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-^
GEOGRAPHIE
DU MOYEN AGE,
I^.TUMI^.E TAU
J 0 A C H I M hEL E W E L.
ACCOMPAGNÉ d'atlas
F.T DE CARTES DANS CHAQUE VOLUME.
S«Tpe palcr dixit , sliidiiim , qord inutilo iPiil^s ?
Ovid. Irist. IV, 10.
TOME H.
BRUXELLES ^
CHEZ V ET J. PILLIET, LIDR AIRES, SUCC" DE P. J. VOGLET,
RUE DE I.A MONTAGNr, 29.
\. LATINS.
PROGRÈS OCCULTE; LA NAVIGATION PRÉPARE LES CARTES
NAUTIQUES, 1154-1520.
104. Revenant aux latins, nous avons beaucoup à observer pour bien
comprendre la marche de la carlographie. Mais nous ne devons pas au
bout du compte oublier le glorieux ouvrage de Sicile. Les efforts de
Roger semblaient s'échapper de l'Europe, pour aller se perdre en Asie,
éblouis par la lumière de Torient. Sur le lieu même, les vestiges de
leur produit se dérobent tout d'abord à notre vue; nous nous trouvons
longtemps dans une obscurité profonde : mais ces efforts ne restèrent
point stériles, ils produirent des conséquences dont nous pouvons heu-
reusement dépister les traces dans nos investigations. Les arabes
coopéraient à Tœuvre sicilienne et les études latines ne cessaient de
puiser dans la science arabe : nuiis d'autres moyens, une autre
pratique, d'autres idées donnaient à la marche de la cartographie
latine une direction tout à fait différente de celle des arabes.
Depuis Hipparche et Ptolémée juçqm'iiii xvi« siècle, les théories astro-
nomiques n'ont fait aucun progrès véritable; queU[ues points fondamen-
taux ont été mieux déterminés; chez k» arak», 'Albateni a mieux
connu la longueur de l'année, faxceotrlcité du aoldt el l'obliquité de
l'écliptique; d'un autre côté, Tbebit a l^t relîtigrâQl^ k science par
son système de trépidation des étoiles. La flvenf avee laqu^m o^le
idée malheureuse a été reçue par tous les MtroDOiaesqai l'ont saivhâtt
une preuve qu'on observa bien peu, ou qu'on obserfa bien mal. Lé
vrai service que les arabes ont rendu à la science, est la face nouvelle
qu'ils ont donnée à la trigonométrie et leurs soins continuels pour
faciliter le calcul de l'astronomie sphérique. Leurs découvertes en ce
genre, imparfaitement connues et plus mal appréciées, ont fait que les
premiers restaurateurs de l'astronomie en Europe, se sont traînés
longtemps sur les pas des arabes, qu'ils n'ont pas égalés : ils ont len-
lenient et péniblement retrouvé ce qui était inventé 500 ans au-r
paravant. C'est le résumé de la marche de l'astronomie dans le moyen
âge (i).
Les latins se traînaient péniblement sur les traces des arabes, chez
lesquels ils cherchaient de l'instruction depuis longtemps. Leur marche
lente et nonchalante, commença à se ranimer enAn, çt voici ce que
décèle le xiii* siècle sur plusieurs points de l'Europe.
(1} Dehimbre, lust. de l'astron. p. 4u8.
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PROGRÈS OCCULTE, «(H;. 3
calendes de juin, jour où Âlfons monta sur le tr<)ne. Bientôt, vers 4290,
se trouva Henri Batcn, ensuite d'autres, capables de signaler et de
corriger les erreurs dans les tables alfonsines.
De même que la sphère céleste, difîérents instruments arabes se
trouvaient aussi dans les mains des latins et on les fabriquait à Fusage
des astronomes et des navigateurs. Raimond LuUe, en 1295, inventa et
décrivit dans son arle de navegar, un astrolabe, car des instruments
d'astronomie nautique, propres à trouver sur mer Theure de la nuit au
moyen des étoiles, existaient vers la fin du iLiii* siècle dans la marine
catalane et majorquine.
Au xiv« siècle, les byzantins commencent à recommander leur
science aux latins, mais la semence arabe jeta de profondes racines
et guidait les observateurs du ciel. On examinait partout les tables
astronomiques, le soleil, les astres, la sphère, Tastrolabe; on en écrivait
des traités nouveaux. À la fin du xv® siècle Marc benevintin commenta le
système de trépidation de Thebit, tout en s'occupant de très-nouvelles
découvertes pour les études terrestres dans la géographie de Ptolémée.
La marche était excessivement lente, mais elle suivit les sentiers
par lesquels pénétra la lumière astronomique de Torient. Cette lumière
fit connaître, sinon les cartes. géographiques des arabes, du moins la
méthode de leur construction. Chaque ouvrage astronomique traitait
de la manière de lever les longitudes et les latitudes géographiques,
c'en était la partie intégrante. Plusieurs furent accompagnes de tables
de positions; de la distribution des pays entre les sept climats; d'une
notice générale touchant la figure et la situation de Thabitable. Cer-
tainement nous pouvons dire d'avance , que ni la méthode* ni les posi-
tions indiquées par les arabes n'étaient admises dans la construction
des carte latines; mais vu celte infatigable tenf^ance de l'a^itronomie de
se traîner à la remorque des arabes, il faut présumer une continuité
des études géographiques, dans lesquelles un progrès, sinon rapide, au
moins d'un certain mérite, devait se déclarer un jour; et quand on
remarque quelque coïncidence dos cartes latines avec celles des arabes,
il faut conclure que les caries et les connaissances des mahommédans
exerçaient une cerlaine influence sur les géographes latins.
lOo. Les voyages des juifs de l'Europe, de Benjamin ben Jona de
Tudèle (H60-1178), de Pelahhia de Ratisbonne (1173-H83), de même
que les descriptions succinctes du monde, de Groenland et d'autres
parties du nord, chez les Islandais; la description de la partie septen-
trionale de l'Europe par Helmold le bozovien (1175); la description des
pays de Galles et d'Irlande par Giraud iîarrt/ (cambrensis vers 1180);
la relation du pèlerinage à Jérusalem de Henri fils de Saemundr, abbé
de Thingôr en Island (1154); une autre détaillée delà traversée de
Pays-Bas jusqu'à la Palestine par Emon, abbé de Werum dans Gronin-
gcn (1217); celle de Tecmarus (1218); le voyage (perdu) de l'islandais
Gissur, fils de Hall, par les parties méridionales de l'Europe (1206); les
pèlerinages des juifs Samuel ben Simson de France (1220), de Jacob
de Paris (1258) sont des monuments de la géographie descriptive ,
qui laissent des traces que la connaissance des pajs présentait de
l'intcrét.
4 GÉOGR. LATIMK, 1330-1410.
Une plus haute étude des pays décèle un cadastre de Waldemar H,
roi de Danemark (1251), ou recensement topographique de toutes les
provinces de son royaume ; et le tableau général et détaillé des posses-
sions territoriales du clergé en Angleterre, que fit élaborer le roi
Edward II (1291). Ces voyage et cadastre produisirent les dessins de
cartes et de tableaux.
On connaît deux dessins de Titinéraire de Londres à Jérusalem.
Toute la route représente la suite des stations de journée en journée,
les villes, dessinées, accompagnées d'épigraphes indiquant leurs nom,
qualité et souvent quelque singularité (à) (voir n"^ 63, 64 de Fatlas; 5, 4,
de la planche).
On rencontre quelquefois dans les manuscrits de cette époque les
tracées du fleuve Jordan et de la terre sainte et le plan de Jérusalem ,
pour rinstruction des pèlerins (s) (voyez n® 100 de notre allas).
D'après les monuments gé(^raphiques qui restent de cette époque,
il parait qu'en Angleterre toute l'attention se portait vers les itinéraires.
On traçait les ébauches de ces itinéraires (voyez n* 61, 62 de notre
atlas, n"^ 1 et 2 de la planche), et on les marquait dans les cartes com-
posées avec un grand soin et avec une habileté remarquable , lorsqu'on
réfléchit que sans qu'elles fussent basées sur des procédés géométriques,
on se retrouve dans d'innombrables positions entre les détours compli-
qués de la multitude des rivières. Je pense qu'en examinant la carte
prise du vélin de cette époque (u"" 65 de notre atlas, 5 de la planche),
on trouvera cette observation juste et on admirera l'habileté d'un dessi-
nateur instruit, qui savait développer les cartes topographiques et
chorographiques en conservant les proportions des provinces et du
(i) Le desti» de l*iihiëraira à lëniMleai m troare doaUe m Aofdetem , atteebë avx manvteritt
et MaUûea Paris dast les bibliotk. royale de Londres et di collège beaet. Goach en pablia des
fragments de Londres i DouTres, dont nons reprodnisons une rédaction. M. Jomard les donnera en
entier dans sa grande publication.
(5) Ilovs donnons dans notre atlas nn dessin très-pen diroinoé d*nn manuscrit de Bruxelles de la
bibliotb. de Bourgogne. Du mons gaudii on Toit la Tille sainte et par : Tiens ad cÏTitatem on entre
dans la Tille par : porta DaTÎd occidentalis. Dans la cité : sepulcrnm domfni ; lapis scissns ; golgota ;
calnarie — turris danid ;'eclesia latin'a — les deux quartier» de deux autres sont séparés par : Tiens
porte s. Stephant ; tIcus porte montis sjon — Dans ces deux autres quartiers on lit : Viens ad portam
losaphat; iter ad portam spe gosam^ qui se croisent; piseina; templum sancte Adda; tempinm
domini; templum salomonis; Salomonis claustrum ; cambium monete; forum rernm uenalium. —
Par la porte DaTid : Tiens ad bethlecm due leuge conduisent à Bethléem ; muni d'un : presepe
(mangeoir) pour les pèlerins ; sepulcrum rachel; fons syloe ; mons syon ; cenaculum ; porta Syon
australis; aeheldemach (haceldama ou eham des sang : Jean Vande Cotte, coup-d'œil p. 156], sepnl-
tura percgiinorum; betbania sont d'un côté de la cité ; de l'autre près de v porta s. stephani septen-
trionalis, on a, sepnlcmm s. stephani. — An delà delà : porta losaphat orientalis, coule, torrens
cedron.et on passe Tallis iosapbat, pour se rendre an sepulcrum s. marie ; ecclesia s. marie; mons
oliTOti ; ascensio domini. Au dessus est attaché un plan de la Palestine en raccourci, où l'on Toit :
nasareth; desertum; mons exceisus locus VI ; mon» chabor; hiericbo ; regio penthapolis. — à partir
de : mons seyr ; de mortuum mare; on monte la riTière par les : lacus genesaret; mare tibenadis ;
mare galilee ; jusqu'aux sources de : iordan, du mons liban. — ubi dominus ieiuuauit locus XI; mons
exceisus super quem assnmptus fuit dominus a diabolo; mons synay; lapis percussus a Moyse.
Un semblable plan de Jérusalem se trouTO dessiné à la fin du xiii* siècle, chez les islandais (mss.
ama magn. n* 736). En entrant par la porte piscinm f. dd (siTC DaTÎd), on a à gauche : templum
sancte crucis; sepulcrum Ade, sepulcrum domini ; porta gr^is et probacie (probaticae) piscine ;
Golotba (Golgotba), lapis scitus (scissus), caWarie locus. — à droite : turie Dauids , porte natus
(natiis? de nations) siue judiciari. ecclesia latina — tIcus porte Stephani , Tiens porte montis Syon,
séparent les deux autres quartiers de la Tille. — Dans celui de gauche, au delà de iter habitanti
auTulst se trouTe, templum scte Marie (Anne); de l'autre cdté de la rue qui conduit à la porte uallis
losaphat, et nalles losaphat, dans nne antre section du quartier on Toit : templum domini, sous
lequel est inscrit le nom de la Tille Jorsala boi^. Jérusalem. — Dans le quartier de droite : habitatio
régis et prophetarum; habitatio cinuinm propharum; claustra Salomonis : templum Salomonis ;
ermestti Jérusalem. Sur ce point la porte manque, seulement au delà de l'enceinte on lit : porte
aurea per quam ingressus Uicsus super a»nam. (Voyez fig. ci-Jointe'.
PHOGRÈS OCCULTE, 105. 5
pays entier. L*Ecosse était moins connne au dessinateur anglais. C'est
Tunique monument de ce genre qui donne une idée de l'adresse de
répoqiie et des cartographes postérieurs, dont le produit lopographi-
que est perdu pour nous.
On voit sur cette carte de vélin les routes erleurs distances, les
fleuves et leur direction ; les provinces se laissent distinguer et séparer.
