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Full text of "Fin du Répertoire du Théâtre Français, avec un nouveau choix des pièces des autres théâtres"

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^ 


FIN 

DU    RÉPERTOIRE 


BV 


THÉÂTRE  FRANÇAIS. 


34. 


»M«%W^« 


SENLIS, 

IMPRIMERIE  STÉRÉOTYPE  DE  TREMBLÂT. 


^    Printed   in    ï^mnce. 

A 


( 


FIN 

DU  RÉPERTOIRE 

THEATRE  FRANÇAIS, 

AVEC  UN  NOUVEAU  CHOIX  DES  PIÈCES  DES  AUTRES 

THÉÂTRES , 

ba8ssmbx.£e«  pae  m.  L£P£INTR£. 
VAUDEVILLES.  —  TOME  UI. 


A  PA.RIS, 

CHEZ  M"Π VEUVE  DABO, 

A  LA  UBBAIBIB  flSiBionPB,'mïE  DU  FOr-DE-FEB  ,  n<^  l/^j 


>v\V/ 


:.:iART 


.À.  ; 


K 


I  ;  \-iA  AND 


PIERRE, 

PAUL  ET  JEAN, 

COMÉDIE  EN  DEUX  ACTES , 

MÊL^E  DS  VAtlUSVILLES,  ^ 

Pak  mm.  SEWRIN  et  OURRY  ; 

Bepnétaitée ,  ^potBt  k  première  fois,  sur  le  théâtre 
du  VaoaeyiUe  »  le  3  novenabre  i8ai» 


F.  Tan^leTlIlts*  3* 


•■Mapa 


PERSONNAGES. 


LE  GÉNÉRAL  BUISSON. 

PAUL  BUISSON,  fabricant  à Quimper. 

BIBI,     ■_      \        .     .   t 

ALISON,  } 

PIERRE  BUISSON,  fermier. 

MARIE-JEANNE,  femme  de  Boisson. 

TIENNETTE,  fille  de  Buisson. 

M.  VERRÀDEC. 

M"*  YERUADEC. 

HENRI,  leur  fils. 


PIERRE, 

PAUL  ET  JEAN, 

COMÉDIE. 

acte:  PilEMIEIt 

le  tKéâbre  Kpiaiseole ,  à  «Iroite  êa  spectateur ,  une 
cbaiioiière  avec  une  grange  ;  à  gauche ,  les  bâtimens 
d^une  fenne ,  avec  cette  affiche  sur  la  porte  :  Petite 
F^rme  à  t^endre  ;  dans  le  fond  y  une  mamn  foomr- 
ge«se  ,  dont  tous  les  volets ,  peints  en  vert  y  son 
fermés  ;  on  voit  sur  b  porte  cette  a0tche  :  JoUe 
Maison  bourj^ernse  à  vendre^. 


SCÈNE  ï. 

TIENNËTTl»  seule,  et  iitant  avec  un  rouet 
devant  la  porte  de  la  ferme. 

(EUediante ,  en  fifeat ,  une  ancienM  chanson  conniio 
iODs  le  nom  de  la  Pastourelle  du  duc  de  Brahant,) 

JiiN  revenant  de  Nivelle 
Monté  sur  mon  palefroi , 
Rêvant  a  je  ne  sais  quoi , 
Rencoutre  aaejnstoureDe. 


4  PIERRE,  PAULET  JB^K. 

Je  Taborde  poliment  j 
Descendant  de  ma  monture , 
Et  lui  fais  un  ooropfiment 
Convenable  à  Payentnre  ; 
Hais  eUe ,  d'un  air  mutin , 
Me  répond  :  «  Que  Teut-il  dire  ? 
.a  Passez  vof  chemin ,  beau  sir 
«  Passez  Tof  chemin.  » 

SCÈNE  II. 

TIENNETTE,  HENRI,  en  pcHt  habit  4e 
de  chasse ,  avec  son  fusil  et  sa  gioeciére. 

{Henri  parait  dans  le  fond  ;  il  aperçoit  Ttenndte  qui 
file  et  chante,  il  s'arrête  pour  Pécouteri  il  s^ayance 
sur  la  pointe  des  pieds,  et  arrivé  auprès  de  Tiennette, 
U  lui  dérobe  un  baiser  tout  à  coup.  ) 

TIEITNBTTE  jette  UD  Cri. 

Ah  !...  C'est  bien  mal  à  voas^  Monsieur, 
de  preodre  com*  ça  le  m  ou  de  en  traître  ! 

9  E  If  B 1 5  voulant  lui  baiser  la  main. 

Ma  chère  petite  Tieonette  !...  Pardon! 

xiBiffliETTEs  Utt  donnant  qn  coup  de  qucnouiHe  sur 

les  doigts. 

Laissez- moi ,  Monsieur...  Tous  allez  cm* 
brouiller  mon  fil...  Finissez ,  ou  )'  vas  vous 
dire  comme  la  chanson  : 

«  Passez  vot^  chemia ,  beau  siie> 
n  Passez  Tot!  chemin.  » 


ACTE  ï,  SCÈNE  IL  5 

BB5BI. 

Ah  !  TOUS  m'aimez  trop  pour  que  cela 
s'adresse  à  moi. 

TiENNETTE,  se  levant  ' 

Je  TOUS  akne  !  Par  exerape,  n'ayez  pas 
d' ces  pensées -là  9  Monsieur...  Yous  sayez 
fort  bien  que  je  n'  dois  pas  vous  aimer  et  que 
)e  n'  vous  aime  pas  du  tout,  du  tout,  du  tout. 
C'est  vrai  ça...  Sî  nion  père  vous  entendait, 
il  croirait  que....  Allez-vous-en,  M.  Henri, 
i'  TOUS  en  prie ,  on  m'a  défendu  d' vous  parler. 

BE5RI ,   la  regardant  d^an  air  sopplîant  pour  rester. 
Ma  chère  Tiennette  ! 

TIENNETTE. 

Mais ,  mon  Dieu  !  quelle  familiarité  !  Ma 
chère  Tiennette  !...  Je  n'  suis  pas  vot'  chère 
Tiennette,  Monsieur...  A  la  bonne  heure  sî 
fdevais  vous  épouser,  j' vous  appellerais  aussi 
«mon  cher  Henri!...  »  Mais  vous  êtes  ben  sûr 
en  vous-même  que  je  n'  serai  jamais  vot' 
femme...  La  fille  d'un  fermier  d'  Basse-Bre- 
tagne n'épouse  pas  des  mcssicux  d' la  ville. 

HENRI. 

AIR  :  Parmi  les  filles  du  canton^  (  De  Joconde,  ) 

Ah  !  revenez  de  cette  erreur, 

Et  regardez-moi  sans  rien  craindre  ; 

A  la  ville  on  est  connaisseur , 


G  PIERRE,  PAUL  ET  JEAN. 

Vous  auriez  grand  tort  de  vous  plaindre  | 
Vos  grâces ,  vos  naîssans  attraits 
T  recevraient  un  juste  hommage  : 
De  la  ville  on  vient  tout  exprès 
Pour  chercher  des  fleurs  au  village» 

TIEWITETTE. 

Tout  cela  est  bel  et  beau^  mais  vos  parens 
sont  ûers ,  ils  sont  riches...  Nous  n'avons  pas 
grand' chose  y  nous...  Ainsi,  allez-vous-en  , 
M.'Henri,  allez-  vous-en. . .  Je  crains  toujours. .  • 

Oh  !  n'ayez  pas  peur. ..  (  //  tire  du  gibier  de 
sa  gibecière.  )  Si  votre  père  sait  qae  je  vous  ai 
parlé ,  vous  lui  direz  qu'en  revenant  de  la 
chasse ,  et  en  passant  par  ici  ^  je  vous  ai  priée 
de  lui  remettre  quelques  pièces  de  gibier... 
Tenez  y  ces  deux  bécasses... 

(  Il  ks  pose  sur  la  chaise  de  Tiennette.  ) 

TIBNNETTE. 

Des  bécasses!. . .  quelle  idée,  par  exempc! . . . 
!Est-ce  que  nous  mangeons  des  bécasses  ?.... 
M.  Henri,  reprenez  vos...  [Elle  entend  quel" 
gu^un.  )  O  nion  Dieu  !  sauvez-voos»  on  nous 
surprendra  encore  ensemble ,  et  pais  je  serai 
grondée. 

BEIfBI. 

Grondée  !  oh  I  ea  ce  cas ,  je  tous  quitte. 
Adieu ,  adieu ,  ma  bonne  petite  Tiennette... 

(  n  lui  baise  une  inj»in.  ) 


ACTE  I,  SCÈNE  HT.  ^ 

ktn  :  Mon  galoubet. 

Pensez  i  moi  ^  Çeu,  ) 

Ma  Tiennette ,  mon  bieo  iuprâne  1. 
Si  quelqu^UD ,  youj  offrait  sa  foi , 
Vous  dit  y  dans  son  délire  extrême , 
Qtt'on  ne  peut  aimer  plos  qu'il  n'aùiie..., 

Peiiaez  à  moi  i  r^ig^  \ 

(n  «'en  Ta  en  oooraat. } 

TiEirifETTE,  de  loin. 

^h  bien  !  M.  Henri  ?...  Et  vos  bécasses  ?..^ 
Allons  5  il  n*  m*écoute  pas. 

(Pierre  Buisson ,  son  pérc,  entre  an  moment  où  elle 
tient  encore  les  bécasses  suspendues  à  sa  main.Comme 
Ijennette  se  retourne,  elle  aperçoit  tout  à  coup  son 
1^ ,  ci  elle  ne  sait  plus  quelle  contenance  iaire.  } 

SCÈNE  III. 

TI^NETTE,  PIERRE  BUISSOIf. 

PIE»>E. 

En  bien  !...  qu'cst-o'  que  c'est  qa'pa  ? 

I 

TlBVlfBTTe^   embarrassée. 

Ça ,  mon  père  P.,.  C'est.  .•  c'est  des  bécasse» 
y»c  M.  Henri,  qui  passait ,  m'a  dit  de  vou»^ 
donner...  l\  parait  qu'il  a  fait  bonne  cbaise. 

PIEBRE)  ironiquement. 
Oui  !...  Il  a  fait  bonne  chasse! 


8  PIERRE,  PAULET  JEAI?, 

iLiR  :  Traitant  V Amour  sans  pitiés 

Je  sais  qu'il  est  not^  voisin , 
Qu^il  possède  un  beau  domaine , 
Et  que  souvent  dans  la  plaine 
On  Tapcrcoit  drès  V  matin. 
Mais  j*  crois  que  Pgibier  qu'il  guette 
IS'est  qu'un'  gentille  fillette  ; 
Et  sais-tu  c'  qui  m'inquiète  ? 
C'est  de  voir  que ,  par  malheur , 
Le  gibier ,  dans  cette  terre , 
Devient  assez  téméraire 
Pour  ^Itçndire  le  chassçur, 

TIENNETTE. 

Mon  père,  j' lui  ai  bien  dcfeDdu  de  m*  par<« 
1er  davantage, 

PIERBB. 

Et  G*e9t  ce  que  Ui  peux  faire  de  mieux;  car 
M»  Henri  n'a  pas  du  tout  envie  du  manage. 

TIEJfHBTTE. 

C^eat-à'i'dire  y  mon  père...  Je  suis  bien  sûre 
quMl  le  voudrait,  lui;  mais  ce  sont  ses  pareas 
qui  n'  voudraient  pas  d' moi, 

•Et  c'est  tont  simple...  M.  Henri  t*ahne , 
parce  que  vous  êtes  du  même  âge  ,  du  même 
endrait,  et  que  vous  avez  été  élevés  ici  pxes-« 
qn'cnsembe  ;  mais  monsieur  et  madame  Ver-* 


ACTE  I,  SCÈNE  III.  9 

Wec  doivent  trouver  mieux  qu'  toi  pour  leur 

fils. 

Mieux...  pour  la  fortune...  oui;  mais  du 
ivste,  j*ai  bien  aussi  mon  petit  mérite.  De- 
Diaadez  plutôt  à  M.  Henri. 

AiB  :  J*a9ais  employé  la  dwceur. 

Il  s'y  cottnsdt ,  el  bien  souyent 

Il  m'a  dit  :  «  Ma  chère  Tiennette , 

»  Je  préfèr^  ton  minob  piquant 

>  A  la  beauté  la  plus  parfaite  «<• 

»  Pour  mon  bonheur ,  je  trouve  en  loi 

»  Tout  ce  qui  peut  diarmer  et  plaire.  » 

PIBREE. 

Ah  !  H  fa  dit  cela  ? 

TIENNBTTE. 

£n  conscience ,  était-ce  à  moi 
De  lui  soutenir  le  contraire  ? 

PI«BRE. 

Tws-toi ,  car  v'ià  ta  mère  qui  n'  badinerait 
l»«  là-dessus. 

^Twimclte  court  se  remettre  à  son  rouet ,  et  Pierre 
cache  les  bécasses  dans  sa  poche.  ) 


SCÈNE  IV.  ■' 

LES  FsiçÉDEiis,  MARIE-JEANNE. 

-    HABIE-jEiHIfB.  ' 

TiB!nraTrE?...Tiennftlte?...Ehbier»lqu'esi- 
c' qu'elle  fait ,  c'te  p'iîte  fiUe?  Dopuis  mu 
heure  je  la  cherclie.  ■* 


Ali  I  te  v'ia  revenu  , 
bien  !  qo'eat-c'  que  l'a  dit 
TU  des  acquéreui 
«'trouve  pas  d'not'pelil 
vaut,  fiiudra 

diable  1  quatre  graadi 
et  son  Ëlat  perdu  1 
Tuillc)  on  s'  donne^ 
crédit,  les  fonds 
les  OUI 

pourtant  qu<!  Icsi 
quefois  exposer 

là...  J' 
a  plus 
n'  ïeuJonaj 
dessus,  et 


ACTE  I.  SCÈHE  IV.  ,i 

M4' toiles  f>eiutes  à  Quïmper,  ne  manquera 
pi|Ou|e  d'  m'appelle  poiat  Marie-Jeanue. 

PIBKKE,   traosport^. 

Embrasse-moi ,  ma  braTc  Temme!...  Ab! 
•tel  d' bonne  soncht 


lo  PIERRE,  PAUL  ET  JEAK. 

SCÈNE  IV.  ' 

LES  PBicEOENS,  MARI E-JEÂN N £. 

MABrE-rJEANlfB. 

* 

TiE!mETTE?...Tiennfilte?..,  Ehbîen!  qu*est- 
c^ qu'elle  fait ,  c'te  p'Ute  fille?  Depuis  ua« 
heure  je  la  cherche. 

PIEBBE. 

Tu  vois  qu'elle  est  à  son  ouvrage. 

MARIE-JEANNE. 

Ah  !  te  v'ia  revenu  ,  notre  homme  !...  Eh 
bien  !  qo'est-c'  que  t'a  dit  le  notaire  ?...  A-t-il 
TU  des  acquéreurs?...  Je  t'en  préviens,  s'il 
n' trouve  pas  d'not'pelîte  ferme  le  prix  qu'elle 
vaut)  faudra  aviser  à  un  aut'  inojen  pour 
venir  au  secours  de  ton  frère  Paul...  le  pauv* 
diable!  quatre  grandes  filles  bonnes  à  marier, 
et  son  état  perdu  I. ..  V'ià  c'  que  c'est  !  Un  tra- 
vaille, on  s'  donne  ben  du  mal,  on  liirrc  à 
crédit,  les  fonds  n' rentrent  pas,  faut  payer 
les  ouvriers,...  et  avec  quoi?...  C'est  com' ça 
pourtant  que  les  plus  honnôtes  gens  sont  quel- 
quefois exposés  à...Maié,  Dieu  merci,  j' pense 
com'  toi,  notre  homnie...  Nous  ï  tirerons  de 
là...  J' n'ons  qu'un  enfant,  il  en  a  quatre,  il 
a  pl^s  besoin  qu'nous....  £h  bioni  si  je 
n'  vendons  pas  la  ferme,  j'emprunlerons 
dessus,  et  la  maison  de  Paul  Buisson,  fabri- 


ACTE!,  SCÈNE  17.  it 

eantd^  toiles  peiutes  à  Quioiper,  ne  manquera 
fa»,  ou  je  n'  m'appelle  point  Marie- Jeantie. 

FIEBRE9  transporté. 

Embrasse-moi ,  ma  brave  femme  !...  Ab  ! 
c'est  d^  bonne  souche ,  ça  ! 

MAaiE-JEAlTNE, 

Et  j*  m'en  vante  !  (  En  se  retoarnant ,  elle 
wî  Tiennette  qui  s'essaie  les  yeux  avec  son  ta" 
i^.}  Eb  bien  !...  qu'est-ce  quêta  as  donc> 
toi? 

TiEiriTETTE,  le  cϞr  gros. 

Kien ,  ma  mère. 

MARIE-JEANSE.    ' 

Tu  t'essuies  les  yeux. ..  c'est  que  tu  pleures. 

TIEHVETTE. 

Hais  dam^  ^  aussi ,  c'est  tous  qui  m' laites 
pleurer 9  ma  mère».,  avec  tout  c'que  tous 
dites  1% de  mon  pauvre  oncle...  Jç  suis  bien 
naibeureuse  de  n'être  pas  ricbe,  tous  Terriez. 

MAAIE-JEANITE. 

£til  faut  pleurer  pour  pa,  petite  bête! 

BiEtas; 

EU'  tient  d' toi...  «Me  a  bon  ootiir... 

MABlE-KlBiLil9X,  à^et effusion. 

Dis  doQG,  dû  doiicy  n^tre  li»iiime...  Si 
}'  Teadona  la  ferme ,  est-c'  qoej'  serons  pltia 


la  PIERRE,  PAUL  ET  JEAN. 

mal  que  j' n'étions  il  y  a  ringt-cînq  ou  trente 
ans  ?...  Eshc'  qu'il  n'  nous  restera  pas  encore 
c'te  grange  et  c'te  chaumière  où  feu  ton  père 
nous  a  mariés...  où  j^étions  si  heureux? 

^  1 E  B  &  E  9  coutemplaDt  la  chaumière. 

Eh  !  mon  Dieu ,  oui  !  C'est  là-dedans  qu'il 
nous  a  tous  élevés,  moi,  mon  frère  Paul,  et 
ce  pauvre  Jean!...  qui  est  parti  si  jeune,  et 
dont  j' n'avons  pus  entendu'parîer...  Tu  n'I'as 
pas  connu  ^  toi ,  not*  frère  Jean. 

MÀEIE-JEAIÎ5E. 

O  que  si,  que  si!...  J'étais  hen  petite;  mais 
je  r  vois  encore  avec  sa  veste  rouge...  ses 
cheveux  blonds  comme  de  l'or...  et  son  gros 
cataugan...  qui  m' fesait  rire  I... 

PIEBBE. 

Qu'est-il  devenu  ? 

MABl£-JEAKJï£é 

Ah  1  il  s'est  passé  tant  de  choseSi  jlc  depuis... 
Ne  pensons  plus  à  tout  cela.  Tiens,  songeons 
à  ceux  qui  restent,  à  ton  frère  PauU  qu'il  f^ut 
d'abord  tirer  d'embarras. 

PIEBBE4- 

T'as  raison ,  c'est  1'  pua  {HrœSé. 

VABIE-IEAirnS* 

r  m'  vient  une  idée  !..•  Monsieur  et  ifia- 
dame  Yerkadec»  nos  toisins^  sont  d'yieul 


ACTE  I,  SCÈNE  IV.  i3 

richards  qui  ont  des  écus...  Si  j' leu'  d'inan- 
(EoDs  d'nous  prêter  une  souime  par  iinpo* 
tcque  sur  tous  nos  biens  ? 

PIEBRE. 

Dam*  y  essaie  ;  car ,  moi ,  je  n'oserais  pas. 
TiEWBTETTB,  se  levant. 

àiA  :  De  la  blonde  à  là  brune. 

Quelles  craintes 'Sont  les  vôtres  ? 
On  peut  bien  parler ,  je  croi. 

MARIE-J£ANN£. 

Cest  vrai  \  pariant  pour  les  autres , 
On  est  pus  z^hardi  qu^  pottr.soi; 
Sur  ce  mdtif  quand  i^toi'  fotfdk ,'  ^ 
Rien  a^st  capab'  de  m'  trbubler  ; 

£t, voulant  servir  ^  la' ronde 

Ceux  qui  craign^  de  parler , 
Moi ,  )e  suis  bon  avocat  : 
Quand  il  y  a  qneuq^  <l|^bat«. 
Je  me  sens  en  état 
De  parler  pour  tout  V  monde  ! 

riE&RE. 
C'est  qu'i'  n'  faudrait  pas  l'en  défier/ 

MABIE-'JEÀirNE. 

Tiens,  les  T'ià  justement...  Attends ^  at- 
tends ,  tu  vas  voir.  Sois  bien^  po|i  t  notre 
^omme,  entenfis-lu? 

p.  VauiféViÛcs.   S;  a 


,4  PIERRE,  PAUL  ET  JEAN. 

SCÈNE  V. 

LES   PEÉCÉDEKS,    M.    ET   M»«    VERKADEC. 

(M.  et  maflamc  Verf^éc,  jwrsontt&ges  grotesques, 
costumes  du  vieux  tems;  ik  an-ivcu?  en  se  tenant 
par  le  bras.  Madame  Verkadec  porte  un  grand  ri- 
dicule et  uo  parasol.  ) 

M.    ET   M"*    TERKADEC. 

AIR  :  no  I  ^e  V Héritier  de  PaimpoL 

Le  beau  pays  que  la  Bretagae 
C'est  un  air  pur  !, ..  un  ciel  scrrin  ! 
JVime  surtaux  à  1»  campagne 

La  promenade  dtii  matia  1 

MARI  B-^  E  A.î«  »  1.      - 

J'  somm'  vot'  set-vafite ,  ManSîeuf  èl^  Ma- 
dame. Tiennette»  offrez  dc^nc  mcrlre  chaise  à 
madame  Verkadec.  »  * 

Merci ,  «aofci ,  1*-  bpn.o«  fef^mc^»     , 
M.  VEREADECi  à  T4ewttcttc  quUpporte  sa  chaift. 

Ne  to«3  dérangez  pa»»  ma  p^ite,  qouinc 
Toulons  pas  ï>ous  asseoir. 

m"*"  terkadec- 

Iiou8  marchons  pour  notre  santé. 


ACTE  î,  SCÈNE  V.  i5 

Savez- VOUS 9  la  bonne  femme,  si  quelqu'un 
l'est  présenté  pour  acheter  notre  maisou  ? 

(  Ik  indiquent  celle  au  fond.  ) 

MARIE-JEAIfNE. 

0  mon  Dieu  ,  personne...  G*est  comm**^ 
ions,  not'  ferme...  à  moins  d' la  donner  pour 
lien,  j'  crois  que  nous  serons  forcés  de  la 
prder. 

M.    TERKADEC 

À.hl...  mes  amis 9  rarg;ent  est  rare. 

MARIE-JEANNE. 

Rare...  pas  pour  tout  le  monde  ;  et  si 
loQsîeur  te  Touiait  bien  ,  î'  n'  sVait  pas  em- 
barrassé de  nous  prêter  là-dessus...  dix  mille 
iiocs. 

11"^  TEBKABBGy  bas  à  son  mari. 

Ne  TOUS  ayisez  pas  de  cela ,  entendez-?ous? 

MARIE-JEANNE. 

/ 

Quand  on  est  riche,  c'est  si  doux  d'ren- 
^  service  I 

n.    TBBKADEG. 

*  Riche  !  riche  1  Tous  tous  trompez ,  ma 
hinne  amle^  oons  arons  des  charges,  beau- 
coup de  charges  ;  demandez  à  ma  femme  ; 
àt%  Don-raleurSy  des  rentes  mal  servies,  des 
fermiers  qui  ne  paient  pas,  la  grêle,,  les 


i 


i6  PIERRE,  PAUL  ET  JEÀlf. 

orages ,  le  diable  !  Madame  est  là  pour  tous 
le  dire. 

m"*'    TEftKADEC. 

C'est  Trai. 

PIEBRE. 

Tout  r  pays  assure  pourtant  qu'  vous  êtes 
joliment  à  votre  aise. 

M™*  verkàdec. 

Le  pays...  le  pays  ne  sait  ce  qu'il  dit. 
M.  Verkadec3  allons  au  labyrinthe. 

PI  erre  5  â  sa  femme. 

T'as  ben  réussi ,  toi ,  avec  tes  politesses. 
(  Haut  à  M.  Verkadec ,  et  cCun  iir  un  peu 
piqué,  )  y  vois  5  Monsieur ,  qu'  vous  avez  peur 
de  comprometlTe  vos  fonds;  vous  avez  tort; 
et  j'  suis  ben  sûr  qu'  monsieur  Tot'  fils,  s'il 
était  à  vot'  place ,  ne  se  serait  pas  tant  fait 
prier. 

M'°'  TERKAUBG^  Se  retournant  vivement. 

Mon  fils!...  Je  trouve  bien  singulier  que 
vous  mêliez  mon  fils  dans  une  affaire  pareille! 
Est-ce  qu'il  vous  a  jamais  donné  à  penser 
qu'il  eût  d'autres  sentimeus  que  les  nôtres? 

PIERRE.  <• 

Dam'  y  Madame  y  quand  i'  vient  nous  par* 
1er.... 

M"^    VERKADEC. 

Est-ce  que  mon  fils  vient  vous  parler  ? 


ACTE  I,  SCÈNE  V.  17 

PIERRE. 

Mais  j*  croîs-  qu'il  n'est  poiot  déshonoré 
pour  ça. 

V.    YERKADBC. 

Non,  mon  amî.. .  mais  chacun  doit  se  tenir 
à  sa  place ,  et  ce  n'est  point  ici  la  sienne. 

PIERRE. 

Ah?...  en  c'  cas,  dit'-Iui  vous-même  quT 
icrerienne  pusVôder  par  devers  cheux  nous; 
et...  tenez...  rendez-lui  ses  bécasses....  {il 
ks  tire  de  sa  poche  )  qu'il  a  apportées  encore 
ic' matin    là...  à  not'fiUe. 

I.  TERKADBG,  tenant  Ics  bécasses  H  regardant 

sa  femme. 

Des  bécasses  ! 

hf^^    TERKADEC. 

Cela  n^est  pas  possible  ! 

PIERRE. 

Non ...  {Il  va  chercher  Tienneite ,  et  C  amène 
devant  monsieur  et  madame  Verkadec.  )  Viens  9 
loi...  et  parle ,  je  te  l'ordonne.  Qu'est-c'  qui 
est  venu  ici  c'  matin  ? 

TIEVNBTTB,  déconcertée.' 
Qui...  qui...  mossîefi  Henri. 

M.    ET  V""*    TERKABEG. 

Benri! 


r6  PIERRE,  PAUL  ET  JEAN. 

PiEKBE^  à  sa  fille. 
Après  ? 

UAEIE-JEANITE. 

Oui,  oui....  aprè»?  Dites  tout>  Mam'selU 

T1B99ETTE. 

Eh  bien  !  j' dirai  tout ,  y'ià  tout  : 

▲im  :  de  PréyiUe. 

En  traTaîlIant,  je  chantais  pour  m^  distraire. 

Quand  tout  à  coup  je  Fai  vu ,  ce  matm  ,  \ 

Auprès  de  moi  s'  glisser  avec  mystère  : 

J^  lui  dit  alors  de  [lasser  son  chemin.         (Bit.  } 

Il  nVn  lit  rien ,  puisqu'il  faut  que  j'  Tavoue  ^ 

Je  V  croyais  loin ,  mms  le  petit  sournois 

S^est  ayancé  soadain  en  tapinois... 

Il  m'a  donné  deux  baisers  sur  la  joue... 

Mof ,  j'ii  ai  donné  deux  bons  coups  soi  les  doigts. .. 

TOUS. 

Deux  baisers  !...  Après  ? 

TIEKNETTE. 

Après ,  il  m'a  appelé  sa  chère  l^iennette  I 
Je  lui  ai  dit  que  si  c^était  pour  le  mariage,  à 
la  bonne  heure ,  mais  que... 

M.    TEEKADBG. 

Le  mariage  ! 


ACTE  r,  SCÈNE  V.  19 

AI  a  :  Vaudeville  de  la  partie  carrée. 

Un  écolier  »  dans  m  folle  tendFesse , 
Parie  déjà  de  s^unir  sans  retour  ! 
Grâce  aux  écarts  dHioe  areugle  jeunesse , 
Les  moeurs  chez  nous  se  perdent  chaque  jour, 
rai  pu  jadis  ,  dans  mon  humeur  gaillarde, 
A  maint  tendron  conter  quelques  douceurs.. •• 
Mab  l'épomer  !...  ah  !  je  n^aurais  eu  garde..» 
Par  respect  pour  les  mœurs. 

m"»*   T2&K.ADEG. 

Nous  saurons  bien  empêcher  de  pareilles 
liaisons  ;  et  aujourd'hui  même  M.  Henri 
partira  pour  Rennes. 

TIB1V77ETTE,  à  part. 

Qu'entends-je  ? 

MABlE'JEANir  £.  ^ 

De  pareilles  liaisons!...  Eht  mon  Dieu  1 
Madame  5  il  n*  faut  pas  non  pus  avoir  l'air  de 
tant  i-abaisser  le  monde  !  tous  n'  savez  pas 
cocore  si  j' voudrions  d'vot'fils  pour  not* 
gendre. 

m"**    verra  DEC. 

Là,  là!...  la  bonne  femme!  vous  oubliez... 

M  A  E I E- J  £  A  lî  N  £  9  sVniportant. 

La  bonne  femme  rf'est  pas  bonne  du  tout 
quand  on  la  prend  du  mauvais  côté. 


ao  PIERRE,  PAUL  ET  JEAN.  . 

M™'    VERRADEC.  .  , 

SaweZ'UOus  ben  qu'à  la  parfin,  (  De  la  Dat^  ] 

Ah  !  c'est  trop  fort ,   en  vérité  ! 
Du  respect  sans  crainte  on  s'écarte  î 

MARIE-JEANNE. 

Tant  pis  pour  qui  s^  croit  maltraité  ! 

Mais  tout  c'que  j'pense...  il  faut  qu'ça  parte  ! 

M.    YERKADEC. 

Respectez-nous , 
Entendez-vous  ? 

^  MARIE-JEANNE. 

Jamais  je  ne  m'arrête , 

Un'  fois  qu'on  m'  mont'  la  tête. 

PIERRE. 

Avec  elle,  il  faut  filer  doux. 

TIENNE7TE ,  4  sa  mère. 
^ ._      Apaisez-vous  ! 

MADAME  VERKADEG  ,  à  son  miri. 

Poursuivons  notre  promenade  ; 
Que  venions-nous  chercher  ici  ? 
Pour  deux  mois  je  serai  malade 
De  m'cntendre  traiter  ainsi. 

MARIE-JEANNE. 

Oui ,  poursuivez  vot'  promenade, 
Au  lieu  de  nous  traiter  ainsi  ; 
Dussiez-vous  en  dev'nir  malade ,   , 
Vous  n'auriez  pas  1'  dernier  ici.     ^ 


ACTE  I,  SCÈNE  V.  ai 

M.    VERKADEC,  à  «a  femme.  '''*-  ' 

llab  pourquoi  donc  vous  compromettre  ? 

Pourquoi  vous  mettre 
Eu  courroux  contre  ces  geus'-là  ? 

PIERBS  ET  TIEVKETTE,  à  Marie-Jeaolie. 
Afa  !  calme ,  calme  ta  colère  ! 
Ah  l  calmez  ,  calmez  vot^  colère  ! 

Il  ne  faut  pas,  <  ,     ' 

(ma  mère, 

Te       )  ' 

Vous   \  cl^agriipeï  d^  tout  cela. 

M.  VERKADXC  ,  à  sa  femme. 

Madame ,  cette  indignité 
Est  votre  faute ,  en  vérité . 
Contre  eux  Tous  êtes  en  fiirechr  :  - 
Pourquoi  leur  faire  tant  d'honneur? 

MARIE-JEANNE. 

Faut  que  je  me  retienne, 
Car  pieux  chanterais  une  antienne!... 

Biais  jVeux  en  ce  moment , 
JVeux  m^expiiquer  tout  doucement 

MADAME  VERKADEC. 

Ah  !  c'est  trop  fort ,  en  vérité  ! 
Du  respect  ainsi  Ton  s'écarte  ! 
C'est  vraiment  une  indignité  ! 

MARIE-JEANNE. 

Tant  pis  pour  qui  s'croit  maltraité  ! 
Hais  tout  c'quc  j'pense...  il  faut  qu^ça  parte  ; 
Et  je  dis  tout'  la  vérité  ! 


89  PIERRE,  PAUL  ÇT  lEAIT. 

M.    V£11KADEÇ,>  ta  icosma  ,  PISK&S   ST    TXS1VNETT& 

à  Marie-Jeanne. 

Afoins  de  vivacité.  .(^^'0 

(h.  ft  madame  Yerladec  sortent.) 

SCÈNE  VI. 

PIERRE  BUISSON,  MARIE- JEANNE, 

TIEXNEXTfi. 

(Tous  trois  Mat  atterrés  de  la  scéae  qui  viçiit  d^ayoïf 

Meu.  ) 

PIBREE. 

Eh  bien? 

MAEIE-JEAirifS. 

Ne  m*en  parle  pas...  j'en  suis.*. 

TIEirifBTTB. 

Et  moi  donc?...  J*  suis  bien  fôchéequ'roas 
TOUS  soyez  fâchés!...  si  j'avais  su...  je  n'au- 
rais rien  dit  du  toat. 

MAElE-JEAIflTE. 

Ce  qui  est  fait  est  fait. 

FIEEEE. 

« 
AIR  :  Des  Landes. 

Oui  ;  raais,  diaprés  c'tebisbîQe, 
L^insratîel  est  que  leur  fib 
N^  vienn^  pus  acostcr  nof  fiQe... 


ACTE  i,  S€ÈKE  VII.  •  •  a3 

Poisqu'iU  ont  tâSl  de  lif  éj^rk  î 

(a  TîtllHetttf.  ) 

ht  foi  V  ne  «dis  |iio  ii  boirac , 
'£Bteiids-lu  y  ma  dière  enfam. 
S'il  y  revitnt  ,v)e:t?oid[oiniie 
Pe  tn'9Vj»^>siNr*le^€hafBip. 

Éù  c*  tâi  îà , 
Tvom  avertis  qae  le  v'ià. 

SCÈNE  Vlli 

^  LES  i»RBGéDENS,    HENRI. 


■  e  ^  j?     « 


B  E  ir  A I ,  accouraot  et  parlant  tréf-vite. 
'  M.  BLïssoNVitt*  ^isspii  î 

PIEBRE   ET   MABIE-JEANNE. 

Coouneot!  c*est  cncote  Tt)us,  Monslear  ? 

HENlily   très-vftc. 

Oui ,  oui ,  je  sais  tout,  j*aî  tout  entendu... 
Mais  c'est  égal.,,.  Je  YÎcns  vous  dirç  que  tout 
à  rheufe,  \iû  générât...  fe  i^é  Bais  pâs  i^on 
nom...  est  arrivée  dans- 1^  vîU<^e...  ii  a  un  bel 
habit,  des.  épaulel-tes ,  et  trojs^, ou  quatre 
croix..!,  il  a  rcncoalre.mgn  père  et  ma  mère, 
ils  se  sont  salués;  le  gèncrtilleur  a  dît  qu'il 
venait  pour  voir  dcSbîetJS  ^ui  étaient  à  vendre 
dtû^hffkjBi  m^fi  p^re  a  parti  aussitôt  de 


a4  PIEftRE,  PAUL  ET  JEAN. 

sa  maison  ,  de  celte  loaifioar  Jà...  (IL  indiqué 
celle  du  fond,  )  Mais  comme  ma  mère  est  fâ- 
chée contre  yous^  o»  rt'iai  point  parlé  de  yotre 
ferme ,  et  je  voua  en  averti»,  afin  que  si  vous 
avez  toujours  envie:  de  la  Tendre ,  tous  ne 
mniquiez  pas  une  sr  banne  ocGasion..^.  un 
général  !  Çi^,.p«iie  bjcip  î.^  A4*l^ ,  M.  Buisson, 
je  me  sauve;  ne  dites  pas  qtje. c'est  moi  qui 
vous  ai  prévenus....  Adieiu,  ^mademoiselle 
Xiennetle.    .  .  :  y  .  ii,. 

TIEN  NETTE. 

Adieu,  M.  Henri.    '  .    ';;  ;  ' 

(Il  s'en  va  en  courant. } 

SCÈNE  vm. 


PIERRE  BmSSO'N,  MARIE -JEANf^B 

TlÉirNEl*rE.  ■•     ■'•■      ■ 


9 


^      *  \t         ".» 


».4  *-,^   ** 


X;Ç.IfTïETTE^ 


Ce  bon  jeune  hon>me  !,cpn  venez,  ma  mère, 
qu'il  est  bien  servia1>le." 

Opi,  q'ejsjt  une  attention  jï  sii  pari-. 


é      •  « 


•  Pilotons  toujours  de  l'avis;  viens ,Tien- 

ueltei  viens  ranger  tout  dans  là  fi;rrae. 

..  ,     -.  .    .  '  »  ' 

PIERRE^ 

>  .    .  < 

.  Oui ,  qu'  ça  puisse  dqnaer.daus  l'^ildec* 


ACTE  I,  SCÈNE  IX.  d5 

ftoéral...  et  moi ,  y  yas  V  guetter  pour  le  faire 
«ûtrcr. 

( Marie- Jeanne  et  Tiennette  rentrent.  ) 

SCÈNE  IX. 

PIERRE  BUISSON,  LE  GÉNÉRAL 
BUISSON,  M.  VERKADEC,  UN 
VIEUX  DOMESTIQUE  portant  ungros 
trousseau  de  clefs. 

M.    YBRKADEC*      *        . 

Par  ici,  mon  Général,  par  ici...  {Au  vieux 
éomestique,  )  Thomas,  ouvrez  vile  les  portes, 
les  fenêtres ,  les  volets ,  ouvrez  tout, 

(Le  vieux  domestique  ouvre  la  porte  de  la  maison  do 
fond  ;  il  entre  ,  et  quelques  instans  après  on  le  voit 
ouvrant  les  fenêtres  et  les  volets  du  haut, 

riEi  B E  9   à  la  vue  du  Général ,. àte  son  cht^eau  et 

dit  à  part. 

Il  a  une  bonne  phy^*onomîe. 

LE  GBifÉAAL  salue  aSectueusemeul,  Pierre  et  dit  à 
part  à  M.  Verkadec. 

Duel  est  cet  homme  ?, 

*  -       '       •  ..■":'■■.■. 

Un  ,V£RKàDEC.    ;    ^ 

Oh  !  c'est  un  petit  laboureur  de  l'endroit.A 
qu'on  appelle  Pierre  Bui^soQ. 

as  G  B  N  B  a  A  L  fait  un  nit)uvçto(6nt. 

Pierre!.,.  ^ 

F.  y aude villes.  3.  3 


a6  PIERBE,  PAUL  ET  JEAN. 

If.    irEB«âDEC» 

Oui,  ne  faîtes  pas  attention ,  mon  Général 
et  vénéï  voir... . 


LB    GénÉftAL. 


J*aime  ce  pays  ! 

M.  Verkadeg. 

Votis  êtes  donc  décidé,  Général,  à  tous] 
tiier  ? 

LE    GENERAL. 

Oui  5  c'est  mon  projet. 

AiA  :  Vaudeville  de  Turerme, 

Je  crois  que  ce  Keo  solitaire 

Aura  pour  moi  bien  des  attraits  ; 

C*e$t  lorsque  Toa  a  fait  la  guerre , 

Qu'Où  sebt  tout  le  prit  de  la  pait. 
•        Coiïtr«  ttu.  danger  qui  m'îoquiéte 
Je  dois  d'ailleurs  m'assuter  un  abri  ; 
Car  l'âge  vient  ;  c'est  le  seul  enncoH' 

Qui  uoQs  oblige  à  la  retraite. 

H.  Veb&adeg. 

i 

Mon  Général...  Tair  est  excellent  â^ini  ce 
pays  9  nous  y  tftons  deliE'  centenaires  ^  Fan- 
.cieli  bedeau  et  le  makre  d'école. 

Ah^oh'f,..  le  maître  d'école  yU  encore... 
j'ai  habité  autrefois  ces  cantons...  Tout  est 


ACTE  I,  SCÈNE  IX.  37 

Wa  changé  depuis  trente-septt  ans*  Je  n'y 
ncoanais  plus  rien...  ces  maisons-là  n'exis- 
Iskûi  pas. 

M.    TERRADEG. 

Mon  Général ,'  il  n'y  a  que  huit  ans  que  la 
sienne  est  bâtie. 
{Pemlant  cette  scènç^  Pierre  a  pris  un  balai,  etU 

cpousselte   les  toiles  d^araignée  du  devant  de  sa 

saison  :  il  est  censé  ne  pas  entendre  tout  ce  que 

dit  le  Général.) 

u  GÂififtAty  portant  ses  regards  du  côté  de  la 

ferme. 

Qu'est-ce  que  îe  toIs  sur  cette  porte?... 
we  affiche  !.. .  {Il  Ut,  )  Petite  ferme  à  vendre. 
Ah!...  vous  ne  ai'aYÎez  point  parlé  de  cela^ 
M-  Verkadec. 

M.   TEBKAnEGy  bas  au  Général. 

Ob!  les  plus  mauvaises  terres  du  pays. 

p  I E  R  B  E  s^arrêtc ,  salue  ,  et  dît  : 

Oui ,  monsieur  V  Généra!  ;  c'est  aussi  à 
Tendre. 

u.    y  E  R  K  ▲  n  E  G  9  bas  au  Général. 

Ça  ne  toqs  conviendrait  pas. 

PIERRE. 

Si  monsieur  le  Général  veut  la  toir,  la  vue 
n'en  coûte  ri-on. 

LE  cénéRAt. 

Tout  à  l'heure ,  mon  ami>  je... 


i 


us  PIERRE,  PAUL  ET  JEAIf. 

M.    Y  E  R  K  A  D  E  C  ,  au  Gëocral  qu'il  tire  U  part. 

Je  ne  tous  conseille  pas  d^avoir  des  aHaire 
d'intérêt  avec  ces  gens-là... 

LÇ    GÉirÉAAL. 

Est-ce  que?... 

V.    VERKADBC. 

Je  TOUS  conterai  cela...  (^Haut.  )  Donnez- 
vous  la  peine  de  passer,  mon  Général...  je 
viu's  vous  tnontrer  ma  maison,  le  jardin... 

LE  GÉNÉRAI.,  machinalement,  et  jetant  toujours 

les  yeux  sur  Pierre. 

Combien  a-t-il  d'arpens  ? 

M.    VÉBK.ABEC. 

Dix...  traversés  par  une  petite  rivière  où 
l'on  pêche  de  la  truite  et  du  brochet.  De  plus 
je  vous  donnerai  droit  de  chasse  dans  naa 
petite  forêt. 

LE   GÉNÉRAL. 

Monsieur  est  chasseur  ? 

H.    VERKADBG. 

Je  m  en  pique  un  peu. 

AIR  :  De  V Incognito, 

Ici  je  laisse  aux  amateurs  vulgaires 

Le  sot  plaisir  de  tuer  un  lapin. 

Plus- hardi  qu^eux ,  moi ,  je  ne  poursuis  guéres 

Que  ie  renurd ,  le  sanglier ,  le  daim.  (Bti.) 


ACTEI,  SCfelfEX:  «9. 

kwÊa  ardeur ,  qu'auGun  danger  n^arréte , , 
tqpûs  vingt  ans  donnant  un  libre  essor ,  .^ 

J'ai  dans  mes  bois  chassé  la  g^rosse  bête... 
Maàs  U  en  reste  encor.  (  Ter.  ) 

LE   ciNÉBAlb 

h  m'en   rapporte  k  vous...  Allons  voîr 
lîotre  propriété.  (  //  passe  devant  Pierre  BuiS" 
*Rj  lui  serre  la  main  et  lui  dit  ;  )  Je  reviens 
ws  un  instant ,  mon  brave  homme. 
'  [Il  entre  avec  M.  Yerkadec  dans  la  maison  du  fond. .) 

MoQ  brave  homme!...  et  il  m^a  serré  la. 
^ÎQ  !...  Oh  t...  c'est  un  bon  diable ,  ce  gé-* 
&éral-là  j  et  je  commence  à  espérer... 

SCÈNE  X. 

PIERRE  BUISSON,  MAKIE- JEANNE. 

liE  I E' J  E  À  V  N  E  5  accourant ,  une  lettre  à  la  main.' 

PiEEaE  9  vois  donc,  vois  donc  vite  ,  c*est 
une  lettre  de  ton  frère  Paul  y  de  Qnimper, 
qu'on  vient  d'apporter. 

p  I B  B  R  E  5  regardant  Tadresse. 

Oui  y  ma  foi ,  c'est  son  écriture. . .  oh  !  oh  f . .  • 
est-ce  que...  (  //  Couvre  et  lit,  )  «  Frère,  j'ai 
•  à  te  faire  part  d'un  grand  événement.  At- 
«tends-moi  pour  dîner,  je  t'amènerai  mes 
> quatre  filles,  et  nous  resterons  chez  toi,  si 

3. 


3o  PIERRE,  PAUL  ET  JEAW. 

»  tu  reux  nous  donner  à  coucher.  »  Âb  I  nu 
Dieu!  est-ce  qu'on  l'aurait  déjà  mis  ik  la  por 
de  sa  fabrique  ? 

Un  grand  'éyénement  !  l'imbécile  f  T  n*  d 
pas  si  c'est  bon  ou  mauvais  5  s*il  faut  s*  ré 
|ouir  ou  se  désoler. 

FIBBRB. 

C'est  yrai  que  c'est  bien  maladret  d'sa  part. . 
Mais  qu'importe  après  tout?...  Ils  seront  tou 
jours  les  bien  Tenus. 

MABlE-JEilfirE. 

▲la  :  De  Marianne, 

Oui ,  tninieiit ,  oiii ,  qneuqu*  cho«'  qu'arrive , 
Noos  les  recevrons  de  bon  cœor. 

VIBRRB. 

Not*  tendress'  n^cn  s'ra  que  pins  vive , 
S'ils  se  triMivent  dans  le  malheur. 

UABiS-JBATfNE. 

De  lenr  fortune , 
Cent  fois  pour  une 
Leur  amitié 
^      Noi|s  ofDcit  h  moitié. 

pnBBB. 

A  nosaecoars 
S'ils  ont  recours , 
Pour  eux  nos  bras 


ACTE  I,  SCÈNE  XI.  3t 

9e  se  fcvmenmt  ptt. 

UA.RIB-JXANN£. 

Faut  s^entr'alder  clans  la  nature  ; 
IkHl-4>n  y  coinin^  tant  d^gens  d^aujourd'hui , 
He  donner  la  main  qvCk  celui 
Qui  descend  de  voiture  ?  ITer.) 

PIEBEB. 

Et  puis  9  j*  vons  p'têtre  lui  trouveçla  somme 
int  il  a  besoin  ;  car  j'ai  idée  que  je  m'arran- 
|erai  avec  ce  mossleu  V  Général. 

Ta  eroîs  ? 

PIEBBE. 

Oai,  oui.  Tais- toi ,  le  ?Mà  qui  ressort 

SCÈNE  XI. 

t 

iispiicéDE99>  I»£  GJÈN^&AL^  U.  VER- 

&AOËG. 

M.    TEBKADEC. 

Mov  Général ,  je  yais  chez  moi  attendre 
îotre  réponse. 

(Il  sort.  ) 
iE  HivànALf  s'avançaat yers  Pierre. 

BoDoes  gens,  je  suis  à  tous  maintenant. 

PIEBRE    ]PT  MABIE-JEA1I9E. 

s 

Monseigneur  ! 


32  PIERRE,  PAUL  ET  JEÂIT: 

LE  céNEBAL)  âTec bonté. 
Oh  f  pas  de  monseigneur,  je  tous  eo  prie. 

PIERBE. 

Mossieu  r  Général ,  nous  serions  ben  con* 
tens  que  tous  fussiez  notre  acquéreux,  parce 
que  c^cst  du  bon ,  tout  est  en  plein  rapport 

HAEIE-JEANNE* 

Grâce  à  notre  homme ,  qui  a  ben  traTaillé 
pour  ça  ! 

PIEBBE. 

Oh  !  oui  9  i'  peux  dire  que  c*est  mon  oo- 
Trage ,  et  que,  si  j'  m'en  défais,  ce  n'  sera  pas 
sans  regret. 

UABIE-JEÀ5]fE. 

C'est  Trai. 

LE   GBIvéBÀL. 

Et  pourquoi  tous  en  défaites-TOUS  ? 


I 

I 

/ 

MÀBIE-JEANNE. 


Ahl  monsieur  V  Général...  c'est  qu'  TOjei- 
vous,  j'aTons  un  frère... 

PIEBBB. 

Marie -Jeanne,  d'histoire  -  là  ennuierait 
Monsieur. 

I.B   GiN^BAt. 

Non,  non,  mes  amis,  acheTex. 

FIBBBK. 

£h  bien  !  monsieur  Y  Général»  nous  afoni 


ACTE  I,  SCÈNE  XI.  35 

un  frère  qu'a  quatre  enfans.  Il  est  fabricant 
de  toiles  peintes  à  Quimper,  ici  tout  près. 
II  a  éprouvé  par-ci,  par-là,  des  faillites,  si 
bien  qu*  son  éiat  court  risque  det'  perdu,  et 
c'est  pour  l'empêcher  d'  manquer  que  nous 
toqIods  Tendre... 

C'est  bien  y  mes  ami^. ..Cette  actîon*Iâ  tous 
portera  bonheur.  Je  veux  voir  Totre  ferme  , 
le  Tenx  la  voir  tout  de  suite  y  et  nous  serons 
bientôt  d'accord. 

PIERBE,. 

Uossiear  1'  Gé|iéraJ[,,  [e  suis  à.  vos  ordces.. 
LE  céiréAAii. 

AIR  :  De  Folie  el  raison. 

Votre  amour  pour  un  frère 

Vous  honore  à  mes  jeux  \ 

A  ce  marché,  fespére, 

I7ou8  gagnerons  tons  denx.  , 

PIERRE. 

Je  crains  que  Pprlx  que  j'en  demande... 

LS  ù'intKkL, 
Je  cabnerai  votre  frayeur. 

PIERRE. 

Et  puis  la  maison  n'est  pas  grande... 

LE  CiNÉRAL. 

Il  linil  peu  de  place  au  bonheur. 


34  PIE&RB  ,  PAUL  ET  l£AN. 

LE  0«NBXit« 

Voire  amour  fM>iir  un  ktife 

Voiu  «honore  à  mes  yeux  ; 
^1     A  et  ouirché,  pespère, 
ta  j     Kotts  gagncroiifi  tous  deux. 

g  \  PIERRE   ET  MARIB-JE\KNS, 

H  1     A  sauver  notre  Mrt 

Nous  bornons  tous  nos  touix  : 
J^  ce  m:irclié ,  j^espère , 
lïous  gagnpjTons  tous  deux. 

(pierre  conduit  le  GénénX  daa$  sa  ferme.  ) 

MAaiB-jBAïf N E,  seule. 

Quen  bon  vent  nous  a  amené  ici  ce  mon- 
sieur-là  !  C*est  qu'il  n*û  pta  Tair  du  tout 
d'  vouloir  naarchander...  au  contraire. 

(  On  entend  dans  la  ceuUsse  du  fond  y  à  droite ,  des 
cris  de  \(ùe,  et  ces  mots  :  ) 

H  ohé  !  hohé  !  ma  tante  !  ma  sceur  ! 

MAEiE-JEANiTE,  ëtonnée ,  regarde. 

Qu*C8t-c' que  j'entends?... Eh!  Dieu  m'par- 
donne^  c'est  Paul  àTcc  mes  quatre  nièces  1 


ACTE  î,  SCËNE  XII.  35 

SCaÈNE  XIÏ. 

MARIE-JEÀNNB,  PAUL  BUISSOlPï, 

TfCa  en  bon  bourgeois  dfe  QaixDpcr  \  B I B I ,  M  A- 
EIANNE  FIFINB  et  ALISON,  ses 
quatre  filles,  toutes  habillées  cle  même  en  toiles 
peintes  de  leur  fabtiquè.  Pdul  Buîsaôn  a  aussi  ua 
grand  gilet  de  la  méoûtt  éiàSé. 

[  Paul  Buisson  et  ses  qtnlrë  filfe»  ateeoiireDt ,  et  viennent 
galment  entourer  Marie-Jeanne ,  %u'ib  entrassent 
four  a  tour.  ) 

kiK:  Les /lie  flac,^ 

£h  bonjour  t  bo^ollr ,  bMjdur  I 
Chère  tante  1 
Que  j Ws  contente! 

MARIB-JEANHE,  les  embrassant  l'une  après  Ttutri. 

Eh  bonjour  ,  bonjour  ^  bonjour  !  ,  ^ 

Chacune  aura  son  tour. 
Je  n^comprends  pas  t'^qwè  èH  teât  ^è^ 
Je  TOUS  cro5«istods  malfaeurem  : 
Loin  quVous  pleuriez ,  je  vous  vois  rire.», 

■ 

BIBI. 

Jfa  tante ,  ça  n\aut-il  pas  mieoi  ?. 

MARIE-JEÂNNtf. 

Je  suis  tduf  r^MÎe 
De  votre  air  satisfait  ; 
Mais  jYrai  ben  pltts'  ravie 
Qoand  vous  m' mtWtz  an  hijL 


36  pierre;  PAUL  ET  JEAN. 

Nous  TOUS  y  mettrons^  mais  en  atteodan  f. . 

(Tous  reprennent,  en  Tembrassant  de  nouveau.  } 

£h  bonjour ,  bonjour ,  bonjour  I 
Chère  tante  ! 
Que  je  suis  contente  ! 
£h  bonjour ,  bonjour ,  bonjour  ! 
Le  bonheur  a  son  tour  ! 

Ah  f  à  !  Yt)Ud  ayez  donc  gagné  à  la  loterie 

PAVI.. 

Pas  si  bête  I 

Avez-yous  trouva  un  trésor? 

PAUI. 

A  peu  près. 

BiBr. 

Mais  où  est  mon  oncle  ? 

mabiavre. 

Où  est  ma  cousine  P 

BIBI, 

Nous  leur  apportons  tout  plein  d*  choses» 

km  :  Eh  ma  mère  i 

A  Tiennette  je  destine 
Ce  joli  fichu  d'couleor 


••• 


ACTE  I,  SCÈNE  XII.  3; 

MARIANNE. 

C'tablier  pour  ma  cousine., 

PAUL. 

C'te  robe  est  pour  tous  ,  ma  sœur. 
Le  tout  est  d'bon  teiot ,  j^m^en  pique  ; 
Car  je  n^  vous  présente  ici 
Que  des  objets  d*ma  fabrique... 
Et  mes  quatre  fili'  aussi. 

UAaiE-XEANNE. 

Ben  obligé  de  tos  attentions,  mais  me 
direr-TOus?... 

PAUL)  étalant  la  robe  en  pièce. 

Admirez  ce  dessin-là.. .Quel  goût!  heîn?... 
C'est  d' mon  invention.  J'en  ai  fourni  déjà  dix 
pièces  pour  V  département  d'Ile-et-Vilaine. 

MA  RI  B-J  SAN  NE. 

Décidément,  <TOt*  fabrique  n*est  donc  pas 
suspendue  ? 

PAVL. 

Suspendue! 

BIBI. 

Ben  du  contraire!  ça  roule  joliment  main-> 
tenant  !  ...... 

MAEIE-^EAKNB.  - 

Mais  il  y  a  queuq'  jours ,  tous  étiez  sur 
r  point... 

P.  YaudeviUes.  3.  4 


18  PIERRE,  PAUL  ET  JEAN. 

BIBK. 

Eh  bien!  oui^  de  mettre  la  clef  sous  la 
porte. 

PAUL» 

Et  d'être  coffré  peut-être  par-dessus  V  mar- 
ché ;  mais,  tenez,  ma  sœur,  H  y  a  une  pro- 
TÎdence  pour  l'es  honnêtes  gens. 

BIBI. 

Oh  !  çà ,  oui.,  il  y  en  a  une  I 

PAUL. 

Figurez-yous  qu' samedi  dernier...  c'était 
samedi ,  n'est*ce  pas ,  Bibi  ? 

BIBI. 

Oui ,  mon  papa...  Le  jour  des  paiemens  , 
quoi  !  une  fin  d*  mois ,  les  billets  échus  et  la 
caisse  vide. 

PAU  t. 

Elle  sait  tout  cela ,  elle...  c'est  mon  pre- 
mier commis. 

.  MABIE-JEAIflCE. 

Eh  bien  ? 

PAUL. 

Eh  bien  !  y 'là  que  je  reçois  une  lettre^  de 
monsieur  chose... 

BIBI. 

De  M.  Lebon. 


ACTE  I,  SCÈNE  XII.  ^ 

PAIOL. 

Notre  juge  de  pnix,  qui  m'învîle  à  passer 
chei  lui  sur-le-champ...  J'y  \ole  avec  Bibî. 

AIR  :  F'wc  une  femme  de  tête* 

«  Asseoyez-vous ,  mMit  c'brave  bomme , 
£t  signez  c''te  quittanc^-Lî. 

—  Un'  quittance  !...  et  de  quefl'  somme?... 
De  vingt  mitl^  fmacs  que  voilà. 

—  Par  exemple ,  v'ia  qirest  uoiqiie  ! 
Et  d^ou  me  vient  cet  argent  ? 

—  D'un  liomm'  qui  dans  voC  fabrique 
Veut  le  placer  utilement 

n  sait  qu'vous  ê.V  dans  b  peine , 
Mais  sans  l'avoir  mérité  ; 
Qu'si  vous  éprouvez  d'ia  gène  ^ 
Vous  avez  d''la  probité. 
11  croit  fair',  d''aprcs  c'  système  ^ 
D'son  or  un  usage  lieurenx.  » 

—  Parbleu  !  me  dis-je  à  moi-même , 
Un  frèr'  n'agirait  pas  mieux. 
JPprofitons  d'son  obligeance , 

Je  sign'  !  j'emport'  le  magot  ; 
J'pai'  tout  c'qu'était  en  souffrance  : 
Via  la  barq'  remise  à  flot. 
Alors  courant  d'i^n  train  d'poste , 
Les  chalands  et  les  commis , 
Chacun  revient  à  son  posté , 
£t  j'ai  r'vu  tous  mes  amis. 


4ô  PIERRE,  PAUL  ET  JEAN. 

MABIE-JEAniTE. 

Cela  n*est  pas  possible!...  Il  fallait  donc 
uous  écrire  ça  plus  tôt. 

FAVL. 

vNoD  9  ma  foi  9  nous  nous  fesions  une  fête 
de  yenir  vous  l'apprendre  nous-mêmes. 

SCÈNE  XIII- 

I.ES  PKÊcéDENSy   PIERRE  BUISSON. 

p  I  £  A  B  E  9  accourant  avec  joie. 

Femme  ^  embrasser-moi...  Eh  !  te  v^là^HODOO 

frère  ! 

LES   QVATBE   F1LIX8. 

Bonjour  5  mon  oncle. 

p  A IJ  L  9  lui  serrant  la  maiii. 
Bonjour,  Pierre. 

BIBI. 

Mais  où  est  donc  ma  cousine  Tiennette  ? 

PIERBB. 

Elle  est  dans  la  salle  basse...  Allez ,  allez f 
elle  sera  bien  contente  de  vous  Toir. 

B I B 1 9   entraînant  ses  sœurs. 

Courons  vite  Tembrasser,  et  lui  faire  nos 
petits  présens. 

(Elles  entrent  dans  la  ferme.  ) 


ACTE  I,  SCÈNE  XIV.  4i 

SCÈNE  XIV. 

?IERRE,   PAUL,  MARIE-JEANNE, 
ensuite  LE  GÉNÉRAL. 

PIERRE. 

Ces  pauvres  enfans  î  Je  v'nons  de  travaiDer 
pour  elles...  Femme  ,  c'est  une  affaire  faite, 
monsieur r  Général  est  enchanté  d'son  iaqui« 
siâon  ;  la  ferme  est  vendue, 

Tendue  !  .     ,  , 

PIERRE. 

Quarante  mille  francs.  ..dont  dix  mille  payés 
â'^avance  et  comptant  en  tons  papiers.,.  Les 

;il  montre  un  paquet  de  billets.  Le  Général  sort  de  la 
ferme ,  et  écoute  dans  le  fond  la  scène  qoi  suit.  ^ 

.  p ATII, ,  avec  inquiétude. 

Comment  !  frère,  tu  t'  défais  de  ta  ferme? 

p  I E  B  R  E  ,  le  tirant  à  part. 

Oui...  et  prends  c't  àcompte-là,  mon  ami, 
prends. 

PAUL. 

Pourquoi  faire  ? 

PIERRE. 

Tu  me  le  demandes...  Crois-tu  que  j*  souf-< 

4. 


4a  PIERKE,  PAUL  et  JEAN. 

frirons  qu'il  y  ait  un  banqueroutier  dans  la 
famille?  Non,  moo ,  morgue!  prends  ça^  et 
ya  vite  parer  1*  coup. 

p  A  u  L  9  (oui  ému. 

Par  exemple?..,  J'te  r'mercie,  frère,  mais 
j'ai  trouvé  des  fonds...  plus  qu'il  n*  m'en  faut 
pour  faire  aller  la  maehine. 

PIEB&&9  étonné. 

Ohloht 

PAVL. 

Va  rendre  à  c'  monsieur  son  argent,  [c  n'veux 
pas  que  tu  vendes  ta  ferme ,  un  bien  que  ta  as 
gagné  à  la  sueur  de  ton  front  ! 

PIBBUE. 

Rendre...  c'est  bien  aisé  à  dire. 
y  a-t-îl  un  écrit  ? 

PIEftRV. 

Pas  encore...  mais  ma  parole... 

PAVI. 

Diable  ! 

LE  GENERAL  s^avancc. 

Mes  amis ,  j'ai  tout  vn ,  tout  examiné  dans 
le  plus  grand  détail  y  et  je  suis  content. 

PAUL  9  à  Pierre  et  à  Marie- Jeanne. 

Si  on  pouvait  lui  faire  entendre  ratson».. 


ACTE  I,  SCÈNE  XIV.  ^ 

riERKEy  k  Marîe-Jéanne. 
Va,  toî  qui  parles  pour  tout  le  monde. 

MAEIE-JEANITE. 

Essayons...  {Haut,  )  Mossieu  V  Général... 

LE   ciNÉBAL. 

Je  sais 5  ]e  saîs...  Soyez  tranquille,  je  n'oit 
Iblierai  pas  les  épingles. 

M  ABIE-JEAiriVE. 

Uossî^u  rGénéraL..  yous  êtes  ben  bon, 
«aïs...  ( ui  Pierre  etàPauL  )  Parlez,  si  tous 
Toulez ,  moi ,  je  n'oserai  jamais. 

PAUL,  d'un  air  détermÎQé. 
Modskur  le  Général... 

LE  oàirÉBAL,  à  Pierre. 
Quel  est  ce... 

PIERBB. 

C'est  Dût' frère  Paul,  le  fabricant  de  Quim- 
pcr. 

LE   GBifÉBAL. 

Ah  I  ah  !  fort  bien.  Je  connais  le  motîf  pour 
lequel... 

PAU  u 

Oui,  Général,  mais... 

LE  GÉHBB'AL. 

Votre  frère  m'a- tout  dit.  C'est  son  procéda 


44  PIERRE,  PAUL  ET  JEAN, 

four  vous  qui  m*a  surtout  décidé  à  cooclure 
le  marché. 

FAUL. 

Je  conçois  cela;  cependant... 

LE    &EIIÉAAI.. 

Je  m'en  félicite  d'autant  plus  que  je  traite 
îcî  avec  de  braves  gens;  j'habiterai  ce  pays, 
et  nous  nous  verrons  souvent,  car  je  me 
regarde  déjà  coname  un  ami  de  la  famille. 

.  (  Ils  le  saUient  tons.  ) 
PAU  t. 

Général  5  vous  êtes  trop  honnête...  (^ 
Pierre  et  à  Marie" Jeanne,  )  Ma  foi  9  il  est  sî 
poli,  qu'il  n'y  a  pas  moyen  d*  lui  dire  un  mot. 

LE    GÉNÉRAL. 

Monsieur  Pierre ,  je  m'invite  à  diner  chez 
vous,  et  nous  passerons  l'acte... 

PIEERE. 

J'ai  fait  avertir  le  ootairc. 

MARI  E-JE Ajsr  lî  E  ,  ba9  à  Pierre. 
Il  y  tient. 

LE    céNÉRAt. 

Je  suppose  bien  que  nous  n'aurons  aucune 
difficulté  pour... 

F  A  u  L  5  comme  firappé  d^une  idée. 

Ahl...  si  fait!«,.  un  moment!.*,  pênes 


ACTE  I,  SCÈNE  XIV.  45 

garde  !  nous  ayons  un  frère  qui  a  sa  portion 
Sijr  ce  côté-là. 

(n  indique  les  bâtimeos  à  droite.  ) 

LE  céicÉBAt. 

Ah!  ah  !...  est-ce  que  ces  vieux  bâtimeos 
font  aussi  partie  de  la  yente  ? 

p  1 E  R  a  E  9  vivement. 

Non  5  non ,  mossieu  le  Général  ;  Paul  se 
trompe,  ceci  n'en  est  pas...  Oh!  pour  un 
royaume  je  n'  donnerions  point  c*te  grange 
et  c'te  chaumière. 

LB    GBNÉBAL. 

J'en  suis  fûché  pourtant...  j'aurais  fait 
abattre... 

PIBBRE. 

Abattre!...  L'ancienne  maison  de  not* père! 
que  j' conservons  comme... 

MABIB-JEANNE. 

D'ailleurs,  comme  dit  Paul,  mossieu  le 
Général ,  i)  y  a  un  troisième  frère  qui  a  sa 
portion  là-dessus. 

PIBBRE. 

Not'  frère  Jean,  qui  est  parti... 

PADI. 

Et  que  nous  n^avons  pas  reru  depuis  plus 
de  treute  ans. 


46  PIERRE,  PAUL  ET  JEAN. 

PIBRBE. 

Le  notaire  dit  bien  qu'il  j  a  proscriptio*)  ^ 
et  qu'  la  loi  est  pour  nous;  mais  c'est  ég^al. 

AIR  :  Cîiantons  Vcunour  et  le  plaisir. 

De  c'tc  loi ,  comme  de  ben  d'autres , 
Assez  d'gens  sauront  profiter  ; 
Mais  ce  n'sVa  ni  nous ,  ni  les  nôtres , 
Qui  par  ell*  voudront  hériter. 
Moi ,  je  sens  bien  qu'il  en  est  une 
Qui  défend  de  faire  ainsi  fortune... 
£t  cette  loi  des  bonnet'  gens 
Ça  n's'écrit  pas ,  mais  c'est  là  d'dans. 

(  Il  indique  ton  coeur.  ) 

LE    céNÉBAL. 

Je  n'insiste  plus ,  mes  amis  ;  tous  ares 
raison  ,  si  ce  frère  revenait  un  jour... 

PIEIBB. 

Abl...  c'est  fini,  nous  ne  l'espérons  plus... 
Ce  pauvre  Jean  !... 

(  Ici  Henri  paratt,  court  à  la  fenêtre  de  la  fenne ,  et 
frappe  aux  carreaux  ;  ensuite  il  se  sauve  dans  le 
fona ,  et  se  cache  derrière  des  arbres.  ) 

PIEBBE. 

AIR  :  d€  Montènéro, 

Ah  !  de  revoir  ce  frérc  aime 

N 'aurons-nous  jamais  l'avantage  ?^ 


ACTE  I,  SCÈNE  XV,  4; 

LB    GÉNÉAAL. 

Croyez  qu'avec  vous  je  partage 
Le  vœu  que  tous  avez  fonnc. 

Mais  patience , 

Oui  f  patience  ! 
Le  Ciel  vous  doit  la  récompense 
Des  vertus  dont  je  suis  témoio... 
Le  bonheur  qu'on  cherche  bien  loin' 
Est  souvent  plus  près  qu'on  ne  pense. 

TiENVETTE»  sur  ia  porte  de  la  ferme. 
Mon  papa  ,  le  notaire  est  arrivé. 

LE    GéNé&AC. 

Allons  9  mes  amis ,  allons  dresser  Tacte  de 
îcnte. 

TOOS  reprennent. 

Le  bonheur  qu'on  cherche  bien  lofo 
Est  souvent  plus  prés  qu'on  ne  pense 

(ib  centreat  tous  dans  la  ferme.  Tiennetie  reste  la  demièrf  { 
Bcvî ,  qui  la  guettait ,  accoort  à  elle ,  et  la  relient.  ) 

SCÈNE  XV. 

TIENNETTE,  HENRI. 

HBlfAI. 

Mademoiselle  Tiennetie . 

TIEWNETTE. 

Que  TOUS  êtes  imprudeat  y  M*  Henri  !  Si 


4d  PIERRE,  PAUL  ET  JEAN. 

ma  mère  vous  avait  vu,.,  et  mes  cousines 
qui  étaient  avec  moi  !.«. 

fiENai. 

Ma  chère  Tiennelte  I  vous  me  voyez  au 
désespoir.  Je  suis  perdu!  j'ea  mourrai. 

TIENNETTE. 

Ah  !  mon  Dieu  !  que  vous  est-il  donc  ar- 
rivé ? 

BENRI. 

Je  viens  d'avoir  une  explication  avec  mes 
parcns....  ils  ont  traité  les  vôlresl...  et  de- 
vant moi  !  cela  m'a  fait  une  peine  !...  Voyant 
cela,  j'ai  eu  le  courage  de  tout  dire  :  je  leur 
ai  avoué  que  je  vous  aimais,  et  que  je  ne 
pourrais  pas  vivre  sans  vous....  Ils  se  sont 
mis  dans  une  colère  !...  si  vous  saviez.. .  Mou 
père  a  fait  venir  le  vieux  Thomas ,  notre  do- 
mestique, et  l'a  chargé  de  me  conduire  sur- 
le-champ  à  Bennes ,  chez  un  négociant  de  ses 
amis.  De  là  je  dois  partir  pour  Paris  ;  que 
sais-je  ce  qu'ils  ont  envie  de  faire  de  moi  ! 
Pendant  que  Thomas  attelait  le  cheval  au 
cahriolct,  je  me  suis  échappé ,  j'ai  couru  bien 
vite  par  ici...  Jugez  s'ir était  essentiel  poar 
moi  de  vous  voir,  de  vous  parler  ! 

TIENNETTE. 

Ah  !  M.  Henri ,  c'est  moi  qui  suis  cause  de 
tout  cela. 


ACTE  I,  SCÈNE  XVI.  49 

HENRIETTE. 

Promettez  -  moi  de  ne  pas  m*oublier,  de 
m'écrire, ,.  ma  chère Tiennetle...  promeltez-i 


!  fc-moi  ! 


I 

TIENNBTTE. 
Aia  :  Pauure  Riquet  I  ou  Romance  de  Romagnésie, 

Puis-je  vous  fair'  celte  promesse  I 
Quoi!  TOUS  partez.... 

Dans  peu  d^instaos. 
De  la  rigueur  de  mes  parent 
Consolcwiioi  par  ta  tendresse 

TIENNETTE,  à  part. 

Combien  mon  cœur  est  attendri  ! 
Je  sens  que  sa  peine 
Est  la  mienne  !... 
Pauvre  lienri  !  pauvre  Henri  ! 

(l>'air  est  interrompu  par  celui  qui  suit.  On  eotend  des  chants 
i'ailégresse  ,  qui  partent  tout  à  coup  de  Tinldrieur  de  I4 
£enne. JTiennette,  surprise,  s'arrcte  et  «'conte. ) 

Morceau  chanté  dans  Vintérieurdc  lajermeparla 
fandlle  Buisson ,  réunie» 

Am  De  Joconde. 

Jour  lieureux  ! 
Le  ciel  comble  enfin  nos  vœux  ! 

Ab  !'  pour  nous 
Combien  ce  moment  est  doux  ! 
F.  Vaudevilles.    3.  S 


5o  PIERRE,  PAUL  ET  JEAN. 

—  0  mes  amis  !  —  0  mon  frère  ! 

—  Mon  cher  Paul  !  —  Mon  pauvre  Pierre  ! 
—  Est-ce  loi...  toi  que  je  revois  encor?... 
Quel  momcat!  quelle  ivresse!  quel  Iransport  ! 

TIZNNETTE ,  étoonëc. 

Qu'enlcnds-je  ?  Quels  accens  ! 

SCÈNE  XVI. 

tES   PBécéDENS,    MARIE-JEANNE, 

LE    YIEOX   D0ME9TIQBE   THOjVlAS 

MARI£-Jli;ANNB,  eoUraînant  Tieouette. 

Mon  enfant ,  viens  donc ,  ne  perds  pas  de  tems  ; 
Viens  prend^  part  au  bonheur  de  tes  parens  I 

TIENNETTB   BT  HENAI  ^  à  part. 

Ah  !  quel  chagrin  I 

MAEIE-JEANIfB. 

^  Quelle  ivresse  I 

LE    VIEVX    THOMAS ,  accourant   par  I«  fond  et  prenant 

Henri  par  le  brais. 

Mais  ,  Monsieur ,  le  tems  nous  presse  : 
Tout  est  prêt  ;  il  faut  partir  à  Tintant 
Venez  donc ,  la  voiture  vous  attend 

TlfilfniTTE. 

Henri! 

REITKI. 

Tiennette!.... 

.TOVS   DEUX. 

Ah  !  quels  momens  ! 


ACTE  I,  SCÈNE  XVI.  5i 

TIK  DE  L^ÀIR  de  la  Romnnce  de  Roma^si, 

HENRI  de  loin,  ET  TIENNETTE,  ensemble. 

Console-moi  y  par  ta  tcnilresse , 
De  la  rigueur  de  mes  parens. 

S  I    MARIS- JEANNE,  enlrainant  sa  fille  dans  la  ferme. 

toi 

%  \      Viens  partager  notre  allégresse , 
r  1     £t  le  bonheur  de  tes  parens. 

THOMiS  ,  entraînant  Henri  vers  le  c^té  droit. 

H  faut  partir,  le  tems  nous  presse  ; 
Obéissez  à  vos  parens. 

[ibrie-Jeanne  rentre  dans  la  ferme  avec  sa  fille  ;  Henri  s'en 
Ta  avec  Xboaxas  pnr  le  fond  à  droite  ,  et  la  toile  baisse.) 


M 
58 
to 

M 

« 
H 


rZjr   DU    PREMIER  ACTE. 


ACTE  SECOND. 

Le  tbéâtre  représente  une  chambre  rustique  dont  k 
fond  ne  s^étend  pas  au-delà  du  deuxième  plan.  Oi 
y  voit  un  vieux  fauteuil  de  tapisserie  et  des  esca- 
belles.  Un  portrait  de  vieillard  est  attaché  à  la  mu- 
raille. 


SCÈNE  I. 

Au  Icrer  du  rideau  ,  toute  LA  FAMILLE 
BUISSON  est  en  scène. 

TABLEAU.  ^ 

(  Le  Général  est  assis  dans  le  grand  faufcuU  ;  il  occupe 
le  milieu  du  théâtre.  A  sa  droite ,  Pierre  et  Marie 
sont  assis  sur  àcs  escabelles  ;  h  sa  gauche  est  Paul 
avec  une  de  ses  Biles  :  deux  autres  filles  de  Pauï 
sont  debout ,  appuyées  sur  le  dos  du  fauteuil.  La 
quatrième  est  assise  par  terre ,  un  bras  appuyé  sur 
le  genou  du  Général ,  et  de  Tautre  elle  tient  îe  cha- 
peau de  son  oncle.  Tiennette  est  debout ,  à  Textré- 
mité  droite ,  devant  une  petite  table  couverte  de 
fleurs  des  champs ,  dont  elle  arrange  un  bouquet. 
Le  Général  est  censé  achever  le  récit  de  ses  aven- 
tures ;  tout  le  monde  Pécoute  en  silence  et  avec  un 
grand  intérêt. } 

{  LE   GÉlfÉRAl. 

Oui  ,  mes  amis ,  après  cette  journée  fatale 
je  fus  fait  prisonaier  ,  et  envoyé  à  reitrémitè 


ACTE  II,  SeÈIfE  I.  5» 

de  l'Europe  ,  dans  un  pays  presque  sauyage  : 
fj  demeurai  huit  ans. 

TO€S. 

Huit  ans  ! 

Et  tu  n'as  pas  pu  nous  donner  de  tes  nou- 
▼elles  ? 

LE    GÉNÉRAL. 

Toute  communication  était  sérèrement  in- 
terdite... J'ai  beaucoup  souffert;  mais  ni 
moi  ni  mes  compagnons  d'infortune  nous 
n'ayons  jamais  dései^péré. 

AIR  :  Du  Verre. 

Pendant  qu^un  espoir  plein  d'appa^ 

Raffermissait  notre  courage , 

Da  récit  de  nos  yieui  combats 

Noos  amusions  notre  esclavage. 

Calnies  an  milieu  des  déserts , 

écrivant  gaiment  nos  mémoires , 

An  fouTenir  d^un  seul  revers 

Nous  opposions  trente  -victoires  <  ^ 

MABIE-;»E  AlflTE. 

Un  Français  !...  ça  tire  parti  de  to^ut. 

LE    GBNÉaAL. 

J'ai  reru  ma  patrie  !...  et  tous  mes  maux 

ont  cessé.  Wes  blessures  m'ont  valu  une  re- 

-     5. 


54  PIERRE,  PAUL  ET  JEAN. 

traite  honorable  ;  j'ai  aequis  une  fortune  dont 
)e  n'ai  point  à  rougir,  et  je  Tiens  finir  ma 
carrière...  où  j'ai  passe  mon  enfance. 

A.IR  :  Du  Pot  de  fleurs. 

Jeune ,  on  s'embarque ,  Ton  voyage , 
Et  gatment  ou  brave  le  sort  : 
Plus  tard ,  échappé  du  naufrage , 
On  aime  à  renXrcr  dans  le  port. 
Assis  à  Tombre  d'un  vieux,  hêtre , 
Entoure  de  ses  vieux  amis , 
On  sent  que  le  plus  beau  pays , 
C'est  le  pays  qui  nous  vit  naitre. 

PIERRE. 

C'est  ici  !  v'Ià  la  chaumière  encore  telle 
que  tu  l'as  quittée. 

PATI  t. 

Excepté  qu'elie  est  bien  plus  rieiUe.  Vous 
souTenez-YOus ,  mon  frère  le  général,  que 
jfious  couchions,  tous  dans  la  grange  qui  est 
là...  à  côté?  Comme  nous  fesîx>ns  des  cul- 
butes sur  les  bottes  de  paille  f  hein  ? 

PIERRE. 

Et  v'ià  r  TÎeux  fauteuil  de  not'  bon  père. 
Le  cher  homme!  combien  de  fois...  assise... 
là...  cofnme  tu  es  ,  il  nous  a  parlé  de  toi  ! 

PAUL. 

S'il  vivait,  serait-il  heureus;  de  roir  son 
fils  en  général  ! 


ACTE  II,  SCÈNE  I.  55 

t£  ciffÉRAL  jettcse&regatds  vers- le  tableau  attaché 

à  la  muraille. 

Mai3  c'est  son  portraît  que  j'aperçois! 

(n  se  lève.) 

PJEBRE. 

Eh  !  mon  Dieu  l  oui  y  c'est  lui-même. 

(  Tout  le  monde  se  lève.  ) 

TlBnNETTE. 

Mon  oncle»  Toilà  un  bouquet  d^  fleurs  des 
champs...  que  ]*  viens  d'arranger  pour  tous. 

LE    GivéhAL. 

Grand  merci ,  ma  chère  petite  nièce,.,  tu 
es  bien  aimable...  tiens ,  va  le  placer  sur  ce 
cadE». 

(  Tâcnnette  va  attacher  le  bouquet  au  tableau.  )  ' 

Ah!  çà,  mes  amis,  me  voilà  arec  vous, 
point  de  façon  ,  point  de  gêne  ,  je  veux  que 

TOUS  me  traitiez  comme comme  votre 

frère. 

PIERRE. 

Oh  !  dame,  nous  ne  pourrons  pas  te  trai- 
ter en  grand  seigneur  ^  mais  nous  ferons  d' 
nol' mieux. .« .  Femme,  songe  au  dîner, 
d'abord.  '' 

HAEiE-JEANVE. 

Oui,  oui,  notre  homme...  sois  tranquille. 
Où  faudra-t-il  mettre  la  table  ? 


S6  PIERRE,  PAUL  ET  JEAN. 

LE    céïlé&AL. 

Ici. 

MA&IE-JEANITB. 

Oh  I  c'est  bien  petit,  c'  t'eodroit....  nous 
n'  seroQS  point  à  notre  aise. 

LE   GÉNÉRAL. 

Ëh  bien  !  pourquoi  pas  dans  la  grange  ?... 
elle  est  assez  grande...  Je  me  souviens  que 
c'étaient  les  ruines  de  Tancien  château.... 
nous  y  prenions  autrefois  nos  meilleurs  repas. 

PAUL. 

C'est  vrai  :  ça  nous  rappellera  not'  jeune 
lems. 

/LiR  :  A  nos  goàts  conJormeZ'Vous  vite.  (  De  Pantin.  ^ 

Grâce  au  souvenir  aimable..  , 
De  tout  cMont  nous  fùm'  témoins , 
I^ons  allons  à  cette  table 
Avoir  quarante  ans  de  moins/ 

MARIE-JEANNE. 

Je  n'svÀs  pas  assez  coqnette 
Pour  vouloir  arrêter  V  tems  ; 
D^ailleurs  aurais-j'  ma  Tiennette, 
Si  j^  n^avais  que  mes  vingt  ans  l 

LES    TROIS   FRERSS.' 

Grâce  au  souvenir  aimable ,  etc. 

PIERRE. 

^Si  le  r'pas  est  vaille  que  Taille  , 


ACTE  H,  SCÈNE  II.  57 

Par  le  coear  il  s^n  servi  ; 
£1  sur  ce  champ  de  bataille 
Tu  n''verTais  pas  un  en^mi. 

LES   TROIS   FRERES,  rëanû. 

Grâce  au  souvenir  aimable ,  etc. 

(ils  sortent  tous ,  czespté  Tiennatto  et  le  OénéalL  ) 

SCÈNE  II. 

LE  GÉNÉRAL,  TIENNETTE. 

LE    GENERAL. 

Restb...  TieDoette...  )*ai  à  te  parler^ 

TIEilTlTETTE. 

Me  Toilà  I  mon  oncle. 

LE   GénÉBAL. 

Dis-moi  un  peu  :  tantôt  9  quand  tu  es  Tenue 
m'embrasscr....  tu  étais  bien  émue....  tu 
pleurais...  pourquoi  cela  ? 

TIENHETTE,    COnfuSC. 

Mon  oncle...  c'était  le  plaisir...  de  tous 
Toir...  la  joie... 

LE   GBVÉ&AL. 

Oh  î  la  joie...  L'amour  n'est-îl  pas  pour 
quelque  chose  dans  tout  cela  ? 

TIENWETTE, 

Mon  oncle  ,  je  tous  assure... 


58  PIERRE,  PAUL  ET  JEAN. 

LE    GÊifÉaAL. 

Cependant  M.  Henri  m'a  dît... 

TIENNETTB. 

M.  Henri  vous  a  dit  ?... 

LE    GÉNÉRAL. 

Qu'il  t'aimait. .  Et  pourquoi  en  rougir  ? 
tiewnette. 

Je  ne  rougis  pas ,  mon  oncle  ;  mais  il  est 
bon  que  vous  sachiez  tout....  Si  j'  pleurais 
tantôt,  ce  n'était  pas  sans  cause  :  M.  Henri 
est  parti  pour  Rennes. 

LE  GÉNÉRAt,  en  confidence. 

Pas  encore. 

TIEWKÏTTÉ. 

Pas  encore  !  est-il  possiWc  ?  ah!  que  j' suis 
donc  contente  ! 

LE   GÉNÉRAL. 

J'ai  fait  prier  M.  Verkadec  de  suspendre 
ce  départ  5  et  de  la'ameoer  son  fils. 

TIINNBTTK. 

Oh  !  il  est  brouillé  avec  mon  père  et  liia 
mère  ;  il  n'  viendra  pas. 

LE    GÉNÉRAL. 

Il  viendra.  L'espoir  de  me  vendre  une 
maison  dont  il  a  grande  envie  de  se  défaire 
le  fera  bientôt  accourir.  £h  !  parbleu  !...  re- 


ACTE  II,  SCÈNE  III.  5g 

garde  par  cette  fenêtre  :  n'est-ce  pas  lui  qui 
Tient  par  là-bas  ? 

TIEIfNETTE. 

Oh!  mon  Dieu!  oui...  Je  tremble,  mon 
oncle,  je  n'  veux  pas  rester...  je... 

LE    GÊNÉ  BAL. 

Oui ,  oui ,  va-t'en...  laisse-nous,  et  sur- 
tout ne  dis  encore  à  personne  que  je  suis  ton 

oncle. 

TIEVKETTE. 

Bon!  je  comprends....  Je  vais  sortir  pur 
ici  pour  ne  pas  les  rencontrer. 

(Etie  sort  par  la  droite.  AI.  Verkadec  et  son  fils  entrent 

par  la  gaucbe.  ) 

SCÈNE  III. 

LE  GÉNÉRAL  ,    M.  VERKADEC  en 

liabit  de  visite;  HENRI  en   frac    noir,  gilet  . 
blanc ,  pantalon  et  bas  de  soie  noirs. 

M.   VEEKADEC. 

GÉHÉBAL,  je  me  rends  à  votre  invitatioD. 

tB  GiSirÉBAL,  regardant  Henri. 
Ah!...  voilà  votre  fils? 

M.    VERKADEC. 

Oui ,  Général.  (  j4  son  fils.  )  Saluez  donc . 
Monsieur.    {Ju  Général,)  Ma   foi,  il  allait 


6o  PIERRE,  PAUL  ET  JEAN. 

TBonler  en  Toiture  au  moment  où  j^ai  reçu 
Totre  billet. 

LE   GENEE  AL. 

Pardon  ,  Monsieur  ,  si  je  tous  reçois  dans 
cette  modeste  demeure. 

H.    TERKADBC. 

Général  9  je  suis  honteux  pour  tous...  Si 
î'aTais  su  que  tous  dussiez  rester  quelques 
jours  d«ns  ce  Tillage,  je  tous  aurais  prié 
d'accepter  un  logement  chez  moi. 

LE    GENEEAL. 

Oh  !  je  ne  suis  pas  di/Ticile...  Dans  mes 
campagned  je  n*ai  pas  toujours  été  aussi  bien 
logé. 

M.    TEB&ADEG. 

C'est  que  j'ai  acheté,  moi ,  un  Tieux  châ- 
teau oélèbre  en  souTenirs  magiques  et  che- 
Taieresqaes  ;  il  a  été  bâti ,  je  croîs  >  dans  le 
tems  des  Goths. 

LE  civitiku    ' 

Je  TOUS  eh  félicite 

H.    TERKADEG. 

Oui,  j'ai  Toolu  même  que  cet  antique  ma- 
noir conservât  les  noms  du  Tieux  tems. 

AIR  :  Amour,  hasard ,  ont/ait  plus  d'un  prodige, 

(Des  Fiancés.) 

Auprès  de  la  tour  des  Trophées 
Voas  auriez  vu  la  tour  des  Preux , 


ACTE  II,  SCÈNiî  IIL  61 

Et ,  non  loin  de  la  tour  des  Fées , 

La  tour  des  amans  malheureux. 
Ua  femme  tient  à  la  tour  des  Folies  : 
lUais  j''aurals  pu  ,  sans  aucun  embarras , 
Vous  installer  dans  la  tour  des  Génies , 
Que  je  n*habite  pas. 

LB   GBNéBÀI,. 

Vous  êtes  trop  bon  !  Mais  je  tous  deman* 
derai  la  permission  de  faire  ma  cour  à  Ma- 
dame. 

X.    TKHKlDEC. 

Ab!  Général...  je  gagerais  que  tous  ayez 
serri  dans  TaDcien  tems. 

XE   GBHBKAL. 

Mai»..*  oui. 

M.    TERKADBC. 

Od  Toît  cela...  A  yos  manières...  |*aî  de- 
viné tout  de  suite  que  vous  étiez..^. 

LB   GBNBRAIr. 

J'ai  été  soldat. 

K.  VERKADEC. 

Sol... 

LE    GÉNÉRAL. 

Soldat...  dans  les  chasseurs  bretons. 

M.    ?  E  R  K  A  D  E  C. 

Ah!  ah!...   c'est  le  régiment  qui  est  en 
garnison  k  Quîmpcr. 

F.  Vaudevilles.  3  6 


6a  PIERRE,  PAtJL  ET  JEAN, 

LB  GéKCAAt. 

Vraiment?...  J'en  suis  charnaé;  j*y  trou- 
verai peut-être  quelques  anciens  compagnons 
d'armes. 

M.   YER&ADEG. 

Et  vous  ttes  devenu  général!...  c'est  su- 
perbe I  Nous  avons  eu  les  Fabert,  les  Ca- 
tinai.*.  qui  ont  fait  comme  vous. 

LÉ  GÉïïÉRÀty  isourtaitt. 
Et  quelques  autres...  que  vous  ne  noiïimez 

pas. 

AIR  :  Un  chet*€Llier* 

L^ancienne  France  eut  Fabett ,  Catînat , 

Dont  les  noms  seuls  valaient  presque  une  aràiée  j 

Mais ,  de  nos  jours  aussi ,  plus  d^un  soldat 

Sur  ses  talons  fonda  sa  renommée. 

La  gloire  eniîn  ,  de  tant  d^exploits  gUtnîé^s 

Formant  jine  immortelle  cbaine» 

Sur  nos  drapeaux  peut  flotter  incertaine 

Entre  les  vieux  et  les  nouveaux  lauriers^ 

Je  ne  dis  pas  non. 

HEIVBI. 

Si  mon  père  avait  voulu...   à  préseot  ja 
serais  peut-être  oflicier. 

M.    VERKADEC. 

Taisez-vous  >  monsieur  mon  fiU. 


ACTE  II    SCÈNf:  III.  63 

LE    céNBRAL. 

Ah!   ahl  j«iune  homme,  vous  auriei  du 

goût?... 

HENRI. 

Oui 9  Général...  Je  sais  les  malhcmatiqueS)  ' 

le  dessin... 

LE    céNEBAL. 

C*est  quelque  chose...  mais  «  pour  être  des 

aôlrcs. , 

AiB  :  Unejîlle. 

Avez-yoïis.  fait  avec  frait 

Les  études  militaires  ? 

De  Bos  manœuvres  guerrières , 

Jeune  homme ,  êtes- vous  instruit  ? 

ÏIENJRI. 

II  s^en  laut  que  )e  connaisse 
Ce  bel  art  qui  m'intéresse  f 
Mats  mon  ;èlc  et  ma  jeunesse 
Réppndêtit  de  meis  progrès. 
Eh  !  croycz-^ous  que  je  puisse 
Demeurer  long-tems  novice 
Bans  un  régiment  français  ? 

M.    TERKADEC. 

Général...  excusez...  aae  ^euoe  tête... 

LE   GÉNÉRAL. 

Il  me  gloU  y  voue  fils;  et  je  serais  charmé 


Ç4  PIERHE/PAUL  E/r  JFAN. 

si ,  par  le  rang  que  j'occupe ,  je  pouvais  con-^ 
tribuer  à-  sa  fortune  et  à  son  aTancemeoit. 

M.,  TBRKADEC. 

Général..,  {A  Henri,)  Remerciez  doDC  >, 
MoDsieur. 

HEITBI. 

Ah!...  je  n*ai  plus  d*auil>ition  depuis  que^ 
je  n'ai  plus  d'espoir  de.... 

LE    céNÉEAL. 

Que  dit-il  ? 

Des  folies...  une  passion  ridicule...   pour- 
une  petite  villageoise...  qui  n'a  rien...  et  que 
Monsieur  voudrait  épouser  !. 

nBiiBi. 

Mon  père  !... 

U.  VER&ÂDBG. 

Taisez-?ons>  Monsieur...  Il  y  a  de  quoi- 
irriter  des  parens...  aussi  inadaaie  Verkadeo 
est  furieuse  !... 

lE  CBRBBAX»    tirant  à  part  M.  Verkadec. 

Soyez  tranquille ,  je  me  charge  d'arranger 
cela.  J'ai  un  parti...  un  excellent  parti.....  à 
"VOUS  proposer  pour  votre  fils. 

M.    VEBKADEG. 

En  vérrté^  Général. ..  vous  songeriez  !..« 


ACTE  II,  SCÈÏfE  Uli  69 

LE   CBHBRAL. 

Noos  en  reparlerons  :  je  reirx  auparayaat 
termiDer  pour  la  maisoa  ea  question. 

If.    TEftJLADEC. 

Général...  n ou srn 'mirons  point  de  di/!icul~ 
tés;  je  Yous  laisse  le  maître  des  conditions. 

LE    céKBUAL*. 

En  ce  cas,  faites-njoi  ramitîé  de  dîner  ayec 
moi...  là...  sans  cérémonie...  Amenez  ma- 
dame Totre  épouse ,  et  nous  signerons  l'acte 
aa  dessert. 

M.    YKItKADEC. 

Ifta  foi 9  Générale  on  n'est  pas  pltis  r«nd 
que  TOUS  en  affaires.^.  Je  cours  chercher 
madame  Yerkadec. 

L£  cénÉBAi. 

Vous  ferez  un  mau.yaîs  dîner;.  mai&  la 
franchise  et  la  bonne  humeur... 

M.    TBAKADEC. 

Oui  9  oui...  la  gaîté,  îa  cordialité... 
LE  céiréRAL,  bas  à  M.  Yerkadec. 

Laissez-moi  votre  fils ,  je  serais  bien  aise 
de  causer  an  peu  avec  lui. 

M.  T  EAKADEC. 

Gomment  donc  !  mais  c'est  beaucoup- 
d'honneur  !...  Henri')  restez  ayee  monsieur 
le  Général ,  et  tâchez  de  profiter  de  ses^  con-*^ 

6. 


.  ,  ,MU«  swwn»  ICI  dans  une 
'"^"S^'  JT»  Jweo  rhoprjewr  de 
,.«(ïsa]u«'»  '^11  sort.) 

SCÈÎiE'ÎY:    • 

jgi^:fÉRAL,  AENRL 


f     f 


iiieBl  moo  cliier  ^Qllli^,aolttlSoalID«tt 

^0^*  n©  pa«  V^tre»  de  Tiénn^tite^' 

LE  géné:r  ai.  '  '  .' 

irîffif*^^"'  sérieusement? 

BENRI.' 

>^l^^ue  VOUS  ne  pouvez  rim^gîner  ! 

I  jkut  réfléchir  pourtant Vne  .jpetite 

.^l^ise.,.  sans  fortune... 

HENBI.. 

>giitis  fortune  ! 

AIR  :  Sol  mûrgîne  del  ri<K 


ACTE  II,  SCÈNE  ÎY.  6j 

S9D  biinieur  peit  cofjuette... 
£C  surtout  sa  bouté  .... 
Simple ,  douce  ,  innocente, 
partout  elle  plaira  ,' 
Bien  de«.  beauiés  ^^on*  vante 
N^onl  pas  o^i  ti?4soi;-là. 

LE    GÈNE  fi  AL. 

Propos  d'amoureux...  Vous  dites  cela  au- 
jourd'hui ^  et  daus  six  mois  tous  tiendrez  un 
autre  langage. 

Jamais  9  mon  Général,  jamais  ! 

LE    GÉNEBAL* 

J'ça  suis  lâché..*,  j'ai  dans,  ce  pay^  une 
nièce....  fort  jplie... 

HENRI  y  TÎvement. 

Est-ce  que  tous  auries  eu  le  dessein  ?... 

LB   &ÉNÉRAL. 

Oui,  je  yeux  lui  donner  un  marî^  et  fran- 
chement 9  j'avais  jeté  les  yeux  sur  vous. 

H  B IV  R I ,  vivement. 

Sur  moi  !  que  dites-vous? ah!  pardon  !  ne 
me  la  proposez  pas ,  je  serais  forcé  de  vous 
refuser. 

LE    GÉNÉRAL. 

PiaWe  !  refusy...  Songez  que  je  lui  donne 


70  PIERKE,  PAUL  ET  JEAN. 

PIBRUB. 

Oh  I  c'est  èèyÀ  fait  :  pour  son  oncle  !  elle 
est  parée  qu'ail*  n'  «çpj^it  p9S  pis  le  jour  do 
ses  noces.  .  Ah  !  çà^  oion  irère>  tu  as  doao 
engagé  du  monde  ? 

LE   GENERAL. 

Oui  9,  oui.  Devine  qui  ? 

PIERRE. 

^'a  Gne  !  je  n'  sai&. 

LE   6  BIT  é  RAI., 

M^et  madame  Verkadcc,  ayec  leur   fils 

H^API. 

PIERRE. 

.Qaollcîdée! 

LB  GBlfiRAL. 

Laîsse-^moî    foire,  j'ai   des  raisons  poar 
cela. 

PIERRE. 

*  '  __  • 

'   Mais  \h  n''toûdront  poinf  ^ner  arec  noiis, 

LE    qÉlï.ÉRAL. 

•  •  •        •  ' 

C'est  possible  i  njais   ils  .  voudront  bien 
dîner  avec  moi. 

'PÎERRiÈ. 

Oh  !  toi,  c'est  différent;.  Ma*s^noiïs  avins 
eu  encore  i\  d  oo^tin.  une. (marelle... 

"  .     .     •*■  LE.  çiji:^R.AL.    .    "    -, 

Le  dfner  raccommodera  toeH  c^ela. 


ACTE  II,  SCÈNE  V.  ^t 

PISBBB. 

Bo  c*  cas,  j*  n*aî  pas  d'  rancune ,  moi.... 
J' lats  ben  vite  mettre  leux  cou teits...  Dit 
doQCy  frère...  les  yolot  déjàl 

LE    céirÉBACé 

Bon!  fais  entrer.. «.  et  enToie-moI  ta  fille 
jdaBS  quelques  iostans. 

IPIEBBE. 

I 

Donnez-Tous  la  peiue  d'entrer,  Monsieur 

|etBIadame. 

I 

X<B    GENEBÀI.* 

Madame». <  permettez  qu'un  Tieuz  ixdli'^ 
bire. 

Mi    VBBI&ÂdÉG^  è  Pierre. 

Laissez-nous,  bonhomme...  No'ùS  atone âi 
causer  a?ec  monsieur  \ù  Général; 

A  Totre  aise  ^  Mônfiî^tir ,  à  Totre  aise.  (  A 
P^L  )  S'il  savait  que  V  général  est  le  frère  du 
koohomine  ! 


I  II      fié  t      I 


^  PIERRE,  PAUL  ET  JEAN. 

SCÈNE  VL  / 

LE  GÉNÉRAL,   M.  vt  M™*  VERKADEC 

"HENRI. 

^  Madame  Yetltadcc  est  en  grande  toilette.  ) 

lE  GÉNÉRAL,  à  madame  Verkadec: 
Votre  fils  s'est  acquitté  de  ma  commission? 

M™*   VEBEADEC. 

Oui ,  Général...  Mais  yoje?.  le  caprice  des 
jeunes  gens...  Monsieur ,  il  n'y  a  qu'un  ins- 
tixûXy  ne  Youlail  point  partir  pour  Rennes, 
maintenant  il  faut  se  fâcher  pour  le  reteoir, 
et  nous  ayons  eu  beaucoup  de  peine  à  le  ra« 
mener  ici. 

ïiE  GÉiféAÀX.,  souriant. 

Oh  !  je  dcTinc. . ,  L'offre  que  je  lui  ai  faite... 

M.    TERKADEC. 

Comment!   Général,  vofots   avez  en  la 
bonté?... 

Oui ,  |e  lui  ai  fait  part  dn  projet  dont  je] 
vons  ai  parlé...  Je  D*aî  pas  été  henreax  dai 
mes  néguciatrons ,  on  m'a  refusé. 

M.    TERKADEC. 

Refusé  !...  Vous  ne  nous  aviez  rien  dit  df 


ACTE  II,  SCÈNE  Vii  j3 

ceh?...  Refuser  ait  hiarrîa^e  aiiquel  moQsIeur 
le€énéral  yétU  bieir  ^'intéresser  ! 

LE   QévàtLà.L, 

J'en  suis  AVutanf  plus  êtôhrié  que  la  jeûne 
personne  me  touche  de  ijfëë  ^è^...  C'est  moi 
qui  la  doterai../  €'e«ti9a  nièce^ 

M.    ET   M"**    rÉïï^iiA»JLQi     . 

Votre  nièce  ,  Général  ! 

Nous  nous  réjouissons  très  fort  d'une  al- 

LE    GBrTBB  AL. 

Vous  allez  la  toir^.;/  ne  Tintîmidex  pas 

M"*"   TEBSADEC. 

Oh  f  pou?ei'-TOiJrs  pei^r  Pi .»    , 

tu  ûiHwâVJ  . 
Elle  est  jeune,.,  sans  expérience. 

Je  suis  sûr  d'ayance  qu'elle  éii  él&âfijiàifie 
Je  bfdld  du  àGÉjhr  Aë  ^émràiééfl 

Jéf  ttmdrils  âéfà  pôuVaiH  Vàp^lkt  ma 
fille. 

F.  TattdtTilIei.  3.  m 


>4        piesRRE,paul{:ï  JEA».  ^-^ 

LE    GBNÉAi^t.  ., 

Il  ne  lient  <}u!à  tous  de  lui .  doimerlxi^  ^ 
^om...  la  voici. 

H.   VEBK.ADEC5  d'un  air  de  coateatemeat. 
Madame 'Verkadec 

•        •  • 

Je  suis  eachaotée  !  ..-   .:r. 

SCÈNE  VU,      . 


«     I.  û 


'il 


^liis  beaux  atours. 


lMo5  père  ux'a  dit  que  tous  me  dcmaodiè^j 

us  GSNEaAXi  val&pïéndre  {)ar  la  maîa,  et  la  |jresente 
à  M.  et  madame  Yerkadccv  «    :  .  ]\   •       ^ 

Avance 9  ayauce^  ma  ohcre  amie..«.  n'aie  1 
jas  peur.  .    .  > 

Queyois-îef 

y.    TERKADEG,. 

Mais  c'est  la  fille  du  père  Buisson  l 

Ehbien!  oui,  ma  .nièce.. •.?."? ^P^''^'^^* 

fel'use. 

r'  .• 


ACT£iî,'SCÈNE  vit;  ^t; 

HEiTRi,   vivênkent 
Taccepte  ,  Généra! ,  j'accepte  F-     ' 

IiE    GÉNÉRAI.    " 

la  nièce  du  général  Buisson*  * 

TIENNE  TTE. 

Mon  oxîWéy  '•  '  ^'      '  '*'   '•• 
I  r  '' 'î»c'. oi iHi'i  K'À  t;.-'  •  T  t  * 

I    Regardez-la. ..  N*^sMI  'd^as  Vrhî  ,:;Màda||tte, 
j  <|«e  votre  bru  est  tdul-iV-faïît  j'ôlje  ?  ";:     * 

.  '•  "v     .'  '  '*_ 

I  ■  t 

èiitLi  MmFOfwIietté^stthdrmante.       !"     , 

Ma  Tienrfèirtè'est  élÂnnânté ,        '  '  '   ' 
Sans  art  et  sans  apprêta;      i  j  .  :..     j    ' 
La  fortune  incon'stanîfe*'^'  '  '  '    >    •  ■ 
rîe  vaut  pas  ses*  alïraitîî.'' 

■'      'mrifRT,  tt  ses  parèhs. 

Oui ,  Tien'nette  est  cliarnrante , 

Sans  art  et'sans  a{>prétsj»^  - 

La  fortune  inconsfanfe  :■;•..'[      ' 

Vaut-elle  ses  altraifs?'-: -'  '- ;•:      / 

« 
« 

M.    ET    MADAME   VERKA.DEC* 

Oui,  Tienhette  est  piqi^ante 
'  9abi^!âH\;t'^abn5  dppr^ts-j  '    '  '  '    ' 
'     MaiaFihië^tottAci  rente  «'i''    • '•         î 
Doublerait  ses  attraits. 

HENRr.- 

VoT  n^ii  Tien  qui  nie  tento; 
Ma  fortuoc.eit  brillante... 


96  PIEftEE,  PATII  ET  J£AX 

Pourtairt  9  i^otrfs  biei| 
Je  joins  moitié  du  mien. 

M.   ET  M™*  TEKKADEG. 

Moitié  du  YÔtre  ! 

LS   oàviKkh  ST  BfBJf^l. 

Ouï  »  Tienoeite  tsi  chsnMnte, 

,  S^ps  arl  et  ?j^ii?  jipprètei 
La  (ôrtune  ip^nstaote  . 
Ne  vaut  pas  ses  attraits. 


g  J  Oui ,  TienoeUç  ea,f;h^mfx^j,   - 

S  (  Sans  art  et  sans  j)|i(ur/Sjts^f      •  ■    ,^ 

g   \  Mais  une  bonnc^^e  .  ^ 

r^    I  Va  doubler  ses  ^^'jts. 

J'  somn^'  1^  rcicopvaîss^fil^  y  ; 

Mon  oncle  »  d^  1^  bietij^. 

Et  mon  ame  conj^ttle 
MHes  oublira  jamais. 

LE    GÉNEEAt.     . 

Ah  !...  eh  bien  !  iqqt^  P.lî^ri  J9^f>  ««  t'a- 
vais-je  pas  dit  tantôt  /ct^a' J(u„i9«F^jri}  mon 
neveu?  ■  .       * 

H,E9IL1. 

Monsieur. .  •  jxum:  eher  ^ikelc  I 

(It  lui  saute  au  cou.  ) 


ACTE  H,  SCÈNE  VIU.  .77 

LE   G  en ^ BAL,  àUenri. 

Embrasse  ta  future.  (A  madame  f^erkadec.) 
Hbintenant  vous  allei  dîner  avec  toute  ma 
i^njUe...  Ycjfiez*  Madame  <,  nous  termine- 
rons toutes  les  affaires  à  table ,  et  vous 
Terrez  une  sa^e  cb  festin  d*un  nouveau 
genre, 

Noos  serons  bien...  partout  oi!i  yous  serei. 

Il  Cjfc9fi«RAli  lui  ^oone  la  iiu|îa,  ensuite  il  dit  à 
ïiennctte  et  à  ficoiri. 

Passez  devacit,  j^eujaçs  g^en?...  vous  n^êtes 
fas  e»pore  iqjàjrlés,. 

Tilïif  E  T  T  ç  5  ^aliQcnt,  et  dçnnant  l^raain  à  Henri. 

kh  I  le  b^Qi  petit  .09c1e  I 

(ÎOQs  sortent  par  le  côté  droit ,  Paul  entre  par  la 

gaache.  ) 

SCÈNE  VIII. 

Mon  frère  1  mon  frère  !  Eh  bien  I  o\\  est^l 
donc  ?  je  le  croyais  encore  ici...  et  le  dîner 
qui  est  tout  prêt  1...  Il  no  s'attend  pas  à  une 
ÀrprU^  1...  ]|i.9)UAÎqu«4e3  phasseuri  brelons 
qui  vient  dcyfenir.  Ils'X>9itSiLi  l'arrivée  de  noi' 
frère  le  général ,  e^  îlf  y^i^t  lui....  bcin  î.... 

7- 


78  PIERKE,  PAUL  ET  JEAN. 

qu'est-ce  que  f entends ?..•   {En  ce  moment 
on  entenctune  fanfare  militaire»  )  Est-ce  qu'on 
se  serait  mis  à  table  sans  moi  7  courons  vite  I 
(Il  sort  en  courant  par  le  côté  droit.) 

SCÈNE  IX. 

(  Deux  grands  panneaux  du  fond  de  la  chaumière  s*ou- 
yrent  tout  à  coup ,.  et  laissent  apercevoir  une  belle 
grange  formée  des  nùnes  d^un  ancien  château ,  et 
au  nuiieu  de  laquelle  est  dressé^  une  grande  table 
toute  servie.  Le  fond  de  la  grange  est  ouvert  et 
donne  sur  la  campagne..  Des  guirlandes  de  fleurs  et 
de  feuilles  décorent  cette  salle  à  mander.  La  porte 
du  fond  est  occupée  par  la  musique  des  chasseurs 
bretons  qui  exécute  des  fanfares.  Tous  les  convi- 
ves sont  a  table  :  le  général  dans  le  milieu ,  ma- 
dame  Veriiadec  à  sa  droite,  Marie-Jeanne  à  sa 
gauche  ;  Tiennette  prés  de  madame  Verkadec  ; 
Henri  prés  de  Marie-Jeanne  \  le  reste  dans  Tordre 
naturel.) 

(Apres  la  fanfare.) 

PIEBRE,  se  levant ,  le  verre  à  la  main. 

Méat enfans....  à  la  santé  de  votre  oncle  1* 
Général  ! 

TOUS. 

i  not'  frère 
A  la  éanté  de  \  notre  oncle  \  le  Général  ! 

(  moùsieur 

(  Fanfares.  ) 


ACTE  îr,  SCÈNE  IX:  79. 

LE  GÉEfÉBAL  se  lève  et  vient  sur  le  (levant  delà  scéiie;. 
tout  le  monde  quitte  la  table. 

{A  madame  Verkadec,  )  Convenez  5  Ma- 
dame ,  que  je  suis  comblé  par  le  sort.  Quitte 
euTers  TÉtat,  Je  n*ai  point  oublié  que  j'avais 
des  parcns...  Je  les  revois,  je  les  embrasse  y. 
je  Q*ai  jamais  c:té  si  heureux! 

PiAVL. 

Mon  frère  ,  à  présent  je  vois  à  qui  j^ài  l^l• 
bligatioD... 

Que  veux-tu  dire ,  mon  pauvre  Pàuf? 

PAUL,  en  confidence. 

Les  vingt  mille  fraoos  que  le  juge  de  paix, 
de  Quimper... 


LE   GÉNÉRAL. 


Silence  !  n'en  aurais-tu  pas  fait  aulant-pour 
moi  ? 

PAUL. 

Oh  !  ça... 

LE    GÉNÉRAL. 

Eh  bien!  qu'as-tu  à  dire?,..  Nous  nous 
sommes  retrouves  9  mes  amis  9  ne  nous 
quittons  plus. 

AI  A  :  //in«yà«</ns.' (Vaudeville  des  Atna^onts,) 

Ton»  trois, de  front  ^  iqsqulà  la  tombe  »     , 
Suivons  toujours  uieme  chemid. 


ao      /    PIERRE,  PAUL  ET  IEAK. 

Si  Tun  de  nouji  chancelle  .et  tombe. 

Les  autres  lui  terniront  la  ms^îQ* 

Entre  frcres  chaque  fortfinQ 

I?e  doit  former  qi|\ufi  seul  trésor... 
Qti\à  Pun  de  npus  le  sort  en  enlève  une , 
Pour  le  braver  il  en  est  deux  encor- 

i  MABIE-JBÂlflCE. 

Yous  ne  nous  en  voulez  plas  y  madame 
V.erka^^ç  ? 

p  lE  RR E  9  la  retenant. 

Tais-toi  donc ,  tqujt  (iî^  ^s^  oublié.  La  paix  I 
oot'  feipine  ^  la  paix  ! 

.    yAUOBVaLE,  ^ 

AIR  :  De  Doche, 

¥A4iB-^BA9rN|£ 

Lç  àiip^fà^  «^  IPC  pjait  gi^àrp } 
Mais  je  ris  lorsque  les  méchaos , 
Les  ingrats  et  les  ioUpijg;^ 

Se  font  la  guerre.  iP^^) 

Pendant  qaHls  sp  )ap9snt  dç^  jtraîts , 
Et  qoç  des  tipublps  sont  leurs  fête| , 
^r  Êîut  s^dire  entre  gens  honnêtes 
*        Fcsoiu  la  patx.^  C*i'*} 

CHOEUR 

La piîi  >  b  pùi  h pavx,  (a  pat^S 

PIERRE. 

.  0rè8  Pmatîn,  quRad  vot*  inënagcrç 


ACTE  I|,  S  CE  HE  IX.  81 

Gronde ,  querelle  et  fait  du  bruit , 
Quand  tout  Tlong  du  jour  eU*  tous  dit . 

Pesons  la  guerre;   '  (bU.) 

A  votre  plac* ,  moi ,  9e  rirais , 
Et  je  la  laî^T^s  coAtr^^jve. 
Faut  bco  que  ysoir  tlV  yj^ïC  yfius  d'iKC  ; 
—  Mon  p'âlli^me  ....;Miu  la.p^«, .(  Bis.  ) 

La  paix ,  la  paix  ;  fa  pajx ,  \a  paix  ! 

.](QMr  ravir  à  jeune  bergère 
Avec  adresse  un  àf^  b^scr 
QnVlle  prétend,  nous  refuser , 

Fesdns  la  guerre.  (Bis.  ) 

Mais  91  ce -baiser  plein  d^attraits 
Lui  ^ausc  une  colc^re  extrême , 
Pour  en  obV^iir  un  deuxième  « 

Pesons  la  faix.  ^  (  B<«>  ) 

CHOEUR. 

La  paix  ,  la  paix ,  la  paix  ^  la  paix  ! 

LK   GÉNÉRAL.    • 

Si  quelque  ennenii  téméraire 
Troublait  encore  nos  états , 
Chacun  criait  :  Jfwor^  tff^  àr^f^ 

Fesont  la  guerre  !  (  Bis.  ") 

Mais  pour  qu^alors  d^autres  succès 
Couronnent  nos  vieilles  bannières , 
Plus  de  discorde  entre  des  frères , 
Français,  Français ^  fesons  la  paix. 


Sa  PIERR£\  PAUL  ET  JEAN.  ÀCT.  11^  SC, 

.        ■      .  .ÇHOÇyR.  *      .... 

L»  paix,  la  paix ,  la  paix,  .la  paijLÎ;'  ; 

Je  n'ai  pas  Miumewr  trcs-gacrriére  ; 
Je  sens  p»àTtatit  au  fond  du  cœur ,   ' 
QuaDdon  insulle  à  ootre  hoDuiiut'y 

Qu'il  i'atit  la  f  .yeiçfe.  (  ^''-  ) 

Mais  pour  fair'  Heurlr  à  jamab. 
Au  sein  de  not*  belle  patrie 
Les  arts ,  le  commbrc' ,'  l'industrie... 

Il  faut  la  paiJE .  •    i  '     '•  "'{BWI'Jî 


1  . 


La  paix  f  la  paix  ^  la  paix  ,'Ia  paixf  .. 

TIENNETTE,  au  p^^f... ,  ,^,  .- 

On  m'a  dit  que  dans  le  partenre;  : 
L'indtdgence ,  appui  des  talehs^  !    :  -  ..  • 
£t  la  critiq',  depuis  loDg-tei|[is  '  ' 

Se  fout  la  guerre.  (^i^O 

Entre  elles ,  pour  nos  intérêts , 
Terminant  cett' lutte  fatale,  "'  .     ' 

Que  toutes  les  mains  dans  Ja  salle 

Signent  la  paix  (Bisi) 

caoËUB 
La  paix ,-  la  paix  y  la  paix ,  k  paix  ! 


Fin   Dfe   PIEKRE,    PAOL   ET   JEAN. 


•   ■  • 


LE    FIFRE 

DUJROÏ  DEPRtrsSE, 

OU 

lES  PRISONNIERS  DE  SPANDAU, 

COMÉDIE  EN  UN  ACTE, 
I  ^%  ii£l£S  de  vaudevilles  , 

PAR  M.  REVEL; 

tée,  pour  la  première  foû,  sur  le  théâtre 
des  Variétés^  le  i8  norbiibirt'  1^18. 


^^J"^ 


PERSONNAGES. 


FRÉDÉRIC-LE-GRAND^  roi  de  Prusse. 
CONSTANC^y:  baronne  de  Lf4)0iii^g. 


"*~Tes  du  Roi. 


HIPPOLYTB,    r^S< 


Tl>ftÉ.t)ïl^tEI ,  fiff^e  dû  roi  dé  Prtwsé/ 
SCHLAGUE ,  caporal  et  concierge  de  Span^ 

duu. 
NIC£TT£^  sa  iUe. 


La  scène  se  passe  it  Sfpandai^.- 


LE  FIFRE 

DU  ROI  DE  PRUSSE  ; 

COMÉUIÊ. 

«  ♦ 

Le  théâtre  représente  les  jardins  de  S{Mndati  ;.a  droite 
de  Facteur,  Tentree  de  la  prisoiv)  à  gauche ,  un 
b(»quet  ;  dans  le  fond ,  une  grilte  qui  s'ouvre  au 
mîRen;  à  côté,  ta  tiialsôn  de  Scfilaguè :' une  (Me 
f  t  *n  hoM  de  i^nte'  sut  \t  devint  de  là  séfyé ,  à' 
dMifé. 


SCÈNE  PREMIÈRE. 

TURLUTUTU,  NICETTE. 

TUBLUTVTV. 

i 

EircoBB  ùtte  fôUf  iâam*setté'  AicéUé>  Idfs^ez- 
moi  tout  entier  aut  riotiTetfeà  foncliôôs  dont 
je  suis  e£argé« . . .  ï^ài  besoin  de  Coût  mon 
esprit 

Eh  I  mon  Diea  !  je  n-en  veux  pas  à  votre 
\,   esprit,  M.  Turlirtuiu. 

F.  Ytaderillet.   3.  8 


«6      LE  FIFRE  DU  ROI  DE  FRUSSE. 

TURHITUTU.  ' 

C*est  à  mon  cœur^  n'est-ce  pas  ?...  Maïs 
c^est  que  j'en  ai  besoin  aussi  pour  le  mo- 
ulent,   . 

KIGSTTE. 

Infidèle  ! 

In6dè]e  si  vous  voulez;  mais  un  homme 
dans  la  situation  où  je  me  trouvé' ne  peut 
pas  songer  à  Tamour^pour  deux  raisons  :  la 
preiniere,  c'est  que  l'amour  est  incompatible 
avec  1^3  ^^ flaires  d'état  ;  et,  la  seconde  c*est 
que  les  afl'aires  d'état  sont  incompatibles 
avec  l'amour. 

KICETTE. 

J'vois  beh'qûe  voiis.o^qa'4raiéz  plus ,  vous 
avez  oublié  votre  petite  Nicette. 

AIR  du  partage  de  la  richesse. 


Vous  souvient-il  de  la  prairie , 

Où  tous  les  deux  nous  allions  si  souvqit?.  .  ,  ^ . 

Vous  me.  trouviez  assez  jolie , .  .,  ,     ^ 

El  VQus  n'héliez  heureux  qu^en  me  voyant 

Dans  ce  tems-là  près  de  vous  une  belle 

N^aurait  obtenu  qu^un  refus  ; 

Vous  me  juriez  d'être  toujours  fidèle... 

:.         TDRLrTVTtJ.-      . 

Je  ne  mVa  souviens  presque  plus.  (Bit.  ). 


SCÈNE  L  $7 

Méhùcdr, 

Vous  jouvient-il-  que  dans  notre  village , 

Tous  les  gak'çoûs  àes  alentours  •   !   ' 

M^avaient  présenté  leur  hornuiage 

Et  venaient  me  parler  d  auuKHs  ?.. 

^ais ,  moi ,  fidèle  à  ma  tendresse  j     -    .     : 

J'ai  rendu  leurs  vœux  sii|)crâus  ;         .    ■ 

Vous  souvient-U  de  ma  sagesse  ?      ^ 

TVRLUTUTU.  .    .      ' 

Je  ne  m'co  souviens  presque  plus.  (  Bis.  } 

Ml  CETTE. 

Vous  De  inc  disiez  pas  ça  ,  il  y  a  tin  mois. 

TCR  LUTCTU. 

Il  y  a  un  mois    je  n*étais  pas  ce   que  je 

suis. 

Àh!  mon  Dieu,   ah!  mon  Dieu!  Le.  roi 
arait  bien  aFuire  de  vous  donner  une  place. 

TCRLCTUTD. 

CeFt  à  ma  valeur  que  je  la  dois. 

NICETTE.      ' 

Vol'  valeur,  vot'  valeur!  vous  en  parlei 
toujours. 

TUR  tUTUTC. 

'     C'est  elle  qui  fait  que  je  suis  inspecteur 
I  <les  prisonniers  ù  Spandau. 


«8      LE  FIFRE  DU  ROI  DE  PRUSSE. 

iri(C«vfE. 
Conlez-moi  dopfi  eonune  c'est  arrivé. 

