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Full text of "Etudes de lépidoptérologie comparée"

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Fascicule IV 


IMPRIMÉRIE OBERTHUR 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


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DE 


LÉPIDOPTÉROLOGIE 


COMPARÉE, 


CHARLES OBERTHUR 


Fascicule IV 


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RENNES 


IMPRIMERIE OBERTHÜR 


Avril 1910 


À mon cher petit-fils HENRT OBERTHUR, 


a Paris. 


C’est à toi que je dédie ce Livre. 

Tu es l’aîné de mes petits-fils et tu as le goût inné de 
l'Histoire Naturelle. Plusieurs fois, déjà, tu as été mon 
aimable compagnon de chasse aux Papillons, dans les 
landes de Monterfil, sur les falaises des côtes bretonnes, 
dans nos champs et dans nos bois. De même que jadis 
— il y a de cela plus d’un demi-siècle — mon cher grand- 
père m'initiait à l'Entomologie dont la pratique a charmé 
ma vie, ainsi Jéprouve à mon tour une Joie très douce à 
te faire connaître, selon la mesure de mes moyens, au 
cours des excursions que nous faisons ensemble, ce que 
J'ai appris moi-même des choses de la Nature. 

Aussi bien les ouvrages d’'Entomologie que je me plais 
à publier au déclin de mon âge, prennent, dans ma pensée, 
un caractère plus intime. Je me trouve heureux d'offrir à 
mes amis et à mes collaborateurs, un nombre d'exemplaires 
plus grand que je n’en livre à la Librairie, pour des lecteurs 
inconnus. Sans négliger le côté scientifique, but essentiel 
de mes travaux, je recueille volontiers mes souvenirs et 
j'aime à rendre hommage à la mémoire d’amis qui ne sont 


8 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


plus. Puis, lorsque je compare entre elles les séries de 
papillons rangés dans mes boîtes, si j'ai devant les yeux 
un exemplaire récolté par moi-même, aussitôt, grâce à une 
association des idées qui se pressent dans mon esprit, non 
seulement, je me représente, en même temps que l’insecte, 
l’image du pays où je lai capturé, mais encore la vision 
de mes compagnons de chasse vient agréablement animer 
le souvenir de ce paysage et le compléter. 


C’est ainsi qu'en écrivant la notice concernant la 
Lycaena Ægon, je me suis immédiatement reporté aux 
jours heureux du dernier été. Vers la fin de juillet 1909, 
nous nous trouvions à Cancale ensemble, mon cher petit- 
fils, et tu m'accompagnais souvent à la chasse aux 
Papillons. Une fois, un peu avant le soir d’une journée 
qui fut pleine de soleil, nous trouvant, tous les deux, sur 
la haute falaise, au voisinage de la pointe du Grouin, 
marchant, l’un auprès de l’autre, pour faire lever les Pha- 
lènes abritées dans les touffes de bruyère et d’ajonc, nous 
pénétrâmes dans une lande dont l’aspect me parut propice 
à l'habitat de la Zycaena Ægon. Te souviens-tu que je 
te fis part de mon impression, tout en observant que jamais 
encore, sur la côte de la Manche, je n’avais rencontré cette 
espèce pourtant si abondante dans les bois et les landes 
de l’intérieur du pays, ainsi que sur la côte méridionale 
de la presqu’ile armoricaine? Quelques instants plus tard, 
un petit papillon bleu, dérangé par nos pas, s’envolait 
devant nous. La brise était un peu forte et le souffle du 
« Noroï » emportait la légère et fragile Zycaena. Tu pus 
cependant la capturer, avant qu'elle ne réussit à s’enfoncer 
dans un massif de grands ajoncs sur lesquels elle venait 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 9 


enfin de se reposer. C'était bien la Lycaena Ægon et ma 
prévision basée sur l'aspect de la localité, n'avait pas été 
une illusion. 

Les jours suivants, nous revinmes au même lieu d'où 
l’on domine la mer d'émeraude que parcourent sans cesse 
les bateaux aux blanches voiles des hardis pêcheurs can- 
calais. Nous capturâmes de nouveau des exemplaires de 
la Lycaena Ægon et la première femelle bleue que nous 
recueillimes, se trouve représentée sur l’une des Planches 
de cet ouvrage. 

Nous avons soigneusement exploré ensemble toute 
cette pittoresque falaise qui était couverte de bruyères et 
d’ajoncs en fleurs. Quelquefois, nous nous arrêtions dans 
notre chasse et nous contemplions le superbe et immense 
panorama que dominaient nos yeux. Vers le Nord, ce 
sont les îles Chausey dont le nombreux Archipel limite 
l’horizon ; du côté de l'Orient, tout près de la côte, c’est 
le chaos rocheux de l'ile des Landes; plus au loin le phare 
de la Pierre et enfin la côte normande avec Granville et 
Saint-Pair; vers le Sud-Est, le fort et les rochers de 
Cancale apparaissent près de la pointe des Rimains, tandis 
qu’au fond de la baie, Tombelaine et le Mont Saint-Michel 
semblent dresser leur masse de pierre au milieu des flots. 
Au couchant qui s'empourpre si magnifiquement des feux 
du soir, la côte se trouve découpée par ses nombreux 
promontoires d'aspect sévère et ses grèves de sable d'un 
jaune rosé, toujours frangées d’écume blanche. Et tout au 
loin, au delà de la contrée malouine et dinardaise, la masse 
imposante du Cap Fréhel, aux parois verticales, changeant 
de couleur avec les heures du jour, tantôt grise ou bleue, 


10 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


tantôt violette ou noirâtre, est la dernière terre que l’on 
puisse apercevoir. 

Nous avons également, l’un et l’autre, foulé de nos pas 
le plateau de ce Cap aride et nous avons respiré le parfum 
du serpolet qui couvre de ses fleurs couleur de lilas, les 
bords pierreux des sentiers. Sur ces grands espaces où le 
vent s'oppose à la végétation des arbres, mais que les {/lex 
europœus et nanus mélangés à nos quatre espèces de 
bruyères: ciliaris, Letralix, cinerea et vulgaris, couvrent 
d’une verdure persistante si gracieusement fleurie de jaune 
d'or et de violet rose depuis la fin du printemps jusqu'aux 
premières semaines de l'été, nous avons récolté le Satyrus 
Semele dont je te faisais remarquer les intéressantes 
variations, ainsi que les grandes Argynnes nacrées souvent 
nombreuses au bord de la mer. 


« En ce monde où tout change sans cesse », comme un 
de nos Poètes l’a dit avec tant de vérité, les plaisirs de 
l'été passent rapides et le mélancolique automne sépare 
les familles que les beaux jours de l’année avaient réunies. 
Tu as repris à Paris le cours de tes études sérieuses, en 
vue de préparer ta carrière. Je pense affectueusement à 
toi, mon cher petit-fils, avec l’espérance que tu transmettras 
aux petits enfants qui naïîtront plus tard, lorsque je ne 
serai plus, la tradition familiale que m'ont laissée nos 
ancêtres, ceux dont tu n'as pu connaître les sentiments 
que par la communication de mes souvenirs pieusement 
conservés dans mon cœur. 

Je souhaite que les circonstances te permettent de rester 
toujours un Entomologiste fervent. Au milieu des diff- 
cultés incessantes de la vie, 1l est bien doux de pouvoir 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE II 


se concentrer parfois dans une étude qui nous repose, 
en nous faisant momentanément oublier les noirs soucis. 
L'Entomologie nous vaut des amitiés fidèles ; cest 
une consolation qui réconforte puissamment aux Jours 
d’épreuve. Elle nous porte à apprécier et à aimer toujours 
davantage la Nature, œuvre du Très-Haut. 

J'ai appris de mes parents et des maitres qu'ils m'ont 
donnés dans ma jeunesse, qu'il n’y a point d'effet sans 
cause et que la Création dont nous sommes les témoins, 
est l'effet de la puissance infinie de Celui-là seul qui 
résume en lui-même toutes les perfections, qui n'a Jamais 
commencé et qui ne finira jamais. Ce que nous étudions 
dans ces papillons si délicats, si charmants et si variés, 
c’est une partie infime sans doute, mais cependant mer- 
veilleuse de l’œuvre de Dieu, seul Auteur de la vie, 
Ordonnateur, Classificateur et Législateur de tous les 
Mondes. C’est le plan divin de la Création dont nous 
essayons de percevoir quelque parcelle. Regarde le Sys/era 
Nature, chef-d'œuvre du grand Linné, dont l'esprit syn- 
thétique a inventé la méthode qui reste toujours la base du 
progrès accompli depuis un siècle et demi dans les sciences 
naturelles. Ouvre ce livre si estimable dans sa simplicité 
et dans la rectitude de son ensemble et glorifie avec Linné, 
le Seigneur, notre Dieu, source de tout bien, de tout 
dévouement, de toute noble inspiration, de toute haute 
pensée. 

« Finis Creationis telluris est gloria Dei » est-il dit dans 
V/ntroitus de la X° édition du Systema Nature. Je pense, 
à ce point de vue, comme pensait Linné; nos ancêtres 
pensaient de même. Garde nos convictions ; que ta pensée 


12 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


reste toujours libre et indépendante, sans se laisser impres- 
sionner par les erreurs en vogue dans le moment. Car il y 
a une mode pour les faux systèmes, pour les préjugés, 
comme pour autre chose. 

Jignore s’il me sera donné de terminer l’œuvre d’'Ento- 
mologie que J'ai entreprise ; je voudrais achever de publier 
ce que je sais, d’après les documents que j'ai recueillis, 
sur les Lépidoptères français et algériens, comparés dans 
leurs formes et dans leurs races, aux exemplaires de même 
Espèce répandus plus ou moins abondamment çà et là, 
en certaines parties de l’Europe, de PÂsie, de l'Afrique et 
même de l'Amérique du Nord. Je compte du moins consa- 
crer à ce travail tous mes loisirs de lhiver. Mais quand 
reviendront les beaux jours, je désire encore goûter le 
plaisir de chasser les Papillons avec toi. Lorsque nous nous 
reposerons en face d’un site grandiose, jouissant d’une vue 
lointaine qui s’étendra devant nous, je remercierai Dieu, 
Créateur et Père, qui me donnera encore la joie d'admirer 
les beautés de la Nature, en compagnie de l’un de ceux 
qui me sont si chers et qui continueront et garderont 
fidèlement, je l'espère, avec une conviction profonde et 
une fermeté inébranlable, les saintes croyances et les res- 
pectables traditions des aïeux. 


Rennes, 19 Décembre 1900. 


CHarLes OBERTHÜR. 


LÉPIDOPTEROLOGIE 
COMPARÉE 


Notes pour servir à établir la Faune Française 
et Algérienne des Lépidoptères 


(Suite). 


(Voir, pour le commencement, la livraison IT). 


R'HOPAEOICGER* 


Cœnonympha Iphis, Huebner. 


Espèce de plaine et de montagne; affectionne les prairies; 
manque en Angleterre; ne se trouve ni dans l'Ouest de la France, 
ni en Algérie; répandue depuis la Champagne, la Franche-Comté 
et la Bourgogne jusqu'en Sibérie; habite les Alpes françaises où 
elle s'élève à une altitude de plus de 2,000 mètres et les Pyrénées- 
Orientales, notamment autour de Montlouis-sur-Tet et de Mantet, 
entre 1.500 et 1,700 mètres. 

La forme champenoise d'/phis m'est connue par des exemplaires 
que M. H. Powell a recueillis le 18 juin 1909, aux environs de 
Lusigny (Aube). D'après ce que M. H. Powell m'a mandé au sujet 
d'Iphis et de la localité où il a rencontré cette espèce, Lusigny est 


16 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


un village situé au milieu d’un terrain plat et riche, parsemé de 
villas, entrecoupé de forêts et de prairies souvent humides et maré- 
cageuses. C’est dans l’un de ces prés, très fleuri de marguerites, 
à la sortie de Lusigny; un peu après la traversée de la rivière, que 
volait Cænonympha lphis. Dans la race champenoise, le dessous 
des ailes inférieures, même chez le GC, est bien ocellé et la liture 
plombée submarginale se trouve très apparente. 

En Bourgogne, d’après les documents contenus dans la collec- 
tion Bellier, Zphis est de grande taille, d’un brun rougeûtre clair 
en dessus, bien ocellé en dessous; les © ont même un ocelle noir 
cerclé de jaune et pupillé d'argent vers l’apex des ailes supérieures; 
mais la liture submarginale argentée n'est bien indiquée que chez 
les ©. Malheureusement Bellier a négligé de faire connaître de 
quelle partie de la Bourgogne proviennent ses /#kis et je ne puis 
que regretter l'absence de ce renseignement essentiel. 

La forme d’/#his que je possède de Morteau (Doubs), ressemble 
beaucoup à celle de Lusigny; mais on rencontre en Franche-Comté, 
sans doute par aberration, des /pkis G absolument dépourvus en 
dessous de toute ocellation et privés de la liture submarginale 
argentée. Le fond des ailes inférieures, en dessous, est brun rou- 
geâtre vers la base et gris vers le bord extérieur, éclairé seulement 
de quelques macules médianes blanches. 

Dans les Pyrénées-Orientales, / pis a généralement les ailes infé- 
rieures en dessous, pourvues de six ocelles noirs cerclés de jaune 
et pupillés de blanc; celui qui est le plus voisin du bord costal 
est le plus gros de la série; le second est plus petit; les trois autres 
sont de taille assez égale; le dernier, près de l’angle anal, est très 
petit et souvent semblable au second. 

Iphis vole depuis la fin de juin jusqu’au 20 juillet environ, dans 
les prairies élevées autour de Montlouis, notamment au sud du 
village de la Cabanasse, en lisière de la forêt qui s'élève sur les 
pentes de la montagne du Cambrès d’Ase. Chez certaines Q pyré- 
néennes, les ailes inférieures, en dessus, sont ornées de petits ocelles 
fauves ressortant sur le fond gris noirâtre des ailes et transpa- 
raissant du dessous. La figure 250 donnée par Huebner contient 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 17 
cette particularité. D'ailleurs les papillons représentés par cet Ico- 
nographe (©, n° 249; © n° 250 et 251) semblent bien conformes 
aux /phis des Pyrénées-Orientales. 

C'est dans les Alpes françaises que la race d’/phis se distingue 
par l'absence de toute ocellation et la suppression de la liture 
submarginale argentée. Guenée, dans sa collection, avait appelé 
Belisaria la forme aveugle d'Zphis qu'il avait capturée aux environs 
de La Grave (Hautes-Alpes), en 1850. J'ai observé cette race Beli- 
saria sur les prairies alpestres du Lautaret, du 15 au 21 juillet 
1006; le Cænonympha Iphis était assez commun au milieu des 
pelouses du Lautaret dont le charme est rendu si sensible par 
l'abondance et la variété des fleurs. Le col du Lautaret est, depuis 
la fin de juin jusqu'à la fin de juillet, le plus délicieux jardin 
naturel alpin que nous offrent nos montagnes et je ne sais rien 
de plus joli et de plus attrayant que cette succession de pelouses 
ondulées au milieu desquelles des tapis de fleurs aux couleurs les 
plus variées ne cessent de solliciter l'admiration du voyageur. 

Les papillons volent en foule au travers de ces prés dont le sol 
tantôt sec et escarpé, tantôt arrosé par des ruisseaux qui s’entre- 
croisent, convient à une faune presque aussi variée que la flore. 

Le Cœnonympha Philea-Satyrion sy trouve dans les mêmes 
lieux que son congénère / pis. Sans doute les deux espèces doivent 
s'hybrider; mais je n'ai cependant vu aucun accouplement de 
papillons des deux espèces, bien que je me sois préoccupé d'en 
rechercher. | 

La var. carpathica, Hormuz : « alis non ocellatis, vel al. post. 
ocellis subnullis; plerumque minor », suivant les termes du Catalog 
Staudinger et Rebel 1001, paraît, d'après la diagnose ci-dessus 
rapportée, être la même que la variété aveugle du Lautaret. Cepen- 
dant je n'ai pas eu occasion de voir /phis des montagnes de la 
Bucovine et j'ignore s'il y a quelque particularité susceptible de 
le distinguer de celui de nos Alpes. 

Le D" Siépi a rencontré /phis aux environs du Monetier-de- 
Briançon et M. Powell l’a trouvé au Mont-Pelat (Basses-Alpes), 
le 27 juillet 1906, et sur les pentes du Lausson (Alpes-Maritimes), 


D 


18 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 

le 4 août 10906. Les chasseurs Coulet, de Digne, ent pris également 
Iphis à Enchastrayes, en juillet 1806 et à Larche, en août 1806 
et en juillet 1807; mon frère l’a rapporté d'Ecclepans, en Suisse. 

Dans les départements des Hautes et Basses-Alpes et des Alpes- 
Maritimes, /#his est semblable à la variété carpathica, Hormuz 
(Belisaria, Guenée, i7 Mus. du Lautaret). Je possède un seul G 
d'Ecclepans dont l’ocellation est plus accentuée; mais je ne suis 
pas assez documenté sur la forme de cette localité, pour en disserter. 

L'ocellation est extrêmement apparente chez la variété 7 picles, 
SET, 10e S1IDÈNE: 

Quant à Mahometana, Alph, que j'ai reçue du Fort-Naryne 
(Prov. Semirechgensee), dans le Turkestan oriental, le dessous est 
très peu ocellé; mais la teinte générale gris clair du dessous des 
ailes et uniformément brun noirâtre du dessus, avec une frange 
d'un blanc assez pur, la caractérise tellement que je suis porté à 
considérer Mahometana, non comme une variété, mais comme une 
espèce spéciale et distincte d’Zphis. 


Cœnonympha Iphioides, Ster. 


Répandue en Espagne centrale, à Cuenca, à Brañuelas, à la 
Granja où MM. George Charles Champion et D' Thomas 
Algernon Chapman l'ont trouvée à une hauteur de 5,000 à 
6,500 pieds, depuis le 23 juillet au 3 août 1004. Avant ces dis- 
tingués Entomologistes anglais, leur intrépide compatriote, 
M° de la Bâtie Nicholl, voyageant en Aragon et en Castille, 
pendant les mois de juin et juillet 1897, avait capturé la Cæno- 
nympha Tphioides « fying over a wet field in the Tagus valley 
in some numbers ». M"* de la Bâtie Nicholl ajoute les observations 
suivantes (7 ransactions of the entomological Society of London, 
1897, p. 428) : « This was described by D' Staudinger as a 
variety of C. Zphis, W. V. (= Amyntas, Poda, wich is the older 
name); it differs however, from C. Awynthas (Iphis) in having 
the ocelli on the underside of the hindwimg evenly disposed, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 19 


whild in that species the ocellus above vein 3 1s displaced inwards; 
also there are no white blotches in the inner side of the series of 
ocelli; these differences seem perfectly constant, and there can be 
little doubt that it is a distinct species. It is also closely allied to 
C. Leander, Esp., from Russia and Hungary, but differs from it 
in having an orange terminal line on the underside of the 
forewing, and in having a silvery line on the inner side of the 
terminal orange line of the hindwing instead of one the outer 


side. » 


Voici la traduction française de ces observations, dont Je suis 


redevable à M. Harold Powell : 


« À été décrite par le D' Staudinger comme variété de C. Zp/us, 
W. V. (= Amyntas, Poda, qui est le nom le plus ancien); elle 
diffère cependant de C. Awyntas (Iphis) par la disposition égale 
des ocelles sur l’aile inférieure en dessous, tandis que dans cette 
espèce (Awyutas) l’ocelle qui se trouve au-dessus de la veine 3 
est déplacé vers l’intérieur ; de plus, il n'y a pas de taches blanches 
du côté intérieur de la série d’ocelles; ces différences paraissent 
parfaitement constantes, et on ne peut guère douter que l'espèce 
soit distincte. Elle est également très voisine de C. Zeander, Esp. 
de Russie et de Hongrie, mais elle en diffère par la présence d’une 
ligne orangée terminale sur le dessous de l'aile supérieure, et d'une 
ligne argentée qui, au lieu d’être du côté extérieur de la ligne 
orangée terminale de l'aile inférieure, se trouve du côté intérieur 


de cette ligne. » 


Cœnonympha Arcanioïdes, Pierret. 


C'est dans les Annales de la Société entomol. de France, 
année 1837, que Pierret a figuré sous le n° 5 de la PI 12 et décrit 
aux pages 306 et 307, le Satyrus Arcanioïdes, d'après un exem- 
plaire d', seul sexe qu’il connût alors, provenant d'Oran, en Bar- 


barie. 


20 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


L'espèce est répandue en Algérie et en Tunisie, notamment près 
du littoral méditerranéen; elle éclôt une première fois depuis la 
fin de l'hiver jusqu'au commencement de l'été, plus tôt ou plus 
tard, suivant l'altitude, et une seconde fois à la fin d'août et en 
septembre. M. Holl a observé à Maison-Carrée la seconde appa- 
rition du Cænonympha Arcanioïdes et a bien voulu m'offrir 
quelques exemplaires de la génération de fin d'été. Les papillons 
sont plus petits et plus obscurs en septembre qu'au printemps; sur 
les ailes supérieures en dessus, l’espace fauve se trouve très réduit 
et le dessous des ailes est plus foncé. J'ai distingué la seconde 
génération d’'Arcanioïdes sous le nom de Æolli. 

Ma collection contient des Aycanioïdes provenant des localités 
suivantes : Cap Aokas (Dayrem; avril 1909); Hamman-Rhira 
(Dayrem; mai 1909); Philippeville (Merkl; avril 1884); Bône 
(D' Vallantin et Merkl; juin 1884); Djurjura (Merkl; juillet 
1884); Rovigo (Holl; mai 1007); Lambèze (avril et juin 1884); 
Nemours (Gaston Allard, en avril); Arzew (fin de mars); Sebdou 
(Powell; mai 1907); Tunisie (V. Faroult); Oran (D' Codet; fin 
février 1870); Maison-Carrée (Holl; 31 août, 4 et 18 septembre 
1008). De plus, les collections Boisduval, Guenée, de Graslin, 
Kuwert renfermaient des exemplaires d'Alger et probablement de 
Collo. 

L'ocelle apical noir de l’aile supérieure, en dessous, est relati- 
vement très gros chez Acanioïdes. T1 est cerclé de jaune et pupillé 
de blanc. Aux ailes inférieures, en dessous, la tache ocellée qui, 
chez A7canius, se remarque isolée, près du bord costal, manque dans 
Arcanioïides. On remarque seulement chez le Cenonympha algérien, 
une série de 5 petits ocelles intranervuraux, de taille assez égale, 
régulièrement rangés entre la liture submarginale argentée et 
l'éclaircie blanche médiane laquelle est de forme plus ou moins 
irrégulière et quelquefois presque linéaire, descendant sinueuse du 
bord costal au bord anal des ailes inférieures, en dessous. Sur le 
dessus des mêmes ailes, on voit parfois transparaître du dessous 
une série d’ocelles jaunes pupillés de noir. 

L’ocelle apical noir du dessous des ailes supérieures peut se 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 21 


trouver, mais très rarement, suivi un peu plus bas d’un second 
ocelle noir plus petit, mais également cerclé de Jaune et pupillé 
de blanc. Cette variation &zocellata atteint les deux sexes. Je 
possède une Q de Lambèze chez laquelle la biocellation ne se 
remarque que d’un seul côté des ailes. 

Dans le Catalogue of Diurnal Lepidoptera of the family Saty- 
ride in the Collection of the British Museum by Arthur Gardiner 
Butler (London, 1868), l’auteur anglais qui fut, comme l'on sait, 
très fécond, insère à la page 41, dans la mention relative à Cæno- 
nympha Arcanioides, la notice suivante : « Local form. ? Papilio 
(Hipparchia) arcanoides (sic), Freyer, Neuere Beitraege, V, p. 125; 
n. 816, tab. 457, n. 1 (1845). Switzerland (Freyer). B. M. It is 
quite likely that the Swiss specimens may be a race of arcanioïdes; 
they do not, howewer, agree with the figure of that species in all 
respects. We have an insect from Algeria, which Mr. Adam White 
had labelled as this species; but it more nearly resembles A7cania, 
and is probably distinct from both. ». 

Il est aisé de voir d’après les lignes qui précèdent que Butler ne 
connaissait point, avec certitude, le véritable Arcamoïdes. Il ne 
l'indique du reste pas dans la collection du British Museum, comme 
venant d'Algérie, contrée qui est la patrie exclusive d’Arcantoides, 
mais comme originaire de Suisse. L'opinion que vraisemblablement 
les spécimens de Suisse peuvent être une race d'Acantoïdes est 
tout à fait erronée; d’ailleurs Butler reconnaît que les spécimens 
de Suisse ne concordent pas sous tous les rapports avec la figure 
d'Arcanioïdes; quant à l’insecte d'Algérie (ou supposé algérien ?) 
et étiqueté Arcanioïdes par M. Adam White, Butler dit qu'il res- 
semble davantage à A7cania, dont il est plus voisin, tout en étant 
probablement distinct des deux. La question semble donc être 
restée bien confuse pour M. Butler et l'erreur d'indication de localité 
commise par Freyer a contribué à cette confusion. 

En Suisse, on trouve les Cæenonympha Arcanius, Darwiniana et 
Philea-Satyrion. Mais ces Satyridæ sont certainement spécifique- 
ment distincts d'Arcanioides et aucun d'eux ne peut être considéré 
comme une race de l'espèce algérienne. Freyer, cité par Butler, 


[e) 
[ee 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


comme il est dit ci-dessus, figure sous le n° 1 de la Tab. 457, un 
véritable Ayrcanioïdes, qu'il appelle à tort Arcanoides. Dans son 
texte, on lit (p. 125) que M. von Weissenborn à qui Freyer est 
redevable de communications si intéressantes, lui a envoyé les 
deux sexes du papillon dont il est cas, en observant qu'il avait 
reçu de Suisse, deux paires semblables, sous le même nom. 

L'erreur de localité, relatée par Freyer, est évidente et elle a 
contribué comme je le dis ci-dessus, à mettre Butler dans l'embarras; 
mais ledit Freyer est coutumier du fait et il ne convient d'attribuer 
qu'une confiance modérée à ses assertions, en ce qui regarde la 
provenance des papillons qu'il figure. Freyer a pour excuse de 
n'avoir pas attendu pour venir au monde, l'époque fortunée où 
chaque Allemand, en naissant, est déjà professeur de géographie. 
C'est en effet le même Freyer qui prétend dans ses VWeuere Batrege 
(vol. V; p. 76) que la Zygæna Favonia dont il donne la figure 
sous le n° 1 de la PL 428, a été trouvée en Turquie par le 
D' Wagner. Ceci est encore une méprise que je ne suis pas seul 
à avoir constatée. En effet, feu Otto Staudinger, après son voyage 
en Algérie, publia dans Berliner entom. Zeits. (Bd. XXXT; 1887; 
Heft I, p. 29-42) un travail sur quelques nouvelles Espèces et 
Variétés des Genres Sesia et Zygæna; et s'occupant dans cet 
opuscule de la Zygæna Favonia que Freyer, le premier, a figurée 
et décrite, Staudinger à propos de l'indication erronée de localité 
donnée par Freyer, sut trouver une raison tout au moins originale, 
pour excuser Freyer qui avait donné la Turquie, pour patrie à cette 
Zygæna, au lieu de l'Algérie. Le vieux honorable M. Freyer, dit 
Staudinger, à cause de la même religion mahométane des deux 
pays en question (Turquie et Algérie) a fait à leur endroit une 
confusion. « und wird der alte ehrenwerthe Herr Freyer, der 
gleichen muhamedanischen Religion der betreffenden Laender 
wegen, hier dieselben verwechselt haben ». 


Le docteur Moritz Wagner, qui a découvert la Zygæna Favonia 
en Algérie, avait effectué un voyage dans cette contrée pendant 
les années de guerre et de conquête; 1836, 1837 et 1838. Wagner 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 23 


était un historien et un naturaliste; 1l écrivit une relation de son 
voyage qui fut publiée à Leipzig en 1841 et porte une dédicace 
à Son Altesse Royale Ferdinand-Philippe-Louis, Duc d'Orléans 
(Seiner Kæniglichen Hoheit Ferdinand Philipp Ludwig, Herzog 
von Orleans, etc., etc., etc.). On peut y lire le récit de l'expédition 
vers Constantine et de la prise de cette ville en 1837, des détails 
sur la mort du général Damrémont et du colonel Combes, une 
foule de considérations ethnographiques et militaires, des notices 
biographiques sur des chefs arabes, ainsi que des aperçus sur la 
faune de la Barbarie. On trouve, entre autres documents d’histoire 
naturelle, dans l'ouvrage intitulé : Xetsen in der Regentschaft 
Alger von D. Moritz Wagner et sous le titre : Ueber die Schmetter- 
linge der Regentschaft Algier mit besonderer Beruecksichtigung 
threr geographischen Verbreitung (p. 195-210) une notice sur les 
papillons observés en Algérie par l’Auteur. Les fautes de déter- 
mination sont nombreuses. On en jugera pour les Zygæna par les 
lignes suivantes (p. 205) : « Eine seltene und schœne Art der den 
Uebergang von den Tagfaltern zu den Schwaermern bildenden 
Gattung Zygæna ist Z. Milaris, welche Graf von Hoffmansege in 
Portugal gefunden. Z. Sarpedon hat die Regentschaft Algier mit 
Italien, Sudfrankreich, Spanien und die bekanntere Meliloti mit 
dem ganzen gemaessigten Europa gemein. » 

Pas plus Æilaris que Sarpedon et Meliloti ne se trouvent en 
Algérie et c’est cette fausse Sarpedon, plus tard reconnue pour être 
une espèce spéciale et distincte, que Freyer a distinguée sous le 
nom de Favonia, en la comparant d’ailleurs à Sarpedon et en lui 
donnant la Turquie, au lieu de l'Algérie, pour patrie! 


Cœnonympha Arcanius, Linné. 


Décrit par Linné, dans les termes suivants qui sont bien 
sommaires, mais n'ont cependant pas donné lieu à synonymie : 
« A7cantus, 242. P. alis integerrimis ferrugineis : subtus anterio- 
ribus ocello unico ; posterioribus quinis : primo fascia remoto. 
Habitat in Europæ pratis silvaticis. Larva viridis : lineis dorsa- 


24 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


lhbus obscurioribus lateralibus flavis, cauda bidentata. » (Carol 
a Linné Systema Naturæ. Tom I. Pars V, p. 2.286). 

L'espèce manque en Angleterre; elle est généralement commune 
en France où on la voit voler depuis la fin de mai jusqu’à la fin 
de juillet, suivant les années et les localités. Ma collection contient 
des exemplaires provenant de la forêt de Rennes où elle fréquente 
les clairières et les allées herbues, à la fin de juin, de Bourg-des- 
Comptes (Ille-et-Vilaine) où je l'ai trouvée dans les champs 
d'ajonc; de Cancale, sur les bords de la Manche; des landes de 
Milly (Maine-et-Loire); de Charroux (Vienne); de Dompierre-sur- 
Mer (Charente-Inférieure); d'Angoulême, où elle paraît dès la fin 
de mai, mais est surtout abondante en juin; de Samoussy (Aisne); 
de Lusigny (Aube); de Montigny-Beauchamps, de Lardy et des 
bois situés entre Sèvres et Versailles (Seine-et-Oise); d'Evreux; du 
Saut-du-Doubs; d'Uriage (Isère); de Florac (Lozère); d’Aix-les- 
Bains (Savoie); du Mont Gourdon, de Garamagne, d'Entrevaux et 
de Digne (Basses-Alpes); de Menton, Puget-Théniers, Escarène et 
Levens (Alpes-Maritimes); de la Sainte-Baume (Var); des envi- 
rons de Marseille; de Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales); de 
Cauterets (Hautes-Pyrénées). 

Je possède aussi des exemplaires de Coburg, de Silésie; de 
Bohême; d'Autriche; de Florence, où je l’ai prise en juin 1007, 
dans les petits bois de chêne voisins de la Poudrière; de l'Italie 
méridionale; de Grèce; de Broussa, en Asie-Mineure; de Crevola, 
où se trouve la plus grande race jusqu'ici connue et appelée : 
insubrica, Raetzer. J'ai figuré cette variété qui habite Crevola et 
le versant méridional du Simplon, près de Laquinthal, dans la 
1e livraison des Ætudes de Lépidoptérologie comparée, d'après 
des documents dont je suis redevable à feu mon ami le chanoine 
E. Favre, l’auteur de la Faune des Macro-Lépidopières du Valais, 
ouvrage publié en 1800, avec la collaboration d’Arnold Wull- 
schlegel. 

Arcanius est une espèce des plaines et des basses montagnes. 

Esper a figuré sous le n° 4 de la Tab. XXI, la forme la plus 
ordinaire, c’est-à-dire celle dont les ailes inférieures, en dessus, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 2 


Un 


sont uniformément d'un gris noirâtre, sans aucune éclaircie médiane 
de couleur fauve; mais Huebner a figuré sous le n° 240, un Ayca- 
nius dont les ailes inférieures, en dessus, montrent une tache fauve 
médiane assez grande et très caractérisée. 

Cet Arcanius 3 figuré par Huebner, se rencontre à ma connais- 
sance, surtout aux environs de Samoussy (Aisne) où M. Harold 
Powell et mon frère, en compagnie de M. Henry Brown, le captu- 
rèrent, le 13 juin 10009. Cependant, bien qu'une dizaine de Œ' pris 
à Samoussy soient pourvus de cette éclaircie fauve plus ou moins 
accentuée, sur le disque des ailes inférieures, en dessus, un nombre 
plus grand d'Arcanius ©, également trouvés le même Jour, à 
Samoussy, sont dépourvus de cette tache fauve et montrent le 
dessus de leurs ailes inférieures entièrement et uniformément noi- 
râtre. Il résulte de cette constatation qu'à Samoussy, les exemplaires 
Œ d’Arcanius, dont l'aile inférieure est maculée de fauve, peuvent 
être considérés comme l'expression d’une variété plus ou moins 
abondante et non comme la forme géographique normale du lieu. 

J'ai désigné sous le nom de Æuebneri, la variété C' portant une 
éclaircie fauve sur le disque des ailes inférieures, telle que l'a 
figurée Huebner; mais j'ignore d'où provient le C' figuré par 
Huebner, sous le n° 240. Est-ce un exemplaire aberrant? Est-ce 
plutôt le représentant d'une race locale offrant le plus généralement 
la particularité d’être maculée de fauve sur la partie médiane des 
ailes inférieures, en dessus ? Je ne puis le savoir. Toutefois, Je 
remarque dans ma collection que cette variété Azebneri peut s'ob- 
server dans des localités très distinctes. En effet, j'ai sous les yeux 
un Azcanius ©, pris au cours d’une chasse à Roccaraso et Palena, 
dans l'Italie méridionale, à la fin de juillet 1907, par M. Fabresse 
et un autre G capturé aux environs de Menton, dans les Alpes- 
Maritimes, en 1907, par M. Decoster, présentant l’un et l’autre une 
éclaircie fauve peu développée, mais très apparente sur le disque 
des ailes inférieures, en dessus. Ces deux A7canius peuvent être 
rattachés à la variété Huebneri. Par ailleurs, je n’ai jamais observé 
d'Arcanius tendant à la variété Huebneri. En Bretagne et à Cau- 
terets, Arcanius a la couleur fauve plus foncée et plus brune que 


26 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


dans les autres localités, notamment qu'aux environs de Paris, en 
Charente et dans les Pyrénées-Orientales; mais cet assombrissement 
général de la teinte fauve aux environs de Rennes et de Cauterets, 
bien qu'il soit parfois tel que sur la surface des quatre ailes, il 
reste à peine, aux supérieures, une faible éclaircie fauve, près de la 
base, ne me semble pas mériter d’être l'objet d'une appellation 
particuhère. Les Naturalistes de l'Ecole Fruhstorfer en jugeront 
peut-être autrement; mais Je leur laisse le soin de créer un quali- 
ficatif nouveau pour désigner la race obscure de Cæenonympha 
Aycanius à Rennes et à Cauterets, si cela leur est agréable. 

On trouve exceptionnellement çà et là des exemplaires d’un 
fauve pâle; mais il existe une Aberration dans laquelle la couleur 
fauve est remplacée par une teinte d'un blanc jaunâtre très clair; 
les deux sexes d'Arcanius peuvent être atteints de cet albinisme et 
ma collection contient de l’Aberration que j'appelle Dupuyi, en 
l'honneur de mon ami Gabriel Dupuy qui l’a trouvée plusieurs fois 
a Angoulême, 5 individus venant de Silésie, de Bohème, de Breslau 
et de la Charente, c'est-à-dire de contrées bien éloignées les unes 
des autres, mais où se reproduit exactement la même variation. Je 
fais figurer (PL XXXVII; fig. 233 et 234) deux échantillons GO 
et Q de l'Ab. Dupuy. 

Par ailleurs, c’est dans l’ocellation de ses ailes que varie Ay7ca- 
nus. 

D'après Linné, la forme qu'il décrit et qui est par conséquent la 
forme type, a un ocelle apical aux ailes supérieures en dessous et 
cinq ocelles aux inférieures, dont le premier est éloigné des autres. 
Il est fréquent de trouver des Aycanius privés de l’ocelle apical; 
ainsi dans la Charente, l'absence de cet ocelle apical des supérieures 
n'est pas rare. Inversement l’ocelle apical peut être suivi d’une 
seconde tache ocellée contiguë à la première, et même d’une troi- 
sième; celle-ci très réduite généralement. Une Q d'Allemagne 
(Collection Kuwert) possède 3 taches ainsi définies. 

Aux ailes inférieures, la série des quatre ocelles qui est plus 
souvent portée à cinq, peut se trouver réduite à trois et même à 
deux. Lepelletier de Saint-Fargeau publie sous le n° 5 de la PI. 7, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 27 


le dessous d'un A7camus dont les ailes inférieures présentent, en 
outre de l'ocelle costal, deux gros ocelles de la série submarginale, 
situés entre deux très petits. Tous les ocelles peuvent même dis- 
paraître, comme dans l'Ab. cœca dont je publie la figure 
(PI. XXXVIT, fig. 235) d'après une © venant de Vienne, en 
Autriche. L'ocelle supérieur et isolé des ailes inférieures, en dessous, 
peut aussi manquer, alors qu'une série des ocelles submarginaux 
subsiste. Je possède un C' pris à Crevola (PI. XXXVIT; fig. 232), 
chez lequel manquent l’ocelle apical des supérieures et, ce qui paraît 
extrèmement rare, le gros ocelle costal des inférieures; mais 1l reste 
aux inférieures une série de 3 ocelles submarginaux, contigus, de 
grande dimension. 

Tous les ocelles du dessous peuvent transparaître en dessus, sous 
forme d’un petit anneau fauve centralement ponctué de noir. La 
figure d’Acanius © donnée par Huebner, sous le n° 242, représente 
cette particularité. Elle est plus fréquente dans les régions chaudes 
et méridionales. Le GO est ordinairement moins favorisé que la ©, 
au point de vue de la reproduction en dessus des taches ocellées 
du dessous et le plus souvent, on ne voit ressortir chez le G' que 
la tache ocellée apicale des ailes supérieures. Cependant je possède 
un © de Grèce, présentant sur les inférieures, en dessus, une série 
de 4 ocelles submarginaux transparaissant du dessous. Ce sont sur- 
tout les Q qui montrent, en dessus, une reproduction plus complète 
et mieux marquée des taches ocellées du dessous. 

Je possède des Q capturées dans la Lozère, les Pyrénées- 
Orientales, la Savoie et la Charente conformes à la figure 242 de 
Huebner. 

La liture marginale argentée fait quelquefois défaut, surtout 
aux ailes supérieures, chez les ©. 

Le P. Engramelle a publié la figure de l’Arcanius, sous le nom 
de Céphale (PI. XXIX; fig. 57a et 57 6). Le papillon qu'il indique 
comme variété de Céphale, sous les n° 57c et 57 d est l'Iphis. 


28 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Cœnonympha Darwiniana, Ster. 


Mon frère a rapporté de Fusio, où il avait trouvé Darwiniana, 
du 10 au 14 juillet 1907, volant dans de hauts pâturages, fré- 
quentés par la Colias Phicomone, une longue série d'exemplaires 
conformes aux figures données par Herrich-Schaeffer, sous les 
n°* 180 et 187, avec le nom d’Arcanius var. M. Wullschlegel m'a 
envoyé une série d'exemplaires capturés en 1909 dans la vallée de 
Saas, au Valais. Lang a représenté le même Cænonympha, mais 
avec une coloration beaucoup trop pâle, sous le n° 5 de la 
PI LXXV et avec le nom de var. Darwiniana, Stgr. La bande 
blanche du dessous des ailes inférieures est très réduite chez Darwri- 
niana; les taches ocellées d’un noir vif, centralement pupillées de 
blanc, sont entourées d’un cercle jaune plutôt qu'orangé et l’ocelle 
costal des inférieures paraît plus rapproché de la série des 4 ou 
5 ocelles submarginaux que chez l'Arcanius de nos plaines ou de 
nos basses montagnes. Il y a chez Darwiniana, comme chez 
Aycanius, une variété oôsoleta, Tutt, caractérisée par « disappear- 
rance of apical spot un. s. f. w. », suivant George Wheeler, dans 
the Butterflies of Switzerland (p. 118). Le nombre des taches 
ocellées aux ailes inférieures en dessous, est, tout compris, de 5 
ou 6; mais certaines taches, surtout les n° 2, 3 et 6, peuvent être, 
proportionnellement aux autres, très réduites et même annihilées. 


Dans sa collection, Guenée considérait Darwiniana, comme une 
espèce distincte d'Arcamius. Je ne suis pas éloigné de partager cette 
opinion. En France, Darwiniana se trouve à Allos et à Enchas- 
trayes, dans les Basses-Alpes, où les chasseurs de Digne l'ont 
récoltée en juillet 1896 et 1897; mais dans les Basses-Alpes fran- 
çaises, la forme est moins colorée et moins grande qu'à Fusio. 


Il est intéressant d’observer la présence d’Arcanius insubrica, qui 
est la forme agrandie d’Arcanius, au Simplon, dans le voisinage 
de Darwiniana qui est généralement de plus petite taille que la 
forme normale d’A7cantus. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 20 


Cæœnonympha Philea, Huebner. 


George Wheeler, dans son ouvrage 74e Butterflies of Suwitzer- 
land, publié à Londres, en août 1903, établit (p. 118) PArlea, 
Freyer, comme une aberration d’Aycanius et érige en espèce dis- 
tincte Sa/yrion, Esper (PAilea, Huebner). 

En comparant entre elles les figures de PAilea et de Satyrion 
données par les auteurs, je n'arrive pas à trouver de différence 
spécifique possible entre PAilea et Satyrion. 

Esper (Tab. CXXII; fig. 2) a figuré un Satyrion dont le disque 
des ailes supérieures est d’un rouge orange invraisemblable; mais 
il faut reconnaître que sa diagnose (p. 24) atténue sérieusement 
la magnificence de cette couleur orangée; en effet, on lit : swpe- 
rioribus ochracets. 

Passant à l'ouvrage de Freyer, je vois, sur la Tab. 367, Safyrion 
figuré avec les n° 1 et 2 et PAilea avec les n° 3 et 4. Je cherche 
en vain, en comparant ces figures entre elles, un motif sérieux de 
séparation. Je me reporte au texte (p. 137 et 138); Safyrion aurait 
la couleur du fond plus claire et plus pâle « doch ist die Grund- 
farbe um vieles heller und blaesser ». De plus l’éclaircie blanche 
serait plus large et l’ocellation plus atténuée sur les ailes infé- 
rieures en dessous; mais ces différences telles qu’elles sont indiquées 
sur les figures, sont bien peu sensibles. 

Herrich-Schaeffer figure Sa/yrion Œ' sous les n°* 289 et 290. La 
couleur du fond (Grundfarbe) du dessus des ailes et d’un brun 
noirâtre uni et le disque n’est pas fauve. Huebner, qui a sans doute 
la priorité du nom, a figuré PAilea Q assez obscure sous Îles 
n*“ 264 et 255. Mais la Q n'offre pas de caractères différentiels 
aussi intéressants que le O. Quant à Lang, il figure, malheureu- 
sement grossièrement, Sa/yrion d', sous le n° 6 de la PI LXXV. 

En résumé, il y a deux formes de O' et deux formes de ©. Chez 
l’une, le G a les ailes, en dessus, uniformément d’un brun clair et 
chez l’autre, on voit, à partir de la base des supérieures, une éclaircie 
fauve s'étendre jusqu’à la bordure brun noirâtre. Comparant les 


30 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 
A ne SN ee à 
Q, l’une a les ailes supérieures d’un fauve rougeatre clair, avec une 
bordure brunâtre faiblement indiquée et traversée par une liture 
de la couleur du fond parallèle au bord marginal; l’autre est plus 
obscure, présente une bordure brun noirâtre assez large; mais il 
y a des exemplaires de transition et, au même lieu, on trouve quel- 
quefois les deux formes. 

Je crois qu’on peut donner le nom de Sazyrion, H.-S. (289-200) 
à la forme dont le © est le plus uniformément brun noirâtre, et 
le nom de Pilea, Freyer (PL 367; fig. 3, 4) à la race dont le 
dessus des ailes, chez le ©, est plus rougeâtre vers la base et plus 
rapprochée de Darwiniana. 

C'est ainsi que Staudinger et Rebel ont défini la question dans 
leur Catalog 1901 ; ces auteurs attribuent à PAilea, Freyer, le 
Cænonympha figuré sous ce nom par Godart (PL XX; fig. 1, 2). 
Il ne faut pas cependant s’en rapporter à la figure donnée par 
Godart, pour cette attribution de nom; car le dessus des ailes, dans 
le papillon figuré, est entièrement et uniformément brun noir; mais 
bien plutôt à la description où il est dit (Tableau méthodique, 
p. 30) : « ailes entières, d’un brun noirâtre en dessus, avec le disque 
des supérieures roussâtre... » 

C’est en somme le disque des supérieures roussdtre qui caractérise 
Philea et le dessus des ailes uniformément d’un brun noirâtre qui 
convient à Sa/yrion. 

Mais PAilea et Satyrion sont certainement les deux termes d’une 
même unité spécifique, unis par les plus insensibles transitions. 
J'ai pris PAlea et Satyrion au Mont Revard, en Savoie, pendant 
les mois de juin et juillet 1906; au Lautaret (Hautes-Alpes), en 
juillet 1006; à Chamounix, en juillet 1802; au Ryffelalp, en 
juillet 1864, 1866, 1802 et 1808; J'ai reçu PAilea des environs de 
Digne; quant à Sa/yrion secundum Herrich-Shaeffer, je lai trouvé 
dans l'Oberland bernois à la fin de juin 1808 et Je l’ai reçu, plus 
caractérisé, d'Arolla où il avait été pris en Juillet 1906. PA1lea peut 
avoir comme Aycanius une Ab. cæœca que Je fais représenter 
(PL XXXVII; fig. 236). J'ai déjà fait figurer deux curieuses 
Aberrations de PAilea, sous les n° 104, Q impunctata, Obthr., et 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 31 


105, © melania, Obthr., dans la XX° livraison des Æ/udes d'Ento- 
mologie. 

Philea et Satyrion se plaisent dans les prairies alpestres; leur 
vol est sautillant, court et peu élevé. Généralement ce sont des 
papillons abondants là où ils habitent. Darwimiana, Phuilea et 
Satyrion semblent être exclusivement alpins et manquent dans les 
Pyrénées. 

Pour considérer Satyrion, Esper, comme une espèce distincte 
de PAilea, Fr, M. Wheeler disposait sans doute d’un « #aterial » 
tout à fait différent de celui que je possède, car à mes yeux, PArlea 
et Satyrion, tels que je les connais et que Je l’expose ci-dessus, sont 
à peine distinguables l’un de l’autre, même comme variété. 


Cœnonympha Dorus, Esper. 


Esper a, le premier, décrit et figuré Dorus (Tab. LXXVIIT, 
fig. 1) d'après un envoyé par M. de Villers, qui l’avait découvert 
sur les montagnes du Languedoc (*). Linné avait établi l'usage 
de chercher dans la Fable, les noms pour désigner les papillons. 
Dorus était donc, selon la Fable, fils de Neptune et d’Alope. Il 
quitta la Phtiotide où régnait son père et vint fonder au pied du 
Mont Ossa une colonie qui, de son nom, fut appelée la Doride. 

Le Cœnonympha Dorus est un papillon d’assez petite taille, de 
contexture un peu délicate, répandu en France dans les départe- 
ments les plus méridionaux, en Espagne et en Algérie. Voici 


(*) En lisant l’article consacré par Esper à la nouvelle espèce Dorus, j'ai 
trouvé en note une correction qu'Esper se faisait à lui-même à propos de 
Pasiphaë, d’abord signalé par lui, à tort, comme pris aux environs de Paris, 
puis indiqué avec plus de raison comme venant d'Antibes, en Provence. L’Auteur 
ajoute, en parlant de Pasiphaë : « Er enthaelt sich auf den Pyrenacen ». Si 
j'avais pris connaissance plus tôt de cette note imprimée à la page 130 du 
2° volume de l’ouvrage intitulé : Der europaeischen Schmetterlinge ersten Theils 
zweyter Band welcher die Fortsetzungen der Tagschmetterlinge enthaelt (sans 
date), j'en aurais fait mention à la page 393 de la 3° livraison des Z/udes de 
Lépidoptérologie comparée. 


32 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 

d’ailleurs le relevé des localités où les Dorus de ma collection ont 
été capturés : Marseille; Pont-du-Gard; Cette; Florac; La Turbie 
près Nice, Castillon, Puget-Théniers, dans les Alpes-Maritimes; 
Digne, Allos, Entrevaux, Mont-Gourdon, Saint-Martin-d'En- 
traunes, dans les Basses-Alpes; Millau, dans l’Aveyron; Vernet- 
les-Bains, dans les Pyrénées-Orientales; Albarracin, Escorial, 
Grenade, Sierra de Alfakar, en Espagne; Nemours, dans la pro- 
vince d'Oran. J'ai sous les yeux environ 200 exemplaires provenant 
des différentes localités précitées. 

En France, Dorus Ga généralement les ailes supérieures, en 
dessus, d’une teinte brune unie avec un reflet soyeux et un peu 
chaud. Un ocelle, le plus souvent unique, subapical, noirâtre, 
cerclé de fauve, transparaît du dessous. Cet ocelle, pupillé de 
blanc d'argent en dessous, est aveugle en dessus. On voit, mais 
rarement, au-dessous de la tache ocellée subapicale des ailes 
supérieures, sur le dessus des ailes, comme dans la figure publiée 
par Esper, deux autres petits ocelles noirs, cerclés de fauve, for- 
mant avec l’ocelle supérieur ordinaire une petite série de trois 
taches alignées le long du bord marginal. Plus généralement, au 
lieu d’ocelles bien formés, on voit une éclaircie d’un fauve jaunâtre 
plus ou moins vaguement indiquée. Les ailes inférieures, brunes 
vers la côte, d’un fauve orangé sur le disque et près du bord anal, 
bordées d’une fine liture fauve, sont généralement marquées de 
3, 4 où même $ points noirs plus ou moins gros et accentués, 
transparaissant du dessous. 

La © diffère du O' en ce qu’elle est entièrement d’un fauve 
orangé, en dessus, plus ou moins clair ou foncé, avec la bordure 
des ailes d’un brun noirâtre, traversée parallèlement au bord mar- 
ginal par un fin liséré fauve. Chez certaines ©, la base et le bord 
costal des ailes inférieures se rembrunit et la bordure des supé- 
rieures s’élargit (PI. XLVIII, fig. 389); mais comme le dessus des 
ailes supérieures de quelques G' s’éclaire un peu plus largement de 
fauve, le long du bord marginal des supérieures au-dessous de 
l’ocelle subapical, il en résulte que si, dans la majorité des exem- 
plaires, les O' et © sont très différents, il se présente cependant 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 33 


parfois des O' aussi bien que des © dont l’analogie est remar- 


quable. 


En dessous, chez les deux sexes, l’ocellation est ordinairement 
très accentuée. Les taches ocellées sont d’un noir vif, cerclées de 
fauve, pupillées d'argent. Un liséré d'argent descend, un peu 
sinueux, le long du bord marginal des ailes, depuis l’apex des 
supérieures Jusqu'au bord anal des inférieures. Aux ailes supé- 
rieures, il y a généralement un seul ocelle et une série de six aux 
inférieures. 


Mais cette série n'est point alignée droit; elle est pour ainsi 
_ dire formée de 3 groupes, d'abord un ocelle détaché des autres et 
comme isolé près de la côte, puis 2 ocelles juxtaposés et enfin 3 en 
ligne. Les 5 derniers ocelles sont le plus souvent de taille assez 
sensiblement égale dans le même exemplaire; mais lorsque la 
dimension varie, les ocelles médians sont plus gros que les deux 
extrêmes. 


La couleur jaune du dessous des ailes est assez variable; elle 
tend à être plus uniformément jaune foncé chez les Doyus de la 
Lozère et de l'Aveyron, tandis que dans les Pyrénées-Orientales 
et dans les Alpes-Marifimes, le dessous est plus nuancé de jaune 
foncé et de jaune nankin. De plus, les Dorus de la Lozère et de 
l'Aveyron ont l’ocellation bien plus petite et moins accentuée que 
dans les départements plus méridionaux. Un © pris à Millau par 
mon frère (PI. XLVIII, fig. 388) n’a plus qu'un seul tout petit point 
noir sur le dessus des ailes inférieures et les ocelles du dessous 
sont extrêmement petits. J'ai fait figurer dans la XX° livraison 
des Etudes d'Entomologie, sous le nom de Ab. fulvia, Obthr. 
une variété Q de la Lozère dont le dessous des ailes inférieures 
est d’un brun grisâtre et soyeux unicolore. J'ai appelé »2cr0ph- 
thalma la race de l'Aveyron et de la Lozère. 


Une © des Bouches-du-Rhône, dont je suis redevable à l’obli- 
geance de M. Gédéon Foulquier, est remarquable par l’ocellation 
de ses ailes supérieures, formée d’une série de trois taches intra- 


nervurales, contiguës, en dessus, comme en dessous. Une autre Q 


3 


34 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


de Puget-Théniers est de même /riocellata, mais les ocelles sup- 
plémentaires sont, dans cet exemplaire, plus fortement dessinés 
en dessous qu'en dessus. Le ' figuré par Esper est au contraire 


triocellé en dessus seulement; en dessous, il est uniocellé. 


À Albarracin, en Espagne, la race n’est pas sensiblement diffé- 
rente de la forme des parties méditerranéennes du midi de la 
France. M. Fabresse a capturé au cours de son voyage pendant 
les mois de juillet et août 1007, dans les environs d’Albarracin, 
un curieux Dorus Œ ayant en dessous une série de 3 ocelles super- 
posés aux ailes supérieures (PI. XLVIII, fig. 387). Sur l’une des 
ailes, 1l y a même un quatrième petit ocelle immédiatement juxta- 
posé en dessous de l’ocelle subapical qui reste toujours le plus gros. 
Cette variété /riocellata existe donc en des contrées très diverses. 


Dans l’/ris-Dresden (Band XIX, 1006), Carl Ribbe distingue 
(p. 243) la race d’Andalousie sous le nom d’Ardalusica ; en effet, 
la forme de Dorus à Grenade et à la Sierra-de-Alfakar est tout 
à fait particulière, et c’est avec raison que Ribbe lui a donné un 
nom spécial qu’elle mérite à tous égards (PI. XLVIIT; fig. C' 300, 
Q 391). 

L’entomologiste allemand désigne sous le nom d’Ab. exoculata 
la variété de Dorus relativement assez fréquente en Andalousie 
et qui est privée de toute ocellation en dessous. M. C. Ribbe 
ignorait sans doute que J'avais déjà figuré, avant qu'il ne la 
dénommät, cette Aberration aveugle, avec le nom de Cæca, sous 
le n° 102 de la PI. VI de la XX° livraison des Etudes d'entomo- 
logie. 

La race de Dorus à l'Escorial paraît conforme à celle de Gre- 
nade. Les G' et les © sont plus obscurs que dans le type de 
France; très peu ponctués en dessus comme en dessous, certains 
exemplaires ressemblent beaucoup à Cænonympha Fettign. Mon 
frère a pris à la Sierra de Alfakar, en juillet 1870, avec 
d’autres exemplaires plus faciles à distinguer de Feffigu, une 
Q qui, en dessus comme en dessous, peut être facilement confondue 
avec ce dernier Cœnonympha (PI. XLVIII, fig. 392). 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


[#2] 
Un 


J'ai désigné sous le nom d’Azstautr (PI. XLVIIT, fig. 386) la race 
de Dorus qui habite aux environs de Nemours, en Algérie orien- 
tale. Sur les ailes inférieures, en dessous, l’espace blanc est plus 
étroit et intérieurement il est limité par une ligne plus droite; Îles 
points ocellés, sans être en série rectiligne, chevauchent moins que 
dans les Dorus du Midi de la France. Le ©, en dessus, montre une 
large éclaircie fauve aux ailes supérieures. J'ai signalé la var. 
Austauti, pour la première fois, dans la VI° livraison des Etudes 
d'Entomologie (p. 59-60). 

Huebner a figuré le © Dorus, avec le nom fautif de Dorion, 
sous les n° 247 et 248. Il semble avoir représenté un exemplaire 
du littoral méditerranéen français. 

Une race de Dorus extrêmement curieuse et très différente du 
type, est celle du Nord-Ouest de l'Espagne, appelée : Warhewi. 

MM. T.-A. Chapman et G.-C. Champion ont publié dans les 
Transactions of the entomological Society of London, 1907, un 
travail assez bref, mais du plus haut intérêt, sous le titre : Æxzo- 
mology in N. W. Spain (Galicia and Leon). Dans cette notice se 
trouve décrit le Cœnonympha Dorus-Mathewi, Tutt (p. 152-155) 
et d'excellentes et nombreuses figures (PI. V, fig. 1-12) représentant 
avec ses variations la nouvelle variété géographique très remar- 
quable de Dorus. Je dois à l’obligeance de M. T.-A. Chapman la 
possession de 9 exemplaires du Cœnonympha Mathewi provenant 
de Pontevedra, Brañuelas, Casayo et Vigo. M. T.-A. Chapman 
considère ]/athewi seulement comme une race locale de Dorus et 
dit qu'il n’y a probablement pas grande différence entre Mathewi 
et le Cœnonympha Bieti (recte Bieli), Stgr, du Portugal. Je ne 
puis mieux faire que d'inviter le lecteur à se reporter aux rensei- 
gnements publiés par MM. Chapman et Champion. La méthode 
qui consiste à donner la figure d’un grand nombre d'exemplaires 
variant entre eux est d’ailleurs excellente et s’imposera désormais, 
comme un progrès très précieux, en vue de fournir une connais- 
sance vraiment complète des Espèces. 

Le Cœnonympha Mathewi varie beaucoup pour l’ocellation. Les 
figures exécutées d’après des exemplaires très judicieusement 


36 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


choisis, présentent une documentation extrêmement utile et per- 
mettant d'apprécier exactement la variation qui atteint dans le 
Nord-Ouest de l'Espagne ce joli Cœnonympha. Je serais, pour ma 
part, tenté de le considérer plutôt comme une espèce distincte et 
séparée que comme une race géographique de Dorus, si certains 
exemplaires ne formaient pas une transition qui justifie le ratta- 
chement à Doyus. Les ocelles, chez Mathewi, sont généralement 
plus accentués en dessus qu’en dessous, ce qui, comparativement 
à la race méditerranéenne française, est l'inverse de ce que nous 
pouvons constater. 

Le Cœnonympha Dorus se plaît dans les garrigues calcaires, 
sèches et chaudes du Midi de la France, où on le voit voltiger en 
abondance depuis la fin de juin jusqu’au 25 juillet environ. Il se 
pose volontiers sur les touffes de thym, de dorycnium, d’origan, 
même sur le sol rocailleux, entre les buissons et les grosses pierres. 


En toute saison, le vent peut souffler violemment et souvent 
avec la plus fatigante continuité sur les collines pelées du Rous- 
sillon, du Languedoc et de la Provence. Aussi le C. Dorus serait 
vite emporté par le mistral fougueux, s’il n'avait pas la précaution 
de se blottir, généralement par petits groupes d'exemplaires très 
rapprochés les uns des autres, à l'abri de quelque pan de mur, ou 
simplement de gros rochers, au milieu de broussailles protectrices. 
Lorsque parfois le vent s’apaise, on jouit de matinées calmes, qui 
sont vraiment délicieuses, durant les beaux jours de l'été, dans la 
région voisine de la Méditerranée. Alors les papillons méridionaux, 
sans crainte d’être enlevés par l’impétuosité de l’aquilon, peuvent 
voitiger à leur aise, au milieu des sites agrestes tout imprégnés de 
l'odeur des plantes balsamiques qu’ils affectionnent. 

Il y a dans les Pyrénées-Orientales, entre Prades et Vernet- 
les-Bains, un plateau assez fortement ondulé que j'ai entendu 
appeler Trancada d'Ambouilla. On s’y rend de Vernet par Cor- 
neilla-de-Conflent et il faut, à partir de ce village, monter assez 
longtemps, d’abord près d’une haie de grenadiers dont les fleurs 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


5 
=>: 


rouges réjouissent toujours la vue, puis au travers d’une campagne 
d'aspect très aride et dépourvue d’arbres, avant de parvenir au 
plateau. Pendant les chaudes journées de juillet, 1l est avantageux 
de se mettre en route, de très bonne heure le matin, afin de gravir 
la pente raide et ardue, tant que le soleil ne se trouve point encore 
très élevé sur l'horizon. Après l'effort qu'il a fallu produire pour 
atteindre le plateau désiré, c’est, pour un entomologiste, un charme 
exquis de voir à Ambouilla, par une brillante et calme matinée 
d'été, le Cœnonympha Dorus posé en grand nombre sur les fleurs 
d’origan, ou bien se mouvant de son vol sautillant, répété, pas 
très rapide, assez près de terre, entre les plantes parfumées et les 
rochers calcaires; avec lui, tous les autres Sa/yride, ses compa- 
gnons ordinaires, plus robustes, moins délicats et de plus grande 
taille, voltigent souvent très nombreux en cette localité particu- 
lièrement chaude et méridionale. 

Ordinairement les Dorus sont très abondants; la récolte en est 
facile et d’ailleurs le papillon, très joli et gracieux, sollicite 
l'attention du chasseur. Lorsqu’arrive le milieu du Jour, si l’atmos- 
phère reste calme, on voit s'élever du sol que calcinent les rayons 
du soleil, comme des colonnes d’air vibrantes, lumineuses et 
mobiles, montant en incessantes spirales vers le ciel. À l’ombre 
trop claire de quelque arbre rabougri, assis sur une pierre où l'on 
se repose en prenant le repas de midi, c'est un plaisir de voir 
constamment autour de soi voleter le Cœnonympha Dorus et les 
autres Satyres assez familiers et qui semblent tenir à l’homme 
aimable compagnie. 

Dans l'intimité du souvenir d’un paysage qui m'est cher, 1l me 
plaît d’unir dans la vision que mon esprit évoque si volontiers, 
le Cænonympha Dorus, papillon si petit et si fragile, aux splen- 
deurs admirables d’une nature à la fois méridionale et alpestre 
dont rien ne surpasse peut-être la poésie et la beauté. En face de 
soi, directement vers le Sud, se dresse, sombre et massive, la haute 
montagne du Canigou, dont les flancs déchirés et d'aspect noirûtre, 
surmontés d’un front étincelant de neige qui tranche vigoureu- 
sement sur l’azur du ciel, constituent un si imposant décor. 


38 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


À droite, vers l'Ouest, les crêtes des Pyrénées profilent leurs 
multiples sommets autour et au delà de Montlouis. À gauche, du 
côté de l'Orient, ce sont les basses montagnes et l'horizon lointain 
vers la Méditerranée, paraissant d’un2 profondeur infinie, avec ses 
couleurs changeantes suivant les heures du jour, passant du gris 
argenté au violet purpurin par une teinte bleue d’une mcomparable 
douceur. 

Partout, sur le sol rocheux du plateau, au milieu des pierres 
éparses, comme dans les petites murailles qui séparent les héri- 
tages, les touffes de thym croissent et fleurissent, mêlées à d’autres 
herbes odoriférantes. Sous les pas qui les foulent, ces plantes 
répandent leurs parfums dont on se trouve délicieusement enve- 
loppé et pénétré; senteurs exquises de la flore naturelle qui 
embaument et dont on ne jouit nulle part en France avec autant 
d'intensité que dans les chaudes contrées du Midi. 

Parmi tant de sites pyrénéens si variés, tantôt riants et tantôt 
sévères, 1c1 boisés et ailleurs complètement découverts, quelquefois 
arides ou bien au contraire si largement arrosés par les eaux les 
plus vives, les plus fraiches et les plus pures, la Trancada d’Am- 
bouilla, habitée par le Cœnonympha Dorus, malgré sa sécheresse, 
ses rudes rocailles et son extrême chaleur, a toute ma prédilection. 


Cœnonympha Fettigii, Obthr. (PI XLVIII fig. 398, Q 309). 


Le Cœnonympha que je dédiai à l’abbé François-Joseph Fettig, 
et dont la figure a déjà paru dans la 1" livraison des Æudes 
d'Entomologie (PI. I, fig. 4 a, b), fut découvert par Gaston Allard, 
dans l'Algérie orientale, en 1870. 

L'abbé Fettig était alors curé de la Vancelle, dans la vallée de 
Sainte-Marie-aux-Mines, au diocèse de Strasbourg; plus tard, il 
fut nommé curé de Matzenheim, près Benfeld, et c’est dans cette 
localité qu’il rendit son âme à Dieu, le 5 mai 1906, dans la 
81° année de son âge. Il était né le 16 juillet 1824. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 39 


C'était un prêtre vénérable, se conciliant naturellement l’uni- 
versel respect. Son extrême simplicité et sa modestie étaient les 
deux premières qualités qu'on distinguait en lui. Il possédait un 
noble cœur, plein de générosité, essentiellement charitable et bon. 
Il jouissait d’un jugement très droit et savait toujours rester calme 
et parfaitement mesuré. Sa conversation était aimable; son visage 
était doux; toute sa personne attirait la confiance et inspirait la 
sympathie. On l’affectionnait autant qu’on le respectait. 

Grâce à Dieu, au cours de ma carrière, j'ai largement goûté le 
charme si précieux que procure l'amitié; mais parmi tous les chers 
défunts dont je regretterai toujours la perte, mon ami Fettig, si 
loyal, si franchement et si cordialement dévoué, méritant à un si 
haut degré qu'on l’estimât, comptera au nombre des meilleurs qu'il 
m'a été donné de connaître et d'aimer. 

Jusqu'à mon dernier jour, mon souvenir lui restera affectueu- 
sement fidèle. 

Ce fut une belle vie, celle de l’abbé Fettig, exclusivement 
consacrée à l’accomplissement du devoir, sans ambition, sincère- 
ment humble, laborieuse, constamment préoccupée de la gloire de 
Dieu et du salut des âmes. Hélas ! elle fut attristée par de mul- 
tiples épreuves. L'abbé Fettig en a connu d’exceptionnellement 
cruelles : celles auxquelles ont été soumis tous les Alsaciens de 
notre temps. Cependant il trouvait dans l'étude de la Nature, 
œuvre du divin Créateur, un adoucissement à bien des peines, un 
puissant et incessant réconfort, une consolation douce et sereine. 
Toute sa vie, l'abbé Fettig a travaillé à étendre et à élargir la 
connaissance de la faune entomologique de son cher pays. Son 
patriotisme trouvait une satisfaction très sensible et très délicate 
dans chaque découverte qui venait enrichir l'inventaire de la faune 
alsacienne et en faisait ressortir la richesse et la variété. 

Aussi, avec une activité inlassable et que le poids des années 
ne parvenait point à atténuer, l'abbé Fettig, pendant toutes les 
heures de liberté que pouvait çà et là lui laisser l’accomplissement 
des devoirs de son saint ministère, cherchait, observait, étudiait, 
écrivait. Tous ses travaux sont empreints d’une clarté, d’une netteté 


40 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


et d’une sincérité qui reflètent le caractère de l’auteur et leur valent 
une incontestable et durable autorité. 

L'esprit très scientifique de l'abbé Fettig envisageait très volon- 
tiers les problèmes de philosophie entomologique; tels ceux qui 
résultent de la variabilité et de la dispersion des Espèces. Mais 
mon ami avait le sens des services pratiques que ses connaissances 
lui permettaient de rendre à ses concitoyens, et c’est avec un égal 
intérêt qu'il se livrait à la méditation des questions purement 
spéculatives et à l'observation attentive des insectes pouvant être 
utiles ou nuisibles aux champs et aux jardins. Les études d'histoire 
naturelle sont d’ailleurs le seul délassement que l’abbé Fettig 
ait jamais cherché. Après avoir obtenu la connaissance exacte 
d'un dommage causé par une espèce d’insecte à quelque plan- 
tation, il se plaisait à distribuer autour de lui les conseils judicieux 
pour combattre efficacement les ravages d'un ennemi dont il avait 
patiemment découvert l’histoire. C’est ainsi que l'abbé Fettig 
publia en 1876 un Æssai d'Entomologie générale appliquée, 
excellent livre énumérant avec détail les /nsectes nuisibles de 
l'Alsace avec un aperçu des Insectes utiles. 

Les entomologistes alsaciens qui ont pu connaître et apprécier 
l'abbé Fettig et qui liront ces lignes s’associeront, j'en ai la con- 
fiance, à l'hommage que je rends à la mémoire de leur excellent 
et si respectable compatriote. 

Je tiens à honorer dans le présent ouvrage auquel mon intention 
est de consacrer le travail de mes dernières années, tant qu’il plaira 
à Dieu de m'en laisser les moyens, le souvenir d’un ami toujours 
cher; mais avant tout, je tiens à écrire la vérité qui ne cesse jamais 
d'être mon but. 

Ce fut au mois de juin de l’année 1863 — il y a de cela plus 
de 46 ans — que je goûtai pour la première fois le charme de 
l'hospitalité au presbytère de la Vancelle. J'étais allé, cette année- 
là, en Alsace, avec ma famille, rendre visite à mon grand-père 
paternel qui demeurait à Strasbourg. 

Je profitai de mon séjour en Alsace pour aller à Schlestadt, et 
là, je pris la voiture qui, à cette époque, conduisait les voyageurs 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 41 


vers Sainte-Marie-aux-Mines. Pour atteindre la Vancelle, village 
situé sur la montagne, à mi-côte, au milieu de belles prairies et à 
l'entrée de la grande forêt de hêtres qui s'élève jusqu'au Fran- 
kenbourg, on s’arrêtait à Lièpvre, dans le fond de la vallée. 
L'Aroynnis Daphne, dès les premiers jours de juillet, voltigeait 
sur les buissons de ronces et un peu plus haut la Zycæna Euplemus 
habitait les prairies. D'ailleurs, par les belles journées d'été, la 
faune entomologique était riche et les insectes, variés et nombreux, 
animaient très agréablement pour nous la montagne et la forêt. 
De l’autre côté de la vallée, au sud et juste en face de la Vancelle, 
se trouvaient les ruines si pittoresques de l'antique château de 
Hohkænigsbourg. Je les ai parcourues en l’aimable compagnie de 
l'abbé Fettig et dans mon souvenir s’est gravé le beau et riant 
paysage qui se présentait devant nous : d’abord la riche plaine 
d'Alsace, parsemée de villes et de villages, étendant jusqu’au Rhin 
le vert tapis de ses prés alternant avec la teinte sombre des bois 
et la couleur plus claire des moissons jaunissantes; vers le Nord, 
la flèche de la cathédrale de Strasbourg élançant vers le ciel sa 
haute aiguille de pierre; puis le ruban argenté du grand fleuve 
aux eaux rapides; et au delà, limitant la plaine du pays de Bade, 
les sombres montagnes de la Forêt-Noire déroulant leur longue 
chaîne dont la crête se profile si nette et termine l'horizon. 


En juillet 1865, revenant de Dalmatie, par Vienne et l'Allemagne 
du Sud, Gaston Allard et moi, nous séjournâmes ensemble au 
presbytère si hospitalier de la Vancelle. Lorsque plus tard, de 
nouvelles découvertes, réalisées en Algérie, nécessitèrent des noms 
nouveaux dans la nomenclature des Lépidoptères, d'accord avec 
Gaston Allard, le nom de l’abbé Fettig fut attribué au joli 
Cœnonympha algérien dont je vais ci-dessous compléter l’histoire, 
au moyen des chasses plus récentes du docteur Codet, de 
M. Harold Powell et de M. Holl. Un peu avant sa mort, l’abbé 
Fettig, curieux de voir en nature le Sa/yride qui portait son nom 
et qui était pour lui un témoignage de notre amitié, me pria de 
lui transmettre pour sa collection un spécimen de l'espèce. Je fus 


42 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


heureux de causer à mon ami cette satisfaction entomologique, la 
dernière que j'aie pu lui donner ici-bas. 

Le Cœnonympha Fettisü ne paraît pas rare, au mois de juillet 
et au commencement d'août, aux environs de Sebdou. M. H. Powell 
en a capturé de nombreux exemplaires, en 1907, dans les localités 
suivantes : Sidi-Vahia, Mirzab et route de Sebdou à Mirzab, 
Misseghenin, Djebel-Ouargla, Tagemout (Telagh), Daya, Sebdou 
à Aïn-Kitsa et Aïn-el-Hamar. C'est dans la province d'Oran que 
se trouve la forme-type de Ferfigu. Le Set la ©, en dessus, sont 
généralement chaudement colorés de fauve sur un fond brun plus 
ou moins étendu. Le dessous des ailes supérieures est d’un fauve 
clair et vif et les ailes inférieures sont d’un gris un peu jaunâtre; 
les 4 ailes sont finement lisérées d'argent; l’ocelle des ailes supé- 
rieures, noir, cerclé de jaune paille et pupillé de blanc, est très 
vif; aux ailes inférieures, l’ocellation est généralement très faible 
ou presque nulle. Sur les ailes inférieures, 1l y a une ligne brunâtre, 
un peu sinueuse, rarement complète, descendant du bord costal au 
bord anal, ordinairement extérieurement accompagnée d’une petite 
éclaircie d’un blanc jaunâtre; mais cette éclaircie peut faire quel- 
quefois défaut. 

M. Holl a pris à la Glacière de Blida, vers la mi-juillet, une 
race de f'e//igu que j'appelle Æolli, qui est de plus petite taille 
que l'ettigu de Sebdou, d’une teinte fauve moins vive et dont le 
dessous des ailes inférieures est d’un gris plus jaunâtre, avec 
l'éclaircie plus étendue et les petits ocelles noirs, cerclés de fauve 
et pupillés de blanc, mieux indiqués. Le Cœnonympha Fettigi 
et sa var. Æoll; C sont bien distincts en dessus de Dorus-anda- 
lusica par l’accentuation de leurs taches fauves; les © de Fertigü 
et de Dorus-andalusica se ressemblent davantage en dessus. Pour 
le dessous des ailes, les Dorus-andalusica ont la partie marginale, 
située au delà de la ligne sinueuse-transverse extracellulaire, teintée 
de jaune nankin pâle, tandis que chez Fettigii et même chez Æoll, 
on perçoit une éclaircie beaucoup plus limitée et moins accentuée, 
sur le fond gris des ailes. L’ocellation, chez Dorus-andalusica, est 
généralement bien plus fortement accusée; mais mon frère a pris 


LÉPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE 43 


à la Sierra de Alfakar, en juillet 1870, avec d’autres exemplaires 
bien plus rapprochés de Dorus, une © très voisine de Z'erligu. 

Si l’on compare une boîte pleine de Dorus français à une autre 
boîte de Æet/igu, aucune confusion n’est possible entre les deux 
Cœnonympha et la séparation spécifique ne peut faire aucun 
doute; mais la race andalusica offre des exemplaires qui, comme 
le prouve la Q signalée plus haut, paraissent former une transition 
suggestive entre les Dorus de la France méridionale et les Ferrigu. 
Il faut observer toutefois que Fetigu ne vit pas seul en Algérie 
et à l'exclusion de Doyus; témoin la race Awstauti, de Nemours. 

En l'état actuel de nos connaissances, relativement à Dorus- 
andalusica, je déclare rester encore hésitant quant à la question 
de savoir s1 lettigu est, ou non, une unité spécifique bien vala- 
blement distincte de Dorus; mais comme la question me semble 
pleine d'intérêt, J'ai cru devoir, pour en faciliter l'étude et la 
solution, ajouter à la figuration des Aberrations cœca et fulvia 
de Dorus qui a déjà paru dans la XX®° livraison des Æ/udes 
d'Entomologie, la représentation des documents suivants concer- 
nant plus spécialement Doyrus et Fettigu. 


12I0SCBAVA UE 
N° 386. Cœn. Dorus-Austauti, S, Obthr. — Nemours (Oranie). 


387. — Dorus-triocellata G, Obthr. — Albarracin (Espag.). 

388. — Dorus-microphthalma S, Obthr. — Millau (Avey- 
ron). 

380. — Dorus, Esper, © (rembrunie). — Vernet-les-Bains 
(Pyrénées-Orientales). 

390. — Dorus-andalusica S, Ribbe. — Grenade (Anda- 
lousie). 

301. — Dorus-andalusica ©, Ribbe. — Grenade (Anda- 
lousie). 

302. — Dorus-andalusica ©, Ribbe (var. trans. ad Fertigu). 
Sierra-de-Alfakar (Andalousie). 

306. — Feitigu-Holli G, Obthr. — Glacière de Blida 


(Algérie). 


44 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


N° 307. Cœn. Fettigü-Holli ©, Obthr. —— Glacière de Blida 


(Algérie). 

308. — Feltigiü S, Obthr. — Route de Sebdou à Mirzab 
(Oranie). 

390. — Fettigu ©, Obthr. — Sidi-Yahia (Oranie). Variété 


quadri-ponctuée aux ailes supérieures en dessus. 


Cœnonympha Corinna, Huebner. 


Petit Sa/yride spécial à la Corse, à la Sardaigne et à la Sicile 
où 1l fut découvert par A. Lefebvre, mais où personne ne l’a 
retrouvé depuis le voyage de cet entomologiste français. La col- 
lection Guenée contient un des exemplaires de Corinna rapportés 
de Sicile par Lefebvre. Mon frère l'a communiqué à M. Enrico 
Ragusa qui, dans le journal Nafuralista siciliano, 1008, lui a donné 
le nom de Zefebvrei. Je le fais figurer sous le n° 304 de la 
PI XLVIIT du présent ouvrage. On remarquera combien l’ocel- 
lation des ailes supérieures et inférieures, en dessous, du Corinna 
de Sicile, est prononcée, comparativement à la race de Corse et 
de Sardaigne. 

Corinna n'est pas rare dans ces îles. Feu Damry en a récolté de 
nombreux exemplaires à Sassari, en Sardaigne. Bellier de la Cha- 
vignerie, Rambur, et plus récemment H. Powell et Decoster en ont 
rapporté des séries considérables, notamment de Vizzavona et 
Saint-Pierre-de-Venaco. L'espèce varie pour l’accentuation et l’en- 
vahissement, ou inversement pour l’atténuation de la teinte noirâtre 
sur le dessus des ailes et par la présence ou l'absence, à l’apex des 
supérieures et le long du bord marginal des inférieures, en dessus, 
de points noirs cerclés de fauve. En dessous, les petits ocelles des 
ailes inférieures figurent quelquefois au nombre de six; mais leur 
nombre est souvent réduit à deux ou trois, ou même ils sont 
complètement supprimés, à l'exception cependant de l’ocelle costal 
qui paraît plus tenace. Les ocelles du dessous des ailes inférieures 
sont noirs, pupillés d’argent et entourés d’un cercle fauve. Exté- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 45 


rieurement à la ligne très sinueuse, extracellulaire, descendant du 
bord costai au bord anal, il y a une éclaircie blanchâtre ou jau- 
nâtre, de dimension variable. [1 y a une liture marginale d'argent 
moins généralement interrompue aux inférieures qu'aux supé- 
rieures. Parfois l’ocelle apical est double; je n'ai pas vu, dans une 
centaine d'exemplaires que contient ma collection, un seul spécimen 
à qui l’ocelle apical des supérieures, en dessous, fait défaut. La 
figure donnée par Huebner, sous les n° 536 et 537, me paraît mal 
coupée, les ailes étant représentées trop arrondies. Cependant le 
Corinna de Huebner est parfaitement reconnaissable et 1l n'y a 
nulle hésitation pour l'identification des exemplaires naturels avec 
la figure publiée par cet iconographe. 

Tout récemment j'ai reçu un Cœnonympha Corinna albinisant. 
La couleur fauve normale est remplacée par une teinte uniforme 
Jaune paille. 


Cœnonympha Vaucheri, Blachier. 


Une des plus jolies espèces nouvellement découvertes au Maroc. 
M. Blachier, le savant et distingué lépidoptériste genevois, a décrit 
le Cœnonympha Vaucheri dans le Bulletin de la Société entom. 
de France, 1905, p. 213, et donné le nom de gemimipuncta à une 
curieuse Aberration ' dont l’ocelle apical des ailes supérieures, en 
dessus, est remplacé par 2 points, tandis que les 4 gros points des 
inférieures sont remplacés par 3 petits; le dessous restant conforme 
au type. Le Cœnonympha Vaucheri et V'Ab. geminipuncta ont été 
figurés par les soins de M. Blachier, dans les Annales de la Soc. 
ent. de France, 1908, sous les n° 1, 2, 3 et 4 de la PI. 4. 

L'espèce avait été préalablement figurée dans les Transactions 
of the entomological Society of London, 1905, sous les n°* 1 et 2 
de la PL XIX, à l'appui d’un travail de M. E. G. B. Meade-Valdo 
publié dans les mêmes T7ansactions (p. 369-303), avec le titre : 
On a Collection of Butterflies made in Marocco in 1000-01-02. 
L'auteur fait une revision critique des diverses espèces de papillons 


46 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


capturés au cours d’un voyage au Maroc où il était, dit-il, accom- 
pagné par M. Henri Vaucher, de Tanger, comme taxidermiste et 
interprète. J'ai vu à Genève la collection de papillons du Maroc 
formée par M. Vaucher, de Tanger, et possédée par son frère 
M. Alfred Vaucher. J'ai été frappé de la beauté des formes de 
Lépidoptères marocains. Lorsqu'il sera permis aux Européens de 
circuler au Maroc avec un peu de sécurité, je pense qu’il sera pos- 
sible aux entomologistes d'y réaliser encore de surprenantes 
découvertes. 


Cœnonympha Pamphilus, Linné. 


Décrit dans le Systema Nature (Edit. X, portant la signature : 
Vpsaliae, 1757. d. 24 Maï, et la date d'impression MDCCLX), 
avec les termes suivants : «( p. 472) Pamphilus. 86. P. D. alis 
integerrimis fulvis; subtus primoribus ocello unico; posticis fascia 
alba. Habitat in Europa. Sexus alter minor. Alis posticis subtus 
ocellis 6 : primo maiore ». 

Linné avait préalablement décrit Pamphilus dans la Fauna 
suecica, imprimée à Stockholm en 1746, sans lui donner de nom, 
ainsi que cela a généralement eu lieu pour l'ouvrage Fauna suecica. 
Je copie textuellement l’article entier, avec tous les commentaires, 
de ce dernier ouvrage relatif à Pamphilus. « 780. Papilio tetrapus; 
alis rotundatis fulvis : primariis subtus ocello unico; secundariis 
subtus albo fasciatis. —— Petit mus. p. 34 n. 311. Papiliunculus 
aureus oculatus in ericetis frequens. — Raj. ins. 125. n. 10. Papilio 
parva e fulvo et fusco bicolor, fulvo mediam alam, fusco oras 
extremas occupante, cum ocello ad extimum angularum alarum 
exteriorum. Habitat in ericetis. — Descr. Raji descriptio bona est : 
Alae supra fulvae, subtus cinerascentes. Ocellus in ala primaria 
subtus unicus est et niger puncto albo circuloque nigro. Alae 
secundariae carent ocellis et fascia pallidiore notantur. Variat 
major ocello obsoleto. » 

Dans toutes ces diagnoses, il y a des points contradictoires; 
ainsi Linné dit d’une part, dans le Systema Nature, que les ailes 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 47 


inférieures, en dessous, ont six ocelles et que le premier est plus 
grand, et ailleurs, dans le commentaire de la launa suecica, que 
les secondes ailes manquent d'ocelles. La vérité, c'est qu'on peut 
constater sur le dessous des aïles inférieures, aussi bien l’absence 
de tout ocelle que la présence de six ocelles; mais je n'ai pas 
observé que dans le cas des six ocelles, le premier füt plus grand 
(primo maiore), ainsi que le dit Linné. Quoi qu'il en soit, les 
auteurs anciens ont été assez d'accord pour attribuer le nom de Pam- 
philus au vulgaire petit Satyride que nous désignons toujours 
nous-mêmes sous ce vocable. Seul Huebner l’a figuré sous le nom 
de Nephele (fig. 237, 238 et 230). Pamphilus est une espèce sem- 
blant s’accommoder des plaines et des montagnes, du Nord et du 
Midi. Ce Cœnonympha éclôt au printemps et en été; il est répandu 
en Angleterre et en Irlande, en France, en Espagne, en Algérie et 
à travers l'Europe, jusqu'en Asie-Mineure, le Turkestan oriental 
et la Sibérie. 


Quoique, d’après Linné, Pamphilus soit oculé en dessous 
(subtus) et que le vieux maître suédois ne fasse pas mention de 
l’ocellation sur le dessus des ailes supérieures, à l'angle apical, 
cependant les exemplaires chez lesquels locellation n'est pas 
apparente en dessus et existe seulement en dessous, sont les plus 
rares chez nous. Il n’en est pas moins vrai que d’après les descrip- 
tions de Linné qui sont formelles, aussi bien dans launa suecica 
que dans Systema Nature, c'est cette forme aveugle en dessus, 


oculée en dessous, qui est le type de l'espèce. 


Charles Barrett dit de Cœnonympha Pamphilus (Vol. I, p. 266) : 
« One of the most universally common of butterflies, occurring 
almost everywhere in grassy places, and even inhabiting the 
higher portions of the mountains, where, 2.000 feet above the sea, 
it shares with C. Davus and Erebia Cassiope the honour of being 
the only resident butterflies. » Sous le n° 2 c de la PI. 36, Barrett 
figure une © de la collection du D° P.-H. Mason, qui, confor- 
mément à la description du Systema Nature, n’a de tache ocellée 
qu’en dessous et en manque totalement en dessus. Sous le n° 20 


48 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


de la même Planche se trouve représentée une © de la collection 
Webb, dont les 4 ailes sont d’un fauve plus pâle en dessus. 

Mosley figure aussi « a very pale specimen taken by Mr. J. 
Firth, at Bradford ». Je possède moi-même 3 exemplaires très 
pâles : un C' d’un blanc jaunâtre portant l'étiquette « Spain » et 
faisant partie de l’ancienne collection Ward d'Halifax; un autre S 
pris à Besançon par M. Fritsch, en mai 1895, et une Q capturée 
par mon frère à Vernet-les-Bains, en juillet 1801. C’est l'Aber- 
ration pallida, Tutt. Esper la figure sous le n° 4 de la 
Tab. LXXVIII d’après un exemplaire qui fut trouvé, avec plu- 
sieurs autres, aux environs de Francfort-sur-le-Mein; cette Azsart 
de Pamplilus appartenait à Gerning. 

M. George Wheeler (T%e Butterflies of Switzerland, p. 119) 
signale l’Aberration bipupillata, Cosmovici, « in wh. it is large 
and distinctly double-pupilled ». 

Ma collection contient 4 O' bipupillata, dont 2 pris par mon 
frère : l’un à Rennes, au printemps 1907, et le second à Charroux 
(Vienne); le troisième exemplaire fut récolté à Lectoure (Gers) 
par M. Dayrem, en mai 1007, et le quatrième à Akbès, en Syrie, 
en 1891. Ces 4 Cœnonympha sont bipupillés en dessus et en des- 
sous; mais il serait plus exact de dire qu'ils sont biocellés; chaque 
ocelle, aveugle en dessus, est, en dessous, pupillé de blanc. Chez 
l'exemplaire de Charroux, la biocellation, en dessus, se trouve 
faiblement indiquée; mais sur la face inférieure des ailes, 1l y a 
un troisième point noir supplémentaire situé au-dessous du double 
ocelle. 

J'ai fait figurer sous le n° 106 de la PI. VI de la XX® livraison 
des Etudes d'Entomologie une Q cæca, de la collection Boisduval, 
et non Bellier, comme je l’avais fait imprimer par erreur, qui est 
sans doute la même que l’Ab. obsoleta, Tutt, chez laquelle toute 
ocellation à l’angle apical des ailes supérieures, sur les deux faces, 
a disparu. 

Pamphilus produit une très Jolie variété géographique méri- 
dionale et estivale figurée par Esper, d’après un exemplaire du 
Portugal, sous le nom de Zyllus; mais la représentation de Zyllus 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 49 


(PI CXXII, fig. 1) est grossière et n'est pas satisfaisante. Les 
figures données par Huebner sous les n°* 557 et 558 sont au con- 
traire très bonnes. Zyllus est quelquefois orné d’une liture margi- 
nale argentée; il est d’ailleurs très variable et les formes les plus 
accentuées de Zyllys se lient à Pamphilus par une série d’insen- 
sibles transitions; ainsi 7 2yrsis, de Crète, qui est certainement un 
Pamphilus Lyllus. 

Quelquefois les ailes supérieures, en dessous, de Zyllus sont 
marquées d’une série de points noirs situés en ligne droite au- 
dessous de l’ocelle apical. Généralement l’ocelle inférieur est plus 
gros que le (ou les) point noir intermédiaire. Herrich-Schaeffer a 
représenté cette Ab. sous les n*% 430 et 431 et avec le nom de 
Lyllus. Staudinger et Rebel, dans le Catalog 1901, ont distingué 
cette Aberration sous le nom de 7'.yrsides. Te fais figurer sous 
le n° 303 de la PI. XLVIII du présent ouvrage une Q très accentuée 
de cette Ab. TAyrsides, capturée à Khenchela (province de Cons- 
tantine) en Juillet 1008. 

Je possède des Zyllus superbes, principalement d’Akbès, d’AI- 
gérie, de Sicile, d'Andalousie et de l’Escorial. Il y en a qui 
ressemblent en dessus à Dorus ©. Quelques exemplaires ont les 
ailes inférieures assez fortement ponctuées en dessous et même 
en dessus; ils appartiennent à l’Ab. ocellata, Tutt, « a distinct 
row of eye-spots un s. h. w. ». L’Ab. ocellata n’est pas rare à 
Akbès. L’Ab. wnicolor, Tutt, « in wh. it is entirely reddishbrn » 
se lie si intimement aux formes plus claires qu'il paraît difficile 
de trouver le point séparatif. 

Quant à l’'Ab. marginata, Ruehl, elle existe aussi avec des 
transitions chez Pamphilus, comme chez Zyllus; elle est fréquente 
en Algérie et elle se combine dans les mêmes exemplaires avec 
T'hyrsides et ocellata. 


Cœnonympha Typhon, Rott. 


Typhon est une espèce très variable. Elle se trouve en Irlande, 
en Angleterre et en Ecosse; sur le continent, elle est répandue en 


+ 


50 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Laponie, en Allemagne (Glogau, Posen, etc.), en Russie, en Suisse, 
principalement dans le Jura. Pour ce qui concerne la France, Je 
ne connais d’autre localité que Morteau, dans le Doubs, où 7 yfAon 
ait été authentiquement capturé. 7 yphon se plaît dans les maré- 
cages et dans les tourbières; sa chenille, que les entomologistes 
anglais connaissent bien, vit sur les KXynchospora et les É710- 
phorum. Dans le Royaume-Uni, il y a deux races très distinctes 
de Typhon : 1° scotica, Stgr, figurée par Barrett, sous les n° 14 
et 1 e de la PI 36. Cette scofica a le dessus des ailes d’un fauve 
clair et soyeux avec le bord marginal grisâtre; en dessous, elle 
est très peu ocellée. Je l’ai reçue de M. W. Ried, un habile chasseur 
écossais qui la récoltait dans les pays de Perth et d’Aberdeen. 
Les collections Sheppard, vendue à la salle Stevens, à Londres, 
les 25 et 26 mars 1880, et Howard-Vaughan, vendue les 22 et 
23 avril 1800, contenaient de bonnes séries qui m'ont instruit et 
documenté sur la variabilité et l'habitat de T'ypAon en Grande- 
Bretagne. La forme scofica se trouve aux îles d’Arran, de Hoy, 
de Lewis et dans les montagnes du Nord de l’Ecosse, tandis que 
la forme Piloxenus, figurée par Esper : la © sous le n° 3 de la 
Tab. LIV et le O' sous le n° 3 de la Tab. LXXVIII, d’après des 
exemplaires trouvés dans les prairies, aux environs montagneux 
de Wohnsiedel, a été capturée dans le Westmoreland, notamment 
à Meathop-Moss, en 1883, par H. Goss. Barrett figure cette forme 
avec le nom de Rozhliebu, sous les n° 1 & et 1 d de la PI. 36. 
Philoxenus est très différent de scofica; on peut dire qu'il est 
aussi largement ocellé que scorica l’est peu. En dessus, PAilo- 
xenus © est d'un fauve brun et on voit transparaître du dessous 
l’ocelle apical des ailes supérieures, ainsi que la série des autres 
ocelles qui souvent accompagne cet ocelle apical. De plus, les 
ocelles des ailes inférieures transparaissent, entourés de leur cercle 
plus clair. En dessous, l’ocellation est nombreuse, formée de points 
noirs assez gros, cerclés de jaune paille et pupillés de blanc; le 
fond des ailes est d’un brun plus ou moins rougeâtre, traversé aux 
supérieures par une ligne extracellulaire extérieurement éclairée de 
blanchâtre. Cette éclaircie blanchâtre se prolonge sur les inférieures 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE SI 


où elle présente des contours assez sinueux. Il y a dans le West- 
moreland des variations très intéressantes pour l’ocellation du 
dessous des ailes, et je trouve que le 7'yphon Phuiloxenus de cette 
localité est une des plus jolies formes de l'espèce. Dans la col- 
lection Boisduval, je remarque une petite série de 4 exemplaires 
portant l'étiquette Marsyas, Eversmann. J'ignore si ce nom a été 
publié quelque part. Ces Marsyas sont des PAiloxenus provenant 
sans doute de quelque contrée de la Russie, dont les ailes sont 
plus allongées et moins arrondies que chez les exemplaires alle- 
mands et dont l’ocellation, surtout chez la ©, est très fortement 


accentuée. 


Huebner représente sous les n° 243 et 244 et avec le nom de 
Tullia, la forme ordinaire © du Jura bernois, et Borkausen avec 
le nom de Zaidion figure un O' entièrement fauve clair en dessus, 
très peu ocellé en dessous, comme on en trouve dans le même pays. 
Godart (PI. XXI, fig. 1, 2) représente avec le nom de Davus la 
forme qu'il dit très commune dans l'Est de la France et qui est 
en effet assez conforme à celle de Morteau. Quant à Lang, sur sa 
PI. LXXVII, il figure, sous les n° 2, le O' et la © du Z'yfhon 
de l’Europe centrale, et sous les n° 3, le G'et la © du PAiloxenus 
anglais. Il dit que cette forme lui paraît être particulière (peculiar) 
au Nord de l'Angleterre, principalement au Durham, Cumberland 
et Vorkshire où elle fréquente les marécages. Staudinger, ajoute 
Lang (p. 312), mentionne le Sud-Holstein comme une localité pour 
Philoxenus ; mais Lang répète qu'il est extrêmement probable que 
Philoxenus est spécial au Nord de l’Angleterre et 1l trouve pos- 
sible qu'il soit une espèce distincte. « It is probably a distinct 
species. » L'opinion de Lang est évidemment sur ce point erronée. 


La race lapone est petite et ressemble assez à Pamphilus. Aussi 
Freyer, en figurant et décrivant son Demophile de Laponie 
(Tab. 430, fig. 3, 4, p. 97), qui paraît être le 7 ypkon du Nord, 
appelé /sis par Thunberg, écrit-il les observations suivantes : « Ich 
vermuthe, dass dieser Falter nur eine Lokal-Abaenderung ohne 
Augenflecken in den Hinterfluegeln, von P. Pamphilus sem 


52 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


duerfte dem er sehr aehnlich sieht ». Il ajoute, il est vrai : « Er 
hat jedoch die Groesse von ?. Davus. » 


Je crois cependant que Freyer se trompe en présumant que son 
Demophile pourrait être une locale variété, sans taches ocellées 
sur les ailes inférieures, de Pamphilus auquel il paraît très sem- 
blable. Ce Demophile, qui a d’ailleurs la grandeur de Davus 
(Typhon), est très vraisemblablement une variété locale de ce 
dernier Cœnonympha. 


Libythea Celtis, Esper. 


Curieuse espèce d'aspect original avec ses ailes découpées, ses 
palpes allongés et ses antennes courtes et épaisses; unique repré- 
sentant en Europe de la peu nombreuse famille des Zzbytheide. 
Celtis est répandue dans le midi de la France, à Digne, à Vernet- 
les-Bains, à Montpellier; elle se trouve à Grenade, en Sicile, en 
Syrie; n’est commune nulle part. Je ne l’ai jamais vue volant que 
par exemplaires isolés. La Zzbythea Celtis habite aussi l'Algérie 
où elle a été prise par M. Holl à la Glacière de Blida, en juin et 
juillet. Seule la © a la première paire de pattes complètement 
développée. 

Le docteur A. Pagenstecher, de Wiesbaden, a écrit dans das 
Tierreich (1901), une Etude monographique sur les Ziôytheide. 
Je ne puis que renvoyer le lecteur à ce travail. L'auteur, en dressant 
l'inventaire des espèces de la famille en question, constate l’exis- 
tence de 10 espèces. 

Certaines de ces espèces offrent de nombreuses variétés. Toutes 
habitent les parties chaudes ou tropicales du globe. Dans le Genera 
Insectorum publié par P. Wytsman, le même docteur A. Pagens- 
techer (1902) a donné une nouvelle édition de la monographie des 
Libytheidaæ qu'il répartit en 3 sous-genres, comme suit : 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE me 


u +R 


1% sous-genre : LIBYTHEA, Fabr. 


Celtis, Fuessly. Midi de l'Europe; Asie-Mineure; Algérie. 
Var. Lepita, Moore. Chine; Japon; Inde; Bornéo. 
Var. Lepitoides, Moore. Nilgiris. 

Myrrha, Godart. Continent et Archipel indien. 

Var. Rama, Moore. Ceylan; Inde mérid. | 
Var. Vicevillei, Oliff. Nouv.-Guinée; Nord-Australie. 
Var. sanguinalis, Fruhst. Malacca; Himalaya. 

Var. myrrhina, Fruhst. Sumatra; Bornéo? 

Narina, Godart. Inde; Archipel malais; Philippines. 
Var. Rohini, Marshall. Inde. 

Zibera, Nicév. Bornéo. 

hybrida, Martin. Sumatra. 

Geoffroyi, Godart. Archipel malais; Philippines. 
Var. sumbensis, Pagenst. Sumba. 

Var. autipoda, Bdv. Nouv.-Calédonie. 

Var. plilippina, Ster. Philippines. 

Var. celebensis, Stgr. Célèbes. 

Var. ceramensis, Wall Amboine; Ceram. 

Var. batchiana, Wall. Batchian; Halmahera. 

Var. pulchra, Butl. Nouv.-Bretagne. 

Var. ortentalis, Godm. Iles Salomon. 

Var. guadrinotata, Butler. Lifu, Ile Loyalty. 

Var. Hauxwell:, Moore. Inde. 

Var. alompra, Moore. Tenasserim. 


2° sous-genre : HYPATUS, Huebner. 


Carinenta, Cramer. Amériq. tropic. 
Var. Bachmanni, Küirtl. Etats-Unis. 
Var. larvata, Streck. Texas. 

Var. #otya, Bdv. Cuba. 

Var. terena, Godart. Haïti. 


54 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


3° sous-genre : DICHORA, Scudd. 


8. Labdaca, Westw. Afrique tropicale occident. 
Lajus, Trimen. Natal. 
Var. {siandava, Gr. Sm. Sud-Ouest Madagascar. 
10. Cinyras, Trimen. Ile Maurice. 
Var. ancoata, Gr. Sm. Nord-Ouest Madagascar. 


Nemeobius Lucina, Linné. 


C'est en Europe la seule espèce qui représente la nombreuse 
famille des Erycinide, si largement répandue dans la région tro- 
picale américaine où elle se distingue, entre toutes, par la richesse 
du coloris, la variété des formes et la grâce exquise des papillons 
qui la composent. 

Lucina se rencontre en Angleterre et même en Ecosse, près 
Dumfries. On la trouve principalement dans les bois de la moitié 
méridionale de la grande Ile et notamment dans New-Forest. 

En Bretagne, elle m'a paru généralement très peu commune. 
On peut en capturer çà et là des exemplaires isolés dans les forêts 
dés environs de Rennes, en mai et juin. La seule localité d’Ille- 
et-Vilaine où j'ai vu la Vemeobius Lucina en quelque abondance, 
c'est le côté oriental de la falaise de Cancale qui fait face à la 
côte normande du département de la Manche, depuis la pointe 
des Rimains jusqu’à l’anse sablonneuse de Port-Mer, un peu avant 
l'extrémité du cap du Grouin. La falaise, en cette partie, est assez 
haute: au-dessus de son assise rocheuse constamment battue par 
les flots mouvants de la mer, elle est recouverte d’une épaisse 
couche de terre végétale et ornée d’une flore vigoureuse et assez 
variée. Les grands ajoncs dominent et forment des touffes impé- 
nétrables, puissantes et serrées; mais ils laissent des places libres 
pour les primevères qui servent de nourriture à la chenille de 
Lucina, pour les narcisses, les jacinthes, les violettes, les euphorbes, 
les silènes, les centaurées, les chèvrefeuilles, les prunelliers, etc., etc. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 55 


dont les fleurs se succèdent avec les saisons et forment des parterres 
agrestes au milieu desquels butinent de nombreux insectes. Un 
étroit sentier, pour le service ordinaire des douaniers, serpente sur 
la corniche de la falaise et parfois descend plus ou moins bas, sur 
le flanc fortement incliné de la colline. Alors, à l'abri de quelque 
talus protecteur du vent, on rencontre à mi-côte, notamment au- 
dessus de la grande grève de sable de Port-Mer, quelques petits 
placis bien exposés au soleil du matin. C'est là, et également près de 
la crête du plateau des Rimains, que, par une belle journée de prin- 
temps, à l'époque des fêtes de la Pentecôte, on peut voir Luca vol- 
tiger avec vivacité, s'écartant d’ailleurs fort peu de son heu d'origine 
et aimant à se reposer de temps en temps, en compagnie de 7 Xecla 
zubi sur les fleurs ou les feuilles des plantes, principalement de 
l'Euphorbia amygdaloïdes qu'elle affectionne à Cancale comme en 
Angleterre. Dans notre pays, je crois que Zucina éclôt une seule 
fois par an; du moins je n'ai encore jamais vu se produire ni à 
Cancale, ni à Rennes, une seconde éclosion en août. Cependant le 
Decteur-Professeur Reverdin, de Genève, a constaté au mois d'août 
1000, l'existence de Lucina Œ en bon état, à Allevard (Isère) et 
Charles Barrett qui, avant l'observation de M. Reverdin, avait 
entendu parler de cette apparition estivale de Zucina, en fait men- 
tion comme suit (Vol. I, p. 103) : « On the Continent, it 1s said 
to be double-brooded, the second emergence taking place in 
August. » 

J'ai pris très fréquemment Zucina à Vernet-les-Bains, en mai, 
juin et même aux premiers jours de juillet; mais dès la mi-juin, les 
exemplaires frais deviennent fort rares. Pour capturer Lucina dans 
toute sa fraîcheur à Vernet-les-Bains, c’est en mai qu'il faut la 
chasser. Elle est assez commune aux environs immédiats du village 
de Vernet et à Saint-Martin-du-Canigou où elle voltige vivement 
dans les prés qui s'étagent en gradins, au-dessous de l’ancien 
monastère. Jamais nous n’avons rencontré Lucina en août, dans les 
Pyrénées-Orientales, pas plus que dans les autres localités que 
nous avons fréquentées. 

La Vemeobius Lucina est assez abondante dans la forêt de 


56 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Chantilly (Oise) et dans les Basses-Alpes, aux environs de Digne; 
la Q y donne quelquefois une variété assez claire, à cause de la 
réduction des dessins noirs normaux qui sont envahis par la teinte 
fauve. J'ai pris cette même forme © à Vernet. M. Gabriel Dupuy 
a trouvé Lucina dans la Charente et mon frère en a rapporté un O 
de La Granja, en Espagne. Zucina n'a pas été observée en Algérie. 

Herrich-Schaeffer figure sous le n° 156 une Aberration méla- 
nienne de Zucina, très obscurcie sur le dessus des ailes, dépourvue 
en dessous, sur les ailes inférieures, de la bande maculaire blanche 
extracellulaire normale et présentant, sur les ailes supérieures, un 
joli rayonnement de taches noires intranervurales. 


Dans l'Asie centrale, on a découvert quelques espèces d’un genre 
d'Érycinidæ que Staudinger a appelé Polycæna. 

J'ai décrit, sous le nom de Carmelita (Bulletin Soc. Ent. France, 
1903; p. 268-70), une nouvelle espèce de Polycæna provenant de 
Moupin, Siao-lou, Tâ-tsien-lou et Tien-tsuen, aux frontières OCCI- 
dentales du Su-Tchuen. Carmelita n'ayant pas encore été figurée, 
je profite de la publication du présent ouvrage pour combler cette 
lacune sous le n° 400 de la PI XLIX et rendre ainsi valable le 


nom que J'avais proposé pour cette espèce. 


Jamides roboris, Esper. 


Il paraît que la collocation dans un genre spécial, de l'espèce de 
Lycénide désignée sous le nom de 7oboris, Esper (Evippus, Hbn), 
s'impose, à cause des caractères spéciaux de l’espèce en question qui 
n’a pas d’analogue en Europe. Rambur fut de cet avis et inventa 
le genre Læosopis, dans le Catalogue systématique des Lépid. de 
l'Andalousie (p. 33). Mais Staudinger et Rebel qui ont adopté ce 
nom de genre Læosopis, ne furent pas conséquents avec eux-mêmes, 
puisqu'ils ont pour règle, disent-ils, de mettre le principe de la 
priorité au-dessus de toute autre considération. En effet, Huebner 
avait déjà créé le genre /amides pour son Evippus, dans le Verzez- 
chniss bekannter Schmetterlinge (p. 71) qui fut imprimé à Augs- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


(Wat 
D: 


bourg, 


primé par l’autre et dait lui céder la place. 


en 1810. Dès lors le nom Zæosopis qui date de 1858 est 


Esper a figuré d’une manière très reconnaissable, avec le nom 
de robonis, sous le n° 5 de la PI. CIIT, la Zycænide que Huebner 
a figurée un peu plus tard avec le nom d'Evippus, sous les n° 366 
et 307. Il est dommage qu'Esper ait donné le nom de 7oborts à 
une espèce qui vit sur le frêne et non sur le chêne. Esper dit que 
roboris lui a été communiquée par Gerning, ce que je ne songe pas 
à contester; mais cet auteur ajoute que le papillon a été trouvé dans 
les environs de Francfort-sur-le-Mein, ce qui n’est certainement pas 
exact. Le /amides roboris est une espèce méridionale, speciale aux 
Pyrénées-Orientales, au Languedoc, à la Provence et à l'Espagne. 
Nous avons pris roboris à Vernet-les-Bains, en juillet; Victor Cotte 
l'a trouvé en juin 1904, dans les Alpes-Maritimes, à Escarène, 
Levens et Lantosque. Mon frère l’a capturé à La Malène et 
M. Dayrem à Florac (Lozère). Je le possède de l’Escorial où 1l 
fut capturé, encore très frais et en nombre, les 20 et 30 juillet 1870. 
Feu le colonel Duro me l’a envoyé de Madrid. La Q est géné. 
ralement plus grande que le G'; mais à l'Escorial, elle est de taille 
relativement considérable. 

La teinte bleu foncé est toujours plus largement répandue sur la 
surface des ailes du ©. Cependant en France, les © conservent 
une tache bleue encore très apparente, tandis qu’à l’Escorial, 11 y a 
des Q absolument unicolores, chez lesquelles le fond des ailes est 
tout noir et entièrement dépourvu de teinte bleue. Pour cette cause, 
ainsi que pour la taille sensiblement plus grande de la © espa- 
gnole, comparée à la forme du midi de la France, j'ai cru devoir 
distinguer la race de l’Escorial, sous le nom de escortalensis. 


Je ne connais pas la var. lusitanica, Stgr. 


Zephyrus quercus, Linné. 


L'espèce est décrite dans le Sys{ema Nature (p. 482), comme 
suit : « Quercus, 148, P. P. alis subcaudatis supra cæruleis, subtus 
anereis linea alba, puncto ani gemino fulvo. Habitat in Quercu. » 


58 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 

Huebner l'a figurée sous les n° 368 O, 369 of et 370. Esper en 
a donné de moins bonnes figures sous les lettres à et c de la 
Tab. XIX. Le Zephyrus quercus est répandu en Angleterre, en 
Irlande, en France, en Italie, en Espagne, en Algérie et dans presque 
toute l'Europe, ainsi qu'en Arménie et en Asie-Mineure. 

Barrett représente la 7'Xecla quercus sous les n° 3, 3a et 30 
de la PI 8 de son ouvrage. Il cite de singulières Aberrations exis- 
tant dans les collections anglaises; mais 1l n’en figure pas. Mosley 
donne l’image d’un hermaphrodite faisant partie de la collection 
S. Stevens; le côté gauche est G'; le côté droit est © (*). 

J-W. Tutt, dans le vol. IX de l'ouvrage si considérable qu’il 
rédige avec tant de compétence, intitulé : À Natural History of 
the british Lepidoptera, donne sur le Bithys Quercus, une planche 
photographiée (PI. X) montrant l’œuf, la chenille sur sa plante 
nourricière, la chrysalide et le papillon. [1 accompagne cette 1llustra- 
tion d’un copieux, minutieux et savant commentaire qui occupe près 
de 40 pages (p. 234-273), et il publie une seconde planche photo- 
graphiée (PI. XVII) représentant « larval Hairs and Spiracle of 
Bithys quercus ». La figure 1 de cette PI. XVII est consacrée aux 
« airs of fullgrown Larva x 100 et la figure 2 au « Speracle of 
4 th abdominal segment of Larva x 200 ». Après une étude aussi 
approfondie que celle consacrée par Tutt à l’histoire des espèces 
de papillons anglais, il devient difficile d'ajouter quelque chose qui 
soit digne d'intérêt. 


(*) Charles Barrett cite cet hermaphrodite (p. 52) comme suit : «... Mr. S. Ste- 
vens à gynandromorphus exemple in which the right side is male ». Tutt dit 
également que le côté droit de cet hermaphrodite est ' : « Right side C, left 
side Q. Sold with the Stevens collection, March 27th 1900. 3.15. (Æntom. 
XXXIIT, p. 157). This example was figured by Mosley (Z/7us. Vars. Brit. Le. 
Thecla, pl. I, fig. 4, 1880) ». J'ai sous les yeux l’ouvrage de Mosley et je vois 
dans le livre que je possède, la TAecla Quercus hermaphrodite figurée avec 
côté gauche C' et côté droit ©, juste au contraire de ce que disent Barrett 
et Tutt. L’hermaphrodite figuré dans l’Zris est, comme celui d’Angleterre 
côté gauche O, côté droit Q. Il y a un malentendu de la part de Barrett et 
de Tutt que je ne puis expliquer. Dans l’ouvrage de Verity, le côté gauche 
est représenté droit et inversement, parce que les reproductions photographiques 
n’ont pas été retournées. Mais dans le livre de Mosley, la photographie ne 
semble pas être intervenue, ni avoir joué aucun rôle. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 50 


Tutt cite un hermaphrodite de Qzercus qui est figuré dans l’/r25- 
Dresden (Bd. XVIII; Taf. 1; fig. 6) et qui porte la légende sui- 
vante sur l’Erklærung zu Tafel T : 26 juni 1902; aus einer bei 
Lauterbach bei Crimmitschau gefundenen Raupe erzogen von 
Junkel. » 

Comme l'hermaphrodite de la collection Stevens, le gwercus- 
Zwitter de Lauterbach est représenté avec le côté gauche GC et le 
côté droit Q. 

L’Aberration Q Pellus, figurée par Huebner, d’abord sous le 
n° À de la Taf. I (II Band; IV Theil) de Beztrege zur Geschichte 
der Schmetterlinge, 1700; puis sous le n° 621 de la grande Icono- 
graphie, et par Gerhard sous le n° 2 de la PI. 4, porte 2 ou 
3 taches d’un jaune orangé vif sur les ailes supérieures, au delà 
et au-dessous de la tache basilaire bleue. Mon petit-fils Henri 
Oberthür a pris un exemplaire de cette Aberration à Monterfil 
(Ille-et-Vilaine), en août 1007; elle a été observée en Hongrie, en 
Angleterre (Colchester district, Harwood et Drayton Drury, Nor- 
gate); en Allemagne, en Suisse, en Roumanie et en France éga- 
lement, par M. Delahaye qui l’a capturée dans le département de 
Maine-et-Loire. 

La race d'Algérie diffère de celle d'Europe, ainsi que je l’a 
observé dans la 1° livraison des Æzudes d'Entomologie (p. 19) 
« par la teinte du dessous qui est plus pâle, plus grise et plus 
effacée. » Cette différence étant constante, Staudinger a eu raison 
de distinguer par le nom 6erica, le Zephyrus quercus d'Algérie et 
aussi d'Espagne; mais je dois dire que la forme espagnole de 
Zephyrus quercus m'étant jusqu'ici restée inconnue, Je ne puis 
apprécier si elle est conforme à la race algérienne. 

Le Zephyrus quercus éclôt une seule fois par an, en juin, Juillet 
et août, suivant les localités; il est commun dans presque tous les 
départements français. On le voit voltiger par troupes autour du 
sommet des grands chênes. En Bretagne, le papillon descend fré- 
quemment des arbres qui bordent les haies des champs pour se 
reposer sur les fleurs de blé noir où il est aisé d’en faire une ample 


récolte durant les beaux jours d'été. 


60 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


La chenille est commune en mai et au commencement de juin, 
dans les chênes. On l’obtient aisément en battant les branches au- 
dessus d'un parapluie. D'une larve ainsi recueillie à Monterfil, j'ai 
obtenu une belle Aberration que j'appelle albovir gata. 

Comme l’Aberration de W. album figurée par Tutt (oper. cit. 
Vol. IX; PL I, fig. 4), à laquelle Tutt a donné le nom d'albovirgata, 
l'Aberration de Quercus se distingue par une éclaircie blanche, 
assez large, se développant tout le long de la ligne sinueuse trans- 
verse du dessous des ailes inférieures, entre cette ligne et la ligne 
submarginale, formée de demi-lunules grisâtres, qui part du bord 
costal et aboutit au-dessus de la petite tache jaune anale. 

Depuis le bord costal jusqu'aux approches du bord anal, il y 
a donc une longue bandelette blanchâtre qui est élargie vers le 
milieu. 

Les Zephyrus quercus français de ma collection proviennent de 
Huelgoat (Finistère); Rennes, Cancale (Ille-et-Vilaine); Charroux 
(Vienne); Montmorency (Seine-et-Oise), Vernet-les-Bains (Pyré- 
nées-Orientales); Madone de Fenestre à Lantosque (Alpes-Mari- 
times); Les Châtelliers près Châteaudun (Eure-et-Loir); Château- 
du-Loir (Sarthe); Lectoure (Gers). Je possède des exemplaires de 
Coburg (collection Kuwert), de Cerchio (Abruzzes), d'Angleterre 
(collection Sheppard et Tugwell). D’Algérie, j'ai reçu une longue 
série d'exemplaires de la var. 4erica, pris à Boghari, Djebel- 
Ouargla (Oran), Daya (27 juillet 1907), Misseghenin (23 juillet 
1907), Khenchela (juin 1008), Glacière de Blida (19 juillet 1005), 
Sebdou à Aïn-Kitsa et à Aïn-el-Hamar (3-5 août 1907). Dans la 
var. ‘berica, les G' ont un reflet plus ou moins bleu ou verdâtre. Je 
possède un © de Khenchela dont les ailes en dessus reflètent une 
couleur franchement verte. Sur plus de 150 Zephyrus quercus que 
J'ai sous les yeux, le G' le plus brillant est celui que J'ai pris à 
Huelgoat (Finistère), le 10 juillet 1900; la couleur bleu d'acier 
est d’un éclat très vif. 

Si j'avais récolté à Huelgoat un plus grand nombre d'exemplaires 
de Zephyrus quercus et s'ils s'étaient tous trouvés d’un bleu d'acier 
aussi brillant que le seul C' rapporté par moi d’une excursion ento- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE O1 


mologique, entreprise en Juillet 1900 dans les Monts d'Arrée, je 
n'hésiterais pas à distinguer, par un nom, la variété O' étincelante 
du Finistère. 


Zephyrus betulæ, Linné. 


Se trouve en Angleterre, en Bretagne, dans presque toute la 
France et se rencontre jusqu'aux frontières occidentales du Thibet. 
Je ne crois pas que beule ait été observé en Algérie. Je n'ai vu 
aucun exemplaire provenant d'Espagne. Barrett figure la 7'kecla 
betulæ, dans ses divers états, sous les n° 2, 2a, 2 et 2c de la 
Pi. 7 de son ouvrage : 74e Lepidoptera of the british Islands. 
Il consacre à cette espèce une notice qui est imprimée sur les pages 
42 à 45 du Vol. IL. Tutt publie une étude très complète de l’espèce, 
dans le Vol. IX de À nat. hist. of the brit. Lepid., depuis la 
page 273 jusqu’à la page 310, et il publie sur la PI XI, les photo- 
graphies des œufs, des larves avec et sans parasitisme, des chry- 
salides et du papillon. De plus, sur la PL XIV, Tutt figure 
photographiquement « Portion of cremaster of pupa X 100 ». 
Enfin, sur Ja PL I, où sont figurées toutes les espèces anglaises de 
Thecla, chacune avec un nom de genre spécial, Ruralis betulæ se 
trouve représenté sous les n° 12 (O'), 13 (Q), 6 (dessous), 7 (S 
major), 14 (Q major). 

Mosley figure une Aberration sous le n° 2 de la PI. I des 7'Æecla, 
avec la notice suivante : « In the late F. Bond's collection (now 
Webb's), who it might be a hybrid between be/zle and guercus. » 

J'ai toujours observé que le Zephyrus betulæ était un papillon 
relativement rare. J'en ai rencontré çà et là de petites colonies, 
notamment à Cancale, dans mon jardin, où j'ai vu, pendant quelques 
années de suite, des Zephyrus betulæe voltiger sur les ormeaux. Ils 
se tenaient généralement au-dessus des têtes des arbres ou des 
hautes branches, voltigeaient au soleil avec vivacité et aimaient à 
former des groupes de deux ou trois exemplaires se jouant en- 
semble durant quelques instants; puis ils se séparaient rapidement 


62 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


pour se reposer sur les feuilles des arbres. Les Q semblent descendre 
plus volontiers que les @ du haut des ormes ou des chênes et 
restent quelquefois posées assez longtemps sur les feuilles des 
arbustes, dans les jardins, ou bien sur les fleurs de blé noir, dans 
les champs, à l'instar de Zephyrus quercus. Je crois que les plantes 
nourricières de la chenille de Zephyrus betule, en Bretagne, sont 
principalement : #lmuSs campestris, quercus sessiflora et pedunculata. 
Tutt, en faisant le recensement des « foodplants » de Ruralis 
betulæ, d’après les indications des auteurs, ne cite pourtant ni le 
chêne, ni l’ormeau; mais il relève les noms d'arbres et d’arbustes 
que Je transcris comme suit : Prunus spinosa, prunus domestica, 
Prunus padus, betula alba, corylus, amygdalus nana (cum flore 
pleno), le chêne (oa#), le peuplier (poplar), l'aune (alder), le ner- 
prun (buckthorn), l'abricotier (apricof), le cerisier (cherry), le 
pêcher (feach). Il a omis de nommer l’épine-vinctte indiquée par 
le P. Engramelle et le tilleul cité par Esper. 

Le Zephyrus betulæ est un papillon charmant, l’un des plus jolis 
qu'on puisse voir dans nos contrées. La Q avec sa tache d’un rouge 
orangé très riche, sur le dessus des ailes supérieures, est beaucoup 
mieux décorée sur cette face que le O'; mais les deux sexes pré- 
sentent sur le dessous de leurs ailes, un fond d’un brun Jjaunâtre, 
très agréablement nuancé de rouge orange et sur lequel les lignes 
d'un blanc pur, soulignées de brun noirâtre, ressortent très agréa- 
blement. 

Le GO‘ varie pour ses ailes antérieures, en dessus, qui, tantôt sont 
entièrement d’un brun noirâtre uni et tantôt sont ornées de taches 
extra-cellulaires d’un jaune orangé pâle. Ces taches ne paraissent 
pas dépasser le nombre de 3. Gerhard, dans un ouvrage intitulé : 
Versuch einer Monographie der europ. Thecla, etc, publié en 1853, 
a représenté, sous le n° 2 de la PI. 3 et avec le nom de s#znose, 
une variété O qui se distingue par la présence, sur ses ailes supé- 
rieures, de 3 taches extra discoidales : la première grande, contiguë 
au trait noir cellulaire, les deux autres allongées, situées dans les 
espaces intranervuraux au-dessous de la première tache. Cependant 
on doit observer que les 3 taches en question, caractéristiques de la 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 63 


var. spinosæ, sont colorées non pas en orangé pâle, mais en rouge 
orangé vif. Je n'ai jamais vu d'exemplaire de Zephyrus betule G 
montrant des taches d'une couleur rouge orange aussi accentuée. Est- 
ce une exagération du peintre? Je ne saurais le dire. Toutefois l'expé- 
rience m'a plusieurs fois appris que de telles erreurs de coloration 
sont généralement rares et qu'il convenait, jusqu'à preuve du con- 
traire, de considérer comme à peu près exactes les figures qui sont 
publiées par les différents auteurs. D'ailleurs, dans le Catalogue des 
Lépid. du Jura Neuchâtelois, 1 est dit (p. 16) que M. de Rou- 
gemont possède une Aberration de be/ulæ , sur les ailes duquel 
les taches rouges commencent à apparaitre. Cette observation me 
paraît mériter quelque attention. 


Si donc j'accorde créance à la coloration donnée à la var. spt- 
nosæ dans la Monographie de Gerhard, je déclare que je ne possède, 
ni ne connais cette variété; si au contraire, comme le fait Tutt, 
je fais bon marché de la couleur orangé vif qui serait alors consi- 
dérée comme outrée, et si je n’attache d'importance qu’à l'existence 
des 3 taches, même de couleur orangé pâle, je puis attribuer le 
nom de spinosæe, Gerhard, à des papillons notablement différents 
de la figure donnée par cet auteur. 


J'ai fait des recherches bibliographiques en vue de savoir Si 
d’autres auteurs que Gerhard, avaient représenté des bc/ule © 
avec des taches sur les ailes supérieures et quelle coloration ils 
avaient fait donner à ces taches; mais le résultat n’a pas été 
concluant, ainsi qu'on le verra ci-dessous : Ræœsel (Tab. VI, fig. 3 
et 4) n'a peint que la Q en dessus et en dessous; Sepp, vers 
l'an 1800 (Vol. III, PI XII); représente le O' tout noir sous les 
net go et la © sous les n° 6 et 8. De plus, la © ôetule est 
reproduite sur le frontispice de l'ouvrage De vonderen Gods; le 
nom vulgaire hollandais de be/ule est Berke-page (p. 45). 

Le G' figuré par le P. Engramelle (PL XXXV; mn 70 a)hest 
presque unicolore; cependant la description fait mention de 
quelques taches plus claires interrompant, dans les ailes supérieures, 
la couleur du fond chez le O' du Porte-Queues à bandes fauves. 


64 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Esper représente la Q seulement, la chenille et la chrysalide 
(Tab. XIX, fig. 1); Huebner figure les deux sexes, sous les n°° 383, 
384, 385; mais le GO (383) est entièrement unicolore en dessus. 
Lang, comme Huebner, donne l’image d’un C' unicolore (PI. DC\VALIES 
fig. 1). Godart se borne à figurer la Q, de sorte que, si je m'en 
rapporte aux observations relatées ci-dessus, je puis dire que la 
forme du ' qui est pourvue de 3 taches orangé pâle, reste à figurer. 

Le Zephyrus betulæ éclôt une seule fois par an, de la fin de 
juillet à la fin d'août et même au commencement de septembre, 
suivant les localités et les années. 

Ma collection contient des Zephyrus betulæ provenant de Can- 
cale (août 1801, 1802 et 1893); Rennes; Digne; Vernet-les-Bains 
(août 1808, septembre 1908); Les Châtelliers (Eure-et-Loir) de la 
coll. A. Guenée: Cassel, de la coll. Kuwert; Prusse; Angleteïre, 
des coll. Tugwell et Sheppard. J'ai observé berule à Beg-Meil 
(Finistère); j'ai pris, dans cette localité, le 18 août, une © très 
grande, encore fraîche, malheureusement ayant les ailes inférieures 
mutilées. Il paraît que be/ule est considéré comme très rare dans 


le département du Finistère. 


Aux environs de Tâ-tsien-lou, sur la frontière occidentale de 
la Chine et tout près du Thibet, le Zephyrus betulæ est représenté 
par une race de très grande taille, presque double des exemplaires 
anglais. Il ne me semble pas qu'il y ait entre les be/ulæ-crassa, 
Leech, de Tien-Tsuen, Siao-lou, etc. et ceux de Grande-Bretagne, 
de France et d'Allemagne, d'autre différence appréciable que la 
dimension des ailes et la longueur des queues aux ailes inférieures. 
Le Zephyrus betule paraît rare sur la frontière du Thibet; car J'ai 
reçu seulement 2 et 8 © Crassa, dans l’espace de 30 années. 
Leech a figuré avec le nom Ælwesi (PI XXVIIT; fig. 8) une autre 
variété chinoise de be/ulæ dont la Q est rouge orange en dessus; 
l'aile supérieure étant seulement bordée de noir. Le dessous des 
ailes est semblable à Ge/ulæ-crassa. J'ignore cependant si Ælwesi 
est ou n'est pas une espèce distincte. Ma collection en renferme 
seulement 3 © et 3 © de Mou-pin, Tien-Tsuen et Siao-lou. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 65 


Tutt signale qu'on a observé deux cas d’hermaphroditisme chez 
betulæ; 1° S côté droit, © côté gauche; obtenue d’éclosion à Ham- 
bourg, en 1897; 2° O' côté gauche, Q côté droit; obtenue à Eperjes, 
en Hongrie (11 août 1876). 

Au sujet de la variation, Tutt pousse l'analyse jusqu'à ses 
extrêmes limites; bien que son ouvrage soit très connu et très 
apprécié, comme il n’est peut être pas dans toutes les mains, Je 
crois intéresser les Entomologistes, en transcrivant ci-dessous le 
tableau des variations pour les deux sexes de Zephyrus (Rurals) 
betulæe, tel que Tutt l’a conçu et établi. 


1° MALES. 


1. Entirely fuscous with no pales patches on forewings, — wxi- 
60107, 0 40: 


[D] 


Entirely fuscous except for a pale orange shade on the outside 
of the discoidal lunule — ab. swbunicolor, n. ab. 


Fuscous with pale orange shade outside discoidal lunule and 


[e2) 


continued series (two) of pale orange interneural dashes 
below — ab. spinose, Gerh. 

4. As in 3, but the paler areas faintly yellowish — ab. lwrea, 
n. ab. 


UT 


As in 3, but the paler areas faintly grey — ab. grisea, n. ab. 
6. As in 3, but the paler areas whitish = ab. pallida, Tutt. 


Ainsi suivant la méthode analytique de Tutt, Zephyrus betule © 
offre six formes caractérisées comme suit 


1. znicolor; entièrement brun. 


LD 


subunicolor; entièrement brun, excepté une ombre couleur 
orangé pâle, située en dehors de la lunule discoiïdale. 
3. spinosæ, Gerh.; comme 2, mais avec 2 traits d'un orangé pâle 
en dessous de la tache ou de l'ombre extracellulaire. 
4. lutea, comme 3; mais les espaces plus pâles, sont faiblement 
jaunâtres, 


66 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


g. grisea, comme 3; mais les espaces plus pâles sont faiblement 
OTIs. 
G. pallida, comme 3; mais les espaces plus pâles sont blanchâtres. 


Tutt ne tient pas compte de la coloration en rouge orangé vif, 
dans la figure de spinosæ donnée par Gerhard. Il attribue ce nom 
de spinosæ à une couleur « pdle orange » et il subdivise la variété 
qu'il admet comme s#inose, en 4 sous-variétés pourvues d’un nom, 
chacune : à l'orange pâle, Tutt réserve le nom de sxnose; à la 
teinte plus jaune, il donne le nom de /w/ea; à la teinte grise, le 
nom de grisea; à la teinte blanche (aberration très rare, dit Tutt), 
le nom de pallida. 


2° FEMALES. 


1. With narrow orange patch crossed by black nervures = ab. 
restricta-lineata, n. ab. 
2. With broad orange patch crossed by black nervures = ab. 


lata-lineata, n. ab. 
With narrow orange patch not crossed by black nervures = 


[®2] 


ab. estricta, n. ab. 

4. With broad orange patch not crossed by black nervures — 
ab. lafa, n. ab. 

s. The orange markings yellowish in colour — ab. #som, 
Wheeler. 

6. With submarginal series of interneural orange streaks in hind- 


wings pointing towards base = ab. cuneata, n. ab. 


Aïnsi les 4 premières variations de Q se distinguent par la 
largeur ou le rétrécissement de la tache orangée, traversée, ou non, 


par les traits noirs des nervures. 


1. 7estricta-lineata; tache orangée étroite, traversée par les nervures 
noires. 
2. lata-lineata, comme n° 1, mais la tache orangée est large, au 


FE 


lieu d’être étroite. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 67 
—__— 
3. restricta, la tache orangée est étroite; mais non traversée par 

les nervures. 
4. lata, comme n° 3, mais la tache orangée est large, au lieu d'être 


étroite. 
fisoni, la tache est jaunâtre, au lieu d’être orangée. 


Ur 


6. cuneata, il y a, sur les ailes inférieures, une série submarginale 
de traits intranervuraux orangés dont la pointe est tournée 


vers la base. 


Naturellement ces variations peuvent s'amalgamer; cuneala peut 
aller avec lata ou Lata-lineata; fisoni peut être lata ou restricta; elle 
peut être aussi /neata. 

On se rend compte après cette étude, des séries énormes d'exem- 
plaires qui deviennent nécessaires aux Entomologistes adonnés à 
l'analyse des espèces. Nos prédécesseurs n'avaient point égard à 
de pareilles minuties. Cependant personne ne peut contester que la 
camparaison méticuleuse de très nombreux papillons est indispen- 
sable pour obtenir la connaissance des variations qu'on peut appeler 
régulières et naturelles pour les caractériser exactement. Il est juste 
de dire que Tutt apporte à son travail analytique un esprit de 
méthode qui contribue singulièrement à rendre claires et intelli- 
gibles les observations dont on lui doit la publication. 


Thecla Spini, Huebner. 


La T'Aecla Spini ne se trouve ni en Angleterre, ni en Bretagne; 
elle n'a pas été rencontrée jusqu'ici en Algérie; elle habite en 
France, surtout la région méridionale; mais elle remonte jusqu’en 
Charente du côté de l'Ouest; elle atteint le département du Doubs 
vers notre frontière orientale et même l'Alsace. La Thccla Spin 
a été authentiquement récoltée dans les localités suivantes, d’après 
les documents contenus dans ma collection : Angoulême, fin 
juin 1908; Vernet-les-Bains, depuis la fin de mai jusqu'aux pre- 
miers jours de juillet; Florac (Lozère), en juin et juillet ; Grenoble; 


OS LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Digne, Larche, Saint-Martin-d'Entreaunes (Basses-Alpes), en 
juillet; La Grave (Hautes-Alpes), fin juillet 1906; Col de Cas- 
tillon, La Turbie (Alpes-Maritimes), en juin 1807 et 1006; Mar- 
seille, Saint-Pons (Bouches-du-Rhône); Aix-en-Savoie ; Saut-du- 
Doubs; Vallée du Rhône près Vernajaz et Vallée de Zermatt en 
Suisse; Wurtemberg ; Prusse; Grenade, Sierra de Alfakar, Cadix, 
Vallée de Ronda, en Andalousie: Roccaraso et Palena, en Italie 
méridionale; Akbès, en Syrie. 

La Z'Aecla Spini, comme la plupart de ses congénères, affec- 
tionne les arbres buissonneux et les arbustes autour desquels elle 
voltige avec vivacité. Elle aime à se reposer sur les feuilles; elle 
se plaît aussi dans le Midi, sur les touffes de thym et de doryc- 
nium. C'est une espèce d'un aspect brun et un peu sombre, cepen- 
dant très élégante dans sa forme et présentant de fort jolis 
détails. Les ailes du ©‘ sont brun foncé en dessus; celles de la Q 
sont un peu plus claires. Le G‘ porte aux ailes supérieures une 
tache cellulaire ovale, d'un gris foncé mat. Aux ailes inférieures, 
on voit une tache jaune orangé de chaque côté de la queue qui est 
noire et terminée par une houpette très fine d’un blanc pur. Quel- 
quefois ces taches jaunes sont très faiblement indiquées chez le Gr; 
mais les Q sont généralement ornées de taches plus larges, plus 
accentuées et qui forment parfois, à partir de l’angle anal et en 
remontant vers le bord costal, tout le long du bord marginal, une 
série plus où moins confluente et prolongée. En dessous, les quatre 
ailes sont d'un brun bronzé, traversées, du bord costal des supé- 
rieures au bord anal des inférieures, par une série non interrompue 
de taches blanches intranervurales, intérieurement soulignées de 
brun plus foncé. De plus les ailes inférieures sont décorées, près 
de l'angle anal, d'une tache noire veloutée, ronde, précédée d'un 
semis d'atomes bleuâtres du plus joli effet. Au-dessus de cet 
espace bleuâtre, entre la ligne extracellulaire de taches blanches 
et le liséré blanc marginal, il y a une série de taches jaunâtres ou 
rougeâtres, en forme de chevron, allant en décroissant de grosseur 
à partir de la tache bleue et à mesure qu'elles remontent vers le 
bord costal, Ces taches orangées sont surmontées d’un croissant 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 09 


———— 


noir et inférieurement soulignées de noir d’abord et de blanc enfin. 
Les antennes sont très joliment annelées de blanc et de noir et 
terminées par une massue noire. Les poils du dessous du thorax 
sont d’un gris bleuâtre, comme les pattes dont le dernier article 
est annelé de noir et de gris; le dessous de l’abdomen est blan- 
châtre. 

La race des Alpes-Maritimes est sensiblement plus grande que 
celle des autres pays; je l’ai appelée : #ajor. J'ai reçu d'Akbès 
une Aberration © chez laquelle les ailes inférieures, en dessous, 
sont ornées d’une série de taches blanches cunéiformes, le long du 
bord marginal; les taches blanches en question résultent d'un 
développement anormal de la ligne blanche moniliforme ordi- 
naire. J'ai appelé cette Aberration : albosparsa et je la fais repré- 
senter sous le n° 408 de la PI. XLIX de la présente livraison. Je dois 
ajouter que sur les ailes supérieures, en dessus, d’albosparsa, 1 
s'est fait un développement de 4 taches intranervurales fauves, 
dans l’espace submarginal. 

Je possède une © de Vernet-les-Bains dont les ailes supérieures, 
en dessus, présentent des éclaircies fauves, intranervurales, extra- 
cellulaires. En Andalousie, les spini Q diffèrent des exemplaires 
des autres pays parce que les ailes supérieures, en dessus, sont 
marquées d’une grande tache fauve qui occupe tout le disque; sur 
les ailes inférieures, la couleur fauve se trouve plus où moins lar- 
sement développée le long du bord marginal. Chez les o, les 
taches orangées submarginales, du dessous des ailes inférieures, 
sont plus petites et un peu carminées. Huebner a figuré sous les 
n* 674 et 675 et avec le nom de Lynceus, la Q de la race anda- 
louse de spini, et sous les n° 602 et 693, le Œ' Lynceus. On trouve 
en Espagne la var. spini-Lynceus en Andalousie et à l'Escorial, 
mais non à Albarracin où spini est conforme à la race des P yrénées- 
Orientales. Feu de Graslin, Ribbe, mon frère et M. Fabresse ont 
capturé les exemplaires de spini-Lynceus que contient ma 
collection. 


70 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Thecla W album, Huebner. 


Est répandue dans diverses parties de la France, de l'Angleterre 
et de l'Allemagne. Ma collection contient des exemplaires pro- 
venant d'Alsace; de l'Aube (Lusigny); de lAisne (Villers- 
Cotterets); de Seine-et-Oise (Bondy); d'Eure-et-Loir (Château- 
dun); de la Sarthe; d’Ille-et-Vilaine (Rennes et Cancale); de la 
Charente-Inférieure (Dompierre-sur-Mer); des Alpes-Maritimes 
(Col de Castillon); du Wurtemberg. Je possède 17 échantillons 
anglais ayant fait partie des collections Sheppard et Tugwell. 

L'espèce éclôt en juin et juillet, suivant les localités. La chenille 
vit sur l’orme où je lai trouvée au mois de mai. La 7'Lecla W album, 
dans les jardins potagers, aime à se reposer sur les fleurs d'oignon 
où je l'ai souvent observée; mais c’est toujours une espèce assez 
rare et je ne l’ai jamais capturée en grande quantité. 

Le d, comme chez spini, porte une petite tache ovale, grisâtre, 
mate, dans la cellule, près du bord costal de l'aile supérieure. 
L'aspect de la Z'Aecla W album est sombre; le dessus des ailes 
étant d'un brun noir uni et le dessous d’un brun bronzé obscur. 
La ligne blanche descendant du bord costal des ailes supérieures 
vers l'angle anal des inférieures où elle forme la lettre W, ainsi 
que la bordure marginale rouge orange des ailes inférieures, 
tranchent agréablement sur la couleur un peu obscure du fond des 
ailes. 

Tutt a cru devoir créer pour la Tecla W album un nouveau 
genre : Edwardsia. L'analyse poussée aussi loin que Tutt a cou- 
tume de le faire, est évidemment excellente, puisque, pour chaque 
espèce étudiée avec une aussi scrupuleuse attention, elle donne lieu 
à un historique complet. Tout ce qui a été observé et publié sur 
une espèce se trouve rassemblé, coordonné, apprécié, contrôlé et 
condensé, par Tutt, dans une mise au point presque parfaite où se 
résument toutes nos connaissances actuelles jusqu'ici dispersées. 
C'est donc une œuvre louable et utile que Tutt accomplit ainsi. 
Mais il paraît qu’à force d'analyser, on ne perçoit plus exactement 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 71 


la synthèse, et en fouillant jusqu'aux plus menus détails, on peut 
perdre la claire vision des caractères généraux. Le Genre est 
pourtant une réalité Un ensemble de caractères communs lie 
incontestablement certaines Espèces à d’autres Espèces qui sont 
cependant spécifiquement bien distinctes les unes des autres. 

Les Thecla spini, W. album, pruni, ilicis, Fixseni, eximia, 
ornata, V. album, patrius, etc, sont unies par des affinités évi- 
dentes; on sent instinctivement qu’elles sont plus rapprochées les 
unes des autres que d’Ayton, de Cyllarus, de Corydon, de Bel- 
largus qui sont pourtant des Espèces appartenant à la même 
famille des Zycænide. Il faut donc, tout en pratiquant l'analyse, 
conserver la saine notion de la synthèse et se garder de la création 
immodérée et non justifiée de Genres nouveaux. Cette multiplicité 
des Genres serait une cause de désordre et d’anarchie. En classant 
chaque Espèce dans un Genre spécial, on détruirait la méthode 
linnéenne binominale, pourtant appuyée sur une réalité naturelle 
évidente, base d’une classification excellente, à laquelle est dû un 
essor d’admirable progrès. Un Genre pour chaque Espèce, c'est 
l'instauration de la méthode uninominale, c’est-à-dire l'organi- 
sation du chaos à la place de l’ordre. Je crois devoir protester 
hautement contre la tendance à laquelle Tutt s’est laissé entraîner. 
Ne multiplions pas les Genres avec excès. Conformons-nous à ce 
que la Nature elle-même nous enseigne et ne rejetons pas les 
inspirations résultant pour nous de l'observation sincère des êtres 
vivants. N’élevons pas de barrières plus hautes que celles résultant 
de la séparation spécifique, entre des insectes visiblement liés et 
uns entre eux par tout un ensemble de caractères qui imposent, 
dans la classihication des Espèces, l'unité générique de groupe- 
ment. Je demande aux entomologistes de réagir contre l'abus que 
je me fais un devoir de signaler. Cette critique étant une fois 
formulée contre la création du genre Edwardsia pour W album, 
aussi bien que du genre Felderia pour eximia (Tutt, p. 151), je 
rends de nouveau hommage au talent dont Tutt a fait preuve en 
écrivant l’histoire de W album depuis la page 144 à la page 192 
du vol. IX de À Natural History of the British Lepidoptera, et 


72 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


je résume très sommairement ci-dessous les observations relatives 
à la variation de l’Espèce. 

Sur la PL I, Tutt a figuré sous le n° 4 et avec le nom d’albo- 
vtrgata, une Aberration de W album dont Bellier, d’après une Q 
prise à Bondy, en juin 1857, par Blondel, a publié une excellente 
figure (Awx. Soc. ent. France, 1858, PI. 14, fig. 2). Je possède 
encore le papillon qui se trouvait dans la collection de feu Bellier. 
Bien qu'il soit âgé de plus d’un demi-siècle, il est encore parfai- 
tement conservé. 

Dans la revision des autres variations de W album — variations 
beaucoup moins importantes assurément — Tutt propose le nom 
de : #72n07 pour tous les exemplaires ayant une expansion infé- 
rieure à 28 millimètres et de : z7ajor pour tous ceux qui ont plus 
de 35 millimètres. En outre, cet auteur appelle : obsoleta la varia- 
tion caractérisée par l'absence de la petite tache anale rougeûtre 
du dessus des ailes; 1l signale les variations résultant de diffé- 
rences dans la nuance de la teinte du fond en dessous, « from 
fuscous-brown to fawn-brown »; la largeur de la ligne blanche 
transverse; l’oblitération de la lettre W sur les ailes inférieures 
en dessous (Ab. Butlerowi, Kroulikowsky); la largeur et l'intensité 
de la couleur de la bande orange et l’importance de la bordure 
noire des lunules orangées. 


Thecla Ilicis, Esper. 


C'est en France la plus abondante des 7 ecla. Il est surprenant 
qu'on ne la trouve pas en Angleterre. Elle éclôt chez nous en juin 
et juillet; elle est très commune en Bretagne, notamment à la forêt 
de Rennes et à Monterfil; à Charroux (Vienne); à Digne; à Cau- 
terets ; à Florac; dans les Pyrénées-Orientales; à Hyères; à Saint- 
Germain-en-Laye, à Lardy (Seine-et-Oise); à Châteaudun; à 
Angoulême; à Lectoure (Gers); dans les landes de Milly (Maine- 
et-Loire) ; au col de Castillon (Alpes-Maritimes). Je l’ai reçue de 
Genève; M. Wullschlegel me l’a envoyée de Martigny (Valais); 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


DT 
OC 


la collection Kuwert m'a fait connaître quelques exemplaires 
d'Allemagne; enfin je l'ai prise à Florence, en juin 1907, et à 
Potes (Asturies), en juillet 1882. Mon frère l’a récoltée à Naples; 
Bellier l'a trouvée en Sicile. C’est une espèce assez grande, aux 
ailes arrondies, d’un brun chaud, soyeux et brillant en dessus, et 
d'une teinte de bronze en dessous. 

Le Œ est tantôt d’un brun foncé, uni, en dessus; tantôt ses ailes 
supérieures sont ornées d’une tache de teinte fauve orangé. Chez 
les © de France, cette tache est plus développée; les nervures la 
divisent finement en 4, 5 ou même 6 parties. Une petite tache 
fauve orangé se trouve à l'angle anal en dessus, chez les C' comme 
chez les ©; sur les ailes inférieures de ces dernières, également 
en dessus, on voit souvent, le long du bord marginal, se dérouler 
une série de taches fauves. En dessous, les ailes sont traversées 
du bord costal au bord anal, par une ligne de petits traits blancs 
plus accentuée aux ailes inférieures; une rangée intranervurale de 
taches rouges surmontées d’un croissant noir et suivies d’une ombre 
noirâtre se développe, le long du bord marginal des ailes imfé- 
rieures, au-dessus d’un fin liséré blanc. Dans certains pays, la 
tache fauve orangé des ailes supérieures du Of est souvent nulle, 
tandis que dans d’autres contrées, elle est très accentuée. À Flo- 
rence, à Naples, en Sicile, à Genève, aux environs de Paris, en 
Allemagne, les G' sont généralement presque unicolores. Dans la 
Lozère, dans les Alpes-Maritimes et les Basses-Alpes, la tache 
fauve orangé est ordinairement très largement développée chez 
les G. En Bretagne et en Poitou, dans les Asturies, en Malarsset 
dans les Pyrénées-Orientales, on trouve des G' qui forment la 
transition entre la race brune unicolore et la race qui est ornée 
d'une macule fauve comme la ©. Mais les Q elles-mêmes varient 
pour la dimension et l'intensité de la macule fauve qui décore 
leurs ailes supérieures en dessus, et j'ai sous les yeux des exem- 
plaires chez lesquels la macule en question est fort peu développée, 
ou même à peine indiquée. D'ailleurs dans les Basses-Alpes, où 
les sont généralement fortement maculés, on en rencontre qui 
le sont fort peu, de sorte qu’il faut juger, au point de vue de la 


7A LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


tache fauve du dessus des ailes supérieures, en tenant compte de 
la majorité des exemplaires observés dans une localité, mais non 
pas de la totalité. 

Esper publie, comme z/icis ©, une Q sous le n° 1 à de la 
PI XKXIX (la citation de cette figure est omise dans le Catalog 
Staudinger et Rebel 1001). Huebner représente sous les n° 378 
et 370 la Q slicis, et sous les n° 863 et 864, avec le nom Cerri, 
le G de la forme qui a les ailes supérieures maculées de fauve; 
sous les n° 865 et 866, Huebner donne l'image de la Q. 

C’est par erreur que Staudinger et Rebel rapportent à Cerni, 
dans leur Catalog 1001, la Tecla figurée par Huebner, avec le 
nom esculi, sous les n°* 600 et 601. Cette 7 Zecla escul: se rapporte 
comme variété à esculi n® 559 et 560, absolument comme Zyx- 
ceus Q 674 et 675 se rapporte à spi. 

Gerhard a figuré z/2c1s, avec le nom de Zynceus, sous les n° 2 a, 
2det2c de la PI 2, et la variété dont le O' est maculé de fauve, 
avec le nom correct de cerri, sous les n® 1 a et 1 & de la PL 4. 
Lang a grossièrement représenté 2/:c2s sous les n° 4 de la PI. XVI]; 
dans son texte, il cite la var. cerri avec la mention : « Has the 
orange patch on the fore wings larger than in the common form 
of the female ». Mais il a, par erreur sans doute, fait suivre le 
nom cerri du mot : female, au commencement de son article; c’est : 
male qu'il aurait fallu dire. 

Freyer figure sur la PI 529 la Q iicis, avec la chenille et la 
chrysalide, et sur la PI 580, le @' 1/cs, avec les ailes unicolores 
en dessus. Freyer représente de nouveau sur la PI. 589 consacrée 
au Œ, la chenille et la chrysalide dont l’image se trouve déjà 
jointe à celle de la ©. 

M. Gabriel Dupuy a pris à Angoulême une Ab. albosparsa que 
je fais figurer sous le n° 401 de la PI. XLIX. Cette Aberration tout 
à fait conforme à celle de spini que j'ai appelée du même nom : 
albosparsa, est, une fois de plus, la preuve d’une Loi d’après 
laquelle, dans un Genre, se constituent les variétés et Aberrations. 

M. Dupuy a eu l’obligeance de me faire connaître aussi l’Ab. 
bialbolineata, chez laquelle les taches fauves submarginales des 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Gi 


ailes inférieures, en dessous, sont surmontées d'une ligne de che- 
vrons blancs parallèle à la ligne blanche extracellulaire normale. 
Par inversion, je pense qu'on doit trouver des exemplaires de 
Thecla ilicis complètement dépourvus en dessous de toute ligne 
blanche: car M. Dupuy m'a envoyé un G' d'Angoulême chez lequel 
la ligne blanche commune normale n'existe qu'à l'état de vestige. 

En Asie-Mineure, habite la variété Bischofhi, Gerh. (PI. 2, 
fig. 4 a, b, c), dont j'ai reçu de nombreux exemplaires de Broussa 
et d'Akbès. M. Holl signale la 7'Xecla Ilicis-Cerri, Huebner, du 
Camp des Chênes, en juin, et de Blida-Glacière, en juillet (pro- 
vince d'Alger). 


Thecla esculi, Huebner. 


Espèce tout à fait distincte d’#/icis dont elle n’est certainement 
pas une variété comme le prétend, à tort, le Cafalog Staudinger 
et Rebel 1901. Æsculi habite avec /icis dans le Midi de la France; 
mais ses mœurs sont tout autres. D'ailleurs la forme des ailes et 
un, ensemble de caractères très tangibles différencient complètement 
esculi d'ilicis, au point de vue spécifique. Feu Guenée partageait 
ma manière de voir au sujet de la distinction d’esculi, Huebner, 
en espèce spéciale et indépendante d’7ices. 

Guenée avait logé presque toute sa collection dans des petites 
boîtes hermétiquement closes, chaque boîte étant consacrée à une 
seule Espèce. Sur le côté de la boîte, Guenée avait collé une feuille 
de papier où il avait retracé de son écriture si fine et si serrée qu'il 
faut quelquefois la lire au moyen d’une loupe, les observations 
synonymiques et biologiques que lui avait suggérées chaque 
Espèce. Je transcris textuellement, comme suit, la notice écrite 
sans doute vers 1863 et consacrée par Guenée à la 7'4ecla esculi : 
« Thecla Æsculi, Hb. 550, 560. ; Och.; God. Enc. p. 649; De V. 
et Gn. p. 40 — pris par moi au Vernet en 1850; juin et Juillet. 
Croirait-on que cette espèce si distincte n’est pas admise par les 
auteurs allemands, même les plus modernes, qui veulent y voir 


76 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


une variété de ZLynceus, Fab. (ilicis) ! Il est aussi commun à 
Montpellier que le Zynceus (ilicis) chez nous, et ce dernier sy 
trouve aussi et ne se mêle point avec lui. La var. Cerri d'ailleurs 
à laquelle se rapportent presque tous les individus du Midi, est 
exagérée en sens contraire de l’Æsculi. La coupe d’aile, l'absence 
complète de taches fauves dans les deux sexes — (Guenée ignorait 
la forme d’Andalousie et d'Algérie), — la forme de la ligne 
blanche des inférieures et de leurs lunules fauves, l’absence du 
liséré terminal, la massue des antennes, etc, ne devraient pas 
même laisser de doute sur sa validité. La chenille vit sur l’yeuse 
et ressemble beaucoup à celle du ZLynceus (ilicis) : j'ai élevé la Q 
n° 4; la chrysalide est à côté. » 

Gerhard, dans sa Monographie des Lycænide, considère aussi 
la T'hecla esculi comme espèce distincte. Cependant j'avais lieu 
de me documenter convenablement pour fixer définitivement mon 
opinion sur la question de la distinction spécifique d’esculi et J'ai 
réuni dans ce but 374 exemplaires provenant des Alpes-Maritimes, 
des Pyrénées-Orientales, des Bouches-du-Rhône, de l'Hérault, 
d'Andalousie (Grenade, Sierra de Alfakar, vallée de Ronda, 
Sierra-Nevada), de Tanger et d'Algérie (Sebdou, Khenchela, 
Vakouren, Lambèze, Djurjura, Magenta, El Haçaiba). La forme 
esculi, Huebner (, 550, 560), est celle de la France méridionale. 
Les deux sexes sont brun foncé en dessus. Assez rarement, on voit 
chez la Q une faible éclaircie fauve sur les supérieures et quelques 
macules de même nuance le long du bord marginal des ailes 
inférieures, en dessus. 

En Espagne, en Algérie et dans les Pyrénées-Orientales, aux 
environs de Collioure, on trouve, en même temps que la forme 
type, la variété dont Huebner a figuré la ©, sous les n°* 690 et 691, 
avec le même nom esculi, déjà donné au papillon GO‘ représenté 
sous les n° 550 et 560. C’est cette esculi (Q 690 et 691) que Stau- 
dinger et Rebel rapportent par erreur à Cerr, comme synonyme 
(Catalog 1901). Dans cette variété esculi, Huebner (Q 690 et 691), 
le d est unicolore en dessus; mais la Q est ornée sur l’espace 
extracellulaire de l'aile supérieure d’une large tache fauve, et le 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Pé 


long du bord de l'aile inférieure, d’une bordure très développée, 
formée de taches confluentes également fauves. Gerhard a donné 
(PI. 4, fig. 4) une figure de cette variété © d’esculi et il lui a 
imposé le nom de waculatus. J'ignore pourquoi cette variété 
maculatus, Gerhard, n’est pas recensée dans le Catalog Staudinger 
et Rebel 1901. Une fois de plus, je constate combien ce Catalog 
a été dressé sans soins et à la légère. 

Feu de Graslin avait capturé dans la Sierra-Nevada, le 
16 juillet 1835, une Aberration O' d’esculi dont les ailes inférieures, 
en dessous, présentent un curieux amalgame des taches rouges 
submarginales, des points noirs qui les surmontent et de la ligne 
blanche ordinaire, laquelle se trouve transformée en petits traits 
blancs accompagnant sur chaque côté les taches rouges et noires 
qui ont subi un extraordinaire allongement. J'appelle cette Aber- 
ration : Graslini et je la fais représenter sous le n° 402 de la 
BEXLIX 

Gerhard figure avec le nom d’ilicioides, sous les n° 54, Sbetsc 
de la PI. 4 de sa Monographie des Lycænide, une grande forme 
d’esculi dont la © est d’un brun unicolore comme le ©, mais 
montre quatre lunules rouges, le long du bord marginal des ailes 
inférieures, en dessus, à partir de l’angle anal. En dessous, l'aile 
supérieure est dépourvue de ligne blanche. Dans son texte, 
Gerhard érige 1/2cioides en espèce séparée, après esculi, et rattache 
maculatus à iicioides ; il fait connaître qu'il en a reçu plusieurs 
exemplaires de Lederer, comme provenant de Ronda. Pour moi, 
ilicioides est une forme d’esculi voisine de wauretanica, Stgr., un 
peu plus grande que cette dernière et avec les taches rouges du 
dessus et du dessous des ailes inférieures plus accentuées. 

Staudinger désigne en effet sous le nom de wauretanica la race 
d'Algérie, plus petite, dit-il, en dessous plus obscure et presque 
unicolore. Je fais figurer un C' mauretanica, pris à Sebdou, en 
juin 1007, sous le n° 405 de la PI. XLIX. Mais il y a une autre 
race en Algérie que Gerhard et Staudinger ont ignorée et dont 
je fais figurer les deux sexes sous les n° 403, 404 de la PI. XLIX. 
Cette race est remarquable par le développement, en dessus, chez 


78 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


le G' comme chez la ©, de l'éclaircie fauve sur les quatre ailes. 
D'ailleurs, en Algérie, esculi varie selon les lieux : à Vakouren, 
les deux sexes de esculi sont, en dessus, d’un brun foncé presque 
unicolore; mais par le dessous, ils ressemblent aux exemplaires 
du Midi de la France; par conséquent ils n’appartiennent pas à 
la variété #auretanica, mais plutôt à z/cioides, Gerhard, tandis 
qu'à Sebdou, à Khenchela, on rencontre des esculi-mauretanica 
analogues à celui qui est figuré dans le présent ouvrage, c’est-à- 
dire d’un brun noir sans taches en dessus, mais dont le dessous 
présente assez bien les caractères indiqués dans la diagnose de 
Staudinger. Avec ces esculi-mauretanica, 6n trouve la race lar- 
gement lavée de fauve sur le dessus des quatre ailes, dont Je fais 
ci-dessus mention et que j'appelle Powell:; en outre, on peut 
observer toutes les transitions entre les individus unicolores, entiè- 
rement noirâtres en dessus, et ceux qui sont si largement lavés 
de fauve. La proportion des échantillons lavés de fauve par 
rapport aux unicolores, est même très grande à Sebdou et à 
Khenchela. 

On distinguera aisément la variété #aculatus, d'Andalousie et 
de Collioure. Le dessus des ailes du GO semble rester toujours 
unicolore, d’un brun noirâtre foncé; seule, la Q a les ailes mar- 
quées de fauve, mais d’une façon bien moins diffuse que chez 
Powelli. 

Pour établir la nomenclature des diverses races et variétés 
d'esculi, je décompose la synthèse de 7'Zecla esculi, Huebner, du 
Midi de la France, d'Espagne, de Portugal et d'Algérie, en 


5 formes ou variétés analysées comme suit : 


1. — ct Q quasi-unicolores en dessus. 
Esculi, Huebner (©, 550, 560). — Midi de la France. 
Æsculi, Gerhard (PI 2; fig. 14, 1 6, 16). — Portugal 


2. —  unicolore en dessus; Q maculée de fauve aux 4 ailes. 
Maculatus, Gerhard (PL 4; © fig. 4). — Andalousie; 
Collioure. 


Esculi, Huebner (© 690, 691), 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 79 


A6. Graslini, Obthr. (SG, Lépid. comparée; IV, PI XLIX, 
fig. 402). — Sierra-Nevada. 
3. — Unicolore en dessus; teinte noirâtre foncée, assez grand; 
les taches rouges bien apparentes. 
Ilicioides, Gerhard (PI 4; fig. 5a, 5b, 5c). — Ronda; 
Vakouren. 
4. — Les taches rouges du dessous plus effacées; le dessous 
plus unicolore. 
Mauretanica, Stgr., Obthr. (Lépid. comparée, IV. PI XLIX ; 
Œ fig. 405). — Algérie (Sebdou, Khenchela, etc.). 
5. — Le dessus des ailes largement lavé de fauve orangé. 
Powelli, Obthr. (Lépid. comparée; IV. PL XLIX; ©, ©, 
fig. 403, 404). — Algérie (Sebdou, Khenchela). 


Thecla pruni, Linné. 


Ainsi décrite par Linné, dans Systema Nature, Edit. X; 
p. 482: « Pruni. 147. P. P. alis subcaudatis supra fuscis, subtus 
fascia marginali fulva utrinque nigro punctata. Habitat in pruno 
domestica. » 

La TAecla pruni se trouve en Angleterre, et d’après les éléments 
de ma collection, en Alsace, en Saxe, en Nassau, en Wurtemberg 
et à Ecclepans, en Suisse, où mon frère l’a capturée en Juillet 1907. 
Les exemplaires anglais que je possède faisaient partie des col- 
lections Sheppard et Tugwell; l’un d’eux porte létiquette de 
localité : Northamptonshire. 

Je n'ai jamais vu la 7 Xecla pruni en Bretagne, ni en Charente, 
ni dans les contrées du Midi où j'ai chassé les Lépidoptères. C’est 
une espèce très localisée qui, en France, n’a pas été trouvée dans 
un grand nombre de places. J'ai appris qu’on la rencontre, géné- 
ralement en petit nombre d'exemplaires, dans quelques bois des 
environs de Paris, à Chantilly, à Compiègne, en Seine-et-Oise, 
dans l'Aube, la Marne et la Haute-Marne. Feu de Graslin n'avait 
trouvé la T'Xecla pruni ni dans la Sarthe, ni dans la Vendée. 


80 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Guenée ne possédait dans sa collection que des exemplaires 
d'Allemagne; les échantillons de Prum, dans les collections 
Boisduval et Bellier, n’ont aucune indication de localité. 

Comme la T'Xecla pruni habite l'Angleterre, Tutt lui consacre 
une étude approfondie, depuis la page 192 à la page 226 du 
vol. IX de À Natural History of the British Lepidoptera. Chaque 
espèce anglaise de 7'ecla faisant partie d’un genre spécial, pruni 
est incorporée par Tutt dans le genre S#ymon. 

La PI IX est consacrée à la reproduction par procédés photo- 
typographiques de l’œuf, de la chenille sur sa plante nourricière, 
de la chrysalide et du papillon posé sur une petite branche de 
prunier. En outre, la PI. I représente sous les figures 15, 16, 17, 
18 et 10 la 7'Xecla (Strymon) pruni, à l'état parfait, en dessus et 
en dessous. 

La Thecla pruni est une espèce très reconnaissable et facile à 
distinguer. Tutt a observé des variations pour l'appréciation 
desquelles j'invite à se reporter au travail extrêmement complet 
de cet auteur. Huebner figure sous la lettre T de la PI. IIT du 
2° volume (III° partie) de l'ouvrage intitulé : Beträge zur 
Geschaichte der Schmetterlinge, imprimé à Augsbourg, en 1700, 
une très belle Aberration de fruni, appelée : semialbofasciata pax 
Tutt, chez laquelle les ailes inférieures sont traversées du bord 
costal au bord anal par une bande de taches intranervurales 
confluentes, d’un blanc pur. Cette Aberration superbe faisait 
partie du Cabinet de Gerning, à Francfort-sur-le-Mein. Elle avait 
été prise à Francfort. 

Huebner constate à cette occasion que la forme ordinaire de 
pruni a été depuis longtemps et plusieurs fois décrite et figurée. 
« Der gewühnliche Falter ist laengst und mehrmalen beschrieben 
und abgebildet worden. » 

En effet, la 7 4ecla pruni a été figurée tout d’abord par Roesel 
qui a dû achever le dessin et la gravure sur cuivre vers 1744; mais 
la publication en fut faite un peu plus tard. C’est sur la Tab. VIT 
que l’on peut voir la figure de la larve (fig. 1), de la chrysalide 
(he )ier de l'imaso (fes res, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE BI 


August Iohann Roesel von Rosenhof était peintre de minia- 
tures, « Miniatur-Mahler », comme mon grand-père le fut aussi. 
Roesel était né en 1705 et il mourut en 1750. Son portrait, dessiné 
par son gendre Kleemann, lui aussi peintre de miniatures, et 
d'après la peinture de von der Smissen, a été gravé sur cuivre 
par J. W. Windter et orne le commencement de l'ouvrage lon- 
guement intitulé : Der monatlich-herausgegebenen  Insecten- 
Belustigung erster Theil, in welchem die in sechs Classen ein- 
getheilte Papilionen, mit ihrem Ursprung, Verwandlung und 
allen wunderbaren Eigenschaften, aus eigener Érfahrung bes- 
chrieben, auf 78 Kupfertafeln, welche 121, mit Farben auf das 
natürlichste illuminirte Tabellen enthalten, nach dem Leben 
abgebildet worden von dem vortreflichen Naturforscher und 
berühmten Mignaturmahler August Iohann Roesel von Rosenhof, 
mit einer Vorrede, in welcher von dem Nutzen der Insecten 
gehandelt, was sie seyen gezeiget, und von der Einthealung 
derselben Nachricht gegeben wird, von dem Roeselischen Eidam 
und Mignaturmahler C. F. C. Kleemann mit vielen neuen 
Beobachtungen und Anmerkungen hin und wieder vermehrt und 
verbessert. Nürnberg, zu finden in der Naspischen Buchhandlung. 


Au bas du portrait de Roesel sont gravées ses armes, et le 
Doctor Huth, qui a signé une petite pièce de vers imprimée au 
revers du titre et finissant ainsi : « Wie gross Gott auch im 
Kleinen sey » (Combien Dieu est grand même dans ce qui est 
petit), a fait insérer au pied du portrait ces mots auxquels il a 
cru donner une tournure plaisante et qu’il a également fait suivre 
de sa signature : « So sah Herr Roesel aus Dem, nach dem Tod, 
das Leben Gewürme, Früsch, und Krôten geben »; ce qu'on peut 
traduire comme suit : « Ainsi parut Monsieur Roesel, donnant, 
après sa mort, la vie à des vers, grenouilles et crapauds. » En 
face du portrait de Roesel se trouve, suivant l’usage du temps, 
un frontispice gravé sur cuivre et colorié à la main, représentant 
des figures allégoriques et cette sentence de Pline inscrite sur le 
piédestal de la statue qui semble, au milieu du tableau, person- 


6 


82 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


nifier la Nature. « Rerum natura nusquam magis quam in minimis 
tota est. Pin ESC NEED CE 

Les figures des papillons publiées dans l’ouvrage posthume de 
Roesel, par les soins de son gendre Kleeman, sont généralement 
d’une exécution excellente; les chenilles, les chrysalides, souvent 
même les œufs sont reproduits en même temps que les insectes 
parfaits, et le dessin, la gravure et le coloriage sont traités avec 
un talent supérieur. Le vieux maître hollandais Sepp a seul 
montré plus de perfection et plus de finesse encore que Roesel, 
dans le dessin et la gravure de certaines Planches de papillons. 
Je m'associe donc complètement à l'éloge que Guenée fait des 
travaux iconographiques de Roesel, à la page LI de la Préface 
de l’Aistoire Naturelle des Insectes; Species général des Lépi- 
dopières dans les Suites à Buffon; Noctuélites; tome I; 1852, et 
je ne saurais exprimer en termes meilleurs mon admiration pour 
des figures qui, malgré leur ancienneté, sont encore, comme le dit 
Guenée, restées sans rivales. 

Si l’on compare les figures données par Lang en 1884, ou même 
celles en lithographie publiées par Barrett à partir de 1893, ou 
encore celles de Seitz à l’époque actuelle, aux images gravées vers 
le milieu du XVITT* siècle par Roesel, à Nuremberg, et par Sepp, 
à Amsterdam, combien apparaît haute la supériorité des vieux 
Maîtres! Puisse le très remarquable talent de mon collaborateur 
artistique actuel J. Culot valoir à mon présent travail un mérite 
analogue à celui que les Anciens, dont je me plais à évoquer le 
souvenir digne d’admiration, ont su si parfaitement acquérir! 
Tel est mon plus vif désir. On trouvera juste en tout cas que ma 
plume rende un légitime hommage aux fondateurs de notre 
Science, à ces fervents amis de la Nature qui vivaient à l’avant- 
dernier siècle, à une époque où se dessinait un si magnifique essor 
scientifique. La Révolution française arrêta le progrès, qui 
s’annonçait si brillant et si rapide, dans les diverses branches de 
la Science; lors de cette époque si malheureuse et si tourmentée, 
la vie d’un Lavoisier n'était même pas respectée par la hache 
révolutionnaire. Cependant la flamme ne s'était pas complètement 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 83 
D  — 
éteinte dans l'insécurité de ces temps troublés. Sous le premier 
Empire, en 1805, Jacob Huebner, d’Augsbourg, commençait la 
publication de son incomparable Iconographie : Sammlung 
europaeischer Schmetterlinge, et c'était la collection d’un amateur 
strasbourgeois, Franck, qui fournissait des matériaux pour servir 
de modèle aux admirables Planches que publiait Jacob Huebner. 
Dans la XX° livraison des Etudes d'Entomologie, à la page 64, 
à propos des variations de CÆelonia Caja, j'ai été amené à parler 
de la collection Franck dont tant de fois, jadis, m'a entretenu 
mon grand-père qui l'avait bien connue. Précédemment, j'ai déjà 
écrit que sur la noble terre d'Alsace, l'étude des Sciences a 
toujours été en grand honneur et n'a jamais manqué d’adeptes. 
Mais on ne doit pas craindre de dire encore qu'aucune autre 
province n’a fourni dans la spécialité à laquelle je me suis 
consacré, un plus grand nombre d'amateurs éclairés dont le com- 
merce fut toujours aimable et le zèle toujours ardent. Il en a été 
de même pour toutes les autres branches des connaissances 
humaines où apparaît la haute culture de l'esprit, où s’afhrment 
la rectitude et la solidité du jugement, l'amour de la Nature, le 
coût sûr et distingué des Arts, la constance pour le travail, la 
probité et la sincérité dans les recherches de l'Histoire. 

J'ai toujours admiré le talent des nombreux artistes et les 
vastes connaissances de tant d'hommes érudits dont l'Alsace a 
si justement le droit de se montrer fière. Aussi m'honorerai-Je 


toujours grandement des liens qui m’attachent à ce noble pays. 


Thecla acaciæ, Huebner. 


N’existe ni en Angleterre, ni en Algérie; est très abondante 
dans la France méridionale, notamment à Florac (Lozère), où je 
l'ai prise en juillet 1863; aux environs de Vernet-les-Bains 
(Pyrénées-Orientales) ; à l'Escarène et Levens (Alpes-Maritimes), 
où l'éclosion a lieu en juin; à Lectoure (Gers); à la Montgie 
(Puy-de-Dôme). L'espèce remonte vers le Nord jusqu'a Rennes 


84 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


où Je l'ai capturée dans le jardin potager de Mesneuf (commune 
de Bourgbarré), reposée sur les fleurs d’oignon, et à Châteaudun 
(Eure-et-Loir), où feu Guenée l’a élevée de la chenille et l’a 
observée voltigeant avec z/icis, sur les fleurs de ronces. Dans la 
collection Kuwert, 1l y a des T'Lecla acaciæe avec l'étiquette : 
Ungarn. I] ne semble pas que les acaciæ hongrois soient différents 
de ceux de France. La Q se distingue aisément des autres espèces 
de 7’Aecla françaises par sa petite touffe anale de poils noirs, 
ras et veloutés, comme chez R£ymnus de l'Oural et T'engstroemi 
du Turkestan. 

En dessus, les deux sexes sont d’un brun canelle uni, avec 
quelques taches d’une teinte orangé pâle, en remontant depuis 
l'angle anal, le long du bord marginal des ailes inférieures, géné- 
ralement jusqu’au-dessus du petit appendice caudal dont l’extré- 
mité est blanche. 

Le dessous est bronzé, traversé du bord costal des ailes supé- 
rieures au bord anal des inférieures, par une ligne blanche non 
interrompue, formée de petites taches intranervurales, en forme 
de rectangle allongé. Le long du bord terminal, il y a un liséré 
noir surmonté d’un mince filet blanc, sur lequel se trouve assise, 
aux ailes inférieures, une série de taches d’un rouge orangé; ces 
taches rougeâtres sont en forme de croissant; elles sont marquées 
d'un point noir dans l’espace concave; un arc noir précédé d’un 
arc blanc entoure leur sommet. La 7'Lecla acaciæ est vive; elle 
aime dans le Midi à se poser sur les buissons et sur les fleurs de 
thym et de dorycnium. 

Huebner a figuré la T'Lecla acacie sous les n°° 743, 744, 745 
et 746. Gerhard en a donné des figures très inférieures sous les 
n® 44, Ab et 4c de la PI I. La forme orientale abdominalis, 
Gerhard (PI 4; fig. 3a, 36), paraît commune à Akbès et à 
Broussa, en Asie-Mineure. La forme Gerkardi, Stgr, de Mesopo- 
tamie, est remarquable par la blancheur de son abdomen, en 
dessous, et par l’accentuation de la touffe noire anale chez la ©. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 85 


Callophrys rubi, Linné, et Avis, Chapman. 


La Thecla (Callophrys, Bilberg) rubr, Linné, est une délicieuse 
petite créature, infiniment gracieuse dans chacun de ses mouve- 
ments et charmante à voir, en avril, posée sur les feuilles naissantes 
de ronce ou d’aubépine, dans les sites abrités et un peu chauds 
qu’elle affectionne. Linné l’a décrite dans le Sys/ema Nature, 
édit. X, p. 483, en termes exceptionnellement concis : « Kubr; 
154. P. P. alis dentato-subcaudatis : supra fuscis, subtus viridibus. 
Habitat in Xubo aculeato ». La Thecla rubi est répandue en 
Angleterre, dans toute l'Europe continentale, en Algérie et en 
Asie-Mineure. Tutt a consacré près de 50 pages de À Natural 
History of the British Lepidoptera à l'étude de Callophrys rubr. 
La PI IV de l'ouvrage anglais représente, d’après les procédés 
phototypographiques, les œufs, les chenilles sur la plante légu- 
mineuse nourricière, les chrysalides et le papillon. Guenée a 
remarqué que la chenille de 7wbi ne vit point sur la ronce, mais 
sur le Genista sagittalis, du moins aux environs de Châteaudun. 

Tutt énumère (p. 109) une considérable série de plantes nourri- 
cières (food plants) pour la chenille de Callophrys rubr. Je citerai, 
d'après Tutt, Xwbus aculeata (Linné); bourgeons de Xubus 
fruticosus (Wilkes); Rubus idœus (Richter); fleurs et fruits verts 
de Cornus sanguinea (Schmid); graines immatures de X£amnus 
catharticus (Prideaux); Rhamnus frangula (Glitz); les fleurs de 
Vaccinium vitis-idæa (Zeller); Vaccinium myrtillus (Freer); 
fleurs d’Ærica tetralix (Wolfe et Chapman); Æyrica arborea; Ilex 
aguifolium (Minà-Palumbo); Helianthemum vulgare (Frey); 
Rumex (chenille élevée à maturité; Stange); les diverses espèces 
de trèfles; Medicago lupulina; Lotus corniculatus; les Genista 
anglica, tinctoria, germanica, sagittalis; les Ulex nanus et euro- 
pœus; les Spartium scoparium et junceum; diverses espèces de 
Cytisus; les fleurs de Calycotome spinosus et d'Onobrychis 
sativa; l'Hedysarum onobrychis. Suivant les lieux, la chenille de 
Thecla rubi dévore telle ou telle plante; à la Riviera, c’est le 


86 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Calycotome; dans l'Argyllshire, c'est l'ajonc (#lex); mais suivant 
Chapman et d'accord avec Guenée, les plantes le plus généra- 
lement préférées par 702 seraient encore et partout les arbrisseaux 
de la famille des Légumineuses ou Papilionacées à laquelle 
appartiennent d’ailleurs l’Ulex et le Calycotome. 

Pour la variation, on constate que la marque androconiale est 
tantôt d’un gris brun, tantôt d’un jaune paille extrêmement pâle; 
d'autre part, la couleur du dessus des ailes varie du brun noirâtre 
(environs de Moscou) au brun rougeâtre clair (Algérie). Stau- 
dinger a donné le nom de fervida à la forme algérienne dont le 
dessus des ailes est d’un brun rougeûtre clair; sur le dessous des 
ailes, la teinte verte est un peu variable; de plus, tantôt les quatre 
ailes sont unicolores, tantôt elles sont traversées par une ligne de 
taches blanches qui descendent du bord costal des premières 
ailes au bord anal des inférieures. Ces taches sont intranervurales; 
elles ont la forme de petits rectangles allongés. 

Tutt désigne sous le nom de punctata la forme de Tkecla rubr 
qui a la série des taches blanches très développée sur les quatre 
ailes; ordinairement trois aux supérieures et sept aux inférieures, 
dit-il Je possède une Q punctata, de Digne, avec 5 taches 
blanches aux supérieures et 8 (y compris la tache anale cependant 
moins apparente que les 7 autres) aux inférieures. La forme qui 
a une série de taches blanches bien développée aux ailes infé- 
rieures seulement a reçu le nom d’zferopunctata, Vutt. 

La série incomplète de taches blanches sur les ailes inférieures 
est nommée 2#completa, Tutt. 

Deux taches blanches seulement sur les ailes inférieures, une 
à la côte, l’autre vers le centre de la bande ordinaire, valent le 
nom de Otpunctata, Tutt. 

Une seule tache blanche sur les ailes inférieures, près de la 
côte, c’est 7wb1, Linné. 

Sans aucune tache blanche sur les ailes inférieures, c’est cæcus, 
Geoff. 

Ma collection contient toutes ces différentes formes; mais 
punctata et cæcus me paraissent les plus rares. Il y a des inter- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 87 


médiaires entre les formes ci-dessus analysées et elles ont reçu 
des noms (Voir Tutt; p. 92, 03). 

Le dessous des ailes inférieures peut être brun bronzé, au lieu 
d’être vert (Ab. brunnea, Tutt). 


Barrett constate que l’insecte, au moment où il émerge de la 
chrysalide, ne paraît pas avoir de trace de vert sur le dessous 
des ailes, cette surface étant d’un brun doré (golden-brown) 
comme le dessus. La couleur verte se caractérise à mesure que les 
ailes se développent. 


M. Blachier possède de Digne une Aberration remarquable; le 
dessous des ailes est d’un gris olivâtre uniformément très obscur 
et noirâtre. Cette Aberration dite : olivacea, Blachier, est décrite 
et figurée (p. 370, PL 0, fig. 10) dans le fasc. 4 du Vol. 1 du 
Bulletin de la Société lépidoptérologique de Genève. 

Dans les Annales de la Soc. ent. de France (1887) se trouve 
imprimée, à la page 216, la description par Millière d'une Aber- 
ration de Z'kecla rubi, prise le 5 avril 1887, à Cannes, près de 
l'Hôtel des Pins, par M" Texier. « Les ailes, en dessus, sont 
d’un jaune fauve uniforme très chaud, moins la base et le dessous 
de la côte qui se montrent pointillés de gris. La frange est très 
blanche aux quatre ailes. Tout le corps, en dessus, participe de 
la couleur anormale des ailes. Celles-ci, en dessous, seraient d’un 
carné vif, si elles n'étaient lavées de vert d’eau pâle chatoyant, 
à la base surtout. Les franges sont ici d’une teinte aurore assez 
indécise. Sur les ailes inférieures, on aperçoit trois points blancs 
très petits, à peine visibles, placés au centre et en hpnenlfes 
antennes sont annelées de blanc et se terminent en massue 
allongée d’un pourpre obscur; le ventre et les pattes sont d'un 
gris blanchâtre ». Tutt a appelé pa/lida cette Aberration décrite 
par Millière, mais non dénommée par ce dernier. 


Mosley figure très grossièrement, .en dessus seulement, une 
Aberration de Tkecla rubi faisant partie de l’ancienne collection 
Gregson, qui devint la propriété de M. Webb. Une autre Aber- 
ration remarquable par une large éclaircie brun clair, le long du 


88 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 
bord terminal des ailes inférieures, prise en mai 1903, à Plauen, 
est figurée sous le n° 3 de la PI. 1 de l’/25s, XVIII, 1005. 

Ma collection contient des exemplaires de Tkecla rubi recueillis 
à Digne (mars et avril 1807) ; à Hyères (20 mars 1906) ; en Corse; 
à Cannes et dans diverses autres localités des Alpes-Maritimes, 
à Marseille; à Vernet-les-Bains, en avril et mai; à Cauterets, en 
juillet 1883; à Cancale et à Rennes, en avril, mai et quelquefois 
commencement de juin; à Lectoure (Gers); à Châteaudun (Eure- 
et-Loir); dans le North-Devon (Angleterre); dans le Sud de 
l'Irlande; à 35 kilomètres au Nord-Est de Moscou; à Tokat et 
à Broussa, en Asie-Mineure; à Lambèze (avril 1884); Alger; 
Sebdou; Khenchela (mai 1908); Méchéria (mars 1886), en 
Algérie. M. Holl me mande qu'il a pris Z'kecla rubi à Zeralda, 
en mars; à Bouzaréa, en avril, et à Blida-Glacières, en juin. 


Les entomologistes, chaque printemps, aiment à voir réappa- 
raître la 7 Lecla rubi et ses compagnons ordinaires, les Ax#hocharis 
cardamines, Lycæna argiolus, Pararge Ægeria, Rhodocera 
rhamni, qui sont dans nos contrées, après les rigueurs et les tris- 
tesses de l'hiver, les messagers des beaux jours. Lorsque, vers la 
fin d'avril, paraissent dans les bois les fraiches frondaisons 
nouvelles, c’est une jouissance exquise de voir, avec la résurrection 
de la Flore, les espèces précoces d’Insectes renaître et animer de 
nouveau la campagne. Le plaisir d’apercevoir alors quelques 
T'hecla rubi voltigeant autour des premiers buissons verts est aussi 
aimable que la jouissance d’aspirer le parfum des premiers lilas. 
Chaque année n’apporte qu'une fois avec elle ce charme délicieux, 
mais, hélas! si passager, d’une apparition si rapide, si courte et 
si tôt finie. 

La Thecla rubi est une espèce heureusement abondante et 
commune en très différents lieux. On peut, sans longues et 
patientes recherches, plusieurs fois la rencontrer au cours d'une 
promenade, et l’admirer dans sa grâce et sa délicatesse, quand 
elle se repose sur les feuilles nouvelles avec lesquelles la couleur 
verte de ses ailes la confond aisément. Qu'on se trouve sur la 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 89 


lisière des bois, ou le long d’une haie ensoleillée dans la campagne, 
ou encore dans les allées d’un parc près d’une habitation, aussi 
bien en Algérie que dans les Iles britanniques ou en Russie, tant 
sur le haut des falaises couvertes d’ajonc et le long des grèves 
de la Côte d'Emeraude que dans les sites agrestes et parfumés 
au pied desquels la Méditerranée ne cesse avec fracas de dérouler 
ses flots bleus, lorsque commence à paraitre le printemps, on a 
fréquemment l’occasion d’apercevoir la 7'Lecla rubi, qui constitue 


un si Joli régal des yeux. 


Existe-t-il cependant des entomologistes qui seraient dédai- 
gneux de cette charmante /ycænide, comme de bien d’autres 
espèces communes, sous prétexte qu'étant vulgaires et partout 
répandues, elles se trouvent tarifées, comme article d'échange, à 
un nombre de Pfennig si petit que la récolte en devient, à cause 
de cela, indifférente. 


Le négoce est dans le Monde une nécessité et je ne médirai 
point des relations commerciales au moyen desquelles les peuples 
se font mutuellement profiter des produits les plus divers. Mais 
je plaindrai toujours, dans toute la sincérité de mon cœur, les 
amateurs de papillons, nos chers et certainement très distingués 
confrères, qui possèdent des dispositions commerciales tellement 
développées que leur satisfaction entomologique se mesure à la 
valeur marchande de leurs captures. [ls s'intéressent principale- 
ment aux Espèces qui, le plus souvent, grâce à un savoir-faire 
dépourvu de toute considération scientifique, ont conservé sur les 
Catalogues qu'ils honorent de leur confiance, un prix fabuleux, 
tandis que les papillons dont la tarification est insignifiante ne 
paraissent pas mériter la faveur de leur savante attention. De 
quelles précieuses jouissances ne se privent-ils pas? Mais dans 
l'Entomologie, comme ailleurs, on peut dire, en parlant des 
hommes qui sy adonnent, « tot capita, tot sensus! » Aussi 
existe-t-il encore, grâce à Dieu, un grand nombre de naturalistes 
dont la conception et l'objectif, dans leurs études entomologiques, 
ont une direction tout autre, et qui, sans se soucier de la hausse 


90 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


et de la baisse à l’/sectenboerse, trouvent leur joie dans l’étude 
patiente et consciencieuse de la Nature. 

Ils s’attachent même davantage aux espèces les plus abon- 
damment représentées, ne serait-ce qu'à cause des chances plus 
grandes d'obtenir des sujets variés qui constituent toujours une 
documentation scientifique précieuse et de l’observation facilitée 
par la grande quantité des exemplaires. 

M. le D' Thomas Algernon Chapman, de Reigate, est l’un de 
ces chercheurs avisés à qui échoit parfois une récompense bien 
méritée, sous forme d’une intéressante surprise. C’est en observant 
minutieusement et avec continuité la Jolie, mais très commune 
T'hecla rubi, que le D' Chapman a trouvé dans le Sud de la 
France une nouvelle espèce très voisine sans doute de 7402, mais 
paraissant distincte, et qu'il a appelée Azzs. C'est une découverte 
vraiment sensationnelle! Ainsi fut-1l de la Pieris Mann, naguère 
ignorée en France et confondue avec sa congénère ape; main- 
tenant elle est justement distinguée et considérée comme appar- 
tenant à une unité spécifique distincte et spéciale. Une nouvelle 
espèce de Pieris est donc venue très tardivement enrichir l’inven- 
taire de la Faune française. 

Demain il en sera de même pour Æpinephele Rhamnusia, qui 
ne tardera guère à être admise désormais, sans conteste, comme 
une espèce bien distincte d'Exdora. 


Le docteur T. A. Chapman a publié dans 74e Entomologisrs 
Record (Vol. XXI, n° 6, June 15% 1000, p.130, 131), sous lle 
titre de : Callophrys Avis-a new butterfiy from Southern France, 
la notice suivante, que je transcris textuellement : 


« Much resembles Callophrys rubi. C. Avis is larger 32 mm. 
to 36 mm. in expanse. C. rub1 rarely exceeds 32 mm. It has hardly 
any trace of tails. The upper surface has a ruddy tint, in excess 
usually of that of C. rubz var. fervida, and the venation is often, 
especially veins three, four and five of the upperwing in the ©, 
marked by rather broad dark lines as if raised, differing from 
the narrower flatter lines seen in C. 7#bi. À marked character is 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE OI 
a 
that the head has a long ruddy fur, replacing all trace of the 
silber lines round the eyes so conspicuous in C. rubz. The andro- 
conial brand on the © forewing is triangular, perhaps a shade 
broader than in C. 7ubi, but of only about half the length along 
the line of the veins, that it has in C. ruba, in which it is oval 
or fusiform. The club of the antenna is red or fleshcolour, all 
along the lower inner side, a colour confined in C. rubz to a few 
terminal joints of the club, and the same on all aspects of the 
antenna. There is rather a different shade of green on the 
underside, and the white line has quite a different character from 
that in C. rubi. It is narrow, but continuous; it is, in fact, usually 
broken by each vein, but looks continuous compared with C. rubr, 
in which the line breaks up into spots, rather than become narrow 
as in C. avis. Either really, or as an effect cf its narrowness, it 
has a suggestion of being faintly tinted green. It is entirely 
without the dark scales along its inner margin that are so constant 
in C. subi. The portion in each interneural space is curved. It 
occupies all the spaces on each wing, from the costa to the space 
in front of vein two, but is bright towards the costa (space 
between six and seven), and fades towards the inner part of the 
wing. The row of spots in C. rubi is much more irregular. The 
first spot on the hindwing slopes inwards, in C. rubi it slopes 
outwards, giving the second spot the appearance of being dis- 
placed inwards in C. zubi, outwards in C. avis. The G appendages 
have only slight differences. I have not examined sufhciently 
numerous specimens to be able to assert that these are constant. 

It specialises in its foodplant, instead of being quasi omnivorous 
like C. rubi. 

Habitat, Southern France (Var and Pyrénées-Orientales), 
Morocco (Tangier). The only specimen I have seen, not in my 
possession, is one of the Brit. Mus. Collection, ranged with C. rubt 
var. fervida, and labelled « Tangier, Elwes Coll. » 

Dans les Transactions of the entomological Society of London, 
1900 (Proceedings, Wednesday, June 2%, p. XXIX), on lit sur le 
même objet ce qui suit : « New Palaearctic Species of Callophrys. 


02 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


— D'T. À. Chapman exhibited specimens of Callophrys avis, 
a new species from the South of France, first taken by him at 
Hyères three years ago, and in the following year, and now 
obtained by him this year from the Pyrénées-Orientales. It is very 
closely allied to C. 7ubr, but distinguishable by its larger size, 
ruddier colour, red hairy face without silver lines round the eyes, 
the very different form of the androconial band, the red underside 
to the club of the antennae, the different tone of the green of the 
underside and the different character of the white line. 

It has probably been passed over in the field as merely #1, 
but could hardly be so in the collection, though the only specimen 
seen by the exhibitor, and not in his own possession, is one in 
the Natural History Museum at South Kensington, series of 
C. rubi, labelled « Tangier, Elwes coll. » The species is doubtless 
scarce and local. D' Chapman said he hoped to submit later a 
paper on the species giving some details of habits and life history; 
he thought it better not at present to forestall any interest that 
communication might possess. 

He ventured to say, however, in case the present exhibit left 
any doubt as to whether C. avis might not be merely a variety 
of C. rubi, that there were great differences in the larvae, of 
which also he exhibited examples in the last instar. The most 
remarkable was perhaps in the first stage. In two species, so closely 
allied, one rather expected there would be no appreciable diffe- 
rence between them in the first stage. There were, however, not 
only differences of colour and markings, but notable differences 
in the development of the hairs. » 


Il sera agréable aux Entomologistes français de lire la tra- 
duction des observations qui précèdent. Je dois cette traduction 
à l’obligeance de M. Harold Powell, aussi habile à s'exprimer en 
français qu’il l’est en anglais, sa langue maternelle. 


« Ressemble beaucoup à Callophrys rubi. C. avis est plus 
grande : 32 "/" à 36 "/" d'envergure. C. 7ub1 n'excède que rarement 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 03 
32 "/", Elle n’a presque pas trace de queues. La surface supérieure 
a une teinte rougeâtre généralement en excès de ce qu'on remarque 
chez C. rubi, var. fervida, et les veines, surtout les veines n°* 3, 4 
et 5; de l'aile supérieure chez les mâles, sont souvent marquées par 
des lignes assez larges et foncées paraissant en relief, différant 
des lignes plus étroites et plus aplaties que l’on voit chez C. 74b:. 
Un caractère marqué est la présence sur la tête d’une fourrure 
longue et rougeâtre, remplaçant toute trace des lignes argentées 
autour des yeux. 

La marque androconiale de l’aile supérieure chez le O' est trian- 
gulaire, peut-être une idée plus large que chez C. rub1; mais elle 
n’a que la moitié de la longueur, environ, le long de la ligne des 
veines, de celle de C. rubi, chez laquelle elle est ovale ou fusiforme. 

La massue de l'antenne est rouge ou couleur chair, tout le long 
du côté intérieur en dessous, couleur restreinte dans le cas de 
C. rubi à quelques anneaux terminaux de la massue, et entourant 
l'antenne. Il y a en dessous une teinte de vert un peu différente, 
et la ligne blanche a un caractère tout autre que chez C. rubr. 
Elle est étroite, mais continue; elle est, en fait, généralement 
brisée par chaque veine, mais elle a l’aspect d’être continue en 
comparaison avec celle de C. rubi qui se divise en taches plutôt 
que de s’amincir comme chez C. avis. Soit en réalité, soit par 
l'effet de son étroitesse, elle donne l'impression d’être faiblement 
teintée de vert. Elle est entièrement dépourvue des écailles foncées, 
le long de sa marge intérieure, si constantes chez C. rubr. La 
portion contenue dans chaque espace internervural est courbe. Elle 
occupe tous ces espaces sur chaque aile, depuis la côte jusqu'à 
l’espace précédant la veine 2, mais elle est brillante vers la côte 
(espace entre les veines 6 et 7), et diminue d'éclat vers la partie 
intérieure de l'aile. La rangée de taches est bien plus irrégulière 
chez C. rubi. La première tache de l’aile inférieure est inclinée 
vers l’intérieur; chez C. rubi elle est inclinée vers l’extérieur, ce 
qui donne à la seconde tache l'apparence d’être déplacée vers 
l’intérieur chez C. rubi et vers l'extérieur chez C. avis. 

Les appendices Œ ne présentent que de faibles différences. Je 


04 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


n'ai pas examiné assez d'exemplaires pour pouvoir déclarer qu’elles 
sont constantes. 

Au lieu d’être quasi-omnivore comme C. 7ubr, cette espèce se 
spécialise quant à sa plante nourricière. Habite la France méridio- 
nale (Var et Pyrénées-Orientales), le Maroc (Tanger). Le seul 
exemplaire vu par moi, qui n’est pas en ma possession, est dans 
la collection du British Museum rangé avec C. rubi var. fervida 


et portant étiquette « Tanger, Elwes coll. » 


Dans les 77ansactions of the Entomological Society of London, 
1000, Proceedings, Wednesday, June 2", p. XXIX), on lit sur le 


même objet ce qui suit : 


« Une Espèce Paléarctique nouvelle de Callophrys. — Le 
D' T. A. Chapman exhiba des specimens de Callophrys avis, 
espèce nouvelle de la France méridionale, capturée par lui pour 
la première fois à Hyères, il y a trois ans, et l’année suivante, et 
prise par lui cette année dans les Pyrénées-Orientales. Cette 
espèce est très voisine de C. 7#bi, mais elle en est séparable par 
sa plus grande taille, sa couleur plus rougeâtre, sa face poilue 
rouge sans lignes argentées autour des yeux, la forme très diffé- 
rente de la bande androconiale, le dessous rouge de la massue de 
l'antenne, le ton différent du vert du dessous et le caractère 
différent de la ligne blanche. Confondue avec 741, la C. avis est 
restée probablement méconnue à la chasse, mais elle ne pourrait 
guère l'être en collection, quoique le seul spécimen vu par l'expo- 
sant et ne lui appartenant pas, est un exemplaire dans le Natural 
History Museum à South Kensington, série de C. rubi, étiqueté 
« Tangier, Elwes coll. » 

L'espèce est sans doute rare et localisée. 

Le D' Chapman dit qu'il espérait soumettre plus tard une 
étude sur l’espèce, donnant des détails de ses mœurs et premiers 
états. 

Il estima qu'il valait mieux pour le moment ne pas anticiper 
sur l'intérêt que cette communication pourrait offrir. Il osa dire, 
cependant, pour le cas où les spécimens exhibés laisseraient sup- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 95 


poser que le C. avis ne soit qu'une simple variété de C. 7462, qu'il 
existait de grandes différences entre leurs chenilles, et il en 
montra des spécimens dans leur dernière livrée. Il dit que la diffé- 
rence la plus remarquable était peut-être dans la première phase 
larvaire. Chez deux espèces si rapprochées, on s’attendrait à ne 
trouver aucune différence appréciable dans la première livrée. I] 
existait, cependant, non seulement des différences de couleur et 
de dessin, mais aussi des différences notables dans le dévelop- 
pement des poils. » 


J'ai reçu de M. Chapman, à la courtoisie et à la générosité de 
qui je ne saurais rendre un hommage assez reconnaissant, des 
exemplaires authentiques de C. avis. Je me suis alors facilement 
rendu compte que je possédais déjà C. avis, de Khenchela et de 
Tunisie, et j'ai appris que l'espèce avait été trouvée en outre à 
Bussaco, en Portugal. Je fais figurer sur la PI L du présent 
ouvrage une série de Callophrys rubi et avis, et j'espère, au moyen 
de cette illustration, faciliter la connaissance de la nouvelle 
Espèce. 

Sous les n° 417 et 418, sont représentés deux 7#b1-suaveola, 
d'Akbès: sous les n° 410 et 420, deux avis, d'Amélie-les-Bains 
(Pyrénées-Orientales), et un de Tunisie; sous le n° 421, un 7#b1t- 
fervida, d'Algérie, et sous le n° 422, un 7ub4, de Moscou, où Ja 
race géographique est, en dessus, d’un brun noirâtre différent du 
brun toujours un peu plus rougeâtre des 7wbi de l'Europe occi- 
dentale. 


Thestor mauritanicus, Lucas. 


Décrit dans l'Explorafion scientifique de l'Algérie, pendant les 
années 1840, 1841, 1842, par H. Lucas, du Muséum d'Histoire natu- 
relle, membre de la Commission scientifique de l'Algérie, etc. 

Cet auteur, à la page 360 du Tome III, termine la notice con- 
cernant le Polyommatus mauritanicus, par la phrase suivante 
« Je n'ai rencontré qu’un seul individu Q de ce curieux Polyommate 


96 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


que j'ai pris dans les premiers jours de mai, aux environs de 
Bougie, sur les bords de la route qui conduit au Gouraïa; quant 
au mâle qui habite les environs d'Alger, il m’a été communiqué par 
M. Pierret. » Lucas ne semble pas s'être demandé comment la 
reproduction de l'espèce pourrait se perpétuer, si le O s’obstinait 
à habiter les environs d'Alger, tandis que la Q serait en villégiature 
à Bougie. 

Quoi qu’il en soit, le T'Aestor mauritanicus s'est arrangé pour 
perpétuer son espèce et on le trouve encore de nos jours à Alger, 
et à Maison-Carrée, où il vole en février et mars; à Birmandreïs, 
où il a été trouvé dès la fin de février 1007; à Kouba; à Tlemcen; 
à sebdou. 

Ainsi que je l'ai déjà exposé à la page 49 de la Livraison VI 
des Ætudes d'Entomologie, le Œ varie de plusieurs façons. La 
teinte du fond des ailes qui est généralement d'un gris brun uni- 
forme, est parfois sablée d'atomes jaunes : Ab. sabulosus Obthr.; 
les ailes supérieures du © peuvent être ornées d'une éclaircie 
orangée assez large, mais moins grande et de couleur moins vive 
que chez la © : var. Boisduvali, Obthr.; les ailes inférieures 
peuvent être immaculées en dessus (forme type); ou bien décorées 
près du bord anal et le long du bord marginal, de deux ou trois 
taches orangées plus où moins grosses : #adulatus Gerhard. Ces 
taches submarginales des ailes inférieures, chez le ©, sont d'un 
rouge où d'un jaune orangé. En dessous, aux ailes supérieures, les 
petites taches qui sont d’un noir si vif, varient passablement de 
nombre et de direction. Guenée a observé que dans auritanicus, 
les tibias de toutes les pattes chez le G' et des pattes antérieures 
chez la ©, sont très renflés; les pattes sont ponctuées de jaune 
paille; la frange est formée par des écailles épaisses et serrées. 