La partie occidentale, surtout Sussex , Kent, Essex, Suffolk, Norfolk
sont remplis d'inscriptions qui deviennent rares dans rintcrieur et au
nord, et disparaissent presque dans les parties occidentales. Quantité de
ces inscriptions ont été enlevées par le temps destructeur; mais beau-
coup plus de positions n'étaient point inscrites. Les plus importantes
manquent souvent : Oxfort, Coventer, Lincoln, Doncaster, Carlile y res-
tent innommées. Le dessin de la carte n'était pas achevé. L'écriture
est très-fine, quelquefois trop petite, difQcile à débrouiller. Plusieurs
lettres ne se laissent pas distinguer à première vue , se ressemblent
l'une à l'autre. Les élisions des lettres et de fortes abréviations, comme :
ncest (Chichester) exercent la sagacité des investigateurs (voyez notre
portulan général à la fin, p. 27-29) (e).
Mappam mundi descripsi in pelUs duodecim pergameni, dit en 1265
un dominicain, annaliste de Colmar : mais nous ne l'avons pas, elle
est perdue. Les mappemondes furent souvent dessinées sur une très-
grande échelle. Une assez grande carte existe dessinée par un chanoine
Henri , imago mundi conlexla per Henricum canonicum ecdesiœ sanciœ
Mariœ civitalis Magonliœ, de rerum natura, imperatoribus , regnis,
regibus et ponlificibus usque ad Henricum imperatorem filium Henrici.
Elle accompagnait évidemment une chronique qui continuait jusqu*à
Henri IV (mort 1106) (i).
(6) La plupart de ces carter de la Bretagne se trouTent dans les manuscrits de Mathieu de Paris,
consenrés dans les bibliothèques royale de Londres, oottonienne et du collège benêt. Richard Gmigb
les a publiés dans son ouvrage ibritish topografiby, dont la première édition parut à Londres,
en 4768 in-4% la seconde à Londres 1780, de mèmein-4*, en t volumes; le premier vol. delà
troisième éditjion a été réduit en cendres avec rétablissement de John Nicbols en 1808. On compte
7 planches de monuments géographiques relatirs à la Gr. Bret. dans le 1" vol. et une 8"* dans le
second. Nous les reproduisons en grande partie dans notre atlas. En premier lieu, les quatre
suivants : 1* Quatuor ttratas per Britanniam réduite en proportion de SS à 8; t* Britannia nnnc
dicta AngUa quœ compleetUur Seodam GtUeweiam et fFàliMm, réduite deux cinquièmes. On suppose
au'elle est de la main de Mathieu même (1S69) parce qu*on présume que lui-même donna à l'abDaie
e s. Alban son manuscrit qui passa ensuite dans h bibl. royale. — 3* Fragment de la mappemonde
de Haldingbam. — 4" La plus importante dessinée sur deux pièces du vélin, que nous avons réduite
on proportion de iO à 3 de réchclle et reproduit Kent et Su*»ex, sur la grandeur de l'original (pi. VI,
t I, p. 76). Thomas Martin l'a heureusement exhumée et présentée en 1768 à la société des anti-
quaires , prétendant qu'elle est du temps d'Edward III. Elle est oblonsue, tournée l'orient en haut
et elle parait être du xii* siècle. Je dois les calques de ces cartes à l'amitié et aux soins de mes
compatriotes, Pierre Jastrcembski et Valerien Krasinski, avantageusement connu dans le monde
littéraire , par ses savantes publications sur l'histoire et l'état politique des Slaves. Je n'ai pu me
procurer les calques de deux cartes qu'on voit dans l'ouvrage de Gough (t. I, p. 64, pi. III ; et 1. 1,
p. 67, pi. IV, n* 3), celle delà mappemonde de Henri et loutre d'un manuscrit de Matthieu du
collège benêt, laquelle contient beaucoup de places qui ne se trouvent pas dans les autres. Gough
explique toutes ces cartes et distingue leur mérite. Mais ceux qui ne connaissent pas l'ouvrage très-
difficile de Gough, sont induits en erreur par une étrange opmion de Matthias Christian Sprengel
(Gescb. dcr Enldeckungen, chap. f 0 p. 230) fidèlement répétée par Malte-Brun (XIX, p. 507 de l'édit.
Huot). Toutes ces cartes sont condamnées en globe , très-grossières, le dessin des principales villes
et des abbayes avec leurs murailles, leurs clochers et leurs portes, occupe tant dVspace, qu'il n'a
pas été possible de marquer les divisions des provinces, les endroits peu considérables et les petites
rivières. Ce n'est qu'à l'occasion de l'Ecosse de Harding du xv* siècle (Gough. t. U, p. 580, n* 67 de
notre atlas, 7 de la planche) que Sprengel se relève, ou plutôt retombe dans une autre erreur
(p. 339) en faisant promener sur cette carte l'armée royale de station en station.
(7) Cette carte est conservée au collège benêt. Gough a extrait de cette carte l'Angleterre et
rirlande pour sa publication (t. I, p. 64, pi. lU, n* 1). Elle se trouvera entière dans la publication
des monuments géogr. de N. Jomard.
y
6 GÉOGR. LATINE, 1330-1410.
En Angleterre, Richard de Haldingham mit à exécution une immense
mappemonde. Rien de plus grossier , on pourrait dire de plus
monstrueux. La description de TAsie mineure peut donner une idée
de son exécution. Elle y est d'une forme qui représente à peu près un
carré long, pouvant avoir six pouces dans un sens et sept à huit
dans l'autre. La ville de Nicée est placée à l'angle supérieur vis-à-vis
de Constantinople ; puis successivement au-dessous de Nicée , le long
d'une côte marquée verticalement par une ligne sans contours, on lit
de haut en bas les noms de Chalcedonia, Nicomedia^ Prusias, Cisicum
et Abidos (ces deux derniers noms semblent s'appliquer à une seule
et même ville) , Lamsacus, Lilium et enfin Troja ciuilas bellicosa. Un
peu après Troja, qui est VAlexàndria Troas , la côte se replie à angle
droit; mais l'auteur de la mappemonde, confondant le détour que
fait ici en effet la côle de la Troade pour former le golfe Adramylti
avec celui de la côte carienne, trace horizonlalemenl, depuis Troie
jusqu'au golfe dTssos, une nouvelle ligne droite, qui figure la côte
méridionale de la péninsule et sur cette côte il inscrit successivement,
de gauche à droite, les noms de Prienna , Milelus , Pacera (Paiara),
Mirrea, Listra, Telmessus et Alalia, Après Atalia il n'y a plus de
noms. Sur la côte septentrionale il n'y en a qu'un , celui de
Heraclea, inscrit non loin de Nicca avec le fleuve Licus. Dans l'inlé-
rieur , Ephesus est placé presque au centre du pays ; un peu plus
loin sont les villes Antiochea , Iconium et Tarsus ; puis, à l'extré-
mité vers l'orient, Anlioche de Syrie et le mons Cassius, Une ligne
sinueuse figure le fleuve Halys, qui est écrit Belles, Les noms des
anciennes provinces : Phrygia^ Caria, Paphlagonia , Cappadocia, etc.,
sont jetés pêle-mêle et comme au hasard. Du reste le tout est exécuté
avec un très-grand soin calligraphique et les villes y sont figurées
suivant leur importance traditionnelle , par une ou plusieurs tours
parfaitement dorées et coloriées. Le Pont Euxin et la mer de Cypre
sont représentés par d'étroits canaux peints en vert : et par une
sorte de compensation de ce que de vastes mers perdent ainsi en
étendue, les détroits qui se prolongent entre l'Euxin et l'Egée, y
compris la Propontide , ont reçu d'énormes dimensions (s).
Cette description n'est pas flatteuse pour la grande mappemonde
de Haldingham. Elle est ronde; Jérusalem y est au centre et certes elle
n'est pas"^ moins intéressante pour l'histoire, pour la géographie
descriptive et pour la reconnaissance des vices qui chargent le dessin
des cartes postérieures.
La carte d'Angleterre, d'Ecosse et d'Irlande, qui est dans notre atlas
(n<^ 69) prise de cette grande mappemonde, donne aussi l'idée de la
finesse du dessin et de la grossièreté de la composition. Haldingham ,
en qualité d'Anglais, a dû connaître les îles britanniques, mais sa
composition prouve le contraire. La nomenclature des positions y est
de l'époque, nationale et assez spécifiée; mais les îles ne décèlent leur
forme que d'une manière très-incertaine. Le fleuve bande passe à tra-
(8) Cette description de l'Asie est tirée de Touvragc de M. Vivicu de Saint-Martin, histoire des
dccouveKcs géographiques , chap. ii, t II, p. 486, 487.
MAPPEMONDES, iOC. 7
vers Hibernia et divise Tlrlande en deux îles; le fleuve iveede sépare
la Scoiia de la Bretannia (9).
106. De la très-grande mappemonde, je passe à de toutes petites
figurines. Celle de Gautier de Metz , dessinée dans différents manus-
crits de son ouvrage (u"" 50, 57 de notre atlas), est tout à fait insigni-
fiante (10). Celle qui accompagne le manuscrit de la pharsale de
Lucain conservée à Mons, cnHainaut, n'offre plus d'intérêt (11). Mais
les trois autres que nous allons prendre en considération sont en appa-
rence vides et chétives : elles méritent cependant un examen sérieux.
La figurine extraite d'un code de la bibliothèque nationale à
Paris, est du commencement du xiii* siècle ou de la fin du xii%
(voyez n® 68 de notre atlas) ; les quatre points cardinaux y sont nommé-
ment marqués ce qui la distingue des précédentes. Lis nord y est figuré
par une étoile; le levant par une croix qui désormais représentera le
signe de Torient; le sud par un M (meridies) et le couchant par un P
(ponente) , employé plus lard dans la navigation. — Cette même
figurine offre une pose inusitée dans les images antérieures, pose
arabe, au haut de laquelle ne se trouve pas Torient avec son paradis,
mais le sud. Enfin cette ébauche de Thabitable retire Jérusalem du
centre , probablement par inadvertance. La pose antérieurement
inaccoutumée , ferait croire que le dessinateur se trouvait sous Tim-
prcssion de la carte arabe (12).
Une figurine islandaise , conservée sur quelques feuillets de la fin
du XIII» siècle, tient la même pose arabe. Le nord est en bas, le sud
en haut, le planisphère est divisé en deux demi- cercles, dont celui du
sud forme Synri bygdJi^ ou région méridionale , placée au delili de la
ligne équinoxiale : au reste, il est conforme à l'image suivante de
Cecco, que nous allons analyser. Ce qui est encore spécial à l'ouvrage
de la docte Islande , c'est que ce planisphère est traversé par une
bande qui représente i'écliptique (is).
(9) La carte de HaMingham est conservée dans les archiyes do la cathédrale d'Erefbrd , enfehnëe
dans nne caisse ancienne construite à cet eflet; elle ne remplit pas moins de douze planches pa|Mer
grand aigle ou six planches doubles dans la collection des monuments de la géographie du moyen
âge, dont la publication est préparée par le savant Joroard. — Notre copie des Iles britanniqties de
celle carte a élé faite sur celle de Gougb t. 1, p. 74, pi. V; elle n'est pas assez exacte. En 4849 parvt
à Ilorcrord : a brief description of tbo map ofthe ancient world ureserved in tiie cathcdral chùrch of
Hercrord, by S. Bannister, m. a. formely of qneen's collège Oxford, with a sp^ecimen, drawn by
B. Nucker esq. L'ouvrage m'est arrivé trop tard. Le spécimen contient un l'ac-similc des îles britan*
niques et le coin de la carte, voisin de ces iles. Dans ce coin, on voit l'empereur Auguste assis;
au dessus de sa tiare on lit : Lucas in euangelio exiit edictum ab Auguste cesare, ut describeretur
liuniucrsus orbis. L'empereur tient cet édit. et le donne aux trois géomètres : Archodoxus (Zeoo-
dozus), Theodocus, Policlinis Polyclitcs). L'édit. porte :Ite in orbem nninersum et de omni eius
continentia, referte ad senatnm et ad istum confirmandam (extrait de la cosmogr. d'Eticns, p. S6,
edit. de Gronove). Le sceau suspendu porte : Augusti ces arisimperatori, autour d'une main qni
tient un sceptre. Au dessous est inscrit. Tuz ki ce$t estoire ont, ou oyront, ou liront, ou ueront,
prient a Ihesu en de yce de Richard de llalding:ham e de lafford (lord, seigneur], ept pite (et prieBt
pour ice) kilat fet (qui l'a fait) e compassé, ki ioie (joie) en cel li sere donoe.
(10) Nous en avons copié deux de celles qui furent publiées par Santarem.
(ii) La figurine pour la pharsale de Lucain, indigne le septentrion par les noms de denx vents :
boreas et cl. (claudit?) aquilo fortis. (Voyez ig. ci-jointe.}
(12) Cette image que nous avons placée dans notre allas réduite i moitié à côté du fragment de
Haldingham, se trouve dans un codfrqui contient plusieurs articles de différents genres, derécritiire
du XII* siècle. L'image n'appartient à aucun de ces articles, elle doit être considérée comme isolée,
volante. H. Santarem la donne dans son grand ouvrage qui est tous presse. Je no sais pas à qu'elle
époque ni à qui il pense l'attribuer
(13) Ce planisph. islandais "est publié dans les antiq. amer. Hafaïao I8S7, p. S7S. (V. fig. ci-jointe.)