Oh!  cVst  une  grande  xiffairef...  Figurez- 

TOUS  d'abord  un  champ  de  ba(allfe...  L*en- 
neiTiî  est  là. . . .  Supposons  que  tous  soyez 
reniiemî;  moi,  je  suis  l'ormée...ie  m\'ivance 
courageusement.  Vou4  vous  défendez  d'abord 
cela  ?a  sans  dire;  mais  ensuite  quand  vous 
TOUS  trouvez  bloquée  ^  vous  vous  rendez» 

IflCETl'B. 

Cela  va  aussi  sans  se  «dire...  Quand  on  se 
trouve  bIo(|U£e. 

IVei^aarq'W  Wep  irjpn  coMrage,  ^  q^oi,  pien- 
dant  toute  cette  bataille.... 

NICETTE. 

Vous  vous  battez  ? 

TDBLCTBTU. 

r^on  9  non  »  du  tout. 

91CETTB. 

Vous  enlevez  des  drapeaux. 

TUBLDTVTV. 

Non. 

JfICETrB. 

Vous  faites  des  prisonniers  ? 


SCÈNE  I.  Bg 

Ah  !  bah  1  Encore  plus  que  çà. 

Kl  CETTE. 

Eh  bien  !  qu'est-ce  que  vous  faites  donc  ? 

TORL€TUTU. 

Je  reste  en  place ,  et  je  joue  du  fifre. 

9iCl{TTE. 

C'est  là  tout  ? 

TVItUTIITU. 

Conamentl  c'est  là  teotl...  Et  c'est  par- 
bleu !  bien  assez  j  dem^niêz  au  roi,  auprès 
de  qpî  je  ?uîs  resté  toqt  le  tems  du  combat... 
Après  la  victoire  que  nous  avions  remportée, 
le  reî  derpande  à  sea  officiers  :  «  Messieurs, 
•  que!  est  celui  qui  a  montré  le  plus  de 
»  bravoure  dans  cette  bataille  ?  —  Sire  , 
»  c'est  vous  ,  disent  tous  les  officiers —  Ex- 
>ceptez-moi,  répond  le  roi.  •  Ces  Mes- 
sieurs ,  bien  embarnissés  ,  se  regardent  ;  ils 
n'eseet  pas  dire,  c'est  moi,  qnoiquHls  le  pen- 
sent ,  et  chacun  d'eux  nomme  son  voisin , 
quoiqu'il  ne  le  pense  pas...  Mais  le  roi  leur 
dit  :  «  Vou9  n'y  êtes  p^s ,  McAsieurs  ;  c'ost  un 
»  fifre  qui  p'a  cessé  dans  le  fort  du  cotnbqit 
»  de  souffler  dans  son  tupluti^HM,  et  qui  a  tou- 
«  jours  joué  juste...  »  Depuis  ce  tems-là  le 
nom  de  Turlututu  m'est  resté...  Dame!  c'est 
une  justice  à  me  rendre>  jo  me  suis  bien  con- 
4oît. 

8. 


90      LE  FIFRE  DU  ROI  DE  PRUSSE. 

AIR  </u  Fjfre  et  du  Tambour, 

Pavais  une  ardeur  sans  pareille , 
Mon  fifre  sVn  est  ressenti  ; 
Pour  mon  rot  c'fut  une  merveille 
D^enteudr'  soufikr  jusf  prés  de  lui  ; 
Car  on  sait  que  ioriqu^à  i^oi^cille 
Les  courtisans  lui  soufflent  deux  mots  : 
C^csl  toujours  fau& ,  c^est  toujours  faux. 

iriCBTTE. 

C'est  ce  qu'on  dît. 

TURLtlTtJTU. 

Le  roi  m'appelle  alors ,  et  me  dit:  «  J^aîme 
9  les  braves ,  je  veux  t*attacher  à  moi  ;  je  te 
>  nomme  inspecteur  des  prisonniers  â  Spao- 
dau...  »  Depuis  ce  tems ,  le  roi  et  moi  nous 
sommes  très-bien  ensemble^  j'ai  mon  franc 
parler  avec  lui. 

WICETTE. 

Et  toutes  ces  grandeurs  vous  ont  fait  ou^ 
blier  Nicette  ? 

TUBLUTUTC. 

Non,  je  ne  vous  ai  pas  oubliée^  maïs  songez 
donc  un  peu:  surveiller  mes  prisonniers!  sur- 
veiller ma  femme  !  Ah  !  mon  Dieu  !... 

Kl  CETTE. 

Ah  ï  j'sais  bien  pourquoi  vous  dites  tout 
ça  f  parce  qu'il  y  a  depuis  quelque  tems  chs^ 


SCËNEI.  91 

Catherine,  la  fermière  de  madame  la  baronne 
deLisbourg,  une  jeune  paysanne  qui  se  donne 
hi  airs  d'une  dame  de  la  ville. ..  J 'm 'aperçois 
bien  que  tous  lui  faites  la  cour. 

TCRLUTUTU. 

ConTenez  qu*elie  est  bien  gentille. 

HICETTE,  pleurant. 
Pas  plus  que  moi ,  M.  Turlututu. 

TUAttJTUTC. 

Elle  est  douce  9  elle  a  de  Tesprit. 

IVIGETTB. 

Pas  plus  qae  moi. 

TURLUTUTU. 

Et  puis  f  elle  est  vertueuse  ,  ah  ! 

BICETTB. 

Pas  plus  que  moi.  Âh  !  ah  !  ah  I 

TUftLUTUTU. 

Allons  )  allons  ;  soyez  raisonnable,  Mam'- 
selle  Nicette.Je  vais  visiter  mes  prisonniers: 
je  n'en  aï  que  deux  pour  le  moment  ;  deux 
pages,  M.  Victor  d'Herleim,  et  son  ami,  mon- 
sieur H  ippolyte...  Ils  se  sont  fait  emprisonner 
pour  une  petite  escapade  de  jeunes  gens.... 
Au  revoir, Mam'selle  Nicet  te , consolez-vous. . . 
(A  part,  )  Elle  me  fait  de  la  peine,  vrai- 
ment... Je  crois  que  je  Taime  encore  un  peu... 


9!k      LE  FIFBE  DU  ROI  DE  PRUSSE. 

Qh  I  mais  l'autre  est  si  joiie  I  £Ue  pie  OQOfieal 
bien  mieux. 

AIR  :  VaudevUlè  du  Bouquet  du  Roi. 

(Htut.  ) 

Ne  pleurez  donc  pas  comme  ça , 
Mademoiselle  Nioette. 

m  CETTE. 

Allez  afi[W8s  d'  To('  coquette. 

T17IlI.17TnTV  ,  ^  bM- 

Je  suif  sÀr  €pCt\\fi  en  moufra. 

mCETTE. 

Ah  !  TOUS  m^abandonnez  ,  traître  ! 
D^une  autr^  femm'  siii?ez  la  loi , 
Elle  TOUS  troq;)pe)ra»p^i|t-êtr^.... 
M'aviez-voQS  pas  assez  d'moi? 

TURLUTUTF. 

Ne  pleurez  doue  pas  oomme  ça ,  etc. 

(  Il  entre  dwtf  ^  ^i«o«,  )  ' 

SCÈNE  II. 

WÎCETTE. 

Les  hommes  soot  des  mon^^res,  et  le  meil- 
leur n'en  vaut  rien  !...  Lui  ^  qui  m'arait  juré 
tant  de  fois  de  m'aimer  toujours  !. ..  Oh  I  le 
iFailre  !•••  Mais  je  ne  yeux  pa^  qu^Ql)  dijse  que 
hojfï  infidélité  m'a  fait  d'Ia  pejpe  9  c\  puisqu'il 
m^abandonue ,  je  veux  faire  de  ipêipe. 


sc^ffï.  m.  .  as 

A  m  :  Le  beau  Lucas  aimait  The'rmre. 

Lubin  dit  que  je  suis  jolie  ^ 

Que  je  puis  seiiT  le  rendre  heureux  ; 
Qup  ï*fetf»$  te  fc^oh^ur  «le  49  vie. 
£|j  bien  !  je  vais  caml^jr  ses  v^ujc. 
Ah  J  c^en  est  fait ,  c^en  est  fait  ^  je  me  venge ,  (Bi«  ) 
£t  je  prends  Lublo  pour  mari  ;  (fils.) 

P«i«<|ii^aajoaciPhiiil  mon  amant  dkWtgs 
}Êûi  je  puis  bien  changer  aussi.   :    . 

Oui  9  v'l<\  qa*eM  éi^xi^^..  Ah  !  mon  Dieu! 
RM)j&  X>iet4  !  $ui$rj^  malbçttpçiise  ! 

(  Elle  pleure.  ) 

Sa^NE  III. 

NI  CETTE,  SCllhAGVK 

JBb  i>ien  I  petite  filU ,  qa We2t-fpu9  A  Terser 
des  lann«s  dU  blf^jirs  ? 

Kl  CETTE. 

Je  ne  pleure  pas ,  mon  père  ? 

SCHLAGUB. 

Fous  foulez  Tire ,  en  disant  que  fous  ne 
hUufiiz  pa$,,.  'Qu'afe*-vons  ? 

Je  n'ai  rien. 


94      LE  FIFREbu  ROÏ  I>E  PRUSSE. 
Faut  pas  bleurer  pour  ça. 

VlCBTJfZ..  » 

■  . 

Tiens ,  ça  vows  est  bîeo  aîsé  À  dire  ,  mon 
père  ,  faut ^as 'pleurer  !      ' 

,  '    *  SCHLAGU  E. 

Sans  toute...  Un  petite  ûUe  doit  tiou jours 
être  gaie,  saâs.  tristesse >.  raisoQuapliuiieat 
parlant. 

i        *       .    '    .'.  ..ir-rciTT ».•*.':>  -'i  '  .  "  .  ~ 

Oui,  gaie...  Quand"  Tululutu  me  laisse  là. 

SCHLAGVE. 

Que  tite-fous  donc  ?...'Mopsir  Tirlititu  ? 

.    *.    ..        .      i 

NICBTTE, 

Dëpuis-'qÀ*!!  est  inspectfe'a rides  prisonniers 
a  Spandau ,  il  ne  veut  plus  de  moi. 

SGBLAGUR. 

•  Je  ra'avre  toujours  douté  '  que  \a  for- 
tune le  changerait,  ce  monsir  Tirlilitn.... 
barce  quMI  est  iui^peoteurde  Spandau!...  Ëh 
bien  !  moi  !  j'en  suis  le  concierge  ,  et  s*il 
être  tetans  dans  la  prison  ,  je  suis  à  la  porte 
moi. 

NICETTE. 

£h  bien  I  oui ,  il  nous  y  laisse.  Ah  !  ah  ! 

,  SCBLAGOE. 

VoilÀ  comme  sont  tous  les  hommes,  rai^ 


SCÈRE^IH.;    •  gî 

sonnaplement  barlan t..  Allons, bleurez  pas, 
jo'manque  pas  de  maris. 

.....  i  '  . 

VIGETTE.       ,       .  M 

Il  y  a  mari  et  mari.  »      ; 

SCHLACUE.' 

C'est  chuste...  Cette  paunre  bretite^  elle 
me  fend  le  cœur.  ^.:  :     ■    ^ 

AIR  des  PùrrQts. 

Allons  ,  nia  6l!e  ,*  plufi  ^é  tristesse , 

Tu  troufeitts^Cin  ai^Ur?  ainant. 

11  aura  pour  toi  plus  d^tcndresse 

Qu^nVn  avait  tdti  pifctnitt  garant  ; 

Plus  d*un  jciin^gens  vÎEiilra^'icçagie, . 

Te  iair' la  cour  ;-tii  cboisiras,  ■.,.:,..,. 

£t  tons  les  garçons  du  (Ulage 

T'^épouseroDt  quâud  lu  voudras. 

■   • 
ttiCette. 

Vous  avez  beau  dire  j  mon  pèrçi  c^est  in- 
digne de  la  part  de  Turlututii,  »         "  "  * 

SCffLAGtE. 

Ooî ,  ouï;  c'est  intigne...  Fan  t. dire  comme 
elle,  raisonnaplement  barlant'   •  •  ^  i  '  ' 

TÎICBTTE. 

Me  tromper  pour  faire  la  cour  â  une  autre! 

SCntAGtE. 

'     Comment? 


96      LE  FIFBE  Blé  KdîîyK  PRUSSE. 

Oui  9  Monsieur  est  aitiQureui  âe  cette  de-- 
iDobelie  ConslaDce,  q[iîî  semble  être  venue 
tout  exprès  pour  m^ealdver  oa^û  amant» 

5CI&A0«Br 

Voilà  cp»i  est  particulier.. .Cettejéuimdame 
m'ayre  demandé  un  rentré-.vous  ,  Ici  tout  à 
rheure ,  tout  de  suite ,  pour  me  dire  quelque 
chose  de  bieniBF(èf^^sad(. 

]fl€STfB. 

Je  parie  que  o*est  pottr  voir  Tiïrtù tutu, 

scaiiAGué. 

Allons^  TOUS  a'afesi  que  TOtreTirUtutu  daus 
la  tête...  Rentrez  à  la  maison. 

JCIGETTÈ. 

Je  sais  bien  ce  que  je  ferai. 

SGHLAGHE. 

Eh  bien  !  que  fereE-vous  ? 

iriCETTB* 

Le  roi  Tiendra  sans  doute  ici  ayant  la  ba- 
taille 9  je  lui  parlerais 

SGBLACVBi 

Vous  lui  barlerei  ? 

VI  CE  TTC. 

Oui ,  oui  9  je  lui  parlerai. 


SCÈNE  IV.  gy 

SCffLÀGOi:. 

Il  ne  TOUS  répondra  pas...  Rentrez ,  encore 
une  fois. 

Kl  CETTE. 

Prenez  garde  sartoift  «  mon  père ,  de  ne 
pas  TOUS  laisser  attraper  par  cette  demoiselle. 

Sd^lÀGÙE. 

Est-ce  que  j*aî  une  figure  qu'on  attrape  ? 

Non  ,  mais  tous  pourriez  bien  ne  pas  Yoir 
qu'on  téut... 

SCBLACBE. 

Che  yoîs  tout. 

NiCBTfÉ)  à  part. 

Excepté  ce  qtk*il  ùe  YOit  pag.  (  Hâu^  )  Mé- 
fiez-vous toujours ,  mon  père. 

(  Elle  sort.  ) 

SCÈNE  IV. 

SGHLArGUE. 


98      LE  FIFRE  DU  ROI  DEPRUSSE* 

pour  elle^che  suis  in^cnsible.^ .  et  froid  comme 
un  marbre  de  glace. 

▲i&  .*  Lise  épouse  Vbeau  Gemance, 

Quand  j^étais  dans  la  jeunesse , 
J'étais  tout  plein  de  tendresse  ; 
Et  pour  proufer  mon  ainour , 
J^en  barlais  la  nuit,  te  jour. 
Maintenant  c'est  une  autre  affaire , 
Cbe  ne  suis  plus  éloquent, 
A  mon  âge  on  doit  se  taice.^ 
Raisonnaplemenl  barlant, 

Je  Tentends  ,iche  crois...  Tertef  !  £He  être 
pien  cholie  aujourd'hui  1 

SCÈNE 

CONSTANCE,  SCHLAGUE.   ' 

•         .  .  .  '» 

♦      '     i  •  f  \        t        f  j 

CONSTANGB. 

Yoici  Schlague ,  je  ne  sais  comment  lui 
dire... 

8CBLAGVE. 

Me  la  regardons  pas. 

GONSTASCif. 

Que  pensera-t-il  de  moi  en  apprenant  que 
la  baronne  de  Lisbourg  a  pris  ces  habits  pour 
chercher  à  voir  son  amant  ?...  C'est  là  qu'il 
est  enfermé.  .    . 


SCÈNE  V.  99 

SGBLAGtJE. 

•  « 

Elle  se  consulter  Montame  ^  j'êcôute...  )e 
regarde  pas. 

CONSTAKCE. 

Mon  cher  Schlague  I... 

SGELA6I7E. 

Mon  cher  Schlugno  î  Elle  a  dit  mon  cher 
Schlague!  ..  O  fertu  des  Allemands^  sou  liéns- 
moi. 

COjrSTANCE. 

N'allex  pas  concevoir  une  mauyaisc  opi- 
Dion  de  uioi. 

SCHLA.GUE. 

Plus  te  toute  ! 

COVSTÀIïCE. 

Mon  bonheur  dépend  de  vous. 

SCHLAGUE. 

La  voilà  bartie. 

GOIfSTAKCE. 

H.  Schlague ,  ne  soyez  pas  cruel. 

SGBLAG  m. 

Montamel...  (  A  part,  )  Ché  pien  envie 
de  ne  pas  l'être. 

CONSTANCE. 

f 

Tous  VOUS  laissez  toucher? 


ïpo    LEFIFRE  DUftOI^E'PRUSSE. 
Ya!yAl 

^  COIfSTAIfCE. 

Vous  VOUS  aU«edris^e»  ? 
Ya  !  ya  ! 

jÇOKSTÀlf  GJI^ 

Ah  1  feitest-moi  voir  cekii  que  j^aimie* 

SCHLÀG1JE. 

Allons ,  regartez  à  votre  aise. 

CONSTANCE. 

Ah  !  je  croîgnais  de  rencontrer  en  vous  un 
de  ces  geôliers  insensibles...  Tenez,  prenc» 
celle  bourse. 

sCHtAGVE  f  étonné. 

Celle  pourse  ! 

cou  5TATICE. 

En  récompense  de  voire  humanité. 

SGRtAGUE. 

Comment  !  vous  tpnnez  de  Targent... 

CONSTANCE. 

Croyez  que  I4  baroniie  de  Lisbourg  a'en 
restera  pas  là. 

SGHLAGDE. 

La  baronne  de  Lisbourg  ! 


SCÈNE  Y.  i<^r 

CONSTANCE. 

C'est  clic  que  vous  royet  devant  tous. 
J*ai  pris  ce  déguisement  pour  éloigner  tout 
soupçon. 

SGHIÀGUE. 

Entendons -nous,  s'il  vous  plaît..,.  Tous 
Usiez  tout  à  l'heure.... 

COVSTAHGE. 

Que  j'aime  le  jeune  Victor  d'Herlcim  qui 
est  enferme  dans  cette  prison ,  et  que  Fré- 
déric a  puni  pour  une  faute  dont  je  suis  la 
eause. 

SCHLAGVE. 

C'est  bien  difTurcntl...  Che  ne  peux  plus 
TOUS  écouter. 

aoifSTAiircB. 
Comment  ? 

SGHLAGVB. 

Foict  fotre.bourse. 

CONSTANCE. 

Mais  écoutezHnoi. 

AIR  :  L'amour  est  un  dieu  volage. 

Ail  !  puisque  par  ma  prière , 
Je  ne  pub  vous  attendrir  ; 
Si  rien  ne  peut  vont  ttécbir , 
Pourrais-je  au  ai<Hi|$  «ibiepif 
Uùe  faveur  biep  \è%m  ? 


xoa    tE  FIFRE  1)U  ROI  DE  PRUSSE. 

De  ma  part,  et  promptement» 
Allez  prés  de  mon  amant , 
Et  dites-lui  que  sa  belle  » 
Fuyant  les  plaisirs  ^  liélas  ! 
Lui  sera  toujours  fidèle. 

SCULAGUS. 

Montame ,  ça  n^se  peut  pas. 

CONSTAH  CK. 

Comment ,  tous  ne  pouvez  pas  ? 

SGHLAGCE. 

Si  fait  9  che  le  peux ,  si  che  yeux  me  faire 
chasser... 

CONSTANCE. 

Croyez  que  ma  reconnaissance... 

SGRLACl'E. 

C*hentendre  pas  de  c't'oreille-lâ, 

AIR  de  la  lég^re^ 

Impossible , 

Impossible , 

A  tout  chMois  ctie  insensible. 

Impossible , 

Impossible , 

JHe  retenez  pa&  ^ 

Mes  pas 

CONSTANGB. 

Je  veux  lui  dire  un  seul  mot 
Pour  calmer  sa  vive  flamme. 


SCÈNE  V.  ,o3 

SCfiLAGUE. 

Je  VOUS  l'répète  ,  Madame  ; 
lia  mot ,  c^ej>t  bcaacoa|)  de  trop. 

CONSTANCE. 

£n  vain  vous  voulez  coiniiattre  j 
Un  mot ,  c'est  sitôt  fini. 

SCHLAGUE. 

Mais  ,  moi ,  Ton  m'en  dirait  quatre  : 
&lon.sieaT  Sclilague ,  sortez  d'ici  l 

Impossible , 
Impossible , 
A  tout  ch'dois  être  insensible. 
Impossible , 
Impossible , 
Ne  retenez  pas 
H   I  Mes  pas. 

t    I  CONSTANCE. 

^  \  Impossible , 

Impossible , 
A  tout  il  est  insensible. 
Impossible , 
Impossible , 
Ne  retenons. pas 
Ses  pas^ 

(6cblaga«  sort.) 


io4     LE  FIFRE  DU  AOI  DE  PRUSSE. 

SCÈNE  VI. 

CONSTANCE. 

Me  Tollà  bien  avancée....  Maudit  soit  cet 
homme  intraitable...  Je  n*ai  pu  le  séduire.,.. 
Mais  que  dira-t-on,  si  Ton  apprend  ?...  £ii  I 
qu'importe... Veure  à yingt-cinq  ans  du  baron 
de  Lisbourg  9  neisuis-je  pas  maîtresse  de  mes 
actions^  de  mon  choix?...  Un  jeune  page  de 
Frédéric  me  distingue  ,  sa  persévérance  me 
le  fait  remarquer;  sa  famille  vaut  la  mienne; 
}e  suis  prête  à  lui  accorder  ma  main  y  lorsque 
par  malheur  Victor  oublie  auprès  de  moi 
rheure  à  laquelle  il  devait  se  présenter  chez 
le  roi....  Le  sévère  Frédéric  le  fait  enfermer 
pour  quinze  jours  À  Spandau.  ..Quinze  jours... 
C*esfrun  siècle  quand  on  aime...  Aussi  ai-je 
pris  ce  déguisement  pour  tâcher  de  le  Toir  j 
de  lui  parier...  On  blâmera  peut-être  ma  dé- 
marche ;  mais. . . 

AI  à  de  Jùlte,  ou  U  P&t  de  Fleurs, 

VtxX  en  vain  qu^à  naiate  folie , 

La  raison  voudrait  s'émoiivoîr  ; 

Aitpfés  d'une  femme  jolie 

On  sait  qu^elle  a  peu  de  pouvoir. 

Tout  le  teras  que  le  cœur  soupire , 

Il  Êiut  obéir  à  ses  lois  ; 

La  raison  élève  la  voix 

Quand  le  cœur  n'a  plus  rien  à  dire. 


SCÈWE  VIÏ.  io5 

Maïs  quel  moyen  employer,  maintenant? 
Je  ne  dois  plus  rien  espérer  de  Seblague^ 

TuaLUTOTU,   i)erriére  le  tbéâtrç. 

C'est  boa  9  jlen  parlerai. 

ÇOTfSTAlfGHk 

Ve^tmwàs  quelqu'un...  C'est  ee  fifre  que  le 
roi  a  nommé  inspecteur  de  Spandau.  Je  ut 
dois  pas  me  confier  à  lui^  son  dévouement  à 
Frédéric  m'assure  d*avance  d'un  refus,...  El 
deux  refus  en  un  jour,  c'est  beaucoup  trop 
pour  quelqu'un  qui  n'y  est  pas  habituée 

SCÈNE  VIL 

CONSTANCE,  TCRLUTUTU. 

SVILCTVTU 

C'est  fort  bien...  Les  prisons  sont  dans  un 
très-bel  état...  (  j^  part,  )  Ab  !  mon  Dieu  I 
que  ¥ols~je.  ?...  mademoiselle  Constance  !... 
Knfio ,  c'est  plus  fort  que  nv>i ,  quand  je  Tois 
cette  femme-là ,  je  ne  sais  plus  où  j'en  suis... 
3e  ne  puis  ni  parler  ni  marcher ,  et  je  reste- 
là  comme  une  statue...  Allons  donc,  Turlu- 
tutu,  ne  soyez  pas  si  modeste,  regardez  votre 
tournure;  parlez,  et  Ton  tous  écoutera.  [Il 
^opour  avancer,  )  Oui,  mais  il  faudrait  trouver 
un  moyen  neuf  et  ingénieux  d'entamer  la 
conversation...  Voyons  un  peu...  {Haut) 


loB    LE  FIFRE  DU  ROI  DE  PRUSSE. 

Mademoiselle  «  ne  Irouver-yous  pas  qu'li  £iit 
bien  beau  pour  se  promener? 

CÎONSTANÇE. 

Aussi,  je  profite  de  la  permission  que  vous 
in*ayez  donnée  de  fréquenter  ces  jardins. 

Ah  !  Madeti^oiselle  9  c*est  un  bien  grand 
bonheur  pour  ces  jardins...  Ûuf  ! 

COBfSTAWCE. 

Ah  \  mon  Dieu  ,  quel  soupir  ! 

TUKLUTUTU  ,  à  part. 

Elle  Ta  entendu  ;  c'est  bon  signe. 

.CONSTANCE, 

Sçrieïi-Yous  amoureux  ? 

TURLCTUTU. 

Si  je  suis  amoureux!...  Comme  on  ne  Test 
pas. 

C  0  N  s  T  A  N  C  K. 

Comment,  tous 9  amoureux  !...  Je  croyais 
que  la  gloire  seule  occupait  votre  esprit. 

TORLUTCTU. 

Ah  î  Mademoiselle  ?..,  (A  part.  )  C'est  là 
le  moment  de  lui  déclarer...  Mais  comment 
fairepour  lui  arouerque  c'est  elle  que  j'aime?.. 
«Tamais  je  n'oserai  le  lui  dire  en  face.  En  ne  la 
regardant  pas ,  j'aurai  peut-être  plus  de  cou- 
rage. 


SCÈNE  VU.  lo; 

CONSTANCE,  à  part. 

Mais  je  perds  ici  un  tems  précieux...  Â\i« 
tons  aiix  moyens  de  voir  Victor. 

f  Elle  sort.) 

TUELDTVTU)  loujours  à  part. 

Oiii,.c*est  une  bonne  idée  l.«..  Fesons 
comme  si  elle  n'y  était  pas.  ..  C'est  pa.... 
(Haut  9  sans  se  retourner.  )  Oui  !  Mademoi- 
selle,  je  suis  amoureux  !  Ne  tous  mettez  pas 
en  colère  ,  si  je  tous  le  dis...  Ah  I  thon  Dieu 
je  parie  qu'elle  me  fait  des  yeux  !...  C'est  que 
tous  êtes  si  jolie  !...Mademoiâ^le9  permettez- 
moi  de  baiser  votre  jolie  ntain...  Ticùs  5  elle 
ne  dit  rien  !...  Qui  ne  dit  mot  consent.  (  Il 
u jette  à  genoux  en  se  retournant.  )  Eh  bien  ! 
il  n'y  a  personne!...  Ahl  tant  mieux  ^  elle 
a'aara  pas  entendu  ipa  déclaration...  Je  m'y 
étab  mai  pris.  (  //  se  relève,)  Quel  dommage 
qae  je  ne  sache  pas  écrire  ;  on  est  bien  plus 
hardi  dans  une  lettre...  C'est  embarrassant... 
ih!  mais  Toici  l'heure  o\\  j'ai  prorais'à  mes 
prisonniers  de  les  laisser  prendre  Tâir...  Le 
devoir  avant  tout...  {li  ouvre,  )  Messieurs, 
TOUS  pouTes  sortir. 


loff   LE  ^FREÏIU  ROI  I>é  PRUSSE. 

SCÈNE  VIII. 

â 

TURLUTUTU,  VICTOR,  HIPPOLYTE. 

TICTORy    HIPPOLTTB. 

Àtft  de  VEnfiait  et  le  Grenadier. 

Rivaux  d'amour ,  rivaux  Je  gloire , 
Dans  la  mênie  prison  ,  restons  ;  ^ 

Puisque  tous  deux  nous  conij^attons  ' . 
Eoserablc  aux  champs  de  la  victoire,  « 

VICTOR  ,  4  Hippolytc» 

Mddèle  des  amis  âncères  y  *      . 

D*étre  ici  puis^je  m^attristcr  ?<..  ' 
Mes  cbaloes  me  semblent  légèrct» 
L'amitié  m'aitle  à  hs  porter. 

Rivaux  d'amour ,  etc. 

TICXOBé 

Eh  !  Voilà  notre  ami  Turl'utatir. 

TUBLUTUTU. 


«•• 


Messieurs ,  je  suis  biecE  r^Ubre  aotyiti 
£h  bieni  commencez-vous  à  vous  habituer 
à  votre  retraite  ? 

VICTOR. 

Gomment  donc?...  nous  serions  bien  dif^ 
ficiles...  Il  n*est  pas  de  séjour  plos  agréable, 
Q  est-ce  pas ,  Hippoljte  ? 


SCÈNE  VIIL  to^ 

BI^POLTTE. 

Je  te  conseille  de  plaisanter  9  quand  c'est 
par  ton  étourderie  seule  que  nous  somoies 
ici... 

VI  CTDII. 

On  dirait  que  tu  n'es  pas  content  d'j  être. 

HIPPOLYTB. 

Toi  f  tu  as  mérhé  ta  disgrâce  ;  mais  moi  > 
qu'ai-je  fait  pour  la  partager  ? 

VICTOR. 

Tu  t'es  sacrifié  à  l'amitié...  tu  joues  dans 
cette  affaire  un  rôle  superbe  !  J*cn  appelle  à 
Turlututu...  Suis-je  bien  coupable  ?*..  j'aim« 
une  femnie  charmante. 

TVR.LVTIITI7» 

Je  sens  bien  ça. 

VIOTOH. 

Cette  femme  charmante  m'aime* 

Cette  femme  charniante  l'aime...  est -il 
lieureux  ! 

VICTOH. 

On  me  donne  un  rendez-vous. 

TCaLUTUTIF. 

On  vous  donne  un  rendei-vous  I...  Bon- 
heur sur  bonheur  l 

r.  YaadcYiUei.  3.  *® 


910    tEFIFUEDUBOI  D£  PRUSSE. 

\IGTOB. 

J'y  Tole  de  suite. 

TTRCUTCTU. 

Oh  I  comme  c'est  cela. 

TICTOR. 

Mon  cher  Hîppolyte  m'y  accompagne, 

BIPPOI.TTE, 

Jusqu'à  la  porte,  qui  se  referme  sut*  moi  et 
me  laisse  le  maître  de  contempler  la  nature. 

TICTOA. 

Te  mets-tu  à  ma  place ,  Turlatutu  ?  Je  suis 
I£te-à-^t45te  avec  une  jolie  femme^  je  lui  parle 
de  mon  amour. 

Ah  !  Dieu  !  il  y  a  de  quoi... 

▼  ICTOR. 

PouTais^-je  penser  que  Theure  m'appelait 
auprès  die  Frédéric  ? 

AIR  :  Dû  ha  roîhe  tt  Us  bottes^- 

Lorsqu^on  est  prêt  d*tine  femme  qu'on  aime , 

Et  qu'on  «dmioe  ses  attraits  ; 
^Lorsque  les  yeux  dam  une  ivresse  eitréme 

Devinent  maints  charmes  secrets  ^ 
Quand  la  pudeur  rougit  le  itciat  de  roses 
I>e  la  beauté  qui  reçoit  nos  aeimens  , 


SCËREVfIL  ut 

Mon  cher ,  on  pense  à  tant  de  choses  ^ 
Qu'il  est  pennis  d'oublier  les  instans. 

HIPPOLTTE. 

Sans  doute  ;  mais  tu  coo  viendras  qu*il  est 
cruel  pour  moi  »  qui  5  preoant  le  frais  sous 
lesarbresy  atrats  letems  de  compter  tes  heures 
d'être  puni  comme  les  ajaut  oubliées. 

TICTOR. 

Parce  que  tu  a*as  pas  voulu  abandoBoer  foo 
ami...  c'est  un  beau  trait  l 

t. 
Oui ,  c*est  joli  !..>  Mais  M.  Victor  est  bfen 
excusable:  d'ailleurs,  grâce  à  moi,  votre 
captivité  n'est  pas  très-désagréable  ;  je  vous- 
laisse  la  liberté  de  vous  promener  dans  ce 
carré  une  deml-'heurc  par  jour...  Vous  êtes, 
libres  de  rire  et  de  chanter^  d'écrire  même  si 
cela  TOUS  amuse ,  vous  pouvez  me-  parler 
quand  vous  voulez  :  convenez  qu'il  y  a.  peu 
it  prisons  aiîssi  agréables  que  celle*ci«. 

TIGTOB. 

J'en  conviens;  mais  il  est  bien  cruel  do 
vivre  éloigné  de  celle  qu'on  adore. 

Je  suis  de  yotre  avis  ;  je  prends  part  aux 
peines  dij  cœur  j  parce  que  je  suis  amtoureux 

aussi. 


lia    LE  FIFREDUBOIDJEPRUSSE. 

TICTOB. 

El  quelle  est  la  belle  qui  a  su  charmer  Ion 
cœur  ? 

TURIUTUTU. 

Imagîneit-\ou9  tout  ce  qu'il  y  a  de  plus 
joli  !,..  des  yeux  !.,.  ah  l...  et  une  bouche  ! 
oh  !  ..  vous  ne  vous  en  faites  pas  dldée,..  Jo 
pense  à  une  chose...  vous  êtes  si  obligeant, 
M.  Victor,  si  vous  vouliez  lui  écrire  une  pe- 
tite déclaration  en  mon  nom. 

HIPPOLTTE. 

Et  comment  se  nomme  cette  beauté  ? 
Constance. 

VICTOB. 

Constance!...  Est-il  possible  ?... 

TURI.UTUTU. 

.    Oui, 

TiCTOB,  à  part. 

Mon  amie  ! 

BIPPOiTTE* 

Parbleu î  n'y  a-t-il  qu'une  femme  au  monde 
qui  se  nomme  Constance  ? 

TUBLUTCTF. 

Qu'est-ce  qu'ils  ont  donc  ?• ..  Eh  bien  oui, 
elle  ae  nomme  Constance. 


SCtNE  VIII.        .  n3 

TICTOB. 

C*est  UT)  bien  joli  nom. 

TDBIUTUTU, 

11  y  a  huit  jours  qu'elle  est  venue  dans  ces 
environs. 

TICTOR. 

Huit  jours  P... 

TURlUTUtr. 

Oui....  justement  le  lendemain  de  yotre 
arrivée  ici- 

TICTOR. 

Ah  I  mon  Dieu  ï  si  c'était.., 

BIPPOLYTE. 

Allons  9  OÙ  diable  vas-tu  t'imagîner?... 

TORLUTVTV. 

V 

Elle  demeure  chez  Catherine  >  la  fermière 
de  madame  la  baronne  de  Lisbourg^. 

VICTOR. 

Madame  la  baronne  de  Lisbourg!. ..  tu  l'en- 
tends ;  ah  !  mon  ami  !....  c'est  elle  t....  plus 
de  doute. .  Mon  cher  Turlutulu,  je  vais  écrire 
ta  lettre...  vite  de  Tencre,  une  plume...  Ah  ! 
mon  cher  ami  !...  que  tu  as  bien  fait  de  de- 
venir amoureux  de  cette  femme-là ,  tu  me 
rends  un  grand  service...  je  vais  lui  écrire. 

TraïuTCTu, 

Je  vais  vous  dicter. 

10. 


ti4   LE  fIFKE  DU  ROI  DE  PRUSSE. 

(    TlGTOm. 

Oui  «  oui  9  dicte  tout  ce  que  tu  roudras. 

TOALUTVTV. 

«  li^idenioiselle.  > 

T I GT o  A  9  vWemeiit. 
Ma  chère  Constance  ! 

TOftLITTUTlI. 

Oh  !  non ,  il  ne  faut  pas  mettre  ma  chère 
Constance,  nous  n'en  sommes  pas  encore 
là...  «  Mademoiselle.  » 

YIGTOl. 

Mademoiselle. 

TURLUTUTU. 

c  Depuis  huit  jours  que  fe  tous  vois...  » 

TIGTOa. 

Depuis  huit  jours  que  je  ne  tous  toîs  pas. 

TtELUTÛTU. 

Que  je  TOUS  toîs  ,  donc. 

TiGTOa. 

Oui. 

«Je  languis  9  je  sèche...  tos  jeux  m'ont 
>  tourné  la  tête...  et...  comme  je  vous  disab, 
»  depuis  huit  jours  que  je  vous  vois...  je  suis 
»  amoureux...  Prencz^tîé  d'un  malheureux 


SCÈNE  Vlir.  I.1& 

»  que  vos  charmes  rendent  imbécile  f...  Im- 

•  bécile...  y  êted-fous  ?....  imbécile  !..*•  s^ur- 

•  ce ,  Mcidemoiselle ,  je  tous  prie  d'excusée 

•  ma  hardiesse. ••  Ma  hardiesse...  a?ec  la- 
»  quelle  j*ai  l'honneur  d'être  le  plus  respec- 
»  tueux  des  fifres  9  Turlututu.  »  Ça  n'est  pas^ 
mai  comme  çst ,  n'est-ce  pas  ? 

YICTOE. 

C'est  très-bien  ! 

HIPPOLTTK. 

Oh  !  je  te  jure  qu'elle  sera  énchaûtée  du 
stjrle  de  cette  lettre. 

Jastementjerentend3...Messîeurs3  rentre! 
et  je  vais... 

TIGTOB. 

C'est  elle  !  Grand  Dieu  I 

TVELVTUTU. 

Qu'est-ce  qu'il  a  donc  aujourd'hui  y  arec 
ses  exclamations  !  Allons ,  rentrez  y  rentrez  I 

TICTOB. 

Comment  I  tu  yeux  ? 

H  le  faut  ;  tous  savez  que  la  cohsi^e  est 
très-sérère  lik-dessus...  Yousne  pouvez  voir 
personne. 

(  Victor  et  iiippoljte  rentrent  dans  la  priioa.  )^ 


Xi6    LE  FIFRE  DU  ROI  DE  PRUSSE.' 

SCÈNE  IX. 

H 

TURLUTUTU,  CONSTANCE. 


CONSTA-irCE*  ^ 

Je  n'ai  pu  rien  obtenir  de  Schlague...  En- 
core ce  fifre  I       •         '  *k 

ttJRlPTDTTJ.  il 

Mademoiselle,  je  vous  demande  bien  par-  ^ 
don.  C'est,,  ^ 

COHSTAMCE,  \-* 

QueTOulez-TOus?  ^ 

ï  u  11  I.  \J  T  U  T  c  ,  lui  présenUttt  la  lettre. 
Yous  Yoyez.*.  \ 

i 

CONSTANCE.  !j 

Comment  !.,.  Quelle  est  cette  lettre  ? 
.     Ah  !  dame ,  je  ne  peux  pas  tous  dire  ça  ,    | 

moi. 

CONSTAWCE. 

Maïs  puis-je  au  moins  saroir  de  qui  ? 

-  '  AH  !  c^esl  difféfenl. . ..  C'est.  - .  Ah  !  Je  ne 
peux  pas  vous  dire  oelit  n^n  plus--  (  ^ 
part  )  Cachons-nous,  et  voyons  un  peu 
c(>nLme  «lie  prc^di??  Ça^  • 


SCÈKEIX-  117 

COifSTANCE)  ouvrant  la  lettre. 

Toîlàqui  est  extraordinaire...  Giell...  que 
Tois-je  ?  récriture  de  Victor  I  *  \ 

TTJftLVTVTIT. 

Ah  !  Tollù  que  ça  fait  son  effet. 

CONSTANCE. 

t  Ma  chère  Constance  ^  depuis  huit  jours 
foe  je  De  vous  vois  pus  ,  je  ne  connais  phis 
le  bonheur...  Le  hasard,  ou  plutôt  Tamour 
ie  ce  fifre  pour  vous  ,  me  fournit  le  moyen 
k  TOUS  écrire...  Servez-vous  du  même  pour 
îépondre,  et  comptez  sur  l*amour  de  Victor.» 
Oh!  quel  bonheur! 

TURLXJTUTU. 

Ah  !  çh  y  si  je  ne  me  trompe  ,  elle  parait 
biea  contente. 

AiA  :  yi  ma  Margots 

Voyons  comment  ça  fiofra , 
Puisque  ça  commence  comm^  çà. 

CONSTANCE. 

Pour  moi  quelle  aimable  surprise  f 
Le  Dicti  d^amour  me  favorise. 
Par  cette  lettre  de  Victor  y 
Je  suis  stj:^  qu^il  m^aime  cncor. 
0  bonheur  !  ô  bonheur  !  j^ai  de  sa  constance 
La  douce  assurance. 

(Ette  baise  b  lettre.) 


tiS    LE  FIFRE  IVU  ROI  DE  PRUSSE. 

TBBlUTUTtï. 

Dieu  me  parde|ine  I  elle  baise  la  lettre  !.•• 
^Ah  !  ç'd  y  mais  alors. 

Voyons  commet  ça  fînip , 
Puisque  ça  commence  comm*  ça. 

Elle  $*asseoît ,  elle  écrit. 

GOjrSTAKGB. 
DEUXIÈME    COUPLET.  * 

Servons-nous  de  la  même  ruse. 

TUELUTDTU. 

Je  ne  sais  pas  si  je  m^abuse  ; 
Mais  je  crois  quelle  me  répond. 
Vraiment  mon  bonheur  me  confond. 

CONSTANCE  .  fittfsstDt  n  lettre. 

Cher  Victor  !  cher  Victor  !  tu  sais  que  je  t'aime  ; 
Aime-moi  de  même. 

(  EU«  plie  la  lettre.  ; 

£st-on  plus  heureux  que  raoi  ? 

Ah  I  ça  devait  finir  par  là , 
Puisque  ça  commençait  oomm*ça. 

(  f  I  t'evaiice.  ) 

Mademoiselle  ,  o*est  en  tremblant  si... 

CONSTANCE. 

Rassurez^Yous  ;  je  vous  sais  gré  de  votre 


SCÈNE  X.  n^ 

déroarche...  Prenez  cette  lettre^  tous  y  verrez 
quels  sont  mes  Téritables  sentimens. 

(Elle  sort.) 

SCÈNE  X. 

TURLUTUTU,  d'abord  seul;  puis    YICTOK 
ET  HIPPOLYTE. 

TUALDTOTU. 

lUsstBEz-vous...  Je  voqs  sais  gré  de  Totre 
démarche... Prenez  cette  lettre,  vous  y  verrez 
quels  sont  mes  véritables  sentimens...  Oh; 
ce  n'est  pas  ainsi  que  parle  une  femme  qui 
oVime  pas...  Elle  est  amoureuse...  Ohl  Tur- 
Itttutu...  quelle  belle  journée  pour  toi  !,..  Mais 
voyons  ce  que  contient  sa  lettre...  Comin^ 
je  ne  sais  pas  lire,  appelons...  M.  Victor  l 

(  Il  ouvre  h  prison.  ) 

VICTOIi. 

£h  bien  ! 

J'ai  rerais  la  lettre. 

VICTOft. 

Bon  ! 

TUJ&LCTOTV. 

On  a  exprimé  une  douce  joie  en  la  xece-' 
raiit. 


120    LE  FIFRE  DU  ROI  DE  PRUSSE. 

VICTOR. 

,  Est-il  possible  ? 

TDBLCTUTU. 

£tde  plus... 

VICTOR. 

De  plus  ? 

T.BRLC-TUTU.  . 

On  a  baisé  la  lettre. 

VICTOR. 

On  a  baisé  la  lettre!...  Oh I  mon  ami  ! 
combien  je  te  remercie...' 

TUBLÇTUTU. 

De  quoi  donc  ? 

VICTOR. 

De  me  conter  cela  ^  ça  me  fait  plaisir  pour 
toi. 

TrRLUTtîTU. 

Ce  n^st  pas  tout ,  on  a  répondu. 

VICTOR. 

On  a  répondu  !...  On  a  répondu  !.;.  Oh  ! 
en  vérité ,  Turlututu  j  tu  es  un  homme  char- 
mant ! 

TURttJTtJTU. 

Et  voici  la  réponse. 

VICTOR. 

Donne,  donne  vite!...  Ah  !  ma  chère  Cons- 
tance f  •       '    . 

(  Il  baise  la  lettre,  y 


,     SCÈNE  X.  .    lai 

TUBLUTUTU.  ' 

£h  bîeo  !  qu'est-ce  que  vous  faîtes  donc  ? 

VICTOR. 

C'est  rintérêt  que  je  te  porte...  (  //  dé~ 
cacheté  la  lettre^  après  C avoir  parcourue  il  dit  :  ) 
Ah  !  mon  ami ,  cette  fem.mc-là  t'adore. 

TUELUTUTU. 

Âh  !  que  dit-elle  ?...  Je  vous  en  prie  ^  ne 
me  faites  pas  languir. 

V  iCTOR  ,  à  part. 

^  Oh  !  quelle  idc^e  !  Pro6tons-en...  (  Haut.  ) 
Ecoute  bien  :  «  Monsieur  j'ai  reçu  saus  colère 
»  Taveu  de  vos  sentinnens.  » 

TURLUTCTC. 

Hein  !...  Dites  donc  9  elle  a  reçu  sans  co- 
lère l'aveu  de  mes  sentiinens...  Ça  dit  toat, 
ça  :  o'est-ce  pas  ? 

HIPPOLTTB. 

Certainement.  ^ 

TIF  RL  ITT  II  TU. 

Contiauez. 

n    ' 

VICTOX. 

«  Je  m'étais  déjà  aperçue  de  votre  an^our. 

ti;rlctutu. 

Elle  s'était  déjà  aperçue  de  mon  amour.. .^ 
Od  n'écrit  pa»  mieux  que  cela. 

F.  Vaudevilles.  3.  1 1 


laa    LE  FIFRE  DU  ROI  DE  PRUSSE. 

TICTOE. 

«  Comme  |e  ne  yeux  pas  tous  ôter  toute 
»  espérance  ^  je  cooseos  non  pas  à  vous  en— 
»  tendre  ,  parce  que  je  craindrais  un  pareil 
lè  entretien.  » 

TURtUTUTU. 

Il  y  a  ça ,  qu'elle  craindrait  un  pareil  en- 
tretien ?  Vous  Tentende*  ? 

TICTOE. 

«  Mais  faîtes  -moi  parler  de  Totre  amour 
»  par  un  interprète  de  vos  sentimens  ,  et  je 
p  lui  répondrai  ce  que  je  crois  dcToir  loi  ré- 
»  pondre.  »  Tu  Tenlends ,  Turlututu  P 

TVELVTUTV. 

Ah  !  diable  l  Toîlà  qui  m'embarrasse. 

TICTOR. 

•   Comment  ? 
Oui...  où  trouTcr  cet  interprète  ? 

<r  TICTOE. 

Oh  l  dame  !  c'est  difficile....  Moi ,  je  t*en 
serTirais  bien ,  si  tu  Toulais. 

Vous,  ML  Victor?..,  Oh!  oui;  mais  la 
consigne...  ^ 

VICTOR, 

Ah  !  c'est  juste,  la  consigne...  Qae  toux- 


SCÈNE  X.  taS 

tu  qne  j'y  fasse  ?  Adresse>toi  à  Schiague  ,  si 
tu  veux... 

TrRlUTtJTU. 

Le  YÎeiix  concierge  !...  Y  pensez-vous  ? 

y  IGTOB. 

Je  ne  toîs  que  lui. 

Oh  î  mon  Dieu  1  mon  Dieu  !  Quel  em- 
barras !. . . .  Maudite  consigne  !  M*  Victor  ^ 
cherchez  donc  un  moyeu  de... 

VICTOB. 

Mais  après  tout ,  la  consigne  peut  se  violer 
on  peu...  D'ailleurs  9  nous  ne  sortirons  pas 
d«  là...  Amène  ta  belle  ici ,  ce  sera  bientôt 
fait...  Si  Ton  nous  surprend  ,  c*est  moi  qui 
serai  puni  ;  mais  n'importe...  Tu  as  eu  pour 
moi  beaucoup  d'égards  4  je  me  sacrifie...  Va 
chercher  cette  Constance  qui  a  Fair  de  si  bien 
t'aimer,  et  )e  te  réponds  qu'elle  ne  résistera 
pas  à  mon  éloquence  ;  je  plaiderai  ta  cause 
avec  ce  feu....  enfin  je  ferai  comme  pour 
moi. 

TUAIUTUTU. 

Oh  !  M.  Victor,  qne  tous  êtes  bon  !  (  A 

part,  )  Voilà  oomme  un  bienfait  n'est  jamais 

perdu...  J'ai  eu  pour  ce  jeune  homme  des 

égards  ,   des  prévenances  ;  eh  bleu  !  il  se 

charge  de  mes  intérêts...  Vraiment  on  n'est 

pas  plus  obligeant. 

(  n  sort.) 


y 


124    LE  FIFRE  DU  ROI  DE  PRUSSE. 

SCÈNE  XI. 

VICTOR,  HIPPOLYTE. 

■VICTOR. 

Oh  !  quel  bonheur  !  mon  cher  Hîppoljte. 
Je  vais  la  voir,  lui  parler...  Mais  partage  dooo 
ma  joie. 

HIPPOLYTE, 

Je  la  partagerais  sincèrement,  si  nous  étions 
hors  d'ici. 

V 1  c  T  o  a. 

Eh  !  qu'importe ,  puisque  Constance  j  est 
aussi  ? 

HIPPOLYTE. 

Cela  me  fait  beaucoup  de  bien,  à  moi. 

TU  R  LU  TU  TU,  CQ  debovs. 
Par  ici ,  Mademoiselle  ,  s'il  tous  plaît. 

VICTOR. 

La  voici  !...  Oh  !  mon  ami ,  rends-moi  un 
grand  service,  occupe  Turlututu  tout  le  tems 
que  je  parlerai  à  Constance. 

HIPPOLYTE. 

C'est  cela ,  toujours  les  petites  commis- 
sions agréables. 


SCÈNE  XII.  125 

SCÈNE  XII- 

tEs  phécedens,    constance,   TLR- 

LUÏUÏU. 

VICTOB. 
AIR  :  Quand  toi  sortir,  etc. 
Approchez  ,  charmante  femme. 

- 

HIPPOLYTE,  remparant  de  Turlattttu. 
Reste  là  pendant  ce  tems. 

VICTOR. 

Daignez  répondre  à  la  flamme 
Du  plus  tendre  des  amans  , 
L^amour  tourmente  son  ame. 

tuululutu. 

Monsieur ,  votre  ami  vraiment 

£st  pour  moi  bien  complaisant.  (  Bis.  ) 

VICTOR. 

Il  VOUS  adorera  sans  cesse , 
Et  soyez  sûre  que  jamais 
U  ne  trahira  sa  tendresse. 

TURLUTUTU. 

Comme  il  prend  mes  intérêts  • 

VICTOR. 
DEUXIEME   COUPLET^ 

Doatcz-voiis  de  sa  constance  ? 

XE. 


ia6    LEFIFRE  BUROI  DE  PRUSSB. 

Vos  yeux ,  si  jolis ,  si  doux , 
Vous  en  domient  rassurance , 
Je  me  jette  à  vos  genoux. 

TURLUTUtU. 

A-t-on  plus  de  complaisance  ? 
,    Il  se  jette  à  ses  genoux. 

HIPPOLYTE. 

Il  se  jette  à  ses  geHout. 

CONSTANCE* 

Cidl  Victor i  y  pensez-vous?  o 

VICTOR. 

n  veut  vous  consacrer  sa  vie  ; 
Encouragez  ses  feux  discrets. 
Il  baise  votre  main  jolie. 

TURLUTTÏTV  ,  à  Hippoljte. 

Comme  il  prend  mes  intérêts  !  (4  foSt.  ) 

(  On  entend  battre  tnz  champs.  ) 
TVEtQTUTU. 

Oh  !  mon  Dieu  !  c'est  le  roi  !  Eh  !  vite  , 
Messieurs,  rentre»  dans  TOti*c  prison. 

(Us  rentrent.) 

(Constance  tort) 


SGËNEXIII.  twj 

SCÈNE  XIII.  \ 

rURLUTUTU  ,     TILtAGEOIS  ,     TIltAGEOISES  , 

puis  FRÉDÉRIC  et   DHARLEIM,  son 
MAJoa;  SCHLAGUE,  NICETTE. 

CHCBITR* 

▲iji  :  jih  !  pour  Smnt-Cjrr, 

Livroos-iious  k  l^allégresse  ; 
D'être  joyeux  tout  nous  fait  la  loi. 
Uo  prince ,  en  ce  jonr  d'ivresse , 
S^montre  à  nous  plein  de  tendresse. 
Vive  le  fVoî  î  Vive  le  Roi  ! 

Il  £l>  i'ft  I G  ^  entrant  en  scène  avec  le  major  d^Har- 

Icim. 

Eh  !  non  9  morbleu  !  M.  le  Major  9  ]e  ne 
TOUS  donnerai  pas  raison  sur  ce  point.  Ces 
boutpns  ne  sont  pas  trop  u$ès  ;  il  n'y  a  que 
trois  ans  que  je  les  porte;  ils  n*ont  fait  que 
cinq  campagnes^  ilssoût  bien  un  peu  rouilles 
mais  qu'importe  1 

AïK  :  FijUe  à  qui  Von  dit  un  secret. 

Les  boutons  nnûltés  des  soldats 
Doivent-ib  donc  choquer  la  vue  ? 
Peut-on ,  après  tant  de  conibab , 
Obserrer  là  mène  tenue  ? 


itS     le  fifre  du  roi  de  PRUSSE. 

Beaucoup  de  gens  ont  des  boutons  bien  beaux  ; 
A  les  polir  leurs  mains  sont  occupées  , 

Lorsfpie  souvent  dans  leurs  fourreaux 

Ils  laissent  rouiller  leurs  épées. 

LE    MAJOB. 

Je  n'insiste  plus ,  Sire. 

FEBDÉBIC. 

Et  VOUS  faites  bien.,.  D'ailleurs,  réconomîe 
est  le  soutien  d'un  état...  £h  !  comment  au- 
rais-je  complété  mes  superbes  compagnies 
de  grenadiers  ?  (^Allant  à  ses  officiers.)  Bien  ! 
mes  amis,  je  suis  content  de  vous  ;  mémo 
activité,  même  zèle.  {A  Schlague.  )  Caporal, 
comment  1  tu  as  une  montre  ?  Il  faut  que  tu 
sois  bien  économe  pour  avoir  fait  une  pareille 
empiète  ;  la  mienne  va  mal...  Quelle  heure 
est-il  à  la  tienne  ? 

Sire....  elle  ne  marquait  point  les  heures 
m  les  minutes.' 

(Il  tire  sa. montre. ) 

FRÉDÉAIC. 

Que  vois-je  ?...  Une  balle  !  - 

SCHLAGYIE. 

Ya,  Sire... Ce  être  une  balle. 

AiA  :  //  me  faudra  quitter  l'empire. 

Je  la  reçus  en  Silésic , 

Sur  mon  cœur  elle  vint  s^amortûr  ; 


S<:ÈNE  XIII.  Tag 

Elle  pensa  m^ôter  la  vie  i 
Mais  je  puis  encore  servir  ;    , 
.    Dans  mon  gQUsset  elle  demeure  ; 
Cette  montre  est  pour  1901  $a^s  prix , 
Car  elle  m^avcrtit  à  toute  heure .  . 
Que  jMois  mourir  pour  mon  pays. 

FBÉBÊRIC.  ' 

Bien  ,  mon  camarade,  bien...  Cela  ne  m'é- 
tonue  pasl..  de  vieilles  moustaches  ! 

^AiR  des  Amazones, 

Couverts  de  nobles  cicatrices. 

Je  contemple  ces  grenadiers , 

Après  de  glorieux  services , 

Se  reposant  dans  leurs  foyers.  (Bis.  ) 

Ail  !  maintenant ,  si  leurs  gcnou!L  fléchissent 

Sous  le  poids  de  soixante  hivers  ; 
De  nos  soldats  si  les  cheveux  blanchissent , 
.  Leurs  vieux  laïuicrs  resteront  toujours  verts. 

Ah!  le  voilà,  Turlututu.  {Bas  au  Major.') 
C*esC  un  bouffon;  il  nr.imuse,  et  je  lui  passe 
bien  d*;s  choses  ;  d'ailleurs ,  c'est  un  brave  ! 
(Haut,  )  Eh  bien!  comment  te  trouves-tu 
daos  ta  uouvelle  place  ? 

TURLUTUTU. 

Dame  9  Sire  ,  assez  bien....  Cepeiydant  je 
regrette  le  tems  où  je  jouais  du  fifre  auprès 
de  vous. 


i3o    LE  FIFRE  D0'rÔ1DE*PPiUSSE. 

C'est  ton  courage  que  j'ai  récompeosé^  ' 

Vous  êtes  bien  bon,  Sire  :  maïs  que  voulez- 
vous  ,  quand  ou  se  trouve  là,  à  quoi  ça  sert* 
il  d'avoir  peur  ? 

F  R  é  D  é  a  I  c. 

Tu  as  raison...  Et  tes  deux  prisonniers 
en  esi-tu  content  ? 

TUBLUTUTt-. 

Ah  !  Sire  ,  ce  sont  de  bien  aimables  jeunes 
gens  que  ces  deux  pages  !  II  me  semble  p 
Sire... 

FaiDéaiG,  sévèrement. 

Il  TOUS  semble  P 

Non ,  don ,  il  Ae  ihe  semble  pas. . .  Je  pense 
seulement.... 

rSSDBRIG. 

VoQS  pensez  ? 

TVtitVrVTV. 

Non,  Sire  j  je  ne  pense  pas  ;  je  disais... 

FRÉDÉRIC. 

Yous^  dîtes  ? 

turlotutu. 
Je  ne  dis  rien. 


SCÈNE  XIIÏ.  ,3, 


VftBDBBlC. 


Ils  ont  enfreint  la  dbcipline  milîtaîre ,  ils 
doivent  être  punis...  Voilà  comme  on  fait  les 
bons  soldats.  (  Se  tournant.  )  Mes  amis  ayez- 
TOUS  quelques  plaintes  quelques  réclomaiions 
à  faire?...  Parle» ;i  je  «uis  prêt  à  vous  rendre 
justice...  Tout  le  monde  est  content  ;  c'est 
bien. 

HICETTB^  sVançaot. 
Sire  !... 

FBBDBBIC. 

Hein  ?...  Quelle  est  cette  jeune  fille? 

TUBLCTUTU. 

Ah  !  mon  Dieu  !  c'«»t  Nieette  !...  Je  8upplî« 
Totre  JMafjesté  de  ne  pas  récouter. 

Pourquoi  donc  ? 

TÙBLUTUTV. 

Mai5«*« 


»         r 


FBBOBBic^  seyeremcnt. 
Tais-toi. 

TVBLUTVTV. 

Oui  5  Sire. 

FBBDÉBIÇ5  à  Nieette. 
Parlez ,  ma  belle  enfant. 


l3â    LE  FIFRE  DU  ROI  DE  PRUSSE. 

NI  CET  TE. 

*  É  » 

▲la  :  Mon  gahuh^U 

Turltitutu,  (bîs.) 

M^aîmait  jadis  d*amour  eitrême , 
Mais  d*pûts  qu^il  s^est  si  bien  battu , 
Il  lu^abandunn'  ^  pourtant  je  Faime. 
Ah  !  pour  moi  ce  n^est  plus  le  même 

Tuiiutulu.  (Bis.) 

SSUXlèMB   COUPLET. 

TurlututU)  (bî**) 

Jouait  sous  ma  fenêtre  un  air  tendre , 
Et  mon  cœur  en  était  ému  j 
Mais  j'ai  beau' maintenant  attendre , 
Helas  !  il  ne  m'fait  pitis  entendre 

TurUilutu.  (Wa.) 

Cooiment  ?... 

inCETTE. 

Oui,  Sire  9  depuis  qu'il  est  înspçctdurde 
Spaadau  ,  il  m*trouye  trop  pauvre. 

F  R  B  D  £  B  1  G. 

Est-il  vrai ,  M.  Turlututu  ? 

TUELUTUTV. 

C'est  que  mon  cœur... 

FfiÉDÉEIG. 

Votre  cœur  ne  sait  ce  qu'il  dit.  Je  veux  que 


SCËNE  XIV.  i33 

tous  épousiez  cette  petite  fille...  Faites  venir 
mes  deux  pages. 

(Turlututu  va  ouvrir  la  porte  et  les  fait  sortir,  ) 

Kl  CETTE. 

Od  a  bien  raison  de  dire  que  Votre  Majesté 
est  juste. 

ff 

SCÈNE  XIV. 

uspRÉcÉDBjïs,  VICTOR,  HIPPOLYTp. 

FBÉsÉniC. 

Vota  voilà ,  Messieurs. 

y  I  GTOR. 

Ah  I  Sire  ,  nous  ne  demandons  point  notre 
grâce  ;  mais  permettes-noiis  de  vous  suivre 
au  combat,  de  vous  défendre ,  de  mourir 
pour  FOUS* 

TCRLUTUTt. 

Ah  !  votre  Majesté  ne  peut  pas  leur  refuser 
cela. 

FRÉDÉRIC. 

Tais-toi!...  Non,  Messieurs,  îl  faut  un 
exemple...  (  A  part,  )  Il  resteront  en  prisoii 
tout  le  tems  de  la  bataille  ;  je  les  connais  , 
c^est  la  punition  la  plus  sévère  qu'on  puisse 
leur  infliger. 

F.  Yaudevillcf .    3«  12 


i34     LE  FIFRE  DU  ROI  DE  PRUSSE,. 

TIGTOB. 
kiK  du  Petit  Courrier» 

Ah  !  de  mes  vieux  le  plus  ardent , 
O^est  d^xposer  pour  vous  ma  vie. 

HiPPOLYTEv. 

Faut-il,  pour  une  étourderie , 
Nous  punir  si  sévèrement  ? 

FAEDÉAIC. 

{.a  disciptiae  militaire 

Doit  être  tout  (lour  un  soldat. 

VICTOjl. 

Sire ,  rien  n^aurait  pu  nous  faire 
Oublier  Theure  d^un  combat. 

F  A  Epia. ic. 

C*est  bien  !  c'est  très^bien  9  Messieurs  !.«. 
Mais  vous  resterez  «n  prison  'inalgré  cela  , 
l'exemple  le  ie\}t,\  Allant  à  ses  officiars.  ) 
Messieurs  9  des  rebelles  osent  encore  élever 
la  voix;  mais  rassurez-vous  ^  mes  ^rcpadiers 
sont  là  pour  les  faire  taire».  «  An  revoir ,  c^e» 
amis, 

GHQEtTR. 

livToni-DOus  à  Tallégresse ,  etc. 

{Q  «oit  aiwi  que.kt  viliageois.  Oa  cnlend  le  casospar  iwf 

.tervaUen.) 


SCÈNE  XV.  i35 

SCÈNE  XV. 

VICTOR  ,  HIPPOLYTE ,  TURLUTUTU. 


On  va  se  battre  9.  et  nous  sommes  ici  ? 

HIJPPOLTVE. 

Quelle  honte  i 

TtlRlUTlîtU. 

Allons ,  Messieurs  9  consolez-yous. 

TlGTOa. 

Mon  cher  Turlututu  ! 

TCRLTJTOTV* 

M.  Victor  ? 

TICTOB. 

Tu  as  TU  ce  que  j'ai  fait  pour  loi  tout  à 
llieure  ? 

TVtiLVTVTV, 

Certainement ,  je  Vous  en  ai  une  grande 
obligation. 

TICTOR. 

Rends-moi  un  service. 

TUatUTlTTU. 

Parlez ,  si  je  le  peux. 

VfCTOB. 

Laisse-nous  sortît 


ï36    LE  FIFRE  DU  ROI  DE  PRUSSE. 

TURLUTUTU. 

Sortir  î  y  pensez-vons  ? 

HIPPOLYTE. 

Mon  cher  Turlututu  ! 

TUBLUTUTÏÎ. 

Impossible  !  Mess-.eurs ,  impossible  ! 

V  IGTOH. 

Écoute ,  Turlututu. 

AIR  du  major  Palmer. 

Nous  Yolons  à  la  bataille , 
Et  pleins  de  zèle  et  d'ardeur , 
Bravant  bombes  et  mitraille , 
Nous  prouvons  notre  valeur. 

HIPPOLYTE. 

Sur  rrunemi  je  m'ébnce 
Dans  le  moment  le  plus  beau , 
Et  redoublant  de  vaillance , 
Soudain  f  enlève  un  drapeau. 

VICTOB.  ^ 

Moi ,  près  du  roi  je  me  range , 
Et  courant  de  toutes  parts , 
En  un  seul  instant  je  change 
Nos  ennemis  en  fuyards. 
Frédéric  qui  nous  remarque 
Est  charme  de  nos  transports, 
Et  cet  auguste  monarque 
Dit,  en  oubliant  nos  torts^: 


SCËNE  XV.  Mâg 

«  Nous  TOUS  deyons  la  victoire  !  » 

Sire ,  dis-je  à  ses  genoux , 

Votie  fifre  à  cette  gloire 

A  bien  plus  de  part  que  nous» 

Ce  trait  superbe  le  touche , 

n  est  bientôt  rëpandn  ; 

L^on  entend  de  bouche  en  bouche 

Le  nom  de  Turlututu.  (l'^'O 

TURtCTTîTU. 

Au  fait  y  ça  pourrait  bcn  arriver  comme  ila 
le  disent. 

niPPOLTTE. 

Ça  ne  peut  pas  manquer. 

TiGioa. 

D'ailleurs ,  nous  te  promettons  d'être  ici 
ayant  le  retour  du  roi....  seulement  le  tems 
de  la  bataille. 

TOatUTUTU. 

Oui  y  et  si  TOUS  êtes  tués  ? 

VICTOR. 

Ah!  alors 9  je  ne  te  promets  pas...  Ccpen^ 
lant  nous  ferons  notre  possible. 

HIPPOLTTE. 

Allons»  Turlututu,  lâi8se->toi  gagner  ;  on  se 
bat  maintenant ,  et  nous  perdons  du  tems. 

TwaLnuTu. 
Allons  j  tenez,  je  le  yeux  bien  ;  mais  dé* 


i38    LE  FIFREDUROIDE  PRUSSE. 

péchez  T0U9  de  sortir,  que  Schlague  ne  tou^ 
Toie  pas...  Suivez-moi.  {Il leur  ouvre  la  portm 
du  concierge t  et  leur  dit:)  Sauvez-Tous. 

(lis  sortent.) 

SCÈNE  XVI- 

TURLUTUTU, 

.ObI  Diea^  comme  ils  courent!  sont-ils 
lestes.  (  Ôt)  entend  Schlague  qui  tousse  dans 
la  cabane,  )  Voici  Schlague  qui  rient?  évitons 

»a  présence, 

(  n  se  eaehâ  dans  le  jardin.  ) 

SCÈNE  XVII, 

^CâtAGtJB:,    d abord  seul,  CONSTANCE, 

en  toilette  élégante, 

SCffliAGVB. 

On  a  pîen  raisoii  de  dire  ,  raisonnaplement 
barlant,  que  les  femmes  font  dd  Vous  co 
qu'elles  veulent  ;  ch'avnis  pien  churé  de  rte 
pas  me  laisser  gagner  ;  eh  bien  !  cette  tame  ' 
paronue ,  afre  tant  lait  qu'elle  m'avait  se-» 
rfiiit.,.  GhC  (aïs  lui  vaire  Mt  son  prisonnier 
amant,,..  Monsir  ïuflututu  ny  êlre  pas, 
ainsi.,.  Ah  !  lerlef ,  j'y  pense  ,  la  grille  qu'y 
Être  ouverte;  pendant  qu'il  causerait  Ici  ,  il 
n'aurait  qu*à  s'échapper.  (  //  ferme  la  ^nlle.  ) 


f 


SCÈNE  XVIL  iSç 

Maintenant  che  suis  en  sOretè...  Ah!  tous 
voilà^  Mootame. 

CONSTANCE. 

Tous  allex  vous  acquitter  de  Tolre  pro- 
messe ? 

Oui  9  Montarae...  (  //  ouvre  la  porte ^  et  ii 
appelle.  )  MoRsrr  Victor!*..  Il  va  venir,  Mon- 
tame...  Monsir  Victor?...  vous  pouvez  sortir. 

coirsTAirci. 

If  ne  rient  pa^. 

SCBtAGUB. 

Monsir  Victor  !...  allons,  il  ne  feot  plus 
sortir  à  présent*.*  il  est  peut-être  endormi... 
che  vais  vous  Taniener. 

(  Il  entre  dans  la  prison.'  ) 

COlfSTAIf  CE. 

Je  vais  donc  pouvoir  îni  parler  sans  té- 
n'oifi ,  la  présence  du  (îfrc  nf)*a  tout  à  Theore 
empêché  de  lui  répondre  ;  mais  cette  fois.». 

SCBLACÎIJE. 

Montante  ,  Montame ,  pins  pei^sonne. 

«OlfSTAlirCÉ. 

Que  dites-vous  ? 

SOBtÀGiiri. 
le  pfisônnkr  ,  il  est  enfolé. 


i4o    LE  FIFRE  DU  ROI  DE  PRUSSE: 

CONSTAKCE. 

Grand  Dieu  !  grand  Dieu  ! 

SCHLAGCE. 

Monsir  Turlututu  !  monsîr  Turlututu  ! 

SCÈNE  XVIII. 

LES  PttECÉDEirs,  TURLUTUTU.    . 

TURLUTUTU. 

Eh  bien  !  eh  bien  !  qu'est-ce  qu'il  y  a  ? 

SCHLAGUE. 

Le  prisonnier ,  où  être-t-il  ? 

'     CONSTANCE. 

Par  pitié  !  où  est  Victor  ? 

tURLUTUTU,  étonné  et  à  part. 

Que  vois-je  ?....  mam'selle  Constance  en 
belle  dame  t...  quelle  toilette!...  Et  puis  c'te 
familiarité,  où  est  Victor  ?...  {Haut.  )  D'où 
savez-YOus  son  nom  ? 

* 

CONSTANCE. 

Encore  une  fois  ,  où  est-il  ? 

TURLUTUTU. 

I 

Il  est  allé  se  battre. 

CONSTANCE. 

Voilà  le  malheur  que  je  craignais  arriré. 


SCÈNE  XVIU.  tix 

Je  bénissais  son  esclavage ,  parce  quHl  l'em- 
pêchait d'assister  au  combat. 

TVRLUTUTUy  à  part. 

Qu'est-ce  que  cela  veut  dire  donc  ? 

COTTSTAirCB. 

Âh  I  mon  Dieu  !  il  va  revenir  blessé...  Je 
luiavais  pourtant  écrit  que  ses  jours  m'étaient 
cher-,  ? 

TVBLVtVTO. 

Comment  f  vous  lui  aviez  écrit  que  ?...  J'y 
suis...  La  lettre  5  c'était  une  lettre  de  lui  ^ 
c'était  pour  lui  la  réponse...  Eh  bien  I  j'ai 
joué  là  un  joli  rôle. 

GONSTAIICJS. 

Oh  !  ne  vous  en  repentes  pas  9  vous  noiM 
avet  été  bien  utile. 

C'est  fort  agréable  pour  moi  9  et  je  ne  m'é- 
tonne plus  de  tout  son  empressement...  Ah! 
Dion  Dieu  !  mon  Dieu  !  et  moi  qui^me  suis 
brouillé  avec  ma  petite  Nicette  que  j'aimais 
tant. 

Allons ,  consolez-vous  j  je  vous  racommo- 
derai  ensemble. 

TURI.UTUTU. 

Justement^  la  voici. 


gli     LE  FIFEE  DU  1\0I  DE  PRUSSE, 

SCÈNE  XIX. 

hEi  paécBDE^s»  NKIETTE* 

HiCBTTEy   à  part. 

Je  saU  inaiotenant  que  cette  prétendue 
f^f  satine  est  !a  barooiie  de  I/isbourg  !  ah  ! 
j^b  !  M,  Turlututu  ! 

Ma  chère  Nicette  ! 
riaît-il,  Monsieur  ? 

Tous  avez  eu  la  bonfé  de  demander  au  roi 
lie  tn'épouser, 

y  yiGETTE, 

Je  ne  sarais  ce  que  je  disais  i  Monsieur. 
Nicette  ! 

IffIGETTK. 

Ne  me  parlez  jamais,  % 

COKSTANCB, 

Allons,  allons,  ma  belle  amie,  pourquoi 
affecter  cet  air  d'indifférence  qui  est  loin  de 
ton  cœur  ?...  Faîtes  ïa  pait. 

AIK  :  Aimable  et  jolie  (  du  nouveau  Nicaise.  ) 

Pnisqu^il  est  fidèle , 
Y^\%  moins  ki  cruelle , 


SCÈNE  X!X.  ,4$ 

À  son  amour 
Ke  sols  pas  léteïLt  ; 
Piûsqtt'O  est  fidèle , 
Fais  moins  la  cruelle, 
A  son  amour 
Réponds  à  ton  loor. 
l^ar  le  bonheur ,  songcs-y ,  ma  beBe  ^ 
Il  faut  savoir  diarmer  chaque  jour  ; 
Tous  les  inslans  qu'on  paçse  en  querelle- 
Autant  d'instans  perdus  pour  Tamour. 

ï0aL0TUTU ,  «ux  geoous  de  Nieettv^     . 
Piùsquef suis  fidèle, 
Fais  moins  la  cruelle , 

A, mon  amouf 
Ne  soûlas  rebelle. 
Puisque  j'suis  fidèle  , 
Fais  moins  la  cmeUé , 

A  mont  amonr« 
Réponds  k  ton  tour. 

CON9TAJrct« 

Puisqu'il  est  fidèle^ 
Fais  moins ,  etc. 

^nisqu'Ucstid^, 
J'iais  moins  la  cnfeUe , 

A  son  amoor 
H'soyons  pas  rebelle. 
l>uisquHl  est  fidèle, 
J'Êiis  mokis  la  cnaeUe  f 

A  son  amofir 
JVéponds  à  mon  tour. 

(On  entend  l<  iMahw»»  ) 


i44    LE  FIFRE  DU  ROI  DE  PRUSSE. 
Voici  le  roi. 

TUBLUTUTU. 

Ah!  çà,  mes  prisonniers  ne  reyienncnt 
pas....  ils  m'araient  taiu  promis  d'ôtre  ici 
ayant  le  rot. 

CONSTANCE. 

Pourvu  qu'il  ne  soit  rien  arrlyé  à  moo 
cher  Victor, 

SCÈINIE  XX. 

LES   PRECEDEES,    FRÉDÉRIC,    OFjriGIERS. 

CfifOCUB. 

Victoire  !  (fer,  ) 
Plus  de  guerre ,  plus  de  combats  I 

La  gknre  ('^<^''')  ' 

Guide  nos  pas.  (Bis.) 


FIEDERIG5  à  ses  officiers. 

Bien,  mes  amis,  vous  avez  tous  fait  preure 
de  valeur...  vos  troupes  ont  bien  maooeuTré, 
mais  je  ne  vols  pas  parmi  vous  les  deux  offi- 
ciers qui  ont  surpris  ce  fort  occupé  par  l'en- 
nemi  et  qui  ont  enlevé  les  drapeaux  ;  dans  la 
mêlée  ,  je  n'ai  pu  distinguer  letir s  traits,  j 

LE   MAJOB. 

Sire  9  ils  vont  vous  être  présentés  dans 
lliistant. 


'       SCÈNE  XX:  ,4Î 

Vailà  des  brayes  !..,  Eh  bien  !  Turfutufa , 
c'est  de  la  faute  de  tes  priionniers^  si  tu  n*é- 
tais  pas  à  la  bataille. 

ComiiieDt  donc  »  Sire  ? 

»■  t 

FAéDBBIC. 

n  fallait  que  ta  restasses  fiour  les  garder* 

Ti7Bt.i}TiJTU)  à  part. 

Cela  a  biearéussf.  {tiauù)  Ah  !  ouï.  Sire, 
comme  tous  dites  ,  pour -les  gardefr. 

Fais-les  sortir  maînteôàiit  ;  je  vettï  leur 
pafdouneTi 

toaiuTUTii^  tvpubl^. 

Âh  I  mon  Dieu  !  comment  dites-vous? 

FBÉDÉRIG. 

Fais-les  sortît 

TUBLOTUTt,      i 

Schlagne  ^  le  roi  demande  à  toir  les  pri-' 
sonniers ,  entendez-yous  ? 

Gh'entendre  fort  pîen  ^  ndais  tous  afcï  la 
clefc 

TtBLVTOTIF. 

Non  5  je  ne  l'ai  pas.  i; 

F.  YandeviUet.  d<  Ici 


)46    LE  FIFKE  DU  KOi  D^  PRUSSE. 


:F&âll»lcJ' 


M'obéît-on  ^ 
Ah  l  Sire  l...      , 
Qu'est-ce  ? 

fO-»«,1I««TV«-  

Yos  page»  J 

FHéi^éaic» 

£Ii  hievt  1  me^  pages  9  . 

Ils  «e.,aimt  ép^pf^ 

Ils  se  sont  éch'appé^  f.... 'Morbleu  t.tjit'oa 
les  pôUTSuive  >  et^a'îld  soient  pour'tînq  ans 
en  prison» 

C'était  pour  aller  &  la  bataiHe. 

FRé»éftIC. 

A  la  bataille...  Deux  ans  !...  (Là  baronne 
de  Lisbourg  s'aoamee,  )  Que  Yois-j,e  ?  La  ba- 
ipoDûe  à^  {i>isl|OiAi>g  t  . 

cosrsTAycE. 

EUe-tneme ,  qu<  est  cause  de  la  préoiij^re 
faute  de  Victor. 


I 


SCÈNE  XXI.  14^ 

FKéDÊEIC. 

La  s^Qo.nde  est  iiDpardoiiQ<^kIe< 

Non  ,  Sire ,  €^e  e»t  exousabk. 

riiÉDéftio. 

Tous  faites  des  observations.  £h  bien  !  fe 
iQus  caise  de  vos  fonctions. 

SCÈNE  XXI. 

us  99AakpE$s  t  VJCTOa  ^  BIPPOLTIE. 

LS  MAjroa, 

SiMy  TOtci  les  deux  officiers  que  tous  afes 

demandés» 

C098TA,KGB. 

Qde  Tois-je  ?  Victor  1  1,  jj. . 

CBCBOR. 
AIR  :  Honneur  à  ia  miùùjue^ 

Pour  eux  plus  d'eadavage  ^ 
Car  les  deux,  officiers . 
Qui  montrèrent  tant  décourage , 
Soot  cc:^  deux  prisomù^^. 

aivpeinrfa. 
Aia  du  Maginna  îPtéfttocbahU. 

Nous  méritoOs,  liélas!  votre  colère  , 


sis    L£FIFft£9UR0ID£PRUSSI^ 

Car  nous  ayons  brayé  rautonté  ^ 
Ifaîs  cependant  chacun  de  nous'  eipère 
Voir  teimmer  notoe  ca{»tiTfté.  (nié) 

Oni ,  conoaÎMant  yolre  ioilice  taUtxèmt , 
19ou9  foiiuDe$  sûrs  de  sortir  de  prison  ; 
Cpac  nous  yenons  nous  racheter  nous-mcme. 
fiire  l  toi}à  notre  rancofa. 

(  B*  présettiettt  det  drspeauz.  ) 

CoippQent  !  ce  sont  eux««.  Oh  !  les  braver 
feunes  gens  !•#.  Messieurs ,  ]lr  Rûi  vous  par^ 
aoone. 

FaiùéÉic. 

Tu  m'as^ien  JQgè...  Victor  «t  Hippoljte^ 
|e  TOUS  Domme  tous  deux  aides  de  camp 
de  Bk^''  gardes.  Madame  la  baroone ,  ce  grade 
r&od  Victor  Totre  égah 

I^A   BAplOirVE. 

Je  T0M8  enf ends ,  Sire. 

TIGTOA   ET   BIPPOLTTE. 

Que  de  bontés  I  • 

A  U  bomie  heures*  o*est  parler,  cela.., 

FilDiaifc. 

Je  t'ai  ôté  la  place  d'iuspeoteur  de  Spaodau 
parce  que  tu  as  trop  bon  cœur  pour  la  rem* 


s  CÈNE  XXI.  ^49 

plir;  je  te  pomine  hui9sier  de  la  chambre  ^  à 
coodition  que  tu  apprendras  à  lire. 

TVBLVTUTV. 

Et  à  écrire  aussi  \  ça  fait  que  je  lirai  et  que 
j'écrirai  mes  lettres  moi-même*  Je  ne  tous 
irai  point  cl^ercher  pour,  cela ,  H.  Yictor. 

VAUDEVILLE, 

AIR  :  ymuhviUe  des  Ikihors  troMpeuri, 

n  ùmX  hk*  soî-mem'  tcê  affaires , 

L'pniTerb*  le  dit,  il  n^a  pas  tort  ; 

Aux  autres  on  ne  songe  guères , 

C*cst  à  soi  qu*on  pense  d'abord. 

^M.  p^t'  Nicctte ,  quYaim'nd  sans  cesse  » 

Deviendra  ma  femme  demain , 

'.Et  pour  lui  prouTer  ma  tendresse  I      1   .       . 

rn^irai  pas  chereher  le  voisin.  J  >  ^'  ^ 

HIGETTX ,  à  Turlutvt««' 

Sai^  espérance  de  me  plaire , , 

Et  malgré  mes  refus  çopstans  ^ 

Lnbin ,  le  Yoisin  de  mon  père , 

Me  fiiit  la  cour  depuis  long-tems« 

Dans  le  moment  de  ma  disgrâce^ 

Quand  tu  me  fuyais  ce  matin  y 

ComlHcn  de  femmes,  à  ma  place,    (  /g:    '\ 


1  -^  ^ 

.  Seraient  allé*  cbçicher  le  v(Msin  ! 

aiPPOLTTB. 

'  L'hymen»  suivàut  toaiours  son  frère 


i3. 


}  («..) 


ï5o    LE  FIFRE  DU  ROrOE  PRUSSE. 

Aime  à  (Femeirrer  prés  de  lui  j 
Le  niaKn  amour,  aci  contraire , 
Ne  peut  le  voir  qu^ayec  eanin. 
Quaac!  dans  le  même  voisinage 
Ils  se  trouvent,  Tamour  soudain 
Doone  coofé ,  puis  dîémënage. 
Sans  aQer  dtercher  son  toliin» 

Sous  le  voile  de  Panonyme , 

Vùjtt  cet  écrivaîit  rampant , 

DistiUaut  le  fiel  (yii  Panime , 

Nous  iusulter  impunément. 

A  celui  que  son  pasnpiîîet  blesse 

Il  donne  sa  dîemeufe  enfin  ^ 

Mais  quand  on  court  à  son  adresse,    1 

Il  est  toujours  chez  h  voisin.  î  (*•'  ) 

F2l£D£AIC. 

La  paix  est  enfis  rétablie  ^ 

Apres  de  gloriçUx  combats  ; 

Et  puisque  la  guerre  est  fiuic , 

Amis,  ne  la  raHumons  pas. 

A  cette  paix  so jolis  fidèles  , 

Et  sachons  nous  etiteudre  enfin  j 

Pour  faire  finir  nos  querelles  ,        l     /  «^  ^ 

N^allons  plils  chercber  le  voi*>in.    j     ^      *^ 

COirSTÂlfCE  ,  au  Puklic. 

Sur  le  destin  de  son  ouvra^ 
Notre  auteur  est  tremblant  ce  soir  j 
Il  redoute  certain  orage  : 
Messieurs ,  ranimez  son  espoir. 


SCÈNE  XXI.  i5i 

Pour  que  sa  craiate  à  TinstaDt  cesse , 
Il  ne  lui  faut  qu^ua  coup  de  main. 
Ce  soîr  f  pour  appkudir  sa  pièce , 
N'aUez  pas  cberclier  le  voisin. 


j  (BU.) 


flir    DU    FIFEE   DU    KOI   DE   FEU8&B. 


LE  JUIF, 

COMÉDIE  AS^CDOtlQUE  EIÏ  DEUX  ACTES, 

wfhd^  ms  YAUDcyaLEs , 

Pae  mm.  a.  ROUSSEAU ,  DÉSAUGIERS 

«T  MESNARD; 

u 

Aencésentée»  pour  la  première  fois,  snr  le  théâtre 
de  la  porte  Saint-Martia ,  le  i4  mai.iSaî* 


£,VJ) 


ifci  irt. 


PERSONNAGES 


•a» 


ÏSAAC  SAMUEL ,  juif. 

LUCETTE  RICHARD. 

M"«  SIMONNE ,  aubergiste. 

CHARLES,  »oi>f^!s,  soldai: 

M.  PINCE',  procureur.  \ 

BRILLANT,  p«ti4.,»aitre.  )., 

DELAtNE,  tiulJeur.  >voyaffeur$, 

M-DESCÉaULIS,plaid€iwô.L        ^ 

HORÏENSE,  actrice.  J 

RUSÏADT^  Cènducleur  àé  hb  dîUgew».  . 

THOMAS ,  gaj^û  d'auberfl». 

UN  SERGENT. 

ROSSIGNOL^  f     , 

BRISETO«T,  J^<^'«"«'S- 

Paysans. 

Soldats. 

VOLECBS. 


La  scène  est  an  Tillage  de  Rémival ,  sur  la  route  d'Or- 
jeans ,  dans  Tauberge  de  madame  Simonne. 


LE  JUIF, 

COMÉDIE. 


ACTE  PREMIER. 

Le  théâtre  représente  la  salie  basse  d^une  auberge  âc 
village  y  il  y  a  plusieurs  tables ,  sur  lesquelles  sont 
des  verres ,  brocs ,  bouteilles,  eic. . ,  et  sur  chacune,. 
noe  lumière  ioiUquant  qa^il  fait  nuit ,  des  bancs  de 
boi>  et  des  ciiaises  de  paille  j  à  droite  de  tracteur , 
au  dernier  pbn ,  uoe.ptote  conduisant  dans  Tinté- 
rieur;  au  fond ,  la  porte  4^^Dtrée ,  et  de  chaque  côté, 
im  Titrage  qui  permet  de  voir  la  campagne  à  Tex- 
teneur;  nue  cneminée  à  droite:  une  fenêtre  du 
même  cote. 


SCÈNE  I- 

ROSSIGNOL ,  fiRiSÉTOtJT,  THOMAS, 

PATSATTS. 

(  Au  lerer  du  rideau ,  ilos^ignol  et  Brisetout  sont  assis 
m  une  taUc  à  droite  ,  sut  le  devant  de  la  scène  ,  et 
boivent...  Plusieurs  paysans  hoi'vent  par  groupes 
aux  difféventcs  tables ,  Thomas  va  de  Tuuc  à  Tau- 
tre.) 

AIR  :  D*un  chœur  dts  f^faMçais  en  catUonnement. 

JtiN  bons 
VigiiVons , 


ï56  '         LE  JUIF, 

Caressons  • 
Les  flacons  f         ^ 
Soignons 
La  treille , 
ti  fêtons 

La  bouteille ,  \ 

Qua'hd  d*ces  produits , 
renriebissoBS  Vpays , 
rdevoBS  être  les  premiers  servis. 

ÛN  BUVEVRi  ^  une' table. 

A  boîr^,  garçon  î 

THOMAS ,  k  partr 

Dieu  !  comme  ils  sont  avides  ! 

ÙN  ATJTBE  BUVEua  )  à  une  autre  Ubie.    • 

Thomas ,  du  vin  I 

TBOMAS ,  portant  nne  pinte  &  dMCiin'  d'eux^ 

Vous  allez  en  avoir» 

(a  part.) 

Du  train  qu'ils  vont,  nos  tonn's  sVaient bîentâf  vîdes^ 
S'il  D^jr  avait  pas  de  Peau  dans  Trésej^voir. 

CHŒUR  nXS  BUVEÛBS. 

En  bons  .    . 

Vignerons ,  etc. 

»AT8ET0UT,fcasà  RossîgnoL 

■Dis  donc,  Rossigùd ,  est-ce  que  ces  ehien» 
de  paysans  ne  s'en  iront  pas? 

ft088iGKO&9  de  m&ae. 

T»îs-*t&i^  tu  BOUS  feJ^ai8V6IûanIuer• 


ACTE  I,  SCÈNE  I.  iS; 

BUISETOOT,  de  même. 

Ça  t'est  facile  à  dire  ;  maïs  les  àmîs  nous 
attendent;  la  nuit  est  Tenue  et  voilà  Theure 
où  passe  la  diligence, 

THOMAS^  s'approdiant. 

Qu'est-ce  que  ces  Messieuris  parlent  de  la 
dUigeoce? 

BBISETOCTT,  d'un  toD hrutal* 

Hein  ?  qu*est«^ce  que  cela  te  fait  ? 

mossiONOt,  bas  à  Brisetout. 

Yois-ta,  animal!  (^Haut  tfun  ton  douces 
reux.  )  Nous  disions  que  la  nuit  approche  , 
que  ces  braves  gens  vont  rentrer  dans  îeur 
logis  >  et  qu'il  nous  faut  aussi  regagner  le  nô- 
tre en  diligence. 

tBonics. 

AhTc^est  ça...  regagner  en  dili...  c'est  le 
mot,  Toyez-vous,  qui  m'a  fait  de  l'effet,, 
parce  qu'il  n'y  pas  encore  un  mois  qu'elle  a 
tlé  arrêtée  à  une  lieue  d^cu 

I  BBISETOOT. 

La  diligence^ 

Bossicirou 
Pas  possible  l 

1SOMA9. 

Si  fait....  que  trop  !  on  dit  que  font  près 

V.  VaudcTlUes.  3.  i4 


,58  lÊJUIF. 

de  ce  village 5. dans  la  forêt,  il  y  a  uoe  ùttre 
bande  de  voleurs! 

BBISETOUT9  toujours  brusquement. 

Des  voleurs?....  allons  donc,  c'est -ua 
conte..» 

LE  s  PATS  ANS. 

C'est  vrai...  c*est  vrai. 

TBOMAS. 

J'crois  ben  que  c'est  vrai,..,,  Comment  î 
Monsieur,  vous  ne  croyez  pas  aux  voleurs? 

BRIS  ET  ou  T. 

Non,  et  JMsqu^à  ce  que  j'aie  àlè  volé,. 

Si  feit,  S4  feil. . .  {Bas,  )TfAê-i6\âù  nfc.  [Haut,  ) 
Oui ,  il  y  croit ,  j'y  crois  aussi ,  tttcii  ;  «t  pour- 
quoi pas?  est-ce  qu'il  »'y  en  a  pas  eu  de  tout 
tcms?  je  crois  aux  voleurs  comme...  à  naoi- 
même. 

il»  :  Ifu  vaudevîUe  dé  la  Sonmamhtite, 

Tant  que  Ton  verra  l'ignorance 
Tlfiiirper  les  droits  cla  talent, 
Et  dans  les  enipluis  de  finance 
En  quelques  nïois  sVnridiir  un  traitant  \ 
Tant  qu^on  verra  l^effronté  parasite  , 

.Écornifler  les  diners  les  meilleurs , 
Et  le  banquier  riche  après  sa  faillite , 
Mes  amiji ,  croyons  auiL  voleurs. 


ACTE  I,  SCÈNE  L  ,5^ 

THOlfAS. 

Vous  avez  bien  raison  ,  Monsieur;  aussi  , 
c'est  pa  pour  vous  renvoyer;  mais  si  vous 
avez  ù  aller  loin ,  je  vous  conseiHe  de  ne  pas 
TOUS  altorder...  quoiqu'il  n'y  oit  pki^  tant  de 
danger  à  présent,  parc^  qUé ' depuis  Tadaire 
de  la  diligence  il  y  a  toujours  un  détache- 
ment de  la  garnison  qui  veille  à  notre  sûreté. 
BBISETOUT^  murmurant. 

Que  le  diable  les  emporte  ! 

THOMA». 

Qui?  les  soldats? 

&  o  S  s  I G  N  OL  9  vivement. 

Non  ,  les  voleurs  qui  compromettent  ainsi 
la  sûreté  des  voyageurs  honnêtes.  (  Bas  à 
Briselout,)  Tu  ne  te  tairas  pas? 

PAYSANS,  criant  ensemble  à  différentes  tables. 

Du  vin!  Thomas...  garçon,  un  litre  !  al< 
Ions  donc,  paresseux. 

THOMAS,  avec  humeur. 

Eh!  un  moment...  comme  ils  crient,,  donc', 
il  n'y  en  a  plus,  là  î...  [A  demi-voix.)  L'puils 
est  à  sec 

FAISANS. 

Comment  !  comment  !  H  n'y  en  a  plus. 

THOMAS,  se  reinrenant. 
Faut-il  pas  en  garder  pour  la  diligence , 


^6o  LE  JUIF. 

quand  ail'  s'arrêtVa  pour  changer  de  che* 
vaux  ?  de  ce  tems-I^ ,  lejs  yojagqurs  sont  sî 
siUérés. 

PATSANS9  frappant  sur  les  tables. 

£h  !  va  -  t'en  au  diable ,  avec  tes  voja-- 
gcurs...  du  yio  !  du  vin 

SCÈNE  II. 

tEa  t%iciiizvs  f  SIMONNE,  entrant 

par  la  droite.  ^ 

slMONiiE)  aux  buveq^ 

QuEX.  tapage  faites-VQUs  donc?  j'^i  cru  qqe 
gipus  étions  assaillis  par  la  bande  de  la  forêt. ,. 
Qu'est-ce  que  vous  demandez  à  ce  garçon  ? 
du  vin  ?  il  n'y  en  a  pas. 

Xià  •  Yoye^  •*  TOUS  ?  la  bourgeoise  vous  le 
dit, 

Ah  I  m^id^me  ^îiBopne. 

aiKOIf  NE, 

Non  )  il  n'y  en  a  pas,  pour  vous,  toufours; 
il  est  l'heure  de  rentrer;  est-ce  que  vous  vou- 
lez vous  griser  !  si  c'était  de  jour ,  encore 
passe,  mais  à. la  nuit,  vos  femmes  ne  me  le 


ACTE  I,  SCÈNE  II.  ,(5., 

pftrdonneraieDt  pas;  voyons,   que  chacun 
paie  500  écot,  et  partez. 

(  Ole  rc^it  Tarj^ent  à  chaque  table  ,  et  2e  met  dans 

tin  petit  SBC.) 

KO  S  SI  QH  0](.,  appelant, 
A  nous  ,  garpoo ,  le  compte  ? 

THOMAS,  allant  à  leur  table. 

On  y  ya  !  Six  litres ,  ïe  paiu ,  Ja  tranche 
de  iamboo  ,  uoe  omelette..,  oh  !  diable  !  ça 
f^it  uoe  dépense  conséquente. 

^Ais^Tàu  Tj,  d'ufl  top  farusfpje,  l^i  jetant  une. 

pièce  d*or, 

Faie-toi« 

T  H  O  M  A  9  ,  examinant  la  pièce. 

De  For!...  oh  J  ahî  tenez,  rendez,  not' 
bourgeoise...  DiabJe }  on  voit  bien  que  vous 
n'êtes  pas  de  ce  pays-ci ,  car  nos  paysans 
p*ont  pas  souvent  de  c'te  mounaie-là. 

B0SSI6NOI,  basa  Bris  tout. 

loibécile,  avec  ton  orl 

s  I M  0 FN  E ,  rendant  à  Brisetout. 

Si  vous  en  avez  beaucoup  comme  ça ,  dé- 
fiez-vous de  la  grande  route  d'Orléans  ;  il  est 
bien  tard,  elle  n'est  pas  sûre  :  et  si  vous-n'c- 
tes  pas  bien  armés ,  avec  de  bous  chevaux. .% 

tAlSETOVT,  d'un  ton  brutal. 

Nous  n'avons  pas  peur, 

»4-    . 


i6a  LE  JUIF. 

ROSSIGNOL. 

Et  puis,  je  crois  qu'on  exagère  le  danger, 
nous  ra?oiT5  traversée  tantôt ,  celte  foret 
qu'on  dit  pleine  de  brigands ,  et  je  vous  as- 
sure que  nous  n'y  avons  vu... 

BIISBTOVT. 

Que  nous. 

BOSStGNOC,  bas. 

Chien  de  Brisetout...  (Haut.)  Et  un  jeune 
soldat  qui  marchait  avec  précaution  dans  les 
fourrés  les  plus  épais ^  et  qui  parafssait  aVoîr 
plus  peur  que  nous. 

8IMONNE9  venant  à  lai  précipitamment ,  et  laissant 

son  sac. 

Un  soldat  !  ah  !  mon  Dieu  !  et  de  quel  âge 
à  peu  près?  avez-vousvu  sa  figure?  comment 
ét^ait-ilfait? 

TBOUAS^  riant. 

Tiens,  sa  figure!...  alFez-vous  pas  vous  fi- 
gurer... soyez  tranquille,  not' bourgeoise  , 
c'était  pas  M.  Charles  ,  il  est  bien  paisible  à 
la  garnison,  dans  la  caserne  d'Orléans. 

(Pendant  que  Thomas  parle ^  Biisetout gagne  insea<ii^ 
blement  la  table  où  est  le  sac ,  le  couvre  dUuie  ser- 
viette et  s^approche  de  Rossignol.) 

THOMAS,  en  confidence. 

Faut  pas  prononcer  ce  mot  de  soldat  de- 
vant la  bourgeoise,  voyez- vous,  ça  lui  fait 


ACTE  I,  SCÈNE  II.  ,63 

àes  souleurs  ,  parce  qu'elle  a  un  fils  qui  s'est 
engagé  à  Orléans ,  par  un  désespoir  d'amour, 
où  c'qu'il  est  à  présenf.  C'est  dommage  que 
fous  partiez^  je  vous  aurais  conté  cVhis- 
toire-là. . . 

itisSTOVTjbasà  Rossignol ,  hii  indiquant  le  sac. 
Regarde  donc... 

ROSSIGNOt,  bas  à  Rttstîtotit. 

Fi  donc!  quand  on  trayailfe  sur  la  grande^ 
route  ,   descendre  à  de»  menues  filouteries  ; 
des  jeux  d'enfaus  l...  «'est  se  déshonorer. 

»EïSïîT0»T,  «le  même. 

Oh  !  je  ne  suis  pas  fier,  moi.^. 

THOBfASy  k  ttadame  Simonne. 

Allons,  madame  Simonne  ne  vous  attris- 
tez pas  comme  ça  devant  ces  hommes  esti- 
mables. 

SIKONIfK. 

C'est  Yrai...  excusez.  Messieurs,  mars  que 
Toulez-vous,  c'est  mon  seul  fils,  et  une  nlère 
est  bien  pardonnable... 

aossiGNoi. 

C'est  juste;  allons,    adieu,  ma  bonne 
dame,.. 

.  BfiiSETOfiT  prend  le  sac. 

Adieu',  là  mère. 


i64  LE  JUIF. 

0iMONifE,  le  prenant  des  mains  de  Brisetout  et 
qroy^nt  que  c^est  pour  le  lui  remettre. 

Ne  vous  donnez  pas  la  peine...  bien  obli- 
gée de  TOtre  complaisance. 

BBisi^TOUT^  avec  humeur. 

Il  n'y  a  pas  de  quoi..,  {A  part.)  Diable  de 
femme  ! 

1 0  s  SI  Gif  0  L  9  bas  à  Brisetout. 

C'est  bien  fait,  tu  méritais  ça. 

(  On  entend  des  cris.) 

SIMONKC. 

Messieurs  ,  bon  voyage.  {En  $e  retournant^ 
elle  aperçoit  Rustaut  qu'on  voit  passer  derrière  le 
vitrage.  )  Ah  !  ah  l  qu'est-ce  qui  nous  arriye 
donc  là?...  C'est  le  conducteur  de  la  dili- 
gence. 
(  Rossignol  et  Brisetout ,  prêts  à  partir,  s'arrêtent.) 

BOSSIGNOtf  bas* 

Brisetout ,  ne  nous  en  allons  pas  encore  ,  il 
y  a  peut-être  quelque  cliose  de  bon  à  appren- 
dre* 


ACTE  I,  SCÈNE  III.  i65 

SCÈNE  m. 

ROSSIGNOL  ,  BRISETOUT,  écoutant  dans  le 
fond  ,  SIMONNE  ,  RUSTAUïV-entrant  par 
la  porte  du  fond ,  THOMAS, 

B  V  ST  ÀUT,  â  la  cantonade. 

Eh  bien!  quoi  ?  quand  tous  crierez»., *quand 
TOUS  jurerez...  mol  aussi  ^  je  jure  ^  mais  le 
mal  est  fait. 

SIMONNE. 

Comment  !  Rustauti  est-ce  que  votre  Toi- 
ture.'... 

EVSTAUT. 

£h  !  noo^  d'une  pipe  ^  ne  nrren  parlez  pas. 

AIR  :  Fwe  la  Liûiogrophie, 

Moi ,  <{!if  (  le  diable  m^eniporte  ) , 
Jour  ni  nuit  n'ayais  yersé , 
Descendre  à  dîiL  pa^  d'Ia  porte , 
Patatras ,  dans  uu  fossé  ! . . . 
Mes  vojageurs  sont  là  tons , 
Qui  s'démcnent  sens  d^sus  d'sous  , 
Et  notez  bien ,  s'il  vous  plait , 
QuUls  étaient  au  grand  complet. 
Chaqu'  voisin  sur  Paiitrc  enjambe , 
Udiable  n^s^y^reconnaitralt  pas... 
Monsieur,  ren.lcz-moi  ma  jambe , 
Madam',  rendez- moi  mon  bras.. 


t66  LE  JUIF. 

Cest  une  actrice  dTaris , 
Qui  n'^peut  r'^prendre  ses  esprits  ; 
C'est  un  petit  monsieur  musqué  y 
Criant  qu^il  est  disloqué  ; 
C^est  un'  petite  riense  »  _ 
Dont  la  langue  est  un  moulin  ; 
C^est  une  vieille  plaideuse  y 
'Sanglotant  sur  son  carlin  ; 
C'est  un  juif  baragouinant 
Le  français  avec  Tallemand  :  ' 
Un  iirocurcur  re|)êchant 
Sa  perruqu^  dans  un  étang  ; 
C'est  un  tailleuf ,  aux  injures 
Joignant  un  geste  assez  lourd , 
Qui  mMit  qu'j^ai  mal  pris  mes  mesures 
£t  que  j^ai  coupé  trop  court  ; 
C'est  qu'il  faut  voir  tous  ces  gens. 
Moitié  dehors ,  moitié  d^dan^t 
Criaut  après  moi  comm^  si 
J'n'éfais  pas  d'ia  chute  aussi. •« 
Au  diable  les  chevaux  ,  l'omiére  « 
Le  postitlon  de  malheuc 
£t  la  diligence  entière.. « 
Excepté  le  conducteur. 

SIMONTf  E. 

Mon  Dieu  !  que  faire  de  tout  ce  moude-là? 

THOMAS. 

Tiens!  fa  vous  embarrasse,  not'  bour- 
geoise ?  les  liâmes  dans  -^V  chambre  ,  le 
p'iit-inaître  dans  le  colombier ,   Tprucureur 


ACTE  I,  SCÈNE  IV.  1C7 

n  grenier  ,  Ttailleur  dans  la  mansarde  ,  le 
j'jif  dans  la  soupente;  et  si  par  hasard  il  y  a 
qaeoq'  musiciens,  à  la  cave  :  allez  les  cher- 
iber,  allez  les  chercker,  M.  Rustaut ,  j'ar- 
rang[eroDs  ça  cq^Tenablement. 

BUSTAUT. 

C'est  dît  9  }c  Tais  achever  de  les  tirer  d'ia 
caisse^  et  jVous  les  amène. 

(Ilsort.  ) 

SCÈNE  IV. 

ROSSIGNOL,  BRISETOUT,  M»'' SI- 
MONNE, THOMAS. 

THOMAS. 

Cest-il  malheureux,  un  «éTénemen^  ocoi-' 
dentel  comme  celui  -  là  :  tous  Cds  pauvre» 
diables  qui  vont  être  obligés  de  passer  la  nuit 
ici...  dites  donc  ,  not'  bourgeoise ,  si  nos  voi- 
sins de  la  grande  route  étaient  instruits  de 
ça,  ils  pourraient  bien  venir  Yoiis  rendre  tî-* 
site. 

Voyez ,  Pimhccile  !  tu  me*  ftfis  trembler, 
avec  tes  sottes  reflexions. 

THOMAS. 

Heureusement ,  ils  n'en  sauront  rien. 

BBISETOU.T5  s^approchant* 
Qui  est-ce  qui  le  leur  dirait  ? 


i^o    >  LE  JUIF. 

Plalt  aux  %^^%  qu^on  arrête..^ 
Ce  nVst  pas  tout  d^étre  voleur^ 
Faut  encore  être  lionnéte. 

BBISETOVT. 

Ma  foi  5  chacun  a  sa  manière  5  et  à  tout 
prendre  ^  je  crois  que  la  mienne  est  la  meiU 
kure. 

AIR  :  Vu  pas  redoublée 

.  Toi ,  tu  caresses  d^une  main , 
Quaud  tu  prends  dTautre  ua^  montre  ^ 
(kloi ,  je  n^connais  que  rdrott  diemin  ,  ' 

.  l'el  que  }e  suis  je  m^mon^re } 

'  C  Vest  pas  moi  qu^on  verra  jamais 
Flatter  ceux  que  jVançonne  ^ 
Je  vole  tout  le  monde ,  mais 
Je  ne  trompe  personne. 

ROSSIGNOL, 

Je  te  conseille  ,  en  effet ,  de  le  piquer  de 
délicatesse  ;  uu  reste  ,  comme  je  tiens  à  faire 
encore  quelque  tems  des  affaires ,  je  le  pré- 
viens que  si  tu  ne  changes  pas  tes  manières  y 
je  romps  toute  association  avec  toi. 

BRI  8ETOIÏT. 

Eh  bien  !  à  la  bonne  heure,  mais  en  alten-' 
dant... 


k 


ACTE  I,  SCÈNE  V.  171 

AIR  :  Mon  système  est  cTaimer  le  bon  vin. 

Courons  vite ,  vite  au  rendez-vous , 
Nos  coofrères  doivent  nous. 
Attendre. 

ROSSIGNOL. 

El  dans  un  quart  d^heure  à  pas  de  loups  | 
Revenons  les  surprendre 
Tous 

BRtSETOUT. 

Ami ,  pour  ta  part  de  la  victoire , 
Je  veux  bien  te  laisser  le  tailleur. 
Mais  moi ,  qui  ne  connais  que  la  gloire , 
Je  prétends  voler  le  procureur 

E1V»SMBLK. 

Courons  vite ,  etc. 

(Faosn  sortie.) 

ROSSIGNÛZ.. 

A  la  porte  je  les  vois  paraître  ; 
Ils  sont  huit...  ali!  quel  revenant  bon! 
Disparaissons  par  cette  fenêtre , 
Pour  sVnricbir  tout  diemin  est  bon. 

ENSEMBLE. 

Courons  vite ,  etc. 

(  Ile  lortanl  par  la  fenêtre.  ) 


17»  LE  JTJIF. 

SCÈNE  \h 

DELAUNE,  M.  PINCÉ.  LUCËTÏE, 
IVUSTAUT,  HORTENSÉ,  BRIL- 
LANT, M^  DESCÉDÛLÉS,  THO- 
MAS, SAlilUEL,  Uparattkdemief. 

(  Rustaut  entre  k  premier,  tous  let  yojageors  le  f  ui- 
vent  dans  Tordre  indiqué  ci-dessus  ;  Je  Procureur 
est  sans  perruque  avec  un  boonet  de  nuit,  Hor- 
tense  s'appuie  sur  Brillant ,  madame  Desoédisles  tient 
un  oreiller ,  sur  lequiel  est  un  cariin*  avec  k  pâte 
enveloppée^  Thomas  va  et  vient.) 

TOUSt  LES  VOTAOEVAS, 

.  AiB  :  Du  Dèjetinef  tHHci,  etc. 

VOTJkGERA. 

Qoî  voudra , 
En  diligence , 
Bien  fin ,  je  pense , 

Sei^ 
Qui  m'y  reprendra. 

HOfiTENSS  ,  k  BrillaoV 

Croyez  qu'une  telle  culbute , 
Monsieur,  est  ma  première  chote  ; 
Jus({u'içi  je  n'avais ,  hélas  ! 
Fait  tout  au  plus  que  des  faux  pas. 

TOtlS. 

Voyagera. 
Qui  voudra ,  etc. 


ACTE  I,  SCÈNE  VI.  173 

BBILLANT. 

Moi ,  f  ai  brisé  dans  la  bagarre 
Un  flacon  d'une  essence  rare. 

PINCB. 

Mol,  le  reste  d'un  pâté  fin. 

MADAMJt  DESCBDULES  ,  avec  èXcUinatiOfli. 

Moi ,  la  pâte  de  mon  carlin  ! 

(Elle  le  pOM  sur  1»  table ,  et  défait -«oo  maotelet  |>our  Pea 

couvrir.) 

TOUS. 

Voyagera 
Qui  voudra ,  etc. 

BOaTENSE. 

Le  conduoteur  doit  être  responsable  de  h 
catastrophe.  Moi  qui  dois  débuter  aprèst 
demain  à  Orléans  ^  dans  les  Voitures  verséesy 
jugez  du  tort  que  le  nioîndre  retard  pourrait 
me  faire. 

H.    PJIfCB. 

Oh  I  qu*il  n'en  est  pas  quitte  !  je  Tais  ver- 
baliser ^  et  à  notre  arrivée  à  Orléans  je  l'at- 
taque en  dommages  et  intérêts. 

RVSTAVT* 

Je  ne  vous  crains  pas^  monsieur  le  Pro- 
cureur; de  quoi  vous  plaignez-vouus  ?  vous 
ne  vous  êtes  cassé  ni  bras  ni  jaro^bes. 

M.  PINCE. 

Et  ma  perruque  noyée  dans  le  bourbier  ? 

i5. 


exposer  un  homme  de  robe  à  la  risée  pu- 
blique ! 

DELAVNE. 

Et  le  détestable  souper  qui  nous  attend 
daos  cette  bicoque  ? 

M™*  DESGBDVI.ES. 

Et  mon  pauvre  Azor  qui  g;émit  dans  des 
souffrances  intolérables  I  encore  s'il  y  ayail 
un  homme  de  Tart  dans  cette  bourgade  ! 

HORTEN  SE. 

Et  mes  pauvres  nerfs  qui  ne  se  remettront 
de  long-tems  d'une  pareille  secousse  !  c'est 
ma  faute  aussi  ;  il  ne  tenait  qu'à  moi  d'accep- 
ter une  place  dans  la  calèohe  d'un  Anglais  de 
ma  connaissance. 

BRlttANT. 

Oh  !  c'est  fini  ;  pour  les  grands  voyages 
je  ne  me  sers  plus  que  de  mon  boghei. 

RUSTAUT. 

Messieurs  et  Mesdames,  faites  coname  vous 
Toudrez  ;  je  vous  ai  trouvé  un  bon  gîte  ^  vous 
pouvez  manger  et  dormir  :  cette  nuit  on  va 
réparer  la  voiture  ,  et  demain  nous  serons  de 
bonne  heure  à  Orléans...  vrai  ;  ne  vous  plai- 
gnez pas  :  vous  ne  tBouverez  jamais  de  con- 
ducteurs qui  vous  verSetît  aussi  doucement 
que  moi.  je  vous  souhaite  bien  le  bonsoir. 
(  II  sort  par  l«  fond  et  menacé  par  les  vx>yagcur$.} 


ACTE  ï,  SCÈNE  VII.  17^ 

SCÈISE  VII. 

izs  pftficÉoBNS,  excepté  AUSTAUT  et 

THOMAS. 

(  Horlense  s^assiéd ,  Brillant  s'appuie  sur  le  dos  de  sa 
chaise  ,  Piaeé  se  met  à  la  cheminée,  madame  Des- 
cédules  s'assied  et  soigne  son  cariin.  Delanoë  brosse 
son  habit ,  et  le  Procureur  écrit  à  la  table  à  droite.) 

BORTEirsEy  sortent  un  rôle  de  son  ridicule. 

Fdisqve  je  snis  condamnée  à  attendre , 

repassons  mon  rôle  de  début  ;  pourvu  que 

ma  voix  ne  se  ressente  pas  de  cette  aven*- 

lure  ! 

(Elle  fait  une  roulade.) 

BAILLÀIf  T. 

Ah  f  divin  !  divin  ! 

HO  RTBNSB. 

Vous  trouvez  ? 

BRILLANT. 

Je  me  suis  cru  à  TOpéra-Bufifo. 

SAMUEL^à  Lucette. 

£t  fous,  mon  chentil  Demoiselle^  fous  li 
être  pas  plessée  ? 

B  E 1 L  L  A  V  T. 

Ah!  miracle  !  voilà  le  premier  mot  que  nous 
dit  le  cher  compagnon  de  voyage. 


i^O  LEJUIF. 

SAMVEI,. 

C'était  pas  à  fous  que  je  Tadressais.  (^  JLu- 
celte,)  Vous  li  être  pas  plessée  ? 

LU  CE  TTC. 

I^on  ^  Monsieur. 

Sli^MÇEI.. 

Non  5  dUout  ?  ditout  ?  malgré  la  rudesse 
de  la  chocPIe  bouleversement  des  voyageurs, 
la  secousse  des  contre-coups  ? 

ItV  CETTE, 

Mon  Dieu  !  doo« 

SAMUEL. 

li  être  îiiîmaginabile.,..  fous  pien  heu-» 
rçuse. 

Lr CETTE 9  vivement, 
]Pst-ce  que  vous-même  ? 

SAMUEL, 

Pas  plus  que  fous  9  mais  moi  li  être  fort.. . . 
robuste...  Vous  aire  eu  uiie  belle  peur  tou« 
jours  Pbein? 

LU  CETTE. 

Non. 

SAMUEL. 

Vous  pien  heureuse  encore. 

LU  CET  TE. 

Je  suis  seulement  bien  aiHi|[éc  de  ce  re* 


Q 


ACTE  I,  SCÈNE  VII.  177 

tard...  j'espérais  revoir  ce  soir  mofl  pauvre 
Ciiarles. 

BRILLANT. 

Ah!  son  pauvre  Charles...  La  petite  est 
sentimentale,  c'est  charmant;  mais,  ma  toute 
belle ,  d  après  ce  que  vous  nous  avez  conté 
en  voyage ,  le  cher  Charles  ne  peuf  entrer 
dans  les  chaînes  de  l'hymen  qu'en  se  déga- 
geant <|u  joug  de  l^ars. 

LUCETTE,  naïVenient. 

Je  ne  sais  pas ,  Monsieur  ;  mais  je  suis  bien 
f  ûre  d'une  chose ,  c'est  qu'il  pourra  m'épou- 
ser  dès  que  j'aurai  acheté  son  congé  et  à  pré- 
sent que  j'ai  tant  d'argent  !... 

SAVDEL,  il  part. 

Tiaple  de  langue  l 

X.  p  1 N  G^  ,  quittant  vivement  la  table  sur  laquelle  il 

est  dippuyé. 

Hein  ?  quoi  ?  qu'est  -  ce  que  vous  parlez 
d'argent  ?. 

LVGETTE. 

Oui  A  onze  mille  francs  en  billets  que  j'ai 
sur  moi. 

s  A  M  c  B  i ,  lui  piienaiil  la  maû^. 

Ch€))ti  Temoiselle  ,  fous  li  être  pien 
cheuQc ,  c'était  peut->être  le  première  fois 
que  fous  foyachez  ;  je  foulais  tonner  à  fous 
un  pon  aûs  p  c'est  de  chamais  conter  ses  pe- 


1^8  LE  JUIF. 

tits  affaires  dans  une  foiture  publique  à  tes 
ctranchers,  c'était  soufent  pour  repentir  fous 
beaucoup* 

LVCETTE. 

Pourquoi  donc  ?  quand  on  est  heureux ,  ii 
est  si  dou^  de  le  dire  !  < 

I  8AU0EL.  ' 

Oui  f  mais... 

AIR  :  f^audeviUe  de  la  bêUe  Fermière, 

Le  bonheur  fait  des  chaloux , 
Et  puis ,  mon  enfiint,  à  votre  âche ,  i 

Tant  d'arcbent,  corapreocz-TOus^  i 

Ça  provoque  la  pafartadie. 

LUCETTA. 

Si ,  me  voyant  sans  soutien  ; 

Un  bon  ooeur  m'oArit  le  sien , 
Et  daigna  me  faire  du  bien  » 

Faut^il  qu-on  s*en  étonne  ? 
Je  n^ai  fait  de  mal  à  personne. 

B&iLtAiVT,  s^approchant 

Elle  a  raison ,  M.  le  Juif  allemand  ;  si  tout 
le  monde  était  aussi  discret  que  vous ,  que 
deviendrait  cette  confiance  réciproque  qui  s'é- 
tablit toujours  entre  voyageurs ,  et  grâce  à 
laquelle  nous  avons  su  tous  qui  nous  étions 
à  une  demi-lieue  de  Paris  ;  une  demi-lieue  !  . 
c'est  trop  dire... nous  avions  le  bonheur  dp 


ACTE  I,  SCÈNE  Vil.  179 

connaître  Madame  (ihnontre  madame  Descé" 
dates)  avant  d'avoir  passé  les  barrières». 

M.  PIKCi* 

C'est  vrai ,  excepté  M.  le  Juif,  qui. s'est 
obstiné  à  garder  Tihcognito  i  personne  n'a 
laissé  languir  la  conversation.  ■ 

V^"  DB9CBDULËS. 

Dieu  merci*  c'est  tin  ' l-éprocbe  que  je  ne 
mèriterm limais.        .^  r.  '  .  .:  . 

£h  bien  I  ^  trou  tais  fa  ibiiï  piî^;  'cef  datait 
le  plaisir  tos.Ct^njtQtures^ntnoiicibe  aittia^» 
fort  à  téviner  9  cbe  avais  le  co^p  ti^'cièil  ^im^ 
coup  cbuste  ^  et  suinle  tixvpnure,  les  expres- 
sions ,  che,  foyais  tout  te  suite,      / 

Quelle  perspicacité  î  AlVlsJ  Vrttis  hvèz  tlc^ 
tiné  au  premier  abord  qoi  nous  étions  ? 

..     .  9AHÉÈL.1  '    "  '     • 

Oh  !  pour  fous ,  Monsir ,  cbe  me  être 
trompé  ;  mais  fous  tefez  |)àrtîî)nfter  à  moi  , 
U  fesaU  le  nuit  toute  aoWfkuM^A  e^'in^i^ 
uyi  dans  le  carrosse  à  côtéiiià^  Imis.         '•    "*■ 


07 


si) 


kiKiDe  VÉcu^f  fif^ivncs 

I^otis  parliez  dWe  pmif  fbh;  (t{>ucé 
Te  fotre  petite  santé  y 


é 


i8o  LE  JUIF. 

A  la  plus  lécbére  segousse , 

Un  cri  par  fous  était  cheté  ;    ^ 

Ce  toa  mignard ,  sans  épigramme  y 

A  trompé  mon  sagacité , 

Et  choscpi^alors*  en  vériié  ^. 

tJ*avais  pris  tous  pour  ma'  p^tif  femme. 

DfiLAtzcEf  à  part» 
Attrape. 

Et  TOUS  Toilà  bien  détrompé  ^  f«8pèreî.»» 

&«.  u  u  E  L. 

Ckïî,  crâce  à-fotre  habit.  «.  mais  pour  re- 
Tenir,  je  tis  encore  à  le  choli  temoS^Ile  Tê- 
tre  pki&  tiscrète^ 

Qh  !  fe  le  Teuz  bien ,  il  ne  in*en  coûtera 
pas  beaucoup;  pendantjqueje  ne  dirai  rien  ^ 
je  penserai  à  Charles.  •^ 

A 

BRIILAIIT. 

Parbleu  !  ce  1^  Charles  est  un  heureux 
mortel. 

H0BTB5SE«  rcpfi^Qt spa  Tole. 

Ah!  me  Toîlà  tranquille  >  je  sais  mon  rè\& 
sur  le  bout  du  d^igt,  et  on  petti  lever  le  ri- 
deau quand  on  voudra. 

Vous  devei  ^tre  bien  impatlemmc^n,!  at« 
tendue. 


ACTE  ï,  SCÈNE  VIL  t8i 

HORTENSE. 

Je  TOUS  en  répoads. 

kiAi  De  Mariarma, 

Sttivabtja  coutume  ordinaire , 
Par  la  gaxelle  cl*Orléa)iis , 
Depuis  uué  quinzaine  entière 
Je  fais  proclamer  mes  talens. 

On  me  désire , 

Chacun  n^aspire 

Qu'à  voir  enfin 
Mon  jeu  brillant  et  fin; 

Je  suis  Tidole 

Dont  on  raffole. 

Après  demain 
Mon  triomphe  est  certai n , 

BAILLANT. 

Oui ,  de  totts  ftt  points  de  la  salle  ^ 
Je  prédis  que  sur  yotre  Iront 
Trente  couronnes  tomberont. 

