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2739463.
GALERIE
DES
PEINTRES FRANÇAIS
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OU
COUP-D'(EIL CRITIQUE
SUR LEURS PRINCIPAUX TABLEAUX,
ET SVa. LES DIFFÊRENS OCVKAGES
DE SCULPTURE, ARCHITECTURE ET GRAVURE;
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PAR R. J. DURDENT.
PARIS,
AU BUREAU DU JOURNAL DES ARTS,
aUE DES MOULINS , N". 31.
ET CHEZ ALEXIS ETMERT , RUE MAZARIME , N*. 3o.
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GALERIE
DES
PEINTRES
FRANÇAIS.
Jacqvotot. ...••.;..% • • 29
Knip (M»«.) 74
LeHIRE m 72
Lescot (M"«.) 23, 24 , 75
lorihiee (m"^) 2(}
Mauduit (M"'.) r 2g
Mayer cm»».) aS , 58
MONGEZ . 5, 20
%OBtIfEAU (M"«.). .....•....*..*... 22
Romance (de). . 6 , 28
Servières 1 2S
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PEINTRES.
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A^^iAux,. ..;..•• ^ ,,,,,, ,. ; • ; • 6t'
AJUSTE. . /. 74
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Bagetti. . ....•......,•. I. ••..•*... ; €9^
Berre (d'Ani^ers^, .•••...••..>,»• • ^^
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Bebtin.. ^ ..^ .».».••... . G}
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DCSSA^LCHOY (Ch.) 'jt
DUYIVIER 7S
FoRBiN (De). . : . 6 , 36
Fragonard. 4 « . « ^2
Franqce (Pierre et Joseph) . - * yS
Garnerey (François, Jean et Auguste)* •«»>.•.. n3
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Géricault. ..... r 4f 7<>
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MoNsiAux . 4i 47
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Odeyaere . 43
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MM.
Ommeganck. ; . . 5 , 70
Pajoo. .,».... .• 68
Peyrakke 65
Pfïron -, 68
Prudhon i 4ï 58
QUAGLIA. . . » ya
Revoil 4, 34, 57
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RiESNER. « 6
Robert -Lefèvre Sz
RoEHN 5, 66
Rouget . 44
Saiwt 6> 7^
Serangeli. » Qo
SiCARDI. 72
Steube; : \ \ 4 4 » 1 1
SWEBAGH 71
ÏAOTAY 5 , 48
Teerlitïck 71
Thevenin - .69
' ToPFER ( de Genève ) 70
TuRPiN DE Crissé 5 , 73
Vafflard.- 67
Vatï^Dael. 6
Van-Loo (César ) 69
Van-Spaendowck 6
Vaczelle. . . . .^ • 74
VïRMAY. . 5
Vernet ( Carie ). 6, 67
Vernet ( Horalte ) 6 ,, 68
Yerstappeu 7 3
MM. ^
Vtgnaud. •......., 3t^
VOGRENAND -^I
.Watelet 72
SCULPTURE.
MM.
1 ...
Beawaliet. êi
Bosio 8»
BrIDAN - • . r • • 75
Callamard , 85
Charpentier (M"^. Julie) 83
Chinard.. 7f^
CiORNEiLLE (Barthél.) 80
Sereine. .....* So
DlJpATY (Ch,) 81
Fortin 85
Germain 85
Gois 86
HOUDON 81
Lemot *•••.' • ' ^
MiLHOMME s»
Roland. , 8i , 84
homagnesi. 86
IVutxhiel 84
Tauway. • .^ ........*.. 79
V -^
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ARCHITECTURE
ET
GRAVURE.
M»
MM.
Andrieu • < t^
Anselin 89
Balta&d « . . . . 8g
BOVINET 89
Charpentier 89
Chatilloit 89^
Claessens. . . \/ 89
Debucourt ^ 89
Desnoyers (Auguste) 89
GlACOHELU (M"«.) 90
GiROUX « . • . • 89
godefroi 89
Laurent . 89
Malbeste / go
Massard • . • . gi>
MORGHEN .••••....•. 90
Ponce 90
Tardieux c^o
Ulher < . . 90
Yauooyer r . 89.
I
m (t.
* ... ! ■ ... I Ml
INTRODUCTION.
Au moment où Pon réunit en une brochure mes
articles sur le Salon de 1812, insérés dans le
Journal des Arts, je crois devoir y joindre queU
ques ohserçations générales,
L'Ecole française est aujourd'hui la première de
t Europe : c^est une s^érité incontestable. Les autres
pays ont plusieurs Artistes plus ou moins célèbres ,
ou dignes de célébrité. En France seulement y un 9oit
au premier rang un certain nombre de peintres , de
sculpteurs y etc. , dont la réputation est établie sur,
les bases Us plus solides ; ensuite des élèves déjà
formés attirent V attention des amateurs , et donnent
V assurance que la culture des Arts n'éprouvera point
dHnterruption ; c'est là proprement ce qui constitue
.une Ëcoje.
Sous ce rapport donc^ F état des Arts en France
ne fut jamais plus satisfaisant ; mais il est une ques^
tion quia frappé un grand nombre d'esprits ^ et sur
laquelle il convient de s^ arrêter un instant.
Cette abondance ne nous menacerait - elle pas
d* entraîner à sa suite dégrades inconvéniens ? Beau*
coup de personnes ne se croyent-elles point trop lé^
gère ment appelées à s'illustrer par leur pinceau? En
^. INTRODUCf ion.
un mot , ne sommes-nous pas menacés de çoir les
Ans cuhi^s pur un trop grand nombre de gens ^ui
n*auraient que le nom d" Artistes ?
L'augmentation progressif des productions expo^
sies ne justifie que trop ces craintes. Du temps de
/'Acaiiémte. de Peinture, etc. /le Sa ton, propre^
meni dit , suffisait à trois ou quatre cents ouvrages :.
tewr nombre ^ depuis ce temps , s'est toujours accra.
Il était , il y a deux ans , de douze cent dix ; cette
tannée il est de treize cent cinquante (i) , ^ ^n assure
que le Jury en a refusé au moins quatre cent^.
Cette midtiplication d'Artistes ne serait pas sans
ineon$féniens , Jars même que tous auraient des ta-
lens distingués. Ils se nuiraient les uns aux autres ;
et d'ailleurs ^ il e$t généralement reconnu que, dans
tous tes genres , si ^excellent devenait commun , it
perdrait de son prix aux yeux des hommes.
Mais que dire , lorsqu'une assez grande partie
de ceux ^ui stdUcitent et obtiennent une place dans
le sanctuaire des Arts , sont absolument compara^
iles à ces écri^^ains , / '
«r Qui prennent pour génie une ardeur de rimer, »
^i»— ^«»-^— — ■ ■ Il «Il ■■ » ^— — «^
(i) La collection des tableaux ^ exposés dans la grande
galerie du Musée Napoléon > renferme des ouvrages de toutes
tes écoles depuis la renaissance de l*'Art; et on n'en compta
fu'^n, peu plus de lOOo,
^
INTODUCTION. XI
et à qui le législateur du Parnasse \ sévère mai^
j[ifste ^ mais çraiment leur ami, défend t approche
du Mont sacré. Comment étaient donc ces quatre cents
tableaux refusés , puisque ils fiut été jugés inférieurs
à tant d'autres qu*on s^oit au Salon as^ec un4 yérita-*
If le peine ! V institution de V Académie pou\^ait ap-
porter des obstacles à ce que de jeunes talens fus-r
sent contyus et, appréciés d^ public i mais aujourd'hui
ne passè-t^n pas d*un extrême à Vautre. ?
Il est encore, une observation , peut-^tre digne
d'être méditée i,c' est que les ouvrages faibles {pour
jne pas dire plus) produisent de mauvais effets dani
les bons souffrent. Il faut' une patience qu'on ne
peut raisonnablement exiger du public ^ pour demi*
1er un bon tableau , perdu en quelque sorte au milieu
de productions défectueuses qui fatiguent les regards.
Cette année , par exemple , le Salon ^ réduit à peu
près à moitié , eût offert le coup d'œil le plus satis^
faisant ; toutefois , si des étrangers prévenus , peu
^connaisseurs , ou jaloux ^^ avançaient qi/ il fourmille
de morceaux médiocres dans tous les genres , il se-
rait impossible de réfuter leur assertion ; et peut-
être ensuite- obtiendrait-on difficilement qu'ils ren-
dissent une justice complète aux tableaux d*un mérite
réel. \
Mais , rèpondra-t'on , faudrait-il , pour arrêter les
progrès du Tiial <f, soumettre de nouv^eau la culture
essentiellement libre des Beaux^-^irts aux entraves
Xlj ÏNTRODIJCTIOW:
académiques? Ce n'est pas là ce que je veux dire : it
estprous^è que , dans les Arts comme dans les Lettres ^
les çrais.ïalens se forment toujours indépendamment
de ces sortes d* associations , quoiqu'elles aient d'ail"
leurs des avantages certains. Mais pourquoi n'exerce"
rait-on pas une sévérité plus grande sur les ouvrages
à exposer ? Pourquoi ne rejettrait'^onpas de prétendus
tableaux^ d'histoire , dont les auteurs ne possèdent pas
les premiers élémens du dessin ? Pourquoi admettrait--
on avec tant d'hospitalité ces longues suites deportraits
de toutes les formes et de toutes les couleurs ? Pour^
quoi , enfin , puisque tant de candidats se présentent j
ne fixerait-on pas le norhbre des ouvrages à exposer
dans chaque genre ^ de manière qu'une place obtenue
au Salon fût déjà la preuve dune supériorité , dii
moins relative ? Sauf à déroger à ce principe \ si
Von se voyait dans l'agréable nécessité d'augmenter
le nombre des élus , par un sentiment d'équité , et en
considération de leurs talens. J'exprime ici avec fran-
chise une opinion qui ne m* est point particulière ^
parce que je ne vois absolument que l'intérêt de l'Art
et celui des véritables Artistes.
Quant à cette brochure, l'espace dans lequel j'étais
circonscrit , et l'immense quantité des ouvrages ex-
posés , ne m'ont pas permis de ni* étendre autant que
je V aurais désiré sur plusieurs d'entre eux. Sans
doute aussi ^ malgré toute l'attention que j'ai apportée
à ces examens , j^aurai passé sous silence quelques
• •*
INTRODUCTION. Xllj
productions dignes d'être remarquées. Quelquefois ,
au reste , ce silence a été déterminé par des motifs:,
particuliers. Par exemple , si des Artistes^ depuis long-*
temps cortnus , ont produit des tableaux peu dignes
d'eux , oii était la nécessité de relever les défauts
d'une manière qiiil h*est plus en leur pouvoir de
changer?
Sai cherché à donner un aperça général du
Salon de 1812. Je n'ai ni dù\ ni çoulu porter plus,
loin mes prétentions. Les listes jointes à cette bro-
chure , ont été faites pour concourir à ce but. Je n^ai
jamais songé â faire un examen approfondi , com--
plet.de tous les morceaux exposés. Pour y parvenir ^
il eût fallu y au lieu d^une simple brochure, écrire
des volumes.
L'impartialité dont je me suis fait un rigoureux
devoir , me porte à consigner ici , en finissant , une
réclamation de M. Dvbufe , auteur du tableau
d'Achille , prenant sous sa protection Iphigénie que
son père voulait sacrifier Cn". SaS). Cet artiste a
répondu par une lettre à mes observations. J*ai
parlé d'après ce que je voyais; j'ai cru , je crois en-
core que , dans les parties essentielles , sa composi--
iion rappelle trop le Pyrrhus de M. Guérin. M. Du-
bufe atteste « que sa composition était faite avant
» l'exposition de ce tableau ; quHl l'a montrée â
» M. David Çdont il invoque le témoignage) au
» commencement de 1810. » Mais H avoue aussi f
ivr î K T E O B U C T I O N.
» ijue les apparences sont malheureusement contre^
i lui. » Ces mois sujfiraient pour ma justification l -
sUl était possible que j'en eusse besoin. Je ne pouvait
jms pressentir la révélation que fait aujourd'hui ce
jeune Artiste. Je suis persuadé , diaprés le ion de
tondeur qui règne dans sa lettre \ que tout ce qu'il
avance est vrai; et je désire que ceux qui verront son
iableau en soient aussi persuadés que moi; je désire
surtout^ qu^avec un talent réel ^ il ne soit plus exposé
désormais à de semblables reproches.
»
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GALERIE
DES
PEINTRES FRANÇAIS
CQu tJalou ^e 1 o i S .
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N_. 1^\
o
COUP-DCEIL GÉNÉRAL.
Ap&is avoir été plus dVne fois désappointés ^ les amis des
Arts viennent enfin de voir commencer, le i*'. novembre,
cette exposition tant et si vivement attendue. Il serait de toute,
impossibilité , dans ces premiers momens , d^émettre , avec
tjuelque détail, une opinion quelconque sur tel ou tel de ces
ouvrages, que le catalogue porte à treize cent cinquante-trois^
«t dont plusieurs même se trouvent compris sous un seul
numéro ; mais on peut*, dès. à. présent/ donner un aperça
général de <:e Salon , rappeler des noms déjà célèbres, et con-
tribuer à en faire connaître d'autres qui cherchent à souscrire
pour la première fois dans le temple de la renommée.
(O
Parlons d^abord de nos privations : c^est , dit-on , le moyen
le plus sûr de mieux apprécier ses jouissances. On chercherait
vainement , dans le iiinrei ^ Findication de quelque tableau
exécuté par M. David ou M. Regnault. M. Guérin qui , jeune
encore, s^est assuré une place si distinguée dans l'Ecole fran-
çaise , n'a également rien exposé.
Trois portraits et une étude de Vierge sont tout le contin-
gent de M: Girodet; mais , dans ces ouvrages, et surtout
dans V étude , il a montré V angle du lion. M. Gérard s'est borné
\ deux portraits , et on les attend encore avec toute la con-
fiance que doit, inspirer un talent tel que le sien. M. Gros ,
dont Tardeur ne se rallentit point , a deux tableaux et quatre
grands portraits. Dans un des tableaux , il a représenté IVn-
ircQue de Leurs Majestés V Empereur des Français et V Empe-
reur d* Autriche , en Moraçie. L'autre, d'une proportion plus
petite que ne le sont ordinairement les vastes compositioofi de
cet artiste , retrace , en figures de demi-nature, le moment où
Charles-Quint est introduit , par François P'. , dans t église de
Saint-Denis, M. Garnier a fait , dans la même proportion , un
tableau représentant t enterrement du roi Dagoèert dans cette
mime église de Saint-Denis.
Le sujet , terrible jusqu'à l'atrocité , où /2f premier des
Brutusfait décapiter sous ses yeux ses deux fils , vient d'être
définitivement transporté sur la toile par M. LetbîWs , di-
recteur de l'école des Beaux- Arts à Rome. C'est sous le ciel
inspirateur de ceUe. ville , qu'il a exécuté en grand cette ira*
* I
(3)
mense composkion , depuis long-temps connue par le dessin
et les gravures (comme on Ta dernièrement dit dans le Jour-
nal des Arts). L'examen de cette production capitale , à Ia«
quelle le peintre a cru devoir faire des changemens aussi im«
portans qu^heureux , ne peut être entrepris en ce moment. Il
suffira de remarquer que si les artistes avaient encore , comme
il y a quelques années , la coutume de décerner eux-mémesune
couronne au tableau le plus important de l'exposition , cette
marque d'honueur serait probablement acccordée au tableau
de M. Lethiers.
Parmi les peintres dont la réputation est depuis long-*temp3
établie sur de solides bases, on doit toujours compter M. Mey-
nier.On le retrouve avec toutsontatent , dans un tableau dont
le sujet offre le plus grand intérêt. Il représente la rentrée de
r Empereur Napoléon dans tih de Loèau j après la bataille
d'Essiins.
Nous paraissons avoir un peu perdu de vue la manière dont
les tableaux d'égKse doivent être exécutés , malgré le grand
nombre d^admirables modèles qu'offre en ce genre le Musée
Napoléon. Le Salon toutefois en possède quelques-uns ,
parmi lesquels il serait injuste de ne pas distinguer une assomp-
$ion de la Vierge , ouvrage de M. Ansiaux»
Au nombre des artistes qui , n'ayant exposé jusqu'ici au* ,
€un tableau , ou qui , du moins , n'en ayant pas fait d'une
«
^certaine importaipce, se présentent main tenant aux' regards du
pabUc avec des droits certains d'attifcr son attention , l'oi
• •
peut , dès cet instant , compter M. Blandel, à qui Ton doit un
tableau de Zénobie trouoée mourante dans rAra%e;JH. Paulin
Guérin , qui a représenté Ccan après le meurtre d'Abel (com-
position dont ridée première est éminemment originale ,
mais dont Texécution peut devenir Tobjet de plusieurs obser-
vations) ; M. Dorcy de Dreux , qui a peint Bajazet et le berger i
M. Steube , auteur de Pierrfle^Grand , etc.
M. Gériicault dont, à. ma connaissance , lé nom n'a point
encore élé placé parmi ceux des artistes, débute aussi d'une
manière très-ayantageuse, fàT le portrait équestre d* un officier
de chasseurs,
M. de Boisfremont , dont on aime la grâce et la correction ,
a peint cette année Virgile lisant son Enéide en présence d*Au-
guste et d'Octaçie. Il a , comme on le présume, saisi l'instant
où un passage divin du YK chant cause un long évanouisse-
ment à la mère du jeune Marcellus , trop tôt enlevé à l'es-
pérance des Romains.
MM. Prud'hon, Debret , Berton , Mon^aù et autres, ont
aussi des tableaux d'histoire à cette exposition. Elle ne man-
que donc point de productions estimables dans ce premier de
tous les genres de peinture ; mais elle est encore plus remar-
quable par le grand nombre de ces tableaux de chevalet, du
genre qu'on peut appeler anecdotique. Depuis plusieurs an-
nées , des compositions fort piquantes , et surtout celles de
M. Richard, lui ont donné beaucoup de vogue. Cet artiste
n'a rien exposé ; mais M. Revoii | son compatriote et soa
V
<^5)
émule , qui s^est distingué t il y a deux ans , par ion Chadei-*
Quint , a représenté un tournoi dont le héros est Bertrand
du Guesclin* Jeune encore , il commençait ainsi sa carrière si
glorieuse et si fatale aux implacables ennemis de la France.