Lucas a représenté le ©‘ sans aucune tache en dessus, sous le 
n° 9 de la PL I des Lépidoptères de l'Exploration scientifique de 
l'Algérie. Le dessous du ' est figuré sous le n° 9a; et la ©, en 
dessus et en dessous, sous les n° 0 à et oc. Gerhard a donné sous 
le nom d'uxdulatus (PI 5; fig. 2 a, 2 &) l'image de wauritanicus ©, 
variété avec 3 points rouge orange le long du bord terminal des 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 07 


ailes inférieures, en dessus. À tort, Gerhard a cru que ce Polyom- 
matus dont il avait reçu, dit-il, trois exemplaires d'Anderrego, était 
une variété de Ballus originaire du Sud de la France et sa courte 
notice est tout à fait fautive. Néanmoins le nom d'yrdulatus peut 
être conservé pour désigner la variété C' tri-ponctuée par compa- 
raison au O' type qui reste, comme je le constate plus haut, d’une 
teinte uniforme brunâtre et immaculée. 

À part les différences de taille, je n’ai point vu dans la ©, de 
variation valant d'être signalée. Mais par analogie à l'Ab. Crosi © 
de Pallus, on doit trouver des Q aurttanicus albinisantes, quant 
à la couleur de leur tache orange du dessus des ailes. 


Thestor Ballus, Fabr. 


Charmante Zycænide dont le dessous des ailes est très agréa- 
blement décoré de vert, de brun et de rouge-orange et marqué de 
points noir vif finement soulignés de blanc. Se trouve à la fin de 
l'hiver et au premier printemps à Hyères (Var); à Malaga; à Bar- 
celone et à Villaviciosa-de-Odon en Espagne; en Tunisie et dans 
beaucoup de localités d'Algérie : à Alger (fin janvier, 20 février 
1907, 22 mars 1008); Maison-Carrée (3 avril 1908); Kouba 
(1® avril 1908); Tlemcen; Collo; Lambèze (avril 1868 et 1884, 
juin 1885); Mecheria (fin mars 1886); je possède aussi Ballus 
de Grèce. La chenille vit sur le lofus hispidus; on la trouve au 
mois de mai, à Hyères, selon Guenée. 

J'ai fait figurer une Jolie Aberration sudfus-partim-confluens de 
Ballus, sous le n° 82 de la PI 5 de la XX° Livraison des Æfudes 
d'Entomologie. Les ailes supérieures en dessous, dans cet exem- 
plaire aberrant, ont le fond très pâle et les points noirs médians 
sont partiellement confluents. Huebner a figuré la Q sous les 
n% 360 et 361, et le O', mais avec une coupe d'ailes très défectueuse, 
sous les n° 550. Ce Ballus Œ a les ailes inférieures, en dessus, 
marquées de deux petites taches rouge orange. Boisduval, dans 
l'Icones, a représenté la Q en dessus, sous le n216 dela Pl urotet 
le G' en dessous, sous le n° 7 de la même Planche. Boisduval dit 


7 


98 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


(Zcones; p. 48) que M. de Cerisy a pris Ballus, en 1824, aux envi- 
rons de Perpignan. Cet auteur ajoute : « il paraît que Dahl la 
aussi trouvé en Sicile. » Duponchel a donné d'assez bonnes figures 
ducret de la Q Ballus, en dessus et en dessous, sous les n° 1, 
21eti3 dela Pl VII du Supplément. Quant à Gerhard, il a figuré 
des Ballus de grande taille, sous les n° 1 4, 1 & et 1 c de la PL. 5, 
avec l'Espagne comme indication de patrie. M. L. Dupont a décrit, 
dans le Bulletin Soc. Ent. France; 1008; p. 319, une variété de 
coloration de 7’Xestor Ballus ©, chez laquelle la couleur rouge du 
dessus est remplacée par une teinte or très pâle. Cette Aberration 
albinisante a été trouvée à Mascara par le D' Cros et M. Dupont 
l'a appelé Cros. Le Thestor Ballus Gest, en dessus, tantôt uni- 
colore, tantôt orné près du bord marginal, de petites taches rouge 
orange comme la var. wrdulatus de mauritanicus. La description 
de Fabricius ne fait pas mention de ces petites taches rouges mar- 
ginales. Je lis en effet « alis integris, fulvis (feminæ fuscis) margine 
fusco; subtus anticis nigro punctatis, posticis viridibus, margine 
fusco : habitat in Hispania. » Dès lors, le type O' est la forme 
unicolore de l'espèce et je donne le nom zadulatus à Ballus Œ qui a 
les points marginaux rouge orange aux ailes inférieures, comme 
Gerhard l’a attribué au auritanicus semblablement maculé. 

Dans le Bulletin de la Soc. ent. de France, 1000, p. 228 et 220, 
M. E. Holl décrit, avec le nom d’Oberthüri, une Ab. © albinisante 
de Ballus, et avec le nom de Weberi, une Ab. (@) mélanisante de 
la même espèce. Chez Oberthüri, une teinte crème remplace la 
couleur or rouge des ailes, et chez Weberi, l'aspect des ailes infé- 
rieures, entièrement envahies par le brun foncé, est très sombre. 
Les deux Ab. Oberthiüri et Weberi viennent des environs d'Alger. 


Oberthiri serait une exagération de C7os1. 


Polyommatus Phlæas, Linné. 


J'ai publié dans la XX° Livraison des Ætudes d'Entomologte, 


sous lesin® 70,71, 72, 73, 74175, vOlet 77 ide la DIS MES ue tree 
de toute une série de variations du Polyommatus Phleas, qui ont 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 09 


été gravées avec un réel talent par M. Dallongeville. Cet artiste a 
fait également les modèles de coloriage; mais dans sa conscience 
scrupuleuse, il craignait tellement de dépasser le ton que presque 
toujours, bien loin d'exagérer la couleur, 1l restait au-dessous de 
la réalité. Cette critique à part, le travail de gravure ayant été 
exécuté avec les modèles en nature sous les yeux et en s'aidant de 
photographies préalablement obtenues, je puis dire que la repro- 
duction de la forme des ailes et de l'emplacement des nervures et 
taches diverses est irréprochable. Tutt, dans le VIII" volume de 
À Natural History of the british Lepidoptera (pages 326 à 414) 
traite fort en détail l’histoire de Rumzcia Phlæeas; en se servant 
des figures que j'ai publiées pour définir certaines variations de 
l'espèce, Tutt rend un légitime hommage à l'excellence du travail 
artistique de la XX° Livraison des Etudes d'Entomologie. Tout 
l'honneur en revient à M. Dallongeville et c'est justice que Je le lui 
attribue, puisque s'en présente l’occasion. 

Le lecteur a remarqué ce nom générique de Rwricia inventé par 
Tutt pour le seul Polyommatus Phleas. Je désapprouve absolument 
la création du genre Rwmicia, une pareille méthode, si elle se géné- 
ralisait, devrait forcément entraîner la suppression même du nom 
de genre, à cause de sa multiplicité abusive, sans raison valable, 
ainsi que je l’ai déjà exposé dans la notice consacrée à T'hecla 
W album. 

Le Polyommatus Phlæas paraît être une espèce douée d'une 
vigoureuse résistance et d’une ténacité vitale hors ligne; car elle 
s’est répandue sur presque toute la surface de l'Europe, en Asie, Jus- 
qu'au Japon, en Afrique, sur la côte méditerranéenne et jusqu'en 
Abyssinie, ainsi que dans l'Amérique du Nord. Elle paraît abon- 
dante en Angleterre; elle est commune dans toute la France et en 
Algérie. Elle fournit les plus intéressantes variations. J'en ai déjà 
rendu compte aux pages 12-14 de la XX° Livraison des Etudes 
d'Entomologie. 

Je signale ici tout d’abord la forme Huebneri, Obthr. dont le 
fond des ailes est blanc au lieu d’être noirâtre, alors que les parties 
rouge feu restent normales. J'ai traité dans le Bulletin Soc. Ent. 


100 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


France; 1005; p. 55, 56, de la question des variations albicantes 
de PAlæas et J'ai établi que les variations admises sous le même 
vocable de Schmidtiü, dans le Catalog Staudinger et Rebel, 1901, 
s'apphquaient à des variétés non seulement bien distinctes, mais 
par le fait opposées. Ainsi Fuebneri (Huebner, 736, 737) est l’in- 
verse de Schmidt, Gerhard, qui conserve la couleur noirâtre du 
fond des ailes et transforme la teinte rouge feu en blanc argenté. 
Ma collection contient actuellement 1 G' Æuebneri, de Berlin, ayant 
fait partie, Je pense, de l’ancienne collection Wiskott, et 5 C'et 1 Q 
Schmidtu, provenant d'Angleterre (', ex coll. Sheppard; &, de 
Chislehurst (juillet 1892), ex coll. J. A. Clark; ©, de Tilgate, 
extcoll Musvell) de DisnestderBerlincettde Saxe Sn 
aussi la transition entre Schmidtü, où l'or feu est remplacé par 
le blanc argenté, et la forme type rouge feu; cette variété formant 
passage a été appelée cuprinus par H. de Peyerimhoff, dans le 
Catalogue des Lépid. d'Alsace (1° Public. Colmar, 1862, p. 13). 

La teinte normale rouge feu y est remplacée par une teinte or 
jaune. 

Ma collection renferme 1 © cuprinus pris à Hyères, en avril 
1908 ; 2 G'et 2 Q d'Angleterre (ex coll Howard-Vaughan, ex 
coll. J. À. Clark (Hackney; mars 1877); ex coll Maddison); 
un © pris par mon frère, à Charroux (Vienne), en septembre 1006. 
Ce dernier PAlæas, tout en étant cuprinus, est aussi un peu /#rc1cus, 
c'est-à-dire assombri par un semis plus épais d’atomes noirs. Dans 
plus de cent PAleas anglais que j'ai sous les yeux et ayant fait 
partie des anciennes collections John Sang de Darlington, Tugw2ll, 
Howard-Vaughan, Sheppard, Briggs, Maddison, Clark, Je re- 
marque un certain nombre d'exemplaires avec une seule aile 
claire; ce sont des cas pathologiques dont il n’y a pas lieu de 
faire état. 

Tutt désigne sous le nom d’obliterata, Scudd. l'Aberration que 
j'ai représentée sous le n° 72, venant de Cancale, et il donne le 
nom de #ipunctata, Tutt, à l'Aberration n° 73, presque semblable 
au n° 72, mais plus accentuée encore dans le sens « suprà-minus- 
punctata », prise à Vernet-les-Bains. Les 2 © figurées sous les 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 101 


n*“ 72 et 73 de la XX° Livraison des Æ#udes d'Entomologie, sont 
remarquables parce que l'éclat de la couleur or feu est également 
éteint chez ces deux spécimens, qui prennent ainsi un aspect mat 
et terne très différent des PAlæas normaux; elles ont en outre le 
même dessous des ailes et dérivent du même principe de variation; 
les 2 n° 72 et 73 auraient dû porter le même nom. Autrement il 
faudrait un nom spécial à chaque papillon aberrant, puisque deux 
sujets quelconques et surtout les anormaux, sont si rarement abso- 
lument pareils entre eux. 

La véritable A. bipunctata, chez laquelle la teinte or rouge feu est 
restée naturelle et par conséquent bien différente du spécimen figuré 
sous le n° 73, dans la XX° Livraison des Etudes d'Entomologte, 
se trouve, à mon avis, être le papillon représenté sous la fig. 2 4 
de la PL 9 de l'ouvrage de Charles Barrett. TLe Lepidoptera of 
the british Islands. Je possède 2 exemplaires de cette A0. bipunctata, 
figurée par Barrett; tous les deux anglais; l’un © de la coll. Shep- 
pard; l’autre également Q de la coll. Briggs, portant l'étiquette 
(difficile à lire) : « Meek Standish habt 1896 » et le n° 1082. 
Qu'on me permette de faire observer à cette occasion combien il 
est regrettable que les papillons des collections anglaises, si géné- 
ralement dispersées, après la mort de leurs propriétaires, à la salle 
Stevens, à Londres, au hasard des enchères publiques, manquent le 
plus souvent des étiquettes détaillées indiquant la localité et la 
date de capture. La plupart du temps, les papillons anglais, 
d'ailleurs épinglés si bas et que l’on doit toujours faire préparer de 
nouveau, lorsqu'ils parviennent sur le Continent, sont dépourvus 
de toute étiquette intéressante. 

Les Ab. wnipunctata Tutt et wnpunctata, Tutt, dont je n'ai pas 
vu les dessins, me paraissent rentrer dans le même cadre que : 
obliterata et bipunctata. 

Tutt appelle remota, le Phlæas dont le O' se trouve figuré sous 
le n° 75 de la PI $ de la XX° Liv. des Etudes d'Ent. Cette Ab. 
remota, Tutt, avait été désignée par moi comme suit : «€ punctis 
nigris remotis ». Le spécimen figuré vient d'Angleterre (ex. coll. 


Howard-Vaughan). 


io2 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Tutt signale encore les Aberrations suivantes : 


1° L'Ab. parvipuncta, Strand ; elle est définie comme suit 
(p. 361) « With very small and videly separated spots in the tra- 
verse row, sometimes only indicated by indistinct points ». Je 
possède 2 G' de la coll. anglaise Briggs. 

2° L'Ab. magnipuncta, Tutt. « The black spots in the submar- 
ginal transverse row crossing the forewings much larger than usual, 
but not actually united ». Je pense que je possède 4 exemplaires 
de cette Aberration, venant de Châteaudun, Silésie, Bernstadt et 
d'Angleterre (Abbot's Wood, 1892), ex coll. J. A. Clark. 

3° L'Ab. juncta, Tutt. « The spots, forming the transverse sub- 
marginal row that crosses the forewing, large, but quadrate, 
united to each other directly, or by short dark streaks, along the 
nervures, so as to form an united zigzag band accross the fore- 
Wings. » 

4° Kochki, Strand. C'est l’Aberration que j'ai figurée sous le 
n° 74, avec la mention « szpra-radiata ». Mon exemplaire a été 
pris à Vernet-les-Bains, en juillet 1804. Je possède un autre exem- 
plaire d'Angleterre (ex coll. Briggs). Il est remarquable qu'en 
Amérique, les ?Aleas (Hypophlæas, Bdv.) aient une tendance très 
fréquente à l'Ab. Kochi (supra-radiata); ma collection renferme 
6 exemplaires Xochi provenant de Milton (Mass.), de Dorchester 
(Mass.) et de Brooklyn (N. Y.). 

s° extensa-conjuncta, Tutt. With the black spots of the trans- 
verse submarginal row on the forewings, enlarged as in Ab. ex- 
tensa, but, in addition, the 2" and 3" united to the discoidal spot. 

6° centriconjuncta, Tutt. The spots of the submarginal transverse 
series of the forewings enlarged and moved up closely to the dis- 
coïdal spot, and united directly therewith and with each other, 
forming a large and central seriated blotch accross the middle of 
the wing. 

7° fasciata, Strecker, variété de Floride (Etats-Unis). 

8 Zatomarginata, Tutt. The black outer marginal border of the 
forewings considerably extended towards the centre of the wings. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 103 


0° egroaprcata, Tutt. Having a broad black band extending all 
along the outer margin of forewings, and much intensified at the 
apex, where it runs inwards, enclosing the three black spots there 
situated. 

10° selanophlæas, Guenée et de Villiers. C'est la variété très 
noircie que Jai fait figurer sous le n° 76 de la PL 5 de la 
XX° Livraison des Etudes d'Entomologie, d'après un G, de Paris. 
Elle semble l'exagération d'Æleus. 

11° cæruleo-punctata, Stgr., variété assez fréquente chez laquelle 
les ailes inférieures sont marquées en dessus de points bleu brillant. 
Barrett figure cette variété sous le n° 2 de la PL 0. On peut la 
rencontrer dans toutes les localités, au Nord comme au Sud. 


12° oôsoleta Tutt et radiata Tutt (transitus ad obsoleta), variété 
figurée sous le n° 77 de la PI. 5 de la XX®° Livraison des Etudes 
d'Entomologie, dépourvue de la bande marginale or rouge feu des 
ailes inférieures, en dessus. Tantôt la bande or feu manque abso- 
lument (oésoleta); tantôt les nervures sont marquées d’un trait fin 
doré (radiata). Cette variété paraît être spéciale à l'Angleterre d'où 


J'en possède actuellement 8 exemplaires des deux sexes. 


Il convient encore d'observer que les PAlæas subissent surtout 
en été et principalement dans le Midi, un mélanisme à la suite 
duquel les parties rouge feu des ailes sont quelquefois très enfu- 
mées par un semis d'atomes noirs. 

Je pense qu'on peut appeler cette variété mélanienne : Æleus, 
d'après la description que Fabricius a insérée aux pages 430 et 431 
du Supplementum Entomologie systematice (Hafniæ, 1708). 
Voici comment cette description est conçue : « Æleus. 180 — 1 H. R. 
alis emarginatis fuscis : anticis utrinque disco fulvo nigropunc- 
tato, posticis fasciola fulva, subtus cinereis nigro punctatis. Habitat 
in Germania. Affinis certe H.' elle at omnino distincta. Antennæ 
fuscæ, albo annulatæ, clava oblonga nigra, apice ferruginea. Alæ 
anticæ fuscæ disco fulvo, nitido punctis majoribus nigris, subtus 
cinereæ disco fulvo punctis subocellaribus atris. Posticæ valde 
emarginatæ et fere bicaudatæ fuscæ, nitidæ fascia abbreviata, 


104 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


dentata, fulva, subtus cinereæ punctis minutis nigris strigaque pos- 
tica obsoleta fulva. » 

Eleus, selon Fabricius, habiterait en Allemagne. Quoique la 
forme mélanienne de PAlæas que nous rapportons à cet Æleus se 
rencontre surtout en Algérie et dans l'extrême sud de la France, 
elle se trouve aussi, mais plus rarement, dans les contrées plus 
boréales du Continent européen. C’est ainsi que j'ai pris à Cancale, 
au bord de la Manche, la forme Æleus aussi caractérisée qu’à Vernet- 
les-Bains, à Sebdou, en Corse ou à Digne. Je la possède d’An- 
gleterre encore bien plus nettement accentuée; c’est une GNde la 
coll. J. A. Clark, prise à New-Forest, presque entièrement noire 
en dessus; elle n’a conservé qu'une lueur d'un rouge doré près de 
la base des supérieures; en outre, j'ai trouvé dans les collections 
dont J'ai fait mention ci-dessus, quelques individus @' faisant 
une transition à Æleus et s'en rapprochant assez sensiblement. 

Stygianus, Butler (P. Z. S. of London, 1880; PL XXXIX, 
fig. 5), est assez différent d'Æleus; c'est la forme obscure du nord- 
ouest de l'Himalaya. 

Je dois observer encore que partout la génération printanière de 
Phlæas paraît distincte de la génération d'été. PAlæas-vernalis n’a 
pas de caudature aux ailes inférieures et PAlæeas-æstivus est bi- 
caudé; de plus PAlæas-vernalis a les ailes d’une couleur rouge feu 
bien plus vive et plus claire que PAleas-æstivus; celui-ci tend au 
mélanisme et devient le plus souvent Æleus. 

Il y a éncore la race #rcicus, Gerhard’ (Pl 5: Ge na 00,16) 
qui se trouve fréquemment en Grèce et à Akbès. Je considère /#r- 
cicus, comme bien intimement lié à Æleus. Mais je dois dire que 
les figures de Gerhard, grossièrement exécutées comme toutes celles 
données par cet auteur, ne cadrent pas absolument avec ce que Je 
désigne sous le nom de /wrcicus. 

Tutt signale enfin les variations du dessous des ailes auxquelles 
il donne les noms de : zfraextensa, discojuncta et infraradiata. 

La chenille dévore les diverses espèces de 7#/71ex, ce pourquoi 
Tutt a créé le genre Rwmicia. Dans l’ouest de la France, on voit 
voler le papillon depuis les premiers beaux jours d'avril jusqu’à la 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 105 


fin d'octobre; 1l paraît un peu plus tôt et finit un peu plus tard 
selon les localités. Il se pose volontiers sur le sol et sur les fleurs 
des plantes qui ne sont pas très élevées au-dessus de terre. 

Je juge inutile d'indiquer la patrie des PAlæas rangés dans ma 
collection au nombre de plus de mille exemplaires. J'ai déjà dit 
sur quelle énorme surface de la terre ce joli Polyommatus se trou- 
vait répandu. C’est une espèce dont l'extinction ne paraît pas devoir 
être prochaine. 


Polyommatus Xanthe, Fab. 


N'existe ni en Angleterre, ni en Algérie; généralement très 
commun au printemps et en été, dans les plaines de l'Europe 
continentale; habite aussi les hautes montagnes où 1l éclôt une 
seule fois par an, en juillet et août. 

Ma collection contient des exemplaires provenant de Rennes et 
Cancale; Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales); Digne; Uriage 
(Isère); Charroux (Vienne); Ozoir-la-Ferrière (Seine-et-Marne); 
forêt du Dom et Hyères (Var); Entrevaux (Basses-Alpes); Angou- 
lème; Nice; Dordogne; Lozère; Maine-et-Loire; Locarno (Suisse); 
Italie méridionale; environs de Madrid; Escorial (Espagne); 
Silésie; Halle-sur-Saale (Allemagne); Cauterets, Gèdre (Hautes- 
Pyrénées); Larche; Lanslebourg (Savoie); Chamonix; Levens et 
Madone-de-la-Fenestre (Alpes-Maritimes); prairie du Mont-Pelat 
et lac d’Allos. 


Il y a en Europe trois races principales de Xanthe. 


1° La race espagnole que j'ai appelée Bleusei. Le , au prin- 
temps, n’a pas les ailes inférieures caudées; 1l présente, sur le dessus 
de ses ailes supérieures, une large tache d'un jaune orangé vif, 
comme on le remarque sur les Q de nos plaines. Les 2 sexes, en 
été, ont les ailes caudées comme ?PAleas estival; le O' et la Q 
ont le fond des ailes supérieures en dessus, jaune et non brun. 


J'ai fait figurer sous les n°° 66, 67 et 68 de la PI. 5 dela XX° Liv. 


106 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


des Æ£/udes d'Éntomologie, le G' et la Q Bleusei-æstivalis, d'après 
des exemplaires pris à l'Escorial à la fin de juillet 1870 et le & 
de Pleuser-vernalis, d'après un exemplaire pris par moi, en avril 
1807, aux environs de Madrid, près de la route qui conduit au 
village d'El Pardo, alors que je chassais en compagnie de mes amis 
Gaston Allard, D. Laureano Perez Arcas et Serafin de Uhagon. 

2° La race des hautes altitudes, chez laquelle le fond des ailes 
supérieures est noir en dessus, pour le C', comme pour la Q:1Cette 
race alpine a été appelée Montana, Meyer-Dürr et la Q a été 
figurée, sans nom, par Bellier de la Chavignerie, dans les Awnales 
Soc. ent. France (1859; PI 5; fig. 3), d'après un exemplaire pris 
à Larche (Basses-Alpes) et que J'ai sous les yeux. Voici ce que 
Bellier dit au sujet de ce Lépidoptère (/oc. cr. p. 188, 180) : 
« Taille de ?. Eurydice. Les quatre ailes d'un brun violacé et 
brillant sans aucune apparence de taches fauves. Les points noirs 
disposés comme chez le type, mais plus petits, plus arrondis et 
paraissant à la loupe très finement cerclés de jaune. Côte des ailes 
supérieures Jaune; frange des quatre ailes d’un blanc très pur nul- 
lement entrecoupée. Dessous d’un jaune grisâtre. Les points y sont 
également plus petits et il n'y a presque pas de lunules fauves. 
Je n’ai point vu à Larche le Xanthe ordinaire. Il semble y être 
remplacé par ce type qui est rare. Il paraît en même temps qu'£wry- 
dice et habite les mêmes localités. Je n'ai pris que des Q et Je ne 
puis malheureusement parler du Œ. La connaissance des deux 
sexes motiverait peut-être pour ce Polyommate, la création d'une 
espèce nouvelle; mais dans le doute, je préfère le rapporter comme 
variété de race à notre Xax/e, en appelant toutefois sur lui l’atten- 
tion des Lépidoptéristes. » 

Le oO que Bellier ignorait en 1850, a le fond des ailes unifor- 
mément brun noir en dessus, avec des points d’un noir plus vif qui 
ressortent sur le fond très obscur des ailes et une frange d’un blanc 
très pur. 

Le Xanthe montana se trouve en Savoie, dans les Hautes et 
Basses-Alpes et les Alpes-Maritimes à partir de 1,600 à 1,800 mètres 
d'altitude. Il n’a pas de caudature aux ailes inférieures. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 107 


3° La race des plaines chez laquelle les deux sexes sont différents, 
tandis qu’en Castille et dans les Alpes, ils sont semblables entre 
eux. Mais on constate dans la race des plaines de l'Europe cen- 
trale comparée à celle de Castille et des hautes montagnes alpines, 
la particularité suivante : Le GO‘ des plaines ressemble à la © 
alpine et la Q des plaines ressemble au O' castillan. 

Voici pour le Xanthe de l'Europe centrale, la description de 
Fabricius, dans Mantissa Insectorum, Hafniæ, 1787. Glossata, Clas. 
VI, p. 81 : « 731 P. P. K. X'anthe alis subintegris fuscis nigro 
punctatis : fascia marginali fulva, subtus lutescentibus : punctis 
numerosis. Papilio Xanthe Wien. Verz. 181. 6. — Papilio Phocas, 
Esp. pap. tab. — fig. — Habitat in 7wwmice acetosa Dom. 
Schiffermyller. Minor. Alæ omnes fuscæ nigropunctatæ margi- 
neque tenuissime albo et ante marginem fasciola fulva nigro punc- 
tata. Subtus virescentes punctis numerosis ocellaribus nigris : an- 
ticis disco fulvo, posticis fasciola fulva, apice subemarginatis. 
Fœmina alis anticis supra disco fulvo nigro punctato. » 

La race Xanthe des plaines d'Europe n’a pas les ailes plus 
caudées en été qu’au printemps; il n’y a donc que la race Bleuser- 
æstivalis de l'Escorial qui offre ce caractère. 

La Q Xanthe a deux formes dans les plaines : 1° le fond des 
ailes supérieures en dessus est entièrement d’un jaune orangé vif; 
2° Je fond des ailes est obscurci par un semis plus ou moins serré 
d’atomes noirs. 

Chez nous, en Bretagne comme dans les Pyrénées-Orientales, 
comme à Digne, on trouve les deux formes Q, mais la forme à 
fond des ailes jaune orange est beaucoup plus abondante que la 
forme obscurcie. 

Esper a représenté sous la fig. 2 de la Tab. XXXV, avec le nom 
de PAocas, la Q dont le fond des ailes supérieures, en dessus, est 
orangé et sous la fig. 1, le ©, dont les ailes en dessus, sont bordées 
d’un liséré orange; mais Esper intervertit les sexes et dans son 
texte, comme sur la figure 35, il appelle O' ce qui est la Q 
et vice-versa. Huebner sous les n° 334, 335 et 336, figure avec le 
nom de Circe, le G un peu plus obscur que le G (supposé Q) 


108 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


représenté par Esper et la © dont le fond des ailes est très obscurct. 
La race obscure Q de Xanthe doit donc être distinguée de la 
race © jaune, par le nom de Cerce, secundum Huebner. Freyer 
donne, avec le même nom Czrce, sous les n°“ 3 et 4 de la Tab. 157, 
la figure des mêmes formes que Huebner a représentées, c'est-à- 
dire la Q obscurcie par le semis des atomes noirs. Lang figure très 
grossièrement, sous le nom de Dorilis, Hufnagel (PL XXI, fig. 3, 
3, 3) le O' en dessus et en dessous et la Q jaune non obscurcie de 
noir, en dessus. Gerhard (PI. 10; fig. 1 4, 1 à, 1 c) représente le C 
et la © jaune, non obscurcie, avec le nom de Xan/e et (PI ro; 
fig. 2) il figure le dessous des ailes, d’une variété Canidia, Stentz, 
venant de Dalmatie, se distinguant par la teinte verdâtre du 
dessous des ailes. « Diese Var. unterscheidet sich durch die gruen- 
liche Unterseite, sonst ist sie ganz gezeichnet wie Xanthe. » 


Xanthe offre les aberrations suivantes qu'on pourrait appeler 
régulières, puisqu'elles émanent d'une loi qui atteint les diverses 
espèces du genre Polyommatus. 


1° 7adiala. 


J'ai pris dans une prairie, en mai, tout près de l'étang des an- 
ciennes forges dites : de la Vallée, non loin de la forêt de 
Rennes, un Œ' rayonné en dessous et J'ai acquis une © de Silésie, 
également rayonnée. Je fais figurer ces deux A0. radiata sous les 
n% 332 et 333 de la PI XLIII du présent ouvrage. 

Je possède une Q de Breslau, subradiata, ayant, en dessous, 
tous les points noirs plus gros et plus allongés et formant de chaque 
côté des ailes et sur chaque aile, une série arquée de points noirs 
très prononcés. Aux ailes inférieures notamment, les 2 rangs de 
points noirs submarginaux confluent dans le sens de la longueur : 
celui qui surmonte les taches rouges intranervurales marginales se 


joignant à la rangée extracellulaire. 


2° purpureo punctata, Wheeler. 


Comme ?Alæas, Xanthe peut offrir sur le dessus de ses ailes 
inférieures, une rangée submarginale de points bleuâtres. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 109 


3° cuneifera. 


Les taches noires des ailes supérieures en dessus, peuvent se 
développer en longues larmes dont la pointe est dirigée vers la 
base des ailes. J'ai pris à Rennes, en été, une Q cuneifera et à 
Cancale un G' présentant la même variation (©, PI XLIIT, 
fig. 335). 


En outre de ces Aberrations, les ailes du dessus chez le 
peuvent être plus ou moins lisérées d’orangé; la teinte du dessous 
des ailes peut être plus ou moins vive et les taches noires plus ou 
moins développées. 


Il me reste à faire connaître les variations en sens opposé aux- 
quelles le CG Xanthe peut être soumis, aux environs de Rennes. Je 
n'ai pas remarqué dans les autres localités où J'ai recueilh Xaufke, 
la même variabilité. Il peut donc arriver à Rennes que le G' ait 
le disque des ailes supérieures assez fortement lavé de Jaune, se 
rapprochant ainsi de Bleusei et inversement que le G' ait le fond 
des ailes d’un brun noirâtre très profond, avec la frange très 
blanche, se rapprochant alors de #ontana. Toute bordure orangée, 
dans ce cas, a disparu sur le dessus des ailes. J'ai appelé la variété 
d' à fond des ailes jaunâtre : Monterfilensis, du nom du pitto- 
resque pays où je l’ai plusieurs fois capturée (PI. XLIIT; fig. 334). 
Quant à l’autre, rien ne la distingue effectivement de #ontana qui 
conserve pourtant le fond de ses ailes, en dessus, d’une teinte 


noire plus pure et un peu moins rembrunie. 


M. de Peyerimhoff, dans l’Appendice à la 1° publication du 
Catalogue des Lépidoptères d'Alsace, a décrit l'Ab. Xanthoides, 
chez laquelle les taches noires, sur le disque des ailes, sont beau- 
coup plus marquées et le fond du dessous est d'un gris mat, au 
lieu d’être d'un gris jaunâtre. La capture de Xanthoïdes fut faite 
fin de mai au Kastenwald. 


De tout ceci, il résulte que la nomenclature du Polyommatus 


Xanthe peut être établie comme suit 


110 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Xanthe, Fab. (Phocas, Esper). Plaines et montagnes de l’Europe 
centrale. 
1° forma geographica alpina : 
montana, Meyer-Dürr : S' Q supra alis totis nigris, Alpes, 
au-dessus de 1,600 mètres. 
2* forma geographica castillana : 
Bleuser, Obthr, Castille. 
vernalis, G' alis super. supra aurantiacis; | 
æstivalis ©, Q alis super. supra flavescentibus; O, © alis 
inferior. caudatis. 


Ab. 1° Q obscurior : Czrce, Huebner (335, 330). 

2° © subtus griseoviridescens : Canidia, Stentz;, Gerhard, 
Dalmatie. 

3° d' maculis nigris supra bene notatis;, subtus grisescens : 
Xanthoides, de Peyerimhoff, Alsace. 

4° d, Q subtus radiata, vel subradiata : 
radiata, Obthr. 
subradiata, Obthr. 

5° d, Q alis infer. supra punctis minutis cærulescentibus : 
purpureo punctata, WNheeler. 

6 d, Q maculis nigris alar. super. guttato-elongatis : cunei- 
fera, Obthr. 

7° Œ' alis super. supra flavescentibus : Monterflensis, Obthr. 
Env. de Rennes. 


Les exemplaires d'Asie-Mineure que je possède, ne me semblent 
pas mériter un nom spécial : orientalis Stgr. Ils ne diffèrent pas 
des exemplaires européens. Les Q orientales appartiennent tout 
simplement à la forme Czrce, Huebner. 

Le Polyommatus Xanthe est un papillon très vif, qui affectionne 
les prairies; il aime à voltiger au-dessus des fleurs des prés, sur 
lesquelles il se repose de temps en temps. Il ne s'éloigne guère des 
lieux où il est né. Partout où j'ai chassé en France, j'ai trouvé 
Xanthe; à Cauterets, il n'y éclôt sans doute qu'une fois par an, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE TI 


en Juillet; la race de Cauterets n'appartient pas à la forme #ou- 
tana; sur les flancs de la montagne du Péguère où Jje l’ai capturée, 
elle est semblable à la forme des plaines. 

Il est surprenant que X'anfhe ne se rencontre pas en Angleterre, 
alors qu'il habite vis-à-vis, sur les falaises de la côte malouine, et 
qu'il s'avance dans l'Allemagne, assez loin vers le Nord. Sans doute, 
Xanthe aura habité jadis l'Angleterre? Mais il y aura été détruit, 
comme tant d’autres espèces de Lépidoptères l'ont déjà été ou le 
seront un peu plus tard dans la grande Ile. En France, c'est encore 
une espèce très abondamment et très généralement répandue. 


Polyommatus Amphidamas, Esper. 


L'Amphidamas a été figuré par Esper, sous le n° 4 de la 
Tab. LVIIL Il a été aussi représenté par Iluebner, avec le nom 
de elle, sous les n° 331, 332 et 333. Ce n’est point une espèce de 
l'Europe occidentale; Amphidamas habite la Sibérie, la Laponie, 
la Prusse, la Saxe; cependant on l'a rencontré dans le Jura bernois 
et en France, dans le département du Doubs. Je suis redevable à 
M. François Jeunet, de Besançon, de deux exemplaires français de 
cette gracieuse petite espèce. 

La Franche-Comté qui avoisine l'Alsace est, comme cette pro- 
vince, extrêmement intéressante pour ses productions naturelles, 
notamment pour sa faune entomologique qui est fort riche; et de 
même qu'en Alsace, il y a en Franche-Comté, un assez grand nombre 
d'amis très ardents de l'Histoire naturelle. À Besançon, notamment, 
résident plusieurs Lépidoptéristes très zélés qui ont attentivement 
exploré leur pittoresque pays. Ils ont d’ailleurs le mérite d'apporter 
dans leurs recherches, une persévérance laborieuse et une sagacité 
qui ne pouvaient manquer de leur valoir le succès. MM. François 
Jeunet et René Fritsch sont au premier rang de ces chasseurs 
consciencieux qui ne reculent devant aucune fatigue, ni aucun 
effort. Ils sont fort obligeants et je leur porte une gratitude très 


sincère pour les communications utiles dont je leur suis redevable. 


112 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Le Polyommatus Helle du département du Doubs, ressemble 
tout à fait à celui du Jura bernois. Le Œ présente deux formes, 
l'une qui a le fond des ailes supérieures d’un violet à peu près 
uniforme, et l’autre qui présente sur le disque des ailes supérieures 
une éclaircie d’un rouge aurore sur laquelle se détachent très bien 
les points noirs cellulaires et la rangée courbe extracellulaire des 
petites taches intranervurales noirâtres qui transparaissent du 
dessous. Cette forme du GO‘ à disque aurore, se rapproche de la 
forme © normale. 


J'ignore si elle a été distinguée par un nom; J'ai été inhabile à 
le découvrir. Wheeler dit qu'Amphidamas est une espèce de mon- 
tagne; 4l lui donne pour localités en Suisse, la pente occidentale 
du Moléson, dans les prairies marécageuses, en juin; Villard-sur- 
Clarens; la pente des rochers de Nayes, près Caux; la vallée de 
Tinière et Villars-sur-Gryon;, Stockhornthal; Pas-de-Cheville; 
Tramelan; Hasliberg; Justisthal; Pilatus; l'Alp d'Emsig; Ober- 
Gurnigel. 


M. Frédéric de Rougemont, dans le Catalogue des Lépidoptères 
du Jura neuchâätelois, dit (p. 19) que M. Guédat trouve elle 
(Amplidamas) en grande quantité, à l'étang de la Gruyère, au 
commencement de juillet et qu'on le rencontre aussi dans tous les 
marais avoisinant Tramelan. 


Feu le chanoine Favre ne signale Awphidamas qu'au col de 
Cheville et dans les environs de la Gemmi; mais il déclare n’avoir 
jamais rencontré l'espèce dans ses chasses. Il en est ainsi pour moi; 
jamais je n'ai vu le Polyommatus Amphidamas vivant. 


Polyommatus Gordius, Sulzer. 


Dans l'ouvrage publié à Winterthur, en 1776, sous le titre : 
Dr Sulzers abgekuerste Geschichte der Insecten nach dem Linneis- 
chen System, se trouve figurée sous les n° 7 et 8 de la Tab. XVIII, 
avec le nom de Gordius, une Q dont la taille est extraordinairement 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 112 


développée. Jamais je n'ai vu un exemplaire de Gordius aussi 
grand (*). 

La description est ainsi conçue : « Gordius. Etwas gezaehnte 
rothgelbe Fluegel, mit schwarzem Saume und Flecken, die unten 
einen grauen Rand haben. Die Hinterfluegel sind unten grau, der 
hinter Rand gelb. Aus Buendten. » Cette diagnose est bien courte 
et bien abrégée; sans la figure à l'appui, elle serait lettre morte; 
mais la représentation de Gordius, donnée par Sulzer, malgré une 
coupe d'ailes inexacte, ne laisse pas de doute, quant à l'identifica- 
tion de l'espèce. Huebner a donné des figures passables sous les 
n® 343 O, 344 et 345 Q. Quant à Esper, il a copié la figure de 
l'ouvrage de Sulzer, sous les n° 34 et 3% de la Tab. XXX. 
D'ailleurs il a la probité de dire qu'il a fait un emprunt à l’ou- 
vrage de M. Sulzer (p. 327) : « Ich habe ihn aus dem Werke des 
Herrn Sulzers entlehnt. » Le dit Esper ne représente une Q vue 
par lui en nature, que sous le n°4 de la Tab. LXXVII et le ©, sous 
la fig. 4 de la Tab. XCIV. Gerhard a figuré Gordius Set ©, 
sous les n°4, 10, 1c dela PI. 0; 


Dans la XX° livraison des Etudes d'Entomologie, J'ai moi-même 
fait paraître sous les n° 78 et 70 de la PL 5, des figures très bien 
exécutées par M. Dallongeville, représentant en dessous, un C' 
subtus-fere-radiata et une © subtus-minus-punctata. Aux pages 
10 et II, j'ai écrit une notice sur diverses variations de Gordius; 
puis dans le Bulletin Soc. ent. France, 1906, p. 25 et 26, j'ai ajouté 
quelques Observations sur les variations du Polyommatus Gordius. 


(#) Gordius, père de Midas, avait un chariot dont le joug était attaché au 
timon par un nœud d'écorce de cornouiller si artistement entrelacé qu’on n’en 
- pouvait découvrir les houts. 

Un oracle avait déclaré que celui qui pourrait le délier aurait l'empire de 
l'Asie. Alexandre-le-Grand, roi de Macédoine, se trouvant en Phrygie, dans 
la ville de Gordine, ancien séjour du roi Midas, eut envie de voir le chariot 
où était attaché le nœud gordien; et, s'étant persuadé que la promesse de l’oracle 
le regardait, il fit plusieurs tentatives pour le délier; mais n'ayant pu y réussir 
et craignant que ses soldats n’en tirassent un mauvais augure, il n'importe, dit-il, 
comment on le dénoue; et l’ayant coupé avec son épée, il éluda ou accomplit 
l’oracle (Diciion. de la Fable, par Fr. Noël. Paris, An XIII-1805). 


8 


114 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


J'ai cité un Gordius Œ, à fond des ailes blanchâtre, portant l’éti- 
quette : Graubiinden, ce qui est la désignation allemande du canton 
des Grisons, en Suisse. Je fais représenter ce papillon sous le 
n° 247 de la PI XXXVIII de cet ouvrage, avec le nom : albescens. 
Il faisait, je pense, partie de la collection Wiskott. 

De plus, je constate la fréquence à Digne d’une variété à ten- 
dance définitive et se renouvelant chaque année, caractérisée par 
l'absence de points noirs en dessous; j'ai appelé cette variété 
diniensis; elle est également figurée sous le n° 245 de la 
PI XXXVIII. 

Au contraire de ce qui se passe dans les Basses-Alpes, on 
remarque aux Pyrénées la tendance du Polyommatus Gordius 
à avoir les taches noires très développées. Je fais figurer avec le 
nom de Rondoui, sous le n° 246 de la PL XXXVIII, un très bel 
exemple de rayonnement des taches noires, provenant de Gèdre 
(Hautes-Pyrénées). Je suis redevable de cet exemplaire magnifique 
à la générosité de mon ami Rondou. 

J'ai fait figurer en outre, sous le n° 248, un Gordius ©, de la 
Sierra-Nevada, que j'appelle Mevadensis et une paire de Gordius, 
pris en Sicile, dans les Monts Madonie, par Bellier, et que je désigne 
sous le nom de Bellieri (PL XXXVIII; fig. 249 et 250). 

Gordius se trouve dans le Valais; M. Fabresse l’a rapporté de 
son voyage dans l'Italie méridionale. I] a pris 2 Q au Mont Majella, 
au commencement d'août 1007. 

J'ai déjà cité dans le Bulletin Soc. ent. France, 1006, les localités 
françaises d’où j'ai pu obtenir Gordius; ce sont : Limoges; Florac; 
Pont-du-Gard; Hyères; Vernet-les-Bains; Cauterets; Gèdre; 
Digne; Larche; Uriage; Marseille et quelques points des Alpes- 
Maritimes où la race est magnifique. Gordius n'existe ni en Angle- 
terre, ni en Algérie. Je l’ai pris dès la fin de mai, à Vernet-les- 
Bains, mais exceptionnellement, à cette date précoce. L’éclosion de 
Gordius a surtout lieu en juin et juillet. C’est une très jolie espèce, 
mais que je n'ai jamais vue très abondante en individus. 

Vers l’est, Gordius modifie ses couleurs en les assombrissant ; 
il revêt alors la forme Ætere, Fabr. qui habite en Alsace les pâtu- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 115 


rages élevés des Vosges et les bois arides de la plaine (Cazal. de 
Peyerimhoff; p. 14) et dans les Vosges, à Plombières, où feu 
de Graslin l’a pris le 11 juillet. Esper a figuré Æ2ere, sous le nom 
de 2520106 (Tab. LXII ©, fig. 2; Tab LXXVIIL ©, ñg. 6). 
Le même auteur avait déjà figuré le G' avec le nom d'7:ppothoë 
var. sous le n° 5 de la Tab. XXXV. Quant à Huebner, il a bien 
figuré les deux sexes en dessus et en dessous, avec le nom de 
Lampetie, sous les n* 356, 357, 358 et 350. 


Les Q Aüiere varient pour le dessus de leurs ailes qui sont tantôt 
d'un brun uniforme en dessus, avec une simple ligne maculaire 
orangée, le long du bord des inférieures, et tantôt avec une éclaircie 
fauve orangé plus ou moins étendue sur les supérieures, dans 
l’espace cellulaire et au delà vers le bord terminal, var. z#/ermedia, 
Stefanelli. La liture maculaire, submarginale, orangée, des ailes 
inférieures est quelquefois surmontée d'une rangée d’atomes bleus. 
Quant aux ©, la variation en dessus, porte surtout sur les ailes 
inférieures qui offrent le plus souvent, près du bord costal, une 
éclaircie d’un rouge aurore plus ou moins étendue et prononcée. 
Enfin les taches noires du dessous varient beaucoup de grosseur. 


Hiere donne une variété dépourvue de points noirs en dessous, 
conforme à la Déniensis de Gordius. J'en possède une © d'Alle- 
magne. Herrich-Schaeffer a figuré, sous le n° 356, un C' de cette 
variété. Je lui ai donné le nom d'Æerrichi. Gerhard a copié la 
figure publiée par Herrich-Schaeffer; mais il l’a changée de côté. 
Son coloriage est mal réussi. Il a représenté Azere C' et Q sous 


les n° a 4,b4 et c 4 de la PI 8. 


Staudinger a donné le nom de Welibœus à la race de Grèce et 
d'Asie-Mineure. Melibœus est très commun à Akbès. IT y a une 
autre forme géographique très grande que G. S. Akulin m'a envoyée 
du Fort-Naryne, dans la province Semirechgensee, au Turkestan 
oriental. Je fais figurer la Q qui est très obscure en dessus, avec 
une bordure marginale de croissants blanchâtres aux ailes infé- 
rieures en dessus, sous le nom de Waryna (PI. XLIX; fig. 407), 


116 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 
NU Te TS SR 


Polyommatus Chryseis, Bergstraesser. 


En 1778, le professeur de Philosophie Joh. Andr. Benignus 
Bergstraesser, Recteur de l'Ecole évangélique-luthérienne-latine 
de Hanau et membre d'honneur de la Société des Amis de l'étude 
de la Nature de Berlin, entreprenait, avec l'appui et la souscription 
de plus de 250 notabilités d'Allemagne, de Hollande, de Dane- 
mark et même de Russie, la publication d’un livre qu'il intitulait : 
Nomenclatur und Beschreibung der Insecten in der Grafschaft 
Hanau-Miünzenberg wie auch der Wetterau und der angraensenden 
Nachbarschaft dies und jenseits des Mains, mit erleuchteten 
Kupfern. 

La faune du comté de Hanau, de la Vetteravie et des pays 
voisins, en deçà et au delà du Mein, est certainement riche et 
variée. De plus, à Francfort-sur-le-Mein, il y avait, à la fin du 
XVIII siècle, la célèbre collection Gerning qui renfermait une 
abondance de documents telle que, si elle existait de nos jours, 
elle se trouverait encore au premier rang. Bergstraesser, comme 
Esper, pouvait compter sur l’utile concours de Christian Gerning et 
tous les deux ont profité des trésors entomologiques qui se trou- 
vaient à leur portée et à leur disposition. Malheureusement, toutes 
les Planches de l'ouvrage de Bergstraesser ne sont pas parfaites 
et beaucoup d'espèces délicates de papillons, surtout parmi les 
Lycæna, ne sont pas spécifiquement reconnaissables; mais s'il y a 
des inégalités considérables dans la valeur des cuivres gravés, il 
est cependant possible d'identifier avec certitude un assez bon 
nombre d'espèces, surtout celles qui sont de grande taille et qui 
présentent des caractères saillants. En tout cas, l’ouvrage, dans son 
ensemble, n’est pas sans valeur, et on y peut trouver des documents 
et des renseignements utiles. 

Bergstraesser figure sur la Tab. 68, deux espèces de ces papillons 
à couleur rouge feu, que les Allemands appelaient autrefois 
gold glaensende Falter, ou feuerfarbschimmerende Tagvoegel. Les 
n® 4, 5, 6, 7, 8 sont consacrés à la représentation de C#ryses, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE ia 4 


tandis que les n° 1, 2 et 3 figurent /2ppothoë; mais qu'est-ce exac- 
tement que CArysers et Hippothoë, où plutôt laquelle des deux 
espèces doit porter le nom linnéen d’A1ppothoë? Dans les trois 
espèces de Polyommatus rouge feu de l'Europe occidentale, une 
seule espèce, Virgaureæ, Linné, ne donne pas lieu à confusion. La 
synonymie des deux autres est très embrouillée et le trouble ne 
date pas d’hier; car, dès la fin du XVIII siècle, on n'était déjà 
pas d'accord sur l'espèce à laquelle on devait appliquer le nom 
d'Aippothoë, donné par Linné, à un feuerfarbschimmerende 
Tagvogel. 

Pour essayer de voir clair dans cette partie confuse de la Nomen- 
clature entomologique, J'ai placé devant mes yeux deux 1ppothoë 
et deux CAryseis ', en dessus et en dessous, et J'ai remonté aux 
sources. 

J'ai ouvert la Fauna Suecica Caroli Linnei, Equitis aurati de 
Stella Polari; Archiatri Regu Med. et Botan. Profess. U psal. etc. 
Editio altera, auctior. Stockholmiæ 1761, et à la page 274, 
art. 1046, d'{nsecta Lepidoptera Papilio (Helicont), j'ai lu ce qui 
suit : » Papilio Hippothoë, alis integerrimis : supra fulvis imma- 
culatis, subtus cinerascentibus punctis ocellaribus numerosis. 
Habitat apud nos rarissime. Descr. Statura P. vgauree. Alx 
supra omnino fulvæ immaculatæ, subtus luteo-cinerascentes. Pri- 
mores subtus punctis nigris iride alba : 3 majoribus intra marginem 
exteriorem; 7 minoribus fere transversim positis, 6 minutissimis 
ad marginem posticum. Secundariæ subtus cinerascentes punctis 
ocellaribus circiter 17, præter fasciam ad marginem posticum 
fulvam, antice nigropunctatam. » 

Donc les ailes sont très entières; elles sont en dessus fauves 
(fulvis), immaculées; en dessous elles sont de couleur cendrée, avec 
de nombreux points ocellés. Ce premier signalement peut s’appli- 
quer aussi bien à Æippothoë qu'à CAryseis, mais il n’est complè- 
tement satisfaisant pour aucune des deux espèces en question. En 
effet. les ailes en dessus ne sont pas /#/lvis, mais rouges (7#b1dis). 
Elles ne sont pas immaculées, puisqu'il y a dans chaque espèce, aux 
ailes supérieures, en dessus, un point noir pour clore la cellule; enfin 


118 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


elles sont entourées d’une bordure noire dont Linné ne fait pas 
mention. 

Dans la description plus détaillée qui suit la diagnose, la phrase 
« subtus luteo cinerascentes » convient sans doute mieux à CAryseis 
qu'à Æippothoë; quant à la ponctuation, elle convient également 
aux deux espèces; mais les mots « præter fasciam ad marginem 
posticum fulvam, antice nigro punctatam » s'appliquent à Aippo- 
thoë, plutôt qu'à CAryseis. En effet, on remarque chez Zippothoë, 
une bande fauve, près du bord inférieur, surmontée d’une ponc- 
tuation noire, tandis que CAryseis est presque dépourvue de cette 
bande fauve (fascia fulva). 

Linné a placé son Æippothoë entre Arcania et Hero. Virgauree 
qui figure dans les Plebeÿ, est au n° 1070, très loin d’Arppothoë 
qui est colloqué dans les Æeliconu. Les Plebej: sont séparés des 
Heliconti par les Nymphales. Ce sont les ÆEquites ou Chevaliers qui 
commencent la série des Lepidoptera, avec Machaon, seul repré- 
sentant de la noblesse lépidoptérologique en Suède. 

S'il existait une figure de l’Jippothoë, de Linné, on ne serait 
pas si embarrassé. Le Suédois Charles Clerck, membre de la Société 
royale des Sciences d'Upsal, a publié à Stockholm, en 1759, 
lZcones Insectorum rariorum cum nominibus eorum trivialibus, 
locisque e C. Linnei Arch: R:et Equ: Aur: Syst: Nat : alle- 
gatis (*); mais Fippothoë n'est point compris parmi les pièces rares 


(*) On ne lira peut-être pas sans intérêt la page suivante, manuscrite en 
tête de l’exemplaire de ma Bibliothèque, qui porte en outre, en seconde page, 
cette indication : « Donné par M. le Chambellan Jenning, en 1769 ». 


« Note mise en tête de l’exemplaire qui a appartenu à M. Mariette. — Ce 
livre joint au mérite de la plus parfaite exécution celui d’une extrême rareté. 
M. Charles Clerck, Suédois et membre de l’Académie d’Vpsal, qui en est l’auteur, 
s'était réservé le soin de peindre lui-même les exemplaires qu’il se proposait 
de répandre dans le Public; mais à peine en eut-il formé le projet qu’il mourut ; 
et l’on assure qu’il n’en avait pu achever que dix, sans espérance de pouvoir 
rencontrer quelqu'un qui eût le même zèle et le même talent : à quoi il faut 
ajouter que les planches qu'avait gravées ce savant Naturaliste et qui ont servi 
à guider son pinceau, ne subsistent plus. On me la ‘du moins fait entendre. 
Un Suédois qui avait acheté des héritiers de M. Clerck le peu d'exemplaires 
qui leur restaient, étant venu à Paris en 1768, fit présent de celui-ci à 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 19 


figurées par Clerck. Pourtant Linné dit qu'il se trouve très rarement 
dans son pays et la représentation de cet Æ/2ppothoë eût été bien 
utile. 

Voyons comment les auteurs de la fin du XVII[ siècle ont 
apprécié la question. 

Tout d’abord il convient d'observer que la priorité réelle entre 
les vieux auteurs est quelquefois difficile à établir exactement. En 
effet, très souvent la date de la publication reste fort incertaine à 
quelques années près. 

Dans la 3° partie de la Recréation provenant d’une publication 
mensuelle sur les Insectes (Der monatlich-herausgegebenen Insecten 
Belustigung Dritter Theil) du peintre en miniature Roesel von 
Rosenhof continuée par Kleeman, gendre de Roesel et peintre en 
miniature comme son beau-père, on trouve sur la Tab. XXXVII 
Suppl. Classis IL. Papilionum diurnorum, la figure de la forme 
alpine de CAryseis ©, dite : Eurydice très finement représentée 
sous les fig. 6 et 7. 

Il est bien certain que le papillon figuré par Roesel est un 
Chryseis-Eurydice; mais cherchant dans ma collection à identifier 
la figure de Roesel avec quelqu'un des exemplaires d'Ewrydice qui 
y sont conservés, je dois dire que je ne possède aucun échantillon 
semblable. Les différences portent sur la tache noire cellulaire des 


ailes supérieures, en dessus, plus accentuée dans la fig. 7 de la 


Mad. Geoffrin, qui m’honore de son amitié et qui, croyant que ce livre me 
plaisait, s’en est bien voulu priver en ma faveur, et m’accorder ce nouveau 
gage de son estime et de sa bienveillance. Ce livre relié en mar. violet... doubl. 
de... a été vendu 720 à la vente de M. Camus de Limarre en 1786. » 

« J'ai acheté le présent exemplaire à Paris, en l’an 3, 4000, les assignats 
à 15 p. o/o. Signé : Huzard. » 


(II y a deux mots illisibles; j'ai dû les laisser en blanc; la signature, diffi- 
cile à déchiffrer, pourrait cependant ne pas être Huzard. Cet Huzard était un 
membre de l’Institut, possesseur d’une Bibliothèque scientifique dont quelques 
pièces sont venues entre mes mains; notamment l’ouvrage : Genera Insectorum 
Linnaei et Fabricii Iconibus illustrata a Joanne Jacobo Roemer. Vitoduri Helve- 
torum 1789, qui porte très distinctement la griffe : Huzard, de lInstitut. — 


Ch. Obthr.) 


120 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


PI XXXVII de Roesel et dans la ponctuation du dessous où se 
trouve plus fortement indiquée la série des points marginaux des 
ailes supérieures comme des inférieures, tandis que tous les points 
plus éloignés du bord terminal sont au contraire moins nombreux 
et partiellement plus absents chez l’exemplaire de Roesel que chez 
les miens. 

Dans le texte (p. 230 et 231), il y a seulement le nom allemand 
vulgaire que J'ai cité plus haut qui veut dire : brillant d’or 
(gold glaensend), ou : couleur de feu reluisant (feuerfarbschimme- 
rend). Mais en note, on lit que, d'après M. von Rottemburg, la 
figure donnée par Roesel sous les n°* 6 et 7, représente A2ppothoë, 
Linné. J'ai inutilement recherché la date de cette publication; je n’ai 
pu découvrir que la suivante : Nuernberg, den 12 september 1755; 
cette date se trouve imprimée après un avant-propos (Vorrede) 
signé de August-Johann Roesel von Rosenhof. Mais l'édition a 
certainement paru un peu plus tard, sans doute avant 1757, 
date de la X° Edition du Systema Nature, puisque Linné y fait 
mention de l'ouvrage de Roesel. 

Quoi qu'il en soit, CAryseis des montagnes, ou Æwrydice se 
trouve rapporté à Æ/ippothoë, Linné, dans l'ouvrage de Roesel, 
ce qui est évidemment une erreur; car en Suède, on ne trouve pas 
la forme alpine Æwrydice représentée par Roesel. 

J'ai déjà dit que les figures étaient magnifiquement exécutées; 
j'ajoute que le texte a été supérieurement imprimé par Johann 
Joseph Fleischmann, de Nuremberg. 

Si maintenant je cherche ce qui a été fait par Esper dont l’ou- 
vrage : Die Schmetterlinge in Abbildungen nach der Natur mit 
Beschreibungen von Eugenius Johann Christoph Esper, a paru 
à Erlangen, en 1777, je trouve sur la Tab. XXII, le Ckryseis © 
représenté sous la fig. 3, avec le nom d'Appothoë et si je me 
reporte au texte (p. 202 et 293), je lis le nom d'Æippothoë, Linné, 
attribué à ce papillon, avec copie de la description linnéenne qui 
est rapportée comme ci-dessus : alis integerrimis supra fulvis imma- 
culatis, subtus cinerascentibus, punctis ocellaribus numerosis. 

En outre, Esper reconnaît dans sa notice descriptive, qu’il a par 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE F2] 


erreur appelé Æurydice, la Q d'Aippothoë figurée sous la fig. 3 
de la Tab. XXXI; aux pages 320 et 330, il confirme pour le nom 
de cette ©, la correction qu'il juge déjà à propos d'indiquer quelques 
pages auparavant. Seulement le même Esper semble être bien mal 
fixé sur la valeur spécifique relative de Æippothoë et Chryseis, 
attendu qu'après avoir figuré comme #/ippothoë, le Chryseis , 
sur la Tab. XXII et le CAryseis Q, sur la Tab. XXXT, il figure 
comme var. d'Aippothoë, et non pas comme espèce séparée, l’Z7p- 
pothoë Dispar S et ©, représenté sous les n°” 1 a et 1 b de la 
Tab. XXXVIIT. 

Les figures sont excellentes et ce sont les premières qui repré- 
sentent le dispar anglais actuellement éteint. Pourtant Esper ne 
s'est pas rendu compte de la différence spécifique si grande qui 
existe entre son Aippothoë (Chryseis) et sa variété d'Aippothoë ! 

Cette confusion enlève de la valeur à la détermination de 
Chryseis, comme Hippothoë, secundum Linné, par Esper, et 
démontre avec quelle légèreté s'est faite parfois l'étude, la compa- 
raison et la dénomination des espèces, même chez les Anciens. 

Je reviens maintenant à Bergstraesser dont j'ai parlé au début 
de cette Notice. 

Que dit-il lui-même? Il affirme que son Æippothoë (lg. 1, 2 et 
3 de la Tab. 68) est bien celui de Linné. Il discute la question de 
façon à démontrer que sa conviction est absolue et 1l figure avec 
le nom encore nouveau à cette époque, de CAryseis, sous les n° 4, 
5 (S), 6, 7 (Q) et 8 (Ab. confluens), le Polyommatus a) qui Je 
crois devoir définitivement maintenir ce même nom. 

Moritz Balthazar Borkausen, dans Waturgeschichte der euro- 
peischen Schmetterlinge (erster Theil-Tagschmetterlinge; p. 143, 
144), admet comme valable ce que propose Bergstaesser. 

Il dit en parlant d'Ayppothoë (sic), Bergstraesser; Tab. 68; 
fig. 1, 2, 3 « Dieser Falter ist unstreitig die ware Hyppothoë des 
Ritters ». Ce papillon est incontestablement le véritable 7 yppo- 
thoë du Chevalier. 

Remarquons en passant que Bergstraesser emploie cette même 
désignation : Riter-Chevalier, pour désigner Linné, Chevalier de 


122 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


l'Etoile Polaire et la phrase de Bergstraesser (p. 43), est sensi- 
blement la même que celle de Borkausen (p. 143) : « Der Falter 
den wir hier vor uns haben, ist die ware Hippothoë des Rüitters ». 
Le papillon que nous avons devant nous, est le véritable Fzppothoë 
du Chevalier. Seulement Bergstraesser écrit correctement Æ/1#po- 
thoë, comme le Chevalier Linné l’a écrit lui-même et Borkausen 
commet une incorrection en écrivant À yppothoë. 


Les auteurs du Systematisches Verzeichniss von den Schmetter- 
lingen der Wiener Gegend (Braunschweig; 1801; II er Band) 
partagent la même opinion (p. 253). Ils admettent comme //1ppo- 
thoë, le dispar qu'Esper a figuré comme variété d’Azppothoë, sous 
les fig. 1 a et 1 à de la Tab. 38, et ils considèrent comme Crysess, 
l'Zippothoë, Esper (Tab. XXII, G''hg. 3); mais il y a plus, le 
Doct' Jo. Frid. Gmelin, dans l'édition 13° du Systema Nature 
de Linné, augmentée et corrigée (Tom. I; part. V; 1788; Lepidop- 
lera; p. 2350), distingue Cryseis et Hippothoë et les décrit 
comme suit : | 


1° « Chryseis 815. P. alis aureis : margine cærulescente, poste- 
rioribus subdentatis, subtus obscure griseis : punctis ocellaribus 
numerosis. Habitat in Austria, Zippothoæ nimis affinis, Eurydice 
Esperi. » 


2° « Aippothoë 254. P. alis integris : margine albo, subtus 
cinereis : punctis ocellaribus numerosis. Systema Nature XIL 2 p. 
703, n° 254; Fauna suecica 1046. Papilio alis integerrimis supra 
fulvis immaculatis, subtus cinerascentibus : punctis ocellaribus 
numerosis (Roesel; Tab. 37; fig. 6, 7. — Esper; T. 38; fig. w): 
Habitat in Europæ pratis. » 


Le D' Gmelin, dans la 13° édition de l’œuvre linnéenne, considère 
donc CAryseis comme valable et le décrit d'une manière qui le 
caractérise très bien et le distingue d’A/:ppothoë. Mais comment 
se fait-il que Gmelin, cependant averti, dans l’état synonymique 
qu'il dresse, confonde en une même unité spécifique, 7 1ppothoë, 
Roesel (Tab. 37; fig. 6, 7) qui est un Chyseis-Eurydice, et la 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 123 


variété d'Hippothoë, Esper (Tab. 38; fig. 1 a, 16) qui est le 
dispar anglais ? 

Ces confusions se rencontrent souvent chez les Entomologistes, 
même les plus qualifiés. Esper, comme je le remarque ci-dessus, 
est coupable d’une faute, en considérant sa variété d'Hippothoë 
(Tab. XXXVIII, fig. 14, 10) comme appartenant à la même 
unité spécifique que ses autres Æ2ppothoë qui sont des Chryseis 
MÉPEXIl otS etlTab XXI N O3): 

Cependant les erreurs qui subsistent effectivement rendent bien 
précaire la base sur laquelle les gens de bonne foi essayent d'asseoir 
la nomenclature entomologique et nul ne peut dire après tout cela 
que nous jouissons d’une certitude tout à fait satisfaisante pour 
notre esprit. Un doute reste et restera définitivement. 


Cependant, j'ai tenu à faire part des recherches longues aux- 
quelles il est nécessaire de se livrer si on veut essayer de connaitre 
la vérité, et j'ai cité plusieurs vieux livres dont il faut étudier les 
textes et comparer les Planches, si on veut connaître tous les élé- 
ments de la cause. Bibliophile par état, je n'ai pas à me plaindre 
de l’occasion qui m'est offerte de feuilleter les ouvrages des anciens 
auteurs et d'apprécier le savoir-faire des imprimeurs de l'avant- 
dernier siècle. 

La combinaison de l'Entomologie et de la Bibliophilie consti- 


tuent une double délectation pour mot. 


Après les Entomologistes du XVIIT siècle, ceux du siècle der- 
nier ont généralement adopté la nomenclature de Bergstraesser qui 
s'appuie sur des figures imparfaites, mais sûrement identifiables. 
Huebner a figuré CAryseis, sous les n° 337, 338, 355 et Euridice, 
forme alpine de CAryseis, sous les n° 339, 340, 341 et 342. 

Quant à Hippothoë, il se trouve représenté sous les n°* 352, 353 
et 354 et sa variété dis par, sous les n°° 066, 967 et 968 de l'ouvrage 
de Huebner. 

Gerhard a figuré Hippothoë et dispar sous les n° TA, 1 PAC 
et2a,2bet2c de la PL 7, Chryseis sous les n° 4a, 40 et 4c et 
la variété alpine Æwrydice, sous les n° 34, 38 et 36. De plus 


124 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


les Ab. confluens de Chryseis ont été représentées copieusement 
Sous les ne 1 2010 cn dde laps. 

Boisduval, dans l’?ndex Methodicus, 1840, adoptait la nomencla- 
ture à laquelle je crois devoir me rallier; c’est-à-dire qu’il attribuait 
à l’Æippothoë, Linné, et au CAryseis, les mêmes unités spécifiques 
que Bergstraesser fixe d'un manière certaine, au moyen des figures 
qu'il a publiées en 1778. 

Tout récemment Tutt (British Lepid. vol. VIII), à propos de 
Chrysophanus dispar, expose que déjà Wallengren a fait connaître 
dans ses Lepidoptera Scandinavie Rhopalocera, 1853, que le nom 
d'Æppothoë Linné doit se rapporter à CÆryseis, parce que CAryseis 
se trouve en Suède et que l’autre espèce n’y a pas été rencontrée. 
C'est une raison sériense. Cependant il faudrait pour que cette 
observation fût déterminante, qu’il fût démontré que Linné, en 
traitant de la Fauna Suecica, n'a eu effectivement sous les yeux 
que des animaux réellement récoltés en Suède. Or, comme les éti- 
quettes précises de localité n'étaient guère usitées, 1l y a 150 ans, 
il est fort possible qu'à des papillons effectivement capturés en 
Suède, aient été adjoints par erreur d’autres papillons de prove- 
nance étrangère. 

En écrivant ces lignes, je pense aux deux Editions de la Fauna 
Suecica et aux différences qu'il est aisé d'y remarquer. Ainsi dans 
l'Edition de 1746, Linné indique (p. 241) sous le n° 702, le Papilio 
Podalirius et dans l'Edition de 1761, il n'y a plus que le Papilio 
Machaon. Linné aura sans doute reconnu que Podalirius n'avait 
pas lieu d’être maintenu dans la Fauna Suecica. L'exemplaire de 
Podalirius qui avait été considéré comme suédois en 1746, avait 
peut-être perdu de son authenticité en 1761 et dès lors la probité 
scientifique de Linné a fait exclure le Podalirius de la nouvelle 
Edition de la Fauna Suecica. Mais 1l n’en reste pas moins la preuve 
d'une erreur commise en 1746 et reconnue en 1761. 

D'autre part Fippothoë, où du moins l'espèce que j'appelle ainsi, 
d'accord avec Bergstraesser et tant d’autres auteurs, semble avoir 
une tendance à s'éteindre en bien des lieux. Est-il téméraire de 
penser qu’elle a habité autrefois en Suède et qu’elle s’y est éteinte ? 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 125 


Je reconnais volontiers ce que cette proposition a de problématique; 
mais quelle que soit la valeur des observations de Wallengren, 
je ne me sentirais convaincu par elles, que si nous pouvions dis- 
poser encore de l'exemplaire dont Linné s’est servi pour sa descrip- 
tion, ou bien si nous avions une figure tenant lieu du spécimen 
fragile et exposé à la destruction par un si grand nombre de causes. 

La nomenclature entomologique, sans bonnes figures à l'appui 
des descriptions, est une illusion; je ne dois pas me lasser de 
proclamer cette vérité. On peut lire dans le Compte rendu des 
séances du Congrès international de Zoologie, tenu à Paris en 
1880, que non seulement le premier, j'y ai proposé la substitution 
de la nomenclature trinaire à la nomenclature binaire (p. 474), ce 
qui fut adopté par le Congrès; mais que « la plupart des descrip- 
tions sur lesquelles est basée la nomenclature actuelle étant défec- 
tueuses où insuffisantes » j'ai proposé aussi de décider (p. 472), 
qu’ « une bonne figure à l'appui d’une description est indispensable 
pour que le nom soit valable. » 

Il serait urgent de faire prévaloir cette règle qui sauverait la 
Nomenclature entomologique du Chaos où elle pourra sombrer; 
mais il faudrait pour cela, obtenir que beaucoup d'Entomologistes 
fassent sur l'Autel de la Science, le sacrifice de sentiments per- 
sonnels résultant plutôt de la vanité qui est au fond du cœur de 
tous les hommes, que de l'amour pur et désintéressé de la Vérité 
scientifique. Aussi faut-il s'armer de patience et de persévérance, 
pour ne pas cesser d'essayer de triompher officiellement du fléau 
des descriptions sans figures. Il n'en est pas moins vrai que c'est 
faute d'une figure, pour éclairer le texte linnéen, que depuis 
150 ans, les Entomologistes se demandent à quelle espèce convient 
exactement la description de l’illustre Chevalier. Aussi avec les 
erreurs des uns et des'autres, celles d'Esper et de Gmelin — erreurs 
dont seules les figures publiées permettent de se rendre compte — 
aujourd'hui, si nous voulons nous entendre à l'abri de toute confu- 
sion, nous sommes obligés de laisser pour ce qu'elle vaut la des- 
cription de Linné; il nous faut faire commencer la nomenclature, 
en ce qui concerne Æippothoë et C hryseis, à l'ouvrage de Bergs- 


126 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


traesser, à cause des figures publiées par cet auteur. En effet, 
seules ces figures fixent, sans laisser place à aucun doute, les noms 
de deux espèces assurément voisines, mais tout à fait distinctes de 
Polyommatus d'Europe, du groupe des rouge feu ou feuerfarb- 


schimmerende Tagvoegel. 


On me permettra de remettre sous les yeux du lecteur ce que 
J'écrivais en 1889 — il y a de cela 20 ans — et qui a été imprimé 
aux pages 472 et 473 du Compte rendu des Séances du Congrès 
intérnational de Zoologie de Paris. « Quiconque a cherché à déter- 
miner un être orgamisé dont il na pas encore été publié une 
figure suffisamment bien exécutée, ne parvient que bien rarement 
à sortir d'un à peu près qui est la négation même de la Science, 
puisque la Science est la Vérité et que la Vérité, tant qu’elle n’est 
pas certainement obtenue, n'existe réellement pas encore. 

Pourquoi la Vérité, dans ces conditions, ne s’obtient-elle pas 
aisément et reste-t-elle le plus souvent indécise? C’est que les des- 
criptions ne sont pas toujours différentielles; que trop souvent elles 
font un portrait non pas comparatif, mais positif; que ce portrait 
peut quelquefois s'appliquer à plusieurs êtres différents, d’autant 
plus qu'au moment où la description est écrite, l’auteur ignore les 
êtres dont la découverte reste à intervenir et auxquels sa descrip- 
tion pourrait éventuellement convenir. 

Dès lors ne faudrait-il pas baser toute description sur une 
comparaison établie avec des êtres très généralement et exactement 
connus, faire ressortir les caractères différenciant l'être qu’on décrit 
de tous ceux connus appartenant à des formes voisines, indiquer 
très exactement la provenance et ne pas se contenter de données 
vagues et générales pour l'indication de patrie; mais surtout la 
nécessité d’une bonne figure ne s’impose-t-elle pas ? 

Avec un dessin bien exécuté, tous les doutes sont levés, parce 
que toutes les proportions relatives sont indiquées dans la figure, 
plus nettement que dans aucune description. 

En Entomologie, où les êtres sont plus nombreux et les carac- 
tères différentiels souvent moins saillants, les déterminations sont 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 12 


De: 


douteuses à peu près toutes les fois qu’une bonne figure n’a pas 
été publiée. 

On peut même dire que toute certitude de détermination est 
irrémédiablement perdue, lorsque l'échantillon original est perdu 
lui-même et que l'identification cesse, par là même, d’être possible, 
à moins toutefois qu'une bonne figure n'ait été publiée. 

Les descriptions non accompagnées de figures restent absolu- 
ment livrées à l'appréciation fantaisiste de chacun, ou à une sorte 
d'accord traditionnel transmis par certaines collections, mais sans 
qu'il soit possible cependant d'obtenir aucune certitude; tandis 
que, grâce à l’Iconographie de Huebner, par exemple, le doute 
subsiste rarement sur l'identification des Insectes lépidoptères 
publiés par cet auteur. Donc supériorité indiscutable du dessin 
sur la description seule. 

J'émets le vœu, d'une part qu'il soit admis que la priorité du 
nom appartient au premier iconographe plutôt qu'au premier des- 
cripteur, opinion que je résume ainsi : Pas de bonne figure à 
lappui d'une description, pas de nom définitivement valable. » 

Ce que j'ai pensé et écrit en 1880, je le pense tout aussi bien 
en 1900, et il me semble que tout ce que j'ai exposé ci-dessus se 
trouve bien justifié par la question même de l'attribution des 
noms : /ippothoë et Chryses. 

La description linnéenne nous laisse un doute que nous sommes 
impuissants à lever; la possession de la vérité est impossible à 
obtenir avec la seule description de Linné, tandis que les figures 
de Bergstraesser nous donnent le moyen de raisonner d’après une 
base certaine et nous permettent de savoir exactement ce qu'est 
Hippothoë et ce qu'est CAryseis, tout au moins d’après Bergs- 
traesser. 

C'est donc du Polyommatus Chryseis, secundum Bergstraesser, 
qu'il va être question plus loin. 

Le Polyommatus Chryseis est une espèce de plaine et de mon- 
tagne. Elle manque en Angleterre et dans l'Ouest de la France; 
mais on la trouve assez près de Paris, dans la forêt de Compiègne 
(Oise); à Villers-Cotterets et à Samoussy (Aisne); à Morteau, 


128 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 

dans la Franche-Comté; en Auvergne (Lioran et Mont-Dore); 
dans les Hautes-Pyrénées où nous l'avons capturée à Cauterets et 
près de la chapelle Notre-Dame-d'Héas, à une petite distance de 
Gèdre; à Aix-en-Savoie; dans les Pyrénées-Orientales, où elle 
vole à la fin de juin et au commencement de juillet, dans la vallée 
d'Eyna et à l'entrée de la forêt de Randai, vers 1,500-1,600 mètres 
d'altitude. Dans toutes les localités précitées, CArysers appartient 
à la même forme. Le G' a les ailes partiellement obscurcies, prin- 
cipalement le long de la côte des supérieures et du bord anal des 
inférieures et la Q a le fond des ailes brun, avec une éclaircie d’un 
fauve orangé plus ou moins étendue sur le disque des supérieures, 
et une liture submarginale de même nuance fauve, le long du 
bord terminal des ailes inférieures. La même forme CÆrysers se 
trouve en Allemagne (Cassel) et dans l'Oberland Bernois où je 
l'ai capturée abondamment à la fin de juin 1808, notamment dans 
les prairies voisines d’Interlaken. 

À Chamounix (Haute-Savoie); à Prémolles, au-dessus de Vaul- 
naveys, près Uriage (Isère); dans les Alpes-Maritimes. aux envi- 
rons de Saint-Martin-de-Vésubie,; j'ai trouvé une forme intermé- 
diaire entre CAryseis et Eurydice, c'est-à-dire dont le GO‘ est d’un 
rouge feu beaucoup plus brillant et moins obscurci que le CAryseis 
des Pyrénées, des forêts de Picardie, et des prairies de Franche- 
Comté; mais dont la Q est encore brune et non noirâtre, et avec 
une éclaircie fauve plus ou moins développée sur les ailes supé- 
rieures et une bordure marginale fauve sur les inférieures. Il en 
est de même dans les Hautes-Alpes, à la Grave; dans les environs 
de Larche et la prairie du Mont-Pelat (Basses-Alpes); à Fusio 
(Tessin); à la Certosa di Pesio (Piémont), où, comme à Fusio, la 
forme est extrêmement grande et belle. 

Dans le Valais, depuis Zermatt et jusqu'à Ryffelalp, c'est au 
contraire la véritable forme alpine dont le G' est d’un rouge feu 
extrêmement brillant et semble étinceler dans la prairie, lorsqu'il 
est posé sur une fleur ou qu'il vole au-dessus des herbes; au con- 
traire, la Q entièrement noire n'a plus aucun vestige de fauve, en 
dessus et elle est aussi sombre que le C' est resplendissant. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 129 


Plus on s'élève à une haute altitude, en Valais, plus la forme 
Eurydice s'accentue; je l'ai vue à son maximum d’expression, au- 
tour de l'hôtel Ryffelalp et dans les prairies de Fluelen. 

Le Polyommatus Chryseis se trouve en Laponie où M. Wilhelm 
Mau a trouvé en juin et juillet 1008, à Kvickjock, Mont Sutilelma 
(Lulea-Lappmarken), une race, assez brillante, un peu moins rouge 
et généralement plus petite, me semble-t-il, que la race de l'Europe 
centrale. C’est la variété géographique Szeberi, Gerhard. Cependant 
les exemplaires de ma collection sont d’un rouge moins jaune que 
le Szeberi, figuré par Gerhard, sous les n°® 1 4 et 1 & de la PI 35 
et ils n’ont pas le thorax et l’abdomen jaune orangé, mais brun 
noirâtre. M. Neuschild a trouvé une race petite et obscure de 
Chryseis à Tlemcen, en Oranie. 

Une belle variété géographique est celle de Turquie, appelée 


candens et figurée par Gerhard sous les n° a 3, b 3 et « 3 de la 
BI. 


Chryseis présente fréquemment des exemplaires appartenant à 
l'Ab. confluens, généralement asymétriques, chez lesquels les points 
noirs du dessous des 4 ailes, le long du bord extérieur, se 
rejoignent dans le sens des nervures et forment des lignes noires 
plus ou moins épaisses. J'ai fait figurer sous les n* 80 et 81 de 
la PL 5 des Ztudes d'Entomologie, XX° livraison, deux exemplaires 
d'et © confluens. La © figurée est surtout remarquable pour la 
symétrie et l’accentuation de la confluence dont elle est atteinte. 
Le G' est asymétrique. 


Je prie le lecteur de se reporter aux pages O et 10 de la 
XX®° livraison des Etudes d'Entomologie pour quelques détails 
qu’il est inutile de répéter ici. Inversement à l'Ab. confluens, il y 
a l'Ab. subtus impunctata, dont je possède un G' du Tyrol et un 
autre G de Turin. Chez cet Æuwrydice, il reste seulement les points 
noirs cellulaires, les autres ont disparu. 

Les © Cryseis ont quelquefois, principalement dans lAltaï, 
une bordure de points bleus au dessus de la liture marginale des 
ailes inférieures. En dessus, sur les ailes supérieures, la ligne extra- 


9 


130 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


cellulaire de points noirs, chez la ©, peut disparaître ou bien être 
transformée en taches allongées ayant la forme de larmes. Les G 
Chryseis ont constamment un trait noir qui clôt l'extrémité de la 
cellule; les © Eurydice perdent souvent ce trait noir et montrent 
alors une surface or rouge feu immaculée, entourée d’une bordure 
noire que relève une frange d’un blanc pur. 

Le Polyommatus CÆryseis est un des plus jolis Rhopalocères 
de la faune européenne. 

J'ai donné le nom de ziolacea à l'Ab. CAryseis Œ prise à Cau- 
terets, en juillet 1883 et que j'ai déjà signalée précédemment. 
C'est un papillon relativement très sombre, mais d’un coloris très 
riche et très brillant. Il est figuré sous le n° 406 de la PI XLIX 
du présent ouvrage. Il semble que dans les Hautes-Pyrénées, 
Chryseis ait une tendance à être plus obscur que dans la Picardie 
et l'Est de la France. 

J'ai reçu de Silésie un @ chez qui la couleur rouge feu, en 
dessus comme en dessous, est remplacée par une teinte d’or pâle, 
tout comme dans certaines Aberrations de PAlæas; mais le fond 
des ailes conserve un reflet un peu rose assez spécial. J'ai donné 
à cette Aberration pâle, qui est très jolie, le nom de Æermat}on, 
second fils de l’Aurore. La mort d'Hermathion, dit la Fable, fut 
si sensible à la déesse Aurore, sa mère, qui ouvrait les portes du 
Jour, que ses larmes abondantes produisirent la rosée du matin. 

L'Ab. Hermathion est figurée sous le n° 473 de la PI LV. 


Polyommatus virgaureæ, Linné. 


Décrite par Linné, dans le Systema Nature, Edition X, 1757, 
à la page 484, comme suit : « Vérgaureæ, 161, P. P. alis suban- 
gulatis fulvis margine fusco, punctis atris sparsis. Habitat in 
Solidagine virgaurea Europae, Africae. Sexus alter alis omnibus 
supra fulvis immaculatis; subtus flavis : primoribus punctis 
fuscis; posticis serie punctorum albidorum. — Alter alis supra 
primoribus fulvis : maculis sparsis aîris; posticis fuscis fascia 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 131 


postica fulva dentata. Subtus primores maculis sparsis atris mar- 
gine albo ocellatis; posticæ cinerascentes punctis nigris obsoletis. » 

Linné cite comme synonymie : 1° sa Æauna Suecica, 807, 808, 
édit. 1746, où l’auteur dit que le papillon appelé vulgairement 
Butyracea vulgaris vole sur les prairies de la Westmannie; 
2HiRoesel- ab ON VIRE 6, 7, et cab XEV;: fe, 6; 
édit. 1756? Cependant l'espèce figurée par Roesel sur la 
Tab. XXXVII est Chryseis-Eurydice, ainsi que je l’ai exposé à 
l’article précédent, et l'espèce figurée par l2 même Roesel sur la 
Tab. XLV est PAlæas. Linné confond donc d’une part vrgau- 
reæ S avec Chryseis-Eurydice, et, d'autre part, vzrgaureæ Q avec 
Phlæas. Bergstraesser s'est bien rendu compte de cette méprise, et 
sa notice écrite en 1770 (Tom. III, p. 37) sur le Goldruthenfalter 
est curieuse à lire: « Der Papilio Phleas, virgaurea, und Hiÿ- 
pothoë sind bisher von den meisten Autoren verwechselt worden », 
c'est-à-dire : Les papillons PAleas, virgaurea (sic) et Hippothoë, 
ont été jusqu'ici confondus par le plus grand nombre des auteurs. 

Décidément l'étude des ouvrages anciens est fertile en ensei- 
gnements. Nous avons la preuve que Linné a fait une double 
confusion en identifiant son z#7gaureæ © au Chryseis-Eurydice, 
figuré par Roesel, et son virgaurece Q au PAlæeas, parfaitement 
représenté par le même Roesel. Les anciens auteurs manquaient-ils 
de l'attention et de l'expérience sans lesquelles il est difficile 
d'apprécier les différences spécifiques et d'établir les distinctions 
nécessaires entre des espèces voisines? Il le semblerait. Toujours 
est-il qu'en dehors des figures qui nous renseignent plus exac- 
tement, lorsqu'elles ne sont pas trop grossièrement exécutées, nous 
n'avons rien à attendre, qui soit exact et précis, des descriptions 
seules. En outre, il faut observer que souvent les anciens ont eu 
sous les yeux plusieurs espèces voisines et ne voyant pas leurs 
différences spécifiques, en ont décrit les exemplaires, pourtant 
distincts entre eux, sous un même vocable. La figure seule, quand 
elle existe, nous permet d’attribuer à l'espèce qu’elle représente un 
nom valable. Si la figure fait défaut, la description est incapable 
d'y suppléer. La légion des descripteurs sans figures compte 


132 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


encore de nos jours un effectif important. De quel chaos toujours 
plus grand ne sera-t-elle pas responsable ? 


Il est curieux de constater que Cuvier, en 1700, s'était rendu 
compte, comme Bergstraesser en 1770, des multiples erreurs 
commises par Linné dans la synonymie; aussi s’alarmait-il déjà 
du désordre devenu inévitable dans la Nomenclature entomolo- 
gique. J'ai trouvé de curieux documents à cet égard dans la Revue 
entomologique, imprimée en 1833 chez M"° veuve Silbermann, 
place Saint-Thomas, 3, à Strasbourg, et publiée par son fils, Jeune 
alors, entomologiste plein de zèle, plus tard l’un de nos plus 
éminents confrères imprimeurs et l’un des premiers typographes 
français qui ait imprimé en couleurs avec une réelle perfection. 
Mon grand-père François-Jacques Oberthür, mon premier initia- 
teur à l’entomologie, graveur et dessinateur excellent, imprimeur 
lui-même à Strasbourg et collaborateur d’'Aloys Senefelder, 
inventeur de la lithographie, a gravé quelques Planches de la 
Revue Entomologique et précisément une Planche de Coléoptères 
et d'Hyménoptères dessinée par Cuvier et se rapportant à une 
des Lettres écrites sur l’'Entomologie par cet illustre naturaliste, 
lorsqu'il n’était encore âgé que de 21 ans. Ces lettres sont rédigées 
en langue allemande et en latin; elles étaient adressées par Cuvier 
à son ami Hartmann, médecin distingué dans le Wurtemberg, et 
elles ont été communiquées à Silbermann par M. le professeur 
Duvernoy, doyen de la Faculté des Sciences de Strasbourg. Les 
lettres de Georges Cuvier, dit Silbermann, sont un monument 
historique de l’état de la Science vers la fin du XVIIT* siècle et 
montrent que dès sa jeunesse Cuvier a donné des preuves de ce 
profond talent d'observation qu'il porta plus tard dans l’étude 
des Sciences naturelles. Silbermann s’est attaché à les traduire 
d'allemand en français avec la plus grande fidélité, en laissant 
toutefois subsister les phrases latines qui y sont intercalées. Dans 
chaque lettre se trouve un certain nombre de dessins à la plume 
ou à la mine de plomb; ils sont faits avec beaucoup de soin. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 13 


Où 


Ce sont ces dessins qui furent confiés à Silbermann et que mon 
grand-père, ainsi que je le dis plus haut, reproduisit en gravure 
sur cuivre et signa comme suit : « Oberthür sculpsit Argenti- 
nensis 1833. » Selon M. Duvernoy, qui avait souvent vu dessiner 
Cuvier, ces dessins étaient tracés avec la plus étonnante rapidité. 

Dans la première lettre de Cuvier, datée de Caen, 18 novembre 
1700, et adressée à Hartmann, je copie le passage suivant, bien 
d'accord avec ce que je pense et ce que J'écris aujourd’hui, à 
Rennes, le 15 octobre 1909 : « Ce que vous me dites de l'ouvrage 
de Gmélin ne m'étonne pas et me persuade davantage qu'il est 
nécessaire de retravailler l’'Entomologie en entier. 

Depuis la mort de Linné, l’histoire naturelle n’a pas de légis- 
lateur; chacun marche à sa guise, et si cette anarchie dure encore 
longtemps, la Science deviendra un labyrinthe inextricable. Du 
reste, Linné a fait lui-même beaucoup de fautes dans la syno- 
nymie, ce qui vous sera démontré clairement dans mon mémoire 
sur les Crustacés (que j'enverrai sous peu à notre Société). J'y ai 
décrit et figuré 32 espèces et J'ai eu occasion, à la Bibliothèque 
de cette ville, d'en débrouiller assez bien la synonymie. Vous ne 
pouvez vous imaginer quelles fautes ridicules Linné a commises 
sous ce rapport. Souvent il cite la même figure pour trois ou quatre 
de ses espèces; plus souvent encore il cite trois ou quatre figures 
différentes à propos d’une seule de ses espèces (*). Fabricius a 
encore augmenté cette confusion et n’a pas même bien connu les 
noms de Linné... » 

Ce qui était vrai en 1700 l’est encore aujourd’hui. Malheureu- 
sement l'anarchie, conformément à l'expression de Cuvier, ne s’est 
pas cantonnée dans le paisible champ de l’histoire naturelle, et 
de même qu’en 1700, on pouvait redouter ses conséquences dans 
des domaines bien différents, ainsi en 1000, des signes précurseurs 
analogues font présager de semblables perturbations. Mais ainsi 


(*) Comme on l’a vu plus haut, Linné cite à tort 2 espèces différentes à 
propos de virgauree. 


134 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


qu'Engramelle, à la veille d'événements tragiques, poursuivait, 
sans se laisser arrêter par les bruits du dehors, le cours de ses 
travaux entomologiques, continuons nous-mêmes nos tranquilles 
études sur les papillons, en dehors de toutes les agitations 
humaines. 


Le Polyommatus virgaureæ est une espèce extrêmement bril- 
lante, un des plus beaux Feuerfarbschimmerende Tagvoegel qu 
existent. Contrairement à ce que dit Linné, 1l n’habite point dans 
les prairies d'Afrique, mais seulement d’une certaine partie de 
l'Europe. II manque en Angleterre, en Bretagne et généralement 
dans tout l'Ouest de la France. Ma collection contient des exem- 
plaires pris en Alsace; en Franche-Comté; à Chamounix (Haute- 
Savoie); à la Chartreuse de Prémolles (Isère); à Digne, Colmars, 
Allos, Larche, Enchastrayes et Saint-Martin-d'Entraunes (Basses- 
Alpes); au Lautaret, à la Grave et au Monetier-de-Briançon 
(Hautes-Alpes) ; dans le vallon de Vallorgues, près Saint-Dalmas 
(Alpes-Maritimes); à Gèdre et à Cauterets (Hautes-Pyrénées) ; à 
Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales); dans la Vieille-Castlle ; 
aux environs de la route du Simplon et dans la vallée de Zermatt 
(Valais); à Fusio (Tessin); à la Certosa-di-Pesio et à Grissolo 
(Piémont); à Roccaraso et Palena (Italie méridionale); en Saxe; 
en Esthonie; en Laponie; en Sibérie, dans la région du lac Baïkal 
et aux environs d’Irkust; dans les Balkans et à Mersina. 

Les variétés géographiques de vigaureæ sont nombreuses. Je 
ne connais pas la forme de la Westmannie où se trouve le type 
de l'espèce, puisque les premiers exemplaires décrits par Linné 
proviennent de cette contrée. 

Bergstraesser figure grossièrement les deux sexes de v7gaureæ 
sous les n°“ 1, 2, 3 et 4 de la PI. 65; Esper représente vz7gaureæ 
Get © sous les n°” 2 a et & de la Tab. XXII. Huebner donne 
d'assez bonnes figures sous les n° 349, 350 et 351; puis il fait 
connaître une variété que je déclare ne point avoir vue en nature, 
sous les n° 884, 885, 886 et 887. Le O' a la bordure des ailes 


inférieures fortement ponctuée et les points noirs très détachés de 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 135 


la bordure noire; la forme des ailes inférieures, chez les deux 
sexes, est plus entière et moins subcaudée; enfin la Q a un faciès 
tout à fait spécial. J'ignore d'où provient cette forme. 

Dans le Bulletin Soc. ent. France, 1005, p. 56, je signale 
l’Aberration blanche de v#rgauree Œ que j'appelle : virginalis, et 
l'AB. or jaune également G' que je désigne sous le nom de Ckryzon. 
Je fais figurer sous le n° 244 de la PL XXXVII du présent 
ouvrage l'Ab. verginalis, d'après un ©, de Silésie; et sous le 
n° 237, l'Ab. CÆryzon, d'après un O' de Francfort-sur-le-Mein. 


Les variétés géographiques de v#gaureæ sont, à ma connais- 
sance, les suivantes : 


1° Oranula, Freyer (Tab. 455; O fig. 1; © fig. 2), plus petit; 
les ailes inférieures, chez la Q, sont plus sombres; Laponie. 
Freyer dit qu'il a devant lui 5 exemplaires communiqués par 
Kretschmar, de Berlin, parmi lesquels il a choisi les plus petits 
pour les faire figurer. 


2° Zermattensis, Fallou. Les Q sont obscures; le dessus des 
quatre ailes, au lieu d’être d’un fauve orangé à reflets dorés, est 
d'un brun bronzé. Toutes les © que j'ai vues et prises à Zermatt 
sont ainsi; l'appellation spéciale est donc parfaitement justifiée. 
Je possède de Zermatt 4 © Ab. cuneifera, avec les points noirs 
des ailes supérieures allongés en forme de larmes dont la pointe 
est tournée vers la naissance des ailes. La plupart des Q Zermat- 
tensis appartiennent à l’Ab. cæruleopunctata; elles portent sur les 
ailes inférieures, en dessus, une série de points bleuâtres disposés 
parallèlement au bord marginal. Zermattensis est abondant dans 
les prairies qui entourent le village de Zermatt. 

3° Miegu, Vogel; la race est grande; aux ailes supérieures, en 
dessus, le G' a un point discoïdal et quelquefois un point cellulaire 
noir et Jusqu'à 5 points noirs extracellulaires, avec l’apex et le 
bord terminal largement noircis. Les © ont le fond des ailes, en 


dessus, doré, avec les points très gros. Vieille-Castille. 


4° Aureomicans, Heyne. Très jolie race de Mersina; les deux 
sexes sont d’une couleur or feu plus jaune et moins sombre que 


130 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


chez les autres formes; le O' a les ailes, en dessus, finement lisérées 
de noirâtre; les 4 ailes de la © ont le fond d’une même teinte 
jaune doré unie. En dessous, le G' est d’un fauve orangé uni, sans 
taches aux inférieures, avec quelques points noirs aux supérieures. 
La Q a deux points blancs aux inférieures, en dessous; je possède 
une seule paire prise en 1807, par Holtz, à Mersina, en Asie- 
Mineure. 


En Alsace, les © vzgaureæ ont le fond des ailes d’un or plus 
rouge que dans les Alpes et que dans les Pyrénées. Près de 
Vernet-les-Bains, virgaureæ vole assez abondamment dans les 
prés, au delà du village de Casteil, du côté de la vallée de Cady, 
et s'élève jusqu'à 1.800 mètres d'altitude, dans la vallée de 
Lipaudère, entre Mariailles et le Col Vert. Mon frère a pris dans 
les Pyrénées-Orientales le G' avec des points noirs extracellulaires 
très nettement marqués sur le dessus des ailes supérieures; c'est 
une transition à Mzegi. Nous avons capturé fréquemment dans le 
même pays des © très grandes et tout à fait semblables aux Q 
Miegii. Le dessous des ailes des Q vgaureæ, dans les Pyrénées- 
Orientales, est d’une teinte plus Jaune et un peu moins rouge que 
dans les Basses-Alpes. À Cauterets, comme au Vernet, les 77- 
gaureæ d' ont assez souvent une tache noire fermant la cellule des 
ailes supérieures, en dessus; nous avons trouvé au Vernet l’Ab. © 
cuneifera ; mais nous n’y avons encore jamais vu l'Ab. Q cæruleo- 
punciata. 


Le Catalog Staudinger et Rebel 1901 indique dans l'Italie 
centrale une variété Q Apennina et la définit diurior. Je ne 
connais virgaureæ de l'Italie centrale que par les récoltes de 
M. Fabresse qui chassait pour nous en ce pays, durant toute la 
belle saison 1007. J'ai sous les yeux des vgaureæ pris en Juillet 
et août à Roccaraso, par 1.300 mètres d’altitude environ, et à 
Palena, au commencement de la chaîne de montagnes de Majella. 
Roccaraso se trouve sur la ligne entre Isernia et Sulmona, à 
environ 53 kilomètres de cette dernière ville. Quant à la gare de 
Palena, elle se trouve à environ 44 kilomètres de Sulmona. Je ne 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 137 


vois point de différence entre les v#gaureæ de Roccaraso et 
Palena et ceux des Alpes françaises. 

Le même Catalog signale la variété Æstonica, Huene. Cette 
prétendue variété m'est connue par 2 O'et 2 Q que J'ai achetés à 
Staudinger. Il ne me semble pas que les caractères spéciaux de 
cette variété soient bien tangibles. La race Æs/onica me parait 
petite. La race de vérgaureæ à Chamounix et au Lautaret pourrait 
aussi bien s'appeler Æstonica que la forme d’'Estomie. Il ne me 
semble pas que le nom Æs/onica puisse être définitivement 
maintenu. 

Une race géographique superbe me paraît être celle de Fusio; 
mais j'en possède trop peu d'exemplaires pour pouvoir en disserter 


en parfaite connaissance de cause. 


Polyommatus Hippothoë, Linné. 


Très belle espèce; jadis habitant l'Angleterre où elle donnait 
la superbe variété Dispar qui était bien la perle des Lépidoptères 
anglais; actuellement encore habitant à ma connaissance les 
environs d'Uriage (Isère) où je l’ai capturée en juin 1895, quelques 
localités de la Gironde, de l'Aube, de l'Alsace, de l'Allemagne, 
de l'Italie et de la Sibérie. On m'a affirmé qu’Æ/ippothoë avait été 
rencontré en Algérie; je n'en ai pu obtenir aucune preuve. 
Autrefois une forme très grande d’Aippothoë, aussi belle que 
Dispar, mais distincte par la couleur plus grise et non bleuâtre 
du dessous de ses ailes inférieures, se trouvait dans l'Aisne, près 
Saint-Quentin. J'en avais reçu de très grands exemplaires pris 
par feu Gronier, entomologiste de Saint-Quentin. J'ai voulu savoir 
si Hippothoë vivait encore en Picardie et j'ai organisé, avec le 
dévoué et intelligent concours de M. Harold Powell, une explo- 
ration des marais de l'Aisne, en juin 1900. Le succès n’a point 
couronné nos efforts et nous croyons que le Polyommatus Hig- 
pothoë, éteint en Angleterre, se trouve également éteint aujourd’hui 
dans les marais des environs de Saint-Quentin. M. Powell a tenu 


138 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


un journal de ses chasses. J'en extrais les renseignements con- 
cernant //1ppothoë. 


« Je suis arrivé à Paris le 10 juin à 11 heures. À Paris, Je suis 
allé voir M. Henry Brown. À propos de CArysophanus dispar, 
qu'il est allé lui-même chasser à Saint-Quentin, M. Brown me dit 
qu'il y a bien peu d'espoir de trouver cette espèce désormais, 
attendu qu’elle n’a pas été vue depuis 4 ans. Sa localité était dans 
les marais de Rouvroy. M. Brown pense qu’on doit chercher une 
autre cause que les cultures, pour expliquer la disparition de dis par 
à Saint-Quentin, puisque les marais de Rouvroy sont en grande 
partie une propriété réservée pour la chasse et la pêche et non 
cultivée. On y trouve la Lifhosia muscerda, et des chenilles de 
Nonagria dans les joncs en août. 

Je me suis entendu avec M. Brown et par téléphone avec 
M. René Oberthür, pour les rejoindre samedi soir à Laon, afin 
d’aller chasser à Samoussy, dimanche, endroit connu et recom- 
mandé par M. Brown. 

Départ le soir du 10 juin pour Saint-Quentin, où je suis arrivé 
AND 30: 


11 Juin. — Temps assez beau, nuageux parfois. Vent N.-O.; 
forte brise; température fraîche, même froide. Jusqu'à 11 heures 
je me suis occupé de trouver le fils de M. Gronier, entomologiste, 
qui prenait autrefois le dispar à Saint-Quentin. 

Il y a six MM. Gronier ici. Le quatrième que j'ai visité était le 
bon, mais il n’était pas chez lui et je ne pourrai le voir avant 
8 heures demain matin. 

Aussitôt après le déjeuner je suis parti pour Rouvroy. On 
prend le train jusqu’à Remicourt et on descend ensuite le chemin 
jusqu’au canal. I] faisait beau, mais très frais. Le pays est ondulé, 
cultivé partout : blés, betteraves, quelques pâturages. Assez peu 
d'arbres. Ressemble à certaines parties de l'Angleterre et ne paraît 
_pas être bien bon, au point de vue : papillons. De tout l'après-midi 
(j'étais sur le terrain à 1 h.), je n'ai pas vu un seul papillon 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 139 


diurne, ni ape, ni brassicæ, ni l’anessa. Dans les marais, Jai 
pris une seule Pyrausta. Sur une haie d’aubépines j'ai pris une 
chenille de Porthesia similis. Elle est assez voisine de 
Chrysorrhæea. 

Les marais commencent de l’autre côté du pont et s'étendent 
en largeur jusqu'au village de Rouvroy. Le chemin les traverse 
avec des haies de chaque côté et il y a grande quantité d'affiches 
défendant l'entrée des marais, avec annonces d’avertisseurs 
chargés à plomb! Du côté droit, le marais est sous-loué à de 
nombreux petits locataires qui cultivent des légumes. I y a de 
ce côté une assez grande partie inculte que j'aurais voulu visiter, 
mais le propriétaire était absent de sa maison et je n'ai pas pu 
lui demander autorisation. Du côté gauche, le grand marais est 
inculte. Le propriétaire en a 7 hectares. Je me suis adressé à la 
maison du garde. Sa femme m’a donné le permis de circuler et 
m'a prêté un bateau plat, sans lequel je n'aurais pu aller bien loin, 
car la terre sèche est divisée en lanières séparées par des canaux 
larges qui sont envahis par des plantes aquatiques. La terre 
ferme est couverte de roseaux, joncs, saules, peupliers, orties, etc. 
Chaque année, on doit raser méthodiquement un certain nombre 
de ces lanières de terre. Il y en a où la végétation est très dense; 
d’autres sont fauchées. Je n’y ai point vu le grand Rwmex, qui 
pousse cependant autour de la maison du garde et aux bords du 
canal de la Somme, et aussi dans quelques-unes des propriétés à 
droite de la route de Rouvroy. J'ai parcouru en bateau et à terre 
une srande partie de ces marais privés; mais Je n'ai pas vu trace 
de dispar, ni même d'autre papillon. 


Je suis rentré le soir à 7 heures. Il faisait alors froid. 


12 Juin. — Pendant la matinée une pluie froide et triste n'a 
cessé de tomber. Je suis allé voir M. Henry Gronier, 07, rue Saint- 
Thomas, à 8 heures. C’est le fils de l’entomologiste décédé il y a 
deux ans. Il n’a très bien reçu. Il s'intéresse lui-même à l'ento- 
mologie et la question de dispar l'occupe spécialement. Il croit 
que dispar est éteint à Saint-Quentin. Son père, autrefois, Île 


140 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


prenait dans les marais de Rouvroy, jamais en grande abondance 
et en nombre très variable selon les années. 

Le papillon volait bien, pendant les temps chauds et orageux. 
Il se posait sur les grandes fleurs blanches des marais (Spiræa ?), 
et aussitôt posé, fermait les ailes. L’éclosion ne durait qu'une 
quinzaine de Jours, et le papillon s’abimait rapidement. 
M. Gronier père en a pris un une fois le 31 mai; mais cette date 
est exceptionnelle. Depuis bien des années le papillon diminuait 
en nombre et a fini par disparaître M. Henry Gronier me dit 
qu'il y a plus de quatre ans qu'on n’en a point vu. Son père 
employait un homme qui pendant un mois passait ses Jours dans 
les marais, chaque année, pour signaler une apparition du 
papillon. Depuis plus de deux ans avant la mort de son père, 
aucune n’a été signalée. M. Henry Gronier lui-même l’a cherché 
chaque année depuis, sans succès. De son côté, M. Gronier pense 
que le travail qu'on a fait dans les marais : cultures, coupes régu- 
lières et comblages, a détruit dispar. Autrefois on ne les cultivait 
pas et ne faisait que des coupes irrégulières. Les marais protégés 
maintenant pour la chasse, n’appartiennent que depuis deux ans 
au propriétaire actuel. Dispar devait en être disparu avant ce 
moment-là ; sinon il aurait pu se maintenir avec la protection qui 
existe seulement depuis deux ans. 

Il y a d’autres marais le long de la Somme où /ispar a été pris 
autrefois. D'après M. Gronier, il n’y en aurait plus, les marais 
ayant subi les mêmes malheurs qu'à Rouvroy. Il me conseille de 
voir les marais de Laon qui sont encore en grande partie intacts. 
Il m'a donné un mot de recommandation au propriétaire qui est 
un de ses amis. M. Gronier est en possession des notes de son 
père sur dispar et autres espèces. Il a l'intention, dit-il, d’éditer 
les notes concernant dispar cet été, et de les publier dans le 
Bulletin de la Société Entomologique, de laquelle il a l'intention 
de devenir membre. M. Henry Brown me cite Lusigny, près 
Troyes, comme localité pour d1spar. 

Je verrai ce soir M. René Oberthür et M. Brown à Laon, et 
nous pourrions faire une chasse aux marais peut-être, aussi bien 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 141 


que la chasse dans la région de Samoussy. Mais à Lusigny, ce 
ne doit pas être le grand dispar comme jadis en Angleterre. J'ai 
lieu de penser que la race y est plus petite. 

Laon est une ville perchée sur une colline très raide. Nous y 


avons passé la nuit à l'Hôtel de la Bannière. 


13 juin. — Matinée fraîche avec brouillard. Le brouillard s’est 
dissipé, mais le temps est resté couvert avec quelques éclaircies, 
et une averse vers midi et demi. Nous sommes partis en voiture 
pour Samoussy et sommes arrivés à l'auberge vers 8 heures. De 
là, M. Brown nous a conduits au Sud-Ouest, dans une prairie un 
peu marécageuse où pendant quelques moments de soleil volaent 
des CArysophanus Chryseis très frais; mais il y en avait bien peu. 
Sur le même terrain, on a pris quelques Ærebta medusa pas 
fraîches et quelques /0 globularie. Cænon. pamphilus était 
assez abondant, avec Æuclidia glyphica, et un peu plus loi, sur 
un terrain sablonneux, M. Brown a pris Syrichthus carthami frai- 
chement éclos, sur une touffe de Potentilla. M. Oberthür l’a pris 
aussi. À la lisière de la forêt, nous avons rencontré les premiers 
Argynnis Ino et Cæœnon. Arcania, suivis bientôt de Melitea 
Athalia, Dictynna et Aurelia fraîches et M. Aurinia passée, 
M. Cinxia assez rare et abimée. M. Brown nous avait annoncé 
M. Maturna à Vétat de chenille, chrysalide et papillon, et en effet 
il eut bientôt trouvé une chrysalide sur un tremble, et M. Oberthür 
une chenille adulte se préparant à se chrysalider. La chenille de 
cette espèce est très belle, jaune et noire; la chrysalide a de la 
ressemblance avec celle de A. didyma. La plante nourricière est 
le chèvrefeuille. Sur le tremble, on a trouvé des peaux de jeunes 
chenilles de Zymantria dispar avec, devant la tête de chacune, un 
relativement gros cocon oblong-ovoide d'un A'ymenopière parasite. 
Ce cocon est blanc et noir. 

Bientôt après, j'ai pris une M. Maturna papillon, et d'autres 
ont été prises ensuite sur les feuilles, au bord du bois. A7g. 770 
se trouvait ici également, surtout dans les prairies humides, vers 


le marécage. À poria cratægi très frais mais peu abondant. 


142 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Dans les prairies ont été pris : Æuchelia Jacobeæ; Nemeo. 
russula; Lycæna semiargus, icarus (les Q très bleues); Æyrastria 
argentula; Chrysophanus Chryseis (1 ©); Zygœena trifolu et 
flipendule. 

Ces prairies s'étendent le long du bois jusqu'à la ferme; mais 
arrivés là, on nous a priés de ne pas y aller, à cause des fourrages. 

Dans les allées et clairières de la forêt il y avait quelques 
Abraxas Ulmata, ressemblant beaucoup aux Pantaria du Midi, en 
plus noir; c'est-à-dire que les taches sont agrandies. Une Sesza a 
été trouvée par M. Brown sur un tas de fagots. 

Les Zimenitis et A patura, qui volent certainement 1c1, n'étaient 
pas encore éclos. S'il avait fait beau, nous aurions pu voir cepen- 
dant des individus précoces. Dans un petit fossé allant dans le 
marais, il y avait des grands Àumex de l'espèce qui nourrit d2s par. 
Mais dispar n'a pas paru. J'ai pris une WMemoria d'un vert mat 
assez foncé, dont les ailes inférieures sont anguleuses; A cidalia 
decorata et quelques autres Phalènes du marais. 

Les chenilles d’une Plusia (verte; ligne stigmatale blanche, 
ombrée de noir) étaient très abondantes, dans leurs « tentes » 
(une par tente), sur diverses plantes. I] y en avait beaucoup sur 
le framboisier. Nous avons pris des chenilles de plusieurs pha- 
lènes, y compris Aimera pennaria, la chenille d'A cronycta rumicts, 
et d’un autre Acronycta, noire, avec tubercules et poils jaune brun, 
sur framboisier. 

L'après-midi, nous avons suivi le bord du chemin de fer avant 
et après la gare. Sur les barrières, des deux côtés, poussent des 
chèvrefeuilles, et M. Brown nous a montré des chrysalides de 
M. Maturna suspendues au bois. Nous avons pris encore 2 CAryseis 
ici, et M. Brown une jolie Cucullia. Anaïtis plagiata était com- 
mune sur les barrières et les troncs d'arbres. La barrière portait 
beaucoup de fourreaux de Psyche (3 espèces au moins). La forêt, 
de ce côté, est très belle. Il y a des allées qui la traversent en ligne 
droite, et dans ces allées volent des Wemeophila plantagins. 
Malgré le temps couvert, nous avons vu et pris plusieurs mâles 
d'un même type de plantaginis à ailes inférieures Jaunes, cet 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 143 
_—— 
après-midi. Le vol est très rapide. Dans ces allées, plus tard, vole 
Limenitis populi. Nous avons vu plusieurs Bombyx rubi sans 


ouvoir les prendre. Le soir, nous sommes allés à Paris. 
P 


14 Juin. — J'ai vu M. Howard dans la matinée, relativement 
à la lutte entreprise en Amérique contre la propagation des 
Liparis chrysorrhæea et dispar, et je suis retourné à Saint-Quentin 
l'après-midi. Temps couvert pendant une bonne partie de la 
journée, avec forte averse à Paris, vers 1 heure. Assez beau à Saint- 
Quentin, le soir; mais plus froid qu'à Paris. 


15 fuin. — Je suis allé de bonne heure chez M. Gronier, ce 
matin, mais il n'était pas chez lui. Ensuite chez M. Azembre, qui 
m'a été nommé comme entomologiste. Il a une assez Jolie col- 
lection de papillons bien conservés. Il possède les Phalènes (en 
partie du moins) de la collection Constant, et beaucoup d’exotiques. 

Ses papillons d'Europe et Asie portent généralement des détails 
de localité, etc., et sont bien conservés. Il n’a que 3 CArysophanus 
dispar dans sa collection et pas un de Saint-Quentin. Ce sont des 
rutilus d'Allemagne. Il n’a jamais pris déspar ici, mais il est allé 
plusieurs fois à sa recherche. Il m'a parlé d’un autre entomologiste 
saint-quentinois, M. Passay, qui a dû prendre le dispar, dans Île 
temps, et aurait pu donner quelques renseignements. lInesthennce 
moment à son château de la Ferrière, à Capelet. 

M. Azembre m'a donné l'adresse d’une dame Veuve Desprez, 
dont le mari chassait le dispar, il y a 40 ou 50 ans. M°° Desprez 
m'a montré des cadres suspendus aux murs de son salon, et con- 
tenant en tout une quarantaine de dispar de Saint-Quentin, avec 
quelques exotiques. La couleur cuivrée de ces dispar est bien 
conservée; mais les papillons eux-mêmes n’ont pas été très bien 
préparés. Il manque des antennes dans bien des cas. Tous sont 
étalés de face, et comme M"° Desprez n’a pas voulu que je défasse 
les cadres, je n’ai pas pu voir le dessous. La taille ne me parait 
pas bien grande, guère plus que celle des 7urilus d'Allemagne. 
M, Desprez était peintre, Il chassait beaucoup le dispar dans le 


144 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 

marais de Rouvroy, à droite de la route, en allant vers Rouvroy, 
après avoir traversé le canal. Il le prenait aussi dans un marais 
de l’autre côté de Saint-Quentin; mais ce marais a été comblé et 
on a bâti dessus. 

M'* Desprez ne veut pas se défaire de ses dzspar. Elle les garde 
en souvenir de son mari. 

Le temps est resté couvert presque toute la journée. En quittant 
M Desprez, je suis allé à Rouvroy. Le plus grand propriétaire 
du côté droit est un M. de Laporte, qui reste rue du Gouver- 
nement, à Saint-Quentin. Il loue la chasse et la pêche. Justement 
le locataire, avec des amis, chassaient la poule d’eau, et le garde, 
que j'ai pu voir quelque temps après, ne pouvait pas me laisser 
pénétrer dans la propriété aujourd’hui; mais il est entendu que 
J'irai demain matin. 

Pendant 20 minutes il a plu fortement. Ensuite J'ai remonté 
le long du canal. Il y a beaucoup de grands Rumex au bord du 
sentier; mais ce n’est pas l'espèce de dispar. Au premier pont en 
amont (moulin brûlé), une route traverse les marais vers l'Est. Ici 
j'ai trouvé le vrai Rumex de dispar poussant dans les fossés; 
mais jamais trace du papillon lui-même. Il y en avait surtout 
autour d’un petit champ de tir. 

Ce qui est remarquable à Saint-Quentin, c’est le manque à peu 
près complet des Lépidoptères dans ces marais. Comme diurnes 
il n’y a rien, rien. Cependant j'ai vu des chenilles de Vazessa 
urlice. 


16 Juin. — Matinée brumeuse et froide. Je suis descendu à 
Rouvroy, à 8 heures, où j'ai rencontré le garde, et nous avons 
pénétré dans le marais. Ce marais a été aménagé par moyen de 
canaux. Aux bords des canaux, non loin de la route, le grand 
Rumex pousse, même dans l’eau; mais il n'y en a pas grande 
abondance. Plus loin, dans le marais, qui est assez boisé de peu- 
pliers, trembles et saules, il y en a davantage. Il y a quelques 
coins humides exposés au soleil où poussent de grandes valérianes, 
et c’est ici que j'espérais trouver le dispar. Il y avait aussi trois 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 145 


longues lanières de terre tourbeuse, séparées par des canaux. 
Beaucoup de fleurs, valérianes et autres, sont sur ces terres. Je suis 
resté dans le marais toute la matinée, le garde me faisant tra- 
verser les canaux en bateau. À partir de 9 heures le soleil a paru 
et il a fait chaud et lourd. Le vent venait du Nord, mais les 
arbres, au Nord, protégeaient le marais dans ses endroits décou- 
verts. En somme, les conditions atmosphériques étaient bonnes et 
la localité exacte selon les indications de M"° Desprez, et selon 
son aspect, mais il n’y avait rien, ni dispar, ni autre diurne. Seu- 
lement j'ai trouvé quelques Phalènes du marais, et encore bien 
peu. 

Le garde (c'est le fils du garde actuel, mais il est garde aussi) 
m'a dit avoir vu au mois de mai un papillon aux reflets cuivrés, 
dans le marais, mais on ne peut conclure sur ce témoignage que 
c'était dspar. Il me semble éteint. 

L'après-midi, je suis parti pour Troyes pour chercher le dzspar 
à Lusigny, où M. Brown dit qu'il est signalé. Je suis arrivé à 
Troyes à 11 heures du soir. Autour des lampes à arc de la gare 
volaient des masses de papillons blancs. Je suis allé prendre ces 
papillons blancs sur les poteaux des lampes en dehors la gare. 
On aurait dit de la neige, vu d’un peu loin. La proportion des Q 
était grande. C’est, je pense, la Salicis. Il paraît que les saules 
ont été dévorés dans la région... » 


Voilà donc le résultat négatif des recherches effectuées par 
M. Harold Powell dans la région de Saint-Quentin. J'ai reproduit 
ces notes telles que M. Powell les a rédigées chaque soir; elles ont 
un caractère de sincérité qui donne aux observations une réelle 
valeur. Je les considère comme importantes au point de vue de 
l’histoire du Polyommatus dispar, et je remplis un devoir de 
justice — devoir qui m'est d’ailleurs fort agréable — en exprimant 
à M. Powell toute ma gratitude pour son zèle scientifique. Je le 
remercie aussi d’avoir bien voulu traduire en français les notices 
publiées par M. Charles Barrett et par M. Tutt, relativement au 
Polyommatus dispar anglais, éteint lui-même en Angleterre, et 


10 


140 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


depuis longtemps. M. Harold Powell possède aussi bien la langue 
française que sa langue maternelle et sa traduction a le mérite 
d'une parfaite fidélité. 

Grâce à sa connaissance si précieuse des langues française et 
anglaise, M. Harold Powell mettra les Entomologistes français 
à même de se rendre un compte très exact de ce que les Entomo- 
logistes anglais contemporains ont écrit au sujet du plus beau 
papillon diurne de l'Angleterre, dont tout le monde regrette la 


disparition. 


Dans son Aistoire des Papillons anglais, à l’article consacré au 
Pol. dispar, Barrett s'exprime ainsi, aux pages 57, 58, 50 et 60 
du Volt 


« CHRYSOPHANUS DISPAR. — On lit dans 7%e Entomologist, 
année 1883, une histoire curieuse de la découverte de cette espèce 
en Angleterre, par H. J. Harding, le marchand d’insectes bien 
connu. Il dit : « Il y a quarante ans environ, Mr. Benjamin 
Standish (le grand-père) entendit dire que Wdispar avait été vu 
dans les marais (fens). [1 obtint un dessin du papillon, colorié 
par son père, et s’en alla aux marais. Il montra son dessin à un 
homme qui travaillait dans les marais et qui lui dit en avoir vu 
le jour même. Standish lui offrit cinq shillings pour quil le 
conduisit à l'endroit: mais l’homme refusa, en disant qu'il avait 
l'intention d'en porter lui-même une quantité d'exemplaires à 
Londres. Cependant, Standish découvrit l'endroit où travaillait 
l’homme, et il prit une belle série du papillon. 

Il ne tarda pas à être connu des habitants du marais que Îles 
papillons valaient deux shillings pièce, à Londres; deux hommes 
vinrent alors de Cambridge et s’emparèrent d'un grand nombre 
d'échantillons qu’ils emportèrent dans des boîtes à Londres, et 1ls 
vendirent chaque exemplaire six pence. J'y suis allé trois ans plus 
tard et j'y ai trouvé des chenilles. Elles paraissaient très localisées, 
plus nombreuses là où leur plante nourricière — le water-dock — 
était le plus abondant. Les chenilles étaient chassées par tout le 
monde, vieux et jeunes. Jen ai acheté deux douzaines à une vieille 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 147 


femme pour neuf pence, desquelles J'ai obtenu, par élevage, des 
spécimens très beaux que J'ai vendus un shilling chaque. 

M. Cole, à Holme Fen, en prit un grand nombre. La cour de 
sa maison était tout près de leur localité. La dernière fois que j'y 
étais, M. Cole me dit qu'il n’en avait pas vu un seul spécimen 
depuis plusieurs années. La plante nourricière était au même 
endroit en abondance, mais pas de chenilles. On les avait trop 


chassées. » 


En 1850, dans une lettre adressée à M. H. T. Stainton (qui a 
été publiée dans 7%e Intelligencer de cette année-là), le 


Rev EN CR Jenkins dit: 


« Je vais vous faire un récit de ce qui est arrivé à ma connais- 
sance personnelle, relativement à ce bel insecte, qui était, 1l y a 
environ trente ans, tellement abondant dans les marais non 
exploités autour de Whittlesea Mere, que je ne m'attendais Jamais 
à apprendre qu'il avait été totalement exterminé. Je n'oublierai 
jamais son éclat brillant au soleil pendant le vol, et le voir posé 
sur la fleur de l'Eupatorium cannabinum, montrant le dessous de 
ses ailes, était une chose inoubliable. J'en ai pris seize, une fois, 
dans l’espace d'une demi-heure environ, dans un endroit spécial, 
où la plante sus-nommée était très abondante; mais ils étaient 
difficiles à trouver quand le soleil n'était pas très brillant. Dans 
ce temps-là, la chenille était inconnue, et Jj'attribue la disparition 
du papillon à la découverte de la chenille, aux attaques incessantes 
des collectionneurs et à la destruction par le feu de la végétation 
basse des marais, qui est pratiquée en temps sec quand on doit 


les exploiter. » 


Cette lettre fut suivie une semaine plus tard par une autre de 


M. J. W. Douglas, dans laquelle il dit : 


« Je crois que l'extinction du papillon n’est due ni aux collec- 
tionneurs, ni à l’incinération de la végétation basse, Jusqu'à une 
certaine date, que je ne connais pas au juste, mais il doit y avoir 
quatorze ou quinze ans, l'espèce avait survécu à toutes les influences 


148 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


contraires et n'était pas du tout rare, puisqu'on pouvait en acheter 
presque n'importe quelle quantité chez les marchands de Londres. 

Mais subitement advint une inondation au moment où l’insecte 
était à l’état de larve; toute la génération fut noyée et, à la suite, 
il ne resta pas un seul spécimen pour réjouir les yeux d’un collec- 
tionneur. J'ai fait un pèlerinage à Whittlesea Mere en 1841, exprès 
pour voir le bel insecte vivant, mais il a plu chaque jour pendant 
la semaine que J'y étais, et je n’ai vu qu'un seul spécimen, qui osa 
ouvrir ses ailes pendant un rayon de soleil passager. » 


Ces notices, écrites par des Entomologistes qui ont eu une 
connaissance personnelle de l’insecte, paraissent bien mériter d’être 
conservées, ainsi qu'une notice sur ses habitudes par M. Frederick 
Bond, citée par M. Stainton dans son Manual of British Butterfhes 
and Moths comme :l suit : 


« Tout ce que je puis vous dire de leurs habitudes est ceci : 
qu'ils étaient très actifs et timides, ne volant que lorsque le soleil 
brillait. Ils se posaient toujours sur un chardon fleuri quand ils 
pouvaient en trouver un, s’envolant pour attaquer n'importe quel 
insecte qui pouvait passer près d’eux, mais ne retournant pas tou- 
jours au même endroit, s'en allant généralement prendre place 
ailleurs. Si on les manquait du premier coup de filet, il était très 
peu utile de les suivre, car ils s’en allaient comme le vent et 
n'offraient que rarement une deuxième occasion de les prendre; 
ils étaient en vérité peu commodes à suivre parce que c'était assez 
difficile de les tenir en vue et en même temps d'éviter les endroits 


marécageux. » 


M. C. W. Dale, dans son History of British Butterflies, cite 
un récit que M. Haworth fit au Rev. W. T. Bree et qui parut dans 
Londons Natural History, en 1834 (que je n'ai pu consulter), 
disant qu’à la suite d’une saison pendant laquelle l’Espèce avait 
été prise en abondance, il arriva que l'hiver suivant fut très plu- 
vieux, et le terrain où les cuivrés avaient été trouvés fut complè- 
tement et entièrement inondé, et resta sous l’eau pendant un temps 
considérable. Les Entomologistes jugèrent que l'inondation 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 149 


détruirait sûrement les czivrés et que la race disparaîtrait dans 
ce coin du pays. L'été suivant, cependant, les papillons furent 
retrouvés exactement au même endroit, et en aussi grand nombre 
qu'auparavant. 

Ensuite ce terrain fut soumis à l’action du feu; toute la surface 
fut brûlée en vue d'améliorations agricoles. Après cette opération 
on ne trouva plus les cuivrés dans cette localité particulière. » 

Donc, les opinions diffèrent quant à la cause de destruction, 
mais aucun doute ne paraît exister que, soit avant, soit aux 
environs de l’année 1851, quand le Whittlesea Mere fut définiti- 
vement drainé, cet insecte disparut de chez nous. 

Les seules localités bien connues semblent être Whittlesea Mere, 
Vaxley Fen et Holme Fen dans le Cambridgeshire et le 
Huntingdonshire. M. Dale raconte que M. Haworth prit cinquante 
exemplaires en un seul jour, en 1827, à Bardolph Fen, Norfolk, 
et que quelques-uns furent pris à Benacre, Suffolk. Il ajoute que 
les dernières captures paraissent être de cinq exemplaires à Holme 
Fen en 1847 ou 1848. Le papillon habitait autrefois, en toute 
probabilité, bien des parties des marais, non drainés alors, qui 
s'étendaient depuis le Huntingdonshire jusqu'au Lincolshire, et 1l 
est tout Juste possible qu'au moment de la destruction des derniers 
repaires de l'espèce, quelques individus se soient répandus dans 
le pays, maintenant ainsi l'espèce pendant quelques années, dans 
des endroits favorables. En 1856, Richard Weaver déclara qu'un 
male et une femelle avaient été capturés l’année précédente, en 
Staffordshire; en 1857, M. W. D. Crotch annonça la capture d’un 
exemplaire en Somersetshire; et, en 1860, le Rev. Joseph Green 
enregistra une capture en Suffolk. 

De plus, il est dit qu’en 1865, un spécimen qu'on déclara avoir 
été ramassé sur des laiches à Slapton Lea, fut exhibé à l’Exeter 
Naturalists Club. 

Quoi qu’il en soit, 1l n’y a pas lieu de croire que l'espèce existe 
encore quelque part chez nous. 

Il y a une série magnifique dans la collection du Musée de 
Cambridge; et d’autres belles séries, comprenant des exemplaires 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


va 
© 


d'élevage, se trouvent dans les collections de feu MM. H. Dou- 
bleday, F. Bond et J. C. Dale, et dans toutes les primer 
pales collections appartenant aux Entomologistes vivants. Quoi- 
qu'éteinte, l'espèce est toujours considérée comme étant un des 
plus riches bijoux de la faune britannique. » 


Mais les Entomologistes anglais n’ont pas abandonné l'espoir 
de voir ressusciter le Polyommatus dispar dans leur pays, et la 
note reproduite ci-dessous et parue dans « 74e Entomologists 
Record, Vol. XXI, p. 154 », sous la signature de M. G. H. Verrall, 
F. E.S. indique les efforts déjà faits et invite les Entomologistes 
anglais à être discrets dans la récolte éventuellement possible du 
nouvel Æippothoë dont l’acclimatation a été essayée : 


« Comme il n’y a aucun exemple prouvé de l'existence de cette 
espèce en Grande-Bretagne depuis 1848, je ne pense pas que l’on 
puisse m’accuser d'agir d’une façon non-scientifique en tentant de 
la réintroduire au moyen de sujets continentaux. 

En conséquence, avec la bienveillante assistance de M. J. W. 
Tutt, j'ai mis en liberté de nombreuses larves de la forme 7##lus 
à Wicken Fen, et je demande à tous les Entomologistes leur 
concours pour empêcher la capture d'exemplaires pendant quelques 
années, afin de se rendre compte si cette belle espèce peut être 
établie de nouveau. D’autre part, il sera intéressant de voir si, 
dans le courant de quelques générations, une reversion vers la 
forme britannique ancienne pourrait se produire. 

J'apprends qu’on essaye aussi d'introduire l’autre « dispar » 
(Lymantria) au même endroit, de sorte que les captures que l’on 
pourra faire de cette espèce resteront également sans valeur, au 
point de vue de la faune britannique. » 


Ainsi que je l’expose à la page 8 de la XX° livraison des 
Etudes dEntomologie, ma collection contient quelques exem- 
plaires anglais et picards du large Copper, actuellement éteint 
aussi bien en Angleterre qu'en Picardie. Je fais figurer sous les 
n® 328 et 320 de la PI. XLIII de cet ouvrage un O' et une Q 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 151 


dispar, pris jadis à Saint-Quentin, et sous les n° 330 et 331, une 
paire provenant d'Angleterre. J'ai acquis dernièrement quelques 
dispar qui furent vendus à Londres, notamment une belle paire 
faisant partie de la collection de feu J. A. Clark. La première 
portion de cette collection Clark a été dispersée aux enchères 
publiques, les 2 et 3 novembre 1909. Dans cette partie, se trou- 
vaient, sous les n° 00, 91, 02, 03, 94, 05, 06, 07 et 08, O dispar 
qui furent adjugés un par un, chaque exemplaire formant un lot. 
À ma connaissance, deux échantillons O' et Q furent vendus 
comme suit : 1° « À magnificent specimen, very large and rich 
colour Œ » (lot o1) atteignit le prix de 11 livres 10 shillings, ce 
qui fait, avec les frais divers s’élevant à 10 %, à peu près 
316 francs; 2° « À magnificent specimen and very large Q » 
(lot 95) arriva seulement à 6 livres 10 shillings, soit, avec les frais, 
178 fr. 75. D'ailleurs, les papillons anglais « now extinct » ou 
aberrants atteignent souvent des prix très élevés en vente publique, 
alors que les boîtes contenant des quantités d'exemplaires en état 
d'excellente conservation, appartenant à des espèces même rares, 
mais existant encore en Grande-Bretagne et ne présentant pas 
d'anomalie sérieuse, sont adjugés à des prix quelquefois infimes. 

Quoi qu'il en soit, j'ai réussi à réunir Jusqu'ici 17 dis par 
anglais, et c’est avec ces éléments de comparaison que Je puis 
établir les caractères distinctifs de cette race vraiment merveilleuse. 
La taille des spécimens anglais est généralement grande. Les Q 
sont, en dessus, d’un rouge métallique mat, très chaud et plus 
foncé que dans les autres races; les points noirs discoïdaux et la 
bordure noire des ailes sont très accentués; la frange est blanche, 
courte, mais bien serrée et très apparente. Les © sont d'un rouge 
un peu fauve avec les points noirs plus gros que dans les autres 
formes géographiques de l'Espèce; mais ce qui est très particulier, 
c'est la teinte gris bleu du dessous des ailes inférieures, du bord 
des supérieures, du thorax, des pattes et de l'abdomen; cette teinte 
bleuâtre reste caractéristique du dispar anglais. Les points noirs, 
dans les deux sexes, sont gros, en dessous, et agréablement cerclés 
de blanchâtre. 


152 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Les dispar de Saint-Quentin, dont ma collection et celle de feu 
Bellier contenaient ensemble six exemplaires envoyés jadis par 
feu Gronier, sont aussi grands que les dispar anglais; mais la 
teinte rouge feu du dessus des ailes des d'est moins vive et plus 
claire; les points noirs, sur le dessus des ailes supérieures de la ©, 
sont moins gros, et surtout le dessous des ailes inférieures est 
plus gris et non bleuâtre, comme chez les dispar anglais. J'ai sous 
les yeux de très beaux Æippothoë (rutilus) de l'Allemagne du 
Nord (Berlin, Magdebourg, etc.); on peut dire que la race éteinte 
de Picardie est intermédiaire entre la race détruite d'Angleterre 
et les plus beaux spécimens du Nord de la Germanie. En Alsace, 
en Dauphiné, dans la Gironde, Hippothoë est relativement plus 
petit que dans l’Allemagne du Nord, tandis qu'en Dalmatie, 
Hippothoë paraît être plus grand et bien vivement coloré, se 
rapprochant de l’ancienne forme picarde et de la race germanique 
actuelle. 

En France, Hippothoë éclôt deux fois par an, au printemps et 
en été. M. Charles Rothschild essaya, il y a quelques années, 
d’ensemencer de nouveau Hippothoë en Angleterre, agissant avec 
le même sentiment et animé des mêmes intentions que M. Verrall 
réalisa plus tard, comme on l’a vu ci-dessus. L’excellent docteur 
Macker, de Colmar, eut l’obligeance de me procurer une Q vivante 
qu'il prit en août et que j'envoyai à M. Charles Rothschild, 
amateur très passionné de la faune lépidoptérologique anglaise. 
Malheureusement, la première tentative d’acclimatation d'Æ:pp0- 
thoë en Angleterre ne réussit pas. 

J'ai publié sous le n° 69 de la PI. 5 de la XX* livraison des 
Etudes d'Entomologie la figure d’une belle Aberration 7adiata 
d'Hippothoë Œ. John Curtis, dans son bel ouvrage : British 
Entomology,; being illustrations and descriptions of the genera 
of Insects found in Great Britain and Ireland; Lepidoptera, à 
publié sur la PI. 116-12, de très belles figures de Zycæna dis par 
(the large Copper Butterfly). L'auteur anglais donne des détails 
intéressants sur ce joyau magnifique de la Lépidoptérologie bri- 
tannique et cite notamment les remarques suivantes sur les pre- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 15 


(SS 


miers états, communiquées par M. Henderson, of Milton 

« Messrs. Whybray and Wood found the caterpillars in May 
and June 1826. Mr. Wood says that they are found in the greatest 
plenty the first three weeks of June, about which time they change 
to Chrysalides, and remain in that state about three weeks : it 
is supposed that the eggs remain through the winter, and are 
probably hatched about the latter end of May. The capillar feeds 
on the Rumex aguaticus, and other docks found in the fens, and 
the chrysalis is attached to the back of the leaf-stalk near the 
bottom. » 

John Curtis ajoute quelques renseignements; Je les traduis 
comme suit : « Ce splendide papillon a été découvert dans le 
pays de Galles (Wabs) par le célèbre botaniste Hudson. Le 
docteur Skrimshire le captura, pendant plusieurs années, dans le 
marais Bardolph, en Norfolk. Ces dernières années, 1l apparut en 
orande abondance à Whittlesea Mere, dans le Huntingdonshire, 
où on le trouvait du 25 juin au 10 août. Au commencement de 
juillet, la chenille, la chrysalide et le papillon ont été trouvés 
vivants, le même Jour. » 

Curtis ne dit pas que l’Espèce soit disparue; mais Je crois que 
la 1° édition de son ouvrage date de 1823 à 1840, époque où le 
dispar n'était pas encore éteint; c’est du moins Guenée qui fournit 
ce renseignement de date bibliographique. [L'’exemplaire de 
l'ouvrage de Curtis qui existe dans ma bibliothèque n’est précédé 
d'aucun avertissement ni d'aucune préface. Il porte la mention 
éditoriale : Lovell Reeve & C°, Henrietta Street, Covent Garden; 
1862. J'ai lieu de croire que c'est une réédition de l'ouvrage de 
Curtis. Pourtant, contrairement à l’usage, le titre est dépourvu de 
toute autre indication capable de renseigner le lecteur. 

Les chenilles, les plantes et les papillons sont admirablement 
gravés dans cet ouvrage de Curtis; le coloriage et l’impression du 
texte, dans l'édition que je possède, sont excellents; mais ce n’est 
évidemment pas, vu la date 1862, l’édition originale. 

Guenée avait été favorisé par son ami Doubleday d’une très 
importante documentation sur la faune des Lépidopteres anglais, 


154 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


et 1l avait notamment recu de M. Doubleday 4 dispar; Guenée 
les a pourvus de l'indication suivante, qui a dû être écrite vers 
1860 : « Nord de l'Angleterre; 1l paraît que cette superbe variété 
a progressivement disparu d'Angleterre. » 

Il y avait 5 exemplaires dans la collection Boisduval et ils sont 
magnifiques. Chacun porte à son épingle une étiquette sur laquelle 
on lit : « Hope, 1820 ». Le papier est vieux et l’encre est Jaume 
par le temps. On peut voir dans l’/cones une excellente figuration 
de dispar anglais, sous les n° 1, 2 et 3 de la PI. 10. Boisduval a 
parfaitement observé le caractère des ailes inférieures, en dessous, 
car 1l remarque (p. 44) « que le dessous des inférieures est d’un 
gris blanc lavé de bleu ». Duponchel a donné de bonnes figures 
du dispar, sous les n°2 "et 416); 5'et 6 (0)de Ja PISTE 
Supplément. I n'y avait pas de dispar anglais dans la collection 
Bellier ; il existait une seule © avec la mention : « Donnée par 
Pierret », dans la collection de Graslin. Sans doute Pierret a 
possédé une superbe série de dispar anglais; mais qu'ont-ils pu 
devenir et en quelles mains sont-ils passés? Feu Depuiset a 
revendu en détail la collection Pierret qu'il avait achetée en bloc, 
et il m'a souvent dit que cette opération fut le commencement de 
sa fortune. Il la fit d’ailleurs très honorablement, joignant au 
mérite d’un fin connaisseur celui d’avoir toujours été d’une labo- 
rieuse activité et d’une parfaite loyauté. 

C'est à Depuiset que je suis redevable de la collection des dessins 
originaux de l’/cones. Depuiset eut la bonté de me les offrir en 
amical souvenir. Les peintures de dispar, dues au pinceau de 
Dumesnil, y sont de véritables chefs-d'œuvre; les papillons, en 
dessus, sont coloriés d’un seul côté; il incombait au graveur et 
au coloriste de reproduire le côté manquant, conforme au côté 
achevé. 

Cette méthode était basée sur la conviction que les deux côtés 
de tous les papillons sont rigoureusement symétriques. Cela est 
exact pour certains groupes; mais J'ai déjà fait observer, au cours 
de mes précédents travaux, que pas un seul exemplaire de 
Cydimon, Urania, Chrysiridia, etc, n’a les deux côtés des ailes 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE I 


UT 
UT 


symétriques. L'aspect général n'indique pas de différence saillante 
entre les deux côtés; pourtant la disposition des taches est tout 
autre. Le peintre E. Blanchard, travaillant comme Dumesnil, ne 
s’est pas rendu compte que l’Urania Ripheus est asymétrique; et, 
dans la Faune entomologique de Madagascar, par Boisduval 
(Paris, 1833), dont je possède aussi les peintures originales, un 
seul côté du magnifique papillon Ripheus ayant été figuré en 
couleur, le graveur, contrairement à la réalité, a représenté les deux 
côtés des ailes absolument pareils. Cela ne s’est pourtant jamais 
vu. Îl est étonnant que le peintre, obligé d'observer de si près tous 
les détails, pour les représenter sur le papier, ne se soit pas rendu 
compte de cette particularité. Je n'ai pas vu que Guenée, généra- 
lement si méticuleux et observateur si attentif des petites choses, 
ait remarqué cette intéressante bizarrerie. Du moins J'ai été inhabile 
à en trouver la mention dans le tome I des l/ranides et Phalénites, 


Species général des Lépidoptères, IX; Paris, édit. Roret, 1857. 


Lycæna boetica, Linné. 


Charmante espèce répandue dans l'Australie; le Japon, la 
Chine; l'Inde; à Madagascar; aux Comores; en Abyssinie; à l’île 
Bourbon ; à Zanzibar; à Natal; au Sénégal; en Algérie (Lambèze, 
Bône, Djurjura, Biskra, Laghouat, Blida, Sebdou); en Italie 
(Castellamare-di-Stabia) ; en Espagne (Grenade, Sierra de Alfakar, 
Sierra de Ronda, Vittoria, Alsasua, Barcelone); en France (Au- 
vergne, Vichy, Chartres, Gavarnie, Pyrénées-Orientales, Basses- 
Alpes, Marseille, Charroux, Rennes, Cancale, Var, Alpes-Mari- 
times), et en Valais. On rencontre occasionnellement boefica en 
Angleterre, le premier exemplaire observé dans la grande Ile fut 
pris en 1850, à Brighton. 

L'Espèce est variable; les sont en dessus, d’un bleu lilas plus 
ou moins clair ou foncé, transparent ou opaque; avec la bordure 
brunâtre des ailes amincie ou élargie; la tache marginale ocellée 
qui est en dehors de la petite queue, est entourée d'une auréole 


156 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


aurore, plus ou moins visible. En dessous, les dessins d’un blond 
doré sont plus ou moins confluents et les deux ocelles noirs, de 
chaque côté de la queue, sont surmontés d’un arc orangé et sou- 
lignés d’atomes bleu ou vert d’or d’une accentuation très variée. 
Il y a deux types de © et tous les passages entre les deux formes 
extrêmes existent : d’abord la forme qui, chez nous, est plus ordi- 
naire, elle a le fond des ailes brun, avec la base saupoudrée d’un 
semis d’atomes bleus s'étendant jusqu'au delà du milieu; puis 
l’autre forme dont les ailes inférieures sont traversées, du bord 
costal aux approches du bord anal, par une bande maculaire 
blanche quelquefois très nette : albovittata, Obthr. Les taches 
ocellées marginales, intranervurales sont aussi plus ou moins 
accentuées aux ailes inférieures. En dessous, les linéaments et taches 
blond doré des Q sont agréablement mélangées de blanc. La taille 
est aussi très différente; il y a des exemplaires très grands; 
d’autres très petits. Il ne paraît pas qu'il y ait de variétés géogra- 
phiques, malgré la diversité des pays habités par la Lycæna boctica. 
Je n'ai cité dans l'indication des localités ci-dessus relatées que les 
contrées d’où proviennent les exemplaires de ma collection; mais 
Je ne doute point que la Zycæna boctica n'habite presque toute la 
France, notamment le Centre et l'Ouest, étant cependant plus rare 
dans le Nord et l'Est. 

La Zycœna boetica vole en juillet et août dans les Pyrénées- 
Orientales; en mai et juin en Algérie; en août, septembre, octobre et 
même commencement de novembre, à Rennes. Je l'ai trouvée à Can- 
cale, en août; la chenille, aux bords de la mer de la Manche, doit 
vivre sur les genêts et les ajoncs; dans les jardins, elle affectionne le 
baguenaudier. Je crois que la Zycæna boetica, en Bretagne et en 
Angleterre, est un papillon non indigène, mais se renouvelant 
chaque année par des exemplaires émigrant du Sud vers le Nord, 
comme les Colas Edusa et Hyale et plusieurs autres espèces. Je 
l'ai vue très commune dans les jardins publics de Paris, en sep- 
tembre, il y a une cinquantaine d'années. Je ne me suis pas trouvé 
à même de l’observer de nouveau nulle part, dans de semblables 
conditions d’abondance. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Do 


M. Powell a obtenu d’'éclosion, à Hyères, une Q sans queue. 
Il m'a envoyé cet exemplaire avec une notice qui authentife cette 
sorte de variation que j'appelle ecaudafa. 

La Lycæna boelica est une espèce connue de tous les Entomolo- 
gistes, ne donnant lieu à aucune confusion et ayant été figurée par 
un très grand nombre d'auteurs. 


Lycæna Telicanus, Huebner. 


Espèce méridionale; je ne l'ai jamais vue nulle part abondante; 
elle habite, d'après les documents que je possède, Tanger (Maroc); 
Bebdou, Alger (Algérie); Malaga, Grenade, Sierra-Nevada, côté 
de Lanjaron (Espagne); la Corse; la Sicile; Menton (Alpes-Mari- 
times); Millas, Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales); Digne 
(Basses-Alpes). 

Je ne crois pas que la Zycæna figurée avec le nom de Telicanus, 
sous les n° 8 et o de la PI. 26 de l’Aistoire de Madagascar, par 
Alfred Grandidier, Paris, 1885, appartienne à la même unité spéci- 
fique que notre Z'elicanus de la région méditerranéenne occidentale. 

Les Lycæna pulchra et rabefaner de Madagascar, dont les frères 
Perrot nous ont envoyé jadis d'importantes séries, sont des espèces, 
à notre avis, distinctes de Z'elicanus et doivent en être spécifique- 
ment séparées. La Lycæna Telicauus a été figurée par beaucoup 
d'auteurs. Millière l’a représentée avec sa chenille et sa chrysalide, 
sous les n° 10 à 13 de la PL 108 de son artistique Iconographie. 
D'après Millière, la calluna vulgaris serait une des plantes dont 
se nourrit la chenille de Z'elicanus. Le papillon éclôt depuis le 
mois de juin jusqu'à l'automne. 


Lycæna Theophrastus, Fabr. 


La description de Fabricius est ainsi conçue à la page 281 
de l'Entomologia systematica; Hafniæ; 1793 : « H. KR. alis cau- 


datis fuscescentibus subtus albis nigromaculatis : posticis punctis 


158 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


quinque marginalibus aureis. Habitat in Marocco; Mus. Dom. de 
Sehestedt. Parva. Alae anticæ fuscæ basi lineis duabus cærulescen- 
tibus, disco macula flavescente obsoleta, atromaculata. Posticæ 
fuscæ cinereo undatæ. Cauda nigra, apice alba. Subtus albæ strigis 
plurimis e punctis lineolisque transversis, atris. Striga marginalis e 
punctis quinque aureis, quorum secundum puncto atro notatum. » 

(H et R en tête de la description concernant la ©, ci-dessus 
transcrite, signifie : Æesperia. Rurales, termes qui correspondent à 
une classification de Fabricius). 

Vit sur le jujubier; éclôt deux fois par an, au printemps et en 
été. Répandue en Algérie où elle a été capturée à Sebdou et à 
Zebch, en mai et en août; à Biskra, en mai; dans le Djurjura, en 
juillet ; à Bou-Saâda, en mai; à Aïn-Sefra, en avril; à Laghouat, 
en avril; à Rovigo, en mai; à Littré, en mai. 

La forme 7'Leophrastus a été parfaitement représentée par 
Herrich-Schaeffer, avec le nom de Psiftacus, sous les n° 220, 221, 
222 et 223. Les figures données par Lucas, dans l’Exploration 
scientifique de l'Algérie, sous les n° 6 et 6a de la PI. 1, sont 
beaucoup moins bien exécutés. Freyer a représenté la variété Balka- 
rica, de Turquie, de Syrie de l'ile de Chypre, sous les ne 
de la PI 421. Cette variété Balkanica dont il me semble que 
Staudinger et Rebel, dans le Catalog 1001, font à tort une espèce 
distincte de Z'zeophrastus, est caractérisée par les taches brunes, 
transparaissant du dessous et très visiblement indiquées sur le 
dessus des ailes, par le ton d’un lilas plus rosé et moins bleuâtre 
du dessus des ailes chez le O' et par les dessins noirs du dessous 
des ailes qui sont plus fins, tout en étant sensiblement les mêmes 
que ceux de 7'.eophrastus. Il y a d’ailleurs des exemplaires de tran- 
sition; certains échantillons algériens, notamment ceux qui appar-. 
tiennent à l’Ab. rosacea, Austaut, sont d’un lilas rose comme la 
variété Balkanica; d'autre part je possède un © pris à Biskra et 
chez lequel on voit, sur le dessus des ailes supérieures, des taches 
brunes transparaissant très distinctement du dessous; enfin pour 
le dessous des ailes, comme il y a des petites différences chez 
chaque individu, je ne crois pas qu’on puisse trouver chez Balkanica 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 159 


un détail assez constant et assez saïllant pour qu’on puisse l'invoquer 
à titre de valeur spécifique différentielle. La forme du Haut- 
Sénégal qui a été rapportée des Kayes par le D' Charles Nodier, 
en 1881, fait un passage excellent « transitus egregius » entre 
Balkanica de Turquie et 7 eophrastus d'Algérie. Je possède Teo- 
phrastus référable à la forme algérienne, provenant de Solan, près 
Simla (N.-O. de l'Inde) où il fut pris par le Lepcha Lakatt en 
1806; de Ceylan; des jungles de Noatoli; de Trichinopoly (Sud 
de l'Hindoustan); de Karrachee; de la frontière Gangpur et Sam- 
balpur; de Kulu; de Sikkim; Punjab et Nepaul, en Asie; et d'Abys- 
sinie, de Kimberley et Freetown (Sierra-Leone), en Afrique. Je 
suis convaincu que Sybaris, Hopf. alteratus, Moore, venosus, Moore 
désignent la même unité spécifique qui est appelée TXeophrastus. 
Ananda, de Nicéville, me paraît être une espèce voisine, mais tout 
à fait différente. 


La Zycœena Theophrastus est donc répandue dans une vaste 
étendue de pays, en Afrique, en Asie et dans le Sud-Est de 
l'Europe où elle donne la variété Balkanica. M. Aigner-Abañ 
a figuré dans Schmetterlings-Aberrationen aus der Sammlung des 
Ungarischen national Museums, une jolie Ab. Frivaldszkyi, de 
Balkanica, sous le n° 4 de la PI. XIV. 


Les Q sont assez variables; plusieurs capturées en Algérie, 
concordent parfaitement avec les figures 222 et 223 de Psittacus, 
Herrich-Schaeffer; c’est-à-dire que tout le fond des ailes est noi- 
ratre avec les dessins noirs transparaissant du dessous, plus foncés. 
Dans l'Inde, le fond des ailes est blanc, au lieu d’être noirâtre 
et les taches noires se détachent très nettement. Certaines © algé- 
riennes, montrant une éclaircie blanche dans l’espace post-cellulaire, 
font le passage entre les formes extrêmes, la plus obscure et la 
plus claire. 


M. H. Powell a pris à Sebdou, en mai 1007, une Aberration 
radiata que je fais figurer sous le n° 410 de la PI. XLIX, et à 
Zebch, près Sebdou, en août 1907, une © très curieuse ayant le 
côté gauche noirâtre et normal et le côté droit semé d’atomes bleu 


160 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


brillant, Ab. wzcærulescens qui est représenté sous le n° 409 de 
IP PONIEIEXe 

Le dessous des ailes inférieures, ainsi que je l’expose ci-dessus, 
étant assez variable, je fais figurer un G' du Sud-Algérien pris par 
M. Gaston Allard, une © de Bou-Saâda, très obscure en dessous, 
prise par mon frère, en 1875, et une Q de Zebch, prise par M. Powell 
en août 1907, à dessins normaux, mais ornée d’une série de taches 
vert d'or extrèmement brillantes, le long du bord terminal des 
ailes intérieures (NES ho ANT, 412, 413, 444) 


Lycæna Coretas, Ochs. 


Je suis convaincu que Coretas est une espèce à part d’Ayntas 
et tout à fait distincte. J'ai observé Coyelas aux environs de 
Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales) où elle éclôt deux fois par 
an en mai et en Juillet, et dans la Dordogne, au sud de Bergerac, 
où elle vole en juillet, et sans doute aussi au printemps, dans des 
petits bois secs et montueux où elle ne paraît pas bien rare. Je l'ai 
aussi reçue de Digne. Jamais je n'ai pris Ayntas à Vernet-les- 
Bains. Dans la Dordogne, je n'ai vu Azynlas commencer qu’au 
nord de Périgueux. Parcourant en automobile la route de Cauterets 
à Rennes, en 1008, je me suis arrêté à chasser dans plusieurs forêts 
que je rencontrais; c’est ainsi que J'ai exploré, malheureusement 
trop rapidement, quelques bois entre Périgueux et Angoulême, en 
passant par Brantôme et la Roche-Beaucourt. J'ai observé, çà et là, 
Amyntas voltigeant sur les bruyères, dans les clairières sylvatiques, 
comme jamais je ne l'avais vu aussi nombreux nulle part; mais 
il était seul, sans Coretas, à partir de Bergerac et en remontant 
vers le Nord; de même que Coretas se trouvait sans Awyntas 
dans la région plus au Sud. 

J'ai fait figurer Coretas sous les n* 75 et 76 de la PI XX qui 
a paru avec la III° livraison des Æ/udes de Lépidoptérologie 
comparée. La Q est toujours noire, en dessus. Jamais il ny a, 
pas plus chez le G' que chez la Q, aucun vestige de tache jaune, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 161 
le long du bord marginal des ailes inférieures, en dessous. Huebner 
a figuré Corefas, avec le nom de 7 zresias, sous les n°5 319, 320 et 
321. On trouve Coretas dans quelques parties de l'Autriche, notam- 
ment en Croatie. 


L'Espèce n'est pas bien commune au Vernet; la place où j'ai vu 
le plus d'exemplaires, était sur le flanc oriental de la montagne 
dite : de Feuilla, au-dessus du château de Manfred, entre Vernet- 
les-Bains et: Villefranche-de-Conflent, avant d'arriver à une ferme 
que J'ai entendu appeler Badebagne par les gens du pays; mais 
cette localité à été bouleversée. On trouve aussi Coretas à Saint- 
Martin-du-Canigou; mais pour recueillir 25 exemplaires de Coretas 
dans une année, À Vernet, il faut être favorisé par des circonstances 
heureuses. En 1900, J'ai chassé au printemps et mon frère en été, 
aux environs de Vernet-les-Bains. En tout, nous avons à peine 
capturé dix exemplaires. L'Espèce est délicate: la Q surtout est 
facile à détériorer. Il est extrêmement rare de la posséder parfai- 
tement intacte. Les deux générations vernale et estivale ne semblent 
pas différer l’une de l’autre. Coretas est resté Jusqu'ici une espèce 
généralement méconnue des Lépidoptéristes français. 

Ochsenheimer, auteur de l'ouvrage sans figures : Die Schmetter- 
linge von Europa, publié à Leipzig, en 1808, n'était pas éloigné de 
croire que Coretas, dont il paraît qu’il fut le premier observateur, 
constitue une espèce séparée; car il dit à la page 60 de la 2° partie 
du 1* volume : « In der Schiffermuellerschen Sammlung sah 
Ich eine Abart (vielleich Art) unter dem Namen L. C oretas, welcher 
die rothgelben Flecken und Silberpunkte gaenzlich fehlten. » ce 
que Je traduis ainsi : J'ai vu dans la collection de Schiffermueller 
une variété (peut-être Espèce) sous le nom de Coretas à 
laquelle les taches d’un Jaune rouge et les points d'argent man- 
quaient complètement. 

La collection Schiffermueller se trouvait à Vienne. Schiffer- 
mueller était avec Denis, professeur au Collège impérial des Thé- 
résiens, à Vienne. Denis et Schiffermueller furent ensemble, en 
1776, les auteurs du Wiencrgegend Verseichniss. Les Thérésiens 
ont mérité les éloges de Guenée pour la classification qu'ils ont 


11 


162 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


imaginée et Guenée les appelle « les vrais fondateurs de la Méthode 
naturelle ». Quant à Ferdinand Ochsenheimer, il était acteur au 
Théâtre Impérial royal de la Cour à Vienne « Schauspieler bey 
dem kaiserl. koenigl. Hoftheater in Wien ». M. Arnost Grund, 
d'Agram, qui a fait des observations sur Corefas, est aussi lui 
comédien, profession qui exige une vive intelligence, un grand esprit 
d'observation et beaucoup de mémoire. 

I1 remplit les fonctions de premier comique et de régisseur du 
théâtre croate. Sa collection composée uniquement de papillons de 
Croatie et de Dalmatie contient beaucoup de pièces fort intéres- 
santes, capturées dans des localités jusqu'ici inexplorées. M. Arnost 
Grund pense, comme moi, qu'Aryntas et Coretas sont des espèces 
distinctes; de plus, il paraît croire que decolorata, Stgr. serait aussi 
une espèce. Je suis redevable d’une paire de decolorata Cet Q 
à l’obligeance de M. Grund qui est un Entomologiste très docu- 
menté et parfaitement au courant de la Science; mais je déclare 
que je ne puis avec un si petit matériel, me former une opinion 
personnelle, c’est-à-dire me rendre compte des différences spéci- 
fiques pouvant exister entre Coretas et decolorata; tandis que pour 
la distinction entre Awyntas et Coretas, que j'ai vus tous les deux 
maintes fois vivants et que je me suis trouvé à même d'observer 
depuis longues années dans la Nature, ma conviction, comme Je 
le dis au commencement de cette notice, est fermement établie. 

Coretas est aussi bien une espèce différente d’Ayntas, qu'_Ægon 
est différent d'Argus, que Bellargus (Adonis) est différent d'carus 
(Alexis) et de Corydon. 


Lycæna Tiresias (*), Esper (Awyuntas, Huebner). 


La synonymie de cette Espèce, répandue dans diverses contrées 
de l'Europe, de l'Asie et de l'Amérique, est assez difficile à bien 


(#) Tirésias, l’un des plus célèbres devins de l'Antiquité, était fils d’'Evère 
et de la nymphe CAariclo. Ayant rencontré sur le mont Cyllène deux serpents 
qui frayaient ensemble, il les sépara avec un bâton et aussitôt devint femme; 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 103 


établir. Le premier auteur à qui nous sommes redevables de figures 
permettant de la bien reconnaitre, est Esper qui a représenté, avec 
le nom de 7?resias, d'après des exemplaires de la collection Herr- 
mann, de Strasbourg, sous les n° 1 et 2 de la PL XXXIV, la 
forme estivale et OPEtroustle nez de la PI XEEX 12 formée 
vernale ©. L'ouvrage d'Esper : Die Schmetterlinge in Abbildungen 
nach der Natur, a paru à Erlangen, en 1777, ainsi que j'ai déjà 


eu occasion de le rappeler au cours du présent ouvrage. 


Johann-Andreas-Benignus Bergstraesser, dans : Nomenclatur 
und Beschreibung der Insecten in der Grafschaft Hanau, etc, 
imprimé en 1778, a publié sous les n° 3, 4 et 5 de la PI. 44, avec 
le nom de Polysperchon, la génération printanière de 7iresias et 
sous les n° 1, 2, 3 et 4 de la PI. 45, mais cette fois avec le nom 
de 7resras, la génération d'été. Les figures de Bergstraesser sont 
très grossièrement exécutées. Le même auteur représente sous les 
n° 3 et 4 de la PI. 54, une variété © de Ziresias que le P. Engramelle 
a appelée : le Myrmidon. 


Jacob Huebner, en 1805, a donné, avec le nom d'Awyntas, sous 
les n° 322, 323 et 324, la figure de la forme d'été de Tiresias, 
secundum Esper, réservant le nom de 7?resias au Coretas, Ochs. 
ou peut-être à decolorata? ce qui serait possible à cause de la 
teinte bleue un peu verdâtre qui a été employée pour le coloris 


UC fe.n 310. 


Esper, Bergstraesser et Huebner sont des iconographes; sachons- 
leur gré des figures qu'ils ont pris la peine de publier. Un de leurs 
contemporains qu’on peut presque ranger parmi les descripteurs sans 
figures, car il n’a, en tout, produit que deux Planches, pour cinq 


mais, au bout d’un certain temps, il les rencontra encore dans la même position 
et reprit son premier sexe. Choisi pour juge d’un différend qui s’éleva entre 
Jupiter et Junon, Tirésias prononça contre la Déesse qui en fut si irritée qu’elle 
l’aveugla; mais il en fut dédommagé par le don de prophétie qu’il reçut de 
Jupiter et par une vie sept fois plus longue que celle des autres hommes. 
Tirésias fut honoré à Thèbes comme un Dieu, et eut à Orchomène un oracle 
longtemps fameux (Dict. de la Fable, par Fr. Noël. Paris, An XIII-1805). 


164 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


volumes, Moritz-Balthasar Borkhausen (Francfort, 1788) a écrit 
(Tom. I, p. 166), une notice sur 7'iresias où je remarque le rensei- 
gnement suivant : « Man findet diesen Falter schon in Mai, am 
oeftersten aber im Julius und August, oft auch noch im Sep- 
tember auf bebluemten Wiesen und in grasigten Waeldern. » 
c'est-à-dire « qu’on trouve ce papillon d’abord en mai, mais le 
plus souvent en juillet et août, quelquefois aussi encore en sep- 
tembre, sur les prairies émaillées de fleurs et dans les forêts 
herbues ». 


Je lisais ce renseignement, le 18 octobre 1900, au moment même 
où M. Gédéon Foulquier, de Marseille, me communiquait quatre 
exemplaires de Lycæna Tiresias, pris par lui, le 26 septembre 1900, 
dans le pays si curieux et si peu connu qu'on appelle : la Crau. 
Je n'ai jamais, pour ma part, vu voltiger Zéresias qu'au printemps 
d'abord et en juillet et août ensuite. J'ignorais qu'une 3° éclosion 
pût avoir lieu en septembre et je m'en suis trouvé informé, en 
même temps, par M. Foulquier qui l’a constatée dans la Nature, 
et par la lecture des lignes ci-dessus rapportées de l'ouvrage de 
Borkausen, datant de 117 ans. 


Le P. Engramelle a figuré sous les n° 78 a, b, c, d et 70 a, b 
de la PL XXXVII, le pezi Porte-queues, suivant son habitude, 1l 
a pris la © pour le 'et vice versa. Il dit que « ce papillon paraît 
tout l'été, mais en petite quantité. On le trouve dans les bois fleuris 
et les prés qui les avoisinent. » Il signale une très petite Q (qu'il 
prend aussi pour le ©‘), se trouvant aux mois d'août et de septembre, 
dans les mêmes endroits que le précédent. Quant à la forme prin- 
tanière, dont la © est différente de Polysperchon Q, et qui est 
figurée sous les n° 70 & bis, b bis, c bis et d bis, de la PL LXXXIT, 
Engramelle l'appelle : le Myrmidon, et prétend l'avoir copiée du 
cabinet de M. Gerning. J'ai conservé ce nom de WMyrmidon, pour 
désigner la seconde forme © de Polysperchon. 


Les Thérésiens, c’est-à-dire Denis et Schiffermueller, les auteurs 
du Systematisches Verseichniss von den Schmetterlingen der 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 105 


Wiener Gegend, qui signent modestement le titre de leur ouvrage, 
comme suit : « Herausgegeben von einigen Lehrern am kaiserl. 
koenigl. Theresianum in Wien », décrivent dans l'édition de 1801, 
sous le nom d’Ayntas, en reproduisant tout d’abord la phrase 
latine de Fabricius qui s'applique au ' seul, la race printanière de 
Tiresias. I] ne semble pas que les Thérésiens aient eu connaissance 
de la figuration donnée par Bergstraesser. 


J- Chr. Fabricius, dans Mantissa Insectorum (Hafniae, 1787), à 
la page 70 du vol. If, a maintenu le nom d'Awyutas dont il fait 
remonter l'origine à la première édition (1776) du Catalogue des 
Papillons des environs de Vienne par Denis et Schiffermueller, 
et fait tomber en synonymie le Zéresias, Esper (Tab. 49; fig. 2) 
qui est une © du printemps. Il en résulterait que les Thérésiens 
auraient la priorité du nom Ayryntas pour la forme vernale et 
Esper la priorité du nom 7%esias pour la forme estivale. 


Mais avec les descriptions sans figures, on risque trop de 
commettre des erreurs d'identification. Exemple : la description 
d'Argrades, donnée par Fabricius, 6 pages plus loin que celle 
d'Arzyntas (p. 76) et qui me paraît bien difficile à rapporter à 
autre chose qu'à une sorte de Zzresias acaude et ayant le dessous 
des ailes très foncé : « alis.. subtus fusco cinereis ». Je déclare 
ne pas reconnaitre ce papillon. Dès lors je crois que le mieux, en 
la circonstance, est d'appliquer la formule : « Pas de bonne figure 
à l'appui d'une description, pas de nom valable » et de s’en tenir 
aux iconographies d'Esper et de Bergstraesser, pour fixer la 
nomenclature de l'espèce de Zycæna dont il est cas. Au moins 
nous disserterons sur une base qui ne peut donner lieu ni à erreur, 
ni à confusion et nous raisonnerons d'après des déterminations se 
rapportant à des papillons dont la connaissance nous est nettement 
acquise. 


J'établis donc la Nomenclature de la Zycæna Tiresias, d’après 
les Iconographies, comme suit : 


1606 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Lycæna Tiresias, Esper. France, Allemagne, Italie, etc. 
1° forma æstivalis; juillet, août, septembre. 
Tiresias, Esper; Tab. XXXIV; Gp. 2, 0er 
— Bergstraesser, Tab°45, Or hg. 12, 0h02 


Amyntas, Huebner; G' 322; Q 323, 324. — Obthr. 
Lépid. compar. II; PL XX; C'fig. 81; © fig. 82. 


2° forma vernalis; mai. 


Polysperchon, Bergstraesser; Tab. 44; O' fig. 3, 4; 
Q üg. 5. — Obthr. Lépid. compar. III; PL XX; 
O' fig. 83; Q fig. 8. 

Amyntas (vernalis), Herr. Schaeff. n° 645 (dessous 
des ailes). 


Tiresras AE Sper Mab REX  otee 


ue forma. 


79 c bis et 70 d bis. — Obthr. Léprid. compar. IN; 
PANNE EE 602 


Tiresias, Bergstraesser;, Tab. 54; fig. 3, 4. 


©122 forma. 


| Myrmidon, Q Engramelle; PL LXXXIII; fig. 


Dans la circonstance, je laisse de côté les races asiatique et 
américaine et m'intéresse seulement aux formes de l'Europe que Je 
suis arrivé à connaître. 


Tiresias a été trouvé en Angleterre, mais fort rarement. C'est 
sans doute une espèce tendant à émigration, malgré sa délicatesse. 
La grande étendue de pays qu’elle habite actuellement semble le 
prouver. Il est possible que les rares exemplaires qui ont été trouvés 
jusqu'ici en Angleterre, proviennent d’une émigration de l'Espèce 
vers le Nord-Ouest ? 


Voici la traduction française, due à M. Harold Powell, de la 


notice publiée dans le 1‘ volume de son ouvrage sur les papillons 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 167 


anglais, par Charles Barrett, aux pages 68 et 60, relativement à 


la présence de 7'zresias en Angleterre : 


« Deux exemplaires, mâle et femelle, ont été capturés sur 
Bloxworth Heath (Lande de Bloxworth), Dorset, les 18 et 
20 août 1885, par les deux fils du Rev. O. Pickard, de Cambridge. 
Ils volaient dans un endroit gazonné de la lande, au milieu de 
nombreux Polyommatus Alexis et Ægon dont on ne pouvait les 
distinguer au vol. Des recherches répétées dans la même localité 
n'ont pas amené la découverte d’autres exemplaires. 

La même année (1885) le Rev. J. S. St. John acheta une petite 
collection faite par un Dr. Marsh, habitant alors Frome, Somerset, 
et 1l y trouva deux mâles de cette espèce. 

L'auteur de la capture se rappela les avoir pris en 1874, à 
proximité d’une petite carrière, dans les environs de Frome. Ces 
spécimens ont été exhibés par M. St. John à une réunion récente 
de l’Entomological Society de Londres. Par la bonté de 
M. Cambridge, j'ai pu également examiner les deux exemplaires 
de Bloxworth, et je puis comprendre combien 1l est facile de 
laisser passer cette espèce inaperçue. La capture d’un autre exem- 
plaire à Bournemouth, par M. P. Tudor, est enregistrée par 
M. Cambridge dans 7’ Le Entomologist, 1885. Dans 7e Young 
Naturalist pour 1880, M. J. Chappell, de Manchester, dit qu'en- 
viron vingt-cinq ans plus tôt, M. J. Clegg, de Oldham, en chassant 
P. Alexis, à Blackpool, prit un spécimen ayant des quenes. Celui-ci 
devint la propriété de M. Chappell, fut classé comme Z. Bætca, 
et n’a été reconnu que récemment. S'il n’y a eu aucun déplacement 
accidentel de spécimens, cette capture est vraiment remarquable 
et difficile à expliquer. Ces exemples sont nos seuls pour cette 
espèce. Les localités dans lesquelles elle a été prise semblent 
écarter l'hypothèse d’une introduction accidentelle avec des 
plantes, et 1l est possible qu’une localité permanente pour l'espèce 
soit découverte un jour sur les grandes landes s'étendant depuis 


le Surrey à travers le Hants et le Dorset. » 


En Bretagne, Zzresias n'est pas rare au printemps et en été. 


168 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Mais J'ai observé une particularité de diversité d'habitat selon la 
saison, et il me paraît intéressant de la signaler. 

J'ai constaté en effet qu’en Ille-et-Vilaine, au printemps, Tresias- 
Polysperchon vivait assez fréquemment dans les allées herbues des 
bois et dans les prairies basses, un peu humides, émaillées de fleurs 
« auf bebluemten Wiesen und in grasigten Waeldern », comme 
Borkausen l’a observé lui-même; mais en été, il ne reste plus un 
seul Z?resias dans les prairies où l'Espèce voltigeait au printemps. 
D'ailleurs l’herbe a été coupée et fanée au mois de juin et les 
bestiaux ont été amenés dans les prés pour y pacager, après la 
récolte des foins. En été, c'est dans les landes, là où l’humus un 
peu plus épais permet aux bruyères de végéter vigoureusement, qu'il 
faut chercher Z'zresias. Lorsque les Æyica ciliaris deviennent hautes 
et qu'elles poussent mélangées à l’£yica tetralix, aux Ulex europeus 
et surtout xanus et au Genista anglica, plantes sur lesquelles doit 
vivre chez nous la chenille de Zzresias, c'est une bonne localité pour 
trouver le papillon, depuis le 10 juillet jusqu'aux premiers jours 
d'août. 

En lisant la Contribution à l'étude des Lépidoptères du Mor- 
bthan, par ]. de Joannis (Ann. Soc. ent. France; 1000), je vois que 
pour Baton (A ylas), il en est dans le Morbihan, exactement comme 
pour Ziresias, en Ille-et-Vilaine : « Première éclosion à la fin de 
mai, et le papillon se prend alors dans les prairies; deuxième 
éclosion fin de juillet à septembre, le papillon se trouve alors dans 
les landes ». Pourquoi cette différence d'habitat de la génération 
de printemps et de celle d'été, commune à 2 espèces de Zycæna, 
dans deux pays très voisins l’un de l’autre? J'ai cependant observé 
qu'en Ille-et-Vilaine, la Lycæna Baton ne se trouve que dans les 
landes sèches et arides, au printemps aussi bien qu’en été; Jamais 
je ne l’ai vue dans les prairies; c’est donc pour Baton très différent 
en Ille-et-Vilaine, comparativement à ce qui a lieu dans le Mor- 
bihan. 

Pourquoi encore cette différence de mœurs, en ce qui concerne 
Baton, en Ille-et-Vilaine et en Morbihan? Je ne sais que répondre. 
Mais le fait est curieux et devait être porté à la connaissance des 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 109 


Entomologistes. J'aurais désiré faire, cette année 1909, des obser- 
vations nombreuses sur 7Zresias, en vue de l'ouvrage que J'écris 
présentement. Mais la température a été très souvent contraire 
pendant le printemps et l'été 1909, en Bretagne. Aussi ai-je été 
empêché de chasser comme j'en avais l'intention. Cependant au 
mois de mai, profitant de quelques journées où les rayons du soleil 
n'étaient pas trop souvent empêchés par l’amoncellement des nuages 
de réchauffer la terre et d'animer les papillons, M. Prosper Boulé, 
mon frère et moi, nous avons recherché Zzresias-Polysperchon à la 
forêt de Rennes où nous en avons trouvé quelques jolis exem- 
plaires. M. Boulé a capturé de son côté Polysperchon Œ très abon- 
damment, le 10 mai, dans la grande lande de Caden (Morbihan) 
et le même mois, dans les environs de Laillé et Bourg-des-Comptes. 
Je suis allé à Monterfl en mai, pour voir si Polysperchon volait 
dans la lande dite de Grosse-Roche, en la vallée de Roc-Huel, où 
on le voit habituellement en été et où j'ai effectivement capturé, 
cette année même, la forme estivale 7%restas, en juillet et en août. 
Mais malgré mes investigations, je n'ai pu y apercevoir en mai, 
un seul Polysperchon; j'ai seulement vu Baton (Hylas) au même 
lieu où je l'ai retrouvé le 7 août, alors que J'avais le plaisir, en 
l’'aimable compagnie de M. Fernand Le Cerf, le très compétent 
connaisseur en Sesia, de chasser l'Uroceriformis armoricana dont 
il réussit à capturer quelques exemplaires. Zéresias était assez abon- 
dant dans la lande, un peu au-dessous de l’arête rocheuse, presque 
au pied de la colline, sur les Ærica ciliaris, tandis qu'au printemps, 
comme je le dis plus haut, je n'étais pas parvenu à en voir un seul 
échantillon au même lieu. 

En Bretagne, Ziresias présente deux formes saisonnières bien 
accusées et il est intéressant, comme je l'expose ci-dessus, d'observer, 
outre la différence d'habitat de l'Espèce, au printemps compara- 
tivement à l'été, la différence des caractères extérieurs du papillon. 

Polysperchon ou Tiresias vernal, éclôt en mai; je lis les dates 
O, 10, 23 mai inscrites sur les étiquettes de mes exemplaires; le 
comparativement à la forme d'été, est plus petit, d'un bleu plus 
clair; la bordure noire qui entoure les ailes est plus fine. La Q 


1 70 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


toujours plus petite que celle d'été, est généralement sablée, en 
dessous, d’atomes bleu pâle, comme l’exemplaire figuré sous le 
n° 84 de la PI. XX qui fut pris à la forêt de Rennes, dans une 
allée herbue. Il y a aussi des échantillons plus obscurs et moins 
bleuâtres; mais il existe une seconde forme de © vernale, très 
caractérisée et fort jolie, que je désigne sous le nom de Wyrmidon, 
déjà donné par Engramelle; c'est celle que je fais figurer sous le 
n° 302 de la PL XLI, d’après un spécimen que J'ai capturé à 
la forêt de Rennes, cette année même, dans l'allée de la ligne des 
eaux, au commencement de mai. C’est bien cette forme que Bergs- 
traesser représente, avec le nom de 77resias variété, sous les n° 3 
et 4 de la Tab. 54 et dont Engramelle donne également la figure. 

À Saint-Mariens, localité très intéressante et très riche du nord 
du département de la Gironde, on trouve au printemps Polysper- 
chon, avec la même © que j'ai fait représenter sous le n° 84 de 
la PL XX. En Prusse, on trouve aussi la même forme de Polys- 
perchon © et ©, et dans les Basses-Alpes, à Digne, seule localité 
où, d’après les documents dont je dispose, les Zycæna Coretas et 
Tiresias vivraient en proche voisinage, on rencontre la Q Wyr- 
nudon. 

Je possède la forme estivale Ziresias provenant de Monterfil et 
Pipriac (Ille-et-Vilaine); d'Entrevaux, au-dessus de Neigeas 
(Basses-Alpes), 4 juillet 1906; de Charroux (Vienne); du Piémont; 
de Châteaudun (Eure-et-Loir), d'Angoulême et des forêts entre 
Périgueux et la Roche-Beaucourt. En Charente, Zirestas à des 
mœurs et un habitat tout autre qu’en Bretagne. Je lai capturée 
dans un champ de luzerne de la vallée des Eaux-Claires et sur 
des pentes de collines calcaires où abondent les papillons de 
diverses espèces. Aux environs d'Angoulême, Tiresias ne doit pas 
être rare; je ne connais pas Polysperchon, ou Tiresias vernal, de 
la Charente ni du Poitou et j'ignore si, comme en Bretagne, on 
les rencontre en ces pays dans des lieux différents, selon les saisons 
où se fait l'éclosion de l’Espèce. 

Entre Périgueux et la Roche-Beaucourt, j'ai pénétré dans des 
forêts que traverse la grande route. Tÿresias voltigeait en grande 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 171 


quantité sur les bruyères, dans les clairières des bois. On aurait pu 
en recueillir des centaines d'exemplaires. Malheureusement, c'était 
le 20 juillet 1008 et les papillons étaient déjà un peu usés par le 
vol. On ne trouvait presque plus d'exemplaires frais. Mais jamais 
Je n'ai vu 77resias aussi abondant que dans cette région forestière 
du centre occidental de la France. 

Le Zÿresias estival est grand; le G' est en dessus d’un bleu 
violacé assez foncé avec une bordure noire pas très large, mais 
assez accentuée et des points noirs le long du bord des inférieures; 
la frange est bien blanche. En dessous, le fond des quatre ailes 
est d’un gris un peu bleuâtre, clair, avec les points noirs petits, mais 
généralement bien marqués et deux ou trois taches jaune orangé, près 
du bord terminal des ailes inférieures. Ces taches jaunes sont sur- 
montées d’un petit croissant brun et à leur extrémité, du côté du 
bord terminal, elles sont centralement finement ponctuées de noir 
vif. La © est noire en dessus; quelquefois avec un ou deux points 
Jaunes très vifs aux ailes inférieures, à partir du côté extérieur de 
la petite queue. Certaines Q sont saupoudrées d’atomes bleus près 
de la base des ailes supérieures et le long du bord terminal des 
ailes inférieures. En dessous, elles ressemblent aux G'; mais les 
points noirs sont plus accentués et le bord des ailes supérieures est 
légèrement teinté de brun. 

Lorsque le temps est beau, au mois de juillet, les Zzresias C 
voltigent assez rapidement au-dessus des bruyères bretonnes et à 
cause du dessous gris blanchâtre de leurs ailes, ils sont faciles à 
distinguer des autres LZycæna. Les Q sont moins actives et elles 
se trouvent fréquemment posées sur l'extrémité des tiges de la 
molle et tendre Æyica ciliaris dont les fleurs sont d'une si jolie 
couleur rose. En marchant dans les bruyères, on fait lever les © 
qui produisent un vol généralement assez court. Mais si elles se 
sentent de nouveau menacées, elles s'enfoncent rapidement dans 
les touffes épaisses de la bruyère dont la hauteur attemt parfois 
40 à 50 centimètres. Comme la couleur noire du dessus de leurs 
ailes est extrêmement délicate et fragile, les © du moment qu’elles 
ont cherché à se cacher dans les bruyères, se trouvent presque 


1 72 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


toujours défraichies. Cette bruyère appelée : Æyica ciliaris par 
Linné, varie passablement pour la teinte rose de ses fleurs qui est 
plus ou moins purpurine pâle ou foncée. Çà et là, on trouve une 
touffe d'un blanc très pur. Cette variété albine est du plus agréable 
effet. 

L'année 1909 fut exceptionnellement humide, et à cause des 
pluies incessantes en juillet, la chasse aux papillons fut très contra- 
riée. Je compte, l'an prochain, s'il plaît à Dieu, étudier tout parti- 
cuhèrement la question de la diversité de l'habitat de la Zycæna 
Trrestas, en Bretagne, à l'éclosion du printemps, comparativement 
a celle d'été; puis instruit par M. G. Foulquier et par Borkausen, 
Je me propose d'aller, vers la fin de septembre, voir dans les landes 
où /7resias à été abondante au mois de juillet, si une troisième 
éclosion y paraîtra au commencement de l'automne, comme dans 
la Crau. 


Lycæna Argus (*), Linné; Huebner (316, 317, 318), 
et Lycæna Ægon, W. V.; Huebner (313, 314, 315). 


J'appelle Argus, Linné, ce que Staudinger et Rebel (Catalog 
1901), appellent Argyrognomon et j'appelle Æzgon, W. V. ce que 
les mêmes auteurs, dans le même Ca/alog, appellent A7gus. 

Argus et Ægon se trouvent en Scandinavie; mais je crois que 
la description de Zinné s'applique juste au contraire de ce qui est 
indiqué dans le Catalog de Staudinger et Rebel; édit. 1001. 

Voici la description de Linné, à la page 483 du Systema Nature, 
édit. X; Upsaliæ 1757; impr. 1760 : « Papilio Argus alis ecau- 
datis cæruleis; posticis subtus limbo ferrugineo ocellis cæruleo 


(*) Argus était fils d’Arestor; il avait cent yeux dont cinquante étaient 
ouverts, pendant que le sommeil fermait les cinquante autres. Junon lui confia 
la garde d’Zo qu'elle venait de changer en vache; mais Mercure l’endormit 
complètement au son de sa flûte et lui coupa la tête. Junon prit ses yeux et les 
répandit sur la queue du paon, ou le métamorphosa en cet oiseau (Dictionn. de 
la Fable, par Fr. Noël. Paris, An XIII-1805). 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 17 


Q9 


argenteis. Habitat im Rhamno Europæ, Africæ ». L'indication 
Afrique est certainement erronée; n1 A7gus, ni Ægon n’ont été jus- 
qu'ici rencontrées en Afrique. 

Pour moi, les mots « ocellis cæruleo argenteis » fixent la ques- 
tion, autant qu'une description peut la fixer, attendu que l’Argus 
de Scandinavie a bien les points marginaux des ailes inférieures, 
en dessous, d'un bleu métallique, tandis qu'Ægon, du Nord, ne 
présente pas cette particularité au même degré. C’est seulement 
dans les pays méridionaux qu’Æzon a les points des ailes infé- 
rieures métalliques, en dessous. Toutefois je reconnais que la 
question reste incertaine; car, d’une part, il ne faut pas oublier 
que Linné confond facilement les espèces voisines, et, d'autre part, 
on ne doit pas perdre de vue combien Linné apportait peu d’at- 
tention aux détails spécifiques pourtant essentiels; ainsi, dans la 
synonymie que Linné établit pour son A7gus dont la caractéris- 
tique consiste dans « ocellis cæruleo argenteis », 11 cite Roesel, 
ab XVII ne 5 Orlessñe 2er 5 de Roeselireprésentent 
Icarus (Alexis); la fig. 4 représente Acis (Semiargus). Aucun de 
ces Zycæna n’a les ocelles d’un bleu argenté. Donc l'établissement 
de la synonymie par Linné, dans la présente circonstance, est 
absolument faux. 

Dans la Fauna Suecica, Upsaliæ, 1761, Linné ajoute les indi- 
cations suivantes : 1074. Papilio hexapus : alis rotundatis integer- 
rimis cæruleis : subtus ocellis numerosis. —- Ray. Ins. p. 31; n° 11. 
Papilio parva, alis superne purpureo cæruleis, subtus cinereis 
maculis nigris circulo purpurascente cinctis, punctisque nigris 
pulchre depictis — Habitat in Rhamno — Descr. Alæ supra 
cæruleæ, subtus ocellis numerosis nigris, et in alis secundariis sub- 
tus maculis marginalibus fulvis confertis in fasciam pupillis 
cæruleo argentatis. 

La description ci-dessus rapportée s'applique au G‘ Linné, décrit 
la ©, avec le nom de /das et dans les termes suivants : 1075; 
Papilio Idas alis ecaudatis cæruleis : posticis fascia terminali rufa 
ocellari : subtus pupillis cæruleo-argenteis. Papilio hexapus, alis 
rotundatis integerrimis nigro fuscis : subtus ocellis numerosis. 


1 74 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Habitat in Ericetis. — Descr. : Facies, magnitudo et color omnino 
præcedentis, a quo differt alarum lateris superioris colore, qui non, 
ut in illo, cæruleus, sed omnino nigro fuscus; Alæ secundariæ pos- 
tice supra fascia obsoleta ex ocellis ferrugineis pupilla nigra. 
Subtus omnes alæ similes præcedenti, sed pallidiores et fascia 
albida ante posticam ruffam (sic) ex ocellis cæruleo argenteis. An 
solo sexu a prioris diversus ? 

Linné se demande si /das n’est pas l’autre sexe de l'espèce précé- 
dente qui est Argus. Il est évident que Zdas n’est autre chose que 
la © d’Argus. Il faut tenir compte des mots fascia albida; en effet 
dans l'Argus Q scandinave, on remarque cette fascie blanche sur 
les ailes, en dessous, où elle est très distincte. 

Les Thérésiens, en 1775, semblent avoir eux-mêmes fixé la 
question, comme je crois juste de la définir, en appelant Argus 
ce que Staudinger et Rebel désignent sous le nom d’A7gyrogno- 


mon et en créant pour l’autre espèce voisine le nom d’Ægon. 


Il est donc entendu, comme je l'ai dit plus haut, qu'au cours 
de toute la présente notice, j'appellerai Argus, Linné, ce que Stau- 
dinger et Rebel ont eu la fantaisie d'appeler A7gyrogromon, et 
j'appellerai Ægon ce que ces auteurs appellent Argus. 

Je n'ignore pas quelle obscurité et quelle confusion existent au 
sujet de la nomenclature des deux espèces : Argus et Ægon. Mais 
il faut pouvoir se comprendre clairement et tout en cherchant a se 
rapprocher le plus possible de la vérité, demeurer d'accord avec 
le bon sens. 

Je crois fermement que Staudinger et Rebel ont eu grand tort de 
proposer cette appellation Argyrogromon pour désigner l'Argus 
linnéen. Argyrognomon peut désigner une des formes Q d'Argus; 
mais rien de plus. J'ignore à quel mobile Staudinger et Rebel ont 
pu obéir. Ils ont eu une conception étrange, et dont je n'avais encore 
jamais rencontré l’expression nulle part; c'est de donner au même 
exemplaire deux noms différents; un pour son endroit et un pour 
son envers, comme tout le monde peut aisément s’en rendre compte. 
Staudinger, étant mort, ne peut plus rien répondre; mais Rebel 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 175 


aura probablement l’obligeance de nous renseigner. Je lui en serais 
pour ma part, fort reconnaissant. 


Voici donc ce que l'examen du texte même du Catalog 1001 
permet de constater : 


Staudinger a inventé un nom tout nouveau : Callarga, pour 
désigner seulement le DESSUS des ailes d’'Argyrognomon (Bergs- 
traesser; Tab. 46; fig. 1). I1 faut en effet remarquer que c’est seule- 
ment le DESSOUS des ailes du même A7gyrognomon (Bergstraesser, 
Tab. 46; fig. 2) qui est consacré, en tête de l’article 544, à asseoir 
la nomenclature de l'Espèce; ce n’est qu’en second lieu qu'est citée 
l'autre Argyrognomon © (Bergstraesser; Tab. 51; fig. 7 et 8); 
celle qui n'est pas coupée en deux, comme la première, puisque 
Staudinger et Rebel veulent bien l’admettre dans leur Catalog, 
pour l'intégralité de ses deux faces, au même article 544. Pourtant 
ce nom nouveau Callarga ne doit pas désigner seulement le DESSUS 
des ailes d'Argyrognomon (Bergstraesser; Tab. 46; fig. 1); en 
effet il a une autre mission; c'est de remplacer aussi le nom Calliofis 
(Boisduval; Zcones; PI 15; fig. 4); mais toujours pour le DESSUS 
des ailes seulement. En ce qui concerne le DESSOUS des ailes du 
même papillon Calliopis (Boisduval; Jcones; PI. 15; eo) ae 
nom Calliopis est conservé par Staudinger, mais pas franchement, 
parce qu'aucun alinéa spécial n’est constitué pour Calliopis et que 
ce nom se trouve bloqué au milieu de tout le mélange synonymique 
de l’art. 544. Voilà donc deux papillons du genre Zycæna : A7gy- 
rognomon, Bergstraesser et Calliopis, Boisduval, que Staudinger et 
Rebel coupent moralement en deux, dans un sens où il ne serait 
pas aisé de les couper pratiquement, vu la mince contexture de 
leurs ailes, et à moins de s'être longtemps exercé à l’art difficile 
de couper un cheveu en quatre, dans le sens de l'épaisseur. Il est 
curieux de voir deux papillons recevoir en même temps deux noms, 
un pour le DESSUS de leurs ailes et un pour le DESSOUS. Le Cal- 
liopis, spécimen typicum de Boisduval, existe encore dans ma 
collection; c’est bien le même échantillon dont le dessus et le 
dessous ont été reproduits dans l’/cones PINS He teta0) 


176 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Comment Staudinger et Rebel ont-ils pu avoir l'idée de donner 
deux fois, dans le même article 544, pour Argyrognomon et Cal- 
lopis, deux dénominations différentes à un même exemplaire; 
c'est-à-dire créer une dénomination spéciale et différente pour chaque 
face ou pour chaque côté des aïles; comme si le devant et le derrière 
du même individu pouvaient porter deux appellations personnelles 
distinctes! 

Pour essayer de tirer au clair la question actuellement très 
embrouillée d'Argus et Ægon qui sont deux espèces tout à fait 
distinctes l’une de l’autre, mais souvent confondues, j'ai réuni sur 
les deux espèces le plus de documents que J'ai pu, les comparant 
l’une à l’autre dans la même localité, lorsque Argus et Ægon font 
partie de la même faune. Mais il convient d’abord de se rendre 
compte de ce que les divers auteurs anciens et modernes ont publié 
sur cette question. 

Il n’est pas indifférent d'observer que Bergstraesser, en 1778, 
connaissait parfaitement l’Argus linnéen. I] l'appelle « Der Stech- 
ginsterfalter », c'est-à-dire le papillon du genèt-qui-pique, ou 
l'Argus de Linné : « oder des Linne Argus ». Comme Je l’ai déjà 
fait observer précédemment, presque toutes les figures publiées par 
Bergstraesser en 1778 et 1770, dans son ouvrage : Nomenclatur und 
Beschreibung der Insecten in der Grafschaft Hanau-Muenzen- 
berg, etc, sont malheureusement exécutées très grossièrement et 
difficiles à identifier avec certitude, du moment que l'espèce figurée 
offre des détails ou des caractères un peu délicats. Cependant sous 
les n° 3 et 4 de la PI. 52, on reconnaît assez bien la Q A7gus avec 
sa fascie blanche sur le dessous des ailes, comme le décrit Linné. 
Le ' représenté sous les n° 1 et 2, est plus énigmatique; s'il n'avait 
pas les points argentés du dessous des ailes inférieures qui sont 
caractéristiques, on pourrait aussi bien prendre l’Argus Œ, secundum 
Bergstraesser, pour Adonis (Bellargus) S', d'autant plus que dans 
la figure 1, la frange blanche est violemment traversée par les 
nervures noires. Quoi qu'il en soit, Bergstraesser a connu non seu- 
lement l’Arsws de Linné, mais aussi l’Ægon; car dans la descrip- 
tion d'Ayrgus (3 ter Jahrg. p. 7), il dit : « Schon oben habe Ich 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 177 
mich geaeussert, das der Azgyrotoxus und die Argyra jener Ægon 
der angefuehrten Entomologen sein koennte », ce qui signifie en 
français : « Déjà ci-dessus, j'ai exprimé mon opinion que les 
Argyrotoxus et Argyra pourraient bien être l'Ægon des Ento- 
mologistes cités. » 


En effet, à la page 78 (2 /er Jahrgang), Bergstraesser en décri- 
vant A7gyra, s'exprime en ces termes : « Wahrschenlich das 
Weibchen des vorhergehenden und der wienerischen Entomologen 
Ægon weiblichen Geschlechts. Vom A7gus unterscheidet er sich 
sehr merklich durch die Groesse. ». Voici la traduction de cette 
phrase : « Argyra est vraisemblablement la © du précédent (Argy- 
rotoxus) et lÆgon Q des Entomologistes viennois. Il se distingue 
très visiblement par la taille. » 


Donc Bergstraesser connaissait Argus et Ægon et il semble bien 
avouer par les lignes ci-dessus reproduites, qu'il sent son tort 
d'avoir créé un A7gyra qui est la Q d'un Aygyrotoxus; d'autant 
plus que tous les deux : Argyra et Argyrotoxus lui paraissent être 
simplement les deux sexes d’une espèce appelée Ægon et déjà 
considérée comme étant distincte d'Argus. 


Mais qu'est-ce donc que ce fameux Argyrognomon? C'est une 
Lycæna Q assez grande, dont les 4 ailes en dessus sont recouvertes 
(dans la fig. 1 de la PI. 46, que j'ai là, ouverte devant moi), d’une 
épaisse couche de bleu cobalt, avec le bord terminal des ailes 
inférieures marqué de 6 gros points noirs surmontés d’une ligne 
rouge orangé; quant au dessous, ce serait celui d’/carus (Alexis), 
s'il n'était pas entendu qu'il a des points argentés. Avec cette © 
un peu anormale et très grossièrement dessinée et enluminée, sont 
figurées trois autres Q de Zycæna, en dessus et en dessous; elles 
sont affublées des noms suivants : Argyrocapelus (n*% 3 et 4); 
false 2 et 3/mitexto)) A727yr0ela (ns et10); Arryrocopus (n°7 
et 8). Toute cette nomenclature est donc à base d'argent! IT est 
clair que par cette argenterie même, cette collection d'Argyrogno- 
mon, Argyrocapelus, Argyroela et Argyrocopus représente (très 
grossièrement, hélas !) une série de variétés d’Argus, dont le carac- 


12 


178 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


tère spécifique est d’être, en dessous, pourvu de « pugpillis infra 
cærulescenti-arsenteis. » 

Mais Argyrognomon n'est, comme je l’ai déjà fait observer, 
qu'une © supra cœrulea d'Argus. L'idée des D" en Philosophie 
Staudinger et Rebel est tout de même bizarre. Ils ont bouleversé 
toute la nomenclature, telle qu’elle était couramment admise par nos 
auteurs les plus justement considérés : les Thérésiens, Huebner, 
Ochsenheimer, Godart, Freyer, Boisduval, etc.; ils ont contre toute 
raison, transposé les noms d'Ægon et d'Argus, appelant Argus ce qui 
est Æ gon, et ils ont proposé à l'adoption du Public entomologique 
qui s'est bien gardé de protester jusqu’ci, le nom d’Argyrognomon, 
pour remplacer le nom linnéen d’Argus, alors que ce nom d’Argy- 
rognomon ne primait nullement A7gws, et est simplement employé 
pour désigner une forme de Q bleue d’Argus. Encore tout ce 
charivari entomologique, comme dirait Fruhstorfer, est-il basé 
(on ne saurait assez le dire) sur un seul côté des ailes d’un papillon 
très grossièrement figuré et dont le specimen typicum est depuis 
longtemps perdu; l’autre face du même papillon recevant une autre 
dénomination. 


Voilà d’ailleurs ce que Bergstraesser, fondateur de toute cette 
collection de noms argyresques, écrit, à la page 76 de son ouvrage, 
au sujet d’Argyrognomon : 


« Sollte dieser schoene Falter der wienerischen Entomologen 
Adonis sem? Meines Wissens kommt er nirgendswo noch in einer 
Abbildung vor, und auch im Systeme nicht, wenn er jener Adonts 
nicht ist. Es sind die wenigen Exemplarien, die hier vorkommen, 
im vorigen Sommer von den hiesiegen Insectenfreunden in dem so 
genannten Bruchkoebler Walde gefangen worden. Fast alle hieher 
cehoerige Stuecke aus der hiesigen Gegend besitzt nun der grosse 
Sammler Herr Gerning zu Frankfurt. Man vergesse nicht, dass 
er gleich dem Argus und Æzgon des wienerischen Verzeichnisses 
silberne Pupillen auf den Hinterfluegeln der untern Seite hat. Also 
machen diese ohnefehlbar kein wesentliches Kennzeichen des Argus 


aus ». 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 179 


Je donne la traduction française littérale de ce texte, comme suit : 


« Ce beau papillon serait-il l'Adoxis des entomologistes vien- 
nois? À ma connaissance, son dessin n’a encore paru nulle part et 
pas davantage dans le Système (ou Classification), s'il n'est pas 
l'Adonis en question. Les rares exemplaires qui paraissent ici, ont 
été capturés, l'été passé, par les amateurs d'insectes dans la forêt 
de Bruchkoebl. Presque toutes les pièces de la contrée d'ici sont 
en possession maintenant du grand collectionneur M. Gerning, de 
Francfort. Qu'on n'oublie pas que pareillement à l’Argus et à 
l’Ægon du Catalogue viennois, il possède des pupilles en argent 
en dessous des ailes postérieures. Ainsi celles-ci ne font sans aucun 
doute pas un signe caractéristique essentiel de l'Argus. » 


Comme il est facile de s’en rendre compte, Bergstraesser ne sait 
pas au juste à quoi rapporter son Argyrognomon. Le dessus bleu 
des ailes le fait penser sans doute à la © bleue d'Adoms; mais 
les taches d'argent du dessous s'opposent à ce rapprochement. 
L'hésitation de Bergstraesser reste visible. Il connaît A7gus et 
Ægon; mais il n'ose pas faire de son Ayrgyrognomon un A7gus, 
comme 1l s’est cependant presque résigné en ce qui concerne ses 
Argyrotoxus et Argyra, à les reconnaître pour Ægon. 


J'ai déjà donné dans la XX° livraison des Etudes d'Entomo- 
logie, aux pages 26, 27 et 28, des renseignements sur Argus et 
Æ gon et j'ai publié dans le même ouvrage, sur les PI. 4 et 5, de 
nombreuses figures d’Argus et d'Ægon que Dallongeville a gra- 
vées avec un véritable talent. 

létrappelle quelles n52,563, 64565, 56, 57et 59 représentent 
des Zycæna Argus, soit comme Aberrations, soit comme races 
géographiques de la Sierra-Nevada, de Rennes, des Hautes-Pyré- 
nées et du Valais. Les n* 50, 60, 61, 62 et 63 représentent des 
Ægon de la Sierra-Nevada, de Vernet-les-Bains, d'Angleterre et 
des Hautes-Pyrénées. Sous les n°° 64 et 65 de la PL 5, sont figurés 
Calliopis, Bdv., G'et ©, pris par moi à Uriage (Isère) et référables 
à Calliopis, dont les types que renferme ma collection, proviennent 


180 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


également de l'Isère. Le D' Boisduval avait recueillis ses Callioprs, 
dans le polygone de Grenoble. 

Je prie donc le lecteur de vouloir bien se reporter pour l'histoire 
d'Argus et d'Ægon à ce que J'ai écrit dans la XX° livraison des 
Etudes d'Entomologie; 11 y trouvera quelques renseignements que 
je ne crois pas devoir répéter ici. 

J'avais signalé dans mon ouvrage précité (p. 27) deux erreurs 
commises par Staudinger dans son Ca/alog, édition 1871; 1° lors- 
qu'il attribua à Argus, comme variété, la Lycæna Hypochona, 
Rambur qui est effectivement une race géographique d’Ægon; 
2° lorsqu'il rattacha à Ægon comme variété géographique, della, 
H. S. qui est réellement référable à Aygus. Il est vraiment 
dommage que Staudinger ait constamment vu de travers et se soit 
généralement trompé en ce qui concerne Argus et Ægon. Je dois 
reconnaître cependant que dans l'édition 1901 de leur Catalog, 
Staudinger et Rebel se sont décidés, conformément à mon redres- 
sement, à attribuer Æypochiona à ce que j'appelle Ægon,; mais 
ils ont probablement cru que leur dignité les obligeait à imprimer 
entre parenthèse et avec un point de doute, ces mots : (ax Argyro- 
gnomon var?) ce qui n'est pas soutenable. Quant à Bella, ils se 
sont entêtés à la laisser comme variété € de mon Ægon qui est 
devenu leur Argus. La vérité scientifique, seule considération que 
j'aie à cœur de faire prévaloir, m'oblige à dire que toute cette obsti- 
nation n’est pas raisonnable. Bella, Herr.-Schaeffer (O' 227, 228) 
est une forme d'Argus (Argyrognomon, sec. Stgr. et Rebel, 1901) 
et non d'Ægon (Argus, sec. Stgr. et Rebel, 1901). De même pour 
la var. Corsica d'Ægon qui est si curieuse avec les taches ocellées 
du dessous des ailes, brunes au lieu d’être noires, et que Staudinger 
avait omis de citer dans son Catalog, édition 1871, ce que J'ai fait 
observer à la page 20 de la XX°* livraison des Æ/udes d'Entomo- 
logie, pourquoi, dans le Catalog 1901, dire « vix nominanda », 
alors qu'il est manifeste que Corsica, Bellier, est une des variétés 
géographiques les plus remarquables et par conséquent les plus 
dignes d'être distinguées par un nom. Tout cela semble résulter 


d'une mauvaise humeur qui pourrait paraître enfantine et d'un 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 181 


amour-propre blessé; mais non du souci pur et simple de la 
recherche et de l'établissement de la vérité. 