HOIITEIVSB  ,  ëa  <ïonfideiice.  ^ 

Elles  sont  dans  ma  malle.  (  Ter.) 
8  À  M  t  E  II* 

Li  être  fort  bîéit;' tuais  en  attendant  qu'on 
^*fe  le  liteau  poUfr  Montànne  ^'  si  on  mettait 
ïa  nappe  pour  nous,  chc  croyais  que  ce  se- 
rait pas  trop  mal  non  plus. 

En  effet  9  je  m'aperçois  que  Tcrscr  donne 
on  appétit  de  tous  les  diables. 

f.  YaudrviUes.  S.  l6 


i 


i82  ^  LE  JUIF. 

SCÈNE  VIII 

lES   PKBCBDTTTS,    KP»«   SIMONNE, 

M™'  S I 11 o  N NB,  yémmi  an  ttilieo. 

Messieo&s  et  d^mc^s  »  le  souper  est  servi 
dans  la  salle  ;  quand  \oaâ  voudrez... 

DEL  À  UNE. 

Ah  !  bonne  nouvelle  ! 

H.  rrvci. 

Nous  ferez-TOus  faire  lK>DBe  obère  ^  au 
moins? 

Je  ne  m*attends  pas  à  "être  merTcilleuse* 
ment  traité  daos  votre  viUaniî  de...  dè«.. 

Rémivalé 

t 
LCGETTE,  Irès-cmue  ,  s|  part» 

Le  village  de  Rcmival  ! 

M"«  SIMOHNEr 

J*ai  fait  pour  le  .mieux»  «t  f  espère  4fn'.^ 
ne  sera  pas  trop  ;  mécontent  f^e  l'auberge  de 
là  veuve  Simoùne. 


f.   « 


LaveuTO  Sirnoonel  ah  !  moq  Dieu  1  c'fest 

elle  ! 


ACTE  r,  SCÈKJ-   VIIi;  i«3 

SA  MB  E  L ,  bas  à  Luceltc  cj«'i4  observait. 

Qu'aveï-vous  donc,  mon  cheniil  temoi- 
sclle  P 

LUCETTE,  trcîWîmue. 

I 

Ah!  Monsieur,  c'est  la  mère  de  Charles. 

SlMUELy  â  demi  -voix. 

Ne  Ikes  rien  te£ant  le  monde;  il  fallait  cba- 
piajs... 

X.  C  C  E  T  T  E  ,  de  lucme. 

J*ai  tant  d'envie  d€  lui  paricri 

SAMVE  L. 

Attendez. 

DELAUNB  et   M.   PIKCÉ. 

Allons^  à  table,  à  table. 

BRILLANT. 

Messieurs,  la  main  aux  dames. 

M.    PI  NCÉ 

AIR  :  Tu  vas  changer. 

A  taWe  !  à  tabjc  !  et  prenons  sons  façon 
Ce  qu'ici  le  Iiasard  nous  donne. 

DE  L  AU  If  E. 

Mauvais  souper  peut  nous  paraître  bon, 
Lorsque  rap|)ëlit  Tassaisonne. 

BBILLANT  ,  oOrant  la  main  à  Hortente. 
CVst  toujours  aux.  mets  délicats 
Que  je  donne  la  préférence. 


i84  LEJUJF. 

M.  PINCE)  offrant  la  main  à  madame  Dcsc^dulef» 

Moi ,  quand  j^ai  faifQ  ,  je  ne  dédaigne  pas 
Une  pièce  de  résistance. 

l^*""  PESCÉPÇI.ES5  prenant  $on  carGû. 

Un  momentj  MoDsicur^  que  je  preDoe  mon 
Azor.  Comme  lu  souffres  9  cher  petit  !  (  A 
madame  Simonne.  )  Madame,  ayez  soin  de 
mettre  des  macarons  au  dessert^  Azor  les 
aime  beaucoup. 

SAMUEL. 

Et  moi  aussi  ;  fous  en  mettrez  pour  moi  et 
pour  M.  Àzpr. 

Tova. 
Allonf: ,  atnts ,  et  prenons  sans  façon  »  etc. 

{  0nll;rnt  sorl  en  donnant  Ja  main  à  lïurteniie  ,  M.  Pincd  à 
madame  Dcsçddules',  Delaune  les  suit  ^  LuccUo  reste  eu 
scène  ,  Samuel  fait  quelque  pas  pour  sortir  y  madame  Si- 
monne suit  ;  il  la  grood  par  ta  main,  et  la  ramené  en  face 
de  Lucetle.^ 

SCÈNE  IX. 

SAMUEL,  M-»»  SIMONNE,  LLCETTE. 

M"'  SlMQVHEt  à  pnrt. 

QoE  me  veut  donc  ce  voyageur?  [Haut,  ] 
Eât-ce  que  Monsieur  et  Mademoiselle  ne  veu^ 
leut  pas  souper  ? 


ACTE  I,  SCÈNE  IX.  '     i8& 

LCCETTE,  avec  émotion  et  timidité. 
Madame ,  vous  ne  me  CQonaisses  pas  P 

M™'  SIMONNE. 

Je  ne  pense  pas  avoir  Thonoeur.., 

I.17CETTE. 

Je  suis  Lucette  Richard. 

M™*  siMQi^N^^  avec  colère. 

Lucettç!,..  comment  I  cette  jeune  orphe-- 
line...  £t  vous  ose^  vou3  présenter  chez  moi? 

LVGETTE. 

CNîSt  notre  accident  qui  m'y  a  conduite... 
je  ne  le  savais  pas  ,  Madame  ,  je  vous  assure; 
je  m'étais  mise  hier  en  voyage  ,  j'allais  voir 
Charles. 

M°'*   SIMONNE. 

Vraiment  P  ah  !  j'espère  bien  que  voiis  n'en 
ferez  rien  ,  par  exemple  ;  ce  n*cst  pas  assez 
peut-être  de  m*avûîr  ravi  mon  pauvre  en- 
iant  ?  Sans  sa  folie  passion  pour  vous ,  il  se- 
rait encore  dans  Télude  où  je  l'avais  placé  à 
Paris ,  ou  bien  il  serait  devenu  huissier^  avo- 
cat ou  clerc  de  notaire  :  qui  sait  où  le  talent 
peut  conduire  ? 

AIR  :  En  naissant ,  promis  à  ThaliQ» 

r 

Mais ,  hclas  !  sa  folle  tciidrrsse 
Me  sépare  à  jamais  de  lui  ) 

16. 


,S6  LBJUIF. 

n  eât  SMikigé  ma  Vieittcssc  y 
Et  vous  m^eakvez  soa  a^pul. 

A  mon  cœur  épargnez  ce  blâme , 
Loin  de  vous  ravir  un  enfant 
S'il  n'eût  tenu  qu'à  moi ,  Madame , 
ViMis  en  auriez  deux  à  présent. 

M*^*    SIMONNE. 

C'est  justement  ce  que  je  n'ai  pas  voulu  et 
ce  que  je  ne  yeux  pas  encore  ;  je  jure  bien 
que  plutôt  que  de  ooB^ettitir  à  un  pareil  ma- 
riage^ j'aimerais  mieux... 

SAMUEL. 

Li  être  fort  piea  de  ehurer,  si  Montamë  i! 
iifait  reçu  sur  le  compte  de  la  cheunc  per- 
sonne des  rcnsei^aamens^.. 

M*^  SIMONNE. 

Du  tout;  elle  est  snge,  laborieuse  ,  bien 
élevée  ,  mais  ça  n'a  rien;  une  petite  ou- 
vrière en  broderie  ,  orpheline  ,  abandonnée 
dès  sa  naissance  par  son  père  ,  qui ,  après 
s'être  ruiné  en  France  dans  le  commerce,  c>i 
parti  il  y  a  dix-buît  ans  pour  rAmcrique,  san» 
que  depuis  ce  tetns  on  en  ait  eu  vent  ni  nou- 
velle. 

s  A  M  V  B  L. 

Paufrc  petite  !  et  après  le  papa  ,  il  n'afrc 
pas  de  parent  proche  dans  les  iles  ? 


ACTE  I,  SCÎlNE  XL  187 

tu  CETTE. 

Hétas  !  ùofi  ,  Monsieur. 

S/lMTEL. 

Pas  un  oncle 5  un  frère,  un  tante,  un  pe- 
tit cousin  sur  qui  reposer  fous  du  soin  de  fo- 
ire afenir  ? 

LU  CETTE. 

Le  ciel  m*^  refusé  cette  ccrnsolalîon. 

M™"   SI  MOTtNE.    ■ 

Aussi ,  sans  une  brave  femme  qui  Vu  re» 
cueillie 9  élerée  •  et  qui  lui  a  appris  l'état  de 
broderie ,  c^ue  serait-elle  dev.enue  ?  él4i4-ce 
là ,  je  vous  le  den^ndfi»  PB  parti  convenable 
pour  le  fils  de  rnadame  Simonne ,  éduqué 
comme  le*  fifs  d'un  duc  etpair^  et  héritier, 
après  ma  mort,' de  Taubcrge  du  Soîeil-d'Or? 
Aussi  9  quand  on  m*a  écrit  de  Paris  rhisloire 
de  ces  amours-là  ,  j'ai  refusé  mon  consente- 
ment comme  je  le  devais  ;  là^dessus ,  mon 
jeune  homme  se  monte  la  tête ,  s'engage ,  rt 
depuis  deux  ans  qu'il  cs4  en  garnison  à  Or- 
léans,,  Tin  grat  n'est  pas  venu  voir  une  seule 

fois  sa  mère. 

\  ■  * 

SA  M  TEL. 

Ainsi,  c'était  foire- rigueur  qui  afait  privé 
fotre  fils  de  sojn  liberté  ?    . 

tvCETTE,  viveipitnt. 
Et  c'est  mon  amour  qui  va  la  lui  rendre  ; 


iS8  LEJUJF.  •* 

ohl  écoutez-^moi ,  ma  bonne  madame   SK 
monoe ,  je  suis  riche  4  présent ,  bie.n  ric^^e, 

M™*  siMpNNÇf  l^vec  [oie  et  surprise. 

Comment  !  ma  chère  enfant  >  yqus  êtes  ri- 
che? 

LUC  ET  TE* 

J*ai  onze  mille  francs. 

V"^  SIMONNE)  radoucie, 

Oaze  mille  francs! 

s  A  M  V  B 1. 4  bas  à  Lucette* 

Encore  I  j'afais  dit  à  fous  de  chamais  dire, 
et  fous  dire  toujours. 

»™  8IM0NKB. 

Savez-YQus  bien  que  c'est  vn  trésor  que 
cela?  Comment  cela  s'est-H  fait?  Votre  père 
a-l-il  écrit,  est-il  revenu,  a-t-îl  fait  fortune? 
Les  braves  gens  prospèrent  toujours..»  cou-^ 
teai-^moî  di^uQ  (^o* 

SAM  CEI" 

Gontez-moi  tonopa!..Gonte2-moi  toncçaî.. 
Laissez  donc  à  Tenfant  le  tems  pour  gootcr. 
(^I.a^fi//tf.)ilèpcndez...  votre  père?.,. 

tUCETTB. 

Hélas!  il  n'est  pas  revenu,  mais...  C'est 
Tavenlure  la  plus  étonnante...  Vous  n*avîez 
pos  voulu  de  moi  pour  voire  bru  ,  parce  que 
je  n'avais  rien  ,  et  je  me  suis  dit  ;  Pour  va- 


ACTE  I,  SCÈNE  IX.  1S9 

chetcr  Charles,  pour  pouvoir  Tépouser  ^  ii 
faut  de  l'argent...  travaUlons;  mais  j*ayais 
beau  faire:  depuis  deux  ans^ne  quittant  mon 
métier  ni  four  ni  nuit  «  je  n'avais  pas  amassé 
graûd^'cbose.,,  Dlmantîhe  dernier,  une  dame, 
(|uc  je  n'avais  jamais  vue,  vient  chez  moi  ; 
elle  avait  monté  mes  cinq  étages  ,  j'en  étais 
toute  honteuse. 

M"'  SIMONNE,  rinleiromiMnt. 
Et  cette  dame  était  donc?... 

SAMUEt. 

Ah  !  si  c'est  vous  qui  voulez  gonfer,  le 
cbeune  6Ile  il  gontera  pas.  {A  Lucelie.)  Lais* 
sez  gonler  le  JVjUmtame. 

M"*"  SIMONNE. 

Non  ,  non ,  je  ne  dis  plus  rien  ;  maïs  cette 

dame  ?... 

L17CETTE. 

«  Vous  êtes  mademoiselle  Lucette  Richard, 
>  me  dit-elle?  moi  je  suis  la  sœur  d'un  ban- 
n  quier  de  Paris ,  et  voilà  onze  mille  francs 
»  qu'il  m'a  dit  de  vous  remettre.  —  A  moi  ? 
»  mon  Dieu  !  et  de  quelle  part  ?  —  Je  ne  peux 
»  pas  vous  le  dire.  —  Mais  qu'en  vais-je  faire? 
N  — Ce  qu'il  vous  plaira;  la  personne  qui  vous 
»  envoie  cette  somme  vous  laisse  niaîtressc 
»  d'en  disposer  à  votre  gré,  adieu.  »  Vous 
jugez,  madame  Simonne,  que  mon  cœur  en 
a  bien  vile  trouvé  l'usage. 


I90  LE  JUIF. 

Air  :  /e  voudrais  pourtant  bien. 

Je  cours  oiiovcher  celui  que  j^aime , 
J'espère  que  par  un  refus , 
£û  voyant  notre  amour  estr^e , 
Vouft  n«  nous  affligerez  plus. 
Je  possède  e»  vain  la  fortune , 
Charles  manque  encor  à  mes  veeor. 

Plus  éc  raucuoe, 

LUCSTTE. 

Seul ,  on  n^cst  point  heureux , 

^aii  on  Test  tant  quand  on  est  deax. 

H^'   SIMORKE. 

C'est  coanne  hb  miracle  cette  hîstoîre^Ià  ; 
ma  pauvre  Lucette,  tu  mérites  toa  boobeur, 
combien  je  t'aitne  à  présent  !  tu  vas  me  ren- 
dre mon  pauvre  file.  • .  •  Non  >  certes  y  je  ne 
I  uinigerai  plus, 

SAMUEL,  malignement. 

Mais,  Montnrac,  si  fous  afez  churé  de  ne 
chamaîs  consentir  à  ta  mariage  ,  fous  pou  fez 
pas,  pour  la  bagatelle  de  onze  mille  francs... 

M^*    SIM  OH  NE. 

Ab!  Monsieur  9  vous  ne  savez  pas  ce  <|ue 
€*«i»t  que  la  tendresse  maternelle. 

SAMUEL. 

Non  ,  che  connaissais  pas  le  tendresse  ma- 
terncUe  de  onze  mille  francs. 


ACTE  I,  SCÈNE  IX.  ,^, 

Écoule  ,  il  ne  faut  pas  qu'une  jolie  fille 
comme  toi  voyage  toute  seule...  demain,  je 
t'accompagnerai  à  Orléans,  je  reverrai,  j'em- 
brasserai mon  Charles. 

SAMUEL. 

£t  le  au  perche  ! 

Ah  !  l'auberge  deviendra  ce  qu'elle  pourra; 
et  puî5,  après  tout ,  j'aî...  nous  avons  à  pré- 
sent onze  «iille  francs...  et  je  n'ai  pas  envie 
de  passer  toute  ma  i^ie  ati  service  des  voya- 
geurs. 

PLD»IEVB8  ¥  0 1  ï  ,  éaBS  Thitérieur. 

Madame  Simonne  !  La  maîtresse  î 

THO  Ma  s  ,  sur  la  poirte. 

Venez  donc  ,  not'  hourgicoise,  pendant  que 
TOUS  jasez  là,  fe  rôli  ht'ù\t9  et  le  éhat  em- 
porte les  côtelettes. 

SAMUEL. 

AhJ  çà,  quel  auperche  il  était  que  ça?  le 
chien  y  mangeaii  les  macarons ,  le  chat  y 
mangeait  les  côtelettes,  et  les  voyageurs... 

PLUSIEURS  V  o  I  X  ,  dans  rintcricur. 

Madame  Simonne  !  garçon  ! 

THOMAS. 

Tenez,    les  entendez-vous?  Ils  mangent 


19^  .  LE  JUIF* 

comme  des  ogres  ,  et  ils  crient  comme  de» 
possédés. 

Allons  ,  f*y  vais  ,  mais  c'est  pour  Ta  der- 
nière fois...  Tu  ne  vas  pas  souper,  rnoo  en- 
fant ? 

LUCETTB. 

Je  n'ai  pas  faim...  J*aime  mieux  rester  lâ, 
au  milieu  de  tout  ce  monde  je  ne^  pourrais 
pas  penser  à  lui.  (  A  Samuel,  )  Mais  tous  » 
Monsieur? 

SAMUEL*  / 

Moi  ?  mon  gentil  temoiselle ,  che  afai's  pria 
pour  fous  le  plus  grande  amhié,  et«.«  che  al- 
lais souper. 

M°**  SIMORHE. 

Merci,  Monsieur,  merci.  {Samuel rentre,] 
Il  a  Tair  d'un  brave  homme ,  ce  monsieur  juif. 
Embrasse-moi,  ma  Lucette,  Ta...  demain,, 
à  cette  heure-ci,  j'espère  que  nous  seroniT 
tous  contens. 

(  On  appelle  encore ,  elle  j  va.) 


( 


ACTE  I,  SCÈNE  X.  193 


SCÈNE  X. 

LUCETTE^  CHARLES. 

On  Toît  arriver  Charles  par  la  route  qui  est  au  fond 
du  tltéâtre  ;  il  cherche  a  voir  dans  la  maison  à  tra- 
vers le  vitrage  ;  il  est  vêtu  en  militaire ,  sans  avmes 
et  sans  sac ,  dans  le  désordre  de  quelqu^un  qui  a 
Ibit  une  longue  route  à  pied.) 

•  LDCBTTE. 

Ah!  je  me  sen»  plus  heureuse  ;  j*ai  TaTeii 
de  sa  mère,  mou  cœur  ne  me  fera  plus  de 
reproches.  Je  le  verrai  demain  !  demain  !  maî,s 
lui  il  est  bien  loin  de  m*attendre!  On  dit  qu'une 
grande  surprise  est  souvent  funeste...  il  fau- 
drait le  prévenir  d'avance;  à  nfton  arrivée^  un 
billet  que  je  lui  enverrai....  c'est  cela  ,  écri- 
vons-le toujours»»,  quand  il  ne  devrait  pa» 
servir. 

(  Elle  se  met  a  la  table ,  à  droite ,  et  écrit.) 

CB  A  & L E  S^  eatranl  avec  précipitation  et  regardant 

de  tous  côtés. 

Personne  !  entrons...  m'y  voilà  donc  en- 
fin.», mais  je  ne  veux  pas  la  voir;  elle  u 
causé  mon  malheur,  je  voudrais  seulement 
parler  à  Thomas.  (//  aperçoit  Lacet  te. )Que\\e 
est  cette  jeune  personne  ?  Grand  Dieu  !  cette 
taille.»,  c^est.  elle  l  mais  non  9  cela  ue  »e  peut 

F.  Taad«vU)es;  3.  17 


194  LE  lUlF. 

LUCETTE9  se  levant  et  le  recoûDaîssai^t. 

Ociei!  c'est  TOUS?  Voas!...  quel  bonheur! 
Charles!  mon  ami!  et  votre  i).onoc  mère  , 
qu'elle  va  être  contente*!  (  Elle  vu  pour  Cap- 
peler,)  Madame!... 

CEÀftLES^  ranrétaat. 

N'appelez  pas!  je  ne  veux...  je  ne  .puis  par- 
ler qu'à  vous...  Mais,  vous  iciî...  cb«*  îHjh 
mère,  qui  vous  a  repoussceî..;  comment  se 
fait-il?... 

LUGIS.T'SE. 

J«  fie  pouvais  supporter  pîirs  fong-tems 
TOtre  absence...  J'allais  à  Orléans. 

è 

CnAAL^iS. 

J 'allais  à  Paris  vous  revoi f,  et... 

te  OETTE. 

1 

•  ■ 

A  Paris?  vous  avez  donc  obtenu  uoaipf-r- 
missioix? 

CB  uIl  a,  L  &  s ,  (roaUé. 

Une  permission  ?  Au  nom  du  ciel ,  ne  m'in  • 
terrogez  pas;  laissez-moi  fouir  d'un  bowhien^r 
«i  cruellement  acheté...  dites-moi  seuleroçill 
que  vous  m'aimez  toujours. 

'      LUCETT^.  .       . 

Si  je  v«u9  aime!...  Charles...  *éh1  -selrttis- 
je  ici  sans  cela? 


ACTE  I,  SCÈNE  X.  19$ 

€  &  ▲  B LE  s  5  doutoureuMiuettl. 
Vous  m'aimez  !...  et  dous  ne  serons  jamais 

UQÎS. 

X.DGETTE,  avec  une  joie  naïve. 
Mais  oui...  tous  allez  m'épouser. 

CHARLES. 

Ma  mère?... 

tcCE'TT'É. 

Elle  y  consent. 

CHAliiES. 

Mon  fatal  engorgeaient  ? 

AU  G  s  TT  Bu 

Vous  allez  être  libre  ;  je  strlB  rîchej  demain 
jachète  votre  congé. 

CAÂBLES. 

Mon  congé  !,..  Ah,I  mall^eureax!  qu'ai-je 
fail? 

LU  c  E  TT  E  »  étonnée. 

Mais  pourquoi  ds  chagrin  ? 

€  H  A  ir  t  É  s  ^  au  désespoir. 

Je  suis  perdu  ! 

LOCETTE. 

Charles!  vous  m'effrayez. 

CHA«VES-  > 

Depuis  deux  ans  que  jç  suis  soldat ,  la  dqu- 


196  LE  JlfIF. 

leur  a  abattu  mon  courage,  troublé  ma  rai— 
sxjn  9  j^ai  cédé  au  désir  de  vous  revoir»  ]e  lui 
ai  sacrifié  mon  devoir,  Thonneur,  j'ai  des- 
serte. 

t  V  CETTE. 

-    Que  dites-vous  ? 

CHAR  LE  s. 

AIR  :  Sans  murmurer  (  de  Michel  et  Cbristine.  } 

J'ai  déserté , 
La  faonle  et  rinfamie 
Vont  s'attacher  à  mon  nom  détesté. 
3'al  tout  trahi...  le  serment  qui  me  Ke , 
L^honneur,  mon  roi ,  mon  devoir,  ma  patrie 

J'ai  déserté. 

LTJCETTE. 

Àh  !  grand  Dieu  !  Comment  avez-vous  pu  ? 

CHARLES. 

A  peine  ai-je  commis  cette  jconpable  ac- 
tion ,  que  le  remords  s'est  emparé  de  moi  ; 
j'ai  senti,  mais  trop  tard,  que  pour  tous 
revoir  un  seul  instant  je  vous  perdais  pour 
la  vie. 

LUGETTE. 

C'est  une  grande  faute,  je  le  sais  bien; 
mais  ne  pouvez- vous  encore  ?... 

CHARLES. 

La  réparer?...  Il  est  trop  tard. 


ACTE  I,  SCËRE  XI.  197 

SCÈNE  XI. 

SAMUEL,  LUCETTE,  CHARLES. 

LU  CE  TTB ,  courant  a  Samuel. 

Ah  l  Monsieur,  tou$  m'avez  dit  que  vous 
TOUS  intéressiez  à  mol...  Venez  à  notre  se- 
cours ,  donnez -nous  un  bon  conseil  pour 
uous  tirer  de  peine...  le  voilà...  tenez,  c'est 
Charles... 

SAMUEL. 

Ah!  c'était  le  cbeune  soldat.,  physiono- 
mie heureuse... 

LUGETTB. 

Il  m'aime  toujours. 

SAMUEL. 

Il  fesaît  pien. 

LU  CETTE. 

Il  ne  pouvait  se  passer  de  me  voir. 

SAMUEL. 

Il  fesait  pien  encore. 

LUCETTE. 

Et  il  a...  il  a... 

SAMUEL,  gaiement. 

Eh  bien  !  qu'est-ce  qu'il  avait  encore  fuît 
la  cheune  soldat  ?  ' 

LUCETTE. 

Il  a...  déserte. 


1  •* 


19a  LE  JUIF. 

SAMUEL,   changeant  fout  à  coup  d'^expressioD  Je 

pliysidÉdttie. 

Oh!  il  fesaît  niai;  il  fesait  pien  uval;  cLeune 
hotnm^,  èaAfc-totfs  ce  que  c*est  qu'il q  dé- 
serteur? 

CHARLES. 

Que  t#op,  Modsîèur. 

AïK  :  Voilà,  voilà  tout  le  secnt. 

Lûîd  des  bf>jets  qu^  àîmé , 
Aller  cacher  son  sort  ; 
£n  horreur  à  rul-même , 

F&nr  et  chercher  te  faort.  -^ 

Se  voir .  tant  que  la  vie        •  * 

,  Prolonge  sa  dooleiirv 
Sans  amis ,  sans  amie , 
Sans  espoir  de  bonheur, 
Sans  parens  ,  sans  pahiè , 
Et  sans  consolateur  : 
Voilà,  voilà  le  dë^iteuf.  ' 

SAMUEL. 

Eh  bien  I  vous  safiez  tout  ça  ,  et  ça  n'avait 
pas  einbêché  tous  de  faire...  Ahf  cheunes 
chens  y  cheunes  cheàs! .  . .  J'afre  été  cheunu 
aussi  ^  pien  cheune  même»i»' j'âft*e  ^ie  de:» 
miennes...  maû  le»  mie^nnes  et  les  fôtres,  ça 
fesait  deux.  • 

CHAULES.  , 

Ah!  Monsieur,  je  sens  toute  l'étendue  de 
ma  faute. 


I  i 


ACTE  i,  SCÈNE  XL  i<)9 

C*est  chuste,  le  reproche  il  était  inatile 
à  présent  ;  dites  i  cheune  soldat,  depuis  corn- 
bien  de  tems  fous  avez  quitté  le  rc^'  '"'înl  ? 

CHARLES. 

Depuis  cinq  jours...  troublé  par  mon  ac- 
tion y  |e  me  suis  trompé  de  chemfn ,  j'ai  erré 
tout  ce  tems  dans  ks  hois,  et  ee  n'est  que  ce 
soir  que  je  me  suis  trouyé  dans  ce  village.. « 
derant  la  maison  de  ma  mère. 

Cinq  chours!  tiaple  !  il  jrafait  presque  plus 
de  remède. 

LUCBtTB,  effrayée. 

Et  que  pèut-îl  donc  loi  arriver? 

SAMVÊL. 

Aien  ,  que  il  serait  fusillé. 

LUCETTE. 

Grand  Dieu  t 

s  A  M  V  E  L  9  examinaut  Puniforme  de  Ch^irles. 

Eh!  mais...  chc  trompais  pas  moi ,  votre 
rèchiment  il  était  à  OHéans?...  {j4  Lacelte.) 
Aassurez-Yous ,  ce  n'était  pas  encore  lait. 

LUCETTE. 

Ah!  si  tout  mon  argent... 

s  AM  0  E  L9  allant  s'asseoir  à  une  table. 
C'était  inutile. 


900  lEJUIP. 

LUGETTE. 

Qu'allez-^TOus  donc  faire  ? 

SAMUEt. 

Écrire...  Appelez  un  carçon. 

LUGETTE. 

Pourquoi  pas  sa  mèr«  ? 

9ABf  UBJCy  écrivant. 

'    Non»  pas  la  mère^  il  fallait  qu'utile  ignore 
que  sou  fils  était  ici. 

LVGETTE. 

Elle  Taime  tant  ! 

SAMUEL. 

C'était  pour  ça,  elle  était  trop  papillarde... 
il  fallait  rien  lui  dire. 

CHARLES. 

SauTons-lui  du  moins  les  tourmens  de  Fia- 
quiétude.  (^Passant  près  de  Samuel,)  Aion- 
bieur,  si  quelques  recommandations  étaient 
nécessaires.,. 

SAMUEL. 

Non ,  non  9  en  fait  de  recommantations,  je 
recommandais  à  fous  de  pas  recommencer , 
foiià  tout.  Où  était  le  carçon?...  Il  s'appe- 
lait Thomas,  je  croîs. . .  (//  appelle,  )  Tho- 
mas ! 


ACTE  I,  SCËNE  XII.    ',.  201 

SCÈNE  XII. 

LES  PBÉGÉDF.NJT»  THOMAS,  accourant. 

TBOMAS. 

Me  T'ià ,  quoi  qu'il  y  a  ?  {ji percevant  C/iar^ 
ies,)  Ah  !  mon  Dieu  ,  est-ce  que  j'ai  la  berlue 
tloQC  !  nou  ,  je  ne  me  trompe  pas ,  e'est  no- 
ire jeune  bourgeois...  ah!  jami  queu  conten- 
tement! (//  appelle.)  Madame  Sim... 

s  A  M  u  E  L9  lui  mettant  la  main  sur  la  bouche. 

Silence!  fous  été  un  bafard.,,  écoutez-moi, 
fous  afez  des  chefuux  ici  ? 


THOMAS. 

Ceux  de  la  diligence. 

SAMUEL. 

Marchent<rils? 

THOMAS. 

Si  les  chevaux  marchent  ? 

SAM  V  EL. 

£h!  oui,  pête!... 

THOMAS. 

Oh!  par  exemple... 

SAMUEL* 

Marchent^ils  rite  ? 

ao»  LE  JUIF. 

THOMAS. 

Pardine!  desi  chevaux  de  dilig^ence...    Si 
ceux-là. . . 

C'était  pas  uae  raison  ;  il  fallait  en  pren* 
dre  un. 

THOldAS» 

tonrqnxA  faire? 

SAMUEL. 

Pour  monter  dessus,   et  partir  pour  Or^ 
iéans  à  franc  étrîer. 

THOMAS. 
SAM'tJfB. 

£t  revenir  de  m^êmey  tout  de  suite ,  tout 
de  suite. 

^  THOMAS. 

Pas  si  bête  que  jîa,  voye^z-vous...  et  la  fb-» 
rêt  à  traverser  en  pleine  nuit  tfrèc  ces  hon- 
nêtes gens  qui  y  sont  par  bandes  comme  deg 
corbeaux  ! 

s  A  M  0  E 1 9  lui  montrant  une  bonrse. 

Et  cçtte  pourse  A  gagner,  si  tous  fesez  fa 
commission  te  porter  cette  lettre  et  rappor- 
ter le  réponse  à  uaoi  afonl  neuf  heures  te~ 
main. 

THOMAS,  indécid. 

C/te  bourse  ?  elte  est  dodue ,  c*est  tentant, 
mais»  ma  foi... 


ACTE  t,  SCtKE  XII.  2c3 

OHJk4ULEë. 

Thomas 9  veux-tu  me  sauver  la  vie? 

TBOIIAS. 

Dîeu   de  Dieu!  j*iraî$  au  milieu  de  leuz 
bandes  pour  ça. 

LUCETTE. 

Mon  bon  ami ,  au  nom  du  ciel ,  partes 
sur-le-cfaamp» 

xaoii.A«. 

» 

Tiens  f  c*Xe  voyageuse  qui  s'intéresse  aussi 
à  ça  ?  diable  mi'emporte  si  |e  comprends  rien^ 
c'est  égal  9  vous  m*en. avez  dît  assec...  je  me 
risque...  me  v'ià  parti...  Pour  qui  c'te  lettre? 

Samuel. 

L*atresse  il  était  tessus^  prenez  aussi  la 
pourse. 

"Non  pas,  çardei -* la-moi  Jcrsqu'à  ceqtre  je 
revienne;  j'ai  c'te  damnée  de  forêt  -A  passer^ 
je  ne  veux  pas  m!expo«er  'à  perdre  mon  ar- 
geot  avant  de  Tavoir  gagné...  Ahl.çà  ,. en- 
core une  réflexion...  si  la  bourgeoise  o^e  de- 
mandait?... 

SAMtJË'L. 

Chc  prenais  toute  chose  stif^Ai;  ^'fmis  » 
eheune  soldat. . .  afez-vous  tans  cette  v iUocbe 


904  LE  JUIF. 

UD  pon  entroît  pour  cacher  fou5  jusqu'à  te— 
maia  ? 

Me  cacher! 

SAMUEL. 

li  le  fallait. 

THOMAS. 

J'ai  Totre  affaire 9  chez  ma  nourrice,  tout 
à  Tautre  bout  du  YÎllage.  On  peut  se  fier  à 
elle;  elle  ne  Toit  ni  n'entend,  c'est  la  femme 
la  plus  discrète  du  pajs...  justement  je  passe 
devant  ;  j*vas  vous  y  conduire  en  m'en  al- 
lant. 

SAM  u  El.. 

Alors  9  ce  était  pien,  partez. 

CHABLES. 

Mais  vous  ^  Monsieur,  qui  vous  intéres.^ez 
à  moi  9  sans  que  j'y  aie  aucun  titre,  qui  donc 
êtes-yous  ? 


SAXOBl.. 


*       •      I 


Che  étais  rien  que  un  paufre  ehuif  alle- 
mand..^. allez-TOUS-en. 


•    *  *# 


CBABtES,  douloureusement. 
Adieu  i  Lucette  I 


ACTE  I,  SCÈNE  XII.  2o5 

THOMAS. 
A»  :  Tourterelle ,  bien  fidèle,^ 

Confiance 

Et  pradence , 
Mais  je  n'pnis  calmer  ma  firayenr, 

Quand  d^avance 

V'ià  que  j^pense. 
Que  j'puis  tencontrer  queiiqa''  volew.j 

SAMUEL. 

Confiance, 
m    I  Espérance, 

H  y      Comptez  sur  un  destin  meilleur^ 
^  \  Ma  prutcnce , 

Che  le  pense , 
Fient  Cassnrer  iotre  bonheur. 

lUCSTTE  et  CHARLES. 

Confiance , 
Espérance , 
Comptons  sur  un  destin  meilleur^ 
Sa  prudence 
Va,  je  pense, 
y    Mettre  un  terme  à  notre  maUieuv. 

CHARLES. 

Faut-il ,  6  mon  amie  , 

Quitta  )0nr  oii  puisse  dire ,  héla»  l 

«  Une  fois  éins  sa  vie , 

»  Charlc  a  fui  ie  trépas!..» 

f.  Tande-villei.   3.  1^ 


M 

n 


H 


iTBOMAS, 
Confiance,  etc. 
SAMUEL. 
CoElfîance ,  etc. 
LUCETTE  ET  QBi^lihl^&, 
Confiance ,  etc. 

* 

SCÈNE  Klti, 

i 

tvCETTË,  le  suivant, 4^  j^px. 

Pavtbe  Charles  !  qui  m^eûit'  '4il  que  o^iis 
nous  reverrîdiM  ainsîP 

SAMirEL. 

Chut  !  les  v^jAif^pr»  ,iï»  die^i^iHkeDt  y  et 
che  répétais. eQCore  .à  iûj^s  j^u'il  fallait  fst» 
dire  devant  eux...  .  , 

LVGBTTK. 

Oh  !  non ,  ne  craigne2  rien  ,  t^éi^i  bios 
quand  j'étais  heurei»se. 


ACTE  I,  SCÈNE  XIV.  ao; 

SCÉÎSE  XIV. 

SAMUEL,  DELAUÎfE,  M.  PINCÉ,  BWL^ 
LA  NT,  HORTBWSË.  «*•  DESCÉDULES, 
LUCETT£>  SIMONNE. 

Eb  bien  !  non  ,  je  ne  sais  pas  trop  mèOMt» 
tent  du  souper  :  qué*  dilable  voulez-vous  ?  on 
Miitbîcn  qn'oa  nV^t  pa^ici  chez^BeauvilUers; 
à  la  guerre  connue  à  la  guerte^  ' 

BBILLAKT.  r 

Et  vous  avez  mts  le  précepte  en  exemple... 
monsieur  le  Procuréul-  srétis^  s'é^  fort  bien 
conduit  à  table. 

M.  PINCé. 


(i 


Oui,  en  voyage  on  a  beaucoup  plus  d'ap-* 
petit  ;  car  à  Paris  je  mange  infiniment  peu. 


r         ... 

BRI  LLANT. 


Sans  doute  ^  vous  devez  l'exemple  à  vos 

clercs. 

m"*^  DESCÉDULES* 

I  ♦  • 

4 

Pour  moi,  je  n'ai  rien  pris;  )a  situation 
de  mon  pauvre  A'zor  ni 'absorbe  à  un  point  !.. 
Madame* ,  uii«  cîifarhbi*e  ,  s'il  Vous  phit;  cette 
innocente  petite  béfee  ar  tant  besoia  de  repos, 

Veset-  bassiner  u»  Ht. 


»o8  LE  JUIF. 

DOETEHSE. 

Ahr  ouï ,  dt  grâce  une  chambre ,  je  suis  s£ 
prodigieysemeat  fatiguée... 

M*^  SIMOHlfE. 

Mon  Dieu!  tout  de  suite  y  Messieurs  et 
Mesdames;  c'est  que  j'attends  le  garçon  pour 
vous  y  conduire  y  et  je  ne  sais  où  il  s'est 
fourré* 

«AM  UBL. 

Le  garçon^  il  n'était  pas  ici ,  Montame  » 
c'est  moi  qui  k  afais  chargé  t'une  commis- 
sion. 

H"^  SIMOWWE. 

Quan4  r<e viendra- t-il? 

SAMUEL. 

Temain  matin. 

M****  SIMONWE. 

Et  il  y  est  allé  ?  Il  faut  que  tous  lui  ayez 
donné  une  bonne  récompense  ;  car  c'est  le 
plus  grand  poltron  que  je  connaisse;  et  d'or- 
dinaire à  l'heure  qu'il  est,  rien  ne  pourrait 
l'obliger  à  passer  le  seuil  de  la  porte. 

BBILIANT. 

De  quoi  a-t^il  donc  peur  oel  imbécile? 

M"**  81  MO 9 NE. 

De  quoi  ?  des  yoleurs  qui  désolent  ce  pays, 
et  qui  rôdent  sans  cesse  sur  cette  route. 


ACTE  I,  SCÈNE  XIV.  209 

TQOS. 

Comment»  des  voleurs! 

BAILLANT,  riant. 
Ah  !  ah!  âh!  la  bonne  plaisanterie  ! 

M™*  SI  MOU  NE.  . 

Oui  9  riex  si  vous  voulez;  mais  au  lieu  de 
TOUS  plaindre  de  votre  accident ^  félicitez- 
vous  plutôt  qu*il  vous  ait  dispense  de  traver- 
ser la  forêt  pendant  la  nuit. 

BQBTENSE. 

Âhl  n^on  Dieu ,  s'il  était  vrai  !..  exposées, 
sans  défense,  dans  cette  maison  écartée,  à  un 
quart  de  lieu  du  village  ! 

BaiLLàRT. 

Eh!  non;  contes  de  vieilles  femmes,  tra- 
ditions populaires  que  tout  cela. 

DE  LA6NE. 

Diable,  Monsieur,  comme  vous  êtes  brave! 
vous  n*avez  pas  peur  des  voleurs  ? 

BRILLANT. 

Pas  plus  que  de  M.  le  Procureur. 

•f.    PIIfCB. 

De  moi  !  de  moi  I  qu'est  -  ce   que  cela 
prouve? 

«      SAMUEL. 

Que  le  Monsir  U  afait  chamais  te  procès , 
foiU  tout. 

18. 


ita  LE  JUIF. 

Ah  î  çà,  mais  pcmWiiits^ifri'ôil^'ëà  â^rftaît 
ici ,  ça  serait  ioft' dèsaf^èabie. 

Ah!  Mon sieiir,  TOUS  me  faîtes  frémir, 

P'étrt'itiiaî,  cHê  lé^  c^âl^Aaîs  p55...  ch«  avais 
pâ^lWgtJht,  uî^pàtfyre  chûif!    •    .. 


'  ■  » 


BRILLANT. 

■  îi 


Eh!  tranqpilisèz-Yous,  Mesdames,  jp  ;suis 
yôt^  dhèVatfei^;  qùlls  viennent  césVièâîAds 
4c  te  féi^iH..;  je  réï  attends. 


j .  • 


r        ' 


I   L 


ACTE  I,  8C£NE  XV.  an 

.  5CÈNE  XY. 

I.SS  PE^cÉDENS,  ROSSIGNOL,  BRI^ 

SETOUT,    LB5    TOLBUBS. 

(Pendant  la  scène  précédente  ^  on  a  ivii  les'Vpkurs 
paraître  dtli/'Héife  lès  Vitrages,  examinant  furtive- 
ment  dans  rintérienr  de  Tauberge,  «^introduire 
doucement  et  s'emparer  des  issues.  L'un  d'euxa  été 
ouvrir  ctoiiM<ibéitt  la  feitôfté  et  d*antres  sont  iîntrés 
par  là.  x\u  dernier  mof  tpa  dit  Brillant,  Rossi* 
gnol ,  Brisetout  et  deux  autres  viennent  en  scène 
parmi  les  voyageurs^  d^Buties  MOI datis  h  sd\&,  aux 
denx  portes ,  sur  la  iienctre ,  en  dehors  de  la  maison 
et  à  travers  Hî»  ¥It%€S.  £h  lés  ipeitdkwvni  Lucette 
se  <;^cbe  derrière  ii)adame  Simonne  |  flertenifteet 
niadaiffe  Descédtûlcs  tombent  d'efl^oi  snr  Leurs  sié^ 
%es  :  Brisetout  est  entre  Delanne  et  Pincé  ;  Kossignol 
entre  Pinaé  et  Btfillaiit;  iia  adtie  tolélit  entre  Bc- 
niface  et  Defaune  ;  un  quatrième  entre  Hortense  et 
DMkfeiM  D(és(â}dù1è^f  Sanikiel  s'eaft  àtc^on^i  derrière 
une  iBMe ,  mt  lé  ofMikr  plan ,  à  là  droite  du  pa* 
bUc.) 

VOIiVDBS. 

AtA  :  Frii%tHeHt  de  la  Clociiette, 

Nous  voilà. 

Nous  voilà , 
àcèôurshi  poàr  Vous  [Aaîre , 

N<H»  voiiâ , 

NeU&  idàt , 
Ptrétl  à  voÉë  satisfaire. 


\ 


aia  LE  JUIF. 

Qu'atteodez-vous  de  notre  ministère 
Pour  vous  montrer  tout  notre  savoif-faîre  « 
Nous  voilà , 
j^ous  voila. 

»  • 

LES    VOTaOEUBS. 

Ah  !  Ciel  !  nous  sommes  perdus. 

r 

Ab  î  Uaple  !  la  factieuse  afeature  t 

9QRT^irsB. 

J«  vais  me  trouver  mal. 

BMSETOOT,  damnent. 

Attendes;  quand  nous  aurons  réglé  nos 
comptes 

AOSSi6i!fO&9  dlun ton  poli. 

Pourquoi  dootc  ?...  si  fait  ;  oes  dames  peu- 
vent s'évanouir:  est-ce  que  cela  oous  eiapêche 
de  remplir  nos  fonctions  ? 

M""*  siMOTTVE,  étonnée. 

£h  !  mou  Dieu ,  ce  sout  ces  hommes  de 
tantôt. 

ROSSIGNOL. 

Ah  çà,  procédons...  (  U  s'a4jlresse  à  mon- 
sieur Pincé  et  Briselout  à  Deinanê.  )  11  n'est 
pas  nécessaire  ,  je  pense  ^  de  vous  répéter  le  # 
compliment  orcUuairet...  vous  $arex....   la/ 


ACTE  I,   SCÈNE  XV.  ai3 

bourse  ou  ..  c'est  une  formule  consacrée  par 
Tusage. 

M.   PINCÉ  5   treniblaut. 
AIR  :  Pu  vaudeyiUe  deVAvat^  et  son  ÀnU, 


.1         i 


ToiU  njoa  saç  de  procédure^. 

ROSSIGNOL. 

MoDsiei»  scrsdt-il  procaieur  ? 

DELAITNB  ,  tr«iniktMU 

Mes  échantillons,  me^  mesurei. 

BRISETOUT. 

Vous  éles  donc?... 

DELAUiri^.- .  -.rv    ■ 
Je  suis  tipUcur.. 

BRISETOUT  et  ROSSIGNOL ,  Jaôr  /«nnt  ub  grand  tdut. 
Eh  qaoi  !  tailleur  et  procureur  ! 

liOSSIGNOt    ' 

Grâce  à  nos  statuts  très-sérétes  \ 
De  nous  ne.cr^gœz  lâen  vàf.. 
Nous  savons  |rop  bien ,  Tfi.cn  merci , 
Ce  qu'on  se  doit  entre  confrères. 
(Pincé  et  Dektuie  gagnent  là  àf\»U  «le  la  tcène.  ) 

BRISETOUT9  àHôrfense. 
A  notre  tour  ^  Li  belle. 

HOBTBNSB. 

X   Insolent  ! 


rtf  iSlit  O^vVy'  lui  piijnànt  sbusàt. 

Pardi  !  demandez-nous  de  ia  galanterie. 

E  0  s  s^i  G  N  6 1  9  à  Briâsetout. 

,  CVitvvreri  ,  oa  ♦»  tô  a^  mattvaft' Wh  ,  c'est 
donner  une  opinion  défavorable  de  soi.  («S'a* 
vançant  vers  madâihe  D^Mcfàîes^cTun  (oh  ga- 
lant. )  Tiens,  re{^dfd(?-itt'(yl...  Voulez-vous 
bien  9  belle  dalné  !:  i  . 

M'"^>*«9CBiy'lTC.E9.; 

Ah  !  Monsieur  ,-}é'n*al'  rittn  ,  absolument 
rien, 

BRiSETODT^  durei^oH «rAîUslit.      . 

A  VOUS,  monsieur  k/ fanfaron  ,  videz  vos 
poches.  ; ,  •      ;.  . 

9  &  I  it  jL.4,;(fr  9u  Ijffaal  d«-.  sii  i  pociift  «»t  koitrje  et  wà 

Voilà  ma  bourse. 

(.  Voubiit  resserrai:  Tageniila;  )\ 
BRISE TOiKT^  liil'reieadi]it>le  bf«#V  ' 
Qu'est-ce  cfuW  c'est  que  ça  i    '' 


'  » 


(  t 


KiK'iDe  Tur^nne., 

Cest  mon  albnin ,  Hiscri^  dëpokitave  < 
Des  vers  heureux  c^iie  me  dicte  Pamour. 

AOSSIGNOL  ,  pesHat  la  bourbe ,. 

ta  bourse  me  parait  légère. 


ACTE  ï,  SCÈ5E  XV.  arô 

•^BAISBT&W.,  .tentât  tIagmitU. 

QsAraiiHieivofis. prier  mainteaaDt  de.àoue 
prêter  votre  montre  ? 

Jie.^ai'ai  «:îeiii^.à<T)0UBirefu^t.u([/^^/a  «foM^.  ) 
J'y  tenais  jpourta.u.t,bç>ï,uco^iy). 

Achetant  Vain^-    -         à  * 

De  la  garder,  tant  elle  m^élait  cbèrç^,  ^      1  /,  = 
J'avais  formé  la  réspl^jlKm .  ^ 

Il  fallait  celte  occasion , 

^ôor'iifèîigager  à' m'en  défaire. 


» 


Jusqu^à  présent  la  recellc  va  mal  ;  ^hiCj 
a  pas  là  fl^^pj  m^^k  \r^mh(kW§^T  rfies  frais 
de  rexpédition,..  Tout  le  Jiîonde  j  a-l-il 
passé.  •      •  ■  •" 

LU  CETTE  ^  'isas  ¥  madame  Simonne. 
Oh  !  ma  boune  amîe  ,^[6  tfemWù. 
ROSSIGNOL,  se  baissant ,:  anercoit  Samacl. 

Et  ce  petit  Monsj|lttr^q^^:<fte,^q»iA»ilà  der- 
rière la  table.  (f^îP#f4jf«Û.)l(l>ite6  dftAC  Tami 
est-ce  que  comme  fiés  Jjf  oitskinrâ  (u/  xtésigne 
Delaune  et  M,  PiWfl^î^îtQii'S'iaTOî.WBîi brevet 
d'exception  ?         , ..,::  vu  -,  \  ..  ,. .  <f.4  ) 


aid  LE  JUIF. 

SAM VE  L  )  bas  tiux  voleurs. 

Pourquoi  pas  ?  Ya ,  mes  braves  gens;. .  Je 
cachais  pas  moi  pour  la  peur...  li  être  pour- 
faire  signe  à  fous ,  et  fouS  pas  comprendre 
moi^  depuis  une  heure  que  je  démentibulaîs 
mon  tête. 

BftiSBTOUTi  briis^eaiettC. 
Ëh  bien  ^.poiii^uoi  nous' fésais^d'  slgne^?' 

QAMYiEI;  mystérieusement.         '    -  *' 
Plus  bas  donc. 

BOSSIGNOL.  , 

11  a  raison. 

Li  être  pour  dire  à  fous  que  tous  amusez- 
vous  à  la  moutarde^  et  que  moi  li  être  capable 
pour  enseig^ier  vous  une  chose  qui  fera  votre 
ibrtune.  ■    - 

BHISETOOT  ET    BOSSIGNCU 

Notre  fortune  !  que  faut-il  faire  > 

SAMCBL.     . 

àiB  :  De  Ift  ronde  du  Solitaire. 

Commencez  par  leur  readre 
Tous  ces  pekhs  larcins  j 
•  '^       Faut-it  se  faire  prêfrdre 
<    Pour  des  vols  si  mcsquôis  ? 
Onze  billets  de  banque         ' 
De  mille  francs ,  bien  nets 
(  Pas  un  denier  n'y  manque  )^ 


ÀCTfi  I,  SCÈNE  XV.  ai7 

Vous  consoleront  ;  n»ab.... 
Chut  !  je  ne  puis  rien ,  sans  que 
Un  petit  pot  de  rin       * 
Soit  le  prix  du  butui. 

ROSSIGNOL  et  BRISETOUT. 

Un  petit  pot  de  vin  ? 

SAMUEL. 

Ta ,  pour  prix  du  butin. 

BISETOUT. 

(  Pari^  )  Eh  quel  serait  ce  pot  de  tîq  ? 

SAMUEL. 

Ile  onzième   de  la  somme ,  li  être  pas 
trop. 

ftOSsiGiroi. 
Mille  francs. 

SAUtÉt. 

Ya. 

B  lis  1^7  ou  T. 

D'ayanoe  ? 

SA  M  U  £  L* 

Non,  après.  . .      " 

BBISETOUT. 

'  •  ■  €  \  # 

4     «     ^  I  t  . 

A  la  bonne  heure.  (  A  RossignoL  )  Qu'en 
penses-tu  ? 

BBiiLAifT,  pendant  qu'ils  se  coneeistent.  : 
De  quoi  peut-U  leur.par{^^si  long-tems  P 

Ks  ont  l'air  de  s^entendm. .   j  i 

F.  VattdcYiUe*.   3.  19 


9i8  LE  luir. 

Ma  foi,  je  né  Tbîs^jpas  ce  que  notis  ns— 
quons  ;  d'un  côté  ,  ce  procédé  les  empêchera 
délicatement  de  nous  faire  poursuivre. 

BRISEXQVT. 

Et  de  l'autre  ,  je  .ne  crois  pas  le  marché 
très-mauvais. 

SAM  U  Et. 

£h  bien  î        ..  •    : 

R0f?s«r6>iio^  :£i^  iiBTViiroto^^  lui  ^titMiilbiil^ 

la  main. 

Eh  bien  !  touchez  là.        . 

M.    PINCÉ.  f 

Ils  se  prennenl  1â  Mdfih. . 

Quelle  horreur  ! 

Mesdames  et  Messieurs  ,  à  la  demande' de 
ce  brave  homme  ('  fhontrdnt  Samuel,]  n^us 
TOUS  prions  de  reprendre  ces  6l)jet9/dont  la 
privation  vous  sérail  p\ùs  pénible  que  leur 
pasftsâis(oà  'Élè  mà^  îeÀh(>»Vëtitâgë<f è«. 

T01J  s  ^  avec  la  dennère  surpnse. 

Et  de  nous  i^arddbtiëi'Tïhstaiàt  de  frayeur 
que  nous  vous  atoh»  oatfsé» 


ACTE  î,  SCÈWE  XV.  ai^ 

toua»  4emânie. 

lEiLLAVTj  à  qui  on  donne  une  montre  d'ai,gen( 
Permettez  ,  ma  montre  était  d'or. 

itbssiGNOL. 
C'est  juste. 

(  il  lui  i«a4  sa  iBoutce.  )     x 

ï  0  V  &• 
Méprise  da  tmir. 
Be  leur  fcipomieriie 
Bougiraient-ils  tout  l)9Ji  ?     .  • 
Je  n^ai  vu  de  paa  yje  . 
Voleurs  plus.  4él^c^« 

De  gens  loysw^  et  (^Ç6. 

BOSSlGNpL  9  de  m^nw. 

Dis-nous  donc  qui  recèle 
Les  onze  mille  francs. 

SAMUEL. 

Chutl  c^est  la  demoiselle 

Qui ,  là-rlMS ,  tout  Ikrb^Sf 

N^ose  pasf&ftre «a ^.  i 

RI9ET0UT. 

Cetenfant-U? 

SA4M0E^.  ' 

PJusbas. 

mossicffOL. 
Ceb  ne  se  peut  pas.  ' 


330  LE  JUIF, 

LDGBVTE; 

(  Parié,  )  Ils  m'oDt  regardée  ^  je  suis  per- 
due... 

EOSSIGH0{4.     . 

Au  reste  9  il  ne  coûte  rleo  d'y  voir. 

SAMUEL. 

Elle  les  a&ît  ;  moi  che  étais  sûr... 

ROSSIGirO  L. 

Camarades 9  quepersonne  ne  sorte... 
£t  malheur  à  toi 9  si... 

SAMUEL. 
Suite  de  fair 
Chut  !  ia  somme  est  sur  èRe. 

BRISETOUT  ,  couranl  vers  Lacieit6.  • 
Allons  tôt ,  toii  argent  ! 
Obéis  sur^le-diauip. 

ROSSIGNOL. 

Sans  façon ,  belle  enfant , 
.  Donnez-nous  yoJ^e  argent. 

S    I  LUC£TT£. 

g  /  Je  me  mcu|rs ,  quel  moment!  :  . . 

g  \  Plus  d^époux  ,  plus  d'awâul  I 

Juste  Ciel  !  le  brigand 
A  trahi  cette  enfant. 

SAMUEL ,  il  part. 

Ils  ^wennenii  son  sirgeul  ' 

C'est  charmant  !  e^cst  charmant  1 


ACTE  I,  SCÈNE  XY,  aai 

ItSICIStTB)  s^éçbappant  de  leurs  mains. 

Arrêtez;  ne  me,  touchez  pas...  vous' les 
voulez...  les  Yoîlà...  prenez-les.  {Avec  dés- 
espoir. )  Prenez  tout  mon  bonheur,  toutes 
mes  espérances  !  prenez  ma  vie ,  elle  était 
attachée  k  cette  somme.  Oh!. Charles^  il 
n^est  donc  plus  d'espoir. 

(  Elle  tombe  accablée  sur  une  chaise.  ) 
viiiSETOUT,  prenant  les  billets. 

C'est  bon,  kl  belle,  pas  tant  de  yérémiades.. . 
y  sont'-ils  bien  ?  pasde  fript^nnerie  au  moins. .. 
(7/  U$  compte,  )  Oui  ^  ma  foi...  camarade^  , 
Texcellente  aubaine.  • 

SAMDBI,. 

Mes  prafes  Morisîrs ,' fous  safez  bien,  q^ue 
fous  m'afez  promis  ?... 

a^ssiAifûL.   ^ 

Cal ,  la  probité  avant  tout,  notre  parole 
est  sûre  ;  voilà  tes  mille  francs. 

SAMVEL,   à  partv 
Autant  de  pris  sur  Tennemi. 

B  R 1  s  E  T  0  II T  j'  bas'  à  Kossïgnol ,  voyant  ks  '  signes 
que  ses  camarades  lui  font  de  loin. 

On  a  fait  le^^ignal  de  retraite. 

ROSSlGnOL. 

Allons ,  ces  Messieurs  et  ces  Dames  ont 
besoin  de  repos.  C'est  à  regret  que  nous  vous 

19. 


132      LE  JftfIF.  ACTE  r,  SCÈ3ÎE  XV. 

quiitjdBfi  i  eaiîbai»liÎ84'a Voir  fait  TOtrctënnaîs- 
sanç^. 

Naud  pareiU4»miBnt* 

(Le«  voleur»  donne  ^tikc  poigfné'  fh  maÎB  aHX  voyageurs 
qui  la  ittçaîycnt  en  4reinbibat.  ;  * 

LES    TOTAGEVBS. 

AIR  \Ftvgment  d'un  chœur  de  Lodoiska, 

g   1     Ne  pas  TOUS  trouver  9g|  mlawr^ 

S  I    Ai»îÇtf»teoimçBuit,>pj|Ypya|C9 
^   ■     Puisse  encor  à  notre  fctpàr,' 

Le  sort ,  nous  garder  Tavantage 

De  Qou:»  reDéoàtrer^u^HF^c  jour. 

les  voyageurs  rw»tf«»<  df^*  J'^»a>ff|ge..  .^Brè»  ^ffjf^  ffs^s 
chacun  un  des  chandeliers  qui  sont  »ur  \e%  tables  «  et  les 
voleurs  sortent  par  la  porte  du'  fond  -,  oa  les  voit  passer 
derrière  lea  vitra^at.  Sainud  vai^o«r  anivn  Itt  «Tiiyageiir». 
(lui  lui  ^ëqiçiçnept  leur  nië|»rM  .  il  toft  par  le  ctU  oppoa^. 
Le  thëitce  ff^f  a^#cfir.) 


fin    DP   ^Jl|;^l]$R    ACTI. 


^■^«^^^v^'*^^/*^*^-^  \'%,^ 


ACTE  ,§SCOND. 

Même  âécorMion.  Le  fojir  vient  pendant  Fentr'acte. 


t  / 


/ 

DELALIMB,  *MtLAiNTr,  M.  PINCÉ. 

Âh  !  Messieurs  ,'ia  brulslle ^chose  qu'une  in- 
êamsû^f^  i^ia'fii  pastéfirini  iiii>86àl  instant  ; 
mais  le.nuM^Ctt  PiOn^anrart^nai»  tous  lesbosmiee 
dans  une  même  pièce  ;  pas  un  appartement 
séparé '^>è«r  «H)i  ;  en  vérité ,  ces  g^ens-là  n'ont  ^ 
pas  plus  d'égarés  pour  quelqu'un...  Qjù  est 
ma  rue  du  Helder  !  mon  bôtél  du  Dauphin  ! 

Ça  oe  m'a  pa»  eîBpêdlé  ée  dormir  tout 
cVon  somme  :  '(Jue  ne  fesî«ï-vou8  de  même  ? 
.le  ne  -vois  pas  ce  qui  a  pu  trouMer  Totrc 
lommeil. 

BRICLAlfT. 

Parbleu!  iMonsievr  yC'est  le  Tôtr  e  ;  vos 
ronflemens  ébranlaient  les  murailles  de  cette 
bicoque  ;  et  joignes  à  cela  'monsieur  le  Pro- 
cureur q/ài  n'a^MSsi  de  parl«;r  de  céfuré,  sani- 


zrzj 


324  LE  JUIF. 

•  * 

mation  .  jugemeos  exécutoires  5  prises  de 

corps.  '  . 

•       "M.  PI k ce, 

C'est  possible;  }e  suis  un  pteu  ^mnacnbule. 

BRILLANT. 

Alors  ,  je  tous  conseille  de  oe  pas  dormir 
en  compagoie^  vous  t cabine^  tous  les  secrets 
de  la  Bazoche.  ' 

M,  PIN  ci  9 'avec  humeur. 

Parbleu!  quand  on  rêye...»  vous  rêvici 
aussi  cooime  les  autres  >  probablement. 

..•,.....•  Bai.i.xAir.T. 

Mal  ?  f  ètais.bieB  éveillé  9  et  f  ai  pensé  sans 
pesse  àlnotreaveniture.dliîer.afti.son',  • 

De  glpîre  moi^  cœur  trop  ayîje 

Prévoyait  d^adtres  ennemis , 

Et  par  une  honie  homiolde 

Nous  etinns  encore  astaîllis  f 

Mais  ce  bras ,  combattant  leu»  rage-,  ■    •  , 

Les  ab<ittaii  tQus,  à  mes  pieds  > 

Par  des  prodiges  de  courage...  *       ( 

.M.PJNCC. 

Vous  vpye4  bîeii  qup  .vou$  rêvk^,  ' 

.  BAILLANT,,^ 

Pas  mal ,  pas  ihaL...  le  trait  y  est....  |'a« 


ACTE  II,  SCENE  IL  QaS 

voue  9  par  .exemple  9  que  j'ai  admiré  ia  tran- 
quillité de  noire  Juif^  quoique  Thôtesse  fu- 
rieuse contre  lui  »  lui  ait  à  peine  accordé  un 
Ut  de  sangle  dans  le  coin  de  la  chambre  ;  il 
s'est  endormi  avec  autant  de  sérénité  que  s*ii 
eût  fait  hier  ia  meilleure  action  du  monde. 

DE  LA  UNE. 

Écoutez  donc    il  nqu*  a  feit  rendre  tout 
ce  qu'on  nous  avait  pris. 

SCÈNE  n. 

lEs  paicÉDENs,  HORTENSE. 


B  R I L  L  A  if  T     allant  au-devant  d^Horfente. 

Voici  celle  que  je  pourrais  surtout  accuser 
de  mon  insomnie. 

M^   F 1 K  c  é  9  bas  à  Bnllant. 

Je  vous  laisse  ensemble  ;  $u2s-je  aimable  ? 
lieînl 

BRILLANT. 

Charmant.  , 

PRI^AUNlt. 

Et  moi  •  je  vais  yoi^  si  la  diligence  se  vë^ 
pare.  (  Bas  à  Brillant.  )  Les  tête-à^têtcs  ^  en 
▼oyage,   peuvent,,  faire,  faire  beaucoup  de  ' 
chemin. 

BRILLANT. 

Vous  vous  en  souvenez? 


3^6  LRJUir. 

Eii  ?  fh!  { Hiepre^ant  te  ton  grave.)  Ma- 
dame  9  fm  bien  i'iioiinetir... 

SCÈNE  III. 

BRILLANT,  HORTENSE. 

BRILLAHT. 

Eh  bien  !  chArinaate  fiortense^  un  peu  de 
repos  vous  a-t-i!  remise  de  yotre  ag;itatioti  ? 

BOiiTEnsE,  languissammeot. 

D*honneur  ^  je  le  disais  ;  dans  une  misé> 
rnble  auberge ,  tout  manque  ;  point  de  pcr-* 
siiJdnes,  de  «ûublos  rideaux...'  d'ilUeups  le 
jour  vient  de  trop  bonne  beure  à  la  oam- 
pagne. 

BORTKNSE. 

C'est  vrai  9  on  Ta  dès  qu'il  paraît;  et  puis 
par  «m  ton?  Il^rrlble  »  que  je  reproc^rai  à 
riiôtesse  9  on  m^a  fait  partager  la  ehnmbrè 
de  c^te  madaiiie  Deseèdales,  qui  Q'interroni* 
pait  riiistoire  de  ses  procès  que  pour  déplorer 
rindîsposilion  de  son  carlin  ;  aussi  je  n'ose 
pa*>  me  regarder  ce  matjn  :  le  teiqt  pâle  ^  les 


ACTE  II,  SCÈÎVE  III.  227 

traits  gonflés ,  les  yeux  daus  un  état  !  est-ce 
que  je  ne  fais  pas  peur  ? 

BBILLA9T. 

Toujours  belle  à  ravir. 

ilOlTEjrSE. 

Flatteur  !  non  9  vrai ,  tout  ceei  ai'«  fait  un 
mal...  aussi  y  je  Youdrais  êtr«  bm  Ma  :  est- 
ce  que  le  conducteur  ne  nous  fera  pas  bientôt 
partir  ? 

BI11LI.ANT. 

Cela  m'est  tout-à^>fyit  ii>di<ft)>étft  ;  pour 
tien  au  monde  je  ne  TO^idraid  ùotttihuer  ce 
malencontreux  y(ffVgé  :  f «Ikiis  voit  un  yieit 
oncle  enfoui  dans  TOrïi&tfliftiè ,  fe  lui  dois 
quelques  é§;ards  9  f'en  hêfftife  ;  itiïiis,  tdut  bien 
considéré,  il  recevra  jiiti^'hi  poste  léf  témoin 
gnages  de  ma  tendresse  ;  él  et  tïtadiû  même 
je  retourne  à  Pari». 

Ht)ii'l*-Ifrsk. 

O  ciel  t  TOUS  nous  quittée  ?  maàs  e*est  du 
dernier  mal. 

£h  bien  !  non  ,  belle  éanie  f  ««v«ib s  alar- 
mez pas  ;  î*ttai  «^sis't^r  4  ¥0S   «lèbtitif  ;  '  je 
les  protégerai ,  je  me  charge  èCfiS'éèuron nés, 
TOUS  verrez  comme  fb  $èf$  hvèâi  ëmfîs  j  mais  à 
minuit  préd^...  ^  I4.1ëi*e^âé:)  >ït>h  ,  k  èi^t 
,    Leuies  du  mattq ,  je  reprenfd^  'là  ^Oute  de  la 
l    capitale;  car  ce  n^estqtee  là  (pe  petit  vivre 
I   un  homme  comme  moi. 


-. 


32a  LE  JUIF. 

AIA  :  Séjour  d*amaur, 

Paris  y 

Des  ris 
Douce  retraite , 
Charme  mes  foisirs^ 
Piqac  mes  désirs 
Par  HQ  essaim  de  plaisirs  y 

Qm  tous  y 

Jaloux 
De  ma  conquête. 
Semblent  s'inviter. 
Pour  se  disputer        >  . 

Le  pouvoir  de  m'enchanlof .    . 
À  chaque  aurore      ;    , 
Qui  vient  d'éclore  ^  . 
.  Plus  fraîche  encore  9.    • 
.  Lisette  en  secret 
Vient  et  m'apporte       -»  .  .  .         i. 
Lettre  ou...  n'import|C  y  , 
Et  puis  renwor^  ,  ■ 

Un  fraiser  cÉscretV 

Blonchevll;     -«^  ' 
.  Superbe, animai,    '.. 
A  mon  le^er  m^s^tcnd ,  n'emperle  et  iro)e , 
.    ,  ,      nfend  Faiff,  '     ■         ',  .  . 

.  Plus  promt  que.  réclair, 
Cest  le  rivad ,  c'est  le  vauoqueur  d'Éole.    , 
Au  retour, 
Beauté  faite  au  tour,. 
A  son  tour, 


ACTE  n,  SCÈHEIII.  as^ 

Gaiment  npe  propose 

UnjoU 
Déjeuner ,  qu''arrose 

Le  Chablj, 
Le  Beaune  oa  VAj'  : 

Après 
'  Les  frais 
Qae  j'ai  dû  faire  , 
Je  pars  en  chantant  f 
Un  concert  m'attend , 
Je  n'y  reste  qu'un  instant. 

J'entre  au 

Caveau  ^ 
Où  sur  la  guerre 
Buvant  du  sGubac,  . 

Prenant  du  tabac  ^ 
Je  parle  ab  hoc  et  ah  hoc. 
J'entends  qu'on  vante  .    i  .'. 

Les  mets  qu'invente  .  '.    * 

La  main  savante  .  •'  ' 

D'un  maitre-d^otel  f u  a.'.  \  uL 

Cornus  m'invite , 

Bacchus  m'excite  y.  *    i:> .. 

£t  jcrceurs  vije  ■     .      .     .  .  / 

Encenser  leur  auteî.'  '    '  ' 

L^opéra 
Comique  ou  Buffa 
A  du  nouveau ,  j'y  suis  indispensable, 

Jusqu*au  bout 
Je  critique  tout  y 

r.  "Vaudeville».   3.  2© 


83o  LE  lUir. 

Car  applatulîr  est  d'un  fou  ^éleailabll*. 

Pour  un  thé 
Le  soir  inyité , 

L'écarté , 
Qu^UQ  perdant  dédOAe , 

Me  ^duit', 
Et  de  perte  en  perte 

Me  conduit 
Jusques  à  minait. 

Alors 
Je  sors , 

Car  cVst  Fosage , 

L'instant  obligé 

Où  riiomme  rangé 
De  son  monde  prend  4Migéé 
Et  dé- 
cidé 

A  rester  sage , 

Je  regagne  enfin 

L^hôtei  du  Dauphin , 
Au  plus  tard...  le  leddèmAfai. 

HOBT&irSV. 

Voilà  bieD  rexistence  la  plus  déllëieuse. 


ACTE  II,  SCÈNE  V.  a3i 

SCÈNE  IV. 

LES  micip^uss  M°»  DESCÉDt^fcES. 

M"^  DESCBDULBS^  - 

AhI  rheareuse  aouveilei  Madame!  l'heu- 
reuse nouyellel 

BtlLLAUT. 

Les  voleurs  scmîent^ls  j^ris? 

M™*  DES  ce  DU  LE  s. 

Non  ;  mais  mon  pauvre  Azor  va  beanconp 
mieux...  Je^ours  l^annoneer  à  tout  le  monde, 
et  je  viendrai ,  j'ospère,  bientôt  vous  appren- 
dre sa  parfaite  guérîson...  La  pauvre  bête! 

(Elle  «ort  prëcipitaminent.) 

BEILLANT  et  HOBTBNSB.  . 

La  vieille  folle  ! 

SCÈNE  V, 

DELAUNB,HORTENSE,Ll!CeT'tE, 
M«*  SIMONNE,  BRILLANT. 

a  eav  BNf  a ,  ««rw^  \  L«çQHe, 

BoMïovBy  chère  petite,  si  vo«is  sav^ot  covn- 
bien  votre  malheur  nous  désespère  I  nous  \\w 
parlons  pus  d'autre  chose.  Peiqaiides  à  IVIa- 
ûamo. 


a33  LE  JUIF. 

m"*  s  I  m  o  n  w  e  j  avec  Immcar . 

Vraiment,  vous  pouvez  bien  y  prendre 
pari;  elle  a  payé  pour  tout  le  inonde  »  €?t 
grâce  à  votre  maudît  juif,  que  Dieu  puisse 
confondre,  il  ne  vaus  en  a  pas  coûté  une 
obole, 

BORTEirSE. 

Ne  parlez  donc  pas  de  cet  bomme  là  ;  sa 
conduite  est  odieuse. 

Horrible.   .        ; 

m"**'  SIMONNE. 

Épouvantable;  grâce  à  lui,voiU  le  ma- 
riage manqué  ,  et  mon  pauvre  .Cbarleè  soldat 
pom'  Jong-tenas  encore...  ob!  ce  damné  d'Is* 
raélite,  si  |c  le  tenais... 

SCÈNE  VJ. 

LES    PBÈÇÉDENSj    S^MIJEL. 

S  AM 17E  L ,  entrant  par  le  fond, 
'  Fous  teoianlez  moi ,  Montarrtfe? 

m""'  SIMONNE. 

C'est  VOU5,  vtewx  fripoti  PVenes-vous  en- 
core.insulter  kU  victime  d^  voUe  avarioe? 

*  Ce  n'était  pas  mon  faute;  sî  le  Temoiselie 


ACTE  II,  SCÈNE  VI.  a33 

il  afait  pas  papille  tans  le  foîture,  che  aurais 
pas  su  qu'il  afait  onze  mille  francs. 

HOKtEirSB. 

Parce  que  yous  le  saviez  «  était-ce  une  rai- 
son pour  la  dénoncer  aux  brigands? 

M"**"  SI  MO  UNE. 

Qui  sait  s'il  n'était  pas  d'intelligence  aveo 
eux  ?  vous  arez  vu  hier... 

I.VGETTE. 

Ne  Tinjuriez  pas...  quoiqu'il  m'ait  rendue 
bien  malheureuse ,.  quand  il  n'aurait  rien  dit» 
les  voleurs  m'auraient-ils  plus  épargnée  que 
les  autres?  ils  auraient  bien  su  découvrir... 

■'SÂMUEt. 

Excellent  cœur!  il  prenait  encore  mon  té- 
fense. 

M"*  S 1  MO N N E ,  à  Lacette. 
£hl  non,  on  aurait  pu  leur  cacher... 

BEIILANT. 

Si  fait,  ce  que  dit  Mademoiselle  est  très- 
Juste;  elle  aurait  tout  perdu,  et  nous  pod- 
vions  perdre  quelque  chose;  ainsi i,  tout  bien 
considéré,  Monsieur  a  agi  en  homme  de  sens 
et  d'esprit. 

.SAiiîOÊL,  à  mac^ainc  Simonne. 

Che  approufe  les  inchures...  [j^ Brillant») 
Et  che  mt'^prise  le  éloche. 

•20» 


»34  LEIUfF, 

A  m  :  Du  Parnasse  des  î)atnes» 

Que  me  fesait  Ce  4\u'o^  eu  ftnse  y 
Mon  cœur  il  était  bteo  content , 
Pour  ce  qu'en  cette  circonstance 
Ch^ai  fait  ponr  )a  dbolie  enfant  ; 
Ch^ai  |>our  fous  tiae^milie'  tettdre , 
£t  ce  cbour  serm  pas  fini 
'Sans  que  chc  puisse  enoor  yoius  X€ndtt 
Un  nouveau  service  d^ami. 

Mort  de  ma  fie  !  ne  tous  en  avisez  pas  !. .  • 

lU  CETTE.  , 

Ah!  Monsieur 9  jsi  |e  tous  entends  bien  , 
Tons  pouvez  encore  mériter  ma  reconnais- 
sance. 

Qu'est-ce  que  cela  Tent  dire?  Qu'as-ty  à 
démêler  aTec  ce  tcpro«Té? 

Madame»  ne  Tirritez  pas. 

M?*  siMOirir« 

JOï  !  teot  (oif  qfi'tl  ast^  ÙU-U  le  imi  «i^ 
rant,  je  répéterai  toujoars  que  c'est  untnaf^ 
honnête  homme...  Allons I  la  force  armée»  \ 
présent  f... 


ACTE  U,  SCtfeîTE  VH.  a35 

SCÈNE  vn. 

LES  VAicÉDBirs,  CN  SERGENT^ 

.  ,.    •         »• 
LESEmCEKT,  enti^  mtdbM  Simoime et  Samuel. 


MBçuiÉxmê^iBhmà4e  l'éTéMmenloiii  tous 
est  arrivé  hier  «'«st  proinpiçifte^^t  répandu; 
instruit  d«  ce  fait ,  à  Fa  pointe  du  jour^  je  luis 
accoora  arec  'le  poste  que  je  Commande  à 
^nx  ftcocs  d'îd  ^  pciur  ftiïîlîter  vos  recher- 
ches et  punir  les  coupables.  Au  moment  eé 
je  TOUS  p.i#iis;Vi9£  %f^pà^  fêHie4t  mes  hom- 
mes parcourent  les..^pxiroB3^  «^  le^  malfei- 
leurs  ne  pourront  leur  échapper.  (  Désignant 
Lacelte,  )  N'cist-  ce  pus  ¥^  la  fêone  personne 

qui  ^  éié  âivhriifHMvIf  ur  *hQtim^  \  ' 

Oui  9  monsieur  le  Sergent,  c^est  cett^  pau^ 
vre  LpeèiMe  qui,  «ans  cek,  «orait  épouse 
mwa  Al^p  Ah  l  \e  va*idr^î.8  Wqh  /lu'uriîfîfuces 
coquiA^fût  Afcrèlé.,,  feiitnç\i:e  b|c*n  q^'iKi  4^ 
sas  aviîMic  éf^k^Wçimttiç  4^Ue^  çAtc^». . 

tE  SERGEnr,  «'en  aperecvant. 
Que  Toulez-v«>ii8  diveP 

«''**, s  moîHiE. 
Ces  gens-là  ont  des  amis  partout^  et  quel- 


3i36  XE  imf. 

quefoîs  mêlés  .parmi  les  voyageurs  ^   ne  se 
pourrûît-il  pa8<{u*uu  de  leurs  confrères  !.. 

•  LE  8£li6BIfT  .vivement.     . 

Exp1iquez--T0us  joueux^  auriei-vous  quel-» 
que  indice? 

.    Madame  Simonne  >  pouvez^vous?... 

H*^""  si  H  0  N  ir  B  9  éclatant. 
'■'■   .  ■ 
Tout  ce  que  tu  voudras...  tu  ae  n^'empê- 

cheras  ,pa3  4ç  dife  que  ton  J^if  ^  fait  ui^tour 

pendable. ...  .     •  , 

!■  «BRCiirT^'tfés^vîfedièRl. 

Maïs  ce  Jtilfoù  dst-îl?       ' 

/SiA)|i^Zï,,  froidement. 

Cctait  moi>  tlion^ir  le  Scfpdieiït^;  mois  re^ 
cartez  mes  papiers,  che  fous  prie,  che  étais 

pas  capablçpour... 

•  ■       '       • 

LV  SBBjGEfl'T,  oxamtoant  ks 'pa|»8rs. 

Non ,  sans  douie ,  ces  papiers  prouvent  que 
Monsieur  exerce  une  profession  honorable  et 
jouit  d\]hei»onne  réputation;  je  vous  invite  « 
madame  Simonne,  à  ne  pas  accuser  si  légè- 
rement. 

C'est  ça ,  vous  verrea  que  c'est  un  honnête 

homme. 


ACTE  II,  SCÈNE  VII.  ^S; 

LÉ-  8EE6E1VT. 

Le  conducteur  de  la  diligence  étaît-il  pré- 
seot? 

M"^   SIMOIÎNE. 

Non  ^  il  a  passé  la  nuit  à  réparer  sa  voiture* 

LE  SERGEIfT.     . 

Où  sont  les  autres  voyageurs  ? 

M**   SIMOiriîB. 

I 

Ils  sont  réunis  duns  la  salle  à  manger. 
Veuillez  tous  les  rcijoindre  ar€C  moi. 

TOUS. 

Tous?,,. 

t£  SERGENT. 

Oui ,  il  faut  que  je  recueille  la  déposition 
de  tous  ceux  qui  ont  été  les  témoins  de  Té- 
vénement  ;  voulez-vous  bien  nous  accompa- 
gner aussi 9  Mademoiselle? 

LOCETTE, 

Âh!  Monsieur,  dispensez-moi... 

SAMUEL. 

Oui,  monsir  le  Serchent,  je  répontrai  pour 
le  temoiselle ,  car  che  raimais  comme  mon 
fille.       " 

M™*^    SlMOïTIfE. 

Allons,  je  vois  que  dans  cette  aifaire-là  on 
ne  punira  pas  leti  plus  coupables. 


238  LEIUIP. 

Ni  les  pltLs  pavardë. 

(Ils  tutrcDt  tous ,  lessolilats  suivent  le  sergent.) 

SCÈNE  VIIL 

LUCETTE. 

Je  ne  sais  pourquoi  cet  kotnme,  malgré  sa 
conduite ,  m'inspire  de  Taffection  et  presque 
de  la  confiance  ;  ah  !  je  le  bénirais  encore , 
s'il  pouvait  sauver  le  malbetireux  Charles... 
ù  présent  il  faiu  essajer  de  Teubli^r.**  mais 
non  pas  tant  qu'il  sera  malheureux. 

AiA  :  Nouveau  de  M,  Alex,  Ptccini» 

Pour  rendre  ma  peine  éternelle  , 
Je  sens  qu'un  invisible  attrait 
À  non  coeur  sans  cesse  rap}K'lLe 
Le  Ixmlieur  qui  nous  attendait. 
Des  biens  perdus  la  douce  iuiage 
De  nos  chagrins  accnift  le  tours  : 
On  pourrait  supporter  Torage  , 
Sans  ie  souvenir  des  beaui  jours. 

Si  jamais  une  ardeur  nonvcilc 
Prés  d^une  autre  engage  sa  foi , 
Il  pourra  la  trotivf  r  plus  belle  , 
Mais  non  plus  aimante  que  moi. 
Que  se*  destins  soient  sans  nuagC'i , 
0  Ciel  !  proti'gc-lc  toujours , 


ACTE  n,  SCfe^E  IX.  a^ 

Réserte  pour  mei  les  orages , 
£1  fftrde  po«r  lui  les  Imaiu  jours. 

SCaÈNE  IX. 

LUCETIE^   CHARLES,  entrant  préci|û- 

lammenl. 

iiVGSTTS. 

Geavd  Dtea!  tous  tel!  imprudent!  qii'o- 
sez-Yous  faire  ?  la  maison  est  pleine  de  sol- 
dats :  si  Ton  vous  apercevait! 

Ehl  que  m'importe?  je  n'ai  tu  que  Totrer 
raalheur^  les  dangers  que*  vous  avez  courus; 
le^ bruit  en  est  parvenu  jusque  dans  ma  re-^ 
traite;  fai  tout  bravé. .«  chère  amie^  ei6t-i| 
bien  Trai  ?«.. 

Ouï  j  Charles,  on  m*a  tout  enlevé  ;  ainsi  ^ 
plus  de  mariage ,  {Hus  de  bonheur  !  je  suis  re-^ 
devenue  pauvre,  je  ne  puis  plus  être  à  vous; 
maiSy  «B  BOBi  du  Ciel ,  ailoK«To«is-*eB;  je  trem- 
ble que  l'on  ne  vous  i[oie«  restez  bien  caché 
jusqu'à  ce  que  le  secours  que  nous  a  promis 
M.  Samuel... 

X&AKLSS. 

Samuel  9  n'est-ce  pas  ce  malhtureux  juif, 
i6n\  l'infâme  trahison...  le  perfide!  j'aime 


24©  LE  JUIF. 

mieux  subir  foute  la  rigueur  de  moa  sort  que 
de  lui  en  devoir  radouci$:$eiiieQt  :  écoute  , 
Iiucette;  ici,  nous  ne  serons  jamais  heureux; 
€onûe-toi  à  mon  aoiour,  à  ma  loyauté;  suis- 
moi  dans  un  autre  pays,  où  la  plus  douce 
union... 

LUGETTE.  ' 

Je  devine...  n'achevez  pas  ;  non  jamais  , 
Charles;  je  vous  aimeplus  que  tout  au  monde, 
|e  ne  vous  préfère  que  mon  deyoir. 

AIR  :  De  VErmite  de  Sainl-AveUe,  ■_ 

On  m'a  ravi  celte  opulence ,  •  ^ 

pont  je  n'ai  joui  qu'un  seul  jour  : 

On  m^a  ravi  tonte  espérance ,  .  .    . 

Pai  toul  perdu ,  hors  mon  amour  f 

Mais  j'iai  les  biens  dont  on  s'honore , 

L'innocence  et  la  paix  du  cœur  ; 

Ah  !  pour  que  je  sois  riche  encore , 

Mon  ami ,  ûissezHtnDil'hoBntur. 

:  .  * 

SCÈNE  X.      —  ^ 

I.E9  PRÉCÉBEWS,   M*^  SIMONItB, 

dans  la  couliisse.  <    ■ 

ih"**'  SIMONNE,  accourant» 

Que  vois-je  !...  mon  filsJ.t.  Charles...  mon 
pauvre  enflint ,  ,tu  t'es  donc  souvenu,  de  l» 
mère. 


ACTBil,  SCÈNE  X.      *  ai}! 

Je  a'ai  jamais  cessé  de  tous  chérir,  et  pour- 
tant «votre  rigueur  a  préparé  ma  perle  ;  écou- 
tez f  ma  mère ,  les  instans  sont  chers  :  voie» 
Lucette,T0Udsave2sî  je  l'aime!...  accordez* 
nous  TOtre  aveu. 


M"^   SIMONNE. 


Comment  !  qu'est-ce  que  cela  veut  dire  ? 
est-ce  un  complot  entre  vous  ?  n'es-tu  veftu 
ici  que  pour  m'afQiger  encore  ? 

GHABI.  ES. 

Ma  mère 5  accordez-moi  Lucette..»  il  j  va 
de  ma  vie. 

M™*  SIMONNE,. 

Bah  !  propos  d'amioureux;  ta  Taimes»  c'est 
)iiste ,  cette  chère  eniant ,  ^e  Taime  aussi , 
moi,  elle  le  sait  bien  ;  mais  enfin  elie  n^a  rien, 
et  son  aventure  d'hier?...  allons,  allons, 
qu'on  ne  m'eo  parle  plus ,  cela  ne  se  peut 
pas. 

CHABLIS» 

Ma  mère-,  vous  ne  savez  pas».,  j'en  mour; 
rai. 

(  Samnel entre  et  écoate  au  fond.) 
SAKiTEt,  à  pari. 

La  cheune  soldat  et  son  tiaple  de  mère  , 
chustement  que  je  foulais  pas.*. 

F.   VaU'JeviUe».    3.  21 


24a  LE.tUrF. 

M*"'   SI  MON  Kit. 

Bah!  on  Bt  meurt  pas  de. ça...  Lueette^  f  o 
n'as  plus  uffaîrc  A  Orléans,  reprends  la  route 
de  Paris;  la  voilure  pas»e  dans  une  iieure  ^ 
lïmi ,  je  Tais  préparer  la  chaHilire  de  «non  ftls 
qui  vient  en  congé  chez  moi  ;  et  eomitie  H  ne 
serait  pas  bien  de  rester  avec  lui... 
(  Elle  lui  fait  sigiie  de  la  suivre ,  et  va  pour  sortir.) 

cnARLKSy  rarrétant  avec  énejrjgie. 

Un  moment  :  puisqu'il  le  faut  ^  apprenez 
tout;  j'ai  déserté,  c'est  un  crime  que  la  loi 
militaire  punît  de  mort.  ' 

%V^  SI  M  0  i!f  NE ,  avec  angoisse. 
Mon  fib! 

Sî  voû«  perststei  dans  totre  refiis^  fe  courâ 
Me Imer  au  cooéeil  de  guerre;  sî  vous  m'ac- 
oordez  Lucettè,  je  retourne  à<)rlèans,  mais 
pour  me  Jeter  aux  pieds  dé  mon  colonel;  il 
ra'tnm^^  eanr  ftistfu'à  ûb  fùur  j'^vats  toujours 
fait  mon  devoir;  il  me  protégera ,  il  me  sau- 
vera du  danger  qui  4i[iie  menace ,  et  j'atten- 
drai ,  heurenx  de  xolt^fn^miçR^  y  j'jnstansloCi 
la  loi  assure  ma  Tiberlé. 

ïtfiilhëureux  !  IP  ne  ,doat«6  pas  de  ma  lenn 
dresse... 

chahees. 

Prononcez. 


ACTE  II,  SCÈNE  X.  ^43 

Une  fille  sans  fôrlune ,  c*esl  impossible. 

CHARITES. 

Je  pars. 

s  A  M  u  c  1 9  sortant  précipitamment. 

£hl  vite!  eh!  vite  i  il  j  afre  pa«  d'autre 
moyen. 

M"**   SIMONNE. 

Arrête  ! 

tUCËTT*. 

Madame ,  ce  n  ««t  pas  pour  moi  que  je  vous 
implore 9  mais  il  y  va  de  sa  vis. 

De  sa  vie!  ah!  je  suis  mère.,  embrasse- 
moî,  et  épouse  ta  Lucelle;  quel  dommage 
pourtant  que  ce  maudit  Juif...  Mais  tu  es  sûr 
uu  moins  que  le  colonel... 

CHAALBS. 

Oui ,  j'en  puis  répondre. 

M"**  SI  MO  sus. 

£h  bien  !  pars  vite  ;  il  y  a  ici  des  soldais 
partout^  si  Ton  t'arrêtait. 

LU  CETTE. 

Oui  9  partes. 

AIR  :  Le  calmé  de  ta  nuit,  (de  M.  Bérat.) 

Ptfî$sKms-Tî(lti.<$  (iésorraais , 
Puis(|u'un  sort  pieiii  U'attriiiis 


Hi  iEJUIF. 

Semble  en6n  nous  sourire , 
N'avoir  plus  à  nous  dire  ,- 
Grâce  au  plus  tendre  nœud  :  ' 

Adieu  t  adieu ,  adieu. 

TOUS. 

Adieu,  adieu,  adieu. 
CBARLBS  ,  approchant  de  lui  Lu<;etle  et  sa  mère. 

Si  j'en  crois  de  mon  cœur 

Le  présage  flatteur, 

Objets  de  ma  tendresse , 

Ce  n'est  qu'à  la  tristesse 

Que  obus  dirons  dans  peu  :  ' 

Adieu ,  adieu ,  adieu. 

TOUS. 

Adieu ,  adieu ,  adieM. 
(  Charles  est  prêt  à  sortir  ,  lorsque  San^uel  ei^tre  amenant  les 
soldats  ,  et  suivi  de  firiliaot  et  Delauae  i   ils   eolrent  par 
la  poale  de  droite.) 

SCÈNE  XI. 

DELAUNf;,  BRILLANT,  SAMUEL, 
LK  SERGENT,  soldats,  LUCETTE, 
CHAR.LES,  M-»    SIMONNE. 

SAMVEU 

AIR  :  Chœur  des  Savoiarth* 
MBSSiEUfis ,  à  mpi  )  main  forte  ! 

LUCSTTK  ,  CHARLES  ,    MADAME   SIMONffE. 

Nous  trahir  de  la  sorte  !... 

1 


ACTE  n,  SCÈNE  XI.  2'|5 

Vile  aD6  bonne  esœrlc , 
Et  déployex  voire  rigueur  ^^ 
Empêchez  qu'il  ne  sorte , 
Je  me  fais  son  accusateur, 
Cet  l^Oiume ,  il  est  un  déserteur. 

CHAAL£S. 

Eh  bien  !  oui ,  je  suis  dései^etir. 

LUCETTB  et  MADAME   SIMONNE. 

Quel  coup  affreux  !  ah  !  quel  malheiu:  t 

SAMUEL. 

Oui  y  cet  homme ,  il  est  déserteur  ! 

LES  VOïAGEUI\S  ,  LtS  SOLDATS. 

Quoi  i  ce  serût  un  déserteur  ! 

MADAME   SIMONNE. 

Rendez-le-nous. 

LDCETTK. 

C'est  mon  époux. 

CHARLES  y  mcaaçant  Samuel, 

Âh  !  tu  vas  payer  de  ta  vie , 
Pétfide ,  ce  nouveau  forfait. 

(  Les  soldats  le  retiennent.  )  ^ 

BRILLANT ,  k  Dclaune. 

Ce  Juif  est  leur  mauvais  génie. 

DELAUNE. 

11  veut  les  perdre  tout-à-iait. 

SAMUEL ,  montraut  Ghanes. 

]l  faut  partir. 


b46  le  juif, 

'  MADAME  SIMOffNB»  tUCSTT«, 

Rcodez-le-Dous. 

I.ES  SOI^DATS. 

Noa ,  non. 


Ctsison     )  .  ^ 


I.ES  SOT^DATS, 
SAMVEL  9  HUXJIolcktS. 

A  fous^  Mesaieuis ,  je  le  confie , 
Coiiduisez4e  vite  en  prison. 

CHARLES  ,  à  SaïQUel, 

Ah  !  traitre ,  fh  (a  perfi<îîe , 
^  J^eiipère  avoir  bientôt  raison, 

è  I  BBILLANT. 

jd  ^  Ah  !  quelle  infâme  perfidie!... 
Ah  !  ({ueîîé  nôtre  Ifrahîson  ! 

L^S  VOYAâECRS,  '    ^ 

(1  s'appIauJit  de  cette  tralûson, 

MADAME  SIMONNE  et  LUCETT^I,      , 

Latssez-noiu ,  je  vous  prie, 
Partag^er  sa  prison, 

Lis   SERONT, 

Camarade )  tous  êtes  mon  prisoimier. 


ACTE^J,  8Cfii\E  XL  ^47 

COARtES, 

Je  me  rc.si^ot  À  mon  forl)  u«iis  lais^ex-^mol 
du  moins  punir  ce  misérable. 

LE  8«1ft«fil»T,  têt^tenaat. 
Doucement,  pas  de  riolence. 

SAMCEb* 

Le  incrat!  il  foulait  tuer  moi  poar  me  re- 
mei'cier  de  mon  protection. 

BBIttART^ 

Jolie  protection  que  la  vôtre  !  la  veille , 
f%iK  tùïuiBt  lé  Ttri^Hste^e;  le  lendemain,  t'ous 
faites  arrêter  Tamant. 

LE  ^BltCENT. 

Camarade  y  mon  devoir  fn^oMîge  de  tous 
cootluire  sur-le-cbavip  à  Orléans» 

Monsir  le  sercbeot^  ai  fous  foulez  payer 
moi  de  mon  pon  afis,  tardez  4e  eoidat  ici 
«ne  htture  seulement  9  cne  aUendais.  quei^ 
qu'un...  l'avais  un  craat  impatiences 

LE  S«>a«E|lf, 

IntpèsÀïAt ,  marcboY». 

CHAat.ES. 

Adieu  ,  ma  mère;  adieu  •  Lucette. 


-148  LEIUIf; 

SCÈNE  XIL 

LBS  PftieiDBirs,  THOMAS,  accourant  du 

debors ,  essoufilé. 

THOMAS. 

Plage  i  place  !  il  j  a  de  grandes  nou  Telles  ! 
Quoi  doQC? 

SAMUEL. 

.  Grande  nouYelle!  grande  nouvelle!  mon 
réponse,  d'abord? 

THOMAS^ 

Quelle  réponse? 

SAMUBL. 

A  mon  lettre,  impécille  ! 

TBOMAS. 

Tiens  !  c'est  vrai  ;  c'est  que  dans  tout  ce 
fooulevari  de  voleurs  ^  je  n'y  pensais  plus;  at- 
tendez. (  //  se  fouille.)  Ëh  bien  !  la  v'ià,  vot' 
réponse,  j'ons  eu  assez  d'peine  à  l'trouver 
vot'  colonel...  au  beau  milieu  de  la  nuit:  il 
dormait  qu'ça  fesait  plaisir;  mais  je  l'ai  fait 
lever,  moi,  comme  ça ,  sans  gêne. 

SAMUEL. 

Tonne ,  tonne ,  tonne ,  tonne. 


ACTE  I!,  SCÈNE  XII.  249 

THOMAS.         ' 

Toune,  tonne,  il  çst  clair...  qu'il  faut  que 
]e  vous  Ja  donne,  mais  pour  ^ a  faut  que  jlu 
trouve»  aU!  h  v'ià. 

.     SAMC^El. 

Cêtalt  pieu  heureux. 

M"°    SIMOHUE» 

Et  la  neuYelle  donc  ? 

TnoaiAs. 

Pour  en  revenir  donc,  figurei*vous  que  c'tc 
nuit,  en  traversant  le  bois,  |'treinblaî»l...  ça 
n*est  pas  étonnant,  parce  que  le  courage  n'em- 
pêche pas  d'avoir  peur  ;  je  prenais  tous  les 
arbres  pour  des  voleurs;  iluiie  semblait  que 
de  derrière  chaque  buisson  on  me  criait  :La 
bourse  ou  la  vie!  pourtant  je  n'ai  rencontré 
personne  ..  je  crois  bien ,  ils  étaient  ici  i\  foire 
leur  coup. 

LE  SER€RNT. 

Mais  enfin  caninacnt  sais-tq  P  . 

THOMAS. 

Ah!  v'ià  l'intéressant!...  c'est  que  tout  à 
l'heure ,  en  passant  près  du  moulin  de  Gros- 
Pierre,  \\  tout  à  l'entrée  du  viNnge,  comme 
j'étais  descendu  de  cheval,  je  me  mets  à  pen- 
ser à  la  bourse  que  ce  Monsieur  doit  me  don- 
ner  pour  ma  commission,  j'veux  aveindro 


$tSo  LE  JUIF.  ^ 

mon  argent  pour  calculer  combien  qii'ça 
mTra  aycc  deux  p'tits  écus  que  j^ayais  déjà  9 
y\k  iftie  fseos  nne  n^ain  qu'était  entrée  dans 
êùa  pùAé  aratit  la  mienne;  )'m6  r'toume  , 
j'yols  une  figure,  j'en  Tois  deux,  troi«,  fcrîe 
comme  un  aveugle;  tos  messieurs  qu'étaient 
là  tout  prêts  surviennent,  et  T*là  qu'on  prend 
toute  la  nichée  de  filous  d'un  seill  coup  de 
lilet..'  Us  s'cttout  fourrés  sous  la  grande  roue 
du  moulin  ;  alors  quand  j'ai  Ttt  qu'il  n'y  arait 
plus  de  danger,  le  courage  m'est  revenu  ;  je 
9UÎS  remonté  sur  ma  bête,  et  j'arrivons  tous 
les  doux  bien  essoufllés ,  pour  roua  raconter 
(fi'tei  b!>diiB  nouvelle* 

\  TOPS, 

Ils  s60t  pris  ? 

tItOMAS. 

Pardlne ,  es|<!>ce  qu'il  n'j  a  pas  une  provi* 
dence%  donc!. 

PréToyant  notre  arrivée,  Ils  n'auront  pas 
osé  rentrer  dans  la  forêt.  Consolez  -  vous  , 
Mademoiselle,  sous  une  heure ,  tout  vous  sera 
rendu. 

THOMAS,  à  Laoette. 

Tiens ,  est-i-ce  qu'il  vous  ont  aussi  volé 
qneuqti' chose,  Mam'selle? 


ACTE  II,  SCElîÊ  XU.  att 

lE  SEBGEITT. 

Et  as-tii  reconnu  les  i5çurcs  de  c^u?  fUfi 
sont  v^nus  Lier  soir. 

TH  OM  AS. 

Non  j  TU  que  j'étais  i  Qrléiio»  qmnd  ils 
étaient  ioi...  muis  patience...  du  train  do&t 
on  y  Ta.  (  On  entend  des  coups  4^  pUUtlei  si 
de  fusil.)  Miséricorde! 

TOUS. 

Qu'est-ce  que  c*€ist  4|Me  4)#to.P 

(  Cliarle«  ,  quoi<|iie  fans  ftrmes  s^éhmse  «  'frtftV«r$  1iï$' 
solclaù  qui  regardent  d^titù  -^  kimeut  les  coopt  (kf 
pi&tolet ,  et  disparait  ;  toits  les  ^o^age^r$  ACfi|n(' 
renl.)  .  .' 

LE  SERGENT^ 

Où  côurez-TOus  ? 

Où  mon  devoir  mr'appeWe. 

s  A  M  V  E  L  9    M^'    s  lAlO  K  INI»  i(rA€#t«  f  il' 

Ain  :  Quand j^etnis  Garde-marine, 

Où  PeiTiporlc  wp  courage  f 
Il  court  à  d^Miitres  périls. 

les  voyacjetIVI^     '    . 

C'est  un  combat  qui  ^>j[if4«^e  ^  ,  >'      - 

Les  brigands  revienrîraiint-ib  '* 


a«»2  LE  JUIF. 

LUCKTTI. 

D^une  amante ,  d'ane  mère. 
Ciel  !  exauce  la  prière. 

MADAME   SIMOKNE. 

De  ma  fille  et  de  sa  mère  , 
Ciel!  exauce  la  prière. 

S    f  SAMUEL. 

^  (  Maïs  bieutôt  de  cette  affaire 
S  \  n  reviendra  sauf,  inespéré. 

LES  VOYAGEURS, 

Braro  \  TexoeUente  affaire  ! 
Les  soldats  leur  font  la  guerre. 

THOMAS. 

Oli  ^oi^oé  \  la  bonne  affaire , 
Nos  soldats  leur  font  la  guerre. 

CHOEUR  j  derrière  le  thc'dtre. 

Rendez-TOus ,  rendez- tous. 

LBS  YQTAGBVRS. 

Ça  va  bien ,  rassurez-vous ,  . 

Plus  de  danger,  plus  d'alarmes  \ 

Hs  rendront  bientôt  les  arntes , 

^  I  bientôt ,  nous  les  tiendrons  tous. 
M  y 

%  <  MADAME  SIMONNE  et  LUCETTE. 

H    \ 

S  ]  Quand  du  bonheur  d'être  époux 
Ils  entrevoyaient   )  ,^  ^j^^^^ 
Nous  entrevoyions  ) 
Fallbit-^il  voir  les  alarmes 
Troubler  uo  espoir  si  doux  ?..- 


ACTE  II,  SCÈNE  XIII.  a&3 

SOÉ^NE  Xlil. 

CHARLES,  LE  SERGENT,  THOMAS, 
M-«  SIMONNE,  BRÏSETOUT,  ROSSI- 
GNOL,  VO&BD&S,   SOID^T^»  , 

CHOEUR,    t 

AIR  :  C'^st  chatmant. 

Ils  sont  pnSf  (BU.)' 

Us  la  pairont  jejier j;  ^aps:  dbjiiie , 

Us  sont  pris  y,  Bis.). 

Plus  de  voleurs  sur  la  route.  i  •- 

Quel  bien  pdur  notre  pays  ,'- 
Sil'oa  voiilaitœiçux^^ei||c^]fdie,  ; 

Et  c|ue  Ton  pût  enfin  prendre 
Les  grands  comme  les  petits. 

BAiiirAifT,  d'un  air  triomphant. 

J'étais  bieo  sûi>^pie  nod»  fiQÎripns  par  les 
soumettre. 

LE   SSEGERT. 

Reconnaissez-TOU9  ces  hommes-là? 

tHOUAS» 

Tiens!  o*est  liies  braves  gens  d'hier  soir! 
Ce  sont  nos  voleurs  fie  cette  nuit  ! 

TOU  S.; 

Oui,  oui,  ce  sont  eu]^. 

F.  Vaudovilles.  3.  ^a 


2^  -   :       tEJUIF. 

M"*    SIMONNE. 

Fouillez-les,  ils^'doivëtrt  avoir  sur  eux  Tar- 
gent  <l€. cette  pauvre  Liicette« 

Allons,  coqutA®;  r^dez'toût.      ^i       . 

Kendre  ? 

Sur-le-=-champ.  '  .         î' 

Et  £Î  nbus  restituons? 

Vous  aure«<ifèlà'dc  toorns'  sur  la  conscience. 

BOSSIGNOL,  àpàrt.  , 

Et  dans  la  poche. 

;;-'-''Tr6Mis. 

Cote n^étti !' ^ies  ti6nifit(t's ' ho^taiéi 'étalent 

des...  Oh!  Dieu!  *  .i>. ...(;. 

irE  SlB  A  G  E  NT  ,  remet  les  billets  à  madame  Simonoc. 

Maintenant,  en  route. 
(Les  soldats  s^apprôbhe&t,'te  Sergent  lenr  parle  bas, 

et  au  même ;m9^e«t'6viéeloiit!liû  ticeldaisa^oclie 
soD  mouchoir  qui  sortait  ;  le  soldat  se  retourne  ma- 
chinalement, Bmétoè/t^eiàtdcilt'essuyer  une  larme.) 

M"»  siM'ôv'irB.       --    "^ 

Un  moment,  ità  VrliD^ïnent;  ça  ne  fait  que 
dix  billets ,  il  y  en  avai»  «Of  c. 


1  •  .  M 


ACTE  II,  SCÈNE  XIII.  a55 

'  M.    PINCé. 

C*cst  juste,  où  est  le  onzième? 

BRidETOVT»  oi(intriint  Samuel. 
Le  onzième ,.  c'est  ip.carp^r^dcr  qui  V^ 

Là,  quand  je  disais^ 

La  poignée  de  main  s'explique. 

THOMAS. 

Tiens,  TJuif  qu'a  l'onzième! 

BRILtA^T, 

r        M 

Complicité  ! 

D  E  L  A  U  K  E. 

Connivence  ! 

».  PIN  ce. 
Collusion  ! 

LCSERGBNT. 

En  prison  avec  les  autres.  ' 

TOUS. 

En  prison  !  En  prison  ! 

SAMUEL. 

Un  moment  donc  !  en  prison  !  en  prison  ! 
bhe  étais  pas  le  camarade  de  ces  Messieurs  , 
le  sergent  il  afre  vu  mes  papiers^ 


^5«  LE  JUIF. 

tE   SBfLQBBT. 

Les  papûer^  ne  prouyent  rîen  ^  quand  les 
toiiis  les  démentent. 

SAMTTBC 

Si  ie9  papiers  ne  prouvent  rfen,  alors  c*é* 
lait  pas  l^a  peine  pour  apprendre  à  écrire. 

LE    SERGE  H  T.    . 

Allons, pas  de  raison j  restituez ,  et  suives 
vos  eomplices. 

SAMUEL,  donnant  |e  billet. 

Ghe  foulais  bien  restituer;  mais  che  foii« 
iiiis  pas  suivre. 

LE  SEBGEKT,  le  remettant  à  Lucef te. 

Mademoiselle,  tout  Totre  argent  vous  est 
.risndu... 

SAltfVBI.. 

Non  9  tout  li  était  pas  rendu  encore ,  ii 
manquait  un  misère... 

Qu'est-ce  donc? 

SAMUEL. 

Rien,  que  teaz  cent  n^illc  francs, 

TOUS. 

Deux  jDent  mille  francs  ! 

LE    SEEGEKTr 

Et  où  sont-ils? 


ACTE  II,  SCÈNE  XIII.  bSv 

SAMVEi:.. 

Dans  mon  pocfae. 
^  Les  voleurs  font  im  mouYement  nonj  sauter  sur 

Samuel.) 

EOSSIGROI.*, 

Ab  1  si  nous  avions  su  ça  ! 

Silence! 

(  Il  fait  signe  d^emraniGr  les  voleurs.} 

SÀMpEft. 

Che  lisais  pi«n  que  foas  amusiez  fous  ^  la 
g^ou  tarde. 

(On  emmène  les  voleurs.) 

AIR  :  Ban  Jt^fige, 

I.ES  VOTAGCVnS. 

Bon  voyage , 

Mes  chers  amis , 
Pour  quelque  tems  vous  voilà  sans  ouvrage; 

^U  voyage ,  mes  chers  amis , 
Pour  quelque  tems  vous  voilà  sans  pro6ts^ 

LIÇS   V0I«£V11S. 

pou  voyage. 

Mes  chers  amis , 
NoAs  saurons  bien  romprt  notre  esclavage  ; 

Bon  voyage  ,  mes  clu:rs  amis  « 
Nous  reviendrons  bientôt  dans  le  pays. 

(Les  volciirs  sont  emmenés,  trois  soldats  restent.) 

aa. 


/* 


358  LE  JUIF. 

SCÈNE  XIV. 

LES   PBéCBDENSy    eXCeptéLES   VOLEVRS. 


■me 


Quoi  !  Moosîeur  ,  ces  deux  cent  mille 
francs  ?  ' 

SAMUEL. 

Li  être  à  la  petite» 

LUCETTE. 

A  moi,  tout  ceiàf... 
Tout  cela. 

LV  CETTE. 

Mais 9  Monsîçiu*,  <|Mi  $lQ$^yous  donc? 

SAMUEL. 

Samuel ,  l'ami  intime  et  Tassocié  de  fotre 
père  5  que  Iti  guerre  afait  toujours  retenu  en 
Amérique,  et  empêché  d'entojer  à  vous  ni 
archent  ni  noufelles. 

LUCETTE. 

Ah  1  Monsieur,  quand  pourraî-je  le  revoir? 

Chamais ,  mon  pmvre  enfanl  ! 

LucETiri 
Ciel!  mon  père!...  * 


ACTE  tl,  SCENE  XIV.  aSc) 

SAMUEL. 

Mais  chfi  fieixs  pour  rej^glf^ieç  ^yi  prts  de 
vous*  Samuel,  m*a-t-il  àh  à  ses  teraiers  mo- 
mens,  pendant  quinze  ans  y  intérêts  ,  peines  , 
plaisirs,  tout  il  afre  été  coaimun entre  nous, 
iUaUt  ODU^  séparer;  cbe  m'^nfas  sans  re- 
mords, mais  non  san^  fpg^t  ;  puisque  che 
peux  pas  embrasser  le  seul  enfant  q^e  le  Ciel 
m'afrc  donné.  Sois'  plus'Heurpux  c[ue  moi , 
porte  à  mon  Lucettt^  lesVœux  que' che  afre 
fait  pour  elle  chia^v'à  mê  ternier  soupir  ; 
convne^u  afre  aimé  le^  père ,  tii  aimerî^s  l'ejn- 
fant ,  n*ëst-il  pas  vrai,  m,on  cjier  Samuel., 
qu'il  tne  tisaîl,  en  sèrra,nt  mes  mains  qu'il 
mouillait  de  ses  larmes  ?  aide-lâ  de  tes  con- 
seils, guide  sa  ckeune  cœur,  unis-la  à  un 
homme  sage,  laborieux,. hop^ète;  che  lais- 
sais à  elle  un  fortune  suffisante  pourteux,  et 
si  un  chour  li  être  heureuse,  qu'elle  pénisse  le 
Ciel,  qui  ne  recheler  chamais  les  prières  de 
rhouiA'êtë  fcomme  et  do 'Bon  pïère.-  En  tisant 
ces  mots,  il  serra  moi  encore  une  fois  datis 
ses  pras,  et  ce  fut  la  tcrnière  ;  mais  li  être 
égal ,,  TQtre  père  jl  {5fr4  pi)ur  vous  tant  oue 
che'^fraij.ettog^  q^  que  je  tésire  ai\  ffloiîde, 
c'est  (ie  mourir  chamais* 

M™''-  t  ru»  0  »  ir  &..: 

PduVquk)i"nc  vous  être. pas  fait  connaître  de 
suite?  "  ■     ' 


?^  LE  JUIF. 


SAMUEÏ.. 


Je  foulais  savoir  l'usache  que  le  petite  il 
ferait  tes  onxc  mille  francs  que  j'afre  envoyé^ 

tu  CETTE, 

Quoi  I  c'est  encore  à  tous  que  je  dois  ?.., 


^BII£AlrT. 


Maïs  alors  pouroupi  Ven  avoir  fait  aussitôt 
dépouiller  par  les  brigaqds  ? 

Pour  saiifer  aoo,ooo  frapcs  que  je  afre  dans 
ce  porte-feuille,  et  qui  être  }c  fortune  te  Lu^ 
cette  et  te  spn  Cfcarles.  ^    * 

^1^  imoirvE. 
Oh  I  le  digne  4iomme  ! 

SAMUEL;  ^pçmi  le  porte-fciwUc  à  Locètle  qujl 

pleure. 

Comipenti  xno^  enfanj,  fous  n'être  pas 

encore  consente  ? 

•  ».        » 

irCETTE. 

Ah!  Monsieur';  puîs-je  l'être  lorsque  j'ai 
perdu  mon  père ,  et  que  ma  fortune  entière 
oepeut  sauver  Charles....  r       .. 

£S   SEftCElTT. 

C'est  impossible,  Madempî/jcIIe.  14  Char- 
ges. )  Allons,  jeune  homme,  marchons... 


f 


ACTE  II,  SCÈNE  XIV.  a£i 

CHA1I.B8* 

Je  suis  prêt. 

LVCBTTI^ 

Monsieur  Samuel !..• 

iAMVBL^ 

Un  motneut,  un  moment,  le  cheune  homme 
il  marchera  pas,  il  peut  pas  marcher...  il  est 
lipre. 

(  n  remet  an  so-jg^eot  la  lettre  que  Thomas  loi  a  ap- 
portée.) 

T0O6. 

ISkrel        * 

LB  SBEGBJTT,  lisant.    ' 

Son  congé  I 

CBABBBS. 

Il  sé  pourrait  1 

LE  SEECBNT,  lisant. 

Il  est  en  forme,  c'est  fort  bien  ;  mais  il  ne 
4étruit  pas  le  fait  de  la  désertion^  ainsi... 

SAMUEL. 

Partonnez...  le  tésertion,  il  était  de  cinq 
jonrs  seulement,  et  le  congé,  il  afait  huit  jours 
de  date ,  fojes. 

CBABLBS. 

Ahl  Monsieur,  vous  nous  avez  tenu  pa- 
role. 


aGa  LEJUIF. 

LE  .seR«&iir. 

Pardonnez,  Monsieur,  votre- eopduîld  est 
digne  d'éloges,  et.)^^  voidr  &^ec  plaisir  que 
noire  présence  ici  n'aura  coûté  de  pjçurs  à 
personne. 

(  IllsèTt  iivee  ses  soldab.) 

.  .SCÈNJB.XV."  •^••- 

us  Pftéfitowîfi.,.  RUÇTAliX,   HPJITEW4B:, 
M.  PINÇPi,  ïflOMAS. 

(  Oo  entend  le  fouet  du-postSiOn ,  Rostaut  entre  par  le 
fond ,  tous  les  voyageurs  reprennent  leurs  palets  , 
parapluies  ,  s«çs  <k  uui| ,  etç  y  etç;  ,  qu'ils  avaient 
au  premier  acte  ,  et  qui*  leur  sont  apportés  par 
Thomas.) 

Allons,  messieurs  les  voyageare^  Ift-pos- 
tillon  est  à  cheval^  les  bctps  s'inopatientent , 
parton$. 

SAMUEL. 

Le  Temoiselle  restait  y  et  moi  aussi. 

RU.STAUT.    . 

Gomme  you^  voudras  ^  I03  places  sont 
payées;  mais  vrai ,  vous  avez  tort;  la  i;oiture 
remise  presqu*à  neuf,  la  route  libre ,  un  om- 
brage continuel  et  les  bords  de  la  Loire  donc! 
rien  que  pour  les  voir,  il  faudrait  faire  le 
voyage  :  ainsi ,  croyez-moi... 


ACTE  II,SCËNE  XV.  363 

VAUDEVILIxE. 

AIR  :  Tfq}e  ^frappe. 


Vite  ,eu  route. 

Coûte  que  coûte.  ^     , 

Vite  en  route , 

Et  sans  trébucher  ; 

Vile  en  route , 

Coûte  que  coûte , 

Vite  en  route , 

Et  foue'tte  cocber. 

TOUS. 

Vite  en  rpul^ ,  etc. 

Si  je  connaissais  un  p^s 
Où  l'on  ne  fit  que  dés'  habits 
Dont  la  mode  fût  paisSângiêre  , 

L'étoffe  légère  j 

Lafaçon  trés«ebéie,  > 
Ah  !  comme  j^irais , 
£t  comme  j&ijijtais  : 
Vite  çn  toute ,  etc* 

Si  je  connaissais  uA  )$ajs  ' 
•  Où ,  moins  sévércf  qu'à  PaliS , 
Lcpublic  fût ,  par'bOfité  rare  ^ 
Du  sifflet  barbote  "'  ^'  * 
Un  plus  av4tre ,   ' 
Ah!  comme firab. 


<  ♦ 


266    LE  JUIF.  ACTE  II,  SCENE  XV. 

Entre  la  crainte  et  Pc^pésance, 
Flotte  iin  «&;rooment  toortàtoor, 
Ah  !  proufezrkii ,  conrae  il  «mpede 
Quelque  oracbe,  quelque  idéM  y 
Que  le  merrredi  pour' ma  6e«le 
N'être  pas  le  chouridu  sai^bat. 

'inîOEVRr  " 

Vite  en  route ,  etc. 


FINtDfU   Jtri7. 


..;.: 


Nota.  H  faut  au  septième -VeBï.substitàcr  à  «  pour 
ma  secte  »  ces  mots  :,  pour  notret  $é^tt ,  lorsque  ce 
couplet  sera  chanté  le  uindi.t.npaicdl^u».  jf^di  de  la  se- 
maine  ;  et  le  quatrain  suivant  auz.qi^tre'ilerniers  vers, 
lorsque  ce  sera  le  samedi. 

Oubliez  tous ,  comme  il  suspecte 
Qudqne  orage  ,i«|iielque  débat  />  . 
Que  le  samedi  pour  ma  secte 
Li  cire  le  jourdu  sabbat. 


\ 


LA 

VE¥  VE.DU<  MM  ABAB , 

COMÉDIE  EN  UN  ACTE, 

MÊLÉE   DE   TAVDETIIiI.ES, 

^    PAR  M.   SÀINT-AMAND; 

Bqirésentée ,  pour  la  première  fois ,  an  Gymnase 
dramatique  »  le  19  août  i8aa.  ^ 


PERSONNAGES. 


DUPRÉ  ,  négociant ,  établi  au  Malai)ar. 

M"«  DU  PRÉ,  sa  femme. 

SUR  VILLE ,  jeune  Français  attaché  à  la  com< 

pagnîe  des  Indes. 
ZÉILA  f  jeune  yeuye  indiennp. 

ALI-BRULLr-PHA-GOS^  courtier  de  com- 
merce. 


La  scèae  est  dans  une  TîHe ,  sur  la  cote  du  Malabar. 


LA     . 

VEUVE  DU  MALABAR , 

COMÉDIE. 


.%/«*.^^ 


Le  théâtre  représente  une  salle  de  ràpparteraent  de 
Pvpré  ;  .on  voit  çà  et  là  quelnnes  ballots  de  mar- 
chandises. A  droite ,  un  cabinet  qui  conduit  au  ma- 
gasin. A  gauche ,  d'autres  appartemens  ;  au  fond 
des  croisées  qfui  donnent  sur  la  yiUe. 


SCÈNE  PREMIÈRE. 

DU  PRE  9  parlant  au  fond  à  la  cantonnadc;  sur  le 
devant  de  la  scène ,  UNS  FEMME,  tenant  itne 
lettre  à  la  main. 


r 


DUP&B. 


Sebb^z  ces  briUots  de  marchandises  ,  et  pre- 
nez garde  de  rien  gâter...  Ces  domestiques 
indiens  sont  d'une  maladresse  !...  En  France 
quelle  différence  !..  Je  me  rappelle  que  quand 
|*étais  laquais ,  j'avais  toujours  plus  d'esprit 
que  mes  maîtres. 

LA  FEMMEj  s^avançaoL 

Monsieur... 

a3. 


270         LA  VEUVE  DU  MALADAR. 

DU  PRÉ. 

C'est  jasle  ;  on  m'avait  dît  que  quelqu'un 
m'attendait  dans  mes  magasins.,..  (D'a/i  to?i 
imposant,)  Qu'est-ce  que, c'est? 

LA   FFMME 

De  la  pari  de  Sïîladî ,  ma  maîtresse. 

DUPRi,  pFenaat br tettiM!. 

Voilà  une  soubrette  qui  a  une  fort  jolie 
tournure...  une  charmante  petite  feoim^  ! 
( La  regardant j  )  Àb  !  ntoii  Dieu  !  quel  sou- 
Tenir  ! 

lA   FBMME. 

Quel  son  de  rofx  ! 

DUpas. 
A k  SBfeur  froiefe  qui'  me  «saisît.., 

£^A  F  E  M  M  E. 

A  la  terreur  que  j'éprouve... 
Je  ne  peux  pas  m'abuser. 

LA   FEMME. 

Je  ne  me  trompe  pas...  c'est  I«  frjpon'dd 
Dupré! 

DUPfti. 

C'est  ma  femme  ! 


SCÈNE  I.  9^1 

LA    FEMME. 

C'est  mon  m  a  ri  î...  Gomment  î  après  cinq 
ans  d'abience ,  je  te  reçois  enfin  ? 

Comment  1  malgré  FOcéan  qni  nous  sépa- 
rait, je  te  retrou  Vie  encore  ? 


Hime     Dupm^^ 


&em  est  foit^  je  evois  à  la  sympathie. 

Et  moi  à  la  fatalité.  {Uonirmt  sa  femme,  ) 
Je  la  laisse  en  Europe  9  et  m^'embarque  pour 
les  Indes...  seul  moyen  9  avec  elle  ,  pour  taire 
bon  ménage...  Eh  bien  !  il  faut  que  le  hasard, 
plus  pnîssattf  cpsie  nos  cœurs,  no u^  péuntsse. 
Où?...  au  Malabar...  un  pays  qui  ,  jusqu'à 
présent,  m'avait  poné  bo«heur  !  C'était  bien 
la  peine  de  faire  le  Toyage  !  ^ 

m"*   DUPHé. 

Plains*toi  donc  ! 

AIR  :  j^  soixante  ans. 

J'ai ,  comme  toi ,  vu  Iç  cap  des  tempêtes  ^ 

J^ai ,  comme  toi ,  passé,  sous  Péquateur  ; 

Des  ouragans  qui  gronriaient  sur  nos  têtes , 

Ainsi  que  toi ,  j^ai  bravé  la  fi^iir! 

Mais  toi ,  du  moiusu,  dans  le  fond  de  ton  ane  »  « 

Un  tendre  es^ioir  te  sûlfait  jusquMci... 

Car  ce  vojfage...  hélas  Iqucje  maiidi  ,. 


27a         LA  VEUVE  DU  MALABAR. 

Tu  le  fesais  pour  éviter  ta  femme , 
Et  je  Pai  fait  pour  trouver  mon  mari. 

Et  quel  mari  ?  un  mauTais  sujets  uq  bru- 
tal f  un  jaloux^  uq  dissipateur...  un... 

D  V  p  A  i  ,  h  regardant  avee  tendresse. 

Cette  chère  Angélique!...  elle  n'est  point 
changée.  Eh  bien  !  donc ,  Qia  douce  com- 
pagne 9  puisque  les  vents  contraires  tous 
ramènent  près  de  moi ,  donnez-moi  des 
nouvelles  de  mon  ménage  d'outre^mer  ?.. . 
Voyons...  qu'as-tu  fait  pendant  les  cinq  ans 
de  mon  absence  ? 