U serait impossible dHndiquer tous les artistes qui , cette
année , soutiennent leur réputation. Ici MM. Marlay ,
Yermay , etc. , traitent le même genre que MM. Revoil et
Richard ; U , MM. Roehn , Taunay , Mulard et autres , con-
tinuent à retracer , dans des tableaux de petite proportion , *
plusieurs des innombrables faits d*armes qui immortalisent
les armées françaises. D'autres peintres font passer sur la
toile, soit sans aucun emblème, soit. en employant Tallégo-
rie , les plus intéressantes circonstances dont la naissance de
S. M. le Roi de Rome fut accompagnée.
Les dames artistes ne se sont pas montrées moins labo-
rieuses que leurs émules de Fautte sexe. M"^. Mongèzqui,
seule d'entre elles , a eu Tintrépiditç de se vouer aux grandes
compositions historiques, a représenté le moment où Persée ,
vainqueur di^ monstre marin , délivre Andromède. Parmi plu*
sieurs portraits de M™^. Benoît , on s^arréte surtout devant
celui de S. M. Tlmpératrice et Reine. M***. Lescot soutient
rhonneur de ses premiers débuts, par des tableaux pleins de
vigueur et de vérité , et surtout par celui du haisement de
pieds dans la basilique de Saint-Pierre ,à Rome, Parlerài-je des
paysagistes? MM. Bidault , Bourgeois-, Duperreux , Turpin
de Crissé ^ Ommegànck/ etc. ^ ne se sont point endoroûa sur
(6.)
leurs lauriers, et M. de Forbins^eit surpassé danstm Ubleau
à*Inès de Castro,
M. Deaiarne renouvelle les preuves de %ovk talent dans le
cercle , peut-être un peu circonscrit où il s'est placé , mais oà
îl est toujours sûr de plaire. On en peut dire autant de M.
Boilly , si amusant dans ses scènes familières , et de M. César
Vanloo, si vrai dans ses paysages, où 41 ne veut jamais nous
montrer que l'hiver, avec son triste cortège de neiges et de
frimas.
Il faut ajouter i tous ces noms , bien connus , ceux de
DIM. Carie et Horace Ye^net. MM. Augustin , Aubry ,
Saint, etc., ont encore cette fois exposé des miniaturÊs^diai^-
mantes , et M. Isabey , dans une suite d'aquarelles , a re-
tracé , arec la supériorité de son talent , les traits de tous les
augustes parens de S^ M. l'Impératrice et Reine. MM. Van-
Spaendonck et Yan-Daël continuent à nous prouver que le
secret de peindre les fleurs parfaitement n'est point enièrmé
dans la tombe de Yan-Huysum. M. Riesner , madame de
Romance , M. Bonnemaison , et plusieurs autras bons pein-
tres de portriCts, contribuent à Fembellissement de cette ex-
position. D'autres artistes , dont les noms ne sont pas encore
consignés dans ce premier aperçu y doivent être , et seront
l'objet d^un examen attentif.
C'est alors que l'auteur de cet article se permettra de
s'exprlm.er avec franchise et avec la {dus rigoureuse impar-
tialité. Quelles que soient se% observations, fl ne s'écartera
(7) ' .
jamais des égards qui sont dus aux talens ;^surtout il n^ou-
bliera pas que , pour parvenir à exécuter en quelques mois ua
tableau , il a fallu souvent dix , quinze où vingt années
d^études préliminaires ; en un nrot , il agira diaprés ce prin-
cipe de Montagne y qu'on ne peut trop rappeler : il ^donnera
ses opinions ; dictées seulement par l'amour des Arts , non
comme bonnes^ mais comme siennes.
Il ne faut point terminer cet aperçu sans annoncer que li
sculpture rivalise cette année, d'une manière très -brillante , sa
séduisante sœur. Outre un nombre considérable de bustes ,
une longue galerie , au rez-de-chaussée , contient environ
trente statues de grandeur naturelle , ou même colossale^
Plusieurs sont en marbre , et on les doit au ciseau de nos plut
habiles sculpteurs. La gravure enfin offre des morceaux
remarquables , tant par le talent des artistes qui les ont exé-
cutés, que par la célébrité des tableaux que cet art sait re-
produire en partie, muhiplier, et soustraire ^ sous quelques
rapports 9 aux atteintes du temps.
(8)
^%t%f%^%A,^/\/v\/%n,%^%f*/%t%'\/%i*f\f\fK'^/%/%/*/\f%.'%/%Mr^/%n.>i%/%f%f%/K'%^^
N°. IL
TABLEAUX D'HISTOIRE.
JL'emtkeyoe de Leurs Majestés PÈmperemt des Français et
f Empereur d'Autriche , en MoraQÎe (n*. 444) » P^r M. Gros ,
offre un de ces évënemens de la plus haute ifnjportance en
eux-mêmes , et par leurs suites ; et dont ks AfIs ne doivent
pas être moins empressés que Thistoire de retracer le sou-
venir à la postérité. Le peintre qui sait si bien placer dans de
vastes toiles des figures remplies d*action et de feu , a sage«-
inent conçu qu'un tel sujet lui demandait une autre manière
et des beautés d'une autre espèce. Une noble simplicité est le
caractère de cette composition. Les deux monarques, debout,
s'approchent Fun de l'autre avec un air de bienveillance et
de dignité. Un large manteau que porte S^ M. l'Empereur
d 'Autriche ^ a fourni à l'artiste le moyen de produire , sans
affectation , un effet pittoresque. Un officier du Monarque-
autrichien est placé sur le second plan ; au-delà on entrevoie
le feu du bivouac de FEmpereur Napoléon , et un monticule
sert de fond. Non loin du Pirinee français, on voit quelques^
officiers; et un peune page, d'une physionomie intéressante,.
tenanS par la bridé le cKeval de l'Empereur. De Fautre côte ,.
(9)
un officier supérieur français retient , à une certaine distance ^
un groupe de bons paysançmoravcs «empressés de bénir le ciel
d^un événement qui leur assure le bienfait de la paix. Au
sommet de la colline, quelques soldats font aussi éclater leur
joie. On conçoit , par cet aperçu, avec quelle sagesse le peintre
a coordonné toutes les parties de la composition ; Texéeution
y répond parfaitement , et M. Gros , coloriste brillant, quand
il le veut être , s^est ici interdit le luxe des teintes : son co-
loris est suave et simple.
Cette richesse de tons qu^il sait trouver sur sa palette , il
Fa , pour ^nsi dire , prodiguée* dans son tableau (n^. 44^) *
où Charles-Quini est reçu dans Véglise de Saint-B^is par Fran-^
çois I'^ , accompagné de ses fils et des princes de sa cour. Il est
impossible de réunir plus d'éclat à plus d'harmonie : lorsque
Ton observe les expressions nobles et justes dès personnages,
lorsque Ton songe à la correction du dessin et au beau ca>
ractère des têtes, on n'est pas éloigné de regarder ce tableau
comme au mioins égal au meilleur de ceux, que M. Gros a
jusqu'ici exécutés.
Dan^ son tableau de Càin après ie meurtre d*Abei (n^. 4S4)t
/
M. Paulin Guérin s'est efforcé de produire une impression
terrible. Le fratricide fuit avec sa femme et ses deux enfans ;
ils se trouvent sur le bord d'un précipice dans le moment où
un orage éclate *• Caïn se sent plus que jamais tourmenté par
ses remords , et sa femme implore le ciel ; enfin , Satan ,
sous la figure d^un serpent , s'attache à ses pas*. Nul doute
( 10)
qiie ruttsle ne te toit su bon gré d^avoir rassemblé tottlet
oes. circoRStanoes propres à mieux &ire sentir Uétat misérable
où Cala sVst réduit par son crime; et cette manière de con-
cevoir un sufet mérite effectivement des âoges. Mais dans les
Arts I les penséei , qfuelque heureuses qu'elles soient , ne sont
comptées pour rien , satis le talent de Texécution. Celle de
ce tableau laisse beaucoup à désirer : là télé de Caïn est d'un
style fort peu relevé , et le coup de lumière <pii frappe sa joue
droite , tandis que le reste du visage est dans Tombre , ne
produit pas on bon effet. Le plus jeune des deux en&ns est
comme ployé en deux , et fait songer â ce» misérables petites
victimes ilont la cupidité et It besoin disloquent les membres
pour leur apprendre à devenir des artistes d'agilité. ^ En
général , il y a dans ce tableau trop de contorsions ; il est
~ certain aussi que le ciel d^orage est d'un ton absolument
faux ; mais l'ouvrage amionce un artiste plein de feu , ayant
le sentiment de la couleur, et très-capable d'exécuter un bon
tableau , lorsqu'il réglera mieux son imagination.
^ C'est ainsi qu'on nomme maintenant ceux que nos pères
appelaient , moins poliment , sauteurs. Sans compter les véri-
fables artistes , on sait conrbien , depuis quelque temps ,
ceux qui prennent ce nom , se sont multipliés. Nous avons
jusqu'à des artistes pour la propreté de la cftaussure^r 11 n'y st
point U de quoi fâcher nos grands peintres , nos sculpteurs
célèbres. Ne savent-ils pas que les familles des gens de lettres
et des hommes delw se sont aussi prodigieusement accrues ^
depuis que les écrivains publics et les solticit^rs de procès en
font pattie ?
(il)
On rétrçuYe ce même désir d'étonner le spectateur, aTe#
un talent plus exercé , dans le Pierre-fê-Grand de M. Steube
{n^ 860). Ce Monarque russe/ est sur le lac de Ladof;a , dans
une barque conduite seulement par deux pécheurs. Une tem-
pête s'élève : déjii le mât du fragile bâtiment est brisé , et
vient de tomber dans les flots ayec la voile qu'il portait. Leczar
alors saisit le gouvernail , et dit aux pécheurs 7 « Vous ne
» périrez pas , Pierre est avec vous. »
C'est absolument là situation de César, lorsqu'il prononça
ces mots fameux : « Ne crains rien , tu portes César et sa for^
tune. » Il est impossible que le peintre n'y ait pas songé, et
on s'en aperçoit facilement , car le costume qu'il a donné Â ces
deux pécheurs est entièrement antique , et ce dë£aut devient
encore plus sensible , lorsque l'on voit, près d'eux, le czar
€n pelisse fourrée et en bottes gamies^ de leurs éperons. Un
autre défaut , c'est que le jeune pêcheur qui tourne les yeux
Ters le czar, ouvre tellement la bouche, qu'à l'expression de
l'effroi, se joint très sensiblement un air stupide, qu'il n'était
sans doute pas dans l'intention dii peintre de lui donner.
Après avoir fait ces critiques , on n'a plus que des éloges à
donner à l'artiste. L'attitude dii czar est fière , animée ; tout
l'ensemble de la figure est d'un bon goût de dessin , et colorié
avec vigueur. Le peintre a su conserver à Pierre ses traits gé^,
néralement connus , en leur communiquant, jusqu'à un cer-
tain degré, la noblesse dont ils étaient dépourvus.
Puisque nous en sommes aux artistes qui , exposant pour
(" )
la première fou, font plus que de donner des espérances ,
occupons-nous du tableau où M. filondel a peint Zénobie
trouQée mourante sur les bords de VAraxe (n^. loi). Les mal-
heurs de cette princesse sont assez connus par le chef-d! œuvre
de Crébillon , et surtout par le récit quHI met dans la bouche
de Rhadamiste , le plus beau caractère théâtral quM ait jamais
conçu. On sait que, s'écartant peu de Thistoire, ce poète lui
fait avouer comment, égaré par une jalouse fureur, il avait
poignardé son épouse , compagne de sa fuite , afin de la
soustraire aux ennemis qui les poursuivaient tous deux.
M. Bloadel a saisi le moment où Zénobie^ qui n^a pas en-
core repris connaissance, est rencontrée étendue , sur le berd
du fleuve , par des pasteurs dont l'artiste a varié le sexe et
rage. La figure de la malheureuse épouse de Rhadamiste est
belle , et les expressions d'une surprise mêlée du plus tendre
intérêt , se lisent sur le visage d'une jeune femme et d'un
vieillard respectable. Un homme d'un âge mûr place sa main
sur le. cœur de la reine d'ibérie, et fait remarquera ses com-
pagnons qu'elle resjnre encore. Peut-être y a-t-îl , dans l'at-
titude du jeune homme qui leur montre Zénobie, quelque
chose de forcé, surtout, dans la manière dont il tourne la
tête. Quoi qu'il en soit , toutes ces figures sont d'un grand
goût de dessin , sans que rien annonce en eux des personna-
ges au-dessus de leur condition , ce qui est tout ce que les
censeurs les plus difficiles peuvent exiger. La couleur a cette
solidité qui convient à un su^et tel que celui-ci. £n un mot^
( >3)
t
ce tableau est exécuté de manière â faire infiniment d^honneur
au peintre. Il en est qui , au premier aspect , attirent plus les
regards de la multitude ; mais il faut le compter dans le très-
petit nombre de ceux vers qui les amis de l'Art reviennent
avec le plus de plaisir.
Tout auprès de cette bonne composition historique, se
trouve IMmmense tableau de M. Lethiers : Brutus condamnant
ses deux fils à mort (n°. 583). Il est inutile de s'appesantir sur
les changemens que l'artiste a faits à son sujet : une descrip*
tion rapide du tableau les indiquera aux personnes qui con-
naissent le dessin original. A droite du spectateur, Brutus et
son collègue CoUatinus sont sur leurs sièges ; derrière eux ,
on voit un certain nombre de sénateurs également assis. De
ce lieu un peu élevé , le farouche ennemi des Tarquins con-
temple le spectacle affreux dont il ose être le témoin. La
hache fatale a déjà privé du jour un de ses fils, dont le cada-
vre est ^ demi couvert d'une draperie, savamment disposée
pour dérober au spectateur ce qu'il y a de hideux dans le sup-
plice. Tandis que deux licteurs emportent le corps inanimé ,
d'autres amènent devant Brutus le second de ses fils. Plusieurs
Romains élèvent leurs maûns vers l'inflexible juge , et le prient
V^ainemeçt d'épargner cette seconde victime. CoUatinus se
détourne et se voile le visage. Les sénateurs paraissent agités
de divers mouvemens ; et le jeune homme, la tète penchée ,
attend son sort sans faiblesse , mais avec une émotion que la
mort de son frère et une si cruelle situation rendent sans
( «4 )
dovte bien naturelle. Dans une composition si savanle , si
profonde , cette figure surtout nie parratt un ehef*d^œuvrc.
' Cependant , sur un plan pli^ éloigné , on amène , au lieu
du supplice , 4'autres conjurés. Le bourreau est encore tout
prêt à frapper. Le peuple le presse en foule autour de la place
de Texécution , et sur le devant , à gauche, un homme (sans
doute un père) sVloigne avec horreur. Dans le fond, des^ô-
Briques nobles et simples achèvent de reporter les spectateurs
' au tieu de la scène.
' Si Ton observe que , parmi cette foule de figures , il n^en.
est pas une qui ne soit parfaitement à son plan , parfaitement
groupée avec calles qui ^environnent ; que tout concourt à
Faction de ce terrible drame , sans confusion , sans aucun de
ces prétendus épisodes qui ne se lient point au sujet , et qu'on
retrouve trop souvent , même dans les productions des plus
grands maîtres ; oA sentira combien cjct ouvrage doit faire
honneur à M. Lethiers et à notre 'école moderne. C'est un
irait de génie que d'avoir choisi le moment précis où le sort
d^un des fils de Brutus est déjà décidé , et où .la situation dm
second inspire un si vif intérêt. Le peintre a parfaitement
senti que si son sujet était éminemment propre à la peinfure,
il étak aussi tellementrepoûssaht^que chacun des spectaiteurs
dirait comme Curiace :
Je ren-ds giices aux Dieux de n*étre pas Romain ^
Four conserver «ncor ^uel^ue chose d*humain.
J^ussi quel soin n'a*t-il pas pris pour joindre , àla terreur que
( '5 )
ce sujet lui fournissait , toute h. pitié qui pouvait faire suppor-
ter un tel spectacle ! Il eb est résulté que son tableau pro«
duit le même effet qu^une tragédie sombre et pathétique. Sans
balancer un instant à condamner Texaltation , et peut-être
l'ardeur de s'imrnortaliser par une action unique dans This-*
toire» '^ qui portèrent Bru tus à outrager si cruellement ta
nature, tout Frâinçais doit voir arec plaisir que, dans tes deux
grands Arts , ce sujet atroce ait inspiré parmi nous des ou«
vrages tels que le Brutus de Voltaire , celui de M. David et
celui de M. Lethiers.
Il reste à considérer , sous le rapport de Fexëcution , ce
tableau de la mort desjils de Brutus, Personne ne sera surpris
que le dessin en soit très-<:orrect ; maison a fait une obser-
vation à laquelle je ne peux me rendre : on a prétendu qu'U
n'était pas assez noble ; j'avoue qu'il me paraît parfaitement
conforme à l'idée qu*on se fait des Romains , pleins de vigueur
et d^une sorte de rudesse , qui vivaient à cette époque fameuse-
On objecte égalen^nt que le .coloris n'en est pas assez bril- .
lant: mais d'abord il faut observer que , toujours guidé par
* Deux des vers les plus remarquables de Virgile , sont
ceux où il caractérise l'action de Brutus. Tous les mots doi-*
vent en être pesés :
InfeHx \ tttcumque ferent.ea facta minores ,
Vincet amor patris , laudumquc immensa cupîdo*
« Malheureux ! quelque jugement que la postérité doive porter
de sa conduite , l'amour de la patrie et le désir immodéré de
la renommée l'emporteront dans son cœur. {Enéid, ^iv. 6)-
( i6 )
Theureuse idée de tout faire concourir i Faction principale ^
le peintre a donné un aspect sombre et orageux à son ciel ,
de sorte que , dans ce jour de sang , la nature semble elle*
mêoie comme ensevelie dans la tristesse. Or , une grande
réunion d'hommes dans une place publique, lorsque le temps
n'est pas serein , n'offre pas des couleurs brillantes. D'ailleurs ,
serait-il bien vrai qu'un coloris plus séduisant produisît un
meilleur effet P Si , au lieu de ces couleurs rompues dont se
Gon^posent les draperies de tant de figures, le peintre eût fait
choix de tons plus éclatans , aurait-il pu également conserver
l'harmonie générale dans une si vaste composition ? Les ar-
tistes, comme les poètes dramatiques, sont souvent obligés
de ohoisir entre deux moyens de plaire qui s'offrent à leur
esprit , avec la certitude qu'on leur pourra toujours faire
quelque objection spécieuse. Il ne leur reste qu'à prendre ,
s'ils le peuvent , le meilleur parti : c'est , je crois , ce qu'a fait
M. Lethiers.
Je hasarderai ici une observation , non^ur le dessin d'une
figure , mais sur sa grandeur : il me semble que le corps
porté par les licteurs est un'peu trop long. Supposez que celte
figure ♦ animée et entière aille se placer auprès de celles qui
sont sur le même plan , ne paraîtra-t-elle pas d'iine taille
beaucoup plus haute que la leur ? Au reste, si cette remar-
que est juste , elle n'est pas d'une extrême importance*
Terminons cet article par l'examen d'un tableau dont le
sujet est également pris dans l'histoire romaine; c'est tout ce
qu'il
( '7 )
qu'il a de cpmraun ayec celui de J)f . Lethiers 9 ou plutèt le
contraste est parfait , pui$quHl s'agit d'une tendre mète qui
s'évanouit au souvenir de la mort de son fils.