Pour toutes ces raisons, J'ai cru devoir apporter dans cet ouvrage, 
un copieux faisceau de documentation sur la question A7gus et 
Ægon, en plus de ce que J'ai déjà publié dans la XX® livraison 
des Ætudes d'Entomologie, en mai 1806, et dans divers autres 
écrits. Aussi ai-je fait figurer dans cette IV° livraison des Æ/udes 
de Lépidoptérologie comparée un certain nombre d'exemplaires de 
provenances diverses qui Jjetteront, je l'espère, un peu plus de 
lumière dans la confusion que feu Staudinger et I. Rebel semblent 
s'être complu à parachever. 

Mais avant de fournir les explications nécessaires sur les races 
et variétés d’Argus et d'Ægon dont je publie la figure dans le 
présent ouvrage, Je crois utile de passer en revue et de citer les 
observations et les figures données, par les principaux auteurs dont 
je n'ai point encore parlé jusqu'ici, au sujet d'Argus et d'Ægon. 

Jacob Huebner, dans Peitrege sur Geschichte der Schmetterlinge 
(Vol. I; Augsbourg, 1786), figure sur la Taf. III, d'une manière 
très reconnaissable et avec infiniment plus de finesse et de vérité 
que Bergstraesser, le Cet la ©, en dessus et en dessous, la chenille 
et la chrysalide de Lycæna Argus, mais avec le nom de Papulio 
Asus, erreur de dénomination que le texte même écrit par Huebner 
rend difficile à expliquer. Plus tard, dans Sarmlung europæischer 
Schmetterlinge, Huebner a très correctement figuré Ægon, sous les 
nn, su etarsiet Ares, sousles n°%310,,31/7 318, dinsi que 
je l’établis déjà, en tête de cette notice. 

La forme d’Argus que Jacob Huebner représente sous le nom 
d'A /sus est assez voisine de celle qui vole dans les Alpes. Borkausen, 
dans Naturgeschichte der europæischen Schmetterlinge (Vol. I; 
1788) décrit à la page 152, l'Argus ou Stechginsterfalter, conforme 
Mrs Berestraessen (lab 52; fig. 1,,2,.3, 4). Il décrit aussi 
Ægon, à la page 154; il lui donne comme synonymes : A7gyro- 
toxus, Argyra et Argyrophalara, Bergstraesser. 

Le même auteur érige Argyrognomon, Bergstraesser, en espèce 


distincte, parce que dit-il elle était toujours solitaire « einsam » 


182 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


et qu'elle parut à une époque où A7gus était déjà passé « verflogen ». 
Il considère comme Spzelarten où Aberrations d’Argyrognomon, 
à moins que ce ne soit de la Q d’Aygus, Argyrocapelus, Argyro- 
copus, Argyrophylax, Argyroela, Argyrobius, Bergstraesser. 

Les Thérésiens, dans Sysfematisches Verzeichniss von den 
Schmetterlingen der Wiener Gegend, édit. 1801, citent (p. 272) : 

1° A7gus, Linné, dont la © a été appelée /das par le même 
auteur. Ils lui donnent comme synonyme A7gyrognomon, Bergs- 
traesser et 1ls indiquent comme plante nourricière de la chenille, 
Genista Germanica, Linné, ou genêt épineux. 

2° Ægon, dont ils font connaître le nom vulgaire : Gerssklee- 
falter. 

La chenille vit, disent-ils, sur Cytisus austriacus qui s'appelle en 
allemand : Geissklee. Ils ajoutent cette observation qui prouve 
l'intérêt qu'inspirait, il y a un siècle, aux Entomologistes, la ques- 
ton Ayrgus-Ægon : « Die Rechte dieser Art sind von so vielen 
vorzueglichen Entomologen in Schutz genommen, dass unsre Ver- 
theidigung derselben nur anmassung seyn wuerde. » ce qui signifie 
littéralement en français : « Les raisons d’être de cette Espèce sont 
prises en considération par un si grand nombre d'Entomologues de 
haute distinction que l'apologie que nous pourrions faire de ces 
raisons, serait de notre part une prétention superflue. » 

Fabricius, dans Mantissa Insectorum, 1787 (p. 74; n° 600), con- 
fond Argus et Ægon dans une même unité spécifique; il dit 
d'Ægon qu'il réunit à A7gus, « vix differt, quamvis minor. » sans 
doute il ne connaissait pas bien les deux espèces, ou 1l les avait 
mal étudiées. 

Esper, dans Die Schmetterlinge in Abbildungen nach der Natur, 
1777, figure sur la Tab. XX, l'Argus (O' fig. 4) et l’'Argus (Q 
Idas, fig. 5). Les figures sont grossières et tout aussi bien appli- 
cables à Æ gon qu'à Argus. Le même auteur représente avec le nom 
de Leodorus, sous les n° 1 et 2 de la Tab. LXXX, comme C et 
O, 2 Q : l’une, avec le dessus des ailes bleu, l’autre avec le dessus 
des ailes brun, de lÆgon méridional. « Ces papillons viennent de 
nos localités franconiennes, dit Esper; je les ai reçus semblables, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 183 


du Sud de la France; ils existent aussi dans les montagnes du 
Tyrol... » 

Pourtant les races d’Ægon en Franconie, au Tyrol et dans la 
France méridionale sont très différents. Mais Esper n'avait peut- 
être pas sous les yeux des exemplaires dont la provenance était 
très exactement indiquée; ou bien il aura manqué de se livrer à un 
examen attentif, comme il a fait pour Déspar qu'il appelle //:p- 
pothoë varietas et qu'il réfère à la même unité spécifique 
désignée auparavant par lui sous le même nom d’///ppothoë. 
Gb SOMME ne, 12; Tab KIT 23): 

Esper figure encore des Ægon ou des Argus, sous les n° 3 et 4 
de la Tab. CI et avec le nom A/sus; sous le n° 5 avec le nom A7gus 
et sous le n° 6 avec le nom Aygiades. Les figures sont très gros- 
sières. Je considère qu'il est très difficile d'identifier avec quelque 
certitude ces figures à Argus plutôt qu'à Ægon et vice versa; j'a 
beau les regarder; elles me laissent dans le doute et je ne crois 
pas que personne puisse dire exactement à laquelle des deux espèces, 
elles s'appliquent réellement. 

Freyer, dans Veuere Beitraege zur Schmetterlingskunde, 1830, 
figure Ægon sur la Tab. 175 et Argus sur la Tab. 160. Je crois 
que Freyer a fait des déterminations exactes, 

Lang (The Butterfies of Europe; 1884), représente sous le 
n° 1 de la PI XXIIL Æzon, et sous le n° 2, Argus, les figures 
dont la couleur est obtenue par des procédés chromolithographiques 
dépourvus de toute finesse, sont méconnaissables. 

Gerhard (Versuch einer Monographie der eur. Thecla, Polyom- 
matus, etc.; 1853) figure sous les n° 2 a, 2 6, 2 c de la PI 23, Ægon, 
Hbn.'et Q ; sous les n° 34, 36, 3c, avec le nom de Zeodorus, Hbn, 
une prétendue variété d'Ægon, ne semblant différer en rien du pré- 
cédent et sous les n° 4 4, 4 à, 4 c, avec le nom d’Ægidion, Meissner, 
et la mention de provenance : « Suedl. Europa », un petit Ægon 
dont l’auteur dit ce qui suit (p. 13) : « Diese Var. zeichnet sich 
besonders durch die Kleinheit und hellere Faerbung aus. Sie wurde 
mir durch die Guete des Herrn Superintendent D' Heydenreich in 
Weissenfels mitgetheilt. » ou, en français « Cette variété se dis- 


184 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


tingue surtout par la petitesse et la couleur plus claire. Elle m'a 
été communiquée par la bonté de M. l’Intendant supérieur 
D' Heydenrich à Weissenfels ». Evidemment, cet Ægidion 
rattaché à Ægon et venant du Sud de l’Europe, n’est pas le même 
Ægidion que celui de Meissner, originaire des Alpes et considéré 
comme une forme d’Argus, ou bien il y a, de la part de Gerhard, 
confusion entre Argus et Ægon. 

Sur la Pl 24, Gerhard figure A7gus, Linné sous/les nr, 
16, 1c; Acreon, Fabr, sous les n°® 24, 26, 2c, puis /smenias, 
Bksen, et Zyczdas, Bksen, tous les deux du Sud de l'Europe, sous 
les n° 3 a, 3 6, 3 c, 3 d'et 4 a, 4 b, et comme des variétés d'Argus. Les 
figures sans être absolument mauvaises, sont coloriées sans aucune 
délicatesse; de plus, l’auteur ne donne aucune précision aux loca- 
ktés d’où proviennent les papillons qu'il représente. Dans ces condi- 
tions, Je considère que les figures publiées par Gerhard sont pour 
la circonstance, sans utilité et ne peuvent être identifiées avec certi- 
tude. Cependant je crois que A7gus et Acræon, selon Gerhard, 
pourraient se rapporter plutôt à la race d’Argus que J'ai appelée 
ligurica, qu'à toute autre. 

Herrich-Schaeffer, le véritable maître des Iconographes, a figuré 
sous les n° 22; et 228 Bella, forme géographique d'A7gus et sous 
le n° 247, une superbe variété à ailes inférieures rayonnées d’A7gus. 


L'Ægon, selon Huebner (n* 313, 314 et 315), selon Barrett 
(Lepid. bnit. Islands} Plancher re, 12,16), habiteseulien 
Angleterre. L'Argus ne se trouve pas dans les Iles anglaises. 

On rencontre /Æ gon dans toute la moitié sud de l'Angleterre et 
dans le pays de Galles. Suivant Barrett, il est surtout abondant 
dans les bruyères de Dorset, Hants, Surrey et Berkshire; 1l est 
commun en Norfolk et en Suffolk; rare au Gloucestershire et au 
Somersetshire; il s'étend au Yorkshire et au Lancashire; récem- 
ment il a été signalé au delà de la Pass de Killiecrankie et aussi de 
Rannoch, en Perthshire. En Irlande, il parait être très rare et 
local. M. Birchall le signale de Murrough of Wicklow et de Ros- 


trevor. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 185 


J'ai sous les yeux une longue série d’Æ gon anglais, provenant 
des anciennes collections John Sang, de Darlington, et Howard- 
Vaughan; plusieurs sont étiquetés : Epping. 

La forme anglaise ressemble pour le G' à la race bretonne; mais 
les Q anglaises ont souvent les ailes, en dessus, plus ou moins 
saupoudrées d’écailles bleues, à la base des supérieures et sur le 
disque des inférieures, ce qui ne se voit que rarement chez les exem- 
plaires de la péninsule armoricaine. J'ai fait figurer sous le n° 62 
de la XX° livraison des Ætudes d'Entomologie, une © anglaise 
A6. radiata, quant aux points noirs des ailes en dessous. Je possède 
une autre © Ab. radiata de l’ancienne collection Prest, d'Vork. 

En Bretagne, on trouve les deux espèces Argus et Ægon; mais 
elles ne cohabitent pas dans toutes les localités. Le plus souvent 
Ægon est seul, sans Argus qui se rencontre seulement çà et là, 
généralement en petites colonies, et affecte des mœurs un peu 
spéciales et une époque d'apparition différente d’Ægon. 

Dans le Finistère, j'ai capturé Æzon, le 10 juillet 1900, au pied 
du mont Saint-Michel qui se trouve entre la Feuillée et Brasparts, 
au milieu des bruyères, sur le côté occidental de la grande route. 
Je l'ai vu aussi en grande abondance, au milieu de juin, sur la 
lande sauvage qui précède le chaos rocheux du Bec-du-Raz-de-Sein 
J'en possède une Q très intéressante de la forêt de Quimperlé, où 
elle fut prise par le lieutenañt Mathieu. Je n'ai jamais vu A7gws 
dans le Finistère. 

Ægon paraît vivre seul, c’est-à-dire sans la compagnie d’A7gus, 
dans les clairières fleuries de serpolet, d’Aelichrysum ‘stæchas, de 
rosa pimpinellifolia et de dianthus gallicus, dont le parfum a tant 
de suavité, au milieu de la forêt de pins qu'on a réussi à faire 
pousser dans les sables à la base de la presqu'île de Quiberon, 
du côté ouest de la route qui va de Plouharnel au Fort-Penthièvre. 
Nous avons plusieurs fois chassé en 1909, dans ce site d'aspect 
assez méridional, à cause des nombreux pieds d'Aelichrysum qui 
tapissent le sol. Les pins forment de précieux abris contre les vents 
et il y a entre les massifs d'arbres, des places un peu découvertes, 
très fleuries dans lesquelles on voit voltiger les Zycæna Ægon. 


186 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


L'Argynnis Pandora n'est pas rare dans cette localité et elle est 
d'un bel effet, lorsqu'elle vole un peu haut, au-dessus des branches 
de pins, ou bien quand elle se pose sur le sable, chauffé par le 
soleil, étalant ses ailes de façon à ne pas souffrir des coups de 
vent. C’est seulement au printemps, les 4, 5 et 6 juin que la Zycæna 
Æ gon fut trouvée en grand nombre. Aux premiers jours de juillet, 
le nombre m'en parut beaucoup moins grand et vers le 10 août, 
on ne voyait plus que de rares exemplaires complètement déflorés. 
Ma collection contient une série de plus de 400 échantillons, dont 
le plus grand nombre fut récolté par M. P. Boulé, au commence- 
ment de Juin. 

La race à Plouharnel est petite; le O' est gris de lin en dessous; 
quelquefois ses ailes inférieures en dessus sont ornées de taches 
marginales aurore; assez souvent il y a une grosse tache noire en 
forme de barre sur le milieu des ailes inférieures en dessous; Je 
possède ainsi 7 exemplaires semblables, pris en 3 jours de chasse. 
J'ai fait figurer le O' et la Q de cette Aberration sous les n° 252 
et 253 de la PL XXXVIII de cet ouvrage. J'ai donné à cette 
Aberration, le nom de Plouharnelensis. Exceptionnellement, on 
trouve de superbes rayonnements, tel le n° 251 qui paraît un des 
plus beaux spécimens connus de l'Ab. adiata. Les Q sont très 
obscures; sur 100 exemplaires que j'ai sous les yeux, 5 exemplaires 
ont quelques atomes bleus surmontant la bande marginale orangée 
des ailes inférieures, en dessus. Chez un peu plus de la moitié des 
100 exemplaires, cette bande marginale orangée s'étend plus ou 
moins largement le long du bord terminal des ailes supérieures. 
Généralement, elle n’est pas très accentuée. Une seule Q est 
presque unicolore d’un brun profond, un peu doré, sans aucune trace 
de tache orangée. Ægon vole aussi en exemplaires isolés, mais 
fréquents dans les landes de Carnac, sur les bruyères et les aJoncs 
qui croissent entre les alignements des pierres druidiques. 

Cette année 1900, j'ai trouvé pour la première fois au mois de 
juillet, depuis près de cinquante ans que je chasse dans ces parages, 
la Lycæna Ægon, sur la côte nord de Bretagne, dans des landes 
de bruyère et d’ajonc, sur la falaise du côté ouest de la pointe 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 187 


du Grouin, près Cancale. Le vent du nord-ouest y arrive du large, 
souvent violent et brutal. Semblant s'élever de la mer comme pour 
monter à l'assaut de la falaise, son souffle impétueux oblige toutes 
les herbes qui en tapissent les pentes, à s’incliner dans le même 
sens, sous l'effort de son habituelle furie. Il semblerait que les 
papillons devraient être chassés et repoussés au loin par ces rafales 
chargées, comme une pluie fine, de parcelles de l’écume salée. Il 
n'en est cependant rien, et au commencement de l'été, on voit ordi- 
nairement un grand nombre de Lépidoptères appartenant princi- 
palement aux Argynnis, Satyride, Lycenide, Hesperidæ voltiger 
ensemble sur ces falaises d’ailleurs très fleuries. La Lycæna Ægon 
ne semble pas autant redouter l’aquilon que la Lycæna Argus; 
celle-ci se plaît, en effet, dans des sites plus abrités. 

La Lycena Ægon, à Cancale, m'a donné une Q supra cærulea, 
dont les ailes supérieures sont assez largement recouvertes d'un 
semis épais d’écailles d’un bleu métallique foncé. 

Dans l’intérieur des terres, j'ai rencontré Ægon et Argus, coha- 
bitant à la forèt de Rennes, où les deux espèces volent presque à 
la même époque, dans les allées herbues, sur les relais des routes 
qui sont pourvus d'une végétation abondante et dans les clairières 
où poussent les bruyères spécialement l’Erica tetralix et le Genista 
anglica. Argus, dans la forêt, paraît rare, isolé et comme erratique, 
tandis qu'Ægon y est beaucoup plus commun. 

Argus n’est pas rare à Laillé, près Rennes. J'ai capturé Argus 
à Bourg-des-Comptes, dans les prés un peu humides, sur les bords de 
la rivière du Canut. M. P. Boulé a trouvé Ægon, en grand nombre, 
dans l'arrondissement de Redon, notamment à Pipriac; mais 
chassant plus souvent à Monterfil qu'ailleurs, en lile-et-Vilaine, 
c'est dans ce pittoresque pays que nous avons trouvé plus d'occa- 
sions d'observer les deux Zycæna Argus et Ægon, de les comparer 
et de noter leurs différences biologiques. 

Ægon éclôt à Monterfil une seule fois, en juillet; Argus y 
paraît d’abord en juin, puis en août et septembre. Cette année 1900, 
j'ai pris, le 2 juillet, les deux espèces : Argus finissant et Ægon 
commençant. Ægon se plaît sur les plateaux et sur les sommets 


188 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


pierreux, secs et arides des landes, où la végétation est maigre et 
représentée surtout par des touffes d’ajonc et de bruyère cendrée. 

Au contraire A7gus aime à vivre par colonies, dont les membres 
ne s'éloignent guère du lieu qui les a vus naître, sur les pentes des 
collines ou bien dans le fond des vallées, là où l’humus plus pro- 
fond permet aux bruyères molles (Ær2ca ciliaris) de se développer 
largement, en mélange avec les ajoncs et les genèts, dans lesquels 
j'ai lieu de croire que vit chez nous la chenille de Zycæna Argus. 

Au bas de la lande de Roveny dont le sommet est décoré d’une 
belle croix de granit élevée tout récemment par la population entière 
de Monterfil ainsi qu'au temps des ancêtres, il y a, le long du petit 
ruisseau qui coule au fond du thalweg entre les pierres et les 
osmondes royales, un espace plan assez large, planté de quelques 
arbres, couvert de genêts, de bruyères communes et de fougères. 
Un peu plus loin, s'étendent dans un site découvert, entre le ruisseau 
et le sentier qui serpente au bas du coteau, de vigoureuses touffes 
d'Érica ciliaris. Ce fut pour moi un véritable plaisir de récolter, 
le 22 juin 1900, les Argus qui voltigeaient assez nombreux dans 
cette vallée chaude abritée du vent et formant un paysage très 
agreste, riant et fleuri. Les © se reposaient principalement sur 
les branches de genêt, ou près de terre, sur les touffes de bruyère. 
il y en avait de superbes, d'une teinte brun noirâtre un peu mor- 
dorée, en dessus, et d’une couleur très foncée en dessous, rehaussée 
par la bordure marginale rouge orange des ailes et la rangée de 
petits points métalliques d’un bleu argenté si brillant, près du 
bord terminal des inférieures. 

Les ©, d’un bleu violacé en dessus et d’un brun plus foncé et 
plus ocreux en dessous que dans aucune autre région, généralement 
grands et très actifs, tant que brillaient les rayons du soleil, volti- 
ceaient et se reposaient alternativement dans le vallon de Roveny, 
sur une longueur d'une centaine de mètres qu'ils ne dépassaient 
guère, s’offrant comme une proie facile; car ils revenaient toujours 
autour des plantes qui leur plaisaient. Me trouvant sur le sentier 
d'où je pouvais dominer les bruyères au bas du vallon, Je m'arrêtai 
plusieurs fois et j'interrompis momentanément ma chasse, pour jouir 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 189 


du charmant spectacle que m'offraient ces jolis papillons, les uns 
produisant un vol si animé, les autres posés et étalant leurs ailes 
bleues sur les touffes d’'Æyica ciliaris dont les fleurs roses et pur- 
purines étaient alors dans toute leur fraicheur. 

J'ai donné à la Lycæna Argus de Monterfil et de Bourg-des- 
Comptes où la race paraît être la même, le nom qui me paraît bien 
justifié d'Armoricana. 

L'Argus armoricana se trouve çà et là, dans les plaines du centre 
et de l’ouest de la France, plus ou moins caractérisé; je la possède 
de Belle-Isle-en-Mer (Morbihan) où elle vole en mai; de Dax 
(Landes), de Fontainebleau; de St-Germain-en-Laye; de la forêt 
de Livernant, en Charente; mais nulle part, je n'ai vu des exem- 
plaires plus beaux et méritant mieux d'être distingués par un nom 
géographique, que ceux des environs de Rennes. 

On peut même rattacher à l'Arworicana, Argus de Fusio 
(Tessin), où mon frère en captura une douzaine d'exemplaires, du 
10 au 14 juillet 1907. Les © de Locarno (16 juillet 1907) appar- 
tiennent encore à la race armoricana, comme celles de la forêt de 
Livernant, auxquelles elles ressemblent surtout; mais les c de 
Locarno, en dessous, sont plus gris et moins bruns que les nôtres, 
ainsi du reste que ceux de Livernant. Ils font la transition de la 
race Armoricana dont le maximum d'intensité se trouve dans la 
presqu'île armoricaine, aux autres races qui vont faire plus loin 
l'objet de nos observations. 

Ægon, à Monterfil et à la forêt de Rennes, quoique souvent de 
taille égale, est très différent d'Argus. Le CG Ægon a les ailes, en 
dessus, d’un bleu plus clair, quelquefois assez largement Lordé de 
noir, tandis que le G' Argus est d'un bleu violacé, avec une bordure 
noire très fine. En dessous, Ægon Ga le fond des ailes gris de lin, 
sans points métalliques brillants aux inférieures, alors qu'Argus Œ 
est, sous ce rapport, très bien orné. Les Q Ægon sont d'un brun 
sombre en dessus, comme en dessous; mais présentant un aspect, 
surtout en dessous, tout autre que celui des Q Argus, à cause de 
leur bordure orangée moins accentuée et de leurs points bleus métal- 
liques moins éclatants. De plus, les points noirs qui constellent le 


100 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


dessous des ailes des deux espèces sont, chez Ægon ©, finement 
cerclés de blanc, ce qui n’a pas lieu chez A7gus. Enfin ces points 
noirs sont plus gros chez l'Ægon que chez l’Argus breton. Argus, 
chez nous, tend quelquefois à avoir les points noirs du dessous des 
ailes allongées, de façon à former un rayonnement. Cette disposi- 
tion existe aussi chez Ægon, mais plus rarement. 

En Maine-et-Loire, je ne connais pas A7gus, J'ai seulement sous 
les yeux une assez longue série d'Ægon qui furent pris par 
M. P. Boulé, dans les landes de Milly, en juin 1900. La race 
d'Ægon, à Milly, est beaucoup plus petite qu'aux environs de 
Rennes; comme à Rennes, le &, en dessous, a les points bleus 
métalliques très peu développés et souvent nuls, Les © sont obscures 
et je n’en ai pas vu ayant des atomes bleus sur le dessus des ailes. 


Argus et Ægon sont des espèces de plaine et de montagne; 
elles sont répandues aussi bien en Laponie qu’en Andalousie, c'est- 
à-dire à l'extrême Nord, comme à l'extrême Sud de l'Europe; de 
plus de l'Ouest à l'Est, Argus et Ægon se rencontrent depuis les 
confins de la péninsule armoricaine jusqu'aux bords de la mer du 
Japon. Dans des altitudes si différentes et des climats si divers, 
il n’est pas surprenant que des races très tranchées se soient pro- 
duites. 

L'une des formes géographiques les plus remarquables est celle 
de Corse. Argus, notamment à Bastelica (Powell) et dans les 
montagnes de l’île (Bellier) est généralement de grande taille. 
Le c'est, en dessus, d’un bleu violet un peu sombre, presque comme 
Acis (Semiargus), avec une bordure noire nette et assez large. En 
dessous, le fond des ailes est gris; les points noirs sont gros et 
cerclés de blanchâtre; les taches bleu métallique du dessous des 
ailes sont peu apparentes chez le ©, un peu plus accentuées chez 
la ©. La couleur fauve orangé qui surmonte les taches bleu métal- 
lique, le long du bord terminal des ailes inférieures, en dessous, 
est tellement pâle chez le G', qu’elle paraît à peine se distinguer 
de la teinte grise du fond. Chez la ©, la couleur fauve orangé 
est plus prononcée. Le dessus des aïles de la Q est d'un brun 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE IOI 


noirâtre uni, avec les points noirs marginaux des inférieures plus 
foncés; un lavis bleuâtre s'étend près de la base et vers le bord 
inférieur des ailes; on ne voit pas de taches fauves le long du bord 
terminal des secondes ailes. 

Guenée regardait la forme corse d’Argus comme une espèce dis- 
tincte; il lui avait donné le nom de Be/lieri que je lui maintiens. 
Ma collection contient 2 exemplaires d’Argus-Bellieri avec les 
taches noires du dessous des ailes transformées en taches longues 
rayonnantes et une trentaine d'individus normaux. 

Une autre race d'Argus dont le G seul se rapproche de Bellieri, 
est celle que mon frère a prise dans la Sierra-Nevada d’Anda- 
lousie, en juillet 1870. Bien que j'aie déjà fait figurer un Argus 
nevadensis G, sous le n° 54 de la PL 4 de la XX® livraison des 
Etudes d'Entomologie, je fais encore représenter sous les n°% 259 
et 260 de la PI. XXXIX du présent ouvrage, un G' et une Q de 
cette forme si remarquable Elle est extrêmement belle, grace sur- 
tout au développement et à l'éclat exceptionnels des points bleu 
métallique, le long du bord terminal des ailes inférieures, en 
dessous. Par le dessus, le G se distingue peu d’Argus Bellieri 5; 
cependant le bord des ailes inférieures est un peu dentelé 
chez Nevadensis; le dessous de Nevadensis est d'un gris café au 
lait clair, avec les parties fauves marginales assez accentuées et les 
points bleu brillants très gros et d’un éclat très vif. Les points 
noirs du dessous sont à peu près comme chez Bellieri. La Q Neva- 
densis, en dessus, est brune avec le bord marginal fauve aux quatre 
ailes. Le dessous est couleur café au lait, avec les points marginaux 
bleu brillant des inférieures, exceptionnellement grands et éclatants. 

En Corse, comme en Andalousie, les Ægon présentent des varia- 
tions géographiques aussi intéressantes que les Argus des mêmes 
contrées. Bellier a appelé corsica la forme d'Ægon de l'ile de 
Corse et a publié dans les Annales Soc. ent. France, 1862, sous le 
n° 5 de la PI. 14, la figure du dessous des ailes de la © Ægon- 
Corsica; il a décrit la variété en question à la page 615 des mêmes 
Annales. La Q Ægon-Corsica a le fond des aïles brun en dessus, 
avec les disques saupoudrés d’un épais semis d’atomes bleus, 


102 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


s'étendant plus ou moins largement; mais, en dessous, chez les 
deux sexes, les points noirs ordinaires sont d’un ton brun à peine 
plus foncé que le fond sur lequel ils se détachent pourtant très 
nettement, au moyen du cercle blanc qui les entoure. Outre les 
types de la collection Bellier, je possède de beaux échantillons 
pris par M. Powell, en juin 1803. Le papillon est commun dans 
les montagnes de la Corse, où sa chenille vit sur une espèce d’As- 
tragale, selon Bellier. 

En Andalousie, Ægon présente sa magnifique forme /7ypo- 
chiona, Rambur, décrite dans le Catalogue systématique des Lépi- 
doptères de l'Andalousie, aux pages 35-37. Rambur cite aussi 
Ægon comme se trouvant, mais rarement, dans les montagnes de 
la Sierra-Nevada et il indique les montagnes des environs de 
Grenade, comme patrie de son ÆZypochiona, qu'il érige au rang 
d'espèce spéciale. Je possède une assez grande quantité d'A ypo- 
chiona andalous; les uns ayant fait partie de la collection de 
Graslin qui les avait capturés, en compagnie de Rambur, à Grenade 
et à Alfakar, d'après les étiquettes encore attachées à l’épingle des 
papillons; les autres de la collection Rosenhauer (ze There 
Andalusiens); et enfin la plus grande quantité et les plus beaux 
exemplaires pris par mon frère, en juillet 1870, dans la Sierra- 
Nevada, du côté de Lanjaron, à la Sierra-de-Alfakar et aux envi- 
rons immédiats de Grenade. Ce qui caractérise 7 ypochona, c'est 
la couleur blanche un peu bleuâtre, mais très vive et très éclatante 
du dessous des ailes, chez le G', ainsi que la teinte café au lait clair 
du dessous des ailes, chez la Q; de plus les points bleu brillant 
du dessous des ailes, chez la © surtout, sont magnifiquement 
métalliques. Le ' est d’un bleu un peu transparent et comme 
rosé, en dessus, avec la frange longue et très blanche; les points 
noirs marginaux des ailes inférieures, en dessus, très développés 
et gagnant même le bord des ailes supérieures, où l’on compte, 
chez certains exemplaires, autant de points qu’il y a d'espaces intra- 
nervuraux. La largeur de la bordure noire est variable chez les O; 
én dessous, les points noirs sont gros, vifs, et comme dit Rambur, 


la ligne médiane des points noirs est anguleuse après son milieu. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 103 


Les ©, en dessus, sont tantôt brunes, tantôt plus ou moins large- 
ment lavées de bleu, surtout près de la base des ailes; le bord 
marginal des quatre ailes, chez la ©, est orné d’un feston fauve 
orangé, en dessous, servant à accompagner, mais du côté intérieur 


des ailes seulement, la rangée de points noirs intranervuraux. 


Déjà, j'ai fait figurer sous les n° 50 et 60 de la PI 4 de la 
XX® livraison des Etudes d'Entomologie, les deux sexes d'A yp0- 
chiona; mais grâce à l'influence exercée sur les Entomologistes de 
notre temps par le Catalog Staudinger et Rebel, dont les assertions 
sont, par tant de nos confrères, acceptées comme l'expression d’une 
infailhibilité absolue, bien peu nombreux sont les Lépidoptéristes 
qui attachent à Æypochiona et aux variations diverses d’Argus 
et d’'Ægon — dont il semble que le Catalog en question se soit 
complu à diminuer l'importance — l'intérêt que pourtant ces races 
géographiques méritent si légitimement et à un si haut degré. Dès 
lors, J'ai cru devoir, comme pour Argus-Nevadensis, faire repré- 
senter de nouveau et sur la même planche, en vis-à-vis, Ægou- 
Hypochiona. On pourra alors aisément, par cette comparaison 
dont les termes sont si voisins, se rendre exactement compte des 
différences si grandes qui distinguent A7gus et Ægon dans le 
même pays, et aussi des différences qui distinguent les Argus entre 


eux et les Ægon entre eux, suivant les pays d’où ils proviennent. 


C'est dans les parties peu élevées de la Sierra-Nevada et dans 
les environs de Grenade, que se trouve la plus belle forme d’77y0- 
chiona; je ne connais pas l'Ægon des grandes hauteurs de l’Anda- 
lousie; mais, comme dans les Pyrénées-Orientales, où les deux 
formes d’Ægon se trouvent : l’une, Fypochiona, en bas, dans les 
parties chaudes; l’autre, alpina, en haut, dans les régions alpines, 
on doit rencontrer à la Sierra-Nevada, sur les pâturages alpestres, 
une race d'Ægon qui, par les ailes du O' : « violaceo-cæruleis, 
marginibus externis latis nigris », comme dit Rambur (loc. cit, 
p. 37), ressemble certainement beaucoup à celle des hautes mon- 
tagnes des Pyrénées-Orientales. Malheureusement, je n'ai pas 
encore vu en nature cet Ægon alticole de l’Andalousie. 


15 


104 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 

La forme }ypochiona des contrées chaudes du midi de l'Es- 
pagne, se retrouve avec ses caractères essentiels, mais plus ou moins 
atténués, dans la Catalogne, en Castille, dans les Pyrénées-Orien- 
tales, le Languedoc méditerranéen et jusqu'à Celles-les-Bains 
(Ardèche). 

Guenée avait rangé dans une des petites boîtes de verre qui 
contenaient sa collection, une série d'Ægon qu'il avait pris ou 
élevés de la chenille à Celles et il avait rattaché ces Ægon au 
Leodorus, Esper (Tab. LXXX,; fig 1). Les Q Ægon, à Celles, 
sont sablées sur le dessus des ailes, de bleu pâle, avec une ligne 
blanche autour de la partie inférieure des points noirs marginaux 
des secondes ailes. La chenille vit sur le Dorycnium suffruticosum 
et suivant Guenée, elle diffère de celle figurée par Huebner. 
Guenée ajoute que les chenilles d'Ægon, à Celles, sont cannibales; 
elles se dévorent entre elles et mangent aussi leurs chrysalides. 
Guenée ne connaissait pas l’Æypochiona d'Andalousie. 

Nous avons pris, mon frère et moi, un nombre considérable 
d’Ægon dans les Pyrénées-Orientales. Sur la montagne aride qui 
sépare la vallée du Vernet de celle de Feuilla, l'Ægon est commun 
depuis le mois de juin. Là, poussent en touffe, les Dorycrium, des 
cistes et des thyms; en outre, quelques chênes un peu rabougris, 
des pins souvent dévorés par les Cnethocampa pityocampa, des 
ronces, des chèvrefeuilles et des prunelliers, quelques restes de 
vigne constituent la végétation principale de cette petite montagne. 

La race des Ægon qui l’habite, est l'Jypochiona; mais moins 
accentuée qu'en Andalousie, plus petite, avec le dessous des ailes 
du &œ d’un blanc moins éclatant. J'ai fait figurer sous le n° 61 
de la PI. 4 des Etudes d'Entomologie (KX° liv.), une Q Ægon- 
Hypochiona, de Vernet-les-Bains, capturée à une faible altitude, 
dans la région chaude de la vallée. 

On trouve dans cette localité la variété c rufomaculata, Reverdin, 
chez laquelle les points rouges marginaux du dessous des ailes 
inférieures transparaissent en dessus. C’est ainsi qu’en Juin IOO1, 
j'ai capturé au pied du col de Feuilla, 2 G' dont l’un présente 


3 lunules rougeñtres et l’autre 2, surmontant, le long du bord mar- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 105 


ginal des ailes inférieures, les points noirs ordinaires. Je me 
souviens d'avoir remarqué chez l’un des exemplaires, une rougeur 
sur le dessus des ailes, tandis qu’il volait devant moi, et quoique 
les taches rouges soient bien nettes, je fus déçu, lorsque le papillon 
fut piqué dans ma boîte; parce que en le voyant voltiger, 
Je croyais les taches rouges bien plus développées. MM. Chapman 
et Champion, pendant un voyage effectué en 1906 dans la province 
de Galice, au Nord-Ouest de la Péninsule Espagnole, ont découvert 
dans la vallée de Casayo une forme d’Ægon, appelée par eux 
Argus, en conformité du Catalog Staudinger et Rebel 1901, 
remarquable par le développement des taches rouges aux ailes 
inférieures du ©, en dessus. Cette variété a été désignée sous le 
nom de casaiacus; elle est décrite et figurée dans les Transactions 
of the entomological Society of London, 1907, p. 158, 159 et 
PI V, © fig. 16, 17 et 19; Q fig. 18. Grâce à la bienveillance de 
MM. Chapman et Champion, je possède 3 © de casaiacus pris à 
Casayo, du 2 au 8 juillet 1908; un seul de ces casaiacus a deux 
croissants rouges bien apparents; chez les deux autres, ils sont très 
faiblement indiqués. Les 2 Ægon que j'ai pris au Vernet sont plus 
vivement marqués de rouge que le plus caractérisé des casatacus; 
mais je pense que les casaiacus recueillis par MM. Chapman et 
Champion n'étaient pas tous aussi bien marqués de rouge aux ailes 
inférieures et que les exemplaires les plus fortement décorés sous 
ce rapport, ont eu les honneurs de la figuration sur la PI V des 
Transactions de 1007. 

Dans les plaines accidentées du midi de la France, à Cannes, 
à Marseille, à Montpellier, on trouve en juin de superbes Æ go. 
Les G' sont en dessus d’un bleu clair, légèrement violacé; les © 
sont largement bordées de rouge orangé, avec des traits blancs 
comme à Celles-les-Bains, soulignant les points noirs, le long du 
bord marginal des ailes inférieures, en dessus; et elles ont souvent un 
lavis bleu sur le fond brun des ailes. La frange est souvent blanche 
à l’apex et brun clair autour des ailes. En dessous, le C'est blanc 
bleuâtre vif et la Q café au lait clair; les points vert brillant sont 


petits, mais fréquents. 


106 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


De plus, il y a à Casayo et à Vernet-les-Bains, ainsi que je viens 
de l’exposer, une tendance au développement des taches rouges sur 
le dessus des ailes inférieures du G'; comme si ces G' participaient 
à une ornementation dont les © sont plus normalement l’objet. 

Si nous passons maintenant à l'examen des Ægon de Digne, 
nous constatons une race assez intermédiaire entre l’Zypochtona 
et l'Alpina; mais dans les Basses-Alpes aussi, la forme change avec 
l'altitude des lieux. Dans les localités chaudes et relativement 
basses, les Æzgon S ont le dessus des ailes d’un bleu violâtre clair, 
tandis que la teinte est d’un bleu violacé plus sombre dans les 
hauteurs. En dessous, la forme des hautes altitudes est d’une teinte 
sombre, grise, un peu brunie; tandis que dans les lieux plus bas 
et plus chauds, le fond du dessous des ailes est d'un gris blan- 
châtre clair, avec la base bleuâtre. Aussi les points métalliques du 
dessous apparaissent plus fréquemment dans la race méridionale 
et ne se montrent pour ainsi dire jamais dans la forme alpine. 

Je possède de Digne un Æ gon Œ presque complètement dépourvu 
des points noirs ordinaires en dessous et une © admirablement 
rayonnée, surtout aux ailes inférieures. 


Dans les Alpes françaises, dans les Pyrénées-Orientales et les 
Hautes-Pyrénées, on trouve une race d’Argus tout à fait différente 
de celle des plaines de l'ouest et du centre de la France, de la 
Corse et de l'Andalousie. Cette race semble être celle que Huebner 
a figurée avec le nom d’A/sus, sous les n°° 3 a, 6, c, d (N) de la 
Taf. III de son ouvrage Beitraege sur Geschichte der Schmetterlinge 
(Augsbourg, 1786). 

Les exemplaires figurés par Huebner seraient la forme géogra- 
phique d'Augsbourg; car il termine sa notice explicative par ces 
mots : « In der Augsburgergegend nicht selten ». 

Cette race géographique d'Argus me paraît être à peu près la 
même à Cauterets et Gavarnie dans les Hautes-Pyrénées; au plateau 
gazonné de Mariailles, vers 1,600 à 1,800 mètres dans les Pyrénées- 
Orientales; à la Grave, au col du Mont-Genèvre, au Lautaret, dans 
les Hautes-Alpes: au Mont-Pelat, à Saint-Martin-d'Entraunes, à 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 107 


Larche, à Allos, à Enchastrayes, dans les montagnes autour de 
Digne (Basses-Alpes); aux environs de la route du Simplon, à 
Arolla, à Ryffelalp, en Suisse. J'ai fait figurer sous les n° 57 et 
58 de la PI 4 de la XX° livraison des Etudes d'Entomologie, le 
dessous des ailes de deux © Argus des Hautes-Pyrénées et du 
Valais. 

Les points noirs du dessous sont petits; la couleur du dessous 
des ailes est d’un gris un peu brun, terne, pas très foncé, même 
chez la ©. Les C' sont, en dessus d’un bleu violet, avec une bordure 
noire étroite; mais cette bordure noire semble fusionner avec les 
nervures qui deviennent noires au contact du bord terminal. Huebner 
représente assez bien, dans la fig. 3 4, une sorte de pli intranervural 
qui se produit, près du bord des ailes, parallèlement aux nervures. 
La race A/sus, Huebner se rapproche beaucoup de celle de Scandi- 
navie; je crois qu'Ægidion, Meissner, n'est qu'un synonyme d’A/sus 
et qu'Alsus n'est autre chose que l'Azgus linnéen. Il n’y a donc 
pas lieu de maintenir les noms d'Ægidion et d’Alsus ; ils ne 
désignent rien d'autre que l'Argws, Linné, de Scandinavie, des 
Alpes et des Pyrénées. 


Les © sont plus variables que les G'; il y en a de brunes, il y 
en a de bleues; il y en a de plus ou moins bordées de fauve orangé 
en dessus. La © figurée par Huebner, sous le n° 3 c, a la base des 
ailes lavée de bleu verdâtre et un beau développement des ocelles 


et croissants fauves sur le bord des quatre ailes. 


Comme je l’expose ci-dessus, les Q Aygyrognomon, Argyro- 
capelus, Argyrocopus, Bergstraesser, sont probablement des Q 
bleues d'Argus; mais à cause de la grossièreté du dessin et du 
coloriage des figures, il est impossible d'identifier à quelque pa- 
pillon qui soit exactement conforme, les figures et par conséquent 


les noms que Bergstraesser a inventés pour les figures en question. 
J'ai fait figurer dans la 1° livraison des Ætudes de Lépidopt. 
comparée, des Q Argus que j'ai appelées valesiaca. 


Certains Entomologistes penseront peut-être que ce sont des 
Argyrognomon, des Argyrocapelus ou des Argyrocopus? Comme 


108 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


les valesiaca sont variables, 1l est possible qu’on cherche à utiliser, 
pour les désigner, les noms de Bergstraesser; malheureusement la 
fantaisie tiendra toujours une large place dans cette identification 
et à cause de l'impossibilité de les appliquer exactement, mon opi- 
nion est d'en abandonner l'emploi purement et simplement. 

Calliopis, Bdv. (lcones; PI. 15; fig. 4 et 5) est une intéressante 
spécialité; j'ai fait figurer sous les n° 64 et 65 de la PI. 5 de la 
XX" livraison des Ætudes d'Entomologie, un C' et une Q Calhopis 
que j'avais pris à Uriage (Isère). En Dauphiné, Calliopis a les 
points noirs du dessous des ailes très réduits et Je n'ai pris nulle 
part ailleurs cette forme. Il y a lieu d'observer, comme Je l’ai du reste 
déjà dit à la page 28 de cette XX° livraison, qu’en outre de Cal- 
liopis, on rencontre aux environs d’Uriage une autre forme d’A7gus 
dont je parlerai plus loin. 

Les mœurs de ces Argus linnéens sont bien différentes de celles 
de l'Argus-Ayrmoricana et elles changent aussi avec les localités. 
Dans les Hautes-Alpes, en montant de Briançon pour aller à Cla- 
vières, en Italie, par la route du col du Mont-Genèvre, Argus d' se 
trouve en grande quantité, près du col, mélangé à d’autres espèces 
de Lycæna et à des Hespéries, posé sur la terre un peu fraîche des 
talus qui s'élèvent sur les côtés du chemin. Lorsqu'on inspecte ces 
talus, on aperçoit de temps à autre, sur la terre humide, une de ces 
réunions. Les Zycæna se trouvent serrés très près les uns des 
autres et il est facile, en mettant le filet sur un bon coin, de cap- 
turer à la fois trente ou quarante exemplaires, quelquefois même 
davantage. Comme ils s’agitent dans le filet, il y a toujours des 
échantillons qui sé gâtent, avant qu'on ne réussise à les faire 
pénétrer dans le flacon chargé de cyanure ou de chloroforme; mais 
on peut aisément discerner les espèces entre elles et Je me souviens 
qu'Argus, en juillet 1906, était au col du Mont-Genèvre, de beau- 
coup le plus abondant des Zycæna. Donseli qui arrivait sans 
doute des forêts de mélèzes voisines, était le plus rare de tous. 
Dans les Hautes-Pyrénées, c'est sur les pelouses rases où poussent 
les lotus et les thyms herbacés, en mélange de fines graminées, que 
l'on voit voltiger Argus, généralement assez près de terre et en 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 199 


petit nombre d'exemplaires. Il y a sur la montagne du Péguère, 
à Cauterets, le long du chemin qui mène à la Glacière et aussi un 
peu plus bas sur le sentier, au-dessus de la maison hospitalière, 
de bonnes places pour trouver A7gus. À Gavarnie, quand on sort 
du village dans la direction de la célèbre cascade, il est fréquent, 
pour peu que le soleil brille au firmament, de rencontrer des 
groupes de Lycæna et d'Aespéries posés sur les parties humides 
de la route, le long du ruisseau, à partir d’un gros rocher dans les 
fentes duquel pousse la jolie Ramondia pyrenaica, aux fleurs d'un 
violet si tendre. 

De nombreux touristes ne cessent de passer, à pied ou à cheval, 
sur le chemin, et les papillons sont fréquemment dérangés dans leur 
tranquillité. Les Syrichthus, Hesperia et Carcharodus agiles et 
pleins de vivacité vont et viennent d’un vol rapide; mais les 
Lycæna, parmi lesquels figurent Argus, Ægon, Acts, minima, 
pyrenaica, etc, reviennent généralement le plus promptement pos- 
sible aux flaques de boue qui, durant les jours chauas de l'été, leur 
offrent un si irrésistible attrait. Maintes fois, sur ce chemin que Je 
suis toujours heureux de parcourir, j'ai observé les Zycæna Argus 
avec leurs congénères; ils se présentent cependant bien moins 
nombreux que les Ægon, au filet de l’'Entomologiste. Mais pour 
venir se rafraîchir sur la boue des sentiers où les chevaux et les 
mules laissent si souvent de leurs traces, dont les papillons d'appa- 
rence si délicate semblent pourtant très friands, les O' seuls 
quittent le lieu qui les a vus naître, c'est-à-dire leur véritable patrie, 
celle à laquelle les Q restent plus fidèlement attachées. 

Plus loin, en continuant la route vers le Cirque de Gavarnie, on 
rencontre une vaste pelouse rase où l'Erebia Tyndarus paraît 
nombreuse, en même temps que la Zycena Ægon, à gauche de la 
large grève au milieu de laquelle s’écoulent les eaux du torrent et 
avant d'atteindre la montagne boisée, si admirablement décorée par 
la magnifique floraison bleue de l’Zris Xiphioides qui croît en touffes 
nombreuses, dans les clairières, au milieu des pins. On trouve quel- 
quefois des Ægon en gravissant la pente rude et escarpée de cette 
montagne au delà de laquelle on parvient enfin au but désiré; 


200 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


mais la Zycæna la plus abondante en ce lieu me paraît être Acis 
(Serzargus), plutôt qu'Ægon. 

Dans la pelouse qui s'appelle, je crois, la prade Saint-Jean, la 
Lycæna Ægon est d'une forme bien différente de l'Æypochiona, 
d'Andalousie ou des parties chaudes du Roussillon et du Lan- 
guedoc. C’est un papillon plus petit; le Gest d’un bleu plus foncé en 
dessus, avec une bordure noire élargie; le dessous est gris et non 
plus d’un blanc éclatant; les points métalliques sont éteints, sauf 
chez la Q où ils existent encore, mais sans être bien larges, ni 
brillants. Telle est la forme de la Norwège où l’a prise mon fils, 
le D° J. Oberthür, des Alpes et des parties élevées des Pyrénées. 

J'ai déjà fait figurer sous le n° 63 de la PI. 5 de la XX° livraison 
des rudes d'Entomologie, une Q de Gavarnie. Il y a une certaine 
variabilité individuelle parmi ces Ægon, mais du moment qu’ils 
proviennent d'une certaine altitude alpine ou pyrénéenne, ils 
appartiennent bien à une même race qui est appelée a/pina, Berce, 
dans 7’Xe Butterfies of Switzerland, par George Wheeler (p. 42). 

Il reste à examiner une dernière race européenne d’'Argus; c'est 
celle qui, d'après ce que je connais, a son maximum de dévelop- 
pement et de beauté à Cernobbio, sur les bords du lac de Côme, 
où elle vole à la fin de mai et au commencement de juin, dans les 
prés qui s'élèvent en gradins sur le côté de la route qui longe le 
lac. En dessus, le ' est d’un bleu violet, avec la bordure noire 
assez large et nette; le dessous est gris de lin avec les points d’un 
noir vif, cerclés de blanc et une bordure marginale rouge orange 
se développant du bord costal des supérieures au bord anal des 
inférieures. Cette ligne orange est intérieurement surmontée de 
chevrons noirs; elle encadre la moitié supérieure des points noirs 
qui sont légèrement pupillés de bleu métallique et dont l’autre 
moitié inférieure est bordée de demi-cercles blancs, de telle façon 
qu'au contact de l’extrémité de chaque nervure avec le bord terminal, 
il y a un petit triangle noir. 

La © est brune en dessus; il y a assez souvent des exemplaires 
lavés de bleu. Je crois que cette race se lie intimement à celle du 
Japon que Leech a figurée sous le nom d’ensularis (Butterflies from 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 201 


China, etc, PL XXXI; C' fig. 8; Q fig. 5); mais elle ne cadre 
cependant pas absolument avec cet A7gus-insulars du Japon. 
Ægon se trouve d’ailleurs aussi au Japon, où il paraît être simple- 
ment une forme agrandie de l'Ægon des environs de Rennes. 

À l'Argus de Cernobbio, que j'appelle Zzguwrica, lui conservant 
le nom sous lequel j'ai reçu de Cassarate un forme ana'ogue, 1l 
faut joindre comme faisant partie de la même race, celui de Ver- 
soix, de Veyrier, en Suisse, de Majella, dans les Abruzzes; de 
Vichy (Allier); d'Uriage (Isère); de Sidemi (Mandschourie) et 
des régions du Nord de la Chine. La teinte bleu violacé du © 
est lisérée très finement de noir; les points noirs marginaux des 
ailes inférieures sont tantôt nuls, tantôt apparents et même bien 
détachés; la frange paraît très blanche. Le dessous des ailes, chez 
le S, est gris bleuâtre très clair, avec la bordure rouge orange vive 
et les points noirs marginaux bien marqués, depuis le bord costal 
des supérieures. Il y a, aux inférieures, 2 ou 3 points bleus métal- 
liques. Les Q sont brunes, avec ou sans lavis bleuâtre; les taches 
orangées en dessus sont généralement bien accusées; le dessous des 
Q est café au lait très clair avec une éclaircie blanche, qui existe 
aussi chez le O', plus où moins accentuée, entre la bordure orange 
et la ligne de points noirs qui descend du bord costal au bord 
anal. À Cernobbio, où la race est plus grande, la bordure marginale 
noire, chez les ©, est plus large qu'à Versoix, Veyrier, Uriage, 
Vichy, Sidemi, où elle est très fine. 

La race de Marseille et de Péone (Alpes-Maritimes; H. Powell; 
3 septembre 1906) est voisine de cette race d'A7gus-ligurica. 
Cependant je dispose de trop peu d'exemplaires pour pouvoir 
établir mon opinion. Je possède environ 2.500 exemplaires des 
Lycœna Argus et Ægon présentement classés dans ma collection. 

Ils proviennent de localités bien diverses; mais je ne me dissi- 
mule pas les nombreuses et importantes lacunes de ma documen- 
tation, notamment pour la faune de l'Allemagne, de l'Autriche et 
de la Hongrie, qui est trop peu représentée dans mes boîtes. De 
combien d'exemplaires devront être composées les collections de nos 
successeurs, lorsque le progrès de la Science exigera une analyse 


202 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


— 


poussée toujours plus loin et des éléments de comparaison infi- 
niment plus étendus! 


Voici, en attendant et conformément aux observations ci-dessus 
rapportées ainsi qu'aux figures publiées dans le présent ouvrage, 
comment 1l me semble que les races d’Argus et Ægon doivent être 
présentement classées : 


Argus, Linné, Scandinavie; Alpes (Larche), Digne; Pyrénées. 

Var. Calliopis, Bdv. Grenoble, Uriage. 

Var. Armoricana, Obthr. Bretagne, Dax, Fontainebleau, Angou- 
lême, Fusio. 

Var. Bellieri:, Obthr. Corse. 

Var. VNevadensis, Obthr. Andalousie. 

Var. Lgurica, Obthr. Lac de Côme, Sidemi, Chine-Nord, Vichy, 
Isère. 

Var. 2nsularis, Leech. Japon. 

Var. Ægina, Leech. Tâ-tsien-Lou. 


Æ gon, Huebner. Angleterre; Bretagne (Plouharnel, Huelgoat, 
Quimperlé, Rennes, etc.); Japon. 

Var. alpina, Berce. Simplon, Cauterets, Larche. 

Var. corsica, Bellier. Corse. 

Var. 2ypochiona, Rambur. Andalousie; Vernet-les-Bains; Lan- 
guedoc. 

Var. casaiacus, Chapm. Casayo. 


Des observations sur Argus et Ægon ayant récemment paru 
dans les 7'7ansactions of the entomological Society of London, 
1909, aux pages XII-XVIII, j'ai cru devoir porter à la connais- 
sance du Public entomologique l'opinion de M. J. W. Tutt et de 
M. Chapman, exprimées au cours de deux séances de l’honorable 
Société. La traduction était difficile à faire; il était nécessaire de 
connaître parfaitement les deux langues anglaise et française et 
d’être un entomologiste très au courant de la Science contempo- 
raine. J'ai eu recours pour cela à l’obligeance de M. Harold 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 20 


CD 


Powell et je le remercie cordialement de son concours savant et 
très apprécié. 

M. Tutt se range, pour la nomenclature, à l’avis de Staudinger; 
on a pu voir les raisons qui m'ont fait adopter une opinion 
opposée. Quant au reste, Je le considère comme une exposition très 
curieuse de constatations savantes et d’hypothèses très hardies. 

Cependant et quelle que soit la doctrine de chacun, la lecture 
des documents insérés dans les .7'ransactions of the entomological 
Society of London paraîtra à tout le monde du plus haut intérêt. 


Extrait des Transactions of the Entomological Society 
of London, 1909 


(Pages XII, XIII, XIV, XV, XVI, XVII et XVII) 
Séance du Mercredi 17 Mars 1900. 


DISCUSSION SUR LES DEUX ESPÈCES SIMILAIRES //eberus 
Argus (-Ægon) Er PF. Argyrognomon. 


M. J. W. Tutt ouvrit une discussion sur les affinités des deux 
espèces paléarctiques : Plebeius Argus, L. (Ægon, Schiff.;, Argy- 
rotoxus, Brestr.), et P. Argyrognomon, Brgstr. (Argus, À uctorum). 
Après avoir dit qu'il y avait eu grande confusion entre les deux 
espèces, à partir de la première description et plus tard, il cita 
les Autorités suivantes : 


1758. Linné, Sysiema Nature, 12° édition, page 483 A7gus, 
papillon bleu avec taches bleu argenté en dessous. Aussi 
Idas, p. 488, une espèce indienne. 

1761. Linné, Fauna Suecia, ? édition, page 283 — Argus, avec 
les mêmes références. Aussi /das, p. 284, en la suggérant 
comme © de l'Argus (par conséquent pas l’/das de la 


10° édition). 


204 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


1767. Linné, Systema Nature, 12° édition, pages 789-090 — Argus, 
avec la même description, mais avec /das référée à la 
même espèce comme ©. 

1775. Schiffermüller, Wien- Verz., page 183 (note), référa l’Argus 
de Linné à l’espèce non-britannique connue maintenant 
sous le nom d’Argyrognomon, et décrivit Ægon comme 
une autre espèce, l'identifiant clairement à l'espèce que 
nous connaissons sous le nom d'Ægon. 


1788. Borkhausen, Sys£. Besch., p. 154 us 
é suivirent Schiffermüller. 
1787. Schneider, Sys2 Desk p. 252 


Hübner, Illiger, Laspevyres, Herbst, Ochsenheimer, Oken, Godart, 
Boisduval, Duponchel, Freyer, Herrich-Schäffer, et toute une 
armée d’autres Auteurs connus adoptèrent sa conclusion, appelant 
notre espèce anglaise Ægon et l'espèce non-britannique Argus. 

Fabricius, Lewin, Haworth, Stephens, Curtis; Wood, West- 
wood, etc. maintinrent le nom linnéen A7gus pour Ægon. 

Stephens confirma ceci, en faisant observer que dans la « Col- 
lection linnéenne », à Burlington-House, l’Argws reconnue des 
entomologistes du continent ne se trouvait pas. 

En 1853, Wallengren (ne connaissant évidemment qu'une 
espèce, la nôtre britannique), dit que c'était l’Argus de Linné. 
Ensuite, ayant connaissance des deux, il maintint notre insecte 
britannique comme A7gus. 

En 1871, Kirby, dans son Syronymic Catalogue, appela notre 
espèce Argus. 

En 1882, Schüyen écrivit une revision critique (Ænr. Tads., 1, 
p. 34, 100), concluant que l’Argus de Linné était notre Ægon. 

En 1001, Staudinger suivit les conclusions des Scandinaves, et 
depuis ce moment, chacun a suivi Staudinger. D’après les des- 
criptions, nous aurions suivi Schiffermüller. 

Sur le fait qu'il existe encore dans la collection linnéenne, à 
Burlington-House, outre quatre exemplaires d'Ægon étiquetés 
comme anglais, de la main de Smith, et un sans étiquette, deux 
spécimens, un mâle étiqueté « 1074 », le numéro de l’Argus de 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 205 


Linné dans la Faun. Suec. et une © portant étiquette « 1075, 
[das », le numéro de l’/das de Linné dans la Faun. Suec., nous 
sommes portés à admettre l'utilité, maintenant que le changement 
est accepté, de maintenir Argus pour notre Ægon, et Argyrogno- 
mon pour l'insecte continental connu si longtemps sous le nom 
d'Argus. 

M. Tutt attira ensuite l'attention sur la distribution et les races 
locales remarquables de notre Plebeius Argus britannique (Ægon), 
démontrant qu'en Grande-Bretagne nous avons trois formes dis- 
tinctes : une forme des collines calcaires, puis une forme des 
landes à bruyère, enfin une forme des tourbières ou des marais. 
Sur le continent, dans l'Europe septentrionale (excepté l’extrême 
nord) et centrale, le type était la forme des plaines. Dans les 
Hautes-Alpes, c'était la race pailonomus, Brastr. (= Ægidion, 
Meissner) ; Æ giades, Gerh., se trouvait en Europe centrale sur les 
landes: la variété corsica, Bellier, était restreinte à la Corse, et 
plus à l’est, dans l’Asie-Mineure, c'était la forme ortentalis, avec 
son Ab. bella, H.-Sch. De l’ouest à l’est de la région paléarctique, 
les principales formes raciales de l'Argus étaient distribuées 
comme 1l suit : 


pyrenaica, Tutt. ) 


PVRÉNÉENNE AO 
hypochionoides, Tutt. \ 


Pyrénées françaises. 


bejarensis, Chpmn. 
ESPAGNOLE casaiacus, Chpmn. 
brañuelasensis, Tutt. 


vigensis, Tutt. 


ortentalis, Tutt. 


ASIATIQUE sifanicus, Grm.-Grshm. 
ongodai, Tutt. 
koreana, Tutt.— Grande taille, comme bejarensis. 
micrargus, Butl. — Petite taille (sans taches mé- 
JAPONAISE 


| Xypochiona, Ramb. — Dessous blanc. 
| talliques). 


pseudæegon, Butl. — Forme de montagne. 


206 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


P. Argyrognomon a une distribution presque identique dans 
la région paléarctique. Sa variation est également presque parallèle 
à celle de ?. Argus; la grande race orientale du Japon égalant 
comme taille la var. £oreana. Les formes corses des deux espèces, 
avec beaucoup de ressemblance en dessus, sont très distinctes en 
dessous; P. Ayrgyrognomon var. corsica avec taches ocellées à 
centres noirs, ?. A7gus var. corsica avec ces centres gris ou brun 
pale (l'aile de la couleur du fond). De même, la race alpine est plus 
petite, les races méridionales plus grandes, de sorte que les deux 
espèces paraissent présenter une portée de variation parallèle en 
montagne, en plaine, et chez les races méridionales respectivement. 
Considérées superficiellement et au point de vue de la structure, 


les deux espèces offrent plusieurs différences marquées. 


Par exemple : 


a) Chez Argyrognomon Vépine sur la partie avant du tibia 
est absente; 

b) La forme des ailes chez A7gus est plus arrondie; 

c) La frange des ailes est plus large; 

d) Chez A7gus le fond des ailes en dessous varie du pâle au 
blanc, chez Argyrognomon la couleur est plus uniformément grise; 

e) Il y a une différence d’angle dans la rangée de taches trans- 
versales des dessous des ailes supérieures, celle d’Argus étant 
plus courbée en dessous de la lunule discoïdale; 

f) Les androconia chez Argus sont prolongés (8 à Oo rangées 
de points traversent chacun), dans Argyrognomon ils sont arrondis 
(10 à 12 rangées de points); 

g) Les poils écailleux blancs, tant en évidence chez Argyro- 
gnomon, manquent chez Argus; 

}) Les organes génitaux présentent des différences notables 
dans les deux espèces; 

Et finalement 7) les premiers états et l’histoire naturelle (l’évo- 
lution) sont entièrement différents, et tandis que Argyrognomon 
a deux éclosions par an, Argus n’en a qu’une seule. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 20 


NI 


Le docteur T. A. Chapman fit ensuite des projections lumineuses 
montrant des préparations de chenilles de P. Argus (Ægon) de 
diverses tailles à diverses époques de leur existence, de celle 
d'Argyrognomon dans sa première livrée, pour comparaison, et 
de divers points de l'anatomie extérieure de la larve et de la 
nymphe, et des accessoires sexuels d’Argus, d'Argyrognomon et 
d'autres espèces pour comparaison, et des tibias de ces espèces, 
pour démontrer combien elles différaient dans ce qu'on appelle 
l'épine tibiale. Parlant de ces espèces, 1l dit : 

« En examinant les épines tibiales d’Argus et d'Argyrognomon, 
j'ai noté une réversion curieuse chez un spécimen d’Aygus de 
l'Espagne; le tarse est normalement (dans le mâle) en une seule 
pièce ; tous les articles et l’ongle terminal étant fusionnés ensemble 
sans trace d'articulation. Cependant, le premier exemplaire 
espagnol que j'ai examiné avait le tarse divisé en trois articles. 
Je me demandai, naturellement, si ceci pouvait être un caractère 
des races espagnoles, mais je n'ai pu trouver un exemplaire pareil, 
ceux d'Espagne et d’ailleurs étant parfaitement conformes. Il y a 
ambiguité à appeler ceci l'épine tibiale, c’est l'extrémité du tibia 
même. Ce qu'on appelle généralement l’épine tibiale est une 
protubérance à part qui n’est pas présente dans ces espèces. 

» L'extrémité pectiniforme des pinces génitales présente des 
variations inattendues: le nombre total des dents variant dans des 
limites considérables, et la présence ou l'absence d’une ou de plu- 
sieurs dents moins importantes ou mal développées à l’un ou à 
l’autre bout de la série, étant un autre point qui offre une grande 
inégalité suivant les individus. 

» Les pinces opposées d’un même individu diffèrent très souvent 
et le nombre des dents du peigne peut varier chez les exemplaires 
d'une même localité. Il y a probablement quelque variation géo- 
graphique également, mais je ne l'ai pas démontré. 

» Nous pouvons conclure que des différences considérables dans 
cette partie des pinces n’interfèrent pas avec la syngamie complète 
chez l'espèce. 

» La tendance à la variation est évidemment assez forte pour 


208 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


établir facilement une espèce nouvelle, si une partie de la présente 
espèce pouvait être isolée par ségrégation, pour une période rela- 
tivement courte. 

» Nous pouvons de plus conclure que ces organes spéciaux et 
« formidables » ne correspondent à aucune portion des appendices 
de la femelle différenciée d’une manière semblable, parce que, dans 
ce cas-là, quatre dents au peigne ne pourraient posséder la même 
utilité que cinq, six, sept ou huit. 

» La grande différence qui existe entre les genitalia de l’Argus 
et de l’Argyrognomon m'a suggéré la question : Est-ce que ces 
deux espèces sont en réalité aussi étroitement alliées que nous le 
supposons ? Il nous est permis de supposer qu’elles sont dérivées 
de différentes portions de la souche Plebeiide qui se sont rap- 
prochées par mimétisme ; ou bien, puisque les deux sont abondantes 
(mais rarement, peut-être jamais, abondantes ensemble), qu'elles 
se sont rapprochées par le fait qu’elles se trouvent dans des con- 
ditions très similaires, et, étant donné une légère variation de ces 
conditions, chacune capable de prendre la place de l’autre. 

» Nous trouvons que chez ces Zycænidæ l’armature dorsale 
diffère beaucoup et possède une valeur générique plutôt que spé- 
cifique. En prenant Zcarus ou Bellargus comme représentant en 
moyenne les Plebeiides nous trouvons chez Aygus que chaque 
membre latéral de l’armature dorsale est long, mince, courbé et 
faiblement crochu à l'extrémité. Le crochet accessoire est fortement 
courbé, la partie terminale longue, droite et mince, sauf la pointe 
qui est légèrement courbée et crochue. Par contre, Argyrognomon 
diffère d’Zcarus de façon opposée; chez Argyrognomon, l'appen- 
dice latéral est court, large et émoussé, et l’accessoire présente une 
courbe prolongée; ce qui le fait paraître courbé d’un bout à l’autre, 
et quoique ayant une légère courbe ou crochet terminal, comme 
Argus, il diffère par sa forme plus large et plus robuste. 

» Quand nous comparons les extrémités des pinces, la différence 
est immense; tandis que Argus a quelques longues dents un peu 
de côté de l’appendice dur, Argyrognomon a un nombre de dents 
très fines (petites) sur l'extrémité un peu large de l’appendice. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 209 


Celles-ci donc semblent être des formes d’appendice presque sans 
parenté (dans le groupe de Plebendes. Pour les accepter comme 
étant étroitement alliées, je suis obligé de prêter une valeur un peu 
exagérée à une considération qui a beaucoup d'importance dans 
l'étude de ces genitalia. 

» Les genitalia se trouvent, au point de vue de la sélection, dans 
des conditions totalement différentes de celles des caractères 
externes que nous examinons le plus ordinairement. 

» Ces caractères externes sont soumis à une sélection continue 
en rapport avec les circonstances de l'entourage, telles que les 
ennemis, le climat, la plante nourricière, etc. 

» Les genitalia, quoique tout autant sujets à varier, et proba- 
blement en réponse à des éléments perturbateurs similaires de 
l’environnement, ne sont soumis à aucune force sélective exercée 
par l’environnement. 

» Dans les limites d’une espèce il ne faut pas que la déviation 
de la valeur moyenne aille suffisamment loin pour empêcher 
l'individu de trouver une compagne, mais la valeur moyenne peut 
se modifier graduellement dans n'importe quelle direction. 

» Tant qu'un groupe d'individus est syngamique (c’est-à-dire 
est une espèce) les genitalia peuvent varier similairement d'un 
bout à l’autre du groupe, mais sans former de variétés définies. 
Cependant, quand un tel groupe est divisé en deux parties ou 
groupes par ségrégation géographique, saisonnière ou autre, chaque 
partie doit conserver une forme constante des appendices pour 
toute cette partie, mais s'éloignant probablement de ceux de 
l’autre groupe, qui peuvent être en voie de varier dans une autre 
direction. 

» Quand une telle différenciation a été poussée assez loin, les 
deux groupes ne sont plus syngamiques et agissent l’un envers 
l’autre comme des espèces distinctes, dans le cas où se présente 
une occasion de se mélanger. 

» Il paraît très probable qu'une séparation de ce genre puisse 
se produire très rapidement considérant les nombreux cas que 


nous connaissons de deux ou trois espèces, très distinctes quant 
14 


210 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


aux organes génitaux, tout à fait asyngamiques, et cependant très 
ressemblantes quant aux caractères externes et difficiles même à 
différencier. 

» Il est très probable que de telles paires d’espèces se sont 
éloignées l’une de l’autre quant aux caractères externes pendant 
leur ségrégation, mais qu'une fois assujetties de nouveau au même 
environnement, elles sont arrivées à se ressembler de nouveau très 
intimement, toute question de mimétisme mise à part. 

» L’armature dorsale des genitalia d’Argus et d'Argyrognomon 
me paraît infirmer une pareille hyothèse; mais cela est néanmoins 
possible, et c'est même l'hypothèse généralement admise que ces 
deux espèces dérivent d’une souche commune d’une des façons 
que Je viens d'indiquer. 

» Le point sur lequel je désire attirer l'attention comme ayant 
une portée dans des cas pareils, est que si une portion relativement 
petite d’une espèce est entièrement ségrégée, elle peut varier plus 
ou moins quant aux caractères externes, adoptant une position 
appropriée à son environnement nouveau et restreint et demeurant 
constante ensuite, mais que les genitalia ne subissent aucune res- 
triction, étant libres de varier à n'importe quel degré, à la condition 
que tous les individus du groupe varient ensemble. 

» Quand le groupe ne renferme qu’un petit nombre d'individus, 
une tendance à varier aura plus de chance d'amener un change- 
ment, puisqu'il n’y aura pas une foule d'individus pour absorber 
des tendances contraires, et par son inertie, empêcher le change- 
ment. 

» Donc, tandis que dans les genitalia, peu ou point de chan- 
gement n'aura peut-être lieu dans certains cas, ou dans la majorité 
des cas, au contraire, dans d’autres cas, un changement considé- 
rable s'effectuera probablement avec rapidité. 

» Il est à noter qu'il y a bon nombre d’espèces dont les appen- 
dices paraissent être plus ou moins intermédiaires entre ceux 
d'Argus et d'Argyrognomon, et je vous montre sur l’écran des 
photographies de cinq de ces espèces ressemblant le plus à Argus 


par la présence de grandes épines. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 211 


» Il est à noter que toutes ces espèces intermédiaires (intermé- 
diaires quant aux genitalia) sont, par leurs caractères externes, 
abondamment différentes d’Argus et d'Argyrognomon. Argus et 
Argyrognomon sont les seules espèces européennes de ce groupe 
(à l’exception de la très locale P. Zephyrus et sa var. Lycidas), 
et elles se ressemblent mutuellement plus en Europe qu'ailleurs. 
Cette circonstance semble indiquer qu’elles ont été assez largement 
séparées dans leur petit groupement particulier, mais que là où 
elles ont de nouveau occupé des habitats semblables, elles se sont 
rapprochées dans leurs caractères externes. » 


Séance du Mercredi 7 Avril 1900. 


Le Président ayant invité M. Tutt à répondre sur la discussion, 
M. Tutt dit que, selon lui, la ressemblance entre les deux espèces 
n'avait pas le mimétisme pour cause. Il considérait les deux 
espèces en vérité étroitement alliées, et que les grandes diffé- 
rences observées dans les appendices ancillaires ne dénotaient 
peut-être pas une division aussi importante qu'on pourrait le 
supposer. Il attira l'attention sur le fait que les premiers états 
(histoire de la vie) des deux espèces étaient tout à fait distincts 
et connus depuis au moins 135 ans. 

Quant à l’apparition des deux espèces ensemble, 1l fallait se 
rappeler que, dans les régions basses, Argyrognomon avait deux 
générations et Argus n'en avait en général qu'une seule, et ceci 
n’admettait aucun chevauchement réel, quoiqu'il en existât jusqu'à 
un certain point; il était vrai que dans les montagnes, les deux 
espèces apparaissaient plus ou moins à la même époque, Argy- 
rognomon, cependant, généralement bien en avance sur A7gus 
dans ces régions. Aucun doute ne pourrait exister quant à la 
distinction de ces espèces; l’idée de M. Marshall, selon laquelle 
les deux formeraient une espèce, dimorphe, ne s’appuyait abso- 
lument sur rien. 


22 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Lycæna Hesperica, Rambur 
et Lycæna Lycidas, Trapp. 


J'ai publié dans la 1° livraison des Etudes de Lépidoptérologie 
comparée, des figures de ZLycidas (PI. 2; fig. 17 et 18) et d'Æespe- 
Call 2/25 ete); 

Je prie le lecteur de vouloir bien se reporter à ce que J'ai écrit 
relativement à ces Lycæna, dans l'ouvrage précité. Lycidas se 
trouve sur la route du Simplon, au voisinage du Refuge n° 2, à la 
fin de juin et au commencement de juillet; je l'ai aussi pris à Viège, 
à l'entrée de la vallée de Zermatt, en 1864 et 1866, alors que Je 
me trouvais en compagnie de MM. Guenée, Fallou, Constant et 
Jourdheuille. 

Hesperica se trouve en Andalousie où il a été découvert par 
Rambur et de Graslin. Rambur a fait paraître de bonnes figures 
d’Æesperica sous les n° 1, 2, 3 et 4 de la Faune entomologique de 
l'Andalousie, ouvrage imprimé en 1830. Æesperica y est décrite 
aux pages 270 et 271. Je remarque que l’un des O' pris par de 
Graslin, il y a près de 75 ans, a des éclaircies de couleur aurore, le 
long du bord terminal des ailes inférieures, un peu comme chez la 


Lycæena Ægon-casaiacus. 


Lycæna Escheri, Huebner. 


Espèce voisine de Zycidas et d’ÆHesperica, près desquelles elle 
vit dans le canton du Valais, aussi bien qu'en Andalousie; mais 
restant toujours bien distincte de Zycidas et d'Hesperica par le 
dessous de ses ailes inférieures qui porte, près du bord marginal, 
vers le milieu, une éclaircie blanche, de forme presque triangulaire, 
tandis que Zycidas et Hesperica présentent une longue bande 
blanche, se développant depuis le bord costal jusqu’au bord anal 
des inférieures, au-dessus de la série marginale de lunules fauve 


orangé. 


[SS) 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 21 


Huebner a figuré Escheri G' sous les n° 709 et 800 et Escherz ©, 
sous les n°° 867 et 868, d'après des exemplaires qui, selon Boisduval, 
lui furent envoyés par M. Escher. 

En l’année 1832, date de l'impression de l’Zcones et du Supplé- 
ment aux Tomes I et II de l’Aistoire naturelle des Papillons de 
France, par Godart, Boisduval et Duponchel publièrent, simulta- 
nément et chacun de son côté, la figure de Lycæna Escheri; Bois- 
duval, sous les n°° 4, 5 et 6 de la PL 12, et Duponchel, sous les 
n® 3, 4, 5 et 6 de la PI 11. Les figures données par Huebner, 
Boisduval et Duponchel, sans être mauvaises, laissent à désirer; le 
coloriage ne semble pas avoir été soigneusement surveillé. Dans les 
exemplaires de ma Bibliothèque, les franges des ailes des Q sont 
restées blanches, tandis que, d’après les descriptions, elles devraient 
être grises. Boisduval dit que « cette espèce est assez commune 
dans plusieurs de nos départements méridionaux, pendant une 
grande partie du mois de juin et qu'il ne croit pas qu’on l'ait trouvée 
jusqu’à présent ailleurs qu'en France ». Duponchel prétend (p. 72) 
qu’il a trouvé, le premier, ce Polyommate dans le département de la 
Lozère, mais qu'il ne l'avait pas distingué d'Alexs. Cet auteur 
ajoute que M. Alexandre Lefebvre l’a pris depuis dans les environs 
de Toulon et que M. de Saporta l’a découvert également dans une 
de ses terres, près la Sainte-Baume (Var). 

Tout cela me donne à penser que les individus figurés par Bois- 
duval et par Duponchel proviennent de Provence. Mais il est bien 
regrettable que ces auteurs, et tant d’autres avec eux, aient si géné- 
ralement négligé de faire connaître l'origine exacte des papillons 
qu'ils faisaient représenter. Il est si intéressant de savoir quelle est 
la race-type de l'Espèce, c’est-à-dire la plus anciennement décrite. 
Chaque auteur figurant un papillon devrait avoir soin d'indiquer 
sa provenance exacte. 

D’après ce que je connais de la Zycæna Escheri, c'est une espèce 
méridionale dont la station la plus avancée vers le Nord-Ouest, est 
jusqu’à présent Dompierre-sur-Mer (Charente-Inférieure). Æschert 
se trouve dans les Pyrénées où elle monte jusqu’à une assez grande 
altitude; en Espagne; en Languedoc; en Provence; dans la vallée 


214 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


du Rhône, jusqu'auprès de Bérisal, sur la route du Simplon; à 
Zermatt; en Dalmatie; en Grèce; et dans quelques parties de 
l'Italie. 

J'ai fait figurer sous les n° 78 et 79 de la PI XX de la 
3° livraison des Æfudes de Lépidoptérologie comparée, le G' et la Q 
de la race des Bouches-du-Rhône. Le G' est très grand, d’un bleu 
clair soyeux et chatoyant en dessus, d’un gris blanchâtre éclatant en 
dessous, avec les points d’un noir très vif, cerclés de blanc. La Q 
est brune, mordorée, quelquefois avec un trait noir à l'extrémité de 
la cellule des ailes supérieures; elle a une large bordure fauve 
orangé aux quatre ailes; la frange est brune jusqu’à l’apex où elle 
devient d’un blanc pur. Le dessous de la Q est d’une teinte café 
au lait clair. 

Sous le n° 80 est figurée une Q radiata de la plus grande beauté. 
J'en suis redevable au D’ Siépi qui l’a capturée à Saint-Pons et 
a fait mention de cette magniñique Aberration, dans le Catalogue 
raisonné des Lépidopières du département des Bouches-du-Rhône 
et de la région de la Sainte-Baume (p. 40). 

On trouve dans les environs de Saint-Zacharie, non loin du 
château de Montvert, en juin et au commencement de Juillet, de 
superbes Q Æscheri. C'est à M. Gédéon Foulquier, l’habile et 
ardent chasseur qui explore si soigneusement les environs de Mar- 
seille, que je suis redevable de la connaissance de ces intéressants 
Lépidoptères. Chez certaines Q d'une variété que j'appelle : Foul- 
guieri, et qui est fréquente en Provence, rare ou nulle ailleurs, la 
rangée intranervurale des taches marginales fauve orangé aux ailes 
supérieures, commence au bord costal, comme dans l’exemplaire 
figuré sous le n° 5 de la PI. 12 de l’/cones, de telle sorte qu'il y a 
6 taches contiguës, presque carrées et très bien marquées. Chez 
d’autres ©, la couleur brune du fond semble se fondre avec la teinte 
fauve orange des taches marginales, aux ailes supérieures; enfin 
quelques © montrent près du corps, des atomes bleus. La teinte 
fauve orangé est généralement très vive; accidentellement les taches 
marginales qui décorent le dessous des ailes de la © Escheri sont 


d’un jaune pâle. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 215 


Je possède des Lycæna Escheri recueillies à Grenade et à la 
Sierra-de-Alfakar, par feu de Graslin et par mon frère, en Juillet 
1879; à Vittoria; à Albarracin et à Barcelone; notamment une 
Aberration O' subtus-tmpunctata, venant de Catalogne et figurée 
sous le n° 25 de la PI. 3 de la XX° livraison des Ezudes d'Ento- 
mologie. 

Les Æscheri S' d'Espagne ont le fond des ailes rosé, en dessus, 
et plus transparent que les échantillons des autres pays. Si on 
éclaire, au moyen de l'électricité, une boîte contenant des Æschert G 
espagnols, piqués à côté d’Æscher: de Provence, de Dalmatie, des 
Alpes, des Pyrénées-Orientales, etc, on constate une différence 
très sensible dans la couleur du fond des ailes. De plus, la bordure 
noire est extrêmement fine; J'ai désigné la race espagnole d'Æscher:, 
par le nom de roseonitens. Le dessous du GO, en Andalousie, est 
d’un gris blanc vif, avec les points noirs très gros. Les Q ont le 
dessous d’une teinte café au lait clair, encore plus vive que dans 
la race provençale. La bordure fauve orangée est d'une couleur 
tantôt fauve rouge, tantôt jaune; plus ou moins large, atteignant, 
ou non, le bord costal aux supérieures. Les © sont donc variables; 
mais le caractère rosé des ailes des GC en dessus, parait commun 
à tous les individus. 

En outre, la race d'Andalousie paraît être généralement de plus 
grande taille que la forme des Bouches-du-Rhône qui est pourtant 
très développée. Dans les Pyrénées-Orientales, je n'ai pas remarqué 
qu'Escheri s'élevât à une grande altitude. Je l'ai toujours observée 
dans les localités chaudes et plutôt assez basses. La forme qui vole 
aux environs de Vernet-les-Bains, ne diffère guère de celle de 
Provence que par sa taille un peu réduite. Dans les Hautes-Pyrénées, 
on voit la Lycæna Escheri Œ voltiger dans les vallées chaudes, 
avec les autres espèces de Zycæna et se reposer au milieu de ses 
congénères, sur les parties humides des routes, notamment aux 
abords de Luz. On la trouve aussi plus haut, à Cauterets et sur 
les pentes de la montagne du Péguère; mais Æscheri monte jusqu'à 
près de 2,000 mètres d'altitude et je l'ai capturée au bout du lac 
de Gaube, sur une pelouse rase parsemée d'énormes blocs de rochers 


210 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


isolés et plantée çà et là de groupes de pins. Je veux désigner la 
sorte de prairie où l’on aborde, lorsqu'on traverse le lac de Gaube, 
en bateau, pour marcher ensuite dans la direction du Vignemale. 
La race de Lycæna Escher: qui vole sur ce gazon alpestre, en com- 
pagnie d'Æros, Acis (Semiargus), Adonis (Bellargus), Orbitulus- 
Oberthüri, Arion, présente des caractères spéciaux et je lui ai donné 
le nom de Londoui, en l'honneur de mon honorable ami Rondou, 
l'excellent Naturaliste et Instituteur de Gèdre. 

Puisque la Lycæna Escheri habite dans les Pyrénées, les vallées 
chaudes et qu’elle s'élève graduellement depuis les altitudes faibles 
jusqu'à près de 2,000 mètres, elle doit offrir, dans les différentes 
localités où elle vit, des formes très distinctes, si l’on compare les 
individus qui proviennent des points extrêmes; mais si l’on envi- 
sage une série d'exemplaires capturés dans des localités intermé- 
diaires, on doit trouver des formes transitionnelles. Dans la réalité, 
il en est effectivement ainsi. Dès lors, pour fournir une histoire plus 
complète de l'Espèce, j'ai fait figurer sous le n° 72 de la PI XX, 
le SG des Hautes-Pyrénées, pris à Cauterets et faisant la transition 
entre la race provençale et celle du lac de Gaube. Cette forme de 
Cauterets est moins grande que la forme des Bouches-du-Rhône 
et le bleu du dessus des ailes, chez le ©, est d'aspect moins trans- 
parent. Quant à la var. Rondoui, elle est caractérisée en ce qui 
concerne la © (fig. 73), par des atomes bleus à la base des ailes 
et la frange de ses quatre ailes entièrement blanche et non brune 
avec l’apex blanc, comme partout ailleurs. Le G' Rondoui est plus 
petit, en dessus d’un bleu qui présente, regardé dans un certain Jour, 
un léger reflet un peu verdâtre, tandis qu'en dessous, le fond des 
ailes est d’un gris uni avec les points noirs très petits, — souvent 
beaucoup moins accentués même que dans la fig. 71. Il faut remar- 
quer encore l'absence presque complète de tache triangulaire 
blanche, le long de la bordure marginale de taches fauves, aux ailes 
inférieures. On peut trouver partout l’Ab. radiata; témoin la superbe 
Q (fig. 74), prise à Gèdre (Hautes-Pyrénées), en 1906 et dont 
M. Rondou a eu la générosité de me faire cadeau. J'ai décrit aux 
pages 57 et 58 du Bulletin de la Soc. ent. de France, 1906, la nou- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 21 


ÈT 


velle variété Rondoui que j'avais capturée en juillet 1905, aux 
abords du lac de Gaube. C'était par une journée incertaine, avec 
intermittence de brouillard et de rayons de soleil. Le temps ne 
tarda pas à se gâter tout à fait et cette circonstance m'empêcha 
de récolter un grand nombre d'exemplaires, ainsi que Je le désirais. 
J'avais pris tout d’abord la Zycæna Escheri-Rondoui pour Lycidas, 
à cause de la taille réduite et de l'absence — ou tout au moins de 
l'oblitération — de la tache blanche triangulaire aux ailes infé- 
rieures en dessous. 

Dans la montagne du Péguère, on trouve parfois des Q petites, 
très obscures, dépourvues de taches fauve orangé aux supérieures 
en dessus et frangées de blanc pur. Mais on en trouve aussi qui 
ont les franges grises ou d’un brun très clair et qui établissent la 
transition. Mon frère a pris, en passant de Cauterets à Gavarnie, 
en juillet 1882, une © Rondoui presque complètement unicolore en 
dessus: il lui reste seulement quelques vestiges de taches fauve 
orangé aux ailes inférieures. J'ai pris moi-même à Gavarnie un 
Escheri-Rondoui d très analogue à ceux des bords du lac de 
Gaube. 

Dans les Alpes, la ZLycæna Escheri s'élève à une altitude peut-être 
plus grande encore qu'aux Pyrénées; non seulement je l'ai prise 
abondamment sur la route du Simplon, un peu au-dessous de Béri- 
sal, du 18 au 23 juillet 1002, mais je l'ai rencontrée aux environs 
de Ryffelalp, à plus de 2,000 mètres. Il y a des exemplaires O' de 
Ryffelalp qui, par leur petite taille et leur teinte bleue en dessus, 
ne sont pas distinguables de la var. Rondouï; en dessous, ils me 
paraissent également être assez semblables à Rondoui; malheu- 
reusement je n'ai pas pris la Q Æscheri à Ryffelalp et j'ignore 
comment est sa frange. Si elle est blanche, la race de Ryffelalp 
pourrait être appelée Rondoui, ainsi que la forme des bords du lac 
de Gaube. Dans la Lozère, à Florac, la Zycena Escheri O' est de 
plus petite taille qu'en Provence; elle est en dessus, du même b'eu 
que dans les vallées pyrénéennes; en dessous elle a les points noirs 
plus vifs; quant à la Q Æscheni, dans la Lozère, elle est grande 
et tout à fait analogue à celle de la Côte d'Azur. J'ai pris, en 1803, 


218 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


à Florac, un © Æscheri curieusement coloré; 1l est, en dessus, d’un 
bleu grisâtre, avec une bordure brun clair assez large; c'est un 
exemplaire d’un faciès anormal; il était du reste très frais lorsque 
je le capturai, il y a plus de 46 ans; je l’étalai sur le vif, sans le 
ramollir et sa couleur n’a pas changé; pas plus d’ailleurs que la 
teinte bleu des Æscheri récoltés à cette époque déjà éloignée et 
préparés immédiatement après leur capture. Dans les Alpes-Mari- 
times, il y a de superbes Æsckeri; les plus grands et les plus beaux 
exemplaires sont ceux des montagnes les plus voisines de la côte. 
Je possède une série d'échantillons récoltés à Castillon; l’'Escarène; 
Levens; Lantosque; N.-D. de Fenestre; vallon de Rabuans, près 
Saint-Etienne-de-Tinée; Venanson. 


Le long de l'Océan, dans les plaines calcaires de la Charente- 
Inférieure, la Lycæna Escheri se trouve à Dompierre-sur-Mer où 
M. P. Boulé en a récolté 8 O' et 5 Q, en juin 1907 et du 5 au 
12 juin 1900. L'Espèce ne doit pas être rare à Dompierre, mais 
M. Boulé, de même que Duponchel, dans la Lozère, en 1817, 
ne s’aperçut pas, en la capturant, qu’elle différait d’A/exis, ce qui 
explique pourquoi il n’en a pas récolté davantage. En dessous, le 
d'est d’un gris foncé, presque brun, ce qui distingue la race de 
Dompierre de toutes les autres formes. La © est très obscure en 
dessus, d’une nuance brune, chaude et riche; en dessous, elle est 
d'un gris un peu plus brun que le G'; mais très distincte aussi des 
autres races qui ont le fond des ailes café au lait plus ou moins 
clair; c’est-à-dire comme s'il y avait une proportion variable de lait 
par rapport au café. 


Je prends la liberté de dédier cette jolie Zycæna, dont la pré- 
sence dans la Charente-Inférieure était naguère encore insoup- 
connée, à M'° Hélène Vigé, et je l’appelle Felene. 


La variété Dalmatica, Spr. diffère légèrement de la race pro- 
vençale par la largeur un peu plus grande de l'ombre noirâtre 
qui longe le bord terminal des ailes, en dessus, du moins si j'en 
juge par les six que contient ma collection. Un de ces exemplaires 
dalmates a la cellule aux ailes supérieures close par un trait noir 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 219 


fin, mais vif; c’est le seul O' que je possède ainsi Les autres 
exemplaires n’offrent pas une semblable particularité. 

La Lycæna Escheri éclôt une seule fois par an en juin et Juillet. 
On ne l’a pas trouvée en Algérie. 


Lycæna Icarius, Esper. 


Le G' a été figuré par Esper, mais assez grossièrement, sous 
le n° 4 de la Tab. XCIX, d’après un exemplaire venant des pro- 
vinces qui étaient dites : suédoises, en ce temps-là, et que lui avait 
communiqué l'avocat Schneider, de Stralsund, comme une pièce 
très précieuse « als ein sehr schaetzbarer Beytrag ». Huebner a 
figuré avec le nom d’'Adntus (sic), sous les n° 283, 284, 285, une 
race spéciale avec la Q (284) très largement bleue en dessus et 
dont je n’ai encore jamais vu un semblable échantillon en nature 
(j'appelle cette © bleue : Huebneri); puis avec le nom d’Awandus, 
et sous les n°% 752 et 753, le O', et sous les n° 754 et 755, la © 
brune en dessus et conforme à la race de l’Europe orientale. 
Boisduval, dans l’/cones, a représenté Zcarius sous les n° 1, 2 et 3 
de la PI. 12, et Gerhard figure le même /carius sous les n°* 4 a, 
ANAict Ar cde la PIN 20; 

La ZLycæna Icarius n'a jamais été trouvée en Angleterre, n1 
dans la France occidentale, boréale et centrale, ni en Algérie. En 
France, d’après les documents que renferme ma collection, elle 
habite les Pyrénées-Orientales, où je l'ai prise bien des fois à 
Saint-Martin-du-Canigou et au delà de Casteil, aux mois de juin 
et de juillet; les Hautes-Pyrénées, où on la voit paraître au mois 
de juillet, à une altitude relativement assez faible, dans la mon- 
tagne du Péguère et sur le chemin qui va des bains de la Raillère 
à Cauterets. Souvent, par une belle matinée d'été, /carius voltige 
sur les parties humides de cette route; il est facile de reconnaître 
Icarius des autres espèces de Zycæna par le bleu clair et éclatant 
du dessus des ailes du ©‘. Il se trouve aussi à Venanson, au Mont- 
Castel-de-Brans, vers la fin de juin, et au Mont-Pacanaglia, dans 


[ee 
WŸ 
© 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


les premiers jours de juin (Alpes-Maritimes); à Entrevaux, au 
Mont-Gourdon, Garamagne (Basses-Alpes), à la mi-juillet. Je le 
possède en outre de Scandinavie; de Hongrie; du Valais; du 
Fort-Naryne, dans le Turkestan, où /carius donne la variété Zydia, 
Krulik; de Syrie et d'Andalousie. Feu de Graslin avait dans sa 
collection 4 et 5 Q portant l'étiquette : Grenade et Sierra- 
Nevada. Les © andalouses ont généralement la base des supé- 
rieures assez largement sablée d'atomes bleus. De plus, le bord 
terminal des ailes inférieures porte des ocelles noirs, surmontés 
d'un large croissant fauve orangé. Dans les Pyrénées, les Q 
paraissent être généralement très obscures. /carius, en France, ne 
m'a Jamais semblé être un papillon abondant, et je l’ai presque 
toujours recueilli par exemplaires isolés. 

Je fais figurer sous Mletn 205 de la Pl XEMduprsent 
ouvrage une superbe Aberration © de Hongrie, que J'ai appelée : 
A viator. 


Lycæna Martini, G. Allard. 


Très jolie Zycæna, spéciale à l'Algérie centrale et orientale; 
abondante à Lambèze, Batna, Khenchela; trouvée à Rovigo et au 
Camp-des-Chênes, par M. Holl; elle vole en mai et juin. 

Le GO‘ est d'un bleu pâle, un peu violacé; les ailes ont une 
contexture délicate, d’où résulte un aspect légèrement transparent; 
elles sont finement lisérées de noir et frangées de blanc. Quel- 
quefois la cellule des supérieures se trouve close par un trait noir 
fin ; assez souvent, on voit des points noirs intranervuraux, le long 
du bord terminal des inférieures. En dessous, le fond des ailes est 
gris; les points noirs sont petits et ont une tendance à l’oblité- 
ration. Les © sont brunes en dessus; mais la teinte brune n’est 
pas très foncée ; souvent la base des quatre ailes est plus ou moins 
largement lavée de bleu pâle. Les points noirs, généralement assez 
gros, qui se trouvent le long du bord terminal des inférieures, sont 


M 
surmontés d’un croissant fauve orangé assez souvent souligné de 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 20) 


blanc. En dessous, les © sont d’un gris plus brunâtre que les ©. 
Chez les deux sexes, les petits points marginaux bleu brillant 
sont surmontés de fauve orangé, d’un sourcil noir et d’une éclaircie 
blanche: ils sont finement soulignés de blanchâtre. Les points 
noirs du dessous des ailes sont cerclés de blanc. Une Q prise à 
Lambèze par mon frère, en 1875, porte, le long du bord externe 
des ailes supérieures, une rangée de taches fauve orangé, formant, 
vers le bord costal des ailes supérieures, la prolongation des 
taches marginales ocellées, surmontées de fauve, des ailes 
inférieures. 

La Zycena Martini fut dédiée par Gaston Allard à feu notre 
digne ami Emmanuel Martin, qui voulut bien me servir de parrain 
à mon entrée dans la Société entomologique de France, où je fus 
admis à la séance du 28 août 1861. Emmanuel Martin était un 
parisien plein de finesse, extrêmement dévoué à ses amis; son 
cœur était enthousiaste et généreux; on l’a toujours vu très arrêté 
et très ferme dans ses convictions; il était doué d’une bonhomie 
très douce: mais il se laissait assez facilement entraîner à quelque 
pointe d'ironie; d’ailleurs il savait manier la plaisanterie avec 
aisance et délicatesse et il ne dépassait point la bonne mesure; 
il semblait être né observateur; son caractère était gai; sa conver- 
sation agréable, aimable et enjouée. 

Il m'a traité, au temps de ma jeunesse, avec la plus affectueuse 
bienveillance, et je conserverai toujours la plus sincère reconnais- 
sance pour ses conseils excellents et sa bonté pour moi qui ne s’est 
jamais démentie. 

Emmanuel Martin possédait, vers 1862, une collection de 
papillons admirablement rangée et parfaitement tenue; il avait 
la prescience de l'importance des variations géographiques chez 
les Lépidoptères. Aussi les échantillons qu'il conservait de chaque 
espèce, quoique peu nombreux — faute de place pour les loger, — 
étaient bien choisis dans des provenances diverses et pourvus 
d'étiquettes où se trouvait inscrite l’indication précise de la localité 
d’origine, ce qui était rare à cette époque et est encore trop peu 
pratiqué aujourd’hui. Pourtant un papillon sans indication exacte 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


[S) 
[es] 
[S) 


de provenance est une non-valeur; tel un corps sans àme. I] s’inté- 
ressait surtout aux Geometre, dont il avait réuni un grand nombre 
d'espèces; 1l les connaissait fort bien et en avait étudié plusieurs 
depuis leurs premiers états. Ses chasses annuelles dans les mon- 
tagnes lui avaient permis de réaliser des captures du plus grand 
intérêt. En outre, il avait parcouru très fréquemment les forêts des 
environs de Paris, dont la faune est si riche et si variée, et il avait 
trouvé notamment dans les bois de l'Oise, entre Compiègne et 
Chantilly, une grande quantité de pièces remarquables, entre 
autre un hermaphrodite de Bupalus piniarius qu'il avait aperçu 
au moment où il venait d’éclore sur le tronc d’un pin sylvestre, 
près de Creil; il avait assisté, nous dit-il, au complet dévelop- 
pement de cet exemplaire qui est demi-mâle et demi-femelle. Ce 
fut M. Fallou qui posséda en dernier lieu cette insigne rareté. Elle 
doit se trouver maintenant au Muséum national de Paris. 

Lorsqu'Emmanuel Martin chassait, son attention était toujours 
en éveil ; il avait l'œil très expérimenté et il se plaisait à inspecter 
les rochers et les troncs des arbres. Combien de fois l’ai-je vu 
découvrir des Noctuelles ou des Phalènes endormies au milieu des 
lichens avec lesquels leurs couleurs les confondaient exactement. 
Cette ressemblance si parfaitement mimétique n’avait pourtant pas 
suffi à les protéger contre la vue perçante du chercheur habile entre 
tous, qui fut l’un de mes meilleurs maîtres et de mes amis les plus 
affectionnés. 

Emmanuel Martin vivait au temps où florissaient les Boisduval 
et les Guenée, les Bellier de la Chavignerie et les de Graslin, les 
Millière et les Constant, les Fallou et les Lafaury, les Guillemot 
et les Laboulbène. Il a chassé avec eux tous et a été leur ami. 
Plusieurs fois, la Société entomologique de France a publié les 
intéressants Rapports que Martin écrivait à la suite des Excursions 
et des Congrès provinciaux; je les consulte toujours avec plaisir 
et profit. Je me souviens des marches prolongées en montagne que 
Martin, malgré sa frêle apparence, accomplissait si vaillamment. 
J'ai eu le plaisir d’être maintes fois son compagnon et j'admirais 


toujours la persévérance et la continuité de son effort entomolo- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 22 


[e2) 


gique. Toujours prêt à saisir un papillon, en toutes circonstances, 
et son attention ne souffrant jamais de défaillance, il réalisait 
ainsi des captures souvent excellentes et là où elles étaient parfois 
plus imprévues. 

En compagnie d'Emmanuel Martin, j'ai fait les excursions 
organisées par la Société entomologique de France : l’une en 1862, 
dans les Pyrénées-Orientales; l’autre en 1863, dans la Lozère. 
Gaston Allard faisait aussi partie de ce voyage qui fut extré- 
mement agréable. Je me rappelle le soin méticuleux que les Ento- 
mologistes parisiens de ce temps-là apportaient à la préparation 
de leurs papillons. Après la chasse, ils avaient l’habitude de ne 
prendre aucun repos; ils se mettaient incontinent à préparer les 
papillons capturés durant la journée et maintenus frais dans la 
boîte de chasse, au moyen d’une éponge imprégnée d’eau. Il est 
certain que les Zycæna qui n’ont pas subi l'opération dite : du 
ramollissage restent d’une nuance bien plus pure que les autres. 
Jules Fallou et Emmanuel Martin, tous deux habitant Paris, 
étaient unis par les liens d’une vieille et solide amitié. Entomo- 
logistes également ardents, ils rivalisaient de savoir-faire, aussi 
bien à la chasse que dans l’art d’étaler les Lépidoptères. Que de 
fois j'ai admiré la préparation irréprochable de leurs papillons, au 
moment où ils les retiraient des étaloirs et les rangeaient dans 
leurs boîtes ! 

À partir de 1863, Emm. Martin alla passer les hivers à Hyères, 
en compagnie de sa respectable mère, tant qu’elle vécut, et l'été, 
il habitait avec elle la ville de Creil où 1l finit par se faire bâtir 
une maison, au haut d’une côte dominant l'Oise, d’où l’on jouissait 
d’une jolie vue sur les collines opposées. Bien des fois, je suis allé 
avec Jules Fallou visiter Emm. Martin dans son cottage, et 
ensemble, après avoir admiré ses cultures auxquelles il donnait 
tous ses soins, nous faisions de longues promenades dans les bois 
environnants. Malheureusement la nouvelle maison d'Emmanuel 
Martin, à Creil, n'était pas sèche comme son appartement de la 
rue de Sèvres, 111, à Paris. Emm. Martin eut le chagrin de cons- 


tater le développement de la moisissure dans ses boîtes et :1l 


224, LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


remarqua que ses chères Géomètres se ramollissaient et perdaient 
leur magnifique rigidité. Dès lors il ne voulut plus revoir sa 
collection, ni la montrer à personne. Après en avoir extrait les 
pièces essentielles qu'il partagea entre Jules Fallou et moi, 1l 
abandonna ses papillons à la destruction. Grâce à l'humidité du 
lieu où elles étaient déposées, le désastre fut rapide et irrémédiable. 
Ainsi périt malheureusement le fruit de plus de trente années d'un 
labeur considérable, accompli avec une compétence et une intelli- 
gence supérieures. Je n'aurais jamais cru qu'un tel sort pût être 
réservé au résultat de tant de travaux. 

Mon pauvre ami Emmanuel Martin s’est éteint en 1897, à l'âge 
de 70 ans. Il avait toujours semblé d’une complexion délicate et 
d'une santé fragile; mais les chasses entomologiques sont une 
précieuse thérapeutique. La vie au grand air, les promenades fré- 
quentes dans les bois et dans les champs, l’activité intellectuelle 
toujours éveillée, mais généralement exempte des soucis doulou- 
reux qui accablent si souvent les hommes, constituent une panacée 
à laquelle beaucoup d'entomologistes ont dû leur longévité. 
Emmanuel Martin était un amateur éclairé d’horticulture, en même 
temps qu’un fervent collectionneur d'objets préhistoriques ; 1] cul- 
tivait volontiers les lettres latines et l’apologétique religieuse. 
Chrétien convaincu, d’une charité inlassable, les espérances 1m- 
mortelles soutinrent toujours son courage. 

Ce n'est pas sans une émotion profonde qu'ayant tant de fois 
éprouvé le bienfait d’une si dévouée amitié, je fais renaître dans 
ma pensée, avec Ja vivacité d'un souvenir toujours fidèle, la loyale 
et sympathique figure de mon ami Emmanuel Martin. Combien 
de fois à Rennes, où il me visitait presque chaque année, en ins- 
pectant ensemble les boîtes de ma collection dont il aimait à suivre 
les progrès, avons-nous devisé sur les questions entomologiques 
où sa haute expérience de chasseur exceptionnellement habile et 
d’observateur judicieux apportait tant d'intérêt et était pour moi 
si instructive! Il fut membre de la Société entomologique de 
France pendant 42 ans; il méritait bien que son éloge biologique 
fût imprimé dans les Awxales. Mais un silence inexplicable fut 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE DD 


gardé par les dirigeants de cette Société. J'ai suppléé de mon 
mieux, dans le présent ouvrage, à l’oubli regrettable dont mon 
cher ami Emmanuel Martin fut l’objet de la part de ses collègues 
parisiens, et je rends un juste tribut d'estime et d'affection à une 
mémoire qui me restera toujours chère. 


Lycæna Allardi, Obthr. 


Une des plus jolies espèces du genre Zycæna. Elle n'a encore 
été trouvée que dans l'Oranie. Gaston Allard l’a découverte à 
Daya. Le D" Codet et Harold Powell l'ont capturée à Sebdou où 
elle vole au mois de mai. En dessus, le © de Zycæna Allardi 
ressemble beaucoup à Martini; mais la Q est toujours beaucoup 
plus obscure; le dessus de ses ailes est plus noirâtre que brun. En 
dessous, la disposition des ocelles est analogue à celle de Wartini; 
mais les points noirs beaucoup plus gros, cerclés de blanc pur, 
ressortent vigoureusement sur le fond des ailes qui est d’un brun 
chaud et un peu doré dans les deux sexes, chez Af/ardi. C'est 
évidemment de Martini qu'Allardi se rapproche le plus. Lorsque 
Staudinger et Rebel, dans le Catalog 1901, impriment à lar- 
ticle 553, à propos de Zycærna Allardi, ces mots : « praeced. forma 
Darwiniana? » — (l'espèce précédente étant Zephyrus avec les 
formes Zycidas, Hesperica, etc.), on se demande quelle mauvaise 
plaisanterie les auteurs dudit Ca/alog ont voulu servir à leurs 
lecteurs. La vérité, c'est qu'Allardi est une espèce spéciale, ne 
pouvant être confondue avec aucune autre européenne. Allardi est 
plus voisine de Martini que de toute autre espèce. En serait-elle 
même la forme orientale algérienne, tandis que Martini resterait 
l'expression occidentale d’une même unité spécifique ? lepnenle 
crois pas; tous les exemplaires étant si facilement et si nettement 
distincts les uns des autres; mais on pourrait à la rigueur 
exprimer une opinion dans ce sens. Ce ne serait pas, en tout cas, 
aussi paradoxal et contraire à toute vraisemblance que le ratta- 
chement envisagé par Staudinger et Rebel d’A/ardi à Z ephyrus. 

15 


226 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Quoique le Catalog 1001, véritable tissu d'erreurs, nous ait presque 
habitué à y trouver la note fausse et que, dès lors, je devrais à 
peine insister sur des méprises dont il est si aisé de se rendre 
compte et de faire bonne justice, je crois devoir signaler cette fois 
encore une assertion pleine de fantaisie, afin de mettre en garde 
contre elle les entomologistes à qui la Zycæna Allardi ne serait 
pas encore connue en nature. A/lardi paraît beaucoup moins abon- 
dante que Martini. J'ai réuni jusqu'ici une trentaine d'exemplaires 
d’Allardi contre plus de 150 Martini. Les © Allardi varient un 
peu pour l’accentuation des taches jaunes, le long du bord marginal 
des ailes inférieures, en dessus; les d, comme ceux de Martini, 
ont parfois un trait noir cellulaire aux ailes supérieures, en dessus; 
mais, à part ces légères différences individuelles, tous les exem- 
plaires présentent bien les mêmes caractères essentiels, et tandis 
que chez Martini, il y a tendance manifeste à l’oblitération des 
taches noires ocellées du dessous des ailes, c’est tout à fait l’in- 
verse dans A/lardi. Te possède des exemplaires superbes, avec les 
taches noires relativement énormes, d’une teinte très vive, entourées 
d'un liséré blanc, produisant un effet qu’on pourrait qualifier 
d'étincelant sur le fond des ailes qui est d’une couleur brune riche 
et chaude. Il est malheureusement difficile de rendre exactement, 
par le coloris sur papier, le bel effet brillant que produit le dessous 
des ailes de la © Allardi. 

Les Zycæna Martini et Allardi n’ont été jusqu’à ce jour ren- 


contrées nulle part ailleurs qu’en Algérie. 


Lycæna Dorylas, W. V. 


La première édition du Systematisches Verzeichniss der Schmet- 
terlinge der Wienergegend, par quelques professeurs du There- 
sianum, a paru à Vienne, en 1776. C’est un beau livre, grand in-4°, 
avec un superbe frontispice en couleurs représentant des Amours 
ailés, l’un comme A pollo, l’autre comme A glia Tau, un troisième 
à peu près comme Cardamines ; ils regardent une boîte ronde, ainsi 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 227 


qu'on en avait en ce temps-là, contenant des papillons. Ces trois 
amours sont au premier plan, sur une élévation gazonnée d’où 
s'élève, en forme d'encadrement, d’un côté un Convolvulus à fleurs 
bleues et de l’autre un Pzgnonia à fleurs rouges. Des papillons 
variés européens et exotiques, même un petit oiseau, butinent sur 
ces fleurs. Du haut du terre-plein sur lequel sont figurés les amours 
ailés, s'étend en perspective dans le lointain une avenue dessinée 
en jardin à la française, bordée de charmilles taillées et d'arbres; 
au fond de l’avenue s'élève une grande habitation. Cela rappelle 
à mon souvenir une vision de la résidence impériale de Schæn- 
brunn, près Vienne; à la dernière page (322) de ce livre se trouve 
nommé, pour la première fois par ordre de date, le P. Dorylas, 
« Vielaeugigte Falter, Feinblauer, silberglaenzender. » C’est en 
effet un papillon pourvu de beaucoup d’ocelles, d’un bleu délicat, 
argenté, brillant. 

La description n’est pas longue; mais aux temps anciens, on 
ne décrivait pas toujours minutieusement les caractères divers 
d’une espèce. 

Esper, un an plus tard, en 1777, a figuré Dorylas avec les noms : 
1° de T'Aetis (Q, Tab. XXXIII, fig. 3); 2° d’Aylas (S, Tab. XLV, 
fig. 3); 3° encore d’Aylas (Q, Tab. LV, fig. 1). Il est bon d’ob- 
server, à propos du premier nom 7'4efis relevé dans Esper, que le 
Thetis , secundum Esper (Tab. XXXII, fig. 2), est une © cœru- 
lescens d’'Alexis (Icarus). 

Une seconde édition du Systematisches Verseichniss von den 
Schmetterlinge der Wienergegend, avec synonymie et remarques 
diverses, a paru en 1801, à Vienne; mais cette fois en deux volumes 
et modestement imprimée sur format petit in-octavo. 

Dorylas s'y retrouve indiqué à la page 270 du vol. IT, avec 
rappel de l'édition de 1776; le nom d’Aylas, Esper et Borkausen, 
y tombe en synonymie. 

Jacob Huebner a figuré Dorylas sous les n° 280, 200 et 201; 
Boisduval, dans l’Zcones (PI. 14; fig. 1, 2, 3), a donné des figures 
du même Dorylas; ainsi que Duponchel, dans le Sypplément 


(PINS; Gen). 


228 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


La Zycæna Dorylas éclôt à la fin du printemps et en été. Elle 
a deux éclosions par an, ou plutôt, je pense, une série d’éclosions 
consécutives de juin à août. Je l'ai trouvée abondante en juin, aux 
environs d’'Uriage (Isère). Nous l'avons capturée dans les Pyrénées- 
Orientales en Juin, juillet et août; je la possède des Basses-Alpes, 
des Alpes-Maritimes, où J'ai pris une belle Ab. © subtus-radiata, 
à Saint-Martin-de-Vésubie, en juin 1806; je l’ai fréquemment ren- 
contrée aux environs de Zermatt, dans le Valais; en Savoie: dans 
la Lozère; à Cauterets (Hautes-Pyrénées); mon frère l’a prise à 
Eclepans et à Fusio, en Suisse. 

Je l’ai reçue d’Akbès, en Syrie; des Abruzzes; de Cassel, en 
Allemagne; de Franche-Comté, d’où M. René Fritsch a eu l’obli- 
geance de me faire cadeau d’un C' bien curieux; aux ailes supé- 
rieures, en dessous, cet exemplaire n’a gardé que le point cellulaire, 
tandis que les ailes inférieures sont très bien rayonnées. Ma col- 
lection contient un G' de Lombardie richement rayonné aux quatre 
ailes. J'ai fait représenter sous le n° 37 de la PI 3 de la 
XX" livraison des Æ£/udes d'Entomologie un G' bien rayonné, mais 
aux ailes supérieures seulement, venant des Basses-Alpes. Mon 
frère a pris une © presque semblable à Vernet-les-Bains. 

L'espèce varie en dessus pour le ton du bleu, chez le G', et pour 
le nombre des taches fauve orangé chez la ©. On trouve des © 
très obscures; d’autres ont, aux ailes inférieures, deux ou trois 
taches fauves, le long du bord terminal, et chez certains échan- 
tillons, les ailes supérieures, en outre des inférieures, sont éga- 
lement bordées de taches fauves. En dessous, la nuance grise du 
fond varie beaucoup, ainsi que les taches diverses, pour leur accen- 
tuation et leur développement. Les © ont tantôt la frange tout 
entière d’un blanc pur, et tantôt la frange partiellement brune; 
le O a les ailes bordées par un liséré noir très fin, quelquefois, 
cependant, la bordure noirâtre s’élargit et les nervures, au contact 
du bord terminal, deviennent noirâtres, ainsi que le pli intra- 
nervural. L'espèce présente aussi des différences de taille notables. 

J'ai fait figurer sous le n° 77 de la PI XX du présent ouvrage, 
avec le nom de Gabrielis, une Q prise à Angoulême, dont les 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 229 


quatre ailes sont ornées, en dessus, d’un semis assez abondant 
d’écailles d’un bleu brillant. Je possède une © analogue prise 
dans les Bouches-du-Rhône, par le D’ Siepi. Le GO de la var. 
Gabrielis a le bord terminal des ailes inférieures nettement ponctué 
de noir. J'ai été heureux de dédier à mon digne et excellent ami 
Gabriel Dupuy, d'Angoulême, cette variété concernant les deux 
sexes de Zycæna Dorylas, Aeuron charmant de la faune lépidop- 
térologique charentaise, où ont été réalisées de si intéressantes 
découvertes. Je pense que Dorylas ne dépasse pas Angoulême du 
côté du Nord-Ouest; j'ai été agréablement surpris de connaître 
authentiquement sa présence dans cette localité d’ailleurs si privi- 
légiée. J'avoue que je n'aurais pas osé prévoir que Dorylas fût une 
espèce charentaise. 

La var. espagnole zivescens, Keferstein, très bien figurée par 
Rambur, sous les n° 8, 0 et 10 de la PI. 10 de la Faune entomo- 
logique de l'Andalousie, habite les parties chaudes et pas très 
élevées des environs de Grenade, de Tijola (Almeria), d'Albar- 
racin et de Sierra-Alta. Mon frère l’a prise en juillet à la Sierra- 
de-Alfakar. Dans la Sierra-Nevada, on trouve une forme de C 
bleu et de Q brun foncé, très peu maculée de fauve. Feu de 
Graslin avait pris, le 24 août, peut-être par un temps d'orage, un 
d' d’un violet gris en dessus, que j'ai fait représenter sous le n° 38 
de la PL 3 de la XX® livraison des Æzudes d'Entomologie. 
Dorylas n’a pas été trouvée en Algérie; mais 1l y a au Maroc une 
superbe forme géographique appelée atlantica, Elwes, et dont les 
deux sexes sont figurés dans les 7'7ansactions Ent. Soc. London, 
1905, sous les n* 5 et 6 de la PL XIX. Dans les Alpes et les 
Pyrénées, Dorylas G' se plaît sur les routes avec les autres espèces 
de ZLycæna et les Hesperide. I] se repose en compagnie de ses 
congénères sur les parties humides des chemins, pendant les 
journées chaudes. Dorylas est facile à distinguer des autres 
Lycæna, par son incomparable couleur bleu céleste, d’un brillant 
argenté si délicat : « Vielaeugigte Falter, Feinblauer, silberglaen- 
zender. » 


230 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 
PE 


Lycæna Tithonus, Huebner (Æros, Ochs, etc.). 


La Zycæna qui doit régulièrement s'appeler Tihonus, c'est 
l'espèce que depuis un siècle les entomologistes appellent commu- 
nément Æ7os. 

C’est vraiment une bizarre chose, la nomenclature entomolo- 
gique! Il semble que la plupart des lépidoptéristes qui écrivent 
des livres sur l’'Entomologie ne se préoccupent nullement de savoir 
si les noms par lesquels ils désignent les diverses espèces de 
papillons sont justifiés ou non. Il y a des règles de priorité dont 
ils négligent de tenir compte; sans doute ils évitent de remonter 
aux sources et de lire ce qui a été imprimé avant eux. Alors les 
erreurs qu'ils publient s’accréditent; et nul, parmi les amateurs, 
ne prend la peine de contrôler les assertions des auteurs. 

Huebner a figuré, en 1805, la Lycæna Tithonus sous les 
n® 555 et 556. 

Ochsenheimer, dans son ouvrage : Die Schmetterlinge von 
Europa, publié en 1808, a changé le nom de Z'##Aonus pour celui 
d'Æros, sous prétexte (vol. II, p. 42) que le nom de 7 #Aonus 
ayant déjà été donné par Linné, 1l y a lieu de désigner ce papillon 
par le nom d’Æyros, sous lequel 1l l’a d’abord reçu. 

« Der Name 77Aonus schon von Linné vergeben ist, so nenne 
ich diesen Falter ?. Æ7ros, unter Welchem Namen ich 1hn zuerst 
erhielt. » Il existe en effet un Satyride du nom de 7 z/honus; mais 
ce n’est point une raison pour qu'une Zycæna ne puisse pas s’ap- 
peler également Z'#honus. Il y a bien un Ormithoptera Tithonus, 
et personne ne songe à changer ce nom en un autre nom, sous le 
prétexte qu'invoque Ochsenheimer. Plusieurs espèces de Rhopa- 
locera portent le nom de S/audinger:. Parce qu'il existe un Sazyrus 
Staudingeri, Bang-Haas, cela n'empêche pas qu'il y a aussi une 
Lycæna Staudingeri, Christoph. 

Le nom 7Z7honus, Huebner, 1805, est donc antérieur au nom 
Eros, Ochs., 1808. La chose ne peut être contestée. Cependant 
Boisduval, Duponchel, Herrich-Schaeffer, Gerhard, Staudinger et 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 231 


Rebel ont adopté et popularisé le nom d’Æros, qui est d’ailleurs 
court, harmonieux et tout à fait mythologique, puisque Æ7os est 
le Cupidon céleste, fils de Jupiter et de Vénus. Mais comme :1l est 
postérieur au nom de 7 2/%onus, il faut renverser l’ordre de choses 
généralement admis jusqu'à présent, afin de rétablir Z'2/konus à 
la place d’Æros, conformément à la règle. Je m'y résigne avec 
peine et en disant : dura Lex, sed lex; car il est toujours malheu- 
reux de troubler une tradition universellement acceptée. Pourtant, 
si Boisduval, Duponchel, Staudinger et les autres s'étaient donné 
la peine d'ouvrir le livre d'Ochsenheimer, il y a longtemps que 
l'erreur eût été corrigée et que les entomologistes auraient modifié 
leurs étiquettes. 

Voici donc le Cupidon Æros déchu de son usurpation et c'est 
Tithonus, époux de l’Aurore (*), dont le nom désignera désormais 
et de nouveau la jolie Zycæna dont je viens d'étudier l’état civil. 

La Zycena Tithonus, Huebner (Eros, Ochs. etc.), est une très 
jolie espèce dont le ©, d’un bleu argenté clair (Duennblauer 
Falter), scintille au soleil beaucoup plus vivement que les autres 
Lycæena. La Q, généralement brune en dessus, est plus rare que 
le S, et tandis que celui-ci abonde parfois en Juillet, sur les grèves 
sablonneuses des torrents ou dans les prairies alpestres, notam- 
ment à Zermatt, à Ryffelalp et au ravin de Findelen, la Q sem- 
blant moins active et plus cantonnée dans son lieu d’origine, reste 
ainsi plus difficile à découvrir. La ZLycæna Tithonus est une espèce 
des hautes altitudes. Dans les Pyrénées, on ne la trouve guère à 
moins d'atteindre une hauteur d’environ 1,800 mètres. Dans les 
Alpes, je l’ai rencontrée à partir d’environ 1,600 mètres. En 
Europe centrale, nous avons capturé Tonus (Eros) dans les 
Pyrénées-Orientales, près de Montlouis-sur-Têt; dans les Hautes- 


(*) Zithonus, dont le nom me paraît d’une euphonie moins agréable qu’Æros, 
trouve aussi lui sa place dans la Fable. Il est fils de Laomédon et frère de 
Priam. L’Aurore l’aima et l’enleva dans son char. Tithon obtint de Jupiter 
l’immortalité, à la prière de l’Aurore; mais ayant oublié de demander qu’il ne 
vieillit pas, il devint caduc et souhaita d’être changé en cigale, ce qu’il obtint 
(Noël, Dictionn. de la Fable. Paris, An XIII, p. 615). 


232 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Pyrénées, sur les pelouses rases au delà du lac de Gaube, dans 
la direction du Vignemale; en Savoie, au-dessus de Lanslebourg 
(D' J. Oberthür, Juillet 1894); au Lautaret et à La Grave 
(Hautes-Alpes); en Valais, aux environs de Ryffelalp et de 
Zermatt. Les chasseurs de Digne, que nous employions en 1806 
et 1897, ont pris Z'#Aonus à Larche, à Enchastrayes, au Cheval- 
Blanc et à Allos. M. H. Powell l’a récoltée à la Cayolle, à la 
prairie du Mont-Pelat, au lac d’Allos et dans la vallée du Rou- 
bion. Le comte Turati m'a envoyé des exemplaires de l'Italie 
centrale (Gran Sasso, Mont Majella). 


Cette Zycæna est extrêmement commune dans les montagnes 
de Tâ-tsien-lou, sur la frontière orientale du Thibet, où elle est 
plus grande que dans nos Alpes et où elle appartient à la forme 


Froides ESC M2 6) 


Tithonus vole communément en juillet; mais je l’ai trouvée 
encore fraiche en Savoie, après la mi-août, voltigeant isolément 
autour des fumiers qui sont dressés dans les villages, près des 
étables. Elle nous a paru très rare dans les Pyrénées-Orientales ; 
elle est plus abondante dans les Hautes-Pyrénées, mais dans une 
proportion toujours bien moindre qu’en Savoie, en Valais ou aux 
Basses-Alpes. Il y a plusieurs formes de © : la forme brune, sans 
bordure fauve accentuée, qui est la plus ordinaire; la forme brune 
qui présente le long du bord externe des quatre ailes une série de 
taches fauves surmontant des points noirs intracellulaires, infé- 
rieurement soulignés de blanchâtre; la forme bleue, que J'ai appelée 
cærulescens et fait figurer sous le n° 4 de la PI I de la 
VIII° livraison des Ezudes d'Entomologie. 


La première forme, dont j'ai sous les yeux plus de 80 exem- 
plaires, est celle qu'on voit le plus souvent dans les Alpes et les 
Pyrénées-Orientales; la seconde forme, avec sa bordure fauve plus 
développée, que j'appelle #alica, est celle des Monts Apennins; 
la forme cærulescens se trouve dans les Hautes-Pyrénées, plus ou 
moins caractérisée. Rarement on rencontre à Larche (Basses-Alpes) 
une forme que je rattache à cærulescens, pour ne pas multiplier 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 233 
2 0 AN EL 1 RENTE NONERENEESRSEE CRE 
indéfiniment les noms de variété, et qui est d'un gris argenté 
légèrement bleuûtre. 

Enfin la Q Eroides est d'un brun noirâtre sombre; à Tà-tsien- 
lou, elle a généralement des taches marginales d'un fauve orangé 
vif sur les ailes inférieures et quelquefois sur les supérieures, 
jusqu’auprès du bord costal. Je possède quelques Q sino-thibé- 
taines légèrement sablées d’atomes bleus; d’autres sont très obs- 
cures et sans bordure de taches fauves. Ordinairement, à Tâ-tsien- 
lou, les & Æroides sont plus grands et d’un bleu moins argenté 
que les G Z'ihonus de nos Alpes ou de nos Pyrénées; mais j'ai 
reçu des exemplaires exactement conformes à ceux des montagnes 
de l’Europe occidentale. 

Souvent la Lycena Tithonus a les taches noires du dessous des 
ailes inférieures transformées en rayons; tel le G' du Valais que 
j'ai fait figurer sous le n° 39 de la PI. III de la XX° livraison 
des £tudes d'entomologie. Inversement les taches noires du dessous 
peuvent disparaître; ainsi est le G' Æroides, du Thibet, représenté 
sous le n° 40 de la PI. III de l'ouvrage précité. 

Tithonus (Eros) varie un peu pour la taille, pour la largeur 
de la bordure noire du dessus des ailes chez le d, pour la ponc- 
tuation intranervurale du bord terminal des ailes inférieures, pour 
la nuance grise du dessous des ailes et la grosseur des taches noires 
ocellées. 

La race des Pyrénées-Orientales paraît être exceptionnellement 
petite; mais je possède trop peu d'échantillons de cette provenance 
pour pouvoir donner une indication précise. Les Tithonus Œ qu'on 
ramollit pour les étaler sont exposés à perdre de leur éclat et à 
se tacher; comme le dit Donzel, le mieux, pour conserver Tithonus 
(Eros) dans toute sa beauté, c'est ’étaler ses ailes, peu de temps 
après sa mort, alors qu’elles n'ont pas encore perdu leur souplesse. 

Il a été publié d'assez bonnes figures de Zithonus © par 
Huebner, sous les n°“ 555 et 556; par Boisduval, dans l’Zcones, 
avec le nom de Zros, sous les n°“ 4, 5 et 6 de lle TAT#par 
Duponchel, dans le Sypplément, sous lésn rebOide la Pl°#72 
Herrich-Schaeffer a très bien représenté la Q brune normale, tou- 


234 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Jours avec le nom de Z7os, sous les n° 212 et 213. Je fais figurer 
dans le présent ouvrage la © cærulescens, de Larche, plus 
argentée et moins bleue que celle des Hautes-Pyrénées; la Q 
alica, du Mont-Majella, dans les Abruzzes; les © Æroides, de 
Tâ-tsien-lou, normale et su0tus-radiata. 


J'ai conservé dans mon souvenir et J'évoque comme une bien 
agréable réminiscence la vision déjà lointaine des jours heureux 
que J'ai passés à Zermatt, en 1864 et 1866, avec de chers et aimables 
compagnons que, sauf un seul, Dieu a maintenant rappelés à Lui. 
La Zycæna Tithonus est intimement liée à la mémoire de toutes 
les chasses auxquelles nous nous livrions si joyeusement ensemble 
dans ces montagnes superbes et ces prés si fleuris. 

Par les belles journées de juillet, le torrent dont les eaux des- 
cendent du glacier du Gorner est moins gonflé le matin que dans 
le milieu du jour; la fonte des neiges et des glaces étant plus 
abondante sous l'influence des rayons solaires que durant la frai- 
cheur de la nuit. Dans la matinée, le long du torrent, il reste donc 
des grèves de sable que les eaux recouvrent tous les après-midi, 
mais qui, Jusqu'au milieu du jour, se trouvent assez largement 
découvertes; elles conservent l'humidité, quoique chauffées par les 
rayons ardents du soleil. Sur ces grèves sablonneuses se trouvaient 
çà et là quelques grosses pierres enfoncées plus ou moins profon- 
dément et que la violence des eaux, à certaines heures, déplace st 
facilement, malgré leur énorme poids. À côté de ces pierres, 1l y a 
des places un peu plus creuses, formant comme l'ouverture d’un 
entonnoir et dont les parois étaient particulièrement affectionnées 
par les Zycæna. 

En s'avançant vers les bords du torrent, nous dérangions les 
Lycæna souvent posées en grand nombre sur le sable humide et 
chaud. Nous étions alors comme enveloppés dans un tourbillon 
de petits papillons bleus, parmi lesquels les 7%onus (Eros) 
semblaient les plus nombreuses. Une fois troublées et déplacées, 
ces Zycæna voltigeaient pendant quelque temps avant de se 
reposer de nouveau à terre, formant comme un petit nuage brillant, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 235 


agité et délicieux à contempler. Il en était de même le long du 
ruisseau, au pied du village de Findelen. Mais au grand soleil 
de l'après-midi, les Zycæna T'ithonus, chassées des grèves sablon- 
neuses par la crue des eaux, se retrouvaient, volant actives et ani- 
mées, sur les prairies alpestres, à la hauteur de Ryffelalp; le bleu 
argenté de leurs ailes contrastait avec la couleur rouge feu des 
Polyommatus Eurydice qui leur tenaient compagnie. 

Dans ce magnifique paysage, la haute pyramide du Cervin se 
dresse avec une incomparable majesté; telle la sentinelle avancée 
de toute cette quantité de pics neigeux et glacés dont les cîmes, 
en arrière du Cervin et des deux côtés de la vallée, se profilent 
sur le ciel bleu. Lorsque nous chassions au milieu de la prairie de 
Ryffelalp d’où les yeux dominent le glacier encadré par la verdure 
sombre des pins aroles et la teinte plus claire des melèzes, ayant 
toujours la vue du Cervin dressé sur son énorme base, nous jouis- 
sions d’un contraste charmant que nous offrait le spectacle si 
grandiose de cette scène de la Nature et la grâce délicate des 
papillons fragiles voltigeant nombreux sur les fleurs alpines. 


Lycæna Icarus, von Rottemburg. 


Sous le n° 4 de la Tab. XXXII, Esper a figuré, en 1777, une 
Lycæna S' avec le nom d’/carus. La figure est grossièrement exé- 
cutée; cependant l'identification peut être admise à la rigueur entre 
la figure publiée par Esper et l'espèce qu'on peut qualifñer de la 
plus commune et de la plus répandue des Zycæna européennes. 
Sur la même Planche XXXII, Esper a figuré sous le n° 2, avec 
le nom de 7’Xefis, une Q cærulescens de l'espèce Zcarus; et sur la 
Tab. L, le même auteur a figuré avec le nom de Polyphemus 2 © 
brunes et assez normales de la même /carus. Huebner, sous les 
n° 202, 293 et 294, a représenté avec le nom d’Alexis, mais d’une 
manière plus exacte qu'Æsper, les deux sexes de la même Zycæna. 
C’est sous ce vocable d’Alexis que Ochsenheimer, qui connaissait 
parfaitement les figures données par Esper et en a établi une très 
bonne synonymie, a désigné la Zycæna qui nous occupe actuel- 


236 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


lement, aux pages 38, 30, 40 et 41 de son ouvrage : Die Schmet- 
terlinge von Europa. L'Espèce n'était pas restée inconnue aux 
Thérésiens. À la page 184 de leur ouvrage : Systematisches Ver- 
zeichniss der Schmetterlinge der Wienergegend, portant la date 
de 1776, en passant en revue les papilions qu'ils appellent : 
Polyophthalmi (Vielaeugichte Falter), ces auteurs nomment 
Alexis : l’Argus bleu et l’autre sexe l’Argus brun de Geoffroy. 

Suivant les Thérésiens, la chenille d’Alexis vit sur Onoms 
spinosæ. Mais, dans un journal scientifique intitulé Der Natur- 
forscher, imprimé à Halle, depuis 1774 jusqu'à 1802, à la page 21 
du « Sechstes Stueck » portant la date de 1775, S. A. von Rot- 
temburg, sous le titre : « Awmerkungen zu den Hufnagelischen 
Tabellen der Schmetterlinge », donne le nom d’/carus à la 
Lycæna dont Kleemann a publié une excellente figure sous le n° 5 
de la PI 37 de la 3° partie de l’ouvrage posthume de son beau-père 
Roesel von Rosenhof. 

S. À. von Rottemburg comprend le n° 3 de la PI. 37 du vol. III 
de Kieemann (Roesel), qui est figuré en dessus, sous le même nom 
d’Zcarus que le n° 5, lequel est figuré en dessous et semble seul 
parfaitement reconnaissable. Je crois que le n° 3 ne peut pas être 
considéré avec certitude comme le dessus de la même Zycæna qui 
porte le n° 5; mais le n° 5 reste acquis et l'identification n’est pas 
douteuse. Seulement von Rottemburg décrit à la page 22, avec le 
nom d’A/exis, une Zycæna Q qui me semble être une À gestis, qu'à 
la page 10, le même auteur appelle Medon. Qu'on en Juge : 
« O. Pap. Alexis. Plebejus ruralis. Von diesem Vogel Kenne ich 
nur das eine Geschlecht, nemlich das Weibchen, das Maennchen 
soll wie mir ein Freund berichtet, oben blau seyn, wie fast bey 
allen Argusarten. Das Weibchen ist auf der Oberseite dunkel- 
braun, am Rande mit orangefarbenen Flecken eingefasst. Diese 
Einfassung gehet bey den mehresten um alle vier Fluegel, bey 
einigen aber fehlet sie an den Oberfluegeln. Diese Flecke sind 
weit rothgelber und viel schoener und lebhafñfter, als bey den 
Weibchen vom Aygo und /caro. In der Mitte der Oberfluegel ist 
ein kleiner schwarzer Fleck. Auf der untern Seite ist er ganz 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 237 


hellgrau. Die schwarzen Augen stehen in einer etwas andern 
Ordnung, als bey A7go und Zcaro, und einige derselben haben 
ausser der weissen Einfassung noch einen weisslichen Schatten. 
Dieser Vogel zeiget sich im Junio in den Gaerten, und ist nicht 
haeuñig. » 


Dans ces conditions, on peut se rendre compte de la confusion 
qui existait déjà dans la Nomenclature entomologique, à la fin 
du XVIIT® siècle. 

Conrad Christoph Jung, en 1782, jJugea à propos de publier, à 
Francfort-sur-le-Mein, le Verzeichniss der meisten bisher bekannten 
europæischen Schmetterlinge mit ihrer Synonymen in Alphabe- 
fischen Ordnung verfertigt. Dans ce « Catalogue de la plupart 
des Papillons d'Europe connus jusqu'ici, avec leur synonymie 
dressée en ordre alphabétique », je trouve Alexis à la page 6 et 
Icarus à la page 70. 


Je copie les deux articles comme suit : Alexis, Pleb. rur. s. V. 
Fam N° n°12 p.184 Scop. n. 461, var. 2 Esp t 32 f T7 MeZor. 
Hufn. n° 41. WMedon. Naturf. 6 St. p. 10 und p. 22. n° 0. Alexis 
NB. Pode Alexis ist der Wiener Dameætas. Pap. d'Eur. PL 30. 
NON a C2r4s, Pap Eép 022) 1 410656 05 Naturi OISE 
HerRoesMl et 7 10 Pap d'éuropetbls8 nN80. ur 


D'après cela, c’est l’espèce appelée À gestis par Boisduval et tous 
nos auteurs français qui serait A/exis. Voici d’ailleurs ce que Jung 
dit à propos du nom Agestis (p. 4): « Agestis, Pleb. rur. S. V. 
pDap Ham Nn 15/p 194 Scop n 401 Aer var. [> 

Le nom As/rarche, Bergstraesser, qui désigne A geshis dans le 
Catalog 1901 par Staudinger et Rebel, n’est pas relevé par Jung. 


J'ai cru devoir mettre sous les yeux des entomologistes contem- 
porains tout ce grimoire confus, afin de montrer avec pièces à 
l'appui non seulement combien la base de notre Nomenclature 
présente aujourd’hui d'incertitudes, mais dans quel état troublé se 
trouvait déjà la désignation des espèces de Lépidoptères, à la fin 
de l’avant-dernier siècle. 


238 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


La citation de la synonymie de Jung manque un peu de clarté 
pour tout le monde et surtout pour ceux qui n’ont pas la clef des 
abréviations employées; mais J'ai cru devoir copier le Verzeichniss 
tel qu'il est imprimé et sans y changer une virgule. 

Quoi qu'il en soit, il faut actuellement s'entendre, et Je crois 
qu'on peut désigner sous le nom d’/carus, en toute sécurité de 
savoir exactement de quelle espèce il s’agit, le papillon figuré en 
dessous par Kleemann-Roesel (vol. IIT, PI. XXX VIT, fig. 5). C’est 
la même espèce qu'Ochsenheimer, Huebner et Boisduval ont 
appelée Alexis. Elle est répandue dans les plaines et dans les 
montagnes; elle habite depuis les bords de l'Océan Atlantique 
jusqu’au Turkestan oriental et depuis le nord de l’Ecosse jusqu’au 
Sahara algérien. La Zycœna Tcarus (Alexis) offre en Angleterre 
une race spéciale et distincte des formes continentales. J'ai donné 
le nom de Z'afti à la Lycæna Tcarus anglaise, voulant ainsi honorer 
le nom d’un Lépidoptériste très laborieux, auteur très fécond et 
aussi estimable par la quantité que par la qualité de la documen- 
tation dont il fait part au monde entomologique dans d’incessantes 
publications. Je dispose, pour apprécier la question des formes 
géographiques de la Zycæna Icarus, d'un nombre d’exemplaires 
très considérable. C’est ainsi que ma collection contient environ 
150 spécimens britanniques provenant de Rannoch, au Nord de 
l'Ecosse (Ried), Dover, Cheshire, North-Devon (Mac Arthur), 
comté de Kerry, en Irlande (Salvage), North-Kent, Glengariff, 
Folkestone, New-Forest, des collections Prest d’Vork, Howard- 
Vaughan et Maddison. 

Ce qui différencie la race anglaise 7'wt/i des formes continen- 
tales, c’est que 7'u/t1 a les ailes supérieures sensiblement plus 
élancées et moins arrondies; de plus, le dessous des ailes des Œ 
est d’une teinte grise plus sombre, tandis que le dessus est d’un 
bleu un peu plus transparent avec un fond plus rosé; les ©Q Tur# 
sont généralement bleues, avec une bordure de taches intraner- 
vurales orangées, inférieurement ponctuées de noir, surtout aux 
inférieures; elles se distinguent par une éclaircie blanchâtre, 
notamment près de l’apex des supérieures et au-dessus de la 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 239 


bordure maculaire orangée. Les © cærulescens de France n'ont 
pas le même aspect que celles d'Angleterre; les nôtres manquent 
de ces traits pâles et de ces larges éclaircies d’un blanc bleuâtre 
qui sont la caractéristique spéciale d’un grand nombre de Q /carus 


anglaises. 


Les Hermaphrodites ne sont relativement pas très rares chez 
Icarus; je possède un Hermaphrodite complet G' côté gauche, 
© cærulescens côté droit, portant l'étiquette suivante : taken by 
J. D. Malton at Beverley, 21/7 1800. Cet Hermaphrodite faisait 
partie de la collection Maddison. J'ai aussi, venant de la même 
collection, une Q subtus-radiata portant au Catalogue de la vente 
l'indication suivante : « very fine underside, all the wings with 
large spots and streaks, Dover, Chatwin, 1870. » Par ailleurs, les 
Icarus-Tutti varient comme ceux de tous les pays, par la confluence 
de certaines taches noires du dessous des ailes qui se rejoignent 
et forment un gros trait courbe allongé, notamment près du bord 
costal des inférieures et du bord interne des supérieures; aussi 
par l'absence plus ou moins totale des ocelles noirs. La plupart 
des © Tutti sont cærulescens; il y en a cependant qui ont le fond 
des ailes brun, mais toujours avec des parties claires près de l’apex 
des supérieures, le long du bord terminal des inférieures, et des 
atomes d’un bleu argenté pâle plus ou moins serrés, répandus près 
de la base des ailes. 


En Bretagne, la Lycœena Tcarus est commune partout, dans Îles 
jardins, sur les gazons, dans les bois et sur les dunes du littoral 
de la Manche. Elle éclôt d’abord au mois de mai et on la voit 
voltiger presque sans interruption jusqu'en octobre. J'ai fait 
figurer dans la XX®° livraison des Ærudes d'Entomologie, sous 
les n° 41, 42, 43, 44, 45, 46 et 47 de la PI. 4, des Aberrations 
diverses, en dessous : #inus-punctata, de Cancale; transitus ad 
radiatam, de Cancale; radiata, de Besançon; maculis extensis, de 
Chartres; obscurior, de Cancale; en dessus cærulea, de Lambèse, 
et Hermaphrodite côté gauche cet côté droit 2/3 Q et 1 LEO 
de la collection Boisduval. J'avais déjà figuré une Q 7wfina, de 


240 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Bône, sous le n° 52 de la PI. 6 de la XIX° livraison du même 
ouvrage. 


Pour les explications accompagnant les figures précitées, que Je 
ne répéterai pas ici, Je prie le lecteur de vouloir bien se reporter 
aux pages 22, 23 et 24 de la XX® livraison. 


Je fais figurer dans le présent ouvrage quelques Aberrations 
d'Zcarus, notamment : 7adiata, de Berlin; ämpunctata, de Vienne; 
cæca, de Dusseldorf; cærulescens, de Bourg-des-Comptes (IIle-et- 
Vilaine); Zmpunctata, d'Angleterre et de Digne, et enfin un 
Hermaphrodite de Digne. 

N'est-il pas curieux de constater l'existence d’une Aberration 
d’Zcarus tout à fait analogue à la var. écossaise d’A ges#is, connue 
sous le nom d’Ayfaxerces, privée de toute tache noire au milieu 


de l’ocelle blanc? (PI XLIIT; fig. 323). 


Feu de Graslin et mon frère ont pris en Andalousie la var. 
Celina, Austaut, de taille extrêmement petite; le G' est souvent 
punctiger, en ce sens qu’il a le bord terminal des aïles inférieures 
ponctué de noir dans les espaces intranervuraux. Les © brunes 
ou légèrement sablées de bleu sont bien plus nombreuses que les 
© cærulea, dans les Pyrénées-Orientales, dans les Basses-Alpes, 
en Espagne et en Algérie. On trouve parfois dans cette dernière 
contrée des © dont les quatre ailes sont bordées de taches orangées 
extrêmement grosses, depuis le bord costal des supérieures jusqu’au 
bord anal des inférieures. Je possède quelques Q superbement 
bordées de taches orangées prises à Hammam-Rhira en mai 1909 
et à Lambèse en juin 1885. 


Bellier avait rapporté de Corse une très belle race d’/carus chez 
laquelle le dessous des aïles inférieures du GO‘ est d’une couleur 
blanc jaunâtre carné, avec les taches orangées très vives; le tout 
donnant un effet très brillant. Les ©, brun foncé en dessus, avec 
les taches marginales d’un rouge orangé vif, sont, en dessous, d’une 
nuance café au lait clair. Le même entomologiste avait trouvé dans 
les monts Madonie, en Sicile, des G' très punctiger en dessus et 


d’une couleur riche et chaude en dessous. 


RE 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 241 


Dans les Hautes-Alpes, on trouve des /carus G d’un gris clair 
et mat en dessous, avec les taches marginales non pas orangées, 
mais d’un jaune très pâle tranchant à peine sur la couleur du fond. 

En résumé la Zycæna Icarus est fort variable. La race anglaise 
est spéciale et ses caractères la distinguent bien nettement; mais 
les formes continentales et insulaires méridionales, quoique pré- 
sentant des exemplaires très différents les uns des autres, sont trop 
intimement liées entre elles par d’insensibles transitions pour qu'on 
puisse raisonnablement les classifier séparément. Les G' sont 
grands ou très petits; ils sont, en dessus, ponctués aux ailes infé- 
rieures ou totalement dépourvus de points. En dessous, la couleur 
de leurs ailes varie du gris clair au blanc jaunâtre carné, quel- 
quefois assez foncé aux inférieures. Les © sont brunes ou bleues 
en dessus, avec la bordure des taches orangées plus ou moins large 
et accentuée; il y a des exemplaires où les taches en question sont 
d'un jaune paille presque blanc, d’autres où elles sont d'un rouge 
orange vif. Quant à la transition du brun au bleu, elle s'établit 
au moyen d'individus plus ou moins sablés d’atomes bleus, depuis 
quelques écailles vers la base jusqu’à l’envahissement total par le 
bleu. I] y a aussi des O© entièrement ou presque entièrement brunes, 
chez qui les taches marginales orangées ont disparu. Quant à 
l’ocellation du dessous des ailes, elle est aussi variée que possible. 
Il y a des Zcarus chez qui les points sont très gros et cerclés de 
blanc, d’autres chez qui ces points sont presque nuls. Cette variation 
s'exerce généralement sur une partie plutôt que sur la totalité des 
taches ocellées. Enfin il y a les taches noires transformées en 
rayons. C’est donc, malgré la vulgarité d’Zcarus, une invitation 
aux chasseurs-entomologistes de capturer des séries suffisamment 
nombreuses de cette Zycæna pour pouvoir en apprécier les varia- 
tions extrêmes reliées entre elles par d’insensibles passages. 

Il y a des formes orientales très intéressantes. J'ai reçu du fort 
Naryne une grande quantité d’carus remarquables par leur taille 
très développée, la teinte générale des G' un peu pâle, en dessus 
comme en dessous. Groum Grshimailo m'a envoyé des Monts 
Hissar, avec le nom de Kashgharensis, des Tcarus dont les © sont 

16 


242 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


d'un bleu argenté brillant; mais je ne me sens pas assez docu- 
menté sur les formes d’/carus de l'Asie occidentale pour apprécier 
avec quelque exactitude les races et les variations de l'espèce dans 
cette région. 

Herrich-Schaeffer a figuré sous le n° 246 une © Alexis manquant 
du point noir à la base des ailes supérieures en dessous. Cette 
Aberration est très fréquente. C’est l’/carinus, Scriba, selon Stau- 
dinger et Rebel. Herrich-Schaeffer a représenté en outre sous le 
n° 362 une © très curieusement 7adiata aux ailes supérieures, en 
dessous. Gerhard a copié sous les n°* 8 et 9 de la PI. 38 les deux 
figures 246 et 362 données par Herrich-Schaeffer, ainsi que beau- 
coup d’autres d’ailleurs, mais en changeant les dessins de côté. 
Le même Gerhard figure Alexis G'et © sous les n° 4a, 40 et4c 
deal 7 

La PI 28 de l'ouvrage Versuch einer Monographie der euro- 
paeischen T hecla, etc. est tout entière consacrée à la figuration 
de variétés d'Alexis. Les fig. 1 a, 1 6, 1 c représentent une variété 
lphis; le Œ Iphis semble être d’un bleu lilas plus pâle que la 
forme normale: sous les n°“ 24,2bet 26, c’est la variété 7 kersites 
({carinus), chez laquelle manque le point noir basilaire des ailes 
supérieures, en dessous. Les n°% 3 a, 3 6 et 3 c représentent, sous le 
nom de pusillus, de très petits exemplaires Get Q de la forme 
normale; le n° 4 représente la © bleue d’Alexis, les n° 5 a et 5 à 
donnent la figure d’un Alexis G de petite taille rapporté d'Es- 
pagne par Lederer, et pouvant probablement être rapporté à 
Celina. Le n° 2 de la PL 35 représente un Hermaphrodite partiel 
d’Alexis communiqué par le capitaine Ver-Huell, d'Arnheim. 

Dans l'ouvrage hollandais de Jan Christiaan Sepp, qui, com- 
mencé en 1762, se continue encore de nos jours, sous le titre : 
Beschrijvingen en Afbeeldingen van Nederlandsche Vlinders 
bijeengebragt door Mr. S. C. Snellen van Vollenhoven, se trouvent 
figurés sur les PL. XIII et XIV du vol. IT de la 2° série, les pre- 
miers états et les insectes parfaits de la Zycæna Alexis; la chenille 
est représentée sur Ononis spinosa et il me semble que les chry- 
salides figurées de face et de profil, sont attachées à une branche 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 243 


de genista anglica. I] y a deux formes de © : la bleue peinte sous 
le n° 17 et la brune sous le n° 18. 
L'article est signé A. Brants et daté d’Arnhem, Sept. 1865. 


Au sujet de cet ouvrage hollandais dont la publication se 
poursuit depuis près d’un siècle et demi, Je crois intéresser les 
entomologistes en imprimant ici une notice biographique sur Jean 
Sepp; elle fut originairement écrite en allemand, par C. von 
Heyden, et publiée dans l’Entomologische Zeitung (1855, p. 16); 
la traduction française a été faite par feu H. Jekel et le document 
que je livre au public faisait partie des papiers entomologiques 
de feu À. Guenée. 


« Le 19 décembre 1853 mourut à Amsterdam ie hbraire et 
entomologiste Jean Sepp. Il était né dans cette même ville, le 
18 septembre 1778, et connu comme continuateur de plusieurs 
ouvrages publiés sur l’histoire naturelle et plus particulièrement 
de ceux entomologiques entrepris par son grand-père Christian 
Sepp, né à Goslar, mort à Amsterdam, et son père, Jean Christian 
Sepp, né le 8 novembre 1730, mort le 20 novembre 1811. Dans 
une communication verbale que me fit le sieur Jean Sepp, actuel- 
lement décédé, lors d’une visite que je lui fis à Amsterdam en 1835, 
il m'apprit que son grand-père travailla d’abord seul au premier 
volume de son ouvrage sur les Papillons néerlandais jusqu'à la 
planche 30, puis, jusqu’à la fin, avec la collaboration de son fils. 

» C’est certainement un fait rare de voir se continuer cet ouvrage 
qui date déjà d'environ un siècle, car bien que le titre du premier 
volume soit de l’année 1762, il est certain qu’une grande partie du 
travail en avait été commencé beaucoup plus tôt. 

» Actuellement il a paru du 7° volume jusqu’à la page 108 et 
la planche XLVI (Mamestra Chenopodu, F), et l'ouvrage va être 
continué par un fils du défunt. Des Entomologistes néerlandais 
distingués, tels que Snellen, van Vollenhoven, Ver-Huell, Van 
Eyndhoven, de Graaf, Trapp, van Medenboch de Rooy, d’Ailly, 
Herklots, etc., y joignirent leurs observations et fournirent même 
parfois tout le texte de certaines espèces. Les figures, surtout celles 


244 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


dans les premières parties qui proviennent encore de Christian 
Sepp, surpassent manifestement celles de Roesel, et il est frappant 
que, même la continuation de cet ouvrage soit si peu connue en 
dehors de la Hollande. Les espèces qui y sont contenues sont à 
peine citées dans les autres ouvrages entomologiques, ce qui tient 
probablement à ce qu’il est écrit en langue hollandaise et est d’un 
prix élevé. D’autres ouvrages remarquables sur l'Entomologie, tels 
que ceux de Cramer, Stoll et Voet, font également partie du fond 
de la Librairie Sepp, de sorte que cette famille, en plusieurs géné- 
rations, s’est rendue très utile à l’'Entomologie, sans parler des 
autres branches de l'Histoire naturelle. » 


Lycæna Agestis, W. V. 


On lit dans l'ouvrage Die Schmetterlinge von Europa, 1808, de 
l'acteur Ferdinand Ochsenheimer, à la page 46 de la 2° partie du 
1* volume, la notice suivante concernant À gesfis : « Dass dieser 
Falter der ?. Agestis des Wien. Verz. sey, davon habe ich mich 
durch den Anblick der Schiffermueller'schen Sammlung ueber- 
zeugt und die Anmerkung der Verfasser S. 183.; in welcher sie 
das Weib des ?. Alexis von dem P. À gestis unterscheiden, bestae- 
tigt dasselbe. » 

Voici la traduction française littérale de cette observation : « De 
ce que ce papillon est le P. Agestis du Catalogue de Vienne, je 
m'en suis convaincu par l'examen de la collection de Schiffer- 
mueller; et la remarque des Auteurs (p. 183) dans laquelle ils 
distinguent la femelle du P. Alexis du P. Agestis confirme cela. » 

En effet, à la page 183 du Systematisches Verzeichniss der 
Schmetterlinge der Wiener gegend, publié à Vienne en 1776, 1ly a 
une courte remarque pour séparer les unes des autres les espèces 
de Papiliones polyophthalmi qui sont nos Zycæna actuelles. 

La © d’Alexis (Jcarus) a toujours un peu de poussière bleue 
sur le dessus des ailes et cela la distingue d’Ageszis; mais 1l s'en 
faut encore de beaucoup pour que Agestis, dont le O' est brun 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 245 


comme la ©, ait été nettement distingué en ces temps-là. Quoi 
qu'il en soit, par ordre de date, je crois que le premier nom est 
A gestis et, dès lors, ce nom prime, par ancienneté, l’As/rarche de 
Bergstraesser, dont l'ouvrage date de 1770. D'ailleurs ledit 
Bergstraesser se doutait bien que son As/rarche n'était qu'un 
synonyme d’A ges/is, puisqu’au bas de la page 4 du vol. III (Dritter 
Jahrgang) de l’ouvrage WNomenclatur und Beschreibung der 
Insecten in der Grafschaft Hanau-Muenzenberg, Vauteur imprime 
en note : A gestis (femina) W. Sch. 184 13?, et pour son papillon 
Salacia qui semble, d’après les fig. 1 et 2 de la Tab. 50, être, à 
cause du lavis bleu à la base des ailes, une © d’Alexis (Jcarus), 
ces mots : « Medon, Esp. Tab. 32, fig. 1 ». Bergstraesser connais- 
sait donc l'ouvrage d’'Esper paru en 1777 comme il connaissait 
l'ouvrage des Thérésiens paru en 1776; or, le nom de Wedon 
primerait encore le nom d’Assrarche; mais Medon n'est1l pas un 
nom applicable à une © d’Alexis (Icarus) plutôt qu'à À gesris ? 
Je ne puis le dire avec certitude, vu le peu de perfection dans 
l'exécution de la figure. La question reste donc bien obscure. Il 
semble toutefois qu'Ochsenheimer distingue bien Agestis. Il sait 
que les ailes sont brunes chez le G' comme chez la © ; et du moment 
qu’il a vu la collection Schiffermueller, ce qui a fait sa conviction, 
dit-il, je crois qu’on peut partager cette conviction et garder le 
nom d'A gestis 1776, préférablement à celui d’As/rarche 1770, dont 
la figure, d’ailleurs extrêmement grossière, ne fait guère honneur 
à ceux qui l'ont publiée. 

L’A gestis est répandue en Angleterre, en France et dans une 
grande partie de l'Europe, ainsi qu'en Algérie et en Asie; elle est 
généralement assez abondante, mais beaucoup moins qu'A/exis 
(Zcarus). 

En Ecosse, on trouve la variété géographique Aytaxerces, Fabr., 
dont Boisduval a donné dans l’/cones une assez bonne figure sous 
les n* 7 et 8 de la PL 14 Duponchel a très bien représenté 
Artaxerces sous les n° 3 et 4 de la PL IX du Supplément. Guenée 
possédait des Aytaxerces que lui avait envoyés Doubleday, en 
l'informant que la chenille identique à celle d’Ageszis vit sur 


246 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


l’'Helianthemum vulgare. En dessus, chez Artaxerces, le point dis- 
coidal aux ailes supérieures est blanc; généralement la bordure 
de taches rouges n’est pas très accentuée en dessus, en ce sens que 
les taches rouges sont plutôt petites; quelquefois elles sont appa- 
rentes sur les ailes inférieures seulement; d’autres fois, on en voit 
3, 4, 5 ou 6 le long du bord des supérieures. En dessous, les ocelles 
sont aveugles, c’est-à-dire tout blancs sans ponctuation centrale 
noire; mais il y a tous les passages entre la variété Ay/axerces la 
plus caractérisée et la forme normale À ges/is qu’on trouve au sud 
de l'Angleterre. Cette transition est fournie par la variété Salmacis, 
Stephens, qui a les taches blanches du dessous des ailes finement 
ponctuées de noir. Je possède une longue série d’Ayfaxerces prises 
dans le nord de l’Ecosse, par Ried, ou ayant fait partie des 
anciennes collections John Sang de Darlington, Prest d'Vork, 
Sheppard, Briggs, Doubleday (in coll. Guenée et de Graslin), etc. 
Les exemplaires écossais sont généralement de plus petite taille 
que ceux du Continent. 


Je crois intéressant de présenter aux Entomologistes français la 
traduction de la notice consacrée à Agestis par Charles Barrett, 
à la page 76 de son important ouvrage contenant une histoire très 
complète des papillons anglais. 

Je suis redevable de cette traduction à M. Harold Powell. 

Il s'agit de l'étude comparée des formes anglaises À ges/s, 


Salmacis et Artaxerces. 


M. Barrett s'exprime en ces termes : 


« Une longue polémique eut lieu, il y a quelques années, au 
sujet de la plante nourricière de la chenille d’A gestis; la supposée 
restriction de la forme méridionale à l'Ærodium, et de la forme 
septentrionale à l’Æelianthemum, étant admise comme évidence 
puissante de la distinction spécifique des deux formes : A gestis et 
Artaxerces. Ceci, cependant, a été réfuté par feu M. W. Buckler, 
qui se procura par l'intermédiaire de M. W. R. Jeffrey, d’Ashford, 
des œufs d'A gestis sur Helianthemum, et éleva les chenilles jusqu'à 
la maturité; d'autre part, des chenilles sur la même plante, reçues 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 247 


de M. Robson, lui donnèrent les trois formes. Il ressort cependant 
des observations de M. Robson que les formes septentrionales : 
Salmacis et Artaxerxes, sont produites seulement par des chenilles 
ayant hiverné, et que plus au nord, où l’Agestis type ne se trouve 
pas, il n’y a qu’une seule génération dans l’année. 

» Ce papillon ne montre pas beaucoup d'activité. II voltige pai- 
siblement dans les creux chauds des coteaux, dans les champs, 
ou sur les pentes abritées des dunes, et on peut facilement le 
confondre avec la femelle d’une des autres espèces. Il aime bien 
à se reposer et à dermir sur les tiges de grandes graminées, 
surtout sur les feuilles enroulées du Marram-grass (Awmoplhila 
arundinacea). 

» La forme typique abonde dans la moitié sud de l'Angleterre 
__ sur les collines crayeuses au milieu des Æelianthemum, sur les 
dunes de la côte et les endroits sablonneux de l'intérieur, là où 
l’'Erodium pousse communément. M. À. H. Clarke m'assure que 
ce papillon était autrefois abondant à Wormwood Scrubbs, près 
de Londres. Je l'ai trouvé en masse dans le com occidental 
extrême du sud du pays de Galles. Dans les comtés du centre il 
devient plus localisé, et est rare, ou bien il manque dans bien des 
régions; mais il est commun dans le Dovedale en Derbyshire, et 
se trouve aussi à Scarborough; à Grange Silverdale et Chatmoss 
en Lancashire: et est même signalé aussi loin vers le nord que 
Dumfries. Mais, au sud de cette région, l'espèce se montre en 
général sous la forme Sa/macis, comme à Richmond, Yorkshire; 
et dans le Cumberland; tandis que la variété A7/axerces est, ou 
du moins était, abondante sur les Pentlands, remontant la côte 
Ecossaise dans l’est presque jusqu'à Aberdeen, et dans l'ouest 
jusqu’à la région de la Clyde. 

» Dans le Roxburgshire, juste de l’autre côté de la frontière, 
M. Adam Elliott la trouva dans les clairières d’un bois de pins, 
se posant sur les fleurs de la Centaurea nigra. Dans cette localité, 
l'individu le plus précoce a été vu le 19 juin. D’habitude l'espèce 
y volait en juillet; la seule éclosion durant jusqu'à la fin de ce 
moIs. 


248 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


» En Irlande on ne paraît avoir observé que la forme typique 
— et son existence dans ce pays semble même douteuse. M. Birchall 
l'a signalée en effet dans le comté de Wicklow et près de Dublin, 
et également dans les Mourne Mountains, près Rostrevor; mais 
il a exprimé ensuite des doutes sur ces records. » 


En Bretagne, Agesfis paraît localisée; elle n’est pas rare à 
Cancale, sur les pelouses de mon jardin, où Je la vois éclore deux 
fois par an, en mai et en août; elle est au contraire très rare à 
Rennes; mais elle est très abondante dans les bois de pins à l’ouest 
de Plouharnel, près de l'endroit où le chemin de fer qui va de la 
gare de Plouharnel à Quiberon coupe la grande route de Plou- 
harnel à Quiberon. J'ai vu en août 1000, sur des genêts qui crois- 
saient dans les sables, au milieu des clairières de la forêt, de véri- 
tables essaims de Zycæna Agestis. En frappant avec un bâton 
les branches de genêt, on faisait lever de grandes quantités 
d'A gestis qui ne s'écartaient point des genêts et revenaient se poser 
sur ces papilionacées dès que le mouvement qui les avait troublées 
paraissait terminé. La Lycæna Agestis est une espèce de plaine 
et de montagne; je relève dans ma collection les localités suivantes 
où elle a été recueillie, en outre de celles déjà citées : Charroux 
(Vienne); Dompierre-sur-Mer (Charente-Inférieure); Savoie et 
Haute-Savoie; Alpes-Maritimes; Isère; Hautes-Pyrénées, à des 
altitudes diverses, en juillet; Vernet-les-Bains (P yrénées-Orien- 
tales); col du Mont-Genèvre; Lautaret; Monetier-de-Briançon 
(Hautes-Alpes); Larche (Basses-Alpes), juillet 1807; Digne; 
Bouches-du-Rhône; Paris (ex-coll. Bellier) ; Les Châtelliers (Eure- 
et-Loir); Nantes; Vendée; Cette (Hérault); route du Simplon, 
Ryffelalp, Zermatt (Valais), en juillet, Fusio (juillet 1907); Jura 
bernois; Vittoria et Mont Gorbea; Barcelone; Sierra-Nevada,; 
Grenade et Sierra-de-Alfakar: Sierra-de-Ronda, Jimera à Benoa- 
jan, 12-13 mai 1894; Cordoue, juin 1880; Castille; Corse; Sicile 
(Bellier); Sulmona (juillet) ; Paternopoli; Castellamare-di-Stabia ; 
Rome: Catanzaro (Italie); Sebdou; Lambèse (avril et juin 1884); 
Djurjura (juillet 1884); Biskra (mai 1885); Géryville (mai 1886); 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 249 


Magenta (juin 1886); Daya (Algérie); Fort Naryne (Turkestan) ; 
Tokat (Asie-Mineure) ; Larnaca (Ile de Chypre); Akbès (Syrie); 
Caucasie; Sibérie; Simla (N. W. Inde); Sikkim; Nord de la 
Chine. 

Partout le G et la Q sont, en dessus, d’un brun foncé un peu 
brillant, sans aucun atome bleu; dans les plaines de la France, 
les ailes sont ornées, en dessus, d’une bordure marginale bien 
accentuée de taches intranervurales rouge orangé vif. Un point 
noir clôt la cellule aux ailes supérieures. En dessous, le fond des 
ailes varie du gris blanchâtre au brun, avec les points noirs ordi- 
naires cerclés de blanc et une éclaircie blanche sur les ailes infé- 
rieures, au contact du milieu de la bande marginale rouge orangé; 
cette bande surmonte une série de points noirs intranervuraux qui 
sont presque contigus au bord terminal. Ces points sont souvent 
visibles en dessus, étant, comme le point cellulaire, d’un noir plus 
foncé que le fond brun noirâtre des ailes. La frange est blanche 
mélangée de brun clair. 

Dans les montagnes alpines et pyrénéennes, les taches rouge 
orangé du bord des ailes, en dessus, disparaissent quelquefois 
totalement ; le plus généralement, elles sont seulement rétrécies et 
plus ou moins réduites; la frange paraît plus blanche. 

L’A gestis est de taille relativement très grande à la Sierra-de- 
Alfakar et à la Sierra-Nevada, en Andalousie; les taches rouge 
orange du bord des ailes sont très réduites, comme dans les Alpes 
de France et de Suisse, tandis qu’en Castille, dans la vallée de 
Ronda et aux environs de Grenade, la Zycæna A gestis ne semble 
pas différer de la forme normale de la France centrale et méri- 
dionale. En Algérie et en Corse, on trouve parfois des exemplaires 
Q ayant les taches rouge orange extrêmement développées, aussi 
bien en dessus qu’en dessous; les ©, en Corse, ont le dessous des 
ailes d’un brun roux; les O' sont gris de lin, en dessous; c'est la 
variété calida, Bellier. 

A gestis est donc une espèce très variable suivant les lieux et les 
altitudes, et je crois pouvoir établir comme suit le tableau assez 


complet des variations : 


250 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


1° Artaxerces,; ailes du C' un peu élancées; les taches orangées 
marginales réduites; la tache cellulaire des ailes supérieures 
blanche; toutes les taches du dessous des ailes blanches et privées 
de pupillation noire; Nord de l’Ecosse. 

L'Ab. quadripunctata, Tutt, a en outre deux points blancs sur 
le disque des ailes inférieures. 

2° Salmacis; passage d’Artaxerces à A gestis; le point cellulaire 
blanc des ailes supérieures, en dessus, est ponctué de noir; les 
points blancs du dessous sont finement pupillés de noir; Nord 
de l’Angleterre. 

3° Allous, Huebner; O' 980, 090; Q 991, 092; le G' est abso- 
lument tout noir en dessus; en dessous, les deux sexes sont d’un 
gris noirâtre analogue à Eumedon, et les taches, au lieu d’être d'un 
rouge orangé, sont d’un jaune clair. Je possède 3 c' conformes 
aux figures 080 et 090 données par Huebner; ils ont été pris en 
mai 1903, à 45 kilomètres à l'Est de Zlaoust, dans l’Oural 
méridional. 

4° Nevadensis, Obthr.; diffère d’Allous, Huebner (088), par sa 
taille sensiblement plus grande et la couleur jaune crème un peu 
carnée du dessous des ailes chez le G. La Q a le dessous des ailes 
roux et une bordure de taches rouges aux quatre ailes. Vole en 
juillet dans la Sierra-Nevada et la Sierra-de-Alfakar; je possède 
16e 310, 1les uns pris par mon frère en Juillet 1870, les autres 
provenant des collections de Graslin, Boisduval et Bellier. 
Rambur parle de cette variété, sans lui donner de nom, à la 
page 266 de la laune entomologique de l'Andalousie et à la 
page 38 du Catalogue systématique des Lépidoptères de l'A nda- 
lousie. Boisduval avait dans sa collection, sous le nom inédit de 
Morenae, un S de taille plus grande encore que Wevadensis, dont 
le dessous des ailes est plus gris et moins jaune paille carné que 
Nevadensis. On trouve aux environs de Vernet-les-Bains, suivant 
l'altitude des lieux où l’on chasse, des exemplaires qui sont bien 
conformes à Vevadensis des montagnes d’Andalousie. 

s° Agestis, Huebner. Sous les n° 303, 304, 305 et 306, avec le 
nom d'A gestis, et sous le n° 088, avec le nom d'Allous, Huebner 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE DE 


figure l'A ges/is de nos montagnes alpines et pyrénéennes. Le Ca 
seulement 4 taches rouges aux ailes inférieures, en dessus; les 
taches du dessous des ailes sont de couleur rouge plus accentuée 
que chez l’Allous 989 et 092; le fond de la teinte, en dessous, est 
gris chez le G' et roux chez la ©; c'est la forme que nous trouvons 
au Lautaret et au col du Mont Genèvre, dans les Hautes-Alpes; 
dans le Jura bernois, aux environs de Fusio, de Larche, d'Uriage, 
de la Madone de la Fenestre (Alpes-Maritimes); de Lanslebourg 
et dans quelques parties des Pyrénées, notamment à la haute vallée 
de Cady, au-dessus de Casteil (Pyrénées-Orientales). Dans les 
Hautes-Pyrénées (Cauterets, Gavarnie), la forme tend à Gallica, 
comme aux environs de Vernet-les-Bains, dans les parties peu 
élevées et chaudes. Les figures données par Gerhard sous les 
n® 14, 14,1cet 2 de la PI. 26, avec leurs taches rouges petites 
mais vivement colorées chez les O', conviendraient pour représenter 
certaines formes d’Agestis pyrénéennes. En donnant le nom 
d’Albus à la Q 2, Gerhard commet évidemment une erreur. 

Le papillon figuré par Freyer comme Ages#s, sous le n° 1 de 
la Tab. 235, ressemble pour la taille et le dessus des ailes à 
Nevadensis; mais en dessous il est d’un gris un peu plus blanc 
jaunâtre et non pas d’un jaune clair carné; cependant l’Ages/s 
de Freyer, pas plus que l’Agesiis de Huebner, ne représentent 
l’'Agestis des environs de Paris. Je ne connais malheureusement 
pas la forme allemande d’A gestis, et les Entomologistes allemands 
ne paraissaient pas autrefois connaître la forme française de la 
même Zycæna. Cela tient au dédain professé par tant d'amateurs 
pour les espèces de papillons réputées vulgaires. La recherche 
exclusive des espèces considérées comme rares ou ayant une haute 
valeur en Pfennig n’a tout de même rien de scientifique. Le mer- 
cantilisme que certains Lépidoptéristes envisagent comme le but 
suprème de l’'Entomologie est, à mon sens, une conception fausse 
et contraire aux progrès scientifiques; mais je ne me fais point 
l'illusion de pouvoir changer quoi que ce soit à un système auquel 
sont cramponnés tant d'excellents confrères. Aussi je me garde 
d’insister; et revenant à la question d’A gestis, je constate que notre 


252 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


forme française des plaines parisiennes, analogue à la forme bre- 

tonne et poitevine, n’a pas encore été figurée; en effet, Godart a 

représenté le dessous seulement d’A ges/is, ce qui est insuffisant. 
Je décris donc cette forme inédite sous le nom de gallica. 


6° Gallica, Obthr, intermédiaire entre Agestis, Huebner, et 
calida, Bellier ; la bordure des taches rouge orangé est, en dessus, 
de couleur très vive; chez les ©, les taches rouges sont moins 
grandes que chez les © ; elles n’arrivent pas toujours à Joindre le 
bord costal des ailes supérieures ; mais très fréquemment chez les G 
et toujours chez les ©, la bordure de taches rouges commence 
auprès du bord costal des supérieures et descend jusqu’au bord 
anal des inférieures. Le dessous des Cest gris et le dessous des Q 
est roux. Environs de Paris; Bretagne; Poitou, et certaines parties 


des Pyrénées. 


7° Calida, Bellier; c'est l’exagération de gallica; les taches 
rouges, chez les G' comme chez les ©, sont plus grandes et de 
couleur très vive. Chez certaines ©, les taches rouges confluent en 
une large bande et prennent un développement considérable. Les 
Q sont, en dessous, tantôt d’un brun roux très chaud, comme dans 
le type calida, tantôt grises, comme dans la sous-variété ornata, 
Ster. de la variété calida, Bellier. 

Je possède Calida de Corse (les types), de Rome, de Grenade 
et de diverses localités d'Andalousie. J'ai des Ornata de Lambèse, 
de Magenta et de Daya. Il y a d’ailleurs tous les passages depuis 
le fond gris des ailes jusqu’au roux foncé, c’est-à-dire depuis 
Calida jusqu'à Ornata. D'après Staudinger et Rebel (Catalog, 
1001, p. 83), Orna/a serait vernale et Calida serait estivale. C'est 
une erreur; Car j'ai pris moi-même, le 12 mai 1894, dans la vallée 
entre Ronda et Algésiras, une © Calida très rousse en dessous. 

Dans l'ouvrage Æntdeckungs-Reise in die Sued-See und nach 
der Berings-Strasse zur Erforschung einer nordoestlichen Durck- 
fahrt, unter dem Befehle des Lieutenants der Russisch-Kaiserli- 
chen Marine Otto von Kotzebue, publié à Weimar en 1821, se 
trouve décrite à la page 217 du 3° volume et figurée assez grossiè- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 253 
—  — 
rement sous les n° 264 et 266 de la PI X, avec le nom de 
Cramera, la forme d'A gestis, rencontrée à Ténériffe. Les descrip- 
tions des papillons imprimées dans cet ouvrage sont leuvreide 
Friedrich Eschscholtz. M. Blachier, dans les Arales de la Soc. 
ent. de France, 1880, a figuré avec le nom de Canartensis, sous 
les n°° > et 8 de la PI. 4, la même forme d’A ges/is venant également 
de Ténériffe. Le développement considérable de la bordure de 
taches rouge orange aux ailes supérieures, comme aux ailes infé- 
rieures du ©, indique que Cramera (Canariensis) est probablement 
l'expression extrême dans le sens du développement des taches 
orangées en dessus, de la Zycœna Agestis. Calida serait la tran- 
sition entre gallica et Cramera (Canariensis). 

8 Chinensis, Murray; le bord des ailes est plus dentelé; le 
dessous des © est plus gris et le bord des ailes entre le liséré 
terminal noir et les points noirs qui sont à l'extrémité de la bande 
rouge est blanc. Chine du Nord. 

Par aberration : 1° les taches rouge orangé peuvent être Jaune 
pâle, Ab. pallidior, Obthr.; 2° tous les ocelles noirs du dessous 
des ailes peuvent disparaître. J'ai fait figurer dans la Feuille des 
Jeunes Naturalistes (n° 18; 1900) une Q prise par Austin à 
Folkestone, de l’ancienne collection Briggs, qui n’a conservé en 
dessous que les 4 points noirs cellulaires. Ab. z#punctata, Obthr.; 
3° les ocelles noirs peuvent former des traits noirs; j'ai fait repré- 
senter une remarquable Ab. radiata d'Auvergne, sous le n° 51 de 
la PL 4 de la XX° livraison des Æ/udes d'Entomologie. 

Il y a des exemplaires © extrêmement ambigus et embarras- 
sants: sont-ce des Zcarus (Alexis); sont-ce des A gestis? de même 
entre Adonis (Bellargus) © et Corydon Q,1lya quelquefois une 
telle ressemblance que l'attribution exacte de certains exemplaires 
à l’une des espèces plutôt qu’à l’autre est bien difficile et souvent 
impossible à résoudre exactement. Cela n'empêche pas À ges/is 
d’être une espèce très distincte d’/carus (Alexis), aussi bien que 
Corydon est une espèce très distincte d'Adonis (Bellargus). 
Toutes les © qui ont des atomes bleus sur le dessus des ailes sont 
des Zcarus (Alexis), non des Agestis; mais il y a, surtout en 


254. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Tunisie et dans l'Italie méridionale, des échantillons quelquefois 


bien embarrassants. 


Lycæna Eumedon, Esper. 


Chez la Zycæna Eumedon, comme chez À gestis, le et la Q 
sont, en dessus, de la même couleur. Les deux sexes d’A ges/is sont 
bruns; les deux sexes d’Eumedon sont noirs. 

Esperheuretsous les n#2/et > de la Tab PNA oO MePMIEnS) 
d'après des exemplaires recueillis « dans la forêt, au mois de 
mai ». Je suppose que cette forêt se trouve près d’'Erlangen, ville 
où fut édité l'ouvrage d’'Esper, en 1777. Huebner a très bien figuré 
Eumedon S' sous les n* 301 et 302. L’exemplaire représenté en 
dessous (302) porte aux ailes inférieures la bandelette blanche, 
comme l'exemplaire Q figuré en dessous sous le n° 7o1. La 
figure 700 représente la © en dessus; elle a trois points fauves 
le long du bord terminal des ailes inférieures et deux aux supé- 
rieures, près de l’angle interne. 

La Zycæna Eumedon est en France une espèce de montagne; 
elle habite à une altitude d'environ 1,500 à 1,700 mètres; elle 
manque en Angleterre, en Algérie et dans toutes les plaines fran- 
çaises ; mais elle se trouve en Sicile où Bellier l’a capturée, pendant 
son voyage d'exploration entomologique en 1850. Dans ma col- 
lection, il y a des exemplaires d'Exmedon provenant des localités 
suivantes : forêt entre Zermatt et Ryffelalp, en juin, juillet; Béri- 
sal; Pieracave, dans les Alpes-Maritimes, en juin; Lanslebourg 
(Savoie); forêt de l’'Oursière, au-dessus de Saint-Martin-d'Uriage 
(Isère); Larche (Basses-Alpes); plateau du Revard, au-dessus 
d’Aix-en-Savoie; Jura bernois; forêt de Randaïi, au-dessus de 
Vernet-les-Bains; Cauterets (Hautes-Pyrénées); Bosmie; Prusse; 
Wiesbaden; Broussa (Asie-Mineure); Fort Naryne (Turkestan 
oriental); Koukounoor; Oural méridional; Sicile. Rambur dit 
avoir pris un exemplaire dans la Sierra-Nevada; mais je n'ai 
jamais vu d’Eumedon récolté en Espagne. | 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 255 


La Lycæena Eumedon éclôt d'assez bonne heure dans la saison, 
généralement en juin; elle est souvent complètement passée au 
mois de juillet ; elle fréquente les forêts de melèzes dans les mon- 
tagnes ; on la voit voler sur les touffes de Geranium, en compagnie 
d'A cis (Semiargus) et de Donselii. On la trouve par petits groupes 
et elle s'éloigne fort peu du lieu qui l’a vue naître. 

Elle varie pour la couleur du dessous des ailes qui est plus ou 
moins grise ou brune; pour l'absence ou la présence de la bande- 
lette blanche sur le dessous des ailes inférieures. On peut trouver 
au même lieu des Ermedon avec bandelette et des Eumedon sans 
bandelette blanche; ainsi, dans la forêt de melèzes et de pins 
aroles entre Zermatt et Ryffelalp et au Fort Naryne, on trouve les 
deux formes: celle qui n’a pas de bandelette a reçu le nom de 
Fylgia, Spgbg; la forme intermédiaire, où la bandelette est plus 
ou moins apparente, s'appelle Speyeri, Husz. Il y a aussi la belle 
Ab. radiata dont j'ai fait figurer un exemplaire C' sous le n° 50 
de la PL 4 de la XX® livraison des Æzudes d'Entomologie; et 
l'Ab. inverse : subtus-impunctata, qui n’est pas très rare. En 
Prusse, la race semble grande et presque toujours v#//ata. En 
Sicile, elle paraît petite et également vi//ata. Dans les Alpes- 
Maritimes, j'ai pris un superbe G' dont la teinte, en dessous, est 
tout à fait particulière. Le développement des taches rouges mar- 
ginales du dessous des ailes est aussi très variable. Il y a des G 
au Fort-Naryne chez qui ces taches rouges sont très accentuées, 
s'étendent aux quatre ailes et atteignent presque le bord costal 
des supérieures. Au Koukounoor, le fond des ailes est brun roux, 
en dessous, au lieu d’être gris comme en Savoie. Les © sont quel- 
quefois entièrement noires en dessus, comme les d. Elles peuvent 
aussi montrer des taches jaune orange en dessus, le long du bord 
des ailes inférieures et même près de l'angle interne des supé- 
rieures. La frange des quatre ailes est généralement bien blanche 
et l'encadrement qu’elle donne aux ailes contraste avec leur couleur 
d'un noir profond. J'ai fait figurer sur la PI. XLII du présent 
ouvrage quelques exemplaires d'Eumedon qui m'ont paru offrir 


de l'intérêt. 


256 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Lycæna Idas, Rambur. 


Espèce jusqu'ici exclusivement espagnole; figurée par Rambur 
sous les n® 5 et 6 de la PL 10 de la Faune de l'Andalouste. Elle 
fut trouvée sur des parties très élevées et légèrement arides de la 
Sierra-Nevada, à plus de 2.000 mètres d’élévation. Rambur dit 
avoir pris une variété dans les localités moins élevées de la Sierra- 
Prieta, chez laquelle les points noirs des ailes inférieures ont 
presque entièrement disparu (PI. 10, fig. 7). {das se montre au 
mois de juin, voltige très près de terre et se pose sur les plantes 
basses. Ma collection contient une série d'échantillons pris par de 
Graslin qui fut, comme l’on sait, le compagnon de Rambur. Je lis 
sur les étiquettes écrites par feu de Graslin : « Sierra-Nevada, 
17 juillet et 15 août ». Donc l’'Espèce n'apparaît pas seulement 
au mois de juin. Le docteur Thomas Algernon Chapman a trouvé 
Idas à Casayo, dans le Nord-Ouest de l'Espagne, du 2 au 
8 juillet 1906. Il ne me semble pas que les /das de Casayo 
diffèrent de ceux de la Sierra-Nevada. Le D' Chapman a publié 
de bonnes figures sous les n° 13, 14 et 15 de la PI. V des 77ans. 
ent. Soc. London, 1007. L’Espèce varie pour le développement de 
la tache discoïdale des ailes supérieures, en dessus. 


Lycæna Donzelii, Boisduval. 


Découverte par Boisduval en 1825, aux environs de Briançon, 
et dédiée par lui à son ami Donzel, de Lyon, « dont le zèle et 
le talent observateur nous ont fait connaître plusieurs espèces 
nouvelles ». Boisduval a bien figuré Donzelu, dans l’/cones, sous 
les nr, 2tet3 dela Pleure 

La Lycena Donselii n’est pas rare dans la forêt de melèzes 
entre Zermatt et Ryffelalp; mon fils, le docteur J. Oberthür, l’a 
prise aux environs de Lanslebourg, en Savoie. Elle a été capturée 
à Enchastrayes et à Larche (Basses-Alpes); je l’ai rencontrée au 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Dur 


col du Mont-Genèvre, le 18 juillet 1006, et à la Grave, du 21 au 
28 juillet de la même année. Mon frère l’a observée pour la pre- 
mière fois, dans les Pyrénées-Orientales, à la forêt de Randai, en 
juillet 1006; depuis cette époque, elle a été retrouvée en Juillet 1908 
et 1909 dans la même forêt, entre Randaï et le plateau gazonné 
de Mariailles. 

La forme pyrénéenne, d’après 14 exemplaires que J'ai sous les 
yeux, ne paraît pas différer de celle des Alpes. En Finlande et 
dans l'Oural méridional, on a trouvé une race de Donzeli appelée 
septentrionis. Le Œ a le dessus des ailes d’un ton verdâtre plus 
clair et la bordure noire est plus étroite et plus nettement définie 
sur le dessus des ailes. 

Je crois qu'Ayacinthus, Herrich-Schaeffer, est une forme de 
Donzelii privée de bandelette sur le dessous des ailes inférieures 
et présentant un développement plus accentué des taches margi- 
nales qui sont d’un fauve orangé vif. Ayacinthus a été prise par 
Kindermann aux environs d'Amasieh. Herrich-Schaeffer en a 


donné de bonnes figures sous les n° 345, 346, 347 et 348. 


Lycæna Rippertii, Boisduval. 


M. Rippert, de Beaugency, qui fut jadis un entomologiste très 
ardent, découvrit cette Zycæna, dont les deux sexes sont également 
d'une couleur brune, en 1820, aux environs de Digne. Boisduval a 
figuré la Lycæna Rippertii sous les n°* 4, 5 et 6 de la PI. 16 de 
l’Zcones, et il en a publié la ‘description aux pages 68 et 69 de 
cet ouvrage, en 1832. L'espèce fut également figurée sous les 
n*% 058, 059 et 060, par Huebner, avec le nom de Ripertu. On 
remarquera qu'il y a chez l’auteur allemand une faute dans 
l'orthographe du nom Rippert. 

Duponchel a figuré Réppertii dans le Supplément, sous les n° 1 
et 2 de la PI X, et il a décrit l'Espèce aux pages 61 et 62. 
Duponchel se trompe certainement en disant qu'il a trouvé Rippertii 
dans la Lozère, en 1817. D'après ce que Boisduval et Duponchel 


17 


258 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


lui-même nous font connaître, il s'agit non pas d’un O, seul sexe 
pourvu de caractères spécifiques facilement distinctifs et très 
tangibles, mais d'une © qui fut capturée par Duponchel, que cet 
auteur a d'abord appelée Damon et qu'ensuite il a cru devoir 
rapporter à Rippertü. Mais Damon se trouve dans la Lozère aussi 
bien que Dolus, tandis que Rippertii n'a jamais encore été ren- 
contrée dans ce département. Comme les Q des trois Zycæna 
Damon, Dolus et Rippertii sont à peu près semblables entre elles 
et très difficiles à distinguer spécifiquement les unes des autres, 
l'erreur de détermination est facile à commettre; il n’est cependant 
pas vraisemblable qu’une seule © de Réppertii ait été trouvée dans 
la Lozère à l'exclusion du Œ' qu’on n'y a encore jamais vu. Dès 
lors je suis convaincu que Duponchel a donné à tort, plus tard, le 
nom de Rippertii à une © qu'il avait d'abord rapportée à Damon. 
La première idée de Duponchel devait être la bonne. 

Quant à Ripartü, Freyer, c'est un nom qu'il me paraît à propos 
de supprimer de la Nomenclature, à cause de son évidente incor- 
rection et de l'impossibilité où l'on se trouve de l’attribuer avec 
certitude à l’une des trois espèces : Damon, Dolus ou Rippertu. 
Freyer, avant de publier l'ouvrage : Meuere Beitraege, etc. Augs- 
burg, 1833, a fait imprimer sur un format minuscule, à Augsburg, 
en 1830, un premier travail entomologique intitulé : Bettraege zur 
Geschichte europaeischer Schmetterlinge. 

Dans ce petit livre, aux pages 128 et 120, Freyer décrit une 
Lycena dont il figure la Q seulement, sous le n° 3 de la Piles 
avec le nom de Ripartü. Freyer dit que l’exemplaire lui a été 
communiqué par le Baron Von Vimmer, de Prague. C'est une O; 
elle est très voisine de Damon Q et comme Damon ©, elle a un 
trait blanc sur les ailes inférieures, en dessous. Les deux sexes, 
dit Freyer, sont, en dessus, d’un brun obscur et, en dessous, d’un 
gris brun avec les ocelles ordinaires noirs, bordés de blanc. Tou- 
tefois, Freyer ne parle nullement des caractères distinctifs du © 
c'est-à-dire de cet espace soyeux si caractéristique qui existe sur le 
dessus des ailes supérieures de la Zycœna Ripperti Œ. Je pense 
que Freyer n'aurait pas manqué de signaler ce caractère, s’il avait 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 259 
D  — 
été à même de l’observer. Je suis donc porté à croire que Freyer 
n’a réellement connu que la ©, seul sexe dont il a donné la figure 
et dès lors il est impossible de savoir à quelle espèce il convient 
de rapporter cette Q; car, ainsi que Je le constate plus haut, il 
n'y a aucune distinction vraiment appréciable entre lESMO des 
trois espèces : Damon, Dolus et Ripperti. 

Freyer dit que Ripartä vient d'Espagne. En effet, la Lycæna 
Rippertii a été trouvée en Espagne; mais Damon y a été trouvée 
aussi et au même lieu que Rippertü. D'ailleurs est-ce bien d'Es- 
pagne que vient le Répartii de Freyer ? On sait, par l'histoire de 
la Zygœna Favonia, qu'en fait de géographie, Freyer a des idées 
qu'on pourrait qualifier de très larges. Puis, d'où vient ce nom de 
Ripartii ? L'ouvrage de Freyer est daté de 1830; la découverte de 
l'Espèce par feu Rippert, date de 1820. Ne serait-ce point un 
papillon de Digne plutôt que d'Espagne, qui aurait été déjà répandu 
sous le nom de Ripperti, nom que Freyer aurait estropié et changé 
en Æipartü, comme il a changé, dans une autre circonstance, 
l'Algérie pour le pays des Turcs. 

Toujours est-il qu’il semble fort probable d'une part que le nom 
Ripartii n'est que la dénaturation du véritable nom Rippertu, et 
d'autre part rien n'indique que Freyer ait réellement eu en vue la 
vraie Ripperti, dont il aurait vraisemblablement fait figurer lete 
plutôt que la ©, si réellement le G' avait été mis à sa disposition. 

Pour toutes ces raisons, je pense que le nom correct de A2ppertu, 
donné par Boisduval, doit être préféré et maintenu; car seul, ce 
nom s'applique exactement à l'espèce dont 1l est cas. C'est donc 
avec cette désignation que je vais parler de cette Lycæna. 

Elle est très abondante à Digne où elle vole en été; ma collec- 
tion contient environ 400 exemplaires capturés aux environs de 
Digne et au col de Lure, par les chasseurs Cotte et Coulet, à la 
fin de juin, en juillet et même au commencement d'août 1806, 1807, 
1904. J'ai reçu des Basses-Alpes deux belles Aberrations radiata, 
prises en 1904 par Victor Cotte : un O* chez qui les ocelles des 
quatre ailes, en dessous, sont transformés en rayons et une Q qui 


porte, aux ailes supérieures seulement, un rayonnement large et 


260 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


épais. Tous les individus que j'ai vus montrent en dessous, sur les 
ailes inférieures, la bandelette blanche; mais elle est moins appa- 
rente chez les O' que chez les O, à cause du fond plus clair des 
ailes des G. La bandelette blanche en effet ressort plus vivement 
sur les ailes inférieures des Q qui sont d’une couleur plus brune 
et plus foncée. 

La Lycæna Rippertii se trouve aussi dans les Alpes-Maritimes 
d’où j'ai reçu une centaine d'exemplaires recueillis par M. Decoster, 
en juin et juillet 1006, surtout au col de Castillon. Il ne semble 
pas que les Rippertii des Alpes-Maritimes diffèrent de celles des 
Basses-Alpes; cependant les © ont une tendance à avoir aux ailes 
inférieures, en dessus, le long du bord terminal, une série de 2, 3 
ou 4 petites taches rougeâtres; ce que je n'ai constaté chez 
aucune © des Basses-Alpes. Dans les environs de Menton, il y a 
de très grands exemplaires d, mais aussi des spécimens plus petits 
et la bandelette blanche est généralement bien accentuée. 

M. Fabresse a trouvé à Albarracin, en juillet et au commencement 
d'août 1907, en même temps que Damon, une forme géographique 
nouvelle que j'appelle Fabressei. Le O' est relativement petit; 1l 
n'est pas très foncé en dessus; mais il est, en dessous, plus brun 
et moins gris que les exemplaires français; de plus, il est dépourvu 
de bandelette blanche, tandis que la ©, d’un brun plus rougeâtre 
que celle de France, est ornée d’un trait blanc assez vif et net, sur 
le dessous des ailes inférieures. Enfin, le G' a les points noirs très 
marqués, le long du bord terminal des ailes inférieures, en dessus, 
et ces points noirs sont surmontés d'un croissant rougeâtre. La 
même race se trouve en Crimée. 

Le d de Fabressei se rapproche donc beaucoup d’Admetus, 
Esper (Tab. LXXXII: Ge 5; 0 fig. 4)ettluebne(os se 
Q 308 et 309); mais le O' Admetus est plus grand que le G' Fa- 
bressei; il est, comme ce dernier, toujours privé de bandelette 
blanche sur le dessous des ailes inférieures qui est plus foncé chez 
Fabressei; la © Admetus présente des croissants rougeâtres, le 
long du bord terminal des ailes inférieures, en dessus, mais ces 
croissants sont plus accentués chez Admetus Q que chez Fabres- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 261 


sei ©. De plus, bien qu’on puisse voir quelquefois un soupçon de 
bandelette blanche sur le dessous des ailes d'Adinetus ©, très 
généralement Admetus Q est aussi bien privée que le G' de cette 
bandelette; et en tout cas, je n'ai jamais vu d’exemplaire 
d'Admetus Q chez qui l’accentuation de ladite bandelette soit 
aussi nette que chez l'abresser Q. 

Au Fort-Naryne, dans la province Semirechgensee, S. Akulin 
a pris en grand nombre la Lycæna Rippertu, conforme à la race 
des Basses-Alpes. La bandelette blanche est aussi nettement indi- 
quée chez les Ripperti du Turkestan oriental que des environs de 
Digne. J'ai reçu, de M. S. Akulin, deux belles Aberrations 
Subtus radiata. 


Lycæna Dolus, Huebner. 


Si le principe de mathématiques : « Deux quantités égales à 
une troisième sont égales entre elles », est vrai, dans l'Histoire 
naturelle, les Zycæna Dolus et Rippertii S, l'une blanche, l’autre 
noire, dont les Q semblables, semblent être égales entre elles, 
seraient pareillement spécifiquement égales et constitueraient alors 
simplement les deux termes extrêmes d’une même espèce. Mais 
la question, très intéressante théoriquement, ne peut trouver une 
solution que dans l'étude comparative de l'œuf, de la chenille et 
de la chrysalide des deux Lycæna en cause : Dolus et Rippertu, 
travail qui reste à accomplir. 

De même qu'il y a deux formes de Rippertii, l'une sans bande- 
lette blanche, appelée : Admetus et l'autre avec bandelette blanche, 
dite : Rippertu, il y a deux formes de Dolus, sans bandelette et 
avec bandelette: j'ai appelée cette dernière vi//ata et je l'ai figurée 
sous le n° 48 de la PI. 4 de la XX* livraison des Etudes d'Ento- 
mologie, tandis que je figurais l’autre, celle qui n’est pas v//afa, 
sous le n° 49 de la même PL. 4. J'ai publié aux pages VIII et X 
du Bulletin de la Société ent. de France, 1892, une notice détaillée 
sur la Zycæna Dolus et sa forme vittata. Je prends la liberté de 


262 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


prier le lecteur de vouloir bien se reporter audit Bulletin, comme 
aussi à la courte notice qui a été imprimée dans la XX® livraison 
des Etudes d'Entomologie, à la page 17. 

Je me contente d'ajouter les observations suivantes à celles que 
J'ai déjà signalées. 

Depuis 1802, la documentation que renfermait ma collection 
relativement à la Zycæna Dolus, s'est beaucoup augmentée; Je 
possède actuellement rangés dans mes boîtes plus de 800 Dolus et 
je puis avec ces éléments d'étude, donner quelques nouveaux rensei- 
gnements. La Lycæna Dolus semble avoir sa localité la plus occi- 
dentale, du moins parmi celles aujourd’hui connues, dans l'Aveyron, 
aux environs d'Aguessac, c'est-à-dire sur les bords du Tarn, un 
peu au-dessus de Millau. M. Dayrem a capturé à Aguessac, une 
centaine de Dofus, en juillet 1906. La race à Aguessac est vz//afa, 
comme à Florac; généralement les G' sont de taille moyenne; Je 
n'en ai pas vu d'aussi grands que certains exemplaires de Provence; 
ils sont le plus ordinairement moins bleuâtres et quelques mdividus 
sont tout blancs, sans apparence de couleur brune sur le duvet des 
ailes supérieures et sans reflet bleu. Cependant les Q, à Aguessat, 
sont au moins aussi grandes qu'en Provence. En dessous, elles ont 
les ocelles des ailes supérieures très gros et le fond des aïles de 
couleur café au lait, avec la bandelette blanche très nette. 

En France, Dolus se trouve, comme on le sait, dans la Lozère 
et dans certaines parties des Bouches-du-Rhône, du Var et des 
Alpes-Maritimes. M. Gédéon Foulquier récolte chaque année la 
Lycæna Dolus, en juillet dans le vallon de Saint-Pons; la race 
y est en général plus grande et plus bleuâtre que dans la Lozère 
et l'Aveyron; mais comme il y a dans chaque contrée des variations 
individuelles notables, il faut envisager comparativement un 
ensemble d'individus des diverses provenances, pour fonder son 
opinion. Dolus ne paraît pas rare dans les Alpes-Maritimes, au 
col de Castillon. Le G' est ordinairement grand et d’aspect robuste. 
Il est orné d’un très joli glacis bleu pâle qui produit une coloration 
très délicate sur le fond soyeux et brillant des ailes. En dessous, 
il y a beaucoup d'exemplaires des deux sexes, sans aucune bande- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 263 


lette blanche et d’autres avec cette bandelette très caractérisée. Tous 
les passages existent donc entre les formes extrêmes. Les aïles infé- 
rieures portent quelquefois une ocellation très fine, mais plus géné- 
ralement des taches noires bien nettes, cerclées de blanc et 
ressortant assez vivement sur un fond gris. Les Q semblent avoir 
l'ocellation des ailes supérieures plus accentuée que les ©. La 
Lycæna Dolus est aussi très répandue en Italie méridionale, 
notamment à Sulmona, où M. Fabresse a récolté plus de 350 exem- 
plaires pendant l'été 1908. Ce qui caractérise la race italienne de 
Dolus, c’est l'absence du reflet bleuâtre sur le disque des ailes, chez 
le S. Il ne reste chez les Dolus italiens, un vestige de bleu que 
vers la base, à peu près comme dans la race d'Amasieh, appelée 
Menalcas, Freyer. La race italienne n'est pas de si grande taille, 
n1 d'apparence aussi robuste que celle des Alpes-Maritimes. Les © 
ont le plus souvent des chevrons de couleur orangée surmontant les 
points noirs près du bord terminal des ailes inférieures et les 
montrent également une série de taches brunes intranervurales, 
faisant l'effet d’une ponctuation le long du bord terminal des 
mêmes ailes. La forme Menalcas d'aspect général plus jaunâtre et 
encore moins bleuâtre que la race italienne, est vi//ata,; tandis qu’en 
ltalie, la Lycæna Dolus est sans bandelette. J'ai distingué la forme 
italienne de Dolus sous le nom de Virgilia. Il y a donc actuelle- 
ment de l'espèce Dolus, envisagée à part et sans intervention de 
Rippertii ni d'aucune autre espèce ou même race voisine ou alliée, 
les quatre formes suivantes : 

1° Dolus, Huebner. Bouches-du-Rhône, Var et Alpes-Maritimes. 

2° vittata, Obthr. Lozère, Aveyron. 

3° Vargilia, Obthr. Italie méridionale. 

4° Menalcas, Freyer. Amasieh. 


Lycæna Damon, W. V. 


Habite en France, la Lozère et les départements alpins, depuis 
la Haute-Savoie jusqu'aux Alpes-Maritimes; n'a jamais été trouvée 
dans les Pyrénées, ni dans les régions boréales occidentales de la 


264, LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


France. J'a1 pris Damon, en 1863, sur le chemin de Sainte-Enimie 
(Lozère), le long du Tarn, et M. Dayrem a retrouvé Damon en 
1008, aux environs de Florac. 

La Zycæna Damon éclôt une seule fois par an, en juillet et au 
commencement d'août; elle abonde dans certaines localités des 
Hautes et des Basses-Alpes et, ainsi que Je le fais ci-dessus 
connaitre, Damon a été capturée à Albarracin, en Espagne, par 
Fabresse. 

La Zycæna Damon a toujours une bandelette blanche sur le 
revers des ailes inférieures. Le G' est en dessus d’un Joh bleu clair 
brillant, satiné, avec une bordure brune assez large; la côte est 
blanche; la frange généralement grise au contact de l'aile supé- 
rieure est blanche à son extrémité; quelquefois elle est entièrement 
blanche. Damon G' manque du feutrage soyeux qu'on remarque 
sur les ailes supérieures, en dessus, de Dolus et de Rippertu. Je 
possède des exemplaires qui, par le dessous de leurs ailes, appar- 
tiennent à l’Aberr. radiata. M. le Docteur-Professeur Reverdin a 
fait connaître dans le fascicule IV du Bulletin de la Société 
lépidoptér. de Genève, une Aberr. © #“aculata (PI. 10, fig. 4) 
remarquable par quelques taches d’un gris blanchâtre situées près 
du bord des ailes inférieures, en dessus, non loin de l’angle anal. 
L’exemplaire figuré par M. Reverdin a été pris à Bérisal, le 
11 août 1908. Je possède trois © de cette Aberration 71aculata, 
dont un exemplaire fut recueilli par moi-même, à la Grave (Hautes- 
Alpes), en juillet 1906. Un autre exemplaire vient de Digne, le 
troisième fut pris au Sappey, par feu de Graslin. Généralement 
Damon Q est entièrement brune en dessus; mais à Larche, on 
trouve parfois des Q dont la base des quatre ailes est saupoudrée 
d'un semis d’atomes bleus qui s'étend principalement le long du 
bord anal des ailes inférieures. J'ai appelé cette forme de Q 
cærulescens. La Lycæna Damon, dans certaines localités des Alpes 
françaises, est extrêmement abondante; elle est plus rare dans la 
Lozère. Elle varie beaucoup pour la taille. En dehors de la France 
et de l'Espagne, je possède la Zycæna Damon de Gœættingue et 
de Gallicie (ex coll. Kuwert). 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 265 


Lycæna Meleager, Esper. 


