille et de beau dévelop-
pement.
Zygæna Zuleïma, Pierret.
Feu Pierret a décrit et figuré dans les Annales de la Société
entomologique de France, 1837 (pages 22 et 23 et PI. 1, fig. 8),
avec le nom de Z#leima, une petite Zygæna spéciale à l'Algérie
qui éclôt de très bonne heure, c'est-à-dire dès le mois de mars,
aux environs d'Alger: tandis qu'à Lambèse, la même Espèce vole
en mai et juin. Je la connais des localités algériennes suivantes :
environs d'Alger, du Tarf, de Lambèse et d'Oran.
Pierret dit, en la décrivant, que Zw/eima a été prise aux environs
de Bône et que M. Doué l’a reçue d'Oran. Zxleima est une petite
Zygæna, à nuances ternes. Le corps est tout noir, sans anneau
rouge; le fond des ailes supérieures est d’un gris ardoisé pâle,
avec 3 taches rouges longues, comme chez Scabiose, mais avec
442 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
cette différence qu’elles sont, toutes proportions gardées, infiniment
plus fines, et que la tache longue médiane se prolonge par un
point rouge qui semble suspendu à son extrémité inférieure, et qui
se trouve dès lors presque en contact avec le bord extérieur des
ailes. Celles-ci sont finement lisérées de noirâtre, aussi bien le
long du bord costal que du bord externe. Ce n’est pas une
Zygæna bien commune. Lucas l’a figurée avec le nom de /#dicra,
sous le n° 1 de la PI 3 des Lépidoptères, dans l’Aflas de
l'Exploration scientifique de l'Algérie. J'ai publié moi-même la
figure de la Zygœna Zuleima sous le n° 81 de la PI. 8, dans la
XIIT° livraison des Etudes d'Entomologie.
Zygæna Corsica, Boisduval.
La première description de la Zygæna corsica à paru dans
l'Essai sur une Monographie des Zygénides, suiv: du Tableau
méthodique des Lépidoptères d'Europe, que Boisduval fit paraitre,
en 1820, au début de sa brillante carrière entomologique. Ce furent
Latreille et Bosc qui rédigèrent le Rapport sur le manuscrit de
Boisduval, lequel manuscrit avait été présenté à l’Académie des
Sciences, le 10 septembre 1827. Latreille et Bosc concluent dans
les termes suivants : « Quoique M. Boisduval n'ait donné à son
ouvrage que le titre modeste, Æssai d'une Monographic…., vous
avez cependant pu vous convaincre par cette analyse que, tant par
l'observation des habitudes des insectes dont il traite, que pour
les signalements et la synonymie des espèces, il a fait tout ce
qu'on pouvait attendre d’un bon naturaliste, dans l’état actuel de
la Science. Peu de Monographies peuvent être comparées à celle-ci,
et vos commissaires sont d’avis qu’elle mérite de trouver place
dans les mémoires des savans étrangers dont l’Académie ordonne
l'impression. — Paris, ce 1* octobre 1827. »
L'ouvrage de Boisduval est d’un débutant, assurément riche de
promesses; mais combien les Planches sont loin de valoir -celles
que publièrent tant d'anciens maîtres, avant la Révolution !
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 443
+2
La Zygæna corsica figurée sous le n° 2 de la PI. $ ne ressemble
nullement à la réalité naturelle; la description est imprimée aux
pages 81 et 82; elle a le tort de ne pas mettre en lumière l’un des
caractères saillants sur la généralité des exemplaires de Corse, qui
est la couleur grisâtre du dessus des ailes supérieures.
Rambur, dans les Annales de la Société ent. de France, 1832,
donne, sous les n* 5 et 6 de la PI. VII, de meilleures figures de
la Zygæna corsica, dont la description est imprimée sur les
pages 267, 268 et 269, au cours d’un intéressant mémoire ayant
pour titre : Catalogue des Lépidoptères de l'ile de Corse. Rambur
fait précéder les descriptions des espèces de papillons qu'il avait
découvertes en Corse, par un aperçu très intéressant et très ins-
tructif sur la configuration et la flore de cette île. Relativement
à la Zygæna corsica, Rambur fait connaître à la page 254 de cet
Avant-Propos que les lieux schisteux fournissent la Santolina
incana, qui sert de nourriture à la chenille de cette Espèce; et plus
Join, à la page 258, il ajoute que la nature, en Corse, se montre
plus bizarre à l'égard du genre Zygæna qu'elle exclut complè-
tement, à l'exception toutefois d’une espèce toute caractéristique
et particulière aux terrains schisteux, la Z. Corsica; les Procris
semblant étrangers à l’île. |
Boisduval, dans l’/cones (1834), a donné une nouvelle, mais,
cette fois, bonne figure de la Z. Corsica, sous le n° Oo de la PIE
et dans sa description (p. 58), il n’a pas manqué d'appeler
l'attention sur les ailes supérieures qui sont d’un bleu un peu vio-
lâtre, fortement lavées de blanc jaunâtre, ou blanchâtres avec le
bord de l'extrémité et de la côte bleus.
Duponchel, de son côté, a bien figuré la Zygeæra Corsica sous
le n° 7 de la PI VII du Supplément-Zygénides et la description
se trouve imprimée sur les pages 87 à 80.
La Zygœna Corsica éclôt au commencement de Juin; elle vole
rapidement en plein soleil et va se reposer, à l'approche de la nuit,
sur les tiges sèches des bruyères ou sur celles de la Santolina
In Cana.
444 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Les Santolina sont des Composées dont le nom est une alté-
ration de Sanctolina, c'est-à-dire plante sainte, à cause de ses
vertus médicinales.
La Santolina incana est une Espèce polymorphe qui s'appelle
aussi Chamecyparissus,; elle a les tiges et les feuilles couvertes
d'un épais tomentum blanc; elle se trouve répandue sur les
coteaux arides de la région méditerranéenne (Ælore descriptive et
ulustrée de la France, par l'abbé Coste; IT, p. 340).
La coque de Z. Corsica est d'un blanc argenté luisant ou d’un
gris Jaunâtre; elle est fixée aux tiges; la chenille est brune avec
des points latéraux blanc jaunâtre, des incisions et une ligne
dorsale blanc grisâtre. Je possède de beaux exemplaires de la
Zygæna Corsica pris à Bastia par feu Bellier, et à Sassari, en Sar-
daigne, par feu Damry, en 1806. La race de Sardaigne paraît
avoir les ailes supérieures, en dessus, plus sombres et moins blan-
châtres que la race de Corse. La collection de Graslin contenait
des échantillons pris par Rambur. Guenée était d'avis que la
Zygœna Corsica avait des rapports avec À ctllee, à l’état parfait,
et avec Æxulans, à l’état de chenille. Aucun des 75 individus
contenus dans ma collection n’a les taches rouges des ailes supé-
rieures confluentes ; les 3 extrabasilaires forment des points isolés
d’un rouge vif, placées en trépied : 2 en dessus, 1 en dessous. Les
Aberrations par confluence semblent donc très rares; mais elles
doivent se rencontrer cependant, conformément à la loi de variation
du Genre Zygœna.
Zygæna Loyselis, Obthr.
J'ai fait figurer la belle Zygæna Loyselis, espèce bien distincte
de Favonia, autant qu'ÆAzlaris est distincte de Fausta, sous le n° 4
de la PI III de la 1° livraison des Æzudes d'Entomologie; la
description se trouve imprimée aux pages 34 et 35 de cet ouvrage.
Dans la XITI° livraison des Ætudes d'Entomologie, parue en 1800,
J'ai consacré une partie importante de la figuration aux Lépidop-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 445
tères algériens; c'est ainsi que les figures 76, 77 et 78 de la PI 8
reproduisent avec une exactitude parfaite la race oranaise de
Loyselis, d'après des exemplaires pris à Géryville, par le lieu-
tenant Lahaye, en mai 1886, tandis que les n°* 79 et 80 représentent
la forme de Lambèse. J'ai déjà plusieurs fois parlé de la Zygæna
Loyselis et je prie le lecteur de vouloir bien se reporter aux Æ/udes
d'Entomologie, pour y trouver la documentation sur l’Espèce en
question. L'ouvrage de Seitz : Les Macrolépidoptères du Globe,
mentionne la Zygæna Loyselis au milieu des variétés de /'avonia,
comme si Loyselis était elle-même une des variations de /’avonia.
Ainsi que je l’expose ci-dessus, Zoyselis et Favonia sont deux
Espèces différentes de Zygæna et elles ne peuvent être confondues
sans erreur. M. Powell a capturé Loyselis à Sebdou, en mai 1907,
et à Khenchela, en mai 1908; M. Dayrem a récolté la même
Zygæna à Lambèse en mai 1907.
Sur 87 exemplaires de Loyselis qui sont rangés dans ma col-
lection, un seul G' de Lambèse est dépourvu de l'anneau abdominal
rouge; on n'aperçoit plus que très peu de vestiges de rouge sur
les côtés de l'abdomen de cet individu; mais chez les autres,
l'anneau abdominal rouge n’est pas toujours complet, dans l'Est
de l'Algérie surtout, où la couleur rouge des ailes est moins vive
et moins opaque, la tendance à l'interruption de l'anneau rouge
sur le dessous de l'abdomen est assez générale.
J'ai fait figurer sous le n° 77 de la PI 8 de la XIII livraison
des Etudes d'Entomologie un bien bel exemplaire d'avec les
taches rouges des ailes supérieures très brillantes et très déve-
loppées. Le collier et les épaulettes sont toujours rouges ou roses
chez Loyselis, toujours blanchâtres chez Favonia.
Zygæna Favonia, Freyer.
Encore une spécialité algérienne que Freyer a indiquée comme
du pays des Turcs, vraisemblablement d’après les échantillons
recueillis dans la régence d'Alger, par le D' Moritz Wagner, ainsi
446 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
que Je l’ai déjà fait connaitre dans le présent ouvrage, à propos
de Cœnonympha Arcanioides (p. 22 et 23). Moritz Wagner
désigne certainement Æavomia sous le nom erroné de Sarpedon, à
la page 205 de la 3° partie de son ouvrage intitulé : Xezsen in der
Regentschaft Algier, in den lahren 1836, 1837 und 1838, et paru
a Leipzig en 1841.
D'ailleurs les déterminations de Zépidoptères sont très fré-
quemment fausses dans l’article qui est consacré aux Papillons,
sous le titre : Ueber die Schmetterlinge der Regentschaft Algier
mit besonderer Beruecksichtigung 1hrer geographiscen Verbreitung
(p. 195-210). L’iconographe Huebner avait déjà figuré l'avonta,
avant tout autre auteur, avec le nom de Sarpedon, sous le n° 171.
La Zygœna Favonia a été l’objet d'observations assez détaillées
dans la XIII° livraison des Etudes d'Entomologie, aux pages 20
et 21. Les figures 74, 75, 82, 83, 84, 85, 86, 87, 88 et 89 de la
PI. 8 sont consacrées à la représentation des variétés de l'Espèce;
c'est-à-dire que 10 exemplaires de la Zygæna Favonia ayant déjà
été figurés par mes soins et avec l'exactitude la plus consciencieuse
de la part de Dallongeville, il ne me semble pas qu'une docu-
mentation illustrée supplémentaire soit désormais bien utile.
M. H. Powell a cependant pris à Khenchela, le 15 Juin 1908, un
exemplaire de Favonia que j'ai appelé Powellz et chez lequel les
parties normales rouges sont devenues d’un jaune citron pâle.
L'exemplaire lavonia-Powell: est très frais; il est figuré sous le
n° 175 de la PI XXIX dans le 3° volume de Lépidoptérologie
comparée, à côté d’un autre O' lavonia ayant la couleur rouge
normale représentée sous le n° 174, pour comparaison. Je dois dire
que le coloriage de tous les exemplaires de la PI XXIX n'a pas
été également bien réussi et je regrette d’avoir à faire observer
que le coloriage de cette Planche, notamment en ce qui concerne
Favonia, eût gagné à être plus soigné. Le n° 174 a été capturé sur
le chemin du col des Arzaïls, près Sebdou, par H. Powell, le 20 juin
1907, ainsi qu'il est imprimé dans la légende explicative des Planches.
Ma collection contient environ 600 exemplaires étalés de Zygæna
Favonia provenant des localités suivantes : Aïn-Draham, en
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 447
Tunisie (Faroult); Alger (R. P. Guillemé); Bône (Merkl); Boghari
(Raffray); Constantine et Teniet-el-Haad (D' Charles-Henri
Martin); Lambèse (Bleuse et Dayrem); Khenchela (H. Powell);
Draria, dans la province d'Alger (Holl); Géryville, Magenta
(L' Lahaye); Sebdou (DACodet Er Powell Nedroma; Sidi-
bel-Abbès ; Tanger.
La coque est finement chagrinée, d’un gris argenté luisant,
quelquefois avec une légère teinte jaunâtre; elle a la forme d'une
carène plus ou moins allongée et profonde.
La Zygæna Favonia présente quelques variations : V/717a, avec
les 4 ailes entièrement transparentes, et les taches rouges de la
base et de l'extrémité seules maintenues sur le fond hyalin;
Staudingeri, avec un seul anneau abdominal rouge; 7 hevestis,
plus grande, avec les taches rouges des supérieures très dilatées.
La Zygœna Favonia vole en Tunisie, en Algérie et au Maroc,
pendant les mois de mai et de juin; un peu plus tôt ou plus tard
suivant les localités et la température de l’année. Elle parait
remplacer Sarpedon sur les côtes barbaresques. J'ai reçu une seule
fois de Bône quelques exemplaires de la Zygæna Sarpedon, mais
par intermédiaire, non pas directement; dès lors je ne trouve pas
assez d'authenticité dans la provenance pour en faire état.
Zygæna Sarpedon, Huebner;
Zygæna Contaminei, Boisduval;
Zygæna Punctum, Ochs.
Je crois que les Zygæœna Sarpedon (*), Contaminer et Punctum
sont les termes différents d’une même unité spécifique; Sarpedon
représentant l’Espèce en France et en Espagne; Contaminer, race
spéciale des Hautes-Pyrénées, Punctum, forme italienne, dalmate,
(*) Le nom de Sarpedon a été emprunté à la Fable. Sarpedon était fils de
Jupiter et d'Europe et frère de Minos et de Rhadamanthe. Il mena une colonie
de Crétois dans l’Asie-Mineure.
448 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
hongroise, en un mot race orientale comparativement à la Sarpedon
de France et d'Espagne.
Mais la confusion est très grande pour la dénomination des
diverses races de la Zygæna Sarpedon. La forme la plus répandue
est celle qui a les ailes inférieures rouges, tandis que la variété
qui a le fond des ailes inférieures bleues est beaucoup plus rare
et même manque tout à fait dans un certain nombre de localités.
Pourtant c’est la Sarpedon à ailes inférieures bleuâtres qui a été
connue et décrite la première, et c'est à cette forme plus rare qu'il
convient d'appliquer le nom de Sarpedon, pour raison de priorité.
Je compte passer en revue successivement les diverses variétés,
races et formes des Zygœna Sarpedon, Contaminei et Punctum.
J'en ai fait une étude attentive, en m'appuyant sur des documents
relativement importants et provenant d’un grand nombre de
localités. Je serai heureux si je réussis à établir clairement la
situation, telle qu’elle résulte réellement, d’une part, des travaux
déjà publiés depuis la fin du XVIII siècle, et, d'autre part, des
renseignements fournis par la Nature elle-même.
1° Sarpedon, Huebner (Beitreg., Taf. 1; C; II Band, IV Theïl
et Samml., fig. O0).
Graalis; minuta; sudiaphana; alis posticis cerulescentibus;
annello abdomin. unico rubro.
Sarpedon, avec l'ensemble des ailes transparent, un simple
anneau abdominal rouge et le fond des ailes inférieures bleuâtre
ponctué de rougeâtre, a été sommairement décrite par Jacob
Huebner, dans l’ouvrage publié à Augsbourg, en 1790, sous le
titre de Beitrege zur Geschichte der Schmetterlinge; elle se
trouve bien figurée sous la lettre C de la Taf. I du IT Band
(IV Theil) de l'ouvrage en question. D'après Huebner, le papillon
figuré par lui se rencontrerait en Italie et faisait partie de la
célèbre collection Gerning, à Francfort.
Je crois que Sarpedon, en Italie, n’habite que les parties les plus
voisines des Alpes françaises. Huebner a figuré de nouveau la
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 449
même forme à ailes inférieures bleuâtres et avec le même nom de
Sarpedon, sous le n° 9 de sa grande Iconographie, dans la partie
consacrée aux Sphinges. Je possède une douzaine d'exemplaires
cadrant très bien avec les figures données par Huebner, et
notamment quelques-uns chez lesquels les taches des ailes supé-
rieures sont bien séparées. Tous proviennent de Provence; ils ont
été pris à Saint-Pons, par M. Gédéon Foulquier; au col de Bar-
tagne, dans la montagne de la Sainte-Baume, par M. Siépi; à
Hyères, par M. H. Powell, et dans les environs de Digne, par les
chasseurs Cotte et Coulet. La Sarpedon varie un peu; l’anneau
rouge abdominal peut être double et inversement presque nul; les
ailes inférieures peuvent paraitre plus ou moins diaphanes et les
taches rouges des ailes peuvent confluer ou rester séparées comme
dans la figure o de Huebner.
2° Trimaculata, Esper (Æ£wrop. Schmett. IL Theil; Tab. XL ;
Ho 01)
Major, robustior, magis opaca; minus precedenti diaphana; alis
cærulescentibus, anticis 3 maculis rubris; posticis 2 (S); annell.
abdominal. duplo rudro.
Sarpedon var. de Graslin (Awsal. Soc. ent. France; 1863:
PISE then),
Annello rubro abdomin. minimo incomplet.
Vernetensis, Obthr. (Erud. Ent. VIII, p. 28); érimaculata,
Obthr (Etxd Ent. XX; pl. VIII: Ho #140).
Ce qui est assez curieux, c’est que peu d'années plus tard, au
lieu de représenter cette fois la forme la plus commune, c’est-à-dire
celle qui a les ailes inférieures rouges, Esper, tout comme venait
de le faire Jacob Huebner, a figuré, sous les n° 7 et 8 de la
Tab. XL, avec le nom de /rimaculata, une Sarpedon moins dia-
phane, à ailes inférieures également bleues et à double anneau
29
450 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
abdominal rouge. De Graslin a représenté dans les Axx. Soc. ent.
France, 1863, sous le n° 1 de la PI. 8, une Sarpedon, de Vernet-
les-Bains, qu'il a simplement désignée comme variété à ailes infé-
rieures bleues et à anneau abdominal très atténué. De mon côté,
j'ai fait figurer sous le n° 143 de la PI. 8 de la XX° livraison des
Etudes d'Entomologie cette même Zygœna Sarpedon, dont le
fond des ailes inférieures est bleu; je lui avais donné à tort le
nom de Vernetensis, dans la VIIT° livraison des Etudes d'Ento-
mologie, p. 28. J'ai reconnu plus tard mon erreur et Je l'ai confessée
à la page 47 de la XX° livraison des Eudes d'Entomologie. Le
nom de V’ernetensis, Obthr., tombe en synonymie devant le nom
de /7imaculata, Esper, plus ancien d’un siècle.
Cela n'empêche pas que Staudinger et Rebel, dans leur
Catalog 1901, ont admis comme valable le nom erroné de l’erne-
tensis, qu'ils ont cependant défiguré en Vermetensis. Si ces auteurs
avaient pris la peine de regarder les figures et de parcourir les
textes, 1ls auraient joint Vernetensis à leur citation de la fig. 143
de la XX° livraison des Æ/udes d'Entomologie. Ce qu'ils ont
publié dans leur Catalog pour Sarpedon est donc fautif, et
malheureusement, au lieu d’éclaircir la difficulté, Staudinger et
Rebel ont davantage embrouillé la question.
De plus, bien que le mot Vermetensis n'ait aucun sens, tous les
auteurs qui ont écrit sur les Zygæna depuis 1901, au lieu de
recourir à la source, c'est-à-dire à la VIII® livraison des Etudes
d'Entomologie consacrée aux Lépidoptères des Pyrénées, et où
J'établis, à tort, Je le répète, la variété Vernetensis de Sarpedon,
ont aveuglément copié les fautes, y compris celle d'impression du
Catalog 1901.
C'est ainsi que Adalb. Seitz, qui publie un ouvrage que son bas
prix rend populaire, a adopté à tort le terme erroné V’ermetensis,
sans prendre la peine d’en rectifier même l'orthographe. C'est bien
d'essayer d’aller vite; c'est mieux d'aller correctement.
M. Abeille, dans ses intéressantes études sur les Zygæna de
Marseille et de la Sainte-Baume, déclare qu'il possède lAb.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 451
Vermetensis. O puissance fétichiste de certains Catalog! Ils ont
beau être cousus de grossières erreurs, tout le monde est d'accord
le]
pour les croire infaillibles.
T'rimaculata est plus grande et d’aspect plus robuste que
Sarpedon. Rarement les exemplaires ont l'anneau rouge abdominal
double; le plus souvent, l’anneau rouge abdominal tend à s’at-
ténuer et même à s’oblitérer. J'ai réuni environ 75 exemplaires de
T'rimaculata. Ns ont été pris à Vernet-les-Bains (P yrénées-Orien-
tales) ; dans les Alpes-Maritimes, notamment à Castillon, Escarène
et Levens ; aux environs de Digne, et dans le vallon de Saint-Pons,
où érimaculata vole avec Sarpedon.
La forme varie pour l'intensité et le développement de la teinte
bleue sur les ailes inférieures, pour la confluence ou la séparation
des taches rouges. Il y a une grande affinité entre Sarpedon,
Huebner, et #r2maculata, Esper; il n’est pas très rare de trouver
des exemplaires transitionnels qui lient intimement les deux races
dont les individus, parfaitement conformes aux types des auteurs
qui les ont figurés et décrits, sont cependant assez différents
entre eux.
Les noms de Sarpedon, Huebner, et 7'7imaculata, Esper, con-
viennent donc exclusivement aux exemplaires dont le fond des
ailes inférieures est bleu. Cette variation n’a été observée jusqu'ici
mi dans l'Ouest de la France, ni en Espagne. Jamais on ne l’a
rencontrée chez Punctum. Elle atteint, d’après nos connaissances
actuelles, seulement les Zygæena Sarpedon des parties méridionales
de la France : Roussillon, Provence et Nice, et ne paraît pas
affecter les papillons des autres localités où se trouve également
Espèce.
Jusqu'ici, Je n'ai cité que les figures des auteurs : Huebner,
Esper, de Graslin et moi-même ayant représenté la Zygæna
Sarpedon à ailes inférieures bleues.
452 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Il va être maintenant question de l’autre forme, celle dont le
fond des ailes inférieures est rouge. Mais je dois préalablement
signaler une forme quasi-intermédiaire, difficile à identifier exac-
tement à l'époque actuelle, faute de bonnes figures et de types
authentiques. C’est celle qui a été figurée par Boisduval, tant avec
le nom de Sarpedon qu'avec le nom de Balearica, dans l’Æssar
sur une Monographie des Z'ygémides paru en 1820.
La Sarpedon, dont Boisduval représente le G' et la ©, sous les
n° 7 et 8 de la PI. 2, est assez voisine, me semble-t-1l, de la Sar-
pedon initialement décrite et figurée par Huebner; cependant la
Sarpedon de Boisduval a les ailes inférieures beaucoup moins
bleues. La Balearica, figurée sous le n° 5 de la même PI. 2, aussi
bien que la Sarpedon figurée et décrite par Boisduval, dans son
Essai, sont des formes transitionnelles et indécises; toutes les
deux sont indiquées par Boisduval, avec les ailes antérieures :
subdiapharnis. Chez Balearica, les ailes inférieures sont dites :
« subdiaphanis rubris, limbo lato cyaneo »; chez Sarpedon, la
diagnose latine est ainsi rédigée pour les ailes inférieures :
« postiais diaphanis rubris, dilutioribus, margine latiori, sinuato,
plumbeo ». [Il y a donc bien peu de différence entre les deux :
Sarpedon et Balearica. Dans la collection Boisduval, 1l y a des
Sarpedon, sans indication de localité, anciennes, mais bien con-
servées. Les figures de l’Æssai sont très grossières; il est difficile
de dire si elles se rapportent, où non, à quelqu'un des exemplaires
de la collection Boisduval existant encore; cependant il me paraît
bien peu probable que les exemplaires de Balearica et Sarpedon
figurés dans l’Essai de Boisduval aient été conservés par lui.
Autrefois on se souciait trop peu de conserver les specimina
typica. Ainsi que je l’ai rapporté au sujet de la Psyche bicolorella,
on remplaçait volontiers un vieux type par un exemplaire plus
frais, sans même faire attention aux différences pouvant exister
entre le vieil exemplaire et le nouveau. D'autre part, comme cer-
taines Planches laissent beaucoup à désirer (ainsi celles de l’Æssaz
chez lesquelles la nervulation n'a été l'objet d'aucune attention),
il devient parfois bien difficile d'identifier exactement une race
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 453
ou une forme, d'autant plus que trop rarement la provenance du
spécimen figuré se trouve indiquée. Boisduval laisse ignorer d'où
viennent les exemplaires de Sarpedon et Balearica figurés dans
RESSaz:
Dans l’/cones, Boisduval figure sous le n° 1 de la PI. 54, avec
le nom de Palearica, une Zygœna Sarpedon que, cette fois, 1]
indique comme venant de Cadix, communiquée par M. Pierret.
« Les ailes inférieures sont rouges, dit Boisduval, avec le liséré
bleu encore plus étroit que dans punctum ». Après avoir décrit
cette nouvelle Balearica (1834), Boisduval fait loyalement le
procès de la figure publiée par lui-même dans lÆssat (1820).
« La figure que nous en avons donnée dans notre Monographie,
dit-il, est mauvaise et inexacte; la bordure des ailes a été trop
largement gravée et le point discoïdal n’a pas été indiqué. » Dès
lors, il y aurait peu d'importance à attacher à la figuration publiée
par Boisduval dans l’Essai sur une Monographie des Zygénides.
Je renonce donc à en faire état, pour rester dans des données
plus certaines et ne rien établir de douteux et peut-être de faux,
imitant en cela Rambur à la page 168, en note, du Catalogue
systématique des Lépidoptères de l'Andalouste.
Duponchel a figuré sous le n° 3 de la PI 5 du Supplément;
Zygénides (1835), avec le nom de Balearica, une Zygæna parais-
sant être la même que celle figurée par Boisduval dans l’/cones.
Rambur a représenté Sarpedon à ailes rouges, sous le n° 8 de
la PL 12 de la Faune de l'Andalousie (1830), et a décrit dans Île
Catalogue systématique qui porte la date de 1858, en lui donnant
le nom d’Aispanira, la forme à ailes diaphanes et peu colorées
qui se trouve plus spécialement en Espagne.
Enfin Herrich-Schaeffer a produit la meilleure figure de la
Sarpedon robuste et à ailes inférieures rouges, telle que nous la
trouvons le plus ordinairement dans les Pyrénées-Orientales, sous
le n° 51 de la Tab. 7 des Zygeænides Europ. Le même auteur a
représenté avec le nom de balearica, la forme plus pâle, sous je
Heidela Tab
454 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Je vais tâcher d'identifier exactement ces diverses descriptions
et les figures qui s’y rapportent, laissant seulement de côté, ainsi
que Je l’expose plus haut avec les raisons déterminantes, ce que
Boisduval a publié dans l’Essai de 1820.
3° Hispanica, Rambur (Car. Syst. Andal. p. 167, 168).
Maxime diaphana; pallidior; anticis punctis rubris tribus mi-
nutlis; posticis roseis, ad basim hyalinis.
Rambur a établi le nom de Wispanica pour la variété de Sar-
pedon venant d'Andalousie et de Castille, si pâle que les papillons
sont à moitié transparents, avec les taches rouges pâlies et très
diminuées, pâleur qui ne tient pas seulement, dit Rambur, à ce
que les écailles sont moins nombreuses, mais à ce qu’elles sont
moins colorées; dans cet état, les deux segments rouges de
l’abdomen sont toujours bien visibles.
Rambur ajoute que l’Æispanica est très répandue dans toute
l’Andalousie, surtout sur le littoral, — ce qui n’est pas mon avis, —
pendant les mois de mai et juin; la chenille qu'il a souvent ren-
contrée, dit-1l, vit sur les Æryngium campestre et maritimum, et
d’après ses descriptions, elle ne présente aucune différence d’avec
celle de la Sarpedon de Touraine.
La chenille de Sarpedon vit en effet sur les Zryrgium, plantes
de la famille des Ombellifères, communément appelées : panicaut
et chardon-roulant, dont les espèces sont répandues sur les sables
maritimes des côtes de la Manche, de l'Océan et de la Méditer-
ranée, dans les terrains arides et surtout calcaires, parmi les
éboulis de rochers, et au milieu des hauts pâturages des Alpes et
des Pyrénées.
Le mot Æyyngium vient du grec ÆErygma, qui veut dire :
éructation, par allusion à de prétendues propriétés médicinales.
La Æispanica, Rambur, vole communément à J'Escorial, en
juillet; j'en possède 28 exemplaires pris dans cette localité les 29
et 30 juillet 1870. J'ai reçu Æispanica de feu Aurelio Vasquez,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 455
qui la capturait près de Madrid. De plus, ma collection contient
des exemplaires pris à la Sierra-de-Alfakar; à la Sierra-Nevada,
du côté de Huejar; à Grenade (dont une paire rapportée par
Rambur); à Villaviciosa-de-Odon (Castille); donc très loin du
littoral. Ce n’est pas Æispanica, c'est Balearica qui se trouve sur
les côtes de l'Espagne.
La AHispanica offre parfois une particularité signalée par
Rambur, c’est que la tache externe des supérieures est plus dilatée
que chez la Sarpedon et tendant à produire une tache supplé-
mentaire. J'ai un @ de la Sierra-de-Alfakar et une © de Villa-
viciosa-de-Odon qui présentent cette dilatation de laquelle résulte
une tache supplémentaire inférieurement contiguë à la tache
normale.
Exceptionnellement la forme diaphane Aispanica, mais privée
de la tache supplémentaire, se rencontre dans les Pyrénées-
Orientales, où 4 d' ont été recueillis en juillet 1886 et en juillet
1805. 2 de ces exemplaires ont l'abdomen presque entièrement
dépourvu d'annulation rouge. Dans la Charente-Inférieure (Dom-
pierre-sur-Mer) et en Provence (Vallon de Saint-Pons), on trouve
des individus tout à fait référables à Æispanica, mais à titre
aberrant et non normal.
4° Balearica, Boisduval (/cones, PI. 54, fig. T).
Sarpedon, var. Obthr. (Anales Soc. Hist. Nat. Esp., 1875,
Pl. 7)
Annello abdomin. rubro: macula rubra externa anticarum bilo-
bata; nec diaphana; macula rubra minima ad originem cellule.
C'est la forme qu’on trouve sur les côtes de l'Espagne, notam-
ment à Carthagène, et que Boisduval a décrite d'après un individu
de Cadix, communiqué par M. Pierret. Mon frère a pris à Car-
thagène 3 exemplaires dont l’un, que jadis J'ai offert à feu mon
ami J. Fallou, doit encore figurer dans sa collection déposée au
Muséum national, à Paris.
456 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
La Balearica, Bdv. (/cones), est d'un rouge vermillon, non
carminé; les ailes ne sont pas diaphanes; la coloration générale
est opaque; la tache rouge externe est inférieurement accompagnée
d'une petite tache supplémentaire qui lui est contiguëé; il y a un
point rouge dans l’espace cellulaire, à l’origine de la fourche que
forment les nervules; la tache rouge inférieure conflue avec la
tache basilaire et remplit avec elle l’espace intranervural; l'anneau
rouge abdominal est double ou simple; la bordure bleue des ailes
inférieures est étroite et non développée; je crois qu’on peut rap-
porter à la Balearica figurée par Boisduval, celle représentée par
Rambur (faune de l'Andalousie, PI. 12, fig. 8), dont la tache
rouge externe est bilobée, et la Balcarica représentée par Duponchel
(CS232%7%, Pl Ve);
5° Dalmatina, Boisduval (Zcones, PI. 54, fig. 2); Duponchel
(Supplém. Zyg, PI V, fig. 2).
Precedenti similis; sed abdomine toto nigro, absque annello
rubro, differt.
Ne diffère de Balearica, Boisduval (Zcones, PI. 54, fig. 1), que
par son abdomen tout noir et dépourvu d’anneau rouge. C'est cette
Dalmatina que Staudinger a appelée Contamineoides dans les
éditions IT et III de son Catalog. Mais le nom Dalmatina est bien
plus ancien et 1l n'existe aucune raison d'en faire fi, d'autant plus
qu'il est éclairé par des figures bien exécutées.
Herrich-Schaeffer a représenté Dalmatina sous les n* 59 et 60
de Ja Tab. 8 des Zygænides Europ. Je possède 11 Dalmatina
prises en Sicile. Dalmatina a probablement pour synonyme, outre
Contamineoides, \a Zygœna Ledereri, Rambur, décrite dans le
Catal. Syst. Andal., aux pages 160 et 170, et mal figurée sous le
n° 0 de la PI. 1. Le nom Contaminecides Stgr. n’a pas plus raison
de subsister que le nom Vernetensis, Obthr. Ces deux noms
tombent en synonymie et doivent être supprimés de la Nomen-
clature entomologique.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 457
6 Carmencita, Obthr.
Sarpedon, Herrich-Schaeffer (Zygænides Europ, Tab. 7,
fig. 51).
Posticis rubris, limbo cæruleo nec lato; anticis 3 maculis rubris
intensius pictis; macula externa tinteriore rubra frequenter ad
basalem maculam rubram confluente; thorace plus minusve albes-
centi,; abdomine rarius nigro toto; sæpe abdomine rubro annellato
aut biannellato.
Herrich-Schaeffer à publié une bonne représentation de la
forme la plus ordinaire en France de la Zygœna Sarpedon.
L'aspect est robuste; la taille relativement assez grande; les
couleurs ne sont point diaphanes, mais opaques; le fond des ailes
supérieures est d’un bleu verdêtre foncé; l’espace basilaire est tout
entier maculé de rouge carminé, finement divisé en trois parties,
par les nervures; les deux taches rouges des ailes supérieures,
l'extracellulaire et l’infracellulaire sont grosses, assez nettes; les
ailes inférieures sont rouge carmin vif, avec le trait dépourvu
d’écailles qui part de la base, bien apparent; la bordure des ailes
inférieures n’est pas très large et de la même teinte bleu verdâtre
que les supérieures; l’avant-dernier anneau abdominal du ' est
rouge; mais on peut trouver les formes inverses, c'est-à-dire avec
double anneau rouge et sans aucun anneau rouge; le thorax peut
être noir ou bien offrir une pilosité grisätre plus ou moins impor-
tante.
C'est cette forme qui, en France, représenterait micux l’Espèce.
On la trouve surtout dans les Pyrénées-Orientales, d’où ma
collection contient environ 350 exemplaires.
La Carmencita (Sarpedon, H.-S. 51) se trouve en outre, à ma
connaissance, aux Sables-d'Olonne (Vendée); à Sarzeau (Mor-
bihan); au Pouliguen (Loire-Inférieure); à Castillon, Escarène,
Borson et Levens (Alpes-Maritimes) ; dans les Bouches-du-Rhône
et les Basses-Alpes, en mélange avec d’autres formes; à Albarracin
(Espagne); à Dompierre-sur-Mer (Charente-Inférieure).
458 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Dans la Lozère, l'Aveyron et l’Orléanais, 1l y a une autre forme,
aux ailes plus élancées, présentant quelquefois une curieuse dispo-
sition de variation. Il s’agit de la réunion de la bande rouge
inférieure au point rouge supérieur. La tache basilaire rouge
conflue avec la tache rouge inférieure, forme une tache allongée
unique, et de là remonte, en décrivant une légère courbe, à la
rencontre de la tache externe supérieure. D’autres Entomologistes
n'hésiteraient peut-être pas à donner le nom d’elongala à cette
forme plus allongée; mais elle rentre effectivement dans la caté-
gorie des Carmencita. En surchargeant la nomenclature de déno-
minations nouvelles pour des variations d’une importance très
secondaire, ainsi qu'aime à le faire Fruhstorfer, il me semble
qu'on fait naître plutôt du trouble qu’un supplément de lumière.
Je dois citer une Aberration jaune remarquable :
Ab. flava, Obthr. {Etud. Ent., XX ; PI. VIII, fig. 142); Millière
(Mconosr A Po EE 0) p 170)
Maculis anticarum alarum posticisque alis flavis pro rubris.
Vernet-les-Bains (Obthr.); ex coll. Donzel, sans indication de
patrie (Millière).
La Balearica, Herrich-Schaeffer (Zygœnides Europ, Tab. I,
n° 2), me paraît pouvoir rentrer dans le cadre de Carmencifa,
comme petite forme, présentant l’Aberration par confluence de la
tache rouge externe inférieure avec la tache rouge basilaire. Cette
Balearica, H.-S., 2, ne semble pas pouvoir être assimilée à la
Balearica, Bdv. (JZcones).
7° Contaminei, Boisduval (Zcones; PI. 53, fig. 4 et 5); Herrich-
Schaeffer (Zygænides Europ., Tab. I, fig. 1).
Alis anticis subdiaphanis, macula rubra inferiore ad maculam
basalem confluente, propterea elongata, exteriore minuta; posticis
rubns, limbo nigro-cerulescenti, nec lato; abdomine nigro, absque
annello.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 459
C'est la forme spéciale de Sarpedon dans les montagnes des
Hautes-Pyrénées. Contaminei varie très peu. Il est extraordinaire
de constater, comparativement à la variabilité de l'Espèce d’où elle
dérive, la fixité de cette race qui paraît confinée dans les Hautes-
Pyrénées, vers l'altitude d’au moins 1,700 mètres. Je l’ai prise dans
la vallée de Cambasque et sur les pentes au-dessus et autour du
lac de Gaube; M. Rondou la recueille assez abondamment, cer-
taines années, dans la vallée du Cambieil, à la montagne de
Saugué et à la côte de Pouyaspé (Catal. raisonné des Lépid. des
Pyrénées, 1003). II m’a semblé que Contaminei avait des années
d’abondance et qu’elle était presque nulle certaines autres années.
Boisduval a décrit la Zygœna Contaminei dans l’/cones, à la
page 48, et a fait représenter le G' et la © sous les n°” 4 et 5 de
la PI 53. Duponchel en a publié une figure très peu exacte, sous
le n° 2 de la PI V du Supplément-Zygénides. Je ne crois même
pas qu’elle s'applique à la vraie Contaminei. Les parties rouges
des ailes supérieures sont trop développées et d’une couleur trop
vermillon.
La Zygœna Contaminei fut découverte dans les environs de
Barèges (Hautes-Pyrénées), par M. le capitaine de Contamine,
du régiment des Lanciers de Nemours, qui tenait alors garnison
à Tarbes.
La chenille de Contaminei vit sur l'Eryngium Bourgati, plante
vivace, bleuâtre, très épineuse, ayant des feuilles coriaces et des
fleurs bleues. Cette Ombellifère est décrite et figurée à la page 156
du Vol. IT de la Flore descriptive et illustrée de France, par
l'abbé H. Coste, chanoine honoraire de Rodez, l’un de nos plus
savants botanistes français.
8° Punctum, Ochs.-Boisduval (Zcones, PI. 53, fig. 3).
Abdomine toto nigro; maculis rubris extensis, confluentibus;
macula rubra parva ad furcam, inter ramos subcostal. et med.
La Z. Punctum est extrêmement commune dans la partie cen-
trale et méridionale de l'Italie. M. Fabresse l’a capturée en grande
460 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
quantité à Paternopoli et dans diverses localités de la province
d'Avellino. M. G. Leoni l’a récoltée aux environs de Cerchio,
dans les Abruzzes, et M. Zickert l’a recueillie, à la fin de juin 1907,
au Monte-Castello, par une altitude d'environ 600 mètres, et à
Bagnoli Irpino.
Il est impossible de séparer spécifiquement Punctum de Sar-
pedon; 1l y a des exemplaires de Sarpedon à Vernet-les-Bains
(Pyrénées-Orientales), rigoureusement identiques à des Panctum
de Cerchio, et des Punctum tout à fait pareilles aux Sarpedon
(Carmencita) de la Loire-Inférieure et des Bouches-du-Rhône.
Seulement en Italie, l'abdomen de Punctum est toujours tout noir
(du moins d’après ce que je connais), tandis qu'en France, l’ab-
domen n’est noir qu’exceptionnellement.
J'ai mis dans ma collection, auprès l’un de l’autre, un O' de
Cerchio, un © du Pouliguen et un G' des Bouches-du-Rhône.
Tous les trois montrent une petite tache rouge, située dans la
fourche, à l’origine des nervules sous-costale et médiane, et pré-
sentant une parfaite similitude des autres taches rouges sur les
ailes supérieures. Les ailes inférieures sont absolument pareilles
dans les trois exemplaires. L’abdomen de Punctum provenant de
Cerchio est tout noir; l'abdomen de Sarpedon-Carmencita capturé
au Pouliguen, le 10 juillet 1004, et dans les Bouches-du-Rhône,
est doublement annelé de rouge.
Mais il convient de dire que le © Punctum comparé aux
Sarpedon-Carmencita est légèrement aberrant par rapport aux
autres Zygæna Punctum italiennes. De même le © Sarpedon-
Carmencita, de Vernet-les-Bains, qui, à part un peu de rouge sur
le dessus et sur les côtés de l'abdomen, est un véritable Pynctum,
bien conforme à la forme italienne de Punctum la plus répandue,
est un sujet aberrant, comparativement à la masse des Sarpedon-
Carmencita, de Vernet-les-Bains, que représente très bien la
figure 51 de Sarpedon publiée par Herrich-Schaeffer. J'ai placé
dans ma collection, comme je l’ai fait pour l’autre exemple cité
plus haut, le G de Vernet et un G' de Cerchio, tout près l’un de
l’autre. Celui de Vernet provient certainement de Vernet; il n'y a
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 461
pas de doute possible; 1l à été authentiquement recueilli à Vernet,
pendant l'été 1806. A part la tache rouge abdominale et la couleur
des pattes un peu plus foncée dans l’exemplaire de Vernet, il
n'y a pas de différence appréciable entre les deux O' : celui des
Pyrénées-Orientales et celui des Abruzzes.
Je suis convaincu d’être tout à fait dans le vrai en réunissant
spécifiquement Punctum à Sarpedon. D'ailleurs les chenilles et
les coques dans lesquelles s’enferment les chrysalides paraissent
semblables. Voilà donc à quelles constatations servent les longues
séries d'exemplaires classées dans les collections. Mais combien
nous connaissons peu la faune européenne des Lépidoptères! Il
serait cependant grand temps de recueillir les documents utiles
avant toutes les destructions de la flore et de la faune dont nous
sommes les témoins, et qui sont constamment effectuées partout
en Europe, sous prétexte de nécessités industrielles.
Zygæna Achilleæ, Esper.
Les premières figures de la Zygena Achilleæ sont dues à
Eugenius Johann Christoph Esper qui, dans la deuxième partie
de son ouvrage intitulé : Die Schmetterlinge in Abbildungen nach
der Natur mit Beschreibungen, publié à Erlangen, en 1770, a
représenté, sous les n°” 1 a et 1 à de la Tab. XXV, l’'Espèce qu'il
décrit à la page 180, d’après des exemplaires trouvés en Franconie.
Esper commence ses observations en ces termes : « Der Sphinx
À chilleæ ist eme ganz neue Entdeckung in unserm Franken. Wir
haben sie den Bemuehungen des Herrn Kammerrath Jung zu
Uffenherm zu danken ». C’est donc la forme géographique de
Franconie qui est le type de l'espèce.
En France, la Zygœna Ackilleæe, dont la chenille ne vit nul-
lement sur l’Achillea millefoliim, pas plus que sur toute autre
Espèce du genre A c/zllea, plantes de la famille des Composées,
mais bien sur les Coronilla, les Astragalus, le Lotus corniculatus,
les Z'rifolium, V'Hippocrepis comosa, appartenant toutes à la
462 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
famille des Papilionacées, est répandue dans les plaines calcaires
et les basses montagnes. Elle ne s'élève pas à une grande altitude
et Je ne l’ai jamais vue à plus de 1,500 mètres. Elle ne se trouve
ni en Angleterre, ni en Algérie.
La Zygenra Achilleæe éclôt en mai et juin en Toscane, dans les
Charentes et aux environs de Paris, de Digne et dans les Alpes-
Maritimes, tandis qu'à Cauterets et dans les Alpes, elle vole un
peu plus tard, à partir de la fin de juin et Jusque vers le 25 juillet.
En France, la forme qui peut être considérée comme la plus
voisine de celle de Franconie paraît être celle de la Franche-Ccmté
et de la Savoie, à laquelle se relie la race parisienne. Je regrette
de ne pas bien connaître, c’est-à-dire avec de longues séries d’exem-
plaires classés par localités bien définies, les races allemandes,
probablement différentes, suivant les régions, de la Zygæna
Ac/ulleæ. Je crois d’ailleurs que les Zygæna allemandes n'ont
Jamais été jusqu'ici l’objet d'aucune étude comparative établie sur
des documents un peu importants; mais comme c’est la faune
française qui m'occupe principalement dans le présent ouvrage,
ce sont par conséquent les diverses expressions et manifestations
de la Zygæna Achilleæ en France et dans les contrées limitrophes,
notamment en Suisse et en Italie, à l'étude desquelles je vais
procéder.
1° Forme type de Paris; Doubs; Savoie; Gers; Vallée
du Rhône;
et 2° Région Charentaise et Girondine (yzrzacea, Obthr.).
La forme des plaines de la France centrale est sans doute celle
que Duponchel a décrite et figurée dans le Szpplément-Zygénides;
PI. IV; Q fig. 6a; C' fig. 6 6. Le Ca le fond des ailes supérieures
d'un bleu d’acier quelquefois un peu verdâtre, avec les taches
d’un rouge vermillon plus ou moins carminé. Quelquefois le fond
des ailes supérieures, surtout près du bord interne, est grisâtre;
mais d’une manière moins accentuée que chez la ©, dont le fond
des ailes est presque toujours entièrement grisâtre. Les taches
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 463
rouges sont généralement au nombre de 5 : 2 à la base, à peme
séparées l’une de l’autre par la nervure qui est comme la racine
d’où partent les nervules costale et médiane; la 3° occupe la nais-
sance de la fourche, entre les nervules costale et médiane; cette
3° tache est souvent liée par confluence à la tache basilaire costale
qui se prolonge jusqu’à elle. La 4° tache externe inférieure est
située au-dessous de la nervule médiane et au-dessus de la sous-
médiane. La 5°, qui est relativement très grosse, est formée par la
réunion de deux taches qui peuvent se séparer dans certains cas
et s'isoler l’une de l’autre; elle est située au delà de l’espace
cellulaire.
Il y a un double collier blanc; le corps est d’un noir bleuâtre;
en France, je n'ai jamais vu d'exemplaires chez qui l’abdomen
soit annelé de rouge.
L'Espèce est très commune en mai et juin à Dompierre-sur-Mer,
à Angoulême, à Villeneuve-de-Blaye (Gironde). Quelquefois les
taches rouges des ailes supérieures, même chez le ©, paraissent
légèrement entourées de blanchâtre. Fréquemment les taches
rouges confluent de façon à former comme une unique tache rouge
plus développée encore que chez purpuralis (Minos) et présentant
un aspect analogue. Toutes les transitions existent entre les exem-
plaires chez lesquels les taches rouges sont plus isolées les unes
des autres et ceux où elles sont d’une confluence plus développée.
C'est la race des Charentes, dont les taches rouges sont de la
nuance la plus vermillon et dont les © sont généralement d’un
gris verdâtre plus clair et se rapportant mieux à la figure 6a de
la PI. IV du Supplément de Duponchel. Les À cAtlleæ des environs
de Paris (forêt de Carnelles; 35 exemplaires pris le 20 mai 1909)
sont d’une teinte plus pâle, moins vive et d’un aspect plus assombri.
Je compare environ 800 exemplaires des Charentes et de la
Gironde à ceux des environs de Maintenon, de Bondy, de Vichy,
de Besançon, d’Aix-les-Bains et de diverses localités autour de
Paris, et je constate que nulle part ailleurs que dans les plaines
calcaires de l'Ouest de la France, la forme de la Zyzœna Achilleæ
n’atteint un égal degré de vivacité dans les couleurs et de déve-
404 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
loppement des parties rouges aux ailes supérieures. Je donne à
cette race le nom de wzn1acea.
Me basant sur les figures publiées par Esper, et en attendant
cependant d'être mieux informé au moyen d’une comparaison qui
serait établie avec de nombreux exemplaires d’Aczilleæ, provenant
de Franconie, il me semble qu'il est raisonnable de considérer
comme appartenant à la forme type de l’Espèce Ac/zllee, les
formes géographiques françaises répandues dans la région pari-
sienne, le Doubs et les basses montagnes de Savoie, les environs
de Lectoure (Gers), ainsi que celles habitant en Suisse la vallée
du Rhône.
LI
Ab. flava, Herrich-Schaeffer (fig. n°* 64, 65, 66 et 67); Obthr.
(Etudes d'Entomol., XX: liv., PL 8, fig. 140).
Ainsi que Je le rapporte à la page 43 de la XX° livraison des
Etudes d'Ent, je possède 7 exemplaires de l’Ab. #ava, pris
autrefois dans la forêt de Bondy, près Paris, par un garde qui
s'était fait une spécialité de la recherche de cette Aberration. La
localité a changé de face et j'ai entendu dire que ce serait bien
en vain qu'on rechercherait aujourd’hui sur le territoire de Bondy
les papillons que nos devanciers y rencontraient jadis.
3° Hautes-Pyrénées (1545, Obthr.).
Aux environs de Cauterets, sur les fleurs, le long du chemin qui
descend des bains de la Raiïllère vers la ville, on rencontre une
race d'Aczilleæ à laquelle j'ai donné le nom de #r2s45, qui désigne
l'aspect sombre du papillon. Le fond des ailes supérieures est
d’une teinte verdâtre ou bleuâtre un peu bronzée; les taches rouges
des supérieures et le fond des inférieures sont d’une nuance car-
minée qui manque de vivacité; l'aspect général est assez terne.
Ordinairement, chez Aczilleæ tristis, les taches rouges sont de
dimension moyenne; assez souvent la tache basilaire inférieure et
l’externe inférieure comprises entre les nervules médiane et sous-
médiane confluent. J'ai trouvé, une fois, l’Ab. brunnea, chez
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 465
laquelle les parties normalement rouges sont remplacées par ure
couleur café au lait. Cette Ab. érunnea, Obthr., est relatée à la
page 160, dans le Catalogue des Lépid. des Pyrénées, 1003, par
Rondou; mais une faute a été commise dans le texte où 1l est dit :
« Tout ce qui est rouge dans le type est ver dans cette Aber-
ration ». C'est brun qu'il aurait fallu imprimer, au lieu de vert.
Mon frère a capturé à Cauterets un exemplaire que J'ai fait
figurer sous le n° 125 de la PL 7 de la XX livraison des Ezudes
d'Entomologie; il est placé, sur la Planche ?, entre le n° 124 qui
représente une Zygæna purpuralis (Minos) normale, de Cauterets,
et une Aczilleæ-tristis, hgurée sous le n° 126. Ce n° 125 est parfai-
tement intermédiaire entre les n° 124 (purpuralis) et 126 (Acil-
leæ-tristis). Est-ce un hybride naturel de purpuralis et Achillee ?
Achilleæ s'accouple volontiers avec d’autres Espèces de Zygæna,
telles que purpuralis et flipendule,; et maintes fois ces unions
hybrides ont été observées d’une façon indubitable; je déclare,
en présence du papillon que j'ai sous les yeux, ne savoir à laquelle
des deux Espèces : purpuralis et Ackillee, il vaudrait mieux le
rapporter, et je le considère comme étant probablement lhybride
naturel issu de l’accouplement de purpuralis et d’'Achilleæ; mais
je ne possède aucune preuve et Je n'exprime qu'une opimon.
Achilleæ-tristis donne parfois l’'Ab. /anthina Boisduval, à 5
ou 6 taches rouges, réduites et bien séparées, aux ailes supérieures.
Il sera plus loin amplement question de cette Ab. /anthina. Aux
environs d’Innsbruck, au Tyrol, AcÆzlleæ donne une forme aux
couleurs éteintes, voisine de /154i5s de Cauterets.
Ce qui est curieux, c'est que la forme d’Aczrlleæ prise par
M. Dayrem, à Lectoure (Gers), et dont j'ai devant moi un grand
nombre d'exemplaires, n’a aucune conformité ni avec la race
charentaise et girondine #z2macea, ni avec la race pyrénéenne
tristis. Dans le Gers, la forme d’Aczilleæ, avec les taches d’un
rouge carmin vineux assez vif, non pas terne comme chez #725415,
et ne tendant pas au vermillon comme dans les Charentes, res-
semble plutôt à la race de Suisse, de Franche-Comté et de Savoie
qui me semble référable à la forme de Franconie, primitivement
30
466 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
décrite et figurée par Esper, ainsi que je l’expose ci-dessus. Il est
cependant bizarre de constater que, malgré sa position géogra-
phique entre les régions girondine et pyrénéenne, le Gers, en ce
qui concerne la forme de Zygæna Achilleæ, se rattache plutôt à
la région orientale.
4° Basses-Alpes et Isère (4/pina, Obthr.).
Je désigne cette ferme avec le nom de alpina.
I] me semble que c’est celle dont Boisduval a donné la figure
dans l’/cones, sous les n° 6 et 7 de la PI. 53, et qu'il y a décrites
aux pages 49 et 50.
A clulleæ-alpina est caractérisée par la couleur rouge carmin et
non vermillon, aussi bien des taches aux ailes supérieures que des
ailes inférieures. La confluence des taches rouges, à partir de la
base des ailes supérieures, est fréquente, ce qui ne se remarque
généralement point chez Wagneri-Achilleoides et chez Tripto-
Lemus, dont il sera question plus loin. Aux environs de Digne et
d'Uriage, où AcAilleæe vole abondamment en mai, se trouvent en
effet assez souvent des exemplaires pourvus d’une confluence
conforme à celle que représente la figure 6 de l’Zcones. Les Q ont
ordinairement le fond des ailes d’un gris verdâtre. Le double
collier blanc existe. La forme de Digne que j'ai appelée A/pina
est spéciale; J'en ai environ 300 exemplaires sous les yeux, et ces
papillons présentent dans leur ensemble un aspect bien particulier,
comparativement à ceux des autres localités. Mais il est toujours
utile d'observer que partout on peut trouver, au milieu des exem-
plaires appartenant à la forme normale du lieu, des individus qui,
par aberration plus ou moins fréquente, se rapportent mieux à
ceux qui constituent la forme normale ailleurs. J'ai fait cette
observation pour Sarpedon et Punctum; elle semble également
justifiée dans le cas des diverses races locales d’A ckillee.
En examinant une colonne de plus de 20 Zygæna À chlleæ-
alpina à taches confluentes, et dont la confluence évolue confor-
mément à la figure 6 de la PI 53 de l’/cones, je remarque quelques
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 467
exemplaires chez lesquels cette confluence des taches rouges aux
ailes supérieures est si développée que ces papillons ressemblent
tout à fait à la Zygœna purpuralis (Minos); cependant ils ne
parviennent pas, sous ce rapport, au même degré que ceux des
Charentes. Inversement je remarque la tendance des Ac/illeeæ,
dans les localités élevées des Basses-Alpes, à devenir conformes
à la /anthina, Boisduval (/Zcones, PI. 53, fig. 8). Chez Janthina,
le fond des ailes supérieures est d’un bleu verdâtre un peu bronzé,
comme le dit Boisduval dans sa description; les taches rouges
sont petites. La première /ax/lina décrite par Boisduval dans
PÆssaz et figurée sous le n° 7 de la PL 8, n’a réellement que
5 taches rouges aux ailes supérieures, savoir : 2 petites basilaires ;
la 3° arrondie et petite également, située dans la fourche, à la
naissance de la cellule; la 4° inférieure externe, ronde et pas bien
étendue; la 5° extracellulaire petite et simplement suivie inférieu-
rement d’un prolongement linéaire très faible. Je ne possède,
venant des Basses-Alpes, en outre du specimen typicum Borsdu-
valianum, qu'un autre O' semblable, également à 5 taches. Bois-
duval avait pris /anthina à Bourg-d'Oysans, dans l'Isère.
C'est un papillen très vieux, mais encore bien conservé. La
Zygæna Vice, Huebner, fig. 11, paraît être une /anthina dont
le fond des ailes supérieures est plus clair. Ma collection contient
une /anthina piémontaise se rapprochant un peu de Vzciæ, mais
cependant plutôt référable à /anthina. D'ailleurs je reparlerai de
Janthina à propos de la forme florentine d’A c/llee.
5° Italie centrale {7 7:p/olemus, Huebner).
En Toscane, la Zygœna Achilleæe donne la forme 7'riptolemus
Huebner (n°* 06 et 07), et l’Ab. /anthina, Boisduval (essai Mono gr.
sen, Pl OVITT ho. 7 et Zcones, PL 53, fo: 8).
Le fond des ailes supérieures, dans la forme florentine normale,
est d’un bleu d’acier parfois légèrement verdâtre; les taches
rouges sont carminées ; la basilaire costale est relativement longue ;
on voit une tache rouge assez grande, à la naissance de la fourche,
468 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
entre les nervules costale et médiane, et une autre assez grosse
tache rouge au delà de l’espace cellulaire; cette tache est composée
de deux taches confluentes; enfin à la base, entre les nervules
médiane et sousmédiane, il y a une tache rouge assez grosse, mais
s'arrêtant court et ne semblant pas tendre à confluer avec la tache
rouge externe qui est située un peu plus loin.
La Zriptolemus, bien représentée par Huebner, est la race qui
est très commune aux environs de Florence, à la fin de mai et au
commencement de juin. Certaines Q ont un soupçon d’entourage
blanc autour des taches rouges de leurs ailes supérieures. Quelques
Q ont le fond des ailes supérieures d’un gris verdâtre clair.
Il y a des exemplaires G' dont les taches rouges des ailes supé-
rieures sont très réduites; la grosse tache rouge supérieure externe
ordinaire est alors remplacée par deux petits points rouges séparés
l’un de l’autre, ou même par un seul; le point inférieur ayant
disparu.
Ces exemplaires sont conformes à l’Ab. /anthina, décrite et
figurée par Boisduval, premièrement dans l’Essas sur une Mono-
graphie des Z'ygénides, 1820, p. 45, 46, et PI. VIII fig. 7, d’après
un exemplaire à 5 taches aux ailes supérieures recueilli à Bourg-
d'Oisans (Isère), par Boisduval lui-même; secondement dans
l’/cones, 1834, p. 51 et PI. 53, lg. 8, d’après un individu à 6 petites
taches toutes séparées, les unes des autres, sauf les basilaires. Le
fond bleu des ailes et la teinte rouge diffèrent un peu d’A czil-
leoides; autrement Ackilleoides et surtout Wagneri présentent le
même caractère que /anthina, relativement à la réduction du
nombre et de la grosseur des taches rouges des ailes supérieures.
Le double collier blanc est généralement bien marqué.
Sur près de 109 exemplaires que J'ai pris à Florence, en juin
1907, un seul O' a les 2 taches rouges comprises entre les nervules
médiane et sous-médiane, confluentes. Mais on remarquera la
confluence très fréquente de la tache rouge costale basilaire des
ailes supérieures et de la tache rouge qui est à la naissance de la
fourche formée par les nervules costale et médiane. Cette con-
fluence n'existe pas dans tous les exemplaires de Florence; mais
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 469
chez de nombreux individus de cette localité, la confluence se
remarque bien conforme à ce qui est représenté sur les figures
n° 06 et n° 07 de l'ouvrage de Huebner.
A Florence, Achilleæ-Triptolemus est très abondante dans un
petit bois de chênes qui se trouve à mi-côte, en face de la Poudrière.
Elle habite avec sa congénère Oxytropis; mais elle est plus abon-
damment représentée que celle-ci. Le matin, elle se tient posée sur
les brins d'herbe et il est aisé d’en faire une ample récolte.
6° Alpes-Maritimes (Ac/zlleoudes, Wagner, et Wagneri,
Millière).
La Zygæna Wagneri fut décrite et figurée par feu Millière,
dans les Annales de la Société entomologique de France, 1886,
aux pages 6, 7 et 8, et sur la PI. I; les figures 3 et 4 représentant
la larve; la figure $ donnant la coque et les figures 6 et 7 étant
consacrées à l’imago.
Je suis très étonné de lire dans l'ouvrage du D" Adalbert Seitz :
Les Macrolépidopières du Globe, à la page 21 de la traduction
française, à propos de la Zygœna Wagneri, ce qui suit : « Cette
espèce ne se rattache directement à aucun autre groupe ».
Evidemment le D' Adalbert Seitz ne s'est pas donné la peine
d'étudier attentivement la question. Sans cela, il eût aisément
reconnu que Wagneri est une simple modification locale d’A cZl-
leæ; les premiers états sont tout à fait analogues et les transitions,
notamment celles que fournit Acæilleoides, sont telles qu'aucune
séparation spécifique entre Wagneri et Achilleæ ne peut paraître
raisonnablement possible.
Wagneri et Achilleoides habitent dans les Alpes-Maritimes.
A chilleoides se rencontre jusqu'à Bordighera vers l'Est, du moins
d’après ce que je connais. J'ai sous les yeux plusieurs centaines
d'Achilleoides et de Wagneri, au moins 850 en tout des deux
formes: je dispose en outre d'environ 1,500 AcAilleæ de localités
diverses ; c’est donc appuyé sur ces documents que je poursuis la
470 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
présente étude dont les conclusions ne sont pas d'accord, en ce
qui concerne Wagneri, avec l'opinion des auteurs allemands.
Wagneri pure est caractérisée par son aspect sombre; le fond
des ailes supérieures est noir ardoisé, avec les taches rouges d’un
ton carminé vineux qui ne ressort pas vivement sur le fond, à
moins que les taches rouges en question ne soient cerclées de
blanchâtre. Les ailes inférieures sont d’un rouge carmin plus ou
moins largement bordées de noir ardoisé. On perçoit assez net-
tement un double collier blanc. Généralement les ailes supérieures
de Wagneri présentent, en outre des taches rouges basilaires, trois
petites taches rouges assez arrondies, placées comme les trois
points d’un triangle dont deux sont en haut et un est en bas. Le
premier point rouge, en haut, se trouve dans la fourche, à l’origine
des nervules souscostale et médiane; le second, en haut, est au delà
de l’espace cellulaire; il est quelquefois accompagné d’une tache
inférieure contiguë; le troisième, en bas, est presque juxtaposé
au-dessous de la rervule médiane. /anthina, Bdv., se comporte
exactement de cette manière; mais, ainsi qu'il est dit ci-dessus,
Janthina est référable à une autre race locale d’A czillee.
Dans sa description, Millière appelle sxbcærulea la variation
bleu ardoisé. Caractérisée, d’après les individus qu'il m'a jadis
envoyés, étiquetés de sa main, par l'élargissement de la bordure
bleu d’ardoise des ailes inférieures, au détriment du fond rouge
des mêmes ailes. Dès lors, M. Clemens Dziurzinski, un spécialiste
viennois pour les Zygæna, aurait pu se dispenser d'inventer le
nom #2p9ra, en vue de désigner les exemplaires chez lesquels Île
noir a presque envahi le rouge des ailes postérieures, puisque
Millière avait pourvu, au moyen de l’appellation svbcærulea, à la
caractéristique de cette variation (Voir Awnales Soc. ent. France,
1886, p. 7, en note). Cependant je dois reconnaître que l'esprit
imprécis de feu mon ami Millière se retrouve dans les termes
insuffisamment explicites de sa description. Il a fallu que j'aie en
ma possession des co-types de swbcærulea pour savoir exactement
à quelle variation leur nom s’appliquait exactement, et cette cir-
constance est une sérieuse excuse du doublon synonymique commis
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 471
par M. Driurzinski. D'ailleurs c'est dans le sens de la suppression
ou de l’oblitération tout au moins partielle des parties rouges que
semble se diriger la variation chez Wagneri, exactement à l'inverse
de ce qui se passe chez winiacea. En effet, des trois taches rouges
placées normalement sur les ailes supérieures comme un trépied,
il peut manquer l’une ou l’autre. C’est ainsi que la Q figurée par
Millière sous le n° 6 de la PI. 1 des Annales Soc. ent. France, 1886,
est privée de la tache extracellulaire, et le © représenté sous le
n° > manque du point rouge de la base de l’espace cellulaire.
Examinant les exemplaires de ma collection, je constate les
variations essentielles suivantes :
1° Subcærulea, Millière (zigra, Dziurzinski) ; les ailes inférieures
sont largement envahies par la bordure bleu d’ardoise.
2 Les macules rouges sont entourées de blanc, aux ailes supé-
rieures, très rarement chez le &, plus fréquemment chez la Q;
certaines taches peuvent même devenir presque totalement blanches.
3° Giesekingi, Wagner. La tache rouge à la base de la fourche
cellulaire des ailes supérieures, entre les nervules médiane et sous-
costale, est absente (fig. 7; Millière). Je possède plus de 20 ©,
mais aucune © de cette variation.
4° La tache rouge inférieure du trépied manque; ma collection
contient plusieurs Get une Q de cette variation.
5° La tache rouge externe extracellulaire des ailes supérieures
fait défaut (fig. 6; Millière). Je ne possède pas d'exemplaire de
cette variation.
6° Quadrimaculata; inversement à la variation par défaut, pré-
citée sous le n° 5, la tache rouge externe extracellulaire est bilobée,
en ce sens qu’elle est pourvue inférieurement d’une tache supplé-
mentaire qui lui reste généralement contiguëé. Cette variation est
très fréquente et toutes les gradations du développement de cette
tache supplémentaire existent.
Quant à A cAlleoides, elle est la transition entre Wagner: pure
et Achillee. La couleur rouge carmin est plus vive chez Acil-
leoides et un peu mélangée de vermillon; les Q ont le fond des
ailes supérieures grisâtre, la côte et le bord externe restant d'un
472 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
bleu indigo noirâtre. La confluence entre les taches rouges des
ailes supérieures est extrêmement rare. Les taches en question sont
généralement petites. On ne peut confondre À chälleoides et tristis;
tristis est dans son ensemble moins grande et moins robuste; le
fond de ses ailes supérieures est plutôt verdâtre, tandis qu’il tend
généralement au bleuâtre chez Ackilleoides; la teinte du rouge
chez /ristis est plus éteinte. D’un autre côté, on distingue aisément
A clalleoides d'Alpina qui a les taches rouges plus grandes et de
couleur plus vermillonnée. Ce sont les races de Puget-Théniers; du
Mont Gourdon; de la vallée du Roubion; de la Cascade de
Neigeas, en la vallée du Var; de Saint-Martin-de-Vésubie, qui
établissent une insensible transition entre Achtlleoides et Alpina.
Dans la vallée du Paillon, sur les montagnes entre le Laghet et
les moulins Gaetti, à Vence, au Mont-Castel-de-Brans, à Tourette-
sur-Loup, on trouve Achilleoides inclinant vers Wagneri; quant
à Wagneri pure, c’est au col d’Eze, à la Turbie, au Mont Paca-
naglia qu'il faut surtout la rechercher.
Si l’on place à côté les uns des autres les exemplaires charentais
et niçois d'Aczilleæ, c'est-à-dire les formes w#zmtacea et Wagneri,
les plus accentuées, chacune dans son sens, on trouve assurément
une différence énorme entre les deux races; mais si l’on envisage
la série des transitions offertes par AcAilleoides, Alpina et
A chilleæ type, on acquiert la même conviction d'unité spécifique
qui se dégage de l'examen des diverses formes de Sarpedon et
Punctum, de Scabiose et Neapolitana. Y1 se fait une modification
assez profonde dans la même unité spécifique du genre Zygæna,
entre les représentants de cette même unité, selon qu'ils vivent à
l'Est ou à l'Ouest, c’est-à-dire dans la péninsule italienne, au delà
des Alpes, ou du côté de l'Océan et dans les montagnes pyré-
néennes; mais rien d’absolu nulle part; en tous lieux, on peut
rencontrer à l’état d'Aberration, ce qui caractérise ailleurs la race
normale. Nous ferons des constatations analogues pour 77ans-
alpina-Hippocrepidis Meliloti-Charon, et c’est l'étude de ces
variations géographiques quelquefois si accentuées et relativement
si constantes qui ajoute tant d'intérêt aux observations que suscite
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 47
2)
le genre Zygœna. De plus, quel ensemble de Lois homogènes
s'applique à ce genre Zygæna, pour la modification des couleurs,
l'oblitération ou la confluence de certaines taches! Enfin quelle
influence mystérieuse, dont les causes restent inconnues, produit
la teinte vermillon sur Ackilleæ et Hippocrepidis dans les Cha-
rentes, tandis que dans les Alpes-Maritimes, c’est une couleur
carminée foncée qui remplace pour les parties rouges des ailes la
tendance miniacée si remarquable dans les plaines calcaires de
l'Ouest de la France!
Nous n'avons jamais trouvé Acilleæ dans les Pyrénées-
Orientales.
Je possède quelques exemplaires d’Ackilleæ recueillis dans les
Abruzzes. D’après les échantillons que renferme ma collection, les
Abruzzes donneraient une race assez spéciale d’Ackilleæ, mais Je
préfère n’en pas parler davantage, dans la crainte de commettre
quelque erreur d'appréciation. En l'état actuel de la Science, je
pense qu’une centaine d'exemplaires est indispensable pour
apprécier une forme locale comparativement aux autres.
M. Orazio Querci m'a gracieusement offert une belle Aberration
confluens d'A chilleæ, prise à Polleca, dans les monts Aurunci, par
600 mètres d'altitude, en juin 1900. Cet exemplaire est remarquable
par la couleur grisâtre de ses ailes supérieures, la réduction consi-
dérable du point rouge cellulaire et la confluence en un gros trait
rouge de la tache basilaire et de la tache externe inférieure.
Evidemment la race d'Acxilleæ dans la partie de l’Italie qui est
plus méridionale que la Toscane est spéciale et nécessite une étude
qui sera très intéressante. J'espère y pourvoir au moyen d'une
documentation suffisamment importante et que je m’efforcerai de
réunir sans délai.
M. CI Dziurzinski m'a envoyé quelques individus étiquetés
Ab. cingulata, pris à Moedling, présentant une faible rougeur sur
un anneau abdominal. En France, dans aucune localité, ainsi que
je l'ai déjà fait connaître, je n'ai vu un seul exemplaire de
474 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Zygæna Achilleæ tendant à avoir l'abdomen annelé de rouge;
mais M. Abeille, dans les Mémoires de la Société linnéenne de
Provence, 1900, p. 12, fait connaître qu'il a pris un seul exemplaire
de l'Ab. cingulata, le 2 juin 1908, sous le rocher de Bartagne,
dans la montagne de la Sainte-Baume (Var). « Le papillon, dit-il,
porte sur le dessus de l'abdomen un anneau rouge très foncé et
nettement interrompu sous le ventre » En Provence, Aczilleæ
éclôt deux fois par an, en mai, puis en juillet et août, d’après les
observations de M. Abeille.
