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Full text of "Fautes à corriger : une chaque jour"

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OUl^-j^^*-^ 


FAUTES  A  CORRIGER 

UNE  CHAQUE  JOUR 


nu 

A.  LA  PRESSE  FKANÇAISE  BU  CANADA 

FAUTES  A  CORRIGER 

UNE  CHAQUE  JOUR 


ALPHONSE  LUSIGNAN    ^«S*^  **'>i(k. 


QUÉBEC 

IMPRIMÉ  PAK  C.  DARVEAU, 

80  à  84  rue  de  la  Montagne. 

1890 


V 


Enregistré  au  bureau  du  ministre  cle  l'Agriculture,  Ottawa, 
conformément  à  l'acte  du  parlement  du  Canada,  en  l'année 
mil  huit  cent  quatre-vingt-dix,  par  Alphonse  Lusignan. 


PREFACE 


Le  livre  que  je  publie  aujourd'hui,  j'avais  idée 
de  l'écrire  il  y  a  vingt-cinq  ans.  Je  n'osai  cepen- 
dant, étant  jeune  et  sans  la  moindre  autorité, 
riscpier  une  leçon  aussi  directe  à  la  presse.  Nous 
nous  contentions,  Frécliette,  Buies  et  moi,  de 
signaler  de-ci  de-là,  dans  le  Pays,  les  fautes  les 
plus  grossières  de  nos  adversaires  politiques  en 
matière  de  langue.  Car  à  cette  époque  tout  était 
subordonné  à  la  politique,  et  nul  journaliste  n'eût 
reproché  à  son  compagnon  d'armes  le  moindre 
péché  de  ce  genre,  chose  bien  secondaire,  vrai- 
ment !  On  ne  tire  pas  dans  le  dos  d'uu  camarade, 


VI 


Nous  en  étions  donc  à  prêcher  les  ennemis,  dont 
quelques-uns  peut-être  se  corrigeaient  plus  ou 
moins,  tandis  que  les  erreurs  des  nôtres  allaient 
leur  chemin  courant. 

Aujourd'hui  on  n'en  est  plus  là.  Nombre 
d'entre  nous  se  sont  épris  de  Lien  parler  et  de 
mieux  écrire.  Ils  ont  découvert  cette  nouvelle 
forme  de  patriotisme  français.  Je  l'ai  <lit  ailleurs, 
le  respect  de  sa  langue  est  la  meilleure  preuve 
que  nous  puissions  donner  à  l'ancienne  mère 
patrie  de  notre  fidélité  à  son  souvenir.  Il  y  a 
de  la  bonne  volonté  dans  notre  presse,  qui  ne 
demande  qu'à  être  conseillée.  Ce  qui  fait  son 
malheur,  c'est  que  le  journalisme  n'est  pas  une 
profession  ;  on  y  entre  au  sortir  du  collège  afin 
de  gagner  de  quoi  payer  ses  cours  de  droit,  on 
le  quitte  quand  on  a  conquis  le  diplôme  d'avocat_ 
Le  personnel  de  la  rédaction  se  renouvelle  sans 
cesse  ;  des  jeunes  gens  succèdent  à  des  jeunes 
gens,  et  nulle  expérience  ne  s'acquiert.  Combien 
sont-ils  ceux  qui  entrent  résolument  dans  la  car- 
rière avec  la  détermination  bien  arrêtée  d'y 
rester  ? 

Ceux  qui  deviennent  propriétaires  des  jour- 
naux (ju'ils  ont  longtemps  alimentés  de  leur 
prose    incorrecte   cessent  d'écrire    ou   hien  sont 


—   VII    — 

trop    vieux    pour    se    corriger,    et  les   gazettes 
s'ancrent  dans  leurs  mauvaises  habitudes. 

Je  partage  l'opinion  de  Legendre  que  notre 
petit  peuple  parle  mieux  que  le  peuple  dans  cer- 
taines parties  de  la  France,  mais  que  nos  hommes 
réputés  instruits  parlent  infiniment  plus  mal 
que  là-bas.  A  quoi  est-ce  dû  ?  A  la  presse.  La 
presse  est  la  grande  éducatrice  ;  on  lit  le  journal 
quand  on  laisse  le  livre  de  côté;  c'est  dans  la 
gazette  que  l'on  puise  inconsciemment  son  ins- 
truction. Or  la  presse  enseigne  mal  parce  qu'elle 
a  été  mal  enseignée  et  rarement  reprise  ;  elle 
perpétue  dans  l'oreille  du  lecteur  et  par  suite 
sous  sa  plume  les  anglicismes  les  plus  baroques 
les  barbarismes  les  plus  audacieux,  toutes  les 
fautes,  tous  les  crimes  de  langue.  C'est  elle  la 
coupable,  c'est  elle  la  mère  de  ce  langage  bâtard 
que  les  étrangers  signalent,  sans  nous  le  repro- 
cher toutefois,  et  c'est  à  elle  que  je  m'adresse» 
que  je  dis  ses  vérités.  Je  lui  mets  ses  incorrec- 
tions sous  les  yeux,  je  lui  indique  le  remède. 
Qu'elle  n'écarte  pas  mes  conseils,  qu'elle  entre 
dans  mes  vues,  qu'elle  se  concerte  pour  accom- 
plir un  progrès  national,  une  œuvre  patriotique- 
J'ai  fait  mon  travail  sans  aigreur  contre  personne, 
sans  citer  le  nom  d'un  seul  journaliste,  et  si  j'ai 


—   VIII  — 

<|uelquefois  nommé  des  journaux  fautifs,  leur 
impersonnalité  couvre  les  hommes  qui  les  diri- 
gent. 

Quand  j'ai  commencé  en  1 884,  dans  Va  Patrie 
sous  le  titre  :  fautes  à  corriger,  une  chaque 
jour,  le  travail  d'épuration  que  je  livre  au  pu- 
blic, j'ai  constaté  la  disposition  de  plusieurs 
journaux  à  s'amender,  leurs  progrès  réels,  et, 
de  fait,  je  pourrais  en  nommer  un  qui  est  rare- 
ment retombé  dans  l'une  ou  l'autre  des  cent 
fautes  indiquées.  Il  en  sera  ainsi  cette  fois,  j'en 
ai  l'assurance,  car  le  journalisme  montre  une 
tendance  sérieuse  à  se  dégager  des  liens  de  la 
routine  et  à  prendre  sa  part  d'autorité  dans  la 
conduite  de  l'opinion.  Son  premier  titre  au 
respect,  c'est  le  souci  de  la  langue.  Des  pères  de 
famille  m'ont  demandé  les  noms  des  journaux 
écrits  dans  le  meilleur  français.  Hélas  !  ils  ne 
sont  pas  nombreux  les  bons  dont  on  peut  con- 
seiller la  lecture  à  nos  enfants  au  point  de  vue 
de  la  o^rammaire.  Mon  livre  les  aidera  tous  à 
s'améliorer. 

On  dépasse  quelquefois  le  but  quand  on  tente 
une  réforme.  Je  rends  hommage  à  ceux  de  nos 
écrivains  qui  tirent  le  même  collier  que  moi  et 
consacrent  leurs  loisirs  à  purifier  notre  langage, 


—  IX  — 

mais  j'ose  croire  que  je  ne  vais  pas,  eoninie 
certains  d'entre  eux,  jusqu'à  proscrire  des  ternies 
corrects. 

Mon  petit  liv^re  corrige  au  delà  de  cinq  cents 
fautes,  et  je  n'ai  pas  fini.  Mon  travail  se  conti- 
nuera d'année  en  année.  D'autres  écrivains 
luttent  à  mes  cAtés.  Legendre  et  Fréchette 
doivent  chacun  publier  prochainement  un  livre 
sur  des  questions  de  langue.  Le  mouvement  de 
réforme  est  sérieusement  commencé,  et  si  la 
presse  entend  se  montrer  patriote,  elle  va  le 
pouvoir  faire  à  son  aise,  ne  serait-ce  qu'en 
proscrivant  chaque  jour  de  son  vocabulaire  un 
mot  incorrect.  Je  ne  lui  demande  que  cela. 

Les  lettres-préfaces  de  Fréchette,  Legendre  et 
Suite,  qui  viennent  à  la  suite  de  ceci,  méritent 
d'être  lues  et  méditées.  Je  remercie  ces  vaillants 
amis  de  leur  concours. 

Alphonse  Lusignan. 


LETTRES 


Montréal,  22  mai  1890. 

A  Monsieur  Alphonse  Lusignan. 

Mon  cher  ami, 

Je  viens  de  parcourir  ton  intéressant  et  précieux 
manuscrit,  avec  la  satisfiiction  qu'on  éprouve  à  la 
vue  d'un  bel  édifice  destiné  à  une  belle  œuvre. 

Ces  pages  ont  un  double  intérêt  pour  moi  :  en 
dehors  de  ma  filiale  admiration  pour  notre  chère 
langue,  si  gracieuse,  si  claire,  si  colorée  et  si 
chantante,  elles  ont  l'éveillé  chez  moi  un  souvenir 
bien  agréable,  celui  d'une  de  nos  bonnes  et  longues 
causeries  d'autrefois. 


XII 


Car  —  si  lu  t'en  soiivicn.s  —  c'est  dans  une  de 
CCS  causeric8,  rarement  inf«?eondes,  que  Vidée  de  ce 
petit  livre  a  fait  son  éclosion. 

C'était  sous  les  pins  odorants  de  Nicolet  ;  la 
brise  du  soir  chuchotait  doucement  dans  les  grands 
rameaux  solennels,  tandis  que  les  dernières  lueurs 
créjHiscuiaires  s'éteigiuiient  au  loin  sur  la  rivière, 
dans  l'enchevClrement  des  îlots  assombris. 

Nous  causions  de  mille  et  une  choses  :  beaucou]} 
du  passé,  un  peu  de  l'avenir. 

Mais,  quand  on  a,  comme  nous,  atteint  le  dernier 
vei-sant  de  la  vie,  si  l'on  rêve  d'avenir,  c'est  plutôt 
pour  les  autres  que  pour  soi.  L'avenir  qui  alors 
nous  ])réoccupe  et  souvent  nous  passionne,  c'est 
celui  des  enfants,  celui  du  pays,  celui  de  la  race. 

La  conversation  était  tombée  dans  ce  courant, 
et  nous  nous  disions  : 

—  Un  des  jjlus  ])i-écieux  éléments  de  noti'e 
richesse  nationale,  c'est  notre  langue  —  hi  langue 
française. 

C'est  comme  l'arche  sainte  de  nos  institutions  et 
de  nos  traditions.  C'est  elle  qui  détermine  le  carac- 
tère de  nos  aspirations  collectives,  qui  assure  nos 
libertés  et  maintient  notre  autonomie,  en  nous 
gi'oupant  autour  du  clocher  de  la  j)aroisse. 

Il  est  donc  de  la  ]j1us  extieme  importance  pour 
nous  de  conserver  cette  portion  sacrée  de  notre 


XIII   ~ 

patrimoine  daihs  toute  sa  2)iircté  et  dans  toute  son 
intéi^-rité. 

Malheureusement  la  tâche  est  beaucoup  plus 
difficile  qu  elle  De  le  paraît  au  premier  abord. 

Les  langues,  comme  toutes  les  autres  choses 
humaines,  sont  essentiellement  vai'iables.  Le  temps, 
les  lieux,  les  circonstances  les  modifient,  les  re- 
manient, les  transforment  constamment.  La  phra- 
séologie s'altère  ;  de  nouvelles  locutions  chassent 
les  anciennes  ;  les  tournures  vieillissent  et  tombent 
en  désuétude;  les  mots  mcMnes,  à  la  longue,  chan- 
gent de  valeur  et  de  signitication. 

Il  suffit,  pour  s'en  faire  une  idée,  de  compai'cr  la 
langue  de  l'ancienno  Rome  avec  l'italien  moderne, 
et,  sans  remonter  si  loin,  de  mettre  les  auteurs 
français  du  seizième  siècle  face  à  face  avec  nos 
écrivains  du  jour. 

Or  supj-josons  ces  races  divisées  chacune  en  deux 
groupes  ayant  entre  eux  toute  la  largeur  d'un 
océan,  et  modifiant  ainsi  simultanément  leur  lan- 
gage chacun  dans  sa  direction  ,  où  serait,  malgré 
le  point  de  départ  commun,  l'identité  après  quel- 
ques siècles  ? 

C'est  contre  cette  bifurcation  fatale  et  ])resque 
inévitable  qu'il  faut  i-éagir  ici,  si  nous  ne  voulons 
pas  donner  raiso.i  à  nos  compatriotes  d'une  autre 
nationalité,  et  aux  Américains  des  Etats-Unis,  qui 


—   XIV   — 

prétendent  que  nous  ne  parons  ni  n'écrivons  le 
français  de  Fiance,  mais  un  français  à  nous,  une 
langue  hybride,  un  patois  déguisé,  Canadian  Frencli. 

C'est  eu  mouvement  divergent  qu'il  faut  enrayer, 
si  nous  ne  voulons  pas  que  nos  descendants  parlent 
et  écrivent,  un  jour,  un  idiome  ni  français  ni  anglais, 
une  espèce  de  basque,  sans  lègles,  sans  cachet,  sans 
chefs-d'œuvre,  sans  traditions,  langue  triviale  et 
dégénéi-éo,  ne  conservant  avec  soi  origine  qu'une 
])arenté  abâtardie. 

Et,  poussant  la  conversation  dans  cet  ordre 
d'idées,  nous  constations  avec  effroi  le  chemin  déjà 
parcoui'u  sur  cette  pente  malheureuse. 

Nous  déplorions  les  maigres  connaissances  de  la 
plupart  de  nos  professeurs  de  français,  l'indiffé- 
rence coupable  de  nos  hommes  prétendus  instruits 
ù  l'égard  de  cette  question  vitale,  l'ignorance,  hélas  ! 
trop  générale  de  la  langue  chez  nos  hommes  de 
profession  les  plus  distingués,  et  enfin,  par-dessus 
tout,  le  honteux  débiaille  de  notre  presse,  école 
permanente  et  sans  vergogne  de  baibarismes,  d'an- 
glicismes, d'expressions  vicieuses  et  d'abomina- 
tions contre  la  syntaxe  et  le  vocabulaire,  qui  font 
parfois  pouffer  de  l'ire,  malgré  tout  ce  qu'il  y  a 
d'attristant  dans  une  pareille  plaie. 

—  Si  nous  pouvions  au  moins  extirper  une  faute 
de  temps  en  temps  !   disais-tu. 


—    XV    — 

Et  c'est  de  cette  pensée  patriotique,  j'îitriotiqiie- 
ment  mûrie  et  méditée,  qu'est  né  ce  p'ctit  volume, 
qui  rendrait  de  si  c^rands  services  à  tout  le  monde, 
si  tout  le  monde  avait  seulement  la  bonne  volonté 
de  s'en  servir. 

Il  signale  une  faute  à  corriger  par  jour  ;  eh  bien, 
si  nous  nous  corrigions  d'une  faute  par  jour,  cela 
ferait  trois  cent  soixante  et  cinq  fautes  corrigées 
au  bout  de  l'année.     Songeons  au  pi'Ogrès  réalisé  ! 

Pi'Ogi'ès  nécessaire  si  nous  voulons  rester  fi-an- 
çais;  progrès  indispensable  surtout  pour  nos 
compatriotes  qui  ont  à  visiter  la  Fr:!nce,  ambi- 
tion si  chère  à  tout  cœur  canadien. 

J'imagine  un  des  nôtres  qui  débarque  à  Paris, 
apiès  un  voyage  à  bord  des  cliars^  qui  aperçoit  le 
dcpôt.,  qui  entre  dans  la  siation,  et  qui  demande  à 
un  charretier  de  la  stand  comment  il  charge  pour 
aller  lui  chercher  du  change  ! 

Il  est  tout  abasourdi  si  on  ne  le  comprend  i)as, 
et  très  offensé  si  son  ahurissement  provoque  le 
sourire;  il  reviendra  en  disant  que  les  Fra' çais^ 
en  dépit  de  leur  réputation,  ne  sont  pas  polis  ! 

Et  c'est  pourtant  bien  de  cette  façon  qu'on 
s'exprime,  même  dans  nos  collèges,  en  croyant 
parler  français. 

J'ajouterai  que  cela  peut  ])rêter  à  des  quiproquos 
dont  il  serait  difficile  de  prévoir  les  conséquences. 


Ainsi,  tout  doiMiièromcnt,  notre  populaire  Mgr 
Labcllc  arrive  à  Pai-i.>,  et  les  journaux  acclament 
à  son  de  ti'ompc  notre  ministre  d'Ai^ricullure,  élu 
député  jiour  le  canton  de  Saint -Jérôme. 

—  Il  ne  se  donne  pas  de  crocs-en-jambe,  disaient 
quelques-uns.  Le  voilà  député,  le  voilà  ministi-c, 
rien  que  cela  du  coup  !  Parlez-nous  de  lui  ])our  la 
faii'c  à  l'oseille. 

Mii;r  Label  le  était  pourtant  bien  innocent  de 
cette  réclame  exagéîée.  Tout  venait  d'un  malen- 
tendu causé  par  une  inadvertance  d'expressioiis. 

Le  brave  curé,  habitué  à  notre  langage  officiel, 
qui  traduit  deputy  minider  par  député-ministre,  au 
lieu  de  se  donner  comme  chef  de  bureau  au  minis- 
tère de  l'Agricultui'e,  s'était  involontairement  fait 
inscrire  comme  députe  et  ministre  de  l'A  riculture. 
On  avait  cru,  tout  naturellement,  que  nous  avions, 
comme  en  Belgique,  des  ministres  on  dehors  do 
la  Chambre,  mais  que  Mgr  Labelle,  lui,  était  à  la 
fois  ministre  et  député. 

Ceci  peut  servir  de  réponse  à  ceux  qui,  trop 
apathiques  pour  .«surveiller  leur  langage,  vous  disent 
avec  aplomb:  —Qu'est-ce  que  ça  fait,  pourvu  qu'on 
nous  comprenne? 

Comme  en  le  voit,  il  peut  arriver  des  cas  où  l'on 
ne  nous  comprenne  guère. 


—  xvn  — 

î)u  rc8to,  c^R  messicni'R  pourraient  tout  aussi 
bien  nous  dire,  et  avec  autant  de  raison  :  — Pour- 
quoi l'ortogi'aphe,  pourquoi  la  gi'ammaire,  poui'vu 
qu'on  soit  compris  ?  .  . .  . 

En  somme,  mon  cher  nmi,  je  me  réjouis  de  la 
tentative  que  tu  fais  aujourd'hui.  Ton  livre  n'est 
]ias  l'édifice  tout  entier;  d'autres  y  ont  déjà  apporté 
])!us  d'une  piei-re  ;  à  peine,  d'ailleurs,  sort-il  du  sol. 
Mais  c'est  une  la  ge  assise  que  ta  main  vient  de 
poser. 

Je  t'en  félicite  pour  ma  part,  et  tous  ceux  qui 
aiment  notre  belle  langue  t'en  seront  reconnais- 
sants. 

Toujours  uni  à  toi  dans  la  bonne  cause, 
Ton  vieil  et  sincère  ami, 

Louis;  Fréciiettk. 


Mon  cher  Lusignan, 

J'ai  toujours  soutenu,  je  ci'ois  même  avoir  prouvé 
que  nous  n'avons  pas  de  patois  au  Canada,  et  que 
le  langage  du  peuple,  ici,  est  bien  supérieur  à  celui 
de  certaines  campagnes  de  Fi'ance.  C'est,  du  reste, 
ce  qu'ont  affirmé,  invariablement,  les  visiteurs 
étrangers  qui  avaient  la  com])étcnce  nécessaire 
pour  ])rononcei-  sur  ce  point. 

Je  ne  pouri-ais  pas  en  dire  autant  du  langage  de 
la  classe  instruite.  Chose  assez  singulièi-e,  c'est 
parmi  cette  classe  que  l'on  l'cmarque  le  plus  de 
défauts  sous  ce  rapport.  J'en  trouve  très  facilement 
la  preuve  en  écoutant  parler  mes  savants  confrères 
du  barreau.  Ils  disent  i-arement,  produire,  mettre 
un  docinnent^  une  pièce  au  dossier,  mais,  presque 
ton'ymv^  :  filer  un  exhibit  de  record  ;  ils  ne  consultent 
pus  la  liasse,  la  collection  d'un  journal,  ils  réfèrent  à 
hxfile.  Ils  i dent i fient  [QOw^iwiQv  l'identité)  une  jiartie 
en  cause  ;  ils  adressent  le  juiy  et  le  juge  va  même 
jusqu'à  le  chanjer  ;  ils  commentent  \o présentement 
(rapport)  du  ç/ r a nd  ']uvy  (  juiy  d'accusation). 


XX 


Comme  question  de  fait  (as  a  matter  of  fact),  ce 
sont  là  dey  ai»<;Iici«mc.s  impardohnables  ;  et  je  n'en 
cite  qu'un  petit  nombre:   il  j  en  a  une  légion. 

Cependant,  mes  savants  confrères  ne  sont  pas 
les  seuls  coupables  ;  toutes  les  autres  professions 
ont  également  de  sérieux  reproches  à  se  faire. 
J'excepterai  toutefois  les  notaires,  qui  se  servent 
presque  toujours  de  formules  bien  françaises. 

Mais  c'est  surtout  dans  la  presse  que  l'on  dé- 
couvre un  plus  grand  nombre  de  fautes.  Nos  jour- 
naux sont  rédigés,  pour  la  plupart,  avec  un  sans- 
gene  regrettable.  Et  pourtant  ils  devraient  être 
les  premiers  à  respecter  la  langue,  puisque  ce  sont 
eux  qui  contribuent  dans  la  plus  grande  mesure  à 
former  le  langage  de  nos  populations. 

Malheureusement,  ils  sont  bien  éloignés  de  la 
perfection  et  même  de  la  simple  correction.  Vous 
trouvez  à  chaque  instant  :  un  ailicle  éditorial,  un 
éditorial  ;  je  iiie  votre  avancé;  il  est  rumeur  que; 
cette  loi  a  été  passée  ;  elle  est  venue  en  force  le  jour 
de  n'd  jjassation  ;  nous  nous  objectons  à  ;  nous  con- 
courons  dans  cette  décision  ;  le  comité  rapporte 
27rogrès  ;  l'orateur  a  laissé  le  fauteuil,  etc.,  etc.  Je 
laisse  de  côté  les  fautes  de  grammaire  qui  sont 
innombrables. 

Et,  à  part  cela,  la  forme  générale  des  articles 
n'est  pas  dans  le  génie  de  la  langue,  L;i  phrase 
peut  être   cori'ecte  à  la  rigueur  ;   elle  est  composée 


—   XXI   — 

de  mots  français;  mais  ces  mots  sont  mal  disposés; 
il  y  a  dans  leur  assemblaG;e  quelque  chose  qui  jure  ; 
c'est  loui-d  et  embrouillé  ;  on  ne  se  sert  pas  du 
terme  propre.  Enfin,  c'ctst  un  peu  comme  la  mu- 
sique de  sir  Arthur  Sullivan  ;  toutes  les  notes  y 
sont  avec  leur  valeur,  la  phrase  est  bonne,  l'har- 
monie est  sans  défaut  ;  et  cependant  on  sent  qu'il 
y  manque  un  je  ne  sais  quoi  dont  l'absence  jette 
sur  le  tout  une  couleur  terne. 

C'est  peut-être  un  certain  savoir,  mais,  à  coup 
sûr,  ce  n'est  pas  de  l'art. 

Tout  cela  est  difficile  à  expliquer  sans  des 
exemples.  Pour  me  faire  mieux  comprendre  je 
vais  citer  un  court  article  publié  dans  un  de  nos 
journaux,  ii  y  a  une  dizaine  d'années. 

"  Le  chef  de  police.  —  Kous  n'avons  pas  l'inten- 
tion de  dicter  au  conseil  de  ville  quel  doit  être 
son  choix  pour  le  successeur  de  M.  X.  ;  mais  il 
nous  semble  que  nous  pouvons  bien  dire  qui  il  ne 
doit  pas  choisir.  Le  premier  contre  lequel  nous 
nous  objectons  est  le  monsieur  qu'on  appelle  le 
capitaine  Y.,  de  Québec.  Kous  n'avons  pas  besoin 
d'étrangers  pour  administrer  nos  affaires.  Ce 
monsieur  demeure  à  Québec  ;  qu'il  y  reste. 
Montréal  est  ca^^able  de  fournir  des  hommes 
aussi  qualifiés  que  lui.  Ce  n'est  ni  un  génie,  ni 
une  illustration  en  quelque  genre  que  ce  soit,  et 
ce  serait  une  disgrâce  pour  Montréal   que  d'ac- 


—  xxii  — 

C'Cpter  un  tel  homme.  Que  l'on  choisisse  qui  l'on 
voudra  parmi  les  résidents  de  Montréal,  pourvu 
que  ce  soit  un  homme  qualifié  ;  nous  n'allons  ni 
au-delà  ni  en-dcça  de  cela." 

Il  faudra  du  temps  pour  faire  disparaître  de  nos 
journaux  ce  style  déplorable  ;  nous  n'}'  arriverons 
que  par  petites  joui-nées. 

En  attendant,  mon  chei-  Lusignan,  tu  as  entre- 
pris une  sérieuse  croisade  contre  les  fautes  qui 
demandent  une  plus  prompte  attention.  Tu  as 
toutes  les  qualités  requises  ]^our  conduire  cette 
œuvre  à  bonne  fin.  Ton  livre  n'est  que  le  commen- 
cement d'un  ouvrage  plus  complet.  Mais  c'est  déjà 
nn  travail  d'une  importance  réelle,  dont  nous  te 
savons  gré  et  dont  nous  ierons  tous  notre  profit. 

Napoléon  Legendre. 

Québec,  16  mai  1S90. 


Ottawa,  9  mai  181)0. 


Mon  cher  Lusignan, 


Ta  sais  que  j'ai  adressé  au  capitaine  Henri 
Jouan,  de  Cherbourg,  une  liasse  de  journaux  trai- 
tant du  débat  du  mois  dernier  sur  l'usage  de  la 
langue  française  au  Canada.  J'ai  reçu  en  réponse 
le  billet  suivant  :  "  Prenez  garde  !  vous  aidez  ceux 
qui  veulent  vous  anglicise)-,  et  vous  ne  semblez  pas 
en  avoir  le  soupçon.  Ainsi  votre  presse  st  huilée 
d'anglicismes  :  "  Les  bagages  sont  consignés  direc- 
tement pour  éviter  le  trohb'e...  "  l  en  français  on 
dirait  la  peine.  "  Hardes  faites  "  est  du  vieux  fran. 
çais  ;  c'est  le  ready  made  clothing  des  Anglais  d'à 
présent.  Le  mot  hardes  n'est  plus  employé  que 
dans  nos  campagnes  ;  dans  les  villes  on  dit  véte^ 
ments  confectionnés.  Au  lieu  de  dire  "  hardes  faites 
dans  les  derniers  patrons,  "  en  ^France  on  dirait  mr 


—    XX  TV    — 

les  derniers  patrons  ou  sur  les  derniers  modèles. 
''  S30,0U0  valant  de  bijouteries  etc."  Je  n'ai  januiis 
entendu  cela.  "  Plusieurs  journaux  expriment  une 
opinion  adverse...;"  il  faudrait  contraire  ou  opposée. 
"  Sa  position  est  guère  soutenable  "  ;  mettez  n'est 
guère.  "  M.  McCall  a  causé  une  commotion  devant 
le  comité";  c'est  plutôt  une  émotion  au  comité. 
*'  Nous  les  pi-ions  de  visiter  notre  magasin  à  bonne 
heure  "  ;  on  retrouve  cette  expression  dans  nos 
campagnes  ;  elle  est  remplacée  presque  partout 
par  (le  bonne  heure.  "Bazar"  pour  vente  de 
charité,  anglicisme  pur.  Voilà  en  passant.  Gardez 
votie  belle  langue  du  grand  siècle,  ce  qui  ne  vous 
empêchera  pas  de  conseiver  aussi  ce  que  vous  avez 
])ris  de  bon  aux  Anglais  :  le  sang-froid,  l'esprit 
pratique,  et,  en  y  joignant  une  dose  l'aisonnable  de 
l'esprit  normand,  vous  êtes  sûrs  d'arriver  à  vos 
fins." 

Le  capitaine  Jouan  a  soixante  et  dix  ans  et 
d'excellents  états  de  service  dans  la  marine  mili- 
taire ;  il  a  beau  avoir  l'air  d'un  jeune  homme  de 
cinquante  ans,  on  l'a  mis  à  la  retraite,  —  et  il  em- 
ploie ses  loisirs  à  étudier  l'histoire  du  Canada. 

En  quelques  mots,  je  lui  ai  fourni  l'explication 
que  tu  vas  lire  : 

Nos  écrivains  d'il  y  a  cinquante  ans  se  servaient 
de  quatre  ou  cinq  lois  plus  d'anglicismes  que  ceux 


XXV    

d'îiujoind'hui  ;  l'amélioration  est  duc  aux  dix  ou 
douze  brochures  qui  ont  été  ]Hibliées,  de  ti-ois  ans 
cil  quatre  ans,  pendant  cette  ]>éi'iode  afin  de  nous 
siij^nalcr nos  défauts;  loin  d'cm])ii'cr,  notre  lanii,ag"0 
s'épure  constamment,  —  mais  jugez  parce  qu'il  est 
encore  de  ce  qu'il  devait  être  en  ces  temps  heureux 
de  1830  à  1810  ! 

L'cpuiation  est  visible  surtout  dans  les  livres. 
]es  revues  sont  moins  bien  écrites  que  les  livres; 
les  journaux  sont,  sous  ce  ra])])ort,  inférieui's  aux 
D'cvues,  et  le  barreau  est  resté  au  bas  de  l'échelle. 
Dans  ces  quatre  blanches,  il  existe  un  louable 
dessein  de  se  peifectionner  ;  on  rencontre  nombre 
de  ])eroonnes  qui  se  ]jréoccuj:)cnt  de  trouver  le  mot 
juî^te  et  qui  lougissent  lorsqu'on  kur  indique  une 
incorrection  de  leur  plume  ;  cela  ne  paraît  pas 
avoir  existé  autrefois.  'Nous  en  concluons  que 
l'esclavage  de  l'anglicisme  se  fera  de  moins  en 
moins  sentir,  cai",  chose  de  jjremièrc  im],ortance, 
il  y  a  parmi  nous  des  professeurs  de  collège,  de 
lycées,  d'écoles  ordinaires  même,  qui  se  mettent  à 
soigner  leur  langue. 

On  n'est  plus  ignorant  comme  un  maître  cV école. 

C'est  un   fameux  point  de  gagné  ;  cependant  le 
vocabulaire  anglais  a  trop  de  j^lacc  dans  nos  écrits, 


—    XXVI 


et  l'on  rencontre  à  chaque   alinéa  je  ne  sais  quoi 
dans  la  facture   des  phrases  qui  rappelle  le  génie 


anglais 


Oui,  c'est  la  mode,  au  tcuips  où  nous  AÙvons; 
Voilà  comuient,  li'^las  !   nous  écrivons  ! 