Virgile Usoftt son Enéide en présence d'Augmte et d*Octtt^
vie ; teliesit le titre du tableau de M. de Boisfremont ( n®. 288 )«
Dam un palais somptueux, et tel que devait l'être celui da
maître du monde , Virgile Réclame avec chaleur les vers du
YI^. chant de l'Ënêîde , où Anchise , après avoir prédit tout
ce qiuç {lome attendra du jeune MarcellusCfils d'Octavie, et
qu'Auguste voulait choisir pour son successeur ) , le -nomme
«nfip 9 et déplore sa mort précoce* Yîrgile vient de s'écrier :
Hea ! miserande pa«r ! si qui fata aspira mmpâs ;
Tu MarcfUus cris!..
« Jeime infortuné! situ peux, hélas ! vaincre ta cruelle àe%^
» tioée , tu seras Marcellus ! »> Octavie , placée e^ face du
poëte , perd lie sentiment , tandis q^i' Augusie la contemple
avec douleur et inquiétude.
Cette intéressante composition n'a que ces trois ngures y
de grandeur naturelle. Les portraits de Virgile , parvenus
jusqu'à nous , autorbaient le peintre à lui donner de la
beauté, et il n'a eu garde de se priver de cet avantage. Il a
su aussi fort bien retracer sur la figure de Virgile » l'enthou-
siasme qu'il éprouve en lisant d'aussi beaux vers , dont il est
l'auteur , devant des auditeurs tels que les siens. La tête .^
d'Auguste est aussi fort expressive : cependant , il semble
que le peintre était guidé par les statues et les médailles à lui
( «8)
donner plus de noblesse^ Quant k Octavie , cette figure ,
prise en elle-^méme, est charmante , mais c'est celle qui prête
le plus à la critique. Marcellus mourut a vingt ans , selon
quelques ^historiens ; à dix - huit , selon d'autres * : or , sa
mère , Octavie , n'en a pas plus de seize dans le tableau de
M. de Boisfremont. Quand il hii donnerait quelques années
de plus , ce qui ne s'accorderait guère avec ses formes svelteis
et virginales , .il lui serait impossible d'éviter le reproche de
l'avoir faite beaucoup trop jeune. Au reste , si l'on excepte cette
faute ( irrémédiable , à moins de repeindre entièrement la
figure ) , ce tableau , d'un coloris très-agréable , est fait pour
soutenir la réputation que l'auteur acquit , il y 9 deux ans f
çn peignant un trait de clémence de S. M. F Empereur et RoL
« #
'^ Par la faute d'Antonius Musa , son médecin. Ainsi , en
supposant Taccnsation fondée, l'i^r orance de cet hommfe
concourut ii donner aux Romains Tibère pour maître;
( '9)
N^ II L
FEMMES ARTISTES.
U N homme fort singulier du dernier siècle , Diderot , qui
a dîsserié suries Salons de son temps avec toute la chaleur de
son imagination:, prétend quelque part, « que, quand on
» écrit sur les femmes , il faut tremper sa plume dans l'arc*
» èn-ciel , et jeter sur son style la poussière des aîles du pa*
» ptHony » Je ne demanderais pas- mieux que de suivre son
conseil ; par malheur, la chose ne me paraît pas très- facile ;
tm, pour mieux dire, )e n'entends pas bien cette phrase, l'une
des plus originales , sans contredit;, qui soient jamais sorties
de la pluisie d'un philosophe.
Je me bornerai donc à exprimer , « en langage un peu plus
humain » (comme dit Scarron ), les idées qu'#nt fait naître
en moi les les ouvrages de nos dames-artistes. Une observation
iqu'il serait injuste, de négliger, c'est qu^il n'est point de pays
qui, à aucune époque antérieure, ait pu se glorifier d'avoir-
-vu naître i la fois tant de femmes cultivant la peinture avec
un succès décidé. Pline nous parle bien d'une Lola , de Cy-
aique, à laquelle il accorde de très-grands talens; mais celte.
(ao)
çierçe perpétuette * ne paraît pas avoir eu beaucoup d^émules
de son sexe. L^Italle y avec ces superlatifs dont elle est tou-
jours' si prodigue-, a beaucoup trop vanté , ily a environ un
siècle , sa F'alentissima ed onoratissima signora Rosa Alha
Carierij dont le principal Hiérile était de bien péfndre^un
portrait au pastel. Les nobles et gracieuses compositions
à^Angélica Kauffman honorent T Allemagne qui lui a donné
naissance ; là France elle-même sVst enorgueillie long-temps
des ouvrages de mesdames» Vincent tt Le Brun ; mais jamais ,
jusqu'à ces dernières années , on n^avaît vu les noms d'en-
viron trente femnses inscrits dans le livret d'une eiposition
de tableaux. Cet article sera consacré teot entier à l'examea
de leurs productions. C'est , en ap(»arence , la partie de ma
tdche*Ia plus agréable , et , en rëaitté , la p3us difficile.
Bès le début , je me trouve dans un véritable embarras.
Madame Mongez s'est livrée exclusivement à la peinture
d'histoire ; elle ne s'abaisse point auY genres secondaires ;inais
la critique , en lui tenant compte 4le ses efforts audacieux ,
lui a plus d'une fois adressé des observailîoiis sévères. Sera-l-
elle plus douce cette année? Pour moi, je suis bien sûr de
n'être contredit par personne , quand ^'aranoerai que le ta-
bleau de Persde et Andromède , peint par cette' dapie (n^6S8),
est un d^s plus remarquables du SaUa j q«e trè$-peu dhommes
^ Perpétua QÎrgo. C'est une circon^tanœ que Pline a c(*a
devoir remarquer, et qui semble assez étrangère au mérite de
celle feriirtie artiste.
( ai )
seraient en état (et l'exposition elle-même le prouve) de s'éle-
ver à ce goût de dessin idéal , k cette vigueur de coloris. Mais
aussi les carnations ne sont-elles pas d'un ton peu naturel ?
La pose de l'Andromède , et surtout celle du bras gauche de
cette figure , n'a-t»eHepas quelque chose d'affecté ? Ce Persée,
dont les formes rappellent celles des belles statues antiques ,
ne se présente-t-il pas sous un aspect peu agréable? Que
la carrière où M"*. Mongez s'est aventurée est difficile à par-
courir, surtout pour une femme , puisque , avec un si beau
talent ^jcs «mvragps ont toujours prêté plus ou moins à de
jfraves objections ! Venons a,ux dames qui n'ont pas tant pré-
sumé de leurs forces I et en ont peut-être fait un .emploi plus
Judicieux*
Je VrOudrais bien pouvoir dire à M"^» Auzou qu'eUe ne
laisse rien à désirer dans le sujet charmant qu'eUe a exposé
sous ]e n°. 22. (5. M. l'Impératrice apani son Toariage^et au
moment de quitter sa famille , distribue les diamans de sm mère
aux archiducs et archiduchesses ^ ses frères et sœurs) ; mais un
dessin peu correct , une, couleur quelquefois crue , et le dé-
faut d'harmonie 5 obligent 4^ classer ce tableau parmi ceux où
le talent n'a pas tout à fait secondé le zèle. Il faut toutefois
reconnaître , dans la 'composition , une de ces idées délicates «
qui semblent appartenir plu$ spécialement aux femmes qu'aux
hommes , soit qu'elles tiennent la pkime ou le pinceau. En
recevant les dons d'une sœur chérie, le plus âgé des jaunes
princes^ et la princesse^ qui va désormais rester l'aînée de se»
C 42 )
Aoeurs , éprouvent un sentiment de tristesse ; tandis que les
autres, sentant moins la perte quHls vont faire^ se livreot
plus ouvertement à la joie qu€ leur causent les magnifiques
présens qu'ils reçoivent.
M"»«. Auzou a eu plus de bonheur dans le n". aj, repré-
sentant Diane de France et Montmorency, La fille de Henri U
était aimée du fils du connétable. S'il en faut croire le livret,
eHe le payait de retour; et une duchesse de Britsaciavorîsàît
leur tendresse. Henri U, qui savait très-bien
Qu*aa tendre cogtgemtDt va phis loin qn*on ne pense ,
long-temps avant que Quinault Peut dit, voulut un jour s^as*
aurer de ce qu'il devait penser d'une liaison dont il re-
doutait les suites. Que vit-il? Diane tenant une margue-
rite sur laquelle elle venait de déposer un baiser , et Mont-
morency attendant ^ avec tout le respect d'un descendant de
preux chevaliers , le don de ce gage d'amour. Quoi de plus
rassurant pour l'inquiétude paternelle ! €e qui n*est pas
moins heureux pour M"*. Auzou, c'est qu'elle a rendu avec
beaucoup de grâce 1«, groupé des deux.^mans. Les'figures du
fond , quoique dans la demi-teinte , laissent aussi voir des
expressions fort justes ; de sorte que le tout ensemble formé
un des. plus jolis petits tableaux de l'exposition.'
Voici encore une coihposition où tine marguerite joue un
tôle important. Dans son tah\ea\ià^tiifaireetBngiiié(n\'j2^)y.
M^^^. Robineau a introduit une jeune filte cherchant à savoir^
en effeuillant une de- ces (leur;», si son amant viendra bientdi
- (a3)
près d'elle. Tandis qu'elle interroge ainsi la destinée, arec
une attention tout il fait aimable , ce page espiègle Tobserve
et cherche è la suprendre par son retour. Je me plais d'au*
tant plus à remarquer cette aimable petite scène d^amour ,
que , si je ne me trompe , M"^ Robineau n'a encore rien
exposé. Ce. début est d'un très^heureux. augure. EUe possède
la grâce , qui ne «^acquiert pas : le temps et le travail lui don-
neront ce qui lui manque sous le rapport de la correction du
dessin , et de la fermeté du pinceau.
: Quand M^^^ Mayer serait absolument l'égale de M. Pru-
d'hon, son maître « dont ses tableaux retracent la manière
avec tant d'exactitude , je me permettrais encore de lui dire
qu'avec un talent aussi distingué que le sien , elle devrait ne
pas marcher si scrupuleusement sur les traces d'autrûî. Je
crain» bien d'ailleurs que , dans son tableau d'une neHade
jetant de Veau à une troupe de petits amours (n^63i) , elle n'ait
pris l'affectation pour de la grâce , et des tons roses pour des
carnations.
Honneur cette fois encore i M*^*. Lescot r son principal
tableau, représentant le boisement de pieds dans la basilique
de Saint-Pierre , à Rome ( n®. 576) , est fait pour soutenir , et
même pour étendre sa réputation. Son coloris est toujours
yigoureux ; tou^owrs elle saisit svec vérité des détails de
mœurs et de costume qui font aisément reconnaître les ha-
bitons de Rome , où ses tableaux sont composés^
La^ statue de.l'apâtrc , en bi^nae , est rey£tue d'habits- poii^
( a4 )
liteaux 4 des pçnileiis da^s leur étr^âge iccoolrêmént , des
ipoines, surtout de charinantea viUageoJâes rennes de Fras—
G^U ou de Taucien Titur , s^apprQcn^QldévotciBeiftt de Feb|et
de lepr vénération. Si le loxe des rétcmens donne. un. aspect
assez singulier à cette figure 9 dont on n'aperçoit que ]e visage
i^oir et les mains no.ireSy ce n'est pas la faute de l'artiste r
M''^; Lescot a peint ce qu'elle a vu ; et la Yérilé dq sofi kni*-
t^tion est frappante jusque da^s les moindres détails.
Après des éloges donpé» si volontiers à tne des femme»
dont le pinceau honore le plus leur sese et leur patrie , il
doit m'étre permis de remacquer que les groupes sont utt peu
épars. Un petit moine , prosterné i 4erre au milieu du tableau,
ne se lie à rien ; enfin , dans les port^its de Français et de
Françaises qui sont à droite du spectateur ^ il me semble que
Tartiste n'a point la richesse de tons et k fermeté de pinceau
qu'on ^st accoutun^é à voir dans ses ouvrages , et qu'on ré-
trouve ménae dans plusieurs parties de ce tableau. Les autres
ouvrages de M^''. Lescot sont , dans une moindre propor--
tion, dignes de celui-ci.; séulemeiit sonycti,<^« miûn chêude
( n**. 677 ) semble annoncer qu'elle île rend pas les ex-
pressions d'une gahé naïve au^i facilement que cdles de la
piete.
Passer .des ouvrages d'une excellente élève dé M. Lethiers
à un tableau de la fille de ce peintre distingué^ c'est line
transition toute naturelle. 1/intéressante Maihitde de cette
U"*. Cottm \ qu'on peut Gritiqoei* ptua facilement qu'on ne
hi remfdacdra , n^a point vaîn«aieiit iùspiré M**^. âerrièrea
(n*^. 84-5). Son Malek-Adhel a bien le caractère énergique qnt
rhistQÎ^e 6t le roman lai d<)^mienl ; k fetine chrétienne est
cluarmanke sous ses vêlement reKgîeux ; et si ce tablean , dont
le sujet est très-heureux et très-pittoresqoe « laisse quelque
chose à déslrei* , ce n'est peul-dtre qu'un peu plus de fermeté
dans le dessin de Malek-Adhel.
On sait assez que le mérite d'un tableau ne doit pas se
f ager par son étendue. Diaprés ce principe , je détourne vo-
lontiers mes tegards de plusieurs compositions immenses
dont je ne dirai jamais rien (et pouf cause) , afin de considé-
rer de petites productions bien soignées dans tontes leurs
li^riies. De ce nombre sont tro;s tableaux exposés sous les
!!**•.• 2^2, iyS et 2^4' I^'^ïï offre nn -intérieur d'églîse gothique.
Une jetone femme , Jeanne , fille de Raymond YIII , comte de
Toulouse , fait ses adieux aux tombeaux dé ses pères , dont
iin mariage illustre ra l'éloigner. Il serait difficile de porter
plus loin l'entente de la perspective aérienne , la vérité et la
«uavité de la couleur. Le même mérite se retrouve dans le
second tableau , où \w chevalier partant pour la Terre^Sainte ^
renouvelle , en présence des autels , ses sermens ctatnour à sa
dame. L'idée de placer, au milieu delà composition , un vaste
tombeau Vu par uri de ses angles, a quelque chose de hardi ,
car il fallait dej teintes aussi jiistes , abssi harmonieuses que
ceHes que Tarliste a su employer , pour que ce monument ne
fil paa tache. Avant de quitter ce joli tableau pour le troi-
<»6)
iièmet j'observerai que la dame à qui on le doit, ne parati
pas avoir autant étudié It^Jigure c|ue les autres parties de Tare.
Ni le chevalier, ni sa maîtresse , oe manquent d'élégance;
mais l'avant-bras droit du jeaoe homme n# s'offre pas sous
un aspect heureux.
V intérieur dCune église oà' un capucin dit des évangiles
(n®. 278 ) , est , selon moi, supérieur aux deux autres taUeauz.
Là les figures , d'une très-petite proportion , il est vrai , ont
de la grâce , de l'élégance , sans offrir les .moindres traces
d'incorrection. Quant à l'aspect général de l'édifice , il me
paraîtrait difficile d'être à la fois plus harmonieux et plus
simple : la dégradation des tons , la lumière qui passe par les
fenêtres, sont de l'effet le plus vrai. Je serais vraiment fâcbé
de l'extrême modestie de l'artiste , qui l'a portée à ne se .dési-
gner dans le livret que par trois lettres initiales , sisotn^nam.,
écrit au bas d'un de ces tableaux , ne me permettait de citer
M'"'', de Manne comme l'auteur de ces charmans ouvrage Sw
Elle est encore une des personnes qui soumettent ^ pour la
première fois , leurs tableaux aux regards du public ;«t certes^
ce n'est pas celle à qui l'observateur attentif doit le moins de
félicitations.
M*'*. Capet , M"*. Charpentier, M**. Davin , née Mirvault,
sont toujours au nombre des dames qui traitent le portrait
avec le plus de succès. C'est tout ce que je peux dire d'ou^
vrages qui, parleur nature même, échappent' à l'analyse ;
m^is je me croirais injuste envers M^^^rGodefroi» si ^e n-ob-r
(»7) »
servais pas que ses grands portraits de S, M, la Reine Ho¥^
Unse f aifecjes princes ses enfans ( n°. 4i8 ) f ^t des ef^ans de
S. Ex, le duc de Ropigo (n^ 4^9)9 doiyenl ajouter beaucoup.
à sa réputation.
M"*^. Benoît soutient ,1a sienne , et c'est beaucoup dire.
Quoiqu'on puisse peut-être 'désirer un peti plus de vigueur
dans son beau portrait en pied de S, M. Vlmpératrice et Reine
( n^.43) , il est impossible de ne pas combler d'éloges Tha^.
bile artiste qui a si bien su faire passer sur la toile les grâces de
cette auguste princesse. La diseuse de bonne aventure ( n". 44) «
est également digne du pinceau de M™^ Benoît. La jeuae fille
est très jolie ; le paysage et Farchilecture de ce tableau , Fuu
des plus agréables du Salon , font beaucoup d'honneur k
M. Mongin.Ils prouvent que cet artiste n'a point voulu faire
briller ces accessoires aux dépens des figures. L'éloge ne pa-
raît pas grand \ mais onTapprécieraf en songeant combien
peu de peintres, en pareille circonstance, ont su en mériter •
un semblable.
MP^ Chaudet n'aurait pas besoin de porter le nom d'un
sculpteur que les arts regrettent, et auquel ils doivent d'excel-
Içns ouvages , pour attirer l'attention : ses tableaux se re-
commandent encore cette année par la grâce et la délicatesse.
Celui à^ une petite fille déjeunant açec un chien Ç^n"*. 199 X«
n'offre plus ces carnations d'un rouge un peu cru, qu'on
li^i a plus d'une fois reprochées. Parmi ses portraits , ce-
lui qui est exposé sous le n. 201 , plaîi surtout par l'art
^ ( »8 )
«Tee lequel M**. Chaudet a indiqué le nu sons des tînges
tfansparen». Il représente une dame en religieuse , ou , pour
parler comme le livret, en naoice.
Une Qestale (n^ 234)9 et une jeune fille faisant sa prière
(ri**. ^35) , sont les deux seuls tableaux , demî-figures , que
M**. Dabos ait exposés. Sa couleur a toujours de la finesse ^
et toujours aussi son dessin laisse à désirer plus de correc-
tion.
' M^ 258. Jeune fille conduisant sa mèn^ aœugle^ par made-
moiselle Alexandrine Délavai. Voici un de ces sujets dont le
choix seul doit adoucir les traits de la critique. Cette compo-
sition « dont les figures sont de grandeur naturelle, est de la
p(us aimable simplicitéé Si le tableau laisse à désirer plus de
correction dans le dessin et plus d^harmonie dans la couleur ,
du moins M"^ Délavai estrcUe dans une très-bonne route :
e^le n^a point dans la tête ce qu^on .appelle , en peinture ,
des systèmes»
Le portrait de madame Raucourt , par M'^*. de Romance
(a®. 292), est d'une ressemblance frappante. C'est une idée
heureuse (je ne dis pas une idée neuve) qu'a eue cette dame
de représenter M"*. Fleury^ actiice de l'Odéon , de face et de
profil , au moyen d'une glace (n^ 291). Au reste , ma mé-
moire peut me tromper , mats il me semble qu'il y a deux
ans , M™', de Romance exposa un portrait de femme qu'au-
cun de ceux qu'elle a placés cette année au salon , n^égale
pour la finesse de la couleur.