Zygæna Anthyllidis, Boisduval.
Boisduval, le premier, a décrit et figuré la Zygœna appelée par
lui Anthyllidis, aux pages 78 et 70 et sous le n° 8 de la PI. IV
de l'EÆssai sur une Monographie des Zygénides, d'après deux
individus qui lui avaient été indiqués, à tort, comme capturés
dans l'Espagne méridionale.
L'Espèce est de nouveau figurée sous le n° 7 de la PI 55 de
l’/cones; mais dans ce dernier ouvrage, Boisduval dit que la
Zygœna Anthyllidis se trouve en Espagne et dans les Pyrénées,
aux environs de Barèges. On peut en effet rencontrer A%/kyllidis
dans les Pyrénées espagnoles, au proche voisinage du département
des Hautes-Pyrénées, mais jamais elle n’a été capturée dans
l'Espagne méridionale, ainsi que Boisduval l’avait d’abord pré-
tendu, s'étant trouvé induit en erreur par de fausses indications.
J'ai fait moi-même figurer la Zygæra Anthyllidis, à l’état de
chenille, coque et imago, sous les n° 14, 15, 16 et 17 dela PL
de la VIII° livraison des Ætudes d’Entomologie. Je prie le lecteur
de se reporter à la page 30 de cette VIII® livraison où je donne
quelques renseignements sur la manière de vivre de l’Espèce.
En donnant le nom d’'Anfhyllidis, Boisduval eut en vue cer-
taines plantes de la famille des Papilionacées, composant le genre
Anthyllis. Ce mot Anthyllis est formé des deux mots grecs :
anthos fleur et ioulos duvet. Ce sont des plantes velues soyeuses,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 47
| Ur
comme le dit l’abbé Coste, à la page 316 du vol. I de la /‘Zlore
descriptive et illustrée de la France. L'Anthyllis vulneraria paraît
être la plus connue des Espèces du Genre; elle est vulnéraire et
résolutive et entre dans la composition du thé suisse.
La Zygœna Anthyllidis est une Espèce des grandes hauteurs
pyrénéennes ; elle n’a Jamais été trouvée par nous ailleurs que dans
les Hautes-Pyrénées, par une altitude d’au moins 1,700 à
1,800 mètres, et elle s'élève au delà de 2,000 mètres. Elle a aussi
été rencontrée dans les montagnes du Caucase, où elle donne une
forme différente de celle des Pyrénées.
J'en ai capturé de très nombreux exemplaires, au mois de
Juillet, lors des séjours que je fis à Cauterets. Dans le nombre des
individus, 1l se trouve des Aberrations assez intéressantes; mais
Je n'ai Jamais pris Aw/#yllidis jaune.
Lorsque Staudinger et Rebel firent imprimer dans leur Catalog
1001, à l’article 4340 : Anthyllidis, la mention : Ab. f#ava, Obthr.
(Etudes d'Ent., XX, PL 8, fig. 141), ils rapportèrent à tort à
Anthyllidis ce qui s'applique réellement à exwlans. Tout naturel-
lement, le D' Adalbert Seitz, négligeant de recourir aux sources,
s’abstenant de toute vérification et, malgré les erreurs dont cet
ouvrage est rempli, adoptant toutes les assertions du Cafalog,
comme étant l'expression infaillible d’une vérité incontestable et
qu'il serait sans doute bien téméraire même de contrôler, a repro-
duit servilement, à la page 22 de l'édition française (Zygæna),
la faute commise par Staudinger et Rebel.
Le collier est d’un jaune décidé; l'abdomen est généralement
annelé de rouge; mais l'anneau rouge fait parfois défaut, et l’on
trouve tous les degrés depuis l’abdomen entièrement noir jusqu'à
l’annellation rouge vive et nette; mais l’anneau existe sur un seul
segment abdominal; pas sur deux. Les parties rouges des ailes
et de l’abdomen sont plus ou moins claires ou foncées; les exem-
plaires même frais peuvent paraître d’un rose pâle, au lieu d’être
d’un rouge vif. Je crois que ceux qui, éclos, la veille, passent la
nuit, exposés au froid de la montagne et à l’humidité ambiante,
subissent une décoloration considérable. Le fond des ailes supé-
476 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
rieures est bleu ou verdâtre; les taches rouges des mêmes ailes
sont plus ou moins soulignées et surmontées de jaune; elles restent
généralement séparées et confluent très rarement entre elles.
Cependant la tache basilaire costale supérieure est fréquemment
jointe à la première tache rouge cellulaire et les deux taches
externes sont souvent contiguës; mais la réunion des quatre taches
rouges des ailes supérieures en une seule macule, cependant con-
forme à la loi de variation chez les Zygæna, est bien exception-
nelle, puisque sur plus de 400 exemplaires alignés dans ma
collection, sans parler des autres que J'ai vus et pris et qui n’y
figurent pas, il n'existe pas un seul individu offrant cette confluence
que J'ai pourtant constatée plusieurs fois dans l’Espèce voisine
Exulans.
Si, par un beau temps de juillet, quittant Cauterets de grand
matin pour aller récolter la Zygœna Anthyllidis vers les Oulettes
du Vignemale, au delà du lac de Gaube, on s'engage, après avoir
dépassé l'établissement des bains de la Raillère, dans la belle
route tracée au milieu de la forêt de hêtres et de sapins qui
conduit au Pont d'Espagne, il n’y a guère pour l’'Entomologiste
de papillons à prendre, en dehors des Noctuelles et des Phalènes
reposées sur les rochers de granit, tout le long du chemin. C'est
pourtant un plaisir délicieux, avant que les rayons du soleil ne
soient venus rendre la montée un peu plus laborieuse, de côtoyer,
dans la fraîcheur matinale, le torrent dont les eaux, merveilleuses
de limpidité, forment de si admirables cascades.
Les pêcheurs de truites fréquentent constamment les bords
escarpés du torrent. On les voit, agiles, sautant sur les roches
autour desquelles bouillonnent les eaux tumultueuses, cherchant
l’occasion de saisir leur proie. Avec quelle violence les ondes
écumantes se précipitent dans la pente qui les entraine, tandis
que çà et là, trouvant à se reposer de leur course rapide dans un
lit plus plan, leur masse paraît d’un azur si profond, si clair et
si pur. D’énormes blocs de rochers semblant éboulés des hautes
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 477
crêtes se sont arrêtés comme suspendus sur les flancs de la mon-
tagne, ou bien, emportés par leur poids, 1ls ont renversé tous les
obstacles et ont roulé jusqu'au fond de la vallée. Des massifs de
sapins étendent leurs branches d’un vert foncé sur lequel se
détachent agréablement les jeunes pousses d’un vert encore si
tendre. Les À Dies pectinata et excelsa, arbres qui vivent longtemps,
ainsi que l'indique leur nom dérivé du grec : ab1os, élèvent vers
le ciel la flèche qui couronne leur pyramide, et mélangent leur
feuillage à celui des bouleaux, des sorbiers, des framboisiers et
des sureaux.
Arrivés auprès du Pont d'Espagne où viennent confluer les
eaux du lac de Gaube et de la vallée de Marcadau, il faut produire
un sérieux effort pour gravir les sentiers mal entretenus, encombrés
de pierres et traversés de racines, que certains touristes, coutumiers
des Hautes-Pyrénées, connaissent sous les noms familiers de
crève-cœur et de coupe-Jarret.
Si le soleil n’a pas encore atteint les cimes du côté de Lutour,
l'ascension est plus facile et l’on est récompensé, par une économie
de fatigue, d’avoir été matineux. Les pins ont remplacé les sapins.
Le tronc écailleux et gercé, mais d’une agréable couleur rosée, du
Pinus sylvestris, s'élève, souvent dégarni de branches jusqu'à sa
couronne, concurremment avec la tige gris noirâtre du Pzus
montana; leurs cônes desséchés jonchent le sol et les émanations
balsamiques de leur résine parfument l’atmosphère. Les premières
touffes de ÀAododendron présentent leurs fleurs d’un rose carminé
et la gracieuse Rosa alpina, dans les sites où elle échappe à l'at-
teinte des promeneurs, élance ses longues branches flexibles à
l'extrémité desquelles s'épanouit sa fleur pourprée dont le parfum
est si doux.
Enfin on aperçoit la nappe azurée du lac de Gaube, dont les
eaux s'étendent tranquilles et à peine irisées par un zéphyr léger.
On peut traverser le lac en bateau et aborder assez promptement
à la rive prochaine, ou bien suivre le chemin que parcourent les
chevaux et les mulets sur le flanc de la montagne, à droite du
478 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
lac de Gaube, C’est le long de ce chemin que vole la Zycæna
Orbitulus-Oberthuri, et sur la pente pierreuse, au-dessus du sentier,
que se trouve la Zygæna Contaminet; mais Anthyllidis ne com-
mence à paraître que plus loin encore.
À l'extrémité du lac, on rencontre une prairie assez plane d'herbe
rase, parsemée de pins et d'énormes rochers, dont J'ai déjà fait
mention au cours de ces Æ/udes. On y peut apercevoir les Lycæna
T'ithonus (Eros) et Escheri-Rondoui, ainsi que la Cieogene Pele-
lerarta. Mais il faut continuer la route, gravir encore ure pente
très raide, traverser un pâturage partiellement marécageux et
suivre sans relâche le sentier tracé au fond de la montagne; cette
fois, 1l est à gauche du torrent, dont les eaux mugissantes roulent
et se pressent, pour se précipiter plus bas dans le lac dont on
domine déjà la surface d'un bleu si pur.
Sur le côté gauche de la montagne que traverse la route mule-
tière, des touffes de XAododendron ferrugineum se développent
au milieu des pierres éparses. Leurs fleurs d’un rose si vif sont
épanouies. On s'arrête; car c'est là qu'on peut commencer à voir
voltiger la Zygena Anthyllidis. D'ailleurs les rayons du soleil se
sont élevés au-dessus des crêtes, du côté de l'Orient. Brillant dans
un Ciel que n’encombrent pas encore les nuages, ils ne tardent pas
a dessécher la rosée du matin et à réchauffer la vallée. La Zygæna
Anthyllidis S'anime alors; le papillon semble une grosse mouche
de la couleur même des fleurs de XLododendron. Les G' volent
autour des buissons, passent et repassent, descendant et remontant
la pente pierreuse et fleurie. On distingue de loin, sur les pierres,
les coques qui recouvrent les chrysalides; elles sont blanches et
luisantes comme de la porcelaine; au milieu du gazon fin qui
pousse entre les pierres écroulées d'en haut avec les avalanches,
la chenille peu active est facile à découvrir, grâce à ses couleurs
tranchantes, jaune et noire. Parmi les Graminées, les An/2ylls,
les Szlene acaulis et diverses Papilionacées rases, autour des buis-
sons peu élevés de génévrier, la Zygæna Anthyllidis ©, plus rare
que le Œ, mais généralement plus variée de couleur, se traîne assez
lourdement et ne cherche guère à voltiger.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 479
Pour peu que la matinée reste ensoleillée et que les nuages
tardent à paraître, la récolte de la Zygæna Anthyllidis peut être
extrêmement abondante. L'Espèce, dans certaines années et à
certains jours, n'est point rare, et lorsqu'on est parvenu à l'altitude
au-dessous de laquelle toute recherche la concernant serait vaine,
il est aisé d’en faire une ample provision.
Mais donnons à notre excursion un but plus éloigné; marchons
vers le pied du Vignemale, en suivant toujours les bords du
torrent. Nous ne cesserons pas de rencontrer la Zygæna Anthyl-
lidis; elle sera partout en nombre plus ou moins grand, les Œ
voltigeant au soleil et les Q ordinairement peu mobiles et posées
sur le gazon.
Quand vient l'heure de midi, on s'arrête pourtant, et le repas
étendu sur l'herbe, au milieu des plantes alpestres, st vivement
colorées, primevères et silènes, dans le magnifique décor de la
haute vallée que ferme la masse imposante du Vignemale, sollicite
une trêve et invite les Entomologistes à cesser momentanément
leur fructueuse récolte.
Souvent, hélas! au milieu du jour, dans les hauteurs pyré-
néennes, les nuages s'élèvent de toutes parts et obligent à une
prompte retraite; mais j'ai connu des journées superbes pendant
lesquelles le ciel, sans orage, restait serein. C’est ainsi qu'en 1005,
favorisés par un temps magnifique, nous avons poussé Jusqu'au
pied de la haute montagne toute formée de pierres éboulées, dont
le sommet se trouve couronné par un refuge hospitalier, en face
et tout près du Vignemale.
Les châlets du comte Russell sont à côté de ce refuge où l’on
peut obtenir un frugal souper et un abri pour la nuit. C'est à
mi-route de Cauterets à Gavarnie. On est là au milieu de la plus
belle faune lépidoptérologique pyrénéenne. Cependant la Zygæna
Anthyllidis ne se trouve plus à cette altitude; du moins Je ne l'y
ai point vue, tandis qu’elle était si abondante au pied même de
la montagne de pierres dont l'ascension est vraiment dure, surtout
quand on marche depuis le matin.
480 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Ce n’est pas sans émotion que je rappelle ces souvenirs de jours
qui furent si beaux et si tôt finis. Le comte Russell n’est plus;
mais le monument qu'il a laissé de sa prédilection pour le
Vignemale et de sa sollicitude s1 bienveillante envers les amateurs
des sommets pyrénéens, lui survit. Le comte Russell était une
noble et sympathique figure; sa mémoire a droit au respect et à
la reconnaissance des hommes. Malheureusement il ne fut m
Botaniste, ni Entomologiste, ni Géologue; je l’ai toujours regretté
pour lui et pour nous. Il savait décrire les paysages montagnards
avec une exactitude incomparable; aussi les ouvrages dans lesquels
il a relaté le souvenir de ses longs voyages et de ses ascensions
souvent téméraires, sont-ils empreints d'une bonhomie et d'une
sincérité dont je goûterai toujours le charme séduisant et le puis-
sant attrait. La vie terrestre du comte Russell est maintenant finie,
comme sera sans doute bientôt la nôtre; car l’âge est inexorable.
Mais que sont donc les joies de la terre, même les plus pures,
celles que nous vaut l'étude de la Nature, à côté du bonheur
céleste, lorsque nous pourrons, s'il plaît à Dieu, dégagés et puriñés
de toutes les misères d’ici-bas, admirer ses œuvres non point dans
une obscurité incertaine, mais au sein de la clarté et de la vérité
éternelles !
Zygæna Exulans, von Hohenwarth et Jos. Reiner.
Esper a figuré la Zygœna Exulans, sous les n°* 1 et 2 de la
PI XLI de son Volume Il, d’après des exemplaires originaux
qui lui furent communiqués par celui qui découvrit l'Espèce,
c'est-à-dire par le Domdechanten Freyherr von Hohenwarth « zu
Ende Julius auf den hoechsten Alpengipfeln des Eisgebuerges
am Glockner, auf der sogenannten Pasterze in Obercaernthen »;
ce qui signifie en français : « par le Doyen de Cathédrale Baron
de Hohenwarth, à la fin de juillet, sur les plus hautes cimes
alpestres de la montagne de glace, au Glockner, sur le lieu dit
Pasterze, en Haute-Carinthie. »
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 481
Depuis la fin du XVII[* siècle, époque où l’on commença à
connaître la Zygœna Exulans, de nombreuses stations nouvelles
furent reconnues comme habitées par l’Espèce en question, aussi
bien en Ecosse qu’en Laponie, dans les Pyrénées et dans les Alpes.
En ce qui me concerne, je n'ai Jamais observé Æxwlans à une
altitude moindre de 2,000 mètres et Je l’ai vue voler jusqu'à près
de 2,800 mètres; mais M. Rondou signale Æxzlans au-dessus de
1,000 mètres Jusqu'à 2,500. Exulans a été capturée, paraît-il, au
Gran-Sasso, en Italie. Je ne connais pas la forme qui provient de
cette localité. Je ne crois pas qu'on ait trouvé Æxwlans dans la
Sierra-Nevada d'Andalousie, où je crois possible qu’elle existe.
La forme écossaise, dont J'ai sous les yeux une assez grande
série d'exemplaires pris par Ried, ou bien ayant fait partie d’an-
ciennes collections anglaises que j'ai pu acquérir, a un aspect très
diaphane et quelquefois un peu ochracé, de telle sorte que le nom
de subochracea que lui a donné White se trouve fréquemment
justifié. Charles Barrett a figuré l’Exylans d'Ecosse sous les
figures 5, 5 a, 5 d (larve) de la PI. 58 de son ouvrage : Te Lepid.
of the British Islands.
Barrett fait connaître qu'Æxwlans a été originairement prise
dans les montagnes à Braemar, Aberdeenshire, en 1871, à une
élévation d'environ 2 à 3,000 pieds au-dessus du niveau de la
mer, par le D' Buchanan White et par le Prof. Traill.
Les plantes suivantes sont indiquées par Barrett comme pouvant
servir à la nourriture de la chenille d'exulans : Azalea procumbens;
Cherlera sedoides,; Silene acaulis; Trifolium alpinum, repens,
pratense,; Lotus corniculatus; Geum montanum, Sibbaldia pro-
cumbens; Alchemilla alpina; les Erica; les Vaccinium. Le docteur
White dit qu'il a élevé les larves sur : Polygonum aviculare et
Triicum repens, plantes qui ne se trouvent pas dans les localités
natives d’'Æxuwlans.
En Laponie, il est à ma connaissance que Æxulans fut capturée
dans la province de Finmarken par feu Staudinger, et pendant
l'été 1908, à Kvickjock, au Mont Sutilelma (Lulea-Lappmarken),
par Wilhelm Man. Les exemplaires de Laponie, considérés comme
31
482 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
plus diaphanes que ceux des Alpes et des Pyrénées, ont reçu le
nom de l’anadis. I]1s ont en effet un facies très luisant et un peu
spécial; notamment il ne semble pas que l’anadis tende à avoir
les nervules accentuées par une couleur jaune, ainsi que cela se
remarque chez Æxulans des hauts sommets alpestres.
En France, Æxulans a été rencontrée dans les Pyrénées-Orien-
tales, à la Croix de la Roquette (Pla Guilhelm), les 20 et 21 juillet
et 3 août 1900, par H. Powell, et sur l’arête Nord du Camigou,
les 31 juillet et 1° août 1900, par le même chasseur. L’Espèce
était abondante. Elle a fourni deux Q dont les taches rouges des
ailes supérieures sont tout à fait confluentes et forment une grande
macule d’un rose carminé, seulement interrompue par les nervules.
Sur les hauteurs des Pyrénées-Orientales, les © Exulans ont
fréquemment les taches rouges entourées d'un très mince liséré
jaune doré; les exemplaires sont de taille moyenne; ils ont tou-
jours l'abdomen noir, sans anneau rouge. Mon frère a trouvé
Exulans au sommet du Nethou et nous l'avons rencontrée dans
quelques hautes montagnes, au-dessus de Cauterets, mais seulement
par exemplaires isolés. Feu de Graslin avait capturé Exulans sur
les hautes crêtes du Cambrès d'Ase. Elle est aussi dans la vallée
d'Eyna. Je possède un © des Pyrénées-Orientales chez qui les
parties normalement rouge carmin des ailes sont devenues oran-
gées. Cet exemplaire fait la transition entre la forme rouge et l’Ab.
flava que j'ai fait figurer sous le n° 141 de la PI 8 de la
XX® livraison des Etudes d'Entomologie, d'après un O' pris au
Lautaret par feu mon ami Emmanuel Martin. C’est une Aberration
très belle et d’un jaune bien décidé. Je la crois extrêmement rare.
La Zygœena Exulans est commune dans les Alpes : à Enchas-
trayes; à Larche; à Chamounix; au lac d’Allos; au mont Pelat ;
au Galibier et au Lautaret; entre Ryffelberg et Ryffelalp, mais
plus près de Ryffelberg ; au Simplon, d’où je possède une magni-
fique Ab. confluens, d'un rose carminé très vif; ce papillon faisait
partie de l'ancienne collection Guenée. Au Simplon, les nervules
des ailes supérieures tendent plus particulièrement à être d'un
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 483
jaune brillant, de façon à former comme un enlacement de lignes
dorées très fines autour des taches rouges.
Le fond des ailes supérieures est bleu ou vert bronzé. Il y a
dans les Alpes des exemplaires dont la taille est extrêmement
réduite; d’autres qui ont au contraire de plus grandes dimensions.
La Zygæna Exulans vit habituellement par colonies de nombreux
exemplaires, çà et là, sur les hautes montagnes. Au Lautaret, il y
avait, en Juillet 1006, une bonne localité pour Æxwlans, sur un
petit plateau auquel on parvient après une légère ascension; ce
plateau est adossé à de grands rochers, au sud-est de l'Hôtel
Bonabel. Quelques touffes de Rhododendrons poussaient en cet
endroit. Sur tout le plateau, aussi bien qu’en remontant les pentes
qui y aboutissent, les Zygœna Exulans se trouvaient en nombre
parfois considérable et les © offraient de jolies variations par
coloration jaune des nervules des ailes supérieures. Un peu plus
bas, de l’autre côté de la route que parcourent les voitures qui vont
et viennent entre la Grave et le Galibier ou vers le Monetier-de-
Briançon, il y avait sur une éminence sèche et chaude une colonie
également nombreuse de Zygæna purpuralis (Minos); ce furent
les deux seules Espèces de Zygæna observées par moi sur le
plateau fleuri du Lautaret, au mois de juillet 1906.
La larve d'Exulans est grosse, de couleur noirâtre, avec des
points latéraux jaunâtres et quelques touffes de poils courts et
noirs; la coque est blanche, luisante, un peu chagrinée, de forme
ovalaire, comme un canot. On en trouve quelquefois plusieurs
agglutinées sur la même branche et s'étant formées les unes sur
les autres.
Je n'ai jamais vu d'Æxrwlans avec la 4° tache rouge aux ailes
supérieures.
Pour compter les taches des Zygæna, il y a deux méthodes,
suivant qu'on comprend, ou non, dans le compte les taches rouges
basilaires ordinaires.
Avec les taches basilaires, généralement au nombre de deux et
séparées par la nervure, il y a $ ou 6 taches sur les ailes supé-
rieures; sans les taches basilaires, il reste seulement 3. ou 4 taches
484 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
externes. Dans la circonstance présente, je fais abstraction des
taches basilaires; j'envisage donc seulement les taches externes
ordinaires et Je constate qu'il y en a toujours 3, Jamais 4, du
moins d’après ce que Je connais, chez Æxulans. J'ai sous les yeux
plus de 1,000 exemplaires. Mais il peut se faire qu’on trouve, çà
ou là, une variation à 4 taches. C’est dans l’ordre et il y a sur
l'aile de la place où loger la 4° tache; ne serait-ce que juxtaposée
à la 3° tache externe, c’est-à-dire collée à celle qui est le plus près
du bord extérieur des ailes supérieures.
Anthyllidis, au contraire, montre toujours la 4° tache rouge
ultime qui manque chez Exulans.
Les Zygæna Anthyllidis et Exulans sont les deux Espèces du
Genre qui atteignent les plus hautes altitudes; la plupart des autres
Espèces de Zygæna habitent les lieux moins élevés dans les mon-
tagnes et se plaisent même dans les plaines et sur le bord de la
mer.
Zygæna Meliloti, Esper.
Staudinger et Rebel indiquent, dans leur Catalog 1901, que
Meliloti a été décrite et figurée par Esper, sous les n°* 1 à 8 de la
Tab. XXXVIIL Hélas! je constate encore une erreur. La Tab.
XXKXVIIT contient exclusivement les figures de Æippophaës et
Tineiformis. C'est la Tab. XXXIX (Cont. XIV) du Tom. II qui
contient effectivement la figuration de Meliloti; Imago (fig. 1, 2
et 3); larve (fig. 4, 5); folliculus (fig. 6); chrysalides (fig. 7 et 8).
Dans le texte (p. 10 de Zweiter Abschnitt), Esper fait imprimer :
Meliloti; mais sur la Tab. XXXIX, le graveur a écrit : Melilotha,
ce qui est fautif. Esper, sur la Tab. XXXIX, attribue à la coque
le nom de folliculus; dans le texte, il appelle la coque : Gehaeuse,
mot qui veut dire : boîte, coquille, enveloppe. L’Espèce Weliloti
était abondante (zahlreich) dans les environs du lieu où résidait
Esper (in unsern Gegenden), sans doute la ville d'Erlangen, en
1770.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 485
Meliloti ne paraît pas avoir été rare Jusqu'ici en Angleterre. Je
possède en effet 82 exemplaires anglais portant les étiquettes
suivantes : Brockenhurst, 1801; Canterbury, 1803; Lyndhurst,
1874; New-Forest; ils faisaient partie des anciennes collections
Maddison, Sheppard, Howard-Vaughan, Tugwell, Claxton,
Battershell-Gill. Charles Barrett a figuré {/ellotr sous les n° 1,
WAR mncatanve).de la Pl60
Il dit que la chenille vit sur Lotus corniculatus et autres basses
légumineuses (and others low growing leguminous plants). Sui-
vant Barrett, Meliloti habite des places marécageuses (marshy
spots) à New-Forest, Hants; on rapporte, dit-il, qu'elle a été prise,
il y a plusieurs années, dans la forêt de Tilgate, Sussex. Barrett
ne connaît pas d’autre localité britannique pour l'Espèce.
En France, du côté occidental, je ne connais qu’une seule loca-
lité pour la Zygœna Meliloti; c'est à Cauterets, sur la montagne
du Péguère: mais la Melilofi n'y est point commune et je n'ai pu
recueillir qu'un petit nombre d'échantillons. Ma collection ne
contient que dix exemplaires récoltés tout auprès de Cauterets.
Ils sont du reste à Cauterets, semblables à ceux que je connais
d'Angleterre, de Prusse, de Wiesbaden, de Kritzendorf et de Zer-
matt.
La collection de Graslin contenait un exemplaire de la Zygæna
Meliloti portant l’étiquette : Nancy. L'Espèce existerait donc aussi
en Lorraine; mais un seul individu ne me permet pas d'apprécier
la forme ordinaire d’une contrée.
En Angleterre, aux environs de Vienne, dans l'Allemagne du
Nord et dans les Hautes-Pyrénées, Weliloti a les ailes supérieures
allongées, d’un gris bleuâtre ou verdâtre bronzé, un peu pâle,
avec les taches rouges d’une teinte carminée, généralement peu
brillantes. La bordure grise indigo des ailes inférieures est peu
large et assez régulière; le fond des ailes inférieures n’est pas d'un
rouge carminé très vif. Quelquefois la tache basilaire inférieure
et la tache externe inférieure confluent. Abstraction faite des taches
rouges basilaires, la Zygœna Mclioti, Esper, n’a que trois taches
480 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
aux ailes supérieures et non quatre; de plus elle a l'abdomen tout
noir, sans anneau rouge.
Herrich-Schaeffer figure cependant sous les n°* 86 et 87 de la
Tab. 12 des Zygænides Europ. une variété de Melilott ayant
l'abdomen annelé de rouge, ce qui paraît d’ailleurs conforme à la
règle de variation des Zygæna.
Contrairement à l’assertion du Catalog Staudinger et Rebel
1001, je ne crois pas que Séentz, Freyer (Neuere Barrage;
Tab. 278; fig. 4) puisse être identifiée à Meliloti var. Herr. Schaeff.
86 et 87; la bordure indigo des ailes inférieures, telle qu'elle est
représentée sur la fig. 4 de la Tab. 278 de Freyer, s'oppose, sui-
vant moi, à cette identification. S/entzu, Freyer, est référable à la
forme Caron, non à la forme typique Melo.
Je ne connais pas en nature la forme de Welilori dont l'abdomen
est annelé de rouge et qui est figurée par Herrich-Schaeffer, sous
les n°" 86 et 87.
Meliloti affecte dans les Alpes-Maritimes, le Piémont, le sud de
l'Italie, le Tyrol, une forme différente de la forme primitivement
décrite et figurée par Esper.
Huebner a figuré cette forme alpine et transalpine sous le n° 21
de la PI. Lepidoptera 1; Sphinges 1; avec le nom de Caron.
De même que Weliloti, Charon, Huebner (21) a l’abdomen tout
noir et les ailes élancées; mais CLaron porte quatre taches rouges
au lieu de trois (les taches basilaires non comprises) sur les ailes
supérieures dont le fond est d’une nuance bleue bien plus foncée
que chez Meliloti; la couleur rouge des taches des ailes supérieures
et des ailes inférieures est bien plus vive chez Charon; la bordure
indigo des ailes inférieures n’est pas de largeur régulière, mais
épaissie le long du bord anal et à l'extrémté apicale; la bordure
devient plus étroite seulement vers le milieu du bord terminal.
Herrich-Schaeffer a figuré cette Caron sous les n°* 69 et 70 de la
Tab. o des Zygénides Europ. Au sujet de ces figures, 1l est assez
intéressant de constater que le n° 70 est représenté avec quatre
taches rouges sur le côté gauche des ailes supérieures et trois
seulement sur le côté droit. L'’anneau abdominal rouge existe chez
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 487
la forme de Caron représentée sous le n° 23 de la Tab. 3 des
Zygænides Europ. par Herrich-Schaeffer. Caron type et Welilot:
type ont, toutes les deux, comme je l'ai déjà dit, l'abdomen entiè-
rement noir et dépourvu de tout anneau rouge. Herrich-Schaeïfer
donne à Caron, dont l'abdomen est annelé de rouge, ie nom de
Stentzii qui fait confusion avec Szentziü, Freyer, en ce sens que la
Zygœna Stentzii, H.S. (23) a 4 taches rouges aux ailes supérieures,
tandis que la Séentzi, Freyer (278, 4) a seulement 3 taches rouges.
Du reste les CAaron perdent quelquefois leur 4° tache rouge;
j'ai sous les yeux des exemplaires des Alpes-Maritimes qui pré-
sentent d’insensibles transitions entre la forme à 4 taches et celle
à 3 taches et il faut tenir compte de cette circonstance. En somme,
dans la forme CÆaron, le plus grand nombre des exemplaires pré-
sente 4 taches, mais non l’universalité des individus.
Duponchel a figuré sous le n° 7 de la PI. V du Supplém. Zygé-
rides, la Meliloti © semblant bien conforme à la race type nommée
par Esper. Je pense que Zzglossi, Duponchel (Sp. Zygénides,
PI. XII, fig. 4), est une WMeliloti G'; je partage à cet égard l'opi-
nion émise par le D' Boisduvai (/cones, IT, p. 56). Je ne sais pas
à quoi rapporter exactement la Zygæna loi, Huebner (32); Je
doute beaucoup que /o/i puisse être exactement identifié à Caron.
Je crois que la figure 32 de Huebner est de celles dont, pour cause
d'incertitude (incertæ sedis), 1l n’y a pas à tenir compte.
La Charon, Huebner (21), d’après les documents que je possède,
se rencontre dans les Alpes-Maritimes (Moulinet, col de la
Madone de Fenestre); dans les Basses-Alpes et les Alpes-Mari-
times (Mont-Gourdon, Entrevaux); en Piémont, à la Certosa di
Pesio : au Monte-Generoso: au Val-Maggia, comme aussi au Monte-
Castello, dans le sud de l'Italie; la variété chez laquelle l'abdomen
est annelé de rouge, se trouve dans le Tyrol méridional; de plus,
en Ligurie, il existe une race dont les ailes inférieures sont plus
ou moins envahies par la teinte indigo de la bordure. Cette variété
sombre, analogue à celle dont sont affectées d’autres espèces de
Zygena, a les ailes supérieures d'un vert bronzé foncé et luisant
et présente plutôt 3 taches rouges que 4, sur les mêmes ailes supé-
488 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
rieures. C’est l’Ab. z/alica, Caradja. On trouve au Moulinet des
individus qui s’en rapprochent et forment le passage entre : 1° la
forme à ailes inférieures rouges bordées d’indigo et à 4 taches
rouges sur les ailes supérieures qui est la Caron, Huebner; et 2° la
forme à 3 taches rouges sur les supérieures et à ailes inférieures
où 1l reste une simple tache rouge centrale peu développée, et qui
est l’z/alica. |
Aux environs de Chamouny, feu Prévost, de Genève, avait jadis
capturé une race de Caron qui est représentée dans la collection
Guenée, mais qui ne me semble pas avoir été retrouvée depuis bien
longtemps; les ailes supérieures sont marquées de 3 taches rouges
petites et semblables à celles d’zalica; mais les ailes inférieures
sont restées rouges avec une bordure indigo qui n’est pas plus
large que celle de Caron, typique. Je pense que c’est la Zygæna
pennina, décrite par Rambur, à la page 160 du Catalogue systém.
des Léfhid. de l'Andalouste.
L’Aberration à taches entièrement confluentes, appelée confusa
par Staudinger, se trouve en Angleterre; la figure 1 à de la PI. 50
de Barrett représente une Q confusa qui lui fut communiquée par
M. S. Webb. La fig. 1 à de la même PI. 59 établit la transition
entre l’Ab. confusa et le type Meliloti.
Les deux taches rouges extérieures de Caron peuvent être
réunies et confluer de façon à présenter une sorte de cœur, non
seulement dans la forme sicilienne, mais à titre accidentel dans
les Alpes-Maritimes et dans l'Italie méridionale, au Monte-Cas-
tello.
La Zygæna Meliloti et sa var. Charon sont des papillons un peu
grêles et cependant, d’après ce que J'ai vu, très actifs et doués d’un
vol très rapide et soutenu, lorsque brille le soleil. Ils ne sont nulle
part extrêmement abondants et paraissent rester très localisés.
Meliloti ressemble à Trifolu, Lonicere, Filipendule, etc.; mais
elle est beaucoup plus petite et plus délicate d’aspect. La collection
Guenée contenait un exemplaire portant l'étiquette : Lyon. Je n'ai
jamais vu d’autres Melilofi provenant de la région lyonnaise. Je
suis porté à croire que Guenée était redevable de cet exemplaire
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 480
à son ami Millière, qui habitait Lyon, avant d'aller se fixer à
Cannes.
Zygæna Trifolii, Esper.
Je commence l'étude d’une série d'Espèces de Zygæena mal
connues, souvent confondues entre elles, et dont la distinction spé-
cifique n’est pas, en effet, toujours facile à établir, du moins pour
certains exemplaires peu caractérisés dans un sens ou dans un autre
et restant, malgré tout, litigieux, parce que les races où formes
pourtant bien définies et bien distinctes dans leur ensemble, sont
reliées les unes aux autres, par des exemplaires et même par
d’autres races ou formes locales établissant d’insensibles, mais
incontestables transitions. Il s’agit des Zygæena Trifoli, Serisiati,
Lonicere, Angelice, Filipendule, Stæchadis, Dubia, Medicaginis.
Je me suis depuis longtemps appliqué à leur étude et j'ai réuni
à leur sujet des documents en très grand nombre; mais l’abon-
dance de la documentation, si elle est nécessaire en vue des obser-
vations poursuivies avec sincérité et ayant pour unique but l’obten-
tion de la vérité recherchée sans aucun parti pris préalable, n’est
pas exempte d’inconvénient ; car elle apporte forcément avec elle
des éléments de transition essentiellement troublants et qui aug-
mentent singulièrement la difficulté. Les exemplaires dont les
caractères sont indécis, éloignent, bien plutôt qu'ils ne rapprochent,
la vision claire et nette des distinctions réelles de Forme, de
Variété et même d’Espèce que tous les Entomologistes désireraient
pourtant percevoir avec cette précision qui est seule susceptible de
donner à l’esprit qui observe et apprécie, une légitime satisfaction.
On peut bien compter que Je n’agirai cependant pas à l'instar
de cet éminent Coléoptériste dont j'ai déjà rappelé le souvenir et
qui détruisait purement et simplement les échantillons embarras-
sants, ne gardant que les exemplaires qui présentaient des carac-
tères tangibles et tranchés. Je tiendrai, au contraire, exactement
compte de tout ce que je suis parvenu à connaître; mais Je Jugerai
490 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
une Race, une Forme, une Variété, une Espéce, d’après un ensemble
d'individus suffisamment nombreux pour que je puisse être certain
de ne pas disserter sur des exceptions.
Dans les questions délicates et difficiles comme celles de cer-
taines Espèces de Zygœna, voisines les unes des autres, mais
semblant pourtant spécifiquement distinctes, 1l est en effet indis-
pensable d'envisager un ensemble important d'exemplaires de la
même localité, pour en concevoir une opinion ayant chance d’être
vraie.
La Zygena Trifolii a d'abord été nommée par Esper qui, sous
les n°" 4 et 5 de la Tab. XXXIV du Tome II, figure l'Ab. confluens
(Ag. 4) et la forme normale (fig. 5) de 7 r1folu. Les figures d’Esper
sont grossières; cependant elles peuvent paraitre suffisamment
reconnaissables. Esper nous apprend que l’Espèce a d’abord été
découverte par lui-même aux environs de Francfort-sur-le-Mein.
Huebner a figuré 7'7:folu sous les n°* 134 et 135; il a appelé Orobz
une variété représentée sous le n° 133, ayant un petit point rouge
entre la tache rouge cellulaire et la tache externe supérieure. Le
même Huebner, sous le n° 138, a représenté avec le nom de G/1-
cirrhisæ, une Aberration dont les taches rouges sont partiellement
confluentes. Je ne sais pas bien si le papillon figuré par Huebner
sous le n° 70, avec le nom de 7 r2folx, représente réellement 7 72folu.
Boisduval a très mal figuré 77ifolu sous le n° 7 de la PI. 3 de
l'Essai sur une Moncgr. des Zygénides. La figure 8 de la PI. 54
dans l’/cones du même Auteur est moins défectueuse, sans tou-
tefois donner ample satisfaction; mais l'Observation imprimée à
la page 60 est judicieuse et me paraît conforme à la réalité des
faits. Duponchel a figuré 7'rifolii sous le n° ; de la PI VI du
Suppl. Zygénides sous le n° 1 de la PI VIII du même ouvrage.
Cette dernière figure est à retenir. La description imprimée aux
pages 71 et 72 est exacte. Freyer a donné une représentation
grossière de /7ifola, avec exagération des dimensions de l’ab-
domen, sous le n° 4 de la Tab. 200; il a figuré Glycirrhiza (sic)
sous le n° 3 de la Tab. 164.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE AOT
J'ai publié moi-même dans la XX° livraison des Etudes d'Ento-
mologie, quatre figures de Z71fol sur la PI. 8 et comme suit :
1° n° 150, Z 71folu, de Vernet-les-Bains; 2° n° 151, Trifolu-palustris-
sexmaculata, de Rennes; 3° n° 152, l'Ab. confluens de la même
Trifolii-palustris-sexmaculata; 4 n° 153, l’Aberration Confluens
de la Z'rifolu-palustris normale, c’est-à-dire à 5 taches (y compris
les 2 taches basilaires) et non à 6 taches. Je prie le Lecteur de se
reporter à ce que J'ai écrit au sujet de 7 ifolu, de sa race Palustris,
de l'Ab. sexmaculata, de l'Ab. confluens et des formes anglaises
de Zrifolu, dans le même ouvrage, aux pages 43, 45, 48, 49,
FO, ST.
Enfin dans le III° Volume des Ætudes de Lépidoptérologie
comparée, jai fait figurer sur la PI XXVIII, 6 nouveaux exem-
plaires de Trifoli : n° 163, Trifolu-lutescens, Cockerell, Ab. coz-
fluens, Tutt, d'Emsworth (Angleterre) capturé par Christy, en
1803 ; n° 164, Z'rifolu-obscura, Tutt, d'Angleterre; n° 165, Palustris,
de Rennes; n° 166 et n° 167 Palustris-confluens Cet Q, de Rennes;
n° 167, Z'rifolu, Dup. de Hyères (Var).
Le relevé de toute cette Iconographie générale relative à 7'r1folu,
étant fait, je passe à l'examen des races locales de 7 1f0ol, Espèce
polymorphe, répandue depuis l'Angleterre à la Barbarie.
1 Australis, Lederer; 7 74folz, var. Rambur.
Andalousie; certaines parties de l'Algérie.
En commençant par le Sud, la première race de 7 r2fol qu'on
peut observer est celle qui habite l’Andalousie, les environs de
Géryville et d'Alger. Je crois que c’est la forme que Lederer a
désignée sous le nom d’Aws/ralis. Mais je regrette de n'avoir pu
lire la description originale de Lederer. Je n'ai pu me la procurer
et Je crois devoir en faire la déclaration.
Quoi qu'il en soit, 1l s’agit de la Zygæna considérée par Rambur
comme une variété locale andalouse de 771fol et décrite par cet
Auteur, aux pages 177 et 178 du Catalogue Systématique des
492 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Lépidopt. de l'Andalousie. D'ailleurs la description n'existe pas
seule et dépourvue de figure; mais nous devons une juste gratitude
à Rambur qui, dans le Cat. Systém. des Lépidopt. de l'Andalouste,
a copieusement représenté sous les n° 5, 6, 7 et 8 de la PL 1, la
Trifolu de l’'Andalousie.
La fig. $ semble être la figuration de l’Ab. cærulescens, Obthr,
dont les ailes inférieures sont presque entièrement envahies par la
couleur bleu foncé de la bordure. Cependant, dans le texte (p. 175),
Rambur rattache la figure 5 à S/æchadis, comme représentant la
race type de Sæchadis ?
Je possède un grand nombre d'exemplaires recueillis à Grenade
(de Graslin, mai et juillet); Sierra-de-Alfakar et Sierra-Nevada,
du côté de Lanjaron (R. Obthr., juillet 1879); Barcelone (coll.
Bellier); Géryville (1° lahaye, mai 1886), Husseim-Dey et
Maison-Carrée (Holl, 1908); Lambèse, mai 1875, mai 1884, juin
1885, mai 1906 et août 1885); Puebla de D. Fabrique, près Grenade
(1900, Escalera).
La taille d'Australis est plutôt petite, le fond des ailes supé-
rieures est d’une coloration verdâtre bronzé, non transparent, avec
une tache basilaire rouge carmin, coupée en deux par la nervule
et ne descendant pas jusqu’au bord interne. Dans le milieu de
l'espace cellulaire, il y a une petite tache rouge carmin souvent
inférieurement contiguë à une tache plus grosse, avec laquelle la
première tache forme, dans ce cas, comme une seule et unique tache
qui serait simplement coupée par la nervule médiane. Quelquefois
aussi les deux taches rouges (celle qui est dans l’espace cellulaire
et celle qui est au-dessous), sont nettement séparées l’une de l’autre
et forment deux petites macules arrondies bien distinctes. Enfin,
il y a une tache externe rouge carmin, plus grosse, arrondie, au
delà de l’espace cellulaire, de sorte que chez Awstralis, abstraction
faite des taches basilaires, on constate 3 taches rouges sur les ailes
supérieures. Ces taches sont d’un carmin un peu vineux, mais vif.
Les ailes inférieures sont d’un rose carminé moins foncé que les
taches des supérieures; elles sont entourées d’une bordure bleu
D
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 493
d'acier assez large et régulière. Il convient. de remarquer les deux
teintes; vert bronzé du fond des supérieures et bleu d’acier du bord
des inférieures, chez le même individu.
Je n'ai jamais vu d’Aberration andalouse ou algérienne à 4 taches
rouges aux supérieures, n1 d'autre confluence que celle des deux
taches rouges médianes. À la Sierra-de-Alfakar, l’envahissement
des ailes inférieures par la teinte bleue de la bordure, produit la
variété cærulescens figurée, sans nom spécial, par Rambur, sous
le n° 5 de la PI. 1 et rapportée à tort, il me semble, par cet auteur,
à Stæchadis. Mon frère a pris le même jour, en juillet 1870, au
même lieu, c'est-à-dire dans les montagnes incultes et sauvages qui
s'élèvent du côté oriental de la petite ville d'Alfakar, un peu plus
loin que la fontaine d’eau gazeuse, et d’où l’on jouit vers le Sud,
d’une vue si belle sur la Sierra-Nevada, $ © cærulescens, 2 O in-
termédiaires, 1 Cet 3 Q à ailes inférieures rouges, simplement
assez largement bordées de bleu d'acier.
La forme cærulescens ne paraît donc pas rare en cette localité ;
Je ne l’ai Jamais vue, venant d’autre part que de cette Sierra-de-
Alfakar.
Je possède de Lambèse, où elles furent capturées par Merkl,
en juin 1884, deux Ab. © aurorina, caractérisées par la couleur
d'un rose orangé qui remplace la teinte rouge normale, en dessus
comme en dessous, sur les ailes inférieures et aux taches des supé-
rieures.
Je dois faire observer que les races andalouse et algérienne occi-
dentale diffèrent un peu l’une et l’autre de la race algérienne
orientale.
La race de Géryville, c’est-à-dire oranaise du sud, ressemble
plus à la forme andalouse; la race de Hussein-Dey est également
référable à l'Azs/ralis d'Andalousie. La race de Lambèse paraît
encore une forme d'Aws/ralis. Mais à Khenchela, la race est plus
grande, avec les taches rouges plus grosses et la forme des ailes
plus élancée. Comme à Hammam-Rhira, c’est plutôt la forme
Syracusiæ, de Sicile, à fond des ailes supérieures bleu d’acier
494 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
plutôt que vert bronzé et à abdomen très allongé. Cependant cer-
tains exemplaires de Lambèse et de Hammam-Rhira, mis côte à
côte, ne semblent pas disparates. La différence est plus sensible
entre les individus de la Sierra-de-Alfakar et ceux de Syracuse.
2° Syracusiæ, Zeller.
Sicile.
La forme de Sicile figurée par Freyer, dans les Neuere Beitrege,
sous les n° 3 et 4 de la Tab. 506, comme Syracusia (non Sjracusiæ)
sur la Planche, et Syracusii dans le texte, d’après une paire fraîche
rapportée de Sicile par Zeller et communiquée à Freyer par
Rendant Metzner, de Francfort-sur-l'Oder, est tout à fait diffé-
rente de la forme andalouse et ne peut être confondue avec
Australis, ainsi que cela se fait généralement. La longueur déme-
surée de l'abdomen, comme l’a représenté très correctement Freyer,
l'aspect plus robuste, la teinte indigo du fond des ailes supérieures
et du bord des inférieures, la bordure indigo régulière et moins
large des ailes inférieures, la longueur plus grande des antennes
dont l'extrémité paraît plus pointue, les taches rouges plus petites
et d'une couleur plus miniacée constituent un ensemble de diffé-
rences tout à fait suffisant pour séparer Syracusiæ, Zeller, d’Aus-
tralis, Lederer. Je possède une série de Syracusiæ rapportée de
Sicile par Bellier.
Ainsi que je l’exposais à la fin de la notice relative à Aus/rals,
la race de Hammaim-Rhira, dont M. Dayrem a recueilli 19 exem-
plaires en mai 1900, est assimilable à Syracusiæ plutôt qu'à Aws-
tralis. Il en est de même de la race d'Ain-Draham, en Tunisie et
aussi de la race de Khenchela (Province de Constantine) dont
M. Harold Powell captura 27 échantillons en mai 1908; mais ce
qui est plus curieux, c’est que la race de l’Escorial (fin juillet 1879)
est bien plutôt conforme à Syracusiæ qu'à sa voisine Aws/ralis.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 495
3° Duponcheliana, Obthr.
Pyrénées-Orientales.
Assez conforme à la 7 r2fol Var. figurée par Duponchel, sous
le n° 1 de la PI. VIII du Supplément Z'ygén. et représentée par
moi, sous le n° 150 de la PI. 8 de la XX° livraison des Æ/udes
d'Entomologie. Duponcheliana donne deux fois par an ; elle vole
aux mois de mai et de septembre dans les prairies très arrosées,
à l'altitude voisine de celle des villages de Casteil et de Vernet-
les-Bains, le long de la route qui conduit à Casteil et dans la
vallée de Saint-Vincent. C’est une Zygæna de taille relativement
petite ou moyenne, d'aspect général terne, pas très opaque et peu
brillant. Le fond des ailes supérieures est indigo pâle; les taches
rouges et les ailes inférieures sont de nuance rose carminé; les
taches des ailes supérieures confluent parfois dans toute leur lon-
gueur, mais surtout entre la tache cellulaire et la tache externe,
c'est-à-dire conformément à la confluence que représente la fig. 138
de Huebner (G/ycirrhizæ). Cependant il n'y a aucun rapport de
taille et surtout de coloration entre cette Glycerrhizæ de Huebner
et la confluens, selon la disposition Glycirrhizæ, des Pyrénées-
Orientales.
Je possède environ 130 exemplaires de la Duponcheliana, pris
à Vernet-les-Bains. C'est une forme dont l’aspect est bien homo-
gène. Je crois qu'on peut lui rapporter la 7 7i7olz d'Elne, du Canet
et de Banyuls, c'est-à-dire du littoral des Pyrénées-Orientales,
mais comme ma collection ne contient qu’un trop petit nombre
d'échantillons des localités voisines de la Méditerranée, dans les
Pyrénées-Orientales, je ne crois pas pouvoir affirmer que la race
y est semblable à celle de Vernet-les-Bains. La coque est allongée
et Jaune. Le dessous des ailes reproduit le dessus, mais encore en
plus pâle. J'ai reçu de Digne une paire seulement du 771folu,
cette paire de Digne ressemble beaucoup à la 771/oli1 (sans indi-
cation de localité), de la collect. Boisduval, qui est intermédiaire
entre Duponcheliana de Vernet-les-Bains et Olbzana d'Hyères
(Var).
496 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
4° Olbiana, Obthr.
Hyères.
C'est la forme qui est représentée sous le n° 168 de la PI. XXVIIT
du Vol. III de la Lépidoptérologie comparée. Ma collection con-
tient environ 75 exemplaires pris au Ceinturon, près Hyères (Var),
par M. Harold Powell, le 21 mai 1906. Les deux sexes sont diffe-
rents. Le O' est d’aspect robuste, à ailes bleu Indigo, avec un reflet
d'acier brillant; les taches ordinaires des ailes supérieures sont
petites et d'un rose carminé vif; les ailes inférieures sont rose
carmin, largement et nettement entourées d’une bordure indigo
semblant moins luisante que le fond des ailes supérieures. Les
antennes sont noires, longues, épaisses ; le thorax et l’abdomen sont
d’un noir bleu et d’une contexture épaisse. La Q a les ailes ailon-
gées ; elle paraît plus molle que le G' et a une ressemblance avec
Loniceræ. Elle est de couleurs moins vives que ie ©, mais ls
taches rouges des ailes supérieures sont plus larges. Olbiana diffère
de Duponcheliana par sa taille généralement plus grande, son
aspect plus fort, son corps plus large et ses couleurs plus foncées
et plus vives. Duponcheliana fait l'effet d’une race pâle et chétive,
tandis qu'Ulbiana est sensiblement plus ample et paraît plus vi-
goureuse. Je n'ai vu aucun exemplaire d'Ofbiana dont les taches
des ailes supérieures tendent à confluer. La coque d’O/biana est
blanche, jaune ou chamois clair, luisante comme de la porcelaine,
assez lisse, peu ridée.
J'ai pris, en Juin 1805, dans les prairies au-dessus d'Uriage
(Isère), 4 O' et 1 Q d'une forme de T'rifolu tout à fait intermé-
diaire entre Olbiana et Duponcheliana. Elle ressemble beaucoup à
Olbiana, mais est moins robuste et moins vivement colorée.
Je possède de la Sainte-Baume un seul ©, de petite taille, ayant
les taches rouges des ailes supérieures extrêmement réduites et la
bordure indigo des ailes inférieures moins large. Je signale cet
exemplaire aux Entomologistes de Marseille comme pouvant être
l'indication d’une race de 7 71fol2 distincte et encore inconnue qu'il
faudrait rechercher dans les prés sylvatiques de la Sainte-Baume.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 497
M. H. Powell a pris une © Olbiana d’une couleur rose orangé
pâle, mais ayant un aspect très brillant. Cet exemplaire aberrant
est très grand et d’une remarquable fraicheur.
À titre exceptionnel et aberrant on peut trouver O/biana en
Angleterre, car ma collection contient un © portant l'étiquette
Hailsham (6—1892) ayant fait partie de la collection Tugwell qui
fut vendue à la salle Stevens, le 10 décembre 1895, et ayant tout
à fait l'aspect de la race O/brana.
s’ Trifolii, Esper (Tom. II, Tab. XXXIV; fig. 4, 5).
11 me semble que la 7 7:fol de Lectoure (Gers) (mai, juin 1906)
dont M. Dayrem m'a envoyé une série de plus de 100 exemplaires;
d'Angoulême (4-5 mai 1006), et de beaucoup d’autres localités que
j'énumérerai plus loin, peut recevoir le nom de 7 r:folu, Esper.
La taille est plus ou moins grande; les ailes ont la forme un
peu élancée; l'aspect est moins robuste que dans Olbiana; le fond
des ailes supérieures est d'un bleu indigo, tournant parfois au
verdâtre, mais pourvu d'un reflet d'acier luisant; les taches des
supérieures sont d’un rouge carmin un peu miniacé très vif, ainsi
que les ailes inférieures dont la bordure indigo est nette, mais bien
moins large que dans Olbiana.
A Lectoure, on trouve l’'Ab. Glycirrhisæ, Huebner, et l’Ab.
confiuens, totale, quelquefois très accentuée et d’une remarquable
étendue. La forme d'Angoulême ne paraît pas différer de celle de
Lectoure.
Au sujet de la Zr:folu de Lectoure, qui est de taille assez
grande, il me paraît intéressant de rapporter que feu Jules Fallou,
il y a une quarantaine d'années, étant allé rendre visite à un de
ses amis, à Auch, c'est-à-dire dans une ville située tout près de
Lectoure, trouva aux environs d'Auch, en grande quantité, une
race de 7 71folii exceptionnellement petite et dont J'ai sous les yeux
une paire donnée autrefois à Guenée par Jules Fallou.
Je me souviens de m'être jadis entretenu de cette Zygæna Trifolu
32
498 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
d'Auch, dont la taille est presque de moitié inférieure à celle de
la / rfolu de Lectoure, avec Guenée et Fallou. Celui-ci nous assura
que tous les exemplaires vus par lui, étaient de dimension également
réduite; telle est la paire que je possède et que J'ai sous les yeux.
Cette constatation est intéressante, en ce sens qu’elle indique
combien les races peuvent être localisées et comme, dans une localité
séparée d'une autre par une petite distance, on peut trouver une
forme différente d’une autre forme, en ce qui concerne la Zygæna
Î'rifolu. Guenée avait donné dans sa collection le nom de pusilla
à cette forme minuscule de 7 7:fola, que je n’ai jamais vue capturée
dans une autre localité que les environs d’Auch. M. Dayrem a pris
à Lectoure 2 S Zrifolu de l'Ab. sexmaculata, c'est-à-dire présen-
tant à l'extrémité de la 5° tache qui est l’externe supérieure, une
sorte de petite tache satellite, contiguë à la 5°, de plus petite dimen-
sion que celle-ci, mais très nettement indiquée. J'ai signalé cette
Ab. sexmaculata pour la forme palustris; je ne l’ai jamais observée
pour /71fol2 que dans la forme de Lectoure et dans celle de
Rennes. Je crois que l’on peut rapporter à Z'r1folu, Esper, c'est-à-
dire à la forme de l’Espèce considérée comme type, les formes
provenant des localités suivantes, du moins d’après les documents
que Je connais : Sandburn, Freshwater, Lyndhurst, Dower en An-
gleterre; Béville et Cherbourg (Guenée, 9/im et Vuillet, 1009);
24 exemplaires de taille moyenne, plutôt petite; ailes d’un noir
indigo très foncé, avec un reflet d'acier un peu verdâtre, taches
rouges petites, d’une couleur carminée très vive, ne présentant
aucune confluence. — Samoussy, dans l’Aisne (Powell, iuin 1909);
forme colorée à peu près comme à Cherbourg, mais sur O exem-
plaires, 4 ont les taches rouges élargies et plus ou moins confluentes.
—— Pont-de-l'Arche (L. Dupont, 1908), 17 exemplaires, forme
colorée comme à Cherbourg; même taille; taches des ailes supé-
rieures conformes à celles de Samoussy; c'est-à-dire plus grosses
qu'à Cherbourg. — Allemagne (ex Staudinger); Berlin (ex coll.
À. Kuwert); Limoges, Saint-Germain-en-Laye, Biarritz (D* Ober-
thür, juillet 1805); coloration rouge d’une vivacité extraordinaire
— et Nay, dans les Basses-Pyrénées (P. Chrétien, mai 1906);
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 499
Besançon (Jeunet); Jura; Forêt-de-Lorges, dans les Côtes-du-
Nord (26 juin 1881); Chartres (Guenée); Iles Chausey, à l’ouest
de Granville, dans la Manche (août 1883); Huelgoat, dans le
Finistère (10 Juillet 1900); Quiberon, dans le Morbihan (juillet
1879); Bagnoles-de-l’Orne (juin 1904) ; Cancale (été 1800); Bourg-
des-Comptes; Forêt de Rennes; Monterhl; çà et là aux environs
de Rennes, en juin; Larche, dans les Basses-Alpes; Dompierre-
sur-Mer, dans la Charente-Inférieure; Forêt de Vouvant et la Ba-
raudière, en Vendée.
En Angleterre, la Zygæna 1rifolu fournit des variétés du plus
haut intérêt, notamment celle que Tutt a appelée obscura à la
page 497 du premier volume de son ouvrage intitulé : À Natural
History of the british Lepidoptera, d'après un exemplaire qu'il
n'a sans doute Jamais vu, mais que J'avais mentionné dans la
XX° livraison des Æzudes d'Entomologie. J'ai fait figurer cette
Ab. obscura sous le n° 164 de la PI XXVIII du Vol. III des
Etudes de Lépidoptérologie comparée. Ce spécimen faisait partie
de la coll. Battershell-Gili qui fut vendue à ja salle Stevens, dernier
rendez-vous de la plupart des collections anglaises de Lépidop-
tères, les 12 et 13 avril 1886.
Une autre variété très remarquable est la /y/escens Cockerell,
signalée par Tutt (loc. cit, p. 487). J'ai fait figurer, sous le n° 163
de la PI. XXVIÏII du Vol. III, un exemplaire qui est à la fois
lutescens et confluens, pris par Christy, à Emsworth, en 1893.
Ma collection contient 4 Ab. lufescens prises par Christy; 2 ©
portent l'étiquette Emsworth et faisaient partie de la coll. Tugwell ;
2 autres C' sont étiquetés Watergate, 1893; Wim Christy, et appar-
tenaient à la collection Maddison qui fut vendue à la salle Stevens
les 23 et 24 février 1000.
Voici ce que dit Tutt au sujet de l’Ab. Zutescens : « Cockerell,
in naming this aberration, simply gives the reference « ÆEx/om.
1878, p. 102. » Turning to his, we read that Wellman « exhibited
some yellow forms of Zygæna trifolu, reared from larvae. » Bond-
Smith describes certain Gamlingay specimens (probably #alustris),
caught July 16", 1891, and bred later, as being of-a « beatiful
500 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
lemon-yellow, showing no trace whatever of red. » This aberra-
tion has been recorded from Malpas, in Cheshire (Walker),
Emsworth, where 100 were obtained in May 1803, and 11 in 1804
(Christy), Upton St. Leonards (Higgs), Chattenden (Tutt). »
Je n'ai jamais vu d'exemplaires français de l’Ab. /utescens de
T'rif ola.
On trouve aussi en Angleterre des exemplaires à taches con-
fluentes et à ailes d’un rose orangé, au lieu d’être rouge carmin.
Il semblerait que le traitement des chrysalides par la chaleur
produirait le développement sur les ailes supérieures de la pig-
mentation rouge. J'ai reçu en 1007, de M. Hans Burgeff, de léna,
des 7 r:folu écloses de chrysalides qui avaient subi une température
de + 49°. L’une d'elles a les ailes supérieures envahies par la
couleur rouge dans le genre de l’Ab. /#cendium de Zonicere
figurée sous le n° 105 de la PI. XXII du Vol. III de la Lépidopté-
rologie comparée.
6 Palustris, Obthr.
C'est la plus grande forme connue de 7 r1folx,; en même temps,
c'est la plus vivement colorée et la plus fertile en exemplaires aber-
rants par confluence. J'ai déjà fait figurer dans la XX° livraison
des Ætudes d'Extomologie, sur la PI. 8, Palustris-sexmaculata, sous
les n° 151 et 152 et Palustris-confluens sous le n° 153; mais si la
gravure du trait faite par Dallongeville est excellente, le coloriage
est très médiocre et je dois déclarer que la teinte du rouge dans
le coloriage est tout à fait différente de la réalité. Le rouge est
superbe chez Palustris de Rennes; il est d’un carmin vif, égayé
par une pointe de minium dont l’œ1l perçoit l’agréable effet, tandis
que rien n’est plus terne et au-dessous de la vérité que le coloriage
de la PI. 8, dans la XX° livraison des Æzudes d'Entomologie.
À cause de cette défectuosité que je confesse, J'ai fait figurer de
nouveau la Zygæna Trifolu-Palustris, sous les n° 165, 166 et 167
de la PI XXVIII du Vol. IIT des Z7udes de Lépidoptérologie
CO mparée.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE SOI
La coloration rouge y est meilleure, mais encore tout à fait in-
suffisante, et elle est bien loin de rendre cet éclat chaud et brillant
que je constate dans la Nature. Il faut croire que la coloration
rendant exactement la réalité, est bien difficile à produire. J'en
exprime tous mes sincères regrets.
C'est pourtant une bien curieuse mutation de Trifclu, celle que
j'ai appelée Palustris. Les Entomoiogistes anglais l'avaient cons-
tatée dans leur île, comme moi-même je l’avais observée aux en-
virons de Rennes et ils s’apprêtaient à la désigner sous un nom,
probablement celui de 77ifolii-major, lorsqu'ils furent devancés
par la publication de la XX° livraison des Æ/udes d'Entomologie.
D'ailleurs la priorité du nom Palustris n'est point contestée et
Tutt (p. 480, vol. I), après avoir constaté qu'il y a deux formes ou
sous-espèces, se rencontrant en Angleterre et jusque-là pourvues
du même nom de 7 r1fola, n'hésite pas à dire que les deux races
ont été séparées récemment (Æ#4. Record, IX, p. 88) comme
Trifoli-minor et T'rifolii-major, mais qu'il n’y a pas de deute que
Palustris d'Oberthür est le plus ancien nom donné à la dernière
forme (#1folu-major).
Si on place une série bien choisie de Palustris, capturées aux
environs de Rennes, à côté d’une colonne de Duponcheliana, Ol-
biana, Australis, Syracusiæ, on reconnaît une telle dissemblance
de taille, de couleur et d'aspect, que l’on peut à bon droit citer bien
des Espèces distinctes, comme ne présentant pas un faciès aussi
divergent. Mais si on envisage la forme 7 7ifolu type et une série
de Palustris, dans laquelle les exemplaires n'auraient pas été sélec-
tionnés soigneusement, je reconnais qu'on trouverait des exem-
plaires à peu près équivalents dans la comparaison des deux races.
Cependant, à cause du grand nombre d'exemplaires de Palustris
bien caractérisés qu'on peut recueillir au même lieu, la grande
Palustris impose véritablement son qualificatif #ajor comparative-
ment à la normale 7 rfolu. Aux environs de Rennes, 7 7folu et
Palustris ne se trouvent pas nécessairement ensemble, mais elles
ne s’excluent pas absolument; il y a longtemps que Jj'étudie la
question. Je ne me souviens pas d'avoir rencontré la vraie Palustris
502 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
à la forêt de Rennes où j'ai toujours trouvé 7 71foli1 presque #1nor.
Dans les prés et les bords des chemins humides et herbus de
Monterfil, c'est 7'rifolii normale que l’on trouve et non pas Palus-
tris; mais sur les berges du canal d’Ille-et-Rance, vers Saint-
Grégoire, un peu au nord de Rennes et dans l’allée de châtaigniers
de la Hublée, à 4 kilomètres est de la ville de Rennes, c’est
Palustris caractérisée, presque sans mélange de 77folii normale
avec ses variétés conjlucns et sexmaculata, aue l’on a pu observer.
Je dois faire connaître cependant qu’à la Hublée, Palustris est
détruite depuis quelques années; je crois que cette disparition de la
Zygæna est due à la coupe de l'herbe et au pacage des bestiaux.
Sur les berges du canal d’Ille-et-Rance, Palustris existait encore
en abondance l’an dernier.
À la fin de mai, ou vers le commencement de juin, suivant les
années, Palustris éclôt ici ou là, aux environs de Rennes, ne sem-
blant pas se maintenir avec une continuité bien prolongée, au
même lieu, mais disparaissant ici et apparaissant soudain ailleurs,
à une place où on l'aurait peut-être auparavant inutilement re-
cherchée.
J'ai rangé dans ma collection plusieurs centaines de Palustris
récoltés aux environs de Rennes. Depuis mai 1806, époque de la
publication de la XKX° livraison des Æzudes d'Entomologie, qui
contient aux pages 45, 48 et 40, la description initiale de Palustris,
j'ai été amené à faire un certain nombre d’intéressantes observa-
tions. J'ai acquis de nouvelles Palustris où Trifolii-major d'An-
gleterre, et je me suis efforcé de me documenter toujours davantage
sur la question de 7'rifol. Je suis donc plus renseigné aujourd’hui
qu'il y à 14 ans.
En Angleterre (Ile de Wight), ex collection Maddison, et à
Rennes, la forme Palustris me paraît presque équivalente; cepen-
dant pour la taille et la vivacité de la couleur rouge, c’est à Rennes
que J'ai constaté les exemplaires les mieux partagés. On trouve à
Rennes des 7rifolii conformes aux échantillons de Lectoure,
Biarritz et Angoulême; mais la réciproque n’est pas vraie, du moins
d’après ce que je connais, et c’est à Rennes seulement que J'ai
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 503
—— —
observé en abondance ces Zygæna qui sont alors l’expression la
plus accentuée de Palustris, c'est-à-dire dont la taille et la vivacité
de la couleur rouge sont supérieures à tout ce qui se présente sous
ce rapport dans toutes les autres races.
La proportion des individus confluens est très grande chez Pa-
Lustris de Rennes et aussi de l'Ile de Wight. Du 15 au 20 juin
1906, du 18 au 24 juin 1907, sur les berges du canal d'Ille-et-
Rance, au territoire de Saint-Grégoire, près Rennes, le nombre des
Ab. confluens était tel qu'on pouvait en récolter une centaine
d'échantillons en deux ou trois chasses; d’autre part, on pouvait
capturer des variations remarquables. C'est ainsi que 4 var. sex-
maculata furent recueillies en 1906 et que 6 var. sexmaculata furent
capturées en 1G07; parmi ces 6 dernières, se trouve une © Sex71a-
culata qui a tellement l'aspect d’une f/ipendule, à cause du déve-
loppement de sa sixième tache rouge, que j'ai cru devoir la pourvoir,
peu de temps après sa capture, de l'étiquette suivante que je transcris
textuellement et qui exprime bien mon opinion : « Cette Zygena
d'aspect différent de 7ijolü-palustris et rappelant F#pendule
a été prise, seule de sa forme, avec un nombre considérable de
Trifolii-palustris. Je la considère comme un exemplaire aberrant
de Trifolii-palustris, non comme #lipendule qui éclôt fin juillet
en Bretagne et non en Juin. »
Les Entomologistes dont les documents se trouvent maintenant
réunis aux miens, sont morts depuis plus ou moins longtemps et
ils ont emporté dans la tombe le secret d'observations qu'il nous
eût été bien utile de connaître aujourd’hui. En effet, si nos devan-
ciers avaient pris soin d'écrire le renseignement nécessaire, au
moment opportun, et s'ils l'avaient fixé à l'épingle du papillon qui
en était l’objet, nous aurions actuellement des certitudes, au lieu
des doutes que nous cherchons à éclaircir, trop souvent en vain.
Quant à moi, qui écris aujourd’hui ces lignes, en attendant qu'à
mon tour je sois nécessairement frappé par l’inévitable mort, ins-
truit par l'expérience, je me suis efforcé de munir de toutes les
indications capables de bien renseigner mes successeurs, les docu-
ments si laborieusement amassés dans ma collection.
504 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
J'espère que cette précaution sera utile à la Science. Elle per-
mettra de rectifier les erreurs que J'aurai pu commettre, comme
aussi de confirmer les assertions dont la vérité paraîtra suffisam-
ment démontrée.
Dans l'intérêt de la Science, j'engage tous les Entomologistes à
pourvoir les exemplaires qu’ils récoltent, de tous les renseignements
susceptibles d’être utiles à leurs successeurs. La vie et la production
laborieuse de chaque homme ici-bas sont bien courtes; mais c'est
dommage, faute d’une étiquette écrite en temps utile, de priver
ceux qui, dans l'avenir, s'intéresseront à ce qui nous intéresse au-
jourd’hui, d’une documentation qui pourrait être plus tard très
instructive, si elle était complétée maintenant par les indications
nécessaires.
En outre d'exemplaires très frais, mais albinisants et chez
lesquels la couleur rouge a été remplacée par une teinte rose orange
plus où moins pâle, M. P. Boulé trouva éclosant et posée sur un
brin d’herbe, une admirable Aberration chez laquelle les parties
rouges sont remplacées par une teinte d’un noir de suie. J’ai décrit
cette Aberration avec le nom de xigricans, dans le Bulletin Soc.
ent. France, 1907, p. 220. Je prie le Lecteur de se reporter à ce
que J'ai écrit à ce sujet dans le Bulletin précité.
J'aurais dû faire figurer cette pièce hors ligne, mais J'avoue que
Jai reculé devant les dangers auxquels sont exposés tous les pa-
pillons soumis à la figuration. Le dessinateur, le graveur, le colo-
riste ont beau être soigneux et attentifs pour la conservation des
spécimens qui leur sont confiés, les dommages arrivent toujours
en proportion plus où moins grande, mais ils sont inévitables et
j'aurais déploré qu’un accident, toujours possible, vint abîmer un
Lépidoptère aussi rare et dont la conservation est Jusqu'ici restée
parfaite.
Toujours est-il qu'il est bien bizarre de constater la présence de
la grande Palustris à l'ile de Wight, tandis qu'à Cherbourg on
trouve 77ifolii plutôt #en0r et d'observer qu'aux environs immé-
diats de Rennes, ladite Palustris, du moins d’après ce que nous
connaissons aujourd'hui, atteint son maximum d’ampleur et de
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 505
—
vivacité dans la coloration. Rien ne peut m'expliquer pourquoi
Palustris abonde sur les berges du canal à Saint-Grégoire, alors
qu’à une très petite distance de là, à la Forêt de Rennes, Trifolii
vit isolée et non pas en masse, et y donne des exemplaires sensi-
blement plus petits.