Ce  qu£  j'ai  fait  ?  J'en  ai  profité  pour  être 
heureuse. 

Et  moi  pour  faire  fortune. 

M"'   DUPfti. 

Comment!  il  serait  possible?  Ce  riche 
négociant  chez  lequel  je  venais... 

DUPRÉ. 

C'est  moi-même....  et  tout  ce  que  tu  vois 
m'appartient.  Cette  maison... 

m"**  duphe,  avec  tendresse. 
Dupré  ! 

D  v  p  A  B. 

Ces  esclaves  »  ces  marchandises... 


SCÈNE  L  273 

M"'  DVP&B  ,  de  même. 

Mon  cb^r  Pupré  F... 

D.DPBB. 

Et  dans  ma  caisse  ,  cinquante  mille  pias- 
très. 

M"«  D  T7  P  B  É  ,  de  même. 

A^|i  ami  !  et  j'osais  t'aqpuser  !...  soupçon- 
ner ta  conduite  !... 

POPBÉ. 

Tu  40 e  pardopnes  donc  mon  départ  ? 

M™*    DUPEE. 

T'en  ai-je  jamais  gardé  rancune  ? 

fraude  fille  de  la  SomnombiUe. 

Après  cinq  ans  de  d^cpcde  et  d^^bsence , 
Ah  !  qu^il  est  doux,  de  se  revoir  ! 

MADAME    DUPEE. 

Ainsi  que  toi ,  mon  bon  ami ,  je  pense. 

OUPAlSy  la  regardant  avec  surprise. 

Fortune ,  quel  est  ton  pouvoir , 

Tu  Élis ,  rien  C(u^en  daignant  paraître , 

Ce  que  Taraour  n^a  pu  faire  jadis  I 
Pottr  la  première  fois ,  peut-être , 

Ha  femme  ei  moi  sommes  du  même  avis. 

M™*  pppRé,  de  même. 
Mon  ami  !.., 


274         LA  VEUVE  pu  MALABAR. 

DDPRé. 

Mon  Angélique  !...  (lis  s^ embrassent.)  Quel 
bonheur  de  se  retronrer-!* 

^  De  s'aimer  plus  que  jamais! 

D  u  p  R  é. 
De  ne  plus  parler  du  passé  1 

Oii  plutôtde  le  farfe  oublier  parles  soins... 
les  égards  ,  les  prévenances...  Tu  dis  donc  , 
mon  ami,  que  tu  as  gagné  cinquante  mille 
piastres  ? 

Oui ,  ma  fbmme. 

M"*    DtPRÉ. 

Et  que  cette  maison  ,  ces  esclares  j  ces 
marchandises  nous  appartiennent  ? 

DU  PRÉ. 

Oui  y  madame  Dupré.  Dô  plus  »  je  jouis 
d'une  certaine  considération  dans  lé  pays  : 
d^abord  je  m*j  suis  fait  naturaliser ,  ce  qui 
augmente  encore  la  confiance  ;  et  à  la  pre- 
mière occasion  farorable ,  je  nie  retire  des 
affaires,  je  réalise  mes  fonds  et  vais  m'établir 
en  France ,  où  je  n'aurai  plus  rien  à  faire 
qu'ù  vivre  en  honnête  homme. 


SCÈNE  I.  2^5 


M"'    0UPftÉ. 


El  moi ,  en  grande  <iaine.  Q«el  bonheur! 
Je  vais  le  dire  àiadj.Anthony ,  ma  maîtresse, 
ayecqai  j'étais  Tenue  en  ce,  pays. 

C'est  lo4l|ile<.* rJe,  $ors.*..et; jeioe  charge- 
rai de  ta  commission.,.  Si  on  venait  me  de- 
mander, je  reviendrai  dans  une  heure. 

Tq  me  quittes^  dcjè? 

jDUPiEiB. 

Il  le  faut  pour  une  affaire  importante  qÀî 
regarde  un  de  mes£ompatriotes  ,  M.  de  Sur- 
ville^  un  jeune  Français  t|:^srriçhe. 


me i 


M™-PBP»B. 

Eh I  quelle  est  cette  affaire? 

Oh  1  ce  n'est  pas  une  affaire^dé  comtnerce 
proprement  dité.«..|)arce4}u'il  s'agît ,  vois- 
tu  bien...  ]\Iais  dans  pe,  moment  je)  ne^peux 
pas  t'en  dire  davantage. 


M""    DO  PRE. 


Et  pour.queUjejraisjon  ? 
Vearce  que  c'est  un  secret. 


a;6         LÀ  VEUVE  DU  MALABAR. 
Vous  en  ave^  donc  pour  moi? 

DVPRB. 

Sans  contredit. 

Apre»  Tamour  que  j'ai  pour  tous  ( 

DtpaÉ. 

Eûfendons-Dous.  Je  suis  sûr  de  ton  amour^ 
mais  noopas  de  ta  discrétion. 

M"*    BVPfti. 

Tu  auras  beau  faire  ,  cependant  il  faudra 
bien  que  je  sache... 

Tu  ne  le  sauras  pas. 

m"*  Dvpai. 
Je  le  saurai  I 

DVPRB. 

C*est  ce  que  nous  verrons. 

Âh  !  tu  espères  me  cacher  ta  conduite  ! 
mais  j'y  mettrai  bon*  ordre. 

&UPHÉ. 

Ah  !  tu  crois  que  je  me  laisserai  mener  ! 

M™'    DUPEE. 

Et  moî,  que  je  me  laisserai  tyranniser  !..• 


SCÈNE  I.  377 

non...  J*a!  été  trop  dbace  jusqu'à  présent  ; 
mais  je  yeux  être  inaîtpoâse  chez  moi.  Je  yeux 
être  obéie^  et  si  tu  ne  me  dis  à  Tinstant... 


DIJPRE. 


Là!...,  ybîfà  nos  querelles  européennes  qui 
recoin  nrien  cent. 


■me 


M"^    D II  P  fi  E» 

lin  :   Cteur  infidèle,  coeur  volage,  (  Fragment  d'un 
duoxle  Blmsc  et  Babet.  ) 

BNSÏMBLS. 

Crois-moi ,  redoute  ma  colère  ; 
Oui ,  tu  prétends  en  yain  le  faire  ^ 
.  Je  montrerai  du  caractère  ; 
Oui ,  redoute  ici  ma  colère. 

DUPRS. 

Crob-moi ,  redoute  ma  colère  y^ 
Comtpcnce  d''ab9rd  par  te  taire  f 
Je  montrerai  du  caractère  : 
'  Oui ,'  redoute  ici  ma  colère. 

Bien  \  pourquoi  donc  suis-je  vernie  ? 

DVPAÉ. 

Plus  que  toi  je  suis  mécontent  ! 

MADAME    DUPAE., 

Je  ne  puis  supporter  ta  vue. . . 

DUPRÉ. 

Tu  peut  Rembarquer  à  Pinstanl. 

F.  Vaudevilles.   3.  ^4 


278         LA  VEUVE  DU  MÂJLABAR. 


^  ENSEMBLE. 


Oui ,.  jK^oiAt^  ici  ma  colère  ! 

(  A  part.) 

Dieu  !  quel  sûmaMe  caractère , 
Sur  Fun  ou  sur  Tautre  hémisphère» 
.    Touiours  le  même  caractère  :  ' 

(  Haat.) 

Oui  i  redoute  .ici. ma  colère. 

^  Duprtf  pcend  son  chapeau  et  sort.  ) 

SCÈNE  IL 

M-  DO  PRÉ. 

Lc9  maris  sont  partout  les  ii^êo^es.  Le  pajs 
n*y  fait  rien...  En  France  ,  en  Angleterre  9 
ainsi  qu'au  Malabar ,  ce  sont  toujours  des... 
des  maris  ^  et  puisque  me  Toilà  de  nouTeau 
enchaînée  auprès  du  mien',  puisqu'il  Tautab^ 
solument  que  je  fasse  bon  ménage ,  je  n'ai 
plus  qu'un  moyen  pour  virr^e  avec  lui ,  c'est 
de  le  faire  mourir  de  chagrin.  Iteîii  !  qui 
vient  là  ?...  quelle  est  cette  grotesque  figure  ? 
C'est  sans  'Aouip  quelque  mai^abou  da  pays. 

SCÈNE  m. 

M-  DUPRÉ,  BRULL-PBÂ-GOS. 

BBT  LL~PHA-G0  9. 

Le  seigneur  Dupré  est-il  chez  Juî  ? 


SCÈNE  III.  ^79 

M""    BOPBK. 

Non  5  Monsieur,  il  vient  de  sortir. 

BBVLL-PffA-^GOS. 

Ah  1  ah  !  moi  qui  Tenais  lui  parler  pour 
affaire  importante.  (  Regardant  madame  Du- 
pré.  )   Serait-ce  là  une  de  ses  esclayes  ? 


i'"''  Dupai. 


C'est  tout  comme  ,  je  suis  sa  femme. 

BEULL-PHA-GOS. 

Eh  !  mais ,  je  ne  le  croyais  pas  marié. 

M™*  dupr£ 

Plût  au  ciel  !...  Je  suis  venue  le  retrou- 
ver. 

BRVLL-PHA-GOSy  la  regardant. 
Ah  !  ah  !  vous  êtes  sa  femme  ,  et  vous  ha- 
bitez désormais  ce  pays  :  c'est  fort  heureux... 
pour  nous. 

M"^  i>VT&à,  sèchement. 
Et  pourquoi  P 

BRVLL-PBA-GOS* 

Pourquoi  ?  parce  qu'on  ne  sait  pas  ce  qui 
peut  arriver...  non  pas  que  je  le  désire  ,  ce 
cher  Du  pré  !  mais  enfin,  j'espère,  en  cas 
d'événement ,  que  vous  vous  adresserez  à 
moi. 

«"•    DVPItB, 

Qui  êtes-vous  donc  ? 


a8o         LA  VEUVE  DU  MAXABAR. 

B  B  U  L  L-P  H  A-G  0  S. 

Ali,  Briill-Pha^Gos,  courtier  de  commerce, 
commis  feûtiei* ,  employé  aux  bûctiers  du 
Malubar. 

Quelle  est  eette  place-là  1^ 

B  BVLt-PHA-G  os.. 

C'en  est  uue  fort  bonne  dans  ce  pays  « 
quand  on  a  une  certaine  clientelle  ,  et  je  puis^ 
me  flatter  d'itrcun  des  plus  occnpés.  A  pro- 
pos de  cela,  oserais-je  vous  offrir  des  billets 
pour  la  cérémonie  d'aujourd'hui?  elle  sera 
superbe  !...  Il  y  aura  long-tems ,  je  m*ea 
vante ,  qu'on  n'aura  tu  un  spectacle  aussi 
magnifique. 

Qu'est-ce  donc  ? 

BBULt-P.HA-COS. 

Gomment!  tous  n'en  aTez  pas  entendu 
parler  ? 

Eh  !  mou  Dieu  !  non ,  j'arrive. 

BUVtt-PHA-JGOS. 

Vous  ne  pouviez  pas  mieux  tomber  :  c'est 
la  TeuTe  du  Tieil  Amrou,  la  jeune  Zéila,  qui 
doit  se  brûler. 


SCÈNE  I H.  28< 

Gomment!  se  hrûler!  et  pour  quelle  rai^ 
son? 

Je  TOUS  Tai  dit  ;  parce  que  son  mari  est 
mort 

Elle  raimait  donc  bien  ! 

Elle  ne  pouvait  pas  le  souffrir ,  mais  c'est 
égal,  c^estTusagedupays..  Dèsqu'un  homme 
marié  vient  à  mourir,  J*  "'y  a  pas  de  milieu, 
il  faut  que  sa  femme  soit  brûlée  vive. 

M°*^  nu  pMÎ 

Mais  voilà  une  ÇQOtume  qui  n*a  pas  le  sens 
commun  I 

BRVLl-PR  A-GOS. 

Je  ne  dis  pas  non ,  mais  elle  est  très<pro^ 
ductive  pour  nous  antres  courtiers.  Écoutez 
donc  9  iJ  faut  que  tout  le  monde  vive...  Au- 
jourd'hui ,  par  exemple  ,  o'est  une  fort  belle 
jififaire!...  Ce  n'est  pas  que  nous  n'ayons  des 
frais...  douze  voies  de  bois  de  sandal,  six 
fagots  d'aioës..,  ce  qui  est  énorme. 

Vaudeville  de  Voltedre  chez  Ninon. 

QufJqtiefols  pourtant,  j^en  conTÎcn, 
Lu  famille  nous  en  tient  compte  ; 

34- 


aBa         LA  VEUVE  DU  MALABAK. 

Aussi  mes  affairés  vont  bieo , 
Et  ma  fortune  sera  prompte. 

MADAME   DUPRE ,  à  plrt. 

Je  n^eo  reyiens  pas ,  c'est  aflfreur  ! 

(A  BruU-Pha-Ooa.  ) 
An  moios  >  dlles-moi ,  je  yous  prie , 
Pent-OD  se  faire ,  dans  ces  lieux , 
Assurer  contre  l'iacendie. 

BAVfiL-PBA-€OS« 

Il  n'y  a  pas  encore  de  compag[iiîe  d'assu- 
rance. 

Mais 9  Monsieur,  lorsque  les  gens  ne  sont 
pas  du  pays  y  leurs  feiiitnes  sont-elles  obli- 
gées?... 

BRULL-PHA-GOS. 

Non  9  certainement.  A  nïoiiis'queles  maris 
ne  se  soient  fait  natui^aliî^ëri  aûquef  cas  il 
est  jtiste  qu*i1é  jôùîsSént  des  préro^dtiVCs  et 
desavantag^s^...  « 

M««  Dvpas. 

Ah  I  mon  Dieu  l 

vitii-ftiA'GOs.  ' 

Qu*aYez-Yous  donc? 

M*'    DOPRé. 

Bien...  Vous  appelez  cela  un  avantage  ?  ^ 


SCËNEIV.  263 

BRULL-PHA-GÛS. 

C'en  est  uq  réel. 

Âii.  :  îRi  Ménage  de  garçon. 

Chez  nous ,  aouTent  glacé  par  Page ,  ^ 
Maint  vieil  épouz  a  le  maliicur 
De  ne  trouver  dans  son  ménage 
Qu^indififérence  et  que  froideur  \ 
Mais  un  espoir  calme  son  amc 
Et ,  tût  ou  tard ,  cliaque  mari 
Est  toujours  cerlaîn  que  sa  femme 
Finira  pai^  bktâcr  pour  lui. 

Allons ,  je  reviendrai  voir  ce  cher  Dupré.. 
Ah!  il  est  marié...  {ji  parti  )  Encore  une 
pratique  de  plus..» 

(Il  sort.) 

SCÈNE  IV. 

M"»"  DUPRÉ. 

YditAun  ârbotnîDablê  hotïiQoiie  !  et  si  jamais 
il  refliet  fes  pîeds  chez  moi.. .  Mats ,  en  effet , 
je  crois  me  rappeler  maintenant  que  j'ai  en- 
tendu dire  autrefois  qu'au  Malabar...  On  n'a 
jamais  vu  une  coutume  pareille  î...  C'est  un 
pays  où  l'on  ne  peut  pas  vivre...  Comment! 
si  mon  brutal  de  mari  venait  à  mourir ,  je 
fierais  obKgée...  Cette  idée-là  serait  capable 
de  vous  dég^oûter  du  yeuvage. 


364         ^^  VEUVE  eu  HÂLÂBAPu 

SCÈNE  V. 

M°^  DIAPRÉ,  DUP&É. 

|>  u  p  R  É  entre  pf  écipitamoieiit ,  et  jette  son  diapeau 

sur  la  table. 

Ouf  !  ce  n'est  pas  sans  peine  ;  maïs  enfin,.. 
(  Apercevant  madame  Du  pré,  ]  Âh  !  te  yoilik 
encore  là  ? 

Pendant  ton  absence  il  est  Tena  une  vi- 
site... (Se  reprenant,)  Ah  !  mon  Dieo  !  comme 
tu  a^  èhaud..«.  S'il  est  possible  de  courir 
ainsi  !...  Voilà  comme  on  attrape  une  mala- 
die. 

DO  PRE. 

Tais-toi  donc^..  J'j;i/  bien  d'autres  choses 
qui  m'occupent. 

M"*  ^upBÉ. 

C'est  pour  cela  que  ce  soin-là  doit  me  re- 
garder... (  Lui  essayent  le  front  avec  son  mou- 
choir» )  Vrai ,  ixion  ami ,  tu  dçvrais  changer.. . 

D  V  p  B  B. 

le  te  répète  que  je  n'ai  pas  le  tems. 

Je  l'en  supplie...  Si  ce  n'est  pas  pountoi^ 
que  ce  soit  pour  moi*..  Il  n'j  a  rien  de  plus 
dangereux. 


s. 


SCENE  V.  '385 

DUPRR. 

£h  i  mais  ,  je  n'en  reTÎens  pas...  Comme 
te  Toilà  radoucie!  Quels  égards!*.,  quelles 
aUeatjoas  1 

M"«   D  Vf  fié. 

C'est  que ,  depuis  un  instant  ^  j'ai  /ait  ties 
réflexions...  J'ai  cace  matin  un  mouvement 
de  vÎTacité  que  je  me  suis  bien  reproché  : 
cette  scètie  m'a  fait  un  mal  !... 

Et  à  moi  donc  !  elle  m*a  tourné  le  sang. 

M™*  pu  PB 6,  vivement. 

Il  serait  possible  !..*  Je  ne  t'en  ferai  plus, 
mon  ami  j  }e  te  le  promets. 

Allons  9  ma  femme  vaut  mieux  que  je  ne 
croyais ,  et  je  con^mence  à  penser  que  son 
caractère...  C'est  bien,  ma  chère  amie;  mais 
laisse-moi ,  j*ai  des  affaires  à  terminer. 

m"*  dvprb. 

Toujours  des  affaires!  Tu  travailles  trop , 
ta  te  fatigues...  t^  ne  te  soignes  pas  assez. 

OVPRÉ. 

Encore'!...  Àh  !  çà,  je  t'en  prie,  modère 
(on  affection ,  et  rentre  dans  ton  appartement. 


a86         LA  VEUVE  DU  MALABAR. 

I  ê 

-  4 

AIE.  ;  Berce ,  berce ,  bonne  grande-mire, 

VcStle v^*l^  »  ^  Diett  tQtéliifcl 
Sur  des  jours  amsi  précieux. 
(▲  ton  mari.) 

Car  c^est  d^une  santé  »  chère 
QUè  dé|idnd  la  nôlre  à  toàs'détik. 

DUPRS. 

T^^eo  iras-tu  ? 

HADAMB   DUPRÉ ,  retenant. 

Surtout  pai'dliDprttdeQce  l 
TttiB^eâtèads-biSen?. . . 

DUPR]£. 

Tu  ¥eux  donc ,  je  le  ?oi , 
Mk  fkyé  id  motirir  d'iib-^àtieùfcé?* 

MADAMS   DUPR£,  s'éloignaot  viveiaéiit.. 

Non,  ce  seul  moi  me Taîf  fôourir  d'effroi. 

fiNSZMULE. 

Veille ,  yeiUe,  6  Dieu  lutéiait^  ! 
Siir  des  jours  aiisSi  précieux  j 
Car'  c'est  d'une  santé  si  chère 
Que  dépend  la  nôtre  à  tous  deux. 

DUPRÉ. 

Enfin  tu  partiras ,  j'espère , 
Tous  mes  instans  sont  précieux. 
Ah  !  d'une  tendresse  aussi  dière. 
Combien  les  liens  sont  ennuyeux. 

(  madame  Ou|)ré  tort.  ) 


I. 


SCÈNE  VI. 

'»..■..  .       .!    • 

Les  femmes,  so.nt  çj^içêiqes  ^p.  {^^\,,.  ^  la 
I  mienne  se  met  une  fois  à  m'adorep  /  il  n'y 
aura  pas  moyen  dytènîi',  moi  surtout  qui 
n'en  ai  pas  Thabitutle.-EiÉfin  eiîê^est  paj'lîe... 
ouvrons  à  M.  de  SuryUle.  Je  ne  sais  à  quoi 
je  m'cxpos^/:^,^ epoiwlftnt,^jî^pr9J^^,,, j^jï^ui 
indiquant  ce  ^a^sage;  .S||irtg5r#in  c^ui.ritfôane 
dans  les  caT^^u;^  4^.l^ffiip^5  HWi^.JQfftQ  pftu- 
▼ais  pas  faire  autrjçgvB»to-»i*iR»iFfmi^j»Uun 
compatriote...  D'un  autre^côté ,  cette  pauvre 
Zéîla!...  la  pitié...  rhumânité...  et  les.iringt 
mille  piastre^  qà^oh  m'a  'pVôniisêsl  !?îèjiiô% 
de  résister  à  des  motifs  aussi  prépônÏÏèrgns^I.. 
(  Pendant  ce  tcms  il  câ'érc^e  parmi  un-ivoussèau 
de  clefs,  et  va  ouvrir  une  p  et  à  é' porté  secrète  qui 
est  à  gauche,  )  EntrësSèVriétraignez  rien,  vous 
êtes  en.:àkv&téi  ■     :  "-.n  •{:.."-. »;'i  r  '3 

DUPRÉ,  SU||Ly.i;[<LE,  ZÉILA. 

A  travers  ces  voûtes  ^literrdines , 


388         tÀ  V£UVE  DU  MALABAR. 

SURVI£LE. 

C^est  Vamour  qur  vient  briser  tes  chaînes  y 
Zéiià,  calme  enfin  ^n  effoi* 

Ah}  gi^and  Dieu!  cVsl  Henri  que  je  vot. 

JSURVXLLB. 


I    .    <   I  • 


Oui ,.  TQOS  ites  chez  moi.  ;< , 

'Veus-révôiir  a^aint  iwa  dèrnîete  héîiW,  '[ 
De  Wdï  Toeux  c'était  fc  pfos  doûxi;  "  '  ' 
An  tombeau  cil!  rëpdux  que  j&  ^leorè , 

""U  jpirUlift»  et  je  pensais  i  vous; 

.,.'.■>        .         •        >ii 

.    SNSEMBXiS. 

De  frajeur  mon  oœut  palpite  et  treanble  ^  ^ 

De  Brama  redoutez  le  courroux  ,' 
'  '  Au  lombeaai.ie  dois  suivre- un  époux  : 
De  giace  eloignez-vous. 

C'est  Tamour  qui  tous  deux  nous  rassemble  y. 
De  Brama  je  crains  peu  le  courroux , 
Car  je  suis  votre  ampnt ,  votre  époux  ; 
Oui  i  je  suis  vobe  époux. 

Oui,   Madame,    Monsieur   vous   afme, 
TOUS  épouse  et  vous  eoiiuèue. 

ZÊILA. 

Ilclas  !  que  je  le  voudrais  !  Mais  un  autre 


SCÈNE  VII.  a99 

sort  m'attend  :  mes  amis,  mes  parens  le  disent 
tous. 

Je  crois  bien  ,  si  vous  consultez  yos  héri« 
tiers. 


ZEILA. 


Non  9  ils  prétendent  qtie  Brama  me  puni- 
rait 9  si  je  désobéissais  à  mon  époux. 

▲IR  du  vaudeville  de  Vhomrhe  uer*t*\ 

£d  mourant ,  son  ordre  suprême 
Veut  que  je  partage  son  sort  f 
Car  nos  maris  ont  pour  système 
Qu^on  soit  iîdèle  après  leur  mortf 

DUPBJB. 

Après  leur  morl^  être  Bdèle  1 
Chez  nous  Fépoux,  moins  exigeant, 
Est  trop  heureux  lorsque  sa  belle 
Veut  bien  Tétre  de  son  vivant. 

ZEICA» 

Sahs  compter  qu'on  est  irès-mécbant  dans 
cette  yille.  Si  je  ne  meurs  pas^  toutes  les 
dames  de  ma  connaissance  vont  dire  du  mai 
de  moi  ^  et  me  voilà  déshonorée  dans  le 
pays. 

Quoi  !  c'est  là  le  Vrai  motif  7 

ZÉlLA. 

Ouï ,  Monsieur ,  il  n'y  en  a  pas  d'aufre  } 

F.  Vaudevilles.    3.  ^^ 


29©         LA  VEUVE  DU  MALABAR. 

6an^  ceia  y  je  n'ai  pas  plus  «n?ie  que  yous 

d'être  brûlée. 

■/ 

TRIO. 
àimDire  à  moi  sans  mystère,  (D'Elisca.  ) 

SUJIY1LI.E. 

Quoi  !  rhonneur  vous  invite 
A  Djiourir  pour  votre  époux  ? 

ziiLA. 
Oui  y  oui. 

DVPRE. 

Ce  mari  qui  vous  quitte, 
La ,  franchement ,  Taimiez-vous  ? 

ziiLk, 

Non  f  non.  Mais  c^est  là  qu^est  le  mérite  y 
A  ce  que  l^on  dit  chez  nous. 

SUAV1I4LE. 

Dieu  !  quelle  erreur  profonde  ! 
Pour  ne  plus  être  avec  lui , 

DUPKlê   ET    SURVILLE. 

S^il  est  dans  Tautre  monde , 
Demeurez  en  celui-ci. 

/  ZEILA. 

g  I     Je  vais  en  Tautre  monde 
g  T     En  regrettant  celui-ci. 

^  \  '  j 

w    \  SURVILLE   ET   BUPRB. 

"  f     S^il  est  dans  Fautre  monde , 
\     Demcureaf  en  cclui-d. 


SCÈIfE  VII.  291 

DUPAÉ. 

Oui  y  calmez  TOtre  peur , 
Vous  voulez ,  à  ce  qu'il  me  semble  ^ 

Mourir  par  point  d'houDeur  ^ 
£h  bien  !  si  j'accordais  ensemble 
£t  votre  amour... 

ZÉILJl, 

Et  mon  amouK.  < 

'  SUPAÉ. 

£t  votre  honneur... 

ZÉILA. 

Et  mon  honneur  ! 

DUPRi.. 

Tous  deux  ensemble  ! 

ZÉILI.. 

Tous  deux  ensemble. 
L'existence  alors ,  je  le  croî , 
Aurait  trop  de  charmes  pour  moi* 

BTJPR^. 

Sur  moi  que  Ton  se  fonde , 
Et  j'espère  qu'aujourd'hui ,, 
Morte  pour  tout  le  monde  , 
Vous  ne  vivrez  que  pour  lui. 

ZÉILA  ET    SURYILLK. 

I  Par  quel  moyen? 

DUPRli. 

Je  ne  dis  rien. 
Promettez-moi... 


39Î         LA  VEUVE  DU  MALABAR. 

zilLA. 

Oui ,  sur  ma  Toi. 

DUPBÉ. 

D'être  tranquille 

Eu  cet  asile , 
Et  (le  uos  soins,  je  le  promets, 
Bien'ot  vous  verrez  les  effets. 

Oui ,  de  vos  soins ,  je  le  promets, 
Je  vais  attendre  les  effets. 

SURVILLE. 

Oui ,  de  ses  soins ,  de  ses  bienfaits , 
Daignez  attendre  les  elFels. 

ZÉILA. 

A  vous  je  me  confie , 
Et  je  renonce  à  raourîr, 
Comment  quitter  la  vie , 
Quand  Tamour  peut  rcmbclUr  \ 

g  <  SDRVILLE   ET    DUPRlé. 

g  j         C'était  une  folie , 

De  vouloir  ainsi  mourir. 

Comment  quitter  la  vie 
Quand  Tamour  peut  Tembcllir  ! 
(  Dupr^  conduit  Zeila  dans  la  chambre  %  droiU.  ) 


SCÈNE  VII I.  .         393 

SCÈNE  VIII. 

^ES  pRBcéDENS^  excepté  Z É I L A . 

6URTILLE  >  suivant  des  jeux  Zéila  qui  entre  dans  la 

chambre. 

Pauvbb  femme  !  quelle  horrible  coutume  I 
(  A  Dapré,  )  Mais ,  dis-moi  :  comment  es- 
pères-tu la  sau?er  9  et  quel  est  ton  moyen  ? 

OVPRB. 

Le  mojen  le  plus  simple ,  et  qui  plus  d'une 
fois  sans  doule  a  déjà  dû  être  employé.  Ap- 
prenez donc,  Monsieur,  que  toutes  celles 
qui  montent  sur  le  bûcher  n'en  meurent  pas. 
J'ai  connu  ,  sur  la  côte  du  Coromandel ,  une 
brave  femme  qui  avait  déjà  été  brûlée  en 
premières  et  en  secondes  noces,  et  qui  con- 
volait en  troisièmes. 

SVRYIttE. 

Il  serait  possible  ! 

DVPRÉ. 

Vous  sentez  bien  que  cela  n'est  pas  natu- 
rel, et  qu'il  y  a  là-dessous  quelque  tour  de 
gibecière  ou  d'escamotage.  Eh  bien!  Mon- 
sieur, partout  où  il  y  a  des  escamoteurs,  il 
faut  des  bompères  et  des  dupes.  Les  dupes 
«eront  les  spectateurs,  qui  sont  déjà  placés  et 
quf  attendent  la  cérémonie;  le  compère,  ce 
sera  vous,  si  vous  voulez  bien  le  permettre. 

35. 


294         LA  VEUVE  DU  MALAbAR. 

SG&Vl  LIE. 

Moi  î  et  que  poiirrai-je  faire  ? 

DrpfiB. 

Aller  trouTerun  certain  AHBruU-Pha-GoSy 
tme  espèce. de  courtier  5  qui  est  chargé  des 
détails  de  la  cérémonie  ^  de  l'ordonnance  du 
b(Vcher ,  et  surtout  du  soin  de  conduire  la 
veuve  9  dont  les  traits  sont  presque  toujours 
cachés  par  un  grand  yoile  ,  notez  bieti  cette 
dernière  circonstance: /Comme  FindiTidu  au- 
quel je  vous  adresse  est  un  coquin ,  et  que  je 
le  connais  ,  c^est  uà  de  mes  amis,  vous  pou- 
vez hardiment  aborder  la  question.  Offrez- 
lui  jusqu'à  la  concurrence  de  trente  à  qua- 
rante mille  piastres;  vous  pouvez  marchander, 
mais  c^cst  un  prix  fait^  vous  «e  Taurez  pas  à 
moins  ^  ,et,  moyennant  cette  somme  ^  il  se 
chargera  du  reste. 

SOBVJILE. 

Comment  IZéila... 

DUPEE. 

Sera  brûlée  par  procuration  ;  c'est  â  lui  de 
trouver  quelqu'un  ,  de  découvrir  un  rempla- 
çant. 

AIR  :  VmideytilU  de  Partie  carrée. 

On  fournit  <out ,  et  de  ce  sacrifice 
C^cst  à  lui  seul  alors  de  se  mêler. 


scÈiTE  vnr;  99S 

SUAVILLE. 

T  penses- tu  ?  comment  veux-tu  qu^il  puisse; 
Trouver  des  gens  qui  se  laissent  bcà)er« 

DUPRi. 

Pourquoi  donc  pas?  en  ces  Heux  comme  en  France^ 
On  trouve  tout ,  et  pour  de  For ,  morbleu  ! 
Combien  de  gens  de  notre  connaissance 
Qui  se  mettraient  au  feu  ! 

Pendant  cctems^  nous  nous  embarquons^, 
vous  et  votre  veuve,  moi,  ixia  femme  ,  mes 
richesses ,  et  le  peu  de  marchandises  qui  me 
I       restent. 

8URTILLC. 

Comment  !  tu  veux  aussi  ?... 

DU  PRÉ. 

Je  n'irai  pas  rester  dans  le  pays  après  notre 
expédition;  depuis  long-tems  je  veux  rétour- 
■       ner  en  France ,   et  je  ne  p.uis  trouver  une 
plus  belle  occasion. 

6«K  VILLE. 

Qui  ;  mais  songe  donc  que  de  te  voir  partir 
ainsi  avec  armes  et  bagages  ,  cela  peut  exci- 
ter des  soupçons. 

Bupsé. 

Vous  avez  raison,  il  faudrait  d'ailleurs 
trouver  un  moyen  pour  fermer  ma  maison  ,^ 
renvoj'er   mes    domestique^ ,    et    pt*océdeÊ.' 


9^         LA  VEÛTEDUMâLâBâB. 

tranquillement  an  déménagement...  J*ai  une 
idée...  silence  !...  c'est  ma  femme;  il  faut 
qu'elle  ne  sache  rien  :  faites  seulement  sem-* 
IflsLUt  de  me  chercher  dispute. 

8VBTII.LB. 

pour  qiielle  raison  ? 

QUBIB9  bas. 

Je  TOUS  le  dirai.  (Haut,  )  Monsieur,  voua 
l^renez  chez  moi  un  singulier  ton  !  (  Bas.  ) 
Allons.... 

SCÈNE  IX. 

Uss  PRiciD«ii9>  M™"  DUPRÉ. 

8UATI£LE. 

MoNsiBVB.,,  je  trou?e|e  vôtre  encore  jplti^ 
singulier, 

M*"   DUP&B. 

flh  I  mon  Dieu  !  qu'y  a-t-il  done  ? 

ou  P Ré  9  très-haut. 

C'est-à-dire,  Monsieur ,  que  tous  me  prc-« 
nez  pour  u^n  sot  P  (  Bas.  )  Dites  que  oui. 

SVRVILLE,   très-haut. 

'  ■  •  t 

Monsieur..^  je  tous  prends  pour  ce  qun 
TOUS  êtes. 


SCÈNE  IX.  397 

DVPBÉ. 

Cela  me  suffit,  Monsieur...  tous  m*iûsul- 
tez...  et  si  tous  m'avez  compris... 

SORYILLE. 

Pns  encore,  Monsieur,  et  c'est  moi  qui 
TOUS  demande  une  explication. 

DUFftÉ. 

Je  ne  demande  pas  mieux.  (  Bas^  )  Descen- 
dez avec  moi ,  je  tous  dirai  ce  qu'il  faut  faire. 

M°^    DU  PRB. 

Ab  !  mon  Dieu  !  ils  se  parlent  bas. 

t  DTJPRÉ,  bas. 

Je  reste  ici  avec  un  esclave  qui  m'est  dé- 
Toué  ;  et ,  grAces  à  la  ruse  que  je  médite  , 
nous  serons  depuis  long-tems  en  mer  qu'on 
ne  se  sera  pas  aperçu  de  ma  disparition. 

suaviLLE. 
Cela  suffit...  sortons. 

!  DU  PRÉ. 

Oui ,  sortons. 

m""    du  PRB. 

Mais,  mon  ami ,  où  vas-tu?...  et  songe 
donc...  s'il  t'arrivail  malheur  !... 

*  DU  PRÉ. 

Cela  ne  te  regarde  pas. 

(Il  sort  avec  Surville.) 


a^8         LA  VEUVE  DU  MALABAR, 

SCÈNE  X. 

M™»  DIJPRÉ. 

Comment?  cela  ne  rae  regarde  pas!..,  Eiv 
France ,  à  la  bonne  heure...  mais  dans  ce 
vilain  pays  ,  avec  leurs  maudites  coutumes  ^ 
on  est  bien  obligé  malgré  soi  de  se  mêler  des 
affaires  du  ménage....  Mais  je  ne  reconnais 
).lns  mon  mari...  lui  qui  était  si  poltron  et 
si  maladroit...  il  ne  sait  pas  qu'il  défend  ses 
jours  et  les  miens;  et  il  est  capable  de  se 

laissertuer  comme  un  simple  célibataire 

Hein!  qui  vient  là  ?  s'ont-ce  des  nouvelles 
que  Ton  m'apporte  ? 

SCÈNE  XI. 

M»=  D  U  P  R  É ,  B  li  l)  L  L-P  H  A-G  0  S. 

r 
BRTJLL-PHA-GOA. 

Par  exemple!  voilà  un  événement!  je  ne 
m'y  serais  jamais  attendu. 

W""    flUPEF.. 

11  est  arrivé  un  malheur? 

BRVrL-PHA-GOS. 

Le  plus  grand  de  tons...  Vons  savez  bien 
Zéila  ,  cette  jeune  veuve  doni  je  vous  ai  parlé 
ce  malin...  et  qui  paraissait  si  bien  disposée..* 


SCÈNE   XI.  299 

Je  Viens  de  descendre  dans  le  caveau  où  elle 
était...  Disparue  avec  les  diatnans. 

Comment  l  ce  n'est  que  cela  ? 

BBULL-PHA-GOS. 

Ce  n'est  que  cela!  mais  c'est  inoui!.. 
sans  nous  prévenir  encore!...  nous  qui  y 
comptions...  Songez  donc  que  tout  est  prêt 
pour  la  cérémonie,  et  je  venais  consulter  ce 
cher  Dupré  ,  qui  a  quelquefois  des  idées  !...• 
Est-il  rentré? 

M™'    DUPKÉ. 

Ah!  bien,  oui ,  rentré..,,  bien  mieux  que 
cela...  il  est  ressorti...  Où  croyez-vous  qu'il 
soit  dans  ce  moment?.:..  A  se  battre.  Mon- 
sieur. 

BRULL-FH  A-COS  ,  sc  frottant  les  mains  en  signe 

de  salisfaclion. 

Comment!  à  se  battre/...  il  serait  p os*- 
sible  ? 

M"*    DOPRi,    àp»t. 

Ah  !  mon  Dieu  !  qu'est-ce  que  j'ai  dit  là  ?.. 
{Haut.)  Non,  Monsieur,  non...  c'est  une 
simple  explication...  {On  entevd  un  coup  de 
pistolet,)  Un  raccommodement...  une  ex- 
plication... avec  un  ami...  et  vous  ,  qui  devez 
le  connaître...  vous  devinez  que  dans  un  mo- 
ment...  cela  finit  par  un  déjeuner...  Tenez 


3oo         LA  VEUVE  DU  MALABAR; 

s*csl  lui  qui  revient...  {j^ percevant  Surville*) 
C'est  4*autre...  ah  !  mon  Dieu  I  mes  genoux 
fléchissent. 

SCÈNE  XII. 

LES   PRBGKDEI789    SUftYILLE* 

svAYilLE,  à  part. 

ÀLioi^s,  fcsons  ce  que  Dupré  m^a  dit> 
puisqu'il  a  ses  raisons 

£h  bien!  Monsieur  ^  parlerez  -  vous  ?««.. 
qu^avez-YOUS  à  m'annoncer? 

svavii.£E. 

Madame...  mou  silence  et  mon  trouble 
VOUS  en  disent  assez...  vous  êtes  témoin  que 
c*est  lui  qui  m'a  provoqué  :  mais  l'événement 
n'en  est  pas  moins  aifreui:..,  ce  pauvre  Du- 
pré!... 

Il  est  défunt  ? 

SUKVILLE. 

C'est  vous  qui  l'avez  dit. 
Dieu  !...  je  suis  veuTc. 


SCÈNE  Xfll.  ^        3oc 

BAO  K.L-P  HA-G  OS,   tirant  son  calepin  et  écrivant. 

Ce  que  c'est  que  de  nous!...  Comme  les 
accideos  arrivent  ! 

SURVILLE. 

On  vient  déjà  de  renvoyer  les  acheteurs 
qui  étaient  en  bas  dans  les  magasins  :  on  a 
fermé  les  portes,  les  fonêtres... 

BHULL-PHA-GOS. 

Conformément  à  Fusage. 

SVBVILLE. 

Je  n'ose  moi-même  rester  en  ces  lieux  >  et 
vais  porter  ailleurs  mes  regrets.  (  A  part.  ) 
Pendant  que  Dupré  dispose  tout  pour  notre 
départ ,  courons  chez  le  courtier  de  com-< 
merce  dont  il  m'a  parlé,  Ali  Brull-Pha-Gos, 
près  la  grande  pagode  :  il  faudra  bien  que  je 
le  trouve. 

(Il  sort.) 

SCÈNE  XIII- 

LES  PBÉGÉDBR  S,  exccpté  SUKYILLE. 

BRVLL-PBA-GOS. 

Dieu!  comme  cela  se  rencontre!...  moi 
qui  venais  demander  à  Dupré  quelque  moyen 
pour  sortir  d'embarras. 

F.  VaudeviUes.  3.  ^6 


3t)a         J.A  VEUVE  DU  MALABAR. 

une  D  V  p  A  É  •  qui ,  pendant  tout  ce  tems  ,  est  restée 

sur  sa  chai&e. 

On  n*a  jamais  vu  de  femme  plus  malbeu<- 
reuse  ! 

BRULL-PHA-GOS. 

Je  conçois  combien  votre  douleur  est  lé- 
gitime :  ce  cher  Dupré  était  si  bon  ! 

Lui  ?  il  était  brutal ,  colère  ,  ah  ! 

BRULL-PHA-G09. 

Je  ne  dis  pas  non...  mais  Tamour  qu'il 
Avait  pour  vous... 

M™*  D  V P  r£  9  de  mêroe. 
Depuis  cinq  ans  il  m'avait  abandonnée. 

BBVLL-PHA-GOS. 

Je  ne  dis  pas  non...  mais  la  concorde  qui' 
auparavant  régnait  entre  vous... 

M™*'    DU  PRB. 

Nous  nous  disputions  sans  cesse...  Ah! 
quelle  perte  I  je  suis  bien  malheureuse. 

BftUtt-PHA-GOS. 

Je  VOUS  en  prie  ,  madame  Dupré ,  calmez 
voire  clonlenr;  votre  désespoir  est  si  grand, 
que  ce  «era  pour  vous  une  consolation  de 
remplir  votre  devoir. 

(  Il  lui  présente  Tagenda  sur  lequel  il  a  écrit.  ) 


SCÈNE  XIII.  3o3 

M™''  D  u  »  a  é 
Qu'est-ce  que  c'est  ? 

BRULL-PHA-GOS. 

I 

Une  simple   formalité  :  il  s'agit,   comme 
veuve  ,  d'écrire  là  votre  aom. 

jj  uc   D  u  PUÉ  ,   essuyant  ses  yeux. 

Comment  !  voilà  tout  ce  que  vous  exigez 
de  moi  ? 

BRULL-PH  A-GOS. 

Pas  autre  chose. 

la™*    DU  PRÉ. 

£h  bien  !  alors... 

BRt  LL-PHA-GOS. 

C'est  tout  uniment  pour  prendre  date.... 
parce  que  souvent  U  y  a  foule...  mais  main- 
tenant que  vous  êtes  enregistrée,  vous  voilà 
certaine... 

M™*    DVPRÉ. 

De  quoi  ? 

BRULl-PH  A-GOS. 

De  ce  que  je  vous  disais  ce  matin...  de 
paraître  à  celte  auguste  cérémonie  qu'ont 
établie  en  ces  lieux  nOs  lois  et  nos  usages. 

m"*  du  pré. 

Comment  !  Monsieur  ;  je  serais  obligée  de 
mourir  pour  un  mari  qui  ne  sait  pas  vivre  ? 


3o4       LA  VÈUVEDUMALADAR. 

BUrLL-PH  A-COS. 

On  ne  force  personne...  Mais  dès  qu*oa  a 
signé  9  il  n*y  a  pas  moyen  de  s*eQ  dédire. 

(  M"**    DU  PRÉ. 

Mais  c'est  donc  une  fournaise  y  un  enfer 
que  ce  pays-ci  ? 

BRDLt-PBA-GOS. 

Vous  avez  an  moins  l'avantage  de  ne  pas 
attendre,  et  de  profiler  d'une  belle  occasion... 
un  bûcher  magnifique  !. ..  bûcher  de  première 
classe. 

M"*®    DU  PRÉ. 

Ah  I  mon  Dieu  !  que  faire  ?  Personne 
n'arrivera-t-il  à  mon  secours  ? 

BROLL-PHA-GOS. 

Walse  de  Hossiiii, 

Oui ,  partons  à  Tinslant , 

Déjà  Ton  TOUS  attend. 

Et  voyez  quel  bonheur 

D'avoir  un  protecteur , 

Songez  <2ooc  que  personne 

N'eût  un  pareil  honneur  ;  * 

Le  tour  que  je  vous  donne 

Est  un  tour  de  faveur. 


SCENE  XIV.  3o5 

SCÈNE  XIV. 

LES  PRECEDEES,    ZÉILA,  sortant  du  cabinet 

à  droite. 

* 

*  ZEILA. 

Sst-ceIuî  ?  je  croyais  reconnaitrfe  ses  pas  ! 
Bélas  !  j^attends  eu  vain ,  Henri  ne  revient  pas. 

BRVLL-PRA-OOS. 

Que  TQÎs-je  !  Zéila... 

ZJÉIL\. 

0  rencontre  cratlle  ! 

MADÀMS    DUPRi. 

Que  dites- vous  ?  c^est  cUç« 

BRULL-PEÀ-GOS  ,  à  Zéila.* 

Et  l*on  osait  pourtant  accuser  votre  xèle  , 
Partons ,  suivez  mes  pas... 

ZÉILA. 

Que  vais-jc  devenir  ? 
Henri  !...  Sans  le  revoir  il  faudra  donc  mourir. 

BHUiL-PHA-GOS ,  à  part. 

Deui  pour  une... 

^  A  madame  Duprê.  ) 

Ce  soir  je  compte  revenir. 

a6. 


/ 


3o6         LA  VEUVE  DU  MALABAR. 

Oui,  partons  à  l'instant,  ; 
Déjà  Ton  nous  attend , 
Et  je  sens  que  mon  cœur 
Succombe  à  îa  douleur. 
Oui  i  comment  vivre  encore 
Après  un  tel  roallieuri 
Le  destin  que  j^implore 
Est  plus  qu''uae  faveur. 

MADAME   DtJl'K£. 

J'échappe  en  cet  instant 

Au  destin  qui  m'attend  ; 
g  /         Voyez  donc  quel  malheur 
g  (  Qu'un  pareil  protecteur  ! 

Pour  déplacer  personne  .  . 

J'eus  toujours  trop  bon  cœur , 

Et  ne  veux  qu'on  me  donne 

Aocaik  tour  de  faveur. 

«HtLL-PHA-CDSv 

Oaiî-,  paitmu;  à  TinstaDt , 
Déjà  l'on  vous  attend  ; 
Mais  selon  votre  gré  , 
Bientôt  je  réviendrai , 
Car'vous  voyez  la  suite 
De  votre  peu  d'ardeur  ^     ' 
Une  autre  ici  profite 
De  ce  tour  de  faveur. 

Mais ,  qu^ici  votre  cœur  ne  sott  pas  4i^  j.lloux  ; 
Pour  vous  prendre ,  bientôt  je  reviendrai  chez  voiis. 

(il  soit  et  emmène  Zéila.') 


M 


SCÈNE  XV.  3o7 

SCÈNE  XY 

M-    DUPRÉ. 

Pauvre  femme!....  elle  v  va  :  et  voilà 
connue  je  serai  demain...  ce  n^est  que  dif- 
féré... •  et  tout  cela  y  c'eët  de  la  faute  de 
Dupré. 

▲lA  de  Turervie. 

Omî  ,  de  sa  p«t  t^tst  une  perfidie. 
Pleurez ,  mes  yeux  ^  et  foudcz-vous  eu  êau  » 
Vous  le  voyez  ,  la  moitié  de  ma  vie 
Va,  dans  ce  jour,  mettre  Pautre  au  tombeau. 
Perdis  lèu  époux  est  ua  tdup  bien  foBCste  ; 
Mais ,  j'en  oonviens ,  dans  ua  pareil  revers, 
Je^plairis ,  béla^  !  là  moîllé  que  je  perd« 
Biea  moius  que  œlle  qpni  me  reste. 

(  S'essuyaot  les  yeux.  ) 

Mais  }c  SUIS  bien  bonne  d*être  là  à  me  dés^ 
espérer  et  à  attendre  le  danf^er...  Arrivera 
ce  qu'il  pourra  5  puisqu'il  doit  revenir  ce  soir, 
je  pars  à  Tinstant  même  ,  quand  je  devrais 
aller  au  bout  du  liionde  ...  (  E iU va  pour  bot- 
<'r,  ety  rencontrànrDupréy  ellepouêse  un  grand 
(ri  )  Ah  I 


3o8         LA  VEUVE  DU  MALABAR.   , 

SCÈNE  XVI. 

DUPRÉ,   M-  DUPaÉ. 

Ma  femme L...  ma  femme!....  qn*as-to 
donc? 

M™*  Durai. 

Cette  fois ,  je  ne  me  trompe  pas ,  c'est 
bîeo  lui  :  tu  existes  ^  n'est^e  pas  ?•..  tu  en  es 
bien  sûr  ? 

DUFRB. 

Je  t'en  donne  ma  parole  d'honneor* 

Alt  :  Du  partage  dfla^hesse. 

Jiis  aujoârd^bui  nous  quittons  ce  rivage , 
Mais  on  pouvait  soupçonner  nos  projets  \ 

Et  j'ai  piis  le  parti  fort  iage' 
D^être  défunt  pour  m^en  aller  en  paix. 
Ma  mort  notait  qa^une  ruse  nouvelle  ;  ' 
Mais  j'ai  voulu ,  par  un  ordre  prudent  y 
Qu'on  te  Tapprit ,  afin  que  la  nouvelle 

St  répandit  plus  proinptement. 

M"»*  BVPBi. 

Si  tu  savais  TcfTet  que  cela  a  produit  sor 
moi!...  la  joie...  la  crainte... 


SCÈ5EXVI.  !3o9 

DUPEE. 

Mais  5  euectivement*..  sa  physionomie  est 
toute  reayersée  !  Je  n'aurais.jamaîs  cru  que 
ma  femme  m*aimât  à  ce  point-là. 

M"*  D  tr  p  R  é ,   le  retenant  par  la  main. 

Reste  là  ;  ne  t'éloigne  pas...  que  je  te  re«- 
garde  encore...  Dieu  !  qui  m'aurait  jamais 
dit  que  la  vue  de  mon  mari  me  ferait  tant  de 
plaisir! 

BUPRB. 

Ma  femme...  ma  chère  Angélique  !...  ai-je 
été  injuste  à  ton  égard!...  Etre  adoré  à  ce 
point-là  f  et  sans  s*en  douter  ! 

M"*    DVPRB. 

Quand  j'ai  cru  t'avoir  perdu  ,  si  tu  savais 
quel  a  été  mon  désespoir!...  j'ai  manqué  ne 
pas  te  survivre. 

DVPRB. 

On  n'a  pas  d'idée  d'un  dévouement  comme 
celui-là  !...  va...  je  reconnaîtrai  cet  eicpè^de 
tendresse...  Toutes  nos  affaires  sont  en  or- 
dre... tont  est  disposé,.,  nous  n'attendons 
plus  que  M.  de  Snrville  et  notre  jeune  veuve... 
Où  est-eiie  donc  ? 

Qui?  Zéila?  Ah!  mon  Dieu!  elle  était  là 
tout  à  l'heure,  lorsqu'il  est  venu  un  courtier 
qui  voulait  te  parler,  un  nommé  Brull-Pàa- 
Gos. 


3io         LA  VEUVE  DU  MALABAR. 

D  O  P  B  É. 

Oh  !  Ciel  !  eb  bien  ? 


jjinc    |>upRi^. 


Eb  bien  !...  Zéila  a  voulu  partir  avec  lui, 
et  il  Ta  emmenée. 


dupbe. 


Et  tu  l'as  laissé  faire?...  tu  les  as  laissés 
partir ?..- Malheureuse  !  c'est  fait  «le  nous, 
de  notre  fortune...  Que  dire  maintenant  à 
M.  de  SurvJlle  ?...  Je  n'ai  plus  qu'à  me  brû- 
ler la  cervelle. 

M™*   DU  p  B  É  ,   tombant  dans  un  fauteuil. 

Dieu  !  impossible  qu'aujourd'hui  j'en  ré- 
chappe. 

D  D  p  B  É  9   regardant  par  la  fenêtre. 

De  cette  fenêtre,  qui  donne  sur  la  grande 
place ,  on  aperçoit  déjà  tout  le  peuple  ras- 
«einblé...  et  ce  graud  bûcher  qui  s'élève  au 
centre...  les  feux  sont  allumés,  mais  personne 
encore  n'y  paraît...  {Regardant  par  la  porta^,] 
ph  !  mais,  je  ne  me  trompe  pas...  quel  boii- 
heur!  M.  de  Surville  et  Zéila  qui  viennent 
clfMccôté...  Brull-Pha-Gos  les  accompagne; 
K'oublions  pas  que  pour  lui  je  suis  mort.... 
Ma  femme,  reste  là  ;  je  revfensdans  l'instaat. 

Gomment!  mon  ami ,  tu  t'en  vas? 


S€ÈNEXVII.  3n 

DUPBB, 

Je  tfi  dis  que  je  suis  ]à. 

M™=    DU  PUÉ. 

N'importe...  ce  n'est  pas  la  même  chose., 
j'ai  besoin  de  ta  présence. 

(Duprë  entre  dans  le  cabinet ,  madame  DUpré  reste 

dans  le  fond.) 

SCÈNE  XVII. 

M-'  DUPRÉ,  SURVILLE,  BRULL-PHA- 

GOS,  ZÉILA. 

DBrLL-PBA-GOS. 

Venez  donc  vite...  au  moins  ici  on  peut 
parler  en  sûreté. 

8VB  VILLE. 

Zéila  ,  quelle  a  été  ma  surprise  en  vous 
voyant  traverser  les  jardins  de  la  pagode,  où 
depuis  une  demi-heure  j'attendais  Monsieur  ! 

BBDLL-PHA-C0  9. 

Mais  il  n'est  pas  question  de  cela  ;  parlons 
de  nos  affaires  ,  entendons-nous.  Nous  avons 
dit  quarante  mille  piastres... 

SVRVILLE. 

Les  voici  dans  ce  portefeuille  en  bons  sur 
la  compagnie  des  Indes. 


^li         LA  VEUVE  DU  MALABAR. 

BHULL-PHA-609. 

C4ela  suffit  :  et  comme  un  honnf;te  homme 
ir^a  que  sa  parole,  je  me  charge  de  tout.  Le 
nom  de  Zéiia  sera  à  jamais  en-iionneur  dans 
le  pays  :  chacun  porte  aux  nues  cette  nou- 
velle Arthéinise.  Ainsi  Madame  peut  se  re^ 
garder  comme  authentiquement  brûlée. 

m"*  DVPaé;   à  part 

Ah  !  le  fripon...  si  je  Tavais  su  ! 

BaVL  L-PBA-60S,    à  Zéila. 

Voici  même  le  procès- verbal  que  j*avais  ré- 
digé d'avance,  et  arec  lequel  vous  pouvez 
attester  à  qui  de  droit... 

ZBILA. 

Je  n'en  ferai  pas  usage;  envoyez-le  à  ma 
famille,  c'est  tout  ce  que  je  demande.  Mais 
comment  espérez-vous  faire  ? 

BRUil^'PHA-GOS. 

Cela  me  regarde...  J'ai  ici  quelqu'un  de 
disponible  et  sur  lequel  je  compte  pour  vous 
remplacer. 

M"""   D  u  p  H  i  ,  à  part  et  s'avançant. 

C'est  ce  que  nous  allons  voir. 

BLULL-PHA-GOS. 

Sans  cela ,  vous  sentez  bien  que  je  ne  me 
serais  pas  avisé  au  moment  même...  Ah! 
vous  voilà  ^  madame  Dupré  9  je  suis  enchanté 


SCÈNE  XVn.  3i3 

de  vous  troiiTeK..  £h  bien!  ma  chère  amie, 
voilà  un  éyénemeut  qui  vous  avance...  vous 
m'av&z  dit  que  tous  étiez  prête...  voici  le 
moment. 

SrKYILLB. 

Gomment  !  ce  serait  Madame? 

BRUIL-PBA-GOS. 

J'espère  que  vous  n'avez  pas  à  vous  plain^' 
dre...  une  petite  femme  fort  gentille  |  fort 
convenable...  Allons |  partons. 

M"*   DU  PRE. 

Avec  grand  plaisir,  mon  honnête  Mon- 
sieur ;  mais  il  n'y  a  qu'une  petite  di.flicultè. 

BaULl-PHA-GOS. 

Et  quelle  est-elle,  s'il  vous  plaît  ? 
M™*  i>  V  p  R  É  ,  ouvrant  la  porte. 
Tenez  ;  la  voici. 

BRXJLL-PHA-GOS« 

C'est  Dnpré  ! 

SUEVILLE. 

Ah  !  mon  ami,  viens  donc  ;  combien  je  te 
remercie  l  J'ai  suivi  tes  conseils ,  et  tout  est 
arrangé.  (Montrant  Brull-Pha-Gos.  )  N'est- 
il  pas  ¥1*31  ? 

BRUXL-PHA-GO  ». 

C'est-à-dire ,  tout  est  Cbt  arrangé...  dans 

f .  VaudcYillcr.  3.  ^3 


3i4         LA  VEUVE  DU  MALABAR. 

ce  9.en%  que  je  suis  dans  on  furieux  embarras^ 
et  que  je  ne  sais  trop  comment  faire. 

s  URYILLE. 

Comment  ?  morbleu  !  Toudriei-Tous  vous 
dédire  ? 

BRULL'PBA-COS. 

Do  tout  y  du  tout  y  TOUS  ayez  ma  parole... 
(Regardant  madame  Dupré.  )  Mais  c>st  que 
je  comptais...  {Regardant  Dupré.)  Il  se  porte 
bien.    , 

DVPRé. 

Je  vous  préviens  du  reste  que  tout  le  peu- 
ple s'impatiente  ,  et  qu'il  y  a  déjà  quelquesi 
minutes  que  la  cérémonie  devrait  être  com- 
mencée. 

B  B  r  t  L-P  H  A-6  o  s  9  il  part. 

Allons,  il  faut  sortir  de  là...  Ce  beau 
mannequin  que  j'ai  enréservepour  lés  bonnes 

occasions...  il  n'y  a  pas  d'autre  moyen...  Ah! 
çà  ,  quoi  qu'il  arrive,  vous  meproip^tleB  le 

secret  ? 

SORTILLÉ. 

Vous  pouvez  être  tranquille,  nous  nou» 
embarquons. 

BRULL-PBA-GOS. 

C'est  encore  mieux  ;  maïs  ne  tardez  pas... 
Au  moment  où  vous  verrez  la  flamme  briller, 


SCÈNE  XVIII.  3i5 

sortez  alors  9  c'est  le  momeot  le  plus  favo' 
rable  ,v parce  que  tout  le  monde  sera  daos  la 
grande  place  à  jouir  du  spectacle. 

DU  F  HÉ. 

Nous  profilerons  de  vos  avis, 

T  0  r  s. 
Adieu  ,  M.  Brnll-Pha-Gos. 

M™*    DUPAË. 

Adieu,  honnête  courtier. 

B&ULt-PBA-GOS. 

Adieu  ,  mes  aiuis ,  bon  voyage.  Allons ,  je 
n*ai  pus  perdu  mon  tems  ;  maisvoili^,  je  puis 
le  dire  »  une  journée  fièrement  chaude. 

(Il  sort.  ) 

SCÈNE  XVIIÏ. 

LES  PBBCÉDÇNS^  exccpté  BRULL-PHA-GOS. 

D  V  p  R  é  «  à  son  époui<*. 

Ma  chère  femme ,  après  toutes  les  marques 
d'amour  que  tu  m'as  données... 

Ne  parlons  pas  de  cela  ici  ;  en  Fi^oce  ce 
tcra  autre  chose. 


» 


3i6         LA  VEUVE  DU  MALABAR. 

FINAL.  ^ 

SUBVILIS. 

▲lA  du  ballet  de  l'Enfant  prodigue. 

Guidés  par  Tespérance , 
Embarquons-nous  promptement  \ 
Aux  rivages  de  France 
Le  bonbeur  nous  attend. 

TOUS. 

Guidés  par  Fespcrancc ,  etc. 

(ils  regardent  par  la  fenétw  du  fond.} 

sunyiLLE. 

Prés  du  bûcher  comme  ou  sVmpresse  l 
J'entends  leurs  accens  d'allégresse  j 

Le  peuple  répète  déjà  : 

a  Honneur,  honneur  à  Zéila!  » 

CHOEUR  en  dehors ,  accompagné  d'instrumens  militairef, 
ti  Honneur,  honneur  à  Zeîia«  » 

SURVILLZ. 

Et  oous ,  pendant  ce  tems-là , 

CHOEUR. 

(a  demi-voix.  ) 
Guidés  par  Pespérance , 
Embarquons-nous  promptement , 
Aux  rivages  de  France 
Le  bonbeui'  nous  attend.  ; 

ZÉILA  ,  au  Public* 

Échapi^ée  k  Tinccndie , 


SCÈNE  XVIIl.'  ^3i7 

Ah  !  daignez ,  en  ce  moment , 
M^assurer ,  je  vous  en  prie ,  ~ 

'  Contre  un  malheur  bien  plus  grand. 
£t  je  dkai  galmcnt  : 

Reprise, 

Guidés  par  Pespérance , 
Embarquons-nous  promptement  t 
Aux  rivages  de  France  / 

Le  bonheur  nous  attend. 


flK  Dl  IiA  TBVYB  DV  KAlAlAft. 


^ 


•  \ê 


LA 

CARTE  A  PAYER, 

OIT 

L'AUBERGISTE  BOURGMESTRE , 

COMÉDIE  EN  UN  ACTE, 

MÊLlLs   P9  YAUDETILLES  , 

Par  HM.  MERLE,  BRAZIER  xt  CABMOUCHE  ; 

Représentée ,  pour  la  première  fois ,  sur  le  théâtre  dt$ 
Ynriétés ,  le  ai  février  i8z8. 


^-.^J) 


PERSONNAGES. 


RAZCOFF,  aTocat  et  barbier. 
GONNINBE&G,  juge  et  aubergiste. 
SAINT-CYR,  peiotce  français. 
GaLOPMâNN,  courrier,  fils  de  RaxcoS 
CATHEEINK,  fille  de  Gonninberg. 
UN  GREFFIER. 

BOMMBS  ET  VEMMES. 
«ARÇONS  d'aVBEKGE.     * 


ÏA.tcÙÊt  le  passe  dans  on' petit  .yillage  d'AlkiHigiiej 


LA 


CARTE  A  PAYER , 


.M». 


COMEDIE. 


Le  tbéâlre  représente  un  saloa  d^auberge.  j 


SCÈNE  PREMIÈRE. 

CATHERINE,  GONNINBERG,  des 

papiers  à  la  main  ;  GiRÇQNS  d'avbe&GB. 

GOXfKlIîBEEG. 
AIR  :  Quand  on  est  mort  c*est  pour  long-'tems» 

ixAiiçoNS ,  De  vons  amusez  pas  ; 
Du  courage , 

Vous  avez  de  l'ouvrage  ; 
Faites  marcher  du  même  pa^ 
La  justice  et  les  bons  repas» 

Que  mon  commerce 

Ne  sonfire  en  rien. 

Qu^à  faire  bien 

Ici  chacun  s^exerce.' 

(  à  un  Garçon.  )  f 

Toi  mets  en  perce 


3aa  LA  CAKTE  A  PATER. 

Un  vieux  tonneau. 
(  A  un  autre.  ) 

Chez-  ma  |)artîe  adverse  » 

Toi  «  varren  de  nouyeau. 
(  A  Un  autre.  ) 

Cbez  mon  huissier 

Porte  uu  dossier. 

(  A  UQ  autre.  ) 

Vile  qu^on  parte 

Me  porter  cette  carte. 
^  A  un  autre .  ) 

Que  le  rôti  surtout  soU  hieu  doré. 
Garçons ,  qu^on  ne  s^ainuse  pas ,  etc. 

LES    GAfiCONS. 

^lons  )  ne  nous  aiuusdas  pas ,  etc. 

(  Ilf  sortent.  ) 

SCÈNE  II. 

LES  raiciDEKSy  excepté  les  gaeçovs; 
puis  GALQPMANN. 

GAtopuAirir. 

£oiiJ[Oi7&  f  'papa  Gonornberg^* 

coiririirBERG,  gatmient. 

Ah  !  te  Toilà  9  Galopmann^  déjà  de  retour 
de  Yiennc  !...  diable  !  c*est  affaire  à  toi.  Que 
viens-tu  faire  ici?.*»  tu  viens  déjeuoer  :  j'ai 
des  grillades  excellente»^. et  de  U  çbxmcraute 
de  Magdebourg. 


SCËREIL  3a3 

Non 5  M^  Gonniobecg,  |e  vieD8.4. 

GONZiiirBEBG,  grat^nteot. 

Ab!  f entends,  te  plaindre  de  quelqucf 
foyageurs  qui  font  mal  paj.é. 

GAL0PHA9. 

Non,  M.  Gonninbergo. 

ÇOKNINBEBC. 

C'est  donc  de  quelques  camarades  qui  t*ont 
£iîtun  passe-droit?...  Parle,  mon  ami,  parle^ 
je  te  ferai  rendre  justice...  qne  dis-je?.,,  je  tè 
la  rendrai  moi-même  :  je  ne  sois  pas  bourg- 
mestre pour  des  prunes. 

GALOPtfANV. 

Mais  5  mon  Dieu  !  ce  n^est  pas  ça. 

GOHNI^iLRC. 

Porte  ta  plainte,  mon  garçon,  por!^  ta 
plainte,  et  passe  chez  mon  greffier..^  Tu  ar- 
rives au  bon  moment^  j'expédierai  ton  affaire 
ce  matin. 

CALOPMA.NTf,   à  part.  ' 

Diable  d'homme  I  (  Haut.  )  Quand  je  yons 
dis  qu'il  né  s*agit  pas  d'un  mot  de  tont  cela. 
Je  viens  pour  vous  parler  de  voire  fifle. 

GOifKiNDERC,   OTCC  bumcnr. 
Pour  me  parler  de  ma  fille  ?...  Parbleu  î  je 


3a4  l'A  CARTE  A  PAYER. 

suiâ  bien  bon  de  Técouter  et  de  perdre  mon 
tems  ayeo  cet  imbécile. . .  Me  parier  de  mm 
fille!...  Voilà  une  coDTersation  bien  intéres- 
saote  pour  un  bourgmestre  ^  un  jour  d'au* 
dieace  encore. 

GALOPMANIV. 

Mais ,  M.  Gonnînberg,  Catherine  est  d'âge 
d'être  mariée,  et  moi  je  l'aime  depuis  six 
mois. 

GONVINBBBG. 

£h  bien!  qu'est-ce  que  ça  me  fait?  d'ailleurs^ 
ma  fille  est  encore  bien  jeune ,  elle  a  le  tems 
de  songer  au  mariage. 

;  CATBERIlfE. 

Qu'est-ce  que  tous  dites  donc  b ,  mon 
père  ! 

AIR  :  yaudeyille  de  lron9-nous  à  Paris, 

5i  i'al  la  ieaneMe  en  partage  » 

Dans  un^  femme  c^nVst  pa$  un  défaut. 

Pour  le  bonheur  il  n^cst  point  d^agc  y 

On  ne  saurait  aimer  trop  tôt. 

Tous  deux  nous  brûlons  d'ia  mëm'  flamme  ; 

Il  raBfoUe  de  mes  seize  ans  ; 

S^il  veut  que  déjà  f  sois  sa  femme , 

C'est  pinu:  être  heureux  pins  long-tems. 

CORNIlf  BERG. 

,    Propos  d'amoureux . . .  Laissez  -  moi  tran- 
quille. 


SCÈNE  III.  U% 

GAIiOFMAlfir. 

J'aperçoi»  mon  pèreî.w.  M.  Gonpiubcrg, 
tâi4i«SE  dooc  d'arranger  ça. 

GOiiNiNBEac,  sans  L'écouter. 

Cailierine ,  £aÎ3  -  pioi  le  fldîsLr  d'alkr  roir 
à  la  broche  si  j'y  suis...  et  toi,  M.  le  courrier^ 
ya  à  ton  poste  ou  à  }^  pp^le. 

(Galopmonn  et  Cajlheri^e  ^Upt. } 

SCÈNE  III. 

GONNINBEBG,   RAZCOFF,   enhabît 

^e  ye^qqwr. 

coarvisBi^aa. 
Eh  !  bonjour  ^  mon  cher  Haacoff. 

BAZGOEF. 

«         •        '  T 

Salut  à  monsieur  U  bourgraeslre.  Gomment 
ya  Fauberge  ? 

«ovvjSBJEac 

Pas  mal,  et  yous?... 

Je  ne  me  plains  pa3  ;  la  |uriâpjriajdeAce  y9 
assez  bien. 

'      GONViSBEKG. 

Et  les  baibes  ? 

F.  Vaudevilles..   3,  aS', 


3)6  LACÂRTE  APÂTEJR. 

RAZGOFF. 

Elles  poussent  beaucoup...  la  saison  est 
fayorable;  vous  savez,  l'été. ..  la  végétatioD.», 

Convenez)  mon  chec,  que  votre  état  est 
bon« 

•Kazgoff. 

Ahl  mon  amî,  défendre  et  raser  Thuma- 
nîté,  sont  les  deux  pkiatbeaux  privilèges  dont 
l'homme  puisse  jouirt 

AI&  :  Vaudeville  â^AAequin  Mmard* 

Be  l'un  suis-je  avocat ,  eh  !  vite , 
Je  m'offre  d^ctre  son  coiffeur. 
Qu'un  autre  à  le  coiffer  m'invite , 
Je  m^offre  pour  son  défenseur.. 
Prenant  mon  intérêt  pour  base  » 
Grâce  à  ces  métiers  différens , 
Si  je  défends  ceux  que  je  rase  » 
Je  rase  ceux  que  je  défends. 

Ah  çà  I  à  propos,  vous  avez  un  étranger  ici  ? 

GONNlNBEEG. 

Oui  9  un  jeune  homme ,  que  je  soupçonne 
être  un  grand  personnage  qui  voyage  inco- 
gnito. 

EAZCOFF. 

A-t-il  un  valet  de  chambre  ?••• 


SrCËNEIIf.  da7 

COJfNlIlBEEG.. 

Non» 

BAZGOFK. 

En  ce  cas»  il  doit  aToir  besoin  de  mes  ser* 
Tlces  :  je  repasserai...  je  repasserai  d*abard 
mes  rasoirs ,  et  puis  je  repasserai  poar  le  coup 
de  peigne. 

GONNINBEEO*. 

Ah  ça  Y  écoutez  dooc;  nos  dîahres  d*enlkns 
me  rompent  la  tête  ée  leur  amour,  il  CEiut 
nous  en  débarrasser..  «.Voyons^  que  donneres- 
Yous  à  TOtre  fils  ? 

B  AZ  C  0  F  F. 

« 

Qu*cst-ce  que  je  donnerai  à  mon  fîlstM,, 
Qu'est-ce  qu'il  yeut  ? 

Q.OIîIfIjrBEB«i^t 

II  veut  se  marier.. 

E^zcaFF. 

Puisqu^il  veut  se  marier,  je  Ini  dlonDerai».... 
)e  lui  donnerai  une  femme. 

QOIÇNIJIBEBG. 

Est-ce  que  fous  ne  lui  donnerez  pas  ^el- 
que  autre  chose  7 

KA^GOFF« 

Un  barbier  de  Tillage  n*est  pas  un  fermier* 
général  ;  tous  savez  aussi^  bien  que  moi  quel 
est  le  prix  d'une  barbe...  deux  sous...  quand 


3a8  LA  CARTE  A  PAYER. 

je  les  ferais  payer  six  b'IanOs  $  il  en  faudrait 
diablement  pour  faire  fortune. 

GONNINBeiiG. 

Mais  ma  fille,  jolî^  coiniiie  elle  est ,  peul, 
aiijoard'hai  pour  demain,  Irolaver  un  riche 
parti, 

Bi.ZC0FF. 

Mon  fils  a  un  très-bon  état,  courrier  de 
cabinet  ;  c'est  unie  des  premières  places  di- 
plomatiques ;  c'est  un  gaillard  qui  tous  mène 
lès  ambassadeurs... 

GOHirilIBEBG. 

Oui ,  quand  ils  courent  la  poste» 

EAZCOFF. 

Il  est  en  très-beau  cbeiidih. 

G0HHI5BÉRG. 

Je  le  crois  bien  y  deux  fois  par  mois  sur  la 
reutè  dé  Vienne,  là  plus  belle  roule  de  l'Al- 
lemagne. 

BAZCOf  F. 

Tout  pftYc. 

GONTTIIVBEBC. 

Mais  songez  donc,  mon  bcin  ami ,  à  Tbon- 
neur  de  mon  alliance ,  à  ma  double  profession, 
qui  est  excellente. 


SCfeNÊ  III.  3tïô 

PREMIER    COUPLET. 

AIR  de  Préville  et  Taconnet, 

Quand  un  procès  chez  mcfi  rassemUe 

Des  amaitélirs  au  jus  cllvm , 

Je  hs  coadamne  à  boire  ensemble 

En  magistrat  qui  vend  du  vin  y 

Et  je  ne  parle  pas  en  vain. 
Servez  ,  gai-çon  ,  dit  le  perdant  tout  triste  ; 
Le  çaguant  crie  :  Allons ,  versez  du  vieux  !  (Bis.  ) 
De  iiigè ,  alors ,  je  deviens  aubergiste , 
Je  vends  mon  vin  et  je  trinque  avec  eux. 

DEUXIEME   COUPLET. 

Mdn  tribnnal  est  ma  guitiguette  : 

Cela  double  mes  intérêts , 

Car  les  tables  de  la  buvette 

Servent'  de  boréaux  au  Palais  ; 

Mais  tout  i^hange  lio  moment  après  : 
Devant  Bacchns  et  sén  joyeux  délirb  ^ 
On  voit  Tiiêmis  prompte  à  se  retirer ,     (  Bis.  ) 
Et  L'on  entend  soudain  chanter  et  rire 
Aux  mèincs  lieux  où  Ton  voyait  pleurer, 

RAZGOFF. 

Malhcureusetnent  il  n'en  est  pas  de  même 
chez  moi ,  attendu  que  je  ne  me  sers  que  d'caa 
chaude.'. 

AÏÏons^  allons,  mon  cher  Razcoff,  faites 

a8. 


25o  LACARTEAMYER. 

un  sacrifice...  saignez-Tous ^  moD  ami,  sai- 
gnez-vous. 

KAZGOFF. 

Je  sais  assurément  quel  honneur  il  y  aura 
pour  mon  fils  à  être  le  gendre  do  bourgmes- 
tre ;  mais  aussi  le  bourgmestre  ne  peut  pas 
vouloir  marier  sa  fille  comme  un  grigou. 

G01fITI5BBBG. 

MaiS)  mon  cher,  tous  savez  que  mon  an-i 
berge  ne  ?a  pas  :  ce  n'est  pas  un  métier  d'or 
que  celui  d'aubergiste...  Excepté  ce  jenne 
Français  qui  est  logé  chez  moi  depuis  deux 
jours,  je  n'ai  pas  vu  une  pratique  de  la 
semaine ,  et  cependant  je  fais  tous  les  jours 
des  provisions  que  je  suis  obligé  de  manger. 

AAZGOFF. 

Je  sens  votre  position;  mais  alors  il  faut 
que  la  fille  d'un  aubergiste  ait  une  dot  pour 
épouser  le  fils  d'un  avocat. 

GONVIUBERG. 

Ah!  voilà  tout  de  suite... ^  avocat!  belle 
affaire  ;  avocat  sans  causes. 

RAZCOFF,  se  fâchant. 

Avocat  sans  causes!...  oh!  ne  touchons  pas 
cette  corde-là ,  je  vous  prie...  Un  avocat  sans 
causes  vaut  bien  un  gargotier  qui  mauge  son 
fonds. 


«0H5I9BEEG>  encolérc. 

Si  je  n'avais  que  des  pratiques  comme  you»> 
â  la  bonne  heure. 

aAZGOFP. 

Vous  ne  trouveriez  peut-être  pas  beaucoup- 
d'avocats  qui  se  contentassent  de  votre  cui^ 
sine. 

6  OVU  IN  B  E  B G  f  se  fâcliaDt. 

'  Ma  cuisine  !...  ma  cuisine!...  vous  avez  uql 
air  de  la  ravaler...  Savez- vous >  mauvaî» 
avocat ,  que  j'ai  élé  dix  ans  dans  la  bouche  de 
TArchiduchesse  ?... 

IHallait  y  rester ,  monsieurMe  magistrat 
des  marmitons. 

GONNiNDEEGy  avcc mépris. 

Ah  çà!  dites  donc»  monsieur  de  la  Houpe^, 
aUez  démêler  vos  perruques  et  débrouiller 
vos  procès. 

EACGOFF. 

Jevous  préviens  d'une  chose,  vous  n'aureft 
plus  ma  pratique...  à  daler  d'aujourd'hui,  je 
ne  dine  plus  diez  vous. 

GONiriNBEEG. 

C'est  autant  de  gapiê. 

EAEGOFF,   fllrieilX. 

C'est  une  horreur!...  je  sors,  oarj'étouflè. 


33îi  LA  CARTE  A  PAYER. 

Ain  :  t^auàépîlîk  dé  Vécu  de  sixjftwics, 

Ali  !  c{uelle  conduite  est  la  yètre  ! 
Non  :  plus  de  liens  entre  nous  : 
Faites-vous  'aser  par  lin  ibtre , 
Qtt^  «fiOre  ii^ssi  ^hiAt  chez  VoOs. 

GOKHtNDÈBG. 

Parbleu  !  tous  ferez  des  merveilles  ! 
Vous  ni^ôbligercz ,  su.  snrpîiii  j 
Gar  vous  ne  m^écôrcherez  plus 
Ki  ie  neotott  ai  les  oreiUet. 

EAZCOFF>  forien. 

Ah  !  par  exemple^  c'est  trop  fort  I...I1  n*y  a 
rien  à  répondre...  Il  n*y  a  pas  un  mot  à  ré- 
pondre S  cela...  s'il  y  en  avait  un  9  moi  qui 
suis  avocat ,  bien  certainement  je  le  trouve- 
rais... mais  il  n'y  en  â  pas  bii  seiil...  (  Fausse 
sortie,  )  Si  9  en  ToHà  trois  on  Cfuatrë...  Silen^ 
iiarn  e9t  àrgmntntam  smpientke,  ou ,  il  Tùut 
mieux  se  taire  que  de  dire  des  bêtises. 

(Il  sort  ) 

SCÈNE  IV. 

GONNlNfiERG. 

Jb  n*en  puis  plu^..  iCe  misérabtie  barbier 
m'a  mis  dans  nrâ  colènb  !...  Se  permettre  de 
mépriser  un  bourgmestre  de  moa  espèce  !..• 


SCÈNE  V.  353 

on  magistrat  I...  Allons  voir  .un  peu  ce  qui  se 
passe  h  la  cuisioe. 

(  n  va  pour  sortir.  ) 

SCÈNE  V.  ^ 

GONNINBERG,  SAINT-CYR,  sortant 

de  la  chambre. 

COVVIlTBERe. 

Ah  !  ah  !  voici  mon  voyageur.  (  Satuanl,  ) 
Seigneur  Irançais... 

SAINT-CYR. 

Bonjour 5  mon  cher  hôte. 

GONNITTBERG. 

Vous  devez  avoir  passé  une  bonne  nuit  ; 
mps  lils  sont  excellens;  vous  avez  la  meilleure 
et  la  plus  illustre  chambre  de  Tauberge. 

SAlNT-CYR. 

Que  m'importe  ?  je  dorsbien  partout. 

GONNINBERG,   à\\n  air  d^iuipor  tance. 

Il  est  pourtant  agréable  de  dire  :  J'ai  cou- 
ché dans  le  lit  de  Tarchiduc  Léopold. 

SAINT-CTR, 

Malepeste  ! 

GONT^INBËRG. 

t'est  une  chambre  que  je  ne  donne  pas  à 


334  LA  CARTE  A  PLAYER. 

tout  le  monde ,  et  si  je  ne  vous  ayats  pa»  jugé 

un  homme  d'importance.*. 

SàlWT-CTB. 

Vous  TOUS  trompe»,  mon  cher  hôte,  je  suis 
un  modeste  Toyageur,  un  peintre  français. 

A  d'autres!  à  d'autres!...  je  m'y  connais- 

SAlTft-CTR. 

Je  me  rends  en  Russie  pour... 

GOKHIWBEEG. 

Oui ,  pour  une  mission  secrète.. 

SAITST-CTII. 

Pour  faire  des  portraits, 

GOHKINBEEG,   fineiBcnt. 

Vous  êtes  un  grand  seigneur. 

saint-cyh. 
Vous  êtes  un  fou  l  mais  [e  vous  dirai  fran- 
chement que..... 

Parle* ,  Monsieur ,  parle». 

SAIKT-CTB. 

Je  suis  à  jeun ,  et  un  petit  déjeuner  ap- 
prêté... là,  à  votre  goût,  avec  ce  talent  qui 
distingue  l'hôte  illustre  de  l'archiduc  Leopold, 
me  rendrait  heureux  comme  un  prince. 


SCÈNE  V.  335 

eONNINBEEG. 

Je  TOUS  eDteDdS)  Mooseigoear^  que  faut-il 
foire? 

SAINT-CtA. 

€e  que  tous  Toudrez.-  Surtout  de  boo  vin, 
et  songez  que  je  Teux  me  remettre  en  route 
tout  de  suite  après  le  déjeuner. 

€01fNINBEE6« 

Quoi!  TOUS  ne  nous  ferez  pas  l'honneur  de 
Toir  les  curiosités  de  la  ville  ? 

SAiifT-CTB,  le  regardant. 

J'en  ai  déjà  tu  plusieurs. 

GOITiriNBERG. 

Je  TOUS  prie  de  receTOÎr  mes  regrets  bien 
sincères. 

SAINT-GTB. 

Préparez  mon  déjeuner  et  la  note  de  ce  que 
je  TOUS  dois. 

GOifiriirBERG,  à  part. 

Nous  Terrons  s*il  est  généreux.  (  Haut,  ) 

Je  sois  désolé  de  tous  Toir  partir...   Mais 

Traîment  je  tous  plains  de  quitter  si  tôt  ma 

maison...»  Dans  la  minute  tous  êtes  servi , 

Monseigneur. 

(Il  sort.) 


336  LA  CARTE  A  PAYER. 

SCÈNE  VI- 

SAlHT-CyE. 

Le  plaisant  original  !...  On  n'est  pas  plus 
curieux...  Holii!  holà  !  mon  couvert!...  Gar- 
çousî...la  fille!...  Allons  donc! 

SCÈNE  VII. 

SAINT-CYR,    CATftPïlISP  amvecD 

pleuraoti 

Ah  !  ab  !  ah  l 

saiht-ctr. 
Comment  !  vou$  pleurez,  mon  enfant  ? 

J'en  ai  bien  sujet  de  pleurer...  Allez ,  si 
TOUS  saviez  pourquoi..; 

Je  pourrais  trouver  les  moyens  de  vpas 
consoler. 

GATBEBIlfC. 

Oh  !  non  »  c'  n'est  pas  vous...  Ça  tous  se- 
rait bien  dinicile. 

SA  I N  T-C  Y  ». 

Peut-être. 


SCÈNE  V\ÏI.  33; 

CÀTREBIN  E. 

J'aîme  un  garçon  de  not'  endrûit,qui  m'aime 
bien  aussi. 

SAINT-CYR. 

Je  ne  vois  pas  li^  de  quoi  vous  chagriner, 

CATHERINE. 

Il  est  fou  de  moi,  et  il  veut  m'éponser... 
Ah  !  ah  ! 

SAIIfT-CTB. 

Est-ce  que  vous  ne  voulez  pas  ? 

CATHERIlfE. 

Si  fait,  mais  c'est  mon  père  qui  s'y  oppose. 

SAINT-CYB. 

Quelles  raisons  donne-t-il? 

CATHEBllTE,  | 

Il  dit  que  Galopmann  n*est  qu'un  courrier, 
et  que  dans  ce  mélîêr-Ià  on  ne  fait  pas  for- 
tuné... C'est  dommage ,  car  nous  aurions  Ailt 
un  si  bon  petit  ménage  ensemble...  Si  vous 
le  connaissiez... 

AIR  :  Et  pourtant  papa.  (Encore  un  i^onrceaugoac.  ) 

PRîMIEX   COUrtET, 

Son  amour  extrême 
Frilie  à  tout  moment  ; 
De  r  chérir  de  même  , 
J'ai  fait  le  serment  j 
F,  Vaudevilles.  3.  29 


338  LA  CARTE  A  PAYER. 

£l  pourtant  papa 
N  '  veut  pas  que  je  Taioie  ; 
S'il  avait  c'cœiir-là , 
Il  n'  dirait  pas  ça. 

DEUXIEME    COUPLET. 

L'aut'  jour ,  à  la  fête , 

Tout  bas  il  m'apprit , 

Dans  un  téte-à-téte , 

Des  choses  pleines  d^esprit  ; 

Et  pourtant  papa 

Dit  que  c'n'est  qu'un'  bêle  s 

S'Ueûtétëlà, 

Il  n'dirait  pas  ça. 

TROISIÈME   COUPLET. 

Quand  il  x'fuse  d'faire 
C'mariage  k  mon  gré , 
Jl  m'dit  :  J'suis  ton  père , 
£t  j'te  rprouverai  ! 
Et  pourtant  papa , 
Du  vivant  d'ma  mère ,  * 
Devant  elle,  da, 
N'eût  jamais  dit  ça. 

SAINT-GTB. 

Allons,  allons,  ma  petite,  du  conrag^e; 
tout  cela  s'arrangera  ;  je  parlerai  à  TOtre  père  f 
je  lui  ferai  entendre  raison. 

CATHERINE. 

Vouj croyez,  Monsieur?  Eh  ben  !  Monsieur^ 
allez  >  TOt' déjeuner  est  serri. 


SCÈNE  IX.  339 

8AJNT-GTB^   à  part. 

Elle  est  charmante  I  oe  serait  dommage  de 
ne  pas  la  marier. 

(Il  sort.) 

SCÈNE  VIII. 

CATHERINE. 

Ma  fine 5  ii  faut  caQ?enir  que  ce  voyageur 
est  tout-à-fait  aimable!...  Que  disait  donc 
mon  père,  qu'on  ne  pouvait  pas  çn  avoir  deux 
paroles  de  suite  ?•..  Il  cause  très^bien. 

AIR  :  La  marmotte  a  mal  au  pied, 

C  Voyageur  est  plein  d^bonté , 

Il  faut  le  bisser  faire. 

J'crois  quVil  s^en  mêle ,  en  vérité  » 

Il  arrangera  Taffaire  ; 

Dans  tous  ses  propos  anjoard^hoi 

LMésir  d^obliger  brille , 

Et  si  la  chos'  ne  t'nait  qu^à  lui  y 

Je  n^serais  pas  long-teni5  611e. 

SCÈNE  IX. 

.     CATHERINE,  GONNINBERG. 

GATHERIITE9  se  croyant  seule. 

C*£ST  toujours  bien'ennuyeux  d'être  à  ma- 
rier. 


3^0  LA  CARTE  A  PAYER. 

€0NN1NBBRG. 

Encarts  !  finiras  -  tU  tes  jéréhiiades  !  que 
diable  I  semble-t-il  pas  que  ta  manqueras 
d'cponseurë...  Il  faut  que  je  fasse  le  compte 
de  cet  étranger...  Diable  !  je  suis  fâché  qu'il 
ne  séjourne  pas  ici;  il  m'aurait  défrayé  des 
pertes  que  je  fais  journellement  avec  les 
\ojageurs... 

CATHERIITE. 

Qui  ne  viennent  pas. 

GONNINBERG. 

Puisqu'il  ne  veut  pas  rester  plus  long-tems» 
fesims-lui  sa  carte  en  conséquence.  Catherine^ 
mets- toi  là. 

GATUERiiCE)  s^asseyaot. 

Me  v'ià^  mon  père. 

>|  GOltlflNBERG. 

Si  c'était  un  habitué  »  je  ne  le  ferais  pas,  â 
cause  des  principes  ;  mais  on  peut  bien  plumer 
un  oiseau  de  passage...  D'abord,  pendant 
dcdx  jours  et  deux  nuits  la  chambre  où  a  logé 
rarciiiduc  :  elle  vaut  plus  qu'une  autre ,  il  a 
été  logé  là  comme  un  prince  ;  cinquante  ' 
francs ,  je  crois  que  c'est  en  conscience. 

GATAESirrE,  surprise. 

Cinquante  francs  1 

GOHNINBERG. 

Pour  deux  jours  de  nourriture  j  déjeuner^ 


SCÈNE  tX.  54i| 

dîner»  souper,  etc,  ctc,  cinquante  francs... 
Ce  n'est  peut-être  pas  assez  cher. 

CATHERINE  regardant  8on  père . 

Cinquante  francs  ! 

GOifNiif BERG9   dictant. 

Pour  le  déjeuner  d'aujourd'hui ,  un  cha- 
pon... Il  se  dit  artiste,  mais  il  est  appelé  à  la 
cour...  douze  livres  dix  sous.  Quel  vin  lui  a- 
t-on  servi  ? 

GATBHRlIfE. 

Dame  !  mon  père ,  du  vin  ordinaire  9  de 
votre  petit  vin  du  crû. 

GONNIKBERG. 

Ah  bien!  c'est  ç.i.  Écris...  pour  deux  bou- 
teilles de  vin  de  Bordeaux,  vingt -quatre 
francs. 

CATHERiVE,  écrivant. 

Pauvre  jeune  homme  !...  C'est  payer  kien 
cher,  pour  un  peintre. 

GOTÎNINBEBG. 

Oui,  uo  peintre  qui  est  rais  comme  un 
seigneur.^,  mets  vingt-quatre  francs,  te  dis- 
je..,De  plus,  menus  frais,  vingt-six  francs... 
Pis-moi  le  total  ? 


CATHERINE. 

Cent  soixante-deux  livres  dix  sous. 


29. 


54a  LACAKTE  A  PAYER. 

GOUNINBEBG. 

Tiens,  ma  fille ,  je  te  charge  du  mémoire; 
on  n'ose  pas  marchander  avec  une^oiiefemme, 
et  Ton  paie  pour  ses  beaux  yeux...  Vois-tu  , 
ça  fait  cent  soixante-deux  livres  dix  sous  à 
recevoir;  et  moi,  je  vais  me  préparer  pour 
mon  audience,  qui  a  lieu  ce  matin. 

CATHERINE. 

Cependant ,  je  trouve  cette  carte  bien  chère. 

air:  yaudeville  de  $  Anglaises  pour  rire. 

Dans  une  auberge  si  mince , 
Vous  allez  tout  lui  compter 
Aussi  cher  que  pour  un  prince. 

GONNINBERO. 

Vraiment ,  c^est  pour  le  flatter  : 

Je  ne  crois  pas  qu'il  résiste 

A  cette  marque  d'honneur  j 

Il  est  beau  pour  un  artiste  ^ 

De  payer  comme  un  grand  seigneur. 

Le  voilà ,  je  te  laûse  avec  lui* 

(11  sort.) 

SCÈNE  X, 

CATHERINE,  SAINT-CYR. 

SAIKT-CTR. 

Ea  bien!  ma  belle  enfant ,  et  nos  petits 
chagrins,  sont-ils  passés? 


SCËNEX.  3^3 

C  A  T  H  E  E I  If  E  y  luî  remettant  le  mémoire. 

Pas- tout- à- fait  :  tous  avez  demandé  le 
mémoire  de  ce  que  vou^  devez. 

SAIWT-CYB. 

Quoi  !  c*est  vous ,  gentille  Galherine ,  qui 
Tenez  régler  avec  moi  ? 

CATHERINE. 

Ouï,  Monsieur;  et  je  tous  prie  de  ne  pas 
oublier  la  fille  si  vous  êtes  content. 

SAINT-CYH. 

AIR  de  M.  Deschalumeaux» 

Je  ne  saurais  vous  refuser , 

Et  je  veux  vous  faire  une  offrande  : 

Acceptez  un  petit  baiser. 

Pour  répondre  à  votre  demande. 

cathehine. 

Ôh  !  je  ne  prends  rien ,  en  ce  cas  : 
Je  suis  sage  plus  que  gentille. 

SAINT-CYB. 

Un  voyageur  ne  doit-il  pas 
Donner  quelque  chose  ù  la  fille  ? 

(  Il  lit  la  carte  et  marque  une  grande  surprise.) 

Ah!  mon  Dieu  î...  cent  soixante-deux  livres 
dix  sous. ..Votre  père  a  fait  une  erreur,  ou  il 
Teut;ne  tromper. 

CATHERIIfE. 

D'abord  y  papa  ne  se  trompe  jamais. 


344  LA  CARTE  A  PAYER. 

SAINT-CYR. 

Ceci  est  trop  fort,  morbieu  !  cent  soixante- 
deux  livres  dix  sous!...  {Appelant,)  Monsieur 
l'aubergiste  !...  cent  soixunte-dcux  livres  dix 
sous!...  J'aimerais  mieux  rester  ibi  toute  ma 
vie  ,  que  d'en  sortir  à  pareil  prix...  M.  Gon- 
ni^berg!  Taubcrgiste  !...  Il  est  donc  sourde? 

SCÈNE  XI. 

LES  paÉGÉDEïfs,  GONNINBËKG» 

GONNiirBEBGy  accottraof. 
Que  désire  Monseigneur  î 

SAIWT-CTB. 

Il  est  bien  question  de  monseigneur...  Je 
vous  appelle  depuis  une  heure  pour  savoir  si 
vous  vous  êtes  trompé  en  fesaril  cette  carte. 

CONNlIïBEnG. 

C'est  possible ,  Monsieur. 

SAllîT-CTB. 

Vous  dvet  marqué  cent  soixartle-dfeux  livre» 
dix  sous  y  c'est  beaucoup  trop. 

Vous  tron  vez  que  c'est  trop  cher. . .  Écoutez» 
\e  ne  veux  pas  disputer  avec  vous...  (li  prendl 
la  carte;  il  écrit  et  lui  rend,  )  Tenez ^  j'ôte...». 


SCÈNE  Xî.  345 

SAlIfT-GTfi. 

^  Comment  l  vous  ôtez  les  dix  sous  !.. . 

GONlflNBEaG. 

Ça  reste  à  ceiït  soitante-Jeirx  francs,  c'est 
le  prix  en  couscience  :  je  n'en  puis  rien  ra- 
battre. 

SAIIIT-CYE. 

Gomment  !  comment  I  c'est  le  prix  !... 

GONIflJNBEIIG. 

Je  n'en  diminuerai  pas  un  denier...  Les 
denrées  sont  d'un  rare  et  d'une  cherté... 

SAIIfT-CYB. 

Je  ne  me  doutais  pas  qu'il  en  coûtât  si  cher 
pour  voyager  en  Allemagne. 

AIR  :  yaudet^ille  de  Haine  auxjemmes» 

Sar  les  dangers  des  "voyageurs 
Maintenant  je  n''ai  plus  de  doutes 
Je  ne  craignais  que  les  voh  urs 
Qni  pillent  sur  les  gran  'es  routes  ; 
Mais  je  disais  :  entre  leurs  mains  ,• 
Que  craignent  de  pauvres  artistes  ?... 
J^oubliiiis  que  les  aubergistes 
Sont  aussi  sur  les  grundj  chemins, 

6ONNINDER6. 
Monsieur,  Monsieur!  vous  m'insultez,  je 
crois. 

SAiNt-CYR. 

.  Rançonner  de  la  sorte  un  modeste  voya- 


346  LA  CARTE  A  PAYER. 

f!:eur....  C'est  uae  horreur!  Il  faut  être  ua 
fier... 

GOTlirlNBBRG. 

Monsieur  y  n'allez  pas  plus  loin. 

SAINT-GTB. 

Vous  oe  m'intimiderez  pas..,  A-t-on  jamais 
TU  pareille  friponnerie  ? 

gonhinbebg. 

Ménagez  yos  expressions^  tous  me  les 
paieriez  cher. 

SAINT-GTB. 

Pas  plus  cher  que  tos  repas.. •  Mais  il  y  a 
peut-être  une  justice  ici. 

GONNINBERG. 

Comme  tous  dites  5  peut-être. 

GATJIBBINE. 

Mon  père... 

GONRIVBEHG. 

Laissez-moi. 

GATHEBINE. 

Monsieur  le  Toyagenr... 

SAIRT-GTR. 

Je  n'écoute  rien...  J'aurai  raison  de  tous... 
Je  rais  chez  le  bourgmestre. 

GONNINBEBG. 

Vous  n'irez  pas  bien  loin. 


SCÈNE  XT.  347 

SAINT-CYB. 

Àb  !  monsieur  l'aubergiste  ,  nous  verrons 
comment  vous  allez  vous  tirer  de  Jà. 

GONNINBERG. 

Le  bourgmestre  ne  me  fait  pas  peur. 

SAI5T-CYR. 
AIR  du  Renégat . 
Vous  abusez  de  votre  état  ; 
Mais  il  faudra  qu'on  vous  punisse  : 
Je  vais  trouver  le  magistrat  ; 
De  vous  il  me  fera  justice. 

GONNINBERG. 

De  cet  endroit  on  a  toujours  cité 
Le  magistrat  pour  son  intégrité. 

SAINT-CTR. 

Monsieur ,  redoutez  la  colère 
Du  juge  qui  nous  entendra  ; 
Je  suis  sûr  que ,  dans  cette  affaire , 
C'est  l'honneur  qui  triomphera. 

GONNINBERG. 

w  J  Monsieur ,  je  ne  redoute  guère 

g  /  Le  juge  qui  nous  entendra  ; 

I  \  Je  suis  sûr  que ,  dans  celte  affaire , 

g  I  La  probité  l'emportera. 

CATHERINE. 

Ah  !  l'aventure  est  singulière  ! 
Le  drôP  de  procès  que  voilà  ; 
Le  voyageur  ne  s'doute  guère 
Que  la. partie  et  le  juge  sont  là. 

(  Gonninberg  et  CaUierine  sortent.  ) 


348  LA  CARTE  A  PAYER. 

SCÈNE  XII. 

SAÎNT-CYR,  RAZCOFF,  son  i)Iat  à  barbe 
et  sa  trousse  d^une  inain,  sa  robe  et  son  bonnet 
d'avocat  de  l'autre. 

RAZCOFF. 

Quel  bruit?  qu'y  a-t-il  donc  de  oouTeaii 
dans  la  maison  ? 

SAiNT-CTfty  se  promenant  vite. 

C'est  une  infamie  ! 

H  Azc  0  FF  y  le  suivant  par  derrière. 

Monsieur... 

SAlKT-CTa. 

Une  horreur! 

BAZGOFF. 

Monsieur  ! 

SAINT-CTB. 

J'en  aurai  raison. 

BAZCOFF. 

Ob  I  pour  ça  y  oui  ;  de  quoi  s'agit-ii  ? 

8A1NT-CTB. 

Quel  est  cet  homme  ? 

RAZCOFF. 

Monsieur ,  je  yous  demande  pardon  si  je 
TOUS  incommode;  je  renais  pour  tous  ac- 


SCÈNE  XII.  349 

commoder....  Vous  voyez  Laurent -Ignace 
Razcofif,  pour  vous  raser  si  j'en  étais  capable. 

SAINT-GTA. 

C'est  bien  le  roomentl...  Si  vous  saviez 
comme  je  sui^  arrangé. 

BAZC0FP9  le  regardant. 

En  effet  vous  me  paraissez  défrisé. 

SAIIfT-CTR. 

H  n'y  a  donc  plus  de  probité  ?... 

RAZCOFF^ 

Un  coup  de  peigne ,  et  il  n'y  paraîtra  plus. 

SAINT-CTa. 

On  veut  me  voler,  mais  ça  jne  fiqira  pas 
ainsi. 

Bazcopf,  posanjt  vivenieivt  soq  pUt  à  h^xbe  et  sa 

trouise  ;sur  la  table. 

Tentative  de  vol  !  votre  cause  est  superbe , 
vous  la  gagnerez.  Les  magistrats  de  l'endroit 
sont  d'une  intégrité...  Le  bourgmestre  sur- 
tout. 

SAUÏT-CYR. 

•S'il  ne  vaut  pats  mieux  qçie  votre  fripon 
d'aubprgiste... 

RAZCOFF. 

C'est  l'aubergiste  î...  Ah!  Monsieur,  laissez 
faire,  l'aubergiste  a  pu  vous  tromper,  mais 
nous  aurons  raison  du  bourgmestre. 

F»  Vaudevilles.  3.  3o 


35o  LA  CARTE  Â  PAYER. 

SAINT-CTI. 

Cest  une  indignité! 

B  A  Z  C  O  F  F. 

Un  vol  nianifeste  !...  Chargez*inoi  de  TOtre 
affaire ,  et  je  vous  réponds  du  succès. 

SAIVT-CTE. 

Comment  Tentendez-Yous? 

EAZCOFF. 

Celte  robe  et  ce  bonnet  doivent  tous  prou- 
ver que  j'étais  appelé  à  tout  autre  chose  qu'à 
faire  des  barbes. 

SAIIIT-CTB» 

Comment,  monsieur  le  barbier ,  tous  êtes 
avocat  aussi? 

RAZCOFF. 

Ça  TOUS  étonne 9  Monsieur?..  £h  bien! 
quand  tous  m'aurez  entendu  plaider,  tous 
serez  forcé  de  conTenir  que  je  suis  le  Gicéron 
des  barbiers. 

SAIHT-CTB. 

Je  TOUS  charge  de  ma  cause. 

BAZCOFF. 

J'espère  tous  prouTcr  aujourd'hui  que  l'on 
peut  défendre  les  gens  et  leur  faire  la  queue. 

SAIST-GTB. 

J'accepte  tos  serTices;  tous  allez  Teniravee 
moi  chez  le  bourgmestre. 


SCÈNE  XIL  .  35i 

BAZGOFF. 

Il  demeare  dans  cette  maison.  C'est  au« 
joQrd*hui  jour  d'aadîence^  elle  Ta  s'oUTrir^ 
et  c'e&t  ici  même  qu'elle  se  tient. 

SAINT-CTl.     ^ 

Ici? 

BAZGOrF. 

Ici  même.  Si  tous  permettez  que  je  tous 
soÎTe,  je  Tais  prendre  connaissance  des  pièces, 
constituer  un  corps  de  délîL..  Diable  I...  ce 
ne  sont  pas  des  plaisanteries  qu*il  nous  faut, 
ce  sont,  parbleu  !  de  belles  et  bonnes  charges. 

SAITCT-CTB. 

Tenez ,  Toilà  la  carte. 

BAZCOFF. 

C'est  cela....  Pièce  de  conTÎctîon.  Allons, 
Monsieur ,  je  Tais  préparer  de  Teau  chaude 
pour  TOtre  barbe ,  un  exorde  pour  mon  plai- 
doyer; et  quand  tous  aurez  été  défendu ,  et 
par  conséquent  rasé  par  mol,  tous  Terrez  que 
je  «uis  digne  de  Tenseigne  de  ma  boutique  : 
ConsiUôque  manu.  Ignlace  RazcofT,  perruquier 
et  aTOcat  consultant. 

(  Ils  sortent.  ) 


35a  LACART£  A  PATER. 

SCÈÎSE  XIII. 

CATHERINE,  GARÇONS,  ensuite 
GONNINBERG. 

CHŒUR. 

AIR  :  T^nez,  M.  Dnhut. 

Albons  , 
^    Dépîclions , 

Vite ,  arrangeons 

Et  décorons 

Lé  tribunal  ,- 

Poiirqu^au  signal 

Ciiacun  s^installe 

Dans  la  salle. 
Ici  IMtroandeur , 

Là ,  rdéfendeur , 

Là ,  les  huissiers , 

Là ,  les  greffiers , 

Et  dans  les  coins        "^ 

Tous  les  témoins. 

UN    GARCOÎï'.. 

Place  au  magistrat , 
Dont  on  publie 
La  probité , 
La  sagacité. 

GONNINBERG,  en  ^uge. 

Ah  !  ma  robe ,  je  te  remercie  : 


SCÈNE  XIV.  ^53 

Je  te  dois 
L'honneur  que  je  reçois. 

CHOKUR. 

Allons , 
D^chons  f  etc. 

GOWINIERG. 

Allons,  allons,  que  l'auberge  dfsparai^e, 
et  que  le  tribunal  soit  établi  céanS  daa^  les 
formes  ;  je  ne  suis  plus  le  maître  de  l'aubergo 
du  Grand-Cerf,  je  suis  le  bourgmestre  de 
Mttldorff.  (  jiua  garçons.  )  L'audience  est  bu- 
Tèrte ,  întroduiset  leà  plaig^ans ,  fet  hmtt 
entrer  le  ptjblic. 

SCÈNE  XIV. 

i£S  PBBcfeENs,  UN  GREFFIER,  hommes  ei 
FEMMES  ;. chacun  se  place. 

CfiOBDA. 
AIR  :  >^  boùv,  à  boire. 

Silence  ,  silence ,  silence  » 

Messieurs ,  Taudièace 
Commence , 
Pënïfljtit  tout  le  ci»urs  dei  dâiats , 
Si  TOUS  donnez  t  fouiee  ixnâ  bas. 

ooniriiiBERG. 

Greffier,  appelez  les  causes.  .- 

3o. 


3^4  LA  CARTE  A  PAYER. 

LE    GREFFIEB. 

Pierre  Gottman,  contre  Catherine  Bulder, 
sa  feaime... 

G0N91N9Eft6, 

De  quoi  s*agit-il? 

LE   GREFFICl. 

D'une  dispute  suirie  de  Toies  de  fait  »  à  la 
lortie  de  la  taverne ,  dimanche  dernier. 

G0NNI1I9ER6. 

C'est  une  quenelle  de  ménage ,  cela  ne  nous 
regarde  pas.,.  Hors  de  cour...  Dépens  com- 
pensés ,  ordonne  que  les  parties  se  racçom-^ 
moderont  dimanche  prochain  dans  Tauberge 
du  sieur  Gonninberg.  Â  une  autre. 

LE    G&EFFIEB. 

Le  peintre  Saint  -  Cyr ,  français  ,  contre 
l'aubergiste  Gonninberg. 

GOlCniIVBIÇRG. 

Je  connais  Taffaire.ii..  Faîtes  entrer  les 
parties* 

SCÈNE   XV. 

LES  PEiciDEiis,  SAINT -CYR,  RAZCOFF, 

ea  costume  de  palais. 

SAIKT-Cta. 

Qii£(  appareil  ! 


SCÈNE  XV.  355 

GOlfNiHBEBG,   à  part. 

Ah  !  ah  1  Razcoff  Ta  plaider  pour  ma  partie 
ad?erse. 

(  Razcoff  lui  lait  des  ngnes.  ) 

SAI9T-CTR^   regardant  autour. de  lui . 
Mon  coquin  d'aubergiste  n'est  pas  encore  là. 

60N915BERG. 

Monsieur  9  je  n'entends  pas  qu'on  dise  du 
mal  de  cet  homme-là  devant  moi. 

SAINT-CTR. 

Que  Tois "je  ?  C'est  lui  !.. .  Ah  !  dans  quel 
piège  suis-je  tombé  !  Comment ,  tous  êtes 
aussi  le  juge  de  l'endroit  ? 

COKVINBEEG. 

Oui,  Monsieur. 

SAlIfT-CTB. 

Ah!  je  suis  perdu.  Messieurs  «  ne  poussons 
pas  plus  loin  la  procédure...  C'est  bien  assez 
pour  moi  d'être  volé  par  un  aubergiste  ^  sans 
l'être  encore... 

BAZCOFF. 

Du  tout,  du  tout,  il  faut  que  justice  se 
fasse. 

SAINT-CTB. 

Je  ne  demanderais  pas  mieux,  mais  le 
moyen  ? 


356  LA  CARTE  A  PAYER. 

G09VIHBEBG. 

La  procédure  est  entamée ,  les  débats  sont 
commencés  ;  il  faut  que  l'affaire  soit  jugée. 

SAINT-CTR. 

Allons,  c'est  un  guet-apens....  II  faudra 
que  j'en  paie  les  frais.  Tâchons  au  moins  d'en 
rire  9  et  de  nous  amuser  pour  notre  argent. 

G0NNI5BEB6. 

Parlez,  avocat. 

B  AZ  c  0  F  F  tousse ,  cradie ,  se  moache ,  et  relève  ses 

manches. 

Messieurs  !  si  jamais  cause  importante  fut 
soumise  ù  la  justice ,  c'est  sans  doute  celle  que 
je  suis  appelé  à  défendre.  L'honneur  de  notre 
ville...  quedis-jePde  notre  ville!...  Thonneur 
de  l'Allemagne  entière  s'y  trouve  compro- 
mis... Les  droits  de  rbospitalité  sont  violés  : 
un  étranger  est  spolié  au  milieu  d'un  peuple 
civilisé^  par  la  rapacité  coupable  d'un  auber- 
giste d'un  petit  bourg  de  la  Bohême. 

GONNINBEBG. 

Avocat!  point  d'injures. 

RAZCOFF. 

Je  dois  défendre  mon  client  :  que  suis  -  je 
ici,  Messieurs?....  Je  suis  un  jeune  artiste, 
j'ai  tout  au  plus...  Quel  âge  avons-oous? 

SAINT-GTB# 

J'ai  vingt-cinq  ans,  et... 


SCÈNE  XV.  357 

BAZGOFF. 

J'entre  dans  ma  vingt- si zième  année  ^  je 
SUIS  d'une  figure  intéresscmie  !...  Je  voyage 
pour  mon  instruction  9  ye  suis  un  peintre  dis- 
tingué, mais  ce  n'est  point  une  raison  pour 
que  je  sois  écorché ,  pour  que  je  paie  tout,  et 
particulièrement  un  déjeuner,  dix  fois  sa  va- 
leur, 

G0KNI5BBB6. 

Le  déjeuner  était  bon. 

KAZGOFF. 

Je  l'ai  trouvé  détestable. 

GONIflNBEftG. 

La  preuve  ? 

BA2C0FF, 

La  voici.  J'en  viens  de  suite  à  ce  repas. 
(//  ///  sur  la  carte.  )  Un  chapon,  douze  francs. 

GONNINBERG. 

Eh  bien!...  Un  chapon,  ce  n'est  pas  trop 
cher. 

BAZCOFF. 

Ce  n'est  pas  trop  cher!...  Ça  serait  trop 
cher  pour  un  chapon ,  à  plu9  forte  raison  pour 
un  coq. 

GONNIITBERG. 

C'était  un  chapon. 


358  LA  CARTE  A  PAYER. 

RAZCOFF. 

C'était  un  coql...  D'ailleurs  les  voisins  s*eQ 
aperceyronl  bien  demain  matin...  Mettez-moi 
ce  cliapon-lù  sur  le  pied  d'un  coq.  '  Greffier, 
donnez-moi  la  patte ,  et  passez-la  de  main  en 
main  jusqu'à  moi.  (  //  prend  la  patte  du  coq.  ) 
C'était  un  coq«..  Ërgo,  je  dépose  la  patte. 
(Il  la  dépose  sur  le  bureau.  Il  lit  sur  la  carte,  ) 
Article  2.  Deux  bouteilles  de  Bordeaux^  yiu^t- 
quatre  i'rancs. 

Qu*j  a~t-il  à  redire  9  du  Bordeaux  ringt- 
quatre  francs? 

BAZCOFF. 

Il  y  aurait  beaucoup  à  redire  si  c'était  du 
Bordeaux ,  mais  il  est  certain  que  jamais  9  au 
grand  jamais,  il  n'est  entré  dans  la  caye  de 
l'aubergiste  Gonninberg  une  seule  bouteille 
de  Bordeaux...  Du  moins  il  ne  m'en  a  jamais 
fait  boire. 

GONKiNBjERG  y  ptemiit  les  boateillcs  qui  font  sur 

son  barcaa. 

Messieurs. ,  sont-ce  là  des  bouteilles  de  Bor- 
deaux ? 

RAZGOFP. 

Allons  y  c'est  très-bien ,  tods  ayez  raison 
pour  la  forme,  mais  nous  allons  discuter  pour 
le  fonds...  Justement  il  en  reste  on  Terre. 
{Il  remplit  le  verre  gui  était  sur  le  bureau  du 


SCÈNE  XV.  359 

bourgmestre»)  Messieurs,  examinez  seulement 
la  couleur,  et  renvoyez-le-moi  le  plus  tut 
possible.  {Razcoff  reprend  le  verre  de  vin  et 
Vavale,  )  Je  tous  demande  un  peu  si  ce  vin- 
là  a  jamais  pu  passer  pour  du  Bordeaux...  Il 
tient  à  la  gorge  d'une  manière...  Voilà  donc 
des  faits  bien  prouvés  :  il  y  a  dol,  fraude  et 
lésion;  je  persiste  dans  ces  trois  inculpations. 
Quels  sont  vos  moyens  de  défense  ? 

GONNiiTBEEG,  se  levant. 

Messieurs!  Taubergiste  Gonninberg, pen- 
sant recevoir  un  prince  dans  son  auberge, 
comme  il  le  pense  encore ,  a  voulu  que  sa 
munificence  lui  rappelât  Thonneur  qu*il  lui 
avait  fait  en  logeant  chez  lui. 

SAINT-CTR.  1 

Jolie  manière  d'éprouver  la  générosité  I 
B  ▲  z  c  o  F  F ,  re|)reoant  avec  chaleur. 

Vous  chercheriez  en  vain  à  vous  justifier, 
vous  succomberiez  sous  le  poids  de  mon  ac- 
cusation !  Mais  je  me  plais  à  croire  que  tocit 
sentiment  d'honneur  n'est  point  éteint  en 
vous ,  car  si  d'un  côté  le  délit  de  l'aubergiste 
Gonninberg  est  immense  (  Gonninberg  fait 
un  signe  de  colère)  ;  de  l'antre  la  justice  da 
bourgmestre  est  infinie.  (//  le  salue,  )  Si  je 
suis  effrayé  de  l'un,  je  suis  rassuré  par  Tau- 
tre;  si  l'aubergiste  Gonninberg,  comme  il 
n'j  a  pas  le  moipdre  doute  ^  est  an  fripoÀ 


feiQ         LA  CARTE  Â  pâyi:r. 

reconnu  {Gonninberg  veul  lui  Un  f  oser  gilenee)  9 
tp^te  TAUema^^e  connaii  rintégrité  du 
bourgmestre  de  MuldoriF.  (  Gonninberg  salue 
Razcoff.  )  No4is  ferons  punir  Thôtelier  saos 
pudeur 9  et  nous  bénirons  le  juge;  l'un  est  le 
spoliateur  de  Torphelin.  (  Se  retournant  qîo^» 
msntdu  côté  de  SainUCyr^  U  lui  dit  :  )  Atoqs- 
aau3  encore  le  papa  et  ia  coaman  ?... 

SAINT-CYR. 

Oui^  j'ai  ce  bonheur. 

RAZCOFF. 

•  Chut!  taisez- vous.  {Reprenant  son  plai^ 
doyer.  )  L'un  est  le  spoliateur  de  Torphelin  y 
l'autre  est  le  soutien,  le  consolateur  delà 
veuve...  D'ailleurs  9  Messieurs ^  si  une  action 
aussi  noire  a  pu  ternir  la  réputation  de  l'au- 
bergiste Gonninberg,  ça  n'ôte  pas  un  seul 
cheveu  blanc  de  la...  tête  du  bourgmestre, 
de  ce  bourgmestre  dont  le  cœur  nous  est 
connn;  de  ce  bourgmestre  qui  ne  cesse  de 
voler...  {Gonninberg  se  fâchant )  au-devant 
des  besoins  du  malheureux!  de  ce  boiirgoies- 
ire  qui  empoisonne...  ses  jours  d'amectume  I 
de  ce  bourgmestre  qui...  que...  {Gonninberg 
s'attendrit.  )  Mon  éloqiience  a  pénétré  jusque 
,dans  les  replis  de  son  ame,  0es  yeux  sont 
mouillés  des  douces  larn)e$  du  repeptir... 
Mon  juge  est  attendri.  Scpterum  eonsci&ntia 
pxagiiaiiu^  j  cequi  vqutdtre  qn  allemand  ;  eé 
ft'irt  die  isuLung  albe  v§nig  reeJinen,  ce  quj 


SCÈHE  XVI.  561 

veut  dire,  en  français,  qu'il  ya  diminuer  In 
t^artç  de  adollié. 

GOHfflKBBiiGy  se  levant  et  i^essujtnl  les  yeux* 
La  carte  !  la  carte!... 

Ain  fi{e  JitUe, 

Comme  il  ne  faut  p^  qq^on  s^ççi^ 
Des  deTpirs  de  la  prubité  , 
De  moitié  prix  nous  irédaisoos  la  carte  »' 
El  voilà  mon  arrêt  dicté. 
Je  suis  fier  i|yc  ohacun  me  nomma 
Le  digne  organe  de  l^  loi , 
Lorsi(ue  je  pense  que  sans  moi 
On  |Miuvait  tromper  un  brave  homme« 

TOUS. 

Oui  y  vraîracnl ,  ipiis  H  j^onn*  foi , 
Qfk  pQnvqjt  tromper  xa^  |)rave  ho^ime, 

SCÈNE  XVI. 

rant;   ensuite  GALOPMAN^}, 


CATBEB1NE. 

Moif  père  9  nnon  père  1      '     ' 
Eh  bien  î  qu'est-ce.  que  c'est  ? 

F.  VattdevilUs.  3      *  3l 


36a  LA  CAKTE  A  PATER. 

GAXHEAÏflE. 

Voilà  deux  carrosses  qui  Tiennent  de  s'ar- 
rêter devant  la  porte,  il  y  a  quatre  beaux 
messieurs  et  quatre  belles  dames  qui  disent 
qu'ils  sont  pressés  de  diner. 

GOifRiKBERC,  6lant  sa  robe. 

Eb!  vite,  vite,  à  la  cuisine.  Messieqrs, 
l'audience  est  finie.  Greffier,  serrez  les- pa- 
piers et  mettez  le  couvert.  [  A  un  autre 
garçon,  )  Toi ,  va  mettre  la  brocbe. 

Q  ▲  L  o  r  m  A K  If ,  accourant. 

Mon  père ,  mon  père  ! 

BAZCOrF. 

Qu'est-ce  que  c'est  ? 

"  CALÔPMAIflf. 

Deux  voyageurs  qui  veulent  se  ftiîre  raser. 
BAZCOJF,  TÎvcmcnt. 

Allons  ,  allons ,  emporte  ma  robe  à  la 
maison,, et  va  chercher  mon  plat  à  barbe; 
charge-toi  de  nion  plaidoyer  et  ]^répareia'!?a- 
Tonnettè. 

GALOPMANir. 

Mon  père ,  et  mon  mariage  ? 

»  Azc  o  F  F , ,  bas  à,«on  fils. 
Laisse-moi  faire;  je  vais  m'en  occuper. 
(^  Gonninberg.)  Dites  donc,  Toisïn,  j'espère 


SCÈNE  XVI.  363 

que  TOUS  n^avez  pas  à  vous  plaînclre  de  moi... 
Je  croîs  que  le  bourgmestre  n'a  pas  été  mal- 
traité dans  mon  plaidoyer. 

.4îiONiritrSBAG. 

Ouï ,  le  bourgmestre  c'est  bien;  mais  l'au- 
bergiste ? 

BAZGOFF* 

L'aubergîste.».  à  la  bonne  beure...  Eh  bien! 
si  l'aubergiste  en  veut  à  l'avocat,  que  le  bourg* 
mestre  marie  sa  fille  avec  le  fils  du  barbier. 

SAIWT-CYR. 

Si  vous  y  consentez ,  je  double  l'impôt  ex- 
traordinaire que  vous  vouliez  lever  sur  moi 
et  je  le  consacre  au  repas  de  noce. 

GONNINBERG^  s^adiessant  aux  dpax  amans. 

Enfans,  vous  vous  êtes  rendus  coupables 
en  vous  aimant  tous  les  deux,  je  vous  con- 
damne à  vous  épouser. 

LE  G  RE  FF  I  E&  9  des  papiers  à  la  main'. 

M.  Razcoff!  voilà  ce  que  des  messieurs 
m'ont  chargé  de  vous  remettre;  prenez<*en 
connaissance,  ils  sont  \k  qui  attendent. 

RAZCOPF,  prenant  les  papiers. 

Eh  bien!  ne  voilà-t-il  pas  les  auteurs  d'une 
pièce  nouvelle  qui  me  chargent  de  plaider 
leur  cause!...  Ces  messieurs,  parce  que  je 
Tiens  de  faire  répandre  d«  douces  larmes  au 


364  LA  CARTE  A  PAYE».  SCÈNE  XVf. 

bourgmestre,  s'imaginent  que  jye.  Yais,fair« 
pfeurer/..  {yi  son  fils.  )  I)onne-inoi  ma  robe^ 
peut-être...  Essayons.. <  Messieurs.^. 

ikOidébiStMtihëUè. 

••    •       .     •  •  .  * 

Th)i«dllàTt6»f<Mers  te  trûùveiit  Étatisée 

D^aroîr  voulu  surprendre  le  parterre  ; 

Je  penche  assez  pour  <prïb  «dient  excusés 

.    Leur  crime  étant d^a voir  voaS.n  vous  plaire, 

t'oûr  bien  défendre  mes  cliens ,. 