( »9 )
Quoîqu^on ait consacré à M"**. Jacquotot , dans le Journal
des Arts , un article spécial , où on a ju^tem^ntloué ses belles
miniatures en émail (n®\ 5oS , 5o6 et Soy), je crois devoir
joindre ici tHês ^oges à ceux qu'elle a reçus , ne fût-ee que
pour œ pas paraître avoir oublié des ouvrages aussi intéres^
aans que les siens. ^
M"*. Lorimier n'a , cette année , que des portraits (»"». S96,
697 et 598). On y retrouve l'amabilité de son. pinceau.
Une cierge aQtc Venfant Jésus , par M"*. Btankenstetii
(n*. îoo))a bien, jusqu'à un certain degré, l'espèce de
candeur que ces sortes de tableaux exigent, nraitfâ est toujours
dangereux de traiter des sujets qui rappellent d^es cbêft^
<d'œuvres des plus grands maîtres. On n'aurait même pas be-
soin de songer à eux, pour s'apercevoir que cette vierge n'est
pas dans les justes proportions , et que le coloris de l'enfant
est un peu cru. La notice indique , sous le n*. i3o3, une
Vénus désarmant i* Amour j. A la mâtnadame. Je n'ai pu dé-
couvrir QÙ ce tableau est placé.
Les portraits de M^'^.Mauduît (de 619 a 626) sont assez coN
rectement dessinés ; mais cette demoiselle doit craindre d^
contracter Fhabitude des demi- teintes trop noires. Ce défaut se
retrouve danii la figure à* une jeune femme lisant une lettre
(n*. 624) * cMe est , du reste , bien peinte , et pleine de grâces.
Dans le n*. 6^5 , où l'artiste a peint son propre portrait , le
bras droit qu'elle approche de son oreille , ne fait pas un effet
agréable. J'insiste sur ces déf:[iut3 , parce que , ce portrait
t 3o )
prouvanr queUI."'. jyiauduUestiettne, il me paraît qu^on doit
Letucoup espérer de ion talent.
Le tableau à'Edwy et Elgha , par M»T, Harvey (n. 468 ) ,.
offre y sans contredit, le plus singulier sujet qui soit au Salon.
Deux prêtres ^ Dunstaa , abbé de Glaston , et Odo , arche-
vêque de Cantorbéry, se préparent à forcer Tappartement où
Edwy^ petit-fils du grand Alfred^ et roi d^ Angleterre^ est avec
son épouse Elgiva , princesse du sang royal : ils veulent Tar-^
racher de tes bras. Le fait est historique. RapinThoyras rap-
porte, même t d'après qu«l4}ues auteurs, que Dunstan flétrit
Elgiva d'un fer chaud au front , et TexiU en Irlande. Il pré-
tendait qu'elle était trop proche parente du roi pour devenir
sa femme. Voilà un de ces faits qui embarrassent beaucoup
les panégyristes des siècles d'ignorance. Quant au tableau «
îL est fort, bien composé, et d'une couleur vigoureuse ;
mais madame Harvey paraît avoir pour le. Parmesan une
prédilection qui ne lui a pas j^|Kfttis , en imitant ce maître ,
de se garantir de ses défauts. Les figures, tt surtout celle de
la reine 9^ sont d'une longueur démesurée. Au reste , cette
délité il suivre U manière d'un peintre très-recommandable ^
donne à son tableau un aspect ancien. S'il était placé au Mu-
séum parmi les ouvrages des maîtres d'Italie , on pourrait
croire qu'il appartient à quelqu'un d'entr'eux. Il vaudrait
encore mieux que M"*. Harvey composât et exécutât ses ta-r
bleau^ d'après sa propre manière de voir et de sentir. .
-> I -<
(3i)
I
N'. IV.
TABLEAUX D'HISTOIRE (suite).
U IVE des plus vastes et des plus importantes compositions
historiques de cette année , est ia rentrée de VEmpereur dans
file de Loltauj txprès la bataille d'Esllng ^ par M. Meynier
( n. €45 ). Cet habile artiste a saisi le moment où des soldats
blessés oublient leurs souffrances pour exprimer it leur illustre
chef la joie qu'ils ont de le revoie. Us lui tendent les bras , et
TEmpereur ^ d'un signe de main, leur témoigne avec noblesse
combien il est sensible à ces marques de leur attachement ;
mais en même temps il semble leur recommander le calme
dont ils ont besoin , pendant qu'ils reçoivent les secours de$
. chirutgiens militaires. Il y a peu de tableaux de ce genre oik
la figure de l'Empereur ait une expression aussi juste. Le
dessin des soldats à demi déshabillés est savant; mais il est
impossible de ne pas remarquer que plusieurs de ces figures
ont entr'elles une ressemblance qu'un^ aussi bon dessina-
teur que M. Meyaier pouvait facilement éviter. Peut-être ea-.
core un des chirurgiens '^ , placé à l'extrémité gauche du ta-
"^ C'est le mot que M. Meynier emploie dans sa notice.
bleau , e$t>il d^un dessin xAt peu lourd ; qi^p} qy'U eq soît^
cet ouvrage a des beautés réelles , solides ; il est trës-digue
de son auteur.
N". 244- Bajazet et le Berger^ par M. Dorcy Dedreux.
Voict encore un artiste qui débute delà manière la pUisayan-*^
tageuse dans le genre historique. Le premier éloge que je lui
donnerai, c'est d^avoir bien connu ce qui convenait particu-
lièrement à son art. Je m'explique :- Yertot, jdaxis-s.on histoire
deMalte, nous znontre Bajazet , marchant contre ce Tamerlaa
qui devait arrêter le cour^ de.ses triomphes ^ péijtétréde dou^
leur, en songeant que son fils venait de tomber sous le fer
des ennemis , devenus maîtres d/une place importante qu'iU
avaient détruite. Traversaiit un vallon à la tête de son armée ^
il rencoiïtra un pâtre qui ^ fort é.tranger aux querelles des
rnaîjtres delà terre, chantait auprès de<son troupeau,; alors jil
lui adressa ces paroles : « Berger , je te prie que ces nQ.ôtf-cj
» «oient désormais le refrein de tes chajpsoi^LS : Jlfaikewne;ief
tt Bajazet ,!tu ^erep^irus plus ton ehfirjils Ortogyfe.y ni ta PtUc
■I » Il I I ■ I I I m II — <>ii^ I I ? ■■
J'ignore sHla eu quelque répugnance ^ se servir des expresr
sidns ' officiers de santé; pour moi , je n'ai jamais rien coni-
Ïa*is à cette déi^iominaltian , inventée à \ifie <^o^ue du U fid-r
ait que tout fût 'renouvelé dans les mots comité dans les
choses , qtioi qu'il pik en coûter au bon sens. Je sais 'bien ce
que c'e3t qu'un officier de chasse ur^ , de hussards ^ c'^t celu^
qui commande à un certain nombre d^hommes de ces diffé—
renies «mies.; mais tin .officier de santé! Ce mot n'est 'bon
tout au plus qu'à inspirer des plaisanteries^ qui seraient à la
vérité âùssiûues que~ déplacées; la faute en serait àlette bi-
zarre alliance d$ mo^.
» de
.'' ,
( 33 )
f» ife Séha$t€, » Combien d'artistes auraient cherché à faire poas-
•ser sur la toile ces mots touchans ! M. Dorcy Dedreux a senti
<{uela peinture ne peut exprimer les paroles. Dans son tableau ^
le pâtre , qu'il a fait jeune, joue tranquillement de la flûte ;
près de lui Bajazet, debout et enveloppé d'un large manteau,
laisse Toir sur sa figure lesprofondesémotions dont il est agité.
Dans le fond , l'on aperçoit Tavant-garde de l'armée otto-
mane. L'exécution de ce tableau répond au mérite de la pen-
sée : la figure de Bajazet est largement drapée, et le jeune
pâtre a des formes très-agréables. La couleur est chaude et
£ère ; elle caractérise ainsi fort bien le lieu de la scène. A la.
ligueur | on pourrait dire qu'il n'est pas naturel qu'un aou-«
verain , ayant squs ses ordres une armée de trois centmillt
hommes, se trouve ainsi seul et â pied , en avant de ses trou-
pes* Nul doute que Bajazet n'ait marché contre' son ennemi
avec un grand appareil ; mais si ces fortes de licences n'étaient-
pas permises aux artistes ^ il faudrait souvent qu'ils renonças^
aent à des sujets très-heureux ; et on doit passer celle-ci k un
peintre qui ne voulait composer son tableau que de deux
ligures.
TABLEAUX ANECDOTIQUES.
II faut bien adopter de nouvelles dénomiaatiofff, quand
certains ouvrages se multiplient assez pour former un gerire
4 part. J'appelle I ainsi que plusieurs amis des As\s ^ iàhUausia
3
(34)
tmecdotiques , ces tableaux de chevalet , où , depuis quelques
années , des artistet dont le nombre s'augmente à chaque ex-
position , retracent des traits particuliers de la vie des per-
sonnages illustres , ou seulement de ceux qui sont connus
dans Thistoire. Leur but principal n'est point de lutter contre
les, grandes compositions, exécutées avec ce &ire large et sa-
vant qui constitue essenlieliernent le premier de tous les genres
de peinture : ils s'attachent de préférence à reproduire le fini
précieux, la richesse de coloris , qui distinguent un si grand
nombre de tableau» de genre , exécutés par d'habiles maî-
tres de l'école flamande ; mais ils cherchent , avec raison ,
des sujets qui puissent parler à l'esprit du spectateur , afin
qu'il ne porte pas toute son attention sur le mécanisme de
l'art.
M. Revoil a exposé un tournoi ( n*. 726 ) , dont Ber-
trand du Guesclin est le héros. Il était venu , sans se &ire
coif naître, k un de ces exercices guerriers où se trouvait
son père. Après avoir abattu quatorze chevaliers , il triom-
phe d'un quinzième ; mais celui-ci a l'adresse de soulever
la visière du casque de son adversaire , et le jeune Bertrand
est reconnu. Si la plus exacte observation du costume, et le
fini le plus précieux dans les figures des premiers plans , suf-
fisaient pour rendre un tableau irréprochable , celui-ci serait
«n cher-GTœuvre ; mais tout le talent de l'artiste n'empêche
pas qu^oB n'y désire plus la chaleur qui doit animer ces
sortes de tableaux. Pourquoi d'ailleurs le peintre a-t-il teU
(35)
lement éteint la couleur des personnages qui sont dans les
loges du fond de la lice ? On est toujours tenté de croire que
ce sont des fresques peintes sur quelque muraille. Il y aurait
aussi beaucoup de remarques à faire sur le dessin. Toute
Térudition de l'artiste ne lui a pas tellement fait couvrir d'ar-
mures et de costumes du temps le nu de ses diverses figures,^
qu'on n'y remarque plusieurs incorrections. Mais, dira-t-on,
comment peut-on critiquer un si joli tableau P Voilà bien le
mot propre , le mot qu'on répète , quand on l'examine ; et
ceux qui emploient ce mot de joli , fout de l'ouvrage , peut-
être sans y songer, une critique beaucoup plus sévère que la
mienne..
M. Yermay sait exécuter, dans ce même genre, des tableaux
4
très-estimables. Sa Reine de Navarre lisantune ballade (n^. 945) ,'
a infiniment de grâce ; il en faut dire autant de Diane de
Poitiers (n^. g44)- Cettç fameuse maîtresse de Henri II sert
de modèle au célèbre sculpteur Jean Goujon, qui termine,
diaprés elle, la statue de Diane , que l'on voit aujourd'hui
dans le jardin du Musée des Monumens français. Le Roi
est près de sa maîtresse; des courtisans , ^ des pages , s.à
voient sur des plans plus éloignés. M. Yermay entend bieA
la composition d'un tableau ; sa couleur est agréable et a de
la vigueur , mais son dessin manque souvent de correction.
II a surtout le défaut de faire ses figures d'une extrême lon-
gueur 5 il veut ainsi Içs rendre plus sveltes ; l'intention est
bonne , mais il sait sans doute , comme tout le monde ^ que
(36)
pjisser le but ^ ce n^est pas Tatteindre. Son tableau, n"^. 94S ,
où il a peint la découi^erte du droit romain , offre une scène
animëe. Un grand nombre de figures , et surtout la prin*
cipale (celle de l'Empereur Lotaire II), ont beaucoup d^ex-
pression ; mais les' incorrections ikont encore assez nom-
breuses.
Le choix du sujet et la grandeur des figures , me font aussi
placer au rang des tableaux anecdotiques Vlnès de Castro de
M. de Forbîn (n^ 24^)* ^ fable et l'histoire ont quelques
-personnages qui, plus particulièrement que d'autres, semblent
destinés à faire ressortir le talent dt ceux qui cultivent les
beaux-arts. Inès est de ce nombre. Sa mort funeste fournît
.d'abord au Camoëns l'épisode le plus pathétique de la Lu-
«iade. Lamothe ensuite se saisit de ce sujet , le met sur notre
scène tragique, et, quoiqu'il versifiât sa pièce enhonime qui,
.'par principes , méprisait la poésie , die n'en est pas moins
une des plus touchantes qui soient au théâtre. M. de Forbin
saisit enfin , dans la funeste aventure d'Inès , une circons-
tance à la fois tendre et douloureuse ; et son tableau afoutc
à la réputation de l'artiste.
Le Roi Alphonse IV étant mort, après avoir fait assassiner
l'épouse de sdn fils : don Pèdre se transporta dans le cloître
de Tabbayé à'AIcobassa , où Inès était enterrée. Il fit exhu-
mer son cadavre , et lui plaça une couronne sur la tête , tan-
' dis que le chancelier d' armes de Portugal prêtait foi et ho m-
mage a ses restes manimes.
( 57 )
Tel est le sujet du tableau de M. de Forbin. Le supérieur des
«hartreux ; des gardes et queVjues babitans du voisiaagev
sont seuls témoins de cet événement extraordinaire. Le site ^
que Fauteur du tableau assure être exact ^ représente Tinté -
rieur d'un de ces édifices construits par les Maures ^ et où
ils savaient réunir , d^une manière par fois bizarre , mais tou*
jours pittoresque,, les marbres de diverses couleurs, les eaux,
les fruits et les fleurs. Ce site , dans le tableau , produit un
excellent effet ; mais les figures , d'ailleurs un peu longues ,
offretit des teintes d'une vigueur quelquefois outrée. Il est
également certain que le peintre a donné au visage d'Inès un
toloris qui rappelle un peu trop les ravages de k mort et du
temps. C'est lorsqu'un artiste a de pareils objets à représen-
ter , qu'il peut et qu'il doit peut-étra ne pas porter trop loin
la vérité de l'imitation. Quoi quHl en soit , ce tableau , à qui
les figures et le lieu de la scène concourent à donner un as-
pect si original , doit 6tre considéré comme un des plus re-
marquables du salon. La couleur vigoureuse de M. de Forbin
se retrouve dans la t^ue d'une chapelle souterraine ddLïis la villtt
d'£vora , en Portugal (n**. 2^S).
Parmi plusieurs tableaux de Mr Ducis , on s'arrête princi-^
paiement devant celui qui a pour titre le Tasse (n?. 826). Ne-
veu d'un poêle illustre et jcélèbre surtout pour avoir por^ k
un très-haut degré la terreur tragique , cet artiste poursuit
dans son ar^t ^ne autre carrière que celle de notre Shakespeare.
La plupart de ses ouvrages inspirent des sentimeos doux*
(38)
Dans celui dont je parle , Fauteur immortel de la divine
. Jérusalem est parvenu à briser les fers dont le duc de Ferrare
nr^avait pas rougi de le faire charger. Quoiqu^il éprouvât le
dénuement le plus absolu , il est parvenu jusquà la maison de
aa sœur , dans le royaume de Naples. S'étant annoncé à elle
comme un messager chargé de lui reniettre une lettre de sor
frère , il est si ému de la douleur profonde qu'elle éprouve en
lisant cet écrit, où il avait tracé ses malheurs, qu*H ne peut
se contraindre plus long-tempa , et se jette dans ses bras.
Le moment choisi par le peintre est celui où Comélia lit la
lettre : sts yeux se mouillent de larmes; et le Tasse quil'ob^
serte attentivement , va se faire reconnaître. La pantomime
des deux personnages est parfaite. Le dessin et la couleur
ne méritent pas moins d'éloges. Cornélia est belle , et le
)our brillant qui éclaire le Heu de la scène par une fènttre
entr'ouverte , produit un effet très-piquant. Pour mieux ca-
ractériser le sujet, M. Ducis a montré dans le fond la mer,
un paysage et le Vésuve. Si Ton pouvait lui faire quelqtle re-
proche , ce serait d'avoir donné au Tasse , qui , comme il le
dit lui-même dans le livret , « a changé ses habits contre ceux
•- d'un pâtre , » un costume trop riche ; peul-être aussi la
sœur de ce grand poëte, Cornélia, qui vécut dans l'indigence ,
paraît-elle dans le tableau beaucoup plus en état de le secourir
€{u'elle ne l'était réellement. Au reste , 3 n'est pas douteux
que la compositioa pittoresque ne gagne à cette petite li-
oence.
( Ï9 )
Un artiste donne une idée excellente de son caractère ^
' en rendant hommage aux grands maîtres qui se sont illustrés
dans la carrièro'quHl parcourL C'est ce qu'a fait M. Vignaud,
lorsqu'il a peint la mort d'Eustache Lesueur (n*. 962). Le
sort du Raphaël français fut bien difféi^nt de celui du plus
grand peintre de l'Italie : toute leurresseDpiblance fut dans leur
génie « et dans la brièveté de leur existence. Raphaël mourut
à trente-sept ans, par sa faute et par celle des médecins ; mais
comblé d'honneurs y de richesses, et jouissant de toute sa
gloire. Lesueur , toujours pauvre, toujours poursuivi par
l'envie , alla chercher un refuge chez les chartreux de Paris*,
.pour lesquels il avait peint la vie de saint Bruno , fondateur
de leur ordre. "^ Il y termina sa vie ^ n'ayant encore que
trente-huit ans. M. Yignaud l'a représenté expirant au milieu
de ces bons religieux. Près de lui , un de ses frères , qui avait
pria le parti des armes , est plongé dans ta douleur. Le peintre
a placé un crucifix au chevet du lit de Lesueur. C'est une
idée d'autant plus judicieuse, qu'elle rappelle combien ràu-
taur da saint Paid prêchant les EphésienSy de V apparition de
sainte Scolasiiquè à saint Benoit ^ et de tant d'autres produc-
tions immortelles , honneur de l'école française , sut imprimer
de grandeur , et surtout à!*onction aux sujets pieux qu'ail
* Cette suite de tableaux dont plusieurs sont des chefs-
d'œuvre , et qui tous annoncent , dans l'artiste quiles a exé-
cutés , l'ame la plus pure et la plus élevée , forme aujourd'hui
au Luxembourg ce qu'on appelle la Galerie de Lesueur^
( 4o >
traita. La coraposition du tableau de M. Vignaud ne pouvak
être que bonne , car il s'est pénétré de celle du fabl«»u ad*^
ftiirable où Leanenr lui-même ^ petpt la mùr/ de $mni Brunoi.