8 GÉOGR. LATINB, i350-i410.
Cecco (Francesco) Stabili d'Ascoli, naquit vers 1257; il se livra plus
particulièrement à l*astrologie, introduite depuis longtemps d'orient en
Europe et il la professa publiquement à Bologne, depuis 1522 jusqu'à
1525. Dénoncé au tribunal de Tinquisition pour avoir mal et irrégu-
lièrement parlé de la foi catbolique, il fut condamné à une pénitence
publique et privé de ses titres et de tous ses livres d'astrologie.
Le cbagrin qu'il ressentit de ce jugement , l'engagea à quitter Bolo-
gne, pour se rendre à Florence où la mort l'attendait. Traduit de
nouveau devant l'inquisition , il fut condamné au feu comme héréti-
que et brûlé vif en 1527. Il avait écrit , vers la fin du xiii* siècle , un
commentaire sur la sphère de Sacrobosco et ce livre contribua à sa
condamnation (i4).
Cet ouvrage est accompagné d'une petite image (m 58 de notre
allas), qui prouve les progrès des idées géographiques sous l'influence
des connaissances astronomiques et de la vue des caries arabes (is).
Le globe terrestre y est divisé en zones habitables et inhabitables.
L'habitable y est placé sur le quart du globe , étendu le long de toute
la moitié de son hémisphère. Elle est donc oblongue (de 180 degrés) ;
le méridien de Jérusalem la divise en deux portions égales. L'Europe
et l'Afrique sont séparées entre elles par la mer méditerranée , et de
l'Asie par le Tanaïs et le Nil; dans le continent de l'Asie pénètrent
trois mers : la mer Caspienne , la mer indienne (rouge et persique) et
une de l'océan oriental. Toute la figure , contrairement à l'habitude
antérieure, est tournée, à l'iniiiation des arabes, le nord en bas, le sud
en haut. Cette déviation de la méthode usitée, en apparence insigni-
fiante, s'explique de la manière très grave, par l'influence qu'exer-
cèrent à différentes époques, sur les connaissances géographiques des
latins, la géographie arabe et la géographie ptoléméenne. En ce cas, il
sçrait difficile d'admettre qu'une description eût insinué à Cecco une
semblable pose. N'était-ce pas plutôt la vue d'une carte. On pourrait
dire que c'est le mode rogérien qui se maintint jusqu'à Cecco , et
pénétra facilement en Islande. Toutefois c'est de l'arabe.
Mais en observant la petite figurine de Cecco , on voit que l'habita-
ble n'est pas configuré sur la figure de la carte rogérienne ou de
quelque autre arabe de ces temps reculés, mais évidemment sur la
figure des cartes postérieures, où l'Afrique ne s'étendait plus tout le
long au sud de l'habitable. Cecco, en ébauchant sa petite image, a donc
eu devant les yeux une carte arabe assez récente du xiii' siècle , et il
signala à la fin de ce siècle l'avancement des idées géographiques,
élaborées dans l'obscurité de notre ignorance.
Quand la géographie fesait le progrès obscur pour nous, on ne
peut douter que c'était la cartographie nautique qui avait le plus
grand succès. Les Majorquins et les Catalans se servaient de cartes de
marear bien avant 1286 (fenix del as maravillas de l'orbe, Raymundi
Lullii). Les marins de l'Italie ne pouvaient se passer de cartes sem-
blables : elles furent dessinées et perfectionnées. Lorsque la boussole
était chez eux en plein usage au commencement du xui' siècle , elle
(14) Fvt imprimé pour la première fois à Bàle 1485, réimprimé avec les commentaires de Françoic
de Capoue et de Jeao LefebTre d'EtapIes. Venise i449, 1889, in-folio.
(15) La figure de cette image est copiée de la publication de Santarem.
?iAV|GXT10I!<, 107. 9
engendra la méthode de fabriquer ces cartes (le). Mais celles-ci sont
délruiles ou du moins n'ont pas élé retrouvées. Je ne veu% pas afitici-
per sur ces indices très^positifs , D*ayant pas de monuments. Le$
monuments postérieurs expliqueront mieux le succès des cosmogra-
phes ou cartographes et de la marine, qui prenait chaque jour des
dimensions plus larges et plus audacieuses.
107. La navigation s'étant développée par toute la mer méditerra*
née, s'élançait de cet enclos sur les eaux du vaste océan atlantique»
Des tempêtes poussaient souvent les navigateurs égarés sur des points
inconnus et les appelaient à des reconnaissances et à des expéditions
hardies. Le commerce sur les côtes occidentales de TAfrique et les
notions acquises sur Texistence de quelques îles de Tocéan , détermi-
nèrent la république de Gênes à y envoyer, vers Tannée 1275, une
flotte et à prendre possession d'une île, qui reçut le nom de Lanceloie
du nom de Lancelot Malocello (Malus-aucellus, Maloisel, Marucelli),
Génois d'origine française , qui bâtit dans cette île un château fort
appelé Maloxelo, Maroxelo (it).
Ce succès encouragea les Génois à une expédition qui avait pour
but de pénétrer jusqu'à l'Inde en cinglant autour de l'Afrique. En
1285, Thedisio d'Oria et Hugolin di Vivaldo , avec Guy, son frère et
quelques autres, tentèrent ce voyage nouveau et extraordinaire : ils
armèrent à leurs frais deux galères bien équipées^ emmenèrent avec
eux deux moines franciscains et se mirent ainsi en route pour l'Inde.
Qu'elle a été l'issue de leur entreprise? on n'en a pas eu de nou*
velles (is).
(16'i Les soins de DunnboMt ont cxhnmô les dates assez aacionnes de Tiisage de la bonssole cbes
les marins de la mer inéditcrraoée. — Jacq de Vitri, entre 1495 et iil8, dans sou liistoria bierosoly*
mitana dit : adamas iu ladia reperitar ferrum occulta quadam natura ad se trahit; acus ferrca«
postquam adamantein couiligerit, ad steilam septentriuoalem, quac votnt a\is firnaanienti aliis
vergentibus, non movctur, scmper convertitur : unde, valde aecessarins est navi^antibus in inanH
(cap. 89, edit. Bongars p. 1106). Vincent de Beauvais, mort en iiSG, n'a pas négligé d^annoter cette
vertu de l'aiguille : angulus quidam eius, cui virtus est attrahendi ferrum, est ad zaron, id estsep-
tentrionera (r^^"^*^'darom, est 8«d); angulns autem oppositns ad afou, id est, meridiem (l^OV
Zafon est nord, Peritsol, cap. I, p. 10, etc.). Itaqne proprietatem habct magnes , quod si appro-
ximes ei ferrum ad angulum Spsius qui zaron, id est septentrionem rcspicit, ad s(*ptcntrionem se
convertit. Si vero ad angulnm oppositum ferrum admoveris, ad afon, id est meridiem se movebit
(Specul. naturale, t. U, lib. IX, 19). Son contemporain , Albert le grand, mort i28i, n'a pas oublié
d'en faire mention vers 1S50 : angtilus magnetis cujnsdam c.<tt , cuins virtus apprebendi ferrnm est ad
xoron, boc est septcntrionalem et boe utunturnautae. Angulus vero aliuK magnetis, illi oppositus,
trahit ad apbron, id est polura meridionatera. Et si approximes ferrum versus angulum zoron,
convertit se fermm ad zoron; et si ad oppositum angulum approximes, convertit se ad aphroil
(opéra, Lugd. 1654, t. H, p. M3). L'usage de la boussole chez les marins n'est pas une chose nouvelle
pour ces écrivains et Albert le grand a puisé sa relation sur l'aimant , dans un ouvrage apocrjrpbe de
mineralibns, attribué à Aristote; invention antérieure, probablement hébraïque d'un joif.
(17) Eo si quidem, patrara memoria, Januensium armata classis penetravit , dit Petrar(^ae (dcvita
solitaria, U, 11). Toute une génération avant sa naissance qui arriva en 1S04; or, l'expédition eut
lieu vers l'année 1*275. — Cette expédition explique pourq^uoi les cartes postérieures blasonnent de
Gènes l'ile Lansaroto : d'argent à la croix de gueules (pavillon de S. Geoi^cs) : la carte raédicécnne
de 1551, catalane de 1575, etc. Elles indiquent au sud-est de Lansaroto le fort deMaloxello,
Marogello, et celle de 1455 faite per le génois Barthélémy Pareto inscrit : Lansaroto MaroxcUo
Jauuensis. — Les relations postérieures relèvent en 1409 l'existence du castel que Lancelot Maloesei
avait jadis fait construire (conquestes des Canaries, SS, 33) et les nobiKères génois disent : li Marru-
celli, nobili etautichi cittadini genovesi, hanno origine dt Francia [D'Avezac, notice des découvcrlet
dans l'océan atlantique, chap. 8, p. •47-53).
(18) C'est ainsi que s'est exprimé le contemporain Cccco d'Ascoli , né en 13S7, mort en ISiT. ~
Et questo anno Tbcdesio d'Oria et Ugoline di Vivaldo, con un suo fratello et alquanti altri tentorono
di fare un viaggio novo et inusitato, cioë di volere andare in India verso poncnte, et armorono due
gallere molto ben ad ordine, et pigliorono con loro doi frati di S. Franceseo, et nsciti fora del strettp
di Gibeltnre, navigarono verso llDdia, et non se B*è mai hftvnto neva alcana. Et di ^esta mmjga-
II. 5
iO GÉOGB. LàTIKBf I3S0-141O.
Ces parages océaniques furent fréquentés par toutes sortes de navi-
res ; par ceux de Mayorque, de Pise, de Gènes, de Bruges, de Séville.
Mais c'étaient ceux de l'Espagne qui devaient être les plus nombreux ,
parce qu'on donnait à toute la plage jusqu'au cap Cantin, le nom d'Es-
pagnole. Arzilla, Sale, Niffe, Zamuro, Zafli, sont piagge di Spagna (lo).
Mais les Italiens aussi , et spécialement les Génois , y avaient leur
part, parce qu'on voit presque toutes les îles, tant les Canaries, que
celles qui sont disséminées vers le nord, portant des dénominations
italiennes (^%), Les navires français n'étaient pas tout à fait étranger
à ces parages, car (entre 1526 et 155i) une tempête les jetta sur la
grande Canarie (<i). En même temps le Portugal méditait à y prendre
des possessions.
Le Portugal avait une marine qui lui était indispensable, dans sa
position maritime , pour défendre ses côtes, participer aux croisades,
combattre ses ennemis, et pour les besoins d'un commerce assez
étendu. Mais il ne lui répugnait pas de chercher des étrangers habiles.
Le roi Denis appela de Gènes, le génois Emmanuel Pezagno, et lui
accorda par un traité passé en 1517 la charge héréditaire d'amiral, h
condition de fournir et de tenir toujours au complet un état-major de
vingt officiers génois pour le commandement et la conduite de ses
galères (22). Quand le roi Alfonse IV conçut le projet de s'emparer
des Canaries, il équipa en 15 il, deux navires et une barque chargées
de provisions, et en confia la conduite atix marins florentins, génois,
castillans et autres d'Espagne. Cette expédition, sous la direction du
génois Nieoloso di Aecco et du florentin Angelino del Tegghia dei
tione fa mentînne Cicco (rA«coli, nel comento délia speia (Âgostino Giustioiano, casligatissim i
aanali di GeBovo, UI, fol. IH verto). — La «lèine note rar Tedisco Auria et Ugolino Vivaldo, répète
Folîeta : aaorum boinintim qai fueruat casiifi, qurqve vastorum coDsiiiorum exitiis, nulla ad nos
unquan uoia pervenit (Uberti Folietae, historiae GeoneDsism libri, V, fol. flO verso). - L'autre
cootemporaiiiderexpédittoD, Pierre d'Apono, mort en -tSIS, en fit aussi mention : dictum est etiam
Arym civitalem Iddiae existere. Quidam tamen aiuuthiAciHvc, aut econverso, non posse transitum
compleri.... Uude et parum aute ida tempora Janueaces duas paravere, omnibus necessariis
munitas galeas; q«i per Gades Hercnlis Iraaâere. Qnid antem de illis contigerit jam spatio fere
trigesimo igaoratur aoao (Pelri d^Abana, coaciliator controversiarnm quae inter pbilosopbos et
medicos versaatiir, differentia C7, fol. 102). — Presque deux siècles plus tard, Antonio Usodimare,
explorant les parafes de l'océan, y rencontra en 1i55, un Italien qui se disait unique rejeton de
l'ancienne expédition de Vivaldo : reperi ibidem unum de natione nostro ex illis galeae credo
Vivalde, qui se amiserunt snnt anni 470; qui mihi dixit et sic me affirmât iste secretarius, Qon
restabat ex isto semiAe, salvo ^)S0, et alius (lettre de Lisbone d'Ant. Usodimare, datée 1S décem-
bre 4458, dans les anuali di geografia et di statistica, t. H, p. 287). C'est probablement à la suite de
ce rencontre qu'Usodimare a su suppléer TignoraBce des contemporains. Anno domini 428S recesse-
rnnt de ciuitate Januae duae galleae patrouiss^e per Hugolinum et Guidum de Vivaldis fratrcs,
voleutcs ire in levanlom, ad parles Indiarum. Quae galleae mullum navigaverunt : sed quando
fucrunt dictae galleae in hoc mari de Gbinoia, ana earum se reperit infundo sicco per modum quod
non poterat ire necauteaavigare;alia vero Bavigawit et trausivitper istud mare usquedum veairent
ad civitatcm unam Ethiopiae, aomiae Menam : capli fuerunt et detenti ab illis de dicta clvitate qui
sunt christiani de Ethiopia submissi presbytero Joaaui ut supra. Civitas ipsa est ad raarinam,
prope flumen Gion. Praedicli f«eruut taliter detenti, quod nemo illorum a partibus illis uaquam
redivit. Quae predicta narravera^ntoaiotus Ususmaris, nobilis januen«is (aanali de geogr. edi statist.
t. n, p. 290, 291). — Voyez d^Avezac, notice de découvertes dans la mer atlanL ckap. -i, p. 22-28. —
Je [)cnse qu'on peut se contester de Tignorauce des cuutcmporaius, et de passer OMlre sur cette
ingénieuse amplification postérievre.