Tu  apportes,  mon  cher    Lusignan,  un    crible  et 
une  lime,  pour  trier  et  polir  tout  cela. 

Benjamin  Sulte. 


ERRATUM 


L'article  8,  page  4,  a  été  défiguré,  et  doit  se  lire  ainsi  : 

"  Si  étrange  que  eela  paraisse,  il  faut  écrire  siffler  (avec 
deux/^,  et  iKTs  jlcT,  iiersijlaijc  (avec  une  seule  /).  Peu  de 
journaux  s'en  doutent." 


FAUTES  A  CORRIGER 


Commfnçons  par  signaler  im  anglicisme  de  la 
])]ns  belle  eau,  dont  les  avocats  ont  le  aïonopole. 
lis  disent  :  X.  .  .  .vient  de  donner  son  évidence, 
pour  son  témoignage  ;  mon  évidence  est  finie 
]>(var  U);i  preuve  t.-st  faite. 

Au  palais,  le  mot  anglais  (■"oideu.ce  si.ojnitie 
t'-'molgnagf.  ensemi  le  des  témoignages,  réseau 
des  preuves,  taudis  <|Ue  notre  mot  évidence 
signifie  caractère  de  ce  qui  est  évident,  mani- 
feste. 


On  oublie  quelqueiois  que  voltf-face  s'écrit  au 
pluriel  comme  au  singulier.  Monsieur  le  député 
écrira  donc,  comme  Reybaud  :  *'  Une  crise  de 
cabinet  vint  mettre  à  l'épreuve  mon  talent  pour 
les  volte-face-  ;  " — et  j'espère  qu'il  pourra  ajouter 
à  l'inverse  de  Jérôme  Paturot  ;  "  Mais  j'étais 
mal  doué,  et  je  restai  fidèle  à  mes  principes." 


3 


Abus  de  l'accent  circonflexe.  Les  mots  cliihte 
hase,  zone,  atonie,  arôme,  vu  (prép.),  cime,  hccvre, 
vraiment,  mets,  oser,  récUurœ,  otage,  idiome, 
système,  thème,  égoiU,  poteau,  coteau,  navra-nt, 
rets,  tom-e,  vice  versa,  pupitre,  Chrysostome,  que 
Ton  écrit  presque  invariablement  avec  cet  accent, 
ne  l'ont  pas. 


Evitez  de  dire  fiu'un  mandat,  un  warrant,  un 
ordre  du  tribunal,  a  été  értiané ;  dites  que  le 
mandat,  le  warrant,  la  sommation,  a  été  décerné, 
et  l'ordre  donné. 


3  — . 


5 


C'est  en  vain  qu'à  Québec  l'on  francise  la  pro- 
nonciation du  mot  anglais  hydraiit  :  cela  ne  le 
rendra  pas  français.  N'avons-nous  pas,  d'ail- 
leurs, son  équivalent  :  horue-fontaiiie  ? 


Grand  nombre  de  personnes,  d'avocats  même, 
disent  et  écrivent  huissier  comme  si  Vh  était 
aspirée  :  le  huissier,  du  huissier,  au  huissier.  Un 
journal  de  Montréal  contenait  ceci  :  "  M.  Cinq- 
Mars  arrive  de  St-Lin.  Pendant  son  séjour  en 
cette  paroisse,  il  a  aidé  ait  huissier  de  l'endroit 
à  opérer  l'arrestation  d'une  femme.  " 

Inutile  d(^.  dire  que  Vh  n'est  pas  aspirée  et 
(ju'il  faut  écrire  et  prononcer  l'huissier,  de  l'huis- 
sier, à  l'huissiei-. 


On  a  le   même  tort   pour  h  ailier  que  pour 
huissier.     Presque  tous  disent  un  beau  huilit^r 


d'argent .  L7<  iiVst  pas  phis  aspirée  pour  l'A  n'dir,' 
«|ue  pour  l  huile  qu'on  y  niet.  Prononcez  un 
ichvAlier.  des  zka'diprs:  écri\«-z  un  bel  hvilier. 


hi  etraiii^e  que  cela  ])araissc.  il  iaut  ecrnv 
IM<rs\fner' {&.y oc  deux //et  per.s (fi âge  {nwc  une 
seule/).  Peu  de  journaux  s'en  doutant. 


Le  ronstoJjle  est  un  officier  de  pulice  en  An- 
o^leterre  et  dans  les  colonies  anglaises. 

Le  hlgh  constable  est  le  grancl-constahU  ou  1<3 
ha td-consf cible,  au  choix.  Mais  il  n'est  pas  le 
graiid-conaétahle,  car  voici  ce  que  le  mot  conné- 
table signifie  :  le  principal  officier  dans  la  maison 
des  premiers  rois  de  France,  le  coiumandant 
généxal  des  armées,  un  grand  digTiitaire  du  pre- 
mier empire  français,  un  gouverneur  de  ville  ou 
de  place  forte,  un  officier  subalterne  d'artillerie. 
On  a  donc  tort  d'appeler  grands-connétables  les 
deux  principaux  officiers  de  police  de  Montréal 
et  de  Québec, 


lO 


Partir  un  journal,  un  magasin,  une  affaire, 
une  entreprise,  est  un  des  pires  anglicismes 
que  je  connaisse,  et  Dieu  sait  si  nous  nous  le 
mettons  souvent  sur  la^  conscience.  On  fonde  un 
journal,  on  lance  une  affaire,  on  établit  un  maga- 
sin, on  fait  une  entreprise  :  cm  ne  les  part  jamais, 

Nous  entendons  souvent  dire  partira  la  cam- 
pagne, partir  (raj-  Etats-Unis,  par  des  Français 
qui  ont  trouvé  quelques  imitateurs  dans  notre 
presse.  On  doit  dire  partir  pour  la  campagne, 
pour  les  Etats-Unis.  Partir  en  voyage  est  égale- 
ment une  faute  ;  (jn  part,  tout  simplement,  ou 
l'on  part  pour  un  voyage. 


11 


La  pers(mne  (]ui  demande  si  le  journal  est 
■vrrti  fait  une  faute  :  la  gazette  (|ui  annonce,  "  que 
le  candidat  N.  a  sorti  une  adresse  aux  électeurs," 
ou  "  qu'une  autre  brochure  va  sortir  comme 
complément  de  la   première,"  la  gazette,   dis-je, 


—  6  — 

en  fait  autant.     Les  verbes  paraitiw,  piihlicr. 
sont  les  seuls  h  employer  dans  ces  cas. 

Nous  écrivons  en  général  ra-t-en,  ocnvpe-t-eti 
ou  bien  vo-f-en,  occupe-f-cv.  Les  deux  maniè- 
res sont  incorrectes,  le  deuxième  trait  d'union 
étant  superflu.  Il  faut  écrire  ra-fen,  occape- 
fen,  etc. 

La  grammaire  défend  de  confondre  le  pronom 
te  (écrit  f)  qui  se  rencontre-  à  l'impératif  des 
verbes  pronominaux,  comme  dans  les  cas  ci-des- 
sus, avec  le  /  euph<jni(iue  de  ''(t-t-il^suci-iipc-f-il. 

IS 

Que  de  gens  écrivent  "  scholaire,"'  "  sépul- 
chral,  "  mélancholique,"  "  paschal,"  "  Nicholas''  ! 
L'A  est  de  trop. 

14 

Trop  de  journaux  écrivent  lib'l  au  lieu  de 
libelle.    Il  y  en  a  qui  ne  ratent  jamais  l'occasion 


—  7  — 

de  faire  cette  faute  :  tel  journa]  quotidien  de 
Québec  en  est  à  sa  centième  fois.  Lihel  est  le 
mot  anglais,  lihdJc  le  mot  français  :  choisissons. 
Certaines  personnes  font  dans  rehelle  la  même 
faute,  en  supprimant  la  dernière  syllabe  du  mas- 
culin, en  écrivant  par  exemple  un  homme  rehel. 
Ne  ménagez  pas  votre  encre,  bonnes  gens,  et 
qu'une  troisième  syllabe  ne  vous  coûte  point  ! 


Îr3 


Il  n'y  a  pas  cent  personnes  dans  le  pays  qui 
diraient  :  ''  J'ai  allumé  ma  pipe  avec  de  la  tondre." 
Tout  le  monde  dit  du  tondre., — et  tout  le  monde 
a  tort.   Tondre  est  féminin. 


Î6 


Exploita f<:'ur  n'est   pas  français  :  c'est  explo: 
l('(ir  qu'il  faut  employer.  .  .  .ou  fuir. 


1? 


Il  n'y  a  pas  <le  mot  anglais  ([ue  nous  mettion> 
à  plus  de  sauces  »[ue  ^r/.     Nous  disons  et 'l.^cri- 


—  8   — 

vons  :  set  de  salon,  rie  chambre  à  coucher,  de 
salle  à  manger,  pour  rnfvhle  ou  nvienhUmenf  : 
f^PÀ  de  perles,  de  diamant,  d'or,  pour  parure  ;  set 
de  cheminée,  de  foyer,  pour  garaihtre  ;  set  à 
thé,  à  café,  pour  service  :  .s'^î^  en  porcelaine,  en 
argent,  pour  service  de  vai^fielle  ;  .set  de  broches 
à  tricoter,  d'avirons,  f^e  voiles,  pour  jeu  ;  set  de 
fourrures,  pour  toilette,  hahille'nierd  coiyvplet  ;  set 
de  livres,  pour  série,  collection  ;  set  de  rubans, 
de  chaises,  pour  assortiment  ;  set  d'hommes, 
pour  réunioii,assenihlage  ;  set  de  canailles  pour 
ta.s  ;  set  de  dents,  pour  dentier  ;  set  de  danseurs 
pour  groupe,  couples  ;  set  de  quadrille,  pour 
qiutdrille  ou  figures  de  quadrille. 

Et  que  d'autres  w^ts^  / 


18 


N'écrivez  jamais  quel  qu'allusion,  quelqu' opé- 
ration, etc.  Ue  muet  de  quelque  précédant  un 
mot  qui  commence  par  une  voyelle  ou  une  h 
muette,  ne  se  remplace  par  l'apostrophe  que 
devant  un  et  une. 


9 


Les  affiches,  les  pancartes,  les  annonces  de 
journaux,  devraient  avoir  pour  en-tête  avis  et 
non  Hoticc. 

Notice   est   français,  mais  dans  le  sens  d'avi 
c'est  un  anglicisme. 


îlO 


Une  chose  ne  peut  avoir  lieu  pur  quclcpi'un. 
Le  journal  qui  disait  dernièrement":  "  L'autopsie 
aura  lieu  demain  par  le  docteur  B."  disait  un 
non-sens.  Il  fallait  :  "  l'autopsie  sera  faite  demain 
par  le  docteur  B.,"  ou  "  l'autopsie  aura  lieu 
demain  ;  le  <locteur  B.  la  f  era  " 


•SI 


On  ne  rencontre  pas  unlûllet,  une  obligation, 
un  engagernônt  ;  on  y  fait  face,  on  l'acquitte,  on 
1«  paie,  ou  y  fait  honneur. 


10  — 


^9 


J'ai  lu,  je  lis  cette  phrase  clans  tous  les  jour- 
naux :  *•  La  famille  affligée  voudra  bien  accep- 
ter l'expression  de  nos  plus  sincères  condolé- 
ances." Cette  phrase  est  incorrecte.  Les  condo- 
léances étant  l'expression,  le  témoignage  exté- 
rieur de  la  part  que  Ton  prend  à  la  douleur 
d'autrui,  ces  mets  :  "  l'expression  de  nos  condo- 
léances "  équivalent  à  "  l'expression  de  l'expres- 
sion de  nos  regrets." 

Dites  tout  bonnement  :  acceptez  nos  condolé- 
ances, ou  l'expression  de  nos  regrets. 


*2tt 


La  différence  qu'il  y  a  entre  (l'Uuh  et  aïfinx 
est  celle-ci  :  les  aïeuls  sont  le  grand-père  et  la 
grand'mère  :  les  aïeux  sont  les  ascendants  plus 
éloignés,  les  ancêtres.  On  doit  écrire  hisa'ieuh, 
trisaïeals,  et  non  hisaïefLC,  trisaïeux. 


11  — 


*^4 


Stuis  cj/je,  suivi  du  subjonctif,  ne  prend  ne  ni 
quand  la  phrase  principale  est  affirmative,  ni 
quand  elle  est  négative.  La  négation  (ne)  n'est 
pas  même  admise  après  sans  que  suivi  de  ////, 
aacun,  personne,  rien,  jamais  : 

Je  reçus  et  je  vois  le  jour  L[ue  je  respire 

Saus  que  père  ni  mère  ait  daigné  me  sourire.  [L'ac.) 

Elle  n'est  pas  non  plus  admise,  bien  que  s'ins 
soit  suivi  du  verbe  rraindre  (Litivé).  Il  y  a 
donc  une  faute  dans  chacune  des  phrases  sui- 
vantes, tirées  d'un  récit  de  l'expédition  du  Nord- 
ouest  en  1885:  "Nos  volontaires  marchèrent 
douze  heures  .sans  qu'aucun  ne  se  plaignit." — 
"  A  ce  moment-là  tous  se  battent  comme  des 
lions,  sans  que  personne  ne  craigne  la  mort." — 
"  liien  ne  se  faisait  saus  que  le  major  n'y  vit." 

On  dit  aussi  sou\'eiit  :  Avanf  que  ne.  C'est 
une  faute  ;  mais  il  faut  avouer  qu'un  grand 
nombre  d'écrivains  français  eu  ^"ue  s  en  rendent 
coupables  de  nos  jours. 


—  12 


^5 


Le  petit  nombre  de  personnes  cjui  savent 
écrire  qadqae  dans  toutes  ses  modifications 
ferait  croire  que  sa  syntaxe  est  fort  difficile  : 
c'est  cependant  le  pont  aux  ânes,  grâce  aux 
simples  règles  que  voici  : — 

1  Suivi  d'un  verbe,  quelque  .s'écrit  en  deux 
mots  et  qad  s'accorde  en  genre  et  en  nombre 
avec  le  nom  auquel  il  se  rapporte  :  quels  que 
soient  ses  moyens  :  quelle  que  fût  sa  fortune,  etc. 

'2'  Suivi  d'un  nom,  il  s'écrit  en  un  seul  mot 
et  s'accorde  en  nombre  avec  le  nom  :  nous  ne 
vîmes  que  quelques  personnes:  quelques  avis 
qu'on  lui  donnât,  etc. 

3^  Suivi  dun  adjectif  qui  est  lui-même  iîiimé- 
diatement  suivi  de  que,  il  est  invariable  :  quel- 
que difficiles  que  soient  ces  questions;  quelque 
pressée  que  vous  soyez,  etc.  Si  l'adjectif  n'est 
pas  immédiatement  suivi  de  que,  quelque  est 
regardé  comme  adjectif,  et  s'accorde  en  nombre 
avec  le  nom  :  quelques  grands  honnnes  que 
possèdent  les  autres  nations,  la  France,  sous  ce 
rapport,  n'a  rien  à  leur  envier. 


—  13  — 


•16 


C'est  une  faute  d'écrire  ;  "  Nous  paierons  no.«; 
ejiiployés  les  vendredis  soir-s  ou  les  samedis 
niatinfi,  à  leur  choix."  Soir  et  matin,  en  ce  cas, 
ne  prennent  point  la  marque  du  pluriel.  0\\ 
doit  les  écrire  couime  si  l'on  disait  les  vendredis 
au  soir  ou  les  samedis  au  matin.  Cette  der- 
nière formule  est,  du  reste,  considérée  comme  la 
plus  correcte. 


'27 


Je  ne  vois  pas  poni-quoi  l'on  ne  pourrait  dire 
subir  y/Il  refus,  puisque  l'on  peut  subir  "  le  coup 
d'un  destin  rigoureux  "  (Corneille)  ;  "  une  mas- 
carade "  (D'Alembert)  ;  "  un  jugement  solennel  " 
(Barthélémy)  ;  la  question,  un  interrogatoire, 
un  examen,  une  épreuve,  une  réforme,  des  va- 
riétés, des  changements,  etc.  Cependant  Voltaii-e 
dit  :  "  Vous  serez  révolté  de  voir  subir  des  refus, 
parce  qu'on  essuyé  un  refus,  et  qu'on  subit  une 
peine  ;  subir  un  refus  est  un  barbarisme  ;  " — et 
Littré  le  cite  sans  commentaire. 


—  14 


28 


Nuance  entre  odorard  et  odoriféra td  :  tout 
objet  qui  exhale  une  odeur  quelconque — bonnes 
indifie l'ente  ou  mau\'aise — est  odorant  :  odorifé- 
rant ne  se  dit  que  de  celui  qui  exhale  une  bonne 
odeur.  Mais  les  meilleurs  poètes  semblent  em- 
ployer les  deux  mots  indifierenunent,  en  vers. 


se 


Ce  sont  surtout  les  avocats  et  les  voyageurs 
du  commerce  qui  font  de  ces  phrases  :  "  Je  crois 
avoir  satisfad  le  tribunal  que  mon  client  a  rem- 
pli ses  obligations"  :  "je  suis  satisfait  quil  ne 
peut  vendre  sa  marchandise  à  ce  prix-là."  Au 
lieu  de  satisfait,  il  îaudràit  pef-mi  a  dé,  couva  litcu, 
prouvé  à,  fait  voira.  Un  grand  journal  quoti- 
dien de  Montréal  ne  disait-il  pas,  en  faisant  une 
rétractation  :  "  Les  défendeurs  ont  satisfait  le 
demandeur  qu'ils  avaient  agi  de  bonne  foi." 

Sus  à  l'anglicisme  ! 


15 


30 


Si  vous  voulez  parler  de  ^Fontréal  en  tant  (pie 
territoire  administré  par  des  officiers  munici- 
paux, dites  la  municipalité  de  Montréal. 

Si  \'ous  entendez  parler  du  corps  des  officiers 
(jui  l'administrent,  dites  le  conseil  municipal,  ou 
le  conseil  de  ville,  ou  la  numicipalité. 

Si  vous  voulez  désigner  l'édiii.ce  où  se  tient 
l'administration  municipale,  dites  la  municipa- 
lité, ou  la  mairie,  ou  l'hôtel  de  ville. 

Dans  aucun  de  ces  cas  ne  dites  la  corporation. 


Evéque  et  és^éché  prennent  l'accent  aigu  sur 
le  premier  e  ;  archevêque  et  archevêché  ne  le 
prennent  pas.  Diocèse  et  diocésain  sont  fran- 
çais :  archidiocésain  l'est  aussi,  mais  archidio- 
cèse  ne  l'est  pas.  Ce  sont  là  caprices  de  jolie 
langue,  soit  !  mais  il  faut  les  connaître  et  s'y 
soumettre. 


—  16 


9*2 


Plusieurs  écrivent  :  j'ai  reçu  un  à  compte,  des 
à  comptes,  ou  bien  un  à-conipte,  des  à-comptes, 
sur  sa  dette.  D'autres  écrivent  un  accompte, 
des  accornptes.  Ils  se  trompent  tous.  Il  faut  : 
j'ai  reçu  un  acompte,  des  acomptes  ;  ou  bien, 
adverbialement,  j'ai  reçu  tant  à  compte  de  sa 
dette. 


En  France,  «juand  il  s'agit  de  la  nournture 
et  du  logement,  pension  a  deux  sens  :  le  prix 
que  l'on  paie,  l'endroit  où  l'on  mange  et  couche. 
Il  les  a  également  parmi  nous,  mais  nous  lui  en 
donnons  un  troisième,  inconnu  là-bas,  du  moins 
dans  les  dictionnaires,  et  qui  se  rapporte  à  la 
chose  elle-même,  à  la  qualité  de  la  nourriture  et 
du  logement  :  A-t-on  une  boun<'  pension  à  rhôtel 
Richelieu  ?  La  pension  est  mauvaise  dans  les 
auberges. 

On  ne  dit  pas  en  France,  comme  ici,  maison 
de  pension,  mais  simplement  pension.     J'aurais 


—  17  — 

donc  fait  un  cana<lianisme  en  disant,  dans  Coa/js 
d'œil  et  conpx  de  plume,  (]uo  PapineauvilJe  pos- 
sède plusienrs  '"  maisons  de  pension." 

Nous  employons  encore  le  verbe  pensionner 
eonjme  verbe  neutre,  dans  le  sens  de  manger  et 
coucher  dans  une  pension  :  j(^  pensionne  chez 
Mme  N  : — tandis  cpie  le  dictionnaire  le  donne 
uniquement  connue  verl)e  actif  signifiant  faire 
une  pension,  des  rentes,  à  quel<prun. 

Au  mot  corniste,  Littré  dit  :  "  C'est  la  règle 
de  terminer  en  Iste  le  nom  des  instrumentistes. 
Tl  a  sans  doute  raison,  mais  les  exceptions  sont 
nombreuses.  On  dit  un  c(jr,  un  tand:tour,  une 
tambourine,  un  trombone,  une  clarinette,  un  bas- 
son, un  trompette,  etc,  pour  celui  (]ui  joue  ces 
instruments.  Devons-nous  dire  un  ejjvnet  ou  un 
covnétiste  ?  Le  premier  terme  est  dans  le  dic- 
tionnaire, non  le  second,  (pie  j'ai  lu  dans  un  de 
nos  journaux  ;  s'il  y  a  raison  de  l'y  mettre,  il 
me  semble  qu'il  faudrait  l'écrire  covnettwtt. 


LS  _ 


lî*> 


Complétion  n'est  pas  français.  Nous  l'em- 
ployons tous  les  jours  cependant  :  Ces  travaux 
seront  poussés  jusqu'à  complétion,  jusqu'à  leur 
complétion  :  la  complétion  cVun  arrangement, 
d'un  marché,  etc.  Il  faut  dire  le  complet emeyif 
(avec  l'accent  aigu),  ou  l'achèvement,  la  perfec- 
tion :  Cet  édihce  approche  de  sa  perfection. 


110 


Etre  inaladif,  c'est  être  sujet  à  de  fréquentes 
maladies.  C'est  un  état  passif.  Une  tempéra- 
ture variable,  comme  celle  de  l'hiver  dernier, 
peut  engendrer  des  maladies,  mais  elle  ne  saurait 
en  avoir  :  il  est  donc  mal  d'écrire  :  "  nous  avons 
un  temps  maladif." 


87 


Au   cours   d'une   polémique  assez  vive  entre 
deux  journalistes  fort  en  vue,  l'un  d'eux  a  em- 


19 


ployé  le  verbe  se  revenger  à  deux  ou  trois  re- 
prises. Ce  verbe  n'est  pas  français.  Notre  langue 
dit  seulement,  se  venger,  se  rêva neher  et prevdre 
sa  revanche. 


38 


Abstenez-vous  dédire  que  la  loi,  le  règlement, 
la.  fabrique,  le  chemin  de  fer,  la  banque,  la  com- 
pagnie d'assurance,  la  mine,  la  scierie,  etc,  sont 
en  opération.  En  opération  n'est  français  en 
aucun  cas  :  la  loi  est  en  vigueur  :  la  fabrique 
travaille  ;  le  chemin  de  fer  marche,  fait  le  ser- 
vice ;  la  banque,  la  compagnie  d'assurance,  com- 
mence, continue  ses  opérations  ;  la  scierie  fonc- 
tionne ;  la  mine  est  exploitée,  etc.  Bref,  il  y  a 
vingt  manières  de  remplacer  "  être  en  opération,' 
et  le  verbe  fonctionner  est  celui  que  l'on  peut  y 
employer  le  plus  souvent. 


119 


Pour  qu'une  femme  soit  veuve,  il   faut   que 
son  mari  soit  mort,  n'est-ce  pas  ^  Ce  mari  moi-t 


—  20  — 

devient  le  feu  X.  ou  le  défunt  X.  De  même 
(^u'on  ne  pourrait  dire  de  sa  femme  qu'elle  est 
la  veu\e  du  défunt  N.,  de  même  on  ne  saurait 
l'appeler  la  vm^  de  feu.  N.  sans  pléonasme. 
C'est  cependant  ce  qu'on  voit  tous  les  jours  dans 
tous  les  journaux. 

J"ai  consulté  au  sujet  de  cette  expression  deux 
amis,  deux  autorités  en  matière  de  langue.  L'un 
d'eux  la*  trouve  un  peu  redondante,  mais  pas 
plus  pléonastique  que  descendre  en  bas,  marcher 
d'un  pas  alerte,  etc.  L'autre  la  condamne,  et  dit 
qu'on  ne  peut  l'employer  (pie  dans  le  style 
burlesque. 


40 


La  cfih'de  étant  "'  les  menées  secrètes  de  gens 
qui  s'entendent  pour  un  même  dessein,"  et  le 
verbe  cahaler  étant  neutre,  on  a  tort  de  dire  :  l-» 
un  tel  a  cabale  X  :  2"  X  a  été  cabale  par  un  tel  : 
car  1"  un  seul  homme  ne  peut  faire  la  cabale: 
2'*  un  verbe  neutre  n'a  pas  de  passif.  Ceux  que 
nous  nommons  ici  des  cahcdears  ne  sont  (jue  des 
meneurs  électoraux,  des  meneurs  d'élection  ;  ce 
sont   les  gens    f[ui  vont    de  porte   en  porte  faire 


—  21  — 

rie  la  propagande.  Les  cabaleurs  seraient  plutôt 
les  membres  de  tout  comité  qui  dirige  la  bataille 
électorale, — car  eux  seuls  s'entendent  et  déter- 
minent les  menées  secrètes  auxqr.elles  on  re- 
courra. 


41 


Caution  et  c(tiiiionn<'ineiit  ne  sont  pas  la 
même  chose. 

La  caution  est  la  personne  qui  donne  ou  four- 
nit le  cautionnement  ;  le  cautionnement  est  la 
garantie  ainsi  donnée  ou  fournie. 

Caution  e.st  féminin  :  on  ne  doit  donc  pas  dire, 
comme  trop  de  gens  le  font  en  ce  pays,  un  cau- 
tion, mon  caution  a  été  accepté. 


45$ 


L^n  juge,  un  avocat,  a  tort  de  demander  à  un 
témoin  de  quelle  réputation  jioim.sevi^  les  parties 
les  intéressés.  Dans  le  cas  ou  la  réputation 
.serait  mauvaise,  il  est  évident  que  le  mot  jouir 
ne  pourrait  entrer  ni  explicitement  ni  im))Hcite 


—  22  — 

loent  dans  la  réponse  du  témoin,  car  on  ne  jouit 
pas  d'une  mauvaise  réputation.  La  question 
devrait  être  ainsi  formulée  :  N.  jouit-il  d'une 
bonne  réputation  ?  ou  bien  :  Quelle  est  la  répu- 
tation de  X;  ? 

La  même  règle  s'applique  k  la  santé. 


43 


Un  journal  mentionnait  il  y  a  quelque  temps 
le  nom  d'une  charmante  actrice,  des  Bouffe-^ 
parisieii  lies,  disait-il  d'abord,  des  Bouf es  fran- 
çaises, disait-il  en  second  lieu.  Bouffes  est  mas- 
culin. 


44 


Vu  journal  sérieux  raconte  un  miracle.  Une 
paralytique  a  été  guérie  au  sanctuaire  de  Sainte- 
Anne  de  Beaupré  ;  elle  laisse  ses  béquilles  ftiu- 
pieds  de  la  baUiisf rc. 

Il  y  a  trois  fautes  dans  les  mots  en  itali(jUes  : 
1'^  balustre  est  masculin  :  2»^  il  ne  s'écrit  qu'avec 
une  l  ;  3'^  il  fallait  au  pied,  qui  signifie  au  bas  : 
aux  pi^ds  ne  s'emploie  que  pour  les  personnes. 


45 


Je  lis  dans  un  journal  ;  '  .  .  .  mnlgré  que  voH.<i 
refusiez  de  lui  laisser  voir  vos  prétendus  docu- 
ments."' 

Pour  faire  voir  qu'il  y  a  là  une  faute,  je  n'ai 
(]u'à  citer  la  grammaire. 

Malgré  que  n'est  usité  qu'a\'ec  le  verbe  avoir ^ 
de  cette  façon  :  "  malgré  que  j'en  aie,"  "  malgré 
qu'il  en  eût/'  en  dépit  de  moi,  en  dépit  de  lui. 
Quand,  malgré  que  j'en  aie,  amour  me  le  décou- 
vre (Régnier).  Ah  ?  malgré  que  j'en  aie,  il  (ce 
nom)  me  vient  à  la  bouche  (Molière).  Il  faut 
se  divertir,  mrJgré  qu'on  en  ait  (SÉVIGXÉ). 
Malgré  qu'ils  en  eussent  (Bossuet).  On  prend, 
malgré  qu'on  en  ait,  un  rôle  dans  tes  ouvrages 
(Diderot). 


46 


Le  mot  plaisant  ne  s'emploie  plus  guère  dans 
son  ancien  sens  d'agréable  :  on  s'en  sert  presque 
exclusivement  aujourd'hui  cians  le  sens  de  drôle, 


—  24 


«lo  ridicule.  C'est  })()urquoi  le  journal  français 
«rOttawa  n'aurait  pas  dû  dire  :  "  Un  «les  événe- 
ments les  plus  plaisants  de  la  grande  convention 
«le  Toi*<:)nto  a  été  la  présence  des  trois  ministre;» 
canadiens-français. 


17 


Que  l'on  n'écrix  e  donc  plus,  que  l'on  ne  pro- 
nonce donc  plus  iiJléf/éoncr-.  On  doit  écrire  allé- 
geance, car  il  n'y  a  pas  d'accent  sur  le  deuxième 
^-.  et  l'on  doit  prononcer  njlp'in m-f. 


18 


Si  vous  voulez  pouvoir  dire  avec  Fréchette  : 

.T'amasse  un  pécule  et  de  ma  paroi.sse 
J'aspire  à  l'honueur  d'être  rnarduiVicr  ; 

— ou  s'il  vous  prend  envie  de  rire  du  gros  casque 
de  ce  dignitaire,  sachez  d'abord  écrire  son  titre 
correctement.  Il  y  a  deux  /  dans  ce  mot-là,  l'un 
avant  la  première  /,  l'autre  après  la  seconde. 
Les  journaux  souvent  omettent  le  dernier. 


—  25  — 


40 


Cette  pièce  de  vaisselle  d'argent  que  ]"on  mot 
sûr  la  table  et  que  l'on  appelle  au  Canada  une 
épergroe  est  un  surtout,  un  surtout  de  table 
Epergne  est  un  mot  anglais. 


50 


Je  prie  les  avocats — et  les  journalistes  qui 
racontent  leurs  exploits — de  ne  pas  écrire  une 
action  en  dommage,  mais  en  domma.ges,  ou  en 
do'mrnageiî'intéréfs.  Il  fa,ut  le  pluriel. 


51 


Voici  le  comble  de  l'anglicisme:  'Il  y  a  vne 
belle  onvi'iUire  (a  fine  opening)  pour  un  jeune 
homme  actif*  à  tel  endroit."  On  doit  din'  :  une 
belle  occasion  s'offre,  il  y  a  une  bonne  chance  dr 
réussite  pour  un  jeune  homme,  etc. 