X*a figure du mourant et celle de Foffici^r sont bâen dessinées^,
bien peintes ; et les regrets ^ une douce pitié , se lisent sur Iosp
physionomies des solitaires.
J'aurais pourtant voulu, dans ce fablean intéressant ^ une
figure de plus ; celle de JLe Brun , contemplant avec la }oie
inlérietire «t cruelle d'un rival celui dont la mort « attatt lui
» tirer une grosse épine du pied. » ^ (Telles furent les odîeu**
ses paroles qu'il osa prononcer dans cette circonstance). Je
sais bien que c'eût été flétrir la mémoire d'un peintre qui ,
malgré ses défauts, sera toujours estimé pour la noblesse der
ses idées et Tétendue de son imagination ; mais il me semUsr
que la peinture anecdotique doit se piquer d'avoir l'impar^
iSaliié de Thistoire. Au reste , ce serait en vain que des parti-
sans de Le Brun voudraient révoquer en doute la vérité de
ce trait, si honteux pour Ce peintre. Les tableaux desschar^
treux , gâtés par lui ou par ses élèves , inénu après la mort de
Lesueur^ démontrent assez qu'il a dû prononcer les mots que )ef
viens de rapporter. Tant il est vrai (et l'histoire des Arts ner
le prouve que trop) que des sentiraens lâchesi peuvent queV-
quefois s'unir à de très-grands tailens^
'^ Je ne crois pas que Tartistc air eu Finleittion de désigner
Le Brun par un personnage vêtu de noir. Si telle eût été sa
pensée, la ^'éssembiance n'existerait past , et Texpre^iuiincr
serait pas )u$te«
(40
%fV\%MW^^*'W*^'%nf*tw%,'^^f^ft/%/%^twv%^y^fvw.'
N\ V.
TABLEAUX D'HISTOIRE (suite).
«^ammmm
flEftcvLE avait , comme on le sait^ Thabitude héroïque^
et fort digne d^un demi-dieu qui devait la naiâfs^nce à unqui-
proqoo , de laisser un commencement de poslérité dans tous
les pays qu'il parcourait. M. Devosge a su trouver dans une
-vie si connoe ^ et qui a tant offert de sujets aux artistes , un
événement intéressant y qui peut-être n'avait pas encore été
retracé sur la toile. Phillo , fille d'Alcimédon , héros grec ^
céda , comme tant d'autres filles , k la passion d*Âlcide ^
et devînt mère. Alcimédon était apparemment un homme
à préjugés ; il ne sût point apprécier Fhonneur qu'Hercule
-venait de lui faire en augmentant sa famille ; et , par son
ordre , la mère et le fik furent exposés sur ufîe montagne;
Us allaient être dévorés par un lioo> lorsque Hercule, attiré
dans ce lieu désert par lés cris d'une pie qui contrefaisait
ceux de. l'enfant , arriva fort à propos poi^ leur sauver la
vie.
La coïnposition de M. Dévdsge (n^ Si i) est nette et bien
ieatie.Tandisqae le fils de Jupiter presse le lion de ses robusla
(4*)
bras, et est près de rélouffer , Phillo , attachée i un rocher, s^ë-
«
loîgne du monstre de toute la longueur de la chaîne , en don-
nant les signes d'une extrême frayeur. Cherchant surtout à
sauver son fils 9 elle le tient le plus loin qu'elle peut du lieu
de cette lutte terrible. Ces figures sont correctes ; le dessin
même annonce le sentiment des beautés de l'antique : mais
la couleur est la partie faible de ce tableau : elle manque en
général de vérité dans les carnations , ainsi que de vigueur et
d^harmome dans l'ensemble.
* J'ignore si les tribunaux qui ont retenti , il y a quelques
mots , de tant d'accusations de plagiat , auront quelque jour à
s'occuper de plaintes 'semblables , relativement à la compo-
sition des tableaux. Si jamais la mode en venait , il y aurait
beaucoup ii craindre pour M. DubufFe, qui a. représenté
(n^. 323) Achille prenant sous sa protection ïphigénie^ que son
père Agamemnon coulait - sacrifier, A la vérité , les figures de
la princesse et de sa mère lui appartiennent , mais il est im-
possible de ne pas songer aii tableau que M. Guérin exposa^
il y a deux ans, dès le premier instant qu'on jette les yeux
sur celui-ci. Cet Achille , c'est Pyrthus; cet Agamemnon,
c'est Oreste. L'auteur pourra dire qu'il est tout naturel que
des pères et des enfans se ressemblent ; mais , dans les Arts ,
. celte. ressemblance porte un nom qui n'est pas honorable
pour l'artiste venu le dernier.
Je n'ai point encore parlé de la figure d'ErîphîIe : elle
offre , dans la place qu'elle occupe , dans son attitude, enfin
' (43)
dans tout son ensemble , une copie si éridente de rHernrioiie
de M. Guérin , que j'atteste avoir entendu des personnes
létrangères aux Arts (comme leur erreur le |>rouyaif), mais
qai du reste avaient conservé le souvenir du tableau de Pyr-
rhus , prétendre que celui de M. DubufTe était le nfiéme , «t
en donner surtout pour preuve cette Eriphile , qu^elles s^obtî*
naient , avec quelque raison sans doute , à nommer tou-
jours Hermione. On a peine k concevoir quel motif peut
avoir porté M. Dubuflè à provoquer ainsi , de fa part des
connaisseurs , et de ceux qui ne le sont pas , le reproche de
f>lagiat. Comment un artiste i;apable d'exécuter un morceaa
de cette étendue , et dont le dessin ne manque ni de correc-
tion ni de noblesse , n*a-t-il pas senti le tort qu'il se faisait ,
' en se traînant ainsi sur les traces d'autrui ?
Ce malheureux penchant devient <, dans les Arts comme
(dans la Littérature , une véritable épidémie. M. Guérin con-
çois une idée heureuse : il réunit , dans sa Phèdre^ les prin-
cipaux personnages d^un des chefs d'œuvre de Racine; aussi-
tôt on s'empare de cette idée. Il y aurait eu un amour-propre
mieux entendu a la lui laisser. Quoi qû^il en soit, voici un
autre artiste 'à qui du moins on ne peut reprocher d'avoir
voulu s'approprier les figures des tableaux de M. Guérin t
c'est M. Odevaere. Il a peint (n®. 684) l^arrioée d'IpM génie en
AuUde. Je m'arrêterai peu sur ce tableau où l'auteur , d0nt
plusieurs fois j'ai entendu vanter les talens ,.me parait s'être
complètement fourvoyé.- Un dessin maigi'e , une. ccHileur.
(44)
cr»è » H^t bien peu. propres à rendre une scène amsî inté'»
ff«39»Àte que ceUe-ci. Plu» TartUte a ea soin de, motiver lés
inlentioiis de chaque figure , plus on sent combien son exé-
cution est défectueuser II y a cependant du mérite dans la
composition. J'en excepte cependant la figure d^un des che&
de la Grèce : sa jambe droite placée sur son genou gauche j^
ses vêtemens rares et mesquins , sa tête même » tout of&e
en lui un véritable saine Jeau^Baptisie , tel à peu près qu^on
le voit dans plusieurs anciens tableaux. Qu'on imagine TefTet
qu'il devrait produire aufo-ès du roi des rois, de Clytem**-
D'estre , d'Achille » et de tous les héros d'Homère y s'ils
étaient dignement retracés»
Le même artiste a représenté (n^. 68a) ie Roi de Rome am
Capitule. Si je parle de ce tableau , c'est pour déclarer que je
ne ferai aucun examen de cette allégorie ^ ni de plusieurs
autres sur le même sujet. Ce genre , essentieHement froid f
devrait être banni , du moins pour lés sujets modernes , de
FËcoIç française régénérée»
M. Rouget a fait un bien meilleur usage de son temps et
de son talent. Dans son tableau (n*« 808), les Princes f rançaiê
piennent présenter leurs hommages à S. M. le Roi de Rome , em
présence de LL. MM, f Empereur et T Impératrice. Cet ouvrage
atnonce une étude approfondie de la manière de M* David ^
mab on n'y trouve point une servile imitation des producr
lîotts de ce grand maître^ Si le jeune artiste a cherché â se
pénétrer dé ses principes^ il a sa pé0scr d'apràs lav-nnâmci. Il
( 45 )
«n est résulté une composition skMpIe, noble ,et dans U(|«elle
chaque spectateur s^aperçoit avec plaisir i}iie le peintre rCÀ pal
Irof» présumé de «es forcés , en traitant un pareil sujet.
Je regrette dcm^en pouvoir dire autant de M/Goubaud, qui
(u^ 4^2)9 ^ représenté la cérémonie qui eut lieu ùussUdi oprit
ta naissance de S, M. le Roi .Je Reme ; mais le zèle ne suffit
pas pour faire un bon ouvrage , et il y a plus que de ta bar^
diesse à croire que l'on remplira une toile immense avec suc*
CtSf quand on ne peut pas mètùé parvenir à dessiner avec
Correction dés têtes dont il existe une foule dé bons portraits.
M. Debret est un des artistes qui se sont pénétrés avec le
plus de fruit des leçons de M. David. Son talent, depuis
long - temps bien connu , se retrouve dans le tàUeau où il
r a peint la première distribution des décorations de f ordre éè la
Jjégion d'Honneur , faite par S. M. dans l'église de Vhôtd
impérial des Invalides, Il y a de belles et de bonnes cboses
dans cette vaste composition. M. Debret peut se glorifier
d^étre au nombre des artistes qui ont su retracer avec succès
la figure de l'Empereur. Plusieurs autres figures sont égale-
tnent remarquables par la correction du dessin et un coloris
où le peintre paraît avoir cherché, pat-dessus toutes choses ^
la vérité. Ce quinnitle plus à ce tableau , cVst un entassement
de personnages dont on ne voit que les têtes | dans le fond ^
. à gauche. Il est fâcheux potir l'artiste qu'une imitation exacte
de Tévénement Fait forcé de retracer un spectacle aussi anti-
pittoresque. On reproche à IL Debret d'avoir négligé Texé^
(46>
cutîon de cette partie de son tableau , et cette critique nVst
^e trop fondée ; mais il est difficile de croire que , même
avec plus de soin « il fût parvenu à rendre ^ d^une manière
satbfaisante, toutes ces têtes alignées k côtàet au-dessus les
«nes.des autres. Peut-être fallait-il sacrifier quelque chose de
la vérité historique dans cette partie du tableau (qui n^est ,
après tout, qu'accessoire) , et se ménager les 'moyens de pla*
cer U quelques groupes agréables.
Des dix tableaux qui doivent décorer la nef de Saint-Denis ,
et dont les sujets sont pris dans Fhistoire de cette église , k
laquelle se rattachent tant de souvenirs , quatre seulement
sont exposés cette année. Outre celui de M. Gros dont il a
été question , les trois autres , exécutés par MM.. Meynier ,
Gamier et Monsiaux , sont trop dignes d'attention pour que ^
malgré la surabondance. des matières , je n'en dise pas quel-
ques mots.
M. Meynier a représenté (n^. 646) la dédicace de VégUsede
Saint-Denh ^ en présence de i 'Empereur Charlemagne. Une
composition riche , un dessin correct , de belles têtes , une
couleur vive sans crudité , caractérisent ce tableau. Conune
le sn^et ^st un peu froid ,, ce qui nVst pas la faute de l'artiste ,
on peut trouver de l'exagération dans l'expression de quel-
ques têtes. Il y a surtdut un jeune porte-croix , vu de face , et
do. reste d'un beau style , qui regarde le spectateur en
fronçant le sourcil d'une manière très- prononcée et fort
étrangère à Vaction, Quant k la figure de Charlemagne ^ la
r
<
(4n '
manière donr elle est assise , et surtout dont elle tknt le
sceptre , a sans doute beaucoup de grandeur , car cette
grandeur va jusqu'4 Texagération. Une statue de cet Eiuper
reur , dans la même attitude , serait un très-bon ouvrage | si
rexécutioii y répondait ; par cette même raison, on voit que,
dans un tableau , cette même figure, doit prêter à des obserr
▼ations critiques.
Chargé de peindre le couronnement de Marie de Médicis
(^^ 663) , M. Monsiau était obligé de lutter contre une des
plus brillantes , et , si Ton peut s^expriroer ainsi , des plut
somptueuses compositions de Rubens. * Il s'est tiré de ce p^
difficile en homme d'esprit et en artiste habile. S«as chercher
à s'écarter, en général, de la belle ordonnance inventée par
le chef de l'Ecole flamande , il s'est mis à l'abri du reproche
de l'avoir reproduite en entier. Ses changemens , au reste^
ne sont pas tous heureux. Par exemple , Henri lY, d'ailleurs
che2 lui plus reconnaissable par son costume et la place qu'il
occupe , que par les traits de sa figure , appuie sa main gauche
sur le devant de la tribune où il est assis , de manière que
son bras forme un angle très-désagréable. M. Monsiau a mieux
réussi dans la figure de la Reine. Les deux jeunes personnes
placées derrière elle , devaient absolument être toujours jolies:
elles le sont dans le tableau de Rubens ; elles le sont aussi
'* Le tableau où ce grand peintre a représenté ce sujet , est
un de ceux qu'il fit par ordre de Marie de Médicis ellemême^
et qui décorent la' grande galerie du Luxênibourg.
(48)
^aiis celui de M. Monsiau. Le dessin et la couleur sont tels
t|ue ce peintre les a depuis long-temps adoptés ; c*est-â dire ^
que ses teintes ont de la fraîcheur, un ton argentin qui de*
TÎetit par fois grisâtre , et que plusieurs de sts figures ont ^
avec celles de ses autres tableaux , cet air de (amille qui cons^
tîtue essentiellement la manière particulière d'un artiste,
M. Garnier, reconnu poi^ coloriste depuis long temps, s'est
montré digne de sa réputation , dans son enterrement du roi
Dagoberi (n*. 409)- Plus heureux que ses confrères dans la
au jet qu'il avait à traiter, il à pu exciter Tintérét, en plaçant
«u-devant du convoi funèbre , les deux jeunes fils du roi ,
Sigebert et Clovis II , âgés , Tun de dix , l'autre de quatre
ans. Ces figures ont beaucoup de grâce et une expression
fort juste. On pourrait désirer dans les autres un dessin
pluÈ prononcé ; mais quoi qu^'il en soit , ce tableau , d'une
couleur vigoureuse et très-convenable au sujet, ne peut que
teuir un rang honorable dans la collection.
Parmi plusieurs tableaux de môme grandeur, exposés les
uiis près des autres 9 â l'extrémité droite de la partie de la
grande galerie consacrée aux ouvrages modernes, deux sur^
tout se font distinguer au premier aspect, nèn^eulemént
par la grandeur des figures , mais par les rares taleris que M*
Taunay y a déployés : l'un (n®. 88 1) représente un combat à
ia boSonnette à Cassario , prè^ MiUésimo. Il offre une parti-
tularité di^ne d'être remarquée. Dans les tableaux de plu-
jiieurs peintres célèbres des écoles italiennes ^ et principale-
ment
( 49 )
in€nt de telle de Florence , on aperçoit quelquefois des demi-
figures qui sortent du bas du tableau -, qu^elles gâtent presque
toujours. M. Taunay a su changer cette faute en une beauté
réelle , puisque c'en est unt que tout ce qui cont ribue à mieux
caractériser un sujet. Tandis qu'un grand nombre de soldat»
français attaquent corps à corps leurs ennemis, d'autres s'em-
pressent de gravir la colline où se livre le combat , pour s%
joindre à leurs cainarades ; ainsi liées au reste de l'action , ces
figures , vues à mi-<:orps , produisent un excellent effet.
Je louerais bien le feu , l'expression qui régnent dans cette
représentation fidèle d'un combat à outrance , mais je suis
pressé d'arriver au n®. 880.
Dans ce tableau , l'un des meilleurs qu'on ait jamais faits en
ce genre , M. Taunay a représenté le passage de la Guada-
rama , au sommet de laquelle se trouvent quelques habitations
rustiques. L'hiver règne sur ce sol aride : la neige tombe à
gros flocons ; et le vent , soulevant comme des nuages
celle qui déjà est i terre , la disperse au loin. Par ce teigips
Croyable, d'intrépides Français poursuivent leur route ;
plusieurs d'entr'eux tirent ou poussent des canons qu'ils font
ainsi avancer ,* malgré les obstacles que le terrain et la
saison multiplient à chaque pas. Il est impossible de rendre
avec plus de vérité le ton du ciel, les effets de la neige à demi-
fondue sur les vétemens et sur les armes , ni de mieux dégra-
der les tons. Quand on se place à une distance convenable du
tableau, la marche des troupes et la parfaite représentation.
(5«)
<(lu site 9 font use iUnsion que peut i peine dëtmire la pe-
tite proportion èt^ objetf. M. Tavnay était comm connae
va èm bons pemtrea de notre école «loderae § mais je ne
craint paa d'ayanctr que ce tablean doit encore accrottre ta
réputation | depuis long-tenpt si bien établie.
(Si)
N«. VI.
TABLEAUX DIVERS.
j'approche du but Le nombre de mes articles est fixé à
huit Je n'ai plus rien de mieux à faire que de parler* très-
sommaîrement des ouvrages rémarquable3* Je regretterai
de ne pouvoir rien dire de ceux qui les suivent de près , et
me féliciterai de n'avoir point à m'occuper des autres , çko-
rum infinitus est numerus , dirait le roi Salomon.
N**. i3i4. Etude de Vierge^ par M. Girodet-Trioson. Cette
étude prétendue est tout simplement un chef-d^ œuvre , et
le diamant du Salon. De tous les grands maîtres passés et
présens, il n^en est que deux auxquels on puisse songer ,
' quand on voit ce buste admirable : Raphaël et Léonard de
' Yînci. C'est la même correction , la même grâce y la même
' délicatesse de pinceau. Mais puisqu'on ose bien trouver les
carnations de Raphaël un peu rouges dans les clairs et un
'peu noires dans les ombres, puisque celles de Léonard de
Tînci tirent évidemment sur le violet , on peut remarquer
que lesportraits de femme, N<". i3ii et i3ia , par M. Gi-
rodet, ne paraissent pas assez animés, ett que les demi^
teintes en sont un peu grises.
(50
L'ambition peut être permise aux artistes qui ont obtenu ,
Bans un genre secondaire, des succès incontestables.On doit
donc applaudir au dessein qù^a eu M. Robert -Lefevre lié
traiter un sujet historique. Sous le N^. 778 ^ il a représenté
la Mort de Phocion , tableau de trois figures. Belle exécu-^
tion , belle couleur , rien de plus facile à croire ; mais cette
tête de Phocion- n'est-elîe pas un peu grosse? Ce bras droit
qurtient la coupe n'est-il pas un peu maigre? Et l'expression
âes figures ! Et ce bourreau qui , pour témoigner son im-
passibilité , se croise les bras ! Mais les beaux portraits
que ceux de M. Robert-Lefevre ! Le Magistrat çêtu June
êimarre ( N**. 782 ) t est surtout un de ces tableaux qu'on
pourrait placer dans une galerie à côté des ouvrages les plus-
parfaits en ce genre. J'en dirai presque autant du N*. 788 ,
et seulement pour ne pas nommer tous les portraits que 1a
même artiste a exposés cette année.