(49) Pegoletti, écrivain de l'année 1340, pratica délia mercatura ; 4eUa décima t. UI, p. 449, 240,
SS6. 284, 276-281).
(20) La carte catalane de 4578 le pro«ve, Hadera (de baute futaye) est en italien Legname
(de haute fufcaye).
(24) Georges Glas, history of the Canary islaad, p. 1.
122) -
(22) Coatrato coumiser Manuel Peçanho, aos additamento* a memorla sobre m vcrdadeiras epocas
navegaçoes e descobrimeatos no oceaao atlaatico, por J. J. da Costa de Macedo. — Les amiraux
Peçanho s'étieignirent dans rarrière-arrière-petit-fils de Mttiuel, vers 1480.
NAVIGATION, 107. il
Gorbizzi, retourua la même année en Portugal, emmenant quatre
indigènes et différentes productions insulaires (is).
L'expédition était manquée , mais Âlfonse IV ne renonça point à son
projet, et lorsque le pape Clément YI donna, en 1344, Finvestiture
des îles Canaries, à titre de principauté héréditaire, à Louis d'Espa-
gne (arrière petit-fils d'Alfouse le sage et de saint Louis), et le recom-
manda par ses lettres, aux rois de France, de Sicile, d'Aragon, de
Casliile et de Portugal, au dauphin de Viennois et au doge de Gênes,
le roi de Portugal, le dit Alfonse IV, déclara dans sa réponse du 12
février 1545, que voyant ces fies plus voisines de ses états que de
ceux d'aucun autre prince, il pensait qu'elles pourraient être plus
convenablement subjuguées par lui-même; qu'en effet, dans l'in-
tention de mettre à exécution son dessein, il avait déjà envoyé
quelques navires pour examiner le pays, et que la conquête n'en
avait été retardée que par la guerre quMl était obligé de soutenir
contre l'Espagne et les Sarrazins (i4). La conquête différée n'eut pas
lieu; les Espagnols et les Génois ne discontinuaient point de visiter
toutes les îles bien connues (Canaries et Azores).
Les relations assez fréquentes qui s'étaient établies avec les Canaries
exposaient les rivages de l'Afrique au delà du cap Cantin jusqu'au cap
Boïador aux visites des navigateurs : mais les côtes ultérieures étaient
moins accessibles. On sait qu'au delà du cap existait une petite anse de
Boïador, refuge incertain pour ceux qui tenteraient de s'aventurer vers
le sud ; on apprit l'existence d'un fleuve d'or. L'insuccès de l'expédition
génoise n'effrayait point ceux qui étaient disposés à faire des investiga-
tions. Le mayorquin don Jacq Ferer partit en effet le jour de S. Lorens
qui est le 10 d'août dans l'année 1546, pour aller au fleuve d'or, et oo
ne savait pas ce qu'il est devenu (ss).
(S3) Annol34i, a mercatoribns floreDtinis apnd SobUiam Ilispanlae nlterlorfs cfiiîtatcm moran-
tibus, Ftorentiae litterae allatac stiot... io quibus... continentur. Aiunt quidem primo die menso
Julii huius anoi, duas naves, impositis in eisdem a rege Porlugalli opporlanis ad transfretandam
commeatibus, et cum iis oaTicnla iioa munita : homines florentinorum , januensium et bispanorum
castrensium, etatiorum bispanorum, à Lisbona ciuitale datis velis in allum ablisso, ferentes insuper
equoset arma et macbinamenta bellorum Taria ad ciuitates et castra capienda, quacrentes ad eas
Insulas quas vulgo rcpertas dicimus et bad lias faventc vento secundo post diem pervenisse omnes :
et demum mensc novembris ad propria remcasse, secun» baec pariter aiïerentes : primo quidem
quatuor bomincs ex incolis illarum insularum dnxère; pelles praeterea pturimas bircorum atquo
caprarum, scpuni, oleum piscis, et pbocarum exuvias, ligna mbra tingentia fere ut vorziuum ;
Insuper et arbonim corticcs ae^uo modo in rubrum lingentes, sic et tcrram rubram, et hujusmodi
(de Canaria et de insulis reliquis ultra Ilispaniam in oceano uouitcr reperlis, dans les : monument!
d'un ms. autografo di messer Giov. Boccaci de Certaldo trovati cd ilbislrati da Sebastiano Cianipi,
pp. S3, 54). — Verum Niccolosus de Recco jauuensis alter ex ducibus navium illarum, rogatus
aicbat a Sibitia civilatc usque ad pracdictas insulas esse millîa passum fere nongenta (ibid. monu*
menti, p. 54). Le nom de l'autre capitaine de l'expédition, est indique dans le manuscrit de Boccacio
par une note marginale : Florentious qui|cnmhis nauibus praofuit est Angetinus del Teggliia de
Corbizzis, consobrinus ntiorum Gberardini Giannis (ibid. p. 85). D'Avezac, notice . . c. 7.
(24) Attendentes quod praediclae insulae nobis pins quam alicui principi propinquiores existaot,
quodqne pcrnos possenl commodiussubjugariad boc oculos diruxerimus nostrae mentis etcogitatum
nostrum jam ad elTectum perducere cupientes, gentes nostras et naves aliquas illuc misimus ad
illius patriac conditionem cxptorandum : qaae ad dictas insulas accedentes, tam bomines quam
animalia et res alias perviolentiam occuparunt et ad nostra régna cum ingenti gaudio apportaruut....
Verum cum ad praefatas insulas expngnandas armatam nostram milterc curaremus, cum mililum et
pcditum multitudine copiosa, guerra primum intcr nos et regem Castellae, diende inter nos et reges
saracenos suborta, nostrum propositum iropedivit (littene Alf. regiii, in annal, écoles, t. XVI,
edit. 1652, anu. 4344, n* 48).
(25) La carte catalane de 137S annota le port de Bnietdcrc au delà du cap , et trace vaguement les
rivages au delà de
trouve beaucoup
dénonça l'cxpédi
12 GÉOGIt. LATINE, ISS0-14Î0.
Qiiei<|aesatitiëes{^lu8tard, d'autres expéditioiis eurent un meilleur
succès. Les Français de la Normandie où les Normands, équipèrent à
Dieppe deux navires; ils partirent au mois de novembre 1564, et
dépassant les Canaries, arrivèrent vers la Noél au cap Yert, sous lequel
ils mouillèrent dans une baie qui depuis ce temps a conservé le nom
de baie de France. Après avoir recueilli de Tivoire, ils coniinuèrent
d^avancer au sud, toucbèrent à Boulombel (Sierra leone), ensuite au
cap de Monte et s'arrêtèrent enfin à Tembouchure d'une petite rivière
près d'un village, qu'ils nommèrent Petit-Dieppe; ils opérèrent leur
retour à Dieppe au mois de mai 1565.
Au mois de septembre suivant, 1566, des marchands de Rouen s'as-
socièrent avec ceux de Dieppe, et il fut armé quatre navires pour
renouer les relations commerciales avec les nègres. Deux des navires
iirent leur traite au Petit-Dieppe; un troisième alla opérer son charge-
ment en malaguette, à l'embouchure d'une rivière plus éloignée,
devant un village auquel ils donnèrent le nom de Paris ; le quatrième
navire poussa plus loin encore et se procura une grande quantité
d'ivoire et quelque peu d'or chez des peuples moins sociables.
Ces expéditions furent continuées tous les ans par les armateurs de
Rouen et de Dieppe, qui établirent ainsi dés comptoirs au cap Yert, à
Boulombel , au cap de Monte , au Petit-Dieppe et à Paris.
Ce n'est qu'en 1580, qu'un navire expédié de nouveau de Rouen
s'avança jusqu'au lieu d'où l'on a d'abord rapporté de l'or; il y arriva
en décembre, trouva les habitants mieux disposés et revint à Dieppe,
après un voyage de neuf mois.
L'année suivante, 1581, le SS8 septembre, il partit de Dieppe trois
navires. L'un s'arrêta au point où l'on avait déjà traité, et qu'on
appelait la Mine, à cause de la grande quantité d'or qu'on y avait
recueillie; l'autre alla jusqu'à Mouré; le troisième jusqu'à Akara. On
envoya de nouveau trois navires en 1585, deux étaient chargés de
matériaux de construction pour bâtir à Mina un comptoir, où l'on laissa
dix à douze personnes; le troisième, contrarié dans ses opérations par
les marées, revint avant les autres et fut réexpédié, pour ravitailler
la Mina.
Cet établissement prospéra jusqu'en 1410. A cette époque désas-
treuse pour la France, les expéditions se ralentirent, puis cessèrent
tout à fait (te).
delor, algorn de sen Lorens, qui es a x de agost, e fo en lany ■cccxlvi. — Cette expédition est con-
firmée par une autre carie contemporaine du catalan Macla de Viltadestes de Tannée 14S7 (Tastu sur
la carte catalane, notices et extraits, t. XIV}. — Un manuscrit de la bibl. d*Usodimare, qui appartenait
autrefois aox archives secrètes de Gènes , répète cette mention avec quelques variantes et expli-
cations. Recessit de ciuîtate Haiorigarum galleatia nna Joannis Ferne catalan!, in festo sancti
Laurentii , quod est in décima oie mensis augusti a. d. 4346, causa eundi ad riu Auri, et de ipsa
galleatia nunquam postea aliquld novum babuerunt. Istud flumen de longitudine vocatur Vedamet
(C^)^ et LL* fleuve plein] ; simililcr vocatur riu Auri, quia in eo colligitar aumm depaiola-
(G. Graeberg, annali di geograkfia edi statistica, t. U, p. 190). Voyei D'Avezac, notice, chap. 4, p. Si;
BIalte-Brun,XIX, p. 531.
(t6) Un chirurgien allemand Samuel Braun de Basle, pendant le séjour de trois années, qu'il flt à
la côte d'or, de 1617 à 1630, au fort Nassau, apprit par les récits des indigènes que les Français
avaient jadis un établissement en Guinée. In dieser Festung iNassau zu More), wie auch zu Accara,
bab ich Lcuth gesebon, welclie ISOjahralt worden. Die babcn mir gesacbt : dass die Mina, sohon
vor et lichen Jabren, von don Frantzoscn, so dahin gehandiet , seye angefangen vrorden. Und die
viqW aile jabr 3 monat iang, ein solch Rcgenwetlcr mit hartem Wind [vrelchen wtr Travada heissen
NAVIGATION, i07i J5
La navigation vénitienne n^offre pas de dates aussi positives : mais
il n'est pas douteux qu'elle visitait les mers septentrionales. Les Génois,
d'un autre côté, dominant sur la mer noire, établirent leur marine sur
la mer Caspienne (27).