26 


5*1 


Le  verbe  apparoir  ne  s'emploie  qu'à  l'infinitif 
et  à  la  troisième  personne  de  Findicatif  présent  ; 
il  o.pperf. 

Ex  :  Il  fera  apparoir  cU  son  droit  ;  il  appert 
par  un  jugement  que,  etc  ;  ainsi  qu'il  appert  *?/r 
votre  extrait  de  baptême,  etc.  Les  dictionnaires 
ne  donnent  pas  :  ainsi  qu'il  appert  à  l'acte,  av 
contrat,  comme  disent  nos  avocats. 


e>:i 


Nos  journaux  écrivent  souvent  :  feue  madame 
y.,  et  c'est  une  faute.  Voici,  d'après  la  grammaire, 
comment  se  fait  l'accord  de  cet  adjectif  :  feu 
s  accorde  avec  son  sub.stantif  quand  il  suit  l'ar- 
ticle {Is.  feue  reine);  il  reste  invariable  quand 
il  le  précède  (pui  la  reine,  fea  ma  mère),  ou 
devant  madame  (feu  madaiiit-  X.).  ou  devant  un 
nom  propre  (feu  Mari^uerite). 

L'Académie  refu.se  un  pluriel  k  feu  :  Littré  est 
d'avis  ct»utraire  :  en  ce  cas,  le  pluriel  s<n'ait  feus, 
feues. 


—  27  — 

Littré  fait  cette  autre  distinction  :  on  dit  feu 
la  reine,  s'il  n'y  a  pas  de  reine  vivante,  et  la 
feue  reine  si  une  autre  l'a  remplacée. 


54 


"Il  va  DiariHi'  une  iille  riche,"  "elle  a  marié 
un  bon  garçon," — faute  très  fréquente,  angli- 
cisme pur. 

Un  prêtre,  nn  parent,  un  ami,  un  tuteur 
marie  un  homme  à  ou  avec  une  femme  et  vice 
\ersa.  Mais  quand  on  fait  un  mariage  pour  son 
compte  personnel,  on  épouse  quelqu'un,  ou  l'on 
•sr  marie  à  ou  avec  quelqu'un. 

N.  a  marié  sa  tille,  c'est-à-dire  lui  a  trouvé  un 
mari.  N.  a  épousé  mademoiselle  Z,  ou  s'est 
marié  à  mademoiselle  Z,  c'est-à-dire  l'a  prise 
pour  femme. 


o5 


L'employé  qui  transmet  les  dépêches  télégra- 
phiques est  un  ou  une  télégraphiste,  et  non  un 
opérateur  ou  une  opératrice  de  télégropjhe,  comme 


—  28  — 

l'on  dit  coniinuiiémeiit  ici.  Télégraphiste  a  l'a- 
vantage  d'être  franeais  et  moins  long  à  dir« 
comme  à  écrire. 


56 


Rien  de  plus  fréquent  que  chimie  avant  heure, 
rien  aussi  de  plus  inexact.  La  règle  qui  gou- 
verne ce  mot  est  pourtant  1  )ien  simple.  Dern  i 
placé  devant  un  substantif  est  invariable  :  un» 
demi-douzaine,  des  demi-douzaines  ;  placé  après, 
il  s'accorde  en  genre  :  une  douzaine  et  demie,  un 
pied  et  demi.  Il  faut  donc  écrire  une  demi- 
heure,  une  heure  et  demie.  Demi  ne  prend  pas 
la  marque  du  pluriel  :  des  demi-savants,  des 
demi-aunes  ;  deux  ans  et  demi,  deux  aunes  et 
demie. 

On  ne  met  pas  de  trait  d'union  après  l'adverbe 
à  demi  qui  précède  un  adjectif  :  à  demi  mort,  à 
demi  fait.  On  met  un  trait  d'union  après  dsmi 
quand  il  précède  un  substantif  ou  un  adjectif: 
demi- vengeance,  demi-savant. 


—  2d  — 


57 


La  chaudière  d'une  machine  à  vapeur  se  nomme 
un  hou/Uleur.  Un  journal  a  donc  eu  tort  d'écrire  : 
"  On  a  fait  avant-hier,  à  Sorel,  l'essai  du  vapeur 
Québec,  muni  de  ses  nouvelles  bouilloires."  On 
trouve  cette  faute  partout,  même  dans  une  ]iièce 
de  Crémazie. 

La  houilloitr  ou  la  bouillotte  est  un  vaisseau 
de  métal  destiné  à  faire  bouillir  de  ]'eau,  et  par- 
ticulièrement un  vase  en  forme  de  cafetière 
tju'on  met  devant  le  feu. 

On  a  tort  d'employer  les  mots  canard  et 
bombe  pour  la  désigner. 


58 


Au  lieu  de  mon  mofto  (mot  anglais),  dites 
ma  devii^e. 

En  soirée,  ne  passez  pas  des  niottos  aux  dames, 
mais  des  devises  de  bonbons,  des  bonbons  à 
devise j  ou  simplement  des  devises. 


30 


59 


Que  de  fois  n'entendez-vous  pas  dire,  que  de 
fois  n'avez-vous  pas  dit  vous-même  :  "  Y  a-t-il 
des  cochers  sur  le  .'<taiid  f  Je  vais  chercher  une 
voiture  sur  la  stand.  Le  stand  est  désert." 

Le  mot  français  est  place. 

On  dit  une  voiture  de  place.  Place  de  fiacres, 
de  cabriolets,  endroit  où  stationnent  les  voitures 
à  Tusao'e  du  inil)lic. 


OO 


Votre  cordonnier,  \otre  tailleur  parleront  des 
réparages  qu'ils  ont  faits  à  vos  chaussures,  à  vos 
hardes.  D'après  Littré,  le  réparage  est,  dans  le- 
beaux-arts,  l'action  de  réparer,  de  déguiser  les 
défauts  d'un  ouvrage  qui  sort  du  moule,  de 
réparer  ou  d'achever  un  ouvrage  ébauché  ;  dans 
l'industrie,  c'est  l'action  de  donner  avec  les 
forces  une  deuxième  coupe  au  drap,  ou  c'est  la 
façon  que  les  cardeurs  donnent  aux  étoffes  avec 
le  chardon. 


—  8]   — 

On  ne  fait  pas  de  répamges  dans  l'habille- 
ment, la  cordonnerie,  la  menuiserie,  la  charpente, 
la  maçonnerie,  etc.,  mais  des  répr/rations. 


6Ï 


On  entend  souvent  : 

"  Je    ne    sais    où  cette   histoire  a  origine  "  ; 
"  c'est  toi  qui  as  origine  cette  calomnie." 

N'employez  origine)'  sous  aucune  forme.  .  .  . 
et  sous  aucun  prétexte,  car  il  n'est  pas  français 


n^ 


La  poursuite,  l'action,  la  demande  d'un  tel  a 
été  déboutée.  Faute  générale,  surtout  au  barreau. 
On  doit  dii-e  :  un  tel  a  été  débouté  de  sa  ])our- 
suite,  etc. 

Si  je  pouvais  corriger  un  journaliste  et  cinq 
avocats,  ma  journée  ne  serait  pas  perdue. 


—  32  — 


63 


Article  éditoricd  est  un  ansrlicisme  cru.  Disons 
article  de  fond,  de  tête,  de  la  rédaction,  premier- 
Montréal,  premier-Québec. 


64 


C'est  à  l'époque  des  vacances,  que  vous  dites  le 
plus  souvent,  madame  :  Ma  fille  a  grarJué:  la. 
fille  du  voisin  r/raduera  Tannée  prochaine 

Permettez-moi  de  vous  signiak-r  cette  faute  en 
la  corrigeant. 

Il  faudrait  dire  :  Ma  fille  o  été  (ji-ad néo  ou 
sffif  fait  (irdd'oev. 

De  même  pour  les  élèves  des  facultés  de  théo- 
logie, de  droit,  de  médecine,  de  sciences  et  de 
lettres.  La  faculté  les  gradw\  ou  ils  se  font 
(fradficr.  ou  \\<,  prcnneid  levr^  dff/rés. 


—  33  — 

65 

Positif,  à  'positif  de,  sont  des  fiiiglicisines 
d'un  emploi  continuel.  Il  est  'positif  k  dire  cela; 
il  dit  la  vérité,  j'en  suis  'positif:  voilà  des 
phrases  qui  ne  sont  pas  françaises.  Il  faudrait  : 
Il  dit  cela  d'une  manière  positive,  formelle  ;  il 
dit  la  vérité,  j'en  suis  sûr,  certain. 


60 


Anglicisme  à  extirper  :  rappeler  une  loi  (to 
repeal  a  law)  Il  faut  rapporter  :  cette  loi  a  été 
rapportée,  il  est  nécessaire  de  rapporter  ce  règle- 
ment. On  peut  aussi  employer  les  verbes  abro- 
ger, annuler,  abolir,— mais  jamais  rappeler. 


6r 


Non  seulement  le  gros  public,   mais  la  presse 
confond  Vhuile  de  castor,  huile  animale  et  anti- 
spasmodique tirée  de  certaines  glandes  placées 
sous  la  peau  de  ral)domen  du  castor,  avec  l  huile 
2 


—  34  — 

de  ricin,  huile  vogétale  et  piivc^ative.  Ce  que 
presque  tous  iionimtjiit  huile  de  castor,  et  les 
xVn-'lais  ca^tn/'  oil,  n'est  que  l'huile  de  ricin. 


08 


Si  vous  aimez  quelqu'un,  prouvez-le  lui  en 
prenant  son  iiorti,  ce  dont  il  vous  saura  gré, 
mais  non  sa  parf,  car  il  pourrait  vous  montrer 
îe.s  dents.  Je  vous  crois  honnête  :  laissez  à  cha- 
cun ce  qui  lui  appartient. 


60 


On  ne  doit  pas  mettre  de  négation  entre  la 
locution  prépositive  faute  de  et  un  verbe.  Ainsi 
le  journaliste  qui  disait  que  ses  adversaires 
étaient  revenus  1  oreille  basse  d'une  assemblée 
*' faute  de  ri  avoir -^w  se  faire  entendre,  "  s'est 
trompé.  Il  pourra  se  consoler  en  songeant  qu'il 
n'est  pas  seul  coupable  de  cette  faute  et ...  en  se 
corrigeant 


—  35  — 


70 


RoLert  E.sticnne,au  XVIe  siècle,  écrivait  "par 
le  conseil  du  pilot."  La  plupart  de  nos  compa- 
triotes sont  encore  de  cette  époque,  car  ils  disent 
plus  souvent  -j^Hot  que  pilote.  J'ai  même  lu  une 
communication  sur  les  j)Uots  dans  un  journal  de 
Montréal  (nov.  ou  déc.  1887).  Il  ne-*serait  pas 
mal  de  nous  moderniser  et  d'en  revenir  à  pilote. 

Un  barbarisme  atroce  qui  nous  vient  de  l'an- 
g'iai.-^  :  pilote  brave ké  (branched  pilot).  Il  faut 
dire  pilote  cora'niisëionné,  ou  mieux  pilote  lama- 
ncur. 

71 

Moi  pour  un  !  Pour  l'amour  de  la  France,  ne 
vous  servez  jamais  de  cette  atroce  expression. 
Dites  :  pour  moi,  quant  à  moi,  en  ce  qui  me 
regarde,  en  tant  que  j'y  suis  concerné,  etc.  C'est 
surtout  dans  les  assemblées  parlementaires  que 
fleurit  le  moi  pour  un. 


—  30  — 


7^2 


Si,  en  parlant  d'un  lion  une  ou  d'une  chose 
déjà  nommé,  vous  employez  les  termes  du  pra- 
tique ledit,  ladite,  rnondit,  nofidits,  susdit,  etc., 
ne  manquez  pas  d'éci-ire  la  locution  en  un  seul 
mot.  Ne  faites  pas  comme  les  avocats  et  les 
notaires,  lesquels  écrivent  invariai 'lement  du  dit 
sieur,  la  dite  iiiaisori,  etc. 


73 


Absolument  parlant,  le  mot  exJ(  ihition  appli- 
qué aux  concours  agricoles,  artistitpies,  etc., 
n'est  pas  une  faute,  mais  en  France  on  emploie 
le  mot  ej'ixjsitinii  de  préférence. 

Le  mot  concours  pourrait  aussi  se  dire  à  pro- 
pos, en  remplacement  des  deux  précédents. 

On  dit  surtout  i:-oniices  agricoles  pour  les 
expositions  locales. 


17  — 


74 


La  charrette  étant  une  voiture  à  deux  roues, 
avec  deux  ridelles  et  deux  limons,  et  le  charre- 
tier étant  celui  ou  celle  qui  conduit  une  charrette, 
il  est  évident  qu'on  a  tort  de  confondre  le  char- 
retier  avec  le  cocher,  lequel  est  le  conducteur 
d'un  coche,  d'un  carrosse,  d'un  cabriolet. 

On  avouera  (jue  cette  faute  est  presque  géné- 
rale. 

Ainsi,  (^uand  vous  vous  ferez  conduire  en 
voiture  de  place  ou  eu  voiture  de  maître,  dites  : 
cocher,  telle  rue,  tel  numéro. 


75 


Vote  a  r  n'est  pas  français.  Il  faut  dire  électeur 
OM  votant.  Electeur  s'entend  de  celui  (pli  a  le 
droit  de  voter,  votant  de  celui  c(ui  vote. 

Il  y  a  tant  d'électeurs  dans  telle  circonscrip- 
tion électorale  ;  il  y  a  eu.  tant  de  votants  à  telle 
élection. 


38 


76 


Les  clubs  de  raquettes  s'amusent  souvent  à 
herner  leurs  invités,  leurs  officiers,  leurs  amis. 
En  soi,  la  chose  est  assez  agréable  pour  chacun, 
mais  ce  qui  est  désagréable,  c'est  de  l'entendre 
exprimer  par  cet  anglicisme  ou  plutôt  ce  barba- 
risme :  boancer.  8i  les  présidents  des  clubs  s'en- 
tendaient pour  dire  berner,  ce  mot  passerait 
bientôt  dans  le  langage. 


77 


Cette  phrase  est  incorrecte  :  Chacun  s'accorde 
à  dire.  Il  faudrait  :  tout  le  monde  s'accorde  à 
dire,  chacun  est  prêt  à  dire,  ou  ({uehiue  autre 
tournure  équivalente.  On  comprendra  facile- 
ment qu'un  honnne  seul  (chacun)  ne  i)eut  s'accor- 
der à  dire  une  chose  :  il  faut  être  plusieurs  pour 
cela. 


—  ?,9  — 


78 


Le  voyageur  qui  laisse  ses  colis,  ses  malles,  à 
la  gare  du  chemin  de  fer  ne  doit  pas  dire  qu'ils 
sont  dans  la  rhamhi'<'  du  hagar/e,  encore  moins 
dans  la  haggage-njoni,  mais  qu'ils  sont  fii  coii- 
sif/ne,  n  hi  ('<niKi<iar. 


7» 


Au  lieu  de  lettre  eiwcgistrée,  dites  toujours 
lettre  eh(ir(jé('.  "  Charger  une  lettre,  un  paquet, 
dit  le  dictionnaire, faire  constater  sur  les  registres 
de  la  poste  l'envoi  d'une  lettre,  d'un  paquet."  Le 
charo-ement  est  l'action  de  faire  constater  l'envoi. 
On  emploie  même  ce  mot  pour  la  lettre,  1« 
paquet  :  j'ai  un  chargement  à  la  poste. 


80 


Pour  l'amour  de  Dieu,  ne  dites  plus  moulin  à 
coudre,  mais  machine  à  coudre.  Il  y  a  des  mou- 
lins à   vent,  à  eau,  à  vapeur  ;  ces  termes  n'indi- 


—  40  — 

quent  (^ue  la  puissance  motrice.  Mais  couinie  la 
couture  n'est  pas  une  puissance  motrice,  et  comme 
un  moulin  a  pour  objet  de  moudre,  de  broyer, 
on  voudra  bien  ne  plus  moudre  de  couture.  Les 
journaux  devraient  extirper  cette  faute  de  leurs 
annonces. 


81 


Tous  les  oT)uvernements  à  tour  de  r«Me  sont 
accusés  de  faire  élire  leurs  créatures  avec  les 
dons  en  argent  des  entrepreneurs  publics,  que 
les  journaux  nomment  toujours  controcteurs.  Ce 
mot  n'est  pas  français.  Ceux  (jui  s'engagent  par 
contrat  sont  des  contractants.  L'entreprise  qui 
leur  est  adjugée,  dont  ils  se  chargent  par  con- 
trat, n'est  toujours  qu'une  entreprise,  jamais  un 
contrat. 

Celui  que  l'on  appelle  au  Canada  un  sous-con- 
tracteur  est  un  sous-entrepreneur,  un  tâcheron. 


82 


.L'Anglais  qui  dit  :  "  to  argue  a.  case,  a  ques^tion, 
a  matter,"  s'exprime  correctement  ;  mais  le  Fran- 


—  41  — 

çais  qui  dit  arguer  u/nr  caïuir,  une  question,  se 
trompe.  Arguer  signifie  ou  contredire,  accuser, 
ou  tirer  une  conséquence.  L'avocat  doit  donc 
dire  :  j'ai  plaidé  ma  cause,  développé  mes  moyens, 
discuté  la  question,  fait  valoir  mes  arguments, 
etc. 

On  nargicrueitte  pas  non  plus  une  cause. 


83 


On  a  pu  lire  dans  plusieurs  journaux  l'hiver 
dernier  (jue  "la  l'ibrairie  du  parlement  provin- 
cial contient  30,178  volumes."  La  différence 
entre  librairie  et  hihlioiJièque  est  assez  élémen- 
taire et  assez  connue  pour  que  les  apprentis- 
journalistes  qui  l'ont  ignorée  soient  inexcusables. 


84 


Quelle  est  la  gazette  où  l'on  ne  lise  pas géoli^r 
ou  geôlier.  La  véritable  orthographe  ne  permet 
pas  d'accent  sur  Ve,  et  elle  exige  un  accent  cir- 
conflexe sur  Vo.     Le   n^ot  s'écrit   donc  geôlier  et 

se  prononce  ;yo//^'/\ 


—  42  — 


8*^5 


Appelez  votre  garçon  comme  vous  l'entendrez, 
René  même,  si  vous  avez  un  penchant  à  la 
rêvasserie,  ou  de  la  sympathie  pour  le  maladif 
personnage  que  Chateaubriand  a  peint  ;  mais 
dans  ce  cas  écrivez  et  prononcez  René,  sans 
accent  sur  la  première  syllabe. 


86 


Ecrivez  protoitutaire,  et  non  prothu notaire, 
comme  le  font  tant  d'avocats.  L'A  ne  doit  se 
trouver  que  dans  le  mot  anglais  prothonoUtry. 


87 


Dti,  participe  passé  du  verbe  devoir,  prend 
l'accent  circonflexe  au  singulier  masculin  seule- 
ment :  argent  dû.  Le  féminin  et  le  pluriel  s'en 
passent  :  une  récompense  due,  les  honneurs  <ius. 
les  sommes  dues.   On  loublie  8(^)Uvt:'nt. 


48  — 


88 


La  plupart  du  temps,  quand  on  dit  un  dim^- 
tory,  on  ne  se  demande  seulement  pas  s'il  existe 
un  mot  français  correspondant.  Ceux  qui  se  le 
demandent  et  disent  un  directoire  font  une  faute. 
Disons  l'almanach  des  adresses,  ou,  ce  qui  vaut 
mieux,  le  hottln,  du  nom  de  celui  qui  le  publie 
à  Paris. 


89 


On  demande  que,  cm  ne  demande  pas  <:«  ce  que. 
Les  avocats  n'y  font  pas  suffisamment  attention. 
Il  n'est  pas  rare  de  les  entendre  demander  au 
tribunal  à  ce  qit.e  k^urs  clients  soient  admis  à 
caution,  et  de  voir  les  journaux  répéter  la  faute. 


90 


Exercice,  danse,  licence,  voilà  trois  mots  que 
je  vois  bien  souvent  écrits  à  l'anglaise  :  exercise, 
dance,  licence.  Un  peu  d'attention,  s'il  vous 
plaît  !  i 


—  44 


91 


Laissons  les  Anglais  dire  flic  pscal  ycfir,  mais 
ne  traduisons  pas  littéralement  par  Vannée  fis- 
cale. Disons,  comme  en  France,  !'(»  n  née  financière. 
Avec  ce  dernier  terme  on  embrasse  non  seule- 
ment les  opéx'ations  du  fisc,  mais  toutes  les  opé- 
rations d'une  année  en  matière  de  finances  pu- 
bliques. 


9a 


"  Sa  nomination  est.  gazeftée,"  cela  se  dit  tous 
les  jours,  mais  n'est  pas  français.  Le  verl)e 
(jazefif'r  passera-t-il  dans  la  langue  ?  je  l'espère. 
En  attendant  nous  dirons  :  sa  nomination  a  paru 
dans  la  Gazette,  comme  on  dit  en  France  :  a  paru 
à  l'Officiel  :  comme  on  disait  sous  l'Empire  :  a 
paru  au  Moniteur. 


9S 


On    entend    souvent    dire  :  Voilà   une    église 
dévotieuse,  dévote,  une  chapelle  pieuse, religieuse. 


4;") 


(a"  n'est  pas  t'ra lirais.  Il  faut  dire  Tiiie  église, 
une  eliapelle  ijui  porte  à  la  prière,  (|ui  inspire  la 
dévotion,  la  relioion,  la  piété. 


94 


Vous  parlez  d'un  saint,  éci'ivez  eomnie  ceci  : 
saint  Augustin,  sainte  Barbe  :  vous  pîirlez  de  sa 
f '4e,  écrivez  la  Saint- Jean  (avec  la  double  majus- 
cule et  le  trait  «ruiûon,)  la  Sainte-Véronique  ; 
vous  parlez  d'un  monument,  d'une  bjcalité,  écri- 
vez l'église  Saint-Germain,  la  rue  Saint-Pierre, 
la  ville  de  Saint-Hyacinthe. 

Ecrivez  de  même  le  fleuve  Saint-Laure^it,  le 
mont  Saint-Bernard,  ^[.  Louis  Saint-Denis. 


95 


C'est  une  faut!'  d'écrire  f'///y''fnr//r^s' :  il  faut 
oïiiro  (I  titres.  Voici  la  règle  que  pose  Littré  : 

"JJc  tinal  de  r^/z/yv^  s'élide  dans  les  composés  de 
ce  mot  :  entr'acte,  s'entr'aider,  etc.,  mais  dans 
tous  les  autres  cas  on  n'emploie  pas  l'apostrophe  : 
entre  eux,  entre  tdles,  entre  autres,  entre  onze 
heures  et  midi." 


^  4G  — 

96 

Boîtf  avec  fnïioiii.^  est  un  terme  riussi  ridicule 
(ju'inipropre.  Coniine  K-ûjours  nous  l'avons  pris 
aux  Anglais:  ^irifi.tos  hox.  Notre  langue  est 
donc  bien  pauvre  !  Pourtant  les  Français  rendent 
la  n.  ^iiie  idée  tjue  nous  en  disant  h\  barre,  la 
harr>'.  dv  fr'nninah  Le  témoin  y  comparaît  à  la 
barre,  tout  connne  à  la  barre  de  la  chambre 
comparaissent  témoins,  pétitionnaires,  accusés. 

On  ne  doit  pas  non  plus  dire  la  huite  aux 
accavéyi,  encore  moins  la  hoîte  aux  coupahles^ 
mais  le  ha  ne  des  accusés,  des  p rêve n  as. 


97 


En  anglais,  on  écrit  avec  le  jfJi  les  mots  sid- 
jjJiuric,  i^idphate,  sidphite  et  les  autres  dérivés 
de  salpliur  (soufî*e).  En  français,  on  doit  écrire 
salfuriqae,  snlfafo,  <salfite,  etc.  Beaucoup  plus 
de  personnes  qu'un  ne  pense  se  trompent  sur  ce 
point. 


47 


98 


Madame  part  pour  le  bal  et  vent  boutonner 
ses  gants  ;  elle  demande  à  sa  femme  de  cliii  ibre 
le  crochef.  Madame  ferait  mieux  de  dire  le  tire- 
houton^. 


99 


En  temps  d'épidémie,  les  méd(M"ins  et  les  hy- 
giénistes recommandent  l'emploi  des  désinfec- 
tants, dont  l'un  des  plus  efficaces  est  Ih  chlorwre 
de  chaux.  Que  de  gens  demandent  à  tort  d:.'ly. 
chlorure  à  leur  pharmacien  1 

lOO 

Un  journal  annonce  que  "  les  camarades  du 
généra]  B.  lui  ont  présenté  une  insigne  de  la 
légion  d'honneur,"  et  que  "cette  insigne  est  faite 
de  diamants."  Connue  d'autres  journaux  parta- 
gent son  erreur  et  font  insigne  du  féminin,  je 
tiens  à  les  détromper. 


4S  -— 


101 


Je  mets  les  journalistes  en  garde  contre  la 
confusion  des  ternies  pilier  et  pile.  Le  pilier  est 
tout  massif  qui  sert  à  soutenir  (|uel(]ue  partie 
d'un  éditice  ha  pile  iist  le  massif  de  mac/onnerie 
([ui  soutient  les  arclies  d'un  pont.  JLa  distinction 
est  assez  facile  à  faire  pour  (ju'on  ne  soit  }:as 
justifiai )le  de  la  néoliM-er. 

I  Oïl 


Pour([Uoi  nos  journaux  ne  perdent-ils  jamais, 
au  o-rand  jamais,  roccasion  de  se  s<'rvir  du  mot 
nojj(((le  dans  un  sens  qu'il  n'a  pas  ^.  Noyade 
signifie  l'action  de  noyer  inie  ou  plusieurs  per- 
sonnes, et  non  pas  je  fait  de  se  noyer;  Le  sup- 
plice de  la  noyade  a  longtemps  existé  :  on  con- 
naît les  noyndes  de  Nantes  commandées  par  le 
cou venti( )nnel  Carrier. 

Puis((ue  noyade  exprime  le  fait  d'être  noyc* 
par  d'autres,  et  non  de  se  noyer  volontairement 
ou  accidentellement,  ([Uel  e-^t.  dira-t-on,  le  n)ot 
qui  le  remplace  '  Il  n'y  en  a  pas.    En  attendaiit 


49 


qu'on  en  crée  im,  ou  que  l'on  étende  le  sens  de 
noyade,  mettons  noyé  en  tête  des  faits  divers 
qui  relatent  cet  accident. 


103 


Gardez- vous  d'écrire  que  les  débats  au  sénat 
sont  l((nijonveax  ;  ils  peuvent  être  langai^savt^, 
ce  qui  ne  surprendrait  personne,  mais  soyez  sûr 
qu'ils  ne  tournent  jamais  à  l'amour. 


104 


L'Anglais  ni^mme  sluitim/  ri  ni-  nn  endroit 
spécialement  entretenu  pour  les  tins  de  pati- 
nage. Le  Français  lui  emprunte  son  mot,  et  le 
défigure  en  le  prononçant.  Nos  journaux  disent 
rond  (\  jK(fiûer  ou  /xwillon  <lf.spafiiieiirs^  quand 
souvent  l'endroit  est  carré  ou  n'est  pas  abrité 
par  un  pavillon.  J'ai  proposé  j>afinorr,  il  y  a 
plusieurs  années,  et  l'expression  fait  son  chemin. 
Elle  a  toutes  les  allures  d'un  terme  bien  fran- 
çais, sans  présenter  aucune  des  objections  (jue 
l'on  peut  otlrii'  aux  autres, 


—  50 


IO.> 


Etant  donnés  la  liberté* le  franc  jeu  dont  nous 
jouissons  sous  nos  institutions  municipales  et 
judiciaires,  nous  ne  pouvons  dire  avec  vérité  : 
on  a  commencé  l'enquête  ntnfre  le  corps  de 
police,  (■(Hêtre  tel  accusé.  Il  faut  sur,  au  sujet 
de.  etc. 


106 

Les  Anglais  écrivent  les  noms  de  jour  et  de 
mois  avec  une  majuscule  :  Monday,  Friday, 
April,  Xovember,  etc.  En  français,  on  doit  écrire 
lundi,  vendredi,  avril,  novembre,  et<:-.  ;  c'est  ce 
ijue  l'on  est  loin  de  faire  toujours. 


lor 

Il  y  a  un  mot  dont  Tu-Scige  est  si  fréquent 
que  je  ne  comprends  pas  que  des  joui-na- 
listes  ignorent  son  genre  :  c'est  le  mot  atnioa- 
jjJière.     Nous    disons   ou    entendons    dire    tous 


5] 


les  jours  4110  l'atmosphère  est  bas,  posant,  vicié, 
tandis  «pi'il  fainliait  mettre  ces  a<.ljectifs  a\i 
féminin. 


10?^ 


On  m'a  demandé  quelle  dittérence  il  y  a  entre 
piifroïniPi-  et  /xiffonis^u',  et  si  l'un  doit  dire 
qu'une  cjeuvre  de  bienfaisance  est  patronnée  ou 
patronisée  par  les  plus  hautes  dames  de  la  capi- 
tale. J'ai  répondu  ([u'il  faut  seul  employer  le 
premier  de  ces  termes,  le  second  n'étant  pas 
français. 


100 


Un  journal  annonce  que  "  le  chemin  de  fer 
intercolonial  vient  de  s'enrichir  de  trois  engins." 
Le  mot  anglais  oujlne  peut  certainement  se 
traduire  par  Pin/in  ;  mais  quand  il  s'agit  des 
chemins  de  fer  ofn  dit  locunujfive. 


52 


110 


Le  mot  patriotique  ne  s'applique  qu'aux 
choses  :  un  don,  une  vertu,  une  récompense 
patriotique.  On  doit  dire  un  homme,  une  femme 
'patriote.  L'écrivain  qui  a  dit  de  M.  Papineau  : 
"  le  plus  patriotique  de  nos  hommes  d'Etat,"  a 
péché  contre  la  langue. 


111 


On  a  l'habitude,  quand  on  cite  des  phrases 
latines  renfermant  des  mots  de  la  première 
déclinaison  k  l'ablatif  singulier,  de  mettre  un 
accent  circonflexe  sur  Va.  final.  Exemples  :  vice 
versa  :  Dei  gratiâ  :  ex  cathedra  :  in  memoriâ 
asternâ  ;  >:)onâ  tide  ;  in  forma  pauperis,  etc.  Littré 
dit  :  "  Cet  accent  est  inutile  ;  c'est  une  invention 
des  grammairiens  modernes  pour  distinguer 
l'ablatif  latin,  laquelle  ne  mérite  pas  d'être  con- 
servée." 


—  53 


11*2 


Vous  ne  pouvez  mettre  vliaqup.  à  la  fin  d'une 
phrase  ;  il  faut  cJuteun.  C'est  donc  une  faute 
de  dire  :  ces  livres  me  coûtent  un  dollar  chaque  ; 
on  doit  dire  :  un  dollar  chacun  ;  ces  pommes  se 
vendent  un  centin  chacune. 


llll 


"  Je  l'ai  par  If  belle  "  est  incorrect  :  la  véritable 
locution  est  je  l'ai  paré  ou  parée  belle. 