Comme  il  faudrait'  des  isôins  et  àe  la  pehie\ 

^      Attendu  le  mânqîié  dé  tems , 

Messieurs ,  montrez-svmis  indulgens  : 

Remettons  la  cause  à  huitaine. 

(Ces  ciiu|,  deraieis  vera  ne  te  chantent  fulk  U  prem»^ 
préseatation ,  «t  te  lendemain  les' cui vans.) 

L'asrel^e  vetft  ailes  kncor^ 

ff -est  pas  une  petite  chose  f 
Ah  !  Messieurs ,  daignez  prononcer 
Si  vraimeiit  ye  pub  aimoncer 
Que  je  viens  de  gagner  leur  Cause. 


UN   DE   LA   CARTE   ▲  PAYES. 


TABLE 

DES  PIÈCES  CONTENUES  DANS  CE  VOLUME. 


Pag«f. 

PiEBBB,  Paul  st  Je  ah,  comédie  en  deox 
actes ,  par  ]MM.  Sewria  et  Ourri.  •  .       i 

Le  fifbe  du  koi  de  presse  ,  comédie  en 
un  acte  de  M.  Reyel 83* 

Le  juif  ,  comédie  en  deux  actes  de 
MM.  Rousseau  j  Désaugiers  et  Mes- 
nard i53 

La  ¥eute  du  malabaB)  comédie  en  un 
acte^  de  M.  Saînt-Amand 267 

La  cabte  a  fateb  ,  comédie  en  un  acte 
par  MU.  Merle^  Brasier  et  Garmouche.  319 


nn  db  la  tajlb. 


} 


■  »   »  r  r  ^ 


^    >    -  *         »  . 


FIN 

DU  RÉPERTOIRE 


vv 


THÉÂTRE  FRANÇAIS. 


35. 


I 


^ 


SENLIS, 

IMPRIMERIE  STÉRioTYPE  DE  TREMBLAY. 


FIN 

DU  RÉPERTOIRE 

1)0 

THEATRE  FRANÇAIS,    . 

£tec  un  NotrvEAn  choix  des  pièces  des  autres 

THÉÂTRES , 

I 

ftAssEMBLiis  pAE  M.  LEPEINTRE. 
VAUDEVILLTîS*  — TOME   IV 


A  P4RIS, 

CHEZ  M>«  VEUVE  DAÈO, 
A  Uk  inBAimoE  irétioTTPS,  wjz  du  vor-»B-rEB ,  v*  1 4. 

i8a4 


J 


UNE  NUIT 
LA  GARDE  NATIONALE, 

t^      TABLEAU-VAUDEVILLE  EN  Ulf  ACTE, 
P«K  MM.  SCRIBE  ET  DELESTRE-POIRSON; 

Représcdté  ,  pour  la  prefnièrc  fois ,  sur  le  théâtra  cln 
Vaudeville I  le  4  noYcmbre  i8i54 


^.  TMtaavillM.  4'  * 


*  _y 


/^\ 


PERSONNAGES. 


LE  CAPITAINE. 

SAINT-LÉON,  caporal. 

DORYAL  y  garde  national. 

PIGEON ,  garde  national. 

LE  PÈRE  LAQUILLË  5  caporal  iostnicleur. 

ERNEST  DE  VERSAC. 

M"»-  DE  VERSAC,  sa  femme. 

L'ÉVEILLÉ ,  tambour.    . 

LA  MERE  BRIS£MI€H£  ,  marchande  de 

petits  gâteaux. 
vu  CAPORAL  du  poste  roisin. 

PLfJSiBDftS  GA^DIfl  JIATIOIfAUX  ,    )     form^Ql 
vif  SKRGEHT  9  )     le  pOSte. 


UNE  NUIT 
DE  LA  GARDE  NATIONALE, 

VAUDEVILLE. 


Le  théâtre  représente  rintérieur  d^un  corps-de-garde; 
à  droite ,  un  lit  de  camp  et  une  petite  porte  qui 
mène  à  la  cbainbre  du  capitaine  ;  à  gaucue ,  les  fu- 
sils  rangés  sur  le  râtelier  ;  une  porte  au  fond  et 
deux  grandes  croisées,  à  travers  lesquelles  on  voit 
ce  qui  se  passe  dans  la  rue  ^  en  dehors  un  réverbère 
alhimé  ;  une  gnérite  à  la  porte  et  une  sentinelle  en 
faction  ;  sur  le  premier  plan  un  poêle;  sur  le  Kccoad 
une  table ,  un  banc ,  des  chaises  ;  siir  la  table ,  un 
cbanrlelier  en  fer ,  du  papier,  des  livres ,  un  jeu  de 
dames.  Les  murs  sont  tapissés  de  grandes  pancartes» 
sur  lesquelles  on  Ut  en  grosses  lettres  :  Garde  na- 
Tio]!(AL£ ,  Cadre  du  joua  ,  Gansions  <}sn4aal£  , 
etc. 

SCÈNE  PREMIÈRE- 

SAINT-LÉON,  DORVAL,   PIGEON 

et  plusieurs  gardes  nationaux. 

(  Au  lever  du  rideau ,  les  personnages  sont  groupés 
différemment  j  Saint- Léon ,  en  dehors ,  relève  un 
factionnaire.  Pigeon  et  Dorval  jouent  aux  cartes  , 
d^antres  jouent  aux  dames,  od  lisent,  etc.  Quel- 
ques-uns sont  sur  le  lit  de  camp.) 

DORYAL.     ' 

QrATaE-viwGT-pix,   qualre-vingt-ome  >  et 


4     TJÏÏE  UrUIT  PE  LA  CABDE  NATIONALE. 

Ja  dernière  qualrc-vingt-douze,  quatrc-YÎDg;!- 
Xrahp,  gagqc.  Vousêles  capot,  M.  PigQOki. 

PIGEON. 

Soit.  Je  ne  suis  pas  fachè  que  la  partie  soit 
Soie...  Je  m'en  vais  duruiir* 

Bab  *  déjà  ? 

^  PIGEOir* 

Écoutez  donc  ,  ma  faction  est  à  trois 
heures  du  iTiatin  ;  il  est  bien  naturel  que  je 
me  repose  d'avance.  Je  ne  sais  pas  comment 
cela  se  lait,  je  suis  toujours  de  faction  pen** 
4aiit  la  nuit,  et  plutôt  deux  ibis  qu'une. 

t  DaavAL. 

Dame  !  quand  on  est  bîzet. 

SàlIIT-LÉOlf. 

Tous  y  un  riche  marchand  f 

piGBdzr. 

Ne  TOUS  fAchcz  pas.  Vous  snvci  que  je  dois 
dire  habillé  pour  la  revue...  J'ai  côznmaiidé 
mon  uniforme. 

A  la  bonne  heure»      ' 

fAJB  :  Ainsi  jadis  un  grand  prophète. 

Avec  raison  chacun  s^étonne 
iju^un  iustant  Ton  puisse  béâtCTi 


SCÈNE  L  S 

Qnanil  |)arinî  DOas  il  nVst' personne 

Qui  ne  soit  ijer  de  le  porter  ! 

Non  ,  )e  uc  cnnuaî^  pas  en  somme 

D'iiabit  plus  uoble  et  pUis  brillant , 

Piii>  (ii'il  rassure  riiouoête  hoiutoe , 

£t  ^u'il  fait  trembler  le  méchant.  ^ 

D  O  B  V  A  L. 

Et  ie  vous  demanda  si  on  peut  avoir  peut 
d*ui)  héros  ei^  hubit  marron. 

PIGEON. 

Ils  ont  raison  ;  il  est  de  fait  qu^ivec  un 
habit  marron...  J'aurais  mieux  fait  de  preu* 
dre  ma  ^'dingo^e...  la  nuit  sera  froide..,* 
(  H  se  couthe,)  Âh  !  ah  ! 

DOBV  AI» 

C'est  fort  bie.n  9  chacun  est  au  corps-de 
gard^^  comme  chez  soi  :  M.  Pigeon  dort  ;  moi, 
je  nrennuie;  ces  Messieurs  jouent  ;  et  toi, 
tu  rêves  sans  douloù  tes  aa)Ours...Carturaift 
yne  mine  !... 

'   SAINT-LÉ  ON. 

C'est  vrai....  Je  suis  furieux;  el  quand 
un  jeune  homme  honnête  se  présente  pour 
épouser*** 

D  0  R  V  A  t. 
Il  j  en  a  si  peu  qui  se  présentent  ainsi  ) 

SAINT-LéON. 

^u  moins  doit-on  le  refuser  poliment  ]..• 

14 


6   UNE  NUIT  DE  LA  GAKDE  NATIONALE. 

La  lettre  la  plus  impertinente  i  Écoute  seu* 
leitient  cet  endroit-lù,  je  t'en  prie.  {Lisant.) 
tt  Je  n'aime  pas  les  fats  ,  et  je  crains  que  ma 
»  sœur  ne  pense  comme  moi.  Qim  voulei- 
»  vous  ?  c'est  un  goût  de  famille  !.••» 

DORYAL. 

Comment  !  c*est  cette  jolie  madame  de 
Versac  qui  écrit  ainsi...  à  toi,  qui  es  la  mo- 
destie même. 

SAiRT-Léoir. 

Que  Teux-tu  ?  £He  a  su  que  j'étais  tOD  ami 
intime  :  foilà  ce  qui  m'a  perdu  I 

DORVAC. 

Ingrat!  cela  t'a  servi  auprès  de  tant  d'au- 
tres l  D'ailleurs,  pourquoi  t'adresser  â  ma- 
dame de  Versac?...  Parle  à  son  mari,  à  Ver- 
sac  ^  qui  est  notre  ami...  Il  y  a  deux  mois 
encore  qu'il  était  garçon. 

Il  saur»  compatir  aux  maux  qu'il  a  sonfferis  ! 

SAIlIT-LEOir. 

Bah  !  il  est  amoureux  de  ^a  femme  y  et  il 
n'use  plus  nous  voir ,  depeis  qu'elle  le  lui  a 
défendu.  {En  confidence,)  Elle  a  peur  que 
nous  ne  débauchions  son  mari. 

D OR  VAL' 

Voilà  bien  le  comble  de  l'injustice. 
LA  SBrrTivjBLLB  y  ea  dehors. 
Qui  vire? 


SCÈNE  IL  -) 

vs  CAPOBAL9  en  dehors. 
Patrouille  ! 

LA    SE5TINÏLI.E  ,   criaot- 

Halte  là!  Cap^^ral ,  hors  la  garde...  recon-' 
naître  patrouille. 

SA  19  T-L  i  0  N  y  à  deux  gardes  qoi  fortent  avec  lui. 

Allons  )  Messieurs. 

PIGEOV. 

Voilà  les  rondes  qui  commeûcent  !  U  n*y 
«  rien  qui  tous  réveille  comme  ça  cd  sut- 
saut... 

(  Qb  entend  chaoter  eo  dehws.) 

SCÈNE  II. 

LES   PRécBDBtrSy  LAQUILLE. 

LAQDiLLBy  entrant* 

CasT  ua^  bomi^  grivoise 
Qae  mamVUe  Faacbon, 
Aile  vous  amboise , 
£t  ^  rend  saoo  lafcoo..^ 
Un  jour  à  Gy  thére , 
Cupidon  disait... 

DfOaVAL; 

Eh  !  vbîci  n;0^re  brave  iûstructeur,  le  vieux 
père  Laquille. 


8      UNE  KUIT  DE  LA  GARDE  NATiCmALE. 

LIQVILLE. 

Oui  ,  le  vieux  père  Laquille  !  qui  tou^ 
apprend  tout  ce  qu'il  sait^  et  de  bleu  buq 
cqpufi  encore. 

AIR  :  Connaissez  mieux  le  gmnd  Eugèn$^ 

Pendant  vingt  anii ,  de  ma  vailiauce 
Les  ciineiiiis  oui  seuti  les  effets  ! 

SolJat  (lès  ma  p!us.  tendre  enfance , 
faÀ  (riom{)bé  sous  les  drapcuui  français  { 
A  mon  pays  que  j'ai  t^ervi ,  que  j^aîme , 
J'ai  consacré  ju<if{u^au  dernier  soupir; 
JUc  pouvant  plus  le  bien  sirvir  moi-même^ 

V^  taoÎDS  j^enseigne  à  le  servir. 

DORVAU 

Vous  êtes  un  brave. 

L  4  Q  0  I  L  L  B. 

Pren(i|roqs-nous  leçon...  ce  soir? 

DORYAI.. 

Ma  foi  9  noq...  tantôt.  J\lni$  tenez  ,  voil^ 
8aint-Léun  qui  est  amoureux ,  ça  le  di^si* 
pera. 

SAIIVT-LBON. 

Ma  foi  «  non  y  père  Laquille...  Je  ne  suis 
pas  en  traiu  ;  plus  tard  ,  si  vous  voulez. 

LAQCILLE. 

Morbleu  !  qu'est-ce  que  ça  veut  dire  ? 
fimourèu:^  ! 


SCÈNE  II. 

AI»  :  Le  hriquet  frappe  la  pierre» 

.     ■  ■  ,' 

Vous,  Ciilporal,  est-c'  possible? 
Du  désord'  donner  V  signal. 

DOAVAL. 

Mais ,  j)our  être  caporal , 
Faut  «il  donc  être  insensible  ? 

LAQUILLK. 

Oui ,  le  service  d^abord  , 
Fùl-on  mêiii'  s^i^ent-inajor. 
JVms  brûlé  tout  comme  un  antre. 
Et  dt;s  ffuJL  les  plus  ardens  j 
Car  on  était ,  de  mon  tems , 
Amoureux  tout  comftie  au  vôtre; 
Mais  j^ioiis  arrangions  chacun 
Pour  réire  de  deux,  jours  Tun. 

Ainsi  j  décidez- vous 

AIR  :  Gai,  gai,  mariez^vùui,, 

n  faut ,  cVst  là  ma  loi , 
Qtrau  service 
Ou  obéisse  ; 

n  faut ,  cVst  là  ma  loi  y 
Choisir  entr'  l'amour  et  moK. 
A  ce  chef  plein  de  malice , 
Drés  que  vous  vous  adressez  y 
Gn'y  a  plus  besoin  dVxercicC» 
L'amour  en  fait  faiie  assez. 

Il  faut,  etc.  * 


10    Vm  HUIT  DE  lA  GARDE  NATIONALE. 

SCÈNE  III. 

LES  PfcéciDEWs,  I/ÉVEILLÉ,  chargé  de 

divers  objets  qu'il  remet  à  chaque  garde  national. 

L*fiVElLté. 

AI&  :  On  dit  partout  clans  le  monde, 

A  vos  désirs  fidèle ,  '  ~^ 
^^ai  rempli  tous  Vos  vœux  ; 
Je  vais ,  grâce  à  mon  zèle , 
Vous  rendre  tous  heureux.  , 
(Donnaat  ii  Tub  le  journal.) 
Voilà  ce  qu'où  annonce. 

(  A  un  autre .) 

Voilà  votre  billet; 

(A  an  autrt.) 
Voilà  votre  réponse. 
(  A  M.  Pigeon ,  en  lui  donnant  une  Tobille  eaTelopp^ 

dans  du  papier.) 
Voilà  votre  poulet. 

TOUS. 

A  nos  désirs  fidèle  ,* 

Tu  remplis  tous  nos  vœux. 

£tc. ,  etc. 

PIGEON. 

Allons»  tu  as'oublié  mon  bonnet  de  colon  ; 
tour  est  conjuré  corflre  mon  repos. 


»         N 


SCENE  m.  XI 

Tu  as  ©té  bien  long-lems. 

L'éfBiLLé. 

J'avais  tant  de  choses  à  faire  !  L'un  m'on- 
Toie  porter  une  lettre  d'excuse  à  sa  maîtressi?, 
IVutre  demander  de  l'argent  à  sa  femme. 
Savez-Tous  que  pour  être  tambour  de  ia 
garde  nationale  9  il  faut  de  la  tête  et  des  jam- 
bes ;  et  de  l'oreille  donc  !... 

PIGEON. 

C'est  juste,  il  faut  être  musicien. 

L'ÊVBlLLé. 

Et  il  n'y  en  a  pas  un  pour  pincer  un  rou- 
lement comme  moi...  Ce  n'est  pas  moi  qui 
prendrai  un  fjla  pour  un  rrra;  et  ça  sans 
avoir  étudié  au  Conservatoire,  encore. 

DOftVAL. 

Dis  donc,  petit  joufflu...  c'est  toi  qui  portes 
les  billets  de  garde  ? 

l'ÉVEIIiLÉ. 

Je  le  crois  bien. 

D  0  R  V  A  L. 

Eh  bien  !  tache  donc  de  ne  pas  venir  sî 
souvent  chez  moi...  Mon  portierne  voit  que 
ton  visage. 

l'jéveillé. 

Vous  êtes  diflicile.  11  y  a  bien  des  belles 


> 


td  UNE  NUIT  DE  LA  GAKDE  NATIONALE. 

dames  4^  votre  quartier  qui   me  paieraient 
pùar  apporter  des  billets  à  leurs  Qiuri$. 

DOBVAL. 

Bah! 

^   L*£ VEILLÉ. 

AIR  :  Dujroid  avec  courage. 

Quand  Thenreuse  missive 
Arrive  ua  beau  matin , 
Cfac...  répouse  attentive 
LVnvoie  à  son  voisin  : 
Soudain  il  y  regarde 
Le  jour  du  rendez-vous  y 
C*çst  le  billet  de  garde 
Qui  sert  de  billet  donXé 

On  s*cn  est  plaint  à  la  poste...  Le  facteui* 
du  quartier  De  l'ait  plus  rien  \  mais  moi)  c'est 
différcut. 

AIR  :  Vaudeville  de  Lantara^ 

ti  Monsieur  craiut  ma  visite  y 
Mailaui*  la  trouv'  d^  son  goût  ^  ^ 
Vim  m'  pairait  pour  v^nir  plus  vite , 
L^autr*  pour  n'  (>as  v''nir  du  tout  ! 
D^  sorte  que  j^arrive  ou  que  j' turde^ 
Toujours  on  donne  au  facteur  ; 
Et  (lout*  moi  zun  billet  de  garde 
Est  un  billet  zau  porteur. 

SAiNT-iioflr,  àpart. 

Parbleu!  il  me  vient  une  idée.  {Haut.) 
Me&ïieurs  y  quelle  heure  est-il  ? 


SCÈNE  IV.  il 

l>I6E0N. 

Esl-cc  que  vous  youdrleî  vous  aller  cou- 
cher ?*..  Pas  de  ç'^  f  au  moins. 

SAINT-LÉOIV. 

Eh!  non,  soyez  tranquille..  1  Est-ce  qu'un 
caporal  quitte  son  poste!  {À  un  garde.)  Ca- 
marade f  vouiez-vous  me  céder  la  table  ua 
inbtaut  ? 

Bien  volontiers. 

SCÈNE  IV. 

IBS  pkBCÉDEiis,  LE  CAPITAINE. 

l'b  V  E  1 1.  L  E. 

Dites  donc 9  père  Laquilie ,  jouons-noud 
une  partie  ?  la  mouche  ou  'a  brisque« 

LAQUILLE. 

J*aime  mieux  les  jeux  de  combinaison...  la 
drogue...  la  biitailic.  {S^adressanC  au  Capi" 
iaine.  )  Salut  à  notre  digne  Capitaine. 

LE   CAPlTAlIfE. 

y- 

Bonjour,  mon  brave.  Mes  amis^  sommes- 
D0U9  au  complet  ? 

SAlIiT-LfiOB. 

jOxix^  Capitaine» 

F^  V«ud«v;U«i.  4>  ^ 


\ 


i4  UNE  NUIT  DE  LA  GÀKDE  NATIONALE. 

r 

LE    GAPlTAlIfE. 

À  la  bonne  heure.  (  Sévèrement.  )   Mes- 
sieurs • 

AIR  •  VaudtviUe  d^AlhÀrde. 

Oiti  »  )e  Toas  le  dis  sans  détour , 
Dans  les  heures  de  Pexercice , 
Qu'à  son  poste  Toa  soit  toujours  ! 
,        Point  d'excuse  pour  le  sewrice. 
A  la  rigueur  je  suis  enclia  : 
Qii'à  ma  voix  tout  le  monde  tremble  ! 
Ce  soir  obéis;>ez. 

(  Riswt.) 
Demain 
Nous  déjeunerons  toHs  eesemble» 

SAlNT-téON. 

Je  n'ai  pas  oublié  qoe  vous  nous  avex  pro- 
mis un  pâté. 

Et  un  pâté  solide  au  poste. 

£B  GAPITAlîTR. 

Et  six  bouteilles  de  vin  de  Soterne  qui 
nous  attendent  en  faction. 

OOftTAL. 

Capitaine^  si  tous  renforciez  le  poste! 

LE   CAP  rT  AI  HE. 

C'est  juste...  Il  y  en  aura  dQuze;  mais. 


,       SCÈNEV.  i5 

Messieurs,  je  tous  le  demande  en  g;râce... 
des  bonnets  à  poil^  il  nous  en  njanque  eQ<^ 
cor&  dans  la  compagnie. 

LA    MERE    BRISEMXÇHB   ,  60  dehors. 

Buvez  lu  goutte  9  cassez  la  croûte. 

SCÈNE  V. 

LUS  PBKCÉDEifs,  LA  MÈRE  BRISEMI- 
C  H  £9  avec  «les  petits  pains. 

DORYAL. 

JLbI  c'est  la  mère  Brisemiche. 

LA    HERE    BRISEMICHE. 

Allons,  mes  entans,  buvez  la  goutte... 
cas^sez  la  çroute...  De  la  bonne  eau-de-fie, 
des  bons  gâteaux,  ils, sont  tout  chauds. 

V  N  G  A  R  D  E ,  sur  le  lit  de  camp. 

Laisse-nous  dormir. 

LE   CAPITAINE. 

Bah!  elle  en  a  réveillé  bien  d'autres. 

(  Pigeon  et  Laquille  prennent  de  ses  petits  pstins.) 

s  AiNT-LfiON,  bas  à  rÉveillé. 

Tiens ,  il  faut  ù  Tînstant  me  porter  cette  let« 
tre  à  son  adresse  ;  ça  n'est  pas  loin. 

l'éveillé. 

£t  si  le  Capîtiiipe  me  demande  ? 


i6    UNE  NUIT  DE  L\  GARDE  NATIONALE. 

SAINT-LEON. 

Je  m'en  charge;  va  vite...  maïs  oe  dis  pas 
que  ça  vient  du  corps-de-garde. 

l'éveille. 

Soyez  tranquille. 

LA  MÈAE  BBISEMIGHE,  FarrêfaQU 

Dites  (Jonc,  mon  petit,  vous  ne  me  pre- 
nez rien?  Vous  savez  bien  que  je  donne  tou- 
jours le  treizième  par-dessus  le  marché. 

l'éveille. 

.Volontiers,  la  mère...  sî  vous  voulez  me 
donner  uue  douzaine  de  treizièmes. 

SCÈNE  VI. 

ifrs  PBÉGBDE1IS,  excepté  L'ËYEILLB. 

L&QVILLB. 

Cette  linère  Brisemîclie  ,  c'est  ^  bien  ta 
doyenne  des  marc^handes.. 

LA  MEBE  BBiSEMiGflE,  lui  vcTsant à boîre. 

Dame!  voilà  bientôt  dix  ans  que  j'ai  ou« 
Te  ri  mon  commerce  de  gâteaux. 

PIC  EON,  essayant  d'en  manger. 

l^n  voilà  un  qui  date  (le  i*ouverture. 

LA  MEAE  BttiSEMiCHE,  vcrsaot  il  La(|uille. 

Bah  !...  c'est  fait  d*hier. 


SCÈNE  VI.  17 

tkQV  I L  LB  9  apirés  avoir  bu. 
Je  le  Tois  bien. 

liA.  MitABB&l  SE  MICHE. 

Eh  bien  !  y*iù  comme  ils  sont  tou8« 

AIR  :  JW  vu  le  Parnasse  des  dàneSé 

Snr  moi  la  médisanc'  s^xerce , 

Car,  voyez- vous,  j'ons  des  ennemis; 

Od  veut  farr'  torl  à  mon  commerce  , 

Biais  de  leurs  caquets  je  me  ris  I 

Quand  on  a  d^  la  conduite  et  d'  Tordre» 

Ou  est  au-dessus  des  |iro|ios  ; 

Et  f  défions  qu'  jamais  on  puisse  mordre 

Ni  $ur  moi ,  ni  sur  mes  gâteaux.  ' 

LEGAPITAIVE. 

Au  moins,  la  mère  ,  ça  Ta-t-il  comme 
TOUS  voulez  ? 

LAUÈEEBaiSEMICRE» 

Oh!  nous  avons  eu  un  mauvais  moment  à 
passer* 

àlR  :  Sans  mentir. 

Pendant  c^  tems  pas  un  pYit  verre. 
Et  pas  un  gâteau  d^  vendu , 
On  n*  fesait  rien  à  Nanteri^e  » 
Le  commerce  n'allait  plus  ; 
Maintenant,  contre  un'  présidente     ^ 
Je  n'  changerions  pas  d'emploi  : 


ï8    Vm  NUIT  DE  LA  GARDE  NATIONALE. 

On  (lirait  qii^  la  soif  augmente 
Et  tout  r  mond'  veut  lïoir' ,  f  croî 

Depuis  qi^on  boit , 

Depuis  qu'on  boit ,  x 
/  A  la  santé  d'  oot'  bun  Rqî. 

LE   GAPITAINB. 

S'il  est  ainsi...  je  me  dévoue. 

TOUS.   , 

Et  nous  aussi...  nous  boirons  à  la  santé  du 
Roî. 

1£   CAPITAINE,  qui  abu. 

Diable  !  il  faut  bien  Taimer. 

1.AQCILLR9  avalant  un  grand  verre. 
Bah!  renlhousiasme  fait  tout  passer. 

LE  CAPITAINE^  tirant  sa  montre. 
Eh  !  eh  !  Messieurs,  voilà  l'heure  de  la  pre- 
mière patrouille. 

LAMÈ&EBRlSEMlCBE. 

Adieu,  mes  enfans...  je  m'en  vas  au  poste 
voisin...  Bonne  nuit.  Buvei  la  goutte,  casse» 

la  croûte, 

(Elle  tort.) 


SCÈNE  VIL  I» 

SCÈNE  VII. 

LES  PEÉGSDBif»,  etcepté  L4  MÈKE  BRI* 

S£M1CH£. 

I^E  GAPlTAiliE>  lisant  scpr  la  fcuUIe. 

Lis  caporal  '  Sai|it-*LéoD  y  Dorral  et  cioq 
hommes. 

SAiNT-IiBON,  àpart. 

Ah!  diable!  et  FÉTeillê  qui  n'est  pas  re- 
venu. 

LE   GAPITAIVV. 

Allons ,  Messieurs ,  il  faut  vous  disposer. 

SAIKt-LÉON. 

Ou!»  mon  Capitaine.  Allons,  Messieurs. 

DOBVAL9  à  SaÎQt-Léon. 
EhbieTil  qu'est-ce  que  tu  as  donc? 

SAIN  T-L  BON. 

Ce  que  j'ai...  Sais-tu  à  qui  j'ai  écrit?  à 
Yersac. 

nOBVÀL. 

A  Yersac? 

s  A  I  s  T-L  É  O  ir. 

Oui,  un  billet  doux,  un  rendei-vous... 
que  je  lui  donne  de  la  part  d'une  jolie  dame 
de  ce  quartier ,  qu'il  courtisait  avant  son  ma-» 
riâge. 


ao    U*\E  NUIT  DE  LA  GARDE  NATIONALE. 
El  tu  crois  qu'il  y  viendra  ? 

UAINT-LÉOrr. 

Il  se  ferait  pendre  plutôt  que  d*y  manquer. 
A  minuit,  une  heure  ^  il  doit  arriver  sous  les 
fenêtres  de  sa  belle  ^  qui  demeure  ea  Caee. 

BOftVAI. 

£h  bien  ? 

s  A  1 1«  T-L  é  o  ir. 

£h  bien!...  eh  bien!  tu  ne  comprends 
rien.  Nou.^  nous  moquerons  de  lui ,  et  nous 
lui  ferot)^  passer  au  corps-de-garde  une  nuit 
qu'il  croyait  mieux  employer. 

DORVALy  vivement. 

C'est  charmant!  il  nous  paiera  du  puncfa. 

s  A  I  W  T-L  E  o  N. 

Et  conçois-tu  la  colère...  les  soupçons...  la 
|aIousic  de  sa  femme?...  car  elle  est  jaiousci 
ah!  c'est  une  béuédicliou. 

-  D  0  R  V  À 1. 

Ah  !  elle  ne  veut  pas  que  nous  voyions  son 
mari....  et  elle  nous  rel'us^  sa  sœur...  nous 
verrons. 

saikt-l£oiv. 

£tce  l'Éveillé  qui  ne  vient  pas! 

•LE  CAPiTArzvE^  lisant  aaprès du  pocle. 

^h  bien  !  Messieurs  y  cette  patrouille  7 


%  SCÈNE  Vlli.  M 

SAINT- JLËOrr. 

Voilà,  Toîli!)^  mon  Capitaine. 

AIR  :  Ma  belle  est  la  belle  des  belles. 

L^o^dre  en  ce  moment  vous  réclame  : 
Allons ,  Messieurs ,  disposez -vous  ; 

(  Ba9  À  Dur  val.) 
Juge  du  dépit  de  sa  femoie ,  , 

Eu  ue  voyant  pas  son  épaux.  ^ 

"^  DORVAL. 

Certes»  la  .vengeance  est  croelfe. 

SAINT-LSON. 

Je  dois ,  pour  ne  pas  être  ingrat , 
Condamuer  au  veuvage  celle      , 
Qui  me  cobdaïune  au  célibat. 

Allons,  Messieurs,  disposez-vous.  M.  Pi- 
geon!... 

PIGEON. 

Ce  o*e$t  pas  mon  heure  de  faction. 

DOAVAL. 

C'est  une  patrouille...  entendez»vous  ? 

SCÈNE  VIII. 

rtM9  FAicÉDEKS,   L'ÉYEILLÉ. 

t'ivEiILB,liasà  Saint-Lé[>n. 
\         J*AlTemis  lu  lettre.  ' 


a»  r5î:  Kurr  de  la  carde  ^çationale. 

SAIST-LÉOH. 

A  lui  ? 

L*É  VEILLÉ. 

Non,  à  la  femme  de  chambre.. •  Monsieur 
n'était  pas  rentré  ,  et  Madame  l'attendait 
arec  impatience. 

DOITAL. 

^  on  la  lui  remettra  ? 

Ayant  qu'il  se  couche. 

saivt-léoh. 
Bon  !  il  no  se  couchera  pas.  Tu  as  été  bien 


long-tems  ? 


l'É  TEILLE. 


Le  tems  de  changf^r.  Est*  ce  que  je  pou- 
Tais  y  aller  en  militaire?  J*ai  mis  ma  reste 
pour  être  en  habit  bourgeois. 

LE  CAPITAIVE*  Ics  passant  co  RTue. 

C^est  bien,  fort  bien....  Eh  bien!  M.  Pi- 
geoii,  et  votre  giberne?...  Messieurs ,  on  ne 
doit  pas  sortir  du  poste  sans  gibernes. 

DORTAL. 

On  ne  doit  pas  même  les  quitter;  c*est  de 


rigueur. 


PIGEOH,  an  Capitaine. 

Eli  bidl!...  et!a  vôtre?...  Ah!  pardon. 


SCÈNE  VIIÎ.  a3 

8  A I NT-L  1&  0  K  ,  bas  à  TÉ  veille. 

AïK  :  Eh!  ma  mère..» 

Surtout  le  plus  grand  silence , 
Pas  un  mol ,  souviens-t'en  bien. 

le  vous  en  réponds  d'avance , 
Primo  d'abord ,  je  n'  sais  rien! 
Mab  ma  renommée  est  faite 
£t  Ton  sait  qu'en  fait  d'amour, 
J'sis  galant  comme  un  trom|>ettey 
Et  discret  conune  un  tambour^ 

DORVAtybasà  Saînt-Lcon. 

El  s'il  devançait  rheure,  s*il  venait  ayant 
notre  retour  ? 

SAINT-LéON. 

Je  Tais  dire  un  mot  â  la  sentinelle.  Allons^ 
partons. 

lE  CAPITAINE. 

AIR  :  Du  bnmle  sans  fin,. 

Allons ,  partez  tous  enfin 

En  silence , 

Qu'on  s'avance  ,* 
Et  que  sur  votre  chemin 
Kcgocnt  l'ordre  et  la  prudence. 

SAIJPÎT-LÉON. 

Vcrsac  en  ces  lieux  conduit... 


i 


94    t^E  NUIT  DE  LÀ  GâKDE  NATIOUAU; 
Koa$  aOoDS  tont  a  notre  aise 
Passer  une  bonne  nuit , 
Et  sa  ficoHne  une  mauvaise  1 

TOOS. 

Allons  y  partons  tons  enfin 

En  silence  9 

Qu^on  s^avance  , 
Et  que  Tordre  et  la  prudence 
Hègaeat  sur  notre  chemin, 

(Os  so^ileaft.) 

SCÈNE  IX- 

LAQDILLE  et  L'ÉVEILLÉ,  sur  le  fit  de 
camp,  LA  SENTINELLE,  à  la  porte  du 
fonl,  LE  CAPITAINE,  actieyant  de  lire 
la  feuille 

LàQVïLLE. 

Allons,  ]e  vois  qu'ils  ne  prendront  leçon 
qu'à  leur  retour...  Bonne  nuit,  mon  Capi* 
taîoe. 

LB   CAPITAIVB. 

Bonsoir,  mon  brave. 

l'éveillb. 
Prends  garde  au  serein ,  malin* 


'  SCÈNE  X.  aS 

SCÈNE  X. 

K. 
\ 

LES  FftÉciDENS,   ERNEST,  passanl  cUm 

h  rue. 

LA  SBIVT1SELX.B. 
BBNBST. 

Bourgeois. 

(Ernest  ei»t  en  costume  èe  bal ,  bas  cle  soie  blancs ,  etc.-^ 
et  la  croix  d^ionncur.  « 

EBNEST)  entrante 

Salut,  camarades...  Pourriez-yous  avoir 
la  bonté  de  me  dire  qui  est-ce  qui  commande 
ici?  # 

C*est  le  Capitaine  lui-même, 

EBNEST.  ^ 

Me  seraît-il  permis  de  lui  parler  ? 

LE  Capitaine. 

C'est  moi,  Monsieur.  Que  puis*je  faire 
pour  TOUS? 

ERNEST. 

Monsieur  9  je  Tiens  tous  prier....  de  vou-» 
loir  bien  m'arrêler. 

'   LB  CAPITAIKB. 

Cpmmeotl  Monsieur? 

r.  -Vaudcvillct.  4«  ^ 


»6     UNE  NUIT  DE  LA  GARDE  NATIONALE. 

E  B  N  £  s  T. 

C'est  lin  service  que  j'attends  de  votre 

obligeance. 

tB  C4P1TÀ1JÏE. 

» 

Enchanté  de  faire  quelque  chose  qui  trous 
soit  agréable...  mais  ne  pui^-je  savoir?... 

Ers  EST. 

C'est  trop  juste...  Je  vous  avouerai  donc 
que,  quoique  je  sois  militaire,  et  que  j'aie 
vingt- cinq  ans,  j'aime  prodigieusement  à 
ni'amuscr. 

LE    C  APITA  1  HE. 

Voilà  qui  est  bien  étonnait! 

BBKEST. 

Mais  j'ai  une  femme. 

LE   CAPITÀIICB. 

Et  cela  ne  vous  amuse  pas  ?  . 

ERNEST. 

Au  contraire,  Monsieur,  la  plus  jolie  pe- 
tite femme  !  gentille  ,  aimable,  spirituelle, 
qui  ni'aime ,  qui  m'adore  ;  il  y  a  deux  mois 
que  je  l'ai  épousée.    ' 

LE  CAPITAINE. 

Tant  que  cela! 

ERNEST. 

Tout  autant.  Mais  ce  qui  va  bien  plusToai 
suri>rendre,  c'est  que  moi...  Ah!  çà  ,  je  vous 


SCÈNE  X.  •  37 

dcïiaantle  le  phis  grand  secret...  cVst  que 
jVij  suis  amoureux  fou. 

LE    GAPITÀINB. 

Bah! 

ERNEST, 

Mais  qui  n'a  pas  e»  de  faiblesses?  Von*;- 
mCnie...  les  plus  grands  capitaines...  et  la 
mienne  ya  au  point  que  j'ai  promis  à  ma 
femme  de  rentrer  tous  les  soirs  à  neuf  heures. 

AiB  :  Vu  vem. 

Cmjez-TOits  que  depuis  deux  mois , 
Mot ,  jadis  léger  et  frivole , 
C'est  ici  la  première  fois 
Que  je  lui  maDipie  de  parole  ; 
Et  jugez  de  son  désespoir, 
Car,  soit  aiiiour,  soit  babîUide , 
Ma  {emme...  à  ce  que  J'ai  cru  voir, 
Tient  beaucoup  à  rexaclitude. 

Elle  sera  désolée...  mais  que  voulez-vous  ? 
I3ii  dîner  charmant,  du  vin  de  ('hampagne, 
de  jolies  fetnmes...  On  dîne  si  lard  à  pré- 
sent... et  puis,  il  y  a  eu  un  petit  bal. 

LE   GAPITAI  (f  B. 

Oh  !  je  me  mets  bien  à  votre  place. 

ER^EST^ 

Vous  voyez  d'après  tout  cela  que ,  si  je  ne 
suis  p:is  arrêté,  je  suis  un  homme  perdu... 


aS  UNE  NUIT  DE  LÀ  G.\P.DE  NATIONALE, 
tandis  que  si  demain  matîa  on  me  yoit  arrirer 
au  logis  y  conduit  par  deui^  gardes  natto* 
naux...  ni  Comment  I  ce  pauvre  maru,,  U  a 
»  passé  la  nuit  au  corps-de-garde  L.,  et  moi 
»  qui  osais  C accuser,  »  i^ile  m'en  aimera  deux 
fuiâ  mieux. 

LE  CAPITAINE. 

CVst  même  une  spéculation. ••  Mais  tout 
allez  passer  une  mauvaise  nuit.    ^ 

E  a  V  E  s  T. 
Bah!  Tnutre  sera  meilleure...  D'ailleurs  « 
demain,  après  -  demain ,  ne  puis-je  pas  être 
des  YÔtres  ? 

LE   CAPITAINE. 

Ah!  TOUS  êtes  aussi  de  la  garde  nationale? 

E  R  11  E  s  T. 

le  m'en  fais  un  devoir. 

AIR  :  yotdant  par  ses  œuvres  complètes. 

Croyez  ([lie  de  vbtre  obligeance 
J^aurai  toajoars  le  souvenir  ; 
Ah  !  'pour  combler  mon  eqiérance , 
Que  ne  puis- je  ainsi  vous  servir! 
Si  jamais  les  destins  vous  mettent 
Dans  le  cas  où  nous  trouvons , 
Songez  que  nous  nous  fâcherons 
Si  d^autres  que  moi  vous  arrêtent. 

tE   CABlTAUfltf. 

•  Vv)U?^  êtes  trop  bon  ;  mais  je  serais  charmer 
de  faire  plus  ample  coiniMi^sance ,  et  de  saToir 
le  ngm  d*un  mari  aussi  fidèle. 


SCtlKEX.,  99 

Ahî  yolonlîers!  je  surs... 
(  11  te  tire  du  côté  0[>posé  à  rÉveillé  d  k  LafjuUIe ,  et 
lui  [y»Ae  ïm  à  roreille.  } 

tu   GAPITllHE. 

Comment  !  je  l'ai  Tue  autrefois  chex  son. 
père,..  £lle  était  bien  jeune  alors!....  Maïs 
donnez-vous  dooc  la  peine  d*entrer  daos  mon 
appartement. 

AIR  :  Nous  verrons  à  ce  ipi^U  dit» 

Acceptez  donc  sans  façons 
L^ifiite  que  je  yous  présente  ; 
Oui ,  Totre  femme  est  charmante» 
De  SCS  attraits  nous  parlerons. 

Ah  !  d'ici  je  vois 

Son  joli  minois  | 

Je  vois  ' 

Sa  taille  élégante 

£t  son  air  frt|)on , 

i^t  $o|i  pied  mignon. 

ESKSST. 

Ehbkn! 
Vous  ne  voyez  rien. 

LB  CAPITAINE. 

H  I  Acceptes  donc  sans  façons ,  etc. 

^\   Oui ,  f  accepte  sans  façons , 

Monsieur,  une  offre  qui  m^enchante^ 
Puisque  ma  femme  est  abiiente , 
De  ses  atlraits  uuus  paiieiuns. 

I. 


i 


\ 


9o    UNE  SUIT  DE  LA  GARDE'  NATIONALE. 

SCÈNE  XI. 

t'É VEILLE  ,  LAQUILLE  ,  endorims,  ensuite 
M~«  DE  VERSAC. 

t  SBKTinstLB)  à  la  porte. 

Qui  vite?,,.  qUî  TÎveP...  qui  vire?  ou  je 
tire. 

Iime  0£  TBRSAC^  paraissant  à  Importe  du  cor|)s-de- 

garde. 

Garde  nationale  ! 

LA   SBKTlNELtB. 

Comment!  garde  nationale!...  Soldat  du 
posle ,  vous  roulez  dire  ? 

M"«   DE   TBIISAC, 

Oui,  Monsieur,  soldat  du  poste. 

LA  sbutinelle. 

Comment  !  sans  sabre  ni  giberne.  (  F'ïve* 
punt^  à  partp  )  Et  cet  homme  suspect,  dont 
parlait  le  caporaL  {Haut,  )  Entrez  vous  ex- 
Ipliquer. 

M™»   0]B   VERSAC. 

Ne  vous  fâchez  pas,  je  reste...  Il  d'j  a  que 
manière  de  prier. 


SCÈNE  XlLi  Si 

SCÊINE  XII. 

LAOt^TLLE  ,   L'ÉVEÏLLÉ  ,   endormis  ,     LA 
'  SENTINELLE  dans  le  fond  ,    M*"»  DE  VEK- 
3âC  9  eu  habit  de  garde  national. 

M"'*  DB  VERSAC. 

Ab  !  mon  Dieu  !  et  ma  femme  de  cham- 
bre... (  Apercevant  Laquilie.  )  Ah  !  il  m'a  fait 
une  peur!  Non,  il  dort...  Mais  qui  m'aurait 
dit  que  jamais!...  aussi,  conçoit-ou  rien  à 
mon  aventure!...  Le  perfide!  à  minuit, 
n'être  pas  rentré!...  {Montrant  une  lettre/) 
Et  il  arrive  pour  lui  un  rendez-vous,  quand 
peut-être  il  est  déjà  à  un  autre!...  Cette 
lettre  que  in'a  donnée  ma  femme  de  cham- 
bre... ce  n'est  pas  bien  à  moi  de  l'avoir  déca- 
chetée... C'est  vrai!...  Mais  enfin,  pour  qui 
me  tra-hit-il  ?...  pour  une  madame  de  Sénan- 
ges...  la  plu<t  grande  prude...  ou  plutôt  la 
plus  grande  coquette.  Fiez- vous  donc  aux 
îemmes  !...  Que  j'aurais  eu  de  plaisir  à  la 
confondre  ,  àtne  trouver  à  ce  rendez-vous  I 
C'est  pour  cela  que  j'ai  pris  l'habit  de  mow 
mari  !...  Et  encore,  à  peine  suis-je  descendue 
de  ma  voiture,  où  m'attend  ma  femme  do 
chambre,  que  je  me  trouve  arrêtée  ici!... 
dans  un  corps-de-garde-. .  ( Regardant  autour 
délie,  )  Ça  n'est  pas  beau  du  tout...  Des 
(^auus..,  une  table...  ah!,,,  des  cartes,,,  des 


3a    UIÎE  TOIT  DE  LA  GARDE  NATIONALE. 

pajjîers,  des  livres^  Nos  mari;»  ne  sont  pfis  ^i 
à  plaindre  qu^ils  veuleul  bien  le  dire!...  et 
s'ennuient  moins  an  cûrps-^le-^irde  qu<3 
nous  à  les  attendre  I  C'est  lu  sans  Joule  quu,. 
tous  réunis 9  ils  rient  à  nos  dépens,  ou  s'oc- 
cupent peut-être  des  moyens  de  nous  troia* 
per* 

AIR  :  FaudeviUe  de  jadis  et  aujourd'hui» 

Hélas!  crédules  que  nous  sommes. 
Plaignons  donc  encor  nos  époux  ! 
Lorsque  ces  ntossieurs'  sont  entre  hommes , 
Dieu  sait  ce  qu'ils  disent  de  nous. 
Dans  CCS  lieux  où  chacun  outrage 
I^otre  constance  et  nos  Tertu.<i , 
Que  d'é|K)ux  se  peniraieat ,  je  ga^ç... 
suis  a'ëtaieot  pas  déjà  perdus  l 

Aussi  ma  sœur  ne  se  mariera  pas^  et  quoi 
qu'elle  en  dise,  je  la  forcerai  bien  ù  rester 
CHe...  et  à  être  heureuse  malgré  elle. 

SCÈNE  XIII. 

M"*  DE  VERSAC,  LAQUILLE  te  léveillant 

LAQOILLE. 

Si  fe  n'y  araîs  pas  pris  ^arde...  j*a]|ais 
m'endormir.  Ah  !  Toilà  un  camarade. •«.;. 
Allons ^  oamarade...  Toyons  fa  leçon. 


.  SCÈNE  XIII.  IJ 

Quelle  Ief6u?... 

LAQVlttB. 

D*exercîce  apparerhnQent...JSst«ce  que  j  Va 
donne  d*aulres? 

Comment  me  tîrcr  ^e  là! 

IAQITI1.I.E. 

Allons,  prenez  votre  fusil...  Eh  bien!  ne 
Bûfez'-vous  pas  où  est  Totre  fusil?.».  Là... 
avec  les  autres...  Est-ce 'que  vous  êtes  aussh 
umoureuxP  II  n'y  a  que  des  amoureux  dans 
I»  compagnie. 

U^'«  DE  VB&SAC,  à  part. 

.  ÂlloDS,  de  la  hardiesse...  Je  ne  m'en  tire'* 
rat  peut-êlre  pas  plus  mal  que  beaucoMp  do 
ces  Slessieurs. 

lAQVllLE. 

Bien...  Tenez  vous  droit».,  rœiifixe...  ks 
épaules  effacées...  Rentrez-moi  cet  esto- 
mac... Comme  c'est  gauche  un  soldat  qui 
n'a  pas  vu  le  feu...  Attention  au  commande-* 
roqnt.  Portez...  Au  commandement  de  por- 
tez, vous  élevez  Tarme  vivement  près  Fépaule 
gauche;  la  main  gauche  sous  la  crosse,  la 
droite  à  la  batterie.  Portez...  armes! (illa^amt 
tU  Fersac  porte  armes,  )  Pas  mal...  mais  ça 
pourrait  être  mieux!  Ah!  j'oubliais  de  vous 


H    UNE  NUIT  DE  LA  GARDE  laTIONALE. 

dire,  ainsi  qu'à  ces  Messieurs,  que  je  ne 
pourrai  pas  cette  semaine  aller  douaer  de 
leçon  chez  tous. 

V^^   BE   YBfiSAG,   à  pai't. 

Je  n*y  tiens  pas  du  tout.   . 

LAQOlL&ff. 

^IR  :  Du  vaudeville  de  Sophie,  ou  de  V/tubergé* 

N^allez  pas  pertlre  en  inoù  absence 
,  La  leçon  qif  vous  r'ceyez  Iti. 

)^a  tête  haute. 

MÂ9AMM  D£  trCASAÇ. 

Je  vous  en  donne  Tassurance 
Je  n^oublirai  pas  cijfeUc-ci  ! 

J'enrage  ! 

LiCQlriLLK. 

Jugez  pour  tous  quel  avantage , 
D^être  au  poste  venu  coucher  ; 
Vous  n^auriez  pas  eu  d' leçon ,  j'  gage , 
Si  vous  nVtiez  v^nu  la  chercher, 

to"*  DE    TERSàC. 

U  a  raison. 

lAQUILLE. 

Allons....  Présentez..,  armes!...  Eh  bien  ! 
qu'est-ce  que  vous  faites  donc  là  ? 

m"*   HE    TERSAC. 

C'est  qu'aussi  c'est  trop  lourd, 


SCJEiVEXlIi.  35 

Bah  î  vOuS'YOUs  y  ferez...  FI  sur  lé  cliamp 
.    de  bataille  donc!  dix  co«ps  à  la  minute  î  Pif, 
paf,  on   lire,  on  tue,  ou  est  tué..»  la  se- 
conde t'ois  on  n'y  fait  pas  attention. 

LA   SENTINELLE* 

Qui  vive? 

S  ▲  1 9  T-L  EO  N  •  eo  dehors. 
Patrouille  rentrante  1 

LAQCILLE 

C*est  notre  ronde  qui  rerienl  atec  le  ca- 
poral.* je  vais  en  prévenir  le  coiwniandanl» 
-  ^      (Il  entre  eiicz  le  Capitaine.  ) 

Jll"'*-I)E    VER  SAC. 

'Si  je  pouvais  parler  à  ce  caporal^  et  ob-* 
tenir  de  lui  la  liberté  et  le  secret.  Mais  com- 
ment répondre  aux  premières  questions  ? 
Feignons  de  dormir. 

(  Elle  s'assied  «ir  une  chaise ,  et  tourne  le  diW  à  ceux 
qui  arrivent-  On  relève  la  senlinettc  dû  fond  ;  les 
autres  déposent  leurs  fusils ,  ou  se  couchent  sur  k 
Ut  de  can^n  ) 


M  UNE  NDIT  DE  LA  GARDE  NATIONALE. 

SCÈÎSE  XIV. 

LA  SENTINELLE,  SAÎNT-LÉON,  DOR- 
SAL, M-  DE  VERSAC,  PIGEON,  et 
autref  gardes  DationâiuL  ifù  dormcut. 

TOUS» 

▲m  :  Des  Vendanges  du  yatidttniU, 

Nous  voilà  tous  de  retour, 
Noos  ayons  fini  la  ronde  ; 
Quand  on  fait  dormir  le  moncte , 
On  peut  dormir  à  son  lourb 

DOBVAL. 

Notre  z^le  fiût  menreiUe  » 

Et  Ton  doit  être  content. 

Dans  le  quartier  tout  sommeille. 

PIGEOir. 

Moi ,  je  vais  en  faire  autant. 

TOVS. 

Nous  voilà ,  etc. 

LA  SBiiTiKELLEy  bas  à  Saint^Léon. 

J'ai  fait  entrer  quelqu'un  au  corps-de-gar- 
de.... je  ne  sais  pas  si  c'est  votre  homme.... 
TeoeSy  il  est  là  qui  dort. 

SAlIfT-léoif. 

X'est  bieul   {Bas  à  Dorval.)  Versac  est 
arrêté.  (  lis/oiMmceni  tous  dewv,  pas  A  pus. 


SCÈNE  XÎV.  3^ 

^t  aperçoivent  madame  de  Versae ,  qui  dort,  ) 
Que  voîs-je?  c'est  sa  femme  ! 

Quelle  reûcoDlre  ! 

8Ai9T-i.Bdifr. 

Ma  foi ,  je  n'j  conçois  rien...  Mais  ce  tour- 
ci  vaut  mieux  que  le  nôtre...  Dors,  et  laisse- 
moi  parler.  (  Haut.  )  Voyons  donc  ce  garde 
DatiouaLque  Fon  et  aTrê{é.{Feignantde  l'âper* 
cevoir.  )  En  croirai-je  mes  yeux  ! 

»!*"•  DE  TKASAC; 

]\}.  de  Saint-Léon  ! 

9AiifT-LÉ0N|  à  Toix  basse ,  les  premiers  motS< 

Quoi  !  c'est  vous ,  Madame ,  à  la  caserne  ^ 
en  uniforme!  Auriez- vous  par  hasard  reçu 
un  billet  de  carde?  Noire  sergent-major  en 
envoie  à  tout  le  monde  ;  ou  plutôt  ce  qu'on 
disait  des  dames  de  Pari^  sératt-il  vrai  ? 

aib:  Tu  vois  en  nuU  h  rêghrwni  {  JoiU'iWe  au  camp). 

Ces  dainf..s  av%eat  le  projet 

De  fonner  plusieurs  compagnies  j 

Peur  les  coromaucler  ou  devait  , 

Choisir,  dit-on ,  les  jiluff  jolies* 

Mais  je  vois  que  c'est  vnst  erreur  j 

Si  la  aouvi-Hc  tlait  c^r^atJ  e , 

Au  î»u  d'th'e  sinij^ïp  cîm^scuv, 

Riafîa-.oe  serait  capitaîue. 

à. 

F»  Vaudevilles,  .j»  ^ 


98    USE  NUIT  DE  LA  GARDE  NATIONALE. 

WT*  1>E   TIRS  A  G. 

Yous  triomphez  »  Monsieur  :  tous  pouTez 
tn'accabler. 

«AIlTT-ttOir. 

Moi  !  ah  !  tous  me  connaissez  bien  mal. 
(  Avec  intention,  )  El  qiioiquje  tous  n*aiuiiez 
pas  lès  lats...  / 

u^fi  DE  TER  SAC,  confose. 

Ah  I  Monsieur^  combien  je  suis  honreuse  ! 

SAIlf  C-LBOir.' 

Non 5  je  sais  que  tous  ne  les  aimez  pas... 
On  ne  peut  pas  disputer  des  goûts,  niai^  un 
fut  peut  quelquefois  être  utile...  Que  puii-je 
faire  pour  vous  ? 

M"'    DE  TBESAC. 

Vous  le  savez...  me  faire  sortir  de  ces 
lieux. 

8A<l»««l.E0V. 

Impossible  pouf  le  moipent./.  k  moins  d^en 
parler  au  sergent,  qui  en  parlerait  au  capi- 
taine... qui  en  parlerait... 

y»<  DE  YERSAG,  avec  impatiçkice, 

A  toute  la  légion, 

SAIKT'LÉON. 

Non,  pas  tout-à-faît.».  mais  qui  en  ferait 
son  rapport,  et, tous  sentez  que  demain  cela 
irait  à  Tétat-major...  J*aimc  mieux ,  sans  en 


s  CÈNE. XIV.  59 

rîeo  dire^^aisir  la  premièro occasion...  D^ail- 
leurs  ^  déjà  nous  quitter  I  cela  n'est  pas  ga- 
lant. 

M^   DB   TEB9AG% 

Et  comment  justifier  mon  absence  aux 
yeux  de  mon  mari?  Que  lui  dire? 

Mais  ce  qu'il  vous  dit  Iai<»même  en  pareil 
cas. 

M"*  DE  TEBSAC. 

Oh!  les  maris  ne  manquent  jamais  d'ex- 
cuses; ils  s'entendent  avec  le  capitaine;  Us 
disent  qj'Hs  sont  de  garde,  et  tout  fini  par 
là$  mais  moi ,  quel  prétexte  prendra!. ••  En- 
core, s'il  y  avait  bal  de  l'Opéra.    , 

SAlMT-LÉOir. 

C'est  si  commode  les  bals  dèl'Opéra. 

DOETAl^  a  part. 

C'est  la  garde  nationale  des  dames. 

ai?*  DE   VEBSAC. 

Et  d'ici- là ,  si  quelqu'un  de  connaissance.. . 
si  quelqu'un  moins  discret  que  tous?... 

SAiaT-i.BOsr. 

Il  n'y  e;i  a  pas....  Fersonne  ici  ne  vous 
connaît,  à  moins  cependant  que  le  jeune 
Dorval...  N'avez-vdus  pas  idée  ?... 

K^   DE  VERSAC. 

Oui...  oui...  je  l'ai  vu  une  ou  deux  fois  en 


4o    UNE  NUIT  DE  LA  GAflDE  NATIONALE. 

eodété...  et  peut-être  aura-l-îl  remarqué  ma 
figure  l... 

Il  serait  difficile  qu'il  ne  I*eOt  pas  fait 
Mais  rassurez  -  vous  ,  je  vais  parer  le  coup 
(  Lui  frappant  sur  CépauLe*  )  Heio...  DorYal»* 
Pprval! 

»""*   PB   TEBSAG» 

Quoi  î  TOUS  le  réreillez  ? 

SAIKT-tBON. 

4 

Ne  connaîs-tu  pas  madame  de  Versac? 
D  o  B  y  A  L ,  feignaot  de  s^éTciller. 

Oui  t  parbleu  !  la  plus  jolie  femme  du 
monde  ..  Un  peumaligne...  un  peu  prude... 
un  peu.., 

Je  te  présente  M.  Dorlis»  son  frère ,  un  de 
me»  camarade^. 

D  0  B  V  A  £. 

Monsieur  9  enchanté  de  faire  votre  connais- 
fance  ;  comme  vous  voyez  y  je  suis  l'ami  delà 
famille  >  et  je  tiens  beaucoup  à  devenir  le 
vôtre, 

M"**  DE  vebsac. 

Hoasieur.., 

DOBYALy  à  madame  de  Versac. 

C'est  qu'en  effet  vous  ressemblez  bcaMÇûiip 
&  votre  sMBur!...  Charmante  petite  femme^ 


SCÈKEXIV.  41 

qui  ne  peut  pas  me  souffrir  î...  C'est  le  scvil 
défunt  qu'on  lui  reproche  dans  \v.  monde... 
Pdrdî  !  vous  devriez  bien  nous  ruccommoder 
iâveceile... 

SAiHT-LÉOH. 

^Je  n'osais  tous  en  ^trier...  mais  c'est  là  le 
{>lus  ardent  de  mes  vœux.; 

AIR  :  Faudep'tlie  de  ta  Robe  et  les  Bottes. - 

Dites-lui  bien  qu'a  Taiâitié  fidèle , 
Parfois  malia  y  mais  toujours  généreux  $ 

l)OaVA.L. 

De  faux  rapports  ndas  ont  noircis  prés  d'elle  : 
Des  étourdis  ne  sont  pas  dangereux.  < 

SAINT-LÉON.  . 

Daignez  pour  nous  employer  yeis  prières  j 
De  vos  bontés  c^est  peut-être  abuser  ; 

(  Avec  intention  ,  et  lui  prenant  la  main.) 
Mais  on  sait  qu^entrc  militaires 
On  ne  peut  rien  se  refuser. 

TOUS  TROIS.  ^        ' 

Oui,  lorscpie  Ton  est  militatre,  ^  . 

Ou  ne  peut  rien  se  refuser. 

S  A I H  T-L  é  0  N  ^  à  madame  d6  Vessee.  f 
Silence  !  voici  le  Capitaine. 


4t 


4^    UNE  NUIT  DE  LA  GARDE  NATIONALE. 

SCÈNE  XV. 

LES  pBécÉDBïs,  LE  CAPITAINE. 

LB  GAP1TA1VB. 

Eh  bien  !  Messieurs ,  touç  f  oîlà  de  retour? 
Qu*ave£-vou8  tu  peDdaot  la  patrouille! 

SAIS  T-t i  o  9. 

Oh!  rien  de  nouveau,  Gapîtaioe. 

^Excepté  là  pluie. 

LB   GAPII^AIHB. 

Encore  faut-il  que  }e  sache... 

Oh  l  très-f  oloûtîers. 

Walss  i  du  Bàun. 

•Je  pars  ; 
Déjà  de  toutes  parts 
La  Quît  sur  nos  retnpàrfs 
Étend  son  ombre 

Sombre;  . 

Chez  vous , 
DflUtnez ,  époux  jaloui , 
Dormez ,  tuteurs ,  pour  vous 
La  patrouille 

Se  mouille. 

Au  bal 


SCÈNE  XV.  43 

Cniîr?  un  ongioal , 
Qui  d^uD  faux  pas  fatal 
Redoutant  Tinfortune , 
Marche  d^un  air  contraint  ^ 
S'éclabousse...  et  se  plaint 
î)\m  réverbère  éteint  » 
Qui  comptait  sur  la  lune. 

Un  luron , 
Que  l'instinct  gouverne , 
A  défaut  de  sa  raison , 
Va  frappant  k  chaque  taverne  / 
Les  prenant  pour  sa  maisoii. 
Texaniine,  - 
Cette  mine 
Qu^enlumine 
Un  rouge  bord  ; 
Quand  au  poste , 
Qui  Paccoste, 
Il  ri^iosti;  : 
Verse  encor. 
Je  vois 
Bcvcnir  un  bourgeois 
Qui ,  cbarmé'dè  sa  voix , 
Sort  gatment  du  parterre  ; 
Il  chante ,  et  plus  content  qu^un  dieu , 
Il  écoTche  avec  feu 
Un  air  de  Boyelilicu. 

Plus  loin , 
Près  du  discret  cOusin , 
Eu  nio'leste  sapin , 
Rt^nlre  la  financière  ; 
Quand  sa  couturière 


44    U«E  NUIT  DE  LA  GARDE  NATIONALE. 
Sort  de  Tivoli , 
Dans  le  galant  wlski 
Que  prêta  son  mari. 
A  mes  yeux  s'ouvre  une  fenêtre 
Que  lorgnait  un  amateur , 
Mais  je  crois  le  reconnaître , 
Et  ce  n'est  pas  un  voleur. 
Je  m'efface 
Pour  qu'on  fasse 
Volte-face 
ATinstant;'  « 

(a  voix  basse.) 
Car  la  belle , 
Peu  cruelle , 
Était  celle 
Du  sergent.      V^ 
Jugeant,         -  " 
En  chef  intelligent, 
Çue  rieu  n'était  urgent 
Quand  la  ville 
Est  tranquille;  . 
Je  renlfe ,  et  voici ,  Général , 
Le  récit  littéral 
Qu'en  fait  le  caporal. 

Bien,  forC  bien. 

pieBoir. 

Et  ce  qui  m'en  plaît,  à  moi,. c'est  que, 
jgrace  A  ma  patrouille,  inou  heure  de  faclioq 
P^i  passée ,  et  que  je  ne  la  moolerai  pas, 


SCÈI^E  XV.  45 

Luissci  donc  !  votre  tour  Ya  rereatr. 

piGEôir. 

Comment  !  mon  tour  va  revenir;  il  y  en  a 
donc  q.ii  munquenl  P..» On  devrait  avoir  Tœil 
A  celd!  Je  ne  monterai  pas  ma  faction  qu*on 
n'ait  fait  l'appel. 

LK    CAflTAlHE. 

C'esr  juste.  Aussi-bien,  je  ne  Paî  pasen- 
core  fuît. 

ai"«  DE  V  BESA  c,  bas  à  Saint-Léun. 
Il  va  tout  découvrir. 

LE   CAPITAINE. 

Vous  devez  être  dix,  j  compris  le  caporal. 

PIGEOII. 

Voyez-vous....  et  je  parie  que  nous  oe 
soumies  pas  sept. 

LE  CAPITAllTE. 

Tauïbour,  réveillez  tout  le  monde. 

l'É  V  E I  L  L  B  fait  un  roulement. 

Allons  y  Messieurs  y  à  Toppcl,  à  Tappel. 

PLI^SIEVRS  GABDSS  katiouaux,  sorUat  de 
la  chambre  du  CaiMtatae,  ouiveoant  duiond. 

Présent  y  présent! 

TOCS. 

Présent,  présent!  ' 


46    UNE  NUIT  DE  LA  GARDE  HATIONALE. 

LE  CAriTAIHB. 

Rangez* rous  «  je  vais  commeneer  par  tous 

compter.... 

PIGB09. 

On  va  bien  voir.  } 

(Ils  se  rangent  tous  sur  la  même  ligne  ;  Pigeon  est  à  fa 
tête ,  madame  de  Versae  est  à  rextrémité;  a|)rés  elle 
Saint-Léon ,  Dorval ,  etc.  Laquitte  et  TE  veillé  re- 
gardent.) 

LE  GÀPITAINB,  comptant. 

AIR  :  Un  bandeau  couvre  les  feux» 

Un ,  deux  ,  trois ,  quaire ,  cinq ,  six , 
Et  sept ,  et  huit,  et  neuf ,  et  dix  : 

Ma  surprise  est  extrême , 
Sur  ma  Bste  j^ai  bien  compté , 
Votre  nombre  h  dix  est  porté  ! 

D^oà  vient  donc  le  onzième  ? 

tous. 
Cn'  onzième  ! 

LE  CAPlTAiNB^quia  examiné  madame  de  VersiC« 

£b!  mais..^  Cela  serait  singulier! 

LAQriLLE. 

£h  bien!  vous  voyez,  M.  Pigeon  ;  il  y  en 
a  un  de  trop  au  contraire.  Qu'est-ce  que  vous 
disiez  donc? 

PI6E0K. 

Je/dis...  je  dis  que  s'il  y  eo  a  un  de  trop 


! 


SCÈNE  XV.  47 

je  m'en  vais.  C'est  qu'aassi  qui  diable  avait 
,va  ce  M.onsteisr?  [Montrant  madatnc  de  Fer-^ 
sac)  Je  ne  l'ai  pas  encore  aperçu» 

SAiHT-LÉON)  fesant  signe  à  rÉveillé  de  dire  comme 

lui. 

Bah  !  il  y  a  cinq  ou  six  heures  que  j'ai 
causé  avec  lui* 

DOIYAL. 

Moi  Je  mêm^. 

l'Eve  mi. 
Moi  de  même. 

LAQUILIE* 

Pardi!  je  lui  ai  douné  une  lepoti  d'ezer-  / 

cice. 

LE  CAPiTAijrE,  même  jeu. 
Vous  lui  àrei  doané  une  ieppo  I 

li^QOILLB. 

Et  bonne,  encore. 

SAlHT-LÉOZr* 

*  C'est  M.  Dorlis. 

DO&VAL. 

Notre  ami  intime. 

LE  GAPiTA^HE,  avec surpiîM. 
Dorlis! 

PIGBOI!^. 

•  D^uilleursj  s'il  est  do  garde  aujourd'hui. 


$8    UNE  NUIT  DE  LA  GARDE  NATIONALE.    ' 

son  nom  doit  être  sur  [-4  feuilleton  peut  bien 
iroir. 

j^me  ||£  YEASAC^à SaiottLéon. 

Je  suis  perdue  ! 

LB   CâPITJLITïE. 

Ce  n'est  pas  la  peine...  Vous  dîtes,  Dor- 
lis...  oui ,  je  ine  le  rappelle!...  c'était  le  troi- 
sième sur  la  liste...  Je  l'ai  tu. 

SAlHT-LÉOÎf. 

Ahl  vousTaveivu! 

LE  CAPITAINE. 

Oui  5  j'en  suis  sûr  à  présent. 

D  0  R  t  A  L  y  à  part ,  à  Saint-téon. 
Il  est  bon  enfant,  le  Capitaine. 

Oh  !  oh  !  voilà  le  jour  qnî  paraît.  {A  Saint-* 
Léon.)  Caporal,  je  voulaift  vous  prévenir.  Il 
y  aura,  une  corvée  à  faire  ce  matin.  Cr'est  ua 
mauvais  sujet,  à  ce  que  je  soupçonne. au 
moins,  qu'il  faut  recojiduire  chez  lui.  Vous 
Tescorlerez,  vous- et  un  homme  de  bonde 
volonté. 

piCEOir. 

» 

Ce  n'est  pas  moi ,  d'abord. 

(11  se  met  sur  la  chaise  et  se  renflorl.) 

LE  Capitaine,  montrant  maç'ame  de  Versac. 

IVfîu's  peut-être  pourrica-voufl  demander  .à 
M.  Dorlis... 


SCÊJÇEXV.  ^^ 

8  A i«T-i è  0 K ,  bas  à xDadame  de  Vcrsac* 
Acceptez  vite* 

M««   DE   TIRSAC 

Oui,  volontiers,  CdpitaÎQe, 

i-E  CAPITAINE^  àpart. 

Ma  foi ,  je  ne  m'attendais  pas  à  une  sem- 
blable aventure. 

SAiHT-Lioïl,  bas. 

Nous  sortons  ensemble.  Jç  vous  reconduis 
Chez  vous...  cela  vous  convient-il  ? 

«*"•   »B  VBBSAC. 

A  merveille...,  et  je  ne  sais  comment  re- 
connaître... 

LE  Capitaiwé,  à  Saînt^Léon  et  à  madame  de  Versac. 
Ah!  çà,  je  vous  prie  d'avoir  quelques  égards 
pour  ce  jeune  homme  ;  il  se  peut  qu'il  m'ait 
ditja  vérité.  Imaginet-vous  qu'il  est  amou- 
reux de  sa  femme. 

T  0  ir  s  se  rassemblent  prés  du  Capîlaîoe. 
AhîahL.. 

lE  Capitaine. 

El  qu'il  est  venu  me  prier  de  l'arrêter.... 
aJî.  ah....  afin  d'avoir  un  prétexte  pour  ne 
rentrer  que  ce  malin....  ah!  ah'...  sans  être 
grondu. 

T  0  0  s. 

Ah  !  ah  î 

r.   VaudeviBec.    4»  *  5 


'.r 


5o  UNE  NUIT  DE  LA  GARDE  NATIONALE. 

1>0KY±f*. 

Le  moyen  est  jdélicîeux. 

SCÈNE  XVL 

LES  paicÉDENSt  L'ÉVËILLÉy   sortant  de 
la  cliambr«  du  CapiUinc. 

L*é  VEILLÉ. 

Grakdr  nouYelle!...  Ce  monsieur,  tous 
savez  bien...  Ce  malin  qui  est  lâ-^dedans  veut, 
avant  son  départ ,  pa^er  du  punch  à  tout  le 
corps -de-g;arde  y  et  je  vais  en  chercher. 

(U  sort.) 

TOUS. 

Comment I  du  punch!  du  punch! 
p  1 6  E  0  H  9  s^ëyeillant  et  se  levant. 
Présent  I  présent  !  Qu'est-ce  que  c'est  ? 

DOEVAL. 

firavo!  il  fîiiit  boire  à  la  santé  de  cet  ori- 
ginal ,  et  en  même  temps  griser  le  nouveau 
camarade. 

PIGEOH. 

C'est  ça  5  il  faut  le  rendre  mauvais  sujet* 

D  0  R  Y  A  L. 

AIR  :  Faud.  de  Haine  aux  femmes» 

Cet  air  et  modeste  et  discret 
Ne  couvieut  pas  à  la  jeunesse  \ 


SCÈNE  XVII.  5i 

Dites  bonsoir  k  la  sagesse , 
£t  devenez  mauvais  i^ujet. 

SAINT-LEON,  il  madain*  de  Yersac. 

Que  ce  discours  vous  persuade  : 
Allons ,  preoez  ce  parli-là  ; 
Vous  n'y  perdrez  ricù ,  camarade , 
Et  tout  le  monde  j  gaguera. 

TOC».  ' 

Oui ,  tout  le  monde  j  f^j^poera. 

SGÈME  XVII. 

LES  PRÉCÉDÉES,   E RN E S T ^  sortant  de  la 
chambre  du  Capitaine ,  un  peu  etidormi. 

EBMESTi 

Eb  bîcnl  Capitaine,  tous  me  laissez  1û.  {A 
madame  de  Vei*sac  et  à  Saint-Léon.  )  Ah  î  ce 
sont  ces  messieurs  qui  ont  la  bonté  de  me 
reconduire.  {Prenant  la  main  de  piadame  de 
Versac).  Touchez  là ,  camarade. 

M'**  DÉ  TBRS&G,  le  regardant. 

Ciel!  mon  mari  ! 

ERNEST. 

Ma  femme  I 

Tiens»  le  camarade  est  la  femme. 


Sa  L^£  mm  de  la  garde  nationale. 

TOUS. 

AIK  :  On  m^avait  vanté  la  guwguetU» 

Quelle  aventure  surprenante  ! 
Conuncnt  croiic  que  deux  C|XNIx  , 
Dans  iv'ur  ardeur  toujours  constante  ^ 
Se  donnent  td  rendez-vous  ? 

MADAME  DE  YERSAC  ,  lui  donnant  UM  letlr»« 
£h  quoi  !  me  tromper  de  la  sorte  ! 
TERSAC  ,  prenant  la  IeUr«. 
Eb  quoi  !  ç^est  vous  sous  cet  iiaUit? 

MADAME  DE  VERSAC. 

Je  devais  vous  servir  d^escorte* 

YERSAC. 

rétais  vraiment  (brt  bien  conduit. 

TOUS. 

Quelle  aventure ,  etc. ,  etc. 
(pânUant  la  reprise  du  cbœur,  Saint-L^on  et  Dorval  ont  es 
Tair  d'expliquer  à  Yersac  que' ce  sont  eux  qui   ont  ^rit 
la  leUre.) 

M""*  DE  TEESAC,  àsonmari. 

Si  vous  étiez  chez  vous^  Monsieur  y  quand 
il  vous  arrive  des  rendez-vous,  je  ue  serais 
pas  obligée  d'y  nller  ù  votre  place. 

VE  ESAC. 

Gorainent  !  uo  rendez-vons  ? 

s  A I  j«T-tB  ON  9  à  M'n«  de  Versac. 
Rassurez^-voiis...  ce  rendez -vous,  adressi 
A  votre  mari,  était  de  ma  façon. 


8CÈNËXVII.  53 

EBKBST. 

Cammentl  mal>aDae  amie»  tous  osies 
soupçonner... 

*M"»«    DE    TEaSÀC. 

J*ayaîs  tort  en  elTet....  Tout  une  nuit 
dehors. . .  ^ 

Sj^JIfT-LÉON. 

Qu'avez-vous  à  dire?  tous  TaTez  passée 
ensemble...  C'est  comme  si  tous  a'étiex  pas 
sortis  de  chez  Vous. 

M^^^DE   TEKSAC. 

£t  qu'en  dira-t-on,'  s'il  tous  plaît? 

SAIIfT-téoiC. 

AIR  :  I>u  put  de  fleurs. 

Où  dira  quVn  soldat  fdéle , 
Notre  ami  veillait  avec  nous , 
Et  que  sa  femme ,  aimable  autant  que  bslle^ 
Vint  pour  consoler  son  époux. 

LE  CAPITAINE. 

L'aventure  n^est  pas  moderne , 
£t  dans  TOlympe ,  nous  dit-on  y 
Quand  Mars  était  de  faction , 
Vénus  venait  à  la  caserne. 


54    UNE  NUIT  DE  LA  GâRI^  HÀTIONALE. 

SCÈNE  XVaL 

lEs  pRÉcéDBNS,  L'ËYËILLÉs  avec  un  bol 

(le'puDch  allume. 

•    > 

L'ÉTBILLi. 

,  AIR  :  Honneur  à  ce  grand  soi*cieh  (  Bachelier  de  y 

Sttlaiàaacjue.)  ^^-  -  ^ 

QuVn  se  mette 

Tous  en  train  ;  .      •       .      i 

Gai ,  gai ,  yoki  là  i^ctttè 
Pou)^  $s  iaettre  tous  en  traur, 
£(  pour  bannir  le  chagrin. 

toos. 

Qu'on  se  mette 
Tous  en  train ,  etc. 

DORVAt ,  à  Bmeit. 

A  toi ,  je  bèis  le  ptêthié^  rette , 
Nous  devons  te  remercier. 

£RllfiâT. 

A  toi.  C'est  pa. 

C*e$t  toujours  en  pareille  affaire  f 
Uépoux  qui  finit  par  payer. 

CUOEUB. 

Qu'on  se  mette 

Tous  en  train  ; 

pat  y  gai ,  voici  la  récetl 


SCÈNE  XVÏIL  $5 

Pour  se  metrre  f  obs  en  train , 
Et  pdur  noyer  le  cbagrm. 

ff  Aiirr^LÉON  )  k  madame  «te  Terste. 

En  qjuîttaiit  l'habit  militaîre , 
Baignerez-Tous  tous  souvenir 
'  Des  |>roai<;sses  de  votre  frère  ? 

MA.D1ME  DE  YERSIC. 

CVst  à  nia  sœur  à  hes  tenir.  • 

Bien  »  ma  femme. 

cnœuA. 

Qû'oik  se  liifcYte 
Tous  en  trsûn>  etc. 

XRNZST  9  an  Capitaine. 

AIR  :  Bouton  de  Rose;, 

Mon  Capitaine , 
De  vous ,  je  m'éloigne  à  regret , 
Un  autre  sous  ses  lois  m'euchalne  ; 
J'y  reste. 

(  Montrant  ta  femsie.) 
Et  voilà  désormais 

Mon  capitaine. 

CHOEUR. 

Qu'on  se  mette 

Tous  en  f  rain  ; 
Oai ,  gai  ^  voici  la  rccctCe 
Pour  se  mettre  tous  en  train, 
Et  pour  noyer  le  chagrin. 

(  On-  entend  lé  tatblïfilur.) 


56    DRE  NUIT  DE  LA  GARDE  KATIOlfALE. 

LE   CAP1TA.1NK. 

Déjà  la  garde  montante...  on  rient  relcrcr 
Me  posle...  Allons,  Messie ur8>  sous  les  armes. 

LA  QUILLE,  à  rÉvcillé ,  qui  est  occupé  à  bonre. 

Eh  bien!  joufflu,  n'entends-tu  pas  Tap^ 

pelP....  Allons  donc,  à  ton  insirumeot...  le 

chef  d'orchestre i  ^ 

(L'Bmilé  premiaion  tambour.) 

RONDE. 

LAQUILLB. 

AïK  :  P^tit  bonhomme  pna^dsa  kçci€. 

Eotends-iu  Pappel  qui  sonne  ? 

L^E VEILLE  ,  accompagnant  sur  aon'tainboiur. 

R^Ian  tan  plan ,  lironfà ,  H'rocfa.      ' 

LAQtJILLE. 

Au  signal  que  rboancur  donne 
Toujours  le  Français  répondra. 

TOOS, 

£nlends-tiji  )  clc^  \ 

LAQUILLS. 

Parfois  un  buveur  sommeille 
Près  da  flacon  qu^il  vicia  ; 
Mais  quand  d'une  autre  bouteille 
Le  doux  glou  glou  lui  dira  . 
£nLends-tu  Tappel  qui  sonne  ? 

Vevwllb. 

A*ian  tan  plan ,  lironfà,  Uronfa. 


SCÈNE  XVIII.  57 

LAQUILLX. 

Au  slg^nal  que  Baccims  donne , 
Toujours  le  Français  répondra  ; 

TOUS. . 

Entends-tu ,  etc. 

SAINT-Lioir. 

Goûtant ,  après  tant  d'alarmes , 
Le  repos  qu'il  désira , 
Le  Français  pose  les  armes  ; 
Mais  quand  Thonneur  lui  dira  : 
Eutends-tu  Fappel  qui  sonne  ? 

t'ÉVElLLÉ. 

B^lan  tan  plan ,  lironfa ,  liront. 

SAINT-LÉON. 

Au  signal  que  Tbonneur  donne 

Toujours  le  Français  répondra.  (lit.) 

l'éveillé. 

Hier  prés  de  nymphe  mignonne 
J'  m'embarquais  dans  V  sentiment  ; 
J' triomphais ,  quand  la  friponne 
Me  repousse  en  me  disant  :  ' 
EnteuJs-tu  Pappel  qui  sonne  ? 
RMan  tao  plan  ,  lironfa ,  lironfa  ; 
Lorsfjue  le  devoir  Tordoune , 
Faut  toujours  qu'un  tambour  soit  tk,       (Bis.) 

TOUS. 

Entends-tu,  etc. 
(  Pendant  ce  couplet ,  tU  se  sont  mis  sont  les  armes ,  et  sur 

Jeux  rangs. ) 


58   UKE  NUIT  DE  LA  GARDE.  SCÈNE  XVIII. 

LE  GAPITAIRB. 

Portez ,  armes  ! 

MADAME  DE  YEBSAC  ,  ao  PldiKe» 

A  ra[)pel  toujours  docile , 
Aucun  de  vous  n'y  manqua  ; 
Et  lorsque  du  Vaudeville 
Le  tambour  vous  dira  : 

L^EVEfLLi. 

K'ian  tan  plan ,  rangeons-nous  sous  sts  lois* 

MADAME  DE  VEUSAC. 

Au  signal  que  Ton  vous  donne , 

Daignez  repondre  quelquefois.  (Bis.) 

TOUS. 

Entends-tu  Pappel  qui  sonne?  ete* 

LE   GAPlTAIirK* 

Présentez 9  armes! 

(Ils  présentent  les  armes  au  public.  Boiilement.  La  toiltt 

tombe.) 


Flir  d'iîHS  iriîlT  DB  LA   GABDH  HATIORALS. 


LE  NOUVEAU 

POURCEAUGNAC, 

COM£pi£  £N  UN  ACTÏ» 

Par  mm,  SCfllBE  et  DELESTRE^POIRSON  , 

KepmentéjB  »  pour  la  première  fois ,  «iir  le  théâtre 
du  Vaudeville ,  le  i8  février  18^7^ 


€.>•  ) 


PERSONNAGES. 


M.  DE  YERSEUIL  y  colonel  de  hussards. 

NINA,  sa  fille. 

XtiÉOOOAË^  lieutenant  de  hussards^  amant 
de  Nina. 

JULES^   \  ^c)us-Iieutenans  de  hussards* 

ERiNKST  DE  ROUFIGNAC,  jeune  officier 

de  cavalerie,  prétendu  de  Nina. 
M.  FUTËT ,  percepteur  des  contributions. 
M'»«  FUIET,  sa  femme. 
TIEN. NETTE,  filleule  de  Nina. 
UN  BRIGADIER  de  hussards. 
DROLICHON  ,  commis  de  Fotèt. 

OFFICIG&S    DB    BCSSABDa  9    et    J£V1IBS    CBUS   DM 

Paris* 


La  .«ccnc  est  dans  une  petite  \llle  voisine  de  Paris,  daas 
laquelle  «st  caserne  le  régiment  de  M.  de  Verseuil. 


LE  NOUVE.4P 

POURCEAUGNAG, 

COMÉDIE. 


.^v»%^»»^^»»^< 


SCÈNE  PRIÇMIÈRE. 

THÉODORE,  LÉON,  JULES,  et  plu- 
«îtîurs  OFriciBRS  de  biis5Ard9  «  assis  autour 
d'uDe  table  ,  et  figurant  ua  conseil  de  guerre. 

T0C8  y  |)ar]aot  à  la  fois. 

Mot .  Messieurs  9  je  pcose,  et  moD  ans  est 
que  d'adord... 

jri.ES. 

T.h  !  Messieurs  ,  uo  peu  de  silence  ;  on  ne 
peut  Juger  sans  entendre ,  et  si  vous  pariei 
tous  ensemble... 

CVst  h  moi  de  tous  expliquer... 

JULÈ9. 

Non  4  lès  amoureux  sont  trop  bavards.... 
{Se  levant,)  Voici  le  fait: 

AIR  :  De  la  Rôle  et  des  Boites, 

'  Thtorlorc  «îmc  sa  cousine  , 
Qui  ibut  bas  brûle  aussi  pour  lui  ',  ^ 

f,  V4iul«7ific«.  4* 


62    LE50UVEAU  POURCEAUGNAC. 

Mais  pour  tm  antre  oo  la  destine , 

El  cet  autre  arrive  ai^ourd'hoû 
Sur  son  h jmea  il  vient ,  en  homme  sage  , 
Pour  implorer  vos  secours ,  vos  avis , 
Persuadé  quVn  ùil  de  mariage 
On  doit  toujours  compter  sur  ses  amis. 

J*aî  dit. 

LBOn. 

Aia  :  Jdieu ,  je  vous  fois. 

Eh  bien  !  Messieurs ,  quVn  pensez-vous? 
Permettrons-nous  qu^à  nos  jeuK  même 
Un  autre  soit  Theureux  épout 
Ile  la  jeune  beauté  qu'il  aime  ? 

JULXS. 

Nous  seuls  y  puisqu'on  veut  la  ravir, 
Serons  ses  protecteurs  suprêmes... 
Et  plutôt  que  de  le  souffrir , 
Nous  répoaserions  nous-mêmes  I 

TBéODOBE. 

Mes  amis  9  mes  généreux  amis^  c^en  est 
trop... 

Non  ,  voilà  comme  nou»  sommes...  Mais 
nous  aurions  bien  du  malheur  si ,  entre  nous^ 
nous  uc  trouviijns  pas  quelque  moyen  de 
renvoyer  le  futur  dans  sa  proviiicei 

T  B  É  0  D  0  B  E. 

Pensez^y  donc ,  Mcssieur?  ;  un  préteada 


SCÈNE  I.  V  63 

de  Limoges  ,  et  qui  se  notnme  M»  c!e  Kon- 


De  Ruuâgnac!... 


TOUS» 


jlJIiBS. 

De  Roufîgnac  !  .,  Voilà  qui  rime  terrible- 
ment bien  à  Poiirceaugnac.  Et  quel  homme 
ttst-ce  ?... 

THÉODORE. 

C^est  ce  qu^on  ne  sait  pas  précisément... 
Mais  songez  de  grâce  qu'il  arrive  aujourd'hui» 
et  qu'il  o'y  a  pas  de  tems  à,  perdre... 

JULES. 

Voyons  donc  quelque  moyen  bien  extra- 
yagant.  Si  nous...  Non  9  cela  ne  vaut  rien... 

THiODORE. 

Nous  pourrions...  Oh  !  ce  $erait  trop  fort. 

LEON.  ^ 

Je  le  tien9....  Nous  n'avons  qu'à....  Non  9 
cela  pourrait  compromettre... 

3VtiS. 

Allons  y  voilà  de  beaux  moyens  !  Eh  ! 
I^essieurs...  au  lieu  de  nous  creuser  la  tête 
à  chercher  des  inventions  nouvelles ,  des 
farces  ingénieuses  pour  éoonduire  un  pré- 
tendu »  n'avous-nous  pas  sous  la  main  ce 
qu'il  nous  faut  ?  Nous  avons  tous  assisté  ce 
suir  à  la  représenta  Ci  00  de  M.  de  Pourceau- 


64    LE  NOUVEAU  PODRCEADGBTAC. 

gnao  :  roilà  nos  moyens  tout  trouvé:»  :  Isi 
farces  de  Molière  eo  valent  bien  d*autres. 

TBâoBonE. 

Laissez  donc...  C*est  trop  usé... 

IVLCS. 

Bah  !  arec  des  cliangeinens  et  des  addî-* 
tious  9  voilà  comme  ou  fait  du  neuf...  C'est 
la  mode  d'ailleurs ,  et  l'on  a  trouvé  plus  com- 
mode de  refaire  Molière  que  de  Timiler. 

AitL  :  Un  homme  pour /aire  un  tableau, 

Dc$  Cotîns  qa*il  peignît  «  bien 
Nous  voyons  b  race  renaitre. 
Mais  d^un  crayon  tel  que  le  sien 
Nul  cncor  ne  s^est  rendu  maitre. 
Des  hypocrites  et  des  sots 
On  oraludrait  moins  le  caractère , 
Si  tous  nos  Tartuffes  nouveaux 
Pesaient  aaitre  uu  nouveau  Molière. 

THÉOOOBB. 

Ma  foi  !  faute  de  mieux ,  tenons* notts-en 
donc  à  'Molière.*.  Va  pour  M.  de  Pourceair- 
guac* 

tous. 

Va  pour  M.  de  Pourceaagnac! 

J  ÏJtZS, 

ikdopté  ù  la  majorité*  Aujaurd/hui  Tarrl^ 


8CËN{  ï.  65 

Tée  da  futur»  demain  son  départ,  et  nous 
znariond  Théodore  le  mardi  gras. 

THBODOBE. 

Comme  tu  y  ras  ! 

AiB  :  Il  n*est  pas  tems  de  t^ous  qidtttr* 

St  marier  un  mardi  gras  ! 
Vit-on  jamais  rien  de  semblable  ? 

JULES. 

£h  !  mon  cher  ami ,  pourquoi  pas  ?' 
L^à-propos  me  semble  admirable. 
Ce  mardi  gras  qui  voit  la  gaité  fuir 
D'un  jour  d'hjmen  m^ofTre  Temblème. 
C^est  encor  un  jour  de  plaisir 
Mais  c'est  la  veille  du  carême. 

Il  oe  reste  plus  qu*à  distribuer  nos  rôles... 
Au  moins  si  nous  avions  ici  notre  cher  Futet 
et  sa  digne  épouse  !  ce  sont  eux  qui  nous  se^ 
couderaient  merTeilleuseraent....  Mais  ce 
cher  percepteur  des  contributions  esta  Paris 
depuis  ce  malin.  Quel  dommage  !  lui  qui 
passe  sa  vie  à  faire  des  tours ,  des  malices... 
Quelle  fête  pour  lui  I  II  sait  pourtant  la  situa* 
tion  où  nous  nous  trouvons  :  il  avait  promis 
de  nous  seconder...  £h  !  qu'entends- je  ?  fo 
voici  ! 


06    LEKpUYEAUl^ÔlJKCÉà^GNAC. 

r 

SCÈiSE  IL 

•       « 

LliS  yEÉCÉDEHS.,    FOTET, 

AïK  :  Lorsquç  le  champttçne. 

?6UR  fuir  rb^aneur  iioite^ 
^    Jouer  chaque  jour 
Un  tour, 
Chaoterf  rire  et  boiye'. 
C'est  là  le  fait 
De  Fulet. 
I^ql  sot  ne  m^écVâ])pe  \ 
Sur  cbacun  je  drape  ; 
Tous  les  joùts  j'attrape 
No^vcl  original. 
Enfin  sur  la  terre, 
Par  mon  savoir-faire , 
Mon  année  entière 
Est  un  trai  carnaval. 

TOUS. 

Poi|r  fax  rt^umeur  noire,  etç^ 
ToioDO&B. 

Nous    yoMS  occasions  déjà  ,   ipoq  chef 
Fulet,  ' 

f  CTET' 

Ingrat  !...  je  m'occupais  de  vous...  Je  n'ai 
fait  que  rêver  à  YQlre  aventure  loqte  la  quit« 


SCÈNE  II.  67 

Von»  m'intéressez  d'une  manière  tonte  par-  ' 
ticiilière...  Ce  n'est  pas  à  cause  des  excellens  ' 
dinars  où  vous  m*inviter  ;  je  paie  toujours  * 
mon  écot...  eu  gaîlé.   Mais  vous  aimez  tant 
volr«  cousine  !  elle  est   si   gentille  ,  votre 
charmante  Nina  I  c'est  un  petit  démon  en 
vérité.  Je  me  suis  dit  :  Futet,  tu  te  dois  tout 
entier  à  ce  couple  intéressant.  Ce  matia  je 
me  lève  à  six  heures...  je  m'arrache  des  bras 
de  madame  Futet...  Je  selle  Coco  9,  et  me 
voilà  à  Paris  au  bureau  des  diligences;  deux 
ou  trois  entraient  dans  la  cour..#  Quel  spec-f 
tucle  qu'une  descente  de  diligence  l 

A^]^  :  Pégase, 

Un  monsieur,  que  je  juge  artiste , 
Pemandalt  le  grand  Opéra  j 
Taudis  qu^une  jeune  modiste 
pemande  le  Panorama  ; 
Corcelet ,  crie  un  gastronome  ; 
Plus  loin  dVn  air  sentimental , 
JTe  remarque  un  petit  jeune  homme 
Demandant  le  Palais-Ko^s^l. 

3e  me  retoutne  et  paperçois  la  diligen/^e  - 
de  Limoges.  Je  m'informe  adroitement  du  ' 
conducteur  si  M.  de  AouHgnacest  parmi  les 
voyageurs.  Réponse  affirmative.  Je  vois  des- 
cendre de  la  diligence  un  bon  nombre  d'ori- 
ginaux,  de  têtes  toutes  particulières...  comme 
(lous  les  aliûops,  nous  autres  farceurs.  Nous 


6S    LE  NOUVEAU  POURCEAU  ON  AC. 

voilà  donc  assurés  que  notre  victime  est  arii^ 
vée ,  qu'elle  est  dlgat  de  nos  coups. 

▲IK  :  Suzon  sortait  de  son  vUlagc, 

Quand  j^ai  remarqué  leur  6gure 
Je  tourne  bride  vivement  » 
£t  de  Cuco  pressant  l^aliure 
J^arrÎTC  ici  dans  un  instant» 
(  Pour  concerteri 

Pour  an^tcr 
Tous  les  bons  (ours  qu'il  faut  •exécuter. 
Le  carnaval 

Sera  fatal  »  ^ 

Je  le  parie ,  à  cet  original. 

Condamnons ,  par  maintes  esdaadres ,  , 
Notre  victime  au  célibat  y 
£t  nous  brûlerons  le  contrat 
Le  mercredi  des  cendres. 

TOUS. 

C'est  convenu. 

FUTET.   / 

Madame  Futet  nous  secondera*  C'est  une 
commère...  Suffit,  je  D'en  dis  rien;  c*est 
mon  épousé ,  et  vous  la  jugerei  dans  le 
danger. 

JOtBS. 

T^ous  allons  t'expliquer... 

F  n  T  B  T. 

Songez 9  pour  moi ,  que  je  veux...  que i*ti 


SCËNEIII.  69 

droit  à  un  bon  rôle.  Ah!..  }e  tous  recom- 
mande mon  commis  4  cheral^  Drolichoo..* 
qui  n'est  pas  une  bête...    , 

4U£ES. 

Tu  seras  content...  Il  s*ag;it  donc*. 

SCÈNE  ni. 

tis  PHÊGÉDEirs,  TIENNETTE. 

TIBNHBTTB. 

Cbot...  Eh  vite!  retirez-vous!... 

SVLUS. 

C*est  Tiennette  qui  est  notre  fentxnello 
avancée. 

PUTBT. 

Tant  mieux.  Joli  talent...  Elle  peut  nous 
seconder  dans  les  ingénues  en  riostruîsant 
un  peu.^.. 

TIEICirBTTB. 

Oh!  {*ai  de  la  bonne  volonté...  Mais  il 
faut  vous  retirer  ;  M.  le  Colonel  est  levé>  il 
va  sortir  »  il  est  d*une  humeur  !... 

jyxBS. 

Il  n'est  pas  abordable  depuis  quelques 
)ours. 

fBBOOOBX. 

11  attend  à  chaque  instant  le   généra! ,: 


Jô    X.E  NOUVEAU  POURCEAUGNAC, 

qui  doit  Téoir  passer  en  reTue  notre  régK 
çient.. 

TIENHETTE.  v 

Allons ,  voyons  9  àlfez-rous-en  ,  car  d*UQ 
moment  à  l'autre  M.  de  Yerseuil... 

JVIES. 

Ah!  ç^f  Tiennette,  avancez  à  Tordre.  Nous 
attendons  plusieurs  jeunes  gens  de  l^endroit^ 
et  même  de  Paris,  qui  doivent  nous  servir 
dans  nos  projets... 

TIENNETTB. 

Oui,  dans  vos  projets  de  coméâie...  Je 

aais*.* 

Léon. 

Comment  !  tu  sais  ? 

TIENKETTB. 

Oui  !  j'étais  là  çn  sentinelle  et  j'écoutaîs... 
Ohl  soyez  lraiiquille^5  fai  tout  entendu. 

JIJIiBS. 

Futet  a  raison,  elle  a  des  dispositions. 

Si  donc  ces'jéunes  gens  arrivent...  Tu  sais^ 
ce  dont  nous  somme?  eoavcims. 

tlENiETSTTB.     . 

C'est  tout  simple.  Oh  î  mon  Dion  !  vous 
pouvez  vous  en  -rapporter  iV  ynoi.  Je  les  fais 
ipos  passer  dans  le  jurdin  j^isqu'à  c^  que  le 


SCÈNE  ÏIÎ.  ^1 

Q.:  Colonel  soit  parti  ;  et  s'il  les  retiôonii^e  ,  ce 
sont  des  Messieurs  qui  tiennent  pour  noire 
bai  musqué  >  €*est  entendu... 

^  V  U  T  B  T. 

Vojez-vous^  la  petite  gaillarde  t.*.  Em* 
brcisse-moi,  mon  enfant;  tu  aurais  été  digne 
d'être  mademoiselle  Futet»..   Allons ,  Mes* 
^    £:tiurâ  >  ue  perdons  point  de  temsi. 

^  ▲!&  :  du  Panudom 

Qiue  cfaaeim  fasse 

Arinstant 

Le  serroent 
De  promener^ 

De  beraer. 
Sans  fdire  grâce  » 
Le  préteada 

Éperdu , 

Confondu , 
Et  de  rendre  ses  caleùls 
Nuls. 

.     Si  Tenant  de  son  pays 
A  Paris , 
Ce  beau-fils 
Prend  chez  nos  detnolselles 
Les  plus  sages ,  les  plUs  belles  \  * 

Par  ce  choix,  incivil  » 
t^ue  nous  restera-l-il? 

TOOS. 

Que  diaeiin  &sse 


•î    LÉ  NOUVEAU  POURCEAUGNAC. 

A  rinsÊuil 

Le  sermeiit ,  cte. 

(Jlf  tOzÎMDt.) 

SCÈNE  IV. 

TIENNETTÉ. 

Mé  Toîlà  de  la  confidence.. ••  C'e^t  gentil 
d^'être  dans  une  confidence  !  et  surtout  pour 
servir  mademoiselle  Nina  ^  ma  marraine  ,  qui 
est  si  bonne  I  Que  mon  papa  dise  maintenant 
que  je  suis  une  bête. 

AIR  :  C^èst  jna  mie  f  là  veux. 

Tout  bas  quand  on  cause 
J  entends  toujours  breo  ^ 
Je  sais  mainte  chose 
Dont  je  ne  dis  lieu  f 
£t  pourtant  |>aps| 
Dit  que  je  suis  bête. 
Est-ce  ma  faute  ^  dà  ! 
S'il  m'a  faite 
Comm^  ça  ? 

TsMS  que  rvoîsin  Pinm 
Gronde  tant  qu^ii  peut| 
Et  finit  par  faire  « 

Cqnc  su  femme  veut-  ' 
El  pourtant  papa ,  etc« 


SCÈNE  V.  73 

Je  Vois  d^ordiûaire  1 

Maint  et  maint  chaland 
Qui  YÎent  voir  mon  père 
Pour  saluer  maman. 
Et  pourtant  papa ,  etc. 

Je  voudrais  bieb  le  voir  ee  M.  de  Rouf\- 
gnac.»«Roufigoac!...  Il  me  semble  qae  quel* 
qu'un  qui  a  un  uom  comme  celui-là  doit 
avoir  uue  figure  bien  drôle. 

SCÈNE  V. 

TIENNETTE ,  ERNEST  DÉ  ROÙPIGNAC , 

en  négligé  d^ofiicier  de  cavalerie  élégant.  {*) 

BEtfBSTé 

QtEL  singulier  pays!..»  Comment!  per- 
sonne pour  me  recevoir  !...  Ils  ne  sont  pas 
curieux  du  tout.».  Si  un  prétendu  arrivait  à' 
Liiiioges  9  toute  la  fanxille  serait  depuis  le 
matin  sur  la  grande  route. 

TtEjriTBtTE. 

Ah  !  mon  Dieu  !  vpilà  déjà  quelqu^un... 

BJIHBST. 

Ma  belle  enfant... 

TIECrilETTB. 

Chut! 

(*)  Frac  et  chapeau  bourgeois ,  veste ,  pantalon  ci 
bottes  d'uniforme. 

f.   VaudeviUet.  4<  7 


74    LE  NOUVEAU  POURCEAUGNAC. 

EBFEST. 

Qu'est  ce  qoe  c'est  donc?         > 

TlEmCETtE. 

Chut!  T0U5  dis-je...  Vous  Teaes  de  Paris? 

seuest. 
A  l'instant  même... 

TIEHKETTiB. 

Ces  Messieurs  et  mademoiselle  ï?tna  tous 
attendent  ;  maisT  il  ne  faut  pas  paraître  tout 
de  suite.  » 

Eftlf  EST« 

£b  !  pourquoi  donc  ? 

TIENNETTE. 

Le  Colonel  n'est  pas  encore  sorti...  et  je 
guette  sou  départ  et  l'arrivée  du  prétenda. 

Du  prétendu  ! 

TIEHBlBtTE. 

Oui...  Vous  entendez  bien  qu'ils^ £aiut pas 
qu'il  sache... 

EBVBSIJU 

Parbleu  I  cela  va  sans  dire.. • 

TIE|i?I.ETTE. 

Parce  que  s'il  se  doutait  seulement  des 
tours  qu'on  veut  lui  jouer...  ce  ne  serait 
plus  cela... 

ERREST. 

C'est  jusfe...  Mais  dites- moi  :  le  préteudu, 
c'est?... 


SCÈNE  V.  75 

TIEWIfETTK. 

Cet  ii'ubt'clle  qui  arrive  de  Limo^esJ 

CBNEâT. 

Ah!  oui...  oui...  M.  de  Rou%Bac? 

TIEVVCTTS. 

Justement....   Alit   bieu  »   si  tous   savez 
déjà... 

ERNEST, 

Oui ,  je  sais...  confusément.. . 

TIENWETTB. 

Ch  !  nous  criions  l)ien  noo^  amuser!  Tous 
ce$  Messieurs  ,  ces  messieurs  les  OQ'cciers  , 
bout  avertis....  C^est  M.  Fulet ,  le  percep- 
teur des  contributions  ,  qui  mène  tout  cela. 
Mademoiselle  va  ^e  concerter  avec  eux... 
Elle  s'est  déjà  entendue  avec  M*  Théodore. 

E  BREST. 

£h  !  quel  est  ce  M.  Théodore  ? 

TIBRNETTE. 

AIR  :  Mon  galoubet, 

Cest  son  cousin , 
QuVlle  aima  dès  son  premier  âge  { 
^tt  si  quelque  autre  avait  sa  main...  , 

Mad^niuisetle  est  fi'Jéle  et  sag^e , 
Et  n'aimerait  jamais ,  je  g[age , 

Que  son  oousin. 


76    LE  NOUVEAU  POURCEAUGNAC,^ 

ERNEST. 

.  C'est  cfaannaot... 

TIENHETTE, 

C^est  son  cousin 
Qui  toujours  a  la  préféreuce  ; 
£t  si  la  qoœ  s^  fesait  demaio , 
Savez-vous  qui  lui  Trait  d^âvanoe 
Panser  la  premier'  çeptre-danse  f  - 

C  est  soQ  pQosin. 

X 

EIHBST, 

Cette  petite  fille -^là  a  de  Tesprlt  pour  apo 
e*t  « 

THERHETtE. 

N'est'Ce  pas,  Monsienr?...  Il  paraît  qu'on 
vous  attendait  pour  commencer....  Mais 
dites-moi ,  qu'est-ee  que  vous  &ites  donc 
U-rdedaos  ? 

BlITEST. 

Ma  foi...  )e  te  ravoueraf...  je  ne  sâîs  pas 
trop  quel  rôle  je  dois  jouer.,.  Tu  dis  donc 
que  Nina  aime  Théodore  ?o 

.    TIEKNETTE. 

Sans  doute...  ce  qut  n'empêche  pas  qu'ih 
n'aient  quelquefois  de  grandes  disputes.... 
parce  que  M.  Jul«s  est  aussi  fort  aimable... 
Au  fait  9  mailemoiselie  Nina  a  raison  ;  on  a 
des  prévenances...  des  égards,  et  on  raccus» 
d«lre  coquette...  Mais  tous  les  homiuessont 


SCÈNEV.  77 

jaloux...  jusqu'à  M.  Fulet  »  qui,  quoique 
luarié  depuis  quatre  ans...  a  fait ,  il  y  a  six 
mois  ^  une  scèue  horrible  à  sa  iemme,  parce 
qu*on  pré  tendait  Ta  voir  rencontrée  en  car- 
riole dans  les  environs  de  Mfelun  ,  tête-à-têle 
avec  un  jeune  homme...  Et  ça  a  fait  des  pro- 
pos ,  des  histoires...  parce  que  dans  une 
pelite  ville  on  <ist  méchant  ^  mauvaise  lan^ 
g;ue  et  bavard  ,  bavard^  bavard ,  vous  n'eu 
avez  pas  d'idée. 

ERNEST. 

Si  fait...  si  fait...  je  commence.., 

TIENNBTTB. 

Écoutez...  C'est,  je  crois,  le  Colonel...  Je 
vais  le  guetter...  Courez  vite  rejoindre  ces 
Messieurs,  et  vous  habiller  pour  la  comédie... 
Vous  savez  bieiif  cette  comédie  qu'ils  jouent; 
U.  de  Pourceau...  Pourceau... 

BRREST. 

Fourceaugnac... 

TIERKBTTE. 

Gnac  :  c'est  ça. 

ERVEST. 

Ah!  je  vois  alors  le  rôle  qu'on  me  destine. ,T 
Dites-moi...  Y  a*t-il  ici  un  costuaiier  ?.. 

t 

tibnuettb. 

Comment  donc  ,  Monsieur  !  et  un  qui 
vient  de  Farii  encore...  un  élève  de  Babîn..« 


.  n 


78    LE  NOUVEAU  POURCEAUGNAC. 

dans  U  grande  rue  à  droite...  un  magasin  de 
masques  à  côté  de  f*évêché...  tout  ce  qu'il  y 
Si  de  plus  nouveau. «.    des  Gilles,  des  Arle- 
quins, Cendrillon  •  madame  Augot,  et  laiête 
de  n)ort.  Votre  servante,  Monsieur  ! 

(EUesort.) 

SCÈNE  Vï. 

ERNEST. 

Allohs  ,  le  son  en  est  jeté  9  et  je  vois  que 
c'est  à  moi  de  soutenir  Thonneur  des  habi- 
tons de  Limoges. 

41R  :  Reprends ,  Edgard,  ton  vaillant  cùnetême. 
(de  Mi  A.  de  Brauplaad.) 

Au  cliamp  d''honneiir,  allons  ,  on  me  défie , 
Et^'clu  combat  le  gage  m'est  jeté. 
J^ai  atntrë  moi  ruse ,  uailace  et  folle  ; 
Montrons  contre  eux.  et  malice  et  gaité. 
(>ul ,  p<wr  \ps  vaincre ,  en  loyid  adversaire , 
Ne  niuis  servons  que  de  leurs  propres  traits... 
On  vit  toujours  sous  la  même  t>annière 
L'esprit ,  IMiount^ur,  k  gloire  et  les  Franeab 

S'il  faut  ici  leur  céder  la  victoire  , 
Si  ma  défaite  ajoute  à  leurs  laurieh , 
Je  m'y  soumets  ;  c>sC  toujours  une  gloke 
De  résister  à  de  braves  guerriers. 
Aiais  da  combat  si  le  sort  m'est  prosp<':ie  » 


.  scÈrcE  vu.  79 

Jîs  mf*  sntTrort  pardonner  mes  succès... 
iKi  vit  toujours  sous  k  iitêioe  bantiière 
l.^csi>i  il ,  rhonncor^  h  gloire  et  les  Fraoçais. 

Ne    perdons  point  de  tems,  et  de  petir 
d'oublier,  prenons  mes  noies  comme  au  bal 
<1e  rOpéra...  M.  Théodore  ,  M,  Jules...  Tout 
les  deux  font  la  cour...  et  pour  un  rien   se- 
Taient  rivaux.  Madenioiseiie  Nina,  ma   fu- 
ture,   tant  soit  peu  coquette.   M.  Futet 

jaloux.  Madame  Futet...  vue  en  carriole  dans 
les  environs  de  Melun....  ayec  un  jeune 
homme..*  C'est  cbarniant.  On  vient...  £h 
vite  !...  au  magasin  de  masques. 

(Il  sort.  ) 

SCÈNE  VII. 

LE  COLONEL  DE  YERSEUIL,  NINA, 
UN  BRIGADLER. 

l,E  COLOBÇL,  achevant  ^e  donner  des  ordres. 

Qc*0N  tienne  tous  les  chevaux  sellçs,et  qu'an 
premier  signal  l^  régiment  soit  prêt  à  se  ren- 
dre sur  la  place  d*armes..."Nous  attendons  le 
général  d'un  montent  a  l'autre...  et  j'ai  pré- 
venu messieurs  les  Officier»  de  nepoiat  quit- 
ter la  caserne. 

LB  BRIGADIEA. 

Oui ,  mon  Colonel.. « 


8o    LENOUVtAU  POURCEAUGNAC, 

LE   COLOHKk 

Une  reroe  !  quel  bonheur! . 

Aift  :  Caftdt  taujoitrs  plaisir^ 

Que  je  trouTe  de  diarmes 
A  VMT  tous  mes  çneniers , 
Rangées  et  soiis  les  armes , 
Lancer  leurs  fiers  coursiers  ! 
Ainsi  sous  la  mitraûlie 
Je  les  voyais  courir... 
C^est  presque  une  bataille  ; 
Ça  fait  toujours  plaisir. 

Toi  ,  ma  fille...  sr  M.  de  Roufignac  ^irrl^ 
Tait....  tu  lui  diras  qu'un  déjeuner  de  céré<» 
tnonie  m'a  forcé  de  m'absenler  pour  quel- 
ques heures...  mais  que  ta  t'es  chargée  de  le 
reccToir, 

irilfA, 

Mon  père...  je  n^oserai  jamais..^ 

LE   COLONEL. 

•  * 

Comment...  tu  n*o$eras  jamais!...  Le  fils 
d*nh  ancien  ami!...  un  jeune  homme  qui^ 
\\n  éu.îs  sûr^  doit  être  fort  bien!... 

A  19  A. 

Mais  |e  ne  le  cannai  s  pas. 

LB   COLONEL. 

Qji'est-cê  que  ça  fait  ?  tous  ferez  connais-* 
sancc  ?  |)!coule-moi  :  j'ai    là-dessus  uii  sys-* 
'  têuie. 


SCËNE    VII.  8i 

AIR  :  Ces  postliions  sont  d^une  maladresse. 

Oui ,  sans  amour  je  veux  qu^on  se  raarie  ;  , 

Ainsi  jadis  ta  mètt  m^épousa. 
Quand  Tamour  vient  à  la  ccrén^onie , 
l,e  lenrieniain  bien  souvent  il  s^en  va. 
Mai<i  quand  ce  dieu  ne  parpt  pas  d'avance , 
Ou  n'a  pas  peur  qu'il  vienne  à  sVsquiver  ; 
Même ,  au  contraire ,  on  garde  l'espérance   , 
De  le  voir  arriver. 

Aussi  arriva- t-il.;  et  tu  réprouveras  ainsi. 

WINA. 

Je  suis  bien  sûre  que  non. 

L«    COLONEt. 

MIons  ,  tu  as  deâ  préventions  contre  lui... 
Non  9  parle  franchement...  H  est  impossible 
qu'il  ait  du  mérite  parce  qu'il  est  de  Limo- 
ges... Voilà  comme  vous  êtes  9  vous  y  gens 
de  Paris. 

AIR  :  £e  brUfuetJhappe  la  pierre. 

Ton  erreur  est  eicosable  ; 

  Paris  tous  les  amans 

Sont  plus  vifs  et^plus  galans  ; 

Lear  ton  est  plus  agréable. 

Mais,  je  le  dis  entre  nous, 

En  province  les  époux 

Soûl  plus  empressés ,  plus  doux, 

MNA. 

Oui ,  j'obéiiai ,  mon  père. 


82    LE  NOUVEAU  POURCEAUGNAC. 
Ponrtant,  malgré  to5  ans. 
Si  fen  crob  maints  beaux  esprits, 
Chacan  piêteod  aa  oontniie  ^ 

Que  c^est  toujoun  à  Pïris 
Qu^on  troavc  les  b^as  maris../ 

LE  COLOHIL. 

Chimères  que  tout  cela!...  Tu  sais  d'ail- 
leurs que.  ma  parole  est  engage^ y  et  quand 
j'ai  une  fois  promis.  AIloos,  reotre... 

H 19  A. 

Non»  mon  père ,  je  veux  tous  recooduire, 
et  TOUS  Toir  monter  à  cheyal. 

JLE   GGLOHBL. 
AIR  :  Âh  !  quelphÔMir  ! 

Mais  da  repas 
rentends  llieare  qm  m*appdle  ; 
£t  de  ce  pas 
Je  vais  me  rendre  au  repas. 
Prés  de  sa  belle 
Lefutur 
Peut  attendre,  le  fait  est  sàfi 

NINA.  \ 

Avec  moi ,  mon  père ,  je  sens 
Qu'il  pourrait  attendre  lon^-tems. 

L£  COLONEL. 

Mais  du  repas ,  etc. 
(  Il«  «ortoot.  Juïe»  ,  Léoo  et  Théodore  ratrent  de  rantr* 
ct\M  avec  prccftuUoa,) 


SCÈNE  IX.  83 

SCÈrvE  VIII. 

JULES,  THÉODORE,  LÉON. 

THÉODORE. 

Vivat!...  Le  voilà  enfin  parti,.. 

JULES. 

Et  nous  sommes  maîtres  du  champ  de  ba- 
taille. 

(  On  entend  du  bruit  dans  le  fond.) 

JULES. 

Quel  est  ce  bruit  ?...  Eh  !  vois  daoc  quel 
ori||;ina1  ! 

(  On  entend  crier  en  dehors.) 

SCÈNE  IX- 

LES  PRÉCéDENS,   ERNEST. 

ERR  E  SX,  liabillé  grotesquement  et  parlant  à  la  can- 

,     tonade. 

Eh  bien  I  quoi  ?  qu'est-ce  ?  Oo  dirait  qu'ils 
n'ont  jamais  rien  vu..<  Je  vous  demande  la 
maison  de  M.  de  Verseuil...  oui,  du  colonel 
de  Verseuii...  Il  n'y  a  pas  de  quoi  me  rire  au 
nez... 

*  L'enUëe  d'Ernest  doit  éCr«  la  même  quk  celle  de  Pour* 
ceàugiuc  i  elle  doit  être  accompagaée  def  même»  liwsi*. 


84    LE  NOUVEAU  POURCEAUGiNAC. 

THÉODORE. 

M.  de  Yerseuil..;  Serail-ce  notre  homme? 

JULES» 

Ma  foi!  voilà  bien 'l'idée  que  je  m*en  fe-* 
sais.  (Se  retournant  et  partant  vurs  te  fond,) 
Oui  9  iViessieurs;  qu'est-ce  que  ça  »îgaitie. 
d'accueillir  ainsi  les  étrangers? 

E^R  N  E  à  T. 

A  la  bonne  heure,  voilà  ùo  hoanête 
homme. 

JOLES« 

Monsieur  a*t~il  en  soi  quelque  chose  de  n'- 
dicule? 

£BNESt« 

C'est  vrai...  et  parce  que  je  leur  dis  que  je 
viens  de  Limog;es...  il  semble  que  j'aie  l'air 
'd'arriver  de  Poutoise. 

TOUS 9  rentoorant. 

Comment!   vous  venez    de    Limoges?.*. 

BRNEST. 

AIR  :  Ma  bouteille  et  ma  brune. 

Oui ,  vraiment ,  fen  airive^ 
Yoap ,  youp ,  f  arriye  grand  train. 
.   La  flamme  la  plus  vive 
Me  guidait  en  chemin. 
JMois  étr^  marié  deoiaîa.  ^ 


« 


SCÈNE  IX.  65 

THÉODORE. 

Quoi!  TOUS  seriez  notre  cousin? 
Ail  !  pour  nous  quel  heureux  destin  ! 

£RNEST. 

Eh  quoi  !  vous  êtes  mon  cousin  ? 
Ah  !  pour  uioi  quel  heureux  destin  l 

TOUS. 

g  \  Embrassons-nous,  mon  cher  cousin. 
Bravo  !  c'est  notre  cousin. 


S 


t4 


ERNEST. 

Embrassons-nous ,  mon  cher  cousin 
Youp ,  youp,  quel  heureux  destin  S 

ERNEST. 

Maïs  Toyei  donc  comme  ça  se  rencontre! 

TaiODOBB. 

Ôn-n'attend  que  vous  pour  la^océ. 

>      EailEST. 

Ah! ah! 

JUI.ES. 

Il  y  aura  loQg-4ems  qu'on  n'aura  rien  tu 
d'aussi  beau. 

EBNEST. 

Oh! oh! 

JULES.        , 

Ah!  ah  !  oh  !  oh!  le  futur  n'est  pas  fort  sur 
les  répliques. 

ERNEST,  riant  comme  d'inspiration. 
Eh! eh] eh! 

F.  VaudeviUet.   4«  ,  8  . 


86    LEKOCVEÀUPOURCÊÀUCNAC. 

TBBODOAB. 

Qu'aTCi-foas  donc  à  cire? 

C'e«l  une  idée  qui  me  Tient...  Est-ccî  qat 
▼oiis  ue  comptez  pas  me  feîre  qnekjue  drô- 
lerie pour  mon  mariage? 

THÉODOXe. 

Nous  y  avions  déjà  bien  pensé. 

EH  n  E  s  T. 

Oh!  mais...  il  feut  des  farces....  Esf-cc 
que  vous  ne  faites  pas  de  farces  ici?...  Oh! 
à  Limoges,  les  jours  gras,  on  en  fait....  od 
en  fait... 

IV  LES. 

Je  sois  sûr  que  Monsieur  est  un  des  plus 

malins... 

EBNEST. 

Ah!  ah!  c'est  yraî...  Tel  que  tous  me 
voyez,  je  ne  suis  pas  bête. 

THÉODORE. 

Il  y  a  comme  cela  des  physionomies  bien 
trompeuses. 

ER9B8T. 

Mais,  par  exemple,  fout  avoir  l'esprit  bien 
fait,  et  ne  jamais  se  fràcher...  Moi,  d'abord, 
on  m'aurait  assommé,  que  j'aurais  toujours 
ri. 


.SCÈNE  X.  '    87 

THÉODORE)  à  part. 

•      • 

Il  y  a  ^riimentcocsciciice  de  duper  ce  pau- 
"vre  diable-là. 

ERNEST. 

£t  même,  pour  que  cela  finît  plus  gaîment, 
c^étaient  ceux  qui  avaient  été  pris  pour  dupes 
qui  payaient  un  grand  souper  aux  autres. 

JU  LES. 

Très-bien  vu. 

TfTÉODOaE. 

On  a  de  irès-bonnes  idées  à  Limoges. 

E  EN  EST. 

N'est-oe  pas? 

JULES. 

Va  donc  pour  le  grand  repas...  Mais  trem- 
blez. Messieurs:  a  y«c  iin  adversaire  tel  que 
M.  de  Rouâgnac,  vous  m*avez  bien  i*air 
il'en  être  pour  vos  Trais...  Moi ,  d*abord>  je 
parie  pour  lui. 

SCÈNE  X. 

LES    PRÉCÉDENS,     FUTET. 
F  U  T  E  T. 

f 

ia  bien  !  qu'est-ce  ?  déjeune-t-on  aujour* 
d'hui? 

JULES,  basàFutet. 

C'est  notre  homqie. 


88      LE  NOUVEAU  POURCEAUGNAC. 
FUTET^.bas  à  Jules. 

Oh!  alors.* «  nous  allons  nous  amuser.  Lais- 
sez-moi faire.  (  Haut,  m  fesant  un  geste  de 
surprise,)  Oh!  ciel!  en  croîrai-je  lires  yeux? 
quelle  heureuse  reocontrc!  n'est-ce  point  là 
M.  de  Aoufignac? 

ERIfEST. 

Comment,  Monsieur ?••» 

FUTET. 

i^e  peut-il  que  vdus  ne  -reconnaissiez  pas 
le.  meilleur  ami  de  toute  la  famille  de  D^ou- 
%oac  ? 

ERHEST. 

Oui»  oui...  un  peu.  {A  Théodore.)  Diable 
emporte  si  je  m'en  souviens! 

THEODORE. 

li  y  a  cent  choses  comme  cela  qui  passent 
de  k  tête, 

PU  TET. 

Je  vous  ai  vu  pas  plus  haut  que  cela...  et 
)cue  sais  combien  de  fois  nous  avons  joué 
ensemble.  Comment  appelez-vouB  ce  café  de 
Limoges  qui  est  si  fréquenté?  *  > 

ERNEST. 

AUX  Innocens. 

FDTET. 

Aux  Innocens...  c'est  cela...  nous  y  jouions 
tons  les  jours  au  billard...  nous  étions  là  une 
vingtaine  de  lurons... 


I 


SCÈNE  X.  89 

ERNEST. 

Ah  !  oui. 

FUT  ET. 

Embrassons-nous, le  vous  prie.  {Ils  s^em- 
brassent,, {Bas,)  Hein!...  est-il  d'aune  bonne 
pâle!...  (^  Ernest,)  Et  cet  endroit  où  Ton 
dansait...  coinment  Tappelez-vous  donc? 

ERWEST. 

AU!  la  Redoute...  Hein!  le  beau  bal... 

.      FUTET. 

Je  n'en  manquais  pas  un...  c'était  une 
foulé...  et  vous  souvient-H  de  cette  querelle 
que  vous  eûtes... - 

ERHEST. 

Ah!  dame...  on  en  aviiit  souvent...  ne 
fût-ce  que  pour  retenir  ses  places.... 

FUTET- 

Oui...  mais  je  vous  parle  de  celte  affaire 
où  vous  TOUS  montrâtes  si  bien...  et  où  vous 
recules  un  soufflet. 