Grande et belle espèce répandue dans les Cévennes méridionales 
et dans les Alpes françaises, en Valais, Hongrie, Gallicie, Tyrol, 
Crimée, Italie méridionale, Transcaucasie, Turquie, Asie-Mineure, 
Mésopotamie. 

En France, la ZLycæna Meleager se trouve répandue dans la 
Savoie, les Basses-Alpes, les Alpes-Maritimes, la Lozère et 
l'Aveyron. Mon frère a trouvé l'espèce assez abondante à Millau; 
M. Dayrem l’a recueillie à Aguessac et dans la Lozère. Je l'ai pris: 
jadis à Florac; elle vole en juillet; elle a en France deux formes 
de Q; une forme rayonnée de bleu qui parait se trouver seule 
dans les Cévennes, et une forme noire appelée Szevenu, Huebner, 
et qui se rencontre avec la forme bleue considérée comme type, 
dans les Basses-Alpes et dans les Alpes-Maritimes. En Mésopo- 
time, ‘lo a une 2 forme der OQ, à fond blanc mat avec les 
nervures noires et un semis assez clair d’atomes bruns. Cette forme 
a été appelée ignorata par Staudinger; elle se trouve aussi à Akbès. 
J'ai pris la forme noire Szevenii seule, dans la vallée de Ia Viège, 
canton du Valais. 

En Crimée, on trouve les deux formes ©, la bleue et la noire. 
Dans le sud de l'Italie, à Castellamare-di-Stabia, M. Fabresse, 
en juillet 1907, n’a trouvé que la forme bleue. 

Meleager SG a le vol assez rapide; la Q se repose volontiers sur 
les fleurs, dans les montagnes sèches, arides et parfumées des 
Cévennes; c'est un papillon charmant avec ses ailes inférieures au 
contour si découpé et si gracieusement frangé de blanc. Le O est 
d’un bleu pâle, en dessus, avec une bordure noire assez fine et une 
frange blanche; ses ailes inférieures sont beaucoup moins profon- 
dément dentelées que celles de la Q. En dessous, Meleager Gest 
gris clair avec les points noirs ordinaires cerclés de blanc. Ces 
ocelles sont assez petits. En dessous, la Q est d’un brun caïé au 
lait, avec une éclaircie blanche au milieu des inférieures, près du 
bord, et les points noirs sont généralement plus gros et mieux 


266 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


marqués que chez le C'; le long du bord extérieur des ailes, il y a 
des points surmontés de chevrons, d'un brun plus foncé que le 
fond des ailes. Sur les ailes inférieures, en dessus, chez la Q bleue, 
on remarque, le long du bord terminal, une série de croissants 
blancs, intranervuraux, du plus joli effet. Ces croissants blancs 
surmontent la ligne de chevrons noirs qui, comme les sourcils au- 
dessus des yeux, accompagnent les ocelles marginaux. 

Esper a figuré sous le n° 2 de la Tab. XLV, la Q bleue, avec le 
nom de Meleager et le O', sous le n° 1 de la Tab. LXII. Huebner 
a figuré la Q bleue, avec le nom de Daphnis, sous les n° 281 et 
282, et le ©, sous le n° 280; le même auteur a figuré la Q noire 
Stevenu, sous les n° 094 et 005. Bergstraesser a représenté, d’une 
façon très reconnaissable, la Q bleue de Meleager, sous les n° 3 
et 4 de la Tab. 55. Meleager est d'ailleurs une des espèces de 
Lycæna qui sont les plus faciles à reconnaître et elle ne peut être 
confondue avec aucune de ses congénères. Elle n’a été trouvée 
Jusqu'ici ni en Algérie, ni en Espagne, ni dans les Pyrénées. 

Les © bleues et noires sont, chacune, assez variables; plus ou 
moins claires ou foncées; il y a des Q bleues assez rembrunies; 
mais Je n'ai pas vu d'exemplaire faisant une transition satisfai- 
sante entre les deux races. 


Lycæna Bellargus, Esper (Adonis, Huebner). 


C’est une Zycæna charmante entre toutes. Le bleu incomparable 
de ses ailes brille du plus doux éclat au milieu des clairières des 
bois et dans les campagnes des régions calcaires du sud de l’An- 
gleterre, de l'Europe continentale moyenne et méridionale, de 
l'Algérie et de l'Asie-Mineure où l'espèce se trouve répandue. La 
Lycæna Bellargus vole au printemps et en été, depuis le mois de 
mai Jusqu'en septembre, et la vue de ce délicieux papillon, parfois 
très abondant dans les sites qu'il affectionne, est toujours aimable 
pour les yeux. Sa présence un peu nombreuse ajoute aux paysages 
un inexprimable charme auquel se montrent sensibles beaucoup de 
personnes même étrangères à l’'Entomologie. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 26 


NV 


Je conserverai toujours en mon souvenir l'agréable vision des 
Lycena Bellargus que j'ai observées dans les plaines ondulées de 
la Vendée et des Charentes, notamment dans les terrains incultes 
et couverts de leur flore naturelle, près de Dompierre-sur-Mer, sur 
les plateaux boisés de chênes et les pentes des collines sèches et 
chaudes au sud de la ville d'Angoulême, et près de Fontenay-le- 
Comte, au Prieuré d'Auzay, propriété de M. le Colonel Sabouraud, 
beau-père de M. Daniel Lucas. 

Là, dans une petite vallée qui était alors conservée sans culture 
et que j'ai appelée : le vallon des Adonis, j'ai amplement goûté, 
en août 1905 et 1907, tout l'agrément de voir voltiger en grand 
nombre la Zycæna Bellargus. 

Du côté du Sud et de l'Orient, le vallon des Adonis est abrité 
par une épaisse futaie de grands chênes. Au Nord, une vigne 
semblant très prospère, plantée sur le plateau, montre son opulent 
feuillage, d'un beau vert sombre. Vers l'Occident, l'horizon est 
largement découvert et les derniers rayons du soleil couchant 
viennent atteindre une partie du vallon. Si l’on sort du bois par 
l'angle Nord-Est, on commence à descendre sur une pente herbeuse 
et glissante d'où s'élèvent par touffes plus ou moins épaisses, de 
hautes graminées. Leurs tiges ont été complètement desséchées par 
le grand soleil de messidor; d’ailleurs, au mois d'août, les récoltes 
des céréales sont terminées aux environs d'Auzay; le sol est devenu 
très sec et en dehors des diverses espèces de graminées, seuls, des 
buissons de ronces, de genêts et de prunelliers, avec quelques 
ombellifères, végètent maigrement dans la terre calcaire, entre les 
pierres éparses et les rochers qui paraissent former le soutènement 
des côtés du vallon. 

Dès les premiers pas qu’on fait en avançant au milieu des herbes, 
surtout si c'est vers le soir, les Adonis qu'on dérange au commen- 
cement de leur repos, s'enlèvent et voltigent en foule; mais sans 
s'éloigner; ils attendent la cessation du danger qui les a troublés, 
pour se reposer de nouveau, les uns auprès des autres, sur les touffes 
de graminées un peu hautes qui s'élèvent pêle-mêle au milieu des 
buissons. Si on s'écarte du lieu où reposaient les Adonis, on les 


268 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


voit peu à peu reprendre possession des brins d’herbes sur lesquels 
ils comptent jouir du repos de la nuit; cependant ils ont quelque 
peine à se remettre à l’aise pour leur sommeil qu'ils prennent, la 
tête dirigée vers le sol; ils s’agitent un peu, tant qu'ils n'ont pas 
retrouvé la bonne position qui deviendra définitive. Quand enfin 
ils se sont fixés sur la paille qui deviendra leur gîte, avant de 
fermer hermétiquement leurs ailes, ils les ouvrent parfois et immo- 
biles, ils les tiennent un peu de temps exposées aux derniers 
rayons du soleil couchant. 

C'est ainsi que pour la première fois, J'ai vu apparaître vivante 
la jolie Q bleue que J'ai appelée cælestis. Eclairée par les derniers 
feux du jour, au déclin d’une chaude journée d'été, elle montrait 
le dessus de ses ailes d’un azur si pur, se fondant en une teinte 
d'un blanc argenté, le long du bord costal des supérieures, et ornées 
de taches rouge aurore du plus joli effet, sur le bord des inférieures. 
Dans ce site pittoresque et au milieu de cette végétation sauvage, 
les papillons abondaient et, les contempler ainsi, était pour moi 
une jouissance exquise dont J'étais redevable à mes si aimables 
hôtes. 

J'ai publié la description différentielle de la forme Q cæœlests 
de la Lycæna Bellargus, aux pages 23, 24, 25 et 26 du Bulletin de 
la Soc. entom. de France, 1008. Je n'ai rien à modifier au texte de 
cette notice; mais sachant fort bien que la description n'est pas 
suffisante pour rendre un nom valable dans la Nomenclature ento- 
mologique, j'ai consacré la PI. XIX, dans la IIT° livraison des Ær. 
de Lépidopt. comparée, à la représentation de la Lycæna Bellargus 
et notamment des Q cælestis, sous les n° 65, 66, 67 et 68. 

En outre des © cæleshs, J'ai fait figurer sous les n° 57, 58, 50, 
60 et 61 de cette même PI. XIX, les deux sexes de la race géogra- 
phique algérienne que j'ai appelée : punctifera. Le Œ n° 57 est, en 
dessus, 7ubro-maculata, c'est-à-dire que, le long du bord terminal 
de ses ailes inférieures, en dessus, des taches rouge aurore sur- 
montent les points noirs ocellés. 

La variété algérienne punctifera est de grande taille et d'aspect 
robuste. Les © 58, 59 et 60 ont, en dessus, le fond brun des ailes 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 269 


supérieures plus ou moins largement sablé d’atomes bleus. Cette 
variété © Ceronus n’est pas rare en Algérie. 

J'ai pris aux environs du lac de Côme, au mois de juin 1907, 
de magnifiques Zycæna Bellargus, grands et robustes. Le G' est 
quelquefois punctiger; mais sa ponctuation noire est pourtant loin 
d'être aussi accentuée que chez la forme algérienne punctifera. 
Toutes les Q que j'ai prises à Cernobbio, sur le côté Nord du lac 
de Côme, sont brunes avec une superbe maculature d’un rouge pon- 
ceau, le long du bord terminal des quatre ailes. 

À Florence, la Zycœna Bellargus est abondante avec Corydon, 
à la fin de mai et au commencement de juin. Elle se trouve mêlée 
à Corydon sur les collines qui s'élèvent autour de la si belle et si 
célèbre cité. En compagnie de M. Verity, j'ai recueilli dans les 
bois montueux et très accidentés qui couronnent les hauteurs sur 
le flanc desquelles est bâtie Fiesole, quelques exemplaires très bien 
rayonnés en dessous. Les Zycæna Corydon présentaient la même 
tendance à la transformation des points noirs ordinaires du dessous 
des ailes supérieures, en rayons. J'ai fait figurer sous le n° 62 de la 
PI. XIX, une Q florentine Ab. adiata. La forme normale de la 
Lycæna Bellargus ©, à Florence, est représentée sous le n° GI. 
On remarquera la belle série de macules rouges qui borde les quatre 
ailes. Les Œ, à Florence, sont moins grands et d'aspect moins 
robuste qu'à Cernobbio. Je n'ai pas plus trouvé la © Ceronus à 
Florence qu'à Cernobbio; je ne sais si elle y existe; en tout cas, 
elle y paraît fort rare; car je l'ai cherchée soigneusement, sans la 
rencontrer. 

En Asie-Mineure, à Tokat, la race est aussi fort belle, grande et 
d'aspect vigoureux. Il en est de même dans les Alpes-Maritimes 
et aux environs de Marseille où se trouve la forme Ceronus, 
conforme à la figure donnée par Esper, sous le n° 2 de la PI XC. 

Mais aucune forme, ni aucune variété de Bellargus n'égalent en 
grâce et en beauté la © cælestis. Celle-ci est d’ailleurs fort variable; 
quoique, si on les considère dans leur ensemble, les exemplaires 
paraissent parfaitement référables à une même unité de forme ou 
de race. J'ai sous les yeux, un très grand nombre d'échantillons de 


270 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


la Zyceæna Bellargus Q cœælestis, pris par MM. Gabriel Dupuy, 
Vigé, P. Boulé, Dayrem, par mon frère et par moi-même. Je cons- 
tate de grandes différences dans le ton de la teinte bleue; d’autre 
part, les © Caælestis sont, les unes, entièrement bleu céleste avec 
un chevron discoïdal noir cerclé ou non de blanc aux ailes supé- 
rieures, tandis que chez d’autres exemplaires, ce croissant noir est 
à peine perceptible. La frange tantôt d'un blanc pur, tantôt bru- 
nâtre, se trouve toujours traversée, suivant le prolongement des 
nervures, par de petites touffes noirâtres qui entrecoupent régu- 
lièrement et très élécamment la frange en question; le long du 
bord des quatre ailes, on remarque parfois une simple série de 
taches noires intranervurales dont les plus rapprochées du bord 
anal, aux ailes inférieures, ‘sont surmontées d'un croissant rouge 
ponceau; le plus souvent les taches rouges se développent grandes, 
en forme de triangle, surmontant les ocelles noirs marginaux qui 
sont eux-mêmes soulignés de bleu plus pâle que le fond des ailes, 
ou de blanchâtre. Cette décoration rouge ponceau remonte le long 
des ailes supérieures et quelquefois même arrive jusqu'à la ren- 
contre du bord costal des mêmes ailes, ce qui est d’un aspect très 
agréable. 

Il est remarquable de constater combien sont relativement fré- 
quents les cas d’hermaphroditisme dans la Zycæna Bellargus. Les 
n° 69 et 70 de la PI. XIX montrent cette sorte d’hermaphroditisme 
dont je possède 17 exemplaires, tous différents les uns des autres, 
mais semblant émaner d’un même principe : c'est-à-dire la trans- 
formation en apparence de ©, d’une partie plus ou moins impor- 
tante d’un des côtés des ailes de la ©. 

Le n° 69 vient de Dompierre-sur-Mer, ainsi que la plupart des 
autres hermaphrodites; le n° 7o a été capturé à Digne, par V. Cotte. 
Ces 17 papillons anormaux sont très curieux à observer et ils méri- 
teraient d’être tous représentés en couleurs, quoiqu'il soit impossible 
de reproduire exactement l’inimitable couleur bleue de l'Adonis. 

Un curieux cas d’albinisme est celui que fournit le n° 63 de la 
PI XIX, avec ses ailes entièrement fauve clair. Ce n’est point un 
cas pathologique tel que la plupart des albinos. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 271 


Le papillon paraît être aussi vigoureusement et symétriquement 
constitué que tous les exemplaires normaux. Un autre cas fréquent 
d’albinisme est celui qui résulte de la transformation en une teinte 
jaune clair de la couleur rouge des taches qui bordent les ailes, 
chez la @. Cette mutation en jaune de la couleur rouge est conforme 
à une règle générale qui s'applique à tous les êtres organisés. 

Je n'ai vu la forme © cælestis, nulle part ailleurs qu? dans les 
plaines de la région calcaire de l'Ouest et du Sud-Ouest de la 
France; dans les montagnes des Pyrénées, Cælestis n’a pas été 
rencontré jusqu'ici, du moins à ma connaissance, C’est ainsi que 
dans les environs de Gèdre, on rencontre comme forme bleue © 
de Bellargus, le papillon que je dois à l’obligeante générosité de 
M. Rondou et qui est figurée sous le n° 64 de la PI XIX. On 
trouve à Vichy une forme assez analogue; mais ces © bleuâtres 
sont très rares dans les Hautes-Pyrénées, aussi bien que dans 
l'Allier, tandis que Cælestis est très abondante dans les plaines 
de la France occidentale. 

Les Ab. radiata ne sont pas très rares chez Bellargus; j'ai repré- 
senté sous le n° 28 de la PI. 3 de la XX® livraison des Æ/udes 
d'Entomologie, un très beau © radiata, quant au-dessous des ailes 
supérieures, pris à Villeneuve-de-Blaye (Gironde); ma collection 
contient plusieurs autres exemplaires de cette Ab. radiata, entre 
autres un beau Œ\ pris le 13 mai 1006, dans les Bouches-du-Rhône, 
sur les bords de l'Arc, près de Velaux, par le D' Siépi; une © 
prise à Larche (Basses-Alpes) par A. Coulet, en août 1807. 

Je prie d’ailleurs le lecteur de vouloir bien se reporter pour un 
complément de documentation, aux observations que j'ai écrites au 
sujet de la Zycœna Bellargus (Adonis) aux pages 18 et 19 de la 
livraison précitée des Etudes d'Entomologie. J'a désigné dans cet 
ouvrage, avec le nom de zolaceo-grisescens, l'Aberration G' qui 
fut prise par un jour d'orage, dont les ailes, en dessus, sont d’un 
gris violet et qui est figurée sous le n° 26 de la PI. 3; j'ai appelé: 
subtus-impunctata, la Q d'Angleterre figurée sous le n° 27 de la 
même PI. 3. J'ai fait figurer aussi, par reproduction photographique, 
dans la Feuille des Jeunes Naturalistes (n° 22, année 1900), une 


272 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


jolie Aberr. anglaise de Bellargus privée de toute ponctuation noire 
aux ailes inférieures, en dessous; c’est un curieux papillon différant 
de Cinnides, Stgr. (Adoms ©, Huebner, 645-646), parce que le 
fond de ses ailes inférieures, en dessous, est blanchâtre et non 
brun, ainsi que les exemplaires ordinaires de la variété Cinnides, 
Stgr. (alis posticis brunneis, subtus non ocellatis). Cette variété 
Cinnides atteint les deux sexes et j'en ai réuni 13 exemplaires, 
dont une © cælestis, de Dompierre-sur-Mer, a été reproduite photo- 
graphiquement elle aussi, sous le n° 23 de la Feuille des Jeunes 
Naturalistes (année 1900). 


En Angleterre, la Zycæna Bellargus © est fréquemment sau- 
poudrée d’atomes bleus et certains exemplaires cærulescents sont 
assez analogues à la © de Gèdre reproduite sous le n° 64 de la 
PI. XIX du présent ouvrage. Cependant les Q anglaises sont 
presque toujours d’un aspect plus sombre et plus foncé que cette ©. 


J'ai pris une fois, tout près de Rennes, dans une prairie, une Q 
Bellargus; elle était très fraîche; mais il y a longtemps de cela 
et Je ne me rendis compte de l'authenticité de l'espèce qu’en retirant 
le papillon des étaloirs. Il y a bien, aux environs de Rennes, une 
localité calcaire appelée Saint-Jacques-de-la-Lande; les Botanistes 
y récoltent une assez grande quantité de plantes spéciales au cal- 
caire et qui ne se rencontrent pas dans les autres champs d’Ille- 
et-Vilaine dont le sol est schisteux ou granitique; mais Jai 
malheureusement très peu chassé jusqu'ici les Lépidoptères à Saint- 
Jacques-de-la-Lande et ce n’est point dans cette localité calcaire 
que J'ai trouvé Bellargus. Depuis cette époque déjà éloignée, je n’ai 
Jamais eu l’occasion d'observer de nouveau Bellargus en Bretagne 
et Je ne m'explique pas comment j'ai pu capturer tout près de 
Rennes, un seul exemplaire fraîchement éclos d’une Zycæna qui 
est très abondante là où elle existe, ou bien qui fait totalement 
défaut. J'ai souvent observé que des papillons entraient dans les 
wagons de chemins de fer et se laissaient ainsi transporter bien 
loin de leur lieu d’origine. Mais tel ne peut être le cas pour la seule 
Lycæna Bellargus © prise à Rennes, loin des voies ferrées. L'échan- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 273 


tillon a les ailes brunes; il est de petite taille, mais très nettement 
caractérisé. 

De même que certaines © d’/carus (Alexis) et d'A ges/is sont 
parfois difficiles à distinguer spécifiquement entre elles, quoique 
les G' soient si nettement différents, ainsi il n'est point aisé de 
discerner les unes des autres, certaines © de Bellargus et de 
Corydon. Il est cependant facile de déterminer avec certitude 
les Bellargus Q dont les ailes sont saupoudrées de bleu vers la 
base, en dessus, et qui ont la bordure de taches rouge ponceau large 
et très développée; mais les © Bellargus, dont l’aspect est sombre, 
sont bien faciles à confondre avec les © Corydon. Dans le centre 
de la France, Bellargus éclôt seule en mai et juin, tandis que 
Corydon n'éclôt généralement qu'en été; dès lors, les Q printa- 
nières sont des Pellargus et la difficulté reste confinée à la géné- 
ration estivale des deux espèces qui volent ensemble aux mêmes 
lieux; mais dans le sud de la France et en Italie, Corydon et 
Bellargus éclosent toutes les deux au printemps, comme en été. 

Dès lors la distinction spécifique est difficile à établir. C'est 
tellement vrai qu'aux environs de Florence où les deux Zycæna 
s’entremêlent au printemps, dans les mêmes localités, Je me sou- 
viens d’avoir essayé de faire le triage sur place, au moment même 
où je réalisais mes captures; mais Je ne parvenais pas à obtenir 
un résultat qui me satisfit. J'ai pourtant soigneusement étudié les 
deux espèces, à l'état parfait tout au moins, et ma documentation 
se compose d'environ 2.500 exemplaires de Zycæna Bellargus et 
de 3.000 Corydon. Lorsque nous serons plus avancés dans l'étude 
analytique des insectes, c’est par quantités d'exemplaires considé- 
rables qu'il faudra constituer les collections. Ce qui est en effet 
nécessaire pour obtenir la connaissance d’une espèce, c'est un 
nombre suffisant d'individus récoltés en des lieux différents et 
à des saisons différentes dans la même année, et dans des années 
successives. Cela mène un peu plus loin que les quatre exemplaires 


de chaque espèce dont se contentaient nos devanciers ! 


18 


274, LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Lycæna Corydon, Esper. 


Existe en Angleterre et en Irlande, dans les parties calcaires de 
la France, de l'Espagne, de l'Italie, de l'Allemagne et de la région 
caucasique, mais manque en Algérie, où Bellargus reste seule, sans 
Corydon qui l’accompagne ordinairement en Europe. Corydon est 
un papillon des plaines, des basses et moyennes montagnes; Je ne 
l'ai jamais vu à une très crande altitude. 

En Angleterre et en Irlande, autant que je puis en juger, par 
une série de plus de 300 exemplaires que j'ai sous les yeux, pris sur- 
tout à Dover, dans le North Kent, à Brighton et dans le comté de 
Kerry, et avant fait partie des anciennes collections Prest, d’Vork; 
Howard-Vaughan, Battershell-Gill, Maddison, ou bien récoltées 
par W. Salvage, la Lycæna Corydon Gest en dessus, d’un gris bleu 
argenté pâle, avec une bordure noire plus ou moins large aux 
ailes supérieures et une ponctuation noire bien accentuée, le long 
du bord terminal des inférieures. En dessous, le fond des ailes 
supérieures est généralement d’un gris blanchâtre clair et le fond 
des inférieures est un peu plus brun. Les ocelles noirs sont cerclés 
de blanc; les points noirs qui bordent les ailes inférieures sont sur- 
montés d'une tache rouge orange et d’un sourcil noir; en outre, 
il y a une éclaircie blanche vers le milieu et au-dessus du bord 
terminal des ailes inférieures; cette éclaircie est contiguë à la série 
marginale ocellée. Les © Corydon, en Angleterre et en [Irlande sont 
généralement brunes en dessus, avec les points noirs surmontés de 
rouge orange, le long du bord terminal des ailes inférieures, et en 
dessous, elles diffèrent du © par une teinte brune plus foncée sur 
les quatre ailes. Les © varient pour la bordure noire des ailes 
supérieures qui est plus ou moins large, quelquefois absente et alors 
remplacée par du blanc argenté ou bien par des points intraner- 
vuraux qui paraissent plus ou moins noirs au milieu d’un entourage 
plus ou moins clair. En dessous, la variation est plus considérable 
encore; aux ailes supérieures, les taches noires, le long du bord 
interne, confluent souvent en arc, chez les deux sexes et forment 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 278 


une sorte d’accent circonflexe, comme dans 77#%ys, Esper (Tab. LI; 
fig. 4) et dans parisiensis, Gerhard (PI. 32; fig. 4). D'autres taches 
confluent aussi, se rejoignant par paires, surtout dans l’espace cellu- 
laire des supérieures et le long du bord anal des inférieures. 

Les points noirs ocellés du dessous des ailes, également chez les 
deux sexes, manquent parfois plus ou moins complètement sur les 
quatre ailes et il n’est pas très rare d'en voir le nombre réduit aux 
seuls points discoïidaux, comme dans l’Aberration Cznnus, Huebner, 
figurée par cet auteur, sous les n° 830 et 831. J'ai fait figurer moi- 
même, sous les n° 30 et 31 de la PI. III de la XX livraison des 
Etudes d'Entomologie, 2 Q Cinnus provenant d'Angleterre et J'ai 
fait représenter un © Cinnus, pris à Saint-Georges, près Royan, 
sous le n° 33 de la même Planche. En outre, J'ai fait figurer au 
moyen de la photographie, dans la Feuille des Jeunes Naturalistes 
(n° 29; année 1900), une © Cinnus, très belle, de la collection 
Battershell-Gill, portant l'étiquette : South Foreland. Sept. 20 1870. 
Gerhard a figuré une Q Cinnus, mais variant quant aux ailes infé- 
rieures seulement, sous le n° 2 & de la PI. 32. Inversement à l’Aber- 
ration Cinnus, les points noirs, des ailes supérieures surtout, peuvent 
être transformés en rayons. La teinte du fond des ailes est, en 
dessous, très variable, surtout chez les © et d’un brun plus ou 
moins clair ou foncé. Les Q anglaises, en dessus, sont tantôt 
obscures, tantôt sablées d'atomes d’un bleu argenté pâle, ce qui 
est plus fréquent en Angleterre que dans aucun autre pays; mais 
ce lavis bleu argenté peut n'être pas toujours symétrique et les 
Q montrent parfois, sur une de leurs ailes seulement, ce semis 
d’atomes argentés. De même l’oblitération des ocelles noirs qui 
caractérise l'Ab. Cinnus, n'est pas toujours symétrique; la © 
anglaise Cinnus, figurée sous le n° 31 de la PI II de la 
XX® livraison des Etudes d'Entomologie, en est la preuve. Cette 
Ab. Cinnus ne'paraîït pas bien rare en Grande-Bretagne, car J'ai 
réuni dans ma collection, 12 G'et 15 © Cinnus provenant d’Angle- 
terre; c'est-à-dire presque autant que la quantité obtenue jusqu'ici 
des autres pays. 

Huebner a figuré sous le n° 742, une variété © de Corydon qui, 


276 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


par rapport à cette espèce, est exactement analogue à la variété Q 
de Pellargus (Adonis) appelée Cælestis. Cette variété © de Cory- 
don, ayant le fond des quatre ailes d’un gris argenté en dessus, à 
peu près comme le C, a reçu le nom de syrgrapha, Keferstein. 

J'en possède une seule © anglaise, malheureusement sans éti- 
quette de localité et faisant autrefois partie de la collection Howard- 
Vaughan. Sans doute la variété syngrapha est très rare en Angle- 
terre. Elle est au contraire assez commune aux environs de Rouen, 
de Paris, d'Angoulême, de la Roche-Beaucourt et de Hautefort 
(Dordogne), de Royan et de Dompierre-sur-Mer (Charente-Infé- 
rieure). Millière a figuré sous le n° 3 de la PL 4 de l’/conographe 
(2° livraison), avec le nom de semzbrunnea, une Ab. © qui fait le 
passage de syngrapha à la forme brune normale. Chez semzibrunnea, 
les espaces intranervuraux, en dessus, sont rayonnés de brun sur 
un fond gris argenté. Millière dit que le papillon figuré par lui, 
avec le nom de semibrunnea vient de la Pape, localité située au 
Nord-Est de Lyon. 

Ma collection contient quelques exemplaires de l’Ab. semibrunnea, 
Millière; ils ont été pris à Angoulême, à Saint-Georges près Royan, 
à la forêt de Chizé (Deux-Sèvres), à Dompierre-sur-Mer. Sei- 
brunnea vole dans les Charentes, avec la © brune et avec la Q syn- 
grapha que Gerhard appelle ariscolore et qu'il figure sous le 
n° 3 » de la PI. 32, comme venant de France; mais semibrunnea, 
qui est une forme transitionnelle entre syrgrapha et Corydon Q 
entièrement brune, est plus rare que les deux formes extrêmes de 
l'espèce. A la forêt de Chizé, mon frère et moi, chassant le 31 août 
1007, nous avons trouvé, voltigeant ensemble, les trois formes Q 
de Corydon : syngrapha, semibrunnea et le type ordinaire de 
l'espèce, entièrement brun. 

Il ne faut pas confondre la Q seribrunnea avec les Q anglaises 
de Corydon dont le fond des aïles est brun, mais saupoudré d’un 
semis plus ou moins serré d'écailles d'un gris bleuâtre argenté. 
Cette forme anglaise de Corydon Q que j'ai déjà signalée plus 
haut, en disant qu’elle se trouve, à ma connaissance, plus souvent 
en Angleterre que partout ailleurs, est tout à fait différente de 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 277 


semibrunnea, de syngrapha et de la © entièrement brune qui se 
trouve aussi en Angleterre et partout en France, tantôt seule et 
tantôt mélangée à syngrapha et semibrunnea, suivant les régions. 

J'ai donné à cette Q anglaise qui est saupoudrée d’atomes d’un 
gris bleuâtre argenté le nom de Anglica, pour indiquer qu’elle est 
surtout spéciale à l'Angleterre. Les deux seuls exemplaires que j'aie 
vus de Corydon Q anglica, pris en dehors de la Grande-Bretagne, 
furent capturés en août 1909, dans la Dordogne et à Dompierre- 
sur-Mer. On ne lira pas sans intérêt la traduction faite par 
M. Harold Powell, de la notice consacrée par Charles Barrett, aux 
pages 87 et 88 de son ouvrage : 7%e Lepidoptera of the british 
Islands, à la Lycæna Corydon, d'Angleterre, comme suit : 

« Un très bel insecte, d’une couleur difficile à décrire ou à repro- 
duire par la peinture et rarement observée dans la nature! J'ai 
vu la même couleur dans le ciel, au crépuscule d'un jour d’orage, 
représentée par les taches bleu pâle visibles entre de gros nuages; 
mais elle ne se trouve dans aucune fleur et très peu d’autres insectes 
paraissent la posséder. 

Son caractère particulier tient en grande partie sans doute à la 
présence des poils blancs, déjà mentionnés, sur le dessus des pre- 
mières ailes, poils qui sont plus abondants chez cette espèce que 
chez aucune autre, exception faite du très curieux ?. Dolus de 
l'Europe méridionale. Corydon est un papillon très actif, au vol 
rapide, fréquentant principalement les terrains crayeux, mais s’en 
éloignant beaucoup parfois, comme dans le cas d'un individu égaré, 
pris dans le Ladbroke Square, Notting Hill, Londres, en août 1864, 
par M. À. H. Clarke! 

L'espèce est abondante sur les pentes des collines crayeuses des 
comtés de Kent, Sussex, Surrey, Berks, Bucks et Oxfordshire; dans 
le Cambridgeshire et sur une colline crayeuse du comté de Norfolk; 
sur l’oolithe aussi bien que sur la craie en Wilts, Dorset, Glouce- 
stershire et Somerset; et sur le calcaire à Grange et à Silverdale 
dans le nord du Lancashire, en Lincolnshire, Westmoreland et 
Cumberland. On la trouve, ou du moins on l’a trouvée, en Essex, 
Hants, Cornwall, et dans une localité du Glamorganshire. 


[LS] 
NY 
CO 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Les exemplaires rencontrés ailleurs ne seraient que des individus 
égarés. 

L'insecte est abondant et largement répandu sur le continent 
d'Europe, ne se limitant nullement aux régions crayeuses. On le 
trouve en abondance de mai à septembre, dans les champs, les 
pâturages et sur les coteaux, indépendamment de la formation 
géologique. Se trouve aussi en Asie occidentale. 

I] y aurait peut-être intérêt à faire remarquer que les cinq der- 
nières espèces de Zycæna présentent à un degré considérable les 
mêmes phases de variation. On trouve ‘des mâles de toutes ces 
espèces de Zycæna; plus ou moins pâles, foncés ou diaphanes; 
des femelles (excepté chez Ageszis) teintées ou envahies de bleu 
en dessus; des dessous enfumés, ou bien avec les taches allongées, 
confluentes, ou parfois manquantes. Dans ces cas, je pense que la 
tache centrale des ailes supérieures reste toujours intacte ». 

Il est bien intéressant de rapprocher les lignes qui précè-lent, 
et d’après lesquelles sur le continent Corydon ne se limiterait pas 
aux régions calcaires, des observations faites dans les départements 
du Morbihan et de la Loire-Inférieure où fut trouvée la Zycæna 
Corydon; c'est-à-dire à Lantillac (J. de Joannis. Lépid. du Mor- 
bihan; Ann. Soc. ent France, 1908, p. 601, 605 et 705) et aux 
environs de Nantes, où je ne crois pas que le terrain soit calcaire. 
Cependant Corydon est certainement bien plus abondant dans les 
régions calcaires que dans les autres où il n’a été observé qu'à l'état 
de très rare exception. Jamais encore je n'ai trouvé Corydon en 
Ille-et-Vilaine; mais il est possible que l'espèce existe quelque part, 
au mois d'août, notamment sur le territoire calcaire de Saint- 
Jacques-de-la-Lande, près de Rennes; je regrette de n'avoir pas 
encore eu l’occasion de rechercher Corydon dans cette localité, 
pourtant si voisine de ma résidence ordinaire. 

Relativement à Lantillac, localité où, suivant le P. de Joannis, 
une vingtaine d'exemplaires de Corydon ont été pris par 
M. Chabot, il n’y a pas un atome de terrain calcaire dans la 
commune. Les terres de Lantillac, contrée que l’un de nous a 


occasionnellement traversée et sur quoi nous avons reçu quelques 


LÉPIDOPIEROLOGIE COMPARÉE 270 


renseignements, ne contiennent d'autre chaux que celle employée 
comme engrais par les laboureurs. Cet amendement y fait du 
reste merveille, précisément parce que la chaux apportée comble 
une lacune dans la constitution organique et naturelle du sol. 
D'ailleurs, le P. de Joannis ne dit point que lui ou son respectable 
frère a pris la Lycæna Corydon à Lantillac et il engage la res- 
ponsabilité de M. Chabot. Je ne voudrais en quoi que ce soit 
suspecter la véracité de personne; mais d’après l'aspect du pays, 
la présence de Corydon à Lantillac constituerait, à mes yeux, un 
fait entomologique très remarquable. Il serait essentiel que la 
présence de Corydon à Lantillac fût de nouveau constatée et que 
la forme de Corydon, dans ce pays, fût définie. 

Corydon offre, en outre des Aberrations déjà signalées ci-dessus, 
un certain nombre de curieuses variations. Ainsi il y avait, dans 
la collection Boisduval, une Q tout à fait semblable au c'; elle 
est entièrement gris argenté en dessus, avec la bordure des ailes, 
supérieures large, mais claire et formée d'une série marginale 
d’ocelles bruns intranervuraux, séparés, par une ligne gris argenté, 
d’une autre ligne brune qui descend du bord costal jusqu'au bord 
terminal: les inférieures sont bordées par une série moniliforme 
de points bruns intranervuraux, cerclés de gris argenté, puis de 
brun, surmontés de rouge aurore. Aux supérieures, on voit deux 
points discoïidaux noirs, petits, auréolés de blanchâtre. Je n'ai Jamais 
vu d'autre exemplaire Q semblable. Je lui ai donné le nom de 
Ab. Boisduvali. 

On trouve souvent chez les , notamment à Digne, cette même 
ligne gris argenté qui se remarque dans l’'Ab. Q Boisduval, et 
qui coupe en deux parties, la bordure marginale noirâtre, parallè- 
lement au bord externe. 

J'ai déjà traité dans la XX° livraison des Ezudes d'Entomologie, 
aux pages 10-22, des variations de la Lycæna Corydon et jai fait 
figurer sous le n° 29 de la PI. 3 de l'ouvrage précité, une superbe 
Aberration d de Corydon, prise par moi à Vernet-les-Bains, ayant 
le dessus des quatre ailes d’une belle nuance bleue très légèrement 
verdâtre, conforme au papillon représenté par Herrich-Schaeffer, 


280 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


avec le nom de Polona, sous les n°® 432 et 433. Mon frère a pris, 
à Cauterets, un semblable exemplaire GO. 

Staudinger et Rebel, en rapportant Polona comme variété à 
Bellargus (Adonis), ont ajouté une erreur de plus à toutes celles 
dont leur Catalog 1001 se trouve émaillé. On ne peut réellement 
identifier qu'à ce Polona, Herr.-Sch,, les Corydon G' bleus des 
Pyrénées. 

Dans le Taurus et l'Eden, on trouve une forme analogue à celle 
de Vernet et de Cauterets; mais en Asie, il semble que Polona soit 
plutôt la règle, tandis que dans les Pyrénées, c’est l'exception. 

Lederer a distingué une variété bleue de Corydon, sous le nom 
de caucasica. Dans la XX* livraison des Æzudes d'Entomologie, 
J'avais rapporté à tort à Caucasica, V Aberration pyrénéenne bleue 
de Corydon; mais comme Lederer n’a pas figuré caucasica, il est 
difficile de se faire une idée très exacte de la variété caucasica 
en question. Je possède cependant quelques exemplaires étiquetés : 
caucasica. Ce sont des Corydon bleus pris à Borshom et d’autres 
que feu de Graslin avait reçus de Lederer lui-même. Ceux-là ont 
quelque chance de représenter la vraie Caucasica. La différence 
entre caucasica et polona, serait alors comme suit : caucasica est 
d’un bleu plus terne et moins brillant, avec le feutrage soyeux des 
ailes supérieures, en dessus, plus pâle; la bordure noire des supé- 
rieures est beaucoup moins large chez caucasica, Lederer, que chez 
polona, H.-S. (432). 

En Italie, Corydon présente une forme appelée apennina; je juge 
sur 300 exemplaires environ dont le plus grand nombre provient 
des hauteurs de Roccaraso et Palena. Sur la ligne de chemins de 
fer qui relie Naples à Rome, à 70 kilomètres de Naples, se trouve 
la station de Caianello d'où part une autre ligne passant à Isernia 
(46 kil. de Caianello), à Sulmona (120 kil. d'Isernia), à Aquila, etc. 

C’est sur cette ligne, entre Isernia et Sulmona, à 53 kil. de cette 
dernière ville, que se trouve Roccaraso dont l'altitude est d'environ 
1.300 mètres. La gare de Palena est à 44 kilomètres de Sulmona 
et les hauteurs voisines de la station ont été, avec les environs de 
Roccaraso, le théâtre des chasses de M. Fabresse, en juillet et 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 281 


août 1908. C'est donc vers le commencement de la chaîne de la 
Majella dont ces montagnes font sans doute déjà partie, que les 
Lycæna Corydon apennina, dont j'ai une série sous les yeux, ont 
été recueillis; les exemplaires paraissent plus petits que ceux de 
France; les G' sont, en dessus, d'un gris bleu argenté pâle; les 
quatre ailes sont fréquemment bordées d’une ponctuation intra- 
nervurale, noire. Les Q sont brunes, en dessus, avec quelques ocelles 
surmontés de rouge, le long du bord des ailes inférieures. Le 
dessous des ailes des o' est pâle et celui des Q, quoique d'un brun 
café au lait assez vif, semble moins obscur que chez les Corydon 
français. 

Aux environs de Florence, dans tous les bois et les endroits 
incultes, ainsi que je l'ai déjà fait connaître dans la notice consacrée 
à Bellargus, Corydon äbonde avec Bellargus (Adonis), à la fin de 
mai et au commencement de juin. J'ai été très étonné de trouver, 
dans les environs de Florence, une proportion relativement si 
grande de Corydon ayant, en dessous, spécialement sur Îles ailes 
supérieures, les taches noires ordinaires transformées en rayons. 
Je capturai une dizaine de Corydon-radiata, alors que J'avais le 
plaisir de parcourir des bois extrêmement pittoresques où les yeux 
jouissaient souvent d’un plaisir charmant. Des vues magnifiques, 
sur des vallées verdoyantes, s'ouvraient au fur et à mesure qu'on 
s'élevait au-dessus de la montagne sur le flanc de laquelle se 
trouve bâtie la petite ville de Fiesole. Je serai toujours recon- 
naissant à M. Roger Verity des jolies excursions où il voulut bien 
me diriger et m'accompagner aux environs de la belle cité florentine, 
aussi intéressante par son histoire et ses monuments que délicieuse 
par le charme de ses beautés naturelles. Florence est, sur cette terre, 
un véritable Paradis, aussi bien pour l’Artiste et l’Archéologue que 
pour le Curieux de la Nature. 

La race de Corydon, aux environs de Florence, diffère un peu 
de la race estivale de Roccaraso, Palena, Sulmona, Castellamare- 
di-Stabia (fin juillet 1908) et Monte-Majella où parvint enfin 
M. Fabresse, les 5 et 6 août 1908. Je suis redevable à M. le Comte 
Turati de quelques Corydon-apennina, pris en juillet 1907, au 


282 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Gran-Sasso; ils ne diffèrent guère des exemplaires pris par 
M. Fabresse. 


Quant à la variété Rezniceki, Bart. prise au printemps, à Gènes, 
et dont je suis redevable à l’obligeance de M. le Comte Turati, 
elle est plus grande et plus robuste qu’'Apennina; le bord des ailes, 
en dessus, chez les ©, est plus fortement ponctuée de noir et les 
ocelles du dessous des ailes sont plus vigoureusement accusés. Les 
exemplaires qu'on trouve à Florence, au printemps, font assez bien 
la transition entre apennina et Rezniceht. 


Mais c'est en Espagne que les variations géographiques de 
Corydon sont plus sensibles. Dans les parties chaudes et relative- 
ment peu élevées de l’'Andalousie, à Grenade et à la Sierra-de- 
Alfakar, on voit voler en juillet, une race de Corydon, dite albicans, 
Herr.-Sch. (494, 405), figurée aussi par Gerhard, sous les n° 1 4, 
1 6, 3 a, 3 d de la PI. 31; cette variété albicans est remarquable 
par la disparition de toute teinte ou reflet bleuâtre sur le dessus 
des ailes du ©, par l’oblitération fréquente de toute bordure noire 
des ailes, en dessus, et par la teinte brun clair, sans aucun vestige 
bleuâtre ou argenté, en dessus, de la ©. Dans la Sierra-Nevada, à 
une certaine altitude, les Corydon d, sans être teintés d’un bleuâtre 
aussi prononcé qu'en Italie ou dans le sud de la France, sont 
cependant bien différents des albicans de la région andalouse plus 
basse et que calcinent les rayons du soleil de l'été. À l’Escorial, 
il y a une race de Corydon plus petite qu'en Andalousie, où cer- 
tains exemplaires atteignent une très grande taille. Mais cette race 
de l’Escorial est d’un gris argentin dépourvu de reflet bleuâtre et 
d’un ton plus jaunâtre peut-être qu’à la Sierra-Nevada. 


Pour la couleur du fond, la race de Corydon, à l'Escorial, consi- 
dérée dans l’ensemble de ses exemplaires, me paraît à peu près 
intermédiaire entre l’albicans de Grenade et Corydon des hauteurs 
au-dessus de Huejar. 


Herrich-Schaeffer a figuré avec le nom d’#ispana, sous les n°* 500 
et so1, une petite race de Corydon que M. Fabresse a prise à 
Albarracin, en juillet et août 1907. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 283 


Albarracin, localité espagnole, célèbre dans les fastes entomo- 
logiques de la péninsule, se trouve situé à une trentaine de kilomètres 
à l’ouest de Teruel. La rivière Guadalaviar (ou bien : el Turia) 
qui passe à Valencia, à Teruel et Albarracin, se continue dans la 
direction ouest de cette localité. C’est en remontant cette rivière, 
c'est-à-dire en se dirigeant vers l’ouest et en remontant un peu 
vers le nord, qu’on arrive à la Sierra-Alta. Cela se trouve à environ 
25 kilomètres d'Albarracin. La région nommée Sierra-Alta, se 
trouve entre deux villages, dont l’un s'appelle Bronchales. L’alti- 
tude de Sierra-Alta atteint jusqu'à 1,600 mètres. M. Fabresse a 
pris, dans ce pays, une cinquantaine de Corydon qui appartiennent 
à la même race 2spana que les Corydon d'Albarracin. 

La race Zispana est plus blanche et moins bleuâtre que la race 
ordinaire des Pyrénées françaises et espagnoles (Vernet-les-Bains, 
Cauterets, Potes). Elle a le bord brun des ailes supérieures souvent 
divisé en deux bandes égales, par une ligne de la couleur du fond, 
qui descend du bord costal au bord interne; de plus, elle se dis- 
tingue par sa belle ponctuation intranervurale, le long du bord 
terminal des ailes inférieures et même des ailes supérieures, en 
dessus; elle se trouve non seulement en Espagne, mais aussi en 
France à Saint-Paul-de-Fenouillet où mon frère a trouvé, en 
Juillet 1904, une race remarquable, très distincte des autres races 
françaises et ne se différenciant réellement d’Æispana que par une 
taille plus grande. À Tijola (Almeria), Corydon est semblable à la 
race de l’Escorial. En Catalogne, Corydon se rapproche de la forme 
de Vernet-les-Bains, dans les Pyrénées-Orientales. En Castille, 
aux environs de Madrid, les © Corydon tendent à avoir le fond 
des ailes, en dessus, plus clair, comme si la teinte brune était fugace 
et laissait paraître, sur le disque des ailes, des espaces ou des 
stries blanchâtres. Les ocelles marginaux chez la Q castillane sont 
parfois très largement surmontés d'orangé; le O' aux environs de 
Madrid est d’un blanc jaunâtre, comme à Grenade et à l’Escorial, 
c'est-à-dire : albicans, mais d’un faciès différent. 

Les figures d’Arragonensis données par Gerhard sous les n° 1 4, 


1 0, 1 c, 1 d de la PI 32, me paraissent, quoique dessinées et enlu- 


284 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


minées sans finesse, se rapporter à peu près à la race de Corydon 
de l’Escorial. 

La figure de Corydonius, H. S. (595, 596) grande et d’un bleu 
clair chatoyant chez le G', représente la race d'Amasieh. 


Feu Alexandre Constant avait autrefois trouvé à Saint-Tropez, 
en mai, une race de Corydon dont je me souviens d’avoir vu chez 
lui, en sa villa Niobé, à Golfe-Juan, une très nombreuse série 
d'exemplaires. J'avais été frappé, en examinant ces Corydon prin- 
taniers de Saint-Tropez, par la vigueur de la teinte rouge orange 
qui, chez la plupart des Œ, surmontait les taches ocellées, intraner- 
vurales, le long du bord terminal des ailes inférieures, en dessus. 
Cette couleur rouge orange est pourtant un ornement formant plutôt 
l'apanage des © que des G'; on peut trouver partout des Cory- 
don Œ avec un soupçon de rouge près des ocelles marginaux des 
ailes inférieures, comme on rencontre des Ægon-rufolunulata; mais 
à Saint-Tropez, il semble que la coloration rouge soit la règle 
plutôt que l'exception, chez les Corydon qui y éclosent au prin- 
temps et y ont par conséquent deux générations par an; alors qu'il 
y a pour Corydon une seule éclosion d'été dans les plaines et les 
montagnes des autres régions de la France. M. le Docteur-Professeur 
Reverdin, de Genève, a retrouvé à Pardigon, dans le Var, en 
avril 1908, la même forme avec ocelles des ailes inférieures sur- 
montés de rouge, que feu Constant avait prise jadis à Saint- 
Tropez. Certains G' de cette variété remarquable ressemblent, en 
dessus, aux © syngrapha (mariscolore) et surtout à la Q que j'ai 
appelée Porsduvali. 

Le dessous des ailes, chez les ©, est d’un gris beaucoup plus 
foncé que dans les autres races. M. Reverdin mentionne la cap- 
ture des Corydon faite par lui, dans le Var, aux premiers jours 
d'avril, à la page 280 du Bulletin de la Société lépidopt. de 
Genève. 

De son côté, M. H. Powell a récolté un grand nombre d’exem- 
plaires de la même race de Corydon, dans la forêt du Dom (Var), 
au commencement du mois de mai 1900. Non seulement cette race 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 285 


est remarquable, ainsi que je l'expose ci-dessus, par la coloration 
rouge orange qui dans quelques exemplaires O' surmonte les ocelles 
intranervuraux, le long du bord externe des ailes inférieures, en 
dessus, mais encore par la teinte gris foncé du dessous des ailes. 
Cette teinte gris foncé du dessous des ailes est encore plus carac- 
téristique que la coloration rouge orange qui accompagne, en dessus, 
les ocelles marginaux des ailes inférieures, parce qu’elle est cons- 
tante pour tous les Corydon G pris à la forêt du Dom et dont 
j'ai 38 exemplaires sous les yeux. 

Je possède 14 Q de la forêt du Dom; elles sont brunes avec une 
coloration orange plus ou moins accentuée, le long du bord externe 
des quatre ailes, mais surtout des inférieures, en dessus. Le dessous 
est d’un brun assez obscur. 

La race de Marseille et Saint-Zacharie, sensiblement plus grande, 
également ornée parfois d’une coloration rouge orange chez Îles of 
le long du bord externe des ailes inférieures, en dessus, quoique 
habitant une région bien voisine de la forêt du Dom et de Par- 
digon, mais éclosant en Juillet et août, est, en dessous plus encore 
qu'en dessus, tout à fait distincte de la forme printanière du 
département du Var. 


On trouve en France de fort belles races de Corydon dans les 
Alpes-Maritimes; à Vernet-les-Bains; dans le Lot-et-Garonne, dans 
l'Hérault, etc. Je connais aussi Corydon de la Lozère, de l'Isère, 
de l'Aveyron, des Hautes et Basses-Alpes, de la Savoie, de 
l'Ariège, des Hautes-Pyrénées, de la Dordogne, des Charentes, 
du Doubs. 

Dans toute la région qui est au sud de la Garonne et à l'est du 
Périgord, il me semble que les Corydon Q sont très généralement 
brunes, en dessus, sans aucune trace de bleu argenté et sans donner 
la variété syxgrapha. La forme © syagrapha paraît donc limitée 
au bassin de la Seine (Rouen, Paris) et aux départements de 
l'Ouest jusques et y compris la Dordogne et la Gironde. Cependant 
cette limitation est actuellement très difficile à définir exactement 


et on comprend que je ne puisse donner à cet égard qu'un rensei- 


286 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


gnement général, puisque l'exploration entomologique d'un si grand 
nombre de départements français reste encore à faire sérieusement. 


Corydon est une des plus jolies Lycæna qui égayent, pendant 
l'été, les campagnes sèches et calcaires de la France et le bord 
des chemins dans les montagnes. C’est toujours pour moi un 
plaisir délicieux de voir en juillet et août, Corydon © voltiger, 
en nombre quelquefois si considérable, le long des chemins, près 
des fossés où coule un ruisseau d'arrosage. S'il y a une flaque 
humide sur le sentier, Corydon Sy repose quelquefois en masse; 
de même dans les villages, autour de la fontaine d’où chacun, en 
allant puiser l’eau nécessaire, laisse tomber sur la place publique 
de quoi produire un élément permanent d'humidité. Alors les 
Corydon se pressent en foule durant les jours chauds de l'été, 
- autour du sol fraîchement mouillé. Mais on les voit aussi en grande 
quantité, reposés ou voltigeant sur les fleurs de sedum et d’origan, 
leur abondance jointe à leur grâce et à leur beauté, donne au 
paysage une animation dont je me trouve toujours heureux d’être 
le témoin. 


Lycæna Bavius, Eversmann. 


Espèce de Russie, représentée en Algérie par la race que j'a 
décrite et figurée dans la XII[° livraison des Æzudes d'Entomologie, 
avec le nom de Fatma, d'après deux exemplaires représentés sous 
les n° 50 et 51 de la PI. 7 et que feu Staudinger avait capturés en 
1887, dans le Djebel-Aurès. 

Je ne crois pas que Fatma ait été retrouvée depuis le voyage 
de Staudinger dans la province de Constantine. 


Lycæna Orion, Pallas. 


La jolie Lycæna Orion ne se trouve en France, d’après ce que 
Je connais, qu'aux environs de Thiers (Puy-de-Dôme), de Vernet- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 287 


les-Bains (Pyrénées-Orientales) de Draguignan, de Nice et La 
Turbie (Alpes-Maritimes), où elle vole en mai et juin. M. Arnold 
Wullschlegel me l’a envoyée de Martigny (Valais) où il paraît 
qu’elle a deux générations, la première au printemps et l’autre en 
été. Je l'ai prise au bord du lac de Côme, dans le jardin de la 
villa d'Este, en juin 1907, et mon frère l’a observée à Fusio 
(Tessin). 

Aux environs de Vernet-les-Bains, Orion éclôt seulement au mois 
de mai et au commencement de juin; je ne l’ai jamais rencontrée 
en été. Elle vit par groupes d’un petit nombre d’exemplaires, 
notamment dans les terrains ferrugineux ou dans les schistes. Je 
l'ai vue dans le bois que feu de Graslin appelait : Pinats, mais 
qui porte, je crois, actuellement un autre nom. D'ailleurs ce bois, 
localité excellente pour les papillons, a été bien diminué et changé 
d'aspect, depuis que je le connais, par la ligne ferrée qui le tra- 
verse et par les excavations nombreuses pratiquées çà et là en vue 
de la recherche des mines. J'ai aussi trouvé Oyion, dans les Pyrénées- 
Orientales, près de Villefranche-de-Conflent, vers la vacherie du 
parc de Vernet et le long du chemin en lacet qui conduit à l’ancien 
monastère de Saint-Martin-du-Canigou. 

Il y a chez Orion plusieurs races très distinctes : d’abord celle 
des Pyrénées-Orientales qui est relativement petite et chez laquelle 
les deux sexes sont ornés d’un semis d'écailles bleu foncé formant 
une guirlande submarginale et répandues par places sur le dessus 
des ailes. La race des Alpes-Maritimes est à peu près semblable à 
celle des Pyrénées-Orientales; mais celle d'Auvergne semble être 
plus grande; malheureusement je ne possède du Puy-de-Dôme 
qu’une seule paire qui fut prise à Thiers, par feu Guillemot, il y a 
bien longtemps, et je ne me trouve pas assez documenté pour pou- 
voir disserter sur l’O7ion de l'Auvergne. 

Une seconde race chez laquelle les ailes des deux sexes sont en 
dessus, entièrement noires, se trouve au Valais. Enfin dans la 
Haute-Italie, il y a une forme intermédiaire entre celle des A:pes- 
Maritimes et la race noire valaisanne. La base et le bord marginal 
des ailes y sont ornés d’atomes bleus, en quantité moindre que 


288 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


dans les Alpes-Maritimes et que dans les Pyrénées, mais en quan- 
tité plus grande qu'aux environs de Martigny. En outre de ces 
formes européennes, il y a en Mandchourie, à l’île Askold et à 
Sidemi, une forme à laquelle Staudinger a donné le nom 
d'ornata et qui se distingue par le semis plus abondant et surtout 
par la couleur plus claire des atomes bleus qui sont saupoudrés sur 
le dessus des ailes. Orion habite aussi l'Autriche et la Hongrie; 
mais ma collection contient un très petit nombre d'exemplaires de 
ces contrées et sans localité précise. 

Esper, quoique connaissant la description d’'Orion par Pallas, 
a figuré avec le nom de 7elepha, sous le n° 2 de la Tab. XLI, 
un © avec du bleu à la base des ailes, et sous le n° 5 de la 
Tab. XCIV, une Q noire. Huebner de son côté, représente avec 
le nom de Battus, sous les n° 328, 320 et 330, les deux sexes, avec 
un semis d’atomes bleus, comme on le remarque chez la race de 
Vernet-les-Bains, et sous les n° 8or et 802, avec le même nom 
de Battus, la forme noircissante, telle qu'on la remarque aux bords 
du lac de Côme. 

Si on donne le nom de Oyion à la race observée par Pallas, en 
mai € in campis aridis circa Sisranum » et qui, en dessus, a les ailes 
poudrées de bleu (alæ supra fuscæ; disco cæruleo pulveratæ..…), 
je crois, bien que la figure manque pour nous fixer avec certitude, 
qu'on peut appliquer ce nom également à la forme des Pyrénées- 
Orientales et des Alpes-Maritimes; cependant le nom de Pañfus, 
Huebner (328, 320 et 330) lui conviendrait écalement et d'autant 
mieux que la figure existe, fort bien exécutée, pour nous éclairer. 
Le nom de Telephi, Esper conviendrait à la race chez laquelle 
la © (ig. 5; Tab XCIV)estnoratre et le(Ci (he 2h ES EN 
est poudré de bleu. Et quant au nom de Baftus, Huebner (807 et 
802) bien que s'appliquant parfaitement à la race sombre des bords 
du lac de Côme, il est plus difficile d’en tirer parti, puisque le 
même nom a déjà été employé pour les n°“ 328, 329 et 330 qui 
constituent une race différente. 

Wheeler, dans Te Butterflies of Switzerland, appelle var. #1gr9, 
la race valaisanne entièrement noire chez les deux sexes. Pour ceia, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 289 


il n'y a pas d'hésitation; mais pour le reste, quelle confusion 
sommes-nous encore obligés de constater dans la nomenclature ! 

Il faut cependant pouvoir désigner, en évitant tout malentendu, 
les diverses races d’Orion et voici comment Je propose d'établir les 
noms distinctifs de ces races diverses de l'Europe occidentale. 


\ Orion, Pallas. 


Battus, Huebner (328, 320, 330); les deux sexes poudrés de bleu 
| foncé; Pyrénées-Orientales, Alpes-Maritimes. 


Melephe, Esper (OU Tab. XL; fig 2: O Tab" XCIV; fe L); 
le C' poudré de bleu, la Q noirâtre; Autriche. 

Battus, Huebner (801, 802); les deux sexes plus obscurs et plus 
grands que chez Telephü,; Cernobbio (Haute-Italie). 


Nigra, Wheeler (Buft. Switz; p. 40) « the blue has almost, often 
quite, disappeared; © much larger and rather browner 


than O' »; Martigny (Valais). 


Lycæna Abencerragus, Pierret. 


La Lycæna Abencerragus d'Algérie, est à l'espèce européenne 
Baton ce que Cœnonympha Arcanioïdes, Pierret, également d'Al- 
gérie, est à Cænonympha Arcanius, Linné, d'Europe. On trouve 
Abencerragus dans les trois provinces d'Alger, de Constantine et 
d'Oran, en avril, mai et juin. Abencerragus éclôt même quelquefois 
dès la fin de mars. Je l'ai prise à Lambèse, en avril 1867; Je 
possède des exemplaires recueillis à Khenchela, Alger, Daya, 
Sebdou. En dessus, le G' a les ailes saupoudrées d'un semis plus 
ou moins épais d’écailles bleues; la Q est généralement beaucoup 
plus obscure et plus grande; le fond de ses ailes est noirâtre; elle 
présente généralement un feston de croissants bleus intranervuraux, 
le long du bord extérieur des ailes, et vers la base, elle est fré- 
quemment poudrée de bleu. Les taches ocellées noires sont très 


réduites sur le dessous des ailes inférieures dont le fond est gris 
clair. 


19 


200 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Lycæna Baton, Bergstraesser. 


Sur la Tab. 60 de son ouvrage : Nomenclatur und Beschreibung 
der Insecten in der Grafschaft Hanau-Muensenberg etc, publié 
en 1770, le Professeur de Philosophie et Recteur de l'Ecole évan- 
gélique luthérienne latine de Hanau, Joh. Andr. Benignus Berg- 
straesser a figuré d’une manière très reconnaissable avec le nom de 
Baton, l'espèce de LZycæna que Huebner a représentée, un peu plus 
tard, mais avec infiniment plus de finesse, sous les n° 325, 326 et 
327 et à laquelle il a donné le nom de //ylas adopté ensuite par 
Boisduval, Godart et Duponchel. 

Baton n'existe pas en Angleterre, ou bien elle n’y existe plus 
depuis très longtemps; car il ne semble pas que les plus anciens 
auteurs anglais en aient gardé quelque souvenir. 

Wood, dans son livre pourvu de figures si intéressantes : /ndex 
entomologicus or a complete illustrated Catalogue of the Lepidop- 
terous Insects of great Britain, London 1845 et 1855, cite bien le 
Polyommatus Chryseis (Purple-edged-Copper), capturé autrefois 
dans les marais d'Essex et de Sussex, le Cœnonympha Hero 
(Silver-bordered-Ringlet) trouvée jadis à Ashdown-Forest, et tant 
d’autres Lépidoptères maintenant éteints en Angleterre, mais plus 
ou moins vraisemblablement habitants de la Grande-Bretagne, 
il y a bien longtemps, avant l'extinction de Polyommatus dispar; 
Wood ne mentionne cependant Baton d'aucune manière. Pourtant 
Baton se trouve en Bretagne (Morbihan et Ille-et-Vilaine) dans 
des places dont la flore et le climat, comparativement à la grande 
Ile qui nous avoisine, ne doivent pas être très sensiblement 
différents. 

Baton a été fréquemment observé par nous en mai et en août, 
à Laillé et à Monterfil (Ille-et-Vilaine) et à Caden (Morbihan). 
M. de Joannis cite l'espèce des environs de Vannes (Contribution 
à l'étude des Lépid. du Morbihan; Ann. Soc. ent. France, 1008) 
dans les termes suivants : « Première éclosion à la fin de mai, et 
le papillon se prend alors dans les prairies; deuxième éclosion, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 201 


fin de juillet à septembre et se trouve alors dans les landes. 
Commun certaines années ». En outre des localités bretonnes, ma 
collection contient des exemplaires recueillis à Digne, Cauterets, 
Charroux (Vienne), Dompierre-sur-Mer  (Charente-Inférieure), 
Angoulême, Uriage (Isère), Paris, Cannes, la Turbie et diverses 
localités des Alpes-Maritimes, Hyères, Vernet-les-Bains, Vallon de 
Saint-Pons (Bouches-du-Rhône), Aix-en-Provence, Lioran (Cantal), 
Ryffelalp, Jura bernois, Corse, Sicile, Cerchio (Abruzzes), Villa- 
viciosa-de-Odon, Madrid, Barcelone, Grenade, Akbès, Broussa 
(Asie-Mineure), Nord-Cachemire, Turkestan. 


On peut distinguer trois races de Baton; celle de l'Europe cen- 
trale; celle d'Espagne et celle de Turkestan. 


En France, en Suisse, en Corse et en Sicile, le © est d’un bleu 
clair, en dessus, avec un trait discoïdal noir sur chaque aile, une 
bordure de taches ocellées noires, intranervurales, très fines, le long 
du bord externe des ailes et un liséré marginal noir; la frange 
est blanche, entrecoupée de noir. En dessous, les ailes sont gris 
clair, parsemées de taches noires assez grosses; les inférieures sont 
bordés de taches jaune orange comprises, chacune, entre deux points 
noirs. La Q a le dessous des ailes noirâtre, plus ou moins parsemé 
d’atomes bleus. Les ocelles noirs, le long du bord externe des ailes 
sont plus foncés que la teinte du fond et quelquefois surmontés 
aux inférieures de croissants gris bleuâtre, blanchâtres ou même 
jaunes. Les taches noires du dessous des ailes se transforment 
parfois en rayons; je possède un GC très bien rayonné, pris par 
A. Coulet, aux environs le Digne, pendant le printemps 1901 et 
nous avons capturé un Œ analogue à la Trancada d’Ambouilla 
(Pyrénées-Orientales), en mai 1886. 


En Espagne, la variété géographique Panoptes, Huebner (670, 
671, 672, 673) se distingue par la suppression des taches jaunes 
comprises entre les points noirs, le long du bord externe des ailes 
inférieures et par la couleur plus foncée, en dessous. De plus, la © 
Panoptes a généralement le fond des ailes plus noir et moins 
bleuté, en dessus, que la forme Baron. À Vernet-les-Bains, on trouve 


202 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


des exemplaires référables à Panoptes; mais la grande majorité 
a les taches jaunes qui caractérisent Baton. 

Quant à la race du Turkestan, elle est en dessous d'un gris 
plus blanchâtre et en dessus d’un bleu plus pâle et plus grisâtre 
qu'aucune des autres races. Staudinger a désigné la forme de 
Samarcand avec le nom de clara. 

Baton est un gracieux petit papillon qui aime à voler près de 
terre et à se reposer sur les fleurs de thym. Dans les landes de 
Monterfl, Baton est très localisé; son vol y paraît plus vif et plus 
rapide que dans les garrigues des Pyrénées-Orientales où les touffes 
nombreuses de Dorycnium suffruticosum et de Thymus vulgaris 
le sollicitent à de fréquents repos. 

En Ille-et-Vilaine, Baton affectionne les parties élevées, sèches 
et arides des landes et je ne l’ai jamais vu dans les lieux où la 
végétation des bruyères est puissante et bien fournie, tandis que 
Argus et Tiresias préfèrent ces localités pour y élire domicile. 
Baton vit chez nous aux mêmes lieux que Sesza urocertformis- 
armoricana et sa chenille doit également vivre dans les lex. 

À propos de la Zycæna Tiresias, Jai exposé l'intérêt qu'offrait 
la comparaison de l'habitat printanier et estival de 7%restas et de 
Baton, en Ille-et-Vilaine et en Morbihan. Je prie le lecteur de 
vouloir bien s’y reporter. 

Une bien jolie Zycæna thibétaine que j'ai appelée Zanfy, semble 
être une race magnifiquement agrandie de Baton. Feu Monsei- 
gneur Biet, lorsqu'il m'a fait jadis l'honneur d'être mon hôte à 
Rennes et à Cancale, m'a souvent parlé de la flore des montagnes 
de Tâ-tsien-Lou, comparée à celle des Alpes d'Europe. Un des 
membres éminents de la Mission catholique du Thibet, — la 
seule mission chrétienne qui ait d’ailleurs réussi à s'implanter sur 
cette terre barbare et inhospitalière, — était le Père Soulié, bota- 
niste de la plus grande compétence à qui le Muséum national 
d'histoire naturelle de Paris est redevable des plus précieuses 
collections. Le Père Soulié, d'après ce que m'a souvent dit 
Monseigneur Biet, a remarqué maintes fois, la différence remar- 
quable du développement de certaines espèces de plantes thibé- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 203 


taines, comparativement à ce qui se présente pour elles dans les 
Alpes de Suisse et de France. | 

Il en est de même dans les Lépidoptères pour le Zeplyrus 
betule et pour la Zycena Baton-Lanty. Staudinger et Rebel ont 
transformé dans leur Catalog 10901 le nom de Zauty en Lantyr, 
comme celui d'Orleans en Orleansi, sous le fallacieux prétexte 
de correction grammaticale. Pourquoi les mêmes auteurs ont-ils 
donc laissé subsister le nom Goante qui désigne un homme, et ne 
l'ont-ils pas habillé en Goantei? Tant qu'à faire, il faut être 
conséquent avec soi-même et étendre le bénéfñce de ses savantes 
corrections jusqu'aux temps les plus reculés, même jusqu'à Esper, 


s’il y a lieu. 


Lycæna pyrenaica, Boisduval. 


C’est une espèce absolument distincte d'Orbitulus; aussi diffé- 
rente de cette dernière qu'A7gus est différente d'Ægon, que 
Bellargus (Adonis) l'est de Corydon, qu'Euphemus Vest d'Alcon 
ou d’Arcas (Erebus), que Cyllarus l'est de Melanops. Je me demande 
au moyen de quel sentiment que la bonne foi, en tous les cas, ne 
paraît pas suffisamment guider, Staudinger et Rebel, dans leur 
Catalog 1901, se sont obstinés, malgré toutes les raisons péremp- 
toires qui leur avaient été préalablement servies, à rattacher pyre- 
naica comme variété à Orbitulus. S'entêter à soutenir une opinion 
évidemment fausse n’a jamais été la preuve de la rectitude du 
jugement, ni de l'élévation du caractère. Commettre une mesqui- 
nerie est une faute; car les imprescriptibles droits de la vérité et 
de la saine raison finissent toujours par prévaloir et par triompher. 

Je prie le lecteur de se reporter aux figures comparatives d'Orbz- 
tulus et de pyrenaica que j'ai publiées dans la VIIT* livraison des 
Etudes d'Entomologie. 

Il y a deux races distinctes de pyrenaica, celle des Hautes- 
Pyrénées françaises et celle des Pyrénées espagnoles, aux Picos-de- 
Europa. Le d de la race espagnole que j'ai appelée As/wriensis, 


204. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 

se distingue par la série des éclaircies intranervurales blanchâtres 
sur le fond gris, qui longent le bord marginal des quatre ailes, en 
dessus. Le fond des ailes, chez la race des Hautes-Pyrénées 
(Gavarnie et Cauterets) est depuis la base jusqu’au bord terminal, 
d'un gris beaucoup plus uniforme. De même la ©, dans les Pyré- 
nées françaises, est très obscure et presque sans éclaircie; on voit 
seulement le point noir discoïdal des supérieures se détacher 
nettement sur le fond brun noirâtre des ailes et l’on aperçoit quelque 
légère pulvérulence d’un blanc grisâtre, le long du bord terminal 
des ailes inférieures en dessus. Dans la race espagnole, le bord des 
quatre ailes est orné de macules ou de chevrons blanchâtres et le 
point noir discoïdal des supérieures est finement cerclé de blanc; 
le point discoidal des inférieures est apparent et souvent lui-même 
liséré de blanchâtre, ainsi que l'indique la figure 10 de la PI. I de 
la VIII livraison des Etudes d'Entomologie. 

Le dessous des ailes inférieures est d’un brun plus foncé chez 
les Q que chez les Œ, où il reste habituellement d’une nuance 
ocracée très pâle. Il n’y a généralement aucune apparence d’ocelle 
noir au mulieu des éclaircies blanches du dessous des ailes infé- 
rieures, chez la Lycæna pyrenaica; au contraire, l’ocellation noire 
du dessous des ailes supérieures est très accentuée. Dans les Asturies, 
pyrenaca est très abondante sur les gazons ras entremêlés de 
petites pierres, de même que M. P. Rondou l’a observé dans les 
Pyrénées françaises. Nous n'avons jamais vu la Lycæna pyrenaica 
dans les Pyrénées-Orientales où nous croyons qu'Orbifulus vit seul, 
tandis que dans les Hautes-Pyrénées, les deux espèces ne se trouvent 
pas très éloignées l’une de l’autre, tout en ayant, chacune, un 
habitat spécial. 


Lycæna Orbitulus, Esper. 


N’existe pas en Ecosse où vivent cependant la Zygæna exulans 
et l’Anarta melanopa qui, dans les Alpes se rencontrent à peu près 
dans les mêmes localités que la Lycæna orbitulus et même un peu 
plus haut. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 295 


Très répandue dans les Hautes-Alpes, à une altitude d'environ 
1.800 à 2.600 mètres; commune à Ryffelalp (Valais), à Larche, au 
col du Mont-Genèvre, au Lautaret, à Beauvezer, à Enchastrayes, à 
Allos, à la prairie du Mont-Pelat, au col de Lure, etc., dans les 
Alpes françaises; plus rare dans les montagnes au sud de Mont- 
louis-sur-Têt, appelée Cambrès-d'Ase; près de l’arête nord du 
Mont-Canigou et à Pla-Guilhem (Pyrénées-Orientales); assez 
abondante dans certaines places des Hautes-Pyrénées, notamment 
aux environs de Gavarnie et autour du lac de Gaube; se trouve 
aussi en Herzégovine, en Laponie, et dans l’Amérique polaire. 


Les Lycæna américaines 7#s/1ca, Edwards; Vestos, Boisduval ; 
Podarce, Felder, ne me semblent pas être spécifiquement distinctes 
d'Orbitulus. Huebner a figuré Orbitulus d, des Alpes, avec le nom 
de Meleager, sous les n° 761 et 7062. 


L'Espèce varie comme toutes les Zycæna par la transformation 
en rayons noirs des ocelles des ailes supérieures, en dessous. En 
outre, certains exemplaires ont le dessous des ailes inférieures entiè- 
rement privé de ponctuation noire; le fond des ailes reste alors 
uniformément d’un brun jaunâtre plus où moins clair ou foncé sur 
lequel la tache discoïdale ordinaire et le bord des ailes se détachent 
généralement en blanc. Huebner a figuré sous le n° 841, un exem- 
plaire de cette Aberration qui est analogue à Cénnus. Le O' a le 
dessus des ailes saupoudré d’atomes d’un gris argenté bleuâtre, sur 
un fond brun noirâtre; la Q est brune, avec la frange blanche et 
le point discoidal noir, quelquefois liséré de blanchâtre. À Zermatt, 
et dans les Basses-Alpes, on prend parfois des Q montrant une 
série extracellulaire, légèrement courbe, de taches intranervurales 
blanchâtres sur le dessus des ailes supérieures. 


La forme est à peu près la même dans les Pyrénées-Orientales 
et dans les Alpes; mais dans les Hautes-Pyrénées, 1l y a une race 
sensiblement plus grande et d'aspect plus robuste; Staudinger l'a 
appelée : Oberthiüri. J'ai sous les yeux plus de deux cents Oôer- 
thüri et plus de trois cents Orbitulus. Il est évident qu'il y a des 
Oberthiüri tout à fait semblables à des Orbitulus; mais il est évident 


206 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


aussi que la race Oberthuri, considérée dans son ensemble, est très 
distincte des autres formes alpine et pyrénéenne d’'Orbitulus. 


Orbitulus présente souvent le long du bord terminal des ailes 
inférieures, en dessus, une jolie rangée de taches arrondies, intra- 
nervurales, de couleur plus claire que le fond, centralement ponc- 
tuées de noir; les Q paraissent moins nombreuses que les Œ et 
lorsqu'une © se trouve quelque part posée sur une petite plaque 
de terre humide, pendant les heures chaudes du jour, il y a quel- 
quefois tout un essaim de © autour d'elle. Plusieurs fois, sur le 
bord du lac de Gaube, le long du sentier que suivent les bêtes de 
somme pour aller dans la direction du Vignemale, j'ai recouvert 
de mon filet un petit espace de terrain sur lequel un nombre 
souvent considérable d'exemplaires d’Oybrtulus-O berthiri se tenait 
reposé. Je me souviens d’en avoir ainsi capturé, d’un seul coup, une 
cinquantaine d'individus. Il se trouvait une seule © dans ce nombre. 


Fréquemment, les G' offrent d'intéressantes variations, telle que 
celle représentée sous le n° 200 de la PI XL. Orbitulus éclôt une 
seule fois par an et vole en juillet et au commencement d'août, 
comme pyrenaca. Je crois que les Orbitulus du côté de Gavarnie 
sont de moins grande taille qu'autour du lac de Gaube et c'est 
dans cette localité très restreinte que J'ai pris les exemplaires les 
plus développés. 


Je considère, en effet, parmi les échantillons qui sont rangés dans 
ma boîte, certains spécimens remarquablement grands; ils pro- 
viennent tous des bords du lac de Gaube. 


J'a publié de bonnes figures d’'Orbitulus-Oberthiri sous les 
n® 8 et o de la PI. I, de la VIII° livraison des Etudes d'Ento- 
mologie et comme je le rappelle dans la notice relative à pyrenaica, 
J'ai écrit une courte étude sur Orbitulus et pyrenaica comparées ; 
ces observations se trouvent imprimées aux pages 16 et 17 de cette 
VIIT* livraison. Je juge inutile d’en reproduire ici les termes aux- 


\ 


quels je n’ai du reste rien à changer. 


te qu 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 207 


Lycæna Pheretes, Huebner. 


Huebner a figuré Peretes, qu'il avait d’abord décrite sous ce 
nom, avec le nom nouveau d’A/ys, le G' sous les n° 495 et 496, 
la Q sous les n° 548 et 549. 


C’est au Thibet que la Zycæna Pheretes, Huebner, parait être plus 
abondante, plus grande et plus robuste. Les chasseurs chinois et 
thibétains des environs de Tâ-tsien-Lou récoltent chaque année 
une assez grande quantité de Peretes qui ne diffèrent de ceux des 
Alpes d'Europe et de Laponie que par leur dimension un peu 
plus grande. Pheretes s'élève très haut dans les Alpes; Je l'ai prise 
au Ryffelberg, aux environs de 2.800 mètres et au Lautaret; jen 
possède des exemplaires capturés près de Larche, d'Enchastrayes, 
d'Allos et du Mont-Pelat dans les Basses-Alpes. PAeretes n'a pas 
été trouvé dans les Pyrénées. Les Of, en dessus, sont d'un joli 
bleu céleste, avec un fin liséré noir terminal et la frange blanche. 
Dans les montagnes thibétaines, la bordure noire est plus accentuée, 
surtout aux ailes inférieures qui paraissent avoir des points ou des 
chevrons noirs intranervuraux, soudés à la bordure. Les ©, au 
Thibet, sont d'un noir profond, en dessus, tandis que dans les Alpes 
d'Europe, leur teinte est moins foncée et se trouve parfois atténuée 
au moyen d’une pulvérulence bleuâtre près de la base des ailes. 
En dessous, les points blancs des ailes inférieures sont aveugles; 
mais les ailes supérieures gardent ordinairement une série droite de 
petits points noirs cerclés de blanc; ces points noirs peuvent cepen- 
dant faire complètement défaut. L'Aberration waloyenses n'a plus, 
sur le fond uni du dessous des ailes, que les points discoïdaux : 
noir aux supérieures et blanc aux inférieures. PAeretes éclôt une 
seule fois par an, en juillet. L'espèce se plaît sur les gazons ras 


entremêlés de pierres. 


La race de Pheretes, au Thibet et au Vunnan, a souvent le 
dessous des ailes inférieures d’un blanc verdâtre ou jaunâtre, sur 
lequel les taches blanches ordinaires se détachent à peine. Leech 


208 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


a observé aussi que PAeretes en Asie diffère un peu de la race 
européenne. Je distingue Peretes de Tà-tsien-Lou par le nom de 
tatsienluica. 


Je profite de la publication du présent ouvrage pour faire 
connaître deux nouvelles Zycæna du Thibet, dont l’une se place 
au proche voisinage de PAereles. Ces deux espèces nouvelles sont 
figurées sous les n° 300 et 303 de la PI. XLI du présent ouvrage; 
elles appartiennent toutes les deux à la faune paléarctique. 


Lycæna Amphirroë, Obthr. (PI. XLI; fig. 300). 


Taille de Peretes; les deux sexes sont entièrement d’un brun 
noir uniforme en dessus, avec la frange longue et blanche et les 
quatre points discocellulaires blancs. Le fond du dessous des ailes 
inférieures est blanc, avec une bande médiane d’un brun ocracé qui 
traverse les ailes, depuis le milieu du bord anal jusqu’au bord 
costal; 2 taches ovalaires blanches, de la couleur du fond, se trouvent 
entourées par la couleur ocracée; l’une est contiguë au bord costal, 
l'autre est immédiatement au-dessous de celle-ci. La base et le 
milieu des supérieures est d’un brun très pâle, avec le point disco- 
cellulaire blanchâtre; une série d’ocelles gris cerclés de blanc, plus 
ou moins nettement écrits, descend du bord costal et forme une 
ligne brisée dans l’espace extracellulaire; le bord terminal est lar- 
gement teinté de blanc avec quelques taches grisâtres situées en 
série assez droite, parallèlement au bord terminal. Le bord externe 
des ailes inférieures est légèrement ondulé. Le corps est noir en 
dessus, blanc en dessous; les pattes sont blanches; les yeux sont 
cerclés de blanc. La Zycæna Amphirroë vole aux environs de 
Tâ-tsien-Lou; elle est très jolie dans la simplicité de sa teinte et 
de ses dessins. Je lui ai donné le nom mythologique d’une des 
Nymphes de l'Océan. Je crois qu’elle est rare. Je possède seulement 
17 exemplaires. 


k 
| 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 209 


Lycæna Lamasem, Obthr. (PL XLI;, fig. 303). 


Le Dalai-Lama ou Lama-Sem, connu sous le nom de grand 
Lama, est le chef de la religion des Tartares idolâtres qui le 
considèrent comme leur dieu vivant. Il habite un couvent célèbre 
situé sur le sommet d’une haute montagne. Les environs sont 
peuplés d'une prodigieuse quantité de prêtres de cette prétendue 
divinité, nommés Lamas. Le grand Lama n’expose pas sa dignité 
au grand jour; il sort rarement de son palais et se tient renfermé 
dans le temple où il reçoit des Lamas les hommages dus à l’Etre- 
Suprême. La petite Lycæna que j'ai appelée Larmasem habite dans 
les hautes montagnes du pays thibétain soumis à l'influence des 
Lamas. C’est une espèce très délicate, d'aspect sombre en dessus, 
et décorée, en dessous, d’ocelles blancs dépourvus de pupillation 
noire. 


Chez les deux sexes, le dessus des ailes est noir; la frange est 
blanche, entrecoupée de ‘brun; un glacis soyeux et présentant un 
reflet un peu bleuâtre ou violacé, se remarque à la base des ailes. 
En dessous, le fond des ailes est d’un brun grisâtre; un trait 
blanc en forme de clou, occupe chaque espace cellulaire; le bord 
des ailes est orné d’une série intranervurale de points blancs dont 
la forme est arrondie; et, entre les espaces cellulaires et cette série 
marginale de macules blanches, on voit une série de points blancs, 
ovales, décrivant une sinuosité sur chaque aile, et descendant du 
bord costal des supérieures au bord anal des inférieures. Le dessus 


du corps est de la couleur foncée des ailes; le dessous est d’un gris 
blanchâtre. 


L'espèce est rare; ma collection contient seulement 14 exem- 
plaires recueillis par les chasseurs thibétains à Ta-Ho, au Thibet, 
et par les collecteurs de Tâ-tsien-Lou, sans doute dans les mon- 
tagnes voisines de cette ville frontière de la Chine, à l'entrée orien- 


tale du Thibet. 


300 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Lycæna Optilete, Knoch. 


August Wilhelm Knoch a publié à Leipzig, de 1781 à 1783, 
sous le titre de Peztraege zur Insektengeschichte, un ouvrage sim- 
plement, mais correctement imprimé, avec un frontispice suivant la 
mode du temps, gravé sur cuivre, non colorié, et d'excellentes 
planches dessinées par l’auteur A.-W. Knoch et gravées par 
À. Schmidt. Il y a 3 petits volumes contenant en tout 19 planches 
coloriées, dont 17 consacrées aux Lépidoptères et 2 aux Coléoptères. 
C’est sur la PL V du 1° volume que se trouve représentée pour la 
première fois sous les n°” 5 et 6, la Zycæna Optlete ©. L'espèce 
est décrite sur les pages 76 et 77, avec le nom populaire Gelbauge 
(œil jaune) ajouté au nom latin : Papilio plebejus ruralis O ptilete. 
Ce nom d’oplilete est un des surnoms de la déesse Minerve; 
optilos, en dialecte dorique, veut dire : azl et optiletis peut signi- 
fer : qui garde ou qui conserve les yeux. 

Knoch dit que l'espèce se trouve dans les environs de ce pays-c1 : 
(Diese Art findet sich in hiesiger Gegend); c’est-à-dire de Bruns- 
wick, puisque l’Avis au Lecteur (An den Leser) est daté comme 
suit : Geschrieben im Kollegium Carolinum; Braunschweig, den 
8 Hornung 1781. Le mot Æornung est, je crois, peu employé; il 
désigne le mois de février et a pour racine l’ancien terme allemand 
Hor qui signifie bouc. 

En France, Optilete ne se rencontre que dans les hautes mon- 
tagnes des Alpes; mais en Allemagne, ÜUprilete habite sans doute 
les plaines du Nord. 

En Laponie, l'espèce n'est pas rare et j'en possède une longue 
série prise par M. W. Mau, à Kvickjock (Lulea-Lappmarken) en 
Juin et Juillet 1908. J'ai capturé Oprilete à Ryffelalp et tout près 
de l'hôtel du Montanvers, en face du passage de la mer de glace, 
dans la région au-dessus de Chamounix-Largentière. Mon fils, le 
D' J. Oberthür, a récolté Oprilete au-dessus de Lanslebourg 
(Savoie), en juillet 1804. 

Je l’ai reçue de l'Oural méridional (40 kilom. au Sud-Est de 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 301 


Zlatoust), où il me semble que la race a les couleurs bleue du 
dessus et brune du dessous beaucoup plus foncées que dans nos 
Alpes. La collection Bellier contenait une belle série d'exemplaires 
de Prusse, de grande taille, et dont un œ est subtus-radiata. 
Les Q varient beaucoup pour le dessus de leurs ailes qui est plus 
ou moins saupoudré d’atomes bleu foncé. En dessous, les ailes 
inférieures ont, près de l'angle anal, des petites taches d’un bleu 
métallique surmontées d'une tache rouge orange relativement 
large, laquelle se trouve comprise entre ces points bleu brillants 
et le sourcil noir qui surmonte le ge/bauge. Huebner figure sous les 
n% 654, 655, 656 et 657, avec le nom de cyparissus, une petite race 
qui diffère par l'ocellation noire relativement fable du dessous 


de ses ailes, des formes que je suis parvenu à connaître. 


Lycæna Lysimon, Huebner. 


Figurée par Huebner, sous les n° 534 et 535. En Europe, on 
trouve Lysimon en Andalousie, notamment aux environs de Gre- 
nade, où elle vole en mai et en juillet. On m'a assuré que Zysimon 
avait été capturée à Montpellier et à Marseille; mais je nen ai 
jamais vu la preuve. En Algérie, Zysimon est très répandue 
pendant le mois de mai, à Biskra, Sidi-Okba, Omach, dans le 
Djebel-Aurès, à Collo, et en juillet dans les montagnes du Djur- 
jura. Lysimon paraît être surtout une espèce de l'Afrique tropicale. 
Ma collection contient des exemplaires de Sénégal, Sierra-Leone, 
Bénin, Natal, Abyssinie, Mayotte, Madagascar, Bourbon. 

Le d varie pour la largeur de la bande marginale brune qui 
entoure la couleur bleu violacé du dessus des ailes et aussi pour 
le ton de cette couleur. En Andalousie, cette bande marginale semble 
être toujours plus large qu'en Algérie, et, à cause de cela, j'ai appelé 
la Lysimon de Grenade : vandalusica. La Q est généralement 
entièrement brune en dessus; mais en Abyssinie, la Q a la base 
des ailes largement teintée de bleu clair dont l'aspect est assez 
brillant. 


302 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


En dessous, la ponctuation des ailes est également très variable; 
certains exemplaires ont les ocelles des supérieures relativement 
gros; chez d'autres ils sont beaucoup moins accentués. Boisduval 
a fait représenter sous les n°* 7 et 8 de la PL 17 de l’Zcones, le 
dessus et le dessous d’une Zycæna qu’il appelle : Argus Lysimon. 
Je n’ai pas trouvé dans la collection Boisduval l’exemplaire qui a 
pu servir de modèle à ces figures; mais le dessous n° 8 ne repré- 
sente nullement la Zysimon d'Espagne ou d'Algérie. Par les gros 
ocelles noirs submarginaux des ailes supérieures, ainsi que par la 
tache discoïdale des mêmes ailes, ce n° 8 semble plutôt se rapporter 
à une Zycæna de Madagascar encore inédite et que J'ai reçue de 
la partie centrale de l’île (N.-D. de Lourdes, près Tananarive). 
Sans rendre très exactement l'espèce, les figures 28 et 20 d'Herrich- 
Schaeffer sont cependant plus rapprochées de la Zycæena Lysimon, 
telle que je la connais. Duponchel, dans le Supplément (PI VIIT, 
fig. 6 et 7), représente fidèlement le G' de la race algérienne de 
Lysimon qui a la bordure noirâtre des ailes étroite en dessus. II 
est probable que l’exemplaire figuré par Duponchel vient d'Egypte; 
mais cet auteur s’abstient de donner le renseignement pourtant 
essentiel de la provenance du papillon qu'il a fait figurer. C'est 
une lacune fâcheuse et que les écrivains entomologiques de l’époque 
contemporaine devraient prendre grand soin d'éviter. Les figures 
données par Lang (PL XXIV; fig. 3, 3, 3) sont très grossières. 
La fig. 2 c de la PI. 15 dans l'ouvrage de Gerhard me paraît appli- 
cable au-dessous de Lysämon; mais les figures 2 a, 2 bd et 2 d 
représentent des Zycæna quelconques; 2 a n’est certainement pas 
référable à ZLysimon. Cette petite Lycæna Lysimon n'a pas de 
synonymie embrouillée comme tant d’autres espèces du genre; mais 
elle attend encore, pour la forme européenne tout au moins, une 
bonne figuration. 


Lycæna minima, Fuessli. 


Bien représenté par Esper, avec le nom de inima, sous la 
figure 3 de la Tab. XXXIV, et avec le nom d’Alsus par Huebner, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 30 


[SS] 


sous les n°° 278 et 270. Les deux sexes ont le dessus des ailes noir 
et le dessous d’un gris très délicat, avec une ocellation de petits 
points d’un noir très vif, cerclés de blanc. Le O' présente générale- 
ment sur le dessus des ailes et près de la base, un semis peu 
abondant, pulvérulent d’écailles paraissant verdâtres. La Zycæna 
minima se trouve en Angleterre, d’où je possède une série d’échan- 
tillons ayant fait partie de la collection Sang; mais Je ne l'ai 
jamais vue en Ille-et-Vilaine; elle est pourtant signalée aux 
environs de Vannes et de Plouharnel, dans le Catalogue des 
Lépidopières du Morbihan par J. de Joannis (Aww. Soc. ent. 
France, 1008; p. 705). 

Ma collection contient des Zycæna minima prises à Cauterets et 
Gavarnie (Hautes-Pyrénées) en juillet; dans les Alpes-Maritimes, 
à la fin de juin, en juillet et août; dans l'Oberland bernois, du 
28 juin au 2 juillet 1808; à Ryffelalp et Zermatt (Valais), en 
juillet; à Uriage (Isère), en juin; à Lanslebourg (Savoie) et Cha- 
mounix (Haute-Savoie), en juillet; à Larche, Enchastrayes, Allos 
(Basses-Alpes), en juillet; à Digne, en avril, mai et juillet; au 
vallon de Saint-Pons (Bouches-du-Rhône); à la Sainte-Baume et 
au col de Bretagne (Var), en mai; à Potes (Asturies), en Juillet; 
à Vernet-les-Bains et à la vallée d'Eyna (Pyrénées-Orientales), 
en été; au Lautaret (Hautes-Alpes), en juillet; aux bords du lac 
de Côme, en juin; à l’île de Capri, à Naples et à Castellamare-di- 
Stabia, en mai; en Saxe; à Tâ-tsien-Lou (frontière orientale du 
Thibet); dans l'Oural méridional (45 kilomètres à l'Est de Zla- 
toust); à Châteaudun (Eure-et-Loir); à Samoussy (Aisne); à 
Lectoure (Gers); à Dompierre-sur-Mer (Charente-Inférieure), en 
mai et Juin 1900. 

Les points noirs du dessous des ailes peuvent être absents, ainsi 
que cela arrive dans toutes les Zycæna. Je n'ai pas vu d'exemplaires 
de ninima ayant les points noirs transformés en rayons; il doit 
en exister cependant. 

La variété Lorquini, Herrich-Schaeffer (442, 443, 444), chez 
laquelle le d' a le dessus des ailes d’un bleu violacé semble rem- 
placer winima, en Algérie, et peut-être aussi aux environs de 


304 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Grenade. Augustin Coulet a pris un très beau et très authentique G 
de Lorquini, à Digne, en 1806. 

C'est donc aussi une forme française; mais peut-être à l'état 
accidentel; car je n’ai jamais vu que ce seul exemplaire français 
pris dans les Basses-Alpes. 

Je dois ajouter que j'ai acheté à un marchand allemand une 
minima ©, indiquée comme venant de Suisse et saupoudrée sur 
le dessus des ailes d’une pulvérulence bleue et non verdâtre, de 
telle façon que l’exemplaire en question semble former la transition 
entre zrinima et Lorquini. On peut donc penser que la forme Zor- 
guini peut se retrouver quelque part en Europe et sans doute sur le 
côté oriental de la vallée du Rhône, au pied des Alpes. 

Lorquini paraît d’ailleurs assez rare généralement; je possède des 
exemplaires d'Andalousie; de Sebdou (mai 1907); de Mécheria 
(19-30 mars 1886); de Géryville (mai 1886) et du col de Taza; 
mais nulle part, on ne l’a observé en abondance. 

L'ocellation semble plus petite, en dessous, chez Zorquini que 
chez winima. Je ne crois pas que 7inima se trouve en Algérie; 
cependant j'en ai reçu quelques exemplaires avec Bône, pour indi- 
cation de localité; n'ayant pas une certitude suffisante de l’exac- 
titude de ce renseignement, je le considère provisoirement comme 
non existant. 


Lycæna Sebrus, Boisduval. 


Décrite et figurée dans l’/cones, sous les n° 1, 2 et 3 de la PI. 17. 
Duponchel a figuré la même espèce avec le nom de Saporte, dans 
le Supplément (PL IX; fig. 5, 6 et 7). 

La Lycæena Sebrus est fort délicate. Le G' est, en dessus, d’un 
bleu violet assez obscur, avec une bordure noire nette et fine et une 
frange blanche; la ©, en dessus, est tantôt d’un noir obscur, tantôt 
plus ou moins couverte près de la base des supérieures et le long 
du bord des ailes inférieures, d’une pulvérulence bleuâtre. En 
dessous, les deux sexes sont d’un gris clair, avec les ocelles noirs, 
petits et cerclés de blanc; la base des aïles inférieures est légèrement 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 305 


bleuâtre. On trouve la ZLycæna Sebrus en France, sur le côté oriental 
du cours du Rhône et en Suisse, dans le canton du Valais, c’est- 
à-dire toujours dans le bassin du Rhône. J'ai pris Sebrus à Uriage, 
en Juin 1805, à Aix-les-Bains, du 22 juin au 12 juillet 1906, au 
Lautaret, en juillet et aux environs de Florence au commencement 
de juin 1007. 

Sebrus ne semble pas rare dans les allées herbues d’une pro- 
priété dont le sommet est boisé, un peu au-dessus de Fiesole. Je 
possède des exemplaires de Sebrus récoltés dans les localités 
suivantes : Digne (mai 1806); Enchastrayes; Larche; Marseille; 
Celles-les-Bains (Ardèche); Col de Brans, La Turbie et Mont- 
Pacanaglia (Alpes-Maritimes); Albarracin (Espagne); Martigny 
(Valais) où elle vole en avril et mai, puis en juillet; Macédoine et 
Turkestan (Fort-Naryne et Namangan). 

Sebrus varie pour la dimension des ailes et pour la teinte plus 
ou moins foncée du bleu, chez le G. 

On pourrait distinguer par un nom, les © qui sont en dessus 
d’un noir obscur, de celles qui sont poudrées de bleuâtre; mais il 
y a des transitions qui relient intimement les exemplaires appar- 
tenant aux deux formes extrêmes, de sorte qu'il me paraît difficile 
de les limiter très exactement. 

Cependant c’est une © entièrement noire que Boisduval a figurée 
avec le nom de Sebrus et une © saupoudrée de bleuâtre que 
Duponchel a représentée avec le nom de Saporte; dès lors il me 
semble que les © bleuâtres peuvent être désignées sous ce nom de 
Saportæ, conformément à la figure donnée par Duponchel et à la 
dénomination attribuée par cet auteur. 

Je n'ai jamais vu d’Aberration de Sebrus. Cependant l'espèce 
ne peut échapper à la règle des variations qui régit le genre 
Lycæna. 


Lycæna Semiargus, Von Rottemburg (Acis, Den et Schiff.). 


Comme le dit S. A. von Rottemburg, dans : Awmerkungen zu 
den Hufnagelischen Tabellen der Schmetterlinge (Der Natur- 


20 


306 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


forscher, Sechstes Stück, Halle, 1775; p. 20), Roesel a parfaite- 
ment représenté cette Zycæna sous le n° 4 de la Tab. XXXVII du 
vol. IIT; mais sans lui donner aucun nom qui la différenciàt spéci- 
fiquement du n° 5, figurant /carus,; les Lycæna n° 3, 4 et 5 sont 
en effet comprises par Roesel, sous le commun vocable : « Der 
kleine besonders schoene, hochblaue Tagpapilion der zweyten 
Classe ». 

S. À. Von Rottemburg fait seulement remarquer que Roesel a 
oublié de figurer le petit trait noir discoïdal aux ailes inférieures, 
sur le dessous des ailes, qui est d’ailleurs le seul côté représenté; 
mais il y a des exemplaires où ce petit trait noir est oblitéré et à 
peine indiqué. Von Rottemburg s'exprime ainsi : « Nur hat er 
(Rœsel) bey seiner Abbildung, den Kleinen schwarzen Strich ver- 
gessen, so dieser Vogel in der Mitte der Unterfluegel fuchret ». 
La Lycæna Semiargus, Von Rottemburg, 1775 (Acts, System. Verz. 
der Schmetterlinge der Wienergegend; 1776), est répandue dans 
les plaines et les montagnes de la France, en Angleterre où elle 
semble se raréfier de plus en plus et annoncer une extinction pro- 
chaine, en Suisse, en Allemagne et dans le Nord de l’Asie; elle 
manque en Algérie. Autrefois nous trouvions assez abondamment 
la Semiargus aux environs de Rennes, à Monterfl et même à 
Cancale. Mais de même qu’en Grande-Bretagne, cette espèce semble 
tendre à devenir rare dans le Nord du département d’Ille-et- 
Vilaine et depuis longtemps, je n'ai plus vu Seriargus qu’au Sud 
de Rennes, vers Pont-Réan et Bourg-des-Comptes où elle est 
encore assez abondante. Ma collection contient des Seriargus 
anglais, de la collection John Sang, de Darlington, et d'assez nom- 
breuses séries d'échantillons pris en Ille-et-Vilaine; à Samoussy 
(Aisne), à la mi-juin 1909; à Cauterets et Gavarnie (Hautes- 
Pyrénées), en juillet; à Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales), au 
printemps et en été; à Lanslebourg et à Aix-les-Bains (Savoie); à 
la Grave et au Lautaret (Hautes-Alpes), en juillet; à Chamounix 
(Haute-Savoie); à Digne, à Entrevaux, au lac d’Allos et à la 
prairie du Mont-Pelat (Basses-Alpes) ; à la Chartreuse-de-Prémolles 
et à Uriage (Isère); à Pieracave, à Castel-de-Brans, au mont Paca- 


DE 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 30 


naglia, à la Turbie et Laghet (Alpes-Maritimes); à Hyères et à la 
forêt du Dom (Var); à Ryffelalp, à Fusio et à Eclepans (Suisse); 
à Grenade (Andalousie); à la Granja (Castille); en Hongrie; en 
Laponie; à la Certosa-di-Pesio (Piémont); à l'ile Askold, en 
Mandschourie; en Turquie; en Grèce; en Asie-Mineure; en Syrie. 

Toutes les Q que j'ai vues jusqu'ici de Serargus provenant 
d'Europe occidentale sont noires; je n’en connais point de bleues 
qui aient été rencontrées en France ou en Suisse. Dans les Alpes, 
surtout aux alentours du lac d’Allos, à la Grave et au Lautaret, 
Semiargus est de plus petite taille que dans les localités de plaine 
et appartient à la variété #ontana, Meyer-Duer. 

L'Aberration cæca (alis subtus non ocellatis) n’est pas très rare 
et j'en possède plusieurs exemplaires partiellement ou totalement 
aveugles, en dessous, venant de Hongrie, de Cauterets, du lac 
d'Allos et de Zermatt. 

Dans les Pyrénées, les ocelles noirs du dessous des aïles sont 
parfois relativement très gros; mais je ne possède pas l’Aberration 
radiata qui existe cependant. 

Les © varient beaucoup pour l'intensité de la pulvérulence bleue 
qui recouvre le dessus des ailes. Les écailles bleues sont plus ou 
moins claires ou foncées et plus ou moins étendues à partir de la 
base jusqu’au bord des ailes, de sorte que la teinte brune du fond 
des ailes est tantôt assez élargie et tantôt rétrécie près du bord 
externe. 

Dans les plaines, Sewiargus paraît deux fois par an, au prin- 
temps, puis en été; dans les montagnes, elle vole une seule fois, 
en juillet. 

Huebner a représenté avec le nom de Aygiolus, la forme euro- 
péenne de Semiargus, sous les n° 260, 270 et 271. 

En Orient, la Lycæna Semiargus donne les variétés géogra- 
phiques suivantes : Bellis, Freyer (Tab. 308; fig. 1, 2) chez 
laquelle le G présente quelques points rouges, le long du bord des 
ailes inférieures en dessous, au voisinage de l'angle anal; la © 
est ornée de points jaunes, même sur le dessus des ailes. Bellis ne 


308 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


semble pas rare en Turquie où elle fut prise jadis par feu Kin- 
dermann. 

Parnassia, Ster., de Grèce, est une forme un peu atténuée de 
Bellis; elle fait la transition entre Bellis et Semiargus. 

Anthiochena, Lederer, de Syrie, est l'exagération de Bellis; je 
possède une assez bonne série récoltée à Akbès; parmi les ©, il 
y en a une que J'appelle : cærulescens, ayant le dessus des ailes 
saupoudré d’écailles bleues. 

À Akbès, on rencontre l'Ab. © ayant des points d'un rouge 
aurore, le long du bord des ailes inférieures, en dessus. C’est l’Aber- 
ration analogue à 7#fomaculata, Reverdin, d'Ægon. 

La Lycæna figurée sous le nom de cælestina, par Millière (Icono- 
graphie, PI 154; fig. 3) est certainement une Sewzargus et non une 
Cyllarus. 


Lycæna Cyllarus, Von Rottemburg. 


Une des plus jolies espèces de Zycæna, remarquable chez le &, 
par la teinte bleu céleste qui caractérise le dessus des ailes, et chez 
les deux sexes, par la couleur vert brillant qui orne généralement 
le dessous des ailes inférieures, vers la base. Le nom de Cyllarus 
a servi dans la Fable à désigner un fameux cheval appartenant à 
Pollux, ainsi qu'un Centaure qui fut passionnément épris de la 
nymphe Hylonome; celle-ci se tua de désespoir, en apprenant la 
mort du Centaure Cyllarus. | 

J'ignore si von Rottemburg, en donnant le nom de Cyllarus à 
la Lycæna qui nous occupe et qu’il a décrite aussitôt après Sewz- 
argus et dans le même travail, a voulu plutôt rappeler le cheval de 
Pollux ou bien le Centaure, monstre demi-homme et demi-cheval. 
L'auteur ne le dit point; il nous apprend seulement que lui-même 
n’a jamais pris le papillon en question et qu'il a reçu du Prediger 
Hufnagel le seul exemplaire O' qu'il possède. 

La ZLycæna Cyllarus ne se trouve pas en Angleterre; elle se 
rencontre aux environs de Rennes; mais elle y est rare et Je n'y ai 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 309 


jamais pris que des exemplaires isolés; elle est plus commune dans 
certaines contrées du Midi; on l’a observée en Espagne, en Algérie, 
en Autriche, en Italie, en Syrie, dans le Turkestan, etc. La Zycæna 
Cyllarus éclôt en avril, mai ou juin, suivant la température des 
lieux qu’elle habite; je n'ai pas pris d'exemplaires d’une seconde 
génération, à la fin de juillet ou au commencement d’août et j'ignore 
si Cyllarus éclôt réellement deux fois par an. 

Voici le relevé des localités où la Zycæna Cyllarus a été 
authentiquement capturée, bien entendu d’après les documents 
que je possède; car je n'ignore point qu'on peut trouver l'espèce 
en infiniment d’autres lieux : Lusigny (Aube), 20 Juin 1009; 
Samoussy (Aisne), juin 1909; forêt de Carnelles (Seine-et-Oise), 
O mai 1009; Rennes, en mai; Angoulême, en mai et juin; Dom- 
pierre-sur-Mer (Charente-Inférieure), en mai; Lectoure (Gers), en 
mai; Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales), en avril, mai et juin; 
La Voulte-sur-Rhône (Ardèche), en avril; Digne, en avril, mai et 
juin; Alpes-Maritimes, en avril, mai et juin; Besançon; Château- 
du-Loir (Sarthe); Hyères et forêt du Dom (Var); Corse; Sicile; 
Valais; Brindisi (Italie méridionale), en mai; Florence en juin; La 
Granja (Espagne centrale), en juin; Lambèse; Aflou, Khenchela 
(Algérie); Tokat (Asie-Mineure); Akbès (Syrie); Fort-Naryne 
(Turkestan). 

La ZLycæna Cyllarus présente de nombreuses et intéressantes 
variations. Tout d’abord elle offre des exemplaires très différents 
pour la taille. C’est ainsi que Millière a figuré sous les n* 5 et 6 
de la PL 108 de l’/conographie et description de Chemilles et 
Lépidoptères inédits, 1860, une petite race de Cyllarus G, de 
Cannes, ayant la bordure noire des ailes relativement assez large 
en dessus, le fond des ailes, en dessous, gris de souris et les points 
noirs ocellés intranervuraux bien accentués, mais suivant la règle 
normale sensiblement plus gros aux supérieures qu’aux inférieures. 
Millière dit (page 73) : « Par sa petite taille, ce Cyllarus O' se 
rapproche tellement de Welanops qu’on le prendrait volontiers pour 
un hybride de Cyllarus et de Melanops. J'avoue même que Je ne 
suis pas absolument certain qu'il n’en soit pas un. Je n'ai pu 


310 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


encore rencontrer la Q dont la vue trancherait sans doute la ques- 
tion. Quoi qu'il en soit, cette race méridionale paraît constante par 
son exiguité relative ». 

L'opinion de Millière concernant l’hybridation de Cyllarus et 
de Melanops est, dans le cas dont il s’agit, absolument inadmissible. 
En Provence, il y a des petits exemplaires de Cyllarus semblables 
à celui figuré par Müllière; mais il y en a de beaucoup plus grands 
dans les mêmes localités; les petits échantillons ne sont nullement 
le résultat d’une hybridation quelconque; ce sont de purs Cyllarus 
comme les grands, et Millière s’abuse en invoquant la constance de 
la petite taille, après avoir eu soin de déclarer en tête de sa notice, 
qu'il n’a recueilli que trois sujets; ce n’est pas avec un si petit 
nombre de spécimens que sa religion pouvait se trouver éclairée. 
La vérité, c'est qu'il y a des petits et des grands exemplaires de 
Cyllarus, en Provence. Les petits exemplaires sont peut-être rela- 
tivement plus fréquents en Provence que dans les autres contrées 
de la France; mais il ne faut pas aller au delà de cette observation, 
si l’on veut rester véridique. 

Chez la Lycæna Cyllarus, les G' ont le dessus des ailes d’un joli 
bleu clair; elles sont entourées d’un liséré noir de largeur variable, 
mais généralement étroit et assez net. 

Les © ont ordinairement la base des ailes bleue et le bord très 
largement noirâtre; mais suivant les individus, cette teinte bleue 
est plus ou moins développée et quelquefois même absente. J'ai vu 
des exemplaires sur lesquels la teinte bleue forme comme un 
rayonnement d’un effet très gracieux. Chez certains échantillons, 
le bord des ailes inférieures se trouve orné d’une série de chevrons 
bleus, le long du liséré terminal noir qui est frangé de blanc pur. 

En dessous, la ponctuation noire des ailes supérieures est le plus 
souvent formée d’une série de taches assez grosses, fréquemment 
contiguës, décrivant un arc de cercle; les taches qui avoisinent le 
bord costal sont plus petites que les autres. Sur les ailes inférieures, 
l'ocellation, moins grosse que sur les supérieures, décrit aussi une 
courbe, mais souvent moins régulièrement ordonnée qu'aux supé- 
rieures. Toutes ces taches noires ocellées sont cerclées de blanc, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE ci 


sur un fond dont la teinte varie depuis le gris perle au gris de 
souris. Ainsi que cela se constate chez toutes les espèces du genre 
Lycæna, les taches normales du dessous des ailes peuvent s’atté- 
nuer, disparaître, ou inversement s’amplifier sous forme de rayons. 

J'ai fait figurer sous les n®* 31 et 32 de la PL 3 de la 
XX° livraison des Etudes d'Entomologie deux Œ de la Granja 
dont le dessous est plus ou moins complètement dépourvu d’ocel- 
lation noire (Ab. subtus-impunctata et Ab. subtus-partim-punctata). 
J'ai fait représenter aussi sous le n° 33 de la même PI. 3 l’Aber- 
ration subtus-radiata, d'après un ' venant d'Autriche. J'ai donné, 
à la page 16 de l'ouvrage précité, les indications relatives à ces 
Aberrations. 

Les variations des Q ont été distinguées jusqu'ici comme suit : 
la © de Cyllarus entièrement noire, en dessus, a été appelée 
Anderreggi par Rühl. Je l’ai prise aux environs de Florence et 
M. Wullschlegel me l’a envoyée de Saillon, aux environs de Mar- 
tigny (Valais). Je la possède aussi des Alpes-Maritimes et du 
Turkestan. 

Millière a décrit et figuré dans les Annales Soc. ent. de France, 
1887, avec le nom de Blackieri, sous les n°% 8 et Oo de la PL 5, 
une variété de Cyllarus © remarquable par l’accentuation de son 
ocellation noire du dessous des ailes: cette ocellation transparaît 
en dessus, aux supérieures comme aux inférieures. Blachieri fut 
trouvée en avril et mai, au pied du Mont Salève, près Genève. 
Millière la dédia à M. le professeur Blachier, qui joint au mérite 
d'une aménité si parfaite celui d'une connaissance très approfondie 
des papillons en général et de ceux de la Suisse en particulier. 
De son côté, M. Gouin a donné le nom de punctata à une même 
variété © de Cyllarus qui est décrite et figurée, d’après un échan- 
tillon pris à la Sauve, le 1° juin 1003, dans les procès-verbaux 
de la Société linnéenne de Bordeaux (Séance du 9 mars 10904); 
l’'Ab. Punctata est caractérisée comme suit : « Alis posticis, supra, 
quatuor punctis nigris notatis ». Ainsi que le dit M. Gouin, ma 
collection contient un exemplaire de cette Aberration punctata, 
pris à Aflou (Oranie du Sud). En dessous, ce spécimen est tout 


312 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


à fait remarquable par l’accentuation de tous les ocelles noirs 
entourés de blanc, qui forment, sur chaque aile, comme un brillant 
quart de cercle transparaissant d’ailleurs en dessus. Il en est de 
même, au dire de M. Gouin, chez l'échantillon qu'il a décrit et 
figuré avec le nom de functata. 

Blachieri, Millière, et punctata, Gouin, représentent donc une 
même forme © de Cyllarus; punctata paraissant cependant être 
encore plus accentuée dans le sens de sa variation que Blachier:. 

Mais il se présente une confusion due à la notice que Millière 
écrivit pour accompagner dans les Annales Soc. ent. de France la 
figure de la © Blachier:. 

Feu mon cher ami Millière était doué d’un tempérament très 
artistique; il aimait beaucoup l'étude des sciences naturelles et 1l 
chassait avec un incontestable talent; cependant il paraissait privé 
de la vision nette des choses et ses écrits portent trop souvent 
l'empreinte des tendances nuageuses et incertaines de son esprit. 
Les Entomologistes qui liront attentivement ce que Millière a écrit 
au sujet de Cyllarus d, des environs de Cannes, à la page 73 du 
3° volume de l’/conographie, 1860, et à propos de Cyllarus var. 
Blachieri, dans les Ann. de la Soc. ent. de France, 1887, se ren- 
dront compte du manque de clarté, de l’irrésolution et de l’indé- 
cision de l’auteur. 

L'article de Millière, que j'ai lu et relu, me paraît en effet assez 
incohérent. Millière veut rattacher à la forme Blachieri Q du Mont 
Salève la petite race dont il avait jadis récolté 3 G' à Cannes et 
dont il semble que la Q lui soit restée inconnue. 

La vérité, c'est qu'en Provence les © peuvent par Aberration 
très rare, être Blachieri ou punctata; mais les Cyllarus Q normales 
de Provence n’ont pas sur le dessus des ailes la transparence des 
taches ocellées du dessous, parce que les taches ocellées en question 
ne sont généralement pas assez accentuées en dessous pour trans- 
paraître vivement en dessus. 

Je reconnais ne pas SAVOI SIND NO Blachieri, Millière 
(punctata, Gouin) est ou n’est pas la forme la plus fréquente au 
pied du Mont Salève. Je pense que s’il est vrai que les C yllarus ©, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 313 
— 
auprès du Mont Salève, tendent plutôt à y devenir Blachieri- 
punctata, il doit y avoir aussi dans cette localité des exemplaires 
normaux et d’autres qui font la transition entre les deux races. 
Ce ne doit être qu'à titre exceptionnel, aux environs de Genève 
comme ailleurs, mais peut-être à Genève plus souvent qu'ailleurs, 
qu’on trouve des Blachieri Q très caractérisées. M. Charles Blachier 
pourra nous renseigner savamment à cet égard. Toutefois, à mon 
avis, il n’y a nullement lieu d'appliquer aux © si petits soient-1ls, 
le nom de Blachieri. Laissons les O‘ en dehors de cette appellation 
et réservons-la aux Q qui sont pourvues sur le dessus des ailes 
d'une transparence très accentuée de l'ocellation amplifiée du 
dessous. 

J'ai reçu de M. Arnold Wullschlegel, de Martigny, des Cyl- 
larus © intitulés Blachieri; mais pas de Q Blachieri-punctata. 
J'en conclus que celles-ci sont rares dans le Valais, d'où J'ai seu- 
lement reçu plusieurs fois la Q noire Anderreggt. 

Quant à la forme æruginosa, Stgr. (alis posticis subtus fere 
totis virescentibus), c’est la forme ordinaire à Akbès; mais à titre 
d’aberration, on la trouve à Besançon, d’où M. Fritsch m’a envoyé 
un superbe exemplaire ' pris en 1806. 

Dans la forme ærwginosa, les ailes inférieures, presque entie- 
rement couvertes d’une belle teinte bleu verdâtre brillant, sont à 
peu près totalement dépourvues d’ocellation noire. De plus, aux 
ailes supérieures, le nombre des ocelles ovalaires noirs cerclés de 
blanc est réduit ordinairement à trois ou quatre. La Q æruginosa 
de Syrie est tantôt noire en dessus, comme Awderreggt, tantôt 
saupoudrée d’atomes bleus sur le disque des ailes. 

Gerhard a grossièrement figuré Cyllarus sous les n° 3 4, 3 b, 
3c, 34 de la PI. 15. La var. #ristis figurée sous les n°” 4a et 4 d 
de la même PI. 15 vient de Turquie. Je ne vois pas bien en quoi 
elle se caractérise. On trouve en France çà et là des Cyllarus qui 
me paraissent référables à #ristis. Huebner a représenté Cyllarus, 
avec le nom de Dametas, sous les n° 266, 267 et 268. La Q qu'il 
figure est noire avec la base seulement des ailes supérieures bleue. 


314 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Lycæna Melanops, Boisduval. 


Il est bien agréable de voir voltiger Welanops sur les thyms et 
les dorycnium de Provence ou du Roussillon, aussitôt que 
reviennent, après la longue stérilité entomologique de l'hiver, les 
premiers Jours plus féconds du printemps. La Zycæna Melanops, 
dans le Sud de la France, ne produit généralement pas un vol 
bien haut, n1 bien soutenu; on la voit dans les localités chaudes 
et arides qu’elle affectionne, toujours assez près de terre, se reposer 
sur les plantes parfumées qui l’attirent, puis quitter la touffe sur 
laquelle elle s'est tenue quelque temps pour chercher non loin de 
là une autre place à son gré. 

En Andalousie, la Lycæna Melanops semble plus agile; je me 
souviens de l'avoir observée dans les montagnes voisines de 
Cordoue, notamment dans les campagnes d’'Almodovar où elle 
volait rapidement, en avril 1867, au-dessus des massifs de Cistus 
ladaniferus dont les pétales blancs jonchant le sol ressemblaient 
par leur grand nombre à la neige fraîchement tombée. Ces Cis/us, 
à l'odeur si pénétrante, forment le sous-bois des forêts de Quercus 
ilex et de Quercus suber. Melanops avait, dans cette région, une 
allure bien plus active qu'en Provence. Il en était de même, en 
avril 1868, aux environs de Lambèse, dans les plaines ondulées 
qui s'étendent du pied du Djebel-Aurès jusqu’à la ville de Batna, 
partout hérissées de pierres romaines et couvertes d’un gazon qui 
devient, à la fin du mois de mai, une herbe si haute. La même 
Espèce de Lépidoptère affecte quelquefois des mœurs différentes 
dans les lieux différents qu’elle habite. 

Melanops est une Zycæna de petite taille, fragile et délicate, 
exclusivement méridionale, confinée dans quelques localités du 
Sud de la France, de l'Espagne et de l'Algérie. Elle éclôt une 
seule fois par an. On la trouve assez communément dans les 
Basses-Alpes, les Alpes-Maritimes, le Var, les Pyrénées-Orientales, 
la Catalogne, l’Andalousie et la partie non désertique de l'Algérie. 
Les variations pour la forme, le développement ou l'absence des 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 315 


taches noires ocellées du dessous des ailes sont nombreuses et 
intéressantes. 

Boisduval a donné de bonnes figures de l’'Argus Melanops sous 
les n° 4, 5 et 6 de la PI. 17 de l’/cones. La découverte de Melanops, 
réalisée en 1823, est due au comte de Saporta, « qui nous a fait 
connaître, dit Boisduval, une foule d'Espèces nouvelles propres 
au département qu'il habite ». Il s’agit du département du Var, 
où le comte de Saporta possédait le château de Montvert, près 
de Saint-Maximin. Un autre entomologiste provençal, M. Boyer 
de Fonscolombe, dont la propriété se trouvait aux environs d’Aux, 
rivalisait de zèle et d’ardeur pour l'Entomologie, avec le comte 
de Saporta. Je dois à l’obligeance de M. Gédéon Foulquier, de 
Marseille, de connaître la photographie du château de Montvert, 
auquel Duponchel a fait une si juste célébrité dans les fastes de 
la Lépidoptérologie française. M. G. Foulquier s'intéresse non 
seulement à la connaissance de la faune entomologique actuelle 
de son beau pays, mais encore à l’histoire de la Lépidoptérologie 
provençale et des Lépidoptéristes qui ont contribué aux progrès 
de la Science par leurs recherches et par leurs travaux dans le Var 
et les Bouches-du-Rhône. C’est en effet un côté très attrayant des 
études entomologiques. Duponchel était en relations suivies avec 
MM. de Fonscolombe et de Saporta; il fut même leur hôte et 1l 
chassa avec eux, aux environs de leur résidence. Aussi, dans le 
Supplément à l'Histoire naturelle des Pagillons de France, par 
J.-B. Godart, dont P. A. J. Duponchel fut le continuateur, est-1l 
fréquemment donné de lire le récit des découvertes si importantes 
qui se faisaient incessamment dans les régions méridionales de la 
France. Au point de vue entomologique, la Provence ne commença 
d'être sérieusement explorée qu'à partir de l'année 1820. Ce fut 
pendant environ un quart de siècle à dater de cette époque que 
les Bouches-du-Rhône et le Var devinrent, entomologiquement 
parlant, l’objet des recherches les plus productives et les plus sui- 
vies. Dardouin, peseur public du Commerce à Marseille, joignit 
ses efforts à ceux du comte Adolphe de Saporta dont il était le 
contemporain. Marloy, ex-chirurgien de navires, établi comme 


316 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


médecin à Auriol, était aussi, vers 1835, un lépidoptériste pas- 
sionné; de même Meissonnier-Valcroissant, homme de lettres, à 
qui Guenée dédia l'Æadena Meissonnieri, et Théodore Aurran, 
propriétaire, habitant tous deux la ville d'Hyères, se livraient à 
l'étude des papillons du littoral méditerranéen. L'avocat Louis- 
Prosper Cantener, ancien professeur à la célèbre école de Sorèze, 
était l’auteur d’un catalogue des Lépidoptères du Var qui a paru 
dans la Revue entomologique de Silbermann. D’autres entomolo- 
gistes plus ou moins connus, tels que Ginette, employé à la Pré- 
fecture de Draguignan; Eymond d’Esclevin, capitaine-comman- 
dant au corps royal d'artillerie de marine, à Toulon; Isoard, à 
Salernes, près Draguignan; Léautier, capitaine instructeur au 
Collège de Marseille, qui découvrit la chenille de la Xylna 
Leautieri, Bdv.; Solier, capitaine du génie à Marseille, surtout 
coléoptériste, mais aussi amateur de papillons, coopéraient à la 
même époque, c’est-à-dire vers 1835, à l'étude des Lépidoptères de 
Provence. Cependant, si les chasseurs de ce temps-là étaient 
ardents à la recherche des papillons à partir du premier printemps 
et pendant les beaux jours de l'été, ils cessaient leurs recherches 
à l'approche de l’automne, et ce n'était que par hasard qu'ils 
capturaient une Noctuelle ou une Phalène en octobre ou en 
novembre. C’est cet abandon de toutes investigations à la saison 
même où les Noctuelles semblent cependant être plus nombreuses 
qui a empêché les Entomologistes de la première moitié du 
XIX: siècle de soupçonner l'existence de l’'Orfosia Witzenmanni, 
de l’Orrhodia Staudingeri, si fertile en variétés, de l’A gros 
Constanti, pourtant assez abondamment répandus dans la région 
méridionale de la France. 

Feu mon ami Emmanuel Martin, dont J'ai rappelé le sympa- 
thique souvenir dans la notice consacrée à la Zycæna algérienne 
qui porte son nom, se livrait très assidûment, pendant les saisons 
d’hiver et de printemps qu'il passait à Hyères, à la récolte des 
chenilles ; il fit lui-même des captures remarquables et contribua 
à enrichir de plusieurs découvertes l'inventaire de la faune des 
Lépidoptères du Var. Je lui dois, entre autres papillons des envi- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE eu 


rons d'Hyères, de très beaux exemplaires de la Zycena Melanops, 
étalés tout frais et sans ramollissage des aïles, c’est-à-dire conservés 
dans toute la pureté de leur couleur bleu céleste si sensible et 
facile à détériorer. 

Le cd est, en dessus, d’un bleu plus ou moins clair, avec une 
bordure noire assez nette, pas très large, surtout aux inférieures; 
la frange est blanche. La Q a le fond des ailes d’un brun noirâtre 
avec le disque plus ou moins saupoudré d’écailles bleues. Certaines 
Q sont cependant presque unicolores, c’est-à-dire brunes avec un 
léger reflet gris bleuâtre près de la base des ailes; d’autres — et 
c'est le plus grand nombre en Provence et dans les Pyrénées- 
Orientales — sont assez largement poudrées de bleu. Quelques Q 
présentent, le long du bord extérieur des ailes, une sorte de liséré 
bleuâtre qui se détache et ressort nettement sur la teinte brun noï- 
râtre du fond des ailes. 

En dessous, la variation produite par les différentes formes des 
taches noires, ou bien par leur disparition totale ou partielle, est, 
ainsi que je le dis plus haut, très considérable et pleine d'intérêt. 


J'ai fait figurer sous les n° 34, 35 et 36 de la PS ederla 
XX: livraison des Etudes d'Entomologie : 

1° L’Aberration sans taches noires appelée Marchandii et figurée 
dans la Revue entomologique de Silbermann (tome Il, 1834, PI. 27, 
Ho INEtI2). 

2 L'Ab. subtus-partim-impunctata, où les taches noires sont 
absentes des ailes inférieures et limitées aux supérieures. 

3° Enfin l’Ab. subtus-radiata, où les taches noires extrêmement 
développées forment, sur les ailes supérieures, de grosses larmes, 
et, sur les inférieures, une ponctuation arrondie, mais également 
très grosse relativement. 


M'étant occupé un peu spécialement de la recherche des varia- 
tions de Melanops, j'ai réuni une série d’une quarantaine d’indi- 
vidus aberrants. L'étude de ces spécimens serait très intéressante 
à publier, accompagnée de figures explicatives; car la plume est 
impuissante à décrire intelligiblement toutes ces variations formées 


318 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


par un excès ou une absence de ponctuation noire sur le dessous 
des ailes. En attendant que je puisse réaliser ce travail iconogra- 
phique, je prends comme termes de comparaison les trois figures 
34, 35 et 36 de la PI. 3 de la XX°® livraison des Etudes d'Ento- 
mologie et je constate que l’Ab. WMarchandii, Boisduval, paraît être 
la forme extrême, au point de vue du manque de ponctuation, sur 
le dessous des ailes. Je possède le specimen fypicum décrit par 
Boisduval dans la Revue entomologique, aux pages 121 et 122 
du tome II. L’Ab. Warchandii, Bdv., fut découverte le 10 mai 1833, 
par Cantener, dans les bois de pins du Mont Serrat, aux environs 
de Barcelone; Boisduval en fit la dédicace à M. Marchand, de 
Chartres. 

Ce M. Marchand possédait une des plus belles collections de 
Lépidoptères indigènes et exotiques, ainsi que de Coléoptères. T1 
avait acquis la collection de feu Godart. Le Cabinet de M. Mar- 
chand, comme on disait dans ce temps-là, avait cela de remar- 
quable qu’à côté de chaque espèce de Lépidoptère se trouvait la 
chenille moulée en cire et la chrysalide. M. Marchand demeurait 
place Marceau, à Chartres; l’un de ses descendants est devenu un 
ornithologiste très distingué. Le célèbre entomologiste Bellier de 
la Chavignerie était, je crois, le neveu de M. Marchand. 

Une Aberration assez fréquente est conforme à Warchandu 
pour les ailes inférieures, mais possède sur les supérieures 
quelques taches noires. L’exemplaire figuré n° 35 présente une 
série de quatre taches; j'en possède plusieurs qui ont deux taches 
seulement. D’autres ont trois taches; quelques-uns en ont cinq. 
Il y a aussi des WMelanops qui montrent une toute petite tache 
noire, ronde, cerclée de blanc, près de la base, dans l’espace cellu- 
laire des supérieures; puis on trouve toutes les transitions depuis 
les exemplaires dont les ailes inférieures sont dépourvues de toute 
ponctuation noire jusqu’à ceux qui ont les taches en question aussi 
accentuées que dans l’exemplaire n° 36; ce Lépidoptère n° 36 fut 
pris en Catalogne, tout comme l’Ab. inverse Marchand. 

Les deux points noirs situés le long du bord costal des ailes 
supérieures confluent parfois et forment une tache noire allongée. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 319 


Souvent les ailes supérieures sont marquées de taches noires 
arrondies, grosses, contiguës. 

Très rarement ces taches, qui occupent chacune un des espaces 
intranervuraux, confluent en passant par-dessus la nervure et en 
formant ainsi un gros paquet noir qui occupe, sans aucune appa- 
rence de séparation, deux espaces intranervuraux. L’Ab. 7adiata 
aux ailes supérieures ne paraît pas fort rare. J'ai plusieurs exem- 
plaires très accentués sous ce rapport; mais aucun de ceux que Je 
possède ne semble offrir un plus gros rayonnement que le n° 36. 


A Tijola (Almeria) et à Malaga, Melanops est de taille plus 
grande qu'à Digne, Cannes et Vernet-les-Bains. En Algérie, on 
prend à Lambèse et à Sebdou des exemplaires également plus 
grands qu’en Provence et en Roussillon. Les © algériennes se 
distinguent fréquemment par la bordure de croissants d’un blanc 
bleuâtre qui descend le long du bord externe des ailes, presque 
depuis le bord costal des supérieures jusqu'au bord anal des infé- 
rieures. La race algérienne de Melanops mérite parfaitement le 
nom spécial d’Algirica, Heyne-Rühl; Staudinger et Rebel, dans 
leur Catalog 1001, se trompent une fois de plus en disant de cette 
race algérienne « non differt » C’est à croire qu'ils ne l'ont pas 
vue. La race andalouse de Welanops paraît assez conforme à la 
race A/girica; cependant je n'ai pas vu de © espagnole semblable 
à la Q algérienne ci-dessus décrite; il est vrai de dire que toutes 
les © algériennes ne sont point ainsi et J'ai sous les yeux une © 
prise à Sebdou par le D' Codet, deux Q prises à Malaga et une 
autre prise à Tijola qui sont conformes entre elles. 


Huebner a figuré Welanops, avec le nom de Saporte, sous les 
n% 022, 023, 024 et 025; mais la figuration du dessous des ailes 
est mal réussie. 


I1 semble que les contrées où les Aberrations de Welanops se 
rencontrent plus fréquemment, sont les environs de Digne et le 
Mont-Serrat, en Catalogne. C’est à Digne qu’on trouve plus sou- 
vent les Aberrations figurées par Gerhard, sous les n* 14 et 10 
de la PI. 15, avec le nom erroné de Marchandu. Comme je l’expose 


320 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


ci-dessus, le nom de Warchandi s'applique à l'Ab. svbtus absque 
ocellis, ou cæca, tandis que les papillons figurés par Gerhard sont, 
au contraire, pourvus de taches ocellées d'une grosseur au-dessus 
de la moyenne. 


Lycæna Iolas, Freyer. 


Freyer a figuré Pap. lolas d'abord sous les n°% 2 et 3 de la 
Tab. 110 de Bestrege zur Geschichte europæischer Schmetterlinge; 
à la page 60 du 3° volume, Freyer dit qu’en dehors de la Hongrie, 
il ne connaît pas d’autre patrie pour ce papillon. Le même Freyer 
a figuré de nouveau Zolas à l’état de chenille, de chrysalide et 
d'insecte parfait, mais la Q seulement, sur la Tab. 07 de Neuere 
Beitrege. L'auteur fait connaître que le D' Em. Frivaldsky, de 
Pesth, a découvert la chenille qui vit dans la gousse de Colutea 
arborescens, plante de la famille des Papilionacées, croissant 
spontanément sur les coteaux calcaires de l'Europe centrale et 
méridionale, de l’Asie occidentale et de l'Algérie. 

Huebner a admirablement représenté Zolas, avec le nom erroné 
de Zolaus, sous les n° 870, 880, 881 et 882. Boisduval, dans 
l’Zcones, sous les n*% 1, 2 et 3 de la PI. II, a figuré une forme 
de C' un peu différente de celle que représente Huebner. Boisduval 
dit que ce bel Argus a été découvert en Dalmatie, en 1818, par le 
comte Dejean, et presque à la même époque aux environs de Bude, 
en Hongrie. Boisduval ajoute que l'espèce a été prise, il y a une 
dizaine d’années, en Provence, par le comte de Saporta, et qu’on 
dit aussi qu'/olas habite les environs de Rome. 

Duponchel, dans le Szpplément (p. 46 et 47), informe que /olas 
a été découverte dans les environs de Toulon et que le comte de 
Saporta lui a mandé, dans une lettre du 26 octobre 1826, qu'il 
l'avait prise, cette année même, dans son Jardin du château de 
Montvert, près de Saint-Maximin, département du Var. D’après 
Duponchel, /olas paraît en juillet. Duponchel donne des figures 
semblant assez médiocres sous les n° 4, 5 et 6 de la PI. VII. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 321 


Tolas se trouve aux environs de Digne, d’où j'en possède 
27 exemplaires récoltés en avril et mai. M. Wullschlegel m'a 
fourni 14 individus pris aux environs de Martigny (Valais) en 
juin. J'en ai reçu un assez grand nombre d'exemplaires de Hongrie 
et de Tokat (Asie-Mineure). M. Gédéon Foulquier a capturé Zolas 
dans les Bouches-du-Rhône, mais rarement, Je crois, et M. Gaston 
Allard a trouvé cette belle et grande espèce en Algérie où elle 
paraît avoir été trouvée en très petit nombre d'exemplaires Jjus- 
qu'ici. II semble que la © du Valais est plus obscure et moins 
largement saupoudrée de pulvérulence bleue que celles de Digne 
et de Hongrie. 


Lycæna Arion, Linné. 


Habite l'Angleterre, la France, la Corse, l'Autriche, l'Allemagne, 
la Suisse, l'Italie, l'Asie; manque en Algérie. 


C’est une grande espèce, probablement la plus grande des 
Lycæna européennes après Zolas. Elle se trouve en Bretagne, dans 
les landes de Monterfil et de Bourg-des-Comptes; mais à Mon- 
terfil, elle semble se raréfier depuis quelques années, aussi bien 
qu'en Angleterre où son extinction est considérée comme désormais 


prochaine. 


Charles Barrett traite de la question de la disparition d’Arzon 
de l'Angleterre aux pages 08, 00 et 100 de son Histoire des 
Papillons anglais. Je suis redevable de la traduction de cette notice 
à l’obligeance et à la compétence de M. Harold Powell. On verra 
que les années pluvieuses paraissent très peu favorables à la 
reproduction de la Zycæna Arion en Angleterre. L'espèce n’a été 
abondante en Angleterre que dans les étés chauds et secs. [Il me 
semble bien qu'il en est de même en Ille-et-Vilaine. L'année 1909 
fut très humide chez nous; l'été fut frais et pluvieux. J'ai chassé 
à Monterfil à la fin de juin et au commencement de Juillet, c'est- 
à-dire à la bonne époque de l’éclosion d’Ayion qui ne paraît qu'une 

21 


222 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


fois par an, à partir de la saint Jean et jusqu’au 20 juillet environ. 
Je ne vis pas un seul exemplaire, bien que j'aie soigneusement 
cherché l'espèce dans ses localités ordinaires. Je ne crois cependant 
pas qu'A7on soit éteinte à Monterfl où elle donne une forme très 
particulière et dont je parlerai plus loin; aussi j'espère encore revoir 
Aion voltiger dans les landes de mon pays, au cours d’un bel été 
sec et chaud, s’il plaît à Dieu. 


Charles Barrett s'exprime comme suit : 


« Encore une espèce en train de disparaître rapidement de ce 
pays. Elle fut jadis répandue, ayant été vue sur les falaises près 
de Douvres, à Winchester, à Bedford et même dans le Nord du 
Pays de Galles, ainsi qu'à Marlborough Downs et dans d’autres 
localités du Wiltshire. On l’a signalée également sur les collines 
des environs de Bath. Cependant, pendant bien des années, sa 
localité la mieux connue était à Barnwell Wold et les parties 
adjacentes du Northamptonshire, où elle fut découverte par le 
Rev. W. Bree de Polebrook, avant l’année 1840. 

M. C. À. Briggs m'a dit qu’elle s’y trouvait encore en 1850, et 
que l’Archdeacon Bree connaissait bien diverses localités de la 
région où l'espèce n'avait pas été chassée à outrance — comme 
elle l'avait certainement été à Barnwell Wold, — mais que la 
saison extrêmement pluvieuse de l’année 1860 paraît l’avoir exter- 
minée partout dans cette région puisqu'elle n'y a pas été rencontrée 
depuis. Une localité de découverte plus récente était sur les 
Cotswold Hills (Collines Cotswold), en Gloucestershire, où les 
entomologistes de Gloucester l’ont prise en quelque nombre. 

M. Herbert Goss raconte aussi, dans Te Entomologisfs 
Monthly Magazine, comment il fit sa connaissance dans cette 
localité en 1876, d’abord dans une vieille carrière abandonnée, 
ensuite dans les clairières d’un grand bois de hêtres, parsemées 
abondamment de fleurs, surtout de thym sauvage. A7ion y était 
relativement commune. Il dit qu'on ne pouvait la prendre pour 
une autre espèce, sa taille plus grande, sa couleur bleu fer et son 
vol un peu lourd et vacillant la distinguant suffisamment. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 323 


I] dit également que A7ioz vole plutôt à la façon de l’Epinephile 
Tithonus où hyperanthus que comme ses congénères, mais que, 
poursuivie ou effrayée, elle a le vol assez fort. Elle aime bien à 
se reposer sur le thym sauvage et à extraire le nectar des fleurs 
de cette plante. 

En 1877, M. Goss la trouva encore communément; mais en 1883, 
des recherches poursuivies pendant douze jours n’ont pas donné 
un seul exemplaire, et l’espèce fut considérée alors exterminée dans 
la région de Cotswold. On a attribué cette extermination aux 
fermiers, qui ont l'habitude de brûler le gazon mort sur les collines, 
au premier printemps; mais M. Goss fait remarquer que cette 
coutume de brûler le gazon mort remonte aux temps immémoriaux 
et ne peut guère être la seule cause de sa destruction. Du reste, il 
trouva de nouveau le papillon en très petit nombre dans la même 
localité à la fin juin 1800, et on ne doit pas encore désespérer de 
l'y retrouver. 

M. Herbert Marsden contribua à la publication, qui eut leu 
en 1884, d'intéressantes notes sur l'Espèce dans cette localité, 
démontrant combien était grande la fluctuation en nombre d’indi- 
vidus suivant les conditions atmosphériques. En 1868 et 1800, 
pendant les belles saisons, l'augmentation était grande, et l'année 
1870 fut la plus prolifique qu’on ait connue; on aurait pu prendre 
un millier d'exemplaires. Les saisons 1876-77 furent bonnes, mais 
pendant les années pluvieuses qui suivirent, l'espèce était en 
décroissance régulière, et il avait alors vu les derniers individus 
en 1880. 

Le major Still me dit qu’elle était une fois commune dans 
quelques localités très restreintes des environs de Langport, 
Somerset, et qu’elle y fut prise par feu M. J. C. Dale, mais ilnya 
aucun rapport récent pour cette région. Les collines incultes de 
la côte du South Devon près Kingsbridge, Bolt Head, etc. furent 
pendant longtemps des repaires préférés pour cette espèce. Dans 
The Entomologist, M. H. Nicholls signale son abondance dans 
cette localité de 1856 à 1875, et raconte que le papillon effrayé 
avait l'habitude curieuse de se précipiter dans un des nombreux 


324 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


buissons de l'Ulex Europœus, au milieu desquels il se cachait. 
IT était alors impossible de le faire quitter ce refuge sûr. 

M. G. C. Bignell, qui l’a pris abondamment dans la même 
région, dit: « Il est remarquable au vol à cause de sa couleur 
foncée. Les femelles ont une prédilection notable pour les fleurs 
du thym sauvage, sur lesquelles elles déposent leurs œufs et dont 
elles sucent le nectar. La coutume qu'ont les fermiers de brûler 
chaque année l’ajonc (Ulex Europæus) a eu comme résultat 
l’extermination du papillon dans sa vieille localité, sur le Bolt 
Head ». 

On dit cependant que l'espèce existe encore dans quelques loca- 
lités du South Devon et du North Devon, et elle a été prise l’an 
dernier (1891) dans le comté de Cornwall. Les auteurs de ces 
captures de Cornwall, MM. Waterhouse, ont exhibé à une réunion 
de l’'Entomological Club une boîte contenant de très beaux spé- 
cimens provenant de ce comté. Il va sans dire que les localités 
exactes des captures récentes n’ont pas été divulguées. Pour cette 
raison, et à cause de l’existence de vastes terrains incultes et favo- 
rables dans l'extrême sud-ouest où l'espèce paraît maintenant se 
réfugier, 1l y a lieu d’espérer que A7ion, notre plus grand Polyom- 
matus, ne sera pas, d'ici quelques années au moins, finalement 
exterminé dans ce pays. » 


Ma collection contient 8 exemplaires d’Arion jadis pris en 
Angleterre et ayant fait partie de la collection Prest d’Vork, qui 
fut vendue à Londres, il y a déjà bien longtemps. Faisant suite 
à ces A7zon d'Angleterre, je considère dans ma boîte 10 Aion 
de Monterfil, de Laillé et de Bourg-des-Comptes (Ille-et-Vilaine), 
et Je constate la très grande conformité de la Zycæna Arion en 
Grande-Bretagne et en Ille-et-Vilaine. Les &, dans les deux pays, 
ont les taches noires des ailes supérieures, en dessus, de dimension 
relativement réduite, sur un fond d’un bleu grisâtre assez clair, 
mais un peu éteint. Les © ont les taches noires plus grosses et la 
bordure noirâtre est plus développée; la teinte bleue ressort peut- 
être plus vivement chez les Q que chez les . Le dessous des ailes 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 32 


Ur 


est le même dans les deux races : anglaise et bretonne; la couleur 
du fond est de la même teinte brun ochracé clair, avec les ocelles 
noirs cerclés de blanc jaunâtre; de plus, le semis d’atomes bleus 
ou verdâtres près la base des inférieures est moins abondant et 
moins accentué que dans la race du Midi de la France, notamment 
des Pyrénées-Orientales; cette race a elle-même le fond des ailes 
plus gris. En Bretagne, il y a des Of, tel que celui figuré sous le 
n° 10 de la PI. 3 des Etudes d'Entomologie, dont la ponctuation 
noire, sur le dessus des ailes, est très oblitérée; mais il convient 
d'observer que cet exemplaire n° 10 est l’exemplaire le plus carac- 
térisé que je possède dans le sens : s#pra impunctata. Cette même 
tendance existe à Angoulême d’où mon ami Gabriel Dupuy m'a 
envoyé 2 C' appartenant, comme celui de Monterfil n° 19, à VAR. : 
supra non maculata, indiquée avec le nom d'Uiscolor, dans le 
Catalog Staudinger et Rebel 1901. En Limousin, les taches noires 
sont plus développées chez Arion qu'en Angleterre et en Bretagne, 
et la teinte bleuâtre paraît plus violacée. Dans les Pyrénées, la 
race est superbe, généralement grande, avec de grosses taches 
noires en dessus, même sur les ailes inférieures, et une large bordure 
noire. Le dessous des ailes a la base teintée de bleu argenté clair; 
tantôt les taches noires sont très développées; tantôt, par variation 
inverse, elles sont nulles. 

Dans la XX® livraison des Ætudes d'Entomologie, Jai fait 
figurer le dessous des ailes de ces deux formes d’après des exem- 
plaires de Vernet-les-Bains; celle qui est dépourvue de points noirs 
est représentée sous le n° 20 et avec la mention : sxd/us-1mpunctata, 
et l’autre, sous le n° 20’, avec la mention: sxbtus-maculis-extensis. 

Dans les Alpes-Maritimes, il y a une race superbe d’Ayzon que 
J'ai reçue sous le nom de /igurica. J'ignore où ce nom a pu être 
publié. Le fond des ailes, en dessus, est d’un bleu vif, très clair, 
chez les © surtout; les taches noires sont très développées, princi- 
palement aux ailes supérieures où elles forment quelquefois une 
sorte de large et épais faisceau de pointes de flèche dirigées vers 
la base. 

Aux environs de Digne, A7ion paraît être très variable, aussi 


326 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


bien pour la taille que pour l’extension des taches noires, pour leur 
confluence, pour le développement de la bordure noirâtre des ailes 
et la pureté de la teinte bleue. 

À Zermatt, Aion, en dessus, est remarquablement obscur 
presque autant que dans l’Oural, où les exemplaires appartiennent 
à la race géographique : obscura. 

En outre des localités ci-dessus désignées, je possède A7zon du 
Tyrol, de Fusio, de Stresa, de Grèce, de l’Oberland bernois, du 
Jura bernois, de Savoie, de la région du lac Baïkal, de Corse, de 
la Lozère, de la Gironde, de la Charente, des Hautes-Alpes, du 
Doubs, du Turkestan oriental. 

L'examen des A7ion de ces diverses localités démontre qu'il y a, 
dans chacune, une race dont le faciès ou aspect général est assez 
spécial; mais avec un mélange d'exemplaires rappelant ceux qui 
forment la majorité dans les autres endroits. C’est ainsi que partout 
où vole Ayion, il y a des petits et des grands exemplaires, des 
individus à taches très réduites ou très développées en dessus et 
ayant la teinte bleue plus claire ou plus grise; en dessous, l’ocel- 
lation noire ordinaire est plus ou moins accentuée, avec la teinte 
brune du fond ochracée ou grisâtre et la pulvérulence bleu verdâtre 
plus ou moins largement répandue à partir de la base des ailes 
inférieures et vers le milieu. Il faut donc juger une race locale 
sur un ensemble d'individus. C’est ainsi qu'une série d’Ayion 
ligurica comparée à une autre série d’A7ion des Pyrénées Orientales 
paraîtra, envisagée d’une manière générale et synthétique, très 
distincte. Cependant, au milieu des A7zon de Vernet, on trouvera 
des exemplaires d’un bleu plus clair, pourvus de taches noires 
très larges, très noires, avec une rangée d’ocelles blanchâtres, 
pupillés de noir, intranervuraux le long du bord externe des ailes 
inférieures. Ces Aion pyrénéens ne seraient point disparates dans 
la colonne des Aion de Menton ou du Mont Pacanaglia. Pourtant 
la race pyrénéenne d’Ayion est, dans sa généralité, bien plus obs- 
cure. La race de Saint-Pierre-de-Venaco (Corse) semble référable à 
la race ligurica. 11 me paraît nécessaire de disposer d’un nombre 
considérable d'exemplaires pour émettre, au point de vue des races 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 327 


locales d’'Arion, un avis motivé. C'est ainsi que le plus grand 
exemplaire d’Ariox que je possède vient d’Atzwang, près Botzen; 
mais j'ignore s’il n'y a pas dans ce lieu des exemplaires de taille 
moyenne et même petite et comment est la race normale de ce 
pays. Dès lors, faute de documents, je m'abstiens de tout com- 
mentaire. 


En Haute-Savoie, près de Chamounix, Arion n'est pas si obscur 
qu'à Zermatt, mais de taille médiocre et sans grand éclat ; 1l y a 
à Chamounix des exemplaires qui paraissent très peu différents 
des Arion bretons; cependant, comparées dans leur ensemble, les 
deux races ne sont pas semblables. 


Dans les Hautes-Alpes, au Lautaret, ainsi que dans certaines 
localités très élevées des Basses-Alpes, on trouve une race d'Ayion 
très petite, ayant le faciès d'Alcon ou d’Erebus, à nuances éteintes 
et formant un contraste curieux avec la race /2gurica. 


A Entrevaux, au Mont Gourdon, à Garamagne, dans la vallée 
du Roubion, c’est-à-dire à la frontière des Alpes-Maritimes et des 
Basses-Alpes, M. Harold Powell a capturé, en juillet 1906, une 
série de variétés d’Arion extrêmement curieuse à cause des diifé- 
rences extraordinaires de taille, de maculature, d'éclat de la teinte 
bleue qui caractérisent les exemplaires. A côté d’un G' d'Entrevaux, 
tout à fait pareil à ligurica, il y a des exemplaires extrêmement 
sombres. 


Je devrai sans doute consacrer une Planche entière, dans l’une 
des livraisons du présent ouvrage, à la figuration des diverses 
races françaises d’Ayion. Il y a dans ma collection des spécimens 
si opposés par certains de leurs caractères et appartenant cependant 
très authentiquement à la même unité spécifique : Aion, que la 
représentation de ces variétés me paraît très digne d'intérêt. Je 
profiterai de cette figuration d’A7ion pour faire connaître une race 
nouvelle et encore inédite de Tà-tsien-Lou. Le ', en dessus, est 
tout bleu, sans taches noires; la Q est obscurcie par la teinte 
noirâtre et elle est ponctuée de noir sur le dessus des ailes supé- 
rieures. En dessous, les ailes inférieures sont très largement cou- 


328 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


vertes d’une pulvérulence verdâtre et les points noirs ordinaires 
sont très petits. Leech n’a pas connu l’Ayrion tatsienluica. 

Cyanecula est la race d’Ayrion, au Fort Naryne, dans le Tur- 
kestan; c’est une des races les plus constantes que je connaisse. 

Arionides, Stgr, de Mandchourie, me paraît être également une 
variété géographique d’A7ion qui se rapprocherait de ligurica. 

Il y a des Aberrations albinisantes, notamment pour le fond 
brun des ailes qui, chez certains individus, s’est changé en un gris 
très pâle. Je possède un échantillon atteint de cet albinisme et 
capturé à Villeneuve-de-Blaye (Gironde), par mon vénérable ami 
l'abbé Mège. 

Herrich-Schaeffer a publié, sous les n° 519 et 520, la figure 
d'une magnifique Aberration qu’on pourrait appeler lacrymosa, à 
cause de la transformation en énormes gouttes noires, ayant la 
forme de larmes, des taches noires ordinaires, sur le dessus comme 
sur le dessous des ailes. 


Gerhard a copié les figures données par Herrich-Schaeffer, sous 
les n* 3a et 36 de la PI. 38. Il a de même copié les figures 
d'Arion publiées par Herrich-Schaeffer sous les n° 517 et 518; 
mais sous le n° 24 de la PI. 38, Gerhard a représenté le côté 
gauche du dessous des ailes d'Ayion, au lieu du côté droit, ainsi 
que cela est représenté dans l'ouvrage d’Herrich-Schaeffer. 


Les auteurs, même très modernes, qui tiennent à sembler tout 
connaître et ne rien ignorer de ce qui a été publié en dehors d’eux, 
ne se font pas faute de copier les figures des papillons qu’ils n’ont 
Jamais vus en nature, mais qui ont paru dans des ouvrages divers. 
Comme la copie est toujours une altération plus ou moins grande 
de l'original, ces sortes d'opérations méritent quelque critique, 
d'autant plus que très rarement le plagiaire a l’honnêteté d’avouer 
son plagiat et de faire connaître au lecteur que jamais il n’a vu 
le papillon qu’il représente. Je crois utile de signaler cette méthode 
dénuée de scrupule mais toujours à la mode. Elle n’est tolérable 
qu'à la condition de faire sincèrement connaître la source où le 
modèle existe et a été copié. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 329 


Le nom d’Arion a été donné par Linné (Systema Nature, 
édit, X, p. 483, n° 151) dans les termes suivants : « P. P. alis 
ecaudatis : supra fuscis disco cæruleo maculis atris : subtus canis 
punctis ocellaribus ; Habitat in Europa; Statura sequentis (A7gus), 
sed duplo major. Alae posticae subtus ocellis 10, praeter puncta 
marsinalia Roesel. Ins. 3. Suppl. Tab. XLV, fig. 3, 4 » 

La citation des figures données par Roesel ne laisse aucun doute. 

Linné avait emprunté le nom d’Ayion à la Fable. Arion dési- 
gnait ou bien un cheval que Neptune fit sortir de la terre, d'un 
coup de trident;, ou encore un fils de Neptune et de Cérès; ou 
enfin un poète lyrique, habile joueur de luth, né dans la ville de 
Méthymne, en l’île de Lesbos. S'étant précipité à la mer, apres 
avoir fait retentir l'air des accords les plus touchants, 1l fut sauvé 
par un dauphin qui, sensible aux charmes de sa mélodie, était 
arrivé pour l'entendre. 


Lycæna Euphemus, Huebner. 


Manque en Angleterre et en Algérie; répandue en Allemagne 
et vers l'Orient jusqu’au Japon; habite l'Alsace et quelques parties 
de la France, notamment les environs d'Angoulême. 

Huebner a figuré Euphemus sous les n°% 257, 258 et 250; 
Boisduval, dans l’/cones, a représenté la même Zycæna sous les 
n®% 4, 5 et 6 de la PL 13; de plus, sous les n°* 7 et 8, le même 
auteur a publié la figure d’une variété supposée d'£vphemus, 
dépourvue, en dessus, de toute autre tache noire que le croissant 
discoidal à chaque aile; et, en dessous, privée de la série d’ocelles 
noirs cerclés de blanc qui descendent du bord costal des supé- 
rieures au bord anal des inférieures, entre les croissants cellulaires 
et les taches submarginales. Cette variété d’Argus (nom de genre 
adopté par Boisduval pour les Zycæna), nous a été communiquée, 
dit Boisduval, par M. Donzel, de Lyon, et nous croyons devoir 
la rapporter à Evphemus. Toutefois, en terminant la notice con- 
sacrée à Æuphemus, l'auteur croit devoir prévenir qu'il ne peut 


330 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


assurer que cette variété appartienne réellement à cette espèce. Si 
cependant la variété en question peut se référer à Æphemus, on 
peut dire qu’elle est à Æwphemus exactement ce que la variété 
figurée sous le n° 20 de la PI. 3 de la XX* livraison des Ævudes 
d'Entomologie est à Arion. Duponchel a bien figuré £uphemus 
sous les n° 4, 5 et 6 de la PI. L du Supplément. Aux pages 85, 
86, 87 et 88 de cet ouvrage, Duponchel expose très judicieusement 
la question de séparation spécifique d'Euphemus et d'Alcon:; les 
observations que cet auteur a écrites sont intéressantes à consulter. 

La chenille d'Exphemus vit sur une plante de la famille des 
rosacées appelée Sanguisorba ofhcinalis, Linné. Cette plante vivace 
de 40 centimètres à 1 mètre de hauteur, se plaît dans les lieux 
humides; elle fleurit en été; on la trouve près d'Angoulême, dans 
la Jolie vallée des Eaux-Claires, et c’est dans les prés tourbeux et 
marécageux, non fauchés, qu’on voit voler Ephemus en juillet, 
près de la Sangauisorba qui y croît en quantité et dresse sa tige 
souvent rameuse, peu feuillée, terminée par des fleurs hermaphro- 
dites, d’un pourpre foncé, au-dessus des autres herbes de la 
prairie. La Sanguisorba ofhcinalis, d'après l'abbé H. Coste 
(Flore descriptive et illustrée de la France, vol. II, p. 60; Paris, 
1903), a des propriétés vulnéraires, et son nom lui est venu du 
latin : sanguis, sang, et sorbere, boire, par allusion à son utilisation 
médicinale. Le fruit de la Sanguisorba est sec, tétragone, à angles 
ailés, à faces lisses et a un seul carpelle renfermé dans le tube 
endurci du calice. L'abbé Coste, dans son excellent livre, place le 
genre Sanguisorba entre les Pimprenelles (Poferium), dont il cite 
trois espèces françaises, et les A/ckemilla, dont il énumère douze 
espèces croissant spontanément en France. Le genre Sanguisorba 
contient la seule espèce française : ofhcinalis. 

Mon ami Gabriel Dupuy m'a procuré à deux reprises différentes, 
alors que je me trouvais à Angoulême, au mois de juillet, le plaisir 
de capturer la Zycæna Euphemus, qui me rappelle, ainsi que Je 
l'a déjà fait connaître dans la Préface de la III° livraison, de 
chers souvenirs d'Alsace. 

Lorsqu'on sort de la ville d'Angoulême par la partie Sud et 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 331 


qu'on est parvenu au sommet de la première côte, on chemine 
d’abord sur un plateau que traverse, perpendiculairement à la 
grande route, le chemin se dirigeant du côté de l'Est vers Puy- 
moyen. Avant de descendre la pente assez rapide du revers méri- 
dional de ce plateau, ayant à sa droite comme à sa gauche un 
flanc de colline calcaire d’aspect sec et chaud, on voit se dérouler 
devant soi le fond d’une vallée plus longue que large, arrosée par 
des eaux vives et claires d’où la vallée en question a pris son nom. 
La fraîcheur des prairies de la vallée des Eaux-Claires contraste 
avec la sécheresse du penchant de la colline que décorent pourtant, 
du côté de l'Orient, de jolis et nombreux bouquets de chêne vert. 
Leur sombre verdure a du moins le grand mérite d’être persistante 
et de ne jamais laisser le paysage attristé par le dépouillement 
automnal des branches. L'autre côté de la vallée des Eaux-Claires, 
— celui qui fait vis-à-vis, — est formé par un relèvement assez 
brusque du sol, paraissant moins sec que le côté du Nord, car la 
pente et le plateau sont couverts de buissons et de touffes de 
chênes blancs, en mélange avec des arbrisseaux d’essence diverse. 
Pendant la belle saison, les Quercus pubescens joignant leur fron- 
daison d’un vert un peu grisâtre aux autres verdures variées, pro- 
duisent à l'horizon un effet très agréable. 

Des arbres divers, au tronc élevé et au feuillage vigoureux, grâce 
à l'humidité du thalweg, ombragent la route qui traverse la vallée 
et forment des rideaux ou des groupes, le long des champs et des 
prés qu’ils bordent et séparent. Vus du haut de la colline, ces 
grands arbres impriment à la campagne un caractère de richesse 
et constituent un très beau et majestueux décor. Si on pénètre dans 
la vallée parcourue par de nombreux cours d’eau, on rencontre des 
terrains moins fertiles que la vue d’en haut ne le faisait supposer. 
Il y a bien çà et là des champs de luzerne très fournis où s’ébattent 
des quantités de papillons, des terres en culture et des prés très 
plans, où l'herbe a été nivelée par la faux; mais il y a aussi de 
vastes espaces, très verts, sortes de tourbières où l'eau jaillit sous 
les pieds qui foulent le gazon. Des canaux pleins d’eau les tra- 
versent ou les entourent. Depuis longtemps, on ne les fauche pas; 


332 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


sans doute parce que l'herbe qui pousse dans ces sortes de maré- 
cages est de qualité inférieure et ne vaut pas la peine d’être coupée 
et fanée; ces prés humides sont le refuge des Zycena Euphemus. 
Les plants de sanguisorba ÿ poussent, y fleurissent et y fructifient 
sans dommage; aussi les générations de papillons se succèdent 
nombreuses d’un été à l'été suivant. Mais que les propriétaires de 
ces prés tourbeux s’avisent de tirer quelque parti de leur herbe, et 
il en sera sans doute de la Zycœna Euphemus à Angoulême 
comme d’'A7zon en Angleterre. 


À l'abondance actuelle des papillons si jolis à voir voltiger au 
grand soleil de juillet et si agréables à récolter dans la vallée des 
Eaux-Claires, succéderait la stérilité, et il ne resterait aux Ento- 
mologistes que le triste souvenir d’une très jolie espèce jadis repré- 
sentée par de nombreux individus, désormais très réduite ou même 
en voie d'extinction, ainsi que cela a déjà eu lieu en tant de places 
diverses, partout où la Nature a été bouleversée, où la Flore 
sauvage a été détruite. 


Combien de localités excellentes, véritables placers pour le 
Naturaliste, ont été à tout jamais détruites par l’activité soi-disant 
industrieuse, mais souvent, hélas! écoiïste et brutale, des hommes, 
qui sont trop peu soucieux, en tous pays, de la conservation d’une 
faune et d’une flore généralement considérées avec l’ironique 
dédain qu’engendre l'ignorance ! 


Quoi qu'il en soit, le souvenir des belles et douces journées de 
la fin de juillet 1007 et du 26 juillet 1008, dont je suis redevable 
à M. Gabriel Dupuy, reste fixé dans mon cœur, et je le conserve 
précieusement, en l'évoquant avec un sentiment de reconnaissante 
amitié. 


La Zycœna Euphemus est très variable de taille; il y a des 
exemplaires dont les taches noires ordinaires du milieu des ailes, 
en dessus, sont très réduites et même absentes; d’autres où les 
mêmes taches sont allongées. La race d'Angoulême paraît un peu 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 333 


plus claire que celle d'Alsace et d’'Eclepans, en Suisse, la bordure 
marginale des taches intranervurales blanchâtres semblant plus 
accentuée à Angoulême que dans les autres localités. IT est juste 
de dire cependant que certains échantillons provenant de Stras- 
bourg sont tout à fait analogues à d’autres d'Angoulême. Une Q 
présentant une curieuse variation fut prise en ma présence, le 
26 juillet 1908, par M. Gabriel Dupuy, qui eut l’obligeance de me 
l'offrir; elle est entièrement grise en dessus; les taches ordinaires 
sont éteintes et une pulvérulence bleue peu abondante et très légère 
se trouve répandue sur le disque des ailes. Le dessous est sim- 
plement un peu plus pâle. J'ai donné à cette Aberration le nom 
de Sanguisorbæe, pour rappeler la plante nourricière de l'espèce. 
J'en publie la figure, sous le n° 472 de la PI LV. 

En Extrême-Orient, il y a une race Euphemia, Stgr., représentée 
sous le n° 6 de la PI. XIII du Vol. III des Mémoires de Romanoff. 
Cette race £uphemia est plus obscure que la race française. Il y a 
une autre forme dont le Œ est entièrement brun noirâtre en dessus 
et qui a été appelée Kazamoto par Druce. J'ai reçu Euphemia du 
Nord de la Chine et de Sidemi en Mandchourie, et Kazamoto, de 
Yokohama, au nombre de 57 exemplaires. Dans l’Oural méridional, 
à 40 kilomètres à l'Est de Zlatoust, il y a une race très obscure, 
mais dont le Œ conserve une pulvérulence bleue plus accentuée 
que chez Euphemia. Est-ce cette race que Staudinger a appelée 
obscurata ? 

Comme le nom d’Arion, celui d'Euphemus a été emprunté à la 
Fable. Euphémus était fils de Neptune et d'Europe; Argonaute, 
léger à la course, habile à conduire les chars, il remporta le prix 
de la course aux jeux funèbres célébrés par les Argonautes à la 
mort de Pélias qui était lui-même fils de Neptune et de la nymphe 
Tyro. Après la mort de Typhis, fils de Neptune aussi lui et qui 
conduisit le vaisseau des Argonautes, Euphémus devint le pilote 
des dits Argonautes. Le nom d'Euphémus désigne aussi le fils de 
Trazénus; il mena les Ciconiens au secours des Troyens contre 
les Grecs {Dictionn. de la Fable, par Noël; Paris, An XITIT—1805). 


334 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Lycæna Arcas, von Rottemburg. 


Pap. Arcas (Plebejus ruralis) est décrit aux pages 25 et 26 de 
Anmerkungen zu den Hufnagelischen Tabellen der Schmetter- 
linge, dans le Sechstes Stück du journal Der Naturforscher, publié 
à Halle, en 1775. S. A. von Rottemburg dit en parlant d’Arcas : 
« In hiesiger Gegend wohnt dieser Vogel gar nicht », ce que je 
traduis comme suit : « Dans les environs d'ici, ce papillon n’habite 
pas. » J’ignore de quels environs d'ici S. À. von Rottemburg veut 
exactement parler; mais sil s’agit des environs de Halle, A7cas 
y habite, car je l’ai reçu de M. Franz Bandermann, de Halle, 
comme capturé près de cette ville. La Zycæna Arcas se trouve en 
Alsace et aussi, dit-on, en Bourgogne, près de Dijon; elle est 
répandue dans diverses parties de l'Allemagne, à Eclepans, 
Bienne, Divonne et Yverdon, en Suisse. 

August-Wilhelm Knoch a très bien figuré la ©, avec le nom 
d’ÆErebus, sous les n° 6 et 7 de la Tab. VI du II Stück de l’ou: 
vrage Beitraege sur Insektengeschichte, publié à Leipzig, en 1782. 

Knoch dit que l’Erebus a été trouvé dans les environs de 
Leipzig. Il différencie son Z'rebus d’Arcas, Esper (Tab. XXXIV; 
Suppl. X; fig. 4 et 5), qui, en effet, ne semble pas être Aycas, mais 
est peut-être A/con. C'est surtout sous le nom d’Ærebus qu'Arcas, 
d’ailleurs assez bien décrit par S. A. von Rottemburg, a été figurée. 
Huebner représente Ærebus sous les n° 260, 261, 262; mais ses 
figures sont médiocres. Boisduval, dans l’/cones, publie une meil- 
leure figuration d’'Erebus sous les n° 4, 5 et 6 de la PI. IT; cepen- 
dant la couleur bleue est trop claire sur le dessus des ailes du 
n° 6. Duponchel figure Ærebus dans le Supplément, sous les n°% 1 
(S' dessus) et 2 (Q dessous) de la PI. XTIT; cet auteur rapporte 
que « ce Polyommate que l’on croyait étranger à la France et que 
les amateurs faisaient venir d'Allemagne à grands frais, a été 
découvert aux environs de Dijon, il y a 7 ou 8 ans, par le docteur 
Lorey, et, depuis lors, il est devenu très commun dans les collec- 
tions de Paris. On le trouve aussi dans les environs de Colmar. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 335 


M. Alexandre Lefebvre l’a pris sur le revers du grand Salève, 
dans une prairie qui regarde Genève. Son apparition a lieu dans 
le mois de juillet. » 

Ma collection contient une belle © Aberration : cæca. Le dessous 
de ses quatre ailes n’a plus aucun ocelle et est d’un brun foncé uni. 
Cette Ab. cæca vient de Dusseldorf. Généralement les ailes de la 
Q sont en dessus d’un brun foncé mordoré uni; quelquefois 
cependant on voit, sur les supérieures, quelques traits sagittés noirs, 
d’une teinte plus obscure que le fond. 

Comme Æuphemus, Arcas (Erebus) vit sur la Sanguisorba 
ofhcinalis. 

Le nom d’Arcas est, comme les noms d’Ayzon et d'Euphemus, 
emprunté à la Fable. Aycas sert d’ailleurs à désigner des person- 
nalités très différentes, telles que : 1° le fils de Jupiter et de Calisto 
qui donna son nom à l’Arcadie et apprit à ses sujets à semer du 
blé, à faire du pain, à fabriquer de la toile, etc. Cet Arcas fut 
changé en ours avec sa mère Calisto; la mère et le fils forment les 
constellations de la grande Ourse et de la petite Ourse; 2° le fils 
d'Evandre; 3° Ancée, fils de Lycurgue, qui est appelé Arcas par 
Ovide; 4° un des chiens d’Actéon; 5° Mercure, surnommé 
Arcadien, parce qu’il avait été nourri sur le mont Cyllène, en 
Arcadie. 

Linné, dont l’admirable génie, fortifié par la plus haute culture 
des lettres grecques et latines, se trouvait pénétré des légendes 
poétiques de l'Antiquité, avait largement puisé dans la Fable, afin 
d'y trouver les noms qu'il distribuait, pour la premuère fois, aux 
espèces de papillons. Les héros de la guerre de Troie avaient été 
mis à contribution, en même temps que les dieux et les demi-dieux 
de l'Olympe. Les successeurs de Linné, glanant après lui, mais 
s'inspirant de ses exemples, continuèrent à faire revivre sur les 
ailes des Lépidoptères les souvenirs mythologiques. D'ailleurs, 
puisque la langue latine est l’idiome scientifique admis par toutes 
les nations du Globe, n'est-il pas naturel que les auteurs, en quête 
de noms pour distinguer les êtres qu'ils décrivent, s'adressent à 
l'antiquité latine et grecque si intimement associées l’une à l’autre, 


336 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


afin d'y trouver, avec des consonances harmonieuses, des dési- 
gnations qui rappellent à chacun 


Ce le temps où le ciel sur la terre 

Marchait et respirait dans un peuple de dieux ; 
Où Vénus Astarté, fille de l’onde amère, 
Secouait, vierge encore, les larmes de sa mère, 
Et fécondait le monde en tordant ses cheveux... 
Où le monde adorait ce qu'il tue aujourd’hui ; 

Où quatre mille dieux n’avaient pas un athée; 
Où tout était heureux excepté Prométhée, 

Frère aîné de Satan, qui tomba comme lui... 


Lycæna Alcon, Huebner. 


Le nom d’A/con a désigné un graveur habile dont Ovide vante 
les ouvrages dans le 13° livre des Wétamorphoses. Ce nom fut aussi 
appliqué au fils d'Erecthée, au fils de Mars, au fils d'Amycus et 
au fils d'Hippocoon. Il distingue maintenant une charmante 
Lycæna d’un bleu un peu pâle dont la chenille vit aux dépens de 
la Gentiana Pneumonanthe, plante vivace, à grandes fleurs d’un 
bleu vif, qui croit dans les landes et pâturages marécageux de 
presque toute la France, en dehors de la région du littoral médi- 
terranéen. Les Gentianes sont répandues au nombre de près de 
300 espèces, dit l'abbé Coste, dans les parties froides de l’hémis- 
phère boréal, jusqu’à la limite des neiges éternelles; elles tirent 
leur nom du roi d’Illyrie Gentius, le premier, d’après Pline, qui 
utilisa les propriétés de la Gentiane. Les Gentianes font partie de 
la famille des Gentianées qui contient 7 genres seulement de 
plantes appartenant à la Flore française. 

George Wheeler dit que la chenille d’Alcon vit aussi sur Cyisus 
sagittalis. L'abbé H. Coste ne mentionne cependant pas l’espèce 
sagittalis dans le genre Cyfisus; mais je vois dans la Flore 
descriptive et illustrée de la France qu'il y a un Genista sagittalis 
ou Genêt herbacé. Le genre Gexista appartient comme le genre 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 337 


Cytisus aux Papilionacées, et dans la classification, les deux genres 
sont placés très près l’un de l’autre. Je pense donc que c'est le 
Genista sagittalis, selon H. Coste, que Wheeler a voulu désigner, 
dans 7’Le Butterflies of Switzerland, comme plante pouvant servir, 
avec la Genhana Pneumonanthe, à la nourriture de la chenille de 
la Zycæena Alcon. 

La Zycæna Alcon n'a pas été trouvée en Angleterre, ni en 
Algérie; elle se rencontre en Bretagne, notamment au bois de Cicé, 
près Rennes; à Pipriac, dans l’arrondissement de Redon; à Nozay 
(Loire-Inférieure) ; à Vannes. Je la possède aussi d'Enchastrayes 
et de Larche (Basses-Alpes), où elle fut prise en juillet 1807; 
d'Angoulême; de Beauchêne et de Neuillé (de Graslin, en août); 
du Simplon où je l’ai prise du 18 au 23 juillet 1002, me trouvant 
en compagnie de feu mon ami Emile Favre, chanoine du Grand 
Saint-Bernard; du Jura bernois; de Chantilly (ancienne collection 
Guenée; avec la mention des noms de Pierret, Lemée, Roinville 
et Guenée qui y capturèrent A/con ensemble). 

Le 5 d’A/con est, en dessus, d’un bleu grisâtre un peu violacé, 
d'un aspect pâle, avec une bordure noirâtre et une frange blanche, 
sans autre tache que le croissant cellulaire aux supérieures. Encore 
ce trait discoïdal est-il parfois à peine visible. La Q est ordinai- 
rement d'un brun noirâtre, avec un semis d’atomes bleus près de 
la base des supérieures et une série très visible de macules noires, 
sagittées, intranervurales, traversant le milieu des ailes, au delà de 
l’espace cellulaire, depuis le voisinage du bord costal des supé- 
rieures et s'étendant sur les inférieures. On perçoit aussi sur cer- 
tains exemplaires une seconde série maculaire, intranervurale, entre 
la série médiane et le bord terminal des ailes. Il y a des Q 
dépourvues de toute teinte bleue sur le dessus des ailes: elles 
paraissent entièrement brunes ou grises. En dessous, le fond des 
ailes est brun clair avec les points noirs ordinaires cerclés d’ocre 
clair. 

Alcon a été décrite comme suit, par Joh. Christ. Fabricius, dans 
Mantissa Insectorum; Hafniae; 1787; p. 72 : « Alis integerrimis 


coeruleis : margine fusco, subtus fusco cinereis : punctis numerosis 


22 


338 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 

ocellaribus. — Pa. Alcon, Wien. Verz. 182. 4. — Pagilio Arcus 
(szc) Esper. pap. tab. 34. fig. 4. 5. Habitat in Austria. Mus. Dom. 
Schieffermyller. Statura P. Arzon. Mas alis omnino coeruleis mar- 
gine tantum nigricante cilusque albis. Faemina obscurior punctis 
obsoletis obscurioribus. Subtus omnes fusco cinereae punctis atris 
numerosis annulo pallido cinctis. » 

Huebner a donné sous les n° 263, 264, 265 des figures médiocres, 
mais reconnaissables; 1l a représenté la forme de © entièrement 
noire. Boisduval, dans l’/coxes, a figuré Alcon sous les n° 12 
et 3 de la PI 13. A/con ©, selon Boisduval, a le milieu des ailes 
teinté de bleu. À la page 82 de l’/cones, Boisduval donne les ren- 
seignements que je transcris comme suit : « A/con se trouve à la 
fin de juin et au commencement de juillet dans les clairières des 
bois, sur les bruyères et dans les prairies sous-alpines. Il est plus 
répandu en France que l'Euphemus. Aux environs de Paris, il est 
assez commun dans les forêts de Saint-Germain et de Sénart. 
M. Pierret fils, qui joint à un grand zèle des connaissances posi- 
tives en Entomologie, l’a trouvé abondamment dans un petit bois 
entre Luzarche et Chantilly ». Duponchel a figuré sous les n° 1, 
2 et 3 de la PI. L du Supplément le , en dessus et en dessous, 
et la Q, avec le milieu des ailes teinté de bleu, en dessus. Ainsi 
que je l’ai déjà rapporté au cours de la notice concernant 
Euphemus, Duponchel a écrit des observations très exactes sur 
Euphemus et Alcon comparées, aux pages 85-88 du Szpplément. 
Il termine ainsi son article : « Il n’est pas à notre connaissance 
que l’Euphemus ait jamais été pris aux environs de Paris : tous 
ceux qui existent dans les collections de Paris viennent d’Alle- 
magne et de l'Est de la France. Quant à l’Acon, M. Pierret fils, 
jeune entomophile plein d’ardeur, que nous aurons souvent occasion 
de citer, l’a trouvé abondamment dans les premiers jours de Juillet, 
entre Luzarche et Chantilly, dans une clairière humide et boisée 
au bas d’une montagne; mais la plupart des mâles qu’il a recueillis 
étaient fanés, d’où il pense que pour avoir ce Polyommate en bon 
état, il faudrait le chercher huit jours plus tôt, c’est-à-dire vers 


le 26 ou 27 juin. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 330 


La localité dans laquelle il volait, et dont il ne s’écartait pas, 
n'avait pas plus d'un demi-arpent d’étendue. M. Pierret soupçonne 
qu’il était attiré par la plante dont la chenille se nourrit. Du reste, 
il l'a vu rarement se reposer : il voltige comme l’Argzolus autour 
des arbustes et des buissons. Son vol est lourd et ressemble à celui 
de l’Hespérie miroir. » 

Ces observations ont été imprimées en 1832, la même année où 
a paru l’/cones de Boisduval, publication qui avait pour but de 
concurrencer le Supplément de Duponchel. La rivalité entre 
Duponchel et Boisduval avait pris un caractère d’aigreur dont 
l'Avis de l'Auteur, dans l’/cones, signé : « Le Docteur Boisduval, 
rue Mouffetard, n° 76 », porte l'empreinte. Quoi qu'il en soit, les 
observations de Duponchel confirment et développent celles 
données par Boisduval. J'ignore si la Zycæna Alcon se trouve 
encore entre Luzarche et Chantilly, ainsi que dans les bois de 
Sénart et de Saint-Germain. En Bretagne, A/con vole au mois 
d'août; un Œ' pris au bois de Cicé, près Rennes, porte la date du 
10 août 1884. Tous les exemplaires pris dans la Sarthe et faisant 
partie de l’ancienne collection de Graslin, au nombre de 7, portent 
la date des 3 et 19 août. L'année n’est pas indiquée. À Pipriac, 
3 échantillons ont été pris en août 1909. Chez nous, la Q est uni- 
colore, grise. À Angoulême, on trouve les deux formes ©, l'uni- 
colore et celle qui présente une pulvérulence bleue. Il en est de 
même dans les Basses-Alpes. Je n'ai jamais vu A/con, Euphemus, 
ni £rebus dans quelque partie des Pyrénées. Mon ami Rondou cite 
Alcon du Mont-Cagire, dans la Haute-Garonne, mais d’après le 
catalogue de von Caradja. On connaît mon scepticisme à l'égard 
des assertions qui sont imprimées dans les catalogues locaux, et 
notamment dans celui de la Haute-Garonne dont j'ai eu déjà 


occasion de m'occuper. 


Lycæna Argiolus, Linné. 


Une des Espèces qui sont répandues sur une plus grande 
étendue de l'Europe, de l'Asie, sinon même de l'Amérique du 


340 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Nord. On trouve A7giolus en Irlande et au Japon, en Scandinavie 
et en Algérie, et dans l’espace compris entre ces contrées extrêmes. 
C’est un papillon d’un bleu tendre et délicat en dessus, d’un blanc 
bleuâtre en dessous. 

En France, il éclôt deux fois par an : en avril et mai d’abord, 
puis en Juillet et août. On le voit voltiger aussi bien dans les 
Jardins, autour des buissons que forment les divers arbustes, que 
dans les haïes, en bordure des champs. La Q diffère du d' parce 
qu'elle a les ailes, en dessus, plus ou moins largement bordées de 
noirâtre. Au printemps, elle est, en Bretagne, moins obscure qu'en 
été. En dessous, Argiolus varie pour le développement ou l’atté- 
nuation de la ponctuation noire qui est généralement très fine. J'ai 
fait figurer sous le n° 24 de la PI 3 de la XX® livraison des 
Etudes d'Entomologie une belle Aberration © subtus-radiata que 
J'ai prise à la forêt de Rennes, au mois d’avril. Inversement à cette 
Ab. radiata, on trouve des exemplaires à peu près dépourvus de 
toute ponctuation noire, en dessous. Linné a décrit Argiolus, dans 
le Systema Nature, édit. X, 1770, comme suit : « Alis ecaudatis : 
supra caeruleis margine nigris; subtus caerulescentibus punctis 
nigris dispersis. Habitat in Europa. Praecedenti (Argus) similis, 
sed minor; subtus puncta pauciora dissita absque ocellis nigris. » 

On remarque partout des exemplaires de taille très différente. 
Je possède une paire d’Argiolus très petits, venant de Dalécarlie 
(ex coll. Boisduval); mais je ne puis savoir si dans ce pays-là 
Argiolus est toujours aussi petit. Je vois en effet des Argzolus pris 
à Akbès, à l’île Askold, en Angleterre, à Rennes, dans les Pyrénées, 
en Corse, en Sicile, dans le Djurjura, à Alger, etc., et Je constate 
dans chaque localité une grande inégalité de taille. Les Q ont 
généralement le bord des ailes inférieures, en dessus, marqué, dans 
chaque espace intranervural, par un ocelle blanchâtre centralement 
ponctué de noirâtre. Argiolus est une espèce très commune et qui 
fait l'agrément des jardins, en animant les bosquets de son vol, à 
partir des premiers beaux jours du printemps. Souvent on voit 
plusieurs A7giolus voltigeant ensemble, puis se reposant sur les 
feuilles et reprenant bientôt leur vol, tant que brillent les rayons 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 341 


du soleil, et sans s'éloigner des lieux où ils sont nés. D’après 
George Wheeler, la chenille vit sur le lierre, sur le houx et sur le 
Rhamnus frangula où bourdaine, arbrisseau à feuilles caduques, 
croissant dans les haies et les bois de presque toute l’Europe et 
de l'Asie occidentale. Argiolus ne s'élève pas dans les montagnes 


à une grande altitude. Du moins je ne l’ai jamais vu dans la 


région dite alpine, ni dans les Alpes, ni dans les Pyrénées. 


Relations des LYCÉNIDES et des FOURMIS 


En terminant l'étude des Zycénides de l'Europe occidentale 
et de l'Algérie, je crois intéressant pour mes Lecteurs de leur 
offrir la traduction en français d’un article de M. Viehmcyer, de 
Dresde, dont j'ai eu connaissance par un Sonder-Abdruck aus 
dem XXIV lahrgang (1907) des « ÆEntomologischen Wochen- 
blattes » (Insekten-Boerse) que m'a très complaisamment envoyé 
l'auteur. 

J'ai ajouté aux noms d’Espèce imprimés dans l’article de 
M. Viehmeyer, ceux que lui-même avait eu l’obligeance d'ajouter 
à la main, dans la copie qu'il voulut bien m'adresser. On remar- 
quera qu'aux Zycénides s'ajoutent des Ærycimides. 

M. Charles Janet a fait paraître en 1897, sous le titre de : 
Etudes sur les fourmis, etc. (note 14), une revision des Kapports 
des animaux myrmécophiles avec Les fourmis, du moins pour ce 
qu'il lui a été possible d’en connaître. 

On trouvera résumée, à la fin de l’article de M. Viehmeyer, 
dont l'excellente traduction est due à M. Baumann, professeur 
au Lycée de Rennes, la notice savante et documentée de 
M. Charles Janet sur les rapports des Zycenide et des fourmis. 

Je saisis avec empressement l’occasion qui m'est offerte d’ex- 
primer ici à M. Baumann ma plus vive gratitude pour le nouveau 
service qu'il a bien voulu rendre à l’Entomologie, avec tant 
d’obligeance et de compétence. Déjà, il avait bien voulu traduire 


342 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


avec une maitrise à laquelle on ne saurait rendre un hommage 
assez mérité, les savantes Observations du D’ Prof. Max Standfuss, 
de Zurich, sur les mutations d'A glia Tau. 

Je devrai à M. Baumann de pouvoir fournir aux Entomologistes 
français des renseignements très curieux sur une question encore 
neuve et susceptible de donner, quelque jour, sur l’histoire des 
fourmis et des papillons, les résultats les plus inattendus. Les 
vérités les plus surprenantes peuvent nous être révélées plus tard 
par quelque observateur à la fois très patient et très heureux, et 
il en résultera un nouveau faisceau d'observations qui rendra 
l'étude de l’Entomologie toujours plus intéressante et plus chère. 


I. — REMARQUES PRÉLIMINAIRES SUR LA MYRMÉCOPHILIE 
DES CHENILLES DE LYCÉNIDES 


Par H. VIEHMEYER, Dresden — A. 16. 


Traduit de l'allemand par M. BAUMANN, Professeur au Lycée de Rennes. 


C’est un fait plus ou moins connu, que certaines chenilles de 
Lycénides portent sur le troisième avant-dernier segment du 
corps une fente transversale, par où elles sécrètent un suc que les 
fourmis affectionnent comme nourriture. C’est pourquoi celles-ci 
recherchent les chenilles sur leurs plantes nourricières, et, comme 
elles font pour les pucerons, les caressent de leurs antennes pour 
provoquer des sécrétions. À ces chenilles les fourmis, en revanche, 
offriraient une certaine protection contre leurs divers ennemis et 
fourniraient dans leurs nids, aux chenilles adultes, un milieu 
favorable à la chrysalidation. En dehors de cette fente sur le 
11° segment, les chenilles en question possèdent encore sur le 
12° segment, 2 petits tubes caractéristiques, à la fois extensibles 
et rétractiles, portant à leur extrémité une fine touffe de poils. 
Sur le rôle de ces organes on ne sait encore rien de certain; on 
les considère comme des organes défensifs ou des moyens de 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 343 


séduction, peut-être aussi comme des préservatifs contre l’impor- 
tunité de certaines fourmis. Pour Thomann, fente et tubes sont 
des organes d'adaptation, en vue de la visite des fourmis. En ce 
qui concerne la fente, la preuve est faite Faut-1l également 
considérer les tubes comme des organes d'adaptation? Pour cela 
il faudrait savoir s'ils n'existent qu'en corrélation avec la fente. 
Or, d’après certaines indications bibliographiques, ceci ne semble 
pas être le cas. Dans quelle mesure ces indications sont-elles 
exactes ? Il est impossible à cette heure de l’établir. Quoi qu'il en 
soit, les deux organes en discussion sont assez petits, pour qu’à 
bien des observateurs ils aient passé complètement inaperçus ou 
aient partiellement échappé. Tous les sujets par moi observés ont 
ou constamment présenté les deux caractères, ou n’ont présenté 
ni l’un ni l’autre; chez quelques chenilles seulement du genre 
Thecla je n'ai pu arriver à aucune certitude. Les chenilles soufflées 
semblaient avoir une fente, mais point de tentacules. Pour se 
prononcer, il faudra attendre les résultats des recherches sur des 
chenilles vivantes ou conservées dans l’alcool. Erronée, à coup 
sûr, est l'opinion de Brant et d'autres, qui prétendent voir dans 
la fente et les tubes, des caractères de différenciation de certains 
groupes de chenilles de cette famille, par exemple, des TXeclidi 
et des Zycænidi. Un coup d'œil sur la bibliographie montre que 
ces caractères apparaissent dans les groupes les plus différents 
des Zycénides; le plus fréquemment, sans contredit, dans le 
groupe Zycæna. Mais on ne peut pas dire, en appliquant cette 
formule au genre tout entier : les chenilles des Zycænidr où 
seulement les chenilles du genre Zycæna sont toutes myrméco- 
philes; car, même dans ce genre, à côté d’un grand nombre de 
chenilles incontestablement munies d'organes d'adaptation myr- 
mécophiles, nous en trouvons aussi chez lesquelles ces caractères 
font défaut. La bibliographie fournit plusieurs indications à ce 
sujet. Quel crédit méritent-elles? Il est impossible de se pro- 
noncer. Pour me borner à mes observations personnelles, je n’en 
veux citer, comme preuve, qu'une chenille du genre Zycæna 

Lyc. optilete, Knoch. C’est en examinant la collection de chenilles 


344. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


de feu D' ©. Staudinger (*) que j'ai fait cette découverte. Sur 
13 espèces du genre, J'ai pu, de manière indubitable, déterminer 
la présence de la fente et des tubes. Chez les individus adultes et 
bien soufflés, on peut les reconnaître d’une manière relativement 
facile et même à la simple loupe. La fente avec ses deux lèvres 
se boursoufle ordinairement en forme de cône ou de durillons; 
il n’est pas rare de voir les tubes allongés, et même les petites 
touffes de poils sont parfois éventaillées. Lorsque les sujets ne 
sont pas soufflés à plein, il y faut déjà regarder de très près. Les 
tubes non déployés apparaissent alors habituellement sous forme 
de petites taches rondes claires, un peu en dehors et en arrière de 
la dernière paire de stigmates. Mais la chose devient tout à fait 
contestable lorsque les segments postérieurs de l'abdomen, comme 
cela peut arriver facilement, sont ou écrasés ou recroquevillés. 
Même chez des individus conservés dans l’alcool les deux carac- 
tères se peuvent aisément déterminer. 

Comme nous l'avons dit, Zyc. optilete fut l'unique espèce du 
Genre chez laquelle ces caractères étaient absents. Il m’en coûta 
énormément de ne pas croire à une erreur, à une confusion; mais 
le type de chenilles, le grand nombre d'exemplaires (15, et tous 
soufflés dans la perfection), le nom du collectionneur, la scrupu- 
leuse conscience du défunt propriétaire, tout cela devait finir par 
me convaincre d'un fait qui, à le considérer de près, n’est pas 
pour surprendre. Les pucerons n’offrent-ils pas à cet égard des 
particularités analogues ? 

Fente et tubes n’appartiennent donc pas à tous les individus 
sans exception d’un Genre. D'où deux conséquences : d’abord, :il 
faudra examiner toutes les espèces de chenilles de la famille des 
Lycénides à ce point de vue; en second lieu, ce n’est pas seulement 
la présence positive, c’est-à-dire la constatation de l'existence, 


(*) M. A. Bang-Haas, Blasewitz près Dresden, propriétaire de la firme 
Dr ©. Staudinger et A. Bang-Haas, m'a aimablement autorisé à examiner la 


collection et à mettre à profit la riche bibliothèque. Je lui en exprime ma plus 
sincère reconnaissance, — H, Viehmevyer, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 345 


mais aussi l’absence de ces organes qui a sa très grande impor- 
tance. Etant donnée la richesse en espèces de la famille des 
Lycénides d'une part, et la manière de vivre extrêmement cachée 
de leurs chenilles d'autre part, le premier champ d’investigations 
est nécessairement très restreint. Dans la collection Staudinger, 
j'ai pu examiner 45 chenilles de Zycénides, appartenant toutes à 
la faune paléarctique, et, si j'en juge par une longue expérience 
personnelle, il me faut reconnaitre que J'ai eu sous les yeux l’une 
des plus grandes collections de chenilles, si ce n'est la plus grande. 
La collection bien moindre que M. J. Griebel, professeur au 
Gymnase, à Spire (*), a eu l’amabilité de m'envoyer aux fins 
d'examen, contenait cependant encore 6 autres espèces, qui ne 
figuraient pas dans la première collection. Au total, et en comptant 
toutes les espèces indiquées dans la bibliographie, on arrive alors 
à environ 85 exemplaires, nombre insignifiant, vu la richesse en 
Espèces, de la famille. On voit par là combien précieux serait 
tout apport nouveau, l'accroissement ne füût-1l que d'une seule 
espèce. C’est, particulièrement, pour les espèces extra-européennes 
que nous en sommes réduits presque exclusivement aux indications 
bibliographiques. Or, c’est ici précisément qu'il importerait d’avoir 
des sujets de comparaison. 

Peuvent à présent être considérées comme indubitablement 


myrmécophiles les espèces suivantes (**) : 


LYCÆNIDÆ. 


Thecla Tengstræmi, Ersch.! 

Rapala Schistacea, Moore. 

Lycena Admetus, Esper! 
— Amanda, Schn.! 


EE  —— — — —  " ———"— ————…—" ——— 


(*) A M. Griebel, j’exprime ici pour son amabilité ma profonde gratitude. 


#) Ce tableau des espèces, je le dois à l’obligeance de M. le Prof. Dr Cour- 
voisier, Bâle. Il a pour base ses études sur la nervation des ailes de cette 
famille. — Chez les espèces marquées d’un ! j'ai pu en partie constater, en 
partie contrôler l'existence de la fente et des tubes. — H. Viehmeyer. 


340 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Lycæna Arcas, Rott.! 


Argyrognomon, Bergstr.! 
var. Ægidion, Meissn. 
Argus, Linné (Æ gon, Schiff) ! 
Arion, Linné. 

Astrarche, Bergstr. 
Baton, Bergstr.! 
Bellargus, Rott.! 
Corydon, Poda.! 
Cyllarus, Rott.! 

Damon, Schiff ! 

Escheri, Huebner ! 
Eumedon, Esper! 

H ylas, Esper (Dorylas, Huebner\. 
Icarus, Rott.! 

Jolas, Ochs.! 

Melanops, Bdv.! 
Melissa, Edw. 
Minimum, Fuessl.! 
Anna, Edvw.! 

Sepiolus, Bdv.! 

Orion, Pallas! 

Scudderi, Edw.! 

Sebrus, Bdv.! 


Zasera Lysimon, Huebner. 


Cyaniris Argiolus, Linné! 


Pseudargiolus, Bdv.-Lec. 


Chilades Lajus, Cramer. 


Trochilus, Fr. 


Lycænesthes Emolus, Godart. 
Catochrysops Cnejus, Fabr.! 


Pandava, Horsfñeld. 


Polyommatus Baæticus, Linné! 


T'arucus 


Parsimon, Fabr. 


T'heophrastus, Fabr. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 347 
D  —— — 
Lampides Ælianus, Fabr. 
—- Telicanus, Lang! 
Everes Comyntas, Godart. 
Aphnœeus Vulcanus, Fabr. 
Jalmenus Evagoras, Donovan. 
— Ictinus, Hewitson. 
Ogyris Genoveva, Hewitson. 
Gerydus Symethus, Cramer. 
Amblypodia Meander, Bdv. 
Phasis Aranda, Wallengren ? 
—  Thyra, Godart? 


ERYCINIDÆ. 


Nymphidium Molpe, Huebner. 
Theope Eudocia, Doubleday-Hewitson. 
—  Foliorum, Bates. 


Il existe, en outre, encore un petit nombre de chenilles à propos 
desquelles la question ne peut être tranchée à présent, parce qu'on 
n'a pu encore déterminer avec certitude si elles possèdent les 
organes en question, ou parce que les indications bibliographiques 
étaient contradictoires. De la plupart des chenilles citées on ne 
sait rien de certain, si ce n’est qu'elles vivent en symbiose avec 
les fourmis. De quelles espèces de fourmis s'agit-il ici? Dans la 
presque totalité des cas on l’ignore. À de Nicéville seul nous 
devons à cet égard des indications plus étendues. Tout collec- 
tionneur de papillons qui ramasse des chenilles de Z ycénides ne 
devrait pas manquer en même temps de surveiller quelles sont 
les fourmis qui les fréquentent, d'observer de quelle manière 
s'opère cette fréquentation, de prélever et de conserver un certain 
nombre de ces fourmis dans l'alcool, et de publier, si l’occasion 


s'en présente, les noms rigoureusement déterminés des deux sym- 


348 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


biotes. Il ne suffit absolument pas de dire : « fréquentée par une 
petite fourmi Jaune », ou encore : « en compagnie des fourmis 
noires ordinaires ». Le plus souvent, il n’est pas nécessaire de 
chercher bien loin les fourmis, car il n’est point rare de trouver 
la fourmilière au pied de la plante nourricière. En fouillant ces 
fourmilières, on acquiert aussi parfois la preuve de la vie en 
commun de chenilles et de fourmis. Chez toute une série de che- 
nilles d'Argus, en effet, la transformation en chrysalide, semble- 
t-1l, s'opère dans le nid de leurs visiteuses. Peut-être l’hivernage 
de certaines espèces a-t-1l lieu également au même endroit; mais 
on n’a point, jusqu’à présent, fait d'observations à ce sujet. C’est 
principalement le point de savoir dans quelle mesure existe 
effectivement la prétendue protection des fourmis, qui serait 
éclairci par des recherches de ce genre. I1 faudrait aussi consacrer 
une attention particulière à la manière dont se comportent les 
fourmis vis-à-vis des papillons éclos dans leurs nids. Nous man- 
quons, d’ailleurs, de recherches systématiques sur l'attitude des 
espèces de fourmis vis-à-vis de telles et telles chenilles qu’elles 
ne fréquentent pas de façon normale, sur « les relations inter- 
nationales » des chenilles de Zycénides, pour établir si l’amitié 
des fourmis et des chenilles se limite à des espèces mutualistes 
tout à fait déterminées, ou si cette amitié, comme c’est le cas chez 
les pucerons et les cochenilles, a un caractère plus international. 
Jusqu'à présent, les indications phylogéniques sur les organes 
d'adaptation myrmécophiles font presque complètement défaut, 
et 1l n'existe ni examen anatomique de ces organes, ni analyse 
chimique de la gouttelette du suc sécrété. 

La solution de bon nombre de ces énigmes est amorcée; malheu- 
reusement la plupart des recherches échouent faute de matériaux 
nécessaires. C’est pourquoi je prends la liberté d’invoquer le 
concours aimable de tous ceux en état de me rendre service. Ce 
concours pourrait s'effectuer : 

1° Par l'envoi de chenilles de Z ycénides, rigoureusement déter- 
minées (soufflées ou conservées dans l'alcool, formol, etc.), et, 
particulièrement, par l'envoi de sujets exotiques; 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 349 


2° Par l'envoi de fourmis observées en compagnie de chenilles 
ou de chrysalides, ou par la communication des noms rigoureu- 
/ Q LA 
sement déterminés ; 
3° Par la communication d’autres observations et recherches 
personnelles, jusqu'ici inédites, et rentrant dans le cadre de cette 
étude. 


II. — LISTE DES ANIMAUX AVANT DES RAPPORTS 
AVEC LES FOURMIS 


LYCÆNIDÆ 


(Extrait de l'étude de M. Charles JANET; Limoges, Ve Ducourtieux, 
1897, p. 29, 30 et 31.) 


« Guenée a observé des organes spéciaux qui se trouvent sur 
les 10° et 11° anneaux postcéphaliques des chenilles de Zycænide. 
Il décrit les parties extérieures de ces organes chez le Zycæna 
bætica dont la chenille passe sa vie entière dans les siliques du 
Colutea arborescens (Baguenaudier), dont elle ne mange que les 
graines. 

Scudder a examiné ces organes sur les chenilles d’une Zycænide 


américaine, le Cyaniris Pseudargiolus. 


Organe évaginable du 10° anneau postcéphalique. — Sur le 
milieu de la région dorsale du 10° anneau postcéphalique se 
trouve, suivant Guenée, une ouverture impaire, transverse, bordée 
d'un bourrelet saillant autour duquel les granulations qui 
couvrent tout le corps de la chenille s'accumulent particulie- 
rement. Par cette sorte de boutonnière, sort, à la volonté de la 
chenille, une espèce de vésicule hémisphérique, transparente, qui 
donne passage à une sérosité, assez abondante pour former une 
grosse gouttelette, laquelle se reproduit quand on l’a enlevée. La 
chenille ne sécrète cette sérosité que quand elle est inquiétée. 


350 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Scudder pense que cet organe doit exister chez toutes les che- 
milles des genres 7'Lecla, Ballus (*) et Lycæna. 


Organes évaginables du 11° anneau postcéphalique. — Sur le 
11° anneau postcéphalique, anneau qui porte la dernière paire de 
stigmates, se trouve un autre organe qui, lui, est pair. Cet organe 
apparaît extérieurement sous forme de deux petits orifices situés 
du côté anal et ventral des stigmates et peu éloignés d'eux. Ces 
orifices ont, à peu près, la même dimension que les stigmates, près 
desquels ils se trouvent, et leur ressemblent passablement. Par 
chacun de ces orifices sort, lorsque l’animal est inquiété, un petit 
appendice évaginable dont l'extrémité est garnie de petites 
pointes charnues, elles-mêmes hérissées. La chenille possède la 
faculté de faire sortir ces organes à volonté, soit isolément, soit 
simultanément. Elle les dévagine alors comme les chenilles des 
Papilio Machaon le font pour les osmatéries rougeûtres, bifur- 
quées de leur prothorax. 

Scudder a observé ces organes pairs chez la chenille du Cyanaris 
Pseudargiolus. Chacun d’eux consiste en une caroncule extensible, 
cylindrique, portant à son extrémité un groupe de soies qui, 
d'abord disposées parallèlement les unes aux autres, en un 
faisceau, prennent la forme d’un bouquet divergeant lorsque 
l'organe est en complète extension. 


Visites des fourmis aux chenilles de Lycænide. — La chenille 
de Zycæna Argus que l’on trouve en mai et juin, par exemple sur 
les Aelilotus et les Lotus, cachée tout à fait au bas de la plante 
près du sol, est fréquemment entourée d’un groupe d’une dizaine 
de fourmis (Freyer). 

Mac-Cook (74e Mound-making ants of the Alleghanies, 1877) 
a observé près de Philadelphie une formica subsericea qui, sur le 
Cimicifuga racemosa, caressait avec ses antennes les derniers 
anneaux d’une chenille de Zycénide, à la façon dont les fourmis 


(*) Il n’y a pas de genre PBa/lus; c’est probablement 7'Aestor que l’auteur a 
voulu dire. (Ch. Obthr.) 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 351 


caressent les Aphidiens pour obtenir le rejet d’excréments sucrés. 
La fourmi interrompit plusieurs fois ses caresses pour circuler 
sur la plante, mais elle ne tardait pas à revenir et recommençait 
ses sollicitations. Mac-Cook a constaté que la fourmi appliquait 
ses organes buccaux sur la chenille; mais 1l ne vit pas de sécrétion 
hquide ». 


