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Full text of "Géométrie descriptive"

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THE  LIBRARY 

OF 

THE  UNIVERSITY 

OF  CALIFORNIA 


GIFT  OF 


Prof.  G.  C,  Evans 


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GEOMETRIE  DESCRIPTIVE 


LES  MAITRES  DE  LA  PENSÉE  SCIENTIFIQUE 


HuYGENS  (Christian).  —  Traité  de  la  lumière.  Un  vol.  de  x-155  pages 
et  74  figures  ;  broché,  net 3  fr.    50 

Lavoisier  (A.-L.).  —  Mémoires  sur  la  respiration  et  la  transpira- 
tion des  animaux.  Un  vol.  de  viii-G8  pages  ;  broché,  net. .  .      3  fr.      » 

Spallanzani  (Lazare).  —  Observations  et  Expériences  faites  sur  les 

Animalcules  des  Infusions.  Deux  vol.  de  yiii-106  et  122  pages; 

-  chaque  vol.  broché,  net 3  fr.      » 

Clairaut  (A.-C).  —  Eléments  de  Géométrie.  Deux  vol.  de  xiv-95  et 
103  pages  avec  69  et  77  figures;  chaque  vol.  broché,  net.     3  fr.  50 

Lavoisier  et  Laplace.  -^  Mémoire  sur  la  chaleur.  Un  vol.  de  78  pages 
avec  2  pl-inches;  broché,  net 3  fr.     » 

Carnot  (Lazare).  —  Réflexions  sur  la  métaphysique  du  Calcul  infini- 
tésimal. Deux  vol.  de  viii-117  et  105  pages  avec  5  figures;  chaque 
vol,  broché,  net 3  fr.    » 

D'Alembert  (Jean).  —  Traité  de  Dynamique.  Deux  vol,  de  xl-102  et 
187  pages  avec  81  figures;  chaque  vol.  broché,  net 3  fr.     » 

Dutrochet  (René).  —  Les  mouvements  des  végétaux.  Du  réveil  et  du 
sommeil  des  plantes.  Un  vol,  de  viii-121  pages  et  25  figures;  broché, 
net 3  fr.      » 

Ampère  (A.-M,).  —  Mémoires  sur  V électromagnétisme  et  V électrodyna- 
mique. Un  vol.  de  xiy-l\0  pages  et  \1  figures -ybroché,  net     3  fr.     » 

Laplace  (P.-S,).  —  Essai  philosophique  sur  les  probabilités.  Deux 
vol.  de  xn-103  et  108  pages;  chaque  vol,  broché,  net,  ..  .       3  fr.     » 

BouGUER  (Pierre),  —  Essai  d'optique  sur  la  gradation  de  la  lumière. 
Un  vol.  de  xx-l30  pages  et  17  figures;  broché,   net,..      3  fr.     • 

Painlevé  (Paul).  —  Les  axiomes  de  la  Mécanique.  Examen  critique. 
Note  sur  la  propagation  de  la  lumière.  Un  vol.  de  xiii-112  pages  et 
4  figures;  broché,  net 4  fr.     » 

Sous  presse  : 

Mariotte  (Edme).  — '■  Discours  de  la  nature  de  l'air.  De  la  végétation 
des  plantes.  Nouvelle  découverte  touchant  la  vue.  Un  vol.  do 
00  pages  ;   broché,  net » 

MoNGE  (Gaspard), —  Géométrie  descriptive.  Deux  vol.  de  xvi-1  A4 
et  138  pages  avec  53  figures;  chaque  vol.  broché,  net.  .  ;  .  » 


Il  est  tiré  de  chaque  volume  10  exemplaires  sur  papier 
de  Hollande,  au  prix  uniforme  et  net  de  6  francs. 


LES  MAITRES  DE  LA  PENSEE  SCIENTIFIÔUE 
Collection  de  Mémoires  et  Ouvrages 

Publiée  par  les  soins  de  IMaihice  SOLOVINE 


CÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE 


PAU 


Gaspard    MONGE 

AlJiîMEMEE  mm  TlltOlUE  »KS  OMBllES  ET  DE  LA  PERSPECTIVE 

EXTRAITK    DKS  PAPIERS  DE  LAUTEUR 

Par  Barnabe  BRISSON 


PARIS 

GAUTHIER-VILLAHS  ET  C",  ÉDITEUi^S 

LIBRAIRES  DU  BUREAU  DES  LONGITUDES,  DK  l'ÉCOLE  POLYTECJINIQUI 

Quai  des  Grands-Augustins,  55. 
19-22 


Tous  droits  de  traduction,  de  reproduction  et  d'î^daptation  réservés 
pour  tous  pays. 


AVERTISSEMENT. 


V-/-2- 


L'accroissement  rapide  des  découvertes  scientifiques 
engendre  fatalement  Vouhli  des  découvertes  passées  et 
de  leurs  auteurs  —  ouhli  encore  favorisé  par  le  fait 
regrettable  que  la  plupart  des  mémoires  et  des  ouvrages^ 
ou  ces  découvertes  se  trouvent  exposées^  sont  complè- 
tement épuisés  et  introuvables. 

La  collection  des  Maîtres  de  la  Pensée  scientifique 
comprend  les  mémoires  et  les  ouvrages  les  plus  impor- 
tants de  tous  les  temps  et  de  tous  les  pays.  Elle  est 
destinée  à  rendre  accessibles  aux  savants  et  au  public 
cultivé  les  travaux  originaux^  qui  marquent  les  étapes 
successives  dans  la  construction  lente  et  laborieuse  de 
Védifice  scientifique.  Tous  les  domaines  de  la  Science 
y  sont  représentés  :  les  mathématiques ^  V astronomie,  la 
physique,  la  chimie,  la  géologie,  les  sciences  naturelles 
et  biologiques,  la  méthodologie  et  la  philosophie  des 
sciences.  Étant  la  plus  complète,  elle  fournira  les  docu- 
ments indispensables  aux  historiens  de  la  science  et 
de  la  civilisation,  qui  voudront  étudier  Vévolution  de 
Vesprit  humain  sous  sa  forme  la  plus  élevée.  Elle  per- 
mettra aux  savants  de  connaître  plus  intimement  les 
découvertes  de  leurs  devanciers  et  £y  trouver  nombre 


316 


VI  LES    MAITRES    DE    LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

d^ idées  originales.  Les  philosophes  y  trouveront  une 
mine  inépuisable  pour  Vétude  épistémologique  des 
théories^  des  hypothèses  et  des  concepts,  au  moyen  des- 
quels se  construit  la  connaissance  de  Vunivers.  Elle 
offre  enfin  à  la  jeunesse  studieuse  un  moyen  facile  et 
peu  coûteux  de  prendre  contact  à  leur  source  même 
avec  les  méthodes  expérimentales  et  les  procédés  ingé- 
nieux que  les  grands  chercheurs  ont  dû  inventer  pour 
résoudre  les  difficultés  —  méthodes  concrètes,  infini- 
ment plus  suggestives  et  plus  fécondes  que  ne  le  sont 
les  règles  schématiques  des  Manuels. 

On  trouve  encore  dans  les  mémoires  classiques,  où  la 
profondeur  de  la  pensée  et  la  justesse  du  raisonne- 
ment se  manifestent  sous  une  forme  remarquablement 
lucide  et  élégante,  le  secret  d'exposer  les  découvertes 
et  l,es  conceptions  scientifiques  d'une  façon  claire  et 
précise,  comme  Vont  demandé  à  plusieurs  reprises  les 
savants  les  plus  illustres  de  notre  temps. 


Les  mémoires  et  les  ouvrages  français  sont  réim- 
primés avec  grande  exactitude  d'après  les  textes  origi- 
naux les  mieux  établis,  et  ceux  des  savants  étrangers 
sont  traduits  intégralement  et  avec  une  rigoureuse 
fidélité. 


NOTICE  BIO&RAPHIOUE 


Gaspard  Monge,  fils  d'un  pauvre  marcliand  ambu- 
lant, naquit  à  Beaune  (Côte-d'Or)  le  lo  mai  17/16.  Il 
fut  placé  dans  le  collège  de  cette  ville,  dirigé  par  les 
Oratoriens,  où  il  se  distingua  par  son  ardeur  aux 
études  et  sa  pénétrante  intelligence.  A  peine  âgé  de 
i/f  ans,  il  excita  l'admiration  des  notables  de  Beaune 
par  la  construction  d'une  pompe  à  incendie  1res  per- 
fectionnée. Deux  ans  plus  tard,  il  provoqua  l'admira- 
tion générale  pour  le  plan  détaillé  qu'il  traça  de  sa 
ville  natale.  Ce  travail  lui  valut  d'être  nommé,  à  l'âge 
de  16  ans,  professeur  de  physique  au  célèbre  collège 
de  l'Oratoire  de  Lyon.  Les  supérieurs  de  cette  insti- 
tution désiraient  se  l'attacher  pour  toujours  et  lui 
proposèrent  d'entrer  dans  les  ordres.  Mais  le  père  de 
Monge  était  peu  favorable  à  ce  projet  et  lui  conseilla 
d'accepter  plutôt  la  proposition  d'un  officier  supérieur 
de  le  faire  entrer  à  l'École  militaire  de  Mézières,  qui 
formait  les  officiers  du  génie.  Gaspard  Monge  acquiesça 
à  ce  projet.  Il  entra  à  l'Ecole  en  1765,  mais  n'étant 
pas  noble,  il  n'avait  de  droit  d'accès  qu'à  la  section 
pratique,  qui  avait  pour  but  de  former  des  appareil- 
leurs  et  des  conducteurs.  Monge  ne  se  contenta  pas 
seulement  d'exécuter  les  travaux  obligatoires,  il  s'em- 


vin  NOTICE   BIOGRAPHIQUE. 

ploya  à  rechercher  les  fondements  mathématiques  des 
constructions  de  stéréotomie,  et  réussit  à  donner  des 
démonstrations  simples  et  élégantes  des  procédés 
empiriques  employés  jusqu'alors.  Et  ayant  été  chargé 
d'exécuter  un  plan  de  défilement,  il  s'acquitta  de  cette 
tâche  délicate  en  modifiant  radicalement  les  p:océdés 
habituels  et  en  établissant  une  méthode  toute  nou- 
velle pour  traiter  ce  genre  de  travaux.  Cette  méthode 
rencontra,  à  cause  de  sa  nouveauté  même,  une  vive 
résistance,  mais  finit  cependant  par  s'imposer. 

C'est  à  ce  moment  que  Monge  —  qui  n'avait  que 
19  ans  —  fut  nommé  suppléant  de  Bossut,  qui  pro- 
fessait les  mathématiques,  et  de  l'abbé  Nollet,  qui 
professait  la  physique.  En  1780,  Monge  fut  adjoint 
à  Bossut,  qui  professait  l'hydrodynamique.  La  même 
année,  il  fut  nommé,  grâce  surtout  à  l'intervention  de 
D'Alembert,  membre  de  l'Académie  des  Sciences.  En 
1783,  il  quitta  définitivement  l'Ecole  de  Mézières  pour 
remplacer  Bezout,  qui  venait  de  mourir,  comme  exa- 
minateur à  l'Ecole  de  la  marine. 

Embrassant  avec  enthousiasme  les  idées  de  la 
grande  révolution,  il  déploya  une  activité  prodigieuse 
dans  les  circonstances  les  plus  difîiciles.  Il  fit  partie 
de  la  deuxième  Commission  —  comprenant  Borda, 
Lagrange,  Laplace  et  Condorcet  —  qui  fut  chargée 
d'étudier  le  nouveau  système  de  mesures  et  qui  pré- 
senta son  Rapport  le  19  mars  1791.  Le  10  août  1792, 
il  fut  nommé  ministre  de  la  marine,  poste  qu'il  occupa 
jusqu'au  10  mai  1798.  Après  sa  démission,  Monge  se 
consacra  avec  un  zèle  infatigable  aux  problèmes  de  la 


NOTICE   BIOGRAPHIQUE.  IX 

défense  du  territoire,  menacé  par  les  armées  ennemies. 
Il  surveillait  les  travaux  dans  les  manufactures 
d'armes,  dans  les  fonderies,  dans  les  poudrières  et  pro- 
digua ses  conseils  aux  directeurs  des  arsenaux  et  aux 
ouvriers  {Description  de  Vart  de  fabriquer  les  canons, 
Paris  an  II.  Avis  aux  ouvriers  en  fer  sur  la  fabrication 
de  V acier ^  en  collaboration  avec  Vandermonde  et  Ber- 
thollet.  Paris,   1794). 

Il  fut  un  des  principaux  fondateurs  de  l'Ecole  Nor- 
male et  de  l'École  Polytechnique,  dans  lesquelles  il 
exerça  comme  professeur  une  influence  considérable 
et  des  plus  bienfaisantes.  Très  admiré  de  Napoléon,  il 
fut  chargé  par  ce  dernier  de  fonctions  très  impor- 
tantes. 

Il  figura  parmi  les  savants  et  les  artistes,  qui  firent 
partie  de  l'expédition  d'Egypte,  et  fut  nommé  prési- 
dent de  l'Institut  que  l'empereur  y  fonda.  De  tant  de 
travaux  importants  qu'il  y  efTeclua,  il  convient  de 
mentionner  tout  particulièrement  l'explication  si  juste 
du  mirage,  qu'il  étudia  d'une  façon  attentive  pendant 
le  trajet  d'Alexandrie  au  Caire  par  le  désert.  De  retour 
en  France,  il  fut  nommé  sénateur  en  1799  et  peu  après 
comte  de  Péluse. 

Monge,  par  la  supériorité  de  son  génie,  l'affabilité 
de  ses  manières  et  l'élévation  de  ses  sentiments,  sut 
acquérir  l'admiration  et  la  sympathie  de  tous  ceux  qui 
l'approchaient.  Mais  les  dernières  années  de  sa  vie 
furent  assombries  par  des  tristesses  et  des  chagrins  sans 
nombre.  La  chute  de  Napoléon  l'affligea  profondément. 
La   Restauration  le  persécuta    d'une    façon  indigne. 


NOTICE    BIOGRAPHIQUE. 


Par  le  décret  du  21  mars  18 16,  lui  et  Lazare  Carnot 
furent  rayés  de  l'Académie  des  Sciences.  Cette  injus- 
tice et  d'autres  vexations  le  plongèrent  dans  un  état 
de  prostration  profonde  qui  dura  jusqu'à  la  fin  de  sa 
vie,  le  28  juillet  1818. 

Le  génie  inventif  de  Monge  s'est  manifesté  avec  un 
éclat  particulier  dans  sa  Géométrie  descriptive,  œuvre 
remarquable  non  seulement  par  sa  portée  scientifique, 
mais  encore  par  le  champ  illimité  qu'elle  offre  aux 
applications  pratiques.  C'est  «  une  espèce  de  langue 
nécessaire  à  tous  les  artistes  »  (^).  Ce  qui  semblait  être 
voué  pour  toujours  à  la  routine,  aux  tâtonnements  et 
aux  procédés  empiriques  plus  ou  moins  habiles,  s'y 
trouve  réuni  en  un  corps  de  doctrine  d'une  logique 
impeccable  et  réduit  à  des  règles  rigoureuses,  qui  per- 
mettent de  représenter  d'une  façon  précise,  à  l'aide 
du  dessin,  les  formes  des  corps  et,  inversement,  de  les 
reconnaître  d'après  la  description  exacte  une  fois  réa- 
lisée. En  outre  des  parties  achevées,  ce  Livre  contient 
en  germe  presque  tout  ce  qui  a  été  ultérieurement 
ajouté  à  cette  nouvelle  branche  des  Mathématiques. 
Monge  en  conçut  les  idées  fondamentales  vers  1776  ('-), 
il  les  élabora  lentement  et  les  exposa  pour  la  première 


(^)  Monge,  Journal  de  VEcole  Polytechnique,  t.   I,  p.   i. 

(2)  Voir  Mémoire  sur  les  propriétés  de  plusieurs  genres 
de  surfaces  courbes,  particulièrement  sur  celles  des  surfaces 
développahles,  avec  une  application  à  la  Théorie  des  ombres 
et  des  pénombres.  (Présenté  à  l'Académie  des  Sciences,  le 
1 1  janvier  1775.) 


NOTICE   BIOGRAPHIQUE.  XI 


fois  d'une  façon  systématique  à  l'École  Normale,  an  III 
de  la  République.  Mais  il  ne  fut  autorisé  à  publier  ses 
importantes  découvertes  que  l'an  VII,  à  cause  de  la 
crainte  éprouvée  par  le  Gouvernement  que  les  étran- 
gers n'en  tirent  profit  pour  leurs  ouvrages  de  défense 
militaires. 

Par  sa  puissante  originalité  et  les  horizons  nouveaux 
qu'elle  ouvrit,  cette  œuvre  raviva  l'intérêt  pour  les  re- 
cherches géométriques,  qui  étaient  par  trop  délaissées 
au  profit  de  l'Analyse.  La  façon  dont  il  a  exposé  les 
nouvelles  vérités  est  un  modèle  de  simplicité  et  d'exac- 
titude. 

Non  moins  remarquables  sont  ses  travaux  sur  la 
géométrie  analytique  (^)  et  ses  contributions  au  pro- 
blème ardu  de  l'intégration  des  équations  aux  diiïé- 
rentielles  partielles. 

Le    texte   que  nous   reproduisons   est    celui   de    la 

quatrième  édition  de  1820,  qui  contient  en  outre  de 

la  Géométrie  descriptive  la  Théorie  des  ombres  et  de  la 

perspectii^e^  que  Barnabe  Brisson,  et  élève  de  Monge,  a 

publiée  d'après  les  manuscrits  laissés  par  ce  dernier. 

La  première  édition  parut  sous  le  titre  de   Géométrie 

descriptive.  Leçons  données  aux  Écoles  ?îormales,  lan  3 

de  la  République.  (An  VII,  Paris.) 

M.  S. 


(^)  Feuilles  d'analyse  appliquée  à  la  Géométrie,  an  III, 
rééditées  plus  tard  sous  le  titre  de  Application  de  Vanalyse 
à  la  géométrie  des  surfaces  du  premier  et  du  deuxième  degré. 
Paris,  1807. 


PROGRAMME. 


Pour  tirer  la  nation  française  de  la  dépendance  où 
elle  a  été  jusqu'à  présent  de  l'industrie  étrangère,  il 
faut,  premièrement,  diriger  l'éducation  nationale  vers 
la  coimaissance  des  objets  qui  exigent  de  l'exaclitude, 
ce  qui  a  été  totalement  négligé  jusqu'à  ce  jour,  et 
accoutumer  les  mains  de  nos  artistes  au  maniement 
des  instruments  de  tous  les  genres,  qui  servent  à  porter 
la  précision  dans  les  travaux  et  à  mesurer  ses  diffé- 
rents degrés  :  alors  les  consommateurs,  devenus  sen- 
sibles à  l'exactitude,  pourront  l'exiger  dans  les  divers 
ouvrages,  y  mettre  le  prix  nécessaire;  et  nos  artistes, 
familiarisés  avec  elle  dès  l'âge  le  plus  tendre,  seront  en 
état  de  l'atteindre. 

Il  faut,  en  second  lieu,  rendre  populaire  la  con- 
naissance d'un  grand  nombre  de  phénomènes  naturels, 
indispensable  aux  progrès  de  l'industrie,  et  profiter, 
pour  l'avancement  de  l'instruction  générale  de  la 
nation,  de  cette  circonstance  heureuse  dans  laquelle 
elle  se  trouve,  d'avoir  à  sa  disposition  les  principales 
ressources  qui  lui  sont  nécessaires. 

Il  faut  enfin  répandre,  parmi  nos  artistes,  la  con- 
naissance des  procédés  des  arts  et  celle  des  machines 
qui  ont  pour  objet,  ou  de  diminuer  la  main-d'œuvre, 
ou  de  donner  aux  résultats  des  travaux  plus  d'unifor- 


XIV  LES    MAITRES    EE   LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE. 


mité  et  plus  de  précision  ;  et,  à  cet  égard,  il  faut  l'avouer, 
nous  avons  beaucoup  à  puiser  chez  les  nations  étran- 
gères. 

On  ne  peut  remplir  toutes  ces  vues  qu'en  donnant 
à  l'éducation  nationale  une  direction  nouvelle. 

C'est,  d'abord,  en  familiarisant  avec  l'usage  de  la 
Géométrie  descriptive  tous  les  jeunes  gens  qui  ont  de 
l'intelligence,  tant  ceux  qui  ont  une  fortune  acquise, 
afin  qu'un  jour  ils  soient  en  état  de  faire  de  leurs  capi- 
taux un  emploi  plus  utile,  et  pour  eux  et  pour  l'état, 
que  ceux  mêmes  qui  n'ont  d'autre  fortune  que  leur 
éducation,  afin  qu'ils  puissent  un  jour  donner  un  plus 
grand  prix  à  leur  travail. 

C-et  art  a  deux  objets  principaux. 

Le  premier  est  de  représenter  avec  exactitude,  sur 
des  dessins  qui  n'ont  que  deux  dimensions,  les  objets 
qui  en  ont  trois,  et  qui  sont  susceptibles  de  définition 
rigoureuse. 

Sous  ce  point  de  vue,  c'est  une  langue  nécessaire  à 
l'homme  de  génie  qui  conçoit  un  projet,  à  ceux  qui 
doivent  en  diriger  l'exécution,  et  enfin  aux  artistes 
qui  doivent  eux-mêmes  en  exécuter  les  différentes 
parties. 

Le  second  objet  de  la  Géométrie  descriptive  est  de 
déduire  de  la  description  exacte  des  corps  tout  ce  qui 
suit  nécessairement  de  leurs  formes  et  de  leurs  posi- 
tions respectives.  Dans  ce  sens,  c'est  un  moyen  de 
rechercher  la  vérité;  elle  offre  des  exemples  perpé- 
tuels du  passage  du  connu  à  l'inconnu;  et  parce  qu'elle 
est  toujours  appliquée  à  des  objets  susceptibles  de  la 
plus  grande  évidence,  il  est  nécessaire  de  la  faire  entrer 
dans  le  plan  d'une  éducation  nationale.  Elle  est  non 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE.  XV 

seulement  propre  à  exercer  les  facultés  intellectuelles 
d'un  grand  peuple,  et  à  contribuer  par  là  au  perfec- 
tionnement de  l'espèce  humaine,  mais  encore  elle  est 
indispensable  à  tous  les  ouvriers  dont  le  but  est  de 
donner  aux  corps  certaines  formes  déterminées;  et 
c'est  principalement  parce  que  les  méthodes  de  cet  art 
ont  été  jusqu'ici  trop  peu  répandues,  ou  même  presque 
entièrement  négligées,  que  les  progrès  de  notre  indus- 
trie ont  été  si  lents. 

On  contribuera  donc  à  donner  à  l'éducation  natio- 
nale une  direction  avantageuse,  en  familiarisant  nos 
jeunes  artistes  avec  l'application  de  la  Géométrie 
descriptive  aux  constructions  graphiques  qui  sont 
nécessaires  au  plus  grand  nombre  des  arts,  et  en  faisant 
usage  de  cette  Géométrie  pour  la  représentation  et  la 
détermination  des  éléments  des  machines,  au  moyen 
desquelles  l'homme,  mettant  à  contribution  les  forces 
de  la  nature,  ne  se  réserve,  pour  ainsi  dire,  dans  ses 
opérations,  d'autre  travail  que  celui  de  son  intelli- 
gence. 

Il  n'est  pas  moins  avantageux  de  répandre  la  con- 
naissance des  phénomènes  de  la  nature,  qu'on  peut 
tourner  au  profit  des  arts. 

Le  charme  qui  les  accompagne  pourra  vaincre  la 
répugnance  que  les  hommes  ont  en  général  pour  la 
contention  d'esprit,  et  leur  faire  trouver  du  plaisir 
dans  l'exercice  de  leur  intelligence,  que  presque  tous 
regardent  comme  pénible  et  fastidieux. 

Ainsi,  il  doit  y  avoir  à  l'Ecole  normale  un  cours  de 
Géométrie  descriptive. 

Mais  comme  nous  n'avons  sur  cet  art  aucun  ouvrage 
élémentaire    bien    fait,    soit   parce    que    jusqu'ici   les 


XVI  LES   MAITRES   DE   LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

savants  y  ont  mis  trop  peu  d'intérêt,  soit  parce  qu'il 
n'a  été  pratiqué  que  d'une  manière  obscure  par  des 
personnes  dont  l'éducation  n'avait  pas  été  assez 
soignée,  et  qui  ne  savaient  pas  communiquer  les 
résultats  de  leurs  méditations,  un  cours  simplement 
oral  serait  absolument  sans  effet. 

Il  est  nécessaire  pour  le  cours  de  Géométrie  descrip- 
tive, que  la  pratique  et  l'exécution  soient  jointes  à 
l'audition  des  méthodes. 

Ainsi  les  élèves  doivent  s'exercer  aux  constructions 
graphiques  de  la  Géométrie  descriptive.  Les  arts  gra- 
phiques ont  des  méthodes  générales,  avec  lesquelles 
on  ne  peut  se  familiariser  que  par  l'usage  de  la  règle  et 
du   compas. 

Parmi  les  différentes  applications  que  l'on  peut  faire 
de  la  Géométrie  descriptive,  il  y  en  a  deux  qui  sont 
remarquables,  et  par  leur  généralité,  et  par  ce  qu'elles 
ont  d'ingénieux  :  ce  sont  les  constructions  de  la  pers- 
pective et  la  détermination  rigoureuse  des  ombres 
dans  les  dessins.  Ces  deux  parties  peuvent  être  consi- 
dérées comme  le  complément  de  l'art  de  décrire  les 
objets. 


GÉOMÉTRIE  DKSCHIFTIVE 


I. 


1.  La  Géométrie  descriptive  a  deux  objets  :  le  pre- 
mier, de  donner  les  méthodes  pour  représenter  sur 
une  feuille  de  dessin  rpii  n'a  cpie  deux  dimensions, 
savoir,  longueur  et  largeur,  tous  les  corps  de  la  nature 
qui  en  ont  trois,  longueur,  largeur  et  profondeur, 
pourvu  néanmoins  que  ces  corps  i)uissent  être  définis 
rigoureusement. 

Le  second  objet  est  de  donner  la  manière  de  lecon- 
naître,  d'après  une  description  exacte,  les  formes  des 
corps,  et  d'en  déduire  toutes  les  vérités  qui  résultent 
et  de  leur  forme  et  de  leurs  positions  respectives. 

Nous  allons  d'abord  indiquer  les  procédés  qu'une 
longue  expérience  a  fait  découvrir,  pour  remplir  le 
premier  de  ces  deux  objets:  nous  donnerons  ensuite  la 
manière  de  remplir  le  second. 

2.  Les  surfaces  de  tous  les  corps  de  la  nature  pou- 
vant être  considérées  comme  composées  de  points,  le 
premier  pas  que  nous  allons  faire  dans  cette  matière, 
doit  être  d'indiquer  la  manière  dont  on  exprime  la 
position  d'un  point  dans  l'espace. 

L'espace  est  sans  limites;  toutes  ses  parties  sont 
parfaitement  semblables,  elles  n'ont  rien  qui  les  carac- 

MONQE.    —  I.  1 


1  LES   MAITRES   DE    LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

térisc,  et  aucune  d'elles  ne  peut  servir  de  terme  de 
comparaison  pour  indiquer  la  position  d'un  point. 

Ainsi,  pour  définir  la  position  d'un  point  dans 
l'espace,  il  faut  nécessairement  rapporter  cette  posi- 
tion à  quelques  autres  objets  distincts  des  parties  de 
l'espace  qui  les  renferme,  et  qui  soient  eux-mêmes 
connus  de  position,  tant  de  celui  qui  définit,  que  de 
celui  qui  veut  entendre  la  définition;  et  pour  que  le 
procédé  puisse  devenir  lui-même  d'un  usage  facile  et 
journalier,  il  faut  que  ces  objets  soient  aussi  simples 
qu'il  est  possible,  et  que  leur  position  soit  la  plus  facile 
à   concevoir. 

3.  Parmi  tous  les  objets  simples,  nous  allons  re- 
chercher quels  sont  ceux  qui  présentent  plus  de  faci- 
lité pour  la  détermination  de  la  position  d'un  point; 
et  parce  que  la  Géométrie  n'offre  rien  de  plus  simple 
qu'un  point,  nous  examinerons  dans  quel  genre  de 
considérations  on  serait  entraîné,^  si,  pour  déterminer 
la  position  d'un  point,  on  le  rapportait  à  un  certain 
nombre  d'autres  points  dont  la  position  serait  connue  ; 
enfin,  pour  mettre  plus  de  clarté  dans  cette  exposi- 
tion, nous  désignerons  ces  points  connus  par  les  lettres 
successives  A,  B,  C,  etc. 

Supposons  d'abord  que  la  définition  de  la  position 
du  point  comporte  qu'il  soit  à  i^^^  de  distance  du 
point  connu  A. 

Tout  le  monde  sait  que  la  propi-iété  de  la  surface  de 
la  sphère  est  d'avoir  tous  ses  points  à  égale  distance 
de  son  centre.  Ainsi,  cette  partie  de  la  définition 
exprime  que  le  point  que  l'on  veut  déterminer  a  la 
même  propriété  que   tous   ceux  de  la  surface  d'une 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE. 


sphère  dont  le  centre  serait  au  point  A,  et  dont  le 
rayon  serait  i™.  Mais  les  points  de  la  surface  de  la 
sphère  sont  les  seuls  dans  tout  l'espace  qui  aient  cette 
propriété;  car  tous  les  points  de  Tespace  qui  sont 
au  delà  de  cette  surface,  par  rapport  au  centre,  sont 
phis  éloiojnés  du  centre  que  de  i^",  et  tous  ceux  qui 
sont  entre  cette  surface  et  le  centre  sont,  au  contraire, 
moins  éloiaiiés  du  centre  que  de  i™  :  donc  tous  les 
points  de  la  surface  de  la  •  sphère  non  seulement 
jouissent  de  la  propriété  énoncée  dans  la  proposition, 
mais  encore  ils  sont  les  seuls  qui  en  jouissent;  donc, 
enfin,  cette  proposition  exprime  que  le  point  cherché 
est  un  de  ceux  de  la  surface  d'une  sphère  dont  le 
centre  serait  au  point  A,  et  dont  le  rayon  serait  i^». 
Par  là,  ce  point  est  actuellement  distinct  d'une  infi- 
nité d'autres  placés  dans  l'espace;  mais  il  est  encore 
confondu  avec  tous  ceux  de  la  surface  de  la  sphère; 
i!  faut  d'autres  conditions  pour  le  reconnaître  parmi 
'  ux. 

Supposons  ensuite  que,  d'après  la  définition  de  la 
position  du  point,  il  doive  être  à  5!'"  de  distance  du 
second  point  connu  B;  il  est  évident  qu'en  raisonnant 
pour  cette  seconde  condition  comme  pour  la  première, 
le  point  doit  encore  être  un  de  ceux  de  la  surface  d'une 
seconde  sphère,  dont  le  centre  serait  au  point  B,  et 
dont  le  rayon  serait  ç>«\  Ce  point,  devant  se  trouver  en 
même  temps  et  sur  la  surface  de  la  première  sphère 
et  sur  celle  de  la  deuxième,  ne  peut  plus  être  confondu 
qu'avec  ceux  qui  sont  communs  aux  deux  surfaces,  et 
qui  sont  dans  leur  commune  intersection  :  or,  pour  peu 
qu'on  soit  familiarisé  avec  les  considérations  géomé- 
triques, on  sait  que  l'intersection  des  surfaces  de  deux 


LES    MAITRES   DE   LA    PENSÉE    SCIENTIFIQUE. 


sphères  est  la  circonférence  d'un  cercle  dont  le  centre 
est  sur  la  droite  qui  joint  ceux  des  deux  sphères,  et 
dont  le  ])lan  est  perpendiculaire  à  cette  droite;  donc, 
en  vertu  des  deux  conditions  réunies,  le  point  cherché 
est  actuellement  distinct  de  ceux  qui  sont  sur  les  sur- 
faces des  deux  sphères,  et  il  ne  peut  plus  être  confondu 
qu'avec  ceux  de  la  circonférence  du  cercle,  qui  jouissent 
tous  des  deux  conditions  énoncées  et  qui  en  jouissent 
seuls.  Il  faut  donc  encore  une  troisième  condition  pour 
le  distinguer. 

Supposons  enfin  que  le  point  doive  se  trouver  à  3"^ 
de  distance  d'un  troisième  point  C,  connu.  Cette  troi- 
sième condition  le  place  parmi  tous  ceux  de  la  surface 
d'une  troisième  sphère,  dont  le  centre  serait  au  point  C, 
et  dont  le  rayon  serait  3™.  Et  parce  que  nous  avons 
vu  qu'il  doit  être  sur  la  circonférence  d'un  cercle  connu 
de  position,  pour  satisfaire  en  mcnic  temps  aux  trois 
conditions,  il  faut  qu'il  soit  un  des  points  communs, 
et  à  la  surface  de  la  troisième  sphère,  et  à  la  circonfé- 
rence du  cercle  :  or,  on  sait  qu'une  circonférence  de 
cercle  et  la  surface  d'une  sphère  ne  peuvent  se  couper 
qu'en  deux  points;  donc,  en  vertu  des  trois  conditions, 
le  point  se  trouve  distingué  de  tous  ceux  de  l'espace, 
et  ne  peut  plus  être  que  l'un  de  deux  points  déter- 
minés; en  sorte  qu'en  indiquant,  de  plus,  de  quel  côté 
il  est  placé  par  rapport  au  plan  qni  passe  par  les  trois 
centres,  ce  point  est  absolument  déterminé,  et  ne  peut 
plus  être  confondu  avec  aucun  autre. 

On  voit  qu'en  employant,  pour  déterminer  la  posi- 
tion d'un  point  dans  l'espace,  ses  distances  à  d'autres 
points  connus,  et  dont  le  nombre  est  nécessairement 
trois,  l'on  est  entraîné  dans  des  considérations  qui  ne 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE. 


sont  pas  assez  simples  pour  servir  de  base  à  des  pro- 
cédés d'un  usage  habituel. 

4.  Recherchons  actuellement  quelles  seraient  les 
considérations  auxquelles  on  serait  conduit  si,  au  lieu 
de  rapporter  la  position  d'un  point  à  trois  autres 
points  connus,  on  le  rapportait  à  des  droites  données 
de   position. 

Nous  ferons  observer  auparavant  qu'une  ligne 
droite  ne  doit  jamais  être  considérée  comme  termhiée, 
et  qu'elle  peut  toujours  être  indéfiniment  prolongée 
dans  l'un  et  dans  l'autre  sens. 

Pour  simplifier,  nous  nommerons  successivement  A, 
H,  C,  etc.,  les  droites  que  nous  serons  obligés  d'em- 
ployer. 

Si  de  la  définition  de  la  position  du  point  il  résulte 
qu'il  doive  se  trouver,  par  exemple,  à  i"'^  de  distance 
de  la  première  droite  connue  A,  on  énonce  que  ce 
])oint  est  l'un  de  ceux  de  la  surface  d'un  cylindre  à 
base  circulaire,  dont  l'axe  serait  la  droite  A,  dont  le 
rayon  serait  i"^,  et  qui  serait  indéfiniment  prolongé 
dans  les  deux  sens  de  sa  longueur;  car  tous  les  points 
de  cette  surface  jouissent  de  la  propriété  énoncée  dans 
la  définition,  et  sont  les  seuls  qui  en  jouissent.  Par 
là,  le  point  est  distingué  de  tous  les  points  de  l'espace 
qui  sont  en  dehors  de  la  surface  cylindrique;  il  est 
pareillement  distingué  de  tous  ceux  qui  sont  dans 
l'intérieur  du  cylindre,  et  il  ne  peut  être  confondu 
qu'avec  ceux  de  la  surface  cylindrique,  parmi  lesquels 
on  ne  peut  le  distinguer  qu'au  moyen  de  conditions 
nouvelles. 

Supposons   donc    que    le   point   cherché   doive,   en 


LES    MAITRES    DE    LA    PENSEE    SCIENTIFIQUE. 


outre,  être  placé  à  2™  de  distance  de  la  seconde  ligne 
droite  B  :  on  voit  de  même  que  par  là  on  place  ce 
point  sur  la  surface  d'un  second  cylindre  à  base  circu- 
laire, dont  l'axe  serait  la  ligne  droite  B,  et  dont  le 
rayon  serait  2"^,  mais  avec  tous  les  points  de  laquelle 
il  est  confondu,  si  l'on  ne  considère  que  la  seconde 
condition  seule.  En  réunissant  ces  deux  conditions, 
il  doit  donc  se  trouver  en  même  temps  et  sur  la  pre- 
mière surface  cylindrique  et  sur  la  seconde  :  donc  il 
ne  peut  être  que  l'un  des  poinis  communs  à  ces  deux 
surfaces,  c'est-à-dire  l'un  de  leur  commune  intersec- 
tion. Cette  ligne,  sur  laquelle  doit  se  trouver  le  point, 
participe  de  la  courbure  de  la  surface  du  premier 
cylindre  et  de  la  courbure  de  celle  du  second,  et  est,  en 
général,  du  genre  de  celles  qu'on  appelle  courbes  à 
double  courbure. 

Pour  distinguer  le  point  de  tous  ceux  de  cette  ligne, 
il  faut  une  troisième  condition. 

Supposons,  enfin,  que  la  définition  énonce  que  le 
point  demandé  doive  encore  être  à  3'"  de  distance 
d'une  troisième  ligne  droite   C. 

Cette,  nouvelle  condition  exprime  qu'il  est  un  de 
ceux  de  la  surface  d'un  troisième  cylindre  à  base  cir- 
culaire, dont  la  troisième  ligne  droite  C  serait  l'axe,  et 
qui  aurait  3"^  de  rayon  :  donc,  en  réunissant  les  trois 
conditions,  le  point  cherché  ne  peut  plus  être  qu'un 
de  ceux  qui  sont  communs,  et  à  la  troisième  surface 
cylindrique,  et  à  la  courbe  à  double  courbure,  inter- 
section des  deux  premières.  Or,  cette  courbe  peut,  en 
général,  être  coupée  par  la  troisième  surface  cylin- 
drique en  huit  points;  donc  les  trois  conditions  ré- 
duisent le  point  cherché  à  être  l'un  des  huit  points 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE. 


délerniiiH's,  el  parmi  les({uc]s  on  ne  peut  le  dislinguer 
(|ue  par  quelques  conditions  parliculi«'Tes,  du  genre 
de  celles  dont  nous  avons  donné  un  exemple  dans  le 
cas  des  points. 

On  voit  que  les  considéra  lions  auxquelles  on  est 
conduit  pour  déterminer  la  position  d'un  point  dans 
l'espace,  par  la  connaissance  de  ses  distances  à  trois 
lignes  droites  connues,  sont  encore  bien  moins  simples 
que  celles  auxquelles  donnent  lieu  ses  distances  à 
trois  points,  et  qu'ainsi  elles  peuvent  encore  moins 
servir  de  base  à  des  méthodes  qui  doivent  être  d'un 
service  fréquent. 

5.  Parmi  les  objets  simples  que  la  Géométrie  consi- 
dère, il  faut  remarquer  principalement  :  i®  le  point 
qui  n'a  aucune  dimension;  2°  la  ligne  droite  qui  n'en 
a  qu'une  ;  3®  le  plan  qui  en  a  deux.  Recherchons  s'il  ne 
serait  pas  plus  simple  de  déurminer  la  position  d'un 
point,  par  la  connaissance  de  ses  distances  à  des  plans 
connus,  qu'il  ne  l'tst  d'employer  ses  distances  à  des 
points  ou  à  des  lignes  droites. 

Supposons  donc  qu'il  y  ait  dans  l'espace  des  plans 
non  parallèles,  connus  de  position,  et  que  nous  dési- 
gnerons successivement  par  les  lettres  A,  B,  C,  1),  etc. 

Si,  d'après  la  définition  de  la  position  du  point,  il 
doit  être,  par  exemple,  à  i"^  de  distance  du  premier 
plan  A,  san^  qu'il  soit  exprimé  de  quel  côté  il  doit  être 
placé  par  rapport  à  ce  plan,  on  énonce  qu'il  est  un  de 
ceux  de  deux  plans  parallèles  au  plan  A,  placés  l'un 
d'un  côté  de  ce  plan,  l'autre  de  l'autre,  et  tous  deux  à 
i"^  de  distance  du  premier  :  car  tous  les  points  de  ces 
deux  plans  parallèles  satisfont  à  la  condition  exprimée, 


LES    MAITRES    DE    LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE. 


et  sont,  de  tous  ceux  de  l'espace,  les  seuls  qui  y  satis- 
fassent. 

Pour  distinguer,  parmi  tous  les  points  de  ces  deux 
plans,  celui  dont  on  veut  définir  la  position,  il  faut 
donc  encore  avoir  recours  à  d'autres  conditions. 

Supposons,  en  second  lieu,  que  le  point  cherché 
doive  être  à  2"^  de  distance  du  second  plan  B  :  par  là, 
on  le  place  sur  deux  plans  parallèles  au  plan  I^,  fous 
deux  à  2™  de  distance  de  ce  plan,  l'un  d'un  côlé, 
l'autre  de  l'autre.  Pour  satisfaire  en  même  temps  aux 
deux  conditions,  il  faut  donc  (pi'il  se  trouve,  et  sur 
l'un  des  plans  ])ara11èles  au  plan  A,  et  sur  l'un  des 
deux  plans  parallèles  au  plan  B;  et,  par  conséquent, 
qu'il  soit  l'un  des  points  de  la  commune  intersection 
de  ces  quatre  plans.  Or,  la  commune  intersection  de 
quatre  plans  parallèles  deux  à  deux,  et  de  la  position 
connue,  est  l'assemblage  de  quatre  lignes  droites  éga- 
lement connues  de  position;  donc,  en  considérant  en 
même  temps  ces  deux  conditions,  le  point  n'est  plus 
confondu  avec  tous  ceux  de  l'espace,  ni  même  avec 
tous  ceux  de  quatre  plans,  mais  seulement  avec  ceux 
de  quatre  lignes  droites.  Enfin,  si  le  point  doit  être 
aussi  à  3"^  de  distance  du  troisième  plan  C,  on  exprime 
qu'il  doit  être  l'un  de  ceux  de  deux  autres  plans  paral- 
lèles au  plan  C,  et  placés  de  part  et  d'autre,  par  rap- 
port à  lui,  à  3"^  de  distance.  Ainsi,  en  vertu  des  trois 
conditions,  il  doit  être  en  même  temps,  et  sur  l'un  des 
deux  derniers  plans,  et  sur  l'une  des  quatre  lignes 
droites,  intersections  des  ([uatre  premiers  plans  :  il  ne 
peut  donc  être  que  l'un  des  points  communs,  et  à  l'un 
de  ces  deux  plans  et  à  l'une  des  quatre  droites.  Or, 
chacun  des  deux  plans  ayant  un  point  commun  avec 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE. 


cliacuiio  des  quatre  lignes  droites,  il  y  a  huit  points 

I       (l^iis  l'espace,  (pii  satisfont  à  la  fois  aux  trois  condi- 

I       lions  ;  donc,  par  ces  trois  conditions  réunies,  le  point 

I       demandé  ne  peut  plus  être  que  l'un  des  huit  points 

déterminés,  et  parmi  lesquels  on  ne  peut  le  distinguer 

(ju'au  moyen  de  quelcpies  conditions  particulières. 

Par  exemple,  si,  en  indicpiant  la  distance  au  })re- 
mier  plan  A,  l'on  exprime  aussi  dans  quel  sens,  par 
rapport  à  ce  plan,  la  distance  doit  être  prise;  au  lieu 
de  deux  plans  parallèles  au  ])lan  A,  il  n'y  en  a  plus 
qu'un  qu'il  faille  considérer,  c'est  celui'  qui  est  placé, 
par  rapport  à  lui,  du  coté  vers  lequel  la  distance  doit 
être  mesurée.  De  même,  si  l'on  indique  dans  quel  sens, 
par  rapport  au  second  plan,  la  distance  doit  être  prise, 
on  exclut  la  considération  d'un  des  deux  plans  paral- 
lèles au  second;  et  il  n'y  en  a  plus  qu'un  dont  tous  les 
points  satisfassent  à  la  seconde  condition;  vi  en  réu- 
nissant ces  conditions,  le  point  ne  peut  plus  être  sur 
les  quatre  droites  d'intersection  de  quatre  plans  paral- 
lèles deux  à  deux,  mais  seulement  sur  l'intersection 
de  deux  plans,  c'est-à-dire  sur  une  ligne  droite  connue 
de  position.  Enfin,  si  l'on  indique  aussi  de  quel  côté 
le  point  doit  être  placé  par  rapport  au  troisième  plan, 
de  deux  plans  parallèles  au  troisième  il  n'y  en  aura 
plus  qu'un  dont  tous  les  points  satisfassent  à  la  der- 
nière condition;  et  pour  satisfaire  en  même  temps  à 
ces  trois  conditions,  le  point  devra  se  trouver  à  l'inter- 
section de  ce  troisième  plan  avec  la  droite  unique 
intersection  des  deux  premiers.  11  ne  pourra  donc  plus 
êhe  confondu  avec  aucun  autre  dans  l'espace,  et  il 
sera  par  conséquent  entièrement  déterminé. 

On  voit  donc  que,  quoique,  par  rapport  au  nombre 


.^à 


LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


de  ses  dimensions,  le  plan  soit  un  objet  moins  simple 
que  la  ligne  droite  qui  n'en  a  qu'une,  et  que  le  poin| 
qui  ncn  a  pas,  il  présente  cependant  plus  de  facilité 
que  le  point  et  la  ligne  droite  pour  la  détermination 
d'un  point  dans  l'espace  :  c'est  ce  procédé  que  l'on 
emploie  ordinairement  dans  l'application  de  l'Algèbre 
à  ia  Géom^étrie,  où,  pour  cliercher  la  position  d'un 
point,  on  a  coutume  de  chercher  ses  distances  à  trois 
plans  connus  de  position. 

Mais  dans  la  Géomélriè  descriptive,  qui  a  été  pra- 
tiquée depuis  beaucoup  plus  longtemps,  par  un  beau- 
coup plus  grand  nombre  d'hommes,  et  par  des  hommes 
dont  le  temps  était  précieux,  les  procédés  se  sont 
encore  simplifiés;  et  au  lieu  de  la  considération  de 
trois  plans,  on  est  parvenu,  au  moyen  des  projections, 
à  n'avoir  plus  besoin  explicitement  que  de  celle  de 
deux. 

6.  On  appelle  projection  d'un  point  sur  un  plan,  le 
pied  de  la  perpendiculaire  abaissée  du  point  sur  le 
plan. 

Cela  posé,  si  l'on  a  deux  plans  connus  de  position 
dans  l'espace,  et  si  l'on  donne,  sur  chacun  de  ces  plans, 
la  projection  du  point  dont  on  veut  définir  la  position, 
ce  point  sera  parfaitement  déterminé. 

En  efîet,  si,  par  la  projection  sur  le  premier  plan, 
l'on  conçoit  une  perpendiculaire  à  ce  plan,  il  est  évi- 
dent qu'elle  passera  par  le  point  défini;  de  même  si, 
par  sa  projection  sur  le  second  plan,  l'on  conçoit  une 
perpendiculaire  sur  ce  plan,  elle  passera  de  même  par 
le  point  défini  :  donc  ce  point  sera  en  même  temps  sur 
deux  lignes  droites  connues  de  position  dans  l'espace; 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE. 


donc  il  sera  le  point  unique  de  leur  intersection;  donc 
enfin,  il  sera  parfaitement  déterminé. 

Dans  les  paragraphes  suivants,  on  indiquera  les 
moyens  de  rendre  ce  procédé  d'un  usage  facile,  et  de 
nature  à  être  employé  sur  une  seule  feuille  de  dessin. 

7.  Si  {fig.  i),  de  tous  les  points  d'une  ligne 
droite  indéfinie  Al^,  placée  d'une  manière  quelconque 
dans  l'espace,  l'on  conçoit  des  perpendiculaires 
abaissées  sur  un  plan  LMNO,  donné  de  position,  tous 
les  points  de  rencontre  de  ces  perpendiculaires  avec 
le  plan  seront  dans  une  autre  ligne  droite  indéfinie  ah; 
car  elles  seront  toutes  comprises  dans  le  plan  mené 
par  AB  perpendiculairement  au  plan  LMNO,  et  elles 
ne  pourront  rencontrer  ce  dernier  que  dans  l'inter- 
section commune  des  deux  plans,  qui,  comme  on  sait, 
est  une  ligne  droite. 

La  droite  ab,  qui  passe  ainsi  par  les  projections 
de  tous  les  points  d'une  autre  droite  AB  sur  un 
plan  LMNO,  est  ce  qu'on  appelle  la  projection  de  la 
droite  AB  sur  ce  plan. 

Comme  deux  points  suffisent  pour  déterminer  la 
position  d'une  ligne  droite;  pour  construire  la  pro- 
jeclioii  d'une  droite,  il  suUit  de  construire  celle  de 
deux  de  ses  points,  et  la  droite  menée  par  les  projec- 
tions de  ces  points  sera  la  projection  demandée. 

Il  suit  de  là  que,  si  la  droite  proposée  est  elle-même 
perpendiculaire  au  plan  de  projection,  sa  projection 
se  réduira  à  un  seul  point,  qui  sera  celui  de  sa  rencontre 
avec  le  plan. 

Etant  données  {fig.  2)  sur  deux  plans  non  parallèles 
LMNO,  LMPQ  les  projections  at,  a'  h'  d'une  même 


lA  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

droite  indéfinie  AB,  cette  droite  est  déterminée  :  car 
si,  par  l'une  des  projections  ab^  l'on  conçoit  un  plan 
perpendiculaire  à  LMNO,  ce  plan,  connu  de  position, 
passera  nécessairement  i>ar  la  droite  AB;  de  même 
si,  par  l'autre  projection  a'  />',  l'oji  conçoit  un  plan 
perpendiculaire  à  LMPQ,  ce  plan,  cojinii  de  position, 
passera  par  la  droite  AB.  La  position  de;  celte  droite, 
qui  se  trouve  en  même  temps  sur  deux  plans  connus, 
et  par  conséquent  à  leur  commune  intersection,  est 
donc  absolument  déterminée. 

8.  Ce  que  nous  venons  de  dire  est  indépendant  de 
la  position  des  plans  de  projection,  et  a  lieu  également, 
quel  que  soit  l'angle  que  ces  deux  plans  fassent  entre 
eux.  Mais  si  l'angle  que  forment  les  deux  plans  de  pro- 
jection est  très  obtus,  l'angle  que  forment  entre  eux 
ceux  qui  leur  sont  perpendiculaires  est  très  aigu;  et 
dans  la  pratique,  de  petites  erreurs  pourraient  en 
apporter  de  très  grandes  dans  la  détermination  de  la 
position  de  la  droite.  Pour  éviter  cette  cause  d'inexac- 
titude, à  moins  qu'on  n'en  soit  détourné  par  quelques 
considérations  qui  présentent  de  plus  grandes  faci- 
lités, on  fait  toujours  en  sorte  que  les  plans  de  pro- 
jection soient  perpendiculaires  entre  eux.  De  plus, 
comme  la  plupart  des  artistes  qui  font  usage  de  la 
méthode  des  projections  sont  très  familiarisés  avec 
la  position  d'un  ])lan  horizontal  et  la  direction  du  fd  à 
plomb,  ils  ont  coutume  de  supposer  que,  des  deux 
plans  de  projection,  l'un  soit  horizontal  et  l'autre 
vertical. 

La  néci  ssité  de  faire  en  sorte  que  dans  les  dessins  les 
deux  projections  soient  sur  une  même  feuille,  et  que 


GEOMETRIE  DESCRIPTIVE. 


l4  LES   MAITRES   DE  LA  PENSEE  SCIENTIFIQUE. 

dans  les  opérations  en  grand  elles  soient  sur  une  même 
aire,  a  encore  déterminé  les  artistes  à  concevoir  que  le 
plan  vertical  ait  tourné  autour  de  son  intersection  avec 
le  plan  horizontal,  comme  charnière,  pour  s'abattre 
sur  le  plan  horizontal,  et  ne  former  avec  lui  qu'un  seul 
et  même  plan,  et  à  construire  leurs  projections  dans 
cet  état. 

Ainsi,  la  projection  verticale  est  toujours  tracée  de 
fait  sur  un  plan  horizontal,  et  il  faut  perpétuellement 
concevoir  qu'elle  soit  dressée  et  remise  en  place,  au 
moyen  d'un  quart  de  révolution  autour  de  l'inter- 
section du  plan  horizontal  avec  le  plan  vertical.  Pour 
cela,  il  faut  que  cette  intersection  soit  tracée  d'une 
manière  très  visible  sur  le  dessin. 

Ainsi,  dans  la  figure  2,  la  projection  a' h'  de  la 
droite  AB  ne  s'exécute  pas  sur  un  plan  qui  soit  réel- 
lement vertical  :  on  conçoit  que  ce  plan  ait  tourné 
autour  de  la  droite  LM  pour  s'appliquer  en  LMP'Q';  et 
c'est  dans  cette  position  du  plan  qu'on  exécute  la  pro- 
jection verticale  a'h' . 

Indépendamment  des  facilités  d'exécution  que  pré- 
sente cette  disposition,  elle  a  encore  l'avantage 
d'abréger  le  travail  des  projections.  En  elTet,  suppo- 
sons que  les  points  a,  a'  soient  les  projections  horizon- 
tale et  verticale  du  point  A,  le  plan  mené  par  les 
droites  Acr,  Ka'  sera  en  même  temps  perpendicu- 
laire aux  deux  plans  de  projection,  puisqu'il  passe  par 
des  droites  qui  leur  sont  perpendiculaires;  il  sera  donc 
aussi  perpendiculaire  à  leur  commune  intersection  LM  ; 
et  les  droites  aC,  a'C,  suivant  lesquelles  il  coupe  ces 
deux  plans,  seront  elles-mêmes  perpendiculaires  à  LM. 
Or,  lorsque  le  plan  vertical  tourne  autour  de  L\*i 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  I  *> 


comme  chnniièrc,  la  droite  a'C  ne  cesse  pas,  dans  ce 
Miouvement,  d'être  perpendiculaire  à  LM;  et  elle  iiù 
ist  encore  perpendiculaire  lorsque,  le  plan  vertical 
étant  abattu,  elle  a  pris  la  position  Ca\  Donc  les  deux 
droites  aC,  Ca\  passant  toutes  deux  par  le  point  C, 
et  étant  toutes  deux  perpendiculaires  à  LM,  sont  dans 
le  prolongement  l'une  de  l'autre;  il  en  est  de  môme 
des  droil>-s  hD,  Bb\  par  rapport  à  tout  autre  point 
comme  B.  D'où  il  suit  que,  si  l'on  a  la  projeciion 
horizontale  d'un  point,  la  projection  de  ce  même  point 
sur  le  plan  vertical,  supposé  abattu,  sera  dans  la 
droite  menée  par  la  projection  horizontale  perpendi- 
culairement à  l'intersection  LM  des  deux  plans  de 
projection,  et  réciproquement. 

Ce  résultat  est  d'un  usage  très  fréquent  dans  la  pra- 
ti(nip. 

9.  Jusqu'à  présent,  nous  avons  regardé  la  ligne 
droite  AB  {fîg.  i)  comme  indéfmie,  et  alors  nous 
n'avions  à  nous  occuper  que  de  sa  direction;  mais  il 
peut  se  faire  que  cette  droite  soit  considérée  conim. 
terminée  par  deux  de  sts  points  Ay  B;  et  alors  on  peut 
de  plus  avoir  besoin  de  connaître  sa  grandeur.  Nous 
allons  voir  comment  on  peut  la  déduire  de  la  connais- 
sance de  ses  deux  prf éjections. 

Lorsqu'une  droite  est  parallèle  à  un  d'  s  deux  plans 
sur  lesquels  elle  est  projetée,  sa  longueur  est  égale  à 
celle  de  sa  projection  sur  ce  plan;  car  la  droite  et  sa 
projection,  étant  toutes  deux  terminées  à  deux  per- 
pendiculaires au  plan  de  projection,  sont  parallèles 
entre  elles  et  comprises  entre  parallèles.  Ainsi,  dans 
ce  cas  particulier,  la  projection  étant  donnée,  la  ion- 


iC  LES    MAITRES    DE   LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

gueur  de  la  droite  qui  lui  est  égale  est  aussi  donnée. 

On  est  assuré  qu'une  droite  est  parallèle  à  un  des 
deux  plans  de  projcclion,  lorsque  sa  projection  sur 
l'autre  est  parallèle  à  l'intersection  de  ces  plans. 

Si  la  droite  est  en  même  temps  oblique  aux  deux 
plans,  sa  longueur  est  plus  grande  que  celle  de  chacune 
de  ses  projections;  mais  elle  peut  en  être  déduite  par 
une  construction  très  simple. 

Soit  AIj  {fig.  2)  la  ligne  droite,  dont  les  deux  pro- 
jections «6,  a'h'  soient  données,  et  dont  il  faille  trouver 
la  longueur;  si,  par  une  de  ses  extrémités  A,  et  dans 
le  plan  vertical  qui  passe  par  la  droite,  on  conçoit 
une  horizontale  AE,  prolongée  jusqu'à  ce  qu'elle  ren- 
contre en  E  la  verticale  abaissée  par  l'autre  extrémité, 
on  formera  un  triangle  rectangle  AEB,  qu'il  s'agit  de 
construire  pour  avoir  la  longueur  de  la  droite  AB,  qui 
en  est  l'hypoténuse.  Or,  dans  ce  triangle,  indépen- 
damment de  l'angle  droit,  on  connaît  le  côté  AE,  qui 
est  égal  à  la  projection  donnée  ah.  De  plus,  si  dans  le 
plan  vertical  on  mène  par  le  point  a'  une  horizon- 
tale «/<?,  qui  sera  la  projection  de  AE,  elle  coupera 
la  verticale  //D  en  un  point  e,  cjui  sera  la  projection 
du  point  E.  Ainsi,  h'e  sera  la  projection  verticale 
de  BE,  et  sera  par  conséquent  de  même  longueur 
qu'elle.  Donc,  connaissant  les  deux  côtés  de  l'angle 
droit,  il  sera  facile  de  construire  le  triangle,  dont 
l'hypoténuse  donnera  la  longueur  de  AB. 

La  ligure  2,  étant  en  perspective,  n'a  aucun  ra})port 
avec  les  constructions  de  la  méthodd  des  projections  : 
nous  allons  donner  ici  la  construction  de  cette  pre- 
mière question  dans  toute  sa  simplicité. 

La  droite  LM  {fig.  3)  étant  supposée  l'intersection 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  I7 

des  deux  plans  de  projection,  et  les  droites  ab,  a"b" 
étant  les  projections  données  d'une  ligne  droite;  pour 
trouver  la  longueur  de  cette  droite,  par  le  point  a" 
on  mènera  Thorizontale  indéfinie  lie,  qui  coupera 
la  droite  bb"  en  un  point  e,  et  sur  laquelle,  à  i)arlir  de 
ce  point,  on  portera  ab  de  e  en  II.  On  mènera  l'hypo- 
ténuse II!/",  et  la  longueur  de  cette  hypoténuse  sera 
celle  de  la  droite  demandée. 

Comme  les  deux  plans  de  projection  sont  rectangu- 
laires, l'opération  que  l'on  vient  de  faire  sur  un  de  ces 
plans  pouvait  être  faite  sur  l'autre,  et  aurait  donné  le 
même  résultat. 

D'après  ce  qui  précède,  on  voit  que  si  l'on  a  les  deux 
projections  d'un  corps  terminé  par  des  faces  planes, 
par  des  arêtes  rectilignes,  et  par  des  sommets  d'angles 
Solides,  projections  qui  se  réduisent  aux  systèmes  de 
celles  des  arêtes  rectilignes,  il  sera  facile  d'en  conclure 
la  longueur  de  telle  de  ses  dimensiorfs  qu'on  voudra  : 
car,  ou  cette  dimension  sera  parallèle  à  un  des  deux 
plans  de  projection,  ou  elle  sera  en  même  temps 
oblique  aux  deux;  dans  le  premier  cas,  la  longueur 
demandée  de  la  dimension  sera  égale  à  sa  projection  : 
dans  le  second,  on  la  déduira  de  ces  deux  projections 
par  le  procédé  cpie  nous  venons  de  décrire. 

10.  Ce  serait  ici  le  lieu  d'indiquer  la  manière  dont  se 
construisent  les  projections  des  solides  terminés  par 
des  plans  et  des  arêtes  rectilignes;  mais  il  n'y  a  pour 
cette  opération  aucune  règle  générale  :  on  sent  en 
effet  que,  selon  la  manière  dont  la  position  des  som- 
mets des  angles  d'un  solide  est  définie,  la  construction 
de  leurs  projections  peut  être  plus  ou  moins  facile,  et 

MOXGE.   —   I.  2 


8  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


que  la  nature  de  l'opération  doit  dépendre  de  celle  de 
la  définilion.  Il  en  est  précisément  de  cet  objet  comme 
de  l'Algèbre,  dans  laquelle  il  n'y  a  aucun  procédé 
général  pour  mettre  un  problème  en  équations.  Dans 
chaque  cas  particulier,  la  marche  dépend  de  la  ma- 
nière dont  la  relation  entre  les  quantités  données  et 
celles  qui  sont  inconnues  est  exprimée;  et  ce  n'est  que 
par  des  exemples  variés  que  l'on  peut  accoutumer  les 
commençants  à  saisir  ces  relations  et  à  les  écrire  par 
des  équations.  Il  en  est  de  même  pour  la  Géométrie 
descriptive.  C'est  par  des  exemples  nombreux  et  par 
l'usage  de  la  règle  et  du  compas  dans  des  salles  d'exer- 
cice, que  l'on  peut  acquérir  l'habitude  des  construc- 
tions, et  que  l'on  s'accoutume  au  choix  des  méthodes 
les  plus  simples  et  les  plus  élégantes,  dans  chaque  cas 
particulier.  Mais  aussi,  de  même  qu'en  Analyse, 
lorsqu'un  problème  est  mis  en  équations,  il  existe  des 
procédés  pour  traiter  ces  équations,  et  pour  en  déduire 
les  valeurs  de  chaque  inconnue;  de  nnême  aussi,  dans 
la  Géométrie  descriptive,  lorsque  les  projec lions  sont 
faites,  il  existe  des  méthodes  générales  pour  cons- 
truire tout  ce  qui  résulte  de  la  forme  et  de  la  position 
respective  des  corps. 

Ce  n'est  pas  sans  objet  que  nous  comparons  ici  la 
Géométrie  descriptive  à  l'Algèbre;  ces  deux  sciences 
ont  les  rapports  les  plus  intimes.  Il  n'y  a  aucune  cons- 
truction de  Géométrie  descriptive,  qui  ne  puisse  être 
traduite  en  Analyse;  et  lorsque  les  questions  ne  com- 
portent pas  plus  de  trois  inconnues,  chaque  opération 
analytique  peut  être  regardée  comme  l'écriture  d'un 
spectacle  en  Géométrie. 

Il  serait  à  désirer   que   ces   deux  sciences   lussent 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  f() 

cultivées  ensemble  :  la  Géométrie  descriptive  porterait 
dans  les  opérations  analytiques  les  plus  compliquées 
l'évidence  qui  est  son  caractère,  et,  à  son  tour,  l'Ana- 
lyse porterait  dans  la  Géométrie  la  généralité  qui  lui 
est    propre. 

11.  La  convention,  qui  sert  de  base  à  la  méthode  des 
projections,  est  propre  à  exprimer  la  position  d'un 
]H)int  dans  l'espace,  à  exprimer  celle  d'une  ligne  droite 
indéfinie  ou  terminée,  et  par  conséquent  à  représenter 
la  forme  et  la  position  d'un  corps  terminé  par  des  faces 
planes,  par  des  arêtes  rectilignes,  et  par  des  sommets 
d'angles  solides;  parce  que,  dans  ce  cas,  le  corps  est 
entièrement  connu,  quand  on  connaît  la  position  de 
toutes  ses  arêtes  et  celle  des  sommets  de  tous  ses 
angles.  Mais  si  le  corps  était  terminé,  ou  par  une  sur- 
face courbe  unique,  et  dont  tous  les  points  fussent 
assujétis  à  une  même  loi,  comme  dans  le  cas  de  la 
sphère,  ou  par  l'assemblage  discontinu  de  plusieurs 
parties  de  surfaces  courbes  différentes,  comme  dans 
le  cas  d'un  corps  façonné  sur  le  tour;  cette  convention 
non  seulement  serait  incommode,  impraticable,  et 
n'aurait  pas  l'avantage  de  faire  image,  mais  encore 
elle  manquerait  de  fécondité  et  elle  serait  insuffi- 
santes 

D'abord,  il  est  facile  de  voir  que  la  convention  que 
nous  avons  faite  serait  incommode,  et  même  impra- 
ticable, si  elle  était  seule;  car,  pour  exprimer  la  posi- 
tion de  tous  les  points  d'une  surface  courbe,  il  faudrait 
non  seulement  que  chacun  d'eux  fût  indiqué  par  sa 
projection  horizontale  et  par  sa  projection  verticale, 
mais  encore  que  les  deux  projections  d'un  même  point 


20  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

fussent  liées  entre  elles,  afin  qu'on  ne  fût  pas  exposé 
à  combiner  la  projection  horizontale  d'un  certain 
point  avec  la  projection  verticale  d'un  autre;  et  la 
manière  la  plus  simple  de  lier  entre  elles  ces  deux 
projections  étant  de  les  joindre  par  une  même  droite 
jxrpcndiculaire  à  la  ligne  d'intersection  des  deux 
])lans  de  projections,  on  surchargerait  les  dessins  d'un 
nombre  prodigieux  de  lignes,  qui  y  jetteraient  une  con- 
fusion d'autant  plus  grande  qu'on  voudrait  approcher 
davantage  de  l'exactitude.  Nous  allons  faire  voir 
ensuite  que  cette  méthode  serait  insuffisante,  et 
qu'elle  manquerait  de  la  fécondité  nécessaire. 

Parmi  le  nombre  infini  de  surfaces  courbes  diffé- 
rentes, il  en  existe  quelques-unes  qui  ne  s'étendent 
(|ue  dans  une  partie  finie  et  circonscrite  de  l'espace,  et 
dont  les  projections  ont  une  étendue  limitée  dans 
toutes  les  directions;  celle  de  la  sphère,  par  exemple, 
est  dans  ce  cas.  L'étendue  de  sa  projection  sur  un  plan 
se  réduit  à  celle  d'un  cercle  de  même  rayon  que  la 
sphère;  et  l'on  peut  concevoir  que  le  plan  sur  lequel 
ou  doit  en  faire  la  projection  ait  des  dimensions  assez 
grandes  pour  la  recevoir.  Mais  toutes  les  surfaces 
cylindriques  sont  indéfinies  dans  une  certaine  direc- 
tion, comme  la  droite  qui  leur  sert  de  génératrice.  Le 
plan  lui-même,  qui  est  la  plus  simple  des  surfaces,  est 
indéfini  dans  deux  sens.  Enfin,  il  existe  un  grand 
nombre  de  surfaces  dont  les  nappes  multipliées 
.s'étendent  en  même  temps  dans  toutes  les  régions 
de  l'espace.  Or,  les  plans  sur  lesquels  on  exécute  les 
projections  ont  nécessairement  une  étendue  limitée. 
Si  donc  on  n'avait  d'autre  moyen  pour  faire  connaître 
la  nature  d'une  surface  courbe  que  les  deux  projec- 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  21 

tions  de  chacun  des  points  par  lesquels  elle  passe,  ce 
moyen  ne  serait  applicable  qu'à  ceux  des  points  de  la 
surface,  qui  correspondraient  à  l'étendue  des  plans 
de  ])roiections;  tous  ceux  qui  seraient  au  delà  ne 
]tourraient  être  ni  exprimés  ni  connus  :  ainsi,  la  mé- 
lliode  serait  insuilisante.  Enlin,  elle  manquerait  de 
fécondité,  parce  qu'on  ne  pourrait  en  déduire  rien  de 
ce  qui  serait  relatif  aux  plans  tangents  de  la  surface,  à 
SIS  normales,  à  ses  deux  courbures  en  chaque  point, 
;i  ses  lignes  d'inflexion,  à  ses  arêtes  de  rebroussement, 
à  ses  lignes  multiples,  à  ses  points  multiples,  à  toutes 
les  affections  enfin  qu'il  est  nécessaire  de  considérer, 
dès  qu'on  veut  opérer  sur  une  surface  courbe. 

Il  a  donc  fallu  avoir  recours  à  une  convention  nou- 
velle qui  fût  compatible  avec  la  première,  et  qui  pût 
la  suppléer  partout  où  elle  aurait  été  insufTisante.  C'est 
cette   convention  nouvelle   que  nous  allons  exposer. 

12.  Il  n'y  a  aucune  surface  courbe  qui  ne  puisse 
être  regardée  comme  engendrée  par  le  mouvement 
d'une  ligne  courbe,  ou  constante  de  forme  lorsqu'elle 
change  de  position,  ou  variable  en  même  temps  et  de 
forme  et  de  position  dans  l'espace.  Comme  cette  pro- 
position pourrait  être  difficile  à  comprendre  à  cause 
de  sa  généralité,  nous  allons  l'expliquer  sur  quel- 
ques-uns des  exemples  avec  lesquels  nous  sommes 
déjà  familiarisés. 

Lt  s  surfaces  cylindriques  peuvent  cire  engendrées 
dt  deux  manières  principales;  ou  par  le  mouvement 
d'une  ligne  droite  qui  reste  toujours  parallèle  à  une 
droite  donnée  pendant  qu'elle  se  meut,  en  s'appuyant 
toujours  sur  une  courbe  donnée,  ou  par  le  mouvement 


Îi2  LES   MAITRES  DE  LA  PENSEE  SCIENTIFIQUE. 

de  la  courbe  qui  servait  de  conductrice  dans  le  pre- 
mier cas,  et  qui  se  meut  de  manière  que,  s'appuyant 
toujours  par  le  même  point  sur  une  droite  donnée, 
tous  ses  autres  points  décrivent  des  lignes  parallèles 
à  cette  droite.  Dans  l'une  et  l'autre  de  ces  deux  géné- 
rations, la  ligne  génératrice,  qui  est  une  droite  dans  le 
premier  cas,  et  une  courbe  quelconque  dans  le  second, 
est  constante  de  forme  :  elle  ne  fait  que  changer  de 
position  dans  l'espace. 

Les  surfaces  coniques  ont  de  même  deux  généra- 
tions principales. 

On  peut  d'abord  les  regarder  comme  engendrées 
par  une  droite  indéfinie  qui,  étant  assujétie  à  passer 
toujours  par  un  point  donné,  se  meut  de  manière 
qu'elle  s'appuie  constamment  sur  une  courbe  donnée 
qui  la  dirige  dans  son  mouvement.  Le  point  unique, 
par  lequel  passe  toujours  la  droite,  est  le  centre  de  la 
surface;  c'est  improprement  qu'on  lui  a  donné  le  nom 
de  sommet.  Dans  cette  génération,  la  ligne  génératrice 
est  encore  constante  de  forme;  elle  ne  cesse  jamais 
d'être  une  ligne  droite. 

On  peut  ensuite  engendrer  les  surfaces  coniques 
d'une  autre  manière,  que,  pour  plus  de  simplicité, 
nous  n'appliquerons  ici  qu'au  cas  de  celles  qui  sont 
à  bases  circulaires.  Ces  surfaces  peuvent  être  regardées 
comme  parcourues  par  la  circonférence  d'un  cercle 
qui  se  meut  de  manière  que  son  plan  restant  toujours 
parallèle  à  lui-même,  et  son  centre  se  trouvant  toujours 
sur  la  droite  dirigée  au  sommet,  son  rayon,  dans 
chaque  instant  du  mouvement,  soit  proportionnel  à  la 
distance  de  son  centre  au  sommet.  On  voit  que  si, 
dans  son  mouvement,  le  plan  du  cercle  tend  à  s'appro- 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  a3 

cher  du  sommet  de  la  surface,  le  rayon  du  cercle  décroît 
pour  devenir  nul  lorsque  le  plan  passe  par  le  sommet, 
et  que  ce  rayon  change  de  sens  pour  croître  ensuite 
indéfiniment,  lorsque  le  plan,  après  avoir  passé  par  le 
sommet,  s'en  écarte  de  plus  en  plus.  Dans  cette  se- 
conde génération,  non  seulement  la  circonférence  du 
cercle,  qui  est  la  courbe  génératrice,  change  de  position, 
elle  change  encore  de  forme  à  chaque  instant  de  son 
mouvement,  puisqu'elle  change  de  rayon,  et,  par  con- 
séquent, de  courbure  et  d'étendue. 

Citons  enfin  un  troisième  exemple. 

Une  surface  de  révolution  peut  être  engendrée  par 
le  mouvement  d'une  courbe  plane,  qui  tourne  autour 
d'une  ligne  droite  placée  d'une  manière  quelconque 
dans  son  plan.  Dans  cette  manière  de  la  considérer, 
sa  courbe  génératrice  est  constante  de  forme;  elle  est 
seulement  variable  de  position.  Mais  aussi  on  peut  la 
regarder  comme  engendrée  par  la  circonférence  d'un 
cercle  qui  se  meut  de  manière  que,  son  centre  étant 
toujours  sur  l'axe,  et  son  plan  étant  toujours  perpen- 
diculaire à  cet  axe,  son  rayon  soit  à  clia(iue  instant 
égal  à  la  distance  du  point,  où  le  plan  du  cercle  coupe 
l'axe,  à  celui  où  il  coupe  une  courbe  quelconque  donnée 
dans  l'espace.  Alors  la  courbe  génératrice  change  en 
même  temps  et  de  forme  et  de  position. 

Ces  trois  exemples  doivent  sullire  i)our  faire  com- 
prendre que  toutes  les  surfaces  courbes  peuvent  être 
engendrées  par  le  mouvement  de  certaines  lignes 
courbes,  et  qu'il  n'y  en  a  aucune  dont  la  forme  et  la 
position  ne  puissent  être  entièrement  déterminées  par 
la  définition  exacte  et  complète  de  sa  génération.  C'est 
cette   nouvelle    considération    qui   forme    le    complé- 


•24  LES    MAITRES    DE    LA    PENSEE    SCIENTIFIQUE. 


ment  de  la  méthode  des  projections.  Nous  aurons 
souvent  occasion,  par  la  suite,  de  nous  assurer  et  de 
sa  simplicité  et  de  sa  fécondité. 