Une certaine superstition sied assez bien , non-seulement
\ ceux qui cultivent les beaux -arts, mais encore k cens:
qui se bornent humblement â examinjr leurs ouvrages*
J'aime donc à croire que le nom de l'artiste dont je viens
de parler est fort heureux pour quiconque s'adonne au
portrait. Sous les N^*. iS^S et iSaG , un autre M. Lefebvre
a. exposé deux portraits en pied. Celui de madame la com-
tesse Saint-Hilaire est disposé sagement et bien soigné dans
toutes ses parties. L'autre représente M. Grétry. Cet homme
de géo^ie est debout, et yétu de noir ; habillement que.
C53)
•
âit-on, îl né veut point quitter depuis la mort ^e son
épouse. Ce tableau est trop mal exposé pour que j*aie pu
faire autre chose que de Tentrevoir ; mais il m^a semblé har^»
moiïieux dans Tensemble^ La tête a un caractère doux, mé^
lancolique même. Quand on songe à la fausse Magie , au
quatuor de Lucile^ à trente chefs-d'œuvre quUl serait au rotins
superflu de rappeler aux lecteurs , on se dit : Il est impos-^
sible que cette téte-là ne soit pas ressemblante.
. M. Augustin est de ceux qui peuvent dire : Mon travail
est borné , mais ma gloire ne Test pas. Ses miniatures ont
pour le fini quelque chose de désespérant. ( C'est là le mj^t
(NTopre ; je m'en rapporte à la plupart de ses émules. ) L'ét
mail où il. a représenté M. Denon ( N®« 17 ) a plus d'ui»
droit de fixer l'attention des amis de l'art Ik y contemplent
tous avec plaisiir , et plusieurs avec reconnaissance , l'écrivain
élégant , le penseur profond à qui est confié le soin d'éclairer
de ses conseils , de diriger et ii^encourager les talens*
; On n'a pas plus d'esprit que M. Boilly , pour présenter 4
pous un aspect plaisant , quelques-unes des scènes familières
dont Paris abonde. Son Entrée du Jardin turc ( N**. 108)
çst digne , sous ce rapport, de ses ouvrages précédens ;
xnais aussi ses figures se ressemblent presque toutes ; et c'est
un défaut réel dans un genre où la variété est iodispon^
sable. Vous voulez faire contraster un gran d nombre d'indt-r
vidus, d'âge, de sexe et d'état difFéi eus ; faites donc qu'ilsoé
parabsent pas être tous de la même famille !
/
( 54 î
* t *
Qnûnd h Livret m^a ea indiqué ( N^ iio ) vu Christ par
Bf . Boilly ^ )€ Vai cb^^bé avec empressement. J'iétais cu^
rieax Ae voir oônœeni Fantenr aurait exécuté «n pareil
sojet. Foit bien ^ en vérîlé ; -e^est un peth irompe-4'mtj tmi-
tant Tivoire ^ «t «d^un ben goût de detnn.
Si^ cemme je le pense , la pvemiàre qnaKté d^un poriraii
£st une exirème ressendUanœ , ipeu «l'onvrages en ce geiure
pourraient rivaliser le ïN^ 116. IL SoMiemaison n^a poiatr
indiqué le nom du membre <de i'Instttvt «pe i«présente ce
buste t, mais il ne &ut pas Tavoir m deux fois pour necon-
naître le poëte oomiqué à q»i un très-grand succès «t une
Irè^ridiciile qnerelle liftléraire tout acquis une véputatiom
désormais bien au-dessus des attemites de r^nvie*
M. Bouton se seradit , je pense , « le genre golbiqoe est k
la mode. Histoire, poésie , romans , tableaux , tout tend k
nous faire rétix»grader de six ir sept mècles. Eb bien I puis*
qu^onaîsine tant les vieiltes voûtes^ les vieille» fenîtres , le»
vietfx tombeaux ^. et le îovr mystérieux qu4 sHntroduitdans
tous les vieux mennmens y je vais pekidi^ ia salie 4» i3S
sièck du. Musée des msnutnens fimnçms. » Et M. Bouton ,
saisissant , avec ia plos rare précision , les dfefs de lumière el
d'ombres , a pevt-ttre ^xéc»té4e phifréftonnant tabkau qu'on
ait encore (ait en ce genre. Dettt correctife , eependant , a
ces éloges. Son FhU»s9phe jsn fi^dîiiUiim m^a paru fort
ÎDuiile dans ie taMeau , à moins ^e le peintre n'ait Toulif
faire songer i^ cette phrase de Diderot (^i devait s'y co»-'
(55)
naître ) : « Le philosophe qui inédite ressemble i ranimai
w qui dort. » De plus , daûs Fintentioii de se montrer vi-
goureux, M. Bouton a nuitipUé les teintes violettes; et ce
défaut est surtout sensible , lorsqu^on se place k la distanoi
CQinvenable pour juger de relFetdu tableau.
M. Ddëduze a fait ( N^ ^3 ) on tableau de chevalet
très -digne d'être remarqué i et représentant un sacr^iceà
Cérès. L'auteur paraît pénétré des beautés pures et austère»
du Poussin ; mais il ne faudrait pas qu'il portât Tesprit d'i-
nûtation jusqu'à rappeler trop fortement plusieurs figures àt
ce grand peintre. £n songeant au tableau du Temps qui
fait danser les Saisons » qu^on voit dans un des palais de
Aome , j 'ai imité la politesse de Piron , et dté mon chapeau
à deux des jeunes IMityléniennes de M. Delécluze. Il y a
d'ailleurs de la crudité dans sa couleur ; mais la composi-
tion est d'un artiste qui sait réfléchir i et qui ne place pas ses
figures au hasard.
*
Un autre peintre , également pénétré de la nécessité de
penser avant d'exécuter, cNest H. Menjaud. Son Fénéion
rendant la Uberti à ané famille protestante ( li\ 63g ) , est
un des bons tableaux anecdotiques du Salon. Le dessin du
peintre est correct , sa couleur Coureuse. Le visage de Fé-
nébn^est un peu pâle , et le groupe de chanoines parut plus
négligé que le reste.
Il faudrait des yeux bien exercés pour trouver quelque dé-
faut grave au petit tableau N*. 645 , par le même artiste. SI
( 56 )
i^prétfentê un trait fort connu de la vie de Ractiie^ Louis XI f^
se faisant lire par ce grand poète le Piutargue â'Amyot* Qu^nt
eu Marchand de salade ^ N^ 64i )9 M. Henjaud a sans
doute voulu prouver qu'il po.uvait traiter les genre» les plus
opposés ; et il s^en faut bien que la figure et Texpression de
fcet Auvergnat manquent de vérité ; niais, en conscience^ je
he peux pas m^y arrêter long-temps , après avoir parlé Ûm
Louis Xiy , de Racine et de Fénélon.
Un petit chef-d 'œuvre dans le genre de nature commune ^
'est, je n^hésite pas à le dire , le Marchand forain de M.
DrolUng ( N^ 218 ). A l'époque où les amateurs ne pou-
vaiént guère louer que ces sortes de tableaux , on n^aurait
pu trop exalter l'extrême vérité de celui - eu Eo tout temp»^
il mérite une place honorable dans les cabinets des amateurs.
M. Daperreux est un des paysagistes qui savent le mieux
animer leurs compositions , en les rattachant à de grande
souvenirs historiques. Cette année , il noas a montré h brace
*Bayard blessé^ et rapporté à un château près de Brescia
( N^ 34^^), et le sire de Join^tte partant pour accompagner
Saint-Louis dans sa première croisade ( N^. 546 )• L'exacti-
tude avec laquelle M^ Du pèrreux retrace ks sîte^ ^ l'oblige
quelquefois à faire le sacrifice de quelques beautés pittoresr
ques. Il me semble qu'il pourrait jusqu'à un certàân point
remédier ià cet inconvénient , s^il tirait un plus grand parti
des accideàs j je veux dire des différeiftés heures âxt jour ,
de^ variatioits derl'atiiK^spbireyetCr Quoiqu'il en soif ^ la
( 57 )
tndrcliâ des Croisés dans son second tal)leau est tntéres-*
santé , et c^est une figure fort expressive que celle du bon
JoînviUe, p^osant tourner les yeux vers son « èel cbâtel
gu*il avait fart à cceur. » *
Il est rare que les associations de talens réussissent en
peinture. MM. Pierre et Joseph Franque font une honorable
exception à l'usage dans leur tableau de la Bataille de Zurich
{Ti**4 591 ). Dessin correct et même élégant, tant dans les
figures d'hommes que dans les chevaux ; un vaste champ
bien rempli , une action nettement exprimée ; voîlâ ce qu'ion
estime dans ce tableau , l'un des meilleurs de ce genre qui
soient au Salon.
•' La Reprise de Dégo , par M. Mulard ( N«. 669 ) , offre i
dans les mêmes proportions , à peu près de quoi répéter
les mêmes éloges ; mais il n'y a entre le premier et les der-
niers plans aucune dégradation sensible. C'est ( d'une ma-
nière h la vérité beaucoup moins défectueuse ) la faute dans
laquelle est tombé M. Revoil. M. Mulard n'est pas non plus
assez en garde contre les teintes verdâtres qui se glissent
jusques dans ses carnations. -«l
' Veut- on examiner des tableaust auxquels les gens da
monde ne reprochent rien , absolument rien ? Que Von
s^arrète, si la foule le permet, devant ceux de M. Laurent
( de 53l à 54o ) ; tout cela est joli , très-jolî , fini à l'huile ^
de manière à défier les miniatures le plus soigneusement
paintiilées. Qu'ajouter au jugement des gens du monde?
(58)
Bien peu de chose , pour ma part. UOrage ( N^ 538) n^esf
pouit on de» lableaux. ^e M. Laurenl a mis le plus en éri*
deace, el c'est celui que [e serais té&té de préférer. Le
N*. 556 est assez singulier. C'est un très petit tableau , k peine
Tisible. J'aperçois un jeune guerrier et une feune fille debout
l'on devant l'autre ; le paladin lève une aaain et un doigt ea
l'air i... Où est le mot de réaigme? Dans le Li^Kt fort
heureusement. Unj£Utte Chevalier croisé ^ y est-lt dit , 9êulant^
cojwertîr une jeune Sanrusine , lui monfre le chemin du ciel. A
b bonne heure : voiU ce que signée le doigt leré en l'air.
Sans le Idotei^ il pouvait être permis de àe s'en pas'douter#
Les critiques ont déjà suffisamment reprochéà M. Prud^hon ,
auteur du tableau de Vénua et Ad^mis ( N*. ^^% ) , ses tons
roses, âon dessin de pratique et 'sa migoardise. Je me bor-*
neraî donc à rajipeler qu'il a fait la Justice et la Vengeance
dhiae poursuivant le Crime; il est à dësîrer qu'il nous donne
quelquefois des tableaux conçus et exécutés dans ce style. Je
reconnais d'ailleurs ^ corame tout le monde , que ks pèrita"
blés gt-âces l'ont inspiié quand U a peint, N°« ji^^le poftraii
de S, M, Ifi Roi de Rome.
Il faut que la manière de ce peintre ait un grand attrait
pour ses élèves^ Mademoiselle Mayer , dont j'ai parié , ne
suit guère ses traces avec plus de respect que M. Lordon«
lUHylas attiré par les Nymphes ( N°. 5^ ) , ouvrage , de ce
dernier artiste, prouve assez ce que j'avance. Il me semble
pourtant que M. Lordon est par fois «enté de s'abandon<^
( 59
lier à soft propre talent Son Agar renooyie par Abn$ham
( N®. 591 ), se ressent moins de Fesprit dMmitation. La jeune
femme est d'un bon style , et le patriarche a sur sa physio-
«
nomieune douceur qui n'étonne nullement ; car , si rhistoire
en est crue , ce ne fut pas la seule circonstance de sa vie où
il se montra le plus tendre des pères.
Le talent de M. Lordon ne peut que s'accroître , toutes les
fois qu'il se permettra ces estimable^ libertés. « Il ne faut pas
se borner à la seule îmilatton du «altre , même le plus digne
d'être imité. '^ » C'est Quintilien qui a prononcé cet axiome,
<en parlant des écrivains ; et dans ses excellens discours Sur la
pdntwre^ Reyuoids a eu grand soin de rappliquer aux artistes*
■«-■
^ Neque enim solus imitandus , qui maxime imitandus»
(6o)
%«A/«A^%»l«%/«A%f%%%%% V«IV«A« V»%<V%/%\<»W»»%»»t/K»%%<»»<%%%%<»<»»» 'V%/%/V%/k^Wn^
Ko. VIL
PEINTURE (fin).
x uiSQu^on ne doit point s^arréter k des ouvrages qui ne
soutiendraient pas la critique , je passerai sous silence M. Landi
et sa Vénus (jn?, 5a8) , pour m'occuper d'un artiste qui sou-
tient incomparablement mieux Tantique honneur des peintres
italiens. M. Serangeli a représenté (p?: 843) , sur une vaste
toile , Pyrrhus enleçant Polyxène pour la sacrifier sur la tombe
d'Achille, Cette composition réunit bien les principaux per-*
sonnages qui peuvent augmenter Fintérét du sujet , mais
quelques - uns sont moins heureusement rendus que le
Pyrrhus , dont le dessin est d'un très-grand style. Priam a
Fair plutôt endormi que tué. Polyxène , qu'Hécube s'efforce
d^arracher à leur Jbarbare ennemi, ne paraît point heureuse-
sèment Jetée. Le peintre , voulant donner t son coloris tonte
la vigueur convenable , a Ëiit les carnations un peu trop
brunes. On doit remarquer aussi les emprunts évidens que
M. Serangeli a faits à deux gramls maîtres. Une jeune femme
agenouillée , dans le fond , rappelle un peu trop VEuridice
blessée par un serpent , que Poussin a placée dans un de ses
( 6i )
plus beaux paysages. Si cette critique paraissait un peu trop,
rigoureuse, on ne niera pas du moins que deux jeun«s ei
charmantes 6mmes qui se pressent Tune contre Fautre , sur
un plan encore pluséioigné , n^appartiennent ji Raphaël. Quoi
qu^il en soit, M. Serangeli, formé à Técole française , est un
des artistes dont la réputation est le mieux établie ; et certes,
il y a dans et tableau un assez grand nombre de belles parties
pour le faire considérer comme très-digne de sqn auteur. Les
portraits en pied (n®. 844) ^^ deux dames , par le même
peintre , sont d'un bon dessin et d'une couleur fort agréable.
U Assomption de la Vierge (n®. 8), par M. Ânsiaux , est
ime grande composition tpji lui fait beaucoup d'honneur. Il
y a plusieurs figures gracieuses , surtout celle de la Madeleine;
mais , en général , le sujet demandait plus de vigueur dans
le dessin et dans le coloris. Tout gai qu'il est , ce n'en est
pas moins un sujet religieux. J'ose blâmer ^ comme déplacée,
l'action de la jeune fille qui contemple avec étonneinent les
fleurs dont le tombeau est rempli. Quelque merveilleux que
puisse lui paraître cet événement , la vue d'une femme qui
s'élève au ciel sur des nuages , et que des anges entourent ,
doit occuper , avec bien plus de force , l'attention de cette
enfaAt. A l'exemple d'un grand nombre de peintres célèbres ,
M. Ansiaux a varié sa composition par i^n de ces épisodes
qui plaisent d'abord , et ne supportent pas ensuite un examen
réfléchi
J'ai dit que madame Monges était la seuk de nos darnes^
(6a)
«
artistes qui trakit le gonre historique ; jedok me rétracter :
ll"^ Bëfbrt a exposé (n^ 4o) Thésée it Ariant , figune&4e
grande proportion. Celle de Thésée prouye. qiie Fartôste a le
sentiment de Tanlique ; mais elle a beaucoup à faice sous le
rapport de la couleur ^ et m&aae de la correction , pour par-
courir avec succès la carrière périlleuse où. cUe débuHe.
De la p-âce , le talent d'avoir présenté , seus un aspect
neuf, un sujet rebattu : roiU ce qu on remarque dans lejuge^
ment de Paris (n\ 65) „ ouvrage de M. Berthon ; mais on pour-
rait y désirer plus de chaleur et plus de vérité dans le coloris.
Le portrait de S. A. 1. et S. la Princesse Pauline (n^. 66) peut
tire loué avec moins de restrictions. Si le ton des chairs pa-
raît un peu faible, Tensemble est charmant , et les, détails
sont exécutés avec un soin extrém^ Il y a du feu dans le ta^
bleau du même artiste (n^. 64) , où ^ fiénéral Rp/npon faU
prêter sewment à see soldats de défendre It^ redoute de Mon^^
Leêino ; mais le site et les costumes présentaient au peintre de^
difficultés qu'il n'a pas entièrement surmontées.
La scène du tableau où Ml Huiert Gojfin reçoit la décora^
tion de la Lésion dC honneur (n. 1 19), est bien rendue ; et ^
quand on songe au peu de temps qu'a eu M. Bordier pQ.uc
peindre cette vaste composition , l'on ne s'afxpesantit point
sur les incorrections qui s'y trouvent en assez.graad npmbine.
J'ai entendu &ire bien des critiques du S^%uet donné a9$
château des Tuileries, tableau exposé sous le n**. lyS, pat
liL Casanova ;'et , quoique la plupart ne soieiU que trop justes.
(63)
3 n^en fallait pas moins un vrai tatecil pour readbre , dans une
si petite proportioa , ce «i^jet iimnense , attq.«el Tartisle ne
pouvait rien changer.
Je louerai moins qu^oa ne Ta déjài faiM dan^Ie; Journil icÊ
Arts ^ le tableau de M. Coupûi de la C^perie : /«5 éofurs
funestes de Franfuise de Bdmùd (a*. ;^)^ Gêné « eouMM je fe
suis f par le cadre ^ue je me suîa preocrh, yt uerpeiuL délaitter
ce sujets et je me bor^e à renvoyer fca kctents.à VEnfaràa
Dante , ou au moias à Vexeellente iradodioa de et ]KMsae,
que M. Artaud a puJUiée. A y a. c»viroAdcttx asft. "^ Je re€<u»-
nais volontiers dans Fouvrage ck SL Goupiadeb cavi»c-
lion et de la g|câce \ maù quand û& sAsge aux vtra de cet
admirable épisode % oa trouve les deuac ainansuape» firoîdi
I
dans le tableau» L^époux de Fraufoîâe a bie» sur sa figura
Texpression d'une |alott§erage, mais tout son covps esl dans
une immobilité parfaite. Devinerait-OA à son attitude qu^il
va percer son frère et sa femme d^an sevd ceup d'épée i
Le Ganpnède de M. Granger (n^. 434) ^st Fouvcsge d'un
artiste qui a étudié avec succès la pmretié d0s finmies. L'effiA
général pourrait être pks harmonieux.