114 


Le  parlement  local,  la  chambre  locale,  le  gou- 
vernement  local,  la  léofislation  locale,  —  autant 
d'incorrections.  Remplacez  local  par  provincial 
dans  tous  ces  cas  et  les  cas  similaires. 


—  54  — 


115 


Bien  qu'à  la  i-ioueur  on  ])uisse  <lire  un  vieii;f 
cetera I),  —  car  il  y  a  des  vétérans  qui  sont  jeunes 
et  d'autres  vieux,  —  il  vaut  mieux  s'en  abstenir 
à  cause  du  pléonasme.  L'idée  (jui  s'attache  à 
vétéran  est  celle  de  vieilli  dans  les  luttes  :  or 
vieux  ajouté  à  vieilli  sonne  mal  à  l'esprit. 


116 

On  lit  tous  les  jours:  "Le  président  de  l'as- 
semblée infrodni'iif  M.  X.''  Il  faut  dire,  s'il 
s'agit  d'un  conférencier,  de  quelqu'un  (jui  doit 
prendre  part  à  la  réunion,  qu'il  a  été  présenté. 
On  introduit  (quelqu'un  dans  une  assend)iée 
(juan<l  <jn  lui  en  procure  l'entrée. 

Coml^ien  de  fois  n'entendons-nous  pas  dire 
dans  nos  meilleurs  salons  :  "  Venez  que  je  vous 
introduise  à  mademoiselle  X  "  ;  "  Il  me  l'a  intro- 
duit chez  M.  X."  Débarrassons-nous  sans  tarder 
de  cet  anolicisme  mal  sonnant. 


00 


117 


L'usage  a  voulu  que  les  noms  et  adjectifs 
terminés  en  <( nf  et  evt  perdissent  le  t  au  pluriel  : 
des  enfans  charmans,  des  parens  indigens  ;  on 
n'exceptait  que  les  monosyllabes  :  gants,  vents, 
dents,  lents.  L'Académie  conserve  le  f  à  tous  ces 
mots,  et  tous  les  écrivains  aujourd'hui  t'ont 
comme  elle  ;  je  ne  connais  guère  que  la  Ref'ue 
des  Deux-Monrles  ([ui  persiste  à  le  supprimer. 


118 


As.'if' rmerifrr  :  faire  prêter  sennent,  en  parlant 
des  personnes  auxquelles  on  confère  des  offices 
pul)lics.  Assermenter  un  fonctionnaire.  Ce  verbe 
Uh'  s'emploie  qu'en  parlant  des  personnes,  jamais 
des  choses.  C'est  donc  une  faute,  et  fort  com- 
mune, d'écrire  une  déposition  assermentée,  asser- 
menter un  témbignage,  une  plainte,  assermentée, 
etc.  Dites  .so/./s^  serment. 


—  o6 


119 


A  roccasion  d'un  récent  vol  de  bijoux,  plu- 
sieurs journaux  ont  dit  que  les  voleurs  avaient 
pénétré  dans  le  magasin  du  bijoutier  "  par  le 
rasisfas  placé  au-dessus  de  la  porte.  '  Ils  ont 
évidemment  confondu  le  vasistas  avec  Vimposte. 
Le  vasistas  est  ce  carreau  mobile  d'une  croisée 
ou  d'une  porte  que  l'on  ouvre  pour  voir  ce  qui 
se  passe,  pour  parler  à  quelqu'un  ou  pour  les 
besoins  de  la  ventilation.  L'imposte,  au  contraire, 
est  ce  carreau  vitré,  fixe,  qui  surmonte  la  partie 
mobile  de  la  porte  ou  de  la  croisée,  et  qui  a  pour 
objet  de  donner  plus  de  lumière  à  la  pièce. 


1*10 


Nous  avons  le  verbe  monopoliser,  et  le  subs- 
tantif ïiu)intp(>U'ar,  mais  non  mon()pol%*feur, 
encore  moins  inoiu^polisateor.  J'ai  cependant  lu 
c«'s  deux  derniers  mots  dans  notn^  presse. 


—  57 


191 

Nous  appelons  hu'thde  ctiorhun  riuiile  cjui 
éclaire  presque  toutes  nos  maisons.  Son  vrai 
nom  est  pétroh'.  On  ne  dit  plus  huile  de  pétrole 
en  France,  et  ce  qu'on  y  nomme  huile  de  char- 
bon de  terre  ou  de  houille  est  une  substance 
tout  autre  que  notre  huile  d'éclairaoe.  Disons 
donc  pétrole,  et  cond)attons  chez  le  peuple  la 
manie  de  dire  du  (uxd  oit,  (pi'il  prononce,  du 
reste,  fort  mal  :  mbdl. 


ia*a 

Qui  n'entend  dire  tous  les  jours  :  Je  collerfc 
mes  comptes  ?  Collecter  ne  signifie  qu'une 
chose  :  faire  une  collecte,  —  c'est-à-dire  quêter 
dans  un  but  de  bienfaisance.  On  ne  peut  donc 
collecter  un  compte.  Encore  moins  peut-on  dire  : 
X  est  venu  me  collecter.  C'est  un  double  angli- 
cisme. Il  faut  dire  :  X  fait  ses  recouvrements 
.  ou  fait  faire  ses  rentrées,  etc.  Ily  a  dix.  nxa;niè.res 
d'exprimer  correctement  cette  opération. 


5S 


1*^3 

Le  mot  iu\^]ins  (jallavti't/  HU^niUki  et  galanterie 
et  bravoure.  La  galanterie  est  "  tantôt  coquet- 
terie dans  l'esprit,  paroles  flatteuses,  tantôt  pré- 
sent de  petits  bijoux,  tantôt  intrigue  avec  une 
feiunie  ou  plusieurs  ;  "  cette  définition  est  de 
y  (j1  taire. 

Elle  suffit  pour  ftiire  voir  qu'un  homme  qui  .se 
jette  à  beau,  pour  sauver  un  autre  homme  fait 
plutôt  i)reuve  de  courage  que  de  galanterie,  et 
par  conséquent  qu'un  journa]  des  Trois-Rivières 
a  eu  tort  d'écrire  : 

"  M.  le  maire  présenta  la  montre,  portant  cette 
inscription  au  dedans  du  V)OÎtier  : 

"  Présenté  par  le  gouvernement  du  Canada  à 
M.  W.  H.  Kelly,  en  reconnaissance  de  l'humanité 
et  de  la  (/(thi  nferie  par  lui  déployées  en  sauvant 
la  vie,  etc. 

J'ai  relevé  ce  qui  suit  dans  une  adresse  pré- 
sentée  à   un  député  :  "  Si,  comme    d'habitude, 


—  59  — 

vous    êtes    anxieux   de    faire    conDaître    à   vos 
constif uaiits  ce  qui  est  arrivé  durant  la  dernière 
session  du  parlement,  etc." 
.Deux  fautes  en  une  phrase. 

Etre  anxieux,  c'est  avoir  dey  angoisses  d'es- 
prit :  un  député  peut  désirer  faire  connaître  les 
événements  à  ses  commettants,  mais  cela  ne  va 
jamais  jusqu'à  l'anxiété. 

Je  viens  d'écrire  corriiyœttant.^  c'est  le  mot 
français  qui  doit  remplacer  l'anglicisme  consti- 
fvanfs. 


''  C'est  moi  qui  gère  à  mes  affaires  "  ;  "  c'était 
lui  qui  gérait  à  cela."  C'est  un  affreux  barbarisme. 
On  ne  peut  gérer  à.  Il  faut  dire  :  C'est  moi  qui 
gère  mes  affaires  ;  c'était  lui  qui  voyait  à  cela, 
réglait  cela. 

120 


J'ai  lu  je  ne   sais  plus  dans  quel  journal  l'an- 
nonce   d'un    ferronnier    commençant   ainsi  :  A 


—  60  — 

V enseigne  du  r/ros  f arrière.  Il  aurait  fallu  de  la 
grosse  tfirière.  Tarière  est  féminin,  et  sa  pre- 
mière syllabe  s'écrit  sans  /•. 


Galerie  ne  doit  sécrire  qu'avec  une  l.  Quel 
est  cependant  le  journal  qui  ne  lui  en  met  pas 
deux  plus  souvent  que  de  raison  ?  C'est  encore 
l'anglais  qui  ^déteint  sur  nous.  Un  peu  de  sur- 
veillance, n'est-ce  pas  ? 

1^8 


Je  lis  :  Le  jux'é  a  condamné  le  défendeur  à 
.?15  de  doûimages.  Il  fallait  dire  le  jury.  Le  jury 
est  le  corps  des  citoyens  auxquels  une  affaire 
est  soumise  :  le  juré,  c'est  le  citoyen  qui  fait 
partie  de  ce  corps. 

A  l'imitation  des  xlnglais,  nous  disons  ici  le 
grand  jury,  le  petit  jury.  Je  ne  suis  pas  prêt  à 
dire  que  ce  soit  une  faute.  Je  dirai  seulement 
tju'en  France,  lorsqu'on  parle  de  l'institution 
anglaise  des  jurys,  on  appelle  le  grand  jury  le 
jury  d'accusation,   et  le   petit  jury  le  jury   de     i 


61 


jugement.  "  Le  premier,  dit  Littré,  décide  s'il  y 
a  lieu  d'admettre  une  accusation  (cette  institu- 
tion n'existe  pas  en  France)  ;  le  second  décide 
si  l'accusé  est  coupable  des  faits  (pli  lui  sont 
imputés." 


V29 

Si  l'Anglais  peut  dire  en  parlant  d'un  spec- 
tacle où  se  presse  beaucoup  de  monde  :  "  There 
is  a  good,  a  large  hou  fie,"  nous  ne  pouvons  pas, 
nous,  traduire  hov.se  par  inaison  et  dire  "  qu'il 
y  a  Tine  bonne,  une  belle  maison."  Cela  se  dit 
pourtant. 

De  même,  si  l'on  peut  dire  que  la  salle  est 
comble,  qu'il  y  a  salle  comble,  on  ne  saurajt  dire 
dans  le  même  sens  qu'il  y  a  une  l^elle  salle,  une 
salle  nombreuse. 

Il  faut  dire  un  bel  auditoire,  un  auditoire 
nombreux. 

130 

Je  viens  de  parler  de  salle. 


—  62  — 

Xous  avons,  sans  en  avoir  besoin,  emprunté 
aux  Anglais  leur  flinlnfi-roorû,  (|ue  nous  avons 
traduit  par  salle  à  din/'r. 

Or  on  ne  dit  pa.s  salle  à  dîner  en  France,  pavS 
plus  que  sallo  à  souper  ou  à  déjeuner.  On  dit 
tout  siiii])l('ment  soJJp  à  nianf/fr. 


131 


^)n  a  tort  d'appeler  un  ruisseau  un  criqv,*' 
En  fait  d'eau,  rriqve  ne  signifie  pas  autre  chose 
qu'une  petite  haie,  une  petite  anse  dans  les 
anfiaetuosités  du  riva<^e.  Ce  met  est  du  mj.nre 
féminin. 


132 

Pourquoi  disons-nous  colht  poui*  /(cnj:  roi  i 
Le  col  de  la  chemise  est  cette  partie  qui  entoure 
le  cou  et  ([ui  fait  partie  de  la  chemise  :  le  col  est 
encore  une  espèce  de  cravate  (pi  >  l'on  boucle 
derrière  le  cou  ;— le  faux  col  est  le  col  détaché 
(|Ue  l'on  ajoute  et  ajuste  à  la  clieiuise  au  moyen 


—  68  — 

Je  boutons.  —  Le  collet  est  la  partie  d'un  vête- 
ment qui  entoure  le  cou.  Faux  col  s'écrit  sans 
trait  d'union. 

Un  traducteur  pi-essé,  rencontrant  un  jour 
œater-powfr  et  n'ayant  pas  de  dictionnaire  sous 
la  main,   écrî\'it    pouvoir  d'eau   et  son  mot  fit 

fortune au   Canada.     Rempla(^*ons-le  par 

force  h ydro  ni Iq uc,  pu i.^f«i  iice  Ji  ijdyra  idujiic. 

Je  dois  ajouter  cependant  que,  dans  le  récit 
de  son  voyage  au  Canada  en  1885,  M.  de  Moli- 
nari  a  parlé  des  poiuxnrs  d'ecm  de  Saint- Jérôme. 
Mais  une  hirondelle  ne  fait  pas  le  printemps  1 


134 

Gardez-vous  bien  de  jamais  dire  ou  écrire  : 
payer  an  rovipliment  à  quelqu'un.  C'est  un 
abominable  anglicisme.  Dites  faire,  adresser  un 
compliment.  On  ne  paie  pas  non  plus  ses  res- 
pects à  quelqu'un  :  on  les  lui  présente. 


(i4 


i:i5 


Lu  dans  \in  journal  de  Quéljec  :  "  Le  Wifurss 
insiste  à  ce  que  le  français  soit  ensei<;né  dans 
les  écoles  anglaises.  '  Voilà  certes  une  bonne 
idée  chez  le  Wit  nesx  ;  ce  n'en  est  pourtant  pas 
une  moins  bonne  que  les  journaux  français 
enseignent  de  leur  côté  le  français.  Pour  prê- 
cher d'exemple,  le  confrère  (juébecquois  aurait 
dû  écrire  :  "  Le  l^y7v/^^^•^'  insiste  que  ou  pon r  que 
le  français  soit  enseigné,  etc." 

J.rv>rr/.s,sr/' est  un  verbe  neutre,  au  sens  péjo- 
]'atif.  Il  signifie  exercer  dans  la  médiocrité  et 
l'obscurité  la  profession  d'avocat.  Ce  n'est  pas 
ainsi  qu'en  l'emploie  au  Canada  :  on  s'en  sert 
toujours  en  parlant  des  honnnes  publics  qui  se 
sont  faits  les  avocats,  les  défenseurs,  les  apôtres, 
d'un  intérêt  majeur,  d'une  cause  nationale,  d'une 
grande  idée.  Avec  la  bonne  intention  de  leur 
rendre  hommage,  la  presse  les  rapetisse  par 
l'usage  d'un  mot  toujours  pris  en  mau\'aise  part. 

On  n'avocasse  pas  une  chose. 


Itit 

Je  dénonce  à  regret  l'une  de  nos  plus  char- 
mantes fautes  :  sdii/ni/cr  de  qiielqti' ii v.  Nous 
disons  :  '.'  Que  je  suis  aise  de  vous  revoir  !  je 
me  suis  tant  ennuyé  devons!"  C'est  tout  un 
compliment.  Eh  bien,  il  faut  y  renoncer.  On 
peut  ennuyer  quelqu'un,  (^n  peut  en  retour  s'en- 
nuyer en  sa  compagnie  ;  on  peut  s'ennuyer  de 
tout,  c'est-à-dire  être  ennuyé  par  toutes  sortes 
de  choses  ;  —  mais  on  ne  peut  s'ennuyer  d'une 
personne  absente,  c'est  -  à  -  dire  regretter  son 
absence,  se  sentir  l'âme  vide,  dégoûtée,  loin 
d'elle. 

Cela  se  dit  en  Bretagne  comme  au  Canada, 
mais  n'est  pas  reyu  dans  la  langue  officielle. 

Les  journaux  parlent  à  tout  l)out  de  champ 
des  argents -pubUcs.    On  ne   peut  dire  cela  cor- 
rectement.   Il  faut   employer  Hommies,  deaiers^ 
crédits,  ou  tout  autre  mot  indiquant  la  nature 
3 


Ofi 


<le  la  propriété  :  les  expressions  ne  manquent 
})Hs.  La  plus  mauvaise  vaudra  niieux  encore  que 
l^^s  argents. 

139 


On  a  le  tort  assez  général  de  faire  ôftr^'  du 
masculin  :  on  doit  pourtant  dire  et  écrire  :  on 
m'a  îa'it.  une  hdle  offre,  iim'  offre  avantageuse. 


140 

On  peut  dire  :  '"'  force  est  demeurée  à  la  loi," 
(juand  la  légalité  l'a  emporté  sur  le  désordre  ; 
*■  un  long  usage  donne  force  de  loi  ;  "  '"  cette  cou- 
tume a  foi'ce  de  loi." 

Mais  on  ne    saurait    dire    qu'iuie    loi  ou  un 

règlement  est  en  force.  ;  il  faut  dire  en  v'njueur. 

Députés,  avocats,  journalistes,  amendez-vous  ! 

141 

Ne  pas  confondre  résidence  avec  demeure  ou 
domicile.     Votre   résidence  est  à  ^I(nitréal  ou  à 


Saint-Lambert,  —  c'est-à-dire  que  vous  résidez 
dans  l'une  ou  l'autre  de  ces  villes  ;  mais  votre 
demeure  ou  domicile  est  dans  telle  rue,  à  tel 
numéro.  Le  mot  domicile  signifie  en  outre  le 
lieu  où  l'on  est  censé  être  pour  l'exercice  de  ses 
droits  ou  de  ses  fonctions. 

Ou  demeure  à  tel  endroit,  on  n'y  rede  pas. 


14^ 

"  Reliecca  N.  a  été  traduite  pour  la  dixième 
fois  au  recoT(l('r!'  On  lit  cela  dans  la  première 
gazette  venue.  Il  fallait  écrire  :  à  la  cotir  ou 
devant  la  cour  du  recorder,  ou  devant  le  recorder. 

En  d'autres  termes,  on  peut  être  traduit  à  ou 
devant  un  corps  public  :  cour,  [)arlemcnt,  concile, 
assemblée,  etc.  S'il  s'agit  d'un  homme,  on  est 
traduit  devant  lui  ! 


143 

"  Cette  çjevte  de  persécuicurs  fanatiques,  etc." 
(Tous  U^.s  journaux).  Gente  n'est  françai'3  que 
couuui-  féiuiiiiii  (\i-  l'adjectif  gent,  qui  veut  dire 


—  68  — 

gentil.  Comme  substantif  et  prair  signifier  race, 
espèce,  c'est  (jent  qu'il  faut  emplo^'er  :  la  gent 
lu^pocrite,  la  gent  moutonnière. 


144 


Qui  n'a  entendu  ceci  :  ''  Des  souliers  de  cuir 
à  patente,  "  "  des  bottines  de  cuir  patent  "  i 
Cette  grosse  faute  vient  de  ce  (pie  le  vernissage 
du  cuir  a  été  breveté,  patenté.  Mais  il  faut  dire 
"  cuir  verni.  " 


14o 


A'ous  entrez  dans  une  l>u\'ette  et  vous  vous 
fendez  la  bouche  à  demander  de  Vrf  n  p-f/oss-ton- 
ré,  ce  tonique  amer  si  bon  dans  le  whisky.  De- 
mandez-le en  français,  vous  n'aurez  (pi  à  dire 
«le  VaiKjii.sf itrc 

Egalement,  demandez  de  la  tanaisie,  et  non 
pas  du  tan-^!j. 


—  69  — 


146 


Une  récompense  honnête  est  offerte  à  celui 
qui  n'a  jamais  dit  un  quart  de  fleur  pour  un 
quart  de  farine,  ou  de  fleur  de  farine.  Il  est 
mieux  de  dire  un  baril  qu'un  quart.  Fleur  tout 
seul  pour  farine  est  une  faute.  Fleur  de  farine 
désigne  de  la  farine  de  qualité  supérieure. 


147 


"  L'attractiov  de  la  semaine  est  l'Albàni." 
(Tous  les  journaux). 

Anglicisme  imprudent,  qui  se  faufile  jusqu'en 
France.  Seulement,  les  Français  ont  la  pudeur 
de  le  souligner. 

Il  faut  dire  attrait. 

148 

Apnlojjip  signifie  défense,  justification,  mais 
jamais  excuse.    On  doit  donc  éviter  de  dire  :  je 


—  70  — 

vous  fais  apologie  ;  il  me  doit  des  apologies. 
En  anglais,  opology  s'emploie  dans  le  sens  d'ex- 
cuse, lequel  mot  est  sou  seul  équivalent  en 
français. 


149 

Supporter  un  ministère,  un  homme,  un  projet 
une  loi,  n'est  pas  français  dans  le  sens  de  V ap- 
puyer. Disons  appuyer,  soutenir,  aider,  suivant 
le  cas.  Il  y  a  déjà  assez  d'autres  choses  à  sup- 
porter. Ainsi  l'orateur  qui  dernièrement  disait  : 
"  La  responsabilité  d'une  "  loi  anticatholique 
retombe  sur  tous  ceux  qui  sv/pportent  cette  loi 
et  la  font  triompher  par  leur  vote,"  n'a  pas  rendu 
sa  pensée,  parce  qu'il  n'a  pas  parlé  français. 

150 

■'  Vingt  et  un  candidats  seront  ballotés  à  cette 
assemblée."  (Lu  dans  un  journal).  Il  y  a  là  une 
double  faute  :  1-'  ballotter  s'écrit  avec  deux  f  ; 
2"  le  ballottage  ne  se  fait  ([u'eutre  deux  camli- 
dats.  "  Bali.ot'I'aok.  Action  de  ballotter  (lf'ii.r 
candidatti.  Ballotteii.  Ballotter  deux  candidats, 


IL    

fîécicler  par  le  scrutin  lequel  l'emportera  de  deux 
candidats  qui  ont  le  plus  approché  de  la  majo- 
rité, tous  les  autres  étant  exclus." 

Dans  le  cas  dont  parle  le  journal,  il  fallait 
écrire  :  On  votera  sur  la  proposition  d'admettre  ; 
on  proposera  la  réception  de  ;  ou  encore  :  vingt 
et  un  candidats  subiront  l'épreuve  du  scrutin, 
etc.,  etc. 

loi 

S'endonnir  est  un  mot  très  français,  mais 
dans  le  sens  seul  de  passer  de  la  veille  au  som- 
meil, de  tomber  dans  le  sommeil.  On  ne  doit 
jamais  l'employer  pour  signifier  que  Ton  a  besoin 
de  dormir,  auquel  cas  il  faut  dire  fai  sommeilj 
comme  on  dît  f(( i  fa i m  on  j'ai  soif. 

1.V2 

Xous  employons  hîoe  k  tort  en  parlant  de 
maisons  :  un  bloc  de  maisons,  un  beau  bloc.  Il 
faut  dire  un  pâté,  un  beau  pâté  de  maisons.  S'il 
s'agit  d'une  seule  et  vaste  maison,  on  dit  édifice. 

Nous  nous   servons  aussi   du  mot  bloc  pour 


désigner  rcspace  conipris  L'iitre  deux  rues  par- 
rellèles  :  "  Vous  chercliez  la  (Iciiieiiri'  de,  }>\.  Z  : 
passez  encore  deux  blocs,  vous  y  serez."  C'est 
une  faute.  Il  faut  dire  :  "  Passez  encore  deux 
rues." 

Bloc  n'est  pas  du  tout  français  dans  le  sens 
d'agglomération  de  maisons  à  plusieurs  loge- 
ments, ni  de  distance  entre  les  rues. 

On  a  l'habitude  d'appeler  rondncten r  (Je  la 
m  aile  ou  fh  niallc  le  préposé  de  l'administration 
des  postes  qui  est  chargé  d'accompagner  les 
lettres  dans  les  convois  de  chemin  de  fer:  on 
devrait  le  nommer  courrier  de  la  nudlc. 

154 

Coudre,  verbe  actif  (très  actif  même)  :  Je 
couds,  je  cousais,  je  cousis,  je  coudrai,  couds, 
cousu.  On  ne  doit  pas  dire,  au  futur  et  au  con- 
ditionnel, je  cotiserai,  il  couserait,  mais  bien  y f 
coudrai,  il  coudraii.  Il  y  a  des  journaux  de 
ma  connaissance  qui  s'\'  sont  mépris. 


—  73  — 
1  «lo 

Beaucoup  de  personnes  instruites,  plusieurs 
journalistes  même,  écrivent  des  chef-fVœ livres, 
lorsqu'il  faut  absolument  des  rhefs'(T(eavre.  Que 
l'on  remarque  où  l'.s  doit  être  placée. 

lo6 

— Clear  tlie  road,  dit  l'Anglais. 

— Claiirz  le  cliemin,  dit  le  Canadien. 

— The  prisoner  was  clear,  dit  l'Anglais, 

— Le  prisonnier  a  été  claire,  dit  le  Canadien. 

Le  Canadien  traduit  trop  littéralement,  et  fait 
des  néologismes  impardonnables.  Cldirer  existe 
en  termes  de  fonderie,  mais  je  ne  l'en  considère 
j)as  moins  ici  comme  un  néologisme,  compliqué 
d'un  anglicisme  ! 

Il  faut  dire  dans  le  premier  exeiuple  :  Rangez- 
vous,  laissez  le  chemin  libre.  Dans  le  second, 
on  dira  que  le  prisonnier  a  été  acquitté,  libéré. 

Lin  journal  annonce  que  N.,  accusé  de  telle 
offense,  s'en  est  cldi  ré  avec  .S2  d'amende.  S'en 
est  fi l'é  est  la  bcmnc  expression. 


—  74 


157 


Dire  :  une  calomnie  fausse,  c'est  faire  un  plé- 
onasme ;  toutes  les  calomnies  sont  des  asser- 
tions fausses  de  choses  dommageables  à  quel- 
qu'un. La  calomnie  est  un  mensonge  ;  or  vous 
ne  sauriez  dire  "  un  mensonge  faux,  "  n'est-ce 
pas  ? 

loK 

Si  le  verbe  inclure  a  p(jur  participe  passé 
iacliis,  incluse,  il  ne  faut  pas  oublier  que  le 
verbe  exclure  fait  au  même  temps  e.œlii,  exclue. 
Pourquoi  n'écrit-on  plus  ('xdus,  excluse  /  Je 
n'en  sais  rien,  je  sais  seulement  que  cette  der- 
nière forme  n'est  plus  admise. 

159 


Théophile  Gautier  est  assez  connu  de  (piicon- 
que  s'occupe  de  littérature  et  de  peinture  pour 
f|Ue  nos  écrivains  n'aient  ]»as  le  droit  d'épeler 
son  nom  Gauthier. 


Il  y  a  une  locution  prf)vurl)ialt'  qui  dit  :  X<* 
pas  confondre  Gautier  avec  Gargouille. 

lOO 

Que  d'orateurs  populaires  disent  volontiers 
que  leurs  pères  tenaient  les  manchons  de  la 
charrue  !  Que  de  candidats  se  vantent  de  les 
tenir  eux-mêmes  !  Certes,  ce  sentiment  les  ho- 
nore, mais  il  neM  serait  pas  moins  beau  s'ils 
disaient,  en  français,  le  ma ach.e  ou  les  manche- 
rons de  la  charrue. 

161 


L'orthographe  des  noms  de  géographie  laisse 
beaucoup  à  désirer.  C'est  surtout  dans  leurs 
colonnes  de  dépêches  télégraphiques  que  les  jour- 
naux les  estropient.  Souvent  on  ne  traduit  pas 
le  mot  et  l'on  écrit  Antwerp  pour  Anvers, 
Athens  pour  Athènes,  Leghorn  pour  Livourne, 
Cairo  pour  le  Caire,  Hague  pour  LaHaye,  Al- 
giers  pour  Alger,  Tangier  pour  Tanger,  Mecca 
pour   la  Mecque.     Jusqu'à    Lyon  et    Marseille, 


—  70  — 

aux(iuellt's  <»ii  a  1(-  tort  de  conserver  Vs  finale  de 
la  forme  ani^laise. 

N'écrivons-  plus  Brézil,  maïs  Brésil. 

Un  journal  sérieux  de  Quéliec  parlait  der- 
nièreiiu^nt  du  traité  de  Ghent,  conclu  le  18  juin 
1(S22,  qui  avait  réglé  la  (question  des  frontières 
entre  les  Etats-Unis  et  le  Canada  :  il  s'agissait 
du  traité  de  (Jand.  —  et  (iand  se  dit  (client  en 
anglais  1 

Musset,  dans  Bol  la.  a  fait  rimer  Hik-vuI  avec 
cercueil,  lien  avait  le  droit  (Littré,  Vo  Linceul), 
puisque  l'on  prononce  indifféremment  linceul  ou 
lineeuil  :  mais  il  a  respecté  l'orthographe,  ce 
que  ne  font  pas  ceux  ([ui  écrivent  lineeuil. 

]  o:i 

"  Le  bon  usage,  «lit  Littré,  repousse  des 
phrases  comme  celles-ci  :  Il  est  venu  avec  sa 
dame  ;  ces  messieurs  et  leurs  dames.  Il  faut  :  il 
est  venu  avec  sa  femme  ;  ces  messieurs  et  leurs 
femmes. 


^7   — 


"  Dans  le  langage  eouiiaun,  on  dit  votre  (hnno)- 
>t('Uf'  pour  votre  iille  :  Coninient  va  votre  demoi- 
selle '(  mais  cela  n'est  pas  du  l)on  usage  :  avec  le 
mot  (h'ino'isclh',  comme  avec  les  mots  (hrme  et 
sieur,  il  n'est  pas  de  bon  ton  d'employer  les 
adjectifs  possessifs  de  la  2e  et  de  la  oe  personne. 
On  demande  :  Conunent  se  porte  mademoiselle  ? 
et  non  p;is  voivc  demoiselle,  ou  sa  demoiselle. 
De  même  on  dit  comment  se  porte  madame,  et 
non  votre  dame."  ^[ais  toujours  en  ajoutant  le 
nom  propre. 

164 


Noinhrer  est  fran(;ais,  mais  c'est  un  verbe 
actif  ([ui  signifie  trouver  le  nombre  de,  compter, 
relater,  énumércr.  On  nond^re  les  cotés  d'un 
carré,  on  n()]id)re  ses  propriétés,  on  nombre  les 
faveurs  (pi'on  a  reçues,  on  nombre  les  gens,  etc. 
Mais  on  ne  saurait  dire,  comme  un  journal  de 
Montréal  :  '•  Les  Acadiens  des  provinces  mari- 
times (jui  II <> III Jf l'eut  .108,().55  âmes,  etc."  Ici  l'on 
a  fait  de  nomlirci"  un  v('r])e  neutre,  ce  (pie  ne 
permet  pas  le  dictioriuaire.  On  a  servilement 
traduit  irjin  u/nmber,  (piand  il  fallait  dire  :  (jui 
sont  au  nombre  de. 


VS  — 


165 


Darru'  est  un  tenue  d'architecture  hydrau- 
lique dout  ki  sens  se  rapproche  assez  de  cehii  de 
ditjue,  chaussée,  h: tn-a(/€  (iii'tjirlel.  Cependant 
hx  différence  est  assez  gran(h'  pour  (jue  ntjus 
nous  servions  uniquement  de  ces  derniers  ternies 
quand  il  s'agit  de  cc>urs  d'eau.  On  ne  saurait 
dire,  comme  certain  journal,  que  '"  M.  X,  <le  Ren- 
frew,  a  l'intention  de  construire  une  nouvelle 
danunc  sur  la  Bonnechère." 