M. Janet cite les témoignages d'Edwards, Moore, Doherty, 
Nicéville, confirmant l'observation des rapports entre les fourmis 
et les chenilles de Zycémides. Il ajoute que d’après Rogenhofer, 
la chenille de la Zycæna H ylas (Dorylas) se trouve presque tou- 
Jours en compagnie des fourmis sur l'An/kyllis vulneraria. 


€ Enfin Aurvillius a publié une note sur la présence des 
nymphes de Zycæna Argus dans les nids de Zasius niger; mais 
les rapports des Zycænidæe avec les fourmis seraient de même 
catégorie que ceux des ApAide et ne constitueraient pas un véri- 
table cas de myrmécophilie. La présence des nymphes de 
Lycæna Argus dans les nids de Lasius niger s'expliquerait par 
ce fait que les chenilles de Zycæna Argus font leur chrysalide 
dans la terre, près des plantes qui les ont nourries, et que les 
Lasius niger, espèce extraordinairement commune, peuvent être 
attirées vers ces mêmes plantes, précisément par la présence de 
ces chenilles. » 


Guenée a décrit, avec figures à l’appui de sa description, dans 
les Axnales Soc. ent. France, 1867, l'organisation spéciale des 10° 
et 11° anneaux postcéphaliques dans la chemille de Zycæœna 
bætica. C'est probablement à Guenée que revient l'honneur d’avoir, 
le premier, découvert cet organe curieux de la Zycæna betica et 
de l’avoir révélé au monde entomologique. Mais Guenée se garde, 
dans son article, d'émettre la moindre hypothèse sur l'usage pra- 
tique de l'organe en question; il se borne à en constater l’existence 
et à en étudier la structure, ouvrage qu'il semble d’ailleurs avoir 
parfaitement accompli. 


352 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


”Heteropterus Morpheus, Pallas. 


Hespéride plus connue dans les collections françaises sous le 
nom de S/eropes Aracynthus, que Boisduval avait adopté dans 
le Genera & Index methodicus 1840. Le © a été bien figuré par 
Huebner, avec le nom de Szeropes, sous les n° 473 et 474. La 
Morpheus (Aracynthus), dont le nom vulgaire français est le 
Miroir, éclôt une seule fois par an, vers la saint Jean; elle vole 
jusqu’à la fin de juillet et dure plus ou moins longtemps, suivant 
les lieux et la température; elle manque en Angleterre et en 
Algérie. L’ÆHespérie Miroir est commune à la forêt de Rennes, à 
la forêt de Paimpont, et on la trouve même dans les petits bois, 
le long des fossés herbus et humides, à Mesneuf, dans la commune 
de Bourgbarré, près Rennes. On rencontre parfois des Aberrations 
intéressantes pour les taches ovales du dessous des ailes infé- 
rieures, tantôt élargies ou rétrécies, quelquefois remplies par le 
développement de la couleur noire du cercle qui les entoure. J'ai 
capturé l'es périe Miroir dans les marais de la forêt de Livernant, 
en Charente, en même temps que Cœnonympha Œdippus. Je Vai 
prise aussi à Biarritz. Je possède des exemplaires de Hongrie qui 
semblent peu différents de ceux de Bretagne. Le € éclôt plusieurs 
jours avant l’apparition de la Q et j'ai remarqué plusieurs fois 
que la plupart des O' étaient usés par le vol au moment où les Q 
étaient dans toute leur fraicheur. 

L’Hespérie Miroir a un vol très particulier, sautillant et par 
bonds. Elle se plaît dans les clairières herbues des forêts et elle 
aime à se reposer sur les tiges d’herbe et les fleurs de composées. 
Elle voltige depuis O heures du matin jusqu’à la fin de l’après- 
midi. Il me semble que l’Espèce est moins abondante à la forêt 
de Rennes, maintenant, qu'elle n'était 1l y a une cinquantaine 
d'années. Cependant J'en ai encore vu des exemplaires assez 
nombreux en 1800, 1005, 1006 et 1900, d’après les documents que 
me présente ma collection. Mon frère l’a prise à Chantilly, en 1903, 
et M. P. Boulé l’a rencontrée dans la Loire-Inférieure, à la forêt 
du Cellier, au commencement d’août 1007. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 353 


Carterocephalus Palæmon, Pallas. 


De même que Æeteropterus Morpheus, Pallas, est pius commu- 
nément appeiée Szeropes Aracynthus par les Entomologistes de 
France, de même Carterocephalus Palæmon, Pallas, est plus sou- 
vent désignée chez nous par le nom de Paniscus, Fabr., adopté 
par Boisduval, dans le Genera & Index, 1840. 

Huebner a représenté l'Éspèce avec le nom de Érontes, sous les 
n*® 475 et 476. Le nom vulgaire français de Palæmon (paniscus) 
est l’£chiquier. 

Le P. Engramelle dit que l'Espèce est très rare; que cependant 
M. Gigot d'Orcy en a trouvé une très grande quantité à la fois, 
dans la forêt de Sénart, près Paris. Engramelle ajoute ce qui suit : 
« Ce papillon ne paraît qu'une fois l’année, au mois de mai, dans 
les bois; mais nous en avons trouvé dans les mois d’août et de 
septembre une variété qui est représentée en dessus, figure 96 c. 
Ses couleurs sont les mêmes que celles de l'espèce. Les taches de 
ses ailes supérieures sont disposées à peu près de même, mais 
celles du milieu des ailes supérieures sont plus allongées, et 1l 
n’y en a point au bord. Son dessous, fig. 06 4, a le fond des ailes 
supérieures plus terne, et celui des ailes inférieures moins couvert 
de brun. » 

Esper figure Paniscus sous le n° 2 de la Tab. XXVIIT ; le même 
auteur figure une très belle Aberration O', dont l'aile supérieure 
est entièrement noire, sous le n° 5 de la Tab. XCV. 

Ce remarquable échantillon faisait partie de la fameuse col- 
lection Gerning, avec laquelle 1l semble que bien peu de collec- 
tions actuelles pourraient rivaliser. J'ai vu une très curieuse 
Aberration de Palemon (paniscus) entre les mains d’un Jeune 
amateur de Genève, qui en fit l’exhibition devant les membres 
de la Société lépidoptérologique de cette savante Cité, le soir du 
12 novembre 1908, où J'avais le plaisir d’assister à une réunion 
de l’honorable Société lépidoptérologique. Je n'ai encore vu 
paraître ni la description, ni la figure de cette Aberration. Elle 
me semble pourtant bien digne d’être publiée. Freyer figure sous 


23 


354 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


le n° 1 de la Tab. 513 une belle Aberration de Pamiscus, prise à 
Vienne. 

L'Echiquier se trouve en Angleterre; je possède une série 
d'exemplaires portant l'étiquette : Northampton, et ayant fait 
partie de la collection Howard Vaughan. L’Espèce est commune 
à la forêt de Rennes où elle vole en mai; jamais je ne l'ai vue 
paraître de nouveau en été. Elle aime à se reposer sur les fleurs, 
dans les allées sylvatiques, sur les composées, les graminées et 
notamment sur la Bugle (Ajzga reptans, Linné), plante vivace 
de la famille des Labiées, à fleurs d’un bleu violacé. L’Æchiquier 
se trouve dans la forêt de Saint-Germain-en-Laye; je l'ai prise 
à la fin de juin 1898 dans l’Oberland bernois et à Chamounix 
(Haute-Savoie), au commencement de juillet 1802. Mon frère l’a 
capturée à Ozoir-la-Ferrière et à Chantilly, en mai. Il y avait 
dans la collection Kuwert des Palemon (paniscus) de Hongrie 
et du Harz. M. Elwes m'a donné un G' semblable à ceux d'Europe, 
rapporté de Laggan Alberta, où il fut recueilli en juillet 1803. 
La collection Boisduval possédait aussi l’'Espèce de l'Amérique 
du Nord. A l’île Askold et en Sibérie, il y a une race plus obscure 
appelée Brontiades par Staudinger, 2# litt. C'est sans doute Îla 
même que albigutta, Christ. 

L'Æchiquier varie passablement à Rennes, pour la couleur plus 
ou moins foncée des taches jaunes, en dessus; l'extension par 
confluence, et inversement le rétrécissement desdites taches jaunes; 
l'accentuation ou la suppression de la bordure submarginale des 
petits points jaunes intranervuraux, aussi bien aux ailes supé- 
rieures qu'aux ailes inférieures, en dessus; mais je n'ai Jamais été 
assez heureux pour rencontrer des Aberrations notables, comme 
celle figurée par Esper, ou pour trouver les autres variations qu'on 
pressent et qui doivent nécessairement se présenter, par exemple 
par confluence et confusion de toutes les taches jaunes en dessus, 
des ocelles jaune nankin en dessous, etc. 

Silvius, Knoch, très bien figurée sous les n° 1 et 2 de la Tab. V 
du vol. I de Beitraege, est une espèce différente de Palemon 
(paniscus). C’est une Hespérie très jolie, spéciale à la Germanie, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 355 


à la Scandinavie et à la Russie d'Europe, d'Asie. Elle n’a jamais 
été trouvée dans aucune localité de l'Europe occidentale. 

Il y a au Thibet et dans les parties de la Chine qui en avoi- 
sinent la frontière orientale, quelques très jolies espèces de Carte- 
rocephalus; mais bien que plusieurs espèces européennes de 
Lépidoptères se rencontrent au Thibet, je ne crois pas que 
Palæmon (paniscus) y ait été jusqu'ici rencontré. 

Wheeler dit que la chenille vit sur les plantains et les gazons; 
mais Je ne l'ai jamais vue en nature. 


Hesperia Lineola, Ochsenhermer. 


Boisduval, dans l’Zcones, a figuré la Q, en dessus, sous le n° 4 
de la PI. 47, et sous le n° 5, il a figuré le dessous. Il décrit 
l'Espèce, dans sa diagnose latine, à la page 243, comme suit : 
« Alis divaricatis fulvis concoloribus, feminae immaculatis, maris 
lineola nigra tenui; antennarum clava subtus apice nigerrima; 
fimbria albida ». J'ai publié une bonne figure du Œ dans la 
1 livraison des Ætudes d'Entomologie (Algérie; PI. 3; lg. 3); 
mais la forme algérienne est peut-être un peu différente de celle 
de l’Europe, et Staudinger lui a donné le nom de semicolon. Cet 
auteur caractérise la race algérienne de Zineola comme suit, dans 
le Catalog 1901 : « dilutior, androconiis distinctioribus. » Les 
ailes, en dessus, sont en effet d’une nuance moins obscure, plus 
dorée, avec la bordure marginale noire plus étroite. 

Chez les d' en bon état de conservation, on distingue aisément 
sur les ailes supérieures un point noir nettement séparé du trait 
noir qui recouvre une partie de la nervure médiane. Ce point noir 
se trouve placé immédiatement à la base de ce trait nervural 
médian, c’est-à-dire près de la base de la dernière nervule, au- 
dessus de la nervure sous-médiane. Le dessous des antennes est 
blanc jaunâtre avec la massue noire. L’Æesperia lineola éclôt une 
seule fois par an, en juillet; elle se rencontre en Angleterre; à 
Béville (Manche); en Bretagne, notamment sur les falaises de 


350 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Cancale et à Monterfil; à Larche, à Allos, à Digne, à Entrevaux, 
dans les Basses-Alpes; à Chamounix; à Zermatt; au Mont- 
Genèvre et à la Grave (Hautes-Alpes); à Puget-Thémiers, à 
Levens (Alpes-Maritimes); à Madrid; en Sicile; au Fort-Naryne, 
dans le Turkestan oriental; à Lambèse (Algérie); à Broussa 
(Asie-Mineure); à Irkust. 

J'ai fait figurer sous le n° 243 de la PL XXXVII du présent 
ouvrage une © albinisante par la couleur plus claire du fond 
des ailes; Je l'appelle ardens. 

La race de Chamounix est plus noircie sur le bord des ailes 
que la race des plaines. C’est sans doute cette forme des mon- 
tagnes qui est désignée par le nom de Zudovicie. Duponchel n'a 
pas figuré le G' de Lineola. Sous le n° 1 de la PI XLI du Su- 
plément, il a figuré les ailes de la Q; le n° 2 est également une 
Q; mais j'ignore si c'est bien de Zineola. La fig. 3 représente 
bien le dessous de Zineola, mais sans qu’il soit possible de préciser 


le sexe. 


Hesperia Thaumas, Esper. 


Voisine de Zineola; mais généralement plus grande. Très 
commune en Angleterre; aux environs de Rennes et de Cancale; 
en Savoie; dans les Basses-Alpes; les Hautes-Pyrénées; les 
Pyrénées-Orientales; l'Isère; les Alpes-Maritimes; à Lardy 
(Seine-et-Oise): en Poitou; aux environs de Châteaudun, où 
Guenée a élevé la chenille; en Corse; en Grèce; au Djurjura 
(Algérie); en Italie (Florence); en Espagne; à Akbès et Broussa, 
en Asie-Mineure. 

L'éclosion se fait une seule fois par an, en juin et juillet. 

Esper représente l’Æesperia T'haumas sous les figures 2 et 3 de 
la Tab. XXXVI. Engramelle figure, avec le nom de lPA7denr, 
sous les n° 05 a bis et 05 b bis de la PI. LXXIV, une Aberration Q 
blanche, en dessus et en dessous, qui faisait partie de la collection 
Gerning. L'Ardent paraît être, dans son genre, une Aberration 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 257 


analogue à celle de Zineola, figurée sous le n° 243 du présent 
ouvrage, que J'appelle également ardens, mais encore plus accen- 
tuée, me semble-t-il. Je possède une Aberration albinisante de 
T'haumas; c'est un O' que je fais figurer sous le n° 242 de Ja 
PI. XXXVII de ce livre; mais l’albinisme respecte la teinte fauve 
doré et n’atteint que les parties normalement noires. C'est l'inverse 
de l’Ardent. Je possède une © très curieuse, prise au Bois de 
Boulogne; elle se trouvait dans la collection Bellier. Cette Q est, 
en dessus, d’un brun très obscur, plus foncé que la teinte du fond 
des ailes des exemplaires ordinaires. 

Le & de Thaumas porte sur les ailes supérieures un trait noir 
plus épais que chez le G' de Lineola; ce trait noir n'est pas sou- 
ligné chez 7'aumas par un point séparé, comme chez Zineola. 
En dessous, la massue des antennes n’est pas noire comme dans 
Lineola; mais entièrement jaunâtre dans T’kaumas. La chrysalide 
repose dans une feuille enroulée. L'Espèce vole dans les allées 
des bois et le long des champs, dans les sentiers où l'herbe est 
drue et un peu haute. La forme d'Algérie et d’Asie-Mineure est 
de couleur plus claire que celle de France et d'Angleterre. 

La frange paraît être moins blanche chez T#aumas que chez 
Lineola. 

Dans la première édition (1776) du Systematisches Verseichniss 
der Schmetterlinge der Wienergegend, les Thérésiens, à la 
page 160, appellent Zirea, Mueller, l’Æesperia Thaumas, selon 
Esper, dont l’ancien nom vulgaire français, reproduit par Engra- 
melle, était la bande noire, selon Geoffroy. D’après les Thérésiens, 
la chenille vit sur une graminée du genre Aÿa, à laquelle ils 
donnent le nom spécifique de #ontana. I] n’y a pas d’Ara mon- 
tana dans la Flore de l’abbé H. Coste, mais une Avena montana, 
graminée croissant dans les pelouses rocailleuses des montagnes. 
Probablement la chenille de l’'Æesperia Thaumas vit sur plusieurs 
espèces de graminées dont elle s’accommode également bien. 

D’après mon expérience, les Hesperia Thaumas et Lineola ne 
s'élèvent pas à une très grande altitude; Zineola, dans le Valais, 
voltigerait cependant plus haut que T'aumas et arriverait bien à 


358 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


près de 2,000 mètres. Huebner a bien figuré les deux sexes de 
l’'Æesperia T'haumas, avec le nom de ZLinea, sous les n°° 485, 486 
et 487. 


Hesperia Hamza, Obthr. 


J'ai fait figurer cette nouvelle espèce sous les n® 24, 26 et 2c 
de la PI IIT de la 1° livraison des Æudes d'Entomologie (1876). 
L’Espèce est décrite à la page 29 de l’ouvrage en question. 

L’Æesperia Hamza n'est pas rare dans la province d'Oran, aux 
environs de Sebdou, de Nemours, de Magenta, Méchéria, Géry- 
ville; je la possède également de Tanger et de Constantine. Dans 
le Sud, on la prend dès le mois de mars; à Sebdou, l’Æesperia 
Hamza vole en mai et juin. Le G' est toujours plus foncé que la Q. 
Je n'ai pas reçu de variété méritant d’être signalée. L’Æesperia 
Hamza paraît être une espèce assez fixe; c’est une spécialité de 
la Barbarie. 


Hesperia Acteon, von Rottemburg. 


Décrite par S. A. von Rottemburg aux pages 30 et 31 de 
Anmerkungen zu den Hufnagelischen Tabellen der Schmetterlinge 
(Der Naturforscher; Sechstes Stück; Halle; 1775). L'auteur com- 
mence par dire que ce papillon a beaucoup de ressemblance avec 
Thaumas, Hufnagel, ou Sylvestris, Poda; il ajoute qu'il ne la 
jamais pris lui-même, mais qu'il en a reçu récemment deux exem- 
plaires d’un ami de Landsberg-sur-la-Warthe. Esper a figuré 
une Q bien pâle sous le n° 4 de la Tab. XXXVI, et Huebner a 
médiocrement figuré les deux sexes sous les n° 488, 489 et 490. 

L'Hesperia Acteon se trouve en Angleterre; en Bretagne, où 
elle n’est pas rare aussi bien aux environs de Rennes que sur les 
falaises de Cancale, en juillet et au commencement d'août; dans 
la Sarthe (de Graslin); dans les Pyrénées-Orientales, où je l'ai 
prise à Port-Vendres et à Vernet-les-Bains, en juin et juillet; dans 
les Alpes-Maritimes, où je l'ai trouvée à la fin de juin; à Charroux 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 359 


(Vienne); aux environs de Digne; à Aix-les-Bains (Savoie); au 
vallon de Saint-Pons (Bouches-du-Rhône); dans le val du Fier 
(Haute-Savoie); en Sicile; à Bordighera, Florence et Pompei 
(Italie); à Uclès, Bilbao et Grenade (Espagne); à Beyrouth; à 
Tanger, Lambèse, Oran, Sebdou, Alger, Bône (Côte de Barbarie). 
L’Espèce n’a qu’une éclosion par an; mais, suivant les latitudes, 
elle éclôt au commencement de juin, en juillet et même au 
commencement d'août. La race de Beyrouth semble plus grande 
et plus claire que les autres. Il y a des G' qui ont, comme les ©, 
au delà de l’espace cellulaire des ailes supérieures, une série de 
petites taches contiguës d’un jaune d’ocre plus clair que la teinte 
du fond et décrivant un arc; de plus, on aperçoit une tache 
également plus claire, occupant la plus grande partie de l’espace 
cellulaire. D’autres © sont d’un ton plus uniformément obscur. 
L’Æesperia Acteon paraît plus localisée et moins abondante que 
T'haumas; celle-ci semble être en France la plus répandue et la 
plus commune du genre Æesperia. Le nom d’Acteon est mytho- 
logique. 

Actéon était fils d’Aristée et d’Autonoé, fille de Cadmus. Il 
était grand chasseur. Un jour, il surprit Diane qui se baignait 
avec ses nymphes. La déesse indignée lui jeta de l’eau au visage, 
le métamorphosa en cerf et ses propres chiens le dévorèrent. Ce 
malheureux prince fut pourtant reconnu après sa mort pour un 
héros, par les Orchoméniens, qui élevèrent des monuments en son 
honneur. — Actéon désigne encore un des chevaux qui condui- 
saient le char du Soleil, dans la chute de Phaéton (Dricionn. 
Fable, par Fr. Noël; Paris; An XIII-1805). 


Augiades Sylvanus, Esper. 


Extrêmement répandue en Angleterre, dans toute la France, la 
Sicile, l’Asie-Mineure. J'ai trouvé Sylvanus partout où j'ai chassé 
en France et je ne crois pas utile de donner la nomenclature des 
localités d’où je possède authentiquement l’Espèce. Huebner a 


360 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


représenté les deux sexes de Sylvanus, sous les n° 482, 483 et 484. 
Esper avait fait figurer seulement la Q, sous le n° 1 de la 
Tab. XXXVI. L’Æesperia Sylvanus présente une variété que le 
comte Tlurati a décrite et figurée comme espèce distincte, avec le 
nom d'Awgiades faunus, dans Naturalista Siciliano; XVIII: 
Tav. Vi he'erlo et l'av MTS Re: 

Cette Aberration faunus, dont je publie la figure sous le n° 239 
de la PI. XXXVII du présent ouvrage, diffère du type parce que 
les taches plus claires des ailes inférieures, principalement accen- 
tuées sur le dessous des ailes, mais bien apparentes aussi en 
dessus, sont allongées, remplissent entièrement les espaces intra- 
nervuraux depuis l’espace cellulaire jusque plus ou moins près du 
bord marginal et forment par leur confluence une grosse et large 
tache plus claire que les bords, ainsi que cela a lieu dans l’Aber- 
ration de Comma que j'ai fait figurer sous le n° 85 de la PI 6 
de la XX° livraison des Etudes d'Entomologie. Je possède huit 
exemplaires de l’'Ab. faunus, tous Œ, que nous avons pris par 
hasard, c’est-à-dire sans les chercher spécialement, dans les Pyré- 
nées-Orientales, aux environs de Digne, dans l'Isère, à Rennes 
et à Moidrey (Manche), en face du Mont Saint-Michel. Ma 
collection contient en outre plusieurs exemplaires semblant former 
la transition entre l’Ab. faunus et le type. J'ai acquis, de Meek, 
une curieuse Aberration anglaise, dont les ailes inférieures sont 
d'un jaune d’or uni, sans parties plus claires, ni plus foncées, tant 
en dessus qu'en dessous. Les ailes supérieures ont aussi le fond 
plus clair. C’est un sujet remarquablement albinisant. 

L’'Espèce éclôt une seule fois par an, en juin et juillet. Elle 
est extrêmement abondante dans les allées des bois et sur la lisière 
des champs. 


Augiades Comma, Linné. 


Décrite comme suit par Linné, dans Sys/ema Nature, Edit. X; 
1760; p. 484 : « Comma, 162. P. P. alis integerrimis divaricatis 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 361 


fulvis : punctis albis lineolaque nigra. /#. Sec. 793. Habitat im 
Europa. » Si je me reporte à la l'auna suecica, Editio altera, 
auctior: Stockholmiae 1761; je lis à la page 285, sous le n° 1080, 
en outre de la diagnose du Systema Nature qui y est reproduite 
comme elle est rapportée ci-dessus, les renseignements complé- 
mentaires suivants : « Papilio alis erectis ovatis integerrimis 
testaceo-griseis, tesserulis albis linea nigra sub superioribus. 
Habitat in Pratis. Descr. Alae primores concolores, flavae, apice 
fuscescentes maculis pallidis : litura nigra linearis margine nuda 
subargentea in medio paginae superioris. Secundariae supra flavae, 
pallidius maculatae margine fuscescentes. Subtus griseae maculis 
albidis quadratis. » Comma est donc l’une des 52 espèces de 
Lépidoptères diurnes recensées dans la Ælora suecica, édit. 1761. 

Je prie le Lecteur de vouloir bien se reporter à ce que J'ai déjà 
écrit sur Comma dans la XX° livraison des Etudes d'Entomologie, 
aux pages 38 et 30. J'ai fait figurer sous les n° 85 et 86 de la 
PI. VI de l'ouvrage précité, deux Aberrations G' se produisant en 
sens inverse; c’est-à-dire : 

1° L’Aberration chez laquelle les taches blanches du dessous 
des ailes inférieures confluent en une seule large tache blanche, 
centralement teintée d’un peu de jaunâtre; cette Aberration est 
pour Comma ce que V'Ab. Faunus, Turati, est pour Sy/vanus. Mon 
frère a capturé à Gavarnie (Hautes-Pyrénées), le 23 août 1908, 
un second semblable à celui qui a été figuré sous le n° 85 et 
qui provient de Sologne; j'ai désigné cette Aberration sous le 
nom de Faunula. 

2 L’Aberration presqu’entièrement obscure sur le dessous des 
ailes inférieures, prise à Cauterets, et que j'ai appelée Guernisact. 

Sous les n° 240 et 241 de la PI. XXXVIT du présent ouvrage, 
j'ai fait figurer deux Aberrations : 1° Dupuyi (240), , remar- 
quable par l'absence partielle des taches blanches ordinaires sur 
le dessous des ailes inférieures; 2° albescens (241), G, analogue 
pour la direction de l’albinisme à la 7T'zaumas (242); 

L'Augiades Comma est une des espèces qui habitent une plus 
grande étendue de la terre palaé- et néoarctique et qui s'accom- 


362 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


modent de toutes les altitudes; elle se reproduit en effet avec 
autant de continuité en Laponie qu'en Algérie, où Comma se 
rencontre, malgré l'affirmation contraire de Staudinger et Rebel 
(Catalog 1001); on trouve Comma en Europe, en Asie, dans 
l'Amérique du Nord, au bord de la mer comme dans les hautes 
montagnes; elle présente des variations locales ou formes géo- 
graphiques; mais elle offre aussi, dans les diverses localités qu’elle 
fréquente, d’intéressantes variations ou Aberrations individuelles. 

Une des stations où j'ai été à même d'observer Comma en plus 
grand nombre d'exemplaires à la fois est la dune dite de Miel-Pot 
et de la Guimarais, entre Saint-Malo et Cancale (Ille-et-Vilaine). 
Cette dune est exposée au Nord; la mer près de la plage est 
rocheuse, et devant la côte sablonneuse, on voit s'élever du sein 
des flots les énormes rocs dits : Grand et Petit Chevreuil; ces 
rochers ne sont point nus, mais au contraire couverts de végétation. 
On peut accéder au Petit Chevreuil, à pied sec, pendant que la 
mer est basse. Le Grand Chevreuil est toujours entouré d’eau. 
Ces rochers ressemblent, au mois de mai, à un véritable parterre 
de fleurs qui forment un assemblage tricolore; les fleurs blanches 
d'une Caryophillée forment des massifs entre les fleurs bleues de 
la Liliacée : Endymion nutans, la vulgaire Jacinthe, et les fleurs 
roses de Ja Plombaginée : Armeria maritima, communément 
appelée : jonc marin. Dès que le sable est à l'abri du flux jour- 
nalier des flots salés, une abondance de carex et d’ÆEryngtum 
maritimum pousse sur les flancs et la crête du talus qui forme 
comme la bordure de la dune, du côté de la mer. Un peu plus 
à l’intérieur, le sol très mouvementé, est gazonné et tapissé de 
plants de la rose pimprenelle, arbrisseau nain et à souche lon- 
guement traçante dont les fleurs blanches, grandes et solitaires, 
si nombreuses et si éclatantes en juin, sont remplacées, lorsqu’éclôt 
l'Augiades Comma, par de gros fruits d’un rouge noirâtre. Çà 
et là, au pied des relèvements rocheux de la dune, on aperçoit 
des massifs de fougères, et sur la hauteur, se trouve un abri formé 
par un bois d’'érables et de peupliers dont le vent marin tourmente 
la bordure, mais dont le milieu est assez épais et fournit une 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 363 
Re RER 
végétation relativement vigoureuse. C’est dans ce site que l'Ay- 
giades Comma voltige en grand nombre du 12 au 18 août; elle 
se pose sur les fleurs de composées et préférablement à terre, et 11 
est aisé d’en faire une abondante récolte. La chasse en est d'autant 
plus intéressante qu'à cet endroit, l'Awgiades Comma est très 
fertile en variétés. Il m'est arrivé, certains jours, de recueillir une 
quantité assez considérable d'échantillons d’une parfaite fraîcheur. 
En dessus, ils sont plus ou moins clairs ou foncés, cependant 
jamais d’un fauve aussi doré qu'au Taurus, ni jamais aussi 
obscurs qu’en Sibérie ou en Savoie. En dessous, les taches blanches 
normales sont tantôt petites, tantôt plus grosses, quelquefois d’un 
jaune seulement un peu plus pâle que la couleur du fond. Certains 
individus ont l’apex des supérieures et le fond des inférieures 
crisâtre en dessous; d’autres — et c’est le plus grand nombre — 
ont ces parties des ailes d’un jaune verdâtre. Rarement, les taches 
blanches des ailes inférieures, en dessous, sont surmontées de 
traits noirâtres qui les font vivement ressortir sur le fond verdâtre 
clair des ailes. D’après une longue série de Comma d'Angleterre 
que j'ai sous les yeux, la forme de cette Espèce en Grande- 
Bretagne ne diffère guère de la forme normale du département 
d'Ille-et-Vilaine. Les plus grands exemplaires de Comma que Je 
possède viennent du Fort-Naryne, en Turkestan. La chenille gri- 
sâtre, avec la tête noire, n'était pas rare en 1864 et 1866 sur Île 
plateau du Ryffel, en Valais. 


Pamphila borbonica, Boisduval. 


M. Eugène Holl, adjoint de 1"° classe du Génie en retraite, à 
Hussein-Dey (département d'Alger), a découvert à Hussein-Dey, 
où elle vole à la fin du mois d'octobre, une intéressante forme de 
la Pamphila borbonica, Boisduval. Cette trouvaille imprévue et 
insoupçonnée enrichit d’une unité spécifique très intéressante le 
Catalogue des Lépidoptères d'Algérie. 

La Pamphila borbonica fut initialement décrite par Boisduval, 
à la page 65 de la Faune entomologique de Madagascar, Bourbon 


364 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


et Maurice, Paris, 1833, et figurée sous les n* 5 et 6 de la PI. o 
du même ouvrage. 

Comparant aux peintures originales que je possède, signées par 
E. Blanchard, les figures gravées et coloriées d’après ces modèles, 
je trouve l'exécution de la gravure et du coloriage un peu gros- 
sière et Je crois devoir en prévenir le Lecteur. Des figures meil- 
leures de Pamphila borbonica ont paru dans l'Histoire physique, 
naturelle et politique de Madagascar, par Grandidier; Paris, 1887. 
Les Lépidoptères forment le XVIII® volume de cette Æis/oire de 
Madagascar. La Pamphila borbonica y est décrite à la page 360 
et figurée sous les n* 5 et 6, 6a de la PI. 55. La Pamphila bor- 
bonica de Hussein-Dey diffère seulement de la même espèce de 
Madagascar, Bourbon et Sierra-Leone dont j'ai sous les yeux de 
nombreux et très beaux exemplaires, ainsi que les types même de 
l’'Espèce (22 coll. Boisduval), par la taille un peu plus petite et 
la réduction des trois points blancs cerclés de noir qui se 
remarquent sur le dessous des ailes inférieures. 

Comme chez borbonica type, la borbonica-Holli, Obthr. est, en 
dessus, d’un brun noirâtre très obscur. Les ailes supérieures sont 
allongées et les inférieures ont le bord externe sinué avec l’angle 
anal un peu proéminent. Aux supérieures, en dessus, il y a d’abord 
près de l’angle apical et presque contigus au bord costal, trois 
tout petits points transparents, serrés les uns contre les autres et 
formant une petite série maculaire droite. On les perçoit de même 
en dessous, aussi bien que trois autres taches transparentes, sépa- 
rées les unes des autres, et de forme presque carrée; celle du 
milieu étant plus grosse que les deux autres. Enfin, pour achever 
la série qui forme une ligne maculaire oblique, on voit une tache 
Jaune opaque. Les ailes inférieures, en dessus, sont immaculées. 

Le dessous des ailes est d’un jaune olivâtre, avec la base des 
supérieures largement lavée de noir mat. Sur les inférieures, on 
distingue les traces des trois points blancs cerclés de noir qui sont 
beaucoup plus gros et plus accentués dans la forme type de 
Madagascar et Bourbon. Les deux sexes ont les ailes semblables. 
Il semble que la pulvérulence jaune olivâtre du dessous des ailes 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 365 


inférieures est très fugace; car elle ne persiste pas longtemps et 
on ne la trouve que dans les exemplaires frais. Chez ceux qui ont 
un peu volé, la teinte jaunâtre a disparu et 1l ne reste que le fond 
des ailes d’un gris noirâtre uniforme. 


Pamphila Lefebvrii, Rambur, 


et Pamphila Nostrodamus, Fabricius et Herrich-Schaefter. 


Voici comment Fabriaus décrit VNostrodamus, nom qui, après 
lui, a presque toujours été transformé en WNostradamus : « Alis 
divaricatis, fuscis; anticis supra fascia maculari albida; posticis 
subtus cinereis : habitat in Barbaria. » 

Les deux Æesperies : Lefebvru et Nostrodamus constituent 
certainement deux unités spécifiques distinctes; pourtant, dans le 
Catalog 1901, Staudinger et Rebel gardent un silence absolu sur 
l’'Æesperia Lefebvru. Dussé-je une fois de plus contrister les 
dévots du Catalog 1901, le souci de la vérité entomologique, seule 
considération à envisager, m'oblige à apporter de nouveau une 
rectification, sous forme d’addition d’une unité spécifique, à un 
ouvrage qui semble malheureusement rédigé à la légère, sans étude 
suffisante de la bibliographie et même avec un parti-pris facile à 
percevoir en maintes circonstances. Pourtant combien d'Entomo- 
logistes pleins de confiance dans la perfection de l’œuvre et la 
science infailhble des auteurs, sont tout disposés à accepter, sans 
contrôle, toutes les assertions contenues dans le Catalog ! Ne me 
trouvant retenu par aucun respect fétichiste envers le Catalog 
allemand, je signale les fautes lorsque je les trouve, et j'invite 
mes contradicteurs, s'il y en a, à faire valoir leurs raisons. 

Donc Lefebvrii, omise dans le Catalog Staudinger et Rebel, 
1001, est une espèce bien valable et distincte de sa congénère 
Nostrodamus, n° 680 du Catalog précité. 

C'est Rambur qui a distingué Zefeburu, et j'invite le Lecteur 
à se reporter aux pages 00 et 01 du Catalogue systématique des 
Lépidoptères de l'Andalousie, Paris, 1858. 


366 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Nostrodamus © est hgurée par Herrich-Schaeffer sous les n° 35 
et 30 des Æesperides Europ, Tab. 6, et la légende porte bien 
Nostradamus. C'est une espèce à laquelle Rambur (Loc. cit, p. 80, 
90 et 91) consacre aussi une description détaillée. Rambur cite 
avec raison les figures données par Duponchel dans le Supplément 
(PI XLI, fig. 4, 5 et 6), avec le nom de Wostradamus, comme 
se rapportant à Lefebvru. Il désigne encore les figures 458, 450 
et 460 données par Huebner, avec le nom de pygmaæus, comme 
représentant Lefebvru. Je pense que c’est en effet très probable. 
Ésper, sous le n° 3 de la Tab. XCIX, a également figuré, je crois, 
Lefebvri , avec le nom de Pigmaæus. Freyer, sous les n° 2 et 3 
de la Tab. 513, a vraisemblablement représenté, avec un coloriage 
qui manque de finesse, la Wostrodamus qu'il appelle Pumilio. 
Dans les Proceedings of the Zoological Society, 1874, Moore a 
sans doute représenté le © de Wostrodamus, avec le nom de 
Karsana. Boisduval, dans l’Zcones, a figuré Lefebvru, sous le 
n° 3 de la PI. 47, avec le nom de Nostradamus. 

De tout ceci, il résulte que d’une part l’Æespérie distinguée par 
Rambur avec le nom de Zefeburs a été figurée par Esper comme 
Pigmæus; par Huebner, comme Pygmeus,; par Duponchel et par 
Boisduval, comme Vostradamus, et que d’autre part Vostrodamus, 
secundum Fabricius, a été figurée par Herrich-Schaeffer comme 
Nostradamus, par Freyer, comme Pumilio; par Moore, comme 
Karsana. 

La Pamphila Lefebvrz, Rambur, est un peu plus petite que 
Nostrodamus,; les ailes supérieures de Nostrodamus ont l’apex 
allongé, tandis que les mêmes ailes, chez Zefebvrä, sont plus 
courtes et ont le sommet moins proéminent. La couleur du fond 
des ailes est sensiblement plus foncée dans Zefebvrii que dans 
Nostrodamus, aussi bien en dessus qu’en dessous et pour les deux 
sexes. En dessus, Lefebvru est d’un brun noirâtre; VMostrodamus 
est d’un brun un peu fauve; en dessous, Lefebvri est d’un brun 
noirâtre, uniforme, sauf chez le G' qui a la première moitié des 
ailes supérieures plus foncée; VNostrodamus est plus pâle et la Q 
surtout paraît d’un gris presque blanchâtre; certains exemplaires 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 307 


ont le bord anal des ailes inférieures à peu près blanc. La frange 
est plus brune chez Lefebvru. Les ©, chez ZLefebvru, ont, en 
dessus, les taches des ailes supérieures d’un jaune ochracé clair; 
ces taches sont blanchâtres et plus grandes dans Wostrodamus. 
Aux ailes supérieures du ©, en dessous, les points blanchâtres, non 
visibles en dessus, paraissent différemment placés dans les deux 
espèces, et aux ailes inférieures, Lefebvri G' présente cinq à six 
points formant une ligne courbe; ces points sont mieux indiqués 
chez la Q et ils sont parfois surmontés d’atomes noirâtres. 

Nostrodamus se tient volontiers sur la poussière des chemins, 
dont elle a la couleur, et dans le lit desséché des torrents. Suivant 
Bellier, qui a pris Lefebvrü, en Sicile, « aux heures où la chaleur 
a le plus d'intensité, on la rencontre immobile sur les sentiers 
poudreux ou sur quelque pierre brûlante. Rarement elle se pose 
sur les végétaux qui sont à sa portée. Son vol est très rapide; 
elle rase constamment la terre, de sorte qu'on la perd facilement 
de vue; mais quand on l’a manquée, elle revient presque toujours 
se poser à la place même d'où elle était partie ». Elle parait en 
Sicile depuis le mois d'avril jusqu'à la fin d'août, toujours 
rarement et presque isolément. M. Holl a pris les deux espèces : 
Lefebvri et Nostrodamus, aux environs d'Alger, en juin, sep- 
tembre et octobre. Cet habile chasseur pense comme moi que 
Lefebvri et Nostrodamus sont deux espèces très distinctes. 

Je possède Wos/rodamus des localités suivantes : Dalmatie; 
Barcelone; Grenade (de Graslin, juin et septembre); Solfatare, 
près Naples; Hussein-Dey, Maison-Carrée (Holl, août et sep- 
tembre) ; Sidi-Okba, Biskra (R. Oberthür; J. Merkl, mai); Sebdou 
(D' Codet et Powell, en août). 

Et Zefebvru de Sicile (Bellier); de Hussein-Dey (Holl, 
octobre); de Collo (D' Seriziat); de Menton (Alpes-Maritimes), 
où Decoster en a capturé plusieurs exemplaires des deux sexes, et 
de Formia (Prov. de Caserta) dans l'Italie méridionale, d'où me 
l'a envoyée M. Orazio Querci. 

Le nom de Zefebvri est évidemment postérieur à Pigmeus, 
Esper, et à Pygmæus, Huebner, et il y aurait sans doute lieu, à 


3068 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


cause de la loi de priorité, de rétablir le nom le plus ancien : 
Pigmaæus, au lieu du nom plus récent : Lefebvru, Rambur. 


Cependant, bien que les figures données par Esper et Huebner 
semblent bien se rapporter à Lefebvru, 11 est incontestable que 
c'est Rambur, en créant cette Lefebvru, qui a été le véritable auteur 
de la distinction entre deux Espèces jusqu'alors mélangées et 
maintenant encore confondues, grâce à Staudinger et Rebel, qui 
n'ont pas su ou voulu prendre le temps de les discerner. En 
adoptant le nom de Zefebvra donné par Rambur, je suis donc 
sûr de désigner très exactement au moins avec ce nom, l’Espèce 
qui n’est pas actuellement reconnue par tout le monde, comme 
distincte de VNostrodamus. C’est cela qui a dicté ma résolution. 


Boisduval, dans le Genera et Index methodicus, 1840, avait 
bien senti qu'il y avait deux espèces distinctes et 1l avait inscrit 
à la page 35, sous le n° 286, une Æesperia Ætna, de Sicile, à 
laquelle 1l avait donné comme synonyme la Nostradamus, Bois- 
duval (/cones). Il plaçait sous le n° 287 Nostradamus, Fabr.; 
mais 1l établissait ensuite pour Vostrodamus, Fabr., une syno- 
nymie fautive. 


Carcharodus Alceæ, Esper. 


Figurée sous le n° 3 de la Tab. LI et décrite aux pages 4, 5 
et 6 du vol. II de l'ouvrage : £uropæisch. Schmetterlinge. Le nom 
vulgaire allemand donné par Esper est : Der Falter der Garten- 
malve. L’Alceæ éclôt chez nous deux fois par an : au premier 
printemps et à la fin de l'été. Nous ne voyons jamais le papillon 
très abondant. Il fréquente volontiers les jardins et c’est ainsi 
que J'en récolte chaque année quelques exemplaires dans les allées 
ou sur les pelouses, à Cancale et à Rennes. Je possède AZceæ de 
Saint-Pons (Bouches-du-Rhône); de Florac (Lozère); de Char- 
roux (Vienne); de Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales); de 
Digne; des Alpes-Maritimes; de Châteaudun (Eure-et-Loir), où 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 369 


Guenée l’a élevé de la chenille; de Saint-Germain-en-Laye (Seine- 
et-Oise); de Hyères (Var); de Corse; de Brindisi, en mai; de 
Sicile; de Grèce; de la vallée de Ronda (Andalousie), en juin; 
d'Algérie : Alger; Biskra, en mai; Magenta, en juin; Géryville, 
en mai; Lambèse, en avril et juin; Sebdou, en mai; Khenchela, 
en juin; de Tanger, au Maroc; de Larnaca, dans l’île de Chypre; 
de Broussa et de Tokat, en Asie-Mineure; de Beyrouth et d'Akbès, 
en Syrie; du Fort-Naryne, dans le Turkestan oriental, et Siao- 
Lou, aux frontières occidentales de la Chine, tout près du Thibet 
oriental. 


En Syrie, Alceæ donne la variété australis qui est généralement 
petite et d’un brun roussàtre et un peu jaunâtre. 


L'Espèce varie un peu pour la taille et pour la couleur plus 
ou moins claire ou foncée du fond des ailes, aussi bien en dessus 
qu'en dessous. Les dessins bruns du dessous sont plus ou moins 
visibles sur le fond des ailes et les taches transparentes des ailes 
supérieures, ainsi que les taches blanc jaunâtre des ailes inférieures, 


sont plus ou moins développées, en dessus, comme en dessous. 


J'ai toujours pensé qu'Alceæ se trouverait quelque jour en 
Angleterre. En effet, c’est une espèce qui semble voyageuse et qui 
aime à errer assez loin de son point d’origine. Tous les ans, Je 
vois des exemplaires voltigeant isolément dans mon jardin à 
Cancale, et je suis amené à penser qu'une Espèce petite, mais 
d'apparence relativement robuste, répandue depuis le Sahara 
algérien jusqu'aux bords de la Manche, pourrait bien se rencontrer 
sur les côtes du Sud de l'Angleterre, où croissent quelques-unes 
des espèces de Malva : notamment woschata, sylvestris et rotun- 
difolia, sur lesquelles peut vivre la chemille qui est grise, finement 


poilue, avec la tête noire. La chrysalide se fait dans une feuille 
de mauve enroulée. 


Huebner a figuré la Q avec le nom de walve, sous les n° 450 
et 451, et la chenille ainsi que la chrysalide sous les n° 1 à et à 
de la collection des Zarve (Pagiliones, Il; Gens, E, a). 


24 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


(2) 
DS! 
© 


5 Carcharodus lavateræ, Esper; 
2 Carcharodus altheæ, Huebner; 
et Carcharodus bæticus, Rambur. 


Si l’on considère une paire bien caractérisée et normale de ces 
trois Carcharodus, c'est-à-dire si l’on compare lavatere, des envi- 
rons de Digne, à A/fheæ, de Paris ou de Rennes, et à bæticus, 
d'Espagne ou de Martigny (Valais), on aura la conviction que 
lavatere, altheæ et bæticus représentent des unités spécifiques 
bien distinctes; mais si, au lieu d'envisager un petit nombre seu- 
lement d'exemplaires appartenant à des formes bien caractérisées 
de lavatere, altheæ et bæticus, on étudie un matériel plus impor- 
tant composé d'échantillons provenant des localités les plus 
diverses, on est obligé de constater que des liens très intimes 
existent entre /avatere, altheæ et beticus; ces liens sont établis 
par des exemplaires de transition que je me considère comme 
personnellement incapable de rapporter avec certitude à l'une 
plutôt qu'à l’autre des unités précitées. Je ne connais, Je dois 
l'avouer, ni les œufs, ni les larves, ni l'anatomie des genitalia; Je 
juge donc d’après les seuls caractères extérieurs; mais je ne puis 
cacher l'impression que je ressens d’après ce que Je vois, et croyant 
que le plus élémentaire souci de la probité scientifique me fait 
un devoir d'exposer simplement ce que je présume être la vérité, 
au risque de grandement étonner mes lecteurs, je me trouve amené 
à penser et à dire que lavatere, altheæ et beticus sont trois termes 
d’une seule et même unité spécifique. Bæticus forme le passage et 
le lien entre lavatere et altheæ. Je livre cette opinion aux critiques 
et aux recherches ultérieures; il est possible que létude plus 
approfondie des premiers états et des caractères anatomiques 
démontre qu'il y a réellement deux, trois ou peut-être même 
quatre Espèces, tandis que je me sens porté à n’en admettre qu'une 
seule. Je m'inclinerai bien entendu devant la vérité qui me sera 
démontrée; mais j'espère que certains Entomologistes se trouve- 


ront incités par l'intérêt de cette énigme à essayer de soulever le 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 371 


voile qui nous cache encore un des secrets de la Nature. Je 
souhaite vivement que le travail d’où procédera la lumière soit 
publié le plus tôt possible. En attendant, je traite l'histoire de 
chaque Carcharodus comme si les trois : lavatere, Altheæ et 
bæticus étaient spécifiquement distincts; mais J'exposerai au cours 
de chaque notice comment il me semble que le passage s'établit 
de l’une à l’autre des trois Formes, ou peut-être Espèces distinctes 
de Carcharodus; Alceæ restant en dehors et paraissant une Espèce 
nettement différente des autres. 


io Carcharodus lavateræ, Esper. 


Assez grossièrement figuré par Esper, sous le n° 4 de la 
Tab. LXXXII, avec le nom mal orthographié de Zavathere, et 
décrite d’après des exemplaires venant de France et de Suisse, 
qui furent communiqués à Esper par Gerning. Esper dit qu'on 
n’a pas encore découvert l'Espèce dans ses environs, c'est-à-dire 
autour d'Erlangen. 

Huebner a donné une meilleure figure de la © sous les 
n® 454 et 455 et avec le même nom fautif de Lavarheræ. Godart 
a représenté l’'Hespérie de la Lavatère, avec un dessin exact, mais 
un coloris très sombre, sous les n°* 7 et 8 de la PI XXVIITI du 
Vol. II de l’AÆistoire naturelle des Papillons de France. « Lava- 
tère, dit Godart (p. 232, vol. IL), est un genre de plantes de la 
famille des #alvacées, dédié à Lavater, médecin et botaniste 
suisse. » 

Le Carcharodus lavateræ est une espèce assez vive, d’allures 
souvent rapides, éclosant depuis le commencement du printemps 
jusqu'au milieu de l'été, habitant l'Algérie, l'Espagne et les 
régions subalpines de la France; il s'élève assez haut dans les 
montagnes, puisqu'il dépasse dans les Hautes-Pyrénées le village 
de Gavarnie et dans les Alpes celui de La Grave. Il n’est point 
rare de voir, au mois de juillet, quelque lavateræ voltiger, avec 


les Syrichthus et les Lycæna, sur les chemins boueux ou sur les 


S 2 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


fumiers frais et les parties humides des sentiers dans les Hautes- 
Pyrénées, dans les Alpes et dans les Cévennes. 

On distingue facilement lavateræe des autres Lépidoptères qui 
l'accompagnent à sa couleur générale blanc verdâtre. 

Ma collection contient des lavaleræ capturés dans les localités 
suivantes : Cauterets et Gavarnie (Hautes-Pyrénées), en juillet; 
La Grave (Hautes-Alpes), en juillet; Aix-les-Bains (Savoie), en 
juin; Vizille (Isère), en juin; Florac (Lozère), en juillet; route du 
Simplon, à partir du Refuge n° 2, en montant vers Bérizal et 
Zermatt (Valais), en juillet; Digne, en mai et juin; Samt-Pons 
(Bouches-du-Rhône), en mai; La Montgie (Puy-de-Dôme); 
Bourg-d'Oysans, Montpellier et Vernajaz (collection Guenée); 
Bordighera, en mai; Nice, en juin; Hongrie (collection Kuwert); 
Naples (collection Bellier); Grenade (Andalousie), en mai (col- 
lection de Graslin); Algérie : Sebdou, en juin; Lambèse, en juin; 
Méchéria, à la fin de mars; Sicile (collection Bellier);, Akbès et 
Bérut-Dagh (Taurus), en juillet. 

La chenille, suivant Guenée, a été décrite par Hornig. Elle vit 
à la fin d'avril, à la manière de Malvarum (Alceæ), sur le Szachys 
recta, plante vivace de la famille des Labiées, à feuilles poilues 
et vertes sur les deux faces, et à fleurs d’un blanc jaunâtre, qui 
croit sur les coteaux calcaires de l’Europe centrale et méridionale. 
La larve en question est d’un gris bleuâtre, avec la stigmatale 
jaune et la tête noire. 

Les exemplaires de Sicile, d'Espagne et d'Algérie ont généra- 
lement le dessus des ailes d’une couleur plus foncée que ceux des 
Pyrénées, des Cévennes et des Alpes. Les © surtout sont tachetées 
de brun roussâtre, ce qui leur donne un aspect plus obscur. En 
dessous, les ailes inférieures ne sont pas toujours d’un blanc Jjau- 
nâtre ou verdâtre uni; mais les mêmes maculatures que dans 
bæticus commencent à apparaître. En Sicile, la transition de 
lavatere à beticus est parfaite. Il en est de même en Syrie. 
D'ailleurs les bæzicus d'Algérie et d'Espagne sont eux-mêmes de 
nuance plus claire que ceux de Martigny en Valais et ainsi se 
présente un /ransitus egregius entre lavatere et bæticus. J'ai sous 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 373 


les yeux exactement 119 exemplaires de lavatere rangés dans la 
même boîte, par localité, à côté de 05 bæticus. Je considère que 
sur cette quantité une douzaine d'exemplaires sont fort embarras- 
sants et aussi bien référables à lavateræe qu'à beticus. Les lavatere 
de France, de Suisse et de Hongrie sont hors de cause, comme 
les éæticus de France et du Valais; mais Je ne vois aucune 
possibilité de faire, au moyen de quelque caractère différentiel 
extérieur tiré de l'insecte parfait qui puisse donner satisfaction, 
l'attribution à lavatere plutôt qu'à beæticus de certains individus 
algériens, syriens et siciliens. Je ferai observer que jamais nous 
n'avons observé lavatere dans les Pyrénées-Orientales, n1 dans 
les plaines de l'Ouest de la France. Zavatere, sans être rare, n'est 
pas très abondante généralement et on la capture le plus souvent 
par échantillons isolés; cependant, depuis le temps que nous 
chassons dans les Pyrénées-Orientales, si lavateræ y existait, Je 


crois que nous l'y aurions rencontrée. 


20 Carcharodus bæticus, Rambur. 


La © est figurée dans la Faune entomologique de l'Andalouste, 
sous les n° 3 et 4 de la PI. 12, et l'Espèce est décrite aux pages 
8o, 81 et 82 du Catalogue systématique des Lépidopières de 
l'Andalousie. Je ne puis qu'inviter le Lecteur à se reporter à cette 
description publiée en 1858 et à la figure qui date de 1830. Cette 
figure est du reste bien exécutée. Rambur commence sa description 
par ces mots : « Nous n'avons pas à prouver lauthenticité de 
cette espèce, elle est évidente; nous sommes donc surpris que 
M. H. Schaeffer l'ait méconnue dans ses suppléments à Huebner. » 
Pour parler ainsi, Rambur ne devait pas avoir étudié attentivement 
les affinités de bæticus et de lavateræ, d'une part, et de bæñicus 
et d'Al/fheæ, d'autre part. 

Herrich-Schaeffer a figuré bæficus, sous les n° 14 et 15, avec 
le nom de #alvarum var. marrubü, et c’est contre ce rattachement 


de marrubii à malvarum comme variété, que Rambur croit devoir 


3/74 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


protester. Pour apprécier la raison d’être de ce nom : #arrubü, il 
faut savoir que ce nom avait d’abord été donné par Rambur à 
bæticus, mais #n litteris seulement. Rambur avait découvert bæficus 
à Montpellier, en 1827, et il avait répandu sa nouvelle Æespérie 
dans les collections de son temps, en l'appelant : warrubi. C’est 
ainsi que dans les collections Boisduval, Guenée, de Graslin, 
Bellier, bæricus a toujours été étiqueté : #arrubü, Rambur. C’est 
après son voyage d’Espagne que Rambur, en figurant bæficus, 
abandonna le nom ?x litteris de marrubü. 

La chenille vit à Grenade sur le #arrubium hispanicum dont 
elle lie les feuilles pour se renfermer. On trouve dans l’Europe 
centrale deux espèces de wearrubium : vulgare et peregrinum, 
plantes de la famille des Labiées, dont se nourrit, je pense, la 
chenille de bæticus en Suisse et dans le midi de la France. 

Guenée avait dans sa collection 3 exemplaires de #arrubi qu'il 
dit tenir de Rambur lui-même. 

Voici le relevé des documents dont je me trouve disposer 
actuellement : 7 warrubu, dont 2 de Marseille (coll. Bellier); 
4 de Grenade, pris en mai (coll. de Graslin); 4 sans localité (coll. 
Boisduval); 3 d'Andalousie, donnés par Rambur, et 1 de Cata- 
logne (coll. Guenée); 2 © prises au Pardo, près Madrid, par 
moi-même, en avril 1867; 1 Q capturée à la Sierra-Nevada, côté 
de Lanjaron, en juillet 1870, par mon frère; 6 des Pyrénées- 
Orientales, récoltées en mai et en juillet; 1 de Sicile coll. Bel- 
lier); 20 de Martigny (Valais), élevés de la chenille par Arnold 
Wullschlegel, qui a obtenu l’éclosion en juillet; 1 de Khenchela, 
pris en mai; 4 de Lambèze, pris en avril et juin; 14 d'El-Kantara, 
dans la province de Constantine, recueillis par mon frère en mai 
1875; 2 de Magenta (1* Lahaye, juin 1886); 12 de Sebdou 
(L' Lahaye, D' Codet et Harold Powell, mai et juin); 7 de 
Beruth-Dagh, au Taurus (Delagrange, juillet 1800); 6 d’Akbès, 
en Syrie. 

Je compare entre eux les lavatere et les bæticus (marrubti) des 
mêmes localités, c'est-à-dire du Valais, d'Espagne, de Sicile, 
d'Algérie. Je constate que les lavateræ et les bæticus sont très 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 375 
RE 
distincts, au Valais, et ne peuvent être confondus. Mais si J'essaie 
de séparer les lavatere et les bæticus de Syrie, je n'y puis par- 
venir: certains inclinent plus vers lavateræ, d’autres paraissent 
être plutôt des bæicus; toutefois, il est impossible de les distinguer 
spécifiquement les uns des autres, et non seulement ces exemplaires, 
constituent entre eux une transition parfaite, mais encore ils 
forment entre les vrais lavatere et les véritables bæ/icus un 


passage insensible et par conséquent excellent. 


3° Carcharodus altheæ, Huebner. 


La © est bien figurée par Huebner, sous les n° 452 et 453, et 
le d est représenté très fidèlement par Godart, sous les n°* 5 et (6 
de la PL XXVIII du tome II de l’Aistoire naturelle des Papillons 
de France. L'Hespérie de la Guimauve, ainsi que l'appelle 
Godart, est décrite aux pages 230 et 231. Je possède alfheæ, au 
nombre de 83 exemplaires, des localités suivantes : Vernet-les- 
Bains, en mai et juin, puis en Juillet; Cauterets, en juillet; Saint- 
Pons (Bouches-du-Rhône), en juin; Uriage (Isère), en juin alea 
Grave et le Lautaret (Hautes-Alpes), en juillet; Basses-Alpes; 
Saint-Martin-d'Entraunes (Alpes-Maritimes), en juillet; Auzay 
(Vendée), à Ja fin d'août; Rennes, dans mon jardin, en sep- 
tembre; environs de Paris et Sicile (collection Bellier); Chartres, 
Bourg-d'Oysans, Vernet (coll. Guenée); Vernet et « reçu de 
Pierret » (coll. de Graslin); sans localité, dans la coll. Boisduval; 
vallée de Ronda, en Andalousie, au mois de juin; Broussa, en 
Asie-Mineure. 

On remarquera qu’altheæ habite au Vernet avec beticus,; à 
Cauterets, où lavatere se trouve également; dans les Alpes- 
Maritimes, où vit lavatere,; en Andalousie où se rencontrent 
lavatere et beticus; à La Grave, où lavateræ vole à la même 
époque; en Sicile, où lavateræ et bæticus ont été pareillement 
récoltés. 

Althee est seul, c'est-à-dire sans lavatere, ni bæticus, à Paris, 


à Rennes, en Vendée, à Chartres. Ainsi que Je l’expose ci-dessus, 


376 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


dans la notice consacrée à lavatere, celle-ci n’a jamais été observée 
par nous dans les Pyrénées-Orientales; pourtant Zavatere se 
trouve en Catalogne, à Montpellier, dans les Hautes-Pyrénées, 
c'est-à-dire tout autour du Roussillon et de la Cerdagne; cepen- 
dant, si lavatere manque dans les Pyrénées-Orientales, a/tkeæ est 
assez fréquente au printemps et en été, aux environs de Vernet; 
bæticus y est plus rare; mais ce sont les al/heæ des Pyrénées- 
Orientales qui se relient, par une transition parfaite, aux bæricus 
de la même région. Chez bæricus, les dessins olivâtres du dessous 
des ailes inférieures sont plus fins; ces dessins forment comme 
4 bandes principales descendant du bord costal vers le bord anal, 
parallèlement au bord externe et séparées les unes des autres, par 
des espaces blanchâtres, tandis que chez altheæ, les dessins en 
question sont moins nets, plus confus et surtout les deux dernières 
bandes confluent au voisinage du bord extérieur, de telle sorte 
qu'on voit chez al/heæ une sorte de rayonnement figurant comme 
les doigts d’une main étendue dont l'extrémité aboutit au bord 
terminal; mais il y a des passages entre les formes extrêmes et 
ces transitions sont telles qu’on ne peut véritablement faire aucune 
coupure, mn établir aucune séparation entre al/heæ très caractérisé 
et éæñcus. D'un autre côté, j'invite les Entomologistes que la 
question intéresse à piquer sur le bord d’une planche d’agave une 
série d'exemplaires de lavatere et d’althee et à regarder les 
papillons dont tous les dessins et toutes les taches transparaissent 
alors parfaitement, en les plaçant devant la lumière d’une lampe 
électrique. On constatera la parfaite similitude de toutes les taches 
et dessins de lavateræ et d'altheæ. Lavatere est la forme albine 
et altheæ la forme mélanienne d’une même unité spécifique. Telle 
est ma conclusion, sauf à connaître ce que l'étude des premiers 
états et des genitalia pourra révéler. 

Je publierai sans doute dans la V® livraison des Etudes de 
Lépidoptérologie comparée une Planche explicative des transitions 
de lavatere, beticus et altheæ. Si je publiais cette instructive 
Iconographie dans la IV® livraison, je retarderais la publication 
de l'ouvrage plus qu’il ne convient, 


SN 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 7 


—— rm 


Syrichthus Proto, Esper. 


Ne paraît pas rare en Algérie, en Espagne, en Syrie; moins 
abondante en Provence. M. Harold Powell a élevé la chenille de 
Proto à Sebdou et les papillons provenant de cette éducation sont 
éclos en septembre 1907. 


La chenille de Proto vit sur les PAlomis, plantes de la famille 
des Labiées, croissant dans les lieux stériles, secs et rocailleux du 
Midi de la France, de l'Espagne et de l'Algérie. Je crois que dans 
les environs de Sebdou, Pro1o mange les feuilles de la P#Alomis 
Lychnitis, sous-arbrisseau d’un aspect cotonneux blanchâtre, à 
fleurs jaunes. Les feuilles sont pubescentes en dessus, blanches 
tomenteuses en dessous, fortement nervées-réticulées, comme le dit 
très bien l'abbé Coste (Flore illustrée France, vol. III, p. 123). 


La chrysalide repose entre les feuilles, à l'extrémité des tiges, 
et elle est couverte d’une poussière blanche. M. H. Powell m'a 
envoyé des chrysalides, avec la plante dans laquelle elles se sont 
formées. 


Proto est une espèce très variable pour le dessous des ailes 
inférieures; tantôt les taches qui les décorent ressortent en ocre 
jaune pâle sur le fond blanchâtre des ailes, tantôt en rouge brique; 
ces taches sont de dimension variable. Le dessus des ailes est lui- 
même très variable; les taches blanches ordinaires sont parfois 
ochracées, et il semble que tout un lavis jaunâtre soit répandu sur 
toute la surface des ailes; de plus, les taches peuvent être réduites 
ou élargies. Proto se trouve en France aux environs de Marseille 
et de Montpellier; l’'Espèce est répandue en Syrie (Akbès et 
Berut-Dagh, au Taurus); en Espagne (Grenade, Sierra-Nevada, 
vallée de Ronda, Cordoue, en juillet; Carthagène, en Jjum; 
Madrid, d’où me l’envoyait jadis feu Aurelio Vazquez, habile 
chasseur, décédé le 5 janvier de cette année 1910, à Guadalajara) ; 
en Algérie (Vakouren, en juillet 1007; Djurjura, en juillet 1884; 
Alger, chemin des Aqueducs, en juin 1883; Sebdou, Terny et 


378 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Sidi-Vahia, en juin, juillet, septembre et octobre 1907; Tala-rana- 
Maillot, en juin 1900). 

Esper a grossièrement figuré, sous les n° 5 et 6 de la 
Tab. CXXIII, le Proto, primitivement décrit par Ochsenheimer, 
d’après un exemplaire du Portugal; Boisduval, dans l’/cones, n'a 
pas donné une excellente représentation de Proto; cependant 
l'Espèce est reconnaissable sous les n° 4 et 5 de la PI. 46; 
Duponchel n’a guère mieux réussi à figurer Proto sous les n° 7 et 8 
de la PI XLII du Supplément. Aux pages 262 et 263, Duponchel 
décrit Proto et donne, d’après Rambur, qui, le premier, avait 
trouvé la chenille aux environs de Montpellier, une histoire des 
premiers états concordant parfaitement avec les observations de 
M. Harold Powell. La chenille relie, avec des fils de soie, les 
feuilles du sommet de la P/Ælomis Lychnitis, et forme avec ces 
feuilles agglomérées un abri au milieu duquel elle se tient cachée, 
rongeant surtout l'extrémité de la jeune tige. C'est dans ces 
feuilles liées entre elles que la chenille opère sa transformation 
en chrysalide. Frever, sous le n° 5 de la Tab. 361, semble figurer 
avec le nom de Proto le dessous de Carcharodus bæticus et le 
dessus d’un Syrichthus qui est peut-être Proto. Les meilleures 
figures de Proto sont probablement celles de lIconographie de 
Huebner (n° 918, 010, 9020 et 921). Elles ne sont cependant pas 
la perfection. Quant à celles de Lang (figures 4 de la 
PI. LXXVIII), elles sont tout à fait mauvaises. La chromolitho- 
graphie économiquement pratiquée sur des dessins à la plume et 
au crayon n'arrive généralement pas à la finesse nécessaire pour 
représenter convenablement des Syrichthus. Le Rév. Henry- 
Charles Lang, auteur de l'ouvrage 7’%e Butterflies of Europe, 
« Vicar of All Saints Church », est mort le 20 décembre 1900, 
à l’âge de 59 ans. Sa collection de Lépidoptères paléarctiques 
avait été vendue, peu de temps avant sa mort, aux enchères 


publiques. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 379 


EE _— ————— " —  — — — .…" — ——"——.…—""—————————————…—…—….’…’.…_ ’_—…_—_ 


-  Syrichthus Mohammed, Obthr. 
(54 

Je possède 12 exemplaires que je compare à 05 Proto, près 
desquels ils se trouvent alignés dans la même boîte. Ce qui me 
fait considérer Mohammed comme une Espèce à part et différente 
de Proto, c'est le dessous des ailes inférieures. Chez Mohammed, 
les taches blanches du dessous des ailes inférieures sont porce- 
lanées, tandis qu’elles sont mates chez Proto. Les ailes de 
Mohammed, en dessus, ont les taches blanches plus divisées; ces 
taches sont alignées moins droit sur les ailes inférieures; de plus, 
le contour des mêmes ailes inférieures, chez Mohammed, est plus 
dentelé et profondément sinué, avec prolongement aigu des ner- 
vures sur la frange des quatre ailes qui est plus longue chez 
Mohammed. J'ai publié de bonnes figures de Mohammed dans 
la XII° livraison des £tudes d'Entomologie, sous les n* 23 a et 
23 d de la PL V. Je prie le Lecteur de vouloir bien s’y reporter. 
Je me demande pourquoi feu Staudinger prenait plaisir à affubler 
les noms propres d’un génitif; il a satisfait sa manie, en rectifiant 
Mohammed en Mohammedi. Mohammed est un nominatif qui ne 
comporte nullement la même déclinaison latine que le mot 
Dominus. Pour être conséquent avec lui-même, Staudinger aurait 
dû pourvoir d’une désinence indiquant le génitif tous les noms 
propres que Linné et les autres Auteurs ont employés au nomi- 
natif : Arion, Euphemus, Arcas, Cyllarus, Damon, Priamus, 
Hector, Æneas, Polymnestor, Apollo, Machaon, Podalirius, 
etc, etc. On objectera que Mohammed est un mot barbare; mais 
je demanderais si les noms suivants appliqués à des Æespéries 
américaines ne sont pas plus barbares encore : Iowa, Scudder; 
Delaware, Edwards: Hobomok, Harris; Ottoe, Edwards; Huron, 
Edwards: Orono, Scudder; Egeremet, Scudder ; Mystic, Scudder; 
Metacomet, Harris: Panoquin, Scudder, etc. etc. J'ai donné à un 
Syrichthus d'Algérie qui m’a paru nouveau le nom de Mohammed, 
comme j'ai donné à un autre le nom d’Ali, et ces noms resteront 
tels quels. Pourquoi Staudinger, tant qu'il y était, n'a-t-1l pas orné 


380 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


d’une désinence latine le nom arabe A/3 et formé le génitif A/, 
qu'il aurait fait dériver du nominatif As? Cela aurait bien 
valu Mohammedus, Mohammedi, etc. Mohammed (et non Moham- 
medi) a été pris à Sebdou, en mai et en octobre 1007; à Jambèse, 
en mai et en août; à Constantine, d’où feu Olivier m'a envoyé 
des exemplaires superbes. 

Le dessous des ailes inférieures varie pour l'interruption 
(fig. 23 a) ou la continuité sans interruption (fig. 23 &) de la 
bande blanchâtre médiane; mais ce genre de variation est commun 
à presque toutes les Espèces de Syrichthus. 


Syrichthns leuzeæ, Obthr. 


Figurée sous le n° 10:de la PI. IIT de la VIlhivraison des 
Etudes d'Entomologie et décrite à la page 60 du même ouvrage. 
Je ne puis qu'inviter le Lecteur à se reporter à ce que J'ai précé- 
demment écrit, relativement à Zeuzeæ. L'Espèce est très tranchée 
et ne peut être confondue avec aucune autre. Elle paraît rare. J'en 
possède en tout 6 exemplaires : le type, de Mascara (coll. Bois- 
duval); 1 © prise à Sebdou par le D' Codet; 3 G' capturés à 
Sebdou en mai 1007 par Harold Powell; 1 G pris par J. Merkl, 
dans le Djurjura, en juillet 1884. 

Le nom de ZLeuzeæ donné par Boisduval et que j'ai maintenu, 
dédié à Deleuze, naturaliste français, désigne une plante de la 
famille des Composées, à fleurs purpurines, appelée Leuzea cont- 
fera, D. C. Le genre Leuzea, très voisin du genre Centaurea, 
contient dans la Flore de H. Coste une seule Espèce qui croît sur 
les coteaux pierreux et les garrigues de la France méridionale, de 
l'Espagne, de l'Italie et de l'Algérie. 

Je ne crois pas que Boisduval ait connu la plante dont a pu 
se nourrir la chenille de son Syrichthus Leuzeæ,; mais par analogie 
avec les plantes sur lesquelles vivent ordinairement les Syrzchthus, 
Boisduval s’est servi du nom d’une Centaurée, préjugeant ainsi 
un état de choses qu'il ne connaissait probablement point. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 381 


Syrichthus Sidæ, Esper. 


Une des Espèces les plus faciles à distinguer dans le genre 
Syrichthus, à cause du dessous des ailes inférieures orné de deux 
larges bandes jaune d'or. J'ai pris Sz/æe, en mai 1895, dans 
l'Esterel, près Cannes, en compagnie de feu mon ami Alexandre 
Constant. J'ai trouvé Szdæ à Florence, en juin 1907. M. H. Powell 
m'a envoyé des exemplaires récoltés dans la forêt du Dom (Var), 
en mai 1906, et au mont Pacanaglia (Alpes-Maritimes), en juin 
1906. M. Gédéon Foulquier a recueilli Sz/æ dans le vallon de 
Saint-Pons (Bouches-du-Rhône), en juin; feu mon ami Emmanuel 
Martin avait rapporté d'Hyères (Var) des exemplaires nombreux 
et très beaux de Szde. M. Orazio Querci a trouvé Szdæ à Forma, 
dans la province de Caserta (Italie méridionale). Je possède 
l'espèce d’Akbès, de Tokat et de Broussa (Asie-Mineure); de 
Constantinople et de Russie méridionale. Huebner à donné, sous 
le n° 468, des figures meilleures que celle publiée par Esper sous 
le n° 3 de la Tab. XC. La Sida Abutilon, Linné (Abztuion 
Avicennæ, Gaertn.), est une Malvacée qui pousse sur le bord des 
champs et des fossés humides dans l’Europe méridionale et donne 
des fleurs jaunes. Szdæ a été découvert par le Hofrath Boeber, 
aux environs du Volga. 


= Syrichthus Carthami, Huebner. 


Encore une Espèce généralement facile à distinguer des autres 
par les deux faces de ses ailes inférieures, mais qui n'a Jamais 
encore été l’objet d’une excellente figuration. Je trouve cependant 
que les n° 720 et 723 de Huebner représentent assez bien Car- 
thami; mais les n° 721 et 722, quoique figurés avec le même nom 
de Carthami, ne me semblent pas pouvoir être considérés comme 
représentant cette Espèce. Rambur, dans la Faune de l'A ndalouste, 
1830, a représenté Carthami sous le n° 8 de la PI. 8; mais cette 
figure, peinte par lui-même, est mal réussie. La figure donnée par 


382 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Freyer sous le n° 3 de la Tab. 340 n'est pas très satisfaisante; 
celle du Supplément, par Duponchel (PL XLII fig. 3 et 4), ne 
me semble pas représenter le vrai Carthanu. Lang, sous les n° 9 
de la PI LXXVIII, n’a rien fait qui fût bien reconnaissable. Dès 
lors c'est encore aux n° 720 et 723 de Huebner qu'il convient de 
se reporter pour identiñer l’Espèce. Car/ham est cependant très 
variable, et bien qu'il soit relativement facile à discerner par son 
faciès un peu spécial, il faut apporter une grande attention dans 
l'examen des exemplaires pour ne commettre aucune faute de 
classification. 

Le nom de Carthami vient d’un Genre de plantes de la famille 
des Composées qui comprenait autrefois les Espèces : /anatus, 
Linné, à fleurs jaunes, et Cæruleus, Linné, à fleurs bleues. Dans 
le vol. IT de la Flore descriptive et illustrée de la France, par 
l'abbé Coste, le Genre Carthamus (page 398) a fait place au 
Genre Centrophyllum. Les Carthamus où Centrophyllum sont des 
plantes à feuilles pubescentes et épineuses, croissant dans les lieux 
incultes, au bord des chemins, dans les terrains calcaires; cæruleus 
est plus spécialement méridional que lanatus. J'ai réuni près de 
250 exemplaires de Syrichthus Carthami venant des localités 
suivantes : Samoussy (Aisne), juin 1909; Mende et Florac 
(Lozère), juillet; Gavarnie et Cauterets (Htes-Pyrénées), juillet; 
Angoulême, juin; Alpes-Maritimes, Isère et Basses-Alpes, juillet; 
Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales), mai, juin, juillet; Vichy; 
Paris; Châteaudun; Mont-Dore, en Auvergne; le Lioran et Gar- 
rabit (Cantal), juillet; Cassel (Allemagne); Hongrie; Valais; 
Madrid; Sierra-Nevada; Sierra-de-Alfakar (Espagne); Sarepta 
(Russie méridionale). Je n'ai jamais vu Carthami en Bretagne. 
Il n’a pas été trouvé en Angleterre, ni en Algérie. Dans le Valais 
(Viège; route du Simplon, depuis Brigue), on trouve la forme 
Valesiaca, Ruehl, caractérisée par la réduction des taches blanches 
sur les ailes inférieures et le fond plus noir des ailes; mais tous 
les exemplaires du Valais n’appartiennent pas à la variété 
Valesiaca. En Russie méridionale, à Sarepta, la variété Mæschleri, 
Herrich-Schaeffer (fig. 37 et 38 de la Tab. V Æesperides Europ.), 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 383 


semble remplacer le type. Les figures d'Herrich-Schaeffer sont 
très bonnes; mais il semble que les points orangés représentés sur 
le dessus des ailes inférieures (fig. 37) ne se montrent que 
rarement; car sur 15 individus de Sarepta contenus dans ma 
collection, 2 seulement présentent ces taches d’un fauve orangé 
clair situées entre les deux lignes de taches blanches des ailes 
inférieures. J'ai pris à Uriage (Isère), en juin 1895, la même 
variété Maæschleri dont les quatre ailes plus largement saupou- 
drées de blanchâtre, ont, en outre, les taches blanches plus déve- 
loppées, aux ailes inférieures notamment. Valesiaca et WMeschler 
sont les termes extrêmes de la variation, par albinisme d’un côté 
et mélanisme de l’autre, de Carthami. Mon frère a pris à 
Samoussy, le 13 juin 1900, une jolie Aberration de Cartamt ®, 
que j'appelle véfatus, chez laquelle la série extracellulaire et 
coudée des taches blanches des ailes supérieures, en dessus, est 
composée de macules extraordinairement grosses, formant une 
bande continue de taches étroitement contiguës et que divisent 
seulement, mais très finement, les nervures noires. Le dessous des 
ailes inférieures est également un peu aberrant. 

Rambur publie aux pages 65, 66, 67 et 68 du Catalogue systé- 
matique des Lépidopières de l'Andalousie, une description très 
détaillée de Carthami et je lis, au cours de cette description, les 
lignes suivantes : « Les individus recueillis dans la Sierra-Nevada 
diffèrent un peu de ceux de France, surtout par le dessous des 
ailes inférieures, dont le bord externe présente une nuance d’un 
roussâtre obscur, mais ne s'unissant pas complètement avec le 
dessin des ailes comme chez l’Alveus,; la tache de la massue des 
antennes est obscure ou noirâtre. Ils se rapprochent beaucoup de 
la variété de l’Alveus de la même localité, mais ils s’en distinguent 
nettement d’après les caractères énoncés, et surtout par les diffé- 
rences très grandes des parties génitales ». Mon frère a pris, en 
juillet 1870, 5 exemplaires de Carthami dans la Sierra-Nevada, 
côté de Lanjaron; je possède aussi l’exemplaire Q de 7Atere 
Andalusiens, étiqueté à tort Cynaræe. Dans Îles collections de 
Graslin et Boisduval, il y avait aussi des Carthami d'Andalousie. 


384 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


J'estime donc, d’après ces documents, que Rambur a fait une 
observation exacte à l'égard de Carthami andalous; aussi je 
distingue le Carthami de la Sierra-Nevada par le nom de Meva- 
densis qui lui convient autant que celui de Valesiacus est appro- 
prié à certains Carthami valaisans et celui de Mæschler: aux 
Carthami de Sarepta et à certains individus de France. 


Dans le but de bien fixer la nomenclature des Syrichthus, je 
fais figurer sur la PI. LV un C'et une Q Carthami pris à Angou- 
lème, par mon frère, les 4 et 5 juin 1906 (n° 475 et 478), une © 
Carthami-nevadensis (n° 474), prise en Juillet 1870, également 
par mon frère, dans la Sierra-Nevada; une © Carthami-Valesiacus 
(n° 476), capturée par moi-même à Viège en Valais, en juillet, et 
enfin le Œ Ab. : vittatus (n° 477), pris à Samoussy (Aisne), ainsi 
que Je le dis plus haut, le 13 juin 1900. 


Syrichthus Sao, Huebner. 


Les figures données par Huebner sous les n° 471 et 472 sont 
reconnaissables parce que l’Espèce est relativement très tranchée; 
mais elles sont loin de pouvoir compter parmi les meilleures de 

l'Iconographie de Huebner. 

__ Sao manque en Angleterre. Je ne l’ai jamais trouvé en Bre- 
tagne. Il n’est point rare dans les localités suivantes d’où Je le 
possède authentiquement, et sans doute dans bien d’autres où Je 
n’ai pas eu l’occasion de le rechercher : Vernet-les-Bains (Pyrénées- 
Orientales), en mai, juillet et août; Villeneuve-de-Blaye (Gironde); 
Cauterets et Gavarnie (Hautes-Pyrénées), en juillet; Basses- 
Alpes; Alpes-Maritimes; Bouches-du-Rhône; Charente; Lozère; 
Savoie; Var; Gers; forêt de Carnelles (Seine-et-Oise); Isère; 
Hongrie; Valais; Schwalbach; Castille; Andalousie, où nous 
l'avons pris en mai et en Juillet. 

Sao varie beaucoup pour le dessous des ailes inférieures, géné- 
ralement rouge, mais pouvant être ocre jaune, et présenter un 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 385 


développement plus ou moins grand des taches blanches. D'ail- 
leurs, sur le dessus des ailes dont le fond est d’un brun noir un 
peu bronzé, les taches blanches varient beaucoup pour leur degré 
d’accentuation. J'ai réuni plus de 200 individus de France. J'ai 
obtenu quelques intéressantes variations ; mais tous les exemplaires 
sont faciles à identifier et il n'y a aucune difficulté pour leur 
détermination. 

On trouve en Corse une petite race géographique à taches des 
ailes supérieures toujours jaunes, au lieu d’être blanches comme 
sur le continent européen. Cette race a été longtemps considérée 
comme Espèce distincte, ainsi que Z'igelius et Corinna. En fait, 
au sens qui est attribué actuellement au mot Æspèce, le Syrichthus 
T'herapne, Rambur, de l'ile de Corse, peut être considéré par bien 
des Entomologistes comme étant Espèce valable. Il en est de 
même de la race algérienne et marocaine que J'ai appelée AZ et 
dont il y a deux formes, l’une à taches blanches et l’autre à taches 
jaunes, et de taille plus petite, que je désigne sous le nom de 
Therapnoides (PI. LIV; fig. n° 448). Le Syrichthus Al a été 
trouvé à Lambèse, à Sebdou, à Constantine, en mai, 7 Lerapnoides 
vole en juillet et août à Khenchela, à Sebdou et à Zebch, près 
Sebdou. Il m'a été aussi envoyé de Tumisie par M. Faroult, et 
mon frère l’a pris en juin à Tetuan. 

Chez 7'erapnoides, le dessous des ailes inférieures est généra- 
lement moins chargé de rouge brique et les taches du dessus sont 
d’un jaune moins foncé que dans Z'.erapne, de Corse. Ce dernier 
a aussi le fond des ailes plutôt brun que noir, ce qui est le contraire 
chez 7’ herapnoïdes. Je crois que 7'Lerapnoïdes est la forme estivale 
et Az la forme vernale de la race algérienne de Sao. Dans aucune 
partie de la Barbarie, on n’a trouvé jusqu'ici la forme européenne 
de Sao. 

La chenille vit sur le framboisier, la potentille et le fraisier 
sauvage. 

Herrich-Schaeffer a donné de 7 Lerapne, sous les n° 16 et 17 
de la Tab. 3 des Æesperides Europ., une représentation inexacte, 
au moins quant à la couleur des taches du dessus des ailes. Dans 


29 


386 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


l’'exemplaire de ma bibliothèque, les taches en question sont 
restées blanches, tandis qu’elles devraient être d’un jaune accentué. 
La figure donnée par Duponchel, sous les n° 9 et 10 de la 
PI. XLII du Supplément, pêche par l'excès opposé. 


Sytrichthus Fritillum, Huebner. 


Le Æritillum figuré par Huebner, sous les n°° 464 et 465, paraït 
être une Espèce fort peu connue. Car, 1l y a peu de temps encore, 
M. le docteur Reverdin, professeur à l'Université et président de 
la Société lépidoptérologique de Genève, s'intéressant à la question 
des Syrichthus, demandait en vain qu’on le mit à même de faire 
la connaissance en nature de }ritiilum; il ne pouvait trouver de 
correspondant qui fût à même de lui envoyer l’Espèce Je crois 
avoir été seul assez heureux pour le satisfaire, et me trouvant à 
Vernet-les-Bains, au printemps de 1900, je capturai à son intention 
quelques exemplaires qu'il put recevoir frais. Je sais que le 
D' Reverdin s'est livré à une savante étude comparative des 
genitalia de Fritillum et je partagerai bientôt, je l'espère, avec 
beaucoup d’autres Lépidoptéristes, le plaisir de lire le résultat des 
observations, toujours si consciencieusement réalisées et exposées 
d’une façon si instructive par l'honorable Président. 

Le Syrichthus Fritillum n'est pas une espèce commune, quoi 
qu'en dise Rambur qui, aux pages 74, 75 et 76 du Catalogue 
systématique des Lépidoptères de l'Andaloustie, décrit Fritillum 
très en détail, après avoir, quelques années plus tôt, figuré le 
dessous des ailes, sous le n° 14 de la PL 8 de la Faune de 
l'Andalouste. 

La question n’est du reste pas très simple à résoudre; car on 
trouve dans les Pyrénées-Orientales deux Espèces de Syrzchthus, 
l'une assez rapprochée de walvæ (Alveolus), que j'ai appelée 
fritillans, et l'autre beaucoup plus éloignée. Cette dernière est 
relativement grande, comme celle dont Huebner donne la repré- 
sentation; en dessus, la Q est obscure, toujours comme # ritillum, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 387 


fig. 464, de Huebner; en dessous, le fond des ailes supérieures 
est noirâtre et les ailes inférieures sont rouges, avec de faibles 
éclaircies blanches. 

Le Syrichthus qui répond à ce signalement se rencontre, tou- 
jours par exemplaires isolés, au printemps, puis en été, depuis 
Villefranche-de-Conflent jusqu'un peu au-dessus du village de 
Casteil. Il a le vol rapide; on le voit sur les chemins; 1l aime à 
se reposer un moment sur la terre humide; il affectionne aussi 
les réserves de fumier déposées dans les jardins et les champs. 
Je ne crois pas qu'il s'élève très haut dans la montagne. 

Fritillum est donc rare; car mon frère et moi, dans toutes les 
chasses que nous avons faites depuis tant d'années aux environs 
de Vernet-les-Bains, nous n’avons guère réussi à en capturer plus 
de 35 exemplaires, dont 27, en excellent état de conservation et 
de fraîcheur, sont encore dans ma collection. Æ72/1llum éclôt une 
première fois au mois de mai, une seconde fois en Juillet et août. 
Il paraît être bien plus abondant en été qu’au printemps. 

Fritillum est généralement plus grand que #alve ; il a un faciès 
très différent. Les taches blanches des ailes supérieures, en dessus, 
sont chez le Œ plus grosses que dans #alvæ; mais elles n'ont 
pas de tendance à s’élargir comme dans walve-Taras et celles des 
inférieures sont fréquemment très atténuées, surtout chez les ©. 
Le dessous des ailes supérieures a le milieu noirâtre; la côte et 
le bord extérieur sont de couleur blanchâtre ou ocre rouge. Le 
dessous des inférieures est d’un rouge brique, avec les dessins 
blancs ou Jaunâtres assez réduits, surtout le long du bord externe 
des ailes de la ©. Le bord abdominal est blanchâtre ou rou- 
geatre dans 25 exemplaires, mais grisâtre chez 2 ©, notamment 
chez celui que je fais figurer sous le n° 455 de la PL LIV, en 
même temps que 6 autres spécimens, afin de donner une idée très 
exacte et complète de l’Espèce. 

La série médiane des taches blanches, interrompue dans la 
figure 465 de Huebner, non interrompue dans la figure 14 de 
Rambur, est, d’après la description de Rambur et selon mes 
observations personnelles, presque toujours continue chez /'r##11- 


388 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


lum de Vernet, ainsi qu’on peut le constater chez 4 des Fr2/llum 
dont je fais représenter le dessous dans le présent ouvrage. La 
série des taches médianes du dessous des ailes inférieures n'est 
interrompue, conformément à la figure 465 donnée par Huebner, 
que chez le G' représenté sous le n° 455 dans le présent ouvrage. 
Il paraît que les parties génitales de Æ724llum sont très différentes 
des autres espèces de Syrichthus. Rambur en donne l'explication 
à la page 75 du Catalogue systématique. 

Jamais je n’ai vu de Syrichthus Fritillum en dehors des exem- 
plaires pris par mon frère et par moi dans les Pyrénées. Ni lui, 
ni moi, nous n'avons trouvé l’Espèce en Andalousie, comme cela 
est arrivé à Rambur, ni dans aucune autre partie du Midi de la 
France que nous ayons visitée en outre des Pyrénées. Les collec- 
tions françaises Boisduval, Guenée, de Graslin, Bellier de la 
Chavignerie que je possède, ne renfermaient pas Ære1llum. La 
collection allemande Kuvert, que je possède également, ne con- 
tenait point cette Espèce. 

Je me demande pourquoi Rambur a teinté avec la même couleur 
brune qui recouvre le fond des ailes, tout le bord anal de l'aile 
inférieure de lritillum qu'il figure sous le n° 14 de la PI. 8, alors 
que le même Rambur, à la page 77 du Catalogue systématique, 
dit que Alveolus est distingué de Fritillum « par la couleur, en 
grande partie noirâtre, du bord abdominal », ce qui indique évi- 
demment que, d’après l'observation de Rambur, le bord abdominal 
de Fririllum ne peut être noirâtre comme celui d’'Alveolus (malve), 
dont il est, pour ce détail, différent. 

Sur la PI. LIV du présent ouvrage, j'ai fait figurer, du n° 440 
au n° 455 inclus, 7 Fritillum, tous pris dans les Pyrénées-Orien- 
tales, aux environs de Vernet-les-Bains. Les n° 440 et 450 repré- 
sentent le G' et la ©, en dessus, d’après des exemplaires pris en 
juillet et août; les n° 451 et 452 représentent le O' et la ©, en 
dessous, également d’après des spécimens pris en été; les n°° 453, 
454 et 455 sont la figuration, en dessous, d'individus graduel- 
lement plus clairs, de façon à donner une idée complète de l’aire 
de variation dans laquelle se meut l’Espèce : Fr2411lum, du moins 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 380 


pour ce que je connais. Les n°° 453 et 454 ont été récoltés en été; 
le n° 455 a été capturé par moi-même au printemps 1000. 

Je n'ai pas hésité à faire figurer ce C' 455; il a, comme Je le 
dis plus haut, le bord anal des ailes inférieures gris et non blan- 
châtre, ainsi que les autres /r4#1llum; je crois cependant que c’est 
un /‘rohillum; mais je ne me dissimule nullement que cet exem- 
plaire peut paraître discutable, surtout comparé aux walvæ-fritil- 
lans, c'est-à-dire ayant le dessous des ailes inférieures rouge, figurés 
sous les n° 461 et 462, de Vernet-les-Bains. [Il eût été simple de 
supprimer la figuration de ce spécimen 455 intermédiaire et 
embarrassant; la discussion eût gagné en clarté et l’unité spéci- 
fique de Æritillum eût été mise en lumière, sans contestation 
possible. Mais pour moi, il y a un intérêt suprême qui m'est plus 
cher que tout : la vérité Dès lors, confiant dans le talent de 
M. J. Culot pour rendre exactement la figuration des papillons 
que je lui remets, je n'hésite pas à exposer à mes chers confrères 
en Entomologie la question telle que je la vois, avec ses incerti- 
tudes et ses Zoutances. Il est bon de ne pas perdre de vue que ce 
Fritillum 455 a été récolté en mai, tandis que tous les autres ont 
été recueillis en août. Je possède un seul autre Æritillum de 
l'éclosion de printemps. Je l’ai pris en mai ou au commencement 
de juin de 1900. Il est pareil à l’exemplaire 455, c’est-à-dire qu'il 
a le bord anal des ailes inférieures gris en dessous, et non 
blanchâtre; mais 1] n’a pas la bande médiane maculaire blanche 
interrompue, comme cela se remarque dans le n° 455; sous ce 
rapport, 1l est semblable au n° 454 C'est pourtant bien un 
Fritillum; le dessus de ses ailes avec les taches blanches des 
supérieures plus grosses que chez walvæ et les inférieures bien 
pareilles au n° 449, c’est-à-dire avec une partie plus noire que le 
fond, au delà de la tache blanche discoïdale (ce qui a lieu aussi 
chez le n° 455), plaident pour l'attribution de ce spécimen vernal 
à Fritillum plutôt qu'a walvæe (Alveolus). Alors la race vernale 
et la race estivale de Fritillum différeraient par la couleur du 
bord anal des ailes inférieures, en dessous. Je regrette de n'avoir 
pas pu réunir une documentation plus abondante. Cela tient à la 


300 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


rareté de }ritillum et aussi à la vivacité de son vol. On laisse 
échapper un certain nombre d'exemplaires qui disparaissent 
presque aussitôt qu’on les a aperçus. Il y a du reste longtemps 
que J'ai remarqué à Vernet-les-Bains ce Syrichthus spécial, et j'ai 
recherché les Syrickthus, avec la plus grande attention, partout 
où J'ai chassé, capturant toujours le plus grand nombre d'individus 
que je pouvais, et ne perdant pas la préoccupation de Fritillum. 
Je ne l'ai pas en vain recherché dans les Hautes-Pyrénées, où 
j'espérais bien le rencontrer; mais je n'ai réussi à y prendre qu’un 
seul exemplaire, un peu usé par le vol, aux environs de Cauterets, 
en Juillet 1005. 


, _Syrichthus malvæ, Linné. 

Je fais figurer 14 exemplaires sous les n°* 456 à 460 inclus 
de la PI LIV de ce livre, afin de faciliter la connaissance de 
l'Espèce et de ses variétés. 

Linné, dans le Systema Nature, Edit. X, 1760, décrit malve 
comme suit : « P. P. alis denticulatis nigris albo maculatis. » 
Il cite entre autres, à l'appui de sa description, la figure 7 donnée 
par Roesel (Cassis 11 Papilionum diurnorum; Tab. X; Vol. D). 
Le dessus seulement est représenté, par Roesel, plus grand que 
nature; mais à part cette circonstance, le papillon paraît exac- 
tement dessiné et spécifiquement reconnaissable. 

Barrett, sur la PL. 37 de son ouvrage : 74e Lepidoptera of the 
British Islands, donne plusieurs figures du Syrichthus malve 
qu'il appelle Alveolus, nom avec lequel Huebner le figure sous 
les n° 466 et 467 de son Iconographie. Barrett ne représente pas 
le dessous de la forme normale anglaise, mais seulement le 
dessous d’une Aberration plus claire, sous la figure 1 4. Le 
dessous de la © figurée par Huebner, sous le n° 467, représente 
un individu exceptionnellement grand, avec le fond des ailes 
inférieures d’un brun obscur. Rambur, sous le n° 15 de la PI 8 
de la Faune de l’'Andalousie, 1830, donne la figure du dessous 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 301 


d'Alveolus, avec le fond des ailes inférieures brun notrâtre, non 
rougeâtre; la description d’A/veolus, imprimée aux pages 7O1eti77 
du Catal. systématique, 1858, mentionne : « le dessous des ailes 
inférieures variable pour la couleur du fond qui est toujours 
assez foncée et même noirâtre, mais ordinairement d’un brun 
olivâtre, un peu jaunâtre, sur lequel tranchent les taches, lignes 
et points blancs jaunâtres et toujours d’une manière assez vive ». 
De son côté, Barrett définit la couleur du dessous des ailes infé- 
rieures d’Alveolus, à la page 268 du Vol. I, comme suit : « Of 
hind wings dark ochreous tinged with grey or clouded with 
olive-grey; with spots as on the upper side, but much larger; 
and with two or three additional small spots near the base ». 
Freyer, sous les n° 2 et 3 de la Tab. 361, figure Alveolus avec 
sa variété Taras que Huebner représente également sous le n° 507. 
J'en parlerai bientôt. Je signale pour le moment le dessous des 
ailes inférieures d'Alveolus, selon Freyer (Tab. 361; fig. 2), 
représenté d’un gris olivâtre. Dans la description, je lis (p. 127) 
« Die Unterseite ist graugelb mit veissen Flecken und Punkten 
und sehr hellen weissgelben Adern auf den Hinterfluegeln. » 
Dans Berliner ent. Zeits. 1886, Bd. XXX, Johannes Schilde, 
de Bautzen, a fait paraître un article intitulé : Berrachtungen 
ueber die Variabilitaet in der Schmetterlings-Gattung Pyrgus. 
Plusieurs figures en noir ont paru sur la Taf. IT et Îa Notice 
occupe les pages 30 à 62. Schilde figure d’une manière très 
agrandie, sous les n°® 8 et 10, une paire d’ailes en dessus et en 
dessous de malve, et sous les n° 7 et Oo, les ailes en dessus et 
en dessous de l’Aberration T'aras. Les figures semblent bonnes 
et doivent rendre assez exactement les papillons pris pour modèle. 


Le Syrichthus malvæ est une espèce de plaine et de montagne; 
en Bretagne, il éclôt en mai, et il n’est pas rare dans les allées 
des bois, les landes, les pâtures et les jachères où il y a de l’herbe 
rase; je ne l’ai jamais trouvé en août. On dit cependant qu'il a 
parfois une seconde éclosion estivale, en Angleterre; mais J'ai 


302 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


lieu de croire que cette seconde éclosion y est fort peu abondante; 
en tout cas, en Bretagne, elle est nulle. Autrement, je l’y aurais 
certainement constatée. J'ai pris #alvæ en juin, dans les parties 
élevées des Alpes-Maritimes et de l’Isère où je l'ai rencontré à 
plus de 2,000 mètres d’altitude. Dans les Hautes-Pyrénées, je l’ai 
recueilli à la fin de juin et au commencement de juillet; dans les 
Pyrénées-Orientales, nous avons trouvé #alvæ au printemps et 
en été. 

J'ai observé des variations locales intéressantes; mais je crois 
d’abord utile de donner la nomenclature des localités d’où pro- 
viennent authentiquement les Syrichthus malvæe de ma collection : 
Angleterre (collection Prest, d’Vork); Paris (coll Bellier); 
Rennes, en mai; Ryffelalp, en juillet; Besançon; Chamounix, en 
juillet; Aix-les-Bains et Mont-Revard, en juin; Lectoure (Gers), 
au printemps; forêt du Dom (Var), en mai; Uriage (Isère), en 
juin; Alpes-Maritimes, dans les hauteurs de Saint-Martin-de- 
Vésubie, en juin; Fusio (Tessin), en juillet; Lautaret (Hautes- 
Alpes), en juillet; Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales), en mai 
et Juin, puis en juillet et août; Cauterets (Hautes-Pyrénées), en 
juillet; Biarritz, en juillet; Digne, en mars, avril et mai; lande 
de Caden (Morbihan), en mai; Grèce; Sicile (Bellier); Kassel 
(coll. Kuwert); Fort-Naryne (Turkestan oriental); Tokat (Asie- 
Mineure); lac de Come (Italie), en juin; La Granja (Espagne 
centrale), en juin; Zumarraga et Alsasua (Espagne du Nord), 
en juin; Moscou (Russie centrale), au mois de mai. 

En Angleterre, en Bretagne, à Paris, le dessous des ailes infé- 
rieures est teinté de brun un peu olivâtre, sur lequel ressortent 
vivement non seulement les taches et points blancs, mais encore 
les nervures qui sont plus claires. Les exemplaires de la lande de 
Caden, figurés sous les n°% 466 et 467, représentent la forme 
normale anglaise et française. Le n° 465 est la figuration d’un © 
que J'ai pris au Mont-Revard, en Savoie, au printemps 1006, et 
le n° 464 donne l’image d’une Aberration d' que j'ai prise à 
Cauterets, à la fin de juin 1800, et qui, par son semis de points 
blancs, le long du bord externe des ailes inférieures, en dessus, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 303 


rappelle l’Aberration de Side figurée par Herrich-Schaeffer, sous 
le n° 31 de la Tab. 6 des Æesperides Eurog. 

Une race différente est celle d'Alsasua (O, en dessus, n° 458, 
et O, en dessous, n° 459). Cette race d’Alsasua, comme celle de 
Cauterets (Q, en dessous, n° 460), diffère de la race de l’Angle- 
terre et du Nord de la France par la couleur plus rougeâtre du 
dessous des ailes inférieures et le développement de la couleur 
brune au détriment des taches blanches, particularité qui se 
remarque sur le n° 465 du Mont-Revard, mais sans que la couleur 
du fond des ailes de ce dernier incline vers le rougeâtre, ainsi 
que cela a lieu chez les n° 458, 459 et 460. La race de Vernet- 
les-Bains, dont j'ai déjà parlé dans la notice relative à Fritillum, 
a quelquefois le dessous des ailes plus rouge encore, et cette 
couleur rouge, moins envahissante, laisse les parties blanches plus 
larges que dans la forme d’Alsasua et de Cauterets. Les n°* 461, 
462 et 463 représentent, en dessous et en dessus, le Syrichthus 
malve-fritillans de Vernet-les-Bains où il vole ordinairement au 
printemps, depuis le mois de mai jusqu'aux premiers Jours de 
juin; mais #alve a aussi à Vernet-les-Bains une éclosion d'été, 
et contrairement à ce que j'ai observé à Rennes où jamais je n’ai 
vu zalve en juillet et août, nous l’avons maintes fois capturé en 
été dans les Pyrénées-Orientales. 

Cette forme #ririllans, à dessous des ailes inférieures rouge, de 
Vernet-les-Bains, est facile à confondre avec certains exemplaires 
de Fritillum; en effet, il y a vraiment peu de différence entre le 
dessous des ailes de #alve ©, n° 462, que j'ai prise au cours de 
mes chasses depuis la fin de mai jusqu’au commencement de 
juin 1000, et le n° 454 qui est un Æritillum G' capturé par mon 
frère à Vernet, en juillet 1894. Mais le n° 454 a le bord anal des 
ailes inférieures blanchâtre, et chez le n° 462, cette partie des ailes 
est couverte d’un semis d’atomes noirs qui lui donnent un aspect 
cris foncé. 

Les #alve, à Vernet-les-Bains, ne sont pas très communs; nous 
en avons pris en tout une trentaine d'exemplaires; pas un n’inclme 
vers l'Ab. Z'aras; quelques-uns sont analogues aux n° 458, 459 


304 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


et 460, et il y en a d’autres en très petit nombre, comme les 
n® 461 et 462. La Q malve n° 463 de Vernet-les-Bains, repré- 
sentée en dessus, a le dessous un peu moins rouge que les #alvæ- 
fritillans 461 et 462 qui sont très caractérisés. En Grèce, le dessous 
est gris ohvâtre et les taches blanches sont très réduites: la taille 
est plus grande. J'ai fait représenter une grande © en dessus, 
sous le n° 468, et sous le n° 460 un € en dessous de cette forme 
£LT@CA. 

L’Aberration T'aras n’est pas très rare dans certaines localités; 
nous la trouvons assez fréquemment à Rennes; le n° 456 a été 
pris par nous à Mesneuf, en Bourgbarré, près Rennes, en mai 1882, 
et le n° 457, intermedia, vient aussi des environs de Rennes où 
nous l’avons capturé au printemps de 1006. 

Par ailleurs, ma collection contient 6 intermedia de Rennes, 
2 d'Angleterre et 19 Ab. Taras de Rennes, d'Angleterre, de 
Besançon, de Sologne, du Mont-Revard, en Savoie, de la lande 
de Caden et de Châteaudun. Cette Aberration 7'aras a d’abord 
été nommée et figurée par Bergstraesser sous les n° 5 et 6 de la 
Tab. o1 de Nomenclatur und Beschreibung der Insecten in der 
Grafschaft Hanau-Miünzenbers, etc. L’Aberration Zaras n'est pas 
seulement remarquable par le dessus de ses ailes; le dessous des 
inférieures est lui-même très intéressant à cause de la confluence 


envahissante de la couleur brune du fond. 


De toute cette étude, il résulte qu'à Vernet-les-Bains on trouve 
des Fritillum très distincts et très caractérisés, tels les n° 451, 
452, 453 de la PI. LIV ; d’autres qui sont ambigus, tel le n° 455, 
et des #alve-fritillans ayant un air de Fritillum, surtout à cause 
de la couleur rouge du dessous des ailes inférieures; mais ces 
malvæ-fritillans se lient si intimement à d’autres malve indis- 
cutables qu’il ne semble pas possible de les coasidérer autrement 


que comme une variété de coloration de #alve. 


Je pense que le Syrichthus appelé par moi Fritillum est bien 
conforme spécifiquement au #ri#illum de Rambur, venant d’An- 


| 7 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 305 


dalousie et de France méridionale; mais le Æritillum de Rambur 
est-il le même que le Frifillum de Huebner et dès lors ce que Je 
considère comme Ær1#illum, Huebner (n° 440, 450, 451, 452, 453, 
454, 435 de la PI LIV), est-ce exactement identiñé? J'ignore 
d’ailleurs la patrie du Fritillum, nommé et représenté par 
Huebner, ce qui serait très essentiel pour bien l’apprécier, et Je 
sais que les avis sont très partagés sur ce que peut être Ær1/lum. 
Ainsi Johannes Schilde écrit (Berliner Entom. Zeitschrift, KXX, 
1886, p. 30) : « Was Hr. Pf. Fuchs mir davon ueberliess war 
P. Fritillum, fast genau in der Form wie H. Sch. Fig. 33, 34. 
Cirsii abbildet. » J'ai sous les yeux les fig. 33 et 34 dans lesquelles 
Herrich-Schaeffer (Wesperides Europ., Tab. 6) représente Corsu, 
avec les dessins du dessous des ailes brun et non rouge, la ligne 
médiane blanche continue et non interrompue comme dans la 
fig. 465 de Huebner. Je compare les figures initiales 464, 465 de 
Huebner aux figures 33 et 34 d'Herrich-Schaeffer. Il est vrai 
que Huebner représente la © et Herrich-Schaeffer représente le ©; 
mais, à mon sens, la tache blanche près la base des ailes infé- 
rieures, en dessous, chez Cirsii 34, suffit à rendre impossible toute 
identification spécifique avec Fritillum, Huebner, 465, qui, au lieu 
d’une tache blanche longue, séparée de la base par un espace brun, 
montre tout près de la base, dans chaque espace intranervural, 
des taches blanches en forme de larme. Il n’y a aucune similitude 
entre les ailes inférieures de ces deux papillons. Or le Pfarrer Fuchs 
et Schilde étaient presque des spécialistes pour l'étude des Hespé- 
rides d'Europe. Dans ces conditions, l'accord relatif à Æritillum 
n'est pas encore fait. Quoi qu’il en soit, je me suis efforcé de 
mettre sous les yeux du Lecteur toutes les pièces de la procédure. 
Il pourra consulter les Auteurs que j'ai cités, examiner aussi les 
figures que je publie, et surtout étudier le grand livre de la Nature. 
Il est toujours ouvert et à la disposition de tout le monde. Chaque 
année, Æritillum naît de nouveau à Vernet-les-Bains, et sans doute 
dans bien d’autres lieux que je ne soupçonne pas. J'ai dit le peu 
que je sais. À d’autres d'ajouter à nos connaissances des faits 
nouveaux et d'élever comparativement, si possible, une ponte de 


396 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


ce que j'appelle Fritillum et de malve, à ailes inférieures rouges, 
en dessous, que J'ai distingué sous le nom de Ær#1llans. Je me 
flatte tout au moins — et c’est à l’honneur de M. Culot — que 
les figures du présent ouvrage seront trouvées assez exactes pour 
qu'il soit toujours aisé de savoir avec certitude et précision sur 
quels papillons j'ai disserté. 

La chenille du Syrichthus malvæ vit sur le framboisier (Lubus 
dœus), le fraisier des bois (Fragaria vesca), plante sur laquelle 
nous l'avons élevée, la Æragaria sterilis et la quintefeuille (Poten- 
tlla reptans), toutes de la famille des Rosacées. 

J'ai fait figurer sous le n° 238 de la PI XXXVII de cet ouvrage 
une curieuse Aberration albine chez laquelle le fond des ailes et 
le corps sont d’un gris très pâle, au lieu d’être d’un brun noirâtre 
foncé. Cette Aberration peut atteindre toutes les Espèces de 
Syrichthus. 


Syrichthus cacaliæ, Rambur. 


Figuré par Rambur sous les n° 6 et 7 de la PI. 8 de la Faune 
de l’'Andalouste, 1830, et décrit par le même auteur, avec le nom 
de Scelotrix cacalie, à la page 77 du Catal. systématique des 
Lépid. de l'Andalousie, 1858. C'est bien cacalie que Boisduval a 
figuré dans l’/cones, avec le nom d’Alveus, sous les n° 1, 2 et 3 
de la PI. 46. Herrich-Schaeffer a donné d'excellentes figures de 
cacaliæ sous les n°% 23, 24 et 25 de la Tab. 4 des Æesperides 
Europ. C'est une Espèce très reconnaissable par sa teinte semblant 
grisâtre, à cause de sa villosité plus accentuée que chez les autres 
espèces; par la réduction de la taille des taches blanches aux 
ailes supérieures, en dessus; par l'absence totale de taches 
blanches sur le dessus des ailes inférieures, et par les dessins des 
ailes, en dessous, qui sont pâles, un peu nébuleux, comme dit 
Rambur, sur un fond gris, aux supérieures, et d’un ocre verdâtre, 
sur le fond blanc des inférieures. La Cacalia alpina est une 
plante vivace de la famille des Composées, à feuilles un peu 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 307 


épaisses, vertes et glabres, profondément et régulièrement den- 
tées, ayant des capitules de fleurs purpurines en corymbe terminal 
(Abbé Coste, Ælore France, I, p. 285). C'est une plante qui croît 
dans les rochers des montagnes. 

J'ignore si la chenille de Syrichthus cacaliæ vit sur la plante 
à laquelle le Lépidoptère doit son nom. J'ai capturé fréquemment 
le Syrichthus cacalie sur les pelouses de Ryffelalp où 1l vole en 
juillet et aime à se reposer sur les fleurs de Szene acaulis. 
M. Harold Powell l’a trouvé au lac d’Allos, du 21 au 27 juillet 
1906; au Mont-Pelat, le 27 juillet 1906, dans les Basses-Alpes. 
Bellier l’avait pris à Larche. Le Get la Q ont les ailes semblables. 

En France, il n’est pas à ma connaissance que le Syrichthus 
cacalie ait été trouvé jusqu'ici ailleurs que dans les hautes mon- 
tagnes des Alpes. Je n'ai jamais vu un seul exemplaire de 
cacaliæ provenant authentiquement des Pyrénées. Je suis obligé, 
dans le présent ouvrage, de tenir compte des erreurs de déter- 
mination faciles à commettre, surtout lorsqu'il s’agit d'espèces 
souvent litigieuses et susceptibles d’être confondues entre elles; 
l'expérience m'ayant appris qu'il était très dangereux de s'en 


rapporter à la plupart des catalogues locaux. 


Je ne suspecte cependant la bonne foi de personne et je prie 
mes Lecteurs de vouloir bien observer que, tenant essentiellement 
à écrire des observations exactes, je me borne, dans le présent 
ouvrage, à ne citer que les faits dont je me trouve absolument 
certain. Je ne prétends donc ni nier, ni même mettre en doute les 
assertions et les affirmations diverses émanant de plusieurs Ento- 
mologistes qui ont relaté des faits que j'ignore. Mais je tiens à 
faire une œuvre vraie, en vue de préparer l'établissement d'une 
Faune lépidoptérologique française et algérienne plus complète 
et réellement exacte; alors je m’abstiens de parler de ce que je 
ne connais pas. 

C'est ainsi que l’un des plus habiles et ardents chasseurs de 
Papillons de l'époque contemporaine, M"° de la Bâtie Nicholl, 
m'a écrit qu’elle avait trouvé le Syrichthus Andromede dans les 


ES 


LENS 


(a 
> à 


308 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Hautes-Pyrénées. En ce qui me concerne, je n'ai jamais vu 
d'exemplaires pyrénéens; J'ai pris l’'Espèce dans l’Oberland ber- 
nois, à la fin de juin 1808; mais Je ne crois même pas qu'on l'ait 
authentiquement rencontrée jusqu'ici dans les Alpes françaises. 
Il ne s’en suit pourtant nullement que le Syrichthus Andromede 
ne puisse pas être une Espèce pyrénéenne, ainsi que M”*° de la 
Bâtie Nicholl en parait convaincue. Quoi qu'il en soit, je m'abs- 
tiens de disserter sur l'Espèce en question, me trouvant privé des 
documents nécessaires pour apprécier les caractères de la race 
pyrénéenne et dès lors impuissant à émettre une opinion quel- 
conque à son endroit. 


Syrichthus serratulæ, Rambur. 


Les Serratula ou Sarrettes (du latin : serra, scie, par allusion 
aux dentelures des feuilles) sont des plantes de la famille des 
Composées, dont l’abbé H. Coste relate trois Espèces dans la 
Flore descriptive et illustrée de la France : tinctoria, à aigrette 
roussâtre et à fleurs purpurines, répandue dans les prés, les bois, 
les landes de toute la France et donnant, dans les montagnes, une 
variété monticola; heterophylla, plante vivace à fleurs purpurines, 
croissant dans les prairies des Hautes-Alpes et des Alpes-Mari- 
times; #xdicaulis, dont la fleur ressemble à celle d’Leterophylla, 
répandue dans les prairies des montagnes. C'est ce genre de 
plantes que Rambur a envisagé pour distinguer, par le nom que 
lui ont donné les Botanistes, le Syrichthus qu'il a figuré sous le 
n° Oo de la PI. 8 de la Faune de l'Andaloustie, 1830. 

Cependant, d’après Wheeler, dans l'ouvrage qu'il a publié à 
Londres, en 1903, et qui paraît bien documenté, intitulé : 7 Ze 
Butterflies of Switzerland and the Alps of Central Europe, le 
Syrichthus serratule, Rambur, vivrait à l’état de chenille sur Azra 
montana et Potentilla frigida, de même qu'Alveus, selon Emile 
Favre. Les Azra (du grec : aira, ivraie) sont des Graminées; la 
montana, placée par H. Coste dans le genre Avewa, est une plante 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 399 


vivace qui est répandue sur les pelouses rocalleuses des hautes 
montagnes, dans les Alpes, les Cévennes, l'Auvergne, les Pyrénées. 
Les Pontentilla sont des Rosacées et la frigida est une plante 
vivace, d’un vert sombre, très velue, un peu visqueuse, a petites 
fleurs jaunes, croissant dans les pâturages rocheux des hautes 
montagnes. | 

Comme la forme type de serratulæ n'habite pas seulement à de 
grandes altitudes, mais, d’après les documents de ma collection, 
se trouve aussi dans des parties peu élevées et même dans des 
plaines, ainsi : à Lectoure (Gers), à Charroux (Vienne), en 
Vendée, à Cauterets et à Gavarnie, à Vernet-les-Bains, à Aix 
(Savoie), à Lanslebourg (Haute-Savoie), dans les Alpes-Mari- 
times, à Larche, au lac d’Allos et à la prairie du Mont-Pelat 
(Basses-Alpes), au col du Mont-Genèvre et au Lautaret (Hautes- 
Alpes), dans la vallée de Zermatt, au Mont-Dore, au Lioran, à 
la Bourboule (Auvergne), de Vittoria au Mont Gorbea, dans la 
Sierra-Nevada, en Allemagne, il est certain que si la chenille 
s'accommode d'Aira montana et de Potentilla frigida dans les 
hautes montagnes, elle doit se nourrir d’autres plantes dans les 
régions plus basses qu’elle fréquente également. 

La description détaillée de serratulæ est imprimée aux pages 71 
et 72 du Catal. systématique des Lépid. de l'Andalouste, 1858. 
Herrich-Schaeffer en a publié d'excellentes figures sous les n° 18, 
10, 20, 21 et 22 de la Tab. 4 des Æesperides Europ. Schilde à 
figuré le dessous de l'aile inférieure de serratule sous les n° 5 et 6 
de la PL II du Bd. XXX de Berliner entom. Zeitschrift, 1886. 

L'Espèce, comme on l'a vu dans le relevé des localités d'où 
proviennent les exemplaires de ma collection, est répandue en 
France, surtout au sud de la Loire; elle n’a encore été trouvée n1 
en Bretagne, ni en Angleterre. Elle est facile à reconnaitre, étant 
de taille moyenne, peu largement ponctuée de blanc en dessus; 
les ailes inférieures sont d’une teinte olivâtre plus où moins 
jaunâtre ou verdâtre, traversées par 3 séries maculaires blanches : 
d’abord près de la base; puis au travers du milieu; enfin, d’une 


manière plus indécise, le long du bord externe. Les nervures noires 


400 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


sont très apparentes, lorsqu'elles traversent l’espace plus clair 
médian, sur le dessus des ailes inférieures. Guenée dit que 
serratulæ est la plus commune des espèces de Syrzchthus; elle 
est, dit-il, très abondante dans toutes les montagnes secondaires, 
mais plus rare dans les plaines, remontant cependant jusqu'aux 
environs de Paris. Guenée ajoute dans la notice autrefois collée 
sur la paroi de la boîte vitrée contenant sa série de serratulæ et 
maintenant piquée à l'épingle d’un des exemplaires, les observa- 
tions que je transcris comme suit : « On distingue serratuleæ 
d’'Alveus, le seul avec lequel on le puisse confondre, en ce qu'il 
est plus petit ; que les taches blanches du dessous sont très arrêtées, 
séparées, celles entre 1 et 4 arrondies; que la massue des antennes 
est d’un rouge brun foncé; que la gouttière est entièrement grise. 
Il est probable que c’est le plain-chant d'Engramelle; mais rien 
de sür. » 

Dans les collections Boisduval, Guenée, Bellier, de Graslin, 
Kuvwert, les mêmes Syrizchthus sont appelés serratule,; VY'Éspèce ne 
semble donc pas donner lieu à grande confusion, grace sans doute 
aux excellentes figures publiées par Herrich-Schaeffer. Boisduval 
et de Graslin possédaient chacun un exemplaire pourvu d’une 
étiquette paraissant écrite par Rambur lui-même. L’exemplaire de 
la coll. Boisduval a la bande maculaire médiane des ailes infé- 
rieures, en dessous, non interrompue, tandis que dans la figure 9 
de la PI 8 de la Faune de l'Andalousie, 1839, la bande médiane 
en question est représentée interrompue. 

La description imprimée aux pages 71 et 72 du Catalogue 
systématique, 1858, mentionne également l'interruption des bandes, 
mais en apparence plutôt qu'en réalité. Je lis en effet ce qui suit : 
« Ces taches, plus ou moins grandes, forment parfois comme des 
bandes interrompues; il y en a trois avant la base, toujours enve- 
loppées par la couleur du fond : celles du milieu forment une 
bande interrompue, dont la moitié antérieure très large, est divisée 
par les nervures en cinq taches, dont l’antérieure très étroite, plus 
longue, mais pouvant disparaître, la troisième souvent plus petite 


et plus courte, les deux autres réunies, peu ou pas échancrées 


ral 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 4OI 


postérieurement ; puis viennent deux petites, dont la première plus 
reculée et la seconde pouvant manquer; enfin, une dernière tou- 
chant le bord abdominal qui est plus ou moins brunâtre. » 

Rambur dit que « celles du milieu forment une bande inter- 
rompue », mais il cite une nomenclature de taches qui occupent 
tous les espaces intranervuraux; il y a donc réellement une série 
non interrompue de taches pour occuper tous ces espaces et la 
description contient ainsi une contradiction. La vérité, c'est que 
tantôt la ligne maculaire médiane est interrompue par l’oblité- 
ration des petites taches blanches intranervurales qui sont entre 
la grosse tache du milieu et celle qui est plus près du bord anal, 
et que tantôt la ligne médiane se continue sans interruption, par 
l’accentuation plus prononcée de toute la série des taches blanches. 

On prend à Charroux (Vienne) et dans la forêt de Vouvant, 
en Vendée, une très belle race de serratule, plus grande que les 
autres races françaises, et égalant presque, par la taille, la variété 
major, Stgr., de Syrie. Je suis redevable à M. Daniel Lucas de 
3 exemplaires C' qu'il a pris en mai 1003, dans cette forêt ven- 
déenne, très pittoresque et rendue célèbre par l’oratoire rustique 
qui subsiste encore du bienheureux Grignon de Montfort, person- 
nage d’une haute sainteté, Breton d’origine, et qui évangélisa au 
commencement du XVIII° siècle, les campagnes de la Vendée. 

En Grèce et à Amasia, serratulæ présente aussi une race plus 
grande que dans les montagnes de l’Auvergne, des Pyrénées et 
des Alpes. Je fais figurer dans le présent ouvrage, sous les 
n* 480-483 de la PI. IV, serratulæ O', de la forêt de Vouvant 
(n° 480); serratulæ ©, de Charroux (Vienne) (n° 481); serra- 
tule G, plus petite race, de Cauterets (n° 482), et serratule- 
major S, d'Akbès (n° 483). 

Freyer figure avec le nom de cæcus, sous les n° 3 et 4 de la 
Tab. 403 de Neuere Beitraege zur Schmetterlingskunde, un 
Syrichthus que Staudinger et Rebel, dans leur Catalog 1001, 
rattachent, comme variété, à serratule. Freyer dit que les exem- 
plaires dont il donne la figure ont été pris par le D* Nickerl, 
dans les Alpes du Tyrol, en juillet. Malheureusement, les figures 


26 


402 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


publiées par Freyer sont grossièrement exécutées; dans un genre 
aussi ambigu que celui des Syrichthus, une figuration exception- 
nellement fine et soignée est pourtant indispensable pour la certi- 
tude de l'identification spécifique. Dès lors, 1l me paraît impossible 
de savoir exactement à quoi référer le cæcus de Freyer; à serratuleæ 
ou à carlinæ ? Toutes les conjectures sont permises et finalement 
le nom de cæcus ne répond à aucune désignation précise. 

Ma collection contient plus de 300 serratulæ. Aucun spécimen 
ne me parait d’une détermination douteuse et Je crois que serratulæ 


est une Espèce bien distincte et bien tranchée. 


Syrichthus Alveus, Huebner. 


A-t-on affaire à une Espèce polymorphe, très variable non 
seulement selon les lieux, mais encore dans le même lieu ? Ou bien 
Alveus, Carline, Cirsu, Onopordi sont-ils des Espèces distinctes, 
liées entre elles par des exemplaires transitionnels quelquefois 
difficiles à identifier et à rapporter exactement à l’une plutôt qu'à 
l’autre des Espèces, Variétés ou Races? Voilà une question sur 
laquelle l’accord n'est pas encore près de se faire; “les “deux 
Opinions opposées me paraissant également défendables et raison- 
nablement soutenables dans l'état actuel de nos connaissances. 
Il n'y à rien d'assez indicatif, dans un sens ou dans l’autre, pour 
donner à l’une des opinions une raison qui soit décisive et qui la 
fasse prévaloir. Cependant, si on envisage non pas les exemplaires 
extrêmes, mais ceux qui représentent la moyenne de chaque unité 
d'Espèce ou de Race, on constate sans peine des différences cons- 
tantes et importantes qui permettent généralement de classer les 
Espèces ou Races, sans les mélanger, pour peu qu'on y apporte 
l'attention suffisante. Dès lors, en m'aidant d'une figuration 
copieuse et soignée, sans laquelle je considérerais toute argumen- 
tation comme plutôt nuisible qu'utile, je compte donner une idée 
exacte de la faune française des Syrichthus du groupe d’Alveus, 


conformément à la documentation dont je dispose et aux éléments 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 403 


d'information contenus dans les ouvrages que J'ai consultés. Ce 
qui manque, c'est la connaissance comparative des premiers états. 
Là se trouve la clef du mystère, et tant que nous ne la posséderons 
pas, nous manquerons de la base indispensable. Je pense cependant 
que des figures des papillons, en quantité suffisante, bien exécutées, 
avec des indications de localité très précises, peuvent apporter un 
peu d’ordre dans le classement et la nomenclature des Syrichthus, 
améliorer la situation présente pleine de confusion, inciter les 
Entomologistes à la recherche et à l'étude des Syrichthus en 
question et préparer la mise au point de l'Histoire naturelle de 
ce groupe de Lépidoptères. J'étudie donc chaque Espèce (ou 
Race?) séparément et comme suit : 


1° Alveus, Huebner (G' 461; Q 462; dessous 463); Rambur 
(Faune Andal., PL 8, lg. 3); 


Ce Syrichthus assez commun habite en France, d'après ce que 
je sais, les environs de Herblay (Seine-et-Oise), d’Angoulème, de 
Cauterets et de Gavarnie (Hautes-Pyrénées), de Vernet-les-Bains 
(Pyrénées-Orientales), les Basses-Alpes, le Var, les Bouches-du- 
Rhône, les Alpes-Maritimes. A/veus se trouve aussi à Alsasua, en 
juin ; à Florence, en juin; en Norvège (coll. Boisduval); dans la 
vallée de Zermatt et dans la Sierra-Nevada. 

Alveus présente sur le dessus des ailes inférieures une éclaircie 
correspondant par transparence aux parties blanches du dessous 
des mêmes ailes. L'Espèce est robuste, relativement assez grande 
dans les Pyrénées; plus petite à Florence; de taille encore plus 
réduite en Norvège. Le dessous des ailes inférieures est mélangé 
de blanc assez pur et d’ocre jaune; la bande maculaire blanche 
centrale est tantôt interrompue et tantôt continue; les bords des 
ailes supérieures, en dessous, sont blanchâtres; seule, la parte 
médiane des ailes supérieures est plus ou moins noirâtre. Rambur 
décrit en détail A/veus aux pages 60, 70 et 71 du Catalogue 
systématique. Cet auteur fait connaître qu'il possède un individu 
de la Norvège, venu sans doute de Dowre, en même temps que 
les 4 spécimens qui existent encore de la collection Boisduval. 


404 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Il y a fréquemment dans les Basses-Alpes, notamment aux 
environs de Larche, et parfois dans les Pyrénées-Orientales, une 
variété d’Alveus chez laquelle les bandes ocre jaune des ailes 
inférieures, en dessous, sont très réduites d'épaisseur. J'ai appelé 
cette variété, qui est constante, Bellier:, en souvenir de l'Entomo- 
logiste qui possédait l’un des exemplaires que je fais figurer dans 
le présent ouvrage et qui vient de Larche. 


Le Carthami, Duponchel (Szppl., PI. XLIT, fig. 3 et 4), appelé 
plus correctement Alveus dans le texte (pages 250 et 260), figuré 
et décrit d’après un exemplaire envoyé jadis à Duponchel par le 
comte de Saporta, présente, sur le dessus, des taches noires res- 
sortant vigoureusement sur le fond gris jaunâtre des ailes; c’est 
une forme de Provence que je distingue sous le nom de l‘oulquier:. 
Plusieurs exemplaires de cette variété ont été pris à Saint-Pons 
et à Saint-Zacharie, non loin de Marseille, par M. Gédéon 
Foulquier, à l’obligeance de qui j'en suis redevable. 

D’autres échantillons semblables ont été capturés à Digne. 


A Lambèse, dans la province de Constantine, en Juin et en 
août, on trouve une race très intéressante d’Alveus, ressemblant, 
par le dessous de ses ailes inférieures, à C'ynare; j'ai désigné cette 


race géographique sous le nom de umida. 


Je fais figurer Alveus-numida sous les n°* 484, 485 et 486 de 
la PI LV du présent ouvrage; sur la PI. LVI se trouvent repré- 
sentés les Syrichthus Alveus, comme suit : n° 487, Alveus-Foul- 
quieri Œ (Entrevaux à Mont-Gourdon, Basses-Alpes; juillet 1906; 
H. Powell); n° 488, Alveus-Foulquieri © (Saint-Zacharie, Var; 
10 août 1000; Gédéon Foulquier); n° 480, Alveus-Foulquieri S, 
passage à Pellierr (Bouches-du-Rhône; G. Foulquier; 1905); 
n° 400, Alveus-Bellieri S (Larche; coll. Bellier); n° 491, Alveus- 
Bellier: © (Zermatt à Ryffelalp, Valais; fin Juillet 1902); n° 492, 
Alveus CG forme type (Cauterets;, fin Juillet 1905); n° 493, 
Alveus © forme type (Vernet-les-Bains ; été 1895); n°* 494 et 495, 
Alveus-ballotæ (Dowre, Norvège; de la collection Boisduval). 


Je maintiens le nom de ballotæ donné par Boisduval dans sa 


k 


\k y N 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 405 


collection mais non encore publié. Les Ballota sont des plantes 
de la famille des Labiées, à odeur repoussante, dont 25 espèces 
environ habitent l'Europe et l’Asie tempérées, l'Afrique boréale 
et australe. Il y a en France deux Espèces, dont l’une : #2g7a, à 
odeur fétide, porte le nom vulgaire de : marrube noir. 

Les taches du dessous des ailes inférieures, chez Alveus et ses 
variétés : #umida, Foulquieri, Bellieri, ballotæ sont toujours d’un 
jaune ocreux, d’une nuance plus ou moins jaune ou brunâtre, mais 
n'ayant nulle tendance à la teinte rouge. L'Espèce est assez com- 
mune, surtout dans les basses montagnes; elle vole d’abord à la 
fin du printemps, puis en juillet et août. Elle aime à se reposer 
sur les fleurs, sur le sol humide, et elle voltige volontiers autour 
des fumiers. Dans les Hautes-Pyrénées, elle n’éclôt qu'une fois 
par an, en été; elle n’est pas rare à Cauterets et à Gavarnie. Je 
possède un G' albinos de Vernet-les-Bains. Il a le dessus des ailes 
cris, dans le genre du Syrichthus malve que j'ai fait figurer sous 
le n° 238 de la PL XXXVII Les © possèdent un épi de poils 
noirâtres, formant comme un pinceau, à la première articulation 
de la troisième paire de pattes; ce pinceau est figuré sous la 
lettre Z de la PI. 8 de la Faune de l'Andalousie et on le voit sur 
le n° 480 de la PI. LVI du présent ouvrage. 

À Zermatt et jusqu’à Ryffelalp, mais pas beaucoup au-dessus, 
se trouve une race particulière et ambiguë que Je représente avec 
le nom de Ryffelensis, sous les n° 470 et 471 de la PI. LIV. J'en 
possède un certain nombre d'exemplaires que j'ai pris en Juillet 
et au commencement d'août des années 1864, 1866, 1898 et 1902. 
Sur le dessus des ailes supérieures, la maculature blanche est très 
réduite et le fond des ailes du & est couvert d’une pulvérulence 
jaunâtre un peu comme chez cacaliæ, avec lequel on ne peut 
cependant le confondre, quoi qu’il lui ressemble; notamment il 
est toujours d’un aspect plus foncé; le dessous de ses ailes est 
disposé comme chez Alveus dont il est peut-être la forme monta- 
gnarde depuis Zermatt jusqu'à Ryffelalp. La différence est 
cependant bien grande entre Ryffelensis et Foulquierr, s'il est vrai 
qu'ils appartiennent à la même unité spécifique. On ne doit pas 


406 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


perdre de vue qu’on trouve aux mêmes lieux, dans la même mon- 
tagne, l’Alveus Bellieri. 

D'autre part, on rencontre depuis Zermatt jusqu'aux hauteurs 
de Ryffelalp des Syrichthus qui constituent une excellente tran- 
sition entre Xyffelensis et carline des Alpes françaises. J’ai sous 
les yeux une quinzaine de *yffelensis bien caractérisés et nette- 
ment séparables; mais d’autres sont plus incertains; ils inclinent 
vers carline,; enfin le plus grand nombre des Syrichthus des 
montagnes qui entourent le village de Zermatt et que je possède 
dans ma collection sont tout à fait conformes aux carline des 
Alpes françaises. 

J'ai indiqué un peu plus haut l’analogie d'aspect des Syrichthus 
Ryffelensis et cacalie. 


Ce Syrichthus Ryffelensis forme donc un passage ou une 
liaison entre plusieurs unités très différentes, et il ajoute une 
difficulté de plus à l'établissement de la nomenclature et de la 
classification des Syrichthus. 

J'ai connu un Entomologiste de grande réputation, fort respec- 
table d’ailleurs, avec qui j'entretenais des relations excellentes. 
Un jour, nous promenant ensemble, je lui demandais ce que, dans 
ses travaux descriptifs et dans la classification des Espèces, telle 
qu'elle était établie dans ses Monographies, il faisait de tous les 
exemplaires douteux ou embarrassants qu'on rencontre si fré- 
quemment dans certains groupes de Coléoptères, spécialité de mon 
interlocuteur. On ne sait en effet pas aisément à quelle Espèce les 
rapporter exactement, tant 1ls semblent également et intimement 
alliés à plusieurs Espèces ou prétendues Espèces différentes. 

Dans certains cas, il semble que la même Espèce produise des 
variations dans des sens différents, de telle façon que l'expression 
extrême de ces variations, qu'on pourrait qualifier d’opposées, 
donne des échantillons très dissemblables, difficiles, dans l’état 
actuel de la Science, à rattacher exactement à une souche d’où 
l'on puisse avoir quelque présomption fondée qu'ils dérivent 
réellement. Peut-être aussi y a-t-1] beaucoup plus d'Espèces qu’on 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 407 


ne le croit? les Espèces en question étant séparées les unes des 
autres par des caractères très réels, mais très subtils et d’une 
appréciation malaisée pour nous. En tout cas, l'esprit de l’obser- 
vateur reste 1rrésolu et ne perçoit rien d'assez important et d'assez 
stable pour fixer son opinion, d'une manière qui le satisfasse. 
La réponse, que je n'ai point oubliée, fut la suivante : « Jai en 
effet rencontré bien souvent ces exemplaires ambigus, embarras- 
sants, et dont le classement plein d'incertitude laisse la porte 
ouverte à tous les doutes. Comme ces sujets m'ont paru très 
gênants, J'ai cru devoir les supprimer, pour plus de clarté et de 
simplification, et dès lors je n'ai pas eu à en tenir compte. » 
J'avoue que l’aveu sincère de la mise en pratique d’une pareille 
théorie me causa un profond étonnement; car est-il rien de plus 
contraire à la Science que cette manière de redresser la Nature! 
Je suis loin, pour ma part, de partager un semblable parti-pris 
consistant à mettre de côté les exemplaires qui viennent comme 
à plaisir embrouiller une question. Je voudrais bien produire dans 
les questions litigieuses une vision nette et claire; mais pas au 
détriment de la réalité. Aussi, comme Je l'explique déja plus haut, 
à propos de /‘rifillum, est-ce en parfaite connaissance de cause 
que je mets sous les yeux de mes Lecteurs les sujets qui créent 
des embarras, au lieu de donner la simplification désirée. Je dis 
ce que Je sais, en regrettant de ne pas disposer moi-même d'une 
lumière plus éclatante et plus sûre pour en faire profiter les autres; 
mais Je ne cache rien de ce que je connais. Il y a des faits contra- 
dictoires qu’on ne peut nier; par exemple, en Algérie, on trouve 
le Syrichthus Alveus-numida. et le Syrichthus Onopordi. Si 
Onopordi est seulement une forme d’'Alveus, comment expliquer 
la coexistence, dans le même pays, de ces deux formes si diffé- 
rentes, alors qu'en Algérie, tout au moins, aucune transition ne les 
relie l’une à l’autre. D'autre part, on trouve à Angoulême, c'est- 
à-dire au même lieu, Alveus-type et cirsu; à Zermatt, on trouve 
Onopordi-conise, Ryffelensis et Alveus. Si Alveus-numida et 
Onopordi, si Alveus et cirsu, si Onopordi-conize, Ryffelensis et 


Alveus étaient simplement des formes d’une même unité spéci- 


» ? 


408 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


fique, on trouverait sans doute au même lieu tous les passages qui 
relient les formes entre elles: mais ces passages, c’est dans 
d’autres lieux qu’on les rencontre. J’appelle donc sur ce côté de 
la question l'attention des Entomologistes. 


IT peut se faire que certaines formes considérées généralement 
aujourd’hui comme des variétés d’Alveus le soient réellement et 
que d’autres ne le soient pas. Par exemple carlinæ peut être une 
variété d’Alveus et onopordi une Espèce à part? Mais je déclare 
ne pouvoir formuler encore aucune opinion fondée à cet égard et 
je pense que je dois me borner à un simple exposé de tous les 
faits que je suis arrivé à connaître, laissant à d’autres ou remettant 
à plus tard le soin et le moyen de conclure. 


2° Carlinæ, Rambur. 


Le dessous est figuré sous le n° 11 de la PI. 8 de la Faune de 
l’'Andalousie et décrit en note, à la page 72 du Catalogue 
systématique. 

Carline est assez variable; tantôt le dessus des ailes inférieures 
du © reste presque dépourvu d’éclaircies (n° 400); tantôt il est 
moins obscur (n° 406), par le fait que les parties blanches du 
dessous transparaissent en dessus. Aux ailes inférieures, en des- 
sous, les macules sont : ou bien de couleur rouge brique (n*% 500 
et 501), ou bien de teinte brun olive (n° 407 et 408). Ces taches 
rouge brique où brun olive du dessous des ailes inférieures sont 
très nettement détachées sur le fond blanc; cependant elles 
gardent un aspect plus flou, avec les contours semblant moins 
arrêtés que chez Alveus. Cela tient en partie à une villosité plus 
épaisse et plus longue dont il semble que les ailes sont couvertes; 
les bandes maculaires rougeâtres ou brun olive du dessous des 
inférieures sont plus larges et plus confluentes que chez Alveus; 
le bord anal est d’un gris noirâtre chez carlinæ et non blanchâtre 
comme dans A/veus, Les traits noirs qui coupent les franges sont 
aussi plus épais que chez Alveus; l'extrémité abdominale des © 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 409 


est garnie de poils blonds formant un éventail, ainsi qu'on peut 
le voir dans le n° 500. Carlinæ habite les Alpes; je l'ai pris au 
col du Mont-Genèvre, à La Grave et au Lautaret (Hautes-Alpes), 
en juillet 1006; au Mont-Revard, au-dessus d’Aix-en-Savoie, en 
août 1002 et en juillet 1006. Bellier l’a pris à Larche (Basses- 
Alpes); Harold Powell l’a rencontré à la forêt d’Entraunes, du 7 
au 9 août 1006, et dans la prairie du Mont-Pelat, le 1° août 1006. 
Le D" Siepi me l’a envoyé du Monetier-de-Briançon (Hautes- 
Alpes), Coulet l’a capturé aux environs de Digne, en mai et en 
août 1807. 

Les figures n° 406 et 407 représentent deux Œ pris à La Grave 
du 21 au 28 juillet 1006; la fig. 408 est faite d’après un © pris 
au mont Revard au commencement d’août 1002; le n° 409 est la 
figure d’un Œ pris à Larche par Bellier; en dessous, il a les taches 
des aïles inférieures de couleur rougeâtre comme le n° 500 éga- 
lement capturé à Larche, par Augustin Coulet, en août 1806; la 
© des Basses-Alpes est représentée sous le n° 501. 

Tous ces Syrichthus appartiennent bien à la même unité 
carline, dont le type, figuré par Rambur, a les taches du dessous 
des ailes inférieures de couleur rougeâtre; j'ai appelé olivacea la 
forme à couleur brun olive, comme les n°* 407 et 408. 


Les Carlina sont des sortes de chardons de la famille des 
Composées. Elles poussent généralement dans les lieux incultes, 
secs et rocailleux. La Carlina vulgaris croît dans toute la France; 
les autres Carlina sont plutôt répandues dans la région méditer- 
ranéenne et dans les montagnes du Centre et de l'Est de la 
France. 


3° Cirsii, Rambur. 


La chenille, d’après Emile Favre, vit sur Poly gala chamæbuxus, 
qui est une plante vivace de la famille des Polygalées, à souche 
ligneuse, rampante, et à fleurs roses ou jaunâtres, croissant dans 
les bois et parmi les herbes, au milieu des sites rocheux des mon- 


410 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


tagnes. Comme le Syrichthus Cirsu habite en France non seu- 
lement les environs de Digne, mais encore ceux de Paris, d’An- 
goulême, de Dompierre-sur-Mer, c’est-à-dire aussi des localités de 
plaine, la chenille vit nécessairement sur d’autres plantes que celle 
indiquée dans la Faune des Macrolépidoptères du Valais. 

Rambur a figuré le dessous de Czrsù sous le n° 12 de la PI 8 
de la Faune de l'A ndalouste, et il l’a décrit en note aux pages 73 
et 74 du Catalogue systématique. Cirsi a les dessins et les taches 
du dessous des ailes inférieures d’un rouge rouillé un peu vineux. 
Les taches sont nettement limitées, les contours étant très arrêtés. 
En dessus, les taches blanches des supérieures sont assez larges, 
et sur les ailes inférieures, les parties claires par transparence des 
espaces blancs du dessous, sont indiquées en blanc jaunâtre bien 
plus accentué que chez aucun des autres Syrichthus du groupe 
d'A lveus. 

Je fais figurer sous les n° 502, 503 et 504 Csrsu Onet © 
d'Angoulême; sous le n° 505, Cérsi G de Sicile, et sous les 
n* 506 et 507, Cirsii Cet O des environs de Digne et de Belesta 
(Arièce). Le n° 508 représente un C#rsa, de Digne, variété ayant 
les dessins et taches du dessous des ailes inférieures de couleur 
brune, sans vestige de rouge, un peu comme dans la figure 34 de 
Cirsii publiée par Herrich-Schaeffer, sur la Tab. 6 des Æespenides 
Europ. J'ai désigné cette variété sous le nom d'Æerrichu, elle est 
plus fréquente à Digne que la forme typique, à ailes inférieures 
rouges en dessous, de C?7521. 

Les collections Boisduval et Bellier possédaient une série de 
Cirsu pris à Paris. L'un des exemplaires de Boisduval est pourvu 
d’une étiquette semblant écrite par Rambur. Bellier avait pris 
Cirsii en Sicile; le type, dans cette île, paraît être de moins grande 
taille qu'en France et avoir les parties claires (blanches et jau- 
nâtres) du dessus des ailes rétrécies et relativement peu accentuées. 
Harold Powell a trouvé Czrsü-Herrichii à Méounes (Var), en 
septembre, et à Entraunes (Basses-Alpes), en août. V. Cotte a pris 
Cirsii à Digne, en août 1806. Nous avons rencontré Cz#s1 en sep- 
tembre, à Angoulême, et P. Boulé l’a capturé, à la fin d’août, à 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE AIT 


Dompierre (Charente-Inférieure). La collection Kuwert contenait 
des Cirsi étiquetés Schwalbach et Rhein. Csz ne doit pas être 
rare dans les Charentes. H. Powell a trouvé, en septembre 1900, 
un exemplaire Q à Bélesta (Ariège). Le dessous de l'abdomen 
est blanc; mais chez la Q; les côtés en sont teintés de rose. C2rs22 
est un des plus jolis Syrichthus. Il est bien différent de carline 
et facile à distinguer des autres Variétés d’Alveus, ou Espèces 
alliées. 

Je n'ai jamais trouvé Cérsi en Bretagne, et je suis porté à croire 
que l’Æesperia Cirsü, Rambur, signalée par M. le P. de Joannis, 
comme faisant partie de la faune morbihannaise, est le Syrzchthus 


que j'appelle armoricanus et auquel je consacre la notice suivante. 


4° Armoricanus, Obthr. 


Eclôt deux fois par an : d’abord en mai et juin, puis en août 
et au commencement de septembre; se trouve aux environs de 
Rennes dans les prés et les pâtures. À l’arrière-saison, il aime à 
se poser sur les fleurs de Composées et n’est pas très rare sur les 
pelouses des parcs et des grands jardins. Il habite aussi les dunes 
de Miel-Pot et de la Guimarais, entre Saint-Malo et Cancale, et 
les clairières entre Plouharnel et Kerostin (Morbihan). Il descend 
le long des côtes de l'Océan, se trouve en Vendée et jusqu'à 
Dompierre-sur-Mer (Charente-Inférieure), et peut-être plus au Sud. 
C'est un Syrichthus de petite taille, plus voisin de Carlinæ que 
de Cirsü, ayant les parties claires du dessus des ailes moins accen- 
tuées que chez Cirsi, mais plus prononcées que dans Carline, 
et sur un fond plutôt brun bronzé que noir. Les taches du dessous 
des ailes inférieures varient comme chez Carline, depuis la teinte 
brun roux ou même rougeâtre jusqu'à la couleur ocre jaunâtre ou 
verdâtre. La tendance au rougeâtre se remarque sur les bords de 
la mer et vers le Sud: la tendance au verdâtre est plus accentuée 
à Rennes qu'ailleurs. 

Il y a longtemps que j'observe ce Syrichthus. J'ai lieu de penser 
qu’il est surtout répandu en Bretagne, où il est d'ailleurs, avec 


412 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


malve, le seul Syrichihus que j'aie jamais vu. Je sais que Guenée 
l'avait capturé à Châteaudun et j'ai trouvé dans sa collection trois 
échantillons mis à part avec la note que je transcris comme suit : 
« Caractères : taille moyenne, taches blanches bien marquées; la 
cellulaire des inférieures grise, mais bien visible, ainsi que les 
points qui la suivent; l’angle anal des inférieures prolongé; les 
dessins du dessous très nets, un peu semblables à Alveus,; les 
nervures des inférieures d’un jaune olivâtre ou carné; toujours 
plus petit que l’Alveus. » 

Je crois qu'armoricanus est le Fritillaire, Godart (PI KXVITT; 
fig. 1 et 2). La disposition de la ligne maculaire extracellulaire 
des ailes supérieures en dessous, d’une accentuation évidemment 
exagérée dans la figure 2 publiée par Godart, n’en est pas moins 
très indicative. Je remarque en effet dans quelques exemplaires 
du Syrichthus armoricanus que J'ai devant moi, la même direction 
linéaire suivie pour l’ensemble des macules extracellulaires. Dans 
le texte (vol. II, p. 223-226), Godart semble émettre des idées 
synonymiques assez confuses. Je fais figurer sous les n° 509 et 510 
de la PI LVII armoricanus de Rennes (printemps 1907); sous 
les n° $11 et 512, le même Syrichthus des dunes de la Guimarais 
(août 1884); sous les n°* 513 et 514, la forme provenant des dunes 
entre Plouharnel et Kerostin (commencement de juin 1909); sous 
les n° 515 et 516, une paire prise à Dompierre-sur-Mer, par 
P. Boulé, du 8 au 15 juin 1000; enfin, sous le n° 517, un C faisant 
partie des captures que nous fimes en Vendée, mon frère et moi, 
à la fin d’août 1007. 

Je rapporte à l’armoricanus, comme variété géographique que 
j'appelle : ÆFabressei, les Syrichthus pris à Sierra-Alta, par 
P. Fabresse, en août 1007. Il me semble que Fabressez est une 
forme agrandie et exagérée dans ses caractères du Syrichthus 
armoricanus. Les n° 510 et 520 représentent Fabressei, et le n° 518 
donne la figuration de la même race Fabresser, d’après un exem- 
plaire que je pris à Florac (Lozère), en juillet 1863. Ces Fabresset 
forment une transition vers Oropordi du Sud de l'Espagne et 
d'Algérie, et le Syrichthus Œ, de Vernet-les-Bains, figuré sous le 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 413 


n° 528, représente un des termes consécutifs de cette transition ; 
j'ai donné le nom d'armoricanus, bien que le Syrichthus auquel il 
est appliqué se trouve ailleurs que dans l’ancienne Armorique; 
mais parce qu'en Bretagne la forme dite : armoricanus existe seule 
et sans mélange avec aucune autre; ce qui n'est pas le cas dans 
les autres pays où il y a des transitions quelquefois bien difficiles 


à attribuer à une race plutôt qu'à une autre. 


Q, 5° Onopordi, Rambur. 


Figuré sous le n° 13 de la PI. 8 de la Faune de l’'Andalouste. 
Extrêmement commun en Algérie d’où j'en ai reçu des centaines 
d'exemplaires, Onopordi vole à Lambèse, à Sebdou, à El-Biar, à 
Hussein-Dey, c’est-à-dire dans les trois provinces, depuis avril 
jusqu’à septembre. Je fais figurer sous les n° 524, 525, 526 et 527 
la race algérienne d'Oropordi. Il habite aussi l'Espagne, les 
Pyrénées-Orientales, d'où proviennent les n° 528 et 520, et diverses 
parties du Languedoc et de la Provence. Dans les plaines cal- 
caires du Centre de la France et dans les montagnes de la Savoie 
et du Valais, Onopordi donne la race que Guenée a décrite dans 
les Petites Nouvelles entomologiques, sous le nom de cony:e, 
d’après des exemplaires qu'il avait trouvés en Savoie. 

Lorsque je devins acquéreur de la collection Guenée, il restait 
six exemplaires de conyzæ dans sa boîte. Sur la demande de feu 
Staudinger, je lui communiquai deux de ces conyze, afin de lui 
permettre d'apprécier la valeur de l’'Espèce pour son Catalog 1901, 
établi en collaboration de H. Rebel. Jamais ces deux conyzæ n'ont 
repris le chemin de Rennes. Je possède donc encore quatre 
spécimens de conyze. Deux servent de modèle pour la figuration 
des n% 530 et 531 de la PL LVII; deux autres ont été étudiées 
au point de vue de leurs genitalia, par M. le Prof. D' Reverdin, 
et leur abdomen a été sacrifié aux nécessités scientifiques. 

Conyzæ présente quelque analogie de couleur et de disposition 
de taches avec centaureæ : une exacte iconographie permettra de 
se rendre compte de ce qu'est réellement le Syrichthus contze, 


414 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


auquel feu Guenée crut, bien à tort, devoir faire les honneurs 
d'une spécification; ce n'est bien qu'une forme d’Onopordi. 
M. Reverdin et M. Blachier se proposent de rechercher conyze 
là même où 1l fut découvert, au lieu dit, je crois, la Charnée, et 
de compléter, au moyen de la documentation qu'ils espèrent 
obtenir, l’histoire de ce Syrichthus; mais je crois que conyzæ 
n'est pas une grande rareté; il doit se rencontrer dans toute la 
partie méridionale de la Suisse; je l’ai pris dans la vallée de 
Zermatt et je fais figurer sous le n° 523 un conyzæ de cette 
localité. 


Le Genre conyza, qui tire son nom d’un mot grec qui veut dire : 
gale, par allusion à une prétendue propriété des plantes de ce 
genre, appartient à la famille des Composées. L’abbé Coste cite 
deux Espèces, dans la #/ore française : ambigua et Naudini, 
cette dernière paraît spéciale aux Pyrénées-Orientales; l’autre : 
ambigua, habite les lieux incultes, les sables des rivières dans le 
Midi de la France; elle remonte jusqu'à Bordeaux; c'est une 
plante annuelle, d’un vert cendré, à fleurs blanches ou fauves. 
Guenée n’a point connu la chenille du Syrichthus qu'il a appelé 
Conyze et il a choisi le nom d’une plante de la famille des 
Composées, sans savoir même si la chenille de son Syrzchthus 
s'en accommoderait, imitant en cela l'exemple de Rambur, auteur 
de Syrichthus cacalie, etc. 

Le Syrichthus Onopordi-conyzæ se rencontre aussi dans les 
plaines calcaires du Poitou et les n° 521 et 522 ont été capturés 
par mon frère à Charroux (Vienne), en mai 1882. 

Les Onopordum, comme les Conyza, sont des Composées. On 
les appelle vulgairement pe/ d'âne; ce sont des chardons épineux 
dont les Botanistes connaissent un certain nombre d’Espèces. On 


trouve des Onopordum dans toute la France, mais surtout dans 


le Midi. 


Les Syrichthus Onopordi forment en Algérie une race assez 
spéciale par la netteté du contour des taches des ailes inférieures, 
en dessous. Dans le Midi de la France, à Nîmes, à Celles-les-Bains 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 415 


(Ardèche), à Digne, dans les Alpes-Maritimes, le Var, les Bouches- 
du-Rhône, le Gers, les Pyrénées-Orientales, on trouve des 
Onopordi de la race méridionale formant une transition entre 
Onopordi et armoricanus, d'un côté, et entre Onopordi et conyze, 
de l’autre. Il semble, d’après les taches du dessous des ailes infé- 
rieures, que conyzæ ferait plutôt partie de la même unité que 
l'Onopordi algérien, tandis que la forme du Languedoc, de la 


Provence et du Roussillon se rapprocherait d’armoricanus. 


Ma collection contient plus de 1,000 exemplaires du Syrichthus 
Alveus et des Races, Variétés ou Espèces alliées. Si j'avais moins 
de documents, je serais peut-être mieux fixé sur la valeur relative 
de toutes ces formes; mais je suis plutôt disposé à m'orienter 
dans l’autre sens. Je tâcherai de réunir une quantité plus consi- 
dérable de documents provenant des provenances les plus diverses, 
et notamment de celles d’où je n'ai encore obtenu aucuns sujets 
d'étude. J'espère plus tard reprendre la question; cependant Je 
me plais à penser que les figures publiées sur les Planches LIV, 
LV, LVI et LVII du présent ouvrage resteront, par leur exac- 
titude, une base toujours utile à consulter. 

En résumé, les Syrichthus Alveus, carline, cirsu, armoricanus, 
onopordi, envisagés dans leurs formes typiques, pourraient sem- 
bler représenter, chacun, une unité spécifique distincte; maus, 
considérés avec les exemplaires de transition que fournit chaque 
unité, ils paraissent spécifiquement inséparables les uns des autres, 
si grandes que soient les différences qui caractérisent chaque 
forme typique, comparativement aux autres formes. 

Charles Barrett a figuré sous le n° 2 de la PI. 37 un Syrichthus 
Alveus, de la collection du Rev. T. H. Marsh, pris en Norfolk 
(p. 272, 273, 274). Malheureusement Barrett n’a représenté que le 
dessus des ailes. Mais tout porte à croire que l’Alveus anglais 
« captured in a narrow valley at the edge of a wood in Norfolk 
by the Rev. T. H. Marsh, at the end of May or beginning of 
June, in one season only, in or about the year 1860 », pouvait se 


rapporter à l'armoricanus. 


416 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Thanaos Tages, Linné. 


Décrit par Linné, dans le Systema Nature, Edit. X; 1760), 
comme suit: « Z'ages. 168. P. P. (Papilio-Plebeius), alis denti- 
culatis divaricatis fuscis obsolete albopunctatis. Habitat in Eu- 
ropa. Sinulis P. Malve, sed magis fuscus. » 

Le T'hanaos Tages est une Hespérie très commune, qui habite 
l'Angleterre, mais non l’Algérie. Je l’ai observé dans toutes les 
parties de la France où J'ai recherché des Lépidoptères. On voit 
Tages éclore abondamment en avril et mai, dans les plaines de 
France; elle paraît en juin et juillet dans les montagnes jusqu'à 
une altitude de 1,800 mètres. Charles Barrett dit qu'il y a dans 
le Sud de l’Angleterre une seconde éclosion de Z'ages, en août. 
Je n'ai pas trouvé 7 ages en Bretagne, au mois d'août; bien qu'il 
y soit abondant au printemps; mais Je l'ai pris à Vernet-les-Bains, 
en août; non pas dans la haute montagne, mais à une altitude 
relativement faible, près du village. 7'ages est une Espèce très 
variable, tantôt d’un brun grisâtre avec des dessins un peu plus 
foncés, un semis d’atomes blanchâtres et des petits points blancs; 
le tout ressortant d’une façon peu apparente sur le fond des ailes; 
tantôt beaucoup moins unicolore, ayant le fond des ailes presque 
gris, une série marginale de points blancs en grains de collier, 
très nettement indiquée, et toutes les autres taches brunes et blan- 
châtres très distinctes et très apparentes. Cette forme, assez voisine 
de Popovianus, d'Asie centrale et boréale, est le contraire de la 
forme wricolor, de Syrie. La variété Cervantes, de Graslin, se 
trouve en Andalousie et à Valladolid, dans le Nord de l'Espagne. 
Elle vole en mai et juin. Dans la position du repos, ce que les 
Anglais appellent s/eeping posture, le Thanaos Tages a les ailes 
rabattues comme une Noctuelle. Charles Barrett figure, sous le 
n° 2c de la PI. 40, T'ages endormi sur le côté d’une fleur de 
graminée. 7 ages a un vol assez rapide; mais 1l se repose souvent 
sur les fleurs, dans les allées des bois, dans les pâtures, au bord 
des routes et dans les prairies. Je n’ai pas vu d’Aberration notable 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 417 


de Z'ages; mais il existe certainement des exemplaires chez les- 
quels les taches brunes submarginales des ailes supérieures, en 
dessus, forment des traits allongés venant confluer avec la rangée 
maculaire médiane et même basilaire, et où la rangée extracellu- 
laire de petites taches blanches, aux inférieures, se rejoint d’un 
côté à la série moniliforme marginale, de façon à former de longs 
traits blanchâtres, et, de l’autre côté, s'étend vers le trait blanc 
cellulaire. Jusqu'ici J'ai recherché, sans succès, des Aberrations, 
suivant les directions que j'indique ci-dessus. J'espère que des 
Entomologistes plus heureux pourront vérifier l’exactitude de mes 
prévisions, relativement aux Aberrations qui sont susceptibles 
d'atteindre le Z'anaos Tages. 


27 


II. — HETEROCERA 


I. — ZYGÆNIDÆ 


Déjà il a été beaucoup écrit sur les papillons du Genre 
Zygœna. Un grand nombre d'espèces ont été décrites et figurées 
par les Auteurs qui, depuis le XVIII siècle, ont fait paraître 
des ouvrages sur les Lépidoptères. 

Je ne crois pas devoir répéter au sujet des Zygæna les géné- 
ralités qu’il est aisé de trouver exposées dans divers livres 
d'Entomologie. Je me bornerai à une étude critique des Espèces 
du Genre Zygæna, comme je l'ai fait ci-dessus pour les X/0pa- 
Locera, et à la description de plusieurs variétés ou formes qui 
m'ont paru inédites. 

Le D' Ad. Seitz, dans l'ouvrage : Les Macrolépidoptères du 
Globe, prétend que les Zygæna sont des Papillons frotégés. 
Il dit : « Comme les autres Zygénides, ils ont le corps saturé 
d'un liquide huileux jaune, âcre, les rendant incomestibles et les 
défendant ainsi contre leurs ennemis, non seulement parmi les 
vertébrés, mais même parmi les insectes meurtriers, par exemple 
les Asilides. Comme tous les insectes bénéficiant ainsi d'une 
protection interne, 1ls ont la vie excessivement dure, etc... » 

J'ignore jusqu’à quel point certains groupes de Lépidoptères 
peuvent jouir d’une réelle et efficace protection. Je suis porté à 
croire qu’il y a, dans la théorie des Espèces protégées, une grande 


420 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 

part à faire à l'illusion, et J'ai exposé dans la XX° livraison des 
Etudes d'Entomologie comment une espèce sécrétant, elle aussi, 
un liquide huileux et odorant, la Callimorpha Hera, a été dévorée 
devant moi par une hirondelle. Je puis, à propos de Zygæna, 
relater le fait suivant : pendant l’année 1008, au commencement 
de juillet, nous nous trouvions dans les Hautes-Pyrénées. Lors 
d'une excursion au-dessus de Cauterets, vers le Lac-Bleu, la 
Zygœna anthyllidis fut observée extrêmement abondante sur des 
gazons, au milieu de pentes pierreuses. Ce jour-là, les Zygæna 
anthyllidis étaient très fraîches et ne paraissaient point avoir 
d’ennemis. Mais le lendemain, le temps se trouvant encore favo- 
rable, la matinée fut employée de nouveau à la chasse aux 
anthyllidis, et à la même place où elles étaient la veille en si 
grand nombre. La situation se trouva alors tout à fait changée. 
Des petits oiseaux, et surtout des corneilles qui n'avaient pas été 
vues la veille, étaient arrivés en grande quantité et, faisant la 
chasse aux an/hyllidis, qui était la seule espèce de papillon abon- 
dante en cette localité, au-dessous du Lac-Bleu, ces oiseaux 
avaient déja singulièrement raréñé la Zygæna. 

De plus, j'ai fréquemment observé dans l'avenue de la Hublée, 
près Rennes, où je récoltais jadis en grand nombre la Zygæna 
palustris, d'une part les poules d’une maison voisine me faire la 
concurrence, et, d'autre part, les fourmis attaquer les Zygæna qui 
se trouvaient posées sur les tiges d’herbe. Les fourmis saisissaient 
les papillons par les antennes. 

Je possède dans ma collection deux exemplaires de la Z. palus- 
tris-sexmaculala, capturés par moi-même au moment où ces 
papillons étaient aux prises avec une fourmi qui était accrochée 
à une de leurs antennes. L'’extrémité de l'antenne de ces deux 
Zygæna se trouva coupée par les fourmis. 

Les poules sont très friandes des Lépidoptères. Non seulement, 
comme je le dis plus haut, je les ai vues chercher les Zygæna 
palustris dans l'avenue de la Hublée et en faire une grande 
consommation; mais j'ai observé, dans la cour de l'auberge installée 


près des ruines de la Chartreuse de Prémolles (Isère), les volailles 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 421 


de l'établissement essayant de capturer des Zimenitis populi qu 
venaient pour se reposer sur le sol de la cour humide et parsemé 
de matières diverses en décomposition. C'était un spectacle curieux 
offert par le papillon qui, cédant à l'attrait des matières odorantes, 
y revenait sans cesse, malgré le danger quil courait de la part 
des poules. Celles-ci se précipitaient sur lui dès qu'il s’approchait 
de la terre pour se reposer. 

De ces observations, je crois qu’il faut conclure que la protection 
dont seraient favorisées les Zygæna en général laisse quelque peu 
À désirer, surtout si l’on considère le parasitisme des Diptères et 
des Hyménoptères beaucoup plus meurtrier pour les Lépidopteres 
que l'appétit des Vertébrés. 

I1 suffit en effet de récolter les coques contenant les chrysalides 
des Zygæna pour constater de quelle quantité et de quelle variété 
de parasites invertébrés les Zy.gæna ont à souffrir. Rien n’est plus 
aisé, comme chacun le sait, que de recueillir les coques formées 
par les chenilles de Zygæna, au moment où elles se chrysalident : 
ces coques se trouvent attachées à des brins d'herbe, à des tiges 
de bruyère, à des feuilles d'erpngium, etc, etc. De ces coques, 
placées dans des boîtes d'éclosion, sortent soit des papillons, soit 
des mouches. Chaque espèce est parasitée par un nombre plus où 
moins grand d'espèces de Diptères et d'Hyménoptères. A Dom- 
pierre-sur-Mer (Charente-Inférieure), M. Vigé a obtenu 3 espèces 
différentes d'Hyménoptères et une espèce de Diptères qui sont 
sorties des chrysalides de la Zygæna hippocrepidis-occidentalis; 
moi-même, j'ai obtenu des coques de la même Zygæa, ramassées 
à Auzay (Vendée), dans la charmante « vallée des Adons », 
chez mes aimables hôtes M. le colonel Sabouraud et M. D. Lucas, 
une espèce d'Hyménoptère tout à fait différente de celles trouvées 
à Dompierre, mais aucune des espèces de Dompierre. Les espèces 
de parasites sont donc variées pour la même espèce de Zygæna, 
suivant les lieux et à une bien courte distance. Dès lors, comment 
peut-on prétendre que les Zygæna « bénéficient d'une protection 
interne », et quelle fantaisie que cette prétendue protection, alors 


que la plus simple expérience démontre l'effroyable hécatombe 


422 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


résultant pour les Zygæna du parasitisme des Hyménoptères et 
des Diptères. Ce que les oiseaux consomment de papillons n’est 
rien, comparativement à la destruction occasionnée par les 
mouches diverses, parasites des chenilles. C’est une vérité connue 
de tous. 

Quoi qu'il en soit, les Zygæna se trouvent souvent en assez 
grande abondance dans les lieux qu'elles habitent, et comme elles 
sont susceptibles de nombreuses variations, elles constituent pour 
le chasseur-entomologiste un agrément auquel je suis pour ma 
part très sensible. De plus, certains exemplaires sont fort ambigus 
et difficiles à rapporter avec certitude à une espèce bien définie. 
En outre, les hybridations naturelles paraissent plus fréquentes 
chez les Zygæna que dans d’autres groupes de Lépidoptères. 

Toutes ces circonstances contribuent à rendre très intéressante 
l'étude des Zygæna. Ma collection contient environ 20,000 exem- 
plaires classés. C’est avec ces documents que je publie les obser- 
vations suivantes : 


Zygæna rubicundus, Huebner, 137. 


La figure donnée par Huebner ne cadre, comme couleur des 
ailes supérieures, avec aucun des exemplaires que j'ai vus. Freyer 
(Neuere Beitre ge, UT, p. 13) ne semble pas être lui-même satisfait 
de la figure publiée par Huebner, quoiqu'il n’y ait, d’après son 
opinion, aucun doute sur l'identification de l'espèce. « Es ist kein 
Zweifel, dass sie Hübners Sp. rubicundus ist, obgleich das 
Hübner'sche Bild nach einem sehr verloschenen Exemplare 
gefertigt worden zu seyn scheint und deshalb blaesser und heller 
als meine nach einem frischern Exemplar gefertigte Abbildung 
ist. » Mais la figure 3 de la planche 200 des Neuere Beitrege est 
encore bien inférieure à celle de l'ouvrage de Huebner. La critique 
de Freyer, pour être vraie, est cependant déplacée, puisqu'il n’a 
pas su faire même aussi bien. 

Boisduval a figuré la Zygœna rubicundus sous le nom 
d’erythrus, d'abord dans l'Essai sur une Monographie des Zygé- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 42 


e2) 


nides (PI. 1, fig. 6); puis dans l’/cones historique (PI. 52, fig. 1). 
Duponchel la représente également sous le nom d’ery/hrus (Suppl. 
Crépusc., PL IV, fig. 1). Enfin, tout récemment, M. Renato Perlimi, 
dans son travail intitulé : orme di Lepidotteri esclusivamente 
italiane, donne une bonne reproduction en couleurs de la Zygæna 
rubicundus d’après les procédés chromophototypiques (Tav. IT, 
fig. 10). La Zygœna rubicundus est en effet exclusivement ita- 
lienne, et pour cette espèce, M. Perlini est d'accord avec le titre 
de son ouvrage. 

J'ai reçu la Zygæena rubicundus de Cerchio (Abruzzes), où 
elle a été recueillie par M. G. Leoni; de Monte-Castello, où 
M. Fr. Zickert l’a capturée par une altitude d’environ 600 mètres, 
à la fin de juin 1907, et de Polleca, sur les monts Aurunci, où 
M. Orazio Querci a récolté de superbes exemplaires en Juin 1000, 
également par 600 mètres d'altitude. 

Duponchel dit que erythrus (rectè rubicundus) a été prise en 
Sicile, près de Randazzo, par À. Lefebvre. I] paraît que l'espèce 
n'a pas été retrouvée en Sicile depuis cette époque. 

Dans Berlin. entom. Zeitschrift (Band LIT, 1008), M. Clemens 
Dziurzynski, de Vienne, auteur d’un travail intitulé : Die pale- 
arktischen Arten der Gattung Zvgaæna, donne pour patrie à 
rubicundus, en outre de l'Italie, « mittel-und süd-Frankreich ». 
Jamais rubicundus n'a été rencontrée dans le centre, n1 dans le 
midi de la France. 

Le specimen typicum erythrus de Boisduval existe encore dans 
sa collection; mais Boisduval avait remplacé l'étiquette ery#hrus 
par celle plus exacte de 7ubicundus. 


Zygæna Erythrus, Huebner, 87. 


C'est bien l'Erythrus, de Provence, qui a été décrite et figurée 
sous le nom de Saportæ par Boisduval (Zcones, PI. 52, lg. 2 et 3, 
pages 38 et 39) et par Duponchel (Suppl. Crépusc., PI IV, 10202) 
pages 34-37). Mais il convient de lire ce que Duponchel écrit à 


424 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


la page 147 du Szpplément, relativement à l'erreur de détermi- 
nation dont 1l s'était fort bien rendu compte. 

La Zygœna Erythrus vole depuis la fin de juin jusqu’à la fin 
de juillet a Gen Sicile, a généralement le fond des ailes 
supérieures d’un gris plus ou moins jaunâtre et plus clair que dans 
les autres localités. Cependant une © prise à Rome, près la Via 
Appia, présente le même caractère. 


Ma collection contient la Zygæna Erythrus des localités sui- 
vantes : Rome (R. Obthr.); Cerchio, dans les Abruzzes (G. Leoni) ; 
Monte-Castello (Zickert); localités diverses dans la province 
d'Avellino (Fabresse); Bordighera (H. Powell); Palerme (Bel- 
lier); Col de Castillon, dans les Alpes-Maritimes (Decoster); 
Hyères, dans le Var (Emm. Martin et H. Powell); environs de 
Saint-Zacharie, de Marseille et d'Aix (Gédéon Foulquier); bords 
du Drac, près Grenoble (Guenée); La Penne (8 juillet 1906; 
DASiept): 

La chenille de la Zygœna Erythrus vit sur l'Eryngium cam- 
pestre; elle mange aussi le serpolet; la coque est luisante et d’un 
blanc grisâtre. Plusieurs espèces de Diptères-Tachinaires sont 
parasites de la Z Æyythrus. Je regrette de n'avoir pu en obtenir 
la détermination spécifique. Le papillon varie beaucoup pour la 
taille. À Grenoble et à Marseille, on trouve des individus souvent 
très petits. 


Ab. citrina, Obthr. 


Il y avait un exemplaire de cette variété, sans indication de 
localité, dans la coll. Kuwert, maintenant jointe à la mienne. 


Il est aisé de distinguer Æyythrus de purpuralis (Minos) par 
le caractère suivant : chez Æyythrus, l'espace costal basilaire infé- 
rieur des ailes supérieures est toujours rouge, tandis qu'il est 
bleuâtre chez purpuralis. T1 s'agit de l’espace compris entre la 
nervure sous-médiane et le bord interne des ailes supérieures. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 425 


M. Fritz Zickert, de Naples, a décrit dans Eng. Zeits., n° 20, 
Guben, 1005, une Ab. /rpina, d'Erythrus, provenant de Paternopoli 
(Avellino). Je ne connais pas cette Aberration où du moins Je n'ai 


pas réussi à la reconnaître d’après la description. 


Zygæna purpuralis, Bruennich. 


Charles Barrett a figuré la Zygœna purpuralis avec le nom de 
Minos, à l'état de larve et d’imago, sous les n* 4, 4a et 40 de 
la PL 8 du Vol. II de The Lepidoptera of the British Islands. 
L'Espèce se trouve en Grande-Bretagne, où elle fut pour la pre- 
mière fois rencontrée, en 1853, dans les endroits incultes et cal- 
caires du comté de Galway (Irlande occidentale), principalement 
près de la côte. Plus tard, elle fut trouvée dans d’autres places 
de l'Irlande. En Ecosse, la Zygæna Minos a été capturée dans les 
environs de Loch-Etive, dans l’Argyleshire et sur la côte de 
Forfarshire. Au Pays de Galles, elle fut récoltée près d’Abersoch, 
sur les bords de la baie de Cardigan, où on la remarqua abon- 
dante, dit Barrett, en 1887 et en 1880. 

Ma collection contient un grand nombre d'exemplaires irlandais, 
écossais et gallois. Ils diffèrent de ceux du continent par une 
taille un peu plus petite et la couleur plus claire des parties bleu 
d'acier des ailes supérieures. Le corps est très velu, comme dans 
nos montagnes. C’est la forme xwbigena, Birchall. La chenille, 
dans les Hes Britanniques, vit sur le 7’ 2ymus serpyllum, en avril 
et mai. 

D’après Barrett, elle se nourrit, en outre, des plantes suivantes : 
Polygala vulgaris, Pimpinella saxifraga, Beronica ofhcinals, 
Trifolium et Genista tinctorta. 

En France, la Zyg. purpuralis est surtout une espèce de mon- 
tagnes; mais on la trouve aussi dans les plaines, notamment à 
Brosville et à Pont-de-l'Arche, en Normandie (I. Dupont); aux 
environs de Paris (Bellier); à Chartres (Guenée). La race des 
plaines de la Beauce est caractérisée par une villosité abdominale 
très faible, par la tache rouge du milieu des ailes supérieures 


426 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


échancrée postérieurement et ne s’avançant pas, du côté, interne, 
plus loin que la tache costale. Ce caractère est curieux : de la 
base des ailes supérieures partent en éventail une tache rouge 
costale courte et une tache rouge longue, celle-ci occupant l’espace 
compris entre les nervures médiane et sous-médiane. La tache 
rouge qui se trouve plus allongée que les deux autres, dans 
l'espace cellulaire, n’est pas jointe par son pédoncule aux deux 
taches qui partent de la base, et cette tache longue se trouve, à 
sa naissance, bien plus séparée des autres taches, par un espace 
bleuâtre de la couleur du fond, que dans les autres races de 
purpuralis. De plus, les ailes inférieures rouges sont très finement 
lisérées d’indigo. Dans la var. tyrolienne znferrupta, Stgr., se 
trouve accentué le caractère distinctif de la race chartraine. 

Pur puralis est commune à Boujailles (Doubs) ; à Fusio (Tessin) ; 
à Stuttgart; sur la route du Simplon et dans la vallée de Zermatt 
(Valais); à Innsbruck (Tyrol); à Cerchio (Abruzzes); en Pié- 
mont, notamment à Grissolo; au Lautaret (Hautes-Alpes); à 
Eclepans (Suisse); à Ax (Ariège); à Gavarnie et à Cauterets 
(Hautes-Pyrénées) ; à Digne, Entrevaux et Allos (Basses-Alpes); 
à Aix-les-Bains et Lanslebourg (Savoie), à ChamouniX (Haute- 
Savoie); à la Chartreuse de Prémolles (Isère); dans les Alpes- 
Maritimes (Moulinet, Vallée du Roubion). Elle existe aussi à 
Panticosa (Espagne); en Grèce; dans quelques parties des 
Pyrénées-Orientales, notamment à la vallée d'Eyna, mais où elle 
m'a paru rare; à Stettin, en Prusse; en Autriche. 

Habitant des localités si différentes, notamment par l'altitude, 
il est aisé de croire que la Zygæna purpuralis présente des formes 
également différentes selon les lieux. C'est ainsi que dans les 
parties sèches des pelouses du Lautaret, pwrpuralis est de taille 
relativement petite et d'aspect plus transparent, tandis que dans 
les Alpes-Maritimes, pur puralis est grande, d’un rouge vif et d’un 
faciès opaque. On pourrait distinguer ces races par des noms; 
mais elles sont liées entre elles par des transitions si intimes et, 
au même lieu, on trouve parfois des individus si dissemblables, 
que je juge tout à fait inutile de surcharger la nomenclature. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 427 


Pluto, Bdv. (Zcones, PI. 52, fig. 4), est une purpuralis analogue 
à la race des Alpes-Maritimes et du Piémont; Winos (lcones, 
PI 52, fig. 5) représente la forme de Franche-Comté; malheu- 
reusement Boisduval n’a pourvu d'aucune indication de localité 
les Zygæna Minos de sa collection. Je possède des Zygæna éti- 
quetés : Mont-Rose et Piémont, Feisthamel; mais il est impossible 
de savoir s'ils sont des Pluto, selon Boisduval; car cet auteur 
paraît très hésitant. Voici, en effet, comment Boisduval termine 
la notice qu'il a écrite sur Pluto : « M. le colonel Feisthamel a pris 
à Domo d’Ossola et au Mont-Rose une grande quantité de 
Zygæna parmi lesquels se trouvent plusieurs individus que Je 
crois appartenir à cette espèce (Pluto); mais ils sont tellement 
intermédiaires entre elles, Wiros et Saporte, qu'à moins de les 
avoir élevés de la chenille, il est presque impossible de dire s'ils 
sont plutôt des variétés de l’une que de l’autre. Il se pourrait 
même que quelques-uns ne fussent que des hybrides ». Je crois 
devoir observer que jamais le colonel Feisthamel n’a pu prendre 
une Zygœna sur le Mont-Rose, massif de neige et de glace sur 
lequel aucun papillon ne peut séjourner. Le colonel Feisthamel, 
établi à Domo d'Ossola, a pu chasser sur des montagnes très 
éloignées du Mont-Rose, mais d’où on pouvait en apercevoir les 
cimes. Il me semble que c’est ainsi qu'il faut entendre l'expression : 
Mont-Rose, employée par Boisduval. Je n'ai jamais vu parpuralis 
dans les Charentes. L'Espèce ne se trouve ni en Bretagne, n1 en 
Algérie. L'Ab. /utescens existe pour purpuralis (Minos) comme 


pour toutes les Zygæna; mais je ne l’ai encore Jamais vue. 


Zygæna gallica, Obthr. 


J'ai décrit dans le Bulletin Soc. ent. France, 1808, p. 21, cette 
forme française de la Zygæna Corycia, d'après un certain nombre 
d'exemplaires pris à Digne, en juin 1897. Pour rendre cette 
description valable, j'ai fait figurer gallica sous le n° 173 de la 
PL XXXVIII du Vol. III des Etudes de Lépidoptérologie 


428 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


comparée. Gallica est d’un aspect frêle et d’une contexture déli- 
cate; elle doit être très rapidement déflorée par le vol. Je n’ai vu 
aucun nouvel exemplaire depuis ceux que J'avais reçus, il y a 
douze ans, lorsque J'employai les chasseurs de Digne, durant toute 
la saison. Peut-être gallica est-elle très localisée aux environs de 
Digne? Augustin Coulet avait pris un premier exemplaire en 
1806; c'est le seul que J'ai vu en dehors de la série capturée 
en 1807. 

Comme c'est une Zygæna de peu d'apparence, il est possible 
qu'elle n'ait pas retenu l'attention des chasseurs et qu’ils n’aient 
pas pris soin de noter le lieu où ils l’avaient rencontrée. Mais 
l'intérêt offert par cette forme française d’une Espèce orientale 
n'échappera à personne; jusqu'à présent la Zysgæna gallica n'a 
été observée en France qu'aux environs de Digne. Il est possible 
qu'elle habite quelque partie des Alpes-Maritimes ou de Vaucluse, 
et 1] me paraît utile de la signaler à l'attention des Entomologistes 
qui chassent dans le Sud-Est de la France. 


Zygæna Cynaræ, Esper. 


Esper a publié avec le nom de cynare, sous les n°° 2, 3 et 4 
de la Tab. XXXWVII, la figure d’une espèce de Zygæna dont le 
type n'a pas été trouvé en France jusqu'ici. Les exemplaires qu'il 
a représentés avaient été trouvés par le Haushofmeister Rummel, 
pendant son séjour à Lemberg, en Gallicie, dans un bois de 
chênes, de noisetiers et de hêtres, près d'un lieu désigné sous le 
nom de Winiky. L’abdomen de Cynaræ est fortement annelé de 
rouge; le fond des ailes est d’un bleu verdâtre assez clair et les 
parties rouges sont d’un vermillon vif. Feu Millière avait ren- 
contré dans les Alpes-Maritimes une forme géographique de 
Cynaræ, généralement dépourvue d’anneau abdominal rouge, 
aux ailes d’une couleur plus sombre, les parties bleues étant d’une 
teinte ardoisée, et les parties rouges étant elles-mêmes d’un 
carmin vif, mais un peu vineux. [l m'avait donné quelques exem- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 429 


plaires qui portent encore l'étiquette écrite de sa main, à l'encre 
rouge, et ainsi lhibellée : « dahurica, Cannes. » 

Le même Millière avait envoyé 5 exemplaires de la Zyzgæna 
en question à son ami Guenée, dans la collection de qui je les ai 
retrouvées, semblablement dénommées. Je ne crois pas que cette 
Zygæna ait été de nouveau observée à Cannes. Il est vrai que 
depuis le temps où vivait Millière, le pays de Cannes a été bien 
transformé par des constructions diverses et des jardins qui ont 
pris des places jadis occupées par des plantes sauvages. Mais si 
cette Zygæœna dahurica (selon Millière) n'a pas continué à être 
capturée aux environs de Cannes, du moins à ma connaissance, 
elle a été prise en certaine quantité à Bordighera, par MM. Harold 
Powell, Decoster et Balestre. C’est ainsi que j'ai sous les yeux 
plus de 100 individus recueillis à Bordighera, presque tous, 
depuis le 15 jusqu'au 20 juin, pendant les années 1906 et 1907. 
La coque est d’un gris jaunâtre brillant, en forme de bateau assez 
profond, dont les extrémités ne sont point prolongées, mais 
obtuses ; on la trouve collée sur les tiges de graminées. 

Millière avait référé la Zygæna trouvée par lui à Cannes à 
Dahurica, Boisduval (/cones, PI. 54, fig. 7), et Duponchel (Zyg. 
Supplém., PL XII fig. 3). C'est d’ailleurs exactement le même 
papillon que Boisduval et Duponchel ont figuré; Duponchel dit 
en effet (p. 135) que l'individu figuré lui a été communiqué par 
M. Boisduval. Je dois observer ici qu'il y a, dans l'ouvrage de 
Duponchel, une transposition des chiffres 2 et 3 sur la PI XII 
Emdansile texte Cestile n°3 (non le n22)/de la Pl XIT qui est 
effectivement dakurica. 

Cette Zygæna dahurica ‘existe encore dans l’ancienne collection 
Boisduval; la figure donnée par Duponchel est plus exacte que 
celle donnée par Boisduval; mais le papillon est unique; c’est 
un ©, et sa référence à C'ynaræ est, pour moi, incertaine. Je crois 
que Guenée, dont la collection contenait une Q étiquetée dakurica, 
malheureusement sans indication de provenance, mais en effet 
assez conforme aux Zygæna prises par Millière et à celles récoltées 
à Bordighera, a communiqué à Millière le nom que celui-ci avait 


430 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


adopté; Je ne doute point que Guenée n'ait été de très bonne foi 
en identihiant sa © au dahurica O' de Boisduval. Mais ayant 
devant moi les deux papillons, le G' dahurica, Bdv., et la Q 
dahurica, secund. Guenée, j'ai la conviction que l'identification 
de dahurica Boisduval et Duponchel à la forme de Cynaræ de 
la Riviera est tout ce qu'il y a de plus contestable, parce que la 
forme des ailes supérieures est notamment tout autre. 

Dès lors, 1l faut, à mon avis, abandonner la dénomination 
dahurica pour la forme Cynaræ de la Côte d'Azur française et 
italienne. 

J'ai écrit toute cette dissertation en vue de renseigner les 
Entomologistes, assez nombreux encore, à qui Millière montrait 
sa collection et communiquait des dénominations que je sais du 
reste conservées telles quelles dans plusieurs collections françaises 
et étrangères. 

De son côté, Herrich-Schaeffer a figuré avec le nom de dakurica, 
sous le n° 68, une Zygæna à abdomen marqué de rouge, de teinte 
un peu moins sombre que les Cyxare de Cannes et de Bordighera, 
« Welche vollkommen zur Abbildung und Beschreibung von 
Boisduvals Dahurica aus Sibirien passt »; mais à la page 35 du 
texte, on lit qu'Herrich-Schaeffer adopte plutôt le nom de geste, 
sous lequel 1l avait reçu de MM. v. Weissenborn et Heydenreich 
les deux sexes de l’Espèce, et notamment la © figurée sous le 
n°06: 

Malheureusement, j'ai été inhabile à trouver dans Hernich- 
Schaeffer l'indication de la localité d’où provient sa gemistæ (p. 35) 
— dahurica (fig. 68). En tout cas, cette gewistæ-dahurica, H.-S, 
n’est pas exactement conforme à la Zygæna cynare de Bordighera 
et de Cannes (olim) dont voici la description caractéristique : 
ailes supérieures larges (tandis qu’elles sont étroites dans dahurica, 
Boisduval), en dessus, d'un bleu ardoisé sombre, mais peu opaque, 
avec 2 taches basilaires et 3 taches punctiformes nettement sépa- 
rées, assez arrondies, d’un rouge carmin vif, mais un peu vineux 
et sans aucune tendance à la teinte vermillon; ailes inférieures, 
en dessus, assez largement bordées de bleu ardoisé pâle et trans- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 431 


parent, ayant le centre d'un rouge carmin, non opaque, quoique 
de nuance assez vive dans les exemplaires frais. Corps et abdomen 
d'un bleu d’acier très sombre, sans anneau rouge chez le G, géné- 
ralement marqué de rouge sur les côtés ou même finement annelé 
de carmin chez la ©. Dessous des ailes, comme le dessus, mais 
plus pâle, surtout pour le fond bleu ardoisé qui est luisant, parait 
dépourvu d'écailles et ne semble coloré que par la transparence 
des écailles du dessus. Les franges sont fines et d’un brun noirâtre. 

Ce n'est peut-être pas absolument la forme appelée 7'wratii par 
Standfuss; mais il me semble que les Zygæna de Bordighera 
sont cependant plus voisines de cette 7 wratu que de toute autre 
forme. C’est donc présentement sous ce vocable qu’elles peuvent 
être plus exactement désignées. Je compte faire figurer les deux 
sexes de la Zygœna Cynaræe-Turatn dans le V° volume des 
Etudes de Lépidoptérologie comparée, a représentation n'en 
ayant encore paru nulle part. 

On n'a trouvé Cynaræ jusqu'ici m1 en Angleterre, n1 dans 
d’autres parties de la France que les Alpes-Maritimes, ni en 
Espagne, ni en Algérie. C'ynaræ paraît être une Espèce de l’Europe 
orientale qui, vers l'Ouest, ne dépasse pas les Alpes. Elle se trouve 
dans la Russie méridionale avec le nom de centaureæ, en Hongrie, 
en Gallicie, en Dalmatie (Zara), en Allemagne méridionale, en 
Piémont. 


Zygæna scabiosæ, von Scheven. 


En France, scabiosæ est une espèce de basse montagne; elle 
habite les Cévennes, les Pyrénées et les Alpes. En dehors de la 
France, scabiosæ se rencontre en Italie, en Sicile, en Espagne, en 
Allemagne, en Suisse, en Scandinavie, en Sibérie. Elle manque 
actuellement en Angleterre, où 1l est possible qu’elle ait jadis 
existé, et en Algérie. 

Dans la dixième partie du journal Der Naturforscher, publié 
à Halle, en 1877, le Pasteur von Scheven a fait insérer, sous le 


432 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


titre de: Beytraege zur Naturgeschichte der Insekten (Erstes 
Stueck), un article où, de la page 88 à la page 101, ledit Pasteur 
fait part d'observations qui m'ont semblé très judicieuses sur les 
Lépidoptères. À la page 07, von Scheven dénomme le Spznx 
scabiosæ comme suit : « 7—Sp. Scabiosæ. So nenne ich denje- 
nigen, welcher drey lange rothe Flecken auf den Oberfluegeln 
hat ». C'est-à-dire en français : « Je nomme ainsi celui qui a trois 
longues taches rouges sur les ailes supérieures. » Cette simple 
phrase fixe la question. La Zygæna scabiosæ, avec 3 longues 
taches rouges sur les ailes supérieures, c’est la forme normale de 
l'Allemagne et des Pyrénées; mais ce n’est pas la forme qu'on 
trouve ordinairement dans les Cévennes, les Alpes françaises et 
italiennes où les 3 longues taches rouges, généralement divisées 
par une interruption qui atteint la médiane, ou la sous-médiane, 
ou même les deux, présentent plutôt 5 taches courtes que 3 longues. 
La Zygœna Scabiose est en effet une Espèce fort variable sur 
laquelle Calberla a écrit dans le Vol. VIII de l’/715, sous le titre : 
Ueber einige transalpine Zygœnen (pages 203 à 213), de copieuses 
observations. Il les a résumées en une sorte de Tableau où :1l 
s'efforce de mettre les choses au point, pour l’époque (1895) où 
il l’a établi; ce tableau est dressé seulement en ce qui concerne 
les races sudalpines et italiennes; nullement en ce qui regarde les 
races françaises à l'étude desquelles je vais procéder plus loin. 
Esper a figuré scabiose, assez grossièrement, sous les n° 3 a et 
30 de la Tab. XXIV; Huebner a représenté scabiosæ sous les 
n° 6 et 86; Boisduval, sous les n°* 1 et 2 de la PI. 53 de l’Zcones; 
Duponchel, sous les n°” 5 a et 5 de la PI. IV du Supplément. 
Herrich-Schaeffer, sous le n° 3, avec le nom de Orion; sous les 
n° 7,0, 10, 11, avec le nom de 7 riptolemus, sous les n° 48 et 49, 
avec le nom de Celeus; et sous le n° 03, avec le nom de P/uto. 
De son côté, le très distingué et très respectable botaniste et 
entomologiste de Bâle, docteur H. Christ, a publié dans Mirthei- 
lungen der Schweizer. entomolog. Gesellschaft (Decemb. 1880), 
une intéressante étude intitulée : Die Zygænen unserer Südalpen, 


qu’il a accompagnée d’une Planche où il représente, sous les n° 1 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 433 


à 5, des scabiosæ provenant d'Andlau (Alsace), du pays de Bade, 
de Moravie et de Hongrie, et sous les n° 6 à 10, des 77iptolemus 
capturées à Perrero, en Piémont; 7zp1olemus étant considérée 
comme une forme sudalpine de scabiosæ reliée à celle-ci par 
d'insensibles transitions. Bien que je possède dans ma collection 
plus de 700 exemplaires de la Zygæna scabiosæ de provenances 
très diverses, Je sens que mon matériel comporte encore bien des 
lacunes, notamment en ce qui concerne l'Allemagne. Mais Je 
m'efforcerai, pour l’Europe occidentale tout au moins, d'analyser 


exactement les races locales que je suis parvenu à connaître. 


1° Hautes-Pyrénées. —— Scabiosæ n'est pas très rare tout 
auprès de la ville de Cauterets, le long du chemin qui, descendant 
des bains de la Raillère, passe un peu au-dessus de la maison 
hospitalière. C’est une Espèce un peu molle, facilement défraichie, 
qui se plait dans les pelouses entourées de bois et dans les allées 
sylvatiques et ombragées où il est facile de la capturer posée sur 
les fleurs. Vers 11 heures du matin, lorsque le soleil est ardent, 
elle vole rapidement au-dessus des prés, dans les vallées boisées, 
ou sur les flancs de la montagne calcaire appelée : Péguère. 
Autrement elle paraît moins active. Sa coque est d’un blanc gri- 
sâtre argenté et luisant; elle est un peu allongée et on la trouve 
fréquemment fixée sur les brins de bruyère où il est aisé de la 
récolter, tout le long des chemins qui sont tracés entre les bains 
de la Raillère et la ville de Cauterets. La forme ordinaire, dans 
les Hautes-Pyrénées, est celle que Boisduval a représentée sous 
le n° 1 de la PI. 53 de l’Zcones; c’est-à-dire la forme qui présente 
sur les ailes supérieures trois taches allongées, rouges : 1° la 
costale, qui est la plus courte; 2° la médiane, longue et se dilatant 
vers son extrémité, 3° la sous-médiane, longue aussi et légèrement 
courbée en arc de cercle; chacune de ces trois taches, dans la 
majorité des exemplaires, est continue, sans séparation; mais on 
trouve quelquefois des individus chez lesquels la tache médiane 
est amincie, terminée par un bouton généralement réuni au moyen 
d'un mince trait rouge à son pédoncule. Il arrive parfois, mais 


28 


434 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


rarement, que les deux extrémités des taches rouges médiane et 
sousmédiane sont nettement détachées de leur base. Boisduval a 
figuré sous le n° 2 de la PI. 53 de l’/cones, une Q ayant la tache 
médiane cellulaire divisée en deux parties. Cette division partielle 
ou totale est plus fréquente chez la Q que chez le G, dans les 


races où normalement les trois taches longues sont entières. 


2° Pyrénées - Orientales. -_ [a scabiosæ des Pyrénées- 
Orientales ne diffère presque point de celle des Hautes-Pyrénées. 
Les exemplaires avec les trois taches rouges non interrompues 
constituent la règle. La scabiosæ ne vole pas au Vernet même, 
mais à une altitude un peu plus grande. Pour la trouver, 1l faut 
aller plus haut que le village de Casteil; on aperçoit les premières 
Zygæna scabiosæ dans le ravin frais et boisé, au revers de la 
montagne de Saint-Martin-du-Canigou, et en s’élevant dans la 
haute vallée du Cady, jusqu’à la forêt de Randaiï et à la prairie 
alpestre de Mariailles. Dans les Pyrénées, le fond des ailes de 
scabiosæ d'est plus opaque, tandis que celui de la © est plus 
clair et plus transparent. Chez les individus bien frais, les teintes 
rouge et gris indigo sont assez vives; les antennes du O° sont 
longues et paraissent flasques ; l'abdomen noir paraît un peu velu, 
tandis que la © a les antennes très fines, un peu plus courtes et 
l'abdomen presque sans villosité. Je n'ai jamais vu un exemplaire 
pyrénéen ou autre de Zygæna scabiosæ ayant l'abdomen annelé 
de rouge; dans les Pyrénées, je n'ai constaté aucune tendance à 
l’'envahissement des ailes inférieures rouges par la teinte indigo 
clair de la bordure. La taille des scabiosæ pyrénéennes est relati- 
vement grande. J'ai fait figurer sous le n° 140 de la PI. VIII des 
Etudes d'Entomologie une Zygena qui, par ses antennes longues 
et une teinte rouge diffuse sur le dessus de ses ailes supérieures, 
pourrait être considérée comme un produit hybride de scabiosæ 
et de loxicere, à moins que ce ne soit de dyba. Cependant nous 
n'avons à cet égard aucune certitude; c'est une simple impression 
dont J'ai fait part; rien de plus. 

M. H. Powell, chassant pour moi, en 1900, dans les Pyrénées- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 435 


Orientales, a capturé 106 Zygæna scabiosæ, d’une parfaite frai- 
cheur, pendant le mois de Juillet et le commencement d'août, en 
la haute vallée de Cady, à Randaï et Mariailles, entre 900 et 
1,700 mètres d'altitude. Parmi ces 106 exemplaires, 1l y en a 103 
avec les ailes allongées; les 3 taches rouges des supérieures, en 
dessus, sont longues, plus ou moins épaisses, continues et non 
divisées; mais deux GO‘ et une © capturés avec les 103 autres 
exemplaires ont les ailes plus courtes; la teinte rouge est un peu 
moins vive; un O'et la Q ont la tache médiane nettement divisée 
en deux parties; l’autre O' a les taches médiane et sousmédiane 
divisées, de façon à montrer 5 taches, comme Xoweo, de Sicile, 
ou Veapolitana, de la province d’Avellino. Ces deux C' et cette ©, 
bien authentiquement pyrénéens, seraient tout à fait à leur place 
avec les formes sudalpines. Ceci est une preuve de l’unité de 
l'Espèce scabiosæ pyrénéenne, provençale et italienne, et la 
démonstration que dans une même unité spécifique, une race locale 
normale, différente d’une autre, peut toujours paraître chez cette 
autre à l’état aberrant. Du reste, la scabzosæ des Cévennes confirme 
cette proposition. 


. 3° Cévennes. — M. Dayrem a recueilh, en juin et Juillet 1908, 
29 exemplaires de scabiosæ qu’il a trouvés aux environs de Florac 
(Lozère). Sur ces 29 individus, 5 O' sont avec 3 longues taches 
rouges non interrompues sur les ailes supérieures; mais chez ces 
5 ©, la tache médiane, amincie en son centre, se termine par une 
sorte de bouton, comme dans les figures 4 et 8 du travail déjà 
cité du D’ Christ: Die Z'ygœner unserer Suedalpen. Chez les 
24 autres échantillons des deux sexes, la tache longue sous- 
médiane reste continue; mais la tache médiane est divisée en deux 
parties : 1° un petit triangle rouge à la naissance de la cellule, 
2° une tache rouge arrondie, semblant parfois plus foncée au 
centre que sur ses bords, à l'extrémité de l’espace cellulaire. Telles 
sont les figures 5, 9 et 10 données par le D' Christ. Ces Zygæna 
scabiosæ de Florac sont donc en grande majorité des 7 71p{0- 
lemus ; elles ne sont cependant pas, dans leur ensemble, semblables 


430 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


aux /'riplolemus des Alpes provençales, en ce sens que la teinte 
rouge est un peu plus vermillon dans la Lozère et que les ailes 
inférieures y sont moins largement bordées d’indigo. De plus, sur 
les ailes supérieures, les parties rouges sont généralement plus 


larges, ce qui modifie légèrement l'aspect. 


Il y a donc entre les scabiosæ des Pyrénées une analogie plus 
grande avec les formes d'Allemagne : Brunswick, Thuringe, 
Wurtemberg, et même de certaines parties du Piémont, notamment 
de Grissolo, qu'entre les mêmes scabtosæ pyrénéennes et les sca- 
biosæ provençales, ainsi que l'étude des races de la région sud- 
orientale de la France le démontre aisément. 


4° Basses-Alpes, Var et Alpes-Maritimes. — Plusieurs 
races ont été capturées dans la région de Digne, Entrevaux, 
Puget-Théniers, Mont-Gourdon-Garamagne, Cascade de Neigeas 
en la vallée du Var, Venanson, Bonson, Sainte-Baume, Le Lauzet, 
Enchastrayes, Vallée de Roubion, La Turbie, Moulinet, Vence, 
Levens et Madone de Fenestre, Castillon, Tourette-sur-le-Loup, 
toutes localités sur lesquelles les chasseurs de Digne, M. Gieseking, 
M. Harold Powell, M. Gédéon Foulquier et M. Decoster, m'ont 
assez largement documenté. 

Ces races provençales se relient aux formes italiennes et, si l’on 
trouve parmi elles quelques exemplaires conformes à la race ordi- 
naire pyrénéenne, ainsi que cela a lieu à Digne, le plus souvent 
on constate dans le Sud-Est de la France l'existence de races de 
scabiosæ bien différentes de celles de la région montagneuse des 


Pyrénées-Orientales et des Hautes-Pyrénées. 


Je crois que la forme la plus répandue dans les Alpes de 
Provence est celle que Herrich-Schaeffer a figurée avec le nom 
de Z'riptolemus, sous les n* 7 et 11 de la Tab. IT des Zygænides 
Europ., après que Freyer avait donné lui-même, sous les n° 1 et 2 
de la Tab. 164 des Neuere Beitrege zur Schmetterlingskunde 
(Vol. Il), la figure de la même Zygæna Triptolemus, qui ne me 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 437 


semble cependant avoir aucun rapport spécifique avec la 771pt0- 
Lemus de Huebner (n° 06 et 97). 

Chez Triptolemus , H.-S. 7, la tache rouge médiane des ailes 
supérieures est divisée en deux points rouges, éloignés l’un de 
l’autre, l’un restant à la base de l’espace cellulaire, l’autre, de 
forme arrondie, à l'extrémité. La tache rouge submédiane reste 
formée par un trait long un peu aminci à son centre, par rapport 
à la dilatation de ses extrémités. 

Orion, H.-S., figuré sous le n° 3 de la Tab. I des Zygænides 
Europ., ressemble beaucoup à Zriptolemus n° 7. Orion a la bordure 
bleue des ailes inférieures un peu plus large et l’amincissement 
du milieu de la tache rouge sousmédiane un peu plus prononcé; 
mais ces insignifantes différences, plus ou moins sensibles d’ail- 
leurs selon le coloriage des Planches, sont individuelles et ne 
justifient pas un nom distinctif. 

Pluto, H.-S., représentée sous le n° 03 de la Tab. 13 des 
Zygenides Europ. est une petite forme qu'on rencontre dans Îles 
Alpes-Maritimes et qui diffère de scabiosæ des Pyrénées, à 
3 longues taches rouges, par sa contexture plus grêle et la forme 
de ses ailes plus rétrécie. Pluto, H.-S., 03, présente en effet 3 taches 
rouges sur les ailes supérieures, et non 4, comme Triptolemus- 
Orion, où 5, comme Romeo; je possède des exemplaires tout à 
fait semblables au n° 03 de Herrich-Schaeffer, lequel n° 93 parait 
absolument différent du n° 107 portant cependant le même nom 
de Pluto. 

La synonymie des Zygæna est bien difficile à établir, puisque 
le même nom donné par le même auteur s'applique à des unités 
si différentes et qu’une foule de confusions, jadis commises, sont 
impossibles à redresser aujourd'hui, puisque la provenance des 
papillons figurés reste généralement ignorée. 