-* Le même écrivain , parfaitement versé dans' la connais*
fiance de la langue italienne • nous a aussi donné une lraduc«
tion du Paradis. Il a formellement promis le purgatoire ; de
sorte que nous aurons- enfin la dwina commedià , traduite avec
exactitude et en entier. Ce qui n'empêchera poiat la version
de rEnfer, par Bivarol, de continuer à être une infidèle fort
aimable*
(64),
n y » de riction et de la vérité d^ns VAtaiante et Hîppo-
mène de M. Grenier (n^. 437) , et ces figures sont d^un bon
goût de dessin ; mais Texpression d'Hippomène a quelque
chose de forcé qui tient surtout à son regard.
On ne peut voir rarrÎQée de Jacob en Mésopotamie ^par
H. Heim (n^. 4^) t ^ans reconnaître que cet artiste a beau-
coup étudié les loges de IlapbaëL La composition de ce ta-
Jbleau a de Foriginalité ; peut-être mèmç un peu trop, car il
est très-peu ordinaire aux peintres de ne montrer que le derrière
de la tête d'une figure principale. Le dessin est ferme et correct.
Quant à la couleur , si M. Heim n'étudie pas plus la nature
dans cette partie, ses ouvrages auront toujours contre eux' le
premier coup d'oeil ; et c'en s^a peut-être assez pour qu'on
ne rende pas à son talent toute la justice qu'il mérite.
Par un malheur assez ordinaire aux peintres qui ont essayé
»
■âe placer Apollon dans leurs tableaiix , la figure de ce dieu ',
decenu berger , n'est pas la plus belle du tableau de M. La-
<font (n^. 5^3). La manière dont son œil s'élève vers le ciel
.détruit toute la grâce de son visage, et ses formes sont un
peu lourdes ; du reste , les groupes de bergers et de bergères
,sont fort agréable» ; U nte-est bien choisi, et la couleur a de
l'harmonie*
Le tableau de Thétis , par M» Lair (n^ 526), est compo5é
iivec goût , et les figures sont assez gracieuses ; mais on
pourrait y désirer plus de correction. Le portrait de grau-
deur naturelle (n^ 5^5) prouve que cet artbte peut traiter
avea
(65)
t
arec succès des sujets d'une certaine étendue. Il n'y a nul
reproche à faire au dessin , et la couleur a de la vérité.
J'ai entendu dire , j'ai même lu que Y Arabe plewûni son
coursier (n°. 627) , jnr M. Mauaaisse , donnait lès plus heu^
reuses espérances du talent de oet artiste. Sans contester le
mérife île ce tableau , je l'envisage sous un autre aspect. Il
me semble que le mot â^espérancei n'est pas ici appliqué à
propos. C'est U , selon moi 9 la production d^un talent tout
formé; la couleur est chaude et vigoureuse ; les armes ,'Ïq
manteau , sont d'une exécution très-ferme ; mais l'Arabe , et
même le cheval , semblent annoncer que M. Mauzaisse fait
peu d'attention à la noblesse des formes , et que peut-être^
•dans ses ouvrages futurs , la grâce ne se trouvera pas aussi
facilement que Ténergie.
N**. 711 » Ja fuite de Soliman vaincu , par M. Peyranne. La
£gure du sultafo a de la fierté ; celle de l'enchanteur ne man-
que pas de noblesse; le jour mystérieux répandu sur le lieu
4e la scène , contribue à bien exprimer le sujet. Je louerai
«ncore Tartiste d'avoir su trouver dans le poë'me immortel
du Tasse , un événement qui n'avait peut-être pas encore é:é
traité en peinture. Il me semble que si ce tableau était mieux
exposé , il mériterait d^attirer les regards ; peut-être aussi
^'apercevrait-on davantage que la figure dé Soliman est trop
fortement ombrée , et qu'elle se détache sur le fond d'une
manière qui se rapproche trop des silhouettes^
Quelques-uns de nos artistes nous montrent comment on
5
/*
(66)
se place auprès des «grands maîtres ^ MM. Rîépenhaasen
frères ont voulu nous fiiire voir comnnent on les pille. Le înot
est un peu dur ; mais qu^on regarde leur Vierge opec F enfant
Jésus (n?. 764) 9 et Ton verra si ce n^est pas la copie d^ua
tableau de Raphaël , généralement connu. Il n^y a pas \us^
qu^aux petits arbres , jusqu^au fond de paysage qu^ils niaient
jugé de bonne prise, ^excellent, le médiocre, ils se sont ac—
commodes de tout Puisqu'ils font leurs tableaux en société ,
que leur coûterait-il d'ajouter à leurs noms la formule : et
eompagnie ?
Passons à un artiste dont les tableaux offrent quelques dé-
fauls parmi de vraies beautés. La prise de Lériàa par l'armée
de ^ Catalogne sous les ordres du moréchal duc d'Alhuféra
. (n®. 800) ne peut qu'assurer la réputation de M. Roehn. Il y
a dans ce sujet, composé d'un très>grand nombre de figures,
de l'action , une grande vérité. On pei>t désirer., dans les ta-
bleaux de cet artiste , plus d'élégance dans le dessin ; mais
%es compositions ont le mérite d'attacher les spectateurs. Cet
éloge doit surtout s'appliquer aia n®. 8o3 , qui a pour titre :
Réception de drapeaux à Miilesimo. La figure de S. M. l'Em-
pereur est surtout excellente pour la pensée et pour l'exécu-
tion.
En ne peignant que des tableaux de petite proportion ,
M. Vafflard paraît persuadé que , par le choix de ses sujets ,
il peut exciter l'intérêt des spectateurs ; et ses prétentions ne
semblent point exagérées. Sous le n®« 909 , il a exposé un
<% )
jeune homme lisant sur une tombe : « Sta ^oiator , htroem
calcas, M
Arrite , voyageur ,• tu foules uo bëroK. *
Le n». 911 a pour titre : VInfortunée. C'est la représentation
tfès-pathétique d'«ne jeune fille qui lève au ciel ses yeux
pleins de larmes. Ses vétemens annoncent l'extrême indi-
gence , et elle est , au milieu de la nuit , sur le parapet d'un
î^"* Sous le n». 310 {tes pauvres petits), deux ramoneurs
k qui un aubergiste a refusé l'hospitalité , un soir d'hiver ,
sont morts de froid pendant la nuit , devant la porte. Ils se
tiennent encore étroitement embrassés. Au mérite des pen-
sées , les tableaux de M. Vafflard joignent celui d'un dessiit,
<5orr«ct. Le seul reproche qu'on peut lui faire , c'est qu'il pa-
raît affeelionner les tons bleuâires qui donnent quelquefois
i ses ouvrages de la ressemblance avec des camayeux.
On a dit depuis long temps que M. Carie Vcrnet soutenait
dignement la gloire de son nom ; on ajoute maintenant que
-son fils , M. Horace Vernet , ne dégénère point: et rien n'est
mieux fondé que ces éloges. Sans rechercher si le fils , dessi-
nant les chevaux avec moins de finesse que son père , ne
-compense pas cette infériorité par une couleur plus vive , je
me contenterai d'observer que M, Carie Vernet, dans ses ta*
* Sùum cuifue. Celte traduction est toute littérale ; mais
comme elle forme un vers alexandrin , je déclare qu'elle se
trouve dans le livret , et qu'ainsi ce vers appartient à M. V af-
.flarJ.
(68)
bleaui ou dessins (de 946 ^ gSo) , est toujours digne de lui,
surtout dans la chasse de S. M. VEmpereur (a^.947) ; et que ,
dans la prise du eamp retranché de Giatz^ en Silésie (n^. 96 x),
M. Horace Yernet semble s^étre plu ï multiplier les difficultés ^
pour prouver qu^il savait les vaincre. L'action se passe la
nuit. Il y a dans le tableau la lumière de la lune, celle qiiî
provient de la redoute , toute couverte de feux; enfin, celle
que produit sur le premier plan Téclat d'un obus ; et toutes
fois y le peintre a sa mettre de rharmonie dans les diverses
parties de son tableau , d'ailleurs fort bien dessiné. Il en esl
peu au salon qui puissent donner d'un jeune artiste de plut
grandes espérances.
D'autres encore font preuve de talens héréditaires: M.
Pajou a peint I dans un grand tableau , le trait de cïémencm
de S, M. l'Empereur et Roi envers M. de Saint-Simon. L'ordon-
nance en est belle, et plusiaur» figures ont' beaucoup d^ex-
pression. Le portrait du général de division Montricfaard
(n®. i3i6) , par M. Lagrenée , offre des figures bien dessi-
nées j du mouvement , et de très -beaux chevaux.
Deux petits tableaux de M. Peyron (n^^ jii et 7i4)t ^"^
frésenitniV école de Pythagore et V entretien de Démocriie a^ec
Hippocraie, Ce sont de très-bonnes compositions historiques,
bien dessinées , et qui , exécutées dans une plus grande pro^
portion , pourraient se placer à côté de la mort de Socrate ,
du même peintre.
Parvenu aux tableaux de paysages , je suis forcé dUndi-
(69)
quer seulement les principaux d^entrVuz. Copmençona paf
des Ques très-pittoresques prises en Italie , par M. fiagettî
( du n®. 2k4 au n®. 3o ) , et par les six bons paysages de
SI. Berlin ( de 68 à. 78 ) , dont le plus considérable repré-
sente rarrivée de S, M. FEmpêreur à Etllingen. M. Bidâuld
(^ de 80 à 89 ) a retracé avec cette couleur suave , ce beau
fini qu^on lui connaît, des Ques*d*Italie ^ d^ Ermenonçille ^ de
la fontaine de Vaucîuse , etc. Parmi les tableaux de M. C
* Bourgeois (de i3i k 187 ), est une 9ue du château d*As^
ehaffembourg, M. Debret y a uni son talent à celui de cet
habile paysagiste , et a peînt les figures. J^ai déjà parlé de
MM. Demarne et César Yanloo. M. Thévenin^ dont le nom
rappelle son immense tableau du MontSaint^JBemard , n^a
point exposé cette année d'ouvrage aussi important ; mais
sa Que de f ancien couvrent de Trainel , devenu aujourd'hui
une filature ( n^. 888 ) , fait beaucoup d'honneur à l'artiste
qui a su tirer parti d'un site assez ingrat. Deux portraits de
lui se font également distinguer. L'un est celui de M» Mon-
signy ( 889 ), auteur de la musique de Féli± , et d'autres
productions charmantes qui braveront toujours les caprices-
de la mode î l'autre portrait représente l'acteur Caillot ( n**.^
890 ) , cher aux anciens amateurs de cet Opéra-Comique y
dont M. Monsigny est un des créateurs. Ces deux portraits
doivent être placés au théâtre Feydeai». .
Il faut bien , quand il a^'agit de portraits , en revenir en-
core à M. Grosv D^ tous- ceux, qu'il a exposés | celui de nuk
(70)
dame la comtesse de la Salle ( n**. 44^ ) 9 paraît principale--
ment réunir les suffrages par la beauté du coloris ,' et
Texpression de douleur que Tartiste a donnée à la figure de
cette dame. Elle contemple le buste de son époux* mort au
champ d^honneur ( et dont M. Gros avait fait aussi un ex—
cellent portrait ) , tandis que sa feune fille cherche k réloî*
gner doucement d'on lieu où ses regrets deviennent plusr
amers. Le portrait équestre d^un officier de chasseurs à che-
val y par M. Géricaull ( n^. 4i5 ) , a maintenant subi tous les
examens qui pouvaient' le classer à son rang. D est reconnu
que rbarmonie générale et l'exécution hardie de ce tableau
nous donnent la certitude d^avoir pour les portraits équesr-'
très un bon peintre de plus.
M. Topfer de Genève sait choisir aux environs de sa ville
àes sites pittoresques , les bien rendre , et les orner de figures
très-jolies. Les talens de cet artiste , qui expose , je crois ,
pour la première fois ( de 896, à 900 ) , sont une véritable
acquisition pour les arts , ainsi que ceux de M. Berre d'An-
vers. Ce dernier ( de 54 à S9 ) ne peint que àes animaux ,
mais il les dessine bien , et leur donne une couleur à la fois
vraie et vigoureuse. M. Kobell d* Amsterdam ( n®*. 817 ^
5 18, 519 ) Y pourrait passer, si Fon ne craignait de com-
mettre un anachronisme , pour un très-bon élève de Paul
*
Potier. M. Omméganci: ( n"^. 688 et 689 ) ar , pour ainsi
«
dire , surpris par la perfection de son talent pour peindre le»
moutons , ceux qui avaient en lui le plus de confiance.
(71)
Les Marches et les Chasses de M. ' Swebach sont toujours
des morceaux très-précieux ; maïs il semble que cet artiste
fait maintenant ses figures dans de bien petites proportions.
Les paysages de MM. Teerlink ( n*. 886) ;, Vogrenand ( 969
et 970)9 et Letellier ( n^ 585 ), sont au nombre des plus
1
remarquables. Celui de M. Letellier est orné de deux figures
par M. Girodet.
Je ne veux point quitter les tableaux à Phuile sans indi-
quer du moins encore les suivans.
La morl d* Adonis ( n^. 112), figure bien dessinée et d'une
couleur agréable, par M. Boisselîer aîné, mort à Home.'
Deux tableaux de M. Dunant ( n*^*. 343 et 344 ) 9 et surtout
son petit Chaperon rouge, La jolie figure de ce jeune infortuné
touche tous les érudits qui connaissent sa tragique histoire ; ^
et les amis des arts trouvent le tableau fort spirituellement
composé. \J armistice de Znaim ( n*. 349 ) de M. Ch. Dus"-
saulchoy, dans lequel on regrette que Fexécution ne réponde
pas parfaitement à la conception première , qui est très*
bonne. Des Mannes de M. Hne ( de 485 à 4^9 ) 9 l^ Red-
dition de Mantoue , par M. Lecomte ( n°. 546) 9 où le site et
les figures sont également à remarquer. Trois petits tableaux
de M. Leprince ( 565 , 566 et 667 ) , dont le dernier repré-
sente Turenne à Vâge âe lO ans , passant une nuit (Thii^er sur
raffut d*un canon. Le petit Chemer(^ n«. 65o ) , par M. MiF»
1er. La transparence de la couleur donne un prix réel à cet
ouyra{;e« Le passage de Vannée de rèsenfe près du fort de
( 70
Bard^ par M« Mongin ( 659 ); tableau qui lienl une place
distinguée parmi ceux qui ont été commandés pour le- grand
Trîanon. Deux petits tableaux de M. Olagnon ( n^. 6Ô6 et
687 ) ; ils promettent que cet artiste peut être bie»t6t compté
parmi nos bons peintres de genre. Une Que du lac Alhan»
(n^ 960 ), par M. Yerstappen. CVst un des plu» beaux pay-
sages du Salon; et les puesjà^ M. Turpin de Crissé (90^^
906, 907 ), ont droit aux même» distinctions. M. Watelet
prend aussi rang parmi les bons paysagistes par ses tableaux
( 974 9 97^ 9 97^ )) ™^îs sc^ figures laissent beaucoup k dé-
sirer. Une Erigone, par M. Lesage ( n°. SjZ ) ^ est gracieuse
et d'un bon goût de dessin , mais les draperies sont mal
exécutée^.
Je répare un oubli envers madame Lemire : son tableau
At madame de la Vallière donnant des leçons de piété à sa
Jille ( i3^ ), est assez gracieux, pour que jVnsse dû en par-
ler à Farûcle des femmes artistes. J^en dis autant de Gabrielle
de Fierai (n*. 1790), par M^'^ Rosalie Caron , en remar-r
.quant toutefois ç(ue le dessin de ce dernier tableau n'e&t pas
correct. «
. Aux noms de MM. Isabey et Augvstin , quand on foint
dans la miniature ceux de MM. Aubry^ Saint, HoUier^
Jlfuneret„ Jean Guérin t.QDagUa, Sicardi, ef de i|ue)ques
autres , on peut avancer , sans crainte d'être contredit, que
le genre aimable est «ujoiu-d'hui aussi florissant que jamais..
Les vignettes ^ue Mr Alex» Dcs^on^ « faiiies pour divcvs
(7S>
livres récemment imprimés ( n^. 3oî ) , sont exécutées avec
d'esprit. M. DuvÎTÎer a , comme dessinateur « une rtépota-*
tibo solidement établie. On distinguer» cette année son
aquarelle ( n*. 365 ). C'est une composition du genre histo-
rique , et dont on ferait un bon tableau. Le sujet est Hector
pleuré par sa famille. M. Fragonard compose tou^ur^ avec
goût , et toujours aussi son dessin est fort correct. Sa scène
à* Automne ( 386 ) est un très-* beau dessin \ mais dans les
n®'. 387 et 388 , cet habile artiste paraît ayoîr voulu lutter
contre le coloris des véritables tableaux. 11 en est résulté des
ouvrages mixtes , auxquels je ne serais pas surpris qu'on
préférât les dessins d'une sevla couleur.
Les vues d'intérieur d'appartement de MM. François -Jean
et Auguste Garnerey ( de 402 à 408 ) , ont tout le fini , toute
l'exactitude de ce genre, par malheur toujours un peu froid.
On ne peut faire ce reproche à celui que M. Melling traite
avec une supériorité incontestable. Ses Ques ( de 63^ à 637 )
embrassent une vaste étendue de pays , où la perspective
aérienne est aussi bien observée que la perspective linéaire.
Ces aquarelles sont de véritables tableaux.
Si M. Casimir Karpf ne terminait pas tant ses jessins ,
peut-être y gagneraient-ils. Quoi qu'il en soit , ceux qu'il a
exposés ( de 609 à 5i4 ) sont remarquables par une extrême
correction. Le plus grand de tous , Bélisaîre désaltéré par
son guide, est un morceau plein de grâce , et dont les e^--
pressions sont fort castes»
' t
(74) •
Les mes des palais des rois maures ^ k Grenade , par M«
»
Yauzelle ( gSS, 986 et 937 ), sont précieuses, d'abord par
les objets représentes , ensuite parce que Tartiste y a placé de
fort jolies figures.
Les Oiseaux peints i gouache , par M. Auguste ( n®. 16 ) ^
âont de la plus grande yérité et d'un très-beau fini ; mais
Fouvrage le plus curieux en ce genre, c'est le manoùra^
magnificat peint sur vélin ( n^ 5i6 ), par madame Knip.
Cet oiseau, qui ne se trouve que dans la 5'. partie du globe ,
à la Nouvelle - Hollande , près du port Jackson, étale sa
queue comme nos paons , et alors elle office la plus exacte
ressemblance avec une lyre. C'est ainsi que M"*'. Knip Ta
peint. L'exécution est parfaite.
m»
(77)
*"^^^'^'*^*^*^*^*^*^^*>ww>r>-\fii vvt < %m»^
3^0. VIII.