160 

Ammiinition  est  un  mot  anglais.  Nos  chas- 
seurs disent  :  Je  n'avais  pas  emporté  assez  dam- 
munition  ;  ïnes  ammunitions  étaient  humides. 
Nous  avons  le  mot  raïf  nitions,  servons-nous  en. 

167 


Il   est  bon  de  faire   sa\oir  à  certain  journal 
qu'il  ne  saurait  écrire  Y(;i    nouvel  échaïqx/.toire, 


—  79  — 

ce  mot  étant  féminin.  Lui  qui  a  l'habitude  des 
phrases  Jong-ucs  comme  le  bras,  pour((uoi  recu- 
lerait-il devant  l'addition  correcte  d'une  syllabe  ? 

168 

Faute  des  plus  commune  :  rénvumérfr  ai  réna- 
raération  (qui  ne  sont  pas  français,)  au  lieu  de 
réinvnérer  et  réiriuneWitioyi,  Ce  ne  sont  pas 
toujours  les  tj^pographes  qui  s'en  rendent  cou- 
pables. 

Faites  bien  la  distinction  entre  veniranix  et 
vénéa<ni.T.  Le  premier  de  ces  termes  s'applique 
aux  animaux  qui  ont  du  venin  ou  aux  choses 
infectées  de  leur  venin  :  un  serpent  venimeux, 
une  langue  venimeuse.  Le  second  s'applique 
aux  choses  qui  empoisonnent  par  ingestion  :  une 
racine  vénéneuse,  un  suc  vénéneux, 

170 

"M.  X .  .  . ,  avocat,  de  (:Juébec,  est  en  cette 
ville,   en  rapport  avec  des  affaires  profession- 


—  ISO  — 

nelles.'  Le  journal  parle  ninsi,  mais  ne  parlez 
pas  connue  lui  :  dites  [lonr  fiffaires  profession- 
nelles. 

En  rapport  avec  signifie  en  pr()[)oi-tion  a\c'e  : 
sa  dépense  n'est  pas  en  rapport  avec  sa  fortune. 
Cette  locution  ne  doit  jamais  remplacer  relative- 
ment à,  pour,  conceinant,  par  suite  de,  à  la  suite 
de,  au  sujet  de.  M.  Buies  a  deux  bonnes  pages 
sur  cet  impropre  emploi  :  j'en  consedle  la  lecture 


171 


Les  noms  de  peuples,  employés  comme  sub- 
stantifs, prennent  une  première  lettre  majuscule  : 
les  Français,  les  Tartares.  S'ils  sont  employés 
comme  adjectifs,  la  première  lettre  est  toujours 
minuscule  :  les  intérêts  français  dans  le  Tonkin, 
la  question  grecque. 

L'oA-oadiqac  est  cette  partie  de  la  physique 
qui  traite  des  lois  suivant  lesrpielles  le  son  se 
produit  et   se   transmet,     Les  dictionnaires  ne 


—  81  — 

donnent  au  mot  (^ue  ce  sens.  Nous  aurions  donc 
tort  de  dire  l'acoustique  d'une  salle,  l'acoustique 
est  bonne.  Il  est  probable  cependant  qu'on 
emploiera  un  jour  ces  expressions  en  France 
c<)mnie  ici.  Déjà,  M.  Mermeix  a  dit,  dans  la 
Frtf/nee  du  18  novembre  1884,  que  l'acoustique 
du  Grand  Opéra  est  mauvaise. 

173 


8e  garder  d'éci"ire  hofeUicr  (avec  deux  l), 
connue  le  font  la  plupart  des  avocats  dans  leurs 
pièces  de  procédure  relatives  à  ces  citoyens  hos- 
pitaliers.    Il  faut  hôtelier. 

174 


Les  marchands  doivent  éviter  cet  anglicisme  : 
je  suis  dans  la  ligne  des  nouveautés  ;  telle  ligne 
de  connu erce,  d'affaires.  Qu'ils  remplacent  ligne 
par  branche,  ou  par  partie,  que  l'on  dit  quelque- 
fois en  France.  Les  journaux  se  font  leurs  com- 
plices en  publiant  des  annonces  qui  fourmillent 
de  fautes. 


82 


175 


Dire  de  quelqu'un  qu'il  est  un  liomme  ronsé- 
qaeid,  lorsqu'on  veut  dire  qu'il  est  important 
est  une  faute, — comme  c'est  une  faute  de  parkr 
d'une  somme  fo aséqivente  pour  une  somme  con- 
si<iérable.  En  ofarde  contre  ce  barbarisme  ! 


irn 

Ou  doit  dire  divovcpr  avec  le  bon  sens,  l'es- 
prit, sa  femme,  son  mari,  etc,  et  non  pas  divorcer 
davf'r.  On  dira  aussi  fcii rr  divorce  avec  1« 
monde. 

177 

Dd  raDhiifc  doit  s'écrire  sans  apostrophe  après 
le  d.  mais  (Vdvn  ik-p  en  prend  une.  L'on  confond 
quelquefois. 


83  — 


178 


Tran.nf/('r  signifie  "uniquement  aceomnioder 
un  différend  par  des  concessions  réciproques. 
On  a  donc  tort  d'employer  ce  mot  dans  le  sens 
de  faire  des  opérations  de  loi,  de  commerce,  ou 
il  n'y  a  ni  différend,  ni  concessions.  Quand  un 
de  nos  avocats  annonce  qu'il  est  prêt  à  tran- 
siger des  affaires,  il  entend  simplement  dire 
qu'il  s'occupera  d'affaires  de  son  ressort  ;  quand 
un  de  nos  marchands  mentionne  le  chiffre  des 
affaires  qu'il  transige,  il  veut  bonnement  parler 
chi  chiffre  des  affaires  qu'il  fait.  Aucun  d'eux 
n'a  dans  l'esprit  les  affaires  où  l'on  arrange  un 
différend  par  des  concessions  mutuelles  :  ils  font 
donc  usage  d'un  mot  inq)ropi"e. 

iro 

Différence  entre  servieMe  et  essuie-iiviins  :  la 
première  se  dit  également  du  linge  qui  sert  à  la 
talile  et  de  celui  (pli  sert  à  la  toilette  ;  le  second 
se  dit  seulement  du  linge  qui  sert  à  la  toilette. 


_  <S4  — 


180 


Tous  les  étés  les  journaux  parlent  de  Wispprf 
de  la  moisson.  Cela  est  certainement  français, 
mais  dans  un  sens  qui  n'est  pas  celui  où  ils 
l'emploient.  Ils  veulent  parler  de  l'abondance 
plus  ou  moins  grande  de  la  moisson,  de  ce  qu'elle 
laisse  espérer  :  alors  ils  devraient  dire  les  n jh^ki- 
rencfls,  les  y>/'(>//7^.s-.srr^.S'  de  la  moisson. 


181 


"  Le  parlement  est  convoqué  pour  la  déppA-hf 
des  affaires.  "  Pas  français.  "  Pour  ICrpéi^thm 
des  affaires  :  "'  français,  mais  dans  le  sens  ironique 
seulement,  (piand  on  re]n'oche  aux  chambres 
d'aller  trop  vite  en  besogne.  Il  faudrait  em- 
ployer discussion,  étude,,  examen,  prise  en  con- 
.sidération,  direction,  décision,  etc. 


—  85 


18*3 


Dans  le  sens  où  observer  signifie  faire  une 
remarque',  il  n'est  pas  permis  de  dire  :  je  vous 
observe  <pie  ;  il  faut  dire  :  je  vous  fais  observer 
que. 

C'est  un  l)arl)arisme  de  dire  :  je  vous  romaT- 
querai  que ....  Il  faut  :  je  vous  ferai  remar(:(uer 
(pie .... 

18» 

Dans  une  réclame  en  faveur  du  concert  Sara- 
sate-d' Albert,  les  journaux  mettaient  ces  paroles 
dans  la  bouche  de  Von  Bulow  :  "  Il  n'y  a  que 
trois  grands  pianistes  au  monde  :  Rubinstein, 
moi  et  d'Albert  ;  mais  celui-ci  est  encore  jeune 
et  promet  de  nous  outrep(ts.ser  tous." 

Dépasser,  non  ;  outrepasser,  jamais  !  passer  ou 
surpasser,  oui  ! 

Au  reste,  il  faudrait  écrire  oati'e-pas;i<>er  avec 
un  trait  d'union. 


sr.  — 


184 


^lunsieiir  veut  se  chausser  ;  il  deinande  au 
cloinestiiiue  la  railler  jurur  le!<  sovlier.'^.  Monsieur 
devrait  demander  la  corne  ou  le  chausse -pied. 

I)e  même  qu'une  conférence  ou  un  article  de 
journal  sur  le  parlement  ne  saurait  être  une 
conférence,  un  article  parlementaire,  de  même 
la  corre8p(mdance  envoyée  du  siège  du  parle- 
ment aux  gazettes  pendant  la  session  ne  saurait 
être  une  corrf'spctïir/anrf^  piirlementaire. 

Dites  courrier  du  'parlement  ou  lettre  du. 
parlement. 

180 


Bébé  veut  nianger  un  œuf  à  la  coque  et  vous 
demande  un  cocotier.  Donnez-lui  ce  quil  désire, 
mais  reprenez-le  et  lui  faites  promettre  de  dire 
coquetier  à  l'avenir. 


87 


187 

"  M.  Stanislas  L .  .  . .  a  reçu  samedi  soir  de  ses 
amis,  en  cadeau,  une  chaîne  en  or  <ivec  loqtœt,  à 
l'occasion  de  l'anniversaire  de  sa  naissance." 
(Coiirrier  de  X.) 

Je  n'étais  pas  à  la  fête,  mais  je  jurerais  qu'on 
n'a  pas  donné  un  loquet,  mais  un  -niédriilloii.,  à 
M.  L .  .  .  .  Un  loquet  sert  à  fermer  une  porte,  et 
ne  se  pend  jamais  à  une  chaîne  de  montre  ni  à 
un  collier.  Un  médaillon  est  un  bijou  de  forme 
ronde  ou  ovale,  dans  lequel  on  enferme  un  por- 
trait, des  cheveux,  etc.  Un  médaillon  se  dit 
locket  en  anglais  :  de  là  le  barbarisme-anglicisme 
qui  m'occupe. 

188 

On  emploie  généralement  ici  le  verbe  acter  au 
neutre,  et  l'on  dit  plus  souvent  :  un  tel  acte  bien 
(pour  joue  bien  sur  la  scène)  que  :  un  tel  acte 
bien  son  rôle  (pour  tient  bien  son  rôle)  ;  cepen- 
dant on  se  sert  des  deux  manières.  Aucune 
n'est  bonne  :  acter  n'est  pas  français. 


88 


189 


"  Le  fd'if  d'être  allé  vous  promener  avec  lui  ne 
vous  coiiiprouiettra  pas  ;  "  cette  phrase  est  fran- 
çaise. Elle  ne  le  serait  pas  si  l'on  disait  :  "  Le 
piit  qiK'  vous  êtes  allé  vous  promener  avec  lui, 
etc."  (,)n  doit  donc  dire  le  fait  (h  et  non  le  fait 
q  ae. 

On  peut  cependant  dire,  mais  dans  un  autre 
sens,  "  le  fait  est  que." 


190 


Vous  ciicdissi'Z  un  billet,  une  traite,  un  chèque, 
une  lettre  de  change,  un  mandat,  ou  tout  autre 
eUet  négociable,  lorsque  vous  en  touchez  la 
vadeur  :  "  je  cours  à  la  T>an(|ue  encaisser  votre 
dernier  chèque."  Substitiions  ce  verbe  à  chaii- 
</er,  à  éclid iKier,  surtout  à  cet  anglo-barbarisme 
que  j'enten<ls  parfois  :  cttsln'i-  (t<)  caslij. 


89 


191 

Ignorance,  <'U  trop  grande  ressenihlance  des 
mots,  les  journalistes,  les  notaires  et  les  a\ocats 
confondent  souvent  hahilcté  avec  hahillfé. 

L'habileté,  c'est  la  (jualité  de  celui  qui  est 
habile,  entendu,  perspicace,  capable  d'appliquer 
ce  qu'il  sait. 

L'hal)ilité,  c'est  la  (jualité  de  celui  qui  est 
propre,  apte  à  une  chose  :  c'est  l'aptitude  légale 
surtout  :  habilité  à  succéder. 


19*2 


Je  n'accuserai  pas  les  journalistes  d'ignorer 
que  p^'''•s"  fot  est  un  adverbe  de  temps  et  s'écrit 
en  deux  mots  :  il  arrivera  plus  tôt  que  les  autres  : 
et  que  jylutot  est  un  autre  adverbe  qui  indique 
la  préférence  :  plutôt  mourir  que  trahii*.  On 
me  dira  :  mais  c'est  en  toutes  lettres  dans  la 
grammaire  !  Hé  oui,  mais  on  oublie  cette  règle 
si   souvent  que  je  la  rappelle  aux  journalistes 


90 


S'ils  ne  confondent  pas  les  deux  adv^erbes,  je 
leur  reproche  de  laisser  là-dessus  carte  l)lanche 
à  beaucoup  troj^  de  correspondants 


10» 

Celui  qui  fait  mouvoir  et  dirige  les  machines 
à  Aapeur  dans  les  locomotives,  dans  les  usines, 
dans  les  bateaux,  est  un  rnécn  niripn,  non  un 
ingénieur.  Il  peut  se  faire  qu'un  mécanicien 
soit  ingénieur,  comme  il  se  pourrait  qu'il  fût 
avocat,  mais  le  mot  qui  désigne  ses  fonctions 
est  iiiécaiiicieu. 


194 

L'Encyclopédie  étal)lit  ainsi  la  différence,  trop 
inconnue  parmi  nous,  qui  existe  entre  gages, 
appointements  et  honoraires  : 

"  Appointe  nie  nf  s  se  dit  pour  tout  ce  qui  est 
place,  ou  qu'on  regarde  comme  tel.  Honoraires 
a  lieu  pour  les  maîtres  qui  enseignent  quelque 
science,  et  pour  ceux  à  qui  on  a  recours  dans 
l'occasion  à  l'effet  d'obtenir  un  conseil  salutaire, 


>-  91  — 

ou  quelque  autre  service  que  leur  doctrine  ou 
leur  fonction  met  à  portée  de  rendre.  Gages  est 
d'usage  à  l'égard  des  domestiques  de  particuliers 
ou  des  gens  qui  se  louent  pendant  quelque 
temps  au  service  d'autres  personnes." 

Littré  ajoute  à  cette  citation  : 

"  Trc/itemenJ  peut  être  ajouté  à  ces  trois 
mots  ;  ...  il  est  synonyme  d'appointements  et 
diffère  par  conséquent  de  gages  et  d'honoraires. 
I]  y  a  en  outre  une  différence  qui  n'est  pas  notée, 
c'est  que  les  appointements,  le  traitement,  les 
gages  sont  quelque  chose  de  fixe,  tandis  que  les 
honoraires  s'entendent  mieux  de  ce  qui  est  occa- 
sionnel :  un  prêtre  assistant  à  un  service,  un 
médecin,  un  avocat  ont  des  honoraires  ;  le  prêtre 
qui  dessert  une  église,  le  médecin  qui  est  attaché 
à  un  hôpital  ont  un  traitement." 

19o 


Voici  une  faute  des  plus  fréquente.  On 
entend  dire  tous  les  jours  :  "  J'ai  vu  telle  chose 
dans  le  vitra  a.  de  tel  marcliaiid;'  Il  faulraît 
au  moins  le  .^iivjrd'cr  vitrail  et  non  \v  jtlniicl 
vitraux  :  mais   vitrail  et   vitraux   ne   désignent 


—  92  — 

que  les  vitrages  formés  de  panneaux  de  verre 
assemblés  par  compartiments,  comme  ceux  des 
églises.  Le  seul  mot  à  employer  est  vitrine:  la 
vitrine  d'une  boutique,  d'un  magasin,  d'un  cabi- 
net, d'un  musée. 


196 


Balzac  parle  des  •■  fortifications  de  consonnes 
par  lesquelles  la  langue  slave  protège  ses 
voyelles.''  La  langue  française  ne  redouble  ordi- 
nairement ses  consoîuies  que  forcée  par  la 
logique  ou  le  son.  Elle  écrit  frafic  et  non  pas 
tratjfie,  comme  le  font  plusieurs  personnes  parmi 
nous,  à  l'imitation  des  Anglais. 


197 

Ce  (jue  j'ai  dit  S(jus  le  numéro  précédent  s'ap- 
plique au  redoublement  de  la  consonne  d  dans 
les  mots  <i(li-('ss<',  tftlrrs.srr.  Ecrire  (((/</ resseï'  est 
une  faute  d'orthographe  :  mais  une  faute  bien 
plus  grave,  c'est  cet  anglicisme  si  fré(|uent  parmi 
nous  :  <(iLrsfn;i'  nue  ^/.s>v'///6/6'V,  quand  on  devrait 


—  93  ~ 

dire  haranguer,  faire  un  discours,  porter  la 
parole,  adresser  la  parole,  s'adresser  à  une  assem- 
blée, etc. 


198 


On  se  débarrassera  difficilement,  je  le  sais,  du 
mot  qualification  dans  le  sens  de  capacité,  apti- 
tudes, mais  on  pourrait  commencer  par  ne  plus 
dire  un  examen  de  qualiti cation,  quand  il  s'agit 
de  y  examen  (F  aptitudes  que  subissent  les  aspi- 
rants au  service  civil.  Ce  serait  un  premier  pas 
dans  la  bonne  voie. 


199 

PrafÂquer  sa  profession  n'est  peut-être  pas 
une  expression  impropre,  mais  voici  ce  qu'en  dit 
Littré  : 

"  PRATIQUER,  V.  n.  2  Exercer,  en  parlant 
«l'une  profession  ;  //  ne  se  (lit  f/nère  qu'en  par- 
la ut  (le  1(1  inéderine  et  de  Vart  rétéri naire. 
A})Solument.  Ce  médecin  praticpie  depuis  vingt 
ans." 


—  94  — 

Les  autres  hommes  de  profession  exercent. 

"PRATIQUE,  s.  f.  15^'  Toute  la  clientèle  de 
l'étude  d'un  avoué,  d'un  notaire.  Ce  notaire,  cet 
avoué  vendra  bien  sa  pratique,  quand  il  se  reti- 
rera des  affaires.  On  dit  aujourd'hui  clientph/' 


dOO 


Tous  les  jours  les  -àyocfitsjyroflaisenf  des  docu- 
ments en  cour  ou  les  dépose  nt  au  greffe,  ou  encore 
pétitionnent  le  tribunal.  Ils  sont  dans  leur  rôle, 
mais  ils  sortent  de  leur  rôle  de  Français  tenus  à 
l'exemple,  eux  les  instruits,  quand,  parlant  de 
leurs  exploits,  ils  disent  qu'ils  ont  plé  wwq  appl t.- 
cafwn,  pu  une  motion,  un  exhilât,  etc. 


301 


Avocats  et  notaires  font  tous  la  faute  d'écrire 
réffistfy'K.  rnre^/isfrcr.  on ré'j'istrcincid.  Ces  mots 
ne  prennent  pas  1  "accent  ai  ou.  Les  journali.ste=^ 
.suivent  l'exemple  ch^^  liomims  ri-  loi,  et.  chose 
chagrinante,  des  hommes  de  lettres  bien  en  vue. 


—  95  — 

«le  ceux  surtout  <jui  s'occupent  df^  rhist<")ire  du 
(.■anadci,  emboîtent  le  }>a8. 

Quant  au  mot  réf/istratear,  (^uî  signifie  chez 
nous  directeur,  receveur  de  l'enreofistrenient 
conservateur  des  hypothèques,  et  que  notre  code 
civil  a  consacré,  il  existait  déjà  avec  l'accent  : 
il  y  a  vingt-quatre  régistrateurs  des  bulles  et 
des  supplic^ues  à  la  cour  de  Rome. 


Je  constate  un  progrès  :  on  écrivait  il  y  a 
vingt  ans  bien  plus  souvent  qu'aujourd'hui 
^/y/bassade,  r:î/)ibassadeur.  La  faute  ne  peut  se 
taire  en  conversation  ;  elle  ne  se  rencontre  pas 
dans  nos  livres  :  on  la  voit  seulement  dans  les 
journaux.  Pas  l)esoin  de  dire  qu'il  faut  (r/y^bas- 
sade,  etc.  J'ai  déjà  lu  aussi  (//7djûche,  a/nbus- 
cade,  mais  il  y  a  si  longtemps  ! 


aos 


Que  Dieu  vous  sauve  de  la  picote,  c'est  mon. 
vœu  de  chrétien  ;  qu'il  vous  préserve  de    mal 


—  or;  — 

ortliograpliier  le   liéau,  en    l'écrivant  av«-c  deux 
t  :  jucottr, — c'est  là  mon  souhait  <le  Icxicolo^-ue. 

•104 


Un  parapet  étant  un  nmr  à  hauteur  d'cxppui 
élevé  sur  le  bord  dun  pont,  dinie  terrasse,  ou, 
en  fortification,  la  partie  supérieure  d'un  rem- 
part, je  ne  vois  pas  pounpioi  les  Canadiens  le 
confondent  avec  un  trottoir.  La  faute  cependant 
n'est  pas  générale  et  ne  se  commet  que  dans 
«luelques  parties  du  l^ays,  et  par  peu  de  per- 
sonnes encore.  Elle  tend  à  disparaître.  Ceux  (pii 
la  font  l'aggravent  souvent  en  ù\si\\\t  pa luipcl. 


aOo 

l"n  journal  de  Montréal  disait  en  parlant  de 
l'atelier  du  sculpteur  Hébert  :  ''  C'est  une  pièce 
spacieuse  composée  d'un  seul  appartement." 
Une  pièce  n'est  toujours  qu'une  pièce,  tandis 
qu'un  appartement  se  C(jmpose  de  plusieurs 
pièces.  Dire  qu'une  pièce  se  compose  d'un  ou  de 
plusieurs  appartements,  équivaut  à  dire  qu'une 


—  97  — 

personne  forme  une  ou  plusieurs  familles.  Un 
appartement  est  une  réunion  de  pièces  ou  de 
chambres,  comme  une  famille  est  une  réunion 
de  personnes  attachées  l'une  à  l'autre.  On  ne 
dira  donc  pas  d'une  maison  qui  contient  dix 
pièces  qu'elle  contient  dix  appartements. 


''  Des  lettres  cV incorporation  ont  été  accor- 
dées." C'est  une  faute.  "  Des  lettres  de  corj90- 
ration  "  vaudrait  mieux.  Mais  nous  avons  les 
termes  "  constitution  légale,"  "  lettres  patentes," 
et  des  périphrases  en  veux-tu  en  voiJà.  Incorpo- 
ration veut  dire  action  de  faire  entrer  des  par- 
ties dans  un  tout,  mais  non  pas  de  former  un 
tout  avec  des  parties  éparses  :  ce  mot  suppose 
l'existence  d'un  principal  auquel  viennent  se 
mêler  des  accessoires,  et  non  l'agglomération  de 
corps  distincts  mais  égaux  au  même  degré. 

Dix  personnes  instruites  sur  douze  écriront 
et  diront  une  astérique,  sans  se  douter  que  ce 
signe  de  renvoi  *  s'écrit  astérisque. 


—  98  — 
208 

Ne  confondez  pas  jalousies  av^ec  2)er siennes. 
Les  jalousies  sont  les  lames  mobiles  que  l'on  met 
dans  les  fenêtres,  à  l'intérieur  des  maisons,  et 
que  l'on  abaisse  ou  relève  au  moyen  d'un  cor- 
don ;  tandis  que  les  persiennes  sont  les  cadres 
de  bois  sur  lesquels  se  posent  les  lames,  fixes  ou 
mobiles,  qui  gardent  du  soleil,  et  que  l'on  place 
à  l'extérieur  des  maisons. 


ao9 


Les  êtres  d'une  maison  sont  ses  différentes 
parties,  la  distribution  des  pièces  dont  elle  se 
compose.  On  dira  donc  :  je  sais  tous  les  êtres  de 
ce  château  ;  je  connais  les  êtres  de  cette  maison, 
et  non  les  airs,  comme  presque  tout  le  monde 
dit  ici. 


^10 


"  Cet  homme  est  consistant  "  —  voilà  un  angli- 
cisme.    Il  faut  dire  logique,  conséquent;     Voici 


—  99  — 

une  plus  grosse  faute  encore  ;  je  la  trouve  dans 
un  journal  publié  par  un  professeur  de  belles- 
lettres  :  Aucun  catholique  qui  veut  être  consis- 
tant avec  ses  devoirs  religieux.  Il  aurait  fallu  : 
tidèle  à  ses  devoirs  religieux. 


^11 


"  Le  terme  de  la  cour  est  clos  "  ;  "  il  sera  jugé 
au  prochain  temne."  Ici  terme  est  un  anglicisme 
des  moins  fardé  :  il  faut  session. 


^1^ 


Quand  la  laveuse  a  décrassé  le  linge  dans  de 
l'eau  avant  de  le  mettre  à  la  lessive,  elle  a  fait 
ce  qu'elle  appelle  son  échange  ;  elle  a,  comme 
toutes  les  ménagères  disent  au  Canada,  échangé 
son  linge.  Maîtresses,  servantes,  chevalières  du 
battoir  font  toutes  cette  faute.  On  doit  dire 
essanger,  faire  Vessange, 


Oh. 


100 


^13 


Ne  pas  dire  la  race  ovine,  bovine,  porcine  ou 
chevaline,  mais  l'espèce.  Vous  direz  ht  race  quand 
vous  voudrez  mentionner,  en  fait  de  chevaux 
les  percherons,  etc.,  en  fait  de  vaches  les  Durham 
etc.  Si  l'on  parle  de  poules  en  général,  on  devra 
dire  l'espèce  galline  ;  mais  l'on  dira  la  race 
padoue,  la  race  cochinchinoise,  la  race  Plymouth, 
etc.  Voyez-vous  la  différence  ? 


314 


Episode  se  rencontre  (quelquefois  au  féminin 
dans  les  journaux.  Il  est  masculin,  de  même  que 
les  mots  suivants,  presque  toujours  féminisés 
par  le  peuple  :  escalier,  oreiller,  espace,  inter- 
valle, argent,  emplâtre,  éventail,  incendie. 

Le  journal  d'Ottawa  qui  a  dit  "  des  décombres 
sociales,  religieuses  et  morales  "  a  fait  une  grosse 
faute,  décombres  étant  du  masculin. 


~  101  — 


^15 


Saint-Pierre  et  Miquelon  sont  deux  îles  fran- 
çaises, situées  dans  le  golfe  Saint-Laurent,  et 
distinctes,  bien  que  gouvernées  par  la  même  au- 
torité. On  doit  donc  dire  Saint-Pierre,  ou  Mi- 
quelon, ou  Saint-Pierre  et  Miquelon,  selon  que 
l'on  veut  parler  de  l'une  ou  de  l'autre,  ou  des 
deux.  Mais  il  faut  ne  jamais  dire  Saint-Pierre 
Miquelon,  ni  Saint-Pierre  de  Miquelon. 

S16 


Vous  ne  vous  permettriez  certes  jamais  de 
dire  que  vous  avez  lu  tel  fait  sur  un  livre  :  vous 
devez  de  même  éviter  de  dire  que  vous  avez  lu 
ceci  ou  cela  sur  un  journal.  Dans  les  deux  cas, 
la  préposition  dans  est  la  seule  permise. 

217 


Défiez-vous  de  cet  anglicisme  :  "  sous  ces  cir- 
constances {iinder  those  circonstances)  ;  "  il  faut 
"  dans  ces  circonstances." 


—  102  — 

Nos  honunes  politiques  —  ministres,  députés, 
journalistes,  —  tombent  souvent  dans  cette 
erreur. 

Le  soufre  (minéral)  ne  prend  qu'une  /,  en  quoi 
il  se  distingue  de  plusieurs  temps  et  personnes 
du  verbe  soufirir  qui  en  prennent  deux  :  je 
souffre,  qu'il  souffre.  Il  est  facile  de  faire  la 
distinction. 


S19 

Si  les  Canadiens-français  s'occupaient  davan- 
tage de  sport ...  et  de  leur  langue,  beaucoup 
moins  diraient  un  ditruh  hell  et  beaucoup  plus 
feraient  usage  de  l'expression  française  :  une 
haltère. 

L'A  est  aspirée. 

Aide  est  tantôt  du  féminin,  tantôt  du  mascu- 
lin. Il  est  féminin  dans  le  sens  de  secours,  assis- 


—  103  — 

tance,  protection  :  L'aide  qu'il  m'a  donnée  était 
précieuse.  Il  est  masculin  quand  il  indique  les 
hommes  qui  prêtent  leur  concours  à  quelqu'un  : 
Ce  chirurgien  a  un  bon  aide  ;  et  féminin  si  ce 
sont  des  femmes  :  Cette  infirmière  est  une  aide 
intelligente. 

Peu  de  mots  prêtent  aussi  souvent  à  la  confu- 
sion des  genres. 

Un  mot  anglais  dont  peu  de  personnes  sem- 
blent connaître  la  traduction  française,  le  chib, 
le  swinging  club,  espèce  de  massue  dont  se  ser- 
vent les  amateurs  de  gymnastique  pour  déve- 
lopper la  poitrine  et  les  muscles  des  bras.  Le 
mot  français  est  mils  (s.  m.  pi.),  qui  se  prononce 
comme  s'il  n'avait  pas  d's.  Ce  mot  est  tiré  du 
persan,  mais  passé  dans  notre  langue. 

C'est  une  faute  de  dire  :  J'ai  acheté  une  copie 
de  tel  livre,  de  tel  journal  ;  il  faut  un  exevi- 
plaire. 


—  104  — 

Le  Messager  de  X . .  .  annonce  qu'un  bateau  à 
vapeur  a  remorqué  les  homes  qui  servent  vis-à- 
vis  la  ville  à  arrêter  le  bois."  Bornes  —  que  j'ai 
vu  écrire  haiimes  par  un  avocat  —  est  la  corrup- 
tion du  mot  anglais  booms,  qui  se  rend  en  fran- 
çais par  estacacles. 

Quel  est  le  dictionnaire  français  où  l'on  trouve 
le  mot  incendiât  ?  Quel  est  le  criminel  en 
France  que  l'on  a  jamais  accusé  du  crime  d'in- 
cendiat  ?  Journalistes  et  avocats  —  de  la  campa- 
gne comme  des  villes  —  ne  se  font  pas  faute 
d'employer  ce  terme. 

Il  faut  dire  :  accusé  d'incendie,  du  crime  d'in- 
cendie. 

^25 


Ne  traduisez  plus  dead  letter  par  lettre  onorte 
quand  il  s'agit  d'une  lettre  non  reclamée  et  qui 


—  105  -^ 

retourne  au  bureau  central  des  postes;  dites  lettre 
en  rebut,  lettre  tombée  en  rebut.  De  même,  tra- 
duisez dead  letter  office,  non  par  bureau  des 
lettres  mortes,  mais  par  bureau  des  rebuts.  C'est 
ainsi  que  l'on  dit  en  France. 