Ce  n'est  donc  pas  en  donnant  les  projections  des 
points  individuels,  par  lesquels  passe  une  surface 
courbe,  que  l'on  en  détermine  la  forme  et  la  position, 
mais  en  mettant  à  portée  de  construire  pour  un  point 
quelconque  la  courbe  génératrice,  suivant  la  forme 
et  la  position  qu'elle  doit  avoir  en  passant  par  ce 
point.  Sur  quoi  il  faut  observer  :  i°  que  chaque  sur- 
face courbe  pouvant  être  engendrée  d'un  nombre 
infini  de  manières  différentes,  il  est  de  l'adresse  et  de 
la  sagacité  de  celui  qui  opère  de  choisir,  parmi  toutes 
les  générations  possibles,  celle  qui  emploie  la  courbe 
la  plus  simple  et  qui  exige  les  considérations  les  moins 
pénibles;  2°  qu'un  long  usage  a  appris  qu'au  lieu  de  ne 
considérer  pour  chaque  surface  courbe  qu'une  seule 
de  ses  générations,  ce  qui  exigerait  l'étude  de  la  loi  du 
mouvement  et  de  celle  du  changement  de  forme  de 
sa  génération,  il  est  souvent  plus  simple  de  considérer 
en  même  temps  deux  génératrices  différentes,  et  d'indi- 
quer pour  chaque  point  la  construction  des  deux 
courbes  génératrices. 

Ainsi,  dans  la  Géométrie  descriptive,  pour  exprimer 
la  forme  et  la  position  d'une  surface  courbe,  il  sulht, 
pour  un  point  quelconque  de  cette  surface,  et  dont  une 
des  projections  peut  être  prise  à  volonté,  de  donner 
la  manière  de  construire  les  projections  horizontale  et 
verticale  de  deux  génératrices  dillérentes  qui  passent 
par  ce  point. 


13.  Appliquons    actuellement    ces    général 


ités     au 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE. 


olan,  qui,  do  toutes  les  surfaces,-  est  la  plus  simple, 
t't  celle  dont  l'emploi  est  le  plus  fréquent. 

Le  plan  est  engendré  par  une  j)remièrc  droite  donnée 
d'abord  de  position,  et  qui  se  meut  de  manière  que 
!ous  ses  points  décrivent  des  droiUs  pnrallMf  s  à  une 
seconde  droite  donnée.  Si  la  seconde  droite  est  elle- 
même  dans  le  plan  que  l'on  considère,  on  peut  dire 
aussi  que  ce  plan  est  engendré  par  la  seconde  droite, 
(|ui  se  meut  de  manière  que  tous  ses  pitints  décrivent 
«les  droites  parallèles  à  la  première. 

On  a  donc  l'idée  de  la  position  d'un  plan  par  la  consi- 
dération de  deux  ligiîcs  droites,  dont  chacune  peut  être 
regardée  comme  sa  génératrice.  La  position  de  ces 
deux  droites  dans  le  plian  qu'elles  peuvent  engendrer 
est  absolument  iiidifTérente  :  il  ne  s'agit  donc,  pour  la 
méthode  des  jjrojections,  que  de  choisir  celles  qui 
(•\i<.Tent  les  constructions  les  plus  simples.  C'est  pour 
cela  (jue,  dans  la  Géométrie  descriptive,  on  indique 
la  ]>osition  d'un  plan,  en  donnant  les  deux  droites 
-uivant  lesquelles  il  coupe  les  plans  de  projection.  Il 
est  facile  de  reconnaître  que  ces  deux  droites  doivent 
rencontrer  en  un  môme  point  l'intersection  des  deux 
plans.de  projections,  et  que,  par  conséquent,  ce  point 
est  celui  où  elles  se  rencontrent  elles-mêmes. 

Comme  il  arrivera  très  fréquemment  que  nous 
ayons  des  plans  à  considérer,  pour  abréger  le  langage, 
nous  donnerons  le  nom  de  traces  aux  droites  selon 
lesquelles  chacun  d'eux  coupera  les  plans  de  projec- 
tions, et  qui  serviront  à  indiquer  sa  position. 

14.  Ces  préliminaires  étant  posés,  nous  allons  passer 
aux  solutions  de  plusieurs  questions  successives,  qui 


•26  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

rempliront  le  double  objet  de  nous  exercfr  à  la  mé- 
thode des  projections,  et  de  nous  procurer  les  moyens 
de  faire  ensuite  de  nouveaux  progrès  dans  la  Géo- 
métrie descriptive. 

Première  question.  —  Etant  donnés  (fig.  4)  un 
])oint  dont  Jcs  projections  soient  1),  d^  et  une  droite 
dont  les  projections  soient  AB  et  ah^  construire  les 
projections  d'une  seconde  droite  iTienéc  par  le  point 
donné  parallèîement  à  la  première  ? 

Solution.  —  Les  deux  projections  horizontales  de 
la  droite  donnée  et  de  la  droile  cherchée  doivent 
être  parallèles  entre  elJcs;  car  ehes  sont  les  intersec- 
tions de  deux  plans  verticaux  parallèles,  par  un  même 
plan.  Il  en  est  de  même  des  projections  verticales  des 
mêmes  droites.  De  plus,  la  droite  demandée  devant 
passer  par  le  point  donné,  ses  projections  doivent 
pass.or  respectivement  par  celles  du  même  point.  Donc, 
si  par  le  point  D  on  mène  EF  parallèle  à  AB,  et  si  par 
le  point  cl  on  mène  ef  parallèle  à  «6,  les  droites  EF 
et  ef  seront  les  projections  demandées. 

15.  Seconde  question.  —  Étant  donnés  (/îg.  5) 
un  plan  dont  les  deux  traces  soient  AB,  BC,  et  un  point 
dont  les  projections  soient  G,  g,  construire  les  traces 
d'un  second  plan  mené  par  le  point  donné  parallèle- 
ment au  premier  ? 

Solution.  —  Les  traces  du  plan  demandé  doivent 
être  parallèles  aux  traces  respectives  du  plan  donné, 
puisque  ces  traces,  considérées  deux  à  deux,  sont  les 
intersections  de  deux  plans  parallèles,  par  un  même 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE.  IJ 


plan.  Il  ne  reste  donc?  plus  à  trouver,  pour  chacune 
irelk'S,  qu'un  seul  des  points  par  lesquels  elle  doit 
passer.  Pour  cela,  par  le  point  donné,  concevons  une 
droite  horizontale  qui  soit  dans  le  plan  cherché;  cette 
droite  sera  parallèle  à  la  trace  AB,  et  elle  coupera  \o 
plan  vertical  en  un  point,  qui  sera  un  de  ceux  de  la 
trace  du  plan  cherché  sur  le  vertical,  et  Ton  aura  ses 
deux  projections  en  menant  par  le  point  g  l'horizon- 
tale indéfinie  gF,  et  par  le  point  G  la  droite  GI,  paral- 
lèle à  A13.  Si  l'on  prolonge  GI  jusqu'à  ce  qu'elle  ren- 
contre l'intersection  LM  des  deux  plans  de  projection 
«  n  un  point  I,  ce  point  sera  la  projection  horizontale 
de  l'intersection  de  la  droite  horizontale  avec  le  plan 
vertical.  Donc  ce  point  d'intersection  se  trouvera 
sur  la  Verticale  IF,  menée  par  le  point  I.  Mais  il  doit 
se  trouver  aussi  sur  gF;  donc  il  se  trouvera  au  point  F 
d'intersection  de  ces  deux  dernières  droites.  Donc 
enfin,  si  par  le  point  F  on  mène  une  parallèle  à  BC, 
elle  sera,  sur  le  plan  vertical,  la  trace  du  plan  cherché; 
et  si,  après  avoir  prolongé  cette  trace  jusqu'à  ce  qu'elle 
rencontre  LM  en  un  point  E,  on  mène  ED  parallèle 
à  AB,  on  aura  la  trace  du  même  plan  sur  le  plan 
horizontal. 

Au  lieu  de  concevoir  sur  le  i)lan  cherché  une  droite 
horizontale,  on  aurait  pu  concevoir  une  parallèle  au 
plan  vertical,  ce  qui,  par  un  raisonnement  absolument 
semblable,  aurait  donné  la  construction  suivante  : 

On  mènera  par  le  point  G  et  parallèlement  à  LM 
la  droite  indéfinie  GD  ;  par  le  point  g  on  mènera  gH 
parallèle  à  CB,  et  on  la  prolongera  jusqu'à  ce  qu'elle 
coupe  LM  en  un  point  H,  par  lequel  on  mène  HD  per- 
pendiculaire à  LM  :  cette  dernière  coupera  GD  en  un 


'28  LES   MAITRES    DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

point  D,  par  lequel,  si  l'on  mône  une  parallèle  à  AB, 
on  aura  une  des  traces  du  plan  demandé;  et  si,  après 
avoir  prolongé  cette  trace  jusqu'à  ce  qu'elle  ren- 
contre LM  en  un  point  E,  on  mène  EF  parallèle  à  BC, 
on  aura  la  trace  sur  le  plan  vertical. 

16.  TiioisiiïME  QUESTION.  —  Etant  donnes  [fig.  6) 
un  plan  dont  les  deux  traces  soient  AB,  BC,  et  un 
point  dont  les  deux  projections  soient  D,  t/,  cons- 
truire :  1°  les  projections  de  la  droite  abaissée  perpen- 
diculairement du  point  sur  le  plan;  2^  celle  du  point 
de  renconlre  de  la  droite  et  du  plan  ? 

Solution.  —  Les  perpendiculaires  DG,  dg,  abaissées 
des  points  D  et  d  sur  les  traces  respectives  du  plan, 
seront  les  projections  indéfinies  de  la  droite  demandée; 
car  si  par  la  perpendiculaire  on  conçoit  un  plan  ver- 
tical, ce  plan  coupera  le  plan  horizontal  et  Je  plan 
donné  en  deux  droites,  qui  seront,  l'une  et  l'autre, 
perpendiculaires  à  la  commune  intersection  AB  de  ces 
deux  plans  :  or,  la  première  ô,e  ces  droites  étant  la 
projection  du  plan  vertical,  est  aussi  celle  de  la  per- 
pendiculaire qu'il  renferme;  donc  Ja  projection  de 
cette  perpendiculaire  doit:  passer  par  le  point  D,  et 
être  perpendiculaire  à  AB. 

La  même  démonstration  a  lieu  pour  la  projection 
verticale. 

Quant  au  point  de  rencontre  de  la  perpendiculaire 
et  du  plan,  il  est  évident  qu'il  doit  se  trouver  sur 
l'intersection  de  ce  plan  avec  le  plan  vertical  mené 
par  la  perpendiculaire,  intersection  qui  est  projetée 
indéfiniment  sur  EF.  Si  l'on  avait  la  projection  ver- 


^ à 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE. 


29 


3o  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


ticale  fe  de  cette  intersection,  elle  contiendrait  celle 
du  point  demandé;  et  parce  que  ce  point  doit  aussi 
être  projeté  sur  la  droite  dg^  il  se  trouverait  à  l'inter- 
section g  des  deux  droites  je  et  dg.  Il  ne  reste  donc 
plus  à  trouver  que  la  droite  je  :  or,  l'interseclion  du 
plan  donné  avec  le  plan  vertical  qui  lui  est  perpendi- 
culaire rencontre  le  plan  horizontal  au  point  E,  dont 
on  aura  la  projection  verticale  e,  en  abaissant  Ee 
perpendiculairement  sur  LM;  et  elle  rencontre  le  plan 
vertical  de  projection  en  un  point  dont  la  projection 
horizontale  est  l'intersection  F  de  la  droite  LM  avecDG, 
prolongée  s'il  est  nécessaire,  et  dont  la  projection 
verticale  doit  être  sur  la  verticale  F/  et  sur  la  trace  CB  ; 
elle  sera  donc  au  point  /  de  leur  intersection. 

La  projection  verticale  g  du  pied  de  la  perpendicu- 
laire étant  trouvée,  il  est  facile  de  constridre  sa  pro- 
jection horizontale,  car  si  l'on  abaisse  sur  LM  la  per- 
pendiculaire indéfinie  g  G,  cette  droite  contiendra  le 
point  demandé  :  or,  la  droite  DF  doit  aussi  le  con- 
tenir; donc  il  sera  au  point  G  de  l'intersection  de  ces 
deux  droites. 

17.  Quatrième  questioiN.  —  Estant  donnés  (fig.  7) 
une  droite  dont  les  deux  projections  soient  AB,  ah^  et 
un  point  dont  les  deux  projections  soient  D,  d^  cons- 
truire les  traces  du  plan  mené  par  le  point  perpendi- 
culairement à  la  droite  ? 

Solution.  —  On  sait  déjà,  par  la  question  précé- 
dente, que  les  deux  traces  doivent  être  perpendicu- 
laires aux  projections  respectives  des  deux  droites; 
il  reste  à  trouver,  pour  chacune  d'elles,  un  des  points 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  3l 

par  lesquels  elle  doit  passer.  Pour  cela,  si,  par  le  point 
donné,,  on  conçoit,  dans  le  plan  cherché,  une  horizon- 
tale  prolongée  jusqu'à  la  rencontre  du  plan  vertical 
(le  projection,  on  aura  sa  projection  verlicalc  en 
menant  par  le  point  d  une  horizontale  indéfinie  dG, 
et  sa  projection  horizontale  en  nicnaat  par  le  point  D 
une  pcrpendicuiaire  DU  à  AB,  prolongée  jusfiu'à  ce 
qu'elle  coupe  LM  en  un  point  II,  «jui  sera  la  projection 
horizontale  du  point  de  rencontre  de  l'horizontale 
avec  le  ])lau  vertical  de  projection.  Ce  point  de  ren- 
contre, ([ul  doit  se  trouver  dans  la  verticale  HG  et 
dans  l'horizontale  dG,  et  ])ar  conséquent  au  point  G 
d'intersection  de  ces  deux  droites,  sera  donc  un  des 
points  de  la  trace  sur  le  plan  vertical;  donc  on  aura 
cette  trace,  en  menant  par  le  point  G  la  droite  FC 
perpendiculaire  à  ab;  donc 'enfin,  si  par  le  point  C, 
où  la  première  trace  rencontre  LM,  on  mène  CE  per- 
pendiculaire à  AB,  on  aura  la  seconde  trace  demandée. 

S'il  était  question  de  trouver  le  point  de  rencontre 
du  plan  avec  la  droite,  on  opérerait  exactement  comme 
dans  la  question  précédente. 

Enfin,  s'il  fallait  abaisser  une  perpendiculaire  du 
point  donné  sur  la  droite,  on  construirait,  comme 
nous  venons  de  le  dire,  la  rencontre  de  la  droite  avec 
le  plan  mené  par  le  point  donné,  et  qui  lui  serait  per- 
})endiculaire;  et  l'on  aurait,  pour  chacune  des  deux 
projections  de  la  perpendiculaire  demandée,  deux 
points  par  lesquels  elle  doit  passer. 

18.  Cinquième  question.  —  Deux  plans  étant 
donnés  de  position  {fig.  8),  au  moyen  de  leurs 
traces  AB  et  A  5   pour  l'un,  CD  ci  Cd  pour  l'autre. 


3>.  LES    MAITRES    DE    LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  33 


construire  1rs  projections  de  la  droite  suivant  laquelle 
ils  se  coupent  ? 

Solution.  —  Tous  les  points  de  la  trace  AB  se 
trouvant  sur  le  premier  des  deux  plans  donnés,  et 
tous  ceux  de  la  trace  CD  se  trouvant  sur  le  second, 
le  point  K  d'intersection  de  ces  deux  traces  est  évi- 
dtnunent  sur  les  deux  plans;  il  est,  pr.r  conséquent, 
un  des  points  àc  la  droite  demandée.  On  reconnaîtra 
de  même  que  le  point  F  d'iiitersection  des  deux  tract  s 
sur  le  plan  vertical  est  encore  un  autre  point  de  cette 
droite.  L'intersection  des  deux  plans  est  donc  placée 
(le  manière  qu'elle  rencontre  le  plan  horizontal  en  K  et 
I»'  plan  vertical  en  F. 

Donc,  si  l'on  projette  le  point  F  sur  le  plan  horizontal, 
. .  qu'on  fera  en  abaissant  sur  LM  la  perpendiculaire 
I'7',  et  si  l'on  mène  la  droite  /E,  elle  sera  la  projec- 
lion  horizontale  de  l'intersection  des  deux  plans.  De 
même,  si  l'on  projette  le  point  E  sur  le  plan  vertical, 
en  abaissant  sur  LM  la  perpendiculaire  Ee,  et  si  l'on 
mène  la  droite  eF,  elle  sera  la  projt  ction  verticale  de 
la  même  intersection. 

19.  SixiKME  QUESTION.  —  Dcux  plaus  (//g.  Ç))  étant 
donnés,  au  moyen  des  traces  AB,  lib  du  premier, 
(  t  des  traces  CD,  Cd  du  second,  construire  l'angle 
qu'ils  forment  entre  eux  ? 

Solution.  —  Après  avoir  construit,  comme  dans 
la  question  précédente,  ia  projection  horizontale  F/ 
de  l'intersection  des  deux  plans,  si  l'on  conçoit  un 
troisième  plan  qui  leur  soil  perpendiculaire,  et  qui  soit 
par  conséquent  perpendiculaire  à  leur  commune  iv.  :  cr- 
in «nge.  —  I.  3 


34  LES   MAITRES  DE   LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

section,  ce  troisième  plan  coupera  les  deux  plans 
donnés  en  deux  droites,  qui  comprendront  entre  elles 
un  angle  égal  à  l'angle  demandé. 

De  plus,  la  trace  horizontale  de  ce  troisième  plan 
sera  perpendiculaire  à  la  projection  E/  de  l'intersec- 
tion des  deux  plans  donnés,  et  elle  formera  avec  les 
deux  autres  droites  un  triangle  dont  l'angle  opposé 
au  côté  horizontal  sera  l'angle  demandé.  Il  ne  s'agit 
donc  plus  que  de  construire  ce  triangle. 

Or,  il  est  indifférent  par  quel  point  de  l'intersection 
des  deux  premiers  plans  passe  le  troisième;  on  peut 
donc  prendre  sa  trace  à  volonté  sur  le  plan  horizontal, 
pourvu  qu'elle  soit  perpendiculaire  à  E/.  Soit  donc 
menée  une  droite  quelconque  GlI,  perpendiculaire 
à  E/,  terminée  en  G  et  en  H  aux  traces  des  deux  plans 
donnés,  et  qui  rencontre  E/  en  un  point  I;  cette  droite 
sera  la  base  du  triangle  qu'il  faut  construire.  Actuelle- 
ment, concevons  que  le  plan  de  ce  triangle  tourne 
autour  de  sa  base  GH  comme  charnière,  pour  s'appli- 
quer sur  le  plan  horizontal;  dans  ce  mouvement,  son 
sommet,  qui  est  d'abord  placé  sur  l'intersection  des 
deux  plans,  ne  sort  pas  du  plan  vertical  mené  par  cette 
intersection,  parce  que  ce  plan  vertical  est  perpendi- 
culaire à  GH;  et  lorsque  le  plan  du  triangle  est  abattu, 
ce  sommet  se  trouve  sur  un  des  points  de  la  droite  E/. 
Ainsi  il  ne  reste  plus  à  trouver  que  la  hauteur  du 
triangle  ou  la  grandeur  de  la  perpendiculaire  abaissée 
du  point  I  sur  l'intersection  de  deux  plans. 

Mais  cette  perpendiculaire  est  comprise  dans  le 
plan  vertical  mené  par  E/.  Si  donc  on  conçoit  que  ce 
plan  tourne  autour  de  la  verticale  /F  pour  s'appliquer 
sur  le  plan  vertical  de  projection,  et  si  l'on  porte  /E 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  3^ 


<!«'  /  en  c,  /I  de  /  en  i,  la  droite  e  K  sera  la  grandrur  de 
lîi  i>artie  de  l'intersection  comprise  entre'  les  deux 
])lans  de  projection;  et  si  du  point  i  l'on  abaisse  sur 
cette  droite  la  perpendiculaire  i7r,  elle  sera  la  hauteur 
du  triangle  demandée 

Donc  enfin,  portant  ik  de  I  en  K  et  achevant  le 
Irlantrlo  CKH,  l'anj^le  en  K  sera  égal  à  l'anj^le  formé 
par  les  deux  plans. 

20.  Septième  question.  —  Deux  droites  f[ui  se 
coupent  dans  l'esjiace  {fi;.  lo)  étant  données  par  leurs 
projections  horizontales  AB,  AC,  et  par  leurs  projec- 
tions verticales  ah^  ac^  construire  l'angle  qu'elles 
forment  entre  elles  ? 

Avant  de  procéder  à  la  solution,  nous  rettiarquefons 
(pie,  puisque  les  deux  droites  données  sont  supposées 
^'^  couper,  le  point  A  de  rencontre  de  leurs  projections 
horizontales,  et  le  point  a  de  rencontre  de  leurs  pro- 
jections verticales,  seront  les  projections  du  point  dans 
lequel  elles  se  coupent,  et  seront  par  conséquent  dans 
la  même  droite  aGA  perpendiculaire  à  LM.  Si  les  deux 
points  A  et  a  n'étaient  pas  dans  une  même  perpendicu- 
laire a  LM,  les  droites  données  ne  se  couperaient  pas, 
et  par  conséquent  ne  seraient  pas  dans  un  même  plan. 

Solution.  —  On  concevra  les  deux  droites  données 
prolongées  jusqu'à  ce  qu'elles  rencontrent  le  plan 
horizontal,  chacune  en  un  point,  et  l'on  construira  ces 
deux  points  de  rencontre.  Pour  cela,  on  prolongera 
les  droites  ab,  ac,  jusqu'à  ce  qu'elles  coupent  LM  en 
deux  points  rf,  e,  qui  seront  les  projections  verticales 
de  ces  deux  points  de  rencontre  :  par  les  points  d,  e 


36  LES   MAITRES    DE   LA   PEiNSÉE   SCIENTIFIQUE. 


on  mènera  dans  Je  plan  horizontal  et  perpendiculaire- 
ment à  LM  deux  droites  indéfinies  dD,  eE,  qui,  devant 
passer  chacune  par  un  de  ces  points,  détermineront 
leurs  positions  par  leurs  intersections  D,  E  avec  les 
projections  horizontales  respectives  AB,  iVC,  prolon- 
gées s'il  est  nécessaire. 

Cela  fait,  si  l'on  mène  la  droite  DE,  cette  droite  et 
les  deux  parties  des  droites  données,  comprises  entre 
leur  point  d'intersection  et  les  points  D,  E,  formeront 
un  triangle,  dont  l'angle  opposé  à  DE  sera  l'angle 
demandé;  ainsi  il  ne  s'agira  plus  que  de  construire  ce 
triangle.  Pour  cela,  après  avoir  abaissé  du,  point  A 
sur  DE  la  perpendiculaire  indéfinie  AE,  si  l'on  conçoit 
que  le  plan  du  triangle  tourne  autour  de  sa  base  DE 
connue  charnière,  juscpi'à  ce  qu'il  soit  abattu  sur  le 
plan  horizontal  ;  le  sommet  de  ce  triangle,  pendant  son 
mouvement,  ne  sorlira  pas  du  plan  vertical  mené 
par  AF,  et  viendra  s'appliquer  quelque  part  sur  le 
prolongement  de  1"A  en  un  point  H,  dont  il  ne  restera 
plus  à  trouver  que  la  distance  à  la  base  DE. 

Or,  la  projection  horizontale  de  cette  distance  est  la 
droite  AF,  et  la  hauteur  verticale  d'une  de  ses  extré- 
mités au-dc!^sus  de  l'autre  est  égale  à  aG;  donc, 
en  vertu  de  la  ligure  3,  si  sur  LM  on  porte  AF 
de  G  en  /,  et  si  l'on  mène  l'hypoténuse  a/,  cette  hypo- 
ténuse sera  la  dis  lance  demandée.  Donc  enfin,  si  l'on 
porte  af  de  F  en  H,  et  si  par  le  point  H  on  mène  les 
deux  droites  HD,  HE,  le  triangle  sera  construit,  et 
l'angle  DHE  sera  l'angle  demandé. 

21.  IIuittî:me.  question.  —  Etant  données  les 
projections  d'une  droite  et  les  traces  d'un  plan,  cons- 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE:.  87 


triiirc  l'angle  que  la  droite  et  le  plan  forment  entre 
eux  ? 

Solution.  —  Si,  par  un  point  pris  sur  la  droite 
donnée,  on  conçoit  une  perpendiculaire  au  plan  donné, 
l'angle  que  cette  perpendiculaire  formera  avec  la 
droite  donnée  sera  le  complément  de  l'angle  demandé, 
et  il  suflira  de  construire  cet  angle  pour  résoudre  la 
question. 

Or  si,  sur  les  deux  projections  de  la  droite,  on  prend 
deux  points  qui  soient  dans  la  même  perpendiculaire 
à  l'intersection  des  deux  plans  de  projection,  et  si, 
par  ces  deux  points,  on  mène  des  perpendiculaires  aux 
traces  respectives  du  plan  donné,  on  aura  les  projec- 
tions horizontale  et  verticale  de  la  seconde  droite.  La 
question  sera  donc  réduite  à  construire  l'angle  formé 
par  deux  droites  qui  se  coupent,  et  rentrera  dans  le 
cas  de  la  précédente. 

22.  Lorsqu'on  se.prc»posn  de  lever  la  carte  d'un  i)ays, 
on  conçoit  ordinairemeiil  <iiic  les  points  remarquables 
soient  liés  entre  eux  par  des  lignes  droites  qui  forment 
des  triangles,  et  il  s'agit  ensuite  de  rapporter  ces 
triangles  sur  la  carte,  au  moyen  d'une  échelle  plus 
petite,  et  de  les  placer  entre  eux  dans  le  même  ordre 
que  ceux  qu'ils  représentent.  Les  oj)érations  qu'il 
faut  faire  sur  le  terrain  consistent  principalement  dans 
la  mesure  des  angles  et  de  ces  triangles;  et,  pour  que 
ces  angles  puissent  être  rapportés  directement  sur  la 
carte,  ils  doivent  être  chacun  dans  un  plan  horizontal, 
parallèle  à  celui  de  la  carte.  Si  le  plan  de  l'angle  est 
oblique    à   l'horizon,   ce   n'est   plus   l'angle   lui-même 


38  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

qu'il  faut  rapporter,  c'est  sa  projection  horizontale; 
et  il  est  toujours  possible  do  trouver  cette  projection 
lorsque,  après  avoir  mesuré  l'angle  lui-même,  on  a 
de  plus  mesuré  ceux  que  ses  deux  côtés  forment  avec 
l'horizon,  ce  qui  donne  lieu  à  l'opération  suivante,  qui 
est  connue  sous  le  nom  de  réduction  d'un  angle  à 
l'horizon. 

Neuvième  question.  —  Etant  donnés  l'angle 
formé  par  deux  droites,  et  ceux  qu'elles  forment  l'une 
et  l'autre  avec  le  plan  horizontal,  construire  la  projec- 
tion horizontale  du  premier  de  ces  angles  ? 

Solution.  • —  Soient  A  {fig,  ii)  la  projection  horizon- 
tale du  sommet  de  l'angle  demandé,  et  AB  celle  d'un 
de  ses  côtés,  de  manière  qu'il  faille  construire  l'autre 
côté  AE.  On  concevra  que  le  plan  de  projection  ver- 
ticale passe  par  AB;  et  ayant  mené  par  le  point  A  une 
verticale  indéfinie  Aa,  on  prendra  sur  elle,  à  volonté, 
un  point  d,  que  l'on  regardera  comme  la  projection 
verticale  du  sommet  de  l'angle  observé.  Gela  fait,  si 
par  le  point  d  on  mène  la  droite  cCB,  qui  fasse  avec 
l'horizontale  un  angle  d!BA  égal  à  celui  que  le  premier 
côté  fait  avec  l'horizon,  le  point  B  sera  la  rencontre 
de  ce  côté  avec  le  plan  horizontal.  De  même,  si  par  le 
point  d  on  mène  la  droite  dC,  qui  fasse  avec  l'horizon- 
tale un  angle  c^CA  égal  à  celui  que  le  deuxième  côté 
fait  avec  l'horizon,  et  si  du  point  A  comme  centre,  avec 
le  rayon  AC,  on  décrit  un  arc  de  cercle  indéfini  CEE, 
le  deuxième  côté  ne  pourra  rencontrer  le  plan  horizontal 
que  dans  un  des  points  de  l'arc  CEE.  Il  ne  s'agira  donc 
plus  que  de  trouver  la  distance  de  ce  point  à  quelque 
autre  point,  comme  B. 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE,  M) 


Or,  cette  dernière  distance  est  dans  le  plan  de 
l'angle  observé.  Si  donc  on  mène  la  droite  dD^  de  ma- 
nière que  l'angle  DdU  soit  égal  à  Tangle  observé,  et 
si  l'on  porte  dC  de  d  en  D,  la  droite  DB  sera  égale  à 
cette  distance. 

Donc,  si  du  point  B,  comme  centre,  et  d'un  inter- 
valle égal  à  BD,  on  décrit  un  arc  de  cercle,  K*  point  E, 
où  il  coupera  le  i)remi('r  arc  CKi'\  sera  \v  j)oint  de  ren- 
contre du  deuxième  côté  avec  le  plan  horizontal  ;  donc 
la  droite  AE  sera  la  projection  horizontale  de  ce  côté, 
et  l'angle  BAE  celle  de  l'angle  observé.  •» 

Les  neuf  questions  .qui  précèdent  sufllsent  à  peine 
pour  donner  une  idée  de  la  méthode  des  projections; 
elles  ne  peuvent  en  montrer  toutes  les  ressources.  Mais 
à  mesure  que  nous  nous  élèverons  à  des  considérations 
plus  générales,  nous  aurons  soin  de  faire  les  opérations 
qui  seront  les  plus  propres  à  remplir  cet  objet. 


II. 

DES  PLANS  TANGENTS  ET  DES  NORMALES 
AUX  SURFACES  COURBES. 

23.  Comme  il  n'y  a  aucune  surface  courbe  qui  ne 
puisse  être  engendrée  de  plusieurs  manières  par  le 
mouvement  de  lignes  courbes,  si  par  un  point  quel- 
conque d'ime  surface  on  considère  deux  génératrices 
diiïérentes  dans  la  position  qu'elles  doivent  avoir, 
lorsqu'elles  passent  l'une  et  l'autre  par  ce  point,  et 
si  l'on  conçoit  les  tangentes  en  ce  point  à  chacune  des 
deux  génératrices,  le  plan  mené  par  ces  deux  tangentes 


4o  LES    MAITRES    DE    LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

est  le  plan  tangent.  Le  point  de  la  surface,  dans  lequel 
les  deux  génératrices  se  coupent,  et  qui  est  en  même 
temps  commun  aux  deux  tangentes  et  au  plan  tan- 
gent, est  le  point  de  contact  de  la  surface  et  du  plan. 
La  droite  menée  par  le  point  de  contact  perpendi- 
culairement au  plan  Langent  s'appelle  normale  à  la 
surface.  Elle  est  perpendiculaire  à  l'élément  de  la  sur- 
face, parce  que  la  direction  de  cet  élément  coïncide, 
dans  tous  les  sens,  avec  celle  du  plan  tangent,  qui  peut 
en  être  r(;gardé  comme  le  prolongement. 

24.  La  considération  des  plans  tangents  et  des  nor- 
males aux  surfaces  courbes  est  très  utile  à  un  grand 
nombre  d'arts  ;  et,  pour  plusieurs  d'entre  eux,  elle  est 
absolument  indispensable.  Nous  n'apporterons  ici 
qu'un  seul  exemple  de  chacun  de  ces  deux  cas,  et  nous 
les  prendrons  dans  l'Architecture  et  dans  la  Peinture. 

Les  différentes  parties  dont  sont  composées  les 
voûtes  en  pierres  de  taille,  se  nomment  poussoirs  '  et 
l'on  appelh^  joints  les  faces  par  lesquelles  deux  vous- 
soirs  contigus  se  touchent,  soit  que  ces  voussoirs 
fassent  partie  d'une  même  assise,  soit  qu'ils  soient 
compris  dans  deux  assises  consécutives. 

La  position  des  joints  dans  les  voûtes  est  assujétie 
à  plusieurs  conditions  qui  doivent  être  nécessairement 
remplies.  Nous  ferons  connaître  successivement  toutes 
ces  conditions  dans  la  suite  du  cours;  mais,  dans  ce 
moment,  nous  ne  nous  occuperons  que  de  celle  qui  a 
rapport  à  notre  objet. 

Une  des  conditions  auxquelles  la  position  des  joints 
doit  satisfaire,  c'est  qu'ils  soient  perpendiculaires 
entre  eux,  et  que  les  uns  et  les  autres  rencontrent  per- 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  4l 

pendiculaircment  la  surface  de  la  voûte.  Si  l'on  s'écar- 
tait, sensiblement  de  cette  loi,  non  seulement  on  bles- 
serait les  convenances  générales,  sans  lesquelles  rien 
ne  peut  avoir  de  la  grâce,  mais  encore  on  s'exposerait 
à  rendre  la  voûte  moins  solide  et  moins  durable  :  car, 
si  l'un  des  joints  était  oblique  à  la  surface  de  la  voûte, 
des  deux  voussoirs  contigus  à  ce  joint,  l'un  aurait 
un  angle  obtus,  l'autre  un  anj^le  aigu;  et  dans  la  réac- 
tion que  les  deux  voussoirs  exercent  l'un  sur  l'autre, 
ces  deux  angles  ne  seraient  pas  capables  de  la  même 
résistance;  à  cause  de  la  fragilité  des  matériaux,  l'angle 
aigu  serait  exposé  à  éclater;  ce  qui  altérerait  la  forme 
de  la  voûte,  et  compromettrait  la  durée  de  l'édifice. 
Ainsi  la  décomposition  d'une  voûte  en  voussoirs  exige 
donc  absolument  la  considération  des  plans  tangents 
et  des  normales  à  la  surface  courbe  de  la  voûte. 

'i5.  Passons  à  un  autre  exemple  pris  dans  un  genre 
qui,  au  premier  coup  d'œil,  ne  paraît  pas  susceptible 
d'une   aussi   grande    sévérité. 

On  a  coutume  de  regarder  la  Peinture  comme  com- 
posée de  deux  parties  distinctes.  L'une  est  l'art  pro- 
prement dit  :  elle  a  pour  objet  d'exciter  dans  le  specta- 
teur une  émotion  déterminée,  de  faire  naître  en  lui  un 
sentiment  donné,  ou  de  le  mettre  dans  la  situation  qui 
le  disposera  le  mieux  à  recevoir  une  certaine  inqjres- 
sion;  elle  suppose  dans  l'artiste  une  grande  habitude 
de  la  philosophie  ;  elle  exige  de  sa  part  les  connaissances 
les  plus  exactes  sur  la  nature  des  choses,  sur  la  manière 
dont  elles  agissent  sur  nous,  et  sur  les  signes,  même 
involontaires,  par  lesquels  cette  action  se  manifeste; 
elle  ne  peut  être  que  le  résultat  d'une  éducation  très 


h'  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

distinguée,  que  l'on  ne  donne  à  personne,  et  que  nous 
sommes  bien  éloignés  de  donner  à  nos  jeunes  artistes  ; 
elle  n'est  soumise  à  aucune  règle  générale;  elle  ne  sup- 
porte que  des  conseils. 

L'autre  partie  de  la  peinture  en  est,  à  proprement 
parler,  le  métier  :  son  but  est  l'exécution  exacte  des 
conceptions  de  la  première.  Ici  rien  n'est  arbitraire; 
tout  peut  être  prévu  par  un  raisonnement  rigoureux, 
parce  que  tout  est  le  résultat  nécessaire  d'objets  con- 
venus et  de  circonstances  données.  Lorsqu'un  objet 
est  déterminé  de  forme  et  de  position,  lorsque  l'on  con- 
naît la  nature,  le  nombre  et  la  position  de  tous  les 
corps  qui  peuvent  l'éclairer,  soit  par  une  lumière 
directe,  soit  par  des  rayons  réfléchis;  lorsque  la  posi- 
tion de  l'œil  du  spectateur  est  fixe;  lorsque  enfin 
toutes  les  circonstances  qui  peuvent  influer  sur  la 
vision  sont  bien  établies  et  connues,  la  teinte  de 
chacun  des  points  de  la  surface  visible  de  cet  objet 
est  absolument  déterminée.  Tout  ce  qui  a  rapport  à  la 
couleur  de  cette  teinte  et  à  son  éclat  dépend  de  la 
position  du  plan  tangent  en  ce  point  à  l'égard  des 
corps  éclairants  et  de  l'œil  du  spectateur  :  elle  peut 
être  trouvée  par  le  seul  raisonnement;  et  lorsqu'elle 
est  ainsi  déterminée,  elle  doit  être  appliquée  avec 
exactitude.  Tout  afîaiblissement,  toute  exagération 
changeraient  les  apparences,  altéreraient  les  formes 
et  produiraient  un  autre  effet  que  celui  qu'attend 
l'artiste. 

Je  sais  bien  que  la  rapidité  de  l'exécution,  (|ui  est 
souvent  nécessaire,  ne  permettrait  que  bien  rarement 
l'emploi  d'une  méthode  qui  priverait  l'esprit  de  tout 
secours  matériel,  et  l'abandonnerait  à  l'exercice  de  ses 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  43 

seules  facultés,  et  qu'il  est  beaucoup  plus  facile  au 
peintre  de  poser  les  objets,  d'observer  leurs  teintes  et 
(le  los  imiter  :  mais  s'il  était  accoutumé  à  considérer 
lès  ])usilions  des  plans  tangents  et  les  deux  courbures 
des  surfaces  en  chacun  de  leurs  points,  courbures  qui 
IVronl  l'objet  de  leçons  ultérieures,  il  tirerait  de  ce 
moyen  matériel  un  parti  plus  avantageux;  il  serait  en 
état  de  rétablir  les  ciîets  que  l'omission  de  quelques 
circonstances  a  empêché  de  naîlrc,  et  de  supprimer 
Cj«;ux  auxquels  donnent  lieu  des  circonstances  étran- 
gères. 

Enfin,  les  expressions  vagues,  comme  celles  de 
méplat^  clair-obscur^  que  les  peintres  emploient  à 
chaque  instant,  sont  un  témoignage  constant  du 
besoin  qu'ils  ont  de  connaissances  plus  exactes  et  de 
raisonnements  plus  rigoureux. 

26.  Indépendamment  de  son  utilité  dans  les  arts, 
la  considération  des  plans  tangents  et  des  normales 
aux  surfaces  courbes,  est  un  des  moyens  les  plus  fé- 
conds que  la  Géométrie  descriptive  emploie  pour  la 
résolution  de  questions  qu'il  serait  très  difiîcile  de 
résoudre  par  d'autres  procédés,  et  nous  en  donnerons 
quelques  exemples. 

27.  La  méthode  générale,  pour  déterminer  le  plan 
tangent  à  une  surface  courbe,  consiste  (23)  à  concevoir 
par  le  point  de  contact  les  tangentes  à  deux  courbes 
génératrices  différentes  qui  passeraient  par  ce  point, 
et  à  construire  le  plan  qui  passerait  par  ces  deux 
droites.  Dans  quelques  cas  particuliers,  pour  abréger 
les  constructions,  on  s'écarte  un  peu  de  cette  méthode 


44  LES    MAITRES    DE    LA    PENSÉE    SCIENTIFIQUE. 


prise    à    la    lettre,    mais    on    fait    toujours    l'équiva- 
lent. 

Quant  à  la  construction  de  la  normale,  nous  ne  nous 
en  occuperons  pas  en  particulier,  parce  qu'elle  se 
réduit  à  celle  d'une  droite  perpendiculaire  au  plan 
tangent,  ce  que  nous  savons  faire. 

28.  Première  question.  —  Par  un  point  considéré 
sur  une  surface  cylindrique,  et  dont  la  projection 
horizontale  est  donnée,  mener  un  plan  tangent  à  cette 
surface  ? 

Solution.  —  Soint  AB,  ah  {fig.  12)  les  projec- 
tions horizontale  et  verticale  de  la  droite  donnée, 
à  laquelle  la  génératrice  de  la  surface  cylindrique 
doive  être  parallèle;  soit  EPD  la  courbe  donnée  dans 
le  plan  horizontal,  sur  laquelle  la  génératrice  doive 
constamment  s'appuyer,  et  que  l'on  peut  regarder 
comme  la  trace  de  la  surface  cylindrique;  enfin  soit  G 
la  projection  horizontale  donnée  du  point  considéré 
sur  la  surface  cylindrique,  par  lequel  doive  êlrc  mené 
le  plan  fangenl. 

Gela  ])0sé,  par  le  point  considéré  sur  la  surface,  et 
dont  la  projection  horizontale  est  en  G,  concevons 
la  droite  génératrice  dans  la  i)Osition  qu'elle  doit  avoir 
lorsqu'elle  passe  par  ce  point  :  cette  génératrice  étant 
une  ligne  droite,  elle  sera  elle-même  sa  propre  tangente  ; 
elle  sera  donc  une  des  deux  droites  qui  détermineront 
la  position  du  plan  tangent;  de  plus,  elle  sera  parallèle 
à  la  droite  donnée  :  donc  ses  deux  projections  seront 
respectivement  parallèles  à  AB  et  ah\  donc  si  par  le 
point  G  on  mène  à  AB  une  parallèle  indéfinie  EF,  on 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE. 


aura  la  projection  horizontale  de  la  génératricf.  Pour 
avoir  sa  projection  verticale,  concevons  la  génératrice 
prolongée  sur  la  surface  cylindrique  jusqu'à  ce  qu'elle 
rencontre  le  plan  horizontal;  elle  ne  le  pourra  faire 
que  dans  un  point  qui  sera  en  même  temps  sur  la  pro- 
jection EF  et  sur  la  courbe  EPD,  et  qui  sera,  par  con- 
séquent, l'intersection  de  ces  deux  lignes  :  ainsi  l'on 
déterminera  ce  point,  en  prolongeant  EF  jns(|u'i'i  ce 
qu'elle  coupe  quelque  part  la  courbe  EPI). 

Ici  il  se  présente  deux  cas  :  ou  la  droite  EF  ne  cou- 
pera la  trace  du  cylindre  qu'en  un  seul  point,  ou  elle 
le  coup(  ra  en  plusieurs  points.  Nous  allons  examiner 
ces  deux  cas  séparément,  et  supposer  d'abord  que 
quelque  prolongée  que  soit  la  droite  EF,  elle  ne  ren- 
contre la  courbe  EPD  qu'en  un  seul  point  D. 

Le  point  D  étant  la  trace  de  la  génératrice,  si  on  le 
projette  sur  le  plan  vertical  au  moycndola  ]>("rp;'i!(1i('u- 
laire  D</,  et  si  par  le  point  d  on  mène  df  parallèle  à  ab, 
on  aura  la  projection  verticale*  de  la  génératrice.  Ainsi 
on  aura  les  deux  projections  d'une  des  droites  par 
lesquelles  doit  passer  le  plan  tangent  demandé.  De 
pluF,  la  projection  vcriicale  du  point  de  contact  doit 
se  trouver  sur  la  droite  Ce'  menée  du  point  donné  C 
perpendiculairement  à  LM;  elle  doit  aussi  se  trouver 
sur  df;  donc  elle  sera  au  point  c  d'intersection  de  ces 
deux  lignes. 

Si  la  droite  EF  coupe  la  trace  EPD  de  la  surface 
cylindrique  en  plusieurs  points  D,  E,  on  opérera  pour 
chacun  de  ces  points  de  la  même  manière  que  nous 
venons  de  le  décrire  pour  le  point  D,  regardé  comme 
seul;  il  en  résultera  seulement  qu'on  aura  les  projec- 
tions verticales  c//,  ef  d'autant  de  droites  génératrices, 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  4? 

et  les  projections  verticales  c,  c'  d'autant  de  points 
de  contact  qu'il  y  aura  de  points  d'intersection  entre 
la  droite  EF  et  la  trace  EPD. 

Dans  le  cas  de  la  figure  12,  la  trace  de  la  surface 
cylindrique  est  une  circonférence  de  cercle  qui  a  la 
propriété  d'être  coupée  par  une  droite  en  deux  points  : 
ainsi  la  verticale  élevée  par  le  point  donné  C  doit  ren- 
contrer deux  fois  la  surface,  d'abord  dans  un  premier 
point,  dont  la  jnojeclion  verticale  est  c,  et  par  laquelle 
])assc  la  jjjénéralrice,  iorsqu'elliî  s'ai)puie  sur  le  point  1), 
et  ensuite  dans  un  second  point,  dont  la  projection 
verticale  est  c\  et  par  laquelle  passe  la  génératrice 
lorsqu'elle  s'appuie  sur  le  point  E  de  la  trace.  Ces  deux 
points,  quoi(pi'ils  aient  la  même  projection  horizon- 
tale, sont  néanmoins  très  distincts,  et  à  chacun  d'eux 
doit  répondre  un  plan  tangent  particulier.  Actuelle- 
ment, pour  chacun  des  deux  points  de  contact,  il  faut 
trouver  la  deuxième  d  oite  qui  doit  déterminer  la  posi- 
tion du  plan  tangent.  Si  l'on  suivait  strictement  la 
méthode  générale,  en  regardant  la  trace  comme  une 
seconde  génératrice,  il  faudrait  la  concevoir  passant 
successivement  par  chacun  des  points  de  contact,  et 
construire  dans  chacun  de  ces  points  une  tangente; 
mais,  dans  le  cas  particulier  des  surfaces  cylindriques, 
on  peut  employer  une  considérai  ion  plus  simple.  En 
effet,  le  plan  tangent  au  point  C,  c  touche  la  surface 
dans  toute  l'étendue  de  la  droite  génératrice  qui  passe 
par  ce  point;  il  la  touche  donc  en  D,  qui  est  un  point 
de  cette  génératrice  ;  il  doit  donc  passer  par  la  tangente 
à  la  trace  au  point  D.  Par  un  semblable  raisonnement 
on  trouvera  que  le  plan  tangent  en  C,  c'  doit  passer 
par  la  tangente  à  la  trace  en  E.  Donc,  si  par  les  deux 


48  LES    MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

points  D,  E  on  mène  à  la  trace  les  deux  tangentes  DK, 
EG,  prolongées  jusqu'à  ce  qu'elles  coupent  la  droiteLM 
en  deux  points  K,  G,  on  aura  sur  le  plan  horizontal 
les  traces  des  deux  plans  tangents. 

Il  ne  reste  donc  plus  à  trouver  que  les  traces  des 
mêmes  plans  sur  le  plan  vertical;  et  parce  que  nous 
avons  déjà  pour  l'une  de  ces  traces  le  point  K,  et  pour 
l'autre  le  point  G,  il  ne  reste  plus  à  déterminer  qu'un 
seul  point  pour  chacune  d'elles. 

Pour  cela,  et  en  opérant  pour  le  premier  des  deux 
plans  tangents,  concevons  que  le  point  à  construire 
soit  celui  dans  lequel  une  horizontale  menée  dans  le 
pian  par  le  point  de  contact  rencontre  le  pian  vertical; 
on  aura  la  projection  horizontale  de  cette  droite  en 
menant  par  le  point  G  une  parallèle  à  la  trace  DK, 
qu'on  prolongera  jusqu'à  ce  qu'elle  rencontre  la 
droite  LM  en  un  point  1;  et  l'on  aura  sa  projection 
verticale  en  menant  par  le  point  c  une  horizontale 
indéfinie.  Le  point  de  rencontre  du  plan  vertical  avec 
l'horizontale  se  trouvera  donc  en  même  tenq)s  et  sur 
la  verticale  \i  et  sur  l'horizontale  ci;  il  sera  au  point  i 
de  leur  intersection;  donc,  si  par  les  points  i  et  K  on 
mène  une  droite,  on  aura  la  trace  du  premier  plan 
tangent  sur  le  plan  vertical.  En  raisonnant  de  môme 
pour  le  second  pian  tangent,  on  trouvera  sa  trace  sur 
ie  plan  vertical  en  menant  par  le  point  C  une  droite  CH 
parallèle  à  la  trace  horizontale  EG,  et  on  la  prolon- 
gera jusqu'à  ce  qu'elle  coupe  LM  en  un  point  H,  par 
lequel  on  élèvera  la  verticale  LI^;  par  le  point  c'  on 
mènera  une  horizontale  qui  coupera  la  verticale  H  h 
en  un  jtoint  A,  par  lequel  et  par  le  point  G  si  l'on  mène 
une  droite  G//,  on  aura  la  trace  demandée. 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  49 

29.  Deuxième  question.  —  Par  un  point  considéré 
sur  une  surface  coni<iue,  et  dont  la  projection  horizon- 
tale est  donnée,  mener  un  plan  tangent  à  cette  sur- 
lace ? 

La  solution  de  cette  question  ne  diffère  de  celle  de 
la  précédente  qu'en  ce  que  la  droite  génératrice,  au 
lieu  d'être  toujours  parallèle  à  elle-même,  passe 
toujours  par  le  sommet  dont  les  deux  projections 
sont  données.  Nous  pensons  qu'il  eut  convenable  de 
ne  pas  l'énoncer  ici,  et  de  conseiller  au  lecteur  de  la 
chercher  lui-même,  en  lui  offrant  le  secours  de  la 
ligure  lo,  si  toutefois  cela  était  nécessaire. 

30.  Troisième  question.  —  Par  un  point  consi- 
déré sur  une  surface  de  révolution  autour  d'un  axe 
a;  rlical,  et  donné  sur  la  projection  horizontale,  mener 
un  i)lan  tangent  à  la  surface  ? 

Solution.  —  Soient  A  {/ig.  i/|)  la  projection 
horizontale  donnée  de  l'axe,  aa'  sa  projection  verti- 
cale, BCDEF  la  courbe  génératrice  donnée,  consi- 
dérée dans  un  plan  mené  par  l'axe,  et  G  la  projection 
horizontale  donnée  du  point  de  contact. 

Gela  posé,  si  par  le  point  de  contact  et  par  l'axe  on 
conçoit  un  plan  vertical  dont  la  projection  sera 
l'horizontale  indéfinie  AG,  ce  plan  coupera  la  surface 
de  révolution  dans  une  courbe  qui  sera  la  génératrice, 
])assant  par  le  point  de  contact;  si  par  le  point  G  on 
conçoit  une  verticale,  elle  rencontrera  la  génératrice 
et  par  conséquent  la  surface  en  un  ou  plusieurs  points 
qui  seront  autant  de  points  de  contact,  dont  G  sera 
la  })rojection  horizontale!  commune.  Un  trouvera  tous 

MONGK.    —    I.  4 


5o  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  5l 


ces  points  de  contact  considérés  dans  le  plan  de  la 
génératrice  en  portant  AG  sur  LM,  de  a  m  e,  et  en 
menant  par  le  point  e  une  ])arallcle  à  au  ;  tous  los 
points  1%  (1,  dans  lesquels  cette  tlroitc  coupera  la 
courbe  BCDEF,  seront  les  intersections  de  la  courbe 
génératrice  avec  la  verticale  menée  par  le  point  G,  et 
indi({iieront  les  hauteurs  d'autant  de  points  do  contact 
au-dessus  du  ]>ian  horizontal.  P<tur  avoir  les  projec- 
tions verticales  de  ces  points  de  contact,  on  mènera 
par  tous  les  points  E,  C  des  horizontales  indéfinies, 
(jiii  contiendront  ces  projections  :  mais  elles  doivent 
aussi  se  trouver  sur  la  perpendiculaire  à  LM,  menée 
par  le  point  G;  donc  les  intersections  g,  g'  de  cette 
droite  avec  les  horizontales  seront  les  projeelions  des 
différents  points  de  contact. 

Actuellement,  si,  par  chaque  point  de  conlact,  on 
conçoit  une  section  faite  par  un  plan  horizontal,  cette 
section,  qui  pourra  être  regardée  comme  une  seconde 
génératrice,  sera  la  circonférence  d'un  cercle  dont 
le  centre  sera  dans  l'axe,  et  dont  la  tangente,  qui  doit 
être  perpendiculaire  à  l'extrémité  du  rayon,  sera  aussi 
perpendiculaire  au  plan  vertical  mené  par  AG,  et  dans 
le({uel  se  trouve  le  rayon  :  donc  le  plan  tangent,  qui 
doit  passer  par  cette  tangente,  sera  aussi  perpendi- 
culaire à  ce  même  plan  vertical,  et  aura,  sur  le  plan 
horizontal,  sa  trace  perpendiculaire  à  AG.  Il  ne  reste 
donc  plus,  pour  avoir  la  trace  de  chacun  des  plans 
tangents,  que  de  trouver  sa  distance  au  point  A  :  or, 
si  par  les  points  E,  C  on  mène  à  la  première  généra- 
trice les  tangentes  El,  CH,  prolongées  jusqu'à  ce 
qu'elles  rencontrent  LM  en  des  points  I,  H,  les 
droites  ol,  ali  seront  égales  à  ces  distances;  donc,  si 


52  LES   MAITRES    DE    LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


l'on  porte  ces  droites  de  A  en  i  et  de  A  en  h,  et  si  par 
les  points  i  et  h  on  mène  à  AG  des  perpendiculaires  iQ, 
/tP,  prolongées  jusqu'à  la  rencontre  de  la  droite  LM, 
on  aura,  sur  le  plan  horizontal,  les  traces  de  tous  les 
plans  tangents. 

Pour  trouver  sur  le  plan  vertical  les  traces  des 
mêmes  plans,  il  faut  concevoir,  par  chaque  point  de 
contact,  et  dans  le  plan  langent  correspondant,  une 
horizontale  prolongée  jusqu'au  plan  vertical  de  pro- 
jection; cette  droite,  qui  n'est  autre  chose  que  la  tan- 
gente au  cercle,  déterminera  sur  ce  plan  un  point  qui 
appartiendra  à  la  trace.  Or,  pour  tous  les  pohits  du 
contact,  ces  droites  ont  la  même  projection  horizon- 
tale; c'est  la  droite  GK,  menée  par  le  point  G  perpen- 
diculairement à  AG,  et  terminée  à  la  droite  LM.  Donc, 
si  par  le  point  K  on  mène  à  LM  une  perpendiculaire 
indéfinie  KA/i',  elle  contiendra  tous  les  points  de  ren- 
contre des  horizontales  avec  le  plan  vertical  de  pro- 
jection. Mais  ces  points  de  rencontre  doivent  aussi  se 
trouver  sur  les  horizontales  respectives  menées  par 
les  points  E,  G;  donc  les  intersections  /x,  k'  de  ces 
horizontales  avec  la  verticale  Kk'  seront  chacune  un 
point  de  la  trace  d'im  des  plans  tangents.  Ainsi  la 
droite  Q/i'  sera,  sur  le  plan  verlieal,  la  trace  d'un  des 
plans  tangents;  la  droite  Fk'  sera  la  trace  de  l'autre; 
et  ainsi  de  suite,  s'il  y  en  avait  un  plus  grand  nombre. 

Nous  nous  bornerons,  dans  ce  moment,  aux  trois 
exemples  précédents,  parce  qu'ils  suffisent  pour  toutes 
les  surfaces  dont  nous  avons  défini  la  génération.  Dans 
la  suite  de  cet  écrit,  nous  aurons  occasion  de  considérer 
les  générations  de  familles  de  surfaces  infiniment  plus 
nombreuses;  et  à  mesure  qu'elles  se  prét.enteront,  nous 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  53 


a|»pli(iueroiis  la  même  méthode  à  la  détermination  de 
leurs  plans  tangents  et  de  leurs  normales.  Maintenant 
nous  allons  proposer  une  question,  dans  la  solution  de 
laquelle  on  peut  employer  d'une  manière  utile  la  consi- 
dération d'un  plan  tangent. 

.')1.  QiATiuKMK  QUKSTioN.  —  Dciix  (Iroitcs  étant 
d(»nnées  {fig.  i5),  par  leurs  projections  horizon- 
talcs  AB,  CD,  et  par  leurs  projections  verticales  ah^  cd^ 
construire  les  projections  PN,  pn  de  leur  plus  courte 
distance,  c'est-à-dire,  de  la  droite  qui  est  en  même 
temps  ])erpendiculaire  à  l'une  et  à  l'autre,  et  trouver 
la  grandeur  de  cette  distance  ? 

Solution.  —  Par  la  première  des  deux  droites 
données,  concevons  un  plan  parallèle  à  la  seconde,  ce 
qui  est  toujours  possible,  puisque  si  par  un  point 
quelconque  de  la  première  on  mène  une  droite  paral- 
lèle à  la  seconde,  et  si  l'on  conçoit  que  cette  troisième 
droite  se  meuve  parallèlement  à  elle-même  le  long  de 
la  })remière,  elle  engendrera  le  plan  dont  il  s'agit.  Con- 
cevons de  plus  une  surface  cylindrique  à  base  circu- 
laire, qui  ait  pour  axe  la  seconde  droite  donnée,  et 
pour  rayon  la  distance  cherchée;  cette  surface  sera 
touchée  par  le  plan  en  une  droite  qui  sera  parallèle 
à  l'axe,  et  qui  coupera  la  première  droite  en  un  point. 
Si  par  ce  point  on  mène  une  perpendiculaire  au  plan, 
elle  sera  la  droite  demandée;  car  elle  passera  de  fait 
par  un  point  de  la  première  droite  donnée,  et  elle  lui 
sera  perpendiculaire,  puisqu'elle  sera  perpendiculaire 
à  un  plan  qui  passe  par  cette  droite  :  elle  coupera  do 
plus  la  seconde  droite  perpendiculairement,  puisqu'elle 


54  LES    MAITRES    DE    LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


sera  un  rayon  du  cylindre  dont  cette  seconde  droite 
est   l'axe. 

Il  ne  s'agit  donc  plus  que  de  construire  suroessive- 
lïient  toutes  les  parties  de  cette  solution. 

i*^  Pour  construire  les  traces  du  plan  parallèle  aux 
deux  droites  données,  on  mènera  par  un  point  quel- 
conque de  la  première,  une  parallèle  à  la  seconde;  les 
projections  de  cette  parallèle  seront  parallèles  aux 
droites"  CD,  cd.  La  droite  cd  coupant  la  droite  ah  au 
point  h,  si  l'on  abaisse  de  ce  point  la  perpendiculaire 
hb'  B  sur  l'intersection  comnuine  LM  des  })lans  de 
projection,  et  si  l'on  mène  par  le  point  do  la  première 
droite,  dont  les  projections  sont  B  et  h,  la  parallèle 
à  la  seconde  droite,  cette  parallèle  aura  pour  projec- 
tions horizontale  et  verticale  les  droites  BE,  cd;  elle 
rencontrera  le  plan  horizontal  au  point  E,  qu'on 
obtient  en  menant  la  droite  cE  perpendiculairement 
à  l'intersection  commune  LM.  Donc,  si  l'on  joint  les 
points  A  et  E  par  une  droite,  cette  droite  sera  la  trace 
du  plan  parallèle  aux  deux  droites  données. 

2^  Pour  construire  la  ligne  de  contact  du  plan  paral- 
lèle aux  deux  droites  données  avec  la  surface  cylin- 
drique, il  faut  observer  que  cette  ligne  de  contact  est 
parallèle  à  la  seconde  droite  donnée,  et  qu'un  seul 
point  de  cette  ligne  détermine  sa  position.  Pour  trouver 
ce  point,  on  mène  par  un  point  quelconque  de  la  se- 
conde droite  qui  est  l'axe  du  cylindre  (par  exemple, 
par  le  point  C,  où  elle  rencontre  le  plan  horizontal), 
un  plan  perpendiculaire  à  cet  axe;  l'intt  rsection  de  ce 
plan  avec  le  plan  parallèle  aux  deux  droites,  est  la 
ligne  de  contact  de  ce  dernier  plan  avec  la  base  circu- 
laire de  la  surface  cylindrique. 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  55 

Le  plan  vertical  CD  ayant  tourné  autour  do  sa 
trace  CD  pour  s'applicpier  sur  le  plan  horizontal,  on 
construira  l'angle  ^'Cp  que  la  seconde  droite  donnée 
fait  avec  le  plan  horizontal,  en  prenant  une  verticale 
^'(5  égale  à  b' b.  Le  même  plan  vertical  CD  coupe  le 
plan  parallèle  aux  deux  droites,  guivant  la  droite  FK 
parallèle  à  Cl).  D'où  il  suit  que  le  plan  ])erj)endicu- 
laire  à  l'axe  du  cylindre  mené  par  le  point  C,  coupe  le 
plan  vertical  CD  suivant  la  droite  CK  perpendiculaire 
à  C  (3'  ou  à  1/K,  et  le  plan  horizontal  suivante  la  droite 
Cil  perpendiculaire  à  CD. 

Ce  })lan  perpendiculaire  à  l'axe  du  cylindre,  tournant 
autour  de  sa  trace  horizontale  CH  pour  venir  s'appli- 
quer sur  le  plan  horizontal,  le  point  K  s'abaisse  en  K'; 
le  point  H  de  la  trace  AE  reste  fixe,  et  la  droite  HK' 
est  l'intersection  du  plan  tangent  à  la  surface  cylin- 
drique, et  du  plan  perpendiculaire  à  l'axe  de  cette 
surface.  Donc,  si  du  point  C  on  abaisse  la  perpendicu- 
laire CI  sur  cette  droite  HK',  le  cercle  décrit  du 
point  C  comme  centre,  avec  le  rayon  CI,  est  la  base 
de  la  surface  cylindrique,  et  la  droite  IN,  parallèle 
à  CD,  est  la  projection  horizontale  de  l'arête  de  con- 
tact. Cette  arête  coupe  la  première  droite  en  un  point 
dont  les  projections  sont  N  et  n,  et  par  lequel  passe 
la  perpendiculaire  aux  deux  droites  données. 

3^  Connaissant  les  projections  N,  n  d'un  des  points 
de  la  perpendiculaire  commune  demandée,  pour  avoir 
celles  de  cette  perpendiculaire,  il  suffira  de  mener  par 
le  point  N  la  droite  NPQ  perpendiculaire  à  la  trace  AE. 
Cette  droite  coupe  la  projection  horizontale  CD  de  la 
seconde  droite  donnée  au  point  P,  extrémité  de  la 
projection   horizontale  NP  de  la  perpendiculaire  de- 


56  LES    MAITRES    DE    LA    PENSÉE    SCIENTIFIQUE. 

mandée.  La  projection  verticale  de  cette  perpendicu- 
laire étant  np,  on  en  construira  la  grandeur  par  le  pro- 
cédé de  la  figure  3. 

,  La  considération  d'une  surface  cylindrique  touchée 
par  un  plan  n'était  point  nécessaire  pour  la  solution 
de  la  question  précédente.  Après  avoir  imaginé  un  plan 
parallèle  aux  deux  droites  données,  on  aurait  pu,  par 
chacune  de  ces  droites,  mener  à  ce  plan  un  plan  per- 
pendiculaire ;  et  l'intersection  de  ces  deux  derniers  plans 
aurait  été  la  direction  de  la  plus  courte  distance 
demandée.  Nous  nous  contenterons  d'énoncer  cette 
seconde  manière,  en  conseillant  au  lecteur  d'en  cher- 
cher la  construction  pour  s'exercer. 

32.  Dans  les  différentes  questions  que  nous  avons 
résolues  sur  les  plans  tangents  aux  surfaces  courbes, 
nous  avons  toujours  supposé  que  le  point  par  l(K[uel 
il  fallait  mener  le  plan  tangent  était  pris  sur  la  sur- 
face, et  qu'il  était  lui-même  le  point  de  contact  :  cette 
condition  seule  suffisait  pour  déterminer  la  position 
du  plan.  Mais  il  n'en  est  pas  de  même  lorsque  le  point 
par  lequel  le  plan  doit  passer  est  pris  hors  de  la  sur- 
face. 

Pour  que  la  position  d'un  plan  soit  déterminée,  il 
faut  qu'il  satisfasse  à  trois  conditions  différentes,  équi- 
valentes chacune  à  celle  de  passer  par  un  point  donné  : 
or,  en  général,  la  propriété  d'être  tangent  à  une  sur- 
face courbe  donnée,  lorsque  le  point  de  contact  n'est 
pas  indiqué,  n'équivaut  qu'à  une  seule  de  ces  condi- 
tions. Si  donc  c'est  par  des  conditions  de  cette  nature 
que  l'on  se  propose  de  déterminer  la  position  d'un 
plan,  il  en  faut,  en  général,  trois.  En  effet,  supposons 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE. 


quo  nous  ayons  trois  surfaces  courbes  données,  et 
qu'un  plnn  soit  tangint  à  l'une  d'entre  elles,  en  un 
point  quelconque  ;  nous  pouvons  concevoir  que  ce  plan 
se  meuve  autour  de  la  surface,  sans  cesser  de  la  toucher  : 
il  pourra  le  faire  dans  toutes  sortes  de  sens;  seulement 
le  point  de  contact  se  mouvra  sur  la  surface  à  mesure; 
que  le  plan  langent  changera  de  position,  et  la  direc- 
tion du  mouvement  du  point  de  contact  sera  dans  le 
même  s(;ns  que  celle  du  mouvement  du  plan.  Conce- 
vons que  ce  mouvement  se  fasse  dans  un  certain  sens 
jus([u'à  C(;  que  h)  i>lan  rencontre  la  seconde  surface 
et  la  touche  en  un  certain  point  ;  alors  le  plan  sera  en 
même  temps  tangent  aux  deux  premières  surfaces,  et 
sa  i)Osition  ne  sera  pas  encore  arrêtée.  Nous  pouvons 
en  eiïet  concevoir  que  le  plan  tourne  autour  des  deux 
surfaces,  sans  cesser  de  les  toucher  l'une  cl  l'autre.  Il 
ne  sera  plus  libre,  coninu;  aupariuaul,  de  se  mouvoir 
dans  toutes  sortes  de  sens,  et  il  ne  jtourra  plus  le  faire 
que  dans  un  seul.  A  mesure  que  le  plan  eh;!n<^(ra  de  })0- 
sition,  les  deux  points  de  contact  se  mouvront  chacun 
sur  la  surface  à  laquelle  il  appartient  ;  d(;  manière  (juc 
si  l'on  conçoit  une  droite  menée  i)ar  ces  deux  points, 
leurs  mouvements  seront  dans  le  même  sens  par  rap- 
port à  cette  droite,  quand  le  plan  touchera  les  deux 
surfaces  du  même  côté;  et  ils  seront  dans  des  sens 
contraires,  quand  le  plan  louchera  les  deux  surfaces, 
l'une  d'un  côté,  l'autre  de  l'autre.  Enfin  concevons 
que  ce  mouvement,  qui  est  le  seul  qui  puisse  avoir 
encore  lieu,  continue  jusqu'à  ce  que  le  plan  touche 
la  troisième  surface  en  un  certain  point  :  alors  la  po- 
sition du  plan  sera  arrêtée;  et  il  ne  pourra  plus  se  mou- 
voir sans  cesser  d'être  tangent  à  l'une  des  trois  surfaces. 


58  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE  SCIENTIFIQUE. 


On  voit  donc  que  pour  déterminer  la  position  d'un 
plan,  au  moyen  de  contacts  indéterminés  avec  des 
surfaces  courbes  données,  il  en  faut  en  général  trois. 
Ainsi,  si  l'on  se  proposait  de  mener  un  plan  tangent 
à  une  surface  courbe  donnée,  cette  condition  n'équi- 
vaudrait qu'à  une  seule  des  trois  auxquelles  le  plan 
peut  satisfaire  :  on  pourrait  donc  encore  en  prendre 
deux  autres  à  volonté,  et,  par  exenqde,  faire  passer 
le  plan  par  deux  points  donnés,  ou,  ce  qui  revient  au 
même,  par  une  droite  donnée.  S'il  fallait  que  le  plan 
fût  tangent  en  même  temps  à  deux  surfaces,  il  y  aurait 
deux  conditions  employées;  il  n'y  en  aurait  plus  qu'une 
disponible,  et  l'on  ne  pourrait  assujétir  de  plus  le  plan 
qu'à  passer  par  un  point  donné.  Enfin,  si  le  plan  devait 
toucher  en  même  temps  trois  surfaces  données,  on  ne 
pourrait  plus  disposer  d'aucune  condition,  et.  sa  posi- 
tion serait  déterminée. 

Ce  que  nous  venons  de  dire  regarde  les  surfaces 
courbes  en  général;  il  faut  néanmoins  en  excepter  ce 
qui  a  rapport  à  toutes  les  surfaces  cylindriques,  à 
toutes  les  surfaces  coniques,  et  à  toutes  les  surfaces 
développables  ;  car,  pour  ce  genre  de  surfaces,  le  con- 
tact avec  un  pian  n'est  pas  réduit  à  un  point  unique; 
il  s'étend  tout  le  long  d'une  droite  indéfinie  qui  se 
confond  avec  la  génératrice  dans  une  de  ses  positions. 
La  propriété  qu'aurait  un  plan  de  toucher  une  seule 
de  ces  surfaces,  équivaudrait  à  deux  conditions, 
puisqu'elle  l'assujétirait  à  passer  par  une  droite;  et  il 
ne  resterait  plus  qu'une  seule  condition  disponible, 
comme,  par  exemple,  de  passer  par  un  point  donné. 
On  ne  pourrait  donc  pas  proposer  de  mener  un  plan 
qiii  fût  en  même  temps  tangent  à  deux  de  ces  surfaces, 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  JQ 


et  à  plus  forlo  raison  à  trois,  à  moins  qu'il  n'y  eût 
quelcjucs  circonstances  parlicuiicres  qui  rendissent  ces 
conditions  compatibles. 

.'j3.  Il  nVst  peut-êlre  ])as  inutile,  avant,  «(ue  d'aliir 
plus  loin,  de  donner  quelques  exemples  de  la  nécessité 
où  l'on  peut  être  de  nuMier  des  plans  tangents  à  des 
surfaces  courbes  par  des  points  pris  au  dehors  d'elles. 
Nous  prendrons  le  premier  de  ces  exemples  dans  la 
construction  des  fortifications. 

rA)rsqu'on  expose  les  principes  généraux  de  la  for- 
tilicalion,  on  suppose  d'abord  (pie,  dans  tous  les  sens, 
le  terrain  qui  environne  la  place  forte  à  la  portée  du 
canon  soit  horizontal,  et  ne  présente  aucune  émi- 
nence  qui  puisse  donner  quelque  avantage  à  l'assié- 
geant :  puis,  dans  cette  hypothèse,  on  détermine  le 
tracé  du  corps  de  place,  des  demi-lunes,  des  chemins 
couverts,  et  des  ouvrages  avancés;  et  l'on  indique  les 
commandements  que  les  difïércntcs  parties  de  la  for- 
tification doivent  avoir  les  unes  sur  les  autres,  afin 
qu'elles  contribuent  toutes,  de  la  manière  la  plus  elli- 
cace,  à  leur  défense  réciproque.  Ensuite,  pour  faire 
l'application  de  ces  principes  au  cas  où  le  terrain  qui 
environne  la  place  présenterait  quelque  liautiur  dont 
l'assiégeant  pourrait  profiter,  et  de  laquelle  il  faudrait 
que  la  fortification  fût  défilée,  il  ne  reste  plus  qu'une 
considération  nouvelle.  S'il  n'y  a  qu'une  seule  hauteur, 
on  choisit  dans  la  place  deux  points  par  lesquels  on 
conçoit  un  plan  tangent  à  la  hauteur  de  laquelle  on 
veut  se  défiler  :  ce  plan  tangent  se  nomme  phin  de 
défilement;  et  l'on  donne  à  toutes  les  parties  de  la  for- 
tification le  même  relief  au-dessus  du  plan  de  défile- 


6o  LES   MAITRES    DE   LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE. 


ment,  qu'elles  auraient  eu  au-dessus  du  plan  horizontal, 
si  le  terrain  eût  été  de  niveau  :  par  là  elles  ont  les  unes 
sur  les  autres,  et  toutes  ensemble  sur  la  hauteur  voi- 
sine, le  mêiiK;  commandement  que  sur  un  terrain 
horizontal;  et  !a  fortification  a  les  mêmes  avantages 
que  dans  le  premier  cas.  Quant  au  choix  des  deux 
points  par  lesquels  doit  passer  le  plan  de  défilement, 
il  doit  satisfaire  aux  deux  conditions  suivantes  : 
i'^  que  l'angle  forjnc  par  le  pian  avec  l'horizon  soit 
le  plus  petit  possible,  afin  que  les  terre-pleins  ayant 
moins  de  pente,  le  service  de  la  défense  rencontre 
moins  de  diiïicultés;  2^  que  le  relief  de  la  fortification 
au-dessus  du  terrain  naturel  soit  aussi  le  plus  petit 
possible,  afin  que  sa  construction  entraîne  moins  de 
travail  et  moins  de  dépense. 

Si,  dans  les  environs  de  la  place,  il  y  a  deux  hauteurs 
desquelles  la  fortification  doive  être  en  même  temps 
défilée,  le  plan  de  défil(;nu  nt  doit  être  en  même  temps 
langent  aux  surfaces  de  ces  deux  éminences  :  il  ne 
reste  plus,  pour  fixer  sa  position,  qu'une  seule  condi- 
tion disponible,  et  l'on  en  dispose;  c'est-à-dire,  on 
choisit  dans  la  place  le  point  par  lequel  ce  plan  doit 
passer,  de  manière  que  l'on  satisfasse  le  mieux  pos- 
sible  aux   conditions    énoncées   dans   le   premier   cas. 

^Î4.  Le  second  exemple  que  nous  rapporterons  sera 
encore  pris  dans  la  peinture. 

Les  surfaces  des  corps,  surtout  lorsqu'elles  sont 
polies,  présentent  des  points  brillants,  d'un  éclat  com- 
parable à  celui  du  corps  lumineux  qui  les  éclaire.  La 
vivacité  de  ces  points  est  d'autant  plus  grande,  et  leur 
étendue  est  d'autant  plus  petite,  que  les  surfaces  sont 


GÉOMÉTRIE    DESCRIPTIVE.  6l 

plus  polies.  Lorsque  les  surfaces  sont  mates,  les  points 
brillants  ont  beaucoup  moins  d'éclat,  et  ils  occupent 
une  partie  plus  grande  de  la  surface. 