La marine variée sur tant de mers, animait le dessin des cartes dans
entstehet, in masscn viel Wahrcn zuschandcn wcrdeu, habcn sic an die Einwohuer bcgert, dass sie
mogteu ein Magasin oder Packhauss bawen. IVelches inen auch die Schwaitzen, so mit inen wol
xufrieden sind, gern verwilliget baben. Haben also ein ximiich gross Packbaiiss geoiacbl, uud die
Wahren aaf das Land gebracbU ÂIso einen guten bandel bekommen, besonders weil damalen die
Einwohner dess Lands, das Gold , mit gewogen, sonder beym Augenmass verbandiet. Da iiun deo
Portugaleaern kund getban wordeo, das» die Frantzosen gnten bandel bey den Schiirartzen bekom-
men, haben sie dieselbigen obnversehens iiberfallen, und dassPackbauss eyngenommeu.... Habeo
also endlicb auss diesem RaUffliauss , eine Capell gemacht, \relcbes jezt garfest ist (Fiinff Scbiffàrten,
Sam. Brauns, p. 27, publiés à Frankfort en i68i, par les soins de Jean Théodore de Bry). — Le sou-
-venir de cet ancien établissement se conservait en même temps en Normandie. Le père George
Foumier, né à Caen (1596, mort i6SS), rapporte ce qui suit : avant que les Portugns nous eussent
enlevé la Mine, toulte la Guinée était remplie de nos colonies, qui portaient le nom des villes de
France dont elles estoient sorties (hydrographie, p. 202, de l'édition 16-i3; et p. iS4, de Tédit. 4667).
— En attendant, sur le lieu même, les nouveaux possesseurs de la Mina, les Hollindais, qui savaient
qu'un magasin 7 avait été bâti par les Portugais en Tannée 448i, distinguèrent les murailles et les
constructions du fort, antérieurement érigées par des Français : dit kasteel (van de Mijn) wort
geoordeelt een zeer oudt gebonw te zijn, gelijk zulx de verschillende jaer-aentekeninge in ver-
scheide plaetsen aenwijzen. Aen een vervallen batery, byde onzen vooreenige jaren weer opgemaekt,
en de Franse batery genoemt (ter oorzake bet een Fransch gebouwscheen en de Fransen , na dcr
inwoondercn zeggen, voor de komsle der Portugesen daer gehuistvest waren}, vinden d' onzen de
zijfertallen van't jaer dertien bondert, zonder de twee volgende letteren te kunnen bekennen
(Olivier Dapper (mort en 1690^, naukeurige beschrijvinge der afrikaenscbe gevrestcn,Arasterd. 4668,
p. 439). — Le voyage de D'Elbée en 4669 et 4670, confirme cette observation. — Ce magasin fran-
çais transformé en église et fortifié par les Portugais gardait encore en 4667, la trace de ses anciens
maîtres : Villault de Bellefon^ qui visita alors ces parages, l'atteste de la manière la plus précise :
les Hollandais, dit-il, se servent aujourd'hui pour leurs prèsches, de la même église que nous v bas-
tismes... dans laquelle on renàarque encore 1^ armes de France. Ensuite il donne le récit détaillé
des expéditions dieppoises exécutées entre 436-i et 4<i40, que nul n'avait publié avant lui,
Suoique on sût que la Guinée était remplie de colonies françaises, qui portaient le nom de villes
e France, avant l'arrivée des Portugais. Ce récit se trouve compris dans la relation qu'il adressa à
Colbert et qu'il fit imprimer en 4669 sous le titre de : remirques sur les costes d'Afrique et notam-
ment sur la costc d'Or, pour justifier que les Français y ont esté longtemps auparavant les autres
nations (pp. S, iiO-429). — Ce récit est répété par Estancelin , recherches sur les voyages et décou-
vertes des navigateurs Normands en Afrique, pp. 7 à 4i; et par Vitet, histoire des anciennes villes
de France, t. U, pp. 4 à 36 ; (D'Avezac notice des découvertes dans l'océan atlantique, chap. 4 et 10,
pp. 2-5; 73 84). — Comment s'est il fait, que des entreprises aussi suivies de 1364 se soient éclipsées
et aient été ignorées des écrivains jusqu'en 4617; qu'elles aient échappé à la connaissance des
marins génois; de manière qu'aucune caile n'a su rendre compte d'une acquisition aussi immense
pour la géographie; que le baron normand Bethencourt dans son entreprise de 1402, ignore la navi-
gation dieppoise et n'en fait aucune mention? Il faut avouer qu& des doutes pénibles chargent ce
mystère, démesurément agrandi , ou complètement controuvé. On voit que c'est la prise en posses-
sion de la Mina par les Hollandais, qui éveille l'événement oublié, ou l'inventé; les récits des nègres
et la vue des murailles pouvaient contribuer à illusionner l'imagination. La relation de Villault de
Bellefond, il faut le présumer, a du être puisée dans les registres de l'amirauté de Dieppe, détruits
ensuite dans le bombardement de 4694. Mais le relateur n'indiquant point ses sources, a pu être
séduit par quelque invention obscure, qui précédemment avait pu surprendre la confiance de
Foumier. Ces doutes ne sauraient être levés que par des témoignages contemporains. Les registres
de l'amirauté sont détruits, mais ce n'est point là exclusivement qu'on pourrait trouver des témoi*
gnages. D'autres archives existent, celles de Rouen , de particuliers, les rouennais participaient aux
expéditions dieppoises qui étaient des expéditions faites par des particuliers. Des entreprises qui
durèrent quarante ans ont dû laisser quelques indices dans les chartes de commerce : or, ivoire,
malaguette, Afrique, Guinée, ne se trouvaient-elles pas quelque part dans les documents de cette
époque ? Le moindre témoignage contomporain, directe ou indirect, confirmerait tout ce qu'on a
narré postérieurement. Il faut espérer qu'un jour toute incertitude sera levé à cet égard.
(27) Et encore voz di que la mer... est appelé la mer de Gleveshela (Gheluchelan, Geluchelan,
Glebache, Geluche, Cechichelam, Ghelukelar, Geluchelaz, Ghebachela, Gielacbe, Gelachalat :
variantes du nom de la mer Caspienne ou Ghilan des arabes et Khvalin^oïe des russes) et zire
environ sept cent milles, et est longe de tous mer, ben dose jornee, et hi met de denz le fia
d'Eufrautes et maites autres fins, et est tout environee de montagne et de terre : et novelement les
marchians de Jcne, najerent por cel mer, car il uont mis leingn ou il najerent, et d'iluech vint la soie
ke est apelle gelle : dit dans l'année 1296 Marco Polo (diap. XXUI). — La version latine de ce passage
est assez infidèle : et sciatis quod mare Cechichelam, girat octingenta miliaria, et est longe an omni
mare bene duodecim dietas. Et intrant ibi, multa magna flumina, inter quae, intrat fluvius Enfrates,
unus de fluminibus paradisi deliciarnm. Et veniunt mercatores de levante et navigant per lllnd
mare : inde vcnit sericum quod vocatnr ghelle (cap. 15).
16 GÊOOB. LATI^ie, 1330-4410.
La mélhode de dresser les eartes géographiques par la rose des
vents n'élait pas nouvelle. Elle était connue et pratiquée dans Tanti-
quité (ss). Lorsque la marine des Pisans, des Génois, des Vénitiens et
d'autres, prit de la croissance, elle ne put se passer de cartes géogra-
phiques. Comme la carte rogérienne était continentale , elle ne pou-
vait satisfaire les pilotes. Elle a pu servir de base pour une mappe-
monde, mais les cartes nautiques, tant spéciales que générales, exigeant
une autre opération, toute Tattenlion des cartographes se porta vers la
direction des vents. Pour approvisionner les marins de cette espèce de
cartes , ils organisèrent dans les villes maritimes des établissements
géographiques , où Ton dessinait toutes sortes de cartes : ainsi il ne
manquait pas de portulans ni aux pilotes majorcains, ni aux pilotes
italiens (ss).
Les arabes avaient leurs images figuratives et leurs cartes géographi-
ques. De même les latins ayant leurs images et connaissant les métho-
des de la construction des cartes géographiques, se donnaient la peine
de les dessiner quand le besoin s'en faisait sentir. Chez les premiers
c'étaient les astronomes, les géomètres, les savants géograph.es versés
dans les mathématiques qui dressaient les cartes. Chez les latins, les
dessinateurs qui savaient manier un compas, qui comprenaient les
courses des marins et les itinéraires des voyageurs continentaux com-
posaient ces cartes et avaient à cet effet des ateliers. Le fait est avéré
par les monuments du xiv* siècle qui en sont sortis. Mais ils possé-
daient des ateliers avant celle époque, et bien antérieurement ils se
livraient à Tart du dessin , du temps de Roger et même ayant; ils
étaient alors probablemem moins nombreux qu'au xiv* siècle, et
quelque peu moins avancés dans leur connaissance, mais ils n'étaient
point privés d'instruction : ils élaboraient lentement ce que le xiv«
siècle mit au jour; quoique l'on ne connaisse pas de monument de leur
connaissance et de leur capacité , rien n'autorise à les accuser d'igno-
rance. Supposant même qu'ils négligaienl tolalement le dessin des
caries : les qualifier d'ignorants ce serait comme si un savant auteur
taxait d'ignorant un homme instruit, parce qu'il ne serait pas auteur
comme lui et n'ambitionnerait pas la célébrité d'écrivain. Les latins
étaient assez bons dessinateurs, assez instruits pour dresser et dessiner
les cartes géographiques , et certainement aussi capables que les
arabes. Ils différaient seulement par la méthode et par les bases de
leur construction (34).
(Si) La coDStructiou des cartel ^^frapliiques basée* «ur la rose des rents était conDue dans les
temps les plus anciens , et pratiquée par les navifatears. Telle fut la carie de Timosthénès. Elle
servit de modèle à Eratoslhénès, qui n'eut qu'à la copier pour Tusage de l'école alexandrine (voyez
mes recherches de géogr. ancienne U, 30, Si-37, UI, 4a-S7, Ubula iS, 43, 34). Cette méthode se
perpétua dans la pratique des navigateurs. Reprise au moyen âge elle porta à un haut degré la
perfection de la composition des cartes maritimes. Elle était connue chez les arabes qui dressaient
les roses de positions relativement à Kaaba (centre sacré).
(33) Qu'on ne dise pas que ce que J'avance ici est hasardeux : nous verrons leur produit.
(34) l\ n'arrive que tfop souvent^ qa*aa lieu de ehereher et d'apprécier le savoir et les cornais^
sances des siècles reculés, on sème sur eux avec profusion ua blâme d'ignorance. On fesait grand
htaii d'ignorance de rintérieur, à cause qu'en -1095 les moines ignorants de Tournay ne connais-
saient pas la situation de l'abbaye de Ferneros. OneompMnt parnu les découvertes géographiques
l'apostolat d'Otton de Bamberg en Poméranie, connue par son commerce, dont l'existence fut
ébranlée par l'influence continuelle des Allemands et du christianisme. Les marchands de Brème,
en il37, furent comparés à Cabrai, parce que la tempête les avait jetés s«r les c6iesd'un pays con«u,
dont ils ignoraient les rivages (Fergusson, Sprengel* Valfce^ini, etc.).
CARTES NAUTIQUES, 109* 17
109. La carie rogéricnne s^est perdue, mais la pratique de dessiner
les cartes resta debout et la culture de la géographie fut animée
d'abord exclusivement chez les italiens. Leur marine commerciale et
guerroyante comprit Futilité et la nécessité de celte connaissance.
Elle seule stimulait suifîsamment cette i^tude et lui donnait Timpulsion
et la direction.
La carte des géographes siciliens, inspirée par la science ptolé^
mécnne et la pratique arabe , s*etaît basée sur les longitudes et les
latitudes géographiques, explorées, trouvées ou convenues, sur les
bases mathématiques et scientiliques. Pour les pilotes italiens, cette
parade scientifique, qui décorait le continent, devenait superflue et
mcme nuisible ; parce qu'elle indiquait de fausses proportions, ils
renoncèrent aux chiifres des longitudes et latitudes, ils ne voulaient
guère graduer leurs cartes ! aussi je ne qualifierai pas de scientifique
la culture qu'ils ont faite de la géographie , mais simplement de con^
naissance de la géographie, dans laquelle ils ont progressé et excellé à
un haut peint.
Les bons dessinateurs et les hommes instruits préparèrent, à Tusage
des pilotes, les portulans annotés ou dessinés (vi). Les soins du dessina*
leur se portèrent plus spécialement sur le conlour, que sur la pein*
ture; on s'évertuait à faire ressortir les promontoires, les ports, les
rades, les points dangereux, bas-fonds, écueils; à tracer les golfes,
les sinuosités des bords; à fixer les dislances et la position relative
avec une certaine exactitude. Les portulans annotés suppléaient le
dessin par des renseignements qu'ils donnaient sur les conditions de la
sécurité des ports et des mouillages, sur les moyens d'approvisionnement,
sur la qualité de Teau de rivières, de citernes où de sources, sur les
dispositions des habitants des villes et des rivages; enfin de tout ce
qui pouvait être utile au cabotage des marins.
Les marins dessinaient eux-mêmes, ou fournissaient des rensei-
gnements aux géographes dessinateurs, qualifiés de cosmographes (se).