SCULPTURE,
IjES principes qui dirigent la Sculpture étant absolument les
mêmes que ceux par lesquels la Peinture s'élève au sublîme,^
il était naturel que ces deux Arts dussent fleurir et dégénérer
ensemble. Aussi, dans le siècle dernier, lorsque la Peinture
prit en France une route si propre à Tégarer, les erreurs
où la Sculpture tomba furent-elles aussi déplorables que les
siennes. Ce fut alors qu'on demanda à cet Art , essentielle-
ment pur et austère , des beautés prétendues qu'il avait dé^
daignées è toutes les époques de sa gloire , chez les nations
anciennes ou modernes. La régénération de Técole s'étendit
heureusement jusqu'à lui : on ne vit plus les statuaires faire^
Toltiger en l'air la pierre ou le marbre, pour représenter, d'une
manière toujours imparfaite , les effets du vent sur les che«
yeux y la barbe , ou les draperies des figures ; les bas*relief$
ne furent plus composés dans l'intention d'en faire des espè-
ces de tableaux. Ce mauvais goût dont , malgré des talens
réels, le Bernin avait infecté l'Italie , fut enfin coodamné
•omme il méritait de l'être.
Tout porte à espérer que , de long-temps , il n'exercera
(7»)
parmi nous ^a pernicieuse influence. Le dernier concours pour
les grands prix de sculpture offrait des preuves- remarquables
que les élèves en général cherchent, avant tout , la simplicité
ée la composition , la noblesse et la pureté des formes : véri-
table but de leur art. ^exposition actuelle , k un très-r>etit
nombre d'exceptions près , annonce que les maîtres sont pé-
nétrés des mêmes principes.
Les statues en marbre ou en plâtre se divisent , comme aux
expositions des années précédentes , en figures de dieux ou
de héros de l'antiquité , et en personnages modernes.
Grâce à la munificence du Gouvernement , les ouvrages de
cette dernière espèce sont assez nombreux. C'est par eux qut
je commencerai.
Dès le premier coup-d'œil , je suis arrêté par l'examen
d'une question souvent agitée , et non encore résolue. Quel-
ques statuaires , chargés de faire passer à la postérité les
'traits de plusieurs Français illustrés dans la carrière des
' armes , n'ont pas cru devoir les dépouiller des vêtemens
indicatifs dé leur pays natal , de leur profession, et de
l'époque où' nous vivons; d'autres, sacrifiant* toute consi—
dération résultant des convenances, â la pensée de faire
preuve detalens dans l'exécution du nu, nouslesontmonlrés
tels à peu près que des athlètes victorieux aux Jeux olym.^
piques. Les avantages et les inconvénîens de ces deux procé •
dés , ne peuvent , on le sent bien, être discutés dans un ar-
ticle tel que celui ci. Une dissertation en forme ne serait pas
(79)
trop étend (ie pour peser des opinions si complètement op-^
posées, et qui peut-être ne se rapprocheront jamais , préci-
sément parce que, de F un comme de Tautre côté , n'envisa-
geant la discussion que sous un seul aspect, on s'appuie sur
des raisons sans réplique. Je crois cependant pouvoir avancer
que si , en considération de Part, on veut adopter quelquefois
pour ces figures le style héroïque , c'est-à-dire, la nudité
complète , ce ne doit pas être du moins pour celles qu'on
destine à orner des monumens publics. Je tiens d'autant plus
à cette, opinion qu'elle paraît avoir été adoptée par les ar-
tistes , et peut-être aussi par ceux qui emploient leurs talens«
Le frère d'un de nos plus habiles peintres, M. Taunay, a
donné le costume moderne au modèle d'une belle statue du
général La Salle {n?, 1 144)9 ^^'^^ ^^ marbre , de double pro-
portion , doit être placé sur le pont de la Concorde. On peut
citer encore, comme étant exécutées de même , et ayant éga-
ttOMnt droit ,à des éloges , les statues du générât Wallongne
(p?, 1019) ,' par M. Bridan , et celle du général Cervoni
(n^. io33), par M. Chinard , de Lyon. Les mauvais résultats
qu'a eus le système opposé dans une statue exposée d'abord ,
puis aujourd'hui cachée dans une de nos places publiques *^
ont probablement fait adopter ce parti.
Un autre inconvénient des nudités , c'est que le nom du
personnage devient une véritable énigme. Par exemple, voici,
* La place des Victoires.
(8o)
SOUS le n*. io43, une stalue fort bien traTatUée, ouvrage de
feu Bartbélemi Corneille. Ce jeune homme tout nu , qui vient
de recevoir un coup mortel , est-il un des guerriers d^Aga-
memnofi , un défenseur de Troie, un demi-dieu, un héros
romain ? Non : le livret nous apprend que c*est t adjudant-
commandant Daliàn , tué au passage du Mincio. On doitavouer
que cette indication était indispensable. L^ariîsie a aussi
exécuté de la même manière , sous le n^ io44 1 la staUted'un
général.
M. M3ho»me paraît avoir voulu composer , jusqu'à un
certain point, avec ceux que frappent , en ces sortes d'où*
vrages,les inoonvéniens du style héroïque. Son général Hochê'
{yi^. 1x24)9 ^t ^ssis sur un siège antique. Il a la tête couverte
d'un casque , des brodequins aux pieds , et le corps , en très-
grande partie , couvert d*une draperie. Deux bas-reliefs re«
présentent le Rhin et la Moselle pleurant sa mort prématurée.
L'artiste ne s'est nullement fié k cet accessoire pour faire con-
naître son héros ; il a de plus écrit en toutes lettres , non-
seulement le nom des deux fleuves; mais encore celui de Hoche
au pied de la statue. Au reste ce moùument, presque colos-
sal , est d'un excellent style et d'une très-belle exécution.
Il serait assez inutile d'avertir que la statue de feu S. Exe.
le Ministre des cultes Portails , n'a pas été exécutée dans le
style héroïque par M. de Seine. L'artiste a peut-être même
porté trop loin le fini des détails dans l'imitation des brode-
ries , etc. ) ce qui fatigue un peu l'œiL La tête est bien modelée,
»
mais
(«. )
fnciais elle pffire Ae$ formes un peu maigres. Dans ces sortes
id'ifBîtations j VesÊrème ressemblance , on le sait , n'est point
de rigueur , et un habile sculpteur sait toujours bien donner
-i ttki porlsait ce grim^pseqae son art , borné dans ses moyens
jd'*eiëciitîon , ne doit jamais perdre de vue^ Ces observationà
|»euFent s^appliquer à la statue en marbre* du feu sénateut'
Tronchet/par M. Roland <n®. i i4o).
M. HoudoB est accoutumé à bien reproduire en mérbrt
les traîJts de Voltaire. La nouvelle statue de cet homme itlus-^
en y qu^il a exposée sous le n^ logo , offre ce m^me genre
ide. mérite; siais la figure étant debout, et l'artiste ayant
<m que la maigreur du corps de celui qu'il « représenté
•d,eraît se faire isent^, même ions une ample draperie, cette
^atjue paraît un peu longue. Ce défaut se refrouve (et id sans
ppitv^ir être excusé) dans une statue du général Joubert'^
.toutefois sans numéro , que le bvret attribue à M. Itoudon V
sous le n^ ioSq. -
. Il est beau , sans dottle , de pouvoir dire , comme le grand
'Corneille,
j« «c dtrîf qu^à moi seul toabc ms rtnoma^e {
Mais ôil doit avouer aussi que , pour un artiste , c^est un
' avantage réel que de porter un nont déjà connu , et qui ins-
pire au public de Tattention , et même de la bienveillance*
^Cei avantage est maintenant celui de M. Charles Dupaty, qui
' ne débute pas à rexpôsltion avec moins de trois statues , dox^t
^deux éri marbre , et trois bustes.
(8a)
L'une de ces statues est celle du général LeciercÇn^. xcféÇ) ;
elle est nue et correctement dessinée ; la tête surtout est d'uo
beau caraclère.
La seconde (n. 106I) représente Afa»^ JUs d'Oiiée^ ^m-
^ant Us Dieux, Le premier mérite de cette statue, c^est que,
dès le premier coup*d*œil , on saisit bien Tintention du
sculpteur. Les amis des Arts sont , à la yérité , guidés à re-
connaître Ajax par la ressemblance de sa tête avec le beau
fragment antique auquel on. donne vulgairement le nom
d^Âjax;mM Tattitude du personnage ne le désigne pas
moins : sa jambe droite pose sur un rocher ; et , levant â U
fois la tête et le bras vers le ciel , d^un air menaçant , il sem-
ble prononcer réellement ces paroles impies : « J'en échap-
perai malgré les Dieux. » M. Dupaty a cherché â joindre ^^
dans son. dessin , Fétude de la nature à celle de l'anti-
quité ; dé sorte que cet Ajax se rapproche plus , sous ce rap<«
|>ort, du gladiateur^ que de toute autre statue célèbre. .M,
Hansion a traité le même sujet (n. 1 108). Il paraît avoir songé
À reproduire ces formes idéales que notre imagination accorde
volontiers aux prétendus héros de ces temps à demi-barbares,
appelés temps héroïçues ; mais l'attitude de sa figure a un«
froideur que la comparaison avec celle de l'autre Ajax rend
encore plu^ sensible.
Les vers admirables par lèsquek Lucrèce débute dans son
poëme de la Nature des choses , ont inspiré k M. Dupaty l'idée
4e sa troisième stalve : Fénus animant tunipers (n^ 1067)* La
( 8J )
dëesse dé la beauté , debout , et, selon son nsage , parée de ses
«eiils charmes , approche un flambeau du globe céleste > em-
Uéme de Funivers.
M. Dupaty n'a point voulu qu^on l'accusât d'avoir copiié
la Vénus de Médicis, Si Ton songe à quelque statue antique
• . • • ...
de cette déesse , en regardant son ouvrage , c'est à cette
Vénus dite du Capitale , que Ton voit dans la salle des fieuçes
dû Musée 'Napoléon. Cependant , Farliste a su conserver ua
caractère d'originalité , même en s'exposant à des comparai-
sons si redoutables. Quoique les opinions puissent être par-*
tagées pour savoir Jusqu'à quel point cette statut répond, à*
ridée qu^on se forme de la beauté par excellence, il aeri^
toujours impossible de ne pas la considérer comme la pro-
duction d'un talent très-distingué;^
Le Narcisse de M. Beauvallet (n°. looi) a des grâces , ainsi
»■ ■ • *
que sa Pomone (n^. 1002) ; mais cette dernière statue paraît
cTune proportion un peu longue*
Outre de beaux bustes , et une statue couchée de S, M..
le Roi de Rome (^n^, i<'09) ,* M. Bosio a exposé un amour
lançant des traits , dont l'attitude est fort agf'éable et fort
animée.
Grand nombre Je raisons s'opposent! à ce que Fa sculpture
soit souvent pratiquée par des femmaes. Les ouvrages de ma—
demoiselte Julie Charpentier n'en mérileot que-plus^ d'attirer
liatteatioa. Sop plâtre représentant le Rtdde^Rome^qSre ee^».
(94)
délicatesses qxiî caractérisent Fenfânee', et q^iie ëé ÛH^gntkdm
artistes n^ont pas toujours saisies. '^
Le liyret annonce deux statues de M. Lemot. Je' ifai Yiâ
^^une Hébé çersant le nectar à Jupiter transformé en aigle"
(n®. iioo). C'est un groupe plein de correctten et de grâee 9
mais il est d'uae proportion très-petite , et on ne peut sVmt-
pécher de regretter quVn artiste tel que Mr Lemot n'ait pas^
iburni à l'exposition quelque morceau plus considérable.
M. Rutxbiet , dont le nom ni les^ ouvrages ne sont indi—
qués dans lé liyret , n'en a pas moins exposé des bustes d'ua
excellent travail ^ et un groupe en marbre de Zéphir enle^ani
flore. Des formes charmantes , du mouvement , de la grâce ,
rendent ce morceau un des ouvrages les plus reïnarquaUes de
l'exposition. En souscrivant très-volontiers à tous les éloges
qu'on lui donn^ je remarquerai cependant qu'il y a , dans la
manière dont 'les cheveux de Zéphir sont élevés sur son
front, et symétriquement ornés de fleurs, quel(pie chose
qui tient ^e l'afféterie , et qui s'écarte de ce goût pur dont
l'artiste a fait preuve dans tout le reste de l'ouvrage.
* Témoin Mîchel-Ànge, et la plupart des sculpteurs anti-
ques. Il faut bien dire la plupart , car, si on disait tous , comme
on en serait d'abord tenté, t enfant jouant avec une oie qu'on
voit au Musée Napoléon , sufËrait seul pour démontrer l'in-
|uslice de celte assertion ; et puis, tant de chefs-d'œuvre de
la sculpture antique sont perdus, qu'il y aurait de la témérité
à prononcer qu'elle a été moins parîTaîte dans teBc partier
que dans telle autre , uniquement parce qu'il nous le .sembler
ainsi, d'aj^rès les morceaux . pirvotius jtis^u'à liai^
que chose de noble et d^inepîré. UartiiCe a i^ussi ^ë uft trèé^
bon parti de lu siiperbe tête ailtî^ , géâéraksnent éénèl^
dérée comme le porttailda f^e de l»p0é)sîe. Quant M t6tf$i^
lea fortàes ea paraissent quelquefois appduv#I<^é i^'esl bîenr
ainsi , san» doute ^ qu-nn TÎeiUatd doit être repré^tité i maif
ici peut-être la vèrifté de Vimka0krtk itvàit être saicrifiée k là
pensée d^afirancbir un id persoûnege dé tout, Oé qui tient k
rimperfection et â la faiblesse de la natuf ê b^Hidné*
C'était une des erreurs adoptées par les a#tirCés( du dernier
siècle , que la coutume de présenter des personnes virantei
«vec des attribuas de divinités antides. Ou Fartiste s'éleraif
jusqu'il l'idéal , et alors il n'y arait plus de ressemblante , ùvt
il conserrait les formes indiyîcluelles. On peut juger de l'effet
mesquin qu'il produisait en prenant ce dernier parti, par un
■ portrait d* enfant sous i 'emblème d'un amour ^ exécuté sous le
n^ 1084 , par M. Germain.
Quand les productions des Arts sont si nombreuses , il
est réellement impossible de n'en point passer un grand
nombre sous silence t à moins de ne donner que de
simples catalogue», au lieu d'ppinions motivées. Me voici
à la fin de l'article Sculpture , et je n'ai point encore parlé de
plusieurs ouvrages qui auraient mérité d'être examinés avec
quelques détaib. De ce nombre sont un Hyacinthe blessé j par
M. Callamard (n®. 1024) ; statue où la pureté des formes et
la justesse de Texpression sont portées à un très-haut degré ;
(56)
iitta beam buftes^en marbre de GreNet et de Facteur Baron
(o**. 1079 et 1080) f par M. Fortia , et appartenant à la Co*
médie-Française ; un PJdhcièU de M. Goia (n<^. 1086) ; Jfr-
nerQt protégeant Venfanee de S, M. le Roi de Rome(n\ i i34)f
baf-reiief d'un bon style et dVne coopoiition agréable, par
M. Romagnesiy etc. Quant aux bustes, outre ceux que f ai
éé]k indiques , l'exposition en offre un ^rand nombre
qni 9 pour la plupart , sont d'un bon dessin et d'une belle
exécution. Ce genre paraît très-eocouragé, et mérite de
l'élre. A toute, autre époque , lies personnes constil'uées en
dignité , les bomnses célèbres , et les gens riches , auraient ea
peine à trouver un aussi fpind nombcç de sculpteurs capable»
die transmettre leurs traits aux générations iiiturts»
{
ARCHITECTURE
ET
GRAVURE.
, f
(89)
N^ IX.
ARCHITECTURE
ET
GRAVURE.
JLiES architectes paraissent aroir senti que le S^lon n^est pas
le lieu de leur triomphe , et qu'3s courent le risque de n*y
être pas remarqués» Quoique - Paris en possède un ^and
nombre de très-habiles , huit seulement d^entr^eux ont exposé.
Les artistes examinent les grands prioo d'architecture de
MM. Yaudoyer et Baltard , ouvrage utile aux élèves ^ et
dont le succès est depuis long-temps assuré^; et les curieux
épuisent leur admiration devant un modèle en niief du palais
de Justice (^ n^ ii8S), par M. Giroux.
Les gravures étant , pour la plupart, dé}à connues , )e
xn^arrâterai peu à cette partie de l'exposition. M. Andrieu a
un cadre demédaille$(n<^..i20o ) ; M. Godef&oi une épreuve
àTeau forte de la bataille d*Justeriitz.^ d'après M. Gérard
(nS ia33). MM. Auguste Desaoyers , Bovinet , Claessenc,
Anselin , GhatilloD ,,. Charpeniier , Dehucourt , Laurent j^
<90^
Malbeste, Ponce, Massard, Tardleu, etc., prouvent (de
nouveau , par leurs ouvrages « Pétat florissant de cet art
parmi nous , et soutiennent dignement leur réputation.
La Tran^guraiion de M. Raphaël Morghen est exposée
sous le n®. isSS. Quelle que soit la. célébrité de cet artiste ,
il m^est impossible d'admettre qu'il ait rendu par&itement la
pureté des formes, le caractère des tttes > et Teffet général du
chef-d'œuvre de Raphaël. Quatre sujets allégoriques , F Ac-
cord , le Caprice , VEpreuçe et la Rupture , par M. Ulmer ,
m'ont rappelé le succès qu'avait eu cette jolie allégorie , exé-
cutée avec un vrai talent par ce jeune artiste , d'après le»
âessins de M* Wicar.
^ M^. Giacomelli terminera dignement cette longue nomen-
dature d'artistes, plus ou moins reconmxandables. Sous lé
n*. 'i352, eUe a exposé une suite de cent gravures îou des-
sins , dont les trois poèmes du Dante lui ont fourni les sujets.
Pour exécuter un si grand nombre de compositions, elle a
dioisî la manière la plus expéditive , mais non la moms ex-
pressive de toutes , celle de M. Flaxmann , sculpteur anglais.
Elle consiste à rendre les sujets par un petit nombre de figures
au trait Plusieurs peintres , même célèbres , n'ont pas dé-
daigné d'emprunter à M: Flaxmann , les intentions de quel-
ques-nnes de ses figures. Je ne serais nullement surpris qam
Ht^. Giacomelli obtînt le xt^me honneur ; car elle ^est pé-
nétrée, et de la manière originale de M. Flaxmann, et du
génie extraordinaire du Dante.
( 9»)
Ces examens ont dû prouver aux lecteurs que U France
possède aujourd'hui un grand nombre de talens dans tous
les genres ; mais , pour exprimer ma pensée toute entière , je
crains que la tendance à niultiplier le nombre des artistes ne
finfsse par avoir pour Part de fâcheuses conséquences. Le
jury a, dit -on, refusé environ 4^0 tableaux ; comment
étaient-ils donc , puisqu'ils valaient moins que tels et tels
qu'il serait trop facile d'indiquer!
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