J'ai la conscience d’exposer aussi exactement que possible ce que
j'ai été à même d’observer jusqu'ici, relativement à 771fol1i et à sa
forme Palustris comparées. Je compte du reste continuer à étudier
cette question, me demandant notamment si certaines années ne
seraient pas plus favorables que d’autres au développement de la
forme Palustris. Pour que Palustris se manifeste aux environs de
Rennes et dans certaines régions de l'Angleterre, il faut que
Trifolii d'où émane Palustris et dont celle-ci n’est qu'une mutation
agrandie, amplifiée, magnified, comme on dirait de l’autre côté du
Détroit, trouve des conditions locales et des circonstances spéciales,
restées inconnues de nous, mais qui sont nécessaires au dévelop-
pement de 7 7ifolu, sous la forme Palustris. N’est-1l pas intéressant
de constater la présence simultanée de Trifolii-minor et de Trifolii-
major où Palustris, dans le même pays, en des lieux séparés par
une très faible distance ?
On ignorera évidemment toujours si Palustris s'est graduelle-
ment développée à Rennes, ou bien si elle y a existé dès le com-
mencement de l'apparition de l'Espèce. Le passé nous reste enve-
loppé d’un impénétrable mystère; mais l'avenir s'ouvre devant
nous, puisque nos études pourront être continuées par des succes-
seurs. Il sera fort instructif pour eux de constater plus tard si la
Zygœna Trifoli, aux environs de Rennes et en Angleterre a
maintenu sa mutation Palustris et dans quelles conditions. Pour
ces observations, les faits que nous établissons à l’époque présente
et les documents que nous réunissons, seront la base indispensable
à toutes les études futures et l’origine des conclusions qui en advien-
dront. Nous n’entrerons vraisemblablement pas dans la 7erre
promise de la vérité scientifique; mais nous pouvons sincèrement
nous figurer que nos travaux en faciliteront l’accès aux générations
qui succéderont à la nôtre.
500 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
7° Seriziati, Obthr.
J'ai fait figurer la Zygœna Seriziati dans la IIT° livraison des
Etudes d'Entomologie, sous le n° 7 de la PI. V. J'avais déjà décrit
Seriziati aux pages 33 et 34 de la livraison I, d’après des exem-
plaires recueillis à Collo par le Docteur Seriziat. Plus tard, dans
la XIIT° livraison, j'ai fait figurer la même Zygæna Seriziali sous
les n° 71, 72 et 73 de la PI. VIIL. J'ai donc fourni une documen-
tation illustrée relativement très abondante et à laquelle j'invite
le Lecteur à se reporter. Serisiati habite généralement non loin du
littoral algérien, à Collo, Philippeville, Bône; on l’a prise aussi à
Vakouren, Aïn-Seur, Lalla-Khedidja. Elle éclôt en mai, juin et
juillet, suivant l'altitude des localités et suivant la température.
Il y a 3 formes distinctes : 1° celle qui a les ailes inférieures rouges
bordées de bleu indigo; 2° celle qui a les mêmes ailes entièrement
indigo, sauf un seul point rouge médian; 3° l’intermédiaire entre
la forme à ailes inférieures rouges et celle à ailes inférieures bleues.
En outre des taches basilaires rouges, la Zygœna Seriziati a trois
taches rouges aux ailes supérieures. Le fond de celles-ci est d’un
bleu d'acier luisant et la nuance des taches rouges est d’un carmin
très vif. Les deux taches rouges médianes sont parfois confluentes
et parfois séparées l’une de l’autre; Seriziati est habituellement de
taille moyenne, mais on trouve quelquefois des exemplaires très
petits. Si Seriziati est une race de Trifolii, comme Syracusiæe et
Australis qu'on trouve également en Algérie et avec lesquelles
Seriziati a très peu de ressemblance, il est difficile d'expliquer
comment, à une si petite distance relative, trois formes aussi dis-
tinctes appartenant à une même unité spécifique, peuvent exister.
Le Zygaeniste viennois Clemens Dziurzinski s'est fait, paraît-1l,
un devoir de décorer du nom de #igra la forme de Serzstali dont
les ailes inférieures sont bleues avec une petite tache rouge centrale.
Cette forme n’est pourtant nullement noire. Je la regarde en ce
moment même; je vois du rouge carmin vif, du bleu indigo un
peu plus mat aux ailes inférieures, un peu plus brillant aux supé-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 507
rieures, mais je ne parviens pas à trouver trace de noir. Peut-être
le spécialiste viennois se trouvait-il hanté de noires visions, le jour
où il a comblé la lacune laissée par moi dans la dénomination de
la Zygæna? Je ne trouve que cette raison pour expliquer le mot
: -: £ \ FT?
nigra qui ne répond nullement à la réalité.
Zygæna Loniceræ, von Scheven.
Il y a deux races généralement assez distinctes : celle qui habite
les montagnes des Alpes et des Pyrénées où elle vit à une altitude
d'environ 800 à 1,700 mètres et l’autre qui se trouve en Angleterre
et çà et là, dans les plaines du Nord de la France et en Germanie.
La première est assez molle, d'assez grande taille; elle a les
ailes allongées; le fond des ailes supérieures est bleu d'acier ou
d’un verdâtre luisant; les ailes supérieures, en outre des deux taches
rouges basilaires, sont ornées non de quatre, mais de trois taches;
ce total de cinq taches est caractéristique de l'Espèce. En effet,
von Scheven, dans Der Naturforscher, Zehntes Stueck, p. 77, dit
en Parlant de Loniceræ : « Dieser unterscheidet sich von dem
vorigen (Æiipendule) blos dadurch, dass er nur 5 rothe Flecken
hat. » Les 5 taches, y compris les 2 taches basilaires, sont d'un
rose carminé, comme les ailes inférieures qui sont peu largement
bordées d’indigo.
L'aspect général n'est nullement transparent, mais les couleurs
ne sont guère éclatantes ni foncées. Les antennes sont longues, un
peu renflées avant l'extrémité et terminées en pointe; le dessous
des ailes est plus pâle que le dessus; le fond des supérieures, tout
comme chez 7 rijola,est dépourvu du lavis rouge appelé Nebelstreif
en allemand et qu’on remarque chez la 7'ransalpina française et la
Filipendule. Les taches rouges restent tout aussi bien séparées en
dessous qu'en dessus. Huebner à donné, sous le n° 160, une figure
de la forme des montagnes que je considère comme très satisfai-
sante,
508 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
La forme des plaines a été figurée par Esper, d’après des exem-
plaires pris en Allemagne sous les n° 1 a et 1 à de la Tab. XXIV.
Telle est, à peu de chose près, la Lonicere de la forêt de Com-
piègne, dans l'Oise, et aussi celle d'Angleterre. La race des plaines
ou du moins des régions de basse altitude, en Allemagne, dans le
Nord de la France et en Angleterre, comparée à celle des Alpes
et des Pyrénées, est moins grande; elle a les ailes moins allongées;
les 3 taches rouges extrabasilaires sont généralement peu déve-
loppées et les deux taches médianes sont, le plus souvent, nettement
séparées l’une de l’autre, très rarement juxtaposées. La couleur
rouge est d’un carmin plus vif que dans la race des montagnes;
le faciès est plus trapu et l'apparence moins molle.
Chez la race des montagnes, l’Aberration par confluence des
taches rouges est fort rare; mais lorsqu'elle se présente, elle se
produit tout autrement que dans la race anglaise et française du
Nord.
Les Aberrations par confluence, en Angleterre et à Compiègne,
sont remarquablement semblables entre elles et tout autrement
formées que chez Trifol; ce qui est un caractère dont il faut tenir
compte. J'ai sous les yeux 4 Aberrations par confluence, du Nord
de la France et 10 d'Angleterre; sans doute elles répondent à
l'Ab. Bercei, Maurice Sand. Ce qui donne un caractère particulier
à ces 14 échantillons aberrants par confluence, c’est que la réunion
des taches ordinaires forme une sorte de triangle dont le sommet
se trouve à la naissance des ailes, tandis que la base de cette unique
tache rouge triangulaire est arrêtée par une ligne assez droite et
inclinée presque à 45 degrés, à peu près parallèlement au bord ter-
minal. Je publierai la figure de cette Aberration confluente dite :
Bercet.
Je me suis trompé en donnant le nom de Dubia à la Zygena
que j'ai fait figurer sous le n° 147 de la PI. 8 de la XX° livraison
des Etudes d'Entomologie. C'est Lonicere que j'aurais dû la dé-
nommer et non pas Dubia, ainsi que je l’ai fait à tort. Cette Zygæena
n° 147 montre un commencement de la confluence qui se produit
dans la forme Zoniceræ des montagnes. De nouvelles observations
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 509
faites depuis 1806, sur la faune lépidoptérologique des Pyrénées
m'ont démontré que des erreurs d'appréciation existent dans ce que
j'ai écrit aux pages 49 et 50 de la XX livraison, relativement à
Dubia considérée comparativement à Zomiccræ. Mon opinion ac-
tuelle, c'est que Lonicere et Dubia ne se trouvent pas ensemble
à Cauterets où Lonicere existe non avec Dubia, mais avec }ilt-
pendule, tandis que Zoricere, Dubia et Fulipendulæ se rencontrent
toutes les trois à Vernet-les-Bains. Loniceræ, aux environs de
Vernet, habite plus haut, entre 1,000 et 1,700 mètres, tandis que
Dubia se rencontre plus bas.
Les deux Zygœna (Lomiceræ et Dubia) se mêlent seulement à
la frontière de leur habitat, c'est-à-dire notamment dans le ravin
de Cady, au delà du village de Casteil. Dzbza peut avoir trois ou
quatre taches rouges en dehors des macules basilaires. Zonicere
n’a jamais que trois taches en outre des deux basilaires, ainsi que
von Scheven l’a observé et décrit. Dubia a le fond des ailes d'une
teinte très vive verdâtre bronzé luisant et ses taches carmin sont
bien plus foncées et richement colorées que chez Zorcere. Il y a
cependant des Dubia à trois taches, moins foncées de couleur et
quelquefois difficiles à identifier exactement; le nom de Dubia
convient parfaitement dans la circonstance à ces échantillons énig-
matiques, en exprimant l'idée d'incertitude où reste l’observateur,
quant à la détermination spécifique à donner.
La ZLoniceræ d'Angleterre et de Compiègne ne peut pas res-
sembler à Dubia avec laquelle elle ne cohabite pas; mais c'est
avec Zrifoli qu'il est plus aisé de la confondre. Les Auteurs
anglais se sont bien rendu compte de cette ambiguïté et l’un des
écrivains entomologiques anglais les plus appréciés, Charles Barrett,
déclare simplement que, s'il a décrit les deux espèces Zygæna 1r1-
folii et Loniceræ, c'est par respect pour ce qui est universellement
admis. Il semble résulter des paroles de Barrett que lui-même
n'aurait pas pris l'initiative de la séparation des deux espèces
Lonicere et T'rifoli, mais que ne veulant pas s'élever contre l’opi-
nion générale, qui accepte la séparation des deux espèces, 1l s'y
conforme, toutefois sans conviction.
510 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Voici d’ailleurs la copie du texte de Barrett auquel je fais al-
lusion. 11 est imprimé à la page 132 du vol. IT.
« 1 have described these last two species — Z. loniceræ and Z.
trifolii — as distinct, in deference to the universal adnussion of
them as separate species, both at home and abroad, but they are
exceendingly difficult to separate in the perfect state, since all
their distinguishing characters, even to the form of the antennae,
and of the marginal stripe on the hind wings, vary so as almost
to merge one into the other... »
Charles Barrett figure Loniceræ anglaise sous les n° 3, 34, 3 6,
3 c, 3 d de la PI. 59 du Vol. IL. On remarquera la taille extrêmement
réduite des Aberrations par confluence, figurées sous les n° 34
et 3 6. La fig. 3 4 représente assez bien l’Ab. Bercet, mais outre que
la taille du sujet est trop petite, la couleur rose est trop pâle pour
bien représenter l’Ab. Bercei telle que je la connais.
Donc les Entomologistes anglais trouvent parfois difficile d éta-
blir la distinction spécifique entre leur Zoniceræ et leur 7 r1/olu.
Je crois cependant que Louiceræ et L'rifolii sont deux Espèces bien
différentes, mais je reconnais que / r2folu présente des races locales
susceptibles de causer quelque trouble.
M'étant toujours vivement intéressé à la faune anglaise des Lépi-
doptères, j'ai acquis, lors de la vente publique de certaines collec-
tions de papillons anglais, effectuée à la salle Stevens, à Londres,
les lots entiers du genre Zyzæna de plusieurs collections impor-
tantes, telles que Howard-Vaughan, Prest d'York, Battershell-Gaill,
Tugwell, Sheppard, William Claxton; Je me trouve donc pourvu
d'une documentation assez copieuse sur le fait particulier qui
m'occupe présentement et qui se résume à ceci : 1° Les Zygæra
Loniceræ anglaises constituent-elles réellement une unité spécifi-
quement distincte de Z'rifolu? 2° S'il en est ainsi, les Z. Lonicere
anglaises et leurs similaires du continent sont-elles assez différentes
des Loniceræ des montagnes des Alpes et des Pyrénées, pour que
celles-ci soient distinguées au moyen d’une dénomination spéciale ?
Comparant les Zoriceræe anglaises aux Zoniceræ authentiques
de Cauterets et du Valais, je trouve en effet que les Zomcere
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE sil
anglaises sont de taille plus petite, ont la forme des ailes moins
élancée et sont colorées en carmin plus foncé. Donc elles sont
différentes de la race continentale des montagnes; mais 1l n'est
pas douteux que les Zonicere anglaises se rapprochent de 7 r1folu
et cette ressemblance entre Zoniceræ anglaise et Z71:folx est telle
qu’elle a donné lieu en Angleterre à des confusions, dont Je suis
en mesure de rapporter un exemple fourni par la collection Claxton.
J'ai sous les yeux 9 7'rfoli de cette collection Claxton, étiquetées
comme suit : Bude et Hartley-\Wintnev-Hants, et o Lontcere éti-
quetées S. Wales. L'effet que me produit la comparaison de ces pré-
tendus Loricere du sud du Pays de Galles, c’est qu'elles ne ressem-
blent en rien à nos Zoniceræ, non seulement des montagnes, mais
des plaines continentales: elles ont l'apex des ailes supérieures
beaucoup plus arrondi, les couleurs rouges plus vives, les taches
rouges des supérieures beaucoup plus petites, la bordure indigo des
ailes inférieures plus large. Il est vrai que les antennes sont assez
longues et terminées en façon de pointe; mais mon impression,
c'est que les Zoniceræ de la collection Carton ne sont pas des
Loniceræ; je les déterminerais /7ifolu, en faisant cette réserve
qu’elles appartiennent à une race locale particulière et non con-
forme à celle de 7 7:/ol1 de Bude et de Hartley-Wintney-Hants.
Mais ceci peut bien passer pour un fait particulier à la collection
Claxton, car je reconnais que les Zoniceræ des anciennes collections
Prest, Howard-Vaughan, Tugwell, Sheppard, Battershell-G1ll pa-
raissent être bien exactement des Zoriceræ assez distinctes de 7 7z-
folii par leur aspect général et conformes à celles de la forêt de
Compiègne, au nord de Paris. D’alleurs, à part Charles Barrett
qui avait exprimé son sentiment personnel avec une sincérité par-
faite, mais qui n'avait pas osé rompre avec les idées reçues, Je crois
que très généralement en Angleterre, on considère 7 r1folu et Lont-
ceræ comme deux Espèces bien valablement et authentiquement
distinctes. Tutt, dans le premier volume de À Natural History of
the british Lepidoptera, traite aux pages 466-480 de la Zygæna
(Anthrocera) Lonicere et 11 n'émet aucun doute sur la validité de
l'Espèce.
512 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Les Entomologistes du monde entier reconnaissent qu'il y a en
Angleterre une pléiade de Lépidoptéristes pleins de savoir, d'expé-
rience et de probité scientifique. Les Anglais professent pour la
faune de leurs îles une prédilection qu'on pourrait trouver un peu
trop exclusive, parce que jusqu'ici ils ne se sont pas assez intéressés
à la faune comparative des papillons du Continent. Mais les Ento-
mologistes britanniques s’attachent avec un zèle si persévérant, une
activité si féconde et une sincérité si honorable à la connaissance
exacte des Espèces de Lépidoptères vivant actuellement dans les
îles du Royaume-Uni que leurs efforts, en vue d'obtenir la posses-
sion de la vérité dans la question spéciale de la distinction spéci-
fique de la Zygæna Lonicere, n’ont pu finalement manquer d’être
couronnés de succès. L'ouvrage de Barrett porte ia date de 1895,
mais comme l'ouvrage de Tutt, plus récent (1809) l’admet sans
hésitation, je crois qu'il faut également admettre la validité de
l'Espèce Zoniceræ, la considérer comme distincte de Zrfau et
placer, sous le même vocable : Zonicere, la race des plaines de la
Germanie, du Nord de la France et de l'Angleterre; toutefois, Je
propose de généraliser le nom de Major, Frey et de l’attribuer à une
série de Zoniceræ alpines et pyrénéennes. Ce nom, d’abord destiné
aux échantillons de taille exceptionnellement grande, convient à
un bon nombre des Zoniceræ alpines et pyrénéennes, envisagées
comparativement aux Zonicere anglaises, françaises du nord et
allemandes. On peut référer celles-ci à la figure donnée par Esper,
en 1770.
Tutt passe en revue les Aberrations de Zomicere, dans le premier
volume de son ouvrage : À Natural History of the british Lepi-
doptera; il dit à la page 460, en parlant de Zomiceræ-confluens,
que: « several others are in British collections labelled « Coventry »,
but we know nothing of the captor of these. » Je suis heureux
de pouvoir renseigner M. Tutt d’après les spécimens de la collection
Tugwell. 3 échantillons de Zcrceræ-confluens de cette collection
sont étiquetés ainsi : « Coventry-Nicholls » et 3 autres : « Coventry-
Henry-Doubleday. »
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 513
M. Tutt me pardonnera d'exprimer une opinion tout à fait diffé-
rente de la sienne, lorsqu'il attribue la figure 165 de Huebner,
appelée À chlleæ par cet Auteur, à Lonicere, comme Ab. confluens.
L'Achillee 165 de Huebner représente certainement une /7an-
salpina-Hippocrepidis, Ab. confluens, presque Multosa.
Je possède, venant d'Angleterre, des types de l'Ab. Æboracæ,
Prest. Je les ai achetés dans les ventes publiques où les exemplaires
de la collection Prest, d'York, se trouvaient mis aux enchères. Je
crois, comme M. Tutt, que leur albinisme est de nature pathologique.
Ma collection contient un exemplaire analogue de Chemnitz appar-
tenant à la vraie Zoniceræ et des exemplaires des Alpes et des
Pyrénées tout à fait référables à Zborace. Ce sont des sujets patho-
logiquement décolorés. Il y avait dans la collection Tugwell deux
Aberrations de Lonicere, chez lesquelles la couleur rouge normale
est remplacée par une teinte orange. Cette Aberration existe sem-
blable dans un O' de Loniceræ-major pris à Martigny (Valais),
en juillet 1006, par Arnold Wullschlegel.
C’est, je pense, l’Ab. /utescens, Hewett « In some examples the
red tends to be orange » (Tutt. Vol. I, p. 467).
J'ai fait figurer avec le nom de fava, sous le n° 148 de la PL 8,
de la XX° livraison des Etudes d'Entomologie, une Aberration
de Lonicere, à taches et à ailes inférieures jaune clair, provenant
des Cévennes (collection Bellier). Je possède un semblable exem-
plaire de Silésie; le nom Yava étant postérieur à celui de cz/rina,
Speyer, c'est céfrina qui doit être maintenu, tandis que le nom f/ava
donné par moi tombe en synonymie.
Une Aberration superbe de Zoniceræ-major est celle dont j'ai
publié la figure sous le n° 105 de la PL XXII du Vol. III des
Etudes de Lépidoptérologie comparée, avec le nom d’/ncendium,
d’après un exemplaire pris à Plan-Cerisier, près Martigny (Valais),
en juin 1007, par Arnold Wullschlegel. Je possède un second
exemplaire, mais de taille moins grande, également capturé en
Valais et trois autres individus aberrants curieusement transi-
tionnels entre la forme normale et l'Ab. /xcendium, venant de la
33
i4 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
vallée du Roubion (Alpes-Maritimes), de Digne et de Saint-Dizier
(Haute-Marne).
Il est très intéressant de constater que dans les Alpes françaises,
a Larche, à Enchastrayes, à Allos, à Digne, à Venanson, se trouve
le mélange de la forme normale de Lonicere et de la forme ##a3or.
À Larche, les Zoniceræ sont généralement de petite taille et de
couleur très pale; elles ne sont pas supérieures aux Zoniceræ an-
glaises par la grandeur, mais très inférieures pour la vivacité des
couleurs. On pourrait assez justement donner à la race de Larche
un nom particulier.
Je n'ai pu réunir Jusqu'ici plus de 8 exemplaires aberrants par
confluence de la Zoxicere des Pyrénées. La confluence se fait entre
les trois taches rouges externes, à l’exclusion des taches rouges basi-
laires qui restent séparées des taches rouges externes; celles-ci
confluent entre elles par le grossissement de la tache inférieure et
par l’allongement de la tache externe la plus avancée vers le bord
terminal, au moyen d'un trait plus ou moins épais qui la relie à la
tache cellulaire.
La coque est jaune; il est aisé de la récolter à Cauterets et dans
maintes autres localités, sur les brins d’herbe et de bruyère. La
chenille verte, maculée de noir, présentant des touffes de poils noirs,
courts, est très fréquemment parasitée.
Ma collection contient une Aberration bien curieuse provenant
d’une ancienne collection lyonnaise; l’aile supérieure droite est
normale et sur l’aile gauche une longue barre rouge unit la tache
externe supérieure à la tache basilaire, en absorbant la tache cellu-
laire, tandis que les deux taches inférieures, l’externe et la basilaire,
restent normales et séparées l’une de l’autre.
La Zygæna Lonicere commence à éclore en juin et au commen-
cement de Juillet; elle peut durer jusqu'en août. Elle est surtout
commune dans les montagnes des Pyrénées et dans toutes les Alpes.
Elle est moins abondante dans la région forestière du Nord de la
France où Je la crois très localisée en quelques prairies sylvatiques.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 515
Je crois intéressant de relever sur ma collection les localités
suivantes pour la Zygæena Lonicere.
Gourdon, dans le Lot (juillet 1906, R. Obthr.); Mont-Genèvre,
dans les Hautes-Alpes (18 juillet 1906); Stuttgart (Ad. Peter,
1907); Aix-les-Bains, en Savoie (juin, juillet 1906) ; Saint-Martin-
d'Entraunes, dans les Alpes-Maritimes (20 juillet 1906, H. Powell)
forme grande et sombre; Cauterets, dans Îles Hautes-Pyrénées, en
juillet; très variable pour l'intensité de la couleur rouge; Hongrie ;
Zermatt ; Stelvio; Stresa; Larche, Allos, Enchastrayes, Digne, Le
Lauzet, dans les Basses-Alpes; Dalnis, Vallée du Roubion, Madone
de Fenestre, Lantosque, Venanson, dans les Alpes-Maritimes.
Au-dessus de Vernet-les-Bains, depuis 1,000 à 1,700 mètres; Monte-
Generoso; Gavarnie, dans les Hautes-Pyrénées, Martigny, en
Valais; Fusio, en Tessin; Berlin; Jura; Angleterre; Nord de la
France.
La Zygœna Lonicere manque dans l'Ouest de la France et en
Algérie.
Au début de la notice concernant la Zygæna Lomicere, j'ai fait
mention du Pastor von Scheven qui, dans le journal : Der Natur-
forscher (Zehntes Stueck), publié à Halle, chez Johann Jacob
Gebauer, en 1777, décrit à la page 07, le Sphinx Lonicere, en
s'appuyant sur les figures VI et VII de la Tabula XVI de l'ouvrage
de Schaeffer, intitulé Zcones. Le même Pastor von Scheven avait
donné le nom de Zygæna Scabiose à l'Espèce représentée sur les
figures IV et V de la Tab. XVI du même ouvrage. Cette circons-
tance m’amène à donner quelques détails sur l’Iconographie de
Schaeffer, dont la Præfatio est datée de Ratisbonne, calendes
d'août 1766.
Jacobus Christianus Schaeffer, dont Guenée parle très sommai-
rement, mais en termes trop sévères, à la page LV des Généralités
du Tome V (Noctuélites, Tome I) du Species général des Lépr-
doptères (Paris, Roret, 1852), était possesseur des titres suivants
que je copie au bas de son portrait supérieurement exécuté par le
516 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
graveur viennois I. Iac. Haïd. « S. Theol. et Philos. Doct. Eccles.
Evang. Ratisb. Minist.; — Seremiss. ac potentiss. Regis Daniæ
Norwegiæ a consilus; — Gymnasi academici Alton. Profess.
Philos. Honor.; — Academ. Imp. Natur. Curios. Petropol. Lond.
Berol. Upsal. Robor. Monac. et Manhem; — Soc. litt. dvisb. Hist.
Goett. Phys. Bot. Florent. Oec. Cell. Bern. Lusat. ac plvr. Tevton.
Sodalis Academiæ parisiensis ab Epistolarum commercio. »
« Natus Qverfvrti D. XXXI. Mai. A. MDCCXVIIL. Ord. Sacr.
ads DAV" AMDCCET
Jean-Christian Schaeffer est représenté dans son portrait, debout,
jusqu’à mi-corps, la main gauche appuyée sur un livre qui paraît
être son /cones; l’autre main montre la bibliothèque dont une partie
se trouve dégagée, tandis qu'un épais rideau couvre le reste et sert
de fond au tableau. Sur cette draperie fort bien traitée à la manière
noire, par le graveur Haid, se détache bien en lumière la physio-
nomie assez replète de Schaeffer. L'air est grave, comme il convient
pour un personnage appelé aux conseils du très puissant roi de
Danemark et de Norvège; mais l’ensemble est légèrement sou-
riant aussi. N'est-ce pas en effet justice que sur le visage se reflète
le sentiment de satisfaction si légitime qui résulte tout naturelle-
ment de la conscience de tant de mérites accumulés en une même
personne ? Une perruque blanche encadre le front et les Joues et
une large collerette ou fraise, finement tuyautée, raide et ronde
comme un énorme gâteau blanc, entoure le cou et sépare la tête du
corps que revêt une ample robe noire semblant faite de forte étoffe.
Le grand titre de l'ouvrage vient sur un feuillet consécutif au
portrait. Il est ainsi conçu : D. lacobi Christiani Schaefferi Icones
Insectorum circa Ratisbonam indigenorum coloribus naturam refe-
rentibus expresse. Volvm. 1, Pars 1; puis se trouve la traduction
allemande de ce titre latin et la signature de l’Imprimeur « Regens-
burg, gedruckt bey Heinrich Gottfried Zunkel. »
Le livre a belle apparence; le papier est beau et n’est point mé-
nagé.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 517
Sur un feuillet suivant, est imprimée la dédicace en latin au roi
Christian VIL. Je la transcris textuellement :
SERENISSIMO POTENTISSIMOQUE
REGI AC DOMINO
DOMINO
CÉHRISTIANO VII
DANIÆ NORVEGIÆ VANDALORUM
GOTHORUM REGI
DucI SLESVICI HOLSATIÆ
STORMARIÆ AC DITHMARSIÆ
COMITI OLDENBVRGI ET DELMENHORSTII
CETAICRRAICENR
REGI AC DOMINO SUO CLEMENTISSIMO
Sy D UD}
JACOBUS CHRISTIANUS SCHAEFFER D
Ce n’est pas fini; en tournant le feuillet on voit un cartouche
finement gravé sur cuivre, signé : Maag, de Ratisbonne, représen-
tant une sorte de monument funéraire surmonté d’un phénix, oiseau
renaissant toujours de ses cendres, tenant ses ailes étendues au
milieu du feu. Sept médaillons contiennent les initiales des rois
de Danemark et de Norvège précédemment décédés : C. I; C. IT;
C'IV; C. VI: F. IV: F. V; C. VIL et, au-dessous, on lit ces mots
gravés sur le socle : « Maiorum Avorum Parentum Felicitas Pietas
Pacis artiumque Amor laeta unione in Christiano VIT reviviscentes
perstent splendeant perennent ! » Enfin une nouvelle louange latine
en 32 lignes de texte, dont 24 au verso du feuillet, achève l'hom-
mage rendu par le savant Schaeffer au Roi qui l’a appelé à parti-
ciper à ses conseils; cependant que par un bizarre assemblage de
christianisme et de paganisme, ainsi que c'était devenu la mode
au temps de la Renaissance, quatre figures allégoriques, debout,
près du monument, représentent l’hétéroclite mélange du Symbole
de la Croix avec les réminiscences de la Fable et les attributs des
518 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Dieux de l'Olympe. C’est ainsi que du côté gauche une femme
ayant la tête entourée d'un voile quasi monastique, portant à la
main la Croix du Rédempteur et représentant par conséquent la
religion chrétienne, fait société avec la nymphe Pomone tenant
dans ses mains les cornes d’abondance remplies de fleurs et de
fruits. De l’autre côté du monument, une Victoire, telle que les
Grecs représentent la fille du Styx et de Pallante, montre d’une
main une palme et de l’autre une couronne de laurier; elle est
accompagnée de Minerve, fille de Jupiter, déesse de la sagesse,
de la guerre, des sciences et des arts, la tête casquée, une pique
dans la main droite, l'égide sur la poitrine, s'appuyant de la main
gauche sur son bouclier.
Telle était l'ornementation des Livres, édités avec luxe, vers le
milieu du XVIII siècle. Le papier, d'excellente qualité, n’a souffert
du temps aucun dommage; l'impression est très bonne; le coloriage
n'a pas subi d’altérations.
L'auteur a représenté des insectes de tous les ordres d’après les
peintures de Loiïbel de Ratisbonne et les gravures de Trautner
de Nuremberg. Tous les insectes sont coloriés à la main. En face
de la Planche ou Tabula, on peut lire une description sommaire
de chaque insecte, papillon, mouche, coléoptère, punaise, araignée,
mais sans nom distinctif d'Espèce. Guenée trouve les figures aussi
mal coloriées que grossièrement gravées; Je ne partage nullement
cette manière de voir. Sans doute il y a des Planches moins bonnes
et des Planches meilleures, mais la plupart des insectes figurés me
semblent très reconnaissables.
La Zygæna Scabiose, von Scheven, est représentée sous les
n* IV et V de la Tab. XVI et la description, imprimée en face,
est conçue comme suit : « Sphinx alis integris cauda simplici
secunda. —— Zweyter Daemmerungsfalter mit ganzen Fluegeln
und einfachem Schwanze. »
Quant à la Zygœna Lonicere, von Scheven, qu: est figurée sous
les n* VI et VII de la même Tab. XVI, la description est
ainsi rédigée : « Sphinx alis integris cauda simplici tertia —
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 519
Dritter Daemmerungsfalter mit ganzen Fluegeln und einfachem
Schwanze. »
Le n° 1 de la Tab. XVI représente le Macro glossa Bombyliformis
(Hemaris fuciformis), et les n° 2 et 3, le WMacroglossa Stellatarum ;
tous les deux qualifiés de Sphinx par Schaeffer, ainsi que les
Zygœna Scabiose et Lonicere qui furent définitivement pourvues
d’un nom spécifique et sans beaucoup d'efforts d’ailleurs, par von
Scheven, en 1777. Ce dernier Auteur identifie à son Æphialtes
comme en étant l’autre sexe, la Zygœenu Peucedani figurée par
Schaeffer sous le n° 1 de la Tab. LXXI, et par Roesel sous la
HemO0 de latab MIT du Vol
Von Scheven figure lui-même très bien Æphzaltes, sous le n° 7
de la Tab. II, dans l'ouvrage : Der Naturforscher, Zehntes Stueck,
1777, et j'aurai l’occasion de revenir sur ces travaux iconogra-
phiques des Anciens, lorsque j'écrirai la notice relative à Æphsaltes.
Mais il me semble intéressant, à propos de la Zygæna Lonicere,
de parler d’un autre ouvrage, également ancien, mais de format
et d'aspect bien moins riche et moins soigné que l’/cones de
Schaeffer. Il est vrai que l’Auteur Fuessly, modeste naturaliste,
ne semblait pas faire partie des conseils d’un Roi. Il s’agit du
Magazin fuer die Licbhaber der Entomologie, publié à Zurich et
à Winterthur, en 1778, par Johann Caspar Fuessly. Ce sont des
articles détachés sur des sujets variés et notamment des sortes de
revisions critiques de travaux entomologiques déjà parus. Sous le
titre IL : Systemaiisches Verzeichniss der Schmetterlinge der Wie-
nergegend, etc, l'Auteur se livre à une sorte de compte rendu
critique de l'ouvrage en question et s'occupe plus spécialement de
la famille des Spzingide. Si le Magasin est imprimé sans luxe,
par contre un petit nombre d'excellentes Planches s'y trouve
annexé: la Tab. I notamment contient en outre de la figure de
3 Sesia, de la Thyris fenestrina et de la Syntomis Phegea, la repré-
sentation excellente des Espèces du Genre Zygæna désignées par
Fuessly, comme suit : Fig. F, Ephialtes, Linné; Fig. G, Carnto-
lica, Linné; Fig. H, Fausta, Linné; Fig. 1, Lonicere, d’après la
description de la page 125 copiée dans von Scheven et la figure
520 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
citée de Schaeffer; Zcones, Tab. 16, fig. 6, 7; Fig. 2, Filipendule,
Ï inné et Fabricius; Roesel I. Tab. 57, fig. 5, 7; Fig. 3, quarta,
Schaeffer, Zcones. Tab. 60; fig. 4, décrite p. 126, n° 3 (*); Fig. 4,
encore Zoniceræ (**) (so nennt Hr. Pastor von Scheven diesen
Schwaermer ; Schaeffer hat selbigen /con. Tab. 16; fig. 6, 7, abge-
bildet); Fig. 5, Sphinx Pythia, Fabr. — Scabiosæ (p. 125, n° 7
et 127, n° 5), Schaeffer (/cones, Tab. 16, fig. 4, 5) (***), n° 6, Sphinx
Pythia, das Weibchen? (Q) (****).
La vérité c’est que le n° 1 représente très bien Loniceræ; le n° 2
est Fulipendule; le n° 3 est probablement 7'ansalpina; mais la
Zygæna est figurée en mouche, comme le n° 2 et il est impossible
de rien préciser; le n° 4 est AcAilleæ; le n° 5 est Scabiose et le n° 6
est Purpuralis (Piloselle). On doit reconnaître que les figures sont
très bien exécutées, mais Fuessly n’a pu réussir à voir clair dans
la distinction des Espèces. Il croit que d’insensibles passages lient
Lonicere à Scabiose et à Purpuralis. « Welch ein sanfter Ueber-
gang von Sp. Lonicere zu Sph. Pythia, Fig. 5 (Scabiosæ); und
von diesem zu Sp4. Pythia, Fig. 6 (Purpuralis)! »
La moralité se trouve résumée à la fin de l’article par ces mots
que malheureusement nous avons trop souvent l’occasion de répéter
nous-mêmes : « Quantum est, quod nescimus. » Combien notre
ignorance est immense !
Le grand Linné, dont le génie synthétique fit réaliser de si
grands progrès aux Sciences Naturelles, n'a-t-il pas, comme
Fuessly, terminé l’un des volumes du Systema Naturæ par cet
humble aveu que j'ai déjà transcrit à la page 377 du volume III
des Etudes de Lépidoptérologie comparée : « Ea que scimus sunt
pars mImImMmaA eorum que 12n07amus! »
(*) Je suis porté à croire que la Fig. 3 de Fuessly représente Transa/pina
« noch kleiner, wird auf den Bergen angetroffen ».
(**) Il y a évidemment confusion avec le n° 1; car ce n° 4 représente sans
aucun doute la Zygena Achillee.
(*##) C’est la Zygæena Scabiosæ, sans contestation possible.
(###) Ce n’est point la © de Scabiose ; mais bien la Zygæna purfuralis qui
a pour synonymes Pz/oselle et Minos, o".
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE s21
Le travail que je poursuis actuellement sur le Genre Z7gæna
me démontre amplement combien il est difficile de voir clair dans
la séparation spécifique de ces Papillons. Ainsi que Je l’ai déjà
exposé au début de la notice consacrée à 771foln, je me trouve
impuissant à délimiter certaines Espèces d’une façon qui me satis-
fasse. On perçoit aisément une diversité d’Espèces dont les indi-
vidus, assez nettement caractérisés, sont très nombreux; on constate
l'existence d’une grande quantité d'exemplaires intimement liés
les uns aux autres, par un même ensemble de particularités, d’où
résulte une homogénéité spécifique paraissant bien réelle. Pour
chaque unité dont ils possèdent les caractères spéciaux, ils consti-
tuent un groupement distinct et ne pouvant être confondu avec les
autres groupements qui se trouvent, chacun pour ce qui le concerne,
dans des conditions analogues. C'est ainsi qu'il est aisé de sélec-
tionner une masse d'exemplaires des 4 Espèces : 7 74fola, Lonicere,
Filipendule, Stæchadis, de telle façon que l’on se trouve en pré-
sence de 4 groupes qui sont chacun parfaitement homogènes. Les in-
dividus qui, par leur réunion, constituent lesdits groupes, ne peuvent
donner lieu, quant à leur collocation dans leurs unités spécifiques
respectives, à aucun sentiment de doute, d'incertitude et de confu-
sion. Mais après une telle sélection faite, il reste tous les échantillons
intermédiaires qui viennent apporter au classificateur comme un
ironique défi. Ou bien, c'est une race locale qui est ambiguë dans
son ensemble et qu'on est embarrassé pour rattacher exactement à
l'unité spécifique d’où elle dérive: ou encore, ce sont des individus
çà et là aberrants et troublant, par l’aspect anormal de la variation
dont ils se trouvent atteints, l'ordonnance générale des caractères
qu'on serait pourtant tenté d'admettre comme une base régulière
pour l’Espèce. Par exemple on sélectionnera facilement des Zow1-
cere, des Filipendule et des Dubia, toutes de la même provenance,
soit de Vernet-les-Bains; elles sembleront très nettement distinctes
les unes des autres et ne prêteront pas à confusion; mais lorsqu'on
essaiera de classer dans l’une ou l’autre de ces trois unités, les Dybia
de taille très inégale, à 5 ou à 6 taches rouges, plus ou moins vive-
ment colorées, dont les taches rouges seront plus ou moins grosses,
522 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
ayant la bordure indigo des ailes inférieures plus ou moins large,
les hésitations commenceront et il sera impossible de donner à ces
échantillons transitionnels une attribution spécifique dont la rec-
titude paraisse certaine. Quelques individus inclineront vers Loui-
ceræ, d'autres vers Fipendule, créant ainsi un enchaînement ten-
dant à lier les trois espèces entre elles, ce dont mon esprit se refuse
cependant à admettre toutes les conséquences.
Je ne suis pas parvenu à dissiper le brouillard pour moi-même
et par conséquent pour les autres; mais Je sens bien que quiconque
aurait à sa disposition les documents que J'ai devant moi, éprou-
verait le même trouble et la même impuissance. Il y a des Espèces
très tranchées dans le genre Zygæna et il ne s'agit nullement de
celles qui sont faciles à distinguer par des caractères nettement tan-
gibles et constants; ce qui est en cause, c'est tout le groupe des Zy-
gæna connues sous les noms de 7 r1folu, Lonicere, Angelice, Fili-
pendule, Stæchadis, Dubia, fertiles en variations géographiques,
offrant pour la même Espèce des races locales très distinctes, pré-
sentant cependant chacune un ensemble considérable d'exemplaires
homogènes et bien spécifiquement différents, cependant ces Espèces
fournissent par ailleurs une telle abondance de sujets insuffisam-
ment caractérisés que, s’il est facile d'établir pour chaque Espèce
une sélection d'échantillons représentant sans contestation possible
le type de l’Espèce à laquelle ils appartiennent, 1l est trop malaisé
— pour moi du moins — de savoir à quel type spécifique 1l convient
de rattacher la foule des exemplaires dont l'aspect général est
indécis.
J'ai observé, pendant bien des années, les Zygœna dans la
Nature; J'ai capturé moi-même un nombre considérable d’exem-
plaires dans beaucoup de pays; j'ai tenu note des particularités
diverses que je constatais chez les animaux vivants et à leurs diffé-
rents états. Je cenfesse l'ignorance dans laquelle je suis resté vis-à-
vis de certaines questions. Puissé-je tout au moins par une figuration
assez abondante et parfaitement réussie, — ce qui, pour les Z7ygæna,
notamment au point de vue de coloriage, est très difficile à obtenir,
— préparer la connaissance précise et certaine d’un nombre assez
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 52
2)
grand de Formes, Variétés et Espèces, pour que cette documen-
tation iconographique constitue une base ne prêtant n1 à confusion
ni à équivoque.
Assez d’autres déjà et non des moins qualifiés, ont plutôt con-
tribué à augmenter les difficultés qu'à les aplanir; mais tous,
jusqu'ici, ont senti combien la question est épineuse et, ce qui n'est
guère encourageant, les ambiguités se sont aggravées en proportion
de l'augmentation de la documentation qu’on possède et du déve-
loppement des observations auxquelles on procède ad naturam.
On sait aussi que les Zygæna d'Espèce différente s'accouplent
volontiers entre elles; tous les chasseurs Entomologistes ont saisi
par les antennes des paires de Zygæœna spécifiquement distinctes
et pourtant solidement attachées l’une à l’autre. On a obtenu des
pontes résultant des accouplements hybrides qui se sont réalisés
dans la Nature; des petites chenilles sont nées et sans doute ces
chenilles étant parvenues à leur complet développement, des pa-
pillons hybrides naturels, issus de la copulation de deux Espèces
distinctes de Zygæna, sont éclos et ont pu être capturés dans la
Nature; mais l’hybridation ne suffit pas à expliquer les faits si
nombreux de transition entre différentes Espèces dont nous sommes
les témoins. Il y a une cause encore mystérieuse d’où résulte la
situation que j'ai cru devoir exposer telle que je la conçois actuel-
lement.
À Rennes, il y a deux Espèces de Zygæna seulement : 7 r1fol
et sa forme Palustris d'une part, Fälipendulæ d'autre part. Ces
deux Espèces ne diffèrent guère dans leurs chenilles, ni dans la
coque qui enveloppe leurs chrysalides, mais elles ont des mœurs,
des habitats et une époque d'apparition spéciaux.
Aux environs de Rennes, 7 7ifolu vit dans les prés et éclôt depuis
la fin de mai jusqu’à la Saint-Jean; Fipendule vit dans les forêts
et les lieux secs et éclôt depuis la mi-Juillet jusqu'aux premiers
jours d'août. 771folt, dans son Ab. confluens, présente une toute
autre physionomie que F1pendulæe dans l’Ab. confluens à laquelle
elle est également, mais plus rarement sujette. En effet, l’Ab, ne
524 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
se produit pas d’après la même règle chez les deux Espèces. 7 71/ol2
a 5 taches rouges aux ailes supérieures; Fi/1pendule en a toujours
6, mais J'ai pris des 7 7ifolu qui, par aberration, ont 6 taches comme
Filipendule et je possède même une 7 r1folu-sexmaculata Q au-
thentique qui présente tout à fait le faciès de Flipendule; cepen-
dant, si Je me rends de Rennes au bord de la mer de la Manche,
ce qui n'est pas bien loin, je vois sur la côte 7 7:folu dont l’éclosion
est plus tardive qu'à Rennes, par conséquent se rapprochant de la
date d'apparition de }#/1pendule. En outre, au bord de la Manche,
Trifolii change de forme; elle est de moins grande taille qu'à
Rennes et elle s'éloigne beaucoup de Palustris, tandis que #11-
pendulæ, extrêmement abondante sur certaines dunes, affecte une
manière de vivre tout autre que dans les forêts de l’intérieur du
Département d’Ille-et-Vilaine et devient de taille plus grande qu’à
Rennes, contrastant ainsi avec /7ifolu qui, sur la côte, devient plus
petite. Dans ma conviction, Z7ifolü et Filipendulæ sont, dans
l'Ille-et-Vilaine, deux unités spécifiques distinctes, mais ne se
trouvent-elles pas reliées au moyen de certaines Zoniceræ qui, elles-
mêmes, en d’autres lieux, se rejoignent par des Azgelice et des
Dubia à des Filipendulæ? Des causes inconnues produisent des
effets très différents pour chaque Espèce. À Rennes, ainsi que Je
l’expose plus haut, 7rifolit est plus grande que sur le littoral,
tandis qu'inversement F#/ipendule est plus grande sur le littoral
de la Manche que dans les bois des environs de Rennes. À Larche,
Loniceræe est petite et peu colorée; dans le Valais, elle est grande
et ses teintes sont bien plus vives. À Vernet-les-Bains, tous les
passages existent, insensibles et incontestables, entre Drôza et
Lonicere et à Cauterets entre Zoricere et Filipendule.
Le grand livre de la Nature est ouvert devant nous; l'intelligence
en est parfois difficile, mais il me semble que l'intérêt croît avec
la difficulté. Aussi je compte bien, lorsque les ardents rayons du
soleil de l'été réchaufferont de nouveau la terre de France, conti-
nuer mes investigations entomologiques, s'il plaît à Dieu de m'en
laisser la faculté, et m’appliquer avec plus d'attention que jamais
à l'étude des Zygæna incertæ sedis.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 525
Zygæna Angelicæ, secundum Boisduval (/cones, PI. 53, Hg. 0).
Boisduval figure dans l’/cones et décrit à la page 65 dudit ou-
vrage, avec le nom de Angelice, une Zygæna des Alpes françaises,
de taille plutôt moyenne ou même petite, remarquable par la teinte
d’un carmin très vif des taches qui ressortent, aux ailes supérieures,
sur un fond bleu d’acier ou vert bronzé très riche et très brillant.
Les ailes inférieures sont aussi d'un carmin vif. Aux ailes supé-
rieures, les taches carmin sont tantôt au nombre de 3 et tantôt au
nombre de 4, si l’on ne fait pas état des deux taches basilaires
invariables. Dans le cas où l’on tient compte des deux taches
basilaires en question, il faut dire que les taches rouges des ailes
supérieures varient du nombre de 5 au nombre de 6. Dans la cir-
constance, je fais abstraction des taches basilaires. En dessous, on
remarque chez certains individus, sur les ailes supérieures, le lavis
rougeâtre que les Entomologistes allemands appellent VNebelstreif.
Ce lavis d’un rose carminé s'étend plus ou moins largement au
voisinage des taches rouges qui transparaissent du dessus; mais
le Nebelstreif n’est pas absolument constant et fait quelquefois
défaut.
Boisduval dit avoir remarqué que « les antennes sont d’un bleu
noir avec la pointe un peu roussâtre ou jaunâtre. » Cet auteur
observe aussi que « le dessous des ailes supérieures est à peu près
comme dans Æippocrepidis, avec la frange d’un bleu à reflet rous-
sâtre. » Je ne conteste pas la couleur roussâtre ou Jaunâtre sur la
pointe des antennes et le reflet roussâtre sur la frange bleue; mais
je trouve ces caractères difhciles à percevoir exactement. Ils sont
peut-être un peu fugitifs et plus ou moins accentués selon Îles
individus.
Boisduval n'est d’ailleurs pas sûr que cette Zygæna soit la
véritable Angelice d'Allemagne et si elle ne l'était pas, 1l propo-
serait pour elle le nom d’A/prna.
Il est certain qu’on trouve assez abondamment aux environs de
Digne, en juillet, une Zygæna ambigué, à 3 ou 4 taches rouges (non
526 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
compris les 2 taches de la base), ressemblant, pour la forme qui a
4 taches, à une petite #z/1pendulæ et, pour la forme qui a 3 taches,
à une petite Dzbia où même à Zoniceræ. Tous les passages existent
entre la forme à 3 et la forme à 4 taches et 1l est très intéressant de
constater l'insensible gradation de la 4° tache rouge qui se fait
deviner en dessus par quelques atomes rouges, chez certains exem-
plaires et finalement arrive chez d’autres, à un développement très
complet, tout à fait comme dans }#ipendule. En dessous, la
4° tache est apparente dans des cas où elle est invisible en dessus.
Cette Zygæna ressemble donc d’une part non seulement à #2/1-
pendule, mais encore d'autre part à Zomiceræe et à Dubia. Les
chasseurs de Digne m'ont envoyé environ 350 exemplaires, pas
un n’a les taches rouges des supérieures confluentes. Chez deux ©,
les ailes inférieures sont un peu envahies par la couleur indigo
qui forme la bordure terminale et chez quelques O* la bordure
indigo est élargie. 11 semble que certains petits individus à 3 taches
rouges très vives, très nettes, arrondies, d’un carmin mat, se déta-
chant sur le fond vert brillant des ailes supérieures, pourraient
être considérés comme une race référable à l’allemande A »gelice ;
mais dans la quantité des autres exemplaires, il y en a qui, suivant
le nombre de leurs taches rouges, leur taille, le fond plus ou moins
bleu ou vert brillant du fond de leurs ailes supérieures sont si
voisins de Filipenduleæ, mème de Loniceræ, surtout de Medicaginis
ou de Dubia que toutes les hypothèses se posent à l'esprit quant à la
qualification spécifique qu'il convient d’attribuer à cette Zygæna
et quant à ses limites exactes vis-à-vis des Espèces précitées.
Il me semble donc que la Zygæna de Digne est certainement
conforme à l’'Angelicæ-alpina décrite par Boisduval dans l’/cones,
mais je déclare de nouveau ne pouvoir trouver aucune raison qu!
me satisfasse, relativement à la délimitation spécifique de cette
Angelice-alpina. Les individus transitionnels entre la forme tri-
et quadri-maculée empêchent de séparer les échantillons à 3 taches
de ceux à 4 taches. Je ne suis pas satisfait de considérer À rgeliceæ-
alpina comme une Espèce spéciale et cependant Je ne trouve pas
de raison probante de réunir Angelicæ-alpina à quelqu'autre
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 527
Espèce. Bien qu'il n'y ait pas de barrière sérieuse entre les Azge-
lice-alpina à 4 taches et Filipendulæ, Va réunion spécifique me
répugne à cause de la forme à 3 taches spécifiquement égale à
celle à 4 taches, mais non référable à Æz1pendule. D'autre part,
le Nebelstreif sur le dessous des ailes supérieures et la tendance
d'une 4° tache à paraître en dessous, même lorsqu'il n'y a que
3 taches visibles en dessus, ne permettent pas la jonction à Zont-
ceræ. L'aspect est tout autre que celui de 7r1folu. Il reste S/æ-
chadis-Medicaginis; les variétés très rares qui ont les ailes infé-
rieures envahies par la teinte indigo de la bordure, ou même ceux
qui ont la bordure indigo très élargie, pourraient cadrer avec
Stæchadis; mais la masse des autres est-elle référable à Duéza,
dont elle constituerait une race #1n0r7 et inferior, comparativement
à celle des Pyrénées-Orientales? C'est peut-être là que réside la
vérité? Cependant je ne puis l’affirmer et dès lors J'avoue mon
impuissance à donner la lumière sur une question que Jj'étudie
depuis longtemps, sans réussir à trouver le trait de lumière qui
donnerait la clef de l'énigme.
Je suis convaincu d’avoir devant moi, en écrivant ces lignes,
la Zygæna Angelice-alpina, secundum Boisduval; mais Je n'en
puis dire davantage et je reste dans l'incertitude d’où Boisduval
n’est pas lui-même sorti. Cependant j'incline vers le rattachement
d'Angelice-alpina à Dubia.
Quant à l’'Angelice, secundum Duponchel (Supplément, Zigé-
nides (sic), PI VI, fig. 2), elle n’a aucun rapport spécifique avec
l’'Angelicæ, secundum Boisduval. Je crois que l’Angelice, secun-
dum Duponchel, est une 7’ ransalpina.
Zygæna Stœchadis, Bork.
Voici le texte de la description donnée par Borkausen dans
Rheinisches Magazin fuer Naturkunde : « Sphinx Stæchadis; als
omnibus viridi cœrulescentibus, superioribus maculis sex rubris,
528 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
inferioribus duabus tribusve lituraque baseos rubicunda; collari
maris albo.
Hübners Beytr. 2 B. 3 Th. Fig. o. Sphinx Lavandule.
Nach Herrn Hübners Bemerkung ist dieser Schwärmer in Lan-
guedoc und in Piemont einheimisch. Ausser der grôssern Anzahl
der Flecken soll er sich von der Esperschen Sp4. Lavandulæ noch
durch den Mangel der Schwarzen Einfassung der Flecken unter-
scheiden. Nur das Maennchen soll ein weisses Halsband haben.
Ich sah ihn noch nicht in Natur, und seine Geschichte ist noch zu
wenig aufgeklärt, als dass man mit Zuverlässigkeit entscheiden
kônnte, ob er wirklich von der Sp. Lavandulæe Esperi unterschie-
den sey. »
Je donne la traduction littérale comme suit : « D'après la
remarque de M. Huebner, ce papillon est indigène (chez lui) en
Languedoc et en Piémont. En outre du plus grand nombre de
taches, il doit se distinguer encore du Sp4. Lavandulæe d'Esper
par le manque de la bordure noire des taches. Seul le Œ doit avoir
un collier blanc. Je ne l’a pas encore vu en nature et son histoire
est encore trop peu tirée au clair pour qu'on puisse avec certitude
décider s'il est véritablement différent du Sp#. lLavandule
d'Esper ».
Telle est donc la déclaration de Borkausen. Il n'a pas vu en
nature le papillon qu'il appelle cependant S/æchadis. Il reconnaît
que son histoire reste obscure; 1l prétend que, seul, le S' a le collier
blanc; ce qui est faux, puisque le O' aussi bien que la Q ont le
collier noir; 1l rapporte, d’après Huebner, que l’'Espèce se trouve
en Languedoc, ce qui est également inexact. Borkausen fait évi-
demment une confusion partielle de Lavandulæ et de Stæchadis.
Il pressent cependant que le papillon figuré par Huebner sous là
lettre O de la Taf. III du Band IT de Bei/rege est autre chose que
Lavandule; mais, à cause de la confusion que Borkausen commet
relativement au , c'est à la Q seule que peut s'appliquer la dis-
tinction des caractères qu'il établit d'après la figure donnée par
Huebner : six taches rouges non entourées de noir aux ailes supé-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 529
rieures; deux ou trois éclaircies rouges aux inférieures, pas de
collier blanc, sauf pour le O' qui reste évidemment un Lavandule.
Dans la circonstance, Borkausen a fait preuve d'une prévision fort
avisée; on ne saurait le contester et Je lui rends justice; cependant
il n'a pas vu le papillon en nature; il se trompe pour le &, et à
cause de tout cela, comme la base de nomenclature parait fragile,
précaire et incomplète!
D'autant plus que S/æchadis n'est point une Espèce facile à
distinguer, présentant des caractères certains et ne laissant prise à
aucune contestation. C'est au contraire une Espèce litigieuse dont
les mutations donnent lieu à maintes confusions! J'ai écrit à son
sujet, mais en lui donnant le nom de Medicuginis, Duponchel
(Suppl, PL VI, fig. 6), une notice qui a paru dans le Bulletin Soc.
ent. France, 1808, p. 22. Je prie le Lecteur de vouloir bien sy
reporter. Tout d'abord S/æchadis a été confondue avec certaines
formes de 7 ransalpina qui est cependant une Espèce tout à fait
distincte. Les 4 Zygœna figurées par Freyer, avec le nom de
Stæchadis, sous les n° 1, 2, 3 et 4 de la Tab. 368, sont évidemment
des formes italiennes de Z'ransalpina et nullement des S/æchadis,
ainsi que Staudinger et Rebel l'ont pourtant rapporté, mais à tort,
dans leur Catalog 1901. Ces auteurs n’ont probablement regardé
que le nom : S/æchadis, employé par Freyer, dans le Tom. IV de
Neuere Beitrege, publié à Augsbourg, en 1842, et ils n'ont même
pas jeté les yeux sur les figures qui ne laissent absolument aucun
doute. Freyer, à la page 130, dit que ses Zygæna prétendues
Stæchadis volent dans le sud de la Suisse et le sud de la France;
il aurait dû faire imprimer dans le sud de l'Italie; c'eût été plus
correct. Mais en fait de Géographie, Freyer, comme Je l'ai déjà
fait observer précédemment, avait des idées qu'on peut qualiher de
très larges.
Il est bien évident aussi que les S/æchadis figurées par Herrich-
Schaeffer sous les n°* 35, 36, 37, 38, de la Tab. V des Zygæmdes
Europ. sont des T'ransalpina italiennes, absolument comme l’Ab.
Xanthographa, figurée sous le n° 40 de la même Tab. 5 des Zy-
gænides Euro.
34
530 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Il y a eu des confusions multiples relativement à S/æchadis et
à Z'ransalpina, et 11 convient, à cause de cela, d'être très circonspect
dans l'établissement de la synonymie respective de ces deux
Espèces de Zygæna. Mais 1l s'agit présentement de la S/æchadis,
selon Borkausen, dont le point initial se trouve dans la description
écrite d'après la figure donnée par Huebner. Il est en effet possible
que Lavandule, Huebner (Bettrege sur Geschichte der Schmetter-
linge; Il Band; IIT Theil;, III Tafel; n° o), soit une S/æchadis,
parce qu'elle n'a pas de collier blanc, comme Huebner le fait du
reste remarquer à la page 69; mais le faciès est bien plutôt celui
d'une Zavandule à qui on aurait recollé une tête dépourvue de
collier blanc, que d'une véritable S/æchadis. Le souci de la vérité
empêche donc de tenir sérieusement compte, au sujet de S/æchadis,
de la figure ci-dessus analysée, publiée par Huebner, et dès lors
l'argumentation de Borkausen pêche par plusieurs points.
Cependant les 6 taches rouges existent aux ailes supérieures; la
valeur de ce caractère est incontestable; mais le papillon, je le
répète, parait être le produit d’un raccommodage effectué avec des
pièces hétéroclites, et cette circonstance semble de nature à atténuer
la confiance dans la figure qui est en question et sur laquelle repose
la création même de l’Espèce : S/æchadis.
Néanmoins, on parait actuellement d'accord pour désigner sous
le nom de S/æchadis une Zygæna sans collier blanc, pouvant avoir
6 taches rouges non cerclées de nojr aux supérieures et présentant
les ailes inférieures souvent envahies par la couleur indigo. J'ai
donc accepté comme valable ce nom de S/æchadis, bien qu'il y ait
eu postérieurement une autre application du même nom de S/æcha-
dis, fait à une toute autre unité spécifique, et que le nom de
Medicaginis serait probablement plus exactement approprié. Cepen-
dant, ces observations étant faites, je continue, comme suit, l'examen
des divers travaux des Iconographes au sujet de la Zygæna qui
nous occupe.
Une autre Lavandule, sans collier blanc, représentée par Huebner,
sous le n° 24 de la Planche : Lepidoptera I; Sphinges I, ne peut
pas davantage donner lieu à une identification spécifique exacte
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 531
et 1l n'y a pas à faire état de cette figure douteuse, d'autant plus
que l'individu qui a servi de modèle parait avoir eu les antennes
recollées par une main maladroite, ce qui laisse supposer quel-
qu'artifice, de façon à enlever toute garantie d'identification. Mais
sur la même Planche, Huebner a figuré sous le n° 20, avec le nom
de Medicaginis, une Stæchadis-sexmaculata, à ailes inférieures
rouges, assez largement bordées d’indigo. On trouve à la Certosa
di Pesio, en Piémont, des Zygæna Stæchadis-sexmaculata, dont
le fond des ailes supérieures est d’un vert bronzé luisant et vive-
ment coloré, avec six taches d’un carmin mat très pur et très vif;
les inférieures sont carminées avec une large bordure bleu indigo.
Ces Zygæna semblent référables à la figure 20 donnée par
Huebner; toutefois, 1l convient d'observer que la ligne indigo
formant la bordure des ailes inférieures est rarement dans la
Nature aussi régulièrement parallèle au bord terminal, pour tout
son parcours, que cela est indiqué dans la figure 20 précitée. Dès
lors, ce n'est pas encore avec une certitude complète qu'on peut
rapporter cette Wedicaginis de Huebner à l'Espèce que nous appe-
lons S/æchadis.
Feu mon ami Millière, excellent homme, et dont J'ai gardé un
bien affectueux souvenir, était malheureusement mieux pourvu de
bonne volonté que de capacité pour écrire des ouvrages entomo-
logiques; 1] a consacré les pages 60 à 63 du Vol. IIT de son
Iconographie à l'histoire de la Zygæna Stæchadis. Il à commencé
par copier quelque part la synonymie (p. 60) sans chercher à en
faire le moindre contrôle, et 1l a intercalé des citations qui se
rapportent à Z'ansalpina et non à S/æchadis; d'ailleurs 1l me
paraît bien probable qu'il confondait les deux Espèces en une
seule; puis 1l a décrit la chenille que lui avait envoyée Himmi-
ghofen, de Barcelone; il dit l'avoir élevée sur le Dorycnium suf-
fruticosum, plante de la famille des Papilionacées, très rameuse,
à feuilles soyeuses, formant de petits buissons, très répandue dans
les lieux secs et arides du midi de la France et que beaucoup de
Lépidoptères affectionnent. Millière ajoute qu'il trouvait à s'ap-
provisionner de cette plante au Jardin botanique de Lyon. Mal
p32 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
heureusement Millière a dû faire une confusion quelconque et qui
infirme singulièrement la valeur de sa description; car avec la
sincérité qui le caractérisait et qui est tout à son honneur, Millière
a fait imprimer à la page 464 des Addenda et Corrigenda, V'obser-
vation suivante : « Z7g. Stœchadis, Bor. — Ic., III, p. 60. — Par
suite de certaines communications obtenues postérieurement, J'ai
dû penser que la chenille de cette Zygène n'est peut-être pas au-
thentiquement la S/æchadis. » Quoi qu'il en soit, les papillons
figurés sous les n°* 4, 5 et 6 représentent assez bien la S/æchadis,
de Barcelone.
Millière a tort de dire (p. 62), que Freyer, dans son /conographie,
à la Tab. 363 (s2c pour 368), donne quatre figures de la S/æchadis
vraie, puisque, comme je l'ai exposé plus haut, ledit Freyer repré-
sente sur la Tab. 368 (non 363), 4 7 ransalpina.
Millière a cru devoir faire remarquer encore que la « Zygæna
Stæchadis, de Duponchel (Supplément, Zygénides, PI. VIT, fig. 2),
n'est pas cette Espèce, mais plutôt la variété de Medicagims de
cet Auteur {VI, fig. 6). » — En réalité, la S/æchadis secundum
Duponchel (PI VII, fig. 2), est une variété de KAadamanthus et
non une variété de sa Medicaginis (VI, fig. 6). — Müillière ajoute
que « M. Boisduval ayant voulu rectifier cette erreur, donna dans
son Iconographie (rectiès /cones), PI. 55, fig. 4, le nom de S/æ-
chadis à une Zigène (sic) qui n’est pas davantage la vraie Stæ-
chadis. »
Millière ne savait donc pas que Boisduval ayant fait paraître
son /cones en 1834, tandis que Duponchel a fait paraître en 1835
le second volume de son Supplément à l'Histoire naturelle des
Papillons de France, n'avait pas lieu de rectifier dans son /cones
une erreur qui n'avait pas encore vu le Jour.
Pour apprécier la question que Millière ne s'est pas donné la
peine d'étudier et qu'il a dénaturée, il convient de lire d’abord ce
que Boisduval écrit à la page 71 de l’/cones; alors il sera aisé de
se rendre compte du motif pour lequel Boisduval a donné à une
variété de RAadamanthus le nom de S/æchadis; c'est que, dit
Boisduval « la Zygæna publiée sous le nom de S/æchadis par
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 533
les Auteurs n'étant point une Espèce, mais une simple variété de
Medicaginis, j'ai transporté à celle que je décris ici et qui est
nouvelle, le nom de S/æchadis, en raison de son affinité avec
Lavandule. »
Pour Boisduval, en effet, la S/æc/adis de Borkausen et Ochsen-
heimer serait la variété à ailes envahies par la teinte bleue, de la
Medicaginis qui est figurée dans l’Zcones sous le n° 10 de la PI. 55,
dont les ailes inférieures sont rouges, bordées de bleu indigo et
que Boisduval considère comme la forme type de l’Espèce, S/æ-
chadis à ailes bleues: n'étant que la variété. Mais Boisduval n’a
point distingué les deux espèces différentes : Transalpina et
Stæchadis. I] les a confondues et il commet la faute de vouloir
attribuer S/æchadis comme variété à l’Espèce-type Medicaginis
qui, dans la circonstance, est une 7ransalpina et avec laquelle
Stæchadis ne peut avoir aucun rapport spécifique. Cependant, à
la page 64 de l’/cones, Boisduval publie l'observation suivante :
€ La S/æchadis des Auteurs est une belle variété piémontaise qui,
à l'exception du collier blanc, ressemble extrêmement à Zavan-
dulæ. Chez elle, la bordure envahit presque toute la surface des
ailes inférieures; la base et quelquefois un petit espace entre le
milieu et l’angle interne sont les seules parties qui restent rouge.
La sixième des taches des ailes supérieures disparaît aussi quel-
quefois, au moins en dessus. On trouve du reste tous les passages
entre cette variété et les individus dont la bande est la moins
large. » Ceci est exact et Boisduval n’a pas péché par ignorance
en écrivant ainsi; mais il faut reconnaître qu’au lieu d'appliquer
le nom de S/æchadis à une variété de Rhadamanthus dont les
ailes inférieures normalement rouges sont envahies par la teinte
bleue, il eût mieux fait de choisir une autre désignation afin
d'éviter un supplément de confusion dans la Nomenclature.
D'autre part il est utile de lire à la page 70 du Supplément les
observations formulées par Duponchel, à propos de la Zygæna
Stæchadis, Boisduval (Zcones, PI. 55, fig. 4).
Voici la Note de Duponchel, répondant à celle de Boisduval :
« La S/æchadis dont il est ici question est différente de celle de
534 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Borkhausen et d'Ochsenheimer, laquelle, suivant M. Boisduval,
n'est qu'une variété de la Medicaginis. Cependant, Je crois que
celle à laquelle 1ls ont donné le nom de Séæchadis est plutôt une
variété de la Zavandulæ (*), puisque Ochsenheimer cite la figure
de Huebner qui représente cette dernière, à l'appui de sa descrip-
tion. Quoi qu'il en soit, la S/æckadis de M. Boisduval n’a rien
de commun avec l’une ou l’autre de ces deux variétés, et si elle se
rapproche d’une autre Zvgène, c’est de la Rhadamanthus, comme
nous l’avons dit au commencement de son article. Au reste, nous
ne sommes pas bien convaincu que ce soit une espèce distincte de
cette dernière et nous serions plutôt porté à croire que ce n’en est
qu’une variété locale. »
Herrich-Schaeffer a bien figuré S/æchadis-quinquemaculata, à
ailes inférieures rouges largement bordées d’indigo, sous le n° 45
de la Tab. 6 des Zygænides Euroÿ.
Boisduyal a représenté S/æchadis dans l’Essai sur une Mono-
(*) Duponchel se trompe; il aurait dû dire pour être correct, non pas « une
variété de la Zavandulæ » ce qui est inadmissible; mais « une espèce d’aspect
analogue à la Zavandulæ dont, entre autres caractères distinctifs, elle diffère
par l’absence du collier blanc ». Tout le reste de la note de Duponchel paraît
exact. Seulement Millière a commis une grossière erreur de chronologie que
j'ai relevée ci-dessus et qui démontre avec quelle légèreté les Auteurs étudient
trop souvent les questions dont ils traitent. Ce manque d’attention n’est du reste
pas personnel à Millière. D’autres — et des plus qualifiés — furent coutumiers
du même défaut : ainsi Staudinger et Rebel. Il est donc nécessaire, si l’on tient
à se rapprocher le plus près possible de la vérité, de tenir compte de ces fai-
blesses. Ærrare humanum est ! Pour permettre d'apprécier la valeur de cette
critique et de juger la fragilité des bases sur lesquelles se trouve établie la
nomenclature entomologique, je signalerai la présence dans la collection Bois-
duval, d’une Zygena Achilleæ-Wagneri méconnue et classée parmi les Stæchadis !
Qui sait si Boiduval qui a considéré cette Wagneri, à cause de ses ailes infé-
rieures envahies par le bleu, comme une S/æchadis, et qui l’a mélangée aux
Stæchadis, Medicaginis et Transalpina, ne l’a pas eue en vue, dans l’une quel-
conque de ses dissertations ? On conçoit par cet exemple dont je garantis
l'authenticité, à quelles erreurs se sont laissé entraîner les Anciens. Du reste
l’illustre Linné n’a-t-il pas, ainsi que je le rapporte à la page 131 du présent
volume, confondu CAryseis-Eurydice avec Virgaureæ d et Phlæas avec Virgau-
reæ Q, en identifiant mal à propos Vrrgaureæ d et Q, par une application
erronée de figures données par Roesel ? C’est un enseignement dont les Entomo-
logistes doivent profiter pour regarder de bien près aux déterminations, aux
identifications et aux synonymies qu’ils admettent.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 53
UR
graphie des Zygénides, 1820, sous le n° 3 de la PI. 5, avec la dia-
gnose suivante : « Alis omnibus concoloribus, cyaneis, micantibus ;
anticis maculis sex (vel quinque) sanguineis, nigro subcinctis;
posticis puncto rubro basique rubro radiata; collari concolore. »
Les antennes figurées sous le n° 3 de la PI. 5 sont des antennes
d'emprunt; dans la Nature, chez S/æchadis, elles sont terminées
en pointe et non obtuses. Dans le même ouvrage, le même Auteur
a figuré Sæchadis sous le n° 5 de la PI. 4, avec le nom de Medi-
caginis; mais cette fois, les antennes paraissent plus conformes
à la réalité naturelle. Quant à Duponchel, il a représenté S/æchadis
avec le nom de Medicaginis sous le n° 6 de la PI. VI du Szpplé-
ment-Zigénides (sic); mais à son tour Duponchel confond Szæ-
chadis et Transalpina, en appliquant le même nom de Medicaginis
à deux exemplaires qui appartiennent à deux unités spécifiques
différentes : le n° 5 de la PI. VI appelé Medicaginis par Du-
ponchel étant référable à Transalpina, et le n° 6 de la PI. VT éga-
lement désigné sous le nom de Medicaginis étant référable à
Siæchadis.