Ils se passaient d'aslrolabc, généralement connu chez les arabes. Unç
longue expérience, une vue exercée, l'ombre, les astres, le soleil, la
lune, réloile polaire rapporlée aux gardes de la petite ourse, U
vitesse de la navigation, la direction , les vents fixaient leurs notices et
leurs conceptions. Vient enfin la boussole ou l'aiguille aimantée, dont
raltribulion de la glorieuse découverte, vers 1300, à Flavio Gioïa, est
mise en déroute par l'antique connaissance de la vertu de Taimanl
et par Thenreux usage que depuis plus d'un siècle déjà en faisaient
les pilotes italiens, qui ne pensaient guère à relater de qui et depuis
quand ils tenaient ce mystérieux secret. Chez les arabes, l'aimant
retirait les clous de leurs navires, chez les latins il était le plus fidèle
guide des marins (57). Les porlulaps dessinés et peipts furenj; corjistruijs
(3ti) Je Bc sais pas pour quelle raison on rcru«oraît le titre de poilnlan avv cartes littorales de
IV-poque qui reproduisaient les dénominations des portulans écrits. C'est juste comme les anciens
itinéraria anuotata et picta : les portulans annotés et peints.
{3G) Qu'on ne ra'accnse d'inadvertance à cause de la qualification prématnrée de cosmogniplte^
doinuée aux dessinateurs des cartes du xii* siècle. Je le fais à dessein : parce que je pense que cette
qualification, inventée dans le courant du vi* siècle, ne discontinua point à honorer les dessinateurs
versés, les géographes de profession. Je suis certain qu'uo jour 6Q en trouvera des preuves.
(57) La nave over Zonclii, cbe navegano qucsto mar (de l'Inde).... portano nno so)6 timon; le quûl
II. 9
18 GÉOGR. LAime, iS30-U10.
sur ces bases. Ces partulans fournirent en grande partie des
matériaux à la composition des cartes générales, des mappemondes, et
donnaient à ces mappes un certain fondement d^exactitude et de
perfectionnement.
110. De grands événements sur le continent, ébranlèrent aussi les
habitudes surannées de la géographie, la configuration de différents
points de la mappemonde et de toute sa figure. Les distances de
Fintérieur de l'Europe , réunies par les investigations rogériennes,
dirigèrent longtemps les cosmographes. De nouveaux renseignements
confirmèrent leurs chiffres ou provoquèrent des rectifications. Quant
à Tintérieur de l'Afrique et de TAsie, il était plus difficile aux cosmo-
graphes de toucher à la table ronde de Roger. Mais TAsie ouvrit ses
entrailles aux latins.
L'invasion de Mongoux dans le khalifat délabré, fit espérer aux
chrétiens de gagner un allié aussi formidable à Tislamisme , que favo-
rable à la religion de Tévangile. Les espérances diplomatiques et la
propagande traversaient avec ardeur les routes percées par le com-
merce. Les légations des frères cordeliers, Jean Plan de Carpine
ritalien-pérousin , et de son inlerprèle Benoil le Polonais, envoyés
en 1245 par le pape à la grande horde; du dominicain Simon de
S, Quentin, au commandant des armées tatars en Perse ; du franciscain
Guillaume de Ruysbroek, brabançon, envoyé en 1255 par le roi de
France à la grande horde, apportaient consécutivement des relations
importantes qui changeaient la nomenclature habituelle de la géogra-
phie latine (ss). Tous les efforts diplomatiques de la cour de Rome
étaient certainement illusoires. Les conquérants du khalifat aimaient
mieux simuler leur conversion à Tislamisme, afin d'affermir leurs
conquêtes. Mais la propagande chrétienne fit un progrès parmi les
populations orientales, et les évéchés, fondés jusqu'au delà de l'Indus,
soutenaient une communication lente avec l'Europe, animée beaucoup
plus par l'activité commerciale.
Souvent le marchand, enrichi par ses expéditions, jaloux des con-
naissances qu'il avait acquises, se garda de découvrir ses perlustrations,
rebutées par des récits de danger réel ou Imaginaire. Son heureux
retour, ses succès excitèrent cependant la curiosité et la cupidité des
autres, qui s'enflammaient à braver le péril et à pénétrer le mystère.
Les marchands vénitiens Polo, eurent l'audace de s'aventurer dans
un voyage de vingt ans (1250-1270). De retour sains et saufs, ils
repartirent pour une autre excursion de trois ans (1271-1275), à
navega scnza l)os9olo, perche i portano uno astrologo, el qaal sta in alto eseparato, e con Tastrolobio
in man, da ordene al navegar (légende de 1459 de ira Mauro, apud Znrla, num. 30). Fra Mauro qui le
dit, et les Vénitiens de son temps, avaient de nouvelles et des i enseignements très-positifs de la mer
rouge et de celle de Tlnde. L*usage de la boussole chez les arabes est tardif. Les écrivains mahommé-
dans, qui aiment à jaser sans fin et à se copier réciproquement, ne disent rien de la boussole ou de
l'aiguille aimantée, qui fut connue chez les Chinois tout au plus tard dans le xiii* siècle. Voyez ce
qu'en dit le savant Reinaud dans son introd. à la géogra. d'Aboulf. p. 202, et à la fin du volume.
(38) Mathias Christian Sprengel, Geschichte der geographischen Entdekungen, Halle, 4792,
capit. 2S, 26. — Halte-Brun, précis de la géogr. livre 20. — La profonde et l'inappréciable notice sur
les anciens voyages de Tartarie, par d'Âvezac, dans le recueil de voyages et de mémoires, publié par
la société géogr. Paris, i839, t. IV, p. 309-602. ~- Le texte des voyages de Plan Carpin et de Rnys-
broek, par Hacluyt, Rarousio, etc., en dernier lieu, par d'Avezac et Thomas Wright dans le IV"* du
reciieil susmentionné.
SANUTO» lil. 19
laquelle prit part le jeune Marco Polo. Conduit au fond de TAsie, il
entra en lâ74 au service de Koublaïkhan, ce qui lui fournit le moyen
d'explorer la Chine, Tlnde, les îles. Quand il reparut en Europe
en 1295, il s'engagea dans la malheureuse expédition qu'entreprit sa
patrie contre les Génois. Grièvement blessé dans la bataille de Curzola,
il tomba au pouvoir des vainqueurs. Pendant les quatre années de sa
captivité à Gènes, il fit venir les matériaux qu'il avait rassemblés et
dirigea la rédaction du récit de son voyage, exécutée par le pisan
Rusligiello; les Génois d'abord, ensuite tous ceux qui prirent connais-
sance de sa narration, furent émerveillés. Du vivant de Marco Polo,
en 1307, Thibau de Cépoy traduisit son ouvrage en français, et bientôt
en 1320, François Pipin, bolonésan, en prépara une version latine (39).
Marine Sanuto avait peu de connaissance de cette exploration de son
compatriote, toute récente encore, du moins il en fit peu de cas : mais
la partie plus rapprochée de l'Asie était assez connue des Italiens pour
qu'il ait pu former ses idées sur l'intérêt qu'elle devait offrir aux
puissances chrétiennes.
r
Marino Sanuto, 1320.
111. Marino Sanuto (ou Sanudo), dit Torsellus, vénitien de Rivoalll,
s'étant passionné dès son enfance pour la cause des chrétiens de l'orient,
fil jusqu'à cinq voyages dans la Palestine et visita l'Arménie roubénite,
l'Egypte, les îles de Chypre et de Rhodes et les côtes adjacentes. A son
retour, il composa, en 1306, l'ouvrage intitulé : liber secrelorum fidelium
erucis, où il expose ses connaissances de l'orient, l'état de ses régions
et de l'Egypte , le commerce , et argumente sur la nécessité et les
moyens d'y établir la domination chrétienne.
Il parcourut ensuite diverses contrées de l'occident, afin d'exciter le
zèle des princes chrétiens et essayer de les déterminer à une nouvelle
croisade. En 1321, il présenta son ouvrage au pape Jean XXII, et
quelques années plus tard , au roi de France.
Cet ouvrage fut publié par Jacq Bongars (gesta dei per Francos ,
Hanau i6U). L'éditeur s'est servi de deux manuscrits, l'un de Paul
Petau, l'autre deScalîger, qui ne contenait que le troisième livre; il y a
joint trois cartes, mais il n'a pu se procurer la quatrième qui repré-
sentait la mer méditerranée. Plusieurs bibliothèques possèdent les
manuscrits de son ouvrage accompagnés des cartes. Le plus magnifique
et le plus authentique est celui de délia ricca, rinomatissima collezione
dell'ab. Canonici. Placido Zurla en a donné une description (40). Une
carte d'im manuscrit de Paris a été publiée par Santarcm. La biblio-^
ihèque de Bourgogne possède deux copies manuscrites avec les cartes.
Nous n'avons pas fait grand usage de la publication de Bongars, n'ayant
pu que jeter momentanément un coup-d'œil sur ses cartes. Nous nous
(39) Sprcngcl, chap. 28. — Malte-Brun, livre iO. —Placido Zurla, di Marco Polo c dcgli altri viap;-
giatori vencziani, disscrtationi, vol. 1. — Le texte publié en dernier lieu par Roux, daDS le 1" volumo
au rcaieil de voyages, publies par la société géographique à Parts.
(40) Sulle antiche mappe idro-geograliche, lavorate in Venezia, coromentario dcl p. ab. Placido
Zurla; Venezia, 1818. — Le mtme comtncntaire inclus comme appendice dans le second volume de
di8serlazioni,.p. f 99-392.
30 CiOGR. LATINE, l3S0-lil0>
référons souvent i la description de Zurla, et nous allons faire une
longue analyse de trois copies de la mappemonde que nous avons sous
les yeux, une du manuscrit de Paris, deux bruxelloises. Nous commen-
çons par ces dernières.
112. Les deux codes de la bibliothèque dé Bourgogne n*" 9404 et 9347,
sont de la même époque, du xv* siècle ou plutôt; ils sont tous deux
conformes dans les moindres détails. Les mêmes accessoires se trouvent
dans le même ordre ; les figures et les cartes ont aussi le caractère
de ridentilé; une notice sur le jeu d'échecs et les flgures des échecs,
sont les mêmes : de façon qu*il est nécessaire de conclure que les deux
codes sont des copies du même original, ou qu'ils ont été copiés
Fun sur Tautre. On y voit la même orthographe des noms propres, et
les omissions du texte complétées par des renvois aux insertions mar-
ginales.
Quant au dessin des peintures, celui du n^ 9404^ que nous désigne-
rons par A, est plus fini , plus certain : le dessinateur comprenait ce
qu'il fesait, ce qu'il achevait. Le dessin du n° 9547, que nous désigne-
rons par B, décèle beaucoup d'incertitude. Le dessinateur, en voulant
donner plus d'élégance à son ouvrage, en amaigrit la composition. Ou
voit qu'il a suivi son modèle sans le comprendre, d'où résultent des
défauts et des fautes. Tantôt il oublie de crayonner une jambe, tantôt
il confond les têtes. En changeant de couleur, il déborde par-ci par-là.
Asservi à son modèle, on voit qu'il ne l'a pas bien discerné sur chaque
point et que maintes fois il ne l'a pas même compris. Gela est plus
sensible encore, lorsqu'il se permet de changer l'attitude. Cette diifé-
renée dans les peintures des deux codes prouve l'habileté du dessinateur
de A et le manque de talent et de bon sens de celui de B, et que si l'un
des deux servit de modèle à l'autre , ce ne peut être A. Mais il est plus
probable que chacun de ces codes fut indépendamment exécuté sur le
même modèle , comme l'examen des cartes me le fait présumer.
Il y a dans l'un et l'autre code bruxellois quatre cartes géogra-
phiques. Une de la Palestine, une autre contenant les plans d'Antio-
chie et de Jérusalem , la troisième représente l'Egypte , la Syrie et le
littoral jusqu'à Rhode, la quatrième est la mappemonde. Tout y est
identique, couleur, pose et direction des inscriptions, pointes du litto-
ral, courbure des traits. Mais l'exécution du B est plus facile, plus
déliée, plus claire; celle du A est pénible, on y remarque beaucoup de
maladresse malgré le soin. La Palestine est exécutée dans tous les deux
de la même manière : à l'aide des ligues en carreau dense , tracées au
crayon. Le A a omis le nom de Nicopolis , et son écriture est trem-
blante, embrouillée. Au reste, les omissions des épigraphes sont les
mêmes dans chaque copie (voyez n° 77 de notre atlas).
La carte de l'Egypte et du littoral de la mer de Syrie (voyez n*' 76 de
l'atlas) est exécutée dans les deux codes , sans aucune marque direc-
trice.