ERNEST. 

Oommoul!  im  soufilel?...  Qu'est-ce  qui 
vous  a  donc  dit?.. 

I  U  T  E  T. 

Enfin,  vous  reçûtes  un  soufflet,  ^convenez - 

en...  vous  voyez  que  je  suis  bien  iustiuit... 

{Sas.)  Est-il  bête  ! 

8. 


90    LENOUVEAU  POURCEAUGNAC. 

E]l^EST. 

C'est  vrai...  Mais  d'où  sa vei- vous?.—' 

P«TBT. 

Parbleu!  c'est  moi  qui  tous  i*al  dooné^^.i 

TOUS. 

Ahî  ah!  ah!  ah!  ah! 

ERREST. 

Comment  !  c'était  tous?... Est-ce  heureux 
de^se  retrouver  ainsi!  £h  bien!  iraaglDez- 
-vous  que  je  n'en  savais  rien...  parole  d'hon- 
neur. 

Je  crois  bien... 

ERIÏEST. 

C'était  dans  la  foule  que  je  PaTais  reçu... 
et  je  vous  remercie  de  m'avoir  instruit. 

PUTET, 

Il  n'y  a  pas  de  quoi. 

E£ 9  EST,  mettant  son  chapeau ,  et  d'un  aîr  patelin. 

Si ,  parce  que  je  suis  alors  obligé  de  vous 
en  demander  satisfaction...  et  comme  ces 
Messieurs  ont  justement  là  leurs  épées«.. 

FUT  ET. 

Comitient!  comment! 

E  R  NE  s  T,  à  Théodore. 

D'autant  plus  qu'à  Limoges  nous  sommes 
extrêmement  mauvaises  têtes. 


#  SCÈNE  X.  9( 

JOtES. 

AL  !  ah  !  nous  allons  rire. 

F13TÏT, 

Oui  y  ouK,  nous  uUoas  rire. 

THÉODORE. 

Âh  !  çà  ,  rous  êtes  donc  un  brave ,  M.  de 
RoufîgDâc?  ^ 

BfiliEST. 

Ah!  mon  Dieu!  non...  Mais  comme  j'ai 
dix  ans  de  salle  ,  et  que  je  suis  le  premier  li- 
reur  de  .Limoges...  je  suis  toujours  sûr  de 
tuer  mon  homme  sans  qtiMl  na^arrife  rien.... 

F  U  T  E  T. 

Âli!  mon  Dieu  ! 

ERNEST. 

Ara  :  Ma  comniere  truand  je  danse. 

J^appris ,  dés  mon  plus  jciine  âg;e , 
A  manier  le  fleuret  -, 
J'ai  le  jeu  prudent  et  sage, 
Et  suis  ferme  du  jarret. 
C'e.st  que  mon  maître  en  détachait  ; 
Il  m'a  donné  du  courage 
A  trois  livres  le  cachet. 

Ooyez^vons  sans  cela  que  j*iraîs  m'expo- 
ser  à  recevoir  quelque  coup...  qui  me  ferait 
mal?...  pas  si  bête.,..  Allons ♦  Monsieur, 
ferme.  {Aux  Officiers,)   Vous  allci  voir  o^ 


/^ 


91    LE  NOUVEAU  POURCEAUGIfl^C. 

coiip-U.  Je  parie,  en  entrant  en  tierce  ,  lui 
percer  l'orciUe  gauche,  et  inc  retrouver  en 
quarte.  (-^  Futet.)  Baissez  donc  un  peu  votre 
collet. 

THEODORE. 

Je  parie  pour. 

JULES. 

Je  parie  contre.  {Bas  à  Futet.)  Allez...  al- 
lez toujours,  la  plaisanterie  est  diriiie. ... 
C'est  délicieux...» 

FUTET. 

N'est-ce  pas..,  n'est-ce  pas?  C'est  qu'un 
butor  comme  celui-là  est  capable  de  faire 
quelque  sottise. 

JVCBS. 

Ce  sera  plus  drôle...,  Allez  toujours*     . 

ERKEST. 

Allons 9  en  garde... 

FUTET. 

Ah!  ah!  c'est  charmant!...  Mais  je  veux 
réserver  votre  valeur  pour  une  meilleure  oc- 
casion... 

ERNEST. 

Comment!  une  meilleure  occasion!  où 
voulez-vous  que  je  trouve  jamais  dei  oreilles 
couune  les  vôtres  ? 

PUTET. 

Écoutez  :  le  soufllet  était  de  mon  inven- 
tion... je  vous  Ta  vais  donné...  je  vous  Tôte... 


SCÈNE  X.  93 

Tofre  honneur  est  intact...  ainsi  rengainez.  - 
Mais  c'est  qu'il  le  croyait  bonnement...  Âhl 
ah  !  esl-ii  bêle!... 

E  a  N  B  s  T. 
Comment  !  c'étuit  donc  pour  rire?... 

PU  TET. 

Eh!  sans  doute...  / 

ERNEST,  remettant  son  chapeau. 

Alors  je  suis  obligé  de  vous  en  demander 
satisfaction...  Allons,  l'épée  ù  lu  main... 

F  CT  E  T ,  aux  officiers. 

Ah  !  çà  ,  qud  enragé  !  mais,  est -il  bête! 
esl-il  bête  !  je  vous  demande.  (//  Krnest.) 
Je  vous  déclare,  Monsieur,  que,  dans  mx 
jour  consacré  au  pkisir,  je  ujc  fais  un  devoir 
de  ne  point  me  Battre...  et  je  ne  me  battrai 
pas  un  mardi  gras...  Demain,  si  le  cœur 
vous  en  dit...  [Bas  à  Théodore.^  C'est  déci- 
dé... il  faut  le  renvoyer  aujourd'hui,  et  je 
m'en  charge...  1 

THÉODORE. 

Comment!  vous  voulez?... 

futEt. 

C'est  une  affaire  qui  devient  la  mienne.... 
Justement  voici  ma  femme!... 

,  ERNEST. 

5a  femme!... 


94    LE  NOUVEAU  POURCEAUGNAC. 

FBTET. 

Soyez  Â  vos  rôles...  ça  ya  commeocer. 

SCÈNE  XI- 

tes  PRÉCÉDÉES,  M"»»  FUTET. 

M™*   PC  TE  T. 

AIR  :  Oh  !  ohl  ohJ  ahl^AIahl 

AirUhlah!  ah!  dh  !  ah  l  ab!  ah!  àh! 
Qui  m^eoseîgneni 
UiDfidc'le 
Qu'en  vain  j'appelle  ! 
Ah!  ah  !  ah!  ah!  ah!  ah!  ah!  ah!  ah! 
Ce  perHde-là , 
Qui  donc  ici  me  le  rendra  ? 
Ah  !  dans  le  siècle  ou  nous  j»oninies  , 
A  quoi  donc  sert  la  vertu  ? 
Oui ,  notre  sexe  est  perdu 
Tant  qu'existeront  les  hommes. 
Oh!  oh!  oh!  ah!  ah!  aU!  ah!  ah!  ah! 
Qui  m'enseignera 

L'infidèle  / 

Qu'en  vain  j'appelle? 
Oh!  oh!  oh)  ah!  ah!  ah!  ah!ah!ah! 
Ce  per/ide-là , 
^     Qui  doue  ici  me  le  rendra  ? 

PUT  ET. 

Ccin!...  joue-t-clle  son  rôle!... 


SCÈNE  xr.  95 

M"**    FUT  ET. 

EilAl  vrai  que  madame  de  Verseuil  donne 
sa  fille  à  un  M.  de  KouGgnac?... 

ïQEODOBEy  montrant  £mest. 
Le  voici  lui-même. 

Ifne    PU  TE* T. 

Ah!  Dieu!  c'est  bien  lui...  c'est  trop  (uil 
Soutenez-moi ,  je  vous  prie. 

ERNEST'. 

Qu'est-ce  qu'elle  a  donc  ? 

m""*  PC  TET,  se  relevant. 

Ce  que  j'ai,  perfide!...  Tu  ne  me  recon- 
nais pafsP...  Après  la  promesse  de  mariage 
que  tu  m'as  faite?.. 

AIR  :  Jeitnesjllles,  jeunes  garçons» 

CeA  ta  coupable  trafaisoa 

Qui  seule  égara  ma  faiblesse.  (  Bis.) 

Pour  toi  j'ai  perdu  ma  jeuuesK , 

Pour  toi  j'ai  perdu  la  raison. 

J'ai  perdu ,  quelle  école  ! 

Le  sort  qui  m'était  dû  ; 

J'ai  perdu  la  vertu... 

SRNCST. 

Vous  n''avez  pas  perdu 
La  parole. 

THioBORS. 

Comment!  Monsieur,  oser  faire  la  cour  à 
ma  cousiue  y  lorsque  tous  avez  déjà... 


96    LENOUVEAUPOURCEAUGNAC. 
FUTETy  bas  à  n  femine. 

^    C'est  bien,  c'est  bien.  {Haut,)  Le  (ait  est 
que  si  tous  ayez  déjà... 

M™*    FBTIT. 

PaHe»  perGde;  oserais-tu  le  nier?...  et 
mon  souvenir  est-il  banni  de  ta  mémoire? 
a()rès  toutes  les  bontés  que  j'ai  eues  pour 

toi... 

B&NBST. 

En  effet...  Serait-ce  possible  ?...  Eh  !  oui... 
je  crois  reconnaître... 

FtTET,  àpart. 

Il  reconnaît  ma  feuame...  C'est  charmant  T 
Est-il  bi^te  !  est-11  bête  ! 

E&vEsr. 

C'est  Trai,  Madame  a  raison.  Moi,  d^a- 
bord,  je  ne  mens  jamais...  Mais  je  vous  ai 
si  peu  vue...  cette  carriole  était  si  obscure;  et 
puis  ça  ne  s'est  pas  passé  comme  vous  le 
dites*.. 

TOUS. 

Commeut?...  comment?... 

EAITESr. 

J'aîme  mieux...  tout  tous  raconter.  (J 
FuteL)  Et  c'estYOusque  je  prends  pour  juge... 
11  y  a  environ  six  mois...  oui^  il  y  a  déjà 
cela...  j'allais  à  Meluo... 


-     SCÈNE  XI.  97 

.    prïET. 
A  Melunîé.. 

ERSEST. 

Je  me  trouvai  tête-fr-lete...  dans  une  petite 
caiTÎule...  avec  une  femoie  charmaate,  que 
}ti  ne  pouvais  pas  distinguer* 

rOTET. 

l'ae  carriole  L,/ 

e&hest. 

Je  reconnais  maintenant  que  c'est  Ma« 
damé...  Je  suis  trop  honnête  homme  pour 
ne  pus  le  dire  tout  haut...  Mais  je  vous  de- 
mande si  c'est  ma  faute...  £u  carriole  le  sert- 
liment  va  si  vite! 

Fil  TET 9   à  sa  femme. 
Morbleu  !  Madame. . . 

bruest. 

Mais  je  qVi  rienj promis...  Dites-le  vous- 
même...  •  ' 

PB  TE  T. 

Ehbien!  avais^je  tort  d'être  jaloux?  {A 
Ernest.)  Monsieur,  ça  ne  se  terminera  pas 
uiusi^  etuous  verrons... 

eehest. 

Est-ce  qu'il  voudrait  revenir  à*notre  que- 
relle de  tout  à  l'heure?...  Ëh  bien!  soit...  eu 
garde... 

FUTET. 

.     Il  ne  s*agit  pas  de  cela...  Apprenez  que 

F.  Vaudeville*.  4*  9 


98    Lt  NOUVEAU  POURCEAUGiVAC. 

Madame  est  manée5  qu''eUe  a  un  mari  re5-» 

pectable... 

ERNEST* 

C'est  bien  agréable  pour  lui... 

M'"*   FCTET. 

Maisy  Monsieur...  mais,  mon  ami.«. 

PCTET. 

Fi  !  Madîime. 

JULES  9  à  Emesh  , 

Cela  n'empêche  pas.  Monsieur,  que  votre 
conduite  ne  soit  Irès-immoralé...  très**blâ- 
inable...  Ooyez,moii  cher  Futet^  que  nous 
prenons  sincèrement  part  à  votre  malheur. 
Mais  vous  serez  vengé,  il  n'épousera  pas 
jnademoiselle  Nina...  Nous  allons  répandre 
partout  son  aventure... 

TRÉODO  BE. 

Oui  )  je  rais  la  raconter  à  tout  le  monde... 
et  voici  ma  cousine  elle-même^  à  qui  nous 
allons  tout  apprendre. 

scÈiNE  xn. 

LES  PRBCBDBKSy  NflNÂ* 
THÉODOBB* 

ff 

VEîfEz,  ma  chère  cousine  ,  venez  connaî- 
tre répoux  que  voire  père  vous  destinait.  «< 


SCtNE  XII.  99 

et  que  le  hasard  vient  heureusement  de  dé- 
uausquer... 

-    NINA. 

Je  sais  tout;  j'araîs  yu  Madame  avant  vous. 

FUT  ET. 

Oui...  mais  vous  oe  savez  pas. 

VIVJL9  basàFutct. 
C'est  très-bien...  tout  va  à  merveille. 

PUTET. 

Mais  non ,  au  contraire...  Maudit  Limou- 
sin... vai... 

KINA. 

J'espère,  Monsieur,  qu'après  Téclat  d'une 
p^rciiie  aventure...  [À  part,)  Comme  il  est 
déconcerté  !...  {Haut)  vous  ne  songiez  plu:» 
à  ma  aiain. 

PUTET. 

C'est  ça.  Renvoj^ea-moi  le  provincial. 

EaNEST. 

Ah  î  ah!  qu'est-ce  .que  ça  fait?...  on  a  une 
inclination...  el  on  se  marie,  ça  n'y  fait 
rien...  Vous  le  savez  bien  ,  puisque  vous  m'é- 
pousez...^ 

Comment?  Monsieur! 

JERITEST. 

£U!  mon  Dieu  !  je  sais  tout...  Vous  sentez 


foa  L£  yOCVXAU  rOCE^CEAUC JAC. 

Iften  qn'on  n'est  pas  veno  de  Limo^^^ps  saos 
prenilre  cle$   ÎDr«>mialî»n5...  On  assure  cfue 

Ton$arezdÎ5lÎD^ié  ub  iiMHisicor  Théodore 

«fil  furt  î^î  ^rron  qne  je  De  coonais  pas. 

fort  aimable  ,  mskls  d'an  caractère  facile  «  et 
qui  ne  s^aperceTaît  pas  qu'on  Ta 


Monsieur... 

SI  VA. 

£hl  q:ii  a  pn  tous  dire  que  je  l'aimais? 

EBVKST. 

On  n'a  point  dit  ça...  C'est  bien  lui  qui 
Touj»  fait  la  cour...  Hais  c'est  un  de  ses 
amis  9  M.  Jules  ^  que  tous  aîmex  en  secret. 

THBODOBEy  fioriein. 

£b  bien  !  je  m'en  sois  toajoors  douté... 

BRVEST. 

Pardi!  c'est  connu...  Tout  le  monde  tous 
le  dira. 

BIBA. 

Quelle  indignité!... 

IVLB89  bas  â  Théodore. 
Jeté  jure,  mon  ami... 

TBÉODO&E. 

C'en  cut.asseï.  Monsieur,  et  vous  ne  joui- 
rez pas  plus  long'tems  de  votre  triomphe. 


SCËNEXII.  101 

JULBS. 

r 

Ecoute  donc...  comme  il  te  plaira. 

Mais^  Messieurs,  degrâce... 
FDTBTy  Tiyement. 
Taisez-vous 9  Bladame... 

V 

Aih  :  Cœm*  infidèle  (Biaise  et  Babet) 

* 

TUEDDOAS ,  a  Nina. 

Cœur  trop  léger. 

FUTXT  ,  \  madame  Ftttet. 

Femme  volage , 
Peux-tu  me  faire  un  tel  outrage  ? 

TBifOOORE  ,  FUTE>. 

Cœur  volage , 
Ne  me  ^arie  pas  davantage, 

TB^OOOBS ,  à  Allei. 

A  demain. 

.    F  0  TET  y  à  sa  ffmmc* 

,  Il  n^est  point  dVxcuse. 

JULES,  k  Théodore. 

À  demain ,  soit ,  je  vous  attends. 

FUTST,  à  part. 

Ce  Limousin  dont  je  m^amuse 
S^amuserait  à  mes  dépens  ! . . . 


»oa  LE  NOUVEAU  POURCE AUGNAC. 

FUTET, THEODORE. 

Cceur  icfîdi^e ,  etc. 

TOUS  LES  OFFICIERS. 

§  \  Dans  le  fond  du  cœur  je  partage 


n   I  L'aSiont  sanglant  qui  vous  outrage, 

P  \  MA.DAMfi  FI7TET,  KIN4. 

Je  n'entends  rien  à  leur  bD§;^ef 
Ces)>ons  un  pareil  badinage , 
Ou  Lien,  après  un  tel  oulruge , 
iVe  nie  parlez  pas  davantage. 

(  Le^  officiers  ,  Fatot  et  madama  Futef  lortcnt.  ^ 

SGÈINE  Xin. 

NINA,  ERNEST. 

WIIÏA. 

C*E8T  pourtant  ce  maudit  prcteudii  qui  est 
pause  de  tout  cela...  Oh  !  je  m'en  yengeVai... 
fst  je  Tais  le  traiter  de  manière  qu'il  ne  lui 
rtster^pas  d'envie  de  m'épouser. 

E  A  II  ES  T. 

Ma  future  est  vraiment  fort  jolie ,  et  a  l'air 
de  m'aimer  beaucoup... 

NISTA. 

Eh  bîea  !  Monsieur,  Vous  êtes  content.., 
Voilà  tout  le  monde  brouille ,  et  cela  grâce 
à  vous. 

ERNEST. 

Ah!  dame...  Ils  ont  l'air  fâché;  mais  pour* 
ÇUQ)  cela  ?...  M,oîf  je  n'en  sais  rieu... 


SCÈNE  XIII.  io3 

Comment  î  VOUS  n'en  savez  rien!...  quand 
rous  allez  justement  leur  dire...  (  A  part,  ) 
Alu  l'ail ,  il  a  si  peu  d'intelligence  qu'il  ne  s«s 
doute  pas  même...  {Haut.)  Dites-moi,  M.  de 
Koufignac,  croye7.-vous  quVin  sot  puisse 
époader  une  demoiselle  malgré  elle  ? 

EBNEST. 

âh  î  ah!.,,  voyez-vous... 
Répondez-moi  donc  ? 

EBREST. 

Pardon^'Mademoiselie...  c'est  que  je  ne  sais 
pas  ce  que  vous  me  demandez... 

If  1  N  A. 

Écoutez  [lefesani  recaler)*,  je  suis  bonne, 
je  suis  douce  naturellement;  mais  savez- 
>  DUS  que  l'amour  peut  chauj^er  le  caractère?... 

EBNEST. 

A  qui  le  dites -vous?  C'est  justement  ce 
que  je  viens  d'éprouver  en  vous  voyant.  Oui, 
vous  pouvez  de\'iner,  sans  que  je  vous  le 
dise,  que  je  n'ai  pas  graud  esprit...  Tran- 
chous  le  mot...  je  su\9  un  franc  imbécile, 
sans  éducation,  sanstaipns^  sans  usage... 
Ehlneii!  du  moment  que  je  vous  ai  aperçue, 
je  ne  saisquelle  révolution  soudaine  s*est  opé- 
rée en  moi...  Il  m'a  s>embié  qu'un  nouveau 


io4  LE  NOUVEAU  POURCÉAUGNAC. 
jour  m'éciairait...  de  nouvelles  idées  se  pré- 
sentaient à  mon  itnagioatioQ ,  et  sans  peine, 
sans  effort ,  les  mots  souffraient  d'eux-mê- 
mes pour  les  exprimeré 

Quel  langage  ! 

ERKBST. 

Et  qu'a-t-îl  (Jonc  de  si  étonnant?  de  tout 
tems  Tamour  n'a-t-il  pas  fait  des  prodiges?... 
douteriez-vous  de  ses  miracles?...  et  qui 
plu5  que  vous  cependant  serait  capable  d'y 
faire  croire? 

AIR  :  Faud,  du  Piège. 

Oui ,  d'un  semblable  changement 

Il  faut  vous  en  prendre  à  vous-même. 

On  devient  Ihcu  vite  éloquent 

I^rsqu^on  est  prés  de  ce  qu^on  aime. 

Plus  d'un  amant  fut  interdit 

Près  de  charmes  comme  les  vôtres  ^ 

Et  si  vous  me  donnez  Tesiïrit , 

Vous  Pavez  fait  perdre  à  bien  d^autres.   " 

N 1  ïr  A. 

Serait-ce  une  plaisauterie  ?      ^  * 

ER,lfE9T. 

Qui?  mol,  plaisanter  èur  un  pareil  sujet î 
j'en  suis  incapable...  Et  vousaussî,  je  le  pa- 
rlerais...' Et  si  notre  mariage  vous  avait  dé- 


SCÈNE  XIU.  io5  . 

pin,  s:  quelques  raisons  seerèles s'étaient  op- 
posées h  eette^  union...  je  suis  sâr  que  vous 
m'en  auriez  averti...  que ,  loin  de  me  tour- 
ner en  ridicule  9  vous  auriez  eu  pour  moi  les 
é^»^ari!s ,  les  procédés  qu'on  doil  à  un  ami  de 
son  père  ;  que  loin  de  confier  votre  secret  à 
une  jeunesse  imprudente ,  légère,  qui  peut 
TOUS  compromettre,  vous  m'auriez  tout 
avoué  franchement,  et  vous  vous  seriez  con- 
fiée à  ma  délicatesse...  N'est-il  pas  vrai?... 

NINA. 

Monsieur... 

B  air  ES  T. 

Jugez  donc  de  ce  qui  aurait  pu  arriver... 
sî«  en  voyant  nn  jeune  homine  simple,  sans 
déHaiice,  vous  vous  étiez  fait  un  jeu  de  le 
tourmenter;  si  ce  malheureux  vous  aimait 
réellement;  si,  à  votre  vue,  il  n'avait  pu  se 
défendre  d'un  sentiment  fatal  ;  si ,  trompé , 
désabusé,  forcé  de  renoncer  à  vous,  il  em- 
portait dans  son  cœur  le  trait  qui  Ta  blessé, 
et  qui  doit  peut-être  le  conduire  au  tom- 
beau.... 

NINA. 

Grand  Dieu  ! 

,  ERNEST. 

Kassurez-vous...  il  faut  espérer  que  cela 
n'ira  pas  jusque-là...  Mais  si  ce  n'est  pour  lui 
que  je  parle,  que  ce  soit  au  moins  pour 
vous?  A  quoi  ne  vous  exposez-vous  pas  eu 


loû  LE  NOUVEAU  POURCEAUGNx\C. 

vous  livrant  ainsi?...  car  enfin,  vous  ne  sa- 
vez pasqoi  il  est...  vous  ignorer  son  Secret,  et 
il  possède  le  votre...  Et  s'il  profilait  de  ses 
avantages^  quel  parti  n'en  pourraît-^ii  pas  ti- 
rer dans  une  petite  ville  aoiie  du  bruit  et  du 
3Canda[e?... 

NINA. 

^    Ah!  Monsieur... 

ERHEST. 

M.'iis  heureusement  tout  dépend  de  vous... 
rna  discrétion  se  réglera  sur  la  vôtre...  Voua 
oviei  voulu  in'intrîguer  un  peu ,  je  vous  l'ai 
Jbien  rendu;  ma  vengeance  sb  bornera  là... 
Surtout  pa3'  le  mot  à  ces  fiiessieurs...  Je 
n'exige  pas  non  plus  que  vous  agissiez  contre 
eux...  restez  neutre...  c'est  tout  ce  que  je. 
.TOUS  demande.  Je  croirai  avoir  rempo^té  une 
assez  belle  victoire  en  détachant  de  leur  coa-* 
)itioQ  l'alliée  U  plus  redoutable, 

Je  reste  stupéfaite...  et  je  ne  sais  plus  où 
j'en  suis, 

SCÈNE  XIV. 

izs  PRÉcÉDEifs,  TIENNETTE. 

TiEKRETTEy  lc$, apercevant. 

Ab!.«.  comment!  c'est  vous,  Monsieur?.., 
A  lu  bonnfi  heure  ^  vous  voilà  bien  déguisé... 


SCÈNE  XIV.  107 

'VOUS  avez  bien  trouvé  le  magâsfn...  Mais  ce 
^n^esit  plas  C€!la...  il  faudra  eacore  changer... 
Si  vous  vojfiez  lej  autres^.,  ils  sqiU  tout  ea 
Doir. 

tîiWA,  à  Tiennette* 

Commeut!  est-c6  que  tu  connais  Mon-» 
sieur? 

tlENHETTÉ. 

Sans  doute...  Mais  ne  craignez  rien  .^  il 
est  aussi  du  secret...  Madame  Futct  a  ras- 
Bcniblé  les  jeuues  gens  de  la  ville...  ils  s*ha^ 
billent  de  ce  dôté..^  Allez  ^  allez,  ils  sont 
Lien'di'ôies ,  et  nous  allons  bien  rire.  Vous  ne 
savez  pas...  il  paraît  que  ça  allait  mal  :  tous 
ces  Messieurs  étaient  brouillés;  mais  M.  Fu- 
tet  les  a  raccommodés  et  les  a  réunis  tous 
contre  l'ennemi...  C'est  conune  ça  qu'ilparle; 
mais  il  faut  que  M*  Futet  en  veuille  bien  au 
prétei>du  ;  car  il  y  met  un  zèle  ^  une  ar- 
deur!.... 

E  B.tr  E  8T ,  se  mettatA  à  une  table ,  à  part. 

Ah!  diable!.. é  {Ffaut.)  Attende,  je  vais  le 
seconder. 

NINA. 

Mais  je  ne  reviens  pas  de  tout  ce  que  je 
vois.**  et  cojmment  il  se  fait... 

ERNE8T. 

Que  je  sofs  de  tous  les  partis...  n'est-ce 
p2^s?  Ahî  mon  Dieu!  ça  n'est  pas  nouveau... 


io8  LE  NOUVEAU  POURCEAUGNAC. 

(J  Tiennette.yi'ieusj  cette  note  au  pâtissier... 
cette  autre  au  glacier...  ce  billet  au  Colooel.^ 
et  cette  bourse  pour  toi... 

NINA. 

Mais^  BioDsieur... 

E  B  N  B  s  T« 

Vous  m'avez  promis  de  rester  neutre...  {À 
Tiennette.)  Le  Colooel  est  au  château  ;:  il  faut 
trouver  à  i*instant  quelqu'ud  pour  lui  porter 
ce  billet.  ^ 

TIENNBTTE. 

Nous  ayoQs  Jacques  le  postillon. 

ERNEST. 

C'est  bon.  Passe  à  la  poste. 

TIENNETTE. 

Oh  !  ce  n'est  pas  là  qu'on  le  trouvera .. 
c'est  au  cabaret  du  ooin  ou  chez  l 'orangers 
en  face...  Oh  I  ça  ne  sera  pas  long...  A  pro- 
pos 9  le  prétendu  est-il  venu  ici?  l'avez-vous 
TU?  est-il  bien  drôle? 

ERNEST. 

Oui  I  oui  I  oui...  mais  dépêche-toi. 

TIENNETTE  9  COUraOt 

Votre  servante  9  Monsieur. 

(EUesort) 


SCÈNE  XV.  109 

SCÈNE  XY* 

NINA,  ERNEST. 

NINA. 

Que  dit-elle?  le  prétendu  est-il  venu?  Eâl- 

^  ce  que  vous  n'êtes  pas  M.  de  Roufîgnac?... 

Au  nom  du  Ciel^  qui  êtes-rous  décidcmeat? 

ERHËST. 

Le  plus  dévoué  de  vos  serviteurs...  Tous 
saurez  tout  dans  un  instant,  pourvu  que  vous    ' 
gardiez  le  silence  avec  ces  Messieurs. 

NINA. 

Ah!  je  vous  le  promets. 

ERNEST,  lai  présentant  la  main . 

Me  scra-t-il  permis   de  vous  reconduire 
Jusqu'à  votre  appartement? 

NINA. 

Tous  vous  méfiez  de  moi... 

ERNEST. 

Non  ;  mais  je  veux  vous  éloigner  du  théâ- 
tre de  la  guerre. 

(Il  la  reconduit  jusqu'à  la  porte  et  la  salue.) 


r.   Vau'loviUet.   4*  '^ 


110  LE  NOUVEAU  POURCEAUGNAC. 

3ÇÈNE  XVJ. 
ERNEST. 

a 

Bon  1  voilà  une  partie  de  Tarmée  ennemie 
hors  d'état  de  me  nuire.  Il  parait  que  y  maljj^ré 
la  divisiqn  que  j'a?ais  seméç  parmi  les  autres, 
ils  se  sont  réunis  pour  frapper  les  grands 
coups...  Heureusement  mes  renl'nris  vont 
arriver...  N'importe,  tenons-nuus  sur  nos 
gardes...  ^X  couroii:^  faire  ^r\  ^9fte— 

SCÈNE  XYII, 

ERNEST,  FUTET,  DROLiCHON, 

€Q  robe  de  médecio. 

FUTET,  arrêtaol  Ernest. 

No5  pas...  halte  là.  (^a^.  )  ^UpQS,  {>roli- 
chon ,  à  votre  rôle ,  mon  ami. 

€ 

BRNEST,  se  dégageant ,  et  voulaiit  9'ecfaagprr. 
Qu'est-ce  que  ça  veuf;  dire? 

DBpliCilOir,  Tarrétai^t  4^  raqtre  coU, 
Vous  n'irez  pas  plus  loin. 

'  FUTET. 

D'après  les  Inq^ujétudes  qu'en  a  conçues 
pour  votre  santé,  votre  beau -père  et  votre 
nouvelle  famille  nous  envoient  vers  vous... 


SCÈNE  XVII.  lit 

DEOLicaoïr. 
Vous  nous  êtes  recommandé. 

FOTBT. 

Et  vous  ne  sortirez  de  nos  mâîkïé  (jfué  radi- 
calement guéri. 

ËBkBST,  apairk. 

Ah!  j*^  suis...  Les  médecins...  C^e$i  çà^  la 
scène  obligée...  Sans  doute  les  apothicaires 
ne  sont  pas  loin...  Allons^  je  n'é?ilerai  ras  la 
promenade. 

FUTET. 

Voilà  un  pouls  qui  n*c8t  pas  bon... 

EHNEST. 

Je  crois  déjà  les  entendre...  et  je  Tois  d^ci 
Tanne  fatale...  Morbleu! 

DEOLlCBOir. 

Cet  homme  n*est  pas  bien... 

'  EBflEST. 

Non 9  c*est  ▼rai...(^  part.  )  Quelle  idée!... 
{Haut»)  Ça  commence  même  à  m'inquiéter... 
Kt  je  ne  serai  pas  fâché  de  yous  consulter  « 
rar  la  fatigue  dO  voyage...  Il  y  a  pourtant 
déjà  huit  jours.  {Pesant  la  grimace,)  k\e... 
Mais  ils  disent -comme  ça  que  le  neuvième... 
Aïe...  ^ 

ï  C  T  R  T. 

£h  bren  !  qu'est-ce  qu'il  y  a  donc  ? 


ti9  LEKOUVEAUPOURCEACGKAC. 
Maadit  animal  ! 

DIOLICBOV. 

Commeol?... 

SmNEST. 

Non,  ce  n'est  pas  à  tous  que  j'en  tcuz...  C  Vst 
h  un  petit  chien,  pas  plus  haut  que  cela,  qui, 
H  y  a  quelques  jours,  s'attacha  à  mes  jambes, 
et  tne  mordit  arec  une  affection  touie  parti- 
culière... 

PU  TET   et  DBOLICHOir. 

Un  chien!... 

EBVEST. 

•Te  sais  bien  qu'ils  Yoolaient  tons  me  faire 
accroire  qu'il  était  enragé...  Ah!  bien»  oui, 
pas  si  bête... 

PCTET,  reculaot. 

Enragé?... 

E  &  v  B  s  T  •  le  retenant. 

< 

Vous  sentez  bien  que  ça  n'est  pas  ▼rat... 
Mais  TOUS  allez  toujours  me  faire  une  petite 
ordonnance  de  précaution... 

FUTET  et   DR0L1GH0H. 

Ahl  mon  Dieu!... 

B  R  ir  B  s  T ,  le  retenant. 

Oh  !  TOUS  ne  me  quitterez  pas...  Et  je  Teiu 
que  vous  me  voyiez...  parce  que  depuis  quel- 
que tems  j'éproure  de  momens  à  autres  cer- 


SCÈNE  XÏX.  M?,. 

takies  émotions..*  ms»  veui  s'enflamment... 
me»  nerf»  se  contractent..  £h.bien  !...  qu'est-- 
ce que  je  sens  donc.^. ..  {Il  fait  plusieurs  con» 
torshns,)  Je  crois  que  cela  me  prend. 

F  UT  ET. 

Grand  Dîeu  !  ' 

Nous  sommes  perdus  ! 

(  Ernest  niarcIiedVa  air  furieox.  ) 

FUTKT,  appclaât.     ' 

Au  secoursl  à  moi,  Messieurs,  il  est  en- 
ragé. 

SCÈNE  XVIIÏ. 

LE?  pRECÊDEics,  THÉODORE,  JULES, 
L  E  0  ^j ,  CD  médecins ,  et  tous  les  autres  jeunes 
gens  eu  apotbicaires  ,  entrent  aui  cris  de  Futrt  et 
de  Drolicbon.  On  entend  au  même  instant  battre  )e 
tambour  et  sonner  le  boitte -selle.  Cliacun  reste 
étonné.  Roufignac  s'esquive. 

SCÈNE  XIX- 

iES  FAECÉDENS,  cxccpté  ERNEST,  LE 

.    COLONEL. 

LB  COLOK EL,  entrant. 
Eh  bien!  Messieurs,  sommes-nons  prCts  ? 

10. 


ît4  le  nouveau  pourceàugnac. 

Le  çénùrul  va  bientôt  arrirer,  et  je...  {Aper» 
cecurit  les  officiers  déguisés.  )  Corbleu  !  auc 
veut  (lire  cette  phûsanterie  ? 

TOUS. 

AIR  :  Courons  aux  prés  Saint-Gervah^ 

(Colonel ,  vous  Tavez  vu , 
Au  devoir  nous  allions  nous  rendre  ; 
Slab  cliacun  est  retenu 
Par  on  revers  inattendu. 

LE  COLOU EL. 

Que  veut  dire  ce  mjstère  , 
Kt  ces  aroies-t't?  Corbleu  ! 
Est-ce  donc  là  (a  manière 
D^aller  au  feu  ? 

TOUS. 

Colonel ,  vous  Tjivez  vu ,  etc. 

FUTÎKT. 

Oui,  Colonel,  quand  yous  saurez  que  nous 
avons  ici  un  enragé.;. 

LE   COLONEL. 

A  Fautre... 

SCÈNE  XX 

LB^   PRÉGÉDEHS,   TtENNETTE. 

TisifRETTE,  accoMl-ant ^  sains  voir  !ê  Colonet 
Mo?îsiErRj  les  roiU^  les  roîlâ. 


SCÈNE  XX.  .      ii5 

F  UT  ET. 

Qui  donc? 

TIEyWETTE. 

Eh  bien!  lés  pâtissiers,  lés  (raiteurs,  les 
glaciers,  les  UinoDadiers!  que  sais -je?  tout 
ce  que  ce  Monteur  qui  'est  ai  farce  a  com- 
mandé pour  le  repas  que  ces  Messieurs  doi-* 
-vent  lui  payer  ce  soir. 

TOUS. 

Comment!  lé  rëj|)as? 

TiEHiiETTB,  au  Coloncl. 
Jacques  a  dû  vous  remettre  une  lettre. 

£E  GOLoivki.. 
Oui ,  qui  m'annonce  VârriTée  du  général. 

TlkirifBTTEr 

>■        -.1     . 
Dame!  je  ne  »ms  pas...  C*est  ce  Monsieur 

qui  rae  Ta  remise. 

LB   COLOHEL. 

,  Ce  Monsieur,  ce  Monsieur,  et  qui  en- 
core? Ah!  fâ,Toyons;  Wesàieurs,  m*cxpliqàc- 
ra-t-OD  enfin  ce  que  cela  signifie 

TIENNETTB. 

Tene« ,  lé  toîcî...  kh\  il  a  repris  son  autre 
costume. . 


ii6  LE  NOUVEAU  POUBCEAUGKAC. 

r 

SCÈSE  XXI. 

IBS  PtÉciDBVS>  ERNEST,  dans soo prenicr 


I.BCOLOBBL- 

Abbiteb  donc.  Ah!  ç.i,  qaî  diable  êtes- 
Tous,  monsieur  Tenraçé ,  qui  faites  Tenir  des 
pâtissiers ,  des  traiteurs  ;  qui  changez  en 
pharmaeie  une  caserne  de  hussard:»  ;  qui 
m'annoncez  des  reyues  d'un  génér«il  qui  heu- 
reusement n'arrive  pas,  et  qui  enfin  rendez 
muet  et  tranquille  un  régiment  de  démons 
que  j'ai  l'honneur  de  commander  ? 

ERHEST. 

Mon  Colonel,  je  suis  un  de  ces  pauvres 
proTinciaux  sur  le  compte  desquels  on  cher- 
che toujours  à  se  divertir.  Dans  ce  m(»nient- 
cî,  ces  Messieurs  s'amusaient  à  mes  dé- 
pens. . . 

lE   COLORE  L. 

£h  bien  !  je  ne  m'en  serais  pas  douté. 

EBBEST. 

Demandez  plutôt  à  Mademoiseïle  (  voyant 
Ifina  qui  arrive)  qui,  mieux  que  personne 
VOUS  dira  qui  je  suis. 

Qui ,  moj  ?  je  craindrais  trop  de  me  trom- 
per... C'est  Tienuette  qui  seule  yous  connaît. 


SCr^NE  XXI.  117 

TlEIfWETTB. 

PoÎDi  du  tout...  C'est  un  jeune  homme  de 
Paris...  c'est  un  ami  de  ces  Messieurs. 

F  U  T  B  T. 

A  d'autres...  C'est  le  diable. 

BBNEST. 

Pas  tout*à>- fait,  et  puisqu'il  faut  vous  Iq 
dire.. 

AiB  :  //  mejatuirait  tpdtter  Vmnpire. 

Mon  père  et  tous  d'an  heureux  mariage 
Aviez  conçu  Tespoir  flatteur. 
Mais  j'aurai  fait  un  long  voyage 

(Montrant  Théodore  et  Nina.) 
Pour  assister  à  leur  bonheur. 

LB  COLOKEL. 

Comment!  tous  Toudriez... 

ERNBST. 

Oui ,  j^aime  mieux ,  en  homme  sage  y 
Pc  ces  Messieurs ,  pour  éviter  les  traits , 
Les  divertir  avant  mon  mariage , 

Que  de  les  amuser  après. 

X.B  COLORE L9  aux  officiers. 

Messieurs  9  une  pareille  plaisanterie... 

ERNEST. 

Est  bien  permise^  Colonel;  je  suis  mili- 


iiS  LENOUVEAU  POURCE AUG?ï AC. 

taire  comme  ces  Messieurs  ;  à  ce  titre  s'ils 
veulent  bien  rae  pardbnner  de  n.e  point  m'i^- 
ti-e  laissé  attraper ,  la  btîlle  Nina  d'avuir 
voulu  un  insl«int  troubler  son  bonheur... 
M.  Fùtet  d'avoir  un  pêù  alarmé  sa  jalousit^: 
vous,  Colonel,  d'avoir  interrompu  an  dé- 
jeuner de  coqils  que  le  dîner  de  ces  messîeun 
va  suppléer ,  nous  n'aurons,  rien  à  nous  re- 
prc.cber. 

PUTET. 

Comment  !  la  carriole  de  Melun?... 

ERNEST. 

Je  ne  vais  jamais  en  carriole. 

DROLlCBÔ^r. 

Et  le  petit  chien ,  jplàs  plus  haut  qùé  ceînP.. 

£  B  N  E  s  T. 

Il  court  encore. 

FUT  Et'. 

£h  quoi  !  ma  femtriè... 

Pouvais -tu  douter  de  moi?  (A  part,  re- 
gardant Ernest.)  l'étais  bien  sûre  que  ce  u'é- 
tait  pus  lui. 

BBKEST. 

Ah!  nous  avons  aussi  à  Limoges  quelques 
plaisanteries  ofiginnles  pour  les  Jours  gras, 
et  si  ces  Messieurs  veulent  bien  in'acuorder 
letM^auiitié... 


SCÈNE  XXI.  119 

Monsieur... 

s  B  1¥  E  9  T. 

S'ils  me  jugent  dîgnc  de  m'assocîerii  eirx, 
nous  chercherons  ensemble  quelques  bons 
tours  pu ur  passer  gaîmeht  fe  carnaval. 

VAUDEYJLLE. 
AIR  :  Que  Pantin  y  etc. 

Célébrons  le  eamaval  ,- 

Le  délire 

Qu^il  inspire  ; 
Célébrons  le  carnaval  : 
De^^plaisirs  c'est  le  signal. 

*  MADAME  FUTST. 

AIR  :  Un  soir  qm  ,  sous  son  ombrage,. 

Pauvres  humains  I  dans  la  vie , 

Qu^an  vous  joue ,  bé|as  !  4ç  ^P^rs  : 

La  fortune ,  la  folie  » 

£t  plus  encore  les  ainouH. 

En  vain  d^avance  on  se  vjtfite 

De  ne  plus  être  trompé  j 

Qu^uD  minois  se  présent^ , 

Encore  un  d^attrupç. 

Célébrons ,  etc. 

JULES. 

L^araour  nous  ravit  les  belles  ; 

Bientôt  TamouK  nous  le«  rend)  T 


120  LE  NOUVEAU  POURCEÀUGNAC. 

Car  rhymen  est  auprès  d'elles 
Notre  allié  le  plus  graud. 
Chacun ,  dans  Tespoir  précoce 
D^un  succès  anticipé , 

Peut  dire  à  chaque  nooe  :    . 

Encore  un  ^^attrapé. 

CéiéhronSf  etc. 

TIENNKTTB.^ 

Quand  fêtais  petite  fiUe 
V&  amans  n'songcaient  pas  à  moi^ 
T  devins  un  peu  gentille!     , 
L^un  d^eux  nie  lorgna ,  je  croi. 
Maintenant  rien  ne  nt^échappe. 
D^  moi  plus  d^un  est  occupé. 

A  chaqu*  grâc^  que  Rattrape , 

Encore  un  d^attrapè. 

Célébrons,  etc. 

ERNEST. 

•  De  tout  ce  qui  ùiVnvironoe 
A  quoi  bon  m^inquiéter  ? 
Les  ans  que  le  Ciel  me  donne  7 
Je  les  prends  tous  sans  compter. 
Des  jours  qui  forment  ma*  yie  y 
Bien  loin  de  m^étre  occupé , 

Chaque  soir  je  m'écrie  : 

Encore  un  d'attrapé. 

Célébrons^  etc. 

PC TET. 

Dès.  qu'on  parie  ou  qu'on  discute  » 
Pour  échauffer  jç  suis  là , 


SCENE  XXI.  ,2, 

Hier,  dans  une  dispute , 
Certain  sot  m'apostropba  ; 
Mais  voyez  le  bon  apôtre  ; 
Ce  coup  dont  il  m^a  frappé  ^ 
Il  était  poiur  un  ^lutre... 
(Se  frotUnt  les  mainc.) 

Encore  un  d'attrapé. 
Célébrons,  etc. 

iriNA  y  au  Public. 

A  la  critique  on  échappe 
Dans  ces  jours  où  tout  est  bien  } 
Si  la  pièce  est  une  attra|ie , 
Silence...  n'en  dites  rien, 
Piuur  que  tout  Paris  s'avise , 
Comme  vous,  d'être  trompé^ 

Et  qu^à  chacun  l'on  dise  : 

Encore  un  d'attrapé. 
Célébrons,  etc. 


Fin  DV  NOOTEIU   JPOUGBAUGRAa. 


F.  Tatt(l«TiUeB.  4*  '  ' 


r 


LC^. 


UNE  VlSltE 

A  BEDLAM, 

COMÉDIE  EN  UN  ACTE, 

MÊLÉE   DE  TAUDEYILLES  ^ 


Pak  mm.  scribe  et  DELESTRE-POIRSON  \ 

I 

Éepnfscntce  >  pour  U  j^rémieré  fols ,  sur  le  Uiéatre 
du  Vauctevitle ,  le  à4  avril  1818. 


ILV  P 


PERSONNAGES. 


ALFRED  DE  ROSE  VAL. 

AMÉLIE  9  sa  femme. 

LE  BARON  DE  1SAINT-ELMB ,  son  oncle. 

CRESCENDO,  compositeur  îteHen. 

TOMT,  }ardiuier  du  Baron. 


La  tùèae  se  passe  aiiprès  de  la  nouvelle  maison  de  fous 
de  ikdLun ,  aux  portes  de  Londres. 


^ 


UNE 

VISITE  A  BEDLAM , 

COMEDIE. 

Le  tfiéâtre  rq)résf  nte  nn  parc  à  Tanglabe  fort  élégant, 
orné  de  statues  et  d^arbres  exotiques;  dans  le  lund, 
un  jardin  fermé  d^un  grillage ,  avec  une  porte  éga- 
.  lemcnt  en  treillage;  à  gauche ,  sur  le  premier  plan , 
un  pavillou  ;  au  troisièine  plan ,  l^entrée  du  parc  ; 
sur  le  devant  du  théâtre ,  à  droite  ,  un  saule  [dcu- 
reur,  avec  un  banc  de  gazon  au  pied. 

SCÈNE  PREMIÈRE. 

LE  B.\RON,   AMÉLIE,  CaESCENDO. 

CBESCCVDO. 

Oui,  Signera,  de  rame,  dou  senli^ment,  de 
la  méthode  et  de  hi  vuix  ;  voilà  tout  ce  qu'il 
faut  pour  la  mousîque  italienne ,  ei  vous  pos- 
sédez tout  cela  dans  la  perfeclioni 

Je  crains  que  vclrc  ccolière  ne  vouvfasse 
pa2<  honneur. 

CRESCENDO» 

Point  4u  tout.  Il  n*y  a  pas,  à  dix  lieues  à 

II. 


lîG  USE  VISITE  A  BEDLAM." 

la  ronds,  ounc  de  no^le  Jys  qui  pouîsse  soa- 

luiir  la  comparaisoo. 

LE  ■A.âo^. 

Sarcx-Toas ,  sîgnor  Crescendo  ,  que  je 
tn'cUiiine  toujours  de  Toir  un  talent  tel  que 
le  vôtre  rester  en  Angleterre. 

.CaE$C«SDO. 

Que  vouleï-Tous  ? 

Aïs  :  Un  homme  pour Jaire  un  tableau^ 

Sur  ïes  beaux-arts  et  les  talens 
Peu  de  gloire  c*l  ici  semée  ; 
Paris  seul  dispense  en  tout  tems 
Les  palmes  de  la  Renommée. 
Des  talens  faits  pour  nUuslrtr 
\\  est  ra:»ile  tutélaire... 
En  France  on  sait  les  admirer  J 
Mais  on  les. paie  eo  Angk terre. 

D'ailleurs ,  le  grand  homme  est  de  tous  les 
pays...  Je  vous  réserve  aujourd'hui  un  petit 
air  d'opéra  que  j'achève  dans  ce  moment. 

Barbar  amor  !  cnulel  tyran  î 

Car  je  compose  ,  tel  que  vous  me  voyez  ; 
ce  qui  ne  m'empêche  point  d'aller  à  droite 
4't  II  gauche,  donner  dus  leçons  dans  les  châ- 
teaux voisins. 

LIS  DARoir. 

J'entends  :  I  virtuosi  ambaîaniî. 


^ 


SCÈNE  i.  127 

CRESCENDO. 

C'est  cela  même.  Je  déjeune  le  tTintin  A 
Bcdiain  9  je  dîne  à  Suutharyck  ^  et  je  soupe 
à  Tudor-Uall  :  le'génîe  nnnge  parli»ut.  MtJÎ, 
je  ne  suis  pas  fier  9  et  jViîectionjie  surfont 
votre  château  9  iiionsou  le  Baron.  Quoique 
Français,  vous  savez  apprécier  l§  tiiacaroni  ; 
c:t  Ton  trouve  \t\  les  égards  9  les  attentions  9 
une  voix  dt!icinuse9  une  couisine  française  et 
une  niou^ique  italienne.  C*est  un  séjour  en- 
chanté f 

LE   BÂROir. 

Je   suis  charmé  qu'il  vous  plaise...  MaU  9 
est-ce  que  nous  ne  continuons  pas  la  leçon  ? 

iCBEsàBUDO. 

La  signora  a  Pair  fatigué..*  Je  vais  ,  avant 
le  dîner,  revoir  fa  romance  que  votre  char- 
mante nièce  m'a  permis  de  louî  dt^dier.  Un 
mol  encore  :  comment  met(rai-je  pour  la 
gravoure?  A  maçlame  ou  à  madamigelle  ? 

LB   BABON. 

Qu'est-ce  que  cela  fait  ? 

CRESCENDO. 

Oh!  c'est  très-essentiei....  Voyei-vous  9 
en  p:ros  caractères  :  Dédié  par  son  très- 
humble  serviteur  Crescendo à et  cae- 
tera ,  ai  cœtera.                                    \ 


ia8  UilE  VISITE  Â  EEDLA». 

Aift  :  Vaad,  eu  Pfùatmt9% 

Que  finscTÎTe  ici  ^-otre  nom  ! 
Du  succès  je  rq^oiuls  d^a^anœ  ! 
Et  Yoas  regarde  avec  raboo 
G)fnme  raatcor  de  la  romauoe. 

AUSUE. 

C^est  rétie  à  bon  compte ,  en  efifel. 

CMCSCEirSO, 

Eh  ?  mon  Dîen ,  qae  d^antres ,  je  gage , 
Qui  sont  auteurs  ,  et  qui  n^ont  fait 
Que  mettre  leur  nom  à  TouTrage. 

Mais  il  y  a'ane  dtlJiconUè  :  c*esl  que  de- 
puis un  mois  que  je  donne  des  leçons  k  la 
Signera ,  je  n'.ii  pas  encore  pu  savoir  si  elle 
était  jpciadame  ou  madaniigelle. 

tE   BARON. 

Ktnit-cc  bien  nécessaire  à  connaître ,  pour 
lui  enseigner  des  roulades  et  des  cadences  ? 

GBKSGBHDO. 

Noullement ,  et  je  vous  prie  d'excouser 
non  indiscrétion. 

LE   lAUOlff. 

Ce  n'en  est  pas  une  ;  el  vous  pouvei  mettre 
hardiment... 

CRESCENDO. 

A  madamigelle?... 


SCÈNE  I.  ,ag 

lE    BAROir, 

Au  contraire...  à  madame  ^  madame  la  com- 
tesse Amélie. 

Crescendo. 

^  Ah  î  madame  !...  c'est  diiTérent...  Je  m'en 
clais  toujours  douté...  C'est  qq*il  est  élon- 
na.nt  que  nous  n'ayons  pas  encore  vou  M.  le 
Comte.  Il  doit  s'estimer  bien  heureux  ,  M.  Fe 
Comte  !...  et  il  faut  que  Madame  se  soit  ma- 
riée bien  jeuoe....  Mais,  pardon...  C'est  que, 
Tojrez-vous  ,  J'aîïiour  et  la  jeunesse... 
L'amorè  la  gioventù...  ' 

J'ai  un  rondeau  là-dessus.  (  Se  frappant  le 
front.)  Attendez  :  c'est  la  fin  de  mon  grand 
air...  Depuis  deux  jours  je  la  guettais. 
Crudel  tyran  »...  ah  î  ah  !  ah  !  ali  î 

J'y  suis  :  je  cours  profiter  de  Pinspiration. 

AMÉLIE. 

Prenez  garde  qu'elle  ne  vous  Qjcne  trop 
loin. 

CnESCEllDO. 

Soyez  tranquille  :  je  ne  passerai  pas  Theure 
du  dîtier. 

(  Il  sort  en  chantant ,  en  gesticulant.) 


i3o  UK£  VISITE  A  BEDlcAV. 

SCÈNE  II. 

LE  BARON»  AMÉLIE. 

AVBLIB. 

Alloua  ,  et  lui  aussi  Ta  faire  des  commen- 
taires sur  la  conduite  de  moD  mari,  s'étonner 
de  ce  que  M.  le  Comte.. • 

LE  BAmox. 

C'ebt  qu^en  eJQTet  il  y  a  de  quoi  s'étonner. 

AMiliIE. 

Eh  !  pourquoi  donc,  mon  oncle?  Je  trôore 
tout  naturel  qu'un  mari  reste  éloigné  de  sa 
femme. 

^  LE    lâBOlf.  , 

Oui  «  mais,  qu'il  y  reste  pendant  huit  on 
dix  mois  ?...  On  m\i  assuré  cependant  qu'il 
t'aimait  éperdûment. 

AMÉLIE. 

Mon  oncle ,  vous  n'étiez  pas  à  Paris  lors- 
qu'on m'unit  à  M.  Alfred  de  Roseval!..  ainsi 
TOUS  ne  pouvez  savoir... 

LE    B  A B  0 5. 

Non  ,  mais  sans  le  connaître ,  {é  sais  qTie 
c'est  le  plus  étourdi ,  le  plus  nimahle  et  le 
plus  brave  de  tous  les  officiers  français. 

AMÉLIE. 

Un  véritable  enfant ,  qui  se  croyait  le  plus 


SCÈNE  II.  i3i 

heureux  dûS  hommes  quand  il  était  paré  de 
son'  grand  uniforme  9^ ou  qu^il  montait  son 
cheval  de  bataille....  et  qui  aurait  toul  sa- 
crifié au  bouheur  de  passer  son  régiment  ea 
revue  ! 

LE   BÀBOET. 

Vrai  ?. ..  eh  bien  !  il  me  semble  impossible 
qu'un  homme  comme  cekii-là  ne  soit  pas 
charmant. 

AHéiilE. 

£n  vérité,  moti  oncle,  tous  me  donneriez 
de  rhumeur  ! 

I.B   BAROV. 

^on...  mais  arec  un  tel  caractère...  on 
doit  être  gai,  franc,  incapable  détromper; 
on  doit  aiuief  sa  femine^  et  quoi  que  lu  en 
dises  9  iJ  faut  qu'il  j  ait  un  peu  de  ta  faute  y 
et  tu  ne  ifi*as  pcis  tout  avoué. 

AMÉLIE.  / 

Moi ,  mon  oncle?...'  graod  Dieu  !  si  on 
peut  dire  !.*.  Soyez  notre  juge  !...  On  nous 
maria...  il  disait'  quMI  m'aimait  ^  je  voulus 
bien  le  croire  ;  ils  le  disent  tous  ,  et  Ton  est 
convenu  de  ne  pas  disputer  là-dessus  !  Pen- 
dant huit  jours  ,  je  dois  pourtant  lui  rendre 
celle  justice,  il  parut  beaucoup  plus  occupé 
de  moi  que  de  ses  chevaux,  et  même  de  son 
uniforme!...  11  fallut  partir  pour  une  mission 
importante...  il  en  fut  désolé,  rien  n'égala 
8«  douleur;  moi-même  ,  par  compassion,  Je 


i3a  UNE  VISITE  A  BEDI AV. 

daignai   eo  être  touchée  !  An  bout  de  huit 
iours^ildevailm'écrîre...  quinze  se  passent; 
entin  ia  letlre  arrive  ;  elle  a  été  retardée  par 
une  foule  d^événemeDS  plus  ou   moins  ex- 
traordinaires.... vous  sentes  qu'on  u*est  pas 
dupe  de  tout  cela....  Je  réponds  très-froide- 
ment... On  me  récrit;  mais  d'ua  ton...  vous 
en  auriez  été  indigène.  Je  ne  réponds  pus, 
comme  vous  tous  en  doutez  bien...  J'attends 
qu'on  me  fasse  des  excuses...  qu'on  me  de- 
mande pardon...  eb  bien  I  poin.t  ;  au  mois  y 
deux  mois  se  passent;  aucune  nouvelle... 
vous  sentez  que  ^.ma  vie  en  eût^elle  dépendu^ 
)e  ne  serais  point  revenue  la  première*  A 
cette  époque  ,  vous  passez  en  France.;  vous 
me  propo.«»ez  de  quitter  Paris 9  dont  le  séjour 
me  paraissait  insipide...    de  Tenir  habiter, 
avec  vous,  un  château  que  tous  avez  au  bord 
de  la  Tamise  ,  près  du  nouvel  établissement 
de  Bediam,...  J'accepte  avec  joiel...  et  c'est 
dans  cet  asile  enchanteur  9  au  sein  des  arts  et 
de  Tamitié^que  vous  croyez  que  je  puis  con- 
server quelques  regrets^  ou  former  quelques 
désirs...  Non  ,  mon  oncle  9  rassurez- vous... 
je  ne  regrette  rien. ..  je  n'aime  rien  que  vous<.. 
que  vous  seul...  et  je  jouis  ,  grâc^  au  ciel, 
d'une  tranquillité  et  d'une  indiflerepce  que 
rien  ne  pourra  troubler. 

LE    BABOir. 

Le  ton  dont  tu  me  le  dis  me  persuade  ,  et 
je  ne  conserve  plus  aucun  doute.,,.  Il  }a 


SCÈNE  II.  ,33 

hUn  dans  ton   récit  quelq^ies  petits  détails 
que  lu  ne  in'avafs  pas  racontés...  maïs  c'est 
e-a!,  tu  as  raison  ,  complètement  raison  .. 
lit  que  fait  Atfred  maintenant  ? 

AMELIE. 

^  J'ai  appris  indirectement  que  sa  mission 
eaittenninée,  et  qu'il  voyageait  pour  soq 
plaisir.  .  ^ 

Air  :  de  la  Robe  et  des  Bottes 

On  prétend  qu'il  parcourt  le  monde  , 
Qu'éblouissaol  touteci  les  Cours, 
Il  va ,  proriienant  à  la  ronde 
Son  or,  son  faste  cl  ses  amours. 

lE  SAAÔN. 

En  tous  lieui  s'il  est  iatidéle, 
C'est  qu'il  veut  cooaaitre  par  là 
La  plus  aimable  et  la  plus  belle... 
Je  sm  sur  qu'il  te  reviendra. 

AMELIE. 

Lui  !  quelle  idée  !...  En  tous  cas  ce  serait 
inutile  ,  car  mon  parti  est  pris....  je  le  dis 
î«ans  humeur,  sans  colère...  je  ne  le  reverrai 
jamais.  Jamais  je  ne  rendrai  ma  tendresse 
m  mon  estime  à  quelqu'un  qui ,  volontaire- 
ment, a  pu  vivre  une  année  entière  éloigné 
de  moi.   . 

F,  VaudeviOct,  4.  12 


'l^  UNE  VISITE  A  BEDLAM. 

SCÈÎSE  TIL 

LES  PBÉdéoENSy   TOMY* 
LE   BARON. 

Eû  Ltt'u  !  -que  nous  veut  Tomy  ? 

TOMT. 

Ah  !  c'est  vous  ,  nol'  maître ?.,.  tant  pire. 

LE  BARON. 

Pourq^uoi  tant  pire  ? 

TOMT. 

C'est  que  j'ai  quelque  chose  à  vous  de* 
mander  I 

LE  BARON. 

£h  bien  l  imbécile? 

TOMY. 

Pas  tant...  Dans  le  fond,  c'estbienàYOUs... 
mais  je  in'enlends>  c'est  à  JNJadame  que  je 
voulais  d'abord  m'adrèsser...,  parce  q»e  , 
quand  c'e.st  Madame  cjui  parle  y  on  est  tou* 
jours  sûr  d'obteûlr.  - 

AMÉLIE.. 

Vraiment!..*  Je  ne  me  crojais  pas  tant  de 
crédit  ! 

TOMT.'     - 

Oh  !  tout  le  monde  ici  le  sait  bien...  ailes..* 


SCÈNE  m.  i35 

ASIBLIE. 

Eh  bien  !  voyous  donc  ,  RI.  Tomj... 

TOMT.  '^ 

Madame...  <%;st  que  je  viens  de  la  taverne 
du  Giaiid-Arairul... 

LE   BAROIf. 

J*aurais  dû  m'en  douter. 

TOMT. 

Ima^inez-voufi  que  je  trouve  là  un  beaa 
)eune  homme  qui  arrivait  en  chaise  de  poste  ; 
six  chevaux,  trois  postillons...  clic,  clac... 
tout  était  sens  dessus  dessous  pour  le  rece- 
voir !...  «  liolù  !  la  fille  ,  les  garçons ,  toute 
«  lu  mai.sou  ;  qu'on  me  donne  à  déjeuner  !. ..» 
On  voulait   lui  servir  de  ce  bon  porter  que 
j*aime  taut!...  car  il  y  en  a  d'excellent  à  la 
taverne  de   TAiniral....    Àh  1  bien  ,  oui  !  du 
Champagne ,  du  Bordeaux,  du  vin  de  France  ; 
"vive  la  France!  Aussr%  laut-il  lui  rendre  jus- 
tice ,  il  les  a  (niités  en  compatriotes...   vous 
voyez  que  je  ne  vous  pas^e  rien. 


ÀiMÉLlB. 


Oh  I  ïomy  conte  bien  ! 

TOUT. 

Ab  I  çà  ,   pendant  qo'tl  déjeunait  et  qu'il 

avait  derrière    lui    deux   grands  laquais 

«  iViiiilame  l'hôtesse,  esl-iï  po.*sible  de  visi- 
ter la  nouvelle  maison  royale  de  Bedlam  ?... 


i3ô  UNE  VISIT  E  A  BEDLAM. 

Je  sois  étranger,  el  je  voudrais  voir  en  dotai  1 
ce  bel  élablissertient.  »  On  lui  dit  alai^  que 
ca  n'est  pas  public,  et  qu'à. moins  d'un  mol 
de  recoromandation  d'un  de»  propriétaires 
des  environs...  «  Eh  !  qui  diable  voulez-rous 
qui  me  recommande  ?...  je  nei connais  per- 
sonne. »  Alors,  Monsieur,  je  nae  suis  avancé... 
je  lui  ai  dit  que  s'il  voulait  permettre  >  j'allais 
m'adresser  à  mou  maître... 

LEBAROn. 

Ali!  nons  y  voilà. 

TOMT. 

Qui  était  un  riche  et  brave  seigneur... 

te    BARON. 

Et  tu  lui  as  promis  ta  recommandation  au- 
près de  moi? 

TOMT. 

Dam-!  oui,  Monsieur  ,  le  désir  d'obliger... 
vu  surtout  qu'il  m'a  donné  une  pièce  d'or,  et 
que  je  sois  sûr  qu'il  m'en  donnera  encore  au- 
tant... Vou«  ne  voudriez  pas  me  faire  pei-drc 
cela. 

AMÉLIE. 

D'ailleurs,  il  ne  fout  pas  compromettre  le 
crédit  de  M.  Tomy. 

LE   BARON. 

Je  vois  qu'il  a  eu  raison  décompter  sur  ta 

protection. 

(Il  ouvre  la  porte  du  pavillon  ,  et  écrit.) 


.    SCfeNEIII.  iS; 

T  0  M  T. 

D*aiitaQt  plus  que  5Ionsieùr  çoilnaît  le  di- 
recteur de  la  maîsoQ. des  fous,  et  qu'ainsi  il 
n'y  a  besoin  que  d'  griffonner  un  mol...  {^ 
Amélie,  pendant  que  le  Baron  écrit.)  Pour  en 
revenir  à  not'  jeune  soigneur,  je  Vax  laissé 
arrangeant  sa  craratc  devant  une  glace  9  et 
cajolant  miss  Jennj,  dette  jolie  petite  fille... 

AMétlB. 

C*est 'bon...  c'est  bon... 

TOMT. 

AIR  :  Du  ballet  du  Pierrou, 

Il  demande  son  compte  :  od  P  loi  présente  y 
Il  pai'  sans  en  regarder  P  montant  ; 
Et  puis  il  parle ,  il  rit ,  il  chante  > 
Et  tout  ça  dans  le  même  instant. 
Il  faut  voir  comme  il  se  démène  ; 
Franchement ,  Bedlam  lui  convient  : 
Et  loin  d'  croir'  qu'il  y  ,va ,  morguenne  ! , 
On  croirait  plutôt  qu'il  en  vient. 

LBBARON9  ayant  acLevé d'ëcrire. ' 
£hl  sait-on  quel  est  cet  original?... 

TOUT. 

Ma  fine,  oui...  car  un  de  ses  gens  Pa  nommé 
devant  moi...  et  je  crois  qu*iï  u  dit  le  comte 
de...  de  Roseval. 


138  UPE  VISITE  A  BEDLAM. 

LB    BAKON. 

Rose  val  ! 

AMÉLIE.' 

Alfred  !  grand  Dieu  !. ., 

(  Elle  court  vers  le  cùlé  \iar  ou  Toùiy  est  entré.) 

LB    BARON. 

Sh  bien  I  où  t^is-tu  ? 

A  slÉ  L I  £  f  revenant. 

Mon  onde,  je  nerçsjtç  pa§  ici...  je  ne  veux 
pas  m'exposer  à  le  rencontrer, 

LI   bARON. 

Bon  !  quel  enfaiilHlogc!...  je  ne  rois  rien  U* 
dedans  qui  puisse  t'ellVayer...  ce  n'est  pas  ici 
qu'il  vient.         -  ^ 

A  M  B  C 1 E  9  chercliàdt  à  se  reméUrc. 

Vous  avez  raison...  ce  n'est  qu'une  aven-» 
turc  fort  ordinaire. 

LE   BÂROKi 

Oh!  fort  ordinaire.  {A  part.)  Que!  événe- 
ment! Alfred  dans  ce  pays...  Alfiéd  ai  près  de 
nous!...  Ne  laissons  point  échapper  bplte  oc- 
casion... mais  par  quel  moyen  .^..  Eh!  Siins 
doute...  {JTomy.)Tlcm...  poi'le-lûi  celle 
lettre...  propose-lui  de  le  conduire  toi-même 
À  iiedlara... 

TOMT. 

Pnrdin'î..  je  sais  bien  où  c'est...  la  maison 
l)£s  ibus...  ù  deux  pas  d'ici... 


SCÈNE  ÎV.  i-îg 

LE   BARON. 

Oui...  mais  alors... 

(Il  lui  parle  bas  k  roreille.) 

TOMT.  ' 

Comment!  Mooâieur...  mais  il  n*j  a  pas 
(]e  conscteuce. 

LE   BARON. 

Fuis  co  que  je  te  dis,  et  surtout*. 

TOMT. 

Ah!  soyez  trancj[îiiUe...   Ma  fôî ,   ça  sera 
drôle  ;  car  je  n'y  comprends  rien. 

(Il  sort.) 


»  '  >. 


SCÈNE  IV. 

LE  BAAÔÎ^,  AMÉLIE. 

AMBLIB. 

I,  , .  ) 

Mais 9  mon  oncle  ^  cfuel  est  voire  desdein, 
que  prélendez-voùs  faire  i 


et  que  prelei 


LE    BARÔk. 


Ne  l'inquiète  pas. 

AÙèLlE. 

Je  v6iis  l'ai  dit,  tous  savez  ce  .que  je 
pense  ..  ce  que  j'ai  juré...  je  ne  le  verrai 
i>as...  je  ne  le  verrai  jamais. 

LB  teÂROK. 

,         r 

A  la  bonne  heure...  toi;  tu  ne  peux  pas 


V 


i4o  UNE  VISITE  A  BEOLAIf. 

bculemenl  l'envisager...  c'est  trop  juste...  mais 
inui,  je  o'ai  pas  fait  de  sermeot...  et  la  teci- 
dre:i.se  qu'on  doit  à  sa  famille... 

AIR  :  Tenez  ,  moi,  je  suis  un  bon  homme» 

Je  dois  accueillir  sur  sa  route 
Un  nevett  qui  West  incoanu. 
Qui  v»ite ,  sans  qu'il  s'en  doute  , 
Un  oncle  qu'ail  n'a  jamais  vu. 
Au»)rès  d'un  paient  qu'il  ignore. 
Crains-tu  qu'il  ne  rc^  toujours  , 
Lorsqu'avec  les  |;ens  qu'il  adore 
À  [Urine  reste«t-il  huit  jours  ? 

AMÉLIE. 

Ah  !  quel  plaisir  j'aurais  à  le  tolr  a  mes 
pitds...  et  à  le  désespérer. •• 

LE    BARON. 

£h  bien  l  tout  cela  est  très-possible. 

AMELIE. 

Copiaient?-.. 

LE  BABON. 

Rentre  au  château  ;  je  vais  aller  te  rejoîn* 
dre  et  t'expliquer  noion  projet. 

AMELIE. 

Vous  ne  tarderez  pas..»  n'est-ce  pas»  mon 
oncle  ? 

LB    BAR09. 

'  Donne-mol  au  aiuius  le  tems  de  le  rece- 
Toir, 


SCÈNE  V.       V  i4i 

Si  TOUS  me  le  disiez  tout  de  suite».. 

LE   BAROV. 

On  Tient...  ; 

AMBLIB, 

Non,  mon  oncle....  je  tous  assure  que  ce 
n'est  personne.  , 

L«  BARON. 

£t  si  Traiment ,  te  dis-je. 

AMÉLIB. 

Mon  Dieu!  que  c'est  impatientant!...  Me 

Voilà  niaiiîteaHnt  d'une  inquiétude...  on  aTail 

Lien  besoin  de  receToir  ici  ce  niauTuis  sujet! 

(  £Ue  sort  eu  j^gardaat  plasicurs  his  le  côté  par  le*  . 

qiiei  Alfred  doit  venir.) 

satNE  V, 

LE  BARO»[,  puis  ALFRED,  conduit  pair 

TOMY. 

TOMY. 

Par  ici,  Monsieur,  pnr  ici. 

ALFRED,  dans  le  fonijl.  > 

L'entrée  est  fôrl  bien...  c'est  un  séjour  fo.rt 
«gréaMe  que  Bedlai.o..\  on  ne  se  douterait 
jamais  qu'on  est  dans  une  maison  de  fous. 
(  Montrant  le  Baron,)  C'en  est  uu  que  j'aper- 
çois? 


t4a  UHE  VISITE  Â  BEDLAM. 

TOUT. 

Non ,  Monsieur»  c'est  le  maître  de  la  maî- 
Bon. 

ALFRED. 

.  Ah!  oui,  le  directeur...  C'est  bon^  laisse- 
moi...  Tiens,  Yoilù  pour  boîro  âî.  ma  »4^nlé; 
je  te  remercie  de  m'avjoir  conduit  à  Bediam. 

TOMT. 

II  D*j  a  pas  de  quoi^  Monsieur*   - 

ALPasu. 

* 

DÎA  a  ton  maître  que  le  comte  de  Koseval 
demande  la  permlMsion  de  lui  présenter  ses. 
respects  ii? ant  de  quitter  ce  pajs. 

TOMT. 

Oui,  Monsieur.  (A part.  )  V'iû  de  l'argent 
bien  gaffué... 

SCÈNE  VI. 

LE  BARON,  ALFRED. 

Ses  respects!...  C'est  un  garçon  fort  hon- 
nête que  linon  neveu. 

A  L  F  a  ê  D. 

C'eut  au  docteur  Willis  que  j'ai  Flfonneur 
de  parler  ? 


.SCL\EVI..  143 

LE  BAROK* 

Monsieur... 


\ 

ALFRED. 


Voici  une  lettre  qui  vous  est  acîtessce;  dai- 
gnez, je  vous  prie  )  en  prendre  connais- 
banco. 

LB  BAH  01^9  à  part. 

Je  pourrais  m*cn  dispenser...  (Haut.) 
Hum  !...  hum  !...  On  m*engage  à  vous  faire 
voir  l'intérieur  de  la  nouvelle  maison  de 
Bedjam...  Monsieur,  vous  n'aviez  pas  besoin 
(le  recommandation...  un  «rentilliomme  tel 
que  vous  est  toujours  sûr  d'être  bien  reçu... 
Je  suis  fiîché  cependant  que  vous  veniez  au- 
jourd'hui ;  nous  avons  plusieurs  parties  de 
rétablissement  qui  ne  sont- pas  vi.<4ibles...  et 
je  r^e  puis  même  que  dans  un  instant  vous 
conduire  dans  l'intérieur  de  la  maison... 

ALFRED. 

Comment  dope,  Monsieur!  je  suis  h  vos 
ordres  ,  et  j'attendrai  lant  qu'il  vous  plaira... 
\os  jardins  seuls  méritent  d'être  vus...  il  y 
règne  un  goût,  une  variété;  en  honneur ^ 
j'en  coQnais  peu  d'aussi  beaux. 

LE  BAEOif^  à  part. 

S'entendre  dire  cela  à  soî-mcme  !  un  pro- 
priétaire !...  q'est  charmant! 


1^4  U.NE  VISITE  A  BEDLAM. 

A  L  F  K  E  D.         ^ 

Alu  :  du  Ferre, 


  vos  foas  il  ce  manque  rien , 
Its  sont  les  plus  heureux  du  monde  \ 
En  France  on  les  traite  moins  bien  : 
Cliez  nous  pourtant  Pespcce  abonde  I 
Que  j'aime  ces  ombrages  frais  ! 
Ah  !  .si  chez  vous ,  je  le  coofess? , 
La  FoUe  habite  un  palais , 
Comment  logc-t-on  la  Sagesse? 

On  doit  5C  trou  Ter  trop  faeiireux  de  passer 
sa  vie  dans  un  séjour  semblable.  Parbleu  ! 
vous  devriez  bien  nae  pertnelire  de  m'y  éu- 

bliv. 

LE   DAEOSr. 

Y  pensez -VOUS?  Nous  n^avons  ici  que  des 

geu$  dont  i'a  tête.*. 

A  L  F  8  B  D. 

Eb  bien!  justement...  je  vous  jure  que  je 
n'y  serais  pas  plus  déplacé  que  beaucoup 
d*autres. 

LE   BARON. 

Auriez  -  vous  par  hanard  quelques  cha- 
grins ?  ,     / 

ALFRED. 

C'est  selon,  voyt»z  -  vous...  si  fy  pensais, 
j'tro  aurais  de  Irès-grandïi...  Tel  que  vous  me 
voyez,  je  suis  marie...  vous  ne  vous  eu  dûu« 


SCÈNE  VL  145 

terîeK  pas»  ni  moi  non  plus.  Une  feinin& 
charmante ,  qui  m'aurait  fait  mourir  de  dou- 
leur >  si  je  n'y  arais  pris  garde* 

LB  BAftOH» 

Vraiment!*.,  et  où  est- elle  eti  ce  mo- 
ment ? 

A  II  F  B  B_D. 

Vous  allez  rire...  Vrai...  je  n'en  sais  rien... 
|e  présume  cependant  qu'elle  est  à  Paris ,  au 
milieu  des  plaisirs  et  des  adorateurs....  Nous 
sommes  brouillés  îk  morti...  Une  légèreté.  .. 
un  caprice....  ce  serait  trop  long  à  vous  ra- 
conter. D^aiileurs  f  tout  est  uni...  je.  l'ai 
juré  ! 

LE  BABOfr*  ^> 

Vous  Vaxei  juré  ? 

▲  LFREB. 

Oui  )  Monsieur...  Cependant  j'ai  fait  les 
avances...  j'ai  écrit,  on  ne  m'a  pas  répondu*** 
mu  conscienee  est  tranquille. 

■     lÈ   BABOtr. 

Et  TOUS  ne  fîtes  pas  de  reproches? 

AK.FRED. 

^.Ven^eus  d'abord  envîe.^  mais  c'est  déjà 
si  singiilier  d'être  mnri!...  et  puis  unmari  qui 
se  plaint.*,  comprenez-vous?  on  en  voit  pur- 
tout.  Soit  dépit,  soit  aiiioar-proprc,  je  pré- 
férai une  vengeance  plus  digne  de   moi..* 

l\  Vaudevilles.  4*  I^ 


i4r»  UNE  VISITE  A  BEDLASf. 

J'allai  au  bal  ..  je  me  Jançaî  dans  toutes  les 
sociétés  ;  il  faut  bien  se  faire  une  raîàon. 
CVst  ce  que  je  me  dis  depuis  un  an;  aussi 
les  voyages ,  les  balsf  les  concerts,  les  spec- 
tacles,  je  ne  sors  pas  de  là«..  Bnfio,  Mon- 
siiMir,  vous  vo}xz  rhoimne  du  monde  ie  plus 
mulbeureux! 

LE  DABOrr. 

Croyez,  Monsieur ,  qyp  je  compatis  bko 
sinccremeul...  (^  part.)  Allons,  je  m'en  dou- 
tais^ cp  n*L*sl  qu*uu  étourdj. 

SCÈNE  VII. 

LES  pnicéDENS,  TOMY,  [>arai^sant  et  appc- 
lunl  par  signes ,  L  £  BAKON* 

T  0  M  T. 
St,  st,  6t9  M.  le  Baron! 

LBDABON,  à  part. 

Diable  !  il  faudrait  prévenir  inn  nièce. 

(Toniy  sort.) 
A  t  ï-  R  E  D. 

Eh  bien  I  qu*utleudons-nous  pour  comment 
ccr  notre  visil<;  ?  . 

Aih''  du  vaud,  de  VA  eu  de  six/roncM, 

Allons,  liâtoD^-nmis ,  je  vous  plie, 
L't  daigaez  cuaibler  luou  C!(poir. 


SCÈNE  VIU.  i47 

LE  BAAON. 

VoQs  serez  surpris ,  je  parie , 
De  tout  ce  <[ùe  vous  allez  voir. 

AtFRXO. 

Parmi  tant  de  monde ,  je  gage, 
Qui  bientôt  doit  ra*environner, 
Ce  qui  va  le  plu$  tti'ëtbhner, 
C^est  de  me  trouver  le  plus  sag£. 

SCÈNE  VIII. 

LES  pxâcÉD^H-s,  GRÇSCENDO. 

CBESCENDO9  tout  hors  de  lui. 

lV1oN5u  le  Baron  j  .monsu  le  Baron  ^  mon 
air  e.*t  achevé... 

Crudel  tjran...  ah  !  ab  ! 

LE  BAftON,  à  part. 

Ah  !  diable!  noti'c  musicien;  je  n'y  avais 
pas  songé. 

ALFBÈb. 

Quel  est  cet  homme  ? 

L£  B  AB  0  9 ,  bas  â  Alfred. 

C/eHt  lin  fou....  ihaîs  dfe  ceux  q«î  île  «ohl 
pas  çlangeredï...  et  à  qni'on  hiîssela  liberté... 
Vous  ne  croiriez  janiais..,.  c'est  un  grand 
personnage»..,  un.,.,  chancelier  de  l'échi- 
quier...  qui  a  la  manie  de  se  croire  un  grand 


i48  UNE  VISITE  A  BEDLAM. 

coinposileury  ot  qui  ne  parle  que  musique... 
Tenez  ^  regardez-le,  Il  voit  partout  de?  pro- 
teoleuri»!  et  moi-uiême  il  ine  prend  pour  on 
Larou  ù  qui  il  veut  dédier  uu  opéra. 

ALFKBD. 

Ah  !  ah  !  ah  I  le  pauvrq  homme  ! 

liBBARORjbasà  Crescendo. 

C^est  un  prince  russe.,,  grand  protecleor 
des  beaux-arts...  et  qui  raffole  de  la  musique 
ilulienuc.i. 

CHSSCEIIDO. 

Che  gusto  I 

LB  BAROV/à  Al&ed. 

3e  TOUS  demande  encore  un  instant.  (J 
part»)  Allons  retrouver  ma  nièce.  Je  reviens 
au  plus  vite. 

SCÈNE  IX- 

ALFRED^  CIIESCENDO, 

CRESCSIIDO. 

^!e  sera«t-il  permis  de  vous  présenter  mes 
respects?...  Combien  nous  devons  nous  te- 
nir honorés  d'ounc  semblable  visite! 

▲  LFBEDy  le  regardant. 

VoiU  bien  la  fleure  la  plus  originale  !  Qui 
diable  reconnaîtrait  là  un  chancelier?  [Haut.) 


SCENE  IX,  149 

C'est  mot  y  Monsieur  9  qii!  suis  trop  Iieureux 
de  faire  conoaissunoe  avec  un  aussi,  grand  ta» 
Jeat.««  Vous  dites  aue  yous  tous  appelez ?,... 

CRBSGBKPO* 

Il  signer  Crescendo. 

ALFRED. 

Ma  foi>  signor  Crescendo  9  je  troure  bien 
étonnant  que  Tanciour  de  la  composition  tous 
ait  fait  tout-à-fait  oublier  vos  anciennes  fonc- 
tions. 

CBZSGEIIDO. 

Non  pas...  je  me  rappelle...  j'ai  été  chef 
d'orcheslre  à  Tufin*  et  maître  de  chapelle  à 
Florence...  ]Vluis  l'intrigue  9  la  cabale...  Bah  ! 
à  quoi  bon  les  places?  Vive  le  vrai  comppsi- 
tor  !  Turtiste  indépendant  qui  n'obéit  qu'à  son 
génie!  ^ 

AIR  :  du  vaud,  du  Jaloux  malade,' 

Qurl  arl  plus  noble  et  plus  sublime  ! 
Qui  sait  chaater  doit  tout  savoir  : 
La  nature  à  sa  voix  s'aoîme , 
£t  tout  reconnaît  son  pouvoir  ? 
Les  niorls  sVIancent  de  TÉiébe  ', 
Et  ce  fut  ji  dis  un  rondo 
Qui  fit  bâtir  les  murs  de  Tlièbe  , 
Et  tomber  ceux  de  Jéricho. 


ALFRED. 

Ah!  ah!,  ma  foi,  il  est  trèa-amusant. 


i3. 


iSo     ^      UNE  VISITEE  BEDLAII. 

CIICSGBIIDO. 

A  propos  Je  cela,  luoo  Prince.. é 

ALFISD. 

Me  vuilù  prince  à  pré5eal. 

c  a  E  s  G  KN  D  Ov 

J'oubliais  de  vous  oUanter  mon  grand  air: 
Oiiilcl  t^i^an» . .  ah  I  ah  !  ab  ! 

M<etie£-yous  dans  la  ^lualionî..*  C'est  le 
jeune  héros  qui  marche  au  supplice. ..  et  qui» 
avant  de  monier  à  Téchafaud»  comineoce  en 
ini  bémoi...     • 

Ali!a}i!ab1ah! 

A  L  F  R'E  D. 

Le  morceau  me  paraît  déjà  bien  placé. 

cacsoeifDo. 

C*eAt  que  je  vois  que  vous  ne  connaissez 
pas  mon  opéra.  Que  c'est  heureux  pour 
vous  !  je  m'en  vais  vous  le  chanter...  Il  cbï 
en  répétition  ,  dans  ce  moment  »  au  grand 
thérurede  Londres...  CeiAst  pas  j^ans peine! 
des  passe-droits,  deit  injustices,  qtiiuze  mots 
A  Tétondo....  ça*  ne  serait  pas  pire  à  TOpcra 
de  Paris.  L'ouvertourc...  maestoso  t 

Tra ,  la  ^  la ,  la,,  kl ,  tra ,  la ,  la ,  la ,  la... 

£t  Toboé  qui  se  fait  entendre*. • 

Pon ,  pon,  pon  ,  pon  ,  pon ,  pon... 

Maïs  quand  j*y  pcuse...  quelle  idco  !...  ah! 


1 


SCÈNE  X.  ,5, 

mon  PrÎMce  !  sî  ce  n'était  pas  abou5er  des 
himtés  de  Voire  Allesse...  ye  Un  deuiande- 

)*IÎS... 

ALFREb. 

Vous  n'ayez  qu'à  parler. 

CAESCENOO 

D'accepter  la  dédicace  de  mon  opéra. 

ALFRED. 

Avec  t)Iaîsirî.,,  C'est  servir  la  cause  des 
beaux-arts  que  d'éite  utileà  dn" compositeur 
aussi  distingué. 

GRÈSCEntiO. 

Ma  forloune  est  faite  i 

SCÈNE  X. 

LES  PRéctoviTs,' LE  BARON: 

CRESCENDO,  ati  l>JM:ao  qui  arrive* 

Ah!  monsou  le  Baron.*.,  il  est  enclianté 
de  mon  opéra...  ilne  r«i  pas  etitendu  ;  mih 
il  en  a  accepté  1;^  dédicace  :  Tiie  voiilè:connu 
'  à  Saint'-Pélershourg  î  Je  cours,  écrire  mon 
grand  air^  et  nous  rexé(îut«ron«  après  le 
dincr.  Votre  Altesse ,  motiftou  le  Baron  , 
crojfîi  que  jamais  je  n'oublierai... 

RÉCITATIF, 

Chc  vrgglo...  quai  .spectacolol... 


i5a  UNE  VISITE  A  BED1LA.M. 

Saona  TornbU  tronibal 

Crudel  tyran...  aK  )  ah  !  ah  !  ait  ! 

(  U  tort  en  cham^t  et  eo  (eiticttlant.) 

SCÈJSE  XI. 

ALFRED,  LE  BARON. 

▲  tFRED. 

An\  ah  !  dh  I  j'avoue  d'abord  que  je  le 
plaignais.. ••  Mais  ,  ma  foi ,  je  n'ai  pu  j  r^ 
iiister..«  Ce  pauyre  Chancelier  !  savez-vous 
que  c'est  un  fou  très-dlYertissaat  ? 

LE   BAROir. 

Vous  ailes  en  Toir  bjen  d'autres  :  renés. 

(  Oii  entead  un  prélude. } 

ALFRED. 

Ecoutez  donc.^ 

A  ni  LIE,  ea  dehors. 

Aiil  ;  Combien  foi  douce  souvenance. 

Il  est  parti  loin  de  sa  mie. 
Loin  du  beau  ciel  de  sa  patrie  ; 
Mab  en  vain  IHograt  loos  les  jours 

M^oublie , 
Serai  fidèle  à  mes  amours , 

Toujours. 

ALFRED,  avec  émotion. 
Quelle  jolie  voix  ! 


SCÈNE  XI.  i53 

LE    ÔiiBOK. 

Chnt!  c'est  notre  Jeune  comtesse...  Venez 
de  (ie  côte;  gardons-nous  de  ia  troubler. 

ALVBED. 

Vu  instant ,  je  vous  prie. 

LE  BABON. 

T9oQ  pas;  c'est  l'heure  de  sa  promenade. 
Elle  aime  à  être  seule ,  et  nous  respectons 
sa  douleur.  ^ 

A  L  F  R  B  Q  y  regardant  vers  la  droite. 

Oui...  elle  s'avance  dans  celte  allée...  elle 
9'arrêle...  A  sa  démarche  et  à  sa  taille  9  je 
pariepis  qu'elle  est  charmante. 

LE  BABON. 

C'est  le  mot.-  Une  femme  bien,  estimable 
et  bien  à  plaindre,  qui  a  eu  le  malheur  d'épou- 
ser un  mauvais  sujet. 

ALFBED. 

Voyez-vous  cela  ! 

LE   BABOir. 

Et  à  qui  la  mauvaise  conduite  de  soq  mari 
a  fait  perdre  la  raison. 

AI.FBED. 

Vous  m'avouerez  que  c'est  indigne. 

LE    BABON. 

*    Oui,  Monsieur  I  elle  est  folie  d'amour. 


i54  UI^E  VISITE  A  BEDLAM. 

ALFRED. 

Ail  !  pas  possible. . .  (  Danx  ce  moment ,  Amé- 
lie par  tût  dans  le  jardin  du  fond;  elle  ouci's  la 
p'We*  et  vient  s'axeoir  sous  le  saule.  )  Je  vous 
en  supplie,  laissez-nioi  lui  parler...  Pauvre 
pelile  !  folle  d'arn^iiir  î  ..  Et  vous  dites  qa'cllc 
est  jolie...  Je  ue  lu  dérangerai  pas  de  sapro- 
meuude  ;  luuis  penneltez-moi  de  la  voir. 

LE   BABOir. 

Songei  donc  que  luoo  devoir  me  réclame. 

ALFHED. 

Eh  bien  !  cher  Docteur,  ne  vous  gênez  pas; 
flûtes  vos  affaires...  Je  vous  reîoÎQ&dans  Tios- 
Unt. 

(  Il  pousse  le  Barôa  dehors  par  la  gauche.  ) 

scÈ?îE  xn. 

ALFRED,   AMÉLIE. 

AvÊLti)  b  lêlc  convcflr  dW  gwnd  chapeatt  à  II 

Paciëb. 

Il  est  parti»  Fami  q«  futix} 
Al  tottl  p«ïÂi>  te  Iwnl»^ 
K*cn  est  pour  bmî  q«  arec 

<Htc  f  aÎBK  ! 
"^Lul  est  ibagrin ,  t«Ml  n'est  qa^eonuî! 

Saoshù! 


SCÈNE  XII.  i55 

ALFRED. 

Celle  roixî...  quelle  illusion!...  Mais  non^ 
c^est  impossible. 

A  M  Ë  t  II». 

Iî!nfîn  ,  me  Toilà  seule.  (  Otant  son  cha* 
peau.)  Oui ,  seule  ici  y  seule  dans  le  monde. 

ALFRED,  qui  s^est  approché. 

Ciel!  c^est  elle!...  Quel  changement  dans 
5es  traits  î...  Mais  c'est  bien  elle,  c'est  Amé- 
lie ;  plus  jolie  que  jamais. 

AMÉLIE. 

Amélie!...  Qui  m'a  appelée? Que  veut  cet 
étranger  ? 

AtriisP.. 

Elle  ne  me  reconnaît  pas!...  Am'élic  ! 

(  Il  lui  prend  la  main.) 

AtféLIB. 

Laissez^nroi  ;  votrç  Tue  oo^e  fait  mal. 

ALFBBB. 

Et  c^est  moi  qui  suis  Ja  cause... 

4W9LIB. 

Non  9  ne  t'éloigne  pas...  ïû pleures,  tu  as 
d.u  chagrin....  EcouXe  :  esît-ce  que  tu  as  été 
trahi ,  abandonné  P 

J'aî  perdii  tout  cc  que  j'aimais. 


,56  UNE  VI  SITE  A  BEDLAM. 

AMBJÛIB. 

Reste  alors,  reste  en  ces  lieux...  Et  moi 
aussi,  j*aî  tout  perdu...  Tu  ne  sais  donc  pas... 
Il  est  parti ,  il  s'est  éloigné. 

ALFILB». 

Commeût  se  peut-il  que  sa  raison  se  soit 
ainsi...  Amélie  !...  refien»  à  toi,  recoanais- 
luoi..*  Je  suis  Alfred. 

A  Mini. 

Alfred ,  dites-TOus  ?.«•  Oui,  AlAred,  c'était 
son  nom...  Où  est-il  7 

AI.V11ED* 

Auprès  de  toi. 

▲  tt^LlB* 
jLift  i  de  Af.  Ft'édéric  JtreuU. 

Sêrait-GC  Fâmi  cpie  saos  cesse 

Je  désirais  ? 
VoiUi  èz  yoïs,  endianteresse , 

Voilà  ses  traits  1 
Mais  non ,  une  flaUeuse  iVressc 

5rabase  ici  \ 
Et  tes  yeux,  ont  trop  de  tendresse  $ 

Ce  a^est  pas  lui  ! 

ALFRBD. 

(  Même  air.) 
J''avals  r|uUlé  mon  Amélie. 


SCÈNE  XIL  iS? 

C  V$t  comme  lui  ! 

ALfAXd. 

Tavab  méconnu  mon  amie. 

kuiuz, 
Cest  comme  loi. 

ALFftBl». 

.  iloii eœiir n^a  lirâlé  ^  pour dk; 
J*eii  jure  vd  ! 

Quoi  !  ton  cœnr  fat  touiours  fidâe  ! 

(  Doolonrentcnimt.) 

Ce  n'est  pas  lui  ! 

Je  satais  bien  que  tous  me  trompiez. 
Alfred  ne  doit  pas  reTenir.  Mai^  c'est  lui  que 
)e  plains  ;  oui  >  Monsieur ,  je  le  plains^ 

A»  :*^  Paris  ef  loin  eh  sa  mère. 

Ce  n^est  pas  par  coquetterie , 
Mais  je  crois  entendre  souvent 
Dire  que  je  suis  embellie , 
Et  mon  miroir ^m^en  dit  autant. 
Que  ce  soit  ou  non  un  prestige , 
Je  ne  suis  pas  si  mal  encor  ! . . . 
Voyez  |>ourtant  ce  qu'il  néglige  ; 
Dites ,  dites-moi ,  n'a-t-il  [)as  grand  toit  ? 

ALFRED. 

C*est  qu'en  effet  elle  est  charmante. 

T,  YaudevillM.  4*  *4 


ïS8  UNE  VISITi:  A  BEDLAM. 

AMÉLIE* 

El  puis....  (inystérieusement)  c'est  an  se- 
cret au  moins  ,  il  ne  fant  pas  lai  en  parler!.. 
à  son  retour,  je  youbis  le  surprendre  par 
ncies  progrès  !  Avec  quel  plaisir  j'étudiais  I... 
c'était  pour  luil...  {Avec  gatté.)  ¥oas  ne 
«avez  pa8?...)*ai  fuit  son  portrait...  si  j'étais 
sûre  que  ¥oas  ne  lui  disiez  point ,  je  tous  le 
montrerais...' (It^^af^anf  autour  (telle.')  Te- 
nez, regardez  ?ite;  n'est-il  pas  ressemblant  ?.. 

ALFRED. 

Ah!  je  n'y  liens  plus,  j'en  mourrai  de 
douleur  ! 

AMÉLIE. 

Je  ne  tous  parle  pas  de  ma  harpe,  de  mon 
piano  I...  mais  \ous  savez  comnrie  M  aimait 
la  walse  ?....  eh  bien  l  Monsieur ,  je  walse  & 
ravir  ! 

ALFRED. 

Elle  walse  à  ravir  !  est-on  phis  inatheurcQx! 
Quelle  femme  j'ayais  làî 

AIR  :  De  Doehe^ 

(Am^ie  fait  quelques  pas  de  walse  sur  la  rHouroeOe.  ) 

Quel  charme  lieureux  !  quelle  grâce  légère 
Semble  aoiiner  ses  jeux  déjà  si  doux  \ 

(  Amélie  s'arrête  et  le  regarde.) 
Daigne  un  instant  écouter  ma  prière  : 
C'e^it  ton  amant  qui  tombe  h  tes  getMux. 


/ 


SCÈNE  XIÏI.  1^9 

.AMELIE  le  regarda  ten'lrement ,  et  puis  recommence 

à  wafser* 

Tra  la,  la,  là ,  la ,  la ,  la ,  la ,  la ,  laîre , 
Tra  la ,  k ,  t»,  la ,  ta,  la ,  liEi ,  la ,  la. 

ALFRED;  tombant  à  ses  genoiix.. 

C'est  Alfred....  €*eslloi>.  époux  y  qui  n'a 
^iuai&  cessé  de  t*aiuier» 

SCÈNE  XIII. 

LES  piâcii^Ms,  CRESCEN&O. 

CRESCEHDO  9  paraissant  dans  le  fond  ,  un  papîer 
de  musique  à  ta  main. 

Ch£  veggio  l  Quai  spectacolo  !  ' 

AME  LïS  t  4»!  était  prête  à  se  trahir ,  aperçoit  Cres- 
cendo ,  pousse  un  gjraod  crî ,.  et  s^eniiiit  en  fermant 
la  grille  sur  elle.     ^ 

Ah! 

CRESCEWDO. 

Son  Altesse  aux  pieds  de  mon  écolière  ! 

A  i  F  B  B.IH 

EHe  a  dîâpflruî  (Prenant  Crescendo  au 
cotl^.)  Malheureux!  c'est  ta  présence  qui 
Ta  &iH  fuir!...  oà  eart-elk , dis-tuoii?  tu  m'en 
répondras. 

Ca>ESGENDÔ. 

Mt)n  Prince  !...  (  d  part.)  A  qui  en  a-t-îl? 


i6o  UNE  VISITE  A  BEJ>LÀM. 

ALFRED. 

£h  bien  I  que  fais^je  ?...  je  suU  aussi  in- 
sensé que  lui  ;  mais  yit-on  jamais  un  mal- 
heur égal  au  mien  ?  (  Regardant  le  partraiU) 
Amélie  9  bonne  Amélie  \ 

CaESCENDO. 

Mon  Prince...  c*edt  ce  fameux  air  en  mi 
bémol. 

ALFRED. 

Eh  !  laisse -moi  tranquille..*.  Dis-moi 
plutôt...  connais-ta  cette  jeune  dame  qui 
toutàTheure?... 

OaBSGBVDO.  ' 

Sans  >doute. 

ALFRED*  avec  feu. 

Tu  la  connais,  tu  la  ?oîs  souvent  ?  Abl  je 
t*eo  prie  ^  parle-moi  d'elle. 

CRBSGEKDO. 

C^estia  comtesse  Amélie. 

ALFRED. 

Oui... 

CRESCENDO. 

C'est  la  nièce  de  M.  le  Baron  f  du  maître 
de  ce  château  >  du  possesseur  de  cette  maison 
de>  plaisance.  ••  de  celui  que  tous  ayez  tu. 

ALFRED. 

Allons,  le  château,  le  fiaron...  Voilà  94 
tête  qui  se  perd....  Aussi',  où  ih'avisats-je 
d'aller  Jui  demander  des  renscigpnemens  ?... 


SCËNEXIIT.  i6i 

CRB9GBNDO. 

C'est  mofï  écolière  :  c^est  moi  qui  lui 
montre  la  musique...  et  une  ToixI...  uue 
méthode  !... 

ALFREI». 

£h  !  au  nom  du  Ciel  »  laissons  là  la  mu- 
sique !  Rappelez-Tous  que  tous  a'étes  pas 
plus  musicien  que  moi. 

CE  ESC  END  0. 

Comment  1  pas  musicieo  ? 

ALFRED. 

Eb  i  non ,  M.  le  CbaDcelier. 

CB.ESCB1ID0. 

Moi  »  chancelier  !• .,  rabatsser  ainsi  un  com^ 
posfteur  disting^ué!... 

Allons?  je  ne  m*en  tirerai  pas!...  Morbleu! 
laJssez-^moi.  , 

CBESCBITDO^ 

Non....  l'on  a  «abusé  Votre  Altesse  ;  maïs 
elle  ya  connaître  il  signor  Crescendo  I  Voici 
le?  lettres  les.piou  flatteuses  qui  m'ont  été 
adressées  par  des  princes  et  des  direcleurs  de 
spectacles  ;  voici  des  lettres  de  i^comman- 
dation  pour  les  piou  grands  personnages 
qui  doivent  être  en  ce  moment  en  Angle- 
terre; pour  M.  I^ambassadeiir  de  France, 
pour  M.  le  marquis  de  Valuaonl,  M.  le  comte 
de  Roscval... 


1^1  UNE  VISITE  ABEDLÂM. 

De  Rosoval  ^  dîs-lu  ?■ 

caEscÈKfia. 

Oui ,  Moosieui:  ^  luîripêine. 

A&FREn^  \u^  azradbant  la.  Iettxe>    el   la  déca- 
chetant. 

Qu'est-ce  que  ça  âig»jfi^?> 
MoQseigneuir  «st^sane  AçQi».... 

Eh!  oui...  c'est  pour  moi";  c'est- le  dieTa- 
lier  de  Forlis^  nroli)  asnl:  intime....  lisons. 
«'  O'apri^tA'demi^r^  lçWr«i,,  tM.  doî$.  ôtrc  à 
»  Londres  dans  ce  mp.qieart.  Jie  t>a4r«$âe  et 
»  le  recommandent  sig||ipr  Crescendo  «  mon 
»  maître  de  \nu5Îqiic... 

GBESCENDO. 

C'est  moi. 

A  L  F.  R  E  "D.  ^  coutinuant( 
»  Un  omginal... 

GRCSCEflDO. 

C'est  moi. 

ALFRED,  CODlîlUiant. 

»  Qui.  ne  manque  pas  de,  talent,  a  C*est 
daté  d'hier. ..Comment!  il  serait  vrai,.,  vona 
.seriez  réeliement...  £t  ce  dbâlcau...  Amélie, 
le  Baron?... 


.SCÈNE  Xni.  ,(53 

CRSSCENDO. 

,  Sont  réelletnent  ce  que  je  vous  ai  dit. 
▲  LFfi.ED9  vivement. 
Quel  bonheur  !  Oh  !  oui ,  c'est  cela...  c'est 
cela  même,  mon  cœur  a  besoin  de  le  croire... 
Je  cours  cn'iufonner,  acheyer  de  m'éclair- 
cir...  cette. jolie  Amélie  !...  son  oncle.,.  Ah  ! 
vou*- voulez  me 'donner  des  leçons;...  Mqr- 
bleui  je  leur r^ndjai  !...  Tant  d*idfees  se  croi- 
sent; se  "confondent  dans  ma  tête...  Moucher 
Crescendo! 

CÎtESCBÎÏtia. 

Monseigneur >  vous^  allez  entendre  mon 
gr^ndraîf '^ 

Va  toujours ,  je  t'écoute. 

▲IFBED)  à  part. 

Mais  j'aperçois  Amélie  et  le  Baron...   Ne 
perdons  pas'  de  terasï 

(11  s'enfuit  par  la  gauche.) 


i64  UNE  VISITE  À  BËDLÂM. 

SCÈNE    XIV; 

CRESCENDO,    LE    BARON,     AMÉLIE, 
eutraot  avec  précaution  par  la  droite. 

CRESCENDO,  COUdoiiailt. 

Tba  ,  la,  la,  la,..  Mille  pardons,  il  ja  def 
notes  de  passées. 

(H  corrige  m  crayon.} 

MoD  oncle,  il  D*est  plas  làl 

I.B  BAKOK. 

Aussi ,  tu  le  quittes  sans  attendre  mon  ar« 
rirée  ;  ce  n^est  pas  cela  dont  noas  étions  con- 
Tenus. 

▲  MéLlB. 

C'est  ce  Crescendo  qui  tout  à.coup'm*a 

'effrayée. 

CEESCENDO. 

Trn  «la,  la...  Votre  Altesse  9  mon  Prince!... 
JEh  bien!  où  est -il  donc? 

▲  MÉLIB. 

Quel  dommagje!  si  vous  aviez  vu  son  trou- 
ble, son  désespoir,  le  désordre  de  ses  traits; 
c'était  cbartnanl!... 

LE    BàROV. 

Je  vois  que  tu  es  moins  irritée  contre  loi* 


SCÈNE  Xy.  iC5l 

A  M  É  L I E  9  sévèrement. 

Pins  que  jamais 9  mon  oncle  ;  comme  s'il 
Miffisait  d'un  instant  de  repenlir  pour  effacer 
tous  les  toris  du  monde! 

GKESCERDO. 

Dîtes-mot,  êtes-vous  bien  tfûr  que  notre- 
prince  nmsse  soit  dans  son  bon  sens? 

tB  BABOH. 

Comment? 

CBBSCENDO. 

Oui,  que  sa  tête  ne  soit  pas...  lé...  un 
peu...  Pendant  un  quart  d'heure  il  me  parie 
d'un  tas  de  balîfernes  où  Ton  ne  conçoit 
rien  ;  et  lorsque  je  yeux  eommencer  mou 
grand  air,  il  part  comme  un  éclair;  zeste !••• 

I.B  BA B  ON  ,  bas  à  Amélie. 

Ça  n*est  pas  ai  dépourfci  de  bon  sens. 

(On  enteod  du  bruit.) 

SCÈISE  XV. 

LES  paicBDBirs,  TOMY. 

T  o  K  T ,  arrivant  en  désordre. 

ÂH  !.  Madame....  ah  I  Messieurs...  qui  l'au- 
rait cru....  ce  pauvre  jeune  homme! 

AMBtIE. 

Eh  bien!  qu*as-tii  donc?  Lui  serait-il  ar« 
rivé  quelque  chose  ? 


i66  UN£  VISITE  A  BEDLÂM. 

T  0  M  T. 

La  tête  n'y  €9*  fhis. 

CKKSGBITDO. 

La  !  quand  je  yqus  le  disais. 

TOUT. 

11  faut  que  quelque  rèTolulioa  subite  ait 

partroublé  sa  cerveUe^>  mais  il  est  fou...  foo 
à  lier. 

Moir  mari...  où  estait?  eoiiduis<*moî  de  ce 
côté. 

OEEseeiFB». 

Son  mnri!  allons^  à  l'autre  à  présent...  Ah! 
çà ,  tout  le  monde  perd  donc  la  tête  aujour- 
d'hui? 

Il  est  dansaine  fureur ,  qu^il  a  déjà  ravagé 
deux  plates-bandes  et  brisé  nos  cloches  ù  me- 
lons... Il  demande  sa  feeiine-y  il  la  Toit  par- 
tout, il  lui  demande  pardon ^  il  s* accuse,  et 
il  eusse  tout^ 

AMELIE. 

Mon  Dieu.!  qu'avons-nous  fait  là...  tous 
Toyezy  mon  onple>.  avec  votre  stratagème: 
ce  pauvre  Alfred  !  j'étais  bien  sûre  qu'il  m'ai- 
mait!... mais  en  perdre  la  raison!...  Mon 
oncle,  je  vous  en  supplie,  envoyez  chercher 
des  secours. 


SCÈNE  XVI.  ;67 

LE   BAEOV. 

Parbleu  !  je  vais  moi-même  voir  tin  peu  ce 
dont  il  s'agit.*f  Ce  pauvre  jeune  homme!... 
aussi  avec  une  tôte  comme  la  sienne... 

AMÉLIE. 

Eh  !  allez  donc. 

LE  BA&on. 
Je  reviens  dans  Hnstant. 

SCÈNE  XVI.      . 

LES  PRECIS)  Evs,  exccpté  le  BatoQ.^ 

TCMt. 

Il  s'avanee  de  ce  côté...  retirez-vous,  ^îl 
est  furieux! 

GI^BSCÉKDO. 

Ohiofie  furioso  !.  Madame  9  rentrons  5' je 
vous  le  conseille* 

Non,  quel  que  8oi<(  le  danger,  je  reste  ici, 
je  ne  le  quitte  plus... 

GBESCEBTBO. 

Moi  9  je  nfie  sauve. 
(Il  reueontre  Alfred  et  »*cnfuitde  Tautre  côté.) 


iQ%  UNE  VISITE  A  BEDLAM. 

A  II  FE  E  D  5  dans  la  coulisse  àgauche- 

Laissez-moi  !  laissez-moi  ! 
(Il  entre  d'un  air  égaré  ;  ses  Yêtemefts'iODt  eu  désor- 
dre; Crescendo,  Tomy  poussent  un  grand  cri,  et 
se  sauvent.) 

SCÈNE  xvn. 

ALFRED,  AMÉLIE. 

(Alfred  paréourt  le  théâtre  en  UuntyàmBSmtt  idfae 

derrière  un  arbre.)  ' 

Oui  f  cet  Alfred  est  un  monstre!  c*est  à  lai 
que  j'en  veux! 

AKllilB,  tinidement. 

Mon  Dieu  !  qu*il  a.  l*aîr  méchant  Alfred  » 
c'est  moi»  ne  me  faites  pas  de  mal. 

AI.PBBD. 

J()ui  êtes-Tous?...  approchez. 

AMÉLIE. 

Vous  ne  me  ferez  pas  de  mal? 

AtFRED. 

Vous  le  savez  bien  ;  c'est  Alfred  seul  qui 
mérittrmu  colère... 

AMÉLIE. 

Il  faut  dire  comme   )ui.^  pour  Tapaiser. 
Oui,  sans  doute,  c'est  un  mauvais  sujet)  on 


SCÈNE  XVIÎ.  16^ 

méchant  caractère^  qui  fuît  de  la. peine  ili  tout 
)e  monde...  mafSfâi  vous  m*aimoz,  ft'ait<;9 
comme  moi>  ne  lui  en  voulez  plus...  U  a 
pre:^ié  ma  main  sur  son  cœur!... 

ÂLFBED. 

Connaissez-vous  Amélie  ? 

▲  HBLIB9  tindderaent.  ' 
Oui^  je  la  connais. 

▲LFEiD,  aTecfea* 
Vous  la  connaissez  ! 

A  M  i  L I E  y  s^enftt  jatit  • 
Ah!  mon  Dicul  {Tremblante.)  Non  »  Mon- 
sieur* non  f  je  ne  la  connais  pas.  Âh!  mon 
Dieu!  est-ce  qu'il' ta  toujours  être  conmie 
celât» 

ALffaED. 

Mon  ,  Toas  ne  la  connaissez  pa»  ? 

AMÉtlE. 

Non,  noûy  je  ne  la  cotanais  pas. 

ALPBI]>.  A 

Si  TOUS  la  connaissiez...  tous  Taimeriez 
comme  moi.  Si  tous  saviez  quelle  fut  ma 
conduite...  surtout  depuis  que  je  suis  éloigné 
d'elle,.,  je  veux  tout  vous  raconter. 

Quelle  situation!  une  femme  écouter  les 
confidences  de  son  mari  !  Dieu  sait  coiùbien 
je  vais  en  apprendre! 

F.  Vaudeville*.  4.  l5 


ijo  UNE  ViStTE  A  BEDLAM. 

AtFRED. 

Quand  j\irrivai  à  Vienne,  tous  sarei 
bien.,  jamais  la  Cour  n*avait  été  si  brillante... 
Une  foule  de  fetnnies  cliarmaaléd... 

▲  MB  LIE. 

Ah!  mon  Dieu! 

AtFRB*D. 

ài&  :  de  M,  MélesifUie» 

Une  surtout ,  fraîche  et  jdlie , 
An  fin  sourire ,  au  doux  tmaob , 
Des  Français  vantait  la  foUe , 
La  grâce  et  les  galans  exploits. 

N. 

AMPLIS. 

Et  TOUS  diriez  à  cette  be|{[e..É 

AIJ'JRED. 

Je  disais  en  amant  fidèle... 

Trakftnihi, 
Ne  me  parlez  pas  de  ceb. 

AlfrBblB. 

Comment  !  Monsieur  5  tous  disiez...  Mais 
c^esi  très-bien. 

ALFBED. 

Oh!  ce  n*est  pas  tout  Vons  rappefef-> 
Tous>  à  Berlin,  cette  |eufie  et  jolie  coni'* 
tcsse  ?...  Bonne  et  estimable  femme! 

Même  air. 

Aux  doux  plaBshrs  ainsi  <|a*au  raoti^ 
Elle  voulait  me  ra{>peler  t... 


SCÈNE  XVII.  iji 

AMPLIS. 

Çt  Qialgré  sa  doijeiir  j^rnl^sadc  » 
Monsieur  se  laissa  consoler.. b 

ALFRSD  y  d'un  air  effaré. 

Devoirs...  égards...  dans  mondéfive,' 
Oubliant  tout...  i'asaii  lui  dire... 
^  Gaiment.) 
Tra  la,  trah... 
Ne  me  parlez  pas  de  cela. 

AMiLIB. 

Et  moi  qui  l'aecusais  !  maïs  c'est  un  mo- 
dèle de  fidélilé  cpn^gale. 

ALFBBD. 

Et  Toiis-mêmAy  voii»  êtes  bien  jolie  !  je 
i^'ai  jaioaiî*  ireoconlrè rien.  de.  plus  attraj^ant... 
eh  bien!  vous,  tentecîez  eo  vain,  cke  me  sé- 
duire. 

A  M K  LIE. 

J'ai  bien  envie  d'essayer.  [Tendrement.) 
Alfred,  si  j'avais  été  abusée;  si ,  vous  re- 
trouvant fidèle^  mon  cœur  vous  pardonoail! 

A  L  F  A  E  D  >  fesant  un  mouvement  qu'il  réprime. 
Non...  je  ne  puis  vous  écouler. 

Mon  Dieu  !  il  va  m 'être  trop  fidèle  à  pré- 
senr....  El  si  j'élals  ceUe  Amélie  que  vous 
regrettez. 


t;a  UNE  VISITE  ABEDLAtf. 

ÀLFAEDy  arccfeti. 

Amélie ,  dites-Toos  ?  êtes-Toas  biea  bût» 
que  ce  soit  elle  } 

Je  TOUS  jure  que  c'est  moL    "^ 

ALFRED. 

f 

Ecoatei...  D*espérex  pas  in*abtiserf  fe  le 
saurai  bien....  Amélie ^  d*ab6rd.  ne  in*aurait 
pas  (fit  vous. 

âMÉllB. 

£h  bien  !  AUred ,  fe  te  le  jure. 

ALFRED. 

*  Amélie  me  doonait  un  oom  plus  doux. 

Eh  bien!.,  mon  ami,  mon  AIfk«dL..  (A 
part.  )  Il  faut  bien  faire  tout  ce  qu'il  yeut  ! 

lia  :  Quand  toi  sortir  delà  caxe,  (  PmI  el  Viistaîe.) 

ALFRED. 

Âm^e ,  hélas  l  moins  fiére, 
Regardait  plus  tendrement  ! 

^l-je  donc  l^air  si  sëyère? 

(  A  pan.  )  ^  « 

Je  crains  qa^à  chaque  moment 
n  ne  se  mette  en  colère. 

▲LfEXD  f  U  rtgardratl 

Oui ,  c^est  son  regsrd  charmant , 


SCËN&  XV11. 

Je  mVn  soUTiens  à  présent. 
Hais  je  me  souviens  quMmëiîe , 
Loin ,  hélas  !  de  me  résister, 
U^abandottnait  sa  fuaia  jolie*.., 
(U  liii'Siiif«  b  nuttt.) 

AMSUS.  ' 

Il  œ  fiuitpas  rirriler.  (ÉUJ) 

«ICOlfD  COUVLIT. 
ALFftSD. 

Oui  ^  œ  moment  me  rappelle  ' 
Des  touTeairs  bien  plus  doux  ! 
(U  la  Mrn  d«M  ««•  bm. 

AtfÉLn  y  imn; 

Quelle  contrainte  cruelle  1... 
Mais ,  Alfred ,  j  pense^yôut  ? 

iXFAXO. 

S'il  est  vrai  que  oe  toit  elle , 
If e  sois-je  plus  son  époux  ?. .  • 

Mais I  au  fait,  c^est  mon  époux. 

ALFAED»  vivement. 

Non ,  non ,  jamais  mon  Amélie 
Si  Iong4cms  n^'eùt  pu  résister, 
A  son  amant  (|ui  ]a  supplie. 
(  U  rtmbrnse.) 

U  ne  faut  pas  irriter.  Ois.) 

(  Alfir«d  tomb»  à  ms  gtaous.) 


i5. 


174  UNE  VISITE  A  BEDLAM. 

SCÈNE  XVIII. 

£C8  PEKCBDB9S,  LE  BARON,  CRES- 
CENDO, TQMY,  dansIefoDcl. 

MoNODcIeh»  n>{ipiX>ph^  pas!..,  il  n*3'  j| 
queqoQÎ!... 

AIR  r  (ila  pol  dejt&xn^ 
Non,  TOUS  D^iiYcz  plus  rien  \  QFaîndre.S 

(  Moi^nt  Amelieé) 
Son  cœur  hVtant  plus  courroàcé , 
^      A  mon  tour  je  cesse  de  feindre  : 
Allez...  mon  accès  est  passai 
Sur  ma  i>asolé  qu'on  se  fonde  \ 
A  ce  baiser  je  doi^  ma.  gi|ërison  \ 
£t  ce  qui  n^e  rend  la,raisoa^ 
La  ferait  penlre  à  tout  le  monde. 

Çomment^Monsieur  ? 

ALFRED. 

C'était  le  seul  moyen  de  te  fléchir  !  m'en 
veMx-tu  d'avoir  perdu  la. tête? 

jLK  lUROV.. 

Bah!...  est-ce  qu'Une  femme  ne  pardonna 


SCfefîE  XVMI.  i^5 

pas  toujours  les  folies  qu'on  fait  pour  elle  ! 
Mais  ce  que  je  ne  le  pardonne  pu»,  ce  sont 
mes  plates-bandes...  et  mes  cloches  de  uje- 

lOQS. 

CIVB;$  GENPO. 

Alïî  çà,  Messieurs,,  puisque  TOUS  ayez  tr^is 
recouvré  la  rai^oà,  si.vous  eut«ndiez«on 
^îr?...  ^ 

LE  E^ÀR  0  R\  ^  • 

Après  dîner- 

Au  moins  un  petit  allegro. 
VAUDEVILLE. 

AIR  :  de, M'  Mélesville, 
^nfîn  donc  vitit  cÂcl  plus  doux. 
Pour  vous  succcd  vaux,  orages  ; 
Plus.  dç.  Giour«c5 ,  dç  voyages , 
A\i  !  restez  t9^iouvs  chez  vous. 

CBOEOK» 

EuHu  donc ,  etc. 

LE  fiAACX. 

De  vos  voisina ,  diarpic  jour. 
Français ,  votre  liuuifur  kgère 
Vous  fait  preadre-  tour  à  loue 
L<î  costume  ci  la  mauière. 
Chaque  pays  a  fi^%  goûts  : 
I^HU-iiuoi  renonctT  au  nôlrc  ? 
La  France  en  vatit  bien  un  autre. 
'  Ai|  !  rcUez  toujours  chez  vous. 


i:a  UNE  VISITE  A  BEDLAV 

CLa(|ue  pajs  a  ses  goûts ,  etc. 

TOMT. 

Ne  cpuroBs  point  le  pajs  ; 
Car  souvent  plus  d^uQ  ora^^e 
Nous  menace  hors  du  logis. 
Et  quand  dans  votre  oKoage 
On  TOUS  dira ,  tendre  cpoiut  » 
Que  Tair  Tons  est  necesnîie  ^ 
Croyez  Totre  ménagère» 
Mais  lestez  tonjoan^cfaez  rém»  . 

CBonrft. 
Si  Ton  TOUS  dit»  tendre  époax  |  de' 

▲LFftED, 

Étrangers ,  quVn  sort  jalouK 
Tient  loin  de  votre  retraite , 
Bientôt  enGn  puissiez-vous... 
(  Ab  I  mon  cœur  vons  le  souhaite) 
Goûter  le  bonheur  si  ^oux 
De  retrouver  votre  amie  ! 
Rentrez  dans  votre  patne  « 
£t  restez  toujours  diez  vous. 

CHOBUR. 

Goûtez  le  bonheur  si  doux ,  etc* 

CRESCENDO. 

Dans  un  somptueux  hôtel , 
Lorsque  Pappéti^  me  gagne  » 
JV  cinq  heures  j -entre...  ô  ciel! 
Monsieur  est  à  la  campagne. 


SCÈNE  ÏVIÎI.  tjy 

Vous ,  donl  les  mets  sont  si  doux. 
Dnot  on  vante  la  cuisine , 
Vous ,  enfin ,  chez  qui  Ton  «fine , 
Ajb  !  restez  toujours  chez  tous. 

CHqBVR. 

Vous ,  d6o(  les  mets  sont  si  doui ,  etc. 

AMÉLISy  «iFulilîe. 

Deux  époux  que  met  d*acGoid 
Vue  double  extravajfance , 
Pçur  être  heureux  ont  encor 
Besoin  de  yotie  indulgenoe* 
Messieurs ,  toumaat  contre  nous 
Le  re&ain  qu*oa  tous  adretee , 
Quand  on  donnera  la  pièce , 
N'allez  pas  rester  chez  vour. 

caoBUx.    . 

Metiieiirt ,  tounaDt  contre  noits»  de. 


FIHD^OIIK   flIITl  ▲  BIOLAX. 


LE  SOLLICITEUR, 

00 

L'ART  D'OBTENIR  DES  PLACES , 

»^      GOnÉDIEEN  UN  ACTE, 

ifiLÉB  B£  VAUDEVILLES» 

PAR  MM.  ^RIBE  ET  M***; 

Bepcésentée ,  pour  la  première  fois  ^  sur  iel  théâtre 
des  Variétés  |  le  7  avril  1917, 


mt^Êm^^^^gg^^fgt 


PERSONJNTAGES. 


M.  ^ESPÉRANCE,  tolUciteur. 
M««  DE  VERSAC ,  jeune  solliciteate. 
ARIHANDy  surnuméraire. 
GEORGES  9  garçon  de  bureau» 
li;i»«  DURAND  >  vieiUe  soUioileuse. 
ZURICH ,  suisse. 
SORRËT,  limonadier. 
GRIARDET,  huissier. 


' 


Lt»  scène  se  pssse  dsas  le  vestibule  â^na  miiiîslcre. 


I 


Kt 


LE  SOLLICITEUR, 

COMÉDIJE*  y 


l.e  théâtre  rrprtî^ote  le  vcsUbtlle  d^un  tninisfre.'  A 
gauche  du  qiectaleur  une  grande  porte  vitrée ,  qui 
est  censée  donner  sur  îa  cour,  au'^dessus  dç  laquelle 
est  écrit  :  Fermez  Ià  porte  S.  V.  P.  Une  table  à 
droite ,  un  poélc  à  gauche ,  un  plan  au-dessus  de'  la 
porte  vitrée.  A  droite ,  Tentreç  dc^f  bureaux-.  Au 
fond ,  et  fesant  iace  aux  spectateurs ,  un  vaste  çsca- 
lier,  (|ui  est  celui  du  «niubtre. 


y 


SCÈNE  PREMIÈRE. 