Pour  chaque  surface,  la  position  du  point  brillant 
est  déterminée  par  la  condilion  suivante  :  que  le 
rayon  de  lumière  incident,  et  le  rayon  réfléchi  dirigé 
ù  Tœil  du  spectateur,  soient  dans  un  même  plan  pcr- 
]);'ndiculaire  au  plan  tangent  en  ce  point,  et  fassent 
avec  ce  plan  des  angles  égaux,  parce  que  le  point 
brillant  de  la  surface  fait  fonction  de  miroir,  et  renvoie 
à  l'œil  une  partie  de  l'image  de  robjel  lumineux.  La 
détermination  de  ce  point  exige  une  extrême  préci- 
sion ;  et  quand  même  le  dessin  serait  de  la  plus  grande 
correction,  quand  même  les  contours  apparents 
seraient  tracés  avec  une  exactitude  mathématique, 
la  moindre  erreur  commise  dans  la  position  du  point 
brillant  en  apporterait  de  très  grandes  dans  l'appa- 
rence des  formes.  Nous  n'en  apporterons  qu'une  seule 
preuve,  mais  bien  frappante. 

La  surface  du  globe  de  l'œil  est  polir;  elle  est  de  plus 
enduite  d'une  légère  couche  d'humidité  qui  en  rend 
le  poli  plus  parfait  :  aussi  lorsqu'on  observe  un  œil 
ouvert,  on  voit  sur  sa  surface  un  point  brillant  d'un 
grand  éclat,  d'une  très  petite  étendue,  et  dont  la  posi- 
tion dépend  de  celle  de  l'objet  éclairant  et  de  l'obser- 
vateur. Si  la  surface  de  l'œil  était  parfaitement  sphé- 
rique,  l'œil  pourrait  tourner  autour  de  son  axe  ver- 
tical, sans  que  la  position  du  point  brillant  éprouvât 
le  moindre  changement  :  mais  cette  surface  est  allongée 
dans  le  sens  de  l'axe  de  la  vision:  et  lorsqu'elle  tourne 
autour  de  l'axe  vertical,  la  position  du  point  brillant 
change.  Un  long  exercice  nous  ayant  rendus  très  sen- 


6-1  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

?:ib]es  à  ce  changement,  il  entre  pour  beaucoup  dans  le 
jugement  que  nous  portons  sur  ]a  direction  du  globe 
de  l'œil.  C'est  principalement  par  la  différence  des 
positions  des  points  brillants  sur  les  globes  des  deux 
yeux  d'une  personne,  que  nous  jugeons  si  elle  louche 
ou  si  elle  ne  louche  pas;  que  nous  reconnaissons  qu'elle 
nous  regarde,  et,  lorsqu'elle  ne  nous  regarde  pas,  de 
quel  côté  elle  porte  la  vue. 

En  rapportant  cet  exemple,  nous  ne  prétendons  pas 
que,  dans  un  tableau,  il  faille  déterminer  géométri- 
quement la  position  du  point  brillant  sur  le  globe  de 
l'œil;  nous  avons  seulement  l'inlention  de  faire  voir 
comment  de  légères  erreurs  dans  la  position  de  ce  point 
en  apportent  de  considérables  dans  la  forme  apparente 
de  l'objet,  quoique  d'ailleurs  le  tracé  de  son  contour 
apparent  reste  le  même. 

35.  Passons  actuellement  à  la  détermination  des 
plans  tangents  aux  surfaces  courbes  menés  par  des 
points  pris  au  dehors  d'elles. 

La  surface  de  la  sphère  est  une  des  plus  simples  que 
Ton  puisse  considérer;  elle  a  des  générations  communes 
avec  un  grand  nombre  de  surfaces  différentes  :  on  pour- 
rait, par  exemple,  la  ranger  parmi  les  surfaces  de  révo- 
lution, et  ne  rien  dire  de  parUculicr  pour  elle.  Mais  sa 
régularité  donne  lieu  à  des  résultats  remarquables, 
dont  quelques-uns  sont  piquants  par  leur  nouveauté, 
et  dont  nous  allons  nous  occuper  d'abord,  moins 
pour  eux-mêmes,  que  pour  acquérir,  dans  l'observa- 
tion des  trois  dimensions,  une  habitude  dont  nous 
aurons  besoin  pour  des  objets  plus  généraux  et  plus 
utiles. 


GÉOMÉTRIE    OF-SCRIPTIVE.  ()3 


36.  Première  <^>uEsrioN.  —  Par  une  droite  donnée 
mener  un  plan  tangent  à  la  surface  d'une  sphère  donnée  ? 

Svlullon.  —  Première  manière.  —  Soient  A  et  a 
[fig.  i6)  les  deux  projections  du  centre  de  la  sphère; 
BCD,  la  projection  du  grand  cercle  horizontal;  EF 
et  r/,  les  deux  projections  indéfinies  de  la  droite 
donnée.  Soit  conçu,  par  le  centre  de  la  sphère,  un  plan 
perpendiculaire  à  la  droite,  et  soient  construites,  par 
la  méthode  que  nous  avons  donnée  (fig.  6),  les  pro- 
jections G  et  i^  du  point  de  rencontre  de  la  droite  avec 
le    ])IiUi. 

Cela  posé,  il  est  évident  que,  par  la  droite  donnée, 
on  peut  mener  à  la  sphère  deux  plans  tangents  dont 
le  premier  la  touchera  d'un  côté,  le  second  la  touchera 
de  l'autre,  et  entre  lesquels  elle  sera  placée;  ce  qui 
déterminera  deux  points  de  contact  diiïérents,  dont 
il  s'agit  d'abord  de  construire  les  projections. 

Pour  cela,  si,  du  centre  de  la  sphère,  on  conçoit:  une 
perpendiculaire  abaissée  sur  chacun  des  deux  plans 
tangi'nts,  chacune  d'elles  aboutira  au  point  de  contact 
de  la  surface  de  la  sphère  avec  le  plan  correspondant; 
et  elles  seront  toutes  deux  dans  le  plan  perpendicu- 
laire à  la  droite  donnée  :  donc  les  deux  points  de  con- 
tact seront  dans  la  section  de  la  sphère  par  le  plan 
perpendiculaire;  section  qui  sera  la  circonférence  d'un 
des  grands  cercles  de  la  sphère,  et  à  laquelle  seront 
tangentes  les  deux  sections  faites  dans  les  pians  tan- 
gents par  le  même  plan. 

Si,  dans  le  pran  perpendiculaire,  et  par  le  centre  de 
la  sphère,  on  conçoit  une  horizontale,  dont  on  aura 
la  projectioA  verticale  en  menant  l'horizontale  a/i,  et 


64  LES    MAITRES    DE    LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  G5 

dont  on  aura  l'autre  projection  en  abaissant  sur  EF 
la  perpendiculaire  AH;  et  si  Ton  conçoit  que  le  plan 
perpendiculaire  tourne  autour  de  cette  horizontale 
comme  charnière,  jusqu'à  ce  qu'il  devienne  lui-même 
horizontal;  il  est  évident  que  sa  section  avec  la  sur- 
face de  la  sphère  viendra  se  confondre  avec  la  circon- 
férence BGD,  que  les  deux  points  de  contact  seront 
alors  sur  cette  circonférence,  et  que  si  l'on  construisait 
le  point  J,  où  la  rencontre  du  plan  perpendiculaire 
avec  la  droite  donnée  vient  s'appliquer  par  ce  mouve- 
ment, les  tangentes  JC,  JD,  menées  au  cercle  BGD, 
détermineraient  ces  doux  points  de  contact  dans  la 
position  où  on  les  considère  alors.  Or,  il  est  facile  de 
construire  le  point  J,  ou,  ce  qui  revient  au  même,  de 
trouver  sa  distance  au  point  H  :  car  la  projection 
horizontale  de  cette  distance  est  GII,  et  la  différence 
des  hauteurs  verticales  de  ses  extrémités  est  gg'  ;  donc, 
si  l'on  porte  GH  sur  l'horizontale  ah  de  g'  en  /t,  l'hypo- 
ténuse hg  sera  la  grandeur  de  cette  distance;  donc, 
portant  gh  sur  EF  de  H  en  J,  et  menant  les  deux  tan- 
gentes JC,  JD,  les  deux  points  de  contacts  C,  D  seront 
déterminés  dans  la  position  qu'ils  ont  prise,  lorsque  le 
plan  perpendiculaire  a  été  abattu  sur  le  plan  horizontal. 
Actuellement,  pour  trouver  leurs  projections  dans 
la  position  qu'ils  doivent  avoir  naturellement,  il  faut 
concevoir  que  le  plan  perpendiculaire  retourne  à  sa 
position  primitive,  en  tournant  encore  autour  de 
l'horizontale  AH  comme  charnière,  et  qu'il  entraîne 
avec  lui  le  point  J,  les  deux  tangentes  JC,  JD,  pro- 
longées jusqu'à  ce  qu'elles  coupent  AH  en  des  points  K, 
K',  et  la  corde  CD  qui  coupera  aussi  la  même  droite 
AH  en  un  point  N.  Il  est  évident  que,  dans  ce  mouve- 

MO.NGK.  —  1.  5 


66  LES   MAITRES   DE   LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE, 


ment,  les  points  K,  K'  et  N,  qui  sont  sur  la  charnière, 
seront  fixes,  et  que  les  deux  points  de  contact  C,  D 
décriront  des  arcs  de  cercle  qui  seront  dans  des  plans 
perpendiculaires  à  la  charnière,  et  dont  on  aura  les 
projections  horizontales,  en  abaissant  des  points  C, 
D,  sur  AH,  les  perpendiculaires  indéfinies  CP,  DQ. 
Donc  les  projections  horizontales  des  deux  points  de 
contact  se  trouveront  sur  les  deux  droites  CP,  DQ. 
Mais  dans  le  mouvement  rétrograde  du  plan  perpen- 
diculaire, les  deux  tangentes  JGK',  JKD  ne  cessent 
pas  de  passer  par  les  points  de  contact  respectifs;  et 
lorsque  ce  plan  est  parvenu  dans  sa  position  primi- 
tive, le  point  J  se  trouve  de  nouveau  projeté  en  G, 
et  les  deux  tangentes  sont  projetées  suivant  les 
droites  GK',  GK.  Donc  ces  deux  dernières  droites 
doivent  aussi  contenir  chacune  la  projection  horizon- 
tale d'un  des  points  de  contact,  donc  enfin  les  inter- 
sections de  ces  deux  droites,  avec  les  droites  respectives 
CP,  DQ,  détermineront  les  projections  horizontales  D 
et  S  des  deux  points  de  contact  qui  se  trouveront 
avec  le  point  N  sur  une  même  ligne  droite. 

Poul"  trouver  les  projections  verticales  des  mêmes 
points,  on  mènera  d'abord  sur  LM  les  perpendiculaires 
indéfinies  Rr,  S  s;  puis  si  l'on  projette  les  points  K, 
K',  en  A-,  A',  et  si,  par  le  point  g,  on  mène  les  droites 
gA',  gA',  on  aura  les  projections  verticales  des  deux 
mêmes  tangentes.  Ces  droites  contiendront  donc  les 
projections  des  points  de  contact  respectifs;  donc  les 
points  r,  s  de  leurs  intersections  avec  les  verticales  Rr, 
S  5  seront  les  projections  demandées. 

Les  projections  horizontales  et  verticales  des  deux 
points  de  contact  étant  trouvées,  pour  construire  sur 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  67 

1r  plan  horizontal  les  traces  des  deux  plans  tangents, 
on  concevra,  par  chacun  des  points  de  contact,  une 
parallèle  à  la  droite  donnée.  Ces  droites  seront  dans  les 
plans  tangents  respectifs,  et  Ton  aura  leurs  projections 
horizontale  et  verticale  en  menant  RU,  SV  parah 
lèles  à  EF,  et  rw,  s<^  parallèles  à  ef.  On  construira,  sur 
le  plan  horizontal,  la  trace  T  de  la  droite  donnée,  et  les 
traces  U,  V  des  deux  dernières  droites;  et  les  droites 
TU,  TV  seront  les  traces  des  deux  plans  tangents. 

Au  lieu  de  concevoir,  par  les  points  de  contact,  de 
nouvelles  lignes  droites,  on  pourrait  trouver  les  traces 
des  deux  tangentes  GR,  GS,  qui  rempliraient  le  nienic 
but.  Quant  aux  traces  des  deux  mêmes  plans  avec  le 
plan  vertical,  on  les  trouvera  par  la  méthode  que  nous 
avons  déjà  souvent  employée. 

Cette  solution  pourrait  être  rendue  beaucoup  plus 
élégante,  en  faisant  passer  les  deux  plans  de  projection 
par  le  centre  même  de  la  sphère.  Par  là  les  deux  pro- 
jections de  la  sphère  se  confondraient  dans  le  même 
cercle,  et  les  prolongements  des  lignes  droites  seraient 
moins  longs.  Nous  n'avons  séparé  les  deux  projec- 
tions que  pour  mettre  plus  de  clarté  dans  l'exposition. 
Il  est  facile  actuellement  de  donner  à  la  construction 
tonte  la  concision  dont  elle  est  susceptible. 

37.  Seconde  manière.  —  Soient  A  et  a  (/?g.  17)  les 
deux  projections  du  centre  de  la  sphère,  AB  ou  ah  son 
rayon,  BGD  la  projection  de  son  grand  cercle  hori- 
zontal, et  EF,  ef  les  projections  de  la  droite  donnée. 
Si  l'on  conçoit  le  plan  du  grand  cercle  horizontal  pro- 
longé jusqu'à  ce  qu'il  coupe  la  droite  donnée  en  un 
certain  point,  on  aura  la  projection  verticale  de  ce  plan 


68  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

en  menant  par  le  point  a  l'horizontale  indéfinie  bag; 
le  point  g,  où  cette  horizontale  coupera  e/,  sera  la  pro- 
jection verticale  du  point  de  rencontre  du  plan  avec 
la  droite  donnée,  et  l'on  aura  la  projection  horizontale 
G  de  ce  point,  en  projetant  g  sur  EF. 

Cela  posé,  si,  en  prenant  ce  même  point  pour  sommet, 
on  conçoit  une  surface  conique  qui  enveloppe  la  sphère, 
et  dont  toutes  les  droites  génératrices  la  touchent 
chacune  en  un  point,  on  aura  les  projections  des  deux 
droites  génératrices  horizontales  de  cette  surface 
conique  en  menant  par  le  point  G  les  deux  droites  GC, 
GD,  tangentes  au  cercle  BCD,  et  qui  le  toucheront  en 
deux  points  C,  D,  qu'il  sera  facile  de  déterminer.  La 
surface  conique  touchera  celle  de  la  sphère  dans  la  cir- 
conférence d'un  cercle,  dont  la  droite  CD  sera  le  dia- 
mètre, dont  le  plan  sera  perpendiculaire  à  l'axe  du 
cône,  et  par  conséquent  vertical,  et  dont  la  projection 
horizontale  sera  la  droite  CD. 

Si,  par  la  droite  donnée,  on  conçoit  deux  plans  tan- 
gents à  la  surface  conique,  chacun  d'eux  la  touchera 
suivant  une  de  ces  droites  génératrices,  qui  sera  en 
même  temps  sur  la  surface  conique  et  sur  le  plan; 
et  parce  que  cette  droite  génératrice  touche  aussi  la 
surface  de  la  sphère  en  un  de  ses  points  qui  se  trouve 
sur  la  circonférence  du  cercle  projeté  en  GD,  il  s'ensuit 
que  ce  point  est  en  même  temps  sur  la  surface  conique, 
sur  le  plan  qui  la  touche,  sur  la  surface  de  la  sphère, 
et  sur  la  circonférence  du  cercle  projeté  en  CD,  et  qu'il 
est  un  point  de  contact  commun  à  tous  ces  objets. 
Donc;  i°les  deux  plans  tangents  à  la  surface  conique 
sont  aussi  tangents  à  la  surface  de  la  sphère,  et  sont 
ceux  dont  il  faut  déterminer  la   position;   2^  leurs 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  69 

points  de  contact  avec  la  sphère,  étant  dans  la  circon- 
férence du  cercle  projeté  en  CD,  seront  eux-mêmes 
projetés  quelque  part  sur  cette  droite;  3°  la  droite  qui 
passe  par  les  deux  points  de  contact,  étant  comprise 
dans  le  plan  du  même  cercle,  sera  projetée  elle-même 
indéfiniment  sur  CD. 

Actuellement,  faisons  pour  le  plan  d'un  grand  cercle, 
parallèle  à  celui  de  la  projection  verticale,  la  même 
opération  que  nous  venons  de  faire  pour  le  plan  du 
grand  cercle  horizontal.  La  projection  horizontale  de 
ce  plan  sera  la  droite  BAH,  indéfiniment  parallèle 
à  LM;  le  point  où  il  rencontre  la  droite  donnée  sera 
projeté  horizontalement  à  l'intersection  H  des  deux 
droites  EF,  BAH;  et  l'on  aura  sa  projection  verticale 
en  projetant  le  point  H  sur  ef  en  h.  Si  l'on  conçoit  une 
nouvelle  surface  conique  dont  le  sommet  soit  en  ce 
point  de  rencontre,  et  qui  enveloppe  la  sphère  comme 
la  première,  on  aura  les  projections  verticales  des  deux 
droites  génératrices  extrêmes  de  cette  surface,  en 
menant  parle  point  A,  au  cercle  6 Kl,  les  tangentes  ^K, 
h  I,  qui  le  toucheront  en  des  points  K,  I,  que  l'on  déter- 
minera. Cette  seconde  surface  conique  touchera  celle 
de  la  sphère  dans  la  circonférence  d'un  nouveau  cercle 
dont  Kl  sera  le  diamètre,  et  dont  le  plan,  qui  sera 
perpendiculaire  à  celui  de  la  projection  verticale,  sera 
par  conséquent  projeté  indéfiniment  sur  Kl.  La  cir- 
conférence de  ce  cercle  passera  aussi  par  les  deux 
points  de  contact  de  la  sphère  avec  les  plans  tangents 
demandés;  donc  les  projections  verticales  de  ces  deux 
points  de  contact  seront  quelque  part  sur  Kl;  donc 
aussi  la  droite  qui  joint  ces  deux  points  sera  projetée 
sur  la  même  droite  KL 


70  LES   MAITRES   DE   LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

Ainsi  la  droite  menée  par  les  deux  points  de  contaet 
est  projetée  horizontalement  sur  CD,  et  verticalement 
sur  K 1  ;  elle  rencontre  le  plan  du  grand  cercle  horizontal 
en  un  point,  dont  la  projection  verticale  est  à  l'inter- 
seclion  n  de  Kl,  avec  bag,  et  dont  on  aura  la  projec- 
tion horizontale  N  en  piojetant  le  point  n  sur  CD. 

Cela  fait,  concevons  que  Je  plan  du  cercle  v«  rtical, 
projeté  en  CD  ,  tourne  autour  de  son  diamètre 
horizontal  comme  charnière,  pour  devenir  lui-même 
horizontal,  et  qu'il  entraîne  avec  lui,  dans  son  mou- 
vement, les  deux  points  de  contact  par  lesquels  passe 
sa  circonférence,  et  la  droite  qui  joint  ces  deux  points. 
On  construira  ce  cercle  dans  cette  nouvelle  position, 
en  décrivant  sur  CD,  comme  diamètre,  le  cercle  CPDQ; 
et  si  l'on  construisait  la  position  que  prend  la  droite 
des  deux  points  de  contact,  elle  couperait  la  circonfé- 
rence CPDQ  en  deux  points,  qui  les  détermineraient 
sur  cette  circonférence  considérée  dans  sa  position 
horizontale. 

Or,  le  point  N  de  la  droite  des  deux  contacts,  étant 
sur  la  charnière  CD,  ne  change  pas  de  position  dans  le 
mouvement.  Cette  droite  doit  donc  encore  passer  parce 
point,  lorsqu'elle  est  devenue  horizontale.  De  plus,  le 
point  où  elle  rencontre  le  plan  du  grand  cercle  paral- 
lèle à  la  projection  verticale,  point  dont  la  projection 
horizontale  est  à  la  rencontre  0  des  deux  droites  CD 
BAH,  et  dont  on  aura  la  projection  verticale  t  en  pro- 
jetant le  point  0  sur  Kl;  ce  point,  dis-je,  dans  son 
mouvement  autour  de  la  charnière  CD,  décrit,  un  quart 
de  cercle  vertical  perpendiculaire  à  CD,  et  dont  le 
rayon  est  la  verticale  ot;  donc,  si  l'on  mène,  par  le 
point  0,  une  perpendiculaire  à  CD,  et  si,  sur  cette  per- 


CEOMéTRIE   DESCRIPTIVE. 


peiidiculaire,  on  porte  ot  de  0  en  T,  le  point  T  sera  un 
de  ceux  de  la  droite  des  contacts,  lorsqu'elle  est  de- 
venue horizontale.  Donc,  si,  par  les  points  N  et  T,  on 
mène  une  droite,  ses  deux  points  de  rencontre  P,  Q, 
avec  la  circonférence  CPDQ,  seront  les  deux  points  de 
contact  considérés  dans  le  plan  vertical  abattu. 

Pour  avoir  les  projections  horizontales  des  deux 
mêmes  points  dans  leurs  positions  naturelles,  il  faut 
concevoir  que  le  cercle  CPDQ  retourne  dans  sa  posi- 
tion primitive  en  tournant  sur  la  même  charnière  CD. 
Dans  ce  mouvement,  les  deux  points  P,  Q  décriront 
des  quarts  de  cercle  dans  des  plans  verticaux,  perpen- 
diculaires à  CD,  et  dont  les  projections  horizontales 
seront  les  perpendiculaires  PR  et  QS,  abaissées  sur  CD. 
Donc,  les  projections  horizontales  des  deux  points  de 
contact  seront  respectivement  sur  les  droites  PR 
et  QS  :  or,  nous  avons  vu  qu'elles  devaient  être  aussi 
sur  CD;  donc  elles  seront  aux  deux  points  de  ren- 
contre R  et  S. 

On  aura  les  projections  verticahîs  r,  s  des  deux 
mêmes  points,  en  projetant  les  points  R  et  S  sur  Kl; 
ou,  ce  qui  revient  au  même,  en  portant  sur  les  verti- 
cales Rr,  S 5,  à  partir  de  l'horizontale  bag,  r'  r  égale 
à  PR,  et  s'  s  égale  à  QS. 

Les  projections  horizonlajes  et  verticales  des  deux 
points  de  contact  étant  construites,  on  déterminera 
les  traces  des  deux  plans  tangents,  comme  dans  la  pre- 
mière solution. 

Cette  seconde  solution  peut  aussi  être  rendue  beau- 
coup plus  concise  en  faisant  passer  les  plans  de  projec- 
tion par  le  centre  de  la  sphère;  ce  qui  réduit  les  deux 
projections  à  une  même  figure. 


72  LES   MAITRES    DE    LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

38.  Ces  dernières  considérations  vont  nous  conduire 
à  la  découverte  de  quelques  propriétés  remarquables 
du  cercle,  de  la  sphère,  des  sections  coniques  et  des 
surfaces  courbes  du  second  degré. 

Nous  venons  de  voir  que  les  deux  surfaces  coniques 
circonscrites  à  la  sphère  la  touchaient  chacune  dans  la 
circonférence  d'un  cercle,  et  que  ces  circonférences 
passaient  toutes  deux  par  les  deux  points  de  contact 
de  la  sphère  avec  les  plans  tangents.  Cette  propriété 
n'est  point  particulière  aux  deux  surfaces  coniques 
que  nous  avons  considérées;  elle  convient  à  toutes 
celles  qui  auraient  leur  sommet  dans  la  droite  donnée, 
et  qui  seraient  de  même  circonscrites  à  la  sphère.  Donc, 
si  l'on  conçoit  une  première  surface  conique  qui,  ayant 
son  sommet  sur  la  droite  donnée,  soit  circonscrite 
à  la  sphère,  et  si  l'on  suppose  que  cette  surface  se 
meuve  de  manière  que  son  sommet  parcoure  la  droite, 
sans  qu'elle  cesse  d'être  circonscrite  et  tangente  à  la 
sphère;  dans  chacune  de  ses  positions,  elle  touchera 
la  sphère  dans  la  circonférence  d'un  cercle  ;  toutes  ces 
circonférences  passeront  par  deux  mêmes  points,  qui 
seront  les  contacts  de  la  sphère  avec  les  deux  plans 
tangents;  et  les  plans  de  ces  cercles  se  couperont  tous 
suivant  une  même  ligne  droite,  qui  sera  celle  des  deux 
contacts.  Enfin,  si  l'on  conçoit  le  plan  mené  par  la 
droite  donnée  et  par  le  centre  de  la  sphère,  ce  plan,  qui 
passera  par  les  axes  de  toutes  les  surfaces  coniques, 
sera  perpendiculaire  aux  plans  de  tous  les  cercles  de 
contact,  et  par  conséquent  à  la  droite  qui  est  leur  com- 
mune intersection;  et  il  coupera  tous  ces  plans  dans  des 
lignes  droites  qui  passeront  par  un  même  point. 

Réciproquement,  étant  données  une  sphère  et  une 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  7! 

ligne  droite,  si  l'on  conçoit  par  la  droite  tant  de  plans 
qu'on  voudra,  qui  couperont  la  sphère  chacun  suivant 
un  cercle,  et  si,  pour  chacun  de  ces  cercles,  on  conçoit 
la  surface  conique  droite  dont  il  serait  la  base,  et  qui 
serait  circonscrite  à  la  sphère,  les  sommets  de  toutes 
ces  surfaces  coniques  seront  dans  une  autre  même 
ligne    droite. 

39.  En  considérant  seulement  ce  qui  se  passe  dans 
le  plan  mené  par  la  droite  donnée  et  par  le  centre  de 
la  sphère,  on  est  conduit  aux  deux  propositions  sui- 
vantes, qui  sont  des  corollaires  immédiats  de  ce  qui 
précède. 

«  Étant  donnés  dans  un  plan  (fig.  18  et  19)  un 
cercle  dont  le  centre  soit  en  A,  et  une  droite  quel- 
conque BC;  si,  après  avoir  mené  par  un  point  quel- 
con(pic  D  de  la  droite  deux  tangentes  au  cercle,  et  la 
droite  EF  qui  passe  par  les  deux  points  de  contact,  on 
conçoit  que  le  point  D  se  meuve  le  long  de  la  droite, 
et  entraîne  avec  lui  les  deux  tangentes,  sans  qu'elles 
cessent  de  toucher  le  cercle  :  les  deux  points  de  con- 
tact changeront  de  position,  de  même  que  la  droite  EF 
qui  les  joint;  mais  cette  droite  passera  toujours  par 
un  même  point  N  qui  se  trouve  sur  la  perpendiculaire 
AG,  abaissée  du  centre  du  cercle  sur  la  droite. 

«  Réciproquement,  si,  par  un  point  N  pris  dans  le 
plan  d'un  cercle,  on  mène  tant  de  droites  EF  qu'on 
voudra,  qui  couperont  chacune  la  circonférence  du 
cercle  en  deux  points,  et  si,  par  ces  deux  points,  on 
mène  au  cercle  deux  tangentes  ED,  FD,  qui  se  cou- 
peront quelque  part  en  un  point  D,  la  suite  de  tous  les 
points  d'intersection  trouvés  de  la  même  manière  sera 


74  LES   MAITRES   DE    LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


A 


\ 


\     ^        FiiT  /.•>' 


,..■---    \        !        /■•...„  ••       \ 


Fi^  -Ji) 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE. 


sur  une  même  ligne  droite  BC  perpendiculaire  à  AN.  » 
Ce  n'est  pas  parce  que  tous  les  points  de  la  circonfé- 
rence sont  également  éloignés  du  centre,  que  le  cercle 
jouit  de  la  propriété  que  nous  venons  d'énoncer,  c'est 
parce  qu'il  est  une  courbe  du  second  degré;  et  toutes 
les  sections  coniques  sont  dans  le  même  cas. 

En  effet,  soient  AEBF  (fig,  20)  une  section  conique 
quelconque,  et  CD  une  droite  quelconque  donnée  dans 
son  plan  :  concevons  que  la  courbe  tourne  autour  d'un 
de  ses  axes  AB  pour  engendrer  une  surface  de  révolu- 
tion, et  concevons  les  deux  plans  tangents  à  cette  sur- 
face menés  par  la  droite  CD;  les  deux  plans  auront 
chacun  leur  point  de  contact  particulier.  Cela  posé,  si, 
en  prenant  pour  sommet  un  point  quelconque  H  de 
la  droite  CD,  on  conçoit  la  surface  conique  circons- 
crite et  tangente  à  la  surface  de  révolution,  elle  tou- 
chera cette  dernière  surface  dans  une  courbe  qui  pas- 
sera nécessairement  par  les  deux  points  de  contact 
avec  les  plans  tangents.  Cette  courbe  sera  plane;  son 
plan,  qui  sera  perpendiculaire  à  celui  de  la  section 
conique  donnée,  sera  projeté  sur  ce  dernier,  suivant 
une  droite  EF;  et  cette  droite  passera  par  les  points 
de  contact  des  tangentes  à  la  section  conique,  menées 
par  le  point  H.  Actuellement,  si  l'on  suppose  que  le 
sommet  H  de  la  suiface  conique  se  meuve  sur  la 
droite  CD,  sans  que  cette  surface  cesse  d'être  circons- 
crite et  tangente  à  la  surface  de  révolution;  dans  cha- 
cune de  ses  positions,  sa  courbe  de  contact  aura  les 
mêmes  propriétés  de  passer  par  les  deux  points  de 
contact  avec  les  plans  tangents,  d'être  plane  et  d'avoir 
son  plan  perpendiculaire  à  la  section  conique.  Donc 
les  plans  de  toutes  les  courbes  de  contact  passeront  par 


76  LES  MAITRES   DE   LA   PENSÉE  SCIENTIFIQUE. 

la  droite  qui  joint  les  deux  points  de  contact,  et  qui 
est  elle-même  perpendiculaire  au  plan  de  la  section 
conique  ;  donc  enfin  les  projections  de  tous  les  plans 
seront  des  lignes  droites  qui  passeiont  toutes  par  la 
projection  N  de  la  droite  qui  joint  les  deux  points 
de  contact. 

40.  Enfin,  cette  proposition  n'est  elle-même  qu'un 
cas  particulier  d'une  autre  plus  générale  qui  a  lieu 
dans  les  trois  dimensions,  et  que  nous  nous  conten- 
terons d'énoncer  ici. 

«  Etant  données  dans  l'espace  une  surface  courbe 
quelconque  du  second  degré,  et  une  surface  conique 
circonscrite  qui  la  touche,  et  dont  le  sommet  soit  en 
un  point  quelconque;  si  la  surface  conique  se  meut 
sans  cesser  d'être  circonscrite  à  la  première  surface 
et  de  la  toucher,  de  manière  cependant  que  son  sommet 
parcoure  une  droite  quelconque,  le  plan  de  la  courbe 
de  contact  des  deux  surfaces  passera  toujours  par  une 
même  ligne  droite  (qui  sera  déterminée  par  les  contacts 
de  la  surface  du  second  degré  avec  les  deux  plans  tan- 
gents qui  passent  par  la  droite  des  sommets)  ;  et  si  la 
surface  conique  se  meut  de  manière  que  son  sommet 
soit  toujours  dans  un  même  plan,  le  plan  de  la  courbe 
de  contact  passera  toujours  par  un  même  point.  » 

41.  Seconde  question.  —  Par  un  point  donné, 
mener  un  plan  tangent  à  la  fois  aux  surfaces  de  deux 
sphères  données  ? 

Solution.  —  Soient  A,  a  {fig.  21)  les  deux  pro- 
jections   du    centre    de    la    première    sphère;    B,    è, 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE. 


78  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

celles  du  centre  de  la  seconde  ;  et  G,  c,  celles  du  point 
donné.  Après  avoir  mené  les  droites  indéfinies  AB 
a6,  projections  de  celle  qui  passerait  par  les  deux 
centres,  et  après  avoir  construit  les  projections  GEF, 
ge/,  HIK,  hik  des  grands  cercles  des  deux  sphères 
parallèles  aux  plans  de  projection,  on  concevra  une 
surface  conique  circonscrite  à  la  fois  aux  deux  sphères, 
et  qui  les  touche  toutes  deux.  Cette  surface  aura  son 
sommet  dans  la  droite  qui  passe  par  les  deux  centres. 
On  mènera  aux  deux  cercles  GEF,  HIK  les  deux  tan- 
gentes communes  EH,  FK,  qui  se  couperont  en  un 
point  D  de  la  droite  AB;  et  ce  point  sera  la  projection 
horizontale  du  sommet  du  cône  :  on  aura  la  projection 
verticale  du  même  point,  en  projetant  le  point  D  en  d! 
sur  le  prolongement  de  ab.  Enfin,  on  mènera  les  pro- 
jections CD,  cd  de  la  droite  menée  par  le  sommet  du 
cône  et  par  le  point  donné.  Cela  posé,  si  par  cette  der- 
nière droite  on  conçoit  deux  plans  tangents  à  la  sur- 
face conique,  ils  la  toucheront  chacun  en  une  de  ses 
droites  génératrices  ;  et,  par  conséquent,  ils  seront  tous 
deux  tangents  en  même  temps  aux  deux  sphères.  La 
question  est  donc  réduite  à  mener,  par  la  droite  qui 
passe  par  le  sommet  du  cône  et  par  le  point  donné,  deux 
plans  tangents  à  la  surface  d'une  des  sphères,  ce  qui 
s'exécutera  comme  dans  la  question  précédente,  et  les 
deux  plans  seront  en  même  temps  tangents  à  la  seconde 
sphère. 

Il  faut  observer  que  l'on  peut  concevoir  deux  sur- 
faces coniques  circonscrites  aux  deux  mêmes  sphères. 
La  première  les  enveloppe  toutes  deux  en  dehors,  et  a 
son  sommet  au  delà  d'une  des  sphères  par  rapport  à 
l'autre  :  les  plans  tangents  à  cette  surface  conique 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  70 

touchent  chacun  les  deux  sphères  du  même  côté.  La 
seconde  surface  conique  enveloppe  les  sphères,  l'une 
en  dedans,  l'autre  en  dehors,  et  a  son  sommet  entre 
les  deux  centres.  On  trouve  la  projection  horizontale  D' 
de  ce  sommet  en  menant  aux  cercles  EFG  et  HIK  les 
deux  tangentes  intérieures  qui  se  coupent  en  un  point 
de  la  droite  AB;  et  l'on  a  sa  projection  verticale  en 
projetant  le  point  D'  en  d'  sur  ab.  Les  deux  plans  tan- 
gents menés  à  cetle  surface  conique  touchent  aussi 
cliacun  les  deux  sphères;  mais  ils  touchent  la  première 
d'un  côté,  et  la  seconde  de  l'autre.  Ainsi  quatre  plans 
dilïérents  peuvent  satisfaire  à  la  question  :  pour  deux 
d'entre  eux,  les  deux  sphères  sont  du  même  côté  du 
plan;  pour  les  deux  autres,  elles  sont  de  côtés  diffé- 
rents. 

42.  Troisième  question.  —  Mener  un  plan  tangent 
en  même  temps  à  trois  sphères  données  de  grandeur 
et  de  position  ? 

Solution.  —  Concevons  le  plan  tangent  en  même 
temps  aux  trois  sphères,  et  imaginons  d'abord  une  sur- 
face conique  circonscrite  aux  deux  premières  sphères, 
et  qui  les  touche  toutes  deux;  le  plan  tangent  tou- 
chera cette  surface  conique  le  long  d'une  de  ses  droites 
génératrices,  et  passera  par  le  sommet  du  cône.  Si  l'on 
imagine  une  seconde  surface  conique  circonscrite  à  la 
première  sphère  et  à  la  troisième,  le  même  plan  tangent 
la  touchera  de  même  le  long  d'une  de  ses  droites  géné- 
ratrices, et  passera,  par  conséquent,  par  son  sommet. 
Enfin,  si  l'on  conçoit  une  troisième  surface  conique  qui 
embrasse  et  touche  la  seconde  sphère  et  la  troisième, 


8o  LES   MAITRES  DE   LA   PENSÉE  SCIENTIFIQUE. 


le  plan  tangent  la  touchera  encore  le  long  d'une  de  ses 
droites  génératrices,  et  passera  par  son  sommet.  Ainsi 
les  sonimets  des  trois  surfaces  coniques  seront  dans  le 
plan  tangent;  mais  ils  seront  aussi  dans  le  plan  qui 
passe  par  les  centres  des  sphères,  et  qui  contient  les 
trois  axes  :  donc  ils  seront  en  même  temps  dans  deux 
plans  différents  ;  donc  ils  seront  en  ligne  droite.  Il  suit 
de  là  que  si  l'on  construit,  comme  nous  l'avons  indiqué 
dans  la  question  précédente,  les  projections  horizon- 
tales et  verticales  de  ces  sommets,  dont  deux  suffisent, 
on  pourra  faire  passer  par  ces  projections  celles  d'une 
droite  qui  se  trouve  sur  le  plan  tangent.  La  question  se 
réduit  donc  à  mener  par  une  droite  donnée  un  plan 
tangent  à  celle  des  trois  sphères  qu'on  voudra  ;  ce  qui 
s'exécutera  par  les  méthodes  précédentes,  et  ce  plan 
sera  tangent  aux  deux  autres. 

43.  Il  faut  observer  que,  puisqu'on  peut  toujours 
concevoir  pour  deux  sphères  quelconques  deux  sur- 
faces coniques  qui  les  enveloppent  et  les  touchent 
toutes  deux,  la  première  ayant  son  sommet  au  delà 
d'un  des  centres  par  rapport  à  l'autre,  la  seconde  ayant 
son  sommet  entre  les  deux  centres,  il  est  évident  que, 
dans  la  question  précédente,  il  y  aura  six  surfaces 
coniques,  dont  trois  seront  circonscrites  en  dehors  aux 
trois  sphères  prises  deux  à  deux,  et  dont  trois  auront 
leurs  sommets  entre  les  sphères.  Les  sommets  de  ces 
six  cônes  seront  distribués  trois  par  trois  sur  quatre 
droites,  par  chacune  desquelles  on  pourra  mener  deux 
plans  tangents  en  même  temps  aux  trois  sphères. 
Ainsi  huit  plans  différents  satisfont  à  cette  troisième 
question  :  deux  d'entre  eux  touchent  les  trois  sphères 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  8l 


du  même  côté  par  rapport  à  eux;  les  six  autres  sont 
tellement  placés,  qu'ils  touchent  deux  des  sphères 
d'un  côté,  et  la  troisième  de  l'autre. 

44.  Ces  considérations  nous  conduisent  à  la  propo- 
sition suivante  : 

«  Trois  cercles  quelconques  étant  donnés  de  grandeur 
et  de  position  sur  un  plan  (/îg.  22),  si,  en  les  considé- 
rant deux  à  deux,  on  leur  mène  les  tangentes  exté- 
rieures prolongées  jusqu'à  ce  qu'elles  se  coupent,  les 
trois  points  d'intersection  D,  E,  F,  qu'on  obtiendra 
de  cette  manière,  seront  en  ligne  droite.  » 

Car  si  l'on  conçoit  les  trois  sphères  dont  ces  cercles 
sont  les  grands  cercles,  et  un  plan  qui  les  touche  toutes 
les  trois  extérieurement,  ce  plan  touchera  aussi  les 
trois  surfaces  coniques  circonscrites  aux  sphères  consi- 
dérées deux  à  deux,  et  passera  par  leurs  trois  som- 
mets D,  E,  F.  Mais  ces  trois  sommets  sont  aussi  sur  le 
plan  des  trois  centres  :  donc  ils  sont  sur  deux  plans 
différents,  et  par  conséquent  en  ligne  droite.  «  Si  aux 
mêmes  cercles,  considérés  deux  à  deux,  on  mène  les 
tangentes  intérieures  qui  se  croiseront,  les  trois  nou- 
veaux points  d'intersection  G,  H,  I  seront  deux  à 
deux  en  ligne  droite  avec  un  xles  trois  premiers,  en 
sorte  que  les  six  points  D,  E,  F,  G,  H,  I  seront  les 
intersections  des  quatre  droites.  » 

Enfin,  cette  proposition  n'est  qu'un  cas  particulier 
de  la  suivante,  qui  a  lieu  dans  les  trois  dimensions. 

«  Quatre  sphères  quelconques  étant  données  de 
grandeur  et  de  position  dans  l'espace,  si  l'on  conçoit 
les  six  surfaces  coniques  qui  sont  circonscrites  exté- 
rieurement à  ces  sphères  considérées  deux  à  deux,  les 

ilUNGK.    —    I.  6 


82  LES   MAITRES   DE   LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

sommets  des  six  cônes  seront  dans  un  même  plan  et 
aux  intersections  de  quatre  droites;  et  si  l'on  conçoit 
les  six  autres  surfaces  coniques  circonscrites  intérieu- 
rement, c'est-à-dire,  qui  ont  leurs  sommets  entre  les 
centres  de  deux  sphères,  les  sommets  de  ces  six  nou- 
veaux cônes  seront  trois  par  trois  dans  un  même  plan 
avec  trois  des  premiers. 

45.  Quatrième  question.  —  Par  un  point  pris 
arbitrairement,  mener  un  plan  tangent  à  une  surface 
cylindrique  donnée  ? 

Solution. — 'Soit  EiFK  {flg.  23)  la  trace  de  la  sur- 
face cylindrique  sur  le  plan  horizontal,  trace  que 
nous  supposons  donnée.  Soient  AB,  ah  les  deux  pro- 
jections données  de  la  droite  à  laquelle  la  génératrice 
doit  toujours  être  parallèle,  et  C,  c  celles  du  point 
donné.  Si  par  ce  point  on  conçoit  une  parallèle  à  la 
droite  génératrice,  cette  droite  sera  dans  le  plan  tan- 
gent demandé;  et  les  points  dans  lesquels  elle  coupera 
les  plans  de  projection  seront  sur  les  traces  du  pian 
tangent.  Donc,  si  par  ce  point  C  on  mène  CD  paral- 
lèle à  AB  et,  par  le  point  c,  cd  parallèle  à  aè,  on  aura 
les  deux  projections  de  cette  droite  ;  et  si,  après  avoir 
prolongé  cd  jusqu'à  ce  qu'elle  rencontre  LM  en  un 
point  d,  on  projette  le  point  c^  en  D  sur  CD,  le  point  D 
sera  la  rencontre  de  cette  droite  avec  le  plan  horizontal, 
et  par  conséquent  un  point  de  la  trace  du  plan  tangent. 
Or,  la  trace  horizontale  du  plan  tangent  doit  être  tan- 
gente à  la  courbe  EIFK;  donc,  si  par  le  point  D  on 
mène  à  cette  courbe  toutes  les  tangentes  possibles, 
DE,  DF,  etc.,  on  aura  les  traces  horizontales  de  tous 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE. 


R3 


Fis  23 


«4  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

les  plans  tangents  qui  peuvent  passer  par  le  point 
donné.  Si  par  les  points  de  contact  E,  F,  etc.,  on  mène 
à  AB  les  parallèles  indéfinies  EG,  FH,  etc.,  on  aura 
les  projections  horizontales  des  droites  génératrices, 
dans  lesquelles  les  différents  plans  tangents  touchent 
la  surface  cylindrique;  enfin  on  aura  les  projections 
verticales  eg,  /^,  etc.  de  ces  génératrices  ou  de  ces 
droites  de  contact,  en  projetant  les  points  E,  F,  etc. 
sur  le  plan  vertical  en  e,  /,  etc.,  et  en  menant  par  ces 
derniers  points  des  parallèles  indéfinies  à  ab.  Quant 
aux  traces  des  plans  tangents  sur  le  plan  vertical,  on 
les  trouvera  par  le  procédé  de  la  figure  12. 

46.  Cinquième  question.  —  Par  un  point  pris 
arbitrairement,  mener  un  plan  tangent  à  une  surface 
conique   donnée  ? 

Gomme  la  solution  de  cette  question  diffère  très  peu 
de.  celle  de  la  précédente,  nous  nous  contenterons  d'en 
indiquer  la  construction  dans  la  figure  24,  où  la  courbe 
EGFH  est  la  trace  donnée  de  la  surface  conique,  où  A 
et  a  sont  les  projections  données  du  sommet,  et  où  G 
et  c  sont  celles  du  point  donné  par  lequel  le  plan  tan- 
gent doit  passer. 

47.  Sixième  question.  —  Par  une  droite  donnée, 
mener  un  plan  tangent  à  une  surface  de  révolution 
donnée  ? 

Solution.  —  Nous  supposerons  que  l'axe  de  la  sur- 
face de  révolution  soit  perpendiculaire  à  l'un  des  deux 
plans  de  projection,  ce  qui  n'altérera  pas  la  généralité 
de  la  solution,  parce  qu'on  est  toujours  le  maître  de 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  85 


disposer  de  la  position  de  ces  plans,  de  manière  que 
cette  condition  soit  remplie. 

Soient  donc  A  {fig.  25)  la  projection  horizontale 
donnée  de  Taxe  de  la  surface,  aa'  sa  projection 
verticale,  apia'  la  courbe  génératrice  de  la  surface, 
vt  BC,  bc  les  deux  projections  données  de  la  droite 
par  laquelle  le  plan  tangent  doit  passer.  Du  point  A 
soit  abaissée  sur  BC  la  perpendiculaire  AD,  qui  sera 
la  projection  horizontale  de  la  plus  courte  distance 
entre  l'axe  et  la  droite  donnée,  et  soit  projeté  le  point 
D  en  ^  sur  bc. 

Cela  posé,  concevons  d'abord  que  le  plan  tangent 
soit  mené  ;  puis  supposons  que  la  droite  donnée  tourne 
autour  de  l'axe  de  révolution,  sans  changer  de  dis- 
tance à  cet  axe,  sans  changer  d'inclinaison  sur  le  plan 
horizontal,  et  qu'elle  entraîne  avec  elle  le  plan  tangent, 
de  manière  qu'il  touche  toujours  la  surface  :  il  est  évi- 
dent qu'en  vertu  de  ce  mouvement,  le  point  de  contact 
de  la  surface  et  du  plan  changera  de  position  :  mais, 
parce  que  le  plan  tangent  garde  toujours  la  même 
inclinaison,  ce  point  de  contact  ne  changera  pas  de 
hauteur  sur  la  surface,  et  il  se  mouvTa  dans  la  cir- 
conférence d'un  cercle  horizontal,  dont  le  centre  sera 
dans  Taxe.  De  plus,  la  droite  donnée  engendrera  par 
son  mouvement  une  seconde  surface  de  révolution 
autour  du  même  axe,  à  laquelle  le  plan  tangent  sera 
lui-même  tangent  dans  toutes  ses  positions. 

En  effet,  concevons  un  plan  par  Taxe  et  par  le  point 
de  contact  du  plan  tangent  avec  la  première  surface  : 
ce  plan  coupera  la  droite  génératrice  en  un  point  qui 
sera  celui  du  contact  du  même  plan  tangent  avec  la 
seconde  j  car  indépendamment  de  la  droite  génératrice 


8b  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE  SCIENTIFIQUE. 


F((r.  2  S- 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  87 

par  laquelle  il  passe  en  ce  point,  il  passe  encore  par  la 
tangente  du  cercle  horizontal  au  même  point,  puisqu'il 
passe  aussi  par  la  tangente  du  cercle  horizontal  au 
point  de  contact  avec  la  première  surface,  et  que,  par 
la  propriété  des  surfaces  de  révolution,  ces  deux  tan- 
gentes sont  parallèles. 

Comme  c'est  au  moyen  de  la  seconde  surface  de 
révolution  que  nous  devons  résoudre  la  question,  il  est 
nécessaire  de  construire  la  courbe  suivant  laquelle 
elle  est  coupée  par  un  plan  mené  par  l'axe;  et  nous 
supposerons  que  ce  plan  soit  parallèle  au  plan  vertical 
de  projection,  et  par  conséquent  projeté  sur  le  plan 
liorizontal  dans  une  droite  AF  parallèle  à  LM. 

Soit  pris  sur  la  droite  donnée  un  point  quelconque, 
dont  les  projections  soient  E  et  e,  et  cherchons  le 
point  dans  lequel  il  rencontre  le  plan  de  la  section  dans 
son  mouvement.  D'abord  ce  point  décrira  autour  de 
l'axe  de  révolution  un  arc  de  cercle  horizontal,  dont 
on  aura  la  projection  horizontale  en  décrivant  du 
point  A  comme  centre,  et  de  l'intervalle  AE,  l'arc  EF, 
jusqu'à  ce  qu'il  rencontre  la  droite  AF  quelque  part 
en  un  point  F;  et  l'on  aura  la  projection  verticale  de 
cet  arc  en  menant  par  le  point  e  l'horizontale  indé- 
finie cf.  Le  point  F  sera  donc  la  projection  horizon- 
tale de  la  rencontre  du  point  décrivant  avec  le  plan  de 
la  section  :  donc,  si  l'on  projette  le  point  F  en  /  sur  e/, 
le  point  /  sera  la  projection  verticale  de  cette  rencontre, 
et  par  conséquent  un  point  de  la  section.  Si  l'on  fait 
les  mêmes  opérations  pour  tant  d'autres  points  qu'on 
voudra,  pris  sur  la  droite  donnée,  on  aura  autant  de 
points  g,  /,  r,  n,  par  lesquels  on  fera  passer  la  courbe 
demandée. 


88  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

Cela  fait,  supposons  que  la  droite  donnée  et  le  plan 
tangent,  par  leur  rotation  simultanée  autour  de  l'axe, 
soient  parvenus  dans  une  position  telle,  que  le  plan 
tangent  soit  perpendiculaire  au  plan  vertical  de  pro- 
jection. Dans  cette  position,  sa  projection  sur  ce  plan 
sera  une  ligne  droite,  et  cette  droite  sera  tangente  en 
même  temps  aux  deux  courbes  apia\  grnf.  Si  donc  on 
mène  à  ces  deux  courbes  toutes  les  tangentes  com- 
munes, telles  que  gi,  np,  on  aura  les  projections  de 
tous  les  plans  tangents  qui  satisfont  à  la  question,  et 
considérés  dans  la  position  qu'ils  ont  prise,  lorsque 
par  la  rotation  ils  sont  devenus  successivement  per- 
pendiculaires au  plan  vertical.  Les  points  de  con- 
tact i,  p  de  ces  tangentes  avec  la  génératrice  de  la 
première  surface  détermineront  les  hauteurs  de  ceux 
de  cette  surface  avec  tous  les  plans  tangents  :  par  con- 
séquent, si  par  ces  points  on  mène  les  horizontales 
indéfinies  it,  ps,  elles  contiendront  les  projections  ver- 
ticales des  points  de  contact  de  la  surface  avec  les 
plans;  et  si  du  point  A  comme  centre,  et  avec  des 
rayons  égaux  respectivement  à  it  et  à  ps^  on  décrit 
des  arcs  de  cercle  IK,  PQ,  ces  arcs  contiendront  les 
projections  horizontales  des  mêmes  points.  Il  ne  reste 
donc  plus,  pour  achever  de  les  déterminer,  qu'à  trouver 
sur  quels  méridiens  de  la  surface  de  révolution  ils 
doivent  se  trouver  :  c'est  ce  à  quoi  doivent  servir  les 
points  de  contact  g,  n. 

Pour  cela,  après  avoir  projeté  les  points  g,  n 
sur  AG,  en  G  et  N,  si  du  point  A  comme  centre,  et  avec 
des  intervalles  successivement  égaux  à  AG  et  AN,  on 
décrit  les  arcs  de  cercle  GH,  NO,  jusqu'à  ce  qu'ils 
coupent  la  droite  BG  en  des  points  H  et  0,  ces  arcs 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  89 

expriment  la  quantité  de  rotation  que,  pour  chaque 
plan  tangent,  la  droite  qui  passe  par  ses  contacts  avec 
les  deux  surfaces  a  été  obligée  de  faire  pour  se  trans- 
porter dans  le  plan  vertical  parallèle  à  celui  de  projec- 
tion. Donc  on  aura  les  projections  horizontales  de  ces 
mêmes  droites,  considérées  dans  leurs  positions  natu- 
relles, en  menant  par  le  point  A  les  droites  AH,  AO; 
donc  enfin  les  points  K,  Q,  où  les  dernières  droites  cou- 
jxront  les  arcs  correspondants  IK,  PQ,  seront  les  pro- 
jections horizontales  des  points  de  contact  de  la  pre- 
mière surface  avec  les  plans  tangents  menés  par  la 
droite   donnée. 

Quant  aux  projections  verticales  des  mêmes  points, 
on  les  aura  en  projetant  les  points  K,  Q,  en  /f,  ç,  sur 
les  horizontales  respectives  it,  ps. 

Les  projections  horizontales  et  verticales  des  points 
de  contact  étant  déterminées,  on  construira  les  traces 
de  tous  les  plans  tangents  par  les  mêmes  méthodes  que 
nous  avons  déjà  employées. 

Cette  méthode  peut  facilement  se  généraliser  eL 
s'appliquer  aux  surfaces  engendrées  par  des  courbes 
quelconques,  constantes  de  formes  et  variables  de 
positions  dans  l'espace. 


III. 

DES  INTERSECTIONS  DES  SURFACES  COURBES. 

48.  Lorsque  les  générations  de  deux  surfaces  courbes 
sont  entièrement  déterminées  et  connues;  lorsque, 
pour  chacune  d'elles,  la  suite  de  tous  les  points  de 


QO  LÈS   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

l'espace  par  lesquels  elle  passe  n'a  plus  rien  d'arbi- 
traire; lorsque  pour  chacun  de  ces  points,  une  des  deux 
projections  étant  prise  à  volonté,  ]'autre  projection 
peut  toujours  être  construite;  si  ers  deux  surfaces  ont 
quelques  points  communs  dans  l'espace,  la  position 
de  tous  ces  points  communs  est  absolument  déter- 
minée; elle  dépend  et  de  la  forme  des  deux  surfaces 
courbes,  et  de  leurs  positions  respectives;  et  elle  est 
de  nature  à  pouvoir  toujours  être  déduite  de  la  défi- 
nition des  générations  des  surfaces,  dont  elle  est  une 
conséquence  nécessaire. 

La  suite  de  tous  les  points  communs  à  deux  surfaces 
courbes  déterminées  forme  en  général  dans  l'espace 
une  certaine  ligne  courbe  qui,  pour  des  cas  très  parti- 
culiers, peut  se  trouver  dans  un  certain  plan  et  n'avoir 
qu'une  seule  courbure;  qui,  pour  des  cas  infiniment 
plus  particuliers,  peut  devenir  une  ligne  droite  et 
n'avoir  aucune  courbure;  enfin  qui,  pour  des  cas  infini- 
ment plus  particuliers  encore,  peut  se  réduire  à  un 
point  unique;  mais  qui,  dans  le  cas  général,  est  ce 
(ju'on  nomme  courbe  à  double  courbure,  parce  qu'elle 
participe  ordinairement  des  courbures  des  deux  sur- 
faces courbes,  sur  chacune  desquelles  elle  se  trouve 
en  même  temps,  et  dont  elle  est  l'intersection  commune. 

49.  Il  existe  entre  les  opérations  de  l'Analyse  et  les 
méthodes  de  la  Géométrie  descriptive  une  correspon- 
dance dont  il  est  nécessaire  de  donner  ici  une  idée. 

Dans  l'Algèbre,  lorsqu'un  problème  est  mis  en  équa- 
tions, et  qu'on  a  autant  d'équations  que  d'inconnues, 
on  peut  toujours  obtenir  le  même  nombre  d'équations, 
dans    chacune   desquelles   il   n'entre    qu'une    des   in- 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE.  9I 

connues;  ce  (jui  met  à  portée  de  connaître  les  valeurs 
de  chacune  d'elles.  L'opération  par  laquelle  on  par- 
vient à  ce  but,  et  qui  s'appelle  élimination^  consiste, 
au  moyen  d'une  des  équations,  à  chasser  une  des  in- 
connues de  toutes  les  autres  équations;  et  en  chassant 
ninsi  successivement  les  différentes  inconnues,  on 
arrive  à  une  équation  finale  qui  n'en  contient  plus 
qu'une  seule  dont  elle  doit  produire  la  valeur. 

L'objet  de  l'élimination,  dans  l'Algèbre,  a  la  plus 
grande  analogie  avec  les  opérations  par  lesquelles,  dans 
la  Géométrie  descriptive,  on  détermine  les  intersec- 
tions des  surfaces  courbes. 

En  effet,  supposons  que,  considérant  un  point  dans 
l'espace,  et  représentant  par  a;,  t/,  z  les  distances  de 
ce  point  à  trois  plans  rectangulaires  entre  eux,  on  éta- 
blisse une  relation  entre  ces  trois  distances,  et  que 
cette  relation  soit  exprimée  par  une  équation,  dans 
laquelle  entrent  les  trois  quantités  a;,  t/,  z,  et  des  cons- 
tantes. En  vertu  de  cette  relation,  la  position  du  point 
ne  sera  pas  déterminée  :  car  les  quantités  x^  î/,  z  pour- 
ront changer  de  valeur,  et  par  conséquent  le  point 
pourra  changer  de  position  dans  l'espace,  sans  que  la 
relation  exprimée  par  l'équation  cesse  d'avoir  lieu; 
et  la  surface  courbe,  qui  passe  par  toutes  les  positions 
que  le  point  peut  occuper  ainsi,  sans  nue  la  relation 
entre  ces  trois  coordonnées  soit  altérée,  est  celle  à 
laquelle    appartient    l'équation. 

Par  exemple,  supposons  qu'une  sphère  dont  le 
rayon  soit  exprimé  par  A  ait  son  centre  au  point  d'in- 
tersection commune  des  trois  plans  rectangulaires,  et 
qu'en  considérant  un  certain  point  sur  la  surface  de  la 
sphère,  on  imagine  des  perpendiculaires  abaissées  de 


()2  LES    MAITRES    DE    LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

ce  point  sur  les  trois  plans  et  représentées  par  les 
lettres  x,  y^  z;  il  est  évident  que  le  rayon  de  la  sphère, 
dirigé  au  point  que  l'on  considère,  sera  la  diagonale 
d'un  parallélépipède  rectangle,  dont  les  trois  arêtes 
seront  x^  y,  z;  que  son  carré  sera  égal  à  la  somme  des 
carrés  des  trois  arêtes  ;  et  qu'ainsi  l'on  aura  l'équation 
.7;2  -{-y-  -\-  z^  =  A^.  Gela  posé,  si  le  point  change  de 
position  sur  la  surface  de  la  sphère,  ses  distances  rc, 
y,  z  aux  trois  plans  rectangulaires  changeront;  mais 
sa  distance  au  centre  ne  changera  pas,  et  la  somme  des 
carrés  de  ces  trois  coordonnées,  qui  est  toujours  égale 
au  carré  du  rayon,  aura  toujours  la  même  valeur  :  on 
aura  donc  encore  entre  les  coordonnées  de  ce  point  la 
relation  exprimée  par  l'équation  x~  -\-  y-  -{-  z'  =  A^. 
Cette  équation,  qui  a  lieu  pour  tous  les  points  de  la  sur- 
face de  la  sphère,  et  qui  a  lieu  pour  eux  seuls,  est  celle 
de  cette  surface.  Toutes  les  surfaces  courbes  ont  ainsi 
chacune  leur  équation;  et  s'il  n'est  pas  toujours  facile 
d'avoir  cette  équation  exprimée  en  quantités  aussi 
simples  que  les  distances  x,  y,  z,  il  est  toujours  possible 
de  l'obtenir  en  quantités  plus  compliquées,  telles  que 
les  inclinaisons  des  plans  tangents,  les  rayons  des  cour- 
bures :  il  suffit  à  notre  objet  d'en  avoir  fait  connaître 
une  pour  exemple. 

Actuellement,  si,  ayant  en  x,  ?/,  z  les  équations  de 
deux  surfaces  courbes  différentes,  et  en  supposant  que 
pour  les  points  des  deux  surfaces  les  distances  soient 
prises  par  rapport  aux  mêmes  plans  rectangulaires,  on 
élimine  une  des  trois  quantités  rc,  î/,  z,  par  exemple  z, 
entre  les  deux  équations;  par  la  simultanéité  de  ces 
deux  équations,  on  établit  d'abord  que  ce  n'est  pas  de 
tous  les  points  de  la  première  surface  indistinctement. 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  93 

ni  de  tous  ceux  de  la  seconde,  que  Ton  s'occupe,  mais 
seulement  de  ceux  de  leur  intersection,  pour  chacun 
desquels  les  équations  doivent  avoir  lieu,  puisqu'ils 
sont  en  même  temps  sur  les  deux  surfaces.  Ensuite 
l'équation  en  rr,  t/,  qui  résulte  de  l'élimination  de  z, 
exprime  la  relation  qui  existe  entre  ces  deux  distances 
pour  tous  les  points  de  l'intersection,  quelle  que  soit 
la  distance  z  qui  a  disparu,  et  dont  il  n'est  plus  ques- 
tion dans  l'équation;  elle  est  donc  l'équation  de  la 
projeclion  de  l'intersection  des  deux  surfaces  sur  le 
plan  perpendiculaire  aux  z. 

On  voit  donc  qu'en  Algèbre  l'objet  de  l'élimination 
entre  plusieurs  équations  à  trois  inconnues  est  de 
déterminer,  sur  les  trois  plans  auxquels  tout  l'espace 
est  rapporté,  les  projections  des  intersections  des  sur- 
faces auxquelles  les  équations  appartiennent. 

50.  La  correspondance  entre  les  opérations  de  l'Ana- 
lyse et  les  méthodes  de  la  Géométrie  descriptive  ne  se 
borne  pas  à  ce  que  nous  venons  de  rapporter;  elle 
existe  partout.  Si  dans  l'espace,  pour  opérer  des  géné- 
rations quelconques,  on  fait  mouvoir  des  points,  des 
lignes  courbes,  des  surfaces,  ces  mouvements  peuvent 
toujours  être  dictés  par  des  opérations  analytiques;  et 
les  objets  nouveaux  auxquels  ils  donnent  lieu  sont 
exprimés  par  les  résultats  mêmes  des  opérations.  Réci- 
proquement, il  n'y  a  aucune  opération  d'Analyse  en 
trois  dimensions,  qui  ne  soit  l'écriture  d'un  mouve- 
ment opéré  dans  l'espace  et  dicté  par  elle.  Pour 
apprendre  les  Mathématiques  de  la  manière  la  plus 
avantageuse,  il  faut  donc  que  l'élève  s'accoutume  de 
bonne  heure  à  sentir  la  correspondance  qu'ont  entre 


94  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

elles  les  opérations  de  l'Analyse  et  celles  de  la  Géo- 
métrie ;  il  faut  qu'il  se  mette  en  état,  d'une  part,  de 
pouvoir  écrire  en  Analyse  tous  les  mouvements  qu'il 
peut  concevoir  dans  l'espace,  et,  de  l'autre,  de  se  repré- 
senter perpétuellement  dans  l'espace  le  spectacle  mou- 
vant dont  chacune  des  opérations  analytiques  est 
l'écriture. 

51.  Revenons  actuellement  à  notre  objet,  qui  est 
la  méthode  de  déterminer  les  projections  des  intersec- 
tions des  surfaces  courbes. 

Pour  mettre  plus  de  clarté  dans  l'exposition  de  cette 
méthode,  nous  ne  la  présenterons  pas  d'abord  avec 
toute  l'élégance  dont  elle  est  susceptible  ;  nous  y  arri- 
verons par  degrés.  De  plus,  l'énoncé  sera  général  et 
applicable  à  deux  surfaces  quelconques  ;  et  quoique  les 
lettres  que  nous  emploierons  se  rapportent  à  la 
figure  26,  qui  présente  le  cas  particulier  de  deux 
surfaces  coniques,  à  bases  circulaires  et  à  axes  ver- 
ticaux, il  faut  néanmoins  toujours  concevoir  que 
les  surfaces  dont  il  s'agit  peuvent  être,  chacune  en 
particulier,  tout  autre  qu'une  surface  conique. 

52.  Premier  problème  général.  —  Les  générations 
de  deux  surfaces  courbes  étant  connues,  et  toutes  les 
données  qui  fixent  ces  générations  étant  déterminées 
sur  les  plans  de  projection,  construire  les  projections 
de  la  courbe  à  double  courbure,  suivant  laquelle  les 
deux  surfaces  se  coupent  ? 

Solution.  —  On  concevra  une  suite  de  plans  indé- 
finis, placés  d'une  manière  convenue  dans  l'espace;  ces 


G^OMélRIE  DESCRIPTIVE.  9^ 

plans  pourront,  par  exemple,  être  tous  horizontaux,  et 
c'est  eu  effet  ce  que  nous  supposerons  d'abord.  Dans 
ce  cas,  la  projection  verticale  de  chacun  d'eux  sera 
une  droite  horizontale  indéfinie;  et  parce  qu'on  est 
maître  de  les  mener  à  distances  arbitraires,  nous  sup- 
poserons que  dans  la  projection  verticale  on  ait  mené 
tant  de  droites  horizontales  {fi g,  26)  ee',  ce',  ee',  etc., 
qu'on  ait  voulu,  et  que  la  suite  de  ces  droites  soit  la 
projection  verticale  de  la  suite  des  plans  qu'on  a 
conçus.  Cela  posé,  on  fera  successivement,  pour  chacun 
de  ces  plans,  et  par  rapport  à  la  droite  ee'  qui  en  est 
la  projection,  l'opération  que  nous  allons  indiquer 
pour  celui  d'entre  eux  qui  est  projeté  en  EE'. 

Le  plan  EE'  coupera  la  première  surface  en  ujie  cer- 
taine courbe,  qu'il  sera  possible  de  construire,  si  l'on 
connaît  la  génération  de  la  surface;  car  cette  courbe 
est  la  suite  des  points  dans  lesquels  le  plan  EE'  est 
coupé  par  la  génératrice  dans  toutes  ses  positions. 
Cette  courbe  étant  plane  et  horizontale  aura  sa  projec- 
tion horizontale  égale,  semblable  à  elle-même,  et  placée 
de  la  même  manière;  il  sera  donc  possible  de  construire 
cette  projection,  et  nous  supposerons  que  ce  soit  la 
courbe  FGHIK. 

Le  même  plan  El*]'  coupera  aussi  la  seconde  'surface 
dans  une  autre  courbe  plane  horizontale,  dont  il  sera 
toujours  possible  de  construire  la  projection  horizon- 
tale, et  nous  supposerons  que  cette  projection  soit 
la  courbe  FOGPN. 

Cela  fait,  il  peut  arriver  que  les  deux  courbes,  dans 
lesquelles  le  même  plan  EE'  coupe  les  deux  surfaces, 
se  coupent  elles-mêmes,  ou  qu'elles  ne  se  coupent  pas  : 
si  elles  ne  se  coupent  pas,  quelque  prolongées  quelles 


96  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  97 


soient,  ce  sera  une  preuve  qu'à  la  hauteur  du  plan  EE' 
les  deux  surfaces  n'ont  aucun  point  commun;  mais  si 
ces  4^ux  courbejB  se  coupent,  elles  le  feront  en  un  cer- 
tain nombre  de  points  qui  seront  communs  aux  deux 
surfaces,  et  qui  seront  par  conséquent  autant  de  points 
de  l'intersection  demandée.  En  elîet,  en  tant  que  les 
points  d'intersection  des  deux  courbes  sont  sur  la  pre- 
mière d'entre  elles,  ils  sont  siir  la  première  des  deux 
surfaces  proposées;  en  tant  qu'ils  sont  sur  la  seconde 
courbe,  ils  sont  aussi  sur  la  seconde  surface  :  donc,  en 
tant  qu'ils  sont  sur  les  deux  courbes  à  la  fois,  ils  sont 
aussi  sur  les  deux  surfaces. 

Or,  les  projections  horizontales  des  points  dans 
lesquels  se  coupent  les  deux  courbes  doivent  se 
trouver,  et  sur  la  projection  de  la  première,  et  sur  la 
projection  de  la  seconde;  donc  les  points  F,  G,  ...  de 
rencontre  des  deux  courbes  FGIIIK  et  FOGPN  seront 
les  projections  horizontales  d'autant  de  points  de  l'in- 
tersection demandée  des  deux  surfaces  courbes.  Pour 
avoir  les  projections  verticales  des  mêmes  points,  il 
faut  observer  qu'ils  sont  tous  compris  dans  le  plan 
horizontal  EE',  et  que  leurs  projections  doivent  être 
sur  la  droite  EE'.  Donc,  si  l'on  projette  les  points  F, 
G,  . . .  sur  EE'  en  /,  g,  . . .,  on  aura  les  projections  ver- 
ticales des  mêmes  points. 

Actuellement,  si  pour  toutes  les  autres  horizon- 
tales ce',  ee\  . .  .,  on  fait  la  même  opération  que  nous 
venons  de  faire  pour  EE',  on  trouvera  pour  chacune 
d'elles,  dans  la  projection  horizontale,  une  suite  de 
nouveaux  points  F,  G,  .  . .,  et  dans  la  projection  ver- 
ticale une  suite  de  nouveaux  points  /,  g, Puis,  si 

par  tous  les  points  F,  . . . ,  on  fait  passer  une  branche 


98  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE  SCIENTIFIQUE. 

de  courbe,  par  tous  les  points  G,  . . . ,  une  autre  branche, 
et  ainsi  de  suite,  l'assemblage  de  toutes  ces  branches, 
qui  pourront  quelquefois  rentrer  l'une  dans  l'autre, 
sera  la  projection  horizontale  de  l'intersection  des 
deux  surfaces  ;  de  même,  si  par  tous  les  points  /,  . . . , 
on  fait  passer  une  branche  de  courbe,  par  tons  les 
points  g,  . . . ,  une  autre  branche,  et  ainsi  de  suite, 
l'assemblage  de  toutes  ces  branches,  qui  pourront  aussi 
quelquefois  rentrer  les  unes  dans  les  autres,  sera  la 
projection  verticale  de  l'intersection  demandée. 

53.  La  méthode  que  nous  venons  d'exposer  est  géné- 
rale, même  en  supposant  qu'on  ait  choisi  pour  système 
de  plans  coupants  une  suite  de  plans  horizontaux. 
Nous  allons  voir  que,  dans  certains  cas,  le  choix  du 
système  de  plans  coupants  n'est  pas  indifférent,  qu'on 
peut  quelquefois  le  faire  tel,  qu'il  en  résulte  des  cons- 
tructions plus  faciles  et  plus  élégantes,  et  même  qu'il 
peut  être  avantageux,  au  lieu  d'un  système  de  plans, 
d'employer  une  suite  de  surfaces  courbes,  qui  ne  dif- 
fèrent entre  elles  que  par  une  de  leurs  dimensions. 

Pour  construire  l'intersection  de  deux  surfaces  de  ré- 
volution dont  les  axes  sont  verticaux,  le  s,ystème  de  plans 
le  plus  avantageux  est  une  suite  de  plans  horizontaux; 
car  chacun  des  plans  coupe  les  deux  surfaces  en  des 
circonférences  de  cercles  dont  les  centres  sont  sur  les 
axes  respectifs,  dont  les  rayons  sont  égaux  aux  ordon- 
nées des  courbes  génératrices,  prises  à  la  hauteur  du 
plan  coupant,  et  dont  les  projections  horizontales  sont 
des  cercles  connus  de  grandeur  et  de  position.  Dans  ce 
cas,  tous  les  points  de  la  projection  horizontale  de  l'in- 
texsicetion  des  deux  sijirfaces  se  trouvent  4onc  par  des 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  <)() 

intersections  d'arcs  de  cercle.  Oh  sent  que  si  les  sur- 
faces de  révolution  avaient  leurs  axes  parallèles  entre 
eux,  mais  non  vrriicaux,  il  faudrait  changer  de  ])lans 
de  projection,  et  les  choisir  de  manière  que  l'un  d'enirc 
eux  fût  perpendiculaire  aux  axes. 

54.  S'il  s'agissait  de  construire  l'ihtérsection  de  deux 
sui  faces  coniques  à  bases  quelconques,  Ct  dont  les 
traces  sur  le  plan  horizontal  fussent  données  ou  cons- 
truites, le  système  de  plans  horizontaux  entramciait 
tlans  des  opérations  qui  seraient  trop  longues  pour  ce 
cas;  car  chacun  des  plans  horizontaux  couperait  les 
dvux  surfaces  dans  des  courbes,  qui  srraient  bien  à  la 
\  érité  semblables  aux  traces  des  surfaces  respectives  : 
mais  ces  courbes  ne  seraient  point  égales  aux  traces; 
il  faudrait  les  construire  par  points,  chacune  en  parti- 
culier, tandis  que  si,  après  avoir  mené  une  droite  par 
les  sommets  donnés  des  deux  cônes,  on  emploie  le  sys- 
tème de  plans  qui  passent  par  cette  droite,  chacun  de 
ces  plans  coupera  les  deux  surfaces  coniques  en  quatre 
droites;  et  ces  droites,  qui  seront  dans  le  même  plan, 
se  couperont,  indépendaninfient  des  sommets,  en 
quatre  points,  qui  seront  sur  l'intersection  des  deux 
surfaces.  Dans  ce  cas,  chacun  des  points  de  la  projec- 
tion horizontale  de  l'intcrseCtion  sera  donc  construit 
par  l'intersection  de  deux  lignes  droites. 

55.  Pour  deux  surfaces  cylindriques  à  bases  quel- 
conques, et  dont  les  génératrices  seraient  inclinées 
diversement,  le  système  des  plans  horizontaux  ne 
serait  pas  le  plus  favorable  que  l'on  pourrait  choisir. 
Chacun  de  ces  plans  couperait,  à  la  vérité,  les  deux 


lOO  LÇS    MAITRES    DE    LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

surfaces  dans  des  courbes  semblables  et  égales  à  leurs 
traces  respectives;  mais  les  courbes  qui  ne  correspon- 
draient pas  verticalement  aux  traces  auraient  pour 
projections  des  courbes  qui  seraient  distantes  des  traces 
elles-mêmes,  et  qu'il  faudrait  construire  par  points.  Si 
l'on  choisit  le  système  de  plans  parallèles  en  même 
temps  aux  génératrices  des  deux  surfaces,  chacun  de 
ces  plans  coupera  les  deux  surfaces  dans  des  lignes 
droites,  et  ces  droites  se  couperont  en  des  points  qui 
appartiendront  à  l'intersection  des  deux  surfaces.  Par 
là,  les  points  de  la  projection  horizontale  seront  cons- 
truits par  des  intersections  de  lignes  droites.  Au  reste, 
ceci  n'est  que  la  conséquence  nécessaire  de  ce  que  nous 
avons  dit  pour  le  cas  de  deux  surfaces  coniques. 