Cependant les noms de Zriptolemus, Freyer, Tab. 164; fig. 1 
et 2, et HS. 7 et 11 (Orion, H.-S, 3) me paraissent devoir très 
exactement désigner la race ordinaire de la Zygœna scabiose des 
Alpes de Provence; le nom de Pluto, H.-S., 03 (nec 107) s'ap- 
plique, comme je l’expose ci-dessus, à une variété de Triptolemus 


438 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


qu'on rencontre dans les Alpes-Maritimes. On trouve aussi dans 
les Alpes-Maritimes une autre variété de scabiosæ chez laquelle 
les taches rouges des ailes supérieures sont divisées comme chez 
Romeo, de Sicile, et Neapolitana, de l'Italie méridionale, c’est- 
à-dire de façon à former $ taches distinctes. 


Ces exemplaires semblent exactement référables à Triptolemus, 
Freyer (Tab. 14, fig. 4), des Alpes du Tyrol. Il ne faut pas. 
confondre cette forme de 77iptolemus avec la Triptolemus du 


même auteur (Tab. 164; fig. 1 et 2), dont J'ai fait mention plus 
haut. 


s° Sicile. -— Dans cette île, on trouve Romeo, Lefbv., figurée 
par Duponchel (Supplément; Zygénides; PI. XII, fig. 1), et dont 
je possède, d’après la note écrite par Guenée, l’exemplaire même 
qui a servi de type à Duponchel. 

Au sujet de Romeo, Duponchel dit (p. 132) : « M. Alexandre 
Lefebvre a trouvé cette Zygène à Randazzo, en Sicile, au pied 
nord de l’Etna, en juin 1824, et il l’a dédiée à M”*° la baronne 


Romeo, dont il a reçu le plus obligeant accueil à Randazzo 
même. » 


Romeo est donc, comme Goante, comme Orleans, un nom de 
personne. Pourquoi Staudinger et Rebel, qui se sont donné tant 
de peine pour faire accepter Oyleansi, au lieu d'Oyleans, nom que 
J'ai donné à un magnifique Parnassius du Thibet, n’ont-1ls pas 
ajouté un i au nom de M" Romeo? Romeot eût été une Jolie 
consonance; trois voyelles différentes de suite, n'est-ce pas un 
record d’euphonie ? 


Romeo a les taches, rouges, en dessus, divisées en 5 parties, 
sur les ailes supérieures, comme 77iptolemus, Freyer (Tab. 14; 
fig. 4); elle a les taches rouges en question d’une teinte un peu 
vermillon, au lieu de la couleur carmin vineux que présentent les 
autres races françaises et italiennes de scabiosæe. Aux ailes supé- 
rieures, en dessous, les taches si nettement divisées en dessus, 
tendent parfois à confluer, surtout chez les G. Romeo se rapproche 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 430 


beaucoup de Vevadensis. Celeus, Herrich-Schaeffer, n° 40, est sans 
doute assimilable à Vomeo. 


6° Neapolitana, Calberla. — Figurée par Renato Perlini 
(comme ©, alors que le spécimen représenté est certainement un 
d'), sous le n° 15 de la Tav. IV de l'ouvrage intitulé : Forme di 
Lepidotteri esclusivamente italiane. La Zygena Neapolitana à 
les taches rouges des ailes supérieures, en dessus, divisées en 
5 parties; de plus, elles sont généralement réduites; leur teinte 
n’est pas très vive; les ailes inférieures sont largement bordées 
de bleu indigo:; l’aspect général est assez sombre, autant à cause 
du rétrécissement et du peu d'éclat des parties rouges que du ton 
noirâtre du bleu. J'ai, sous les yeux, un grand nombre d’'exem- 
plaires récoltés par M. Zickert au Mont S. Angelo (900 mètres), 
le 1° juillet 1007; au Monte-Castello (400 à 600 mètres), les 20 
et 21 juin 1007, et à Bagnoli Irpino, le 25 juin 1007. 

Les ailes inférieures peuvent devenir entièrement envahies par 
la teinte sombre de la bordure, plus noirâtre que bleue; c’est alors 
VAb. Æoffmanni, Zickert, figurée sous le n° 12 de la Tav. III de 
l'ouvrage précité de Renato Perlini. Je possède 15 exemplaires 
de cette Ab. Æoffmanni, que m'a envoyés M. Zickert. Il les avait 
récoltés au Monte-Castello, dans la province d’Avellino, avec les 
Neapolitana, les 20 et 21 juin 1907. Parmi ces 15 Æoffmann, se 
trouve l’exagération nigerrima, Zickert, décrite dans Ærx/om. 
Zeits., n° 20; Guben, 1005. 

M. Zickert a trouvé au Monte-Castello (Avellino) l'Ab. à 
taches jaunes #aveola, de la Zygæna Scabiosæ-Neapolitana. 

On trouve dans les Alpes de Provence des exemplaires de 
Triptolemus conformes à Neapolitana; mais si on range tous les 
exemplaires de chaque localité ensemble, on constate que l'aspect 
général de la race est différent pour les scabiosæ provenant de 
l'Italie méridionale comparativement à celles qui ont été récoltées 
dans le Var et les Alpes-Maritimes. M. H. Powell a pris au col 
de Bartagne, dans la montagne de la Sainte-Baume, une scabtoseæ 


cadrant parfaitement avec Neapolitana; ce qui constitue un fait 


440 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


analogue à celui que J'ai constaté pour la scabiosæ des Pyrénées- 
Orientales, c’est-à-dire l'existence, à titre d’Aberration plus ou 
moins rare dans une localité, d'exemplaires différents de la forme 
normale de cette localité et semblables à la forme qui est normale 
dans d’autres localités. 


7° Nevadensis, Rambur. — Figurée sous le n° 10 de la PI. I 
du Catal. systémat. des Lépid. de l'Andalousie; ne paraît pas 
rare à la Granja où mon frère l’a prise au mois de juin; à la 
Sierra-de-Alfakar (juillet 1870) et à la Sierra-Nevada. Feu de 
Graslin avait capturé plusieurs exemplaires, dans les montagnes 
de Grenade, en même temps que le D' Rambur y capturait les 
types de sa Wevadensis. M. Chapman a trouvé WNevadensis à 
Casayo. 


Je pense que la Dalmatina, Boisduval (/cones, PI. 54, fig. 2), 
dont je crois avoir le type sous les yeux, est la même Zygæna 
que Wevadensis. Dans ce cas, le nom de Dalmatina serait plus 
ancien. Mais il me paraît impossible de savoir si le papillon de 
la collection Boisduval provient réellement de Raguse, ainsi qu'il 
est dit à la page 45 de l’/cones (Vol. IT). Rambur a, pour Bois- 
duval, une phrase bien sévère dans la note de la page 166 du 
Catal. systemat. de l'Andalousie; 11 se trompe d’ailleurs en disant 
que Boisduval n’a figuré qu'une Punctum. 


M. Abeille, de Marseille, donne des renseignements intéressants 
sur les premiers états de la scabiosæ provençale, dans le n° 1 des 
Mémoires de la Société linnéenne de Provence, paru en décembre 
1900. La chenille, dit-il, vit sur le Zathyrus pratensis, plante de 
la famille des Papilionacées, répandue dans les prés et les bois 
de toute la France, très abondante dans la région de la Sainte- 
Baume, et aussi sur l’Azppocrepis comosa, qui est également une 
Papilionacée. M. Abeille a élevé la chenille de scabiosæ,; mais il 
n'en a pas obtenu les parasites. Il attribue le manque de parasites 
de la chenille au soin extrême avec lequel elle se cache pendant 
le jour. Je crois pourtant bien avoir obtenu à Cauterets des para- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 441 


sites sortis des chrysalides de scabiosæ qui étaient des Diptères; 
mais j'ai eu le tort de ne pas les conserver. 

Les Scabiosa sont des plantes de la famille des Dipsacées; le 
genre scabiosa tire son nom du mot latin scabies, qui signifie gale, 
par allusion à de prétendues propriétés médicales de la plante; 
il contient un grand nombre d'Espèces. On en compte environ 80 
dans la Flore européenne. 

Les Zygœæna, en général, se reposent sur les Scabieuses, comme 
sur les Ombellifères et les Composées; mais leurs chenilles ne se 
nourrissent point de la scabieuse et von Scheven aurait pu mieux 
choisir le nom qu’il a attribué à la Zygœæna « welche drey lange 
rothe Flecken hat. » 

J'ai pris à Cauterets, en juillet 1908, un bizarre exemplaire de 
scabiose. Les ailes inférieures sont complètement hyalines, c'est- 
à-dire dépourvues d’écailles rouges, sauf le long du bord anal. 
Le liséré marginal indigo est resté normal. Les supérieures sont 
un peu plus pâles que chez les exemplaires normaux. Cette Aber- 
ration hyaline atteint un ' de grande taille et de beau dévelop- 
pement. 


Zygæna Zuleïma, Pierret. 


Feu Pierret a décrit et figuré dans les Annales de la Société 
entomologique de France, 1837 (pages 22 et 23 et PI. 1, fig. 8), 
avec le nom de Z#leima, une petite Zygæna spéciale à l'Algérie 
qui éclôt de très bonne heure, c'est-à-dire dès le mois de mars, 
aux environs d'Alger: tandis qu'à Lambèse, la même Espèce vole 
en mai et juin. Je la connais des localités algériennes suivantes : 
environs d'Alger, du Tarf, de Lambèse et d'Oran. 

Pierret dit, en la décrivant, que Zw/eima a été prise aux environs 
de Bône et que M. Doué l’a reçue d'Oran. Zxleima est une petite 
Zygæna, à nuances ternes. Le corps est tout noir, sans anneau 
rouge; le fond des ailes supérieures est d’un gris ardoisé pâle, 
avec 3 taches rouges longues, comme chez Scabiose, mais avec 


442 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


cette différence qu’elles sont, toutes proportions gardées, infiniment 
plus fines, et que la tache longue médiane se prolonge par un 
point rouge qui semble suspendu à son extrémité inférieure, et qui 
se trouve dès lors presque en contact avec le bord extérieur des 
ailes. Celles-ci sont finement lisérées de noirâtre, aussi bien le 
long du bord costal que du bord externe. Ce n’est pas une 
Zygæna bien commune. Lucas l’a figurée avec le nom de /#dicra, 
sous le n° 1 de la PI 3 des Lépidoptères, dans l’Aflas de 
l'Exploration scientifique de l'Algérie. J'ai publié moi-même la 
figure de la Zygœna Zuleima sous le n° 81 de la PI. 8, dans la 
XIIT° livraison des Etudes d'Entomologie. 


Zygæna Corsica, Boisduval. 


La première description de la Zygæna corsica à paru dans 
l'Essai sur une Monographie des Zygénides, suiv: du Tableau 
méthodique des Lépidoptères d'Europe, que Boisduval fit paraitre, 
en 1820, au début de sa brillante carrière entomologique. Ce furent 
Latreille et Bosc qui rédigèrent le Rapport sur le manuscrit de 
Boisduval, lequel manuscrit avait été présenté à l’Académie des 
Sciences, le 10 septembre 1827. Latreille et Bosc concluent dans 
les termes suivants : « Quoique M. Boisduval n'ait donné à son 
ouvrage que le titre modeste, Æssai d'une Monographic…., vous 
avez cependant pu vous convaincre par cette analyse que, tant par 
l'observation des habitudes des insectes dont il traite, que pour 
les signalements et la synonymie des espèces, il a fait tout ce 
qu'on pouvait attendre d’un bon naturaliste, dans l’état actuel de 
la Science. Peu de Monographies peuvent être comparées à celle-ci, 
et vos commissaires sont d’avis qu’elle mérite de trouver place 
dans les mémoires des savans étrangers dont l’Académie ordonne 
l'impression. — Paris, ce 1* octobre 1827. » 

L'ouvrage de Boisduval est d’un débutant, assurément riche de 
promesses; mais combien les Planches sont loin de valoir -celles 
que publièrent tant d'anciens maîtres, avant la Révolution ! 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 443 


+2 


La Zygæna corsica figurée sous le n° 2 de la PI. $ ne ressemble 
nullement à la réalité naturelle; la description est imprimée aux 
pages 81 et 82; elle a le tort de ne pas mettre en lumière l’un des 
caractères saillants sur la généralité des exemplaires de Corse, qui 
est la couleur grisâtre du dessus des ailes supérieures. 


Rambur, dans les Annales de la Société ent. de France, 1832, 
donne, sous les n* 5 et 6 de la PI. VII, de meilleures figures de 
la Zygæna corsica, dont la description est imprimée sur les 
pages 267, 268 et 269, au cours d’un intéressant mémoire ayant 
pour titre : Catalogue des Lépidoptères de l'ile de Corse. Rambur 
fait précéder les descriptions des espèces de papillons qu'il avait 
découvertes en Corse, par un aperçu très intéressant et très ins- 
tructif sur la configuration et la flore de cette île. Relativement 
à la Zygæna corsica, Rambur fait connaître à la page 254 de cet 
Avant-Propos que les lieux schisteux fournissent la Santolina 
incana, qui sert de nourriture à la chenille de cette Espèce; et plus 
Join, à la page 258, il ajoute que la nature, en Corse, se montre 
plus bizarre à l'égard du genre Zygæna qu'elle exclut complè- 
tement, à l'exception toutefois d’une espèce toute caractéristique 
et particulière aux terrains schisteux, la Z. Corsica; les Procris 
semblant étrangers à l’île. | 


Boisduval, dans l’/cones (1834), a donné une nouvelle, mais, 
cette fois, bonne figure de la Z. Corsica, sous le n° Oo de la PIE 
et dans sa description (p. 58), il n’a pas manqué d'appeler 
l'attention sur les ailes supérieures qui sont d’un bleu un peu vio- 
lâtre, fortement lavées de blanc jaunâtre, ou blanchâtres avec le 
bord de l'extrémité et de la côte bleus. 


Duponchel, de son côté, a bien figuré la Zygeæra Corsica sous 
le n° 7 de la PI VII du Supplément-Zygénides et la description 
se trouve imprimée sur les pages 87 à 80. 


La Zygœna Corsica éclôt au commencement de Juin; elle vole 
rapidement en plein soleil et va se reposer, à l'approche de la nuit, 


sur les tiges sèches des bruyères ou sur celles de la Santolina 
In Cana. 


444 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Les Santolina sont des Composées dont le nom est une alté- 
ration de Sanctolina, c'est-à-dire plante sainte, à cause de ses 
vertus médicinales. 

La Santolina incana est une Espèce polymorphe qui s'appelle 
aussi Chamecyparissus,; elle a les tiges et les feuilles couvertes 
d'un épais tomentum blanc; elle se trouve répandue sur les 
coteaux arides de la région méditerranéenne (Ælore descriptive et 
ulustrée de la France, par l'abbé Coste; IT, p. 340). 

La coque de Z. Corsica est d'un blanc argenté luisant ou d’un 
gris Jaunâtre; elle est fixée aux tiges; la chenille est brune avec 
des points latéraux blanc jaunâtre, des incisions et une ligne 
dorsale blanc grisâtre. Je possède de beaux exemplaires de la 
Zygæna Corsica pris à Bastia par feu Bellier, et à Sassari, en Sar- 
daigne, par feu Damry, en 1806. La race de Sardaigne paraît 
avoir les ailes supérieures, en dessus, plus sombres et moins blan- 
châtres que la race de Corse. La collection de Graslin contenait 
des échantillons pris par Rambur. Guenée était d'avis que la 
Zygœna Corsica avait des rapports avec À ctllee, à l’état parfait, 
et avec Æxulans, à l’état de chenille. Aucun des 75 individus 
contenus dans ma collection n’a les taches rouges des ailes supé- 
rieures confluentes ; les 3 extrabasilaires forment des points isolés 
d’un rouge vif, placées en trépied : 2 en dessus, 1 en dessous. Les 
Aberrations par confluence semblent donc très rares; mais elles 
doivent se rencontrer cependant, conformément à la loi de variation 
du Genre Zygœna. 


Zygæna Loyselis, Obthr. 


J'ai fait figurer la belle Zygæna Loyselis, espèce bien distincte 
de Favonia, autant qu'ÆAzlaris est distincte de Fausta, sous le n° 4 
de la PI III de la 1° livraison des Æzudes d'Entomologie; la 
description se trouve imprimée aux pages 34 et 35 de cet ouvrage. 
Dans la XITI° livraison des Ætudes d'Entomologie, parue en 1800, 
J'ai consacré une partie importante de la figuration aux Lépidop- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 445 


tères algériens; c'est ainsi que les figures 76, 77 et 78 de la PI 8 
reproduisent avec une exactitude parfaite la race oranaise de 
Loyselis, d'après des exemplaires pris à Géryville, par le lieu- 
tenant Lahaye, en mai 1886, tandis que les n°* 79 et 80 représentent 
la forme de Lambèse. J'ai déjà plusieurs fois parlé de la Zygæna 
Loyselis et je prie le lecteur de vouloir bien se reporter aux Æ/udes 
d'Entomologie, pour y trouver la documentation sur l’Espèce en 
question. L'ouvrage de Seitz : Les Macrolépidoptères du Globe, 
mentionne la Zygæna Loyselis au milieu des variétés de /'avonia, 
comme si Loyselis était elle-même une des variations de /’avonia. 
Ainsi que je l’expose ci-dessus, Zoyselis et Favonia sont deux 
Espèces différentes de Zygæna et elles ne peuvent être confondues 
sans erreur. M. Powell a capturé Loyselis à Sebdou, en mai 1907, 
et à Khenchela, en mai 1908; M. Dayrem a récolté la même 
Zygæna à Lambèse en mai 1907. 

Sur 87 exemplaires de Loyselis qui sont rangés dans ma col- 
lection, un seul G' de Lambèse est dépourvu de l'anneau abdominal 
rouge; on n'aperçoit plus que très peu de vestiges de rouge sur 
les côtés de l'abdomen de cet individu; mais chez les autres, 
l'anneau abdominal rouge n’est pas toujours complet, dans l'Est 
de l'Algérie surtout, où la couleur rouge des ailes est moins vive 
et moins opaque, la tendance à l'interruption de l'anneau rouge 
sur le dessous de l'abdomen est assez générale. 

J'ai fait figurer sous le n° 77 de la PI 8 de la XIII livraison 
des Etudes d'Entomologie un bien bel exemplaire d'avec les 
taches rouges des ailes supérieures très brillantes et très déve- 
loppées. Le collier et les épaulettes sont toujours rouges ou roses 
chez Loyselis, toujours blanchâtres chez Favonia. 


Zygæna Favonia, Freyer. 
Encore une spécialité algérienne que Freyer a indiquée comme 


du pays des Turcs, vraisemblablement d’après les échantillons 
recueillis dans la régence d'Alger, par le D' Moritz Wagner, ainsi 


446 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


que Je l’ai déjà fait connaitre dans le présent ouvrage, à propos 
de Cœnonympha Arcanioides (p. 22 et 23). Moritz Wagner 
désigne certainement Æavomia sous le nom erroné de Sarpedon, à 
la page 205 de la 3° partie de son ouvrage intitulé : Xezsen in der 
Regentschaft Algier, in den lahren 1836, 1837 und 1838, et paru 
a Leipzig en 1841. 

D'ailleurs les déterminations de Zépidoptères sont très fré- 
quemment fausses dans l’article qui est consacré aux Papillons, 
sous le titre : Ueber die Schmetterlinge der Regentschaft Algier 
mit besonderer Beruecksichtigung 1hrer geographiscen Verbreitung 
(p. 195-210). L’iconographe Huebner avait déjà figuré l'avonta, 
avant tout autre auteur, avec le nom de Sarpedon, sous le n° 171. 

La Zygœna Favonia a été l’objet d'observations assez détaillées 
dans la XIII° livraison des Etudes d'Entomologie, aux pages 20 
et 21. Les figures 74, 75, 82, 83, 84, 85, 86, 87, 88 et 89 de la 
PI. 8 sont consacrées à la représentation des variétés de l'Espèce; 
c'est-à-dire que 10 exemplaires de la Zygæna Favonia ayant déjà 
été figurés par mes soins et avec l'exactitude la plus consciencieuse 
de la part de Dallongeville, il ne me semble pas qu'une docu- 
mentation illustrée supplémentaire soit désormais bien utile. 
M. H. Powell a cependant pris à Khenchela, le 15 Juin 1908, un 
exemplaire de Favonia que j'ai appelé Powellz et chez lequel les 
parties normales rouges sont devenues d’un jaune citron pâle. 
L'exemplaire lavonia-Powell: est très frais; il est figuré sous le 
n° 175 de la PI XXIX dans le 3° volume de Lépidoptérologie 
comparée, à côté d’un autre O' lavonia ayant la couleur rouge 
normale représentée sous le n° 174, pour comparaison. Je dois dire 
que le coloriage de tous les exemplaires de la PI XXIX n'a pas 
été également bien réussi et je regrette d’avoir à faire observer 
que le coloriage de cette Planche, notamment en ce qui concerne 
Favonia, eût gagné à être plus soigné. Le n° 174 a été capturé sur 
le chemin du col des Arzaïls, près Sebdou, par H. Powell, le 20 juin 
1907, ainsi qu'il est imprimé dans la légende explicative des Planches. 
Ma collection contient environ 600 exemplaires étalés de Zygæna 
Favonia provenant des localités suivantes : Aïn-Draham, en 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 447 


Tunisie (Faroult); Alger (R. P. Guillemé); Bône (Merkl); Boghari 
(Raffray); Constantine et Teniet-el-Haad (D' Charles-Henri 
Martin); Lambèse (Bleuse et Dayrem); Khenchela (H. Powell); 
Draria, dans la province d'Alger (Holl); Géryville, Magenta 
(L' Lahaye); Sebdou (DACodet Er Powell Nedroma; Sidi- 
bel-Abbès ; Tanger. 

La coque est finement chagrinée, d’un gris argenté luisant, 
quelquefois avec une légère teinte jaunâtre; elle a la forme d'une 
carène plus ou moins allongée et profonde. 

La Zygæna Favonia présente quelques variations : V/717a, avec 
les 4 ailes entièrement transparentes, et les taches rouges de la 
base et de l'extrémité seules maintenues sur le fond hyalin; 
Staudingeri, avec un seul anneau abdominal rouge; 7 hevestis, 
plus grande, avec les taches rouges des supérieures très dilatées. 

La Zygœna Favonia vole en Tunisie, en Algérie et au Maroc, 
pendant les mois de mai et de juin; un peu plus tôt ou plus tard 
suivant les localités et la température de l’année. Elle parait 
remplacer Sarpedon sur les côtes barbaresques. J'ai reçu une seule 
fois de Bône quelques exemplaires de la Zygæna Sarpedon, mais 
par intermédiaire, non pas directement; dès lors je ne trouve pas 
assez d'authenticité dans la provenance pour en faire état. 


Zygæna Sarpedon, Huebner; 
Zygæna Contaminei, Boisduval; 
Zygæna Punctum, Ochs. 


Je crois que les Zygæœna Sarpedon (*), Contaminer et Punctum 
sont les termes différents d’une même unité spécifique; Sarpedon 
représentant l’Espèce en France et en Espagne; Contaminer, race 
spéciale des Hautes-Pyrénées, Punctum, forme italienne, dalmate, 


(*) Le nom de Sarpedon a été emprunté à la Fable. Sarpedon était fils de 
Jupiter et d'Europe et frère de Minos et de Rhadamanthe. Il mena une colonie 
de Crétois dans l’Asie-Mineure. 


448 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


hongroise, en un mot race orientale comparativement à la Sarpedon 
de France et d'Espagne. 

Mais la confusion est très grande pour la dénomination des 
diverses races de la Zygæna Sarpedon. La forme la plus répandue 
est celle qui a les ailes inférieures rouges, tandis que la variété 
qui a le fond des ailes inférieures bleues est beaucoup plus rare 
et même manque tout à fait dans un certain nombre de localités. 
Pourtant c’est la Sarpedon à ailes inférieures bleuâtres qui a été 
connue et décrite la première, et c'est à cette forme plus rare qu'il 
convient d'appliquer le nom de Sarpedon, pour raison de priorité. 

Je compte passer en revue successivement les diverses variétés, 
races et formes des Zygœna Sarpedon, Contaminei et Punctum. 
J'en ai fait une étude attentive, en m'appuyant sur des documents 
relativement importants et provenant d’un grand nombre de 
localités. Je serai heureux si je réussis à établir clairement la 
situation, telle qu’elle résulte réellement, d’une part, des travaux 
déjà publiés depuis la fin du XVIII siècle, et, d'autre part, des 


renseignements fournis par la Nature elle-même. 


1° Sarpedon, Huebner (Beitreg., Taf. 1; C; II Band, IV Theïl 
et Samml., fig. O0). 


Graalis; minuta; sudiaphana; alis posticis cerulescentibus; 


annello abdomin. unico rubro. 


Sarpedon, avec l'ensemble des ailes transparent, un simple 
anneau abdominal rouge et le fond des ailes inférieures bleuâtre 
ponctué de rougeâtre, a été sommairement décrite par Jacob 
Huebner, dans l’ouvrage publié à Augsbourg, en 1790, sous le 
titre de Beitrege zur Geschichte der Schmetterlinge; elle se 
trouve bien figurée sous la lettre C de la Taf. I du IT Band 
(IV Theil) de l'ouvrage en question. D'après Huebner, le papillon 
figuré par lui se rencontrerait en Italie et faisait partie de la 
célèbre collection Gerning, à Francfort. 

Je crois que Sarpedon, en Italie, n’habite que les parties les plus 
voisines des Alpes françaises. Huebner a figuré de nouveau la 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 449 


même forme à ailes inférieures bleuâtres et avec le même nom de 
Sarpedon, sous le n° 9 de sa grande Iconographie, dans la partie 
consacrée aux Sphinges. Je possède une douzaine d'exemplaires 
cadrant très bien avec les figures données par Huebner, et 
notamment quelques-uns chez lesquels les taches des ailes supé- 
rieures sont bien séparées. Tous proviennent de Provence; ils ont 
été pris à Saint-Pons, par M. Gédéon Foulquier; au col de Bar- 
tagne, dans la montagne de la Sainte-Baume, par M. Siépi; à 
Hyères, par M. H. Powell, et dans les environs de Digne, par les 
chasseurs Cotte et Coulet. La Sarpedon varie un peu; l’anneau 
rouge abdominal peut être double et inversement presque nul; les 
ailes inférieures peuvent paraitre plus ou moins diaphanes et les 
taches rouges des ailes peuvent confluer ou rester séparées comme 


dans la figure o de Huebner. 


2° Trimaculata, Esper (Æ£wrop. Schmett. IL Theil; Tab. XL ; 
Ho 01) 


Major, robustior, magis opaca; minus precedenti diaphana; alis 
cærulescentibus, anticis 3 maculis rubris; posticis 2 (S); annell. 


abdominal. duplo rudro. 


Sarpedon var. de Graslin (Awsal. Soc. ent. France; 1863: 
PISE then), 


Annello rubro abdomin. minimo incomplet. 


Vernetensis, Obthr. (Erud. Ent. VIII, p. 28); érimaculata, 
Obthr (Etxd Ent. XX; pl. VIII: Ho #140). 


Ce qui est assez curieux, c’est que peu d'années plus tard, au 
lieu de représenter cette fois la forme la plus commune, c’est-à-dire 
celle qui a les ailes inférieures rouges, Esper, tout comme venait 
de le faire Jacob Huebner, a figuré, sous les n° 7 et 8 de la 
Tab. XL, avec le nom de /rimaculata, une Sarpedon moins dia- 


phane, à ailes inférieures également bleues et à double anneau 


29 


450 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


abdominal rouge. De Graslin a représenté dans les Axx. Soc. ent. 
France, 1863, sous le n° 1 de la PI. 8, une Sarpedon, de Vernet- 
les-Bains, qu'il a simplement désignée comme variété à ailes infé- 
rieures bleues et à anneau abdominal très atténué. De mon côté, 
j'ai fait figurer sous le n° 143 de la PI. 8 de la XX° livraison des 
Etudes d'Entomologie cette même Zygœna Sarpedon, dont le 
fond des ailes inférieures est bleu; je lui avais donné à tort le 
nom de Vernetensis, dans la VIIT° livraison des Etudes d'Ento- 
mologie, p. 28. J'ai reconnu plus tard mon erreur et Je l'ai confessée 
à la page 47 de la XX° livraison des Eudes d'Entomologie. Le 
nom de V’ernetensis, Obthr., tombe en synonymie devant le nom 


de /7imaculata, Esper, plus ancien d’un siècle. 


Cela n'empêche pas que Staudinger et Rebel, dans leur 
Catalog 1901, ont admis comme valable le nom erroné de l’erne- 
tensis, qu'ils ont cependant défiguré en Vermetensis. Si ces auteurs 
avaient pris la peine de regarder les figures et de parcourir les 
textes, 1ls auraient joint Vernetensis à leur citation de la fig. 143 
de la XX° livraison des Æ/udes d'Entomologie. Ce qu'ils ont 
publié dans leur Catalog pour Sarpedon est donc fautif, et 
malheureusement, au lieu d’éclaircir la difficulté, Staudinger et 


Rebel ont davantage embrouillé la question. 


De plus, bien que le mot Vermetensis n'ait aucun sens, tous les 
auteurs qui ont écrit sur les Zygæna depuis 1901, au lieu de 
recourir à la source, c'est-à-dire à la VIII® livraison des Etudes 
d'Entomologie consacrée aux Lépidoptères des Pyrénées, et où 
J'établis, à tort, Je le répète, la variété Vernetensis de Sarpedon, 
ont aveuglément copié les fautes, y compris celle d'impression du 
Catalog 1901. 

C'est ainsi que Adalb. Seitz, qui publie un ouvrage que son bas 
prix rend populaire, a adopté à tort le terme erroné V’ermetensis, 
sans prendre la peine d’en rectifier même l'orthographe. C'est bien 


d'essayer d’aller vite; c'est mieux d'aller correctement. 


M. Abeille, dans ses intéressantes études sur les Zygæna de 
Marseille et de la Sainte-Baume, déclare qu'il possède lAb. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 451 


Vermetensis. O puissance fétichiste de certains Catalog! Ils ont 

beau être cousus de grossières erreurs, tout le monde est d'accord 
le] 

pour les croire infaillibles. 


T'rimaculata est plus grande et d’aspect plus robuste que 
Sarpedon. Rarement les exemplaires ont l'anneau rouge abdominal 
double; le plus souvent, l’anneau rouge abdominal tend à s’at- 
ténuer et même à s’oblitérer. J'ai réuni environ 75 exemplaires de 
T'rimaculata. Ns ont été pris à Vernet-les-Bains (P yrénées-Orien- 
tales) ; dans les Alpes-Maritimes, notamment à Castillon, Escarène 
et Levens ; aux environs de Digne, et dans le vallon de Saint-Pons, 
où érimaculata vole avec Sarpedon. 

La forme varie pour l'intensité et le développement de la teinte 
bleue sur les ailes inférieures, pour la confluence ou la séparation 
des taches rouges. Il y a une grande affinité entre Sarpedon, 
Huebner, et #r2maculata, Esper; il n’est pas très rare de trouver 
des exemplaires transitionnels qui lient intimement les deux races 
dont les individus, parfaitement conformes aux types des auteurs 
qui les ont figurés et décrits, sont cependant assez différents 
entre eux. 

Les noms de Sarpedon, Huebner, et 7'7imaculata, Esper, con- 
viennent donc exclusivement aux exemplaires dont le fond des 
ailes inférieures est bleu. Cette variation n’a été observée jusqu'ici 
mi dans l'Ouest de la France, ni en Espagne. Jamais on ne l’a 
rencontrée chez Punctum. Elle atteint, d’après nos connaissances 
actuelles, seulement les Zygæena Sarpedon des parties méridionales 
de la France : Roussillon, Provence et Nice, et ne paraît pas 
affecter les papillons des autres localités où se trouve également 
Espèce. 


Jusqu'ici, Je n'ai cité que les figures des auteurs : Huebner, 
Esper, de Graslin et moi-même ayant représenté la Zygæna 
Sarpedon à ailes inférieures bleues. 


452 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Il va être maintenant question de l’autre forme, celle dont le 
fond des ailes inférieures est rouge. Mais je dois préalablement 
signaler une forme quasi-intermédiaire, difficile à identifier exac- 
tement à l'époque actuelle, faute de bonnes figures et de types 
authentiques. C’est celle qui a été figurée par Boisduval, tant avec 
le nom de Sarpedon qu'avec le nom de Balearica, dans l’Æssar 
sur une Monographie des Z'ygémides paru en 1820. 

La Sarpedon, dont Boisduval représente le G' et la ©, sous les 
n° 7 et 8 de la PI. 2, est assez voisine, me semble-t-1l, de la Sar- 
pedon initialement décrite et figurée par Huebner; cependant la 
Sarpedon de Boisduval a les ailes inférieures beaucoup moins 
bleues. La Balearica, figurée sous le n° 5 de la même PI. 2, aussi 
bien que la Sarpedon figurée et décrite par Boisduval, dans son 
Essai, sont des formes transitionnelles et indécises; toutes les 
deux sont indiquées par Boisduval, avec les ailes antérieures : 
subdiapharnis. Chez Balearica, les ailes inférieures sont dites : 
« subdiaphanis rubris, limbo lato cyaneo »; chez Sarpedon, la 
diagnose latine est ainsi rédigée pour les ailes inférieures : 
« postiais diaphanis rubris, dilutioribus, margine latiori, sinuato, 
plumbeo ». [Il y a donc bien peu de différence entre les deux : 
Sarpedon et Balearica. Dans la collection Boisduval, 1l y a des 
Sarpedon, sans indication de localité, anciennes, mais bien con- 
servées. Les figures de l’Æssai sont très grossières; il est difficile 
de dire si elles se rapportent, où non, à quelqu'un des exemplaires 
de la collection Boisduval existant encore; cependant il me paraît 
bien peu probable que les exemplaires de Balearica et Sarpedon 
figurés dans l’Essai de Boisduval aient été conservés par lui. 
Autrefois on se souciait trop peu de conserver les specimina 
typica. Ainsi que je l’ai rapporté au sujet de la Psyche bicolorella, 
on remplaçait volontiers un vieux type par un exemplaire plus 
frais, sans même faire attention aux différences pouvant exister 
entre le vieil exemplaire et le nouveau. D'autre part, comme cer- 
taines Planches laissent beaucoup à désirer (ainsi celles de l’Æssaz 
chez lesquelles la nervulation n'a été l'objet d'aucune attention), 


il devient parfois bien difficile d'identifier exactement une race 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 453 


ou une forme, d'autant plus que trop rarement la provenance du 
spécimen figuré se trouve indiquée. Boisduval laisse ignorer d'où 
viennent les exemplaires de Sarpedon et Balearica figurés dans 
RESSaz: 


Dans l’/cones, Boisduval figure sous le n° 1 de la PI. 54, avec 
le nom de Palearica, une Zygœna Sarpedon que, cette fois, 1] 
indique comme venant de Cadix, communiquée par M. Pierret. 
« Les ailes inférieures sont rouges, dit Boisduval, avec le liséré 
bleu encore plus étroit que dans punctum ». Après avoir décrit 
cette nouvelle Balearica (1834), Boisduval fait loyalement le 
procès de la figure publiée par lui-même dans lÆssat (1820). 
« La figure que nous en avons donnée dans notre Monographie, 
dit-il, est mauvaise et inexacte; la bordure des ailes a été trop 
largement gravée et le point discoïdal n’a pas été indiqué. » Dès 
lors, il y aurait peu d'importance à attacher à la figuration publiée 
par Boisduval dans l’Essai sur une Monographie des Zygénides. 

Je renonce donc à en faire état, pour rester dans des données 
plus certaines et ne rien établir de douteux et peut-être de faux, 
imitant en cela Rambur à la page 168, en note, du Catalogue 
systématique des Lépidoptères de l'Andalouste. 

Duponchel a figuré sous le n° 3 de la PI 5 du Supplément; 
Zygénides (1835), avec le nom de Balearica, une Zygæna parais- 
sant être la même que celle figurée par Boisduval dans l’/cones. 

Rambur a représenté Sarpedon à ailes rouges, sous le n° 8 de 
la PL 12 de la Faune de l'Andalousie (1830), et a décrit dans Île 
Catalogue systématique qui porte la date de 1858, en lui donnant 
le nom d’Aispanira, la forme à ailes diaphanes et peu colorées 
qui se trouve plus spécialement en Espagne. 

Enfin Herrich-Schaeffer a produit la meilleure figure de la 
Sarpedon robuste et à ailes inférieures rouges, telle que nous la 
trouvons le plus ordinairement dans les Pyrénées-Orientales, sous 
le n° 51 de la Tab. 7 des Zygeænides Europ. Le même auteur a 
représenté avec le nom de balearica, la forme plus pâle, sous je 


Heidela Tab 


454 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Je vais tâcher d'identifier exactement ces diverses descriptions 
et les figures qui s’y rapportent, laissant seulement de côté, ainsi 
que Je l’expose plus haut avec les raisons déterminantes, ce que 
Boisduval a publié dans l’Essai de 1820. 


3° Hispanica, Rambur (Car. Syst. Andal. p. 167, 168). 


Maxime diaphana; pallidior; anticis punctis rubris tribus mi- 
nutlis; posticis roseis, ad basim hyalinis. 


Rambur a établi le nom de Wispanica pour la variété de Sar- 
pedon venant d'Andalousie et de Castille, si pâle que les papillons 
sont à moitié transparents, avec les taches rouges pâlies et très 
diminuées, pâleur qui ne tient pas seulement, dit Rambur, à ce 
que les écailles sont moins nombreuses, mais à ce qu’elles sont 
moins colorées; dans cet état, les deux segments rouges de 
l’abdomen sont toujours bien visibles. 

Rambur ajoute que l’Æispanica est très répandue dans toute 
l’Andalousie, surtout sur le littoral, — ce qui n’est pas mon avis, — 
pendant les mois de mai et juin; la chenille qu'il a souvent ren- 
contrée, dit-1l, vit sur les Æryngium campestre et maritimum, et 
d’après ses descriptions, elle ne présente aucune différence d’avec 
celle de la Sarpedon de Touraine. 

La chenille de Sarpedon vit en effet sur les Zryrgium, plantes 
de la famille des Ombellifères, communément appelées : panicaut 
et chardon-roulant, dont les espèces sont répandues sur les sables 
maritimes des côtes de la Manche, de l'Océan et de la Méditer- 
ranée, dans les terrains arides et surtout calcaires, parmi les 
éboulis de rochers, et au milieu des hauts pâturages des Alpes et 
des Pyrénées. 

Le mot Æyyngium vient du grec ÆErygma, qui veut dire : 
éructation, par allusion à de prétendues propriétés médicinales. 

La Æispanica, Rambur, vole communément à J'Escorial, en 
juillet; j'en possède 28 exemplaires pris dans cette localité les 29 
et 30 juillet 1870. J'ai reçu Æispanica de feu Aurelio Vasquez, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 455 


qui la capturait près de Madrid. De plus, ma collection contient 
des exemplaires pris à la Sierra-de-Alfakar; à la Sierra-Nevada, 
du côté de Huejar; à Grenade (dont une paire rapportée par 
Rambur); à Villaviciosa-de-Odon (Castille); donc très loin du 
littoral. Ce n’est pas Æispanica, c'est Balearica qui se trouve sur 
les côtes de l'Espagne. 

La AHispanica offre parfois une particularité signalée par 
Rambur, c’est que la tache externe des supérieures est plus dilatée 
que chez la Sarpedon et tendant à produire une tache supplé- 
mentaire. J'ai un @ de la Sierra-de-Alfakar et une © de Villa- 
viciosa-de-Odon qui présentent cette dilatation de laquelle résulte 
une tache supplémentaire inférieurement contiguë à la tache 
normale. 

Exceptionnellement la forme diaphane Aispanica, mais privée 
de la tache supplémentaire, se rencontre dans les Pyrénées- 
Orientales, où 4 d' ont été recueillis en juillet 1886 et en juillet 
1805. 2 de ces exemplaires ont l'abdomen presque entièrement 
dépourvu d'annulation rouge. Dans la Charente-Inférieure (Dom- 
pierre-sur-Mer) et en Provence (Vallon de Saint-Pons), on trouve 
des individus tout à fait référables à Æispanica, mais à titre 
aberrant et non normal. 


4° Balearica, Boisduval (/cones, PI. 54, fig. T). 
Sarpedon, var. Obthr. (Anales Soc. Hist. Nat. Esp., 1875, 


Pl. 7) 


Annello abdomin. rubro: macula rubra externa anticarum bilo- 
bata; nec diaphana; macula rubra minima ad originem cellule. 


C'est la forme qu’on trouve sur les côtes de l'Espagne, notam- 
ment à Carthagène, et que Boisduval a décrite d'après un individu 
de Cadix, communiqué par M. Pierret. Mon frère a pris à Car- 
thagène 3 exemplaires dont l’un, que jadis J'ai offert à feu mon 
ami J. Fallou, doit encore figurer dans sa collection déposée au 


Muséum national, à Paris. 


456 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


La Balearica, Bdv. (/cones), est d'un rouge vermillon, non 
carminé; les ailes ne sont pas diaphanes; la coloration générale 
est opaque; la tache rouge externe est inférieurement accompagnée 
d'une petite tache supplémentaire qui lui est contiguëé; il y a un 
point rouge dans l’espace cellulaire, à l’origine de la fourche que 
forment les nervules; la tache rouge inférieure conflue avec la 
tache basilaire et remplit avec elle l’espace intranervural; l'anneau 
rouge abdominal est double ou simple; la bordure bleue des ailes 
inférieures est étroite et non développée; je crois qu’on peut rap- 
porter à la Balearica figurée par Boisduval, celle représentée par 
Rambur (faune de l'Andalousie, PI. 12, fig. 8), dont la tache 
rouge externe est bilobée, et la Balcarica représentée par Duponchel 


(CS232%7%, Pl Ve); 


5° Dalmatina, Boisduval (Zcones, PI. 54, fig. 2); Duponchel 
(Supplém. Zyg, PI V, fig. 2). 


Precedenti similis; sed abdomine toto nigro, absque annello 
rubro, differt. 


Ne diffère de Balearica, Boisduval (Zcones, PI. 54, fig. 1), que 
par son abdomen tout noir et dépourvu d’anneau rouge. C'est cette 
Dalmatina que Staudinger a appelée Contamineoides dans les 
éditions IT et III de son Catalog. Mais le nom Dalmatina est bien 
plus ancien et 1l n'existe aucune raison d'en faire fi, d'autant plus 
qu'il est éclairé par des figures bien exécutées. 

Herrich-Schaeffer a représenté Dalmatina sous les n* 59 et 60 
de Ja Tab. 8 des Zygænides Europ. Je possède 11 Dalmatina 
prises en Sicile. Dalmatina a probablement pour synonyme, outre 
Contamineoides, \a Zygœna Ledereri, Rambur, décrite dans le 
Catal. Syst. Andal., aux pages 160 et 170, et mal figurée sous le 
n° 0 de la PI. 1. Le nom Contaminecides Stgr. n’a pas plus raison 
de subsister que le nom Vernetensis, Obthr. Ces deux noms 
tombent en synonymie et doivent être supprimés de la Nomen- 
clature entomologique. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 457 


6 Carmencita, Obthr. 
Sarpedon, Herrich-Schaeffer (Zygænides Europ, Tab. 7, 
fig. 51). 


Posticis rubris, limbo cæruleo nec lato; anticis 3 maculis rubris 
intensius pictis; macula externa tinteriore rubra frequenter ad 
basalem maculam rubram confluente; thorace plus minusve albes- 
centi,; abdomine rarius nigro toto; sæpe abdomine rubro annellato 
aut biannellato. 


Herrich-Schaeffer à publié une bonne représentation de la 
forme la plus ordinaire en France de la Zygœna Sarpedon. 
L'aspect est robuste; la taille relativement assez grande; les 
couleurs ne sont point diaphanes, mais opaques; le fond des ailes 
supérieures est d’un bleu verdêtre foncé; l’espace basilaire est tout 
entier maculé de rouge carminé, finement divisé en trois parties, 
par les nervures; les deux taches rouges des ailes supérieures, 
l'extracellulaire et l’infracellulaire sont grosses, assez nettes; les 
ailes inférieures sont rouge carmin vif, avec le trait dépourvu 
d’écailles qui part de la base, bien apparent; la bordure des ailes 
inférieures n’est pas très large et de la même teinte bleu verdâtre 
que les supérieures; l’avant-dernier anneau abdominal du ' est 
rouge; mais on peut trouver les formes inverses, c'est-à-dire avec 
double anneau rouge et sans aucun anneau rouge; le thorax peut 
être noir ou bien offrir une pilosité grisätre plus ou moins impor- 
tante. 

C'est cette forme qui, en France, représenterait micux l’Espèce. 
On la trouve surtout dans les Pyrénées-Orientales, d’où ma 
collection contient environ 350 exemplaires. 

La Carmencita (Sarpedon, H.-S. 51) se trouve en outre, à ma 
connaissance, aux Sables-d'Olonne (Vendée); à Sarzeau (Mor- 
bihan); au Pouliguen (Loire-Inférieure); à Castillon, Escarène, 
Borson et Levens (Alpes-Maritimes) ; dans les Bouches-du-Rhône 
et les Basses-Alpes, en mélange avec d’autres formes; à Albarracin 
(Espagne); à Dompierre-sur-Mer (Charente-Inférieure). 


458 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Dans la Lozère, l'Aveyron et l’Orléanais, 1l y a une autre forme, 
aux ailes plus élancées, présentant quelquefois une curieuse dispo- 
sition de variation. Il s’agit de la réunion de la bande rouge 
inférieure au point rouge supérieur. La tache basilaire rouge 
conflue avec la tache rouge inférieure, forme une tache allongée 
unique, et de là remonte, en décrivant une légère courbe, à la 
rencontre de la tache externe supérieure. D’autres Entomologistes 
n'hésiteraient peut-être pas à donner le nom d’elongala à cette 
forme plus allongée; mais elle rentre effectivement dans la caté- 
gorie des Carmencita. En surchargeant la nomenclature de déno- 
minations nouvelles pour des variations d’une importance très 
secondaire, ainsi qu'aime à le faire Fruhstorfer, il me semble 
qu'on fait naître plutôt du trouble qu’un supplément de lumière. 

Je dois citer une Aberration jaune remarquable : 


Ab. flava, Obthr. {Etud. Ent., XX ; PI. VIII, fig. 142); Millière 
(Mconosr A Po EE 0) p 170) 


Maculis anticarum alarum posticisque alis flavis pro rubris. 


Vernet-les-Bains (Obthr.); ex coll. Donzel, sans indication de 
patrie (Millière). 


La Balearica, Herrich-Schaeffer (Zygœnides Europ, Tab. I, 
n° 2), me paraît pouvoir rentrer dans le cadre de Carmencifa, 
comme petite forme, présentant l’Aberration par confluence de la 
tache rouge externe inférieure avec la tache rouge basilaire. Cette 
Balearica, H.-S., 2, ne semble pas pouvoir être assimilée à la 
Balearica, Bdv. (JZcones). 


7° Contaminei, Boisduval (Zcones; PI. 53, fig. 4 et 5); Herrich- 
Schaeffer (Zygænides Europ., Tab. I, fig. 1). 


Alis anticis subdiaphanis, macula rubra inferiore ad maculam 
basalem confluente, propterea elongata, exteriore minuta; posticis 
rubns, limbo nigro-cerulescenti, nec lato; abdomine nigro, absque 


annello. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 459 


C'est la forme spéciale de Sarpedon dans les montagnes des 
Hautes-Pyrénées. Contaminei varie très peu. Il est extraordinaire 
de constater, comparativement à la variabilité de l'Espèce d’où elle 
dérive, la fixité de cette race qui paraît confinée dans les Hautes- 
Pyrénées, vers l'altitude d’au moins 1,700 mètres. Je l’ai prise dans 
la vallée de Cambasque et sur les pentes au-dessus et autour du 
lac de Gaube; M. Rondou la recueille assez abondamment, cer- 
taines années, dans la vallée du Cambieil, à la montagne de 
Saugué et à la côte de Pouyaspé (Catal. raisonné des Lépid. des 
Pyrénées, 1003). II m’a semblé que Contaminei avait des années 
d’abondance et qu’elle était presque nulle certaines autres années. 

Boisduval a décrit la Zygœna Contaminei dans l’/cones, à la 
page 48, et a fait représenter le G' et la © sous les n°” 4 et 5 de 
la PI 53. Duponchel en a publié une figure très peu exacte, sous 
le n° 2 de la PI V du Supplément-Zygénides. Je ne crois même 
pas qu’elle s'applique à la vraie Contaminei. Les parties rouges 
des ailes supérieures sont trop développées et d’une couleur trop 
vermillon. 

La Zygœna Contaminei fut découverte dans les environs de 
Barèges (Hautes-Pyrénées), par M. le capitaine de Contamine, 
du régiment des Lanciers de Nemours, qui tenait alors garnison 
à Tarbes. 

La chenille de Contaminei vit sur l'Eryngium Bourgati, plante 
vivace, bleuâtre, très épineuse, ayant des feuilles coriaces et des 
fleurs bleues. Cette Ombellifère est décrite et figurée à la page 156 
du Vol. IT de la Flore descriptive et illustrée de France, par 
l'abbé H. Coste, chanoine honoraire de Rodez, l’un de nos plus 
savants botanistes français. 


8° Punctum, Ochs.-Boisduval (Zcones, PI. 53, fig. 3). 


Abdomine toto nigro; maculis rubris extensis, confluentibus; 
macula rubra parva ad furcam, inter ramos subcostal. et med. 


La Z. Punctum est extrêmement commune dans la partie cen- 
trale et méridionale de l'Italie. M. Fabresse l’a capturée en grande 


460 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


quantité à Paternopoli et dans diverses localités de la province 
d'Avellino. M. G. Leoni l’a récoltée aux environs de Cerchio, 
dans les Abruzzes, et M. Zickert l’a recueillie, à la fin de juin 1907, 
au Monte-Castello, par une altitude d'environ 600 mètres, et à 
Bagnoli Irpino. 

Il est impossible de séparer spécifiquement Punctum de Sar- 
pedon; 1l y a des exemplaires de Sarpedon à Vernet-les-Bains 
(Pyrénées-Orientales), rigoureusement identiques à des Panctum 
de Cerchio, et des Punctum tout à fait pareilles aux Sarpedon 
(Carmencita) de la Loire-Inférieure et des Bouches-du-Rhône. 
Seulement en Italie, l'abdomen de Punctum est toujours tout noir 
(du moins d’après ce que je connais), tandis qu'en France, l’ab- 
domen n’est noir qu’exceptionnellement. 

J'ai mis dans ma collection, auprès l’un de l’autre, un O' de 
Cerchio, un © du Pouliguen et un G' des Bouches-du-Rhône. 
Tous les trois montrent une petite tache rouge, située dans la 
fourche, à l’origine des nervules sous-costale et médiane, et pré- 
sentant une parfaite similitude des autres taches rouges sur les 
ailes supérieures. Les ailes inférieures sont absolument pareilles 
dans les trois exemplaires. L’abdomen de Punctum provenant de 
Cerchio est tout noir; l'abdomen de Sarpedon-Carmencita capturé 
au Pouliguen, le 10 juillet 1004, et dans les Bouches-du-Rhône, 
est doublement annelé de rouge. 

Mais il convient de dire que le © Punctum comparé aux 
Sarpedon-Carmencita est légèrement aberrant par rapport aux 
autres Zygæna Punctum italiennes. De même le © Sarpedon- 
Carmencita, de Vernet-les-Bains, qui, à part un peu de rouge sur 
le dessus et sur les côtés de l'abdomen, est un véritable Pynctum, 
bien conforme à la forme italienne de Punctum la plus répandue, 
est un sujet aberrant, comparativement à la masse des Sarpedon- 
Carmencita, de Vernet-les-Bains, que représente très bien la 
figure 51 de Sarpedon publiée par Herrich-Schaeffer. J'ai placé 
dans ma collection, comme je l’ai fait pour l’autre exemple cité 
plus haut, le G de Vernet et un G' de Cerchio, tout près l’un de 
l’autre. Celui de Vernet provient certainement de Vernet; il n'y a 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 461 


pas de doute possible; 1l à été authentiquement recueilli à Vernet, 
pendant l'été 1806. A part la tache rouge abdominale et la couleur 
des pattes un peu plus foncée dans l’exemplaire de Vernet, il 
n'y a pas de différence appréciable entre les deux O' : celui des 
Pyrénées-Orientales et celui des Abruzzes. 

Je suis convaincu d’être tout à fait dans le vrai en réunissant 
spécifiquement Punctum à Sarpedon. D'ailleurs les chenilles et 
les coques dans lesquelles s’enferment les chrysalides paraissent 
semblables. Voilà donc à quelles constatations servent les longues 
séries d'exemplaires classées dans les collections. Mais combien 
nous connaissons peu la faune européenne des Lépidoptères! Il 
serait cependant grand temps de recueillir les documents utiles 
avant toutes les destructions de la flore et de la faune dont nous 
sommes les témoins, et qui sont constamment effectuées partout 
en Europe, sous prétexte de nécessités industrielles. 


Zygæna Achilleæ, Esper. 


Les premières figures de la Zygena Achilleæ sont dues à 
Eugenius Johann Christoph Esper qui, dans la deuxième partie 
de son ouvrage intitulé : Die Schmetterlinge in Abbildungen nach 
der Natur mit Beschreibungen, publié à Erlangen, en 1770, a 
représenté, sous les n°” 1 a et 1 à de la Tab. XXV, l’'Espèce qu'il 
décrit à la page 180, d’après des exemplaires trouvés en Franconie. 
Esper commence ses observations en ces termes : « Der Sphinx 
À chilleæ ist eme ganz neue Entdeckung in unserm Franken. Wir 
haben sie den Bemuehungen des Herrn Kammerrath Jung zu 
Uffenherm zu danken ». C’est donc la forme géographique de 
Franconie qui est le type de l'espèce. 

En France, la Zygœna Ackilleæe, dont la chenille ne vit nul- 
lement sur l’Achillea millefoliim, pas plus que sur toute autre 
Espèce du genre A c/zllea, plantes de la famille des Composées, 
mais bien sur les Coronilla, les Astragalus, le Lotus corniculatus, 


les Z'rifolium, V'Hippocrepis comosa, appartenant toutes à la 


462 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


famille des Papilionacées, est répandue dans les plaines calcaires 
et les basses montagnes. Elle ne s'élève pas à une grande altitude 
et Je ne l’ai jamais vue à plus de 1,500 mètres. Elle ne se trouve 
ni en Angleterre, ni en Algérie. 

La Zygenra Achilleæe éclôt en mai et juin en Toscane, dans les 
Charentes et aux environs de Paris, de Digne et dans les Alpes- 
Maritimes, tandis qu'à Cauterets et dans les Alpes, elle vole un 
peu plus tard, à partir de la fin de juin et Jusque vers le 25 juillet. 

En France, la forme qui peut être considérée comme la plus 
voisine de celle de Franconie paraît être celle de la Franche-Ccmté 
et de la Savoie, à laquelle se relie la race parisienne. Je regrette 
de ne pas bien connaître, c’est-à-dire avec de longues séries d’exem- 
plaires classés par localités bien définies, les races allemandes, 
probablement différentes, suivant les régions, de la Zygæna 
Ac/ulleæ. Je crois d’ailleurs que les Zygæna allemandes n'ont 
Jamais été jusqu'ici l’objet d'aucune étude comparative établie sur 
des documents un peu importants; mais comme c’est la faune 
française qui m'occupe principalement dans le présent ouvrage, 
ce sont par conséquent les diverses expressions et manifestations 
de la Zygæna Achilleæ en France et dans les contrées limitrophes, 
notamment en Suisse et en Italie, à l'étude desquelles je vais 


procéder. 


1° Forme type de Paris; Doubs; Savoie; Gers; Vallée 
du Rhône; 
et 2° Région Charentaise et Girondine (yzrzacea, Obthr.). 


La forme des plaines de la France centrale est sans doute celle 
que Duponchel a décrite et figurée dans le Szpplément-Zygénides; 
PI. IV; Q fig. 6a; C' fig. 6 6. Le Ca le fond des ailes supérieures 
d'un bleu d’acier quelquefois un peu verdâtre, avec les taches 
d’un rouge vermillon plus ou moins carminé. Quelquefois le fond 
des ailes supérieures, surtout près du bord interne, est grisâtre; 
mais d’une manière moins accentuée que chez la ©, dont le fond 
des ailes est presque toujours entièrement grisâtre. Les taches 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 463 


rouges sont généralement au nombre de 5 : 2 à la base, à peme 
séparées l’une de l’autre par la nervure qui est comme la racine 
d’où partent les nervules costale et médiane; la 3° occupe la nais- 
sance de la fourche, entre les nervules costale et médiane; cette 
3° tache est souvent liée par confluence à la tache basilaire costale 
qui se prolonge jusqu’à elle. La 4° tache externe inférieure est 
située au-dessous de la nervule médiane et au-dessus de la sous- 
médiane. La 5°, qui est relativement très grosse, est formée par la 
réunion de deux taches qui peuvent se séparer dans certains cas 
et s'isoler l’une de l’autre; elle est située au delà de l’espace 
cellulaire. 

Il y a un double collier blanc; le corps est d’un noir bleuâtre; 
en France, je n'ai jamais vu d'exemplaires chez qui l’abdomen 
soit annelé de rouge. 

L'Espèce est très commune en mai et juin à Dompierre-sur-Mer, 
à Angoulême, à Villeneuve-de-Blaye (Gironde). Quelquefois les 
taches rouges des ailes supérieures, même chez le ©, paraissent 
légèrement entourées de blanchâtre. Fréquemment les taches 
rouges confluent de façon à former comme une unique tache rouge 
plus développée encore que chez purpuralis (Minos) et présentant 
un aspect analogue. Toutes les transitions existent entre les exem- 
plaires chez lesquels les taches rouges sont plus isolées les unes 
des autres et ceux où elles sont d’une confluence plus développée. 

C'est la race des Charentes, dont les taches rouges sont de la 
nuance la plus vermillon et dont les © sont généralement d’un 
gris verdâtre plus clair et se rapportant mieux à la figure 6a de 
la PI. IV du Supplément de Duponchel. Les À cAtlleæ des environs 
de Paris (forêt de Carnelles; 35 exemplaires pris le 20 mai 1909) 
sont d’une teinte plus pâle, moins vive et d’un aspect plus assombri. 
Je compare environ 800 exemplaires des Charentes et de la 
Gironde à ceux des environs de Maintenon, de Bondy, de Vichy, 
de Besançon, d’Aix-les-Bains et de diverses localités autour de 
Paris, et je constate que nulle part ailleurs que dans les plaines 
calcaires de l'Ouest de la France, la forme de la Zyzœna Achilleæ 
n’atteint un égal degré de vivacité dans les couleurs et de déve- 


404 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


loppement des parties rouges aux ailes supérieures. Je donne à 
cette race le nom de wzn1acea. 

Me basant sur les figures publiées par Esper, et en attendant 
cependant d'être mieux informé au moyen d’une comparaison qui 
serait établie avec de nombreux exemplaires d’Aczilleæ, provenant 
de Franconie, il me semble qu'il est raisonnable de considérer 
comme appartenant à la forme type de l’Espèce Ac/zllee, les 
formes géographiques françaises répandues dans la région pari- 
sienne, le Doubs et les basses montagnes de Savoie, les environs 


de Lectoure (Gers), ainsi que celles habitant en Suisse la vallée 
du Rhône. 


LI 


Ab. flava, Herrich-Schaeffer (fig. n°* 64, 65, 66 et 67); Obthr. 
(Etudes d'Entomol., XX: liv., PL 8, fig. 140). 


Ainsi que Je le rapporte à la page 43 de la XX° livraison des 
Etudes d'Ent, je possède 7 exemplaires de l’Ab. #ava, pris 
autrefois dans la forêt de Bondy, près Paris, par un garde qui 
s'était fait une spécialité de la recherche de cette Aberration. La 
localité a changé de face et j'ai entendu dire que ce serait bien 
en vain qu'on rechercherait aujourd’hui sur le territoire de Bondy 
les papillons que nos devanciers y rencontraient jadis. 


3° Hautes-Pyrénées (1545, Obthr.). 


Aux environs de Cauterets, sur les fleurs, le long du chemin qui 
descend des bains de la Raiïllère vers la ville, on rencontre une 
race d'Aczilleæ à laquelle j'ai donné le nom de #r2s45, qui désigne 
l'aspect sombre du papillon. Le fond des ailes supérieures est 
d’une teinte verdâtre ou bleuâtre un peu bronzée; les taches rouges 
des supérieures et le fond des inférieures sont d’une nuance car- 
minée qui manque de vivacité; l'aspect général est assez terne. 

Ordinairement, chez Aczilleæ tristis, les taches rouges sont de 
dimension moyenne; assez souvent la tache basilaire inférieure et 
l’externe inférieure comprises entre les nervules médiane et sous- 


médiane confluent. J'ai trouvé, une fois, l’Ab. brunnea, chez 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 465 


laquelle les parties normalement rouges sont remplacées par ure 
couleur café au lait. Cette Ab. érunnea, Obthr., est relatée à la 
page 160, dans le Catalogue des Lépid. des Pyrénées, 1003, par 
Rondou; mais une faute a été commise dans le texte où 1l est dit : 
« Tout ce qui est rouge dans le type est ver dans cette Aber- 
ration ». C'est brun qu'il aurait fallu imprimer, au lieu de vert. 

Mon frère a capturé à Cauterets un exemplaire que J'ai fait 
figurer sous le n° 125 de la PL 7 de la XX livraison des Ezudes 
d'Entomologie; il est placé, sur la Planche ?, entre le n° 124 qui 
représente une Zygæna purpuralis (Minos) normale, de Cauterets, 
et une Aczilleæ-tristis, hgurée sous le n° 126. Ce n° 125 est parfai- 
tement intermédiaire entre les n° 124 (purpuralis) et 126 (Acil- 
leæ-tristis). Est-ce un hybride naturel de purpuralis et Achillee ? 
Achilleæ s'accouple volontiers avec d’autres Espèces de Zygæna, 
telles que purpuralis et flipendule,; et maintes fois ces unions 
hybrides ont été observées d’une façon indubitable; je déclare, 
en présence du papillon que j'ai sous les yeux, ne savoir à laquelle 
des deux Espèces : purpuralis et Ackillee, il vaudrait mieux le 
rapporter, et je le considère comme étant probablement lhybride 
naturel issu de l’accouplement de purpuralis et d’'Achilleæ; mais 
je ne possède aucune preuve et Je n'exprime qu'une opimon. 

Achilleæ-tristis donne parfois l’'Ab. /anthina Boisduval, à 5 
ou 6 taches rouges, réduites et bien séparées, aux ailes supérieures. 
Il sera plus loin amplement question de cette Ab. /anthina. Aux 
environs d’Innsbruck, au Tyrol, AcÆzlleæ donne une forme aux 
couleurs éteintes, voisine de /154i5s de Cauterets. 

Ce qui est curieux, c'est que la forme d’Aczrlleæ prise par 
M. Dayrem, à Lectoure (Gers), et dont j'ai devant moi un grand 
nombre d'exemplaires, n’a aucune conformité ni avec la race 
charentaise et girondine #z2macea, ni avec la race pyrénéenne 
tristis. Dans le Gers, la forme d’Aczilleæ, avec les taches d’un 
rouge carmin vineux assez vif, non pas terne comme chez #725415, 
et ne tendant pas au vermillon comme dans les Charentes, res- 
semble plutôt à la race de Suisse, de Franche-Comté et de Savoie 


qui me semble référable à la forme de Franconie, primitivement 


30 


466 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


décrite et figurée par Esper, ainsi que je l’expose ci-dessus. Il est 
cependant bizarre de constater que, malgré sa position géogra- 
phique entre les régions girondine et pyrénéenne, le Gers, en ce 
qui concerne la forme de Zygæna Achilleæ, se rattache plutôt à 


la région orientale. 


4° Basses-Alpes et Isère (4/pina, Obthr.). 


Je désigne cette ferme avec le nom de alpina. 

I] me semble que c’est celle dont Boisduval a donné la figure 
dans l’/cones, sous les n° 6 et 7 de la PI. 53, et qu'il y a décrites 
aux pages 49 et 50. 

A clulleæ-alpina est caractérisée par la couleur rouge carmin et 
non vermillon, aussi bien des taches aux ailes supérieures que des 
ailes inférieures. La confluence des taches rouges, à partir de la 
base des ailes supérieures, est fréquente, ce qui ne se remarque 
généralement point chez Wagneri-Achilleoides et chez Tripto- 
Lemus, dont il sera question plus loin. Aux environs de Digne et 
d'Uriage, où AcAilleæe vole abondamment en mai, se trouvent en 
effet assez souvent des exemplaires pourvus d’une confluence 
conforme à celle que représente la figure 6 de l’Zcones. Les Q ont 
ordinairement le fond des ailes d’un gris verdâtre. Le double 
collier blanc existe. La forme de Digne que j'ai appelée A/pina 
est spéciale; J'en ai environ 300 exemplaires sous les yeux, et ces 
papillons présentent dans leur ensemble un aspect bien particulier, 
comparativement à ceux des autres localités. Mais il est toujours 
utile d'observer que partout on peut trouver, au milieu des exem- 
plaires appartenant à la forme normale du lieu, des individus qui, 
par aberration plus ou moins fréquente, se rapportent mieux à 
ceux qui constituent la forme normale ailleurs. J'ai fait cette 
observation pour Sarpedon et Punctum; elle semble également 
justifiée dans le cas des diverses races locales d’A ckillee. 

En examinant une colonne de plus de 20 Zygæna À chlleæ- 
alpina à taches confluentes, et dont la confluence évolue confor- 
mément à la figure 6 de la PI 53 de l’/cones, je remarque quelques 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 467 
exemplaires chez lesquels cette confluence des taches rouges aux 
ailes supérieures est si développée que ces papillons ressemblent 
tout à fait à la Zygœna purpuralis (Minos); cependant ils ne 
parviennent pas, sous ce rapport, au même degré que ceux des 
Charentes. Inversement je remarque la tendance des Ac/illeeæ, 
dans les localités élevées des Basses-Alpes, à devenir conformes 
à la /anthina, Boisduval (/Zcones, PI. 53, fig. 8). Chez Janthina, 
le fond des ailes supérieures est d’un bleu verdâtre un peu bronzé, 
comme le dit Boisduval dans sa description; les taches rouges 
sont petites. La première /ax/lina décrite par Boisduval dans 
PÆssaz et figurée sous le n° 7 de la PL 8, n’a réellement que 
5 taches rouges aux ailes supérieures, savoir : 2 petites basilaires ; 
la 3° arrondie et petite également, située dans la fourche, à la 
naissance de la cellule; la 4° inférieure externe, ronde et pas bien 
étendue; la 5° extracellulaire petite et simplement suivie inférieu- 
rement d’un prolongement linéaire très faible. Je ne possède, 
venant des Basses-Alpes, en outre du specimen typicum Borsdu- 
valianum, qu'un autre O' semblable, également à 5 taches. Bois- 
duval avait pris /anthina à Bourg-d'Oysans, dans l'Isère. 

C'est un papillen très vieux, mais encore bien conservé. La 
Zygæna Vice, Huebner, fig. 11, paraît être une /anthina dont 
le fond des ailes supérieures est plus clair. Ma collection contient 
une /anthina piémontaise se rapprochant un peu de Vzciæ, mais 
cependant plutôt référable à /anthina. D'ailleurs je reparlerai de 
Janthina à propos de la forme florentine d’A c/llee. 


5° Italie centrale {7 7:p/olemus, Huebner). 


En Toscane, la Zygœna Achilleæe donne la forme 7'riptolemus 
Huebner (n°* 06 et 07), et l’Ab. /anthina, Boisduval (essai Mono gr. 
sen, Pl OVITT ho. 7 et Zcones, PL 53, fo: 8). 

Le fond des ailes supérieures, dans la forme florentine normale, 
est d’un bleu d’acier parfois légèrement verdâtre; les taches 
rouges sont carminées ; la basilaire costale est relativement longue ; 
on voit une tache rouge assez grande, à la naissance de la fourche, 


468 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


entre les nervules costale et médiane, et une autre assez grosse 
tache rouge au delà de l’espace cellulaire; cette tache est composée 
de deux taches confluentes; enfin à la base, entre les nervules 
médiane et sousmédiane, il y a une tache rouge assez grosse, mais 
s'arrêtant court et ne semblant pas tendre à confluer avec la tache 
rouge externe qui est située un peu plus loin. 

La Zriptolemus, bien représentée par Huebner, est la race qui 
est très commune aux environs de Florence, à la fin de mai et au 
commencement de juin. Certaines Q ont un soupçon d’entourage 
blanc autour des taches rouges de leurs ailes supérieures. Quelques 
Q ont le fond des ailes supérieures d’un gris verdâtre clair. 

Il y a des exemplaires G' dont les taches rouges des ailes supé- 
rieures sont très réduites; la grosse tache rouge supérieure externe 
ordinaire est alors remplacée par deux petits points rouges séparés 
l’un de l’autre, ou même par un seul; le point inférieur ayant 
disparu. 

Ces exemplaires sont conformes à l’Ab. /anthina, décrite et 
figurée par Boisduval, premièrement dans l’Essas sur une Mono- 
graphie des Z'ygénides, 1820, p. 45, 46, et PI. VIII fig. 7, d’après 
un exemplaire à 5 taches aux ailes supérieures recueilli à Bourg- 
d'Oisans (Isère), par Boisduval lui-même; secondement dans 
l’/cones, 1834, p. 51 et PI. 53, lg. 8, d’après un individu à 6 petites 
taches toutes séparées, les unes des autres, sauf les basilaires. Le 
fond bleu des ailes et la teinte rouge diffèrent un peu d’A czil- 
leoides; autrement Ackilleoides et surtout Wagneri présentent le 
même caractère que /anthina, relativement à la réduction du 
nombre et de la grosseur des taches rouges des ailes supérieures. 

Le double collier blanc est généralement bien marqué. 

Sur près de 109 exemplaires que J'ai pris à Florence, en juin 
1907, un seul O' a les 2 taches rouges comprises entre les nervules 
médiane et sous-médiane, confluentes. Mais on remarquera la 
confluence très fréquente de la tache rouge costale basilaire des 
ailes supérieures et de la tache rouge qui est à la naissance de la 
fourche formée par les nervules costale et médiane. Cette con- 
fluence n'existe pas dans tous les exemplaires de Florence; mais 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 469 


chez de nombreux individus de cette localité, la confluence se 
remarque bien conforme à ce qui est représenté sur les figures 
n° 06 et n° 07 de l'ouvrage de Huebner. 

A Florence, Achilleæ-Triptolemus est très abondante dans un 
petit bois de chênes qui se trouve à mi-côte, en face de la Poudrière. 
Elle habite avec sa congénère Oxytropis; mais elle est plus abon- 
damment représentée que celle-ci. Le matin, elle se tient posée sur 
les brins d'herbe et il est aisé d’en faire une ample récolte. 


6° Alpes-Maritimes (Ac/zlleoudes, Wagner, et Wagneri, 
Millière). 


La Zygæna Wagneri fut décrite et figurée par feu Millière, 
dans les Annales de la Société entomologique de France, 1886, 
aux pages 6, 7 et 8, et sur la PI. I; les figures 3 et 4 représentant 
la larve; la figure $ donnant la coque et les figures 6 et 7 étant 
consacrées à l’imago. 

Je suis très étonné de lire dans l'ouvrage du D" Adalbert Seitz : 
Les Macrolépidopières du Globe, à la page 21 de la traduction 
française, à propos de la Zygœna Wagneri, ce qui suit : « Cette 
espèce ne se rattache directement à aucun autre groupe ». 

Evidemment le D' Adalbert Seitz ne s'est pas donné la peine 
d'étudier attentivement la question. Sans cela, il eût aisément 
reconnu que Wagneri est une simple modification locale d’A cZl- 
leæ; les premiers états sont tout à fait analogues et les transitions, 
notamment celles que fournit Acæilleoides, sont telles qu'aucune 
séparation spécifique entre Wagneri et Achilleæ ne peut paraître 
raisonnablement possible. 

Wagneri et Achilleoides habitent dans les Alpes-Maritimes. 
A chilleoides se rencontre jusqu'à Bordighera vers l'Est, du moins 
d’après ce que je connais. J'ai sous les yeux plusieurs centaines 
d'Achilleoides et de Wagneri, au moins 850 en tout des deux 
formes: je dispose en outre d'environ 1,500 AcAilleæ de localités 
diverses ; c’est donc appuyé sur ces documents que je poursuis la 


470 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


présente étude dont les conclusions ne sont pas d'accord, en ce 
qui concerne Wagneri, avec l'opinion des auteurs allemands. 

Wagneri pure est caractérisée par son aspect sombre; le fond 
des ailes supérieures est noir ardoisé, avec les taches rouges d’un 
ton carminé vineux qui ne ressort pas vivement sur le fond, à 
moins que les taches rouges en question ne soient cerclées de 
blanchâtre. Les ailes inférieures sont d’un rouge carmin plus ou 
moins largement bordées de noir ardoisé. On perçoit assez net- 
tement un double collier blanc. Généralement les ailes supérieures 
de Wagneri présentent, en outre des taches rouges basilaires, trois 
petites taches rouges assez arrondies, placées comme les trois 
points d’un triangle dont deux sont en haut et un est en bas. Le 
premier point rouge, en haut, se trouve dans la fourche, à l’origine 
des nervules souscostale et médiane; le second, en haut, est au delà 
de l’espace cellulaire; il est quelquefois accompagné d’une tache 
inférieure contiguë; le troisième, en bas, est presque juxtaposé 
au-dessous de la rervule médiane. /anthina, Bdv., se comporte 
exactement de cette manière; mais, ainsi qu'il est dit ci-dessus, 
Janthina est référable à une autre race locale d’A czillee. 

Dans sa description, Millière appelle sxbcærulea la variation 
bleu ardoisé. Caractérisée, d’après les individus qu'il m'a jadis 
envoyés, étiquetés de sa main, par l'élargissement de la bordure 
bleu d’ardoise des ailes inférieures, au détriment du fond rouge 
des mêmes ailes. Dès lors, M. Clemens Dziurzinski, un spécialiste 
viennois pour les Zygæna, aurait pu se dispenser d'inventer le 
nom #2p9ra, en vue de désigner les exemplaires chez lesquels Île 
noir a presque envahi le rouge des ailes postérieures, puisque 
Millière avait pourvu, au moyen de l’appellation svbcærulea, à la 
caractéristique de cette variation (Voir Awnales Soc. ent. France, 
1886, p. 7, en note). Cependant je dois reconnaître que l'esprit 
imprécis de feu mon ami Millière se retrouve dans les termes 
insuffisamment explicites de sa description. Il a fallu que j'aie en 
ma possession des co-types de swbcærulea pour savoir exactement 
à quelle variation leur nom s’appliquait exactement, et cette cir- 
constance est une sérieuse excuse du doublon synonymique commis 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 471 


par M. Driurzinski. D'ailleurs c'est dans le sens de la suppression 
ou de l’oblitération tout au moins partielle des parties rouges que 
semble se diriger la variation chez Wagneri, exactement à l'inverse 
de ce qui se passe chez winiacea. En effet, des trois taches rouges 
placées normalement sur les ailes supérieures comme un trépied, 
il peut manquer l’une ou l’autre. C’est ainsi que la Q figurée par 
Millière sous le n° 6 de la PI. 1 des Annales Soc. ent. France, 1886, 
est privée de la tache extracellulaire, et le © représenté sous le 
n° > manque du point rouge de la base de l’espace cellulaire. 
Examinant les exemplaires de ma collection, je constate les 
variations essentielles suivantes : 

1° Subcærulea, Millière (zigra, Dziurzinski) ; les ailes inférieures 
sont largement envahies par la bordure bleu d’ardoise. 

2 Les macules rouges sont entourées de blanc, aux ailes supé- 
rieures, très rarement chez le &, plus fréquemment chez la Q; 
certaines taches peuvent même devenir presque totalement blanches. 

3° Giesekingi, Wagner. La tache rouge à la base de la fourche 
cellulaire des ailes supérieures, entre les nervules médiane et sous- 
costale, est absente (fig. 7; Millière). Je possède plus de 20 ©, 
mais aucune © de cette variation. 

4° La tache rouge inférieure du trépied manque; ma collection 
contient plusieurs Get une Q de cette variation. 

5° La tache rouge externe extracellulaire des ailes supérieures 
fait défaut (fig. 6; Millière). Je ne possède pas d'exemplaire de 
cette variation. 

6° Quadrimaculata; inversement à la variation par défaut, pré- 
citée sous le n° 5, la tache rouge externe extracellulaire est bilobée, 
en ce sens qu’elle est pourvue inférieurement d’une tache supplé- 
mentaire qui lui reste généralement contiguëé. Cette variation est 
très fréquente et toutes les gradations du développement de cette 
tache supplémentaire existent. 

Quant à A cAlleoides, elle est la transition entre Wagner: pure 
et Achillee. La couleur rouge carmin est plus vive chez Acil- 
leoides et un peu mélangée de vermillon; les Q ont le fond des 
ailes supérieures grisâtre, la côte et le bord externe restant d'un 


472 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


bleu indigo noirâtre. La confluence entre les taches rouges des 
ailes supérieures est extrêmement rare. Les taches en question sont 
généralement petites. On ne peut confondre À chälleoides et tristis; 
tristis est dans son ensemble moins grande et moins robuste; le 
fond de ses ailes supérieures est plutôt verdâtre, tandis qu’il tend 
généralement au bleuâtre chez Ackilleoides; la teinte du rouge 
chez /ristis est plus éteinte. D’un autre côté, on distingue aisément 
A clalleoides d'Alpina qui a les taches rouges plus grandes et de 
couleur plus vermillonnée. Ce sont les races de Puget-Théniers; du 
Mont Gourdon; de la vallée du Roubion; de la Cascade de 
Neigeas, en la vallée du Var; de Saint-Martin-de-Vésubie, qui 
établissent une insensible transition entre Achtlleoides et Alpina. 
Dans la vallée du Paillon, sur les montagnes entre le Laghet et 
les moulins Gaetti, à Vence, au Mont-Castel-de-Brans, à Tourette- 
sur-Loup, on trouve Achilleoides inclinant vers Wagneri; quant 
à Wagneri pure, c’est au col d’Eze, à la Turbie, au Mont Paca- 
naglia qu'il faut surtout la rechercher. 

Si l’on place à côté les uns des autres les exemplaires charentais 
et niçois d'Aczilleæ, c'est-à-dire les formes w#zmtacea et Wagneri, 
les plus accentuées, chacune dans son sens, on trouve assurément 
une différence énorme entre les deux races; mais si l’on envisage 
la série des transitions offertes par AcAilleoides, Alpina et 
A chilleæ type, on acquiert la même conviction d'unité spécifique 
qui se dégage de l'examen des diverses formes de Sarpedon et 
Punctum, de Scabiose et Neapolitana. Y1 se fait une modification 
assez profonde dans la même unité spécifique du genre Zygæna, 
entre les représentants de cette même unité, selon qu'ils vivent à 
l'Est ou à l'Ouest, c’est-à-dire dans la péninsule italienne, au delà 
des Alpes, ou du côté de l'Océan et dans les montagnes pyré- 
néennes; mais rien d’absolu nulle part; en tous lieux, on peut 
rencontrer à l’état d'Aberration, ce qui caractérise ailleurs la race 
normale. Nous ferons des constatations analogues pour 77ans- 
alpina-Hippocrepidis Meliloti-Charon, et c’est l'étude de ces 
variations géographiques quelquefois si accentuées et relativement 
si constantes qui ajoute tant d'intérêt aux observations que suscite 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 47 


2) 


le genre Zygœna. De plus, quel ensemble de Lois homogènes 
s'applique à ce genre Zygæna, pour la modification des couleurs, 
l'oblitération ou la confluence de certaines taches! Enfin quelle 
influence mystérieuse, dont les causes restent inconnues, produit 
la teinte vermillon sur Ackilleæ et Hippocrepidis dans les Cha- 
rentes, tandis que dans les Alpes-Maritimes, c’est une couleur 
carminée foncée qui remplace pour les parties rouges des ailes la 
tendance miniacée si remarquable dans les plaines calcaires de 
l'Ouest de la France! 


Nous n'avons jamais trouvé Acilleæ dans les Pyrénées- 
Orientales. 


Je possède quelques exemplaires d’Ackilleæ recueillis dans les 
Abruzzes. D’après les échantillons que renferme ma collection, les 
Abruzzes donneraient une race assez spéciale d’Ackilleæ, mais Je 
préfère n’en pas parler davantage, dans la crainte de commettre 
quelque erreur d'appréciation. En l'état actuel de la Science, je 
pense qu’une centaine d'exemplaires est indispensable pour 
apprécier une forme locale comparativement aux autres. 

M. Orazio Querci m'a gracieusement offert une belle Aberration 
confluens d'A chilleæ, prise à Polleca, dans les monts Aurunci, par 
600 mètres d'altitude, en juin 1900. Cet exemplaire est remarquable 
par la couleur grisâtre de ses ailes supérieures, la réduction consi- 
dérable du point rouge cellulaire et la confluence en un gros trait 
rouge de la tache basilaire et de la tache externe inférieure. 
Evidemment la race d'Acxilleæ dans la partie de l’Italie qui est 
plus méridionale que la Toscane est spéciale et nécessite une étude 
qui sera très intéressante. J'espère y pourvoir au moyen d'une 
documentation suffisamment importante et que je m’efforcerai de 
réunir sans délai. 

M. CI Dziurzinski m'a envoyé quelques individus étiquetés 
Ab. cingulata, pris à Moedling, présentant une faible rougeur sur 
un anneau abdominal. En France, dans aucune localité, ainsi que 


je l'ai déjà fait connaître, je n'ai vu un seul exemplaire de 


474 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Zygæna Achilleæ tendant à avoir l'abdomen annelé de rouge; 
mais M. Abeille, dans les Mémoires de la Société linnéenne de 
Provence, 1900, p. 12, fait connaître qu'il a pris un seul exemplaire 
de l'Ab. cingulata, le 2 juin 1908, sous le rocher de Bartagne, 
dans la montagne de la Sainte-Baume (Var). « Le papillon, dit-il, 
porte sur le dessus de l'abdomen un anneau rouge très foncé et 
nettement interrompu sous le ventre » En Provence, Aczilleæ 
éclôt deux fois par an, en mai, puis en juillet et août, d’après les 
observations de M. Abeille. 


Zygæna Anthyllidis, Boisduval. 


Boisduval, le premier, a décrit et figuré la Zygœna appelée par 
lui Anthyllidis, aux pages 78 et 70 et sous le n° 8 de la PI. IV 
de l'EÆssai sur une Monographie des Zygénides, d'après deux 
individus qui lui avaient été indiqués, à tort, comme capturés 
dans l'Espagne méridionale. 

L'Espèce est de nouveau figurée sous le n° 7 de la PI 55 de 
l’/cones; mais dans ce dernier ouvrage, Boisduval dit que la 
Zygœna Anthyllidis se trouve en Espagne et dans les Pyrénées, 
aux environs de Barèges. On peut en effet rencontrer A%/kyllidis 
dans les Pyrénées espagnoles, au proche voisinage du département 
des Hautes-Pyrénées, mais jamais elle n’a été capturée dans 
l'Espagne méridionale, ainsi que Boisduval l’avait d’abord pré- 
tendu, s'étant trouvé induit en erreur par de fausses indications. 
J'ai fait moi-même figurer la Zygæra Anthyllidis, à l’état de 
chenille, coque et imago, sous les n° 14, 15, 16 et 17 dela PL 
de la VIII° livraison des Ætudes d’Entomologie. Je prie le lecteur 
de se reporter à la page 30 de cette VIII® livraison où je donne 
quelques renseignements sur la manière de vivre de l’Espèce. 

En donnant le nom d’'Anfhyllidis, Boisduval eut en vue cer- 
taines plantes de la famille des Papilionacées, composant le genre 
Anthyllis. Ce mot Anthyllis est formé des deux mots grecs : 
anthos fleur et ioulos duvet. Ce sont des plantes velues soyeuses, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 47 


| Ur 


comme le dit l’abbé Coste, à la page 316 du vol. I de la /‘Zlore 
descriptive et illustrée de la France. L'Anthyllis vulneraria paraît 
être la plus connue des Espèces du Genre; elle est vulnéraire et 
résolutive et entre dans la composition du thé suisse. 

La Zygœna Anthyllidis est une Espèce des grandes hauteurs 
pyrénéennes ; elle n’a Jamais été trouvée par nous ailleurs que dans 
les Hautes-Pyrénées, par une altitude d’au moins 1,700 à 
1,800 mètres, et elle s'élève au delà de 2,000 mètres. Elle a aussi 
été rencontrée dans les montagnes du Caucase, où elle donne une 
forme différente de celle des Pyrénées. 

J'en ai capturé de très nombreux exemplaires, au mois de 
Juillet, lors des séjours que je fis à Cauterets. Dans le nombre des 
individus, 1l se trouve des Aberrations assez intéressantes; mais 
Je n'ai Jamais pris Aw/#yllidis jaune. 

Lorsque Staudinger et Rebel firent imprimer dans leur Catalog 
1001, à l’article 4340 : Anthyllidis, la mention : Ab. f#ava, Obthr. 
(Etudes d'Ent., XX, PL 8, fig. 141), ils rapportèrent à tort à 
Anthyllidis ce qui s'applique réellement à exwlans. Tout naturel- 
lement, le D' Adalbert Seitz, négligeant de recourir aux sources, 
s’abstenant de toute vérification et, malgré les erreurs dont cet 
ouvrage est rempli, adoptant toutes les assertions du Cafalog, 
comme étant l'expression infaillible d’une vérité incontestable et 
qu'il serait sans doute bien téméraire même de contrôler, a repro- 
duit servilement, à la page 22 de l'édition française (Zygæna), 
la faute commise par Staudinger et Rebel. 

Le collier est d’un jaune décidé; l'abdomen est généralement 
annelé de rouge; mais l'anneau rouge fait parfois défaut, et l’on 
trouve tous les degrés depuis l’abdomen entièrement noir jusqu'à 
l’annellation rouge vive et nette; mais l’anneau existe sur un seul 
segment abdominal; pas sur deux. Les parties rouges des ailes 
et de l’abdomen sont plus ou moins claires ou foncées; les exem- 
plaires même frais peuvent paraître d’un rose pâle, au lieu d’être 
d’un rouge vif. Je crois que ceux qui, éclos, la veille, passent la 
nuit, exposés au froid de la montagne et à l’humidité ambiante, 
subissent une décoloration considérable. Le fond des ailes supé- 


476 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


rieures est bleu ou verdâtre; les taches rouges des mêmes ailes 
sont plus ou moins soulignées et surmontées de jaune; elles restent 
généralement séparées et confluent très rarement entre elles. 
Cependant la tache basilaire costale supérieure est fréquemment 
jointe à la première tache rouge cellulaire et les deux taches 
externes sont souvent contiguës; mais la réunion des quatre taches 
rouges des ailes supérieures en une seule macule, cependant con- 
forme à la loi de variation chez les Zygæna, est bien exception- 
nelle, puisque sur plus de 400 exemplaires alignés dans ma 
collection, sans parler des autres que J'ai vus et pris et qui n’y 
figurent pas, il n'existe pas un seul individu offrant cette confluence 


que J'ai pourtant constatée plusieurs fois dans l’Espèce voisine 
Exulans. 


Si, par un beau temps de juillet, quittant Cauterets de grand 
matin pour aller récolter la Zygœna Anthyllidis vers les Oulettes 
du Vignemale, au delà du lac de Gaube, on s'engage, après avoir 
dépassé l'établissement des bains de la Raillère, dans la belle 
route tracée au milieu de la forêt de hêtres et de sapins qui 
conduit au Pont d'Espagne, il n’y a guère pour l’'Entomologiste 
de papillons à prendre, en dehors des Noctuelles et des Phalènes 
reposées sur les rochers de granit, tout le long du chemin. C'est 
pourtant un plaisir délicieux, avant que les rayons du soleil ne 
soient venus rendre la montée un peu plus laborieuse, de côtoyer, 
dans la fraîcheur matinale, le torrent dont les eaux, merveilleuses 
de limpidité, forment de si admirables cascades. 

Les pêcheurs de truites fréquentent constamment les bords 
escarpés du torrent. On les voit, agiles, sautant sur les roches 
autour desquelles bouillonnent les eaux tumultueuses, cherchant 
l’occasion de saisir leur proie. Avec quelle violence les ondes 
écumantes se précipitent dans la pente qui les entraine, tandis 
que çà et là, trouvant à se reposer de leur course rapide dans un 
lit plus plan, leur masse paraît d’un azur si profond, si clair et 
si pur. D’énormes blocs de rochers semblant éboulés des hautes 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 477 


crêtes se sont arrêtés comme suspendus sur les flancs de la mon- 
tagne, ou bien, emportés par leur poids, 1ls ont renversé tous les 
obstacles et ont roulé jusqu'au fond de la vallée. Des massifs de 
sapins étendent leurs branches d’un vert foncé sur lequel se 
détachent agréablement les jeunes pousses d’un vert encore si 
tendre. Les À Dies pectinata et excelsa, arbres qui vivent longtemps, 
ainsi que l'indique leur nom dérivé du grec : ab1os, élèvent vers 
le ciel la flèche qui couronne leur pyramide, et mélangent leur 
feuillage à celui des bouleaux, des sorbiers, des framboisiers et 
des sureaux. 

Arrivés auprès du Pont d'Espagne où viennent confluer les 
eaux du lac de Gaube et de la vallée de Marcadau, il faut produire 
un sérieux effort pour gravir les sentiers mal entretenus, encombrés 
de pierres et traversés de racines, que certains touristes, coutumiers 
des Hautes-Pyrénées, connaissent sous les noms familiers de 
crève-cœur et de coupe-Jarret. 


Si le soleil n’a pas encore atteint les cimes du côté de Lutour, 
l'ascension est plus facile et l’on est récompensé, par une économie 
de fatigue, d’avoir été matineux. Les pins ont remplacé les sapins. 
Le tronc écailleux et gercé, mais d’une agréable couleur rosée, du 
Pinus sylvestris, s'élève, souvent dégarni de branches jusqu'à sa 
couronne, concurremment avec la tige gris noirâtre du Pzus 
montana; leurs cônes desséchés jonchent le sol et les émanations 
balsamiques de leur résine parfument l’atmosphère. Les premières 
touffes de ÀAododendron présentent leurs fleurs d’un rose carminé 
et la gracieuse Rosa alpina, dans les sites où elle échappe à l'at- 
teinte des promeneurs, élance ses longues branches flexibles à 
l'extrémité desquelles s'épanouit sa fleur pourprée dont le parfum 
est si doux. 

Enfin on aperçoit la nappe azurée du lac de Gaube, dont les 
eaux s'étendent tranquilles et à peine irisées par un zéphyr léger. 
On peut traverser le lac en bateau et aborder assez promptement 
à la rive prochaine, ou bien suivre le chemin que parcourent les 
chevaux et les mulets sur le flanc de la montagne, à droite du 


478 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


lac de Gaube, C’est le long de ce chemin que vole la Zycæna 
Orbitulus-Oberthuri, et sur la pente pierreuse, au-dessus du sentier, 
que se trouve la Zygæna Contaminet; mais Anthyllidis ne com- 
mence à paraître que plus loin encore. 

À l'extrémité du lac, on rencontre une prairie assez plane d'herbe 
rase, parsemée de pins et d'énormes rochers, dont J'ai déjà fait 
mention au cours de ces Æ/udes. On y peut apercevoir les Lycæna 
T'ithonus (Eros) et Escheri-Rondoui, ainsi que la Cieogene Pele- 
lerarta. Mais il faut continuer la route, gravir encore ure pente 
très raide, traverser un pâturage partiellement marécageux et 
suivre sans relâche le sentier tracé au fond de la montagne; cette 
fois, 1l est à gauche du torrent, dont les eaux mugissantes roulent 
et se pressent, pour se précipiter plus bas dans le lac dont on 
domine déjà la surface d'un bleu si pur. 

Sur le côté gauche de la montagne que traverse la route mule- 
tière, des touffes de XAododendron ferrugineum se développent 
au milieu des pierres éparses. Leurs fleurs d’un rose si vif sont 
épanouies. On s'arrête; car c'est là qu'on peut commencer à voir 
voltiger la Zygena Anthyllidis. D'ailleurs les rayons du soleil se 
sont élevés au-dessus des crêtes, du côté de l'Orient. Brillant dans 
un Ciel que n’encombrent pas encore les nuages, ils ne tardent pas 
a dessécher la rosée du matin et à réchauffer la vallée. La Zygæna 
Anthyllidis S'anime alors; le papillon semble une grosse mouche 
de la couleur même des fleurs de XLododendron. Les G' volent 
autour des buissons, passent et repassent, descendant et remontant 
la pente pierreuse et fleurie. On distingue de loin, sur les pierres, 
les coques qui recouvrent les chrysalides; elles sont blanches et 
luisantes comme de la porcelaine; au milieu du gazon fin qui 
pousse entre les pierres écroulées d'en haut avec les avalanches, 
la chenille peu active est facile à découvrir, grâce à ses couleurs 
tranchantes, jaune et noire. Parmi les Graminées, les An/2ylls, 
les Szlene acaulis et diverses Papilionacées rases, autour des buis- 
sons peu élevés de génévrier, la Zygæna Anthyllidis ©, plus rare 
que le Œ, mais généralement plus variée de couleur, se traîne assez 
lourdement et ne cherche guère à voltiger. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 479 


Pour peu que la matinée reste ensoleillée et que les nuages 
tardent à paraître, la récolte de la Zygæna Anthyllidis peut être 
extrêmement abondante. L'Espèce, dans certaines années et à 
certains jours, n'est point rare, et lorsqu'on est parvenu à l'altitude 
au-dessous de laquelle toute recherche la concernant serait vaine, 
il est aisé d’en faire une ample provision. 


Mais donnons à notre excursion un but plus éloigné; marchons 
vers le pied du Vignemale, en suivant toujours les bords du 
torrent. Nous ne cesserons pas de rencontrer la Zygæna Anthyl- 
lidis; elle sera partout en nombre plus ou moins grand, les Π
voltigeant au soleil et les Q ordinairement peu mobiles et posées 
sur le gazon. 


Quand vient l'heure de midi, on s'arrête pourtant, et le repas 
étendu sur l'herbe, au milieu des plantes alpestres, st vivement 
colorées, primevères et silènes, dans le magnifique décor de la 
haute vallée que ferme la masse imposante du Vignemale, sollicite 
une trêve et invite les Entomologistes à cesser momentanément 


leur fructueuse récolte. 


Souvent, hélas! au milieu du jour, dans les hauteurs pyré- 
néennes, les nuages s'élèvent de toutes parts et obligent à une 
prompte retraite; mais j'ai connu des journées superbes pendant 
lesquelles le ciel, sans orage, restait serein. C’est ainsi qu'en 1005, 
favorisés par un temps magnifique, nous avons poussé Jusqu'au 
pied de la haute montagne toute formée de pierres éboulées, dont 
le sommet se trouve couronné par un refuge hospitalier, en face 
et tout près du Vignemale. 


Les châlets du comte Russell sont à côté de ce refuge où l’on 
peut obtenir un frugal souper et un abri pour la nuit. C'est à 
mi-route de Cauterets à Gavarnie. On est là au milieu de la plus 
belle faune lépidoptérologique pyrénéenne. Cependant la Zygæna 
Anthyllidis ne se trouve plus à cette altitude; du moins Je ne l'y 
ai point vue, tandis qu’elle était si abondante au pied même de 
la montagne de pierres dont l'ascension est vraiment dure, surtout 
quand on marche depuis le matin. 


480 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Ce n’est pas sans émotion que je rappelle ces souvenirs de jours 
qui furent si beaux et si tôt finis. Le comte Russell n’est plus; 
mais le monument qu'il a laissé de sa prédilection pour le 
Vignemale et de sa sollicitude s1 bienveillante envers les amateurs 
des sommets pyrénéens, lui survit. Le comte Russell était une 
noble et sympathique figure; sa mémoire a droit au respect et à 
la reconnaissance des hommes. Malheureusement il ne fut m 
Botaniste, ni Entomologiste, ni Géologue; je l’ai toujours regretté 
pour lui et pour nous. Il savait décrire les paysages montagnards 
avec une exactitude incomparable; aussi les ouvrages dans lesquels 
il a relaté le souvenir de ses longs voyages et de ses ascensions 
souvent téméraires, sont-ils empreints d'une bonhomie et d'une 
sincérité dont je goûterai toujours le charme séduisant et le puis- 
sant attrait. La vie terrestre du comte Russell est maintenant finie, 
comme sera sans doute bientôt la nôtre; car l’âge est inexorable. 
Mais que sont donc les joies de la terre, même les plus pures, 
celles que nous vaut l'étude de la Nature, à côté du bonheur 
céleste, lorsque nous pourrons, s'il plaît à Dieu, dégagés et puriñés 
de toutes les misères d’ici-bas, admirer ses œuvres non point dans 
une obscurité incertaine, mais au sein de la clarté et de la vérité 
éternelles ! 


Zygæna Exulans, von Hohenwarth et Jos. Reiner. 


Esper a figuré la Zygœna Exulans, sous les n°* 1 et 2 de la 
PI XLI de son Volume Il, d’après des exemplaires originaux 
qui lui furent communiqués par celui qui découvrit l'Espèce, 
c'est-à-dire par le Domdechanten Freyherr von Hohenwarth « zu 
Ende Julius auf den hoechsten Alpengipfeln des Eisgebuerges 
am Glockner, auf der sogenannten Pasterze in Obercaernthen »; 
ce qui signifie en français : « par le Doyen de Cathédrale Baron 
de Hohenwarth, à la fin de juillet, sur les plus hautes cimes 
alpestres de la montagne de glace, au Glockner, sur le lieu dit 
Pasterze, en Haute-Carinthie. » 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 481 


Depuis la fin du XVII[* siècle, époque où l’on commença à 
connaître la Zygœna Exulans, de nombreuses stations nouvelles 
furent reconnues comme habitées par l’Espèce en question, aussi 
bien en Ecosse qu’en Laponie, dans les Pyrénées et dans les Alpes. 
En ce qui me concerne, je n'ai Jamais observé Æxwlans à une 
altitude moindre de 2,000 mètres et Je l’ai vue voler jusqu'à près 
de 2,800 mètres; mais M. Rondou signale Æxzlans au-dessus de 
1,000 mètres Jusqu'à 2,500. Exulans a été capturée, paraît-il, au 
Gran-Sasso, en Italie. Je ne connais pas la forme qui provient de 
cette localité. Je ne crois pas qu'on ait trouvé Æxwlans dans la 
Sierra-Nevada d'Andalousie, où je crois possible qu’elle existe. 

La forme écossaise, dont J'ai sous les yeux une assez grande 
série d'exemplaires pris par Ried, ou bien ayant fait partie d’an- 
ciennes collections anglaises que j'ai pu acquérir, a un aspect très 
diaphane et quelquefois un peu ochracé, de telle sorte que le nom 
de subochracea que lui a donné White se trouve fréquemment 
justifié. Charles Barrett a figuré l’Exylans d'Ecosse sous les 
figures 5, 5 a, 5 d (larve) de la PI. 58 de son ouvrage : Te Lepid. 
of the British Islands. 

Barrett fait connaître qu'Æxwlans a été originairement prise 
dans les montagnes à Braemar, Aberdeenshire, en 1871, à une 
élévation d'environ 2 à 3,000 pieds au-dessus du niveau de la 
mer, par le D' Buchanan White et par le Prof. Traill. 

Les plantes suivantes sont indiquées par Barrett comme pouvant 
servir à la nourriture de la chenille d'exulans : Azalea procumbens; 
Cherlera sedoides,; Silene acaulis; Trifolium alpinum, repens, 
pratense,; Lotus corniculatus; Geum montanum, Sibbaldia pro- 
cumbens; Alchemilla alpina; les Erica; les Vaccinium. Le docteur 
White dit qu'il a élevé les larves sur : Polygonum aviculare et 
Triicum repens, plantes qui ne se trouvent pas dans les localités 
natives d’'Æxuwlans. 

En Laponie, il est à ma connaissance que Æxulans fut capturée 
dans la province de Finmarken par feu Staudinger, et pendant 
l'été 1908, à Kvickjock, au Mont Sutilelma (Lulea-Lappmarken), 
par Wilhelm Man. Les exemplaires de Laponie, considérés comme 


31 


482 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


plus diaphanes que ceux des Alpes et des Pyrénées, ont reçu le 
nom de l’anadis. I]1s ont en effet un facies très luisant et un peu 
spécial; notamment il ne semble pas que l’anadis tende à avoir 
les nervules accentuées par une couleur jaune, ainsi que cela se 
remarque chez Æxulans des hauts sommets alpestres. 


En France, Æxulans a été rencontrée dans les Pyrénées-Orien- 
tales, à la Croix de la Roquette (Pla Guilhelm), les 20 et 21 juillet 
et 3 août 1900, par H. Powell, et sur l’arête Nord du Camigou, 
les 31 juillet et 1° août 1900, par le même chasseur. L’Espèce 
était abondante. Elle a fourni deux Q dont les taches rouges des 
ailes supérieures sont tout à fait confluentes et forment une grande 
macule d’un rose carminé, seulement interrompue par les nervules. 


Sur les hauteurs des Pyrénées-Orientales, les © Exulans ont 
fréquemment les taches rouges entourées d'un très mince liséré 
jaune doré; les exemplaires sont de taille moyenne; ils ont tou- 
jours l'abdomen noir, sans anneau rouge. Mon frère a trouvé 
Exulans au sommet du Nethou et nous l'avons rencontrée dans 
quelques hautes montagnes, au-dessus de Cauterets, mais seulement 
par exemplaires isolés. Feu de Graslin avait capturé Exulans sur 
les hautes crêtes du Cambrès d'Ase. Elle est aussi dans la vallée 
d'Eyna. Je possède un © des Pyrénées-Orientales chez qui les 
parties normalement rouge carmin des ailes sont devenues oran- 
gées. Cet exemplaire fait la transition entre la forme rouge et l’Ab. 
flava que j'ai fait figurer sous le n° 141 de la PI 8 de la 
XX® livraison des Etudes d'Entomologie, d'après un O' pris au 
Lautaret par feu mon ami Emmanuel Martin. C’est une Aberration 
très belle et d’un jaune bien décidé. Je la crois extrêmement rare. 


La Zygœena Exulans est commune dans les Alpes : à Enchas- 
trayes; à Larche; à Chamounix; au lac d’Allos; au mont Pelat ; 
au Galibier et au Lautaret; entre Ryffelberg et Ryffelalp, mais 
plus près de Ryffelberg ; au Simplon, d’où je possède une magni- 
fique Ab. confluens, d'un rose carminé très vif; ce papillon faisait 
partie de l'ancienne collection Guenée. Au Simplon, les nervules 
des ailes supérieures tendent plus particulièrement à être d'un 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 483 


jaune brillant, de façon à former comme un enlacement de lignes 
dorées très fines autour des taches rouges. 

Le fond des ailes supérieures est bleu ou vert bronzé. Il y a 
dans les Alpes des exemplaires dont la taille est extrêmement 
réduite; d’autres qui ont au contraire de plus grandes dimensions. 
La Zygæna Exulans vit habituellement par colonies de nombreux 
exemplaires, çà et là, sur les hautes montagnes. Au Lautaret, il y 
avait, en Juillet 1006, une bonne localité pour Æxwlans, sur un 
petit plateau auquel on parvient après une légère ascension; ce 
plateau est adossé à de grands rochers, au sud-est de l'Hôtel 
Bonabel. Quelques touffes de Rhododendrons poussaient en cet 
endroit. Sur tout le plateau, aussi bien qu’en remontant les pentes 
qui y aboutissent, les Zygœna Exulans se trouvaient en nombre 
parfois considérable et les © offraient de jolies variations par 
coloration jaune des nervules des ailes supérieures. Un peu plus 
bas, de l’autre côté de la route que parcourent les voitures qui vont 
et viennent entre la Grave et le Galibier ou vers le Monetier-de- 
Briançon, il y avait sur une éminence sèche et chaude une colonie 
également nombreuse de Zygæna purpuralis (Minos); ce furent 
les deux seules Espèces de Zygæna observées par moi sur le 
plateau fleuri du Lautaret, au mois de juillet 1906. 

La larve d'Exulans est grosse, de couleur noirâtre, avec des 
points latéraux jaunâtres et quelques touffes de poils courts et 
noirs; la coque est blanche, luisante, un peu chagrinée, de forme 
ovalaire, comme un canot. On en trouve quelquefois plusieurs 
agglutinées sur la même branche et s'étant formées les unes sur 
les autres. 

Je n'ai jamais vu d'Æxrwlans avec la 4° tache rouge aux ailes 
supérieures. 

Pour compter les taches des Zygæna, il y a deux méthodes, 
suivant qu'on comprend, ou non, dans le compte les taches rouges 
basilaires ordinaires. 

Avec les taches basilaires, généralement au nombre de deux et 
séparées par la nervure, il y a $ ou 6 taches sur les ailes supé- 
rieures; sans les taches basilaires, il reste seulement 3. ou 4 taches 


484 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


externes. Dans la circonstance présente, je fais abstraction des 
taches basilaires; j'envisage donc seulement les taches externes 
ordinaires et Je constate qu'il y en a toujours 3, Jamais 4, du 
moins d’après ce que Je connais, chez Æxulans. J'ai sous les yeux 
plus de 1,000 exemplaires. Mais il peut se faire qu’on trouve, çà 
ou là, une variation à 4 taches. C’est dans l’ordre et il y a sur 
l'aile de la place où loger la 4° tache; ne serait-ce que juxtaposée 
à la 3° tache externe, c’est-à-dire collée à celle qui est le plus près 
du bord extérieur des ailes supérieures. 

Anthyllidis, au contraire, montre toujours la 4° tache rouge 
ultime qui manque chez Exulans. 

Les Zygæna Anthyllidis et Exulans sont les deux Espèces du 
Genre qui atteignent les plus hautes altitudes; la plupart des autres 
Espèces de Zygæna habitent les lieux moins élevés dans les mon- 
tagnes et se plaisent même dans les plaines et sur le bord de la 
mer. 


Zygæna Meliloti, Esper. 


Staudinger et Rebel indiquent, dans leur Catalog 1901, que 
Meliloti a été décrite et figurée par Esper, sous les n°* 1 à 8 de la 
Tab. XXXVIIL Hélas! je constate encore une erreur. La Tab. 
XXKXVIIT contient exclusivement les figures de Æippophaës et 
Tineiformis. C'est la Tab. XXXIX (Cont. XIV) du Tom. II qui 
contient effectivement la figuration de Meliloti; Imago (fig. 1, 2 
et 3); larve (fig. 4, 5); folliculus (fig. 6); chrysalides (fig. 7 et 8). 
Dans le texte (p. 10 de Zweiter Abschnitt), Esper fait imprimer : 
Meliloti; mais sur la Tab. XXXIX, le graveur a écrit : Melilotha, 
ce qui est fautif. Esper, sur la Tab. XXXIX, attribue à la coque 
le nom de folliculus; dans le texte, il appelle la coque : Gehaeuse, 
mot qui veut dire : boîte, coquille, enveloppe. L’Espèce Weliloti 
était abondante (zahlreich) dans les environs du lieu où résidait 
Esper (in unsern Gegenden), sans doute la ville d'Erlangen, en 


1770. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 485 


Meliloti ne paraît pas avoir été rare Jusqu'ici en Angleterre. Je 
possède en effet 82 exemplaires anglais portant les étiquettes 
suivantes : Brockenhurst, 1801; Canterbury, 1803; Lyndhurst, 
1874; New-Forest; ils faisaient partie des anciennes collections 
Maddison, Sheppard, Howard-Vaughan, Tugwell, Claxton, 
Battershell-Gill. Charles Barrett a figuré {/ellotr sous les n° 1, 
WAR mncatanve).de la Pl60 


Il dit que la chenille vit sur Lotus corniculatus et autres basses 
légumineuses (and others low growing leguminous plants). Sui- 
vant Barrett, Meliloti habite des places marécageuses (marshy 
spots) à New-Forest, Hants; on rapporte, dit-il, qu'elle a été prise, 
il y a plusieurs années, dans la forêt de Tilgate, Sussex. Barrett 
ne connaît pas d’autre localité britannique pour l'Espèce. 


En France, du côté occidental, je ne connais qu’une seule loca- 
lité pour la Zygœna Meliloti; c'est à Cauterets, sur la montagne 
du Péguère: mais la Melilofi n'y est point commune et je n'ai pu 
recueillir qu'un petit nombre d'échantillons. Ma collection ne 
contient que dix exemplaires récoltés tout auprès de Cauterets. 
Ils sont du reste à Cauterets, semblables à ceux que je connais 
d'Angleterre, de Prusse, de Wiesbaden, de Kritzendorf et de Zer- 
matt. 


La collection de Graslin contenait un exemplaire de la Zygæna 
Meliloti portant l’étiquette : Nancy. L'Espèce existerait donc aussi 
en Lorraine; mais un seul individu ne me permet pas d'apprécier 


la forme ordinaire d’une contrée. 


En Angleterre, aux environs de Vienne, dans l'Allemagne du 
Nord et dans les Hautes-Pyrénées, Weliloti a les ailes supérieures 
allongées, d’un gris bleuâtre ou verdâtre bronzé, un peu pâle, 
avec les taches rouges d’une teinte carminée, généralement peu 
brillantes. La bordure grise indigo des ailes inférieures est peu 
large et assez régulière; le fond des ailes inférieures n’est pas d'un 
rouge carminé très vif. Quelquefois la tache basilaire inférieure 
et la tache externe inférieure confluent. Abstraction faite des taches 
rouges basilaires, la Zygœna Mclioti, Esper, n’a que trois taches 


480 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


aux ailes supérieures et non quatre; de plus elle a l'abdomen tout 
noir, sans anneau rouge. 

Herrich-Schaeffer figure cependant sous les n°* 86 et 87 de la 
Tab. 12 des Zygænides Europ. une variété de Melilott ayant 
l'abdomen annelé de rouge, ce qui paraît d’ailleurs conforme à la 
règle de variation des Zygæna. 

Contrairement à l’assertion du Catalog Staudinger et Rebel 
1001, je ne crois pas que Séentz, Freyer (Neuere Barrage; 
Tab. 278; fig. 4) puisse être identifiée à Meliloti var. Herr. Schaeff. 
86 et 87; la bordure indigo des ailes inférieures, telle qu'elle est 
représentée sur la fig. 4 de la Tab. 278 de Freyer, s'oppose, sui- 
vant moi, à cette identification. S/entzu, Freyer, est référable à la 
forme Caron, non à la forme typique Melo. 

Je ne connais pas en nature la forme de Welilori dont l'abdomen 
est annelé de rouge et qui est figurée par Herrich-Schaeffer, sous 
les n°" 86 et 87. 

Meliloti affecte dans les Alpes-Maritimes, le Piémont, le sud de 
l'Italie, le Tyrol, une forme différente de la forme primitivement 
décrite et figurée par Esper. 

Huebner a figuré cette forme alpine et transalpine sous le n° 21 
de la PI. Lepidoptera 1; Sphinges 1; avec le nom de Caron. 
De même que Weliloti, Charon, Huebner (21) a l’abdomen tout 
noir et les ailes élancées; mais CLaron porte quatre taches rouges 
au lieu de trois (les taches basilaires non comprises) sur les ailes 
supérieures dont le fond est d’une nuance bleue bien plus foncée 
que chez Meliloti; la couleur rouge des taches des ailes supérieures 
et des ailes inférieures est bien plus vive chez Charon; la bordure 
indigo des ailes inférieures n’est pas de largeur régulière, mais 
épaissie le long du bord anal et à l'extrémté apicale; la bordure 
devient plus étroite seulement vers le milieu du bord terminal. 
Herrich-Schaeffer a figuré cette Caron sous les n°* 69 et 70 de la 
Tab. o des Zygénides Europ. Au sujet de ces figures, 1l est assez 
intéressant de constater que le n° 70 est représenté avec quatre 
taches rouges sur le côté gauche des ailes supérieures et trois 
seulement sur le côté droit. L'’anneau abdominal rouge existe chez 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 487 


la forme de Caron représentée sous le n° 23 de la Tab. 3 des 
Zygænides Europ. par Herrich-Schaeffer. Caron type et Welilot: 
type ont, toutes les deux, comme je l'ai déjà dit, l'abdomen entiè- 
rement noir et dépourvu de tout anneau rouge. Herrich-Schaeïfer 
donne à Caron, dont l'abdomen est annelé de rouge, ie nom de 
Stentzii qui fait confusion avec Szentziü, Freyer, en ce sens que la 
Zygœna Stentzii, H.S. (23) a 4 taches rouges aux ailes supérieures, 
tandis que la Séentzi, Freyer (278, 4) a seulement 3 taches rouges. 

Du reste les CAaron perdent quelquefois leur 4° tache rouge; 
j'ai sous les yeux des exemplaires des Alpes-Maritimes qui pré- 
sentent d’insensibles transitions entre la forme à 4 taches et celle 
à 3 taches et il faut tenir compte de cette circonstance. En somme, 
dans la forme CÆaron, le plus grand nombre des exemplaires pré- 
sente 4 taches, mais non l’universalité des individus. 

Duponchel a figuré sous le n° 7 de la PI. V du Supplém. Zygé- 
rides, la Meliloti © semblant bien conforme à la race type nommée 
par Esper. Je pense que Zzglossi, Duponchel (Sp. Zygénides, 
PI. XII, fig. 4), est une WMeliloti G'; je partage à cet égard l'opi- 
nion émise par le D' Boisduvai (/cones, IT, p. 56). Je ne sais pas 
à quoi rapporter exactement la Zygæna loi, Huebner (32); Je 
doute beaucoup que /o/i puisse être exactement identifié à Caron. 
Je crois que la figure 32 de Huebner est de celles dont, pour cause 
d'incertitude (incertæ sedis), 1l n’y a pas à tenir compte. 

La Charon, Huebner (21), d’après les documents que je possède, 
se rencontre dans les Alpes-Maritimes (Moulinet, col de la 
Madone de Fenestre); dans les Basses-Alpes et les Alpes-Mari- 
times (Mont-Gourdon, Entrevaux); en Piémont, à la Certosa di 
Pesio : au Monte-Generoso: au Val-Maggia, comme aussi au Monte- 
Castello, dans le sud de l'Italie; la variété chez laquelle l'abdomen 
est annelé de rouge, se trouve dans le Tyrol méridional; de plus, 
en Ligurie, il existe une race dont les ailes inférieures sont plus 
ou moins envahies par la teinte indigo de la bordure. Cette variété 
sombre, analogue à celle dont sont affectées d’autres espèces de 
Zygena, a les ailes supérieures d'un vert bronzé foncé et luisant 
et présente plutôt 3 taches rouges que 4, sur les mêmes ailes supé- 


488 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


rieures. C’est l’Ab. z/alica, Caradja. On trouve au Moulinet des 
individus qui s’en rapprochent et forment le passage entre : 1° la 
forme à ailes inférieures rouges bordées d’indigo et à 4 taches 
rouges sur les ailes supérieures qui est la Caron, Huebner; et 2° la 
forme à 3 taches rouges sur les supérieures et à ailes inférieures 
où 1l reste une simple tache rouge centrale peu développée, et qui 
est l’z/alica. | 

Aux environs de Chamouny, feu Prévost, de Genève, avait jadis 
capturé une race de Caron qui est représentée dans la collection 
Guenée, mais qui ne me semble pas avoir été retrouvée depuis bien 
longtemps; les ailes supérieures sont marquées de 3 taches rouges 
petites et semblables à celles d’zalica; mais les ailes inférieures 
sont restées rouges avec une bordure indigo qui n’est pas plus 
large que celle de Caron, typique. Je pense que c’est la Zygæna 
pennina, décrite par Rambur, à la page 160 du Catalogue systém. 
des Léfhid. de l'Andalouste. 

L’Aberration à taches entièrement confluentes, appelée confusa 
par Staudinger, se trouve en Angleterre; la figure 1 à de la PI. 50 
de Barrett représente une Q confusa qui lui fut communiquée par 
M. S. Webb. La fig. 1 à de la même PI. 59 établit la transition 
entre l’Ab. confusa et le type Meliloti. 

Les deux taches rouges extérieures de Caron peuvent être 
réunies et confluer de façon à présenter une sorte de cœur, non 
seulement dans la forme sicilienne, mais à titre accidentel dans 
les Alpes-Maritimes et dans l'Italie méridionale, au Monte-Cas- 
tello. 

La Zygæna Meliloti et sa var. Charon sont des papillons un peu 
grêles et cependant, d’après ce que J'ai vu, très actifs et doués d’un 
vol très rapide et soutenu, lorsque brille le soleil. Ils ne sont nulle 
part extrêmement abondants et paraissent rester très localisés. 

Meliloti ressemble à Trifolu, Lonicere, Filipendule, etc.; mais 
elle est beaucoup plus petite et plus délicate d’aspect. La collection 
Guenée contenait un exemplaire portant l'étiquette : Lyon. Je n'ai 
jamais vu d’autres Melilofi provenant de la région lyonnaise. Je 
suis porté à croire que Guenée était redevable de cet exemplaire 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 480 


à son ami Millière, qui habitait Lyon, avant d'aller se fixer à 


Cannes. 
Zygæna Trifolii, Esper. 


Je commence l'étude d’une série d'Espèces de Zygæena mal 
connues, souvent confondues entre elles, et dont la distinction spé- 
cifique n’est pas, en effet, toujours facile à établir, du moins pour 
certains exemplaires peu caractérisés dans un sens ou dans un autre 
et restant, malgré tout, litigieux, parce que les races où formes 
pourtant bien définies et bien distinctes dans leur ensemble, sont 
reliées les unes aux autres, par des exemplaires et même par 
d’autres races ou formes locales établissant d’insensibles, mais 
incontestables transitions. Il s’agit des Zygæena Trifoli, Serisiati, 
Lonicere, Angelice, Filipendule, Stæchadis, Dubia, Medicaginis. 
Je me suis depuis longtemps appliqué à leur étude et j'ai réuni 
à leur sujet des documents en très grand nombre; mais l’abon- 
dance de la documentation, si elle est nécessaire en vue des obser- 
vations poursuivies avec sincérité et ayant pour unique but l’obten- 
tion de la vérité recherchée sans aucun parti pris préalable, n’est 
pas exempte d’inconvénient ; car elle apporte forcément avec elle 
des éléments de transition essentiellement troublants et qui aug- 
mentent singulièrement la difficulté. Les exemplaires dont les 
caractères sont indécis, éloignent, bien plutôt qu'ils ne rapprochent, 
la vision claire et nette des distinctions réelles de Forme, de 
Variété et même d’Espèce que tous les Entomologistes désireraient 
pourtant percevoir avec cette précision qui est seule susceptible de 
donner à l’esprit qui observe et apprécie, une légitime satisfaction. 

On peut bien compter que Je n’agirai cependant pas à l'instar 
de cet éminent Coléoptériste dont j'ai déjà rappelé le souvenir et 
qui détruisait purement et simplement les échantillons embarras- 
sants, ne gardant que les exemplaires qui présentaient des carac- 
tères tangibles et tranchés. Je tiendrai, au contraire, exactement 


compte de tout ce que je suis parvenu à connaître; mais Je Jugerai 


490 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


une Race, une Forme, une Variété, une Espéce, d’après un ensemble 
d'individus suffisamment nombreux pour que je puisse être certain 
de ne pas disserter sur des exceptions. 

Dans les questions délicates et difficiles comme celles de cer- 
taines Espèces de Zygœna, voisines les unes des autres, mais 
semblant pourtant spécifiquement distinctes, 1l est en effet indis- 
pensable d'envisager un ensemble important d'exemplaires de la 
même localité, pour en concevoir une opinion ayant chance d’être 
vraie. 


La Zygena Trifolii a d'abord été nommée par Esper qui, sous 
les n°" 4 et 5 de la Tab. XXXIV du Tome II, figure l'Ab. confluens 
(Ag. 4) et la forme normale (fig. 5) de 7 r1folu. Les figures d’Esper 
sont grossières; cependant elles peuvent paraitre suffisamment 
reconnaissables. Esper nous apprend que l’Espèce a d’abord été 
découverte par lui-même aux environs de Francfort-sur-le-Mein. 
Huebner a figuré 7'7:folu sous les n°* 134 et 135; il a appelé Orobz 
une variété représentée sous le n° 133, ayant un petit point rouge 
entre la tache rouge cellulaire et la tache externe supérieure. Le 
même Huebner, sous le n° 138, a représenté avec le nom de G/1- 
cirrhisæ, une Aberration dont les taches rouges sont partiellement 
confluentes. Je ne sais pas bien si le papillon figuré par Huebner 
sous le n° 70, avec le nom de 7 r2folx, représente réellement 7 72folu. 
Boisduval a très mal figuré 77ifolu sous le n° 7 de la PI. 3 de 
l'Essai sur une Moncgr. des Zygénides. La figure 8 de la PI. 54 
dans l’/cones du même Auteur est moins défectueuse, sans tou- 
tefois donner ample satisfaction; mais l'Observation imprimée à 
la page 60 est judicieuse et me paraît conforme à la réalité des 
faits. Duponchel a figuré 7'rifolii sous le n° ; de la PI VI du 
Suppl. Zygénides sous le n° 1 de la PI VIII du même ouvrage. 
Cette dernière figure est à retenir. La description imprimée aux 
pages 71 et 72 est exacte. Freyer a donné une représentation 
grossière de /7ifola, avec exagération des dimensions de l’ab- 
domen, sous le n° 4 de la Tab. 200; il a figuré Glycirrhiza (sic) 
sous le n° 3 de la Tab. 164. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE AOT 


J'ai publié moi-même dans la XX° livraison des Etudes d'Ento- 
mologie, quatre figures de Z71fol sur la PI. 8 et comme suit : 
1° n° 150, Z 71folu, de Vernet-les-Bains; 2° n° 151, Trifolu-palustris- 
sexmaculata, de Rennes; 3° n° 152, l'Ab. confluens de la même 
Trifolii-palustris-sexmaculata; 4 n° 153, l’Aberration Confluens 
de la Z'rifolu-palustris normale, c’est-à-dire à 5 taches (y compris 
les 2 taches basilaires) et non à 6 taches. Je prie le Lecteur de se 
reporter à ce que J'ai écrit au sujet de 7 ifolu, de sa race Palustris, 
de l'Ab. sexmaculata, de l'Ab. confluens et des formes anglaises 
de Zrifolu, dans le même ouvrage, aux pages 43, 45, 48, 49, 
FO, ST. 

Enfin dans le III° Volume des Ætudes de Lépidoptérologie 
comparée, jai fait figurer sur la PI XXVIII, 6 nouveaux exem- 
plaires de Trifoli : n° 163, Trifolu-lutescens, Cockerell, Ab. coz- 
fluens, Tutt, d'Emsworth (Angleterre) capturé par Christy, en 
1803 ; n° 164, Z'rifolu-obscura, Tutt, d'Angleterre; n° 165, Palustris, 
de Rennes; n° 166 et n° 167 Palustris-confluens Cet Q, de Rennes; 
n° 167, Z'rifolu, Dup. de Hyères (Var). 

Le relevé de toute cette Iconographie générale relative à 7'r1folu, 
étant fait, je passe à l'examen des races locales de 7 1f0ol, Espèce 
polymorphe, répandue depuis l'Angleterre à la Barbarie. 


1 Australis, Lederer; 7 74folz, var. Rambur. 


Andalousie; certaines parties de l'Algérie. 


En commençant par le Sud, la première race de 7 r2fol qu'on 
peut observer est celle qui habite l’Andalousie, les environs de 
Géryville et d'Alger. Je crois que c’est la forme que Lederer a 
désignée sous le nom d’Aws/ralis. Mais je regrette de n'avoir pu 
lire la description originale de Lederer. Je n'ai pu me la procurer 
et Je crois devoir en faire la déclaration. 

Quoi qu'il en soit, 1l s’agit de la Zygæna considérée par Rambur 
comme une variété locale andalouse de 771fol et décrite par cet 
Auteur, aux pages 177 et 178 du Catalogue Systématique des 


492 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Lépidopt. de l'Andalousie. D'ailleurs la description n'existe pas 
seule et dépourvue de figure; mais nous devons une juste gratitude 
à Rambur qui, dans le Cat. Systém. des Lépidopt. de l'Andalouste, 
a copieusement représenté sous les n° 5, 6, 7 et 8 de la PL 1, la 
Trifolu de l’'Andalousie. 


La fig. $ semble être la figuration de l’Ab. cærulescens, Obthr, 
dont les ailes inférieures sont presque entièrement envahies par la 
couleur bleu foncé de la bordure. Cependant, dans le texte (p. 175), 
Rambur rattache la figure 5 à S/æchadis, comme représentant la 
race type de Sæchadis ? 


Je possède un grand nombre d'exemplaires recueillis à Grenade 
(de Graslin, mai et juillet); Sierra-de-Alfakar et Sierra-Nevada, 
du côté de Lanjaron (R. Obthr., juillet 1879); Barcelone (coll. 
Bellier); Géryville (1° lahaye, mai 1886), Husseim-Dey et 
Maison-Carrée (Holl, 1908); Lambèse, mai 1875, mai 1884, juin 
1885, mai 1906 et août 1885); Puebla de D. Fabrique, près Grenade 
(1900, Escalera). 


La taille d'Australis est plutôt petite, le fond des ailes supé- 
rieures est d’une coloration verdâtre bronzé, non transparent, avec 
une tache basilaire rouge carmin, coupée en deux par la nervule 
et ne descendant pas jusqu’au bord interne. Dans le milieu de 
l'espace cellulaire, il y a une petite tache rouge carmin souvent 
inférieurement contiguë à une tache plus grosse, avec laquelle la 
première tache forme, dans ce cas, comme une seule et unique tache 
qui serait simplement coupée par la nervule médiane. Quelquefois 
aussi les deux taches rouges (celle qui est dans l’espace cellulaire 
et celle qui est au-dessous), sont nettement séparées l’une de l’autre 
et forment deux petites macules arrondies bien distinctes. Enfin, 
il y a une tache externe rouge carmin, plus grosse, arrondie, au 
delà de l’espace cellulaire, de sorte que chez Awstralis, abstraction 
faite des taches basilaires, on constate 3 taches rouges sur les ailes 
supérieures. Ces taches sont d’un carmin un peu vineux, mais vif. 
Les ailes inférieures sont d’un rose carminé moins foncé que les 
taches des supérieures; elles sont entourées d’une bordure bleu 


D 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 493 


d'acier assez large et régulière. Il convient. de remarquer les deux 
teintes; vert bronzé du fond des supérieures et bleu d’acier du bord 
des inférieures, chez le même individu. 


Je n'ai jamais vu d’Aberration andalouse ou algérienne à 4 taches 
rouges aux supérieures, n1 d'autre confluence que celle des deux 
taches rouges médianes. À la Sierra-de-Alfakar, l’envahissement 
des ailes inférieures par la teinte bleue de la bordure, produit la 
variété cærulescens figurée, sans nom spécial, par Rambur, sous 
le n° 5 de la PI. 1 et rapportée à tort, il me semble, par cet auteur, 
à Stæchadis. Mon frère a pris le même jour, en juillet 1870, au 
même lieu, c'est-à-dire dans les montagnes incultes et sauvages qui 
s'élèvent du côté oriental de la petite ville d'Alfakar, un peu plus 
loin que la fontaine d’eau gazeuse, et d’où l’on jouit vers le Sud, 
d’une vue si belle sur la Sierra-Nevada, $ © cærulescens, 2 O in- 
termédiaires, 1 Cet 3 Q à ailes inférieures rouges, simplement 
assez largement bordées de bleu d'acier. 


La forme cærulescens ne paraît donc pas rare en cette localité ; 
Je ne l’ai Jamais vue, venant d’autre part que de cette Sierra-de- 
Alfakar. 


Je possède de Lambèse, où elles furent capturées par Merkl, 
en juin 1884, deux Ab. © aurorina, caractérisées par la couleur 
d'un rose orangé qui remplace la teinte rouge normale, en dessus 
comme en dessous, sur les ailes inférieures et aux taches des supé- 
rieures. 


Je dois faire observer que les races andalouse et algérienne occi- 
dentale diffèrent un peu l’une et l’autre de la race algérienne 
orientale. 


La race de Géryville, c’est-à-dire oranaise du sud, ressemble 
plus à la forme andalouse; la race de Hussein-Dey est également 
référable à l'Azs/ralis d'Andalousie. La race de Lambèse paraît 
encore une forme d'Aws/ralis. Mais à Khenchela, la race est plus 
grande, avec les taches rouges plus grosses et la forme des ailes 
plus élancée. Comme à Hammam-Rhira, c’est plutôt la forme 
Syracusiæ, de Sicile, à fond des ailes supérieures bleu d’acier 


494 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


plutôt que vert bronzé et à abdomen très allongé. Cependant cer- 
tains exemplaires de Lambèse et de Hammam-Rhira, mis côte à 
côte, ne semblent pas disparates. La différence est plus sensible 
entre les individus de la Sierra-de-Alfakar et ceux de Syracuse. 


2° Syracusiæ, Zeller. 
Sicile. 


La forme de Sicile figurée par Freyer, dans les Neuere Beitrege, 
sous les n° 3 et 4 de la Tab. 506, comme Syracusia (non Sjracusiæ) 
sur la Planche, et Syracusii dans le texte, d’après une paire fraîche 
rapportée de Sicile par Zeller et communiquée à Freyer par 
Rendant Metzner, de Francfort-sur-l'Oder, est tout à fait diffé- 
rente de la forme andalouse et ne peut être confondue avec 
Australis, ainsi que cela se fait généralement. La longueur déme- 
surée de l'abdomen, comme l’a représenté très correctement Freyer, 
l'aspect plus robuste, la teinte indigo du fond des ailes supérieures 
et du bord des inférieures, la bordure indigo régulière et moins 
large des ailes inférieures, la longueur plus grande des antennes 
dont l'extrémité paraît plus pointue, les taches rouges plus petites 
et d'une couleur plus miniacée constituent un ensemble de diffé- 
rences tout à fait suffisant pour séparer Syracusiæ, Zeller, d’Aus- 
tralis, Lederer. Je possède une série de Syracusiæ rapportée de 
Sicile par Bellier. 

Ainsi que je l’exposais à la fin de la notice relative à Aus/rals, 
la race de Hammaim-Rhira, dont M. Dayrem a recueilli 19 exem- 
plaires en mai 1900, est assimilable à Syracusiæ plutôt qu'à Aws- 
tralis. Il en est de même de la race d'Ain-Draham, en Tunisie et 
aussi de la race de Khenchela (Province de Constantine) dont 
M. Harold Powell captura 27 échantillons en mai 1908; mais ce 
qui est plus curieux, c’est que la race de l’Escorial (fin juillet 1879) 


est bien plutôt conforme à Syracusiæ qu'à sa voisine Aws/ralis. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 495 


3° Duponcheliana, Obthr. 
Pyrénées-Orientales. 


Assez conforme à la 7 r2fol Var. figurée par Duponchel, sous 
le n° 1 de la PI. VIII du Supplément Z'ygén. et représentée par 
moi, sous le n° 150 de la PI. 8 de la XX° livraison des Æ/udes 
d'Entomologie. Duponcheliana donne deux fois par an ; elle vole 
aux mois de mai et de septembre dans les prairies très arrosées, 
à l'altitude voisine de celle des villages de Casteil et de Vernet- 
les-Bains, le long de la route qui conduit à Casteil et dans la 
vallée de Saint-Vincent. C’est une Zygæna de taille relativement 
petite ou moyenne, d'aspect général terne, pas très opaque et peu 
brillant. Le fond des ailes supérieures est indigo pâle; les taches 
rouges et les ailes inférieures sont de nuance rose carminé; les 
taches des ailes supérieures confluent parfois dans toute leur lon- 
gueur, mais surtout entre la tache cellulaire et la tache externe, 
c'est-à-dire conformément à la confluence que représente la fig. 138 
de Huebner (G/ycirrhizæ). Cependant il n'y a aucun rapport de 
taille et surtout de coloration entre cette Glycerrhizæ de Huebner 
et la confluens, selon la disposition Glycirrhizæ, des Pyrénées- 
Orientales. 

Je possède environ 130 exemplaires de la Duponcheliana, pris 
à Vernet-les-Bains. C'est une forme dont l’aspect est bien homo- 
gène. Je crois qu'on peut lui rapporter la 7 7i7olz d'Elne, du Canet 
et de Banyuls, c'est-à-dire du littoral des Pyrénées-Orientales, 
mais comme ma collection ne contient qu’un trop petit nombre 
d'échantillons des localités voisines de la Méditerranée, dans les 
Pyrénées-Orientales, je ne crois pas pouvoir affirmer que la race 
y est semblable à celle de Vernet-les-Bains. La coque est allongée 
et Jaune. Le dessous des ailes reproduit le dessus, mais encore en 
plus pâle. J'ai reçu de Digne une paire seulement du 771folu, 
cette paire de Digne ressemble beaucoup à la 771/oli1 (sans indi- 
cation de localité), de la collect. Boisduval, qui est intermédiaire 


entre Duponcheliana de Vernet-les-Bains et Olbzana d'Hyères 
(Var). 


496 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


4° Olbiana, Obthr. 
Hyères. 


C'est la forme qui est représentée sous le n° 168 de la PI. XXVIIT 
du Vol. III de la Lépidoptérologie comparée. Ma collection con- 
tient environ 75 exemplaires pris au Ceinturon, près Hyères (Var), 
par M. Harold Powell, le 21 mai 1906. Les deux sexes sont diffe- 
rents. Le O' est d’aspect robuste, à ailes bleu Indigo, avec un reflet 
d'acier brillant; les taches ordinaires des ailes supérieures sont 
petites et d'un rose carminé vif; les ailes inférieures sont rose 
carmin, largement et nettement entourées d’une bordure indigo 
semblant moins luisante que le fond des ailes supérieures. Les 
antennes sont noires, longues, épaisses ; le thorax et l’abdomen sont 
d’un noir bleu et d’une contexture épaisse. La Q a les ailes ailon- 
gées ; elle paraît plus molle que le G' et a une ressemblance avec 
Loniceræ. Elle est de couleurs moins vives que ie ©, mais ls 
taches rouges des ailes supérieures sont plus larges. Olbiana diffère 
de Duponcheliana par sa taille généralement plus grande, son 
aspect plus fort, son corps plus large et ses couleurs plus foncées 
et plus vives. Duponcheliana fait l'effet d’une race pâle et chétive, 
tandis qu'Ulbiana est sensiblement plus ample et paraît plus vi- 
goureuse. Je n'ai vu aucun exemplaire d'Ofbiana dont les taches 
des ailes supérieures tendent à confluer. La coque d’O/biana est 
blanche, jaune ou chamois clair, luisante comme de la porcelaine, 
assez lisse, peu ridée. 

J'ai pris, en Juin 1805, dans les prairies au-dessus d'Uriage 
(Isère), 4 O' et 1 Q d'une forme de T'rifolu tout à fait intermé- 
diaire entre Olbiana et Duponcheliana. Elle ressemble beaucoup à 
Olbiana, mais est moins robuste et moins vivement colorée. 

Je possède de la Sainte-Baume un seul ©, de petite taille, ayant 
les taches rouges des ailes supérieures extrêmement réduites et la 
bordure indigo des ailes inférieures moins large. Je signale cet 
exemplaire aux Entomologistes de Marseille comme pouvant être 
l'indication d’une race de 7 71fol2 distincte et encore inconnue qu'il 


faudrait rechercher dans les prés sylvatiques de la Sainte-Baume. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 497 


M. H. Powell a pris une © Olbiana d’une couleur rose orangé 
pâle, mais ayant un aspect très brillant. Cet exemplaire aberrant 
est très grand et d’une remarquable fraicheur. 

À titre exceptionnel et aberrant on peut trouver O/biana en 
Angleterre, car ma collection contient un © portant l'étiquette 
Hailsham (6—1892) ayant fait partie de la collection Tugwell qui 
fut vendue à la salle Stevens, le 10 décembre 1895, et ayant tout 
à fait l'aspect de la race O/brana. 


s’ Trifolii, Esper (Tom. II, Tab. XXXIV; fig. 4, 5). 


11 me semble que la 7 7:fol de Lectoure (Gers) (mai, juin 1906) 
dont M. Dayrem m'a envoyé une série de plus de 100 exemplaires; 
d'Angoulême (4-5 mai 1006), et de beaucoup d’autres localités que 
j'énumérerai plus loin, peut recevoir le nom de 7 r:folu, Esper. 

La taille est plus ou moins grande; les ailes ont la forme un 
peu élancée; l'aspect est moins robuste que dans Olbiana; le fond 
des ailes supérieures est d'un bleu indigo, tournant parfois au 
verdâtre, mais pourvu d'un reflet d'acier luisant; les taches des 
supérieures sont d’un rouge carmin un peu miniacé très vif, ainsi 
que les ailes inférieures dont la bordure indigo est nette, mais bien 
moins large que dans Olbiana. 

A Lectoure, on trouve l’'Ab. Glycirrhisæ, Huebner, et l’Ab. 
confiuens, totale, quelquefois très accentuée et d’une remarquable 
étendue. La forme d'Angoulême ne paraît pas différer de celle de 
Lectoure. 

Au sujet de la Zr:folu de Lectoure, qui est de taille assez 
grande, il me paraît intéressant de rapporter que feu Jules Fallou, 
il y a une quarantaine d'années, étant allé rendre visite à un de 
ses amis, à Auch, c'est-à-dire dans une ville située tout près de 
Lectoure, trouva aux environs d'Auch, en grande quantité, une 
race de 7 71folii exceptionnellement petite et dont J'ai sous les yeux 
une paire donnée autrefois à Guenée par Jules Fallou. 


Je me souviens de m'être jadis entretenu de cette Zygæna Trifolu 


32 


498 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


d'Auch, dont la taille est presque de moitié inférieure à celle de 
la / rfolu de Lectoure, avec Guenée et Fallou. Celui-ci nous assura 
que tous les exemplaires vus par lui, étaient de dimension également 
réduite; telle est la paire que je possède et que J'ai sous les yeux. 
Cette constatation est intéressante, en ce sens qu’elle indique 
combien les races peuvent être localisées et comme, dans une localité 
séparée d'une autre par une petite distance, on peut trouver une 
forme différente d’une autre forme, en ce qui concerne la Zygæna 
Î'rifolu. Guenée avait donné dans sa collection le nom de pusilla 
à cette forme minuscule de 7 7:fola, que je n’ai jamais vue capturée 
dans une autre localité que les environs d’Auch. M. Dayrem a pris 
à Lectoure 2 S Zrifolu de l'Ab. sexmaculata, c'est-à-dire présen- 
tant à l'extrémité de la 5° tache qui est l’externe supérieure, une 
sorte de petite tache satellite, contiguë à la 5°, de plus petite dimen- 
sion que celle-ci, mais très nettement indiquée. J'ai signalé cette 
Ab. sexmaculata pour la forme palustris; je ne l’ai jamais observée 
pour /71fol2 que dans la forme de Lectoure et dans celle de 
Rennes. Je crois que l’on peut rapporter à Z'r1folu, Esper, c'est-à- 
dire à la forme de l’Espèce considérée comme type, les formes 
provenant des localités suivantes, du moins d’après les documents 
que Je connais : Sandburn, Freshwater, Lyndhurst, Dower en An- 
gleterre; Béville et Cherbourg (Guenée, 9/im et Vuillet, 1009); 
24 exemplaires de taille moyenne, plutôt petite; ailes d’un noir 
indigo très foncé, avec un reflet d'acier un peu verdâtre, taches 
rouges petites, d’une couleur carminée très vive, ne présentant 
aucune confluence. — Samoussy, dans l’Aisne (Powell, iuin 1909); 
forme colorée à peu près comme à Cherbourg, mais sur O exem- 
plaires, 4 ont les taches rouges élargies et plus ou moins confluentes. 
—— Pont-de-l'Arche (L. Dupont, 1908), 17 exemplaires, forme 
colorée comme à Cherbourg; même taille; taches des ailes supé- 
rieures conformes à celles de Samoussy; c'est-à-dire plus grosses 
qu'à Cherbourg. — Allemagne (ex Staudinger); Berlin (ex coll. 
À. Kuwert); Limoges, Saint-Germain-en-Laye, Biarritz (D* Ober- 
thür, juillet 1805); coloration rouge d’une vivacité extraordinaire 
— et Nay, dans les Basses-Pyrénées (P. Chrétien, mai 1906); 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 499 
Besançon (Jeunet); Jura; Forêt-de-Lorges, dans les Côtes-du- 
Nord (26 juin 1881); Chartres (Guenée); Iles Chausey, à l’ouest 
de Granville, dans la Manche (août 1883); Huelgoat, dans le 
Finistère (10 Juillet 1900); Quiberon, dans le Morbihan (juillet 
1879); Bagnoles-de-l’Orne (juin 1904) ; Cancale (été 1800); Bourg- 
des-Comptes; Forêt de Rennes; Monterhl; çà et là aux environs 
de Rennes, en juin; Larche, dans les Basses-Alpes; Dompierre- 
sur-Mer, dans la Charente-Inférieure; Forêt de Vouvant et la Ba- 
raudière, en Vendée. 

En Angleterre, la Zygæna 1rifolu fournit des variétés du plus 
haut intérêt, notamment celle que Tutt a appelée obscura à la 
page 497 du premier volume de son ouvrage intitulé : À Natural 
History of the british Lepidoptera, d'après un exemplaire qu'il 
n'a sans doute Jamais vu, mais que J'avais mentionné dans la 
XX° livraison des Æzudes d'Entomologie. J'ai fait figurer cette 
Ab. obscura sous le n° 164 de la PI XXVIII du Vol. III des 
Etudes de Lépidoptérologie comparée. Ce spécimen faisait partie 
de la coll. Battershell-Gili qui fut vendue à ja salle Stevens, dernier 
rendez-vous de la plupart des collections anglaises de Lépidop- 
tères, les 12 et 13 avril 1886. 

Une autre variété très remarquable est la /y/escens Cockerell, 
signalée par Tutt (loc. cit, p. 487). J'ai fait figurer, sous le n° 163 
de la PI. XXVIÏII du Vol. III, un exemplaire qui est à la fois 
lutescens et confluens, pris par Christy, à Emsworth, en 1893. 
Ma collection contient 4 Ab. lufescens prises par Christy; 2 © 
portent l'étiquette Emsworth et faisaient partie de la coll. Tugwell ; 
2 autres C' sont étiquetés Watergate, 1893; Wim Christy, et appar- 
tenaient à la collection Maddison qui fut vendue à la salle Stevens 
les 23 et 24 février 1000. 

Voici ce que dit Tutt au sujet de l’Ab. Zutescens : « Cockerell, 
in naming this aberration, simply gives the reference « ÆEx/om. 
1878, p. 102. » Turning to his, we read that Wellman « exhibited 
some yellow forms of Zygæna trifolu, reared from larvae. » Bond- 
Smith describes certain Gamlingay specimens (probably #alustris), 
caught July 16", 1891, and bred later, as being of-a « beatiful 


500 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


lemon-yellow, showing no trace whatever of red. » This aberra- 
tion has been recorded from Malpas, in Cheshire (Walker), 
Emsworth, where 100 were obtained in May 1803, and 11 in 1804 
(Christy), Upton St. Leonards (Higgs), Chattenden (Tutt). » 

Je n'ai jamais vu d'exemplaires français de l’Ab. /utescens de 
T'rif ola. 

On trouve aussi en Angleterre des exemplaires à taches con- 
fluentes et à ailes d’un rose orangé, au lieu d’être rouge carmin. 

Il semblerait que le traitement des chrysalides par la chaleur 
produirait le développement sur les ailes supérieures de la pig- 
mentation rouge. J'ai reçu en 1007, de M. Hans Burgeff, de léna, 
des 7 r:folu écloses de chrysalides qui avaient subi une température 
de + 49°. L’une d'elles a les ailes supérieures envahies par la 
couleur rouge dans le genre de l’Ab. /#cendium de Zonicere 
figurée sous le n° 105 de la PI. XXII du Vol. III de la Lépidopté- 


rologie comparée. 


6 Palustris, Obthr. 


C'est la plus grande forme connue de 7 r1folx,; en même temps, 
c'est la plus vivement colorée et la plus fertile en exemplaires aber- 
rants par confluence. J'ai déjà fait figurer dans la XX° livraison 
des Ætudes d'Extomologie, sur la PI. 8, Palustris-sexmaculata, sous 
les n° 151 et 152 et Palustris-confluens sous le n° 153; mais si la 
gravure du trait faite par Dallongeville est excellente, le coloriage 
est très médiocre et je dois déclarer que la teinte du rouge dans 
le coloriage est tout à fait différente de la réalité. Le rouge est 
superbe chez Palustris de Rennes; il est d’un carmin vif, égayé 
par une pointe de minium dont l’œ1l perçoit l’agréable effet, tandis 
que rien n’est plus terne et au-dessous de la vérité que le coloriage 
de la PI. 8, dans la XX° livraison des Æzudes d'Entomologie. 
À cause de cette défectuosité que je confesse, J'ai fait figurer de 
nouveau la Zygæna Trifolu-Palustris, sous les n° 165, 166 et 167 
de la PI XXVIII du Vol. IIT des Z7udes de Lépidoptérologie 


CO mparée. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE SOI 


La coloration rouge y est meilleure, mais encore tout à fait in- 
suffisante, et elle est bien loin de rendre cet éclat chaud et brillant 
que je constate dans la Nature. Il faut croire que la coloration 
rendant exactement la réalité, est bien difficile à produire. J'en 
exprime tous mes sincères regrets. 

C'est pourtant une bien curieuse mutation de Trifclu, celle que 
j'ai appelée Palustris. Les Entomoiogistes anglais l'avaient cons- 
tatée dans leur île, comme moi-même je l’avais observée aux en- 
virons de Rennes et ils s’apprêtaient à la désigner sous un nom, 
probablement celui de 77ifolii-major, lorsqu'ils furent devancés 
par la publication de la XX° livraison des Æ/udes d'Entomologie. 

D'ailleurs la priorité du nom Palustris n'est point contestée et 
Tutt (p. 480, vol. I), après avoir constaté qu'il y a deux formes ou 
sous-espèces, se rencontrant en Angleterre et jusque-là pourvues 
du même nom de 7 r1fola, n'hésite pas à dire que les deux races 
ont été séparées récemment (Æ#4. Record, IX, p. 88) comme 
Trifoli-minor et T'rifolii-major, mais qu'il n’y a pas de deute que 
Palustris d'Oberthür est le plus ancien nom donné à la dernière 
forme (#1folu-major). 

Si on place une série bien choisie de Palustris, capturées aux 
environs de Rennes, à côté d’une colonne de Duponcheliana, Ol- 
biana, Australis, Syracusiæ, on reconnaît une telle dissemblance 
de taille, de couleur et d'aspect, que l’on peut à bon droit citer bien 
des Espèces distinctes, comme ne présentant pas un faciès aussi 
divergent. Mais si on envisage la forme 7 7ifolu type et une série 
de Palustris, dans laquelle les exemplaires n'auraient pas été sélec- 
tionnés soigneusement, je reconnais qu'on trouverait des exem- 
plaires à peu près équivalents dans la comparaison des deux races. 

Cependant, à cause du grand nombre d'exemplaires de Palustris 
bien caractérisés qu'on peut recueillir au même lieu, la grande 
Palustris impose véritablement son qualificatif #ajor comparative- 
ment à la normale 7 rfolu. Aux environs de Rennes, 7 7folu et 
Palustris ne se trouvent pas nécessairement ensemble, mais elles 
ne s’excluent pas absolument; il y a longtemps que Jj'étudie la 
question. Je ne me souviens pas d'avoir rencontré la vraie Palustris 


502 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


à la forêt de Rennes où j'ai toujours trouvé 7 71foli1 presque #1nor. 
Dans les prés et les bords des chemins humides et herbus de 
Monterfil, c'est 7'rifolii normale que l’on trouve et non pas Palus- 
tris; mais sur les berges du canal d’Ille-et-Rance, vers Saint- 
Grégoire, un peu au nord de Rennes et dans l’allée de châtaigniers 
de la Hublée, à 4 kilomètres est de la ville de Rennes, c’est 
Palustris caractérisée, presque sans mélange de 77folii normale 
avec ses variétés conjlucns et sexmaculata, aue l’on a pu observer. 
Je dois faire connaître cependant qu’à la Hublée, Palustris est 
détruite depuis quelques années; je crois que cette disparition de la 
Zygæna est due à la coupe de l'herbe et au pacage des bestiaux. 
Sur les berges du canal d’Ille-et-Rance, Palustris existait encore 
en abondance l’an dernier. 

À la fin de mai, ou vers le commencement de juin, suivant les 
années, Palustris éclôt ici ou là, aux environs de Rennes, ne sem- 
blant pas se maintenir avec une continuité bien prolongée, au 
même lieu, mais disparaissant ici et apparaissant soudain ailleurs, 
à une place où on l'aurait peut-être auparavant inutilement re- 
cherchée. 

J'ai rangé dans ma collection plusieurs centaines de Palustris 
récoltés aux environs de Rennes. Depuis mai 1806, époque de la 
publication de la XKX° livraison des Æzudes d'Entomologie, qui 
contient aux pages 45, 48 et 40, la description initiale de Palustris, 
j'ai été amené à faire un certain nombre d’intéressantes observa- 
tions. J'ai acquis de nouvelles Palustris où Trifolii-major d'An- 
gleterre, et je me suis efforcé de me documenter toujours davantage 
sur la question de 7'rifol. Je suis donc plus renseigné aujourd’hui 
qu'il y à 14 ans. 

En Angleterre (Ile de Wight), ex collection Maddison, et à 
Rennes, la forme Palustris me paraît presque équivalente; cepen- 
dant pour la taille et la vivacité de la couleur rouge, c’est à Rennes 
que J'ai constaté les exemplaires les mieux partagés. On trouve à 
Rennes des 7rifolii conformes aux échantillons de Lectoure, 
Biarritz et Angoulême; mais la réciproque n’est pas vraie, du moins 
d’après ce que je connais, et c’est à Rennes seulement que J'ai 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 503 
 —— — 
observé en abondance ces Zygæna qui sont alors l’expression la 
plus accentuée de Palustris, c'est-à-dire dont la taille et la vivacité 
de la couleur rouge sont supérieures à tout ce qui se présente sous 
ce rapport dans toutes les autres races. 

La proportion des individus confluens est très grande chez Pa- 
Lustris de Rennes et aussi de l'Ile de Wight. Du 15 au 20 juin 
1906, du 18 au 24 juin 1907, sur les berges du canal d'Ille-et- 
Rance, au territoire de Saint-Grégoire, près Rennes, le nombre des 
Ab. confluens était tel qu'on pouvait en récolter une centaine 
d'échantillons en deux ou trois chasses; d’autre part, on pouvait 
capturer des variations remarquables. C'est ainsi que 4 var. sex- 
maculata furent recueillies en 1906 et que 6 var. sexmaculata furent 
capturées en 1G07; parmi ces 6 dernières, se trouve une © Sex71a- 
culata qui a tellement l'aspect d’une f/ipendule, à cause du déve- 
loppement de sa sixième tache rouge, que j'ai cru devoir la pourvoir, 
peu de temps après sa capture, de l'étiquette suivante que je transcris 
textuellement et qui exprime bien mon opinion : « Cette Zygena 
d'aspect différent de 7ijolü-palustris et rappelant F#pendule 
a été prise, seule de sa forme, avec un nombre considérable de 
Trifolii-palustris. Je la considère comme un exemplaire aberrant 
de Trifolii-palustris, non comme #lipendule qui éclôt fin juillet 
en Bretagne et non en Juin. » 

Les Entomologistes dont les documents se trouvent maintenant 
réunis aux miens, sont morts depuis plus ou moins longtemps et 
ils ont emporté dans la tombe le secret d'observations qu'il nous 
eût été bien utile de connaître aujourd’hui. En effet, si nos devan- 
ciers avaient pris soin d'écrire le renseignement nécessaire, au 
moment opportun, et s'ils l'avaient fixé à l'épingle du papillon qui 
en était l’objet, nous aurions actuellement des certitudes, au lieu 
des doutes que nous cherchons à éclaircir, trop souvent en vain. 
Quant à moi, qui écris aujourd’hui ces lignes, en attendant qu'à 
mon tour je sois nécessairement frappé par l’inévitable mort, ins- 
truit par l'expérience, je me suis efforcé de munir de toutes les 
indications capables de bien renseigner mes successeurs, les docu- 


ments si laborieusement amassés dans ma collection. 


504 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


J'espère que cette précaution sera utile à la Science. Elle per- 
mettra de rectifier les erreurs que J'aurai pu commettre, comme 
aussi de confirmer les assertions dont la vérité paraîtra suffisam- 
ment démontrée. 

Dans l'intérêt de la Science, j'engage tous les Entomologistes à 
pourvoir les exemplaires qu’ils récoltent, de tous les renseignements 
susceptibles d’être utiles à leurs successeurs. La vie et la production 
laborieuse de chaque homme ici-bas sont bien courtes; mais c'est 
dommage, faute d’une étiquette écrite en temps utile, de priver 
ceux qui, dans l'avenir, s'intéresseront à ce qui nous intéresse au- 
jourd’hui, d’une documentation qui pourrait être plus tard très 
instructive, si elle était complétée maintenant par les indications 
nécessaires. 

En outre d'exemplaires très frais, mais albinisants et chez 
lesquels la couleur rouge a été remplacée par une teinte rose orange 
plus où moins pâle, M. P. Boulé trouva éclosant et posée sur un 
brin d’herbe, une admirable Aberration chez laquelle les parties 
rouges sont remplacées par une teinte d’un noir de suie. J’ai décrit 
cette Aberration avec le nom de xigricans, dans le Bulletin Soc. 
ent. France, 1907, p. 220. Je prie le Lecteur de se reporter à ce 
que J'ai écrit à ce sujet dans le Bulletin précité. 

J'aurais dû faire figurer cette pièce hors ligne, mais J'avoue que 
Jai reculé devant les dangers auxquels sont exposés tous les pa- 
pillons soumis à la figuration. Le dessinateur, le graveur, le colo- 
riste ont beau être soigneux et attentifs pour la conservation des 
spécimens qui leur sont confiés, les dommages arrivent toujours 
en proportion plus où moins grande, mais ils sont inévitables et 
j'aurais déploré qu’un accident, toujours possible, vint abîmer un 
Lépidoptère aussi rare et dont la conservation est Jusqu'ici restée 
parfaite. 

Toujours est-il qu'il est bien bizarre de constater la présence de 
la grande Palustris à l'ile de Wight, tandis qu'à Cherbourg on 
trouve 77ifolii plutôt #en0r et d'observer qu'aux environs immé- 
diats de Rennes, ladite Palustris, du moins d’après ce que nous 


connaissons aujourd'hui, atteint son maximum d’ampleur et de 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 505 
— 
vivacité dans la coloration. Rien ne peut m'expliquer pourquoi 
Palustris abonde sur les berges du canal à Saint-Grégoire, alors 
qu’à une très petite distance de là, à la Forêt de Rennes, Trifolii 
vit isolée et non pas en masse, et y donne des exemplaires sensi- 
blement plus petits. 

J'ai la conscience d’exposer aussi exactement que possible ce que 
j'ai été à même d’observer jusqu'ici, relativement à 771fol1i et à sa 
forme Palustris comparées. Je compte du reste continuer à étudier 
cette question, me demandant notamment si certaines années ne 
seraient pas plus favorables que d’autres au développement de la 
forme Palustris. Pour que Palustris se manifeste aux environs de 
Rennes et dans certaines régions de l'Angleterre, il faut que 
Trifolii d'où émane Palustris et dont celle-ci n’est qu'une mutation 
agrandie, amplifiée, magnified, comme on dirait de l’autre côté du 
Détroit, trouve des conditions locales et des circonstances spéciales, 
restées inconnues de nous, mais qui sont nécessaires au dévelop- 
pement de 7 7ifolu, sous la forme Palustris. N’est-1l pas intéressant 
de constater la présence simultanée de Trifolii-minor et de Trifolii- 
major où Palustris, dans le même pays, en des lieux séparés par 
une très faible distance ? 

On ignorera évidemment toujours si Palustris s'est graduelle- 
ment développée à Rennes, ou bien si elle y a existé dès le com- 
mencement de l'apparition de l'Espèce. Le passé nous reste enve- 
loppé d’un impénétrable mystère; mais l'avenir s'ouvre devant 
nous, puisque nos études pourront être continuées par des succes- 
seurs. Il sera fort instructif pour eux de constater plus tard si la 
Zygœna Trifoli, aux environs de Rennes et en Angleterre a 
maintenu sa mutation Palustris et dans quelles conditions. Pour 
ces observations, les faits que nous établissons à l’époque présente 
et les documents que nous réunissons, seront la base indispensable 
à toutes les études futures et l’origine des conclusions qui en advien- 
dront. Nous n’entrerons vraisemblablement pas dans la 7erre 
promise de la vérité scientifique; mais nous pouvons sincèrement 
nous figurer que nos travaux en faciliteront l’accès aux générations 
qui succéderont à la nôtre. 


500 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


7° Seriziati, Obthr. 


J'ai fait figurer la Zygœna Seriziati dans la IIT° livraison des 
Etudes d'Entomologie, sous le n° 7 de la PI. V. J'avais déjà décrit 
Seriziati aux pages 33 et 34 de la livraison I, d’après des exem- 
plaires recueillis à Collo par le Docteur Seriziat. Plus tard, dans 
la XIIT° livraison, j'ai fait figurer la même Zygæna Seriziali sous 
les n° 71, 72 et 73 de la PI. VIIL. J'ai donc fourni une documen- 
tation illustrée relativement très abondante et à laquelle j'invite 
le Lecteur à se reporter. Serisiati habite généralement non loin du 
littoral algérien, à Collo, Philippeville, Bône; on l’a prise aussi à 
Vakouren, Aïn-Seur, Lalla-Khedidja. Elle éclôt en mai, juin et 
juillet, suivant l'altitude des localités et suivant la température. 
Il y a 3 formes distinctes : 1° celle qui a les ailes inférieures rouges 
bordées de bleu indigo; 2° celle qui a les mêmes ailes entièrement 
indigo, sauf un seul point rouge médian; 3° l’intermédiaire entre 
la forme à ailes inférieures rouges et celle à ailes inférieures bleues. 
En outre des taches basilaires rouges, la Zygœna Seriziati a trois 
taches rouges aux ailes supérieures. Le fond de celles-ci est d’un 
bleu d'acier luisant et la nuance des taches rouges est d’un carmin 
très vif. Les deux taches rouges médianes sont parfois confluentes 
et parfois séparées l’une de l’autre; Seriziati est habituellement de 
taille moyenne, mais on trouve quelquefois des exemplaires très 
petits. Si Seriziati est une race de Trifolii, comme Syracusiæe et 
Australis qu'on trouve également en Algérie et avec lesquelles 
Seriziati a très peu de ressemblance, il est difficile d'expliquer 
comment, à une si petite distance relative, trois formes aussi dis- 
tinctes appartenant à une même unité spécifique, peuvent exister. 

Le Zygaeniste viennois Clemens Dziurzinski s'est fait, paraît-1l, 
un devoir de décorer du nom de #igra la forme de Serzstali dont 
les ailes inférieures sont bleues avec une petite tache rouge centrale. 
Cette forme n’est pourtant nullement noire. Je la regarde en ce 
moment même; je vois du rouge carmin vif, du bleu indigo un 
peu plus mat aux ailes inférieures, un peu plus brillant aux supé- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 507 


rieures, mais je ne parviens pas à trouver trace de noir. Peut-être 

le spécialiste viennois se trouvait-il hanté de noires visions, le jour 

où il a comblé la lacune laissée par moi dans la dénomination de 

la Zygæna? Je ne trouve que cette raison pour expliquer le mot 
: -: £ \ FT? 

nigra qui ne répond nullement à la réalité. 


Zygæna Loniceræ, von Scheven. 


Il y a deux races généralement assez distinctes : celle qui habite 
les montagnes des Alpes et des Pyrénées où elle vit à une altitude 
d'environ 800 à 1,700 mètres et l’autre qui se trouve en Angleterre 
et çà et là, dans les plaines du Nord de la France et en Germanie. 


La première est assez molle, d'assez grande taille; elle a les 
ailes allongées; le fond des ailes supérieures est bleu d'acier ou 
d’un verdâtre luisant; les ailes supérieures, en outre des deux taches 
rouges basilaires, sont ornées non de quatre, mais de trois taches; 
ce total de cinq taches est caractéristique de l'Espèce. En effet, 
von Scheven, dans Der Naturforscher, Zehntes Stueck, p. 77, dit 
en Parlant de Loniceræ : « Dieser unterscheidet sich von dem 
vorigen (Æiipendule) blos dadurch, dass er nur 5 rothe Flecken 
hat. » Les 5 taches, y compris les 2 taches basilaires, sont d'un 
rose carminé, comme les ailes inférieures qui sont peu largement 
bordées d’indigo. 


L'aspect général n'est nullement transparent, mais les couleurs 
ne sont guère éclatantes ni foncées. Les antennes sont longues, un 
peu renflées avant l'extrémité et terminées en pointe; le dessous 
des ailes est plus pâle que le dessus; le fond des supérieures, tout 
comme chez 7 rijola,est dépourvu du lavis rouge appelé Nebelstreif 
en allemand et qu’on remarque chez la 7'ransalpina française et la 
Filipendule. Les taches rouges restent tout aussi bien séparées en 
dessous qu'en dessus. Huebner à donné, sous le n° 160, une figure 
de la forme des montagnes que je considère comme très satisfai- 
sante, 


508 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


La forme des plaines a été figurée par Esper, d’après des exem- 
plaires pris en Allemagne sous les n° 1 a et 1 à de la Tab. XXIV. 
Telle est, à peu de chose près, la Lonicere de la forêt de Com- 
piègne, dans l'Oise, et aussi celle d'Angleterre. La race des plaines 
ou du moins des régions de basse altitude, en Allemagne, dans le 
Nord de la France et en Angleterre, comparée à celle des Alpes 
et des Pyrénées, est moins grande; elle a les ailes moins allongées; 
les 3 taches rouges extrabasilaires sont généralement peu déve- 
loppées et les deux taches médianes sont, le plus souvent, nettement 
séparées l’une de l’autre, très rarement juxtaposées. La couleur 
rouge est d’un carmin plus vif que dans la race des montagnes; 
le faciès est plus trapu et l'apparence moins molle. 

Chez la race des montagnes, l’Aberration par confluence des 
taches rouges est fort rare; mais lorsqu'elle se présente, elle se 
produit tout autrement que dans la race anglaise et française du 
Nord. 

Les Aberrations par confluence, en Angleterre et à Compiègne, 
sont remarquablement semblables entre elles et tout autrement 
formées que chez Trifol; ce qui est un caractère dont il faut tenir 
compte. J'ai sous les yeux 4 Aberrations par confluence, du Nord 
de la France et 10 d'Angleterre; sans doute elles répondent à 
l'Ab. Bercei, Maurice Sand. Ce qui donne un caractère particulier 
à ces 14 échantillons aberrants par confluence, c’est que la réunion 
des taches ordinaires forme une sorte de triangle dont le sommet 
se trouve à la naissance des ailes, tandis que la base de cette unique 
tache rouge triangulaire est arrêtée par une ligne assez droite et 
inclinée presque à 45 degrés, à peu près parallèlement au bord ter- 
minal. Je publierai la figure de cette Aberration confluente dite : 
Bercet. 

Je me suis trompé en donnant le nom de Dubia à la Zygena 
que j'ai fait figurer sous le n° 147 de la PI. 8 de la XX° livraison 
des Etudes d'Entomologie. C'est Lonicere que j'aurais dû la dé- 
nommer et non pas Dubia, ainsi que je l’ai fait à tort. Cette Zygæena 
n° 147 montre un commencement de la confluence qui se produit 
dans la forme Zoniceræ des montagnes. De nouvelles observations 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 509 


faites depuis 1806, sur la faune lépidoptérologique des Pyrénées 
m'ont démontré que des erreurs d'appréciation existent dans ce que 
j'ai écrit aux pages 49 et 50 de la XX livraison, relativement à 
Dubia considérée comparativement à Zomiccræ. Mon opinion ac- 
tuelle, c'est que Lonicere et Dubia ne se trouvent pas ensemble 
à Cauterets où Lonicere existe non avec Dubia, mais avec }ilt- 
pendule, tandis que Zoricere, Dubia et Fulipendulæ se rencontrent 
toutes les trois à Vernet-les-Bains. Loniceræ, aux environs de 
Vernet, habite plus haut, entre 1,000 et 1,700 mètres, tandis que 
Dubia se rencontre plus bas. 

Les deux Zygœna (Lomiceræ et Dubia) se mêlent seulement à 
la frontière de leur habitat, c'est-à-dire notamment dans le ravin 
de Cady, au delà du village de Casteil. Dzbza peut avoir trois ou 
quatre taches rouges en dehors des macules basilaires. Zonicere 
n’a jamais que trois taches en outre des deux basilaires, ainsi que 
von Scheven l’a observé et décrit. Dubia a le fond des ailes d'une 
teinte très vive verdâtre bronzé luisant et ses taches carmin sont 
bien plus foncées et richement colorées que chez Zorcere. Il y a 
cependant des Dubia à trois taches, moins foncées de couleur et 
quelquefois difficiles à identifier exactement; le nom de Dubia 
convient parfaitement dans la circonstance à ces échantillons énig- 
matiques, en exprimant l'idée d'incertitude où reste l’observateur, 
quant à la détermination spécifique à donner. 

La ZLoniceræ d'Angleterre et de Compiègne ne peut pas res- 
sembler à Dubia avec laquelle elle ne cohabite pas; mais c'est 
avec Zrifoli qu'il est plus aisé de la confondre. Les Auteurs 
anglais se sont bien rendu compte de cette ambiguïté et l’un des 
écrivains entomologiques anglais les plus appréciés, Charles Barrett, 
déclare simplement que, s'il a décrit les deux espèces Zygæna 1r1- 
folii et Loniceræ, c'est par respect pour ce qui est universellement 
admis. Il semble résulter des paroles de Barrett que lui-même 
n'aurait pas pris l'initiative de la séparation des deux espèces 
Lonicere et T'rifoli, mais que ne veulant pas s'élever contre l’opi- 
nion générale, qui accepte la séparation des deux espèces, 1l s'y 


conforme, toutefois sans conviction. 


510 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Voici d’ailleurs la copie du texte de Barrett auquel je fais al- 
lusion. 11 est imprimé à la page 132 du vol. IT. 

« 1 have described these last two species — Z. loniceræ and Z. 
trifolii — as distinct, in deference to the universal adnussion of 
them as separate species, both at home and abroad, but they are 
exceendingly difficult to separate in the perfect state, since all 
their distinguishing characters, even to the form of the antennae, 
and of the marginal stripe on the hind wings, vary so as almost 
to merge one into the other... » 

Charles Barrett figure Loniceræ anglaise sous les n° 3, 34, 3 6, 
3 c, 3 d de la PI. 59 du Vol. IL. On remarquera la taille extrêmement 
réduite des Aberrations par confluence, figurées sous les n° 34 
et 3 6. La fig. 3 4 représente assez bien l’Ab. Bercet, mais outre que 
la taille du sujet est trop petite, la couleur rose est trop pâle pour 
bien représenter l’Ab. Bercei telle que je la connais. 

Donc les Entomologistes anglais trouvent parfois difficile d éta- 
blir la distinction spécifique entre leur Zoniceræ et leur 7 r1/olu. 
Je crois cependant que Louiceræ et L'rifolii sont deux Espèces bien 
différentes, mais je reconnais que / r2folu présente des races locales 
susceptibles de causer quelque trouble. 

M'étant toujours vivement intéressé à la faune anglaise des Lépi- 
doptères, j'ai acquis, lors de la vente publique de certaines collec- 
tions de papillons anglais, effectuée à la salle Stevens, à Londres, 
les lots entiers du genre Zyzæna de plusieurs collections impor- 
tantes, telles que Howard-Vaughan, Prest d'York, Battershell-Gaill, 
Tugwell, Sheppard, William Claxton; Je me trouve donc pourvu 
d'une documentation assez copieuse sur le fait particulier qui 
m'occupe présentement et qui se résume à ceci : 1° Les Zygæra 
Loniceræ anglaises constituent-elles réellement une unité spécifi- 
quement distincte de Z'rifolu? 2° S'il en est ainsi, les Z. Lonicere 
anglaises et leurs similaires du continent sont-elles assez différentes 
des Loniceræ des montagnes des Alpes et des Pyrénées, pour que 
celles-ci soient distinguées au moyen d’une dénomination spéciale ? 

Comparant les Zoriceræe anglaises aux Zoniceræ authentiques 


de Cauterets et du Valais, je trouve en effet que les Zomcere 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE sil 


anglaises sont de taille plus petite, ont la forme des ailes moins 
élancée et sont colorées en carmin plus foncé. Donc elles sont 
différentes de la race continentale des montagnes; mais 1l n'est 
pas douteux que les Zonicere anglaises se rapprochent de 7 r1folu 
et cette ressemblance entre Zoniceræ anglaise et Z71:folx est telle 
qu’elle a donné lieu en Angleterre à des confusions, dont Je suis 
en mesure de rapporter un exemple fourni par la collection Claxton. 
J'ai sous les yeux 9 7'rfoli de cette collection Claxton, étiquetées 
comme suit : Bude et Hartley-\Wintnev-Hants, et o Lontcere éti- 
quetées S. Wales. L'effet que me produit la comparaison de ces pré- 
tendus Loricere du sud du Pays de Galles, c’est qu'elles ne ressem- 
blent en rien à nos Zoniceræ, non seulement des montagnes, mais 
des plaines continentales: elles ont l'apex des ailes supérieures 
beaucoup plus arrondi, les couleurs rouges plus vives, les taches 
rouges des supérieures beaucoup plus petites, la bordure indigo des 
ailes inférieures plus large. Il est vrai que les antennes sont assez 
longues et terminées en façon de pointe; mais mon impression, 
c'est que les Zoniceræ de la collection Carton ne sont pas des 
Loniceræ; je les déterminerais /7ifolu, en faisant cette réserve 
qu’elles appartiennent à une race locale particulière et non con- 
forme à celle de 7 7:/ol1 de Bude et de Hartley-Wintney-Hants. 

Mais ceci peut bien passer pour un fait particulier à la collection 
Claxton, car je reconnais que les Zoniceræ des anciennes collections 
Prest, Howard-Vaughan, Tugwell, Sheppard, Battershell-G1ll pa- 
raissent être bien exactement des Zoriceræ assez distinctes de 7 7z- 
folii par leur aspect général et conformes à celles de la forêt de 
Compiègne, au nord de Paris. D’alleurs, à part Charles Barrett 
qui avait exprimé son sentiment personnel avec une sincérité par- 
faite, mais qui n'avait pas osé rompre avec les idées reçues, Je crois 
que très généralement en Angleterre, on considère 7 r1folu et Lont- 
ceræ comme deux Espèces bien valablement et authentiquement 
distinctes. Tutt, dans le premier volume de À Natural History of 
the british Lepidoptera, traite aux pages 466-480 de la Zygæna 
(Anthrocera) Lonicere et 11 n'émet aucun doute sur la validité de 


l'Espèce. 


512 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Les Entomologistes du monde entier reconnaissent qu'il y a en 
Angleterre une pléiade de Lépidoptéristes pleins de savoir, d'expé- 
rience et de probité scientifique. Les Anglais professent pour la 
faune de leurs îles une prédilection qu'on pourrait trouver un peu 
trop exclusive, parce que jusqu'ici ils ne se sont pas assez intéressés 
à la faune comparative des papillons du Continent. Mais les Ento- 
mologistes britanniques s’attachent avec un zèle si persévérant, une 
activité si féconde et une sincérité si honorable à la connaissance 
exacte des Espèces de Lépidoptères vivant actuellement dans les 
îles du Royaume-Uni que leurs efforts, en vue d'obtenir la posses- 
sion de la vérité dans la question spéciale de la distinction spéci- 
fique de la Zygæna Lonicere, n’ont pu finalement manquer d’être 
couronnés de succès. L'ouvrage de Barrett porte ia date de 1895, 
mais comme l'ouvrage de Tutt, plus récent (1809) l’admet sans 
hésitation, je crois qu'il faut également admettre la validité de 
l'Espèce Zoniceræ, la considérer comme distincte de Zrfau et 
placer, sous le même vocable : Zonicere, la race des plaines de la 
Germanie, du Nord de la France et de l'Angleterre; toutefois, Je 
propose de généraliser le nom de Major, Frey et de l’attribuer à une 
série de Zoniceræ alpines et pyrénéennes. Ce nom, d’abord destiné 
aux échantillons de taille exceptionnellement grande, convient à 
un bon nombre des Zoniceræ alpines et pyrénéennes, envisagées 
comparativement aux Zonicere anglaises, françaises du nord et 
allemandes. On peut référer celles-ci à la figure donnée par Esper, 


en 1770. 


Tutt passe en revue les Aberrations de Zomicere, dans le premier 
volume de son ouvrage : À Natural History of the british Lepi- 
doptera; il dit à la page 460, en parlant de Zomiceræ-confluens, 
que: « several others are in British collections labelled « Coventry », 
but we know nothing of the captor of these. » Je suis heureux 
de pouvoir renseigner M. Tutt d’après les spécimens de la collection 
Tugwell. 3 échantillons de Zcrceræ-confluens de cette collection 
sont étiquetés ainsi : « Coventry-Nicholls » et 3 autres : « Coventry- 
Henry-Doubleday. » 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 513 


M. Tutt me pardonnera d'exprimer une opinion tout à fait diffé- 
rente de la sienne, lorsqu'il attribue la figure 165 de Huebner, 
appelée À chlleæ par cet Auteur, à Lonicere, comme Ab. confluens. 
L'Achillee 165 de Huebner représente certainement une /7an- 
salpina-Hippocrepidis, Ab. confluens, presque Multosa. 

Je possède, venant d'Angleterre, des types de l'Ab. Æboracæ, 
Prest. Je les ai achetés dans les ventes publiques où les exemplaires 
de la collection Prest, d'York, se trouvaient mis aux enchères. Je 
crois, comme M. Tutt, que leur albinisme est de nature pathologique. 
Ma collection contient un exemplaire analogue de Chemnitz appar- 
tenant à la vraie Zoniceræ et des exemplaires des Alpes et des 
Pyrénées tout à fait référables à Zborace. Ce sont des sujets patho- 
logiquement décolorés. Il y avait dans la collection Tugwell deux 
Aberrations de Lonicere, chez lesquelles la couleur rouge normale 
est remplacée par une teinte orange. Cette Aberration existe sem- 
blable dans un O' de Loniceræ-major pris à Martigny (Valais), 
en juillet 1006, par Arnold Wullschlegel. 


C’est, je pense, l’Ab. /utescens, Hewett « In some examples the 
red tends to be orange » (Tutt. Vol. I, p. 467). 


J'ai fait figurer avec le nom de fava, sous le n° 148 de la PL 8, 
de la XX° livraison des Etudes d'Entomologie, une Aberration 
de Lonicere, à taches et à ailes inférieures jaune clair, provenant 
des Cévennes (collection Bellier). Je possède un semblable exem- 
plaire de Silésie; le nom Yava étant postérieur à celui de cz/rina, 
Speyer, c'est céfrina qui doit être maintenu, tandis que le nom f/ava 
donné par moi tombe en synonymie. 


Une Aberration superbe de Zoniceræ-major est celle dont j'ai 
publié la figure sous le n° 105 de la PL XXII du Vol. III des 
Etudes de Lépidoptérologie comparée, avec le nom d’/ncendium, 
d’après un exemplaire pris à Plan-Cerisier, près Martigny (Valais), 
en juin 1007, par Arnold Wullschlegel. Je possède un second 
exemplaire, mais de taille moins grande, également capturé en 
Valais et trois autres individus aberrants curieusement transi- 
tionnels entre la forme normale et l'Ab. /xcendium, venant de la 


33 


i4 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


vallée du Roubion (Alpes-Maritimes), de Digne et de Saint-Dizier 
(Haute-Marne). 


Il est très intéressant de constater que dans les Alpes françaises, 
a Larche, à Enchastrayes, à Allos, à Digne, à Venanson, se trouve 
le mélange de la forme normale de Lonicere et de la forme ##a3or. 
À Larche, les Zoniceræ sont généralement de petite taille et de 
couleur très pale; elles ne sont pas supérieures aux Zoniceræ an- 
glaises par la grandeur, mais très inférieures pour la vivacité des 
couleurs. On pourrait assez justement donner à la race de Larche 
un nom particulier. 

Je n'ai pu réunir Jusqu'ici plus de 8 exemplaires aberrants par 
confluence de la Zoxicere des Pyrénées. La confluence se fait entre 
les trois taches rouges externes, à l’exclusion des taches rouges basi- 
laires qui restent séparées des taches rouges externes; celles-ci 
confluent entre elles par le grossissement de la tache inférieure et 
par l’allongement de la tache externe la plus avancée vers le bord 
terminal, au moyen d'un trait plus ou moins épais qui la relie à la 
tache cellulaire. 

La coque est jaune; il est aisé de la récolter à Cauterets et dans 
maintes autres localités, sur les brins d’herbe et de bruyère. La 
chenille verte, maculée de noir, présentant des touffes de poils noirs, 
courts, est très fréquemment parasitée. 

Ma collection contient une Aberration bien curieuse provenant 
d’une ancienne collection lyonnaise; l’aile supérieure droite est 
normale et sur l’aile gauche une longue barre rouge unit la tache 
externe supérieure à la tache basilaire, en absorbant la tache cellu- 
laire, tandis que les deux taches inférieures, l’externe et la basilaire, 
restent normales et séparées l’une de l’autre. 

La Zygæna Lonicere commence à éclore en juin et au commen- 
cement de Juillet; elle peut durer jusqu'en août. Elle est surtout 
commune dans les montagnes des Pyrénées et dans toutes les Alpes. 
Elle est moins abondante dans la région forestière du Nord de la 


France où Je la crois très localisée en quelques prairies sylvatiques. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 515 


Je crois intéressant de relever sur ma collection les localités 
suivantes pour la Zygæena Lonicere. 


Gourdon, dans le Lot (juillet 1906, R. Obthr.); Mont-Genèvre, 
dans les Hautes-Alpes (18 juillet 1906); Stuttgart (Ad. Peter, 
1907); Aix-les-Bains, en Savoie (juin, juillet 1906) ; Saint-Martin- 
d'Entraunes, dans les Alpes-Maritimes (20 juillet 1906, H. Powell) 
forme grande et sombre; Cauterets, dans Îles Hautes-Pyrénées, en 
juillet; très variable pour l'intensité de la couleur rouge; Hongrie ; 
Zermatt ; Stelvio; Stresa; Larche, Allos, Enchastrayes, Digne, Le 
Lauzet, dans les Basses-Alpes; Dalnis, Vallée du Roubion, Madone 
de Fenestre, Lantosque, Venanson, dans les Alpes-Maritimes. 
Au-dessus de Vernet-les-Bains, depuis 1,000 à 1,700 mètres; Monte- 
Generoso; Gavarnie, dans les Hautes-Pyrénées, Martigny, en 
Valais; Fusio, en Tessin; Berlin; Jura; Angleterre; Nord de la 
France. 


La Zygœna Lonicere manque dans l'Ouest de la France et en 
Algérie. 


Au début de la notice concernant la Zygæna Lomicere, j'ai fait 
mention du Pastor von Scheven qui, dans le journal : Der Natur- 
forscher (Zehntes Stueck), publié à Halle, chez Johann Jacob 
Gebauer, en 1777, décrit à la page 07, le Sphinx Lonicere, en 
s'appuyant sur les figures VI et VII de la Tabula XVI de l'ouvrage 
de Schaeffer, intitulé Zcones. Le même Pastor von Scheven avait 
donné le nom de Zygæna Scabiose à l'Espèce représentée sur les 
figures IV et V de la Tab. XVI du même ouvrage. Cette circons- 
tance m’amène à donner quelques détails sur l’Iconographie de 
Schaeffer, dont la Præfatio est datée de Ratisbonne, calendes 
d'août 1766. 

Jacobus Christianus Schaeffer, dont Guenée parle très sommai- 
rement, mais en termes trop sévères, à la page LV des Généralités 
du Tome V (Noctuélites, Tome I) du Species général des Lépr- 
doptères (Paris, Roret, 1852), était possesseur des titres suivants 
que je copie au bas de son portrait supérieurement exécuté par le 


516 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


graveur viennois I. Iac. Haïd. « S. Theol. et Philos. Doct. Eccles. 


Evang. Ratisb. Minist.; — Seremiss. ac potentiss. Regis Daniæ 
Norwegiæ a consilus; — Gymnasi academici Alton. Profess. 


Philos. Honor.; — Academ. Imp. Natur. Curios. Petropol. Lond. 
Berol. Upsal. Robor. Monac. et Manhem; — Soc. litt. dvisb. Hist. 
Goett. Phys. Bot. Florent. Oec. Cell. Bern. Lusat. ac plvr. Tevton. 
Sodalis Academiæ parisiensis ab Epistolarum commercio. » 


« Natus Qverfvrti D. XXXI. Mai. A. MDCCXVIIL. Ord. Sacr. 
ads DAV" AMDCCET 


Jean-Christian Schaeffer est représenté dans son portrait, debout, 
jusqu’à mi-corps, la main gauche appuyée sur un livre qui paraît 
être son /cones; l’autre main montre la bibliothèque dont une partie 
se trouve dégagée, tandis qu'un épais rideau couvre le reste et sert 
de fond au tableau. Sur cette draperie fort bien traitée à la manière 
noire, par le graveur Haid, se détache bien en lumière la physio- 
nomie assez replète de Schaeffer. L'air est grave, comme il convient 
pour un personnage appelé aux conseils du très puissant roi de 
Danemark et de Norvège; mais l’ensemble est légèrement sou- 
riant aussi. N'est-ce pas en effet justice que sur le visage se reflète 
le sentiment de satisfaction si légitime qui résulte tout naturelle- 
ment de la conscience de tant de mérites accumulés en une même 
personne ? Une perruque blanche encadre le front et les Joues et 
une large collerette ou fraise, finement tuyautée, raide et ronde 
comme un énorme gâteau blanc, entoure le cou et sépare la tête du 
corps que revêt une ample robe noire semblant faite de forte étoffe. 


Le grand titre de l'ouvrage vient sur un feuillet consécutif au 
portrait. Il est ainsi conçu : D. lacobi Christiani Schaefferi Icones 
Insectorum circa Ratisbonam indigenorum coloribus naturam refe- 
rentibus expresse. Volvm. 1, Pars 1; puis se trouve la traduction 
allemande de ce titre latin et la signature de l’Imprimeur « Regens- 


burg, gedruckt bey Heinrich Gottfried Zunkel. » 
Le livre a belle apparence; le papier est beau et n’est point mé- 


nagé. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 517 


Sur un feuillet suivant, est imprimée la dédicace en latin au roi 


Christian VIL. Je la transcris textuellement : 


SERENISSIMO POTENTISSIMOQUE 
REGI AC DOMINO 
DOMINO 
CÉHRISTIANO VII 
DANIÆ NORVEGIÆ VANDALORUM 
GOTHORUM REGI 
DucI SLESVICI HOLSATIÆ 
STORMARIÆ AC DITHMARSIÆ 
COMITI OLDENBVRGI ET DELMENHORSTII 
CETAICRRAICENR 
REGI AC DOMINO SUO CLEMENTISSIMO 
Sy D UD} 
JACOBUS CHRISTIANUS SCHAEFFER D 


Ce n’est pas fini; en tournant le feuillet on voit un cartouche 
finement gravé sur cuivre, signé : Maag, de Ratisbonne, représen- 
tant une sorte de monument funéraire surmonté d’un phénix, oiseau 
renaissant toujours de ses cendres, tenant ses ailes étendues au 
milieu du feu. Sept médaillons contiennent les initiales des rois 
de Danemark et de Norvège précédemment décédés : C. I; C. IT; 
C'IV; C. VI: F. IV: F. V; C. VIL et, au-dessous, on lit ces mots 
gravés sur le socle : « Maiorum Avorum Parentum Felicitas Pietas 
Pacis artiumque Amor laeta unione in Christiano VIT reviviscentes 
perstent splendeant perennent ! » Enfin une nouvelle louange latine 
en 32 lignes de texte, dont 24 au verso du feuillet, achève l'hom- 
mage rendu par le savant Schaeffer au Roi qui l’a appelé à parti- 
ciper à ses conseils; cependant que par un bizarre assemblage de 
christianisme et de paganisme, ainsi que c'était devenu la mode 
au temps de la Renaissance, quatre figures allégoriques, debout, 
près du monument, représentent l’hétéroclite mélange du Symbole 
de la Croix avec les réminiscences de la Fable et les attributs des 


518 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Dieux de l'Olympe. C’est ainsi que du côté gauche une femme 
ayant la tête entourée d'un voile quasi monastique, portant à la 
main la Croix du Rédempteur et représentant par conséquent la 
religion chrétienne, fait société avec la nymphe Pomone tenant 
dans ses mains les cornes d’abondance remplies de fleurs et de 
fruits. De l’autre côté du monument, une Victoire, telle que les 
Grecs représentent la fille du Styx et de Pallante, montre d’une 
main une palme et de l’autre une couronne de laurier; elle est 
accompagnée de Minerve, fille de Jupiter, déesse de la sagesse, 
de la guerre, des sciences et des arts, la tête casquée, une pique 
dans la main droite, l'égide sur la poitrine, s'appuyant de la main 
gauche sur son bouclier. 


Telle était l'ornementation des Livres, édités avec luxe, vers le 
milieu du XVIII siècle. Le papier, d'excellente qualité, n’a souffert 
du temps aucun dommage; l'impression est très bonne; le coloriage 
n'a pas subi d’altérations. 


L'auteur a représenté des insectes de tous les ordres d’après les 
peintures de Loiïbel de Ratisbonne et les gravures de Trautner 
de Nuremberg. Tous les insectes sont coloriés à la main. En face 
de la Planche ou Tabula, on peut lire une description sommaire 
de chaque insecte, papillon, mouche, coléoptère, punaise, araignée, 
mais sans nom distinctif d'Espèce. Guenée trouve les figures aussi 
mal coloriées que grossièrement gravées; Je ne partage nullement 
cette manière de voir. Sans doute il y a des Planches moins bonnes 
et des Planches meilleures, mais la plupart des insectes figurés me 
semblent très reconnaissables. 


La Zygæna Scabiose, von Scheven, est représentée sous les 
n* IV et V de la Tab. XVI et la description, imprimée en face, 
est conçue comme suit : « Sphinx alis integris cauda simplici 
secunda. —— Zweyter Daemmerungsfalter mit ganzen Fluegeln 
und einfachem Schwanze. » 


Quant à la Zygœna Lonicere, von Scheven, qu: est figurée sous 
les n* VI et VII de la même Tab. XVI, la description est 


ainsi rédigée : « Sphinx alis integris cauda simplici tertia — 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 519 


Dritter Daemmerungsfalter mit ganzen Fluegeln und einfachem 
Schwanze. » 

Le n° 1 de la Tab. XVI représente le Macro glossa Bombyliformis 
(Hemaris fuciformis), et les n° 2 et 3, le WMacroglossa Stellatarum ; 
tous les deux qualifiés de Sphinx par Schaeffer, ainsi que les 
Zygœna Scabiose et Lonicere qui furent définitivement pourvues 
d’un nom spécifique et sans beaucoup d'efforts d’ailleurs, par von 
Scheven, en 1777. Ce dernier Auteur identifie à son Æphialtes 
comme en étant l’autre sexe, la Zygœenu Peucedani figurée par 
Schaeffer sous le n° 1 de la Tab. LXXI, et par Roesel sous la 
HemO0 de latab MIT du Vol 

Von Scheven figure lui-même très bien Æphzaltes, sous le n° 7 
de la Tab. II, dans l'ouvrage : Der Naturforscher, Zehntes Stueck, 
1777, et j'aurai l’occasion de revenir sur ces travaux iconogra- 
phiques des Anciens, lorsque j'écrirai la notice relative à Æphsaltes. 

Mais il me semble intéressant, à propos de la Zygæna Lonicere, 
de parler d’un autre ouvrage, également ancien, mais de format 
et d'aspect bien moins riche et moins soigné que l’/cones de 
Schaeffer. Il est vrai que l’Auteur Fuessly, modeste naturaliste, 
ne semblait pas faire partie des conseils d’un Roi. Il s’agit du 
Magazin fuer die Licbhaber der Entomologie, publié à Zurich et 
à Winterthur, en 1778, par Johann Caspar Fuessly. Ce sont des 
articles détachés sur des sujets variés et notamment des sortes de 
revisions critiques de travaux entomologiques déjà parus. Sous le 
titre IL : Systemaiisches Verzeichniss der Schmetterlinge der Wie- 
nergegend, etc, l'Auteur se livre à une sorte de compte rendu 
critique de l'ouvrage en question et s'occupe plus spécialement de 
la famille des Spzingide. Si le Magasin est imprimé sans luxe, 
par contre un petit nombre d'excellentes Planches s'y trouve 
annexé: la Tab. I notamment contient en outre de la figure de 
3 Sesia, de la Thyris fenestrina et de la Syntomis Phegea, la repré- 
sentation excellente des Espèces du Genre Zygæna désignées par 
Fuessly, comme suit : Fig. F, Ephialtes, Linné; Fig. G, Carnto- 
lica, Linné; Fig. H, Fausta, Linné; Fig. 1, Lonicere, d’après la 
description de la page 125 copiée dans von Scheven et la figure 


520 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


citée de Schaeffer; Zcones, Tab. 16, fig. 6, 7; Fig. 2, Filipendule, 
Ï inné et Fabricius; Roesel I. Tab. 57, fig. 5, 7; Fig. 3, quarta, 
Schaeffer, Zcones. Tab. 60; fig. 4, décrite p. 126, n° 3 (*); Fig. 4, 
encore Zoniceræ (**) (so nennt Hr. Pastor von Scheven diesen 
Schwaermer ; Schaeffer hat selbigen /con. Tab. 16; fig. 6, 7, abge- 
bildet); Fig. 5, Sphinx Pythia, Fabr. — Scabiosæ (p. 125, n° 7 
et 127, n° 5), Schaeffer (/cones, Tab. 16, fig. 4, 5) (***), n° 6, Sphinx 
Pythia, das Weibchen? (Q) (****). 

La vérité c’est que le n° 1 représente très bien Loniceræ; le n° 2 
est Fulipendule; le n° 3 est probablement 7'ansalpina; mais la 
Zygæna est figurée en mouche, comme le n° 2 et il est impossible 
de rien préciser; le n° 4 est AcAilleæ; le n° 5 est Scabiose et le n° 6 
est Purpuralis (Piloselle). On doit reconnaître que les figures sont 
très bien exécutées, mais Fuessly n’a pu réussir à voir clair dans 
la distinction des Espèces. Il croit que d’insensibles passages lient 
Lonicere à Scabiose et à Purpuralis. « Welch ein sanfter Ueber- 
gang von Sp. Lonicere zu Sph. Pythia, Fig. 5 (Scabiosæ); und 
von diesem zu Sp4. Pythia, Fig. 6 (Purpuralis)! » 

La moralité se trouve résumée à la fin de l’article par ces mots 
que malheureusement nous avons trop souvent l’occasion de répéter 
nous-mêmes : « Quantum est, quod nescimus. » Combien notre 
ignorance est immense ! 

Le grand Linné, dont le génie synthétique fit réaliser de si 
grands progrès aux Sciences Naturelles, n'a-t-il pas, comme 
Fuessly, terminé l’un des volumes du Systema Naturæ par cet 
humble aveu que j'ai déjà transcrit à la page 377 du volume III 
des Etudes de Lépidoptérologie comparée : « Ea que scimus sunt 


pars mImImMmaA eorum que 12n07amus! » 


(*) Je suis porté à croire que la Fig. 3 de Fuessly représente Transa/pina 
« noch kleiner, wird auf den Bergen angetroffen ». 

(**) Il y a évidemment confusion avec le n° 1; car ce n° 4 représente sans 
aucun doute la Zygena Achillee. 


(*##) C’est la Zygæena Scabiosæ, sans contestation possible. 


(###) Ce n’est point la © de Scabiose ; mais bien la Zygæna purfuralis qui 
a pour synonymes Pz/oselle et Minos, o". 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE s21 


Le travail que je poursuis actuellement sur le Genre Z7gæna 
me démontre amplement combien il est difficile de voir clair dans 
la séparation spécifique de ces Papillons. Ainsi que Je l’ai déjà 
exposé au début de la notice consacrée à 771foln, je me trouve 
impuissant à délimiter certaines Espèces d’une façon qui me satis- 
fasse. On perçoit aisément une diversité d’Espèces dont les indi- 
vidus, assez nettement caractérisés, sont très nombreux; on constate 
l'existence d’une grande quantité d'exemplaires intimement liés 
les uns aux autres, par un même ensemble de particularités, d’où 
résulte une homogénéité spécifique paraissant bien réelle. Pour 
chaque unité dont ils possèdent les caractères spéciaux, ils consti- 
tuent un groupement distinct et ne pouvant être confondu avec les 
autres groupements qui se trouvent, chacun pour ce qui le concerne, 
dans des conditions analogues. C'est ainsi qu'il est aisé de sélec- 
tionner une masse d'exemplaires des 4 Espèces : 7 74fola, Lonicere, 
Filipendule, Stæchadis, de telle façon que l’on se trouve en pré- 
sence de 4 groupes qui sont chacun parfaitement homogènes. Les in- 
dividus qui, par leur réunion, constituent lesdits groupes, ne peuvent 
donner lieu, quant à leur collocation dans leurs unités spécifiques 
respectives, à aucun sentiment de doute, d'incertitude et de confu- 
sion. Mais après une telle sélection faite, il reste tous les échantillons 
intermédiaires qui viennent apporter au classificateur comme un 
ironique défi. Ou bien, c'est une race locale qui est ambiguë dans 
son ensemble et qu'on est embarrassé pour rattacher exactement à 
l'unité spécifique d’où elle dérive: ou encore, ce sont des individus 
çà et là aberrants et troublant, par l’aspect anormal de la variation 
dont ils se trouvent atteints, l'ordonnance générale des caractères 
qu'on serait pourtant tenté d'admettre comme une base régulière 
pour l’Espèce. Par exemple on sélectionnera facilement des Zow1- 
cere, des Filipendule et des Dubia, toutes de la même provenance, 
soit de Vernet-les-Bains; elles sembleront très nettement distinctes 
les unes des autres et ne prêteront pas à confusion; mais lorsqu'on 
essaiera de classer dans l’une ou l’autre de ces trois unités, les Dybia 
de taille très inégale, à 5 ou à 6 taches rouges, plus ou moins vive- 
ment colorées, dont les taches rouges seront plus ou moins grosses, 


522 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


ayant la bordure indigo des ailes inférieures plus ou moins large, 
les hésitations commenceront et il sera impossible de donner à ces 
échantillons transitionnels une attribution spécifique dont la rec- 
titude paraisse certaine. Quelques individus inclineront vers Loui- 
ceræ, d'autres vers Fipendule, créant ainsi un enchaînement ten- 
dant à lier les trois espèces entre elles, ce dont mon esprit se refuse 
cependant à admettre toutes les conséquences. 

Je ne suis pas parvenu à dissiper le brouillard pour moi-même 
et par conséquent pour les autres; mais Je sens bien que quiconque 
aurait à sa disposition les documents que J'ai devant moi, éprou- 
verait le même trouble et la même impuissance. Il y a des Espèces 
très tranchées dans le genre Zygæna et il ne s'agit nullement de 
celles qui sont faciles à distinguer par des caractères nettement tan- 
gibles et constants; ce qui est en cause, c'est tout le groupe des Zy- 
gæna connues sous les noms de 7 r1folu, Lonicere, Angelice, Fili- 
pendule, Stæchadis, Dubia, fertiles en variations géographiques, 
offrant pour la même Espèce des races locales très distinctes, pré- 
sentant cependant chacune un ensemble considérable d'exemplaires 
homogènes et bien spécifiquement différents, cependant ces Espèces 
fournissent par ailleurs une telle abondance de sujets insuffisam- 
ment caractérisés que, s’il est facile d'établir pour chaque Espèce 
une sélection d'échantillons représentant sans contestation possible 
le type de l’Espèce à laquelle ils appartiennent, 1l est trop malaisé 
— pour moi du moins — de savoir à quel type spécifique 1l convient 
de rattacher la foule des exemplaires dont l'aspect général est 
indécis. 

J'ai observé, pendant bien des années, les Zygœna dans la 
Nature; J'ai capturé moi-même un nombre considérable d’exem- 
plaires dans beaucoup de pays; j'ai tenu note des particularités 
diverses que je constatais chez les animaux vivants et à leurs diffé- 
rents états. Je cenfesse l'ignorance dans laquelle je suis resté vis-à- 
vis de certaines questions. Puissé-je tout au moins par une figuration 
assez abondante et parfaitement réussie, — ce qui, pour les Z7ygæna, 
notamment au point de vue de coloriage, est très difficile à obtenir, 
— préparer la connaissance précise et certaine d’un nombre assez 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 52 


2) 


grand de Formes, Variétés et Espèces, pour que cette documen- 
tation iconographique constitue une base ne prêtant n1 à confusion 
ni à équivoque. 

Assez d’autres déjà et non des moins qualifiés, ont plutôt con- 
tribué à augmenter les difficultés qu'à les aplanir; mais tous, 
jusqu'ici, ont senti combien la question est épineuse et, ce qui n'est 
guère encourageant, les ambiguités se sont aggravées en proportion 
de l'augmentation de la documentation qu’on possède et du déve- 
loppement des observations auxquelles on procède ad naturam. 


On sait aussi que les Zygæna d'Espèce différente s'accouplent 
volontiers entre elles; tous les chasseurs Entomologistes ont saisi 
par les antennes des paires de Zygæœna spécifiquement distinctes 
et pourtant solidement attachées l’une à l’autre. On a obtenu des 
pontes résultant des accouplements hybrides qui se sont réalisés 
dans la Nature; des petites chenilles sont nées et sans doute ces 
chenilles étant parvenues à leur complet développement, des pa- 
pillons hybrides naturels, issus de la copulation de deux Espèces 
distinctes de Zygæna, sont éclos et ont pu être capturés dans la 
Nature; mais l’hybridation ne suffit pas à expliquer les faits si 
nombreux de transition entre différentes Espèces dont nous sommes 
les témoins. Il y a une cause encore mystérieuse d’où résulte la 
situation que j'ai cru devoir exposer telle que je la conçois actuel- 
lement. 