Pourquoi  écrire  et  prononcer  dangereux  et 
"profondément,  quand  il  favit  dangereux  (sans 
accent)  et  profondément  (avec  accent)  ? 


S3r 

S'abstenir  de  dire  :  le  membre  pour  Lévis,  le 
membre  de  Joliette  :  on  doit  dire  :  le  député,  le 
représentant  de  Lévis,  de  Joliette. 

La  semence  est  la  chose  que  l'on  sème  ;  la 
semaille  est  l'action  de  semer  ;  la  semaison  est 
le  temps  pendant  lequel  on  fait   les   semailles. 


—  106  — 

On  ne  doit  donc  pas  dire  qu'on  a  terminé  ses 
semences,  mais  ses  semailles;  ou  bien  on  dira 
que  la  semaison  est  finie. 

Si  ferblanterie  et  ferblantier  s'écrivent  en  un 
seul  mot,  il  n'en  est  pas  ainsi  àQ  fer-blanc,  qui  s'é- 
crit, ou  le  voit,  en  deux  mots  reliés  par  un  trait 
d'union.     Plusieurs  s'y  méprennent. 


330 

Xous  avons  des  carrousels  dans  nos  carnavals. 
Des  centaines  de  mille  personnes  disent  ce  mot, 
mais  pas  une  sur  mille  correctement.  Elles 
prononcent  carroiœel,  au  lieu  de  carrouzel. 

Tous  les  auteurs  enseignent  que  Vi  de  si  s'é- 
lide  devant  les  pronoms  il  et  ils,  et  devant  eux 
seuls.     Dites  alors  :  s'il,  s  ils,  et  non  si  il,  si  ils. 


—  107  — 

Je  ne  connais  qu'un  seul  journaliste  qui  se 
rend  coupable  de  cette  faute,  mais  ça  lui  arrive 
tous  les  jours. 

Avialgamation  est  un  terme  français  ;  il  si- 
gnifie la  séparation  de  l'or  et  de  l'argent  de  leur 
minerai  à  l'aide  du  mercure.  On  ne  saurait  s'en 
servir,  comme  le  font  nos  journaux  et  même 
nos  législateurs,  pour  exprimer  la  fusion  de 
deux  sociétés  commerciales,  de  deux  entreprises 
industrielles,  de  deux  intérêts.  C'est  surtout 
quand  il  s'agit  de  chemins  de  fer  qu'on  l'em- 
ploie ici. 

Journaliste,  mon  ami,  vous  recevez  souvent 
des  billets  de  faveur  qui  vous  permettent  de 
voyager  à  frais  réduits,  d'aller  au  théâtre,  au 
concert,  sans  bourse  délier,  etc.  Je  n'en  suis 
pas  jaloux,  mais  je  suis  jaloux  des  droits  de  la 
langue,  et  je  vous  prie  de  la  respecter  assez  pour 
ne  dire  jamais  des  billets,  coinplimientaives. 


108 


334 


On  dit  bien  conforme  à,  conformément  à, 
mais  si  l'on  emploie  la  locution  adverbiale  en 
conforiiiité,  il  faut  la  faire  suivre  de  la  préposi- 
tion de  :  en  conformité  de  vos  ordres. 

Résuriier  le  débat,  c'est  l'analj^ser  ;  or  ce  n'est 
pas  ce  que  fait  l'orateur  qui,  dans  un  corps  dé- 
libérant, rejyrend  le  débat,  continue  la  discussion 
(resuvies  the  debate),  après  un  ajournement  ou 
une  interruption.  Notre  presse  commet  très 
souvent  cet  anglicisme,  surtout  durant  les  ses- 
sions du  parlement. 

336 


Ce  sont  moins  souvent  les  journalistes  que 
leurs  correspondants  qui  écrivent  exonorer 'pour 
exonérer  ;  mais  ils  ont  le  tort  de  laisser  passer 
la  faute.  J'ai  même  lu  exhonorer.  Rien  n'ex- 
cuse semblable  ignorance  ou  manque  d'attention. 


109  — 


ssr 


Cette  cheminée  a  beaucoup  de  tirage,  un  fort 
tirage,  dev^rait-on  dire  au  lieu  de  beaucoup  de 
tire,  une  forte  tire. 


938 


Ne  dites  pas:  Je  vais  faire  prendre  mon  por- 
trait ;  mais  bien  :  Je  vais  faire  faire  ou  tirer 
mon  portrait. 


93» 


Différence  entre  va  sans  dire  et  va  s'en  dire. 

"  Va  sans  dire  que  les  amis  du  maire  L.  . ., 
sont  heureux  de  son  triomphe  sur  M  . . . .  Aussi 
il  va  s'en  dire  des  paroles  le  soir  de  son  instal- 
lation." 

Soumis  aux  réflexions  du  journal  qui  réclame 
pour  lui  la  plus  grande  publicité. 


110 


â40 


Doit-on  dire  angliciser  et  anglicisation  ou 
bien  anglifier  et  anglification,  qui  sont  d'un 
usage  général  parmi  nous  ?  Les  dictionnaires 
ne  donnent  que  la  première  forme.  Si  j'avais 
quelque  autorité,  je  conseillerais  à  mes  compa- 
triotes d'employer  angliciser  pour  les  choses  : 
"  tel  mot  français  est  anglicisé  ;  "  et  anglifier 
pour  les  personnes  :  "  nos  muscadins  ont  une 
tendance  à  s'anglifier." 

Faire  des  gestes  se  dit  en  ce  pays  pour  être 
maniéré,  prendre  des  airs,  poser,  sortir  du  na- 
turel en  un  mot  dans  la  parole  ou  la  démarche. 
Ce  n'est  pas  français. 

Pour  l'amour  du  dictionnaù-e,  cessez  d'écrire 
exhorhitant,  exhubérant.     Pourquoi  mettre  une 


—  111  — 

h  dans  le  corps  de  ces  mots  que  la  grammaire 
n'en  frappe  pas  ? 

^43 


Manqxier  quelqu'un,  pour  être  privé  de  sa  pré- 
ssnee,  est  un  anglicisme.  On  ne  dira  donc  plus 
le  départ  de  ma  servante  m'a  mis  dans  l'embar- 
ras ;  je  la  manque  beaucoup. 

344 


Je  parie  que  la  plupart  des  letttres  qui  sont 
adressées  à  S  ceint- Hugues,  dans  le  comté  de 
Bagot,  portent  la  mauvaise  suscription  de  Saint- 
Hughes.  Cette  faute  est  quasi  générale.  Quand 
il  était  question  de  l'affaire  Hugues-Morin,  un 
grand  journal  français  de  Montréal  écrivait 
presque  invariablement  Hwgkes.  Hughes  est 
î'épellation  anglaise. 

345 

La  cretonne  est  une  toile  qui  a  la  chaîne  de 
chanvre  et  la  trame  de  lin  ;   elle  est  fort  connue 


112 


et  employée  au  Canada,  mais  ou  a  le  tort  assez 
général  de  la  faire  du  genre  masculin  et  de  dire 
du  cretonne. 


•246 


On  est  en  faute  quand  on  dit:  " fantici2)e 
quelque  malheur,  quelque  difficulté  ;  "  il  faut  : 
"  je  prévois,  je  pressens,  je  devine,  etc.,  quelque 
malheur,  etc."  Anticiper  signifie  prévenir,  de- 
vancer. 

•247 


Lu  dans  un  journal  : 

"  Le  ministre  a  institué  des  procédés  au  cri- 
minel." Il  fallait  dire  des  'procédures,  ou  une 
poursuite,  une  action,  un  procès,  etc.,  mais  pas 
des  procédés. 

S48 

Ayez  bien  soin  de  ne  plus  dire  ni  écrire  :  se 
rappeler    de   quelqu'un,    de   quelque  chose  ;  je 


—  113  — 

m  en  rappelle.  Il  faut  :    se   rappeler   quelqu'un, 
quelque  chose,  je  me  le  rappelle. 

Il  n'est  permis  d'employer  le  de  que  devant 
un  infinitif;  on  dit  alors  indifféremment:  je 
me  rappelle  cZ'avoir  vu  ou  avoir  vu,  c^'être  allé 
ou  être  allé. 

Si  l'on  tient  à  l'emploi  du  de,  que  l'on  se 
serve  du  verbe  se  souvenir. 


940 


"  Vous  le  verrez  en  awvun  temps.  "  "  Je  don- 
nerais aucune  somme  d'argent  pour  cet  incu- 
nable. "  "  Aucun  parti  politique  lui  est  indiffé- 
rent "  Remplacez  aucun  par  tout,  n  importe 
quel,  et  ces  phrases  deviendront  correctes. 


.    950 


Abuser  quelqu'un,  pour  l'insulter,  l'injurier, 
le  couvrir  d'opprobre,  etc.,  est  un  anglicisme  (to 
abuse.) 


—  114  — 


251 


Ne  dites  pas  porter  une  lettre  à  la  malle,  niais 
à  la  poste,  La  malle  est  le  mode  de  transport 
des  lettres,  la  poste  est  le  lieu  où  elles  sont  dé- 
posées et  reçues.  On  peut  dire  :  la  malle  de 
Québec  est  arrivée  ;  on  ne  peut  dire  :  je  m'en 
vais  chercher  ma  malle,  mais  mon  courrier. 
Maller  une  lettre  est  un  barbarisme  ;  il  faut 
dire  :  mettre  à  la  poste. 


^o»3 


"  Si  vous  avez  voté,  c'est  que  nul  ne  s  y  est 
objecté.  "  Grosse  faute  très  fréquente.  Il  faut 
dire  :  n'y  a  objecté.  On  ne  s'objecte  pas  à  une 
chose.  S'objecter  est  un  verbe  réfléchi,  qui  si- 
gnifie être  objecté..  Ex.  :  Voilà  ce  qui  s'objecte 
en  pareille  circonstance  ;  je  me  suis  objecté  ma 
jeunesse. 


115 


^J5:i 


On  appelle  en  ce  pays  saucier  le  vase  dans 
lequel  on  sert  les  sauces  ;  on  devrait  dire  sau- 
cière :  une  saucière  d'argent,  de  porcelaine,  de 
faïence.  Le  saucier  est  la  personne  qui  compose 
ou  qui  vend  des  sauces.  Pour  emploj^er  le  vrai 
mot,  nos  sauces  n'en  seront  pas  moins  bonnes. 


Moelle,  nioelleiix,  Dioelleibsement  ne  prennent 
pas  le  tréma  sur  le  premier  e.  Ils  le  prenaient,  il 
est  vrai,  au  seizième  siècle,  mais  on  écrivait 
aussi  alors  onouelle  Tout  cela  est  changé.  Moellon 
se  passe  aussi  du  tréma. 

Coercion  et  coercition  se  disent  tous  deux, 
mais  ni  l'un  ni  l'autre  n'a  de  tréma. 


^55 


Ne    jamais  écrire    ayions,    ayiez.    Le    verbe 
avoir  fait  ayons    et    ayez   à    l'impératif   et   au 


—  116  — 

subjonctif  présent.  Jamais,  à  aucun  temps,  il 
n'est  permis  de  mettre  un  i  après  Vy.  Faute 
commune,  cependant. 

Si  l'on  doit  écrire  et  prononcer  Venise  (sans 
accent  aigu  sur  le  premier  e),  il  n'en  faut  pas 
moins  écrire  et  prononcer  Vénitien  (avec  accent) 

Un  journal  de  Montréal  avait  l'habitude  d'é- 
crire invariablement  un  héro  :  nos  remarques 
l'ont  corrigé. 

Au  singulier  comme  au  pluriel,  il  faut  écrire 
héros. 

Ce  que  l'on  nomme  dans  toutes  nos  cuisines 
sassejKtnne  (corruption  du  mot  anglais  sattce- 
pan)  est  tout  bonnement  la  casserole,  que  Littré 
définit  ainsi  :  Ustensile    de    cuisine    en   métal, 


—  117  — 

à  queue,  à  fond  plat  et  à  parois  droites  et  cy- 
lindriques. 

Quand  l'ustensile  a  une  anse,  on  l'appelle 
coqueniar. 

Dites  :  Avez-vous  la  ononnaie  d'un  dollar  ? 
Ne  dites  pas  :  Avez-vous  du  change  pour  un 
dollar  ?  encore  moins  de  réchange,  comme  on  dit 
presque  généralement  sur  la  rivière  Ottawa. 

"  Ce  projet  de  loi  était  opposé  par  les  députés 
d'Ontario.  "  "  Les  fabricants  de  sucre  n'opposent 
pas  le  tarif  actuel.  " 

Deux  fautes  relevées  dans  un  courrier  du  par- 
lement pendant  la  dernière  session. 

Il  fallait  :  Ce  projet  de  loi  était  combattu, 
ou  bien  :  les  députés  d'Ontario  s'opposaient  à  ce 
projet.  Dans  le  second  cas,  il  fallait  :  Les  fa- 
bricants ne  sont  pas  opposés,  ou  ne  s'opposent 
pas  au  tarif. 


—  118  — 

Opposer  un  projet,  un  candidat,   vie,  est  un 
anglicisme  féroce. 


^61 


"  Nous  avons  cru  emprunter  à  tel  journal,  " 
— "nous  croyons  rapporter  ce  qui  se  disait  à 
cette  époque  ;"  —  "je  crois  vous  remercier  pour 
vos  bontés;" — "vous  croyez  en  appeler  à  un 
tribunal  supérieur.  "  Autant  de  phrases  que  j'ai 
cueillies  dans  les  journaux,  qui  sont  françaises 
en  soi,  mais  qui  ne  l'étaient  pas  dans  la  circon- 
stance, parce  qu'elles  ne  rendaient  pas  la  pensée 
de  leurs  auteurs  qui  voulaient  dire  :  "  Nous 
avons  cru  devoir  emprunter  ;  nous  croj^ons 
devoir  rapporter;  je  crois  devoir  vous  remer- 
cier ;  vous  croyez  j)Otivoir  en  appeler. 

Faute  bien  plus  commune  ([u'on  ne  croit. 

Autre  faute  de  la  même  nature  :  "  Le  bureau 
des  travaux  publics  rt  jugé  de  faire  disparaître 
les  fils  électriques.  "  On  voulait  évidemment 
dire  :  a  jugé  à  propos  de  faire  disparaître,  etc. 


119 


•26*3 


Peu  de  personnes  écrivent  quelques  fois,  mais 
il  y  en  a  encore.  Nous  leur  rappelons  que  la 
seule  manière  correcte  est  quelquefois,  en  un 
seul  mot. 


^63 

Nous  disons  presque  toujours  faire  une  chose 
à  la  perfection.  "  Elle  chante  à  la  perfection  ; 
il  faut  en  perfection,  et  non  à  la  perfection 
comme  on  dit  à  la  cour."  (De  Caillières,  1690, 
cité  par  Littré).  Ou  peut  dire  aussi  dans  la 
perfection. 


964 


Plusieurs  journaux,  annonçant  l'arrestation, 
par  erreur,  de  M.  Gye  et  de  l'Albani  à  Anvers, 
ont  dit: 


—  120  — 

"  Ils  n'ont  pu  se  soustraire  aux  mains  des  po- 
liciers qu'en  se  précipitant  dans  le  théâtre,  où 
leurs  amis  les  identifièrent!' 

Il  fallait:  où  leurs  amis  ont  établi  leur 
identité. 

On  ne  doit  pas  dire  non  plus  :  Le  cadavre 
trouvé  dans  le  fleuve  a  été  identifié,  —  mais  :  on 
a  constaté  l'identité  du  cadavre,  on  a  reconnu  le 
cadavre,  etc. 

Identifier  signifie  :  rendre  identique,  com- 
prendre deux  choses  sous  une  même  idée. 


Beaucoup  de  personnes  appellent  estaiivpille  le 
petit  cachet  volant  qu'elles  collent  sur  leurs 
lettres  pour  les  aflranchir.  C'est  une  erreur. 
Le  mot  propre  est  timbre-poste  ou  seulement 
timbre.  On  appelle  indifieremment  estampille 
ou  timbre  l'empreinte  appliquée  sur  les  lettres 
pour  indiquer  la  date  et  le  lieu  de  leur  départ 
ou  de  leur  arrivée.  On  nomme  en  outre  estam- 
pille l'instrument  dont  on  se  sert  pour  cela,  la 
marque  qui  indique  la  provenance  des  marchan- 
dises, la  marque  mise  sur  les  livres  pour  indi- 


121  — 


quer  la  bibliothèque  à  laquelle  ils  appartiennent, 
enfin  le  f  ae  simile  d'une  signature  que  l'on  appose 
sur  un  papier  quelconque. 


^60 


Dites  le  secrétaire  particviier  et  non  le  secré- 
taire privé  d'un  ministre,  d'un  administrateur, 
etc. 

Î307 

Nous  appelons  ordinairement  clerc  extra  celui 
qui  n'est  pas  employé  à  titre  permanent  dans 
les  administrations.  Ni  clerc,  ni  extra  ne  sont 
français  en  ce  sens.  Il  faut  dire  coinmis  supplé- 
mentaire ou  auxiliaire. 

Voici  une  faute  presque  générale.  On  dit  : 
j'ai  été  notifié  du  fait,  de  la  chose,  au  lieu  de  : 
le  fait,  la  chose,  l'acte  m'a  été  notifié.  On  notifie 
une  chose  à  quelqu'un  ;  quelqu'un  n'est  pas  noti- 


—  122  — 

fié  de  cette  chose.  On  peut  dire  aussi,  avec  cor- 
rection, notifier  que  :  on  lui  notifia  qu'il  eût  à 
payer  sans  retard. 


369 


La  Malbaie,  Kamouraska,  Saint-Léon,  Varen- 
nes,  etc.,  ne  sont  pas  des  places  cVeaiix,  mais  des 
villes  d'eaux.  Le  mot  ville  s'applique  même  aux 
moindres  endroits  :  témoin  Mont  Oriol,  inventé 
et  célébré  par  Guy  de  Maupassant. 

On  dit  également  stations  balnéaires,  —  et 
stations  thermales  quand  les  sources  y  sont 
chaudes. 


370 


Dites  à  votre  cocher  de  vous  conduire  à  la 
station,  à  la  gare  du  chemin  de  fer,  mais  jamais 
au  dépôt.  En  France,  on  coffre  les  gens  qui  vont 
au  dépôt. 


—  123  — 

Si  vous  dites  :  J'ai  son  billet  promissoire,  vous 
dites  un  mot  de  trop.  Promissoire  est  français, 
mais  on  ne  l'emploie  pas  dans  ce  sens,  j  Billet 
suffit. 

27*2 

Distinguons  entre  le  substantif  et  l'adjectif,  et 
écrivons  1'^  (subs.)  une  fiole  d'ammoniaque,  de 
l'ammoniaque  gazeuse,  liquide  ;  2°  (adj.)  du  gaz 
ammoniac,  de  la  gomme  ammoniaque. 

"  Le  maire  et  plusieurs  officiers  municipaux 
ont  visité  le  village  Quinsigamond  samedi  dans 
le  but  de  prolonger  les  canaux  d'égouts  de  Wor- 
cester  et  d'empêcher  les  eaux  de  la  rivière 
Blackstone  d'être  polluées  par  ces  égouts  qui 
s'y  déchargent." 

Souillées,  corrompues,  infectées,  contaminées, 
soit  !  polluées,  jamais  ! 


—  124 


274 


Quand  vous  allez  lire  les  journaux  clans  une 
salle  de  lecture,  dans  un  hôtel,  ne  demandez  pas 

la  file  de  la  Patr^ie,  de  V Electeur,  mais  la  liasse. 

Cet  être  au  pas  pressé,  à  l'air  grave,  aux  ha- 
bits râpés,  qui  vous  rend  des  visites  aussi  régu- 
lières qu'incommodantes,  et  •  auquel  vous  dites 
de  revenir  dans  un  mois  s'entendre  dire  quand 
il  devra  repasser,  vous  l'appelez  un  collecteur  : 
ce  n'est  qu'un  garçon  de  recettes, 

Non  plus,  ne  pas  appeler  collecteur  du  revenu 
l'officier  préposé  à  la  perception  des  droits  d'ac- 
cise et  de  douane  :  c'est  un  percepteur. 

are 

Quand  les  journaux  disent  :  Cet  homme  pu- 
blic est  une  disgrâce  pour  le  pays  ;  ce  crime  est 
une  disgrâce  pour  notre  ville,  —  ils  ne  se  doutent 


—  125  — 

pas  de  l'anglicisme  qu'ils  commettent.    Disgrâce 
n'est  pas  français  dans  ce  sens. 


Le  prétexte  est  souvent  une  linesse,  mais  tou- 
jours un  mensonge  de  parole  ou  d'action.  Les 
locutions  "  sous  prétexte  de  "  et  "  sous  prétexte 
que  "  ne  doivent  donc  être  employées  que  si  Ton 
entend  signaler  la  cause  supposée,  la  raison  ap- 
parente d'un  dire  ou  d'un  acte.  Quand  le  dire 
et  l'acte  n'ont  pas  besoin  d'excuse  ou  de  man- 
teau, on  ne  doit  pas  les  employer  :  on  dira 
"  pour  la  raison  que,"  "  parce  que,"  *'  a  cause  de,'' 
"  à  raison  de,"  "  vu  que,"  etc. 

378 


"  Cette  voie  d'eau  fut  aveuglée  avec  du  cane- 
vai^"  se  lit  dans  un  journal  de  Montréal  du  11 
juillet  1888.  On  aurait  dû  dire  avec  de  la  toile 
à  voiles.  L'anglais  canvass,  que  l'on  a  traduit 
de  trop  près,  par  l'oreille,  signifie  également 
canevas  et  toile  à  voiles  ;  mais  il  est  évident  que 


~  126  — 

l'on  n'a  pas  aveuglé  une  voie  d'eau  avec  du 
canevas,  "  grosse  toile  claire  pour  la  tapisserie  à 
l'aiguille,"  qui  doit  se  trouver  rarement  sur  les 
bâtiments.  Cette  faute  se  fait  souvent  dans  la 
région  maritime  au-dessous  de  Québec. 

Si  l'on  ne  veut  pas  dire  toile  à  voiles,  que  l'on 
emploie  caneveau,  qui  en  a  le  sens. 


•279 

Un  journal  de  Montréal  annonce  que  la  mu- 
nicipalité a  donné  aux  cochers  de  place  "  un 
kiosque  pour  s'abriter  contre  les  rigueurs  de 
l'hiver.  "  Ce  journal  se  trompe  :  un  kiosque  est, 
selon  Littré,  "  un  belvédère  situé  dans  un  jardin, 
sur  une  terrasse  ;  un  pavillon  turc  ouvert  de 
tous  côtés,  dont  on  décore  les  parcs,  les  jardins  ; 
une  petite  boutique  sur  les  boulevards  de  Paris 
et  des  grandes  villes  où  l'on  vend  les  journaux 
aux  passants." 

Ce  que  la  municipalité  a  fourni  aux  cochers, 
c'est  un  refuge,  —  bâtiment  où  se  mettent  à 
l'abri  de  l'intempérie  des  saisons  les  cochers  de 
place,  les  gens  qui  attendent  que  le  tramway 
passe,  ceux  que  surprend  un  orage,  etc. 


—  127 


380 


Le  mois  de  novembre  1888  a  été  mauvais  pour 
la  langue  :  il  a  vu  l'introduction  dans  la  presse 
de  deux  mots  anglais  pur  sang,  que  l'on  emploie 
peut-être  dans  le  langage  parlé,  mais  que  je 
n'avais  encore  jamais  vus  dans  les  journaux. 
On  ne  les  a  même  pas  soulignés.  La  Patrie  an- 
nonçait que  le  plant  de  l'Imprimerie  Générale 
avait  été  vendu  pour  $15,000.  Elle  voulait  dire 
le  matériel,  l'outillage. 

La  Presse,  de  son  côté,  parlait  d'une  hose 
(boyau)  adaptée  à  une  borne-fontaine. 

Sentinelles,  prenez  garde  à  vous  ! 

*i81 


Ecrivez  \xn  fabricant  de  cigares  et  un  homme 
fabriquant  des  cigares,  un  travail  fatigant, 
et  un  travail  faMguant  l'ouvrier. 

Ecrivez  infatigable,  et  non  infatiguable. 

N'écrivez  jamais  traficant  mais  toujours  tra- 
fiquant. 


—  128  — 

Distinguez  entre  intrigant  (suljstantif)  et 
intriguant  (participe). 

L'anglais  a  déteint  jusque  sur  le  rasoir.  Ra- 
zor  a  produit  razoir,  que  j'ai  vu  quelquefois 
dans  les  colonnes  d'annonces  des  journaux.  Ne 
nous  laissons  pas  faire  la  barbe  par  ce  mot-là. 

L'on  écrivait  jadis  en  France  hazard,  mais 
aujourd'hui  c'est  hasard.  Je  rappelle  la  chose, 
à  certain  journaliste  qui  n'est  évidemment  pas 
de  son  siècle  et  qui  déteste  les  innovations  mo- 
dernes. 

Faire  ai^plication,  anglicisme  barbare,  ré- 
pandu partout,  presque  indéracinable.  Cette 
locution  est  censée  vouloir  dire  demander,  sol- 
liciter, soumissionner. 

384 

Que  de  fois  j'ai  lu  briques  à  feu  (fire  bricks) 
pour  briques  réfractaires  ! 


—  129  — 

C'est  à  Ottawa  que  j'ai  entendu  pour  la  pre- 
mière fois  coiirir  coinrïie,  courir  pour,  dans  le 
sens  d'être  candidat,  et  je  l'y  entends  encore 
tous  les  ans.  On  court  pour  la  mairie,  quand  ce 
n'est  pas  pour  la  Qiiairerie,  on  court  comme 
échevin,  on  court  comme  membre,  ou  simplement 
on  court.  C'est  la  traduction  littérale  de  l'anglais 
to  run.  Ne  pourrait-on  pas  dire,  comme  en 
France,  être  candidat,  se  porter,  se  présenter 
comme  candidat,  etc,  ? 

"  La  blessure,  quoique  peu  dangereuse,  est 
très  souffrante." — Cette  phrase  se  lit  dans  tout 
journal  qui  ignore  la  différence  entre  souffrante 
et  douloureuse. 

Je  m'avoue  pauvre  clerc  en  matières  de  milice 
mais  la  traduction  de  color  sergeant  par  sergent 


—  130  — 

de  couleur  est  absurde.  Un  sergent  de  couleur 
serait  un  sergent  noir,  un  nègre.  Si  l'on  disait 
sergent  de  couleurs  (au  pluriel),  je  pourrais  à  la 
rigueur  comprendre  qu'il  s'agit  d'un  sergent  qui 
porte  les  couleurs  de  la  compagnie  ;  mais  ce 
terme  est  inconnu  en  France.  On  a  là,  comme 
en  Angleterre  et  ici,  un  sous-officier  qui  porte 
l'étendard  de  la  compagnie  et  se  nomme  porte- 
étendard,  et  un  officier  qui  porte  le  dr^ipeau  du 
régiment  et  s'appelle  porte-drapeaiL 


388 

Xos  journalistes  qui  se  traitent  tous  les  jours 
entre  eux  de  misérables  et  se  reprochent  toutes 
les  vilenies  possibles,  n'écrivent  même  pas  cor- 
rectement leurs  injures  :  ils  écrivent  vilenies  à 
tout  coup. 


389 

On  a  voulu  à  tort  exclure  le  substantif  item 
de  la  langue.  L'item  est  un  article  de  compte.  Il 
ne  prend  pas  la  marque   du   pluriel  :    plusieurs 


petits  item  de  son   compte.    Par  analogie    avec 
compte,  on  peut  dire  les  ifem  du  budget. 


390 

Injurier  signilîe  offenser  par  des  paroles 
blessantes,  et  ne  signifie  que  cela.  On  a  donc  eu 
tort,  en  racontant  qu'un  taureau  avait  été 
décorné,  de  dire  que  l'opération  n'a  pas  injurié 
l'animal.  On  a  simplement  traduit  le  verbe  an- 
glais to  injure  par  le  mot  qui  lui  ressemble  le 
plus  de  forme,  tout  en  signifiant  autre  chose. 


Tourne-clef,  mot  qui  n'est  pas  français,  —  que 
l'on  a  fabriqué  au  moyen  d'une  servile  traduc- 
tion du  mot  anglais  turnhey, — et  que  nos  jour- 
naux, sans  exception,  emploient  au  lieu  de  gui- 
chetier. Si  le  guichetier,  ainsi  volé  de  son  nom^ 
pouvait  mettre  ses  détracteurs  sous  triple  ser- 
rure, et  ne  tourner  la  clef  de  délivrance  qu'après 
triples  excuses  ! 


132  — 


aea 


Disparution  s'employait  souvent  au  Canada, 
il  y  a  trente  ans  ;  on  l'emploie  encore  quelque- 
fois. Mais  il  faut  l'abandonner  complètement. 
Le  seul  mot  permis  est  disparition. 

Ne  me  conseillez  jamais  d'investir  mes  capi- 
taux ici  ou  là  ;  je  sais  mieux  que  vous  où  les 
bien  placer.  Votre  investissement  ne  vaudrait 
point  mon  placement. 

094 


"  Il  se  garde  bien  de  ne  rien  publier  qui  puisse 
nuire  à  ses  chers  alliés."  L'auteur  de  cette  phrase 
a  voulu  dire  de  son  adversaire  qu'il  se  garde 
bien  de  publier  quelque  chose  de  défavorable  à 
ses  alliés.  En  mettant  la  négation,  il  a  dit  le 
contraire  de  sa  pensée.  Ce  genre  de  faute  est 
assez  commun. 


—  133  — 

a95 

Esclandre  a  été  du  féminin,  nous  dit  Littré  ; 
et  des  écrivains  contemporains,  Scribe  et  Soalié 
entre  autres,  l'ont  fait  de  ce  e^enre.  Mais  la  recèle 
est  admise  qu'il  est  aujourd'hui  du  masculin. 
Conformons -nous -y. 

•296 

Magasin  de  liardes  faites  !  Ne  dites  jamais 
cela,  je  vous  prie,  mais  bien  magasin  de  confec- 
tion. En  termes  de  tailleur,  la  confection  c'est 
l'action  de  faire  des  habillements  à  l'avance  ; 
c'est  l'habillement  lui-même  ;  c'est  aussi  la  partie 
d'un  magasin  où  sont  ces  habillements. 

•297 

Je  lis  dans  une  circulaire  signée  par  les  admis- 
nistrateurs  de  trois  grands  journaux  quotidiens  : 
"  Ce  journal ...  a  poursuivi  un  système  de  dé- 
nigration  systématique  contre  ses  confrères." 

Dénigrement,  s'il  vous  plaît  ! 


134 


â98 

"  Les  orangistes  voteront  contre  lui,  et  les 
180  Irlandais  catholiques  feront  pareil  "  (La 
Presse).  Faute  rare  dans  les  journaux,  mais 
commune  dans  la  conversation. 

Il  faut  ixi.reilleinent. 

S99 


Législater  n'est  pas  français  ;  nous  l'avons 
pris  à  l'anglais  legislate.  Nous  devons  dire  légi- 
férer. 