56.  Enfin,  pour  deux  surfaces  de  révolution  dont 
les  axes  seraient  dans  le  même  plan,  mais  non  paral- 
lèles entre  eux,  ce  ne  serait  plus  un  système  de  plans 
qu'il  serait  convenable  de  choisir,  ce  serait  le  système 
de  surfaces  sphériques,  qui  auraient  leur  centre  com- 
mun au  point  de  rencontre  des  deux  axes  :  car  chacune 
des  surfaces  sphériques  couperait  les  deux  surfaces  de 
révolution  dans  les  circonférences  de  deux  cercles  qui 
auraient  leurs  centres  sur  les  axes  respectifs,  et  dont 
les  plans  seraient  perpendiculaires  au  plan  mené  par 
les  deux  axes  ;  et  les  points  d'intersection  de  ces  deux 
circonférences,  qui  seraient  en  même  temps  et  sur  la 
surface  sphérique  et  sur  les  deux  surfaces  de  révolu- 
tion, appartiendraient  à  l'intersection  demandée. 
Ainsi  les  points  de  la  projection  de  l'intersection 
seraient  construits  par  les  rencontres  de  cercles  et  de 
lignes  droites.  Dans  ce  cas,  la  position  la  plus  avanta- 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE. 


geuse  des  deux  plans  de  projection  est  que  Tun  soit 
perpendiculaire  à  un  des  axes,  et  que  l'autre  soit  paral- 
lèle aux  deux  axes.  Ce  petit  nombre  d'observations, 
par  rapport  aux  surfaces  courbes  qui  se  rencontrent 
le  plus  fréquemment,  suflit  pour  faire  voir  la  manière 
dont  la  méthode  générale  doit  être  employée,  et  com- 
ment, par  la  connaissance  de  la  génération  des  sur- 
faces courbes,  on  peut  choisir  l'espèce  de  section  qui 
doit  donner  des  constructions  plus  faciles. 

57.  Lorsque  deux  surfaces  courbes  sont  définies  de 
formes  et  de  positions  respectives,  non  seulement  la 
courbe  de  leur  intersection  est  déterminée  dans  l'espacé 
mais  encore  toutes  les  afîeetions  de  ces  courbes  s'en- 
suivent immédiatement.  Ainsi,  par  exemple,  dans 
chacun  de  leurs  points  la  direction  de  leur  tangente 
est  déterminée  :  il  en  est  de  même  de  celle  de  leur  plan 
normal,  c'est-à-dire  du  plan  qui  coupe  la  courbe  à 
angle  droit,  et  qui  est  par  conséquent  perpendicu- 
laire à  la  tangente  au  point  d'intersection.  Quoique 
nous  devions  avoir  souvent  occasion,  dans  la  suite.,  de 
considérer  les  plans  normaux  aux  courbes  à  double 
courbure,  nous  n'entrerons  ici,  par  rapport  à  leur  déter- 
mination, dans  aucun  détail,  parce  que  ces  plans  étant 
toujours  perpendiculaires  aux  tangentes,  il  nous  suffira 
d'avoir  donné  la  manière  de  construire  les  projections 
des  tangentes  aux  intersections  des  surfaces  courbes. 

58.  Second  problème  général.  —  Par  un  point 
pris  à  volonté  sur  l'intersection  de  deux  surfaces 
courbes,  mener  la  tangente  à  cette  intersection. 


I02  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIEIQUE. 

Solution.  —  Le  point  pris  à  volonté  sur  l'intersec- 
tion des  deux  surfaces  courbes  se  trouve  en  même 
temps  et  sur  l'une  et  sur  l'autre  de  ces  surfaces.  Si 
donc  par  ce  point  considéré  sur  la  première  surface 
on  mène  à  cette  surface  un  plan  tangent,  ce  plan  tou- 
chera l'intersection  dans  le  point  que  l'on  considère. 
Pareillement,  si  par  le  même  point  considéré  sur  la 
seconde  surface  on  mène  à  cette  surface  un  plan  tan- 
«j'ent,  ce  plan  touchera  l'intersection  dans  le  point 
que  l'on  considère.  Les  deux  plans  tangents  touche- 
ront donc  l'intersection  dans  le  même  point,  qui  sera 
en  même  temps  un  de  leurs  points  communs,  et  par 
conséquent  un  de  ceux  de  la  droite  dans  laquelle  ils  se 
coupent;  donc  l'intersection  des  deux  plans  tangents 
sera  la  tangente  demandée. 

Ce  problème  donne  lieu  à  l'observation  suivante, 
qui  est  d'un  grand  usage  dans  la  Géométrie  descrip- 
tive. 

«  La  projection  de  la  tangente  d'une  courbe  à  double 
courbure  est  elle-même  tangente  à  la  projection  de  la 
courbe,  et  son  point  de  contact  est  la  projection  de 
celui  de  la  courbe  à  double  courbure.  » 

En  effet-,  si,  par  tous  les  points  de  la  courbe  à  double 
courbure,  on  conçoit  des  perpendiculaires  abaissées  sur 
un  des  plans  de  projection,  par  exemple,  sur  le  plan 
horizontal,  toutes  ces  perpendiculaires  seront  sur  une 
surface  cylindrique  verticale,  qui  sera  coupée  par  le 
plan  horizontal  dans  la  projection  même.  De  même, 
si,  par  tous  les  points  de  la  tangente  à  la  courbe  à 
double  courbure,  on  conçoit  des  verticales  abaissées, 
elles  seront  dans  un  plan  vertical  qui  sera  coupé  par  le 
plan  horizontal  dans  la  projection  même  de  la  tan- 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  Io3 


gente.  Or,  la  surface  cylindrique  et  le  plan  vertical  se 
touchent  évidemment  dans  toute  l'étendue  de  la  ver- 
ticale abaiflsée  du  point  do  contact,  et  qui  leur  est  com- 
mune ;  donc  les  intersections  de  la  surface  cylindrique 
et  du  plan  par  le  plan  horizontal  se  toucheront  dans  un 
point  qui  st;ra  l'intersectiou  de  la  droite  du  contact. 
de  la  surface  cylindrique  et  du  plan  vertical.  Donc 
enfin  les  projections  d'une  courbe  à  double  courbure 
et  d'une  de  ses  tangentes  se  touchent  en  un  point  qui 
est  la  projection  du  point  de  contacrt  de  la  courbe. 

59.  Nous  allons  actuellement  faire  l'application  de 
tout  ce  qui  précède  à  quelques  cas  particuliers;  et 
pour  commencer  par  des  considérations  simples,  nous 
supposerons  d'abord  qu'une  des  deux  surfaces  dont  il 
i&v!t  détjBrminer  l'dntersecrtion  soit  un  plan. 

Première  question.  —  Construire  l'intersection 
d'une  surface  cylindrique  donnée  par  un  plan  donné 
de   position  ? 

La  position  des  pians  de  projection  étant  arbitraire, 
nous  supposerons  d'abord,  ce  qui  est  toujours  possible, 
que  ces  deux  plans  aient  été  choisis  de  manière  que 
l'un  soit  perpendiculaire  à  la  génératrice  de  la  surface, 
et  que  l'autre  soit  perpendiculaire  au  plan  coupant, 
parce  que,  dans  cette  supposition,  la  construction  est 
beaucoup  plus  facile;  puis,  pour  donner  aux  élèves 
l'habitude  des  projections,  nous  supposerons  que  les 
deux  plans  de  projection  soient  placés  d'une  manière 
quelconque. 

Solution.  —  Premier  cas,  dans  lequel  on  suppose  que 
la  ^nératrice  de  la  surface  soit  perpendiculaire  à  Vun 


Io4  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

des  plans  de  projection^  par  exemple,  au  plan  horizontal, 
et  que  le  plan  coupant  soit  perpendiculaire  à  Vautre. 

Soient  A  {fig.  27)  la  projection  horizontale  de 
la  droite,  à  laquelle  la  génératrice  de  la  surface 
cylindrique  doit  toujours  être  parallèle;  aa"  sa  pro- 
jection verticale;  BCDE  la  trace  donnée  de  la  sur- 
face cylindrique,  trace  qui  sera  la  projection  horizon- 
tale de  la  surface  indéfinie,  et,  par  conséquent,  celle 
de  la  courbe  d'intersection  ;  soient  /g la  projection  verti- 
cale donnée  du  plan  coupant,  projection  qui  sera  aussi 
celle  de  l'intersection  demandée,  et  FG  la  trace  horizon- 
tale du  même  plan  :  il  est  évident  que  si  l'on  mène  à 
la  courbe  BCDE,  et  perpendiculairement  à  LM,  les 
tangentes  indéfinies  Ee",  Ce",  les  droites  ee",  ce" 
seront  les  projections  verticales  de  la  génératrice  dans 
ses  positions  extrêmes,  et  que  les  points  e',.c',  dans 
lesquels  elles  couperont  la  projection  fg  du  plan  cou- 
pant, termineront  sur  fg  la  projection  verticale  de  l'in- 
tersection demandée. 

Cela  posé,  si  par  un  point  pris  arbitrairement  sur 
l'intersection  (point  dont  la  projection  horizontale 
sera  un  point  H,  pris  à  volonté  sur  la  courbe  BCDE,  et 
dont  on  aura  la  projection  verticale  en  projetant  le 
point  H  en  i'  sur  fg)  on  veut  mener  la  tangente  à  cette 
intersection,  il  est  clair  que  cette  tangente  sera  com- 
prise dans  le  plan  coupant,  et  que  sa  projection  ver- 
ticale sera  la  droite  fg;  il  est  clair  aussi  qu'elle  sera  com- 
prise dans  le  plan  vertical  tangent  à  la  surface  cylin- 
drique, et  que  sa  projection  horizontale,  qui  sera  la 
même  que  celle  du  plan  tangent,  sera  la  droite  FHN 
tangente  en  H  à  la  courbe  donnée  BCDE  .  Ainsi  tout 
est  déterminé  par  rapport  à  l'intersection  demandée- 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE. 


io5 


tob'  LES   MAITRES  DE   LA  PENSÉE  SCIENTIFIQUE. 

60.  Actuellement,   posons    qu'il    s'agisse    de    cons- 
truire cette  intersection  telle  qu'elle  existe  dans  son 
plan  et,  par  un  de  ses  points  pris  à  volonté,  de  lui 
mener  une  tangente.  Si  le  plan  de  projection  verti- 
cale  se    trouve  à   une    trop    grande    distance    de    la 
courbe  BCDE,  on  pourra  concevoir  un  autre  plan  ver- 
tical qui  lui  soit  parallèle,  qui  passe  dans  l'intérieur 
de  la  courbe  BCDE,  et  dont  la  projection  horizontale 
soit  la  droite  EG  parallèle  à  LM.  Ce  plan  vertical  cou- 
pera le  plan  coupant  dans  une  droite  parallèle  à  sa 
projection  /g,  et  autour  de  laquelle,  comme  charnière, 
nous  supposons  que  le  plan  coupant  tourne  pour  de- 
venir vertical  et  présenter  en  face  la  courbe  demandée. 
Gela  posé,  par  tant  de  points  H  qu'on  voudra,  pris 
arbitrairement  sur  BCDE,  on  concevra  des  plans  ver- 
ticaux perpendiculaires  au  plan  vertical  de  projection, 
et  dont  on  aura  en  même  temps  les  projections  horizon- 
tales et  verticales,  en  menant  par  tous  les  points  H 
des  droites   llJKii'  perpendiculaires   à    LM.  Chacun 
de  ces  plans  coupera  le  plan  coupant  dans  une  droite 
horizontale  perpendiculaire  à  la  charnière,  et  dont  la 
projection  verticale  sera  le  point  de  rencontre   i'  des 
deux  droites  /g,  ii'.  De  plus,  dans  chaque  plan,  cette 
droite  horizontale  rencontrera  la    charnière  dans  un 
point  dont  la  projection  horizontale  sera  l'intersection  J 
des  deux  droites  EG,  HJKii';  et  elle  rencontrera  la 
courbe  demandée  dans  des  points  dont  les  projections 
horizontales  seront  les  intersections  H,  K  de  la  droite 
HJKu'  avec  la  courbe  BCDE.   Enfin  cette  droite  et 
toutes  ses  parties  seront  égales  à  leurs  projections 
horizontales.  Or,  lorsque  le  plan  coupant  tourne  autour 
de  la  charnière  pour  devenir  vertical,  toutes  ses  droites, 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  I07 

qui  d'abord  étaient  horizontales,  ne  cessent  pas  d'être 
perpendiculaires  à  la  charnière,  et  ne  changent  pas  de 
grandeur.  Donc,  si  par  tous  les  points  i'  on  mène  à  /g 
des  perpendiculaires  indéfinies  A/f,  et  si  sur  ces  perpen- 
diculaires on  porte  JH  de  i'  en  /i,  et  JK  de  i'  en  /c,  on 
aura  tant  de  points  A,  A:  qu'on  voudra,  par  lesquels 
on  fera  passer  la  courbe  demandée  e'  kc'  h. 

61.  La  courbe  étant  construite  dans  son  plan,  il 
s'agit  par  un  de  ses  points  A,  pris  arbitrairement,  de  lui 
mener  une  tangente;  on  aura  la  projection  \erticale  de 
ce  point  en  abaissant  du  point  h  sur  fg  la  perpendi- 
culaire hi';  on  aura  sa  projection  horizontale  en  pro- 
jetant i'  en  H  sur  la  courbe  BCDE;  on  aura  la  pro- 
jection horizontale  de  la  tangente  demandée,  en  me- 
nant la  droite  FN,  tangente  en  H,  à  la  courbe  BCDE, 
et  il  suffira  de  rapporter  sur  le  plan  de  la  courbe  un 
point  quelconque  de  la  tangente,  celui,  par  exemple, 
qui  est  projeté  sur  le  point  N  pris  arbitrairement,  et 
dont  la  projection  verticale  est  sur  fg  en  a'.  Or,  en  rai- 
sonnant pour  ce  point  comme  pour  tout  autre  point 
du  plan  coupant,  il  est  clair  que  si  par  le  point  a'  on 
mène  à  fg  la  perpendiculaire  a'  n,  et  que  si  sur  cette 
droite  on  porte  de  a'  en  n  la  distance  NA  du  point  N 
à  la  droite  EC,  le  point  n  sera  le  second  point  de  la 
tangente.  Donc  en  menant  la  droite  hn^  on  aura  la 
tangente  demandée. 

62.  Quelle  que  soit  la  courbe  donnée  BCDE,  on 
voit  que  l'intersection  e'  kc'  h  jouit  de  la  propriété, 
que,  pour  un  de  ses  points,  quelconque,  la  sous- 
tangente  a'  n  est  égale  à  la  sous-tangente  AN  de  la 


I()8  LES    MAITRES    DE   LA    PENSÉE    SCIENTIFIQUE. 

première.  Cette  propriété,  qui  est  très  connue  pour  le 
cercle  et  l'ellipse,  lorsque  ces  deux  courbes  ont  un  axe 
commun,  n'a  lieu  par  rapport  à  elles  que  parce  qu'elles 
sont  les  intersections  d'une  même  surface  cylindrique 
par  deux  plans  différents. 

63.  Enfin,  il  peut  arriver  qu'on  ait  besoin  de  tracer 
sur  le  développement  de  la  surface  cylindrique  l'effet 
de  la  section  faite  par  le  plan  coupant.  Pour  cela,  après 
avoir  développé  la  courbe  BCDE,  avec  toutes  ses  divi- 
sions, sur  une  droite  IIQ;  si  par  toutes  les  divisions 
de  RQ  on  lui  mène  des  perpendiculaires  indéfinies, 
on  aura  sur  le  développement  de  la  surface  les  traces 
des  différentes  positions  de  la  droite  génératrice,  et  il 
ne  s'agira  plus  que  de  porter  sur  ces  perpendiculaires 
les  parties  des  génératrices  correspondantes,  comprises 
entre  la  section  perpendiculaire  BCDE  et  la  section 
faite  par  le  plan  coupant.  Or,  ces  parties  de  généra- 
trices sont  égales  à  leurs  projections  verticales,  et  ces 
projections  sont  toutes  terminées  d'une  paît  à  la  droite 
LM,  et  de  l'autre  à  fg.  Donc,  si  le  point  H,  par  exemple, 
tombe  en  S  sur  la  droite  RQ,  en  portant  ii'  sur  la  per- 
pendiculaire qui  passe  par  le  point  S,  de  S  en  T,  le 
point  T  sera  sur  la  surface  développée  celui  où  la 
génératrice  qui  passe  par  le  point  H  est  coupée  par  le 
plan  coupant.  I^a  courbe  XTYZ,  qui  passera  par  tous 
les  points  déterminés  de  la  même  manière,  sera  la 
courbe  demandée. 

64.  Il  est  évident  que  si  l'on  prolonge  la  tangente 
au  point  H  jusqu'à  .ce  qu'elle  rencontre  la  trace 
horizontale  GF  du  plan  coupant  quelque  part  en  un 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  I09 

point  F,  et  que  si  l'on  porte  HF  sur  RQ  de  S  en  U,  la 
droite  TU  sera  tangente  à  la  courbe;  car  lorsque  la 
surface  cylindrique  se  développe,  ses  éléments  ne 
changent  pas  d'inclinaison  par  rapport  au  plan  hori- 
zontal. 

Second  cas,  dans  lequel  on  suppose  la  surface  cylin- 
drique et  le  plan  coupant  placés  d'une  manière  quel- 
conque par  rapport  aux  deux  plans  de  projections. 

65.  Solution  (fig.  28).  —  Soient  A  A'  et  aa'  les 
deux  projections  de  la  droite  à  laquelle  la  généra- 
trice doit  être  parallèle;  CEDF  la  trace  donnée  de  la 
surface  cylindrique;  et  HG/î,  hh  les  traces  du  plan 
cou])ant. 

On  imaginera  une  suite  de  plans  parallèles  à  la  géné- 
ratrice de  la  surface  cylindrique,  et  qui  seront  de  plus 
tous  perpendiculaires  à  un  des  plans  de  projection,  par 
exemple,  au  plan  horizontal;  chacun  de  ces  plans  sera 
projeté  suivant  une  droite  OKE  parallèle  à  AA',  et 
coupera  la  surface  en  des  droites  qui  seront  des  posi- 
tions de  la  génératrice  et  qui  rencontreront  le  plan 
horizontal  aux  points  d'intersection  E,  F  de  la 
droite  OKE  avec  la  courbe  CEDF.  Si  donc  on  projette 
les  points  E,  F  sur  LM  en  e,  /,  et  si  par  ces  derniers 
points  on  mène  à  la  droite  aa'  les  parallèles  ee\  ff\  on 
aura  les  projections  verticales  des  intersections  de  la 
surface  avec  chacun  des  plans  parallèles  à  la  généra- 
trice. 

Ces  mêmes  plans  couperont  aussi  le  plan  coupant  en 
des  droites  qui  seront  parallèles  entre  elles,  qui  auront 
toutes    leurs    traces    horizontales    sur    les    différents 


IIO  LES   MAITRES   DE    LA   PENSEE    SCIENTIFIQUE. 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  lit 

points  0  de  la  droite  HG,  et  dont  les  projections  ver- 
ticales seront  aussi  parallèles  entre  elles.  Pour  avoir 
ces  projections,  il  faut  d'abord  chercher  la  direction 
de  l'une  d'elles,  de  celle,  par  exemple,  qui  correspond 
au  plan  vertical  mené  par  AA'.  Pour  cela,  si  l'on  pro- 
longe AA'  jusqu'à  ce  qu'elle  rencontre,  d'une  part,  la 
trace  du  plan  coupant  en  un  point  N,  et,  de  l'autre,  la 
droite  LM  en  un  point  B,  et  si  l'on  projette  le  point  B 
en  b  sur  A6,  les  deux  points  N  et  è  seront  sur  les  deux 
plans  de  projection  les  traces  de  l'intersection  du  plan 
coupant  avec  le  plan  vertical.  Donc,  si  l'on  projette 
le  point  N  en  n  sur  LM,  et  si  l'on  mène  la  droite  nb, 
on  aura  la  projection  verticale  de  cette  intersection. 
Donc,  en  projetant  sur  LM  tous  les  points  O,  dans 
lesquels  la  trace  GH  est  coupée  par  les  projections  des 
l)lans  verticaux,  ce  qui  donnera  une  suite  de  points  o, 
et  en  menant  par  ces  derniers  les  parallèles  oik  à  n6,  on 
aura  les  projections  verticales  des  intersections  du 
plan  coupant  par  la  suite  des  plans  verticaux.  Donc 
enfin  les  points  de  rencontre  i,  k  de  chaque  droite  oik 
avec  les  projections  ee\  ff  des  sections  faites  dans  la 
surface  cylindrique  par  le  plan  vertical  correspondant, 
seront  sur  la  projection  verticale  de  l'intersection  de- 
mandée; et  la  courbe  qui  passera  par  tous  les  joints  i, 
/f,  ainsi  déterminés,  sera  cette  projection.  Si  l'on  pro- 
jette les  points  t,  /c,  en  J,  K,  sur  la  projection  OKE  du 
plan  vertical  correspondant,  on  aura  la  projection 
horizontale  des  mêmes  points,  et  la  courbe  KJP,  qui 
passera  par  tous  les  points  ainsi  déterminés,  sera  la 
projection  horizontale  de  l'intersection. 

66.  Pour  avoir  les  tangentes  de  ces  deux  projections 


ir2  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

aux  points  J,  i,  il  faut  se  rappeler  que  ces  tangentes 
sont  les  projections  de  la  tangente  à  l'intersection.  Or^ 
cette  dernière  tangente  étant  en  même  temps  dans  le 
plan  coupant  et  dans  le  plan  tangent  à  la  surface  cylin- 
drique doit  avoir  sa  trace  horizontale  dans  l'inter- 
section des  traces  horizontales  de  ces  deux  plans  :  de 
plus,  la  trace  du  plan  tangent  est  la  tangente  en  F  à 
la  courbe  GEDF.  Donc,  si  l'on  mène  cette  tangente,  et 
si,  après  l'avoir  prolongée  jusqu'à  ce  qu'elle  rencontre 
la  trace  du  plan  coupant  en  un  point  G,  on  mène  la 
droite  GJ,  cette  droite  touchera  au  point  J,  la  pro- 
jection horizontale  de  l'intersection.  Enfin,  projetant 
le  point  G  sur  LM  en  g,  et  menant  la  droite  gi,  on  aura 
la  tangente  en  i  de  la  projection  verticale  de  la  même 
courbe. 

67.  S'il  faut  construire  la  courbe  de  l'intersection, 
telle  qu'elle  existe  dans  son  plan,  on  concevra  que  le 
plan  coupant  tourne  autour  de  sa  trace  horizon- 
tale HG,  comme  charnière,  pour  s'appliquer  sur  le 
plan  horizontal.  Dans  ce  mouvement,  chacun  des 
points  de  la  section,  celui,  par  exemple,  qui  est  projeté 
en  J,  décrira  un  arc  de  cercle  dont  le  plan  sera  vertical, 
perpendiculaire  à  HG,  et  dont  on  aura  la  projection 
indéfinie,  en  menant  par  le  point  J  une  droite  RJS 
perpendiculaire  à  HG  :  donc,  lorsque  le  plan  sera 
abattu,  le  point  de  la  section  tombera  quelque  part 
sur  un  point  de  cette  droite.  Reste  à  trouver  la  dis- 
tance de  ce  point  à  la  charnière  :  or  la  projection 
horizontale  de  cette  distance  est  JR,  et  la  dilîérence 
des  hauteurs  de  ses  extrémités  est  la  verticale  is.  Si 
l'on  porte  JR  sur  LM  de  s  en  /,  l'hypoténuse  ri  sera 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  Il3 

cette  distance.  Donc,  portant  ri  sur  RJ  de  R  en  S,  le 
point  S  sera  un  des  points  de  l'intersection  consi- 
dérée dans  son  plan  abattu  sur  le  plan  horizontal;  et 
la  courbe  STUV,  menée  par  tous  les  points  S  semblable- 
ment  construits,  sera  cette  intersectioji  elle-même. 

68.  Pour  avoir  la  tangente  de  cette  courbe  au 
point  S,  il  suffît  d'observer  que,  pendant  le  mouve- 
ment du  plan  coupant,  la  tangente  ne  cesse  pas  de 
passer  par  le  point  G  de  la  charnière  :  donc,  si  l'on 
mène  la  droite  SG,  on  aura  la  tangente  demandée. 

69.  Deuxième  question.  —  Construire  l'inter- 
section d'une  surface  conique  à  base  quelconque 
donnée,  par  un  plan  donné  de  position  ? 

Solution.  —  Nous  supposerons,  ce  qui  est  toujours 
possible,  que  le  plan  vertical  de  projection  soit  placé 
perpendiculairement  au  plan  coupant. 

Soient  A  et  a'  (fig,  29)  les  projections  du  sommet 
du  cône  ou  du  centre  de  la  surface  conique,* 
l^CDE  la  trace  de  cette  surface  sur  le  plan  horizontal, 
/g  la  projection  verticale  du  plan  coupant,  et  G/  sa 
trace  horizontale.  On  imaginera  par  le  sommet  du 
cône  une  suite  de  plans  perpendiculaires  au  plan  ver- 
tical de  projection  :  les  projections  verticales  de  ces 
plans  seront  les  droites  a'  c  menées  par  la  projection 
du  sommet,  et  leurs  traces  horizontales  seront  les 
droites  cC  perpendiculaires  à  LM,  qui  couperont  la 
trace  de  la  surface  conique  quelque  part  en  des 
points  C,  C,  ....  Ces  plans  couperont  la  surface  en 
des  droites  dont  les  projections  verticales  seront  les 

MONOK.    —   I.  8 


n|  LES  MAITRES  DE   LA   PENSÉE  SCIENTIFIQUE. 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  1 15 

droites  a' c^  ...,  et  dont  on  aura  les  projections 
horizontales  en  menant  au  point  A  les  droites  CA, 
C'A,  ....  Les  mêmes  plans  couperont  aussi  le  plan 
coupant  dans  des  droites  qui  seront  perpendiculaires 
au  plan  vertical.  Les  projections  de  ces  droites  seront 
les  points  h,  ...  de  rencontre  de  /g  avec  les  droites 
a'  c,  .  .  .,et  Ton  aura  leurs  projections  horizontales  en 
abaissant  des  points  /i,  ...  sur  LM  les  perpendicu- 
laires indéfinies  AH,  ....  Cela  fait,  les  droites  h  H,  ... 
couperont  les  droites  correspondantes  CA,  C'A,  ..., 
en  des  points  H,  H',  .  .  .  qui  seront  les  projections 
horizontales  d'autant  de  points  de  l'intersection  de- 
mandée; et  la  courbe  PHQH',  qui  passera  par  tous  les 
points  construits  de  cette  manière,  sera  la  projection 
de  l'intersection. 

70.  Pour  mener  à  cette  courbe  une  tangente  par 
un  point  H  pris  à  volonté  sur  elle,  il  suffit  de  chercher 
sur  le  plan  horizontal  la  trace  de  la  tangente  de  l'in- 
tersection dans  le  point  qui  correspond  au  point  H. 
Or,  cette  trace  doit  être  sur  celle  du  plan  coupant,  et 
par  conséquent  sur  G/;  elle  doit  être  aussi  sur  celle  du 
plan  qui  touche  la  surface  conique  dans  la  droite,  dont 
la  projection  est  AH  ;  de  plus,  si  l'on  prolonge  AH 
jusqu'à  ce  (|u'elle  rencontre  la  courbe  BCDE  quelque 
part  en  un  point  C,  la  tangente  CF  de  cette  courbe  au 
point  G  sera  la  trace  horizontale  du  plan  tangent. 
Donc  le  point  F  de  rencontre  des  deux  traces  /  G,  CF 
sera  sur  la  tangente  au  point  H  de  la  courbe  PHQH'. 

71.  S'il  est  nécessaire  de  construire  l'intersection 
considérée  dans  son  plan,  on  pourra  jndiiïéremment 


l6  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


concevoir,  ou  que  le  plan  coupant  tourne  autour 
de  G  /  comme  charnière,  pour  s'abattre  sur  le  plan 
horizontal,  et  construire  la  courbe  dans  la  position 
qu'elle  aura  prise  alors,  ou  qu'il  tourne  autour  de  sa 
projection  verticale  /g  pour  s'appliquer  sur  le  plan  ver- 
tical; c'est  cette  dernière  hypothèse  que  nous  allons 
suivre. 

Toutes  les  horizontales  dans  lesquelles  la  suite  des 
plans  menés  par  le  sommet  a  coupé  le  plan  coupant, 
et  qui  sont  perpendiculaires  à  /g,  ne  changent  pas  de 
grandeur  dans  le  mouvement  du  plan  coupant,  et  ne 
cessent  pas  d'être  perpendiculaires  à  /g  :  donc,  si  par 
tous  les  points  h  on  mène  à  /g  des  perpendiculaires 
indéfinies,  et  si  l'on  porte  sur  elles  les  horizontales 
correspondantes  KH,  KH',  de  h  en  N  et  en  N',  les 
points  N  et  N'  seront  des  points  de  la  section;  et  la 
courbe  RNSN',  menée  par  tous  les  points  ainsi  cons- 
truits,  sera   l'intersection  considérée   dans   son  plan. 

72.  D'après  tout  ce  qui  précède,  il  est  évident  que, 
pour  mener  à  cette  courbe  une  tangente  en  un  point  N, 
pris  arbitrairement  sur  elle,  il  faut  du  point  N  abaisser 
sur  /g  la  perpendiculaire  N/î,  mener  la  droite  a' h 
jusqu'à  ce  qu'elle  rencontre  LM  en  un  pomt  c,  projeter 
ce  dernier  point  en  C  sur  la  courbe  BCDE,  mener  à 
cette  courbe  la  tangente  en  C,  qui  coupera  la  trace  G/ 
quelque  part  en  un  point  F,  et  porter  F/  perpendicu- 
lairement à  /g  de  /  en  0.  La  droite  ON  sera  la  tangente 
demandée. 

Quant  à  la  manière  de  construire  le  développement 
de  la  surface  conique  à  base  quelconque,  et  de  tracer 
sur  ce  développement  l'efl'et  de  l'intersection  par  le 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  II7 

plan  coupant,  nous  Texposerons  incessamment,  après 
avoir  parlé  de  rinterscetion  de  la  surface  conique  par 
celle  d'une  sphère  qui  aurait  son  centre  au  sommet. 

73.  Troisième  question.  —  Construire  l'inter- 
section de  deux  surfaces  coniques  à  bases  circulaires, 
et  dont  les  axes  sont  parallèles  entre  eux  ? 

Solution.  —  Nous  ne  répéterons  pas  ici,  sur  la 
figure  26,  tout  ce  que  nous  avons  dit  en  exposant 
la  méthode  générale  à  laquelle  cette  figure  servait 
de  type  ;  nous  observerons  seulement  que,  dans  le  cas 
dont  il  s'agit  ici,  de  même  que  dans  celui  de  deux  sur- 
faces quelconques  de  révolution,  les  sections  faites 
dans  les  deux  surfaces  par  les  plans  horizontaux  sont 
des  cercles  :  mais  nous  entrerons  dans  quelques  détails 
par  rapport  aux  tangentes,  dont  nous  n'avons  pas  eu 
occasion  de  parler. 

74.  Pour  trouver  la  tangente  au  point  D  (fig.  9,0) 
de  la  projection  horizontale  de  l'intersection,  nous 
nous  rappellerons  qu'elle  est  la  projection  de  la 
tangente  de  l'intersection  des  deux  surfaces,  au  point 
qui  correspond  à  D,  et  qu'il  suffit,  pour  la  déterminer, 
de  trouver  le  point  S  qui  est,  sur  le  plan  horizontal,  la 
trace  de  la  tangente  de  l'intersection.  Or  cette  der- 
nière tangente  est  dans  les  deux  plans  qui  touchent 
les  surfaces  coniques  dans  le  point  de  l'intersection; 
donc,  si  l'on  trouve  les  traces  horizontales  Rr,  ()q 
de  ces  deux  plans  tangents,  elles  détermineront  par 
leur  rencontre  le  point  S.  Mais  le  plan  tangent  à  la 
première  surface  la  touche  dans  une  droite  qui  pas3e 


Il8  LES   MAITRES   DE   LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

par  le  sommet,  et  dont  on  aura  la  projection  horizon- 
tale en  menant  la  droite  indéfinie  AD.  De  plus,  si  l'on 
prolonge  AD  jusqu'à  ce  qu'elle  rencontre  en  un 
point  Q  la  trace  circulaire  horizontale  TQUV  de  la 
surface,  le  point  Q  sera  un  point  de  la  ligne  de  contact 
de  la  surface  et  du  plan;  par  conséqueni,  la  trace  hori- 
zontale du  plan  sera  tangente  en  Q  au  cercle  TQUV  : 
scit  donc  menée  cette  tangente  Q^.  Pareillement,  si 
l'on  prolonge  le  rayon  BD  jusqu'à  ce  qu'il  rencontre 
en  R  la  trace  horizontale  circulaire  RXYZ  de  la  seconde 
surface,  et  si  l'on  mène  à  ce  cercle  la  tangente  en  R, 
cette  droite  Rr  sera  la  trace  horizontale  du  plan  tan- 
gent à  la  seconde  surface.  Donc,  si  par  le  point  S  d'in- 
tersection des  deux  tangentes  Q(/,  Rr  on  mène  la 
droite  SD,  on  aura  la  tangente  au  point  D  de  la  pro- 
jection horizontale  de  l'intersection. 

Quant  à  la  tangente  au  point  correspondant  d  de  la 
projection  verticale,  il  est  clair  qu'on  l'obtiendra  en 
projetant  le  point  S  en  5,  et  en  menant  ensuite  la 
droite  sd,  qui  sera  cettp  tangente. 

75.  Il  peut  arriver  qu'il  soit  nécessaire  de  cons- 
truire sur  le  développement  de  l'une  des  surfaces 
coniques,  peut-être  même  sur  celui  de  chacune  d'elles, 
l'effet  de  leur  mutuelle  intersection;  ce  qui  serait 
nécessaire,  par  exemple,  s'il  fallait  exécuter  les  cônes 
avec  des  substances  flexibles,  telles  que  des  feuilles  de 
métal  :  dans  ce  cas,  on  opérera  pour  chaque  cône,  comme 
nous  allons  l'indiquer  pour  le  premier. 

Nous  observerons  d'abord  que,  lorsqu'une  surface 
conique  se  développe  pour  devenir  plane,  les  lignes 
droites  qui  sont  sur  cette  surface  no  changent  ni  de 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  ij^ 

iorme,  ni  de  grandeur,  parce  que  chacune  d'elles  est 
successivement  la  charnière  autour  de  laquelle  s'opère 
le  développement  :  ainsi  tous  les  points  de  la  surface 
restent  toujours  à  la  même  distance  du  sommet.  De 
plus,  lorsque,  comme  dans  ce  cas,  la  surface  conique 
est  droite  et  circulaire,  tous  les  points  de  la  trace 
horizontale  circulaire  sont  à  égale  distance  du  som- 
met ;  ils  doivent  donc  être  à  égale  distance  du  sommet 
sur  le  développement,  et  par  conséquent  sur  un  arc  de 
cercle  dont  le  rayon  est  égal  à  la  distance  constante  du 
sommet  à  la  trace  circulaire.  Donc,  si  après  avoir  pris 
arbitrairement  un  point  pour  représenter  le  sommet 
sur  le  développement,  on  décrit  de  ce  point,  comme 
centre,  et  d'un  rayon  égal  à  aC,  un  arc  de  cercle  indé- 
fini, cet  arc  sera  aussi  indéfiniment  le  développement 
de  la  trace  horizontale  de  la  surface.  Puis,  si,  à  partir  du 
point  T  de  la  trace  par  lequel  on  veut  commencer  le 
développement,  on  porte  l'arc  de  cercle  TQ  sur  l'arc 
qu'on  vient  de  décrire,  on  déterminera  la  position  du 
point  Q  sur  le  développement;  et  la  droite  indéfinie, 
menée  par  ce  point  au  centre  du  développement,  sera 
la  position  qu'occupera  la  droite  de  la  surface  qui  est 
projetée  en  AQ,  et  sur  laquelle  devra  se  trouveï  le 
point  D,  d  de  la  section  rapportée.  Pour  construire  ce 
point,  il  ne  s'agira  plus  que  de  trouver  sa  distance  au 
sommet,  et  de  là  porter  sur  là  droite  indéfinie,  à  partir 
du  centre  du  développement.  Pour  cela,  par  le  point  d 
dans  la  projection  verticale,  on  mènera  l'horizontale  dk 
jusqu'à  ce  qu'elle  coupe  le  côté  a  G  du  cône  en  un 
point  k;  et  la  droite  ak  sera  cette  distance.  En  cons- 
truisant de  même  successivement  tous  les  autres  points 
dfr  l'intersection,  et  faisant  passer  par  tous  ces  points 


I20  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

une  courbe,  on  aura  l'intersection  des  deux  surfaces 
rapportées  sur  le  développement  de  la  première  :  on 
opérera  de  même  pour  la  seconde  surface. 

76.  Quatrième  question.  —  Construire  l'intersec- 
tion de  deux  surfaces  coniques  à  bases  quelconques  ? 

Solution.  —  Soient  A,  a  (fig.  3o)  les  projections 
du  sommet  de  la  première  surface;  CGDG',  sa  trace 
donnée  sur  le  plan  horizontal;  B,  è,  les  projec- 
tions du  sommet  de  la  seconde;  et  EHFH',  sa  trace 
sur  le  plan  horizontal.  On  concevra  par  les  deux  som- 
mets une  droite,  dont  on  aura  les  projections  en  me- 
nant les  droites  indéfinies  AB,  ab,  et  dont  on  cons- 
truira facilement  la  trace  I  sur  le  plan  horizontal.  Par 
cette  droite  on  concevra  une  série  de  plans  qui  cou- 
peront chacun  les  deux  surfaces  coniques  dans  le  sys- 
tème de  plusieurs  lignes  droites  ;  et  celles  de  ces  lignes 
droites  qui  seront  dans  le  même  plan  détermineront 
par  leurs  rencontres  autant  de  points  de  l'intersection 
des  deux  surfaces.  Les  traces  horizontales  de  tous  les 
plans  de  cette  série  passeront  nécessairement  par  le 
point  I;  et,  parce  que  la  position  de  ces  plans  est 
d'ailleurs  arbitraire,  on  pourra  donc  se  donner  arbi- 
trairement leurs  traces  en  menant  par  le  point  I  tant 
de  droites  IK  qu'on  voudra,  pour  chacune  desquelles 
on  fera  l'opération  que  nous  allons  décrire  pour  une 
seule  d'entre  elles. 

La  trace  Kl  de  chacun  des  plans  de  la  série  coupera 
la  trace  horizontale  de  la  première  surface  conique  en 
des  points  G,  G',  qui  seront  aussi  les  traces  horizon- 
tales des  lignes  droites,  suivant  lesquelles  le  plan  coupe 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE. 


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«I2î2  LES   MAITRES    DE   LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

la  surface  conique  :  ainsi  AG,  AG'  seront  les  projec- 
tions horizontales  indéfinies  de  ces  droites,  et  l'on 
aura  leurs  projections  verticales  en  projetant  G,  G' 
en  g,  g',  et  en  menant  les  droites  indéfinies  ag,  ag' . 
Pareillement  la  trace  Kl  du  même  plan  de  la  série 
coupera  la  trace  horizontale  de  la  seconde  surface  co- 
nique dans  des  points  H,  H',  par  lesquels  si  l'on  mène 
indéfiniment  BH,  BH',  on  aura  les  projections  horizon- 
tales des  droites,  suivant  lesquelles  le  même  plan  de 
la  série  coupe  la  seconde  surface;  et  l'on  aura  leurs 
projections  verticales  en  projetant  H,  H'  en  h^  h\  et 
en  menant  les  droites  indéfinies  bh,  bh'. 

Gela  fait,  pour  le  même  plan  dont  la  trace  est  Kl,  on 
aura  sur  la  projection  horizontale  un  certain  nombre 
de  droites  AG,  AG',  BH,  BH';  et  les  points  P,  Q,  R,  S, 
où  celles  qui  appartiennent  à  l'une  des  surfaces  ren- 
contreront celles  qui  appartiennent  à  l'autre,  seront 
les  projections  horizontales  d'autant  de  points  de 
l'intersection  des  deux  surfaces.  Ainsi  en  opérant  suc- 
cessivement de  la  même  manière  pour  d'autres  lignes 
Kl,  on  trouvera  de  nouvelles  suites  de  points  PQRS; 
et  faisant  ensuite  passer  par  tous  les  points  P  une  pre- 
mière branche  de  courbe,  par  tous  les  points  Q  une 
seconde,  par  tous  les  points  R  une  troisième,  etc.,  on 
aura  la  projection  horizontale  de  l'intersection  de- 
mandée. 

Pareillement,  pour  le  même  plan  dont  la  trace 
est  Kl,  on  aura  sur  la  projection  verticale  un  certain 
nombre  de  droites  ag,  ag',  bh,  bh\  dont  les  points  de 
rencontre  seront  les  projections  verticales  d'autant 
de  points  de  l'intersection. 

Il  faut  observer  ici  qu'il  n'est  pas  nécessaire  de  cons- 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  123 

truire  les  deux  projections  de  la  courbe  d'intersection, 
indépendamment  l'une  de  l'autre,  et  (ju'un  point  de 
l'une  étant  construit,  on  peut  trouver  son  correspon- 
dant sur  l'autre  projection,  en  le  projetant  par  une 
perpendiculaire  à  la  commune  intersection  des  deux 
plans  de  projection  sur  l'une  des  droites  qui  doit  le 
contenir;  ce  qui  fournit  les  moyens  de  vérifier  les  ope 
rations,  et  d'éviter  dans  certains  cas  les  intersections 
de  droites  qui  se  couperaient  sous  des  angles  trop 
obliques. 

77.  Pour  trouver  les  tangentes  à  la  projection 
horizontale,  celle,  par  exemple,  qui  la  touche  au 
point  P,  il  faut  construire  la  trace  horizontale  T  de  la 
tangente  de  l'intersection  au  point  qui  correspond 
à  P.  Or  cette  tangente  est  l'intersection  des  deux  plans 
qui  touchent  les  surfaces  coniques  dans  ce  point  :  sa 
trace  sera  donc  dans  la  rencontre  des  traces  horizon- 
tales de  ces  deux  plans  tangents.  De  plus,  A(x'  P  est  la 
projection  de  la  droite  de  contact  du  plan  qui  touche  la 
première  surface  ;  ainsi  la  trace  de  ce  premier  plan  sera 
la  tangente  de  la  courbe  GGDG'  au  point  G'  :  soit 
G' TV  cette  tangente.  Pareillement  BH'  P  est  la  pro- 
jection horizontale  de  la  droite  de  contact  du  plan  qui 
touche  la  seconde  surface;  ainsi  la  trace  horizontale 
du  second  plan  tangent  sera  la  tangente  au  point  II' 
de  la  courbe  EHFH'  :  soit  H'  TU  cette  tangente.  Les 
deux  tangentes  G'  V,  H'  U  se  couperont  donc  en  un 
point  T,  par  lequel,  si  l'on  mène  la  droite  TP,  on  aura 
la  tangente  au  point  P  demandée. 

En  raisonnant  de  même  pour  les  autres  points  Q, 
R,  S,  on  trouvera  :  1°  que  la  tangente  en  Q  doit  passer 


124  LES   MAITRES   DE   LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

par  le  point  de  rencontre  des  tangentes  en  G'  et  en  H; 
•2^  que  la  tangente  en  R  doit  passer  par  la  rencontre 
des  tangentes  en  H  et  en  G;  3°  que  la  tangente  en  S 
doit  passer  par  la  rencontre  des  tangentes  en  G  et 
en  H\ 

Quant  aux  tangentes  de  la  projection  verticale,  elles 
n'ont  aucune  difficulté,  lorsque  celles  de  la  projection 
horizontale  sont  déterminées,  car  en  projetant  les 
traces  horizontales  des  tangentes  de  l'intersection,  on 
a  les  points  par  lesquels  elles  doivent  passer. 

78.  Cinquième  question.  —  Construire  l'intersec- 
tion d'une  surface  conique  à  base  quelconque,  et  de 
celle  d'une  sphère  ? 

Nous  supposerons  ici  que  les  deux  surfaces  sont 
concentriques,  c'est-à-dire  que  le  sommet  du  cône  est 
placé  au  centre  de  la  sphère,  parce  que  nous  aurons 
besoin  de  ce  cas  particulier  pour  la  question  suivante. 

Solution.  —  Soient  A,  a  {fig.  3i)  les  projections 
du  centre  commun  des  deux  surfaces,  BCDE  la 
trace  horizontale  donnée  de  la  surface  conique, 
am  le  rayon  de  la  sphère,  et  le  cercle  If  g'  m  la  pro- 
jection verticale  de  la  sphère.  On  concevra  par  le 
centre  commun  des  deux  surfaces  une  série  de  plans, 
que  l'on  pourra  de  plus  supposer  tous  perpendicu- 
laires à  l'un  des  deux  plans  de  projection.  Dans  la 
figure  3i,  nous  les  avons  supposés  verticaux.  Chacun 
de  ses  plans  coupera  la  surface  conique  dans  un  sys- 
tème de  lignes  droites,  et  la  surface  de  la  sphère  dans 
la  circonférence  d'un  de  ses  grands  cercles;  et  pour 
chaque  plan,  les  rencontres  de  ces  droites  avec  la  cir- 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE. 


il6  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIÈNTIF'lQUE. 

conférence  du  cercle  détermineront  des  points  de  l'in- 
tersection demandée  :  soient  donc  menées  par  le 
point  A  tant  de  droites  indéfinies  CAE  qu'on  voudra, 
qui  seront  les  projections  horizontales  d'autant  de 
plans  verticaux  de  la  série,  et  en  même  temps  celles  des 
lignes  suivant  lesquelles  ces  plans  coupent  les  deux 
surfaces.  Chaque  droite  CAE  coupera  la  trace  horizon- 
tale BCDE  de  la  surface  conique  en  des  points  C,  E, 
qui  seront  les  traces  horizontales  des  sections  faites 
dans  cette  surface  par  le  plan  correspondant;  et  si, 
après  avoir  projeté  les  points  C,  E  sur  LM  en  c,  e,  on 
mène  les  droites  ac^  ae,  on  aura  les  projections  verti- 
cales des  mêmes  sections.  Il  s'agit  actuellement  de 
trouver  les  rencontres  de  ces  sections  avec  celles  de  la 
sphère  par  le  même  plan. 

Pour  cela,  après  avoir  mené  par  le  point  A  la  droite 
GAF  parallèle  à  LM,  on  concevra  que  le  plan  vertical 
mené  par  CE  tourne  autour  de  la  verticale  qui  est 
élevée  par  le  point  A  et  projetée  en  ci  a,  jusqu'à  ce 
qu'il  devienne  parallèle  au  plan  vertical  de  projection, 
et  de  plus  qu'il  entraîne  avec  lui  les  sections  qu'il  a 
faites  dans  les  deux  surfaces.  Dans  ce  mouvement,  les 
points  C,  E  décriront  autour  du  point  A,  comme  centre, 
des  arcs  de  cercle  CG,  EF,  et  viendront  s'appliquer 
en  G,  F  ;  et  si  l'on  projette  ces  derniers  points  sur  LM 
en  g,  /,  les  droites  «g,  af  seront  les  projections  verti- 
cales des  sections  faites  dans  la  surface  conique,  con- 
sidérées dans  la  nouvelle  position  qu'elles  ont  prise 
en  vertu  du  mouvement  du  plan.  La  section  faite  dans 
la  surface  de  la  sphère,  considérée  de  même  dans  la 
nouvelle  position,  aura  pour  projection  verticale  la 
circonférence  If  g' m.  Donc  les  points  de  rencontre  /', 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE.  127 


g'  de  cette  circonférence  avec  les  droites  ag,  af  seront 
les  projections  des  points  de  l'intersection  demandée, 
considérés  aussi  dans  la  nouvelle  position  du  plan. 

Actuellement,  pour  avoir  les  projections  des  mornes 
points  considérés  dans  leur  position  naturelle,  il  faut 
supposer  que  le  plan  vertical  de  la  série  retourne  dans 
su  position  primitive.  Dans  ce  mouvemeni,  tous  les 
points  du  plan,  et  par  conséquent  ceux  de  l'inter- 
section qu'il  contient,  décriront  des  arcs  de  cercles 
horizontaux  autour  de  la  verticale  élevée  par  le  point  A 
comme  axe,  et  dont  les  projections  verticales  seront 
des  droites  horizontales.  Donc,  si  par  les  points  g\  f 
on  mène  les  horizontales  ^'i,  f'h^  elles  contiendront 
les  projections  verticales  des  points  de  l'intersection  : 
mais  ces  projections  doivent  aussi  se  trouver  sur  les 
droites  respectives  ac^  ae;  donc  elles  seront  aux  points 
de  rencontre  i,  h  de  ces  dernières  droites  avec  les 
horizontales  g'i,  f  h.  Ainsi  la  courbe  /c/mi,  imenée  paj* 
tous  les  points  construits  de  la  même  manière  pour 
toute  autre  droite  que  CE,  sera  la  projection  verticale 
de    l'intersection    demandée. 

Si  l'on  projette  les  points  i,  h  sur  CE  en  J,  11,  on 
aura  les  projections  horizontales  des  mêmes  points 
de  l'intersection;  et  la  courbe  KHNJ  menée  par  tous 
les  points  J,  H,  construits  de  la  même  manière  pour 
toute  autre  droite  que  CE,  sera  la  projection  horizon- 
tale de  l'intersection. 

79.  Pour  trouver  la  tangente  au  point  J  de  la  pro- 
jection horizontale,  il  faut  construire  la  trace  horizon- 
tale P  de  la  tangente  au  point  correspondant  de  l'in- 
tersection. Cette  droite  doit  se  trouver  à  la  rencontre 


I'28  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

des  traces  des  plans  tangents  aux  deux  surfaces  au 
point  de  l'intersection  qui  correspond  au  point  J.  Or 
il  est  évident  que,  si  par  le  point  C  on  mène  à  la 
courbe  BGDE  la  tangente  CP,  on  aura  la  trace  du 
plan  tangent  à  la  surface  conique.  Quant  à  celle  du 
plan  tangent  de  la  sphère,  on  opérera  comme  nous 
l'avons  vu  pour  les  surfaces  de  révolution,  c'est-à-dire 
en  menant  par  le  point  g'  au  cercle  If  g' m  la  tangente 
g'o  prolongée  jusqu'à  la  droite  LM  en  o,  en  portant 
ensuite  a'  o  sur  CE  de  A  en  0,  et  menant  par  le  point  0 
la  droite  OP  perpendiculaire  à  CE.  Donc  les  deux 
traces  CP,  OP  se  couperont  en  un  point  P  par  lequel, 
si  l'on  mène  la  droite  JP,  on  aura  la  tangente  au 
point  J. 

Enfin,  il  est  évident  que  l'on  aura  la  tangente  au 
point  i  de  la  projection  verticale  de  l'intersection,  en 
projetant  le  point  P  sur  LM  en  p,  et  menant  ensuite 
la  droite  ip,  qui  sera  la  tangente  demandée. 

80.  Si  la  sphère  et  la  surface  conique  n'étaient  pas 
concentriques,  il  faudrait  concevoir  par  leurs  deux 
centres  une  ligne  droite,  et  choisir  la  série  des  plans 
coupants  qui  passerait  par  cette  droite.  Chacun  de 
ces  plans  couperait  la  surface  conique  dans  des  dioites, 
et  celle  de  la  sphère  dans  un  de  ses  grands  cercles, 
comme  dans  le  cas  précédent,  ce  qui  donne  également 
une  construction  simple;  mais  alors  il  serait  avanta- 
geux de  placer  le  plan  vertical  de  projection  parallè- 
lement à  la  droite  menée  par  les  deux  centres,  afin  que, 
dans  le  mouvement  que  l'on  fait  faire  à  chaque,  plan 
coupant  pour  le  rendre  parallèle  au  plan  vertical  de 
projection,  les  deux  centres  soient  immobiles    et   ne 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  129 


changent  pas  de  projections;  ce  qui  simplifie  les  cons- 
tructions. 

81.  Sixième  question.  —  Construire  le  dévelop- 
pement d'une  surface  conique  à  base  quelconque,  et 
rapporter  sur  cette  surface  ainsi  développée  une  sec- 
tion dont  on  a  les  deux  projections  ? 

Solution.  —  On  concevra  la  surface  d'une  sphère 
d'un  rayon  pris  à  volonté,  et  dont  le  centre  soit  placé 
au  sommet  du  cône,  et  on  construira,  comme  nous 
l'avons  fait  dans  la  question  précédente,  les  projec- 
tions de  l'intersection  de  ces  deux  surfaces.  Cela  fait, 
il  est  évident  que  tous  les  points  de  l'intersection  sphé- 
rique  étant  à  la  même  distance  du  sommet,  ils  doivent 
aussi  sur  la  surface  développée  se  trouver  à  la  même 
distance  du  sommet,  et  par  conséquent  sur  un  arc  de 
cercle  décrit  du  sommet  comme  centre,  et  avec  un 
rayon  égal  à  celui  de  la  sphère.  Ainsi,  en  suppo- 
sant que  le  point  R  {fig.  33)  soit  le  sommet  de  la 
surface  développée,  si  de  ce  point  comme  centre,  et 
d'un  rayon  égal  à  am  {fig.  3i),  on  décrit  un  arc  de 
cercle  indéfini  STU,  ce  sera  sur  cet  arc  que  tous  les 
points  de  l'intersection  sphérique  viendront  s'appli- 
quer, de  manière  que  les  parties  de  cet  arc  seront  ros- 
pectivement  égales  aux  parties  correspondantes  de 
l'intersection  sphérique.  Il  s'agit  donc  actuellement, 
après  avoir  pris  à  volonté  sur  cette  intersection  un 
point  pour  origine,  par  exemple,  celui  qui  est  projeté 
en  N,  n  (fig.  3i),  et  un  point  S  {fig.  33)  pour  son  cor- 
respondant sur  la  surface  développée,  de  développer 
Jes  différents  arcs'de  l'intersection  sphérique,  et  de  les 

MONGE.   —   I.  0 


l3o  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE  SCIENTIFIQUE. 

porter  successivement  sur  l'arc  de  cercle  STU  de  S  en 
des  points  T.  Pour  cela,  la  courbe  sphérique  étant  à 
double  courbure,  il  faut  lui  faire  perdre  successive- 
ment ses  deux  courbures,  sans  altérer  sa  grandeur, 
de  la  manière  suivante  : 

L'intersection  sphérique  étant  projetée  sur  le  pian 
horizontal  en  NJKH  (flg.  3i),  on  peut  la  regarder 
comme  tracée  sur  la  surface  d'un  cylindre  vertical, 
dont  la  base  serait  NJKH  :  on  pourra  donc  développer 
cette  surface,  comme  nous  l'avons  indiqué  (fig.  27),  et 
rapporter  sur  cette  surface  cylindrique  développée 
l'intersection  sphérique,  en  développant  l'arc  NJ 
(fig.  3i)  en  N'  J'  (fig.  82),  et  en  portant  la  verticale  i' i 
(fig.  3i)  perpendiculairement  à  N'N'  (fig.  82)  de  J' 
en  J".  La  courbe  N"J"K"H"N'',  qui  passera  par  tous 
les  points  J"  ainsi  déterminés,  sera  l'intersection  sphé- 
rique privée  de  sa  courbure  horizontale,  sans  avoir 
changé  de  longueur.  On  aura  la  tangente  au  point  J'^ 
de  cette  courbe,  en  prenant  JP  (fig.  81)  et  la  portant 
sur  N'N'  (fig.  82)  de  J'  en  P',  et  menant  la  droite  J"P\ 

Actuellement,  on  développera  la  courbe  N"  J^K^'H^N" 
pour  la  replier  sur  l'arc  STU  (fig.  ZZ)  :  par  exemple,  on 
portera  l'arc  N"  J"  de  S  en  T,  et  le  point  T  sera  sur  la 
surface  conique  développée,  le  point  où  s'applique 
celui  de  l'intersection  sphérique,  dont  les  projections 
sont  J,  i  (fig.  81).  Donc,  si  l'on  mène  la  droite  RT,  on 
aura  sur  le  développement  de  la  surface  la  génératrice 
dont  la  projection  horizontale  est  AC  (fig.  81);  enfin, 
s'il  se  trouve  sur  cette  génératrice  un  point  qu'il  faille 
rapporter  sur  la  surface  développée,  il  ne  s'agira  plus 
que  de  prendre  (fig.  3i)  la  distance  de  ce  point  au 
sommet  de  la  surface  conique,  et  de  la  porter  (fig.  ZZ) 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  l3l 

sur  RT  de  R  en  V;  et  le  point  V  sera  sur  la  surface 
développée  celui  que  l'on  considère. 

82.  Septième  question.  —  Construire  l'intersec- 
tion de  deux  surfaces  cylindriques  à  bases  quel- 
conques ? 

Solution.  —  Lorsque,  dans  la  recherche  qui  donne 
lieu  à  la  question  dont  il  s'agit,  on  n'a  pas  d'autres 
intersections  à  considérer  que  celle  des  deux  surfaces 
cylindriques,  et  surtout  quand  ces  surfaces  sont  à 
bases  circulaires,  il  est  avantageux  de  choisir  les  plans 
de  projection  de  manière  que  l'un  d'entre  eux  soit 
parallèle  aux  génératrices  des  deux  cylindres  :  par  là 
l'intersection  se  construit  sans  employer  d'autres 
courbes  que  celles  qui  sont  données.  Mais,  lorsqu'on 
doit  considérer  en  même  temps  les  intersections  de 
ces  surfaces  avec  d'autres,  il  n'y  a  plus  d'avantage  à 
changer  de  plans  de  projection;  et  même  il  est  plus 
•facile  de  se  représenter  les  objets  en  les  rapportant 
tous  aux  mêmes  plans. 

Nous  allons  donc  supposer  les  génératrices  des  deux 
surfaces  placées  d'une  manière  quelconque,  par  rapport 
aux  plans  de  projection. 

Soient  donc  {fig.  34)  TFF'U,  XGG'V  les  traces 
horizontales  données  des  deux  surfaces  cylindriques  ; 
AB,  ab  les  projections  données  de  la  droite  à 
laquelle  la  génératrice  de  la  première  doit  être  paral- 
.lèle;  CD,  cd  celles  de  la  droite  à  laquelle  doit  être 
parallèle  la  génératrice  de  la  seconde.  On  concevra  une 
série  de  plans  parallèles  aux  deux  génératrices.  Ces 
plans  couperont  les  deux  surfaces  dans  des  lignes 
droites  ;  et  les  rencontres  des  ^eux  sections  faites  dans 


l32  LES  MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  l33 

la  première  surface,  par  les  sections  faites  dans  la 
seconde,  détermineront  les  points  de  l'intersection 
demandée. 

Ainsi,  après  avoir  construit,  comme  dans  la  figure  i5, 
la  trace  horizontale  AE  d'un  plan  mené  par  la 
première  droite  donnée  parallèlement  à  la  seconde, 
on  mènera  parallèlement  à  cette  trace  tant  de 
droites  FG'  qu'on  voudra,  et  Ton  regardera  ces  paral- 
lèles comme  les  traces  des  plans  de  la  série.  Chaque 
droite  FG'  coupera  la  trace  de  la  première  surface  en 
des  points  F,  F',  et  celle  de  la  seconde  en  d'autres 
points  G,  G',  par  lesquels  on  mènera  aux  projections 
des  génératrices  respectives  les  parallèles  FH,  F'H', ..., 
GJ,  G'  J',  ...  ;  et  les  points  de  rencontre  P,  Q,  R,  S, 
de  ces  droites,  seront  les  projections  horizontales 
d'autant  de  points  de  l'intersection  des  deux  surfaces. 
En  opérant  de  même  pour  la  suite  des  droites  FG',  on 
trouvera  une  suite  de  systèmes  de  points  P,  Q,  R,  S, 
et  la  courbe  qui  passera  par  tous  les  points  trouvés 
de  la  même  manière  sera  la  projection  horizontale 
de  l'intersection. 

Pour  avoir  la  projection  verticale,  on  projettera 
sur  LM  les  points  F,  F',  . . .,  G,  G',  ...  en  /,  /',  . . ., 
g,  g',  . . .,  et,  par  ces  derniers  points,  on  mènera  aux 
projections  des  génératrices  respectives  les  paral- 
lèles //i,  /'  /i',  .  . . ,  gi,  g'  i'j  ...  qui,  par  leurs  ren- 
contres, détermineront  les  projections  verticales  p, 
g,  r,  s  des  points  de  l'intersection.  En  opérant  de 
même  pour  toutes  les  autres  droites  FG',  on  aura  de 
nouveaux  points  p,  ç,  r,  5;  et  la  courbe  qui  passera  par 
tous  ces  points  sera  la  projection  verticale  de  l'inter- 
section. 


l34  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

Pour  avoir  les  tangentes  de  ces  courbes  aux  points  R 
et  p,  on  construira  la  trace  horizontale  F'  Y  du  plan 
tangent  en  ce  point  à  la  première  surface  cylindrique  | 
puis  la  trace  G'  Y  du  plan  tangent  en  ce  même  point  à 
la  seconde  ;  et  la  droite,  menée  du  point  P  au  point  Y 
de  rencontre  de  ces  traces,  sera  la  tangente  en  P.  Enfiil, 
projetant  Y  sur  LM  en  ?/,  et  menant  la  droite  py,  on 
aura  la  tangente  au  point  p  de  la  projection  verticale. 

83.  Huitième  question.  —  Construire  l'inter- 
section de  deux  surfaces  de  révolution,  dont  les  axes 
sont  dans  un  même  plan  ? 

Solution.  —  On  disposera  les  plans  de  projection 
de  manière  que  l'un  d'entre  eux  soit  perpendiculaire 
à  l'axe  d'une  des  surfaces,  et  que  l'autre  soit  paral- 
lèle aux  deux  axes.  D'après  cela,  soient  A  {fig,  35) 
la  projection  horizontale  de  l'axe  de  la  première 
surface,  aa'  sa  projection  verticale,  et  cde  la  géné- 
ratrice donnée  de  cette  surface.  Soient  AB,  paral- 
lèle à  LM,  la  projection  horizontale  de  l'axe  de  la 
seconde  surface,  a'b  sa  projection  verticale,  de  manière 
que  A  et  a'  soient  les  projections  du  point  de  rencontre 
des  deux  axes;  et  soit  fgh  la  génératrice  donnée  de 
cette  seconde  surface.  On  concevra  une  série  de  sur- 
faces sphériques,  dont  le  centre  commun  soit  placé 
au  point  de  concours  des  deux  axes.  Pour  chacune  des 
surfaces  de  cette  série,  on  construira  la  projection 
iknopq  du  grand  cercle  parallèle  au  plan  vertical  de 
projection;  et  ces  projections,  qui  seront  des  arcs  de 
cercle  décrits  du  point  a'  comme  centre,  et  avec  des 
rayons  arbitraires,  couperont  les  deux  génératrices  en 
des  points  A,  p. 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE. 


Cela  posé,  chaque  surface  sphérique  coupera  la  pre- 
mière surface  dans  la  circonférence  d'un  cercle,  dont 
le  plan  sera  perpendiculaire  à  Taxe  aa\  et  dont  on 
aura  la  projection  verticale  en  menant  l'horizontale  ko^ 
et  dont  on  aura  la  projection  horizontale  en  décri- 
vant du  point  A  comme  centre,  et  d'un  diamètre  égal 
à  Ao,  la  circonférence  de  cercle  KROR'.  De  même 
chaque  surface  sphérique  de  la  série  coupera  la  seconde 
surface  de  révolution  dans  la  circonférence  d'un  cercle 
dont  le  plan  sera  perpendiculaire  au  plan  vertical 
de  projection,  et  dont  on  aura  la  projection  verticale 
en  menant  par  le  point  p  une  droite  pn  perpendicu- 
laire à  a'b. 

Si  le  point  r,  dans  lequel  se  coupent  les  deux 
droites  ko,  pn,  est  plus  près  des  deux  axes  respectifs 
que  n'en  sont  les  points  /r,  p,  il  est  évident  que  les 
deux  circonférences  de  cercles  se  couperont  en  deux 
points,  dont  le  point  r  sera  la  projection  verticale 
commune  ;  et  la  courbe  menée  par  tous  les  points  r, 
construits  de  la  même  manière,  sera  la  projection  ver- 
ticale de  l'intersection  des  deux  surfaces.  Projetant  le 
point  r  sur  la  circonférence  du  cercle  KROR'  en  R  et  R', 
on  aura  les  projections  horizontales  des  deux  points  de 
rencontre  des  circonférences  de  cercles  qui  se  trouvent 
sur  la  même  sphère;  et  la  courbe  menée  par  tous  les 
points  R,  R',  construits  de  la  même  manière,  sera  la 
projection  horizontale  de  l'intersection  demandée. 

Ces  exemples  doivent  suffire  pour  faire  connaître  la 
manière  dont  il  faut  employer  la  méthode  de  construire 
les  intersections  des  surfaces  et  de  leur  mener  des  tan- 
gentes, surtout  si  les  élèves  s'appliquent  à  construire 
avec  la   plus   grande   exactitude,   s'ils   emploient   de 


l36  LES   MAITRES   DE  LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


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GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  187 

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grandes  dimensions,  et  si,  autant  qu'il  sera  possible, 
ils  tracent  les  courbes  dans  toute  leur  étendue. 

84.  Dans  tout  ce  qui  précède,  nous  avons  regardé 
les  courbes  à  double  courbure  comme  déterminées  cha- 
cune par  deux  surfaces  courbes  dont  elle  est  l'intersec- 
tion, et  c'est,  en  effet,  le  point  de  vue  sous  lequel  elles 
se  présentent  le  plus  ordinairement  dans  la  Géométrie 
descriptive.  Dans  ce  cas,  nous  avons  vu  qu'il  est  tou- 
jours possible  de  leur  mener  des  tangentes.  Mais,  de 
même  qu'une  surface  courbe  peut  être  définie  au 
moyen  de  la  forme  et  du  mouvement  de  sa  génératrice, 
il  peut  arriver  aussi  qu'une  courbe  soit  donnée  par  la 
loi  du  mouvement  d'un  point  générateur;  et  alors, 
pour  lui  mener  une  tangente,  si  l'on  ne  veut  pas  avoir 
recours  à  l'Analyse,  on  peut  employer  la  méthode  de 
Roberval.  Cette  méthode,  qu'il  inventa  avant  que 
Descartes  eût  appliqué  l'Algèbre  à  la  Géométrie,  est 
implicitement  comprise  dans  les  procédés  du  Calcul 
différentiel,  et  c'est  pour  cela  que  les  éléments  de 
Mathématiques  n'en  font  pas  mention;  nous  nous 
contenterons  ici  de  l'exposer  d'une  manière  sommaire. 
Ceux  qui  désireront  en  voir  des  applications  nom- 
breuses pourront  consulter  les  Mémoires  de  VAca- 
demie  des  Sciences,  antérieurs  à  1699,  dans  lesquels  les 
ouvrages  de  Roberval  ont  été  recueillis. 

85.  Lorsque,  d'après  la  loi  de  son  mouvement,  un 
point  générateur  est  perpétuellement  poussé  vers  un 
même  point  de  l'espace,  la  ligne  qu'il  parcourt  en  vertu 
de  cette  loi  est  droite;  mais  si,  dans  chaque  instant  de 
son  mouvement,  il  est  en  même  temps  poussé  vers 


l38  LES  MAITRES  DE  LA  PENSÉE  SCIENTIFIQUE. 

. t , . '. 

deux  points,  la  ligne  qu'il  parcourt,  et  qu^,  dans 
quelques  cas  particuliers,  peut  encore  être  une  droite, 
est  en  général  une  ligne  courbe.  On  aura  la  tSMigente 
à  cette  courbe  en  menant  par  le  point  de  la  courbe 
deux  droites,  suivant  les  deux  directions  différentes 
du  mouvement  -du  point  générateur,  en  portant  sur 
ces  directions,  et  dans  le  sens  convenable,  des  parties 
proportionnelles  aux  deux  vitesses  respectives  de  ce 
point,  en  achevant  le  parallélogramme,  et  en  menant 
la  diagonale,  qui  sera  la  tangente  demandée  f  car  cette 
diagonale  sera  dans  la  direction  du  mouvement  du 
point  décrivant,  au  point  de  la  courbe  que  l'on  consi- 
dère. 

86.  Nous  ne-^iterons  qu'un  seul  exemple. 

Un  fil  AyLB  (fig,  -36)  ^tant  attaché  par  ses  extré- 
mités à  deux  points  fixes  A,  B,  si,  au  moyen  d'une 
pointe  M,  on  tend  ce  fil,  et  si  l'on  fait  mouvoir  la 
pointe,  de  manière  que  le  fil  soit  toujours  tendu,  la 
pointe j  décrira  une  courbe  DCM  qui,  comme  on  sait, 
est  une  ellipse  dont  les  points  fixes  A,  B  sont  les  foyers. 
D'après  la  génération  de  cette  courbe,  il  est  très  facile 
de  lui  mener  une  tangente  par  la  méthode  de  Roberval. 
En  effet,  puisque  la  longueur  du  fil  ne  change  pas, 
dans  chaque  instant  du  mouvement  le  rayon  AM 
s'allonge  de  la  même  quantité  dont  le  rayon  BM  se 
raccourcit.  La  vitesse  du  point  décrivant  dans  la  direc- 
tion AM  est  donc  égale  à  sa  vitesse  dans  la  direc- 
tion MQ.  Donc,  si  l'on  porte  sur  MB,  et  sur  le  prolon- 
gement de  AM,  des  droites  égales  MQ,  MP,  et  si  l'on 
achève  le  parallélogïïimme  MPRQ,  la  diagonale  MR 
de  ce  parallélogramme  sera  la  direction  du  point  gêné- 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  '  iSg 

rateur  en  M,  et,  par  conséquent,  la  tangente  au  même 
point  de  la  courbe.  On  voit  clairement,  d'après  cela, 
que  dans  l'ellipse  la  tangente  partage  en  deux  parties 
égales  l'angle  BMP  formé  par  un  des  rayons  vecteurs 
et  par  le  prolongement  de  l'autre  ;  que  les  angles  AMS 
et  BMR  sont  égaux  entre  eux,  et  que  la  courbe  doit 
avoir  la  propriété  de  réfléchir  à  un  des  foyers  les 
rayons  de  lumière  émanés  de  l'autre. 

Il  est  facile  d'étendre  la  méthode  de  Roberval  au 
cas  des  trois  dimensions,  et  de  l'appliquer  à  la  cons- 
truction des  tangentes  des  -courbes  à  double  cour- 
bure. En  effet,  si  un  point  générateur  se  meut  dans 
l'espace,  de  manière  qu'à  chaque  instant  de  son  mouve- 
ment il  soit  poussé  vers  trois  points  différents,  la  ligne 
qu'il  parcourt,  et  qui,  dans  quelques  cas  particuliers, 
peut  être  plane  et  même  droite,  est  en  général  une 
courbe  à  double  courbure.  On  aura  la  tangente  de  cette 
courbe  en  un  point  quelconque,  en  menant  par  ce 
point  des  droites,  suivant  lea  trois  directions  diffé- 
rentes des  mouvements  du  point  générateur  ;  en  portant 
sur  ces  droites,  et  dans  le  sens  convenable,  des  parties 
proportionnelles  aux  trois  vitesses  respectives  de  ce 
point,  en  achevant  le  parallélépipède;  et  en  menant 
la  diagonale  du  parallélépipède,  qui  sera  la  tangente 
de  la  courbe  au  point  que  l'on  considère. 

87.  Nous  allons  appliquer  cette  méthode  à  un  cas  ana- 
logue à  celui  de  l'ellipse;  et  la  figure  87,  que  nous 
allons  employer,  représentera  l'objet  en  perspective, 
et  non  pas  en  projection. 

Trois  points  fixes  A,  B,  C  étant  donnés  dans  l'espace, 
soit  un  premier  fil  AMB  attaché  par  ses  deux  extré- 


l4o  LES  MAITRES  DE  LA  PENSÉE  SCIENTIFIQUE. 

mités  aux  points  A  et  B  5  soit  un  autre  fil  AMC,  d'une 
grandeur  indépendante  de  celle  du  premier,  et  qui 
soit  attaché  par  ses  extrémités  aux  deux  points  A 
et  C  ;  si  un  point  générateur,  saisissant  en  même  temps 
les  deux  fils,  se  meut  de  manière  que  ces  fils  soient 
toujours  tendus,  il  parcourra  une  courbe  à  double 
courbure  (^).  Pour  mener  à  cette  courbe  une  tangente 
au  point  M,  il  faut  remarquer  que  la  longueur  du  pre- 
mier fil  AMB  étant  constante  dans  chaque  instant  du 
mouvement,  la  quantité  dont  la  partie  AM  s'allonge 
est  égale  à  celle  dont  la  partie  MB  se  raccourcit,  et  que 
la  vitesse  du  point  générateur  dans  la  direction  AM 
est  égale  à  sa  vitesse  dans  la  direction  MB.  De  même, 
la  longueur  du  fil  AMC  étant  constante,  la  vitesse 
du  point  générateur  dans  la  direction  MC  est  encore 
égale  à  sa  vitesse  dans  la  direction  AM.  Donc,  si  sur 
le  prolongement  de  AM,  et  sur  les  droites  MB,  MC, 
on  porte  les  parties  égales  MP,  MQ,  MR,  et  si 
l'on  achève  le  parallélépipède  MPUSVQRT,  la  diago- 
nale MS  de  ce  parallélépipède  sera  la  tangente  de- 
mandée. 

Comme  la  méthode  de  Roberval  est  fondée  sur  le 


(^)  M.  Dupin,  en  s'occupant  de  la  détermination  d'une 
sphère  tangente  à  trois  autres,  a  fait  voir  que  la  courbe 
indiquée  ci-dessus  comme  à  double  courbure,  est  plane 
et  du  second  degré  ;  ce  qui  tient  à  la  théorie  générale  du 
nombre  infmi  de  foyers  qui  appartiennent  à  chaque  courbe 
du  deuxième  degré.  Voir  la  Correspondance  sur  l'École 
Polytechnique,  t.  I,  p.  22  ;  t.  II,  p.  887,  et  les  Développe- 
ments de  Géométrie,  par  M.  Dupin,  p.  280.  (Note  commu- 
niquée par  M.  Dupin.  ) 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  l4l 

principe  de  la  composition  du  mouvement,  il  est  facile 
d'apercevoir  que,  dans  les  cas  moins  simples  que  ceux 
que  nous  avons  choisis  pour  exemples,  on  peut  s'aider 
des  méthodes  connues  pour  trouver  la  résultante  de 
forces  qui  sont  dirigées  vers  un  point,  et  dont  on  con- 
naît les  grandeurs  et  les  directions. 