À Rennes, il y a deux Espèces de Zygæna seulement : 7 r1fol 
et sa forme Palustris d'une part, Fälipendulæ d'autre part. Ces 
deux Espèces ne diffèrent guère dans leurs chenilles, ni dans la 
coque qui enveloppe leurs chrysalides, mais elles ont des mœurs, 


des habitats et une époque d'apparition spéciaux. 


Aux environs de Rennes, 7 7ifolu vit dans les prés et éclôt depuis 
la fin de mai jusqu’à la Saint-Jean; Fipendule vit dans les forêts 
et les lieux secs et éclôt depuis la mi-Juillet jusqu'aux premiers 
jours d'août. 771folt, dans son Ab. confluens, présente une toute 
autre physionomie que F1pendulæe dans l’Ab. confluens à laquelle 
elle est également, mais plus rarement sujette. En effet, l’Ab, ne 


524 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


se produit pas d’après la même règle chez les deux Espèces. 7 71/ol2 
a 5 taches rouges aux ailes supérieures; Fi/1pendule en a toujours 
6, mais J'ai pris des 7 7ifolu qui, par aberration, ont 6 taches comme 
Filipendule et je possède même une 7 r1folu-sexmaculata Q au- 
thentique qui présente tout à fait le faciès de Flipendule; cepen- 
dant, si Je me rends de Rennes au bord de la mer de la Manche, 
ce qui n'est pas bien loin, je vois sur la côte 7 7:folu dont l’éclosion 
est plus tardive qu'à Rennes, par conséquent se rapprochant de la 
date d'apparition de }#/1pendule. En outre, au bord de la Manche, 
Trifolii change de forme; elle est de moins grande taille qu'à 
Rennes et elle s'éloigne beaucoup de Palustris, tandis que #11- 
pendulæ, extrêmement abondante sur certaines dunes, affecte une 
manière de vivre tout autre que dans les forêts de l’intérieur du 
Département d’Ille-et-Vilaine et devient de taille plus grande qu’à 
Rennes, contrastant ainsi avec /7ifolu qui, sur la côte, devient plus 
petite. Dans ma conviction, Z7ifolü et Filipendulæ sont, dans 
l'Ille-et-Vilaine, deux unités spécifiques distinctes, mais ne se 
trouvent-elles pas reliées au moyen de certaines Zoniceræ qui, elles- 
mêmes, en d’autres lieux, se rejoignent par des Azgelice et des 
Dubia à des Filipendulæ? Des causes inconnues produisent des 
effets très différents pour chaque Espèce. À Rennes, ainsi que Je 
l’expose plus haut, 7rifolit est plus grande que sur le littoral, 
tandis qu'inversement F#/ipendule est plus grande sur le littoral 
de la Manche que dans les bois des environs de Rennes. À Larche, 
Loniceræe est petite et peu colorée; dans le Valais, elle est grande 
et ses teintes sont bien plus vives. À Vernet-les-Bains, tous les 
passages existent, insensibles et incontestables, entre Drôza et 
Lonicere et à Cauterets entre Zoricere et Filipendule. 

Le grand livre de la Nature est ouvert devant nous; l'intelligence 
en est parfois difficile, mais il me semble que l'intérêt croît avec 
la difficulté. Aussi je compte bien, lorsque les ardents rayons du 
soleil de l'été réchaufferont de nouveau la terre de France, conti- 
nuer mes investigations entomologiques, s'il plaît à Dieu de m'en 
laisser la faculté, et m’appliquer avec plus d'attention que jamais 
à l'étude des Zygæna incertæ sedis. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 525 


Zygæna Angelicæ, secundum Boisduval (/cones, PI. 53, Hg. 0). 


Boisduval figure dans l’/cones et décrit à la page 65 dudit ou- 
vrage, avec le nom de Angelice, une Zygæna des Alpes françaises, 
de taille plutôt moyenne ou même petite, remarquable par la teinte 
d’un carmin très vif des taches qui ressortent, aux ailes supérieures, 
sur un fond bleu d’acier ou vert bronzé très riche et très brillant. 
Les ailes inférieures sont aussi d'un carmin vif. Aux ailes supé- 
rieures, les taches carmin sont tantôt au nombre de 3 et tantôt au 
nombre de 4, si l’on ne fait pas état des deux taches basilaires 
invariables. Dans le cas où l’on tient compte des deux taches 
basilaires en question, il faut dire que les taches rouges des ailes 
supérieures varient du nombre de 5 au nombre de 6. Dans la cir- 
constance, je fais abstraction des taches basilaires. En dessous, on 
remarque chez certains individus, sur les ailes supérieures, le lavis 
rougeâtre que les Entomologistes allemands appellent VNebelstreif. 
Ce lavis d’un rose carminé s'étend plus ou moins largement au 
voisinage des taches rouges qui transparaissent du dessus; mais 
le Nebelstreif n’est pas absolument constant et fait quelquefois 
défaut. 

Boisduval dit avoir remarqué que « les antennes sont d’un bleu 
noir avec la pointe un peu roussâtre ou jaunâtre. » Cet auteur 
observe aussi que « le dessous des ailes supérieures est à peu près 
comme dans Æippocrepidis, avec la frange d’un bleu à reflet rous- 
sâtre. » Je ne conteste pas la couleur roussâtre ou Jaunâtre sur la 
pointe des antennes et le reflet roussâtre sur la frange bleue; mais 
je trouve ces caractères difhciles à percevoir exactement. Ils sont 
peut-être un peu fugitifs et plus ou moins accentués selon Îles 
individus. 

Boisduval n'est d’ailleurs pas sûr que cette Zygæna soit la 
véritable Angelice d'Allemagne et si elle ne l'était pas, 1l propo- 
serait pour elle le nom d’A/prna. 

Il est certain qu’on trouve assez abondamment aux environs de 
Digne, en juillet, une Zygæna ambigué, à 3 ou 4 taches rouges (non 


526 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


compris les 2 taches de la base), ressemblant, pour la forme qui a 
4 taches, à une petite #z/1pendulæ et, pour la forme qui a 3 taches, 
à une petite Dzbia où même à Zoniceræ. Tous les passages existent 
entre la forme à 3 et la forme à 4 taches et 1l est très intéressant de 
constater l'insensible gradation de la 4° tache rouge qui se fait 
deviner en dessus par quelques atomes rouges, chez certains exem- 
plaires et finalement arrive chez d’autres, à un développement très 
complet, tout à fait comme dans }#ipendule. En dessous, la 
4° tache est apparente dans des cas où elle est invisible en dessus. 
Cette Zygæna ressemble donc d’une part non seulement à #2/1- 
pendule, mais encore d'autre part à Zomiceræe et à Dubia. Les 
chasseurs de Digne m'ont envoyé environ 350 exemplaires, pas 
un n’a les taches rouges des supérieures confluentes. Chez deux ©, 
les ailes inférieures sont un peu envahies par la couleur indigo 
qui forme la bordure terminale et chez quelques O* la bordure 
indigo est élargie. 11 semble que certains petits individus à 3 taches 
rouges très vives, très nettes, arrondies, d’un carmin mat, se déta- 
chant sur le fond vert brillant des ailes supérieures, pourraient 
être considérés comme une race référable à l’allemande A »gelice ; 
mais dans la quantité des autres exemplaires, il y en a qui, suivant 
le nombre de leurs taches rouges, leur taille, le fond plus ou moins 
bleu ou vert brillant du fond de leurs ailes supérieures sont si 
voisins de Filipenduleæ, mème de Loniceræ, surtout de Medicaginis 
ou de Dubia que toutes les hypothèses se posent à l'esprit quant à la 
qualification spécifique qu'il convient d’attribuer à cette Zygæna 
et quant à ses limites exactes vis-à-vis des Espèces précitées. 

Il me semble donc que la Zygæna de Digne est certainement 
conforme à l’'Angelicæ-alpina décrite par Boisduval dans l’/cones, 
mais je déclare de nouveau ne pouvoir trouver aucune raison qu! 
me satisfasse, relativement à la délimitation spécifique de cette 
Angelice-alpina. Les individus transitionnels entre la forme tri- 
et quadri-maculée empêchent de séparer les échantillons à 3 taches 
de ceux à 4 taches. Je ne suis pas satisfait de considérer À rgeliceæ- 
alpina comme une Espèce spéciale et cependant Je ne trouve pas 
de raison probante de réunir Angelicæ-alpina à quelqu'autre 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 527 


Espèce. Bien qu'il n'y ait pas de barrière sérieuse entre les Azge- 
lice-alpina à 4 taches et Filipendulæ, Va réunion spécifique me 
répugne à cause de la forme à 3 taches spécifiquement égale à 
celle à 4 taches, mais non référable à Æz1pendule. D'autre part, 
le Nebelstreif sur le dessous des ailes supérieures et la tendance 
d'une 4° tache à paraître en dessous, même lorsqu'il n'y a que 
3 taches visibles en dessus, ne permettent pas la jonction à Zont- 
ceræ. L'aspect est tout autre que celui de 7r1folu. Il reste S/æ- 
chadis-Medicaginis; les variétés très rares qui ont les ailes infé- 
rieures envahies par la teinte indigo de la bordure, ou même ceux 
qui ont la bordure indigo très élargie, pourraient cadrer avec 
Stæchadis; mais la masse des autres est-elle référable à Duéza, 
dont elle constituerait une race #1n0r7 et inferior, comparativement 
à celle des Pyrénées-Orientales? C'est peut-être là que réside la 
vérité? Cependant je ne puis l’affirmer et dès lors J'avoue mon 
impuissance à donner la lumière sur une question que Jj'étudie 
depuis longtemps, sans réussir à trouver le trait de lumière qui 


donnerait la clef de l'énigme. 


Je suis convaincu d’avoir devant moi, en écrivant ces lignes, 
la Zygæna Angelice-alpina, secundum Boisduval; mais Je n'en 
puis dire davantage et je reste dans l'incertitude d’où Boisduval 
n’est pas lui-même sorti. Cependant j'incline vers le rattachement 
d'Angelice-alpina à Dubia. 

Quant à l’'Angelice, secundum Duponchel (Supplément, Zigé- 
nides (sic), PI VI, fig. 2), elle n’a aucun rapport spécifique avec 
l’'Angelicæ, secundum Boisduval. Je crois que l’Angelice, secun- 


dum Duponchel, est une 7’ ransalpina. 


Zygæna Stœchadis, Bork. 


Voici le texte de la description donnée par Borkausen dans 
Rheinisches Magazin fuer Naturkunde : « Sphinx Stæchadis; als 
omnibus viridi cœrulescentibus, superioribus maculis sex rubris, 


528 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


inferioribus duabus tribusve lituraque baseos rubicunda; collari 
maris albo. 

Hübners Beytr. 2 B. 3 Th. Fig. o. Sphinx Lavandule. 

Nach Herrn Hübners Bemerkung ist dieser Schwärmer in Lan- 
guedoc und in Piemont einheimisch. Ausser der grôssern Anzahl 
der Flecken soll er sich von der Esperschen Sp4. Lavandulæ noch 
durch den Mangel der Schwarzen Einfassung der Flecken unter- 
scheiden. Nur das Maennchen soll ein weisses Halsband haben. 
Ich sah ihn noch nicht in Natur, und seine Geschichte ist noch zu 
wenig aufgeklärt, als dass man mit Zuverlässigkeit entscheiden 
kônnte, ob er wirklich von der Sp. Lavandulæe Esperi unterschie- 
den sey. » 


Je donne la traduction littérale comme suit : « D'après la 
remarque de M. Huebner, ce papillon est indigène (chez lui) en 
Languedoc et en Piémont. En outre du plus grand nombre de 
taches, il doit se distinguer encore du Sp4. Lavandulæe d'Esper 
par le manque de la bordure noire des taches. Seul le Πdoit avoir 
un collier blanc. Je ne l’a pas encore vu en nature et son histoire 
est encore trop peu tirée au clair pour qu'on puisse avec certitude 
décider s'il est véritablement différent du Sp#. lLavandule 
d'Esper ». 


Telle est donc la déclaration de Borkausen. Il n'a pas vu en 
nature le papillon qu'il appelle cependant S/æchadis. Il reconnaît 
que son histoire reste obscure; 1l prétend que, seul, le S' a le collier 
blanc; ce qui est faux, puisque le O' aussi bien que la Q ont le 
collier noir; 1l rapporte, d’après Huebner, que l’'Espèce se trouve 
en Languedoc, ce qui est également inexact. Borkausen fait évi- 
demment une confusion partielle de Lavandulæ et de Stæchadis. 
Il pressent cependant que le papillon figuré par Huebner sous là 
lettre O de la Taf. III du Band IT de Bei/rege est autre chose que 
Lavandule; mais, à cause de la confusion que Borkausen commet 
relativement au , c'est à la Q seule que peut s'appliquer la dis- 
tinction des caractères qu'il établit d'après la figure donnée par 


Huebner : six taches rouges non entourées de noir aux ailes supé- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 529 


rieures; deux ou trois éclaircies rouges aux inférieures, pas de 
collier blanc, sauf pour le O' qui reste évidemment un Lavandule. 
Dans la circonstance, Borkausen a fait preuve d'une prévision fort 
avisée; on ne saurait le contester et Je lui rends justice; cependant 
il n'a pas vu le papillon en nature; il se trompe pour le &, et à 
cause de tout cela, comme la base de nomenclature parait fragile, 
précaire et incomplète! 

D'autant plus que S/æchadis n'est point une Espèce facile à 
distinguer, présentant des caractères certains et ne laissant prise à 
aucune contestation. C'est au contraire une Espèce litigieuse dont 
les mutations donnent lieu à maintes confusions! J'ai écrit à son 
sujet, mais en lui donnant le nom de Medicuginis, Duponchel 
(Suppl, PL VI, fig. 6), une notice qui a paru dans le Bulletin Soc. 
ent. France, 1808, p. 22. Je prie le Lecteur de vouloir bien sy 
reporter. Tout d'abord S/æchadis a été confondue avec certaines 
formes de 7 ransalpina qui est cependant une Espèce tout à fait 
distincte. Les 4 Zygœna figurées par Freyer, avec le nom de 
Stæchadis, sous les n° 1, 2, 3 et 4 de la Tab. 368, sont évidemment 
des formes italiennes de Z'ransalpina et nullement des S/æchadis, 
ainsi que Staudinger et Rebel l'ont pourtant rapporté, mais à tort, 
dans leur Catalog 1901. Ces auteurs n’ont probablement regardé 
que le nom : S/æchadis, employé par Freyer, dans le Tom. IV de 
Neuere Beitrege, publié à Augsbourg, en 1842, et ils n'ont même 
pas jeté les yeux sur les figures qui ne laissent absolument aucun 
doute. Freyer, à la page 130, dit que ses Zygæna prétendues 
Stæchadis volent dans le sud de la Suisse et le sud de la France; 
il aurait dû faire imprimer dans le sud de l'Italie; c'eût été plus 
correct. Mais en fait de Géographie, Freyer, comme Je l'ai déjà 
fait observer précédemment, avait des idées qu'on peut qualiher de 
très larges. 

Il est bien évident aussi que les S/æchadis figurées par Herrich- 
Schaeffer sous les n°* 35, 36, 37, 38, de la Tab. V des Zygæmdes 
Europ. sont des T'ransalpina italiennes, absolument comme l’Ab. 


Xanthographa, figurée sous le n° 40 de la même Tab. 5 des Zy- 
gænides Euro. 


34 


530 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Il y a eu des confusions multiples relativement à S/æchadis et 
à Z'ransalpina, et 11 convient, à cause de cela, d'être très circonspect 
dans l'établissement de la synonymie respective de ces deux 
Espèces de Zygæna. Mais 1l s'agit présentement de la S/æchadis, 
selon Borkausen, dont le point initial se trouve dans la description 
écrite d'après la figure donnée par Huebner. Il est en effet possible 
que Lavandule, Huebner (Bettrege sur Geschichte der Schmetter- 
linge; Il Band; IIT Theil;, III Tafel; n° o), soit une S/æchadis, 
parce qu'elle n'a pas de collier blanc, comme Huebner le fait du 
reste remarquer à la page 69; mais le faciès est bien plutôt celui 
d'une Zavandule à qui on aurait recollé une tête dépourvue de 
collier blanc, que d'une véritable S/æchadis. Le souci de la vérité 
empêche donc de tenir sérieusement compte, au sujet de S/æchadis, 
de la figure ci-dessus analysée, publiée par Huebner, et dès lors 
l'argumentation de Borkausen pêche par plusieurs points. 

Cependant les 6 taches rouges existent aux ailes supérieures; la 
valeur de ce caractère est incontestable; mais le papillon, je le 
répète, parait être le produit d’un raccommodage effectué avec des 
pièces hétéroclites, et cette circonstance semble de nature à atténuer 
la confiance dans la figure qui est en question et sur laquelle repose 
la création même de l’Espèce : S/æchadis. 

Néanmoins, on parait actuellement d'accord pour désigner sous 
le nom de S/æchadis une Zygæna sans collier blanc, pouvant avoir 
6 taches rouges non cerclées de nojr aux supérieures et présentant 
les ailes inférieures souvent envahies par la couleur indigo. J'ai 
donc accepté comme valable ce nom de S/æchadis, bien qu'il y ait 
eu postérieurement une autre application du même nom de S/æcha- 
dis, fait à une toute autre unité spécifique, et que le nom de 
Medicaginis serait probablement plus exactement approprié. Cepen- 
dant, ces observations étant faites, je continue, comme suit, l'examen 
des divers travaux des Iconographes au sujet de la Zygæna qui 
nous occupe. 

Une autre Lavandule, sans collier blanc, représentée par Huebner, 
sous le n° 24 de la Planche : Lepidoptera I; Sphinges I, ne peut 
pas davantage donner lieu à une identification spécifique exacte 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 531 


et 1l n'y a pas à faire état de cette figure douteuse, d'autant plus 
que l'individu qui a servi de modèle parait avoir eu les antennes 
recollées par une main maladroite, ce qui laisse supposer quel- 
qu'artifice, de façon à enlever toute garantie d'identification. Mais 
sur la même Planche, Huebner a figuré sous le n° 20, avec le nom 
de Medicaginis, une Stæchadis-sexmaculata, à ailes inférieures 
rouges, assez largement bordées d’indigo. On trouve à la Certosa 
di Pesio, en Piémont, des Zygæna Stæchadis-sexmaculata, dont 
le fond des ailes supérieures est d’un vert bronzé luisant et vive- 
ment coloré, avec six taches d’un carmin mat très pur et très vif; 
les inférieures sont carminées avec une large bordure bleu indigo. 

Ces Zygæna semblent référables à la figure 20 donnée par 
Huebner; toutefois, 1l convient d'observer que la ligne indigo 
formant la bordure des ailes inférieures est rarement dans la 
Nature aussi régulièrement parallèle au bord terminal, pour tout 
son parcours, que cela est indiqué dans la figure 20 précitée. Dès 
lors, ce n'est pas encore avec une certitude complète qu'on peut 
rapporter cette Wedicaginis de Huebner à l'Espèce que nous appe- 
lons S/æchadis. 

Feu mon ami Millière, excellent homme, et dont J'ai gardé un 
bien affectueux souvenir, était malheureusement mieux pourvu de 
bonne volonté que de capacité pour écrire des ouvrages entomo- 
logiques; 1] a consacré les pages 60 à 63 du Vol. IIT de son 
Iconographie à l'histoire de la Zygæna Stæchadis. Il à commencé 
par copier quelque part la synonymie (p. 60) sans chercher à en 
faire le moindre contrôle, et 1l a intercalé des citations qui se 
rapportent à Z'ansalpina et non à S/æchadis; d'ailleurs 1l me 
paraît bien probable qu'il confondait les deux Espèces en une 
seule; puis 1l a décrit la chenille que lui avait envoyée Himmi- 
ghofen, de Barcelone; il dit l'avoir élevée sur le Dorycnium suf- 
fruticosum, plante de la famille des Papilionacées, très rameuse, 
à feuilles soyeuses, formant de petits buissons, très répandue dans 
les lieux secs et arides du midi de la France et que beaucoup de 
Lépidoptères affectionnent. Millière ajoute qu'il trouvait à s'ap- 
provisionner de cette plante au Jardin botanique de Lyon. Mal 


p32 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


heureusement Millière a dû faire une confusion quelconque et qui 
infirme singulièrement la valeur de sa description; car avec la 
sincérité qui le caractérisait et qui est tout à son honneur, Millière 
a fait imprimer à la page 464 des Addenda et Corrigenda, V'obser- 
vation suivante : « Z7g. Stœchadis, Bor. — Ic., III, p. 60. — Par 
suite de certaines communications obtenues postérieurement, J'ai 
dû penser que la chenille de cette Zygène n'est peut-être pas au- 
thentiquement la S/æchadis. » Quoi qu'il en soit, les papillons 
figurés sous les n°* 4, 5 et 6 représentent assez bien la S/æchadis, 
de Barcelone. 

Millière a tort de dire (p. 62), que Freyer, dans son /conographie, 
à la Tab. 363 (s2c pour 368), donne quatre figures de la S/æchadis 
vraie, puisque, comme je l'ai exposé plus haut, ledit Freyer repré- 
sente sur la Tab. 368 (non 363), 4 7 ransalpina. 

Millière a cru devoir faire remarquer encore que la « Zygæna 
Stæchadis, de Duponchel (Supplément, Zygénides, PI. VIT, fig. 2), 
n'est pas cette Espèce, mais plutôt la variété de Medicagims de 
cet Auteur {VI, fig. 6). » — En réalité, la S/æchadis secundum 
Duponchel (PI VII, fig. 2), est une variété de KAadamanthus et 
non une variété de sa Medicaginis (VI, fig. 6). — Müillière ajoute 
que « M. Boisduval ayant voulu rectifier cette erreur, donna dans 
son Iconographie (rectiès /cones), PI. 55, fig. 4, le nom de S/æ- 
chadis à une Zigène (sic) qui n’est pas davantage la vraie Stæ- 
chadis. » 

Millière ne savait donc pas que Boisduval ayant fait paraître 
son /cones en 1834, tandis que Duponchel a fait paraître en 1835 
le second volume de son Supplément à l'Histoire naturelle des 
Papillons de France, n'avait pas lieu de rectifier dans son /cones 
une erreur qui n'avait pas encore vu le Jour. 

Pour apprécier la question que Millière ne s'est pas donné la 
peine d'étudier et qu'il a dénaturée, il convient de lire d’abord ce 
que Boisduval écrit à la page 71 de l’/cones; alors il sera aisé de 
se rendre compte du motif pour lequel Boisduval a donné à une 
variété de RAadamanthus le nom de S/æchadis; c'est que, dit 


Boisduval « la Zygæna publiée sous le nom de S/æchadis par 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 533 


les Auteurs n'étant point une Espèce, mais une simple variété de 
Medicaginis, j'ai transporté à celle que je décris ici et qui est 
nouvelle, le nom de S/æchadis, en raison de son affinité avec 
Lavandule. » 

Pour Boisduval, en effet, la S/æc/adis de Borkausen et Ochsen- 
heimer serait la variété à ailes envahies par la teinte bleue, de la 
Medicaginis qui est figurée dans l’Zcones sous le n° 10 de la PI. 55, 
dont les ailes inférieures sont rouges, bordées de bleu indigo et 
que Boisduval considère comme la forme type de l’Espèce, S/æ- 
chadis à ailes bleues: n'étant que la variété. Mais Boisduval n’a 
point distingué les deux espèces différentes : Transalpina et 
Stæchadis. I] les a confondues et il commet la faute de vouloir 
attribuer S/æchadis comme variété à l’Espèce-type Medicaginis 
qui, dans la circonstance, est une 7ransalpina et avec laquelle 
Stæchadis ne peut avoir aucun rapport spécifique. Cependant, à 
la page 64 de l’/cones, Boisduval publie l'observation suivante : 
€ La S/æchadis des Auteurs est une belle variété piémontaise qui, 
à l'exception du collier blanc, ressemble extrêmement à Zavan- 
dulæ. Chez elle, la bordure envahit presque toute la surface des 
ailes inférieures; la base et quelquefois un petit espace entre le 
milieu et l’angle interne sont les seules parties qui restent rouge. 
La sixième des taches des ailes supérieures disparaît aussi quel- 
quefois, au moins en dessus. On trouve du reste tous les passages 
entre cette variété et les individus dont la bande est la moins 
large. » Ceci est exact et Boisduval n’a pas péché par ignorance 
en écrivant ainsi; mais il faut reconnaître qu’au lieu d'appliquer 
le nom de S/æchadis à une variété de Rhadamanthus dont les 
ailes inférieures normalement rouges sont envahies par la teinte 
bleue, il eût mieux fait de choisir une autre désignation afin 
d'éviter un supplément de confusion dans la Nomenclature. 

D'autre part il est utile de lire à la page 70 du Supplément les 
observations formulées par Duponchel, à propos de la Zygæna 
Stæchadis, Boisduval (Zcones, PI. 55, fig. 4). 

Voici la Note de Duponchel, répondant à celle de Boisduval : 
« La S/æchadis dont il est ici question est différente de celle de 


534 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Borkhausen et d'Ochsenheimer, laquelle, suivant M. Boisduval, 
n'est qu'une variété de la Medicaginis. Cependant, Je crois que 
celle à laquelle 1ls ont donné le nom de Séæchadis est plutôt une 
variété de la Zavandulæ (*), puisque Ochsenheimer cite la figure 
de Huebner qui représente cette dernière, à l'appui de sa descrip- 
tion. Quoi qu'il en soit, la S/æckadis de M. Boisduval n’a rien 
de commun avec l’une ou l’autre de ces deux variétés, et si elle se 
rapproche d’une autre Zvgène, c’est de la Rhadamanthus, comme 
nous l’avons dit au commencement de son article. Au reste, nous 
ne sommes pas bien convaincu que ce soit une espèce distincte de 
cette dernière et nous serions plutôt porté à croire que ce n’en est 
qu’une variété locale. » 

Herrich-Schaeffer a bien figuré S/æchadis-quinquemaculata, à 
ailes inférieures rouges largement bordées d’indigo, sous le n° 45 
de la Tab. 6 des Zygænides Euroÿ. 


Boisduyal a représenté S/æchadis dans l’Essai sur une Mono- 


(*) Duponchel se trompe; il aurait dû dire pour être correct, non pas « une 
variété de la Zavandulæ » ce qui est inadmissible; mais « une espèce d’aspect 
analogue à la Zavandulæ dont, entre autres caractères distinctifs, elle diffère 
par l’absence du collier blanc ». Tout le reste de la note de Duponchel paraît 
exact. Seulement Millière a commis une grossière erreur de chronologie que 
j'ai relevée ci-dessus et qui démontre avec quelle légèreté les Auteurs étudient 
trop souvent les questions dont ils traitent. Ce manque d’attention n’est du reste 
pas personnel à Millière. D’autres — et des plus qualifiés — furent coutumiers 
du même défaut : ainsi Staudinger et Rebel. Il est donc nécessaire, si l’on tient 
à se rapprocher le plus près possible de la vérité, de tenir compte de ces fai- 
blesses. Ærrare humanum est ! Pour permettre d'apprécier la valeur de cette 
critique et de juger la fragilité des bases sur lesquelles se trouve établie la 
nomenclature entomologique, je signalerai la présence dans la collection Bois- 
duval, d’une Zygena Achilleæ-Wagneri méconnue et classée parmi les Stæchadis ! 
Qui sait si Boiduval qui a considéré cette Wagneri, à cause de ses ailes infé- 
rieures envahies par le bleu, comme une S/æchadis, et qui l’a mélangée aux 
Stæchadis, Medicaginis et Transalpina, ne l’a pas eue en vue, dans l’une quel- 
conque de ses dissertations ? On conçoit par cet exemple dont je garantis 
l'authenticité, à quelles erreurs se sont laissé entraîner les Anciens. Du reste 
l’illustre Linné n’a-t-il pas, ainsi que je le rapporte à la page 131 du présent 
volume, confondu CAryseis-Eurydice avec Virgaureæ d et Phlæas avec Virgau- 
reæ Q, en identifiant mal à propos Vrrgaureæ d et Q, par une application 
erronée de figures données par Roesel ? C’est un enseignement dont les Entomo- 
logistes doivent profiter pour regarder de bien près aux déterminations, aux 
identifications et aux synonymies qu’ils admettent. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 53 


UR 


graphie des Zygénides, 1820, sous le n° 3 de la PI. 5, avec la dia- 
gnose suivante : « Alis omnibus concoloribus, cyaneis, micantibus ; 
anticis maculis sex (vel quinque) sanguineis, nigro subcinctis; 
posticis puncto rubro basique rubro radiata; collari concolore. » 

Les antennes figurées sous le n° 3 de la PI. 5 sont des antennes 
d'emprunt; dans la Nature, chez S/æchadis, elles sont terminées 
en pointe et non obtuses. Dans le même ouvrage, le même Auteur 
a figuré Sæchadis sous le n° 5 de la PI. 4, avec le nom de Medi- 
caginis; mais cette fois, les antennes paraissent plus conformes 
à la réalité naturelle. Quant à Duponchel, il a représenté S/æchadis 
avec le nom de Medicaginis sous le n° 6 de la PI. VI du Szpplé- 
ment-Zigénides (sic); mais à son tour Duponchel confond Szæ- 
chadis et Transalpina, en appliquant le même nom de Medicaginis 
à deux exemplaires qui appartiennent à deux unités spécifiques 
différentes : le n° 5 de la PI. VI appelé Medicaginis par Du- 
ponchel étant référable à Transalpina, et le n° 6 de la PI. VT éga- 
lement désigné sous le nom de Medicaginis étant référable à 
Siæchadis. 

Il est possible que l’acteur du Théâtre impérial royal de la cour 
de Vienne, Ferdinand Ochsenheimer, ait bien eu en vue la vraie 
Zygæna Stæchadis qu'il décrit d’ailleurs sous ce nom, mais sans 
la figurer, pas plus qu'aucune autre d’ailleurs, à la page 83 de son 
Zuweyter Band. Y\ définit ainsi la diagnose latine: « Alis omnibus 
cyaneis, anticis maculis quinque (sex) rubris; posticis disco litu- 
raque apici rubris. » 

Ochsenheimer ajoute, dans la description allemande, que les 
antennes sont longues, minces, avec les pointes brunâtres. La tête, 
le dos, le dessous du corps et les pattes sont concolores bleu noir; 
le collier blanc manque tout à fait. 

« Die Fuehler lang, duenn, mit bræunlichen Spitzen-Kopf, 
Ruecken, Hinterleib und Fuesse sind einfaerbig schwarzblau, der 
weisse Halsring fehlt gaenzlich. » Les antennes sont longues, 
c'est vrai, mais elles ne sont minces que relativement. La Zygæna 
Stæchadis est chez elle (zu Hause), dit Ochsenheimer, en Piémont 
et dans le Sud de la France. Ce dernier renseignement est un 


536 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


argument très intéressant et qui a une valeur. Mais bien que 
Ochsenheimer décrive Transalpina (p. 60) et Medicaginis (p. 61), 
on peut toujours redouter qu'une confusion ait été commise et 
craindre d'admettre pour vrai ce qui est erroné. 

Dans l’Espèce que j'appelle S/æchadis, pour me conformer à 
l'usage établi chez la plupart des Entomologistes contemporains, 
je distingue plusieurs races géographiques comme suit : 


1° Stœchadis et Medicaginis, Alpes-Maritimes et Italie. 


En Toscane, en Piémont et dans la région peu éloignée du 
Httoral des Alpes-Maritimes, notamment aux environs de Nice, 
au Moulinet, au mont Pacanaglia, à la Turbie, sur les bords du 
Var, à Vintimille, à Nervia, à la Certosa di Pesio, dans les Abruzzes 
et dans la campagne de Florence, on trouve en mai et juin, puis 
en août, une Z’ygæna d'apparence robuste, avec le thorax épais, 
les antennes longues, terminées en pointe mais fortement renflées 
vers leur extrémité, ayant le corps d’un noir bleuâtre. En dessus, 
les ailes qui sont assez allongées ont le fond des supérieures d'un 
bleu ou d’un vert riche et brillant, avec $ taches d’un rouge carmin 
mat et très vif. 

Quelquefois, mais rarement, au lieu de % taches on en voit 6. 
La forme à 6 taches est plus fréquente à la Certosa di Pesio que 
dans le département des Alpes-Maritimes. Les ailes inférieures 
sont d’un rouge carmin vif et pur, entourées d'une bordure bleu 
indigo qui, tantôt se trouve limitée à un épais liséré suivant le 
bord terminal, et tantôt envahit plus ou mains largement la sur- 
face des ailes inférieures. Le dessous est la reproduction atténuée 
du dessus, au point de vue de l'éclat de la coloration. Ma collection 
contient un millier d'exemplaires parmi lesquels un seul Πappar- 
tient à l’Ab. f#ava; il a été pris au Var, près Nice, par Victor 
Cotte, en mai 1807. Le Nebelstreif paraît très rare sur le dessous 
des supérieures; mais on remarque quelquefois sur le dessous des 
supérieures une 6° tache rouge qui ne paraît pas visible en dessus. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 53 


NY 


Je possède un seul exemplaire pris à Castillon, le 28 juin 1906, 
qui présente une confluence des deux taches rouges médianes et 
une tendance à se Joindre à la dernière tache externe. 

Certains échantillons à 6 taches rouges et à ailes inférieures 
faiblement bordées de bleu indigo, ressemblent à F#/ipendule; 
d’autres à 5 taches rouges moins vivement colorées, d'apparence 
plus molles, avec les antennes plus longues et plus amincies 
ressemblent à Zoniceræ,; mais il y a une masse très caractérisée, 
notamment celle dont les ailes inférieures sont envahies par le bleu. 

Je distingue par le nom de Wedicaginis, Duponchel, la race à 
ailes inférieures rouges de S/æchadis des Alpes-Maritimes; j'ai 
fait figurer sous ce nom de Medicaginis, dans le Volume III des 
Etudes des Lépidoptérologie comparée, quelques échantillons dont 
Je rappelle la référence, mais en rectifiant la nomenclature, confor- 
mément aux conclusions de la présente étude : 


PI XXVIII, n° 157, ©, Stæchadis, Ochs. 


« Die Hinterfluegel sind dunkelschwarzblau, in der Mitte 
mehr oder weniger hochroth gefaerbt » Ochsenheimer ; Szœ- 
chadis, p. 83. — « Les ailes inférieures sont d’un noir bleu 
obscur, dans le milieu plus ou moins colorées de rouge vif. » 

Le n° 157 représente bien S/æchadis, conforme à la des- 
cription d’Ochsenheimer; l’exemplaire figuré vient du mont 
Pacanaglia. . 

N° 159 ©, Stæchadis, Ochs.; très obscure; individu chez lequel 
l'éclat de la teinte rouge est très atténué; de Nice. 

N° 158 ©, Medicaginis-quinquemaculata, Duponchel (Suppl. 
PI. VT; fig. 6), à ailes inférieures rouges, largement bordées 
de bleu indigo; du mont Pacanaglia. 

N° 160 ©, Medicaginis-sexmaculata; transition à dubia; à ailes 
inférieures plus rouges et moins largement bordées de bleu 
indigo; du Moulinet (Alpes-Maritimes). 

N° 161 ©, Medicaginis-sexmaculata, intermédiaire entre les n° 158 
et 160; de la Certosa di Pesio. 


538 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


J'avais déjà fait figurer sous le n° 110 de la PI 7 de la 
XX° livraison des Etudes d'Entomclogie, un S Stæchadis, forma 
Medicagins-quinquemaculata, du Piémont. 

La chemille est d’un vert jaunâtre avec des taches noires plus 
ou moins grosses; la coque est en forme de bateau, luisante, assez 
hsse, jaune ou blanchâtre. 


2° Dubia, Pyrénées-Orientales. 


En France, nous appelons Dubia — (j'avoue que je ne sais guère 
comment on peut justiier l'exactitude de cette désignation) -— 
la forme de S/æchadis de Vernet-les-Bains. Staudinger, sans avoir 
en vue la forme particulière des Pyrénées-Orientales, mit au Jour 


ce nom qui, malgré sa brièveté, est très significatif, — et c’est là 
son mérite, — dans la première Edition de son Catalog der Lepi- 


dopteren Europas und der angrensenden Laender qu parut en 
septembre 1861. Cette première Edition est bien peu volumineuse, 
comparée à la troisième qui vit le jour 40 années plus tard. Tou- 
jours est-il que Dubia figure sous le n° 145, à la page 21 de 
l'Edition 1861. Le mot Dzbia est précédé d’un point d'interro- 
gation qui complète l’idée dont 11 émane. ? Dybia comprend donc : 


Medicaginis, Bdv., Essai (PL 4, fig. 5). 

Charon, Bdv., Essai (PI 4, fig. 4;. 

Charon, Bdv., Icones (PI. 54, fig. 7, rectiüs 9). 

Charon, Duponchel (Supplément, Zyg, PI VIII fig. 1 Os). 
Stæchadis, Herrich-Schaeffer (fig. 45). 


C'est-à-dire tout un ensemble de Zygæna différentes entre elles 
et que Staudinger, ne sachant comment classer, a réuni sous un 
même vocable qui exprime son hésitation à les cataloguer dans un 
ordre satisfaisant, Le mot Dwbia comporte avec lui un aveu d’im- 
puissance à débrouiller une inextricable confusion. Evidemment 
toute cette synonymie est bien contestable. I] est fort probable que 
si l’on voyait, au lieu des figures imparfaitement gravées et colo- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 530 


riées, les papillons mêmes qui servirent de modèle et si ces papillons 
étaient pourvus de l’exacte désignation de la localité d’où ils 
proviennent, on trouverait que l'assemblage est bien bizarre et très 
peu d'accord avec l'indication qui résulterait de la réalité des faits. 

La troisième Edition du Catalog, en 1001, a maintenu le nom 
de Dubia, comme variété de S/æchadis et s’est enrichie de citations 
nouvelles non prévues en 18671, et notamment de la diagnose sui- 
vante : « Var. major, al. ant. macul 5 vel 6, al. post. rubris, tantum 
late nigro-marginatis, in transit. ad spec. sequet. v. “ e ”? » 
L’Espèce subséquente à laquelle Dybia fait transition, c'est F/1- 
pendule; la description cependant peut convenir au papillon que 
nous appelons Dub; pourtant le mot : wajor est forcé, de même 
les mots : /antum late nigro marginatis manquent d’exactitude en 
ce qui concerne notre Dybia. En effet, la forme des Pyrénées- 
Orientales n’est pas plus grande que la S/æchadis italienne et 
niçoise, donc elle n’est pas #ajor, comparativement à celle-ci; elle 
est même d'aspect moins robuste; quant à la bordure des ailes 
inférieures, elle est rarement bien large. Mais en France, mes vieux 
amis Guenée, Fallou, Martin, Lafaurv, avaient adopté le nom de 
Dubia, Stgr. (Catalog, 1861), et peu après l'apparition dudit 
Catalog, pour désigner la S/æchadis de Vernet-les-Bains; aussi 
ce nom est-1l généralement admis maintenant chez nous pour cette 
forme de Zygæna dont nous avons répandu dans diverses collec- 
tions d'Europe de nombreux échantillons étiquetés par nous Drbia 
et provenant tous des Pyrénées-Orientales. 

Donc j'ai conservé le nom Dybta, mais pour bien indiquer ce 
que J'entends par Dubia, j'ai fait représenter trois exemplaires de 
la Zygæna en question, au moyen des figures 160 et 171 de la 
PI XXVIII des Æfudes de Lépidoptérologie comparée, pour 
Dubia-quinquemaculata et de la figure 170, pour Drubia-sexma- 
culata. Cette Zygæna m'est très familière et j'en possède un nombre 
considérable d'exemplaires. Certains individus de Dubia, ou pré- 
tendus tels, à 5 taches rouges, inclinent vers Zonicere,; d’autres, 
a 6 taches, sont bien voisins de F#ipendulæ; cependant le plus 
grand nombre des individus capturés dans le voisinage de Vernet- 


540 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


les-Bains et à une altitude à peu près égale à celle des villages 
mêmes de Vernet et de Casteil, ou légèrement supérieure, conserve 
un faciès spécial et constitue une forme assez distinctement carac- 
térisée de S/æchadis-Medicaginis-Dubia. Les teintes rouge carmin 
et bleu ou vert luisant, sont en dessus extrêmement vives et opaques; 
la Zygæna est dans son ensemble un papillon très brillant et haut 
en couleur (Æochkgefaerbt, comme on pourrait dire en allemand, 
la teinte carminée étant appelée Zockrothk, par Ochsenheimer). Je 
crois d’ailleurs que la Dubia des Pyrénées-Orientales, telle qu’elle 
nous est connue, peut se définir ainsi : Suprà, alis anticis cyaneo- 
virescentibus, valde micantibus ; maculis quinque vel sex sanguineis 
minoribus; posticis rubro purpureis, margine nigro-cyaneo, paulo 
latiore quam apud #ipendul. et Lonicer., sed minus lato quam 
apud Wedicagin, Dup. Antennis elongatis, ante apicem inflatis, 
nigro-Cyaneis;, thorace abdomineque nigro-cyane's aut virescen- 
tibus; pedibus rufescentibus; infrà, alis anticis sicut suprà, sed 
pallhidioribus; interdum maculis rubris 6 al. antic. colore roseo- 
coccineo sparso jJunctis. 

La chenille et la chrysalide me paraissent semblables à celles 
des Alpes-Maritimes. 

Voici quelques notes prises en sute des chasses de 1900 par 
mon frère. Je les transcris ci-dessous; elles donnent l'impression 
produite par l'observation de la Nature vivante et à ce titre, ne me 
semblent pas dénuées d'intérêt : « Zygæœna Dubia; M. Harold 
Powell a récolté le 28 juillet 1900, près de Py. une série d'environ 
60 exemplaires qui sont tous à 5 taches et dont le dessous des ailes 
supérieures n'est nullement lavé de rouge. Il y a des échantillons 
de taille et de coloration tres diverses. Ce sont plus spécialement 
et généralement des Zoniceræe. Quelques jours après, J'ai moi-même 
capturé au-dessous du col de Fuilla, une assez grande quantité 
de Zygæna Dubia où se trouvent des exemplaires à 5 et à 6 taches 
rouges, ayant ou n'ayant pas le lavis rouge (Webelstreif) sur le 
dessous des ailes supérieures. Quant à la 6° tache rouge, tantôt 
elle est très grosse et tantôt très réduite. Lorsque la 6° n'existe pas 
en dessus, on la perçoit quelquefois en dessous. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE s4i 


Le 6 août 1900, J'ai pris 80 spécimens dans la vallée de Saint- 
Vincent, entre 5 h. 1/2 et 6 h. 1/2 du soir. C’est un moment très 
favorable pour recueillir des Zygæna qui se mettent au repos pour 
la nuit, sur des tiges de graminées, sur des scabieuses, des fleurs 
d'origan ou encore sur les tiges de genêt. Il est rare d’en trouver 
dans d’autres conditions et notamment sur les fleurs de ronce que 
ces papillons affectionnent cependant beaucoup durant la Journée; 
elles ne dorment pas non plus sur les fleurs de chardon. Si l'on 
arrive dans une localité où 1l y a une certaine quantité de Zygena 
Dubia déja établies au repos pour la nuit, à $ heures du soir par 
exemple, et qu'un des individus s'envole, une véritable contagion 
de terreur s'empare du groupe; les vols deviennent presque una- 
nimes; toutes les Zygæna s'enfuient avec une surprenante rapidité. 
Mais lorsque tous les Papillons diurnes ont disparu et qu'il n'y 
a plus de soleil à l'horizon, les Zygæna ne jouissent plus d’au- 
cune activité et on peut les récolter à volonté, en les prenant par 
les antennes. En général, elles se posent la tête en haut contrai- 
rement aux Zycænde, et seulement quelquefois à plat sur les 
fleurs de scabieuse, mais toujours les antennes écartées, ce qui est 
l'inverse chez les petites Espèces : Alanis et Sarpedon par 
exemple, qui reposent toujours, ayant les antennes jointes et la 
tête en haut également. 

On trouve aussi bien des Q que des G' Pubia posés ainsi sur 
des tiges; J'ai remarqué que certains accouplements ne sont plus 
bien frais, ni pour le Œ n1 pour la ©, ce qui semblerait indiquer 
que l'accouplement des Q n’a pas lieu aussitôt après l’éclosion. 
On trouve les copulations dans les mêmes endroits que les exem- 
plaires isolés et très souvent l’un des deux exemplaires 27 copula 
a 5 taches, tandis que l’autre en a 6. On peut évaluer à un peu 
plus d’une dizaine pour cent le nombre des exemplaires à 6 taches 
dans la vallée de Saint-Vincent et dans la vallée de Vernet. 

Il est très remarquable de constater que chez Drbza les Aberra- 
tions sont excessivement rares, bien que les dimensions de cette 
espèce soient fort variables; seule, la grandeur des taches paraît 
varier, mais la confluence ne se rencontre que bien rarement. 


542 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


J'ai observé, dans un endroit où les Ascalaphes abondaient, que 
ces Névroptères faisaient une chasse acharnée aux Zygæna Dubia. 

Il n'est pas rare de voir, en regardant en l’a, des Zygæna 
Dubia volant à une grande hauteur relative, c'est-à-dire au-dessus 
des arbres. Elles sont poursuivies de très près par les Ascalaphes 
qui les pourchassent sans cesse. Je n'ai cependant jamais vu d’As- 
calaphe capturant une Zygæna, mais J'ai vu, à quelques minutes 
d'intervalles, des Zygæna serrées de très près par des Ascalaphes. 
On peut conclure que si les Ascalaphes mettent tant de persistance 
à poursuivre leur proie, c’est qu'ils réussissent parfois à s’en rendre 
maitres. Dans ce cas, le vol est droit et très rapide, mais Je pense 
bien que les Ascalaphes doivent voler plus vite que les Zygæna 
proportionnellement plus lourdes et moins agiles; car les Asca- 
laphes, dans le milieu du jour surtout, ne sont pas très faciles à 
Saisir. 

Bien que les A scalaphes soient très nombreux à Vernet-les-Bains 
et qu'ils fassent vraisembiablement une grande consommation de 
papillons, 1l semble rester toujours à Vernet une égale abondance 
de Lépidoptères et les Ascalaphes ne paraissent pas les détruire 
en nombre suffisant pour les raréfher. 

Dans la vallée de Cady, les fleurs de ronce sont très attrayantes 
pour les Zygænu Dubia et rien n’est plus curieux que de voir 
plusieurs exemplaires de Dybia sur une même tige fleurie, passer 
d'une fleur à une autre, puis céder la place à une nouvelle arrivante. 
C'est la mème chose dans la vallée de la Maggia, entre Locarno 
et Bignasco, où les Zygæna que je présume être Zoniceræ abondent 
sur les fleurs de ronces. » 


La Zygæna Stæchadis-Medicaginis des Alpes-Maritimes pro- 
duit des exemplaires tout à fait conformes à ceux des Pyrénées- 
Orientales que j'appelle Dubta. 

Le n° 160 de la PI. XXVIII du vol. IIT de Zépid. comparée en 
fournit la preuve. En effet, ce n° 160, qui provient du Moulinet, 
ne diffère guère du n° 170 capturé à Vernet-les-Bains. Mais la 
réciproque n'est pas complète. La Dubia des Pyrénées-Orientales 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 543 


n'a pas donné jusqu'ici, du moins à ma connaissance, la forme 
à ailes inférieures envahies par la couleur bleu indigo de la bor- 
dure, comme les n°* 157, 150 et même 158 qui proviennent tous les 
trois des Alpes-Maritimes. On peut donc dire avec vérité que dans 
les Pyrénées-Orientales et dans les Alpes-Maritimes, on trouve 
des individus de la Zygæna Dubia qui sont semblables entre eux, 
mais que dans les Alpes-Maritimes 1l se produit une évolution vers 
la mutation S/æchadis, par l’envahissement de la surface des 
ailes inférieures, au moyen de la couleur bleu indigo de la bordure 
qui tend à prendre un développement considérable, tandis que 
dans les Pyrénées-Orientales 1l y a plutôt la tendance inverse, 
c'est-à-dire vers le rétrécissement de la bordure bleu indigo des 
ailes inférieures. Les individus de Vernet-les-Bains figurés sous 
les n°* 169 et 170 représentent l'expression du grand développement 
de la bordure bleu indigo des ailes inférieures dans la forme des 
Pyrénées-Orientales et le n° 171 est, sous le rapport de ia bordure 
bleu indigo des ailes inférieures, la représentation de la forme la 
plus ordinaire. Cependant je possède 2 ou 3 G Dubia de Vernet- 
les-Bains ayant la bordure indigo un peu plus large que chez les 
n® 169 et 170. Ce sont des sujets rares et exceptionnels. 

Je dois ajouter d’ailleurs que si je n'ai pas eu connaissance 
jusqu'ici d’un exemplaire de Dybra des Pyrénées-Orientales, ayant 
les ailes inférieures envahies par la teinte bleu indigo, il ne s’en 
suit nullement que l'Aberration en question ne puisse pas se pro- 
duire aux environs de Vernet-les-Bains. Je considère même le fait 
comme probable, parce qu'il résulterait d'une Loi naturelle ne 
comportant sans doute pas d’exceptions. Cependant, on peut dire 
en toute vérité, qu'a Vernet-les-Bains, l'Aberration à ailes infé- 
rieures envahies par la teinte bleue, doit être excessivement rare, 
tandis qu'elle est très fréquente dans les Alpes-Maritimes. 


3° Seeboldi, Obthr.; Bilbao. 


Sur les bords de la mer cantabrique, M. Théodore Seebold, qui 
se livrait jadis à un important commerce d'armement au port de 


544 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Bilbao, récoltait en grande abondance une Zygæna qu'il appelait 
Ochsenheimer:. Je ne pense pas que ce nom-là puisse être exac- 
tement appliqué à cette forme géographique d’une Zygæna que 
je crois devoir plutôt rattacher à la S/æchadis. 


Elle est voisine de la Dybia des Pyrénées-Orientales; mais elle 
est de plus grande taille. Ses couleurs sont extrêmement vives; 
c'est une Zygæna à qui convient parfaitement la qualification 
allemande Zockgefaerbt (hautement colorée). Le fond noir à reflet 
verdâtre ou bleuâtre de ses ailes supérieures, en dessus, est très 
opaque; les taches rouges des supérieures sont au nombre de 5 
ou de 6, mais l’on remarque les transitions les plus insensibles entre 
la forme à 5 taches et celle à 6 taches bien accusées. Ces taches 
sont d’un carmin mat très pur et très vif, ainsi que le fond des 
ailes inférieures dont la bordure indigo est peu large, surtout 
chez les ©. 11 me semble que Seeboldi est une race géographique 
spéciale à laquelle ne convient aucune des dénominations déjà 
attribuées aux Zygæna du groupe de S/æchadis. Je lui ai donné 
le nom d’un très aimable et excellent compagnon de chasse avec 
qui J'ai bien des fois excursionné dans les Pyrénées. Sa collection, 
qui était fort belle, a été donnée au Musée de Madrid. 


4° Kindermanni, Obthr. Russie caucasique. 


Les collections Boisduval, de Graslin, Guenée, contiennent en tout 
9 exemplaires d’une forme de S/æchadis qui leur furent envoyés 
de la Russie caucasique, par Kindermann, voyageur entomologiste. 
Ces papillons sont certainement spécifiquement référables à S/æ- 
chadis. Is diffèrent seulement par leur taille un peu plus petite 
de la race de Catalogne. Le fond de leurs ailes supérieures est bleu 
ou vert luisant, mais avec une sorte d’atténuation grisâtre dans la 
nuance, ce dont les exemplaires des Alpes-Maritimes sont dé- 
pourvus. Les taches rouges sont très petites, au nombre de 5 sur 
les supérieures, d’un carmin vif et pur; les ailes inférieures sont : 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 545 


ou bien presqu’entièrement lavées d’indigo bleu, avec une ou deux 
éclaircies carminées, ou encore centralement d’un rose carminé, avec 
un entourage bleu indigo très large. 


En dessous, les taches sont, comme en dessus, sans trace de 
Nebelstreif et d’une coloration plus mate et plus faible qu'en 
dessus. 


C’est à cette race X2ndermanni que se rattache, sans autre diffé- 
rence qu'une taille un peu plus grande, la forme de Catalogne que 
feu Himmighoffen, récoltait aux environs de Barcelone, il y a une 
quarantaine d'années, et avait répandue dans les collections fran- 
çaises de ce temps-là. Rambur en a donné une excellente descrip- 
tion dans le Catal. systém. des Lépid. de l'Andalouste, p. 175. Je 
la transcris comme suit : « Ailes supérieures larges, d’un vert 
obscur parfois presque métallique, brillant, souvent chatoyant un 
peu en bleu, d’autres fois cuivreux, avec 5 taches rouges souvent 
très petites dont les deux basilaires assez courtes, des deux du 
milieu, la première très petite tendant à disparaître, la cinquième 
ronde un peu transversale, ne se dilatant Jamais, entourées de 
noirâtre, le plus souvent peu sensible; inférieures d’un rouge vif 
avec une bordure large, sinuée d’un noir bleu violâtre, envahissant 
souvent une grande partie de l’aile en suivant les nervures, ne 
laissant parfois qu'un petit point rouge en avant du sominet et 
un ou deux traits vers la base; dans ce cas, les taches des supé- 
rieures diminuant en proportion, l’on conçoit que le rouge puisse 
disparaître entièrement sur les deux ailes, mais d’abord aux infé- 
rieures; dessous différant peu, n'ayant Jamais les taches con- 
fluentes; franges de la couleur des ailes, luisantes, n'ayant pas 
de reflet roussâtre; corps de la couleur des ailes ou de leur bor- 
dure aux inférieures; pattes d’un noir verdâtre, un peu roussâtres 
à la face interne des tibias et des cuisses. 


Antennes à peu près comme chez la Flipendule, assez épaisses 
chez le mâle, avec la massue allongée, partant d'assez bas et se 


prolongeant en pointe avec le sommet un peu rouge obscur à la 
loupe. 


35 


846 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Elle diffère de la Medicaginis (*) en ce que le corps est toujours 
plus robuste et les antennes un peu plus épaisses, n'ayant Jamais 
de tache blanche au sommet, en ce que les ailes sont plus ai- 
guës, plus allongées, n’ont jamais six taches, ni en dessus, mi en 


dessous (**), que la tache postérieure médiane est placée moins 
en dehors et que le bord des franges n'est Jamais roussâtre; la 
bordure des inférieures, lorsqu'elle n’est pas très dilatée, est moins 
sinueuse. 

Elle a les mœurs de la 7/71:fol2 dont nous la croyons une 
race (***); elle habite les lieux humides, le bord des ruisseaux, 
les marécages. Je n'ai pas trouvé de différences sensibles quant à 
la chenille d'avec celle de la 77:folu; la chrysalide est souvent 
d'un brun roussâtre pâle; la coque, beaucoup moins jaune, est 
parfois couleur feuille morte, plus foncée d’un côté et plissée de 


la même manière. » 


Les figures 4, 5 et 6 de la PI. 107 de l’/conographie de Millière, 
publiées en 1860, peuvent être considérées comme représentant 


(*) Medicaginis, secundum Rambur, est Z'ansalpina, Esper. (II. XVI; f.). 

(**) C'est ce qui différencie la race S/æchadis-Kindermanni de la race 
Stæchadis-Medicaginis, Dup. (PI. VI; fig. 6); cette dernière ayant quelquefois 
6 taches en dessus comme en dessous; ou ayant $ taches en dessus ayec la 
b® visible en dessous; et encore ayant le Webelstreif ou confluence des taches 
rouges en dessous. 


\ 


(**#*) Je ne suis pas d'accord avec Rambur à ce sujet. Pour moi, S/æchadis 
est plus rapprochée de Zoniceræ que de Zrifolii. Je pense que Rambur a confondu 
la 7'rifolii d'Andalousie à ailes inférieures envahies par le bleu, avec la S/æchadis 
de Catalogne. Ce sont pourtant deux unités très distinctes. La figure 5 de la 
PI. I du Catal. stystém. Andal. représente plutôt, à mon sens, la 77ifoZä bleue 
que la S/æchadis. Je suis convaincu que Rambur a fait une erreur par confusion. 
D'ailleurs était-il lui-même bien fixé ? Sur la Planche 1, les fig. 5 (à ailes 
inférieures bleues), 6, 7 et 8 sont des Zygæna Trifoli, var. Dans le texte, 
les fig. 6, 7, 8 sont seules rapportées à 77ifolii (p. 177); mais bien qu'il soit 
fait mention à la page 175 de la fig. $ comme représentant le type de S/æchadis, 
il ne me semble pas possible que cette fig. s de la PI. 1 puisse représenter 
« les individus de Barcelone qui sont grands et bien caractérisés », que Rambur 
prend comme type et qu’il décrit très bien dans les termes que j’ai cru devoir 
rapporter. La fig. $ de la PI. 1 représente certainement une Zygæna Trifoli 
d'Andalousie; la figure en question est d’ailleurs loin d’être un chef-d'œuvre; 
mais elle ne peut être rapportée à S/æchadis de Catalogne. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 547 


d'une façon assez reconnaissable, la S/æchadis-Kindermanni, de 
Barcelone. 

On trouve quelquefois dans les Alpes-Maritimes des exemplaires 
de S/æchadis avant les taches rouges très légèrement entourées 
d’une nuance plus pâle, presque blanche. C’est une transition à la 
forme tyrolienne /zdicarie, Calberla, si J'en juge d’après la des- 
cription, car Je n’en connais pas encore de figure et je n'ai jamais 
vu d'exemplaires typiques de cette forme. 

Dans la XX° livraison des Æ£/udes d'Entomologie, publiée en 
mai 1806, J'ai commis des fautes par confusion entre S/æchadis 
et Zransalpina, Esper. Je n'avais pas encore débrouillé le malen- 
tendu qui existait dans les collections françaises au sujet de ces 
deux unités spécifiques. C'est plus tard que j'ai contribué à mettre 
cette question au clair, dans le Bulletin Soc. Ent. France, 1808, 
p. 22 et 23. 

L’Ab. jaune Borsduvali que J'ai figurée sous le n° 111 de la PI. 7 
de la XX°® livraison des Etudes d'Entomologie, en la rapportant 
à tort, dans ce temps-là, à S/æckadis, se rapporte réellement à 
Transalpina, Esper. J'en ferai de nouveau mention en traitant de 
Transalpina, Esper, dans le Vol. V, avec une figuration appropriée. 

Il y a, en effet, comme je l'ai déjà exposé en diverses occasions, 
2 Zygæna Transalpina bien distinctes : celle qu'Esper a fait 
connaître et qui est le type d’une Espèce très fertile en intéres- 
santes variétés et celle que Herrich-Schaeffer, Boisduval et Du- 
ponchel ont décrite et figurée et qui, dans certains cas, est la forme 
de S/æchadis, définie et analysée sous le nom d’OcAsenheimeri, 
ainsi qu'il suit : 


s’ Ochsenheimeri, Zeller. Sicile, Italie centrale: Montpellier. 


I s’agit de la Zygæna que Ferdinand Oschsenheimer a décrite 
en 1808, comme 7 7ansalpina, à la page 60 du Zweyter Band de 
l'ouvrage intitulé : Die Schmetterlinge von Europa. La description 
d'Ochsenheimer est conçue dans les termes suivants : « Z. atra, 


548 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


alis anticis nigrocyaneis, maculis sex connatis rubris, subtus con- 
fluentibus; posticis rubris margine sinuato cyaneo. » ia patrie 
indiquée est l'Italie et le sud de la France. La 7Z'ransalpina, se- 
cundum Ochsenheimer, a été figurée avec le même nom de 7 7an- 
salpina, par Boisduval, sous le n° 3 de la PI. 4 de l’Æssa? sur une 
Monographie des Zygénides; par Herrich-Schaeffer sous les 
n® 61 et 62 de la Tab. 8 de Zygœænides Europ.; par Duponchel, 
sous la fig. 1 de la PI. VI du Szpplément-Zigénides (sic). 

Dans la Zycæna Transalpina, secundum Ochsenheimer, Bois- 
duval, Herrich-Schaeffer et Duponchel, les deux sexes sont très 
différents, ce qui est un fait rare chez les Zygœna. Le C' a été 
figuré par Herrich-Schaeffer; la © par Boisduval et Duponchel. 
Je dois faire observer que dans la figure 62 donnée par Herrich- 
Schaeffer, le Nebelstreif qui pourtant existe dans la Nature, — 
plus ou moins accentué, il est vrai, mais cependant facilement 
perceptible, — n'a pas été représenté sur le dessous des ailes supé- 
rieures. Cependant la teinte du rouge dans laquelle 1l entre une 
partie de vermillon, la taille et la coupe des ailes, telles qu'elles 
sont représentées par Herrich-Schaeffer, se rapportent aux exem- 
plaires que j'ai sous les yeux. Le O' ressemble beaucoup à #1/1- 
pendule; il a la même forme d'ailes assez étroite et allongée; 1l 
montre aux supérieures six taches rouges, par paires assez régu- 
lièrement espacées; la bordure indigo des ailes inférieures n'est 
pas large ; la coloration générale n’est pas très vive. 

La Q a les ailes beaucoup plus aliongées et proportionnellement 
plus larges, sa taille est ordinairement bien supérieure à celle du 
Duponchel a figuré une © prise par lui-même tout près de la ville 
de Rome. La figure qu'il publie ressemble bien aux exemplaires 
rapportés de Sicile par feu Bellier de la Chavignerie. La forme 
de Montpellier diffère de celle de Sicile seulement par sa teinte 
rouge un peu plus pâle et moins vermillonnée. 

Pour éviter la confusion pouvant résulter dans la Nomenclature 
de la double application du même nom de 7 ransalpina à deux 
unités spécifiques distinctes du même genre Zygæna, Zeller a 


substitué le nom d'OcAsenheiment au nom Transalpina pour la 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 549 


Zygæna qui nous occupe. Le nom de Z'7ansalpina a été laissé à la 
Zygæna décrite par Esper, sous ce vocable, en 1770, d’après un 
échantillon qui lui avait été envoyé de Vérone. 

La Zransalpina, Esper, a été figurée malheureusement très 
grossièrement sous la lettre f de la Tab. XVI de l'ouvrage intitulé : 
Der europaeischen Schmetterlinge zweyter Theil. Dans le même 
ouvrage, le même Esper a représenté avec le nom de F/ipenduleæ- 
major, mais d'une façon tout à fait grossière également, sur la 
figure 4 de la Tab. XLI, une Zygæna qui est peut-être une © de 
la Z'7ansalpina, Ochsenheimer = Ochsenheimeri, ZLeller. 

IT est bien difficile de dire à quelle unité spécifique il convient 
de rapporter Ochsenheimer:. Est-ce à Stæchadis? Est-ce à Fili- 
pendulæ, comme l'ont pensé Staudinger et Rebel? OcAsenheimeri 
serait-elle même une Espèce propre? Il est présentement difficile 
de répondre à ces questions, en s'appuyant sur des raisons capables 
de fournir quelque certitude. 

Les Zygœna Trifolu, Lonicere Stæchadis, Filipendule, pré- 
sentent des formes très caractérisées et très distinctes les unes des 
autres, mais ces formes se trouvent reliées entre elles par des tran- 
sitions parfaites, et non seulement ces transitions unissent les 
diverses races et variétés de l’une des Espèces, mais encore elles 
unissent les Espèces elles-mêmes. Dès lors nous subissons un sen- 
timent de trouble dû à l'ignorance où nous restons encore des 
caractères particuliers, constants, spéciaux qui seraient réellement 
le propre de chaque unité spécifique et qui en établiraient l’incon- 
testable distinction. Les chenilles, les coques, certains insectes 
parfaits se ressemblent extérieurement; ces ressemblances ne nous 
facilitent pas l'exacte vision des choses. 

La situation se trouve donc comme suit : Si l’on fait abstraction 
des échantillons qui établissent les transitions et si l’on se borne 
à n'envisager que des séries bien sélectionnées de sujets caractérisés 
dans le sens spécifique qui paraît propre à chacun d'eux, on obtient 
la conviction que l’on se trouve en présence d'unités différentes 
les unes des autres et que dès lors la séparation et la distinction 
de ces unités s'impose. Mais si l’on considère les éléments de tran- 


550 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


sition qui ont tout au moins l'apparence de relier les unités entre 
elles d'une façon presque parfaite, l’opinion change. Deux sen- 
timents contraires animent donc l'esprit du Naturaliste aux prises 
avec l'étude de ces Zygæna; l'un tendant à la séparation des 
Espèces, Variétés, Races, par la constatation de caractères diffé- 
rentiels extérieurs tangibles ; l’autre opposé au premier et inclinant 
vers la réunion en une seule unité de toutes ces Espèces, Variétés 
ou Races, grâce aux échantillons transitionnels qui les unissent 
si intimement. | 

Je prends pour exposer plus clairement le sentiment de trouble 
et d'incertitude occasionné par les insensibles transitions au moyen 
desquelles une unité se trouve liée à une autre dans la Nature, le 
fait suivant que j'ai observé dans les Hautes-Pyrénées. 

J'ai sous les yeux 49 exemplaires de Zyzœna Lonicere pris par 
mon frère et par moi-même à Cauterets, entre l'Etablissement des 
bains de la Raïllère et la ville même de Cauterets. Pas un de ces 
49 exemplaires ne détonne au milieu des autres. Ils sont parfai- 
tement et semblablement caractérisés ; ailes relativement allongées ; 
antennes longues et terminées en pointe; aspect un peu mou; 
couleurs légèrement transparentes; 5 taches rouges aux supérieures, 
tant en dessus qu'en dessous; pas de trace de Webelstreif; le des- 
sous exactement conforme au dessus, sans indication d'un germe 
de 6° tache, mais avec l’atténuation du coloris, comme si le dessous 
des ailes n'était pas recouvert d'écailles et était seulement coloré 
par la transparence du dessus. À côté se trouvent rangées quatre 
colonnes d'une Zygena qui pourrait bien être Fzlipendule, con- 
tenant environ 75 exemplaires. Ceux-ci sont également bien 
caractérisés : forme des ailes plus raccourcie, teintes beaucoup 
plus vives et plus opaques; toujours 6 taches rouges aux supé- 
rieures, et en dessous un Webelstreif formant comme un lavis rose 
dans lequel se distinguent toujours en couleur plus vive et plus 
arrêtée les 6 taches rouges ordinaires. Mais entre les colonnes des 
49 Lonicere et des 75 Filipendulæ qui sont bien nettement carac- 
térisées et différentes les unes des autres, il y a la colonne des 


intermédiaires, au nombre de 15. Ce sont : soit des Zosicere chez 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 551 


lesquelles on aperçoit, en dessus comme en dessous, des vestiges 
de la 6° tache rouge, qui paraît naissante, soit des ##lipendule 
qui sont en train de perdre cette 6° tache rouge. Ces échantillons 
transitionnels ont un Mebelstreif de tansition comme les autres 
caractères et à toute cette colonne de 15 exemplaires formant la 
liaison quelquefois presque parfaite entre Lonicere et Filipendule, 
est joint l’accouplement d’une Zoxicere G ayant 5 taches rouges 
aux supérieures en dessus et en dessous — mais un Webelstreif 
bien apparent sur les dessous des ailes supérieures, tandis que le 
Nebelstreif semble nul chez les Zoniceræ pures — avec une Q 
Filipendulæ dont les 6 taches atteignent leur maximum de dimen- 
sion et d'éclat. Il est vrai que dans la même boîte Je vois un Œ de 
Zygœna Filipendule qui fut pris accouplé avec Procris Geryon ©, 
en juillet 1882, au même pays de Cauterets. Les accouplements 
hybrides sont-ils la cause de l’apparition de ces papillons tran- 
sitionnels entre deux Espèces dont l’ensemble des exemplaires 
considérés comme de race pure, paraît bien nettement distinct ? 
Je ne le saurais dire. Je m’efforce de constater des faits réels et 
j'avoue ne savoir quelle conclusion en retirer pour rester parfai- 
tement véridique, ce qui est mon seul souci. 

Les hypothèses qui ont la prétention d'expliquer des phéno- 
mènes naturels, peuvent être le produit d’une imagination riche et 
féconde, mais il est prudent de se défier des théories, si sédui- 
santes qu’elles soient, lorsqu'elles ne reposent pas sur un fond de 
vérité bien authentiquement acquise. Aussi je me rappelle la parole 
de Fuessly : Quantum est, quod nescimus! et je la répète auJour- 


d’hui. j 


6 Anceps, Obthr. Bouches-du-Rhône et Var. 


On trouve à Hyères, à la Sainte-Baume, à Saint-Zacharie, à 
Montrieux, à Saint-Pons, en juin, puis en septembre, une race 
extrêmement énigmatique de Zygæna. Certains exemplaires sont 
très petits, notamment ceux qui sont récoltés en septembre; d’autres 
sont de très grande taille, Les uns ont 5 taches rouges aux supé- 


Lise LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


rieures, comme 7 7:folu et Lonicere auxquelles ils ressemblent très 
bien; les autres ont 6 taches, comme Fzlipendule, dont il est 
difficile de les séparer; mais il y a des échantillons avec la 
6° tache naissante et présentant le développement insensiblement 
graduel de cette 6° tache. Le fond des ailes supérieures est moins 
opaque et moins brillant que chez S/æchadis-Medicaginis des 
Alpes-Maritimes ; les ailes inférieures sont peu largement bordées 
d'indigo, les taches des ailes supérieures et les ailes inférieures sont 
d'un rose carminé assez vif, mais pas du ton carminé pur de 
Stæchadis; en dessous, le VNebelstreif existe, mais dans des degrés 
d’accentuation très divers. 

On pourrait classer d'une façon satisfaisante certains exem- 
plaires avec Flipendule, d'autres avec Zrifoli ou Lonicere; 
toutefois, ce dernier triage serait plus embarrassant à faire que le 
premier, mais, quel sort donner aux échantillons intermédiaires ? 
Il est évident que toutes ces Zygæna, grandes et petites, à 5 et 
à 6 taches rouges, ayant les couleurs plus ou moins claires ou 
foncées, la frange même des supérieures tantôt indigo et tantôt 
presque d’un gris Jaunâtre, s’accouplent ensemble, se mélangent 
intimement et constituent, dans les mêmes lieux où elles habitent, 
une seule unité de Race, de Variété ou d'Espèce. Je l'ai appelée 
Anceps, pour exprimer mon sentiment à son égard, au moyen de 
ce seul mot qui la distingue des autres races avec lesquelles je ne 
vois pas de similaire exactement conforme, du moins 54 j'envisage 
l'ensemble de ses exemplaires; car dans cent autres lieux bien 
éloignés de la Provence on trouve des Zonicere, des Trifolu et 
des l1lipendule, avec lesquelles on ne pourrait discerner aucune 
différence sensible entre certaines Zygæna anceps des Bouches- 
du-Rhône et du Var et ces diverses Zygæna. 

Seulement il faudrait, dans une série certainement homogène par 
ses origines et par ses parentés, c’est-à-dire au milieu de nombreux 
exemplaires de Zygæna récoltés aux mêmes lieux dans les Bouches- 
du-Rhône ou le Var et frayant constamment ensemble, sélec- 
tionner arbitrairement des sujets dont on ferait ensuite la ré- 
partition dans des unités distinctes. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Lie 


Le classificateur aurait pour guide l’impression que produirait 
sur ses yeux chaque échantillon comparé à d’autres sujets faisant 
partie de groupements différents, constitués avec des spécimens 
capturés dans des contrées très diverses. Ces Zygæna des Bouches- 
du-Rhône et du Var subiraient ainsi une dissociation qui pourrait 
les éloigner considérablement les unes des autres et je pense que 
cette classification artificielle serait en désaccord avec les indi- 
cations fournies par la Nature elle-même. Voilà pourquoi J'ai 
retenu toutes ces Zygæna de Provence, bien que présentant entre 
elles des différences individuelles, dans la même unité de race 
que J'ai appelée Aceps, et telle est la raison pour laquelle je me 
suis abstenu de disperser et d’éparpiller toutes ces Anceps, estimant 
qu'il était plus conforme à la réalité de maintenir les races ou 
formes locales groupées géographiquement pour l’ensemble des 
individus qui les composent. 


Zygæna Filipendulæ, Linné. 


Linné a dénommé le Sphinx Fuipendulæ dans la X° édition 
du Systema Nature, mais le même Auteur, dès 1746, avait décrit 
l’'Espèce dans la Fauna Suecica, à une époque où la Nomencla- 
ture binaire n'était pas encore pratiquée et où les Papillons ne 
recevaient pas de désignation spécifique. Je transcris ci-dessous 
la première description latine de Linné; elle porte dans la Fauna 
Suecica, 1746, le n° 814. 

« Phalæena subulicornis spirilinguis; alis superioribus subcæ- 
ruleis : punctis sex rubris, inferioribus omnino rubris; Habitat 
in Filipendula, volitans de die, licet tarde. 

Descr. Puppa intra folliculum membranaceum flavum latitat. 
Phalæna mas gaudet maculis sex rubris in ala exteriore, fœmina 


vero macuhs quinque (*) connatis scilicet duabus baseos. — Corpus 


(*) Linné avait sans doute en vue Zoniceræ qu'il considérait comme la @ de 


Filipendule. 


554 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


et artus nigra, vestita lana nigra. Antennæ antrorsum ascendentes, 
versus summitatem sensim latiores (non tamen clavatæ) ad apicem 
attenuatæ ac depressæ. Alæ superiores ex viridi-cæruleo nitentes : 
punctorum tribus paribus ovatis coccineis, alæ inferiores coccineæ 
margine cæruleo nitido. » 

Linné dit : « Habitat in Filipendula. » Les vieux auteurs 
Sulzer, Schaeffer, Roesel von Rosenhof cent répété l'indication 
donnée par Linné. Cependant, en France, nous ne trouvons pas 
la chenille de la Zygæna Filipendule sur d’autres plantes que sur 
des Papilionacées, telles que : 7Z7ifolium pratense, Lotus corni- 
culatus, Onobrychis Sativa, Anrthyllis vulneraria. J'ignore toute- 
fois si, en Suède, la Zygena Filipendule vit effectivement sur Ja 
plante à laquelle le Lépidoptère doit son nom spécifique. La 
Spirea Filipendula, Linné, est une plante vivace de la fanulle des 
Rosacées, haute de 30 à 60 centimètres, répandue dans les bois et 
les prés calcaires; elle porte des fleurs blanches ou rougeûtres et 
offre, dit l’abbé Coste, des tubercules d'un goût agréable, comes- 
tibles et astringents. 

La Zygœna Filipendule est une Espèce fort commune; elle est 
répandue dans les Iles britanniques, en France, en Allemagne; elle 
se rencontre au bord de la mer, dans les plaines et sur les mon- 
tagnes. 

Dans l'ouvrage intitulé : Die Kennseichen der Tnsekten nach 
Anleitung des Küônigl. Schwed. Rütters und Letbartzts Karl 
Linnaeus, publié à Zurich, chez Heidegger und Comp, daté de 
1761, la Zygœna Filipendule est décrite et représentée par Sulzer, 
comme suit (p. 37 et Tab. XV, fig. o1) : « Abendvogel, die obern 
Fluegel tuerkisfaerbig mit sechs rechten Punkten : Die untern 
ganz roht (sic). Filipendule Linn. Syst. Nat.; Sphinx, 32. Wobnt 
auf dem rothen Steinbrech (Spiræa flipendula). » 

Jacobus Christianus Schaeffer, en 1766, dans les Insecta Ratis- 
bonensia, a figuré sous les n° IV et V de la Tab LXIX, la Zygena 
Filipendule; Roesel von Rosenhof, sous les n°* 2, 3, 4, 5 et 7 de 
la Tab. LVII (Classis IT. Papilionum Nocturnorum), a représenté 
la chenille, la coque, la chrysalide et le papillon, — les ailes 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 555 


étendues (fig. 5) et en mouche (fig. 7), — du Sphinx Filipendula 
(sic), der Steinbrecher-schwaermer; die Bockhorn-Phalaene; der 
Rothfleck; die Zirkelmotte, tous noms vulgaires allemands de la 


Zygæna Filipendule (voir Insecten-Belustigung, p. 289). 


Jan Christiaan Sepp a consacré à la Zygœna Filipendule la 
Tab. XXII de Nacht-Vlinders (van't Tweede Gezin der Eerste 
Bende) de son bel ouvrage consacré à la description et à la figu- 
ration des WMederlandsche Insecten, qui fut commencé à publier 


à Amsterdam en 1762 (Gedrukt voor den Auteur) et qui a été 


où 


continué jusqu'à nos jours. Sepp représente l'œuf (fig. 1 et 2); 
la chenille (fig. 3 et 4); la coque (fig. 5 et 7); la chrysalide (fig. 6) 
et le papillon (fig. 8 et 0). La figuration est bonne, mais elle n'a 
pas la valeur exceptionnelle et qui n’a jamais été surpassée, d’un 
certain nombre des premières Planches. 


La Zygœena Filipendulæ est, je pense, l’espèce la plus ancien- 
nement connue du genre et, avec Peucedani qui diffère par son 
anneau abdominal rouge et Æp/ialtes, elle paraît avoir été la plus 
anciennement figurée. 


Parmi les modernes qui ont représenté Æ/ipendule, je citera 
Charles Barrett qui consacre toute la Planche 60 de son ouvrage 
sur les Papillons anglais, à la figuration de l’Espèce. Les n° 1 
et 1 a représentent la forme normale; le n° 1 & : l'Ab. à taches 
et ailes inférieures noires, dite CÆrysanthemi,; les n° 1 c et 1 4 
l'Ab. flava; les n° 1 e et 1 f : des Aberrations tendant au brun 
clair (1 e) et au rose pâle (1 f); le n° 1 g : l’Ab. à taches confluentes 
depuis la base jusqu’à l'extrémité de la dernière tache; le n° 1 % : 
l'Ab. avec 4 taches seulement, par le fait de la suppression de la 
tache basilaire inférieure et de la tache médiane inférieure des 
ailes supérieures, en dessus; le n° 1 Æ représente un échantillon 
singulier avec une aile inférieure supplémentaire, ayant donc 
5 ailes au lieu de 4. Les n°* 1 2 et 1 7 sont consacrés à la représen- 
tation de la chenille et de la chrysalide. Charles Barrett a ainsi 
fourni une documentation illustrée très considérable de la Zygæna 
Filipendulæ des Yes Britanniques. 


556 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


En Angleterre, la Æ#/pendulæ porte, d'après Wood (/ndex 
methodicus, 1845, p. 11), le nom vulgaire de 6-spotted Burnet; 
Wood dit que Æ#1pendulæ habite « Fields and meadows by 
woodsides, in Middlesex, Devonshire, S. Wales, etc.; June and 
July. » Cet auteur figure Flipendule sous le n° $ a + de la PI. 4 et 
la variété à taches et à ailes inférieures jaunes, sous le n° 6 a de 
la même planche, avec le nom de Æippocrepidis et le nom popu- 
laire anglais (exglish name) de Narrow-bordered 6-spot Burnet. 
Ce mot Burnet qui signifie en anglais pimprenelle, est appliqué 
par Wood à toutes les espèces du genre Zygæna (Anthrocera, 
secundum Wood). 

C’est un curieux ouvrage, celui de Wood (*). Le but de l’Auteur 
fut d’incorporer dans un volume in-octavo un catalogue illustré 
de tous les Lépidoptères connus comme habitant la Grande-Bre- 
tagne, mais 1llustré avec des figures réduites de taille, cependant 
gravées et coloriées avec un soin tel que chaque Espèce serait 
toujours parfaitement reconnaissable. Pour guider les Entomolo- 
gistes dans l'appréciation de la taille naturelle des divers insectes 
qui sont tous figurés avec la même dimension, sans égard pour 
leur grandeur réelle et relative, une lettre de l'alphabet et un signe 
sont ajoutés à chaque numéro de référence qui se trouve gravé 
près de chaque papillon. C'est ainsi que la lettre 4 indique un 
insecte grand d'un pouce un quart, et que la lettre 4, suivie du 
signe +, indique un pouce et demi; tel est le cas de la Zygæna 
Filipendule, tandis que la variété jaune ippocrepidis n'est 
grande que d’un pouce et un quart, etc. C'est très bizarre de voir 
sur la même Planche l’Acerontia Atrofos réduite à la même 
dimension que la Procris Statices, mais le dessin, la gravure et le 
coloriage sont très bons et l'ouvrage en lui-même est fort inté- 
ressant et contient une série de figures qui sont en effet parfai- 


tement reconnaissables. 


(*) L'exemplaire que je possède et qui faisait partie de la bibliothèque de 
feu Guenée, porte une dédicace signée : « Henry Doubleday December 6th 1852; 
To Mons. A. Guenée, from his sincere and grateful Friend. » 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 557 


Les Microlépidoptères notamment sont parfaitement traités. 
Un supplément à l'ouvrage de Wocd fut publié par feu mon 
honorable ami \Vestwood, en 1854. 

Un auteur anglais contemporain, connu pour son talent ana- 
lytique et la richesse de sa documentation, J. W. Tutt, dans Île 
Vol. I de À Natural History of the british Lepidoptera, publié 
en janvier 1890, a consacré les pages 507-538 à l’histoire des 
Anthrocera Fiipendulæ et Hippocrepidis, Stephens; celle-c1 pa- 
raissant être une forme anglaise de /1pendule. 

Je me suis efforcé de me documenter aussi largement que pos- 
sible au sujet de la Zygœna Filipendulæe anglaise et ce sont les 
variétés britanniques de cette Espèce que je vais d’abord étudier, 
me référant à l'ouvrage de Tutt, mais n'étant cependant pas tou- 
Jours d'accord avec lui. 

Par exemple, Tutt dit que « Pathological leucochroism also 
occurs, a failure of pigment sometimes resulting in aberrations 
similar to Ab. grisescens, Obthr. » Je sais fort bien qu'une déco- 
loration peut intervenir chez Filipendulæ, comme dans Æborace, 
pour Loniceræ, par manque ou insuffisance pathologique du pig- 
ment. Mais tel n'est point le cas pour l’Ab. anglaise grisescens 
que j'ai fait figurer sous le n° 135 de la PI. 8 de la XX° livraison 
des Ætudes d'Entomologie. Cette Ab. grisescens (que M. Tuttn'a 
probablement jamais vue en nature) est tout à fait comparable à 
l'Ab. Huebneri du Polyommatus Phleas. Le fond de ses ailes a 
été atteint d'albinisme sans que les écailles aient été diminuées 
pour cela de nombre ou d'épaisseur. Les écailles se trouvent 
comme dans les individus normaux, sauf qu'elles sont colorées 
en gris argenté, au lieu d’être d’un bleu verdâtre ou d'un vert 
bouteille. Les antennes, sauf à la massue et à la pointe qui sont 
restées noires, sont devenues grises; le thorax, l'abdomen, en 
dessus comme en dessous, sont gris; le fond des ailes supérieures 
et la bordure des inférieures sont d’un gris argenté très opaque 
et les écailles sont très denses et très serrées. L’Ab. grisescens a 
conservé ses parties rouges colorées avec l'intensité ordinaire, mais 
un albinisme très intéressant a atteint toutes les parties qui sont 


558 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


normalement d’un bleu verdâtre ou noires. Cet albinisme est fort 
rare; l’exemplaire que je possède provient de la collection Prest, 
d'York. L’albinisme inverse est celui qu, respectant les parties 
vertes et noires, c’est-à-dire le fond des ailes supérieures, la bor- 
dure des ailes inférieures, les antennes, la tête et le corps, se déve- 
loppe au détriment des parties rouges, qui sont changées en jaune 
ou en rose orangé pâle. 

Ma collection contient actuellement 6 /1pendule anglaises de 
l'Ab. 2ntermedia vel aurantia, Tutt (p. 510 et 511), venant 
d'Harwood et peut-être de Colchester; celles-ci de la coll. Maddi- 
son, les autres des collections Tugwell et Sheppard; mais jusqu'ici 
J'ai réuni, en outre, 21 exemplaires de l’Ab. fava, dont J'ai fait 
figurer un échantillon, sous le n° 133 de la PI. 8 de la XX° livrai- 
son des Ætudes d'Entomologie. Ces 21 Ab. flava viennent de 
Wortham, July 1808 (ex coll. Maddison); Cambridge (Inghsh, 
1892; ex coll. Tugwell); ex coll. Shearwood, vendue le 23 nov. 
1801; Gates (1872, bred; ex coll. Howard-Vaughan); Winchester 
(ex coll. Raynor, vendue 27 oct. 1801); Harwood (1892, ex coll. 
Tugwell) ; Hartlepool (ex coll. John Sang, of Darlington) ; Hud- 
dortfield (1877, ex coll. Battershell-Gill) ; ce nom de localité étant 
toutefois difficile à lire et peut-être, à cause de cela, mal transcrit; 
je regrette de ne pouvoir déchiffrer pour les exemplaires de la 
collection Goldthwait, vendue le 5 octobre 1900, l'étiquette de 
localité. 

Inversement aux Ab. 2x/ermedia, aurantia, flava, qui sont des 
manifestations par albinisme, on trouve chez Filipendulæe l'Ab. 
par mélanisme, CÆrysanthemi, chez laquelle toutes les parties 
rouges ont été remplacées par une teinte brun noir. J'ai fait figurer 
cette Aberration sous le n° 134 de la PI. VIII de la XX° livraison 
des Etudes d'Entomologie. Cette Ab. CArysanthemi a été figurée 
sous le n° 1 de la PL 1 de l'ouvrage de Moritz Balthasar Bor- 
kausen, intitulé : Naturgeschichte der europaeischen Schmetter- 
linge et publié à Francfort en 1788 ou 1780, et sous le n° 1 de la 
Tab. XXXVII de la seconde partie de l'ouvrage d’Esper, d’après 


un exemplaire communiqué par l’avocat Schneider, de Stralsund. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 559 


D'ailleurs, c'était le même Regierungs-Advokat Schneider qui 
avait fait part à Borkausen de la découverte de la Zygæna CAry- 
santhemi dont il avait capturé presque chaque année quelqu'exem- 
plaire, en compagnie du commun S/eënbrechschwacrmer où ZYy- 
gena Filipendule, aux environs de la ville de Séralsund. On trouve 
quelquefois l’'Ab. CArysanthemi aux environs de Paris, mais c'est 
toujours une très grande rareté. 

Les Ab. albinisantes avrantia et flava offrent une curieuse par- 
ticularité, c’est de sembler tendre à la mélanisante Chrysanthemi 
dont elles sont pourtant la contre-partie. En effet, quelques-uns 
des exemplaires appartenant à l'Ab. Java, aussi bien qu'à l'Ab. 
aurantia, ont les ailes rembrunies, de manière à former comme 
une transition à CArysanthemi. Ma collection contient un échan- 
tillon de Rouen et un autre d'Angleterre (ex coll. Howard- 
Vaughan) ayant le fond des ailes inférieures et les taches des 
supérieures de couleur rose semblant enfumée et deux d’Angle- 
terre, de la collection Sheppard, d’une teinte brun clair mélangée 
d'ocre jaune et semblant se rapprocher de CArysanthemt. 

j'ai fait figurer sous le n° 132 de la PI. VIII de la XX* livraison 
des Etudes d'Entomologie une Aberration confluens, dont je pos- 
sède o exemplaires bien semblables entre eux. L'un d'eux vient de 
Rouen (H. Lhotte), les 8 autres sont anglais. 

Ces Aberrations confluentes que de Selys-Longchamps a ap- 
pelées bipuncta pour les distinguer de celles où la confluence des 
taches rouges est générale, ont seulement la tache basilaire infé- 
rieure rouge et la tache médiane inférieure réunies. La confluence 
n’atteint pas la tache externe inférieure qui reste très nettement 
séparée de la tache médiane inférieure alors que celle-ci forme, 
à partir de la naissance des ailes, avec la tache basilaire, un long 
trait rouge. La tache basilaire costale supérieure ne joint ordinai- 
rement pas la tache médiane cellulaire, parce qu'elle ne fait pas 
partie du même espace intranervural. Ma collection contient un 
seul exemplaire anglais de l'Ab. communimacula de Sélys. Il 
provient de la collection William Machin et présente la confluence 
de la tache rouge médiane cellulaire et de la tache rouge externe 


560 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


supérieure, sans que la tache basilaire et la tache médiane soient 
jointes ensemble. En Bretagne et en Charente, la confluence des 
taches rouges chez 'ilipendule se fait tout à fait autrement. Très 
souvent, les taches rouges se joignent par paire, notamment les 
deux taches rouges externes qui ne forment plus qu'une grosse 
macule à tendance cordiforme; c'est l’Ab. Cytisi, Huebner, mais 
quelquefois aussi une sorte de lavis rouge recouvre plus ou moins 
totalement l’espace compris entre les 3 groupes de 2 taches rouges et 
forme, depuis la base jusqu’à l'extrémité des 2 taches externes, une 
longue et large macule rouge unique, c’est la véritable Ab. confluens. 

Je ne parle pas des cas de décoloration pathologiques fréquents, 
desquels 1l résulte que sur l’une des ailes inférieures et quelquefois 
sur les deux, une pâleur jaunâtre, grisâtre ou même blanchâtre 
remplace la vive couleur rouge normale. 

La plus brillante race française de /’1pendule est, à ma 
connaissance, celle de la Charente-inférieure. Tandis qu'en Bre- 
tagne }lipendule éclôt depuis le 15 juillet au 10 août, à Dom- 
pierre-sur-Mer, on la trouve abondamment dès le mois de mai. La 
couleur rouge est particulièrement vive dans les Charentes et les 
exemplaires à taches confluentes y sont relativement nombreux. 
Ma collection contient une vingtaine d'individus offrant les plus 
intéressantes variations. Le grossissement des taches rouges amène 
le rapprochement ou même la jonction desdites taches; mais il y 
a des exemplaires dont les ailes supérieures sont tellement cou- 
vertes d'écailles rouges que la teinte vert bronzé du fond n'est plus 
guère apparente que vers l’apex et le long du bord inférieur. 
La symétrie n'est généralement pas parfaite entre les deux côtés 
des ailes supérieures, dans ces échantillons extraordinairement 
confluents. La coloration rouge fait l'effet d’être partie de la base 
et d’avoir envahi la surface des ailes supérieures par le semis pré- 
pondérant du pigment carminé qui recouvre tout ou partie de 
l'espace normalement occupé par la teinte vert bronzé du fond. 
Ces Zygœna Fulipendule Ab. confluens, de Dompierre-sur-Mer, 
sont vraiment superbes et elles constituent à peu près pour 777. 
pendulæ ce que l’Ab. #zl1osa du même pays fait pour A2ppocre- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 561 


pidis. Il y a par année 2 éclosions de Filipendulæ dans les régions 
qui donnent une apparition printanière de l'Espèce, car M. H. Po- 
well a capturé Filipendulæ le 27 septembre 1904, à Carqueiranne 
(Var), et M. Dayrem en automne, à Lectoure, et dans ces deux 
contrées, on peut récolter des FZlipendulæ dès la fin de mai. La 
Zygœna Filipendulæ vole en mai et juin à Aix-en-Savoie; en 
mai à Angoulême; en Juillet dans les Alpes-Maritimes (Saint- 
Martin-d'Entraunes); en juin à Samoussy (Aisne); en Juillet dans 
les Alpes et en Bretagne. Dans la Charente-Inférieure, le We- 
belstreif est extrêmement accusé sur le dessous des ailes supérieures. 

Herrich-Schaeffer a figuré sous les n°* 100 et 110 de la Tab. 16 
de Zygeænides Europ., le Set la © d’une Zygæna qu'il appelle 
Manni et qui est considérée comme la forme alpine de Fulipendule. 
Le coloris rouge, aussi bien que le fond des ailes vert bouteille ou 
bleu verdâtre, sont d'un aspect plus pâle que chez la ##2pendule 
des plaines. La forme de la Charente-Inférieure et de la Lozère 
notamment est tout à l'opposé, par l'éclat de sa teinte, de la race 
alpine Manni. J'ai capturé Manm, en juillet, à Zermatt et sur la 
route du Simplon. Le Webelstreif, sur le dessous des ailes supé- 
rieures, est relativement très faiblement indiqué chez Manm; déjà 
la forme de l'Isère (Bourg-d'Oisans, Uriage), sans être aussi 
accentuée que la forme du Valais, au point de vue de l’atténuation 
de l'éclat des couleurs, présente au même degré que la race valai- 
sanne, la réduction, sinon même la suppression du Webelstreif. 
J'ai sous les yeux des Zygæna Filipendulæ prises dans l'Isère par 
feu Guenée et par moi; ces papillons ont en dessous les taches 
rouges du dessus reproduites sur un fond bleu et presque sans 
qu'aucun lavis rouge vienne les Joindre ou les entourer. Il n'y a 
pas lieu d’attacher à l'absence ou à la présence du Webelstreif plus 
de valeur que ce détail n’en comporte; cependant on doit en tenir 
compte dans la juste mesure; au point de vue de la classification 


des races, c’est un caractère incontestablement intéressant. 


Staudinger et Rebel, dans leur Catalog 1901, ont considéré 
Ramburi Herr. Schaeff. et Lederer, Gurda, Lederer et Syrzaca, 


36 


502 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Obthr., comme trois synonymes d’une même variété de F#/1pen- 
dule. J'ai déjà fait remarquer à la page 46 (note) de la XX° li- 
vraison des Ætudes d'Entomologie que Ramburi, Herrich-Schaeffer 
(Weue Schmetterlinge, fig. 161 et 162) n'était pas la même espèce 
que la Zygena Ramburi, Lederer (Wiener entom. Monatschr., 1861, 
af. 1, fig. 10). En conséquence comme le même nom ne peut pas 
convenir à deux Espèces différentes dans le même genre, Jai 
donné le nom de Syriaca à la Ramburi, sec. Herrich-Schaeffer et 
j'ai fait figurer, à l'appui de mon observation, Syrzaca sous les 
n° 136, 137 et 138 de la PI. 8 de la XX° livraison des Efudes 
d'Entomologie; le n° 136 représente Syriaca quinquemaculata; 
le n° 137 figure Syriaca-sexmaculata, conforme à la figure 161 
d'Herrich-Schaeffer, et le n° 138 représente l'Ab. Confluens, 
également figurée par Herrich-Schaeffer sous le n° 102. La 
Mersina, Herrich-Schaeffer (n° 163), est la même espèce que 
la Gurda, Lederer (Wiener entom. Monatschrift, 1861; Taf. 1, 
fig. 0). Mais nm Ramburi, Lederer, ni Syriaca, Obthr. (Rambuni, 
H. S.), ni Gurda, Lederer (Mersina, H. S.) ne paraissent être des 
formes ou variétés de Filipendule, ainsi que Staudinger et Rebel, 
dans leur Catalog 1001, l’ont fait imprimer certainement par 
erreur, et qu'on me permette d'exprimer toute ma pensée, par une 
erreur commise en parfaite connaissance de cause (*), ce qui est 
raisonnablement inexplicable. 


Je me demande non seulement comment Staudinger et Rebel 


(*) Une de ces erreurs énormes, commise volontairement par Staudinger et 
Rebel, est celle qui existe à l’art. 4175 (p. 365) du Catalog 1go1. Il s'agit de 
Phragmaiobia Leprieuri, Obthr., mise en synonymie de Pramatobia Breveti, 
Obthr. J'avais communiqué à Staudinger, sur sa demande, le type de Brevet; 
d'autre part, il connaissait parfaitement Zeprieuri, dont le DT Seriziat lui avait 
fourni des exemplaires pris à Collo. Comment est-il possible qu'un Entomolo- 
giste, ayant quelque expérience de la distinction des Espèces, puisse spécifique- 
ment réunir Æreveti et Leprieuri, même avec un point d'interrogation ? 

Une délicieuse cacophonie est aussi celle qui distingue le genre O7rAodia, dans 
le Catalog Staudinger et Rebel 1901, aux pages 208, 209 et 210. Il semble que 
les Auteurs du Catalog ont goûté une délectation particulière, en offrant à leurs 
Lecteurs, à propos du genre Orrodia, une collection d'erreurs et de confusions 
qui parait constituer le record dans un ouvrage où les fautes ne sont pourtant 
pas l’exception; hélas! 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 5063 


peuvent considérer Lamburi, Gurda, Syriaca comme appartenant 
à une même unité, alors que des différences si constantes et si tan- 
gibles les séparent les unes des autres, mais encore d'après quels 
principes ces Auteurs érigent une Unité en Espèce séparée ou la 
rabaissent au simple titre de Variété. Le n° 4353 du Catalog 1001 : 
Lederer: Stgr. (Laphria, in texto, H. S.) est inscrit à titre d'Espèce; 
mais 1l suffit d’avoir des yeux pour constater que Zedereri (Laphira, 
H. S, fig. 108) est bien plus près de Æzipendule que Gurda, dont 
les ailes sont beaucoup plus allongées que Syriaca et que Ramburi. 
Il n'y a donc pas eu unité dans les vues et dans la conception, ni 
le moindre esprit de suite pour déterminer la ligne de conduite qui 
guidait les Auteurs du Catalog. Tout paraît livré au hasard ou 
bien à fantaisie du moment. Ici, une différence légère et même 
contestable suffit pour valoir la séparation spécifique; là, malgré 
les différences les plus notables et les plus certaines, la séparation 
spécifique n’est pas admise et l'inscription comme simple Variété 
est adoptée. C'est vraiment dommage qu'un travail aussi consi- 
dérable, qui aurait pu rendre de si grands services, ne soit que le 
propagateur d'un si grand nombre d'erreurs, malheureusement 
acceptées sans contrôle et de confiance par la plupart des Ento: 
mologistes ! 

Je pense donc qu’il y a réellement 3 Espèces de Zygæna de 
Syrie, à distinguer, ainsi que Je l'établis sur un tableau qui est 
imprimé un peu plus loin et qui définit exactement la question 
telle que je la comprends. 

Il convient même d'ajouter à ces 3 Espèces de Zyz2æna, de Syrie, 
une 4° espèce syrienne que J'ai appelée Rosa et que J'ai fait figurer 
sous les n° 106 et 107 de la PI. XXII du IIlI° Volume de la 
Lépidoptérologie comparée. 

Ces 4 Espèces de Zygæna se trouvent dans la région d’Akbès 
où Ch. Delagrange chassa pour nous, durant la saison 1890. Le 
Frère Philippe nous a aussi envoyé d'importantes collections for- 
mées dans cette localité très riche et sur laquelle feu le savant 
abbé Armand David avait, le premier, appelé l'attention des Natu- 
ralistes. 


564 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Voici donc cemment il y a lieu, suivant mon appréciation, de 
définir la synonymie des Zygæna syriennes dont il vient d'être 
question et de les séparer spécifiquement entre elles : 


1°} Syriaca, Obthr., Etud. d'Entom, XX* liv. (page 46, note). 
| forma Syriaca-sexmaculata, Obthr. (loc. cut, PI 8, fig. 


137). 
Ramburi, Herrich-Schaeffer (Neue Schmett., fig. 


161), nec Lederer. 
forma Syriaca-sexmaculata-confluens, Obthr. (loc. «tt. 
P18, 9. 130): 
Ramburi, Herrich-Schaeffer (loc. cif., fig. 102). 
forma Syriaca-quinguemaculata, Obthr. (loc. «it, PI. 8, 
fig. 136). 
Région d’Akbès (Ch. Delagrange, été 1890; 27 coll. 
Obthr., 18 spécim.); Antiochia (Lederer, sec. Herr.- 


SchHaeit, Loc CT, pa) 


2°  Ramburi, Lederer (Wiener entom. Monatschr. Bd. V, 1861 ; 
Taf. 1, fig. 10), nec Herrich-Schaeffer. 

Région d'Akbès (Ch. Delagrange, été 1800; an coll. Obthr.); 
Antiochia (Cotyp. ex Lederer; #7 coll. Bellier, de Graslin, 
Boisduval) — (2x coll. Obthr., 8 spécim.). 


3°: Gurda, Lederer (Wiener entom. Monats. Bd. V., 1861; Taf. 1, 
fig. O, p. 152). 
— Mersin, sec. Lederer. 

Mersina, Herrich-Schaeffer (Neue Schmett., p. 32, fig. 163) — 
« Mersin, 7 Kleinasien, durch H. Lederer erhalten »; Herr.- 
Sch p.22 

Région d'Akbès (Ch. Delagrange, été 1800 et Frère Philippe; 
in coll. Obthr., 17 spécim.). 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 565 


4 Rosa, Obthr. (Etud. Lépid. compar, Vol. I, PI. XXII, fig. 
106, 107). 
Région d’Akbès (Ch. Delagrange, été 1890; 27 coll. Obthr., 


15 spécim.). 


Syriaca, Obthr. (Ramburi, H. S. nec Lederer) est une Espèce 
de grande taille, d'aspect un peu lourd et robuste. Le fond des 
ailes supérieures et la bordure des inférieures, en dessus, est d’un 
noir indigo ou légèrement verdâtre, luisant; les taches rouges, au 
nombre de 6 ou de 5, sont de nuance carminée assez vive, ainsi 
que les ailes inférieures. Les antennes et le corps sont d’un noir 
indigo. Les pattes sont très longues avec le revers des premiers 
articles d’un brun jaunâtre. Il n'y a pas de Webelstreif sur Île 
dessous des ailes supérieures, chez 15 exemplaires; dans 2, le 
Nebelstreif est équivalent à celui qui est représenté sur la fig. 161 
donnée par Herrich-Schaeffer; le Nebelstreif est très accentué dans 
l'Ab. confluens. 

Syriaca est sûrement une Espèce distincte de }#ipendule, la- 
quelle Filipenduiæ se trouve également en Syrie. J'en possède une 
paire récoltée à Berut-Dagh, par Ch. Delagrange, en juillet 1800. 
Ce sont bien, des Filipendulæe chez lesquelles dans le groupe des 
2 taches rouges externes, les taches en question sont très rapprochées 
et confluent même, tandis que dans Syrzaca les mêmes taches sont 
bien plus nettement espacées. Il y a des Syriaca © dont la taille 
égale celle des OcAsenheimert. 


Ramburi, Lederer (nec Herrich-Schaeffer) et Gwrda, Lederer 
(Mersina, H. S.), sont remarquables par la teinte rose de leurs 
taches et de leurs ailes inférieures. Il en est de même chez la nou- 
velle Espèce que j'ai appelée Rosa, à cause de cette coloration par- 
ticulière. Gurda a les ailes allongées et les deux taches externes sont 
confluentes et forment un cœur; la bordure des ailes inférieures 
est sinueuse, de largeur inégale; le fond des ailes supérieures est 
d'une teinte indigo avec reflet d'acier, peu opaque et relativement 
claire. 


566 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Chez ÀRamburi, Lederer, la bordure des ailes inférieures est 
étroite et régulière; les 2 taches externes des ailes supérieures, en 
confluant, ne prennent pas un aspect cordiforme. 


Quant à Àosa, c'est une Zygœna dont le Œ a les ailes courtes 
et l'abdomen proportionnellement très long. Depuis la base, jusqu’à 
l'extrémité de la grosse tache externe qui semble unique et non 
pas formée de la réunion de deux macules, c’est un lavis rose 
répandu sur presque toute la surface des supérieures, paraissant 
un peu fondu, c’est-à-dire n'étant pas nettement défini dans ses 
limites et contours. Une partie du bord costal, l'extrémité apicale 
et le bord inférieur des ailes supérieures restent seuls non envahis 
par la couleur rose et d’un indigo assez pâle. En dessous, l’aspect 
de l'aile supérieure uniformément lavée de rose est le même que 
l'effet de l’aile inférieure qui est semblablement colorée. Il y a un 
trait hyalin partant de la base, sur les ailes inférieures de Xosa. 
Ce trait n’a pas été ménagé par le coloriste de la PI. XXII de mon 
ouvrage. Chez Syriaca, Ramburi, Gurda et Rosa, V'abdomen est noir, 
sans trace d’anneau rouge, de même que chez 7rifolu, Lonicere, 
Stæchadis et Filipendulæe dont j'a1 toujours vu l’abdomen noir, 


sans ceinture rouge, ni tendance à produire des variétés cn gulata. 


La figuration donnée par Herrich-Schaeffer et par Lederer est 
excellente et l'identification des Espèces ne fait aucun doute. 


Je ne pourrais attribuer le même éloge à la figuration publiée 
par Seitz. Cet Auteur donne de Àamburi une détestable figure. 
Du reste 1l ne semble pas que ia question relative aux Espèces 
Syriaca, Ramburi, Gurda lui ait été connue. 


Zygæna Ephialtes, Linné. 


Espèce très anciennement connue et remarquablement poly- 
morphe; ainsi décrite dans le Tom. I, Pars V, de la 13° édition 
(aucta, reformata) de Caroli a Linné Systema Nature, publiée par 
les soins de Jo. Frid. Gmelin et imprimée à Leipzig, en 1788 : 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 507 


« Ephialtes (*) 36. Sphinx. Zygœna. Cyanea, alis primoribus 
punctis sex rubris : posterioribus unico, abdomine cingulo rubro. » 

Cette description est suivie de l'observation qui concerne la 
variété B : Spinx Coronille. Wien. Schmetterl., p. 45, n° 7 et que 
je transcris : « Habitat in Europæ magis australis medicagine, 
punctis interdum albis, aut baseos alarum primorum abdominisque 
cingulo flavis. Larva pilosa, flavescens : capite, pedibus lineisque 
duabus flavis. » (Je crois que le mot : fais est un lapsus-calami 
commis par l’Auteur. Il aurait fallu écrire : a/ris.) 

Enfin la Bibliographie relative à l'Espèce est citée, telle que Je 
la rapporte : 


Fabr. Species Insectorum; Hamburgi et Kilonu, 1781 (Dans le 
Sp. Insectorum se trouve reproduite (p. 158) la diagnose de Linné, 
à laquelle Fabricius a ajouté l'observation suivante : « Variat 
punctis albis, baseos tamen semper aut rubra aut flava »). 

Wien. Schmetterl., p. 45, n° 6, Sphinx falcate. 

V. Scheven, Naturf, 10, t. 2, f. 7. 

Fuessli, Ent. Mag., t. 1, f. F. 

Bsper pap. 2, t 27, f3. 


11 n'est pas question dans cette synonymie de l'ouvrage de Roesel 
qui a pourtant connu, avant les autres, l’une des formes de la 
Zygœena Ephialtes. 

En effet, Roesel a figuré sous les n°* 6 et 7 de la Tab. LVII 
(Classis IT Papilionum nocturnorum) dans l'Insecten-Belustigunsg, 
la forme d'Ephialtes à 6 taches rouges sur les ailes supérieures et à 
ailes inférieures rouges (Pezcedani, Esper), à laquelle Kleemann, 
dans la Note imprimée au bas de la page 280, donne le nom 
vulgaire de Rothringel; Rothguertel; Guerleltraeger,; ce qui veut 
dire : Petit-anneau-rouge; Ceinture-rouge; Porte-centure. 

Von Scheven, cité parmi la Bibliographie d'Ephialtes, Linné, 


(*) Ephialtes, dans la Fable, est le nom d’un Géant fameux, fils de Neptune 
et d’Iphimédie. Les deux frères Ephialtes et Othus sont appelés, par Homère, 
les Aloïdes. Fiers de leurs forces, ils entreprirent de détrôner Jupiter; mais ils 
furent précipités dans le Tartare. 


568 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


par Gmelin, dans Der Naturforscher (Zehntes Stueck, 1777) décrit 
(page 95) le Spzinx Ephialtes et en donne une excellente figure, 
sous le n° 7 de la Tab. IT; il y a lieu de remarquer la pupillation 
carminée qui est indiquée par le coloriste sur les 4 taches blanches 
des ailes supérieures de l’Ephialtes représentée. C’est sans doute 
d'accord avec la description linnéenne qui a soulevé bien des objec- 
tions de la part de von Scheven, Fuessly et Esper. Von Scheven 
considère Peucedani comme pouvant être le G' d'Ephialtes, car il 
dit : « Das Maennlein unterscheidet sich von dem Sphinx Fili- 
pendule bloss durch den rothen Guertel, womit der Leib umgeben 
ist. » Von Scheven ajoute d’ailleurs qu'il tient le papillon figuré 
par Roesel sous le n° 6 de la Tab. 57, comme le O' de son Æfzialtes. 
Ce n’est donc pas d’hier seulement que l’unité spécifique d'Efphialtes 
et de Peucedani est reconnue. Mais von Scheven discute la des- 
cription linnéenne « alis primoribus punctis sex rubris, posterioribus 
unico. » [Il ne trouve pas la tache unique sur les ailes inférieures, 
quand il y a 6 taches rouges sur les supérieures. 

Gmelin ne mentionne pas Jacobus Christianus Schaeffer qui, dix 
ans plus tôt, en 1766, avait figuré sous le n° 1 de la Tab. LXXI, la 
Zygæna Peucedani désignée ainsi : « Sphinx alis integris cauda 
simplici guinta. Fuenfter Daemmerungsfalter mit ganzen Fluegeln 
und eimfachem Schwanze »; le même auteur représente sous les 
fig. III et IV de la Tab. CLXV, la Zygœna Efhialtes-Trigonelle, 
avec l’abdomen annelé de jaune et $ taches sur les ailes supérieures. 

Johann Caspar Fuessly a été cité par Gmelin, aussi bien que von 
Scheven, parmi les Auteurs qui s'étaient, à sa connaissance, occupés 
d'Ephialtes. Dans Magazin fuer die Licbhaber der Entomologie 
(Erster Band, 1778), Fuessly a effectivement figuré admirablement 
sous la lettre F de la Tab. 1, la Zygæna Efhialtes ©, à 6 taches 
aux ailes supérieures, dont les 2 basilaires rouges et les 4 autres 
blanches plus ou moins légèrement pupillées de carmin. De même 
que von Scheven, J. C. Fuessly se trouve embarrassé par les termes 
de la diagnose linnéenne. Fuessly expose que le Pastor von 
Scheven, dont la compétence en Entomologie ne fait de doute pour 
personne, dit dans Waturforscher, X, p. 06, que la description de 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 509 


Linné paraît concerner le G' d’Efhialtes. Cependant le Œ doit 
avoir les ailes inférieures rouges sans taches et Linné dit expres- 
sément que les ailes en question doivent être noires avec une tache 
blanche (Inferiores nigræ puncto albo). La question est traitée tout 
au long par Esper aux pages 148-151 de la 2° Partie. Esper cite 
le texte de Linné de la XII° édition du Sys/ema Nature où se 
trouve pour la première fois, je crois, imprimée la description 
d'Ephialtes. 

Je ne puis qu'inviter le Lecteur à se reporter à toute cette dis- 
cussion des anciens Auteurs, au sujet des textes linnéens. IT est 
très intéressant de se rendre compte d’une part, du trouble qui 
existait déjà dans la Nomenclature lépidoptérologique, à la fin 
du XVIIT* siècle et, d'autre part, de la peine que prenaient tous 
les Auteurs de ce temps-là, pour essayer d’élucider les textes 
obscurs. 

Je crois, pour ma part, que Linné a décrit un exemplaire de 
la Zygena Ephaltes, ayant les taches qui sont ordinairement 
blanches, exceptionnellement pointillées d'une forte pigmentation 
carminée. On trouve cette forme à Martignv, en Valais et j'en ai 
fait figurer un échantillon sous le n° 26 de la PI. IIT de la première 
livraison des Ætudes de Lépidoptérologie comparée. Tes figures 
publiées par von Scheven et par Fuessly portent la trace de cette 
pigmentation carminée, mais à un degré insuffisant pour justiher 
la constatation de 6 taches rouges aux ailes supérieures, ainsi que 
l’a écrit Linné. Il me semble que très probablement -— mais sans 
aucune certitude cependant —— [inné a possédé un exemplaire 
extraordinairement rouge, ce qui est fort possible, si l’on considère 
les individus de cette forme qu'on rencontre surtout en Valais, 
tandis que ni von Scheven, ni Fuüessly, ni Esper n’ont connu la 
variété valaisanne d’Epzialtes, à taches carminées aux supérieures 
et que Wullschlegel dit provenir de l’accouplement hybride de 
Filipendule S et Ephialtes © à taches blanches. 

Quoi qu’il en soit, si l’on compare les figures de Zygæna gravées 
à la fin du XVIII siècle, à celles qui sont publiées maintenant en 
chromolithographie, dans l'ouvrage : Les Macrolépidoptères du 


570 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Globe, par Adalbert Seitz, ou bien dans /akresbericht des Wiener 
entomologischen Vereines, 1003, par Clemens Dziurzynski, on ne 
peut s'empêcher de reconnaître la supériorité considérable des an- 
ciens Iconographes sur ces modernes. 

Ayant déjà écrit dans le fascicule I des Æ£/udes de Lépidopté- 
rologie comparée (mars 1004), aux pages 43-51, une Notice détaillée 
sur certaines particularités de Zygœna Ephaltes et Ab. Sophie, 
Favre, de Martigny (Valais) dont j'ai publié 3 figures, sous les 
n°” 25, 20 et 27 dela Pl IIT, je ne puis quinviter le Pecteuraise 
reporter aux pages précitées et Je m’abstiens de répéter ici les 
observations que J'ai déjà exposées. Je me bornerai donc à faire 
connaitre les formes françaises d'Ephialtes et à établir la nomen- 
clature des variétés de l’Espèce, telles qu’elles me paraissent résulter 
de nos connaissances actuelles. 


I — Æphialtes, Linné. 


Ailes d’un noir bleuâtre; 6 taches rouges aux supérieures ; 
1 tache blanche aux inférieures ; abdomen annelé de rouge 
carmin. 

Valais ? 


14 { Scheveni, Obthr. 
Ephialtes, von Scheven (Naturforscher, 10" Stueck, 1777; 
Tab. 2, fig. 7, p. 05, 06). — Fuessly (Magazin, 1778; Tab. 1, 
fig. F). 

Diffère d’'Epaialtes, Linné, parce que les ailes supérieures, 
au lieu d’avoir 6 taches rouges, ont deux taches rouge 
carmin à la base, et au delà 4 taches blanches plus ou moins 
légèrement pupillées de rouge carmin. Schkevent est la tran- 
sition entre Æphialtes, Linné et Æsperi, Obthr. 


10 ( Æsperi, Obthr. 
E phialtes, Esper (Tom. II, Tab. XVIII, fig. 3). 


Diffère d’'E phialtes, Linné et de Schkevem, Obthr., parce 
que les 4 taches externes des ailes supérieures sont d’un 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 57I 


blanc pur, sans pupillation carminée; les 2 taches basales 
et l’anneau abdominal restant d’un rouge carminé. 
Pont-du-Gard; Autriche. 


1 Sophie, Favre (Faune Macrolépid. Valais, 1800, p. 75) ; Obthr. 
(Lépidoptér. comparée, Liv. 1, PI. III, fig. 25, 26, 27). 

Aïles supérieures avec les 2 taches basilaires d’un rouge 
carmin, les 4 autres blanches ou pupillées de rouge (hybride 
de Fiipendule Set Fphialtes (Espers, Obthr.) © secun- 
dum Wullschlegel; ailes imférieures avec 2 taches blanches 
au lieu d’une; abdomen ceinturé de rouge carmin. 


Martigny (Valais). 


12( Medusa, Pallas (*). 
Falcatæe, Huebner (fig. :33). 


Diffère de Esperi, parce qu'au lieu de 4 taches blanches 
externes aux ailes supérieures, 1l n’en reste que 3. 

On trouve au Moulinet (Alpes-Maritimes) une très Jolie 
variété de Medusa, chez laquelle la tache basilaire inférieure 


(*) Voici le texte de la description de Pallas, telle qu’elle est imprimée dans 
l'Appendix — Descripliones fugitive animalium alque plantarum, annis 1768 
et 1769 observatorum (Vol. I; p. 733). Edition des Voyages de Pallas, en diffé- 
rentes provinces de l'Empire de Russie et dans l'Asie septentrionale, traduite de 
Pallemand, par Gauthier de la Peyronie, Commis des Affaires Etrangères; Paris, 
1788, chez Lagrange. « 67. Sphinx Medusa. Magnitudo et facies SH4. Phegce, 
tota atra-cærulea, nitidissima. Abdomen cingulo carmineo; alæ concolores, pri- 
mariæ maculis 2 orbiculatis et puncto disci albis; ocello ad basin rubro, intra 
circulum album, maculaque oblonga in crassiore margine rubra. Secundariæ 
puncto unico albo, sed exteriore margine griseæ. Habitat in Af*amanta cer- 
varia. » — (Afhamanta est une plante de la famille des Ombellifères). — 

A la page 310; 1769, 18 juin, ruisseau de Zarbaï et Markofka, Pallas parle 
de Medusa, dans les termes suivants : « Nous traversimes des landes élevées, 
sèches et arides: je n’y trouvai d’autres plantes que le mélilot jaune et la sca- 
bieuse d’un jaune pâle (Scabiosa ochroleuca) dont les feuilles larges et fendues 
étaient remarquables. Près de Markofka, on entre dans des bas-fonds variés et 
des forêts qui abondent en plantes. J'y trouvai le faux turbith des montagnes 
(Cervaria alba) qui avait plus de cinq pieds de hauteur; il a souvent une double 
couronne de fleurs. Elles étaient entourées d’insectes; les plus remarquables 
étaient le papillon Apollon et le sphinx Méduse (Spiërx Medusa); Appendix 
HONG 7)... 


07e LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


est d’un blanc pur, alors que la tache basilaire supérieure 
reste d’un carmin très vif. Chez les individus bien frais, 
l'extrémité des antennes est blanche. 

Alpes-Maritimes; Pyrénées-Orientales, dans la vallée du 
Cady, au-dessus du village de Casteil. 


1e Æmiln, Favre (Faune Macrolépid. Valais, 1800, p. 75). 


Diffère de Medusa, parce qu'il y a 2 taches blanches au 
heu d’une sur les ailes inférieures. 
Martigny (Valais). 


1/ falcate, Obthr. (Etudes d'Entomol., XX, pl. 7, fig. 113). — 
nec Huebner. 


Diffère de Medusa, parce que les 3 taches blanches des 
ailes supérieures sont fortement pigmentées de rouge carmin. 
Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales). 


18 Wadlschlegeli, Obthr. (Lépidopt. compar., Liv. III, PI XXIX, 
fig. 176). 

Entièrement d’un bleu noir; a perdu toutes les taches aux 

4 ailes, sauf les 2 taches médianes blanches des supérieures 


qui sont de taille réduite. 
Valais. 


14 Coronille, Esper (Tom. Il, Tab. XXXIII, fig. 2). 


Les taches de la base et l'anneau abdominal sont de couleur 
Jaune, au lieu d’être d’un rouge carmin. Les ailes supérieures 
ont, en outre des 2 taches basilaires jaunes, 4 taches blanches. 

Autriche. 


17 Tngonelle, Esper (Tom. II, Tab. XX XIII, fig. 3 et 4). 


Diffère de Coromlle, parce qu'aux ailes supérieures il y a 
3 taches blanches au lieu de 4. 
Autriche; Piémont. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 573 
[I —— Transition entre Zphialtes, dont le fond des ailes inférieures 
est d'un noir bleu, et Peucedani, dont le fond des ailes infé- 


rieures est rouge. 


24 Metzgeri, Hirschke (XIV. /ahresb. d. Wien. ent. Ver. 1903, 
Het nr?) 

Les taches des ailes supérieures sont au nombre de 5; 
les 2 taches basilaires sont carminées; les 3 taches externes 
ont le fond blanc plus ou moins fortement pigmenté de 
carmin; les ailes inférieures ont la base lavée de rose et une 
tache ronde de couleur rose carminée, vers l’angle apical; 
l'abdomen est annelé de carminé. 

Haute-Autriche, Moyenne et Basse Carinthie; d'après 
Hanns Hirschke, K. K. Hauptmann a. D. (loc. cit, p. 57). Je 
possède un d' de Gallicie (ex coll. Kuwert). 


21 Aurantiaca, Hirschke (XIV. /akresb. d. Wien. ent. V’er., 1003, 
BARRE SE): 

Les ailes supérieures scnt d’un bleu noir, avec les 2 taches 
basilaires rose carmin et les 3 (ou 4) taches externes blanches 
pigmentées de rose; les ailes inférieures sont largement 
bordées d’indigo noir, avec un lavis rosé s'étendant depuis la 
base et rayonnant sur la partie antérieure de la surface des 
ailes. L’abdomen est annelé de rose. 

Hochschwab-Gebiete, selon Hanns Hirschke. 

Je possède une Q de la coll. Kuwert, de Berlin, sans indi- 
cation de localité. 


III. — Le fond des ailes inférieures est rouge, orange, jaune, ou 
même partiellement blanchâtre. Tous les passages, les plus 
insensibles existent du blanc jaunâtre au rouge, par le jaune, 
l'orange, le blanc pigmenté de rouge ou d'orange et le rouge 
vermillon. 


3m Æacus, Esper (Tom. Il, Tab. XXXIIL, fig. 1). 
Les taches basilaires sont jaunes, les taches externes sont 
blanches ou jaunes et au nombre de 3; les ailes inférieures 


574 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


sont jaunes, avec une tache ronde blanchâtre, vers l'angle 
apical; l'anneau abdominal est jaune. 
Environs de Vienne. 


3* Zcterica, Lederer; Dziurzynski (XIV. /akresb. d. Wien. ent. 
Ver, 1903, Taf. Il, fig. 10); Æacus, Huebner (Lésd., MW; 
Sphinges, l; fig. 18). 

Les taches basilaires sont jaunes; les taches externes sont 
blanchâtres (Huebner) ou jaunes (Dziurzynski), mais au 
nombre de 4 et non de 3, comme chez Æacus, Esper; les ailes 
inférieures sont Jaunes, largement bordées de noir indigo, 
avec une simple éclaircie un peu plus pâle vers l’angle apical, 
au lieu d’une tache arrondie blanche, comme chez Æacus, 
Esper. L'anneau abdominal est jaune. 

Environs de Vienne. 


30 Adalbert, Obthr. (/c/erica, Adalbert Seitz;, Zygœna, Pi. 6 b). 

Il est aisé, en comparant les 2 figures d’/cterica, selon 

Datursynski (loc. cit.) et selon Adalbert Seitz, de constater 

qu'il n'y a aucune similitude entre l’/c{erica d'après l’un et 
l’/cterica d’après l’autre. 

L’Zcterica, selon Seitz, est une variété à ailes orangées dont 
les ailes inférieures sont très peu largement bordées de noir 
indigo, tandis que cette bordure est très large dans l'/c{erica 
selon Dziurzynski, qui a les ailes jaunes. 

Tcterica, selon Seitz, a l'abdomen annelé de rouge, mais 
l'anneau abdominal d’/c/erica, selon Dziurzynski, est jaune. 
Du reste les 2 Zczerica existent dans la Nature; ma collection 
contient un certain nombre d'exemplaires de l’une et de l’autre 
et ces exemplaires sont respectivement conformes aux ñgures 
grossières données par les deux Auteurs, mais reconnaissables 
toutefois. 

J'ai appelé: Adalberti Y'Icterica figurée par Adalbert Seitz, 
dans la colonne à de la PI. 6 de Zygæna. Il est fort regret- 
table que M. Seitz ait travaillé à la légère et sans prendre la 
peine d'étudier attentivement les textes et les figures déjà 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 575 
 —  _— 
publiés. Ce qu'il donne comme Æacus, dans la colonne a de 
la PL 6 de Zygzæna, avec 6 taches aux supérieures et des 
traces de coloration rouge, n'est nullement la vraie Æacus 
qui n’a aucun vestige de rougeûtre et qui est nettement jaune, 
avec 5 taches. Il suffit de se reporter à l'ouvrage d'Esper, 
créateur d'Æacus, pour se rendre compte de l'erreur. L’Ay- 
rantiaca figurée par le même Seitz, dans la colonne ? de la 
PL 6 de Zygœna, n’est pas davantage l’Awranriaca, de 
Hirschke. Là encore, il n'y a qu’à ouvrir le /akresbericht des 
Wiener entomologischen V'ereines, n XIV, année 1003, et de 
regarder la figure 11 de la Taf. II, pour se rendre compte 
que l’Awrantiaca, Hirschke, avec 5 taches, n'a aucune SIMI- 
litude avec l'Awrantiaca, selon Seitz, qui a 6 taches et dont 
les ailes inférieures sont rouges avec une bordure noirâtre 
peu large, tandis que dans lAwrantiaca, Hirschke, les ailes 
inférieures très largement bordées de noir indigo, présentent 
seulement un lavis de rose orangé répandu sur la surface des 
ailes, rapprochée de la base. Si les Auteurs modernes qui 
doivent tendre à une analyse toujours plus exacte, et qui 
publient des ouvrages populaires, accréditent les erreurs avec 
un tel sans-gêne et une pareille profusion, que deviendra 
la Nomenclature? Nul n'est obligé d'écrire quoi que ce soit 
à propos des Sciences, mais si quelqu'un entreprend de coo- 
pérer à l'instruction de ses contemporains, il semble que le 
premier de ses devoirs est de prendre la peine de recourir 
aux sources. Dans la circonstance, c'était facile. Les fautes 
sont inévitables, je le sais, et quiconque prend un rôle actif 
de quelque nature que ce soit, ne tarde pas à vérifier à ses 
dépens la vérité de la sentence : Æyrare kumanum est. Hélas ! 
les hommes sont sujets à l'erreur et ils ne peuvent éviter 
absolument de la commettre, mais au moins qu'ils s'efforcent, 
par tous les moyens possibles, de réduire au minimum les 
chances d'erreur auxquelles 1ls sont exposés. 
Donc, M. Adalbert Seitz a accumulé les fautes et les 


Entomologistes devaient en être informés, ahn de leur per- 


570 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


mettre de les éviter eux-mêmes dans la détermination de 
leurs Zygæna. 
La forme A dalberti se trouve à Digne, à Meran, à Wachau; 


les exemplaires des Basses-Alpes sont bien pareils à ceux 
d'Autriche. 


32 pallens, Obthr. 


Les ailes inférieures sont nettement rouges; aux supé- 
rieures il y a 5 taches; les 2 de la base sont roses; les 
3 autres sont blanches, quelquefois légèrement pigmentées de 
rose. L’anneau abdominal est rouge. 

Digne; Pont-du-Gard; Florac; Vienne; Wachau. 


34 pallida, Obthr. 


Diffère de pallens, parce qu’il y a aux supérieures 4 taches 
blanches ou blanc faiblement rosé, au lieu de 3. L’anneau 
abdominal est rouge. 

Wachau; Digne. 


37 Athamante, Esper (Tom. II, Tab. XXXVII fig. 6). 


Toutes les 5 taches des ailes supérieures sont rouges, ainsi 
que les ailes inférieures; la bordure indigo de celles-ci est 
régulière et peu élargie; l'anneau abdominal est rouge. 

France, dans les parties calcaires du centre et du midi; 


Allemagne; Bohême. 


35 Peucedant, Esper (Tom: II, Tab. XXV/h6°). 


Toutes les 6 taches des ailes supérieures sont franchement 
rouges, ainsi que les ailes inférieures qui sont d'un rouge 
assez vif avec une bordure indigo, comme chez A/kamante ; 
l'anneau abdominal est rouge. Esper a figuré la prétendue 
chenille de Peucedani sur une plante de la famille des Om- 
bellifères, d’après le dire de Pallas, le célèbre voyageur russe, 
qui raconte avoir trouvé la chenille en question sur le Peuce- 
danum, dans les steppes de la Russie méridionale. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 577 


Voici le seul renseignement que j'ai trouvé à l'égard d’'Epialtes 
(mais non de la forme Peucedani), dans les Voyages de Pallas 
(Tome I, p. 270) : « 1769, 10 mai, Sizran; .. Ces plantes étaient 
pleines d'insectes, et ils se rassemblent le soir sur les boutons des 
fleurs de la Centaurée double. Les plus remarquables sont la Sau- 
terelle Nymphe à taches doubles et le papillon la Phrynée. Plu- 
sieurs grandes places étaient couvertes de queue-de-pourceaux 
(peucedanum germanicum) sur laquelle je trouvai un grand nombre 
de petites chenilles qui produisent le Spinx incube (Sphinx 
Eplaltes). » 

Je ne crois pas que chez nous la larve de la Zygæna Ephialtes 
vive sur une Ombellifère, cette chenille semble vouloir manger 
plutôt les plantes de la fanulle des Papilionacées et notamment 
la Coronilla vania, à fleurs assez grandes, panachées de blanc, de 
violet et de rose, formant des sortes d'ombelles sur des pédoncules 
qui dépassent les feuilles. La Corolla varia se trouve dans les 
bois et les coteaux pierreux, surtout calcaires, de presque toute la 
France, de l'Europe centrale et méridionale, de PAsie occidentale 
jusqu’à la Perse, d’après l'Abbé Coste. 

Du reste, la chenille figurée par Esper ne doit pas être celle 
d'Ephialtes, elle est blanche et ne ressemble guère à celle qui est 
figurée comme étant celle de Peucedani, dans la Collection [cono- 
graphique des Chenilles par Boisduval, Rambur et A. Graslin. La 
chenille d'Ephialtes-Peucedani est entièrement d’un jaune pâle 
tirant plus ou moins sur le vert, avec une raie longitudinale noire 
et deux rangées latérales de taches noires et la tête noire, comme 
la décrit du reste Gmelin, sauf qu'il faut lire noires, au lieu de 
jaunes, ainsi que je l'ai fait observer plus haut. 

En France, d’après ce que je connais, la Zygœæna Ephialtes a été 
rencontrée dans les localités suivantes et avec les formes ci-dessous 
désignées : 

Environs de Digne : Peucedant, Pallida, Pallens, Medusa, À dal- 
berti, Scheveni. 

Alpes-Maritimes (Moulinet) : Medusa et var. à tache inférieure 
basilaire blanche. 


37 


578 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Isère (Vizille) : A/zamante. 

Charente-[nférieure (Dompierre-sur-Mer) : A/kamante. 

P yrénées-Orientales (Vernet-les-Bains) : Hedusa, Falcate. 

Gard (Pont-du-Gard) : Pallens, Peucedant, Esper:. 

Allier (Vichy) : Peucedan. 

Lozère (Florac) : A/4amanitæe, Peucedani, Pallens. 

Haute-Savoie (Val du Fier) : Peucedant. 

Seine-et-Oise (Lardy) : Peucedani Q trouvée accouplée avec 
Filipendule S, Pailens. 


Zygæna Transalpina, Esper. 


Je prie le Lecteur de vouloir bien se reporter à l’article intitulé : 
Observations sur la Zygæena Transalpina, Esper, que J'ai fait 
insérer dans les Annales Soc. ent. France, 1907. 

Dans ce travail, j'ai établi qu'il y avait deux races distinctes 
de la Zransalpina, la race italienne généralement caractérisée par 
l'absence de lavis rougeâtre, ou Webelstreif, sur le dessous des 
ailes supérieures, et la race française chez laquelle, au contraire, le 
dessous des ailes supérieures est largement lavé de rouge. 

Précédemment, dans le Bulletin Soc. ent. France, 1808, j'avais 
distingué (p. 22 et 23) la forme transitionnelle des Alpes-Mari- 
times, sous le nom de #aritima. 

Cette année 1910, le comte Emilio Turati, l’'éminent entomo- 
logiste milanais, a publié sous le titre: La Zygena Transalpina, 
Esper, e Le sue forme italiane, un travail de 31 pages paraissant 
très complet et concluant à une analyse de 30 formes italiennes, 
toutes pourvues d'une désignation. 

Sans doute le comte Turati publiera une Iconographie des 
formes italiennes de la Zygæna Transalpina qui achèvera de 
donner à son étude l'autorité que lui vaut déjà la compétence et 
la riche documentation de son auteur. 

En ce qui me concerne, fidèle à ma doctrine, qui est d'éclairer 
toute description par une figure, après avoir décrit dans le Bulletin 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 579 


(1898) et dans les Annales de la Société entomologique de France 
(1907), certaines formes françaises de la Zygæna Transalpina, j'ai 
consacré la PI. XXX des Æfudes de Lépidoptérologie comparée à 
la figuration des diverses races et variétés françaises de la Zygæna 
en question. L'explication des figures de la PI. XXX est donnée 
sur la référence (p. 414 et 415) du Vol. IIL. 

J'ai, pour le moment, peu de chose à ajouter à ce que le comte 
Turati, pour les races italiennes, et moi-même, pour les races fran- 
çaises, nous avons publié jusqu’à ce jour sur la Zygœna Transalpina. 

Je dois cependant rectifier une erreur que J'ai commise en attri- 
buant à S/æchadis, l'Ab. Boisduvali, provenant, je crois, de feu 
Achille Costa, de Naples, et que j'ai fait figurer sous le n° 111 de 
la PI VII de la XX® livraison des Ætudes d'Entomologie. Cette 
Ab. Borsduvali doit être référée à 7 ransalpina et non à S/æchadis. 
Je ne connaissais pas, en mai 1806, l’histoire de la Zygæna 
Transalpina, comme J'ai appris à la connaître plus tard en réu- 
nissant près de 3,000 exemplaires non seulement français, mais 
aussi italiens de cette Espèce. MM. Zickert et Fabresse m'ont 
notamment bien documenté sur la forme jaune Borsduvali de 
Transalpina et jai pu constater une fois de plus combien il était 
facile de se tromper, lorsqu'on dissertait sur une documentation 
insufhsante. J'ai donc fait une faute et J'accomplis le plus élémen- 
taire des devoirs en faisant l’aveu pur et simple de mon erreur. 

À propos du nom avec lequel il convient de désigner la forme 
cisalpine (diesseits der Alpen) de la Zygæna Transalpina, je crois 
devoir donner les indications suivantes résultant de l'étude des 
textes et des figures publiés par les anciens Auteurs. 

Il y a longtemps, en effet, qu’on a remarqué une Espèce différente 
de Flipendulæe, quoique lui ressemblant beaucoup. En 1770, Esper 
a figuré la forme de Vérone, en Italie, sous la lettre f de la 
Tab. XVI du Tome IL D'abord Esper avait considéré cette 
Zygæna comme une variété de Fiipendulæe,; mais, à la page 106, 
cet auteur la distingua par le nom de 7 7ansalpina, qui est le plus 
ancien, et qui désigne l’Espèce sans contestation possible. Il s’agit 
donc seulement des noms que doivent porter les formes géogra- 


580 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


phiques principales. Il convient d'observer que si quelques auteurs 
pressentaient l'existence de plusieurs Espèces distinctes de Zygæna 
ressemblant à Fipendule, 1 restait cependant une hésitation et un 
trouble chez certains de nos prédécesseurs. Plusieurs d'entre eux 
continuaient à confondre Æi/1pendule et Transalpina, dont ils ne 
percevaient pas nettement les caractères distinctifs. Ils restaient 
donc irrésolus, tout en manifestant un sentiment qui indiquait d'une 
façon très intéressante, la recherche à laquelle ils se livraient, sans 
avoir pu obtenir encore pour eux-mêmes la satisfaction désirée. 
C'est ainsi que très probablement, dans le Magasin, publié en 1778, 
Fuessly, sous la fig. 3 de la Tab. I, représente la forme suisse de 
Transalpina sur laquelle, à la page 126, il s'exprime dans les 
termes suivants : « N° 3; noch kleiner, wird auf den Bergen 
angetroffen. Ist auf den Oberfluegeln goldgruen schimmernd, 
heller als die uebrigen, mit 6 groessern, eckichtern, naeher beysam- 
men stehenden Flecken. Die Unterfluegel haben einen sehr schmalen 
Saum. Die rothe Farbe sehr hell. Diese 3 Arten haben Spindel- 
foermige vorne zugespizte (s2c) Fuehhoerner ». 

A la page 130, Fuessly dit que le « Sechsfleckigter Steinbrechs- 
chwacrmer der bergichten Gegenden » est le Sph. quarta, Schaeffer, 
Icon, Tab. 69; fig. 4 ». Je déclare que je trouve absolument impos- 
sible de discerner si la figure pubhée par Schaeffer représente 
Transalpina où Filipendule. Mais le nom guarta, auquel Fuessly 
ne substitue aucun autre nom, n’est en somme qu'un numéro d'ordre 
et ne peut pas primer le nom de 7ransalpina donné par Esper, 
en 1770. Cependant ce nom de 7 7ansalpina qui reste pour l'Espèce 
désigne la race italienne sans Nebelitreif sur le dessous des ailes 
supérieures. Puisqu'il existe une race avec Vebelstreif, 11 y a lieu 
de la distinguer par un autre nom. D'ailleurs, ce sont plusieurs 
races avec le Vebelstreif, et non pas une seule, qui se rencontrent 
chez la cisalpine 7 7ansalpina. 

Huebner a donné le nom de Loi à la 7 ransalpina d'Augsbourg. 
Il a publié la figure de la chenille sous la lettre G de la Taf. IT 
(II Theil) de Beitraege zur Geschichte der Schmetterlinge (1700); 


la notice est imprimée aux pages 30, 40 et 41. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 581 


Sous prétexte que Lot, dans Sys/ematisches Verseichniss der 
Schmetterlinge der Wienergegend (1776), pourrait bien ne pas être 
spécifiquement la même Zygena que Zransalpina, Borkausen 
inventa le nouveau nom d’'As/ragali dans Rheinisches Magasin zur 
Erweiterung der Naturkunde (1703). 

Je crois devoir donner la reproduction du texte intégral écrit par 
Borkausen. Cet auteur connaissait le nom de Zo/i, Huebner, qui 
prime dès lors évidemment celui d’As/ragali; 11 considère le n° 2 
de la Tab. I du WMagazin de Fuessly, ct non le n° 3, comme repré- 
sentant son espèce As/ragali. Pourtant, suivant Fuessly, le n° 2 
serait Filipendule, et c'est le n° 3 qui est l'espèce différente de 
Filipendule, c'est-à-dire Transalpina de Suisse. On voit combien 
toutes ces origines sont embrouillées, erronées et obscures. Quoi 


qu'il en soit, voici le texte de Borkausen : 


«€ 12.) Sphinx Astragali; alis anticis nigro cyaneis : maculis sex 
miniaceis; posticis rubris margine lato sinuato migro cyaneo; 
antennarum apicibus albis; abdomine immaculato. 

Fuessly, Magaz. I. Th. IL St Tab. 1; fig. 2. 

Élübners Bévte 20 2 00h = lañtihe(G S%30 Wo dieser 
Schwärmer unter dem Nahmen Sp%. Loti nach allen Ständen 
beschrieben und seine Raupe abgebrldet ist. 

Hierher gehôrt die Sphinx Transalpina Esperi. Es finden sich 
nemlich Stücke, welche mehr grünlich als schwarzblau sind, und 
bey diesen sieht man die schwärzliche Einfassung der rothen 
Flecken deutlich, welche bey den schwarzblauen nicht sichtbar 1st. 
Von der Spk. Filipendulæ unterscheidet sich dieser Schwärmer 1.) 
durch die mennigrothen Flecken, welche, wie bei Spk. Peucedani, 
leicht verschiessen und manchmal ganz weisslich werden; 2.) durch 
den eigenen Schnitt und den breiten Saum der Hinterflügel, als 
woriner der Spk. Peucedan: gleichkommt; 3.) durch die weissen 
Fühlhornspitzen. Von Sp. Peucedani unterscheidet er sich 1.) 
durch den Mangel des rothen Rings, 2.) durch den nicht parallelen 
Stand des zweiten und dritten Fleckenpaares, das dritte steht in 
viel schregerer Richtung, als das zweite, 


582 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Ich besitze eine Varietät dieses Schwärmers, bey welchem alle 
sechs Flecken zusammenfliessen. 

Die Raupe dieses Schwärmers fand ich im May an As#ragalus 
glycyphyllos (welche Pflanze im Oestreichischen Leckritzwicke 
genennt wird, daher man den Schwärmer Leckritzwickenschwärmer 
nennen kôünnte.) Sie kam in ihrem Habitus der Raupe der Sp. 
Filipendule. Sie war grünlich und in jeder war ein breiter gelber 
Streif, über welchem eine Reihe dreyeckigter schwarzer Flecken 
stand. Ueber den Rücken lief eine schwärzliche ununterbrochene 
Linie. Die Luftlôcher waren schwarz. Die Wärschen des Kôrpers, 
auf welchem die Haare stehen, hatten die Farbe des Grundes, auf 
welchem sie standen. Das Gespinnste, das sie sich bei der Verwan- 
delung fertigte, war weisslichgelb, und wie das Gespinnste der 
Filipendule-Raupe gestaltet. Die Puppe war braun, bis auf den 
Hinterleib, welcher weisslich-grün und schwarz gefleckt war. 

Herrn Hübners Beschreibung der Raupe stimmt mit dieser 
überein, und beweiset also, dass dieser Schwärmer keine Varietät 
von Spk. Filipendule, sondern eine besondere Art ist. 

Herr Hübner glaubt in ihm die Spk. Loti des wiener Verzeich- 
nisses zu finden; allein hier irrt er allen anderen Zeugnissen nach. 
Herr Schrank hat in Fuesslys neuem Magazin die wahre Spk. Loti, 
welche auch Herr Gerning unter diesem Nahmen aus Wien erhielt, 
beschrieben, und auch Herr Fabrizius bezeuget dadurch, dass er 
die Sp. Loti Vienn. bey seiner Zygæn. Fulvia allegirt, dass diese 
Sph. Loti ein fünffleckigter Schwärmer sey, ob er gleich drey 
verschiedene Sphinxen nemlich die Loti, Lonicere und Ackillee 
mit eimander verwechselt. 

Sph. Astragali habe ich diesen Schwärmer von der Nahrungs- 
pflanze, dem As#ragalus glycyphylos genennt. Den Nahmen Sp. 
Transalpina konnte ich nicht beybehalten, weil er auch diesseits 
der Alpen, in Deutschland und selbst in unserer Gegend sich findet. 


Borkausen établit donc un nom nouveau pour la Zygæna Tran- 
salpina à cause de la différence de provenance; mais il ne dit rien 
du caractère des ailes supérieures en dessous, c'est-à-dire du lavis 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 583 


rouge qui existe dans la forme suisse et allemande et qui fait défaut 
dans la forme italienne. 

Esper a figuré avec le nom de Zo, la 7'ransalpina viennoise, 
sous le n° 1 de la Taf. XXXV. 

Du côté d'Esper encore, ce nom de Loti a donc pour lui lindis- 
cutable priorité sur Asragali. 

Je reconnais cependant que plus tard le nom de Zo# fut appliqué 
par Huebner à deux unités spécifiques très distinctes, dans ses 
Illustrations. Evidemment Zofi à 6 taches, n° 32, de Huebner, n'est 
pas la même Espèce que Loti à 5 taches, n° 82, du même Huebner. 

De là découle une nouvelle source de confusion, mais postérieure 
à la Notice écrite par Borkausen en 1703. Cependant, pour ce qui 
nous concerne, à l'époque présente, la confusion commise par 
Huebner, dans son Iconographie, n'est pas indifférente. Définiti- 
vement, ce sont, à mon sens, les figures 54 et 55 données par 
Herrich-Schaeffer, avec le nom d'Æ2ppocrepidis, qui fixent la ques- 
tion, en figurant excellemment la Zygæna en cause. La pointe des 
antennes est blanche; le dessin et la couleur sont exacts et, en 
dessous (fig. 55), le Mebelstreif caractéristique de la race non 
italienne est parfaitement représenté. Les fig. 52 et 53, avec le 
même nom d'Æippocrepidis, sont également très bien exécutées; 
mais il y a un anneau abdominal rouge qui n'existe pas ordinai- 
rement chez l'Hippocrepidis d'Allemagne, des Alpes et des Pyré- 
nées. En outre, il reste la race spéciale des plaines calcaires de 
l'Ouest de la France et d’autres races encore, ainsi que je l'ai fait 
connaître dans les Annales de la Société entom. de France, en 1007. 


Zygæna Lavandulæ, Esper. 


Espèce bien connue et qu'il est difficile de confondre avec aucune 
autre. 

Il y a deux formes : 1° Lavandule, figurée par Esper, sous la 
figure 2 de la Tab. XXXIV du Tom. IT; 2° Consobrima, Germar. 

Herrich-Schaeffer a représenté le dessous des ailes de Lavandule 


584. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


sous le n° 42 de la Tab. $ de Zygænides Europ., et de Consobrina 
sous le n° 43. Moi-même, dans la XX" livraison des Æ/udes d'En- 
tomologie, j'a donné, sous le n° 108 de la PI. 7, la figure du dessus 
des ailes de Consobrina, et sous le n° 100, de Zavandule. 

La Zygæna Consobrina, en dessus aussi bien qu'en dessous, 
montre la couleur rouge plus développée sur ses ailes inférieures, 
comparativement à Lavandule, chez qui la teinte indigo envahit 
l'espace que la couleur carminée recouvre dans Consobrina. 

Lavandule et Consobrina se distinguent des autres Espèces de 
Zygæna par leur collier d’un blanc pur. Les ailes supérieures sont 
frangées de blanc. 

M. Emmanuel Abeille, dans une Æ7ude sur les Zygènes des 
Environs de Marseille et de la Sainte-Baume, consacre une inté- 
ressante notice à la Zygœna Lavandule. I] passe en revue les 
diverses phases de la vie évolutive de l’Espèce et donne sur le 
parasitisme qui détruit un si grand nombre d'individus, des rensei- 
seignements très instructifs Quand on pense que les Zygæna 
comptent, selon les idées du Docteur Adalbert Seitz, parmi « les 
insectes bénéficiant d’une protection interne! » Que serait-ce donc 
si cette faveur insigne leur avait été refusée? 

M. Abeille nous apprend qu'il a observé aux dépens de la chenille 
de la Zygœna Lavandule 3 séries de parasites : 

1° En Janvier, février et mars, plusieurs espèces de mouches 
Tachinaires, dont es larves dévorent peu à peu l'intérieur de la 
chenille dans laquelle elles se développent. Les larves de Tachi- 
naires sortent du corps de leur victime, dont elles percent la peau, 
et laissent la pauvre chenille entièrement vidée et cependant con- 
servant encore la vie pendant quelques jours; les larves des 
mouches se chrysalident, pour éclore 20 à 30 jours plus tard. 

2° En mars et avril, ce sont encore des Tachinaires, mais ren- 
forcées par des Hyménoptères de la famille des Chélonides 
appartenant au genre RÀogas. Les Rogas vivent, à raison d'une 
larve par chenille, dans le corps de celle-ci. Lorsque la larve de 
kRogas a atteint son entier développement, la chemille meurt et se 
dessèche, formant une momie d’où sort, un peu plus tard, la 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 585 


mouche Rogas, en brisant la partie inférieure de la momie en 
question. 

3° En avril et mai, paraissent de nouveaux parasites, sous forme 
d'Hyménoptères du genre Wicrogaster. Ceux-ci vivent en grand 
nombre, dans l’intérieur d’une même chenille dont ils sortent, en 
entourant leur victime de petits cocons blancs reliés entre eux par 
une fine mousse de soie blanche. Quelles hécatombes et quelles 
luttes douloureuses! Toujours des victimes et toujours des bour- 
reaux, inconscients les uns et les autres, 1l est vrai. Toutefois, sans 
détruire l’Espèce, les parasites réduisent singulièrement le nombre 
des individus qui la composent et maintiennent dans des limites 
sensiblement égales la proportion des échantillons favorisés qui, 
après avoir échappé à toutes les causes de destruction, parviennent 
à assurer la reproduction de leur Espèce. 

J'ai fait figurer sous le n° 162 de la PL XXVIII du Vol. IIT de 
la Lépidoptérologie comparée, YAb. Step, à taches jaunes, de 
Lavandule. C'est sans doute l’'exemplaire dont parle M. Abeille, 
à la page 3 de son Æ/ude (1900), et qu'il dit avoir capturé, il y a 
trois ans, c’est-à-dire en 1906, au dessus du champ de la Vigne, 
près de la vallée de Saint-Pons. 

La Zygæna Lavandulæe est une des plus jolies Espèces du 
Genre. J'ai pris assez abondamment la forme Consobrina à Hyères, 
en avril 1866. Je possède Consobrina de Digne; Montpellier; Col 
de Bartagne; Saint-Pons, près Gémenos; environs de Marseille; 
Tijola (Almeria), Observatoire près Nice et La Turbie où se ren- 
contrent des spécimens de transition entre Consobrina et Lavan- 
dule. 

Quant à la forme Lavandulæ pure, ma collection contient de 
nombreux échantillons de Bordighera, Castillon, La Turbie, envi- 
rons de Nice, Menton, Bonson, Escarène, Levens, Cannes, Mont 
Pacanaglia, dans les Alpes-Maritimes; Barcelone, Grenade, Tijola 
(Almeria), Vittoria et Mont Gorbea, en Espagne; Collioure et 
Vernet-les-Bains, dans les Pyrénées-Orientales. 

Le dessus des ailes supérieures a le reflet plus bleu chez les 


exemplaires de Provence et plus vert chez ceux de Catalogne. Sans 


580 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


doute cette particularité ajoutera quelque jour un nom à la nomen- 
clature entomologique. Pour moi, je ne juge pas une désignation 
spéciale assez justifiée. L'Espèce varie pour la dimension des 
taches rouges aux ailes supérieures. J'ai capturé un © chez qui les 
taches rouges sont réduites à de très petits points; j'en ai pris 
d’autres, au contraire, qui sont remarquables par la dimension de 
leurs macules rouges. 

La chenille vit sur le Dorycnium suffruticosum, plante de la 
famille des Papilionacées. Cette chenille est facile à distinguer de 
ses congénères, étant d’un blanc grisâtre, traversée par deux lignes 
latérales épaisses, brunes, qui laissent paraître sur le milieu du dos 
un espace longitudinal blanchâtre de la couleur du fond. Le 
papillon éclôt en avril et je l'ai vu voler jusqu’en juin. 

M. Harold Powell, chassant pour moi en 1906, a capturé, le 
13 juin, entre le Laghet et les moulins Gaetti, une très belle Aber- 
ration de Zavandule que j'appelle Powelli. Entre les taches rouges, 
et tout autour desdites taches, extérieurement et intérieurement, le 
liséré noir mat qui entoure normalement les taches rouges des añles 
supérieures s’est développé de façon à occuper tout le fond des 
ailes. De plus, la tache rouge basilaire supérieure conflue, par un 
long trait costal rouge, avec la première tache rouge médiane. C'est 
exactement pour Lavandulæ ce qu'est l'Ab. Gueneei pour Rhada- 
manthus. 


Zygæna Rhadamanthus, Esper. 


Grossièrement figurée par Esper, sous les figures 1 et 2 de la 
Tab. XL du Tom. Il, d'après des exemplaires appartenant à 
Gerning qui les avait reçus des environs de Nîmes, en Languedoc. 

Le G' a le dessus des ailes Xellolaenzendes Gruen, c'est-à-dire, 
en mot à mot : clairement-brillant vert, et la © dunkles Blau, ou 
d'un bleu-obscur, dit Esper. 

La Zygœna Rhadamanthus est une de nos plus jolies Espèces, 
elle porte le nom du frère de Minos. Tous deux, Rhadamanthe et 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 587 


Minos, étaient fils de Jupiter-Asterius, roi de Crète, et d'Europe. 
Tous deux furent réputés pour leur amour de la Justice et de 
l'équité. Aussi furent-ils mis par les Poètes au nombre des juges 
des Enfers. 

Rhadamanthe jugeait les peuples d'Asie et d'Afrique. Les 
Anciens, lorsqu'ils voulaient parler d’un jugement Juste, quoique 
sévère, ne l’appelaient-ils pas un jugement de Rhadamanthe? Voilà 
donc le nom de ce maïître-juge, transmis à la postérité la plus 
reculée, sur les ailes d’une Zygæna! 

J'ai donné une figuration assez abondante des variations de 
Rhadamanthus, sous les n° 181 à 188 de la PI. XXIX du Vol. III 
de la Lépidoptérologie comparée, et j'avais déjà représenté sous le 
n° 107 de la PI. 7 de la XX° livraison des Æ/udes d'Entomologie, 
la forme A/garbiensis, Christ, du Portugal, que j'avais appelée 
fautivement A/garvensis. 

Je considère comme pouvant être le type normal de lEspèce 
dans les Alpes-Maritimes, le n° 188, de Vence, aux ailes d’un bleu 
assez foncé, luisant, paraissant intermédiaire entre Lellglaensendes 
Gruen et dunkles Blau de la description d’'Esper, mais plus rap- 
proché de dunkles Blau. J'appelle grisea la forme de Digne et des 
montagnes entre l'Escarène et Levens, dont le dessus des ailes 
supérieures est d’un gris blanchâtre (fig. 187). 

Les individus, avec l'abdomen annelé de rouge, portent le quali- 
ficatif de cngulata, Lederer. 

J'ai fait représenter l'Ab. fara, de Tijola, à taches et à ailes 
inférieures jaunes. 

J'ai distingué par le nom de Gueneei la belle Aberration que 
feu Guenée a fait connaître, le premier, d'après un exemplaire qu'il 
avait pris à Celles-les-Bains (Ardèche), mais à laquelle il n'avait 
donné aucun nom. 

La description rédigée par Guenée et la figure ont paru dans les 
Annales de la Société entomologique de France, 1870 (PI. 7, fig. 12). 

Cette Aberration Gueneei se reproduit régulièrement. J'en possède 
en tout 7 échantillons dont 5 trouvés à Digne, une © capturée à 
Montpellier (ex coll. Bellier) et le type même de Guenée. Les 


588 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


figures 185 et 186 du Vol. IIT de la Zépidoptérologie comparée 
représentent l’'Ab. Gzyeneei qui est caractérisée absolument comme 
l'Ab. Powell; de Lavandule, c'est-à-dire par l'extension extraor- 
dinaire des petits traits noirs, normalement placés à droite et à 
gauche de chacune des taches rouges des ailes supérieures, à 
l'exception toutefois de l'ultime externe, laquelle reste toujours 
libre de tout accompagnement noirâtre. 

Les ailes inférieures de KAadamanthus peuvent être plus ou 
moins envahies par la teinte bleue. Tous les passages existent entre 
la forme type dont les ailes inférieures sont entièrement rouges 
avec un mince liséré marginal indigo, et l’Ab. Kïesenwetteri, la 
plus accentuée dans le sens du mélanisme; tel le n° 06 de la 
Tab. 14 des Zygænides Europ. d'Herrich-Schaeffer. Non seulement 
les ailes inférieures sont entièrement indigo, mais encore la 6° tache 
rouge ultime externe des ailes supérieures a disparu. La transition 
a été appelée Sæchadis par Boisduval qui l’a figurée sous le n° 4 
de la PI 55 de l’/Zcones, d'après un exemplaire provenant des envi- 
rons de Barcelone et que lui avait donné le colonel Feisthamel. 
Duponchel a fourni une excellente figure de cette Ab. intermédiaire 
Stæchadis, sous le n° 2 de la PI. VII du Supplément-Zygénides, 
toujours d’après un spécimen de Barcelone. Herrich-Schaeffer à 
représenté également fort bien cette même Szæchadis, sous les 
n°” 97 et 08 de la Tab. 14 des Zygænides Europ., avec le même 
nom de Xzesenwelteri qu'il donne à son n° 06. 

IT ne faut pas confondre les deux Zygœna Stæchadis : 1° celle 
de Boisduval, qui n’est qu'une forme mélanisante de Rkadaman- 
thus, et 2° celle de Borkausen, à laquelle se rattachent Dyubza et 
Medicaginis. 

J'ai fait moi-même représenter A2esenwetteri (H.-S. 06) sous les 
n*® 181 et 183 de la PI XXIX du Vol. III des Etudes de Lépr- 
doptérologie comparée, et Stæchadis, Boisduval, sous le n° 182. 
Cependant je regrette vivement que le coloriage de la PI XXIX, 
dans un certain nombre d'exemplaires du Vol. IIT de Zépidopt. 
comparée, laisse à désirer. Malheureusement, le coloriage de cette 
Planche a été exécuté hâtivement et sans les soins méticuleux qui 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 589 


sont cependant nécessaires, surtout pour la représentation des 
Zygæna. Je m'excuse près de mes Lecteurs pour cette non-réussite 
partielle. 


M. Abeille a traité de l’histoire de la Zygæna Rhadamanthus, 
comme il l’a fait pour Lavandule, avec compétence et exactitude. 
La chenille de Rhadamanthus vit, comme celle de Lavanduleæ, sur 
le Dorycnium suffruticosum, Papilionacée qui, dans le Midi de la 
France, sert de nourriture et d'asile à une foule de Lépidoptères. 
Les chenilles des deux Espèces se ressemblent; mais les deux 
coques sont très distinctes; celle de LAadamanthus est ovoïde. 


J'ai réuni de nombreux documents relatifs à la Zygæna Rhada- 
manthus qui habite une partie de l'Espagne, le Midi de la France 
et l'Italie. Je dispose de plus de 1,200 exemplaires provenant de 
localités très variées; c'est avec ces matériaux que Je crois pouvoir 


établir la variation de l’Espèce, par localité, comme suit : 


1° Portugal. — Algarbiensis, Christ (Algarvensis, Obthr.). Rela- 
tivement grande; 6 taches rouges aux supérieures; ailes mférieures 
en dessus bleu indigo, avec quelques traits carminés partant de la 
base et deux points rouges confluents vers l'extrémité et près du 
bord terminal: en dessous, plus largement lavées de carminé qu'en 
dessus; pas d’anneau abdominal rouge; poils du thorax épais, 
mélangés de blanchâtre, ainsi que les épaulettes. À été prise à Faro, 


par Max Korb, de Munich, en 1884. 


2 Almeria et Grenade. — Cingulata, Lederer; Herrich-Schaeffer, 
fig. 21, 22. Généralement petite; fond des ailes supérieures d'un 
bleu grisâtre; taches et ailes inférieures d'un rouge assez vif; 
abdomen généralement annelé de rouge. C'est à Tijola, près d'AI- 
meria, que Martinez de la Escalera captura, en 1900, la belle Ab. 
flava qui est figurée sous le n° 184 de la PL XXIX. 

Cette Ab. fava est elle-même céngulata; mais en jaune naturel- 
lement. De Graslin a recueilli Rkadamanthus cingulata à Grenade, 
les 5 et 8 juin 1835. Rambur en fait mention dans le Catalogue 


systém. Andalousie. 


590 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


3° Catalogne. — On trouve aux environs de Barcelone les 
formes ÀAadamanthus, Stæchadis et Kiesenwetteri. La Rhadaman- 
thus de Barcelone est petite et de couleurs vives, avec le thorax 
abondamment couvert d'une pilosité soyeuse blanchâtre. Pas d’an- 
neau abdominal rouge; fond des ailes supérieures bleu ou verdâtre, 
tout à fait: « Hellglaenzendes gruen oder blau ». En Catalogne, 
l'Ab. intermédiaire S/æchadis et l'Ab. Xzesenwetteri sont fort inté- 
ressantes. X7esenwetteri paraît très variable. Tous les 16 exemplaires 
que Je possède de Catalogne ont 6 taches rouges aux ailes supé- 
rieures. Le fond de celles-ci est bleu indigo, ou gris verdâtre, ou 
vert brillant; les ailes inférieures, en dessus, sont quelquefois 
entièrement indigo; mais le plus généralement avec quelques traces 
de rose carminé. Les taches rouges des ailes supérieures, latéra- 
lement bordées d’un trait noir, sont quelquefois, en haut et en bas, 
accompagnées d’un trait blanc, comme dans les Alpes-Maritimes. 
Les Q Â7esenwetteri montrent un double collier blanchâtre; chez 
les O, on voit simplement une pilosité soyeuse blanche, à la base 
des antennes et autour de la tête. Les ailes supérieures sont finement 
frangées de blanc jaunâtre ou de fauve pâle. La Ahadamanthus, 
en Catalogne, paraît varier à peu près comme dans les Alpes- 
Maritimes. 


4° Pyrénées-Orientales. — Dans les Pyrénées-Orientales, on 
trouve la Zygæna Rhadamanthus, aux mois d’avril et de mai, à la 
Trancada d'Ambouilla, sur les fleurs de l'Onobrychis Sativa ou 
sainfoin, plante de la famille des Papilionacées, qui est cultivée 
comme fourrage. 

Il y en avait jadis quelques champs assez maigres situés en 
gradins sur la pente, du côté Sud et Sud-Est du plateau. Les 
Zygæna Rhadamanthus se trouvaient posées sur les fleurs roses, 
striées de rouge, qui s'élèvent en grappes assez longues à l'extrémité 
des pédoncules qui surpassent les feuilles. Le souffle du vent incli- 
nait ou balançait ces fleurs avec lesquelles les Zygæna confondaient 
presque leurs couleurs et sur lesquelles elles se cramponnaient, 
lorsque l’aquilon prenait de la force. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE SOI 


La forme de la RAadamanthus des Pyrénées-Orientales est 
d'aspect un peu terne; le fond des ailes supérieures est d'un gris 
bleuâtre; les 6 taches des mêmes ailes et les ailes inférieures sont 
d'un rouge mat et sans éclat; quelquefois le bord anal des infé- 
rieures se trouve pigmenté d'indigo; l'abdomen est noir, non annelé 
de rouge; le thorax est velu et mélangé de poils soyeux blan- 
châtres; les ailes supérieures sont finement frangées de blanc; les 
inférieures sont lisérées d'indigo. Dans les Pyrénées-Orientales, Je 
n'ai jamais vu l’Ab. Xiesenwetteri. D'ailleurs, l'Espèce paraît très 
localisée dans les Pyrénées-Orientales, et jamais nous n'avons 
trouvé Rhadamanthus que sur la montagne de la Trancada d'Am- 
bouilla, entre Prades et le Canigou. J'ai essayé de décrire cette 
localité si remarquable sous le double point de vue du paysage et 
de l’entomologie, aux pages 37 et 38 du présent ouvrage, dans la 
notice consacrée au Cœnonympha Dorus. 

Il y avait autrefois des champs de sainfoin près de Villefranche- 
de-Conflent Je les ai plusieurs fois examinés, pour trouver la 


Zygæna Rhadamanthus sur les fleurs; mais toujours sans succès. 


s° Languedoc et Provence. — La Zygæena Rhadamanthus se 
trouve à Mende où Jje l'ai prise en 1863, à Montpellier, aux environs 
d’Aix-en-Provence, à la Sainte-Baume, à Celles-les-Bains (Ardèche) 
et à Digne Dans aucune de ces diverses localités Je n’ai vu la 
forme Xesenwetter. À Celles-les-Bains et à Digne, on rencontre 
des exemplaires dont l'abdomen est annelé de rouge (czngulata); 
on trouve aussi la charmante Ab. Gyeneer, tantôt cngulata, tantôt 
avec l'abdomen tout noir; mais ce qui caractérise la race langue- 
docienne et provençale de Réadamanthus, c'est l'éclat de la couleur 
rouge vermillon des taches des ailes supérieures et le développement 
desdites taches; de plus, il y a pour la couleur du fond des ailes 
supérieures, en dessus, deux races bien distinctes, quoique réunies 
l’une à l’autre par des exemplaires de transition, celle qui est spé- 
ciale à cette région et aux montagnes entre Levens et l’Escarène, 
qui a le fond des ailes d’un gris presque blanc (forma grisea, 
Obthr., PL XXIX, fig. 187), et l’autre qui a le fond des ailes d’un 


5902 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


bleu ou d'un vert plus ou moins conforme aux termes employés 
par Esper, dans sa description initiale. Les taches rouges des ailes 
supérieures confluent parfois, mais fort rarement complètement. Le 
principe de la confluence se trouve généralement dans l'allongement, 
le long de la côte des ailes supérieures, de la tache basilaire rouge 
supérieure. Cet allongement, limité à la jonction de la tache basi- 
laire et de la tache cellulaire, est fréquent; mais il y a loin de cette 
confluence partielle à la confluence étendue et gagnant toutes les 
taches, ce qui constitue la véritable Ab. confluens,; la macule basi- 
laire inférieure émet, dans ce cas, un prolongement qui la relie à 
la macule médiane rouge inférieure; les taches rouges s’élargissent, 
au détriment du fond gris ou bleuâtre qui se trouve dès lors extrè- 
mement rétréci entre les traits noirs devenus très rapprochés. La 
0° tache rouge (externe ultime) est tantôt séparée de la 5° et tantôt 
elle lui est contiguë. 

Sur environ 350 exemplaires de ÀAadamanthus pris à Digne et 
rangés dans ma collection, à peine 70 appartiennent à la var. cn- 
gulata et ce sont surtout les spécimens de la forme grsea; celle-ci 
constitue près de la moitié de l'effectif total à Digne. Un seul © 
pris à Digne, a le fond des ailes supérieures aussi bleu que le 
n° 188, pris à Vence; ce seul individu, parmi tous ceux de Digne, 
présente sur les ailes inférieures une légère tendance à l’obscurcis- 
sement, par une pigmentation de couleur indigo. Cet exemplaire, 
conforme à ceux des Alpes-Maritimes et rencontré seul au milieu 
des individus de Digne où la forme normale est différente de la 
forme de la Riviera, prouve une fois de plus que partout où vit 
une Espèce, on peut trouver au milieu d’une forme locale spéciale, 
à titre aberrant, des spécimens très différents de la forme normale 
du lieu où ils sont nés, mais semblables à ceux qui constituent 
ailleurs une forme locale très distincte. 


6° Alpes-Maritimes. — C'est vraisemblablement dans les Alpes- 
Maritimes que se trouvent les plus belles variations de LAada- 
manthus. Chassant moi-même après la mi-juin 1806, entre l’Esca- 
rène et Levens, puis autour de Nice, notamment à l'Observatoire 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 503 


et à La Turbie, Je capturai plusieurs RXadamanthus dont les ailes 
supérieures me parurent d’un bleu si vif, avec des taches rouges si 
carminées, que Je les rapportai d’abord à Oxyfropis, à laquelle elles 
ressemblent en effet. Je recueillis aussi des sujets très intéressants 
de Xzesenwetter:; mais l'Espèce commençait à se déflorer et Je 
rencontrais peu d'échantillons encore frais. Cependant les années 
suivantes Je chargeai le chasseur Victor Cotte, de Digne, de faire 
une exploration entomologique au commencement de juin; enfin, 
avec l’aide de MM. Powell et Decoster, je parvins à réunir près 
de 600 exemplaires de XÀAadamanthus pris à Vence, Bonson, 
l'Escarène, Levens, La Turbie, Castillon, Sospel, Puget-Théniers, 
Mont Pacanaglia, Mont Castel-de-Brans, Vallée du Paillon, Mon- 
tagnes entre le Laghet et les moulins Gaetti, Col d'Eze, Tourette- 
sur-Loup, Bordighera, ce qui me permet d'apprécier en connaissance 
de cause la forme de la Riviera. 


Lorsqu'on place les unes à côté des autres les boites qui con- 
tiennent les Zygæna Rhadamanthus de Digne, des Pyrénées- 
Orientales, d'Espagne, des Alpes-Maritimes et d'Italie, on constate 
aisément : 


1° Que l’Ab. mélanienne Xesenswetteri se rencontre seulement 
en Catalogne et dans les Alpes-Maritimes, contrée d’où le Catalog 
1901, de Staudinger et Rebel, s'abstient de la signaler; 

2° Que la race normale, c’est-à-dire à ailes inférieures rouges, est 
très différente d'aspect dans les Alpes-Maritimes, comparativement 
aux autres localités, à cause de la teinte bleue vive et foncée du 
fond des ailes supérieures, presque partout, sauf à Levens et à 
l'Escarène, et de la couleur carminée rose, non vermillonnée, des 
taches rouges des ailes supérieures et de la surface des ailes infé- 
rieures. 


Plusieurs colonnes d'Oxyrropis de Sicile, des Abruzzes, de Flo- 
rence sont rangées près des RAadamanthus; Oxytropis diffère 
moins, par son faciès, de Rhadamanthus des Alpes-Maritimes que 
celle-ci ne se distingue de sa pareille de Digne et de l'Escarène 


qui n'habite pourtant pas à une distance bien éloignée. 


38 


504 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Mais ceci est pour l'effet général. C’est l'impression que produit 
la vue d’un ensemble, sans s'occuper des détails que révélera l'ana- 
lyse des individus. 

S1 l’on procède donc à l'analyse en question, on constate une 
variation individuelle assez grande dans la teinte bleue qui fait le 
fond des ailes supérieures de la forme à ailes inférieures rouges 
Khadamanthus,; mais c'est dans les échantillons AZesenwetteri que 
la variation est surtout remarquable. 

Tout d’abord, il y a des RAadamanthus dont les ailes supé- 
rieures présentent les deux taches rouges externes, unies en forme 
de cœur, comme chez Oxytropis. D'autres ont les deux taches 
rouges ultimes bien séparées; chez le plus grand nombre, les taches 
rouges sont d'un rose carminé vif, avec les traits noirs latéraux 
bien indiqués; mais chez quelques sujets, la nervure médiane forme, 
depuis la base, un trait blanc qui surmonte la tache rouge médiane 
inférieure, souligne la tache rouge externe supérieure et s'arrête au 
contact de la 6° tache externe inférieure. Cette ligne blanche, sur 
la nervure médiane, lorsqu'elle est bien accentuée, produit un effet 
fort agréable. Souvent les R£adamanthus des Alpes-Maritimes ont 
le bord anal des ailes inférieures pigmenté d'indigo, comme à la 
Trancada d'Ambouilla Au milieu des RAadamanthus à ailes 
supérieures bleu foncé, on voit des exemplaires à fond des æles 
d'un gris légèrement verdâtre; mais, sauf entre Levens et l’Esca- 
rène, ce n'est pas la forme gisea de Digne. 

Quant aux ÂAZesenwetten, elles peuvent avoir le fond des ailes 
supérieures gris ou d’un bleu indigo très obscur, avec $ ou 6 taches 
rouges; mais lesdites taches rouges sont quelquefois presque entiè- 
rement noires, surtout les 2 ultimes. L'Ab. S/æchadis, Boisduval, 
qui fait le passage entre RAadamanthus et Kiesenwetteri, se pré- 
sente elle-même extrèmement variable non seulement pour ses ailes 
inférieures qui sont plus ou moins rougies, mais aussi pour les 
supérieures, qui se montrent tantôt claires et tantôt foncées. La 
nervure médiane peut ressortir en blanc depuis la base des ailes 
supérieures Jusqu'à la 6° tache rouge chez Xiesenwetteri, des Alpes- 


Maritimes, comme chez celle de Catalogne et tout aussi bien que 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 595 


chez Rhadamanthus. J'a1 désigné sous le nom de 5—raculata Ja 
Kiesenwetteri qui a perdu la 6° tache rouge des ailes supérieures. 
Tels sont les n* 181 et 183 de la PL XXIX du Vol. III, et tel est 
aussi l’exemplaire figuré par Herrich-Schaeffer, sous le n° 00. 
J'ai appelé obscura la forme chez laquelle la couleur rouge des 
taches des ailes supérieures est envahie par le noir. Entre Levens 
et l'Escarène, il y a, comme Jje l'ai déjà fait observer, une forme 
grisea assez analogue à celle de Digne; elle affecte L£adamanthus, 
Stæchadis et Kiesenwetteri et les exemplaires de couleur grisâtre 
volent avec les individus dont les ailes supérieures ont le fond 
bleu foncé, conformément à la race ordinaire qui se rencontre dans 
les autres localités des Alpes-Maritimes. C'est seulement dans la 
forme grisea de l'Escarène que j'ai vu une unique Q cngulata, 
parmi tous les exemplaires récoltés dans le département des Alpes- 
Maritimes. À Digne, la variété céngulata est plus fréquente, ainsi 
qu'on l'a vu plus haut. La forme gisea paraît affecter un tiers 
environ des échantillons de RAadamanthus, Stæchadis et Kiesen- 
wetteri, entre l'Escarène et Levens; les deux autres tiers, dans ces 
montagnes chaudes et si escarpées, sont conformes à ceux qu'on 
voit dans la région plus rapprochée du littoral méditerranéen. 
On y trouve même des exemplaires bien voisins d'Oxytropis, qui 
me paraît être simplement une race géographique de XAadaman- 
thus, spéciale à l'Italie, et non point une Espèce propre. Ma col- 
lection contient des exemplaires italiens d'Oxy#ropis mdistinguables 
de certains échantillons français de RZadamanthus. 11 doit en être 
d'Oxytropis et de Rhadamanthus comme de Punctum et de Sar- 
pedon. Je traite donc la Zygæna Oxytropis, Boisduval, comme la 


D 22 


7° race géographique de Rkadamanthus. 


7° Ltalie. — Oxytropis, Boisduval. Les échantillons bien carac- 
térisés diffèrent de RAadamanthus par une taille plus petite, un 
corps moins velu et moins épais, entièrement noir, et les couleurs 
rouges et bleues du dessus des ailes plus vives. 

Oxytropis se trouve à la fin de mai et au commencement de juin 
en Sicile, aux environs de Florence, à Cerchio (Abruzzes), dans la 


500 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


vallée du Petrella où l’a capturée M. Orazio Querci; à Rome et 
dans le pays napolitain. J'ai eu le plaisir de la récolter moi-même 
abondamment aux proches environs de Florence, dans les taillis de 
chènes qui s'élèvent sur les collines, en face de la Poudrière. 

L’Ab. confluens, Zickert, n'est pas rare à Cerchio, où l’on constate 
chez beaucoup d'exemplaires que toutes les taches rouges se réu- 
nissent en une longue et unique macule non interrompue et dont 
les contours restent sinueux. Zickert a obtenu quelques échantillons 
de l’Ab. cengulata. 

La figure d'Oxytropis donnée par Boisduval, dans l’£ssaz, 1820, 
est détestable. La figure publiée par Duponchel (Szpplément- 
Zygénides, PI. VIT fig. 3) est bonne; Boisduval a fourmi sous le 
n° 3 de la PI. 55 de l’/cones une figure meilleure que celle de l'Æssaz. 
Boisduval dit à la page 70 de l’/cones (Vol. Il) qu'Oxytropis 
« se distinguera facilement de RAadamanthus par ses ailes supé- 
rieures plus bleues, avec les deux taches postérieures connées, par 
son corselet noir, par la bande de ses ailes inférieures ». Je suis 
d'accord pour les ailes supérieures plus bleues, pour le corselet noir, 
mais pas pour les taches rouges connées. Je possède des Oxytroprs 
authentiques, ayant les taches rouges ultimes, — celles qu'on appelle 
les 5° et 6° taches, — nettement séparées l’une de l’autre, donc 
nullement unies et ne formant point, par leur réunion, l'angle très 
ouvert, dont parle Boisduval; Herrich-Schaeffer a figuré sous les 
n® 19 et 20 Oxyfropis, avec les 5° et 6° taches séparées. D'un autre 
côté, ma collection contient des RAadamanthus qui ont les 5° et 
6° taches rouges unies comme Oxy/ropis les présente généralement 
et non séparées. Ceci n'est donc pas un caractère de distinction 
spécifique qu'on puisse raisonnablement invoquer. 

La bordure, d'un bleu noir plus large que dans Rhadamanthus, 
n'est pas davantage un caractère constant. Mais 1l faut reconnaître 
que le thorax est généralement plus noir chez Oxyéropis, bien que 
j'aie récolté à Florence des individus pourvus d’épaulettes blanches; 
la teinte bleue du fond des ailes supérieures est plus vive chez 
Oxytropis, ainsi que la couleur rouge; mais on conviendra que ces 


différences, intéressantes pour distinguer une race, n’ont pas grande 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 507 


valeur spécifique. Oxytropis n'est à mes yeux que la forme italienne 
de RAadamanthus. 


Boisduval a donné à la Zygæna italienne le nom d'Oxyfroprs, 
qui est un genre de plantes de la famille des Papilionacées, voisin 
des As/ragalus, et répandu dans les rocailles et dans les pâturages 
des montagnes de l'Europe, de l'Asie et de l'Amérique du Nord. 
Les Oxytropis sont des plantes généralement basses dont on 
connaît actuellement, d'après l'abbé Coste, environ 200 Espèces. 
J'ignore si la Zygæna Oxytropis peut vivre sur la plante dont elle 
porte le nom. Je ne crois d’ailleurs pas que la chenille d'Oxytroprs 
soit actuellement bien connue. Je suppose qu'elle peut se nourrir 
de Dorycnium, comme Rhadamanthus, et de Lotus, ainsi que beau- 


coup de ses congénères. 


J'ai éprouvé un plaisir infini à récolter OUxrytropis aux environs 
de Florence, dans une jolie localité boisée où m'avait conduit 
M. Roger Verity. On sort de la ville par le Nord-Est et l’on suit 
un faubourg dont la route poudreuse couvre les voyageurs d'une 
épaisse couche de poussière. C'est le fléau des routes italiennes; 
aux environs de Naples, la promenade est rendue presque impos- 
sible par l'épaisseur de la couche poudreuse dans laquel'e il Faut 
se mouvoir. Cependant on finit par quitter cette route, dont Île 
parcours est peu agréable, pour traverser à gauche un lit de rivière 
desséché. Quelques champs en culture occupent la partie plane sur 
les bords du torrent qui est, au printemps, presque complètement 
privé d’eau, jusqu'au pied de collines boisées, couvertes de fleurs 
et d’un aspect très riant. Là, c'est la nature fraiche et aimable; le 
site est plaisant; il y a un peu d'eau, beaucoup d’ombrage; les 
papillons abondent. On trouve 3 espèces de Zygæna, au commen- 
cement de juin, dans les clairières de ce bois de chênes : Oxy#roprs, 
Achillee et Stæchadis. Tant que le soleil n'est pas très ardent, 
Oxytropis reste fixée sur les tiges de graminées ou sur les fleurs. 
On peut alors la cueillir facilement avec Acælleæ. I ma paru 


que Stæchadis est à Florence la plus rare des 3 Zygæna. 


508 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Il y avait dans ce bois agreste une foule de Zycæna, d'Hespéries, 
de Phalènes. Sur les gazons secs, aux abords du bois, du côté du 
sud, la jolie petite Cleta pygmeæaria paraissait très nombreuse; 
mais sous l’ardeur des rayons solaires, la capture, vu la délicatesse 
et la taille exiguë du papillon, n'était pas très aisée à réaliser. Je 
me souviens d’avoir passé des heures bien agréables dans cette 
localité restée un peu sauvage, malgré son proche voisinage de la 
grande et magnifique cité. Les monuments, les basiliques, les palais, 
les musées, les promenades où les Lucioles voltigent, le soir, 
comme des étincelles de feu, les paysages, l’histoire même de Flo- 
rence sont des attraits qui évoquent toujours en moi le désir de 
revoir encore une fois la ville incomparable que je n'ai jamais 
quittée sans un vif sentiment de regret. Du moins les papillons 
récoltés dans la campagne de Toscane sont là, sous mes yeux, bien 
loin de leur pays d’origine sans doute, mais contribuant à ressus- 
citer sur leurs ailes délicates la vision des lieux charmants qui se 
trouvaient encore embellis pour moi par une compagnie qui m'est 
infiniment chère et par l’aimable commerce de l'amitié. Jai déjà 
dit que nous parcourions les environs de Florence avec le jeune 
Roger Verity. Cet entomologiste très distingué, dont le nom est 
déjà si justement connu dans le monde des Naturalistes, a réussi 
à produire une œuvre fort importante, écrite avec un esprit émi- 
nemment scientifique, toujours inspirée par un très sincère sentiment 
de recherche de la vérité. De plus, la nombreuse figuration qu'il a 
donnée, bien qu'ayant pu beaucoup gagner à être présentée d’une 
façon moins serrée, conserve le mérite d’une telle exactitude que 
la plus grande estime demeurera toujours acquise aux RAopalocera 
palæarctica. J'ai été heureux de concourir à la publication d’un 
ouvrage qui fait honneur à son auteur et nous fait espérer une 
longue suite d’utiles travaux. 


Zygæna Ignifera, Korb. 


Découverte à Cuenca, en Castille, par Max Korb, dans l’année 
1800, et figurée deux fois : 1° par Clemens Dziurzinski, sous le 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 590 


n° 16 de la Taf. II de /akresb. d. Wien. ent. Ver, 1003; 2° par 
Adalbert Seitz, dans l'ouvrage Les Macrolépidoptères du Globe 
(PI. 7, colonne A). Ces deux figurations sont malheureusement 
très grossièrement exécutées. /gnifera est une belle, grande et 
vigoureuse Zygæna. J'en possède seulement deux exemplaires que 
j'ai achetés à Korb; ce sont des éléments d'appréciation tout à fait 
insuffisants et j'attendrai à posséder une documentation un peu 
plus considérable pour écrire au sujet d’Zgnifera et publier de cette 
Espèce une figure que je tâcherai d'obtenir d'exécution supérieure 
à celles déjà données, afin d'en établir la connaissance sur des 


données vraiment exactes. 


Zygæna Hilaris, Ochsenheimer. 


Décrite en premier lieu par l'acteur Ferdinand Ochsenheimer, 
aux pages IOI et 102 du 2° volume de l'ouvrage Die Schmetterlinge 
von Europa, d'après quatre exemplaires du Portugal, dont deux 
existaient dans la collection Tauscher et les deux autres dans celle 
du comte von Hoffmansegg (*). 

Malheureusement, Ochsenheimer ne dit pas de quelle partie du 
Portugal provenaient les Zygæna qu'il a décrites. Voici quelle est 
la diagnose de Ochsenheimer : « Alis anticis nigro-cyaneis, maculis 
sex cinnaberinis confluentibus flavoque marginatis; posticis cinna- 
berinis, limbo sinuato nigro-cyaneo; capite humerisque pilis albis, 
abdomine immaculato. » Il convient d'observer qu'Ochsenheimer 
doit compter la macule basilaire, pourtant bien compacte, pour 
deux taches, suivant l'usage adopté pour les autres Zygæna. Je ne 
possède aucun exemplaire de Æilaris provenant du Portugal, pays 
où les Lépidoptères ne paraissent pas être souvent recherchés par 


(*) L'orthographe du nom du comte von Hoffmansegg n’est pas la même pour 
tous les Auteurs allemands. Certains écrivent Hoffmannsegg. Je crois que cette 
dernière manière est la bonne; mais, dans la circonstance, j'ai transcrit textuel- 
lement ce qui est imprimé dans l'ouvrage d’Ochsenheimer, 


600 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


les amateurs. Mais l'Espèce, depuis sa découverte au Portugal, a 
été retrouvée en Espagne, dans la France méridionale et sans doute 
en Algérie. Dans ces diverses contrées, elle produit des formes 
géographiques pleines d'intérêt. 

Duponchel (Supplément-Zygénides) a donné, sous le n° $ de la 
PI. VII, une excellente figure de Æzlaris, sans dire toutefois de 
quelle localité provenait l’exemplaire figuré. Boisduval a moins 
bien réussi à représenter Æilaris; les figures qu'il a publiées dans 
l’Essa, 1829 (PL. 6, fig. 5), et dans l’/cones (PL 55, fig. 1}, laissent 
beaucoup à désirer. L'iconographe Huebner a représenté assez bien 
une variété de Æzlaris, sous le n° 123 de Lepidoptera 1. — 
Sphinges TL. Rambur, dans la Faune de l'Andalousie, figure correc- 
tement deux formes de Æilaris, sous les n° 5 et 6 de la PI. 12. 
La figure 6 s'applique à la race que j'ai appelée Æscorialensis et 
que J'ai moi-même fait représenter sous le n° 48 de la PI. 7 de la 
XII° livraison des Æ/udes d'Entomologie. Du reste, j'ai publié 
plusieurs figures des diverses variétés de Æilaris, notamment sous 
les n° 48 a, 48 b, 48 c de la même PI. 7; puis sous les n°“ 120, 
130 et 131 de la XX* livraison des Æ/udes d'Entomolog; enfin 
sous les n° 170 et 180 de la PI XXIX du Vol. III des Etudes 
de Lépidoptérologie comparée. 

On m'excusera de rappeler que j'ai antérieurement beaucoup 
écrit sur les Zygæna et que J'ai fourni une figuration très consi- 
dérable, surtout des Zygæna algériennes, dans la XIII° livraison 
des Etudes d'Entomologie. Cependant je ne puis faire nouvel état 
de tout ce que J'ai déjà publié sur le groupe même dont fait partie 
la Zygæna Hilaris, ni rééditer ici les observations précédemment 
imprimées par mes soins. Je prie donc le Lecteur de se reporter à 
mes travaux contenus dans les Æ/udes d'Entomologie. Je me bor- 
nerai, dans la circonstance présente, à une revision des races géo- 
graphiques de //ilaris, conformément à la méthode par localité, 
que J'ai déja employée pour l'étude critique des Zygæna; mais il 
est bien entendu que je suppose le Lecteur en possession des 
renseignements déjà publiés et sur lesquels je ne reviendrai que 
pour corriger les erreurs dont je me reconnaîtrai coupable. C’est en 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE (cel 


effet un devoir de conscience auquel J'ai la ferme intention de 
rester fidèle. 


1° Espagne Méridionale. — Hilaris, Ochs. Il s'agit de la race de 
Grenade et de la Sierra-Nevada, figurée par Rambur, sous le n° 5 
(non 6) de la PI. 12 de la Faune de l’'Andalouste. 

Les /Zilaris de Grenade ressemblent à certains exemplaires de la 
Zygæna Algira, Duponchel. Ainsi que je le dis plus haut, Je ne 
connais pas la race portugaise de //2laris, qui est la forme typique 
Jamais, dans ma longue carrière entomologique, je n'ai même 
trouvé l’occasion de la voir en quelque main. Cependant, à cause 
du voisinage, je considère comme probable que /zlaris, d'Anda- 
lousie, et Æilaris, tout au moins de la partie méridionale du Por- 
tugal, appartiennent à une race dont les individus sont analogues. 
Dès lors, quoique manquant de la certitude, mais sous le bénéfice 
des observations ci-dessus exposées, J'applique le nom de Hzlaris- 
Hilaris, qui n'appartient réellement qu'à la race portugaise, à la 
race andalouse (Rambur, Faune Andal. PI. 12, fig. 5), considérant 
— au moins provisoirement — cette race comme référable au type 
de l’'Espèce décrite par Ochsenheimer, suivant les termes de sa 
diagnose latine reproduite ci-dessus. 


2° Castille. — Escorialensis, Obthr. Très bien figuré: par Rambur 
sous le n° 6 de la PI 12 de la Faune de l'Andalousie, et représentée 
également par moi-même, dans la XII° livraison des Æfudes 
d'Entomologie (PI. VII, fig. 48). La forme Æscoralensis est très 
caractérisée par ses ailes non pas plus transparentes, ainsi que J'ai 
eu le tort de le dire à la page 23 de la XII° livraison précitée, 
mais par son faciès plus pâle, ce qui est dû à la confluence enva- 
hissante des parties rouges, lesquelles sont d’une teinte un peu 
rose, et non d’un rouge vermillon ou carminé vif, comme dans les 
autres races. Les lisérés jaunâtres, autour des réserves bleu indigo 
des ailes supérieures, sont amincis et d’une teinte généralement peu 
vive et peu tranchante. Les exemplaires que je possède ont été 
capturés à la fin de juillet 1870, sur les montagnes des environs 


de l’Escorial. 


602 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


3° France méridionale. — Gallie, Obthr. Très variable et très 
belle. Les figures 48 a, 48 & et 48 c de la PI. VII de la XIT° liv. 
des Etudes d'Entomologie représentent 3 formes choisies parmi 
celles qu’on rencontre communément à Vernet-les-Bains (Pyrénées- 
Orientales). 

Ma collection contient un millier d'exemplaires provenant des 
localités suivantes : Vernet-les-Bains, Fontpédrouse, dans les Pyré- 
nées-Orientales; Florac (Lozère); Rumilly (Haute-Savoie); Saint- 
Pons, près Gémenos (Bouches-du-Rhône); Puget-Théniers, Le 
Moulinet, Vallée du Roubion, Venanson, Lantosque à Notre-Dame- 
de-Fenestre, Entrevaux, Mont Gourdon, Escarène, Levens, Allos, 
dans les Basses-Alpes et dans les Alpes-Maritimes; Grenoble. 

Ce qui est remarquable, c'est, d’une part : l'impression d’unité 
qui ressort de l'aspect général présenté par les diverses formes 
françaises de Hilaris, — en mettant à part, bien entendu, les Aber- 
rations notables et la race spéciale Ononidis, Millière, — et, d'autre 
part, ce qui paraît cependant contradictoire avec la première obser- 
vation : la variabilité extrême de l'Espèce, en France. 

On ne distingue pas les individus des Basses-Alpes de ceux des 
Pyrénées-Orientales; mais partout en France, où la race est géné- 
ralement grande et de vigoureuse apparence, on rencontre des 
exemplaires très petits, à côté d’une quantité d'échantillons de 
taille supérieure; on observe les taches rouges des ailes supérieures 
d'une teinte plus ou moins carminée ou vermillon, entourées d'un 
liséré mince ou épais, jaune paille, jaune orange ou même rouge, 
de façon à se confondre avec les taches rouges elles-mêmes; on 
constate que les taches rouges en question sont confluentes et 
élargies, ou bien resserrées et nettement séparées les unes des 
autres: mais les transitions sont tellement insensibles, les exem- 
plaires sont si rarement absolument semblables entre eux que le 
mélange de toutes ces Æilaris appartenant à la race normale fran- 
çaise constitue un ensemble bien homogène, malgré son extrême 
variabilité individuelle. Je n'ai jamais vu de Zygœna Hilanis 
française ou espagnole ayant l'abdomen annelé de rouge. Tous les 
spécimens ont l'abdomen entièrement noir; ils ont le collier, les 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 603 


épaulettes, les poils du thorax d’un blanc plus où moins jaunâtre, 
mais jamais rouges, comme chez Æausta; le collier rouge restant 
l'un des caractères distinctifs de Fausta. 

Chez la Zygœna Hilaris-Gallie, les Aberrations sont rares; mais 
il y en a de bien remarquables; j'ai fait figurer sous le n° 120 de 
la XX° livraison des Ætudes d'Entomologie V'Ab. confluens; sous 
le n° 130 l’Ab. &icolor, et sous le n° 131, l’'Ab. wzzcolor. Toutes 
les trois viennent de Vernet-les-Bains. Je possède un second exem- 
plaire de l’Ab. 6icolor pris à Entrevaux et deux autres individus 
de l’'Ab. confluens provenant : l’un, de Vernet, comme le premier 
figuré, et l’autre, de Digne. 

Dans le 3° Vol. de Lépid. comparée, Jai donné la figure 180 
d'une belle Ab. icolor, capturée au Moulinet (Alpes-Maritimes) 
par Decoster, et la fig. 170 de l’Ab. Foulquteri, chez laquelle toutes 
les parties rouges sont devenues d’un beau jaune; elle fut prise par 
M. Gédéon Foulquier, à Saint-Pons, près Gémenos (Bouches-du- 
Rhône), le 12 juillet 1003. Je suis bien reconnaissant à M. Foulquier 
de m'avoir gratifñié de cette pièce insigne. 

M. Decoster a pris au Moulinet l’'Ab. Awrantiaca, chez laquelle 
toutes les parties normalement rouges sont devenues d’un Jaune 
orangé, tandis que l'Ab. Foulquieri est d'un jaune de chrome tres 
franc et sans aucun vestige de rougeâtre dont on voit quelques 
traces près du bord costal des ailes supérieures d'avrantiaca. 

Ma collection contient aussi une Aberration tendant au brun, 
prise aux environs de Marseille (ex coll. Bellier). 


4° Cannes. — Ononidis, Millière. Feu Millière avait découvert 
aux environs de Cannes une race qu'il avait appelée Onontdis, pour 
rappeler la plante Ononis mitissima, Papilionacée de la région 
méditerranéenne, dont se nourrit la chenille. Cette race est fort 
remarquable, absolument spéciale, et n'a, je crois, Jamais été 
retrouvée. J'en possède 4 exemplaires que Millière avait partagés 
par moitié entre Guenée et moi-même. Ils constituent une variété 
très caractérisée par le fond bleu noir des ailes supérieures, la 


couleur rouge carmin très foncée des taches des supérieures et des 


604 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


ailes inférieures, le peu de largeur de ces taches, — ce qui laisse 
beaucoup d'espace au fond indigo des ailes, — la minceur ou même 
la nullité du liséré blanc jaunâtre autour des taches rouges, l'ab- 
sence presque complète de pilosité blanchâtre sur la tête, le cou et 
le thorax. De plus, le bord interne des ailes supérieures, est entiè- 
rement indigo et nullement teinté de jaunâtre ou de rougeâtre. 

Je possède 3 coques qui sont semblables à celles de Æzlaris. 

Millière décrit la Zygœna Ononidis dans le 5° fascicule de 
Lépidoptérologie (Mémoire présenté à la Société des Sciences 
naturelles, des Lettres et des Beaux-Arts de Cannes; séance du 
20 mars 1870), et 1l donne de bonnes figures sous les n° 6, 7 (che- 
nilles), 8 (coque), 9, 10 (imago Get Q) de la PI V des Annales 
des Sciences Nat. de Cannes. 

Millière, dans le 2° Supplément au Catalogue raisonné des 
Lépid. des Alpes-Maritimes (sans date), indique le bois de la 
Présentation, à Cannes, comme localité de la Zyzœena Ononidis. 
À la fin de la description dans les Annales de Cannes (p. 7 et 8), 
Millière fait part de ses craintes, hélas! trop fondées, de ne plus 
Jamais revoir la Zygæna découverte par lui en 1878, « car », dit-il, 
« tout le monde ne sait-1l pas que certains papillons cessent de se 
montrer pendant 10, 15, 20 ans et plus, sans qu'il soit possible 
d'en définir la cause »; — puis, il informe que l'habitat de la 
Zyg. Onomdis lui a paru être surtout la lisière d'un bois de pins 
d'Alep, situé au Sud-Ouest, sur une colline de la vallée du Cannet; 
mais le pays de Cannes à bien changé depuis un quart de siècle 
et 1l est possible que les endroits sauvages où chassait Millière se 
trouvent aujourd’hui convertis en jardins et en villas. 


$° Algérie. —— Algira, Duponchel. — Duponchel, le continuateur 
de l'ouvrage de Godart, fut le créateur du nom A/gzra, appliqué 
pour la première fois à une Zygæna. On peut lire ce qui suit, à la 
page 86 de l’Æistoire Naturelle des Lépidoptères ou Papillons de 
France; Supplément; Tome IL. Paris, 1835. XXXII Zygène Algé- 
rienne; Zygœna Algira. Nobis. (PI. 7, fig. 6). Envergure, 10 lignes. 
« Cette Zygère, que nous avons reçue d'Alger, ne diffère de 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 605 


l'Ailaris que parce que les taches rouges de ses premières ailes ne 
sont pas cerclées de jaune, en même temps que leur bord interne, 
au lieu d'être de cette dernière couleur, est du même rouge que les 
taches. Du reste, elle lui ressemble entièrement. D'après cela, nous 
croyons pouvoir nous dispenser d'en donner une plus ample 
description ». Il est évident que cette description a été écrite sans 
l'examen minutieux et approfondi qui devrait être de règle; 11 y a 
cependant une observation fort importante qui n’a pas été négligée 
et dont il faut tenir grand compte : c'est que le bord interne des 
ailes supérieures est du même rouge que les taches. 

Passons maintenant à l'examen de la figure 6 de la PI. 7. Cette 
PL VII du Supplément-Zygénides est excellente. Duménil, qui à 
signé comme peintre, et M'e Plée, comme graveur, ont accompli 
un travail louable en représentant, avec une exactitude évidente, 
les 7 Zygæna qui figurent sur cette Planche VIT Il semble donc 
que nous pouvons avoir confiance dans la figuration qui se trouve 
publiée dans l'ouvrage de Duponchel. Toutefois, la figure 6 de la 
Zygæna Algira paraît donner l'image d'un exemplaire différent de 
celui qui a servi à la description. 

Il arrive en effet assez fréquemment qu’un auteur, en possession 


oarde l’un des 


de deux exemplaires d'une Espèce jugée nouvelle, g 


individus pour le décrire, tandis qu'il se dessaisit de l’autre échan- 
tillon destiné à servir de modèle au peintre, sans avoir préalable- 
ment examiné assez attentivement si les deux spécimens, — celui 
qui servira de type au descripteur et celui qui sera copié par Île 
dessinateur -— sont bien semblables entre eux. Il ne suffit pourtant 
point d'un examen superficiel; si exercé que soit l'œil d'un Ento- 
mologiste, rien ne le dispense de consacrer le temps et l'attention 
nécessaires à une minutieuse et indispensable comparaison. 

Donc, la figure 6 de la PL VII indique un liséré jaunâtre très fin 
autour des taches rouges, alors que Duponchel déclare que « les 
taches rouges des premières ailes ne sont pas cerclées de jaune ». 
C’est une contradiction qui aurait dû être expliquée. Du reste, la 
figure représente une Zygæna ayant le collier et les épaulettes 


blanchâtres; une grosse tache rouge occupe toute la base des supé- 


606 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


rieures, sauf à l'origine du bord interne, où un espace qui n’a pas 
été envahi par la couleur rouge est resté d’un indigo noir. Au delà 
de cette tache Indigo, qui est contiguë à la naissance même des 
ailes, la tache basilaire rouge se prolonge inférieurement au moyen 
d'un trait rouge épais qui aboutit à la partie inférieure de la grosse 
macule rouge externe. Un liséré jaunâtre d’une finesse extrême, 
mais très bien défini, limite extérieurement la tache basilaire rouge. 
Celle-ci se trouve nettement et entièrement séparée de l'unique 
grosse tache rouge externe, sauf inférieurement, par la jonction que 
forme le trait rouge longeant le bord interne. Un large espace 
indigo s'élève au-dessus de ce trait rouge qui longe le bord interne; 
la couleur indigo occupe le milieu des ailes et le bord costal entre 
la tache rouge basilaire et la tache rouge externe, et se relie par 
le bord costal à la même couleur indigo noir faisant le fond des 
ailes supérieures et occupant le bord terminal. Un point imdigo 
reste emprisonné dans la grosse macule rouge externe constituée 
par la confluence des taches médianes 2, 3 et 4 avec la tache ultime 
qui est en forme de haricot. De ces 4 taches confluentes résulte 
donc, dans le spécimen figuré sous le n° 6, une sorte d'ilôt rouge, 
centralement ponctué d’indigo noir et dont les contours sinueux 
sont très finement lisérés de jaunâtre. 