Il est possible que l’acteur du Théâtre impérial royal de la cour
de Vienne, Ferdinand Ochsenheimer, ait bien eu en vue la vraie
Zygæna Stæchadis qu'il décrit d’ailleurs sous ce nom, mais sans
la figurer, pas plus qu'aucune autre d’ailleurs, à la page 83 de son
Zuweyter Band. Y\ définit ainsi la diagnose latine: « Alis omnibus
cyaneis, anticis maculis quinque (sex) rubris; posticis disco litu-
raque apici rubris. »
Ochsenheimer ajoute, dans la description allemande, que les
antennes sont longues, minces, avec les pointes brunâtres. La tête,
le dos, le dessous du corps et les pattes sont concolores bleu noir;
le collier blanc manque tout à fait.
« Die Fuehler lang, duenn, mit bræunlichen Spitzen-Kopf,
Ruecken, Hinterleib und Fuesse sind einfaerbig schwarzblau, der
weisse Halsring fehlt gaenzlich. » Les antennes sont longues,
c'est vrai, mais elles ne sont minces que relativement. La Zygæna
Stæchadis est chez elle (zu Hause), dit Ochsenheimer, en Piémont
et dans le Sud de la France. Ce dernier renseignement est un
536 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
argument très intéressant et qui a une valeur. Mais bien que
Ochsenheimer décrive Transalpina (p. 60) et Medicaginis (p. 61),
on peut toujours redouter qu'une confusion ait été commise et
craindre d'admettre pour vrai ce qui est erroné.
Dans l’Espèce que j'appelle S/æchadis, pour me conformer à
l'usage établi chez la plupart des Entomologistes contemporains,
je distingue plusieurs races géographiques comme suit :
1° Stœchadis et Medicaginis, Alpes-Maritimes et Italie.
En Toscane, en Piémont et dans la région peu éloignée du
Httoral des Alpes-Maritimes, notamment aux environs de Nice,
au Moulinet, au mont Pacanaglia, à la Turbie, sur les bords du
Var, à Vintimille, à Nervia, à la Certosa di Pesio, dans les Abruzzes
et dans la campagne de Florence, on trouve en mai et juin, puis
en août, une Z’ygæna d'apparence robuste, avec le thorax épais,
les antennes longues, terminées en pointe mais fortement renflées
vers leur extrémité, ayant le corps d’un noir bleuâtre. En dessus,
les ailes qui sont assez allongées ont le fond des supérieures d'un
bleu ou d’un vert riche et brillant, avec $ taches d’un rouge carmin
mat et très vif.
Quelquefois, mais rarement, au lieu de % taches on en voit 6.
La forme à 6 taches est plus fréquente à la Certosa di Pesio que
dans le département des Alpes-Maritimes. Les ailes inférieures
sont d’un rouge carmin vif et pur, entourées d'une bordure bleu
indigo qui, tantôt se trouve limitée à un épais liséré suivant le
bord terminal, et tantôt envahit plus ou mains largement la sur-
face des ailes inférieures. Le dessous est la reproduction atténuée
du dessus, au point de vue de l'éclat de la coloration. Ma collection
contient un millier d'exemplaires parmi lesquels un seul Œ appar-
tient à l’Ab. f#ava; il a été pris au Var, près Nice, par Victor
Cotte, en mai 1807. Le Nebelstreif paraît très rare sur le dessous
des supérieures; mais on remarque quelquefois sur le dessous des
supérieures une 6° tache rouge qui ne paraît pas visible en dessus.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 53
NY
Je possède un seul exemplaire pris à Castillon, le 28 juin 1906,
qui présente une confluence des deux taches rouges médianes et
une tendance à se Joindre à la dernière tache externe.
Certains échantillons à 6 taches rouges et à ailes inférieures
faiblement bordées de bleu indigo, ressemblent à F#/ipendule;
d’autres à 5 taches rouges moins vivement colorées, d'apparence
plus molles, avec les antennes plus longues et plus amincies
ressemblent à Zoniceræ,; mais il y a une masse très caractérisée,
notamment celle dont les ailes inférieures sont envahies par le bleu.
Je distingue par le nom de Wedicaginis, Duponchel, la race à
ailes inférieures rouges de S/æchadis des Alpes-Maritimes; j'ai
fait figurer sous ce nom de Medicaginis, dans le Volume III des
Etudes des Lépidoptérologie comparée, quelques échantillons dont
Je rappelle la référence, mais en rectifiant la nomenclature, confor-
mément aux conclusions de la présente étude :
PI XXVIII, n° 157, ©, Stæchadis, Ochs.
« Die Hinterfluegel sind dunkelschwarzblau, in der Mitte
mehr oder weniger hochroth gefaerbt » Ochsenheimer ; Szœ-
chadis, p. 83. — « Les ailes inférieures sont d’un noir bleu
obscur, dans le milieu plus ou moins colorées de rouge vif. »
Le n° 157 représente bien S/æchadis, conforme à la des-
cription d’Ochsenheimer; l’exemplaire figuré vient du mont
Pacanaglia. .
N° 159 ©, Stæchadis, Ochs.; très obscure; individu chez lequel
l'éclat de la teinte rouge est très atténué; de Nice.
N° 158 ©, Medicaginis-quinquemaculata, Duponchel (Suppl.
PI. VT; fig. 6), à ailes inférieures rouges, largement bordées
de bleu indigo; du mont Pacanaglia.
N° 160 ©, Medicaginis-sexmaculata; transition à dubia; à ailes
inférieures plus rouges et moins largement bordées de bleu
indigo; du Moulinet (Alpes-Maritimes).
N° 161 ©, Medicaginis-sexmaculata, intermédiaire entre les n° 158
et 160; de la Certosa di Pesio.
538 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
J'avais déjà fait figurer sous le n° 110 de la PI 7 de la
XX° livraison des Etudes d'Entomclogie, un S Stæchadis, forma
Medicagins-quinquemaculata, du Piémont.
La chemille est d’un vert jaunâtre avec des taches noires plus
ou moins grosses; la coque est en forme de bateau, luisante, assez
hsse, jaune ou blanchâtre.
2° Dubia, Pyrénées-Orientales.
En France, nous appelons Dubia — (j'avoue que je ne sais guère
comment on peut justiier l'exactitude de cette désignation) -—
la forme de S/æchadis de Vernet-les-Bains. Staudinger, sans avoir
en vue la forme particulière des Pyrénées-Orientales, mit au Jour
ce nom qui, malgré sa brièveté, est très significatif, — et c’est là
son mérite, — dans la première Edition de son Catalog der Lepi-
dopteren Europas und der angrensenden Laender qu parut en
septembre 1861. Cette première Edition est bien peu volumineuse,
comparée à la troisième qui vit le jour 40 années plus tard. Tou-
jours est-il que Dubia figure sous le n° 145, à la page 21 de
l'Edition 1861. Le mot Dzbia est précédé d’un point d'interro-
gation qui complète l’idée dont 11 émane. ? Dybia comprend donc :
Medicaginis, Bdv., Essai (PL 4, fig. 5).
Charon, Bdv., Essai (PI 4, fig. 4;.
Charon, Bdv., Icones (PI. 54, fig. 7, rectiüs 9).
Charon, Duponchel (Supplément, Zyg, PI VIII fig. 1 Os).
Stæchadis, Herrich-Schaeffer (fig. 45).
C'est-à-dire tout un ensemble de Zygæna différentes entre elles
et que Staudinger, ne sachant comment classer, a réuni sous un
même vocable qui exprime son hésitation à les cataloguer dans un
ordre satisfaisant, Le mot Dwbia comporte avec lui un aveu d’im-
puissance à débrouiller une inextricable confusion. Evidemment
toute cette synonymie est bien contestable. I] est fort probable que
si l’on voyait, au lieu des figures imparfaitement gravées et colo-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 530
riées, les papillons mêmes qui servirent de modèle et si ces papillons
étaient pourvus de l’exacte désignation de la localité d’où ils
proviennent, on trouverait que l'assemblage est bien bizarre et très
peu d'accord avec l'indication qui résulterait de la réalité des faits.
La troisième Edition du Catalog, en 1001, a maintenu le nom
de Dubia, comme variété de S/æchadis et s’est enrichie de citations
nouvelles non prévues en 18671, et notamment de la diagnose sui-
vante : « Var. major, al. ant. macul 5 vel 6, al. post. rubris, tantum
late nigro-marginatis, in transit. ad spec. sequet. v. “ e ”? »
L’Espèce subséquente à laquelle Dybia fait transition, c'est F/1-
pendule; la description cependant peut convenir au papillon que
nous appelons Dub; pourtant le mot : wajor est forcé, de même
les mots : /antum late nigro marginatis manquent d’exactitude en
ce qui concerne notre Dybia. En effet, la forme des Pyrénées-
Orientales n’est pas plus grande que la S/æchadis italienne et
niçoise, donc elle n’est pas #ajor, comparativement à celle-ci; elle
est même d'aspect moins robuste; quant à la bordure des ailes
inférieures, elle est rarement bien large. Mais en France, mes vieux
amis Guenée, Fallou, Martin, Lafaurv, avaient adopté le nom de
Dubia, Stgr. (Catalog, 1861), et peu après l'apparition dudit
Catalog, pour désigner la S/æchadis de Vernet-les-Bains; aussi
ce nom est-1l généralement admis maintenant chez nous pour cette
forme de Zygæna dont nous avons répandu dans diverses collec-
tions d'Europe de nombreux échantillons étiquetés par nous Drbia
et provenant tous des Pyrénées-Orientales.
Donc j'ai conservé le nom Dybta, mais pour bien indiquer ce
que J'entends par Dubia, j'ai fait représenter trois exemplaires de
la Zygæna en question, au moyen des figures 160 et 171 de la
PI XXVIII des Æfudes de Lépidoptérologie comparée, pour
Dubia-quinquemaculata et de la figure 170, pour Drubia-sexma-
culata. Cette Zygæna m'est très familière et j'en possède un nombre
considérable d'exemplaires. Certains individus de Dubia, ou pré-
tendus tels, à 5 taches rouges, inclinent vers Zonicere,; d’autres,
a 6 taches, sont bien voisins de F#ipendulæ; cependant le plus
grand nombre des individus capturés dans le voisinage de Vernet-
540 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
les-Bains et à une altitude à peu près égale à celle des villages
mêmes de Vernet et de Casteil, ou légèrement supérieure, conserve
un faciès spécial et constitue une forme assez distinctement carac-
térisée de S/æchadis-Medicaginis-Dubia. Les teintes rouge carmin
et bleu ou vert luisant, sont en dessus extrêmement vives et opaques;
la Zygæna est dans son ensemble un papillon très brillant et haut
en couleur (Æochkgefaerbt, comme on pourrait dire en allemand,
la teinte carminée étant appelée Zockrothk, par Ochsenheimer). Je
crois d’ailleurs que la Dubia des Pyrénées-Orientales, telle qu’elle
nous est connue, peut se définir ainsi : Suprà, alis anticis cyaneo-
virescentibus, valde micantibus ; maculis quinque vel sex sanguineis
minoribus; posticis rubro purpureis, margine nigro-cyaneo, paulo
latiore quam apud #ipendul. et Lonicer., sed minus lato quam
apud Wedicagin, Dup. Antennis elongatis, ante apicem inflatis,
nigro-Cyaneis;, thorace abdomineque nigro-cyane's aut virescen-
tibus; pedibus rufescentibus; infrà, alis anticis sicut suprà, sed
pallhidioribus; interdum maculis rubris 6 al. antic. colore roseo-
coccineo sparso jJunctis.
La chenille et la chrysalide me paraissent semblables à celles
des Alpes-Maritimes.
Voici quelques notes prises en sute des chasses de 1900 par
mon frère. Je les transcris ci-dessous; elles donnent l'impression
produite par l'observation de la Nature vivante et à ce titre, ne me
semblent pas dénuées d'intérêt : « Zygæœna Dubia; M. Harold
Powell a récolté le 28 juillet 1900, près de Py. une série d'environ
60 exemplaires qui sont tous à 5 taches et dont le dessous des ailes
supérieures n'est nullement lavé de rouge. Il y a des échantillons
de taille et de coloration tres diverses. Ce sont plus spécialement
et généralement des Zoniceræe. Quelques jours après, J'ai moi-même
capturé au-dessous du col de Fuilla, une assez grande quantité
de Zygæna Dubia où se trouvent des exemplaires à 5 et à 6 taches
rouges, ayant ou n'ayant pas le lavis rouge (Webelstreif) sur le
dessous des ailes supérieures. Quant à la 6° tache rouge, tantôt
elle est très grosse et tantôt très réduite. Lorsque la 6° n'existe pas
en dessus, on la perçoit quelquefois en dessous.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE s4i
Le 6 août 1900, J'ai pris 80 spécimens dans la vallée de Saint-
Vincent, entre 5 h. 1/2 et 6 h. 1/2 du soir. C’est un moment très
favorable pour recueillir des Zygæna qui se mettent au repos pour
la nuit, sur des tiges de graminées, sur des scabieuses, des fleurs
d'origan ou encore sur les tiges de genêt. Il est rare d’en trouver
dans d’autres conditions et notamment sur les fleurs de ronce que
ces papillons affectionnent cependant beaucoup durant la Journée;
elles ne dorment pas non plus sur les fleurs de chardon. Si l'on
arrive dans une localité où 1l y a une certaine quantité de Zygena
Dubia déja établies au repos pour la nuit, à $ heures du soir par
exemple, et qu'un des individus s'envole, une véritable contagion
de terreur s'empare du groupe; les vols deviennent presque una-
nimes; toutes les Zygæna s'enfuient avec une surprenante rapidité.
Mais lorsque tous les Papillons diurnes ont disparu et qu'il n'y
a plus de soleil à l'horizon, les Zygæna ne jouissent plus d’au-
cune activité et on peut les récolter à volonté, en les prenant par
les antennes. En général, elles se posent la tête en haut contrai-
rement aux Zycænde, et seulement quelquefois à plat sur les
fleurs de scabieuse, mais toujours les antennes écartées, ce qui est
l'inverse chez les petites Espèces : Alanis et Sarpedon par
exemple, qui reposent toujours, ayant les antennes jointes et la
tête en haut également.
On trouve aussi bien des Q que des G' Pubia posés ainsi sur
des tiges; J'ai remarqué que certains accouplements ne sont plus
bien frais, ni pour le Œ n1 pour la ©, ce qui semblerait indiquer
que l'accouplement des Q n’a pas lieu aussitôt après l’éclosion.
On trouve les copulations dans les mêmes endroits que les exem-
plaires isolés et très souvent l’un des deux exemplaires 27 copula
a 5 taches, tandis que l’autre en a 6. On peut évaluer à un peu
plus d’une dizaine pour cent le nombre des exemplaires à 6 taches
dans la vallée de Saint-Vincent et dans la vallée de Vernet.
Il est très remarquable de constater que chez Drbza les Aberra-
tions sont excessivement rares, bien que les dimensions de cette
espèce soient fort variables; seule, la grandeur des taches paraît
varier, mais la confluence ne se rencontre que bien rarement.
542 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
J'ai observé, dans un endroit où les Ascalaphes abondaient, que
ces Névroptères faisaient une chasse acharnée aux Zygæna Dubia.
Il n'est pas rare de voir, en regardant en l’a, des Zygæna
Dubia volant à une grande hauteur relative, c'est-à-dire au-dessus
des arbres. Elles sont poursuivies de très près par les Ascalaphes
qui les pourchassent sans cesse. Je n'ai cependant jamais vu d’As-
calaphe capturant une Zygæna, mais J'ai vu, à quelques minutes
d'intervalles, des Zygæna serrées de très près par des Ascalaphes.
On peut conclure que si les Ascalaphes mettent tant de persistance
à poursuivre leur proie, c’est qu'ils réussissent parfois à s’en rendre
maitres. Dans ce cas, le vol est droit et très rapide, mais Je pense
bien que les Ascalaphes doivent voler plus vite que les Zygæna
proportionnellement plus lourdes et moins agiles; car les Asca-
laphes, dans le milieu du jour surtout, ne sont pas très faciles à
Saisir.
Bien que les A scalaphes soient très nombreux à Vernet-les-Bains
et qu'ils fassent vraisembiablement une grande consommation de
papillons, 1l semble rester toujours à Vernet une égale abondance
de Lépidoptères et les Ascalaphes ne paraissent pas les détruire
en nombre suffisant pour les raréfher.
Dans la vallée de Cady, les fleurs de ronce sont très attrayantes
pour les Zygænu Dubia et rien n’est plus curieux que de voir
plusieurs exemplaires de Dybia sur une même tige fleurie, passer
d'une fleur à une autre, puis céder la place à une nouvelle arrivante.
C'est la mème chose dans la vallée de la Maggia, entre Locarno
et Bignasco, où les Zygæna que je présume être Zoniceræ abondent
sur les fleurs de ronces. »
La Zygæna Stæchadis-Medicaginis des Alpes-Maritimes pro-
duit des exemplaires tout à fait conformes à ceux des Pyrénées-
Orientales que j'appelle Dubta.
Le n° 160 de la PI. XXVIII du vol. IIT de Zépid. comparée en
fournit la preuve. En effet, ce n° 160, qui provient du Moulinet,
ne diffère guère du n° 170 capturé à Vernet-les-Bains. Mais la
réciproque n'est pas complète. La Dubia des Pyrénées-Orientales
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 543
n'a pas donné jusqu'ici, du moins à ma connaissance, la forme
à ailes inférieures envahies par la couleur bleu indigo de la bor-
dure, comme les n°* 157, 150 et même 158 qui proviennent tous les
trois des Alpes-Maritimes. On peut donc dire avec vérité que dans
les Pyrénées-Orientales et dans les Alpes-Maritimes, on trouve
des individus de la Zygæna Dubia qui sont semblables entre eux,
mais que dans les Alpes-Maritimes 1l se produit une évolution vers
la mutation S/æchadis, par l’envahissement de la surface des
ailes inférieures, au moyen de la couleur bleu indigo de la bordure
qui tend à prendre un développement considérable, tandis que
dans les Pyrénées-Orientales 1l y a plutôt la tendance inverse,
c'est-à-dire vers le rétrécissement de la bordure bleu indigo des
ailes inférieures. Les individus de Vernet-les-Bains figurés sous
les n°* 169 et 170 représentent l'expression du grand développement
de la bordure bleu indigo des ailes inférieures dans la forme des
Pyrénées-Orientales et le n° 171 est, sous le rapport de ia bordure
bleu indigo des ailes inférieures, la représentation de la forme la
plus ordinaire. Cependant je possède 2 ou 3 G Dubia de Vernet-
les-Bains ayant la bordure indigo un peu plus large que chez les
n® 169 et 170. Ce sont des sujets rares et exceptionnels.
Je dois ajouter d’ailleurs que si je n'ai pas eu connaissance
jusqu'ici d’un exemplaire de Dybra des Pyrénées-Orientales, ayant
les ailes inférieures envahies par la teinte bleu indigo, il ne s’en
suit nullement que l'Aberration en question ne puisse pas se pro-
duire aux environs de Vernet-les-Bains. Je considère même le fait
comme probable, parce qu'il résulterait d'une Loi naturelle ne
comportant sans doute pas d’exceptions. Cependant, on peut dire
en toute vérité, qu'a Vernet-les-Bains, l'Aberration à ailes infé-
rieures envahies par la teinte bleue, doit être excessivement rare,
tandis qu'elle est très fréquente dans les Alpes-Maritimes.
3° Seeboldi, Obthr.; Bilbao.
Sur les bords de la mer cantabrique, M. Théodore Seebold, qui
se livrait jadis à un important commerce d'armement au port de
544 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Bilbao, récoltait en grande abondance une Zygæna qu'il appelait
Ochsenheimer:. Je ne pense pas que ce nom-là puisse être exac-
tement appliqué à cette forme géographique d’une Zygæna que
je crois devoir plutôt rattacher à la S/æchadis.
Elle est voisine de la Dybia des Pyrénées-Orientales; mais elle
est de plus grande taille. Ses couleurs sont extrêmement vives;
c'est une Zygæna à qui convient parfaitement la qualification
allemande Zockgefaerbt (hautement colorée). Le fond noir à reflet
verdâtre ou bleuâtre de ses ailes supérieures, en dessus, est très
opaque; les taches rouges des supérieures sont au nombre de 5
ou de 6, mais l’on remarque les transitions les plus insensibles entre
la forme à 5 taches et celle à 6 taches bien accusées. Ces taches
sont d’un carmin mat très pur et très vif, ainsi que le fond des
ailes inférieures dont la bordure indigo est peu large, surtout
chez les ©. 11 me semble que Seeboldi est une race géographique
spéciale à laquelle ne convient aucune des dénominations déjà
attribuées aux Zygæna du groupe de S/æchadis. Je lui ai donné
le nom d’un très aimable et excellent compagnon de chasse avec
qui J'ai bien des fois excursionné dans les Pyrénées. Sa collection,
qui était fort belle, a été donnée au Musée de Madrid.
4° Kindermanni, Obthr. Russie caucasique.
Les collections Boisduval, de Graslin, Guenée, contiennent en tout
9 exemplaires d’une forme de S/æchadis qui leur furent envoyés
de la Russie caucasique, par Kindermann, voyageur entomologiste.
Ces papillons sont certainement spécifiquement référables à S/æ-
chadis. Is diffèrent seulement par leur taille un peu plus petite
de la race de Catalogne. Le fond de leurs ailes supérieures est bleu
ou vert luisant, mais avec une sorte d’atténuation grisâtre dans la
nuance, ce dont les exemplaires des Alpes-Maritimes sont dé-
pourvus. Les taches rouges sont très petites, au nombre de 5 sur
les supérieures, d’un carmin vif et pur; les ailes inférieures sont :
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 545
ou bien presqu’entièrement lavées d’indigo bleu, avec une ou deux
éclaircies carminées, ou encore centralement d’un rose carminé, avec
un entourage bleu indigo très large.
En dessous, les taches sont, comme en dessus, sans trace de
Nebelstreif et d’une coloration plus mate et plus faible qu'en
dessus.
C’est à cette race X2ndermanni que se rattache, sans autre diffé-
rence qu'une taille un peu plus grande, la forme de Catalogne que
feu Himmighoffen, récoltait aux environs de Barcelone, il y a une
quarantaine d'années, et avait répandue dans les collections fran-
çaises de ce temps-là. Rambur en a donné une excellente descrip-
tion dans le Catal. systém. des Lépid. de l'Andalouste, p. 175. Je
la transcris comme suit : « Ailes supérieures larges, d’un vert
obscur parfois presque métallique, brillant, souvent chatoyant un
peu en bleu, d’autres fois cuivreux, avec 5 taches rouges souvent
très petites dont les deux basilaires assez courtes, des deux du
milieu, la première très petite tendant à disparaître, la cinquième
ronde un peu transversale, ne se dilatant Jamais, entourées de
noirâtre, le plus souvent peu sensible; inférieures d’un rouge vif
avec une bordure large, sinuée d’un noir bleu violâtre, envahissant
souvent une grande partie de l’aile en suivant les nervures, ne
laissant parfois qu'un petit point rouge en avant du sominet et
un ou deux traits vers la base; dans ce cas, les taches des supé-
rieures diminuant en proportion, l’on conçoit que le rouge puisse
disparaître entièrement sur les deux ailes, mais d’abord aux infé-
rieures; dessous différant peu, n'ayant Jamais les taches con-
fluentes; franges de la couleur des ailes, luisantes, n'ayant pas
de reflet roussâtre; corps de la couleur des ailes ou de leur bor-
dure aux inférieures; pattes d’un noir verdâtre, un peu roussâtres
à la face interne des tibias et des cuisses.
Antennes à peu près comme chez la Flipendule, assez épaisses
chez le mâle, avec la massue allongée, partant d'assez bas et se
prolongeant en pointe avec le sommet un peu rouge obscur à la
loupe.
35
846 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Elle diffère de la Medicaginis (*) en ce que le corps est toujours
plus robuste et les antennes un peu plus épaisses, n'ayant Jamais
de tache blanche au sommet, en ce que les ailes sont plus ai-
guës, plus allongées, n’ont jamais six taches, ni en dessus, mi en
dessous (**), que la tache postérieure médiane est placée moins
en dehors et que le bord des franges n'est Jamais roussâtre; la
bordure des inférieures, lorsqu'elle n’est pas très dilatée, est moins
sinueuse.
Elle a les mœurs de la 7/71:fol2 dont nous la croyons une
race (***); elle habite les lieux humides, le bord des ruisseaux,
les marécages. Je n'ai pas trouvé de différences sensibles quant à
la chenille d'avec celle de la 77:folu; la chrysalide est souvent
d'un brun roussâtre pâle; la coque, beaucoup moins jaune, est
parfois couleur feuille morte, plus foncée d’un côté et plissée de
la même manière. »
Les figures 4, 5 et 6 de la PI. 107 de l’/conographie de Millière,
publiées en 1860, peuvent être considérées comme représentant
(*) Medicaginis, secundum Rambur, est Z'ansalpina, Esper. (II. XVI; f.).
(**) C'est ce qui différencie la race S/æchadis-Kindermanni de la race
Stæchadis-Medicaginis, Dup. (PI. VI; fig. 6); cette dernière ayant quelquefois
6 taches en dessus comme en dessous; ou ayant $ taches en dessus ayec la
b® visible en dessous; et encore ayant le Webelstreif ou confluence des taches
rouges en dessous.
\
(**#*) Je ne suis pas d'accord avec Rambur à ce sujet. Pour moi, S/æchadis
est plus rapprochée de Zoniceræ que de Zrifolii. Je pense que Rambur a confondu
la 7'rifolii d'Andalousie à ailes inférieures envahies par le bleu, avec la S/æchadis
de Catalogne. Ce sont pourtant deux unités très distinctes. La figure 5 de la
PI. I du Catal. stystém. Andal. représente plutôt, à mon sens, la 77ifoZä bleue
que la S/æchadis. Je suis convaincu que Rambur a fait une erreur par confusion.
D'ailleurs était-il lui-même bien fixé ? Sur la Planche 1, les fig. 5 (à ailes
inférieures bleues), 6, 7 et 8 sont des Zygæna Trifoli, var. Dans le texte,
les fig. 6, 7, 8 sont seules rapportées à 77ifolii (p. 177); mais bien qu'il soit
fait mention à la page 175 de la fig. $ comme représentant le type de S/æchadis,
il ne me semble pas possible que cette fig. s de la PI. 1 puisse représenter
« les individus de Barcelone qui sont grands et bien caractérisés », que Rambur
prend comme type et qu’il décrit très bien dans les termes que j’ai cru devoir
rapporter. La fig. $ de la PI. 1 représente certainement une Zygæna Trifoli
d'Andalousie; la figure en question est d’ailleurs loin d’être un chef-d'œuvre;
mais elle ne peut être rapportée à S/æchadis de Catalogne.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 547
d'une façon assez reconnaissable, la S/æchadis-Kindermanni, de
Barcelone.
On trouve quelquefois dans les Alpes-Maritimes des exemplaires
de S/æchadis avant les taches rouges très légèrement entourées
d’une nuance plus pâle, presque blanche. C’est une transition à la
forme tyrolienne /zdicarie, Calberla, si J'en juge d’après la des-
cription, car Je n’en connais pas encore de figure et je n'ai jamais
vu d'exemplaires typiques de cette forme.
Dans la XX° livraison des Æ£/udes d'Entomologie, publiée en
mai 1806, J'ai commis des fautes par confusion entre S/æchadis
et Zransalpina, Esper. Je n'avais pas encore débrouillé le malen-
tendu qui existait dans les collections françaises au sujet de ces
deux unités spécifiques. C'est plus tard que j'ai contribué à mettre
cette question au clair, dans le Bulletin Soc. Ent. France, 1808,
p. 22 et 23.
L’Ab. jaune Borsduvali que J'ai figurée sous le n° 111 de la PI. 7
de la XX°® livraison des Etudes d'Entomologie, en la rapportant
à tort, dans ce temps-là, à S/æckadis, se rapporte réellement à
Transalpina, Esper. J'en ferai de nouveau mention en traitant de
Transalpina, Esper, dans le Vol. V, avec une figuration appropriée.
Il y a, en effet, comme je l'ai déjà exposé en diverses occasions,
2 Zygæna Transalpina bien distinctes : celle qu'Esper a fait
connaître et qui est le type d’une Espèce très fertile en intéres-
santes variétés et celle que Herrich-Schaeffer, Boisduval et Du-
ponchel ont décrite et figurée et qui, dans certains cas, est la forme
de S/æchadis, définie et analysée sous le nom d’OcAsenheimeri,
ainsi qu'il suit :
s’ Ochsenheimeri, Zeller. Sicile, Italie centrale: Montpellier.
I s’agit de la Zygæna que Ferdinand Oschsenheimer a décrite
en 1808, comme 7 7ansalpina, à la page 60 du Zweyter Band de
l'ouvrage intitulé : Die Schmetterlinge von Europa. La description
d'Ochsenheimer est conçue dans les termes suivants : « Z. atra,
548 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
alis anticis nigrocyaneis, maculis sex connatis rubris, subtus con-
fluentibus; posticis rubris margine sinuato cyaneo. » ia patrie
indiquée est l'Italie et le sud de la France. La 7Z'ransalpina, se-
cundum Ochsenheimer, a été figurée avec le même nom de 7 7an-
salpina, par Boisduval, sous le n° 3 de la PI. 4 de l’Æssa? sur une
Monographie des Zygénides; par Herrich-Schaeffer sous les
n® 61 et 62 de la Tab. 8 de Zygœænides Europ.; par Duponchel,
sous la fig. 1 de la PI. VI du Szpplément-Zigénides (sic).
Dans la Zycæna Transalpina, secundum Ochsenheimer, Bois-
duval, Herrich-Schaeffer et Duponchel, les deux sexes sont très
différents, ce qui est un fait rare chez les Zygœna. Le C' a été
figuré par Herrich-Schaeffer; la © par Boisduval et Duponchel.
Je dois faire observer que dans la figure 62 donnée par Herrich-
Schaeffer, le Nebelstreif qui pourtant existe dans la Nature, —
plus ou moins accentué, il est vrai, mais cependant facilement
perceptible, — n'a pas été représenté sur le dessous des ailes supé-
rieures. Cependant la teinte du rouge dans laquelle 1l entre une
partie de vermillon, la taille et la coupe des ailes, telles qu'elles
sont représentées par Herrich-Schaeffer, se rapportent aux exem-
plaires que j'ai sous les yeux. Le O' ressemble beaucoup à #1/1-
pendule; il a la même forme d'ailes assez étroite et allongée; 1l
montre aux supérieures six taches rouges, par paires assez régu-
lièrement espacées; la bordure indigo des ailes inférieures n'est
pas large ; la coloration générale n’est pas très vive.
La Q a les ailes beaucoup plus aliongées et proportionnellement
plus larges, sa taille est ordinairement bien supérieure à celle du
Duponchel a figuré une © prise par lui-même tout près de la ville
de Rome. La figure qu'il publie ressemble bien aux exemplaires
rapportés de Sicile par feu Bellier de la Chavignerie. La forme
de Montpellier diffère de celle de Sicile seulement par sa teinte
rouge un peu plus pâle et moins vermillonnée.
Pour éviter la confusion pouvant résulter dans la Nomenclature
de la double application du même nom de 7 ransalpina à deux
unités spécifiques distinctes du même genre Zygæna, Zeller a
substitué le nom d'OcAsenheiment au nom Transalpina pour la
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 549
Zygæna qui nous occupe. Le nom de Z'7ansalpina a été laissé à la
Zygæna décrite par Esper, sous ce vocable, en 1770, d’après un
échantillon qui lui avait été envoyé de Vérone.
La Zransalpina, Esper, a été figurée malheureusement très
grossièrement sous la lettre f de la Tab. XVI de l'ouvrage intitulé :
Der europaeischen Schmetterlinge zweyter Theil. Dans le même
ouvrage, le même Esper a représenté avec le nom de F/ipenduleæ-
major, mais d'une façon tout à fait grossière également, sur la
figure 4 de la Tab. XLI, une Zygæna qui est peut-être une © de
la Z'7ansalpina, Ochsenheimer = Ochsenheimeri, ZLeller.
IT est bien difficile de dire à quelle unité spécifique il convient
de rapporter Ochsenheimer:. Est-ce à Stæchadis? Est-ce à Fili-
pendulæ, comme l'ont pensé Staudinger et Rebel? OcAsenheimeri
serait-elle même une Espèce propre? Il est présentement difficile
de répondre à ces questions, en s'appuyant sur des raisons capables
de fournir quelque certitude.
Les Zygœna Trifolu, Lonicere Stæchadis, Filipendule, pré-
sentent des formes très caractérisées et très distinctes les unes des
autres, mais ces formes se trouvent reliées entre elles par des tran-
sitions parfaites, et non seulement ces transitions unissent les
diverses races et variétés de l’une des Espèces, mais encore elles
unissent les Espèces elles-mêmes. Dès lors nous subissons un sen-
timent de trouble dû à l'ignorance où nous restons encore des
caractères particuliers, constants, spéciaux qui seraient réellement
le propre de chaque unité spécifique et qui en établiraient l’incon-
testable distinction. Les chenilles, les coques, certains insectes
parfaits se ressemblent extérieurement; ces ressemblances ne nous
facilitent pas l'exacte vision des choses.
La situation se trouve donc comme suit : Si l’on fait abstraction
des échantillons qui établissent les transitions et si l’on se borne
à n'envisager que des séries bien sélectionnées de sujets caractérisés
dans le sens spécifique qui paraît propre à chacun d'eux, on obtient
la conviction que l’on se trouve en présence d'unités différentes
les unes des autres et que dès lors la séparation et la distinction
de ces unités s'impose. Mais si l’on considère les éléments de tran-
550 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
sition qui ont tout au moins l'apparence de relier les unités entre
elles d'une façon presque parfaite, l’opinion change. Deux sen-
timents contraires animent donc l'esprit du Naturaliste aux prises
avec l'étude de ces Zygæna; l'un tendant à la séparation des
Espèces, Variétés, Races, par la constatation de caractères diffé-
rentiels extérieurs tangibles ; l’autre opposé au premier et inclinant
vers la réunion en une seule unité de toutes ces Espèces, Variétés
ou Races, grâce aux échantillons transitionnels qui les unissent
si intimement. |
Je prends pour exposer plus clairement le sentiment de trouble
et d'incertitude occasionné par les insensibles transitions au moyen
desquelles une unité se trouve liée à une autre dans la Nature, le
fait suivant que j'ai observé dans les Hautes-Pyrénées.
J'ai sous les yeux 49 exemplaires de Zyzœna Lonicere pris par
mon frère et par moi-même à Cauterets, entre l'Etablissement des
bains de la Raïllère et la ville même de Cauterets. Pas un de ces
49 exemplaires ne détonne au milieu des autres. Ils sont parfai-
tement et semblablement caractérisés ; ailes relativement allongées ;
antennes longues et terminées en pointe; aspect un peu mou;
couleurs légèrement transparentes; 5 taches rouges aux supérieures,
tant en dessus qu'en dessous; pas de trace de Webelstreif; le des-
sous exactement conforme au dessus, sans indication d'un germe
de 6° tache, mais avec l’atténuation du coloris, comme si le dessous
des ailes n'était pas recouvert d'écailles et était seulement coloré
par la transparence du dessus. À côté se trouvent rangées quatre
colonnes d'une Zygena qui pourrait bien être Fzlipendule, con-
tenant environ 75 exemplaires. Ceux-ci sont également bien
caractérisés : forme des ailes plus raccourcie, teintes beaucoup
plus vives et plus opaques; toujours 6 taches rouges aux supé-
rieures, et en dessous un Webelstreif formant comme un lavis rose
dans lequel se distinguent toujours en couleur plus vive et plus
arrêtée les 6 taches rouges ordinaires. Mais entre les colonnes des
49 Lonicere et des 75 Filipendulæ qui sont bien nettement carac-
térisées et différentes les unes des autres, il y a la colonne des
intermédiaires, au nombre de 15. Ce sont : soit des Zosicere chez
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 551
lesquelles on aperçoit, en dessus comme en dessous, des vestiges
de la 6° tache rouge, qui paraît naissante, soit des ##lipendule
qui sont en train de perdre cette 6° tache rouge. Ces échantillons
transitionnels ont un Mebelstreif de tansition comme les autres
caractères et à toute cette colonne de 15 exemplaires formant la
liaison quelquefois presque parfaite entre Lonicere et Filipendule,
est joint l’accouplement d’une Zoxicere G ayant 5 taches rouges
aux supérieures en dessus et en dessous — mais un Webelstreif
bien apparent sur les dessous des ailes supérieures, tandis que le
Nebelstreif semble nul chez les Zoniceræ pures — avec une Q
Filipendulæ dont les 6 taches atteignent leur maximum de dimen-
sion et d'éclat. Il est vrai que dans la même boîte Je vois un Œ de
Zygœna Filipendule qui fut pris accouplé avec Procris Geryon ©,
en juillet 1882, au même pays de Cauterets. Les accouplements
hybrides sont-ils la cause de l’apparition de ces papillons tran-
sitionnels entre deux Espèces dont l’ensemble des exemplaires
considérés comme de race pure, paraît bien nettement distinct ?
Je ne le saurais dire. Je m’efforce de constater des faits réels et
j'avoue ne savoir quelle conclusion en retirer pour rester parfai-
tement véridique, ce qui est mon seul souci.
Les hypothèses qui ont la prétention d'expliquer des phéno-
mènes naturels, peuvent être le produit d’une imagination riche et
féconde, mais il est prudent de se défier des théories, si sédui-
santes qu’elles soient, lorsqu'elles ne reposent pas sur un fond de
vérité bien authentiquement acquise. Aussi je me rappelle la parole
de Fuessly : Quantum est, quod nescimus! et je la répète auJour-
d’hui. j
6 Anceps, Obthr. Bouches-du-Rhône et Var.
On trouve à Hyères, à la Sainte-Baume, à Saint-Zacharie, à
Montrieux, à Saint-Pons, en juin, puis en septembre, une race
extrêmement énigmatique de Zygæna. Certains exemplaires sont
très petits, notamment ceux qui sont récoltés en septembre; d’autres
sont de très grande taille, Les uns ont 5 taches rouges aux supé-
Lise LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
rieures, comme 7 7:folu et Lonicere auxquelles ils ressemblent très
bien; les autres ont 6 taches, comme Fzlipendule, dont il est
difficile de les séparer; mais il y a des échantillons avec la
6° tache naissante et présentant le développement insensiblement
graduel de cette 6° tache. Le fond des ailes supérieures est moins
opaque et moins brillant que chez S/æchadis-Medicaginis des
Alpes-Maritimes ; les ailes inférieures sont peu largement bordées
d'indigo, les taches des ailes supérieures et les ailes inférieures sont
d'un rose carminé assez vif, mais pas du ton carminé pur de
Stæchadis; en dessous, le VNebelstreif existe, mais dans des degrés
d’accentuation très divers.
On pourrait classer d'une façon satisfaisante certains exem-
plaires avec Flipendule, d'autres avec Zrifoli ou Lonicere;
toutefois, ce dernier triage serait plus embarrassant à faire que le
premier, mais, quel sort donner aux échantillons intermédiaires ?
Il est évident que toutes ces Zygæna, grandes et petites, à 5 et
à 6 taches rouges, ayant les couleurs plus ou moins claires ou
foncées, la frange même des supérieures tantôt indigo et tantôt
presque d’un gris Jaunâtre, s’accouplent ensemble, se mélangent
intimement et constituent, dans les mêmes lieux où elles habitent,
une seule unité de Race, de Variété ou d'Espèce. Je l'ai appelée
Anceps, pour exprimer mon sentiment à son égard, au moyen de
ce seul mot qui la distingue des autres races avec lesquelles je ne
vois pas de similaire exactement conforme, du moins 54 j'envisage
l'ensemble de ses exemplaires; car dans cent autres lieux bien
éloignés de la Provence on trouve des Zonicere, des Trifolu et
des l1lipendule, avec lesquelles on ne pourrait discerner aucune
différence sensible entre certaines Zygæna anceps des Bouches-
du-Rhône et du Var et ces diverses Zygæna.
Seulement il faudrait, dans une série certainement homogène par
ses origines et par ses parentés, c’est-à-dire au milieu de nombreux
exemplaires de Zygæna récoltés aux mêmes lieux dans les Bouches-
du-Rhône ou le Var et frayant constamment ensemble, sélec-
tionner arbitrairement des sujets dont on ferait ensuite la ré-
partition dans des unités distinctes.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Lie
Le classificateur aurait pour guide l’impression que produirait
sur ses yeux chaque échantillon comparé à d’autres sujets faisant
partie de groupements différents, constitués avec des spécimens
capturés dans des contrées très diverses. Ces Zygæna des Bouches-
du-Rhône et du Var subiraient ainsi une dissociation qui pourrait
les éloigner considérablement les unes des autres et je pense que
cette classification artificielle serait en désaccord avec les indi-
cations fournies par la Nature elle-même. Voilà pourquoi J'ai
retenu toutes ces Zygæna de Provence, bien que présentant entre
elles des différences individuelles, dans la même unité de race
que J'ai appelée Aceps, et telle est la raison pour laquelle je me
suis abstenu de disperser et d’éparpiller toutes ces Anceps, estimant
qu'il était plus conforme à la réalité de maintenir les races ou
formes locales groupées géographiquement pour l’ensemble des
individus qui les composent.
Zygæna Filipendulæ, Linné.
Linné a dénommé le Sphinx Fuipendulæ dans la X° édition
du Systema Nature, mais le même Auteur, dès 1746, avait décrit
l’'Espèce dans la Fauna Suecica, à une époque où la Nomencla-
ture binaire n'était pas encore pratiquée et où les Papillons ne
recevaient pas de désignation spécifique. Je transcris ci-dessous
la première description latine de Linné; elle porte dans la Fauna
Suecica, 1746, le n° 814.
« Phalæena subulicornis spirilinguis; alis superioribus subcæ-
ruleis : punctis sex rubris, inferioribus omnino rubris; Habitat
in Filipendula, volitans de die, licet tarde.
Descr. Puppa intra folliculum membranaceum flavum latitat.
Phalæna mas gaudet maculis sex rubris in ala exteriore, fœmina
vero macuhs quinque (*) connatis scilicet duabus baseos. — Corpus
(*) Linné avait sans doute en vue Zoniceræ qu'il considérait comme la @ de
Filipendule.
554 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
et artus nigra, vestita lana nigra. Antennæ antrorsum ascendentes,
versus summitatem sensim latiores (non tamen clavatæ) ad apicem
attenuatæ ac depressæ. Alæ superiores ex viridi-cæruleo nitentes :
punctorum tribus paribus ovatis coccineis, alæ inferiores coccineæ
margine cæruleo nitido. »
Linné dit : « Habitat in Filipendula. » Les vieux auteurs
Sulzer, Schaeffer, Roesel von Rosenhof cent répété l'indication
donnée par Linné. Cependant, en France, nous ne trouvons pas
la chenille de la Zygæna Filipendule sur d’autres plantes que sur
des Papilionacées, telles que : 7Z7ifolium pratense, Lotus corni-
culatus, Onobrychis Sativa, Anrthyllis vulneraria. J'ignore toute-
fois si, en Suède, la Zygena Filipendule vit effectivement sur Ja
plante à laquelle le Lépidoptère doit son nom spécifique. La
Spirea Filipendula, Linné, est une plante vivace de la fanulle des
Rosacées, haute de 30 à 60 centimètres, répandue dans les bois et
les prés calcaires; elle porte des fleurs blanches ou rougeûtres et
offre, dit l’abbé Coste, des tubercules d'un goût agréable, comes-
tibles et astringents.
La Zygœna Filipendule est une Espèce fort commune; elle est
répandue dans les Iles britanniques, en France, en Allemagne; elle
se rencontre au bord de la mer, dans les plaines et sur les mon-
tagnes.
Dans l'ouvrage intitulé : Die Kennseichen der Tnsekten nach
Anleitung des Küônigl. Schwed. Rütters und Letbartzts Karl
Linnaeus, publié à Zurich, chez Heidegger und Comp, daté de
1761, la Zygœna Filipendule est décrite et représentée par Sulzer,
comme suit (p. 37 et Tab. XV, fig. o1) : « Abendvogel, die obern
Fluegel tuerkisfaerbig mit sechs rechten Punkten : Die untern
ganz roht (sic). Filipendule Linn. Syst. Nat.; Sphinx, 32. Wobnt
auf dem rothen Steinbrech (Spiræa flipendula). »
Jacobus Christianus Schaeffer, en 1766, dans les Insecta Ratis-
bonensia, a figuré sous les n° IV et V de la Tab LXIX, la Zygena
Filipendule; Roesel von Rosenhof, sous les n°* 2, 3, 4, 5 et 7 de
la Tab. LVII (Classis IT. Papilionum Nocturnorum), a représenté
la chenille, la coque, la chrysalide et le papillon, — les ailes
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 555
étendues (fig. 5) et en mouche (fig. 7), — du Sphinx Filipendula
(sic), der Steinbrecher-schwaermer; die Bockhorn-Phalaene; der
Rothfleck; die Zirkelmotte, tous noms vulgaires allemands de la
Zygæna Filipendule (voir Insecten-Belustigung, p. 289).
Jan Christiaan Sepp a consacré à la Zygœna Filipendule la
Tab. XXII de Nacht-Vlinders (van't Tweede Gezin der Eerste
Bende) de son bel ouvrage consacré à la description et à la figu-
ration des WMederlandsche Insecten, qui fut commencé à publier
à Amsterdam en 1762 (Gedrukt voor den Auteur) et qui a été
où
continué jusqu'à nos jours. Sepp représente l'œuf (fig. 1 et 2);
la chenille (fig. 3 et 4); la coque (fig. 5 et 7); la chrysalide (fig. 6)
et le papillon (fig. 8 et 0). La figuration est bonne, mais elle n'a
pas la valeur exceptionnelle et qui n’a jamais été surpassée, d’un
certain nombre des premières Planches.
La Zygœena Filipendulæ est, je pense, l’espèce la plus ancien-
nement connue du genre et, avec Peucedani qui diffère par son
anneau abdominal rouge et Æp/ialtes, elle paraît avoir été la plus
anciennement figurée.
Parmi les modernes qui ont représenté Æ/ipendule, je citera
Charles Barrett qui consacre toute la Planche 60 de son ouvrage
sur les Papillons anglais, à la figuration de l’Espèce. Les n° 1
et 1 a représentent la forme normale; le n° 1 & : l'Ab. à taches
et ailes inférieures noires, dite CÆrysanthemi,; les n° 1 c et 1 4
l'Ab. flava; les n° 1 e et 1 f : des Aberrations tendant au brun
clair (1 e) et au rose pâle (1 f); le n° 1 g : l’Ab. à taches confluentes
depuis la base jusqu’à l'extrémité de la dernière tache; le n° 1 % :
l'Ab. avec 4 taches seulement, par le fait de la suppression de la
tache basilaire inférieure et de la tache médiane inférieure des
ailes supérieures, en dessus; le n° 1 Æ représente un échantillon
singulier avec une aile inférieure supplémentaire, ayant donc
5 ailes au lieu de 4. Les n°* 1 2 et 1 7 sont consacrés à la représen-
tation de la chenille et de la chrysalide. Charles Barrett a ainsi
fourni une documentation illustrée très considérable de la Zygæna
Filipendulæ des Yes Britanniques.
556 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
En Angleterre, la Æ#/pendulæ porte, d'après Wood (/ndex
methodicus, 1845, p. 11), le nom vulgaire de 6-spotted Burnet;
Wood dit que Æ#1pendulæ habite « Fields and meadows by
woodsides, in Middlesex, Devonshire, S. Wales, etc.; June and
July. » Cet auteur figure Flipendule sous le n° $ a + de la PI. 4 et
la variété à taches et à ailes inférieures jaunes, sous le n° 6 a de
la même planche, avec le nom de Æippocrepidis et le nom popu-
laire anglais (exglish name) de Narrow-bordered 6-spot Burnet.
Ce mot Burnet qui signifie en anglais pimprenelle, est appliqué
par Wood à toutes les espèces du genre Zygæna (Anthrocera,
secundum Wood).
C’est un curieux ouvrage, celui de Wood (*). Le but de l’Auteur
fut d’incorporer dans un volume in-octavo un catalogue illustré
de tous les Lépidoptères connus comme habitant la Grande-Bre-
tagne, mais 1llustré avec des figures réduites de taille, cependant
gravées et coloriées avec un soin tel que chaque Espèce serait
toujours parfaitement reconnaissable. Pour guider les Entomolo-
gistes dans l'appréciation de la taille naturelle des divers insectes
qui sont tous figurés avec la même dimension, sans égard pour
leur grandeur réelle et relative, une lettre de l'alphabet et un signe
sont ajoutés à chaque numéro de référence qui se trouve gravé
près de chaque papillon. C'est ainsi que la lettre 4 indique un
insecte grand d'un pouce un quart, et que la lettre 4, suivie du
signe +, indique un pouce et demi; tel est le cas de la Zygæna
Filipendule, tandis que la variété jaune ippocrepidis n'est
grande que d’un pouce et un quart, etc. C'est très bizarre de voir
sur la même Planche l’Acerontia Atrofos réduite à la même
dimension que la Procris Statices, mais le dessin, la gravure et le
coloriage sont très bons et l'ouvrage en lui-même est fort inté-
ressant et contient une série de figures qui sont en effet parfai-
tement reconnaissables.
(*) L'exemplaire que je possède et qui faisait partie de la bibliothèque de
feu Guenée, porte une dédicace signée : « Henry Doubleday December 6th 1852;
To Mons. A. Guenée, from his sincere and grateful Friend. »
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 557
Les Microlépidoptères notamment sont parfaitement traités.
Un supplément à l'ouvrage de Wocd fut publié par feu mon
honorable ami \Vestwood, en 1854.
Un auteur anglais contemporain, connu pour son talent ana-
lytique et la richesse de sa documentation, J. W. Tutt, dans Île
Vol. I de À Natural History of the british Lepidoptera, publié
en janvier 1890, a consacré les pages 507-538 à l’histoire des
Anthrocera Fiipendulæ et Hippocrepidis, Stephens; celle-c1 pa-
raissant être une forme anglaise de /1pendule.
Je me suis efforcé de me documenter aussi largement que pos-
sible au sujet de la Zygœna Filipendulæe anglaise et ce sont les
variétés britanniques de cette Espèce que je vais d’abord étudier,
me référant à l'ouvrage de Tutt, mais n'étant cependant pas tou-
Jours d'accord avec lui.
Par exemple, Tutt dit que « Pathological leucochroism also
occurs, a failure of pigment sometimes resulting in aberrations
similar to Ab. grisescens, Obthr. » Je sais fort bien qu'une déco-
loration peut intervenir chez Filipendulæ, comme dans Æborace,
pour Loniceræ, par manque ou insuffisance pathologique du pig-
ment. Mais tel n'est point le cas pour l’Ab. anglaise grisescens
que j'ai fait figurer sous le n° 135 de la PI. 8 de la XX° livraison
des Ætudes d'Entomologie. Cette Ab. grisescens (que M. Tuttn'a
probablement jamais vue en nature) est tout à fait comparable à
l'Ab. Huebneri du Polyommatus Phleas. Le fond de ses ailes a
été atteint d'albinisme sans que les écailles aient été diminuées
pour cela de nombre ou d'épaisseur. Les écailles se trouvent
comme dans les individus normaux, sauf qu'elles sont colorées
en gris argenté, au lieu d’être d’un bleu verdâtre ou d'un vert
bouteille. Les antennes, sauf à la massue et à la pointe qui sont
restées noires, sont devenues grises; le thorax, l'abdomen, en
dessus comme en dessous, sont gris; le fond des ailes supérieures
et la bordure des inférieures sont d’un gris argenté très opaque
et les écailles sont très denses et très serrées. L’Ab. grisescens a
conservé ses parties rouges colorées avec l'intensité ordinaire, mais
un albinisme très intéressant a atteint toutes les parties qui sont
558 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
normalement d’un bleu verdâtre ou noires. Cet albinisme est fort
rare; l’exemplaire que je possède provient de la collection Prest,
d'York. L’albinisme inverse est celui qu, respectant les parties
vertes et noires, c’est-à-dire le fond des ailes supérieures, la bor-
dure des ailes inférieures, les antennes, la tête et le corps, se déve-
loppe au détriment des parties rouges, qui sont changées en jaune
ou en rose orangé pâle.
Ma collection contient actuellement 6 /1pendule anglaises de
l'Ab. 2ntermedia vel aurantia, Tutt (p. 510 et 511), venant
d'Harwood et peut-être de Colchester; celles-ci de la coll. Maddi-
son, les autres des collections Tugwell et Sheppard; mais jusqu'ici
J'ai réuni, en outre, 21 exemplaires de l’Ab. fava, dont J'ai fait
figurer un échantillon, sous le n° 133 de la PI. 8 de la XX° livrai-
son des Ætudes d'Entomologie. Ces 21 Ab. flava viennent de
Wortham, July 1808 (ex coll. Maddison); Cambridge (Inghsh,
1892; ex coll. Tugwell); ex coll. Shearwood, vendue le 23 nov.
1801; Gates (1872, bred; ex coll. Howard-Vaughan); Winchester
(ex coll. Raynor, vendue 27 oct. 1801); Harwood (1892, ex coll.
Tugwell) ; Hartlepool (ex coll. John Sang, of Darlington) ; Hud-
dortfield (1877, ex coll. Battershell-Gill) ; ce nom de localité étant
toutefois difficile à lire et peut-être, à cause de cela, mal transcrit;
je regrette de ne pouvoir déchiffrer pour les exemplaires de la
collection Goldthwait, vendue le 5 octobre 1900, l'étiquette de
localité.
Inversement aux Ab. 2x/ermedia, aurantia, flava, qui sont des
manifestations par albinisme, on trouve chez Filipendulæe l'Ab.
par mélanisme, CÆrysanthemi, chez laquelle toutes les parties
rouges ont été remplacées par une teinte brun noir. J'ai fait figurer
cette Aberration sous le n° 134 de la PI. VIII de la XX° livraison
des Etudes d'Entomologie. Cette Ab. CArysanthemi a été figurée
sous le n° 1 de la PL 1 de l'ouvrage de Moritz Balthasar Bor-
kausen, intitulé : Naturgeschichte der europaeischen Schmetter-
linge et publié à Francfort en 1788 ou 1780, et sous le n° 1 de la
Tab. XXXVII de la seconde partie de l'ouvrage d’Esper, d’après
un exemplaire communiqué par l’avocat Schneider, de Stralsund.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 559
D'ailleurs, c'était le même Regierungs-Advokat Schneider qui
avait fait part à Borkausen de la découverte de la Zygæna CAry-
santhemi dont il avait capturé presque chaque année quelqu'exem-
plaire, en compagnie du commun S/eënbrechschwacrmer où ZYy-
gena Filipendule, aux environs de la ville de Séralsund. On trouve
quelquefois l’'Ab. CArysanthemi aux environs de Paris, mais c'est
toujours une très grande rareté.
Les Ab. albinisantes avrantia et flava offrent une curieuse par-
ticularité, c’est de sembler tendre à la mélanisante Chrysanthemi
dont elles sont pourtant la contre-partie. En effet, quelques-uns
des exemplaires appartenant à l'Ab. Java, aussi bien qu'à l'Ab.
aurantia, ont les ailes rembrunies, de manière à former comme
une transition à CArysanthemi. Ma collection contient un échan-
tillon de Rouen et un autre d'Angleterre (ex coll. Howard-
Vaughan) ayant le fond des ailes inférieures et les taches des
supérieures de couleur rose semblant enfumée et deux d’Angle-
terre, de la collection Sheppard, d’une teinte brun clair mélangée
d'ocre jaune et semblant se rapprocher de CArysanthemt.
j'ai fait figurer sous le n° 132 de la PI. VIII de la XX* livraison
des Etudes d'Entomologie une Aberration confluens, dont je pos-
sède o exemplaires bien semblables entre eux. L'un d'eux vient de
Rouen (H. Lhotte), les 8 autres sont anglais.
Ces Aberrations confluentes que de Selys-Longchamps a ap-
pelées bipuncta pour les distinguer de celles où la confluence des
taches rouges est générale, ont seulement la tache basilaire infé-
rieure rouge et la tache médiane inférieure réunies. La confluence
n’atteint pas la tache externe inférieure qui reste très nettement
séparée de la tache médiane inférieure alors que celle-ci forme,
à partir de la naissance des ailes, avec la tache basilaire, un long
trait rouge. La tache basilaire costale supérieure ne joint ordinai-
rement pas la tache médiane cellulaire, parce qu'elle ne fait pas
partie du même espace intranervural. Ma collection contient un
seul exemplaire anglais de l'Ab. communimacula de Sélys. Il
provient de la collection William Machin et présente la confluence
de la tache rouge médiane cellulaire et de la tache rouge externe
560 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
supérieure, sans que la tache basilaire et la tache médiane soient
jointes ensemble. En Bretagne et en Charente, la confluence des
taches rouges chez 'ilipendule se fait tout à fait autrement. Très
souvent, les taches rouges se joignent par paire, notamment les
deux taches rouges externes qui ne forment plus qu'une grosse
macule à tendance cordiforme; c'est l’Ab. Cytisi, Huebner, mais
quelquefois aussi une sorte de lavis rouge recouvre plus ou moins
totalement l’espace compris entre les 3 groupes de 2 taches rouges et
forme, depuis la base jusqu’à l'extrémité des 2 taches externes, une
longue et large macule rouge unique, c’est la véritable Ab. confluens.
Je ne parle pas des cas de décoloration pathologiques fréquents,
desquels 1l résulte que sur l’une des ailes inférieures et quelquefois
sur les deux, une pâleur jaunâtre, grisâtre ou même blanchâtre
remplace la vive couleur rouge normale.
La plus brillante race française de /’1pendule est, à ma
connaissance, celle de la Charente-inférieure. Tandis qu'en Bre-
tagne }lipendule éclôt depuis le 15 juillet au 10 août, à Dom-
pierre-sur-Mer, on la trouve abondamment dès le mois de mai. La
couleur rouge est particulièrement vive dans les Charentes et les
exemplaires à taches confluentes y sont relativement nombreux.
Ma collection contient une vingtaine d'individus offrant les plus
intéressantes variations. Le grossissement des taches rouges amène
le rapprochement ou même la jonction desdites taches; mais il y
a des exemplaires dont les ailes supérieures sont tellement cou-
vertes d'écailles rouges que la teinte vert bronzé du fond n'est plus
guère apparente que vers l’apex et le long du bord inférieur.
La symétrie n'est généralement pas parfaite entre les deux côtés
des ailes supérieures, dans ces échantillons extraordinairement
confluents. La coloration rouge fait l'effet d’être partie de la base
et d’avoir envahi la surface des ailes supérieures par le semis pré-
pondérant du pigment carminé qui recouvre tout ou partie de
l'espace normalement occupé par la teinte vert bronzé du fond.
Ces Zygœna Fulipendule Ab. confluens, de Dompierre-sur-Mer,
sont vraiment superbes et elles constituent à peu près pour 777.
pendulæ ce que l’Ab. #zl1osa du même pays fait pour A2ppocre-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 561
pidis. Il y a par année 2 éclosions de Filipendulæ dans les régions
qui donnent une apparition printanière de l'Espèce, car M. H. Po-
well a capturé Filipendulæ le 27 septembre 1904, à Carqueiranne
(Var), et M. Dayrem en automne, à Lectoure, et dans ces deux
contrées, on peut récolter des FZlipendulæ dès la fin de mai. La
Zygœna Filipendulæ vole en mai et juin à Aix-en-Savoie; en
mai à Angoulême; en Juillet dans les Alpes-Maritimes (Saint-
Martin-d'Entraunes); en juin à Samoussy (Aisne); en Juillet dans
les Alpes et en Bretagne. Dans la Charente-Inférieure, le We-
belstreif est extrêmement accusé sur le dessous des ailes supérieures.
Herrich-Schaeffer a figuré sous les n°* 100 et 110 de la Tab. 16
de Zygeænides Europ., le Set la © d’une Zygæna qu'il appelle
Manni et qui est considérée comme la forme alpine de Fulipendule.
Le coloris rouge, aussi bien que le fond des ailes vert bouteille ou
bleu verdâtre, sont d'un aspect plus pâle que chez la ##2pendule
des plaines. La forme de la Charente-Inférieure et de la Lozère
notamment est tout à l'opposé, par l'éclat de sa teinte, de la race
alpine Manni. J'ai capturé Manm, en juillet, à Zermatt et sur la
route du Simplon. Le Webelstreif, sur le dessous des ailes supé-
rieures, est relativement très faiblement indiqué chez Manm; déjà
la forme de l'Isère (Bourg-d'Oisans, Uriage), sans être aussi
accentuée que la forme du Valais, au point de vue de l’atténuation
de l'éclat des couleurs, présente au même degré que la race valai-
sanne, la réduction, sinon même la suppression du Webelstreif.
J'ai sous les yeux des Zygæna Filipendulæ prises dans l'Isère par
feu Guenée et par moi; ces papillons ont en dessous les taches
rouges du dessus reproduites sur un fond bleu et presque sans
qu'aucun lavis rouge vienne les Joindre ou les entourer. Il n'y a
pas lieu d’attacher à l'absence ou à la présence du Webelstreif plus
de valeur que ce détail n’en comporte; cependant on doit en tenir
compte dans la juste mesure; au point de vue de la classification
des races, c’est un caractère incontestablement intéressant.
Staudinger et Rebel, dans leur Catalog 1901, ont considéré
Ramburi Herr. Schaeff. et Lederer, Gurda, Lederer et Syrzaca,
36
502 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Obthr., comme trois synonymes d’une même variété de F#/1pen-
dule. J'ai déjà fait remarquer à la page 46 (note) de la XX° li-
vraison des Ætudes d'Entomologie que Ramburi, Herrich-Schaeffer
(Weue Schmetterlinge, fig. 161 et 162) n'était pas la même espèce
que la Zygena Ramburi, Lederer (Wiener entom. Monatschr., 1861,
af. 1, fig. 10). En conséquence comme le même nom ne peut pas
convenir à deux Espèces différentes dans le même genre, Jai
donné le nom de Syriaca à la Ramburi, sec. Herrich-Schaeffer et
j'ai fait figurer, à l'appui de mon observation, Syrzaca sous les
n° 136, 137 et 138 de la PI. 8 de la XX° livraison des Efudes
d'Entomologie; le n° 136 représente Syriaca quinquemaculata;
le n° 137 figure Syriaca-sexmaculata, conforme à la figure 161
d'Herrich-Schaeffer, et le n° 138 représente l'Ab. Confluens,
également figurée par Herrich-Schaeffer sous le n° 102. La
Mersina, Herrich-Schaeffer (n° 163), est la même espèce que
la Gurda, Lederer (Wiener entom. Monatschrift, 1861; Taf. 1,
fig. 0). Mais nm Ramburi, Lederer, ni Syriaca, Obthr. (Rambuni,
H. S.), ni Gurda, Lederer (Mersina, H. S.) ne paraissent être des
formes ou variétés de Filipendule, ainsi que Staudinger et Rebel,
dans leur Catalog 1001, l’ont fait imprimer certainement par
erreur, et qu'on me permette d'exprimer toute ma pensée, par une
erreur commise en parfaite connaissance de cause (*), ce qui est
raisonnablement inexplicable.
Je me demande non seulement comment Staudinger et Rebel
(*) Une de ces erreurs énormes, commise volontairement par Staudinger et
Rebel, est celle qui existe à l’art. 4175 (p. 365) du Catalog 1go1. Il s'agit de
Phragmaiobia Leprieuri, Obthr., mise en synonymie de Pramatobia Breveti,
Obthr. J'avais communiqué à Staudinger, sur sa demande, le type de Brevet;
d'autre part, il connaissait parfaitement Zeprieuri, dont le DT Seriziat lui avait
fourni des exemplaires pris à Collo. Comment est-il possible qu'un Entomolo-
giste, ayant quelque expérience de la distinction des Espèces, puisse spécifique-
ment réunir Æreveti et Leprieuri, même avec un point d'interrogation ?
Une délicieuse cacophonie est aussi celle qui distingue le genre O7rAodia, dans
le Catalog Staudinger et Rebel 1901, aux pages 208, 209 et 210. Il semble que
les Auteurs du Catalog ont goûté une délectation particulière, en offrant à leurs
Lecteurs, à propos du genre Orrodia, une collection d'erreurs et de confusions
qui parait constituer le record dans un ouvrage où les fautes ne sont pourtant
pas l’exception; hélas!
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 5063
peuvent considérer Lamburi, Gurda, Syriaca comme appartenant
à une même unité, alors que des différences si constantes et si tan-
gibles les séparent les unes des autres, mais encore d'après quels
principes ces Auteurs érigent une Unité en Espèce séparée ou la
rabaissent au simple titre de Variété. Le n° 4353 du Catalog 1001 :
Lederer: Stgr. (Laphria, in texto, H. S.) est inscrit à titre d'Espèce;
mais 1l suffit d’avoir des yeux pour constater que Zedereri (Laphira,
H. S, fig. 108) est bien plus près de Æzipendule que Gurda, dont
les ailes sont beaucoup plus allongées que Syriaca et que Ramburi.
Il n'y a donc pas eu unité dans les vues et dans la conception, ni
le moindre esprit de suite pour déterminer la ligne de conduite qui
guidait les Auteurs du Catalog. Tout paraît livré au hasard ou
bien à fantaisie du moment. Ici, une différence légère et même
contestable suffit pour valoir la séparation spécifique; là, malgré
les différences les plus notables et les plus certaines, la séparation
spécifique n’est pas admise et l'inscription comme simple Variété
est adoptée. C'est vraiment dommage qu'un travail aussi consi-
dérable, qui aurait pu rendre de si grands services, ne soit que le
propagateur d'un si grand nombre d'erreurs, malheureusement
acceptées sans contrôle et de confiance par la plupart des Ento:
mologistes !
Je pense donc qu’il y a réellement 3 Espèces de Zygæna de
Syrie, à distinguer, ainsi que Je l'établis sur un tableau qui est
imprimé un peu plus loin et qui définit exactement la question
telle que je la comprends.
Il convient même d'ajouter à ces 3 Espèces de Zyz2æna, de Syrie,
une 4° espèce syrienne que J'ai appelée Rosa et que J'ai fait figurer
sous les n° 106 et 107 de la PI. XXII du IIlI° Volume de la
Lépidoptérologie comparée.
Ces 4 Espèces de Zygæna se trouvent dans la région d’Akbès
où Ch. Delagrange chassa pour nous, durant la saison 1890. Le
Frère Philippe nous a aussi envoyé d'importantes collections for-
mées dans cette localité très riche et sur laquelle feu le savant
abbé Armand David avait, le premier, appelé l'attention des Natu-
ralistes.
564 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Voici donc cemment il y a lieu, suivant mon appréciation, de
définir la synonymie des Zygæna syriennes dont il vient d'être
question et de les séparer spécifiquement entre elles :
1°} Syriaca, Obthr., Etud. d'Entom, XX* liv. (page 46, note).
| forma Syriaca-sexmaculata, Obthr. (loc. cut, PI 8, fig.
137).
Ramburi, Herrich-Schaeffer (Neue Schmett., fig.
161), nec Lederer.
forma Syriaca-sexmaculata-confluens, Obthr. (loc. «tt.
P18, 9. 130):
Ramburi, Herrich-Schaeffer (loc. cif., fig. 102).
forma Syriaca-quinguemaculata, Obthr. (loc. «it, PI. 8,
fig. 136).
Région d’Akbès (Ch. Delagrange, été 1890; 27 coll.
Obthr., 18 spécim.); Antiochia (Lederer, sec. Herr.-
SchHaeit, Loc CT, pa)
2° Ramburi, Lederer (Wiener entom. Monatschr. Bd. V, 1861 ;
Taf. 1, fig. 10), nec Herrich-Schaeffer.
Région d'Akbès (Ch. Delagrange, été 1800; an coll. Obthr.);
Antiochia (Cotyp. ex Lederer; #7 coll. Bellier, de Graslin,
Boisduval) — (2x coll. Obthr., 8 spécim.).
3°: Gurda, Lederer (Wiener entom. Monats. Bd. V., 1861; Taf. 1,
fig. O, p. 152).
— Mersin, sec. Lederer.
Mersina, Herrich-Schaeffer (Neue Schmett., p. 32, fig. 163) —
« Mersin, 7 Kleinasien, durch H. Lederer erhalten »; Herr.-
Sch p.22
Région d'Akbès (Ch. Delagrange, été 1800 et Frère Philippe;
in coll. Obthr., 17 spécim.).
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 565
4 Rosa, Obthr. (Etud. Lépid. compar, Vol. I, PI. XXII, fig.
106, 107).
Région d’Akbès (Ch. Delagrange, été 1890; 27 coll. Obthr.,
15 spécim.).
Syriaca, Obthr. (Ramburi, H. S. nec Lederer) est une Espèce
de grande taille, d'aspect un peu lourd et robuste. Le fond des
ailes supérieures et la bordure des inférieures, en dessus, est d’un
noir indigo ou légèrement verdâtre, luisant; les taches rouges, au
nombre de 6 ou de 5, sont de nuance carminée assez vive, ainsi
que les ailes inférieures. Les antennes et le corps sont d’un noir
indigo. Les pattes sont très longues avec le revers des premiers
articles d’un brun jaunâtre. Il n'y a pas de Webelstreif sur Île
dessous des ailes supérieures, chez 15 exemplaires; dans 2, le
Nebelstreif est équivalent à celui qui est représenté sur la fig. 161
donnée par Herrich-Schaeffer; le Nebelstreif est très accentué dans
l'Ab. confluens.
Syriaca est sûrement une Espèce distincte de }#ipendule, la-
quelle Filipenduiæ se trouve également en Syrie. J'en possède une
paire récoltée à Berut-Dagh, par Ch. Delagrange, en juillet 1800.
Ce sont bien, des Filipendulæe chez lesquelles dans le groupe des
2 taches rouges externes, les taches en question sont très rapprochées
et confluent même, tandis que dans Syrzaca les mêmes taches sont
bien plus nettement espacées. Il y a des Syriaca © dont la taille
égale celle des OcAsenheimert.
Ramburi, Lederer (nec Herrich-Schaeffer) et Gwrda, Lederer
(Mersina, H. S.), sont remarquables par la teinte rose de leurs
taches et de leurs ailes inférieures. Il en est de même chez la nou-
velle Espèce que j'ai appelée Rosa, à cause de cette coloration par-
ticulière. Gurda a les ailes allongées et les deux taches externes sont
confluentes et forment un cœur; la bordure des ailes inférieures
est sinueuse, de largeur inégale; le fond des ailes supérieures est
d'une teinte indigo avec reflet d'acier, peu opaque et relativement
claire.
566 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Chez ÀRamburi, Lederer, la bordure des ailes inférieures est
étroite et régulière; les 2 taches externes des ailes supérieures, en
confluant, ne prennent pas un aspect cordiforme.