FIN   DU    PREMIER    VOLUME. 


TABLE   DES   MATIERES 

DU    PREMIER   VOLUME. 


Pages, 

Avertissement v 

Notice,  biographique vu 

Programme xiii 

I. 

Objet  de  la  Géométrie  descriptive i 

Considérations  d'après  lesquelles  on  détermine  la 
position  d'un  point  situé  dans  l'espace.  De  la  mé- 
thode des  projections l 

Comparaison  de  la  Géométrie  descriptive  avec 
l'Algèbre 17 

Convention  propre  à  exprimer  les  formes  et  les  posi- 
tions des  surfaces.  Applications  au  plan 19 

Solutions  de  plusieurs  questions  élémentaires  rela- 
tives à  la  ligne  droite  et  au  plan 25 

II. 

Des  plans  tangents  aux  surfaces  courbes,  et  de  leurs 
normales 39 

Méthode  pour  mener  des  plans  tangents  par  des  points 
donnés  sur  les  surfaces 4^ 

Des  conditions  qui  déterminent  la  position  du  plan 
tangent  à  une  surface  courbe  quelconque;  observa- 
tion sur  les  surfaces  développables 56 


"  LES  MAITRES  DE  LA  PENSÉE  SCIENTIFIQUE  " 


HuYGENs  (Christian).  —  Traité  de  la  lumière.  Un  vol.  de  x-155  pages 
et  74  figures  ;  broché,  net 3  fr.    50 

Lavoisier  (A.-L.).  —  Mémoires  sur  la  respiration  et  la  transpira- 
tion des  animaux.  Un  vol.  de  viii-68  pages  ;  broché,  net. , .     3  fr.      » 

Spallanzani  (Lazare).  —  Observations  et  Expériences  faites  sur  les 
Animalcules  des  Infusions.  Deux  vol.  de  viii-106  et  122  pages; 
chaque  vol.  broché,  net 3  fr.      » 

Clairaut  (A.-C).  —  Eléments  de  Géométrie.  Deux  vol.  de  xiv-95  et 
103  pages  avec  69  et  77  figures;  chaque  vol.  broché,  net.     3  fr.  50 

Lavoisier  et  Laplace.  —  Mémoire  sur  la  chaleur.  Un  vol.  de  78  pages 
avec  2  planches;  broché,  nel ♦ .  .      3  fr.     » 

Carnot  (Lazare).  —  Réflexions  sur  la  métaphysique  du  Calcul  infini- 
tésimal. Deux  vol.  de  viii-117  et  105  pages  avec  5  figures;  chaque 
vol.  broché,  net 3  fr.    » 

D'Alembert  (Jean).  —  Traité,  de  Dynamique.  Deux  vol.  de  xl-102  et 
187  pages  avec  81  figures;  chaque  vol.  broché,  net 3  fr.     » 

Dutrochet  (René).  —  Les  mouvements  des  végétaux.  Du  réveil  et  du 
sommeil  des  plantes.  Un  vol.  de  viii-121  pages  et  25  figures;  broché, 
net .  .  .    3  fr.     » 

Ampère  (A.-M.).  —  Mémoires  sur  V électromagnétisme  et  V électrodyna- 
mique. Un  vol.  de  xiv-110  pages  et  17  figures  ;  broché,  net     3  fr.     » 

Laplace  (P.-S.).  —  Essai  philosophique  sur  les  probabilités.  Deux 
vol.  de  xii-103  et  108  pages;  chaque  vol.  broché,  net    ...       3  fr.     » 

BouGUER  (Pierre).  —  Essai  d'optique  sur  la  gradation  de  la  lumière. 
Un  vol.  de  xx-130  pages  et  17  figures  ;  broché,   net. . .      3  fr.     i 

Painlevé  (Paul).  —  Les  axiomes  de  la  Mécanique.  Examen  critique. 
Note  sur  la  propagation  de  la  lumière.  Un  vol.  de  xm-1 12  pages  et 
4  figures;  broché,  net 4  h.     » 

Sous  presse  : 

Mariotte  (Edme).  —  Discours  de  la  nature  de  Vair.  De  la  végétation 
des  plantes.  Nouvelle  découverte  louchant  la  vue.  Un  vol.  de 
00  pages;  broché,  net > 

MoNGH  (Gaspard). —  Géométrie  descriptive.  Deux  vol.  de  xvi-144 
et  138  pages  avec  53  figures;  chaque  vol.  broché,  net. ...  » 


Il  est  tiré  de  chaque  volume  10  exemplaires  sur  papier 
de  Hollande,  au  prix  uniforme  et  net  de  6  francs. 


LES  MAITRES  DE  LA  PENSÉE  SCIENTIFIQUE 

Collection  de  Mémoires  et  Ouvrages 

Publiée  par  les  soins  de  Maurice  SOLOVINE 


^    _  it 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE 


PAR 


Gaspard    MONGE 

AUGMENTÉE  DTNE  THÉORIE  DES  OMBRES  ET  DE  L4  PERSPECTIVE 

EXTRAITE    DES  PAPIERS  DE  l'aUTEUR 

Par  Barnabe  BRISSON 


II. 


PARIS 

GAUTHIER-VILLARS  ET  C",  ÉDITEURS 

LIBRAIRES  DO  BUREAU  DBS  LONGITUDES,  DE  l'ÉCOLE  POLYTECHNIQUE 

Quai  des  Grands-Augustins,  55. 
1922 


Tous  droits  de  traduction,  de  reproduction  et  d'adaptation  réservés 
pour  tous  pays. 


GÉOMÉTRIE  DESCHIPTIVE 


IV. 


APPLICATION  DE  LA  MÉTHODE  DE  CONSTRUIRE  LES 
INTERSECTIONS  DES  SURFACES  COURBES  A  LA  SOLU- 
TION DES  DIVERSES  QUESTIONS. 

88.  Nous  avons  donné  [fig.  '26)  la  méthode  de 
construire  les  projections  de  l'intersection  de  deux 
surfaces  courbes  définies  de  forme  et  de  position;  et 
nous  l'avons  fait  d'une  manière  abstraite,  c'est-à-dire 
sans  nous  occuper  de  la  nature  des  questions  qui 
pourraient  rendre  nécessaires  de  pareilles  recherches, 
l/exposition  de  cette  méthode,  considérée  d'une  ma- 
nière abstraite,  serait  suffisante  pour  le  plus  grand 
nombre  des  arts;  car,  si  l'on  prend  pour  exemples 
Fart  de  la  coupe  des  pierres  et  celui  de  la  charpenterie, 
les  surfaces  courbes  que  l'on  y  considère,  et  dont  on 
peut  avoir  besoin  de  construire  les  intersections, 
forment  (irdinairement  l'objel  princi[)al  dont  on 
s'occupe,  et  elles  se  présentent  naturellement.  Mais  la 
Géométrie  descriptive  devant  devenir  un  jour  une  des 
parties  principales  de  l'éducation  nationale,  parce  que 
les  méthodes  qu'elle  donne  sont  aussi  nécessaires  aux 
artistes  que  le  sont  la  lecture,  Técriture  et  Tarithmé- 
tique,  nous  croyons  qu'il  est  utile  à-^  faire  voir  par 
quelques  exemples  comment  elle  peut  suj_'pléer  l'Ana- 

MONOt.   —   II.  I 


LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 


lyse  pour  la  solution  d'un  grand  nombre  de  questioiis, 
qui,  au  premier  aperçu,  ne  paraissent  pas  de  nature 
à  devoir  être  traitées  de  cette  manière.  Nous  com- 
mencerons d'abord  par  des  exemples  qui  n'exigent 
que  les  intersections  de  plans,  nous  passerons  ensuite 
à  ceux  pour  lesquels  les  intersections  de  surfaces 
courbes  sont  nécessaires. 

89.  La  première  question  qui  frappe  d'une  manière 
remarquable  ceux  qui  apprennent  les  éléments  de 
Géométrie  ordinaire  est  la  recherche  du  centre  du 
cercle  dont  la  circonférence  passe  par  trois  points 
placés  arbitrairement  sur  un  plan.  La  détermination 
de  ce  centre  par  l'intersection  de  deux  lignes  droites, 
sur  chacune  desquelles  il  doit  se  trouver  nécessaire- 
ment, frappe  les  élèves,  et  par  sa  généralité,  et  parce 
qu'elle  donne  un  moyen  d'exécution.  Si  toute  la  Géo- 
métrie était  traitée  de  cette  manière,  ce  qui  est  pos- 
sible, elle  conviendrait  à  un  plus  grand  nombre 
d'esprits;  elle  serait  cultivée  et  pratiquée  par  un  plus 
grand  nombre  d'hommes;  l'instruction  moyenne  de  la 
nation  serait  plus  avancée,  et  la  science  elle-même 
serait  poussée  plus  loin.  Il  existe  dans  les  trois  dimen- 
sions une  question  analogue  à  celle  que  nous  venons 
de  citer,  et  c'est  par  elle  que  nous  allons  commencer. 

90.  Première  question.  —  Trouver  le  centre  et 
le  rayon  d'une  sphère  dont  la  surface  passe  par  quatre 
points  donnés  arbitrairement  dans  l'espace  ? 

Solution.  —  Les  quatre  points  étant  donnés  par 
leurs  projections  horizontales  et  verticales,  on  con- 


GEOMETRIE  DESCRIPTIVE. 


cevra  par  l'un  d'eux  des  droites  menées  à  chacun  des 
trois  autres;  et  l'on  tracera  les  projections  horizon- 
tales et  verticales  de  ces  trois  droites.  Puis,  considé- 
rant la  première  de  ces  droites,  il  est  évident  que  le 
centre  demandé  devant  être  à  égale  distance  de  ses 
deux  extrémités,  il  doit  se  trouver  sur  le  plan  perpen- 
diculaire à  cette  droite,  et  mené  par  son  milieu.  Si 
donc  on  divise  en  parties  égales  les  projections  de  la 
droite,  ce  qui  donnera  les  projections  de  son  iniiieu, 
et  si  l'on  construit  les  traces  du  plan  mené  par  le  point 
perpendiculairement  à  la  droite,  ce  que  nous  savons 
faire,  on  aura  les  traces  d'un  plan  sur  lequel  le  cenire 
demandé  doit  se  trouver.  Considérant  ensuite  les  deux 
autres  droites,  et  faisant  successivement  pour  chacune 
d'elles  la  même  opération,  on  aura  les  traces  des  trois 
plans  différents,  sur  chacun  desquels  doit  se  trouver 
le  centre  demandé.  Or,  de  ce  que  le  centre  doit  être 
sur  le  premier  de  ces  pians  et  sur  le  second,  il  doit  être 
sur  la  droite  de  leur  intersection;  donc,  si  l'on  construit 
les  projections  de  cette  intersection,  on  aura,  sur 
chaque  plan  de  projection,  une  droite  qui  contiendra 
la  projection  du  centre.  Par  la  même  raison,  si  l'on 
construit  les  projections  de  l'intersection  du  premier 
plan  et  du  troisième,  on  aura  encore,  sur  chaque  plan 
de  projection,  une  autre  droite  qui  contiendra  la  pro- 
jection du  centre.  Donc,  sur  chaque  plan  de  projec- 
tion on  aura  deux  droites  qui,  par  leur  intersection, 
détermineront  la  projection  demandée  du  centre  de  la 
sphère. 

Si  l'on  employait  l'intersection  du  second  plan  et 
du  troisième,  on  aurait  une  troisième  droite  qui  pas- 
serait par  le  centre,  et  dont  les  projections  passeraient 


4  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

encore  par  les  projections  demandées,  ce  qui  fournit 
un  moyen  de  vérification. 

Quant  au  rayon,  il  est  évident  que  si,  par  la  projec- 
tion du  centre  et  par  celle  d'un  des  points  donnés,  on 
mène  une  droite,  elle  sera  sa  projection;  on  pourra 
donc  avoir  la  projection  horizontale  et  la  projection 
verticale  du  rayon,  et  par  conséquent  sa  grandeur. 

91.  Si  l'on  est  libre  de  choisir  la  position  des  plans 
de  projection,  la  méthode  précédente  peut  être  consi- 
dérablement simplifiée.  En  effet,  supposons  que  celui 
de  ces  plans  que  nous  regardons  comme  horizontal 
(fig.  38)  passe  par  trois  des  points  donnés,  de 
manière  que  des  projections  données  A,  B,  C,  D  des 
quatre  points,  les  trois  premières  se  confondent  avec 
leurs  points  respectifs;  puis,  après  avoir  mené  les 
trois  droites  AB,  AC,  AI),  supposons  que  le  plan  ver- 
tical soit  parallèle  à  AD,  c'est-à-dire  que  les  droites  TiM 
et  AD  soient  parallèles  entre  elles;  les  projections  ver- 
ticales des  trois  premiers  points  seront  sur  LM  en 
des  points  a,  ^,  c,  et  celle  du  quatrième  sera  donnée 
(jnelque  part  en  un  point  d  de  la  droite  Dd  perpen- 
diculaire à  LM.  Cela  posé,  la  droite  menée  du  point  A 
au  point  B  étant  horizontale,  tout  plan  qui  lui  sera 
perpendiculaire  sera  vertical,  et  aura  pour  projection 
horizontale  une  droite  perpendiculaire  à  AB.  Il  en  est 
de  même  pour  la  droite  menée  du  point  A  au  point  C. 
Donc,  si  sur  le  milieu  de  AB  on  lui  mène  la  perpendi- 
culaire indéfinie  Ee,  cette  perpendiculaire  sera  la  pro- 
jection horizontale  d'un  plan  vertical  qui  passe  par  le 
centre  de  la  sphère;  donc  la  projection  horizontale  du 
centre  sera  quelque  part  sur  la  droite  Ee.  De  même, 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE. 


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6  LES    MAITRES   DE    LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

si  sur  le  milieu  de  AG  on  lui  mène  la  perpendicu- 
laire indéfinie  F/,  cette  perpendiculaire  sera  la  pro- 
jection d'un  second  plan  vertical  qui  passe  par  le 
centre  de  la  sphère,  et  la  projection  horizontale  de 
ce  ceîitie  fera  quelque  part  sur  un  point  de  la 
droii(;  l'Y;  donc  \()  point  G  d'intersection  des  deux 
droites  Ee,  F/ sera  la  projection  horizontale  du  centre 
de  la  sphère,  dont  la  projection  verticale  sera,  par 
conséquent,  sur  la  droite  indéfinie  de  projection  Ggg'. 

La  droite  menée  du  point  A  au  quatrième  point 
étant  parallèle  à  sa  projection  verticale  ad,  tout  plan 
qui  lui  sera  perpendiculaire  sera  aus^i  perpendiculaire 
au  plan  vertical  de  projection,  et  aura  pour  projection 
verticale  une  droite  perpendiculaire  à  ad.  Donc,  si  sur 
le  milieu  de  ad  on  lui  mène  une  perpendiculaire  indéfinie 
HA,  on  aura  la  projection  d'un  troisième  plan  qui 
passe  par  le  centre  de  la  sphère;  donc  la  projection 
verticale  de  ce  centre,  devant  se  trouver  en  même 
temps  et  sur  gg'  et  sur  Hh,  sera  au  point  K  d'inter- 
section de  ces  deux  droites. 

Enfin,  si  l'on  mène  les  deux  droites  AG,  aK,  on  aura 
évidemment  les  deux  projections  d'un  même  rayon  de 
la  sphère;  donc,  si  l'on  porte  AG  sur  LM,  de  g  en  J, 
la  droite  JK  sera  la  grandeur  du  rayon  demandé. 

92.  Deuxième  question.  — •  Inscrire  une  sphère 
dans  une  pyramide  triangulaire  donnée,  c'est-à-dire 
trouver  la  position  du  centre  de  la  sphère  et  la  gran- 
deur de  son  rayon? 

Solution.  —  La  surface  de  la  sphère  inscrite  devant 
toucher  les  quatre  faces  de  la  pyramide,  il  est  évident 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE. 


que  si  par  le  centre  de  la  sphère  et  par  chacune  des 
six  arêtes  on  conçoit  un  plan,  ce  plan  partagera  en 
deux  parties  égales  l'angle  que  forment  entre  elles  les 
deux  faces  qui  passent  par  la  même  arête.  Si  donc 
]u»rmi  les  six  arêtes  on  en  choisit  trois  qui  ne  passent 
}»as  toutes  par  le  même  sommet  d'angle  solide,  et  si 
par  chacune  de  ces  arêtes  on  fait  passer  un  plan  qui 
partage  en  deux  parties  égales  l'angle  formé  par  les 
deux  faces  correspondantes,  on  aura  trois  plans,  sur 
chacun  desquels  le  centre  de  la  sphère  demandée  doit 
se  trouver,  et  qui,  par  leur  intersection  commune, 
doivent  déterminer  la  position.de  ce  centre. 

9^1  Pour  sinq)lilier  la  construction,  nous  suppose- 
rons que  les  plans  de  projection  aient  été  choisis  de 
manière  (juc  celui  que  nous  regarderons  couihkî 
horizontal  soit  le  même  qu'une  des  faces  de  la  pyra- 
mide. 

Soient  donc  {fig.  Sg)  A,  B,  C,  D  les  projec- 
tions horizontales  données^  des  sommets  des  quatre 
angles  solides  de  la  pyramide,  et  a,  ^,  c,  d'  leurs  pro- 
jections verticales;  par  le  sommet  de  la  pyramide,  on 
concevra  des  plans  perpendiculaires  aux  trois  côtés 
de  la  base;  ces  plans  seront  verticaux,  et  leurs  projec- 
tions horizontales  seront  les  droites  DE,  DF,  DG, 
abaissées  perpendiculairement  du  point  D  sur  les 
côtés  AC,  GB,  BA  de  la  base.  Chacun  de  ces  })]ans 
coupera  la  base  de  la  pyramide  et  la  face  qui  passe  par 
l'arête  en  deux  droites  qui  comprendront  entre  elles  un 
angle  égal  à  celui  que  la  face  forme  avec  la  base.  Si 
donc  on  porte  sur  LM  les  droites  DE,  DF,  DG,  à  partir 
de  la  verticale  T>dd\  de  d  en  e,  /,  g:,  et  si  par  le  som- 


LES    MAITRES   DE    LA    PENSEE    SCIENTIFIQUE. 


Fi^  3y 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE. 


met  à'  on  mène  les  droites  à' e,,  d'f^  d' g^  ces  droites 
formeront  avec  LM  des  angles  égaux  à  ceux  que 
les  faces  correspondantes  de  la  pyramide  forment 
avec  la  base;  et  si  l'on  partage  chacun  de  ces  trois 
angles  en  deux  parties  égales  par  les  droites  ee\  ff\ 
gg\  les  angles  que  ces  dernières  droites  formeront 
avec  LM  seront  égaux  à  ceux  que  formeraient  avec 
la  base  les  faces  d'une  seconde  pyramide  qui  aurait  la 
même  base  que  la  pyramide  donnée,  et  dont  le  sommet 
serait  au  centre  de  la  sphère  demandée. 

Pour  trouver  le  sommet  de  cette  seconde  pyramide, 
on  la  coupera  par  un  plan  horizontal,  mené  à  une 
hauteur  arbitraire,  et  dont  on  aura  la  projection  ver- 
ticale, en  menant  une  horizontale  quelconque  pn. 
Cette  droite  coupera  ee',  ff\  gg'  en  des  points  h\  i'.  A', 
desquels  on  abaissera  sur  LM  les  verticales  hh^  i' i, 
k'k]  et  si  l'on  porte  les  trois  distances  e/i,  /i,  kg  sur 
les  perpendiculaires  respectives  de  E  en  H,  de  F  en  J 
et  de  G  en  K,  on  aura  en  H,  J,  K  les  projections 
horizontales  de  points  pris  dans  les  trois  faces  de  la 
seconde  pyramide,  et  qui  se  trouvent  sur  le  plan 
horizontal  arbitraire.  Donc,  si  par  les  points  H,  J,  K 
on  mène  aux  côtés  respectifs  de  la  base  des  parallèles 
PN,  NO,  OP,  ces  droites  seront  les  projections  des 
sections  des  trois  faces  de  la  seconde  pyramide  par  le 
même  plan  horizontal  ;  elles  se  couperont  en  des  points 
N,  0,  P,  qui  seront  les  projections  d'autant  de  points 
des  trois  arêtes  de  la  seconde  pyramide;  et  si  par  ces 
points  on  mène  aux  sommets  des  angles  respectifs  de 
la  base  des  droites  indéfinies  AP,  BO,  CN,  ces  droites 
seront  les  projections  des  arêtes;  enfm,  le  point 
unique   Q,  dans  lequel  elles  se  rencontreront  toutes 


LES    MAITRES    DE   LA    PENSEE    SCIENTIFIQUE. 


trois,  sera  la  projection  horizontale  du  sommet  de  la 
seconde  pyramide,  et  par  conséquent  du  centre  de  la 
sphère  demandée. 

Pour  avoir  la  projection  verticale  de  ce  centre,  on 
raènera  d'abord  la  droite  indéfinie  de  projection  Qq(/, 
sur  laquelle  elle  doil  se  trouver;  puis  ou  projet lera  les 
trois  points  N,  0,  P  sur  l'horizontale  np  en  n,  o,  p; 
par  les  projections  «,  b,  c,  des  sommets  des  angles  res- 
pectifs de  la  base,  on  mènera  les  droites  op,  ho,  en,  qui 
seront  les  projections  verticales  des  trois  arêtes;  et  le 
point  unique  q',  dans  lequel  ces  trois  dernières  droites 
se  couperont  et  qui  sera  en  même  temps  sur  la  droite 
Qqq\  sera  la  projection  verticale  du  centre  de  la 
sphère. 

Enfin,  la  verlicaic  qq'  sera  évidemment  égale  au 
rayon  de  la  sphère  inscrile,  et  les  points  Q,  q  seront 
les  projections  du  point  de  contact  de  la  surface  de  la 
sphère  avec  le  plan  de  la  base. 

94.  Nous  avons  fait  voir  (3)  par  quelles  considéra- 
tions on  pouvait  déterminer  la  position  d'un  point, 
lorsque  l'on  connaissait  ses  distances  à  trois  points 
connus  de  position;  nous  allons  actuellement  donner 
la  construction  de  cette  question. 

Troisième  question.  —  Construire  les  projections 
d'un  point  dont  on  connaît  les  distances  à  trois  autres 
points  donnés  dans  l'espace? 

Solution.  —  Nous  supposerons  les  plans  de  projec- 
tion choisis  de  manière  que  celui  que  nous  regar- 
derons comme  horizontal  passe  par  les  trois  points 
donnés,  et  que  l'autre  soit  perpendiculaire  à  la  droite 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  Il 

qui  joint  deux  de  ces  points.  D'après  cela,  soient  A, 
B,  G  {fi g.  4o)  les  trois  points  donnés  ;  A',  B',  C 
les  distances  données  de  ces  points  au  point 
Jcniandé.  On  joindra  deux  des  points  par  la  droite  AB, 
perpendiculairement  à  laquelle  on  mènera  LM  «pii 
détermine  la  position  du  plan  vertical  de  prctjccliun. 
Puis,  des  points  A,  B,  C,  comme  centres,  et  avec  des 
rayons  égaux  aux  dis  lances  respectives  A',  B',  C/,  on 
décrira  trois  arcs  de  cercles  qui  se  couperont  deux  à 
deux  en  des  points  D,  E,  F,  J,  P,  Q;  par  les  points 
d'intersection  de  ces  arcs  considérés  deux  à  deux,  on 
liiènera  les  droites  DE,  FJ,  PQ,  qui  seront  les  projec- 
tions horizontales  des  circonférences  de  cercles,  dans 
lesquelles  les  trois  sphères  se  coupent;  et  le  point 
unique  N,  dans  lequel  ces  trois  droites  se  rencontre- 
ront, sera  évidemment  la  projection  horizontale  du 
point  demandé. 

Pour  avoir  la  projection  verticale  du  même  point, 
.on  mènera  la  ligne  de  projection  indéfinie  ^nn'  ;  puis, 
observant  que  le  cercle  projeté  en  DE  est  parallèle  au 
plan  vertical,  et  que  sa  projection  sur  ce  plan  doit  être 
un  cercle  de  même  rayon,  on  projettera  la  droite  AB 
ur  LM  au  point  r,  duquel,  comme  centre,  et  avec  un 
intervalle  égal  à  DR,  ou  à  la  moitié  de  DE,  on  décrira 
le  cercle  dnen  \  et  la  circonférence  de  ce  cercle  coupera 
la  droite  Nn/i'  en  deux  points  ti,  n',  qui  seront  indiffé- 
remment la  projection  verticale  du  point  demandé. 

Ce  sera  d'après  les  autres  circonstances  de  la  ques 
tion    qu'on    déterminera  si  les  deux  points   n  et  n' 
doivent  être  tous  deux  employés;  et  dans  le  cas  où  il 
n'y  en  aurait  qu'un  de  nécessaire,  quel  est  celui  qui 
doit  être  rejeté. 


I^  LES    MAITRES    DE    LA    PENSEE    SCIENTIFIQUE. 


Le  lecteur  pourra  se  proposer  de  construire  les  pro- 
jections (Tun  point  dont  on  connaît  les  distances  à  trois 
lignes  données  dans  Vespace. 


95.  Quatrième  question.  —  Un  ingénieur  par- 
courant un  pays  de  montagnes,  soit  pour  étudier  la 
forme  du  terrain,  soit  pour  faire  le  projet  de  travaux 
publics  qui  dépendent  de  cette  forme,  est  muni  d'une 
carte  topographique,  dans  laquelle  non  seulement  les 
projections  des  différents  points  du  terrain  sont 
exactes,  mais  encore  les  hauteurs  de  tous  ces  points 
au-dessus  d'une  même  surface  de  niveau  sont  indiquées 
par  des  nombres  placés  à  côté  des  points  respectifs,  et 
auxquels  on  a  coutume  de  donner  le  nom  de  cotes.  Il 
rencontre  un  point  remarquable  qui  n'est  pas  placé 
sur  la  carte,  soit  parce  qu'il  a  été  omis,  soit  parce  qu'il 
a  été  rendu  remarquable  depuis  la  confection  de  la 
carte.  L'ingénieur  ne  porte  avec  lui  d'autre  instru- 
ment d'observation  qu'un  graphomètre  propre  à 
mesurer  les  angles,  et  cet  instrument  est  garni  d'un 
fd  à  plomb. 

On  demande  que,  saiis  quitter  la  station,  il  construise 
sur  la  carte  la  position  du  point  où  il  est,  et  qu'il  trouve 
ia  cote  qui  convient  à  ce  point,  c'est-à-dire  sa  hauteur 
au-dessus  de  la  surface  de  niveau  ? 

Moyen  de  solution.  —  Parmi  les  points  du  terrain 
marqués  d'une  manière  précise  sur  la  carte,  et  qui 
seront  les  plus  voisins,  l'ingénieur  en  distinguera  trois, 
dont  deux  au  moins  ne  soient  pas  à  la  même  hauteur  que 
lui;  puis  il  observera  les  angles  formés  par  la  verticale 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE. 


et  les  rayons  visuels  dirigés  à  ces  trois  points,  et, 
d'après  cette  seule  observation,  il  pourra  résoudre  la 
<|uestion. 

En  effet,  nommons  A,  B,  C  les  trois  points  observés 
dont  il  a  les  projections  liorizontales  sur  la  carte,  et 
dont  il  pourra  construire  les  projections  verticales  au 
moyen  de  leurs  cotes.  Puisqu'il  connaît  l'angle  formé 
}»ar  la  verticale  et  par  le  rayon  visuel  dirigé  au  point  A, 
il  connaît  aussi  Pangle  formé  par  le  même  rayon  et  par 
la  verticale  élevée  au  point  A;  car  en  négligeaat  la 
courbure  de  la  terre,  ce  qui  est  convenable,  ces  deux 
angles  sont  alternes-internes,  et  par  conséquent  égaux. 
Si  donc  il  conçoit  une  surface  conique  à  base  circu- 
laire, dont  le  sommet  soit  au  point  A,  dont  l'axe  soit 
vertical,  et  dont  l'angle  formé  par  l'axe  et  par  la  droite 
génératrice  soit  égal  à  l'angle  observé,  ce  qui  déter- 
mine complètement  cette  surface,  elle  passera  par  le 
rayon  visuel  dirigé  au  point  A,  et  par  conséquent  par 
le  point  de  la  station  :  ainsi  il  aura  une  première  sur- 
face courbe  détei  minée,  sur  laquelle  se  trouvera  le 
point  demandé.  En  raisonnant  pour  les  deux  autres 
points  B,  C  comme  pour  le  premier,  le  point  demandé 
se  trouvera  encore  sur-  deux  autres  surfaces  coniques 
à  bases  circulaires,  dont  les  axes  seront  verticaux, 
dont  les  sommets  seront  aux  points  B,  C,  et  pour  cha- 
cune desquelles  l'angle  formé  par  l'axe  et  par  la  géné- 
ratrice sera  égal  à  l'angle  formé  par  la  verticale  et  y)ar 
le  rayon  visuel  correspondant.  Le  point  demandé  sera 
donc  en  même  temps  sur  trois  surfaces  coniques  déter- 
minées de  forme  et  de  position,  et  par  conséquent  dans 
leur  intersection  commune.  Il  ne  s'agit  donc  plus  que 
de  construire,  d'après  les  données  de  la  question,  les 


l4  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


projections  horizontales  et  verticales  des  intersections 
de  ces  trois  surfaces  considérées  deux  à  deux;  les 
intersections  de  ces  projections  donneront  les  projec- 
tions horizontale  et  verticale  du  point  demandé,  et 
par  conséquent  la  position  de  ce  point  sur  la  carte,  et 
sa  hauteur  au-dessus  ou  au-dessous  des  points  observés, 
ce  qui  déterminera  sa  cote. 

Cette  solution  doit  en  général  produire  quatre  points 
qui  satisfont  à  la  question;  mais  il  sera  facile  à  l'obser- 
vateur de  distinguer  parmi  ces  quatre  points  celui  qui 
coïncide  avec  le  point  de  la  station.  D'abord,  il  pourra 
toujours  s'assurer  si  le  point  de  la  station  est  au-dessus 
ou  au-dessous  du  plan  qui  passe  par  les  trois  points 
observés.  Supposons  que  ce  plan  soit  au-dessus  du 
plan  des  sommets  des  cônes  ;  il  sera  autorisé  à  négliger 
les  branches  des  intersections  des  surfaces  coniques 
qui  existent  au-dessous  de  ce  plan;  par  là  le  nombre 
des  points  possibles  sera  réduit  à  quatre.  Ce  serait  la 
même  chose  si  le  point  de  la  station  était  au  contraire 
placé  au-dessous  du  pian.  Ensuite,  parmi  ces  quatre 
points,  s'ils  existent  tous,  il  reconnaîtra  facilement 
celui  dont  la  position,  par  rapport  aux  trois  sommets, 
est  la  même  que  celle  du  point  de  la  station,  par  rap- 
port aux  points  observés. 

96.  Construction.  — -  Soient  A,  B,  C  {fig.  4i)  ^es 
projections  horizontales  des  trois  points  observés, 
prises  sur  la  carte;  a,  5,  c  les  projections  ver- 
ticales des  mêmes  points,  construits  en  portant  sur  les 
verticales  B5,  Ce,  à  partir  de  l'horizontale  LM,  qui 
passe  par  le  point  a,  la  différence  des  cotes  des  deux 
autres  points;  et  soient  A',  B',  C  les  angles  observés, 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE. 


i5 


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LES   MAITRES    DE   LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE. 


que  les  rayons  visuels,  dirigés  aux  points  respectifs  A, 
B,  G,  forment  avec  la  verticale. 

On  mènera  les  verticales  indéfinies  aa',  bb',  cc\  qui 
seront  les  projections  verticales  des  axes  des  trois 
cônes;  par  les  trois  points  «,  6,  c,  on  mènera  les 
droites  a/,  bin,  en,  qui  formeront  avec  ces  verticales 
des  angles  respectivement  égaux  aux  angles  donnés  A', 
iV,  C';  et  ces  droites  seront  chacune  la  projection  ver- 
ticale de  l'un  des  deux  côtés  extrêmes  de  la  surface 
conique    correspondanlc. 

Cela  fait,  on  mènera  dans  la  projection  verticale 
tant  de  droites  horizontales  ee'  qu'on  voudra;  on  les 
regardera  comme  les  projections  d'autant  de  plans 
horizontaux;  et  pour  chacune  d'elles,  on  fera  l'opéra- 
tion que  nous  allons  décrire  pour  celle  d'entre  elles  qui 
est  indiquée  par  EE'. 

Cette  droite  coupera  les  projections  des  axes  des 
trois  cônes  en  des  points  /,  g,  A,  cpii  seront  les  pro- 
jections verticales  des  centres  des  cercles,  suivant 
lesquels  le  plan  horizontal  correspondant  coupe  les 
trois  surfaces  coniques  ;  et  elle  coupera  les  côtés 
extrêmes  des  cônes  aZ,  èm,  en  en  des  points  /',  g\  A', 
tels  que  les  distances  //',  gg\  hh'  seront  les  rayons 
de  ces  mêmes  cercles.  Des  points  A,  B,  C,  pris  succes- 
sivement pour  centres,  et  avec  des  rayons  respective- 
ment égaux  à  //',  gg',  hh\  on  décrira  des  cercles  dont 
les  circonférences  seront  les  projections  horizontales 
des  sections  faites  dans  les  trois  surfaces  coniques  par 
le  même  plan  EE'  ;  ces  circonférences  se  couperont  deux 
à  deux  dans  des  points  D,  D',  K,  Iv',  J,  J',  qui  seront 
les  projections  d'autant  de  points  des  Irois  intersec- 
tions des  surfaces  coniques  considérées  deux  à  deux; 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  I7 

t  I.  en  projetant  ces  points  sur  EE'  en  d^  d\  A-,  k\  i,  i', 
on  aura  les  projections  verticales  des  mêmes  points 
des  trois  intersections. 

En  opérant  ensuite  de  même  pour  les  autres 
droites  ee\  on  trouvera  pour  chacune  d'elles  de  nou- 
veaux points  D,  D',  K,  K',  J,  .T',  dans  la  projection 
horizontale,  et  de  nouveaux  points  c?,  d\  /c,  k\  i,  i\ 
dans  la  projection  verticale;  puis  par  tous  les  points  D, 
D',  . . .,  on  fera  passer  une  courbe  DPD\  qui  sera  la 
projection  horizontale  de  l'interseclion  de  la  première 
surface  conique  avec  la  seconde;  par  tous  les  points  K, 
K',  ...,  on  fera  passer  une  autre  courbe  KPK'  qui 
sera  la  projection  de  l'intersection  de  la  seconde  sur- 
face et  de  la  troisième;  et  par  tous  les  points  J,  J',  .  . ., 
on  en  fera  passer  une  dernière  JPJ'  qui  sera  la  projec- 
tion de  l'intersection  de  la  troisième  surface  et  de  la 
l)remière.  Les  points  P,  .  .  .,  dans  lesquels  ces  courbes 
se  couperont  toutes  trois,  seront  les  projections 
horizontales  d'autant  de  points  qui  satisfont  à  la  ques- 
tion. 

De  même  dans  la  projection  verticale,  par  tous  les 
points  d,  d\  .  . .,  on  fera  passer  une  première  courbe; 
par  tous  les  points  A-,  k' ^  . .  .,  une  seconde;  et  par  tous 
les  points  i,  i\  . .  .,  une  troisième.  Ces  courbes  seront 
les  projections  verticales  des  intersections  des  trois 
surfaces  considérées  deux  à  deux;  et  les  points  />,  .  .  ., 
dans  lesquels  ces  courbes  se  couperont  toutes  trois, 
seront  les  projections  verticales  de  tous  les  points  qui 
satisfont  à  la  question. 

Les  projections  P,  p  d'un  même  point  seront  dans 
une  même  perpendiculaire  à  LM. 

L'observateur,  après  avoir  reconnu  parmi  tous  les 
MON  ai;.  —  11,  J 


l8  LES    MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


points  P  celui  qui  appartient  au  point  de  la  station, 
aura  la  projection  horizontale  de  cette  station,  et  par 
conséquent  sa  position  sur  la  carte;  puis,  au  moyen  de 
la  hauteur  du  point  correspondant  p  au-dessus  de  la 
droite  LM,  il  aura  l'élévation  du  point  de  la  station 
au-dessus  du  point  observé  A,  et  par  conséquent  il 
trouvera  la  cote  qui  convient  à  la  station. 

97.  Dans  cette  solution  nous  avons  construit  les 
projections  des  trois  intersections  des  surfaces,  tandis 
que  deux  auraient  suffi.  Nous  conseillons  d'agir  tou- 
jours de  même,  parce  que  les  projections  des  deux 
courbes  à  double  courbure  peuvent  se  couper  en  des 
points  qui  ne  correspondent  pas  à  des  points  d'inter- 
section, et  que  pour  reconnaître  les  projections  des 
points  d'intersection,  il  faut  suivre  les  branches  des 
deux  courbes  qui  sont  sur  la  même  nappe  d'une  des 
surfaces;  ce  qui  exige  une  attention  pénible,  dont  on 
est  presque  toujours  dispensé  en  construisant  les  trois 
courbes;  les  points  où  elles  se  coupent  toutes  trois 
sont  de  véritables  points  d'intersection. 

98.  Cinquième  question.  —  Les  circonstances 
étant  les  mêmes  que  dans  la  question  précédente, 
avec  cette  seule  différence  que  l'instrument  n'est  pas 
garni  de  fil  à  plomb,  de  manière  que  les  angles  avec 
la  verticale  ne  puissent  pas  être  mesurés  ;  on  demande 
encore  que  l'ingénieur,  sans  quitter  la  station,  déter- 
mine sur  la  carte  la  position  du  point  où  il  est,  et  qu'il 
trouve  la  cote  de  ce  point,  c'est-à-dire  son  élévation 
au-dessus  de  la  surface  de  niveau  à  laquelle  tous  les 
points  de  la  carte  sont  rapportés  ? 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  I-9 

Moyen  de  solution.  —  Après  avoir  choisi  trois 
poinjs  du  terrain  qui  soient  marqués  d'une  manière 
préeise  sur  la  carte,  et  tel  que  le  point  de  station  ne 
soit  pas  avec  eux  dans  le  même  plan,  l'ingénieur  me- 
surera les  trois  angles  que  forment  entre  eux  les  rayons 
visuels  dirigés  à  ces  trois  points  ;  et  au  moyen  de  cette 
seule  observation,  il  sera  en  état  de  résoudre  la  ques- 
tion. 

En  eiïet,  si  nous  nommons  A,  B,  C  les  trois  points 
observés,  et  si  on  les  suppose  joints  par  les  trois 
droites  AB,  BC,  CA,  l'ingénieur  aura  les  projections 
horizontales  de  ces  droites  tracées  sur  la  carte;  de  plus, 
au  moyen  des  cotes  des  trois  points,  il  aura  les  diffé- 
rences de  hauteur  des  extrémités  de  ces  droites;  il 
pourra  donc  avoir  la  grandeur  de  chacune  d'elles. 

Cela  posé,  si  dans  un  plan  quelconque  mené  par  AB 
on  conçoit  un  triangle  rectangle  BAD  (fig.  42), 
construit  sur  AB  comme  base,  et  dont  l'angle 
en  B  soit  le  complément  de  l'angle  sous  lequel  le 
côté  AB  a  été  observé,  l'angle  en  D  sera  égal  à  l'angle 
observé,  et  la  circonférence  de  cercle  décrite  par  les 
trois  points  A,  B,  D  jouira  de  la  propriété,  que  si  d'un 
point  quelconque  E  de  l'arc  ADB  on  mène  deux 
droites  aux  points  A  et  B,  l'angle  en  E  qu'elles  com- 
prendront entre  elles  sera  égal  à  l'angle  observé.  Si 
donc  on  conçoit  que  le  plan  du  cercle  tourne  autour 
de  AB  comme  charnière,  l'arc  ADB  engendrera  une 
surface  de  révolution,  dont  tous  les  points  joui- 
ront de  la  même  propriété;  c'est-à-dire,  que  si  d'un 
point  quelconque  de  la  surface  on  mène  deux  droites 
aux  points  A  et  B,  ces  droites  formeront  entre  elles  un 
angle  égal  à  l'angle  observé.  Or,  il  est  évident  que  les 


'10  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  21 

points  de  cette  surface  de  révolution  sont  les  seuls  qui 
jouissent  de  cette  propriété;  donc  la  surface  passera 
])ar  le  point  de  la  station.  Si  l'on  raisonne  de  la  même 
manière  pour  les  deux  autres  droites  BC,  CA,  on  aura 
deux  autres  surfaces  de  révolution  sur  chacune  des- 
quelles se  trouvera  le  point  de  la  station;  ce  point  sera 
donc  en  même  temps  sur  trois  surfaces  de  révolution 
différentes,  déterminées  de  forme  et  de  position;  il 
sera  donc  un  point  de  leur  intersection  commune. 
Ainsi,  en  construisant  les  projections  horizontales  et 
verticales  des  intersections  de  ces  trois  surfaces  consi- 
dérées deux  à  deux,  les  points  où  les  projections  se 
couperont  elles-mêmes  toutes  trois  seront  les  pro- 
jections du  point  qui  satisfait  à  la  question.  La  pro- 
jection horizontale  donnera  la  position  du  point  sur  la 
carte,  et  la  projection  verticale  donnera  l'élévalion  de 
ce  point  au-dessus  ou  au-dessous  des  points  observés. 

99.  Si  celte  question  était  traitée  i)ar  l'Analyse,  elle 
conduirait  généralement  à  une  équation  du  64^  degré; 
car  chacune  des  surfaces  de  révolution  a  quatre  nappes 
distinctes,  dont  deux  sont  engendrées  par  l'arc  de 
cercle  ADB,  et  dont  les  deux  autres  sont  engendrées 
par  l'arc  AFB.  Chacune  des  nappes  de  la  première 
pouvant  être  coupée  par  toutes  celles  de  la  seconde, 
il  peut  en  résulter  i6  branches  dans  la  courbe  d'inter- 
section ;  et  les  1 6  branches  pouvant  être  coupées  par  les 
quatre  nappes  de  la  troisième  surface,  il  peut  en  résulter 
64  points  d'intersection  des  trois  surfaces  :  mais  ces 
points  ne  satisferaient  pas  tous  à  la  question.  En  effet, 
si  d'un  point  quelconque  F  de  l'arc  AFB  on  mène  des 
droites  aux  extrémités  de  AB,  l'angle  AFB  qu'elles 


21  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE  SCIENTIFIQUE. 

comprendront  ne  sera  pas  égal  à  l'angle  observé;  il  en 
sera  le  supplément.  Les  nappes  engendrées  par  l'arc 
AFB,  et  les  nappes  analogues  dans  les  autres  surfaces 
de  révolution,  ne  peuvent  donc  servir  à  résoudre  la 
question;  et  tous  les  points  d'intersection,  qui  appar- 
tiennent à  quelques-unes  de  ces  nappes,  sont  des  points 
étrangers   au   problème. 

Dans  la  Géométrie  descriptive,  on  peut  et  l'on  doit 
exclure  l'arc  AFB  et  ses  analogues  dans  les  deux  autres 
surfaces;  chacune  de  ces  surfaces  n'a  plus  alors  que 
deux  nappes  ;  et  le  nombre  de  leurs  points  d'intersec- 
tion possibles  se  réduit  à  huit.  De  ces  huit  points, 
quatre  sont  d'un  côté  du  plan  qui  passe  par  les  trois 
axes  de  révolution,  et  quatre  sont  de  l'aulre.  L'obser- 
vateur connaissant  toujours  de  quel  côté  il  est  placé  par 
rapport  à  ce  plan,  il  ne  construira  pas  les  intersections 
qui  sont  placées  de  l'autre  côté,  et  le  nombre  des  points 
qu'il  pourra  trouver  est  réduit  à  quatre.  Enfin  parmi 
ces  quatre  points,  s'ils  existent  tous,  il  reconnaîtra 
facilement  celui  qui  sera  placé  par  rapport  aux 
points  A,  B,  C,  de  la  même  manière  que  celui  de  la 
station  l'est  par  rapport  aux  trois  points  du  terrain 
qu'il  a  observés. 

100.  Construction.  —  On  choisira  la  position  des 
deux  plans  de  projections  de  manière  que  celui  que 
nous  regardons  comme  horizontal  passe  par  les  trois 
points  observés,  et  que  l'autre  soit  perpendiculaire 
à  la  droite  menée  par  deux  de  ces  trois  points.  Soient 
donc  ABC  {fig.  42)  le  triangle  formé  par  les  points 
observés,  considéré  dans  son  plan,  et  A',  B', 
G'    les    trois    angles    donnés    par    l'observation.    On 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  a3 


mènera  perpendiculairement  au  côté  AB  ia  droite  LM 
(jui  indiquera  la  position  du  plan  vertical  de  projec- 
tion; et  l'on  construira,  comme  nous  venons  de  1  in- 
diquer (98),  les  arcs  de  cercle  générateurs  ADEB, 
BGC,  CLA  des  trois  surfaces  de  révolution,  dont  les 
côtés  AB,  BC,  AC  sont  les  axes.  Cela  fait,  du  point  A 
comme  centre,  on  décrira  tant  d'arcs  de  cercle  EOL 
que  l'on  voudra,  et  qui  couperont  les  généra Irices, 
dont  les  axes  se  rencontrent  en  A,  dans  des  points  E, 
L,  desquels  on  abaissera  sur  les  axes  respectifs  les  per- 
pendiculaires indéfinies  l^^E',  LI/;  ces  perpendicu- 
laires se  couperont  quelque  part  en  un  point  H  qui 
sera  la  projection  horizontale  d'un  point  d'intersec- 
tion des  deux  surfaces  dont  les  axes  sont  AB  et  AC, 
et  la  courbe  AHP  menée  par  tous  les  points  H . .  . 
trouvés  de, cette  manière,  sera  la  projection  horizon- 
tale de  cette  intersection.  Puis,  après  avoir  projeté 
l'axe  AB  en  a,  on  décrira  du  point  a  comme  centre, 
et  avec  des  rayons  successivement  égaux  aux  perpen- 
diculaires EE',  des  arcs  de  cercle  ee'A,  sur  chacun 
desquels  projetant  le  point  H  correspondant  en  //,  on 
aura  la  projection  verticale  d'un  point  de  l'intersec- 
lion  des  deux  mêmes  surfaces  de  révolution;  et  la 
courbe  ahp  menée  par  tous  les  poin Ls  h.  .  .  construits 
de  cette  manière,  sera  la  projection  verticale  de  cette 
intersection. 

On  opérera  de  même  pour  les  deux  surfaces  de  révo- 
lution autour  des  axes  AB,  BC;  c'est-à-dire,  du 
point  B  de  rencontre  des  deux  axes,  comme  centre,  on 
décrira  tant  d'arcs  de  cercle  MKG  que  l'on  voudra;  ces 
arcs  couperont  les  deux  génératrices  en  des  points  M, 
G,  desquels  on  abaissera  sur  les  axes  rcspcctiis  les 


24  LES   MAITRES   DE   LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


perpendiculaires  indéfinies  MM^,  GG';  ces  perpendi- 
culaires se  couperont  en  un  point  J;  et  la  courbe  BJP 
menée  par  tous  les  points  J...  sera  la  projection 
horizontale  de  l'intersection  de  la  première  et  de  la 
troisième  surface  de  révolution.  Du  point  a  comme 
centre,  et  avec  des  rayons  successivement  égaux  aux 
perpendiculaires  MM',  on  décrira  des  arcs  de  cercle 
mm'  i^  sur  lesquels  on  projettera  en  i  les  points  J  cor- 
respondants; et  la  courbe  aip  menée  par  tous  les 
points  i  sera  la  projection  verticale  de  la  même  inter- 
section. 

Cela  fait,  tous  les  points  P .  .  . ,  dans  lesquels  les  deux 
courbes  AHP,  BJP  se  couperont,  seront  les  projec- 
tions horizontales  d'autant  de  points  qui  satisfont  à 
la  question;  et  tous  les  points  p-  -  -,  dans  lesquels  se 
couperont  les  courbes  ahp^  aip,  seront  les  projections 
verticales  des  mêmes  points. 

Les  projections  ainsi  trouvées  ne  donneront  pas 
immédiatement  la  position  du  point  de  station  sur  la 
carte,  ni  sa  hauteur,  parce  que  le  plan  horizontal  de 
projection  n'est  pas  celui  de  la  carte;  mais  il  sera  facile 
de  la  rapporter  sur  les  véritables  plans  de  projection. 

101.  Sixième  question.  —  Le  général  d'une  armée 
en  face  de  l'ennemi  n'a  pas  la  carte  du  pays  occupé 
par  celui-ci,  et  il  en  a  besoin  pour  faire  le  plan  d'une 
attaque  qu'il  médite.  Il  a  un  aérostat.  Il  charge  un 
ingénieur  de  s'élever  avec  l'aérostat,  et  de  prendre 
toutes  les  mesures  nécessaires  pour  faire  la  carte,  et 
pour  en  donner  un  nivellement  approché  :  mais  il  a 
lieu  de  croire  que  si  l'aérostat  changeait  de  station  sur 
le  terrain,  l'ennemi  s'apercevrait  de  son  dessein;  en 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE. 


conséquence  il  permet  à  l'ingénieur  de  s'élever  à  dilîé- 
rentes  hauteurs  dans  l'atmosphère,  si  cela  est  néces- 
saire; mais  il  lui  défend  de  changer  de  station  à  terre. 
L'ingénieur  est  muni  d'un  instrument  propre  à  mesurer 
les  angles,  et  cet  instrument  est  garni  d'un  fil  à  plomb  : 
on  demande  comment  l'ingénieur  pourra  exécuter  les 
ordres  du  général  ? 

Moyen  de  solution.  —  L'ingénieur  fera  deux  sta- 
tions dans  la  même  verticale,  et  il  connaîtra  leur 
distance  en  faisant  mesurer  la  corde  que  l'on  aura  filée 
|)()ur  relever  de  l'une  à  l'autre.  Dans  l'une  des  stations, 
par  exemple  dans  celle  qui  est  inférieure,  il  mesurera 
les  angles  que  fait  la  verticale  avec  les  rayons  visuels 
dirigés  aux  points  dont  il  veut  déterminer  la  position 
sur  la  carte;  puis,  parmi  tous  ces  points,  il  en  choisira 
un  qu'il  regardera  comme  premier,  et  que  nous  nom- 
merons A,  et  il  mesurera  de  plus  successivement  les 
angles  formés  par  le  rayon  visuel  dirigé  au  point  A, 
et  ceux  qui  sont  dirigés  à  tous  les  autres.  Dans  l'autre 
station,  il  mesurera  les  angles  formés  par  la  verticale, 
et  les  rayons  visuels  dirigés  à  tous  les  points  du  terrain. 
D'après  ces  observations,  il  sera  en  état  de  construire 
la  carte  demandée. 

En  effet,  puisque  l'on  connaît  les  angles  formés  par  la 
verticale,  et  les  deux  rayons  visuels  dirigés  des  deux 
stations  au  même  point,  ce  point  se  trouve  en  même 
temps  sur  deux  surfaces  coniques  déterminées  et 
connues,  car  ces  surfaces  sont  à  bases  circulaires;  elles 
ont  leurs  axes  dans  la  même  verticale  ;  la  distance  de 
leurs  sommets  est  égale  à  la  différence  des  hauteurs  des 
deux  stations,  et  les   angles   que   leurs   génératrices 


'26  LES   MAITRES   DE   LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

forment  avec  l'axe  commun  sont  égaux  aux  angles 
observés.  De  plus,  puisque  l'on  connaît  l'angle  formé 
par  le  rayon  visuel  dirigé  de  la  première  station  à  ce 
point,  et  par  celui  qui  est  dirigé  au  point  A;  le  point 
que  l'on  considère  sera  donc  encore  sur  une  troisième 
surface  conique  à  base  circulaire,  dont  l'axe  incliné 
sera  le  rayon  visuel  dirigé  de  la  première  station  au 
point  A,  dont  le  sommet  sera  à  la  première  station,  et 
dont  l'angle  formé  par  l'axe  et  la  génératrice  sera  égal 
à  l'angle  observé.  Le  point  que  l'on  considère  se  trou- 
vera donc  en  même  temps  sur  des  surfaces  co- 
niques (')  à  bases  circulaires  connues  de  forme  et  do 
position;  il  sera  donc  au  point  de  leur  intersection 
commune;  et  en  construisant  les  projections  horizon- 
tale et  verticale  de  cette  intersection,  on  aura  la  posi- 
tion du  point  sur  la  carte,  et  son  élévation  au-dessus 
ou  au-dessous  des  autres. 

102.  Sans  changer  de  considérations,  la  construction 
peut  devenir  plus  simple,  au  moyen  de  quelques-unes 
des  méthodes  que  nous  avons  déjà  exposées  précédem- 
ment :  car,  connaissant  les  angles  formés  à  la  pre- 
mière station  par  le  rayon  visuel  dirigé  au  point  A,  et 
par  les  rayons  visuels  dirigés  à  tous  les  autres  points, 
et  connaissant,  pour  chacun  de  ces  angles,  les  angles 

(^)  Deux  de  ces  surfaces  sont  des  cônes  droits  à  base  cir- 
culaire, qui  ont  pour  sommet  le  point  A  et  qui  se  coupent 
nécessairement  suivant  deux  droites.  On  détermine  un 
point  de  chacune  de  ces  deux  droites  par  l'intersection  de 
deux  cercles,  en  considérant  les  cônes  comme  des  surfaces 
de  révolution  dont  les  axes  se  rencontrent  (art.  83). 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  a* 

quo  CCS  côtés  forment  avec  la  verticale,  il  sera  facile 
de  les  réduire  à  l'horizon,  c'est-à-dire  de  construire 
leurs  projections  horizontales.  Si  donc  on  prend  sur 
la  carte  un  point  arbitraire  pour  représenter  la  projec- 
tion de  la  verticale  de  l'aérostat;  et  si  par  ce  point  on 
mène  une  droite  arbitraire,  qui  doive  représenter  la 
projection  du  rayon  visuel  dirigé  au  point  A;  enfin,  si 
par  le  même  point  on  mène  des  droites  qui  fassent, 
avec  la  projection  du  rayon  dirigé  au  point  A,  des 
angles  égaux  aux  angles  réduits  à  l'horizon,  il  est  évi- 
dent que  chacune  de  ces  droites  devra  contenir  la 
projection  horizontale  du  point  du  terrain  qui  lui  corres- 
pond. Il  ne  s'agira  donc  plus  que  de  trouver  la  distance 
de  ce  point  du  terrain  à  la  verticale.  Or,  si  dans  la  pro- 
jection verticale,  et  sur  la  projection  de  la  verticale  de 
l'aérostat,  on  prend  deux  points  qui,  en  parties  de 
l'échelle,  soient  distants  l'un  de  l'autre  d'une  quantité 
égale  à  la  distance  mesurée  des  deux  stations,  et  si  par 
ces  points  on  mène  des  droites  qui  fassent  avec  la  ver- 
ticale des  angles  égaux  à  ceux  qui  ont  été  observés 
pour  un  même  point  du  terrain,  ces  droites  se  cou- 
peront en  un  point  dont  la  distance  à  la  verticale  sera 
la  distance  demandée.  Portant  donc  cette  distance  sur 
le  rayon  correspondant,  à  partir  de  la  projection  de 
l'aérostat,  on  aura  sur  la  carte  la  position  du  point  du 
terrain.  Les  deux  mêmes  droites,  dans  la  projection 
verticale,  déterminent,  par  leur  intersection,  la  hauteur 
du  point  du  terrain  ;  prenant  donc  sur  la  projection  ver- 
ticale les  hauteurs  de  tous  les  points  du  terrain  au- 
dessus  d'un  même  plan  horizontal,  on  déterminera  les 
cotes  qui  conviendront  à  tous  les  points  de  la  carte, 
et  l'on  aura  le  nivellement  du  terrain. 


28  LES    MAITRES    DE   LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE. 


Celle  construction  est  assez  simple  pour  ne  pas  avoir 
besoin  de  figure. 

La  droite  menée  de  la  projeclion  de  la  verticale  de 
l'aérostat  à  celle  du  premier  point  A  observé,  ayant 
été  tracée  d'abord  arbitrairement  sur  la  carte,  il 
s'ensuit  que  la  carte  n'est  point  orientée;  et,  en  effet, 
dans  les  observations  que  nous  avons  indiquées,  il  n'y 
a  rien  qui  puisse  déterminer  la  position  des  objets 
par  rapport  aux  quatre  points  cardinaux  de  l'horizon. 
Mais  si  l'ingénieur  observe  à  terre  l'angle  que  fait  avec 
la  méridienne  un  rayon  visuel  horizontal  dirigé  du 
pied  de  la  verticale  à  un  des  points  placés  sur  la  carte, 
et  s'il  rapporte  cet  angle  sur  sa  projection,  il  aura  la 
direction  de  la  méridienne,  et  la  carte  sera  orientée. 


103.  Ce  que  nous  avons  vu  jusqu'à  présent  de  la 
Géométrie  descriptive,  considérée  d'une  manière 
abstraite,  contient  les  principales  méthodes  dont  on 
peut  avoir  besoin  dans  les  arts. 

Si  donc  on  avait  établi  dans  toutes  les  villes  un  peu 
considérables  des  écoles  secondaires,  dans  lesquelle;- 
les  jeunes  gens  de  l'âge  de  12  ans,  et  qui  se  destineni 
à  la  pratique  de  quelques-uns  des  arts,  auraient  été 
exercés  pendant  deux  années  aux  constructions  gra- 
phiques, et  familiarisés  avec  les  principaux  phéno- 
mènes  de  la  nature,  dont  la  connaissance  leur  esl 
indispensable;  ce  qui,  en  développant  leur  intelligence 
et  en  leur  donnant  l'habitude  et  le  sentiment  de  k 
précision,  aurait  contribué  de  la  manière  la  plus  cer 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  29 

taine  aux  progrès  de  l'industrio  nationale,  et  ce  qui, 
en  les  accoutumant  à  l'évidcnc»  ,  les  aurait  garantis 
pour  toujours  de  la  séduction  des  imposteurs  de  tous 
les  genres;  et  si  nous  ne  nous  proposions  que  de  faire 
le  livre  élémentaire  qui  aurait  dû  servir  de  base  à  l'ins- 
truction de  ces  écoles  secondaires,  il  faudrait  terminer 
là  les  généralités,  et  passer  immédiatement  aux  appli- 
cations les  plus  utiles,  et  à  celles  dont  l'usage  est  le 
plus  fréquent.  Mais  nous  ne  devons  pas  écrire  seule- 
ment pour  les  élèves  des  écoles  secondaires,  nous 
devons  écrire  pour  leurs  professeurs. 

On  ne  doit  faire  entrer  dans  le  plan  d'une  instruc- 
tion populaire  que  des  objets  simples  et  d'une  utiiilé 
journalière  :  mais  si  un  artiste  rencontre  une  seule 
fois  dans  sa  vie  une  difficulté  dont  il  n'ait  point  été 
question  dans  les  écoles,  à  qui  s'adressera-t-il  pour  la 
lever,  si  ce  n'est  au  professeur  ?  et  comment  le  pro- 
fesseur la  lèvera-t-il,  s'il  ne  s'est  exercé  à  des  considé- 
rations d'une  généralité  plus  grande  que  celles  qui 
forment  l'objet  ordinaire  des  études  ? 

Pour  donner  aux  professeurs  la  connaissance  de 
quelques  propriétés  générales  de  l'étendue,  et  dont 
on  peut  avoir  occasion  de  faire  usage  dans  les  arts, 
nous  allons  consacrer  quelques  leçons  à  l'examen  de 
la  courbure  des  courbes  à  double  courbure,  et  de  celles 
des  surfaces  courbes. 


DE  LA  COURBURE   ET  DES   DÉVELOPPÉES   DES  COURBES 
A  DOUBLE  COURBURE. 

J04.  On  sait  que  si  une  droite,  considérée  dans  un 
plan,  tourne  autour  d'un  de  ses  points  supposé  fixe, 


32  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


Ces  deux  branches  se  toucheront  donc  elles-mêmes 
en  P^ 

Le  point  P'  dans  lequel  une  courbe  se  réfléchit 
ainsi,  de  manière  que  ses  deux  branches  se  touchent 
à  ce  point,  se  nomme  point  de  rebroussement. 

La  courbe  MNP'O,  sur  laquelle  s'appuie  la  droite 
en  la  touchant  perpétuellement,  s'appelle  la  déve- 
loppée de  la  courbe  GPP'P"H,  parce  qu'un  de  ces 
arcs  quelconques  MNP'  est  égal  à  la  partie  correspon- 
dante MP  de  la  droite  mobile,  et  la  courbe  GPP'  P"  H 
s'appelle  la  développante  de  la  courbe  MNO.  Gomme 
on  peut  avoir  autant  de  courbes  décrites  de  la  même 
manière  que  l'on  peut  concevoir  de  points  P,  p  sur 
la  droite  AB,  regardée  comme  indéfinie,  il  est  évident 
qu'une  même  développée  peut  avoir  une  infinité  de 
développantes  différentes,  telles  que  GPP'P"H, 
gpp'p"h;  et  toutes  ces  développantes  ont  la  propriété 
d'avoir  les  mêmes  normales.  Nous  verrons  incessamment 
que  réciproquement  il  n'y  a  pas  de  courbe  qui  n'ait 
une  infinité  de  développées  différentes. 

105.  On  fait  usage  dans  les  arts  de  quelques  déve- 
loppantes, et  principalement  de  celle  du  cercle,  qui  est 
une  spirale  dont  le  nombre  des  révolutions  est  infini, 
et  dont  toutes  les  branches  successives  sont  éloignées 
les  unes  des  autres  d'une  quantité  constante,  égale  à 
la  circonférence  du  cercle  développé.  C'est  suivant 
la  courbure  de  cette  développante  que  l'on  coupe  les 
cames  ou  dents  des  arbres  tournants  qui  soulèvent 
des  pilons,  comme  dans  les  bocards,  parce  que  le 
contact  de  la  came  avec  le  mentonnet  du  pilon  étant 
toujours  dans  la  même  verticale,  l'effort  de  l'arbre 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  33 

pour  soulever  le  pilon  est  constamment  le  même. 
Vaucanson  employait  souvent  la  spirale  développante 
du  cercle  comme  moyen  d'engrenage  pour  transmettre 
le  mouvement  d'un  arbre  tournant  à  un  autre  arbre 
qui  lui  était  parallèle,  surtout  lorsqu'il  fallait  que 
l'engrenage  fût  exact  cl  transmît  subitement,  sans 
temps  perdu,  le  mouvement  d'un  arbre  à  l'autre. 

106.  Nous  avons  fait  voir  (104)  comment  la  déve- 
loppante peut  être  formée  d'après  la  développée  ;  il  est 
facile  de  concevoir  comment,  à  son  tour,  la  dévelop- 
pée peut  être  formée  d'après  la  développante.  En  effet, 
nous  avons  vu  que  toutes  les  normales  de  la  dévelop- 
pante sont  tangentes  à  la  développée.  Si  donc,  par 
tous  les  points  P,  Q  d'une  courbe  proposée  GPQP', 
on  conçoit  des  normales,  la  courbe  MNO  qui  touchera 
toutes  ces  normales  sera  la  développée.  De  plus,  si  par 
deux  points  P,  Q  consécutifs  et  infiniment  proches 
on  conçoit  deux  normales  PB,  Q^b,  le  point  M  où  elles 
se  couperont,  pour  se  croiser  au  delà,  sera  sur  la  déve- 
loppée; et  ce  point  pourra  être  regardé  comme  lii 
contre  d'un  yjetit  arc  de  cercle  qui,  étant  décrit  avec  le 
rayon  PM,  aurait  la  même  courbure  (pie  l'arc  PQ  de 
la  courbe  que  l'on  considère.  Le  rayon  PM  du  cercle, 
dont  la  courbure  est  la  même  que  celle  de  l'arc  inli- 
niment  petit  PQ  d'une  courbe,  se  nomme  le  rayon  da 
courbure  de  cet  arc;  le  point  M  où  se  coupent  les  deux 
normales  consécutives  en  est  le  centre  de  courbure;  et 
cette  courbure  est  connue  lorsque  la  position  du 
point  M  est  déterminée. 

107.  Jusqu'ici  nous  avons  supposé  que  les  courbes 

MU.NUL.   —    II.  3 


34  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 


étaient  planes,  et  nous  n'avons  considéré  que  ce  qui 
se  passe  dans  leur  plan.  Nous  allons  passer  aux  courbes 
à  double  courbure,  telles  que  celles  qui  sont  produites 
par  l'intersection  de  deux  surfaces  courbes. 

Si  l'on  conçoit  une  droite  menée  par  le  centre  d'un 
cercle,  perpendiculairement  à   son    plan    et  indéfini- 
ment prolongée  de  part  et  d'autre,  on  sait  que  chacun 
des  points  de  cette  droite  sera  à  égales  distances  de 
tous  les  points  de  la  circonférence,  que  par  conséquent, 
si  l'on  imagine  qu'une  seconde  droite,  terminée  d'une 
part  à  un  des  points  de  la  circonférence  et  de  l'autre 
à  un  point  quelconque  de  la  perpendiculaire,  tourne 
autour  de  cette  dernière  comme  axe,  en  faisant  cons- 
tamment le  même  angle  avec  elle,  son  extrémité  mo- 
bile décrira  la  circonférence  du  cercle  avec  la  même 
exactitude  que  si  l'on  eût  fait  tourner  le  rayon  autour 
du  centre.  La  description  du  cercle  au  moyen  du  rayon, 
et  qui  n'est  qu'un  cas  parliculier  de  la  première,  par 
sa  simplicité  est  plus  propre  à  donner  l'idée  de  l'étendue 
du  cercle  :  mais,  s'il  ne  s'agit  que  de  description,  la 
ju'emière  peut  dans  certains  cas  avoir  de  l'avantage, 
parce  qu'en  prenant  sur  l'axe  deux  pôles  placés  de  part 
et  d'autre  du  plan  du  cercle,  puis  menant  par  ces  deux 
points  deux  droites  qui  se  couperaient  en  un  point  de 
la  circonférence,  et  faisant  ensuite  mouvoir  le  système 
de  ces  deux  droites  autour  de  l'axe,  de  manière  que 
leur  point  d'intersection  fût  fixe  sur  l'une  et  sur  l'autre 
droite,  ce  point  décrirait  la    circonférence  du  cercle, 
sans  qu'il  eût  été  nécessaire  d'exécuter  auparavant  le 
plan  dans  lequel  elle  doit  se  trouver. 

108.  Soit  KA  a  D   [fig.  44)  ^iii^    courbe  à    double 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  35 

courbure  quelconque  tracée  dans  l'espace.  Par 
un  point  A  de  cette  courbe  soit  conçu  un  plan 
MNOP  perpendiculaire  à  la  tangente  en  A;  par  le 
point  a  infiniment  proche  soit  pareillement  imaginé 
un  plan  mnPO  perpendiculaire  à  la  tangente  en  a; 
ces  deux  plans  se  couperont  en  une  droite  OP  qui  sera 
l'axe  du  cercle  dont  le  petit  arc  Aa  de  la  courbe  peut 
être  censé  faire  partie  :  de  manière  que  si,  des  points  A, 
«,  on  abaisse  deux  perpendiculaires  sur  cette  droite, 
ces  perpendiculaires,  égales  entre  elles,  la  rencontre- 
ront en  un  même  point  G  qui  sera  le  centre  de  ce  cercle. 
Tous  les  autres  points  g,  g\  g" y  ...  de  cette  droite 
seront  chacun  à  égales  distances  de  tous  les  points  de 
l'arc  infiniment  petit  A  a,  et  pourront  par  conséquent 
en  être  regardés  comme  les  pôles.  Ainsi,  si  d'un  point 
quelconque  g  de  cet  axe  on  mène  deux  droites  aux 
points  A,  a,  ces  droites  gA,  ga  seront  égales  entre 
elles,  et  formeront  avec  l'axe  des  angles  AgO,  agO, 
égaux  entre  eux;  en  sorte  que  si  l'on  voulait  définir 
la  courbure  de  la  courbe  au  point  A,  il  faudrait  donner 
la  longueur  du  rayon  de  courbure  AG,  et  que  s'il 
s'agissait  d'assigner  le  sens  de  la  courbure,  il  faudrait 
donner  la  position  du  centre  G  dans  l'espace.  Mais  s'il 
est  simplement  question  de  décrire  le  petit  arc,  il 
suffira  également  ou  de  faire  tourner  la  droite  A  g 
autour  de  l'axe,  sans  altérer  l'angle  AgO  qu'elle  fait 
avec  lui,  ou  de  faire  tourner  le  rayon  de  courbure  AG 
perpendiculairement  à  cet  axe. 

Ainsi  la  droite  OP  peut  être  regardée  comme  la 
ligne  des  pôles  de  l'élément  Aa;  le  centre  de  courbure 
de  cet  élément  est  celui  de  ses  pôles  dont  la  distance 
à  l'élément  est  un  minimum^  enfin  son  rayon  de  cour- 


36  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

bure  est  la  perpendiculaire  AG,  abaissée  de  l'élément 
sur  la  ligne  des  pôles. 

109.  Que  l'on  fasse  actuellement  sur  tous  les  points 
de  la  courbe  à  double  courbure  la  même  opération  que 
l'on  vient  de  faire  sur  un  de  ses  éléments,  c'est-à-dire 
que  par  tous  les  points  consécutifs  A,  A',  A",  A'",  etc. 
{fig.  45)  l'on  fasse  passer  des  plans  MNOP,  perpen- 
diculaires chacun  à  la  tangente  de  la  courbe  au 
point  où  il  la  coupe;  le  premier  de  ces  plans  rencon- 
trera le  second  dans  une  droite  OP  qui  sera  le  lieu 
géométrique  des  pôles  de  l'arc  AA';  le  second  rencon- 
trera le  troisième  dans  une  droite  O'P',  lieu  des  pôles 
de  l'arc  A'A'',  et  ainsi  de  suite.  Il  est  évident  que  le 
système  de  toutes  les  droites  d'intersection,  ou  la 
surface  courbe  qu'elles  forment  par  leur  assemblage, 
sera  le  lieu  géométrique  des  pôles  de  la  courbe  KAD; 
car  cette  courbe  n'aura  point  de  pôle  qui  ne  soit  sur 
la  surface,  et  cette  surface  n'aura  pas  de  point  qui  ne 
soit  le  pôle  de  quelqu'un  des  éléments  de  la  courbe. 

110.  Avant  que  d'aller  plus  loin,  il  est  nécessaire 
d'exposer  quelques  propriétés  dont  jouissent  les  sur- 
faces de  ce  genre,  indépendamment  de  la  courbe  qui 
a  servi  à  leur  formation. 

Ces  surfaces  peuvent  se  développer  sur  un  plan  sans 
rupture  et  sans  duplicature.  En  effet,  les  éléments  tels 
que  OPP'O',  dont  est  composée  la  surface,  sont  des 
portions  de  plans  infiniment  étroites,  et  qui  se  joignent 
successivement  par  des  lignes  droites.  On  peut  donc 
toujours  concevoir  que  le  premier  de  ces  éléments 
OPP'O'    tourne    autour   de   O'P'    comme    charnière, 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  3y 


jusqu'à  ce  qu'il  soit  dans  le  plan  de  l'élément  suivant 
0'P'P"0";  qu'ensuite  leur  assemblage  tourne  autour 
de  O"?*,  jusqu'à  ce  qu'il  soit  dans  le  plan  du  troisième 
et  ainsi  de  suite.  D'où  l'on  voit  que  rien  n'empêche 
que  de  cette  manière  tous  les  éléments  de  la  surface  ne 
viennent  sans  rupture  se  ranger  dans  un  même  plan. 

De  même  que  les  plans  normaux  à  la  courbe  KAD, 
par  leurs  intersections  successives,  forment  une  surface 
courbe,  à  laquelle  ils  sont  tous  tangents,  pareillement 
les  lignes  droites  dans  lesquelles  ils  se  coupent  se  ren- 
contrent successivement  dans  des  points  qui  forment 
une  courbe  à  double  courbure,  à  laquelle  toutes  ces 
droites  sont  tangentes  :  car  deux  de  ces  droites  consé- 
cutives sont  les  intersections  d'un  même  plan  nor- 
mal, avec  celui  qui  le  précède  et  avec  celui  qui  le  suit 
immédiatement.  Ces  deux  droites  sont  donc  dans  un 
même  plan;  elles  se  coupent  donc  quelque  part  en  un 
point,  et  la  suite  de  tous  ces  points  de  rencontre  forme 
une  courbe  remarquable  sur  la  surface  développable. 
En  effet,  les  droites  consécutives,  après  s'être  croisées 
sur  la  courbe  qui  les  touche  toutes,  se  prolongent  au 
delà,  et  forment  par  leurs  prolongements  une  nappe 
de  surface,  distincte  de  la  nappe  formée  par  les  parties 
des  mêmes  droites  avant  leurs  rencontres.  Ces  deux 
nappes  se  joignent  sur  la  courbe  qui  est,  par  rapport  à 
la  surface  entière,  une  véritable  arête  de  rcbroussement. 