Le A jette ses traits au onde partout où la place se présente; le B les
traîne avec circonspection. Ce dciniei a réussi à bien tracer le littoral
deCilicie, de la Pamphylie, de la Lycie et de la Carie, mais il s'est
égaré dans l'insertion des épigraphes : à la suite de quoi il déplace l'île
SÂMUTo, m. 21
de Ilhodc avec les autres îles adjacentes. Ces iles ei les épigraphes du
littoral sont mieux placées dans le A (4i).
il 5. La mappemonde du A, n^' 9404, offre une copie dans laquelle le
dessinateur n'a pas réussi à donner un dessin net et clair. D'abord , sur
deux pages désunies, où chaque moitié de la carte devait être dessinée,
il a tracé les lignes croisées parlant des points cardinaux avec inexac-
titude et très-irrégulièrement; puis il a dessiné en contours et en cou-
leurs, le continent, les îles, les mers, les rivières et les montagnes,
guidé dans tout par les lignes mal croisées. Le dessin est très-grossier.
Ensuite il se mit à placer les inscriptions et on ne sait dans quel but ,
probablement pour leur vider une place plus claire, Tinfortuné dessi-
nateur fit gratter, sur plusieurs points de la carte, les lignes croisées,
les rivières , les bords de la mer où les inscriptions passaient ou tou-
chaient (42). Aucune inscription n'a subi d'effacement semblable. Enfin,
peu content de son ouvrage à demi détruit, il fit ressortir sur plusieurs
points, avec le noir, les contours de la terre, et avec le rouge plusieurs
traits de division : ainsi que maintes fois , le rouge donne la couleur
aux montagnes et aux rivières.
Le copiste du B, n" 9547, copiant sur une échelle un peu plus grande,
évita un semblable embrouillement. Cependant il serait difficile de
dire s'il a suffisamment distingué les contours du modèle. Ce qui est
évident c'est que, sans se guider par des lignes croisées, il copia à vue
d'œil les deux parties de la carte enfoncée dans la reliure d'un volume,
et que son œil n'a pas su mesurer la profondeur de l'enfoncement de la
carie dans le dos du volume (43) : par conséquent, tout le diamètre,
depuis Sera jusqu'à Gades, offre un raccourci qui affecte et exténue
toute la méditerranée et tout le diaphragme ultérieur de l'Asie, jusqu'à
Sera. Enfin, après avoir achevé son dessin, il a croisé au crayon les
lignes des points cardinaux.
En raison de cette défiguration , le dessin grossier, plus ou moins
Ul) Les deux cartes de la Palestine et de l'Egypte avec le littoral de la mer de Syrie, ont été
publiées du manuscrit de Pctau pcr Bongars (t. 11, de gesladci par Francos, Uanau 46H). Nous
donnons dans notre atlas (n* 7G, 77) du manuscrit bruxellois, celle de la Palestine très-diminuée ; do
l'autre, le littoral de la mer de Sync réduit seulement d'un tiers d'échelle. Nous les reproduisons
pour donner un exemple des cartes spéciales de l'époque ; quoique leur exécution ne se recommande
fias beaucoup. 11 y eu avait pourtant à celte époque d'une exécution supérieure. L'angle du littoral de
'Asie mineure et de la Syrie est excessivement ouvert, de Taçon qu'il n'y a pas moyen de soumettre
cette carte à la graduation ; les autres, de meilleure exécution, cèdent à cette épreuve.
La carte dudit littoral porte le titre : de terra Egypti : mais l'Egypte, quoique occupant avec son
Nil assez de place y est presque nue et n'offre qu'une ébauche vide de sens. Le Nil se prolonge
formant successivement deux iles, une innommée, l'autre portant le nom de castrum degise, à
Toricnt duquel est Kayrus, BabUonia et castrum in monte. A l'occident du Nil il n'y a que trois
bâtiments abbatie in deserto versus occidens^ avec une marque de eollectio aquarum subter abbactis ;
deux tours, istaa. ii. turresfecit pharao in capite soUitu4inis; et un pont, huncpontem fecit bendog-
dar, ad tranceundum quandoflumen hahundat ad fécundandam terram. Enfin on y lit une note ou
citation d'érudit JJonorius. Ègyptus. c, uiUarum et inclita in teba prouintia a tebe duitate dicta,
quam catinus agenoris filius edtficauitt huic adiacet maxima solUudo in qua oUm cottuersabatur
monachorum multitudo. Nous ajoutons qu'à la suite du mons Seyr, est aqua marat , et tout à côté
un carré attaché à la chaîne orientale avec l'épigraphe lex, la chaîne de cette montagne est terminée
par un bâtiment ecclesiœ sancte margarite. Au reste c'est mecha et l'Arabie avec le» mers adjacentes
en raccourci forcé. — Sanuto sacrifia dans son ouvrage un chapitre (U, iv, 36, pour donner la des-
cription du littoral do cette carte : ce qui se trouve a la p. 85, 88, ae l'édit. Bongars. Voyez notre
portulan général, 20, p. 15, 10.
UiS De semblable gratinures, se font remarquer sur sa carte de Palestine.
(43) Le môme cas affecta, comme nous l'avons observé, la carte ronde d'Edrisi du manuscrit
parisien d'asselin.
24 GÉOGR. LATINE, 1330-UlO.
cepeudant , quoiqu'il ail la même circonférence que la mappemonde
parisienne, chan{i;e les proportions dans la configuration de la terre. Il
la diminue en donnant plus d'espace entre la terre et la circonférence;
la mer méditerranée est plus courte dans sa longueur et plus large
dans sa largeur que celle de la mappemonde parisienne (4s). La mer do
Sara (Caspienne , est plus éloignée de TEuxin , diminuée et d'une autre
forme; les Pyrénées n*y sont pas marquées et le nord de T Europe est
modernisé : les figures du Danemark et de la Suède sont toutes diffé-
rentes et de nouvelle invention.
La mer Caspienne, du modèle des copies bruxelloises, est presque
triangulaire et privée du fleuve Olil (Volga) , et porte le triple nom de
mare caspis f yrcanum , de sara. Celle de la mappemonde parisienne
est carrée et est accompagnée d'une longue inscription, pleine d'abré-
viations, dont la lecture devient quelquefois presque impossible. Elle
parle d'abord des appellations de la mer. Islud dicilur mare de Sara ,
propler civUalem inqua imperalor moral; quod dicitur et Caspium
propte uicinilaks ad montes Caspios; Gorgianie, eadem caussa. Puis elle
raconte le danger de la navigation. In eô catct uorago,vades reddebanl
aquas inaccessibiles, gressus propler urinorum oplurala sunl. In eo mari
tumescil per paludem in omni anno et iam plures hoc antea gressi
destructe fuerunt, tandem ut quis deleciarel inlrare innatarel anlea non
absque muUorum periculo. Ensuite elle signale le concours des peuples
et le voisinage sablonneux. Hic et convenits in esliua gens de Sara
usque Noga, cum ponil mililiam. Supra co mare est régie arenosa
temishira, enûn, fl, Olil magnus palet, . al, . bat, (46).
117. La plus forte et la plus frappante différence entre la mappe-
monde parisienne et le modèle des copies bruxelloises , se présente
dans l'Europe et spécialement dans sa partie septentrionale. Dans sa
formation entière elle donne dans le dit modèle plus d'embonpoint h
l'Espagne, à la France, pousse l'Allemagne plus au nord des Alpes et
rétrécit le continent au delà du Danube. Scotia est réuni à VAnglia par
un isthme et conserve avec Ybernia, la même position. A l'est, au delà
de Holsalia, sur la péninsule on lit: Datia, Julia, et sur le dernier
coin des côtes prolongées nord-est infidèles Kareli, Ici est attachée par
' un isthme une autre péninsule plus vaste, qui se prolonge vers l'occi-
dent au dessus du Danemark, vers la Scotia chargée des noms de
Noruegia, Skania, Gocia, Suecia, Finlalia, Alania. Cette forme corres-
pond avec la figure de la Skandinavie que donnaient certaines cartes
des XV® et xiv® siècles (voyez le n** 97 de notre atlas).
La mappemonde parisienne, par ses nombreuses inscriptions, et
par la construction des côtes et des îles de cette partie, prouve
qu'elle avait soin de rendre d'une manière suffisante ses conceptions
sur la mer baltique. On y voit une seule péninsule excessivement
prolongée vers le nord. Près de Olsatïa, dans sa gorge, on lit :
(45) Il est évident que les deux copies bruxelloises dérivant du même modèle enfoncé dans un
volume n'ont pas su prendre la dimension de renFonccment , le B ne l'a pas sondé jusqu'au fond,
le A se l'imagina plus profond qu'il ne l'ctait réellement.
(46) Je ne sais pas si j'ai réussi à débrouiller cette longue épigraphe : la map[)emonde du code
deir ab. Canonici, à sa place offre suivant Zurla : Cofpis, Yrcanum, de Sara, planicUs Mogan in qua
Tartari hyemant.
«ANUTO, lia* 25
inlroUus dalie, puis datia ou dana, ensuite cpaia dalia, qu'il faut
probablement lire prouincia iucia datia ou primaria dacia, la pr(^-
mièrc danie; el vis-à-vis cp cP*or, c'est-à-dire , provincia poslerior
iucie; au delà vers Test sont les fies. La plus grande est chargée d'une
inscription double excessivement difficile à débrouiller. L'une donne
le nom de l'île Zcania du iditusme f. ol daeie, peut-être Scania
diuidil insuie sunt orientales dacie. L'autre dit regio dacie freidiliana
peut-être, super ei duione. Sur l'île suivante on lit : in hoc mari est
maœima copia alctiorum; sur les deux petites : JRtna (c'est Rugia ou
Rana) et Yslandia, nom qui sur ce point figurait déjà dans plusieurs
cartes précédentes.
Nous reviendrons encore sur ce point de la carte de Sanuto;
en attendant, sans s*arrêter à de nombreuses déviations moins
importantes du modèle des copies bruxelloises, nous allons examiner
les épigraphes.
118. Comme les copies bruxelloises, la mappemonde parisienne
est atteinte de quelques déplacements et oublis , parce qu'il est
impossible de ne point rappeler à cette cause l'insertion mal placée
de Pamphilia, de Galatia. Les oublis ou les négligences sont plus
nombreuses, parce qu'on ne peut attribuer qu'à celle cause les diffé-
rences des copies bruxelloises , que nous allons énumérer.
En Afrique , le modèle des copies bruxelloises avait toutes ces
inscriptions qu'on voit sur la mappemonde parisienne. Mais il avait
de plus, ce qui ne se trouve pas sur celle-ci : Locacc5^tm; regio
inhabitabilis propler calorem; Habesse terra nigrorum; Nese; Chus;
Haden; Bedoni; Zinc el imoZinziber dicitur.
Entre les îles , la mappemonde parisienne nomme les deux îles
Meric et Afatie : mais elle a négligé de nommer l'île Kis que connaît
le modèle des copies bruxelloises (4t).
En Asie, à l'exception de la longue légende de la mer Caspienne, du
fleuve Atol, de la Media et de la Mésopotamia , ce modèle contient
toutes les inscriptions de la mappemonde parisienne, étant chargé de
beaucoup d'autres. En commençant par le nord : regio inhabitabilis
propter algorem; Alania; hic fuerunt inclusi Tartari; Carab terra
destructa; castrum Gog et Magog; Sera; hic nascuntur elefantes (dans
l'Inde); h'c convenit multitudô Tartarorum (dans le centre de l'Asie);
ad Tauris (as) ; Taurisium (ou Taurus mons) ; Armenia (avec Tépithète)
magna; Persia (répétée comme appellation plus générale (49), terra
eu fraies (vers l'embouchure de ce fleuve); porta ferréa; (les villes)
Trapesunda, Gerala ou. Gerasa, Ascara, Sebaste; Baldac; Jérusalem;
(47) Les deux îles entre l'Arabie et l'Afrique : Meric et Asfacla, restent iHuoinmces sur la carte
deir abb. Canonici ; Zurla donne nne autre lecture de quelques autres. Au lieu de Laricc dicta Camar,
il lit : ititula Unee di camai ; au lieu de Ccltalcs et Termelic, il a : Jettales et Timelit.
(48) Zurla y voit P. Tauris et au lieu de montes Sytliie il lit : mantes Syriae. — La carte du mscrit
deir abb. Canonici donne le nom du il. Gyon, qu'cm ne trouve pas dans nos co|mcs. Voici ce qu'en dit
Zurla : finie Indiae. Nell' interne poi verso l'occaso trovasi espresso flu. Gyon, nondie Indus flu. e tra
questi due sta scritto hic cùnvemt muititudo Tartarorunit noucbe hic elefantes pascuntur, India
magna, al occaso dell' lodo India parva que et Ethiopia.
(49) Nous apprenons par la carte de 1 Egypte et du littoral de la mer Syriaque, que tout le pays
jusqu'au fleuve Tigre, portait le nom de S3rrie, et an delà du Tigre jusqu'à l'indo était la Partbie,
Il y est dit : Partia extenditur lUtra Tygrum usque ud Indum fiuvium, ubi India terminatur et
£laudit intra se Àsyriatn.