Quant à Àosa, c'est une Zygœna dont le Œ a les ailes courtes
et l'abdomen proportionnellement très long. Depuis la base, jusqu’à
l'extrémité de la grosse tache externe qui semble unique et non
pas formée de la réunion de deux macules, c’est un lavis rose
répandu sur presque toute la surface des supérieures, paraissant
un peu fondu, c’est-à-dire n'étant pas nettement défini dans ses
limites et contours. Une partie du bord costal, l'extrémité apicale
et le bord inférieur des ailes supérieures restent seuls non envahis
par la couleur rose et d’un indigo assez pâle. En dessous, l’aspect
de l'aile supérieure uniformément lavée de rose est le même que
l'effet de l’aile inférieure qui est semblablement colorée. Il y a un
trait hyalin partant de la base, sur les ailes inférieures de Xosa.
Ce trait n’a pas été ménagé par le coloriste de la PI. XXII de mon
ouvrage. Chez Syriaca, Ramburi, Gurda et Rosa, V'abdomen est noir,
sans trace d’anneau rouge, de même que chez 7rifolu, Lonicere,
Stæchadis et Filipendulæe dont j'a1 toujours vu l’abdomen noir,
sans ceinture rouge, ni tendance à produire des variétés cn gulata.
La figuration donnée par Herrich-Schaeffer et par Lederer est
excellente et l'identification des Espèces ne fait aucun doute.
Je ne pourrais attribuer le même éloge à la figuration publiée
par Seitz. Cet Auteur donne de Àamburi une détestable figure.
Du reste 1l ne semble pas que ia question relative aux Espèces
Syriaca, Ramburi, Gurda lui ait été connue.
Zygæna Ephialtes, Linné.
Espèce très anciennement connue et remarquablement poly-
morphe; ainsi décrite dans le Tom. I, Pars V, de la 13° édition
(aucta, reformata) de Caroli a Linné Systema Nature, publiée par
les soins de Jo. Frid. Gmelin et imprimée à Leipzig, en 1788 :
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 507
« Ephialtes (*) 36. Sphinx. Zygœna. Cyanea, alis primoribus
punctis sex rubris : posterioribus unico, abdomine cingulo rubro. »
Cette description est suivie de l'observation qui concerne la
variété B : Spinx Coronille. Wien. Schmetterl., p. 45, n° 7 et que
je transcris : « Habitat in Europæ magis australis medicagine,
punctis interdum albis, aut baseos alarum primorum abdominisque
cingulo flavis. Larva pilosa, flavescens : capite, pedibus lineisque
duabus flavis. » (Je crois que le mot : fais est un lapsus-calami
commis par l’Auteur. Il aurait fallu écrire : a/ris.)
Enfin la Bibliographie relative à l'Espèce est citée, telle que Je
la rapporte :
Fabr. Species Insectorum; Hamburgi et Kilonu, 1781 (Dans le
Sp. Insectorum se trouve reproduite (p. 158) la diagnose de Linné,
à laquelle Fabricius a ajouté l'observation suivante : « Variat
punctis albis, baseos tamen semper aut rubra aut flava »).
Wien. Schmetterl., p. 45, n° 6, Sphinx falcate.
V. Scheven, Naturf, 10, t. 2, f. 7.
Fuessli, Ent. Mag., t. 1, f. F.
Bsper pap. 2, t 27, f3.
11 n'est pas question dans cette synonymie de l'ouvrage de Roesel
qui a pourtant connu, avant les autres, l’une des formes de la
Zygœena Ephialtes.
En effet, Roesel a figuré sous les n°* 6 et 7 de la Tab. LVII
(Classis IT Papilionum nocturnorum) dans l'Insecten-Belustigunsg,
la forme d'Ephialtes à 6 taches rouges sur les ailes supérieures et à
ailes inférieures rouges (Pezcedani, Esper), à laquelle Kleemann,
dans la Note imprimée au bas de la page 280, donne le nom
vulgaire de Rothringel; Rothguertel; Guerleltraeger,; ce qui veut
dire : Petit-anneau-rouge; Ceinture-rouge; Porte-centure.
Von Scheven, cité parmi la Bibliographie d'Ephialtes, Linné,
(*) Ephialtes, dans la Fable, est le nom d’un Géant fameux, fils de Neptune
et d’Iphimédie. Les deux frères Ephialtes et Othus sont appelés, par Homère,
les Aloïdes. Fiers de leurs forces, ils entreprirent de détrôner Jupiter; mais ils
furent précipités dans le Tartare.
568 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
par Gmelin, dans Der Naturforscher (Zehntes Stueck, 1777) décrit
(page 95) le Spzinx Ephialtes et en donne une excellente figure,
sous le n° 7 de la Tab. IT; il y a lieu de remarquer la pupillation
carminée qui est indiquée par le coloriste sur les 4 taches blanches
des ailes supérieures de l’Ephialtes représentée. C’est sans doute
d'accord avec la description linnéenne qui a soulevé bien des objec-
tions de la part de von Scheven, Fuessly et Esper. Von Scheven
considère Peucedani comme pouvant être le G' d'Ephialtes, car il
dit : « Das Maennlein unterscheidet sich von dem Sphinx Fili-
pendule bloss durch den rothen Guertel, womit der Leib umgeben
ist. » Von Scheven ajoute d’ailleurs qu'il tient le papillon figuré
par Roesel sous le n° 6 de la Tab. 57, comme le O' de son Æfzialtes.
Ce n’est donc pas d’hier seulement que l’unité spécifique d'Efphialtes
et de Peucedani est reconnue. Mais von Scheven discute la des-
cription linnéenne « alis primoribus punctis sex rubris, posterioribus
unico. » [Il ne trouve pas la tache unique sur les ailes inférieures,
quand il y a 6 taches rouges sur les supérieures.
Gmelin ne mentionne pas Jacobus Christianus Schaeffer qui, dix
ans plus tôt, en 1766, avait figuré sous le n° 1 de la Tab. LXXI, la
Zygæna Peucedani désignée ainsi : « Sphinx alis integris cauda
simplici guinta. Fuenfter Daemmerungsfalter mit ganzen Fluegeln
und eimfachem Schwanze »; le même auteur représente sous les
fig. III et IV de la Tab. CLXV, la Zygœna Efhialtes-Trigonelle,
avec l’abdomen annelé de jaune et $ taches sur les ailes supérieures.
Johann Caspar Fuessly a été cité par Gmelin, aussi bien que von
Scheven, parmi les Auteurs qui s'étaient, à sa connaissance, occupés
d'Ephialtes. Dans Magazin fuer die Licbhaber der Entomologie
(Erster Band, 1778), Fuessly a effectivement figuré admirablement
sous la lettre F de la Tab. 1, la Zygæna Efhialtes ©, à 6 taches
aux ailes supérieures, dont les 2 basilaires rouges et les 4 autres
blanches plus ou moins légèrement pupillées de carmin. De même
que von Scheven, J. C. Fuessly se trouve embarrassé par les termes
de la diagnose linnéenne. Fuessly expose que le Pastor von
Scheven, dont la compétence en Entomologie ne fait de doute pour
personne, dit dans Waturforscher, X, p. 06, que la description de
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 509
Linné paraît concerner le G' d’Efhialtes. Cependant le Œ doit
avoir les ailes inférieures rouges sans taches et Linné dit expres-
sément que les ailes en question doivent être noires avec une tache
blanche (Inferiores nigræ puncto albo). La question est traitée tout
au long par Esper aux pages 148-151 de la 2° Partie. Esper cite
le texte de Linné de la XII° édition du Sys/ema Nature où se
trouve pour la première fois, je crois, imprimée la description
d'Ephialtes.
Je ne puis qu'inviter le Lecteur à se reporter à toute cette dis-
cussion des anciens Auteurs, au sujet des textes linnéens. IT est
très intéressant de se rendre compte d’une part, du trouble qui
existait déjà dans la Nomenclature lépidoptérologique, à la fin
du XVIIT* siècle et, d'autre part, de la peine que prenaient tous
les Auteurs de ce temps-là, pour essayer d’élucider les textes
obscurs.
Je crois, pour ma part, que Linné a décrit un exemplaire de
la Zygena Ephaltes, ayant les taches qui sont ordinairement
blanches, exceptionnellement pointillées d'une forte pigmentation
carminée. On trouve cette forme à Martignv, en Valais et j'en ai
fait figurer un échantillon sous le n° 26 de la PI. IIT de la première
livraison des Ætudes de Lépidoptérologie comparée. Tes figures
publiées par von Scheven et par Fuessly portent la trace de cette
pigmentation carminée, mais à un degré insuffisant pour justiher
la constatation de 6 taches rouges aux ailes supérieures, ainsi que
l’a écrit Linné. Il me semble que très probablement -— mais sans
aucune certitude cependant —— [inné a possédé un exemplaire
extraordinairement rouge, ce qui est fort possible, si l’on considère
les individus de cette forme qu'on rencontre surtout en Valais,
tandis que ni von Scheven, ni Fuüessly, ni Esper n’ont connu la
variété valaisanne d’Epzialtes, à taches carminées aux supérieures
et que Wullschlegel dit provenir de l’accouplement hybride de
Filipendule S et Ephialtes © à taches blanches.
Quoi qu’il en soit, si l’on compare les figures de Zygæna gravées
à la fin du XVIII siècle, à celles qui sont publiées maintenant en
chromolithographie, dans l'ouvrage : Les Macrolépidoptères du
570 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Globe, par Adalbert Seitz, ou bien dans /akresbericht des Wiener
entomologischen Vereines, 1003, par Clemens Dziurzynski, on ne
peut s'empêcher de reconnaître la supériorité considérable des an-
ciens Iconographes sur ces modernes.
Ayant déjà écrit dans le fascicule I des Æ£/udes de Lépidopté-
rologie comparée (mars 1004), aux pages 43-51, une Notice détaillée
sur certaines particularités de Zygœna Ephaltes et Ab. Sophie,
Favre, de Martigny (Valais) dont j'ai publié 3 figures, sous les
n°” 25, 20 et 27 dela Pl IIT, je ne puis quinviter le Pecteuraise
reporter aux pages précitées et Je m’abstiens de répéter ici les
observations que J'ai déjà exposées. Je me bornerai donc à faire
connaitre les formes françaises d'Ephialtes et à établir la nomen-
clature des variétés de l’Espèce, telles qu’elles me paraissent résulter
de nos connaissances actuelles.
I — Æphialtes, Linné.
Ailes d’un noir bleuâtre; 6 taches rouges aux supérieures ;
1 tache blanche aux inférieures ; abdomen annelé de rouge
carmin.
Valais ?
14 { Scheveni, Obthr.
Ephialtes, von Scheven (Naturforscher, 10" Stueck, 1777;
Tab. 2, fig. 7, p. 05, 06). — Fuessly (Magazin, 1778; Tab. 1,
fig. F).
Diffère d’'Epaialtes, Linné, parce que les ailes supérieures,
au lieu d’avoir 6 taches rouges, ont deux taches rouge
carmin à la base, et au delà 4 taches blanches plus ou moins
légèrement pupillées de rouge carmin. Schkevent est la tran-
sition entre Æphialtes, Linné et Æsperi, Obthr.
10 ( Æsperi, Obthr.
E phialtes, Esper (Tom. II, Tab. XVIII, fig. 3).
Diffère d’'E phialtes, Linné et de Schkevem, Obthr., parce
que les 4 taches externes des ailes supérieures sont d’un
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 57I
blanc pur, sans pupillation carminée; les 2 taches basales
et l’anneau abdominal restant d’un rouge carminé.
Pont-du-Gard; Autriche.
1 Sophie, Favre (Faune Macrolépid. Valais, 1800, p. 75) ; Obthr.
(Lépidoptér. comparée, Liv. 1, PI. III, fig. 25, 26, 27).
Aïles supérieures avec les 2 taches basilaires d’un rouge
carmin, les 4 autres blanches ou pupillées de rouge (hybride
de Fiipendule Set Fphialtes (Espers, Obthr.) © secun-
dum Wullschlegel; ailes imférieures avec 2 taches blanches
au lieu d’une; abdomen ceinturé de rouge carmin.
Martigny (Valais).
12( Medusa, Pallas (*).
Falcatæe, Huebner (fig. :33).
Diffère de Esperi, parce qu'au lieu de 4 taches blanches
externes aux ailes supérieures, 1l n’en reste que 3.
On trouve au Moulinet (Alpes-Maritimes) une très Jolie
variété de Medusa, chez laquelle la tache basilaire inférieure
(*) Voici le texte de la description de Pallas, telle qu’elle est imprimée dans
l'Appendix — Descripliones fugitive animalium alque plantarum, annis 1768
et 1769 observatorum (Vol. I; p. 733). Edition des Voyages de Pallas, en diffé-
rentes provinces de l'Empire de Russie et dans l'Asie septentrionale, traduite de
Pallemand, par Gauthier de la Peyronie, Commis des Affaires Etrangères; Paris,
1788, chez Lagrange. « 67. Sphinx Medusa. Magnitudo et facies SH4. Phegce,
tota atra-cærulea, nitidissima. Abdomen cingulo carmineo; alæ concolores, pri-
mariæ maculis 2 orbiculatis et puncto disci albis; ocello ad basin rubro, intra
circulum album, maculaque oblonga in crassiore margine rubra. Secundariæ
puncto unico albo, sed exteriore margine griseæ. Habitat in Af*amanta cer-
varia. » — (Afhamanta est une plante de la famille des Ombellifères). —
A la page 310; 1769, 18 juin, ruisseau de Zarbaï et Markofka, Pallas parle
de Medusa, dans les termes suivants : « Nous traversimes des landes élevées,
sèches et arides: je n’y trouvai d’autres plantes que le mélilot jaune et la sca-
bieuse d’un jaune pâle (Scabiosa ochroleuca) dont les feuilles larges et fendues
étaient remarquables. Près de Markofka, on entre dans des bas-fonds variés et
des forêts qui abondent en plantes. J'y trouvai le faux turbith des montagnes
(Cervaria alba) qui avait plus de cinq pieds de hauteur; il a souvent une double
couronne de fleurs. Elles étaient entourées d’insectes; les plus remarquables
étaient le papillon Apollon et le sphinx Méduse (Spiërx Medusa); Appendix
HONG 7)...
07e LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
est d’un blanc pur, alors que la tache basilaire supérieure
reste d’un carmin très vif. Chez les individus bien frais,
l'extrémité des antennes est blanche.
Alpes-Maritimes; Pyrénées-Orientales, dans la vallée du
Cady, au-dessus du village de Casteil.
1e Æmiln, Favre (Faune Macrolépid. Valais, 1800, p. 75).
Diffère de Medusa, parce qu'il y a 2 taches blanches au
heu d’une sur les ailes inférieures.
Martigny (Valais).
1/ falcate, Obthr. (Etudes d'Entomol., XX, pl. 7, fig. 113). —
nec Huebner.
Diffère de Medusa, parce que les 3 taches blanches des
ailes supérieures sont fortement pigmentées de rouge carmin.
Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales).
18 Wadlschlegeli, Obthr. (Lépidopt. compar., Liv. III, PI XXIX,
fig. 176).
Entièrement d’un bleu noir; a perdu toutes les taches aux
4 ailes, sauf les 2 taches médianes blanches des supérieures
qui sont de taille réduite.
Valais.
14 Coronille, Esper (Tom. Il, Tab. XXXIII, fig. 2).
Les taches de la base et l'anneau abdominal sont de couleur
Jaune, au lieu d’être d’un rouge carmin. Les ailes supérieures
ont, en outre des 2 taches basilaires jaunes, 4 taches blanches.
Autriche.
17 Tngonelle, Esper (Tom. II, Tab. XX XIII, fig. 3 et 4).
Diffère de Coromlle, parce qu'aux ailes supérieures il y a
3 taches blanches au lieu de 4.
Autriche; Piémont.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 573
[I —— Transition entre Zphialtes, dont le fond des ailes inférieures
est d'un noir bleu, et Peucedani, dont le fond des ailes infé-
rieures est rouge.
24 Metzgeri, Hirschke (XIV. /ahresb. d. Wien. ent. Ver. 1903,
Het nr?)
Les taches des ailes supérieures sont au nombre de 5;
les 2 taches basilaires sont carminées; les 3 taches externes
ont le fond blanc plus ou moins fortement pigmenté de
carmin; les ailes inférieures ont la base lavée de rose et une
tache ronde de couleur rose carminée, vers l’angle apical;
l'abdomen est annelé de carminé.
Haute-Autriche, Moyenne et Basse Carinthie; d'après
Hanns Hirschke, K. K. Hauptmann a. D. (loc. cit, p. 57). Je
possède un d' de Gallicie (ex coll. Kuwert).
21 Aurantiaca, Hirschke (XIV. /akresb. d. Wien. ent. V’er., 1003,
BARRE SE):
Les ailes supérieures scnt d’un bleu noir, avec les 2 taches
basilaires rose carmin et les 3 (ou 4) taches externes blanches
pigmentées de rose; les ailes inférieures sont largement
bordées d’indigo noir, avec un lavis rosé s'étendant depuis la
base et rayonnant sur la partie antérieure de la surface des
ailes. L’abdomen est annelé de rose.
Hochschwab-Gebiete, selon Hanns Hirschke.
Je possède une Q de la coll. Kuwert, de Berlin, sans indi-
cation de localité.
III. — Le fond des ailes inférieures est rouge, orange, jaune, ou
même partiellement blanchâtre. Tous les passages, les plus
insensibles existent du blanc jaunâtre au rouge, par le jaune,
l'orange, le blanc pigmenté de rouge ou d'orange et le rouge
vermillon.
3m Æacus, Esper (Tom. Il, Tab. XXXIIL, fig. 1).
Les taches basilaires sont jaunes, les taches externes sont
blanches ou jaunes et au nombre de 3; les ailes inférieures
574 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
sont jaunes, avec une tache ronde blanchâtre, vers l'angle
apical; l'anneau abdominal est jaune.
Environs de Vienne.
3* Zcterica, Lederer; Dziurzynski (XIV. /akresb. d. Wien. ent.
Ver, 1903, Taf. Il, fig. 10); Æacus, Huebner (Lésd., MW;
Sphinges, l; fig. 18).
Les taches basilaires sont jaunes; les taches externes sont
blanchâtres (Huebner) ou jaunes (Dziurzynski), mais au
nombre de 4 et non de 3, comme chez Æacus, Esper; les ailes
inférieures sont Jaunes, largement bordées de noir indigo,
avec une simple éclaircie un peu plus pâle vers l’angle apical,
au lieu d’une tache arrondie blanche, comme chez Æacus,
Esper. L'anneau abdominal est jaune.
Environs de Vienne.
30 Adalbert, Obthr. (/c/erica, Adalbert Seitz;, Zygœna, Pi. 6 b).
Il est aisé, en comparant les 2 figures d’/cterica, selon
Datursynski (loc. cit.) et selon Adalbert Seitz, de constater
qu'il n'y a aucune similitude entre l’/c{erica d'après l’un et
l’/cterica d’après l’autre.
L’Zcterica, selon Seitz, est une variété à ailes orangées dont
les ailes inférieures sont très peu largement bordées de noir
indigo, tandis que cette bordure est très large dans l'/c{erica
selon Dziurzynski, qui a les ailes jaunes.
Tcterica, selon Seitz, a l'abdomen annelé de rouge, mais
l'anneau abdominal d’/c/erica, selon Dziurzynski, est jaune.
Du reste les 2 Zczerica existent dans la Nature; ma collection
contient un certain nombre d'exemplaires de l’une et de l’autre
et ces exemplaires sont respectivement conformes aux ñgures
grossières données par les deux Auteurs, mais reconnaissables
toutefois.
J'ai appelé: Adalberti Y'Icterica figurée par Adalbert Seitz,
dans la colonne à de la PI. 6 de Zygæna. Il est fort regret-
table que M. Seitz ait travaillé à la légère et sans prendre la
peine d'étudier attentivement les textes et les figures déjà
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 575
— _—
publiés. Ce qu'il donne comme Æacus, dans la colonne a de
la PL 6 de Zygzæna, avec 6 taches aux supérieures et des
traces de coloration rouge, n'est nullement la vraie Æacus
qui n’a aucun vestige de rougeûtre et qui est nettement jaune,
avec 5 taches. Il suffit de se reporter à l'ouvrage d'Esper,
créateur d'Æacus, pour se rendre compte de l'erreur. L’Ay-
rantiaca figurée par le même Seitz, dans la colonne ? de la
PL 6 de Zygœna, n’est pas davantage l’Awranriaca, de
Hirschke. Là encore, il n'y a qu’à ouvrir le /akresbericht des
Wiener entomologischen V'ereines, n XIV, année 1003, et de
regarder la figure 11 de la Taf. II, pour se rendre compte
que l’Awrantiaca, Hirschke, avec 5 taches, n'a aucune SIMI-
litude avec l'Awrantiaca, selon Seitz, qui a 6 taches et dont
les ailes inférieures sont rouges avec une bordure noirâtre
peu large, tandis que dans lAwrantiaca, Hirschke, les ailes
inférieures très largement bordées de noir indigo, présentent
seulement un lavis de rose orangé répandu sur la surface des
ailes, rapprochée de la base. Si les Auteurs modernes qui
doivent tendre à une analyse toujours plus exacte, et qui
publient des ouvrages populaires, accréditent les erreurs avec
un tel sans-gêne et une pareille profusion, que deviendra
la Nomenclature? Nul n'est obligé d'écrire quoi que ce soit
à propos des Sciences, mais si quelqu'un entreprend de coo-
pérer à l'instruction de ses contemporains, il semble que le
premier de ses devoirs est de prendre la peine de recourir
aux sources. Dans la circonstance, c'était facile. Les fautes
sont inévitables, je le sais, et quiconque prend un rôle actif
de quelque nature que ce soit, ne tarde pas à vérifier à ses
dépens la vérité de la sentence : Æyrare kumanum est. Hélas !
les hommes sont sujets à l'erreur et ils ne peuvent éviter
absolument de la commettre, mais au moins qu'ils s'efforcent,
par tous les moyens possibles, de réduire au minimum les
chances d'erreur auxquelles 1ls sont exposés.
Donc, M. Adalbert Seitz a accumulé les fautes et les
Entomologistes devaient en être informés, ahn de leur per-
570 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
mettre de les éviter eux-mêmes dans la détermination de
leurs Zygæna.
La forme A dalberti se trouve à Digne, à Meran, à Wachau;
les exemplaires des Basses-Alpes sont bien pareils à ceux
d'Autriche.
32 pallens, Obthr.
Les ailes inférieures sont nettement rouges; aux supé-
rieures il y a 5 taches; les 2 de la base sont roses; les
3 autres sont blanches, quelquefois légèrement pigmentées de
rose. L’anneau abdominal est rouge.
Digne; Pont-du-Gard; Florac; Vienne; Wachau.
34 pallida, Obthr.
Diffère de pallens, parce qu’il y a aux supérieures 4 taches
blanches ou blanc faiblement rosé, au lieu de 3. L’anneau
abdominal est rouge.
Wachau; Digne.
37 Athamante, Esper (Tom. II, Tab. XXXVII fig. 6).
Toutes les 5 taches des ailes supérieures sont rouges, ainsi
que les ailes inférieures; la bordure indigo de celles-ci est
régulière et peu élargie; l'anneau abdominal est rouge.
France, dans les parties calcaires du centre et du midi;
Allemagne; Bohême.
35 Peucedant, Esper (Tom: II, Tab. XXV/h6°).
Toutes les 6 taches des ailes supérieures sont franchement
rouges, ainsi que les ailes inférieures qui sont d'un rouge
assez vif avec une bordure indigo, comme chez A/kamante ;
l'anneau abdominal est rouge. Esper a figuré la prétendue
chenille de Peucedani sur une plante de la famille des Om-
bellifères, d’après le dire de Pallas, le célèbre voyageur russe,
qui raconte avoir trouvé la chenille en question sur le Peuce-
danum, dans les steppes de la Russie méridionale.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 577
Voici le seul renseignement que j'ai trouvé à l'égard d’'Epialtes
(mais non de la forme Peucedani), dans les Voyages de Pallas
(Tome I, p. 270) : « 1769, 10 mai, Sizran; .. Ces plantes étaient
pleines d'insectes, et ils se rassemblent le soir sur les boutons des
fleurs de la Centaurée double. Les plus remarquables sont la Sau-
terelle Nymphe à taches doubles et le papillon la Phrynée. Plu-
sieurs grandes places étaient couvertes de queue-de-pourceaux
(peucedanum germanicum) sur laquelle je trouvai un grand nombre
de petites chenilles qui produisent le Spinx incube (Sphinx
Eplaltes). »
Je ne crois pas que chez nous la larve de la Zygæna Ephialtes
vive sur une Ombellifère, cette chenille semble vouloir manger
plutôt les plantes de la fanulle des Papilionacées et notamment
la Coronilla vania, à fleurs assez grandes, panachées de blanc, de
violet et de rose, formant des sortes d'ombelles sur des pédoncules
qui dépassent les feuilles. La Corolla varia se trouve dans les
bois et les coteaux pierreux, surtout calcaires, de presque toute la
France, de l'Europe centrale et méridionale, de PAsie occidentale
jusqu’à la Perse, d’après l'Abbé Coste.
Du reste, la chenille figurée par Esper ne doit pas être celle
d'Ephialtes, elle est blanche et ne ressemble guère à celle qui est
figurée comme étant celle de Peucedani, dans la Collection [cono-
graphique des Chenilles par Boisduval, Rambur et A. Graslin. La
chenille d'Ephialtes-Peucedani est entièrement d’un jaune pâle
tirant plus ou moins sur le vert, avec une raie longitudinale noire
et deux rangées latérales de taches noires et la tête noire, comme
la décrit du reste Gmelin, sauf qu'il faut lire noires, au lieu de
jaunes, ainsi que je l'ai fait observer plus haut.
En France, d’après ce que je connais, la Zygœæna Ephialtes a été
rencontrée dans les localités suivantes et avec les formes ci-dessous
désignées :
Environs de Digne : Peucedant, Pallida, Pallens, Medusa, À dal-
berti, Scheveni.
Alpes-Maritimes (Moulinet) : Medusa et var. à tache inférieure
basilaire blanche.
37
578 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Isère (Vizille) : A/zamante.
Charente-[nférieure (Dompierre-sur-Mer) : A/kamante.
P yrénées-Orientales (Vernet-les-Bains) : Hedusa, Falcate.
Gard (Pont-du-Gard) : Pallens, Peucedant, Esper:.
Allier (Vichy) : Peucedan.
Lozère (Florac) : A/4amanitæe, Peucedani, Pallens.
Haute-Savoie (Val du Fier) : Peucedant.
Seine-et-Oise (Lardy) : Peucedani Q trouvée accouplée avec
Filipendule S, Pailens.
Zygæna Transalpina, Esper.
Je prie le Lecteur de vouloir bien se reporter à l’article intitulé :
Observations sur la Zygæena Transalpina, Esper, que J'ai fait
insérer dans les Annales Soc. ent. France, 1907.
Dans ce travail, j'ai établi qu'il y avait deux races distinctes
de la Zransalpina, la race italienne généralement caractérisée par
l'absence de lavis rougeâtre, ou Webelstreif, sur le dessous des
ailes supérieures, et la race française chez laquelle, au contraire, le
dessous des ailes supérieures est largement lavé de rouge.
Précédemment, dans le Bulletin Soc. ent. France, 1808, j'avais
distingué (p. 22 et 23) la forme transitionnelle des Alpes-Mari-
times, sous le nom de #aritima.
Cette année 1910, le comte Emilio Turati, l’'éminent entomo-
logiste milanais, a publié sous le titre: La Zygena Transalpina,
Esper, e Le sue forme italiane, un travail de 31 pages paraissant
très complet et concluant à une analyse de 30 formes italiennes,
toutes pourvues d'une désignation.
Sans doute le comte Turati publiera une Iconographie des
formes italiennes de la Zygæna Transalpina qui achèvera de
donner à son étude l'autorité que lui vaut déjà la compétence et
la riche documentation de son auteur.
En ce qui me concerne, fidèle à ma doctrine, qui est d'éclairer
toute description par une figure, après avoir décrit dans le Bulletin
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 579
(1898) et dans les Annales de la Société entomologique de France
(1907), certaines formes françaises de la Zygæna Transalpina, j'ai
consacré la PI. XXX des Æfudes de Lépidoptérologie comparée à
la figuration des diverses races et variétés françaises de la Zygæna
en question. L'explication des figures de la PI. XXX est donnée
sur la référence (p. 414 et 415) du Vol. IIL.
J'ai, pour le moment, peu de chose à ajouter à ce que le comte
Turati, pour les races italiennes, et moi-même, pour les races fran-
çaises, nous avons publié jusqu’à ce jour sur la Zygœna Transalpina.
Je dois cependant rectifier une erreur que J'ai commise en attri-
buant à S/æchadis, l'Ab. Boisduvali, provenant, je crois, de feu
Achille Costa, de Naples, et que j'ai fait figurer sous le n° 111 de
la PI VII de la XX® livraison des Ætudes d'Entomologie. Cette
Ab. Borsduvali doit être référée à 7 ransalpina et non à S/æchadis.
Je ne connaissais pas, en mai 1806, l’histoire de la Zygæna
Transalpina, comme J'ai appris à la connaître plus tard en réu-
nissant près de 3,000 exemplaires non seulement français, mais
aussi italiens de cette Espèce. MM. Zickert et Fabresse m'ont
notamment bien documenté sur la forme jaune Borsduvali de
Transalpina et jai pu constater une fois de plus combien il était
facile de se tromper, lorsqu'on dissertait sur une documentation
insufhsante. J'ai donc fait une faute et J'accomplis le plus élémen-
taire des devoirs en faisant l’aveu pur et simple de mon erreur.
À propos du nom avec lequel il convient de désigner la forme
cisalpine (diesseits der Alpen) de la Zygæna Transalpina, je crois
devoir donner les indications suivantes résultant de l'étude des
textes et des figures publiés par les anciens Auteurs.
Il y a longtemps, en effet, qu’on a remarqué une Espèce différente
de Flipendulæe, quoique lui ressemblant beaucoup. En 1770, Esper
a figuré la forme de Vérone, en Italie, sous la lettre f de la
Tab. XVI du Tome IL D'abord Esper avait considéré cette
Zygæna comme une variété de Fiipendulæe,; mais, à la page 106,
cet auteur la distingua par le nom de 7 7ansalpina, qui est le plus
ancien, et qui désigne l’Espèce sans contestation possible. Il s’agit
donc seulement des noms que doivent porter les formes géogra-
580 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
phiques principales. Il convient d'observer que si quelques auteurs
pressentaient l'existence de plusieurs Espèces distinctes de Zygæna
ressemblant à Fipendule, 1 restait cependant une hésitation et un
trouble chez certains de nos prédécesseurs. Plusieurs d'entre eux
continuaient à confondre Æi/1pendule et Transalpina, dont ils ne
percevaient pas nettement les caractères distinctifs. Ils restaient
donc irrésolus, tout en manifestant un sentiment qui indiquait d'une
façon très intéressante, la recherche à laquelle ils se livraient, sans
avoir pu obtenir encore pour eux-mêmes la satisfaction désirée.
C'est ainsi que très probablement, dans le Magasin, publié en 1778,
Fuessly, sous la fig. 3 de la Tab. I, représente la forme suisse de
Transalpina sur laquelle, à la page 126, il s'exprime dans les
termes suivants : « N° 3; noch kleiner, wird auf den Bergen
angetroffen. Ist auf den Oberfluegeln goldgruen schimmernd,
heller als die uebrigen, mit 6 groessern, eckichtern, naeher beysam-
men stehenden Flecken. Die Unterfluegel haben einen sehr schmalen
Saum. Die rothe Farbe sehr hell. Diese 3 Arten haben Spindel-
foermige vorne zugespizte (s2c) Fuehhoerner ».
A la page 130, Fuessly dit que le « Sechsfleckigter Steinbrechs-
chwacrmer der bergichten Gegenden » est le Sph. quarta, Schaeffer,
Icon, Tab. 69; fig. 4 ». Je déclare que je trouve absolument impos-
sible de discerner si la figure pubhée par Schaeffer représente
Transalpina où Filipendule. Mais le nom guarta, auquel Fuessly
ne substitue aucun autre nom, n’est en somme qu'un numéro d'ordre
et ne peut pas primer le nom de 7ransalpina donné par Esper,
en 1770. Cependant ce nom de 7 7ansalpina qui reste pour l'Espèce
désigne la race italienne sans Nebelitreif sur le dessous des ailes
supérieures. Puisqu'il existe une race avec Vebelstreif, 11 y a lieu
de la distinguer par un autre nom. D'ailleurs, ce sont plusieurs
races avec le Vebelstreif, et non pas une seule, qui se rencontrent
chez la cisalpine 7 7ansalpina.
Huebner a donné le nom de Loi à la 7 ransalpina d'Augsbourg.
Il a publié la figure de la chenille sous la lettre G de la Taf. IT
(II Theil) de Beitraege zur Geschichte der Schmetterlinge (1700);
la notice est imprimée aux pages 30, 40 et 41.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 581
Sous prétexte que Lot, dans Sys/ematisches Verseichniss der
Schmetterlinge der Wienergegend (1776), pourrait bien ne pas être
spécifiquement la même Zygena que Zransalpina, Borkausen
inventa le nouveau nom d’'As/ragali dans Rheinisches Magasin zur
Erweiterung der Naturkunde (1703).
Je crois devoir donner la reproduction du texte intégral écrit par
Borkausen. Cet auteur connaissait le nom de Zo/i, Huebner, qui
prime dès lors évidemment celui d’As/ragali; 11 considère le n° 2
de la Tab. I du WMagazin de Fuessly, ct non le n° 3, comme repré-
sentant son espèce As/ragali. Pourtant, suivant Fuessly, le n° 2
serait Filipendule, et c'est le n° 3 qui est l'espèce différente de
Filipendule, c'est-à-dire Transalpina de Suisse. On voit combien
toutes ces origines sont embrouillées, erronées et obscures. Quoi
qu'il en soit, voici le texte de Borkausen :
«€ 12.) Sphinx Astragali; alis anticis nigro cyaneis : maculis sex
miniaceis; posticis rubris margine lato sinuato migro cyaneo;
antennarum apicibus albis; abdomine immaculato.
Fuessly, Magaz. I. Th. IL St Tab. 1; fig. 2.
Élübners Bévte 20 2 00h = lañtihe(G S%30 Wo dieser
Schwärmer unter dem Nahmen Sp%. Loti nach allen Ständen
beschrieben und seine Raupe abgebrldet ist.
Hierher gehôrt die Sphinx Transalpina Esperi. Es finden sich
nemlich Stücke, welche mehr grünlich als schwarzblau sind, und
bey diesen sieht man die schwärzliche Einfassung der rothen
Flecken deutlich, welche bey den schwarzblauen nicht sichtbar 1st.
Von der Spk. Filipendulæ unterscheidet sich dieser Schwärmer 1.)
durch die mennigrothen Flecken, welche, wie bei Spk. Peucedani,
leicht verschiessen und manchmal ganz weisslich werden; 2.) durch
den eigenen Schnitt und den breiten Saum der Hinterflügel, als
woriner der Spk. Peucedan: gleichkommt; 3.) durch die weissen
Fühlhornspitzen. Von Sp. Peucedani unterscheidet er sich 1.)
durch den Mangel des rothen Rings, 2.) durch den nicht parallelen
Stand des zweiten und dritten Fleckenpaares, das dritte steht in
viel schregerer Richtung, als das zweite,
582 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Ich besitze eine Varietät dieses Schwärmers, bey welchem alle
sechs Flecken zusammenfliessen.
Die Raupe dieses Schwärmers fand ich im May an As#ragalus
glycyphyllos (welche Pflanze im Oestreichischen Leckritzwicke
genennt wird, daher man den Schwärmer Leckritzwickenschwärmer
nennen kôünnte.) Sie kam in ihrem Habitus der Raupe der Sp.
Filipendule. Sie war grünlich und in jeder war ein breiter gelber
Streif, über welchem eine Reihe dreyeckigter schwarzer Flecken
stand. Ueber den Rücken lief eine schwärzliche ununterbrochene
Linie. Die Luftlôcher waren schwarz. Die Wärschen des Kôrpers,
auf welchem die Haare stehen, hatten die Farbe des Grundes, auf
welchem sie standen. Das Gespinnste, das sie sich bei der Verwan-
delung fertigte, war weisslichgelb, und wie das Gespinnste der
Filipendule-Raupe gestaltet. Die Puppe war braun, bis auf den
Hinterleib, welcher weisslich-grün und schwarz gefleckt war.
Herrn Hübners Beschreibung der Raupe stimmt mit dieser
überein, und beweiset also, dass dieser Schwärmer keine Varietät
von Spk. Filipendule, sondern eine besondere Art ist.
Herr Hübner glaubt in ihm die Spk. Loti des wiener Verzeich-
nisses zu finden; allein hier irrt er allen anderen Zeugnissen nach.
Herr Schrank hat in Fuesslys neuem Magazin die wahre Spk. Loti,
welche auch Herr Gerning unter diesem Nahmen aus Wien erhielt,
beschrieben, und auch Herr Fabrizius bezeuget dadurch, dass er
die Sp. Loti Vienn. bey seiner Zygæn. Fulvia allegirt, dass diese
Sph. Loti ein fünffleckigter Schwärmer sey, ob er gleich drey
verschiedene Sphinxen nemlich die Loti, Lonicere und Ackillee
mit eimander verwechselt.
Sph. Astragali habe ich diesen Schwärmer von der Nahrungs-
pflanze, dem As#ragalus glycyphylos genennt. Den Nahmen Sp.
Transalpina konnte ich nicht beybehalten, weil er auch diesseits
der Alpen, in Deutschland und selbst in unserer Gegend sich findet.
Borkausen établit donc un nom nouveau pour la Zygæna Tran-
salpina à cause de la différence de provenance; mais il ne dit rien
du caractère des ailes supérieures en dessous, c'est-à-dire du lavis
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 583
rouge qui existe dans la forme suisse et allemande et qui fait défaut
dans la forme italienne.
Esper a figuré avec le nom de Zo, la 7'ransalpina viennoise,
sous le n° 1 de la Taf. XXXV.
Du côté d'Esper encore, ce nom de Loti a donc pour lui lindis-
cutable priorité sur Asragali.
Je reconnais cependant que plus tard le nom de Zo# fut appliqué
par Huebner à deux unités spécifiques très distinctes, dans ses
Illustrations. Evidemment Zofi à 6 taches, n° 32, de Huebner, n'est
pas la même Espèce que Loti à 5 taches, n° 82, du même Huebner.
De là découle une nouvelle source de confusion, mais postérieure
à la Notice écrite par Borkausen en 1703. Cependant, pour ce qui
nous concerne, à l'époque présente, la confusion commise par
Huebner, dans son Iconographie, n'est pas indifférente. Définiti-
vement, ce sont, à mon sens, les figures 54 et 55 données par
Herrich-Schaeffer, avec le nom d'Æ2ppocrepidis, qui fixent la ques-
tion, en figurant excellemment la Zygæna en cause. La pointe des
antennes est blanche; le dessin et la couleur sont exacts et, en
dessous (fig. 55), le Mebelstreif caractéristique de la race non
italienne est parfaitement représenté. Les fig. 52 et 53, avec le
même nom d'Æippocrepidis, sont également très bien exécutées;
mais il y a un anneau abdominal rouge qui n'existe pas ordinai-
rement chez l'Hippocrepidis d'Allemagne, des Alpes et des Pyré-
nées. En outre, il reste la race spéciale des plaines calcaires de
l'Ouest de la France et d’autres races encore, ainsi que je l'ai fait
connaître dans les Annales de la Société entom. de France, en 1007.
Zygæna Lavandulæ, Esper.
Espèce bien connue et qu'il est difficile de confondre avec aucune
autre.
Il y a deux formes : 1° Lavandule, figurée par Esper, sous la
figure 2 de la Tab. XXXIV du Tom. IT; 2° Consobrima, Germar.
Herrich-Schaeffer a représenté le dessous des ailes de Lavandule
584. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
sous le n° 42 de la Tab. $ de Zygænides Europ., et de Consobrina
sous le n° 43. Moi-même, dans la XX" livraison des Æ/udes d'En-
tomologie, j'a donné, sous le n° 108 de la PI. 7, la figure du dessus
des ailes de Consobrina, et sous le n° 100, de Zavandule.
La Zygæna Consobrina, en dessus aussi bien qu'en dessous,
montre la couleur rouge plus développée sur ses ailes inférieures,
comparativement à Lavandule, chez qui la teinte indigo envahit
l'espace que la couleur carminée recouvre dans Consobrina.
Lavandule et Consobrina se distinguent des autres Espèces de
Zygæna par leur collier d’un blanc pur. Les ailes supérieures sont
frangées de blanc.
M. Emmanuel Abeille, dans une Æ7ude sur les Zygènes des
Environs de Marseille et de la Sainte-Baume, consacre une inté-
ressante notice à la Zygœna Lavandule. I] passe en revue les
diverses phases de la vie évolutive de l’Espèce et donne sur le
parasitisme qui détruit un si grand nombre d'individus, des rensei-
seignements très instructifs Quand on pense que les Zygæna
comptent, selon les idées du Docteur Adalbert Seitz, parmi « les
insectes bénéficiant d’une protection interne! » Que serait-ce donc
si cette faveur insigne leur avait été refusée?
M. Abeille nous apprend qu'il a observé aux dépens de la chenille
de la Zygœna Lavandule 3 séries de parasites :
1° En Janvier, février et mars, plusieurs espèces de mouches
Tachinaires, dont es larves dévorent peu à peu l'intérieur de la
chenille dans laquelle elles se développent. Les larves de Tachi-
naires sortent du corps de leur victime, dont elles percent la peau,
et laissent la pauvre chenille entièrement vidée et cependant con-
servant encore la vie pendant quelques jours; les larves des
mouches se chrysalident, pour éclore 20 à 30 jours plus tard.
2° En mars et avril, ce sont encore des Tachinaires, mais ren-
forcées par des Hyménoptères de la famille des Chélonides
appartenant au genre RÀogas. Les Rogas vivent, à raison d'une
larve par chenille, dans le corps de celle-ci. Lorsque la larve de
kRogas a atteint son entier développement, la chemille meurt et se
dessèche, formant une momie d’où sort, un peu plus tard, la
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 585
mouche Rogas, en brisant la partie inférieure de la momie en
question.
3° En avril et mai, paraissent de nouveaux parasites, sous forme
d'Hyménoptères du genre Wicrogaster. Ceux-ci vivent en grand
nombre, dans l’intérieur d’une même chenille dont ils sortent, en
entourant leur victime de petits cocons blancs reliés entre eux par
une fine mousse de soie blanche. Quelles hécatombes et quelles
luttes douloureuses! Toujours des victimes et toujours des bour-
reaux, inconscients les uns et les autres, 1l est vrai. Toutefois, sans
détruire l’Espèce, les parasites réduisent singulièrement le nombre
des individus qui la composent et maintiennent dans des limites
sensiblement égales la proportion des échantillons favorisés qui,
après avoir échappé à toutes les causes de destruction, parviennent
à assurer la reproduction de leur Espèce.
J'ai fait figurer sous le n° 162 de la PL XXVIII du Vol. IIT de
la Lépidoptérologie comparée, YAb. Step, à taches jaunes, de
Lavandule. C'est sans doute l’'exemplaire dont parle M. Abeille,
à la page 3 de son Æ/ude (1900), et qu'il dit avoir capturé, il y a
trois ans, c’est-à-dire en 1906, au dessus du champ de la Vigne,
près de la vallée de Saint-Pons.
La Zygæna Lavandulæe est une des plus jolies Espèces du
Genre. J'ai pris assez abondamment la forme Consobrina à Hyères,
en avril 1866. Je possède Consobrina de Digne; Montpellier; Col
de Bartagne; Saint-Pons, près Gémenos; environs de Marseille;
Tijola (Almeria), Observatoire près Nice et La Turbie où se ren-
contrent des spécimens de transition entre Consobrina et Lavan-
dule.
Quant à la forme Lavandulæ pure, ma collection contient de
nombreux échantillons de Bordighera, Castillon, La Turbie, envi-
rons de Nice, Menton, Bonson, Escarène, Levens, Cannes, Mont
Pacanaglia, dans les Alpes-Maritimes; Barcelone, Grenade, Tijola
(Almeria), Vittoria et Mont Gorbea, en Espagne; Collioure et
Vernet-les-Bains, dans les Pyrénées-Orientales.
Le dessus des ailes supérieures a le reflet plus bleu chez les
exemplaires de Provence et plus vert chez ceux de Catalogne. Sans
580 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
doute cette particularité ajoutera quelque jour un nom à la nomen-
clature entomologique. Pour moi, je ne juge pas une désignation
spéciale assez justifiée. L'Espèce varie pour la dimension des
taches rouges aux ailes supérieures. J'ai capturé un © chez qui les
taches rouges sont réduites à de très petits points; j'en ai pris
d’autres, au contraire, qui sont remarquables par la dimension de
leurs macules rouges.
La chenille vit sur le Dorycnium suffruticosum, plante de la
famille des Papilionacées. Cette chenille est facile à distinguer de
ses congénères, étant d’un blanc grisâtre, traversée par deux lignes
latérales épaisses, brunes, qui laissent paraître sur le milieu du dos
un espace longitudinal blanchâtre de la couleur du fond. Le
papillon éclôt en avril et je l'ai vu voler jusqu’en juin.
M. Harold Powell, chassant pour moi en 1906, a capturé, le
13 juin, entre le Laghet et les moulins Gaetti, une très belle Aber-
ration de Zavandule que j'appelle Powelli. Entre les taches rouges,
et tout autour desdites taches, extérieurement et intérieurement, le
liséré noir mat qui entoure normalement les taches rouges des añles
supérieures s’est développé de façon à occuper tout le fond des
ailes. De plus, la tache rouge basilaire supérieure conflue, par un
long trait costal rouge, avec la première tache rouge médiane. C'est
exactement pour Lavandulæ ce qu'est l'Ab. Gueneei pour Rhada-
manthus.
Zygæna Rhadamanthus, Esper.
Grossièrement figurée par Esper, sous les figures 1 et 2 de la
Tab. XL du Tom. Il, d'après des exemplaires appartenant à
Gerning qui les avait reçus des environs de Nîmes, en Languedoc.
Le G' a le dessus des ailes Xellolaenzendes Gruen, c'est-à-dire,
en mot à mot : clairement-brillant vert, et la © dunkles Blau, ou
d'un bleu-obscur, dit Esper.
La Zygœna Rhadamanthus est une de nos plus jolies Espèces,
elle porte le nom du frère de Minos. Tous deux, Rhadamanthe et
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 587
Minos, étaient fils de Jupiter-Asterius, roi de Crète, et d'Europe.
Tous deux furent réputés pour leur amour de la Justice et de
l'équité. Aussi furent-ils mis par les Poètes au nombre des juges
des Enfers.
Rhadamanthe jugeait les peuples d'Asie et d'Afrique. Les
Anciens, lorsqu'ils voulaient parler d’un jugement Juste, quoique
sévère, ne l’appelaient-ils pas un jugement de Rhadamanthe? Voilà
donc le nom de ce maïître-juge, transmis à la postérité la plus
reculée, sur les ailes d’une Zygæna!
J'ai donné une figuration assez abondante des variations de
Rhadamanthus, sous les n° 181 à 188 de la PI. XXIX du Vol. III
de la Lépidoptérologie comparée, et j'avais déjà représenté sous le
n° 107 de la PI. 7 de la XX° livraison des Æ/udes d'Entomologie,
la forme A/garbiensis, Christ, du Portugal, que j'avais appelée
fautivement A/garvensis.
Je considère comme pouvant être le type normal de lEspèce
dans les Alpes-Maritimes, le n° 188, de Vence, aux ailes d’un bleu
assez foncé, luisant, paraissant intermédiaire entre Lellglaensendes
Gruen et dunkles Blau de la description d’'Esper, mais plus rap-
proché de dunkles Blau. J'appelle grisea la forme de Digne et des
montagnes entre l'Escarène et Levens, dont le dessus des ailes
supérieures est d’un gris blanchâtre (fig. 187).
Les individus, avec l'abdomen annelé de rouge, portent le quali-
ficatif de cngulata, Lederer.
J'ai fait représenter l'Ab. fara, de Tijola, à taches et à ailes
inférieures jaunes.
J'ai distingué par le nom de Gueneei la belle Aberration que
feu Guenée a fait connaître, le premier, d'après un exemplaire qu'il
avait pris à Celles-les-Bains (Ardèche), mais à laquelle il n'avait
donné aucun nom.
La description rédigée par Guenée et la figure ont paru dans les
Annales de la Société entomologique de France, 1870 (PI. 7, fig. 12).
Cette Aberration Gueneei se reproduit régulièrement. J'en possède
en tout 7 échantillons dont 5 trouvés à Digne, une © capturée à
Montpellier (ex coll. Bellier) et le type même de Guenée. Les
588 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
figures 185 et 186 du Vol. IIT de la Zépidoptérologie comparée
représentent l’'Ab. Gzyeneei qui est caractérisée absolument comme
l'Ab. Powell; de Lavandule, c'est-à-dire par l'extension extraor-
dinaire des petits traits noirs, normalement placés à droite et à
gauche de chacune des taches rouges des ailes supérieures, à
l'exception toutefois de l'ultime externe, laquelle reste toujours
libre de tout accompagnement noirâtre.
Les ailes inférieures de KAadamanthus peuvent être plus ou
moins envahies par la teinte bleue. Tous les passages existent entre
la forme type dont les ailes inférieures sont entièrement rouges
avec un mince liséré marginal indigo, et l’Ab. Kïesenwetteri, la
plus accentuée dans le sens du mélanisme; tel le n° 06 de la
Tab. 14 des Zygænides Europ. d'Herrich-Schaeffer. Non seulement
les ailes inférieures sont entièrement indigo, mais encore la 6° tache
rouge ultime externe des ailes supérieures a disparu. La transition
a été appelée Sæchadis par Boisduval qui l’a figurée sous le n° 4
de la PI 55 de l’/Zcones, d'après un exemplaire provenant des envi-
rons de Barcelone et que lui avait donné le colonel Feisthamel.
Duponchel a fourni une excellente figure de cette Ab. intermédiaire
Stæchadis, sous le n° 2 de la PI. VII du Supplément-Zygénides,
toujours d’après un spécimen de Barcelone. Herrich-Schaeffer à
représenté également fort bien cette même Szæchadis, sous les
n°” 97 et 08 de la Tab. 14 des Zygænides Europ., avec le même
nom de Xzesenwelteri qu'il donne à son n° 06.
IT ne faut pas confondre les deux Zygœna Stæchadis : 1° celle
de Boisduval, qui n’est qu'une forme mélanisante de Rkadaman-
thus, et 2° celle de Borkausen, à laquelle se rattachent Dyubza et
Medicaginis.
J'ai fait moi-même représenter A2esenwetteri (H.-S. 06) sous les
n*® 181 et 183 de la PI XXIX du Vol. III des Etudes de Lépr-
doptérologie comparée, et Stæchadis, Boisduval, sous le n° 182.
Cependant je regrette vivement que le coloriage de la PI XXIX,
dans un certain nombre d'exemplaires du Vol. IIT de Zépidopt.
comparée, laisse à désirer. Malheureusement, le coloriage de cette
Planche a été exécuté hâtivement et sans les soins méticuleux qui
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 589
sont cependant nécessaires, surtout pour la représentation des
Zygæna. Je m'excuse près de mes Lecteurs pour cette non-réussite
partielle.
M. Abeille a traité de l’histoire de la Zygæna Rhadamanthus,
comme il l’a fait pour Lavandule, avec compétence et exactitude.
La chenille de Rhadamanthus vit, comme celle de Lavanduleæ, sur
le Dorycnium suffruticosum, Papilionacée qui, dans le Midi de la
France, sert de nourriture et d'asile à une foule de Lépidoptères.
Les chenilles des deux Espèces se ressemblent; mais les deux
coques sont très distinctes; celle de LAadamanthus est ovoïde.
J'ai réuni de nombreux documents relatifs à la Zygæna Rhada-
manthus qui habite une partie de l'Espagne, le Midi de la France
et l'Italie. Je dispose de plus de 1,200 exemplaires provenant de
localités très variées; c'est avec ces matériaux que Je crois pouvoir
établir la variation de l’Espèce, par localité, comme suit :
1° Portugal. — Algarbiensis, Christ (Algarvensis, Obthr.). Rela-
tivement grande; 6 taches rouges aux supérieures; ailes mférieures
en dessus bleu indigo, avec quelques traits carminés partant de la
base et deux points rouges confluents vers l'extrémité et près du
bord terminal: en dessous, plus largement lavées de carminé qu'en
dessus; pas d’anneau abdominal rouge; poils du thorax épais,
mélangés de blanchâtre, ainsi que les épaulettes. À été prise à Faro,
par Max Korb, de Munich, en 1884.
2 Almeria et Grenade. — Cingulata, Lederer; Herrich-Schaeffer,
fig. 21, 22. Généralement petite; fond des ailes supérieures d'un
bleu grisâtre; taches et ailes inférieures d'un rouge assez vif;
abdomen généralement annelé de rouge. C'est à Tijola, près d'AI-
meria, que Martinez de la Escalera captura, en 1900, la belle Ab.
flava qui est figurée sous le n° 184 de la PL XXIX.
Cette Ab. fava est elle-même céngulata; mais en jaune naturel-
lement. De Graslin a recueilli Rkadamanthus cingulata à Grenade,
les 5 et 8 juin 1835. Rambur en fait mention dans le Catalogue
systém. Andalousie.
590 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
3° Catalogne. — On trouve aux environs de Barcelone les
formes ÀAadamanthus, Stæchadis et Kiesenwetteri. La Rhadaman-
thus de Barcelone est petite et de couleurs vives, avec le thorax
abondamment couvert d'une pilosité soyeuse blanchâtre. Pas d’an-
neau abdominal rouge; fond des ailes supérieures bleu ou verdâtre,
tout à fait: « Hellglaenzendes gruen oder blau ». En Catalogne,
l'Ab. intermédiaire S/æchadis et l'Ab. Xzesenwetteri sont fort inté-
ressantes. X7esenwetteri paraît très variable. Tous les 16 exemplaires
que Je possède de Catalogne ont 6 taches rouges aux ailes supé-
rieures. Le fond de celles-ci est bleu indigo, ou gris verdâtre, ou
vert brillant; les ailes inférieures, en dessus, sont quelquefois
entièrement indigo; mais le plus généralement avec quelques traces
de rose carminé. Les taches rouges des ailes supérieures, latéra-
lement bordées d’un trait noir, sont quelquefois, en haut et en bas,
accompagnées d’un trait blanc, comme dans les Alpes-Maritimes.
Les Q Â7esenwetteri montrent un double collier blanchâtre; chez
les O, on voit simplement une pilosité soyeuse blanche, à la base
des antennes et autour de la tête. Les ailes supérieures sont finement
frangées de blanc jaunâtre ou de fauve pâle. La Ahadamanthus,
en Catalogne, paraît varier à peu près comme dans les Alpes-
Maritimes.
4° Pyrénées-Orientales. — Dans les Pyrénées-Orientales, on
trouve la Zygæna Rhadamanthus, aux mois d’avril et de mai, à la
Trancada d'Ambouilla, sur les fleurs de l'Onobrychis Sativa ou
sainfoin, plante de la famille des Papilionacées, qui est cultivée
comme fourrage.
Il y en avait jadis quelques champs assez maigres situés en
gradins sur la pente, du côté Sud et Sud-Est du plateau. Les
Zygæna Rhadamanthus se trouvaient posées sur les fleurs roses,
striées de rouge, qui s'élèvent en grappes assez longues à l'extrémité
des pédoncules qui surpassent les feuilles. Le souffle du vent incli-
nait ou balançait ces fleurs avec lesquelles les Zygæna confondaient
presque leurs couleurs et sur lesquelles elles se cramponnaient,
lorsque l’aquilon prenait de la force.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE SOI
La forme de la RAadamanthus des Pyrénées-Orientales est
d'aspect un peu terne; le fond des ailes supérieures est d'un gris
bleuâtre; les 6 taches des mêmes ailes et les ailes inférieures sont
d'un rouge mat et sans éclat; quelquefois le bord anal des infé-
rieures se trouve pigmenté d'indigo; l'abdomen est noir, non annelé
de rouge; le thorax est velu et mélangé de poils soyeux blan-
châtres; les ailes supérieures sont finement frangées de blanc; les
inférieures sont lisérées d'indigo. Dans les Pyrénées-Orientales, Je
n'ai jamais vu l’Ab. Xiesenwetteri. D'ailleurs, l'Espèce paraît très
localisée dans les Pyrénées-Orientales, et jamais nous n'avons
trouvé Rhadamanthus que sur la montagne de la Trancada d'Am-
bouilla, entre Prades et le Canigou. J'ai essayé de décrire cette
localité si remarquable sous le double point de vue du paysage et
de l’entomologie, aux pages 37 et 38 du présent ouvrage, dans la
notice consacrée au Cœnonympha Dorus.
Il y avait autrefois des champs de sainfoin près de Villefranche-
de-Conflent Je les ai plusieurs fois examinés, pour trouver la
Zygæna Rhadamanthus sur les fleurs; mais toujours sans succès.
s° Languedoc et Provence. — La Zygæena Rhadamanthus se
trouve à Mende où Jje l'ai prise en 1863, à Montpellier, aux environs
d’Aix-en-Provence, à la Sainte-Baume, à Celles-les-Bains (Ardèche)
et à Digne Dans aucune de ces diverses localités Je n’ai vu la
forme Xesenwetter. À Celles-les-Bains et à Digne, on rencontre
des exemplaires dont l'abdomen est annelé de rouge (czngulata);
on trouve aussi la charmante Ab. Gyeneer, tantôt cngulata, tantôt
avec l'abdomen tout noir; mais ce qui caractérise la race langue-
docienne et provençale de Réadamanthus, c'est l'éclat de la couleur
rouge vermillon des taches des ailes supérieures et le développement
desdites taches; de plus, il y a pour la couleur du fond des ailes
supérieures, en dessus, deux races bien distinctes, quoique réunies
l’une à l’autre par des exemplaires de transition, celle qui est spé-
ciale à cette région et aux montagnes entre Levens et l’Escarène,
qui a le fond des ailes d’un gris presque blanc (forma grisea,
Obthr., PL XXIX, fig. 187), et l’autre qui a le fond des ailes d’un
5902 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
bleu ou d'un vert plus ou moins conforme aux termes employés
par Esper, dans sa description initiale. Les taches rouges des ailes
supérieures confluent parfois, mais fort rarement complètement. Le
principe de la confluence se trouve généralement dans l'allongement,
le long de la côte des ailes supérieures, de la tache basilaire rouge
supérieure. Cet allongement, limité à la jonction de la tache basi-
laire et de la tache cellulaire, est fréquent; mais il y a loin de cette
confluence partielle à la confluence étendue et gagnant toutes les
taches, ce qui constitue la véritable Ab. confluens,; la macule basi-
laire inférieure émet, dans ce cas, un prolongement qui la relie à
la macule médiane rouge inférieure; les taches rouges s’élargissent,
au détriment du fond gris ou bleuâtre qui se trouve dès lors extrè-
mement rétréci entre les traits noirs devenus très rapprochés. La
0° tache rouge (externe ultime) est tantôt séparée de la 5° et tantôt
elle lui est contiguë.
Sur environ 350 exemplaires de ÀAadamanthus pris à Digne et
rangés dans ma collection, à peine 70 appartiennent à la var. cn-
gulata et ce sont surtout les spécimens de la forme grsea; celle-ci
constitue près de la moitié de l'effectif total à Digne. Un seul ©
pris à Digne, a le fond des ailes supérieures aussi bleu que le
n° 188, pris à Vence; ce seul individu, parmi tous ceux de Digne,
présente sur les ailes inférieures une légère tendance à l’obscurcis-
sement, par une pigmentation de couleur indigo. Cet exemplaire,
conforme à ceux des Alpes-Maritimes et rencontré seul au milieu
des individus de Digne où la forme normale est différente de la
forme de la Riviera, prouve une fois de plus que partout où vit
une Espèce, on peut trouver au milieu d’une forme locale spéciale,
à titre aberrant, des spécimens très différents de la forme normale
du lieu où ils sont nés, mais semblables à ceux qui constituent
ailleurs une forme locale très distincte.
6° Alpes-Maritimes. — C'est vraisemblablement dans les Alpes-
Maritimes que se trouvent les plus belles variations de LAada-
manthus. Chassant moi-même après la mi-juin 1806, entre l’Esca-
rène et Levens, puis autour de Nice, notamment à l'Observatoire
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 503
et à La Turbie, Je capturai plusieurs RXadamanthus dont les ailes
supérieures me parurent d’un bleu si vif, avec des taches rouges si
carminées, que Je les rapportai d’abord à Oxyfropis, à laquelle elles
ressemblent en effet. Je recueillis aussi des sujets très intéressants
de Xzesenwetter:; mais l'Espèce commençait à se déflorer et Je
rencontrais peu d'échantillons encore frais. Cependant les années
suivantes Je chargeai le chasseur Victor Cotte, de Digne, de faire
une exploration entomologique au commencement de juin; enfin,
avec l’aide de MM. Powell et Decoster, je parvins à réunir près
de 600 exemplaires de XÀAadamanthus pris à Vence, Bonson,
l'Escarène, Levens, La Turbie, Castillon, Sospel, Puget-Théniers,
Mont Pacanaglia, Mont Castel-de-Brans, Vallée du Paillon, Mon-
tagnes entre le Laghet et les moulins Gaetti, Col d'Eze, Tourette-
sur-Loup, Bordighera, ce qui me permet d'apprécier en connaissance
de cause la forme de la Riviera.
Lorsqu'on place les unes à côté des autres les boites qui con-
tiennent les Zygæna Rhadamanthus de Digne, des Pyrénées-
Orientales, d'Espagne, des Alpes-Maritimes et d'Italie, on constate
aisément :
1° Que l’Ab. mélanienne Xesenswetteri se rencontre seulement
en Catalogne et dans les Alpes-Maritimes, contrée d’où le Catalog
1901, de Staudinger et Rebel, s'abstient de la signaler;
2° Que la race normale, c’est-à-dire à ailes inférieures rouges, est
très différente d'aspect dans les Alpes-Maritimes, comparativement
aux autres localités, à cause de la teinte bleue vive et foncée du
fond des ailes supérieures, presque partout, sauf à Levens et à
l'Escarène, et de la couleur carminée rose, non vermillonnée, des
taches rouges des ailes supérieures et de la surface des ailes infé-
rieures.
Plusieurs colonnes d'Oxyrropis de Sicile, des Abruzzes, de Flo-
rence sont rangées près des RAadamanthus; Oxytropis diffère
moins, par son faciès, de Rhadamanthus des Alpes-Maritimes que
celle-ci ne se distingue de sa pareille de Digne et de l'Escarène
qui n'habite pourtant pas à une distance bien éloignée.
38
504 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Mais ceci est pour l'effet général. C’est l'impression que produit
la vue d’un ensemble, sans s'occuper des détails que révélera l'ana-
lyse des individus.
S1 l’on procède donc à l'analyse en question, on constate une
variation individuelle assez grande dans la teinte bleue qui fait le
fond des ailes supérieures de la forme à ailes inférieures rouges
Khadamanthus,; mais c'est dans les échantillons AZesenwetteri que
la variation est surtout remarquable.
Tout d’abord, il y a des RAadamanthus dont les ailes supé-
rieures présentent les deux taches rouges externes, unies en forme
de cœur, comme chez Oxytropis. D'autres ont les deux taches
rouges ultimes bien séparées; chez le plus grand nombre, les taches
rouges sont d'un rose carminé vif, avec les traits noirs latéraux
bien indiqués; mais chez quelques sujets, la nervure médiane forme,
depuis la base, un trait blanc qui surmonte la tache rouge médiane
inférieure, souligne la tache rouge externe supérieure et s'arrête au
contact de la 6° tache externe inférieure. Cette ligne blanche, sur
la nervure médiane, lorsqu'elle est bien accentuée, produit un effet
fort agréable. Souvent les R£adamanthus des Alpes-Maritimes ont
le bord anal des ailes inférieures pigmenté d'indigo, comme à la
Trancada d'Ambouilla Au milieu des RAadamanthus à ailes
supérieures bleu foncé, on voit des exemplaires à fond des æles
d'un gris légèrement verdâtre; mais, sauf entre Levens et l’Esca-
rène, ce n'est pas la forme gisea de Digne.
Quant aux ÂAZesenwetten, elles peuvent avoir le fond des ailes
supérieures gris ou d’un bleu indigo très obscur, avec $ ou 6 taches
rouges; mais lesdites taches rouges sont quelquefois presque entiè-
rement noires, surtout les 2 ultimes. L'Ab. S/æchadis, Boisduval,
qui fait le passage entre RAadamanthus et Kiesenwetteri, se pré-
sente elle-même extrèmement variable non seulement pour ses ailes
inférieures qui sont plus ou moins rougies, mais aussi pour les
supérieures, qui se montrent tantôt claires et tantôt foncées. La
nervure médiane peut ressortir en blanc depuis la base des ailes
supérieures Jusqu'à la 6° tache rouge chez Xiesenwetteri, des Alpes-
Maritimes, comme chez celle de Catalogne et tout aussi bien que
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 595
chez Rhadamanthus. J'a1 désigné sous le nom de 5—raculata Ja
Kiesenwetteri qui a perdu la 6° tache rouge des ailes supérieures.
Tels sont les n* 181 et 183 de la PL XXIX du Vol. III, et tel est
aussi l’exemplaire figuré par Herrich-Schaeffer, sous le n° 00.
J'ai appelé obscura la forme chez laquelle la couleur rouge des
taches des ailes supérieures est envahie par le noir. Entre Levens
et l'Escarène, il y a, comme Jje l'ai déjà fait observer, une forme
grisea assez analogue à celle de Digne; elle affecte L£adamanthus,
Stæchadis et Kiesenwetteri et les exemplaires de couleur grisâtre
volent avec les individus dont les ailes supérieures ont le fond
bleu foncé, conformément à la race ordinaire qui se rencontre dans
les autres localités des Alpes-Maritimes. C'est seulement dans la
forme grisea de l'Escarène que j'ai vu une unique Q cngulata,
parmi tous les exemplaires récoltés dans le département des Alpes-
Maritimes. À Digne, la variété céngulata est plus fréquente, ainsi
qu'on l'a vu plus haut. La forme gisea paraît affecter un tiers
environ des échantillons de RAadamanthus, Stæchadis et Kiesen-
wetteri, entre l'Escarène et Levens; les deux autres tiers, dans ces
montagnes chaudes et si escarpées, sont conformes à ceux qu'on
voit dans la région plus rapprochée du littoral méditerranéen.
On y trouve même des exemplaires bien voisins d'Oxytropis, qui
me paraît être simplement une race géographique de XAadaman-
thus, spéciale à l'Italie, et non point une Espèce propre. Ma col-
lection contient des exemplaires italiens d'Oxy#ropis mdistinguables
de certains échantillons français de RZadamanthus. 11 doit en être
d'Oxytropis et de Rhadamanthus comme de Punctum et de Sar-
pedon. Je traite donc la Zygæna Oxytropis, Boisduval, comme la
D 22
7° race géographique de Rkadamanthus.
7° Ltalie. — Oxytropis, Boisduval. Les échantillons bien carac-
térisés diffèrent de RAadamanthus par une taille plus petite, un
corps moins velu et moins épais, entièrement noir, et les couleurs
rouges et bleues du dessus des ailes plus vives.
Oxytropis se trouve à la fin de mai et au commencement de juin
en Sicile, aux environs de Florence, à Cerchio (Abruzzes), dans la
500 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
vallée du Petrella où l’a capturée M. Orazio Querci; à Rome et
dans le pays napolitain. J'ai eu le plaisir de la récolter moi-même
abondamment aux proches environs de Florence, dans les taillis de
chènes qui s'élèvent sur les collines, en face de la Poudrière.
L’Ab. confluens, Zickert, n'est pas rare à Cerchio, où l’on constate
chez beaucoup d'exemplaires que toutes les taches rouges se réu-
nissent en une longue et unique macule non interrompue et dont
les contours restent sinueux. Zickert a obtenu quelques échantillons
de l’Ab. cengulata.
La figure d'Oxytropis donnée par Boisduval, dans l’£ssaz, 1820,
est détestable. La figure publiée par Duponchel (Szpplément-
Zygénides, PI. VIT fig. 3) est bonne; Boisduval a fourmi sous le
n° 3 de la PI. 55 de l’/cones une figure meilleure que celle de l'Æssaz.
Boisduval dit à la page 70 de l’/cones (Vol. Il) qu'Oxytropis
« se distinguera facilement de RAadamanthus par ses ailes supé-
rieures plus bleues, avec les deux taches postérieures connées, par
son corselet noir, par la bande de ses ailes inférieures ». Je suis
d'accord pour les ailes supérieures plus bleues, pour le corselet noir,
mais pas pour les taches rouges connées. Je possède des Oxytroprs
authentiques, ayant les taches rouges ultimes, — celles qu'on appelle
les 5° et 6° taches, — nettement séparées l’une de l’autre, donc
nullement unies et ne formant point, par leur réunion, l'angle très
ouvert, dont parle Boisduval; Herrich-Schaeffer a figuré sous les
n® 19 et 20 Oxyfropis, avec les 5° et 6° taches séparées. D'un autre
côté, ma collection contient des RAadamanthus qui ont les 5° et
6° taches rouges unies comme Oxy/ropis les présente généralement
et non séparées. Ceci n'est donc pas un caractère de distinction
spécifique qu'on puisse raisonnablement invoquer.
La bordure, d'un bleu noir plus large que dans Rhadamanthus,
n'est pas davantage un caractère constant. Mais 1l faut reconnaître
que le thorax est généralement plus noir chez Oxyéropis, bien que
j'aie récolté à Florence des individus pourvus d’épaulettes blanches;
la teinte bleue du fond des ailes supérieures est plus vive chez
Oxytropis, ainsi que la couleur rouge; mais on conviendra que ces
différences, intéressantes pour distinguer une race, n’ont pas grande
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 507
valeur spécifique. Oxytropis n'est à mes yeux que la forme italienne
de RAadamanthus.
Boisduval a donné à la Zygæna italienne le nom d'Oxyfroprs,
qui est un genre de plantes de la famille des Papilionacées, voisin
des As/ragalus, et répandu dans les rocailles et dans les pâturages
des montagnes de l'Europe, de l'Asie et de l'Amérique du Nord.
Les Oxytropis sont des plantes généralement basses dont on
connaît actuellement, d'après l'abbé Coste, environ 200 Espèces.
J'ignore si la Zygæna Oxytropis peut vivre sur la plante dont elle
porte le nom. Je ne crois d’ailleurs pas que la chenille d'Oxytroprs
soit actuellement bien connue. Je suppose qu'elle peut se nourrir
de Dorycnium, comme Rhadamanthus, et de Lotus, ainsi que beau-
coup de ses congénères.