Actuellement,  du  point  A  {fig.  45)  de  la  courbe,  par 
lequel  passe  le  premier  plan  normal  MNPO,  soit 
menée  dans  le  plan,  et  suivant  une  direction  arbi- 
traire, une  droite  A  g  jusqu'à  ce  qu'elle  rencontre  la 
section  OP  quelque  part  en  un  point  g;  par  les  points  A' 
g,  soit  menée  dans  le  second  plan^normal  la  droite  A' g 


38  LES    MAITRES    DE    LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


prolongée  jusqu'à  ce  qu'elle  rencontre  la  section  O'P' 
en  un  point  g'-,  soit  pareillement  menée  A" g'g'\  et 
ainsi  de  suite.  La  courbe  qui  passe  par  tous  les  points  g, 
g'g'\  etc.  est  une  développée  de  la  courbe  KAD;  car 
toutes  les  droites  A  g,  A' g',  A"  g"  sont  les  tangentes 
de  la  courbe  gg' g'\  puisqu'elles  sont  les  prolongements 
des  éléments  de  cette  courbe.  De  plus,  si  l'on  conçoit 
que  la  première,  A  g,  tourne  autour  de  OP,  comme 
axe,  pour  venir  s'appliquer  sur  la  suivante,  A' g,  elle 
n'aura  pas  cessé  d'être  tangente  à  la  courbe  gg'g"; 
et  son  extrémité  A,  après  avoir  parcouru  l'arc  AA',  se 
confondra  avec  l'extrémité  A'  de  la  seconde.  Que  l'on 
fasse  de  même  tourner  la  seconde  ligne.  A' g',  autour 
de  O'P',  comme  axe,  pour  qu'elle  vienne  s'appliquer 
sur  la  troisième,  A"g',  elle  ne  cessera  pas  de  toucher  la 
courbe  gg'g"  et  son  extrémité  A'  ne  sortira  pas  de 
l'arc  A'A",  et  ainsi  de  suite.  Donc  la  courbe  gg'g" 
est  telle,  que  si  l'on  conçoit  qu'une  de  ces  tangentes 
tourne  autour  de  cette  courbe  sans  cesser  de  lui  être 
tangente  et  sans  avoir  de  mouvement  dans  le  sens  de 
sa  longueur,  un  des  points  de  cette  tangente  décrira 
la  courbe  KAD;  donc  elle  est  une  de  ses  développées. 
Mais  la  direction  de  la  première  droite  Ag  était  arbi- 
traire; et  suivant  quelque  autre  direction  qu'on  l'eût 
menée  dans  le  plan  normal,  on  aurait  trouvé  une  autre 
courbe  gg'^'  qui  aurait  été  pareillement  une  développée 
de  la  courbe  KAD.  Une  courbe  quelconque  a  donc 
une  infinité  de  développées  qui  sont  toutes  comprises 
sur  une  même  surface  courbe. 

Les  droites  A' g'  et  A"  g'  forment  des  angles  égaux 
avec  la  droite  O'P^;  et  l'élément  g' g"  étant  le  prolon- 
gement de  la  droite  A" g\'^i\  s'ensuit  que  les  deux  élé- 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  39 

ments  c«tfisécutifs  gg\  g'g"  de  la  développée  gg'g" 
forment  des  angles  égaux  avec  la  droite  O'P'  qui  passe 
par  leur  point  de  rencontre.  Or,  lorsqu'on  développe  la 
surface  pour  l'appliquer  sur  un  plan,  les  éléments  de 
la  développée  ne  cessent  pas  de  faire  les  mêmes  angles 
avec  les  droites  O'P';  donc  deux  éléments  consécutifs 
de  la  courbe  gg' g'\  considérés  dans  la  surface  étendue 
sur  un  plan,  forment  des  angles  égaux  avec  une  même 
ligne  droite;  donc  ils  sont  dans  le  prolongement  l'un 
de  Taulre.  Il  suit  de  là  que  chacune  des  développées 
d'une  courbe  à  double  courbure  devient  une  ligne 
droite,  lorsque  la  surface  qui  les  contient  toutes  est 
étendue  sur  un  plan;  donc  elle  est  sur  cette  surface 
la  plus  courte  qur  l'on  puisse  mener  entre  ses  extré- 
mités. 

i)\\  déduit  de  là  un  moyen  facile  d'obtenir  une  déve- 
loppée quelconque  d'une  courbe  à  double  courbure, 
lorsqu'on  a  la  surface  développable  qui  les  contient 
toutes.  Pour  cela,  il  suffit,  par  un  point  de  la  courbe, 
de  mener  un  fil  tangent  à  la  surface  et  de  plier  ensuite 
ce  fil  sur  la  surface  en  le  tendant  :  car,  en  vertu  de  la 
tension,  il  prendra  la  direction  de  la  courbe  la  plus 
courte  entre  ses  extrémités;  il  se  pliera  par  conséquent 
sur  une  des  développées. 

111.  On  conçoit,  d'après  cela,  comment  il  est  pos- 
sible d'engendrer,  par  im  mouvement  continu,  une 
courbe  quelconque  à  double  courbure  :  car,  après  avoir 
exécuté  la  surface  développable,  touchée  par  tous  les 
plans  normaux  de  la  courbe,  si,  du  point  donné  dans 
l'espace  et  par  lequel  la  courbe  doit  passer,  on  dirige 
<leux  fils  tangents  à  cette  surface;  et  si,  après  les  avoir 


4o  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE  SCIENTIFIQUE. 

plies  ensuite  sur  la  surface  en  les  tendant,  o»  les  fixe 
par  leurs  autres  extrémités;  le  point  de  réunion  des 
deux  fils  qui  aura  la  faculté  de  se  mouvoir  avec  le  plan 
tangent  à  la  surface,  sans  glisser  ni  sur  l'un  des  fils, 
ni  sur  l'autre,  engendrera  dans  son  mouvement  la 
courbe  proposée. 

112.  Tout  ce  que  nous  venons  de  dire,  par  rapport 
aux  courbes  à  double  courbure,  convient  également 
aux  courbes  planes,  avec  cette  différence,  seulement, 
que  tous  les  plans  normaux  étant  perpendiculaires 
au  plan  de  la  courbe,  toutes  les  droites  de  leurs  inter- 
sections consécutives  sont  aussi  perpendiculaires  au 
même  plan,  et  par  conséquent  parallèles  entre  elles. 
La  surface  développable,  touchée  par  tous  ces  plans 
normaux,  est  donc  alors  une  surface  cylindrique,  dont 
la  section  perpendiculaire  est  la  développée  ordinaire 
de  la  courbe.  Mais  cette  surface  cylindrique  contient 
de  même  toutes  les  développées  à  double  courbure 
de  la  même  courbe;  et  chacune  de  ces  développées 
fait,  avec  toutes  les  droites  génératrices  de  la  surface 
cylindrique,  des  angles  constants.  Le  filet  d'une  vis 
ordinaire  est  une  des  développées  de  la  développante 
du  cercle  qui  sert  de  base  à  la  surface  cylindrique  sur 
laquelle  il  se  trouve;  et  quelle  que  soit  la  hauteur  du 
pas  de  la  vis,  si  le  diamètre  du  cylindre  ne  change  pas, 
le  filet  sera  toujours  une  des  développées  de  la  même 
courbe. 

113.  Après  avoir  exposé  la  théorie  des  courbes  à 
double  courbure,  nous  allons  nous  occuper  des  surfaces 
courbes.   Cet  objet  est  de  nature  à  être  traité  avec 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE. 


beaucoup  plus  de  facilité  par  le  secours  de  l'Analyse, 
que  par  la  simple  contemplation  des  propriétés  de 
l'étendue  :  mais  les  résultats  auxquels  il  conduit 
peuvent  être  utiles  à  des  artistes  que  nous  ne  devons 
pas  supposer  familiarisés  avec  les  opérations  ana- 
lytiques; nous  allons  donc  essayer  de  les  présenter 
en  n'employant  que  des  considérations  géométriques. 
Cette  mélhode  introduira  la  clarté  qui  lui  est  particu- 
lière, mais  aussi  elle  apportera  de  la  lenteyr  dans  la 
marche. 

Les  surfaces,  par  rapport  à  leurs  courbures,  peuvent 
être  divisées  en  trois  grandes  classes.  La  première 
comprend  celles  qui  dans  tous  leurs  points  n'ont  aucune 
courbure;  les  surfaces  de  ce  genre  se  réduisent  au  plan, 
qui  d'ailleurs  peut  être  placé  d'une  manière  quel- 
conque dans  l'espace.  La  seconde  classe  renferme 
toutes  celles  qui  dans  chacun  de  leurs  points  n'ont 
qu'une  seule  courbure;  ce  sont,  en  général,  les  sur- 
faces développables,  dont  deux  éléments  consécutifs 
peuvent  être  regardés  comme  faisant  partie  d'une  sur- 
face conique,  même  en  regardant  la  grandeur  de  ces 
éléments  comme  indéfinie  dans  le  sens  de  la  généra- 
trice de  la  surface  conique.  Enfin,  toutes  les  autres  sur- 
faces courbes  composent  la  troisième  classe;  dans 
chacun  de  leurs  points,  elles  ont  deux  courbures  dis- 
tinctes et  qui  peuvent  varier  l'une  indépendamment 
de  l'autre.  Commençons  par  considérer  les  surfaces 
courbes  les  plus  simples,  et  d'abord  les  surfaces  cylin- 
driques. 

114.  Soit  ABFE  (fig.  46)  une  surface  cylin- 
drique   indéfinie    à    base    quelconque,   sur   laquelle 


\l  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


on  considère  un  point  L  pris  arbitrairement.  Par  ce 
point  concevons  la  droite  génératrice  CLG,  et  une  sec- 
tion JLK  faite  par  un  plan  perpendiculaire  à  la  géné- 
ratrice; cette  section  sera  parallèle  et  semblable  à  la 
base  de  la  surface.  Enfin,  par  le  point  L  concevons  à  la 
surface  la  normale  LP;  celte  normale  sera  perpendicu- 
laire à  la  génératrice  CG,  et  par  conséquent  dans  le 
plan  de  la  section  JLK  ;  de  plus,  elle  sera  perpendicu- 
laire à  la  tangente  de  la  section  au  point  L,  ou,  ce  qui 
comprend  à  la  fois  les  deux  conditions,  elle  sera  per- 
pendiculaire au  plan  tangent  à  la  surface  en  L.  Gela 
posé,  si  l'on  prend  sur  la  surface  deux  autres  points 
infiniment  voisins  du  point  L,  l'un  M  sur  la  géné- 
ratrice CG,  l'autre  N  sur  la  section  perpendiculaire, 
et  si  par  chacun  de  ces  points  on  mène  une  nouvelle 
normale  à  la  surface,  ces  deux  normales  MQ,  NP 
seront  chacune  dans  un  même  pian  avec  la  première 
normale  LP;  mais  ces  plans  seront  différents  pour  les 
deux  dernières  normales.  En  effet,  le  plan  tangent  à 
la  surface  en  li  étant  aussi  tangent  en  M,  les  deux 
droites  LP  et  MQ  sont  perpendiculaires  au  même  plan; 
elles  sont  donc  parallèles  entre  elles,  et  par  conséquent 
dans  un  même  plan.  Ces  droites  parallèles  peuvent 
être  regardées  comme  concourant  à  l'infmi.  Quant  aux 
normales  LP,  NP,  elles  sont  évidemment  comprises 
dans  le  plan  de  la  section  perpendiculaire;  elles  con- 
courent donc  en  un  certain  point  P  de  ce  plan;  ainsi 
les  deux  plans  qui  contiennent  les  trois  normales  deux 
à  deux  sont  non  seulement  différents,  mais  perpen- 
diculaires à  l'autre. 

115.  Actuellement,  quelque  autre  point  0  que  l'on 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE. 


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'^'k 


/ 


y  J'tu^ 


44  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

prenne  sur  la  surface,  infiniment  voisin  du  premier 
point  L,  si  par  ce  point  on  conçoit  à  la  surface  une 
normale  OQ,  cette  normale  ne  sera  pas  dans  un  même 
plan  avec  la  première  normale  LP,  et  par  conséquent 
ne  pourra  la  rencontrer  :  car  si  par  le  point  0  on  con- 
çoit une  nouvelle  section  iOk  perpendiculaire  à  la 
surface,  et  qui  coupe  quelque  part  en  un  point  M  la 
droite  génératrice  qui  passe  par  le  point  L,  la  nor- 
male OQ  sera  dans  le  plan  de  cette  section.  Les  deux 
normales  LP  et  OQ  seront  donc  dans  deux  plans  paral- 
lèles, et  ne  pourront  être  elles-mêmes  dans  un  même 
plan,  à  moins  qu'elles  ne  soient  parallèles  entre  elles  : 
or  elles  ne  sont  point  parallèles.  En  effet,  si  l'on  conçoit 
la  normale  au  point  M,  nous  avons  vu  que  cette  nor- 
male MQ  sera  parallèle  à  LP;  mais  elle  ne  sera  pas 
parallèle  à  OQ  :  donc  les  normales  LP  et  OQ  ne  sont 
point  parallèles  entre  elles;  donc  elles  ne  sont  pas  dans 
un  même  plan;  donc  elles  ne  peuvent  jamais  se  ren- 
contrer. 

116.  On  voit  donc  que  si,  après  avoir  mené  par  un 
point  quelconque  d'une  surface  cylindrique  une  nor- 
male à  la  surface,  on  veut  passer  à  un  point  infiniment 
voisin  pour  lequel  la  nouvelle  normale  soit  dans  un 
même  plan  avec  la  précédente,  et  puisse  la  rencontrer 
même  à  l'infini,  si  cela  est  nécessaire,  on  ne  peut  le  faire 
que  dans  deux  sens  différents  :  i^  en  suivant  la  direc- 
tion de  la  droite  génératrice  de  la  surface,  et  alors  la 
nouvelle  normale  rencontre  la  première  à  l'infini; 
2°  en  suivant  la  section  perpendiculaire  ti  la  surface, 
et  alors  la  nouvelle  normale  rencontre  la  première  en 
un  point,  dont  la  distance  dépend  de  la  courbure  de  la 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  45 

base  dans  le  point  correspondant;  enfin,  que  ces  deux 
directions  sont  entre  elles  à  angles  droits  sur  la 
surface. 

Les  deux  points  de  rencontre  des  trois  normales  sont 
donc  les  seuls  centres  de  courbure  possibles  de  l'éléniont 
que  Ton  considère  sur  la  surface;  les  deux  plans  diffé- 
rents, qui  passent  par  la  première  normale  et  par 
chacune  des  deux  autres,  indiquent  le  sens  de  chacune 
de  ces  courbures;  les  distances  du  point  de  la  surface 
aux  deux  points  de  rencontre  des  normales  sont  les 
rayons  des  deux  courbures;  et  l'on  voit  que  dans  les 
surfaces  cylindriques,  un  de  ces  rayons  étant  toujours 
infini,  tandis  que  la  grandeur  de  l'autre  dépend  de  la 
nature  de  la  base  de  la  surface  pour  chacun  des  points, 
il  n'y  a  qu'une  courbure  finie;  l'autre  est  toujours 
infiniment   petite   ou   nulle. 

Ce  que  nous  venons  de  dire  peut  s'appliquer  faci- 
lement à  toutes  les  surfaces  développables,  dont  deux 
éléments  consécutifs  même  indéfinis  dans  le  sens  de 
la  direction  de  la  droite  génératrice  peuvent  toujours 
être  considérés  comme  faisant  partie  d'une  certain<' 
surface  cylindrique.  Passons  maintenant  au  cas  général 
des  surfaces  courbes  quelconques. 


117.  Soit  ABCD  {fig.  4?)  une  surface  courbe 
quelconque,  sur  laquelle  on  considère  un  point  L 
pris  à  volonté,  et  par  ce  point  soit  conçue  une 
droite  FL/  tangente  à  la  surface  :  la  position  de  cette 
droite  ne  sera  pas  déterminée;  elle  pourra  être  menée 
d'une  manière  quelconque  dans  le  plan  tangent  à  la 
surface  au  point  L.  Puis  concevons  que  la  droite  F/ 
se  meuve  de  manière  qu'elle  soit  toujours  parallèle  à 


46  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

elle-même,  et  qu'elle  soit  toujours  tangente  à  la  sur- 
face courbe;  elle  engendrera  par  son  mouvement  une 
certaine  surfac(î  cylindrique  EegG,  dont  la  base 
dépendra  de  la  l'orme  de  la  surface  courbe,  et  qui  tou- 
chera cette  surface  dans  une  courbe  LCKAL,  engendrée 
elle-même  par  le  mouvement  du  point  de  contact  de 
la  droite  génératrice  avec  la  surface  proposée.  Cette 
courbe  de  contact  LCKAL  est  en  généial  à  double 
courbure. 

lis.  Dans  le  cas  très  particulier  de  la  surface  courbe 
du  second  degré,  c'est-à-dire  de  la  surface  qui,  étant 
coupée  par  un  plan  quelconque,  produit  toujours  une 
section  conique,  la  ligne  de  contact  avec  une  surface 
cylindrique  qui  l'enveloppe  est  toujours  une  courbe 
plane,  quelle  que  soit  d'ailleurs  la  direction  de  la  géné- 
ratrice de  la  surface  cylindrique. 

119.  Dans  le  cas  un  peu  plus  général  où  la  surface 
courbe  est  engendrée  par  le  mouvement  d'une  ligne 
courbe  plane,  fixe  dans  son  plan,  mais  mobile  avec  lui, 
lorsqu'il  roule  sur  deux  surfaces  courbes  données,  pour 
chaque  point  de  la  surface  il  existe  une  direction  à 
donner  à  la  droite  génératrice,  pour  que  la  surface 
cylindrique  engendrée  par  le  mouvement  de  cette 
droite  touche  la  surface  courbe  dans  une  courbe  plane, 
et  cette  direction  doit  être  telle,  que  la  droite  soit 
toujours  perpendiculaire  au  plan  mobile,  lorsqu'il 
passe  par  le  point  que  l'on  considère.  Les  surfaces  de 
révolution  en  sont  un  cas  particulier.  En  effet,  si  par 
un  point  quelconque  d'une  surface  de  révolution  on 
conçoit  une  droite  tangente  à  la  surface  et  perpendi- 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  4? 

culaire  au  plan  du  méridien  qui  passe  par  ce  point, 
et  si  l'on  suppose  que  cette  droite  se  meuve  de  manière 
qu'elle  soit  toujours  tangente  à  la  surface  et  perpendi- 
culaire au  plan  du  même  méridien,  le  point  de  contact 
de  la  ligne  avec  la  surface  parcourra  la  circonférence 
du  méridien,  et  la  droite  engendrera  une  surface  cylin- 
drique qui  touchera  la  surface  de  révolution  dans  la 
circonférence  même  du  méridien,  et  par  conséquent 
dans  une  courbe  plane. 

120.  Pour  tout  autre  cas,  une  surface  cylindrique 
I  circonscrite  à  une  surface  quelconque  touche  cette 
(Surface  dans  une  courbe  LCKAL  qui  est  à  double 
(  courbure. 

La  droite  FL/  ayani  d'abord  été  menée  d'une  nia- 
aiière  arbitraire  dans  le  plan  tangent  à  la  surface  au 
\  point  L,  si  par  ce  point  on  conçoit  la  tangente  LU  à  la 
courbe  de  contact  LCKAL,  cette  tangente  fera  avec 
la  ligne  droite  génératrice  FL/  un  angle  FLU  qui 
dépendra  et  de  la  nature  de  la  surface  courbe,  et  de  la 
direction  arbitraire  donnée  à  la  droite  FL/.  Conce- 
vons, ce  qui  est  toujours  possible  dans  chaque  cas  par- 
Iticulier,  que  la  direction  de  la  droite  FL/  change,  sans 
que  cette  droite  cesse  d'être  tangente  à  la  surface  au 
!  point  L,  et  que,  d'après  cette  nouvelle  direction,  elle 
se  meuve  parallèlement  à  elle-même  en  touchant 
toujours  la  surface  ;  elle  engendrera  par  son  mouvement 
une  autre  surface  cylindrique  circonscrite  à  la  surface, 
qui  la  touchera  dans  une  autre  ligne  de  contact  à 
double  courbure;  cette  nouvelle  courbe  de  contact 
passera  encore  par  le  point  L,  et  sa  tangente  en  ce 
point  fera,  avec  la  nouvelle  direction  de  la  droite  gêné- 


48  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

ratrice,  un  angle  différent  du  premier  angle  FLU.  Con 
cevons  enfin  qu'on  ait  ainsi  fait  varier  la  direction  d 
la  droite  génératrice,  jusqu'à  ce  que  la  surface  cylin 
drique,  engendrée  par  cette  droite,  touche  la  surfac 
dans  une  courbe  de  contact,  dont  la  tangente  en  1 
soit  perpendiculaire  à  la  droite  génératrice. 

Cela  posé,  soit  {fig.  l\è)  une  surface  courb 
quelconque,  sur  laquelle  on  considère  d'abord  ui 
certain  point  L;  soit  FLJ  la  droite  tangente  à  l 
surface  en  L,  dont  la  direction  soit  prise  de  manier 
que,  si  on  la  fait  mouvoir  parallèlement  à  elle-mêm 
et  sans  qu'elle  cesse  de  toucher  la  surface,  elle  engendr 
une  surface  cylindrique  EFGHJK,  qui  touche  la  sur 
face  en  une  courbe,  dont  la  tangente  en  L  soit  perpen 
diculaire  à  FLJ.  La  ligne  de  contact  de  la  surfac 
cylindrique  avec  la  surface  proposée  sera  une  courb 
à  double  courbure;  mais  au  point  L  son  élément  s 
confondra  avec  l'élément  LN  de  la  section  GNLD  fait 
dans  la  surface  cylindrique  par  un  plan  perpendicu 
laire  à  la  droite  génératrice  FLJ.  Les  deux  extré 
mités  L,  N,  de  cet  élément,  se  trouvant  sur  la  ligne  d 
contact,  seront  en  même  temps  sur  les  deux  surfaces 
et  si  par  ces  points  L,  N  on  mène  deux  normales  Lr 
NP  à  la  surface  cylindrique,  elles  seront  aussi  noi 
maies  à  la  courbe.  Or  ces  deux  normales  sont  dans  1 
même  plan  perpendiculaire  à  la  génératrice  de  la  sur 
face  cylindrique,  et  doivent  se  rencontrer  quelque  par 
en  un  point  P,  qui  est  le  centre  de  courbure  de  l'arc  LN 
donc  si  sur  une  surface  courbe  quelconque  on  pren» 
deux  points  L,  N,  qui  soient  placés  sur  la  ligne  d 
contact  de  cette  surface  avec  la  surface  cylindriqu 
dont  la  droite  génératrice  soit  perpendiculaire  à  l'élé 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  49 

ment  LN  de  cette  ligne  de  contact,  les  normales  à  la 
surface  courbe,  menées  par  ces  deux  points,  seront 
dans  un  même  plan,  et  se  rencontreront  en  un  point 
qui  sera  le  centre  de  la  courbure  de  la  surface,  dans  le 
sens  du  plan  qui  contient  les  deux  normales. 


121.  Si  sur  la  droite  FLJ  on  prend  un  point  m  infi- 
niment proche  du  point  L,  et  si  par  ce  point  m  on 
conçoit  une  normale  à  la  surface  cylindrique,  cette 
normale  sera  parallèle  à  LP  et  ne  sera  pas  normale  à 
la  surface  courbe.  Mais  si  l'on  conçoit  que  dans  le  plan 
de  la  courbe  ALMB,  déterminé  par  les  droites  FLJ 
et  LP,  la  droite  FLJ  se  meuve  sans  cesser  de  toucher 
la  surface  et  prenne  la  position  infiniment  voisine  fi, 
de  manière  qu'elle  touche  la  surface  dans  un  point  M 
infiniment  voisin  du  point  L,  et  si  l'on  suppose  que 
cette  droite  /Mi  se  meuve  parallèlement  à  elle- 
même  en  touchant  toujours  la  surface,  elle  engendrera 
une  nouvelle  surface  cylindrique  efghik,  infiniment 
peu  différente  de  la  première,  tant  pour  la  forme  que 
pour  la  position,  et  la  ligne  de  contact  de  cette  nou- 
velle surface  cylindrique  passera  par  le  point  M.  La  nor- 
male MQ  à  cette  surface  cylindrique,  au  point  M,  sera 
aussi  normale  à  la  surface  courbe;  elle  sera  dans  un 
même  plan  avec  la  première  normale  LP,  puisqu'elles 
seront  toutes  deux  dans  le  plan  déterminé  par  les 
droites  FLJ,  /Mi;  et  ce  plan  sera  perpendiculaire  à 
celui  qui  passe  par  les  normales  LP,  NP.  Les  deux 
normales  LP  et  MQ  se  rencontreront  donc  en  un  cer- 
tain point  R,  qui  sera  le  centre  de  courbure  de 
l'arc  LM,  et  par  conséquent  le  centre  de  la  courbure 
MONGE.  —  II.  A 


5o  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


de  la  surface  dans  le  sens  du  plan  qui  passe  par  les 
droites  FLJ,  /Mi. 

On  voit  donc  que  si,  considérant  sur  une  surface 
courbe  quelconque  un  point  quelconque  L,  on  conçoit 
une  normale  à  la  surface  en  ce  point,  on  peut  tou  ours 
passer,  suivant  deux  directions  différentes,  à  un  autre 
point  M  ou  N,  pour  lequel  la  nouvelle  normale  soit 
dans  un  même  plan  avec  la  première,  et  que  ces  deux 
directions  étant  dans  des  plans  no  maux  rectangu- 
laires entre  eux,  elles  sont  elles-mêmes  à  angles  droits 
sur  la  surface  courbe. 

122.  Actuellement,  ces  deux  directions  sont  en 
général  les  seules  pour  lesquelles  cet  effet  puisse  avoir 
lieu;  c'est-à-dire,  que  si  sur  la  surface  courbe  on  passe 
dans  toute  autre  direction  à  un  point  0,  infiniment 
voisin  du  point  L,  et  que  si  par  ce  point  on  mène  à  la 
surface  la  normale  OQ,  cette  normale  ne  sera  pas  dans 
un  même  plan  avec  la  normale  LP,  et  ne  pourra  par 
conséquent  la  rencontrer. 

En  effet,  concevons  que  la  seconde  surface  cylin- 
drique ait  été  inclinée  de  telle  manière  que  sa  ligne 
de  contact  avec  la  surface  passe  par  le  point  0; 
l'arc  OM  de  cette  ligne  de  contact  se  confondra  avec 
l'arc  de  la  section  G'OMD'  perpendiculaire  à  la  surface 
cylindrique  ;  les  deux  i  ormaîes  en  0  et  en  M  à  la 
surface  seront  aussi  normales  à  la  surface  cylin- 
drique, elles  seront  dans  le  plan  de  la  section  perpen- 
diculaire ;  elles  se  rencontreront  quelque  part  en 
un  point  Q  :  mais  la  normale  OQ  ne  rencontrera  pas 
la  normale  LP;  car  pour  que  ces  deux  normales  se 
rencontrassent,  il  faudrait  que  le  point  Q  de  la  nor- 


'i  GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  5l 

I     maie  coïncidât  avec  le  point  R,  dans  lequel  cette  nor- 
I      maie  rencontre  LP;  ce  qui  en  général  n'arrive  pas, 
r      parce  que  cela  suppose  une  égalité  entre  les  courbures 
^      des  deux  arcs  LM  et  LN,  et  ce  qui  ne  peut  avoir  lieu 
que  pour  certains  points  de  quelques  surfaces  courbes. 
j      Par  exemple,  la  courbure  de  la  surface  de  la  sphère 
étant  la  même  dans  tous  les  sens,  suivant  quelgue 
^'     direction  que  l'on  passe  d'un  de  ses  points  à  un  autre 
infiniment  proche,  les  normales  menées  par  ces  deux 
points  sont  toujours  dans  un  même  plan;  et  cette 
surface  est  la  seule  pour  laquelle  cette  propriété  con- 
vienne à  tous  les  points.  Dans  les  surfaces  de  révolu- 
tion pour  lesquelles   a  courbe  génératrice  coupe  l'axe 
perpendiculairement,  la  courbure  au  sommet  est  encore 
la  même  dans  tous  les  sens,  et  deux  normales  consé- 
cutives sont  toujours  dans  un  même  plan;  mais  cette 
propriété  n'a  lieu  que  pour  le  sommet.  Enfin  il  existe 
(les  surfaces  courbes,  dans  lesquelles  cette  propriété 
a  lieu  pour  une  suite  de  points  qui  forment  une  cer- 
taine courbe  sur  la  surface  :  mais  cola  n'arrive  que  pour 
les  points  de  cette  courbe;  et  pour  tous  les  autres 
points  de  la  surface,  la  nouvelle  normale  ne  peut  ren- 
contrer la  première,  à  moins  que  le  point  de  la  surface 
par  lequel  elle  passe  ne  soit  pris  suivant  l'une  des  deux 
directions  que  nous  avons  définies. 

123.  Il  suit  de  là  qu'en  général  une  surface  quel- 
conque n'a,  dans  chacun  de  ces  points,  que  deux  cour- 
bures ;  que  chacune  de  ces  courbures  a  son  centre  par- 
liculier,  son  rayon  particulier,  et  que  les  deux  arcs  sur 
lesquels  se  prennent  ces  deux  courbures  sont  à  angles 
droits  sur  la  surface.  Les  cas  particuliers  pour  lesquels. 


5';!  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE  SCIENTIFIQUE. 

comme  dans  la  sphère,  et  dans  les  sommets  de  surfaces 
de  révolution,  deux  normales  consécutives  quelconques 
se  rencontrent  ne  sont  pas  une  exception  à  cette  pro- 
position. Il  résulte  seulement  que  pour  ces  cas  les  deux 
courbures  sont  égales  entre  elles,  et  que  les  direclions 
suivant  lesquelles  on  doit  les  estimer  sont  indiffé- 
rentes. 


124.  Quoique  les  deux  courbures  d'ime  surface 
courbe  soient  assujéties  l'une  à  l'autre  par  la  loi  de 
la  génération  de  la  surface,  elles  éprouvent  d'un  point 
de  la  surface  à  l'autre  des  variations  qui  peuvent 
être  dans  le  même  sens  ou  dans  des  sens  contraires. 
Nous  ne  pouvons  pas  entrer,  à  cet  égard,  dans  de  très 
grands  détails,  qui  deviendraient  beaucoup  moins 
pénibles  par  le  secours  de  l'Analyse;  nous  nous  conten- 
terons d'observer  que  pour  certaines  surfaces,  telles 
que  les  sphéroïdes,  dans  chaque  point  les  deux  cour- 
bures sont  dans  le  même  sens,  c'est-à-dire  qu'elles 
tournent  leurs  convexités  du  même  côté;  que  pour 
quelques  autres  surfaces,  dans  certains  points,  les 
deux  courbures  sont  dans  des  sens  opposés,  c'est-à- 
dire  que  l'une  présente  sa  concavité  et  l'autre  sa  con- 
vexité du  même  côté  (la  surface  de  la  gorge  d'une 
poulie  est  dans  ce  cas);  que  pour  quelques  autres  sur- 
faces dans  tous  les  points,  les  deux  courbures  sont  dans 
des  sens  opposés  (ia  surface  engendrée  par  le  mouve- 
ment d'une  ligne  droite,  assujétie  à  couper  toujours 
trois  autres  droites  données  arbitrairement  dans 
l'espace,  est  dans  ce  cas);  enfin  que  dans  une  surface 
particulière  ces  deux  courbures  opposées  sont,  pour 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  53 


chaque   point,   égales   entre   elles.   Cette   surface   est 
celle  dont  Taire  est  un  minimum. 

125.  Passons  maintenant  à  quelques  conséquences 
qui  suivent  des  deux  courbures  d'une  surface  courbe, 
et  qu'il  est  important  de  faire  connaître  aux  artistes. 

Soit  (fig.  /jg)  une  portion  de  surface  courbe 
quelconque,  sur  laquelle  nous  considérions  un 
point  L  pris  arbitrairement,  et  soit  conçue  la  normale 
à  la  surface  en  L.  Nous  venons  de  voir  que  l'on  peut 
passer,  suivant  deux  directions  différentes,  du  point  L 
à  un  autre  M  ou  L',  pour  lequel  la  nouvelle  normale 
rencontre  la  première,  et  que  ces  deux  directions  sont 
à  angles  droits  sur  la  surface.  Soient  donc  LM  et  LT/ 
ces  deux  directions  rectangulaires  en  L.  Du  point  M 
on  pourra  de  même  passer  dans  deux  directions  diffé- 
rentes à  un  autre  point  N  ou  M',  pour  lequel  la  nor- 
male rencontre  la  normale  en  M,  et  soient  MN,  MM' 
ces  deux  directions  rectangulaires  en  M.  En  opérant 
de  même  pour  le  point  N,  on  trouvera  les  deux  direc- 
tions NO  et  NN'  rectangulaires  en  N;  pour  le  point  0, 
on  aura  les  deux  directions  OP,  00',  et  ainsi  de  suite. 
La  série  des  points  L,  M,  N,  0,  P,  etc.,  pour  lesquels 
deux  normales  consécutives  sont  toujours  dans  un 
plan,  formera  sur  la  surface  courbe  une  ligne  courbe, 
qui  indiquera  perpétuellement  le  sens  d'une  des  deux 
courbures  de  la  surface,  et  cette  courbe  sera  une  ligne 
de  première  courbure,  qui  passera  par  le  point  L.  Si  l'on 
opère  pour  le  point  L',  comme  on  l'a  fait  pour  le 
point  L,  on  pourra  d'abord  passer,  suivant  deux  direc- 
tions rectangulaires,  à  un  nouveau  point  M'  ou  L", 
pour  lequel  la  nouvelle  normale  rencontre  la  normale 


54  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


en  L',  et  l'on  trouvera  de  même  une  nouvelle  série  de 
points  L',  M',  N',  0',  P^  etc.,  qui  formeront  sur  la 
surface  courbe  une  autre  ligne  de  première  courbure, 
qui  passera  par  le  point  L'.  En  opérant  de  même  pour 
la  suite  des  points  L",  L'%  U^\  . .  .,  trouvés  comme  L', 
L",  on  aura  de  nouvelles  lignes  de  première  courbure ... 
L"  M"  N"  0"  P",  L"  M'  W  0''  F'\  etc.,  qui  passeront 
par  les  points  respectifs  L",  L"\  L'^,  etc.,  et  qui  divi- 
seront la  surface  courbe  en  zones.  Mais  la  suite  des 
points  L,  L',  L",  L"\  etc.,  pour  lesquels  deux  normales 
consécutives  sont  encore  dans  un  plan,  formera  sur  la 
surface  courbe  une  autre  courbe  qui  indiquera  perpé- 
tuellement le  sens  de  l'autre  courbure  de  îa  surface, 
et  cette  courbe  sera  la  ligne  de  seconde  courbure;  M, 
M',  M",  M"',  etc.  formera  une  autre  ligne  de  seconde 
courbure,  qui  passera  par  le  point  M;  la  série  des 
points  N,  N',  N",  N''',  etc.  formera  une  nouvelle  ligne 
de  seconde  courbure  qui  passera  par  le  point  N,  el 
ainsi  de  suite,  et  toutes  les  lignes  de  seconde  courbure 
diviseront  la  surface  courbe  en  d'autres  zones.  Enfin 
toutes  les  lignes  de  première  courbure  couperont  à 
angles  droits  toutes  les  lignes  de  seconde  courbure,  et 
ces  deux  systèmes  de  lignes  courbes  diviseront  la  sur- 
face en  éléments  rectangulaires;  et  cet  effet  aura  lieu, 
non  seulement  si  ces  lignes  sont  infiniment  proches, 
comme  nous  l'avons  supposé,  mais  même  quand  celles 
d'un  même  système  seraient  à  des  distances  finies 
les  unes  des  autres.  Avant  que  d'aller  plus  loin,  nous 
allons  en  apporter  un  exemple,  avec  lequel  on  est  déjà 
familiarisé. 

126.  Si  l'on  coupe  une  surface  quelconque  de  révo- 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  55 

lution  par  une  suite  de  plans  menés  par  Taxe,  on  aura 
une  suite  de  sections  qui  seront  les  lignes  d'une  des 
courbures  de  la  surface;  car  pour  qu'une  courbe  soit 
ligne  de  courbure  d'une  surface,  il  faut  qu'en  chacun 
de  ses  points  l'élément  de  surface  cylindrique,  qui 
toucherait  la  surface  dans  l'élément  de  la  courbe,  ait 
sa  droite  génératrice  perpendiculaire  à  la  courbe;  or 
cette  condition  a  évidemment  lieu  ici,  non  seulement 
en  chaque  point  de  la  courbe  pour  un  élément  de  sur- 
face cylindrique  particulière,  ce  qui  serait  suffisant, 
mais  même  par  rapport  à  toute  la  courbe  pour  une 
même  surface  cylindrique.  De  plus,  si  l'on  coupe  la 
même  surface  de  révolution  par  une  suite  de  plans 
perpendiculaires  à  l'axe,  on  aura  une  seconde  suite 
de  sections,  qui  seront  toutes  circulaires  et  qui  seront 
les  lignes  de  l'autre  courbure;  car  si,  par  un  point  quel- 
conque d'une  de  ces  sections,  on  conçoit  la  tangente 
au  méridien  de  la  surface,  et  si  l'on  suppose  que  celle 
tangente  se  meuve  parallèlement  à  elle-même  pour 
engendrer  l'élément  d'une  surface  cylindrique  tangent 
à  la  surface  de  révolution,  l'élément  de  la  surface 
cylindrique  touchera  cette  surface  dans  l'arc  de  cercle, 
et  cet  arc  sera  perpendiculaire  à  la  droite  génératrice. 
Ainsi,  sur  une  surface  quelconque  de  révolution,  les 
lignes  de  courbure  sont,  pour  une  espèce  de  courbure, 
les  méridiens  de  la  surface,  et  pour  l'autre  courbure, 
les  parallèles;  et  il  est  évident  que  ces  deux  suites  de 
courbes  se  coupent  toutes  à  angles  droits  sur  la  surface. 

127.  Si  par  tous  les  points  d'une  des  lignes  de 
courbure  LMNOP  {fig.  49)  d'une  surface  courbe 
on  conçoit  des  normales  à  la  surface,  nous  avons  vu 


56  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

que  la  seconde  normale  rencontrera  la  première  en 
un  certain  point,  que  la  troisième  rencontrera  la 
seconde  en  un  autre  point,  et  ainsi  de  suite;  le  système 
de  ces  normales,  dont  deux  consécutives  sont  toujours 
dans  un  même  plan,  forme  donc  une  surface  déve- 
loppable,  qui  est  partout  perpendiculaire  à  la  surface 
proposée  et  qui  la  coupe  suivant  la  ligne  de  courbure. 
Cette  ligne  de  courbure  étant  elle-même  partout  per- 
pendiculaire aux  normales  qui  composent  la  surface 
développable  est  aussi  une  ligne  de  courbure  de  cette 
dernière  surface.  L'arête  de  rebroussement  de  la  sur- 
face développable,  arête  qui  est  formée  par  la  suite 
des  points  de  rencontre  des  normales  consécutives,  et 
à  laquelle  toutes  les  normales  sont  tangentes,  est  une 
des  développées  de  la  courbe  LMNOP;  elle  est  le  lieu 
des  centres  de  courbure  de  tous  les  points  de  cette 
courbe,  et  elle  est  aussi  celui  des  centres  d'une  des 
courbures  de  la  surface  pour  les  points  qui  sont  sur  la 
ligne  LMNOP.  Si  l'on  fait  la  même  observation  pour 
toutes  les  autres  lignes  de  courbure  de  la  même  suite, 
telles  que  V  M'  N'  0'  F',  L"  M"  W  0"  F",  etc.,  toutes 
les  normales  de  la  surface  courbe  pourront  être  re- 
gardées comme  composant  une  suite  de  surfaces  déve- 
loppables,  toutes  perpendiculaires  à  cette  surface,  et 
le  système  des  arêtes  de  rebroussement  de  toutes  les 
surfaces  développables  formera  une  surface  courbe 
qui  sera  le  lieu  de  tous  les  centres  d'une  des  courbures 
de  la  surface  proposée. 

Ce  que  nous  venons  de  remarquer  pour  une  des  deux 
courbures  de  la  surface  a  également  lieu  pour  l'autre. 
En  effet,  si  par  tous  les  points  L,  L',  h'\  h"',  ..., 
d'une  des  lignes  de  l'autre  courbure,  on   conçoit  des 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  57 

normales  à  la  surface,  ces  droites  seront  consécutive- 
ment deux  à  deux  dans  un  même  plan;  leur  système 
formera  une  surface  développable,  qui  sera  partout 
perpendiculaire  à  la  surface  proposée,  et  qui  la  ren- 
contrera dans  la  ligne  de  courbure  Lï/  L"  l"\  . . . 
qui  sera  elle-même  une  ligne  de  courbure  de  la  sur- 
face développable.  L'arête  de  rebroussement  de  cette 
dernière  surface  sera  le  lieu  des  centres  de  courbure 
de  la  ligne  LI/  U'  L'",  . . . ,  et  en  même  temps  celui  des 
centres  de  seconde  courbure  de  la  surface  proposée, 

pour  tous  les  points  de  la  ligne  LL'  h"  L"\ Il  en 

sera  de  même  pour  toutes  les  normales  menées  par  les 
points  des  autres  lignes  de  courbure  MM'  M''  M'",  . . ., 

N  N' N"  N"",    En  sorte  que  toutes  les  normales 

de  la  surface  courbe  proposée  pourront  être  regardées 
de  nouveau  comme  composant  une  seconde  suite  de 
surfaces  développables,  toutes  perpendiculaires  à  cette 
surface,  et  le  système  des  arêtes  de  rebroussement 
de  toutes  les  nouvelles  surfaces  développables  for- 
mera une  seconde  surface  courbe,  qui  sera  le  lieu  des 
centres  de  la  seconde  courbure  de  la  première. 

128.  Dans  quelques  cas  particuliers,  les  surfaces 
des  centres  des  deux  courbures  d'une  même  surface 
courbe  sont  distinctes,  c'est-à-dire  qu'elles  peuvent 
être  engendrées  séparément,  ou  qu'elles  ont  leurs 
équations  séparées.  On  en  a  un  exemple  dans  les  sur- 
faces de  révolution,  pour  lesquelles  une  de  ces  sur- 
faces se  réduit  à  l'axe  même  de  rotation,  et  pour 
lesquelles  l'autre  est  une  autre  surface  de  révolution 
engendrée  par  la  rotation  de  la  développée  plane  du 
méridien  autour  du  même  axe.  Mais  le  plus  souvent, 

/ 


58  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE.   • 

et  dans  le  cas  général,  ces  deux  surfaces  ne  sont  point 
distinctes,  elles  ne  peuvent  être  engendrées  séparé- 
ment; elles  ont  la  même  équation,  et  elles  sont  deux 
nappes  différentes  d'une  même  surface  courbe. 

129.  On  voit  donc  que  toutes  les  normales  d'une 
surface  courbe  peuvent  être  considérées  comme  les 
intersections  de  deux  suites  de  surfaces  développables 
telles,  que  chacune  des  surfaces  développables  ren- 
contre perpendiculairement  la  surface  proposée  et 
la  coupe  suivant  une  courbe,  qui  est  en  m.ême  temps 
ligne  de  courbure  de  cette  surface  et  ligne  de  courbure 
de  la  surface  développable,  et  que  chacune  des  sur- 
faces développables  de  la  première  suite  coupe  toutes 
celles  de  la  seconde  suite  en  ligne  droite  et  à  angles 
droits. 

130.  Voyons  actuellement  quelques  exemples  de 
l'utilité  dont  ces  généralités  peuvent  être  dans  cer- 
tains arts.  Le  premier  exemple  sera  pris  dans  l'Archi- 
tecture. 

Les  voûtes  construites  en  pierres  de  taille  sont  com 
posées  de  pièces  distinctes  auxquelles  on  donne  le 
nom  générique  de  Poussoirs.  Chaque  voussoir  a  plu- 
sieurs faces  qui  exigent  la  plus  grande  attention  dans 
l'exécution  :  i^  la  face  qui  doit  faire  parement  et  qui, 
devant  être  une  partie  de  la  surface  visible  de  la  voûte, 
doit  être  exécutée  avec  la  plus  grande  précision^  cette 
face  se  nomme  douelle;  2®  les  faces  par  lesquelles  les 
voussoirs  consécutifs  s'appliquent  les  uns  contre  les 
autres,  on  les  nomme  généralement  joints.  Les  joints 
exigent   aussi  la   plus   grande   exactitude   dans   leur 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  tnj 


exécution;  car  la  pression  se  transmettant  d'un  vous- 
soir  à  l'autre  perpendiculairement  à  la  surface  du 
joint,  il  est  nécessaire  que  les  deux  pierres  se  touchent 
par  le  plus  grand  nombre  possible  de  points,  afin  que 
>  pour  chaque  point  de  contact  la  pression  soit  la 
moindre,  et  que  pour  tous  elle  approche  le  plus  de 
l'égalité.  Il  faut  donc  que  dans  chaque  voussoir  les 
joints  approchent  le  plus  de  la  véritable  surface  dont 
ils  doivent  faire  partie;  et  pour  que  cet  objet  soit  plus 
facile  à  remplir,  il  faut  que  la  surface  des  joints  soit 
de  la  nature  la  plus  simple  et  de  l'exécution  la  plus 
susceptible  de  i)récision.  C'est  pour  cela  que  l'on  fait 
ordinairement  les  joints  plans,  mais  les  surfaces  de 
toutes  les  voûtes  ne  comportent  pas  cette  disposition, 
et  dans  quelques-unes  on  blesserait  trop  les  conve- 
nances dont  nous  parlerons  dans  un  moment,  si  l'on 
ne  donnait  pas  aux  joints  une  surface  courbe.  Dans  ce 
cas,  il  faut  clioibir  parmi  toutes  les  surfaces  courbes, 
qui  pourraient  d'ail 'eurs  satisfaire  aux  autres  condi- 
tions, celles  dont  la  génération  est  la  plus  simple  et 
dont  l'exécution  est  plus  susceptible  d'exactitude.  Or, 
de  toutes  les  surfaces  courbes,  celles  qu'il  est  plus 
facile  d'exécuter  sont  celles  qui  sont  engendrées  par 
le  mouvement  d'une  ligne  droite,  et  surtout  les  sur- 
faces développables;  ainsi,  lorsqu'il  est  nécessaire  que 
les  joints  des  voussoirs  soient  des  surfaces  courbes, 
on  les  compose,  autant  qu'il  est  possible,  de  surfaces 
développables. 

Une  des  principales  conditions  auxquelles  la  forme 
des  joints  des  voussoirs  doit  satisfaire,  c'est  d'être 
partout  perpendiculaires  à  la  surface  de  la  voûte  que 
ces  voussoirs  composent.  Car,  si  les  deux  angles  qu'un 


6o  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

même  joint  fait  avec  la  surface  de  la  voûte  étaient  sen- 
siblement inégaux,  celui  de  ces  angles  qui  excéderait 
l'angle  droit  serait  capable  d'une  plus  grande  résis- 
tance que  l'autre;  et  dans  l'action  que  deux  voussoirs 
consécutifs  exercent  l'un  sur  l'autre,  l'angle  plus  petit 
que  l'angle  droit  serait  exposé  à  éclater,  ce  qui,  au 
moins,  déformerait  la  voûte,  et  pourrait  même  altérer 
sa  solidité  et  diminuer  la  durée  de  l'édifice.  Lors  donc 
que  la  surface  d'un  joint  doit  être  courbe,  il  convient 
de  l'engendrer  par  une  droite  qui  soit  partout  perpen- 
diculaire à  la  surface  de  la  voûte  ;  et  si  l'on  veut  de  plus 
que  la  surface  du  joint  soit  développable,  il  faut  que 
toutes  les  normales  à  la  surface  de  la  voûte,  et  qui 
composent,  pour  ainsi  dire,  le  joint,  soient  consécuti- 
vement deux  à  deux  dans  un  même  plan.  Or  nous 
venons  de  voir  que  cette  condition  ne  peut  être 
remplie,  à  moins  que  toutes  les  normales  ne  passent 
par  une  même  ligne  de  courbure  de  la  surface  de  la 
voûte;  donc,  si  les  surfaces  des  joints  des"  voussoirs 
d'une  voûte  doivent  être  développables,  il  faut  néces- 
sairement que  ces  surfaces  rencontrent  celle  de  la 
voûte  dans  ses  lignes  de  courbure. 

D'ailleurs,  avec  quelque  précision  que  les  voussoirs 
d'une  voûte  soient  exécutés,  leur  division  est  toujours 
apparente  sur  la  surface;  elle  y  trace  des  lignes  très 
sensibles,  et  ces  lignes  doivent  être  soumises  à  des  lois 
générales  et  satisfaire  à  des  convenances  particulières, 
selon  la  nature  de  la  surface  de  la  voûte.  Parmi  les 
lois  générales,  les  unes  sont  relatives  à  la  stabilité, 
les  autres  à  la  durée  de  l'édifice;  de  ce  nombre  est  la 
règle  qui  prescrit  que  les  joints  d'un  même  voussoir 
soient  rectangulaires  entre  eux,  par  la  même  raison 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  6l 

qu'ils  doivent  être  eux-mêmes  perpendiculaires  à  la 
surface  de  la  voûte.  Aussi  les  lignes  de  division  des 
voussoirs  doivent  être  telles,  que  celles  qui  divisent 
la  voûte  en  assises  soient  toutes  perpendiculaiies  à 
celles  qui  divisent  une  même  assise  en  voussoirs.  Quant 
aux  convenances  particulières,  il  y  en  a  de  plusieurs 
sortes,  et  notre  objet  n'est  pas  ici  d'en  faire  l'énuméra- 
tion;  mais  il  y  en  a  une  principale,  c'est  que  les  lignes 
de  division  des  voussoirs  qui,  comme  nous  venons  de 
le  voir,  sont  de  deux  espèces,  et  qui  doivent  se  ren- 
contrer toutes  perpendiculairement,  doivent  aussi 
])orter  le  caractère  de  la  surface  à  laquelle  elles  appar- 
tiennent. Or,  il  n'existe  pas  de  ligne  sur  la  surface 
courbe  qui  puisse  remplir  en  même  temps  toutes  ces 
conditions,  que  les  deux  suites  de  lignes  de  courbures, 
et  elles  les  remplissent  complètcmont.  Ainsi  la  division 
d'une  voûte  en  voussoirs  doit  donc  toujours  être  faite 
par  des  lignes  de  courbure  de  la  surface  de  la  voûte, 
et  les  joints  doivent  être  des  portions  de  surfaces  déve- 
loppables  formées  par  la  suite  des  normales  à  la  sur- 
face qui,  considérées  consécutivement,  sont  deux  à 
deux  dans  un  même  plan;  en  sorte  que,  pour  chaque 
voussoir,  les  surfaces  des  quatre  joints,  et  celle  de  la 
voûte,  soient  toutes  rectangulaires. 

Avant  la  découverte  des  considérations  géomé- 
triques sur  lesquelles  tout  ce  que  nous  venons  de  dire 
est  fondé,  les  artistes  avaient  un  sentiment  confus  des 
lois  auxquelles  elles  conduisent,  et,  dans  tous  les  cas, 
ils  avaient  coutume  de  s'y  conformer.  Ainsi,  par 
exemple,  lorsque  la  surface  de  la  voûte  était  de  révo- 
lution, soit  qu'elle  fût  en  sphéroïde,  soit  qu'elle  fût 
en  berceau  tournant,  ils  divisaient  ses  voussoirs  par 


62  LES   MAITRES   DE    LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

des  méridiens  et  par  des  parallèles,  c'est-à-dire  par 
les  lignes  de  courbures  de  la  surface  de  la  voûte. 

Les  joints  qui  correspondaient  aux  méridiens  étaient 
des  plans  menés  par  l'axe  de  révolution;  ceux  qui 
correspondaient  aux  parallèles  étaient  des  surfaces 
coniques  de  révolution  autour  du  même  axe;  et  ces 
deux  espèces  de  joints  étaient  rectangulaires  entre 
eux  et  perpendiculaires  à  la  surface  de  la  voûte.  Mais 
lorsque  les  surfaces  des  voûtes  n'avaient  pas  une  géné- 
ration aussi  simple,  et  quand  leurs  lignes  de  courbure 
ne  se  présentaient  pas  d'une  manière  aussi  marquée, 
comme  dans  les  voûtes  en  sphéroïdes  allongés  et  dans 
un  grand  nombre  d'autres,  les  artistes  ne  pouvaient 
plus  satisfaire  à  toutes  les  convenances,  et  ils  sacri- 
fiaient, dans  chaque^  cas  particulier,  celles  qui  leur 
présentaient  les  difficultés  les  plus  grandes. 

Il  serait  donc  convenable  que  dans  chacune  des 
écoles  de  Géométrie  descriptive  établie  dans  les  dépar- 
tements, le  professeur  s'occupât  de  la  détermination 
et  de  la  construction  des  lignes  de  courbure  des  sur- 
faces employées  ordinairement  dans  les  arts,  afin  que, 
dans  le  besoin,  les  artistes,  qui  ne  peuvent  pas  con- 
sacrer beaucoup  de  temps  à  de  semblables  recherches, 
pussent  les  consulter  avec  fruit  et  profiter  de  leurs 
résultats. 


131.  Le  second  exemple  que  nous  rapporterons  sera 
pris  dans  l'art  de  la  gravure. 

Dans  la  gravure,  les  teintes  des  différentes  parties 
de  la  surface  des  objets  représentés  sont  exprimées 
par  des  hachures   que   l'on   fait  d'autant  plus   fortes 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  63 


OU  d'autant  plus  rapprochées,  que  la  teinte  doit  être 
plus  obscure. 

Lorsque  la  dislance  à  laquelle  la  gravure  doit  être 
vue  est  assez  jurande  pour  que  les  traits  individuels 
de  la  hachure  ne  soient  pas  aporçiis,  le  genre  de  la 
hachure  est  à  peu  près  indifférent,  et,  quel  que  soit 
le  contour  de  ses  traits,  l'artiste  peut  toujours  les 
forcer  et  les  multiplier  de  manière  à  obtenir  la  teinte 
qu'il  désire  et  à  produire  l'effet  demandé.  Mais, 
et  c'est  le  cas  le  plus  ordinaire,  quand  la  gravure  est 
destinée  à  être  vue  d'assez  près  pour  que  les  contours 
des  traits  de  la  hachure  soient  aperçus,  la  forme  de 
ces  contours  n'est  plus  indiiïérenîje.  Pour  chaque 
objet,  et  pour  chaque  partie  de  la  surface  d'un  objet, 
il  y  a  des  contours  de  hachures  plus  propres  que  tous 
les  autres  à  donner  une  idée  de  la  courbure  de  la  sur- 
face; ces  contours  particuliers  sont  toujours  au  nombre 
de  deux,  et  quelquefois  les  graveurs  les  emploient  tous 
deux  à  la  fois,  lorsque,  pour  forcer  plus  facilement 
leurs  teintes,  ils  croisent  les  hachures.  Ces  contoiivs, 
dont  les  artistes  n'ont  encore  qu'un  sentiment  confus, 
sont  les  projections  des  lignes  de  courbure  de  la  sur- 
face qu'ils  veulent  exprimer.  Comme  les  surfaces  de 
la  plupart  des  objets  ne  sont  pas  susceptibles  de  défi- 
nition rigoureuse,  leurs  lignes  de  courbure  ne  sont  pas 
de  nature  à  être  déterminées,  ni  par  le  calcul,  ni  par 
des  constructions  graphicjues.  Mais  si,  dans  leur  jeune 
âge,  les  artistes  avaient  été  exercés  à  rechercher  les 
lignes  de  courbure  d'un  grand  nombre  de  surfaces 
différentes  et  susceptibles  de  définition  exacte,  ils 
seraient  plus  sensibles  à  la  forme  de  ces  lignes  et  à  leur 
position,  même  pour  1rs  objets  moins  déterminés  ;  ils  les 


64  LES   MAITRES    DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

saisiraient  avec  plus  de  précision,  et  leurs  ouvrages 
auraient  plus  d'expression. 

Nous  n'insisterons  pas  sur  cet  objet  qui  ne  présente 
peut-être  que  le  moindre  des  avantages  que  les  arts 
et  l'industrie  retireraient  de  l'établissement  d'une 
école  de  Géométrie  descriptive  dans  chacune  des  prin- 
cipales villes  de  France. 


THÉORIE    DES    OMBRÉS 


l)K  LA  PEUSPECTIVE 


(Extrait  des  Leçons  inédites  de  M.  Monge^ 
par  iM.    Brissov,   ingénieur  des  Ponts  et  Chaussées.) 


132.  Après  avoir  exposé  les  principes  généraux  à 
l'aide  desquels  on  résout  les  différentes  questions 
qu'embrasse  la  Géométrie  descriptive,  il  est  conve- 
nable d'en  faire  connaître  quelques  applications.  Nous 
nous  proposons  de  nous  occuper  d'abord  de  la  déter- 
mination des  ombres  dans  les  dessins,  et  ensuite  de  la 
perspective. 

Dans  une  école  destinée  à  répandre  les  méthodes  de 
la  Géométrie  descriptive,  il  serait  convenable  que  les 
élèves  commençassent  les  applications  de  ces  mé- 
thodes par  l'étude  de  la  coupe  des  pierres  et  de  la 
charpente.  La  correction  rigoureuse  des  épures,  que 
comporte  ce  genre  de  recherches,  accoutume  l'esprit 
et  la  main  à  plus  de  précision;  les  problèmes  qui  se 
présentent  sont  plus  variés  en  général  et  offrent  plus 
d'exercice  à  la  sagacité.  Mais  dans  un  cours  spéciale- 
ment consacré  à  la  Géométrie  descriptive  propre- 
MONGK.  —  II.  5 


66  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

ment  dite,  il  est  naturel  de  prendre  pour  premier  objet 
d'application  la  Théorie  des  Ombres,  qui  doit  être 
regardée  comme  le  complément  de  cette  science. 

On  a  dit  que  la  Géométrie  descriptive  doit  être  envi- 
sagée sous  deux  points  de  vue.  Sous  le  premier,  on  la 
considère  comme  un  moyen  de  recherches  pour  arriver, 
avec  précision,  à  des  résultats  dont  on  a  besoin;  et 
c'est  ainsi  que  l'emploient  la  coupe  des  pierres  et  la 
charpente.  Sous  le  second,  elle  est  simplement  un 
moyen  de  représenter  les  objets;  et  dans  ce  cas,  la 
détermination  des  ombres  est  pour  elle  un  auxiliaire 
avantageux. 

Les  personnes  qui  sont  au  courant  des  méthodes 
de  cette  science  savent  qu'une  projection  seule  ne 
sufFit  pas  pour  définir  un  objet;  qu'il  faut  nécessaire- 
ment deux  projections,  parce  qu'il  y  a  toujours  sur  un 
plan  une  des  dimensions  qui  manque,  mais  qu'au 
moyen  de  deux  projections,  les  trois  dimensions  se 
trouvent  déterminées.  Lors  donc  que  l'on  considère 
la  description  d'un  objet  faite  complètement  au  moyen 
de  ses  deux  projections,  on  doit  comparer  la  projection 
horizontale  avec  la  projection  verticale  ;  et  c'est  de 
cette  perpétuelle  comparaison  que  l'on  déduit  la  con- 
naissance de  la  forme  de  l'objet  propose. 

Quoique  la  méthode  des  projections  soit  facile  et 
qu'elle  ne  soit  pas  dépourvue  d'un  genre  particulier 
d'élégance,  cependant  cette  obligation,  de  comparer 
sans  cesse  deux  projections  l'une  à  l'autre,  est  une 
fatigue  qu'on  peut  diminuer  considérablement  par 
l'indication  des  ombres. 

Supposons,  en  effet,  que  l'on  ait  une  projection 
horizontale,  comprenant  toutes  les  dimensions  en  Ion- 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  ()7 


gueur  et  en  largeur,  mais  qui  ne  détermine  en  rien  les 
dimensions  en  hauteur;  si  l'on  admet  que  les  corps 
soient  éclairés  d'une  manière  bien  connue  (et  il  con- 

;  nt  d'adopter  en  général  la  manière  la  plus  natu- 
nlle,  celle  avec  laquelle  nous  sommes  le  plus  fami- 
liarisés), par  des  rayons  de  Uimière  parallèles  entre  eux, 
par  exemple,  ces  corps  vont  porter  ombre  les  uns  sur 
les  autres  et  sur  le  plan  horizontal  au-dessus  duquel 
ils  sont  placés;  et  par  le  moyen  de  l'étendue  des 
ombres  et  de  leurs  formes,  on  jugera  immédiatement 
des  dimensions  verticales.  Ainsi,  la  direction  des 
rayons  de  lumière  étant  connue,  on  n'a  pas  besoin  de 
deux  projections  :  une  seule,  avec  le*  tracé  des  ombres, 
donnera  une  idée  complète  de  l'objet  que  l'on  consi- 
dère; et  si  l'on  a  la  projection  horizontale  et  la  pro- 
jection verticale,  l'une  et  l'autre  avec  les  ombres  cons- 
l'-uites,  ces  deux  projections  seront  plus  aisées  à  lire, 
montreront  plus  facilement  l'objet  que  si  l'on 
j l'avait  que  les  projections  nues  et  sans  ombres. 

Ainsi,  pour  tous  les  arts  où  il  s'agit  de  représenter 
des  objets,  où  la  Géométrie  descriptive  n'est  pas  em- 
ployée comme  moyen  de  recherches,  mais  d'expo- 
sition, la  détermination  des  ombres  est  avantageuse 
et  rend  plus  parfaite  la  représentation  que  l'on  se  pro- 
pose de  tracer. 

La  détermination  des  ombres  comprend  deux  parties 
distinctes,  l'une  est  la  description  graphique  du  con- 
tour des  ombres,  l'autre  est  la  recherche  de  l'inten- 
sité des  teintes  à  attribuer  à  chaque  partie  des  sur- 
faces qui  reçoivent  ces  ombres. 

Nous  nous  occuperons  d'abord  de  la  première  partie, 
de  celle  qui  est  relative  à  la  description  graphique. 


68  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


DE  LA  DESCRIPTION  GRAPHIQUE  DES  OMBRES. 

133.  La  théorie  des  ombres  est  entièrement  fondée 
sur  un  phénomène  que  tout  le  monde  connaît,  c'est 
que  la  lumière  se  propage  en  ligne  droite.  Nous  sommes 
si  accoutumés  à  cotte  proposition,  que  toutes  les  fois 
qu'on  cherche  à  vérifier  si  une  ligne  est  droite,  on  la 
compare  à  un  rayon  de  lumière.  Veut-on  s'assurer 
qu'une  règle  est  droite,  on  la  compare,  dans  toute  sa 
longueur,  avec  le  rayon  de  lumière  passant  par  ses 
deux  extrémités;,  cherche-t-on  à  savoir  si  une 
rangée  d'arbres  est  alignée,  on  se  place  de  manière 
que  le  rayon  de  lumière  qui  vient  d'une  extrémité  de 
cette  rangée  jusqu'à  l'œi!  passe  le  long  des  arbres, 
et  si  tous  sont  placés  exactement  le  long  de  ce  rayon, 
on  reconnaît  qu'ils  sont  parfaitement  alignés. 

Nous  admettons  donc,  comme  principe,  que  la  lu- 
mière se  répand  en  ligne  droite.  Il  faut  cependant 
observer  que  cette  proposition  n'est  rigoureusement 
vraie  que  quand  le  milieu  dans  lequel  la  lumière  se 
meut  est  d'une  densité  uniforme;  mais  dans  les  appli- 
cations aux  arts  que  nous  avons  ici  uniquement  en 
vue,  on  a  rarement  besoin  de  considérer  les  rayons  de 
lumière  comme  prolongés  à  une  grande  distance,  et 
traversant  des  milieux  de  densités  sensiblement  diffé- 
rentes :  il  nous  sera  donc  permis  de  supposer  les  mi- 
lieux uniformes  et  les  rayons  de  lumière  rigoureuse- 
ment  en  ligne   droite. 

Nous  distinguerons  deux  cas  :  celui  où  l'espace  est 
éclairé  par  un  point  lumineux  unique  et  celui  où  il  est 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  69 


éclairé  par  un  corps  lumineux  de  dimensions  finies;  et 
nous  considérerons  d'abord  le  premier  cas. 

Le  point  lumineux  lance  dans  tous  les  sens  des 
rayons  de  lumière,  dont  l'ensemble  occupe  entière- 
ment l'espace,  si  aucun  corps  ne  s'offre  pour  les  arrêter 
dans  leur  direction  :  il  n'en  sera  pas  de  même  s'il  se 
trouve  un  corps  opaque,  c'est-à-dire  qui  ne  soit  pas 
pénétrable  aux  rayons  de  la  lumière,  qui  les  arrête  ou 
les  réfléchisse  en  tout  ou  en  partie;  les  rayons  qui  ne 
le  rencontreront  pas  continueront  de  se  répandre 
dans  l'espace;  mais  ceux  sur  la  direction  desquels  il 
est  placé  seront  arrêtés  et  ne  s'étendront  pas  dans  la 
partie  de  l'espace  qui  est  au  delà,  et  qui,  par  l'inter- 
position du  corps,  sera  ainsi  privée  de  lumière. 

Concevez  une  surface  conique  ayant  son  sommet  au 
point  lumineux  et  enveloppant  le  corps  opaque,  et 
supposez-la  prolongée  indéfiniment;  elle  sera  au  delà 
du  ci^rps  opaque,  la  limite  de  la  partie  de  l'espace  dans 
laquelle  pénètrent  les  rayons  envoyés  par  le  point 
lumineux  et  de  celle  où  il  ne  saurait  en  arriver  aucun. 
Cette  dernière  partie,  privée  de  lumière  par  l'interpo- 
sition du  corps  opaque,  est  ce  qu'on  appelle  Vomhre 
(le  ce  corps;  telle  est  du  moins  la  définition  de  ce  qu'on 
entend  par  le  mot  ombre,  lorsqu'en  parlant  d'une 
éclipse  de  Lune,  par  exemple,  on  dit  que  la  Lune  entre 
dans  l'ombre  de  la  Terre.  Le  Soleil  est  le  corps  lumi- 
neux duquel  les  rayons  parlent  et  se  répandent  dans 
toutes  les  directions;  la  Terre  est  le  corps  opaque  qui 
intercepte  une  portion  de  ces  rayons;  et  deriière  elle, 
par  rapport  au  Soleil,  il  se  trouve  une  partie  de  l'espace 
privée  de  lumière.  Tant  que  la  Lune  est  hors  de  cette 
partie,  elle  est  éclairée  et  renvoie  de  la  lumière,  elle 


LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 


est  visible;  mais  du  moment  qu'elle  y  entre,  elle  ne 
reçoit  plus  de  lumière,  n'en  renvoie  plus  et  devient 
invisible. 

Dans  le  langage  ordinaire  toutefois,  ce  n'est  pas  là 
ce  qu'on  entend  le  plus  souvent  par  le  mot  ombre, 
lorsque  par  exemple  en  se  promenant  au  Soleil  on 
remarque  que  les  ombres  sont  courtes  à  midi.  Dans 
celle  acception,  l'ombre  n'est  point  l'espace  privé  de 
lumière  par  l'interposition  d'un  corps  qui  arrête  une 
partie  des  rayons  lancés  par  le  point  lumineux,  mais 
c'est  la  projection  de  cet  espace  sur  la  surface  qui  la 
reçoit;  c'est  dans  ce  dernier  sens  que  nous  emploierons 
habituellement  ce   mot. 

Supposons  que  le  point  lumineux  soit  à  une  distance 
infmie;  les  rayons  de  lumière  qui  viendront  de  là 
jusqu'à  nous  seront  parallèles  entre  eux,  à  peu  près 
comme  nous  le  paraissent  ceux  du  Soleil.  Dans  cette 
hypothèse,  à  laquelle  nous  nous  arrêterons  d'abord, 
on  peut  considérer  deux  cas,  celui  dans  lequel  le  corps 
opaque,  qui  porte  ombre,  est  terminé  par  des  surlaees 
planes,  et  par  conséquent  par  des  arêtes  rectilignes  et 
par  des  sommets  d'angles  solides,  et  celui  où  il  est  ter- 
miné par  des  surfaces  arrondies.  Nous  commencerons 
par  nous  occuper  du  premier  qui  est  extrêmement 
simple. 

Si  le  corps  qui  reçoit  la  lumière  et  qui  porte  ombre 
est  terminé  par  des  faces  planes,  on  conçoit  aisément 
qu'une  partie  de  ces  faces  est  éclairée,  cpie  Tautre  est 
obscure,  et  que  la  ligne  qui,  sur  ce  corps,  sépare  la 
partie  éclairée  de  celle  qui  ne  l'est  pas  est  formée  par 
l'ensemble  des  arêtes  rectilignes  d'intersection  des 
faces  obscures  et  des  faces  éclairées;  cette  ligne  est 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  71 

facile  à  trouver,  et  c'est  elle  qui  détermine  le  contour 
de  l'ombre  cherchée.  Si  l'on  conçoit  que  le  corps  opaque 
vienne  à  disparaître,  mais  que  cette  même  ligne  con- 
tinue de  subsister,  et  qu'on  lui  suppose  une  épaisseur 
sensible,  l'ombre  de  cette  ligne,  tracée  sur  la  surface 
qui  doit  la  recevoir,  sera  le  contour  de  l'ombre  du 
corps.  On  voit  que  dans  le  cas  que  nous  considérons, 
le  problème  se  réduit  à  trouver  l'ombre  de  certaines 
lignes  droites  connues  de  position. 

Pour  fixer  les  idées  et  rendre  ce  qui  précède  plus 
sensible,  supposons  que  le  corps  qui  porte  ombre 
soit  le  parallélépipède  ABCD ahcd  (fi g.  5o),  que 
la  direction  des  rayons  de  lumière,  parallèles  entre  eux, 
soit  indiquée  par  L/,  et  que  le  plan  MN  soit  la  surface 
qui  doit  recevoir  l'ombre.  On  juge  immédiatement, 
d'après  la  direction  des  rayons  de  lumière,  que  les 
faces  ABCD,  ABa/>,  AD  ad  sont  éclairées,  et  que  les 
faces  DCdc,  CBc6  et  abcd  ne  le  sont  pas;  que  les 
arêtes  DG,  CB,  B  b,  ba^  ad  et  dD  sont  les  limites  de  la 
partie  éclairée  et  de  la  partie  obscure.  Les  ombres  D'C, 
G'B',  h'b',  b'a',  a'd'  et  d'D'  de  ces  six  arêtes,  sur  le 
plan  MN,  forment  le  contour  ou  les  limites  de  l'ombre 
du  parallélépipède;  les  ombres  des  six  autres  arêtes, 
tombant  dans  l'intérieur  de  l'aire  enveloppée  par  ce 
contour,  sont  confondues  dans  l'ombre  totale  du  corps 
proposé. 

En  général,  quand  il  s'agit  de  corps  terminés  par  des 
surfaces  planes,  les  arêtes  limites,  ou  qui  séparent  les 
faces  éclairées  des  faces  obscures,  se  distinguent  immé- 
diatement ou  sont  faciles  à  déterminer;  et  plus  tard 
nous  indiquerons  un  moyen  simple  de  les  reconnaître 
sûrement,  si  dans  quelques  circonstances  leur  position 


72  LES   MAITRES   DE    LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE. 


Fi^    ^o 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE. 


pouvait  laisser  de  rincerliliide.  La  question  se  borne 
donc,  comme  nous  l'avons  déjà  dit,  à  trouver  l'ombre 
d'un  certain  assemblage  de  lignes  droites  connues  de 
position. 

Cherchons  en  premier  lieu  l'ombre  d'une  de  ces 
droites.  Nous  observerons  que  le  corps  qui  porte 
ombre  étant  connu  de  forme  et  de  position  par  rap- 
port aux  plans  de  projection,  les  arêtes  qui  terminent 
ses  faces  sont  également  connues  par  rapport  à  ces 
mêmes  plans,  c'est-à-dire  qu'on  a  ou  qu'on  peut 
trouver  leurs  projections  horizontales  et  verticales. 
Supposons  que  l'objet  lumineux  soit  un  point  unique 
place  à  une  distance  infinie;  la  direction  des  rayons  de 
lumière,  dans  ce  cas,  sera  donnée  par  la  projection 
horizontale  et  verticale  d'une  ligne  droite  à  laquelle 
ils  devront  tous  être  parallèles.  Les  rayons  de  lumière 
qui  rencontrent  la  droite  dont  nous  cherchons  à  déter- 
miner l'ombre  forment  un  plan,  dont  la  position,  par 
rapport  aux  plans  de  projection,  résulte  de  la  condi- 
tion de  passer  par  la  droite  proposée  et  d'être  parallèle 
à  la  direction  de  la  lumière.  Ce  plan,  prolongé,  contient 
évidemment  l'ombre  de  la  droite  ;  ou,  si  l'on  considère 
le  corps  dont  cette  droite  est  une  des  arêtes,  il 
sépare  la  partie  éclairée  de  l'espace  de  celle  que  l'inter- 
position de  ce  corps  prive  de  lumière.  Ce  même  plan 
va  rencontrer  la  surface  sur  laquelle  l'ombre  est  reçue, 
suivant  une  certaine  ligne  qui  est  l'ombre  portée  par 
la  droite  sur  cette  surface,  ou  qui  appartient  au  con- 
tour de  l'ombre  du  corps  proposé.  La  surface  étant 
connue  et  déterminée  par  rapport  aux  plans  de  pro- 
jection, on  pourra  toujours  construire  son  intersection 
avec  le  plan  que  nous  avons  conçu,  et  parvenir  ainsi 


^4  LES   MAITRES   DE    LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

à  connaître  complètement  cette  partie  du  contour  de 
l'ombre  cherchée. 

Ce  que  l'on  aura  fait  pour  une  première  arête  du 
corps  qui  porte  ombre,  on  le  fera  pour  une  seconde, 
l)our  une  troisième,  et  enfin  pour  toutes  celles  dont 
l'assemblage  forme,  sur  ce  corps,  la  séparation  des 
faces  éclairées  des  faces  obscures. 

Si  le  point  lumineux  était  à  une  distance  finie,  la 
solution  précédente  serait  encore  applicable  en  y 
apportant  une  légère  modification.  Les  rayons  de 
lumière  partant  de  ce  point  dont  on  doit  connaître  les 
projections,  et  dirigés  vers  la  première  des  arêtes  qu'on 
a  considérées,  formeront  également  un  plan  déterminé 
dans  l'espace,  ou  par  rapport  aux  plans  de  projection, 
par  la  condition  de  passer  par  cette  droite  et  par  le 
point  lumineux;  et  les  raisonnements  que  nous  avons 
faits  tout  à  l'heure,  relativement  au  plan  qui,  dans  la 
première  hypothèse,  contenait  les  rayons  de  lumière 
parallèles,  se  répéteront  pour  celui  qui  contient  les 
mêmes  rayons,  lorsqu'ils  partent  d'un  point  placé  à 
une  distance   finie. 

On  voit  que  ces  recherches  ne  sont  que  de  simples 
applications  des  méthodes  de  la  Géométrie  descrip- 
tive. Pieconnaître  sur  le  corps  qui  porte  ombre  les 
arêtes  qui  séparent  la  partie  éclairée  de  la  partie 
obscure;  par  ces  arêtes  faire  passer  des  plans  qui  soient 
parallèles  à  la  direction  des  rayons  de  lumière,  ou  qui 
contiennent  le  point  lumineux  s'il  n'est  pas  à  une 
distance  infinie,  et  construire  les  intersections  de  ces 
plans  avec  la  surface  qui  doit  recevoir  l'ombre  :  dans 
le  cas  qui  nous  occupe,  telle  est  toute  la  solution. 