300 


"  Le  malheureux  n'a  pas  encore  recouvert  con- 
naissance." Littré  dit  qu'au  XVIIe  siècle  on 
confondait  recouvert  et  recouvré,  mais  qu'au- 
jourd'hui ce  n'est  plus  permis.  Dans  l'instance, 
il  faut  dire  recouvré  connaissance. 


185  — 


301 


On  ne  doit  plus  dire  la  grande  cJtartre,  la 
chartre  d'une  compagnie  ;  le  mot  est  tombé  en 
désuétude.  On  dit  charte. 


30^ 


Il  est  mal  de  dire  bris  de  promesse  de  mari- 
age ;  il  faut  dire  rupture. 


303 


Nous  confondons  en  berne  avec  à  "nii-niât 
Berne  est  un  terme  de  marine.  Un  pavillon  en 
berne  est  hissé,  mais  roulé  sur  lui-même.  On  a 
tort  de  dire  :  Au  consulat  français,  le  drapeau 
tricolore  était  en  berne  ;  il  faut  :  était  ou  flot- 
tait à  mi -mât.  Le  pavillon  à  mi-mât  est  tou- 
jours déployé. 


—  136  — 


S04 


"  Une  dépêche  reçue  aujourd'hui  nous  informe 
que  l'honorable  M.  X.  est  sous  traitement,  et 
que  tout  progresse  favorablement."  Anglicisme 
atroce  et  fort  commun.  Progresser  signifie 
avancer,  s'accroître,  se  propager,  s'étendre.  Ce 
qu'on  veut  dire  ici,  c'est  que  l'individu  se  réta- 
blit, conséquemment  que  la  maladie  cède  au 
lieu  de  progresser.  On  a  donc  employé  le  mau- 
vais mot.  Et  tout  progresse. . . .  Qu'est-ce  qui 
progresse  ?  Qu'est-ce  que  ce  tout-\k  représente  ? 
C'est  bien  là  le  vague  de  l'anglais.  Quant  à 
favorablement,  il  est  vague  aussi,  mais  surtout 
redondant.  Quand  on  progresse,  c'est  favorable- 
ment, 

305 


Défalcation  est  français:  ce  mot  signitie 
retranchement,  diminution.  Il  exprime  l'action 
de  retrancher  d'une  somme,  d'une  quantité,  mais 
non  le  péculat,  le  vol  de  deniers  publics,  sens 
auquel  nous  l'employons  presque  exclusivement 


—  137  — 

au  Canada.  Il  faut  employer  les  mots  détourne- 
ment, abus  de  confiance.    Défcdcataire  n'est  pas 

français. 

« 

306 


D'après  Littré,  oppressé  vieillit  dans  le  sens 
d'opprimé,  mais,  dit-il,  "  il  serait  encore  de  bon 
emploi  dans  le  style  élevé."  Dans  le  style  élevé» 
soit  !  mais  pas  dans  une  dépêche  télégraphique 
que  l'on  traduit  de  l'anglais,  surtout  quand  cette 
dépêche  est  adressée  par  le  général  Boulanger 
au  président  da  Fonsaca.  On  disait  ancienne- 
ment un  peuple  oppressé  ;  personne  ne  se  per- 
met plus  cette  expression  que  les  journalistes 
qui  ont  sous  les  yeux  et  dans  l'oreille  le  mot 
anglais  oppressed. 


307 

Sur  l'enveloppe  d'une  lettre  écrivez  Monsieur 
ou  Madame  au  long  (avec  la  majuscule)  : 
Monsieur  Louis  Fréchette,  Madame  E.  Gye- 
Albani. 


—  188  — 

Dans  le  corps  d'un  écrit,  il  faut  distinguer.  Si 
le  titre  est  suivi  du  nom  de  la  personne,  et  s'il 
n'est  pas  en  apostrophe, mettez  M.  pour  Monsieur: 
M.  Mercier  ;  mettez  Mme  pour  Madame  :  Mme 
Sévigné.  S'il  est  en  apostrophe  et  suivi  du  nom 
de  la  personne,  écrivez  monsieur  au  long  avec 
une  minuscule  :  Nierez-vous,monsieur  Mercier...? 
Si  vous  ne  nommez  pas  la  personne,  écrivez 
Monsieur  au  long  avec  une  majuscule  :  Nierez- 
vous,  Monsieur ...  ? 


;I08 

CoTiiices  est  du  masculin.-  On  écrit  donc  à 
tort  les  comices  municipales,  ainsi  que  je  l'ai 
lu  dans  un  journal  de  la  campagne. 

300 

Allez  au  palais  écouter  les  plaidoiries,  vous 
entendrez  chaque  avocat  plaidant  dire  au  juge  : 
Il  est  en  preuve  que  ;  tel  fait  est  en  pn^euve.  Il 
faudrait  dire  :  les  témoignages  établissent  que  ; 
il  est  prouvé  que  ;  la  preuve  de  telle  chose  est 
faite. 


139 


310 


Dites  la  et  non  le  Sud-Amérique,  Nord-Amé- 
rique :  le  genre  de  l'article  est  imposé  par  celui 
du  continent  et  non  par  celui  du  point  cardinal. 

C'est  une  faute  de  dire  l'Amérique  britannique 
du  Nord  ;  cela  implique  une  Amérique  britan- 
nique du  Sud. 

J'ai  lu  dans  nos  journaux  la  haronnesse  Coûts, 
le  baron  et  la  haronnesse  X.  Baronnesse  s'est  dit 
jusqu'au  quinzième  siècle,  peut-être  un  peu  plus 
tard,  mais  il  est  depuis  bien  longtemps  remplacé 
par  baronne,  qui  est  seul  admis.  Ce  sont  les 
traducteurs  de  dépêches  anglaises  qui  font  la 
faute. 

3ia 

Ne  dites  pas  :  tant  qu'à  moi,  mais  quant  à 
moi.  Ne  dites  pas  :  tant  qu'à  me  ranger  de  son 
avis,  mais  quant  à  me  ranger. 


—  140  — 

313 

Station  du  feu  est  la  traduction  trop  littérale 
de  fire  station.  En  France,  où  les  pompiers  sont 
enrégimentés  et  traités  comme  des  soldats,  on 
dit  caserne:  des  pompiers.  Mais  dans  notre  pays 
il  convient  de  dire  poste  des  pompiers.  On  dit 
en  France,  au  lieu  de  hoîte  d'alarme,  appareil 
d'alerte,  avertisseur  d'incendie,  ou  simplement 
avertisseur.  Alarme  ne  s'emploie  guère,  on  dit 
alerte,  sie'nal  d'incendie. 

314 

Utile  distinction  à  faire  : 

"  Collègue  se  dit  de  ceux  qui  sont  revêtus  des 
mêmes  fonctions  ou  qui  ont  une  même  mission  • 
on  est  collègue  dans  un  collège,  au  sénat,  au 
corps  législatif,  dans  un  conseil  municipal,  etc. 
Confrère  se  dit  de  ceux  qui  appartiennent  à  une 
même  société,  à  un  même  corps,  sans  avoir  rien 
à  faire  de  particulier  au  nom  de  cette  société. 
On  est  confrère  à  l'Académie  et  dans  toutes  les 
sociétés  académiques.  Les  hommes  revêtus  des 
mêmes  grades,  comme  les  avocats  entre  eux,  les 


—  141  — 

médecins  entre  eux,  les  marchands  qui  vendent 
les  mêmes  objets,  par  exemple,  les  libraires 
entre  eux,  se  traitent  de  confrères  "  (Littvé). 

315 

Au  cours  d'une  récente  campagne  de  presse 
entreprise  au  sujet  des  Canadiens-français,  nous 
avons  lu  bien  des  fois  des  mots  francophobie, 
francophobe.  Ces  mots  ne  se  trouvent  pas  dans 
les  dictionnaires.  On  y  voit  seulement  gallo- 
phobie,  gallophobe. 

On  entend  tous  les  jours  au  palais  :  ce  témoi- 
gnage, tel  document  est  de  record  ou  est  gardé 
de  record.  L'on  devrait  dire  ctit  dossier,  ou  con- 
servé aux  archives. 

317 

Se  souvenir  que  chariot  n'a  qu'une  r,  et  que 
carriole  et  carrosse  en  ont  chacun  deux.  Les 
ournaux  et  des  écrivains  connus  l'oublient. 


142  — 


:ii8 


Je  suis  tombé  des  nues  quand  j'ai  lu  dans  un 
journal  d'Ottawa  le  prix  du  heiirre  imprhné  sur 
le  marché.  C'était  bien  mal  rendre  l'anglais 
'print  butter.  Il  ne  faut  pas  que  cette  faute 
roule  son  chemin.  On  dira  donc  beurre  moulé, 
beurre  en  pain. 


319 


"  Pendant  qu'on  était  à  élever  le  nouveau 
pôle  pour  hisser  le  drapeau  sur  la  place  Nepean 
hier,  la  grue  se  brisa  et  le  p)ôle  tomba  avec  fra- 
cas sur  le  sol. 

Pôle  est  un  mot  anglais  que  le  journal  a  bru- 
talement introduit  dans  notre  langue  en  l'af- 
fublant d'un  binocle,  pardon,  d'un  accent  circon- 
flexe, et  qu'il  a  par  là  rendu  incompréhensible 
au  lecteur  français.  Il  s'cigit  ici  d'un  poteau, 
d'un  mât,  d'une  flèche,  d'une  hampe. 


—  143 


330 


"  On  demande  des  poseurs  de  briques,  char- 
pentiers, maçons,  manœuvres,  G%rriéreurs,  etc.' 
C'est  dans  une  annonce  que  je  lis  cela  ;  mais  il 
se  lit  et  s'entend  souvent  ailleurs.  Il  faut  car- 
riers. 

S31 

Plusieurs  touristes  qui  sont  allés  en  Europe 
l'an  dernier  à  l'occasion  de  l'Exposition  de  Paris, 
ont,  en  racontant  leur  voyage  dans  les  journaux, 
mentionné  les  îles  Scilly  (the  Scilly  Iles.)  Ils 
devaient  dire  les  îles  Sorlingues  ou  simplement 
les  Sorlingues. 


"  On  dit  que  ce  jugement  va  être  interjeté 
devant  le  Conseil  Privé  d'Angleterre  par  la 
compagnie  Allan." 


—  Ï44  — 

Il  fallait  :  appel  de  ce  jugement  va  être  inter- 
jeté, etc.,  ou  bien  :  la  Compagnie  Allan  va  inter- 
jeter appel,  etc. 

On  n'interjette  pas  un  jugement. 


3*23 


Il  fait  erreur  le  journal  qui  dit  :  "  Notre 
agent  va  passer  au  domicile  de  nos  abonnés  ; 
nous  espérons  que  tous  ceux  qui  sont  endettés 
envers  le  journal  se  feront  un  devoir  de  le 
faciliter  dans  sa  tâche." 

On  facilite  une  chose,  non  une  personne.  Il 
faut,  dans  ce  cas,  lui  faciliter  sa  tâche. 


3^4 


Ne  jamais  dire  qu'un  jury  a  rendu  un  verdict 
de  mortalité  par  suite  de  ceci  ou  de  cela.  C'est 
mort,  décès,  trépas,  qu'on  doit  employer. 


—  145  — 

Très  fréquemment  les  journaux  confondent 
audience  et  auditoire  dans  leurs  comptes-ren- 
dus de  concerts,  de  théâtres,  d'assemblées  pu- 
bliques. C'est  toujours  auditoire  qu'il  faut 
employer  dans  ces  cas  :  un  auditoire  est  l'en- 
semble des  gens  qui  vont  écouter  quelqu'un. 
L'audience  est  soit  l'attention  que  l'on  donne, 
soit  la  réception  que  l'on  accorde  à  ceux  qui  ont 
à  nous  parler  ;  ou  encore  la  séance  d'un  tri- 
bunal. 

Ce  sont  surtout  les  journaux  canadiens  des 
Etats-Unis  qui  confondent  les  deux  termes,  à 
cause  du  mot  anglais  audience,  qui  a  les  deux 
significations. 

Le  verbe  contenancer  n'est  pas  français.  La 
presse,  le  barreau,  les  hommes  publics  l'em- 
ploient cependant  tous  les  jours.  C'est  la  tra- 
duction imitative  de  l'anglais  to  countenance,  qui 
signifie  favoriser,  encourager,  appuyer,  protéger. 
Anglicisme  et  barbarisme  tout  à  la  fois. 


—  146  — 

Calculer  que,  grotesque  anglicisme  !  Je  ne  l'ai 
jamais  vu  imprimé,  mais  je  l'entends  dire  tous 
les  jours  par  des  hommes  censés  instruits.  On 
doit  le  remplacer  par  compter  que,  prévoir  que, 
se  proposer. 

Nous  avons  tort  de  dire  qu'une  personne  a 
été  l'objet,  la  victime,  d'un  assaut  ;  il  faut  dire 
d'une  attaque.  Traduisons  le  terme  légal  assaidt 
and  hattery  par  attaque  et  batterie,  ou  par 
attaque  et  voies  de  fait.  Je  recommande  ceci 
aux  traducteurs  des  lois  et  aux  substituts  du 
procureur-général. 

Je  recommande  surtout  que  l'on  n'écrive 
jamais  assaidf  quand  on  écrit  en  français. 

Peut-on  appeler /o?YY/i  celui  qui  est  détenu 
dans  un  pénitencier  ?  Il  semble  que  oui,  d'après 


—  147  — 

la  délinition  de  Littré  :  malfaiteur  que  la  justice 
condamne  à  des  travaux  auxquels  il  ne  pevit 
se  soustraire.  Il  semble  que  non  d'après  ce  qu'il 
ajoute  :  "  Autrefois  le  forçat  subissait  sa  peine 
dans  les  galères.  .  .  Aujourd'hui  que  les  galères 
n'existent  plus,  les  forçats  sont  ou  employés 
dans  les  arsenaux  militaires  ou  déportés." 

Mais  passe  pour  forçat. 

Ce  qui  ne  saurait  passer,  c'est  le  mot  galérien 
appliqué  à  un  détenu.  Ce  mot  a  fait  le  tour  de 
la  presse  l'an  dernier  à  propos  d'un  suicide  au 
pénitencier  de  Sanit-Vincent  de  Paul. 

Nous  n'avons  pas  de  galères,  par  suite  pas  de 
galériens,  au  Canada. 


:i30 


Je  lis  dans  un  journal  commercial  :  "  On  a 
commencé  à  simialer  des  ventes  d'orbe  nou- 
veau,"  etc.  Orge  nouvelle,  s'il  vous  plaît  !  Orge 
n'est  masculin  que  lorsqu'il  est  suivi  des  parti- 
cipes passés  inondé  (nettoyé,  débarrassé  des 
impuretés  et  des  matières  inutiles)  et  perlé 
(dépouillé  de  ses  pellicules). 


—  148  — 

331 

C'est  peut-être  par  inadvertance  que  plusieurs 
gazettes  écrivent  subordination  pour  suborna- 
tion de  témoins  ;  mais  la  faute  se  répète  bien 
souvent  ! 

On  croit  avoir  reconnu  un  concussionnaire 
américain  dans  un  homme  de  passage  à  Ottawa. 
Le  journal  de  la  capitale  dit  qu'il  paraissait  bien 
approirisionné  d'argent.  Approvisionné  veut 
dire  garni  de  provisions,  et  de  cela  seulement. 
Il  fallait  dire  muni,  pourvu,  garni  d'argent. 

:j:i3 

"  Le  phtstra/je  de  l'école  du  quartier  Dalhousie 
sera  commencé  la  semaine  prochaine."  Plâtrage, 
mon  ami  ! 

Beaucoup  de  personnes  nomment  plastreur 
l'ouvrier  qui  pose  le  plâtre  dans  les  construc- 
tions.   Son  nom  est  plâtrier 


vr. 


—  149  — 

Une  annonce  publiée  depuis  longtemps  dans 
les  journaux  commence  ainsi  :  "  Ce  qui  froisse  un 
plomheur"  Il  îaut  plombier. 


S34 

Il  y  a  deux  fautes  dans  ces  deux  phrases  d'un 
journal  :  "  Notre  Conseil  de  Ville  sera  invité  à 
dire  s'il  préfère  Chicago  à  New- York  comme 
site  de  l'Exposition  de  1892.  Tout  les  maires  de 
nos  principales  villes  ont  reçu  à  ce  sujet  un  cir- 
culaire très  original." 

Site  n'est  pas  le  mot  propre  :  on  devait  em- 
ployer siège  ou  théâtre. 

Circulaire  est  du  féminin  ;  la  plupart  des  mar- 
chands et  des  commis  le  font  cependant  du 
masculin. 


835 

Je  prie  en  grâce  les  journaux  de  se  respecter 
assez  pour  ne  plus  mettre  dans  leurs  colonnes 
d'annonces  grocerie  pour  épicerie,  et  groceur  pour 
épicier.    Ces   mauvaises    expressions    se    lisent 


—  150  — 

parfois  clans  les  gazettes,  souvent  sur  les  ensei- 
gnes de  \'illage,  et  sont  employées  par  les  trois 
quarts  de  la  population. 


836 

L'habitude  est  presque  générale  de  mettre  un 
trait  d'union  après  (//? fi  ou  r/ 7? fe  dans  les  mots 
qui  commencent  par  ces  deux  préfixes.  C'est 
une  faute  :  il  faut  écrire  antichrétien,  antipa- 
triotique, etc.  Il  n'y  a  qu'une  exception  :  anti- 
hois  ou  ante-hois. 

La  même  règle  s'applique  à  tous  les  mots  qui 
ont  le  préfixe  co.  Il  n'y  a  que  deux  mots  qui 
prennent  le  trait  d'union  :  co-aateu/r  et  co-hour- 
geois. 

On  ne  met  le  trait  d'union  dans  aucun  des 
mots  qui  commencent  par  nrchi 

Voici  une  faute  que  je  rencontre  pour  la  pre- 
mière fois  dans  un  journal  ;  je  souhaite  que  ce 
soit  la  dernière  :  "  Il  avait  vendu  la  bête  à  un 
individu  d'Ottawa  qui  est  très  volontiers  de  s'en 


—  151  — 

débarrasser  à  des  conditions  faciles."  Pourquoi 
n'avoir  pas  dit  :  qui  s'en  débarrassera  volontiers, 
ou  :  qui  est  bien  disposé  à  s'en  débarrasser  ? 
Volontiers  est  un  adverbe  et  non  un  adjectif. 

338 


Xe  plus  confondre  j)ervcvsion  et  perversité. 
Perversion,  changement  du  bien  en  mal.  Perver- 
sité, état  de  ce  qui  est  pervers.  Un  honnête 
homme  devient  une  canaille,  —  ce  changement 
est  une  perversion;  son  nouvel  état  moral  est  la 
perversité. 

339 


Un  récit  d'inondation  que  j'ai  sous  les  yeux 
constate  la  destruction  de  cinq  édifices,  lesquels 
étaient  "  une  maison  de  réfugie,  une  oTançre,  une 
étable  et  deux  autres  bâtiments."  De  singuliers 
édifices,  vraiment  !  Voici  la  règle  que  donne  Littré 
pour  distinguer  entre  les  diverses  constructions  : 
"  Le  bâtiment,  c'est  tout  ce  qu'on  bâtit  ;  une  ca- 
bane est  un  petit  bâtiment,  une  caserne  en  peut 
être  un  grand.    U édifice  suppose  plus  d'art,  de 


—  152  — 

grandeur,  d'élévation,  des  matériaux  plus  solides. 
Un  marché  public  qui  n'a  presque  pas  de  hau- 
teur, n'est  qu'un  grand  bâtiment,  l'église  des  In- 
valides est  un  édifice.  Le  monurnent  est  ce  qui 
sert  à  instruire  la  postérité,  ce  qui  reste  comme 
une  marque  de  la  grandeur  des  peuples  ou  des 
hommes  ;  la  porte  Saint-Denis,  l'arc  de  l'Etoile, 
sont  des  monuments  ;  et,  par  extension,  on  donne 
ce  nom  aux  beaux  édifices  et  aux  tombeaux." 

S40 


Peu  de  personnes  parmi  nous  saisissent  la 
différence  qu'il  y  a  entre  f^ite  et  eniplaceinent . 
Nous  employons  presque  invariablement  le  pre- 
mier pour  le  second  ;  nous  disons,  par  exemple, 
que  tel  bâtiment  est  élevé  sur  un  beau  site.  Le 
site,  c'est  un  endroit,  une  partie  de  paysage 
considéré  relativement  à  l'aspect  qu'il  présente, 
à  son  exposition  .•  un  beau  site,  un  site  pitto- 
resque. L'emplacement,  c'est  un  endroit  conve- 
nable pour  construire,  établir  ou  faire  quelque 
chose  :  le  square  Jacques-Cartier  n'est  pas  un 
bon  emplacement  pour  la  statue  de  Nelson. 
C'est  encore  une  place  :  l'emplacement  de  la 
Bastille. 


—  153  — 


341 


Il  y  a  deux  fautes  clans  cette  plirase  :  "  Nous 
sommes  tous  d'accord,  à  part  de  lui."  1^  On  ne 
doit  jamais  mettre  de  après  à  part.  2°  Dans  ce 
sens,  c'est-à-dire  quand  à  part  signifie  excepté, 
il  se  met  toujours  en  tête  de  la  phrase;  il  fallait 
dire  :  à  part  lui,  nous  sommes  tous  d'accord. 

34^ 


De  même  qu'il  ne  faut  pas  confondre  autour 
et  alentour,  ainsi  doit-on  savoir  que  à  travers 
ne  veut  jamais  de  après  lui  et  qu'au  travers  le 
veut  toujours  :  à  travers  les  obstacles,  au  travers 
des  obstacles.  Bossuet  et  Bufïon  ont  péché  contre 
cette  règle;  ne  les  imitons  pas.  Il  n'y  a  pas  lieu 
d'établir  de  distinction  entre  ces  deux  locutions 
prépositives  ;  on  les  emploie  indifféremment. 

3451 

Les  chasseurs  qui  racontent  leurj  exploits 
dans  les  journaux   ne   manquent  jamais,    pour 


~  154  — 

peu  que  le  gibier  ait  donné,  de  parler  des  nom- 
breux voliers  de  canards,  d'outardes,  etc.,  qu'ils 
ont  vus  passer.  Dans  Je  peuple  on  ne  se  sert  pas 
d'autre  mot  :  vm  volier  de  corneilles,  d'étour- 
neaux.  Le  mot  n'est  pas  français  :  c'est  une 
■volée  qu'il  faut  dire. 


344 

C'est  une  faute  assez  ordinaire  de  mettre  un 
accent  circonflexe  sur  Vi  dans  le  mot  ait  (troi- 
sième personne  du  singulier  du  subjonctif  pré- 
sent du  verbe  avoir.) 


345 

On  peut  être  2)réven  u  contre  quelqu'un  ou  en 
sa  faveur,  mais  on  ne  peut  être  préjugé  pour  ou 
contre  lui.  Cependant  on  peut  avoir  des  pré- 
jugés, c'est-à-dire  une  croyance,  une  opinion 
qu'on  s'est  faite  sans  examen,  qui  lui  soit  favo- 
rable ou  défavorable.  Ce  qui  est  inadmissible 
ici,  c'est  la  forme  passive. 


—  155  — 


S46 


Ce  que  nous  nommons  ici  la  hauteur  des  terres 
se  dit  en  France  le  partage  des  eaux,  la  ligne  de 
faîte.  Cette  ligne  est  constituée  par  les  faîtes 
des  montagnes  ou  coteaux  d'une  contrée,  et  elle 
divise  celle-ci  en  deux  régions  Lien  distinctes. 
Hauteur  des  terres  se  disait  cependant  autrefois. 


347 

Littré  dit  que  la  locution  populaire  comme 
tout  est  depuis  longtemps  condamnée.  Il  cite 
l'exemple  suivant  comme  l'un  des  plus  barbares  : 
"  Cette  homme  est  riche  comme  tout,"  pour  est 
très  riche.  Cette  locution  est  employée  par  tout 
le  monde  au  Canada.  Il  est  vrai  que  nous  avons 
l'exemple  de  Dancourt,  qui  a  dit  :  "  Ils  s'en- 
nuient comme  tout  à  ce  camp,"  et  de  Marivaux  : 
"  Voilà  un  petit  mot  qui  me  plaît  comme  tout." 

Littré  rejette  aussi  commie  de  juste.  De  jvMe 
n'est  pas  français,  dit-il,  et  ne  le  devient  pas  da- 
vantage pour  être  joint  k  comme. 


—  156 


348 


L'e  de  lorsqv.e  ne  s'élide  que  devant  il,  elle,  on, 
et  devant  un,  une.  C'est  donc  une  faute  d'écrire  : 
lorsqu'eut  lieu  le  déménagement  ;  lorsqu'on  lui 
ou  son  frère  viendra  ;  lorsqu'attendant  ses  dépê- 
ches ;  lorsqu'Ugolin  fut  condamné  à  mourir  de 
faim  ;  lorsqu'images  et  médailles  leur  étaient 
distribuées,  etc. 

349 


En  outre  de  cela,  qui  se  dit  quelquefois,  est 
une  locution  barbare,  d'après  Littré.  Il  faut 
dire  outre  cela,  ou  simplement  en  outre. 

350 


Quand  tout  le  monde  se  chauffait  avec  du 
bois,  tout  le  monde  appelait  les  poêles  des 
poêles  à  bois.  Aujourd'hui  que  nous  nous  chauf- 
fons avec  du  charbon,  nous  appelons  nos  poêles 
à  charbon,  même  les  plus  petits,  des  fournaises 


—  157  — 

Ce  n'est  pas  exact,  la  fournaise  étant  un  grand 
four  où  brûle  un  feu  ardent. — Mais,  dira-t-on, 
ne  peut-on  nommer  fournaise  le  poêle  entouré 
de  briques,  ordinairement  placé  dans  la  cave,  et 
qui  alimente  les  tuyaux  calorifères  ? — Non,  c'est 
un  'poêle  de  coiistrvction  ou  simplement  un 
calorifère,  car  le  calorifère  est  défini  :  "  appareil 
pour  produire  et  distribuer  la  chaleur." 

:{5i 


—  Quelle  heure  est-il  ? 

—  Cinq  heures  viennent  de  sonner  au  cadran 
du  parlement. 

—  Pardon  !  vous  voulez  dire  à  V horloge  du 
parlement.  Vous  le  savez  comme  moi,  le  cadran 
n'est  qu'un  plan  qui  indique,  au  moyen  de  chif- 
fres et  d'aiguilles,  l'heure  qu'il  est  ;  l'horloge 
seule  sonne  les  heures. 


8oa 

J.-J.  Rousseau  a  dit  :  Je  ne  vois  pas  d'incon- 
vénient de  me  prévenir  du  jour  où  vous  arrive- 
rez. C'est  un  solécisme  ;  il  faut  je  ne   vois  _2^a.s 


—  158  — 

cV inconvénient  à,  ou  je  ne  vois  pas  V inconvé- 
nient de.  Dans  le  premier  cas,  à  est  régi  par  le 
verbe,  dans  le  second  de  est  régi  par  le  nom 
(Littré).  La  faute  de  Ronsseau  se  répète  souvent 
dans  notre  pays. 

On  dit  correctement  :  Votre  mouchoir  sent  le 
magnolia,  et  on  ne  peut  pas  dire  :  Cette  pomme 
goûte  la  fraise.  C'est  Lien  malheureux,  car  il 
existe  tant  de  parité  entre  les  deux  verbes,  et 
chacun  de  nous  fait  cette  faute  si  naturellement  ! 
On  doit  dire  :  Cette  ponune  a  le  goût,  la  saveur 
de  la  fraise.  Mais  la  langue  se  perfectionne,  et  la 
faute  d'aujourd'hui  n'en  sera  peut-être  pas  une 
demain. 

Ne  disons  plus  :  j'ai  eu  beaucoup  de  trouble, 
de  misère,  pour  parvenir  jusqu'au  ministre,  mais 
beaucoup  de  ijeine,  de  difficulté,  de  r)%al.  Ne 
disons  plus  :  permettez  que  je  vous  troid)le  pour 
un  morceau  de  j^ain,  mais  que  je  vous  dérange. 


159  — 


Soô 


Pour,  joint  à  un  mot  qni  exprime  le  temps, 
signifie  jyendant,  mais  avec  le  sens  d'un  futur  : 
je  pars  pour  quinze  jours,  je  vous  interromps 
pour  un  instant,  je  vous  laisse  pour  une  minute. 
Mais  on  ne  saurait  dire  :  il  est  resté  à  Paris  pour 
un  mois,  il  s'est  absenté  pour  une  heure,  il  m'a 
interrompu  pour  plusieurs  minutes,  etc. 


»o6 

Y  a-t-il  quelque  chose  de  plus  horripilant 
que  ces  mots  :  comité  de  -srtii/e  (health  committee), 
médecin  de  santé  (health  officer),  que  nous 
lisons  tous  les  jours  ?  Pourquoi  ne  pas  dire  : 
commission  d'hygiène,  conseil  de  scduhrité 
'publique,  hygiéniste  ijuhlic  ou  municijxd  ?  "  La 
salubrité  publique,  dit  le  dictionnaire,  est  cette 
partie  de  l'hygiène  publique  qui  embrasse  ce  qui 
concerne  les  soins  de  propreté  des  villes,  l'éclai- 
rage, la  surveillance  des  halles  et  marchés,  la 
vente  des  comestibles,  les  falsifications  et  sophis- 


—  160  — 

tications  des  aliments  et  des  boissons  ;  les  inhu- 
mations, constructions  des  rues,  habitations, 
égouts,  canaux,  institutions  et  établissements 
publics  divers,  les  prisons,  les  hôpitaux,  hospices, 
salles  d'asile  ;  la  prostitution;  les  mesures  con- 
cernant les  épidémies,  les  vaccinations." 

Officier  de  santé  se  dit  en  France  d'un  méde- 
cin d'un  rang  au-dessous  de  celui  de  docteur  en 
médecine.  Il  s'emploie  surtour  sur  mer. 


n^t 


La  jonction  de  deux  chemins  de  fer  ou  de 
deux  bateaux,  ou  d'un  chemin  de  fer  et  d'un 
bateau,  pour  le  trafic,  se  nomme  r  accorde  me  nt. 
Le  Pacitique  Canadien  et  l'Atlantique  Canadien 
font  raccordement  à  Saint- Poly carpe  ;  il  y  a 
raccordement  à  tel  endroit.  Nous  autres,  gens 
et  journaux  du  Canada,  nous  disons  connexion 
quand  encore  nous  ne  faisons  pas  pis  en  écrivant 
connection. 


161  — 


*S5S 


Vous  hésitez  parfois,  ne  sachant  si  vous  devez 
placer  l'adjectif  autre,  employé  avec  un  nom  de 
nombre,  avant  ou  après  ce  nombre  :  Son  revenu 
s'élevait  à  six  mille  francs,  dont  il  donnait  deux 
mille  aux  pauvres  et  se  réservait.  .  .  .les  quatre 
OAttres  ?  ou  les  autres  quatre  ?  La  règle,  fréquem- 
ment enfreinte,  est  que  l'adjectif  se  met  toujours 
après  le  nombre  :  on  dira  donc  les  quatre  autres. 