GEORGES  9  avec  une  petite  table  ;  prés  le  bureau 
w*  I  y  CIVIARDET)  en  noir,  avec  une  médaille, 
se  promenant  au  bas  de  Tesculier  du  fond  ;  AR- 
MAND, M"**  DE  VERSAC  ,  sortant  du  bureau 
il  droite.^ 

ti™*   DE  VËRSAC. 

Oui,  mon  cher  Annand»  vou^  avez  beau 
dire^  je  parlerai  pour  you:»|  et  je  réusdirai. 

Je  n*eii  doute  point,  mtt  ]olîe  consme; 
mai?  pourtant  Je  VOUS  prie  de  n*eu  rien  l'aire. 

k\  VaadfviUe»;  4,  ,  iG 


t<s  LE  SOLLICITEUR. 

X"*   DE  TEK  SAC 

Eh!  pourquoi  docc?..  Quand  €%i%  ne  ifr- 
inaofk  pas  pour  soi ,  on  est  bien  hardi.  Lus- 
trée de  fotre  ministère  m'a  tait  cl'abvffi 
effrayée  ;  -ees  grandes  -porte»,  «•  «oaeierfe, 

rcs  factionnaires...  Oh  va  Madame P  Qu^ài- 
mande  Madame  ?  Votre  suisse  a  an  air  rébar- 
baiif...  Mais  ros  chefs  de  bureaux...  c'cft 
bien  diCerenl!  Quel  air  gracieux!..-  queltOB 
•préîenaDlL..  comme  le  son  de  leur  voix 
«'adoucit  quand  ils  tou5  ofôrtnt  le  fauleuîl 
«obligé...  Ce»t  cbariiiant  de  solliciter!...  Je 
i.i;  lii  clunue  plus  si  tant  dépens  s'en  aiêlent. 

El  voilà  justement  ce  qui  ine  désofêrc. 

AIR  :  Il  me  faudra  quitter T empire. 

Ou^m  intrigant  vante  st%  artl&ccs. 
Prône  en  tous  lieuit  cl  son  zclc  et  sa  foi , 

Loin  àe  parler  de  mes  services  , 
Eux  seuls  ici  doivent  parler  pour  roui. 

Oui ,  riiona.Ate  liomuie  qu%>n  oublie  , 
Loin  de  se  plain^lre  et  de  solliciter, 
Met  â,  servir  son  prince  çt  sa  (Milrie 
Le  tem»  qu'un  autre  emploie  k  s*i»  iMiler.' 

Hfitic    pf   YEBSAO. 

Entendoos-DOMs  y  cepeudaut  :  c'est  fort 
bieo  d^avuir  du  oiérile,  aiats  faut -il  que  le 
riiérilt:  parle. 


SCtNEI.  i63 

,  ATA  :  Le  premier  pas^  , 

Il  faut  parler  : 
Le  talent  et  le  zèle  * 

A  la  laveur  doivent  se  rappeler  : 
Dos  prj'trctfurs  H  méoiîire  est  rebelle  , 
Et  près  des  grande,  comme  auprès  cf^une  beHe, 

Il  faut  parler. 

Et  si  VOUS  gardez  le  silence  «  le  niioii^l'Re 
îr.i-t-ii  {îeviiier  qtie  vous  êl^s  un  officier  dis- 
tingu«?...  que  vous  avez  payé  de  voire  por- . 
sant^e  sur  le  chainp4t!  bataille P  qoe  dt'puis 
un  un  vous  Iravaiilexgr^Us  dans,  ses  bureaux- 

ARMAND. 

Quoi!  vouS$  voulez  que  j'aille  dei^and^r 
Dici-inctiie? 

M"""    DB   VB&sic. 

Non,  certes...  Mais  sj  îe  prends  ce  soin  , 
qu'avez-vous  à  répondre? 

ARMAND. 

Je  répoudraî...  que  ce  n'esl  pas.  i«  nainMire  • 
qu'il  m'impurttt  ie  plus  ^le^ fléchir. 

M'^   PE   tCRSAG. 

Que  vou/ez-voug  dire  ?.., 

AIR  :  d^ Agnès  Sorel, 

Il  est  une  pcrsonncenooipe 

Qui  peut  bien  plus  pour  moa  box4>cin'  ! 


ï84'  LE  SOLLICITEUR. 

Vous  la  connaisse;^  ;  mais  j^îgnore 
Si  TOUS  voudrez  parler  en  ma  ûiYeiir. 

Loin  de  croire  à  la  réussite , 

Tout  espoir  est  pour  moi  perdu. 
Depuis  un  ao  i  iiélas  !  je  sollicite» 

£t  n'ai  riei)  çoccre  obtenu. 

m"'^  db   TB&SAO. 

Comment  !  vous  sollicitez  quelque  chose... 
de  moi?...  Eh!  mais,  il  fallait  donc  parler... 
Je  suis  comme  le  minisire,  je  n'entend?  pas 
les  gens  qui  se  taisent ,  et  ne  peux  accorder 
çp  qu'où  ue  me  demande  {^as. 

'  .  àbmahd. 

Pouviez-Tous  blâmer  mon  silence  ?...  Vous 
êtes  riche!...  moi,  sans  état  dans  le  monde  , 
fiaps  plucer.f 

M"**   D»  TBRSAC. 

Raison  de  plus  pour  en  avoir  une.  Votre 
chef  m*a  finit  espérer  aujourd'hui  une  audience 
do  minisliev..  El  frétais  si  empressée  à  venir,  . 
que  je  n'ai  oublié  qu'une  chose  assez  essen- 
tielle,., c'est  voirez  pélilion  que  j'ai  laissée  sur 
ma  toilette...  Vous  aviez  raison,  pour  une 
solliciteuse,  je  n'ai  pas  une  Irop  bonne  tête... 
Mais  il  est  encore  de  bonne  heure,  et  je 
vais... 

ARMAVD. 

Vous  avez  le  laissez-passer  pour  rentrer? 


SCËNEII.  i85 

M™*    DE   YEBSAC 

Oh  f  j^ai  toul  ce  qu'il  faut 

AIR  :  Bonsoir,  noble  dame»  (  Comte  Ory.J 

Prenez  confiance , 
Mol,  j'ai  l'assurance 
(^iie  ce  {yrojet^là 
Nous  réussira. 

*  ARMAND. 

Sans  peine  on  défie 
**  Le  sort  et  ses  coups, 

Quand  femme  jolie 
Veille  ainsi  sur  nous. 

MADAME  TXRSAC. 

Onî ,  cVst  mon  génie 
M   1       Qui  veitte  sur  vous. 

S   \  ARMAND. 

r  f       Quami  femme  joUe , 
Veille  ainsi  sur  nous. 

(Aroand  conduit  madame  de  Y^n^*) 

SCÈNE  n. 

ARMAND,  GEORGES, 

Pabdon,  Monsieur;  est-ce  que  cette  jolie 
4liine  n'aurait  pas  pu  eqtrer 

\  ■ 


as 


i86  LE  SOLLICITEUR. 

r 

Non  ;  «Ile  a?aiè  oublié  quelques  papicrf 
iiiipui'uiiid. 

CEORGES. 

Ah  bien!  elle  est  bien  bonne...  Ce  n*érait 
pa»  la  peine  ..  Tiens  «  des  papiers  avec  ces 
yeux-là  !...  ça  vaut  un  laissez -passer. 

▲  BMAli  D. 

Ah  !  lu  croîs  ? 

G  E  O  E  G  E  s. 

Il  j  en  a  bien  qui  n'ont  pas  ses  jeux  «f  qui 
enlrent  tout  de  incme...  Tenez,  ce  g^rand 
Monsieur  s>ec ,  qui  soflieite  tonjoups,  et  qu'on 
appelle  M.  Lespérance ,  mulgré  le  suis^e,  le 
conci<-rge  et  lu  consigne,  H  trouve  toujours 
le  moyen  de  pas»er...  je  nesaispas  Goninient 
il  fuit  son  compte  y  et  je  ui*étonne  de  ne  pas 
le  voir  encore. 

ABHAIIB. 

Il  est  de  bonne  heure...  Neuf  heures ,  ;e 
crois. 

GBOEGES. 

Et  vous  voilà  déjà  au  bureau!  c'est  su- 
perbe!... Été  cotntne  bivfir,  je  vous  vois 
toujours  brûlant  du  mOn^e  zèle,  et  le  premier 
à  l'ouvrage.  Mais  dame  !  vous  êtes  surnuujé- 
rairc  ;  et  comme  le  chef  de  divisîoti  n'arrive 
qu'à  midi...  c'est  trop  ju^le... 


SC^iXE  II*  ^«7 

Allon5i,Georj:«$,  taisez -v^us...  .D'ailleors» 
c|ii^a  donc  de  si  trtsie  i*éut  de  surnumé- 
aire?... 

AiA  :  de  Partie  carrée. 

Soos  ce  titre  sans  importance , 

On  est  souvent  ti^és^Mnpqrtitnt  ; 

^D  y  g;agne  de  Tinflutnce,  ; 

Si  l'*oQ  n^y  fs^^e  pas  d^argent. 

Oui,  ces  messieurs  ont*dWdînaire 

Plus  de  crédit  qu^un  grand  scigBeur. 

GKOHGES. 

Ça  se  peut. 

(  A  part.) 

Mais  il^  a«j  çj^^jl^xh 
Chez  le  r€sj^vf;ate{ir. 

A  B  M  A  n  0^ 

P'arlleur^  ça  viendra...  De  la  patience. 

GBUftGBS. 

Delà  palience...  Ça  n'est  pas  ôclaqui  rou» 
manque...  Â  propos >  nous  aurons  tmis  ces 
Messieurs  aujouni'hui^  car  c*c$t  je  jour  de 
puicinent. 

ARMA?(D. 

Qh 'est-ce  que  ça  oje.  fait  ? 

GEORGES. 

C'est  vr.ii,  je  u*y  pensais  pas...  Le  paie- 


165  LE  SOLLICITEUR 

^menty  ça  ne  tous  touche  pas;  ce    soot  ces 
A^essîeiirs  qui  toucheot,  et  tous... 

Et  moi  f  je  vais  me  metfre  à  Vourragf,,. 
Si  cette  jeu  oe  dame  revient,  tu  la  feras  entrer; 
il  vaut  mieux  qu'elle  attende  dans  le  bureau 
qu'ici,- 

CBOmOBS. 

Qui  I  MoDSÎ(;ttr. 

(Armand  scHTl.  \ 

SCÈNE  m. 

GEORGES. 

Ces  pauvres  surnamérdires  !...  ça  Tiendra 
^  viendra!...  Croyez  cela  et  buvez  de  l'eaù, 
c'est  le  plqs  clair  de  leur  déjeuner...  Ça  me 
fait  penser  au  sieq  que  j'ai  oublié  de  îui  ppr- 
ter,  le  petit  pJÎn  et  la  carafe  d'eau.  Â  cela 
près,  c'est  un  bel  étal  que  celui  de  surnomé^ 
raire.  Je  sais  ça,  moj,  qui  ï^\  exercé  pen- 
4ant  trois  ans. 

AIB  :  Un  homme  pour  faire  un  Ut^leaUf 

^f  (irmis  qu^on  travaille  pour  deux , 
Et  qu'on  «e  passe  de  salaire  y 
C/est  au  fait  Teinplei  V  plus  beurrux 
QuV<^  puisse  avoir  dans  V  piiiii4cre. 
En  fait  de  places ,  ici-bas 


SCÈNE  IV.  189 

J"  VOIS  chacun  trembler  pour  la  sienne  ; 
Et  f Kl  nioins  quand  on  n'en  a  pas , 
Od  ne  craint  pas  qu'on  vous  la  prenne. 

Maïs  qu'est-ce  qui  vient  là?...  Déjà  des 
S^olllci leurs  ?...  Çà  commence  bien  9  la  jour- 
née sera  bonne. 


SCÈNE  IV. 

GEORGES,  M"*'  DURAND,  entrant  par  la 

gauche. 

M*"*  D  u  B  A  N  D  9  parlant  au  suisse. 

Oui  ,  Monsieur,  Toilà  mon  laîssez-pnsser. 
(  A  G4or^es.  )  Monsieur,  ia  première  divi- 
sion ,  bureau  n*^  1  ? 

€B0R6BS. 

I!  n'y  a  encore  personne. 

M"'*    D  i:  B  A  3f  D. 

Oui,  Monsieur...  mais  vous  voyez  que  j'ai 
un  hnVez-passer, /'t  ce  n'est  certainement  pas 
.*»ans  peine... 

GFORGES. 

Je  vous  dis  qu'il  n'y  a  encore  personne  , 
excepté  un  surninnôraire. 

M'"*   DUR  AN  p. 

Eb  bien  î  dès  qu'il  y  a  quelqu'un. 


/ 


i^o  LE  SOLLICITEUR. 

GEORGES* 

Q»rest-ce  qui  vous  p;jrle  de  quelqu'iiu  ?... 
3e.  vous  dî.s  un  Surnuméraire..',  vous»  arrivei 
de  trop  bu  une  heure. 

Fardon ,  j«  croyais  qtl-'on  ne  pou  rail  fama^ 
arriver  de  trop  boiineheure.  Je  vous  dersian- 
(te>'ai  alors  la  permission  d'attendre  et  de  me 
^  chauffer  au  poêrc.  , 

(  tUc  prend  la  chaise  du.  garçon.  ) 

G  E  O  E  G  £  3- 
£t  bieu  !  c*est  sans  gêne. 

Voyez-Tous,  c'e?t  un  entrepôt  de  tabac 
que  \ii  Foilicitt^  depws  ioo^-tems,  et  qae 
j'aurais  déjà  eu  sans  mou  inarL 

6  E  0  B  G  B  ». 

Est-ce  qu'il  ne  voudrait  pas  ? 

£h!  i>0Q  I>îeu  I  il  n'a  jamais  eu  de  Tolonré , 
et  encore  moins  à  présent*  le  pauvre  cher 
liomine  ;  mais  il  n'a  jamais  su  faire  les  choses 
à  propos...  Imaginez -vous  qu'il  vient  de  se 
laisser  mourir 

GEORGES. 

C'est  bien  malheureux  ! 

M"*"   DURAND. 

Oui  y  sans  doute  ^  car  sans  cela  j'avais  Tea- 


SCENE  IV.  191 

trepOl  de  Saint -JVIalo.  Oti  prélend  qu'il  faut 
im  homme  pour  remplir  cette  place?...  Dieu 
sait  pourt^ant  comme  le  dcfunt  s'tintenduit  à 
remplir  une  place.  ASais  comment  trouver  un 
mari?  Diles-moi,  vou*  qui  voyez  tanl  tie 
roonde  ici ,  vous  ne  poMme*  pas  ui'indi- 
qiier  ?.«. 

GEORCJ&S. 

Eh!  mon  Dieu!  allendez...  je  rois  d'ici 
votre  homme...  c'est  même  un  concurrent, 
et  un  concurrent  redoutable...  M»  Lespé- 
rance>  le  plus  rude  suliicitcnr. 

Et  vous  croyez  qu'il  voudrait... 

GEORGES. 

Lui  ?  pour  obtenir  une  place ,  il  esX  capable 
de  tout...  Vous  ne  le  connaissez  pas.. 

AIR  :  Je  me  suis  marie. 

C'est  le  roi  des  furets , 
Il  guette ,  il  rode ,  il  trotte  ; 
Sua  unique  marotte 
.  Est  de  ccui'ir  s^rès 
Ses  étemels  place  ts. 
Du  uiiaiilére  au  Louire , 
Des  ({MIC  la  porte  s'ouvre,  ^. 

SV)udaia  ou  peut  le  voir. 
Avec  soD  baÎÀt  noir. 

Chef  de  bureau ,  préfet , 


192  LESOLLICITEUIL 

Commis  y  il  vous  menace  ; 
CraigDCz  tlValrer  eu  place  ^ 
Viiiu  aurez  son  billot 
Avec  votre  brevet; 
Car  c^est  d'après  b  gazette 
Qu*il  règle  sa  courbette , 
£t  sou  souris  flatteur 
D'après  le  Mooiteur. 

En  mai  comme  en  janvi^ri 
Que  le  iniuistre  change , 
Lai ,  rien  ne  le  dérange , 
11  est ,  sur  Tescalier, 
Ferme  comme  un  pilier  ; 
£t  Phiiissier  du  ministère , 
S^il  en  fes^iit  rinventaire , 
Ne  pourrait  f  oublier 
Dans  notre  mobilier. 

Dans  les  mêmes  instans 
On  le  voit  aux  finances; 
Il  est  aux  audiences . 
El  trouve  eqcor  du  tcms 
Pour  nos  reprèsentaus. 
En  un  mot ,  il  se  faliguj:  » 
Jilarche  ,  travaiUe ,  intrigue . 
Le  tout  pour  parvenir 
A  ne  Mcu  obtenir. 

une   BVBAND. 

11  pourrait  finir  par  arriver,  et  c'est  un  ri- 
Tal  tiop  dangereux.  iVliUd  dès  que  yous  me 
piuaicUe^  de  lui  parler...  que  d'obligaliuus 


SCÈNE  V.  193 

e  vous  auniil  [Fouillant  dans  son  sac.)  Mon 
)îeu  !  je  n'ai  là  que  niuD  mouchoir  et  ma  pô^ 
îlion...  JMais  je  crois  entendre  sonner  dix 
leurcs..*  je  puis  entrer,  je  crois ?.«• 

«BORGBS. 

Oh  !  snn9  difficulté  ;  mais  une  mitre  fois 
Eiye«  plus  de  mémoire  ,' et  rappelez  -  vous 
qu'on  n'entre  qu'à  dix  heures»..  C'est  qu'en 
venant  Mtôt  on  se  presse  9  et  on  oublie  tou- 
jours quelque  chose.  (  //  part.  )  Attrape  ça. 
{Madame  Durand  entre  dans  le  bureau  adroite,) 
Et  moi ,  n'oublions  pas  le  déjeuner  de  M.  Ar- 
mand. 

(U  eatre  également  à  droite  atec  un  petit  pain  et  une 

carafe  d'^eau.) 

SCÈNE  V. 

L  E  S  P  Ë  R  A  N  C  E ,  en  bas  noir ,  h^blt  noir  ser- 
rant la  taille ,  chapeau  sur  la  téie  ;  il  ouvre  la  porte 
vitrée  à  gauche  ^  et  rcgaixle  autour  de  lui. 

Pebsokne...  Si  je  me  suis  biéh  orienté  snr 
ma  carte  topographique  du  tninistère,  Toicî  la 
grande  entrée  et  l'escalier  du  ministre...  et 
c'est  par  là  que  moi ,  Félix  Lespérance ,  je 
prétends  enlever  Tentrcpôt  de  tabac  de  Saint* 
Malo,  vacant  par  décès  du  titulaire.  Ils  sont 
là,  par  rentrée  ordinaire»  trois  ou  quatre 
cents  personnes  à  attendre  It'ur  tour,  cha- 
cun son  numéi*o...  Ou  appelle  n°  i^  n®  3  9 

ï.  Vaudevilles.   4*  '7 


194  LE  SOLLICITEUR. 

n°  3...  ;  moi  qui  aï  justement  le  399...  elde* 
que  je  voulais  me  faufiler  ou  aiitîcrpcrsurfe 
voifHu,  ils  étaient  toas  à  crier  :  à  la  queael... 
à  la  queue  h*,  et  puis  les  bourrades,  r*lan, 
v'ian;  encore  si  ça  avait  dû  me  faire  avancer, 
je  ne  dis  pas...  parce  que  dès  qii'oo   nvancef 
le  reste  n'est  rien.  Mais  quaud   j*;m   vu  q« 
c'était  en  pure  perte ^  je  les  l.ii^se  la...  jefiù! 
le  tour,  et  j'entre  par  la  grande  porte  OTri 
Azor,  qui  ne  me  quitJe  pas,  et  qui  CQOUii 
tous  les  ministres  comme  mui-même — Moi 
sieur!  Monsieur!  les  chiens  n'cptrent  pjs.- 
Je  ne  prends  pas  ça  pour  moi...  je  coulîoe 
mon  chemin.  — Monsieur!  yolve  chien... - 
Je  ne  lais  pas  semblant  de  le  connaître,  je  n 
toujours  comme  s'il  n'était  pas  de  ma  coii' 
pagnie...Et  peudaïUque  le&uisse,  en  bais^^ani 
sa. hallebarde,  poursuit  ce  pauvre  Âzor  dankj 
la  cour  5  je  me  glisse  impcrcepliliklenient  der-i 
rière  lui.  m  et  me  voilà...  et  il  y  a  des  musarJr 
qui   vous  diseut  :  Mais  comment  donc  faites- 1 
V011S9  on  vous  trouve  partout...  L*audace?...  ' 
je  ne  conaa»  que  l'audace 9  moi...  Audacieux 
«i  fluet)  et  Tau  a^'rive  à  tout. 


sc'KXE  vr.  195 

SCÈNE  VI. 

■  LESPÈraNCË,   ZURICH,  en  suUse , 
E  avec  I<i  baudrier  et  la  Itallebairde. 


ZVRMH. 

Ou  il  être  donc  c*te  petite  Moosir?*.» 
Ahl  diable!... 

ZtTKlCfi. 

Comment  havre -fous  fait   pour  entrir» 
toi?... 

LESPERANCE. 

Pardi!...  par  la  porte. 

ztirtcB.  ' 

Tairteff!  toi  n'entiir  pas. 

LBSPKRAHCE. 

Vous  voyei  bien  que  si ,  pursqupe  me  iroîlà. 

Où  être  la  pelile  feuilleton  >  le  garle  de  ba- 
bicr  pour  la  passage? 

LESPËftANCE. 

Vous  Toulei  dire  ce  papier  par  le  moyen 
dooiiei  on  passe  sans  difficulté?  Vous  voyez, 
h\f[)  qu'il  uie  serait  inutile...  ainsi  n'en  par- 
lons plus. 


i$6  LE  SOLLICITEUR. 

ZURICB. 

J'entendi're  boîot^  et  être  ing^orruplîhle. 

(Tcndaut  la  uutiu.) 
LBSPéBAKCB* 

Mais  encore... 

z  n  R  )  c  H  9  tcntfaiit  toujours  la  main. 

A   moins  de  afoir  aes  molifs  brébondé* 

rans. 

LESPÉEARCE. 

Mais  quand  je  vous  dis  en  bon  français... 

ZDAIGH. 

3e  enlendire  point  le  français. 
LBSPfiRAtrCE,  à  part. 

Va  moi ,  ail  contraire  ,  j'entends  fort  bien  le 
suisse...    J'eiilends  bien  ce  qu'il   veut   dire 
avec  ses  motifs  prépondérans  ;   je   le  com- 
prends mieux  que  lui...  mais  si  une  fois  on 
les  habituait  à  cela,  on  n'en  finirait  pas... 
JViime  mieux  prendre  le  plus  long,  c'est  plus 
co-urt. 

AIR  :  de  Gilles  en  demi; 
Allons ,  puisqu'il  faut  que  je  sorte , 
Sollicitt^ur  intelligent , 
Gagnons  tout  doucement  la  porie , 
Disparaissons  pour  un  instant. 

ZUilICH. 

Allons,  falloir  que  Monsir^orte... 
Je  souis  un  souisse  intelligent. 
Allons,  vite,  gagnez  la  porte» 
£t  disparaissez  à  Tinstaot. 


S5 

'     lA 


n 


SCÈNE  VIL  197 

LESPERANCB. 

Le  hasard  me  sera  propice , 
Et  je  n^ai  nul  rlésir,  vraiment , 
D^aller  me  faire  avec  un  suisse 
Une  querelle  cP Allemand. 

m    t  LESPEAANCE. 

Allons ,  puisqu^il ,  etc. 

ZURICH. 

Alloiis  falloir  que ,  etc. 

(  Lespërance  sort.) 

SCÈNE  VII. 

ZURICH. 

m  * 

Il  être  ponne,  c'te  Monsir...  te  fouloir  at** 
traber  inoi ,  qui  hafre  été  autrefois  le  loustic 
de  la  récfaiincDt,  et  qui  être  toujours  crante-* 
ment  fine  pour  le  malice.  Ce  être  pien  crân« 
tcment  tommage  que  j*hafre  la  fue  un  beu 
passe,  ce  être  gabable  bour  embêcher  moi  de  ' 
faite  mon  jemin..,  n'imborte.  Qui  fa  là? 


•7 


I9S  LESOLLÏCITEUB. 

SCÈKE  VI  II. 

ZURICH,  LESPËRANCE.  fl  atm«  ri- 
,  \eintnt  la  porte  ,  et  liin'<"rsc  te  tNcâCre  d*ua  air  lesCe 
et  (dégagé ;  îl  a  sur  les  }e:ix  des  luo'tfos  verfes;  3 
t'st  .<;an5  chapt  au  it  rbul.it  ouvert  ;  il  a  une  plime 
dans  la  bouthe,  des  |)a{>iers  sous  le  bn»,  et  ira 
rouleau  à  la  main.  11  se  dirige  vers  la  porte  du  bu- 
reau. 

ZORICH. 

Ocifalâ? 

LBSPÉRANGEy  parlant  avec  b  plume  entre  les 

dents. 

Je  suis  de.  la  maison  ,  je  suis  de  la  maîsco. 

ZURICH. 

C'est  chu  sic,  ce  être  yn  employé;  je  re- 
tourne à  mon  boste. 

(Ilsort.) 

SCÈNE  IX. 

LESPÉRANCE. 

C'est  encore  moi.  Je  suis  s(\r  qu^à  ma 

i)lace  un  solliciteur  ordinaire  9  un  paiirrcdia- 
ile  comme  on  en  Toit  tant  se  serait  tenu 
pour  battu.  {Prenant  son  chapeau^  qui  est  at- 
taché sous  la  basque  de  son  habit.  )  Nais  aussi 
il  l'aut  savoir  solliciter.  {Atliculant.  )  11  tuut 


SCÈWEX.  IQ9 

savoir  solliciter...  c'est  un  art  comme  un  au- 
tr«9  et  un  art  qui  a  seâ  principes;  pour  y  ex- 
celler y  il  faut  avoir  de  certaines  qualités  per- 
sonnelles; ça  ne  se  donne  pas...  Par  exem- 
ple, une  jambe  taillée  pour  la  course,  voilà 
une   Jambe  '\,  succès...  Mais  me  roîlî\  enfin 
dans  le  champ  des  Grecs  ;  il  faut  d'abord  son-» 
ger  ù  r&ttaque.  J'ai  là  ma  demi -douzaine  de 
pétitions;  jamais  moins,  quelquefois  plus, 
parce  qu*on  ne  sait  pas  ce  qui  peut  arriver... 
Si  j'essayais...  Justement,  voici  le  garçon  de 
bureau  avec  lequel  j'ai  lait  connaissance  en 
parlant  de  lu  pluie  et  de  la  politique: 

SCÈNE  X. 

LESPÉRANCE,  G  JS  O  &  G  £  S  >  sortant  da 

burvatL. 

LESPÉRAlfCB. 

Si  )>  pouvais  me  le  .gagner  par  quelques 
familiarités.  / 

(Voyant  que  Georges  ^irrud  du  tabac,  il  s'avance  tht- 
l'ière  lui  et  prend  une  prise  daos  sa  Ubatière  ) 

GEORGES^  se  retournant* 

Eh!  c'est  M.  Lespérance. 

LESPëR  ANCC. 

.  Woi-mêine,  mon  cher  Georges.  (  Leregar^ 
dant.)  Hem  I  quelle  santé  ils  ont  dans  ces  bu- 
nsavx;  se  porte-t>on  comme  ça  \ 


y  aoo  LE  SOLLICITEUR. 

G  G  O  a  G  E  s. 

.    Parbleu!  je  parlais  de  vous  tout  à  Theure 
à  uue  dauie. 

LBSPÉRAIfCB. 

Voyez- vous! ce  brave  Georges...  Je  te  dirai 
quelque  chose  tout  ù  l'heure;  pour  le  mo- 
ment, j'ai  une  affaire  indispensable  qui  me 
forcé  à  entrer  là-dedans. 

GEORGES. 

Non ,  ça  ne  se  peut  pas. 

LESPEDlAITGB. 

Comment!  tu  crois  qu'il  n'est  pas  possî* 
ble?... 

f  GCOÈGES. 

Non...  à  moins  qu'un  de  ces  Messieurs  ne 
vous  fasse  entrer;  moi,  je  ne  puis  prendre 
sur  moi...  [Lespérance  regarde  toujours  /« 
porte  sans  écouler  Gorges,  )  Pour  en  revenir 
ù  celte  dame  9  elle  voulait  vous  faire  avoir 
l'entrepôt  de  tabac  de  Saint-Malo. 

LESPÉRANCE)  vivement. 

Hein  t.. .  qu'est-ce  que  c'est?...  de  SaÎDt* 
Malo...  celui  que  je  sollicite. 

GEORGES. 

Et  même  elle  vous  offre  sa  main. 

{.ESPÉRANCE. 

Ah  !  bien  y  par  exemple  y  c'est  diins  cet  mo- 


SCÈNE  X.  aot 

mens -là  qu'on  apprécie  ytv^ment  l'orvantage 
à.'ôlrti  célibataire. 

GEOBGES. 

Si  VOUS  consentez  à  Tépouser,  tous  n^ayes 
qu'à  pnrlei'r 

LBSPéEÀNCE. 

Il  D*j  a  pas  de  doute  ^  et  dès  qu'elle  a  Ten* 
trepôt... 

GEOBGES. 

Je  ne  dis  pas  cela...  Je  dis  qu'elle  est  sCUre 
de  l'avoir  dès  qu'elle  vous  aura. 

LESPÉBANCE. 

Non,  non,  nous  ne  nous  entendons  plus. 

GEOBGES.  ' 

Songez  donc  qu'il   lui   faudrait  Un  tnari 
pour  avoir  Tenlrepôt. 

LESPCBANGE. 

Au  contraire ,  îl  faut  qu'elle  ait  l'entrepôt 
pour  avoir  le  mari.  Diable!  ne  confondons 
pas,  rien  d'obtenu,  rien  de  fait...  Dis-lui  qu'elle 
sollicite  toujours...  hi  elle  est  nommée,  on 
verra...  mais  en  attendant,  je  vais  tâcher  de... 
£h!  mais  voilà  justement  quelqu'un  qui  sort; 
c'est  aujourd  hui  jour  de  paiement,,  et  j'ai 
remarqué  que  ces  jours-là  on  est  mieux  dis- 
posé. (  Montrant  Armand  qui  arrive*  )  i\  fait 
8UDS  doute  partie  des  bureaux  ? 


101  LE  SOLLICITEUR. 

G  «  O  R  C  E  s. 

Partie...  jusqu'à  uo  certain  point.  ' 

Ah!  je  devrne....  En  effet,  je  ne  liiî  Iroo- 
Ynh  pas  c^tte  g'nlé...-au  fait,  il  n'est  pas  payé 
puiir  ça,  c'est  égaL 

SCÈNE  XI. 

GEORGES,LESPÉRANCE,ARMAND, 
auqitel  L^s^ïéfaâce'  iUit  pluiieiirs  salutations. 

A  B  M  A  5  D ,  sans  reraarc)uer  Lcs}.^raiice. 

Georges,  est-ce  que  madame  de  Yersac  n'a 
point  encore  reparu? 

6B0BGBS. 

Non,  Monsieur. 

A  R  M  A  li  l>. 

Allons,  je  vais  profiter  4e  cek  pour  déîcMi- 
ncr;  car  j'ai  tant  d'uuvr.tgo  qu'il  m'a  encore 
été  inip(#Sdîl)fe.  , 

LESPKRAVCE,  à  part. 

Ou'enlends-je?...  il  n'a  pas  déjeuné  J  c'est 
I  n  houiiiie  à  uh)Î.  Il  n  y  a  que  tleux  moyens; 
il  faut  prendre  les  gens  p»»'  les  senliuieuson 
par  la  fi.iuj;  il  ne  serait  pas  régulier  de  com- 
mencer par  la  faim,  débuluus  par  It-s  senti- 
meus.  (//  lotisse  pour  se  faire  remarquer,  et 
recommence  ses  révérences.)  Monsieur... 


SCÈN£  XL  Qo3 

ARM  AND 9  à  paît. 

Quel  est  cet  orig;mal?..«  Q^e  rpe  veul-il 
çivcc  s^s  saiuls? 

^iESPéfiàves,  saluant  toujours. 

Tous  devinez  sans  doute  ce  qui  m'amène; 
s*î1  VUU3  resluit  la  plus  légère  incertitude... 

(Il  «alue  (le  o^iiyeau.) 

^BUAND. 

Vous  saluez  avec  une  jg^râce,  uDe  aisance... 

LESPËBANCB.  \ 

Ci'est  la  g;raacU  habitude...  il  y  a  dix  ans 
(jue  j'exerce. 

A  R  M  A  fiî  p. 

Je  deviae  que  vous  sollicitez. 

rEJîPER  ANGE. 

Vous  l'avez  dit...  et  je  compte  sur  vous,  ai- 
mable jeune  homme...  il  faut  que  voujs  me 
dormiez  un  cou|>  de  main...  ou  un  coup  d'é- 
paule... Préférez-vous  me  donner  un  coup 
vd'épciule  ?....   ca   m'est   parfaitement   égal, 
pourvu  que  vous  me  poussiez. 

AU  M  A  K  B. 

Songez  donc  •que  je  ne  suis  rien  dansVad- 
ixiiuiaflra'tiou. 

LESPÉRANGE. 

C'est  ce  qui  vous  trompe  :' vous  ne  rece^ 
vezpuiat  de  salaire^  c'est  fort  bieu  ;  vous  ne 


ai4  LE  SOLLICITEUR, 

retirez  aucun  fniît  de  voire  labeur  ^  cV$ti 
merveille  ;  tous  travaillez  gratis  pro  Deff  i 
c^est  encore  mieux;  mais  on  tous  paie  ea 
égard» y  en  bienveillance,  et^  sous  ce  rap- 
port,  vous  jouissez  d*un  fort  joli  Iraitemeot. 
{À  part,)  Voilà  pour  les  seutimeos^*  nous 
Verrons  après.  {HauL)  Parlez-moi  des  égards, 
de  la  bienveillance  9  cela  tient  lieu  de  tout 

ARM  Ail  1>. 

Les  égards^  la  bienveillance,  tout  cela  ne 
suffit  pas. 

LESPB&AlfCE. 

C'est  ce  que  je  dis.  (  ^  part.  )  Oh  !  alors  il 
faut  lâcher  le  déjeuner.  (  Haut.  )  Quand  je 
dis  que  ça  tient  lieu  de  tout,  c'est  une  façon 
de  parler.  Je  conçois ,  par  exemple ,  qu'on 
n'engraisse  pas  avec  de  l'estime;  moi^  qui 
vous  parle  ,  je  jouis  d'une  considération  ti*è.<- 
distinguée,  et  cependant...  et  cependant  si  je 
n'avais  pas  déjeuné...  Avez-vous  déjeuné  ? 

AEKAHD,  oflfensé. 

Monsieur  !... 

LESPBRAIIGE9  affirmatiTemrnt. 

Vous  n'avez  pas  déjeuné,  vous  chercheriez 
en  vain  à  le  dissimuler.  Yous  n'avez  pas  dé- 
jeuné. 

ABBIAHD*  sonriaol. 
Monsieur,  je  ne  prends  jamais  rico. 


^SCÈNE  XI.  2o5 

LESPÉRAVGE. 

Je  sais  cela  à  fxierveille.  Vousautres,  vous 
ne  prenez  jamais  rien  >  mais  tous  acceptei 
quelque  chose. 

ARMAND. 

Mopsietir... 

LESPÉKARCB. 

Une  bavaroise  au  lait  ? 

ARMAND. 

Vous  vous  moquez. 

LCSPÉRAlfCV. 

I 

Je  ?oiâ  que  vous  êtes  pour  la  côtelette.  F.h 
bien!  ra  pour  la  côlelette  et  le  carafon.  {À 
poi't.  )  Ma  foi ,  lâchons  la  côtelette.  ^ 

A  R  M  A  N  D  9  avec  dignité. 

C^5t  assez  plaisanter. 

AIR  :  Fils  imprudent ,  <<c. 

» 

En  ces  lieux  je  n'ai  point  d*eoipire  ; 

Si  jamab  je  dois  en  avoir , 

En  vaio'on  voudrait  me  séduire  : 

Je  ferai  toujours  mon  devoir. 
Je  suis  Français  «  et  je  fus  militaire , 
L'honneur)  monsieur,  jamais  ne  se  paya. 

Telle  est  ma  loi. 

(nnvt.) 

L^ESPÉRANCE, 

Ce  garçon-là 
Sera  toujours  surnuméraire. 
I.  YaudeyiUet.   4«  ^^ 


ao3  It  SOLLfciTEUfL 

Â!]<ins,  c'esr  jouer  de  inalhi-nr...  Tïiub^r 
Mir  un  :» u rn II iBC l'aire  qui  uc  déjeune  pa>!... 
Mniâ  cViSt  égal ,  il  faudra  biec...  (Quelle  est 
i;€(le  j€U!ie  dauie  ? 

SCÈNE  XÏI. 

LESPÉRANCE,  M«  DE  YERSAC. 

LESPÉ.R45CK,  à  part. 

Je  suis  bien  sûr  qifune  figure  aomme  celle* 
là  ne  sera  pas  refusée...  i>i-  je  pouTais  oi'ac-; 
crocher ù  elle!  (  Haut.)  0?erais-je  m'inluruicr 
de  ce  que  dcuianJe  IViadanie  ? 

,|.ne    PB   VJ6KSACU 

Je  cherche  quel^iruo  qui  puisse  m^aQooa- 
cer. 

teSFÊBANCfi. 

Je  Tois  que  Madame  a  uo  iaissez-passer? 

K"*   DE    VEASAG. 

Oui  9  Monsieur. 

^ESPÉRANCE. 

Si  j*osais  lui  fAÊTrir  moa  bra»;  uoe  f^pQDme 
seule  se  trouve  souvent  embarrassée^..  Goiii' 
ment  se  reconnaître  dskn»  ci*a  corcidors ,  dans 
ces  escaliiu's  ?  tandis  qn*aTec'un  cavalier... 

M'"*   1)B   TER  SAC. 

Je  vouii  remercie^  je  ne  TCuaLpoIal  abuser... 


s  C  1.  N  K  X  1 1.  aoy 

LEîfPÉ  RAKCE. 

Çîi.iiî^  me  gêne  paî»  du  loul .  an  contraire. 
S^iJgil-il  d'Hiie  place  ,  une  rédl.uii'itîoiu  une 
|»ôlition  !...  Si  je  pouvais  être  utile  à  Madame; 
î'udt!  dire  que  je  suis  assez  connu... 

M""',  D  B  V  E  R  s  A  c,  à  part. 

En   vérité^  voiià  un  Monsieur  bien  obli- 
peiiitt.  [Haut  )  C'est  une  péti(k)n  que  je  dois 
donner  A  Son  Excellence,  rn^iis  je  dois   lui    ^ 
être  présentée  par  un  chef  de  division...  etje 
ne  sais  pus  au  juste  où  est  son  bureau. 

LESFÉBAIHGC. 

Toiilrz-vons  me  permettre  de  voir  son 
nom  ?  (  Prenant  la  pétition.  )  Oui ,  M.  de 
Siinl-Erneît,  r/esl  bien  là  son  bureau.  {^Gar- 
dant fa  pétition  et  offrant  son  bras  à  inudame 
dft  Versac»)  Ei  quand,  vous  voudrez,  nous 
pourrons  enlrer. 

Iki"*    DE   VEKSAC. 

Maissi  VOUS  voulez  seulement  m'indiqucr... 

LESPén  ANCE. 

Je  liens  à  vous  conduire  n)oî-mêrnè. 


fti""'    DE  VER  SAC. 


Non,  déeidéincnt,  je  ne  souffrirai  pas...  Je 
vo'.is  rends  mille  grâces. 

^  LESPÉRANG8. 

Mille.,.  c*e$t  beaucoup,  l^ais  quand  qd  en 


ao8  LE  SOLLICITEUR. 

possède  autant  que  tous, -on  peut-*.  5ans  se 
gOiier  f  en  accorder  une  quantité  plus  ou 
moins  grande.*»,  ce  qui  fait  que  je  vous  en 
demanderai  une...  Vous  refusez  ma  protec- 
tion ,  eh  bien  !  moi ,  je  né  suis  pas  fier^  je 
vous  denrtande  la  vôtre. 

m"^  de  TERSAC9  à  part. 

Voilà  qui  est  .singulier!  (  fToa/.  )  Cei-taîne- 
Oit^nt  9  Monsieur  ,  je  ntf  deni^^nderaL**  pas 
mieux...  mais,  ne  vous  counaissaut  pas  ,  il 
est  indispensable... 

LBSPéRANGE. 

C'est  à-dîrc  indispensable...  si  Ton  veut... 
Il  y  a  beaucoup  de  gt:ns  qui  sollicitent  ,  sans 
savoir  prcciséinent  ce  qu'ils  demandent ,  et 
même  sans  savoir  au  juste  pour  quu 

SCÈNE  XIII* 

LES    PRÉCÉDEVSy    ARMAND. 
ARMAI!  D. 

Fb  quoi  !  Madame  9  vous  êtes  là  ?  moi  qui, 
depuis  une  heure ,  vous  attendais  pour  vous 
conduire. 

LESPKRAHCE  ,  à  part. 

Maudit  surnuméraire  !  encore  une  tenta- 
tivi{  inutile.  Je  n'arriverai  point  au  ministre... 
J!)b!  si,  vraiment.   Quelle  idée!...   Qu'est* 


Scène  xiii.  209 

l^ie    je  risque?...   Il  aura  toujours  de  ma 
prose ,  et  présentée  parnine  jolie  main..w  Al- 
lons ^  en  avant:  le  bureau  des  pétitions. 
^  Il  fouille  rapidement  dans  sa  poche  de  côté  et  tire  une 

pétitina  qu'il  présente  à  Madame  dé  Versac  à  U 

place  de  la  sienne.  ) 

▲IB  :  Quand  0n  soft  aùaer  et  plaire. 
Puîsriu'an  autre  id  tous  donne 
Le  bras  que  Ton  vous  offrait ,  - 
A  lui  je  vous  abandonne, 
Et  je  vous  rends  ce  pla^t. 

MADAME  Dfi  VSilSAC. 

Grojez  qu'au  fond  de  mon  ame... 

Ah  !  je  ne  perds  pas  Pespoir.  . 

Peut-être  allez -vous ,  Madame , 
Me  servir  sans  le  vouloir. 

Armand. 
Souffrez  qu'ici  je  vous  donne  ' 

Le  bras  que  Ton  vous  offrait^ 
A  l'espoir  je  m'abandonne , 
m  1   J'attends  tout  de  ce  placet. 

Sa  }  MADAME  DE  TEESAC. 

«  \   Taccepte ,  puisqu'on  l'ordonne  ^ 
H  ]  L'offre  qu'ici  l'on  me  fait  ; 

A  l'espoir  je  m'abandonne  : 

J'attends  tout  de  ce' placet. 

L'ESPiRANGE. 

Puisqu'un  autre  ici  vous  donne ,  etc. 
(  Madiin«  d«  Yertaa  et  Armaïul  fortcnt.) 

18. 


aïo  LESOLLIClTEUFt, 

SCÈiN'E  XIV. 

LKSFÉaANCE.  . 

< 

RÉCApiTtJtOjïs  un  peu...  Nous  âîsons  donr, 
une  entre  les  mains  de  celte  dftiTie;  âeui  ou 
trois  que  j'ai  glissée»  dans  la  loge  du  portier, 
sous  l'enveloppe  du  Moniteur  ,  trois  ou  qm- 
tre  qui  uie  restent  ;  ti  f«)Ut  croire  x^uet  ètiv  h 
quantité  il  y  en  aurâ^Ut^lqti'uUe  qui  arrirera 
jusqu'au  ministre...  Où  est  l«  ftiâlUe  faire  ses 
demandes  par  duplicata  ?...  Quan  J  on  derrait 
ayoir  deux  ou   liuis  places   au    lien    d'une', 
voilà  tout  ce  qu'on. risque.  Voyons  donc  la 
pétition  de  cette  dame.  (  //  UL  )  Uiabhi  !  une 
place  d'inspecteur!  rieo  que  cela...  Le  uiî- 
nisire  ne  peut  qu'y  gagner^je  ne  lui  demande 
qu'un  entrepôt...  Pourtant,  si  je  pouvais  par- 
venir jusqu'à  lui,  et  lui  parler.  moi-UK*mc ,  çà 
vaudrait  encore  mi(3ux.  (^U  ploie  la  pétition  et 
la  remet  dans  su  poche  de  calé.  )  Allons,  Le^^ 
pérance ,  un  dernier  eûbrt...  Il  faut  l'i^usïir 
ou  perdre  ton  nom. 

CRIARD  ET,  éur  TescaliieF. 

le  déjeuner  de  M.  le  âecfétaîre-GènéralJ  ' 

QtOKÇZS  f  allant  vers  la  porte  vitrée. 

M.  Sorbet!  le  déjeuner  d^  M.  le  Secré-' 
taire-&énéra|. 


'    .  SCÈNE  XV,  911 

L 1  9  c  1 S  S  B  ,  en  dehors. 
l.e  déoheuiier  de  la  Secrélaûe-Cliénéral, 

LBdP.fiR  Aires. 

Voii  Dieu  !  quel  briiil  !...  toî!i\  tout  rbôtel 
sn  ruiiK'tir...  Il  paraît  que  c'est  uoe  aiï'aire 
iiuportaiite  9  et  qu'elle  est  de  celles  qui  d^-» 
niaDdetil  à  être  eipcdiées  promptemeat. 

SCÈNE  xy. 

lESPÉRANCE,  M.  SORBET,  une  serviette 
sous  le  bras ,  et  un  gr^iiid  plateau  chargé  d'un  dé-» 
jeûner. 

SORBET,  entrant. 

Mb  ▼qiii^i.ine  voilà!....  A  peine  anjouiv 
d'Viui   a-t-on    le  tems  de  se  reconiiaîlre.  A 
•  cette  heure-ci  tout  le  bureau  est  au  café. 

LESPGRANCE. 

Djal)le  î  quelle  gaucherie  h  moi  de  n'avoir 
pas  déjeuné  chez  lui  ;  il  peut  m'être  fort 
utile...  C'est  décidé;  dorénavant  j'y  fais  tous 
mes  i^epas.  Il  ne  résistera  pas  à  une  consom- 
iTialion  un  neu  active.  Dites-moi,  M.  Sorbet, 
\\  paraît  qtnl  y  a  de  rarppélîl  parnai  les  em- 
ployés? 

s  0  B  B  E  T. 

Dieu  merci  !  ça  n'est  pas  la  faim  qui  leur 
mapque,  et  ftice  n'itaieuties  crédits,  ça  îriiit 


aia  LES01.LICITEUR. 

bitfn  :c*cst-à-dtre  Messieul*:»  les  emplojêfi.OB 
s'en  retire  totijours,  parce  que  les  jour»  de 

ÎMieiHent,  aujourd'hui  par  exemple  «  od  «st 
à  des  premiers.  {Regardant  par  la  portée' 
tréê,  )  Ah  !  mon  Dieu  ! 

LfiSPÉRAHCB. 

Qu'est-ce  que  c*est  donc? 

SORBET. 

Vous  ne  voyez  pas  y   dans    la    cour,  oi 

Monsieur?.. 

AIR  :  de  là  partie  carrée 

e 

C'est  l'employé  que ,  tonte  la  semaine , 
Dans  son  logis ,  j'ai-clierdié  vainement , 

Pour  me  solder  d^une  quinzaine 
Il  m*a  remis  au  jour  de  son  paiement. 

L'£SPiB\NCR. 

Je  parlrais  qu'il  vous  redoute  ; 
A  grands  pas  je  le  vois  marcher... 
Qu'il  est  léger! 

SORBET. 

Ab  !  plus  de  ifeute , 
C'est  qu'il  vient  de  (ouclier. 

Et  s'il  pnsse  la  porte ,  }e  suis  pcrAi...  Parce 
que  Yons  pensez  bien  que  le  marchand  de  fin 
et  Le  propriétaire... 

LBSPBRAlfCE. 

£h  bien!   courez-j  donc...  courex  thc. 


SCÈNE  XVII.  ai3 

ILtAÎ  prenant  ie  plateau  et  la  serviette.  )  Lais- 
&x— moi  cela. 

SORBET. 

Je  reviens  dans  Tioslant. 

(Il  «ort) 

SCÈNE  XVI. 

LiESPÉRANCE ,  trnaDt  le  plaleaa  et  regardant  par 

la  porte  viiréc. 

Ob!  il  rattrapera...  îl  rattrapera.  [Regar^ 
dant  le  plateau,  )  £h  !  mais...  nia  foi  y  dans  la 
situation  oii  je  suis  »  il  n*y  a  qu'un  parti  dé- 
termine qui  puisse  me  sauver... (  Regardant 
autour  de  lui,  )  Personne^..    Il  faudra  bien 
qu*on  laisse  passer  le  déjeuner  de  M.  le  Se- 
crétaire-Général. (  //  s^ attache  autour  du  corps 
la  serviette  de  Sorbet ,  et  prend  dans  ses  mains 
leplateuu.)  Je  Tai  déjà  dit  :  audacieux  et  fluet» 
et  Ton  arrive  à  tout. 

(  Il  monte  par  IVscalicr  du  foncT,*  Crîardet  se  range 
()uur  le  laiiidt'r  passer  \  il  disparaît.  ) 

SCÈNE  XVU. 

ARMAND,  W  DE  VERSAC,  tortantilu 

bureau  à  ^aaciie. 

♦ 

81*°*   DB   VVnSAC» 

CoKCEV£s- voos  notre  malbeur!...  le  mi- 


5i4  LE  SOLLICITEUR.  | 

nf<tre  qui  ne  peut  pns  nous  receToîr  an]oar- 
dMiUÎ!  Il  n'a  acconlétl'andicnc^es  parlfcnli^vt^ 
qu*â  deux  ou  trois  pcr>ouoes  doot  fc  vki! 
de  Toir  les  noms  inscrits —  Vn  général  9  oik 
dul-heKile  et  110  SI.  de  laLHibardièj-e  y  que  je  k 
VQiin'dii  point. 

Notre  chef  de  dirbioo  est  désolé  de  et 

contre -tcnis. 

m"*  de  tersac. 

Et  rnpi  1  \en  suis  d*une  bumeur...  Mallicur 
AUX  perso  DO  es  qui  me  feront  la  cour  aujour- 

tt'bui! 

A  ft  V  A  H  1>. 

.le  vois  qu'il  ne  faudrait  pas  tous  derasa* 
der  d*audience  parliculière. 

Non,  certîiioement...  Le  ministre  a  des 
caprice»,  tout  lemonde  s'en  ressentira.  Com- 
ment!.,, pas  d'audience  avant  huit  jours! 

A  K  II  A  IV  D. 

Il  faut  espérer  qu'une  autre  fois...  ♦ 

tt™«  DE   VERSA c. 

Et  si  un  autre  vous  prévient...  s*il  oblîent 
lu  plare  malgré  vos  droits...  Vons  vojei  bien 
que  si  l'on  accuï*c  les  grands  (l'itijuslice ,  OQ 
n'a  pas  toujours  tort. 


SCÈNE  XVlL    .  ^i5 

ARMAND. 

On  ne  peut  cependant  pas  répondre  à  tout 
le  iiiondie. 

U^   PM    VEHSAC» 

Si  Monsieur  !é..  et  si  jamais  je  suis  minis- 
t:re,  on  verra. 

C'est  différent.  Je  vous  trouve  déjà  un  nit 
ministériel  loul-à-fait  imposant;  et,  diins  le 
€;as  de  votre  nomination,  je  vous  prie  de  ne 
point  oublier  ma  pétition. 

M"^*    DE  VERSAC. 

La  voilà ,  celte  maudite  pétition  que  je  n'uî' 
pu  présenter...  mais  je  pense  maîntcnunt  à 
cet  original  qui  voulait  à  toute  l'orce  m'offrir 
son  bras...  Je  commence  à  le  plaindre,  depuis 
que  je  sais  combien  il  ebt  désa^réuble  de  res- 
ter ù  la  porte.  ' 

AEMA:«p. 

Lui?...    il  n'y  restera  pas;   il  ÛtiirQ  par 
entrer.».  Il  y  réussira  peut-être  plutôt  que 

YOilS# 


3i6  LE  SOLLICITEUR. 

SCÈNE  xyiii. 

LB»  FfeiciDESS,  LESPÉRANCE. 

(  Sur  la  ritouTnelIe  de  Tair ,  on  Toît  hcspérvaa  iai 
ceudre  ra|Mdement  l'escalier.  3 

LESP^BAHGB. 

AIR  :  Je  triomphe  !  ah  /  quel  bonheur! 

Ah  !  je  trionipbe  !  ah  l  quel  bonheur  ! 
je  suis  nommé ,  j'ai  Pealrepôt. 

Eh  bien  !  tous  ne  vouliez  pas  croire  i  moe 

crédit.  ' 

ARMAND. 

Comment  !  vous  auriez  vu  le  naioistre  f 

M"^   DE  YBkSAC* 

Malgré  la  consigne  ? 

LESP^èHANGB. 

r- 

Bah  !  la  consigne. . .  est-ce  qu'il  j  en  a  pour 
moi?...  Je^  ne  vous  dirai  pas  comment  j'ai 
tVîinchi  l'escalier...  me  voilà  dans  le  comdur. 

AIR  T  J^ai  vu  le  pâmasse  des  dames. 

Je  conçois  que  dans  cette  enceinte 
On  connaisse  mal  les  détourS  ; 
Bfoi^uéuie  dan^»  ce  labyrintlie 
J'ai  fa;it ,  je  crois ,  plus  de  cent  tours. 


SCÈNE  XVIII.  ai7 

Vainement  on  passe ,  on  rrpasse  ; 
•  L^ou  va,  Ton  vient  ;  pcd  s^en  fallait 
Qu'en  ces  ficux  je  ne  m'égarasse..*. 
J^avais  vraiaicnt  Pair  d'un  placet. 

J\'irrive  sur  la  pointe  du  pied  jusqu*à  Panti-» 

"cbaiiibre  du  ministre;  je  guette ,  j'observe... 

J'aperçois    une  vieille    face    de  solliciteur... 

.physionomie    féodale»  dont  les    bâillemens 

annonçaient  au  moins  deux  heures  d'attente. 

.Je  prête  Toreille...  il  grommelait  entre  ses 

dents  ;  «  Faire  ainsi  croquer  le  marmot   à 

.»  M.  de  la  Kibardière!  » 

M"*''  DE  VE&SA,G9  à  Armand* 

C'est  celui  dont  je  vous  parlais. 

LESPÉAAirCB. 

Il  avait  Tàir  de  méditer  sur  réternîlé...  à 
laquelle  un  solliciteur  doit  toujours  croire. 
Son  tour  vient  ;  les  deux  battans  s'ouvrent  j 
et  rhitissier  annonce,  d'une  voix  de  Stentor: 
M.  de  la  Ribardière  I  Notre  homme  cherche  à 
se  soulever  d'un  fauteuil  oii  il  avait,  pour 
ainsi  dire,  pris  racine...  Ëtiibarirassé  de  sa 
toux,  de  son  parapluie  a  canne,  et  surtout  de 
sonépèe...  une  faiblesse  le  fait  retomber  dans 
son  iîtutéuil.  Je  ne  perds  pas  un  instant,  et^ 
.  tandis  qu'il  s'efforce  de  se  sedreéser,  je  m'é- 
lance comme  une  flèche;  j'étais  dans  Je  ca- 
binet du  ministre,  et  j'avais  dé jii  fait  dc\iX 
'  ou  trois  révérences;  qu'il  n'étaif.pas  encore 
debout.  . 

ï*  XaudcviJUe».  4,  "       I9 


ai8  LE  SOLLICITEUR. 

V**   DX   TERSAC. 

J'aToue  que  je  ne  connaissais  pas  ceSH 
lu.iuière  d*escain<iter  une  audieac:e..«, 

Son  Excellence  témoig;ne  d'abord  qiielqiN 
fnrnrise...  je  tire  au  hasard  de  ma  poeheoiic 
de  mes  pî;ti(tons;  Sun  Excellence  daigne  h 
îire ,  en  disant  :  Ah  !  je  sais  ce  que  c*esl,».  Je 
h  croi»  bien ,  citait  peut-être  la  quatrîèim 
qu'il  recevait...  Je  connais  les  taiens  de  n 
jeune  homme,,.  Ce  ^eune  homme  !•••  Vôtre 
Excellence  €«t  bîeniKMme...  ci-Jevant  jeuoe 
hoijiiiie.  D'ailleurs 9  continua-t-jl,  c^est  um 
famille  de  bravss.  Je  ne  sais  pas  qui  a  pu  dire 
cela  à  Son  Excellence  !  le  fait  est  que  j'ai  eu 
un  frère  conscrits  Alors,  après  avoir  écrit 
quelques  mois  de  sa  inaiu,  le  oiinistre  a  remis 
la  pédtioQ  au  Secrétaire,  en  disaiH  :  Qmh 
brevet  soit  eapàdU  sur^le^champ^, 

M««  DX  -VERS A c. 

Comment  !...  il  est  possible! 

I.BSP£aA1ICB. 

Comme  faî  l'honneuT  de  tous  le  dire.  Ma 
pétition  est  au  &écrélariat-généra!  9  et  comme 
c'est  à  votre  bureau  qiie  ça  vient»  je  TW» 
priiTai  de  me  faire  déHvrcT  cela  prouiptc- 

meiit. 

^l«*    DE   VBRSAC. 

£li  bien!  qu'en  dites-vous  ? 


SCÈNE  XIX.  '    210 

AABlAK». 

Ma  foi  9  si  c'est  là  ce  qu-on  îippeiFe  Part 
d'obtenir  des  place»,  je  risque  bien  de  ae  ja» 
tuais  en  avoir. 

SCÈISE  XIX. 

IBS  rticiDENS,  H''^  DURAND. 

ÀbI  mon  cher  Georges!  félicitez -mpî. 
clOftCBS)  à  Lespérance. 

C*est  la  daine  dont  je  tous  ai  parlé  pour  ce 
mariage. 

Je  SUIS  certaine  d'aToîr  Tentrepéi  de  Siuint- 
Halo  9  j*ai  la  parole  fonnelle  du  chef. 

M™*  DB  yeirsie. 
Allons,  tout  le  monde  réussit,   excepié 

lîOOS. 

KESPéRAlfCB, 

Vous  avez  la  parole,  cVst  fort  bien  ;  fîi^i.t, 
moi,  )*aî  la  place,  et  YOtts sentez  ^'aiors... 

M""*   DURAVD. 

Ah!  mon  ))ien,  est-il  possible  ! 

LESPiRÀNCE. 

Et  cet  autre, l]uî  voulait  m'engager  à  tous 
épouser...  j'étais  joli  garçon. 


aao  LE  SOLLICITEUR. 

Aift  i  Ces  postulons  sont  d*une  malacbresse! 

Kon ,  eVn  est  fait ,  Don,  plus  de  mariage  9 

Je  suis  placé ,  je  suis  heureux , 

L'entrepôt  me  tombe  en  partage... 
J^obtieiis  enCu  Tobjct  de  tous  mes  yociul. 
Depuis  dix  ans  cpie ,  malgré  mon  astaoe  , 
Je  cours  toujours ,  je  commence  à  m*user... 
On  Pie  fkvait  uae  place ,  ne  ft^t-cc 
Que  pour  me  reposer. 

SCÈNE  XX. 

r 

I.BS  mécÉDiNS,  SORBET. 

SORBET. 

Il  m'a  toujours  donoé  un  d-compte,  maïs    ' 
ce  rrest  pas  sans  peine...  Où  est  donc  inoa 
déjeuner  ^ 

|.BSp£EASr.E. 

Mon  ami  9  je  sais  ce  que  tous  cherchez... 
C*est  M.  le  Sécrétuire*- Général  qui  s'en  oc- 
'cupc  dans  ce  motpeot, 

SORBET. 

Qu'est-ce  qui  sVst  donc  donné  la  peine  de 
le  porter  ? 

(^xxe.  ça  ne  rous embarrasse  pas.  (Tirant  /& 
serviette  de  sa  poche,  )  Tenez ,  voilà  toujours 
la  sorrielte;  c'est  trop  juste  y  elle  tous  appan 
tien(. 


SdÈNEXXI.  aai 

•  '    SCÈNE  XXI. 

w 

t 
» 

LBS  PRicÉDBiYS,  CRIARDBT. 

GR 1 A B  D E T 9  il  Annand. 

'  C*BST  un  ordre  que  le  inioistre  a  mis  au  bas 
de  cette  pétition. 

ARMAND. 

Et  qu'il  faut  expédier^  c'est  bon. 

LESPBBAVCE. 

'  Oui ,  je  ne  serais  pas  fâché  qu'on  m'ex- 
pédiât. 

C  R 1 A  R  D  E  T. 

Ah!   c'est  Monsieur?...  {Le  saluant,)  i^ 
vous  en  fais  mon  compliment. 

LESPBRARCB. 

Ce  que  c'est  que  le  vent  de  !a  Hïveur  !  Ça 
vous  courbe  les  uns  j  ça  vous  redresse  les 
autres...  Je  suis  persuadé  que  dans  ce  mo- 
ment-cf  je  gagne  au   moins    deux   bons 

pouces. 

M"*  DORAVD. 

LVntrepôt  de  Saint-Malo  donné  h  un  autre, 
après  ce  qu'on  m'a  promis  !.••  Ça  n'est  pas 
possible. 

-  LBSpéRARCB*     ^ 

Signé  du  ministre,  rien  que  pa.)  4  Ar-» 

19. 


22»  LE  SOLLICITEUR. 

maîia.  )  Donnez-luî-cn  lecture ,  |e   tous  « 

prie* 

▲  RMAlf  D. 

Voloatîcrs', 

^(  II  jette  les  yeux  sur  la  signature.  ) 

LlftPBRÂVGB. 

Non  ,  liset  à&%  le  comsienieémeiit  ;  je  ae 
suis  pas  fâché  qu'on  voie  couanent  je  rédige 
une  demande. 

âAVAHD,  Usant. 

«  A  Son  Excellence  9  etc.  Monseî^pneary 
^.  Jules  A.rm'iind  ,  ancîep  lieutenant  de  chas- 
■  senrs,  a  Thunneur  de  tous  exposer...  »  Que 
'?ois-je  ! 

iBSpiRAVCBy  rinterrompant. 

Q\f est-ce  qu'il  lit  donc  là?...  Ne  faites 
doue  pas  de  mauvaises  pliiisanteries...  Lises 
comme  il  y  a...  Benoît*- Félix  Lespérance... 

ABUAiri). 

IVIals  non  ,  c^est  bien  mon  nom  ,  Jules 
Anr.nnd;  et  plus  bas  9  de  la  main  du  ministre: 
Jccordé  ;  je  me  ferai  toujours  un  devoir  derin- 
dre  justice  au  mérite» 

iBSFÉftANGBy  rintevronpant. 

Pe  rendra  Justice  tui  méritû^..  CfieclîreaMBt 

ce  n*e$t  plus  ça. 

ARHA«»>  CÔDlnKmt. 

Et  je  connais  tekd  de  Af  •  Armand. 


SCÈNE  XXI.  223 

ïhî  mon  Dieu!  c'ejt  ma  pétition...  Qui 
doue  »*e9t  chargé  de  la  présenter? 

LESVBRAHGBy  ibttiUaiit  dans  tt  pocFie. 

Là ,  vous  verrez  que  c'est  luoi-tuêtne;  ]e 
ine  serai  trompé  d'exemplaire. 

m"*"  de  VEasAC)  regardant  dans  son  sac. 

Pourtant  elle  .n'est  point  sortie  de  mes 
rrMiins...  Que  ¥oiâ-j«!  BénoU»  Félix  Lespé- 
raoce ! 

EBSréHâlfCE. 

C'est  une  des  miennes ,  nous  iitions  chan- 
gé.   (  //  montre  d'autres  ffétitions,  )  Tenez, 
-voilà  les  pareilles.  Eh  bien  !  voilà  la  première 
place  qne  j'obtiens  de  ma  vie ,  et  c'est  pour 
un  autre!  (  A  madame  Durand.  )  Il  ne  m'ap- 
partient pas  y  Madame  ,  de  vanter  mon  cré- 
dit ;  mais  vous  voyez  ce  que  je  riens  de  faire 
pour  Monsieur  9  et  tous  sentez  qu'il  serait 
iacile,  en  nous  entendant  bien... 

Il  rt'est  plu5  tems ,  Monsieur ,  je  auis  sûre 
de  l'entrepôt  »  et  n'ai  plus  besoiu  de  mari. 

LESPRRilf  CE. 

C'est  différent  !  )'ai  fait  là  une  )olie  jour- 
née!... Jeune  homme ,  vous  pouYez  vous 
vauter  que  votre  place  m'a  donné  du  mal... 
C'est  ég^al ,  il  faudra  bien  que  je  unisse  par 
eu  aeerocher  une. 


ïa4  Lfe  SOLLICITEUR. 

Jl"**   DE    TES  SAC. 

Braîntenont  qae  j^î  Thoiineur  de  tabs 
connaître  ,  \t  penx  tous  j  aider  ,  et  si  foitf 
Toulez  9  TOUS  CD  enseigner  le  mojeo. 

LBSPBEAirGB. 

Comment ,  si  je  le  Teux  !.., 

M**   DE'  TEESÂC. 

AïK  '.du  pot  de  fleurs, 

Da  teiiis  qm  fait  se  montrer  moii»  prod^œj 
Aa  trayail  seul  consaorer  iisg  înstaiis  ; 

Ne  rien  espérer  de  Tintrigue , 

Attendre  font  de  it&  taicns; 
Loin  de  chercher  à  sqrprendre  iit!&  grâces  » 
Les  mériter  par  son  zélé  et  sa  loi  : 
Voilà  »  Monsieur ,  voilà ,  sons  un  bon  nn , 

Le  sei|l  9rt  d'obtenir  des  places. 

ESPÉBAirCE. 

J'en  essaierai.  (  Tirant  sa  montre  vlcement) 
Ah  !  mon  Dieu  !  trois  heures  et  demie  ;  cela 
ne  sera  pas  fermé  à  riotérieur.  J'ai  bien  Thoo- 
neur  de  tous  saluer. 

A  E  H  A  N  D  ^  tirant  aussi  sa  montre. 

Qu'est-ce  que  tous  dites  donc,  trois  heures 
et  demie  ?...  deux  heures  et  demie  ! 

|.KSPÉfiA5CE. 

Pans  ce  oas  je  re9te.*«  Aussi'-bien  j'ai  encore 


k 


^  SCÈNE  XXI.  aa5 

Cl  quelque  chose  à  soUiciler.  {Tirant  une 
ff'ilJio?i  de  sa  poche  et  s" adressant  au  public.  ) 
^ie»*sicnrs,  Beiiôît-Félix  Lespérance  aThon- 
keur  de  vous  exposer  que... 

DEUXIEME  COUPLET. 

Dans  ce  pays  Ton  rencontre  à  la  ronde 
Nombre  de  gens  qui  ne  sont  pas  placés  ; 

Pour  qu^icî  nous  ayon$  du  monde , 
Envoyez-nous  ceux  que  vous  connaissez. 
Et  s''ils  craignaient  encor  quelques  disgrâces , 

Messieurs ,  dites-leur  de  ma  part 
Qu^on  est  chez  nous ,  à  six  heures  un  quart , 

Toujours  sûr  d'obtenir  des  places. 


Fin  DU  SOLLlClTEUa. 


DEUX  MARIS, 

COMÉDIE  EN  UN  ACTE, 

m£lke  ds  vauoetilles, 

PAR  MM.  SCRIBE  ET  VARNER; 

Représentée  ,  pour  la  preitiière  fois  ,  sur  le  théàtr« 
-des  Vurîétés ,  le  3  février  i^xg. 


PERSONNAGES. 


M.  DE  SÉ5A!IGE. 

ÉLISK,  tafeamMu 

EIGALD  9  rcceTeor  de 

W-*  RIGAUD,  sa  femine  (*). 

GERTaLDE,  gourcroaolc  d'ÉIise. 

LABRIE^  domcâûque. 


LaSccne  se  passe  dans  vu  ciiâtcsi,aB  had  êeU 


(  "  )  Ce  rôle  ne  doit  point  être  joué  en  caricataïc  ;fl 
rit  de  remploi  des  preinicxs  rôles  oa  des  jeunes  9011- 
Urv'itcs. 


LES 

DEUX  MARIS, 

'  COMÉDIE. 

Le  th^^âtre  représente  un  salon  élégant  ;  une  porte  au 
fond ,  deux  portes  latérales  avec  deux  marches  j  a 
gauche  du  spectateur,  une  table. 


SCÈNE  PREMIÈRE. 

f 

ÉLISE,  GlilRTRUDE. 

ÉLISE. 

ÏIb  bied  !  Gertrude  ? 

GE&TBVDB. 

Je  Tons  disais  bien  y  Mademoiselle ,  qu'on 
n'avait  point  frappe  et  qu'il  n'y  avait  personne 
à  lu  porte  du  château. 

ÉLISE. 

A  la  bonne  heure  ,  je  me  serai  trompée. •• 
tant  Dileux...  car  le  cœur  me  battait  déjà... 
Soiià  pourtant,  je  crois,  ciuq heures  passées. 

GERTRUDE. 

Eh  [qui  voulez-vous  donc  qui  vienne  ?.#• 

T.  Vaudevilles.   4*  ^^ 


23o  LES  DEUX  MARIS. 

Depuis  un  au  que  toii^s  avez  perdu  maditiiM 
Yolre  tanle ,  et  que  tous  ui*avez  fait  Tefii 
habiter  avec  toi»  cet  ifumeose  château  ai 
fond  de  la  Touraine,  nous  n^aron»  pis  reça 
une  5eule  Tisite...  Dieu  merci ,  nous  n'atteo- 
dons  jamais  persouncy  et  je  voas  toîs  aujoa^ 
ë'hui  d'une  iaipalreDoe ,  d'une  Inquiétude! 


t*** 


Il  est  vrai.. .  Il  y  a  des  jours  où  Ton  ne  peut 
réudre  compte  de  ce  qu*on  éprouve. 

GBKTAVDE. 

Nous  y  ^oîlji^.  Je  tous  disais  bien ,  moi) 
que  cette  solitude  finirait  par  tous  ennuyer... 
que  le  cœur  vien^ait  à  parler...  Ah!...  si 
vous  saviez  ce  que  c'est  que  de  rester  demoi< 
selle  !...  Ce  n'e:»t  pas  parce  que  î*ui  oianqué 
trois  luuriagesy  mais  ccrtuinement... 

BLISB. 

Gertrude... 

€EKTBV]>E. 

Oui,  Mademoiselle,  le  dernier  étaît  ea 
qnatre-vingt^lix-bait...  je  venais  alors  d'en- 
trer ihiHS  votre  fo.Luille  en  qualité  de  gouver- 
nante ;  j'ai  Tudi^puis  tout  le  monde  s'élafalir, 
4ii  .}t  sais  restée  mademoiselle  Gcrlrude. 

EXtSE}  6ou}>irant 
Ah  !  ma  bonue  ! 


SCÈNE  I.  aSi 

QERT&UDB. 

Eh  bien  !  voyons,  delà  confiance...  allons , 
je  le  rois  9  TOUS  aimez. 

ÉLISE. 

Oli  !  mon  Dieu  !  ooo* 

CBBTAirSS. 

r 

Vous  êtesaimce. 

ELISE. 

.Ce  ne  serait  rien...  je  sais.,, 

GERTRVDE. 

-    £h  bien  !  quoi  ? 

ÉLISE. 

Je  suis  mariée^! 

G  B BIT* u  DE  9  stui^éfMte. 

Mariée  !  encore  une  î...  comment ,.  Made* 
moiselle,  avec  cet  air  si  doux,  si  tranquiflel 
qui  ^'en  serait  douté?...  onoi  qui  vous  prê- 
chais... et  quel  est  donc  ôet  époux  invi^àibie? 

ÉLISE. 

Je  ne  Te  connais  pas. 

GERTBCDE. 

On  n*a  jamais  rien  vu  de  pareil  l...£t  voiU 
\i  première  ibis  que  vous  m'en  parlez. 

ÉLISE. 

Quevenx-lu  ?..!  c'était  un  secret,  et  depuis 
le  tems  j'avais  presque  oublié   moi-même 


ft32  LES  DEUX  MARIS. 

que  JVîlais  cnchaîuée...  j'étais  encore  en  pen- 
sion, lorsque  des  inlérêts  da  famille  et  la  yo- 
Ion  lé  diî  ma  tante  me  firent  contracter  cet 
hymen;  nous  fûmes  séparés  en  sortant  de 
l'église;  je  vins  habiter  cette  solitude...  et 
jamais  l'idée  d'une  entreT^ie  ou  d!Qn  rappro- 
chement  ne  s'éiait  présentée  à  mon  esprit, 
lorsque  cette  lettre  est  venue  troubler  mon 
repos  et  renvetder  toutes  mes  idées...  lis  toi- 
même. 

GEETEUI>1S. 

J'en  suis  encore  tout  étonnée  !...  (Lisant.] 
«Paris,  ce  six  décembre...  Ma  chère   nniie, 
»  Adolphe  de  Sénange  vient  d'arriver  ici,..» 
Comment!   M.  de  Séuange<.  que  j'ai    vu  si 
jeune?  que  j'ai,  presque  élevé?...  c'était  un 
charmant  enfant!...  «   Vous  vous  îniagioei 
»  bien  que  huit  adnées  de  voyages  l'ont  un 
»  peu  changé;  mais  l'on  s'accorde  ù  lui  trou- 
»  ver  de  l'esprit ,  de  la  grace^  et  la  réputation 
»  d'un  fort  aimable  cavalier...  Je  ne  doute 
n  point  que  cet  hymen  qu'on  lui  a  lait  coo" 
»  tracter  si  jeune  ne  l'occupe  beaucoup...! 

ELISE. 

Et  moi ,  donc! 

AIB  :  du  yaudevUle  de  Haine  aux  Hommes, 

\    Las  !  par  un  bizarre  devoir, 
II  faut  que  je  mVfforce  a  plaire 
Aux  yt'ui  «Pun  époux ,  Saii^  savoir  • 

QiiL'i  est  son  cœiu*,  sou  caractcrt:. 


SCÈKE  I.  a33 

GERTiniDE. 

Ccst  terrible  qii^il  faille  exprés 
L*aiiner  avant  de  le  connailre, 

IBLISE. 

£h  !  mon  Dieu ,  ce  sera ,  peut-être , 
£ncor  ^\as  diiËciie  après. 

Et  quand  je  song;equ*aujOurd*huî  même  H 
peut  arriver  ! 

GERTRUDE. 

Mais  je  ne  vois  point  cela. 

Élise  9  lui  prenant  la  lettre. 

,  C'est  que  tu  ne  lis  pas...  {LUfint.  )  «  Il 
»  s'informe  de  sa  femme  à  tout,  le  monde  ; 
»  mais  y  vu  re!xtrême  solitude  oà  vous  vivez, 
n  peu  de  gens  peuvent  lui  répondre,  et  je  sais, 
»  par  un  de  ses  amis  intimes ,  qu'il  part  de- 
»  main  pour  se  rendre  auprès  de  vous...  11 
»  arrivera  à  votre  château  ùpied,  inooguito, 
»  comme  un  voya^^eur  égaré  qui  demande 
»  rhuspilalitc,  décidé ,  selon  les  événeuiens, 
»  à  se  faire  connaître  ,  ou  ù  deu>an(ler  la  dis- 
a  solution  d'un  hymen  qui  peul-élre  vous 
»  serait  à  charge  à  tous  les  deux.  »  £h  bien! 
qu  en  dis-tu  ? 

GERTRCDB. 

Je  dis  que  ce  mari-hi  vous  conviendra; 
qu'il  iaut  ciu'ii  vous  convienne. 

ao* 


234  LES  DELX  MxirilS. 

AXA  :  Ds  sommeiller  encor,  ma  chèrs. 

Malgré  le  teins ,  tnalgré  Pabsmcc  , 

A'ous  avez  fait ,  assurémeot 

L^in  en  Ai'ri({iie ,  l^autre  en  France  , 

IlOQ  ménage  jiisqu^à  présent. 

Ficspt'ctant  le  lien  suprême 

Par  qui  vans  fittes  attachés, 

Ne  vous  brouillez  pas  le  jour  même' 

Où  vous  vous  serez  rapprochés. 

RLISB. 

J'y  suis  décidée  ,  je  ne  demanderai  jamais 
la  rupture  de  ce  mariage;  mais,  s'il  l'exige,  je 
fctiraî  prête  à  y  sou6(U*iie...  Tu  rois  quefo  n'y 
mt^t^point  d'umoùr-propre^et  que  ma  vanîlé 
lîle^sée  n'entre  pour  rien  dans  la  crainte  de 
lui  déplaire...  Mais,  dis-moi*  comment  n'ex- 
ciier:iis>»je  pas  ses  dédains,  moi  qui  n'ai  jamais 
quitté  cette  solitude  ,  qiii   n'ai  ni  les  taleos 
ni  les  grnces  des  dames  die  lu  ville  ?...  J'ea 
srtis  Gertaiue,  il  va  me  trouver  gauche,  imi' 
pide...  je  m'en  apercevrai,  cela  me  trotiblera 
encore  plus^  et  je  ne  pourrai  pas  lui  dire  u« 
mot. 

CEàtRDI^Ê. 

AUoos  donc,  Mademoiselle, 


ÉLISE. 


l^coute  :  pour  les  premiers  momcnsseule» 
me{it|  ne  me  nomme  pas;  dis  que  madame 


SCËNE  II.  a35 

e     Scnange  est   absente  ,  et   désigne  -  moi 
iitnme  tine  de  ses  an)ies. 

Gertrcde. 

Tenez,  Mademoiselle,  tous  ces  détours... 
^cs  épreuTes-îà  portent  toujours  malheur... 
On  ne  saurait  ajrir  trop  franchement. ..  C'est 
vous ,  c'est  moi!  Ça  vous  convienl-ii  ?  nous 
voilà!  Moi  qai  vous  parle,  j*al  manqué  mes 
trois  mariages  pour  avoir  vouhi  éprouver 
ixics  futurs,  et  s*il  s'en  présente  jainaii*  un 

quatrième ,  je  tous  jiire  que  je  le  prendrai 

sur  parole. 

éLisK. 

I9Umpûrte!enteQds*tu?j'exige«..  AK!  moQ 
Dieu,  que  nous  veut  ce  vulet? 

SCÈNE  II. 

1 

les  PABCBDenSy  LABAlË,  en  grsHiie  fivnle. 

labuie. 

MAt>A]tfE,  c'est  on  homme  qui  est  à  la  porte 
da  château  ;  i^  dît  qu'il  s  est  égare,  qu'il  ne 
leconnaîl  plus  son^  chemin. 

ÉLlâ£. 

Eh  bien? 

i,ABJiir. 

Il  demande  à  entrer  un  instant,  et  à  «e 
sécher  ail  feu  de  la  cuisine»  car  il -fuit  une 
Dtigeet  uu  froid!... 


a36  LES  DèuX  MARIS. 

É  Li  s  B ,  très-ërauc. 

Qu'on  le  fasse  entrer  ici  :  qu'on  ait  pour 
lui  lous  les  soins,  tous  les  égards..^ 

LAftElE. 

Oui ,  Madame. 

GtiRTBVDE. 

Les  plus  grands  égarcfs,  eôteDdez-roas? 

LABRIE. 

Oui  >  Mademoiselle. 

BLI5B. 
A  m  î  Adieu  ^  je  vousjlàs  boh  cliarmant. 

Dites  quV a  cet  appartement 

A  iiuus  altcn  Ji*e  je  Pinvite , 

Que  i>ous  revcaous  daus  Tiustant. 

GERTBUOE. 

Madame ,  dépécIions-DOus  vite. 
Quaod  il  vient  réclamer  ses  droits , 
Et  surtout  qu'il  vient  en  décembre  , 
On  ne  prut  décemment ,  je  croîs , 
Laisser  l'bymen  faire  anli-cliaœbre. 

ÉLISE. 

"Viens,  te  dis-je,  ma  frayeur  redouble,  et 
j'ai  besoin  de  nie  remettre  quelqueî  instaus. 

^  (  Elles  sortent.  ) 


scEkeiii.  937 

SCÈNE  III. 

f 

\BRIE  ,  puis  RIGALD,  tmant  sons  le  bras  un 
petit  sac  de  nuit  ca  taiTt^tas  flambé. 

LABAIE. 

Pâe  ici.  Monsieur,  par  ici. 

RIG  AUD. 

C'est  mille  foîs  trop  de  br^ntés!...  j'aurais 
lussi  bitMi  altendu"  en  bfis...  je  ne  déttste  pas 
e  feu  (le  la  cuisine...  Oiuble!  un  beauchâteUu 

et  de  beaux  appurlcmens  ! 

i 

LABRIB. 

.    Madame. a  dit  qu'elle  allait  venir,  et  que 
SI  Monsieur  voulait  se  reposer  et  se  rafraî-    ^ 
cbir».. 

RlG  AVD. 

Je  n'en  reviens  pas!...  les  maîtres  de  ce 
château  sont  d'une  polilesse!...  Ma  foi!  jV-u 
profilerai ,  car  j'ai  une  soii'ct  un  appétit  !... 

tABRi^,^  s^inclinant* 

Kouge  Qu  blanc? 

R  1  G  A  U  D. 

Comment,  rouge  ou  blanc?..*  ah  î  ca  m'est 
égal,  je  prends  le  lems  comme  il  vient»  le» 
gens  couiiiie  ils  sont,  et  le  vin  comme  il  se 

Uouvc. 


a3S  LES  DEUX  MARIS. 

LÂBRIB. 

Jetais  monter  à  Monsieur  une  bouteille  Je 
Bordeaux  et  uoe  tranche  de  puté. 

(  n  salue  et  sort.  ) 

SCÈNE  IV. 

RI  G  A 13  D. 

Une  rrand)«  de  pâté  et  une  bouteille  de  rk 
de  Bordeaux!  quel  accueil  ob  me  fait...  m 
m'aura  aperçu  des  fenêtres  du  salon...  Toili 
ce  que  c*est  que  de  voyager  à  pied  ;  on  oeTi 
pas  vite,  il  e?i  vrai,  mais  qu'est-ce  qui  m 
prrsse?  qu'est-ce  que  j'ai  en  perspective?... 
Madame  Rigaud  et  mon  bureau  d'enregislre- 
ment...  farriv^rai  toujours  assez  tôt ,  et  je 
peux  déposer  un  instant  ce  havresac conjugal 
<|ue,  nouvelle  PcnHope,  madame  Iligaudi 
COUSU'  elle-même  de  ses  pudiq.ues  mains. 

(  11  laet  le  sac  sur  U  table.  ) 

iiiR  :  Gai,  Cpco, 

Birn  loin  d'être  volaçc , 
Toujours  fidèle  cl  sage , 
J'ofire  dans  mon  niéuage  , 

Lu  ra'imïi 

D'un  taton. 
Msûii  si,  loin  de  ma  ToAiiie, 
Le  basard  tue  rùdsunc,. 


SCfelîE  V.  a39 

S**!!  faut  quitter  ma  dame  . 
Alofi» ,  ta  mort  dans  Tame 
Xt  poussant  un  soupir. 
Je  dis ,  prci  à  partir, 

Bonsoir  à  ma  fVmote  ^ 

Boujour  au  |^»laisif . 

C*esl  terril»le  les  femmes  !..«  p*nrce  qne  j'ai 
ftU  que^uet»  «Hccès  daos  ma  jeunesse  ;  parce 
|U)e  \Wi  4S»  le  malheur  ( car  c'en  ^esi  un  )  d'clre 
gt\g»alé  coimnie  ua  homaae  à  bonnes  tWtunes^ 
|«  nie  \)eux  pas  tu*absenter  une  quin£aiQ€  de 
^irsvsans  que  soudain  ma  femme  ne  medé- 
ooohe  4jfie  douzaine  d**épîtres<  fulmiuuntes  de 
tendresse^  et  cela  &ou$  .pr>élexle  qu  elle  est 
îalousc  !....mais  est-ce  aia  faute  à  moi  si  je 
suis  doué  de  quelque  sensibîlilé,  d'une  tour- 
nure  entraînante  y   d'une   amabilité  conta- 
gieuse?.. Je  ne  peux  pas  me  refaire,  et  em-* 
,  pêcher  les  aventures  ^lûjue  tombent  de  tous 
côtés. 

SCÈNE  V* 

MGAl^D,  GERTRUDE,  entrant  d'un  air  mys- 
térieux, et  à  voix  basse. 

Monsiecr! 
Qu'est-ce  que  cr:f>»i  ? 


2>  LES  DEUX  MARIS. 

GB&TBroEy  de  même. 

Monsieur  est  sans  doute  ce   beaa  TOp 
geur...  à  qui  dous  ayons  doané   l^liospâi 

lité?  V 

&16AUD. 

Moî-mcroe. 

GERTRVDE,  à  pa^. 

C'est  bien  cela...  il  a  une  excellente  figon 
et  j'étais  bien  sûre  que  je  le  reconnaîtrir 
n'en  qu'à  Falr  de  faofiilte*  {MystérieusrmaA 
Madame  est  encore  à   sa  toifetle  ,  et  j'en 
profité  pour  venir  vous  prévenir....  on  œ 
recommandé  le  secret,  mais  c'est  pourv 
bonheur  à  tous  deux ,  chut  I 

•       RI6A«D,  à  part. 
A  qui  en  a-t-elle  donc  ? 

GERTRVDE. 

On  vous  attendait  avec  impatience  ;  oa 
vous  aime  déjà. 

R 1 G  À  u  D  y  d'un  air  étonné. 
Hein?  On  m'aime  déjà.».., 

GBRTRUDB. 

Silence  !..,  On  voulait  se  déguiser,  tous 
éprouver ,  mais  à  quoi  bon  toutes  ces  pré- 
cauljons?  On  ne  saurait  trop  se  hâter  d'être 
heureux...  et  vous-même,  pourquoi  feinJre 
plus  lon^-tems?  Vous  êtes  dans  votre  maison, 
uue  femme  charmante  vous  at tend.. ••  vous 
voyez  que  j  en  sais  autant  que  vous. 


SCÈNE  V.  a^i 

K16AUD*    h  part. 

3e  dirai  même  plus...  (//aa^)  Ali!çà,pour 
|uî  me  prend-on  ?  ,       ' 

GERTRVDS. 

Pour  le  proprîétîiîre  de  ce  château...  pour 
le  uiari  dé  ina  belle  maîtresse. 

rigAu'd,  vivement. 

lîeîn  ?...  Comment  dites-vous?...  Répétez-, 
moi  cela,  je  vous  en  prie.  {J  part.)  Ma  foi  9 
-voilà  une  bonne  fortune  que  je  ne  cherchais 
pas 9  mais  mon  étoile  remporte! 

GBRTRUDB 

AIE  :  Le  bricjuet  frappe  la  pierre. 

Eecoiinaissez-vous  Gcrîrùcie 
Qui  vous  fil  jnarcLer,  courir  ? 

AIGÂUD. 

J^eu  ai  quelque  souvenir. 

GERTODE. 

Moi ,  jV'o  ai  la  certitude  ; 

(a  part.) 
Quoique  depuis  ce  tems4à 
Il  ait  cliangé...  c'est  bien  ça. 

mQAxrO,  à  part. 

A^l viendra  ce  qui  pourra; 
J*ai  bjuu  renoncer  à  plaire  y 
Du  monde  loe  rrlirrr, 
Oïï  s\/b>tiue  à  ui'adorcr  : 
F.  YAuàtfVtUel.   4*  '  21     ^ 


ji43  LES  PEUX  MAKIS, 

n  ùuilûen  se  hifitcr 
PiiiM|iie  Vim  ne  |K-ut 
Lutter  cooire  mm 


-Mai5  «Ueiiee  avffc  Bfaëaofte  ;  ae  dîies  p3S 
que  je  vous  ai  prérena  ^  et  atteuda  ic 
moment  de  vous  déclarer....  ça  oe  lardea 
pas. 

RIGAUD. 

Bla  femme  est  donc  gentriie  ? 

,    Cliarmante ,  fraîche  cl  jojie  comme  on  Tes 
à  vingt  ans. 

£t  celte  propriété  ? 

Superbe  !....   des   bois  ,   des   prés  9  dei 
vignes. 

Ah  !  des  vignes!...  nous  avons  donc  de 
bon  vin  ? 

0  B«  T  R 1;  J)  B. 

Vous  en  jugerez...  une  cave^dmîrable!.' 

n  J  G  A  C  D ,  à  part. 

Pni'bleu  I  je  ne  serais  pas  fûclic  une  fois  en 
nia  vie  d*étre  propriétcure ,  ne  fût-rce  que 
pour  un  quart  d^beure...  Il  me  «emhle  qui 


SCÈNE  VL  a43 

.*ost  un  do  ces  frêles  qu'on  peut  foner  sans 
.voir  appris.. .  (  Haut)  Ma  foi^  Madame... 

GEBTRIJDE. 

Dites  donc  Gertrudc. 

Hh  bien  foui,  ma  obère  Gertrude...  oaf^ 
oui  5  c'est  tout  ce  que  |'ai  à  tous  dire; 

GERTRUDK. 

Et  o'cst  tout  ce  que  je  voulais. 

RIGAUD. 

Ça  n'était  pas  diffioile...  Hein  l  qui  tient 
là  ?...  Est-ce  la*  tranche  de  pâté  ?... 

SGÈNË  VI. 

LES  pJiiciBSif»^  LAB'RrIS» 

tABRte. 

Madame  n*cst  point  là  ? 

GERTRUDE. 

Que  lui  Teut-on  ? 

LABEIE. 

Je  Tenais  apprendre  4  Madame  un  acci- 
dent qui  est  arrivé  dans  le,  chemin  creux  ; 
une  espèce  de  diligence  a  versé  non  loin 
d'ici. 

GSBftRtDE)  iDoptraiit Aigaud. 

Parlez  à  Monsieur. 


344  LES  DEUX  JIARIS. 

I.ABBfB,  clonnc. 
Comment  ? 

CEETBCHB. 

Prenez  les  ordres  de  Monsieur. 
RIGA.PD,  àpaH. 

C*est  bien  le  moins  que  je  fosse  pour  en 

ce  qu'on  vit  ni  de  faire  pour  moi.  (  Haut.] 
Qu'on  vole  au  secours  de  ces  Tojageur?,  et 
qu'un  ^  empresse  de  les  receiroîr. 

AIR  :  de  Julie  ou  le  pot  de  fleurs^ 

La  maison ,  les  vins  et  la  taUe , 

Il  £iat  tout  offrir,  tout  donner. 
Dès  qu^il  s^agit  d*obliger  son  semUabfe  , 

Moi ,  je  ne  sais  rien  épar^cr. 
Dans  le  bonheur  que  le  hasard  m^apporle , 
Je  ne  suir  pas  de  ceux  qui ,  par  bon  toa  , 
Ont  oublié ,  dès  qu^ils  sont  au  saloOy 

Qu^ib  étaient  naguère  à  la  porte. 

CEftTBUDE*  à  part. 

Quelle  bonté  !  je  le  reconnais  bien  là. 

'     RIGAKD. 

Je  reviendrai  savoir  s'il  ne  leur  mnnqne 
rien....  le  plus  pressé ,  |e  crois ,  est  de  me 
rendre  présentable  ;  (  à  GtriruÂe  )  car  je  n*ai 
pas  trop  l'uir  d'un  uraUre  de  maison. 

I.  A  B  A  I  8. 

Je  vais  monlrer  à  jyionsieur^  la  petite 
chambre  d'eu  haut. 


SCÈNE  VI.  a45 

GERTRU  DE. 

Qu'est-ce  que  c'est?...  L'appartement  du 
premier,  en  tendez- vous  ?...  le  grand  appar- 
lemeat. 

LÂBRIB. 

Maïs  ,  c'est  celui  qui  est  à  côté  de  la  cham* 
bre  de  Madame. 

GERTRUPE. 

Qu'importe!  exécutez  ce  qu'on  tous  dît.., 
ces  gens- là  font  des  questions!...  fihl  allez 
donc 9  Labrie. 

(  Pendant  ce  tcms  ,  Kîgaud  à  ouvert  son  porte-man-' 
teau,  et  en  a  retiré  une  cliemîse,  une  cravate  et  des 

bas.) 

BlGAr  D  y  à  part. 

Diable  !  ne  nous  négligeons  pas...  Allons^ 

lU^aud. 

GERTRX7DE. 

.  Ne  VOUS  donnez  pas-  la  peine ,  on  va  vous 
porter  cela....  Labrie  !....  Je  vais  voir  moi- 
mêuie  s'ils  vous  ont  allumé  du  feu  >  si  tout 
est  en  ordre. 

RIGA  VD. 

Voilà  bien  la  meilleure  fenime  que  j'tiic 
jamais  vue...  ma  chère  Gertrude,  où  est  mon 
appartement  ? 

GERTRCJDEy  lui  indiquant  la  porte  à  gauche. 

^  te  voici. 

(Ri2[aud  sort.) 
ai. 


N 


i46  LES  DEUX  MARIS. 

SCÈTSE  VU. 

G£RTRUDE. 

La  meilleiTre  femme!  qu'il  est  aimable  !... 
je  Tais  doDncr  un  coup  d^oèil  à  sod  appar- 
tement... et  celte  dili^^ence  qnî  arrive....  cr 
Madame  donc  9  je  tenx  la  prévenir  que  soa 
mari  csl  chamanCy  qu'il  lut  GdtiTîent  à  mer- 
vetlle...  Mats^  j'ai  bien-  fait  de  m'en  môler; 
•ans  cela,  ces  pauvres  enfans  ne  se  seraient 
jamais  entendu»...  ah  !'  mon  Dieu  !  déjà  us 
Monsieur  «t  sa  femme  qui  Tiennent  de  ce 
côté  !...  dépêchons-nous. 

(  EUe  sort  du  côté  de  r«({>;>artemeixt  de  Bigaud.) 

SCÈNE  VIIL 

li»«  RIGÂU  D,  CD  cèstome  de  voyage  ëW^aét, 
SENANGE,  luidotoaant  lô  b»s  cl  pertaiie 
foasac. 

silf  AII6  E  >  à  la  cantonade, 

.  C'est  inutile  y  nous  n'avons    besoin  Je 
rien  ;  soignez  ces  dames  et  les  autre:^  voya^ 

H""  KIGAUD. 

Ah!  les  maudites  voitures  !  J'avais  beau 
crier  au  postillon  :  Vous  allci  verser!  Vous 
allez  verser!  Ça  n'a  pas  manqué...  juste  au 


SCENE  VIII.  aÎ7 

t    sans   Phoppilalité  qu'on  veut  bien    nous 
ccorder  en  ce  château... 

SÉN  ANGE. 

Je  n*«  félicite  de  m'être  tfottvé  M  nii  mo- 
ment pour  X ons pottet seûoiitê,  {À  part,)  Çn 
oe  pouvait  pas  mieux  tomber  ;  )•  ma  ftuis 
^^â^é  ù  la  i'aveui^â  Ui  dWtgètice. 

Ah!  Monsieur»  qiieilé  totts  doisje  pas?., 
€),<>  i»€  pnif^air  y  luettre  plus- de  délicatesse... 
do  g^ahM»t6ne..i  Kh  bien  !  je  l'ai  toujours  dit^ 
depuis  çpjte  h  naaître  de  poste  de  l'Ile-Bou- 
cb»t*d  a  or^Qwsé  s^s  pativches  on  côlérifères^ 
oana  VM<  <)tte  d«»  accidenté 

AIR  :  Lise  épouse  V  hetm  Gemahce, 

Grâce  à  cette  nioJê  àiigfarse  , 
Ail  lieu  de  tmit  on  itf.nl  seize  ^ 
Kl  iw  ce  haut  pbaéton  , 
Ub  58  croit  prcsflpi'en  boUed» 
Cet  voitures  qu^on  rcdotile 
Ont  acqub  le  di-oit ,  (Jit-on, 
De  vrrser  sur  chaque  route  , 
hï  brevet  d'îaveatiotl. 

Tous  rie  TOUS  êtes  point  blessée  ? 

M"®   RIGA  0  0. 

Noa,  mais  cette  aventure  oûus  fait  perdra 


f 


Uo  LES  DEUX  MARIS. 

Eh  foieh  I  eut^c-éstle  nfâUi^de  lamai^oé, 
mais  il  e&ïiiÀ  îb'co^nito^  à  oausede  -lliMlinfie... 
V0U9  «aureft tout  coki' plus- taré;. la  d'éolofattoa 
D*a  pas  encore  eu  lieu. 

M"**  aie  AU  D. 

Abff  la  declafalion  n'a  pas  encore  eu  lieu  !.. 
J*cUT!'T(rad  bon  moment. 

fKtrAHGB)  qui  petîd^itt  té  temr  a  toujours  rrguêt 
Vrn  là'  |)drte  à^  dcohe. 

Je  ne  vois  rien  pai^tré.  {J  Gerlrude] 
Me  .<erait-îl  permis  (le  parler  à  madame  de 
6énan|;e  ? 

GBKTRITDB  y  à  part. 

Et  lui  atis9r?...  Enoorfe  une  yisite  F  cés-pati" 
?re5  èpoux>  u*aaront  paâ  un  nvomeAt  pour  A 
f  oir.  (  A  Sénange.)  Ça  ne  se  peut  pas;  Ma^* 
dame  ne  sera  point  au  château  d'aujourd'hu;, 
elle  fait  des  visife§  (ftms  Ibs  environs.... 
(  A  modam$  Rifu^i.)  El.  Aidiisiâui'  n'est  pas 
Vibibje. 

M°**RlGABli,  a  part. 

J'^crt  ^ffoqutf  î  kliaîs  it  Vau't  liifefti  «Té  con- 
tenir, «e  moùét^ty  toir  josqo*<)i>  il  poussert 
la  perfidie,   et  lo   0onfoti4i'é  par  ma  pré- 

Monsieur  f 

séNARGK. 

Vous  n^Vxcusëiés  ;  je  suis  &  tous  dans 

(  Madame  Ei^auJ  tort.) 


SCÈNE  KL  ^^ 

SCÈNE  X. 

SÉNASOB,  GERTRUDE. 

SB  V  ANGE. 

De  sorte  que  madaipe  de  Séiiange  n^e$t 
point  au  chûleau  ? 

Non  ,  Monsieur  >  je  tous  Tai  déjà  diU 

SÉSAIVGE,  regardant  à  droite. 

Eh  î  ditçs-moî ,  quelle  est  cette  jolie  per- 
sonne que  je  viens  d'entrevoir? 

CERTRVDE* 

C'est...  c'est  une  dcîiiloisiollc,.,  une  amie 
de  Madame....  (^  part.)  Mon  Dieu!  ce 
Monsieur  est  bien  curieux. 

SCÊiNE  XI- 

GERTRUDE,  g^ÉNANCJî,  lÈrÙlSE^ 

ea  grande  parure. 
ÉLISE. 

Et  cette  Gerl.rudc  qui  ne  revient  pas.*.. 
{ Apercevant  Sémitti se.)  Ah!  m(ui  Dieu!  c'est 
•iQil  •      *"    ' 

(  Ild  se  saluent  profondéineat.) 


25a  LES  DEUX  MABIS^. 

SÉNA9  GB. 

On  m'a  assuré ,  Mademoiselle,  que  Madame 
de  Séiiaiige  n'élait  point  au  château. 

ELISE  3  à  part. 

C*est  bien  ;  Gerlrtide  a  suivi  mes  ordres- 
(  Haut.)  Je  suis  fâchée  que  madame  dtSi- 
nange  ne  soit  point  ici. 

SÉNAVGB 

Je  ne  m'aperçois  plus  de  son  absence. 

AIR  :  Quand  l^ Amour  naquit  à  Cyihère. 

.raurai:»  pourtaat ,  Mademoiselle  , 

Voulu  la  vuir  et  lui  parler  ; 

On  lira  tant  dit  qu'elle  était  belle. 

ELISE. 

Hélas  !  je  commence  à  trembler. 

SÉNANGE. 

Quoiqtie  Ton  vante  votre  amie  , 
Je  ne  saurais  me  figurer 
Qu'elle  puisse  être  aussi  jolie. 

ELISE.' 

Je  commence  à  rae  rassureix 

sÉt^takce,^  part. 

Ah!  »f  c'eût  été  là  œà  femme,  j'aurais  été 
trop  heureux  ! 

ÉLisc;. 

Madame  de  Scnan^c  ne  reviendra  que  de- 
main. 


SCÈNE  XI.  a53 

GERTRDDEj  appuyant* 
Oui ,  que  demain. 

ÉLISE. 

Miiîs  ,  comme  son  amie  ,  elle  m'a  chargée 
de  faire  les  honneurs  de  chez  elle....  et  )tes« 
père  que  Monsieur  me  fera  le  plaisir  de  pas- 
ser celte  journée  au  chôteau* 

GERTRUDE. 

Qu'est-Kîe  qu'elle  dit  donc  ?   ' 

SBHANGE. 

Madame...  {j4  part.)  J'ai  peur  que  Tamie 
de  tna  femine  ne  soit  beaucoup  trop  jolie. 

ÉLISE. 

Vous  ayez»  dites-vous ,  à  parler  à  madame 
de  Sénange  ? 

SÉHâNGE. 

Oui,  Il  est  vrai,  j'avais  à  lui  parler;  mais 
je  crois  que  maintenaut  ce  que  j^auraîs  à  lui 
dire  serait  inutile...  je  préfère  lui  écrire... 
Croyez,  Mademoiselle,  qu'un  devoir  indis- 
pensable peut  seul  m'empêcher  d'accepter 
votre  invitation. 

AIR  :  de  Montano  et  Stéphanie, 

Voilà  (Ris.) 

Celle  dont  je  rêvais  ritnage , 

.  Voilà  (Bii.) 

Celle  que  j^adorai^  déjà.  ^ 

F.  VBudevtiltfs  4<  ^^ 


V 


a&4  LES  DEUX  MARIS. 

Hclas  !  quel  dommage  ! 
J'ai  fonaé  d'autres  Dkudf  ! 

L'bonncur  m^eogage 
A  fuir  loÎD  de  ces  lieux. 

éuSEy  SÉNIVGI. 

Voilà  CBis.} 

^]f  l  dont  je  rêvais  rimage,^ 
Celle  )  •  ^ 

Voilà  .  (BU.) 

(Celui  qui  me  chamulU déjà* 
Celle  que  j'adorais  déjà. 

(Sënaiif  e  smU  ) 

SCÈNK  XII. 

ÉLISE,  GERTEUDE. 

ÉLISE. 

Oh  !  je  le  comprends ,  c'est  bien  lui...  ToiU 
bien  l'idée  q4ie  je  m^en  fesais...  Ah!  G«r- 
^Tiide,  j'eo  suis  enchantée! 

CSaTRUSE*     *^ 

Et  de  qui? 

ÉL18& 

De  lui. 

De  laî!.*.  de  ce  Monsieur  qui  n'a  rieo 

ÉLISE. 

C  'est  é^al.. .  nous  nous  entendions  si  hieol... 
Quel  air  de  bonté!...  mais  aie  soin  au  raoiai 


SCÈNE  XII.  aS5 

qu'il  ne  jparte  pas  ;  car  je  me  reproche  déjà 
de  l*avoir  trompé  et  de  ne  pas  lui  avoir  dit 
sur-le-champ  que  ['étais  sa  femme. 

6BRTAUDE. 

Sn  femme!...  mais  ce  n'est  pas  là  rotre 
mari.  ^ 

£lis«.  ' 

Comment!  ce  n'est  pas  là... 

GERTRUDE. 

Il  a  ma  foi  une  bien  autre  tournure...  Je 
l'ai  TU  y   je  lui  ai  parlé...  allez  «  Madame, 
TOUS  en  serez  enchantée..*    £h  bien  !  Ma-' 
dame  9  qu'avez-yous  donc  ?...  tous  vous  trou- 
Tez  mai  ? 

iLlSE. 

Non  I  non  9  ce  n'est  rien...  Mais  celui- 
là?... 

GBRTRUDE. 

Celui-là  «est  un  habitant  de  ce  départe- 
ment qui,  pour  son  plaisir  ou  ses  axTairesi 
TOjag;e  en  diligence  aTec  sa  femme. 

itlSE. 

Sa  femme  ! 

GBRTRVDB. 

Oui  9  une  petite  femme  à  laquelle  il  don-* 
nait  le  bras  en  entrant. 

ELISE 9  à  part. 
Ah!  qu'ai- je  fait? 


»56  LES  DEUX  MARIS. 

6ERTE0DE. 

Mais  l'Autre,  quelle  difiërence  !..•  si  toqj 
saviez  comme  il  m'a  reçue  ..  Ma  bonne  Gcr^ 
Uude  !...  Il  a. le  cœur  sur  la  main  ;  en  un  ias- 
tant  il  m'a  tout  avoué  ;  qu'il  était  Toire  tiiari, 
qu'il  venait  vous  éprouver;  mais  quMl  voulût 
eucore  garder  le  secrist  ;  ainsi  y  motus. 

ÉLISS9  douloureusement. 

Plus  de  doute. 

»  • 

Tenez,  le  toÎcî...  Regardez  -  moi  un  peu 
quelle  tournure  et  quel  aplomb  !  il  est  en- 
core mieux  que  tout  à  Theure. 

SCÈNE  XIII. 

iSSrRéCBDESS,  RI  G  A  UB,  en  grande    ' 

parure. 

r     KIGATD* 

>  ■    ■  ■        '      • 

AIR  ;  f^we  les  amours  qui  toujours, 

%KLVT ,  ô  VOUS  à  jquî  je  dois 
Le  bon  accueil  qu^aujourd^liui  je  reçois } 
Ces  lieux  sont  encliautés  ,  je  crois , 
Oq  est  chez  vous ,  ma  foi  | 
Couuiie  chez  soi. 
Bien  n^est  si  frais 
Que  vos  bosquets  : 
{Lien  de  si  beau 


SCÈNE  XIII.  a57 

Que  cft  ancien  cliâleau. 
C'est  divin  ! 
Jtî  ne  vols  eniio , 
Que  vous  ici 
Qui  so^ez  liiieux  que  lui. 
Salut,  etc. 

(41^  Gcrlrude.)  C'est  qu'elle  est  charûiante 
ip«i  teiiiiiie  ! 

gertrudeI 

"NVst-îl  pas  vrai?...  Mais  elle  est  si  émue, 
«îc  ridée  de  vous  voir... 

RI6ADD.       . 

Je  connais  cela...  (^aaf,  à  Élise.)  C'est 
un  événement  bi^n  extraordinaire'  que  ce- 
lui... qui  fait  que  des  g^ens...  qui  ne  se  sont 
jaiiiais  vus,  se  trouvent  attirés  l'un  vers  l'au- 
tre par  une  espèce  de  sympathie. 

GERTRIipE,  bas, 

Prenez  garde  d'en  trop  dire. 

RIGAUDy  de  même. 

Sois  tranquille,  je  vais  compliquer  mon 
style.  (  Haut.)  En  vérité,  si  je  ne  croyais  pas 
aux  attractions  soudaines...  je  ne  pourrais 
expliquer  ce  qu'on  éprouve  en  entrant  dans 
ce  château  ;  on  y  est  comme  sous  l'influence 
d'un  charme  magique...  qui  semble  -vous  in- 
terdire la  possibilité  de  tout  mouvement  ré- 
tragrade^.r  {4  Gertrude.)  Eh  bien!  toi  quj 


aSS  LES  DEUX  HÀBTS. 

craignais  que  je  ne  me  ùsse  trop  compreo- 
dre ,  qu'eu  dis-tu  ? 

GERTRODE«  de  même. 

C'est  bien.  {Beat.)  Hein!  Madame,  e9t-€« 

là  parler? 

iLiSB,  tres-émue. 

Je  ne  doute  point.  Monsieur...  cfue  Totit 
arrivée  en  ces  lieux...  ne  soit  un  grand  boo- 
bcur...  p4)ur  nous...  mais  avant  de  nous  ex- 
pliquer davantage ,  permettezrtnoi  de  me 
recueillir...  de  rassembler  mes  idées...  je  ne 
vous  le  cacbe  pas,  je  suis  dans  ce  momeut 
daus  un  trouble... 

R16ÂI7D. 

Qui  a  bien  son  càté  batteur;  et  quand  nous 
nous  connaîtrons  mieitx... 

ELISB. 

Oui,  je  dois  cliercher  à  détruire  les  im- 
pression» défavorable^)  que  cctie  réception  i 
pu  vous  faire  naître  :  vous  n'êtes  pas  bien 
pressé,  je  crois  «  de  continuer  votre  vojagc? 

RIGAUD. 

Mon  Dieu  !  rien  ne  me  gêne .  et  j*ai  du 
tems  devant  moi. 

AIR  :  Tenez,  pour  vous  rendre  gcnllard,  (la  LaiticiC 

Suisse.) 

Fâiit-il  Tenir  ou  s^en  aller, 

Je  suis  l'hoinme  le  plus  commode. 


SCÈNE  XIV.  a59 

ravo  !  i  un  vient  de  mMnstaner  f. 
l^f  oi ,  j^airae  assez  cette  méthode. 
Entre  dea\  ménages  <|ue  fai  , 
Je  |>renrU ,  heureux  propriétaire , 
l.''un  |>our  domicile  obligé,     ^ 
£t  Pautre  pour  un  pied  à  terre. 

• 

GERTRUDBy  avec  intention. 

Vous  vous  plaignies  tout  à  Thèure^  Ma- 
anric«  d*êtro  obligée  de  souper  Seule;  pour- 
[uoi  Monsieur  ne  tous  ferait*il  pas  Thon- 
fteur  ?...  (Bas,)  Aux  termes  où  vous  en  êtes> 
rous  ne  pouvez  vous  dispenser  de  fioviler. 

éLlSB. 

Eh  bien!  dispose 9  ordonne 9  fais  tout  ce 
que  tu  voudras...  khi  ma  bonne 9  je  n*j 
tiens  plus  9  et  je  me  sens  prête  à  pleurer. 

SCÈNE  XIV. 

LES  PBBCiDBNS,   SÉ^ANGE. 
SBIf^irOB. 

Non,  je  ne  pactirai  pas  ;  il  Aiut  absolument 
que  je  lui  parle.  (  apercevant  Rigaud.  )  Quel 
est  cet  homme  7 

BICAIJD. 

Souper  en  tête  à  tête!...  en  honneur5  je 

lois  trop  heureux. 

(Il  baise  la  main  d^Élûe.) 


20O 


.    Fa:!»: 

à  uue  tl.î  "î-^  »= 


Vovez- 
quelque  ( . 
nient,  j'ai 
forcé  *3i  eiUi 


Non,  ça  n^  — * 

Comment  ! 
ble?... 

Non...  à  mf» 
TOUS  fasse  en  h 
sur  moi...   (L'  ' 

^  I 

porte  sans  écon!  -^ 

ù  celte  dcime ,  .  ^ 

rentrepôl  de  xA,.  ^    -^ 

LES  P  i 

Hein!...  que-  1 

Malo...  celui  que  ^    — 

.^ 

Et  même  elle  ^ 
te 
Ah  1  bien ,  par  e 


SCÈNE  XIV.  a59 

(a  part.) 

>t-avo  !  I^on  vient  de  m'instafler  ;. 
Soi ,  i'^aime  assez  cette  méthode, 
litre  deux  ménages  <|uc  j'ai , 
i^  premU ,  heureux  propriétaire  y 
/un  pour  domicile  obligé,     ^ 
:t  Tsiutre  pour  un  pied  à  terre. 

GBRTRUDBy  avec intention* 

us  vous  plaigniez  tout  à  Thèure/  Afa- 
ï,  d'être  obligée  de  souper  dénie;  pour- 
Monsieur  ne  TOUS  ferail-il  pas  Thon- 
?...  (Bas.)  Aux  termes  où  vous  en  êle^, 
ne  pouvez  vous  dispenser  de  Tioviler. 

éLlSB. 

1  bien!  dispose >  ordonne 9  fais  tout  ce 
tu  foudras...   Ahl   ma  bonne,  je  o*y 
',  plus  y  et  je  me  sens  prête  à  pleurer. 

SCÈNE  XIV- 

LES   PBBC«DENS,    SÉ^ANGE. 
SBIf^ITGB. 

;oif ,  je  ne  pactirai  pas  ;  il  fïiut  absolument 
je  lui  parle.  (  Apercevant  Rigaud,  )  Quel 
cet  homme  7 

RICAIJD. 

3onper  en  tête  à  tête!...  en  honneur,  je 

s  trop  heureux.  , 

(U  baise  la  main  d'Élue.) 


aSS  LES  DEUX  MAKIS. 

craignais  que  je  ne  me  Gsse  trop  compren- 
dre ,  qu'eu  dis-tu  ? 

f  6BRTR0DE«  de  niême. 

C'est  bien.  {Baut.)  Hein!  Madame  y  est-ce 
là  parler? 

iLiSBy  trés-émue. 

Je  ne  doute  point.  Monsieur...  que  rofre 
arrivée  en  ces  lieux...  ne  soit  un  grand  bon- 
heur... pour  nous...  mais  avant  de  nous  ex- 
pliquer davantage ,  permettezrinoi  de  me 
recueillir...  de  rassembler  mes  idées...  je  ne 
vous  le  cache  pas,  je  suis  dans  ce  moment 
dans  un  trouble... 

R16ÂI7D. 

Qui  a  bien  son  côté  flatteur;  et  quand  nous 
nous  connaîtrons  uiiehx... 

ÉLISE. 

Oui,  je  dois  chercher  à  détruire  les  im- 
pression» défavorables  que  cette  réception  a 
pu  vous  faire  naître  ;  vous  n'êtes  pas  bîea 
pressé,  je  crois,  de  continuer  votre  vojagc? 

RIGAOD. 

Mon  Dieu  !  rien  ne  me  gêne .  et  j'ai  du 
tems  devant  moi. 

AIR  :  Tenez,  pour  vous  rendre  gaillard,  (la  LaiticiC 

Suisse.) 

Fatit-il  Tenir  oii  s'en  aller. 

Je  luis  l'homme  le  plus  commode. 


i 


SCÈNE  XIV.  a59 

Bravo  !  i  on  vient  de  m^instalter  f 
Moi ,  i^airae  assez  cette  méthode. 
£utr«:  devLX  ménages  C|ue  faï , 
Je  prencU ,  heureux  propriétaire , 
L'^un  |>our  domicile  obligé,     ^ 
£t  Tskutre  pour  un  pied  à  terre. 

• 

GERTRUDBy  avec intention. 

Yoiis  vous  pl.iignies  tout  à  Thèure  /  Ma- 
lainc«  d'être  obligée  de  souper  Seule;  pour- 
juoi  Monsieur  ne  tous  ferait-il  pas  Thon- 
leur  ?...  (Bas.)  Aux  termes  où  vous  en  êtes, 
v^ous  ne  pouvez  vous  dispenser  de  Tioviler. 

éLlSB. 

Eh  bien!  dispose 9  ordonne 9  fais  tout  ce 
que  tu  foudras...  Âh!  ma  bonne  9  je  n*j 
tiens  plus  9  et  je  me  sens  prête  à  pleurer. 

SCÈNE  XIV. 

LES  PBBCiDBNS9    SÉ^ANG  E. 
SBIf^ITGB. 

Non  9  je  ne  pactirai  pas  ;  il  fbut  absolument 
que  je  lui  parle.  (  apercevant  Rigaud.  )  Quel 
est  cet  homme  ? 

BICAIJD. 

Souper  en  tête  à  tête!...  en  honneur.  Je 

lois  trop  heureux. 

(Il  baise  la  main  d^Éliie.) 


36o  LES  DEUr  MARIS. 

8  £  ir  A  K  G  E. 

Mille  pardons,  Madeiiroîselle  ;  fna  présence 
est  »aos  doute  importune,  et  je  me  relire. 

ÉtlSE. 

NoD^  Monsieur. 

SÉNANGE. 

Je  Tois  que  ceUe  retraite  n'est  pas  aussi  ' 
inaccessible  que  vous  le  disiez...  je  ne  partais 
pas  sans  quelque  crainte  lorsque  je  songeais 
aux  dangers  N  que  vous  pouviez  y  courir... 
mais  je  touS\  quitte  bien  plus  rassuré  ea 
voyant  en  quelle  connpagnie  je  vous  laisse. 

BIGAUD9  à  part. 

Quel  est  ce  Monsieur  si  pincé  ? 

ÉLISE. 

J'ignore,  Monsieur  y  de  quoi  tous  pourcx 
TOUS  plaindre. 

SÉNAlfGE. 

Moi ,  Madame  ,  me  plaindre  !.. .  Eh  !  qui 
m'en  aurait  donné  |e  droit?...  Je  me  disais 
seulement  qu*il  était  moins  cruel  de  perdre 
certaines  personnes  que  de  renoncer  à  Tes- 
time  qu*on  avait  d'elles...  qu'il  y  avait  des 
senlimens  qu'on  regrettait  d'avoir  éprou- 
vés... et  de^  illusions  dont  on  était  bleu  cruel- 
lement détrompé. 

ÉLISE. 

Grand  Dieu!  quelle  idée  &-t-il  Jonc  de 


SCÈNE  XIV.  a6£ 

noî  ?...  Vous  êtes  bien  prompt  dans  la  ma- 
nière dont  vous  accordez  ou  retirez  votre  es- 
time. Monsieur;  vous  vous  hâtez  de  juger 
avec  bien  de  la  sévérité  une  plaisanterie  que 
l'avais  crue  innocente  et  dont  je  vois  main- 
tenant les  conséquences  ..  Je  vous  ai  dit  ce 
matin  que  madame  de  Séoange  était  absente^ 
que  î'étais  une  de  ses  amies;  jei  vous  ai 
trompé 9  et  quelque  opinion  que  puisse  vous 
donner  de  moi  çé  mensonge 9  je  sens  qu'il 
faut  vous  avouer  la  vérité  :  je  suis...  madame 
de  Séoange  elle-même.    . 

SÉNAKGEy  avec  transport. 

Comment!  il  serais  vrai!.. i  L'ai-je  bien 
entendu!...  VOUS  seriez?... 

EIGJLVD9  appuyant. 
Oui^  Monsieur. 

ÉLISE. 

C'est  VOUS  dire  assez  que  je  ne  puis  vous 
entendre...  et  que  ce  n'est  pas  à  moi  qu'il 
faut  vous  adresser.  (J  Rigaud,)  Je  suis  bien 
fâchée,  Monsieur,  de  trahir  votre  inco- 
gnito; mais  les  circonstances  où  nous  nous 
trouvons  rendent  cette  explication  indispen- 
sable... Quoique  Monsieur  ne  soit  qu'un 
étranger,  jfe  tiens  aussi  à  son  estime,  et  je 
vous  prie  de  lui  apprendre  vous-même  qui 
vous  êtes,  et  les  liens  qui  nous  unissent 
Viens,  Gertrude. 

(Elles  SQilcut.) 


\ 


••• 


a64  LES  DEUX  MJiBIS. 

SCÊ^E  XVI. 


An!  Monsieur 9  je  tous  troorc  à propaj 
je  renais  vous  raconter... 


B  I G  A  V  p,  VaptTcewant  et 
Dieu  I  c*est  ma  femme. 
s  é  B  ▲  H  G  E  )  prenant  maJame  Rigaud  par  h  uà 

Sa  femme I...  Ah!  çà,  31onsieur,  Tousê 
donc  le  mari  de  tout  le  moode  ? 

RIGAYID. 

Il  ne  s'agit  pas  de  cela...  Je  tcdx  saToi 

comment  Madame  ,  qui  devrait  être  chexelie, 

'  se  trouve  aujourd'hui  dans  ce  château? 

'  «SÉBANGE.- 

Elle  y  est  avec  moi. 

BIG  AVD. 

Avec  VOUS,  Monsieur?...  Vous  m'appren- 
drez, je  l'espère,  quelle  espèce  dlnlimité 
exislG  entre  vous  et  Madame  ? 

SÉNABCE. 

Parbleu  !  Monsieur,  c'est  ma  femme* 

RIGAtD.  J 

.   Comment  !  votre  femme  ? 


SCÈNE  XVL  a65 

séNATfGEjà  part. 

Puisqu'il  preod  la  mienne,  je  puis  bien  à 
mon  tour...  [A madame  Rigaud.)  Ne  me  dé- 
disez pas. 

Soyez  tranquille  »  j'ai  ma  revanche  à  pren- 
dre. 

RIGAVD. 