Nous  avons  dit  que  la  distinction  des  arêtes  limites, 


CEOMETRIP  DESCRIPTIVE. 


dont  les  ombres  circonscrivent  Tombre  propre  du 
corps,  est  en  général  facile  à  faire;  et  en  effet,  il  suffit 
pour  cela  de  chercher  indistinctement  les  ombres  de 
toutes  les  arêtes  :  celles  d'entre  elles  qui  entreront 
dans  l'intérieur  du  polygone  formant  le  contour  de 
l'ombre  du  corps  ne  peuvent  appartenir  aux  arêtes 
limitey.  Ainsi,  dans  la  figure  5o,  les  ombres  b'c\  d'c\ 
Ce,  A'a',  A'D',  A'B'  des  arêtes  Z>c,  de,  Ce,  A«, 
AD,  AB  n'appartiennent  à  aucune  des  arêtes  limites, 
|)uis(]u'elles  entrent  dans  l'intérieur  du  polygone 
a'b'B'CD'd'. 

Mais  on  peut  avec  nioins  de  Iravaii  reconnaîlre  si 
de  deux  faces  planes  d'un  corps,  l'une  est  éclairée  et 
l'autre  obscure,  ou  si  elles  sont  toutes  deux  obscures, 
ou  toutes  deux  éclairées,  et  par  conséquent  si  leur 
intersection  est  une  arête  limite  ou  non.  Eîî  cfTct,  par 
un  point  quelconque  de  cette  intersection,  imaginons 
un  rayon  de  lumière;  si  des  deux  faces  l'une  est 
éclairée  et  l'autre  obscure,  ce  rayon  de  lumière  pro- 
longé les  laissera  toutes  deux  du  mênie  côté;  mais  si 
elles  sont  l'une  et  l'autre  éclairées  ou  l'une  et  l'autre 
obscures,  il  passera  entre  elles  deux.  Cela  posé,  les 
deux  faces  planes  que  nous  considérons  appartiennent 
à  deux  plans  donnés  de  position  dans  l'espace,  et  dont 
par  conséquent  on  peut  construire  les  traces  sur  les 
pians  de  projection,  ainsi  que  les  projections  horizon- 
tale et  verticale  de  leur  intersection;  que  par  un  point 
quelconque  de  cette  intersection  on  fasse  passer  une 
ligne  parallèle  à  la  direction  de  la  lumière,  et  que  l'on 
construise  ses  deux  points  de  rencontre  avec  les  plans 
de  projection;  si  ces  deux  points  sont  en  dehors  des 
traces  des  plans  proposés,  le  rayon  de  lumière  ne  passe 


76  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

pas  entre  les  deux  plans,  et  l'un  est  éclairé  et  l'autre 
ne  l'est  pas;  si  l'un  des  points  ou  tous  les  deux  se 
trouvent  en  dedans  des  traces,  on  en  conclura  que  le 
rayon  de  lumière  passe  entre  les  deux  plans,  et  que 
ces  plans  sont  tous  deux  éclairés  ou  tous  deux  obs- 
curs :  dans  le  premier  cas,  leur  intersection  est  une 
arête  limite;  dans  le  second,  elle  ne  l'est  pas.  Ainsi 
l'on  peut  reconnaître  d'avance  quelles  sont  les  arêtes 
par  rapport  auxquelles  on  doit  opérer  pour  obtenir  le 
contour  de  l'ombre  du  corps  proposé. 

Les  corps  que  l'on  considère  dans  les  arls  présentent 
fréquemment  des  arêtes  verticales,  c'est  ce  qui  rend 
souvent  utile  l'observation  suivante.  La  projection 
horizontale  de  la  ligne  verticale  se  réduit  à  un  seul 
point;  la  ligne  passant  par  ce  point  dans  le  plan 
horizontal  de  projection  et  dirigée  vers  le  point  lumi- 
neux renferme  toujours  la  projection  horizontale  de 
l'ombre  de  la  verticale,  sur  quelque  surface  que  cette 
ombre  soit  reçue;  ce  résultat  est  vrai,  que  le  point 
lumineux  soit  à  une  distance  finie  ou  infinie.  En  elï'et, 
dans  l'un  et  l'autre  cas,  l'ensemble  des  rayons  de 
lumière  passant  par  la  verticale  forme  un  plan  ver- 
tical qui  doit  contenir  l'ombre  de  la  verticale  proposée, 
et  qui  la  donnera  par  son  intersection  avec  la  surface 
qui  doit  recevoir  l'ombre.  La  trace  de  ce  plan  vertical, 
dans  le  plan  horizontal  de  projection,  contiendra  par 
conséquent  la  projection  horizontale  de  l'ombre, 
quelle  que  soit  la  surface  qui  la  reçoive. 

Au  reste,  cette  observation  s'applique  également  à 
toute  droite  perpendiculaire  à  un  plan  quelconque  de 
projection.  Le  plan  formé  par  les  rayons  de  lumière 
qui    passent    par    cette     droite    est    perpendiculaire 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  77 

comme  elle  au  plan  de  projection,  cl  sa  trace  sur  ce 
plan  doit  contenir  évidemment  la  projection  sur  ce 
même  plan  de  l'ombre  portée  par  la  droite  sur  quelque 
surface  que  ce  soit.  On  conçoit  que  dans  quelques  cir- 
constances et  en  choisissant  avec  intelligence  les  plans 
de  projection,  le  résultat  précédent  peut  simplifier 
beaucoup  les  opérations. 

Ce  que  nous  venons  de  dire  renferme  à  peu  près 
tout  ce  qui  est  d'usage  habituel  dans  la  théorie  des 
ombres,  et  résout  les  questions  relatives  aux  corps  ter- 
minés par  des  surfaces  planes  et  des  lignes  droites 
et  éclairés  par  un  point  unique.  Les  livres  qu'on  a 
coutume  de  publier  sur  cet  objet  vont  rarement  plus 
loin,  et  n'ajoutent  guère  à  ce  qui  précède  que  divers 
développements  d'opérations  graphiques  pour  lesquels 
nous  renverrons  aux  leçons  de  Géométrie  descrip- 
tive. 

134.  Passons  maintenant  au  cas  où  le  corps  qui 
porte  ombre  n'est  pas  terminé  par  des  surfaces  planes. 
La  ligne  qui  sépare,  sur  la  surface  du  corps,  la  partie 
éclairée  de  la  partie  obscure  n'est  plus,  en  général, 
un  assemblage  d'arêtes  facile  à  reconnaître;  c'est  une 
courbe  qu'il  faut  déterminer  par  la  seule  propriété 
d'être  la  limite  de  ces  deux  parties.  Les  rayons  de 
lumière  que  reçoit  la  partie  éclairée  pénétreraient 
dans  le  corps  s'ils  étaient  prolongés;  la  partie  obscure 
n'en  reçoit  pas,  parce  que  ceux  qui  pourraient  lui 
arriver  auraient  à  traverser  le  corps  qui  portp  ombre 
avant  de  lui  parvejiir;  mais  il  est  facile  de  voir  que  les 
rayons  qui  vont  à  la  courbe  limite  de  la  partie  obscure 
et  de  la  partie  éclairée  n'entrent  pas  dans   ce   corps 


LES   MAITRES    DE    LA    PENSEE    SCIENTIFIQUE. 


et  ne  font  que  toucher  sa  surface.  Ces  derniers  rayons 
sont  donc  tangents  à  la  surface  du  corps  ;  chacun  d'eux 
se  trouve  dans  un  plan  tangent  à  cette  surface  et  pas- 
sant par  le  point  lumineux.  On  peut  donc  construire 
la  courbe  dont  il  s'agit,  en  menant  du  point  lumineux 
une  suite  de  plans  tangents  à  la  surface  du  corps  pro- 
posé et  en  déterminant  les  points  de  tajigence;  chacun 
de  ces  points  appartiendra  à  la  courbe  cherchée.  Nous 
ne  nous  arrêterons  cependant  point  à  ce  mode  de 
solution,  et  nous  allons  en  exposer  un  autre  qui  est 
aussi  général  et  d'un  emploi  plus  facile  pour  le  genre 
de  recherches  dont  il  s'agit,  car  on  sait  que  l'élégance 
et  la  simplicité  des  constructions  graphiques  dépendent 
du  système  de  moyens  qu'on  adopte  pour  obtenir 
chaque   élément   du  résultat. 

Nous  supposerons  toujours  le  point  lumineux  à  une 
distance  infinie,  et  la  direction  des  rayons  de  lumière 
indiquée  par  les  projections  horizontale  et  verticale 
d'une  ligne  donnée,  à  laquelle  ces  rayons  doivent  être 
parallèles.  Le  corps  qui  porte  ombre  étant  ccnnu  de 
forme  et  de  position,  par  rapport  aux  plans  de  pro- 
jection, ainsi  que  la  surface  sur  laquelle  l'ombre  doit 
être  reçue,  on  demande  de  construire  la  projection  de 
cette  ombre  et,  pour  y  parvenir,  de  déterminer  sur  la 
surface  du  corps  qui  porte  ombre  la  ecurbe  qui  sépare 
la  partie  obscure  de  la  partie  éclairée.  Cette  dernière 
recherche,  outre  qu'elle  entre  dans  la  solution  du  pro- 
blème qui  nous  occupe,  est  encore  i<itéressante  pour 
les  arts  du  dessin  et  de  la  peinture,  puisqu'elle  fait 
connaître  sur  la  surface  du  corps  éclairé,  où  doivent 
s'arrêter  les  teintes  claires  et  commencer  les  teintes 
obscures. 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  79 

La  méthode  que  nous  allons  exposer  est  analogue 
à  celle  quia  été  donnée,  dans  la  Géométrie  descriptive, 
pour  les  intersections  des  surfaces  cylindriques. 

Concevons  un  système  de  plans  parallèles  à  la  direc- 
tion de  la  lumière  et,  de  plus,  perpendiculaires  à  l'un 
des  plans  de  projection,  au  plan  vertical  par  exemple. 
Les  opérations  que  nous  allons  indiquer  pour  l'un  des 
premiers  plans  se  répéteront  aisément  pour  les  autres. 

Nous  remarquerons  d'abord  que,  puisqu'il  est  per- 
pendiculaire au  plan  vertical  de  projection,  il  est 
entièrement  projeté  suivant  sa  trace,  ainsi  que  toutes 
les  lignes  qu'il  peut  renfermer.  On  peut  le  concevoir 
comme  composé  de  lignes  parallèles  à  la  direction  de 
la  lumière  ou,  ce  qui  revient  au  même,» de  rayons  lumi- 
neux. Or,  il  doit  en  général  couper  la  surface  du  corps 
qui  porte  ombre  suivant  une  courbe.  Des  rayons  de 
lumière  situés  dans  le  plan,  les  uns  rencontrent  la 
courbe  et  s'y  arrêlent  :  ils  font  évidemment  partie  des 
rayons  qui  sont  interceptés  par  le  corps  proposé  et 
dont  l'interruption  produit  roiiibrc  derrière  ce  corps; 
les  autres  ne  rencontrent  pas  la  courbe  et,  n'éprou- 
vant aucun  obstacle,  se  propagent  au  loin  dans  l'espace  ; 
enfin  il  se  trouve  des  rayons  de  lumière  qui,  placés 
entre  ceux  qui  rencontrent  la  courbe  et  ceux  qui  ne 
la  rencontrent  pas,  ne  font  simplement  que  la  toucher; 
et  l'on  observera  que,  si  le  corps  qui  porte  ombre  n'a 
pas  des  dimensions  infinies,  il  doit  se  trouver  en  général 
deux  rayons  âe  ce  genre.  Ces  derniers,  tangents  à  la 
section  du  corps  par  le  plan  que  nous  considérons, 
sont  aussi  tangents  à  la  surface  de  ce  corps;  leurs 
points  appartiennent  donc,  d'après  ce  que  nous  avons 
dit  précédemment,  à  la  courbe  limite  de  la  partie  de 


8o  LES   MAITRES   DE   LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

la  surface  du  corps  qui  est  éclairée  et  de  celle  qui  ne 
l'est  pas;  enfin  leurs  points  de  rencontre  avec  la  sur- 
face sur  laquelle  l'ombre  est  reçue  appartiennent 
également  au  contour  de  cette  ombre. 

Ce  sont  donc  ces  rayons  qu'il  nous  importe  de  re- 
connaître et  de  construire  ;  la  propriété  qui  les  carac- 
térise doit  nous  en  fournir  les  moyens.  Puisqu'ils  sont 
tangents  à  la  courbe  d'intersection  de  la  surface  du  \ 
corps  qui  porte  ombre,  par  le  plan  que  nous  considérons, 
leurs  projections  horizontales  doivent  être  tangentes 
à  la  projection  de  cette  même  courbe.  La  surface  du 
corps  est  connue,  le  plan  coupant  est  donné  de  posi- 
tion; supposons  donc  que  la  projection  horizontale  de 
leur  intersection  soit  construite.  Si  nous  menons  à  cette 
projection  des  tangentes  parallèles  à  la  direction  du 
rayon  de  lumière  projeté  sur  le  plan  horizontal,  elles 
seront  les  projections  des  rayons  dont  il  s'agit,  et  les 
points  de  tangence  seront  les  projections  horizontales 
de  ceux  où  ces  rayons  de  lumière  touchent  la  surface 
du  corps  proposé.  La  projection  ou  la  trace  du  plan 
coupant  sur  le  plan  vertical  contient  la  projection 
verlicaie  du  rayon  de  lumière,  et  pour  déterminer  sur 
ces  projections  celles  des  points  de  tangence  dont  on 
vient  de  parler,  il  suffit  d'élever  par  les  projections 
horizontales  de  ces  points  des  lignes  perpendiculaires 
à  la  commune  intersection  des  deux  plans  de  projec- 
tion. On  obtient  donc  ainsi,  en  projections  horizon- 
tale et  verticale,  deux  points  de  la  courbe  qui,  sur  la 
surface  du  corps  proposé,  sépare  la  partie  éclairée  de 
celle  qui  ne  l'est  pas. 

Si  l'opération  que  nous  venons  d'indiquer  se  répète 
pour  un  nombre  quelconque  de  plans  parallèles  à  la 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE. 


lumière  et  perpendiculaires  au  plan  vertical  de  pro- 
jection, on  trouvera,  en  projection  horizontale,  une 
pareille  suite  de  points,  par  lesquels  faisant  passer  une 
courbe  on  aura  la  projection  de  la  courbe  limite  qui, 
sur  la  surface  proposée,  sépare  la  partie  éclairée  de  la 
partie  obscure.  On  trouvera  également,  en  projection 
verticale,  une  autre  suite  de  points,  et  la  courbe  qui  les 
réunira  sera  la  projection  verticale  de  la  même  courbe 
limite. 

Occupons-nous  maintenant  de  la  détermination  du 
contour  de  l'ombre  sur  la  surface  qui  doit  la  recevoir. 
Le  plan  parallèle  à  la  lumière,  que  nous  avons  d'abord 
considéré,  détermine  en  général,  comme  nous  l'avons 
vu,  deux  rayons  lumineux  tangents  à  la  surface  du 
corps  qui  porte  ombre,  et  qui  sont  eux-mêmes  situés 
dans  ce  plan.  Les  points  de  rencontre  de  ces  rayons 
avec  la  surface  qui  reçoit  l'ombre  appartiennent  au 
contour  qu'il  s'agit  d'obtenir.  Ces  points  de  rencontre 
doivent  évidemment  être  placés  sur  la  courbe  de  l'in- 
tersection du  plan  avec  cette  même  surface.  Le  plan 
et  la  surface  étant  connus  et  déterminés  de  position, 
on  peut  construire  la  projection  horizontale  de  leur 
intersection.  Supposons  cette  projection  construite; 
les  projections  horizontales  des  deux  rayons  de  lumière 
que  nous  considérons  la  rencontreront  en  des  points 
qui  seront  les  projections  de  ceux  où  les  rayons  eux- 
mêmes  rencontrent  la  surface;  et  ces  derniers  points 
appartiennent,  ainsi  que  nous  l'avons  dit,  au  contour 
demandé.  Si  des  points  obtenus  en  projection  horizon- 
tale, on  mène  des  lignes  perpendiculaires  à  la  com- 
mune intersection  des  plans  de  projection,  ces  lignes 
détermineront,  par  leur  rencontre  avec  la  projection 

MO.NuE.  —  11.  6 


82  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE.      ' 

verticale  du  plan  coupant  sur  lequel  nous  avons  opéré, 
les  projections  verticales  des  mêmes  points  du  contour 
de  l'ombre  portée. 

En  répétant  cette  dernière  opération  pour  chacun 
des  pians  parallèles  à  la  direction  de  la  lumière,  on 
obtiendra,  sur  l'une  et  l'autre  projection,  une  série 
de  points  par  lesquels  faisant  passer  des  courbes  on 
aura  les  projections  horizontale  et  verticale  du  con- 
tour de  l'ombre  du  corps  proposé  sur  la  surface  des- 
tinée à  la  recevoir. 

Au  nombre  des  plans  parallèles  à  la  direction  de  la 
lumière,  il  peut  s'en  trouver  qui,  après  avoir  coupé 
le  corps  portant  l'ombre,  ne  rencontrent  pas  la  surface 
qui  doit  la  recevoir,  ou  quelques-uns  des  rayons  tan- 
gents à  la  surface  du  corps,  et  déterminés  par  ces  plans, 
peuvent  ne  pas  rencontrer  ensuite  la  courbe  d'intersec- 
tion de  ces  mêmes  plans  avec  la  surface  sur  laquelle 
on  suppose  que  l'ombre  doit  être  portée.  Dans  l'un 
et  l'autre  cas,  ces  circonstances  feront  reconnaître  que 
cette  surface  ne  reçoit  pas  entièrement  l'ombre  portée 
par  le  corps,  mais  qu'une  partie  lui  échappe,  pour  être 
reçue  par  une  surface  plus  éloignée  ou  se  perdre  dans 
l'espace. 

Pour  rendre  tout  ce  qui  précède  plus  facile  à  com 
prendre,  nous  allons  l'appliquer  à  un  exemple. 

Soit  une  sphère  représentée  par  les  projections 
verticale  et  horizontale  A,  A'  (fig,  5i)  de  deux  de 
ses  grands  cercles;  supposons  que  la  direction  des 
rayons  djC  lumière  soit  donnée  par  les  projections  LL, 
L'L'  d'une  ligne  à  laquelle  ils  doivent  être  parallèles, 
et  cherchons  les  projections  horizontale  et  verticale 
de  la  ligne  qui  sépare  la  partie  éclairée  de  la  surface 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE. 


B3 


Fis  Si 


84  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

de  la  sphère  de  la  partie  obscure,  et  celles  du  contour 
de  l'ombre  portée  par  la  sphère  sur  un  cylindre  droit 
à  base  circulaire,  donné  en  projection  horizontale  par 
le  cercle  B'. 

Conformément  à  la  méthode  que  nous  venons 
d'exposer,  concevons  une  suite  de  plans  parallèles 
à  la  direction  de  la  lumière,  perpendiculaires  au  plan 
vertical  de  projection,  et  par  conséquent  projetés  sur 
ce  plan  suivant  leurs  traces  Pp,  PiPi,  P2  P2j  •  •  •• 
Considérons  en  particulier  le  plan  P;  il  coupera  la 
sphère  suivant  une  courbe  dont  la  projection  verti- 
cale ne  peut  être  que  sur  la  trace  Pp,  et  dont  la  pro- 
jection horizontale  sera  la  courbe  p'p'p'p''  Après 
l'avoir  construite  nous  lui  mènerons  les  deux  tan- 
gentes ^' B'  et  1' t\  parallèles  à  L'L',  lesquelles 
seront  les  projections  horizontales  de  deux  rayons  de 
lumière  tangents  à  la  sphère;  quant  aux  projections 
verticales  de  ces  mêmes  rayons,  elles  ne  peuvent  être 
l'une  et  l'autre  que  la  trace  Pp  elle-même.  Les  points 
de  tangence  T'  et  0'  sont  les  projections  des  deux 
points  où  ces  rayons  de  lumière  touchent  la  sphère,  et 
qui  appartiennent  par  conséquent  à  la  courbe  qui 
sépare,  sur  sa  surface,  la  partie  éclairée  de  la  partie 
obscure.  Pour  avoir  les  projections  verticales  de  ces 
mêmes  points,  on  mènera  les  deux  lignes  T'T  et  0'  0, 
perpendiculaires  à  la  commune  intersection  des  deux 
plans  de  projection,  prolongées  jusqu'à  la  rencontre 
de  la  trace  Pp,  et  l'on  obtiendra  ainsi,  en  T  et  0,  les 
projections  verticales  des  deux  points  dont  il  s'agit. 
En  répétant  pour  chacun  des  plans  P^,  Pg,  P3,  P4,  • . . 
l'opération  que  nous  venons  d'exécuter  pour  le 
plan  P,  on  trouvera  sur  le  plan  horizontal  la  courbe 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  85 

rr,T;0;  0'(-);e;r3,  et  sur  le  pian  vertical  la 
courbe  TTj  Tg  ©i  ©©3  0;  Tg,  pour  les  projections  de 
celle  qui,  sur  la  sphère,  sépare  la  partie  éclairée  de  la 
partie  obscure. 

Reprenons  les  rayons  de  lumière  dont  T't'  et  S' 0' 
sont  les  projections  horizontales,  et  dont  Pp  est  la 
projection  verticale,  et  cherchons  les  points  où  ils 
rencontrent  la  surface  du  cylindre  ;  ce  seront  des 
points  du  contour  de  l'onibre  portée  sur  cette  surface 
par  la  sphère.  Le  plan  P  coupe  la  surface  du  cylindre 
suivant  une  courbe  projetée  sur  le  plan  horizontal, 
dans  le  cercle  qui  sert  de  base  au  cylindre.  Les  lignes 
T't'  et  0'  6'  rencontrent  ce  cercle  dans  les  points  r' 
et  p',  qui  sont  par  conséquent  les  projections  horizon- 
tales des  points  de  rencontre  que  nous  cherchons; 
pour  avoir  leurs  projections  verticales,  il  suffît  de 
mener  les  lignes  r'  r  et  p'  p  perpendiculaires  à  la  com- 
mune intersection  des  deux  plans  de  projection,  et 
jusqu'à  la  rencontre  de  la  ligne  Pp.  Si  l'on  répète 
également  cette  dernière  opération,  relativement  aux 
autres  plans  Pj ,  Pg,  . . .,  on  trouvera  les  projections 
verticales  de  divers  autres  points  de  contour  de 
l'ombre  portée  par  la  sphère  sur  le  cylindre,  et  l'on 
construira  la  courbe  rrir2  pi  ppg  p^  qui  sera  la  projec- 
tion verticale  de  ce  contour. 

En  considérant  le  plan  P3  et  les  deux  lignes  T._^t'^ 
et  ©3  0'.^  qui  sont  les  projections  horizontales  des  deux 
rayons  de  lumière  tangents  à  la  sphère,  situés  dans  le 
plan  dont  il  s'agit,  on  observera  que  l'une  de  ces  pro- 
jections, celle  qui  est  désignée  par  T3  ^3,  ne  rencontre 
pas  la  base  du  cylindre,  qui  est  la  projection  horizon- 
tale, ainsi  que  nous  l'avons  observé  de  la  section  de 


86  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

la  surface  cylindrique  par  le  plan  Pg;  le  rayon  de  lu- 
mière auquel  appartient  la  projection  T^  t'.^  ne  ren- 
contre donc  pas  cette  surface  et  passe  à  côté.  On  en 
conclura  que  l'ombre  portée  par  la  sphère  n'est  pas 
reçue  en  entier  par  le  cylindre,  et  que  le  contour  de 
cette  ombre  sur  la  surface  cylindrique  n'est  point 
fermé,  mais  s'arrête  aux  points  où  les  rayons  de  lu- 
mière tangents  à  la  sphère  sont  aussi  tangents  au 
cylindre. 


135.  Nous  avons  supposé  jusqu'à  présent  que  le 
point  lumineux  était  à  une  distance  infinie;  et  cette 
hypothèse  est  celle  qui  est  le  plus  fréquemment  admise, 
parce  qu'elle  est  à  peu  près  conforme  à  la  manière 
dont  les  corps  sont  éclairés  par  le  Soleil;  mais  si  l'on 
supposait  le  point  lumineux  à  une  distance  finie,  il 
suffirait,  pour  rendre  la  méthode  précédente  appli- 
cable encore  dans  ce  cas,  de  substituer  aux  plans  paral- 
lèles que  nous  avons  employés  une  suite  de  plans 
assujétis  à  passer  par  le  point  lumineux,  et  du  reste 
toujours  perpendiculaires  au  plan  vertical  de  projec- 
tion, comme  dans  la  première  hypothèse. 

Le  procédé  que  nous  venons  d'exposer  peut  souvent 
se  simplifier  dans  les  questions  particulières,  d'après 
la  génération  de  la  surface  du  corps  qui  porte  l'ombre 
et  de  celle  qui  la  reçoit.  Nous  renverrons,  à  cet  égard, 
aux  méthodes  de  la  Géométrie  descriptive  qui,  dans 
ces  recherches,  sont  susceptibles  de  diverses  applica- 
tions intéressantes.  Il  nous  suffit  d'avoir  fait  con- 
naître un  mode  de  solution  qui  comprend  dans  toute 
sa  généralité  le  problème    de   la   détermination  gra- 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  87 

phîque  des  ombres,  lorsque  le  corps  lumineux  se 
réduit  à  un  point  unique. 

La  solution  de  ce  problème  satisfait  à  peu  près  à 
tout  ce  que  demandent  habituellement  les  arts  du 
dessin;  ce  qui  nous  reste  à  dire  nous  donnera  lieu  de 
fr\iie  quelques  observations  qui  ne  seront  jjas  sans 
iiUérêt  sous  le  rapport  de  ces  mêmes  arts;  mais  comme 
.  n  supposant  que  le  corps  lumineux  ait  dos  diiru  nsions 
Unies,  les  constructions  graphiques  deviennent  extrê- 
mement compliquées,  et  seraient  d'ailleurs  d'un  usage 

peu  près  nul,  ce  sera  plutôt  sous  le  point  de  vue  de  la 
héorie  que  sous  celui  des  applications  que  nous  allons 
îraiter  cette  dernière  partie  de  la  détermination 
linéaire  des  ombres. 

Lorsque  le  corps  lumineux  n'est  qu'un  point  et  que 
rien  dans  l'espace  ne  réfléchit  la  lumière,  l'ombre 
portée  par  un  corps  opaque  sur  une  surface  placée  der- 
rière doit  êtTv?  parfaitement  noire,  puisque  aucun  rayon 
ne  peut  y  arriver  directement,  à  raison  de  l'interposi- 
tion du  corps  opaque,  ni  indirectement,  car  nous  sup- 
posons qu'il  n'existe  aucun  autre  objet  qui  puisse  y 
réfléchir  de  la  lumière.  Cette  ombre  étant  donc  d'un 
noir  absolu  sera  par  conséquent  égale  dans  toute  son 
étendue;  et  de  plus  elle  se  terminera  brusquement  à 
son  contour  qui  sera  une  ligne  parfaitement  nette  et 
prononcée. 

11  n'en  est  pas  ainsi  lorsque  le  corps  lumineux  a  des 
dimensions  finies;  le  contour  n'est  pas  tranche  brus- 
quement, et  c'est  par  une  dégradation  insensible  que 
l'on  passe  du  noir  de  l'ombre  à  la  clarté. 

En  efîet,  cherchons  et  qui  a  lieu  dans  ce  cas,  en 
bupposant  toujours  qu'il  n'existe  dans  l'espace  que  le 


88  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

corps  lumineux,  le  corps  opaque  et  la  surface  qui  reçoit 
l'ombre. 

Concevons  un  plan  tangent  à  la  fois  au  corps  lumi- 
neux et  au  corps  opaque,  et  tel  que  les  deux  corps  se 
trouvent  du  même  côté  relativement  au  plan;  puis 
concevons-en  un  semblablement  tangent  et  infiniment 
voisin  du  premier,  qu'il  coupera  suivant  une  droite 
tangente  à  la  fois  aux  deux  corps.  Concevons  encore 
un  troisième  plan  tangent,  infiniment  voisin  du  second  ; 
il  le  coupera  suivant  une  autre  droite  également  tan- 
gente aux  deux  derniers  pians,  et  l'on  observera  que 
cette  seconde  ligne  doit  rencontrer  la  première, 
puisque  l'une  et  l'autre  se  trouvent  sur  le  second  plan 
tangent.  En  multipliant  ainsi  les  plans  tangents,  on 
aura  une  suite  de  lignes  tangentes  à  la  fois  aux  deux 
corps  et  se  rencontrant  deux  à  deux;  elles  appar- 
tiendront à  une  surface  que  l'on  doit  reconnaître, 
d'après  sa  génération  que  nous  venons  d'indiquer, 
pour  être  du  genre  de  celles  qu'on  appelle  déç>elop- 
pables  (110). 

Cette  surface  développable  enveloppe  à  la  fois  le 
corps  lumineux  et  le  corps  opaque;  et  dans  la  partie 
de  l'espace  qu'elle  renferme  au  delà  de  ce  dernier,  il 
ne  peut  pénétrer  aucun  rayon  lancé  par  le  corps  lumi- 
neux; l'aire  de  l'intersection  de  cette  surface  avec  celle 
qui  reçoit  l'ombre  sera  donc  d'un  noir  parfait,  et  par 
conséquent  égal  dans  toute  son  étendue. 

Maintenant,  concevons  une  autre  suite  de  plans 
tangents  au  corps  lumineux  et  au  corps  opaque,  mais 
placés  de  manière  que  l'un  de  ces  corps  se  trouve  d'un 
côté  du  plan,  et  que  l'autre  se  trouve  du  côté  opposé; 
les  intersections  successives  de  ces  plans  donneront 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  89 


naissance,  comme  tout  à  l'heure,  à  une  nouvelle  sur- 
face développable  qui  enveloppera,  ainsi  que  Ja  pré- 
cédente, le  corps  lumineux  et  le  corps  opaque;  maii 
on  observera,  par  rapport  à  cette  surface  et  aux  lignes 
droites  dont  on  peut  la  concevoir  composée,  que  l'un 
(les  corps  se  trouve  d'un  côté  et  l'autre  du  côlé  opposé, 
il  résulte  de  cette  disposition  que,  de  tous  les  points 
extérieurs  à  cette  seconde  surface  développable,  on 
découvre  en  entier  le  corps  lumineux,  sans  qu'aucune 
partie  de  ce  corps  puisse  être  cachée  par  l'interposition 
du  corps  opaque.  Si  l'on  construit  l'intersection  de 
cette  surface  avec  celle  qui  reçoit  l'ombre,  chacun  des 
points  situés  en  dehors  de  cette  intersection  jouira 
d'une  clarté  totale,  c'est-à-dire  recevra  tous  les  rayons 
qui  peuvent  lui  parvenir  du  corps  lumineux. 

Si  l'on  considère  maintenant  les  deux  surfaces  déve- 
loppablcs  à  la  fois,  on  remarquera  que  dans  l'espace 
qu'elles  comprennent  entre  elles,  au  delà  de  leurs 
courbes  de  tangence  avec  le  corps  opaque,  une  partie 
des  rayons  lancés  par  le  corps  lumineux  est  inter- 
ceptée par  le  corps  opaque,  et  qu'ainsi  cette  portion 
de  l'espace  n'est  pas  complètement  éclairée.  Cher- 
chant ensuite  ce  qui  a  lieu  sur  la  surface  qui  reçoit 
l'ombre,  on  observera  que  l'aire  comprise  entre  les 
deux  contours  donnés  par  les  intersections  de  cette 
surface  avec  les  deux  surfaces  développables  forme,  en 
général,  une  espèce  d'anneau  pour  lequel  l'ombre  et 
la  clarté  sont  incomplètes.  Au  milieu  se  trouve  l'ombre 
absolue,  et  en  dehors  la  clarté  totale;  mais  chacun  des 
points  situés  dans  l'aire  annulaire  elle-même  ne  reçoit 
qu'une  partie  des  rayons  émanés  du  corps  lumineux, 
le  reste  lui  étant  enlevé  par  l'interposition  du  corps 


()0  LES   MAITRES   t)E   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

opaque.  Si  ce  point,  pris  sur  Faire  annulaire,  est  voisin 
du  contour  intérieur  donné  par  ]a  première  surface 
développable,  il  ne  peut  recevoir  la  lumière  que  d'un 
très  petit  segment  du  corps  lumineux,  le  corps  opaque 
lui  dérobant  tout  le  reste;  il  est  par  conséquent  très 
près  de  l'obscurité.  Si  ce  même  point  est  voisin  du 
contour  extérieur  donné  par  la  seconde  surface  déve- 
loppable, il  n'y  a,  par  rappoit  à  lui,  qu'ime  très  petite 
partie  du  corps  lumineux  qui  reste  couverte  par  le 
corps  opaque;  il  est  donc  très  près  de  jouir  de  la  clarté 
totale.  On  voit  par  là  que  du  contour  intérieur  au 
contour  extérieur,  dé  terminés  par  les  deux  surfaces  déve- 
loppables,  l'ombre  va  en  diminuant  et  la  clarté  en  aug- 
mentant, de  manière  qu'il  y  a  une  dégradation  insen- 
sible entre  î'ombie  absolue  renfermée  dans  le  contour 
intérieur,  et  la  clarté  totale  qui  a  lieu  au  delà  du  con- 
tour extérieur  :  cette  aire  annulaire,  qui  entoure 
l'ombre  absolue  et  dans  laquelle  l'ombre  et  la  clarté 
sont  incomplètes,  se  nomme  la  pénonihre^  ce  qui  si- 
gnifie presque  ombre. 

Nous  n'avons  encore  considéré  la  distribution  de 
l'ombre  et  de  la  lumière  que  sur  la  surface  placée  der- 
rière le  corps  opaque  ;  il  nous  reste  à  la  considérer  éga 
lement  sur  la  surface  même  de  ce  corps. 

La  courbe  de  tangence  de  la  première  surface  déve- 
loppable avec  le  corps  forme  la  ligne  de  séparation  de 
la  partie  de  la  surface  qui  ne  peut  recevoir  aucun  rayon 
de  lumière  de  celle  qui  peut  en  recevoir.  La  courbe  de 
tangence  avec  la  seconde  surface  développable  forme 
également,  sur  la  surface  du  corps  opaque,  la  ligne  qui 
sépare  les  points  pour  lesquels  une  partie  des  rayons 
lumineux  est  interceptée  par  la  convexité  même  du 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  9I 


corps  opaque,  de  ceux  pour  lesquels  cette  convexité 
ne  peut  en  arrêter  aucun.  Il  se  trouve  donc  sur  la  sur- 
face du  corps  opaque,  entre  sa  face  obscure  et  sa  face 
éclairée,  une  zone  ou  pénombre,  sur  laquelle  l'intensité 
de  l'ombre  diminue  par  gradation  insensible,  pour 
passer  de  l'ombre  absolue  à  la  clarté  totale. 

Ce  que  nous  venons  d'exposer,  en  embrassant  dans 
toute  sa  généralité  le  problème  qui  nous  occupe,  se 
simplifie  beaucoup  et  devient  très  sensibl»^  dans  des 
exemples  particuliers.  Supposons  que  le  corps  lumi- 
neux et  le  corps  opaque  soient  l'un  et  l'autre  des 
sphères  représentées  par  les  cercles  L  et  O  {fig.  62) 
sur  un  plan  de  projection,  dans  lequel  leurs 
centres  soient  placés  ;  que  la  surface  sur  laquelle 
l'ombre  doit  être  portée  soit  le  plan  SS  perpendicu- 
laire à  la  ligne  LO  qui  joint  les  centres  des  sphères. 
Dans  ce  cas,  tous  les  plans  tangents  à  la  fois  aux. deux 
corps  et  placés  de  manière  qu'ils  se  trouvent  tous  du 
même  côté,  par  rapport  à  chaque  corps,  formeront, 
comme  on  le  sait,  par  leurs  intersections  successives, 
une  surface  conique  que  nous  indiquerons  par  les 
lignes  TT',  TT',  suivant  lesquelles  cette  surface  coupe 
le  plan  de  projection.  Son  sommet,  ou  centre,  tom- 
bera au  delà  de  la  sphère  0,  si  cette  sphère  est  d'un 
rayon  plus  petit  que  la  sphère  L;  et  au  contraire  en 
deçà  de  L,  si  cette  dernière  sphère  est  la  plus  petite. 
C'est  à  cette  surface  conique  que  se  réduit  la  première 
surface  développable  que  nous  avons  considérée  en 
traitant  le  cas  général.  On  voit  aisément  que  l'espace 
qu'elle  renferme  au  delà  de  la  sphère  opaque  ne  peut 
recevoir  aucun  rayon  de  lumière  émané  de  la  sphèr<;  L; 
son  intersection  avec  le  plan  SS  est  un  cercle  dont  MN 


9^- 


LES    MAITRES   DE    LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  98 

est  le  diamètre  et  dont  rintéricur  est  absolument 
privé  de  lumière. 

Si  l'on  conçoit  maintenant  d'autres  plans  tangents 
également  aux  deux  sphères,  mais  tels  que  ])ar  ri)]>p<>rt 
à  chaque  plan  l'une  des  sphères  se  trouve  d*un  côté 
et  l'autre  du  côté  opposé,  ces  plans,  par  leurs  inter- 
sections successives,  formeront  une  autre  surface 
conique  dont  le  sommet  sera  placé  entre  les  deux 
sphères,  et  que  nous  indiquerons  comme  la  première, 
par  les  lignes  tt\  tt\  qui  sont  ses  intersections  avec  le 
plan  de  projection;  cette  seconde  surface  conique 
répond  à  la  seconde  surface  développable  que  nous 
avons  considérée,  dans  le  cas  général.  On  voit  de 
même  que  tout  l'espace  qu'elle  laisse  à  son  extérieur 
reçoit  les  rayons  émanés  de  la  sphère  L,  sans  qu'aucun 
soit  arrêté  par  la  sphère  0.  Son  intersection  avec 
le  plan  SS  est  un  cercle  dont  mn  est  le  diamètre,  et  tous 
les  points  du  plan,  extérieurs  à  ce  cercle,  reçoivent  les 
rayons  de  lumière  sans  obstacle  de  la  part  de  la 
sphère  opaque. 

Mais  l'espace  compris  entre  les  deux  surfaces  co- 
niques au  delà  de  leurs  courbes  de  tangence  avec  la 
sphère,  et  qui  se  trouve  indiqué  sur  le  plan  de  projec- 
tion par  les  aires  angulaires  T'ct\  T'ct\  ne  reçoit  pas 
complètement  les  rayons  lumineux  de  la  sphère  L, 
puisque  chacun  de  ses  points  ne  peut  découvrir  qu'une 
partie  du  corps  lumineux,  le  reste  lui  étant  dérobé 
par  l'interposition  de  la  sphère  opaque  :  cet  espace  ne 
sera  donc  pas  entièrement  obscur  ni  entièrement 
éclairé.  Les  points  du  plan  SS,  situés  entre  le  cercle  du 
diamètre  MN  et  le  cercle  du  diamètre  mn,  seront  dans 
ce  cas:  l'intervalle  de  ces  deux  cercles  formera  donc 


94  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE  SCIENTIFIQUE. 

un  anneau  pour  lequel  ni  l'ombre  ni  la  clarté  ne  seront 
absolues. 

Si,  sur  cet  anneau,  on  prend  un  point  voisin  du 
cercle  intérieur,  tel  que  le  point  p,  on  voit,  d'après 
la  figure,  qu'il  ne  peut  recevoir  des  rayons  lumineux 
que  de  la  partie  de  la  sphère  L,  correspondant  à 
l'arc  g/;  si,  au  contraire,  on  prend  un  point  voisin  du 
cercle  extérieur,  tel  que  p',  on  voit  qu'il  peut  recevoir 
des  rayons  de  la  partie  de  la  sphère  lumineuse,  cor- 
respondant à  l'arc  g'  /',  beaucoup  plus  grand  que  g/; 
la  clarté  doit  donc  aller  en  augmentant,  ou  l'ombre 
en  diminuant,  du  cercle  intérieur  au  cercle  extérieur, 
ou  dans  l'étendue  de  ce  que  nous  avons  nommé  la 
pénombre. 

Sur  la  surface  de  la  sphère  opaque,  la  courbe  de  tan- 
gence  du  premier  cône  est  un  cercle  projeté  suivant 
son  diamètre  aa.  La  courbe  de  tangence  du  second 
cône  est  un  autre  cercle  projeté  suivant  son  diamètre  hh. 
La  partie  de  la  surface  de  la  sphère  0  qui  est  au  delà 
du  cercle  aa  est  entièrement  dans  l'obscurité;  celle 
qui  est  en  deçà- du  cercle  hh  reçoit  sans  obstacle  tous 
les  rayons  de  lumière.  Mais  les  points  situés  sur  la  zone 
comprise  entre  ces  deux  cercles  ne  voient  qu'en  partie 
ia  sphère  lumineuse,  sont  par  conséquent  dans  un  état 
intermédiaire  entre  la  clarté  et  l'obscurité,  et  l'ombre 
perd  de  son  intensité,  du  cercle  aa  au  cercle  hh^  sans 
qu'il  y  ait  nulle  part  de  passage  brusque  et  précis  :  il 
y  a  également  une  sorte  de  pénomhre  dans  l'étendue 
de   cette  zone. 

On  peut  regarder,  on  général,  comme  inutile  de 
déterminer  d'une  manière  géométrique  les  contours 
des  pénombres,  ce  qui  serait  d'ailleurs  fort  long  et  fort 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  9^ 

embarrassant;  mais  quelques  observations  assez 
simples  peuvent  fournir  des  données  sur  la  mesure  ô,e 
la  largeur  qu'il  convient  de  leur  attribuer. 

La  distance  entre  le  corps  lumineux  L  et  le  corps 
opaque  0  restant  la  même,  si  Ton  rapproche  parallè- 
lement à  lui-même  le  plan  SS  de  ce  dernier,  la  ligne  Nn 
qui  indique  la  largeur  de  la  pénombre  diminue,  si  l'on 
éloigne  ce  plan  elle  augmente;  on  voit  aisément  qu'elle 
est  proportionni  Ile  à  la  distance  du  corps  opaque  au 
plan  sur  lequel  l'ombre  est  portée,  et  qu'elle  dépend 
d'ailleurs  de  l'angle  ncN  formé  par  les  arêtes  TT' 
et  tt'  des  deux  cônes  qui  enveloppent  la  sphère  opaque 
et  la  sphère  lumineuse,  angle  qui  dépend  lui-même 
de  la  distance  entre  le  corps  opaque  et  le  corps  lumi- 
neux, et  des  dimensions  de  ce  dernier. 

Si  nous  supposons  que  le  corps  lumineux  soit  le 
Soleil,  la  distance  de  cet  astre  à  la  Terre  étant  partout 
sensiblement  la  même,  l'angle  dont  il  s'agit  sera  tou- 
jours égal,  quel  que  soit  le  corps  opaque  que  l'on  con- 
sidère comme  éclairé  par  le  Soleil.  Cet  angle  mesure 
ce  qu'on  appelle  le  diamètre  apparent  du  Soleil  ;  il  est 
d'environ  un  demi-degré,  et  de  cette  donnée  on  peut 
conclure  que  la  largeur  de  la  pénombre  sera  environ 
la  ii5^  partie  de  la  distance  comprise  entre  le  point 
qui  porte  l'ombre  et  celui  où  elle  est  reçue  sur  le  plan, 
que  nous  supposons  à  peu  près  perpendiculaire  à  la 
direction  du  rayon  de  lumière.  Il  est  facile  de  voir  que  s'il 
s'éloignait  de  cette  position,  la  largeur  de  la  pénombre 
augmenterait  d,ans  le  rapport  inverse  du  sinus  de 
l'angle  que  le  plan  ferait  avec  la  direction  de  la  lu- 
mière; on  trouverait  par  exemple,  en  supposant  cet 
angle  de  4o°»  tjue  la  laçgeur  d,ç  la  pé^omlprç  devrait 


96  LES   MAITRES   DE   LA    PENSEE  SCIENTIFIQUE. 


être  la  8i®  partie  de  la  distance  entre  le  point  qui  porte 
l'ombre  et  celui  où  cette  ombre  est  reçue. 

Il  est  donc  essentiel  dans  les  dessins  de  donner  une 
plus  grande  largeur  à  la  pénombre,  à  mesure  que 
l'ombre  portée  s'éloigne  de  l'objet  qui  la  produit,  et 
les  résultats  que  nous  venons  d'indiquer  suffisent 
pour  faire  connaître  l'étendue  à  donner  à  chaque  partie 
de  la  pénombre,  avec  plus  de  précision  même  que 
l'exécution  des  dessins  ne  le  comporte  ordinairement. 

Nous  avons  remarqué  qu'il  se  trouvait  également 
une  pénombre,  ou  zone  incomplètement  éclairée,  sur 
la  surface  du  corps  opaque.  Supposons  toujours  que  ce 
corps  soit  la  sphère  0;  et  pour  trouver  l'étendue  de 
l'arc  ba  qui  mesure  la  largeur  de  la  pénombre,  conce- 
vons aux  points  è  et  a  deux  normales  à  la  surface,  qui, 
dans  le  cas  de  la  sphère,  seront  les  deux  rayons  ob 
et  oa.  On  sait  que  l'angle  formé  par  les  normales  est 
égal  à  celui  que  forment  entre  elles  les  tangentes  TT' 
et  tt';  ainsi,  la  mesure  de  l'arc  ba  ne  dépend  que  de 
deux  éléments,  l'angle  formé  par  les  tangentes  et  le 
rayon  ob  auquel  l'arc  est  proportionnel. 

Si  la  lumière  vient  du  Soleil,  l'angle  dont  il  s'agit 
est  toujours  le  même,  quel  que  soit  le  corps  éclairé, 
et  d'un  demi-degré  à  peu  près. 

On  en  conclura  donc  que  la  largeur  de  la  pénombre 
sur  la  sphère  est  à  peu  près  égale  à  la  ii5^  partie  du 
rayon. 

On  peut,  sans  erreur  sensible,  étendre  ce  résultat 
à  un  corps  de  figure  quelconque,  en  observant  qu(?' 
pour  avoir  la  largeur  de  la  pénombre  correspondant 
à  un  point  déterminé  de  la  ligne  de  séparation  dt  la 
face  obscure  et  de  la  face  éclairée  de  ce  corps,  il  faut 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE. 


concevoir  par  ce  point,  et  dans  le  sens  du  rayon  de  lu 
niière,  un  plan  normal  à  la  surface  du  corps,  et  prendre 
la  II 5®  partie  du  rayon  de  courbure  de  cette  section. 
I^a  nous  hornani  à  ce  qui  précède,  sur  cette  partie 
<lr  la  théorie  des  ombres  qui  a  pour  objet  la  déter- 
mination géométrique  de  leurs  contours,  il  nous  reste 
à  traiter  de  celle  ((ui  est  relative  à  la  recherche  de 
riiilensité  des  teintes  qu'il  faut  donner  aux  différentes 
parties  des  surfaces  ombrées,  pour  qu'elles  nous 
offrent  dans  les  dessins  toutes  les  apparences  d'ombre 
et  (le  lumière  que  les  objets  imités  nous  présentent 
dans  la  nature  ;  mais  pour  embrasser  un  tel  sujet  dans 
toute  son  étendue,  il  ne  suffit  pas  d'envisager  unique- 
ment, comme  nous  l'avons  fait  jusqu'à  présent,  un 
corps  lumineux,  un  corps  opaque  et  une  surface  qui 
reçoit  l'ombre,  en  faisant  abstraction  de  toute  cir- 
constance accessoire.  Il  faut  étudier  les  objets  avec 
tout  ce  qui  les  entoure  dans  la  réalité,  et  avoir  égard, 
entre  autres  choses,  à  la  position  du  spectateur  et 
aux  modifications  que  la  lumière  peut  éprouver  avant 
d'arriver  à  son  œil,  pour  y  porter  la  sensation  du 
spectacle  sur  lequel  il  attache  sa  vue;  ces  considéra- 
tions nous  semblent  exiger  que  nous  fassions  précéder 
ce  que  nous  avons  à  dire  sur  cette  matière  par  l'exj 
si t  ion  de  la  théorie  de  la  perspective. 


no- 


THÉORIE  DE  LA  PERSPECTIVE. 

136.  L'art  de  la  Perspective  consiste  à  représenter, 
sur  un  tableau  dont  la  forme  et  la  position  sont  con- 
nues, des  objets  également  donnés  de  forme  et  de 
position,  tels  qu'ils  paraîtraient  à  un  œil  dont  la  posi- 

MONGE.  —   II.  "j 


gS  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

tion  serait  aussi  déterminée.  Pour  rendre  cette  défini- 
tion encore  plus  sensible,  supposons  que  le  tableau 
soit  d'abord  une  glace  transparente.  Si,  de  tous  les 
points  des  objets  proposés,  on  conçoit  des  rayons 
dirigés  vers  l'œil,  que  ces  rayons,  en  traversant  le 
tableau  transparent,  y  laissent  leurs  traces  em- 
preintes de  la  couleur  et  de  la  teinte  propre  aux  points 
dont  ils  partent,  l'ensemble  de  ces  traces  formera  sur 
le  verre  la  représentation  complète  des  objets  :  c'est 
cette  représentation  qu'on  se  propose  d'obtenir  dans 
l'art  de  la  perspective.  On  voit  qu'ici,  comme  dans  la 
théorie  des  ombres,  on  doit  admettre  deux  parties 
distinctes  :  l'une  est  purement  géométrique,  et  son 
objet  est  de  déterminer  d'une  manière  précise  sur  le 
tableau  la  position  de  chaque  point  représenté; 
l'autre  a  pour  objet  la  recherche  de  la  teinte  d'ombre 
et  de  lumière  qu'on  doit  donner  à  chaque' partie  du 
tableau,  et  c'est  par  des  considérations  physiques 
qu'on  peut  en  général  la  traiter.  Cette  dernière  partie, 
qu'on  désigne  sous  le  nom  de  Perspectwe  aérienne^ 
rentre  entièrement  dans  le  cercle  des  recherches  que 
nous  essaierons  d'exposer  plus  taTd,  pour  compléter  la 
théorie  des  ombres;  nous  ne  nous  occuperons  donc  ici 
que  de  la  première  partie,  appelée  Perspectwe  linéaire. 
D'après  les  définitions  que  nous  venons  de  donner, 
il  est  facile  de  concevoir  que  la  perspective  linéaire 
se  réduit  à  construire  la  section  qu'une  surface  déter- 
minée fait  dans  une  pyramide  dont  le  sommet  et  la 
base  sont  donnés.  L'œil  est  le  sommet;  la  base  peut 
être  regardée  comme  répandue  sur  la  surface  des 
objets  qu'on  se  propose  de  mettre  en  porspecftive,  et 
la  surface  sécant;e  est  le  tableau. 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE.  Ç)i) 


Les  méthodes  de  la  Géométrie  descriptive  donnent 
aisément  la  solution  de  ce  problème  pris  dans  toute  sa 
généralité,  c'est-à-dire,  en  supposant  même  que  le 
tableau  soit  une  surface  courbe  quelconque;  cepen- 
dant, comme  nous  avons  surtout  en  vue  ce  qui  est 
d'une  utilité  habituelle  dans  les  arts,  nous  ne  nous 
étendrons  avec  quelque  détail  que  sur  ce  qui  concerne 
les  perspectives  à  tracer  sur  des  surfaces  planes,  et 
nous  nous  contenterons  de  présenter  ensuite  quelques 
observations  concernant  les  perspectives  à  construire 
&ur  des  surfaces  courbes. 

Nous  supposerons  que  le  tableau  soit  un  plan  ver- 
tical ou  perpendiculaire  à  celui  des  plans  de  projec- 
tion que  l'on  considère  comme  horizontal;  on  pour- 
rait sans  difficulté  le  supposer  incliné  d'une  manière 
quelconque  par  rapport  à  ces  plans  ;  mais  l'hypothèse 
à  laquelle  nous  nous  arrêtons  est  plus  naturelle  et  sim- 
plifie les  constructions. 

Ainsi,  la  position  de  l'œil,  celle  d'un  objet  connu  de 
forme  et  enfin  celle  d'un  plan  vertical  étant  données 
par  rapport  aux  plans  de  projection,  il  s'agit  de 
trouver  les  rencontres  de  ce  plan  avec  les  droites 
menées  de  l'œil  à  chacun  des  points  de  l'objet  proposé, 
et  de  les  rapporter  sur  un  tableau  représentant  ce 
même  plan  vertical  supposé  rabattu. 

Diverses  constructions  peuvent  donner  les  points 
de  rencontre  avec  plus  ou  moins  d'avantage  et  de 
facilité,  selon  les  positions  respectives  de  l'objet,  de 
l'œil  et  du  tableau;  nous  allons  exposer  en  premier 
lieu  celle  qui  est  la  plus  simple  et  ordinairement  la 
plus  commode. 

Plaçons  d'abord  le  plan  vertical  de  projection  dans 


LES   MAITRES    DE    LA    PENSEE    SCIENTIFIQUE. 


une  position  telle,  que  celui  du  tableau  lui  soit  per- 
pendiculaire, et  qu'en  conséquence  ce  dernier  s'y 
trouve  projeté  par  une  ligne  verticale  qui  sera  sa  trace. 
Soient  0'  et  0"  {fig.  53)  les  projections  de  l'œil, 
T'T'  et  "Y""Y"  celles  du  tableau,  ou  les  traces  du 
])lan  vertical  aTU|uel  il  appartient;  supposons  qu'on 
ait  au  delà  les  projections  des  objets  à  nieltre  en 
perspective  déjà  faites,  ou  (pie  l'on  doit  conunencer 
par  faire  sur  les  plans  de  projection  qu'on  a  adoptés; 
par  exenqde,  celles  d'une  pyramide  à  base  quadrangu- 
laire,  dont  les  sommets  ou  angles  solides  A,  B,  C,  D,  E 
soient  donnés  en  projection  borizonlale  aux  points  A', 
B',  C,  D',  by,  et  en  projection  verticale  aux  points  A", 
B",  C,   \)\   \\". 

Si,  de  l'ceil,  oji  mène  une  ligne  à  im  premier  point 
de  l'objet  proposé,  on  aura  })our  les  projections  de  celte 
ligne  les  droites  O'A'  et  0"A".  Les  points  a'  et  a",  où 
ces  droites  coupent  les  projections  T' T'  et  T"  T"  du 
tableau,  sont  évidemment  les  projections  du  point 
de  rencontre  du  rayon  visuel  avec  le  tableau;  il  ne 
s'agit  plus  que  de  trouver  la  position  de  ce  point  sur  le 
tableau  lui-même,  que  nous  concevrons  enlevé  de  sa 
position  x'T'T"T"  et  placé  en  MN.  Un  moyen  sinq^le 
d'y  parvenir  est  de  déterminer  sur  ce  tableau  deux 
lignes  que  l'on  prendra  pour  des  axes  auxquels  tous  les 
autres  points  doivent  se  rapporter;  la  position  de  ces 
axes  étant  fixée  sur  les  plans  de  projection,  on  cber- 
chera  la  distance  à  laquelle  se  trouve,  de  cliacun  d'eux, 
le  point  de  rencontre  du  rayon  visuel  avec  :e  tableau, 
et  à  l'aide  de  ces  distances  la  situation  du  point  sur  le 
tableau  sera  facile  à  marquer.  Ces  deux  axes  pouvant 
être  pris  arbitrairement,  nous  supposerons   que,  par 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE. 


[01 


Fio^  S3 


^ 


T' 


?0>  LES    MAITRES   DE   LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

l'œil,  on  mène  deux  plans,  l'un  horizontal  et  l'aut  e 
vertical,  perpendiculaires  tous  deux  au  tableau;  leurs 
traces  sur  ceux  de  projection  seront  O'Y  et  0"X;  ils 
couperont  le  plan  du  tableau  suivant  deux  lignes,  l'une 
horizontale,  représentée  en  projection  verticale  par  le 
point  X,  et  l'autre  verticale,  représentée  en  projection 
horizontale  par  le  point  y;  ces  deux  lignes  seront  les 
axes  que  nous  adopterons  et,  sur  le  tableau,  nous  les 
représenterons,  savoir,  par  XX  l'axe  horizontal,  et 
par  Y  Y  l'axe  vertical. 

Cela  posé,  nous  avons  dit  que  a'  est  la  projection 
horizontale  du  point  où  le  rayon  visuel  mené  au  pointA 
rencontre  le  tableau  ;  ya'  sera  donc  la  distance  à  laquelle 
co  point  doit  se  trouver  de  la  verticale  passant  par  le 
point  î/,  ou  de  l'axe  YY  sur  le  tableau  MN.  Si  donc  sur 
ce  tableau  on  mène  à  droite  ou  à  gauche  de  l'axe  YY, 
selon  qu'en  projection  horizontale  a'  est  à  droite  ou  à 
gauche  de  î/,  une  parallèle  à  une  distance  égale  à  ya\ 
cette  parallèle  aa^  renfermera  le  point  cherché.  De 
n^ême  a"  étant  la  projection  verticale  du  même  point, 
xci"'  mesure  la  distance  à  laquelle  ce  point  se  trouve  de 
l'axe  horizontal,  mené  dans  le  tableau  par  le  point  x  : 
qu'on  tire  donc  sur  le  tableau  une  parallèle  a" a  à 
l'axe  XX,  en  ayant  l'attention  de  la  placer  au-dessus 
ou  au-dessous,  selon  que  dans  la  projection  verticale 
le  point  a"  sera  au-dessus  ou  au-dessous  du  point  x; 
les  deux  lignes  a'a,  a"a,  parallèles  aux  axes,  donneront 
par  leur  rencontre  le  point  cherché,  ou  la  perspective 
du  point  A;  on  peut  faire  la  même  opération  pour  tous 
les  points  de  la  pyramide  ABGDE  dont  on  obtiendra 
ainsi  la  perspective  complète. 

Quelques     observations     abrégeront    beaucoup     le 


GÉOMÉTRIE   DESCRrPTIVE.  I03 

travail;  on  remarquera  d'abord  que  la  perspective 
dune  ligne  droite  est  une  ligne  droite  lorsque  le 
tableau  est  une  surface  plane.  En  elVet,  les  rayons 
visuels  menés  de  l'œil  aux  divers  poinfs  de  la  droite 
j.roposée  sont  dans  le  plan  mené  par  cette  droite  et 
]iar  l'œil;  par  conséquent,  leurs  points  de  rencontre 
avec  le  tableau  doivent  être  sur  la  droite  d'intersec- 
tion du  tableau  par  le  plan  auquel  ils  appartiennent. 
Ainsi,  il  suffît  de  construire  les  perspectives  de  deux 
points  de  la  ligne  proposée  et  de  les  joindre  par  une 
droite,  pour  avoir  la  perspective  de  la  ligne  eFîe-même. 
Dans  l'exemple  que  nous  avons  pris,  on  pourra  donc 
se  contenter  de  construire  les  perspectives  des  cinq 
sommets  A,  B,  C,  D,  E  de  la  pyramide;  et  en  les  joi- 
gnant par  des  droites,  on  aura  les  perspectives  des 
arêtes. 

En  second  )ieu,  si  le  corps  dont  on  veut  faire  la  pers- 
pective est  opaque  et  inipérjctrablc  aux  rayons  visuels, 
la  partie  antérieure  dérobera  la  vue  de  l'autre  partie; 
il  est  donc  inutile  de  construire  la  perspective  des 
points  qui  appartiennent  à  cette  dernière;  ainsi,  dans 
l'exemple  proposé,  le  point  E  de  la  pyramide  ne  pou- 
vant être  aperçu  de  î'œil  placé  au  point  O,  il  est  inu- 
tile de  cbercher  sur  le  tableau  MN  le  point  qui  lui 
correspond. 

La  partie  visible  d'un  objet  est  séparée  de  celle  que 
l'œiî  ne  peut  apercevoir  par  une  ligne  que  Ton  appelle 
contour  apparent.  La  perspective  du  contour  apparent 
est  le  trait  qui,  sur  le  tableau,  enveloppe  l'image  de 
l'objet  qu'on  se  propose  de  représenter;  il  est  donc  im- 
portant, en  général, de  bien  détermine  r  le  contour  appa- 
rent d'nn  objet  et  d'en  faire  avec  soin  la  perspective. 


I04  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


Lorsque  les  objets  à  représenter  sont  terminés  par 
des  surfaces  planes  et  des  arêtes  reclilignes,  il  est  en 
général  facile  de  distinguer  les  faces  visibles,  pour  une 
position  déterminée  de  l'œiJ,  de  celles  qui  ne  le  sonl 
pas,  et  par  conséquent  de  reconnaître  celles  des  arêtes 
dont  l'assemblage  forme  la  ligne  du  contour  apparent. 
Mais  lorsque  ces  objets  sont  terminés  par  des  surfaces 
courbes,  le  contour  apparent  n'est  plus  formé  de  lignes 
droites  :  c'est  alors  une  courbe  qu'il  faut  déterminer 
sur  Ja  surface  du  corps,  à  l'aide  de  son  caractère  par- 
ticulier, qui  est  de  séparer  la  partie  du  corps  qui  est 
V  sible  de  celle  qui  ne  l'est  pas,  par  rapport  à  un  œil 
doiil  la  position  est  donnée.  On  voit  que  cette  re- 
cherche est  tout  à  fait  semblable  à  celle  de  la  ligne  qui 
sépare,  sur  un  corps  opaque,  la  partie  éclairée  de  la 
partie  obscure,  lorsque  le  corps  lumineux  est  un  point 
unique,  placé  à  une  distance  finie  :  il  s'agit  également 
de  trouver  la  courbe  de  t|ingence  d'un  cône  dont  le 
sommet  est  donné,  et  qui  enveloppe  un  corps  terminé 
par  une  surface  connue.  Nous  croyons  inutile  de  nous 
arrêter  à  cette  recherche,  et  nous  renverrons  aux  solu- 
tions que  nous  avons  données  des  questions  parfaite- 
ment analoo;ues,  dans  la  théorie  des  ombres. 


137.  Nous  devons  faire  connaître  ici  un  résultat  de 
perspective  très  important  par  ses  fréquentes  appli- 
cations, et  dont  l'observation  est  essentielle  pour  la 
correction  du  dessin;  il  consiste  en  ce  que  toutes  les 
fois  que  l'on  doit  mettre  en  perspective  plusieurs 
lignes  droites  parallèles  entre  elles  (mais  non  pas  au 
tableau),  sur  quelque  tableau  que  ce  soit,  les  perspec- 
tives de  ces  droites  concourent  en  un  seul  point.  Si 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  I05 

ce  tableau  est  plan,  ces  perspectives  sont  elles-mêmes 
des  lignes  droites  qui  passent  toutes  par  le  même  point, 
proposition  facile  à  démontrer. 

En  effet,  une  droite  étant  donnée  pour  la  mettre  en 
perspective,  on  conçoit  que  l'ensemble  de  tous  les 
rayons  visuels  menés  de  l'œil  à  cette  ligne  forme  un 
plan  passant  par  la  ligne  et  par  l'œil,  et  dont  l'inter- 
section par  le  tableau  trace  la  perspective  demandée; 
alors,  si  par  l'œil  on  suppose  une  droite  parallèle  à  la 
ligne  donnée,  elle  se  trouve  en  entier  dans  le  premier 
plan.  Maintenant,  qu'on  ait  une  seconde  ligne,  paral- 
lèle à  la  première,  à  mettre  également  en  perspective, 
et  que  l'on  considère  aussi  le  plan  passant  par  cette 
ligne  et  par  l'œil,  comme  traçant  par  son  intersection 
avec  le  tableau  la  perspective  qu'il  s'agit  d'obtenir, 
puis  qu'on  mène  par  l'œil  une  droite  parallèle  à  la 
seconde  ligne  donnée,  elle  sera  entièrement  dans  le 
second  plan.  Mais  les  deux  lignes  données  étant  paral- 
lèles, les  droites  qu'on  mène  par  l'œil,  parallèlement 
à  la  première  et  à  la  seconde,  se  confondent  en  une 
seule  qui  est  en  même  temps  dans  le  premier  plan  et 
dans  le  second  :  elle  est  donc  leur  ligne  d'intersection; 
le  point  où  elle  rencontre  le  tableau  est  par  conséquent 
celui  où  se  croisent  les  lignes  suivant  lesquelles  ces 
plans  coupent  le  tableau,  ou,  ce  qui  revient  au  même, 
celui  où  concourent  les  perspectives.  Il  suit  de  là  que, 
pour  mettre  en  perspective  tant  de  droites  parallèles 
qu'on  voudra,  il  n'y  a  qu'à  mener  par  l'œil  une  ligne 
<iui  leur  soit  parallèle;  le  point  où  cette  dernière  ren- 
contrera le  tableau  sera  le  point  de  concours  auquel 
tendront  les  perspectives  de  toutes  ces  droites. 

Les  projections  de  la  droite  menée  par  l'œil  sont 


Io6  LES   MAITRES   DE    LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

parallèles  à  celles  de  la  ligne  à  mettre  en  perspective, 
et  sont  par  conséquent  faciles  à  construire;  on  a  les 
traces  du  tableau  sur  les  plans  de  projection  :  il  est 
donc  aisé  de  trouver  le  point  de  rencontre  de  la  droite 
et  du  tableau. 

Le  résultat  que  nous  venons  d'expos^er  peut  abréger 
beaucoup  les  opérations,  lorsque  te  tableau  est  une 
surface  plane,  et  qu'il  s'agit  de  tracer  les  perspectives 
de  différentes  lignes  parallèles.  Dans  ce  cas,  ces  pers- 
pectives sont  elles-mêmes  des  lignes  droites,  et  leur 
point  de  concours  étant  déterminé  ainsi  que  nous 
l'avons  indiqué,  il  suffira,  pour  les  tracer,  de  connaître 
sur  le  tableau,  relativement  à  chacune  d'elles,  la  pers- 
pective d'un  second  point. 

Mais  ce  n'est  pas  seulement  co^nime  moyen  d'abré- 
viation que  ce  que  nous  venons  de  dire  doit  être 
considéré;  c'est  encore  lo  procédé  le  plus  sûr  pour 
éviter  des  incorrections  dont  notre  œil  est  facilement 
blessé.  Nous  sommes  en  général  moins  sensibles  aux 
grandeurs  réelles  des  objets  qu'au  parallélisme  des 
lignes  que  nous  jugeons  devoir  être  parallèles.  Que 
deux  lignes  soient  un  peu  plus  éloignées  ou  un  peu 
plus  rapprochées  l'une  de  l'autre  qu'elles  ne  doivent 
l'être,  il  faudra  un  œil  exercé  et  quelque  attention 
pour  saisir  ce  défaut;  mais  si  elles  doivent  être  paral- 
lèles et  qu'elles  ne  le  soient  pas,  nous  nous  en  aper- 
cevrons sur-le-champ  et  nous  en  serons  vivem^ent 
choqués.  Si  donc,  lorsqu'on  met  en  perspective  plu- 
sieurs lignes  parallèles,  les  perspectives  qui  doivent 
concourir  au  même  point  n'y  concourent  pas  en  effet, 
cette  erreur  blesse  extrêmement  l'observateur,  et  les 
parallèles  ne  lui  paraissent  plus  telles;  ainsi,  on  peut 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  I07 

toujours  regarder  comme  essentiel  de  déterminer  sur 
le  tableau  le  point  d^  concours  des  lignes  qui  repré- 
sentent les  perspectives  de«  droites  parallèles,  afin 
d'être  sûr  que  les  perspectives  passent  par  ce  point. 

Dans  l'exposition  dn  procédé  de  construction  que 
nous  avons  domné  ci-dc«sus,  nous  avons  supposé  que 
le  plan  vertical  de  projection  était  perpendiculaire 
au  i)lan  du  tableau;  nous  avons  trouve  dans  cette  dis- 
posilion  l'avantage  d'avoir  le  tableau  projeté  en 
entier  sur  une  seule  ligne.  Si  le  tableau  était  oblique 
au  plan  vertical  de  projection,  pour  trouver  la  hauteur 
de  chaque  point  de  la  perspective  au-dessus  de  l'axe 
horizontal  auquel  on  le  rapporte,  il  faudrait,  du  point 
où  la  projection  horizontale  du  rayon  visnel  rencontre 
la  trace  horizontale  du  tableau,  abaisser  une  perpen- 
diculaire sur  l'intersection  des  deux  plans  de  projec- 
tion, et  la  prolonger  jusqu'à  la  rencontre  de  la  projec- 
I  ion  verticale  du  rayon  a  isuel.  Ce  travail,  quoique  assez 
long,  peut  dans  quelques  circonstances  être  moins 
pénible  que  la  construction  préliminaire  d'une  projec- 
tion verticale  sur  un  plan  perpendiculaire  an  tableau. 

Supposons  qu'on  ait  à  mettre  en  perspective  une 
suite  de  pilastres  semblables,  et  dont  la  direction  soit 
oblique  ati  plan  du  tableau  ;  il  serait  fort  long  d'en  faire 
la  projection  sur  un  plan  verlical  perpendiculaire  au 
tableau,  mais  en  la  faisant  sur  un  plan  perpendiculaire 
à  la  direction  des  pilastres,  elle  se  réduit  à  la  projec- 
tion d'un  seul  d'enire  eux.  On  voit  que,  dans  ce  cas, 
il  devient  préférable  d'adopter  cette  dernière  disposi- 
tion, malgré  l'inconvénient  d'avoir  une  ligne  de  plus 
à  tracer  pour  construire  la  perspective  de  chaque 
point. 


Io8  LES    MAITRES    DE    LA    PENSÉE    SCIENTIFIQUE. 

I:î8.  En  général,  lo  problème  que  présente  la  pers- 
pective linéaire,  en  le  considérant  dans  ses  éléments, 
se  réduit  à  construire  le  point  de  rencontre  du  tableau, 
par  le  rayon  visuel  mené  de  l'œil  à  un  point  déter- 
miné; et  il  est  utile  de  connaître  plusieurs  moyens  de 
le  résoudre,  afin  de  faire  usage,  en  chaque  circons- 
tance, de  ceux  qui  exigent  le  moins  de  travail.  La  plu- 
part des  méthodes  données  dans  les  ouvrages  qui 
traitent  de  la  perspective,  et  particulièrement  celle 
que  nous  avons  déjà  développée,  rentrent  dans  le 
mode  général  de  solution  que  nous  allons  indiquer. 

Si,  par  le  point  à  mettre  en  perspective  et  par  l'œil, 
on  conçoit  deux  plans  difterents,  le  rayon  visuel  se 
confondra  avec  leur  intersection,  et  comme  iis  cou- 
peront nécessairement  le  tableau,  si  l'on  construit  les 
lignes  ou  les  traces  suivant  lesquelles  ils  le  rencontrent, 
le  point  où  ces  traces  se  croiseront  appartiendra  à 
l'intersection  des  deux  plans  entre  eux,  et  sera  par 
conséquent  le  lieu  de  rencontre  du  rayon  visuel  et  du 
tableau.  C'est  au  dessinateur  à  choisir  parmi  le  nombre 
infin  de  plans  qui  peuvent  passer  par  l'œil  et  par  le 
point  à  mettre  en  perspective,  les  deux  plans  dont  il 
lui  est  le  plus  facile  de  déterminer  les  traces  sur  le 
tableau,  l^^n  les  prenant  perpendiculaires,  chacun  à 
l'un  des  plans  de  projection,  on  retombe  sur  la  méthode 
de  construction  que  nous  avons  déjà  donnée.  Il  peut 
être  souvent  avantageux  de  supposer  l'un  des  plans 
perpendiculaire  au  tableau  même;  dans  ce  cas,  il  est 
aisé  de  voir  que  sa  trace  passera  par  les  pieds  des  per- 
pendiculaires abaissées  de  l'œil  et  du  point  proposé  sur 
le  tableau.  Plus  généralement,  si  l'on  conçoit,  par  le 
point  et  par  l'œil,  deux  lignes  parallèles  entre  elles, 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE,  I09 

l'inlerseclioli  du  tableau  et  du  plan  qui  les  contient 
}>assera  par  les  points  où  le  tableau  est  lui-même  ren- 
contré par  ces  parallèles. 

Ces  diverses  observations  sufliscnl  \)cm'  nu  tliv  les 
]»«;rsoniies,  (pii  sont  au  courant  des  méthodes  de  la 
(Jéoniéfrie  descriptive,  en  état  d'abréger  dans  un  grand 
nombre  de  cas  et  de  simplifier  beaucoup  les  opérations 
«pi'exige  la  pratiipie  de  la  perspective  linéaire. 

Supposons  maintenant  (jue  le  tableau  n<'.  soit  plus 
un  plan,  mais  une  surface  courbe  donnée;  les  considé- 
rations que  nous  venons  d'exposer  doivent  en  général 
conduire,  pour  chaque  cas,  à  la  plus  avantageuse  des 
constructions  possibles.  En  elîet,  parmi  tous  les  plans 
passant  par  l'œil  et  par  le  point  dont  on  demande  la 
])erspective,  et  qui  contiennent  en  conséquence  le 
rayon  visuel,  on  peut  toujours  choisir  celui  qui, 
d'après  la  nature  connue  de  la  surface  proposée  pour 
tableau,  doniK^  par  son  intersection  avec  ce  laltleau 
la  courbe  la  plus  aisée  à  construir»  ,  soit  sur  le  plan 
même  que  l'on  considère,  soit  dans  Tune  de  ses  pro- 
jections. Il  sera  ensuite  facile  de  trouver  Tinlersec- 
tions  de  cette  courbe  avec  le  rayon  visuel,  ce  (jui  déter- 
minera le  point  où  le  rayon  rencontre  le  tableau. 

Si,  par  exemple,  le  tableau  était  une  surface  sphé- 
ricpie,  il  faudrait  que  le  plan  mené  par  l'œil  et  par  le 
point  à  mettre  en  perspective  passât  également  par 
le  centre  de  la  sphère;  alors  l'intersection  serait 
toujours  un  grand  cercle,  dont  on  trouverait  facile- 
ment sur  le  plan  même  la  rencontre  par  le  rayon 
visuel. 

Si  le  tableau  était  une  surface  conique,  on  ferait 
passer  constamment  le  plan  contenant  le  rayon  visuel 


LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE. 


par  le  sommet  du  cône  ;  l'intersection  de  ce  plan  avec 
le  tableau  serait  une  ligne  droite  dont  on  trouverait 
sans  peine  les  projections,  et  leur  point  de  rencontre 
avec  celles  du  rayon  visuel. 