J'ai éprouvé un plaisir infini à récolter OUxrytropis aux environs
de Florence, dans une jolie localité boisée où m'avait conduit
M. Roger Verity. On sort de la ville par le Nord-Est et l’on suit
un faubourg dont la route poudreuse couvre les voyageurs d'une
épaisse couche de poussière. C'est le fléau des routes italiennes;
aux environs de Naples, la promenade est rendue presque impos-
sible par l'épaisseur de la couche poudreuse dans laquel'e il Faut
se mouvoir. Cependant on finit par quitter cette route, dont Île
parcours est peu agréable, pour traverser à gauche un lit de rivière
desséché. Quelques champs en culture occupent la partie plane sur
les bords du torrent qui est, au printemps, presque complètement
privé d’eau, jusqu'au pied de collines boisées, couvertes de fleurs
et d’un aspect très riant. Là, c'est la nature fraiche et aimable; le
site est plaisant; il y a un peu d'eau, beaucoup d’ombrage; les
papillons abondent. On trouve 3 espèces de Zygæna, au commen-
cement de juin, dans les clairières de ce bois de chênes : Oxy#roprs,
Achillee et Stæchadis. Tant que le soleil n'est pas très ardent,
Oxytropis reste fixée sur les tiges de graminées ou sur les fleurs.
On peut alors la cueillir facilement avec Acælleæ. I ma paru
que Stæchadis est à Florence la plus rare des 3 Zygæna.
508 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Il y avait dans ce bois agreste une foule de Zycæna, d'Hespéries,
de Phalènes. Sur les gazons secs, aux abords du bois, du côté du
sud, la jolie petite Cleta pygmeæaria paraissait très nombreuse;
mais sous l’ardeur des rayons solaires, la capture, vu la délicatesse
et la taille exiguë du papillon, n'était pas très aisée à réaliser. Je
me souviens d’avoir passé des heures bien agréables dans cette
localité restée un peu sauvage, malgré son proche voisinage de la
grande et magnifique cité. Les monuments, les basiliques, les palais,
les musées, les promenades où les Lucioles voltigent, le soir,
comme des étincelles de feu, les paysages, l’histoire même de Flo-
rence sont des attraits qui évoquent toujours en moi le désir de
revoir encore une fois la ville incomparable que je n'ai jamais
quittée sans un vif sentiment de regret. Du moins les papillons
récoltés dans la campagne de Toscane sont là, sous mes yeux, bien
loin de leur pays d’origine sans doute, mais contribuant à ressus-
citer sur leurs ailes délicates la vision des lieux charmants qui se
trouvaient encore embellis pour moi par une compagnie qui m'est
infiniment chère et par l’aimable commerce de l'amitié. Jai déjà
dit que nous parcourions les environs de Florence avec le jeune
Roger Verity. Cet entomologiste très distingué, dont le nom est
déjà si justement connu dans le monde des Naturalistes, a réussi
à produire une œuvre fort importante, écrite avec un esprit émi-
nemment scientifique, toujours inspirée par un très sincère sentiment
de recherche de la vérité. De plus, la nombreuse figuration qu'il a
donnée, bien qu'ayant pu beaucoup gagner à être présentée d’une
façon moins serrée, conserve le mérite d’une telle exactitude que
la plus grande estime demeurera toujours acquise aux RAopalocera
palæarctica. J'ai été heureux de concourir à la publication d’un
ouvrage qui fait honneur à son auteur et nous fait espérer une
longue suite d’utiles travaux.
Zygæna Ignifera, Korb.
Découverte à Cuenca, en Castille, par Max Korb, dans l’année
1800, et figurée deux fois : 1° par Clemens Dziurzinski, sous le
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 590
n° 16 de la Taf. II de /akresb. d. Wien. ent. Ver, 1003; 2° par
Adalbert Seitz, dans l'ouvrage Les Macrolépidoptères du Globe
(PI. 7, colonne A). Ces deux figurations sont malheureusement
très grossièrement exécutées. /gnifera est une belle, grande et
vigoureuse Zygæna. J'en possède seulement deux exemplaires que
j'ai achetés à Korb; ce sont des éléments d'appréciation tout à fait
insuffisants et j'attendrai à posséder une documentation un peu
plus considérable pour écrire au sujet d’Zgnifera et publier de cette
Espèce une figure que je tâcherai d'obtenir d'exécution supérieure
à celles déjà données, afin d'en établir la connaissance sur des
données vraiment exactes.
Zygæna Hilaris, Ochsenheimer.
Décrite en premier lieu par l'acteur Ferdinand Ochsenheimer,
aux pages IOI et 102 du 2° volume de l'ouvrage Die Schmetterlinge
von Europa, d'après quatre exemplaires du Portugal, dont deux
existaient dans la collection Tauscher et les deux autres dans celle
du comte von Hoffmansegg (*).
Malheureusement, Ochsenheimer ne dit pas de quelle partie du
Portugal provenaient les Zygæna qu'il a décrites. Voici quelle est
la diagnose de Ochsenheimer : « Alis anticis nigro-cyaneis, maculis
sex cinnaberinis confluentibus flavoque marginatis; posticis cinna-
berinis, limbo sinuato nigro-cyaneo; capite humerisque pilis albis,
abdomine immaculato. » Il convient d'observer qu'Ochsenheimer
doit compter la macule basilaire, pourtant bien compacte, pour
deux taches, suivant l'usage adopté pour les autres Zygæna. Je ne
possède aucun exemplaire de Æilaris provenant du Portugal, pays
où les Lépidoptères ne paraissent pas être souvent recherchés par
(*) L'orthographe du nom du comte von Hoffmansegg n’est pas la même pour
tous les Auteurs allemands. Certains écrivent Hoffmannsegg. Je crois que cette
dernière manière est la bonne; mais, dans la circonstance, j'ai transcrit textuel-
lement ce qui est imprimé dans l'ouvrage d’Ochsenheimer,
600 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
les amateurs. Mais l'Espèce, depuis sa découverte au Portugal, a
été retrouvée en Espagne, dans la France méridionale et sans doute
en Algérie. Dans ces diverses contrées, elle produit des formes
géographiques pleines d'intérêt.
Duponchel (Supplément-Zygénides) a donné, sous le n° $ de la
PI. VII, une excellente figure de Æzlaris, sans dire toutefois de
quelle localité provenait l’exemplaire figuré. Boisduval a moins
bien réussi à représenter Æilaris; les figures qu'il a publiées dans
l’Essa, 1829 (PL. 6, fig. 5), et dans l’/cones (PL 55, fig. 1}, laissent
beaucoup à désirer. L'iconographe Huebner a représenté assez bien
une variété de Æzlaris, sous le n° 123 de Lepidoptera 1. —
Sphinges TL. Rambur, dans la Faune de l'Andalousie, figure correc-
tement deux formes de Æilaris, sous les n° 5 et 6 de la PI. 12.
La figure 6 s'applique à la race que j'ai appelée Æscorialensis et
que J'ai moi-même fait représenter sous le n° 48 de la PI. 7 de la
XII° livraison des Æ/udes d'Entomologie. Du reste, j'ai publié
plusieurs figures des diverses variétés de Æilaris, notamment sous
les n° 48 a, 48 b, 48 c de la même PI. 7; puis sous les n°“ 120,
130 et 131 de la XX* livraison des Æ/udes d'Entomolog; enfin
sous les n° 170 et 180 de la PI XXIX du Vol. III des Etudes
de Lépidoptérologie comparée.
On m'excusera de rappeler que j'ai antérieurement beaucoup
écrit sur les Zygæna et que J'ai fourni une figuration très consi-
dérable, surtout des Zygæna algériennes, dans la XIII° livraison
des Etudes d'Entomologie. Cependant je ne puis faire nouvel état
de tout ce que J'ai déjà publié sur le groupe même dont fait partie
la Zygæna Hilaris, ni rééditer ici les observations précédemment
imprimées par mes soins. Je prie donc le Lecteur de se reporter à
mes travaux contenus dans les Æ/udes d'Entomologie. Je me bor-
nerai, dans la circonstance présente, à une revision des races géo-
graphiques de //ilaris, conformément à la méthode par localité,
que J'ai déja employée pour l'étude critique des Zygæna; mais il
est bien entendu que je suppose le Lecteur en possession des
renseignements déjà publiés et sur lesquels je ne reviendrai que
pour corriger les erreurs dont je me reconnaîtrai coupable. C’est en
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE (cel
effet un devoir de conscience auquel J'ai la ferme intention de
rester fidèle.
1° Espagne Méridionale. — Hilaris, Ochs. Il s'agit de la race de
Grenade et de la Sierra-Nevada, figurée par Rambur, sous le n° 5
(non 6) de la PI. 12 de la Faune de l’'Andalouste.
Les /Zilaris de Grenade ressemblent à certains exemplaires de la
Zygæna Algira, Duponchel. Ainsi que je le dis plus haut, Je ne
connais pas la race portugaise de //2laris, qui est la forme typique
Jamais, dans ma longue carrière entomologique, je n'ai même
trouvé l’occasion de la voir en quelque main. Cependant, à cause
du voisinage, je considère comme probable que /zlaris, d'Anda-
lousie, et Æilaris, tout au moins de la partie méridionale du Por-
tugal, appartiennent à une race dont les individus sont analogues.
Dès lors, quoique manquant de la certitude, mais sous le bénéfice
des observations ci-dessus exposées, J'applique le nom de Hzlaris-
Hilaris, qui n'appartient réellement qu'à la race portugaise, à la
race andalouse (Rambur, Faune Andal. PI. 12, fig. 5), considérant
— au moins provisoirement — cette race comme référable au type
de l’'Espèce décrite par Ochsenheimer, suivant les termes de sa
diagnose latine reproduite ci-dessus.
2° Castille. — Escorialensis, Obthr. Très bien figuré: par Rambur
sous le n° 6 de la PI 12 de la Faune de l'Andalousie, et représentée
également par moi-même, dans la XII° livraison des Æfudes
d'Entomologie (PI. VII, fig. 48). La forme Æscoralensis est très
caractérisée par ses ailes non pas plus transparentes, ainsi que J'ai
eu le tort de le dire à la page 23 de la XII° livraison précitée,
mais par son faciès plus pâle, ce qui est dû à la confluence enva-
hissante des parties rouges, lesquelles sont d’une teinte un peu
rose, et non d’un rouge vermillon ou carminé vif, comme dans les
autres races. Les lisérés jaunâtres, autour des réserves bleu indigo
des ailes supérieures, sont amincis et d’une teinte généralement peu
vive et peu tranchante. Les exemplaires que je possède ont été
capturés à la fin de juillet 1870, sur les montagnes des environs
de l’Escorial.
602 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
3° France méridionale. — Gallie, Obthr. Très variable et très
belle. Les figures 48 a, 48 & et 48 c de la PI. VII de la XIT° liv.
des Etudes d'Entomologie représentent 3 formes choisies parmi
celles qu’on rencontre communément à Vernet-les-Bains (Pyrénées-
Orientales).
Ma collection contient un millier d'exemplaires provenant des
localités suivantes : Vernet-les-Bains, Fontpédrouse, dans les Pyré-
nées-Orientales; Florac (Lozère); Rumilly (Haute-Savoie); Saint-
Pons, près Gémenos (Bouches-du-Rhône); Puget-Théniers, Le
Moulinet, Vallée du Roubion, Venanson, Lantosque à Notre-Dame-
de-Fenestre, Entrevaux, Mont Gourdon, Escarène, Levens, Allos,
dans les Basses-Alpes et dans les Alpes-Maritimes; Grenoble.
Ce qui est remarquable, c'est, d’une part : l'impression d’unité
qui ressort de l'aspect général présenté par les diverses formes
françaises de Hilaris, — en mettant à part, bien entendu, les Aber-
rations notables et la race spéciale Ononidis, Millière, — et, d'autre
part, ce qui paraît cependant contradictoire avec la première obser-
vation : la variabilité extrême de l'Espèce, en France.
On ne distingue pas les individus des Basses-Alpes de ceux des
Pyrénées-Orientales; mais partout en France, où la race est géné-
ralement grande et de vigoureuse apparence, on rencontre des
exemplaires très petits, à côté d’une quantité d'échantillons de
taille supérieure; on observe les taches rouges des ailes supérieures
d'une teinte plus ou moins carminée ou vermillon, entourées d'un
liséré mince ou épais, jaune paille, jaune orange ou même rouge,
de façon à se confondre avec les taches rouges elles-mêmes; on
constate que les taches rouges en question sont confluentes et
élargies, ou bien resserrées et nettement séparées les unes des
autres: mais les transitions sont tellement insensibles, les exem-
plaires sont si rarement absolument semblables entre eux que le
mélange de toutes ces Æilaris appartenant à la race normale fran-
çaise constitue un ensemble bien homogène, malgré son extrême
variabilité individuelle. Je n'ai jamais vu de Zygœna Hilanis
française ou espagnole ayant l'abdomen annelé de rouge. Tous les
spécimens ont l'abdomen entièrement noir; ils ont le collier, les
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 603
épaulettes, les poils du thorax d’un blanc plus où moins jaunâtre,
mais jamais rouges, comme chez Æausta; le collier rouge restant
l'un des caractères distinctifs de Fausta.
Chez la Zygœna Hilaris-Gallie, les Aberrations sont rares; mais
il y en a de bien remarquables; j'ai fait figurer sous le n° 120 de
la XX° livraison des Ætudes d'Entomologie V'Ab. confluens; sous
le n° 130 l’Ab. &icolor, et sous le n° 131, l’'Ab. wzzcolor. Toutes
les trois viennent de Vernet-les-Bains. Je possède un second exem-
plaire de l’Ab. 6icolor pris à Entrevaux et deux autres individus
de l’'Ab. confluens provenant : l’un, de Vernet, comme le premier
figuré, et l’autre, de Digne.
Dans le 3° Vol. de Lépid. comparée, Jai donné la figure 180
d'une belle Ab. icolor, capturée au Moulinet (Alpes-Maritimes)
par Decoster, et la fig. 170 de l’Ab. Foulquteri, chez laquelle toutes
les parties rouges sont devenues d’un beau jaune; elle fut prise par
M. Gédéon Foulquier, à Saint-Pons, près Gémenos (Bouches-du-
Rhône), le 12 juillet 1003. Je suis bien reconnaissant à M. Foulquier
de m'avoir gratifñié de cette pièce insigne.
M. Decoster a pris au Moulinet l’'Ab. Awrantiaca, chez laquelle
toutes les parties normalement rouges sont devenues d’un Jaune
orangé, tandis que l'Ab. Foulquieri est d'un jaune de chrome tres
franc et sans aucun vestige de rougeâtre dont on voit quelques
traces près du bord costal des ailes supérieures d'avrantiaca.
Ma collection contient aussi une Aberration tendant au brun,
prise aux environs de Marseille (ex coll. Bellier).
4° Cannes. — Ononidis, Millière. Feu Millière avait découvert
aux environs de Cannes une race qu'il avait appelée Onontdis, pour
rappeler la plante Ononis mitissima, Papilionacée de la région
méditerranéenne, dont se nourrit la chenille. Cette race est fort
remarquable, absolument spéciale, et n'a, je crois, Jamais été
retrouvée. J'en possède 4 exemplaires que Millière avait partagés
par moitié entre Guenée et moi-même. Ils constituent une variété
très caractérisée par le fond bleu noir des ailes supérieures, la
couleur rouge carmin très foncée des taches des supérieures et des
604 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
ailes inférieures, le peu de largeur de ces taches, — ce qui laisse
beaucoup d'espace au fond indigo des ailes, — la minceur ou même
la nullité du liséré blanc jaunâtre autour des taches rouges, l'ab-
sence presque complète de pilosité blanchâtre sur la tête, le cou et
le thorax. De plus, le bord interne des ailes supérieures, est entiè-
rement indigo et nullement teinté de jaunâtre ou de rougeâtre.
Je possède 3 coques qui sont semblables à celles de Æzlaris.
Millière décrit la Zygœna Ononidis dans le 5° fascicule de
Lépidoptérologie (Mémoire présenté à la Société des Sciences
naturelles, des Lettres et des Beaux-Arts de Cannes; séance du
20 mars 1870), et 1l donne de bonnes figures sous les n° 6, 7 (che-
nilles), 8 (coque), 9, 10 (imago Get Q) de la PI V des Annales
des Sciences Nat. de Cannes.
Millière, dans le 2° Supplément au Catalogue raisonné des
Lépid. des Alpes-Maritimes (sans date), indique le bois de la
Présentation, à Cannes, comme localité de la Zyzœena Ononidis.
À la fin de la description dans les Annales de Cannes (p. 7 et 8),
Millière fait part de ses craintes, hélas! trop fondées, de ne plus
Jamais revoir la Zygæna découverte par lui en 1878, « car », dit-il,
« tout le monde ne sait-1l pas que certains papillons cessent de se
montrer pendant 10, 15, 20 ans et plus, sans qu'il soit possible
d'en définir la cause »; — puis, il informe que l'habitat de la
Zyg. Onomdis lui a paru être surtout la lisière d'un bois de pins
d'Alep, situé au Sud-Ouest, sur une colline de la vallée du Cannet;
mais le pays de Cannes à bien changé depuis un quart de siècle
et 1l est possible que les endroits sauvages où chassait Millière se
trouvent aujourd’hui convertis en jardins et en villas.
$° Algérie. —— Algira, Duponchel. — Duponchel, le continuateur
de l'ouvrage de Godart, fut le créateur du nom A/gzra, appliqué
pour la première fois à une Zygæna. On peut lire ce qui suit, à la
page 86 de l’Æistoire Naturelle des Lépidoptères ou Papillons de
France; Supplément; Tome IL. Paris, 1835. XXXII Zygène Algé-
rienne; Zygœna Algira. Nobis. (PI. 7, fig. 6). Envergure, 10 lignes.
« Cette Zygère, que nous avons reçue d'Alger, ne diffère de
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 605
l'Ailaris que parce que les taches rouges de ses premières ailes ne
sont pas cerclées de jaune, en même temps que leur bord interne,
au lieu d'être de cette dernière couleur, est du même rouge que les
taches. Du reste, elle lui ressemble entièrement. D'après cela, nous
croyons pouvoir nous dispenser d'en donner une plus ample
description ». Il est évident que cette description a été écrite sans
l'examen minutieux et approfondi qui devrait être de règle; 11 y a
cependant une observation fort importante qui n’a pas été négligée
et dont il faut tenir grand compte : c'est que le bord interne des
ailes supérieures est du même rouge que les taches.
Passons maintenant à l'examen de la figure 6 de la PI. 7. Cette
PL VII du Supplément-Zygénides est excellente. Duménil, qui à
signé comme peintre, et M'e Plée, comme graveur, ont accompli
un travail louable en représentant, avec une exactitude évidente,
les 7 Zygæna qui figurent sur cette Planche VIT Il semble donc
que nous pouvons avoir confiance dans la figuration qui se trouve
publiée dans l'ouvrage de Duponchel. Toutefois, la figure 6 de la
Zygæna Algira paraît donner l'image d'un exemplaire différent de
celui qui a servi à la description.
Il arrive en effet assez fréquemment qu’un auteur, en possession
oarde l’un des
de deux exemplaires d'une Espèce jugée nouvelle, g
individus pour le décrire, tandis qu'il se dessaisit de l’autre échan-
tillon destiné à servir de modèle au peintre, sans avoir préalable-
ment examiné assez attentivement si les deux spécimens, — celui
qui servira de type au descripteur et celui qui sera copié par Île
dessinateur -— sont bien semblables entre eux. Il ne suffit pourtant
point d'un examen superficiel; si exercé que soit l'œil d'un Ento-
mologiste, rien ne le dispense de consacrer le temps et l'attention
nécessaires à une minutieuse et indispensable comparaison.
Donc, la figure 6 de la PL VII indique un liséré jaunâtre très fin
autour des taches rouges, alors que Duponchel déclare que « les
taches rouges des premières ailes ne sont pas cerclées de jaune ».
C’est une contradiction qui aurait dû être expliquée. Du reste, la
figure représente une Zygæna ayant le collier et les épaulettes
blanchâtres; une grosse tache rouge occupe toute la base des supé-
606 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
rieures, sauf à l'origine du bord interne, où un espace qui n’a pas
été envahi par la couleur rouge est resté d’un indigo noir. Au delà
de cette tache Indigo, qui est contiguë à la naissance même des
ailes, la tache basilaire rouge se prolonge inférieurement au moyen
d'un trait rouge épais qui aboutit à la partie inférieure de la grosse
macule rouge externe. Un liséré jaunâtre d’une finesse extrême,
mais très bien défini, limite extérieurement la tache basilaire rouge.
Celle-ci se trouve nettement et entièrement séparée de l'unique
grosse tache rouge externe, sauf inférieurement, par la jonction que
forme le trait rouge longeant le bord interne. Un large espace
indigo s'élève au-dessus de ce trait rouge qui longe le bord interne;
la couleur indigo occupe le milieu des ailes et le bord costal entre
la tache rouge basilaire et la tache rouge externe, et se relie par
le bord costal à la même couleur indigo noir faisant le fond des
ailes supérieures et occupant le bord terminal. Un point imdigo
reste emprisonné dans la grosse macule rouge externe constituée
par la confluence des taches médianes 2, 3 et 4 avec la tache ultime
qui est en forme de haricot. De ces 4 taches confluentes résulte
donc, dans le spécimen figuré sous le n° 6, une sorte d'ilôt rouge,
centralement ponctué d’indigo noir et dont les contours sinueux
sont très finement lisérés de jaunâtre.
J'ai en vain cherché dans les échantillons algériens de ma
collection un seul exemplaire qui fût pareil au papillon figuré
sous le n° 6; je n’en ai point trouvé; la Zygæna algira figurée par
Duponchel n'est représentée chez moi par aucun exemplaire simi-
laire. C’est évidemment un spécimen un peu aberrant; mais le trait
basilaire indigo, le bord costal indigo, la séparation nette entre la
partie supérieure de la tache basilaire rouge et la grosse tache
externe rouge, au moyen de la teinte indigo du fond des ailes, le
collier et les épaulettes blancs font du papillon figuré par Duponchel
une Zygæna bien différente de la Zygæna Algira, selon Herrich-
Schaeffer, excepté en ce qui concerne le trait rouge qui longe le
bord interne des ailes supérieures.
En effet, Herrich-Schaeffer a représenté, avec le nom d’A/gzra,
sous le n° 106 de la Tab. 15 des Zygænides Europ., la figure d'un
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 607
papillon tout à fait dissemblable de l’A/gzra, Duponchel, et la
Zygæna figurée par Herrich-Schaeffer (106) a été maintes fois
retrouvée conforme, tandis que celle figurée par Duponchel n'a
pas été reprise, du moins à ma connaissance.
Huebner, avant Herrich-Schaeffer, avait figuré avec le nom de
Iilaris, sous le n° 172, la même Zygæna que Herrich-Schaeffer a
représentée sous le n° 106; et sous le n° 173, Huebner avait figuré
avec le même nom de Æ1laris une Zygæna que j'a figurée moi-
même, mais à tort, Je me hâte de le dire, avec le nom de ex,
sous le n° 63 de la XIIL° livraison des Æ/udes d'Entomologte. On
peut la considérer comme une variété de l'A/gira, à cause du trait
rouge caractéristique qui longe le bord interne des supérieures. J'ai
d'abord publié avec le nom de /elix, une autre Zygæna algérienne,
sous le n° 4 de la PI 5 de la Il‘ livraison des Æzudes d'Ento-
mologie; puis, dans la XIII° livraison, J'a1 donné une figuration
très abondante de la Zygæna que J'avais désignée avec le nom de
Felix, cette fois avec raison, sous les n°* 57, 64, 65, 66, 07, 68, 09
et 7o de la PI. 7; j'avais aussi représenté la Zygæna Algira, selon
Herrich-Schaeffer (106), sous les n° 59, 60, O1 et 62 de la même
PI. 7; mais si j'ai fourni une figuration convenable d’A/gtra selon
Herrich-Schaeffer, je ne puis dire que j'aie figuré l’A/gira initiale,
celle qui a été nommée par Duponchel et que je ne connais point
encore en nature.
Staudinger, analysant les différences individuelles entre les
Zygæna que j'ai appelées Felix, a donné le nom de Mauretanica
à la Felix ayant le collier et les épaulettes blancs et dont l'abdomen
est annelé de rouge, c'est-à-dire au n° 70 de la PI 7 de la III iv.
des Ætudes d'Entomologie. Le même auteur a appelé Faustula la
même /elix qui a le collier et les épaulettes blancs, avec les taches
rouges des ailes supérieures largement entourées de blanchâtre,
c'est-à-dire aux n° 57 et 69 de la même PI. 7 de la XIIT° livraison.
Enfin le D' Adalbert Seitz, dans les Macrolépidoptères du Globe,
acceptant ce qu'avaient fait ses devanciers, a publié sur la PI 7
du Genre Zygæna (colonne £), Felix O' et Q, et sur la PIRE
(colonne a), Faustula et Q. et Mauretanica Set Q selon Stau-
608 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
dinger, A/gtra, selon Herrich-Schaeffer (106) et il a même inventé
une ex2gua qui rentre dans la forme A/gira, H.-S. (106), de même
que l'A. concolor, Obthr., dont 1l a été donné une copie d’après
les £tudes d'Entomologie. Mais Staudinger et Seitz n'ont, pas plus
que moi-même, connu la vraie A/gzra, selon Duponchel, et il n'y a
qu'à comparer les diverses figures pour se fixer sur ce point litigieux.
Toutes nos A/gira ont le thorax et la tête noirs. C'est Felix qui a
les épaulettes et le collier blanc; mais Æelix manque du tiait rouge
qui longe le bord interne des ailes supérieures.
En Algérie, il y a deux Espèces faciles à confondre : l'A/gira,
H.-S. (106) et la Felix, Obthr. Je crois avoir reconnu le caractère
spécifique qui les distingue l’une de l’autre. C'est le /a2/ rouge
dont parle Duponchel, et qui, partant de la tache rouge basilaire,
longe le bord interne auquel 1l reste contigu chez A/gira, Duponchel,
chez A/gtra, H.-S. 106, chez Ailaris, Huebner (172 et 173) et dans
les Etudes d'Entomologie, XILI° livraison, sur les Zygæna figurées
sous les n°50, 60, 6r,:62:de la PL 7 avec le nom d'A/e72 eti0s
de la même PI. 7, avec le nom fautif de }'elix. Au contraire, comme
Je le dis plus haut, Felix n'a aucun trait rouge partant de la tache
rouge basilaire des ailes supérieures et qui soit contigu au bord
interne des ailes; chez Æelix, la tache basilaire rouge est limitée et
arrêtée net par un trait extérieur blanc vertical qui se prolonge
horizontalement parfois, blanc, mais non rouge, le long du bord
interne des ailes supérieures.
Nous nous trouvons donc présentement dans la situation sui-
vante : nous 1gnorons l’A/grra, Duponchel (PI VII, fig. 6); nous
appelons A/gira la Zygæna publiée avec ce nom, sous le n° 106,
par Herrich-Schaeffer; mais J'ai expliqué comment l’A/gira, HS.
(106) n'était pas semblable à Algira, Duponchel.
Je possède quelques exemplaires pris à Sebdou, à Khenchela et
à Bainen (Alger, Holl) qui ne diffèrent de Æ/zlaris européenne que
parce qu'ils portent le trait rouge qui longe le bord interne des ailes
supérieures; d’ailleurs Duponchel ignorait que ce trait généralement
blanc ou Jaunâtre chez A/zlaris, de France, peut aussi être rouge
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 609
en France, tout comme en Algérie; J'ai sous les yeux des exem
plaires probants. Mes Zygæna algériennes correspondent donc à la
description très sommaire écrite par Duponchel et, d'après son
texte, on peut les nommer A/gira; mais le thorax est tout noir,
comme chez certaines //1laris, de France, et l'absence du collier et
des épaulettes blancs ne permet pas l'identification avec l’exem-
plaire figuré comme A/gira, par Duponchel. La Zygœna Algira,
Herrich-Schaeffer (106), est fort variable, et les deux exemplaires
figurés par Huebner sous les n°” 172 et 173, quoique très différents
l’un de l’autre, appartiennent bien à la même unité spécifique. Ma
collection contient 275 échantillons, parmi lesquels je vois d’insen-
sibles passages entre le n° 172 et le n° 173 de Huebner; les spé-
cimens conformes à la description de Duponchel (mais non à la
figure donnée par cet auteur), grâce aux exemplaires transitionnels,
sont référables à l’A/gira, Herrich-Schaeffer (106); mais il reste
une lacune que je me déclare impuissant à combler; cette lacune
résulte de mon ignorance d'un exemplaire qui soit conforme à la
figure certainement très exacte de l'Algira, Duponchel. Il faut
admettre aussi la vraisemblance des hybridations naturelles entre
Algtra et Felix, et ces hybridations peuvent donner des papillons
naturellement transitionnels entre A/gira et Felix.
Provisoirement donc, et en attendant qu’on retrouve la véritable
Algtra, Duponchel, je laisse le nom d'Algira à la Zygæna ainsi
nommée par Herrich-Schaeffer, en reconnaissant qu'il y a des
probabilités pour que le nom donné par Herrich-Schaeffer soit
remplacé par une autre désignation, lorsqu'on aura retrouvé la
vraie A/gtra, Duponchel; pourvu toutefois qu’il soit démontré que
cette vraie A/gzra diffère spécifiquement de l’autre; car il faut
admettre comme possible qu'on trouve des individus transitionnels
établissant l'unité spécifique des diverses A/gira et la réunion de
celle de Duponchel à celle de Herrich-Schaeffer. On ne peut encore
rien préjuger de certain à cet égard. Actuellement donc, il me
semble qu'on peut établir la nomenclature relative à A/zira éomme
suit :
89
610 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
1° Algira, Duponchel (Supplément Zygénides, PL VIT; fig. 6. —
Figur. #ec descript.).
2° | Algira, Duponchel (Supplément; Vol. Il; p. 86. — Descript.
nec figur.).
Hilaris, Huebner; fig. 173.
\ Aigrra, Herrich-Schaeffer; fig. 100.
Hilaris, Huebner; fig. 172.
Alotra Obthr (CEtud. d'Ent, XIII, Pl 7; te 50, 60 167 62).
Fe Obthrt(Etad" d'Ent., XI PIERRE 206)
Ab. Concolor, Obthr. (Etud. d'Ent, NI; PI. 2; fig 4).
Algira, Seitz (Zygæna; PL 8; col. a).
Exigua, Seitz (Zygœna; PL 8; col. a).
Les amateurs de dénominations nouvelles pourraient s'offrir le
plaisir de donner des désignations à un certain nombre de varia-
tions de la Zygæna Algira, Herrich-Schaeffer. Les n°* 172 et 173
de Æularis, Huebner, sont notamment bien différents. J'aurais pu,
sans grand effort, créer quelques noms nouveaux; toutefois, J'aurais
considéré cette opération comme une œuvre de mauvais goût; étant
donné d’ailleurs l’état d'incertitude où nous restons sur la nature
de la véritable A/gira figurée par Duponchel et les conséquences
qui peuvent résulter pour la Nomenclature de la redécouverte de
l'Algira, Duponchel.
Algira Herrich-Schaeffer éclôt de très bonne heure, en février et
mars, dans certaines localités, et on la trouve au mois de Juin et
même de juillet dans d’autres circonstances. Voici l'indication des
localités et des époques d'apparition pour chaque localité que Je
(*) Je rapporte à A/gira, Herrich-Schaeffer (106), la Zygœna Felix figurée
sous le n° 63 de la PI. 7, de la XIII® liv. des Z?ud. d'Ent., à cause du trait
rouge qui part de la partie inférieure de la tache basilaire rouge et qui se pro-
longe, le long du bord interne, au delà même de la tache médiane rouge infé-
rieure; cependant l'aspect du papillon reste énigmatique. D'ailleurs, la variabi-
lité est considérable chez A/gira, aussi bien que chez Felix; mais il m'a semblé
qu'on pouvait regarder comme valable, spécifiquement, le caractère résultant de
ce trait rouge, le long du bord interne des ailes supérieures; voilà pourquai Je
classe le n° 63 parmi les A/gira.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE OTT
relève d'après les documents que contient ma collection : Sebdou,
mai 1907, H. Powell; juin 1880, D' H. Codet; Magenta, juin 1880,
L' Lahaye; Khenchela, mai 1908, H. Powell; Lambèse, Dayrem,
mai 1907; mai 1875, G. Allard et R. Oberthür; juin 1884, J. Merkl;
juin 1885, L. Bleuse;, Phihppeville, D' Charles-Henri Martin;
Batna, D' C.-H. Martin; Chemin du Col des Arzaiïls, près Sebdou,
juin 1907, H. Powell; Forêt de Bainen, E. Holl, jun et
juillet 1007; El-Biar, mars 1007, E. Holl; Environs d'Alger,
mars 1807, E. Holl; Ravin de la Femme-Sauvage, près Alger,
Ch. Obthr., mars 1868; Alger, février 1881; Méchéria, mars 1886,
L' Lahaye; Aïin-Draham, en Kroumurie, V. Faroult; Alger, ex coll.
Boisduval; Algérie, ex coll. Guenée.
Zygæna Felix, Obthr.
La Zygæna Felix ne me parait point, comme 1l est indiqué dans
le Catalog 1901 de Staudinger et Rebel, être une variété de Æ/1aris.
C'est plutôt A/grra qui est probablement une race de Æ/zlanis,; du
moins si l’on s'en rapporte aux exemplaires assez rares qui éta-
blissent la transition entre Ailaris et Algira. 11 est certain que les
spécimens de parfaite transition entre Æ/ilaris et Algira, Herr.-Sch.
(106) sont très peu nombreux; mais ils existent; C’est ainsi que Je
suis redevable à l’obligeance de M. Holl d'une Algira G' prise à
Bainen, le 30 mai 1904, et qui figurerait, sans exciter aucun sen-
timent de surprise, au milieu des Æ/ilaris pur sang; mais je ne
connais aucune transition satisfaisante entre Felix et Hilaris. D'ail-
leurs Felix manque de la tache basilaire indigo, très petite, mais
très nette, contiguë au corps, qui se remarque chez Ailaris, chez
Alzgira, Duponchel, et très généralement chez Algira, H.-S. (106)
et Huebner (Æ/zlaris, 172).
J'ai déjà parlé de la Zygœna Felix, dans l’article consacré à
Algira. La moitié des exemplaires de Felix a l'abdomen annelé
de rouge, tandis qu'A/géra, comme Ailaris, a toujours l'abdomen
entièrement noir, du moins d’après ce que je connais.
612 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
f'elix a généralement le double collier et les épaulettes blancs;
mais certains exemplaires ont le thorax et la tête entièrement noirs;
les taches rouges des ailes supérieures sont séparées ou confluentes;
elles sont généralement entourées d'un mince filet blanchâtre; chez
quelques exemplaires, le liséré blanchâtre est plus épais; chez
d'autres, au contraire, il est presque nul. Les taches et les ailes
inférieures sont ordinairement d'un ton rose carminé, quelquefois
pâle, quelquefois vif. Comme j'ai essayé de l'expliquer ci-dessus,
le caractère qui distingue spécifiquement la Zygœna Felix et la
sépare d’A/gzra, c'est la façon dont la tache basilaire rouge est
limitée, chez Felix, par un liséré blanc, un peu sinueux, descendant
en direction droite et verticale, du bord costal au bord interne, et
sy arrêtant généralement tout net. Un espace indigo noir sépare
alors la tache basilaire des taches rouges médianes. Quelquefois
cependant le liséré blanc qui borde extérieurement la tache basilaire
rouge se prolonge horizontalement en une petite queue blanche,
jamais rouge, le long du bord interne.
Je possède }elix de Boghari, Sebdou, Lambèse, Géryville, Khen-
chela, Magenta. Elle éclôt ordinairement en juin. J'en ai fourni des
figures bien réussies sous le n° 4 de la PI V de la IIT° livraison
des Ætudes d'Entomologie et sous les n°* 57, 64, 65, 66, 67, 68, 609
et 7o de la PI. 7 de la XIIT° livraison.
J'ose dire que la figuration faite en gravure sur pierre, par
Dallongeville, des diverses Zygæna, sur la PL VII de la XIII lv.
des Ætudes d'Ent. est excellente, et que la nervulation, si souvent
négligée dans les reproductions des figures de Zygæna, a été l’objet
du soin le plus attentif.
On ne pouvait produire une Iconographie plus consciencieuse et
plus exacte que celle-là. Je me fais toujours un plaisir et un devoir
d'en faire honneur à l’habile artiste qui l’a exécutée.
La Zygæna Felix se place dans la Nomenclature à côté de
Formosa qui est plus pâle, plus transparente, mais qui lui ressemble
beaucoup pour la forme des taches des ailes supérieures, et
notamment pour le caractère de la limitation de la tache basilaire
TOSE.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 613
Staudinger a distingué les variétés Æaustula et Mauretanica,
dont j'ai déjà mentionné les particularités, en dissertant à propos
de la Zygœna Algira. Il serait aisé d'augmenter le nombre des
dénominations, en faisant état des variations, par plus ou par
moins, dans la dimension des taches rouges, leur confluence, l’im-
portance des lisérés blancs, l'intensité de la couleur rouge. Je crois
l'excès de cette analyse plutôt nuisible qu’utile, et il me semble
que la Nomenclature n’a rien à gagner à une surcharge finalement
peu justifiée.
Zygæna Marcuna, Obthr.
Figurée sous le n° 58 de la PI. 7 de la XITF° livraison des Æ/1des
d'Entomologie. L'Espèce a été découverte à Marcouna, près Lam-
bèse, par feu Staudinger, en 1887; elle a été prise par feu le
D' Charles-Henri Martin à Laghouat. Lorsque nous acquimes sa
collection, j'y trouvais deux exemplaires de la Z. Marcuna, d'une
forme un peu différente de celle de Lambèse. Marcuna est une
espèce bien facile à distinguer par le bord interne de ses ailes
supérieures qui est indigo, depuis la naissance des ailes; la tache
basilaire rouge ne descendant pas jusqu'à la rencontre du bord
interne et s’arrêtant net, avant d'y parvenir.
Zygæna Fausta, Linné.
Bien représentée sous la lettre H de la Tab. I, avec le nom
linnéen de Æausta, par Johann-Caspar Fuessly, en 1778, dans
Magazin fuer die Liebhaber der Entomologie, et figurée de nou-
veau, mais plus grossièrement, par Esper, en 1770, sous les n° 14
et 14 de la Tab. XVIII du Tom. II. Bien caractérisée par son
collier toujours rouge, la Fausta parait avoir été universellement
reconnue et n'a pas de synonymie,
614 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
La Zygena Fausta (Der Gluecksvogel, — ou l'oiseau du
bonheur, — suivant l'expression de Sulzer, rapportée par Esper),
ne se trouve m en Angleterre, ni en Algérie. Elle semble habiter
en France les contrées exclusivement calcaires, éclôt deux fois par
an, aux mois de mai et d'août, dans certaines localités, ainsi en
Charente; mais paraît éclore seulement en août et au commen-
cement de septembre dans quelques autres régions, comme à
Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales), où nous n'avons jamais
reconnu qu'une seule génération annuelle, commençant vers le
10 août.
C'est un papillon charmant, généralement abondant dans les
lieux qu'il habite, se mariant volontiers à l'espèce congénère
Transalpina-Hippocrepidis qui éclôt en même temps que Fausta
et vit dans les mêmes endroits. Je crois qu'on a authentiquement
constaté jusqu'ici une vingtaine de cas d’hybridation réelle et
effective entre Aippocrepidis et Fausta. Mon frère a trouvé à
Dompierre-sur-Mer, et gardé pendant plusieurs heures de suite, une
paire des deux Espèces solidement accouplées. La © Hippocrepidis,
après son union avec Fausta Œ, a pondu des œufs, mais il n’est
pas éclos de petites chenilles, tandis que M. Harold Powell, à
Vernet-les-Bains, obtint quelques larves d’une ponte hybride des
mêmes Zygena qu'il avait rencontrées unies, en 1908. Malheureu-
sement, toutes les petites chenilles nées de cet accouplement hybride
sont mortes. J'ai relaté le fait en question à la page 30 du Vol. III
des Ætndes de Lépidoptérologie comparée.
Il en fut de même pour les jeunes chenilles que Guenée avait
obtenues d’un accouplement hybride des Zygœena Achillee et
Filipendule, trouvé par lui au pied du Mont Salève, près Genève,
en juillet 1864 (Ann. Soc. ent. France, 1865; Souvenirs de Zermatt,
P. 92, 93).
La Zygœna Fausta se trouve aux environs de Paris, à La Ferté-
Alais, à Lardy et à Beaumont (Oise); dans les Charentes; aux
Pyrénées-Orientales; dans l'Isère; en Provence et dans le pays de
Nice; en Espagne et dans diverses localités de Suisse et d’Alle-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 615
magne. Elle donne lieu à différentes formes géographiques et à
des Aberrations très intéressantes.
1° Charente. — Fortunata, Rambur (Cat. Syst. Andal., p. 172;
note). La Zygœna Fausta se plait sur les plateaux crayeux des
collines charentaises, au milieu des bouquets de chênes-blancs qui
forment des petits groupes séparés par de larges clairières. C'est
un plaisir délicieux de rechercher ces exquises petites Zygènes dans
les localités calcaires que rend très attrayantes la grande variété
de la Flore naturelle. On aperçoit les Fausta voltigeant au soleil
et ressemblant à des mouches de couleur rouge orange; ou bien
on les découvre, les ailes fermées, posées sur les tiges d'herbes,
tenant leurs grosses antennes noires droites et érigées et présentant
un aspect très bigarré, tricolore, du plus agréable effet. Le 19 sep-
tembre 1005, les Zygœna Fausta et Hippocrepidis étaient extrè-
mement nombreuses dans les allées de la forêt de Saint-Amand-
de-Boixe; il y en avait une moins grande quantité, le 10 sep-
tembre 1906; mais en 1907, on pouvait en récolter beaucoup
d'exemplaires le 20 août, à Dompierre-sur-Mer; le 31 août, dans
la forêt de Chizé (Deux-Sèvres); le 2 septembre, à la forêt de
Saint-Amand-de-Boixe et à Angoulême, ainsi que nous pûmes nous
en rendre compte, au cours d’une rapide excursion.
Dans la région charentaise, la Zygena Fausta n'est généralement
pas de grande taille, bien qu’on y voie, mais à titre exceptionnel,
des exemplaires extrêmement développés. Les échantillons normaux
de la Fausta, en Charente, ont la teinte rouge des ailes d'un ver-
millon un peu orangé; les taches rouges des ailes supérieures sont
élégamment cerclées de blanc jaunâtre; l'abdomen est largement
recouvert, mais en dessus seulement, de rouge vermillon; le dernier
anneau abdominal est d’un indigo noir très vif et l'extrémité anale
est jaune orangé; le double collier est de la même couleur rouge
que le fond des ailes; le thorax noir, légèrement velu, est traversé
latéralement par deux traits verticaux, fins, blanchôtres. Les ailes
supérieures sont frangées très finement de fauve pâle; les infé-
rieures sont bordées d’un étroit liséré indigo; les antennes sont
610 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Re Un =,
d'un noir luisant, terminées par une massue épaisse; les pattes sont
Jaunâtres. Généralement, toutes les taches rouges qui décorent les
ailes supérieures sont liées entre elles par le liséré blanc jaunâtre
qui les entoure. La tache externe ultime, en forme de haricot, se
trouve ainsi unie à la tache extracellulaire, de façon à emprisonner
une petite tache arrondie indigo noir qui paraît comme une prunelle
très vive, encerclée de blanc, dans un entourage rouge.
Rambur (Cat. Syst Lépid. Andalousie, p. 170; note) remarque
que : « la Fausta, comme les Espèces du même groupe, pendant
l’accouplement, fait sortir de dessous le bord du huitième segment
deux touffes de poils nombreux, divergents, jaunâtres, et qui
d'ordinaire sont réunis en deux faisceaux couchés et complètement
cachés sous les bords du segment; en dessus, ils s’insèrent sur le
bord du neuvième, vers la base de la pince; ils paraissent exister
chez la plupart des Zygènes, mais moins prononcés ou rudimen-
taires et d’une couleur obscure ».
Mon ami Gabriel Dupuy, qui réside dans une localité particu-
lièrement favorisée pour la richesse et la variété de la flore et de
la faune entomologique, a récolté, au cours de sa carrière, un
nombre considérable de papillons, et notamment de Zygœna
Fausta. C'est lui qui, chassant à Angoulême avec son gendre,
M. Albéric Frémont, professeur au Lycée de Nantes, a successi-
vement capturé plusieurs exemplaires de l'Ab. Lugdunensis, Mil-
lière, à taches et à ailes jaunes. J'ai fait figurer sous le n° 177 de
la Planche XXIX, dans le Vol. III des Ætudes de Lépidoptérologie
comparée, un spécimen de l'Ab. Lusgdunensis, prise le 10 septembre
1908 sur le plateau de la Tourette, localité excellente située au sud
d'Angoulême, à une faible distance de la ville. Je suis redevable
de cette rare Aberration à la générosité inépuisable de M. Gabriel
Dupuy.
Mais des Aberrations d'un intérêt encore plus grand sont celles
que J'ai fait figurer sous les n° 108 et 100 de la PI XXII du
même ouvrage; la Fausta-Melusina (fig. 108) capturée à Angou-
lème, le 5 juin 1906, et la Fausta-Dupuyi (fig. 109) trouvée au
même lieu, le 6 juin 1906.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE G17
La valeur scientifique de ces deux Aberrations est très grande.
En effet, si l’on compare le n° 108 de la PI XXII, représentant
une Fausta-Melusina, aux n° 119 et 120 de la même PI. XXII,
figurant non plus Fausta, mais des Carmolica prises à Digne, on
constate aisément qu'une même Loi de Variation a atteint de la
même manière, et dans des pays différents, deux Espèces bien
distinctes, mais appartenant à un même Genre.
La Carniolica-Melusina, de Digne, n° 120, ne diffère guère que
par son collier blanc et ses épaulettes thoraciques de la Fausta-
Melusina n° 108, d'Angoulême, dont le collier rouge et la rayure
du thorax caractérisent l'Espèce : Fausta.
Le n° 100, Fausta-Dupuyi, avec sa tache ultime des ailes supé-
rieures blanche (celle qu'on appelle : Ze haricot, à cause de sa
forme), émane encore de la même Loi de Variation qui atteint la
Carniolica-Dupuyi, de Digne, n° 110, présentant elle-même la
tache dite : en haricot, de couleur blanche. Les n° III, 112, 113
sont des Carniolica qui forment pour la couleur du Æarcot un
excellent passage entre la forme normale à haricot rouge, figurée
sous les n° 115, 116, 117, 118 ét l’Aberr. Dzapuyt, n° 110.
Nous sommes donc, pour le Genre Zygæna, témoin de deux
preuves nouvelles de la Loi de Variation, dont j'ai déjà fait res-
sortir de nombreux exemples à la page 42 de la livraison XX des
Etudes d'Entomologie Ces nouveaux cas, non encore observés
jusqu'ici, nous sont fournis par les Fausta-Melusina n° 108 et
Fausta-Dupuyi n° 109, comparées aux Carniolica-Melusina n°° 119
et 120, et Carntolica-Dupuyi n° 110.
On ne peut nier l'importance des conséquences philosophiques
résultant de la constatation de faits qui démontrent irréfutable-
ment l'existence de ZLoës de Variation communes à diverses Espèces,
alors que ces Espèces font évidemment partie du même groupement
synthétique d'Espèces, auquel nous avons donné le nom de Genre.
Les Espèces sont des unités indépendantes les unes des autres,
formées par la collectivité des individus dérivant des mêmes
ancêtres; ce sont des spécialités qui restent toujours elles-mêmes;
ainsi Fausta et Carniohica, Fausta et Hippocrepidis, malgré les
618 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
tentatives d’hybridation naturelles dont nous sommes les témoins,
notamment entre Fausta et Hippocrepidis, mais qui ne parviennent
pas à changer, ni à modifier en quoi que ce soit les générations
successives d'aucune des Espèces, même de celles chez qui les faits
d'hybridation sont plus fréquents. Cependant les Espèces diverses
sont plus où moins rapprochées ou éloignées les unes des autres,
par leurs caractères propres. En les observant, nous constatons chez
certaines Espèces, qui sont pourtant séparées entre elles par des
particularités quelquefois importantes, des caractères communs qui
les rapprochent. Ces affinités, d’une part, nous invitent à une syn-
thèse, tandis que, d'autre part, ces distinctions nous obligent à une
analyse d’après laquelle nous classons séparativement les individus
pourvus de tel caractère (par exemple le collier rouge et les traits
thoraciques de Fausta), comparativement à tel autre (le collier
blanc, les épaulettes courtes et pointues bordées de blanc et le
thorax dépourvu de bandelettes, chez Carniolica).
Les Espèces distinctes les unes des autres par des caractères
constants et les Genres dans lesquels se groupent les Espèces que
rapproche un ensemble de caractères communs, constituent des
réalités présentement reconnues et admises par tous les Natura-
listes. Le Genre existe donc et il est la preuve de l’idée synthétique
initialement conçue par le Créateur. Nous avons acquis la per-
ception de cette parcelle de méthode qui est contenue dans l’œuvre
divine et nous sommes parvenus à la connaissance d’une vérité
d'ordre tout à fait intellectuel et idéal, obtenue par le travail
d'observation et de comparaison des êtres organisés auxquels se
sont attachées les générations successives des Naturalistes. C’est à
Linné que revient l'honneur d’avoir conçu la classification des
Espèces dans des Groupements, et c’est à ce Génie que nous devons
la base initiale de tous les progrès dont les réalisations successives,
plus rapides dans l’espace de moins de deux siècles que dans tout
l’ensemble des siècles précédents, ont pour origine le premier rayon
de lumière qui nous fut révélé par le Systema Nature.
Nous nous sommes donc approprié la connaissance de cette
partie idéale de la Création qui est un des éléments de la classifi-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE G19
RE
cation instituée par Dieu lui-même, non seulement Auteur de la vie
et Créateur des Espèces, mais aussi Auteur de la Méthode classif-
eatrice dont ce que nous appelons le Genre est la première expres-
sion; les Genres forment ensuite les Familles; les Familles forment
des ordres et ainsi de suite. Nous pouvons constituer les groupe-
ments à notre gré; nos essais seront plus ou moins satisfaisants.
L'essentiel, présentement, n’est pas dans l'excellence qui aurait déja
pu être obtenue de la constitution des groupements entre eux et les
uns par rapport aux autres. Il faudra plus où moins de temps pour
réaliser la perfection dans l'établissement de la classification;
d’ailleurs, on peut espérer fermement que les progrès seront l'œuvre
du temps et que des intelligences bien averties profiteront elles-
mêmes et feront profiter la Science d'éclairs révélateurs. Mais ce
qui importe, c'est que l’Idée initiale surgit et qu'elle reçût un com-
mencement d'application. Maintenant que nous possédons la per-
ception de l’idée vraie de classification méthodique des êtres
organisés, conçue par la Suprême Intelligence, et que nous y
ajoutons celle d’une Législation d'ordre supérieur qui règle tous
les détails, nous n'avons qu’à observer judicieusement et à accumuler
les témoignages. Voilà donc pour quelles considérations il est si
intéressant de rencontrer à Angoulême les Fausta-Melusina et les
Fausta-Dupuyi, tandis qu'à Digne, on trouve les Carntolica-
Melusina et les Carniolica-Dupuyi; car ces faits naturels consti-
tuent des preuves nouvelles et irréfutables, corroborant l'opinion
que nous avons déjà, et à différentes reprises, exprimée dans les
Etudes d'Entomologie.
Je trouve le plus grand intérêt des études entomologiques dans
l'observation de ces faits certains et réels que nous présente la
comparaison des productions de la Nature elle-même La Faune
et la Flore sont offertes et livrées à notre examen et à notre
réflexion; nous sommes doués d’une intelligence qui nous permet
de tirer de l'étude à laquelle nous nous consacrons telles déductions
qui nous paraissent légitimes et raisonnables.
Je ne me lasserai donc point de publier ce que je crois être la
vérité, lorsque je pense avoir réussi à en percevoir quelque parcelle.
620 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Dès lors je ne cesserai de déclarer, ainsi que je l'ai toujours fait
Jusqu'ici, d’après toutes les constatations que J'ai pu réunir des faits
naturels, que les êtres n’ont pas été jetés sur la terre au hasard et
dans une confusion chaotique. Il semble évident qu'ils ont été
classés suivant une méthode dont nous sommes loin de connaître
encore toute la divine perfection, mais dont le génie de Linné,
ainsi que Je lui en rends plus haut la justice, nous a révélé le
principe.
Cette variation si parallèlement conforme de deux Espèces
différentes d'un même Genre, dans deux pays différents, nous
paraît être une preuve considérable, s’ajoutant à toutes celles déjà
acquises, en vue de démontrer non seulement qu'à côté de la
Création matérielle des Espèces et des individus qui les composent,
il y a la Création purement idéale d’une Classification méthodique
d’après laquelle toutes les Espèces doivent être rangées dans
l'ordre que leur attribuent leurs affinités; mais encore qu'il y a une
Législation concernant tous les détails, parmi lesquels aucun ne
peut, dans ces conditions, paraître infime, ni rester négligé.
La réalité des Lois régissant la variation des êtres organisés
prouve la réalité de l'intervention du Législateur. Sa Suprême
Intelligence en a conçu l'harmonie; sa Toute-Puissance en a fixé
l'application; sa Providence en maintient la durée.
Les effets des Lois que nous constatons rendent témoignage de
la cause ne résidant pas ailleurs que dans l’action du Très-Haut.
Tous les passages existent entre les Aberrations Melusina et
Dupuyi, aussi bien chez Carniolica que chez Fausta. Jusqu'à présent
ma collection contient 7 exemplaires de l’'Ab. Fausta-Dupuyt, très
caractérisée; ils ont été pris à Angoulême au commencement de
Juin 1006, et à Dompierre-sur-Mer, le 27 mai 1900 et le
29 août 1007.
Les transitions existent également entre la forme type et l'Ab.
Melusina, aussi bien qu'entre la forme à ailes rouges et celle à ailes
jaunes (Zugdunensis, Millière). D'ailleurs on trouve des exemplaires
chez lesquels les taches rouges des ailes supérieures sont plus ou
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 621
moins rétrécies ou élargies et plus ou moins largement cerclées de
blanchâtre. Parmi les échantillons qui, par leur nombre prépon-
dérant, fixent la normalité de la taille et de la couleur, ainsi que
nous l'avons décrite au commencement de cette notice, pour la race
charentaise, il s’en trouve qui, exceptionnellement, se rapprochent
des formes méridionales à cause de la grandeur des ailes, du ton
carminé de la couleur rouge, de la suppression même du lséré
blanchâtre qui entoure les taches rouges. Mais ceci est parfaitement
conforme au fait que j'ai maintes fois signalé déja et qui se reproduit
si fréquemment chez les Espèces dont la forme est variable, avec
les diverses localités qu’elles habitent. L'apparition quelque part,
à titre d'Aberration, d'exemplaires différents de ceux qui consti-
tuent la forme géographique normale, mais qui se rapporteraient
plutôt à une autre forme locale, est d’ailleurs une règle démons-
trative de l'unité spécifique.
Aussi est-il bien nécessaire, pour les Espèces dont les formes
géographiques sont distinctes, d'étudier des séries nombreuses
d'exemplaires de chaque localité. Il n’y a pas d'autre moyen pour
apprécier avec quelqu’exactitude la forme normale d'une Espèce,
dans un lieu, par rapport à celle provenant d'une ou de plusieurs
autres localités différentes.
2° Région autour de Paris. — Feu mon ami Emmanuel Martin
capturait jadis à Beaumont-sur-Oise, au Nord de Paris, vers le
commencement de septembre, une race petite et peu vivement colorée
de la Zygæna Fausta. W avait trouvé à Beaumont un exemplaire
de l’Aberration à taches et à ailes brunes dont J'ai fait figurer
l'analogue avec le nom de érunnea, sous le n° 178 de la PI XXIX
du Vol. III des Ætudes de Lépidoptérologie comparée. L'échantillon
représenté par mes soins a été capturé en Thuringe.
Au Sud de Paris, à Lardy, on trouve à partir des premiers Jours
de juillet, comme aussi à La Ferté-Alais, en août, une race de
Fausta plus grande qu’à Beaumont-sur-Oise, assez variable, très
analogue pour l’ensemble de ses échantillons, dont j'ai sous les
yeux une nombreuse série, à la Fausta charentaise. Je crois qu'à
622 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Lardy et en Charente, la race de l’austa diffère peu de la forme
de Germanie, si J'en juge par quelques exemplaires de Stuttgart et
un nombre malheureusement un peu restreint d'individus ayant fait
partie de la collection Kuwert, de Berlin. La localité allemande,
chez les spécimens de la collection Kuwert, est indiquée, mais en
abrégé, et dès lors Je ne puis saisir le nom de lieu qui est trop
incomplètement écrit. Que les Entomologistes se préoccupent donc
de leurs successeurs, pourtant le plus souvent inconnus d'eux!
Celui qui a écrit au moyen de quelques signes ou lettres dont la
signification lui était sufhsamment connue, se trouvait sans doute
parfaitement fixé sur la valeur de son abréviation, et dès lors 1l
ne se préoccupait pas de l'avenir. Du reste, il ne se rendait proba-
blement pas compte de l'intérêt scientifique qu'un autre Entomo-
logiste aurait trouvé aujourd'hui à comparer des Æausta d’une
provenance allemande bien définie, avec des Æausta françaises
également pourvues de toutes les indications de localité et de date
de capture, qui sont si nécessaires à connaitre. Combien de fois
ai-Je prié des amis dont je visitais la collection de se souvenir qu'ils
édifiaient un monument pour la Science et qu'ils semaient peut-être
pour d’autres qui récolteraient, s'ils en laissaient les moyens. Quel
parti tirer en effet de papillons dont la provenance n'est pas net-
tement indiquée? Au contraire, un Lépidoptère dont l'épingle est
pourvue d'une étiquette contenant la documentation de lieu et de
date de capture sera toujours utile.
Il ne semble pas qu'on trouve /ausla, au mois de mai, aux
environs de Paris. Je suis porté à croire que Fausta y éclôt une
seule fois par an, en été. Ce serait un fait biologique intéressant
à constater et sur lequel je prends la liberté d'appeler l'attention
des Entomologistes parisiens, afin que nous soyons exactement
fixés. Alors qu'en Charente, la double apparition annuelle, au
printemps et en été, est pour Fausta et Hippocrepidis une règle
bien authentiquement observée, 1l semble que dans bien d’autres
régions, ausla n’a qu’une éclosion annuelle unique.
Ainsi semble-t-il en être à Digne, dans les Alpes-Maritimes et
les Pyrénées-Orientales.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 623
3° Digne. — La Zygena Fausta, dans les Basses-Alpes, est d'un
rouge plus carminé que dans les Charentes et qu'à Lardy; de plus,
le liséré blanchâtre qui entoure les taches rouges des ailes supé-
rieures est très aminai. C'est à Digne que Augustin Coulet trouva
la jolie Ab. /ricolor que j'ai fait figurer sous les n°* 28 et 29 de la
PL III de la livr. I des Ætudes de Lépidoptérologie comparée. Je
possède 7 exemplaires de cette Ab. #zcolor, tous pris à Digne, et
ma collection contient un spécimen qui est #icolor du côté gauche
et normal du côté droit. On obtient cette même Ab. #zcolor en
traitant par la chaleur les chrysalides de la Zygæena Fausta.
M. Hans Burgeff, de léna, m'a envoyé 8 échantillons de l'Ab.
tricolor dont les chrysalides avaient été soumises à une température
de + 49 degrés centigrades. J'avoue que J'ai peine à croire à la
survie des chrysalides, lorsqu'elles ont été soumises à une pareille
chaleur. Quoi qu'il en soit, si je compare les Æausta tricolor natu-
relles de Digne aux #icolor artificiellement obtenues à léna, Je
déclare ne trouver aucune différence entre elles.
4° Alpes-Maritimes. — Niceæ, Stgr. Race caractérisée par sa
taille relativement grande, la couleur rouge vermillon vif de ses
ailes, le développment des taches rouges, la réduction des lisérés
blanchâtres qui sont transformés en filets extrèmement minces et
quelquefois presque nuls. La variété Niceæ se trouve à Gorbio, au
Moulinet et à Castillon; elle diffère assez peu de Zætca, Rambur,
qui paraît être à Malaga la forme de Fausta; mais il ne faut pas
croire que toutes les Fausta des Alpes-Maritimes appartiennent à
la variété Niceæ. Dans la région du Var et des Alpes-Maritimes,
à Sallagriffon (8 septembre 1906); à Valbelle, près Méounes (1, 2
et 3 octobre 1906); à Péone (3 septembre 1906); à Montrieux, près
Méounes (17-23 septembre 1900); à Entrevaux, à Puget-Théniers,
à Dalnis, à Solliès-Pont, on trouve une race de Fausia assez sem-
blable à celle de Digne et tout à fait différente de celle qu'on peut
récolter en juillet et août au Moulinet et à Castillon. La race de
Digne fait la transition entre la forme de Faws/a charentaise et
parisienne et la forme Niceæ. Celle-ci est en outre caractérisée,
624 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
comme la Bætica, par son thorax entièrement noir et généralement
dépourvu des deux petites bandelettes jaunes verticales dont on
constate du reste l’accentuation plus apparente sur les Fausta du
Nord que sur celles du Midi. Cependant, sur les 75 Niceæ bien
caractérisées que J'ai sous les yeux, l'anneau abdominal rouge me
parait toujours être double ou triple, tandis que, selon Rambur,
l'abdomen de Bætica ne présente jamais qu'un seul segment rouge
en dessus.
5° Pyrénées-Orientales — Junceæ, Obthr. — Aux environs de
Vernet-les-Bains, je n’ai jamais vu Æausta au printemps; Je crois
qu'elle n'a dans les Pyrénées-Orientales qu'une seule éclosion
annuelle, en été. La race y est plutôt petite; mais la couleur rouge
est d’un vermillon carminé extrêmement vif. Peut-être est-1l pos-
sible de trouver partout où vit la Zygæna Fausta, à titre d’excep-
tion, des individus colorés d’un rouge aussi intense qu'à Vernet-
les-Bains? Mais nulle part, d’après ce que je connais, la couleur
normale de la race locale n'atteint ce degré de vivacité. Les taches
rouges des ailes supérieures sont généralement finement cerclées de
jaunâtre. Le papillon a des allures très vives, et la première fois
que Je le vis, en août 1880, dans le bois que de Graslin appelait :
el Pinats, je fus surpris de son activité et de la rapidité de son
vol. Je pris, avec une quantité d'exemplaires remarquables par la
couleur rouge carmin de leurs ailes et de leur anneau abdomunal,
une Q d'un Jaune orangé tout à fait pareille aux individus à
couleurs claires de la Charente; ce qui est la confirmation d'un
fait que J'ai observé bien des fois et relaté au cours de ce travail.
Niceæ diffère de /wnceæ par sa taille plus grande, la couleur
plus vermillonnée et moins carminée des parties rouges, la réduction
du liséré blanc Jaunâtre encerclant les taches rouges.
6° Andalousie. — Bætica, Rambur. — Figurée sous le n° 9 de la
PI. 12 de la Faune de l'Andaloustie. Ma collection contient des indi-
vidus provenant de Rambur; ce sont donc des co-types; d’ailleurs
la collection de Graslin possédait plusieurs exemplaires pris, avec
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 025
les types, à Malaga, en octobre 1835. Je ne crois pas qu'on puisse
considérer Pælica comme une espèce distincte de Fausta. Bætica
est plus grande généralement, mais pas toujours; car J'ai sous les
yeux deux © très petits; elle parait manquer des traits thoraciques
blanc jaunâtre, comme d’ailleurs la Fausta-Niceæ. Je ne parviens à
découvrir aucun caractère spécifique sérieux. Car la présence d’un
seul segment abdominal rouge, le cinquième segment et les valves
anales noires, ainsi que le fait remarquer Rambur (Car. Syst. Lép.
Andal., p. 171), ne me semblent pas d'une importance suffisante
pour valoir que Bætica soit érigée en Espèce séparée. Elle a été
rencontrée par Rambur aux mois d'avril et de septembre, sur les
collines arides, dans les environs de Malaga, tandis que la F'austa,
à Marseille, dit Rambur, quoique vivant sur le même Coronilla
juncea, bien que commençant à faire sa coque dès le mois de mars,
ne se montre qu'à la fin d'août et en septembre; mais nous savons
pertinemment que austa, dans les Charentes, éclôt au printemps
CHENÉLÉ
En Espagne, on trouve d’autres formes de Fausta, notamment
en Catalogne et à Albarracin. Dans cette dernière localité, d’où
feu l'abbé Zapater m'avait envoyé quelques exemplaires, la forme
est bien différente de Bætica. C'est plutôt Faustina, selon Rambur
(Faune de l'Andalousie, PI. 12, fig. 7); c'est-à-dire une espèce
petite, d'un rouge orangé non carminé, comme on en trouve quel-
quefois à Digne.
Rambur fait connaître (Car. Syst. Andal., p. 172; note) « qu'il
a reçu du célèbre entomologiste Klug un individu du Faustina,
du Musée de Berlin, étiqueté de sa main, comme étant un de ceux
rapportés autrefois du Portugal, par Hoffmannzegge (sic), et que
nous avons fait figurer comme objet de comparaison (Faune ent.
Andal., pl. 12, fig. 7. Zygœena Faustina, Ochs.). Elle ressemble
extrêmement à la #aus/a, dont elle égale à peine la taille, et en
diffère surtout parce que le rouge de la base des aïles supérieures
est séparé des taches du milieu, sur le bord antérieur, par la conti-
nuation de la bande noire qui n'est pas divisée par un prolon-
gement rouge comme chez la Fausta, et par les valves anales qui
40
620 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
sont noires; l’abdomen présente trois segments rouges ». Il y a
dans la collection Boisduval un échantillon absolument conforme
à la figure de Æaustina, donnée par Rambur; mais Jignore de
quelle localité elle provient.
7° Suisse. — Jucunda, Meissner. — Il me semble que c'est bien
la forme /wcunda, dont Fuessly a donné la figure sous la lettre H
de la Tab. I du Magasin fuer die Licbhaber der Entomologie,
en 1778, d'après un exemplaire pris dans les prairies des montagnes,
près Pfeffers, en Juillet. Pourtant Rambur croyait avoir découvert
cette variété locale aux environs de Genève et 1l écrit à son sujet,
dans le Catal. syst. Lépid. Andalousie, ce qui suit : « Nous avons
trouvé sur le mont Salève, près de Genève (département de la
Haute-Savoie) (*), une Zygène différente de la aus/a ordinaire
et que nous nommons Z. Faustula. Les taches sont plus petites et
moins confluentes; les deux basilaires sont en partie divisées et la
seconde ne s'étend pas sur la marge postérieure; la bande de la
couleur du fond qui sépare ces taches de celles du milieu n'est
pas divisée par du rouge; l'abdomen est noir et n'offre que des
atomes rouges en place des segments de cette couleur; elle parait
en Juillet ».
Dans les Annal. Soc. ent. France, 1865, p. 91-02, sous le titre
de Souvenirs de Zermatt, Achille Guenée a consacré une notice
assez développée à la Zygœna Jucunda qu'il appelle Genevensis,
Millière. Guenée avait capturé sa Genevensis au pied du Mont
Salève, à la fin de juillet 1864, lorsqu'il effectuait son retour de
Zermatt. Aucune mention n'est faite par Guenée de l’article précité
écrit par le D' Rambur. Guenée traite de quelques caractères de
la Z. Genevensis et, à propos de l’anneau abdominal, 1l constate ce
qui suit : « L'anneau abdominal rouge n'est pas non plus cons-
tamment absent: il laisse, au contraire, des traces très apprécrables
(*) Le Cat. syst. Lépid. Andal. porte la date 1858; mais la publication doit
avoir été faite bien plus tardivement, puisque le département de la Haute-Savoie
n'existait pas en 1858 et que sa création est postérieure à la guerre d'Italie qui
eut lieu er 1850.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 027
chez la très grande majorité des exemplaires; seulement 1l nest
Jamais complet en dessus et se réduit à des séries de poils bordant
les incisions, et 1l est toujours très nettement interrompu en
dessous »; puis, continuant à s'occuper de la variabilité du caractère
que représente l'anneau abdomunal, 1l ajoute, en note, l'observation
suivante : « C'est du reste un singulier attribut des Zygenes que
cette ceinture rouge qui est alternativement présente ou absente
chez les espèces les plus voisines, qui, nulle chez l'Azlaris, réduite
à un segment chez la Bæñca, en occupe deux chez la f'austa Q,
trois chez l'Uccitanica, quatre chez la Læta et envahit l'abdomen
entier chez Ganymedes. Puis, nous la voyons se montrer furtivement
chez quelques Q d'Onobrychis, tenter ‘parfois le dessus de
l'abdomen chez Æormosa, quitter certains O' de Sarpedon pour
disparaître chez Contaminez. Ne dirait-on pas que la Nature a
voulu nous fournir un moyen tout élémentaire de séparer les
espèces, puis que, se ravisant, elle l'a supprime malicieusement chez
certains individus pour éprouver notre tact et nous défendre les
systèmes absolus? »
Feu mon ami Guenée met sur le compte de Dame Nature des
malices bien noires et des combinaisons bien subtiles. Pour parler
sérieusement, les distinctions spécifiques qu'on pourrait tirer de la
coloration en rouge des anneaux abdominaux chez les Zygæna
sont illusoires. [1 semble que presque toutes les espèces du genre
Zygæna peuvent avoir, ou non, l'abdomen 7xbro-cingulatum,
comme elles peuvent avoir les taches des ailes supérieures et les
ailes inférieures rouges, jaunes ou brunes; comme elles peuvent
avox, ou non, les taches des ailes supérieures bordées d’un liséré
blanchâtre ou Jaunâtre; comme elles peuvent avoir les mêmes
taches des ailes supérieures confluentes ou séparées; la couleur
noir indigo du corps et du fond des ailes transformée en gris
argenté; la bordure bleu indigo des ailes inférieures limitée à un
fin liséré ou développée au point d’envahir toute la surface des
ailes; la 0° tache ultime des supérieures présente ou disparue.
Toutes ces variations se manifestent en vertu des Lois qui les
règlent pour le Genre de Lépidoptères auxquelles elles sont appli-
628 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
quées et sur lesquelles nous avons cru devoir appeler ci-dessus
l'attention des Naturalistes.