J'ai en vain cherché dans les échantillons algériens de ma 
collection un seul exemplaire qui fût pareil au papillon figuré 
sous le n° 6; je n’en ai point trouvé; la Zygæna algira figurée par 
Duponchel n'est représentée chez moi par aucun exemplaire simi- 
laire. C’est évidemment un spécimen un peu aberrant; mais le trait 
basilaire indigo, le bord costal indigo, la séparation nette entre la 
partie supérieure de la tache basilaire rouge et la grosse tache 
externe rouge, au moyen de la teinte indigo du fond des ailes, le 
collier et les épaulettes blancs font du papillon figuré par Duponchel 
une Zygæna bien différente de la Zygæna Algira, selon Herrich- 
Schaeffer, excepté en ce qui concerne le trait rouge qui longe le 
bord interne des ailes supérieures. 

En effet, Herrich-Schaeffer a représenté, avec le nom d’A/gzra, 


sous le n° 106 de la Tab. 15 des Zygænides Europ., la figure d'un 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 607 


papillon tout à fait dissemblable de l’A/gzra, Duponchel, et la 
Zygæna figurée par Herrich-Schaeffer (106) a été maintes fois 
retrouvée conforme, tandis que celle figurée par Duponchel n'a 
pas été reprise, du moins à ma connaissance. 

Huebner, avant Herrich-Schaeffer, avait figuré avec le nom de 
Iilaris, sous le n° 172, la même Zygæna que Herrich-Schaeffer a 
représentée sous le n° 106; et sous le n° 173, Huebner avait figuré 
avec le même nom de Æ1laris une Zygæna que j'a figurée moi- 
même, mais à tort, Je me hâte de le dire, avec le nom de ex, 
sous le n° 63 de la XIIL° livraison des Æ/udes d'Entomologte. On 
peut la considérer comme une variété de l'A/gira, à cause du trait 
rouge caractéristique qui longe le bord interne des supérieures. J'ai 
d'abord publié avec le nom de /elix, une autre Zygæna algérienne, 
sous le n° 4 de la PI 5 de la Il‘ livraison des Æzudes d'Ento- 
mologie; puis, dans la XIII° livraison, J'a1 donné une figuration 
très abondante de la Zygæna que J'avais désignée avec le nom de 
Felix, cette fois avec raison, sous les n°* 57, 64, 65, 66, 07, 68, 09 
et 7o de la PI. 7; j'avais aussi représenté la Zygæna Algira, selon 
Herrich-Schaeffer (106), sous les n° 59, 60, O1 et 62 de la même 
PI. 7; mais si j'ai fourni une figuration convenable d’A/gtra selon 
Herrich-Schaeffer, je ne puis dire que j'aie figuré l’A/gira initiale, 
celle qui a été nommée par Duponchel et que je ne connais point 
encore en nature. 

Staudinger, analysant les différences individuelles entre les 
Zygæna que j'ai appelées Felix, a donné le nom de Mauretanica 
à la Felix ayant le collier et les épaulettes blancs et dont l'abdomen 
est annelé de rouge, c'est-à-dire au n° 70 de la PI 7 de la III iv. 
des Ætudes d'Entomologie. Le même auteur a appelé Faustula la 
même /elix qui a le collier et les épaulettes blancs, avec les taches 
rouges des ailes supérieures largement entourées de blanchâtre, 
c'est-à-dire aux n° 57 et 69 de la même PI. 7 de la XIIT° livraison. 
Enfin le D' Adalbert Seitz, dans les Macrolépidoptères du Globe, 
acceptant ce qu'avaient fait ses devanciers, a publié sur la PI 7 
du Genre Zygæna (colonne £), Felix O' et Q, et sur la PIRE 
(colonne a), Faustula et Q. et Mauretanica Set Q selon Stau- 


608 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


dinger, A/gtra, selon Herrich-Schaeffer (106) et il a même inventé 
une ex2gua qui rentre dans la forme A/gira, H.-S. (106), de même 
que l'A. concolor, Obthr., dont 1l a été donné une copie d’après 
les £tudes d'Entomologie. Mais Staudinger et Seitz n'ont, pas plus 
que moi-même, connu la vraie A/gzra, selon Duponchel, et il n'y a 
qu'à comparer les diverses figures pour se fixer sur ce point litigieux. 
Toutes nos A/gira ont le thorax et la tête noirs. C'est Felix qui a 
les épaulettes et le collier blanc; mais Æelix manque du tiait rouge 
qui longe le bord interne des ailes supérieures. 


En Algérie, il y a deux Espèces faciles à confondre : l'A/gira, 
H.-S. (106) et la Felix, Obthr. Je crois avoir reconnu le caractère 
spécifique qui les distingue l’une de l’autre. C'est le /a2/ rouge 
dont parle Duponchel, et qui, partant de la tache rouge basilaire, 
longe le bord interne auquel 1l reste contigu chez A/gira, Duponchel, 
chez A/gtra, H.-S. 106, chez Ailaris, Huebner (172 et 173) et dans 
les Etudes d'Entomologie, XILI° livraison, sur les Zygæna figurées 
sous les n°50, 60, 6r,:62:de la PL 7 avec le nom d'A/e72 eti0s 
de la même PI. 7, avec le nom fautif de }'elix. Au contraire, comme 
Je le dis plus haut, Felix n'a aucun trait rouge partant de la tache 
rouge basilaire des ailes supérieures et qui soit contigu au bord 
interne des ailes; chez Æelix, la tache basilaire rouge est limitée et 
arrêtée net par un trait extérieur blanc vertical qui se prolonge 
horizontalement parfois, blanc, mais non rouge, le long du bord 
interne des ailes supérieures. 

Nous nous trouvons donc présentement dans la situation sui- 
vante : nous 1gnorons l’A/grra, Duponchel (PI VII, fig. 6); nous 
appelons A/gira la Zygæna publiée avec ce nom, sous le n° 106, 
par Herrich-Schaeffer; mais J'ai expliqué comment l’A/gira, HS. 
(106) n'était pas semblable à Algira, Duponchel. 


Je possède quelques exemplaires pris à Sebdou, à Khenchela et 
à Bainen (Alger, Holl) qui ne diffèrent de Æ/zlaris européenne que 
parce qu'ils portent le trait rouge qui longe le bord interne des ailes 
supérieures; d’ailleurs Duponchel ignorait que ce trait généralement 


blanc ou Jaunâtre chez A/zlaris, de France, peut aussi être rouge 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 609 


en France, tout comme en Algérie; J'ai sous les yeux des exem 
plaires probants. Mes Zygæna algériennes correspondent donc à la 
description très sommaire écrite par Duponchel et, d'après son 
texte, on peut les nommer A/gira; mais le thorax est tout noir, 
comme chez certaines //1laris, de France, et l'absence du collier et 
des épaulettes blancs ne permet pas l'identification avec l’exem- 
plaire figuré comme A/gira, par Duponchel. La Zygœna Algira, 
Herrich-Schaeffer (106), est fort variable, et les deux exemplaires 
figurés par Huebner sous les n°” 172 et 173, quoique très différents 
l’un de l’autre, appartiennent bien à la même unité spécifique. Ma 
collection contient 275 échantillons, parmi lesquels je vois d’insen- 
sibles passages entre le n° 172 et le n° 173 de Huebner; les spé- 
cimens conformes à la description de Duponchel (mais non à la 
figure donnée par cet auteur), grâce aux exemplaires transitionnels, 
sont référables à l’A/gira, Herrich-Schaeffer (106); mais il reste 
une lacune que je me déclare impuissant à combler; cette lacune 
résulte de mon ignorance d'un exemplaire qui soit conforme à la 
figure certainement très exacte de l'Algira, Duponchel. Il faut 
admettre aussi la vraisemblance des hybridations naturelles entre 
Algtra et Felix, et ces hybridations peuvent donner des papillons 
naturellement transitionnels entre A/gira et Felix. 


Provisoirement donc, et en attendant qu’on retrouve la véritable 
Algtra, Duponchel, je laisse le nom d'Algira à la Zygæna ainsi 
nommée par Herrich-Schaeffer, en reconnaissant qu'il y a des 
probabilités pour que le nom donné par Herrich-Schaeffer soit 
remplacé par une autre désignation, lorsqu'on aura retrouvé la 
vraie A/gtra, Duponchel; pourvu toutefois qu’il soit démontré que 
cette vraie A/gzra diffère spécifiquement de l’autre; car il faut 
admettre comme possible qu'on trouve des individus transitionnels 
établissant l'unité spécifique des diverses A/gira et la réunion de 
celle de Duponchel à celle de Herrich-Schaeffer. On ne peut encore 
rien préjuger de certain à cet égard. Actuellement donc, il me 
semble qu'on peut établir la nomenclature relative à A/zira éomme 
suit : 


89 


610 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


1° Algira, Duponchel (Supplément Zygénides, PL VIT; fig. 6. — 
Figur. #ec descript.). 


2° | Algira, Duponchel (Supplément; Vol. Il; p. 86. — Descript. 
nec figur.). 
Hilaris, Huebner; fig. 173. 
\ Aigrra, Herrich-Schaeffer; fig. 100. 
Hilaris, Huebner; fig. 172. 
Alotra  Obthr (CEtud. d'Ent, XIII, Pl 7; te 50, 60 167 62). 
Fe Obthrt(Etad" d'Ent., XI PIERRE 206) 
Ab. Concolor, Obthr. (Etud. d'Ent, NI; PI. 2; fig 4). 
Algira, Seitz (Zygæna; PL 8; col. a). 
Exigua, Seitz (Zygœna; PL 8; col. a). 


Les amateurs de dénominations nouvelles pourraient s'offrir le 
plaisir de donner des désignations à un certain nombre de varia- 
tions de la Zygæna Algira, Herrich-Schaeffer. Les n°* 172 et 173 
de Æularis, Huebner, sont notamment bien différents. J'aurais pu, 
sans grand effort, créer quelques noms nouveaux; toutefois, J'aurais 
considéré cette opération comme une œuvre de mauvais goût; étant 
donné d’ailleurs l’état d'incertitude où nous restons sur la nature 
de la véritable A/gira figurée par Duponchel et les conséquences 
qui peuvent résulter pour la Nomenclature de la redécouverte de 
l'Algira, Duponchel. 

Algira Herrich-Schaeffer éclôt de très bonne heure, en février et 
mars, dans certaines localités, et on la trouve au mois de Juin et 
même de juillet dans d’autres circonstances. Voici l'indication des 
localités et des époques d'apparition pour chaque localité que Je 


(*) Je rapporte à A/gira, Herrich-Schaeffer (106), la Zygœna Felix figurée 
sous le n° 63 de la PI. 7, de la XIII® liv. des Z?ud. d'Ent., à cause du trait 
rouge qui part de la partie inférieure de la tache basilaire rouge et qui se pro- 
longe, le long du bord interne, au delà même de la tache médiane rouge infé- 
rieure; cependant l'aspect du papillon reste énigmatique. D'ailleurs, la variabi- 
lité est considérable chez A/gira, aussi bien que chez Felix; mais il m'a semblé 
qu'on pouvait regarder comme valable, spécifiquement, le caractère résultant de 
ce trait rouge, le long du bord interne des ailes supérieures; voilà pourquai Je 


classe le n° 63 parmi les A/gira. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE OTT 


relève d'après les documents que contient ma collection : Sebdou, 
mai 1907, H. Powell; juin 1880, D' H. Codet; Magenta, juin 1880, 
L' Lahaye; Khenchela, mai 1908, H. Powell; Lambèse, Dayrem, 
mai 1907; mai 1875, G. Allard et R. Oberthür; juin 1884, J. Merkl; 
juin 1885, L. Bleuse;, Phihppeville, D' Charles-Henri Martin; 
Batna, D' C.-H. Martin; Chemin du Col des Arzaiïls, près Sebdou, 
juin 1907, H. Powell; Forêt de Bainen, E. Holl, jun et 
juillet 1007; El-Biar, mars 1007, E. Holl; Environs d'Alger, 
mars 1807, E. Holl; Ravin de la Femme-Sauvage, près Alger, 
Ch. Obthr., mars 1868; Alger, février 1881; Méchéria, mars 1886, 
L' Lahaye; Aïin-Draham, en Kroumurie, V. Faroult; Alger, ex coll. 
Boisduval; Algérie, ex coll. Guenée. 


Zygæna Felix, Obthr. 


La Zygæna Felix ne me parait point, comme 1l est indiqué dans 
le Catalog 1901 de Staudinger et Rebel, être une variété de Æ/1aris. 
C'est plutôt A/grra qui est probablement une race de Æ/zlanis,; du 
moins si l’on s'en rapporte aux exemplaires assez rares qui éta- 
blissent la transition entre Ailaris et Algira. 11 est certain que les 
spécimens de parfaite transition entre Æ/ilaris et Algira, Herr.-Sch. 
(106) sont très peu nombreux; mais ils existent; C’est ainsi que Je 
suis redevable à l’obligeance de M. Holl d'une Algira G' prise à 
Bainen, le 30 mai 1904, et qui figurerait, sans exciter aucun sen- 
timent de surprise, au milieu des Æ/ilaris pur sang; mais je ne 
connais aucune transition satisfaisante entre Felix et Hilaris. D'ail- 
leurs Felix manque de la tache basilaire indigo, très petite, mais 
très nette, contiguë au corps, qui se remarque chez Ailaris, chez 
Alzgira, Duponchel, et très généralement chez Algira, H.-S. (106) 
et Huebner (Æ/zlaris, 172). 

J'ai déjà parlé de la Zygœna Felix, dans l’article consacré à 
Algira. La moitié des exemplaires de Felix a l'abdomen annelé 
de rouge, tandis qu'A/géra, comme Ailaris, a toujours l'abdomen 
entièrement noir, du moins d’après ce que je connais. 


612 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


f'elix a généralement le double collier et les épaulettes blancs; 
mais certains exemplaires ont le thorax et la tête entièrement noirs; 
les taches rouges des ailes supérieures sont séparées ou confluentes; 
elles sont généralement entourées d'un mince filet blanchâtre; chez 
quelques exemplaires, le liséré blanchâtre est plus épais; chez 
d'autres, au contraire, il est presque nul. Les taches et les ailes 
inférieures sont ordinairement d'un ton rose carminé, quelquefois 
pâle, quelquefois vif. Comme j'ai essayé de l'expliquer ci-dessus, 
le caractère qui distingue spécifiquement la Zygœna Felix et la 
sépare d’A/gzra, c'est la façon dont la tache basilaire rouge est 
limitée, chez Felix, par un liséré blanc, un peu sinueux, descendant 
en direction droite et verticale, du bord costal au bord interne, et 
sy arrêtant généralement tout net. Un espace indigo noir sépare 
alors la tache basilaire des taches rouges médianes. Quelquefois 
cependant le liséré blanc qui borde extérieurement la tache basilaire 
rouge se prolonge horizontalement en une petite queue blanche, 
jamais rouge, le long du bord interne. 

Je possède }elix de Boghari, Sebdou, Lambèse, Géryville, Khen- 
chela, Magenta. Elle éclôt ordinairement en juin. J'en ai fourni des 
figures bien réussies sous le n° 4 de la PI V de la IIT° livraison 
des Ætudes d'Entomologie et sous les n°* 57, 64, 65, 66, 67, 68, 609 
et 7o de la PI. 7 de la XIIT° livraison. 

J'ose dire que la figuration faite en gravure sur pierre, par 
Dallongeville, des diverses Zygæna, sur la PL VII de la XIII lv. 
des Ætudes d'Ent. est excellente, et que la nervulation, si souvent 
négligée dans les reproductions des figures de Zygæna, a été l’objet 
du soin le plus attentif. 

On ne pouvait produire une Iconographie plus consciencieuse et 
plus exacte que celle-là. Je me fais toujours un plaisir et un devoir 
d'en faire honneur à l’habile artiste qui l’a exécutée. 

La Zygæna Felix se place dans la Nomenclature à côté de 
Formosa qui est plus pâle, plus transparente, mais qui lui ressemble 
beaucoup pour la forme des taches des ailes supérieures, et 
notamment pour le caractère de la limitation de la tache basilaire 


TOSE. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 613 


Staudinger a distingué les variétés Æaustula et Mauretanica, 
dont j'ai déjà mentionné les particularités, en dissertant à propos 
de la Zygœna Algira. Il serait aisé d'augmenter le nombre des 
dénominations, en faisant état des variations, par plus ou par 
moins, dans la dimension des taches rouges, leur confluence, l’im- 
portance des lisérés blancs, l'intensité de la couleur rouge. Je crois 
l'excès de cette analyse plutôt nuisible qu’utile, et il me semble 
que la Nomenclature n’a rien à gagner à une surcharge finalement 


peu justifiée. 


Zygæna Marcuna, Obthr. 


Figurée sous le n° 58 de la PI. 7 de la XITF° livraison des Æ/1des 
d'Entomologie. L'Espèce a été découverte à Marcouna, près Lam- 
bèse, par feu Staudinger, en 1887; elle a été prise par feu le 
D' Charles-Henri Martin à Laghouat. Lorsque nous acquimes sa 
collection, j'y trouvais deux exemplaires de la Z. Marcuna, d'une 
forme un peu différente de celle de Lambèse. Marcuna est une 
espèce bien facile à distinguer par le bord interne de ses ailes 
supérieures qui est indigo, depuis la naissance des ailes; la tache 
basilaire rouge ne descendant pas jusqu'à la rencontre du bord 


interne et s’arrêtant net, avant d'y parvenir. 


Zygæna Fausta, Linné. 


Bien représentée sous la lettre H de la Tab. I, avec le nom 
linnéen de Æausta, par Johann-Caspar Fuessly, en 1778, dans 
Magazin fuer die Liebhaber der Entomologie, et figurée de nou- 
veau, mais plus grossièrement, par Esper, en 1770, sous les n° 14 
et 14 de la Tab. XVIII du Tom. II. Bien caractérisée par son 
collier toujours rouge, la Fausta parait avoir été universellement 


reconnue et n'a pas de synonymie, 


614 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


La Zygena Fausta (Der Gluecksvogel, — ou l'oiseau du 
bonheur, — suivant l'expression de Sulzer, rapportée par Esper), 
ne se trouve m en Angleterre, ni en Algérie. Elle semble habiter 
en France les contrées exclusivement calcaires, éclôt deux fois par 
an, aux mois de mai et d'août, dans certaines localités, ainsi en 
Charente; mais paraît éclore seulement en août et au commen- 
cement de septembre dans quelques autres régions, comme à 
Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales), où nous n'avons jamais 
reconnu qu'une seule génération annuelle, commençant vers le 
10 août. 


C'est un papillon charmant, généralement abondant dans les 
lieux qu'il habite, se mariant volontiers à l'espèce congénère 
Transalpina-Hippocrepidis qui éclôt en même temps que Fausta 
et vit dans les mêmes endroits. Je crois qu'on a authentiquement 
constaté jusqu'ici une vingtaine de cas d’hybridation réelle et 
effective entre Aippocrepidis et Fausta. Mon frère a trouvé à 
Dompierre-sur-Mer, et gardé pendant plusieurs heures de suite, une 
paire des deux Espèces solidement accouplées. La © Hippocrepidis, 
après son union avec Fausta Œ, a pondu des œufs, mais il n’est 
pas éclos de petites chenilles, tandis que M. Harold Powell, à 
Vernet-les-Bains, obtint quelques larves d’une ponte hybride des 
mêmes Zygena qu'il avait rencontrées unies, en 1908. Malheureu- 
sement, toutes les petites chenilles nées de cet accouplement hybride 
sont mortes. J'ai relaté le fait en question à la page 30 du Vol. III 
des Ætndes de Lépidoptérologie comparée. 


Il en fut de même pour les jeunes chenilles que Guenée avait 
obtenues d’un accouplement hybride des Zygœena Achillee et 
Filipendule, trouvé par lui au pied du Mont Salève, près Genève, 
en juillet 1864 (Ann. Soc. ent. France, 1865; Souvenirs de Zermatt, 
P. 92, 93). 


La Zygœna Fausta se trouve aux environs de Paris, à La Ferté- 
Alais, à Lardy et à Beaumont (Oise); dans les Charentes; aux 
Pyrénées-Orientales; dans l'Isère; en Provence et dans le pays de 
Nice; en Espagne et dans diverses localités de Suisse et d’Alle- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 615 


magne. Elle donne lieu à différentes formes géographiques et à 
des Aberrations très intéressantes. 


1° Charente. — Fortunata, Rambur (Cat. Syst. Andal., p. 172; 
note). La Zygœna Fausta se plait sur les plateaux crayeux des 
collines charentaises, au milieu des bouquets de chênes-blancs qui 
forment des petits groupes séparés par de larges clairières. C'est 
un plaisir délicieux de rechercher ces exquises petites Zygènes dans 
les localités calcaires que rend très attrayantes la grande variété 
de la Flore naturelle. On aperçoit les Fausta voltigeant au soleil 
et ressemblant à des mouches de couleur rouge orange; ou bien 
on les découvre, les ailes fermées, posées sur les tiges d'herbes, 
tenant leurs grosses antennes noires droites et érigées et présentant 
un aspect très bigarré, tricolore, du plus agréable effet. Le 19 sep- 
tembre 1005, les Zygœna Fausta et Hippocrepidis étaient extrè- 
mement nombreuses dans les allées de la forêt de Saint-Amand- 
de-Boixe; il y en avait une moins grande quantité, le 10 sep- 
tembre 1906; mais en 1907, on pouvait en récolter beaucoup 
d'exemplaires le 20 août, à Dompierre-sur-Mer; le 31 août, dans 
la forêt de Chizé (Deux-Sèvres); le 2 septembre, à la forêt de 
Saint-Amand-de-Boixe et à Angoulême, ainsi que nous pûmes nous 
en rendre compte, au cours d’une rapide excursion. 

Dans la région charentaise, la Zygena Fausta n'est généralement 
pas de grande taille, bien qu’on y voie, mais à titre exceptionnel, 
des exemplaires extrêmement développés. Les échantillons normaux 
de la Fausta, en Charente, ont la teinte rouge des ailes d'un ver- 
millon un peu orangé; les taches rouges des ailes supérieures sont 
élégamment cerclées de blanc jaunâtre; l'abdomen est largement 
recouvert, mais en dessus seulement, de rouge vermillon; le dernier 
anneau abdominal est d’un indigo noir très vif et l'extrémité anale 
est jaune orangé; le double collier est de la même couleur rouge 
que le fond des ailes; le thorax noir, légèrement velu, est traversé 
latéralement par deux traits verticaux, fins, blanchôtres. Les ailes 
supérieures sont frangées très finement de fauve pâle; les infé- 
rieures sont bordées d’un étroit liséré indigo; les antennes sont 


610 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 
Re Un =, 
d'un noir luisant, terminées par une massue épaisse; les pattes sont 
Jaunâtres. Généralement, toutes les taches rouges qui décorent les 
ailes supérieures sont liées entre elles par le liséré blanc jaunâtre 
qui les entoure. La tache externe ultime, en forme de haricot, se 
trouve ainsi unie à la tache extracellulaire, de façon à emprisonner 
une petite tache arrondie indigo noir qui paraît comme une prunelle 
très vive, encerclée de blanc, dans un entourage rouge. 

Rambur (Cat. Syst Lépid. Andalousie, p. 170; note) remarque 
que : « la Fausta, comme les Espèces du même groupe, pendant 
l’accouplement, fait sortir de dessous le bord du huitième segment 
deux touffes de poils nombreux, divergents, jaunâtres, et qui 
d'ordinaire sont réunis en deux faisceaux couchés et complètement 
cachés sous les bords du segment; en dessus, ils s’insèrent sur le 
bord du neuvième, vers la base de la pince; ils paraissent exister 
chez la plupart des Zygènes, mais moins prononcés ou rudimen- 
taires et d’une couleur obscure ». 

Mon ami Gabriel Dupuy, qui réside dans une localité particu- 
lièrement favorisée pour la richesse et la variété de la flore et de 
la faune entomologique, a récolté, au cours de sa carrière, un 
nombre considérable de papillons, et notamment de Zygœna 
Fausta. C'est lui qui, chassant à Angoulême avec son gendre, 
M. Albéric Frémont, professeur au Lycée de Nantes, a successi- 
vement capturé plusieurs exemplaires de l'Ab. Lugdunensis, Mil- 
lière, à taches et à ailes jaunes. J'ai fait figurer sous le n° 177 de 
la Planche XXIX, dans le Vol. III des Ætudes de Lépidoptérologie 
comparée, un spécimen de l'Ab. Lusgdunensis, prise le 10 septembre 
1908 sur le plateau de la Tourette, localité excellente située au sud 
d'Angoulême, à une faible distance de la ville. Je suis redevable 
de cette rare Aberration à la générosité inépuisable de M. Gabriel 
Dupuy. 

Mais des Aberrations d'un intérêt encore plus grand sont celles 
que J'ai fait figurer sous les n° 108 et 100 de la PI XXII du 
même ouvrage; la Fausta-Melusina (fig. 108) capturée à Angou- 
lème, le 5 juin 1906, et la Fausta-Dupuyi (fig. 109) trouvée au 
même lieu, le 6 juin 1906. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE G17 


La valeur scientifique de ces deux Aberrations est très grande. 
En effet, si l’on compare le n° 108 de la PI XXII, représentant 
une Fausta-Melusina, aux n° 119 et 120 de la même PI. XXII, 
figurant non plus Fausta, mais des Carmolica prises à Digne, on 
constate aisément qu'une même Loi de Variation a atteint de la 
même manière, et dans des pays différents, deux Espèces bien 
distinctes, mais appartenant à un même Genre. 

La Carniolica-Melusina, de Digne, n° 120, ne diffère guère que 
par son collier blanc et ses épaulettes thoraciques de la Fausta- 
Melusina n° 108, d'Angoulême, dont le collier rouge et la rayure 
du thorax caractérisent l'Espèce : Fausta. 

Le n° 100, Fausta-Dupuyi, avec sa tache ultime des ailes supé- 
rieures blanche (celle qu'on appelle : Ze haricot, à cause de sa 
forme), émane encore de la même Loi de Variation qui atteint la 
Carniolica-Dupuyi, de Digne, n° 110, présentant elle-même la 
tache dite : en haricot, de couleur blanche. Les n° III, 112, 113 
sont des Carniolica qui forment pour la couleur du Æarcot un 
excellent passage entre la forme normale à haricot rouge, figurée 
sous les n° 115, 116, 117, 118 ét l’Aberr. Dzapuyt, n° 110. 

Nous sommes donc, pour le Genre Zygæna, témoin de deux 
preuves nouvelles de la Loi de Variation, dont j'ai déjà fait res- 
sortir de nombreux exemples à la page 42 de la livraison XX des 
Etudes d'Entomologie Ces nouveaux cas, non encore observés 
jusqu'ici, nous sont fournis par les Fausta-Melusina n° 108 et 
Fausta-Dupuyi n° 109, comparées aux Carniolica-Melusina n°° 119 
et 120, et Carntolica-Dupuyi n° 110. 

On ne peut nier l'importance des conséquences philosophiques 
résultant de la constatation de faits qui démontrent irréfutable- 
ment l'existence de ZLoës de Variation communes à diverses Espèces, 
alors que ces Espèces font évidemment partie du même groupement 
synthétique d'Espèces, auquel nous avons donné le nom de Genre. 
Les Espèces sont des unités indépendantes les unes des autres, 
formées par la collectivité des individus dérivant des mêmes 
ancêtres; ce sont des spécialités qui restent toujours elles-mêmes; 
ainsi Fausta et Carniohica, Fausta et Hippocrepidis, malgré les 


618 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


tentatives d’hybridation naturelles dont nous sommes les témoins, 
notamment entre Fausta et Hippocrepidis, mais qui ne parviennent 
pas à changer, ni à modifier en quoi que ce soit les générations 
successives d'aucune des Espèces, même de celles chez qui les faits 
d'hybridation sont plus fréquents. Cependant les Espèces diverses 
sont plus où moins rapprochées ou éloignées les unes des autres, 
par leurs caractères propres. En les observant, nous constatons chez 
certaines Espèces, qui sont pourtant séparées entre elles par des 
particularités quelquefois importantes, des caractères communs qui 
les rapprochent. Ces affinités, d’une part, nous invitent à une syn- 
thèse, tandis que, d'autre part, ces distinctions nous obligent à une 
analyse d’après laquelle nous classons séparativement les individus 
pourvus de tel caractère (par exemple le collier rouge et les traits 
thoraciques de Fausta), comparativement à tel autre (le collier 
blanc, les épaulettes courtes et pointues bordées de blanc et le 
thorax dépourvu de bandelettes, chez Carniolica). 

Les Espèces distinctes les unes des autres par des caractères 
constants et les Genres dans lesquels se groupent les Espèces que 
rapproche un ensemble de caractères communs, constituent des 
réalités présentement reconnues et admises par tous les Natura- 
listes. Le Genre existe donc et il est la preuve de l’idée synthétique 
initialement conçue par le Créateur. Nous avons acquis la per- 
ception de cette parcelle de méthode qui est contenue dans l’œuvre 
divine et nous sommes parvenus à la connaissance d’une vérité 
d'ordre tout à fait intellectuel et idéal, obtenue par le travail 
d'observation et de comparaison des êtres organisés auxquels se 
sont attachées les générations successives des Naturalistes. C’est à 
Linné que revient l'honneur d’avoir conçu la classification des 
Espèces dans des Groupements, et c’est à ce Génie que nous devons 
la base initiale de tous les progrès dont les réalisations successives, 
plus rapides dans l’espace de moins de deux siècles que dans tout 
l’ensemble des siècles précédents, ont pour origine le premier rayon 
de lumière qui nous fut révélé par le Systema Nature. 

Nous nous sommes donc approprié la connaissance de cette 
partie idéale de la Création qui est un des éléments de la classifi- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE G19 
RE 
cation instituée par Dieu lui-même, non seulement Auteur de la vie 
et Créateur des Espèces, mais aussi Auteur de la Méthode classif- 
eatrice dont ce que nous appelons le Genre est la première expres- 
sion; les Genres forment ensuite les Familles; les Familles forment 
des ordres et ainsi de suite. Nous pouvons constituer les groupe- 
ments à notre gré; nos essais seront plus ou moins satisfaisants. 
L'essentiel, présentement, n’est pas dans l'excellence qui aurait déja 
pu être obtenue de la constitution des groupements entre eux et les 
uns par rapport aux autres. Il faudra plus où moins de temps pour 
réaliser la perfection dans l'établissement de la classification; 
d’ailleurs, on peut espérer fermement que les progrès seront l'œuvre 
du temps et que des intelligences bien averties profiteront elles- 
mêmes et feront profiter la Science d'éclairs révélateurs. Mais ce 
qui importe, c'est que l’Idée initiale surgit et qu'elle reçût un com- 
mencement d'application. Maintenant que nous possédons la per- 
ception de l’idée vraie de classification méthodique des êtres 
organisés, conçue par la Suprême Intelligence, et que nous y 
ajoutons celle d’une Législation d'ordre supérieur qui règle tous 
les détails, nous n'avons qu’à observer judicieusement et à accumuler 
les témoignages. Voilà donc pour quelles considérations il est si 
intéressant de rencontrer à Angoulême les Fausta-Melusina et les 
Fausta-Dupuyi, tandis qu'à Digne, on trouve les Carntolica- 
Melusina et les Carniolica-Dupuyi; car ces faits naturels consti- 
tuent des preuves nouvelles et irréfutables, corroborant l'opinion 
que nous avons déjà, et à différentes reprises, exprimée dans les 
Etudes d'Entomologie. 

Je trouve le plus grand intérêt des études entomologiques dans 
l'observation de ces faits certains et réels que nous présente la 
comparaison des productions de la Nature elle-même La Faune 
et la Flore sont offertes et livrées à notre examen et à notre 
réflexion; nous sommes doués d’une intelligence qui nous permet 
de tirer de l'étude à laquelle nous nous consacrons telles déductions 
qui nous paraissent légitimes et raisonnables. 

Je ne me lasserai donc point de publier ce que je crois être la 


vérité, lorsque je pense avoir réussi à en percevoir quelque parcelle. 


620 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Dès lors je ne cesserai de déclarer, ainsi que je l'ai toujours fait 
Jusqu'ici, d’après toutes les constatations que J'ai pu réunir des faits 
naturels, que les êtres n’ont pas été jetés sur la terre au hasard et 
dans une confusion chaotique. Il semble évident qu'ils ont été 
classés suivant une méthode dont nous sommes loin de connaître 
encore toute la divine perfection, mais dont le génie de Linné, 
ainsi que Je lui en rends plus haut la justice, nous a révélé le 
principe. 

Cette variation si parallèlement conforme de deux Espèces 
différentes d'un même Genre, dans deux pays différents, nous 
paraît être une preuve considérable, s’ajoutant à toutes celles déjà 
acquises, en vue de démontrer non seulement qu'à côté de la 
Création matérielle des Espèces et des individus qui les composent, 
il y a la Création purement idéale d’une Classification méthodique 
d’après laquelle toutes les Espèces doivent être rangées dans 
l'ordre que leur attribuent leurs affinités; mais encore qu'il y a une 
Législation concernant tous les détails, parmi lesquels aucun ne 
peut, dans ces conditions, paraître infime, ni rester négligé. 

La réalité des Lois régissant la variation des êtres organisés 
prouve la réalité de l'intervention du Législateur. Sa Suprême 
Intelligence en a conçu l'harmonie; sa Toute-Puissance en a fixé 
l'application; sa Providence en maintient la durée. 

Les effets des Lois que nous constatons rendent témoignage de 
la cause ne résidant pas ailleurs que dans l’action du Très-Haut. 


Tous les passages existent entre les Aberrations Melusina et 
Dupuyi, aussi bien chez Carniolica que chez Fausta. Jusqu'à présent 
ma collection contient 7 exemplaires de l’'Ab. Fausta-Dupuyt, très 
caractérisée; ils ont été pris à Angoulême au commencement de 
Juin 1006, et à Dompierre-sur-Mer, le 27 mai 1900 et le 
29 août 1007. 

Les transitions existent également entre la forme type et l'Ab. 
Melusina, aussi bien qu'entre la forme à ailes rouges et celle à ailes 
jaunes (Zugdunensis, Millière). D'ailleurs on trouve des exemplaires 
chez lesquels les taches rouges des ailes supérieures sont plus ou 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 621 


moins rétrécies ou élargies et plus ou moins largement cerclées de 
blanchâtre. Parmi les échantillons qui, par leur nombre prépon- 
dérant, fixent la normalité de la taille et de la couleur, ainsi que 
nous l'avons décrite au commencement de cette notice, pour la race 
charentaise, il s’en trouve qui, exceptionnellement, se rapprochent 
des formes méridionales à cause de la grandeur des ailes, du ton 
carminé de la couleur rouge, de la suppression même du lséré 
blanchâtre qui entoure les taches rouges. Mais ceci est parfaitement 
conforme au fait que j'ai maintes fois signalé déja et qui se reproduit 
si fréquemment chez les Espèces dont la forme est variable, avec 
les diverses localités qu’elles habitent. L'apparition quelque part, 
à titre d'Aberration, d'exemplaires différents de ceux qui consti- 
tuent la forme géographique normale, mais qui se rapporteraient 
plutôt à une autre forme locale, est d’ailleurs une règle démons- 
trative de l'unité spécifique. 

Aussi est-il bien nécessaire, pour les Espèces dont les formes 
géographiques sont distinctes, d'étudier des séries nombreuses 
d'exemplaires de chaque localité. Il n’y a pas d'autre moyen pour 
apprécier avec quelqu’exactitude la forme normale d'une Espèce, 
dans un lieu, par rapport à celle provenant d'une ou de plusieurs 
autres localités différentes. 


2° Région autour de Paris. — Feu mon ami Emmanuel Martin 
capturait jadis à Beaumont-sur-Oise, au Nord de Paris, vers le 
commencement de septembre, une race petite et peu vivement colorée 
de la Zygæna Fausta. W avait trouvé à Beaumont un exemplaire 
de l’Aberration à taches et à ailes brunes dont J'ai fait figurer 
l'analogue avec le nom de érunnea, sous le n° 178 de la PI XXIX 
du Vol. III des Ætudes de Lépidoptérologie comparée. L'échantillon 
représenté par mes soins a été capturé en Thuringe. 

Au Sud de Paris, à Lardy, on trouve à partir des premiers Jours 
de juillet, comme aussi à La Ferté-Alais, en août, une race de 
Fausta plus grande qu’à Beaumont-sur-Oise, assez variable, très 
analogue pour l’ensemble de ses échantillons, dont j'ai sous les 


yeux une nombreuse série, à la Fausta charentaise. Je crois qu'à 


622 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Lardy et en Charente, la race de l’austa diffère peu de la forme 
de Germanie, si J'en juge par quelques exemplaires de Stuttgart et 
un nombre malheureusement un peu restreint d'individus ayant fait 
partie de la collection Kuwert, de Berlin. La localité allemande, 
chez les spécimens de la collection Kuwert, est indiquée, mais en 
abrégé, et dès lors Je ne puis saisir le nom de lieu qui est trop 
incomplètement écrit. Que les Entomologistes se préoccupent donc 
de leurs successeurs, pourtant le plus souvent inconnus d'eux! 
Celui qui a écrit au moyen de quelques signes ou lettres dont la 
signification lui était sufhsamment connue, se trouvait sans doute 
parfaitement fixé sur la valeur de son abréviation, et dès lors 1l 
ne se préoccupait pas de l'avenir. Du reste, il ne se rendait proba- 
blement pas compte de l'intérêt scientifique qu'un autre Entomo- 
logiste aurait trouvé aujourd'hui à comparer des Æausta d’une 
provenance allemande bien définie, avec des Æausta françaises 
également pourvues de toutes les indications de localité et de date 
de capture, qui sont si nécessaires à connaitre. Combien de fois 
ai-Je prié des amis dont je visitais la collection de se souvenir qu'ils 
édifiaient un monument pour la Science et qu'ils semaient peut-être 
pour d’autres qui récolteraient, s'ils en laissaient les moyens. Quel 
parti tirer en effet de papillons dont la provenance n'est pas net- 
tement indiquée? Au contraire, un Lépidoptère dont l'épingle est 
pourvue d'une étiquette contenant la documentation de lieu et de 
date de capture sera toujours utile. 

Il ne semble pas qu'on trouve /ausla, au mois de mai, aux 
environs de Paris. Je suis porté à croire que Fausta y éclôt une 
seule fois par an, en été. Ce serait un fait biologique intéressant 
à constater et sur lequel je prends la liberté d'appeler l'attention 
des Entomologistes parisiens, afin que nous soyons exactement 
fixés. Alors qu'en Charente, la double apparition annuelle, au 
printemps et en été, est pour Fausta et Hippocrepidis une règle 
bien authentiquement observée, 1l semble que dans bien d’autres 
régions, ausla n’a qu’une éclosion annuelle unique. 

Ainsi semble-t-il en être à Digne, dans les Alpes-Maritimes et 


les Pyrénées-Orientales. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 623 


3° Digne. — La Zygena Fausta, dans les Basses-Alpes, est d'un 
rouge plus carminé que dans les Charentes et qu'à Lardy; de plus, 
le liséré blanchâtre qui entoure les taches rouges des ailes supé- 
rieures est très aminai. C'est à Digne que Augustin Coulet trouva 
la jolie Ab. /ricolor que j'ai fait figurer sous les n°* 28 et 29 de la 
PL III de la livr. I des Ætudes de Lépidoptérologie comparée. Je 
possède 7 exemplaires de cette Ab. #zcolor, tous pris à Digne, et 
ma collection contient un spécimen qui est #icolor du côté gauche 
et normal du côté droit. On obtient cette même Ab. #zcolor en 
traitant par la chaleur les chrysalides de la Zygæena Fausta. 
M. Hans Burgeff, de léna, m'a envoyé 8 échantillons de l'Ab. 
tricolor dont les chrysalides avaient été soumises à une température 
de + 49 degrés centigrades. J'avoue que J'ai peine à croire à la 
survie des chrysalides, lorsqu'elles ont été soumises à une pareille 
chaleur. Quoi qu'il en soit, si je compare les Æausta tricolor natu- 
relles de Digne aux #icolor artificiellement obtenues à léna, Je 


déclare ne trouver aucune différence entre elles. 


4° Alpes-Maritimes. — Niceæ, Stgr. Race caractérisée par sa 
taille relativement grande, la couleur rouge vermillon vif de ses 
ailes, le développment des taches rouges, la réduction des lisérés 
blanchâtres qui sont transformés en filets extrèmement minces et 
quelquefois presque nuls. La variété Niceæ se trouve à Gorbio, au 
Moulinet et à Castillon; elle diffère assez peu de Zætca, Rambur, 
qui paraît être à Malaga la forme de Fausta; mais il ne faut pas 
croire que toutes les Fausta des Alpes-Maritimes appartiennent à 
la variété Niceæ. Dans la région du Var et des Alpes-Maritimes, 
à Sallagriffon (8 septembre 1906); à Valbelle, près Méounes (1, 2 
et 3 octobre 1906); à Péone (3 septembre 1906); à Montrieux, près 
Méounes (17-23 septembre 1900); à Entrevaux, à Puget-Théniers, 
à Dalnis, à Solliès-Pont, on trouve une race de Fausia assez sem- 
blable à celle de Digne et tout à fait différente de celle qu'on peut 
récolter en juillet et août au Moulinet et à Castillon. La race de 
Digne fait la transition entre la forme de Faws/a charentaise et 
parisienne et la forme Niceæ. Celle-ci est en outre caractérisée, 


624 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


comme la Bætica, par son thorax entièrement noir et généralement 
dépourvu des deux petites bandelettes jaunes verticales dont on 
constate du reste l’accentuation plus apparente sur les Fausta du 
Nord que sur celles du Midi. Cependant, sur les 75 Niceæ bien 
caractérisées que J'ai sous les yeux, l'anneau abdominal rouge me 
parait toujours être double ou triple, tandis que, selon Rambur, 
l'abdomen de Bætica ne présente jamais qu'un seul segment rouge 
en dessus. 


5° Pyrénées-Orientales — Junceæ, Obthr. — Aux environs de 
Vernet-les-Bains, je n’ai jamais vu Æausta au printemps; Je crois 
qu'elle n'a dans les Pyrénées-Orientales qu'une seule éclosion 
annuelle, en été. La race y est plutôt petite; mais la couleur rouge 
est d’un vermillon carminé extrêmement vif. Peut-être est-1l pos- 
sible de trouver partout où vit la Zygæna Fausta, à titre d’excep- 
tion, des individus colorés d’un rouge aussi intense qu'à Vernet- 
les-Bains? Mais nulle part, d’après ce que je connais, la couleur 
normale de la race locale n'atteint ce degré de vivacité. Les taches 
rouges des ailes supérieures sont généralement finement cerclées de 
jaunâtre. Le papillon a des allures très vives, et la première fois 
que Je le vis, en août 1880, dans le bois que de Graslin appelait : 
el Pinats, je fus surpris de son activité et de la rapidité de son 
vol. Je pris, avec une quantité d'exemplaires remarquables par la 
couleur rouge carmin de leurs ailes et de leur anneau abdomunal, 
une Q d'un Jaune orangé tout à fait pareille aux individus à 
couleurs claires de la Charente; ce qui est la confirmation d'un 
fait que J'ai observé bien des fois et relaté au cours de ce travail. 

Niceæ diffère de /wnceæ par sa taille plus grande, la couleur 
plus vermillonnée et moins carminée des parties rouges, la réduction 
du liséré blanc Jaunâtre encerclant les taches rouges. 


6° Andalousie. — Bætica, Rambur. — Figurée sous le n° 9 de la 
PI. 12 de la Faune de l'Andaloustie. Ma collection contient des indi- 
vidus provenant de Rambur; ce sont donc des co-types; d’ailleurs 


la collection de Graslin possédait plusieurs exemplaires pris, avec 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 025 


les types, à Malaga, en octobre 1835. Je ne crois pas qu'on puisse 
considérer Pælica comme une espèce distincte de Fausta. Bætica 
est plus grande généralement, mais pas toujours; car J'ai sous les 
yeux deux © très petits; elle parait manquer des traits thoraciques 
blanc jaunâtre, comme d’ailleurs la Fausta-Niceæ. Je ne parviens à 
découvrir aucun caractère spécifique sérieux. Car la présence d’un 
seul segment abdominal rouge, le cinquième segment et les valves 
anales noires, ainsi que le fait remarquer Rambur (Car. Syst. Lép. 
Andal., p. 171), ne me semblent pas d'une importance suffisante 
pour valoir que Bætica soit érigée en Espèce séparée. Elle a été 
rencontrée par Rambur aux mois d'avril et de septembre, sur les 
collines arides, dans les environs de Malaga, tandis que la F'austa, 
à Marseille, dit Rambur, quoique vivant sur le même Coronilla 
juncea, bien que commençant à faire sa coque dès le mois de mars, 
ne se montre qu'à la fin d'août et en septembre; mais nous savons 
pertinemment que austa, dans les Charentes, éclôt au printemps 
CHENÉLÉ 

En Espagne, on trouve d’autres formes de Fausta, notamment 
en Catalogne et à Albarracin. Dans cette dernière localité, d’où 
feu l'abbé Zapater m'avait envoyé quelques exemplaires, la forme 
est bien différente de Bætica. C'est plutôt Faustina, selon Rambur 
(Faune de l'Andalousie, PI. 12, fig. 7); c'est-à-dire une espèce 
petite, d'un rouge orangé non carminé, comme on en trouve quel- 
quefois à Digne. 

Rambur fait connaître (Car. Syst. Andal., p. 172; note) « qu'il 
a reçu du célèbre entomologiste Klug un individu du Faustina, 
du Musée de Berlin, étiqueté de sa main, comme étant un de ceux 
rapportés autrefois du Portugal, par Hoffmannzegge (sic), et que 
nous avons fait figurer comme objet de comparaison (Faune ent. 
Andal., pl. 12, fig. 7. Zygœena Faustina, Ochs.). Elle ressemble 
extrêmement à la #aus/a, dont elle égale à peine la taille, et en 
diffère surtout parce que le rouge de la base des aïles supérieures 
est séparé des taches du milieu, sur le bord antérieur, par la conti- 
nuation de la bande noire qui n'est pas divisée par un prolon- 
gement rouge comme chez la Fausta, et par les valves anales qui 


40 


620 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


sont noires; l’abdomen présente trois segments rouges ». Il y a 
dans la collection Boisduval un échantillon absolument conforme 
à la figure de Æaustina, donnée par Rambur; mais Jignore de 
quelle localité elle provient. 


7° Suisse. — Jucunda, Meissner. — Il me semble que c'est bien 
la forme /wcunda, dont Fuessly a donné la figure sous la lettre H 
de la Tab. I du Magasin fuer die Licbhaber der Entomologie, 
en 1778, d'après un exemplaire pris dans les prairies des montagnes, 
près Pfeffers, en Juillet. Pourtant Rambur croyait avoir découvert 
cette variété locale aux environs de Genève et 1l écrit à son sujet, 
dans le Catal. syst. Lépid. Andalousie, ce qui suit : « Nous avons 
trouvé sur le mont Salève, près de Genève (département de la 
Haute-Savoie) (*), une Zygène différente de la aus/a ordinaire 
et que nous nommons Z. Faustula. Les taches sont plus petites et 
moins confluentes; les deux basilaires sont en partie divisées et la 
seconde ne s'étend pas sur la marge postérieure; la bande de la 
couleur du fond qui sépare ces taches de celles du milieu n'est 
pas divisée par du rouge; l'abdomen est noir et n'offre que des 
atomes rouges en place des segments de cette couleur; elle parait 
en Juillet ». 

Dans les Annal. Soc. ent. France, 1865, p. 91-02, sous le titre 
de Souvenirs de Zermatt, Achille Guenée a consacré une notice 
assez développée à la Zygœna Jucunda qu'il appelle Genevensis, 
Millière. Guenée avait capturé sa Genevensis au pied du Mont 
Salève, à la fin de juillet 1864, lorsqu'il effectuait son retour de 
Zermatt. Aucune mention n'est faite par Guenée de l’article précité 
écrit par le D' Rambur. Guenée traite de quelques caractères de 
la Z. Genevensis et, à propos de l’anneau abdominal, 1l constate ce 
qui suit : « L'anneau abdominal rouge n'est pas non plus cons- 


tamment absent: il laisse, au contraire, des traces très apprécrables 


(*) Le Cat. syst. Lépid. Andal. porte la date 1858; mais la publication doit 
avoir été faite bien plus tardivement, puisque le département de la Haute-Savoie 
n'existait pas en 1858 et que sa création est postérieure à la guerre d'Italie qui 


eut lieu er 1850. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 027 


chez la très grande majorité des exemplaires; seulement 1l nest 
Jamais complet en dessus et se réduit à des séries de poils bordant 
les incisions, et 1l est toujours très nettement interrompu en 
dessous »; puis, continuant à s'occuper de la variabilité du caractère 
que représente l'anneau abdomunal, 1l ajoute, en note, l'observation 
suivante : « C'est du reste un singulier attribut des Zygenes que 
cette ceinture rouge qui est alternativement présente ou absente 
chez les espèces les plus voisines, qui, nulle chez l'Azlaris, réduite 
à un segment chez la Bæñca, en occupe deux chez la f'austa Q, 
trois chez l'Uccitanica, quatre chez la Læta et envahit l'abdomen 
entier chez Ganymedes. Puis, nous la voyons se montrer furtivement 
chez quelques Q d'Onobrychis, tenter ‘parfois le dessus de 
l'abdomen chez Æormosa, quitter certains O' de Sarpedon pour 
disparaître chez Contaminez. Ne dirait-on pas que la Nature a 
voulu nous fournir un moyen tout élémentaire de séparer les 
espèces, puis que, se ravisant, elle l'a supprime malicieusement chez 
certains individus pour éprouver notre tact et nous défendre les 
systèmes absolus? » 

Feu mon ami Guenée met sur le compte de Dame Nature des 
malices bien noires et des combinaisons bien subtiles. Pour parler 
sérieusement, les distinctions spécifiques qu'on pourrait tirer de la 
coloration en rouge des anneaux abdominaux chez les Zygæna 
sont illusoires. [1 semble que presque toutes les espèces du genre 
Zygæna peuvent avoir, ou non, l'abdomen 7xbro-cingulatum, 
comme elles peuvent avoir les taches des ailes supérieures et les 
ailes inférieures rouges, jaunes ou brunes; comme elles peuvent 
avox, ou non, les taches des ailes supérieures bordées d’un liséré 
blanchâtre ou Jaunâtre; comme elles peuvent avoir les mêmes 
taches des ailes supérieures confluentes ou séparées; la couleur 
noir indigo du corps et du fond des ailes transformée en gris 
argenté; la bordure bleu indigo des ailes inférieures limitée à un 
fin liséré ou développée au point d’envahir toute la surface des 
ailes; la 0° tache ultime des supérieures présente ou disparue. 
Toutes ces variations se manifestent en vertu des Lois qui les 


règlent pour le Genre de Lépidoptères auxquelles elles sont appli- 


628 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


quées et sur lesquelles nous avons cru devoir appeler ci-dessus 
l'attention des Naturalistes. 

M. Abeille a écrit des observations très intéressantes sur la vie 
évolutive de la Zygeæna Fausta dans les Bouches-du-Rhône et les 
environs de la Sainte-Baume. Il n'a constaté dans ces contrées 
qu'une seule génération annuelle, en été. Les chemlles de F'austa 
sont détruites par les parasites, en nombre considérable. Diptères, 
Tachinaires et Hyménoptères de la Famille des Chélonides et des 
Genres Rogas et Microgaster réduisent énormément le nombre des 
petites chenilles de Fausta. Les plantes nourricières sont : à la 
Sainte-Baume, l'Ornithopus perpusillus, plante de la famille des 
Papilionacées, tirant son nom : Pzed d'oiseau, de la forme et de la 
disposition de ses gousses; et dans les Bouches-du-Rhône, comme 
à Malaga, la Coronilla juncea, également de la famille des Papi- 
lionacées, sous-arbrisseau à fleurs Jaunes, répandu sur les coteaux 
de la Provence, en Espagne, au Portugal, en Italie et en Algérie. 
Le nom de Coronille, diminutif du latin Corona, indique la dispo- 
sition des fleurs en couronne. L'abbé Coste, dans la Flore descriptive 
et illustrée de la France, énumère 9 Espèces de Coronille croissant 
spontanément en France et 20 environ pour l'Europe, l'Asie occi- 
dentale et le Nord de l'Afrique. Elles sont toutes fourragères et 
plusieurs sont cultivées pour l’ornement des jardins. 


Zygæna Carniolica, Scopoli (Æx/omol., 478). 


Parfaitement figurée par Johann-Caspar Fuessly sous la lettre G 
de la Tab. I du Magasin fuer die Liecbhaber der Entomologie, 
en 1778. Les taches sont bien nettement séparées, entourées de 
blanc, d’une couleur carminée, avec l'abdomen tout noir et sans 
anneau rouge. C'est, dit Fuessly, le Sphinx Carniolica de Linné 
et Fabricius (Want. 1); le Sp. Onobrychis, du Wienerverzeichniss; 
le Sp. septima, de Schaeffer (/cones, Tab. 80, fig. 4 et 5). 

Fuessly publie (p. 114) la diagnose latine suivante : « Z7gæna 
Carniolica : atra, alis anticis cyaneis punctis quinque sanguineis 


subocellatis, posticis rubris, limbo nigro. Habitat in Austria ». 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 629 


L’Espèce ne se rencontre ni en Angleterre, ni en Bretagne. Elle 
est répandue dans les contrées calcaires de la France, depuis la 
Normandie jusqu'aux Alpes-Maritimes. Elle habite l'Italie, la 
Suisse, l'Allemagne, l'Autriche, la Sardaigne, les Pyrénées-Orien- 
tales, l'Espagne et l’Algérie; mais les variations géographiques et 
les races locales sont nombreuses, ainsi que les Aberrations. Je 
considère que Occitanica est une simple forme locale de Carniolica. 
Je suis cependant moins convaincu que Orana et les autres races 
algériennes soient spécifiquement identiques à Carniolica. Cepen- 
dant je les réunis dans la même unité spécifique, comme l'ont fait 
d’autres Entomologistes. 

Dans le Valais, notamment aux environs de Martigny et de 
Vièce, la forme normale a l'abdomen entièrement noir, le double 
collier blanc, le thorax mélangé de poils courts blanchâtres, les 
épaulettes courtes, pointues, triangulaires, bordées de blanc; les 
taches des ailes supérieures sont d’un rouge carminé un peu vineux, 
mais vif, largement cerclées de blanc. Les Aberrations par extension 
et envahissement de la couleur blanche des cercles qui enserrent 
les taches rouges ne sont pas rares. Telle est Ab. Wezleri: qui est 
figurée sous le n° 30 de la PI. III de la 1° livraison des Æ7udes 
de Lépidoptérologie comparée. On obtient l'Ab. Wezleri, comme la 
Fausta-Tricolor, en soumettant les chrysalides à une température 
de 40 degrés centigrades au-dessus de 0. 

Le n° 32 de la même PI. IIT est une transition entre la forme 
normale et l’Ab. Weïleri la plus caractérisée. M. Wullschlegel a 
capturé à l'air libre environ 25 exemplaires analogues à celui qui 
est figuré sous le n° 30; mais inversement on trouve à Martigny 
des Carniolica dont les taches rouges sont presque entièrement 
dépourvues de cercle blanc. Je possède un échantillon capturé par 
M. Wullschlegel qui a presque totalement perdu la tache ultime 
dite. en haricot, et deux autres spécimens dont le haricot rouge n’a 
plus que de très légers vestiges de couleur rouge. La variation dans 
laquelle Carniolica se meut à Martigny est donc très considérable ; 
les taches rouges sont très larges ou très rétrécies; l'entourage 
blanc des mêmes taches est lui-même très élargi ou très réduit; la 


630 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


couleur rouge est parfois plus pâle et plus vermillonnée; mais sur 
une très grande quantité d'exemplaires, je n’en ai vu qu'un très 
petit nombre présentant des traces d’anneau abdominal rouge. 

À Aix-les-Bains, en Savoie, la Zygæna Carniolica a généralement 
aussi l'abdomen noir; du moins sur plus de 200 échantillons de 
cette localité contenus dans ma collection, je n'en compte guère 
qu'un sur dix offrant des vestiges plus ou moins prononcés de 
ceinture abdominale rouge; par ailleurs, la forme diffère peu de 
celle de Martigny; on constate seulement que l'entourage blanc des 
taches rouges est plus généralement rétréci. 

Au pied du Mont Salève, en Haute-Savoie, à la fin de juillet 
et au commencement d'août, la Zygæna Carniolica est assez com- 


mune et ressemble beaucoup à la forme valaisanne et aixoise. 


I] m'a semblé qu'au col du Mont Genèvre, du côté italien, la 
Zygæna Carniolica à abdomen noir, que je trouvais commençant à 
éclore, le 18 juillet 1906, ressemblait aux races savoisienne et valai- 
sanne; cependant la tendance à la perte de la tache en haricot m'a 
semblé intéressante; mais je n'ai pas réussi à capturer assez d’exem- 
plaires pour pouvoir émettre une opinion sérieuse au sujet de la 
forme locale des environs du village de Clavières. 


De Larche, localité très élevée des Basses-Alpes, j'ai reçu une 
soixantaine de Carniolica récoltées par Augustin Coulet, en août 
1806 ; la race est petite, à abdomen généralement tout noir, offrant 
rarement des traces carminées. La couleur rouge est sans éclat, d’un 
carmin un peu vermillonné; sur la moitié des exemplaires, l’entou- 
rage blanc ou jaunâtre des taches des ailes supérieures est nul ou 
presque nul; sur l’autre moitié, il est modérément accentué. 

En Normandie, à Brosville et à Pont-de-l'Arche, on trouve 
Carniolica volant dans la seconde quinzaine de juillet; la forme 
ressemble à celle d’Aix-en-Savoie et de Martigny, avec une ten- 
dance à être de plus petite taille. Je suis redevable d’une série 


d'exemplaires bien choisis à l’obligeance de M. Dupont, agrégé de 
l'Université, à Evreux. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 631 


À Lardy (Seine-et-Oise), on trouve au commencement de juillet 
une semblable forme de Carniolica; il en est de même dans le 
Loiret où la récoltait autrefois feu le marquis de Lafitole. J'ai reçu 
de la Roche-du-Mont, près Ornans (Doubs), et j'ai pris moi-même 
dans le Val du Fier et du Chéran, en Haute-Savoie, une race de 
Carniolica pouvant être classée avec celles du Valais, du Mont 
Salève, d’Aix-les-Bains, c'est-à-dire avec toutes les races précitées 
et celles de Lanslebourg et de Bourg-d'Oisans; toutes ces 
formes se rapprochant d’ailleurs de celles de Thuringe et de 
Berlin, et ne différant pas en réalité de l’exemplaire figuré 
par Fuessly. Seulement il faut tenir compte de la variabilité imdi- 
viduelle, relativement à l'extension et au rétrécissement des cercles 
blancs qui entourent les taches rouges des ailes supérieures et aux 
vestiges de ceinture abdominale carminée. 

Les races dont l'étude offre le plus d'intérêt sont celles des 
Alpes-Maritimes, d'Italie et surtout de Digne. 

C'est cette race, superbe par ses variations et l'éclat de ses cou- 
leurs, que je vais d’abord étudier. On peut dire qu'à Digne la 
Zygœna Carniolica est un véritable Protée; tantôt pareille à la race 
savoisienne et valaisanne, mais semblant toujours plus portée au 
développement de la ceinture abdominale rouge, tantôt d'un rouge 
vermillon orange, c'est-à-dire d’une teinte vive et gaie qui ne se 
remarque nulle part ailleurs, avec les taches rouges confluentes et 
remplissant presque toute la surface des ailes supérieures, où bien 
presque sans cercles blanchâtres et avec les taches rouges de taille 
plutôt petite et toutes séparées les unes des autres, au lieu de 
confluer. 

D'autre part, Occitanica et Carmiolica, à Digne, vivent côte à côte, 
et l’on trouve dans cette localité nombre d'exemplaires dont la 
large tache en haricot offre tous les passages les mieux gradués, 
depuis le blanc absolument immaculé jusqu'au rouge orangé ou 
carminé vif. Il y a des individus qui portent dans la tache en 
haricot des vestiges extrêmement faibles de pigmentation carminée ; 
d’autres, chez qui le semis d’atomes rouges est un peu plus accentué 


et ainsi de suite, jusqu’au maximum. 


632 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Dans la XX° livraison des Etudes d'Entomologie, j'ai fait 
figurer 10 exemplaires variés de la Zygæna Carniolica, sur la PI 7, 
depuis le n° 114 au n° 123 inclus. La Carniolica de Digne est 
représentée sous les n° 118, 110, 120 et 121. Ce sont des papillons 
bien différents, et lorsque je considère les 300 Carniolica de Digne 
qui se trouvent alignées dans une même boîte, je pense qu’il y aurait 
matière à leur appliquer bien des dénominations, si on voulait 
désigner par un terme particulier chaque variété. On constate des 
formes à taches rouges petites, ou larges, mais séparées les unes 
des autres; d’autres à taches confluentes, largement cerclées soit de 
blanchâtre, soit de jaunâtre, ou très finement lisérées de blanc, ou 
encore presque sans aucun liséré; tantôt d’un rouge carmin et 
tantôt d’un rouge orange, avec l’abdomen montrant 1, 2 ou 3 seg- 
ments colorés en rouge. Tous les passages existent d’ailleurs entre 
ces variations diverses qui s’entrecroisent et qui se compliquent de 
la fusion insensible de Carniolica en Occitanica. Feu Millière m’a 
donné jadis quelques Zygæna Carniolica conformes à certaines 
Diniensis; 11 les avait prises à Grasse. 


Je prie le Lecteur de se reporter à la notice concernant la 
Zygena Fausta pour y trouver les renseignements relatifs à la 
variation parallèle chez les deux Espèces, c’est-à-dire la variation 
conforme des Fausta Dupiryi et Melusina et des Carniolica Dupuy 
et Melusina, de Digne. Celles-ci sont figurées sous les n° 110, 119 
et 120 de la PI. XXII du Vol. III des Æ/udes de Lépidoptérologie 
comparée. On verra sur cette même Planche XXII les n°° 111, 112, 
113 représentant des Carniolica de Digne formant la transition 
entre Dupuy: et Occitanica; VAb. bicolor, de Digne, presque sans 
liséré blanchâtre autour des taches roses plutôt que rouges; les 
n° 115, 116, 117 consacrés à la figuration de 3 formes bien dis- 
tinctes de Carniolica-diniensis. 


D'ailleurs, les Zygæna Carniolica représentées sur la PL XXII, 
depuis le n° 110 au n° 120 inclus, proviennent de Digne, à l’excep- 
tion du n° 118 asymétrique (aile gauche normale, aile droite 
Weileri) qui a été capturé à Ofen. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 633 


Il doit rester de l'examen comparatif des n°* 110 à 120, défal- 
cation faite de 118, l'impression qu'aux environs de Digne, patrie 
de ces 10 exemplaires de la même Zygena Carniolica, un 
Fruhstorfer ayant un stock de noms nouveaux à placer, se trou- 
verait en face d’une occasion exceptionnellement favorable, surtout 
si l'on y ajoutait les n°% 118, 119, 120 et 121 de la PI 7 de la 
XX° livraison des Etudes d'Entomologie. 

Dans les Alpes-Maritimes et dans certaines régions des Basses- 
Alpes, telles que : Berthemont-les-Bains, Entrevaux, Allos, L’Es- 
carène, Levens, on trouve des Zysæna Carniolica qui ressemblent 
beaucoup à celles de Digne. Elles sont par conséquent très diffé- 
rentes des Carniolica piémontaises; cependant, à Berthemont, on 
rencontre deux formes de Carniolica, l'une à taches d’un rouge 
orangé, encerclées de blanc ou de jaunâtre, l’autre à taches d’un 
carmin très vif, comme en Piémont, et presque entièrement privées 
du liséré blanc qui les enserre; mais dans les Alpes-Maritimes, on 
trouve aussi Occitanica qui paraît manquer en Italie La Zygœna 
Occitanica est commune à Vence, à la Turbie, à Tourette-sur-le- 
Loup, au col de Castillon, et elle offre, notamment dans la localité 
de Vence, l’Aberration chez laquelle la tache en haricot a tota- 
lement disparu. J'en possède deux exemplaires qui sont reliés par 
un grand nombre d'individus parfaitement transitionnels à ceux 
qui ont la tache en haricot extrêmement large .et développée, 
presque jointe aux taches voisines, c’est-à-dire à l’externe supérieure 
et à la médiane inférieure, lesquelles sont centralement ponctuées 
de rouge; mais par Aberration, cette ponctuation rouge peut aussi 
disparaître et je possède une © dont la tache médiane inférieure 
est grosse et entièrement blanche. Elle a été prise à la Turbie, au 
commencement de juin 1006, par H. Powell. M. Decoster a capturé 
à Vence, le 20 juin 1907, un Œ semblable. 

On remarquera aisément combien l’Occitanica chez laquelle il ne 
reste, en outre des taches basilaires, que les 3 taches arrondies : la 
cellulaire, l'extracellulaire et la médiane inférieure, et à laquelle il 
manque la tache ultime en haricot, est conforme à la Race italienne 
de Carniolica.(ou plutôt Aberration fréquente) dite : Apemina, et 


634 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


dont j'ai donné une figure sous le n° 114 de la PI. 7 de la 
XX° livraison des Etudes d'Entomologie. 

Les Occitanica dépourvues de la tache en haricot et réduites par 
conséquent à $ taches, sur les ailes supérieures, appartiennent à la 
forme espagnole que Staudinger a appelée /berica; mais, comme 
on le voit, l'Espagne n'a pas plus la spécialité de cette variation 
lberica d'Occitanica, qu'elle n’a celle de X7esenwettert et Stæchadis 
pour Rhkadamanthus. Les Alpes-Maritimes partagent donc avec la 
Catalogne l'avantage de fournir ces diverses variations. Au col de 
Castillon, M. Decoster a pris, avec des Occitanica pures, une Occi- 
tanica dont la tache en haricot montre des vestiges de rouge, tran- 
sition qui est bien plus rare au milieu des Occitanica que parmi 
les Carniolica. 

Au Piémont, notamment à la Certosa di Pesio, la Carmiolica 
présente une race superbe, grande, robuste, comme l'Hedysari, 
Huebner (20 et 36), avec l'abdomen noir, le fond des ailes d’un 
vert d'acier luisant, les taches des ailes supérieures et les ailes 
inférieures du carmin le plus vif. Même, comme dans l’Æedysari, 
Huebner, 20, on trouve en Piémont des exemplaires surtout Q 
montrant dans la tache en haricot autant de petits grains de corail 
qu'il y a d'espaces intranervuraux; c'est-à-dire que dans le haricot, 
les nervures séparent par un trait blanc la partie rouge en autant 
de petites taches qu’il y a d'espaces intranervuraux. La figure 29 
donnée par Huebner rend bien ce caractère de la variété Æedysari; 
mais en Piémont, comme ailleurs, la variabilité de Carmiolica est 
très grande. À côté d'échantillons très développés, il y en a de 
petits; de plus, tantôt les taches carminées sont encerclées de 
blanchâtre et tantôt elles sont dépourvues de tout entourage blanc 
ou jaunâtre. 

Dans les Abruzzes, on rencontre l'Ab. Apenina; mais J'ai reçu 
de Cerchio des exemplaires ornés de la tache en hancot, de sorte 
qu'il ne me semble pas qu'Apenina représente une race; c'est sim- 
plement une Aberration assez fréquente dans certaines localités. 

À Paternopoli, c'est Hedysari, avec des taches d’un rouge carmin 
vif, très grosses, généralement séparées les unes des autres et cer- 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 635 


clées de blanc; mais à Paternopoli, comme ailleurs, 11 y a des 
exemplaires très différents de ceux qui forment la généralité de 
la race, soit par leur taille plus petite, soit par leurs taches rouges 
rétrécies. À côté d’'Æedysari très caractérisée, je vois un C chez qui 
la tache en haricot est très réduite et porte dans son milieu un 
simple petit trait rougeûtre. 

À Avellino, M. P. Fabresse a pris des exemplaires de Carntolica 
tout à fait analogues à ceux du Valais et de Savoie, de sorte qu'on 
peut résumer l’histoire de la dispersion des races de Carmiolica 
dans l’Europe occidentale comme suit : 


Depuis la Normandie jusqu'à la Savoie, y compris les environs 
de Paris, la Champagne, la Franche-Comté, le Valais, Carniolica 
donne une race homogène dans son aspect et ses variations ; 1l y a 
un changement de forme dans les Basses-Alpes et dans les Alpes- 
Maritimes où Carniolica et Occitanica se rencontrent; en Piémont, 
où Carniolica redevient seule, la race plus septentrionale s'agrandit, 
prend des couleurs plus vives et plus belles; ce mouvement se 
continue en Italie centrale et méridionale, mais en semblant plutôt 
s'atténuer que s’accentuer. 


Du côté de l'Occident, Occitanica paraît être seule dans les 
Pyrénées-Orientales, dans l'Aveyron et en Espagne. Elle donne à 
Grenade l’Ab. Albicans, figurée par Rambur, sous le n° 10 de la 
PI. 12 de la Faune de l'Andalousie. Cette Ab. est pour Occitanica 
ce que Weileri et Amœna sont pour Carniolica. De plus, la variété 
catalane /berica, dépourvue de la tache en forme de haricot et 
présentant les points rouges réduits et quelquefois privés de tout 
cercle blanc, est tout à fait l’analogue de l’italienne À pexina. Ma 
collection contient plusieurs centaines d'exemplaires de la Zygæna 
Occitanica des Pyrénées-Orientales; la forme y est assez stable, 
bien que variant par le développement, ou inversement par le 
rétrécissement des parties blanches qui entourent les taches rouges 
des ailes supérieures. 


En Espagne, Occitanica se trouve non seulement à Grenade et 
en Catalogne, mais le long de la côte de la Méditerranée et 


636 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


notamment à Tijola (Almeria) où se manifeste la tendance à l’Ab. 
Albicans. 

L'exemplaire le plus curieux que je possède de tout le genre 
Zygæna est certainement la Zygæna Occitanica qui se trouve 
figurée sous le n° 123 de la PL 7 de la XX° livraison des Æ7udes 
d'Entomologie, et dont je parle à la page 53 du même ouvrage. 
Ce papillon monstrueux, qui a 3 ailes supérieures et 1 aile infé- 
rieure seulement, fut obtenu à Montpellier par Daube. Il faisait 
partie de la collection Boisduval. 

La chenille vit aux environs de Vernet-les-Bains sur le Doryc- 
num suffruticosum; le cocon est ovoïde, jaunâtre, et le papillon 
éclôt en été. 

On trouve à Aguessac (Aveyron) une forme superbe d'Occitanica; 
M. Dayrem en a pris dans cette localité une trentaine d’exem- 
plaires, en août 1008. L'un d’entre eux a la tache en haricot 
légèrement pigmentée de rouge; un autre a les taches rouges 
entourées de cercles blancs exceptionnellement larges, de sorte que 
les taches en question se trouvent très rapprochées et presque 
contiguës. 

Je connais, grâce à l'obligeance de M. Gédéon Foulquier, 
l'Occitanica des Bouches-du-Rhône; mais j'ignore encore la Car- 
niolica de ce département, ou plutôt de la Sainte-Baume, dont 
M. Abeille fait une mention détaillée et qu'il décrit comme var. 
Magdalene. L'étude faite par M. Abeille sur les Zygæna de 
Provence est fort intéressante et très instructive; Je ne puis qu’en 
conseiller la lecture aux Entomologistes qui affectionnent ce genre 
de Lépidoptères. M. Abeille a élevé presque toutes les Espèces et 
sa documentation au point de vue des plantes nourricières, des 
mœurs et du parasitisme est tout à fait hors de pair. 

L’Ab. Flaveola, très rare en France, est plus fréquente à Vienne 
d'où me l’a envoyée M. Locke. Je fais figurer sous le n° 442 de la 
PI. II du présent volume une Ab. Defschi, dont je suis redevable 
a M. Ad. Peter, de Stuttgart. Cette Ab. Derschi a été prise par 
M. Alois Detsch, en 1000; elle a l'abdomen tout noir, tandis que 
Flaveola est flavocingulata; la couleur jaune est plutôt /wfeola que 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 637 


Hlaveola. Enfin les taches jaunes des ailes supérieures sont imper- 
ceptiblement bordées de blanc. 

Je ne crois pas devoir disserter sur les races orientales de 
Carniolica; je me borne à signaler la superbe forme de Syrie, 
figurée par mes soins, d'après des individus pris à Akbès, sous 
les n°“ 115 et 116 de la PI. 7 de la XX*° livraison des Æfudes 
d'Entomologie. Feu Staudinger ne possédait pas cette forme qu'il 
avait rapportée à tort à /'awrica, avec laquelle elle n'a pourtant 
aucune similitude; c'est peut-être la plus belle des races de Car- 
niolica, et je l'ai désignée, à cause de cela, sous le nom de 
prestans. 

En ce qui concerne les races algériennes d'Oyana, qui est peut-être 
une forme géographique de Carniolica, je prie le Lecteur de se 
reporter aux Ætudes d'Éntomologie. 

Dans la XIIT° livraison, J'ai fait figurer Orana sous les n°* 52, 
53, 54, 55 et 56 de la PI. VII, et j'ai donné les détails explicatifs 
à la page 24 du même ouvrage. 

La var. Nedroma est figurée sous le n° 3 de la PL III de la 
liv. VI; enfin la var. A/lardi est représentée sous le n° 5 de Ja 
PAP de vi 

Depuis que ces publications ont été faites, J'ai reçu une quantité 
de 140 exemplaires très variés, pris en Juin 1908, à Khenchela, par 
M. H. Powell. Orana est répandue dans les trois provinces. Le 
docteur Henri-Charles Martin l'avait prise à Philippeville et à 
T'eniet. Tantôt elle a l'abdomen tout noir, tantôt annelé de rouge; 
tantôt les taches rouges des supérieures sont largement cerclées de 
blanc, tantôt l'entourage blanc est presque nul; tantôt les taches 
rouges en question sont grosses et tantôt petites, de sorte que la 
variation parait dériver exactement des mêmes lois que chez 
Carnolica. 


On a découvert en Algérie une nouvelle Espèce de Zygæna que 
M. l'abbé de Joanmis a décrite sous le nom de 7'keryr, dans le 
Bulletin Soc. ent. France, 1908. Cette Espèce n'ayant Jamais été 
figurée jusqu'ici, je l'ai fait représenter sous le n° 225 de la 


638 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


PI. XXXV de cet ouvrage, d’après un exemplaire pris à Hammam- 
Rhira par MM. Walter Rothschild et Karl Jordan. Je suis redevable 
de ce papillon à lobligeance de ces savants naturalistes. 
M. Dayrem a capturé un seul exemplaire de la même Zygæna 
T'heryi, au même lieu. Il me semble que la Zygæna T'heryi fait la 
transition entre le Genre Zygæna et le Genre Arichalca, Wallengren, 
créé pour quelques Espèces de l'Afrique tropicale. 

J'avais fait figurer auparavant sous le n° 172 de la PL XXVIII 
du Vol. III des Etudes de Lépidoptérologie comparée, une Espèce 
de Zygæna décrite par feu Poujade, sous le nom d’Æscalerai, mais 
restée non figurée jusqu'ici. Elle fut découverte en Juin 1800, par 
Martinez de la Escalera, en Mésopotamie. Ainsi se trouve comblée 
la lacune dans l’histoire de ces deux Espèces de Zygæna. Main- 
tenant 1l sera facile de les reconnaître et de s’en rendre compte, 


ce qui était bien malaisé avant que la figuration n’en fût publiée. 


ADDENDA & CORRIGENDA 


Antocharis Pechi, Ster. et Obthr. 


Deux dames anglaises entomologistes pleines de zèle, Miss 
Fountaine et Mistress de la Bâtie-Nicholl, ont capturé l'Axfhocharis 
Pechi, Stgr., nec Obthr. aux environs d'El-Kantara, en Algérie. 
Mistress de la Bâtie-Nicholl a bien voulu m'offrir 3 exemplaires 
de cette Jolie Espèce qui est blanche en dessus, avec l’apex des 
supérieures triangulairement marqué de noirâtre et une tache noi- 
râtre en forme de croissant à l'extrémité cellulaire. En dessous, 
l’apex et cette tache cellulaire sont d’un gris verdâtre; les ailes 
inférieures sont uniformément d'un gris verdâtre, avec un point 
blanc médian. 

Roger Verity a donné des figures très exactes de Pech, sous le 
n° 19 de la PI XLIX de l'ouvrage RAopalocera palæarctica. 
L'Anfhocharis que J'ai figuré comme Pechi, sous le n° 11 de la 
PI. V de la XII° livraison des Æ/udes d'Entomologie, est représenté 
de nouveau sous le n° 4 de la PI XXXVII de XZopalocera 
palæarctica, comme forme #elanochloros, Rœber, de Belia occi- 
dentalis. Je ne possède que l'unique exemplaire pris par Merkl, à 
Lambèse, et d'abord mentionné par moi, dans le Bulletin de la 
Société ent. France, 1884, p. LXXXV. Il y a évidemment un 
malentendu au sujet de l’'Axthocharis Pechi, Obthr. ec Stgr. Dans 
l'ouvrage Les Macrolépidoptères du Globe, par Adalbert Seitz, 
J. Rœber, auteur de la Partie Pzeride, décrit, à la page 53, avec le 


nom de Mauretanica, et reproduit d'après une copie évidemment 
P 


040 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


prise sur la PL V de la XIT° livr. des ÆZ/udes d'Entomologie, mais 
non d’après nature, l’Anthocharis Pechi, Obthr.; tandis qu'il décrit, 
à la page 52, mais sans le figurer (du moins J'ai été inhabile à 
trouver la figure), le mème papillon, avec le nom de #elanochloros, 
du moins d’après l'opinion exprimée par Verity, à la page 176 des 
Rhopalocera palæarctica, de sorte que cet Awfhocharis, encore à 
peine connu Jusqu'ici, aurait déjà 3 noms, savoir : Peczt, Obthr.; 
Melanochloros, Roeber; Mauretanica, Roeber. La vérité, c'est 
qu'avec un seul papillon entre les mains, 1l me paraît impossible 
d'établir à son endroit une discussion sérieuse et de fixer définiti- 
vement la valeur spécifique propre de l'individu en question, ou de 
l'attribuer, comme variété ou forme, à quelque Espèce. Je dois 


attendre à posséder des documents complémentaires. 


Antocharis Falloui, Allard. 


Cette Espèce charmante, dont la chenille vit sur le Caprier 
(Capparis droserif olia), est, depuis le mois de janvier 1910, l’objet 
d'une étude et d’une recherche spéciales de la part de M. Faroult, 
à qui Jai demandé de me transmettre, pour en faire part à mes 
Lecteurs, le résultat de ses observations. Je les transcris un peu plus 
loin, telles que cet habile collecteur les a libellées. L’Az/#ocharis 
Falloui, si j'en juge par une série d'environ 125 exemplaires rangés 
dans ma collection, varie peu, sauf pour la taille; cependant les 
grosses taches longues vertes du dessous des ailes inférieures pré- 
sentent quelque variation dans leur disposition relative et leur 
confluence; de plus, elles ne sont pas parfaitement symétriques sur 


les deux côtés, chez le même individu. 


Voici donc les observations sur les Ax/kocharis dans les régions 
voisines du Sahara, écrites au Rocher-Rouge, près El-Outaya, sur 
ma demande, par M. Faroult, et arrivées à Rennes le 10 mai 1910 : 


« Fin décembre 1900, j'arrivai à Biskra par un temps épou- 
vantable, et ce n’est que dans les premiers jours de Janvier que 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE G41 


J'a1 pu faire des sorties un peu intéressantes, destinées surtout à 
étudier la flore qui doit guider tout bon chasseur dans ses 
recherches entomologiques. 

La sécheresse persistante a contrarié considérablement la végé- 
tation; aussi était-1l très difficile de suivre les études faites anté- 
rieurement par des savants dont la bonne foi ne fait pas l'ombre 
d'un doute, mais qui n’ont séjourné dans cette région que pendant 
une période très courte et en température normale. 

Cette année, en général, tout est en retard; l'hiver a été long et 
froid ; le 4 mai, J'ai vu les montagnes de Batna, Lambèse, Khen- 
chela, recouvertes d’une couche de neige de 20 centimètres 
d'épaisseur, et le vent du Nord soufflant constamment, a produit 
un abaissement très sensible de la température dans toute la 
région de Biskra. 

Certaines espèces de papillons, dont l'apparition est très courte, 
n'ont pu être capturées et ont passé inaperçues; le même fait s’est 
produit en 1900, en Kroumirie; je vais en donner des exemples 
très précis. 

En 1908, année normale, je chassai à Aïn-Draham (Tunisie), 
du 30 mai au 15 Juin; J'ai pris: Azcéia Dido, Papilio Lotteri, 
Melanargia Lucasi Cigaritis Syphax, Rhodocera Cleopatra et 
Rhamni, volant par milliers, etc., etc. 

En 1900, je retournai à Aïin-Draham, fin mars, pour rester jus- 
qu'en octobre et suivre toutes les apparitions. 

Après les Saturnia Atlantica, Anthocharis Eupheno, Thaïs 
Rumina, etc, pour lesquelles je n'avais aucun renseignement sur 
les années précédentes, j'ai pris les Ayctia Dido, Papilio Lotteri, 
Cigaritis Syphax, etc, en juillet seulement, aux mêmes endroits 
exactement; soit avec un bon mois de retard; les Zygæna Alpgira 
avec 15 Jours; quant aux espèces très communes : ÀAodocera, 
Vanessa Erythromelas, Cigaritis, Melanargia, etc. elles n’ont eu 
qu’une apparition très courte et en très petit nombre. 

Les Anthocharis, notamment, paraissent à des époques très 
variables, selon la température d’abord, et aussi selon les localités ; 


c'est ainsi qu’on trouve parfois Belemia et ses variétés, en janvier 


41 


042 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


à Sfax, Gafsa, Gabès (Tunisie), et dans la région de Biskra 
(Algérie), tandis qu'à Tumis, El-Kantara, Batna, on ne la trouve 
qu'en avril et jusqu'en Juin; J'ai pris un seul #allou à El-Guettar, 
à 20 kilomètres Nord de Gafsa, le 12 mai 1808. 

Dans le Sud-Tunisien, Belemia vit sur presque toutes les cruci- 
fères: sa chenille est très facile à élever; elle a deux générations, 
janvier et avril; on trouve Belemia en grande quantité à Oudna, 
près Tunis, en avril et mai; on en voit encore cependant quelques 
rares exemplaires en Juin et Juillet. 

L'Anthocharis Charlonia se trouve dans toute la Tunisie et 
l'Algérie, mais à des époques bien différentes; j'ai pris Carloma 
à Sfax, en février; à Tunis et plus particulièrement à Kalaat-es- 
Senam, en avril; dans cette localité, elle paraît en si grand nombre 
qu’on pourrait en capturer des centaines par jour; à Biskra, on la 
trouve de février à juin; en Kroumirie, j'en ai pris un exemplaire 
très frais, le 5 juillet. 

Cette année, j'ai eu la bonne fortune d'élever quelques chenilles 
d'Anthocharis Falloui. Pendant mes chasses au Rocher-Rouge, à 
4 kilomètres de la gare d'El-Outaya, à 28 kilomètres au Nord de 
Biskra, et où je suis actuellement campé, j'ai pu observer une Q 
de Æalloui déposant ses œufs sur Moricandia arvensis, sorte de 
Crambé comestible appelé AXroum (chou) par les Arabes. Cette 
plante croit par exemplaires isolés, entre les fentes des rochers, 
sur des rochers même, dans des endroits souvent inaccessibles. 

Je récoltai sur ces plantes 12 œufs, le 10 mars, dont O seulement 
me donnèrent de jeunes chenilles; 3 de ces jeunes chenilles 
périrent sans cause apparente à la 2° mue; mais j'en trouvai 
3 autres un peu plus grosses sur des plantes, dans la montagne; 
je les mis séparément. Des 6 premières, 3 furent dévorées par les 
autres, et des 3 dernières 1 en dévora 2, si bien qu'ayant dû 
m'absenter pendant 2 jours, je ne trouvai dans les boîtes, à mon 
retour, que 3 chrysalides d’une part et 1 chenille de l'autre 
(5 avril); le 18 avril il est éclos une magnifique ©, et aujourd’hui 
5 mai, J'ai encore 3 chrysalides bien vivantes. 


Dans leur jeune âge, les chenilles restent au même endroit où 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 643 


elles sont nées; puis elles changent de feuille, ou même se mettent 
sur les fleurs qu'elles mangent au fur et à mesure qu’elles s'épa- 
nouissent. | 

Celles qui vivent sur les feuilles sont d’un joli vert tendre avec 
deux bandes latérales jaunâtres très peu apparentes; tandis que 
celles qui sont sur les fleurs et y vivent, sont d’un rose gai avec 
les bandes longitudinales bien apparentes : ce fait s'explique en 
ce que la couleur mauve des fleurs dont elles se nourrissent, se voit 
par transparence de leur peau très fine; ces couleurs disparaissent 
lorsqu'elles se nourrissent à nouveau de feuilles. 

Il est assez difficile de trouver ces chenilles, car elles prennent 
au repos des positions qui les font se confondre avec certaines 
parties de leur plante nourricière : tantôt roulées à la base de la 
tige florale, tantôt allongées en dessous des pétioles ou sur le bord 
même des feuilles et légèrement en dessous; ce n’est que par leurs 
excréments trahissant leur retraite qu'on peut les trouver. 

J'ai pu capturer cette année plus d’une centaine de Falloui; 
mais ce n'est pas chose facile; cette À #/%ocharis affectionne surtout 
les sommets des montagnes arides des environs de Biskra; c’est 
notamment à El-Outaya, près de la montagne de Sel, que j'en ai 
pris le plus grand nombre. 

Cette charmante espèce commence à voler le matin vers 
10 heures, et seulement par beau temps; le vent paraît la déranger 
beaucoup; elle descend du sommet des montagnes, passant rapi- 
dement, allant d’une plante à l’autre sans se poser; rarement le 
s'arrête sur une fleur où 1l ne reste qu'une seconde; la Q vole avec 
une rapidité extraordinaire, ne laissant pas un petit endroit qu’elle 
n'explore, à la recherche des Moricandia qui doivent nourrir ses 
Jeunes chenilles, et sur lesquelles elle dépose ses œufs isolés au 
milieu d’une feuille et généralement un seul sur chaque plante. 

Jusqu'à midi, les Falloui descendent des sommets se dirigeant 
vers la plaine, puis pendant une heure environ, on n’en voit plus; 
ce n'est que vers 1 heure ou 1 h. 1/2 qu’elles recommencent à 
paraître, regagnant les sommets d’où elles étaient parties le matin; 


, \ » . 
cest à ce moment quon peut les prendre plus facilement, en se 


044 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


plaçant en embuscade dans un passage entre deux gros rochers, 
autant que possible, ou dans une gorge. 

Les Calicharis Nouna sont relativement très communs au Col 
de Sfa, près Biskra, à El-Outaya, à El-Kantara; mais leur appa- 
rition n'a pas lieu à la même époque; alors qu'a Biskra la saison 
est très avancée, à El-Outaya, elle commence seulement, et MA DE 
Kantara on ne pourra les chasser que fin mai et Juin. 

En janvier, j'ai parcouru toutes les montagnes des environs de 
Biskra, à 40 kilomètres à la ronde, sans trouver aucune trace de 
Nouna; le 23, j'étais au Djebel-Senia, à l'Ouest du Col de Sfa 
et au Nord de Fontaine-Chaude; ma femme a pris un c qu 
paraissait éclos assez récemment. Comme il faisait un froid assez 
vif, j'ai cherché des chenilles sur plusieurs espèces de plantes, et 
j'ai eu la bonne fortune d'en trouver cinq très petites sur un gros 
pied de Capparis drosenif olia. 

Les Capparis poussent isolément dans les endroits les plus 
arides et les plus inaccessibles; on en trouve beaucoup sur les 
rochers détachés de la montagne. 

Les chenilles recueillies en janvier se sont élevées très facilement, 
comme du reste toutes celles que j'ai pu récolter par la suite; J'en 
ai encore actuellement une cinquantaine à l'élevage. 

Dans leur jeune âge, certaines chenilles (*) sont de couleur vert 
clair avec deux bandes longitudinales brun rouge pâle, et une 
ligne dorsale de même couleur, visible seulement sur les trois pre- 
miers anneaux et sur les deux derniers, avec une interruption au 
milieu; d'autres sont vert olive très foncé, avec deux bandes jJau- 
nâtres de chaque côté, entre lesquelles il y a deux points brun 
rouge sur les deux premiers anneaux; la couleur des chenilles 
varie entre ces deux teintes extrêmes : vert clair et vert très foncé, 
presque brun ; toutes sont légèrement pubescentes, surtout dans leur 


Jeune âge. 


(*} M. J. Culot a reçu la chenille et la chrysalide de VWouna envoyées par 
M. Faroult, Il en a fait une excellente aquarelle qui sera reproduite dans Île 
Volume V des Ztudes de Lépidoft. comparée. — Ch. OBTHR. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 045 


Les chrysalides sont également très variables; du vert pâle au 
Jaune et brun foncé en passant par toutes les teintes intermédiaires ; 
on les trouve généralement en dessous des feuilles de Capparis, 
ou dans les feuilles sèches, sous la plante. 

Les chenilles sont cannibales; aussi, lorsqu'on les élève en 
captivité, doit-on les mettre séparément par grosseurs; car, sans 
cette précaution, les grosses mangent infailliblement les petites ; 
quelquefois aussi elles s’attaquent même aux chrysalides (*). 

Pour la première génération, la durée de la nymphose varie de 
15 à 20 Jours; pour la seconde, elle n'est que de 12 à 15 jours, la 
température étant plus élevée. 

La Nouna vole de 10 heures du matin à 2 heures de l’après- 
midi; un peu plus tard lorsqu'il fait bien chaud; comme allow, 
on ne peut la prendre qu’à l’'embuscade, dans les endroits où les 
Capparis sont nombreux; si on la manque au coup de filet, il est 
inutile d'essayer de la poursuivre sans danger; la nature des 
montagnes où elle vole empêche matériellement toute poursuite; 
car c'est dans les endroits les plus escarpés qu’on peut la rencontrer 
en plus grand nombre. 

Les S, beaucoup plus nombreux que les ©, volent avec rapidité, 
rasant le sol, ne se posant que très rarement au milieu des pierres, 
et disparaissant comme par enchantement. Les Q viennent voltiger 
autour des Cappanris où elles ne s'arrêtent qu'un instant, pour 
déposer un ou deux œufs, puis elles vont à une autre plante. 

Les Nouna présentent une grande variété, surtout chez les ©, 
tant par leurs couleurs que par leurs dimensions. 

Au moment où J'écris ces lignes, ma femme capture en face de 
la tente une jolie Q qui vient voltiger autour d’un Capparis, ou 


Câprier. » 


(*) Les chenilles de Arc/ia Dido dévorent également les chrysalides de leur 
Espèce; nous avons vu, à Rennes, cette année, en avril, une chrysalide de Pido 
prête à éclore, mangée par des chenilles qu'on avait laissées dans la même cage. 
— CH OBTHR, 


646 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Argynnis Adippe, Linné. 


Je suis redevable à l’obligeance de M. Holl d'une paire 
d'Argynnis Adippe, var. Auresiana, Fruhst, prise à Tala-Rana 
(Maillot, Algérie), le 12 juillet 1900. La forme de Adippe, en 
Algérie, paraît, d’après ces deux échantillons, différer un peu de 
la CAlorodippe des environs de Grenade, en Andalousie. Le dessous 
des ailes inférieures paraît plus varié de couleur en Algérie. Le 
comte Emilio Turati, dans Nuove Forme di Lepidotteri e Note 
Critiche (Nat. Sicil., 1000), figure Awresiana sous les n°* 5 et 6 de 
la Tav. I; malheureusement, en dessus seulement; car c’est le des- 
sous des ailes inférieures qui est surtout intéressant et caractéris- 
tique de la forme Awresiana. 


Argynnis Niobe, Linné. 


Ne semble pas exister dans le Finistère. Les exemplaires que J'ai 
reçus de ce département comme étant des Viobe sont simplement 
l'Ab. Cleodoxa d’Adippe. 


Argynnis Aphirape, Huebner. 


Espèce de l'Allemagne, de la Russie, de la Scandinavie et de la 
Sibérie qui s'avance vers l'Ouest jusqu'aux Hautes-Fagnes, en 
Belgique, où elle vole avec Colias Palæno et Argynnis Arsilache. 
Dans les Alpes de Suisse, on n'a pas trouvé Afhirape jusqu'ici. 
Cette Aygynnis A phirape éclôt en mai et juin; elle a été capturée 
abondamment au plateau de la Baraque-Michel, à la forêt de 
Saint-Hubert, à Hertogenwald, à Chiny, d'après les excellents et 
savants renseignements fournis par M. Léon Fredericq, directeur 
de la Classe des Sciences de l'Académie royale de Belgique, en un 


discours prononcé dans la séance publique de la Classe des 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 647 


Sciences, à Bruxelles, le 16 décembre 1004, sous le titre : La Faune 
et la Flore glaciaires du Plateau de la Baraque-Michel (point 
culminant de l’Ardenne). Grâce à l’obligeance de M. Henry Brown, 
de Paris, J'ai pu participer à un intéressant envoi de Lépidoptères 
recueillis en 1900 dans les Hautes-Fagnes belges. Les Colias 
Palæno, Argynnis Aphirape et Arsilache étaient représentées dans 
cette collection. 


Argynnis Pales-Arsilache, Esper. 


C'est une forme de Pales, habitant les plaines dans le Nord de 
l'Europe et les basses montagnes du centre. J'ai omis d'en faire 
mention au cours de l’article consacré à la Pales, des hautes mon- 
tagnes, aux pages 216 et 217 du Vol. IIT des Æ/udes de Lépido- 
térologie comparée. Arsilache se trouve en France aux environs de 
Russey (Doubs), où elle a été prise par M. Hustache. M. Léon 
Fredericq dit avoir trouvé Aysilache à la fin de juin et au commen- 
cement de Juillet au Plateau de la Baraque-Michel, à la forêt de 
Saint-Hubert et au Plateau de la Baraque de Fraiture. 

Les ailes d'Arsilache sont plus larges et quelquefois plus arron- 
dies que chez Pales; la figure donnée par Huebner, sous les n°* 36 
et 37, est assez bonne. J'ai obtenu de la Hesse et du Harz quelques 


très belles Aberrations par mélanisme. 


Polyommatus Hippothoë, Linné. 


À la page 145 du présent volume des Ærudes de Lépidoptérologie 
comparée, Jai annoncé la publication de la traduction due aux 
soins de M. Harold Powell, de la notice consacrée par M. Tutt, 
dans son célèbre ouvrage, à l’histoire rétrospective du Polyormatus 
Hippothoë-Dispar, en Angleterre. 

Diverses circonstances ont retardé la mise au point de cette 
traduction; mais M. Harold Powell ayant pu l’achever avant son 


048 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


départ pour le Djebel-Amour (3 mai 1910), je suis heureux de faire 
profiter les Entomologistes français d’un complément de docu- 
mentation anglaise, au sujet du Polyommatus Hippothoë-Dis par. 

On remarquera chez M. Tutt des renseignements déja publiés 
par M. Barrett; mais cette seconde publication ne peut que renforcer 
la première. Voici donc la traduction de la Notice imprimée dans 
l'ouvrage de M. Tutt : 


« Récit historique de Chrysophanus dispar Britannique 


C'est un fait remarquable que les figures et la description les 
plus anciennes de notre insecte Britannique se trouvent dans l’ou- 
vrage d'Esper Sckmett. Eur. I, PI XX XVIII, fig. 1-2 (1777), p. 350 
(1779). Tandis qu'il le décrit sous le nom d’Aippothoë, 11 exprime 
de graves doutes sur son identité spécifique avec Æippothoë, Linné. 
« Le dessus », dit-il, « est d'une couleur plus ardente et luisante 
que P. Vrrgaureæ, et sa bande marginale extérieure est beaucoup 
plus large; la Q possède des taches d'une régularité extraordinaire 
en dessus, tandis que, chez Æippothoë, le dessus est plus foncé et 
brun. Le dessus diffère d'une manière encore plus frappante de 
P. Virgaureæ et de P. Hippothoë, avec lesquels il n'a rien de 
commun. Les ailes de ce premier (Virgaureæ), en dessous, sont 
d'une même teinte Jaune; les secondes ailes avec des points simples 
et des taches bordées de blanc. 

Veuillez comparer ceci avec l'insecte figuré! Ici le dessous est 
gris, avec une vive teinte de bleu, et une large marge de la même 
couleur; les taches pupillées sont bordées de blanc, tandis que 
la bande marginale rouge vif suffit presque à elle seule à le 
distinguer. 

Les spécimens originaux qui ont servi de modèle pour les figures 
sont de la collection du conseiller Jung, à Uffenheim (Bavière). 
De son habitat, son époque d’éclosion, sa larve et son histoire 
naturelle, on ne peut rien apprendre. » 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 049 


Elle fut reconnue espèce Britannique par Lewin, /nsects of 
Great Britain (1793), p. 84, PI XL, fig. 1-3, également sous le 
nom de Æippothoë. Il dit que « quelques exemplaires ont été ren- 
contrés sur un terrain marécageux en Huntingdonshire, et ont été 
ensuite envoyés à M. Seymour, du Dorsetshire, qui les a présentés 
à feue la duchesse douairière de Portland, et ils sont maintenant 
dans la collection de J. J. Swainson ». 

En 1708, Donovan, dans 7 Le Nat. Hist. of British Insects, VI, 
p. 4, pl 217, décrivit et figura l’insecte, remarquant que « notre 
P. Hippothoë est le plus grand et le plus rare des papillons appelés 
« coppers » (cuivrés); nous avons entendu dire que cet insecte a 
été récemment trouvé dans le Cambridgeshire. 

Nos exemplaires viennent d'Ecosse; la Q est plus grande que 
le , et ses ailes ont un plus grand nombre de taches noires ». Ce 
n'est que lorsque Haworth publia l'ouvrage intitulé : Lepidoptera 
Britannica, en 1803, que le nom Dispar fut appliqué à notre insecte 
britannique, qui fut décrit alors comme « une nouvelle et très belle 
espèce ». 

Cet auteur nous informe que « le papillon fréquente les marais 
du Cambridgeshire en Juillet, dans certaines années qui ne peuvent 
être déterminées », et aussi que c'est une espèce nouvelle et très 
belle rencontrée récemment par lui-même et ses très chers amis, 
W. Skrimshire et F. Skrimshire, M. D. et autrefois par le célèbre 
botaniste Hudson, dans le Pays de Galles. [1 ajoute que l'espèce 
n'a pas été prise en Ecosse, comme l'a affirmé Donovan à la suite 
de renseignements erronés ». Il paraîtrait que MM. Skrimshire ont 
vu ce papillon pour la première fois près Ely, en 1707 ou 1708, 
et que, sachant que ce n'était pas une espèce commune, ils sont allés 
ensuite avec Haworth pour le prendre. La localité d'Aberdeen pour 
Dispar paraît avoir été maintenue par Samouelle qui, en 1810, 
donne (Ænt. Usef. Comp, p. 241) les noms de trois papillons 
« cuivrés » (copper butterflies) comme habitant la Grande-Bretagne, 
en plus du petit cuivré (Rumicia Phlæas). Ce sont : (1) « Zycæna 
Dispar (le grand cuivré), le Papilio Hippothoë de Donovan. 
Habite les marais du Cambridgeshire, et a été vu près d’Aberdeen, 


650 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


en Ecosse ». (2) « Lycæena Chryseis (cuivré à bords pourpres). 
Habite l'Europe; est extrêmement rare en Grande-Bretagne ». 
(3) « Lycæna virgaureæ (cuivré rare). Habite l’Europe; très 
localisé en Grande-Bretagne. Se trouve dans certaines parties du 
Huntingdonshire ». Il est à peu près certain que les noms Z. dis par 
et L. virgaurce ci-dessus employés se réfèrent à une seule et même 
espèce. 

En vue des remarques antérieures de Haworth, le maintien de 
la localité d'Aberdeen, citée d’abord par Donovan, est tout à fait 
inexplicable. Au sujet des remarques personnelles de Haworth qui 
ont été publiées, il y aura intérêt à citer une lettre par lui écrite à 
ce sujet au Rev. W. T. Bree, qui la communiqua à l'An. Mag. 
Natural History, 1834, VII, p. 522. Dans cette lettre, Haworth dit : 
« Quelques entomologistes firent une fois une excursion dans les 
marais (fens), avec le but de prendre le beau Zycæna Dispar, ou 
le « grand cuivré », qui, comme on le sait bien, fréquente les ter- 
rains bas et marécageux. Les « cuivrés » furent capturés en grand 
nombre. L'hiver suivant fut très pluvieux, et le terrain où les 
cuivrés avaient été trouvés fut complètement inondé et demeura 
même sous l’eau pendant un temps considérable. Les entomologistes 
pensèrent que l’inondation détruirait certainement les « cuivrés », 
et que la race serait éteinte dans cette région. L'été suivant, cepen- 
dant, les papillons furent trouvés de nouveau au même endroit, et 
aussi abondants qu'auparavant. Ensuite le terrain fut soumis à 
l’action du feu, et la surface entière fut brûlée en vue d’amélio- 
rations agricoles. Après cette opération, les « cuivrés » ne furent 
plus rencontrés dans cette localité ». 

En 1824, Curtis mentionne l'espèce (Brif. Ent., fo. XIT) sous le 
nom de Dispar (avec références à Haworth, Esper, Lewin et 
Donovan), et enregistre sa capture à Vaxley Meer; d’autre part, 1l 
annonce dans la deuxième édition de cet ouvrage que « ce superbe 
papillon a été découvert d’abord au Pays de Galles par le célèbre 
botaniste Hudson, et le D' Skrimshire l’a pris, il y a bien des 
années, dans le marais de Bardolph (Bardolph Fen), en Norfolk. 
Ces dernières années, il a paru en abondance énorme à Whittlesea 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE O1 


Mere, en Huntingdonshire, et a été trouvé depuis le 25 juin jusqu'au 
10 août. Au commencement de juillet, la chenille, la chrysalide et 
le papillon ont été trouvés vivants le même jour. 

Ce papillon est très actif et se cache en temps de vent au milieu 
des plus hauts roseaux. Il fréquente, pendant les belles journées, 
les espaces couverts de laiches et de graminées grossières qui 
poussent là où les roseaux ont été fauchés ». Kirby et Spence (1826) 
font mention de cette espèce dans leur /n{roduction to Entomology 
comme suit : « Les marécages aussi ont leurs insectes particuliers. 
Dans une région de ce genre, dans le « Isle of Ely », ce rare et 
beau papillon, Zycena Virgaureæ, a été pris par un membre du 
Trinity College de Cambridge », montrant qu'à ce moment encore, 
la nomenclature qui servait aux lépidoptérologistes britanniques 
était assez confuse. M. C. W. Dale affirme qu'après la capture des 
exemplaires signalés comme ayant été pris par Haworth et 
MM. Skrimshire, d’autres furent ensuite pris à Whittlesea Mere, en 
juillet 1810, par Thomas Speechly, un vieux batelier employé par 
son père, et plus tard par son père lui-même et MM. Standish. 
Il dit : « L'espèce paraît avoir été très abondante, puisque plusieurs 
centaines furent prises pendant les 10 années qui suivirent, par les 
collectionneurs de Londres, qui visitèrent les « Meres » de Vaxley 
et de Whittlesea, au mois de juillet, uniquement pour prendre des 
spécimens. En 1827, M. Haworth prit cinquante exemplaires en 
une seule journée, dans le Bardolph Fen, Norfolk; quelques-uns 
furent pris aussi à Benacre, en Suffolk » (British Butterflies, 
p. 47). En 1828, Stephens écrivit sur cette espèce ce qui suit : « Ce 
splendide insecte paraît être restreint aux comtés marécageux de 
Cambridge et de Norfolk, à moins qu'on n’admette le récit de sa 
capture dans le Pays de Galles par Hudson; mais il s’agit proba- 
blement ici de l'espèce suivante (Æippothoë), qui, d’ailleurs, peut 
être un jour reconnue synonymique avec Z. Dispar. Dans les deux 
premières localités, elle paraît exister en grande profusion, car plu- 
sieurs centaines d'exemplaires ont été capturés pendant les dix 
dernières années par les collectionneurs de Londres, qui ont visité 
les « Meres » de Whittlesea et de Yaxley pendant le mois de 


652 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


juillet, dans le but unique de prendre cet insecte, qui se trouve aussi, 
dit-on, sur la côte de Suffolk à Benacre, mais il est possible cepen- 
dant que cette localité soit celle de l’insecte suivant (Æ/1ppothoë) » 
(Is Br CE RE MpSP); 

Lequel des « cuivrés » était désigné par l'/1pp0thoë de Stephens 
est bien douteux. En lisant la comparaison qu'il en fit avec 
C. dispar, on serait porté à penser comme lui qu'il s'agissait d'une 
aberration de cette dernière espèce, « la femelle d’A1pp0thoë 
différant de celle de Z. dispar par la plus petite dimension des 
taches du dessus des ailes antérieures, et en ayant le disque entier 
des ailes postérieures en dessus obscurci par des taches plus foncées, 
et sans les nervures fauves; les taches du dessous sont plus petites 
et moins nombreuses que chez Z. Dispar ». Les observations géné- 
rales qui suivent tendent, cependant, à nous faire conclure qu'il 
avait importé des spécimens continentaux d’/rppothoë (comme 
ceux de CAryseis et de Virgaureæ, que Stephens décrit également); 
car, au sujet de l’insecte décrit sous le nom d’Æ1ppothoë, 11 écrit : 
« La taille inférieure de l’insecte ci-dessus, aussi bien que la diffé- 
rence en nombre et en dimension des taches ocellées du dessous 
des ailes, et la couleur du dessus des ailes postérieures de la femelle, 
ajoutées à la circonstance que, parmi plusieurs centaines de 
L. Dispar prises à Whittlesea Mere, pas un seul spécimen ne corres- 
pondait à la définition ci-dessus, paraissent indiquer le présent 
insecte comme espèce à part. Le mâle que je possède était dans la 
collection de feu M. Beckwith, et la femelle est celle de M. Haworth, 
qui m'informe qu'il l'obtint, il y a bien des années, d’une vieille 
collection formée par un monsieur demeurant en Kent, qui ne 
contenait presque pas un insecte qui ne fût le produit de ce comté, 
et appelée en conséquence le « Kentish Cabinet », ce qui rend pro- 
bable, comme le suppose M. Haworth, que la vraie localité de 
l'insecte est le comté de Kent ». Si peu de précautions étaient prises 
dans ce temps pour séparer les spécimens britanniques et continen- 
taux qu'on est forcé de croire qu'il s’agit d’une importation, et on 
ne doit non plus oublier que c'était Hzppothoë et non Dispar qui 
fut signalée en Kent. Nous ne croyons pas pour un instant que les 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 653 


spécimens de Stephens et de Haworth étaient des Æ1ppothoë de 
Kent. 

La description favorise un peu la supposition que lespèce peut 
être la forme rwtilus de C. Dispar; mais notre connaissance actuelle 
de la chose est nulle. De plus, on peut soutenir qu'il y a quelque 
chose à dire en faveur du maintien de ces individus sombres et 
plus petits comme réellement des exemplaires britanniques (mais 
non de Kent) de la forme 7wéilus, car M. G. Bethune-Baker déclare 
que cette forme a été indubitablement prise en Grande-Bretagne. 
Il écrit : « Je sais depuis bien des années que mon père prit le 
C. Dispar ordinaire et aussi la var. rwtilus à une époque entre 1825 
et 1834. Mon père me dit qu'il prit lui-même ses spécimens (huit 
en tout). Tous, cinq Of et trois Q. sont dans ma collection. Un mâle 
est un Xutilus typique; un autre presque typique, mais avec des 
taches un peu plus grandes; tandis qu'un troisième tient le milieu 
entre Dispar et Rutilus; les deux derniers sont des vrais Dispar. 
Une des femelles est Xulus assez typique, une autre ressemble en 
dessus aux exemplaires plus foncés qu'on prend quelquefois sur le 
continent, c'est-à-dire avec des taches plus grandes sur le dessus 
des ailes; mais les taches du dessous sont décidément plus grandes 
que dans aucune de mes var. Kutilus, tandis que la troisième est 
Dispar vrai » (Ent. Mo. Mag., Vol. XXVIIL, p. 190), et M. Sheldon 
s'est depuis permis de douter (Æxr. Rec., VITE, p. 114) que les trois 
exemplaires dans la « collection Tugwell », catalogués comme 
ayant été pris dans « Say et Seal Park », fussent autres que des 
Rutilus du type continental normal. 

Vers 1833, Geyer, dans sa continuation du Sammlung Euro- 
paischer Schmetterlinge de Hübner, PI CXCV, fig. 006-008, donne 
d'excellents dessins de la forme britannique sous le nom d’A:#- 
pothoë. Mais le jour de l'extinction n'était pas très éloigné, car, en 
1847 ou 1848, la dernière capture de cette espèce en Grande- 
Bretagne fut faite par M. Stretton, qui prit cinq exemplaires dans 
le Holme Fen. En 1880, Merrin enregistra (Ex. Kec., XI, p. 208- 
200) deux exemplaires censés de Monmouthshire; mais, comme 
pour les fameux exemplaires de Langport (Woodland) et de 


054 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Weston-super-Mare réputés avoir été pris dans le Somersetshire au 
commencement du XIX' siècle, et l'exemplaire signalé de Worces- 
tershire dans le « /llus. of Nat. Hist. of Worcestershire, p. 138 », 
de Hastings, on aimerait une information plus authentique. 

À partir de ce moment, toutes les observations ayant rapport à 
C. Dispar britannique ne sont que des souvenirs. Beaucoup sont 
intéressants. En voici un de la plume de M. Sam. Stevens : « Je 
me souviens bien qu’à la réunion de la British Association à Cam- 
bridge, en 1844 ou 1845, Je crois, J'ai été présenté par M. Vernon 
Wollaston, ou par le Rev. Hamlet Clark, à un nommé Rawlinson, 
dit « l'homme aux pâtés » (the pie-man). Il avait l'habitude d'aller 
pour le compte des messieurs de l'Université collectionner dans les 
marais (Fens), les plantes, les insectes et autres objets d'histoire 
naturelle en été, mais en hiver il vendait des pâtés. Rawlinson me 
demanda si je désirais des chenilles du grand cuivré; je lui dis 
que j'en prendrais quelques-unes. Deux jours plus tard, il m'en 
apporta une douzaine; je lui dis que j'en aurais assez avec six, et 
je les lui achetai au prix qu'il demandait, six pence chaque. Je les 
emportai chez moi, et j'obtins par éclosion cinq beaux spécimens en 
parfait état. À ce moment on pouvait acheter le papillon chez 
les naturalistes-marchands de Londres, à 1 shilling et 2 shillmgs 
pièce. Si seulement il avait été possible de prévoir ce qui est arrivé, 
J'aurais certainement pris les douze chenilles et fait une grande 
provision de papillons, car on en aurait pu faire une petite fortune » 
(Science Gossip, 1804, p. 20). 

Une autre réminiscence, qui, écrite par un collectionneur de 
profession (feu « vieux Harding », de Deal), possède un intérêt 
pathétique, puisqu'elle tend à abolir la fiction agréable et si rassu- 
rante pour nous qui consiste à penser que l’extermination de cette 
belle espèce n’est nullement due aux agissements directs des collec- 
tionneurs, mais que ce fâcheux résultat a été amené par le drainage 
des lieux par elle fréquentés. Voici, cependant, ce que Harding 
a écrit : 

« Il y a environ quarante ans, M. Ben]. Standish (le grand-père) 
apprit que Dispar, ainsi appelé alors, avait été vu dans les marais. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 655 


Li obtint un dessin du papillon, colorié par son père, descendit dans 
les marais et le montra aux habitants, mais personne n'en savait 
quoi que ce soit. M. Drake, des « Checkers » (une auberge), lui dit 
qu'un homme qui travaillait dans les marais à couper les roseaux, 
y logeait, et qu'il pourrait bien en savoir quelque chose. Quand cet 
homme retourna de son travail, Standish lui montra le dessin et 
lui demanda : « Avez-vous connaissance d’un papillon comme 
celui-ci? — Oui, répondit l’homme, j'en ai vu aujourd'hui. — Eh 
bien ! dit Standish, que faut-il que je vous donne pour me conduire 
à l'endroit? —- Non, dit l'homme, j'ai l'intention d'en emporter une 
quantité à Londres ». Standish lui offrit alors cinq shillings 
(6 fr. 25) pour qu'il lui montrât la localité, mais l’homme refusa 
de la lui indiquer, même pour une promesse de deux shillings par 
insecte pris. Le propriétaire, cependant, indiqua à Standish l'endroit 
où l’homme travaillait. Il réussit à le trouver et prit une belle série 
de P. Hippothoë. 11 fut bientôt connu des gens des marais que ces 
papillons valaient deux shillings (2 fr. 50) pièce à Londres, et 
deux hommes vinrent de Cambridge, s'en emparèrent d'un grand 
nombre et les emportèrent à Londres par boîtes pleines, où ils les 
vendirent six pence (0 fr. 60) chaque. J'y suis retourné environ 
trois ans plus tard et j'ai trouvé quelques chenilles. Elles parais- 
saient très localisées, plus nombreuses, là où leur plante nourricière 
— le Water dock — était le plus abondant. Les chenilles étaient 
chassées par tout le monde, les jeunes et les vieux. J'en ai acheté 
deux douzaines à une vieille femme pour neuf pence (© fr. 00 
environ). De ces chenilles j'ai obtenu par élevage de beaux spécimens 
que j'ai vendus un shilling chaque. M. Cole, à Holme Fen, en prit 
une grande quantité. La cour de sa maison était tout près de leur 
localité. La dernière fois que j'y étais, M. Cole me dit qu'il n'en 
avait pas vu une seule depuis plusieurs années. La plante nourricière 
y était en abondance au même endroit, mais de chenilles point. On 
les avait trop chassées » (Æx4., XVI, p. 130). 

Le fait que sa plante nourricière existait « en abondance » bien 
après la disparition de l'insecte et que « les chenilles avaient été 
trop chassées » est significatif. Les rapports des auteurs plus 


656 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


récents sont, naturellement, tous extraits des publications anciennes. 
Même aussi récemment que 1857, Stainton énumère deux espèces 
de « cuivrés » britanniques à part CÆrysophanus Phlæas. Ce sont : 
(1) « Chrysophanus Dispar (grand cuivré), et (2) CArysophanus 
Chryseis (le cuivré à bordures pourpres) ». 

À propos def” Dr524r,alécait- «ur, 27e. Rouge cuivré brillant, 
avec une, ou plus d’une, tache noire sur chaque aile; marges exté- 
rieures noires. Dessous — aile inférieure, bleu pâle, avec des taches 
noires distinctes, VII-VIIT (juillet et août). Chenille verte, avec une 
ligne dorsale plus foncée, et une ligne plus pâle de chaque côté 
(Freyer). Sur Rumex hydrolapathum (great water-dock) et X. 
Aguaticus, NI (juin). Trouvée autrefois à Whittlesea Mere et 
Vaxley » (Manual, I, p. 55). 

Stainton cite alors M. Bond comme suit: « Vous ne vous trompez 
pas en supposant que j'ai une connaissance personnelle de €. Despar. 
Je crains beaucoup que je n'aurai plus jamais ce plaisir, car je suis 
convaincu que l'espèce a disparu des marais de Cambridgeshire et 
de Huntingdonshire. Tout ce que je puis vous dire de leurs mœurs 
est qu'ils étaient très actifs et timides, et ne volaient que lorsque le 
soleil brillait; ils se posaient toujours sur un chardon fleuri quand 
ils pouvaient en trouver un, s’envolant pour attaquer n'importe quel 
insecte qui pouvait s'aventurer dans leur voisinage, allant ensuite 
se poser ailleurs plutôt que de retourner au même endroit. Il était 
à peu près inutile de les suivre si on les manquait du premier coup 
de filet, car 1ls s'en allaient comme le vent, n’offrant que rarement 
une seconde occasion de les prendre; ils étaient, au fait, difficiles 
à suivre, parce que ce n'était pas commode de les garder à vue et 
d'éviter en même temps les endroits marécageux ». 

Newman (1871) ajoute entre autres choses : « Les variétés de 
cette espèce ne sont pas communes; chez les exemplaires que J'ai 
eus entre les mains, j'ai noté une uniformité de coloration remar- 
quable; mais M. Dale m'informe qu'il possède une femelle presque 
entièrement noire ». Il ajoute ensuite : « Ma connaissance de la 
chenille et de la chrysalide date de bien des années, de l’époque 
où je les ai rencontrées dans le jardin de M. Doubleday, à Epping, 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 657 


où la même plante de Rumex hydrolapathum qui nourrissait les 
chenilles existe encore ». L'auteur actuel pense qu'il possède, grâce 
à la grande générosité du D' Chapman, un des derniers exemplaires 
élevés par M. Doubleday sur cette plante. Quant à la variabilité 
des dates d'éclosion, M. Newman cite les faits suivants : « Des 
chenilles apparurent au commencement de juin 1826; 3-5 Juillet 
1833: 19 juillet 1827; août 1819; 4 août 1821 ». M. J. C. Dale 
fournit ces dates. Newman avait complètement abandonné l'idée 
que cette belle espèce ait jamais été rencontrée ailleurs que dans 
les comtés de Cambridgeshire et Huntingdonshire. Il dit que dans 
le premier comté, elle a été prise « en abondance à Whittlesea Mere 
(J. FE. Stephens); et n'a pas été prise dans le Cambridgeshire depuis 
1845 (Thomas Brown) ». À propos de son existence dans le dernier 
comté, nous lisons : « Yaxley et Holme Fens. La dernière capture, 
composée de cinq exemplaires, fut faite par Stretton en 1847 ou 
en 1848; tous furent achetés par M. Harrington. J'étais à Vaxley, 
pendant plusieurs années consécutives après cette capture, mais Je 
n'ai jamais vu un autre spécimen ni entendu parler d'une capture 
de plus » (F. Bond). Newman ne mentionne pas le Norfolk et le 
Suffolk, comtés cités par nous sur le témoignage de Stephens et de 
M. C. W. Dale, comme fournissant des exemplaires, mais il n'y a 
aucune raison de douter de l'existence autrefois de l’insecte dans 
ces comtés. 

Il y a un petit incident dans l’histoire de C. Dispar que nous 
n'avons pu sonder. Il a son origine dans un rapport de la réunion 
de la South London Entomological Society du O mars 1893, où 
nous lisons : « Il y eut une discussion quant à l'existence de 
Polyommatus Dispar Haw. à Camberwell (banlieue de Londres), 
il y a cinquante ans, et M. Fenn et M. Tugwell notèrent tous deux 
des spécimens provenant probablement de Kent, avant l’année 
SAS (Er UReEc MIND" 121). 

Nous avons déjà cité ce qu'a dit Stephens d’une espèce de 
« grand cuivré » supposée avoir été prise en Kent, bien avant la 
date de son ouvrage (1828), et qu'il décrivit sous le nom 
d'Hippothoë. 


658 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Le seul autre rapport que nous avons pu trouver ayant une portée 
sur cette question est un paragraphe tout récent, un peu plus 
détaillé que les notes de Stephens, quoique ayant évidemment trait 
aux mêmes spécimens, par M. C. W. Dale, qui écrit : « Il (var. 
Rutilus) à été rapporté comme britannique sous le nom d’/1ppothoë. 
À ce sujet, mon père écrivit dans Zondons Magazine pour 1834 : 
€ M. Haworth me dit qu'ils provenaent d'une vieille collection 
appelée le « Kentish Cabinet », et passaient pour avoir été pris 
près de Faversham. Je tenais un mâle et une femelle de feu 
M. Latham, provenant de la collection du capitaine Lindegren, d’où 
sortirent, probablement, tous les spécimens supposés britanniques » 
(British Butterflies, p. 46). Voilà tout ce que nous trouvons en ce 
qui concerne les exemplaires de CArysophanus Dispar du Kent, 
sauf ce que nous avons déjà noté (Awfea, p. 422). Nous pouvons 
noter quelques-unes des impossibilités concernant certaines localités 
citées pour cette espèce. Nous avons déjà dit que Donovan croyait 
aux exemplaires écossais, tandis que Haworth rapporte que l'espèce 
a été prise autrefois au Pays de Galles par le célèbre botaniste 
Hudson. M. J. B. Hodgkinson, de Preston, annonce dans l’Ento- 
mologiss Weekly Intelligencer, Vol. IV, p. 10 (1858), quil vit un 
exemplaire « dans le Cumberland », qu'il « l’observa attentivement 
et le manqua malgré tout ». Ce récit en attira d’autres. Dans la 
même publication, p. 131, M. W. Winter, de Ranworth, dit : « Cette 
espèce vient d'apparaître de nouveau ici dans les marais; J'en ai 
vu quatre hier, mais Je les ai tous manqués ». C'était le 10 juin 1858. 
On note avoir vu un exemplaire dans les marais de Hackney 
(Entom., Vol. VI, p. 221). La réalité de ces apparitions (et de bien 
d’autres que je ne mentionne pas) me paraît bien douteuse. Pendant 
de longues années, nous avons cru volontiers que cette belle espèce 
nous appartenait entièrement, car il était connu de tous que les 
figures de Duponchel (Hist. Nat. I, XII, 3-6) et de Boisduval 
(Icones, I, X, 1-3), décrites sous le nom donné par Haworth, étaient 
- dessinées d'après des spécimens britanniques; mais quand le 
Catalog der Lepidopt. etc. de Staudinger, parut en 1871, on trouva 
que, quoique le C. Dispar fût restreint à l'Angleterre, ce n'était 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 059 


qu'une forme d'une espèce bien répandue sur le continent. Cette 
espèce était le utilus de Verneburg (B#7r. [, p. 391), le Hippothoë 
de Huebner (fig. 352-4), Ochsenheimer (1, 2, 83), Godart (EL 0, 
sec. 5, 10 sec. 3), et Freyer (127). 

A cette époque, le Ruilus avait été pris en « France, Allemagne, 
le Sud-Est de l'Europe (citr. Graecia), Bithynie, Armémie et 
l'Altai ». 

Kirby aussi considère que le vrai type Däspar appartient uni- 
quement à l'Angleterre. La var. Autlus, qui existe sur le continent 
d'Europe, est, d’après Staudinger, plus petite, avec des taches plus 
petites; mais puisque les exemplaires britanniques de Paspar 
varient beaucoup quant à la taille, les uns n'étant certainement pas 
plus grands et d’autres bien plus petits que les grands Xw#lus, une 
autre distinction était nécessaire. Celle-ci fut fournie apparemment 
par M. Howard Vaughan, qui attira l'attention sur la bande orangée 
de la marge extérieure du dessous des secondes ailes, bien plus 
large chez les individus britanniques de C. Dispar que chez la var. 
Rutilus. Lang dit que tous les spécimens continentaux qu'il a vus 
« appartiennent à la variété Rwfilus et sont si distincts qu'il ne 
devrait exister aucune confusion entre eux et la vraie forme typique 
prise autrefois en Angleterre ». 

Il ajoute : « Le caractère le plus distinctif chez Ruflus, cepen- 
dant, est l’étroitesse de la bande orangée du dessous des ailes 
postérieures, près de la marge extérieure. J'ai examiné un grand 
nombre d'exemplaires de Rutilus et aussi de Dispar, dans le but 
d'établir quelque caractère constant qui permettrait de les différen- 
cier, et Je n'ai Jamais vu un spécimen de Xutilus avec la bande de 
la marge extérieure aussi large et aussi bien définie qu'elle l’est 
toujours chez Dispar. Je suis donc disposé à considérer ce caractère 
comme typique » (Butterflies of Europe, p. 91). Tout ceci était 
admirablement clair, et ceux qui avaient placé leur or en « cuivrés » 
britanniques respiraient librement de nouveau, car il avait été tout 
dernièrement affirmé qu'une forme identique à celle de la Grande- 
Bretagne venait d’être découverte dans les marais Pontins, près de 
Rome, et en Egypte (!), et c'est un fait acquis — telles sont les 


42* 


660 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


singularités des espèces britanniques rares (et même éteintes) — 
que la découverte de la même forme à l'étranger aurait été immé- 
diatement suivie d’une augmentation du nombre des exemplaires 
britanniques authentiques. 

La dernière agitation, cependant, dans le monde des « cuivrés », 
fut soulevée par M. Bethune Baker, qui affirme qu'il possède des 
individus de la variété Rutilus d'origine britannique indubitable, 
capturés 1l y a bien des années avec le Dispar ordinaire dans les 
Fens. Au point de vue scientifique, ceci est évidemment la chose la 
plus naturelle possible, car il n’y a pas de doute que toutes les 
formes locales d'une espèce puissent apparaîtra parfois comme 
aberrations accidentelles dans toutes les localités habitées par 
d'autres variétés de l'espèce. Mais c’est regrettable au point de vue 
du spéculateur, puisqu'il ne peut plus affirmer que les var. Lutilus 
réputées britanniques qui sont quelquefois mises en vente ne le sont 
réellement pas. Deux var. Rwtilus véritables furent offertes comme 
britanniques dans les salles de vente aux enchères, et achetées 
comme telles, nous le croyons du moins, le 13 avril 1806, et « pace 
Lang », nous ne nous sentons pas nous-mêmes capables de séparer 
certains Dispar d'origine anglaise indubitable de certains Aytilus 
indiscutablement continentaux. Les remarques de M. Bethune 
Baker ont déjà été citées 27 extenso. Il existe encore quelques cen- 
taines de C. Dispar britanniques; mais leur nombre diminue chaque 
année. Les accidents, et la négligence dont souffrent certaines 
anciennes collections, sont les deux principales causes de la dimi- 
nution du nombre d'exemplaires. En conséquence, le prix de 
C. Dispar montera toujours. En 1871, lorsque nous commencions 
à collectionner, aucun marchand ne cataloguait le plus beau 
C. Dispar plus de 15 shillings, et une somme dépassant une livre 
(25 francs) pour un bon spécimen était considérée exorbitante. 

Pendant que le nombre d'exemplaires diminuait et le nombre 
d'acheteurs augmentait, les prix montaient lentement et sûrement, 
et maintenant on peut considérer £ 5- 5 s. (131 fr. 25 c.) pour un 
beau mâle, et £ 5- 10 s. (137 fr. 50 c.) pour une belle femelle, 


comme des prix ordinaires. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 661 


Pendant la vente de la collection Burney, en 1806, des mâles 
furent payés #4 6- 10 s. (162 fr. 50 c.) et £ 5- 15 s. chaque, tandis 
que des femelles montèrent à £ 6- 10 5, £ 6 et £ 5- 15. Dans la 
collection Fry, en 1896, 8 mâles ont produit £ 36 (900 fr.), et 
6 femelles £ 30- $ s. (756 fr. 25 c.), certains exemplaires étant 
payés #4 6- 15 s. (168 fr. 75), £ 6-6 s. et £ G pièce; en 1806 éga- 
lement, une belle femelle de la collection Tugwell fut vendue £ 6, 
et un grand mâle £ 7- 7 s. (183 fr. 75); une Aberration Q de 
C. Dispar de la collection Howard-Vaughan, £ 6- 10 s. Dans la 
collection Briggs, vendue en 1806, les prix les plus élevés furent 
de Mots opourun OC, #5 (125 fr) pour une ©, 
tandis qu'un record fut établi par la somme de £ 8- 8 s. (210 fr.) 
payée pour un exemplaire exceptionnellement beau. 

Dans la collection Stevens, vendue en 1900, la somme de 
£ 71-155. (1.793 fr. 75) fut produite par 14 exemplaires; le prix 
le plus bas étant de £ 2 pour un GO nain; un bel exemplaire du 
même sexe se vendant £ 8 (200 fr.), et d’autres produisant respec- 
hvement £ 0,26 16S 2006, ct 40: 

De la collection Crowley, vendue en 1902, les plus fortes sommes 
payées étaient de £ 5- 10 s. pour les mâles, de £ 6 et £ 7 chaque 
pour les femelles. 16 spécimens de la collection Mason, vendue en 
1905, réalisèrent 4 80- 6 s. (2.007 fr. 50), le maximum pour un seul 
exemplaire étant de £ 8 pour une belle © chez laquelle les taches 
basilaires des ailes supérieures étaient réunies. Si élevés que soient 
ces prix, ils ne sont rien à côté de ceux qu'on peut s'attendre à voir 
réaliser assez prochainement quand les « cuivrés » se vendront 
peut-être à des sommes se rapprochant de celles données pour les 
œufs du Great Auk (Grand Pingouin). Pour celui qui sait apprécier 
le côté humoristique des choses, il y a beaucoup d’amusant dans 
une vente de C. Dispar. On y voit le professionnel qui donnera 
une cinquantaine de francs pour un spécimen, même en piètre état, 
à condition qu'il soit intact; mais qui dédaigne l’exemplaire le plus 
brillant s'il lui manque une antenne. Il connaît son marché et il 
n'achète jamais ce dernier. Ensuite il y a l'amateur avisé, qui sait 
attendre, et qui suit les ventes des collections d'importance secon- 


662 © LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


daire. [1 vous dira qu'il a une série de 10 ou 12 exemplaires qu'il 
Wa pas payés plus de £ 2 ou £ 3 chaque, et qui sont aussi beaux 
et en aussi parfait état que des spécimens payés environ £ 5 aux 
ventes des collections mieux connues et mieux annoncées. 

Il y a aussi le collectionneur fortuné, auquel il faut le spécimen 
coûte que coûte, qui écrase toute opposition. 

11 peut être soutenu que tout ceci déroge à la science et que nous 
ne devrions pas nous occuper de ces détails. Nous ne pouvons que 
répondre que cette méthode est la seule possible actuellement pour 
collectionner le C. Dispar britannique ». 


Zygæna Achilleæ, Esper. 


On trouve dans la fin de juillet et au commencement d'août, 
en Italie, à Roccaraso et Palena, ainsi qu’à Partenio, une seconde 
éclosion d’AcAilleæ, remarquable par sa petite taille et sa couleur 
peu foncée. La Q a le fond des ailes supérieures grisâtre, le double 
collier et les courtes épaulettes blancs. J'ai désigné cette race par 
le nom d'alica-æstivalis. Elle est différente de toutes les autres 
formes d'Acilleæ que je connais. Il semble que ce soit une 
A chiileæ minima, aussi bien à cause de sa taille très réduite que 


de son aspect faiblement coloré. 


Zygæna Transalpina, Esper. 


De même que Roccaraso et Palena, en Italie, donnent une 
génération estivale d'AcÆillew plus petite et moins vivement 
colorée, ainsi, au même lieu, M. Fabresse a trouvé, à la fin de 
juillet et au commencement d'août 1907, une forme de 7 7ansalpina 
dont j'ai sous les yeux une série de plus de 20 exemplaires, très 
réduite de taille, par rapport aux proportions normales de l’Espèce. 
La Zransalpina estivale de Roccaraso et Palena est tout à fait 


comparable, sauf la bordure indigo des ailes inférieures qui est 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 663 


plus large et l’ensemble qui se trouve plus intensivement coloré, 
à l’Æippocrepidis-Provincialis que M. Harold Powell recueillit du 
27 au 30 septembre 1006, à Montrieux, près Méounes (Var). Mais, 
en dessous, les ailes supérieures de 7'7ansalpina-æstivalis de 
Roccaraso et Palena manquent absolument du Webelstreif, tandis 
que les ailes supérieures, chez Æippocrepidis-Provincialis, sont 


largement lavées de rouge. 


Zygæna Trifolii, Esper. 


M. Gédéon Foulquier a capturé, le 26 septembre 1900, dans la 
Crau (Bouches-du-Rhône), au Marais des Chanoines et du Mas- 
de-Capelle, une forme de Zygæna Trifolii tout à fait analogue à 
celle de Vernet-les-Bains. Je suis redevable de 13 exemplaires à 
l'obligeance de M. Gédéon Foulquier. Pas un n'a les taches des 
ailes supérieures confluentes. Ainsi que les ailes inférieures, les 
taches en question sont d’un rose carminé pâle; la bordure indigo 
des ailes inférieures n’est pas très large; c'est la 7r2folü-Dupon- 
cheliana. | y a donc dans la Crau une seconde éclosion, à la fin 
de l'été, de la 7 72folu. 

Cette seconde éclosion peut arriver aussi pour quelques rares 
exemplaires de Z7ifolii-Palustris, aux environs de Rennes. 
M. P. Boulé obtint, vers le 17 juillet 1900, des petites chenilles qui 
sortirent des œufs pondus dans une boîte de chasse par des 
Zygæna Palustris capturées en juin, aux environs de Betton et de 
Saint-Grégoire, sur les berges du canal d’Ille-et-Rance, près Rennes. 
Ces petites chenilles mangèrent, pendant une dizaine de jours, des 
feuilles de lotus; elles profitaient rapidement; mais elles cessèrent 
de manger, changèrent de peau et de couleur; au lieu d’être d’un 
vert Jaunâtre avec des bandes noires, elles devinrent très pâles et 
presque blanchâtres; dès lors elles se fixèrent çà et là sur les parois 
de la boîte et ne bougèrent plus, semblant prendre ainsi leurs quar- 
tiers d'hiver. Cependant 3 chenilles firent exception à la règle 
générale; elles continuèrent de manger et de grossir; enfin 2 firent 


664 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


leur coque : la première vers le 4 août, la deuxième vers le 15 du 
même mois; l’autre mourut avant de se transformer. D'une des 
coques sortit, le 31 août, une superbe Zygère à taches confluentes, 
parfaitement conforme aux échantillons capturés à la fin du prin- 
temps de la même année. Il est donc possible qu’une éclosion de 
quelques échantillons dont les chenilles ne se seraient pas immobi- 
lisées vers la fin de juillet, et auraient continué à manger et à se 
développer, paraisse dans la Nature à la fin d'août ou au commen- 
cement de septembre, en Bretagne, comme dans les Pyrénées- 
Orientales et les Bouches-du-Rhône. 


EXPHIS MONDES" PLANCETES 


Nos 224. 


226. 


No 227: 


228. 


PUBLIÉES DANS LA IVe LIVRAISON 


des Études de Lépidoptérologie comparée 


PLANCHE XXXV. 
PariL10o Mucius d, Obthr. Siao-Lou, aux frontières de Chine 
et de Thibet; capturé par les chasseurs indigènes de feu Île 
P'Déjean tensr60$ 


. ZYGÆNA THERYI, J. de Joannis. 


(Bulletin Soc. ent. France, 1908; p. 203, 204). Hammam- 
Rhira (Algérie); captur. 26 mai 1908, par MM. Walter 
Rothschild et Karl Jordan. 

PÂpiLio MucIUS Q, Obthr. Leou-Fang, en Chine; captur. par 
le P. X. Mouton. 

Le Papilio Mucius est sans doute une forme nouvelle de 
Macilentus; c'est un Papilio rare dont, depuis 30 ans, J'ai 
reçu seulement un petit nombre d'exemplaires (19 Gr 20 
pris à Mou-Pin, Tä-tsien-Lou, Siao-Lou et Leou-Fang. Les 
2 Q© viennent de Leou-Fang; je ne connais pas la forme Q 
du Su-Tchuen occidental. Les d de Leou-Fang sont de plus 
petite taille que ceux du Su-Tchuen occidental. 


PLANCHE XXXVI. 


PAPILIO PHIDIAS C', Obthr. Annam. 
(Bulletin Soc. ent. France, 1906; p. 156). 
Ma collection contient 3 © semblables; mais la © reste 
inconnue. 
SEsIA LECERFI GO, Obthr. Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orient.). 
(Bulletin Soc. ent. France, 1909; p. 186). 


666 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


N°S 229. PAPILIO LACEDEMON Œ, Fabr., Donovan, Godart, etc. Hué 
(Annam). 

Le type-spécimen de Zacedemon Q, Fabr., jadis dans la 
collection de Drury, fut le premier exemplaire qui fut connu 
et resta le dernier jusqu'à la nouvelle découverte qu’en fit 
M. Vitalis, aux environs de Hué. Ma collection contient 2 Œ 
reçus en janvier 1907. 

230. SOMABRACHYS CHRETIENI Œ, Obthr. Zebch, près Sebdou (Algé- 
rie) ; septembre 1007. 

(Bulletin Soc. ent. France, 1908 ; p. 48). 

231. SOMABRACHYS KHENCHELÆ GC, Obthr. Khenchela (Algérie); 
septembre 1908. 

La Q a été figurée sous le n° 92 de la PI. XXI, dans la 

III livraison des Ætudes de Lépidoptérologie comparée. 


PLANCHE XXXVII. 


N°5 232. CŒNONYMPHA ARCANIUS-INSUBRICA Œ', Raetzer. Crevola. 
233. CŒNONYMPHA ARCANIUS-DUPUYI O', Obthr. Angoulême. 
234. CŒNONYMPHA ARCANIUS-DUPUYI Q, Obthr. Bohême. 
235. CŒNONYMPHA ARCANIUS-CŒCA Q, Obthr. Vienne. 
(Voir Vol. IV; pages 24-27). 
236. CŒNONYMPHA PHILEA-CŒCA ©, Obthr. Suisse. 
(Vol. IV ; page 30). 
237. POLYOMMATUS VIRGAUREÆ-CHRYZON ©, Obthr. Francfort-sur- 
le-Mein. 
(Bulletin Soc. ent. France, 1005 ; p. 56) — (Vol. JV ; p. 135). 
238. SYRICHTHUS MALVÆ-ALBINA, Obthr. Autriche. 
(Vol. IV; page 396). 
239. AUGIADES SYLVANUS-FAUNUS ©, Turati. Uriage, dans l'Isère; 
juin 1805. 
(Vol. IV; page 360). 
240. AUGIADES COMMA-DUPUYI, Obthr. Angoulême. 
241. AUGIADES COMMA-ALBESCENS, Obthr. Angleterre (ex collection 
Samuel Stevens). 
(Vol. IV ; page 361). 
242. HESPERIA THAUMAS-ANTIARDENS, Obthr. Oberwyk. 
(Vol. IV; page 357). 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 607 


Nos 243: 


Nes 


244. 


HESPERIA LINEOLA-ARDENS, Obthr. Silésie. 
Vol. IV; page 356). 

POLYOMMATUS VIRGAUREÆ-VIRGINALIS ', Obthr. Silésie. 
(Bulletin Soc. ent. France, 1905 ; p. 56) — (Vol. IV ; p. 135). 


PLANCHE XXXVIII. 


. POLYOMMATUS GORDIUS-DINIENSIS ©, Obthr. Digne (Augustin 


Coulet; 1901). 


. POLYOMMATUS GORDIUS-RONDOUI C', Obthr. Gèdre (Rondou; 


5 août 1901). 


. POLYOMMATUS GORDIUS-ALBESCENS Œ', Obthr. Grisons (ex coll. 


Wiskott). 


. POLYOMMATUS GORDIUS-NEVADENSIS Œ', Obthr. Sierra-Nevada, 


côté de Huejar (R. Oberthür; juillet 1870). 


. POLYOMMATUS GORDIUS-BELLIERI ©, Obthr. Sicile, dans les 


montagnes (ex coll. Bellier). 


. POLYOMMATUS GORDIUS-BELLIERI ©, Obthr. Sicile, dans les 


montagnes (ex coll. Bellier). 
(Voir Vol. IV; p. 114). 


. LYCÆNA ÆGON-RADIATA ©, Obthr. Dunes entre Plouharnel et 


Kerostin (Morbihan); captur. par P. Boulé; 4 à 6 juin 1900. 


. LYCÆNA ÆGON-PLOUHARNELENSIS , Obthr. Dunes entre 


Plouharnel et Kerostin (Morbihan); 4 à 6 juin 1900. 


. LYCÆNA ÆGON-PLOUHARNELENSIS ©, Obthr. Dunes entre 


Plouharnel et Kerostin (Morbihan); 4 à 6 Juin 1900. 


. LYCÆNA ÆGoN ©, W. V. Lande au pied du Mont Saint-Michel, 


entre Huelgoat et Brasparts (Finistère); 10 Juillet 1900. 


. LYCÆNA ÆGoON ©, W. V. Lande au pied du Mont Saint-Michel 


(Finistère) ; 10 juillet 1900. 


. LYCÆNA ÆGoN ©, W. V. Forêt de Quimperlé (Finistère); 


capturé en 1881, par feu le Lt Mathieu. 
(Voir Vol. IV; p. 185, 186). 


. LYCÆNA ÆGON-ALPINA O, Berce. Route du Simplon (Valais); 


du 18 au 23 juillet 1902. 


. LYCÆNA ÆGON-ALPINA ©, Berce. Route du Simplon (Valais); 


du 18 au 23 juillet 1902. 
(Voir Vol. IV; p. 200). 


608 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


PLANCHE XXXIX. 


N°8 259. LYCÆNA ARGUS-NEVADENSIS O', Obthr. Sierra-Nevada (côté de 
Lanjaron) ; captur. juillet 1870. 
260. LYCÆNA ARGUS-NEVADENSIS Q, Obthr. Sierra-de-Alfakar (An- 

dalousie) ; captur. juillet 1870. 

261 (ne ARGUS d et Q, Linné. Montagnes au-dessus de 
Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales) ; captur. juillet 1906. 

263. LYCÆNA ARGUS O', Linné. Digne; captur. juillet 1897. 

264. LYCÆNA-ARGUS ©, Linné. Digne; captur. juillet 1907. 

265. LYCÆNA ARGUS ©, Linné. Digne; captur. juillet 1897. 

266. LYCÆNA ARGUS ©, Linné. Enchastrayes (Basses-Alp.) ; captur. 

juillet 1807. 

267 ) LYCÆNA ÆGON-HYPOCHIONA et Q, Rambur. Sierra-Nevada 

(côté de Lanjaron); captur. juillet 1870. 

269. LYCÆNA ÆGON-HYPOCHIONA ©, Rambur. Vernet-les-Bains 
(partie chaude) ; captur. juin 1901. 

270. LYCÆNA ÆGON-HYPOCHIONA Q, Rambur. Vernet-les-Bains 
(partie chaude); captur. été 1891. 

271. LYCÆNA ÆGoON ©, W. V. Digne; captur. 1905. 

272. LYCÆNA ÆGoN O, W. V. Angleterre (ex collect. Briggs). 

273. LYCÆNA ÆGON ©, W. V. Epping (Angleterre); ex collection 
Howard-Vaughan). 

274. LYCÆNA ÆGON ©, W. V. Angleterre (ex collection Howard- 
Vaughan). 


PLANCHE XL. 


E 


Nos LYCÆNA ARGUS-ARMORICANA © et ©, Obthr. Monterfil (Ille- 
et-Vilaine); captur. 22 Juin 1909. 

277. LYCÆNA ARGUS-ARMORICANA ©, Obthr. Monterfil; captur. 
2 juillet 1900. 
278 ) LYCÆNA ARGUS d et ©, Linné. Cauterets (Hautes-Pyrénées) ; 
captur. juillet 1908. 
280. LYCÆNA ARGUS-BELLIERI O, Obthr. Bastelica (Corse); captur. 

7 Juillet 1905. 

281. LYCÆNA ARGUS-BELLIERI Q. Corse; captur. 21 juillet 1905. 
282. LYCÆNA ARGUS ©, Vienne. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 669 


Nos 283 


Nos 


Nos 


5: ÉLxcæxa ÆGoN d'et Q, W. V. Rennes; captur. juillet 1909. 


285. LYCÆNA ÆGON O' et ©, W. V. Falaise près la pointe du 
Grouin, au Nord de Cancale (Ille-et-Vilaine); captur. 
juillet 1900. 

286 )LYCÆNA ÆGON-ALPINA ' et ©, Berce. Cauterets; captur. 

ou juillet 1883. 

288 ) LYCÆNA ÆGoN-CoRSICA Œ et Q, Bellier. Corse; dans les 

0 montagnes. 

290. LYCÆNA ORBITULUS-OBERTHURI-CŒCA ©. Bords du Lac de 
Gaube (Hautes-Pyrénées) ; captur. juillet. 


PLANCHE XLI. 


291. LYCÆNA ARGUS-LIGURICA Œ. Chine Nord. 

292. LYCÆNA ARGUS-LIGURICA ©. Sidemi (Mandchourie); captur. 

par M. Jankowsky, en 1882. 

203 me ARGUS-LIGURICA Πet Q. Cernobbio (Lago di Como, 

Italie du Nord); captur. en juin 1907. 

295. LYCÆNA ARGUS-LIGURICA Q. Vichy (Allier); ex collection de 

Graslin. 

A à ARGUS-LIGURICA Œ et Q. Uriage (Isère); captur. 

juin 1805. 

208. LYCÆNA ICARIUS-AVIATOR ', Obthr. Tyrol (IV; p. 220). 

209. LYCÆNA ICARUS-RADIATA Œ, Oppeln. 

300. LYCÆNA AMPHIRROË d, Obthr. Thibet; Chasseurs thibétains 
de Tä-tsien-Lou; captur. été 1894. 

301. LYCÆNA ARGUS-ÆGINA ©, Leech. Tä-tsien-Lou; 1903. 

302. LYCÆNA TIRESIAS-MYRMIDON ©, Engramelle. Forêt de Rennes; 
captur. 12 Mai 1900. 

303. LYCÆNA LAMASEM ©, Obthr. Thibet; captur. par les chasseurs 
de feu le P. Déjean, en 1805. 

304. LYCÆNA ARGUS hermaphrodite. Quartier de Thauze, à Digne; 
captur. par Augustin Coulet, le 19 mai 1908. 


PLANCHE XLII. 


305. LYCÆNA ARGUS-INSULARIS C', Leech. Yokohama (Japon); 1891. 
306. LYCÆNA ARGUS-INSULARIS ©, Leech. Japon. 


670 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


Nos 307) LYCÆNA ARGUS Œ' et ©, Linné. Larche (Basses-Alpes) ; captur. 

308 par les chasseurs Coulet, en juillet 18097. 

309. LYCÆNA EUMEDON-PEYERI Q, Husz. Fort-Naryne (Turkestan 
oriental); captur. par G. S. Akulin, en 1907 (IV ; p. 255). 

310. LYCÆNA EUMEDON-MARITIMA Œ, Obthr. Forêt de Picracave 
(Alpes-Maritimes) ; captur. fin juin 1806 (IV ; p. 255). 

311. LYCÆNA EUMEDON-SUBTUS-IMPUNCTATA Œ. Berlin. 

312. LYCÆNA CALLIOPIS ©, Boisduval. Polygone de Grenoble (ex 
collection Boisduval). 


I 
: 5 ÉLxcæxa ÆGON-JAPONICA Œ' et Q. Japon. 


315 ) LYCÆNA ÆGoON Œ' et Q, W. V. Larche (Basses-Alpes) ; captur. 

par les chasseurs Coulet, en juillet 1807. 

317. LYCÆNA EUMEDON-SUBTUS-IMPUNCTATA ©. Berlin. 

318. LYCÆNA EUMEDON-SPEYERI, Husz. Enchastrayes (Basses-Alp.) ; 
captur. juillet 1807. 

319. LYCÆNA EUMEDON-FYLGIA ©, Spgbg. Forêt au-dessous de 
lPhôtel Ryffelalp (Valais); captur. juillet 1808. 

320. LYCÆNA CALLIOPIS ©, Boisduval. Polygone de Grenoble (ex 

coll. Boisduval) ; avec le n° 312, l’un des specimina typica 


s 


ayant servi à la description initiale. 


PLANCHE XLIIT. 


N°5 321. LYCÆNA ICARUS-RADIATA OC. Berlin. 

22. LYCÆNA ICARUS-IMPUNCTATA ©. Vienne. 

323. LYCÆNA ICARUS-CÆCA ©. Dusseldorf. 

324. LYCÆNA ICARUS-CÆRULESCENS ©. Bourg-des-Comptes (Ille-et- 
Vilaine); captur. par P. Boulé fils; fin mai 1907. 

325. LYCÆNA ICARUS-TUTTI-IMPUNCTATA ©. Angleterre (ex collect. 
Briggs, vendue Salle Stevens, les 27 et 28 octobre 1896) ; déjà 
figurée par les procédés phototypographiques dans la Feuille 
des Jeunes Naturalistes, 1900, n° 21. 

326. LYCÆNA ICARUS-IMPUNCTATA 9. Digne (avril 1897); Æeuille 

des Jeunes Naturalistes, 1900, n° 20. 
27. LYCÆNA ICARUS hermaphrodite. Digne, dans le Vallon de St- 
Jean; Victor Cotte; 2 août 1907. 
(Vol. IV ; p. 240). 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 671 


N° 328 ) POLYOMMATUS HIPPOTHOË et Q, Linné; transition à DISPAR. 
329 ) Saint-Quentin (Gronier; ex coll. Bellier). 
330. POLYOMMATUS DISPAR O', Haw. Angleterre (ex coll. Boisduval ; 
Hope, 1820). 

331. POLYOMMATUS DISPAR Q. Angleterre (ex coll. Howard-Vaughan, 
vendue à la Salle Stevens, les 22 et 23 avril 1890, avec la 
mention : « K. O. Standish’s coll. purchased 1880 »; déjà 
figurée par les procédés phototypographiques dans la /’euille 
des Jeunes Naturalistes, 1900, n° 16. 

2. POLYOMMATUS XANTHE-RADIATA O. Prairics près l'étang des 
anciennes forges de la Vallée (Ille-et-Vilaine ; mai 1800). 

333- POLYOMMATUS XANTHE-RADIATA OQ. Silésie. 

334. POLYOMMATUS XANTHE-MONTERFILENSIS Œ, Obthr. Monterfil 

(Ille-et-Vilaine) ; printemps 1896. 
35: POLYOMMATUS XANTHE-CUNEIFERA Q, Obthr. Mesneuf (Ille- 
et-Vilaine) ; en août. 
(MoirWol"IVEFptr05-110). 


PLANCHE XL IV: 


MELITÆA PARTHENIE, Godart. 
(Lépidoptérologie comparée; Vol. IT: pages 255-257). 


N°5 336. Ab. RHOIO ©, Obthr. Fond des carrières de Pince-Poches, en 
Cesson, près Rennes; captur. 4 juin 1880 (exagération méla- 
nienne de l’Ab. Ahoio Œ). 
337. Ab. MOLPADIA ©, Obthr. Bourg-des-Comptes (Ille-et-Vilaine) ; 
captur. mai 1806. 

Huebner a figuré une Aberration tout à fait analogue, 
attribuée à Athalia, sous les signes W J, 2, de la PI. IV de 
la 2° partie du 2° Volume de Peitraege zur Geschichte der 
Schmetterlinge; Augsbourg, 1700. 

338. Ab. MOLPADIA d. Cesson, près Rennes; captur. 31 mai 1886. 

339. Ab. MOLPADIA Œ. Laillé, près Rennes; captur. 23 mai 1900. 

340. PARTHENIE ©, légèrement différente de la forme normale. 
Rennes; captur. printemps 1906. 

341. PARTHENIE ©. Cesson, près Rennes; captur. 29 mai 1800. 

342. Ab. RHOIO ©. Bourg-des-Comptes, 1895 (exagération de l’Ab. 
Rhoio S). 


Nos 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


343. Ab. RHOIO OC. Bourg-des-Comptes ; 1892. 

Huebner a figuré des Aberrations analogues, avec le nom 
de Pyronia, sous les n°5 585, 586, 587 et 588. Les Auteurs ont 
rattaché généralement ces Pyronia, Huebner, à Afhalia. 

344. Ab. RHOIO OC. Bourg-des-Comptes ; 1896. 

345. Ab. RHOIO Q. Cesson, près Rennes; captur. mai 1889. 

346. Ab. RHOIO Q. Le Monetier-de-Briançon (Haut.-Alpes) ; captur. 
été 1905 (exagération mélanienne de l’Ab. Xoto Q). 

347. Ab. ELONGATA ©, Obthr. Aix-les-Bains (Savoie) ; captur. juillet 
1905. 


é représentant la forme normale de l'Espèce. 
347 bis. PARTHENIE O 


Le O' a été pris à Rennes en été 1896 et 
347 ter. PARTHENIE Q 


la Q à Cesson, le 2 juin 1880. 

Les n°% 337, 338, 342, 343, 344, 345 ont déjà été figurés 
d’après les procédés phototypographiques, sur la Planche 1 
du Bulletin de la Société ent. de France, 1900; la notice, à 
l'appui des figures, a été imprimée aux pages 276 et 277 du 
susdit Bulletin. 

Molpadia était sœur de Parthenie et gardait avec elle le vin 
de leur père Staphyle; le vin était un don nouvellement fait 
aux hommes. — XAoto, fille de Staphyle et de Chrysothémis, 
était également sœur de Parthenie; elle fut aimée d’Apollon. 


ELANCHE X[CV: 


348 \ MELITÆA DICTYNNA-VERNETENSIS Cf et Q. Obthr. Vernet-les- 
349 Bains (Pyrénées-Orientales) ; mai-juillet. N° 348 et 349, d'; 
359 350 et 351, Q. 

(Lépid. comparée; Vol. IIT ; p. 247). 


_ uELrra AURELIA d'et Q, Nick. Samoussy (Aisne); juin 1909. 
5 
354. MELITÆA AURELIA Ab. MELANAURELIA, Obthr. Osnabrueck. 


(Lépid. comparée; Vol. III; p. 249). 


_ MELITÆA NEVADENSIS, Obthr. Sierra Nevada, côté de Lanjaron ; 
. juillet 1879- Nocc ets 7, OM 210 59,10) 

ge (Lépid. comparée; Vol. III; p. 253). 

35È 


359 ) MELITÆA AURELIA Œ et Q, Nick. Route du Simplon; 
360 juillet 1902. 
(Lépid. comparée; Vol. III; p. 248). 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 673 


—————————————————————_—_—]——_—__————— 


No 


Nos 


361. MELITÆA AURELIA Ab. MELANOPTERA, Obthr. Berlin. 
(Lépid. comparée; Vol. III; p. 240). 


PLANCHE XLVI. 


EREBIA LEFEBVREI, Dup. 
(Lépid. comparée; Vol. III; p. 200). 


362. LEFEBVREI OŒ. Mont Monné, au-dessus de Cauterets; juillet 
1881. 

363. LEFEBVREI ©. Hautes-Pyrénées (ex collection Bellier). 

364. LEFEBVREI ©. Montagnes au-dessus de Gèdre (Rondou). 

365  NiICHOLLI Set Q, Obthr. Autriche, Sud Tyrol; juillet 1895. 

i (lépid. comparée; Vol. III; p. 304, 305). 

367. LEFEBVREI-ASTUR Q, Obthr. Picos de Europa (Asturies) ; 
juillet 1882. 

368. LEFEBVREI-INTERMEDIA ©, Obthr. Montagnes du Cambrè:-d'Ace 
(Pyrénées-Orientales) ; juillet 1862. 


Gc | 
e LEFEBVREI-PYRENÆA ©, Obthr. Frontière espagnole des Pyré- 
_ nées-Orientales. Ull de Ter; 23-25 juillet 1900. 
I 
372. LEFEBVREI-PYRENÆA ©, Obthr. Arète Nord du Mont Canigou ; 


17 août 1000. 
373: LEFEBVREI-PYRENÆA ©, Obthr. Frontière espagnole des Pyré- 
nées-Orientales. UII de Ter; 23-25 juillet 1900. 


PEANCHE XEVITI. 


S 374. ÊREBIA GORGE-RAMONDI Œ, Pierret. Cirque de Gavarnie 


(Hautes-Pyrénées) ; 27 juin 1803. 
375. EREBIA GORGE-RAMONDI Q, Pierret. Montagnes au-dessus de 
Cauterets (de Guernisac). 
(Lépid. comparée; Vol. III; p. 317). 
370 ) ÊREBIA TYNDARUS-ARVERNENSIS Œ'et ©, Obthr. Auvergne (ex 
collection Bellier). 
(Lépid. comparée; Vol. III; p. 338). 
378. EREBIA TYNDARUS-CASSIOIDES G, Ab. 2 ocelles à l’aile supé- 
rieure gauche ; 1 ocelle à l'aile supérieure droite. Cauterets ; 
juillet 1901. 
(Lépid. comparée; Vol. III; p. 330). 


674 


N° 370. 


N°5 386. 
. CŒNONYMPHA DORUS-TRIOCELLATA ©, Obthr. Albarracin; été 


394. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


EREBIA GLACIALIS-DUPONCHELI ©, Obthr. Basses-Alpes ; juillet 


1807. 
(Lépid. comparée; Vol. III; p. 304). 


. ÊREBIA GORGONE ©, Bdv. Hautes-Pyrénées; montagnes au- 


dessus de Gèdre; Rondou; 1907. 


. ÊREBIA GORGONE ©, Bdv. Col de Riou, entre Cauterets et Luz 


(Hautes-Pyrénées) ; fin juillet 1890. 
(Lépid. comparée; Vol. II]; p. 313). 
EREBIA TYNDARUS-CLEO, Huebner (382, O'; 383, 384, Q). Mont 
Majella (Italie) ; Fabresse; 5 et 6 août 1907. 
(Lépid. comparée; Vol. IIi; p. 338). 


. EREBIA GLACIALIS-DUPONCHELI ©, Obthr. Basses-Alpes ; juillet 


1807. 


PLANCHE XLVIIT.: 


CŒNONYMPHA DORUS-AUSTAUTI Œ', Obthr. Nemours (Oranie). 


1907. 


. CŒNONYMPHA DORUS-MICROPHTHALMA ©', Obthr. Millau (Avey- 


ron) ; été 1904. 


. CŒNONYMPHA DORUS Q, Esper. Environs de Verncet-les-Bains ; 


été 1908. 


. CŒNONYMPHA DORUS-ANDALUSICA Œ, Ribbe. Grenade (de 


Graslin). 


. CŒNONYMPHA DORUS-ANDALUSICA Q, Ribbe. Grenade; juillet 


1870. 


. CŒNONYMPHA DORUS-ANDALUSICA Q, Ribbe (transition vers 


Fettigii). Sierra-de-Alfakar (Andalousie); juillet 18709. 
(Lépid. comparée; Nol. IV; p. 31:4381et 43): 


. CŒNONYMPHA PAMPHILUS-THYRSIDES ©, Stgr. et Rebel. Khen- 
e 8 


chela ; juillet 1908. 
(Lépid. comparée; Vol. IV ; p. 49). 
CŒNONYMPHA CORINNA-LEFERVREI C', Ragusa. Sicile (pris par 
Lefebvre). 
(Lépid. comparée; Vol. IV; p. 44). 


. CŒNONYMPHA ŒDIPPUS-GELINI ©, Obthr. Provient de la col- 


lection Boisduval. 
(Lépidopt. comparée; Vol. III; p. 397). 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 675 


Nes 


Nos 


ee 0 FETTIGII-HOLLI Œ et Q, Obthr. Glacière de 
307 Blida (Alger) ; mi-juillet 1908. 
398 ) CŒNONYMPHA FETTIGI Cet Q, Obthr. Environs de Sebdou, 
. en Oranie; juillet 1907. 

(Lépid. comparée; Vol. IV; pages 38-44). 


PEANCHE) XLTX. 


400. POLYCÆNA CARMELITA, Obthr. Siao-Lou. 
(Bulletin Soc. ent. France, 1003 ; p. 268-270) — (Lépridopt. 
comparée; Vol. IV ;:p. 56). 
401. THECLA ILICIS-ALBOSPARSA O', Obthr. Angoulême ; capturé par 
Gabriel Dupuy, le 14 juin 19009. 
(Lépid. comparée; Vol. IV ; p. 74). 
402. THECLA ESCULI-GRASLINI Œ', Obthr. Sierra-Nevada; 16 juillet 
1835- 
(Lépid. comparée; Vol. IV ; p. 77). 
403 ) THECLA ESCULI-MAURETANICA-POWELLI Πet Q, Obthr. Khen- 
ee chela; juin 1908. 
(Lépid. comparée; p. 78). 
405. THECLA ESCULI-MAURETANICA Œ', Stgr. Sebdou; juin 1907. 
(Lépid. comparée; p. 77). 
406. POLYOMMATUS CHRYSEIS-VIOLACEA Œ, Obthr. Cauterets; juillet 
1883. 
(Lépid. comparée; p. 130). 
407. POLYOMMATUS GORDIUS-NARYNA ©, Obthr. Fort-Naryne, au 
Turkestan. 
(Lépid. comparée; p. 115). 
408. THECLA SPINI-ALBOSPARSA ©. Obthr. Akbès. 
(Lépid. comparée; p. 60). 
409 | LYCÆNA THEOPHRASTUS, Fab.; variétés diverses d'Algérie. 


410 Le n° 409 représente une Q micærulescens prise à Sebdou, 
411 en août 1007; les n°% 410 et 413 reproduisent l’Ab. radiata, 
412 de Sebdou et de Bou-Saada ; le n° 411 Q vient de Bou-Saada ; 
413 les n°% 412 et 414 viennent de Sebdou et Biskra. 

414 (Lépid. comparée; p. 150, 160). 


415 Me ESCHERI-HELENÆ © et Q, Obthr. Dompierre-sur-Mer 
416 (Charente-Inférieure) ; juin 1900. 


(Lépid. comparée; Vol. IV; p. 218). 


Nos 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


PLANCHE E 


AI 4 À 
1 CALLOPHRYS RUBI-SUAVEOLA ©, Stgr. Akbès. 


419 de Avis Œ et Q, Chapman. Amélie-les-Bains 
419 bis (Pyrénées-Orientales). 
(Il y a une erreur de numérotage dans le texte, à la 
page 95 du Vol. IV; j'ai laissé imprimer à tort le n° 420, 
au lieu du n° 419 b?s). 
420. CALLOPHRYS AVIS Q, Chapman. Aïn-Draham, en Tunisie. 
421. CALLOPHRYS RUBI-FERVIDA, Stgr. Lambèse ; avril 1884. 
422. CALLOPHRYS RUBI, Linné. 35 kilomètres au Nord-Est de 
Moscou ; 23 mai 1907. 
(Lépid. comparée; Vol. IV ; p. 85-05). 
423. LYCÆNA TITHONUS-ITALICA Q, Obthr. Mont Majella, dans les 
Abruzzes (Italie centrale); août 1907. 


424. LYCÆNA TITHONUS-CÆRULESCENS ©, Obthr. Larche, dans les 
Basses-Alpes ; août 1807. 

425 ) LYCÆNA TITHONUS-EROIDES Q, H.-S. Tâ-tsien-Lou; été 1904. 

426 (Lépid. comparée; Vol. IV; p. 230-235). 

427 \ PHRAGMATOBIA LEPRIEURI Πet Q, Obthr. Philippeville (Al- 

428 gérie) ; avril 1800. 

429 Le n° 427 O' représente la forme 7#orisca, Obthr., et le 
n° 428 O se rapproche beaucoup de la forme initialement 
décrite et figurée dans les Ætudes d'Entomologie, Liv. III, 
PI. 5, fig. 2. La Q (n° 420) est née à Rennes, d'une chenille 
envoyée par feu Olivier. 


430. PHRAGMATOBIA PUDENS O', Lucas. Bône (Algérie). 


PLANCHE’ LT 


431. SCODIONA HOLLI S', Obthr. Lavarande (Algérie) ; 19° mai 1908; 
dédiée à M. E. Holl, qui a découvert l’Espèce. 

432. POLYPTICUS BREVIS, Obthr. Madagascar. 
(Bulletin Soc. ent. France, 1909, p. 233). 


433. AMPHIDASIS QUERCII, Obthr. Tien-Tsuen (chasseurs indigènes 
de feu le PDéjean); 1901 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 677 


N°5 434. AMPHIDASIS CLORINDA, Obthr. Tse-Kou (envoyé en 1895 par 


435. 


439. 


440. 


441. 


feu le P. Dubernard). 


AMPHIDASIS ERILDA, Obthr. Tse-Kou (envoyé en 1900 par feu 
le P. Dubernard). 

Ces 3 beaux Amphidasis, capturés dans la région chinoise 
occidentale qui se trouve évangélisée par les Missionnaires 
catholiques de la Mission du Thibet, paraissent extrêmement 
rares; ils sont spécifiquement différents de fiston emargi- 
naria, Leech, qui est une Espèce du même Groupe. J'ai dédié 
ces 3 belles Geometræ à la famille de M. Orazio Querci, 
entomologiste plein d’ardeur et chasseur très habile, demeu- 
rant à Formia, province de Caserte, en Italie. Je prie 
Me Clorinda Querci et M'e Erilda Querci, toutes les deux 
entomologistes très zélées, d'accepter avec la dédicace de ces 
nouvelles Espèces de Lépidoptères, l'hommage de mon pro- 
fond respect, et M. Orazio Querci de recevoir la cordiale 
expression de ma gratitude pour l’intéressante documentation 
dont je lui suis redevable. 


METROCAMPA HONORARIA-PICTAVORUM Q, Obthr. Charroux 
(Vienne). 2 Q semblables sont écloses en janvier 1907 de 
chenilles trouvées en septembre 1906. 


ZULEIKA PLEBEJARIA, Obthr. El Aouedje, près Sebdou; 27 et 
28 août 1907. — 14 exemplaires semblables ont été capturés 
par M. Harold Powell; le docteur Codet avait déjà recueilli 
un ©, le 18 février 1881. 


ZULEIKA NOBILIARIA ©, Bang-Haas. Biskra. 


ZULEIKA NOBILIARIA O', Bang-Haas. Sud-Oranais. 
Je possède 1 O° du Sud-Oranais acheté à M. Bang-Haas et 
2 Q de Biskra que m'a données M. Deckert. Je ne suis pas 
certain que le n° 438 soit la Q du n° 439; le dessous des aïles 
est un peu différent, comme le dessus d’ailleurs. Cependant 
je ne trouve pas actuellement de caractères assez nettement 
distinctifs pour les apprécier autrement que comme une diffé- 


rence sexuelle. 


CIDARIA MULTISTRIGA, Obthr. Constantine (prise par feu 
Olivier). 


RHEGMATOPHILA AKULINI, Obthr. Fort-Naryne; Prov. Semi- 
rechgensee, au Turkestan oriental ; dédiée à M. Akulin, qui 
a découvert plusieurs exemplaires en 1907. 


43 


078 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


N° 4y2. ZYGÆNA CARNIOLICA-DETSCHI, Obthr. Capturée aux environs 
de Stuttgart, à la fin de juillet 1909, par M. Aloïs Detsch; 
diffère de ÆZaveola, Esper (Tom. II; Tab.. XXXVI; fig. 1), 
par l’absence de l’anneau abdominal jaune; de plus, la teinte 
jaune est /uteola et non flaveola; enfin l'entourage blanc des 
taches jaunes est à peine perceptible. 


PEAN CHENE 


IMBRASIA ERTLI d, Q et larve, Rebel. 
(Annalen K. K. Hofmuseums, p. 67; Taf. 3 (1904). 
La chenille vit sur l’Afzelia Cuanzensis ou Acajou; elle est 


commune à Rikatla, localité située à 25 kilomètres au Nord 
de Lourenço-Marquez (Pasteur Henri A. Junod). 


PLANCHE LIII 


N°98 446. BUNÆA HEROUM, Obthr. Kuyambi, Ubemba (Afrique orientale). 
J'ai reçu 2 Q, en 1908, de M. le P. Guillemé, Missionnaire 
apostolique. 

447. ARCTIA VILLICA-ARABUM ©, Obthr. Algérie, sur le littoral; 
recueillie par M. Dayrem, en 1900. 
Cette forme paraît constante en Algérie; je possède plu- 
sieurs exemplaires semblables rapportés de Yakouren ct Aïn- 
Seur, par feu le D Charles-Henri Martin. 


PLANCHE LIV 


N°3 448. SYRICHTHUS THERAPNOIDES ©, Obthr. Sebdou (Prov. d'Oran); 
août 1007. 
(Vol. IV; page 385). 
449. SYRICHTHUS FRITILLUM Œ, Huebner. Vernet-les-Bains; prove- 
nant des chasses de juillet et août 1900. 
450. SYRICHTHUS FRITILLUM ©, Huebner. Vernet-les-Bains ; chasses 
de juillet et août 1806. 


451 
452 | SYRICHTHUS FRITILLUM Q, Huebner. Vernet-les-Bains; pris en 
1 été 1887, 1894, 1003. 

454 


/ 
455. SYRICHTHUS FRITILLUM O', Huebner. Vernet-les-Bains ; prove- 
nant des chasses de maï et juin 1900. 
(Lépid. comparée; Vol. IV; pages 386-390). 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 679 


N°5 456. SYRICHTHUS MALVÆ-TARAS O', Bergstr. Mesneuf, près Rennes ; 


457. 


458 
459 


460. 


461 
402 
403 


464. 
465. 


466. 


407. 


mai 1882. 
SYRICHTHUS MALVÆ-INTERMEDIA Q. Rennes; printemps 1906. 
SYRICHTHUS MALVÆ, Linné. Alsasua, dans le Nord de l’Es- 
pagne ; juin 1870. 
SYRICHTHUS MALVÆ ©, Linné. Cauterets; fin de juin 1890. 


SYRICHTHUS MALVÆ-FRITILLANS, Obthr. Vernet-les-Bains. 


SYRICHTHUS MALVÆ C', Linné. Cauterets; fin de juin 1890. 


SYRICHTHUS MALVÆ ©, Linné. Mont-Revard, au-dessus d’Aix- 
en-Savoie ; Juin 1906. 

SYRICHTHUS MALVÆ O', Linné. Lande de Caden (Morbihan); 
10 Mal 1009. 


SYRICHTHUS MALVÆ, Linné. Lande de Caden; 10 mai 1900. 


468 ) SYRICHTHUS MALVÆ-GRÆCA, Obthr. Grèce; ex coll. Bellier. 


409 ) 


(Lépid. comparée; Vol. IV ; pages 300 à 396). 


470 | SYRICHTHUS ALVEUS-RYFFELENSIS, Obthr. Environs de Ryffe- 


471) 


479: 


lalp, en Valais; capturés du 5 au 18 juillet 1808. 
(Zépid. comparée; Vol. IV ; page 405). 


PPANCHE EV 


. LYCÆNA EUPHEMUS-SANGUISORBÆ, Obthr. Angoulême. 


(Lépid. comparée; Vol. IV : page 333). 


. POLYOMMATUS CHRYSEIS-HERMATHION €, Obthr. Silésie. 


(Lépid. comparée; Vol. IV; page 130). 


. SYRICHTHUS CARTHAMI-NEVADENSIS ©, Obthr. Sierra-Nevada, 


côté de Lanjaron; juillet 1870. 


. SYRICHTHUS CARTHAMI ©, Huebner. Angoulême; juin 1906. 
6. SYRICHTHUS CARTHAMI ©, Huebner. Angoulême; juin 1906. 
. SYRICHTHUS CARTHAMI-VITTATUS ©, Obthr. Samoussy (Aisne); 


13 Juin 1900. 


. SYRICHTHUS CARTHAMI-VALESIACUS Q, Ruehl. Viège, dans la 


vallée du Rhône, en Valais; juillet. 
(Lépid. comparée; Vol. IV ; pages 381-384). 
POLYOMMATUS HIPPOTHOË ©, Linné (subtus radiata). Berlin. 


680 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


en ————_——_—_—_——— 


N°3 480. SYRICHTHUS SERRATULÆ ©, Rambur. Forêt de Vouvant 
(Vendée). 
481. SYRICHTHUS SERRATULÆ ©, Rambur. Charroux (Vienne). 
482. SYRICHTHUS SERRATULÆ-MINOR d. Cauterets; juillet 1882. 
483. SYRICHTHUS SERRATULÆ-MAJOR. Akbès; été 1890. 


484 : 
48e SYRICHTHUS ALVEUS-NUMIDA et Q, Obthr. Lambèse (Prov. 
186 Constantine; juin). 


PLANCHE LVI 
SYRICHTHUS ALVEUS, Huebner. 


N°8 487. Forma FOULQUIERI , Obthr. Entrevaux à Mont-Gourdon ; 

juillet 1906. 

488. Forma FOULQUIERI Q, Obthr. St-Zacharie (Var); 10 août 1900. 

489. Forma FOULQUIERI Œ, passage à BELLIERI, Obthr. Bouches- 
du-Rhône ; 1905. 

490. Forma BELLIERI ', Obthr. Larche; ex coll. Bellier. 

401. Forma BELLIERI Q, Obthr. Ryffelalp (Valais); fin juillet 1902. 

492. Forma ALVEUS-ALVEUS O', Huebner. Cauterets (fin juillet 1905). 

403. Forma ALVEUS-ALVEUS ©, Hucbner. Vernet-les-Bains ; été 1895. 

494 ) Forma BALLOTÆ, Boisduval (ix musæo). Dowre (Norvège). 

495 Ÿ (Zépid. comparée; Vol. IV; page 404). 

496 ? Forma CARLINÆ d, Rambur. La Grave (Hautes-Alpes); juillet 

497 ) 1906. 

408. Forma CARLINÆ ©, Rambur. Mont Revard, au-dessus d'Aix- 
en-Savoie; commencement d'août 1902. 


499. Forma CARLINÆ C', Rambur. Larche; ex coll. Bellier. 

500. Forma CARLINÆ O', Rambur. Larche; août 1806. 

soi. Forma CARLINÆ Q, Rambur. Basses-Alpes; ex coll. Bellier. 
(Lépid. comparée; Vol. IV; pages 408-409). 


2 … A 
É Forma Cirsit Set Q@, Rambur. Angoulême ; 2 septembre 1907. 
3 


504. Forma CIRsit G, Rambur. Angoulême; 2 septembre 1907. 


505. Forma Cirsit G, Rambur. Sicile; ex coll. Bellier. 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE O8I 


N°S 506. Forma CIRSII O, Rambur. Digne; été 1806. 
507. Forma CIRSI ©, Rambur. Belesta (Ariège); 10 septemb. 1900. 


508. Forma CIRSII-HERRICHIT O', Obthr. Entrevaux:; 12 août 1906. 
(Lépid. comparée; Vol. IV; pages 409-411). 


PLANCHE LVII 


SYRICHTHUS ALVEUS, Huebncr. 


Forma ARMORICANUS ©, Obthr. Rennes; printemps 1907. 


Forma ARMORICANUS Œ' et Q, Obthr. Dunes de la Guimarais, 
entre Cancale et Saint-Malo ; août 1884. 

Forma ARMORICANUS Œ, Obthr. Dunes entre Plouharnel et 
Kerostin (Morbihan); juin 1900. 


Forma ARMORICANUS Œ et ©, Obthr. Dompierre-sur-Mer (Cha- 


Ur Ur 
CR 
[N] 1 
ee AR 0e LR 2 2 at 


rente-Inférieure) ; juin 1900. 
517. Forma ARMORICANUS ', Obthr. Auzay (Vendée) ; fin août 1907. 


518. Forma ARMORICANUS-FABRESSEI ©, Obthr. Florac (Lozère); 
juillet 1863. 
519 He ARMORICANUS-FABRESSEI, Obthr. Sierra-Alta (Castille) ; 
août 1907. 

(Lépid. comparée; Vol. IV ; pages 411-413). 


521 ue ONOPORDI-CONYZÆ O' et Q, Guenée. Charroux (Vienne) ; 
mai 1882. 

523. Forma ONOPORDI-CONYZÆ, Guenée. Zermatt (Valais); juillet. 
524. Forma ONOPORDI OC, Rambur. Lambèse ; avril 1884. 

525. Forma ONOPORDI Q, Rambur. Sebdou; octobre 1907. 

526. Forma ONOPORDI C', Rambur. Sebdou; mai 1907. 

527. Forma ONOPORDI Q, Rambur. Zebch, près Sebdou ; août 1907. 
528. Forma ONOPORDI ', Rambur. Vernet-les-Bains ; août 1880. 
529. Forma ONOPORDI Q, Rambur. Vernet-les-Bains ; juillet 1909. 
530 AR ONOPORDI-CONYZÆ d', Guenée (ex éypicalibus specimi- 
n1b.), La Charnée (Savoic), 


682 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


PLANCHE LVIII 


Nos 532 


CYRTOGONE JUNODI O et Q, Obthr. Rikatla; obtenus de che- 
533 


nilles qui ressemblent à une larve de Saturnide et qui vivent 
sur un arbre appelé Watertree (Henri Junod). /unodi paraît 
voisine, mais distincte de Cyrtogone Cana (Stgr.). Conte 
(Pinarides PLACE. 8). 


534. GONIMBRASIA OSIRIS, Druce (Ann. Mag., N. H. (6); XVII; 

p. 354; 1806). Transvaal, non loin de. Leydsdorp (H. Junod). 

D’après le D' Karl Jordan, Gonimbrasia Osiris auraït reçu 

les deux autres noms suivants : Bunæa Deborah, Weymer 

(Berlin. ent. Zeitsch., p. 70; 1806), et Gonimbrasia Sardane, 
Sonthonnax (Saturn.; PI. X; fig. 1). 

535 


À { TrrLocHa FICICOLA Œ' et Q, Westwood. Lourenço-Marquez; la 
53 


chenille, semblable à un ver à soïe, vit sur un figuier appelé : 
Mpama (Henri Junod). 


RÉPERTOIRE 
DES ESPÈCES DE LÉPIDOPTÈRES 


Mentionnées dans les JNotes pour servir 


à établir la Faune française et algérienne des Lépidoptères 


VOLUME III 


| PAGES 

PAPILIO MPACHAON ÉTÉ ee essence emeesesepee 101 
HOSPITONS GENE ee. see ese= esse celerecesesers cree 103 

ATERANOR ME SDER 22e memencec ons eee cree eee 104 

BODATIREUS PIRE dre once cc 105 

THAIS BODY EN ES CRT ee ICO 
RM A ELA ee ce ee ee mere ce 110 

PARNASSIUS “ APOELO, LINNÉ 2... -seoceevmersserseoncevanoussres 111 
DÉLIUS  ESpER emecese eee ceeee- seomemeepee. 117 

NN MOS NE Re eee ee roescccee 117 

APORIA CRADAG ARTE bas ne messes esrrsace 120 
PIERIS CALLIDICR  ESper.....eccetssee cer cersceseoarseees 120 
DA PÉIDICE NE 2 see etc 121 
CEAUCONOMP RU =. semence ee 125 

NAPI AIRE ee sa eee ere neurone teees 125 

NANTES MANIERE es dm ec cote 127 

RÉNPAD ICI ess see essence ose Pres 130 

BRASSICAÆ MR en see eee 131 

ZEGRIS ÉUPHEME, ESper.......-.-ee.ccreameome sr srorscepeessesane 122 
ANTHOCHARIS EUPHENOIDES, Stgr.............................................. 135 
EUPHENO: LINNé. 2e eme see crc ceceees 137 

CARDAMINES MERDE ee ceaoeeebre. sers eomeesece 138 

CHARTONIAS DOnzel he escorte: 143 

PAGES UC DRE 2 eee -ec ee 143 

BELTA GTAMEr "cesse ee css: eeoe 146 

PECAR IST ee encens eo 152 
PBETEMPASTESper 1. see moerereacene oem 153 


PAPTOURAATIArdE ER Perret 155 


684 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


PAGES 

CATICHARTS IN OUNAMIETICAS ER ER ee RS 155 
L'EUCOPHASIA" DUPONCHRPR ISERE  ceee 156 
SENA PIS MIRE ee ete mere ec CS 

COLIAS PAL ÆNO MLAINNEÉR re re eee co DE Mo uee ENS 160 
PHICOMONE AS DER ce racer ere Mie eee 163 

ÉLVALE ME INN OR Lens to Den LEE CURE 164 

EDUS ANDRE Lt Ne a 167 

RHODOCERA CR AAMNL MERDE nec 176 
CLEOPATRA,  LINnÉ: eee ce 177 

CHARAXES TASIUS AIRE 2 nsc NO CE ES 179 
APATURA IRIS MES ALL SR PER 180 
TEA Suebner 5520 eee EEE 181 

LIMENITIS POPULIMIINMEÉ se M A ANSE SEE 184 
CAMILLA EH HebDner.. 185 

DIBYETA, INTÉRESSE CC RES 186 

NEPTIS EUCILCLA Fabricins. es Pr 189 
VANESSA ATALANTA ®TLINNÉ.:0. RP es ee EE 189 
GCARDUI, L'INNÉ...:-. de eee re 191 

10; LINnÉ se scans ee nee ee 102 

ANTIOPA, LINE OS RSR 193 
POLVYCHLOROSLINNE RE TRI 195 

URTICÆ; Linné RER RCD ER ANUS 107 

CPALBUM ALINNÉ em ee M ne Eos 200 

HCRAT CTAMEr.s ee ee 201 

ARASCHNIA ÉEVANAS Linnés. NE 202 
ARGYNNIS PANDORAS ESper... mec SE tre 203 
PAPHIA, TAinné::54500, 0 EN NAT ER EREREE 204 

AGLAJA, LAINNÉ,.255500 00e D Le RER 207 

ADIPPE, MLINNÉ:2.L de rec ces E O T Are 209 

NIOBE, (LINRÉ 0 NS AN RENE 211 

ÉATHONTIA, Linné. came ee 212 

ELYSA, °Godart.:4.cere RSSSR AE EEE 213 

HECATE, Esper."...etheceeea re 214 

INO, 'Esperi.. ntm meeumercmtdie iereetee re 214 

DAPENE, SCIE eee 214 

AMATHUSIA, ÉSDET 2 recceacenee  S 215 

DIA Linpné. tir nee on RE 216 

PATES MÉUeDNneT ere en TE 216 
EUPHROSYNE CIDRE. re ae EE NE 217 


DELENE, ‘Huebner 5 D Re 220 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 685 


PAGES 

MELITÆA CUNIMETA  EUCDNEE. see. cemedeseso eee eee ee 222 
MARURINA IN ne ccc ces enhenes ss n eee 224 
DESLONDAINIT COdARE. cesse semeccce=ee-o 224 

ARUIIAMIS M EUEDN ER... esse eee pcecomese ee eee 225 

CONS ÉQUÉ sc. andere 231 

PRTHERIE MUBDREE ee ces enceeseseceseredet 235 

AGREE DO ue cree cesse 227 

DNA MOINS Lee eo ERA ES 239 

PICRMNN AIRES Det de er te 246 

TIRE DTA NC Rennes ce sene eme nues 248 

ATEPADEAS MES DER eee senc sroee. ses 249 

DATON ERREUR see eee 253 

PARDADNDE MG OAANEE eee seen iropen tee eme sec 255 

CHIONOBAS AREDO MAUEDnORns eee se ee ceercseeeer- converse 257 
SATYRUS CERCE AR ADEIC US eee nr creer oe rer coce 259 
ÉDDEN A MODE ee recentrer eee 259 

ÉDARMIONR SITE ee hace rence eee 261 

APCNONE ES CRE eee echec tee 262 

NEOMMRIS AGO cn enr semences 263 

BRISEIS PIN en dr eee ice 0e 263 

PRTEUR MBITS a een nn een ee cuo- eee 265 

HIPPOLYTE, Esper.............................................….… 266 

SEM INR ee ce Po ere their ones eur 267 

AREDHUSA  ESPET .-.-eresc-cec-srceemcecemeee ren caeeseetie 270 

HPAUN ARS UIZE Teener eee nes encens stieln 2 

ÉTAIN STAR CC ecrecetree 271 

SNEVICOLA AUS EAU en dede cc herbe serres ee 271 

RDC Lee 0er OC nn DRE ON UE DOS NN EE CE D7I 
AIDER AD ER METEDTE Re ee ces 278 

ACGDRAS ES DER eee cesser pe -eacenee nets 279 

CORDUPA MA DTICIUS 2. eee edit 279 

PAS D RASMIÉIN NÉ 20 ee een see eee ce cet ee 281 
ÉXYPERANTHUS, ÉINNÉ........... eeepc sesemsrcse 283 

EREBIA PEIPHRON, RNOCRE cernes en 284 
MELAMPUS, Esper ..............................sose 288 
CHRISTIRRRACEZEN eee esee eee re ee ee 288 
FIPAVORASCIATA VHeYNen.-...- "cha 289 

NINESTRAN HUCDTER..22..e een cc ca cet ce 289 

PAARIDE MÉUEDNER SE ste eee ee 201 


ManTO, Esper.….…. A ne Me cree es 0201 


680 


ÉREBIA 


MELANARGIA 


PARARGE 


EPINEPHELE 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


CETO,"Huebnen 2 re 
ŒME MUEDDE T2 2 rires sa meurenene ee EE 
MEDUSAMMEADTIGIUS eco otee COTES 
SEVONE OCR Te uses In PR Tee M 
ÉEFEBVRET DUD:.:1 0e ares sospeeecoe rene cp 
GLACPALIS FÉSPDET une ue A0 ee tbe eee CCE 
ÉVTAS AGOdAT EE eue sean res rer Ne 
PATARICA ICDAPMAN 2000 ee 
FPISIVGNE MEUCDROR 2:01. centre eee D ET 
SCIPIO AB OIS UV ALES. eee Mn NES EE CEE 
FORGONE MBOISAUVALE. 2 EE RE EEE 
GORGE MESPDEr 2250 di eee 
GOANTE ME SDOn:scecteee e NE CE UE 
PRONOËS ESPÉT ue CE 
ZAPATERT 1Obthr Serre ER ee 
IN EORIDAS MBOISAUVA IEEE ER 
ZÆATHIOPS) ESDÉL ES een be ee EE 
PURVALE ESPER 68e pee ete mecs 
LIGEA Linn Éd ne es ot 
L'APPONAS ESDEr 5.000 CMS ete CPE EEE 
ŒYNDABIS,, ESDER: 52.0 ee ee ne 
GATDATHEAS “inner eee 
ACHESIS, Huebner.:25fi ra ete ee 
ÉUCAST;  Rambur esse ON CN NT EEE 
TAPYGIA, Esper.....:..:....:1.0c020 eee 
ARGE, SUIZOT. 25200 nee ete due en CO ES 
PHERUSA, Boisduval in #20 ce re nee 
PSYCHE, "Huebnér::..1.1..5... Mec ne 
NES, Home NP SE 
MEGÆRA; LIHné 2... tone 
HTÉRA ME ADrICIUS. 2... ee 
M'ÆRA LLINNÉ 12582 En ARC ve 
ACHINE,"SCOPOÏLE 7100 cases ee TE 
PÉGERTA; EMMA ne EE 
EUDORA, “ÉSDEr:2.200 cesse 
JANIRA; Linné:.::509...0.10mete ec cree 
JANIROIDES;/H:-S: 5.282 Re 
N'URAG; GHIIANI Re EN 
TITHONUS; Linné:..550.0 RE ee 
IDA, Espérance moe 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 687 


PAGES 

EPINEPHELE D PASIPHAE, ESDER..-:.....- er cececocecoccscsesee ete 393 
GŒNONYMPHAICEDIPPUS, HAbDFICIUS-....-..444...n. cocon ses 395 
BR ROMÉDRE der crrepeceese seche 309 

CIGARITIS SPAS CAS MR nee deces sien rene te a 401 
ATARI O DETES RE need mere: ones CS 401 
PAOBRAAIDONZE EME PE mans ce de drone eee caisses 403 

NTÉSSINISS A M EUCAS eee rence re ne 403 

VOLUME IV 

CONONYMPRA PHIS ÉUCDRET. 2-2... ces see seueaes eee 15 
DPHTOLDES IS COR dm scie cree cree 18 

ARCANIOIDE SN BTÉRRER EE ne cs miB oc creceesese 19 

ARCANTUS AIDER en enr carre eco rec peeeee 23 

D'ARWINTAN ARS Eee ne en oereope ns osane sors csvese 28 

PEL A PEMUCDRET. 2 1-2 cum sets aueseesoues 29 

DORUS ES DER een cn nreeccsseses 31 

EIDBIGI OO DIR ee ee see ee condesseee 38 

CORINN A REUGDRER ee eee a peser ns ess uepeutes 44 
VADCACRIABIA CRIER ee rene dec cene 45 

PAMPETEUS RITES ne ae Me eme sou ere cute 46 

VPHON RO emma Eb LS lan ques 49 

LIBYTHEA CDS NE SD ee ee ere reste a pierres 52 
NIEMEOBIUSSMEUCINA IDD de ee encens ep ssenetanserueut 54 
JAMIDES IROBORIS ESP R- eee races ce resort 56 
ZEPHYRUS QUERCUS INR A arr cheedesenec severe eee 57 
BE RU 20 IE LR ER ne en aeees  de ecc sec cee 61 

THECLA SRINE REED DER Se ee eee ee 67 
NIPALE UMA DReR tee. ns ee ospeeeesc eme semacees 70 

DRTCLS NES DE nee ere ee ee 72 

ÉSCUR ÉUCDRENE an een one oem eee 75 
PIRTINEMIÉID A EE eee ee eee ce ee eee eee co 79 

AGACLR MEUEDT ER eee een eee eee 83 

CAP EORRRNSMRUBR INTEL. cecemeec es ete ee 85 
AVIS GhADM ARE eee eee eee 85 

THESTOR MAURITANICUS) DUCAS .-.2.00..0neommmmee teens 95 
BARTUS AE ADI ee ane dencre eee 97 
BOLYOMMATUS PHL AS AIDER ee eee cree seen Ce 98 


MANEHES CAD. 0e cesse nes cmese rence ce: 105 


088 


POLYOMMATUS AMPHIDAMAS, Esper 
GORDIUS ASUIZE RARE ER EUR 
CHRYSEIS ABerTeStraessen en PPT 
VIRGAURE AA MÉINNEÉE 2 re ee ee 
ETPPOTHOP PIED ER RE RER AR ERA Re 
BA RICA AT INN EME Tres eee in Eee Eee: 
MELICANUS MEUEDnER Eee re Tee re 
PHEOPHRASIQUS MAD... ce ee 
COREMAS MDCNS TR rat TE 
IRESTAS MESDOTA res ites AC EEE 
ARGUS ANNE ia Mr 00 OPEN 
PEGON WE MR ee nc OR ER ER 
FDESPERICAN ER AMD UE ES 
EVCIDAS TTADp-.- 2 2 
BSCHERI AAUEDNÉE. 2 TEE 
ICARIUS? ESDEL 6 ner ee TERRE 
NTARTINT RE AILIATA ESS RE RE TN EE re 
ATTARDIs ObLNT ES. rene ee CE NES 
DORYLAS WP NV ten cn ee tr EE Ne 
TDHONUS MEIUEDNETS eee EEE CEE 
ICARUS, von RottemDure 77/7022 
AGESPIS, V2 rene her CR DRE ee 
ÉUMEDON, Esper:. 22 0 ee 
IDASSR AMPUT. ER RN e 
DONZELIM BOISAUV Ale Re 
RIPPERFIL PB OISAUVAL 
DOLUS;. Huebner 2222 ANR Eee 
DAMON, WAV rene NE Ne 
MELEAGER, ESper:., rase 
BELLARGUS, ESPET 1e ee 
CORVDON, ESper sr tte DS ER 
BAVIUS AE VETSD AND ee 
ORION PAL AS ne ee EE EEE 
ABENGERRAGUS, FPICLTEC re ee 
BATON, Bergstraesser ..............................,... 
PYRENAICA SAR OISAU VAL PRE RP ee 
ORBITUEUS, NÉSpEr. 6.2. Pere 
PHERETES  ÉlueDner ee eee PO 
AMPHIRROË, ObTthT... Re NE Re 
LAMASEM, “OPDTRT, rer ere RL RO 


LYCÆNA 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 


PAGES 


TT 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 689 


mo 


PAGES 

LYCÆNA DADIETE RNOGN:51 ere coc ce semestre ee 300 
PNSIMON MERUERRET cc erreurs 301 

RENTOUTES | POSE N'ÉSEPE SA CON PRENONS EEE EE Ge CN 302 

SHBRUS AB OISdUVAlR. eme ee cocon eos pee see 304 

SEMARGUS, On ROtTEMPDUER:. Lette 305 

CPARUS von Rottembure.-7..:.t..4...%.... 0 308 

NTEPAN DES BOIS UMA CES er coomeassds mes este ne 314 

OPA SEE senc Ce oo 320 

ARIOINPR TERME ere Loco ere ce bec dameente ina 321 

PURHEMUS RÉMODNET ME Le ner caen ces ecaccect 329 

ARCAS VON ROTIODIDUTPE EL eee emeneme soso ec 20 334 
AIPCONMRELUEDIER- Eee een nee erec eee soegeectge 330 

ARGIOLUS AB DRE RER en repenser ob 339 
Relationsides Lycénides et des FOUTMIS. et... 341 
ÉLETEROPPERUS MORPHEUS, PAlAS eee des dershsees ee desesseocenns 352 
CARTEROCEPHALUS PALÆMON, PAaMas 222.0... 353 
HESPERIA ÉINEODAMOCNRSERR RAR ee eee none re rese- see 355 
DTAUMAS NES DEL center eee eee ere ceere 350 

ÉTANEZ A RO D CRT eee ce ere S een r severe 358 

ACREON VON AR OLLENDIDERE Se eee de derpesveces ce 358 

AUGIADES SYLVANUS MISDED- eee nee mme rares note iessee 359 
CON RTE Re ei Desserte 360 

PAMPHILA BORBONICA MB DISAIS eee rcsebes eee ecrrerseccens ee 303 
RREBVRIT AR AMDUR ere rene deeeenereesee-eececeune 365 
NIOSTRODAMUS MEADTE eee dee=mec core sesueceres-ecroatsre 365 
CARCHARODUS AECEZR PSP... eme memes coeecen areorseeusesmei ss 308 
DEAN PR DRIRR RES DÉS e nec orcme mens se mocen eee 370 

ADR MÉMeDN Eee eee seems de-eece eee 370 

DA DICUS MR AID DUT ER RE Enr reu eee 370 

SE MRICHDAUS A IP RODO AESPER eus smescseeescene cesser eeetes 377 
NO HAMME DO D UNE Eee nn cn Neeee ee ere 379 

BoD2E 2e ODA eu M certe mecs ces 380 

SD D ME SRE ES 2e ne ee eee de Co 0 ee 381 
CARTHAMMAEUCDNEN cree rene crc Percer eee 381 

SAD  ÉHÉDRED ce elec ssceeeereteee- ee c2- 0e 384 

BRTIPEUM RELUEDNET..-6... 200. ocre 386 

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CACADIR SR AMDUN eee PE en ere Le eee 300 

SERRABUL A MR AMDUT 2 ner decor 398 


ATVEUSMEMEDNORE Mec esse oc-core ee etc reneepeee 402 


600 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 
PAGES 
THANAOS TAGES MPAIDN ERA rence secs eesees ce eee PELLE 416 
ZNGAÆNIDIE eine eee ete ce Dee te een eine eee eee ECC Eee 419 
ZYGÆNA RUBICUNDUS; ÉLUCRnET.:....-.1.s2e0ecc-ce ec 422 
ÉRYTHRUS,  EUEDDET..:--.:--1..- cc ses ee 423 
BURPURATIS AB RUENRICR eee re meer ee 425 
GAPTICA MODE R  e.eecmerce a eee ee 27 
CYINAR A MES DÉR 2 ----erose ce enese eee 428 
SCAPIOS FH IVORISCREVEN..:....- ce de 431 
PURES MPIETIGT 0e ce nos recoc cesse ee AA 
Corsica Poisduval...:./11e0eecertc one 442 
POYSELIS MODE... ue: 2e roc eee ce ee 444 
FAVONTA M ETEVET.. serons ee eee a eee 445 
SARPEDON HMEDNET. 2. nee 447 
CONTAMENET A BOISdUVAlL.. 2-2 eee 447 
PUNCTUMMOCRS nee eee ee re 447 
ACHIDLEZÆ, DESDEL:2.1-e nr eee tee eee 461 
ANTHYLLIDIS  BOISAUVAL.......2.2.2--s-e ee eee 474 
EXULANS; von HOHenWarth.. 2... 480 
MELILOML FEÉSDEL. rs seoecr ec 484 
MRIROLIT ESDER sec ccseocrecccospen see PC CEE 489 
ÉONIGER AN VON SCREÉVER...:....- eee ee 507 
ANGELICÆ DOISTUVAL... 5.20. ccocccsceescee ee 525 
STŒCHADIS  BOTKAUSEN..:..............e ee 527 
FILIPENDUEÆ, MINT 2. .....-20. cc ee 553 
SYRTACASMOPDEINEE. 2-22 -ecrsaerceces secs 564 
RAMBURT MIEL: reeseece eee ec CETEE 564 
GURDA Me UOTE. ete dr coca nc ec eee-ee e EEE 564 
ROSAMODERT ee rec eoeembes sep ee 565 
ÉPHIALTES, LInné.- 2100.20 ee ete 566 
MRANSADPINA ESDET.:....-. sec eee ae 578 
LAVANDULÆ, ESP... 583 
RHADAMANTHUS, ESDOE..- e e 586 
IGNIFERA, KOTD 002 sese etre ee eee 598 
HITARIS OChSenheImer 22e ee ee 599 
FER, JODIDE ee ee ererecs eee eee Ce Grr 
MARCUNAS OPERT ee cree eeepc ete 613 
FAUSTA, LANNG 2502 nsc ces eersccoence ce CEE 613 
CARNIOLICA; 1SCOPOLL 0 628 
THERYI, O: oannis ER 637 


ESCALERAT, POUJAdE cn ee 638 


LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 691 


————————— 


ADDENDA ET CORRIGENDA 


PAGES 

ANTHOCHARIS PECHI, Ster. Et Obthr......... A cd 639 
RATIO ALTATA Een cocon co steee ces cat 0 640 

ARGYNNIS ADIPRRASIPINNE nn eemermmene s soccer eme 0e 646 
NO DRE sr eee cocoaarsss see . 646 

A PETRA PE MEAUEbNeER Er ere -reseee sueur -ereree eee 646 

PATES ARSIPACHE SDET ee -ecscesnct sense eee 647 
POLYOMMATUS ÉPPOTHOË-DISPAR, Haw:........1.. me... 647 
ZYGÆNA RCE RS DER ee eee ere cree 654 
DRANS ADP A MES DORE meer nes te eoucre ever doess 654 

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