Les  panoramas  sont  des  perspectives  tracées  sur  des 
surfaces  cylindriques  verticales  à  base  circulaire,  le 
point  de  vue  étant  pris  sur  l'axe  même  de  ces  surfaces. 
Pour  mettre  un  point  quelconque  en  perspective  sur 
la  surface  d'un  cylindre  vertical,  on  concevia  par  l'œil 
et  par  le  point  proposé  un  plan  vertical  qui  coupera 
cette  surface  suivant  une  de  ses  arêtes,  déterminée  par 
la  rencontre  de  la  trace  horizontale  du  plan  avec  la 
circonférence  du  cercle  servant  de  base  au  cylindre. 
Que  l'on  fasse  la  projection  verticale  de  cette  arête,  sa 
rencontre  avec  la  projection  verticale  du  rayon  visuel 
déterminera  la  hauteur  à  laquelle  le  rayon  visuel  ren- 
contre la  surface  du  cylindre,  au-dessus  de  la  base 
de  ce  dernier;  et  il  sera  facile,  d'après  ces  données, 
de  construire  la  perspective  du  point  proposé,  soit  sur 
la  surface  même  du  cylindre,  soit  sur  le  tableau  sup- 
posé développé. 

139.  Ce  qui  précède  donnant  les  moyens  de  ré- 
soudre toutes  les  questions  que  peut  présenter  la  pers- 
pective, nous  n'ajouterons  plus  que  quelques  observa- 
tions. 

Lorsqu'on  a  un  tableau  offrant  la  perspective  d'un 
objet,  prise  d'un  point  déterminé,  on  peut  en  déduire 
le  tracé  d'une  perspective  du  même  objet  prise  du 
même  point  de  vue,  et  sur  un  tableau  différent.  En 
effet,  l'œil  et  le  premier  tableau  étant  déterminés  de 
pasition,  la  direction  des  rayons  visuels  menés  de  l'œil 


GEOMETRIE  DESCRIPTIVE.  i!t 


à  chacun  des  points  de  l'objet  représenté  se  trouve 
fixée,  et  l'on  peut  en  déduire  par  conséquent  leur  ren- 
contre avec  la  surface  d'un  autre  tableau  dont  la  posi- 
lion  est  donnée. 

Mais  ce  qu'on  vient  de  dire  ne  saurait  plus  avoir 
lieu,  si  l'on  prenait  un  autre  point  de  vue  ;  rien  dans  ce 
cas  ne  déterminant  la  direction  des  rayons  visuels,  et 
une  simple  perspective  ne  sufîisant  pas  pour  définir 
l'objet  représenté.  Une  perspective  est  une  sorte  de 
]»rojeclion  qui  ne  diffère  de  la  projection  orthogonale, 
dont  on  lait  haibituellement  usage,  qu'en  ce  que  la 
pre>niière  «'opère  par  des  lignes  qui  concourent  au 
]>0'int  de  vue  d'où  la  perspective  est  prise,  tandis  que, 
])our  la  seconde,  ces  lignes  sont  perpendiculaires  au 
pian  de  projection;  or,  on  sait  qu'un  objet  n'est  com- 
plètement défini  qu'à  l'aide  de  deux  })rojections  :  il  ne 
le  serait  également  qu'à  l'aide  de  deux  perspectives, 
par  rapport  à  chacune  desquelles  on  connaîtrait  la 
position  du  point  de  vue. 

Nous  terminerons  ici  nos  recherches  sur  la  partie 
géométrique  de  la  théorie  des  ombres  et  de  la  perspec- 
tive. Les  méthodes  que  nous  avons  exposées  em- 
brassent, relativement  à  la  représentation  des  objets, 
à  peu  près  tout  ce  qui,  dans  l'usage,  est  susceptible 
d'un  tiacé  rigoureux.  Ainsi,  divers  objets  étant  pro- 
posés et  déterminés  par  leurs  projections,  si  on  les 
suppose  éclairés  d'une  manière  connue,  on  construira 
les  contours  des  parties  éclairées  et  des  parties 
obscures  sur  la  surface  de  chacun  d'eux,  et  ceux  des 
ombres  qu'ils  portent  les  uns  sur  les  autres,  puis  on 
tracera  sur  un  tableau  d'une  forme  donnée  la  pers- 
pective de  ces  mêmes  objets,  ainsi  que  des  contours  de 


LES   MAITRES   DE    LA    PENSÉE    SCIENTIFIQUE. 


eiirs  ombres,  prise  d'un  point  connu;  il  ne  restera 
plus,  pour  compléter  leur  représentation,  qu'à  donner 
aux  diverses  parties  de  leur  image  les  teintes  avec 
lesquelles,  dans  la  réalité,  elles  s'ofl'rent  à  nos  regards. 


DE  LA  DÉTERMINATION  DES  TEINTES  DANS  LA  REPRÉ- 
SENTATION DES  OBJETS,  ET  DE  LA  PERSPECTIVE 
AÉRIENNE. 

140.  La  partie  de  la  théorie  des  ombres  et  de  la  pers- 
pective dont  nous  avons  maintenant  à  nous  occuper 
est  très  compliquée,  et  a  besoin  d'être  étudiée  avec 
plus  de  soin  qu'elle  ne  l'a  été  jusqu'à  présent;  elle 
exige  quelques  connaissances  physiques  et  surtout 
un  grand  nombre  d'observations. 

Malheureusement,  les  peintres,  qui  sont  obligés  de 
réfléeliir  à  tout  moment  sur  cette  matière,  publient 
peu  les  résultats  de  leurs  méditations  sur  leur  arl. 
Peut-être  plusieurs  découvertes  curieuses,  des  obser- 
vations importantes,  demeurent-elles  ignorées  et 
perdues  pour  l'instruction  générale,  parce  que  les 
artistes  qui  les  ont  faites  n'ont  pas  su  en  rendre  un 
compte  précis,  ou  ont  négligé  de  prendre  ce  soin.  Nous 
sommes  bien  loin  de  présenter  les  recherches  que  nous 
allons  exposer  comme  un  corps  complet  de  doctrine  ; 
ce- ne  sojil  que  des  idées  jetées  en  avant  el  destinées  à 
ouvrir  une  carrière  à  peu  près  nouvelle;  puissent  nos 
essais  faire  naître  des  recherches  plus  profondes,  et 
devenir  amsi  pour  la  science  le  principe  de  quelques 
progrès  ultérieurs. 

La    teinte    qu'offre    à    notre    vue    un    objet    éclairé 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE.  Il) 


dépend,  premièroinent,  de  l'intensité  propre  de  la  lu- 
mière reçue  du  corps  lumineux  et  renvoyée  à  notre 
œil,  et  de  la  manière  dont  a  lieu  sa  distribution  sur  la 
surface  de  l'objet,  et  la  réflexion  qui  la  fait  parvenir 
jusqu'à  nous;  secondement,  des  modifications  que  la 
lumière  éprouve  par  l'elïet  des  milieux  ou  d«'  l'air 
qu'elle  traverse,  et  des  autres  circonstances  aux<|uelles 
elle  est  soumise  :  c'est  dans  cet  ordre  que  se  suivront 
les  considérations  auxquelles  nous  allons  nous  livrer. 
Commençons  par  chercher  l'intensité  de  la  lumièi'c 
venant  du  corps  lumineux  à  l'objet  éclairé  et,  pour 
plus  de  simplicité,  supposons  que  le  corps  lumineux 
soit  unique,  et  considérons-le  comme  réduit  à  un  point. 
On  sait  que  V intensité  de  la  lumière  émise  par  un  point 
lumineux  diminue  en  raison  im>erse  du  carré  de  la  dis- 
tance; il  est  évident,  d'après  ce  principe,  que  plus 
l'objet  éclairé  est  éloigné  du  corps  lumineux,  moins 
il  en  reçoit  de  clarté.  Cette  observation  n'est  pas  d'une 
très  grande  importance  dans  les  arts  du  dessin,  parce 
qu'on  suppose  habituellement  les  objets  éclairés  par 
le  Soleil.  Dans  ce  cas,  la  distance  du  corps  lumineux 
étant  immense,  par  rapport  aux  dimensions  des 
objets  éclairés  et  aux  distances  qui  les  séparent  entre 
eux,  elle  peut  être  regardée  comme  égale  pour  tous,  et 
que  par  conséquent  il  n'y  a  aucune  diiïérence  entre 
l'intensité  de  la  lumière  qui  parvient  aux  divers  points 
des  objets  que  l'on  considère;  mais  si  l'on  avait  à 
représenter  une  scène  nocturne,  éclairée  par  une  lampe 
ou  un  foyer,  il  faudrait  avoir  égard  aux  distances  des 
objets  éclairés  au  corps  lumineux,  et  donner  une  clarté 
plus  vive  à  ceux  qu'on  voudrait  faire  ]>araître  plus 
voisins  du  point  d'où  pari  la  lumière. 

MONUI  .  —  11.  S 


l4  LES   MAITRES   DE   LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


« 


Ce  que  nous  venons  de  dire  n'est  relatif  qu'aux 
parties  éclairées;  quant  aux  parties  dans  l'ombre,  dès 
qu'on  suppose  qu'il  n'y  a  qu'un  seul  point  lumineux, 
et  qu'on  fait  abstraction  de  tout  ce  qui  peut  réfléchir 
la  lumière,  elles  ont  toutes  une  intensité  égale,  elles 
sont  toutes  d'un  noir  absolu.  Cette  assertion  peut 
paraître  extraordinaire,  parce  que  nous  ne  sommes 
pas  habitués  à  voir  les  corps  éclairés  de  cette  manière; 
le  Soleil  est  bien  pour  nous,  dans  le  jour,  la  cause  de 
la  lumière,  mais  les  autres  corps  la  réfléchissent  et 
nous  la  renvoient,  tellement  qu'il  lait  clair  où  les 
rayons  directs  du  Soleil  n'arrivent  pas,  et  que  nous 
n'avons  jamais  occasion  de  voir  une  ombre  complète  : 
on  ne  peut  s'en  former  une  idée  que  par  les  expériences 
de  la  chambre  noire,  et  surtout  par  celles  du  micro- 
scope solaire.  Lorsqu'on  introduit  dans  la  chambre 
noire  un  faisceau  de  rayons  solaires,  en  les  faisant 
tomber  sur  un  verre  lenticulaire;  ces  rayons  se  réu- 
nissent au  foyer,  s'y  croisent  et  de  là  divergent,  en 
formant  un  cône  de  lumière  qui  se  projette,  suivant 
un  cercle  très  lumineux,  sur  le  mur  opposé  de  la 
chambre.  Que  l'on  dispose  un  tableau  très  blanc  pour 
recevoir  ce  cercle  lumineux,  et  qu'au-devant  l'on 
place  un  objet  qui  intercepte  une  partie  des  rayons, 
l'ombre  paraîtra  du  noir  le  plus  intense  et  sera  ter- 
minée par  un  contour  très  précis,  très  tranché.  Dans 
ce  cas,  en  efl^et,  la  lumière  part  d'un  point  unique,  le 
foyer  du  verre  lenticulaire  par  lequel  passent  les 
rayons  lumineux;  et  il  n'y  a  pas  assez  de  lumière  ré- 
fléchie pour  diminuer  sensiblement  l'obscurité  de  la 
chambre  noire,  dans  les  parties  où  les  rayons  n'arrivent 
pas  directement. 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  Ii5 


141.  Considérons  maintenant  la  lumière  renvoyée 
de  l'objet  éclairé  à  l'œil  de  l'observa tevir.  Si  elle  avait 
à  traverser  un  milieu  parfaitement  libre,  qui  ne  lui 
oll'rit  aucune  résistance,  qui  n'en  interceptât  aucune 
partie,  deux  objets  de  la  même  clarté  paraîtraient 
à  notre  œil  de  la  même  clarté,  quelle  que  fût  leur  dis- 
lance  par  rapport  à  nous.  Pour  s'en  rendre  compte, 
que  l'on  conçoive  deux  cercles  égaux,  également 
éclairés,  et  situés  sur  des  plans  également  inclinés  par 
rapport  aux  rayons  menés  de  leurs  centres  à  l'œil; 
l'intensilé  de  la  lumière  renvoyée  par  chacun  d'eux 
décroîtra  en  raison  inverse  du  carré  de  leurs  distances 
jusqu'à  l'œil,  mais  en  même  temps  les  grandeurs  des 
images,  suivant  lesquelles  ces  cercles  se  peindtont  à 
l'œil,  décroîtront  aussi  en  raison  inverse  des  carrés 
des  mêmes  distances.  Ainsi,  d'une  part,  si  la  lumière 
renvoyée  par  tous  les  points  du  cercle  le  plus  éloigné 
est  moins  intense,  d'une  autre  part,  elle  est  plus  ras- 
semblée et  se  condense  pour  nous  ofîrir  une  image  plus 
resserrée;  ces  deux  cfTets  contraires  se  trouvant  dans 
le  même  rapport,  se  balancent  pour  donner  lieu  à  la 
sensation  que  notre  œil  éprouve,  et  il  en  résulte  que 
les  deux  cercles  placés  à  des  distances  inégales  doivent 
pourtant  présenter  la  même  clarté. 

Cependant,  il  n'en  est  pas  ainsi  dans  la  nature,  parce 
«lue  l'air  dans  lequel  se  meut  la  lumière  n'est  pas  com- 
plètement transparent.  Nous  chercherons  plus  tard  à 
apprécier  les  altérations  que  sa  transparence  impai  faite 
fait  éprouver  aux  rayons  lumineux,  mais  nous  devons 
auparavant  examiner  comment  la  lumière  se  comporte 
à  la  surface  des  corps  éclairés,  soit  pour  s'y  distribuer, 
soit  pour  revenir  à  notre  œil. 


llO  LES    MAITRES    DE    LA    PENSÉE    SCIENTIFIQUE. 

Nous  diviserons  les  surfaces  en  deux  classes,  rela- 
tivement à  la  manière  dont  elles  reçoivent  et  renvoient 
la  lumière,  savoir,  les  surfaces  polies  et  les  surfaces 
mates. 

Nous  ne  connaissons  pas  de  surfaces  parfaitement 
polies,  mais  nous  regarderons  comme  approchant  de 
cet  état  celles  qui  forment  miroir.  On  sait  que  les 
rayons  de  lumière,  qui  viennent  frapper  une  surface 
polie,  sont  réflécliis  en  faisant  l'angle  de  réflexion  égal 
à  l'angle  d'incidence.  Si  la  lumière  émane  d'un  point 
unique,  chaque  point  de  la  surface  polie  ne  reçoit  et 
ne  réfléchit  qu'un  rayon,  et  parmi  ces  rayons  un  seul 
parvient  à  l'œil;  tous  les  autres  lui  échappent  :  l'œil 
n'aperçoit  donc  que  le  point  de  la  surface  qui  lui 
renvoie  ce  rayon;  le  reste  est  pour  lui  dans  une  com- 
plète obscurité,  et  le  point  visible  en  paraît  d'autant 
plus  brillant.  La  surface,  la  position  de  l'œil  et  celle 
du  point  lumineux  étant  connues,  la  détermination 
du  point  brillant  est  un  problème  de  Géométrie  des- 
criptive, dont  la  solution  est  plus  ou  moins  compliquée, 
suivant  la  génération  de  la  surface  proposée;  il  s'agit, 
en  effet,  de  trouver  sur  cette  surface  un  point  tel,  que 
menant  de  là  des  lignes  à  l'œil  et  au  point  lumineux, 
ces  lignes  soient  dans  un  plan  perpendiculaire  au 
plan  tangent  et  fassent  avec  lui  des  angles  égaux  (34). 
11  est  facile  de  voir  qu'en  supposant  la  surface  polie 
assez  étendue,  il  doit  y  avoir  en  général  un  point  bril- 
lant. Sur  les  surfaces  planes,  sur  celles  qui  ont  dans 
un  sens  des  éléments  plans  indéfinis,  telles  que  les  sur- 
faces cylindriques,  coniques  et  développables,  il  ne 
peut  se  trouver,  ainsi  que  sur  les  surfaces  arrondies, 
que  des  points  lirillants,  et  non  pas  des  lignes  ou  des 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  II7 

arêtes  brillantes,  du  moins  tant  que  la  lumière  vient 
d'un  point  unique.  Si  elle  vient  d'un  corps  de  dimen- 
sions finies,  plusieurs  points  de  la  surface  })olie  ren- 
voient à  l'œil  des  rayons  dont  l'ensemble  lui  présente 
l'image  plus  ou  moins  altérée  du  corps  lumineux;  le 
reste  demeure  d'un  noir  d'autant  plus  parfait  que  la 
surface  est  plus  polie.  Lors  donc  que  l'on  doit  repré- 
senter un  corps  poli,  il  faut,  après  avoir  déterminé  la 
position  du  point  brillant,  p(  iiulre  ce  point  d'un  blanc 
très  éclatant  et  tenir  le  reste  du  corps  dans  l'obscu- 
rité. 

Les  surfaces  mates,  dont  se  compose  la  seconde 
classe,  beaucoup  plus  nombreuse  (pie  la  première, 
diffèrent  des  surfaces  polies  en  ce  que,  de  tous  leurs 
points  auxquels  parviennent  des  rayons  du  corps 
lumineux,  elles  en  renvoient  à  notre  œil,  à  moins 
qu'un  corps  interposé  n'y  mette  obstacle. 

Il  est  assez  facile  de  se  faire  une  idée  précise  de  la 
quantité  de  lumière  que  cbaque  partie  d'une  surfaces 
quelconque  reçoit  du  corps  lumineux  que,  pour  plus 
de  simplicité,  nous  regarderons  comme  un  point 
unique.  On  sait  déjà,  qu'abstraction  faite  de  l'obli- 
(piité  suivant  laquelle  la  surface  présente  chacune  de 
ses  parties,  l'intensité  de  la  lumière  qui  lui  arrive  est  en 
raison  inverse  du  carré  de  la  distance  du  point  lumi- 
neux. De  plus,  si  l'on  conçoit  que  ce  point  soit  le 
centre  d'une  sphère,  la  quantité  de  rayons  reçue  par 
un  élément  de  la  surface  éclairée  pourra  se  mesurer 
par  la  portion  de  la  surface  de  la  sphère  comprise  dans 
le  cône  dont  le  sommet  est  au  point  lumineux,  et  dont 
la  base  est  l'élément  de  la  surface  proposée.  Plus  cet 
élément  sera   oblique,   par  rapport   aux  rayons   qu'il 


LES   MAITRES   DE  LA   PENSEE   SCIENTIFIQUE, 


reçoit,  plus  le  cône  sera  resserré,  et  moins  la  portion  de 
la  surface  de  la  sphèlie  qui  s'y  trouve  comprise  aura 
d'étendue.  On  peut  donc  en  conclure,  que  plus  la  sur- 
face éclairée  se  présente  obliquement  aux  rayons 
lumineux,  et  moins  elle  recevra  de  lumière.  On  exprime 
d'une  manière  mathématique  ces  résultats,  en  disant 
que  pour  chaque  point  de  la  surface,  V intensité  de  la 
lumière  est  en  raison  directe  du  sinus  de  Vangle  d-'inci- 
dence  du  rayon  sur  le  plan  tangent  en  ce  point,  et  en 
raison  inverse  du  carré  de  la  distance  au  point  lumi- 
neux. 

II  est  plus  difficile  d'apprécier  d'une  manière  satis- 
faisante, comment  la  lumâèrc  est  réfléchie  par  les 
corps  mats,  (ît  quelle  quantité  chaque  partie  de  leur 
surface  en  fait  parvenir  à  notre  œil.  Cette  recherche 
dépend  de  la  contexture  de  l'enveloppe  des  corps;  et 
nos  connaissances  physiques  sont  trop  imparfaites, 
pour  nous  fournir  les  données  qui  nous  seraient  néces- 
saires :  ce  que  nous  allons  dire  sera  donc  fondé  sur  des 
hypothèses;  nos  résultats  ne  seront  <iue  probables,  et 
nous  ne  les  proposons  que  jusqu'à  ce  que  l'on  puisse 
les  remplacer  par  d'autres,  fondés  sur  une  théorie 
plus  certaine. 

Nous  admettrons  donc  que  chacune  des  molécules 
qui  appartiennent  à  une  surface  mate  agit  à  la  ma- 
nière d'un  corps  lumineux,  en  réfléchissant  dans  tout 
l'espace  libre  la  lumière  qu'elle  a  reçue  et  qu'elle 
n'absorbe  pas.  On  sent  que  ces  molécules  doivent 
offrir  une  infinité  d'aspérités,  qui  ne  sont  sensibles 
pour  nous  qu'en  ce  que  le  corps  nous  paraît  mat,  et 
qui  n'empêchent  pas  que  la  surface  qui  l'enveloppe 
ne  soit  à  nos  yeux  unie  et  continue.  Dans  cette  hypo- 


GEOMETRIE  DESCRIϻTIVE.  II<) 

thèse,  chaque  molécule  placée  à  la  surface  du  corps 
nous  renvoie  un  rayon  de  lumière.  Considérons  un 
clément  de  la  surface  ;  nous  avons  déjà  vu  que  la  dis- 
tance à  laquelle  se  trouve  de  nous  cet  élément  influe 
sur  la  grandeur  de  l'image  qu'il  nous  présente,  mais 
non  sur  la  clarté  avec  laquelle  il  nous  apparaît,  autant 
du  moins  qu'on  n'a  aucun  égard  aux  altérations 
qu'éprouve  la  lumière  par  l'elfet  du  défaut  de  trans- 
parence de  l'air  qu'elle  traverse  pour  nous  parvenir. 
L'ensemble  des  rayons  réfléchis  par  tous  les  points 
appartenant  à  cet  élément  et  dirigés  vers  l'œil 
forment  un  cône  dont  l'élément  est  la  base  et  l'œil 
le  sommet,  et  le  noinbre  des  rayons  compris  dans  ce 
cône  est  proportionnel  à  l'étendue  de  l'élément  de  la 
surface.  Si  l'on  conçoit  une  sphère  dont  l'œil  soit  le 
centre,  et  d'un  rayon  égal  à  la  distance  comprise  entie 
la  base  du  cône  et  l'œil,  la  portion  de  la  surface  de 
cette  spiière,  qui  sera  comprise  dans  le  cône,  donnera 
la  mesure  de  l'espace  angulaire  dans  lequel  les  rayons 
se  trouvent  réunis.  L'intensité  de  la  lumière  arrivant 
à  l'œil  pourra  donc  s'évaluer,  par  le  rapport  de 
l'étendue  de  l'élément  que  nous  considérons  à  celle 
de  cette  portion  de  la  surface  de  la  sphère.  L'étendue 
de  l'élément  restant  la  même,  celle  de  la  portion  cor- 
respondante de  la  surface  de  la  sphère  sera  d'autant 
moins  grande,  que  cet  élément  fera  un  angle  plus  aigu 
avec  les  rayons  visuels;  ainsi,  l'intensité  de  la  lumière 
réfléchie  par  la  surface  mate  sera  d'autant  moindre, 
que  cette  surface  approchera  plus  d'être  perpendicu- 
laire aux  rayons  qu'elle  nous  renvoie,  ce  qu'on  peut 
exprimer  d'une  manière  mathématique,  en  disant  que 
pour  chaque  élément  de  la  surface,   celle    intensité  est 


l'}.()  LES    MAITRES    DE   LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE. 

en  raison  im^erse  du  sinus  de  Vangle  que  fait  le  plan 
tangent  ai^ec  le  rayon  visuel. 

Ce  résultat  ne  doit  pas  être  interprété  à  la  rigueur, 
lorsque  l'angle  dont  il  s'agit  est  presque  nul;  dans  ce 
cas,  les  aspérités  de  la  surface  mate,  se  couvrant  en 
partie  les  unes  les  autres,  nous  dérobent  une  portion  de 
la  lumière  qu'elles  devraient  nous  faire  parvenir.  Ainsi, 
en  regardant  une  surface  plane  mate  sous  un  angle 
très  aigu,  on  ne  la  voit  pas  avec  une  clarté  très  intense, 
comme  l'indique  l'expression  analytique  que  nous 
avons  proposée;  cette  expression  devient  alors  incom- 
plète, parce  qu'elle  ne  tient  pas  compte  des  petites 
aspérités,  dont  la  surface  est  couverte,  et  des  rapports 
de  leurs  dimensions  avec  les  distances  qui  les  séparent. 

Nous  citerons  un  exemple  remarquable  à  l'appui  du 
résultat  précédent. 

La  Lune  peut  être  regardée  comme  un  corps  mat, 
éclairé  par  le  Soleil,  dont  il  nous  renvoie  les  rayons.  Si 
cet  astre  était  enveloppé  d'une  atmosphère,  les  rayons 
qu'il  nous  renvoie  des  bords  de  son  disque  auraient  à  la 
traverser  sur  une  plus  grande  épaisseur  et,  sans  doute, 
ils  nous  arriveraient  plus  affaiblis  que  ceux  qui  vien- 
draient du  centre.  Mais  les  observations  astronomiques 
prouvent  que  la  Lune  n'a  point  d'atmosphère  sensible; 
et,  à  raison  de  sa  forme  sphérique,  nous  devons  voir 
près  de  ses  bords  une  plus  grande  étendue  de  surface 
sous  un  même  angle  visuel  :  il  doit  donc  nous  arriver 
de  là  plus  de  rayons  réfléchis,  et  les  bords  doivent,  en 
conséquence,  nous  paraître  plus  éclairés;  aussi  obser- 
vera-t-on  que  la  clarté  de  la  Lune  a  plus  d'intensité  sur 
le  contour  de  son  disque  que  dans  son  milieu. 

La  nature  nous  offre  un  grand  nombre  de  corps  dont 


GEOMETRIE    DESCRIPTIVE. 


les  surfaces  sont  intermédiaires  aux  deux  classes 
exi renies  que  nous  venons  de  considérer,  et  participent 
jusqu'à  un  certain  point,  comme  le  démontre  l'expé- 
rience, aux  propriétés  des  surfaces  polies  et  des  sur- 
faces mates.  Relativement  à  ces  corps,  on  peut 
admettre  que  les  molécules  ({ui  appartiennent  à  leur 
enveloppe  extérieure  sont  des  petites  sphères  à  peu 
près  polies,  réfléchissant  en  partie  la  lumière,  à  la  ma- 
nière des  corps  polis,  et  plus  ou  moins  engagées  dans  la 
solidité  même  du  corps  proposé,  selon  que  son  poli 
est  plus  ou  moins  parfait.  Si  elles  étaient  isolées, 
chacune  olîrirait  un  point  brillant;  mais  comme  elles 
ne  nous  laissent  voir  qu'une  partie  de  leur  contour, 
toutes  ne  peuvent  pas  nous  présenter  un  point  de  ce 
genre  :  celles-là  seules  jouissent  de  cette  propriété, 
pour  lesquelles  le  point  brillant  tombe  sur  leur  seg- 
ment antérieur  et  visible,  qui  se  confond  sensiblement 
avec  la  surface  générale  du  corps.  On  peut  conclure  de 
là,  que  si,  sur  la  surface  du  corps  proposé  considérée 
comme  continue,  on  cherche  la  position  du  point 
brillant,  ainsi  qu'on  le  ferait  dans  le  cas  où  le  corps 
serait  poli,  on  aura,  en  quelque  sorte,  le  centre  de  la 
partie  de  la  surface  où  se  trouvent  les  molécules  polies, 
susceptibles  de  nous  offrir  des  points  brillan  s;  et  l'on 
conçoit  que  cette  partie  lumineuse  sera  d'autant  moins 
resserrée,  que  les  molécules  polies  dont  il  s'agit  seront 
plus  saillantes,  ou  que  le  corps  sera  moins  lisse.  En 
d'autres  termes,  on  peut  dire  que  pour  les  corps  impar- 
faitement polis  le  point  brillant  s'élargit  et  se  répand, 
en  s'afîaiblissant,  sur  un  espace  d'autant  plus  étendu, 
que  le  poli  est  moins  parfait.  Sur  le  reste  de  la  surface 
du  corps   proposé,  les   molécules   ne   nous  renvoient 


122  LES   MAITRES   DE   LA   PENSEE  SCIENTIFIQUE. 

Ja  lumière  que  de  la  manière  propre  aux  surfaces  com- 
plètement mates;  et  ce  que  nous  avons  dit  à  ce  sujet 
trouve  là  son  application. 

Jusqu'à  présent,  nous  n'avons  considéré  dans  la  lu- 
mière que  l'intensité  avec  laquelle  elle  arrive  au  corps, 
s'y  distribue  et  s'y  réfléchit  pour  revenir  à  l'œil  du 
s;  éclateur;  nous  avons  fait  abstraction  des  altérations 
qu'elle  subit  dans  les  milieux  qu'elle  traverse,  et  par 
l'elFet  des  autres  circonstances  qui  agissent  sur  elle  : 
ce  sont  les  modifications  résultantes  de  ces  diverses 
causes  que  nous  avons  maintenant  à  étudier. 


142.  L'air  que  la  lumière  traverse  pour  arriver 
jusqu'à  nous  n'est  pas  doué  d'une  transparence  par- 
faite ;  ses  molécules  arrêtent  quelques  rayons  de  lu- 
mière et  les  réfléchissent,  comme  le  font  les  corps 
opaques.  Cet  effet,  qui  est  insensible  pour  les  objets 
peu  éloignés,  devient  frappant  pour  les  lointains;  il 
s'étend  sur  les  parties  éclairées  comme  sur  les  parties 
placées  dans  l'obscurité;  il  diminue  l'intensité  de  la 
clarté  des  premières  et  de  l'ombre  des  secondes,  et 
modifie  la  couleur  des  objets. 

La  lumière  que  réfléchissent  les  molécules  de  l'air 
a  une  couleur  déterminée;  l'air,  comme  tous  les  autres 
corps  de  la  nature,  a  sa  couleur  particulière;  c'est  ce 
qui  forme  le  bleu  de  ce  que  nous  appelons  le  Ciel.  Si 
l'air  n'existait  pas,  ou  ne  renvoyait  pas  de  lumière, 
le  ciel  nous  paraîtrait  d'un  noir  absolu,  sur  lequel  les 
astres  formeraient  des  points  brillants.  Le  bleu  du  ciel 
est  d'autant  plus  vif,  que  l'air  a  moins  d'humidité;  et 
c'est  pour  cette  raison  que  le  ciel  des  pays  méridio- 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE.  I2'i 

naux  est  habituellement  d'un  azur  ])lus  beau  que 
celui  des  pays  du  nord. 

Lors  donc  qu'un  faisceau  de  lumière  traverse  une 
étendue  d'air  assez  considérable,  il  perd  en  chemin 
une  partie  des  rayons  dont  il  est  formé,  et  par  consé- 
quent de  son  intensité. 

Cette  observation  n'est  pas  aussi  importante, 
lorsque  l'on  considère  le  rayon  de  lumière  dans  sa 
marche,  dei»uis  le  corps  Inminoux  jusqu'à  l'objet 
éclairé,  que  lorsqu'on  le  suit  comme  rayon  visuel  dans 
son  retour  de  l'objet  éclairé  jusqu'à  l'œil.  En  efîet, 
relativement  à  tous  les  objets  éclairés  par  le  Soleil,  par 
exemple,  qui  s'ofTrent  à  nos  regards  dans  un  instant 
déterminé,  la  lumière  traverse  une  couche  d'air  sensi- 
blement égale  pour  éc]airer  chacun  d'eux,  et  la  perte 
qu'elle  éprouve  dans  sa  marche  diminue  également 
la  clarté  de  tous.  Il  y  a  cependant  des  circonstances 
où  il  est  essentiel  d'avoir  égard  à  cette  perte;  et,  pour 
représenter  dans  un  tableau  un  elTet  de  soleil  levant, 
un  peintre  remarquera  que  la  lumière  traversant  alors 
horizontalement  une  grande  étendue  de  l'atmosphère, 
avant  de  parvenir  aux  objets  qu'elle  coloie,  a  bien 
moins  de  force  et  d'éclat  qu'au  milieu  du  jour. 

Mais  c'est  surtout  dans  le  trajet  de  l'objet  éclairé 
jusqu'à  l'œil,  qu'il  est  essentiel  d'examiner  comment 
la  lumière  est  altérée  par  la  masse  d'air  interposée. 
Non  seulement  une  partie  des  rayons  réfléchis  par 
l'objet  se  trouve  interceptée,  mais  les  molécules  d'air 
intermédiaires  reçoivent  aussi  des  rayons  directs 
de  lumière  et  les  réfléchissent  avec  leur  propre  cou- 
leur, dans  la  direction  même  de  ceux  qui  sont  ren- 
voyés à  l'œil  par  l'objet  éclairé.  La  sensation  que  cet 


1^4  LES   MAITRES   DE   LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE. 


objet  doit  faire  éprouver  à  l'œil  est  donc  altérée  de 
deux  manières;  d'abord,  en  ce  qu'une  partie  des 
rayons  qui  doit  la  faire  naître  est  arrêtée;  et  ensuite, 
parce  que  des  rayons  étrangers  et  d'une  couleui 
bleuâtre  se  mêlent  aux  premiers.  Cet  efïet  est  d'autant 
plus  prononcé,  que  la  masse  d'air  interposée  est  plus 
considérable;  et  l'on  peut  admettre  comme  principe, 
qu'à  mesure  que  la  distance  des  objets  éclairés  à  notre 
œil  augmente,  leur  clarté  diminue,  et  leur  couleur 
propre  participe  davantage  de  la  couleur  bleue  de 
l'atmosphère. 

Pour  les  objets  dans  l'ombre,  un  effet  analogue  a  lieu. 
S'il  n'y  avait  qu'un  corps  lumineux  et  point  d'atmo- 
sphère, l'ombre  serait  d'un  noir  absolu;  mais  les  objets 
environnants,  et  particulièrement  l'air  lui-même, 
éclairent  jusqu'à  un  certain  degré  les  parties  des 
corps  qui  ne  reçoivent  pas  directement  la  lumière,  et 
c'est  ainsi  que  leurs  formes  deviennent  sensibles  pour 
nous.  De  plus,  les  rayons  qu'elles  peuvent  nous  ren- 
voyer sont  aussi  en  partie  arrêtés  par  les  molécules  de 
l'air  intermédiaire;  ces  molécules  reçoivent  et  réflé- 
chissent vers  notre  œil  d'autres  rayons,  qui  nous 
parviennent  dans  la  direction  où  l'ombre  que  nous 
considérons  est  placée  relativement  à  nous,  et  qui 
affaiblissent  l'intensité  de  cette  ombre,  en  y  mêlant 
une  teinte  bleuâtre;  on  peut  donc  admettre  égale- 
ment, que  plus  les  objets  non  éclairés  sont  éloignés 
de  nous,  plus  l'ombre  diminue  d'intensité,  en  se  rap- 
prochant de  la  teinte  de  l'atmosphère. 

Concevons  deux  files  d'objets  semblables  se  pro- 
longeant à  une  grande  distance,  l'une  composée 
d'objets  éclairés  et  l'autre  d'objets  dans  l'ombre.  La 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  125 


clarté  des  objets  qui  composent  la  première  ira  s'affai- 
blissant  à  mesure  qu'ils  s'éloignent;  si  on  les  suppose 
de  couleur  blanche,  le  blanc  diminuera  d'éclat  et,  de 
plus,  il  changera  de  couleur  par  degrés  insensibles, 
d'un  objet  au  suivant,  mais  d'une  manière  marquée  sur 
la  longueur  de  la  file,  et  il  passera  à  une  teinte  bleuâtre. 
En  même  temps,  l'ombre  des  objets  qui  composent 
la  seconde  file  diminuera  d'intensité;  elle  s'éclaircira, 
non  pas  en  s'approchant  de  la  couleur  blanche,  mais 
de  la  couleur  bleue.  Si  les  deux  files  d'objets  que  nous 
considérons  s'étendent  extrêmement  loin,  il  arrivera 
enfin  que  le  blanc  de  ceux  qui  sont  éclairés  et  le  noir 
de  ceux  qui  sont  dans  l'ombre,  décroissant  toujours 
pour  se  rapprocher  du  bleu,  se  perdront  en  se  confon- 
dant dans  la  couleur  de  l'atmosphère.  C'est  ce  qu'on 
remarque,  lorsqu'on  aperçoit  de  hautes  montagnes, 
dans  un  lointain  de  25  ou  3o  lieues;  leurs  cimes  cou- 
vertes de  neige  et  brillantes  de  clarté,  leurs  grandes 
ombres  si  prononcées,  lorsqu'on  les  voit  d'une  petite 
distance  et  pendant  un  beau  jour,  tout  s'éteint  presque 
entièrement  et  se  fond  dans  l'azur  du  ciel. 

Ainsi,  quand  on  veut  faire  sentir  dans  un  tableau 
l'intervalle  qui  sépare  deux  objets  inégalement 
éloignés,  il  est  de  principe  de  peindre  celui  qui  est  le 
plus  distant  de  couleurs  moins  vives,  en  éteignant  les 
clairs  et  en  affaiblissant  l'intensité  des  ombres;  et 
quand  on  doit  représenter  des  objets  très  lointains,  les 
couleurs  doivent  prendre  une  teinte  générale  bleuâtre. 

Ce  principe  est  bien  connu,  et  même  on  l'exagère,  et 
l'on  en  fait  très  fréquemment  un  abus  qu'il  est  utile 
de  signaler.  D'après  ce  que  nous  avons  dit,  ce  n'est  que 
lorsque  la  ditférence  entre  les  intervalles  qui  séparent 


[•26  LES    MAITRES    DE    LA    PENSÉE    SCIENTIFIQUE. 

divers  objets  de  notre  œil  devient  considérable,  qu'il 
en  résulte  une  différence  sensible  entre  les  effets  pro- 
duits par  les  masses  d'air  qui  occupent  ces  intervalles, 
sur  la  lumière  que  les  objets  nous  renvoient.  Si  l'on 
a  par  exemple  devant  les  yeux  une  façade  d'archi- 
leclure,  dont  une  partie  forme  une  saillie  ou  un 
avant-corps  de  i"^,  la  couche  d'air  de  i"^  d'épaisseur, 
que  les  rayons  visuels  venant  de  la  partie  en  arrière- 
corps  ont  à  parcourir  de  plus  que  les  autres,  pour 
arriver  jusqu'à  nous,  ne  leur  ôtc  rien  de  leur  intensité, 
ou  du  moins  leur  en  ôte  trop  peu,  pour  que  la  diminu- 
tion soit  appréciable  par  nos  sens.  En  supposant 
donc  l'avant  et  l'arrière-corps  parallèles  entre  eux  et 
semblablement  éclai  es,  c'est  à  tort  qu'on  établirait 
une  différence  entre  les  teintes  qu'il  faut  donner  à  l'un 
et  à  l'autre,  comme  le  font  beaucoup  de  dessinateurs; 
ils  nous  paraissent  également  éclairés  et  doivent  être 
représentés  avec  la  même  clarté. 

Cependant,  nous  distinguons  parfaitement  dans  la 
réalité  qu'une  partie  forme  saillie  sur  l'autre;  il  n'est 
pas  même  nécessaire  que  1  avant-corps  porte  ombre 
sur  la  partie  en  arrière;  et  lors  même  que  la  direction 
du  rayon  de  lumière  venant  du  Soleil  et  la  position 
de  l'œil  sont  tels,  qu'aucune  ombre  n'est  apparente, 
on  juge  sans  peine  quel  est  le  plan  le  plus  voisin  et 
quel  est  le  plus  éloigné.  Il  est  essentiel  de  reconnaître 
ce  qui  dirige  à  cet  égard  notre  jugement,  pour  l'imiter 
s'il  se  peut,  et  que  )a  peinture  avertisse  l'œil  par  les 
mêmes  moyens  que  ceux  qui  l'avertissent  dans  la  réa- 
lité. 

Représentons-nous  toujours  une  façade  d'architec- 
ture  d'un    ton  de  couleur  parfaitement  uniforme,  et 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  1^7 

dont  une  partie  forme  sur  l'autre  un  avant-corps.  Si 
l'on  place  un  obstacle  quelconque,  tel  qu'une  planche, 
«lui  nous  dérobe  la  vue  de  l'arête  par  laquelle  se  ter- 
mine l'avant-corps,  il  nous  devient  impossible  de 
juger  laquelle  des  deux  parties  est  la  plus  voisine  de 
notre  œil;  mais  si  l'obstacle  est  enlevé,  on  en  peut 
juger  à  l'instant .  Cette  expérience  fort  bimple  nous 
apprend  donc  que  c'est  par  la  manière  dont  la  lumière 
agit  sur  l'arête  qui  termine  l'avûnt-corps,  que  nous 
sommes  avertis  qu'il  existe  une  saillie.  Si  l'arête  dont 
il  s'agit  était  une  ligne  droite  mathématique,  l'action 
de  la  lumière  sur  l'arête  serait  nulle,  ou  parfaitement 
inappréciable,  et  nous  ne  pourrions  pas  encore  dis- 
tinguer quelle  est  la  partie  qui  est  en  avant-corps. 
Mais  cette  arête  n'est  jamais  tranchante,  jamais  une 
ligne  droite  mathématique  :  les  matériaux  dont  elle 
est  composée  ne  sont  pas  d'une  compacité  absolue,  les 
instruments  dont  on  fait  usage  pour  les  tailler  ne  sont 
point  parfaits,  on  n'a  point  apporté  au  taillage  une 
précaution  infinie  ;  et  en  sortant  des  mains  de  l'ouvrier, 
cette  arête  était  déjà  loin  d'être  ligourcusement  pré- 
cise. Depuis,  tout  ce  qui  a  pu  la  frapper  ou  simplement 
la  frotter  a  dû  l'émousser  davantage;  et,  définitive- 
ment, au  lieu  d'être  une  arête  tranchante,  ce  n'est 
qu'une  surface  arrondie,  que  l'on  peut  considérer 
comme  une  portion  de  cylindre  vertical  circulaire  et 
d'un  très  petit  rayon;  c'est  par  la  manière  dont  la 
lumière  agit  sur  cette  surface  cylindrique,  et  en  est 
renvoyée  à  notre  œil,  que  l'existence  de  la  saillie  nous 
est  indiquée. 

Nous    avons    montré    précédemment    que    chaque 
partie  d'une  surface  courbe  reçoit   d'autant  plus  de 


/ 


128  LES    MAITRES    DE    LA    PENSÉE   SCENTIFIQUE. 


lumière  qu'elle  se  présente  plus  directement  aux 
rayons  lumineux,  et  que  la  lumière  qu'elle  renvoie  à 
notre  œjl  a  d'autant  plus  d'intensité,  que  cette  sur- 
face s'offre  plus  obliquement  à  nos  regards.  D'après 
ces  principes,  il  doit  se  trouver  sur  la  petite  surface 
cylindri(|ue,  qui  représente  l'arête  du  côté  où  vient  la 
lumière,  une  partie  dont  la  clarté  est  plus  vive;  et,  sur 
l'autre  arête,  une  partie  dont  la  clarté  est  moindre 
que  celle  de  la  façade  du  bâtiment;  le  tout  dépendant, 
pour  la  détermination  précise,  de  la  position  de  l'œil 
et  de  la  direction  des  rayons  lumineux. 

Ainsi,  pour  faire  sentir,  dans  l'exemple  proposé, 
qu'il  y  a  une  partie  de  la  façade  qui  forme  saillie,  il 
faut  ménager  aux  arêtes,  du  côté  de  l'ombre,  une 
ligne  un  peu  moins  claire,  et  à  celles  qui  sont  du  côté 
de  la  lumière,  une  ligne  plus  éclairée,  qu'on  appelle 
reflet;  du  reste,  la  teinte  sur  les  deux  plans  parallèles 
dont  se  compose  la  façade  doit  être  la  même. 

Nous  devons  ajouter  cependant  encore  quelques 
développements  qui  tiennent  à  d'autres  considéra- 
tions. 

Nos  organes  sont  doués  de  certaines  propriétés  qui 
altèrent  les  sensations  qu'ils  nous  transmettent. 
L'organe  de  la  vue,  par  exemple,  prolonge  la  sensa- 
tion au  delà  de  l'instant  où  il  l'éprouve;  c'est  ce  que 
démontre  une  expérience  bien  connue  :  quand  on  fait 
mouvoir  avec  rapidité  un  charbon  allumé,  placé  au 
bout  d'un  bâton,  on  voit,  non  pas  le  charbon  occu- 
pant successivement  différents  points,  mais  un  ruban 
de  feu  continu. 

Ce  même  organe  jouit  d'une  autre  propriété,  c'est 
d'étendre,  d'agrandir  les  objets,  d'autant  plus  (ju'ils 


GEOMETRIE   DESCRIPTIVE.  Ï9.9 

sont  plus  éclairés;  en  voici  un  exemple  frappant. 
Quelques  jours  après  la  nouvelle  Lune,  et  lorsqu'elle 
approche  de  son  premier  quartier,  elle  est  visible  sur 
l'horizon,  encore  un  peu  après  le  coucher  du  Soleil  ; 
un  quart  environ  de  son  disque  seulement  est  éclairé, 
mais  ce  qui  est  dans  l'ombre  reçoit  par  réflexion 
quelque  lumière  de  la  terre  et  n'est  pas  invisible  pour 
nous;  la  partie  éclairée  paraît  alors  d'un  diamètre 
beaucoup  plus  grand  que  celle  qui  est  dans  l'ombre, 
et  il  semble  y  avoir  un  ressaut  considérable  au  pas- 
sage de  la  courbure  de  l'une  à  la  courbure  de  l'autre. 
A  l'époque  du  dernier  quartier,  et  avant  le  lever  du 
Soleil,  la  même  illusion  se  renouvelle;  mais  la  partie 
dans  l'ombre  au  premier  quartier  est  alors  éclairée,  et 
paraît  à  son  'tour  plus  grande  que  l'autre,  qui  est 
devenue  obscure.  Plusieurs  expériences  confirment 
cette  faculté  qu'a  la  vue  d'étendre  les  dimensions  des 
objets  blancs  et  éclairés,  aux  dépens  de  ceux  qui  sont 
obscurs;  nous  ne  rapporterons  que  l'expérience  sui- 
vante, comme  la  plus  simple.  Lorsqu'on  place,  à  côté 
l'une  de  l'autre,  plusieurs  bandes  parallèles,  parfai- 
tement égales  en  largeur  et  alternativement  noires  et 
blanches,  en  les  regardant  d'un  point  un  peu  éloigné, 
les  bandes  blanches  paraissent  beaucoup  plus  larges 
que  les  noires. 

Une  troisième  propriété,  que  l'œil  partage  avec  nos 
autres  organes,  tient  à  ce  qu'en  général  les  sensations 
fortes  affaiblissent  momentanément  en  nous  la  per- 
ception des  sensations  plus  faibles.  C'est  ainsi  que  le 
canonnier,  qui  vient  d'entendre  la  décharge  d'une 
batterie,  est  insensible  à  l'impression  d'un  bruit  mé- 
dioci-e.  Il  arrive  même  qu'une  sensation  vive,  éprouvée 

MONGE.   —    II.  9 


LES   MAITRES   DE    LA    PENSEE   SCIENTIFIQUE. 


par  un  organe,  couvre  tout  à  fait  une  sensation  reçue 
ensuite  par  un  autre  organe  d'une  sensibilité  plus 
obtuse.  Avant  de  boire  de  la  liqueur,  nous  sentons  son 
parfum,  mais  notre  odorat  y  devient  insensible, 
aussitôt  que  nous  en  avons  bu  quelques  gouttes;  la 
sensation  forte  éprouvée  par  le  palais  émousse  tout 
à  fait  la  sensibilité  de  l'odorat.  Cet  effet  des  sensations 
vives  est  très  remarquable  sur  l'organe  de  la  vue  :  les 
objets  brillants  nous  rendent  insensibles  à  ceux  qui 
ne  jouissent  que  d'une  moindre  lumière;  lorsque  l'on 
passe  du  grand  jour  dans  un  lieu  peu  éclairé,  on  ne 
distingue  rien  dans  les  premiers  moments;  on  a  de  la 
peine  à  reconnaître  les  personnes  les  plus  voisines  de 
soi;  mais  peu  à  peu,  la  vue  s'habitue  à  cette  faible 
clarté,  et  l'on  parvient,  après  quelque  temps,  à  lire 
même  un  caractère  assez  fin.  îl  est  vrai  qu'au  moment 
où  l'on  passe  de  la  lumière  à  l'obscurité,  la  prunelle 
de  l'œil  se  dilate  et  permet  l'entrée  à  un  plus  grand 
nombre  de  rayons  ;  mais  cette  dilatation  de  la  prunelle 
a  lieu  instantanément,  et  n'est  pas  la  cause  de  l'effet 
que  nous  venons  de  rappeler  :  il  tient  à  ce  que  l'œil 
ne  perd  que  lentement  l'impression  vive  que  lui  a 
laissée  la  clarté  du  grand  jour. 

En  appliquant  ces  remarques  à  la  détermination  du 
reflet  qu'on  doit  ménager  sur  une  arête  éclairée,  on 
reconnaîtra  que  ce  reflet  paraît  à  l'œil  un  peu  plus 
large  qu'il  ne  l'est  en  effet,  et  que  les  parties  contiguës 
paraissent  un  peu  plus  obscures.  Pour  reproduire  dans 
la  peinture  ces  apparences,  essentielles  à  la  vérité,  de 
l'image,  il  faudra  donner  une  plus  grande  largeur  au 
reflet,  et  placer  parallèlement,  à  droite  et  à  gauche, 
une  teinte  un  peu  plus  sombre  sur  une  faible  étendue. 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE.  l'Jl 


Si  nous  avions  à  notre  disposition  des  couleurs  aussi 
vives  que  celles  de  la  nature,  si  nous  pouvions  peindre 
le  reflet  d'un  blanc  aussi  éclatant  que  celui  qui  a  lieu 
dans  la  réalité,  il  deviendrait  inutile  de  lui  donner  plus 
de  largeur,  et  de  le  rehausser  en  quelque  sorte,  par 
l'opposition  de  teintes  plus  sombres  placées  à  côté  : 
la  copie  fidèle  de  ce  qui  existe  leproduirait,  sur  nos 
organes,  l'effet  produit  par  l'objet  lui-même;  mais 
nous  sommes  obligés  de  compenser  par  une  sorte 
d'exagération,  qui  nous  est  facile,  l'imperfection  de  nos 
moyens  d'imitation. 

143.  Après  avoir  traité  des  modifications  ({ue  la 
lumière  éprouve,  spécialement  dans  son  intensité 
absolue,  et  quelles  que  soient  les  couleurs  dont  elle 
nous  apporte  la  sensation,  il  nous  reste  à  examiner 
quelles  sont  les  variations  que  subissent  les  couleurs 
elles-mêmes  par  l'action  des  diverses  causes  qui 
peuvent  les  modifier.  Cette  recherche  se  rattache  à  la 
partie  de  l'Optique,  dont  l'objet  est  l'étude  de  la  lu- 
mière colorée;  elle  est  beaucoup  trop  vaste  pour  que 
nous  l'embrassions  dans  son  entier,  et  nous  nous  bor- 
nerons à  un  petit  nombre  d'observations,  que  nous 
croyons  susceptibles  d'une  assez  fréquente  applica- 
tion. 

Une  des  causes  principales  des  variations 
qu'éprouvent  les  couleurs  tient  à  la  nature  du  corps 
lumineux;  ainsi,  le  bleuet  des  champs,  qui  est  d'un 
beau  bleu  pendant  le  jour,  semble  violet  à  la  clarté 
d'une  bougie;  à  la  même  clarté,  le  vert  des  feuilles  et 
des  plantes  devient  beaucoup  plus  sombre,  et  le  jaune 
se  lapproche  beaucoup  d'un  blanc  un  peu  rose;  c'est  la 


\ 

102  LES   MAITRES    DE    LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE, 

raison  pour  laquelle  les  personnes  dont  le  teint  n'est 
pas  très  blanc  paraissent  avec  plus  d'avantage  à  la 
lumière. 

Mais  les  changements  qu'on  observe  dans  les  cou- 
leurs ne  proviennent  pas  uniquement  de  la  nature  de 
la  lumière,  soit  directe,  soit  réfléchie,  dont  les  objets 
sont  éclairés;  ils  tiennent  souvent,  en  partie,  à  une 
appréciation  inexacte  que  nous  faisons  des  couleurs, 
lorsque  notre  jugement  est,  pour  ainsi  dire,  faussé  par 
des  circonstances  particulières  :  nous  en  citerons 
quelques  exemples. 

Le  matin,  avant  le  lever  du  Soleil,  et  lorsque  le  ciel 
est   d'un   bel   azur,   si,   devant  une   fenêtre   ouverte, 
nous   avons   sur  une    table    un  papier  blanc  et  une 
bougie,  le    papier  se  trouve  à  la  fois   éclairé  par  la 
clarté  de  la  bougie  et  par  la  lumière  déjà  répandue  dans 
l'atmosphère,  et  que  l'air  nous  renvoie.  Dans  ces  cir- 
constances, que  nous  placions  un  corps  qui  intercepte 
en  partie  la  clarté  de  la  bougie  par  rapport  au  papier, 
l'ombre  portée  sur  le  papier  ne  sera  plus  éclairée  que 
par  l'atmosphère,  elle  paraîtra  d'un  beau  bleu,  ce  qui 
doit  être   en  efîet,   puisque  la  lumière  réfléchie  par 
l'atmosphère   est   bleue;    mais    si   nous    éteignons   la 
bougie,  le  papier  ne  sera  en  entier  éclairé  que  par  cette 
même  lumière  bleue,  et  cependant,  nous  n'hésiterons 
pas  alors  à  le  juger  blanc;  et  s'il  se  trouve  à  côté  un 
papier   d'une  teinte  bleue,  il  nous  paraîtra  sensible- 
ment blanc  comme  le  premier. 

Supposons  encore  que  nous  soyons  dans  un  appar- 
tement dont  les  fenêtres  soient  parfaitement  exposées 
au  Soleil,  et  que  nous  les  fermions  par  des  rideaux 
rouges;  la  pièce  sera  alors  entièrement  éclairée  par 


GÉOMÉTRIE   DESCRIPTIVE. 


de  la  lumière  rouge;  au  bout  de  quelques  instants, 
rœil,  familiarisé  avec  la  teinte  rougeâtre  répandue  sur 
tous  les  objets,  reconnaît  pour  blancs  ceux  qui  sont  de 
cette  couleur,  et  il  regarde  aussi  comme  blancs  ceux 
qui  sont  de  la  couleur  rouge  des  rideaux  :  mais  ce  n'est 
pas  tout.  Si  dans  le  rideau  il  se  trouve  une  ouverture  de 
3rain  ou  4"""  de  diamètre,  et  qu'on  présente  à  peu  de 
distance  un  papier  blanc  pour  recevoir  le  faisceau  de 
rayons  du  Soleil  qui  passe  par  cette  ouverture,  ces 
rayons  peindront  sur  le  papier  blanc  une  tache  verte; 
si  les  rideaux  étaient  verts,  la  tache  serait  rouge. 

Nous  ne  pouvons  pas  ici  expliquer  pourquoi  la 
tache  est  verte  dans  le  premier  cas,  et  rouge  dans  le 
second;  parce  que  ce  phénomène  dépend  de  la  théorie 
de  la  composition  de  la  lumière;  mais  nous  allons 
essayer  d'exposer  comment  il  se  fait  que,  l'apparte- 
ment étant  éclairé  par  de  la  lumière  rouge,  par  exemple, 
un  objet  blanc  qui  reçoit  cette  lumière  paraît  encore 
blanc,  un  objet  rouge  paraît  également  blanc,  et 
pourquoi  la  lumière  blanche  des  rayons  solaires,  qui 
n'éprouve  aucune  altération,  puisqu'elle  passe  par 
une  ouverture  du  rideau  et  qu'elle  est  reçue  sur  un 
papier  blanc,  paraît  cependant  d'une  couleur  toute 
différente. 

Il  nous  est  nécessaire  de  faire  précéder  ce  que  nous 
avons  à  dire  sur  ce  sujet  par  quelques  considéra- 
tions sur  le  rôle  que  la  lumière  blanche  joue,  en  général, 
dans  l'opération  de  la  vision. 

Lorsque  l'on  regarde  un  corps,  quelle  qu'en  soit  la 
couleur,  chaque  molécule  de  sa  surface  visible  nous 
renvoie  des  rayons  blancs  avec  ceux  qui  sont  empreints 
de  la  couleur  propre  du  corps. 


l34  LES   MAITRES    DE    LA    PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 


Plus  nous  recevons  des  rayons  de  ce  genre,  et  plus 
l'objet  nous  paraît  éclairé,  ou  plus  sa  couleur  nous 
paraît  vive  et  claire.  On  connaît  le  cinabre,  substance 
composée  de  soufre  et  de  mercure,  de  laquelle  on 
obtient  ce  rouge  brillant  qu'on  emploie  dans  la  peinture 
des  vitraux  :  en  masse,  le  cinabre  est  d'un  rouge  brun 
assez  terne,  et  semblable  à  celui  de  la  brique  fortement 
cuite;  mais,  à  mesure  qu'on  le  broie,  il  perd  cette 
couleur  obscure  et  foncée;  en  se  divisant,  il  acquiert 
plus  de  surface  et  nous  renvoie  de  la  lumière  blanche 
par  un  plus  grand  nombre  de  points;  enfin,  quand  il 
est  réduit  en  poudre  impalpable,  il  offre  un  rouge  très 
éclatant  et  devient  du  vermillon.  Chaque  molécule 
du  cinabre  renvoie  donc  à  l'œil  plus  ou  moins  de  lu- 
mière blanche;  et  c'est  lorsqu'elles  peuvent  en  ré- 
fléchir une  plus  grande  quantité,  que  cette  substance 
prend  une  couleur  plus  brillante.  De  même,  si  nous 
examinons  un  chapeau,  chaque  poil  dont  le  feutre  est 
composé  est  un  petit  cylindre,  qui,  vu  au  microscope, 
présente  une  arête  blanche,  semblable  à  celle  que  nous 
voyons  sur  un  bâton  de  cire  d'Espagne,  quand  nous  le 
regardons  au  grand  jour;  cette  arête  renAoie  donc  à 
notre  œil  de  la  lumière  blanche.  Ce  que  nous  venons  de 
dire  relativement  à  ces  deux  exemples,  est  vrai  de 
tous  les  corps  de  la  nature  ;  c'est  cette  lumière  blanche, 
réfléchie  de  tous  les  points  visibles,  qui  détermine 
essentiellement  la  teinte  de  clarté  propre  à  chaque 
partie  de  l'objet  considéré,  parce  que  les  rayons  blancs 
sont  les  plus  complets  et  les  plus  vifs  de  ceux  que 
chaque  molécule  nous  renvoie;  ce  sont  ceux,  par  con- 
séquent, qui  nous  font  mieux  connaître  les  formes, 
apprécier  l'inclinaison  de  chaque   élément  et  la  cour- 


GÉOMÉTRIE  DESCRIPTIVE.  1)5 

bure  en  chaque  point  de  la  surface.  Nous  sommes 
habitués  à  cette  grande  abondance  de  lumière  blanche 
et  aux  services  qu'elle  nous  rend  dans  la  vision  ;  et  c'est 
comparativement  à  elle  qu'en  général  nous  jugeons 
de  la  lumière  colorée. 

Ceci  posé,  si  les  objets  ne  sont  éclairés  que  par  de  la 
lumière  déjà  colorée,  si,  comme  nous  l'avons  supposé 
tout  à  l'heure,  des  rideaux  ou  des  vitres  rouges  donnent 
cette  couleur  à  toute  la  lumière  que  le  Soleil  projette 
dans  un  appartement,  ce  ne  sera  plus  au  moyen  de  la 
lumière  blanche  que  nous  jugerons  de  la  forme  des 
corps,  puisque  les  rayons  blancs  que  chaque  point 
aurait  réfléchis,  si  la  lumière  n'eût  pas  été  altérée, 
deviennent  alors  des  rayons  rouges.  Ces  rayons,  cepen- 
dant, sont  encore  les  plus  complets  et  les  plus  vifs  de 
ceux  qui  nous  parviennent,  et  quoique  notre  œil  en 
soit  affecté  d'une  manière  différente,  il  juge  cependant 
par  leur  secours,  comme  il  l'eût  fait  à  l'aide  des  rayons 
blancs  ;  il  est  donc  conduit  naturellement  à  les  regarder 
comme  blancs,  et  c'est  en  comparant  les  autres  rayons 
à  ceux-là  qu'il  apprécie  leurs  couleurs.  On  voit,  d'après 
ceci,  que  s'il  se  trouve  dans  l'appartement  un  corps 
du  même  rouge  que  la  lumière  dont  la  pièce  est  éclairée, 
cet  objet,  renvoyant  des  rayons  de  même  nature  que 
ceux  que  nous  jugeons  blancs,  nous  paraîtra  blanc 
également.  On  vérifiera  facilement  cette  expérience, 
en  plaçant  un  verre  rouge  devant  ses  yeux  et  en  regar- 
dant, au  travers,  des  objets  blancs  et  des  objets  rouges; 
les  uns  et  les  autres  paraîtront  de  la  première  de  ces 
couleurs. 

La  même  cause  qui  nous  détermine  à  regarder 
comme  blancs  des  rayons  qui  ne  le  sont  pas  en  effet 


l3()  LES    MAITRES   DE    LA   PENSÉE   SCIENTIFIQUE. 

ne  nous  permet  pas  d'admettre  comme  tels  ceux  qui 
le  sont  réellement;  et  telle  est  la  raison  pour  laquelle  la 
lumière  naturelle  du  Soleil,  qui  passe  à  travers  une 
petite  ouverture  d'un  rideau  rouge,  va  porter  sur  un 
papier  blanc  une  couleur  qui  nous  paraît  très  sensible- 
ment différente  de  la  couleur  blanche. 

Les  observations  précédentes,  cj[ue  nous  avons  faites 
en  considérant  un  exemple  particulier,  sont  de  nature 
à  être  facilement  généralisées,  et  s'étendent  à  toutes, 
les  circonstances  où  la  lumière  dont  les  corps  sont 
éclairés  n'est  pas  telle  que  celle  que  nous  recevons 
habituellement  du  Soleil.  On  sent  combien  il  peut 
être  essentiel,  quelquefois,  d'y  avoir  égard,  surtout 
quand  il  s'agit  de  peindre  un  objet  qui  ne  reçoit  que 
de  la  lumière  réfléchie,  ou  altérée  par  les  milieux  dia- 
phanes qu'elle  a  traversés.  Presque  toujours,  la  lu- 
mière qui  n'arrive  que  par  réflexion  est  empreinte  de 
la  couleur  des  corps  qui  la  réfléchissent;  cette  modifi- 
cation influe  sur  les  apparences  que  présentent  les 
couleurs  de  l'objet  qu'elle  éclaire,  et  sur  le  jugement 
que  nous  portons  de  leurs  rapports. 


FIN    DU    DEUXIEME    ET   DERNIER  VOLUME 

« 


T\i;i  i;    DES   MATIEHES 

m      !>».t  XIK.MK    VOI.IMT. 


l'ases. 
Application  des  intersections  des  surfaces  à  la  solu- 
tion de  divers'-s  questions I 


V. 

Utilité  de  renseignement  de  la  géométrie  descriptive 

dans  les  écoles  secondaires 28 

Des  courbes  planes  et  à  double  courbure,  do  leurs 
développées,  de  leurs  développantes,  de  leurs 
rayons  de  courbure '^9 

De  la  surface  qui  est  le  lieu  géométrique  des  déve- 
loppées d'une  courbe  à  double  courbure;  propriété 
remarquable  des  développées,  considérées  sur  cette 
surface.  Génération  d'une  courbe  quelconque  à 
double  courbure  par  un  mouvement  continu  ....        36 

Des  surfaces  courbes.  Démonstration  de  cette  pro- 
position :  «  Une  surface  quelconque  n'a  dans 
chacun  de  ses  points  que  deux  courbures  ;  chacune 
de  ces  courbures  a  un  sens  particulier,  son  rayon 
particulier,  et  les  deux  arcs  sur  lesquels  se  me- 
surent ces  deux  courbures  sont  à  angles  droits  sur 
la  surface  » 4o 

Des  lignes  de  courbure  d'une  surface  quelconque,  de 
ses  centres  de  courburs  et  de  la  surface  qui  en  est 


t38  table  des  matières. 

le  lieu  géométrique.  Application  à  la  division  des 
voûtes  en  voussoirs  et  à  Tart  du  graveur 53 

Théorie  des  ombres  et  de  la  perspectiçe. 

Utilité  des  ombres  tracées  sur  les  épures 65 

De  la  description  graphique  des  ombres 68 

Théorie   de   la   perspective. 

Méthodes  pour  mettre  les  objets  en  perspective. ...       97 
De  la  détermination  des  teintes  dans  la  représenta- 
tion des  objets,  et  de  la  perspective  aérienne 112 

Des  variations  que  subissent  les  couleurs  dans  cer- 
taines circonstances i3i 


FIN    DE  LA   TABLE    DES   MATIERES. 


LES  MAITRES  DE  LA  PENSÉE  SCIENTIFIQUE 


HvYGENS  (Christian).  —  Traité  de  la  lumière.  Un  vol.  do  x-155  pages 
et  74  figures  ;  broché,  net 3  fr.    50 

Lavoisier  (A.-L.).  —  Mémoires  sur  la  respiration  et  la  transpira- 
tion des  animaux.  Un  vol.  de  vni-68  pages  ;  broché,  net. . .     3  fr.      » 

Spallanzani  (Lazare).  —  Observations  et  Expériences  faites  sur  les 
Animalcules  des  Infusions.  Deux  vol.  do  viii-106  et  122  pao-es; 
chaque  vol.  broché,  net 3  fr.      » 

Ci-AiRAUT  (A.-C).  —  Eléments  de  Géométrie.  Deux  vol.  de  xiv-95  et 
103  pages  avec  C9  et  77  figures;  chaque  vol.  broché,  net.     3  fr.  50 

Lavoisier  et  Laplace.  —  Mémoire  sur  la  chaleur.  Un  vol.  de  78  pages 
avec  2  planches;  broché,  net 3  i'r.     » 

Caunot  (Lazare).  —  Réflexions  sur  la  métaphysique  du  Calcul  infini- 
tésimal. Deux  vol.  de  viii-117  et  105  pages  avec  5  figures;  chaque 
vol.  broché,  net 3  fr.    » 

D'Alembert  (Jean).  —  Traité  de  Dynamique.  Deux  vol.  de  xl-102  et 
1 87  pages  avec  8 1  figures  ;  chaque  vol.  broché,  net 3  f r.     » 

Dv'TRocHET  (René).  —  Les  mouvements  des  végétaux.  Du  réveil  et  du 
sommeil  des  plantes.  Un  vol.  de  vni-121  pages  et  25  figures;  broché, 
net 3  fr.      • 

Ampère  (A,-M.).  —  Mémoires  sur  V électromagnétisme  et  l'électrodyna- 
/-rttgue.  Un  vol.  de  xiv-llOpagcs  et  17  figures; broché,  net     3  fr.     » 

Laplace  (P.-S.).  —  Essai  philosophique  sur  les  probabilités.  Deux 
vol.  de  xn-103  et  108  pages  ;  chaque  vol.  broché,  net. ...       3  fr.     » 

Eovguer  (Pierre).  —  Essai  d'optique  sur  la  gradation  de  la  lumière. 
Un  vol.  de  xx-130  pages  et  17  figures;  broché,   net...      3  fr.     > 

Pajnlevé  (Paul).  —  Les  axiomes  de  la  Mécanique.  Examen  critique. 
j\ote  sur  la  propagation  de  la  lumière.  Un  vol.  de  xin-112  pages  et 
4  figures;  broché,  net 4   fr.     » 

Sous  presse  : 

\UiiioTTE  (Edme).  —  Discours  de  la  nature  de  l'air.  De  la  végétation 
Jis  plantes.  Nouvelle  découverte  touchant  la  vue.  Un  vol.  de 
00  pages;  broché,  net » 

MoNGE  (Gaspard). —  Géométrie  descriptive.  Deux  vol.  de  xvi-li4 
tt  138  pages  avec  53  figures;  chaque  vol.  broché,  net. ...  » 


Il  est  tiré  de  chaque  volume  10  exemplaires  sur  papier 
de  Hollande,  au  prix  uniforme  et  net  de  6  francs. 


Paraîtront  successivement  : 

Newton.  —  Principes  mathématiques  de  la  philosophie  naturelle. 
Lamé.  —  Examen  des  différentes  méthodes  employées  pour  résoudra 

les  problèmes  de  géométrie. 
Pascal.  —  Traité  de  l'équilibre  des  liqueurs.  Traité  de  la  pesanteur 

de  la  masse  de  l'air. 
Galilée.  —    Dialogues  cl  démonstrations  concernant  deux  sciences 

nouvelles. 
Fermât.  — De  la  comparaison  des  lignes  courbes  avec  les  lignes  droites. 
Carnot  (Sadi). —  Réflexions  sur  la  puissance  motrice  du  feu. 
D'Alembert.  —  Eléments  de  philosophie. 
Faraday.  —  Recherches  expérimentales  sur  l'électricité. 
Helmholtz.  —  Mémoires  sur  l'hydrodynamique. 
Malus.  —  Théorie  de  la  double  réfraction  de  la  lumière. 
Laplace.  —  Mémoire  sur  les  inégalités  séculaires  des  planètes  et  des 

satellites. 
EucLiDE.  —  Les  Éléments. 

De  Saussure.  —  Recherches  chimiques  sur  la  végétation. 
Archimède.  —  De  la  sphère  et  du  cylindre. 
Gauss.  —  Méthode  des  moindres  carrés. 
Foucault.  —  Mémoires  relatifs  à  la  mesure  de  la  vitesse  de  la  lumière 

et  au  mouvement  de  la  Terre. 
Gay-Lussac  et  Thénard.  —  Recherches  physico-chimiques. 
Ingenhousz.  —  Expériences  sur  les  végétaux. 

Chevreul.  —  Recherches  chimiques  sur  les  corps  gras  d'origine  ani- 
male. 
Newton.  —  Optique. 
Lamarck.  —  Philosophie  zoologique. 
Coulomb.  —  Mémoires  sur  l'électricité  et  le  magnétisme. 
Mendel.  —  Essai  sur  les  plantes  hybrides. 

Leibniz.  —  Mémoires  sur  l'analyse  infinitésimale  et  la  dynamique. 
Bravais.  —  Mémoire  sur  les  systèmes  formés  par  des  points  distribués 

régulièrement  sur  un  plan  ou  dans  l'espace. 
BiciiAT,  —  Recherches  physiologiques  sur  la  vie  et  la  mort. 
Laplace.  —  Sur  la  théorie  des  tubes  capillaires.  Sur  l'action  capillaire. 

De  l'adhésion  des  corps  à  la  surface  des  fluides.  Considérations  sur  la 

théorie  des  phénomènes  capillaires. 
YouNG.   —  Théorie  de  la  lumière  et   des  couleurs.   Correspondance 

choisie  sur  des  sujets  d'optique. 
Volta.  —  Lettres  sur  l'électricité  animale. 


Faraday,  Ampère.  —  Rotations  électromagnétiques. 

Herschel.  —  Discours  préliminaire  sur  l'étude  de  la  philosophie  ncUU' 

relie. 
Lagrange.  —  Mémoire  sur  la  tfiéorie  du  mouvement  des  fluides. 
DuTROCHET.  —  De  l'endosmose  et  de  V exosmose. 
Gauss.  —  lîecfierches  générales  sur  les  surfaces  courbes. 
RiEMANN.  —  Sur  les  hypothèses  qui  servent  de  base  à  la  géométrie. 
Clifford.  —  Essais  et  conférences  sur  les  fondements  et  la  philosophie 

des  sciences. 
Laplace.  —  Exposition  du  sijstcme  du  monde. 
Réaumur.  —  Mémoires  pour  servir  à  l'histoire  des  insectes. 
Fresnel.  —  De  la  lumière. 

Geoffroy  Saint-IIilaire.  —  Principes  de   philosophie  zoologique. 
Descartes.  —  La  géométrie. 
Clairaut.  —  Théorie  de  la  figure  de  la  Terre. 

Lavoisier.  —  Décomposition  et  recomposition  de  l'eau.  Réflexions  sur 
la  décomposition  de  l'eau  par  les  substances  végétales  et  animales. 
Desargues.  —  Traité  des  coniques. 
FouRiER.  —  Questions  sur  la  théorie  physique  de  la  chaleur  rayonnante. 

Résumé  théorique  des  propriétés  de  la  chaleur  rayonnante. 
Hales.  —  Essais  de  statique  végétale. 

Mendeléeff.  —  Mémoire  sur  le  système  naturel  des  éléments  chi- 
miques. 
SwAMMERDAM.  —  Mémoires  sur  les  abeilles. 

LoBATSciiEFSKi.  —  Pongéométrie  ou  théorie  générale  des  parallèles, 
suivie  des  opinions  de  d'Alembert  sur  le  même  sujet  et  d'une  discus- 
sion sur  la  ligne  droite  entre  Fouricr  et  Monge. 
Spallanzani.  —  Expériences  sur  la  digestion  de  l'homme  et  de  diffé- 
rentes espèces  d'animaux. 
AccADEMiA  DEL  CiMENTo.  —  Essois  d'cxpéricnces  physiques. 
BoLYAi.  —  La  science  absolue  de  l'espace. 
Harvey.  —  La  circulation  du  sang. 
De  Saussure  (H.-B.).  —  Essais  sur  l'hygrométrie. 
Clifford.  —  Mémoires  mathématiques. 
Bernard  (Claude).  —  Introduction  à  l'étude  de  la  médecine    expé- 

rimer^ale. 
Hertz.  —  Equations  électrodynamiques  fondamentales  des  corps  en 
moyivement  et  des  corps  en  repos. 


D'autres  volumes  sont  en  préparation. 


PARIS.  —  lAirRIMERIE  GAUTHIER-VJLLARS  et  C 
66543        Quai  des  Grands- Augiislins,  55. 


m. 


9jmm^ 


U  DAY  USE 

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ASTRON-MATH-STAT.  LIBRARY 

Tel.  No.  642-3381 

This  book  is  due  before  Library  closes  on  the  last  date 

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I 


f^^     JUL08  1985 

liii      '**=<*^  UCB  A/M/S 


MAY  2  3  1986 


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0.SM994 
kw'd  UCB  A/M/S 


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SEP  -  8  ?nQ3 


LD21-2im-2'75 
(S4015sl0)476 — A-32 


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Berkeley 


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