Quoi  !....  TOUS  oseriez  me  soutenir  ici 
inême  ?.... 

mme  j^  I  <j  ^  u  D  ^  à  Sénange ,  (Van  air  étonné ,  et  moû- 

tiant  Rigaud. 

Mais,  mon  ami^  quel  est  doue  ce  petit 
Mon»ieur? 

RIGAUD. 

Comment,  mon  ami!...  El  djevanl  mai,  en 
ma  présence?...  il  y  a  au  moins  des  personnes 
qui  y  mettent  des  procédés, 

M™*  &  1 6  A  V  D ,  toujours  d'un  air  étonné. 
Kn  vérité,  Monsieur,  je  ne  vous  c'onnais 
pas ,  je  ne  sais  d*où  vient  le  trouble  et  Tagi- 
talion  oO  je  vous  vois. 

SJENAVGE,  bas  à  madame  Kigaud. 

C'eit  bien  ,  c'est  ça...  Allons,  du  courage, 
tutoyez-moi  un  peu ,  n'ayez  pas  peur. 

M'**  RiGArn,  à  Sénange,  hésitant  d'abord  un  jieu. 
Maïs ,  mon  ami ,  regarde  donc  comme  sa 
figure  est  bouleversée...  tu  devrais  appeler 
du  secours,  car  il  va  se  trouver  mal. 

F..  VaudevilUi.  4*  '  a3 


/    \ 


ntCe  LES  DEUX  MARIS. 

Rl€  A  U  D. 

Tu  devrais !...  Je  ne  sais  plus  où  fensak 
et  je  ne  reconnais  pas  là  ma  femme, 
cht^re  amie^  tâchez  de  vous  rappeler,  de 
reconnaître...  C'est  moi,  Narcisse  Riga 
receveur  de  renregislremeut  à   l'Ile 
chard;  je  suis  connu . 

Rîgaud...  maïs  attendez  donc...  noos 
une  parente  assez  éloignée ,  qui  mère 
bie  beaucoup  par  parenthèse  ,  et  qui  a  é[ 
quelqu'un  de  ce  nom-là...  Ëslelle  Rigaui 

RI6AUD. 

C'est  cela. 

M"'   RIGiLUO. 

Àh!  c'est  votre  femme...  Je  tous  en 
mon  compliment...  Comment  se  porte 
elle  ?...  (A  Sénange,)  Dis  donc  »  mon  ami^i 
Tas  vue  a  Paris;  une  petite  femme  d'un  c^ 
ractère  charmant!  Certainement  ce  seraita^ 
freux  de  ne  pas  la  rendre  heureuse,  carelk 
le  mérite  sous  tous  les  rapports. 

R I  6  ▲  u  D ,  stupéfait. 

En  vérité,  je  ne  sais  si  }e  veille  oasij< 
dors. 

AIR  :  Tenez ,  moi /a  suù  un  h<m,  ItQmmK 

Ce  sang-ftoid  qui  me  désespère 
Me  Qonfoiid  et  treiiblfi  mea  sem  » 


SCÈNE  XVII.  2^7 

Comment  cela  $!e$t-il  pu  faire  ?... 
Plus  je  cherche ,  et  moins  je  comprends. 
D'accidens  quel  triste  amalgame  ! 
Comment  retrouver  sans  éiaot 
Mil  femme  qui  n'est  pas  ma  femme  , 
Avec  uo  moi  qui  n^est  pas  moi  ? 

SÉITANGB^  à  madame  Rigaud. 

C*est  un  homme  qui  a  perdu  la  tête<«.«« 
rassure-toi  ;  ma  bonne  amie. 

(  Lui  baisant  la  main.  } 

^    BIGAV.D, 

Ail  l'c'en  est  trop  y  et  je  n*y  tiens  plus.  (Se 
mettant  à  genouo^.  )  Ma  femme  !  madame  Hi- 
gaud>  je  yoDS  demande  grâce. 

SCÈNE  XVII- 

IBS  piiBCÉDENS,  GERTRUDF. 

GEBTBVDB. 

QoÀ  ?OTS-je!...  Comui^nl.Mci  même  M.  de 
Sènange  aux  pieds  d*une  autre  que...  mais 
leYe^-v-ous  donc  9  si  Madame  venait. 

Et  qu'est-ce  que  ça  me  fait? 

GEETaUDB. 

Ce  que  ça  lui  fait...  moi  qui  en  arais  une 
'  si  haute  opiuion  ! 


368  LES  DEUX  MABIS. 

ftlGAUD. 

Ha  chère  amie ,  je  tous  eo  supplie. 

GEBTEDDB. 

Sa  chère  amie  !...  qoel  comble  de  scuh 
dale!...  mais  prenez  garde  «  si  ce  n*est  pou 
la  morale ,  qu'au  moins  ce  soit  pour  toqs... 
TOUS  ne  Toyez  pas  le  mari  de  celle  daflie^qo! 
est  là  j  qui  tous  regarde  ? 

«  EICAUD  y  toDJoiiinàgciioinL,«toiiniaBtdBOÔléi  1 

GertriMic. 

Comment ,  son  mari  ? 

CEmr&vpE. 

Liii-raêrac. 
<  Sénange  fait  passer  madame  Ri||aD<|  à  sa  droite  d  t 
trouve  près  de  Eigaud. 

EIGAUD. 

Et  elle  aussi  !...  ah!  ça  ne  plaisante  pas, 
êles-YOUif  bien  sûr  qu'ils  soient  i-...  « 

GBRTEDDE. 

Tout  ce  qu'il  j  a  de  plus  mari  et  femme; 
regardez  plutôt. 

X I G  A  u  D  9  prenant  la  main  de  Séoange  pour  celle  de 

sa  i'cmuie^ 

Ah!  c'en  est  trop!...  je  ne  souffrirai  pas 
davaniage... 

SEIVANGB. 

Ni  n»oi  non  plus,  Monsieur,  et  si  vous 
parler  encore  ù  uia  femme ^  vous  m'entendez? 


SCÈNE  XVII.  269 

niGAUD*  I 

Eh  bien!  oui.  Monsieur  ,  je  suis  prêt  à  ' 
vous  suivre.  (  Regardant  madame  Rigaud,  ) 
Ça  ne  lui  fait  ricD...  Nous  Terrons,  je  né 
vous  dis  que  cria!  (Même  Jeu.)  Elle  ne  ée 
déclare  pas...  Allons»  sortons!  (fausse  sortie») 
Ah  !  çà  y  mais  elle  ne  m'arrête  pas  ;  je  crois 
qu'elle  me  laisserait  tuer. 

Monsieur  est  le  maître  de  disposer  de  lui. 

B1GAT7D. 

Allons,  tout  sentiment  de  délicatesse  est 
éteint  eu  elle. 

AIR  :  Un  homme  pour  faire  un  tableau. 

Tous  vos  forfaits  seront  transmis 
Aux.  yeui  de  la  race  fiitare , 
£t  de  la  femme  a  deux  maris 
Vous  retracerez  PavenCure. 

(A  pwt.  ) 
Quel  que  soit  le  sort  des  combats , 
Au  saug-fxoid  dont  elk  fait  preuve , 
On  voit  qu^cUe  est  bien  sûre ,  hélas  ! 
De  n^étre.  ^wi  tout-à-fait  veuve. 

M"*'   B1GAUD. 

Je  Tais  tout  disposer  pour  notre  départ, 

(  Elle  sort.  ) 

«a- 


270  LES  DEOXUARJS. 

SCÈME  XVIII. 

Lvs  PAÉcÉDiNSy  excepté  M»'  ftIGAUD. 

ftiOAVD. 

Par  exemple,  si  je  la  laisse  partir. •• 

GSRTKUDB. 

Mais  madame  de  Sénange  qui  tous  attend 
à  souper,  et  qui  saii9  doute  va  venir! 

Qu'elle  yienoe,  qu'elle  s'en  aille ,  ça  m*est 
égal.*,  j'ai  bien  d'autres  choses  en  tête... 
Vous  lui  direz...  non,  vous  ne  lui  direz  ries.,. 
Âhl  le  maudit  château  !.•.  Allonsencore  sup- 
plier ma  femme^  et  tâchons  lié  nous  faire  re- 

connaître* 

(H  sort.) 

SCÈNE  XIX. 

SÉNANGE,  6ERTRUDE. 

GEaTBUDB. 

^      Voità   pourtant  les  hon^mes  f...   qui  s« 
serait  attendu  à  cela  de  M.  de  Sénange? 

SBifAHGB,  en  souriant. 

Allons,  il  y  a  là-dessous  quelque qulproqua 
qu'il  faut  achever  d'éclaircir. 


SCÈNE  XIX.  371 

Ma  maîtresse,  qui  est  si  bonne^ne  méritait 
Iperlainemenl  pas  un  tel  mari. 

SBSANGE. 

Ma  bonne  Gertrude ,  il  faut  que  je  parle  ù 
ta  maîtresse. 

6ERTBUDE. 

Dans  ce  moment  elle  n'est  disposée  à  roir 
personne,  et  tous  moins  que  tout  autre. 

S^NATCCE. 

£t  pourquoi? 

6BRTKUDB. 

Pourquoi....  pourquoi....  tous  le  savex 
.  peut-être  bien...  qui  peut  expliquer  les  fem- 
iuesd*aulourd'hui  Hun  compliment,  un  coup 
d*œily  et  cfac,  Toilà  un  cœur  pris...  mais 
TOUS  n'en  seres  pas  plus  avancé  pour  cela  , 
TOUS  n'avez  rien  à  espérer...  et  je  vous  con- 
seille de  partir  au  plus  tôtj  votre  voiture  doit 
être  prêle. 

SÈNÀIIGE. 

Non,  je  ne  partirai  pas  sans  l'avoir  vue...i 
Tu  ne  sais  donc  pas  que  je  l'aime...  que  je 
l'adore  ? 

GEBTRtDB. 

^t  c^est  à  moi  que  voui  t'avouez? 

SÉNANCE. 

Ont  ;  lu  me  serviras ,  tu  me  feras  obtenir 
\in  moment  d'entretien. 


a7j  LES  DEUX  MARIS. 

GERTRVDB. 

Ah!   çà,  mais,   où   en  sommeâ-nons?... 
dans  quel  siècle  YÎYons-nous?...  Je  vous  dé-' 
clare  que  Madame  vouâ  a  positivement  dé- 
fendu sa  porte. 

SBif  ANGE. 

Eh  bien!  attends;  un  seul  mot,  rien  qu'uQ 
root  d'explication.  (  //  écrit,  )  Dès  qu'elle 
Taura  lu...  je  te  jure  que  ça  ne  contient  rien  \ 
que  d'honnête  et  de  raisonnable...  (JÉrrivoiit  j 
toujoip's.  )  Un  moment  d'entretien.  } 

GERTRDDB. 

Dieu  me  pardonne,  \i  demande  en  rendex- 
vous! 

SÉNÀNCE ,  écrivast  toujours. 

Si  tu  savais  dans  quel  motif...  Les.  înieo- 
tions  les  plus  louables...  «  de  tous  aimer  toa- 
»  jours.  »  Oh!  je  signe...  Va,  il  n*y  a  rien  à 
Ciaiudr<;};  tiens,  porte-lui  ce  billet. 

GERTRUDB. 

Jésus  Maria!  le  Ciel  m'en  préserve! 

SÉ9AN6E,  apercevant  Labrie. 
Tiens,  porte  ce  billet  à  (a  maîtresse. 

CERTRVDE. 

Labrie»  je  vous  le  défends. 

SÉNANGB. 

Et  moi  je  te  l'ordonne!  (  Lui  donnant  de 
("argent,  )  Prends,  et  va  vite. 


SCÈNE  XX.  ajî 

IiA«RIE. 

Kcoute2   doQC ,   Mademoiselle  9  dans  ces 
cas-là  9  iJ  n'y  a  que  le  poid^  qui  décide. 

sénAUGB. 

Et  songe  qu'il  y  aura  une  réponse.    * 

(  Labrie  sort.  ) 

■  SCENE  XX.     ■ 

GERTRUDÉ,  SÉNANGE. 

GERTRVDE. 

Dke  réponse  !...  Vît-on  jamais  une  pareille 
audace?...  Apprenez,  Monsieur 9  qu'il  n*y 
aura  d'autre  réponse  que  Tordre  de  vous 
faire  mettre  à  la  porte  du  château. 

SÉNANCB. 

J*ose  espérer  le  contraire. 

GERTRUDE. 

En  Térité,  il  ne  doute  de  rien...  Apprenez 
que  ma  maîtresse  est  trop  raisonnable... 
Qu'elle  a  été  élevée  par  moi  9  Monsieur ,  et 
que  je  donnais  ses  principes  comme  les 
miens. 


a;4  LES  DEUX  UARIS. 

SCÈNE  XXI. 

j 

LB9  MiiCBDEirSy  ÉLISE  9  entrant  préd|ittaaiiDail, 
la  lettre  de  Séoange  à  la  main. 

silTAVGB. 

C'est  clic  ! 

B  L 1  s  K  j  avec  joie  à  Sénang;e. 

Gomment  ^  il  serait  possible  !...  A.h  I  mon- 
sieur,  que  je  TOUS  demande  ua  million  d'ex- 
cuses. 

GEBTRUDB,  étOttoée. 

Elle  rient  elle-même  ! 

Gertrude,  Uîs$c-nous>  et  que  persoftM  os 
puisse  entrer  ici. 

GERTRVDB5  àpart. 

J*en  reste  muette.  {Haut,)  Gomment, 
Madame! 

s  B  N  À  H  G  B. 

Vous  aTcz  entendu ,  Gertrude,  lalisex- 
nous. 

GERTR17PB9  à  part. 

Allons,  on  a  jeté  un  sort  sur  la  maison  9  et 
"  maintenant  je  n'oserais  pas  même  répondre 
de  moi. 

(  £Ue  fort,  ) 


SCÈRE  XXII.  375 

SCÈNE  XXIL        , 

ÉLIS£,  SÉNANGE. 

ÉLISE. 

CovwBVT  ai- je  pu  un  seul  instant  être  dupe  ^  : 
d'une  pareille  erreur  I 

AiB  t  Duo  de  LulU  et  Quinauk, 

De  votre  présence  mondaine 
Mon  cœur  aurait  dû  m^avertir» 

Oublions  un  instant  de  peine 
Qu'efface  un  instant  de  plaisir. 
Au  tendre  amour  moi)  cœur  se  livre  ^ 
C'est  lui  qui  ^eiii  vient  m'animer. 
Ouï  y  t'aimer  pour  vivre. 

ÉLISE. 

Vivre  |)our  t^aimer 

Toujours.  (4lbif.) 

SXVANGt. 

Oui ,  f  aimer  pour  vivre. 

ELISS. 

Vivre  pour  t^aimer 
Toujours  (4  foit; ,  oui ,  toujours  t'aimer. 


276  LES  DEUX  MAKIS. 

SCÈNE  XXIII. 

LE&  FEÉcéDENS»  RIGAUD  danskftoL 

RI  G  AU  D. 

Allons,  elle  n'en  déii:K>rdéra  pas...  împ» 
sible  de  lui  faire;  avouer  qu'elle  est  madai* 
Rigaud.  (  Apercevant  Sénange  aua>  pîedsà'i- 
lise.  )  Que  vois-je!...  c'est  encore  ce  ]tto^ 
sieur  qui  est  aux  pieds  de  mon  autre..- 
qu'esl-ce  que  vous  laites  donc  là,  s'il  rotf 
plaît  ? 

Vous  le  voyez  bien,  je  suis  son  mari. 

RIGAVD. 

Ah!  çà  9  entendons-nous;  vous  êtes  donc 
aussi  le  innri  de. tout  le  monde?...  ei  vous, 
Madame,  je  trouve  bien  inconvenant  qu'étaût 
tacitement  mon  épouse... 

ÉLISE. 

Moi  9  Monsieur!  vous  vous  trompez  saos 
d(>ute«..  Dieu  merci  !  je  ne  le  suis  point;  ttae 
Tai  jaùiais  été. 

RI6  AVD. 

Là,  c'est  comme  tout  à  l'heure,  Icœcmc 
refrain...  de  deux  femmes  voilà  que  je  n'en 
ai  pliis...  après  tout,  il  n*y  a  pas  de  quoi  se 
désoler,  je  me  retrouve  garyou;  qui  perd 


SCÈNE  XXIV.  377 

gagne...  je  redeTÎens  un  c^élibataire  aiin.ibley 
el  je  reprends  la  route  de  Paris,  où  m'atten- 
dent de  nouYcaux  triomphes  ! 

(  II  va  pour  sortir. }  . 

SCÈNE  xxiy. 

MS  PRÉcÉDBNS,  M"»  RIGAUD9  qai  a  entendu 
Its  derniers  mots  et  qui  le  ramène  en'  le  prenant 
radement  par  le  bras. 

M"*   RIGAUD. 

Non  pas.  Monsieur,  et  avant  que  vous 
retourniez  à  Paris,  je  vous  ferai  voir  du 
chemin. 

RI  G  A  VD ,  se  frottant  le  bras. 

Aïe!  je  te  retrouve  donc  enfin...  et  mon 
cœur  te  reconnaît  à  la  vivacité  de  tes  trans- 
ports. / 

H""*  RIGAVO. 

Oui-dà»  c'est  donc  ainsi  que  vous  prenîea 
votre  parti?  vous  étiez  déjà  d'un  calme,  d'une 
tranquillité... 

IllGAVP. 

Que  veux-tu,  ma  chcre  amie,  je  me  croyais 
veuf!  maintenant  que  me  reste-t-il  à  dési- 
rer?.., je  retrouve  madame  Rigaud,  mon 
bureau  d'enregistrement,,  et  le  bonheur! 

F.  Vaudevilles.   4*  ^4 


378  LES  DEUX  MARIS. 

VAUDEVILLE. 

MA.DÂMS  RIGAUB. 

AïK  :  tTln/brtuae  et  GioCc  (d^Docbe). 


Mais  désomins ,  plus  de  TOyage  ; 
Il  faut,  podr  (aire  bon^nénage  , 
Pouvoir  répondre  â  chaque  ÎBstaqt  : 

Présent.  (lis.) 

Quelque  bonne  que  soit  sa  cauïe  , 
De  loin  à  la  perdre  on  s^expose  » 
Et  souvent  le  lort  le  plus  grand  , 
C^est  d^ctre  absent. 

UGAUD. 

Les  jours  qu^à  dîner  l'on  ni'cng^;e  , 
Les  jours  de  bal ,  de  mariage  , 
A  tout  heure  je  dis  gaiment  : 

Présent.  (fi*.) 

Le^  jours  où  Técot  me  regarde  ^ 
Le  jour  de  Tan ,  les  jours  de  garde , 
Au  premier  rappel  qu^on  entend , 
Je  suis  absent. 

siiTAiras. 

Dans  ces  bals  donnés  à  Fânnée , 
Dans  nos  salons ,  à  PAthénee  , 
Le  plaisir  dit  bien  rarement  : 

Présent.  (Us.) 

Mais  nos  pantomimes ,  nos  drames  , 
Nos  opéras  ,  nos  mélodrames, 
Ah  !  quels  spectacles  amusans. 
Pour  les  abstns. 


»«•• 


SCÈNE  XXIV.  «79 

SLISC ,  au  Public. 

Nous  aimons  assez  le  grand  monde  , 
Tout  nous  sourit ,  tout  <iims  seconde 
Quand  le  public  nous  dit  souvent  : 

Présent.  (BU.) 

Clicz  eux  nos  maris  vous  inviteiit  : 
Soyez  de  ceux  qui  les  visitent  » 
Et  puissiez-vous  donner  céans 
Tort  aux  abscns. 


WIV  DBS  DBUX  MAaiS. 


L'ENNUI , 


OU 


LE  COMTE  DERFORT, 

^^  COMÉDIE  EN  DEUX  ACTES , 

MÊLil   DE  YÀUDSYIliLES  , 

Paa  mm.  scribe  ,  DUPIN  et  MELESVILLE  ; 

Représentée ,  pour  la  première  fou ,  fur  le  théâtre 
des  Variétés ,  le  a  février  1820. 


N. 


»4. 


PERSONNAGES. 


ARTHUR,  COMTE  DERFORT. 

SIR  BIRTON,  baroaneL 

ARUNDEL. 

MAGARTT,  négociant 

MARIE. 

ROBIN ,  jardinier  du  Comte. 

TASSAvx  du  Comte. 


La  seêpc  te  passe  en  fcosse,  das  le  ébSâam  et 

ooDle  Deridrt.  I 


COUPLET  D'AimONCE. 
Àii  :  de  Julie,  ou  le  pot  defleurt^ 

Sur  notre  aflkhe  en  fesanf  ap^nraltre 

Ce  mot  redoutable  l'ennui!!!.,, 
L^auteur  au  moins  ne  vous  prend  pas  en  traître  i 
Et  vous  savez  sur  cpioi  com(Her  iâ. 
Quand  chaque  jour  par  le  titre  on  tous  triche» 
Vous  ne  pourrez ,  Messieurs ,  nous  en  vouloir 
Si  par  basard  la  pièce  allait  ce  soir 

Tenir  ce  que  promet  raffidie» 


L'ENNUI, 

COMÉDIE. 

ACTE  PREMIER. 

Le  théâtre  représente  une  salle  élégante  au  château  ; 
deux  portes  latérales.  Au  fond ,  trois  grandes  portes 
vitrées,  au  travers  desquelles  qh «perçoit  un  site 
pilt(irest|ue. 

SCÈNE  I. 

B I R  T  O  N  9   étendu  sur  une  chaise ,  et  lisant  un 
journal.  MACARTY,   ROBIN. 

IIAGiATTy  s'assejant  dans  une  bergère. 

Ca  m'est  égal;  j'attendrai;  voîl;i  trois  fois 
que  je  viens  pour  parler  ù  lord  Arthur,  et  je 
lui  parlerai. 

ROBIN)  entrant. 

C'est  une  horreurl  une  infamie!... 

-  BIKTON. 

Qu'est-ce  que  c'est  donc  qu'un  tapage 
comme  celni-là?  Robin ,  vous  voulez  dono 
réveiller  tout  le  monde  au  château  ? 


a84  TENNUI. 

ROBIN. 

Comment!  Monseigneur  dort  encore  h  une 
heure  de  l'apWîS-mitli  ?  Dieu  de  Dieu  !  qu'us 
est  heureux  d'être  grand  seigneur  ,  et  de  n 
voir  pas  le  tems  de  se  lever  plus  tôt...  mi 
qui  veux  lui  parler. 

.  T/LkHkfiTYf  brusquement. 

£tmoi  aussi;  et  vous  voyez  que  /'attends. 

ROBlir. 

Vous  qui  êtes  un  étranger,  o*est  bon;  maû 
moi ,  son  frère  de  lait  et  son  jardinier ,  y  de- 
vrais passer  avant  tout. 

BlRTOir. 

Que  veux-tu  ? 

ROBIK. 

J'  viens  lui  demander  justice;  tenei, 
M.  Birton ,  tous  qui  êtes  sop  ami  9  ima^- 
nez- vous  que  le  coUecleur,  le  percepteur.... 
je  ne  sais  pas  lequel  »  ont  dressé  procés-ver- 
bal  pour  uo  lapin  que  j'avais  tiré  dansl'parcy 
et  ils  m'ont  pris  mon  fusil,  sous  prétexte  que 
c'était  la  troisième  fois  qu'on  me  pardonnait; 
;  j'  vous  demande  si  ce  n'est  pas  un  abus. 

BlBTOir. 

C'est  bien  fait  ;  pourquoi  yas-tu  tirer  sur 
les  lapins  de  ton  maître? 

ROBIK* 

i/lniSf  dam*  9  puisqu'il  Q^en  tue  pas. 


ACTE  ;,  SCÈNE  h  aSS 

BIRTOH. 

Qu^est-ce  que  cela  te  fait? 

ROBIir. 

Alçrs,  qui  est-ce  qui  les  tuera? 

AIR  :  Tenez ,  mai  je  suis  un  bon  hûmme* 

V'Ià  justement  pourquoi  f  enrage  ; 

Qu^il  nous  laisse  au  moins  cesoin^â. 

Vous  savez  bien  que  cVst  Tusajfe , 

Et  qu^ici-bas  le  ciel  plaça 

L^  collecteur  pour  être  intraitable, 

Les  vassaux  pour  être  grugés , 

Les  grands  seigneurs  pour  être  à  table , 

Et  les  lapins  pour  êtr'  mangés;     - 

C'est  leur  état...  mais  voyez-vous  M.  le 
Comte  se  promenant  dans  son  parc?  T'nez, 
vMà  comme  il  va  à  la  chasse...  (//  met  ses 
mains  dans  ses  poches,)  £t  puis^  quand  il  a 
fait  un  tour  d'ailée,  il  rentre  au  château,  s'é- 
tend dans  un  bergère,et  s'occupe  à  se  démon- 
ter la  mfllîhoire!  Corbleu!  qu'v'là  un  seigneur 
qui  a  une  vie  agriable!..  Quand  je  vois  ça  , 
ça  me  met  dans  des  fureurs  de  n*être  que 
jardinier! 

BIRTON. 

Eh  bien!  ne  faudrait-il  pas  que  tu  fusses 
(eigneur! 

ROBIir. 

DamM  tout  comme  un  autre. 


tM  L'EN!7UI. 

BI&TOJf« 

Allons  I  alloDS,  ta  trayaiUei^ 

Trayailler,  traraîller...  ils  n*oùt  que  ça  â 
TOUS  dire»  rien  que  ce  mot-là...  ça  me  fail 
mal...  Dites  donc ^  M*  Birtoa,  tous  tous 
chargerez  de  mon  affaire? 

BIKTOir. 

C'est  bon ,  oVst  bon  ;  on  Ta  s'en  occuper 
fur-ie-champ. 

V  A  G  A  B  TT  )  à  Kobin  qui  s^en  va. 
Ah!  çkf  mon  cher^  je  vous  en  prie^  tâ- 
chez de  savoir  si  ?ptre  maître  se  réveillera 
aujourd'hui.  . 

R  0  B I  ir  9  imitant  Binon» 

C'est  bon,  c'est  bon i  on  ra  s'en  occuper 

sur-le-champ. 

(  Il  sort.  ) 

SCÈNE  II. 

BmTON,  MACARTY. 

BIRTOH. 

Voila  ce  que  c'est  de  se  lever  matîa,  on 
est  accablé  de  demandes. 

UAGABTT. 

t 

Vous  vous  levez  donc  matin  >  vous.  Mon* 
sieur? 


ACTE  I,  SCÈNE  II.  Î187 

Oui,  Monsieur^  je  suis  sur^pied  depuis 
midi*.,  j'ai  toujours  eu  les  goûts  roturiers* 

MACABTT. 

Je  vous  en  fais  compliment;  car  un  gent* 
leman  qui  dort  ne  vaut  pas  un  roturier  qui 
fait  ses  affaires;  et  John  "Williams  Macarly, 
Totre  serviteur  ;  ne  serait  pas  devenu  un  des 
premiers  manufacturiers  de  PÉcosse,  s'il  eût 
attendu  la  fortune  dans  son  lit  {regardant 
Binon  )  ou  sur  une  chaise. 

BiBTOsr,  seievant* 

Ah!  vous  êtes  M.  Macarty...  Je  vous  en 
fais  complimenta  mon  tour...  ce  gros  négo- 
ciant estimable  qui  a  toujours  de  l'argent.., 
£st-ceque  vous  viendriez  en  apporter? 

MACAUtV. 

^OU)  Monsieur^  au  contraire;  il  faut  en- 
fin que  le  comte  Derfort  connaisse  Tétât  de 
ses  affaires;  je  sais  bien  que  son  indolence, 
ses  intendans  et  ses  amis  Tempêchent  d'y 
voir  clair  ;  mais  ça  va  mal ,  entendez-vous , 
ça  va  fort  mal. 

birtOv.  ^ 

Eh!  parbleu!  qui  est-ce  qui  vous  dît  que 
cela  aille  bien  ;  qu'est-ce  que  ça  me  fait  qu'il 
se  ruine!  Je  ne  suis  pas  son  intendant,  je  suis 
son  ami.  Je  lui  dirai  cependant  que  vous  êtes 
venu. 


986  L'ENNUI. 

MàCàE.tt,  tinotsamcnitre. 

Ce  nest  pas  la  peine,  fe  le  lui  dirai  bien 
moi-même.. t  I3ne  heure  dans  riostaat;  ahl 
mon. Dieu  5  ei  me$  afifaires  !... 

Alft  :  raud^  des  Gasama», 

Je  pars  et  je  reviens  céans  ; 

Dans  cette  salle 

Je  mlnstalle  ; 
Je  pars  :  nous  autres  cpmraerçaiis  , 
Nous  connaissons  le  prix  da  tems. 

BIRTON. 

Mais  attendez  encor. 

MACARTY. 

Bonsoir. 
Je  dois  être  toujours  en  course , 
Je  ne  m'assieds  qu^à  mon  comptoir^ 
Et  je  ne  cause  qu'à  la  Bourse. 

Je  pars ,  et  je  reviens  céans ,  etc. 
-  '  COmmi.) 

SCÈNE  III. 

1  BIRTON. 

PARBjbttj!  Yoilà  une  visite  qui  fera  grand 
plaisir  au^Comte  Derfort;  quant  à  naoi,  j'en 
ferai  mon  profit,  et  je  ne  crois  pas  que  je  reste 
long-tems  au  château  ;  ça  devient  un  séjour 
fort  ennuyeux...  Arthurne  dit  mot,  ou  bâille 


ACTE  li  SCÈNE  VI.  a% 

LOiJlela  journée.  J'ai  beau  faire  tout  aa  momie 
pcHir  le  distraire.*,  encore,  hier,  mille  guinocs 
[jue  je  lui  ai  gajjiiées  elcinq  cents  sur  parole, 
il  ne  s*en  est  âeuleinént  pas  aperçu;  cdu  foi, 
i'v  re  lonce. 

AIR  :  P^'auei.  de  la  Bohe  et  les  Botlci. 

En  (l^aûtr(:s  lieux  le  doux  plaisir  mVnfralne^ 
J^ai  vingt  amis  t{ui  ni^offrcoé  lei^rs  maisohs  j. 
'     -  Dans  leur  bourse  je  vois  la  mienne , 
Et  par  ég^ard  j^en  use  sans  façonSi  ' 

Partager  tout  est  d'un  ami  fidèle , 
Tout ,  ehire  amis ,  doit  être  de  moitié  > 
£t  chaque  jour  je  remplis  avec  zèle 
Tous  les  devoirs  de  Pamitiéi 

Maïs  Tamitié  a  des  bortîes  quand  la  fortune 
en  a,  et  je  serais  déjà  parti  depuis  iong^ems» 
sans  cette  petite^Marie  qui  est  (Charmante;  et 
il  faut  qu*Arthi^r  soit  aussi  Jusouciant  qu'il 
l*est  pour  ne  pas  Tavoir  remarquée  î  lih  ! 
iDais>  «'est  elle  qui  vient  de  ce  côté. 

SCÈNE  IV. 

BIKTON9  M.ARIE^  marchant  sur  la  pointe  dn 
pied ,  cl  «^avançant  ver^  la  porte  à  gaiiehe« 

fclRTOH. 

Eh  bien  !  que  faites-vous  donc  U  ? 


jago  L'ENNUI. 

M  A  RIE  9  Tapcrcevant. 
Oh!  mon  Dieu!  je  marchais  Ion t  douce* 
mcnl.  de  crainte  de  réveiller  Mouseigneur. 

BIBTON. 

Ahî  ne  craignez  rien;  quand  îl  dort,i 
dort  bien,  il  n'a  que  cela  à  faire...  Eh  bien! 
Marie,  tous  ne  me  regardez  pasl...  Alloflïi 
je  vois  que  vous  êtes  encore  fâchée  dubaisff 
d'hier;  écoulez  donc,  si  tous  me  rafieid» 
né  ,  je  ne  l'aurais  pas  pris. 

AIR  nouveau '^e  M,  Panseron, 

De  toutes  mes  folies 
Accuse  ta  rigueur; 
Toujours  tu  te  défies 
De  ma  sincère  ardeur. 
IHaië  réponds-moi ,  traîtresse , 
Par  quels  moyens ,  hélas  ! 
Te  prouver  ma  tendresse  ? 

'  MÀBIE.' 

En  n^.  m^en  parlant  pas. 

BIRTON. 
DEUXIÈME  COUPLET. 

J'ai  fait  )U)ur  toi  »  cruelle , 
D(^s  si'nuens  et  des  vœux , 
lit  j'ai  fait  senti nelle 
Souvent  une  heure  ou  deux. 
Alors  dis-moi ,  ma  chère ,  -  * 

Tour  plaire  ii  tes  beaux  yeux , 


ACTE  C,  SCÈNE  IV.  Tgi 

De  plus  que  puis- je  faire  ? 

MARIE. 

Me  faire  vos  aiHeux. 

Quel  boubeur!  yoilù  Monseigneur  qui  des- 
cend! 

BIRTOir. 

Eh  !  non 9  ce  n'est  pas  lui.  Ah!  çà ,  quelle 
impatience  avez-TOus  donc  de  le  voir? 

M  A  B I E. 

C'est  que  j'âî  de  bonnes  noureîles  A  lui 
annoncer,  une  nouyelle  qui  lui  fera  bleu 
plaisir...  un  ami  qui  lui  arrive. 

BlUTON. 

Parbleu!  des  amis;  quand  on  est  riche, 
il  Yous  en  arriye  tous  les  jours. 

MARBE. 

Oh!  non,  celui-là,  ce  n'est  pas  uiî  ami  à 
sa  foKune;  c'est  un  ami  à  lui. 

BIRTON. 

Hein? 

MARIE. 

Oui,  c'est  sir  Arundel,  celui  qui  l'a  éleré: 
un  homme  franc  et  loyal ,  qui  ne  flatte  per- 
•oune,  et  dit  toujours  la  vérité. 

BlRTOIf. 

Et  ce  monsîcur-lù  a  fait  fortune! 


a^î  TENIIUI. 

M  A  R  I E9 

Kli!  mais...   ç*est  lui,  je  crors^  qui  Tienl 
fsiiluuré  de  tout  ce  monde. 

BIRTOH. 

Adieu ,  Marie;  je  cède  la  place  à  ootn 
nouvel  arni^ 

(Il  sort.) 

*   .     '  SCÈNE  V. 

MARIE,  ARDNDEL,  ROBIN,  et  pin- 
iii^urs  P  A  Y  S  A  ^i  S  q^  eiitourent  Amndel. 

ABVITDBL. 
AiB  :  Ah!  quel  plaisir!  (  Jcannot  et  Coliii.) 

Ah  !  quel  plaisir  de  vous  revoir. 
Lieux  chéris  de  mon  enfance  !        \ 
Ah  !  quel  plabir  de  vous  revoir. 
Après  une  aussi  longue  absence  ! 

Séjour  de  ma  jeunesse , 

De  mes  premiers  plaisirs , 

Ici ,  je  vis  sans  cesse 

De  mes  vieux  souvenirs. 

Mes  amis,  quelle  ivresse  ! 
Pour  mon  cœur  quçl  plaisir  ! 
Séjour  de'  ma  jeunesse ,  etc. 

§  I  CHOEUR. 


g  /     Séjour  de  sa  jeunesse , 
De  st$  premiers  plaisirs  ; 
Il  retrouve  sans  cesse 
Tou«  ses  vieux  souvenirt. 


% 


ACTE  ï,  SCÈNE  T.  â^.^ 

A  R  t7  N  T>  s  L. 

Mes  bon*  amis!  mes  cbcrs  amis?  combien 
>«  SUIS  aise  de  vous  revoir...  Eh  !  c\?st  Ro- 
bin ,  le  fils  (lu  jardinier!...  Je  ne  Taurals  pu« 
reconou.  - 

B  0  B I  N. 

C'est  vrai  que  je  suis  joliment  grandi. 

Te  pauvre  Robin  !  (  J  pari.)  Il  a  touîourf 
I  dit  bote.  ' 

Ça  n'a  fait  que  oroîire  et  en^iellir. 

A  K  c  N  D  E  t  ,  montrant  Marie. 
Eh  !  quelle  esl  cette  jolie  personne? 

ROBirr. 
C'est  Marie  ;  cette  orpheline  que  M.  Itu 

Comte  avait  recommandée  en  mourant  à  Lord 
Arlliur,  son  fib. 

.        ART7NDEL. 

Je  sais,  je  sais  ;  cette  petite  fîlfe...  Diableî 
^  est  que  depuis  cinq  ans  ce  n'est  plus  cela, 
lenez,  mes -amis,  voilà  toujours  de  quoi 
buire  à  ma  santé.  (  Les  paysans  sortent.  Re- 
gardant autour  de  lui.)  Quel  plaisir  j'éprouve 
a  revoir  ces  lieux!  C'est  ici  que  j'ai  passé  m.i 
jednesse  avec  ce  pauvre  cou»te  Dcribrt,mou 
brave,  mon  respectable  ami,  I  houmnir  de 
son  p.'»ys  ,  la  gloire  de  sa  famille.  JMais  j'es- 
père que  son  Qh ,  que  lord  Arthur  sera  digne 

25. 


C 


agi  L'ENNUT. 

de  lui...  Je  lui  ai  entendu  prononcer  son 
pi esiiier  discours  au  parlement,  et  j*élais  à 
côlé  de  lui  quand  ii  fut  bleâsé  en  Portu^jal,  à 
la  tête  de  son  régiment. 

AIR  :  //  ri* est  pas  tenu  de  nous  quitter. 

Grâce  à  nos  soins ,  à  nos  avis , 
Grâce  à  Pexemple^e  son  père , 
Il  servait  déjà  son  pays 
Comme  un  citoyen  doit  le  faire  ; 
Soldat ,  orateur  à  la  fois , 
Il  consacrait^  dès  Tâge  le  plus  tendre , 
Sa  voix  à  prc*clamer  nos  droits , 
Et  son  ë|)ée  à  les  défendre. 

(Regardant  autour  de  lui.) 

Maïs  pourquoi  n'est-il  pas  là  pour  me 
recevoir?....  Non  pas  que  je  tienne  à  Téti- 
quelle  9  mais  je  tenais  à  Tembrasser  le  plus 
tôt  possible. 

ROBIN. 

Dam*  f  c'est  qu'il  n'est  pai  encore  leré. 

Comment  !  pas  encore  levé  !..«  Serait-il 

malade  y  par  busard  ? 

W  A  B  I  E. 

Oui  5  Monsieur  ,  oui  ,  je  le  crois  bien 
malade. 

A  R  U  If  D  R  L. 

Parbleu  !  j'arrive  bien  beureusemeDl.Dien 


^  ACTE  I,  SCÈNE  V.  ac^S 

merci  9  je  m'eptends  ùi  tout,  et  surtout  eu 
médecine.*..  ConduUez-inoi  vers  ce  pauvre 
Arthur...  mais  dites-moi  avant  tout  quelle  est 
i%.spèce  de  sa  maladie,  et  depuis  couiblen 
de  tcms  P.... Hein  ?..•  £h  bien  !  tous  gardei 
le  silence  ? 

ROBIir. 

Cest  qu'elle  n*ose  pas  vous  dire  que  la 
maladie  de  Monseigneur  c'est... 

(Use  met  àlMuUerj 

ABTJNDEL.  ^ 

Que  veut  dire  cet  original  avec  ses  bâille- 
meus? 

Dam\  Monsieur,  vous  devez  bien  voir» 
d'après  ces  symptômes  ,  qu'il  est  malade  de 
ne  rien  faire...  et  je  troquerais  bien  sa  mala« 
die  contre  ma  santé. 

Sf  A  R 1  s. 

Hélas  î  oui.  Depuis  que  notre  pauvre  maître 
a  eu  le  mulheor  de  se  voir  à  la  tête  de  3oo 
mille  livres  de  rente,  il  n'est  plus  reconnais- 
sable  ;  la  première  année  ,  qui  était  celle  de 
>otrc  départ ,  ça  allait  encore  bien. 

AIR  :  des  Visitandînci^ 

D'être  lieiireux ,  jojeux  et  content 
.    Il  avilit  d^abord  la  recette  ; 
Tout  allait  bien ,  grâce  à  Targ^cot , 


El  dans  c'  pays  où  tout  s^acliéte  , 

Il  acletait  de  la  saoté  , 

Il  achetait  d^  Painour  vif  et  tendre  , 

Il  acti^Uit  plaûir  et  galté  ; 

Mais  dam\  quand  il  eut  tout  achUé , 

Oa  D*eut  plus  rieu  à  lui  yeudre. 

EOBIN. 

Et  alors  il  resta  de  là,  ue  ^ackantplus  qui 
faire. 

MABIE. 

Tous  oubliez  tout  ie  bien  qu'il  a  fait  ici  a 
les  vassaux. 

»OBIH. 

Oui^  ses  yassâuxl  il  s'en  occupe  jolimeot; 
on  né  peut  seulement  pas  tuer  uq  lapin  sur 
•es  terres. 

V  ▲  &  I B  9  avec  TiTacité. 

Robin  y  TOUS  êtes  un  mauvais  cœur  ,  et  ce 
n'est  pas  à  vous  à  parler  ;  tous  ,  pour  qui  il 
a  mille  fois  trop  de  bontés  :  lord  Arthur  est 
sicnsible ,  généreux  plus  qu'on  ne  croit;  et  il 
e6t  étonnant  que  les  personnes  qui  derraicot 
le  défendre  soient  les  premières  à  l'attaquer, 
ik  lui  faire  perdre  tous  ses  amis... 

AaiIItDEL. 

Kon,  non,  il  en  a  encore,  je  le  rois; mais 
)f\obin  a  raison  ,  et  j'ai  bien  fait  d'arrivée 
pDiir  traiter  le  malade;  moi ,  lucs  ordoiH 
f:anc-es  ont  toujours  réussi ^  et  à  moins  qu'il 


ACTE  l',  SCÈÎ^E  V.  297 

le  »oit  dans  un  état  désespéré...  Mais  je 
raïs  d'abord  commender  par  moi,  car  j'ai 
4 ne  fiiin  d'enter...  Conduisez-moi  à  la  salle 
i  manger,  et  surtout  ne  lui  dites  pas  quejo 
mis  arrivé. 

MARIE. 

On  vous  attendait  plus  tût.  "* 

ARU]ÏDEL. 

Oui  ,  je  suis  en  retard  :  ù  quelques  milles 
d'ici  je  me  suis  arrêté  chez  Tom  ,  l'ancien 
garde-chasse  ;  il  y  avait  de  la  brouille  dans 
le  ménage  ,  je  les  ai  raccommodés  en  pas- 
sant ;  moi  ,  ça  me  fait  du  bien  ,  ça  me  tient 
en  haleine;  mais  ça  ne  m'empêche  pas  d'avoir 
fuiui. 

AIR  :  Mon  cœur  à  V espoir  s^abandorme. 

Puisque  votre  maître  sommeille , 
Mes  anirs ,  loin  de  le  gêner, 
En  attendant  qu'il  se  réveille 
Je  vais  trouver  le  d«'jeuner. 
Quand  le  matin  on  read  service , 
On  mange  mieux ,  à  ce  qu'on  dit , 
Et  grâce  au  ciel  c jui  ra*esl  propice  , 
J'ai  toujours  eu  bon  appétit. 
Puisque ,  etc. 

(n  sort  arec  Robin.) 


29$  L'ENNUI. 

SCÈNE  VL 

MARIE,  puis  ARTHUR. 

MARIE. 

*  Et  nous,  préparons  ce  qu'il  faut  h  Mon- 
seigneur ;  ah  !  înon  Dieu  ,  le  voîci!  {^Arthar 
paraît  en  négligé  et  comme  un  homme  qui  vient 
de  se  lever  ;  it  marche  nonchalamment  ^  arrite 
jusqu'au  bord  du  théâtre ,  étend  les  bras.)  Voilà 
pourtant  comme  il  commeûce  toujours  la 
journée  j  et  souvent  comme  41  la  fiait. 

ARTHUR,  sans  regarder  Marie. 

Holù  !  quelqu'un  !  quelle  henre  est-il  7 

M  A  B 1 E ,  timidement. 

Deux  heures. 

ARTH¥R. 

Deux  heures!...  Comment!  il  n'est  que 
cela  ?  les  journées  n*ea  finissent  pas...  £i)  ! 
bien  !  mon  déjeuner  ? 

MARIE. 

Voilà ,  Monseigneur. 
(  Elle  approche  la  table  sur  laquelle  est  le  ïhè.) 

ÀRTBVR. 

Ah  !  c'est  loi ,  ma  petite  Marie...  [A  part] 
C*e.st  une  excellente  tille  que  Marie  ;  elle  me 
gronde  quelquefois  ;  mais  quand   j'ai  causé 


ACTE  I,  SCÈNE  VI.  299 

le  matin  avec  elle ,  il  me  semble  que  je  suîs 
plus  content  le  reste  de  la  journée. 

MARIE. 

IVTon  Dieu  !  Monseigneur,  vous  vous  êtes 
levé  bien  tard  aujourd'hui. 

ARTHV  B. 
AiH  :  d^Arîuîppe. 

Le  jour  (rop  long  me  fatigue  et  m^ennule  , 

Et  je  Tabrége  cîe  mon  mieux  ; 

Sur  les  chagrins-  de  -cette  vie  , 
Je  ravoûrai,  j'aime  à  fermer  les  yeux. 
De  cette  erreur  où  le  sommeil  me  plonge , 

Pourquoi  voudraîs-tu  me  priver  ? 

Le  bonheiff  n^exi^te  qu'en  songe  j 

£t  je  m'endors  pour  le  ÇrpuYQr. 

MARIE. 

Vous  avez  beau  dire ,  il  y  a  des  gens  tout 
-éveillés  qui  le  renconlren!« 

ARTHUR. 

Eh!  parbleu!  je  ne  demanderais  pasm^îcux; 
mais  ce  bonheur  dont  chacun  parle  ,  où  est- 
il  ?  où  le  trouver  ?  Je  l'en  fai«  juge  :  je  l'ai 
cherché  à  la  Cour,  on  n'en  avait  pas  de  nou- 
velles ;  dans  les  emplois  .  dans  les  places  ,  il 
parlait  le  même  jour  qu'on  y  entrait  ;  dans 
les  plaisirs  ,  .ans  la  dissipation,  on  croyait 
le  saisir  ;  ou  ue  reucotUralt  que  l'ennui  y  et 


3oo  L'ENNUI. 

même  près  des  femmes...  Les > femmes  dek 

ville,  tu  be  peux  pas  t'imagiaer,  toi    Marie, 
couibieii  elles  sont  coquettes. 

MAKIE. 

Fh  bien  !  pourquoi  vous  adresser  à  celles- 
là  ?  Il  en  est  tant  d'autres  que  leur  naissaocsi 
leur  fortune,  rendaient  dignes  de  vous. 

ARTBÛA.  ' 

« 

Tu  crois  9  Marie?  Il  est  de  fait  queceou- 
jriage  qu*on  me  proposait... 

MÂRIt. 

Dû  mariage  ?.r. 

ARTHUR. 

Oui  3  c'était  fort  convenable. 
AIR  lE  9  vivement. 
Il  faut  accepter,  Monseigneur. 

ARTBUR. 

Ouï,  niais  je  n*ai  pas  d'amour  pour  la  per- 
sonne. 

Maris,  avec  joie. 
Ah  î  vous  n*aVez  pas...  AlOrS,  voilà  qui  est 
bien  différent  ;  et  je  ne  peux  pas  "Vous  con» 
sellier  ..  Cependant... 

AIR  :  ^/6  Tobema. 

Je  padrais 

(Qu'elle  vous  c^ira  ; 


ACTEI,  SCÈNE  Vh  3oi. 

Et,  par  reconnaissance , 

Voire  cœur  Paiiaera. 

De  ce  mal  qui  \oi\s  gêne 

On  est  bientôt  guéri 

Quand  l^ainour  vous  enchatnc , 

Car  on  dif  qu^avec  lui 

On  peut  avoir  d^  la  peine ,  ^ 

Mais  jamais  de  Tennui , 

Non ,  non ,  jamais  d^ennui. 

ARTHUR. 

Marie  ,  tu  es  fort  âimaLle  ,  et  surtout  de 
bon  conseil  ;  et  peut-être  aurais-je  suivi  celui 
que  tu  me  donnes,  s'il  ne  m'était  pas  venu 
une  autre  idée,  un  autre  projet  qui ,  je  crois, 
assurera  encore  plus  ma  tranquillité  ;  et  je 
suis  étonué  de  n'y  avoir  pas  pensé  plus  tôt. 

MARIE. 

Monseigneur  ,  ce  projet«-Ià  doU-il  vous 
éloigner  de  nous  ? 

ARTB  UR. 

Oui  ;  mais  je  ne  partirai  pas  sans  avoir 
assuré  votre  bonheur  à  tous,  et  :\  toi  surtout, 
uia  bonne  petite  Marie  ;  mais  nous  nous  re- 
verrons  aujourd'hui. 

MABIE. 

Aujourd'hui ,  non  ;  je  vais  à  Falklrk  pour 
porter  à  mou  oncle  la  petite  pension  que 
vous  lui  faites  :  Robin  voulait  in'accompa- 
gnur  ;  mais  je  n'ai  pas  voulu  j  el  j'irai  .*eule. 

F.  V»ttacvUUî«-  4*  '-^^ 


3o3  L'ENNUI. 

ABTHUK. 

AÎDsi  9  je  ne  te  verrai  plus  aujoard'hi 
Non,  Monseigneur;  mais  deinaîn- 

,      ARTHCft. 

Oui,  demain....  Adieu  ,  Marie;  je  te 
mercie  de  ton  ainitié ,  de  L'attacheineat  (, 
tu  me  portes  ;  mais  ,  après  mon  départ, 
penseras  encore  quelquefois  à  moi,  n*esH 
pas? 

MARIB. 

Uh  î  toujours. 

AaTHOB. 

Adieu,  Marie. 

(Itrcmbrasse.) 

MIRIE. 

Adiea,  Monseigneur. 

SCÈNE  m. 

LES    PRÉCÉDENS,    ARUNDEL. 


AKUWDE  t ,  apercevant  Arlhur  qui  embrasse  Marv*. 

Kh  bien  !  courage  ;  il  me  semble,  innde- 
moiselle  Marie,  qu'il  n'est  pas  si  luai  portant 
que  vous  le  di!»iez. 

ARTHUR,  courant  à  lui. 
C'est  loi ,  mon  cher  Arundel  I 


ACTE  I,  SCÈNE  yil.  3o3 

ARVNDEL. 

Moi-même,  qui  ,  depuis  une  berre  , 
attende  en  déjeunant  le  moment  de  t*em* 
larâsser. 

ÂRTHUA. 

Comment  !  on  t'a  fuit  attendre  ? 

ARriYDEL. 

Oh  !  je  ne  me  -5uîs  pas  impatienté,  va  que 
je  ffesais  antichambre  dans  ta  salle  à  manger. 
J'étais  là  d'ailleurs  avcoun  original,  M.  Bîr« 
ton  9  que  Ton  prendrait  pour  le  maître  de  la 
maison.  Il  s'est  fait  apporter  du  meilleur 
"vin...  Ce  n'est  pas  cela  que  je  blâme;  mais 
il  dispose  de  tout  avec  ue  sang-IVoid  !...  Je 
te  préviens  qu'il  a  commandé  ta  calèche  pour 
aller  tantôt  à  Falkirk;  ainsi  arrange-toi  pour 
t'en  passer. 

MAKlEy  à  part. 

Comment!  il  vient  aussi  à  Falkirk?  Pourvu 
que  je  ne  le  rencontre  pas!  Hâtons-nous  de 
partir.  (  A  ArundeL)  Adieu  ,  Monsieur. 

A  R  T7  n  D  E  L. 

Au  revoir,  ma  belle^ enfant. 

(  Marie  sort ,  emportant  le  plateau  sur  lequel  est  le 

déjeuner.) 


3o4  L'ENJ^UI. 

scÈiNE  viir. 

ARTHUR,  ARUNDEL. 

ÂftUNDE  t. 

Voila  cne  charmante  fîlle  pour  laquelle)*»' 

une  aHeclioD  toute  particulière. 

Comment  !  tu  la  connais  ? 

Parbleu  !  depuis  une  heure  que  Je  ivà 
arrivé ,  est-ce  que  je  n'ai  pas  eu  le  tcmsde 
faire  connaissance,  dere\roir  tous  tesaacieos 
vassaux,  de  recevoir  sept  ou  huit  pétitions.'- 
Lei<>  voilà...  je  t'en  parlerai  tout  a  l'heure, et 
il  faudra  bien  que  tu  accordes  ,  car  je  suii 
toujours  solliciteur^  et  surtout  tenace  eo 
diable  :  mais  voyous  d*abord  dans  quel  état 
ffont  tes  affaires. 

AUTOUR)  d\ia  air  iaso?iciant. 

Mais.^.  je  crois  que  cela  va  bieu. 

ARVNBEL. 

« 

II  paraît  que  tu  n'en  es  pas  sûr. 

ARTBîTB. 

Ma  foi,  non;  mais  toi  qui  parles? 

AKUN  DEL. 

Moi ,  ii\sl  dlirértiit  ^  je  n'ai  jamais  eu  beau- 


ACTE  I,  SCÈÎÏE  Vin.  3o5 

•onp  d'ordre  ,  et  je  ne  sais  pas  trop  où  j'en 
luU  ;  je  crois  même  quej'ai  par  le  monde 
linéiques  lettres  de  change  ;  nnais  enfin  elles 
irriveront  y  et  on  verra  bien. 

AIR  :  de  Lantara, 

Qu^un  antre  aux  calculs  s^abandonne , 
Moi  y  moD  budget  est  facile  est  léger  ^ 

Je  reçois  moins  que  je  ne  donoe , 

Et  j'emprunte  pour  obliger, 
je  puis  compter  quelques  dépenses  faites  ; 
Je  puis  compter  des  services  rendus  ; 
Bref,  j^ai  doublé  mes  amis  et  mes  dettes  : 
Voilà  Tétat  de  tous  mes  revenus. 

Mais ,  que  vcux-tu  ?  je  suis  garpon ,  je  n'ai 
pas  d'eufans;  je  me  fais  une  famille;  j'ai  le 
défaut  de  me  mêler  un  peu  de  tout,  il  est 
Traî  9  mais  comme  c^est  pour  rendre  service, 
00  Teut  bien  me  le  passeï^. 

ARTBtR. 

Et  qu"'est-ce  que  cela  te  rapporte  ?> 

'  À  RU  N  DEL. 

Le  plaisir  d'obliger;  c'est  une  spéculation 
comme  une  autre  :  dès  que  j'arrive  quelque 
part ,  je  vois  un  air  amical ,  des  figures  ou- 
vertes, le  sourire  sur  les  lèvres.  On  me  paie 
♦*n  bon  accueil.  Si  tu  savais  comme  ils  m'ont 
reçu  dans  le  pay5!...Vrai ,  je  leur  redois  quel- 
que chose. 

26. 


3o6  L'ENNUI. 

ÀRTHCR. 

Je  vois  que  tu  es  toujonrs le  même;  aussi^ 
lu  étais  digne  d*êlre  heureux. 

A  R  U  T<  D  E  L. 

Et  pourquoi  ne  le  serais- tu  pas  autant  que 
inoi  ?  Je  sais  que  tu  as  des  chances  contre 
toi;  tu  es  riche,  tu  es  grand  seigneur;  mais 
qu'importe ,  morbleu  !  le  bonheur  eàt  par- 
tout. 

ARTHUR. 

Non  pas  pour  moi,  et  si  tu  yeux  que  je 
t'ouvre  mon  cœur^je  suis  le  plus  malheureux 
des  hommes. 

ARrNDBL. 

J'y  suis  !...  quelque  passion  ? 

ARTHUR. 

Non. 

ARtJNDEL. 

C'est  donc  quelque  chagrin  bien  profcDd? 
quelque  accident  imprévu  ? 

ARTHUR. 

Plût  au  ciel!  Mais  tout  semble  au  contraire 
sourire  à  mes  vœux. 

ARUITDEL. 

t 

J'entends  eiiHn ,  tu  es  malade  de  ton  propre 
bonheur. 

ARTHUR. 

Oui ,  je  l'avoue  que  l'ennui  est  le  plus 


ACTE  I,  SCÈNE  VIÏI.  307 

insupportable  des  fardeaux  ,  que  Texistence 
m'est  à  charge  ,  et  que  je  t'attendais  pour  te 
faire  part  de  aies  résolutions  :  tu  étais  l'ami 
de  mon  père  ,  tu  es  le  mien...  C'est  entre 
tes  ir.ains  que  je  veux  remettre  ma  fortune  ; 
tu  en  feras  un  bon  usage ,  j'en  suis  certain  ; 
et  quant  ù  moi,  ce  soir...  je  n'aurai  plus  be- 
soin de  rien  et  ne  m'ennuierai  plus  :  voilà 
mon  projet. 

ABU N DEL 9  froidement. 

Cela  me  paraît  raisonnable  ,  et ,  dans  la 
situation  où  tu  es,  tu  n'as  rien  de  mieux 
à  faire  :  si  tu  étais  utile  à  l'État ,  à  ton  pays5 
ù  tes  compatriotes,  je  te  presserais  de  vivre; 
mais  ton  immense  fortune  ,  tes  brillantes 
qualités, tes  talens,  n'ont  contribué  nia  ton 
bonheur,  ni  ù  celui  des  autres;  tu  peux  par- 
tir ,  tu  ne  laisseras ,  après  toi ,  ni  reproches, 
ni  regrets  ;  ton  absence  miême  ne  sera  pas 
remarquée. 

ARTHUB. 

C'est  ce  qui  te  trompe  ;  je  veux  ,  après 
moi,  leur  être  plus  utile  que  je  n'ai  pu  Têtre 
jusqu'ici  :  je  te  conûe  ces  papiers,  ce  sont 
mes  dernières  volontés  ;  tu  verras  que  je  n'ai 
publié  personne  ;  que  je  donne  à  toi  ^  ù  tous 
)nes  vassaux. 

àRUIVDBL^  froidement. 
C^c3t là  ta  dernière  volonté? 


3«S  rE5.XUÏ. . 

ART  H  vu. 

Oui,  fîxe  cl  iavariable. 

A  au  If  DEL. 

Eh  bien  î  lu  pouvais  l'épargner  cette  peîoe, 
tu  ira$  i:ieû  à  donner. 

ARTHUR. 

Comment!  je  ne  peux  pas  disposer  de  mes 
biens? 

  R  u  N  i>  c  L. 

Tes  biens  1  Apprends  donc  que  tu  n'en  a* 
pas,  qnc  lu  n^as  rien.  3i  j'ûi  consenti  à  me 
taire  par  tendresse  pour  toi,  rien  ne  m'o- 
bliçe  maintenant  à  cacher  la  vérité ,  et  la^ré- 
solulioa  aura  aii'moins  cet  avantage,  qu'ella 
rendra  au  vrai  comte  Derfort  et  son  nom  et 
ses  biens. 

A  RTB  VB. 

Que  veux-tu  dire  ? 

ARONDEL. 

AIR  ;  ^  soixante  cuis.  (  Diner  de  Maileloa.) 

De  ce  séjour  le  maitre  véritable 
Vit  inconnu  dans  son  propre  château  ; 
Pour  f  enrichir  une  adresse  coupable 
V'ous  échangea  tous  les  deux  au  berceau. 
A  tous  les  yeux,  s^il  i'uiit  que  je  Tafificke , 
Je  suis  lout  prêt ,  et  sans  rien  épargner. 
Son  nom ,  ses  biens  ,  je  vais  louit  lui  donner! 


ACTE  I,  SCÈXE  VI  II.  3o9 

n  est  faenrruK ,  je  vais  le  renrfre  ricUe  ; 
liasse  le  Ciel  qu'il  y  puisse  gagner  ! 

ABTBUR. 

£t  pourquoi  m\i5-tn  aussi  long-tetns  ca-> 
cbé  ce  secret? 

À  A  U  R  D  E  L. 

Je  n'arais  d'autre  garafat^  d'Autre  preare 
que  ma  parole ,  et  ne  f  en  aurais  jamais  parlé, 
sans  la  résolution  dont  lu  riens  de  me  faire 
part. 

▲  RTHVR. 

Oui ,  tu  as  raison  ^  ces  biens  ne  m'appar^* 
tiennent  pas^  il  faut  les  rendre. 

A&VNDEL. 

Je  vais  chercher,  le  véritable  propriétaire  ; 
il  nN'st  pas  loin  d'ici  ;  je  le  rétablis  dans  tous 
ses  droits...  je  viens  après  te  rejoindre...  et 
Dous  ne  nous  séparons  plus. 

ARTHUR. 

Que  dis-tu  ? 

A  R  17  N  D  E  L. 

J'ni  promis  à  ton  père  de  ne  jamais  Ce 
quitter  ;  tu  vois  bien  qu'il  faut  que  nous  par- 
tions ense:able. 

ARTHUR. 

Est-ce  toi  que  j'entends? 

A  R  V  N  D  B  u 

Oh!  moi,  c'cstdilTcrent. 


3io  TENNUL 

▲lA  :  des  Amazoms. 

Sur  mon  destin  je  suis  tranfjuille  , 

Pour  mon  pays  j^ai  combattu , 
A  mes  amis  j^ai  tâché  d^étre  utile , 
'  J^ai  toujours  fait  tout  le  bien  que  j'ai  pa. 
Celui  qui  voit  sa  tâclie  terminée  , 
Au  doux  repos  peut  se  livrer  gaîment  ; 
Bon  ouvrier  j'ai  doi  ma  journée  ; 
Voici  le  soir,  et  je  pars  eu  chantant. 

Sois  tranquille,  je  vais  tout  disposer ,  et 
dans  une  heure  je  viens  te  chercher. 

(  Il  prend  la  main  d'Artiiur  et  sort.) 

SCÈNE  IX. 

*  « 

ARTHUR. 

Il  a  beau  djre...  non ,  je  ne  lui  laisserai  pas 
exécuter  ce  dessein.  Mais  Marie ,  cette  boone 
Marie,  dont  j'avais  promis  d'assurer  Iç  bon- 
heur, je  ne  puis  rien  pour  elle,  il  ne  me 
reste  rien. 

SCÈNE  X. 

ARTHUR,  BIRTON. 

Bl&TOir. 

Afl!  c'est  toi,  mon  cher;  je  suis  enchanté 
de  le  rencontrer,  ]ft  pars  à  l'iastant. 


ACTEI,  SCÈNE  X.  3iï 

▲  RTHVU,  diotrait. 
Ab  !  tu  nous  quittes? 

BlRTOir. 

Oui  5  une  affaîre  indispensable  m'oblige  à 
retourner  à  Edimbourg.. •  et  comme  j'aurai 
besoin  de  mes  fonds...  si  tu  pouvais  me  payer 
en  ce  moment  ta  dette  d'hier  au  soir  ? 

Comment? 

■ 

BIRTON. 

Oui,  ces  cinq  cents  guinées  que  je  t'ai  ga-* 
gnées  sur  parole;  les  aurais-tu  oubliées , 
par  hasard.?     ... 

Non  9  certainement;  mais  je  ne  m'atten* 
dais  pas... 

2LiR*rox* 

Dans  toute  autre  occasionnée  te  ferais  cré- 
dit; mais  dans  ce  moment...  [A  l'oreille.)  On 
peat  te  confier  cela,  parce,  qu  autrefois  tu 
étais  un  amateur.  Je  ne  sais  pas  si  tu  as  re- 
marqué ici  une  Cbarmaiile  petite  fille  que  l'ou 
nomme  Marie? 

ARTHUR. 

Oui,  oui;  éh  bien? 

BIRTON. 

Je  l'emmène  avec  moi  h  Édimbotïrg;  elle 
consent  à  me  suivre ,  et  je  pars  avec  elle  dans 


3*i  r  ENNUI. 

tu  calèche  :  tu  yeux  bien  me  la  prêter?...  CVst 
bien  ;  j'en  étais  sur,  et  j'en  avais  disposé  dV 
Yaiice. 

ARTBVRy  étonne. 

Marie  consent  à  te  soivre  ?... 

BIBTOR. 

C'est-à-dire  y  )*atde  un  peu  à  la  lelti«; 
mais  tu  sais,  ces  vertus  ùe  village  ne  deman- 
dent pas  mieux  que  d'être  un  peu  contrain- 
tes; pourquoi  leur  refuser  ce  plaisir- là  ?  JVt 
appris  qu'elle  allait  aujourd'hui  à  Falkirk;  et 
John  et  Williams,  mes  deux  piqueurs,  les 
plus  hardis  coquins ,  dc5  sujets  inipajablcs 
enfin,  doivent  la  joindre  sur  la  roule,  la  faire 
mouler  dans  ta  calèche  y  et  tu  devines  le 
reste. 

ABTBTTRy  Cma. 

l>irton ,  Yolre  conduite  est  indigne  d'un 
galant  houiuie. 

BIBTON. 

Eh  bien!  qu^est«*ce  qu^H  a  donc?  est-ce 
que  tu  en  es  aussi  amoureux?...  Il  fallait  le 
dire;  je  suis  le  premier  en  date,  ce  n'est  pu 

ma  faute. 

ARTH19B. 

Vous  me  rendrez  raison  de  Tinsulte  fjne 
Tcus  lui  avez  faite. 

B]RT0\. 

Ce  que   tu   dis  là  est  tiùs-bcau,  cl  d»ir.s 


ACTE  I,  SCÈNE  X.  3rS 

toute  autre  occasion  j'accepleniis  ts^  propnsî- 
tion;  mais  dans  ce  moment  ma  vie  ne  m'ap- 
partient pas,  mes  créanciers  n'ont  pas  d*au- 
ire  hypothèque  j  et  je  ne  peux  pas  tromper 
leur  cunfiaHCc. 

NonsieurI 

BIRTOV. 

AiA  :  X>«  sommeiller  encor  ma  chèr$, 

pins  que  toi  cela:  me-  désole  f 

Mais  je  te  le  dis  sans  détours» 

Mes  créanciers  ont  tna  parole  y  y 

Et  bitn  loin  d^exposer  mes  jours , 

J^en  prends  un  soin  iuconcëvable  ; 

Je  dors  bien  ,  je  bois  encor  mieux  > 

Je  passe  eu6a  ma  vie  à  table , 

Tu  vois  ce  que  je  fais  [)our  eux. 

ABTHVR*  , 

Je  te  le  répète^  si  tu  n'es  pas  le  dernier 
des  homiuesK.. 

31&T0If« 

Je  ne  suis  pas  le  dernier  des  hommes ,  et 
je  ne  me  battrai  pas,  ici  du  moins.  Je  gn- 
-  lope  sur  la  route  de  Falkii  k ,  permis  à  toi  de 
in*y  rejoindre;  au  moins  ce  ne  sera  pas  un 
duel 9  ce  sera  une  rencontre  imprévue^  mes 
créanciers  n'auront  rien  à  dice,  et  la  belle 
Hélène  que  nous  nous  disputons  sera  le  prix 
eu  combat.  Adieu  ^  mon  très-cher  nmi. 

(Il  sort.) 

t,  Vaudevillet    4*  ^7 


3i4  r  ENNUI. 

SCÈNE  XI. 

ARTHUR. 

Uola!  quelqu'un!  qu'on  me  selle  un  che- 
viil.  Oui ,  je  le  rejoins,  je  m'attache  à  ses 
pas... 

SCÈNE  XIL 

ARTHUR,  MACARTY. 

MAOARTT. 

Enfi5,  je  TOMS  trouve  donc. 

ARTHUR. 

C'est  vous,  tnon  cher  Macarty...  Danslool 
autre  moment  j'aurais  grand  plaisir  à  toui 

Toir...  ••  ? 

MACARTT)  le  retenant 

Non,  Milord,  fous  né  me  quitterez  pas...» 

ARTBUR. 

Une  aiîaîre  indispensable... 

MAGARTT* 

Je  n*en  connais  pas  de  plus  indispensable 
que  celle  de  réparer  ses  torts  et  d'empêcher 
lu  ruine  d'un  honnête  hommc« 

ARTHUR* 

Que  Toolez-Tous  dire  7 


ACTE  I,  SCÈNE  XII.  3i5 

MACARTT. - 

Depuis  long-lems  voire  insouciance  avait 
lausé  le  plus  grand  désordre  dans  dos  affal- 
es ;  vous  n*avez  pas  même  répondu  aux 
Icux  dernières  lettres  où  je  vous  demandais 
les  fonds  pour  le  paiement  des  ouvriers,  et 
roil.V  qu'en  entrant  à  mon  auberge  je  reçois 
la  nouvelle  qu'ils  viennent  de  se  révolter,  et 
[|u^ils  veulent  tous  s'éloigner, 

ARTHUR. 

'    Seraîl-il  possible  ! 

M  A  G  A  R  T  T. 

Milord ,  je  dois  tout  à  votre  père  ;  c'est  lui 
qui  a  créé  cette  manufacture....  qui  depuis  a 
daigné  m  y  associer... 

AIR  :  Çç  Magistrat  irréprochable, 

Gr^ce  à  lui ,  d'un  nom  respectable 

Je  me  suis  montré  le  soutien  ; 

Mais  votre  indolence  coupable 
A  renversé  son  ouvrage  et  le  mien.  (^i<0 

Milord ,  vous  m^ôtez  plus ,  je  pense , 
Que  ne  m^avait  donné  mon  bienfaiteur  \ 

Je  ne  lui  dois  que  Topulence , 

£t  vous  me  ravissez  riionneur. 

ARTQTTR. 

I 

Non ,  mon  ami ,  non  ;  tout  peut  encore  se 
réparer...  Parle,  dispose  de  mol;  que  veux- 
tu  que  je  fasse  ? 


3iê  L'ENNUI. 

HAGARTT. 

Que  TOUS  daigniez  seulement  parler  auc 
ouvriers;  ils  tous  connaissent,  ils  tous  ai- 
inent;  un  mot  de  tous  les  calmera,  leur  fera 
reprendre  leurs  travaux...  Pendaut  ce  tenus, 
je  m'occupe  à  rassembler  les  fonds  nécessaires 
pour  les  payer...  Demain,  je  serai,  je  l'es- 
père ,  en  mesure  ;  mais  ne  perdez  pas  un  oio* 
mcDt,  ou  ma  ruine  est  déclarée. 

ARTHCR. 

Oui ,  je  le  le  promets ,  je  te  le  jure  ;  fais 
tout  prépaier.  pour  mon  départ...  quatn 
lieues,  c'est  i'alîalre  d'un  instant. 

{hlêcuij  mut) 

SCÈNE  XIU. 

ARTHUR,  pois  ARUNDEL. 

ARTaVR. 

Et  ce  duel...  malheureux  que  je  suis...  fi 
f  allais  succomber...  Deux  heures...  je  ae  de- 
mande que  deux  heures...  que  le  Ciel  me  les 
accorde,  et  je  serai  trop  heureux. 

AR  vif  DEL,  froidement. 

Je  Tiens  te  chercher;  quand  tu  roudras» 
nous  partirons. 

ARTBVR,  TÎycmeot. 

If  on  9  mon  ami;  non,  c'est  ito  paisible  ptir 


ACTE  I,  SCÈNE  XIV.  3i7 

e  nrroment;  quelques  înstans  de  plus  oa  ds 
Snoins  ne  chang^eront  rien  à  ma  résolution  ^ 
st  dans  uue  heure  ou  deux  je  suif  à  toi. 

ARUHDVL. 

Diable!...  Mais  comme  tu  dis  y  ça  peut  se 
remettre...  Voici  d'ailleurs  tous  tes  anciens 
viissaux  ;  tu  vas  Leur  faire  tes  adieux 

SCÈNE  XIV. 

%m»  i^&BG&DEirs  >  ROBIN  9  PkJ9kv%f  rATSiiiRl»* 

Fragment  dé  Jean  de  Pariât 

GttoevR. 

GtÂif  Ds  dieux  !  quel  événecnenl  ! 
Quoi  l  Monseigneur,  on  prétend 
Que  TOUS  devez  tout  à  Theure 
Partir  de  cette  demeure  « 
Et  quitter  notre  pays  ?    . 

AaTKUR. 

H  est  trop  vrai ,  mes  aini5^< 

CHOBUlt. 

Ah  !  pour  nous  tous  quel  malheur  ! 
Vous  nous  quittez  ,  Monseigneur. 

ARTHUR ,  bfts  ^  Aruadel. 
Oui  9  je  pars...  et  toi  demeure  ^ 
Je  suis  il  toi  dans  une  heure. 

ARUIVDKL  ,  k  part. 

VtsX  ftnrt  bien ,  tïae  heiux:  ou  deux  ^ 


3i8  L^ENNUI. 

Oui  y  déjà  cela  va  mieux. 

Mais  je  ac  dois  plus  prétendre 
Aux  bouneurs  qu^on  vient  me  rendre  î 
Je  ne  suis  plus  maitrc  ici , 
Je  ne  suis  que  votre  ami. 

CHŒUR. 

Que  dit-il?  parlez  de  grâce. 

▲RVNDBL.- 

D^tm  autre  il  avait  la  place , 
Et  hieatôt  dans  ce  hameau 
On  va  vous  faire  connaître 
Celui  qiù  de  ce'château 
Est  le  véritable  maître. 

CHOEUR. 

Dci  village  et  du  château 

Quel  çst  donc  le  nouveau  mallte? 

RORINk  . 

£ncore  un  qui  va-t-êtr'  maître  ! 
Quand  donc  ce  sVa-t-iVuioa  tour^ 

ARJHUR. 

Oui ,  je  peux  perdre  en  oe  jour 
Et  mon  nom  et  ma  richesse , 
Mais  pour. vous  j^aurai  sans  cesse 
Toujours  la  même  tendresse. 


ACTE  I,  SCÈNE  XV.  3fo 


SCÈNE  XV- 


,BS  pnÉcÉDENS,  M  AC  ART  Y  d'un  côté  , 
DEUX  VALETS  (le  Tautre. 


MAGARTT. 

Allons  qvi^on  se  dépêche  ; 
Partons ,  il  faut  en  Hoir. 

ARTHUR,  trouMe  ,  aux  paysani* 

Mes  amij !...  oui ,  je  vous  quitte. 

(aux  Valets.) 
Je  VOUS  suis. 

(a  Maeorty.) 

Nous ,  partons  vite; 

(A  Aruudel.) 
Je  reviens  de  suite , 
J^en  perdrai  Tcsprit  vraiment. 

CBOSUK, 

Oui ,  Monseigneur,  partez  vite , 
Ne  perdez  pas  un  moment. 

MACARTY. 

Allons  ,  la  voiture  est  prête, 

ARUNDEL. 

C'est  fort  bien  ;  luie  heure  ou  deux  ; 
Oui ,  déjà  cela  va  mieux. 


m 


lào     L'E5XUI.  ACTE  I,  SCfeîïE  XT. 

f  AKTRnit. 

Vniaient ,  jVo  perdrai  la  tête  ; 
A  rcTenir  je  m''apprêle. 
Grands  Dieux. ,  dopoez-noi  le  toat 
De  remplir  tous  mes  semiens! 

AROKDEL. 

Tout  Ta  bien,  ma  ruse  est  prête, 
Tai  mon  projet  dans  la  tête  j 
Encore  quelques  instans , 
£t  je  tiendrai  mes  sermens. 

BQBIV. 

Un  nonrean  seigneur,  qneQ*  fête  ! 
A  bien  danser  je  ra^appréte  » 
Je  prendrai  donc  da  bon  tems  ^ 
Et  nous  serons  Ions  contens. 

MXCAVTT, 

Partons ,  la  Toiture  est  prête , 
Mus  ne  perdez  pas  la  tête  p 
Nous  awtma  eocor  le  ti  m$ 
De  remplir  tous  nos  sermens. 

CBOBUR, 

A  nons  quitter  il  8^a|>prête , 
Pour  le  Tiliage  plus  d*  fêle ,     ^ 
Malgré  nos  nouveaux  sermens , 
Nous  TOUS  aimions  en  tout  tems. 

(  Ib  lai-teBl  tous  ea  sutTaut  Arthur  qui  «erre  U  waia  A'Antf- 
det ,  ol  «'éloi^e  trèr«(ité.  ) 


riir  BfF  riEXiEii  acte. 


ACTE  SECOND. 

UcÊatàéeot. 


SCÈNE  I. 

AKVNDEL,  ROBIN^  «ree  «a  babU  tté$- 
riche ,  nais  a/ant  conservé  ie  reste  de  soo  premier 
^co^tttiue. 

B01I1V. 

CoHtxBNT  !  M.  Àrundel ,  e  est  moi  qui  «si  t« 

seigneur. 

Oui  9  mon  garçoQ  »  et  tu  V»§  touiotirs  été. 

AOBiir. 

Commenl  !  je  le  suis,  et  de  naîss:ince^..^. 
foilà  le  plus  drôle...  Je  tous  demande  com- 
ment mon  père  qui  était  pajsao  a-t*îl  tù 
Tesprit  de  faire  un  seig;neur? 

R'eii  de  plus  aisé  à  l'expliquer  ;  mais  si  tu 
eii' doutes... 

Koaiw. 

I>ii  fout,  du  tout»  mon  IJfeiiy  je  tchis  croM 
sur  p.Arole  ;  tous   l\»fe%  dît^  ça^  solSt^   M 


32a  L'ENNUI. 

il'est  pas  moi  qui  TOudraU  y  regarder  après 
tous;  mais  voyez  queu  reTiremeot...  II 
n'y  a  pas-  trois  heures  que  j*étai$  à  arroser 
les  laitues  de  Monseigneur ,  et  maiuteuanl 
je  vas  les  manger  pour  mon  propre  compte. 

▲AUNDBL* 

Ça  te  fait  dpnc  plaisir? 

•    BOBIN. 

Parbleu  !  il  n'y  a  qu'une  chose  qui  me  fait 
de  la  peine,  c'est  de  ne  pas  raroir  su  ce  ma- 
tin ayant  mon  déjeuner;  ça  aurait  fait  une 
fameuse  différence. 

Tu  uVs  donc  pas  maûgé  ? 

ftOBlN. 

Au  contraire,o'estque)em'en  suis  donne- 
nt qu'il  faut  que  j'attende  à  ce  soîr  pour  aroir 
de  l'appétit...  Qu'est-ce  que  je  m'en  rais 
faire  jusque-là? 

À&VHDEL. 

Ehhîen!  promène-toi. 

ROBIN. 

Le  beau  plaisir;  me  promener  dans  mes 
jardins,  et  je  les  connais  comme  mes  pochesj 
je  les  ai  assez  ratisses» 

ARUKDEK. 

Ya  dans  la  bibliothèque  y  prends  un  linv. 


ACtE  II,  SCÈNE  1.  3aâ 

ROBiN. 

Faut  d^abord  que  j'apprenne  »  et  je.  n'ai  ja" 
nais  eu  de  goût. 

A  R  u  If  1^  E  L< 

Tant  pis* 

Tant  mieux,  parce  que,  si  j*âîiilaÎ5  à  lire  ^ 
ie  donnerais  daos  la  lecture  .«et  ie  ne  ^peuic 

Ift  souffriré  ^  ;^       ,  •> 

Monte  à  cheval. 

ROBIIÏè 

Et  si  je  tombais ,  moi ,  ;qui  fie  yais  .qu*â 
6ne;  la  santé  d'un  seigneur  est  autrement 
préciejjse  que  celle  d'un  jardinier^  je  ne  peux 
pas  comme  ca  l'exposer-  '' 

ARtJNDEt.      *'        '" -' 

Eh  bien!  va  voir  les  vassaux...  Ne  disais-» 
tu  paseeiiîaiin  (Jue,  si  tu  (étais  puissant >  tu 
serais  juste  ^  aifable  ,  généreux? 

•       ROBlNé 

Oh!  ça,  c*est  vrai. 

AIR  :  Du  nouueau  ieigtiÉu1\ 

De  mes  droite,  en  maître  équitable, 

Déjà  je  me  suis  ioforhaé  : 

J'ai  seul  ici  V  droit  d'être  aimable , 


34  L'EJrifUL 

Têà  V  droit  d'être  toujours  «me  | 
J^OBS  aussi  le  droit  de  tout  prendre^ 
Eftfti  jusques  «i  coilectcur 
Que  j'ai  le  droit  de  faire  {ïeiidvfr-: 
Ah  !  le  joli  droit  du  seigneiir4 

Et  je  vais  commencer  par  «n  user;  son  if- 
faire  est  booDe^ 

J-en  suis  fâché,  mais  c'est  impossible;  id 
eô  est  obligé  de  '  juger  les  gens  araot  de 
les  cou  damner. 

101IK« 

Au  moins  »  si  )*âTaîs  là  quelqu'un  de  mei 
gens,  ndus  louerions  une  partie. 

▲  auvDBt. 

Fi  donc!  ça  ne  se  peut  pas...  «t  la  di^iit 
de  seigneur  et  le  décorum^ 

Ça  n'  se  peut  pas»  çb«%'  se  peut  pas..* 
alors,  qu'est-rce  que  |e.  peux  donc >  appre- 
tiet-le  moi? 

Très-Tolontiers. 

Àia  :  On  dit  tpi*€n  marùt^fe. 

Boire  la  naît  entière, 
*    S'éveiUer  à  o&idi  ^ 


ACTE  II,  SCÈNE  I.  3a6 

Bâiller  dans  sa  bergét-ë 
Auprès  de  milady  ^ 
Briguer  dans  les  communes 
li''honDeur  d'être  noitimé  ; 
Se  montrer  aux.  tribunes, 
En  descendre  assommé  ; 
Voilà  quels  sont  d'abord 
Les  devoirs  d'un  mi  lord. 
Par  le  Afoming  Chroniclé 
Kanimcr  sa  gaité , 
Arroser  chaque  article 
D^une  tasse  de  tlié  ; 
Pour  que  Toii  vous  renomme  i 
Acheter  du  crédit , 
Ainsi  que  de  Pesprit^ 
£t  se  croire  un  grand  homme 
Quand  le  journal  Ta  dit. 

Enfin ,  mon  cher... 

Devant  ses  dulcinées , 
£oxer,  fier  comme  un  roc , 
Placer  mille  guinées 
Sur  la  tête  d'un  coq; 
Toute  la  matinée 
Courir  à  New-Market  « 
Et  finir  la  journée 
D'un  coup  de  pistolet  ; 
Voilà  quels  sont  encor 
Les  plaisirs  d'un  milord. 

ItOBiir. 

Ah!   que    c'eet    ennuyeux    de    »*amu5eï 
comme  ça  ! 

F.  Vaudevilles.   4*  .    ^8 


3a«       ;  ,      L'ENNUI. 

SCÈNE  II. 

LIS   «fticÉDE|v$9  MARIE^  temesioufilée. 

EOBlir. 

C*£ST  mam^selle  Marie. 

M  A  AIE. 

Ab  !  Robin... 

ARTINBEb. 

Vous  Yoilà^  lua  cbère' enfant. ..  Eli  bîeoî 

Arlhur?... 

MA&lV. 

,    Ail!  mon  Dîcul  si  vous  saviez  ce  qu'il  i 
fait  pour  moi. 

AIR  :  f^ers  le  ùmple  de  Vhjnnen, 

Uq  indigne  ravisseur  , 

MVutrahialt  malgré  mes  Yarraes; 
Quand  j^eutentis  le  bruit  de^  armes 
Et  la  voix  de,Mon6'eigneur... 
Birton  Toutrage  et  s'avance , 
Mais  soudait)  uiilord  s'élaace , 
£t  malgré  sa  rcsicilance 
Le  désarme... 

BOBIir. 

Ob  !  sur  ma  foi , 
ht  c^  réck  j^ai  Tarae  émue , 
Et  je  veux  qu'il  continue 
A  s^battre  toujours  pour  laoî* 


ACTE  II,  SCÈNE  III.  l2^ 

▲  RVN^ELj  virement, 
[l  s^eAt  battu!  çu  va  bien...  et  il  n*èst  pas 

MàRIB. 

Non  y  Dieu  merci. 

Tant  mieux  )  tant  mieux  ..  Cependant  un 
itit  coup  d'épée^  oa  n'aurait  pas  mal  fiiit; 
ais  il  faut  se  contenter  de  ce  qu*on  a. 

ROBllf. 

Il  s'est  battu  !  comment  diable  a-t-il    fait 
m  compte  j  lui  qui  dormait  toujours. 

A  R  U  9  D  E  L. 

Et  quVst  devenu  notre  fou  de  baronnet  ? 

MARIE. 

M.  Birton?.,.  il  s'est  en  allé  d'un  coté, 
lïonscigncur  a  repris  au  galop  la  route  de 
^'alkirky  et  moi  je  suis  revenue  avec  M.  Ma- 
;arty  dans  la  calèche  de  Milord.  / 

ROB19; 

Dans  ma  calèche,  c'est  très-bien. 

\  ARVNDELy  réfléchissant. 

M.  Macarty,  ce  riche  manufacturier  que 
\W  vu  m  tantôt...  si  j'allais...  je  ne  le  con* 
uuî>  p'is,  iiiaii  c*est  égal. 


328  TENNUI. 

r 

AI9  :  Époux  imprudent ,  Jils  rebelle. 

Il  est ,  dit-ua ,  plein  crhonneiir,  de  franchise ,         I 
Jamais  n^obligeant  à  demi  ; 
Que  même  ardeur  nous  éicchrise , 

Et  conjurons  pour  sauver  un  ami. 

Puisque  Ton  voit ,  dès  qu'il  faut  nous  surprendrry 
De  raccord  parmi  les  méchaos , 
Pans  leurs  cumplots ,  dlionni'tes  gens 
Au  premier  n)ot  doivent  s'enlendre. 

(U  fort.) 

SCÈNE  III. 

MARIE,  ROBIN. 

R  0  B  I  ir, 

Altovs,  «niions,  Wlà  un  combat  qui  me 
fait  Itoniieiir;  il  n'y  a  qu^ine  chose  qui 
cloche  ;  Ma  m 'selle,  vous  dites  toujours  Mon- 
seigneur, milord  Arthur,  et  à  moi,  RoMii 
tout  court;  j*  vous  1*  passe  ,  parce  que  non» 
sommes  seuls  ;  tuais  en  compagnie  faudra 
vous  observer. 

MÀtllE. 

Comment  !  Robin  ,  il  serait  possible.!.. .ce 
qu'où  vîtrnt  de  niè  dire  serait  vrai,  c'e>t  toi 
qui  es  le  seigneur? 

R0BI5. 

Dam'  quelle  quoslîon  î...  est-ce  que  roui 
»e  voyez  pas  Ihabil  brodé? 


ACTE  II,  SCENE  III.  3a9 

£t  lord  Arthur  ? 

R  0  B I  ir. 

"N'est  plus  rien  dans  le  chuleau ,  Mam'- 
selle  ;  tout  est  à  irioi,  sa  furtuue^  ses  hon- 
neurs 9  SCS  décorations... 

MABIE. 

Ses  décorations!...  comment!   tu  oserais 
porter?.,. 

ROBIN. 

Eh  bien  !  ses  blessures  donc,  ses  blessures 
qu'il  a  reçues  en  Portugal,  si  ça  ne  ïiie  comp- 
tait pas,  ça  serait  joli. 

AiA  :  Va,  d*une  science  inutile. 

Tout  c'  qu'il  a  fait  d*  puis  qu'il  est  V  maître , 
Doit  me  profiter,  c'est  mon- bien. 

MARIE. 

Pour  r  remplacer,  il  fau(!rait  étie 
.    Doué  (l'un  mérite  égal  au  sien. 

AUBIN. 

Qii'  vous  avez  donc  la  têt'  rélive  I 
tsj)rit,  mérite  ,  et  cœlera.,. 
C'est  mui  qu'en  ai  puisque  j'arrive , 
Il  n'en  a  plus  puisqu'il  s'en.  va. 

MABIE. 

AbJ  mon  Dieu  !  mon  Dieu,  je  ne  pourrai 
jamais  m'habiluer  à  ne  pas  l'jippeier  Mon- 
seigueur. 


Comment!  Mam'selle^.. 

J^en  5UÎS  fâcbce ,  Robin  ,  mal»  je  ne  peux 
pas  changer  mes  affi-ctions  -du  jour  au  feu- 
demiiiii,  et  oublier  aiosi  celui  qui  fut  notre 
bieuiuîteur. 

Il  o  B 1  if  9  en  colère. 

Eh  bien!  t'ià  c*  que  )'  n'cnlcnds  pas, 
Mam'selle ,  il  n*j  a  que  moi  de  maître  ici  ; 
il  n*j  a  que  moi  d'aimable,  de  respectable, 
et  si  Tou  m*  fait  mettre  en  colère  •  je  saurai 
bien  vous  prguver  aussi  que  je  suis  votre 
bienfaiteur...  c'est  que  je  chasserai  tout  le 
monde,  moi. 

MARIE. 

Ah!  voilà  Milord;  oui,  c*est  hii...  RobîOy 
Robin,  mais  lève-toi  donc,  c'est  Milord. 

R  o  B I K  ,  se  levant. 

Là,  i'  vous  y  prends  encore...  certaine- 
ment j'. vas  m'  lever,  mais  vous  n'  pouviex 
pas  dire  :  Monseigneur,  iève-toi  donc? 

SCÈNE  IV. 

I 

tBt    PRÛCBDB9S,    AKTHURy   couvert  de 

poussière. 

Ji  1 R 1 B  9  courant  à  lui. 

Miu>R»,  TouJi  voilà  enfin  de  retour? 


\ 


ACTE  II,  SCÈNE  IV.  33i 

A  R  T  B  r  &  y  (Van  air  plus  gai. 

Ouï,  ma  chère  enfant,  ouï,  Marîe,  ei , 
grâces  au  Ciel,  j^ai  réussi  dans  l6ut  ce  que 
j'aViiis  entrepris. 

M  A  B I  F. ,  avec  intorct. 

Vous  ayez  l'air  bien  fattgné... 

AETBSB9  gatuent. 

C'est  que  je  me  suÎ5  doftné  une  peine  de- 
puis troi»  heures!...  pas  une  minute  de  repo?, 
toujours  à  cheval,  six  h'eues  au  gfrand  galop  ^ 
un  tems  superbe,  des  chemins  maj^nifiques  : 
c'était  une  pr(ii|3enade  délicieuse;  j'ai  tu  tout 
ie  mjonde.  {Riant.)  Aussi,  je  n'en  puis  plus; 
je  suis  harassé. 

M  A  fi  I  E  y  approchant  un  fauteuil. 

Âsseyez-YO^s  donc...  îqus  devez  avoir  be« 
SOJQ  de  prendre  quelque  chose. 

'A  R  T  H  V  fi. 

Ma  foi,  ouï,  le  grand  atr  et  la  course 
iTi'ont  donné  une  faim  de  tous  les  diables. 

MARIE. 

Xâ...  et  il  n'y  a  peut-être  rien  de  prêt. 

ARTHUR. 

Bah!  un  morceau   de  pain,  une  bouteille* 
de  porter;  la  première  chose  venue. 

MARIS. 

Je  cours  chercher  ce  quMI  vous  faut. 

(Elk  fort.) 


33a  L'ENNUL 

SCÈNE    V. 

AKTHUR,  ROBIN. 

4KTHU&. 

Bonite  petite  Marie!  que  je  me  félicUe  !... 
{Il  aperçoit  Robin,)  Ah  !  uh  !  te  Yoilà,  Robio.^ 
Eh  bien  !  mon  garçon  y  commeot  te  trouves- 
tu  de  ta  seigneurie?...  commeoces-tu  à  tj 
faire  ? 

^o  DiNy  le  chapeaa  à  la  main  et  d'un  aîrembam» 

Oh!  Monseigneur,  vous  êtes  bien  bon;  p 
xne  donne  bien  un  peu  de  tracas;  mais  je 
p'  m'en  plains  pas. 

AfiTHUR,  s^asseyant. 

Je  viens  de  travailler  pour  toi. 

ROBIN,  toujours  debout . 

Oui,  Monseigneur,  j*  sais  que  vous  arei 
ed  la  complaisance  de  vous  battre. 

SCÈNE  VI. 

I.E  S  PRÉCÈDENT,   M  Â  Pi  I  E ,  en  eotraot ,  poK 
stir  la  table  un  plati  au  avec  du  pain ,  du  vin ,  etc. 

ARTHUR» 

J'ai  fuit  mieux  que  cela  ;  j'ai  vq  les  ou- 


ACTE  II,  SCÈNE  VI.  533 

i^îers  de  la  manufacture  du  bon  Macarly  :  ils 
v">iit  rentrés  dans  le  devoir,  et  les  travaux 
ront  reprendre  avec  une  nouvelle  activité... 
£n  passant  à  Falkirk,  j*ai  vu  aussi  le  receveur 
jes  taxes,  et  j*ai  obtenu  pour  les  vassaux  du 
L^omté  une  diminution  que  j'avais  négligé  de 
réclamer;  enfin,  j*aî  fait  en  ton  nom  ce  que 
î^auraîs  dû  faire  plus  tôt  pour  moi-même  et 
pour  le  bonheur  de  ces  bons  villageois;  mais 
"vaut  mieux  tard  que  jamais. 

AIR  :  de  VAuare. 

Mon  cher,  grâce  à  cette  journée , 
On  iM'specte  déjà  ton  nom  \ 
Mes  soins  dans  une  maûnée 
Ont  tout  change  dans  le  canton. 
Ou  te  bénit  dans  ce  doni^iine. 

JtOBIN. 

Soit ,  je  me  laisserai  bénir , 
Et  ça  )jù!  fait  (rautàut  plus  d^  plaisir  , 

Que  ça  n^  ni^a  pas  coûté  grand  peine. 

(Bas  M  Mario.) 

Là,  voyez-vous  encore  ce  que  je  viens  de 
faire,  les  taxes  diminuées.  ^ 

MARIE. 

Monseigneur,  vous  êtes  servi. 

ROBIN. 

Atlcndez  donc  que  j'approche  cette  table. 


33't  rEXNur. 

A  i  T  H  U  ft  9  mangeant  avec  YÎTacité. 
Bien,  bien. 

MAftiR,  le  servant. 

Je  suis  désolée  de  n'avoir  trouré  que  ça  â 
Tudice. 

A  RTnt;  R ,  mordant  dans  son  paie. 

ExceUent!  un  verre.  • 

a  0  B I  if  ,  prenant  une  servielfc  et  Tessuyant. 

Voilà...  et  c'te  bouteille  qui  n'est  seule- 
ment  pas  débouchée. 

(Il  la  di(f bouche  et  verse  à  boire.) 

A  HT  H  m. 

Délicieux!  Je  n'ai  jamais  rien  bu  de  meil' 
leur. 

(Ilmanj^e.) 

R  0  B I N  9  le  rcgartîant  avec  envie. 

Comme  il  mange  !...ost-il  heureux  d'avoir 
faim  comme  ça!  et  moi,  fa^it  que  j'attende 
tmco're  deux  heure»  pour  mon  appétU  du  dî- 
ner. 

M  A  R I E  9  regardant  vers  le  côté  gauche  en  allant  à 

iirthur. 

Ah!  Monseigneur! 

ROBIN,  lui  fesant  des  signes  de  s^adresscr  à  lui. 

Kh  bien  !  eh  bien  !  encore?  {A  Jrthur.)  Dî- 
tes-y  donc,  je  vimis  prie,. qu'elle  s'adresse  I 
moi ,  \t  suis  le  seigneur. 


ACTE  II,  SCÈNE  VII.  335 

ARTHCA. 

C*e8t  trop  juste,  parlez  à  Monsieur. 

MARIE. 

Eh  !  mon  Dieu  ,  voyez  plutôt  d*\ci  :  c'e^l 
un  coiisiabfe  et  de»  gens,  de  justice....  Si 
c'était  pour  ce  duel,  si  on  venait  arrêter 
Monseigneur! 

B  0  Blir ,  se  levant  effrayé. 
Eh  !  arrêter  Monseigneur!...  c'est  que  ça 
n'est  plus  ça  du  lont...  Qu'est-ce  q<ie  ça  veut 
direP...  Un  conslabîe  dans  mon  château!... 
{Fièrement.)  Je  m'en  vas...  {A part.)  Je 
m'en  vas  me  oach-er. 

(ns'eofuil.) 
M  A  R 1 E  9  coaraat  à  Artiiiic:. 

Et  moi,  je  ne  vous  quitte  pas. 

ARTHUR,  regardant  par  le  food. 

Je  ne  me  trompe  point ,  Mâoarty  est  an 
milieu  d'eux,  et  il  a  l'air  de  leur  donner  des 
ordtes. 

SCÈNE  VU. 

iE»  ÏRKCÉDBNS,   MACARTY. 

MAGARTY.àla  coulisse. 

Qu'on  s'empare  de  toutes  les  issties;  jevou» 
répète  qu'il  t\st  ici.  [Se  frottant  tes  mains,) 
Alil  Aiilord!  je  vous  trouve  à  propos. 


336  L'ENNUI. 

ARTBUA. 

Mûrie,  laisse- nous.  J 

Mais,  Monseîo^neur... 

A  &  T  H  tJ  B. 

Laisse-Dous  ,  te  dis-je  ? 

MAGARTT,  à  part. 

Forme...  Portons>lui  les  derniers  coups. 
(  Marie  sort  par  Ja  droite ,  en  ténioigoant  sonioqoié- 
tude  j  elle  se  montre  de  tems  en  tems  pendant  la 
SGcne  suivante.) 

SCÈNE  VIII. 

ARTiaiUa,  MACARTY, 

A  B  T  H  V  &. 

Eh  bien!  mon  cher  Macartj,  qu'y  a-l-il 
donc.^ 

MAC  ARTT. 

Pardon,  Milord,  si  je  vous  ai  laissé  brus- 
quement... nos  affaires  sont  en  bon  train. 

AILTHVR. 

Vous  croyez?...  Mais  on  vient  de  me  par- 
ler de  coustable... 

M  AC  ARTT. 

Que  cch  ne  vous  inquiète  pas;  c*esl  moi 

qni  Tai  fait  venir. 


ACTE  II,  SCÈNE  VIII.  33; 

ARTHUR. 

'Vous?... 

UAGARTY. 

Pour  cette  lettre  de  change  de  trois  cents 


^uioées. 


A  B  T  H  r  K. 

Ah!...  votre  débiteur  est  donc?... 

macàrty. 
Ici  ;  je  le  suivais  à  la  piste. 

ARTBVR. 

Yl  est  au  château  ? 

MACARTT. 

Précisément. 

A  R  T  B  U  R. 

Et  VOUS  allez  le  faire  arrêter  P 

MACARTY. 

Sans  difficulté...  Je  ne  demande  pas  de 
gnlce  pour  mes  engagemens;  mais,  ventre- 
bleu!  je  veux  qu*on  soit  de  même,  et  sir 
Arundel  va  aller  passer  quelques  mois  à  la 
Tour. 

ARTHUR  9  troublé. 

Arnndel!...  mon  meilleur  ami  !...  Quoi! 
c^esl  lui  ?...  En  effet ,  il  me  parlait  ce  malin 
de  quelques  lettres  de  change...  Mais  je  ne 
souffrirai  pas...  M.  Macarty ,  je  me  rends  sa 
caution. 

F.  Vaudeyillei.  4*  39 


338  ^  L'ENNUI. 

ItfjLCARTT. 

Vous,  Mîlord?  j'accepte. 

Étourdi  !...  J^oublîe  que  }e  n^ai  plus  neni 
que  je  ne  suis  plus  rien ,  que  je  ne  puisdi- 
poser  d'un  schelllng...  Jen'ai  plus  de  fortuBff 
il  est  vrai ,  mais  suiS'-je  d<>fic  incapable  à'tû 
acquérir,  de  travailler?...  M.  Macarty^jese 
vous  demande  que  du  tems ,  ou  plutôt...  OU 
quelle  idée .'...  Vous  êtes  à  la  tête  de  plusievn 
mauu  factures? 

MACAUTT. 

Oui. 

ARTnUK. 

Que  donnez-vous  â  vos  ouvriers.' 

HACARTY. 

C'est  suivant  :  je  pab  bien  les  bons  tn* 
Tailleurs  f  peu  le$  médiocres ,  et  je  rearoie 
les  paresseux. 

ARTHVB. 

Donnez-moi  une  placé  d'inspecteur,  de 
chef  d'atelier  9  de  teneur  de  livres^  ça  mVst 

égal. 

MACAftTT. 

Scrieuseraent? 

ARtiua. 
P*>urquoi  non  ? 


ACTE  II,  SCÈNE  VIII.  339 

AI&  :  </«  Julie» 

CXïtt  Ârtmrlel ,  en  ce  pérîl  extrême-. 
De  te  servir  mon  cœur  me  fait  la  Và\ 
l^our  De  devoir  ton  salut  qu^à  moi-mcme ,    . 

!       Je  serai  fier  du  plus  modeste  emploi  ; 

\       Oui ,  sans  rong^ir,  au  travail  je  me  livtv. 
Je  nVrlistais  pas  jusqu'ici  ; 

j  Mais  je  vais  sauver  uo  ami , 

^         D'aujourd'hui  je  commence  à  vivre. 

\  «AGARTT. 

Parbleu!   vous  mVnchantez...  J'ai  juste-' 
HKient  une  place  dé  premier  comiiii.s  ;  ceat 
gainées  par  an  et  le  logement  ^  ça  vous  cou- 
yient-il  ? 

ARTHUR. 

A  merveille  ! 

M  A  C  \  B  T  T. 

Je  ne  vous  en  puieraiqce  k)  moitié  pendant 
six  ans  »  et  votre  ami  sera  quitte  à  (a  sixième 
Muuée.  Ah!  çà,  voyous,  un  petit  bout  d'écrit; 
je  PC  connais  que  cela,  moi. 

ARTHUR. 

Tout  ce  que  vous  voudrez.  (  Pendant  qut 
Macarty  écrit  à  la  hâte,  Arthur  je  promène 
vivement  en  se  frottant  les  mains.  )  Ce  bon 
Arundel!...  Jamais  ce-  jour  ne  j}'elV:icera  de 
uja  mémoire  !...  J'éprouve  une  joie ,  un 
bonheur  que  je  ne  me  croyais  plus  capable 
de  lesseulir. 


34o  L'ENNUI. 

MACARTT9  lui  présetitant deux papien. 
Tenez  y  je  crois  que  cela  suffit. 

ARTHUR,  prenant  b  plume. 
Très-bien,  très-bien! 

M  A  G  A  R  T  T. 

Ah!  çà,  vous  n'avez  aucun  regret? 

ARTHUR. 

Des  rep[rets,  quand  vous  nne  sauvez  plus 
que  la  vie  !...  Je  si^ne  aveuglément. 

(  ïls  prennent  chacun  un  des  doubles  de  récrit  ) 

MACARTY,  lui  prenant  la  maio. 

Bien,  M.  Arthur,  je  vous  estime  ,  je  vons 
honore  :  voyez-vous ,  je  respecte  beaucoup 
les  titres,  les  distinctions,  mais  cela  avant 
tout,  oa  ne  vous  àbandonnejamais,etoa  vant 
mieux  que  le  reste...  Sans  adieu;  dans  une 
heure  je  me  remets  en  route,  nous  parti>i)S 
ensemble,  je  vous  instulie  à  ta  fabrique,  et 
corhleu!  vous  verrez  qu'on  peut  ?ifre  heu- 
reux dans  tous  les-  états ,  quand  on  est  honnête 
et  qu'on  fait  son  devoir.  Serviteur. 

(  Il  sort  j   Marie  reparaît,  et  s^approche   lentencR/ 

d'Arthur.  ) 


ACTE  II;  SCÈNE  X.         /.    34i 

SCÈNE  IX. 

ARTHUR. 

Il  a  ma  foi  raison  9  et  je  raïs  traraîller 
tnainlcnant  avec  une  ardeur 9  un  plaisir!... 
Cent  guinées  par  an!  cinquante  poiir  Arun- 
del  9  cinquante  pour  moi  ^  c'est  trop  juste... 
Kh  bien  !  je  ne'serai  pas  à  plaindre...  cin- 
quante guinées  !  je  n*aurai  pas  de. quoi  faire 
le  seigneur,  mais  enfin  on  peut. être  heureux. 
Macarty  l'est  bien;  tout  respire  chez  lui  un 
air  de  bonheur...  il  est  vrai  qu'il  a  une  fem- 
me, des  enCans  qui  i'aiment.  qui  le  chérissent, 
tandis  que  moi...  £h  bien  !  je  n'avais  pas  en- 
core pensé  à  cela...  autour  de  moi,  personne! 
(  //  se  relourne  et  voit  Marie  près  de  lui.  )  C'est 
toi,  Marie? 

SCÈNE  X. 

ARTHUR,  MARIE. 

VARIB. 

Il  est  donc  vrai,  vous  nous  quittez? 

▲  RTHUB. 

Oui,  Marie,  et  c'est  moi  qui  serai  le  plus 
à  plaindre;  car  toi^  tu  resteras  ici ,  tu  t'éta^ 


blitas  dans  ce  village. 


ao- 


343  rE*'«rçur. 

BARIE»  Tiveraent. 

Moi  ?  jamnis»  ftliford;  ne  tous  rai-je  pas 
dit  ce  inatiu? 

ARTBOA,  la  regardant  aveclDlêrêt 

En  effet.  (  ApT'ès  un  silence,  )  Marie,  je  fotf 
ton  «ini,  ton  meilleur  ami...  parle-moi  frao- 
chement ,  n'aùrais-tu  pas~de  Tamour  pour 
quelqu'un?... 

MAftlï)  bésitant. 

je  crois  qu*oui. 

1 KT  H I!  K9  èmxx ,  et  dootoureitsemenC. 

Comment!  j'aurais  deviné  juste  ? 

AiH  :  Je  i'aimend.  <  deSlangiiû.) 

Quoi!  vous  aimez  sans  espéraoee? 

Attcnne. 
Son  rang  peut-être  empêche  un  nœud  si  doux? 

MARIl. 

IVon  y  grâce  an  Ciel  ^  sa  naissance  est  cnramune. 

ARTflVl. 

£t  aDjez-TOus  qu*il  ait  de  la  fortune  ? 

Pas  plus  que  vous.  (bû.) 

DCUXÙMZ  COU»|.«T. 

dUiTova. 
Tous  aîme-t-il  ? 


ACTE  II,  SCÈ5     X.  S43 

MAKIB. 

Uclas  !  il  me  délaisse  ; 
iamûs  pourtant  je  n^aurai  d'autre  époax» 

Quoi!  lui  ganlcr  une  telle  teiulrcsse!... 
Et  crojrC2-?ûa&  au  moins  qu'il  la  coimaisse? 

MARIS»  «veo  ej^OMNOO» 

Pas  plus  que  vous.  .  (Bit.) 

ARTHPB  :  à  part 

Quelle  idct  !  (  Changeant  d'intention.  )  Kh 
bien!  Marie,  j*iii  aussi  un  conseil  à  le  de- 
mander; je  t'avais  parlé  ce  matiq  d'un  ma- 
riage. 

■  A. Brie,  viyenifii!. 

Oui,  mais  vous  m'aviez  dit  aiis5;i,  je  crois, 
que  TOUS  n'aimiez  pas  Ux  personne. 

A  a T  B  V A ,  loluervant. 

C'est  vrai,  Marie;  d'ailleurs  un  mariage 
de  convenance,  c'était  bon  lorsque  j'avais  de 
la  fortune. 

MABIE. 

Sans  donle,  vous  aviez  l'habilude  de  vous 
passer  de  bonheur;  loniulenaut  que  vous 
li'avez  plus  rien  ,  il  iaui  songer  à  êM'€  heu- 
reux. 

ARTHUR. 

Oui;  mais  ce  bonheur,  je  ne  pourrais  U 


3U  L'Er^NUI. 

trou  Ter  qu'aaprès  d'une  perâonne  qui  m*â>- 
meraît ,  et  aujourd'hui  que  je  suis  privé  de  j 
mes  ricbes9e&..  % 

MÀftlE.  ! 

J'entends  bien ,  tous  seriez  obligé  d'époa- 
ser  quelqu'un  qui  tous  aimât  .pour  tous- 
même...  Datn*,  en  cherchant  bien...  ça  peut 
6e  trou  Ter. 

ÀBTBfiK;  lui  prenant  la  main. 

A  la  bonne  heure  ;  mais ,  supposé  que  cette 
personne-là  existât,  ne  s«rais-je  pas  inii- 
inême  bien  {-eu  généreux  de  lui  avouer  moo 
amour  quand  je  n'ai  plus  rien  à  lui  offrir? 

s*  A  El  1 E ,  avec  tendresse. 

,  Qu*in)porte,  offrei  toujours. 

•    ARTHUR,  avec  feu. 

Marie,  je  te  dois  les  plus  doux  insfnnsqiie 
j'aie  «'ncore  goOtés;  oui ,  je  t'aime  >  je  l'ai- 
iiierai  toujours,  nous  ne  nous  quiUerons  plu5, 
tu  seras  ma  feiTirne,  mon  amiel...  Marie|ie 
Vf  ux-lu  ? 

;  MA  niE,  avec  joie. 

•  Si  je  leveux!  Ab!  que  c'est  heureux  pou^ 
faut  que  vous  ixyei  tout  perdu  ! 


ACTE  II,  SCÈNE  X.  ,    345 

DUO. 

rKAGMENT  DE  JEAKKOT  ET  CULIXf. 

AIR  :  jiu  son  dès  musettes. 

Croyez  qu^au  village 
On  peut  être  heureux  ; 
On  rit  davantage , 
On  cbante  bien  mieux.  » 
La ,  la ,  la ,  la ,  la ,  la ,  la ,  U. 
Gaiment  à  Touvrage 
On  part  tous  les  deux; 
Mais  le  soir  rassemble 
Chacun  au  hameau  ; 
Et  Ton  peut  ensemble 
Danser  sous  l'ormeau  : 
La ,  la ,  la  ,  la ,  la  ,  la ,  la  ,  la.  ^ 

ARTHUR  ,  suivant  ses  mouvemens. 

Oui ,  ce  que  j'éprouve 
Fait  battre  mon  cœur, 
Pi'és  <le  toi  je  trouve 
Eunn  le  bonheur. 
0  moment  pro^ipére  ! 
D'un  çpoux  reçoi 

Cet  anneau ,  ma  chère , 

Gage  de  ma  foi. 

(  Il  lui  donne  une  bif  ne.) 

TOUS    DEVX. 

Oui  y  jurons  ensemble 
De  vivre  au  hameau  ; 
I>(ous  irons  eDsemblè 


346  L'£îf!fUI. 

Danser  sons  roimeau , 
Oui ,  oui ,  oui ,  danser  sous  roguieim. 
Ira ,  la ,  la ,  la,  la  ,  la,  la.  i 

La,  b,  la,  la,  la. 

/  JLATHUJt. 

g  I        Désormais  Marie 

J^  /       Sera  tout  pour  moi. 
K  < 

»    l  Muftis. 

1 

^  f       A  jamais  Haric 
\       Te  donne  sa  foi. 

SNSSMBLX. 


Veux  toute  ma  vie 
Danser  avec  toi. 


{ik  dtMcflt.) 


SCÈNE   XI. 


LES  PRÉCÉDE5S,.  ARUNDEL,    ROfilNy  les 

TlLLA€B01à. 

A  U  fin  du  duo ,  Àruorlel  |>arait  à  la  |>orte  à  gaiicbe , 
Bobin  il  celle  de  droite  ,  tous  les  vilbgeoi»  daiu  k 
iund. 

ABUifDELy  prenant  la  main  a  Artliur. 

Allons,  mon  ami;  allons,  il  est  septbeu* 
Tts  pa$dée!(..i  J^\ieus  le  chercher. 

Sept  heure»  î  . .  Déjà?  (  ^4 percgwtnt  les  vith* 
geois,  )  Eh  !  mon  Dieu  !  que  veut  tout  oe 
inonde  en  habit  de  fête  ? 


I 


ACTE  U,  SCÈNE  XL  34; 

MARIE. 

J«  m'en  dotjte  bien  ;  ils  viennent  remercier 
Monseigneur  de  lu  diininulion  des  taxes; 

ftOBlfk 

Vite ,  mon  fauteuil. 

(  Il  s^assicd.  Les  villageois  vont  droil  à  Arthcfir  quib 
eiiviroiineDtf  sans  luire  attentiou  à  Eobin,  qui  rrste 
seul  sur  son  fauteuil ,  à  Pautre  bout  dn  théâtre.  ) 

CBOsua. 
km  :  de  Joconde, 

Ccsi  à  TOUS  (  bit)  que  le  village 
Doit  la  paix  (bi«)  et  le  bonhciir* 
Nous  vous  offrons  notre  hommage 
Comme  à  notrr  bienfaiteur. 
Vive ,  amis ,  vive  aotits  bon  seigneur. 

BObllf. 

Eh  bien  !  eh  bien  !  mais  Us  se  trompent  ; 
dites  donc, dites  done«  me  v'l:\,  ils  ne  voient 
donc  pas  la  bro(l«rie?..»  hun^.  Ohi  les  pay- 
sans!... 

(  Ardiur ,  attendri ,  serre  la  main  de  cettx   qui  Pen- 

lourcut.  ) 

AftCK0ELy  bas  et  tirant  Arthur  par  son  liabit. 

Allons,  allons;  si  ta  t'amuses  à  écontcr  le* 
bénédictions  de' tout  ce  inonde-U\ ,  nous  n*ea 
finirons  pas^  et  il  faut  partir. . 


348  L'ENNUI. 

Partir,  dis-Ui?  non,  nmon  ami ,  je  ne  pan^ 
plus. 

AIR  :  Conmàssez^vous  le  grand  Eugène. 

LMionneur  défend  c(ne  je  dispose  ' 

D'un  bien  qtti  ne  nrappartienl  plus  ; 
Mon  cœur  doit  sa  métamoi*i:bose 
A  tes  bienfaits, 

(Montrant  Marie.) 

  ses  vertus.  (Bis.) 

Oni ,  désonnais  l'existence  m'est  cbère , 
Et  je  promets ,  juscpi'au  dernier  soupir. 
De  la  consacrer  tout  entière 
  ceux,  qui  me  l'ont  fait  chérir. 

ABDKDEL. 

4 

Ah!  tn  as  changé  d'avis?... 

A  K  T  B  v  R  5  lui  montrant  l'écrit  qu'il  a  signé. 

Juge  loi-même ,  mon  ami ,  si  je  puis  man- 
quer à  de  pareils  engagemens. 

A  B  V  N  D  E  r. ,  lisant. 

Comment!  c'est  pour  moi.  ( Lui  serrant  li 
main.  )  C'est  bien  ,  c'est  très-bien  ,  je  recon- 
nais le  fils  de  mon  ancien  ami ,  le  noble  héri- 
tier du  comte  Oerfort...  tu  es  digne  de  soo 
nom  et  de  sa  fortune,  et  maintenant  tu  peux 
les  reprendre  :  je  le  lei  avais  ôtés  ce  matin, 
je  te  les  rends. 


ACTE  II,  SCENE  XI.  349 

^  JlRTHUR.     . 

Ouc  dis-tu? 

MARIE9  noBiif. 

Commenl  !  milord  Arthur... 

ARVNDEL. 

^'a  jamais  cessé  d'être  votre  seigneur../' 
Mais,  pour  le  guérir,  il  fallait  bien  enlever 
fa  première  cause  du  ma). 
( Marie ôte  Tanneaudesondoigt, etle  présente  àArtlmr 

en  détournant  la  télé.) 

ARTHUR. 

Ah  !  Marie ,  peux-lu  penser  que  J€  le  re- 
prendrai ? 

MARIE, 

Vous  êtes  riche  ,  maintenant... 

ARTHV  R. 

Oui,  Marie,  je  suis  riche, mais  j'abandon- 
nerais ma  fortune  plutôt  que  de  renoncer  à  la 
seule  femme  que  je  puisse  aimer  ;  viens  par- 
tager le  sort  de  ton  époux,  et  m'aider  à  faire 
le  bonheur  de  tout  Cfi  qui  m'entoure. 

UACARTY,  en  riant. 
Avec   tout  cela,  j'y  perds   un  excellent 
commis. 

AO  B IN  t  <:n  soupirant. 

Et  moi?... 

AAtNDBL. 

Toi?  de  mon  autorité  privée  je  t'avais  fait 

F.   VauU«viUe«.  ^4,  3o 


B5o  LEUXUf. 

seigneur;  et  tnalateDaat  je    te    Caîs  farde 

cha:)se.  < 

ftOBiir.  . 

Cest  bon ,  je  pourrai  tuer  des  lapiot. 

▲  BPBDElif  à JUarîe  et  à  Robîa. 

Eh  bien!  quand  je  tous  disais  que  je  il 
guérirais  !  it  est  Trai^  charinaiile  ftlarie,  ^oe, 
»jn$  vous  en  douter^  tous  in*airez  bien  se- 
condé, {A  Arthur.  )  Mon  cher  Artbur,  je  ne 
crains  phis  que  pareille  fatUaisie  te  reprenne i 
mais  M  tu  rencouirais  jamais  de  Qe»  paurra 
cerveaux»  administre -leur  mon  remèJef 
montre -leur  que  jusqa*au  dernier  m omeDt 
on  peut  être  utile  à  ses  semblibles,  A  ses 
nnm,  et  ils  renonceront  bien  Tlte&leurpro* 
jet  insensé. 

VAUDEVILLE. 

Ail  :  Du  Éendê»-  Fvta  (out^ulfit 

ûaité ,  douce  fdtiè  ^ 
Amour, 
Femme  joîie  i 
OjTt  par  tous  tptt  la  vSe 
SVmbeliil  tour  à  tour*    «  (  Tw.) 

cnoEua. 
Gaite ,  douce  fuUe ,  etCi 

IfARiK,  au  i^ukU«4 
ÀX&  \  Enfin  ifu^elte  n*axt  rUn  de  vous.  (  La  Soottlrt^ 

ta*.) 

Attcftil  dVne  sombre  manie  » 


ACTE  II,  SCÈNE   XL        '    35i 

11  'voulait  finir  ses  destins  ; 
ais  Tamour,  mai^s  l^amitié  cbérîe  , 
sur  le  sauver  furent  ses  médecins. 

Ârtbur,  guéri  de  sa  faiblesse , 
n  ce  moiuent  ne  conoait  plus  l'ennui  : 
fk  !  puissiez-^vous ,  en  sortant  de  la  pièce , 
Vuu5  porter  (bis)  aussi  bien  que  lui.     (Ttr.) 

CBO£UA. 

Caité ,  douce  folie  ^ 
Auu>ur, 
Feoime  jolie , 
Ccst  par  vous  que  la  vie 
S'eoibeilit  tour  à  tour.  (j^*) 


ttW  Dl  L*flVVVÙ 


%%^% 'lVBl«^'^»»!fc>»1fc<»-V<>^>»^»^.%j».  »l»»*!^^%>  i>i»%  >■%■»■  ^ 


TABLE 

PES  PIÈCES  CONTENUES  DÂKS  CE  TOLl'ïE. 

Pu**" 
VVK  NUIT  DE  LA  ^AEDS  HATlOlfAtC»  TAU-» 

deyiile  eu  un  acte ,  par  MM.  Scribe 

çt  Delcstre-Poirsoii.  .  .  •  .  .  •  '  ' 
)j5  NOVVBAU  PovRCBAVGNAC 9  cooiédie  en 

un  acte ,  par  les  tnêui^s.  .  ,  .  •  ^9 
Ukb  visite  a  BEDLAAf ,  comédîé  eu  ua 

acte ,  par  les  ipdiVies.  ,  .  .  .  •  **5 
).f  sof,LiciT£ua ,  ooiiiédie  en  ua  ecte» 

par  MM.  Scribe  et  M  *  *  *  •  .  •  «79 
Lrs  DEOx  MAfii!),  comédie  en  un  acte» 

par  MM.  Scribe  et  V^rner»  .  •  .  J»/ 
l.'i»^vi,  comédie  en  deux  actes,  par 

MM,  Scribe ,  Dupla  et  MélesTÎUe.  •    tSi 


riir   »B    IiA   TA»&S« 


41* 


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■%.%fc>^»%»i^^iW«l 


TABLE 

PES  PIÈCES  CONTEIfUES  DÂKS  CE  VOLUML 


riir  ftB   LÀ  TA>UU 


IJVB  NUIT  DB  LA  ^âDB  HATlORAtC  y  TAU-» 

dt;yiile  eu  un  acte»  par  MM.  Scribe 

ai  Delestre-Poirson.     .     *     ...     .  ' 
l£  NOVTBjkXJ  FovRCBiVGHAG,  comédie  en 

un  acte  »  par  les  tnêin^s.   .     •     •     •      ^ 
Uab  vuiTE  A  Bedlaai,  coiuédié  eu  ua 

acte ,  par  les  qidrnes.  ,     •     •     •     .     n^ 
l^f  sof^LiciTEUB  )  comédie  en  un  ecte» 

par  MM.  Scribe  et  M  *  *  *       ,     .     .     «79 
Lrs  DEOX  MAHis,  cotnédie  en  ui)  actei 

par  MM.  Scribe  et  Yarner*    .     •     .    ss; 
(«^BiiMUty  comédie  en  deux  actes,  par 

MM,  Scril>e  9  Duplu  et  MélesTÎUe.  .    tSi 


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