M. Abeille a écrit des observations très intéressantes sur la vie
évolutive de la Zygeæna Fausta dans les Bouches-du-Rhône et les
environs de la Sainte-Baume. Il n'a constaté dans ces contrées
qu'une seule génération annuelle, en été. Les chemlles de F'austa
sont détruites par les parasites, en nombre considérable. Diptères,
Tachinaires et Hyménoptères de la Famille des Chélonides et des
Genres Rogas et Microgaster réduisent énormément le nombre des
petites chenilles de Fausta. Les plantes nourricières sont : à la
Sainte-Baume, l'Ornithopus perpusillus, plante de la famille des
Papilionacées, tirant son nom : Pzed d'oiseau, de la forme et de la
disposition de ses gousses; et dans les Bouches-du-Rhône, comme
à Malaga, la Coronilla juncea, également de la famille des Papi-
lionacées, sous-arbrisseau à fleurs Jaunes, répandu sur les coteaux
de la Provence, en Espagne, au Portugal, en Italie et en Algérie.
Le nom de Coronille, diminutif du latin Corona, indique la dispo-
sition des fleurs en couronne. L'abbé Coste, dans la Flore descriptive
et illustrée de la France, énumère 9 Espèces de Coronille croissant
spontanément en France et 20 environ pour l'Europe, l'Asie occi-
dentale et le Nord de l'Afrique. Elles sont toutes fourragères et
plusieurs sont cultivées pour l’ornement des jardins.
Zygæna Carniolica, Scopoli (Æx/omol., 478).
Parfaitement figurée par Johann-Caspar Fuessly sous la lettre G
de la Tab. I du Magasin fuer die Liecbhaber der Entomologie,
en 1778. Les taches sont bien nettement séparées, entourées de
blanc, d’une couleur carminée, avec l'abdomen tout noir et sans
anneau rouge. C'est, dit Fuessly, le Sphinx Carniolica de Linné
et Fabricius (Want. 1); le Sp. Onobrychis, du Wienerverzeichniss;
le Sp. septima, de Schaeffer (/cones, Tab. 80, fig. 4 et 5).
Fuessly publie (p. 114) la diagnose latine suivante : « Z7gæna
Carniolica : atra, alis anticis cyaneis punctis quinque sanguineis
subocellatis, posticis rubris, limbo nigro. Habitat in Austria ».
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 629
L’Espèce ne se rencontre ni en Angleterre, ni en Bretagne. Elle
est répandue dans les contrées calcaires de la France, depuis la
Normandie jusqu'aux Alpes-Maritimes. Elle habite l'Italie, la
Suisse, l'Allemagne, l'Autriche, la Sardaigne, les Pyrénées-Orien-
tales, l'Espagne et l’Algérie; mais les variations géographiques et
les races locales sont nombreuses, ainsi que les Aberrations. Je
considère que Occitanica est une simple forme locale de Carniolica.
Je suis cependant moins convaincu que Orana et les autres races
algériennes soient spécifiquement identiques à Carniolica. Cepen-
dant je les réunis dans la même unité spécifique, comme l'ont fait
d’autres Entomologistes.
Dans le Valais, notamment aux environs de Martigny et de
Vièce, la forme normale a l'abdomen entièrement noir, le double
collier blanc, le thorax mélangé de poils courts blanchâtres, les
épaulettes courtes, pointues, triangulaires, bordées de blanc; les
taches des ailes supérieures sont d’un rouge carminé un peu vineux,
mais vif, largement cerclées de blanc. Les Aberrations par extension
et envahissement de la couleur blanche des cercles qui enserrent
les taches rouges ne sont pas rares. Telle est Ab. Wezleri: qui est
figurée sous le n° 30 de la PI. III de la 1° livraison des Æ7udes
de Lépidoptérologie comparée. On obtient l'Ab. Wezleri, comme la
Fausta-Tricolor, en soumettant les chrysalides à une température
de 40 degrés centigrades au-dessus de 0.
Le n° 32 de la même PI. IIT est une transition entre la forme
normale et l’Ab. Weïleri la plus caractérisée. M. Wullschlegel a
capturé à l'air libre environ 25 exemplaires analogues à celui qui
est figuré sous le n° 30; mais inversement on trouve à Martigny
des Carniolica dont les taches rouges sont presque entièrement
dépourvues de cercle blanc. Je possède un échantillon capturé par
M. Wullschlegel qui a presque totalement perdu la tache ultime
dite. en haricot, et deux autres spécimens dont le haricot rouge n’a
plus que de très légers vestiges de couleur rouge. La variation dans
laquelle Carniolica se meut à Martigny est donc très considérable ;
les taches rouges sont très larges ou très rétrécies; l'entourage
blanc des mêmes taches est lui-même très élargi ou très réduit; la
630 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
couleur rouge est parfois plus pâle et plus vermillonnée; mais sur
une très grande quantité d'exemplaires, je n’en ai vu qu'un très
petit nombre présentant des traces d’anneau abdominal rouge.
À Aix-les-Bains, en Savoie, la Zygæna Carniolica a généralement
aussi l'abdomen noir; du moins sur plus de 200 échantillons de
cette localité contenus dans ma collection, je n'en compte guère
qu'un sur dix offrant des vestiges plus ou moins prononcés de
ceinture abdominale rouge; par ailleurs, la forme diffère peu de
celle de Martigny; on constate seulement que l'entourage blanc des
taches rouges est plus généralement rétréci.
Au pied du Mont Salève, en Haute-Savoie, à la fin de juillet
et au commencement d'août, la Zygæna Carniolica est assez com-
mune et ressemble beaucoup à la forme valaisanne et aixoise.
I] m'a semblé qu'au col du Mont Genèvre, du côté italien, la
Zygæna Carniolica à abdomen noir, que je trouvais commençant à
éclore, le 18 juillet 1906, ressemblait aux races savoisienne et valai-
sanne; cependant la tendance à la perte de la tache en haricot m'a
semblé intéressante; mais je n'ai pas réussi à capturer assez d’exem-
plaires pour pouvoir émettre une opinion sérieuse au sujet de la
forme locale des environs du village de Clavières.
De Larche, localité très élevée des Basses-Alpes, j'ai reçu une
soixantaine de Carniolica récoltées par Augustin Coulet, en août
1806 ; la race est petite, à abdomen généralement tout noir, offrant
rarement des traces carminées. La couleur rouge est sans éclat, d’un
carmin un peu vermillonné; sur la moitié des exemplaires, l’entou-
rage blanc ou jaunâtre des taches des ailes supérieures est nul ou
presque nul; sur l’autre moitié, il est modérément accentué.
En Normandie, à Brosville et à Pont-de-l'Arche, on trouve
Carniolica volant dans la seconde quinzaine de juillet; la forme
ressemble à celle d’Aix-en-Savoie et de Martigny, avec une ten-
dance à être de plus petite taille. Je suis redevable d’une série
d'exemplaires bien choisis à l’obligeance de M. Dupont, agrégé de
l'Université, à Evreux.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 631
À Lardy (Seine-et-Oise), on trouve au commencement de juillet
une semblable forme de Carniolica; il en est de même dans le
Loiret où la récoltait autrefois feu le marquis de Lafitole. J'ai reçu
de la Roche-du-Mont, près Ornans (Doubs), et j'ai pris moi-même
dans le Val du Fier et du Chéran, en Haute-Savoie, une race de
Carniolica pouvant être classée avec celles du Valais, du Mont
Salève, d’Aix-les-Bains, c'est-à-dire avec toutes les races précitées
et celles de Lanslebourg et de Bourg-d'Oisans; toutes ces
formes se rapprochant d’ailleurs de celles de Thuringe et de
Berlin, et ne différant pas en réalité de l’exemplaire figuré
par Fuessly. Seulement il faut tenir compte de la variabilité imdi-
viduelle, relativement à l'extension et au rétrécissement des cercles
blancs qui entourent les taches rouges des ailes supérieures et aux
vestiges de ceinture abdominale carminée.
Les races dont l'étude offre le plus d'intérêt sont celles des
Alpes-Maritimes, d'Italie et surtout de Digne.
C'est cette race, superbe par ses variations et l'éclat de ses cou-
leurs, que je vais d’abord étudier. On peut dire qu'à Digne la
Zygœna Carniolica est un véritable Protée; tantôt pareille à la race
savoisienne et valaisanne, mais semblant toujours plus portée au
développement de la ceinture abdominale rouge, tantôt d'un rouge
vermillon orange, c'est-à-dire d’une teinte vive et gaie qui ne se
remarque nulle part ailleurs, avec les taches rouges confluentes et
remplissant presque toute la surface des ailes supérieures, où bien
presque sans cercles blanchâtres et avec les taches rouges de taille
plutôt petite et toutes séparées les unes des autres, au lieu de
confluer.
D'autre part, Occitanica et Carmiolica, à Digne, vivent côte à côte,
et l’on trouve dans cette localité nombre d'exemplaires dont la
large tache en haricot offre tous les passages les mieux gradués,
depuis le blanc absolument immaculé jusqu'au rouge orangé ou
carminé vif. Il y a des individus qui portent dans la tache en
haricot des vestiges extrêmement faibles de pigmentation carminée ;
d’autres, chez qui le semis d’atomes rouges est un peu plus accentué
et ainsi de suite, jusqu’au maximum.
632 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Dans la XX° livraison des Etudes d'Entomologie, j'ai fait
figurer 10 exemplaires variés de la Zygæna Carniolica, sur la PI 7,
depuis le n° 114 au n° 123 inclus. La Carniolica de Digne est
représentée sous les n° 118, 110, 120 et 121. Ce sont des papillons
bien différents, et lorsque je considère les 300 Carniolica de Digne
qui se trouvent alignées dans une même boîte, je pense qu’il y aurait
matière à leur appliquer bien des dénominations, si on voulait
désigner par un terme particulier chaque variété. On constate des
formes à taches rouges petites, ou larges, mais séparées les unes
des autres; d’autres à taches confluentes, largement cerclées soit de
blanchâtre, soit de jaunâtre, ou très finement lisérées de blanc, ou
encore presque sans aucun liséré; tantôt d’un rouge carmin et
tantôt d’un rouge orange, avec l’abdomen montrant 1, 2 ou 3 seg-
ments colorés en rouge. Tous les passages existent d’ailleurs entre
ces variations diverses qui s’entrecroisent et qui se compliquent de
la fusion insensible de Carniolica en Occitanica. Feu Millière m’a
donné jadis quelques Zygæna Carniolica conformes à certaines
Diniensis; 11 les avait prises à Grasse.
Je prie le Lecteur de se reporter à la notice concernant la
Zygena Fausta pour y trouver les renseignements relatifs à la
variation parallèle chez les deux Espèces, c’est-à-dire la variation
conforme des Fausta Dupiryi et Melusina et des Carniolica Dupuy
et Melusina, de Digne. Celles-ci sont figurées sous les n° 110, 119
et 120 de la PI. XXII du Vol. III des Æ/udes de Lépidoptérologie
comparée. On verra sur cette même Planche XXII les n°° 111, 112,
113 représentant des Carniolica de Digne formant la transition
entre Dupuy: et Occitanica; VAb. bicolor, de Digne, presque sans
liséré blanchâtre autour des taches roses plutôt que rouges; les
n° 115, 116, 117 consacrés à la figuration de 3 formes bien dis-
tinctes de Carniolica-diniensis.
D'ailleurs, les Zygæna Carniolica représentées sur la PL XXII,
depuis le n° 110 au n° 120 inclus, proviennent de Digne, à l’excep-
tion du n° 118 asymétrique (aile gauche normale, aile droite
Weileri) qui a été capturé à Ofen.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 633
Il doit rester de l'examen comparatif des n°* 110 à 120, défal-
cation faite de 118, l'impression qu'aux environs de Digne, patrie
de ces 10 exemplaires de la même Zygena Carniolica, un
Fruhstorfer ayant un stock de noms nouveaux à placer, se trou-
verait en face d’une occasion exceptionnellement favorable, surtout
si l'on y ajoutait les n°% 118, 119, 120 et 121 de la PI 7 de la
XX° livraison des Etudes d'Entomologie.
Dans les Alpes-Maritimes et dans certaines régions des Basses-
Alpes, telles que : Berthemont-les-Bains, Entrevaux, Allos, L’Es-
carène, Levens, on trouve des Zysæna Carniolica qui ressemblent
beaucoup à celles de Digne. Elles sont par conséquent très diffé-
rentes des Carniolica piémontaises; cependant, à Berthemont, on
rencontre deux formes de Carniolica, l'une à taches d’un rouge
orangé, encerclées de blanc ou de jaunâtre, l’autre à taches d’un
carmin très vif, comme en Piémont, et presque entièrement privées
du liséré blanc qui les enserre; mais dans les Alpes-Maritimes, on
trouve aussi Occitanica qui paraît manquer en Italie La Zygœna
Occitanica est commune à Vence, à la Turbie, à Tourette-sur-le-
Loup, au col de Castillon, et elle offre, notamment dans la localité
de Vence, l’Aberration chez laquelle la tache en haricot a tota-
lement disparu. J'en possède deux exemplaires qui sont reliés par
un grand nombre d'individus parfaitement transitionnels à ceux
qui ont la tache en haricot extrêmement large .et développée,
presque jointe aux taches voisines, c’est-à-dire à l’externe supérieure
et à la médiane inférieure, lesquelles sont centralement ponctuées
de rouge; mais par Aberration, cette ponctuation rouge peut aussi
disparaître et je possède une © dont la tache médiane inférieure
est grosse et entièrement blanche. Elle a été prise à la Turbie, au
commencement de juin 1006, par H. Powell. M. Decoster a capturé
à Vence, le 20 juin 1907, un Œ semblable.
On remarquera aisément combien l’Occitanica chez laquelle il ne
reste, en outre des taches basilaires, que les 3 taches arrondies : la
cellulaire, l'extracellulaire et la médiane inférieure, et à laquelle il
manque la tache ultime en haricot, est conforme à la Race italienne
de Carniolica.(ou plutôt Aberration fréquente) dite : Apemina, et
634 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
dont j'ai donné une figure sous le n° 114 de la PI. 7 de la
XX° livraison des Etudes d'Entomologie.
Les Occitanica dépourvues de la tache en haricot et réduites par
conséquent à $ taches, sur les ailes supérieures, appartiennent à la
forme espagnole que Staudinger a appelée /berica; mais, comme
on le voit, l'Espagne n'a pas plus la spécialité de cette variation
lberica d'Occitanica, qu'elle n’a celle de X7esenwettert et Stæchadis
pour Rhkadamanthus. Les Alpes-Maritimes partagent donc avec la
Catalogne l'avantage de fournir ces diverses variations. Au col de
Castillon, M. Decoster a pris, avec des Occitanica pures, une Occi-
tanica dont la tache en haricot montre des vestiges de rouge, tran-
sition qui est bien plus rare au milieu des Occitanica que parmi
les Carniolica.
Au Piémont, notamment à la Certosa di Pesio, la Carmiolica
présente une race superbe, grande, robuste, comme l'Hedysari,
Huebner (20 et 36), avec l'abdomen noir, le fond des ailes d’un
vert d'acier luisant, les taches des ailes supérieures et les ailes
inférieures du carmin le plus vif. Même, comme dans l’Æedysari,
Huebner, 20, on trouve en Piémont des exemplaires surtout Q
montrant dans la tache en haricot autant de petits grains de corail
qu'il y a d'espaces intranervuraux; c'est-à-dire que dans le haricot,
les nervures séparent par un trait blanc la partie rouge en autant
de petites taches qu’il y a d'espaces intranervuraux. La figure 29
donnée par Huebner rend bien ce caractère de la variété Æedysari;
mais en Piémont, comme ailleurs, la variabilité de Carmiolica est
très grande. À côté d'échantillons très développés, il y en a de
petits; de plus, tantôt les taches carminées sont encerclées de
blanchâtre et tantôt elles sont dépourvues de tout entourage blanc
ou jaunâtre.
Dans les Abruzzes, on rencontre l'Ab. Apenina; mais J'ai reçu
de Cerchio des exemplaires ornés de la tache en hancot, de sorte
qu'il ne me semble pas qu'Apenina représente une race; c'est sim-
plement une Aberration assez fréquente dans certaines localités.
À Paternopoli, c'est Hedysari, avec des taches d’un rouge carmin
vif, très grosses, généralement séparées les unes des autres et cer-
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 635
clées de blanc; mais à Paternopoli, comme ailleurs, 11 y a des
exemplaires très différents de ceux qui forment la généralité de
la race, soit par leur taille plus petite, soit par leurs taches rouges
rétrécies. À côté d’'Æedysari très caractérisée, je vois un C chez qui
la tache en haricot est très réduite et porte dans son milieu un
simple petit trait rougeûtre.
À Avellino, M. P. Fabresse a pris des exemplaires de Carntolica
tout à fait analogues à ceux du Valais et de Savoie, de sorte qu'on
peut résumer l’histoire de la dispersion des races de Carmiolica
dans l’Europe occidentale comme suit :
Depuis la Normandie jusqu'à la Savoie, y compris les environs
de Paris, la Champagne, la Franche-Comté, le Valais, Carniolica
donne une race homogène dans son aspect et ses variations ; 1l y a
un changement de forme dans les Basses-Alpes et dans les Alpes-
Maritimes où Carniolica et Occitanica se rencontrent; en Piémont,
où Carniolica redevient seule, la race plus septentrionale s'agrandit,
prend des couleurs plus vives et plus belles; ce mouvement se
continue en Italie centrale et méridionale, mais en semblant plutôt
s'atténuer que s’accentuer.
Du côté de l'Occident, Occitanica paraît être seule dans les
Pyrénées-Orientales, dans l'Aveyron et en Espagne. Elle donne à
Grenade l’Ab. Albicans, figurée par Rambur, sous le n° 10 de la
PI. 12 de la Faune de l'Andalousie. Cette Ab. est pour Occitanica
ce que Weileri et Amœna sont pour Carniolica. De plus, la variété
catalane /berica, dépourvue de la tache en forme de haricot et
présentant les points rouges réduits et quelquefois privés de tout
cercle blanc, est tout à fait l’analogue de l’italienne À pexina. Ma
collection contient plusieurs centaines d'exemplaires de la Zygæna
Occitanica des Pyrénées-Orientales; la forme y est assez stable,
bien que variant par le développement, ou inversement par le
rétrécissement des parties blanches qui entourent les taches rouges
des ailes supérieures.
En Espagne, Occitanica se trouve non seulement à Grenade et
en Catalogne, mais le long de la côte de la Méditerranée et
636 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
notamment à Tijola (Almeria) où se manifeste la tendance à l’Ab.
Albicans.
L'exemplaire le plus curieux que je possède de tout le genre
Zygæna est certainement la Zygæna Occitanica qui se trouve
figurée sous le n° 123 de la PL 7 de la XX° livraison des Æ7udes
d'Entomologie, et dont je parle à la page 53 du même ouvrage.
Ce papillon monstrueux, qui a 3 ailes supérieures et 1 aile infé-
rieure seulement, fut obtenu à Montpellier par Daube. Il faisait
partie de la collection Boisduval.
La chenille vit aux environs de Vernet-les-Bains sur le Doryc-
num suffruticosum; le cocon est ovoïde, jaunâtre, et le papillon
éclôt en été.
On trouve à Aguessac (Aveyron) une forme superbe d'Occitanica;
M. Dayrem en a pris dans cette localité une trentaine d’exem-
plaires, en août 1008. L'un d’entre eux a la tache en haricot
légèrement pigmentée de rouge; un autre a les taches rouges
entourées de cercles blancs exceptionnellement larges, de sorte que
les taches en question se trouvent très rapprochées et presque
contiguës.
Je connais, grâce à l'obligeance de M. Gédéon Foulquier,
l'Occitanica des Bouches-du-Rhône; mais j'ignore encore la Car-
niolica de ce département, ou plutôt de la Sainte-Baume, dont
M. Abeille fait une mention détaillée et qu'il décrit comme var.
Magdalene. L'étude faite par M. Abeille sur les Zygæna de
Provence est fort intéressante et très instructive; Je ne puis qu’en
conseiller la lecture aux Entomologistes qui affectionnent ce genre
de Lépidoptères. M. Abeille a élevé presque toutes les Espèces et
sa documentation au point de vue des plantes nourricières, des
mœurs et du parasitisme est tout à fait hors de pair.
L’Ab. Flaveola, très rare en France, est plus fréquente à Vienne
d'où me l’a envoyée M. Locke. Je fais figurer sous le n° 442 de la
PI. II du présent volume une Ab. Defschi, dont je suis redevable
a M. Ad. Peter, de Stuttgart. Cette Ab. Derschi a été prise par
M. Alois Detsch, en 1000; elle a l'abdomen tout noir, tandis que
Flaveola est flavocingulata; la couleur jaune est plutôt /wfeola que
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 637
Hlaveola. Enfin les taches jaunes des ailes supérieures sont imper-
ceptiblement bordées de blanc.
Je ne crois pas devoir disserter sur les races orientales de
Carniolica; je me borne à signaler la superbe forme de Syrie,
figurée par mes soins, d'après des individus pris à Akbès, sous
les n°“ 115 et 116 de la PI. 7 de la XX*° livraison des Æfudes
d'Entomologie. Feu Staudinger ne possédait pas cette forme qu'il
avait rapportée à tort à /'awrica, avec laquelle elle n'a pourtant
aucune similitude; c'est peut-être la plus belle des races de Car-
niolica, et je l'ai désignée, à cause de cela, sous le nom de
prestans.
En ce qui concerne les races algériennes d'Oyana, qui est peut-être
une forme géographique de Carniolica, je prie le Lecteur de se
reporter aux Ætudes d'Éntomologie.
Dans la XIIT° livraison, J'ai fait figurer Orana sous les n°* 52,
53, 54, 55 et 56 de la PI. VII, et j'ai donné les détails explicatifs
à la page 24 du même ouvrage.
La var. Nedroma est figurée sous le n° 3 de la PL III de la
liv. VI; enfin la var. A/lardi est représentée sous le n° 5 de Ja
PAP de vi
Depuis que ces publications ont été faites, J'ai reçu une quantité
de 140 exemplaires très variés, pris en Juin 1908, à Khenchela, par
M. H. Powell. Orana est répandue dans les trois provinces. Le
docteur Henri-Charles Martin l'avait prise à Philippeville et à
T'eniet. Tantôt elle a l'abdomen tout noir, tantôt annelé de rouge;
tantôt les taches rouges des supérieures sont largement cerclées de
blanc, tantôt l'entourage blanc est presque nul; tantôt les taches
rouges en question sont grosses et tantôt petites, de sorte que la
variation parait dériver exactement des mêmes lois que chez
Carnolica.
On a découvert en Algérie une nouvelle Espèce de Zygæna que
M. l'abbé de Joanmis a décrite sous le nom de 7'keryr, dans le
Bulletin Soc. ent. France, 1908. Cette Espèce n'ayant Jamais été
figurée jusqu'ici, je l'ai fait représenter sous le n° 225 de la
638 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
PI. XXXV de cet ouvrage, d’après un exemplaire pris à Hammam-
Rhira par MM. Walter Rothschild et Karl Jordan. Je suis redevable
de ce papillon à lobligeance de ces savants naturalistes.
M. Dayrem a capturé un seul exemplaire de la même Zygæna
T'heryi, au même lieu. Il me semble que la Zygæna T'heryi fait la
transition entre le Genre Zygæna et le Genre Arichalca, Wallengren,
créé pour quelques Espèces de l'Afrique tropicale.
J'avais fait figurer auparavant sous le n° 172 de la PL XXVIII
du Vol. III des Etudes de Lépidoptérologie comparée, une Espèce
de Zygæna décrite par feu Poujade, sous le nom d’Æscalerai, mais
restée non figurée jusqu'ici. Elle fut découverte en Juin 1800, par
Martinez de la Escalera, en Mésopotamie. Ainsi se trouve comblée
la lacune dans l’histoire de ces deux Espèces de Zygæna. Main-
tenant 1l sera facile de les reconnaître et de s’en rendre compte,
ce qui était bien malaisé avant que la figuration n’en fût publiée.
ADDENDA & CORRIGENDA
Antocharis Pechi, Ster. et Obthr.
Deux dames anglaises entomologistes pleines de zèle, Miss
Fountaine et Mistress de la Bâtie-Nicholl, ont capturé l'Axfhocharis
Pechi, Stgr., nec Obthr. aux environs d'El-Kantara, en Algérie.
Mistress de la Bâtie-Nicholl a bien voulu m'offrir 3 exemplaires
de cette Jolie Espèce qui est blanche en dessus, avec l’apex des
supérieures triangulairement marqué de noirâtre et une tache noi-
râtre en forme de croissant à l'extrémité cellulaire. En dessous,
l’apex et cette tache cellulaire sont d’un gris verdâtre; les ailes
inférieures sont uniformément d'un gris verdâtre, avec un point
blanc médian.
Roger Verity a donné des figures très exactes de Pech, sous le
n° 19 de la PI XLIX de l'ouvrage RAopalocera palæarctica.
L'Anfhocharis que J'ai figuré comme Pechi, sous le n° 11 de la
PI. V de la XII° livraison des Æ/udes d'Entomologie, est représenté
de nouveau sous le n° 4 de la PI XXXVII de XZopalocera
palæarctica, comme forme #elanochloros, Rœber, de Belia occi-
dentalis. Je ne possède que l'unique exemplaire pris par Merkl, à
Lambèse, et d'abord mentionné par moi, dans le Bulletin de la
Société ent. France, 1884, p. LXXXV. Il y a évidemment un
malentendu au sujet de l’'Axthocharis Pechi, Obthr. ec Stgr. Dans
l'ouvrage Les Macrolépidoptères du Globe, par Adalbert Seitz,
J. Rœber, auteur de la Partie Pzeride, décrit, à la page 53, avec le
nom de Mauretanica, et reproduit d'après une copie évidemment
P
040 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
prise sur la PL V de la XIT° livr. des ÆZ/udes d'Entomologie, mais
non d’après nature, l’Anthocharis Pechi, Obthr.; tandis qu'il décrit,
à la page 52, mais sans le figurer (du moins J'ai été inhabile à
trouver la figure), le mème papillon, avec le nom de #elanochloros,
du moins d’après l'opinion exprimée par Verity, à la page 176 des
Rhopalocera palæarctica, de sorte que cet Awfhocharis, encore à
peine connu Jusqu'ici, aurait déjà 3 noms, savoir : Peczt, Obthr.;
Melanochloros, Roeber; Mauretanica, Roeber. La vérité, c'est
qu'avec un seul papillon entre les mains, 1l me paraît impossible
d'établir à son endroit une discussion sérieuse et de fixer définiti-
vement la valeur spécifique propre de l'individu en question, ou de
l'attribuer, comme variété ou forme, à quelque Espèce. Je dois
attendre à posséder des documents complémentaires.
Antocharis Falloui, Allard.
Cette Espèce charmante, dont la chenille vit sur le Caprier
(Capparis droserif olia), est, depuis le mois de janvier 1910, l’objet
d'une étude et d’une recherche spéciales de la part de M. Faroult,
à qui Jai demandé de me transmettre, pour en faire part à mes
Lecteurs, le résultat de ses observations. Je les transcris un peu plus
loin, telles que cet habile collecteur les a libellées. L’Az/#ocharis
Falloui, si j'en juge par une série d'environ 125 exemplaires rangés
dans ma collection, varie peu, sauf pour la taille; cependant les
grosses taches longues vertes du dessous des ailes inférieures pré-
sentent quelque variation dans leur disposition relative et leur
confluence; de plus, elles ne sont pas parfaitement symétriques sur
les deux côtés, chez le même individu.
Voici donc les observations sur les Ax/kocharis dans les régions
voisines du Sahara, écrites au Rocher-Rouge, près El-Outaya, sur
ma demande, par M. Faroult, et arrivées à Rennes le 10 mai 1910 :
« Fin décembre 1900, j'arrivai à Biskra par un temps épou-
vantable, et ce n’est que dans les premiers jours de Janvier que
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE G41
J'a1 pu faire des sorties un peu intéressantes, destinées surtout à
étudier la flore qui doit guider tout bon chasseur dans ses
recherches entomologiques.
La sécheresse persistante a contrarié considérablement la végé-
tation; aussi était-1l très difficile de suivre les études faites anté-
rieurement par des savants dont la bonne foi ne fait pas l'ombre
d'un doute, mais qui n’ont séjourné dans cette région que pendant
une période très courte et en température normale.
Cette année, en général, tout est en retard; l'hiver a été long et
froid ; le 4 mai, J'ai vu les montagnes de Batna, Lambèse, Khen-
chela, recouvertes d’une couche de neige de 20 centimètres
d'épaisseur, et le vent du Nord soufflant constamment, a produit
un abaissement très sensible de la température dans toute la
région de Biskra.
Certaines espèces de papillons, dont l'apparition est très courte,
n'ont pu être capturées et ont passé inaperçues; le même fait s’est
produit en 1900, en Kroumirie; je vais en donner des exemples
très précis.
En 1908, année normale, je chassai à Aïn-Draham (Tunisie),
du 30 mai au 15 Juin; J'ai pris: Azcéia Dido, Papilio Lotteri,
Melanargia Lucasi Cigaritis Syphax, Rhodocera Cleopatra et
Rhamni, volant par milliers, etc., etc.
En 1900, je retournai à Aïin-Draham, fin mars, pour rester jus-
qu'en octobre et suivre toutes les apparitions.
Après les Saturnia Atlantica, Anthocharis Eupheno, Thaïs
Rumina, etc, pour lesquelles je n'avais aucun renseignement sur
les années précédentes, j'ai pris les Ayctia Dido, Papilio Lotteri,
Cigaritis Syphax, etc, en juillet seulement, aux mêmes endroits
exactement; soit avec un bon mois de retard; les Zygæna Alpgira
avec 15 Jours; quant aux espèces très communes : ÀAodocera,
Vanessa Erythromelas, Cigaritis, Melanargia, etc. elles n’ont eu
qu’une apparition très courte et en très petit nombre.
Les Anthocharis, notamment, paraissent à des époques très
variables, selon la température d’abord, et aussi selon les localités ;
c'est ainsi qu’on trouve parfois Belemia et ses variétés, en janvier
41
042 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
à Sfax, Gafsa, Gabès (Tunisie), et dans la région de Biskra
(Algérie), tandis qu'à Tumis, El-Kantara, Batna, on ne la trouve
qu'en avril et jusqu'en Juin; J'ai pris un seul #allou à El-Guettar,
à 20 kilomètres Nord de Gafsa, le 12 mai 1808.
Dans le Sud-Tunisien, Belemia vit sur presque toutes les cruci-
fères: sa chenille est très facile à élever; elle a deux générations,
janvier et avril; on trouve Belemia en grande quantité à Oudna,
près Tunis, en avril et mai; on en voit encore cependant quelques
rares exemplaires en Juin et Juillet.
L'Anthocharis Charlonia se trouve dans toute la Tunisie et
l'Algérie, mais à des époques bien différentes; j'ai pris Carloma
à Sfax, en février; à Tunis et plus particulièrement à Kalaat-es-
Senam, en avril; dans cette localité, elle paraît en si grand nombre
qu’on pourrait en capturer des centaines par jour; à Biskra, on la
trouve de février à juin; en Kroumirie, j'en ai pris un exemplaire
très frais, le 5 juillet.
Cette année, j'ai eu la bonne fortune d'élever quelques chenilles
d'Anthocharis Falloui. Pendant mes chasses au Rocher-Rouge, à
4 kilomètres de la gare d'El-Outaya, à 28 kilomètres au Nord de
Biskra, et où je suis actuellement campé, j'ai pu observer une Q
de Æalloui déposant ses œufs sur Moricandia arvensis, sorte de
Crambé comestible appelé AXroum (chou) par les Arabes. Cette
plante croit par exemplaires isolés, entre les fentes des rochers,
sur des rochers même, dans des endroits souvent inaccessibles.
Je récoltai sur ces plantes 12 œufs, le 10 mars, dont O seulement
me donnèrent de jeunes chenilles; 3 de ces jeunes chenilles
périrent sans cause apparente à la 2° mue; mais j'en trouvai
3 autres un peu plus grosses sur des plantes, dans la montagne;
je les mis séparément. Des 6 premières, 3 furent dévorées par les
autres, et des 3 dernières 1 en dévora 2, si bien qu'ayant dû
m'absenter pendant 2 jours, je ne trouvai dans les boîtes, à mon
retour, que 3 chrysalides d’une part et 1 chenille de l'autre
(5 avril); le 18 avril il est éclos une magnifique ©, et aujourd’hui
5 mai, J'ai encore 3 chrysalides bien vivantes.
Dans leur jeune âge, les chenilles restent au même endroit où
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 643
elles sont nées; puis elles changent de feuille, ou même se mettent
sur les fleurs qu'elles mangent au fur et à mesure qu’elles s'épa-
nouissent. |
Celles qui vivent sur les feuilles sont d’un joli vert tendre avec
deux bandes latérales jaunâtres très peu apparentes; tandis que
celles qui sont sur les fleurs et y vivent, sont d’un rose gai avec
les bandes longitudinales bien apparentes : ce fait s'explique en
ce que la couleur mauve des fleurs dont elles se nourrissent, se voit
par transparence de leur peau très fine; ces couleurs disparaissent
lorsqu'elles se nourrissent à nouveau de feuilles.
Il est assez difficile de trouver ces chenilles, car elles prennent
au repos des positions qui les font se confondre avec certaines
parties de leur plante nourricière : tantôt roulées à la base de la
tige florale, tantôt allongées en dessous des pétioles ou sur le bord
même des feuilles et légèrement en dessous; ce n’est que par leurs
excréments trahissant leur retraite qu'on peut les trouver.
J'ai pu capturer cette année plus d’une centaine de Falloui;
mais ce n'est pas chose facile; cette À #/%ocharis affectionne surtout
les sommets des montagnes arides des environs de Biskra; c’est
notamment à El-Outaya, près de la montagne de Sel, que j'en ai
pris le plus grand nombre.
Cette charmante espèce commence à voler le matin vers
10 heures, et seulement par beau temps; le vent paraît la déranger
beaucoup; elle descend du sommet des montagnes, passant rapi-
dement, allant d’une plante à l’autre sans se poser; rarement le
s'arrête sur une fleur où 1l ne reste qu'une seconde; la Q vole avec
une rapidité extraordinaire, ne laissant pas un petit endroit qu’elle
n'explore, à la recherche des Moricandia qui doivent nourrir ses
Jeunes chenilles, et sur lesquelles elle dépose ses œufs isolés au
milieu d’une feuille et généralement un seul sur chaque plante.
Jusqu'à midi, les Falloui descendent des sommets se dirigeant
vers la plaine, puis pendant une heure environ, on n’en voit plus;
ce n'est que vers 1 heure ou 1 h. 1/2 qu’elles recommencent à
paraître, regagnant les sommets d’où elles étaient parties le matin;
, \ » .
cest à ce moment quon peut les prendre plus facilement, en se
044 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
plaçant en embuscade dans un passage entre deux gros rochers,
autant que possible, ou dans une gorge.
Les Calicharis Nouna sont relativement très communs au Col
de Sfa, près Biskra, à El-Outaya, à El-Kantara; mais leur appa-
rition n'a pas lieu à la même époque; alors qu'a Biskra la saison
est très avancée, à El-Outaya, elle commence seulement, et MA DE
Kantara on ne pourra les chasser que fin mai et Juin.
En janvier, j'ai parcouru toutes les montagnes des environs de
Biskra, à 40 kilomètres à la ronde, sans trouver aucune trace de
Nouna; le 23, j'étais au Djebel-Senia, à l'Ouest du Col de Sfa
et au Nord de Fontaine-Chaude; ma femme a pris un c qu
paraissait éclos assez récemment. Comme il faisait un froid assez
vif, j'ai cherché des chenilles sur plusieurs espèces de plantes, et
j'ai eu la bonne fortune d'en trouver cinq très petites sur un gros
pied de Capparis drosenif olia.
Les Capparis poussent isolément dans les endroits les plus
arides et les plus inaccessibles; on en trouve beaucoup sur les
rochers détachés de la montagne.
Les chenilles recueillies en janvier se sont élevées très facilement,
comme du reste toutes celles que j'ai pu récolter par la suite; J'en
ai encore actuellement une cinquantaine à l'élevage.
Dans leur jeune âge, certaines chenilles (*) sont de couleur vert
clair avec deux bandes longitudinales brun rouge pâle, et une
ligne dorsale de même couleur, visible seulement sur les trois pre-
miers anneaux et sur les deux derniers, avec une interruption au
milieu; d'autres sont vert olive très foncé, avec deux bandes jJau-
nâtres de chaque côté, entre lesquelles il y a deux points brun
rouge sur les deux premiers anneaux; la couleur des chenilles
varie entre ces deux teintes extrêmes : vert clair et vert très foncé,
presque brun ; toutes sont légèrement pubescentes, surtout dans leur
Jeune âge.
(*} M. J. Culot a reçu la chenille et la chrysalide de VWouna envoyées par
M. Faroult, Il en a fait une excellente aquarelle qui sera reproduite dans Île
Volume V des Ztudes de Lépidoft. comparée. — Ch. OBTHR.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 045
Les chrysalides sont également très variables; du vert pâle au
Jaune et brun foncé en passant par toutes les teintes intermédiaires ;
on les trouve généralement en dessous des feuilles de Capparis,
ou dans les feuilles sèches, sous la plante.
Les chenilles sont cannibales; aussi, lorsqu'on les élève en
captivité, doit-on les mettre séparément par grosseurs; car, sans
cette précaution, les grosses mangent infailliblement les petites ;
quelquefois aussi elles s’attaquent même aux chrysalides (*).
Pour la première génération, la durée de la nymphose varie de
15 à 20 Jours; pour la seconde, elle n'est que de 12 à 15 jours, la
température étant plus élevée.
La Nouna vole de 10 heures du matin à 2 heures de l’après-
midi; un peu plus tard lorsqu'il fait bien chaud; comme allow,
on ne peut la prendre qu’à l’'embuscade, dans les endroits où les
Capparis sont nombreux; si on la manque au coup de filet, il est
inutile d'essayer de la poursuivre sans danger; la nature des
montagnes où elle vole empêche matériellement toute poursuite;
car c'est dans les endroits les plus escarpés qu’on peut la rencontrer
en plus grand nombre.
Les S, beaucoup plus nombreux que les ©, volent avec rapidité,
rasant le sol, ne se posant que très rarement au milieu des pierres,
et disparaissant comme par enchantement. Les Q viennent voltiger
autour des Cappanris où elles ne s'arrêtent qu'un instant, pour
déposer un ou deux œufs, puis elles vont à une autre plante.
Les Nouna présentent une grande variété, surtout chez les ©,
tant par leurs couleurs que par leurs dimensions.
Au moment où J'écris ces lignes, ma femme capture en face de
la tente une jolie Q qui vient voltiger autour d’un Capparis, ou
Câprier. »
(*) Les chenilles de Arc/ia Dido dévorent également les chrysalides de leur
Espèce; nous avons vu, à Rennes, cette année, en avril, une chrysalide de Pido
prête à éclore, mangée par des chenilles qu'on avait laissées dans la même cage.
— CH OBTHR,
646 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Argynnis Adippe, Linné.
Je suis redevable à l’obligeance de M. Holl d'une paire
d'Argynnis Adippe, var. Auresiana, Fruhst, prise à Tala-Rana
(Maillot, Algérie), le 12 juillet 1900. La forme de Adippe, en
Algérie, paraît, d’après ces deux échantillons, différer un peu de
la CAlorodippe des environs de Grenade, en Andalousie. Le dessous
des ailes inférieures paraît plus varié de couleur en Algérie. Le
comte Emilio Turati, dans Nuove Forme di Lepidotteri e Note
Critiche (Nat. Sicil., 1000), figure Awresiana sous les n°* 5 et 6 de
la Tav. I; malheureusement, en dessus seulement; car c’est le des-
sous des ailes inférieures qui est surtout intéressant et caractéris-
tique de la forme Awresiana.
Argynnis Niobe, Linné.
Ne semble pas exister dans le Finistère. Les exemplaires que J'ai
reçus de ce département comme étant des Viobe sont simplement
l'Ab. Cleodoxa d’Adippe.
Argynnis Aphirape, Huebner.
Espèce de l'Allemagne, de la Russie, de la Scandinavie et de la
Sibérie qui s'avance vers l'Ouest jusqu'aux Hautes-Fagnes, en
Belgique, où elle vole avec Colias Palæno et Argynnis Arsilache.
Dans les Alpes de Suisse, on n'a pas trouvé Afhirape jusqu'ici.
Cette Aygynnis A phirape éclôt en mai et juin; elle a été capturée
abondamment au plateau de la Baraque-Michel, à la forêt de
Saint-Hubert, à Hertogenwald, à Chiny, d'après les excellents et
savants renseignements fournis par M. Léon Fredericq, directeur
de la Classe des Sciences de l'Académie royale de Belgique, en un
discours prononcé dans la séance publique de la Classe des
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 647
Sciences, à Bruxelles, le 16 décembre 1004, sous le titre : La Faune
et la Flore glaciaires du Plateau de la Baraque-Michel (point
culminant de l’Ardenne). Grâce à l’obligeance de M. Henry Brown,
de Paris, J'ai pu participer à un intéressant envoi de Lépidoptères
recueillis en 1900 dans les Hautes-Fagnes belges. Les Colias
Palæno, Argynnis Aphirape et Arsilache étaient représentées dans
cette collection.
Argynnis Pales-Arsilache, Esper.
C'est une forme de Pales, habitant les plaines dans le Nord de
l'Europe et les basses montagnes du centre. J'ai omis d'en faire
mention au cours de l’article consacré à la Pales, des hautes mon-
tagnes, aux pages 216 et 217 du Vol. IIT des Æ/udes de Lépido-
térologie comparée. Arsilache se trouve en France aux environs de
Russey (Doubs), où elle a été prise par M. Hustache. M. Léon
Fredericq dit avoir trouvé Aysilache à la fin de juin et au commen-
cement de Juillet au Plateau de la Baraque-Michel, à la forêt de
Saint-Hubert et au Plateau de la Baraque de Fraiture.
Les ailes d'Arsilache sont plus larges et quelquefois plus arron-
dies que chez Pales; la figure donnée par Huebner, sous les n°* 36
et 37, est assez bonne. J'ai obtenu de la Hesse et du Harz quelques
très belles Aberrations par mélanisme.
Polyommatus Hippothoë, Linné.
À la page 145 du présent volume des Ærudes de Lépidoptérologie
comparée, Jai annoncé la publication de la traduction due aux
soins de M. Harold Powell, de la notice consacrée par M. Tutt,
dans son célèbre ouvrage, à l’histoire rétrospective du Polyormatus
Hippothoë-Dispar, en Angleterre.
Diverses circonstances ont retardé la mise au point de cette
traduction; mais M. Harold Powell ayant pu l’achever avant son
048 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
départ pour le Djebel-Amour (3 mai 1910), je suis heureux de faire
profiter les Entomologistes français d’un complément de docu-
mentation anglaise, au sujet du Polyommatus Hippothoë-Dis par.
On remarquera chez M. Tutt des renseignements déja publiés
par M. Barrett; mais cette seconde publication ne peut que renforcer
la première. Voici donc la traduction de la Notice imprimée dans
l'ouvrage de M. Tutt :
« Récit historique de Chrysophanus dispar Britannique
C'est un fait remarquable que les figures et la description les
plus anciennes de notre insecte Britannique se trouvent dans l’ou-
vrage d'Esper Sckmett. Eur. I, PI XX XVIII, fig. 1-2 (1777), p. 350
(1779). Tandis qu'il le décrit sous le nom d’Aippothoë, 11 exprime
de graves doutes sur son identité spécifique avec Æippothoë, Linné.
« Le dessus », dit-il, « est d'une couleur plus ardente et luisante
que P. Vrrgaureæ, et sa bande marginale extérieure est beaucoup
plus large; la Q possède des taches d'une régularité extraordinaire
en dessus, tandis que, chez Æippothoë, le dessus est plus foncé et
brun. Le dessus diffère d'une manière encore plus frappante de
P. Virgaureæ et de P. Hippothoë, avec lesquels il n'a rien de
commun. Les ailes de ce premier (Virgaureæ), en dessous, sont
d'une même teinte Jaune; les secondes ailes avec des points simples
et des taches bordées de blanc.
Veuillez comparer ceci avec l'insecte figuré! Ici le dessous est
gris, avec une vive teinte de bleu, et une large marge de la même
couleur; les taches pupillées sont bordées de blanc, tandis que
la bande marginale rouge vif suffit presque à elle seule à le
distinguer.
Les spécimens originaux qui ont servi de modèle pour les figures
sont de la collection du conseiller Jung, à Uffenheim (Bavière).
De son habitat, son époque d’éclosion, sa larve et son histoire
naturelle, on ne peut rien apprendre. »
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 049
Elle fut reconnue espèce Britannique par Lewin, /nsects of
Great Britain (1793), p. 84, PI XL, fig. 1-3, également sous le
nom de Æippothoë. Il dit que « quelques exemplaires ont été ren-
contrés sur un terrain marécageux en Huntingdonshire, et ont été
ensuite envoyés à M. Seymour, du Dorsetshire, qui les a présentés
à feue la duchesse douairière de Portland, et ils sont maintenant
dans la collection de J. J. Swainson ».
En 1708, Donovan, dans 7 Le Nat. Hist. of British Insects, VI,
p. 4, pl 217, décrivit et figura l’insecte, remarquant que « notre
P. Hippothoë est le plus grand et le plus rare des papillons appelés
« coppers » (cuivrés); nous avons entendu dire que cet insecte a
été récemment trouvé dans le Cambridgeshire.
Nos exemplaires viennent d'Ecosse; la Q est plus grande que
le , et ses ailes ont un plus grand nombre de taches noires ». Ce
n'est que lorsque Haworth publia l'ouvrage intitulé : Lepidoptera
Britannica, en 1803, que le nom Dispar fut appliqué à notre insecte
britannique, qui fut décrit alors comme « une nouvelle et très belle
espèce ».
Cet auteur nous informe que « le papillon fréquente les marais
du Cambridgeshire en Juillet, dans certaines années qui ne peuvent
être déterminées », et aussi que c'est une espèce nouvelle et très
belle rencontrée récemment par lui-même et ses très chers amis,
W. Skrimshire et F. Skrimshire, M. D. et autrefois par le célèbre
botaniste Hudson, dans le Pays de Galles. [1 ajoute que l'espèce
n'a pas été prise en Ecosse, comme l'a affirmé Donovan à la suite
de renseignements erronés ». Il paraîtrait que MM. Skrimshire ont
vu ce papillon pour la première fois près Ely, en 1707 ou 1708,
et que, sachant que ce n'était pas une espèce commune, ils sont allés
ensuite avec Haworth pour le prendre. La localité d'Aberdeen pour
Dispar paraît avoir été maintenue par Samouelle qui, en 1810,
donne (Ænt. Usef. Comp, p. 241) les noms de trois papillons
« cuivrés » (copper butterflies) comme habitant la Grande-Bretagne,
en plus du petit cuivré (Rumicia Phlæas). Ce sont : (1) « Zycæna
Dispar (le grand cuivré), le Papilio Hippothoë de Donovan.
Habite les marais du Cambridgeshire, et a été vu près d’Aberdeen,
650 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
en Ecosse ». (2) « Lycæena Chryseis (cuivré à bords pourpres).
Habite l'Europe; est extrêmement rare en Grande-Bretagne ».
(3) « Lycæna virgaureæ (cuivré rare). Habite l’Europe; très
localisé en Grande-Bretagne. Se trouve dans certaines parties du
Huntingdonshire ». Il est à peu près certain que les noms Z. dis par
et L. virgaurce ci-dessus employés se réfèrent à une seule et même
espèce.
En vue des remarques antérieures de Haworth, le maintien de
la localité d'Aberdeen, citée d’abord par Donovan, est tout à fait
inexplicable. Au sujet des remarques personnelles de Haworth qui
ont été publiées, il y aura intérêt à citer une lettre par lui écrite à
ce sujet au Rev. W. T. Bree, qui la communiqua à l'An. Mag.
Natural History, 1834, VII, p. 522. Dans cette lettre, Haworth dit :
« Quelques entomologistes firent une fois une excursion dans les
marais (fens), avec le but de prendre le beau Zycæna Dispar, ou
le « grand cuivré », qui, comme on le sait bien, fréquente les ter-
rains bas et marécageux. Les « cuivrés » furent capturés en grand
nombre. L'hiver suivant fut très pluvieux, et le terrain où les
cuivrés avaient été trouvés fut complètement inondé et demeura
même sous l’eau pendant un temps considérable. Les entomologistes
pensèrent que l’inondation détruirait certainement les « cuivrés »,
et que la race serait éteinte dans cette région. L'été suivant, cepen-
dant, les papillons furent trouvés de nouveau au même endroit, et
aussi abondants qu'auparavant. Ensuite le terrain fut soumis à
l’action du feu, et la surface entière fut brûlée en vue d’amélio-
rations agricoles. Après cette opération, les « cuivrés » ne furent
plus rencontrés dans cette localité ».
En 1824, Curtis mentionne l'espèce (Brif. Ent., fo. XIT) sous le
nom de Dispar (avec références à Haworth, Esper, Lewin et
Donovan), et enregistre sa capture à Vaxley Meer; d’autre part, 1l
annonce dans la deuxième édition de cet ouvrage que « ce superbe
papillon a été découvert d’abord au Pays de Galles par le célèbre
botaniste Hudson, et le D' Skrimshire l’a pris, il y a bien des
années, dans le marais de Bardolph (Bardolph Fen), en Norfolk.
Ces dernières années, il a paru en abondance énorme à Whittlesea
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE O1
Mere, en Huntingdonshire, et a été trouvé depuis le 25 juin jusqu'au
10 août. Au commencement de juillet, la chenille, la chrysalide et
le papillon ont été trouvés vivants le même jour.
Ce papillon est très actif et se cache en temps de vent au milieu
des plus hauts roseaux. Il fréquente, pendant les belles journées,
les espaces couverts de laiches et de graminées grossières qui
poussent là où les roseaux ont été fauchés ». Kirby et Spence (1826)
font mention de cette espèce dans leur /n{roduction to Entomology
comme suit : « Les marécages aussi ont leurs insectes particuliers.
Dans une région de ce genre, dans le « Isle of Ely », ce rare et
beau papillon, Zycena Virgaureæ, a été pris par un membre du
Trinity College de Cambridge », montrant qu'à ce moment encore,
la nomenclature qui servait aux lépidoptérologistes britanniques
était assez confuse. M. C. W. Dale affirme qu'après la capture des
exemplaires signalés comme ayant été pris par Haworth et
MM. Skrimshire, d’autres furent ensuite pris à Whittlesea Mere, en
juillet 1810, par Thomas Speechly, un vieux batelier employé par
son père, et plus tard par son père lui-même et MM. Standish.
Il dit : « L'espèce paraît avoir été très abondante, puisque plusieurs
centaines furent prises pendant les 10 années qui suivirent, par les
collectionneurs de Londres, qui visitèrent les « Meres » de Vaxley
et de Whittlesea, au mois de juillet, uniquement pour prendre des
spécimens. En 1827, M. Haworth prit cinquante exemplaires en
une seule journée, dans le Bardolph Fen, Norfolk; quelques-uns
furent pris aussi à Benacre, en Suffolk » (British Butterflies,
p. 47). En 1828, Stephens écrivit sur cette espèce ce qui suit : « Ce
splendide insecte paraît être restreint aux comtés marécageux de
Cambridge et de Norfolk, à moins qu'on n’admette le récit de sa
capture dans le Pays de Galles par Hudson; mais il s’agit proba-
blement ici de l'espèce suivante (Æippothoë), qui, d’ailleurs, peut
être un jour reconnue synonymique avec Z. Dispar. Dans les deux
premières localités, elle paraît exister en grande profusion, car plu-
sieurs centaines d'exemplaires ont été capturés pendant les dix
dernières années par les collectionneurs de Londres, qui ont visité
les « Meres » de Whittlesea et de Yaxley pendant le mois de
652 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
juillet, dans le but unique de prendre cet insecte, qui se trouve aussi,
dit-on, sur la côte de Suffolk à Benacre, mais il est possible cepen-
dant que cette localité soit celle de l’insecte suivant (Æ/1ppothoë) »
(Is Br CE RE MpSP);
Lequel des « cuivrés » était désigné par l'/1pp0thoë de Stephens
est bien douteux. En lisant la comparaison qu'il en fit avec
C. dispar, on serait porté à penser comme lui qu'il s'agissait d'une
aberration de cette dernière espèce, « la femelle d’A1pp0thoë
différant de celle de Z. dispar par la plus petite dimension des
taches du dessus des ailes antérieures, et en ayant le disque entier
des ailes postérieures en dessus obscurci par des taches plus foncées,
et sans les nervures fauves; les taches du dessous sont plus petites
et moins nombreuses que chez Z. Dispar ». Les observations géné-
rales qui suivent tendent, cependant, à nous faire conclure qu'il
avait importé des spécimens continentaux d’/rppothoë (comme
ceux de CAryseis et de Virgaureæ, que Stephens décrit également);
car, au sujet de l’insecte décrit sous le nom d’Æ1ppothoë, 11 écrit :
« La taille inférieure de l’insecte ci-dessus, aussi bien que la diffé-
rence en nombre et en dimension des taches ocellées du dessous
des ailes, et la couleur du dessus des ailes postérieures de la femelle,
ajoutées à la circonstance que, parmi plusieurs centaines de
L. Dispar prises à Whittlesea Mere, pas un seul spécimen ne corres-
pondait à la définition ci-dessus, paraissent indiquer le présent
insecte comme espèce à part. Le mâle que je possède était dans la
collection de feu M. Beckwith, et la femelle est celle de M. Haworth,
qui m'informe qu'il l'obtint, il y a bien des années, d’une vieille
collection formée par un monsieur demeurant en Kent, qui ne
contenait presque pas un insecte qui ne fût le produit de ce comté,
et appelée en conséquence le « Kentish Cabinet », ce qui rend pro-
bable, comme le suppose M. Haworth, que la vraie localité de
l'insecte est le comté de Kent ». Si peu de précautions étaient prises
dans ce temps pour séparer les spécimens britanniques et continen-
taux qu'on est forcé de croire qu'il s’agit d’une importation, et on
ne doit non plus oublier que c'était Hzppothoë et non Dispar qui
fut signalée en Kent. Nous ne croyons pas pour un instant que les
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 653
spécimens de Stephens et de Haworth étaient des Æ1ppothoë de
Kent.
La description favorise un peu la supposition que lespèce peut
être la forme rwtilus de C. Dispar; mais notre connaissance actuelle
de la chose est nulle. De plus, on peut soutenir qu'il y a quelque
chose à dire en faveur du maintien de ces individus sombres et
plus petits comme réellement des exemplaires britanniques (mais
non de Kent) de la forme 7wéilus, car M. G. Bethune-Baker déclare
que cette forme a été indubitablement prise en Grande-Bretagne.
Il écrit : « Je sais depuis bien des années que mon père prit le
C. Dispar ordinaire et aussi la var. rwtilus à une époque entre 1825
et 1834. Mon père me dit qu'il prit lui-même ses spécimens (huit
en tout). Tous, cinq Of et trois Q. sont dans ma collection. Un mâle
est un Xutilus typique; un autre presque typique, mais avec des
taches un peu plus grandes; tandis qu'un troisième tient le milieu
entre Dispar et Rutilus; les deux derniers sont des vrais Dispar.
Une des femelles est Xulus assez typique, une autre ressemble en
dessus aux exemplaires plus foncés qu'on prend quelquefois sur le
continent, c'est-à-dire avec des taches plus grandes sur le dessus
des ailes; mais les taches du dessous sont décidément plus grandes
que dans aucune de mes var. Kutilus, tandis que la troisième est
Dispar vrai » (Ent. Mo. Mag., Vol. XXVIIL, p. 190), et M. Sheldon
s'est depuis permis de douter (Æxr. Rec., VITE, p. 114) que les trois
exemplaires dans la « collection Tugwell », catalogués comme
ayant été pris dans « Say et Seal Park », fussent autres que des
Rutilus du type continental normal.
Vers 1833, Geyer, dans sa continuation du Sammlung Euro-
paischer Schmetterlinge de Hübner, PI CXCV, fig. 006-008, donne
d'excellents dessins de la forme britannique sous le nom d’A:#-
pothoë. Mais le jour de l'extinction n'était pas très éloigné, car, en
1847 ou 1848, la dernière capture de cette espèce en Grande-
Bretagne fut faite par M. Stretton, qui prit cinq exemplaires dans
le Holme Fen. En 1880, Merrin enregistra (Ex. Kec., XI, p. 208-
200) deux exemplaires censés de Monmouthshire; mais, comme
pour les fameux exemplaires de Langport (Woodland) et de
054 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Weston-super-Mare réputés avoir été pris dans le Somersetshire au
commencement du XIX' siècle, et l'exemplaire signalé de Worces-
tershire dans le « /llus. of Nat. Hist. of Worcestershire, p. 138 »,
de Hastings, on aimerait une information plus authentique.
À partir de ce moment, toutes les observations ayant rapport à
C. Dispar britannique ne sont que des souvenirs. Beaucoup sont
intéressants. En voici un de la plume de M. Sam. Stevens : « Je
me souviens bien qu’à la réunion de la British Association à Cam-
bridge, en 1844 ou 1845, Je crois, J'ai été présenté par M. Vernon
Wollaston, ou par le Rev. Hamlet Clark, à un nommé Rawlinson,
dit « l'homme aux pâtés » (the pie-man). Il avait l'habitude d'aller
pour le compte des messieurs de l'Université collectionner dans les
marais (Fens), les plantes, les insectes et autres objets d'histoire
naturelle en été, mais en hiver il vendait des pâtés. Rawlinson me
demanda si je désirais des chenilles du grand cuivré; je lui dis
que j'en prendrais quelques-unes. Deux jours plus tard, il m'en
apporta une douzaine; je lui dis que j'en aurais assez avec six, et
je les lui achetai au prix qu'il demandait, six pence chaque. Je les
emportai chez moi, et j'obtins par éclosion cinq beaux spécimens en
parfait état. À ce moment on pouvait acheter le papillon chez
les naturalistes-marchands de Londres, à 1 shilling et 2 shillmgs
pièce. Si seulement il avait été possible de prévoir ce qui est arrivé,
J'aurais certainement pris les douze chenilles et fait une grande
provision de papillons, car on en aurait pu faire une petite fortune »
(Science Gossip, 1804, p. 20).
Une autre réminiscence, qui, écrite par un collectionneur de
profession (feu « vieux Harding », de Deal), possède un intérêt
pathétique, puisqu'elle tend à abolir la fiction agréable et si rassu-
rante pour nous qui consiste à penser que l’extermination de cette
belle espèce n’est nullement due aux agissements directs des collec-
tionneurs, mais que ce fâcheux résultat a été amené par le drainage
des lieux par elle fréquentés. Voici, cependant, ce que Harding
a écrit :
« Il y a environ quarante ans, M. Ben]. Standish (le grand-père)
apprit que Dispar, ainsi appelé alors, avait été vu dans les marais.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 655
Li obtint un dessin du papillon, colorié par son père, descendit dans
les marais et le montra aux habitants, mais personne n'en savait
quoi que ce soit. M. Drake, des « Checkers » (une auberge), lui dit
qu'un homme qui travaillait dans les marais à couper les roseaux,
y logeait, et qu'il pourrait bien en savoir quelque chose. Quand cet
homme retourna de son travail, Standish lui montra le dessin et
lui demanda : « Avez-vous connaissance d’un papillon comme
celui-ci? — Oui, répondit l’homme, j'en ai vu aujourd'hui. — Eh
bien ! dit Standish, que faut-il que je vous donne pour me conduire
à l'endroit? —- Non, dit l'homme, j'ai l'intention d'en emporter une
quantité à Londres ». Standish lui offrit alors cinq shillings
(6 fr. 25) pour qu'il lui montrât la localité, mais l’homme refusa
de la lui indiquer, même pour une promesse de deux shillings par
insecte pris. Le propriétaire, cependant, indiqua à Standish l'endroit
où l’homme travaillait. Il réussit à le trouver et prit une belle série
de P. Hippothoë. 11 fut bientôt connu des gens des marais que ces
papillons valaient deux shillings (2 fr. 50) pièce à Londres, et
deux hommes vinrent de Cambridge, s'en emparèrent d'un grand
nombre et les emportèrent à Londres par boîtes pleines, où ils les
vendirent six pence (0 fr. 60) chaque. J'y suis retourné environ
trois ans plus tard et j'ai trouvé quelques chenilles. Elles parais-
saient très localisées, plus nombreuses, là où leur plante nourricière
— le Water dock — était le plus abondant. Les chenilles étaient
chassées par tout le monde, les jeunes et les vieux. J'en ai acheté
deux douzaines à une vieille femme pour neuf pence (© fr. 00
environ). De ces chenilles j'ai obtenu par élevage de beaux spécimens
que j'ai vendus un shilling chaque. M. Cole, à Holme Fen, en prit
une grande quantité. La cour de sa maison était tout près de leur
localité. La dernière fois que j'y étais, M. Cole me dit qu'il n'en
avait pas vu une seule depuis plusieurs années. La plante nourricière
y était en abondance au même endroit, mais de chenilles point. On
les avait trop chassées » (Æx4., XVI, p. 130).
Le fait que sa plante nourricière existait « en abondance » bien
après la disparition de l'insecte et que « les chenilles avaient été
trop chassées » est significatif. Les rapports des auteurs plus
656 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
récents sont, naturellement, tous extraits des publications anciennes.
Même aussi récemment que 1857, Stainton énumère deux espèces
de « cuivrés » britanniques à part CÆrysophanus Phlæas. Ce sont :
(1) « Chrysophanus Dispar (grand cuivré), et (2) CArysophanus
Chryseis (le cuivré à bordures pourpres) ».
À propos def” Dr524r,alécait- «ur, 27e. Rouge cuivré brillant,
avec une, ou plus d’une, tache noire sur chaque aile; marges exté-
rieures noires. Dessous — aile inférieure, bleu pâle, avec des taches
noires distinctes, VII-VIIT (juillet et août). Chenille verte, avec une
ligne dorsale plus foncée, et une ligne plus pâle de chaque côté
(Freyer). Sur Rumex hydrolapathum (great water-dock) et X.
Aguaticus, NI (juin). Trouvée autrefois à Whittlesea Mere et
Vaxley » (Manual, I, p. 55).
Stainton cite alors M. Bond comme suit: « Vous ne vous trompez
pas en supposant que j'ai une connaissance personnelle de €. Despar.
Je crains beaucoup que je n'aurai plus jamais ce plaisir, car je suis
convaincu que l'espèce a disparu des marais de Cambridgeshire et
de Huntingdonshire. Tout ce que je puis vous dire de leurs mœurs
est qu'ils étaient très actifs et timides, et ne volaient que lorsque le
soleil brillait; ils se posaient toujours sur un chardon fleuri quand
ils pouvaient en trouver un, s’envolant pour attaquer n'importe quel
insecte qui pouvait s'aventurer dans leur voisinage, allant ensuite
se poser ailleurs plutôt que de retourner au même endroit. Il était
à peu près inutile de les suivre si on les manquait du premier coup
de filet, car 1ls s'en allaient comme le vent, n’offrant que rarement
une seconde occasion de les prendre; ils étaient, au fait, difficiles
à suivre, parce que ce n'était pas commode de les garder à vue et
d'éviter en même temps les endroits marécageux ».
Newman (1871) ajoute entre autres choses : « Les variétés de
cette espèce ne sont pas communes; chez les exemplaires que J'ai
eus entre les mains, j'ai noté une uniformité de coloration remar-
quable; mais M. Dale m'informe qu'il possède une femelle presque
entièrement noire ». Il ajoute ensuite : « Ma connaissance de la
chenille et de la chrysalide date de bien des années, de l’époque
où je les ai rencontrées dans le jardin de M. Doubleday, à Epping,
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 657
où la même plante de Rumex hydrolapathum qui nourrissait les
chenilles existe encore ». L'auteur actuel pense qu'il possède, grâce
à la grande générosité du D' Chapman, un des derniers exemplaires
élevés par M. Doubleday sur cette plante. Quant à la variabilité
des dates d'éclosion, M. Newman cite les faits suivants : « Des
chenilles apparurent au commencement de juin 1826; 3-5 Juillet
1833: 19 juillet 1827; août 1819; 4 août 1821 ». M. J. C. Dale
fournit ces dates. Newman avait complètement abandonné l'idée
que cette belle espèce ait jamais été rencontrée ailleurs que dans
les comtés de Cambridgeshire et Huntingdonshire. Il dit que dans
le premier comté, elle a été prise « en abondance à Whittlesea Mere
(J. FE. Stephens); et n'a pas été prise dans le Cambridgeshire depuis
1845 (Thomas Brown) ». À propos de son existence dans le dernier
comté, nous lisons : « Yaxley et Holme Fens. La dernière capture,
composée de cinq exemplaires, fut faite par Stretton en 1847 ou
en 1848; tous furent achetés par M. Harrington. J'étais à Vaxley,
pendant plusieurs années consécutives après cette capture, mais Je
n'ai jamais vu un autre spécimen ni entendu parler d'une capture
de plus » (F. Bond). Newman ne mentionne pas le Norfolk et le
Suffolk, comtés cités par nous sur le témoignage de Stephens et de
M. C. W. Dale, comme fournissant des exemplaires, mais il n'y a
aucune raison de douter de l'existence autrefois de l’insecte dans
ces comtés.
Il y a un petit incident dans l’histoire de C. Dispar que nous
n'avons pu sonder. Il a son origine dans un rapport de la réunion
de la South London Entomological Society du O mars 1893, où
nous lisons : « Il y eut une discussion quant à l'existence de
Polyommatus Dispar Haw. à Camberwell (banlieue de Londres),
il y a cinquante ans, et M. Fenn et M. Tugwell notèrent tous deux
des spécimens provenant probablement de Kent, avant l’année
SAS (Er UReEc MIND" 121).
Nous avons déjà cité ce qu'a dit Stephens d’une espèce de
« grand cuivré » supposée avoir été prise en Kent, bien avant la
date de son ouvrage (1828), et qu'il décrivit sous le nom
d'Hippothoë.
658 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Le seul autre rapport que nous avons pu trouver ayant une portée
sur cette question est un paragraphe tout récent, un peu plus
détaillé que les notes de Stephens, quoique ayant évidemment trait
aux mêmes spécimens, par M. C. W. Dale, qui écrit : « Il (var.
Rutilus) à été rapporté comme britannique sous le nom d’/1ppothoë.
À ce sujet, mon père écrivit dans Zondons Magazine pour 1834 :
€ M. Haworth me dit qu'ils provenaent d'une vieille collection
appelée le « Kentish Cabinet », et passaient pour avoir été pris
près de Faversham. Je tenais un mâle et une femelle de feu
M. Latham, provenant de la collection du capitaine Lindegren, d’où
sortirent, probablement, tous les spécimens supposés britanniques »
(British Butterflies, p. 46). Voilà tout ce que nous trouvons en ce
qui concerne les exemplaires de CArysophanus Dispar du Kent,
sauf ce que nous avons déjà noté (Awfea, p. 422). Nous pouvons
noter quelques-unes des impossibilités concernant certaines localités
citées pour cette espèce. Nous avons déjà dit que Donovan croyait
aux exemplaires écossais, tandis que Haworth rapporte que l'espèce
a été prise autrefois au Pays de Galles par le célèbre botaniste
Hudson. M. J. B. Hodgkinson, de Preston, annonce dans l’Ento-
mologiss Weekly Intelligencer, Vol. IV, p. 10 (1858), quil vit un
exemplaire « dans le Cumberland », qu'il « l’observa attentivement
et le manqua malgré tout ». Ce récit en attira d’autres. Dans la
même publication, p. 131, M. W. Winter, de Ranworth, dit : « Cette
espèce vient d'apparaître de nouveau ici dans les marais; J'en ai
vu quatre hier, mais Je les ai tous manqués ». C'était le 10 juin 1858.
On note avoir vu un exemplaire dans les marais de Hackney
(Entom., Vol. VI, p. 221). La réalité de ces apparitions (et de bien
d’autres que je ne mentionne pas) me paraît bien douteuse. Pendant
de longues années, nous avons cru volontiers que cette belle espèce
nous appartenait entièrement, car il était connu de tous que les
figures de Duponchel (Hist. Nat. I, XII, 3-6) et de Boisduval
(Icones, I, X, 1-3), décrites sous le nom donné par Haworth, étaient
- dessinées d'après des spécimens britanniques; mais quand le
Catalog der Lepidopt. etc. de Staudinger, parut en 1871, on trouva
que, quoique le C. Dispar fût restreint à l'Angleterre, ce n'était
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 059
qu'une forme d'une espèce bien répandue sur le continent. Cette
espèce était le utilus de Verneburg (B#7r. [, p. 391), le Hippothoë
de Huebner (fig. 352-4), Ochsenheimer (1, 2, 83), Godart (EL 0,
sec. 5, 10 sec. 3), et Freyer (127).
A cette époque, le Ruilus avait été pris en « France, Allemagne,
le Sud-Est de l'Europe (citr. Graecia), Bithynie, Armémie et
l'Altai ».
Kirby aussi considère que le vrai type Däspar appartient uni-
quement à l'Angleterre. La var. Autlus, qui existe sur le continent
d'Europe, est, d’après Staudinger, plus petite, avec des taches plus
petites; mais puisque les exemplaires britanniques de Paspar
varient beaucoup quant à la taille, les uns n'étant certainement pas
plus grands et d’autres bien plus petits que les grands Xw#lus, une
autre distinction était nécessaire. Celle-ci fut fournie apparemment
par M. Howard Vaughan, qui attira l'attention sur la bande orangée
de la marge extérieure du dessous des secondes ailes, bien plus
large chez les individus britanniques de C. Dispar que chez la var.
Rutilus. Lang dit que tous les spécimens continentaux qu'il a vus
« appartiennent à la variété Rwfilus et sont si distincts qu'il ne
devrait exister aucune confusion entre eux et la vraie forme typique
prise autrefois en Angleterre ».
Il ajoute : « Le caractère le plus distinctif chez Ruflus, cepen-
dant, est l’étroitesse de la bande orangée du dessous des ailes
postérieures, près de la marge extérieure. J'ai examiné un grand
nombre d'exemplaires de Rutilus et aussi de Dispar, dans le but
d'établir quelque caractère constant qui permettrait de les différen-
cier, et Je n'ai Jamais vu un spécimen de Xutilus avec la bande de
la marge extérieure aussi large et aussi bien définie qu'elle l’est
toujours chez Dispar. Je suis donc disposé à considérer ce caractère
comme typique » (Butterflies of Europe, p. 91). Tout ceci était
admirablement clair, et ceux qui avaient placé leur or en « cuivrés »
britanniques respiraient librement de nouveau, car il avait été tout
dernièrement affirmé qu'une forme identique à celle de la Grande-
Bretagne venait d’être découverte dans les marais Pontins, près de
Rome, et en Egypte (!), et c'est un fait acquis — telles sont les
42*
660 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
singularités des espèces britanniques rares (et même éteintes) —
que la découverte de la même forme à l'étranger aurait été immé-
diatement suivie d’une augmentation du nombre des exemplaires
britanniques authentiques.