S59 


On  accapare  une  chose,  on  ne  s'accapare  pas 
cette  chose,  encore  moins  s'en  accapare-t-on. 
C'est  ce  qu'ignorait  le  journaliste  qui  a  écrit  : 
"  Un  journaliste  de  Montréal  saœajxirait  même, 
l'autre  jour,  de  tout  notre  article  sur  la  confé- 
rence de  M.  N."  Pourquoi  n'avoir  pas  dit  s'em- 
parait ? 

6 


—  162 


3€0 


A  ceux  auxjuels  répugne  l'emploi  du  mot  ger- 
ryriumdermg,  je  propose  cette  traduction  :  re- 
maniement, répartition  des  districts  ou  collèges 
électoraux,  des  circonscriptions  électorales;  re- 
constitution topographique  de  l'électorat.  J'ai 
lu  cette  dernière  expression  dans  un  journal  pa- 
risien. 

361 

Cesser  de  dire  :  ]QCori8€'ns  à  ce  que  ;  toujours 
dire  :  je  consens  que. 

36*^ 


Certains  mots  latins  francisés  ont  leurs  ca- 
prices d'épellation  et  doivent  s'écrire  avec  ou  sans 
italiques,  avec  ou  sans  accent,  avec  ou  sans^ma- 
juscule,  avec  ou  ans  trait  d'union,  ainsi  qu'il  suit  : 


—  1C3  — 

triduuin  ou  triduo  ;  Pater  ;  Ave  ;  Te  Deum  ; 
credo  ;  Confiieor  ;  angélus  ou  angélus  ;  De  pro- 
fundis  ;  bénédicité  (s)  ;  miserere  (s)  ;  Salve  (s)  ; 
in  pace  ;  motu  proprio  ;  ex-voto  ;  ad  patres  ;  ad 
hoc  :  ad  honores  ;  ad  honiinem  ;  paréatis  ;  allé- 
luia (s)  ;  extra  ;  mémento  (s)  ;  ab  hoc  et  ab  hac  ; 
mémorandum  (s)  ;  amen  (mot  hébraïque  latinisé)  ; 
Sanctus  ;  coram  populo  :  agnus  Dei  :  vice  versa 
introït  ;  ad  libitum  ;  ad  rem  ;  in-folio  ;  in-quarto  ; 
in-octavo  ;  in-plano  ;  in  partibus  ;  à  priori  ;  à 
posteriori;  nota  benè  ;  magnificat;  lavabo  (s); 
gloria  patri  ;  Kyrié-éléison  (terme  grec)  ;  ex- 
abrupto  ;  ex  cathedra  ;  ex  -  professo  ;  exeat  ; 
exequatur  ;  pro  Deo  ;  in-extenso  ;  nemine  con- 
tradicente  ;  desideratum,  desiderata  (pi.)  ;  ecce 
homo  ;  habeas  corpus  ;  item  ;  idem  ;  ibidem  ;  tu 
autem  ;  ab  irato  ;  in  extremis;  extra-muros  ; 
ipso  facto. 

Les   mots   suivis    d'une    «    entre     parenthèse 
prennent  cette  lettre  comme  marque  du  pluriel. 


363 

Dit-on  à  Montréal  et  à  Québec,  comme  on  dit 
à  Ottawa  :  acheter  quelque  chose  en  approbation» 


—  164  ^ 

s 3  faire  envoyer  des  marchandises  en  approba- 
tion ?  Habituons-nous  à  dire  à  V épreuve,  à 
l'essai,  et  nous  nous  débarrasserons  ainsi  d'un 
anglicisme. 


Il  y  a  bien  assez  que  l'on  fivocloque  et  skat- 
ingrinqwe  à  Paris,  sans  qu'au  Canada  l'on 
éjvyilr'igJdlse.  Pour  l'amour  du  bon  ssn-.,  de 
Toreille  et  du  langage,  trêve  de  barbaris  .les  à 
l'anglaise  1 

Au  lieu  d'éqanlrifjhtiste,  d'équalrighteur,  que 
nos  jou-maux  n'emploient-ils  '  pas  le  mot  égali- 
tdire,  qui  signifie  partisan  de  l'égalité  ?  Pourquoi 
ne  pas  créer  le  mot  égaliste,  qui  aurait  le  m3me 
sens  ?  Veut-on  un  terme  d'apparence  plus  savante, 
au  radical  latin,  et  qui  rende  bien  le  sens  que 
l'on  a  en  vue  ?  Prenons jiissimilistejussimil  lire. 
N'importe  lequel  des  mots  proposés  vaut  m' eux 
que  l'affreux  équalrightiste  et  le  hideux  eg  tf/N 
rightewr.  ^ 

1.  Je  suis  l'auteur  de  cette  proposition,  qui  a  paru  da  i3  la 
Patrie,  mais  non  de  la  chronique  signée  :  Pierre  S  .xs- 
FAÇON,  dans  laquelle  on  l'a  inte.-2alée. — A.  L. 


—  165  — 


365 


L'habitude  s'introduit  d'appeler  tramps,  de 
l'anglais,  ces  personnes  sans  état,  sans  domicile, 
sans  aveu,  qui  jettent  souvent  la  terreur  dans 
nos  campagnes.  Ce  sont  tout  bonnement  des 
vagabonds. 

(Pour  l'année  hisseœtile). 

"  Notre  reporter  s'est  rendu  hier  soir  à  l'hôtel" 
de-ville.  On  annonçait  depuis  quelques  jours 
que  la  séance  du  conseil-de-ville  serait  très- 
intéressante.  Trente-et-un  de  nos  édiles  étaient 
réunis  dans  la  grande  salle  de  l'entre-sol.  Les 
uns  chantaient,  sifflaient,  lançaient  des  boules 
de  papier,  comme  des  mal-appris  ;  les  autres, 
gourmés  dans  leurs  faux  -  cols  gigantesques, 
étaient  o^raves  comme  des  o^ardes-des-sceaux  de 
l'ancien  régime.  Les  sténographes  affilaient 
leurs  crayons  pour  écrire  le  compte  -  rendu  de 
l'orageuse  séance  qui  se  préparait.  Le  coup-d'œil 


—  166  — 

était  tout-à-fait  curieux.    On  tapageait  bien  au- 
dedanS;  mais  au- dehors  tout  semblait  tranquille. 

"  La  .séance  va  s'ouvrir  dans  un  petit  quart- 
d'heure.  Tout-à-coup  une  vitre  vole  en  éclats, 
et  un  projectile  tombe  sur  la  table  du  greffier  ; 
c'est  une  pierre-ponce,  grosse  comme  les  deux 
poings.  En  un  clin  -  d'œil  toute  la  salle  est 
debout.  Xon  -  seulement  le  maire,  le  greffier, 
l'avocat  de  la  municipalité,  les  journalistes, 
mais  les  deux -tiers,  les  trois-quarts  des  sus- dits 
échevins,  effarés,  à  demi  -  morts  de  frayeur, 
croyant  à  une  émeute,  s'enfuient  dans  toutes 
les  directions.  Quelqu'un  crie  :  Sauve-qui-peut  ! 
Il  y  a  plus  de  bruit  que  dans  un  corps-de-garde. 
C'est  une  bousculade  générale,  tout  est  sens- 
dessus-dessous. 

'•'  Notre  rep  orter  n'a  pas  perdu  la  tête,  il  a 
pris  son  parti  de  ce  contre-temps  et  a  suivi  les 
événements.  La  salle  s'est  évacuée  rapidement  ; 
il  y  a  même  des  gens  qui,  entraînés  par  la 
poussée,  sont  sortis  sens-devant-derrière. 

"  Pas  plus  d'émeute  que  sur  la  main.  La  rue 
est  déserte.  Seul  en  ce  moment  passe  un  pied-bot, 
robuste  porte-faix  qui  tient  à  chaque  main  un 
lourd  porte-manteau.  Il  n'est  pas  probable  que 
ce  soit  là  le  coupable  ;  mais  on  l'interroge  et  il 


—  167  — 

répond  qu'il  débarjue  à  l'instant  d'un  bateau-à- 
vapcur  où  le  rédacteur-en-chef  du  TraÀt-cVv/aion 
l'a  envoyé  chercher  ses  colis.  On  traite  cette 
histoire  d'archi-folichonne,  de  conte  de  ma 
grand'-mère.  Le  maire  le  fait  fouiller  par  un 
sergent-de-viile,  qui  découvre  dans  ses  bottes 
deux  passe-ports  faits  à  des  noms  différents  ;  on 
en  conclut  que  c'est  un  rien-qui-vaille,  et  l'on 
parle  de  le  mener  au  poste  de  police.  Ce  faire- 
le-faut  lui  répugne  terriblement  ;  il  s'adresse 
à  tous  les  saints,  promet  une  grand'-messe  à 
saint- Jossph,  menace  de  porter  l'affaire  à  la 
connaissance  des  tribunaux,  de  la  mère-patrie, 
de  l'univers.  Bref,  on  le  mène  coucher  au  violon. 
Il  parait  qu'on  lui  a  découvert  un  complice.  Les 
co-accusés  comparaîtront  aujourd'hui  devant  le 
recorder  pour  rendre  compte  de  leurs  hauts- 
faits."  (Tiré  possiblement  de  n  importe  lequel 
de  nos  joihvnaibx). 

Combien  de  fautes  mes  lecteurs  ont  -  ils 
reconnues  dans  ce  récit  tout  d'invention  ?  En 
ont-ils  vu  une  seule  ?  Laquelle  ? 

Réponse  :  il  s'y  trouve  cinquante-sept  traits 
d'union,  et  il  n'en  faut  pas  un  seul. 


POSTFACE 


Sous  le  titre  sans  prétention  de  A  travers  la 
presse  canadienne,  M.  Pierre  Foncin,  secrétaire^ 
de  l'Alliance  française,  publie  dans  la  Revue 
Bleue  une  très  remarquable  étude  sur  nos  jour- 
naux. De  même  que  les  amis  dont  je  publie  les 
lettres  en  préface,  il  met  le  doigt  sur  des  fautes 
que  je  n'ai  pas  mentionnées.  C'est  à  ce  titre  que 
j'extrais  de  son  écrit,  si  bienveillant  pour  nous, 
le  chapitre  suivant  : 

"  L'usage  obstiné  de  la  langue  française  a  été  le 
préservatif  tout-puissant  de  la  nationalité  cana- 
dienne ;  il  sera  pour  l'avenir  sa  meilleure  sauve- 
garde.    Chacun  sait  que  là-bas,  et  surtout  dans  les- 


--  169  — 

campagnes,  notre  langue  a  conservé  une  saveur 
parlicuiière  d'archaïsme  ;  elle  l'a  empruntée  aux 
dialectes  provinciaux  du  XVIIe  siècle  que  par- 
laient  pour  la  plupart  les  premiers  colons 

"  Lisez-vous  les  faits  divers  ?  Vous  verrez  que 
à  la  hnmanie  signifie  à  la  brune,  qu'une  cage  est  un 
radeau,  qu'une  claque  est  une  chaussure  que  l'on 
met  par-dessus  sa  chaussure  oïdinaire.  Les  an- 
nonces ?  Il  y  est  sans  cesse  question  de  hardes 
(vêtements),  de  hardes  faites  (confections),  de  gar- 
gotes (restaurants),  de  breuvages  (liqueurs,  bois- 
sons), d'occupations  très  payantes  (emplois  très  lu- 
cratifs), d'assurances  contre  le  feu,  etc.  Il  faut  savoir 
aussi  que  Vorignal  (écrit  souvent,  mais  à  tort,  ori- 
ginal) est  une  sorte  d'élan  ;  que  le  caribou  est  le 
nom  canadien  du  renne  ;  qu'une  place  d'eau  est 
une  ville  d'été,  une  station  de  bains  de  mer  ou 
d'eau  douce  ;  que  la  poudrerie  q^x  de  la  neige  en 
poudre  chassée  par  le  vent  ;  que  cas^-er  la  terre, 
c'est  la  défricher  ;  qu'une  barge  est  une  sorte  do 
bateau  plat;  qu'un  barachois  est  un  étang  formé  au 
bord  de  la  mer,  à  l'embouchure  d'une  rivière  ; 
qu'une  galante  femme  est  une  femme  ornée  de  toutcs^ 
les  veruis. 

"  Voici  d'autres  locutions  (prises  au  hasard  dan» 
divers  journaux)  qui  ont  un  caractère  d'ancienneté, 
d'exotisme  ou  de  naïveté  curieux  :  *•  Grâce  aux 
octrois  (dons)  généreux  de  quelques  municipalités^ 


170 


— Les  habitants  peuvent  en  aucun  temps,  mais 
poui-  leur  nourriture  seulement,  tuer  aucun  des 
oiseaux  susmentionnés. — Il  appert  que... — Dans  la 
bâtisse  de...  —  Cheval  à  vendre  à  dos  conditions  très 
libérales...  —M.  X.  a  été  notifié  que...  —  M.  Y.  .s'est 
infligéwwQ  blessure  grave...  —  Il  e-t  rumeur  que...  — 
Une  intermission  (ontr'acte). — Un  élévateur  (ascen- 
seur). —  Il  y  avait/riC(?^  chez...  (repas  avec  invités). 
—  On  demande  six  bonnes  filles  pour  conduire  des 
machines  à  coudre.  —  On  demande  cent  jolies  jeunes 
fitles  pour  figurer  dans  la  pièce  à  grand  spectacle 
Tht  WaJer  Queen. — On  demande  doux  filles  générales 
(servantes  à  tout  faire).— ^[Ue  X.,  modiste,  se  chai-ge 
de  la  confection  des  toilettes  de  dames  en  général 
(on  voit  que  les  niodistes  sont  en  même  temps  tail- 
leu-es  et  couturières).  —  On  a  besoin  de  bons  pi'es. 
seurs  dans  le  département  des  tailleurs. — Chemin  de 
fer  intercolonial  :  Arrangements  (service)  d'hiver. — 
Mlle  ]Sr.  est  montée  dans  la  boîte  aux  témoins  (sorte 
de  petite  tribune  où  les  témoins  viennent  déposer 
devant  le  tribunal). — Lots  de  terre  mis  en  vente  à 
des  prix  variant  de  deux  dollars  et  demi  par  acre, 
en  montant. — Il  y  aura  cette  année  un  surplus  dans 
le  budget,  etc.,  etc..  " 

"Et  cette  annonce  qui  en  Fiance  passerait  pour 
une  lugubre  facétie  !  ^*  Cercueils  !  Cercueils  ! 
Jaurai  constamment  en  main  dos  cercueils  de  toutes 
les  dimensions  et  à  des  prix   très  bas.     Je  n'em- 


—  171  — 

ploierai  que  du  bois  sec  Qt  de  première  classe.  Je  ga- 
rantis mon  ouvrage  parfait.  Qu'on  s'empresse  de 
venir  me  rendre  une  visite,  je  promets  à  tous  ceux 
qui  achètei'ont  chez  moi  pleine  et  entière  satisfac- 
tion." 

"  Ce  n'est  pas  tout.  Bon  nombre  de  mots  anglais 
ont  fait  invasion  dans  la  langue  française  cana- 
dienne, et,  bien  qu'elle  les  expulse  déplus  en  plus, 
depuis  qu'elle  possède  une  littérature  nationale 
et  de  véritables  écrivains,  tant  s'en  faut  encore 
qu'elle  soit  complètement  expurgée.  Un  Acadien 
racontait  en  ces  termes  un  accident  qui  lui  était 
arrivé  :  *'  Je  voudrais  bien  vous  driver  (promener 
en  voiture),  mais  ce  matin  j'attelai  mon  teaîn  (ma 
voiture),  et  à  peine  sortie  de  la  stable  (écurie),  le 
cheval  prend  sa  race  (course).  Ah  !  ça  allai t/asf 
(vite).  Bb  quand  je  vins  pour  dévirer  le  corner 
(tournant),  je  tombai  par  terre,  le  cheval  partit 
tout  seul.  Il  fat  pogné  (blessé)  et  je  fiisjindé  (mis  à 
l'Amende)."  Sauf  dévirer  et  pogné,  qui  sont  du 
vieux  fi-ançais,  tous  les  autres  mots  qui  surprennent 
le  lecteur  sont  d'origine  anglaise. 

"  Hâtons-nous  de  dire  que  ce  charabia  est  l'ex- 
ception, même  en  Acadie.  Cependant  les  jour- 
naux canadiens,  surtout  dans  leurs  annonces,  sont 
fréquemment  émaillés  de  locutions  britanniques  Oi 
américaines.  Exemple  :  —  Dans  le  budget,  un 
article  de  comp'e  s'rpp-:Me  un  item. — Une  épicerie 


—  172  — 

est  une  grocerie. — Un  gi'cffier  est  un  recorder. — 
Dans  une  énumération  de  me  blés,  on  dira  :  un 
ménage  complet,  un  set  (garniture)  de  salon,  six 
chaises  de  salle  à  dîner,  un  sideboard  (buffet),  une 
grande  berçante,  bizarre  mélange  de  mots  anglais 
et  de  termes  du  cru. — Une  dispute,  une  rixe  est 
qualifiée  de  scène  disgracieuse.— JJ ne  carriole  (ca- 
briolet) s'attelle  en  tandem  (avec  doux  chevaux  en 
flèche). — Un  caucus,  comme  aux  Etals-Unis,  est  un 
groupe  d'hommes  politiques  ayant  la  même  opi- 
nion.—Un  homestead  est  une  ferme,  un  saloon  un 
salon,  un  job  une  occasion  dans  une  vente  ;  des 
gants  de  kid  sont  des  gants  de  chevreau,  etc. 
Inutile  de  multiplier  ces  citations." 


Il   y  a    quelques    légères    erreurs    là-dedans, 
mais  il  n'importe  pas  de  les  relever. 


IISrDEX 


{Le  chiffre  indigne  le  numéro  de  la  faute.) 


Abuser 250 

Accaparer  (s")   de 359 

Accent    circon- 
flexe    3,    111,  344 

Accents 302 

A-conip^e 32 

Acoustique 172 

Acter „ 188 

Addresser 197 

Aide 220 

Aïeuls 23 

Airs 209 

Ait 344 

Algiers 161 

Allégeance 47 

Amalgamation    232 

Ambûche 202 

Ambuscade    202 

Amérique  britannique 

du  Nord 310 

Ammoniaque 272 


Ammunition . 166 

Angliciser,,    anglifier...  240 

Augustory 145 

Année   fisca'e   91 

Alite  Cpréfîxe) 336 

Anti  (préfixe) 336 

Anticiper    246 

Antwerp.. 161 

Anxieux 124 

A  part  de 341 

Apologie 148 

Apparoir    52 

Appartement 205 

Application 283 

Appointements 194 

Approbation 363 

Approvisionné    332 

A  propos 261 

Archevêque 31 

Archi    (préfixe) 336 

Archidiocèse 31 


—  174 


Arguer    82 

Argumenter 82 

Argent 211 

Argents 138 

Arôme 44 

A>pect 180 

Assault .  ..  =  ..,..   328 

Assermenter 118 

Aslérique 207 

Athens    161 

Atmosphère 107 

Atome 3 

A  travers  de 342 

Attraction 147 

Aucun 219 

Audience 325 

Autre 35-^ 

Aux  pieds —     44 

Avant  que 24 

Avocasser 1 3fi 

Ayion.=,    aviez    . . 255 

Bagage     (cli  ambre 

du) 78 

Baîloter 150 

Ballustre    44 

Barounesse 311 

Base 3 

Bâtiment 339 

Berne  (en) 303 

Beurre    irnprimé 318 

Billet    promissoire    ...  271 

Bisaïeux 23 

Bloc... 152 

Boîte    aux    témoins...  96 

Boîte   d'alarme 313 

Bombe    57 

Bôme.«,  baumes 223 

Bouffes   43 

Bouilloire 57 


Bouncer 76 

Branche 70 

Brézil 161 

Brique   à  feu 284 

Bris  de   promesse 302 

Cabale 40 

Cadran    351 

Cniro 161 

Calculer  que... 327 

Calomrie  fausse    157 

Canard    57 

Canevas   278 

Carosse 317 

Carriéreurs    320 

Carriole   317 

Carroucel 230 

Caslier     un     chèque...  190 

Castor    (huile  de) 67 

Caution 41 

Chacun    s'accorde 77 

Change   259 

Changer  un    chèque  ..  190 

Chaque 112 

Charretier. 74 

Charriot 317 

Chartre 301 

Chefd'œuvres    155 

Chlorure 99 

Chrysostôme 3 

Chute   3 

Cîme   3 

Circulaire 3:v4 

Clairer    156 

Clerc 267 

C:ub...., 221 

Co  (préfixe) 336 

Cocotier 186 

Coërcion 254 

Collecter 122 


—  175 


Collecteur 275 

Collègue 314 

Collet 132 

Comices 308 

Comité  de  santé 356 

Comme  de  juste 347 

Comme  tout 34? 

Complétion    35 

Complimentaire 233 

Condoléances 22 

Coiiducleur    de 


malle? 

Conformité 
Confrère  . . 


153 

.   234 

314 

Connection 357 

Connétable 9 

Consentir  à  ce  que. 381 

Conséqueiit    ....    175 

Consistant  . .. .  210 

Constituants . 124: 

Contenancer .  ....   326 

Contracteur   ........      81 

Copie  _... 222 

Cornétiste 3  4 

Corporation ....     30 

Correspondance   parle- 

îiienlaire 18  j 

Coteau    3 

Coudre    154 

Courir 285 

Cretonne. 245 

Crique 131 

Crochet  ., 98 

Croire 261 

Cuiller  pour   souliers.  184 
Cuir  à  patente 144 

Dame 1 65 

Dames  et  demoiselles  .   163 
Dance 90 


Dangereux 226 

D'avantage 177 

Débouter.. 62 

Décombres 214 

Défalcation    305 

Demander  cà  ce  que 89 

Demie 56 

Dénigration   „ 297 

Dépêche 181 

Dépôt 270 

Dévotieuse 93 

Directoire  , 88 

Disgrâce....  ........   276 

Disparution 292 

Dit  (le  dit,  susdit)....     72 

Divorcer  d'avec 176 

Dommage 50 

Dumb   be!l 219 

Dû-',  ducs 87 

Echange .,   259 

Echanger  un  chèque  .  190 

Echanger  du  linge. 212 

Echappatoire........    167 

Edifice 339 

Editorial ....      63 

Kgoût 3 

Emaner 4 

Embassadeur 202 

Emplacement 340 

Emplâtre  .... 214 

En  approbation 363 

En  force 140 

Engin 109 

En  outre  de 349 

Enquête  contre 105 

En   preuve 309 

En  rapport  avec 170 

Enregistrée  (lettre).  .  .     79 
Enregistrer 201 


176  — 


ï^ntr'autres 95 

Epergne 49 

Episode 214 

Equalrighteur 364 

ï:-calier 214; 

Esclandre 295 

Espace 214 

Essuie-mains 179 

Estampille 265 

Eventail 214  ! 

Evêque,  évêcLé 31 

Evidence, 1  ! 

Exercise 90  ' 

Exhibition 73  > 

Exhorbitant 242, 

Exhubérant 242  ; 

Exonorer 236 

Expédition ISl 

Exploitateur IG  ' 

Extra 2G7  : 

Fabriquant 281 

Faciliter 323 

Fait   que 189 

Fatiguant 281 

Faute  de  ne 69 

Ferblanc 223 

Feu,  feue 53 

File :.  274 

Filer 200 

Fleur 146 

Forçat 329 

Fournaise 350 

Francophobe 315 

Gages 191 

Calant 12.i 

Galérien 329 

Gallerie 127 

Oauthier 159 


Gazetler 92 

Gente 143 

Geôlier 84 

Gérer   à 125 

Gerrvmandering 360 

Gestes 241 

Ghent 161 

Goûter 353 

Graduer 64 

Groceur,  grocerie 333 

Habilité 191 

Hague 161 

Hardes  faites 296 

Hauteur  des  terres 346 

Havre 3 

Hazard 282 

Héro 257 

Honoraires 194 

Hose 280 

Hûtellier 173 

Hughes 244 

Huile  de    charbon 121 

Huilier 7 

Huissier 6 

Hydrant 5 

Identifier 261 

Idiome 3 

Incendiât 224 

Incendie 214 

Inclu,    exclus    158 

Inconvénient  de 352 

Incorporation 206 

Infatiguable 281 

Ingénieur 193 

Inj  urier 290 

Insigne 100 

Insistera  ce  que 135 

Interjeter 322 


177  — 


Inlcrvalle 2U 

Intriguant 2^1 

Introdnire 1  !  (> 

Investir '^9;-) 

rtaliques 8<)2 

Item 28',» 


;ic; 


Jalon? 

Jonir 

Juger  (le  . 
Juré,  jui'v 


2  OS 

4  2 

2G1 


Kiosque 27'J 

La uiioureux 1  (  :> 

Le  dit 72 

Legliorn 161 

Légjplîitcr 2!)9  ; 

J.eiie  enregi-trée 7!) 

Lettre   uiorie 225  \ 

Libe! 14  | 

]>ibrairie Ho 

Liceiise 90  < 

Ligne  il'atfaires ]  7^^ 

Linceuil ir.2  '' 

Local lui 

Loquet 187  i 

Lorsque H-l  8  , 

Lyons IGl  j 

Mairerie 285  j 

Mai-O' 129  i 

Majuscule- lOG  171.Hr)2  ; 

Maladif HO; 

Malgré  que 45  | 

Malle,  lualler 251  I 

Mandions 1  60  ! 

MatKiuer  quelqu'un  .  .  243  j 

Marguiller 48' 

Marier 54 


Marseille- IG! 

Matins 2(1 

Mecca .      IGl 

Mé.leciu    (le    santé ;-'>5G 

Mélanclioli(]ue    LS 

Mc'iiibi'e   pour 227 

Mets ;î 

Mi>ère ;>;"4 

McëUe 254 

Moi    jiour   un 71 

Mon  dit    72 

Monopoliseur 120 

Monsieur,    uuulanie  .  .  a07 

ûlonuinent '.'.V.^ 

Mortaiité 324 

Mots  latins :-:G2 

M  Otto 5S 

j\loulin  à  coudre 80 

Navrant 3 

Néga'ion    ne..., '^94 

Nicholas 13 

Nord- A  tnérique 310 

Nouibrer IGl 

Notice 19 

Notifier 2(,8 

Noyade 102 

Objecter  (s') 2:.2 

Observer  que. 1^2 

Odorant,  odoriférant  ..  28 

Offre 139 

Opérateur  de  télégrajjbe  55 

Oj.éraiion    (en) 38 

Opposer -GO 

Oppressé 3(  (j 

i'vge 330 

Oreiller 2J4 

Orlii-iner (il 

Oser 3 


17.S 


Otage •> 

Outrepas.-cr \>'.\ 

Ouvernue    51 

Par 20 

Parapet 204 

Pareil 2t)S 

Parleiiiciitaire    165 

Part (o  I 

Partir ...  1"  i 

Paru    bel.e 11:^ 

Paschal !■•! 

Patriotique 1^0 

Pairoui.^^er 108  . 

Paviliou  de.s  patineur.-^  i  04  j 

Payer  uu  coiiiplinjent.  l--54i 

PeiLsion =  ..  13 

J^erfeetiou  (à  lai 2G3 

Per.-^iet)ne> 20S  , 

Per.-ifflage &; 

Perver.'sion H3S 

Picotte 208  , 

Pilier 101 

Pilot 70 

Place  d'eaux 269  ; 

PIai.=ant 4(1  ! 

Plant 280  : 

Plaslrage,  pla>treur  .  .  H8'i  | 

Ploiubeur -'BH  ! 

Pluriel  de  certain*  mots  117  ! 

Plutôt  et  plus  tôt 192  I 

Foie 319' 

Polluer 2731 

Po.sitif 65' 

Poteau 3 

Pour 355  i 

Pouvoir  d'eau 133 

Pratiquer 199 

Pr;-jugé H45  , 

Prendre  un  portrait .  .  .  23d  : 


Préte.xte 277 

P)-euve  (en,' . ;i09 

Procédé;* 217 

Profondément. 226 

Progre.5.-^er  favorab'e- 

menl lUl-l- 

Prolhonotaire j«'6 

Piipîire 8 

Qua'itieaiiou ..    .  l'JS 

Quelque ls.25 

Quelque.^  foi.>< 2(i2 

P.ace 2l;{ 

Rappeler   une    loi G() 

Rappeler  (çej  de 248 

Rapport  avec  ie). 170 

Razoir... 282 

Rel.el 14 

Réclame 8 

Record 816 

Recorder 1-12 

Recouvrir           .  , 300 

Registre."^ 201 

Ren^arquer  que i  82 

René 85 

Rencontrer 21 

Rémunérer l(j:< 

Réparage (iO 

Résidence Ml 

Rester  à     i  11 

Résumer  le  débat 285 

Rets 3 

Revenger  (se) 87 

Rond  "à    patiner 104 

Saint 94 

Salle 129 

Salle  à  dîner 130 

Sans  que 24 


~  179  — 


Sa.'^sepaniie 258  î 

Satisfait  que 29 

Saucier 25H  | 

Sciiolaire.. 9  ! 

Sciliy  Islanrls. ...  S2l 

Secret  lire  privé 2«)G 

Semence^; 228 

^'endormir 15 1 

S'en  un  ver 1^'7 

Sépulcliral IH 

Ser^rent    de  couleui".  287 

Serviette 179 

Set 17 

Si   il -.Hl 

Sit'- XU,  3^0 

Skatiug  riiik 104 

Soirs  . 2<i 

Sortir U 

Souffrant 286 

Souffre 218 

Sous  ces  circoustauces  217 

St.  Pierre  de  Miqueluii  215  : 

Station    du    feu oli!  ! 

Stand 5;)  ] 

Subir 271 

Subordination •'îHl   | 

Sud-Auiérique ;-5 1  0  j 

Sulpliuriqiie 97  ' 

Supporter 149  [ 

Sur    un  journal 216  ! 

Susdit 72  I 

Système 3; 

Tangiers 161 

'J'ansy 145 

Tant    qu'à o  1 2 


Tarrière 126 

Te 12 

Ternie ...„   211 

Thème 8 

Tinibre 265 

Tire 237 

Tônie... 3 

Tondre.. 15 

Tourne-clef 2i^l 

Tratfic 196 

Traticant 281 

Trait  d'union  12,336.362,366 

Traiietnent 194 

Transiger 178 

Ti'éma 254 

Trisaïeux 23 

Trouble 354 

^^a  sans    dire 239 

Vasistas 119 

Venimeux. Iti9 

Venise 25(> 

Vétéran   115 

Veuve  de  feu. 3* 

Vice    ver-â 3 

Vilenies 288 

Vitraux 195 

Volier     343 

Volontiers 337 

Volte-face 2 

Voîeur 75 

Vraîmeiit 3 

Vu 3 

Zone 3 


'W^"^ 


J 


Bibliothèques 

Université  d'Ottawa 

Echéance 


DEC  1  0  1999' 
MV  2  1 19519 


Libraries 

University  of  Ottawa 

Date  Due 


a3900  3     00L,^3è7k7b