La dernière agitation, cependant, dans le monde des « cuivrés »,
fut soulevée par M. Bethune Baker, qui affirme qu'il possède des
individus de la variété Rutilus d'origine britannique indubitable,
capturés 1l y a bien des années avec le Dispar ordinaire dans les
Fens. Au point de vue scientifique, ceci est évidemment la chose la
plus naturelle possible, car il n’y a pas de doute que toutes les
formes locales d'une espèce puissent apparaîtra parfois comme
aberrations accidentelles dans toutes les localités habitées par
d'autres variétés de l'espèce. Mais c’est regrettable au point de vue
du spéculateur, puisqu'il ne peut plus affirmer que les var. Lutilus
réputées britanniques qui sont quelquefois mises en vente ne le sont
réellement pas. Deux var. Rwtilus véritables furent offertes comme
britanniques dans les salles de vente aux enchères, et achetées
comme telles, nous le croyons du moins, le 13 avril 1806, et « pace
Lang », nous ne nous sentons pas nous-mêmes capables de séparer
certains Dispar d'origine anglaise indubitable de certains Aytilus
indiscutablement continentaux. Les remarques de M. Bethune
Baker ont déjà été citées 27 extenso. Il existe encore quelques cen-
taines de C. Dispar britanniques; mais leur nombre diminue chaque
année. Les accidents, et la négligence dont souffrent certaines
anciennes collections, sont les deux principales causes de la dimi-
nution du nombre d'exemplaires. En conséquence, le prix de
C. Dispar montera toujours. En 1871, lorsque nous commencions
à collectionner, aucun marchand ne cataloguait le plus beau
C. Dispar plus de 15 shillings, et une somme dépassant une livre
(25 francs) pour un bon spécimen était considérée exorbitante.
Pendant que le nombre d'exemplaires diminuait et le nombre
d'acheteurs augmentait, les prix montaient lentement et sûrement,
et maintenant on peut considérer £ 5- 5 s. (131 fr. 25 c.) pour un
beau mâle, et £ 5- 10 s. (137 fr. 50 c.) pour une belle femelle,
comme des prix ordinaires.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 661
Pendant la vente de la collection Burney, en 1806, des mâles
furent payés #4 6- 10 s. (162 fr. 50 c.) et £ 5- 15 s. chaque, tandis
que des femelles montèrent à £ 6- 10 5, £ 6 et £ 5- 15. Dans la
collection Fry, en 1896, 8 mâles ont produit £ 36 (900 fr.), et
6 femelles £ 30- $ s. (756 fr. 25 c.), certains exemplaires étant
payés #4 6- 15 s. (168 fr. 75), £ 6-6 s. et £ G pièce; en 1806 éga-
lement, une belle femelle de la collection Tugwell fut vendue £ 6,
et un grand mâle £ 7- 7 s. (183 fr. 75); une Aberration Q de
C. Dispar de la collection Howard-Vaughan, £ 6- 10 s. Dans la
collection Briggs, vendue en 1806, les prix les plus élevés furent
de Mots opourun OC, #5 (125 fr) pour une ©,
tandis qu'un record fut établi par la somme de £ 8- 8 s. (210 fr.)
payée pour un exemplaire exceptionnellement beau.
Dans la collection Stevens, vendue en 1900, la somme de
£ 71-155. (1.793 fr. 75) fut produite par 14 exemplaires; le prix
le plus bas étant de £ 2 pour un GO nain; un bel exemplaire du
même sexe se vendant £ 8 (200 fr.), et d’autres produisant respec-
hvement £ 0,26 16S 2006, ct 40:
De la collection Crowley, vendue en 1902, les plus fortes sommes
payées étaient de £ 5- 10 s. pour les mâles, de £ 6 et £ 7 chaque
pour les femelles. 16 spécimens de la collection Mason, vendue en
1905, réalisèrent 4 80- 6 s. (2.007 fr. 50), le maximum pour un seul
exemplaire étant de £ 8 pour une belle © chez laquelle les taches
basilaires des ailes supérieures étaient réunies. Si élevés que soient
ces prix, ils ne sont rien à côté de ceux qu'on peut s'attendre à voir
réaliser assez prochainement quand les « cuivrés » se vendront
peut-être à des sommes se rapprochant de celles données pour les
œufs du Great Auk (Grand Pingouin). Pour celui qui sait apprécier
le côté humoristique des choses, il y a beaucoup d’amusant dans
une vente de C. Dispar. On y voit le professionnel qui donnera
une cinquantaine de francs pour un spécimen, même en piètre état,
à condition qu'il soit intact; mais qui dédaigne l’exemplaire le plus
brillant s'il lui manque une antenne. Il connaît son marché et il
n'achète jamais ce dernier. Ensuite il y a l'amateur avisé, qui sait
attendre, et qui suit les ventes des collections d'importance secon-
662 © LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
daire. [1 vous dira qu'il a une série de 10 ou 12 exemplaires qu'il
Wa pas payés plus de £ 2 ou £ 3 chaque, et qui sont aussi beaux
et en aussi parfait état que des spécimens payés environ £ 5 aux
ventes des collections mieux connues et mieux annoncées.
Il y a aussi le collectionneur fortuné, auquel il faut le spécimen
coûte que coûte, qui écrase toute opposition.
11 peut être soutenu que tout ceci déroge à la science et que nous
ne devrions pas nous occuper de ces détails. Nous ne pouvons que
répondre que cette méthode est la seule possible actuellement pour
collectionner le C. Dispar britannique ».
Zygæna Achilleæ, Esper.
On trouve dans la fin de juillet et au commencement d'août,
en Italie, à Roccaraso et Palena, ainsi qu’à Partenio, une seconde
éclosion d’AcAilleæ, remarquable par sa petite taille et sa couleur
peu foncée. La Q a le fond des ailes supérieures grisâtre, le double
collier et les courtes épaulettes blancs. J'ai désigné cette race par
le nom d'alica-æstivalis. Elle est différente de toutes les autres
formes d'Acilleæ que je connais. Il semble que ce soit une
A chiileæ minima, aussi bien à cause de sa taille très réduite que
de son aspect faiblement coloré.
Zygæna Transalpina, Esper.
De même que Roccaraso et Palena, en Italie, donnent une
génération estivale d'AcÆillew plus petite et moins vivement
colorée, ainsi, au même lieu, M. Fabresse a trouvé, à la fin de
juillet et au commencement d'août 1907, une forme de 7 7ansalpina
dont j'ai sous les yeux une série de plus de 20 exemplaires, très
réduite de taille, par rapport aux proportions normales de l’Espèce.
La Zransalpina estivale de Roccaraso et Palena est tout à fait
comparable, sauf la bordure indigo des ailes inférieures qui est
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 663
plus large et l’ensemble qui se trouve plus intensivement coloré,
à l’Æippocrepidis-Provincialis que M. Harold Powell recueillit du
27 au 30 septembre 1006, à Montrieux, près Méounes (Var). Mais,
en dessous, les ailes supérieures de 7'7ansalpina-æstivalis de
Roccaraso et Palena manquent absolument du Webelstreif, tandis
que les ailes supérieures, chez Æippocrepidis-Provincialis, sont
largement lavées de rouge.
Zygæna Trifolii, Esper.
M. Gédéon Foulquier a capturé, le 26 septembre 1900, dans la
Crau (Bouches-du-Rhône), au Marais des Chanoines et du Mas-
de-Capelle, une forme de Zygæna Trifolii tout à fait analogue à
celle de Vernet-les-Bains. Je suis redevable de 13 exemplaires à
l'obligeance de M. Gédéon Foulquier. Pas un n'a les taches des
ailes supérieures confluentes. Ainsi que les ailes inférieures, les
taches en question sont d’un rose carminé pâle; la bordure indigo
des ailes inférieures n’est pas très large; c'est la 7r2folü-Dupon-
cheliana. | y a donc dans la Crau une seconde éclosion, à la fin
de l'été, de la 7 72folu.
Cette seconde éclosion peut arriver aussi pour quelques rares
exemplaires de Z7ifolii-Palustris, aux environs de Rennes.
M. P. Boulé obtint, vers le 17 juillet 1900, des petites chenilles qui
sortirent des œufs pondus dans une boîte de chasse par des
Zygæna Palustris capturées en juin, aux environs de Betton et de
Saint-Grégoire, sur les berges du canal d’Ille-et-Rance, près Rennes.
Ces petites chenilles mangèrent, pendant une dizaine de jours, des
feuilles de lotus; elles profitaient rapidement; mais elles cessèrent
de manger, changèrent de peau et de couleur; au lieu d’être d’un
vert Jaunâtre avec des bandes noires, elles devinrent très pâles et
presque blanchâtres; dès lors elles se fixèrent çà et là sur les parois
de la boîte et ne bougèrent plus, semblant prendre ainsi leurs quar-
tiers d'hiver. Cependant 3 chenilles firent exception à la règle
générale; elles continuèrent de manger et de grossir; enfin 2 firent
664 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
leur coque : la première vers le 4 août, la deuxième vers le 15 du
même mois; l’autre mourut avant de se transformer. D'une des
coques sortit, le 31 août, une superbe Zygère à taches confluentes,
parfaitement conforme aux échantillons capturés à la fin du prin-
temps de la même année. Il est donc possible qu’une éclosion de
quelques échantillons dont les chenilles ne se seraient pas immobi-
lisées vers la fin de juillet, et auraient continué à manger et à se
développer, paraisse dans la Nature à la fin d'août ou au commen-
cement de septembre, en Bretagne, comme dans les Pyrénées-
Orientales et les Bouches-du-Rhône.
EXPHIS MONDES" PLANCETES
Nos 224.
226.
No 227:
228.
PUBLIÉES DANS LA IVe LIVRAISON
des Études de Lépidoptérologie comparée
PLANCHE XXXV.
PariL10o Mucius d, Obthr. Siao-Lou, aux frontières de Chine
et de Thibet; capturé par les chasseurs indigènes de feu Île
P'Déjean tensr60$
. ZYGÆNA THERYI, J. de Joannis.
(Bulletin Soc. ent. France, 1908; p. 203, 204). Hammam-
Rhira (Algérie); captur. 26 mai 1908, par MM. Walter
Rothschild et Karl Jordan.
PÂpiLio MucIUS Q, Obthr. Leou-Fang, en Chine; captur. par
le P. X. Mouton.
Le Papilio Mucius est sans doute une forme nouvelle de
Macilentus; c'est un Papilio rare dont, depuis 30 ans, J'ai
reçu seulement un petit nombre d'exemplaires (19 Gr 20
pris à Mou-Pin, Tä-tsien-Lou, Siao-Lou et Leou-Fang. Les
2 Q© viennent de Leou-Fang; je ne connais pas la forme Q
du Su-Tchuen occidental. Les d de Leou-Fang sont de plus
petite taille que ceux du Su-Tchuen occidental.
PLANCHE XXXVI.
PAPILIO PHIDIAS C', Obthr. Annam.
(Bulletin Soc. ent. France, 1906; p. 156).
Ma collection contient 3 © semblables; mais la © reste
inconnue.
SEsIA LECERFI GO, Obthr. Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orient.).
(Bulletin Soc. ent. France, 1909; p. 186).
666 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
N°S 229. PAPILIO LACEDEMON Œ, Fabr., Donovan, Godart, etc. Hué
(Annam).
Le type-spécimen de Zacedemon Q, Fabr., jadis dans la
collection de Drury, fut le premier exemplaire qui fut connu
et resta le dernier jusqu'à la nouvelle découverte qu’en fit
M. Vitalis, aux environs de Hué. Ma collection contient 2 Œ
reçus en janvier 1907.
230. SOMABRACHYS CHRETIENI Œ, Obthr. Zebch, près Sebdou (Algé-
rie) ; septembre 1007.
(Bulletin Soc. ent. France, 1908 ; p. 48).
231. SOMABRACHYS KHENCHELÆ GC, Obthr. Khenchela (Algérie);
septembre 1908.
La Q a été figurée sous le n° 92 de la PI. XXI, dans la
III livraison des Ætudes de Lépidoptérologie comparée.
PLANCHE XXXVII.
N°5 232. CŒNONYMPHA ARCANIUS-INSUBRICA Œ', Raetzer. Crevola.
233. CŒNONYMPHA ARCANIUS-DUPUYI O', Obthr. Angoulême.
234. CŒNONYMPHA ARCANIUS-DUPUYI Q, Obthr. Bohême.
235. CŒNONYMPHA ARCANIUS-CŒCA Q, Obthr. Vienne.
(Voir Vol. IV; pages 24-27).
236. CŒNONYMPHA PHILEA-CŒCA ©, Obthr. Suisse.
(Vol. IV ; page 30).
237. POLYOMMATUS VIRGAUREÆ-CHRYZON ©, Obthr. Francfort-sur-
le-Mein.
(Bulletin Soc. ent. France, 1005 ; p. 56) — (Vol. JV ; p. 135).
238. SYRICHTHUS MALVÆ-ALBINA, Obthr. Autriche.
(Vol. IV; page 396).
239. AUGIADES SYLVANUS-FAUNUS ©, Turati. Uriage, dans l'Isère;
juin 1805.
(Vol. IV; page 360).
240. AUGIADES COMMA-DUPUYI, Obthr. Angoulême.
241. AUGIADES COMMA-ALBESCENS, Obthr. Angleterre (ex collection
Samuel Stevens).
(Vol. IV ; page 361).
242. HESPERIA THAUMAS-ANTIARDENS, Obthr. Oberwyk.
(Vol. IV; page 357).
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 607
Nos 243:
Nes
244.
HESPERIA LINEOLA-ARDENS, Obthr. Silésie.
Vol. IV; page 356).
POLYOMMATUS VIRGAUREÆ-VIRGINALIS ', Obthr. Silésie.
(Bulletin Soc. ent. France, 1905 ; p. 56) — (Vol. IV ; p. 135).
PLANCHE XXXVIII.
. POLYOMMATUS GORDIUS-DINIENSIS ©, Obthr. Digne (Augustin
Coulet; 1901).
. POLYOMMATUS GORDIUS-RONDOUI C', Obthr. Gèdre (Rondou;
5 août 1901).
. POLYOMMATUS GORDIUS-ALBESCENS Œ', Obthr. Grisons (ex coll.
Wiskott).
. POLYOMMATUS GORDIUS-NEVADENSIS Œ', Obthr. Sierra-Nevada,
côté de Huejar (R. Oberthür; juillet 1870).
. POLYOMMATUS GORDIUS-BELLIERI ©, Obthr. Sicile, dans les
montagnes (ex coll. Bellier).
. POLYOMMATUS GORDIUS-BELLIERI ©, Obthr. Sicile, dans les
montagnes (ex coll. Bellier).
(Voir Vol. IV; p. 114).
. LYCÆNA ÆGON-RADIATA ©, Obthr. Dunes entre Plouharnel et
Kerostin (Morbihan); captur. par P. Boulé; 4 à 6 juin 1900.
. LYCÆNA ÆGON-PLOUHARNELENSIS , Obthr. Dunes entre
Plouharnel et Kerostin (Morbihan); 4 à 6 juin 1900.
. LYCÆNA ÆGON-PLOUHARNELENSIS ©, Obthr. Dunes entre
Plouharnel et Kerostin (Morbihan); 4 à 6 Juin 1900.
. LYCÆNA ÆGoN ©, W. V. Lande au pied du Mont Saint-Michel,
entre Huelgoat et Brasparts (Finistère); 10 Juillet 1900.
. LYCÆNA ÆGoON ©, W. V. Lande au pied du Mont Saint-Michel
(Finistère) ; 10 juillet 1900.
. LYCÆNA ÆGoN ©, W. V. Forêt de Quimperlé (Finistère);
capturé en 1881, par feu le Lt Mathieu.
(Voir Vol. IV; p. 185, 186).
. LYCÆNA ÆGON-ALPINA O, Berce. Route du Simplon (Valais);
du 18 au 23 juillet 1902.
. LYCÆNA ÆGON-ALPINA ©, Berce. Route du Simplon (Valais);
du 18 au 23 juillet 1902.
(Voir Vol. IV; p. 200).
608 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
PLANCHE XXXIX.
N°8 259. LYCÆNA ARGUS-NEVADENSIS O', Obthr. Sierra-Nevada (côté de
Lanjaron) ; captur. juillet 1870.
260. LYCÆNA ARGUS-NEVADENSIS Q, Obthr. Sierra-de-Alfakar (An-
dalousie) ; captur. juillet 1870.
261 (ne ARGUS d et Q, Linné. Montagnes au-dessus de
Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales) ; captur. juillet 1906.
263. LYCÆNA ARGUS O', Linné. Digne; captur. juillet 1897.
264. LYCÆNA-ARGUS ©, Linné. Digne; captur. juillet 1907.
265. LYCÆNA ARGUS ©, Linné. Digne; captur. juillet 1897.
266. LYCÆNA ARGUS ©, Linné. Enchastrayes (Basses-Alp.) ; captur.
juillet 1807.
267 ) LYCÆNA ÆGON-HYPOCHIONA et Q, Rambur. Sierra-Nevada
(côté de Lanjaron); captur. juillet 1870.
269. LYCÆNA ÆGON-HYPOCHIONA ©, Rambur. Vernet-les-Bains
(partie chaude) ; captur. juin 1901.
270. LYCÆNA ÆGON-HYPOCHIONA Q, Rambur. Vernet-les-Bains
(partie chaude); captur. été 1891.
271. LYCÆNA ÆGoON ©, W. V. Digne; captur. 1905.
272. LYCÆNA ÆGoN O, W. V. Angleterre (ex collect. Briggs).
273. LYCÆNA ÆGON ©, W. V. Epping (Angleterre); ex collection
Howard-Vaughan).
274. LYCÆNA ÆGON ©, W. V. Angleterre (ex collection Howard-
Vaughan).
PLANCHE XL.
E
Nos LYCÆNA ARGUS-ARMORICANA © et ©, Obthr. Monterfil (Ille-
et-Vilaine); captur. 22 Juin 1909.
277. LYCÆNA ARGUS-ARMORICANA ©, Obthr. Monterfil; captur.
2 juillet 1900.
278 ) LYCÆNA ARGUS d et ©, Linné. Cauterets (Hautes-Pyrénées) ;
captur. juillet 1908.
280. LYCÆNA ARGUS-BELLIERI O, Obthr. Bastelica (Corse); captur.
7 Juillet 1905.
281. LYCÆNA ARGUS-BELLIERI Q. Corse; captur. 21 juillet 1905.
282. LYCÆNA ARGUS ©, Vienne.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 669
Nos 283
Nos
Nos
5: ÉLxcæxa ÆGoN d'et Q, W. V. Rennes; captur. juillet 1909.
285. LYCÆNA ÆGON O' et ©, W. V. Falaise près la pointe du
Grouin, au Nord de Cancale (Ille-et-Vilaine); captur.
juillet 1900.
286 )LYCÆNA ÆGON-ALPINA ' et ©, Berce. Cauterets; captur.
ou juillet 1883.
288 ) LYCÆNA ÆGoN-CoRSICA Œ et Q, Bellier. Corse; dans les
0 montagnes.
290. LYCÆNA ORBITULUS-OBERTHURI-CŒCA ©. Bords du Lac de
Gaube (Hautes-Pyrénées) ; captur. juillet.
PLANCHE XLI.
291. LYCÆNA ARGUS-LIGURICA Œ. Chine Nord.
292. LYCÆNA ARGUS-LIGURICA ©. Sidemi (Mandchourie); captur.
par M. Jankowsky, en 1882.
203 me ARGUS-LIGURICA Œ et Q. Cernobbio (Lago di Como,
Italie du Nord); captur. en juin 1907.
295. LYCÆNA ARGUS-LIGURICA Q. Vichy (Allier); ex collection de
Graslin.
A à ARGUS-LIGURICA Œ et Q. Uriage (Isère); captur.
juin 1805.
208. LYCÆNA ICARIUS-AVIATOR ', Obthr. Tyrol (IV; p. 220).
209. LYCÆNA ICARUS-RADIATA Œ, Oppeln.
300. LYCÆNA AMPHIRROË d, Obthr. Thibet; Chasseurs thibétains
de Tä-tsien-Lou; captur. été 1894.
301. LYCÆNA ARGUS-ÆGINA ©, Leech. Tä-tsien-Lou; 1903.
302. LYCÆNA TIRESIAS-MYRMIDON ©, Engramelle. Forêt de Rennes;
captur. 12 Mai 1900.
303. LYCÆNA LAMASEM ©, Obthr. Thibet; captur. par les chasseurs
de feu le P. Déjean, en 1805.
304. LYCÆNA ARGUS hermaphrodite. Quartier de Thauze, à Digne;
captur. par Augustin Coulet, le 19 mai 1908.
PLANCHE XLII.
305. LYCÆNA ARGUS-INSULARIS C', Leech. Yokohama (Japon); 1891.
306. LYCÆNA ARGUS-INSULARIS ©, Leech. Japon.
670 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
Nos 307) LYCÆNA ARGUS Œ' et ©, Linné. Larche (Basses-Alpes) ; captur.
308 par les chasseurs Coulet, en juillet 18097.
309. LYCÆNA EUMEDON-PEYERI Q, Husz. Fort-Naryne (Turkestan
oriental); captur. par G. S. Akulin, en 1907 (IV ; p. 255).
310. LYCÆNA EUMEDON-MARITIMA Œ, Obthr. Forêt de Picracave
(Alpes-Maritimes) ; captur. fin juin 1806 (IV ; p. 255).
311. LYCÆNA EUMEDON-SUBTUS-IMPUNCTATA Œ. Berlin.
312. LYCÆNA CALLIOPIS ©, Boisduval. Polygone de Grenoble (ex
collection Boisduval).
I
: 5 ÉLxcæxa ÆGON-JAPONICA Œ' et Q. Japon.
315 ) LYCÆNA ÆGoON Œ' et Q, W. V. Larche (Basses-Alpes) ; captur.
par les chasseurs Coulet, en juillet 1807.
317. LYCÆNA EUMEDON-SUBTUS-IMPUNCTATA ©. Berlin.
318. LYCÆNA EUMEDON-SPEYERI, Husz. Enchastrayes (Basses-Alp.) ;
captur. juillet 1807.
319. LYCÆNA EUMEDON-FYLGIA ©, Spgbg. Forêt au-dessous de
lPhôtel Ryffelalp (Valais); captur. juillet 1808.
320. LYCÆNA CALLIOPIS ©, Boisduval. Polygone de Grenoble (ex
coll. Boisduval) ; avec le n° 312, l’un des specimina typica
s
ayant servi à la description initiale.
PLANCHE XLIIT.
N°5 321. LYCÆNA ICARUS-RADIATA OC. Berlin.
22. LYCÆNA ICARUS-IMPUNCTATA ©. Vienne.
323. LYCÆNA ICARUS-CÆCA ©. Dusseldorf.
324. LYCÆNA ICARUS-CÆRULESCENS ©. Bourg-des-Comptes (Ille-et-
Vilaine); captur. par P. Boulé fils; fin mai 1907.
325. LYCÆNA ICARUS-TUTTI-IMPUNCTATA ©. Angleterre (ex collect.
Briggs, vendue Salle Stevens, les 27 et 28 octobre 1896) ; déjà
figurée par les procédés phototypographiques dans la Feuille
des Jeunes Naturalistes, 1900, n° 21.
326. LYCÆNA ICARUS-IMPUNCTATA 9. Digne (avril 1897); Æeuille
des Jeunes Naturalistes, 1900, n° 20.
27. LYCÆNA ICARUS hermaphrodite. Digne, dans le Vallon de St-
Jean; Victor Cotte; 2 août 1907.
(Vol. IV ; p. 240).
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 671
N° 328 ) POLYOMMATUS HIPPOTHOË et Q, Linné; transition à DISPAR.
329 ) Saint-Quentin (Gronier; ex coll. Bellier).
330. POLYOMMATUS DISPAR O', Haw. Angleterre (ex coll. Boisduval ;
Hope, 1820).
331. POLYOMMATUS DISPAR Q. Angleterre (ex coll. Howard-Vaughan,
vendue à la Salle Stevens, les 22 et 23 avril 1890, avec la
mention : « K. O. Standish’s coll. purchased 1880 »; déjà
figurée par les procédés phototypographiques dans la /’euille
des Jeunes Naturalistes, 1900, n° 16.
2. POLYOMMATUS XANTHE-RADIATA O. Prairics près l'étang des
anciennes forges de la Vallée (Ille-et-Vilaine ; mai 1800).
333- POLYOMMATUS XANTHE-RADIATA OQ. Silésie.
334. POLYOMMATUS XANTHE-MONTERFILENSIS Œ, Obthr. Monterfil
(Ille-et-Vilaine) ; printemps 1896.
35: POLYOMMATUS XANTHE-CUNEIFERA Q, Obthr. Mesneuf (Ille-
et-Vilaine) ; en août.
(MoirWol"IVEFptr05-110).
PLANCHE XL IV:
MELITÆA PARTHENIE, Godart.
(Lépidoptérologie comparée; Vol. IT: pages 255-257).
N°5 336. Ab. RHOIO ©, Obthr. Fond des carrières de Pince-Poches, en
Cesson, près Rennes; captur. 4 juin 1880 (exagération méla-
nienne de l’Ab. Ahoio Œ).
337. Ab. MOLPADIA ©, Obthr. Bourg-des-Comptes (Ille-et-Vilaine) ;
captur. mai 1806.
Huebner a figuré une Aberration tout à fait analogue,
attribuée à Athalia, sous les signes W J, 2, de la PI. IV de
la 2° partie du 2° Volume de Peitraege zur Geschichte der
Schmetterlinge; Augsbourg, 1700.
338. Ab. MOLPADIA d. Cesson, près Rennes; captur. 31 mai 1886.
339. Ab. MOLPADIA Œ. Laillé, près Rennes; captur. 23 mai 1900.
340. PARTHENIE ©, légèrement différente de la forme normale.
Rennes; captur. printemps 1906.
341. PARTHENIE ©. Cesson, près Rennes; captur. 29 mai 1800.
342. Ab. RHOIO ©. Bourg-des-Comptes, 1895 (exagération de l’Ab.
Rhoio S).
Nos
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
343. Ab. RHOIO OC. Bourg-des-Comptes ; 1892.
Huebner a figuré des Aberrations analogues, avec le nom
de Pyronia, sous les n°5 585, 586, 587 et 588. Les Auteurs ont
rattaché généralement ces Pyronia, Huebner, à Afhalia.
344. Ab. RHOIO OC. Bourg-des-Comptes ; 1896.
345. Ab. RHOIO Q. Cesson, près Rennes; captur. mai 1889.
346. Ab. RHOIO Q. Le Monetier-de-Briançon (Haut.-Alpes) ; captur.
été 1905 (exagération mélanienne de l’Ab. Xoto Q).
347. Ab. ELONGATA ©, Obthr. Aix-les-Bains (Savoie) ; captur. juillet
1905.
é représentant la forme normale de l'Espèce.
347 bis. PARTHENIE O
Le O' a été pris à Rennes en été 1896 et
347 ter. PARTHENIE Q
la Q à Cesson, le 2 juin 1880.
Les n°% 337, 338, 342, 343, 344, 345 ont déjà été figurés
d’après les procédés phototypographiques, sur la Planche 1
du Bulletin de la Société ent. de France, 1900; la notice, à
l'appui des figures, a été imprimée aux pages 276 et 277 du
susdit Bulletin.
Molpadia était sœur de Parthenie et gardait avec elle le vin
de leur père Staphyle; le vin était un don nouvellement fait
aux hommes. — XAoto, fille de Staphyle et de Chrysothémis,
était également sœur de Parthenie; elle fut aimée d’Apollon.
ELANCHE X[CV:
348 \ MELITÆA DICTYNNA-VERNETENSIS Cf et Q. Obthr. Vernet-les-
349 Bains (Pyrénées-Orientales) ; mai-juillet. N° 348 et 349, d';
359 350 et 351, Q.
(Lépid. comparée; Vol. IIT ; p. 247).
_ uELrra AURELIA d'et Q, Nick. Samoussy (Aisne); juin 1909.
5
354. MELITÆA AURELIA Ab. MELANAURELIA, Obthr. Osnabrueck.
(Lépid. comparée; Vol. III; p. 249).
_ MELITÆA NEVADENSIS, Obthr. Sierra Nevada, côté de Lanjaron ;
. juillet 1879- Nocc ets 7, OM 210 59,10)
ge (Lépid. comparée; Vol. III; p. 253).
35È
359 ) MELITÆA AURELIA Œ et Q, Nick. Route du Simplon;
360 juillet 1902.
(Lépid. comparée; Vol. III; p. 248).
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 673
—————————————————————_—_—]——_—__—————
No
Nos
361. MELITÆA AURELIA Ab. MELANOPTERA, Obthr. Berlin.
(Lépid. comparée; Vol. III; p. 240).
PLANCHE XLVI.
EREBIA LEFEBVREI, Dup.
(Lépid. comparée; Vol. III; p. 200).
362. LEFEBVREI OŒ. Mont Monné, au-dessus de Cauterets; juillet
1881.
363. LEFEBVREI ©. Hautes-Pyrénées (ex collection Bellier).
364. LEFEBVREI ©. Montagnes au-dessus de Gèdre (Rondou).
365 NiICHOLLI Set Q, Obthr. Autriche, Sud Tyrol; juillet 1895.
i (lépid. comparée; Vol. III; p. 304, 305).
367. LEFEBVREI-ASTUR Q, Obthr. Picos de Europa (Asturies) ;
juillet 1882.
368. LEFEBVREI-INTERMEDIA ©, Obthr. Montagnes du Cambrè:-d'Ace
(Pyrénées-Orientales) ; juillet 1862.
Gc |
e LEFEBVREI-PYRENÆA ©, Obthr. Frontière espagnole des Pyré-
_ nées-Orientales. Ull de Ter; 23-25 juillet 1900.
I
372. LEFEBVREI-PYRENÆA ©, Obthr. Arète Nord du Mont Canigou ;
17 août 1000.
373: LEFEBVREI-PYRENÆA ©, Obthr. Frontière espagnole des Pyré-
nées-Orientales. UII de Ter; 23-25 juillet 1900.
PEANCHE XEVITI.
S 374. ÊREBIA GORGE-RAMONDI Œ, Pierret. Cirque de Gavarnie
(Hautes-Pyrénées) ; 27 juin 1803.
375. EREBIA GORGE-RAMONDI Q, Pierret. Montagnes au-dessus de
Cauterets (de Guernisac).
(Lépid. comparée; Vol. III; p. 317).
370 ) ÊREBIA TYNDARUS-ARVERNENSIS Œ'et ©, Obthr. Auvergne (ex
collection Bellier).
(Lépid. comparée; Vol. III; p. 338).
378. EREBIA TYNDARUS-CASSIOIDES G, Ab. 2 ocelles à l’aile supé-
rieure gauche ; 1 ocelle à l'aile supérieure droite. Cauterets ;
juillet 1901.
(Lépid. comparée; Vol. III; p. 330).
674
N° 370.
N°5 386.
. CŒNONYMPHA DORUS-TRIOCELLATA ©, Obthr. Albarracin; été
394.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
EREBIA GLACIALIS-DUPONCHELI ©, Obthr. Basses-Alpes ; juillet
1807.
(Lépid. comparée; Vol. III; p. 304).
. ÊREBIA GORGONE ©, Bdv. Hautes-Pyrénées; montagnes au-
dessus de Gèdre; Rondou; 1907.
. ÊREBIA GORGONE ©, Bdv. Col de Riou, entre Cauterets et Luz
(Hautes-Pyrénées) ; fin juillet 1890.
(Lépid. comparée; Vol. II]; p. 313).
EREBIA TYNDARUS-CLEO, Huebner (382, O'; 383, 384, Q). Mont
Majella (Italie) ; Fabresse; 5 et 6 août 1907.
(Lépid. comparée; Vol. IIi; p. 338).
. EREBIA GLACIALIS-DUPONCHELI ©, Obthr. Basses-Alpes ; juillet
1807.
PLANCHE XLVIIT.:
CŒNONYMPHA DORUS-AUSTAUTI Œ', Obthr. Nemours (Oranie).
1907.
. CŒNONYMPHA DORUS-MICROPHTHALMA ©', Obthr. Millau (Avey-
ron) ; été 1904.
. CŒNONYMPHA DORUS Q, Esper. Environs de Verncet-les-Bains ;
été 1908.
. CŒNONYMPHA DORUS-ANDALUSICA Œ, Ribbe. Grenade (de
Graslin).
. CŒNONYMPHA DORUS-ANDALUSICA Q, Ribbe. Grenade; juillet
1870.
. CŒNONYMPHA DORUS-ANDALUSICA Q, Ribbe (transition vers
Fettigii). Sierra-de-Alfakar (Andalousie); juillet 18709.
(Lépid. comparée; Nol. IV; p. 31:4381et 43):
. CŒNONYMPHA PAMPHILUS-THYRSIDES ©, Stgr. et Rebel. Khen-
e 8
chela ; juillet 1908.
(Lépid. comparée; Vol. IV ; p. 49).
CŒNONYMPHA CORINNA-LEFERVREI C', Ragusa. Sicile (pris par
Lefebvre).
(Lépid. comparée; Vol. IV; p. 44).
. CŒNONYMPHA ŒDIPPUS-GELINI ©, Obthr. Provient de la col-
lection Boisduval.
(Lépidopt. comparée; Vol. III; p. 397).
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 675
Nes
Nos
ee 0 FETTIGII-HOLLI Œ et Q, Obthr. Glacière de
307 Blida (Alger) ; mi-juillet 1908.
398 ) CŒNONYMPHA FETTIGI Cet Q, Obthr. Environs de Sebdou,
. en Oranie; juillet 1907.
(Lépid. comparée; Vol. IV; pages 38-44).
PEANCHE) XLTX.
400. POLYCÆNA CARMELITA, Obthr. Siao-Lou.
(Bulletin Soc. ent. France, 1003 ; p. 268-270) — (Lépridopt.
comparée; Vol. IV ;:p. 56).
401. THECLA ILICIS-ALBOSPARSA O', Obthr. Angoulême ; capturé par
Gabriel Dupuy, le 14 juin 19009.
(Lépid. comparée; Vol. IV ; p. 74).
402. THECLA ESCULI-GRASLINI Œ', Obthr. Sierra-Nevada; 16 juillet
1835-
(Lépid. comparée; Vol. IV ; p. 77).
403 ) THECLA ESCULI-MAURETANICA-POWELLI Œ et Q, Obthr. Khen-
ee chela; juin 1908.
(Lépid. comparée; p. 78).
405. THECLA ESCULI-MAURETANICA Œ', Stgr. Sebdou; juin 1907.
(Lépid. comparée; p. 77).
406. POLYOMMATUS CHRYSEIS-VIOLACEA Œ, Obthr. Cauterets; juillet
1883.
(Lépid. comparée; p. 130).
407. POLYOMMATUS GORDIUS-NARYNA ©, Obthr. Fort-Naryne, au
Turkestan.
(Lépid. comparée; p. 115).
408. THECLA SPINI-ALBOSPARSA ©. Obthr. Akbès.
(Lépid. comparée; p. 60).
409 | LYCÆNA THEOPHRASTUS, Fab.; variétés diverses d'Algérie.
410 Le n° 409 représente une Q micærulescens prise à Sebdou,
411 en août 1007; les n°% 410 et 413 reproduisent l’Ab. radiata,
412 de Sebdou et de Bou-Saada ; le n° 411 Q vient de Bou-Saada ;
413 les n°% 412 et 414 viennent de Sebdou et Biskra.
414 (Lépid. comparée; p. 150, 160).
415 Me ESCHERI-HELENÆ © et Q, Obthr. Dompierre-sur-Mer
416 (Charente-Inférieure) ; juin 1900.
(Lépid. comparée; Vol. IV; p. 218).
Nos
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
PLANCHE E
AI 4 À
1 CALLOPHRYS RUBI-SUAVEOLA ©, Stgr. Akbès.
419 de Avis Œ et Q, Chapman. Amélie-les-Bains
419 bis (Pyrénées-Orientales).
(Il y a une erreur de numérotage dans le texte, à la
page 95 du Vol. IV; j'ai laissé imprimer à tort le n° 420,
au lieu du n° 419 b?s).
420. CALLOPHRYS AVIS Q, Chapman. Aïn-Draham, en Tunisie.
421. CALLOPHRYS RUBI-FERVIDA, Stgr. Lambèse ; avril 1884.
422. CALLOPHRYS RUBI, Linné. 35 kilomètres au Nord-Est de
Moscou ; 23 mai 1907.
(Lépid. comparée; Vol. IV ; p. 85-05).
423. LYCÆNA TITHONUS-ITALICA Q, Obthr. Mont Majella, dans les
Abruzzes (Italie centrale); août 1907.
424. LYCÆNA TITHONUS-CÆRULESCENS ©, Obthr. Larche, dans les
Basses-Alpes ; août 1807.
425 ) LYCÆNA TITHONUS-EROIDES Q, H.-S. Tâ-tsien-Lou; été 1904.
426 (Lépid. comparée; Vol. IV; p. 230-235).
427 \ PHRAGMATOBIA LEPRIEURI Œ et Q, Obthr. Philippeville (Al-
428 gérie) ; avril 1800.
429 Le n° 427 O' représente la forme 7#orisca, Obthr., et le
n° 428 O se rapproche beaucoup de la forme initialement
décrite et figurée dans les Ætudes d'Entomologie, Liv. III,
PI. 5, fig. 2. La Q (n° 420) est née à Rennes, d'une chenille
envoyée par feu Olivier.
430. PHRAGMATOBIA PUDENS O', Lucas. Bône (Algérie).
PLANCHE’ LT
431. SCODIONA HOLLI S', Obthr. Lavarande (Algérie) ; 19° mai 1908;
dédiée à M. E. Holl, qui a découvert l’Espèce.
432. POLYPTICUS BREVIS, Obthr. Madagascar.
(Bulletin Soc. ent. France, 1909, p. 233).
433. AMPHIDASIS QUERCII, Obthr. Tien-Tsuen (chasseurs indigènes
de feu le PDéjean); 1901
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 677
N°5 434. AMPHIDASIS CLORINDA, Obthr. Tse-Kou (envoyé en 1895 par
435.
439.
440.
441.
feu le P. Dubernard).
AMPHIDASIS ERILDA, Obthr. Tse-Kou (envoyé en 1900 par feu
le P. Dubernard).
Ces 3 beaux Amphidasis, capturés dans la région chinoise
occidentale qui se trouve évangélisée par les Missionnaires
catholiques de la Mission du Thibet, paraissent extrêmement
rares; ils sont spécifiquement différents de fiston emargi-
naria, Leech, qui est une Espèce du même Groupe. J'ai dédié
ces 3 belles Geometræ à la famille de M. Orazio Querci,
entomologiste plein d’ardeur et chasseur très habile, demeu-
rant à Formia, province de Caserte, en Italie. Je prie
Me Clorinda Querci et M'e Erilda Querci, toutes les deux
entomologistes très zélées, d'accepter avec la dédicace de ces
nouvelles Espèces de Lépidoptères, l'hommage de mon pro-
fond respect, et M. Orazio Querci de recevoir la cordiale
expression de ma gratitude pour l’intéressante documentation
dont je lui suis redevable.
METROCAMPA HONORARIA-PICTAVORUM Q, Obthr. Charroux
(Vienne). 2 Q semblables sont écloses en janvier 1907 de
chenilles trouvées en septembre 1906.
ZULEIKA PLEBEJARIA, Obthr. El Aouedje, près Sebdou; 27 et
28 août 1907. — 14 exemplaires semblables ont été capturés
par M. Harold Powell; le docteur Codet avait déjà recueilli
un ©, le 18 février 1881.
ZULEIKA NOBILIARIA ©, Bang-Haas. Biskra.
ZULEIKA NOBILIARIA O', Bang-Haas. Sud-Oranais.
Je possède 1 O° du Sud-Oranais acheté à M. Bang-Haas et
2 Q de Biskra que m'a données M. Deckert. Je ne suis pas
certain que le n° 438 soit la Q du n° 439; le dessous des aïles
est un peu différent, comme le dessus d’ailleurs. Cependant
je ne trouve pas actuellement de caractères assez nettement
distinctifs pour les apprécier autrement que comme une diffé-
rence sexuelle.
CIDARIA MULTISTRIGA, Obthr. Constantine (prise par feu
Olivier).
RHEGMATOPHILA AKULINI, Obthr. Fort-Naryne; Prov. Semi-
rechgensee, au Turkestan oriental ; dédiée à M. Akulin, qui
a découvert plusieurs exemplaires en 1907.
43
078 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
N° 4y2. ZYGÆNA CARNIOLICA-DETSCHI, Obthr. Capturée aux environs
de Stuttgart, à la fin de juillet 1909, par M. Aloïs Detsch;
diffère de ÆZaveola, Esper (Tom. II; Tab.. XXXVI; fig. 1),
par l’absence de l’anneau abdominal jaune; de plus, la teinte
jaune est /uteola et non flaveola; enfin l'entourage blanc des
taches jaunes est à peine perceptible.
PEAN CHENE
IMBRASIA ERTLI d, Q et larve, Rebel.
(Annalen K. K. Hofmuseums, p. 67; Taf. 3 (1904).
La chenille vit sur l’Afzelia Cuanzensis ou Acajou; elle est
commune à Rikatla, localité située à 25 kilomètres au Nord
de Lourenço-Marquez (Pasteur Henri A. Junod).
PLANCHE LIII
N°98 446. BUNÆA HEROUM, Obthr. Kuyambi, Ubemba (Afrique orientale).
J'ai reçu 2 Q, en 1908, de M. le P. Guillemé, Missionnaire
apostolique.
447. ARCTIA VILLICA-ARABUM ©, Obthr. Algérie, sur le littoral;
recueillie par M. Dayrem, en 1900.
Cette forme paraît constante en Algérie; je possède plu-
sieurs exemplaires semblables rapportés de Yakouren ct Aïn-
Seur, par feu le D Charles-Henri Martin.
PLANCHE LIV
N°3 448. SYRICHTHUS THERAPNOIDES ©, Obthr. Sebdou (Prov. d'Oran);
août 1007.
(Vol. IV; page 385).
449. SYRICHTHUS FRITILLUM Œ, Huebner. Vernet-les-Bains; prove-
nant des chasses de juillet et août 1900.
450. SYRICHTHUS FRITILLUM ©, Huebner. Vernet-les-Bains ; chasses
de juillet et août 1806.
451
452 | SYRICHTHUS FRITILLUM Q, Huebner. Vernet-les-Bains; pris en
1 été 1887, 1894, 1003.
454
/
455. SYRICHTHUS FRITILLUM O', Huebner. Vernet-les-Bains ; prove-
nant des chasses de maï et juin 1900.
(Lépid. comparée; Vol. IV; pages 386-390).
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 679
N°5 456. SYRICHTHUS MALVÆ-TARAS O', Bergstr. Mesneuf, près Rennes ;
457.
458
459
460.
461
402
403
464.
465.
466.
407.
mai 1882.
SYRICHTHUS MALVÆ-INTERMEDIA Q. Rennes; printemps 1906.
SYRICHTHUS MALVÆ, Linné. Alsasua, dans le Nord de l’Es-
pagne ; juin 1870.
SYRICHTHUS MALVÆ ©, Linné. Cauterets; fin de juin 1890.
SYRICHTHUS MALVÆ-FRITILLANS, Obthr. Vernet-les-Bains.
SYRICHTHUS MALVÆ C', Linné. Cauterets; fin de juin 1890.
SYRICHTHUS MALVÆ ©, Linné. Mont-Revard, au-dessus d’Aix-
en-Savoie ; Juin 1906.
SYRICHTHUS MALVÆ O', Linné. Lande de Caden (Morbihan);
10 Mal 1009.
SYRICHTHUS MALVÆ, Linné. Lande de Caden; 10 mai 1900.
468 ) SYRICHTHUS MALVÆ-GRÆCA, Obthr. Grèce; ex coll. Bellier.
409 )
(Lépid. comparée; Vol. IV ; pages 300 à 396).
470 | SYRICHTHUS ALVEUS-RYFFELENSIS, Obthr. Environs de Ryffe-
471)
479:
lalp, en Valais; capturés du 5 au 18 juillet 1808.
(Zépid. comparée; Vol. IV ; page 405).
PPANCHE EV
. LYCÆNA EUPHEMUS-SANGUISORBÆ, Obthr. Angoulême.
(Lépid. comparée; Vol. IV : page 333).
. POLYOMMATUS CHRYSEIS-HERMATHION €, Obthr. Silésie.
(Lépid. comparée; Vol. IV; page 130).
. SYRICHTHUS CARTHAMI-NEVADENSIS ©, Obthr. Sierra-Nevada,
côté de Lanjaron; juillet 1870.
. SYRICHTHUS CARTHAMI ©, Huebner. Angoulême; juin 1906.
6. SYRICHTHUS CARTHAMI ©, Huebner. Angoulême; juin 1906.
. SYRICHTHUS CARTHAMI-VITTATUS ©, Obthr. Samoussy (Aisne);
13 Juin 1900.
. SYRICHTHUS CARTHAMI-VALESIACUS Q, Ruehl. Viège, dans la
vallée du Rhône, en Valais; juillet.
(Lépid. comparée; Vol. IV ; pages 381-384).
POLYOMMATUS HIPPOTHOË ©, Linné (subtus radiata). Berlin.
680 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
en ————_——_—_—_———
N°3 480. SYRICHTHUS SERRATULÆ ©, Rambur. Forêt de Vouvant
(Vendée).
481. SYRICHTHUS SERRATULÆ ©, Rambur. Charroux (Vienne).
482. SYRICHTHUS SERRATULÆ-MINOR d. Cauterets; juillet 1882.
483. SYRICHTHUS SERRATULÆ-MAJOR. Akbès; été 1890.
484 :
48e SYRICHTHUS ALVEUS-NUMIDA et Q, Obthr. Lambèse (Prov.
186 Constantine; juin).
PLANCHE LVI
SYRICHTHUS ALVEUS, Huebner.
N°8 487. Forma FOULQUIERI , Obthr. Entrevaux à Mont-Gourdon ;
juillet 1906.
488. Forma FOULQUIERI Q, Obthr. St-Zacharie (Var); 10 août 1900.
489. Forma FOULQUIERI Œ, passage à BELLIERI, Obthr. Bouches-
du-Rhône ; 1905.
490. Forma BELLIERI ', Obthr. Larche; ex coll. Bellier.
401. Forma BELLIERI Q, Obthr. Ryffelalp (Valais); fin juillet 1902.
492. Forma ALVEUS-ALVEUS O', Huebner. Cauterets (fin juillet 1905).
403. Forma ALVEUS-ALVEUS ©, Hucbner. Vernet-les-Bains ; été 1895.
494 ) Forma BALLOTÆ, Boisduval (ix musæo). Dowre (Norvège).
495 Ÿ (Zépid. comparée; Vol. IV; page 404).
496 ? Forma CARLINÆ d, Rambur. La Grave (Hautes-Alpes); juillet
497 ) 1906.
408. Forma CARLINÆ ©, Rambur. Mont Revard, au-dessus d'Aix-
en-Savoie; commencement d'août 1902.
499. Forma CARLINÆ C', Rambur. Larche; ex coll. Bellier.
500. Forma CARLINÆ O', Rambur. Larche; août 1806.
soi. Forma CARLINÆ Q, Rambur. Basses-Alpes; ex coll. Bellier.
(Lépid. comparée; Vol. IV; pages 408-409).
2 … A
É Forma Cirsit Set Q@, Rambur. Angoulême ; 2 septembre 1907.
3
504. Forma CIRsit G, Rambur. Angoulême; 2 septembre 1907.
505. Forma Cirsit G, Rambur. Sicile; ex coll. Bellier.
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE O8I
N°S 506. Forma CIRSII O, Rambur. Digne; été 1806.
507. Forma CIRSI ©, Rambur. Belesta (Ariège); 10 septemb. 1900.
508. Forma CIRSII-HERRICHIT O', Obthr. Entrevaux:; 12 août 1906.
(Lépid. comparée; Vol. IV; pages 409-411).
PLANCHE LVII
SYRICHTHUS ALVEUS, Huebncr.
Forma ARMORICANUS ©, Obthr. Rennes; printemps 1907.
Forma ARMORICANUS Œ' et Q, Obthr. Dunes de la Guimarais,
entre Cancale et Saint-Malo ; août 1884.
Forma ARMORICANUS Œ, Obthr. Dunes entre Plouharnel et
Kerostin (Morbihan); juin 1900.
Forma ARMORICANUS Œ et ©, Obthr. Dompierre-sur-Mer (Cha-
Ur Ur
CR
[N] 1
ee AR 0e LR 2 2 at
rente-Inférieure) ; juin 1900.
517. Forma ARMORICANUS ', Obthr. Auzay (Vendée) ; fin août 1907.
518. Forma ARMORICANUS-FABRESSEI ©, Obthr. Florac (Lozère);
juillet 1863.
519 He ARMORICANUS-FABRESSEI, Obthr. Sierra-Alta (Castille) ;
août 1907.
(Lépid. comparée; Vol. IV ; pages 411-413).
521 ue ONOPORDI-CONYZÆ O' et Q, Guenée. Charroux (Vienne) ;
mai 1882.
523. Forma ONOPORDI-CONYZÆ, Guenée. Zermatt (Valais); juillet.
524. Forma ONOPORDI OC, Rambur. Lambèse ; avril 1884.
525. Forma ONOPORDI Q, Rambur. Sebdou; octobre 1907.
526. Forma ONOPORDI C', Rambur. Sebdou; mai 1907.
527. Forma ONOPORDI Q, Rambur. Zebch, près Sebdou ; août 1907.
528. Forma ONOPORDI ', Rambur. Vernet-les-Bains ; août 1880.
529. Forma ONOPORDI Q, Rambur. Vernet-les-Bains ; juillet 1909.
530 AR ONOPORDI-CONYZÆ d', Guenée (ex éypicalibus specimi-
n1b.), La Charnée (Savoic),
682 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
PLANCHE LVIII
Nos 532
CYRTOGONE JUNODI O et Q, Obthr. Rikatla; obtenus de che-
533
nilles qui ressemblent à une larve de Saturnide et qui vivent
sur un arbre appelé Watertree (Henri Junod). /unodi paraît
voisine, mais distincte de Cyrtogone Cana (Stgr.). Conte
(Pinarides PLACE. 8).
534. GONIMBRASIA OSIRIS, Druce (Ann. Mag., N. H. (6); XVII;
p. 354; 1806). Transvaal, non loin de. Leydsdorp (H. Junod).
D’après le D' Karl Jordan, Gonimbrasia Osiris auraït reçu
les deux autres noms suivants : Bunæa Deborah, Weymer
(Berlin. ent. Zeitsch., p. 70; 1806), et Gonimbrasia Sardane,
Sonthonnax (Saturn.; PI. X; fig. 1).
535
À { TrrLocHa FICICOLA Œ' et Q, Westwood. Lourenço-Marquez; la
53
chenille, semblable à un ver à soïe, vit sur un figuier appelé :
Mpama (Henri Junod).
RÉPERTOIRE
DES ESPÈCES DE LÉPIDOPTÈRES
Mentionnées dans les JNotes pour servir
à établir la Faune française et algérienne des Lépidoptères
VOLUME III
| PAGES
PAPILIO MPACHAON ÉTÉ ee essence emeesesepee 101
HOSPITONS GENE ee. see ese= esse celerecesesers cree 103
ATERANOR ME SDER 22e memencec ons eee cree eee 104
BODATIREUS PIRE dre once cc 105
THAIS BODY EN ES CRT ee ICO
RM A ELA ee ce ee ee mere ce 110
PARNASSIUS “ APOELO, LINNÉ 2... -seoceevmersserseoncevanoussres 111
DÉLIUS ESpER emecese eee ceeee- seomemeepee. 117
NN MOS NE Re eee ee roescccee 117
APORIA CRADAG ARTE bas ne messes esrrsace 120
PIERIS CALLIDICR ESper.....eccetssee cer cersceseoarseees 120
DA PÉIDICE NE 2 see etc 121
CEAUCONOMP RU =. semence ee 125
NAPI AIRE ee sa eee ere neurone teees 125
NANTES MANIERE es dm ec cote 127
RÉNPAD ICI ess see essence ose Pres 130
BRASSICAÆ MR en see eee 131
ZEGRIS ÉUPHEME, ESper.......-.-ee.ccreameome sr srorscepeessesane 122
ANTHOCHARIS EUPHENOIDES, Stgr.............................................. 135
EUPHENO: LINNé. 2e eme see crc ceceees 137
CARDAMINES MERDE ee ceaoeeebre. sers eomeesece 138
CHARTONIAS DOnzel he escorte: 143
PAGES UC DRE 2 eee -ec ee 143
BELTA GTAMEr "cesse ee css: eeoe 146
PECAR IST ee encens eo 152
PBETEMPASTESper 1. see moerereacene oem 153
PAPTOURAATIArdE ER Perret 155
684 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
PAGES
CATICHARTS IN OUNAMIETICAS ER ER ee RS 155
L'EUCOPHASIA" DUPONCHRPR ISERE ceee 156
SENA PIS MIRE ee ete mere ec CS
COLIAS PAL ÆNO MLAINNEÉR re re eee co DE Mo uee ENS 160
PHICOMONE AS DER ce racer ere Mie eee 163
ÉLVALE ME INN OR Lens to Den LEE CURE 164
EDUS ANDRE Lt Ne a 167
RHODOCERA CR AAMNL MERDE nec 176
CLEOPATRA, LINnÉ: eee ce 177
CHARAXES TASIUS AIRE 2 nsc NO CE ES 179
APATURA IRIS MES ALL SR PER 180
TEA Suebner 5520 eee EEE 181
LIMENITIS POPULIMIINMEÉ se M A ANSE SEE 184
CAMILLA EH HebDner.. 185
DIBYETA, INTÉRESSE CC RES 186
NEPTIS EUCILCLA Fabricins. es Pr 189
VANESSA ATALANTA ®TLINNÉ.:0. RP es ee EE 189
GCARDUI, L'INNÉ...:-. de eee re 191
10; LINnÉ se scans ee nee ee 102
ANTIOPA, LINE OS RSR 193
POLVYCHLOROSLINNE RE TRI 195
URTICÆ; Linné RER RCD ER ANUS 107
CPALBUM ALINNÉ em ee M ne Eos 200
HCRAT CTAMEr.s ee ee 201
ARASCHNIA ÉEVANAS Linnés. NE 202
ARGYNNIS PANDORAS ESper... mec SE tre 203
PAPHIA, TAinné::54500, 0 EN NAT ER EREREE 204
AGLAJA, LAINNÉ,.255500 00e D Le RER 207
ADIPPE, MLINNÉ:2.L de rec ces E O T Are 209
NIOBE, (LINRÉ 0 NS AN RENE 211
ÉATHONTIA, Linné. came ee 212
ELYSA, °Godart.:4.cere RSSSR AE EEE 213
HECATE, Esper."...etheceeea re 214
INO, 'Esperi.. ntm meeumercmtdie iereetee re 214
DAPENE, SCIE eee 214
AMATHUSIA, ÉSDET 2 recceacenee S 215
DIA Linpné. tir nee on RE 216
PATES MÉUeDNneT ere en TE 216
EUPHROSYNE CIDRE. re ae EE NE 217
DELENE, ‘Huebner 5 D Re 220
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 685
PAGES
MELITÆA CUNIMETA EUCDNEE. see. cemedeseso eee eee ee 222
MARURINA IN ne ccc ces enhenes ss n eee 224
DESLONDAINIT COdARE. cesse semeccce=ee-o 224
ARUIIAMIS M EUEDN ER... esse eee pcecomese ee eee 225
CONS ÉQUÉ sc. andere 231
PRTHERIE MUBDREE ee ces enceeseseceseredet 235
AGREE DO ue cree cesse 227
DNA MOINS Lee eo ERA ES 239
PICRMNN AIRES Det de er te 246
TIRE DTA NC Rennes ce sene eme nues 248
ATEPADEAS MES DER eee senc sroee. ses 249
DATON ERREUR see eee 253
PARDADNDE MG OAANEE eee seen iropen tee eme sec 255
CHIONOBAS AREDO MAUEDnORns eee se ee ceercseeeer- converse 257
SATYRUS CERCE AR ADEIC US eee nr creer oe rer coce 259
ÉDDEN A MODE ee recentrer eee 259
ÉDARMIONR SITE ee hace rence eee 261
APCNONE ES CRE eee echec tee 262
NEOMMRIS AGO cn enr semences 263
BRISEIS PIN en dr eee ice 0e 263
PRTEUR MBITS a een nn een ee cuo- eee 265
HIPPOLYTE, Esper.............................................….… 266
SEM INR ee ce Po ere their ones eur 267
AREDHUSA ESPET .-.-eresc-cec-srceemcecemeee ren caeeseetie 270
HPAUN ARS UIZE Teener eee nes encens stieln 2
ÉTAIN STAR CC ecrecetree 271
SNEVICOLA AUS EAU en dede cc herbe serres ee 271
RDC Lee 0er OC nn DRE ON UE DOS NN EE CE D7I
AIDER AD ER METEDTE Re ee ces 278
ACGDRAS ES DER eee cesser pe -eacenee nets 279
CORDUPA MA DTICIUS 2. eee edit 279
PAS D RASMIÉIN NÉ 20 ee een see eee ce cet ee 281
ÉXYPERANTHUS, ÉINNÉ........... eeepc sesemsrcse 283
EREBIA PEIPHRON, RNOCRE cernes en 284
MELAMPUS, Esper ..............................sose 288
CHRISTIRRRACEZEN eee esee eee re ee ee 288
FIPAVORASCIATA VHeYNen.-...- "cha 289
NINESTRAN HUCDTER..22..e een cc ca cet ce 289
PAARIDE MÉUEDNER SE ste eee ee 201
ManTO, Esper.….…. A ne Me cree es 0201
680
ÉREBIA
MELANARGIA
PARARGE
EPINEPHELE
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
CETO,"Huebnen 2 re
ŒME MUEDDE T2 2 rires sa meurenene ee EE
MEDUSAMMEADTIGIUS eco otee COTES
SEVONE OCR Te uses In PR Tee M
ÉEFEBVRET DUD:.:1 0e ares sospeeecoe rene cp
GLACPALIS FÉSPDET une ue A0 ee tbe eee CCE
ÉVTAS AGOdAT EE eue sean res rer Ne
PATARICA ICDAPMAN 2000 ee
FPISIVGNE MEUCDROR 2:01. centre eee D ET
SCIPIO AB OIS UV ALES. eee Mn NES EE CEE
FORGONE MBOISAUVALE. 2 EE RE EEE
GORGE MESPDEr 2250 di eee
GOANTE ME SDOn:scecteee e NE CE UE
PRONOËS ESPÉT ue CE
ZAPATERT 1Obthr Serre ER ee
IN EORIDAS MBOISAUVA IEEE ER
ZÆATHIOPS) ESDÉL ES een be ee EE
PURVALE ESPER 68e pee ete mecs
LIGEA Linn Éd ne es ot
L'APPONAS ESDEr 5.000 CMS ete CPE EEE
ŒYNDABIS,, ESDER: 52.0 ee ee ne
GATDATHEAS “inner eee
ACHESIS, Huebner.:25fi ra ete ee
ÉUCAST; Rambur esse ON CN NT EEE
TAPYGIA, Esper.....:..:....:1.0c020 eee
ARGE, SUIZOT. 25200 nee ete due en CO ES
PHERUSA, Boisduval in #20 ce re nee
PSYCHE, "Huebnér::..1.1..5... Mec ne
NES, Home NP SE
MEGÆRA; LIHné 2... tone
HTÉRA ME ADrICIUS. 2... ee
M'ÆRA LLINNÉ 12582 En ARC ve
ACHINE,"SCOPOÏLE 7100 cases ee TE
PÉGERTA; EMMA ne EE
EUDORA, “ÉSDEr:2.200 cesse
JANIRA; Linné:.::509...0.10mete ec cree
JANIROIDES;/H:-S: 5.282 Re
N'URAG; GHIIANI Re EN
TITHONUS; Linné:..550.0 RE ee
IDA, Espérance moe
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 687
PAGES
EPINEPHELE D PASIPHAE, ESDER..-:.....- er cececocecoccscsesee ete 393
GŒNONYMPHAICEDIPPUS, HAbDFICIUS-....-..444...n. cocon ses 395
BR ROMÉDRE der crrepeceese seche 309
CIGARITIS SPAS CAS MR nee deces sien rene te a 401
ATARI O DETES RE need mere: ones CS 401
PAOBRAAIDONZE EME PE mans ce de drone eee caisses 403
NTÉSSINISS A M EUCAS eee rence re ne 403
VOLUME IV
CONONYMPRA PHIS ÉUCDRET. 2-2... ces see seueaes eee 15
DPHTOLDES IS COR dm scie cree cree 18
ARCANIOIDE SN BTÉRRER EE ne cs miB oc creceesese 19
ARCANTUS AIDER en enr carre eco rec peeeee 23
D'ARWINTAN ARS Eee ne en oereope ns osane sors csvese 28
PEL A PEMUCDRET. 2 1-2 cum sets aueseesoues 29
DORUS ES DER een cn nreeccsseses 31
EIDBIGI OO DIR ee ee see ee condesseee 38
CORINN A REUGDRER ee eee a peser ns ess uepeutes 44
VADCACRIABIA CRIER ee rene dec cene 45
PAMPETEUS RITES ne ae Me eme sou ere cute 46
VPHON RO emma Eb LS lan ques 49
LIBYTHEA CDS NE SD ee ee ere reste a pierres 52
NIEMEOBIUSSMEUCINA IDD de ee encens ep ssenetanserueut 54
JAMIDES IROBORIS ESP R- eee races ce resort 56
ZEPHYRUS QUERCUS INR A arr cheedesenec severe eee 57
BE RU 20 IE LR ER ne en aeees de ecc sec cee 61
THECLA SRINE REED DER Se ee eee ee 67
NIPALE UMA DReR tee. ns ee ospeeeesc eme semacees 70
DRTCLS NES DE nee ere ee ee 72
ÉSCUR ÉUCDRENE an een one oem eee 75
PIRTINEMIÉID A EE eee ee eee ce ee eee eee co 79
AGACLR MEUEDT ER eee een eee eee 83
CAP EORRRNSMRUBR INTEL. cecemeec es ete ee 85
AVIS GhADM ARE eee eee eee 85
THESTOR MAURITANICUS) DUCAS .-.2.00..0neommmmee teens 95
BARTUS AE ADI ee ane dencre eee 97
BOLYOMMATUS PHL AS AIDER ee eee cree seen Ce 98
MANEHES CAD. 0e cesse nes cmese rence ce: 105
088
POLYOMMATUS AMPHIDAMAS, Esper
GORDIUS ASUIZE RARE ER EUR
CHRYSEIS ABerTeStraessen en PPT
VIRGAURE AA MÉINNEÉE 2 re ee ee
ETPPOTHOP PIED ER RE RER AR ERA Re
BA RICA AT INN EME Tres eee in Eee Eee:
MELICANUS MEUEDnER Eee re Tee re
PHEOPHRASIQUS MAD... ce ee
COREMAS MDCNS TR rat TE
IRESTAS MESDOTA res ites AC EEE
ARGUS ANNE ia Mr 00 OPEN
PEGON WE MR ee nc OR ER ER
FDESPERICAN ER AMD UE ES
EVCIDAS TTADp-.- 2 2
BSCHERI AAUEDNÉE. 2 TEE
ICARIUS? ESDEL 6 ner ee TERRE
NTARTINT RE AILIATA ESS RE RE TN EE re
ATTARDIs ObLNT ES. rene ee CE NES
DORYLAS WP NV ten cn ee tr EE Ne
TDHONUS MEIUEDNETS eee EEE CEE
ICARUS, von RottemDure 77/7022
AGESPIS, V2 rene her CR DRE ee
ÉUMEDON, Esper:. 22 0 ee
IDASSR AMPUT. ER RN e
DONZELIM BOISAUV Ale Re
RIPPERFIL PB OISAUVAL
DOLUS;. Huebner 2222 ANR Eee
DAMON, WAV rene NE Ne
MELEAGER, ESper:., rase
BELLARGUS, ESPET 1e ee
CORVDON, ESper sr tte DS ER
BAVIUS AE VETSD AND ee
ORION PAL AS ne ee EE EEE
ABENGERRAGUS, FPICLTEC re ee
BATON, Bergstraesser ..............................,...
PYRENAICA SAR OISAU VAL PRE RP ee
ORBITUEUS, NÉSpEr. 6.2. Pere
PHERETES ÉlueDner ee eee PO
AMPHIRROË, ObTthT... Re NE Re
LAMASEM, “OPDTRT, rer ere RL RO
LYCÆNA
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
PAGES
TT
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 689
mo
PAGES
LYCÆNA DADIETE RNOGN:51 ere coc ce semestre ee 300
PNSIMON MERUERRET cc erreurs 301
RENTOUTES | POSE N'ÉSEPE SA CON PRENONS EEE EE Ge CN 302
SHBRUS AB OISdUVAlR. eme ee cocon eos pee see 304
SEMARGUS, On ROtTEMPDUER:. Lette 305
CPARUS von Rottembure.-7..:.t..4...%.... 0 308
NTEPAN DES BOIS UMA CES er coomeassds mes este ne 314
OPA SEE senc Ce oo 320
ARIOINPR TERME ere Loco ere ce bec dameente ina 321
PURHEMUS RÉMODNET ME Le ner caen ces ecaccect 329
ARCAS VON ROTIODIDUTPE EL eee emeneme soso ec 20 334
AIPCONMRELUEDIER- Eee een nee erec eee soegeectge 330
ARGIOLUS AB DRE RER en repenser ob 339
Relationsides Lycénides et des FOUTMIS. et... 341
ÉLETEROPPERUS MORPHEUS, PAlAS eee des dershsees ee desesseocenns 352
CARTEROCEPHALUS PALÆMON, PAaMas 222.0... 353
HESPERIA ÉINEODAMOCNRSERR RAR ee eee none re rese- see 355
DTAUMAS NES DEL center eee eee ere ceere 350
ÉTANEZ A RO D CRT eee ce ere S een r severe 358
ACREON VON AR OLLENDIDERE Se eee de derpesveces ce 358
AUGIADES SYLVANUS MISDED- eee nee mme rares note iessee 359
CON RTE Re ei Desserte 360
PAMPHILA BORBONICA MB DISAIS eee rcsebes eee ecrrerseccens ee 303
RREBVRIT AR AMDUR ere rene deeeenereesee-eececeune 365
NIOSTRODAMUS MEADTE eee dee=mec core sesueceres-ecroatsre 365
CARCHARODUS AECEZR PSP... eme memes coeecen areorseeusesmei ss 308
DEAN PR DRIRR RES DÉS e nec orcme mens se mocen eee 370
ADR MÉMeDN Eee eee seems de-eece eee 370
DA DICUS MR AID DUT ER RE Enr reu eee 370
SE MRICHDAUS A IP RODO AESPER eus smescseeescene cesser eeetes 377
NO HAMME DO D UNE Eee nn cn Neeee ee ere 379
BoD2E 2e ODA eu M certe mecs ces 380
SD D ME SRE ES 2e ne ee eee de Co 0 ee 381
CARTHAMMAEUCDNEN cree rene crc Percer eee 381
SAD ÉHÉDRED ce elec ssceeeereteee- ee c2- 0e 384
BRTIPEUM RELUEDNET..-6... 200. ocre 386
DNA DA LUE DELA 1 SR RS RARES RES PR PARA ARR x 390
CACADIR SR AMDUN eee PE en ere Le eee 300
SERRABUL A MR AMDUT 2 ner decor 398
ATVEUSMEMEDNORE Mec esse oc-core ee etc reneepeee 402
600 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE
PAGES
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ZNGAÆNIDIE eine eee ete ce Dee te een eine eee eee ECC Eee 419
ZYGÆNA RUBICUNDUS; ÉLUCRnET.:....-.1.s2e0ecc-ce ec 422
ÉRYTHRUS, EUEDDET..:--.:--1..- cc ses ee 423
BURPURATIS AB RUENRICR eee re meer ee 425
GAPTICA MODE R e.eecmerce a eee ee 27
CYINAR A MES DÉR 2 ----erose ce enese eee 428
SCAPIOS FH IVORISCREVEN..:....- ce de 431
PURES MPIETIGT 0e ce nos recoc cesse ee AA
Corsica Poisduval...:./11e0eecertc one 442
POYSELIS MODE... ue: 2e roc eee ce ee 444
FAVONTA M ETEVET.. serons ee eee a eee 445
SARPEDON HMEDNET. 2. nee 447
CONTAMENET A BOISdUVAlL.. 2-2 eee 447
PUNCTUMMOCRS nee eee ee re 447
ACHIDLEZÆ, DESDEL:2.1-e nr eee tee eee 461
ANTHYLLIDIS BOISAUVAL.......2.2.2--s-e ee eee 474
EXULANS; von HOHenWarth.. 2... 480
MELILOML FEÉSDEL. rs seoecr ec 484
MRIROLIT ESDER sec ccseocrecccospen see PC CEE 489
ÉONIGER AN VON SCREÉVER...:....- eee ee 507
ANGELICÆ DOISTUVAL... 5.20. ccocccsceescee ee 525
STŒCHADIS BOTKAUSEN..:..............e ee 527
FILIPENDUEÆ, MINT 2. .....-20. cc ee 553
SYRTACASMOPDEINEE. 2-22 -ecrsaerceces secs 564
RAMBURT MIEL: reeseece eee ec CETEE 564
GURDA Me UOTE. ete dr coca nc ec eee-ee e EEE 564
ROSAMODERT ee rec eoeembes sep ee 565
ÉPHIALTES, LInné.- 2100.20 ee ete 566
MRANSADPINA ESDET.:....-. sec eee ae 578
LAVANDULÆ, ESP... 583
RHADAMANTHUS, ESDOE..- e e 586
IGNIFERA, KOTD 002 sese etre ee eee 598
HITARIS OChSenheImer 22e ee ee 599
FER, JODIDE ee ee ererecs eee eee Ce Grr
MARCUNAS OPERT ee cree eeepc ete 613
FAUSTA, LANNG 2502 nsc ces eersccoence ce CEE 613
CARNIOLICA; 1SCOPOLL 0 628
THERYI, O: oannis ER 637
ESCALERAT, POUJAdE cn ee 638
LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 691
—————————
ADDENDA ET CORRIGENDA
PAGES
ANTHOCHARIS PECHI, Ster. Et Obthr......... A cd 639
RATIO ALTATA Een cocon co steee ces cat 0 640
ARGYNNIS ADIPRRASIPINNE nn eemermmene s soccer eme 0e 646
NO DRE sr eee cocoaarsss see . 646
A PETRA PE MEAUEbNeER Er ere -reseee sueur -ereree eee 646
PATES ARSIPACHE SDET ee -ecscesnct sense eee 647
POLYOMMATUS ÉPPOTHOË-DISPAR, Haw:........1.. me... 647
ZYGÆNA RCE RS DER ee eee ere cree 654
DRANS ADP A MES DORE meer nes te eoucre ever doess 654
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