H. 4
38 GÉOGR. LATRIB» 1380-1410.
Cette notice respire comme la carte elle-même , l'érudition antique ,
qui n'avait jamais été oubliée et commençait à reprendre parmi
les Italiens. La notice reproduit fidèlement les mots d'Isidore de Séville,
des ravennates et des géographes antérieurs : elle divise les trois par-
ties du monde en provmces, établies du temps de la domination
romaine. En Afrique pas un seul nom moderne ne se mêle à la
description. En Europe, toutes les appellations postérieures ou mo-
dernes sont subordonnées à l'ancienne division et accidentellement
rattachées. La seule description de l'Asie offre en partie une esquisse
double, ancienne et moderne. Modemi aliter diuidunl, et ce que la
notice a dit de cette division moderne est à peine soulevée par
quelque nom de la mappe de mari et terra , qui abonde en appellations
modernes dans la seule Europe.
Que cette notice marginale soit une partie intégrante de la carte de
Sanuto, ou le voit, non-scuicment par l'aveu qu'elle a faite elle-même
à la fin, mais par la conformité totale et partielle qu'elle présente
avec les copies des cartes , surtout avec la copie parisienne. La Médie,
la Mésopotamie se trouvent sur celle-ci, tandis qu'elles sont passées
sous silence par les copies bruxelloises; les Vandales de la notice
répondent à l'appellation de la vistule Vandalus, qui ne se trouve
que sur la copie parisienne. La notice dit : moderni ponunl ubi Sitia
regnum Caiay et la seule copie parisienne répète : Sitia siue regnum
Catay, Elle seule nomme les pays de Lacedemonia, de Barbarico, dont
on trouve l'explication dans la notice.
i21. D'après ce long examen des copies de la carte de Sanuto et les
recherches auxquelles je me suis livré sur l'état de leur original , il est
temps d'analyser la connaissance géographique de la carte et les
sources où elle a pu puiser.
Personne je pense ne contestera des connaissances géographiques à
Marino Sanuto, s'il entreprend de dessiner les cartes ou de les faire
dessiner pour l'usage des ignorants; que les cartes nautiques lui
étaient certainement assez familières et qu'il était au courant des
explorations des voyageurs. Cependant, la notice qui accompagne les
copies et la carte elle-même reposent sur les anciens antécédents, c'est
un écho de ce qui a été répété depuis les géographes ravennates par
mille bouches. On se copiait par habitude et dans celte répétition
infatigable on semait des nouveautés et on se perfectionnait. Les
géographes de Sicile avec Edrisi marchant plus indépendants de pré-
ventions , ouvrirent la voie à ce progrès imposant et fournirent des
matériaux qui ne cessaient d'alimenter l'exercice italien. Nous avons
dit que la récolte abondante de leurs efforts ne pouvait être perdue
et en analysant la carte de Sanuto nous rencontrons le tableau de leur
conception, et les paroles qu'ils ont tracées sur leur carte ronde.
Le premier coup-d'œil peut convaincre que la mappemonde de
alignas. Duc innt antcm Germanie, snpcrior jnxta septentrionalcm oceanum, iaferior circa Rcnnm
(d'Ailly, cap. 26) : copié mot à mot de ce que dit la cosmograpliic du manuscrit de Bruxelles de
rannée iilO (p. 46); copié textuellement de originnm d'Isidor de Sevilie. ^ La notice en entier
déiive de cette «onrce : eUe est importante autant qu'elle admet des passages et des appellations
pins modernes.
^
SANUTO, U2. 29
Sanuto est calquée sur la carte rogérienne dTdrisî. La moitié n'est
qu'une simple imitation et copie. Toute TÂfrique, avec ses rivières,
montagnes et villes marquées sans noms, pourrait être chargée d'épi-
graphes tirées de la description d'Edrisi et de ces cartes, dont il a
fait la description, par exemple au delà de Zangucbar, inscrivez Sofala
et tes deux bourgs qui s'appellent suivant Edrisi (I, 8, p. G5) Djenlama
et Dendema , situés sur les bords de la mer et qui sont marqués sur la
carte de Sanuto dans le lieu désigné. Toute TAsie , depuis Tembou-
chure du Nil , au sud des montagnes qui montent dans le sens incliné
vers nord-est , n'est qu'une reproduction de la carte édrisienne , ainsi
que celle de Sanuto invente deux mers caspiennes, une rapprochée à
l'Euxin de la nouvelle exploration, et l'autre édrisienne plus éloignée
et retirée vers l'orient, conformément au dessin antérieur des géogra-
phes de Sicile. Les nouvelles explorations italiennes prenaient évidem -
ment leur assiette sur la configuration édrisienne.
i^â. La notice parle d'une région Laccdemonia^ qui s'étendait en
Europe au midi du Danube, ayant ce fleuve au nord, a seplentrione
flumen, située entre la Mésie, les Apennins ou les Alpes, l'Istrie et la
Germanie, dont Gallia belgica est une parlie (53). Ce pays de Lacede-
monia est nommé sur la mappemonde de la copie parisienne et c'est
le nom donné par les géographes de Sicile aux pays montagneux depuis
la mer adriatique jusqu'aux extrémités de Hemus qui louchent l'Euxin.
De même la mappemonde parisienne avance l'épigraphe de Carinthie
jusqu'aux sources du Danube et du Rhin, conformément a la descrip-
tion d'Edrisi. Les Talares inclus par Alexandre-le-grand, Gog et Magog,
sont des contes arabes qu'Edrisi fit connaître aux Italiens. Les KareU
avec l'épilhète d'infidèles , sont les Kalovri madjous d'Edrisi. Mais les
explorations récentes acquirent de nouveaux renseignements,, taat
pour l'Asie centrale, que pour le nord.
Les tles de la mer de l'Inde sont latinisées : à peine reconnaît-on
quelque nom des écrivains arabes. Cependant elles se retrouvent
en parlie par la description d'Edrisi (1,9, iO, il, 6). Ainsi l'île
Kis est certainement ^éS Kaïs du golfe persiquc; Meric (Messireh
sur la côte d'Arabie) , jjlJV Merlan d'Edrisi. CeUalcs , répond à
èi^ Kclah , Kelat; insula Piperis , est une antique dénomination;
Nebula, c'est v >Lsr*^t cl sahab, ou des nuages des arabes (Edrisi , I ,
8, iO, p. G8, 91); insula Sikdpa Camar des copies Bruxelloises est
sans doute Selediba, Serindib, Geilan, vis-à-vis du cap Comorin et
confondue avec j-^ Komor des arabes. Les copies de Paris et d'abb.
Canonici ofl*rent à la place de Sitedpa Lince de Camar et décèlent la
même confusion de Ceilon Lanka avec Komor. En effet , la carte
d'Egypte et de Syrie des codes bruxellois, donnant à celle île le nom
de Laricc Comar, fait croire qu'il y est réellement question de l'île
(oS) Lacedcroonia, habet ab oriente Mcssiam, ab euro Yslriam, ab affrico montes Aponinos , ah
occasuGalliani bclgicam, a septentrione flumen quod Galliamet Gcnnaniami dinidit (à Lacedemonia).
50 GÉOGIU LATINE, 1330-1410.
Komor Malaï , dont la capitale portait le nom de Leirane (d'après Ibti
Saîd). Mais Komor Malaï, sar la carte de Sanulo paraît être représentée
plutôt par Tcrtnelic, Esfacie ou Afacie et Asizia, sont plus embarrassants
pour la comparaison (54). Nous trouvons dans Edrisi (1 , 7, p. 59) à
côté de TAfrique , parmi le groupe des iles Zaledji , une fie qui porte
le nom Andjebeh, dont la capitale Aa.^t Anfoudja répond assez à
Esfacie. Il v a dans Edrisi (YII, 9), deux villes chinoises qui portent le
nom de Asuria, Askirla, Asfizia ou Asiira, etc. (ks), qui ont pu engeu*
drer le nom d'une ile. Le nom d' Asizia répond aussi à \j^[& Aschoura
d'Edrisi (I, 9). Quelle que soit Tincertitude qui règne sur certains
points, toujours est^il indubitable que la mappemonde de Sanuto
dérive de la table ronde rogérienne, et que la description d'Edrisi lui
donne certaines explications.
123. Au centre de l'Asie , Tarse, Turquesten, Sym, India superior
Johannis presbylcri; hic stal magnus canis, tout le Ca{hay, Bclia, sont
le fruit des investigations des voyageurs et des envoyés. C'est par des
informations de Piano Carpini qu'on s'avait que Cumania s'étendait
au-dessus de la mer Caspienne jusqu'à un immense fleuve , dont il
ii*existe pas le pareil. C'est encore lui qui donna des notions sur la
province russe Smdalia, inscrite p. iradalia dans la copie parisienne,
et p, uradalia dans les copies bruxelloises (se).
On avait de nouveaux renseignements assez détaillés sur les côtes
gud-est de la mer baltique. Les exploits précédents des Danois, stimu-
la par l'esprit des croisades, et le nouveau commerce des villes
anséaliques, leur donnèrent quelque retentissement. On y marche , à
partir de la gorge de Dana et de la Olsatia, par Slavia (Meklenburg),
Pomariaon Pomerania, qu^avoisiue l'île (Rina, Rugia, Rana, Runa);
traversant Odra, on rencontre Toronum, peut-être Thorn , construit
par les chevaliers teutoniques en 1255, sur la Yistuie, qui est appellée
Vandalus sur la carte; au delà de Yandalus, on voit Prucia et les
pagani Leioni (Litvaniens) ; Kurland , Linlesunia (Lindanissa , nom de
Revel), ville agrandie par les Danois; Riga, construite vers ilG3 par
les Allemands, et les provinces Liuonia, Variant (Virland, Vironia),
Estonia enfin Kireli ou Kareli infidèles. Cette suite est quelque peu
dérangée par des transpositions et la situation en est déplacée, mais on
voit que des renseignements commerciaux arrivèrent aux Italiens de
ce point éloigné. On le voit encore par la notice qui, à la fin de la
description des petites îles situées dans la méditerranée , s'exprime
ainsi : posl has insulas.., Circa parles Anglie, Ybernie et Scoliê sunt
muUe instUe, quarum nomina sunt ignola, Circa partes Datie et maxime
in mari quod apud indigenas orientale vocatur , sunt valde multe bone
insuie et bene habitate, que regno Datie sunt subiecte. In partibus
rcgnorum Suetie et Norvegie sunt quam plures insuie subjecte regnis
(64} Ptolémée place dans le golfe persiquc une Uo Aflania , elle pourrait-ôtre déplacée , comme
qette autre Kis.
J55) Asfetira do fcrganien Ibn Ketiri, Aspitra de Ptolémée (edit. Golii, p. S5, notre, p. 77).
86} Regpum Géorgie habet ab oriente maffnura montem vocatum Àibzor, tibt multe nationcs
ntant^ dit la aofjce : c'est la montagqe de Gbilan, Elbrous.
8ANUT0, 194. 51
predklis. Norvège et Suède ne se trouvent pas nommées dans la copie
parisienne, mais leur existence n'était pas inconnue aux géographes
de Sicile , du temps d'Edrisi.
Je ne touche pas à quelques épigraphes de cette carte , trop obscu-
res et inintelligibles pour moi, et j'appelle toute Fattention de mes
lecteurs sur le progrès, que la connaissance géographique avait fait
dans la construction des cartes, ce que décelé la mappemonde de
Marine Sanuto.
12 L Sanuto dit lui-même, anno domini 1521, die 24 mensis septem-
bribus, ego Marinus Sanudo diclus Torxellus de Venetiis, gratia dei
preuia, introitum habui ad sanclissimum palrem nostrum dominum
papam, cuius sanclitali, duos libros super terra recuperatione et conser-
vaiione fidelium presenlaui. Quorum unus cooperlus fuerat rubeo, aller
vero de croceo, Eidem eliam presenlaui quatuor mappas mundi : unam
de mari mediterraneo ; secundam de mari et terra; ter dam de terra
sancta; quartam vero de (erra Egipti : qu'en 1521 , le 21 de septembre
il présenta au pape les deux volumes reliés en rouge et jaune, conte-
nant son ouvrage sur la récupération de la terre sainte et sur la
conservation des fidèles; qu'en même temps, il lui présenta quatre
mappes, dont une représenlait la mer méditerranée , l'autre la mer
cl le continent, de m^ri et terra, la troisième la Palestine et la
quatrième l'Egypte; j'ignore s'il y a des manuscrits de l'ouvrage de
Sanuto, qui contiennent toutes ces cartes; le manuscrit de Paris, autant
que je sache , dont se servit Bongars, et ceux de Bruxelles n'en ont
que trois : la carte de mari et terra, et celles de Palestine et -de l'Egypte,
Cependant au dire de l'auteur, la carte de la mer méditerrané figurait
au premier rang, comme si elle était essentielle et de prédilection.
Pour nous, elle aurait été de la plus haute valeur. Elle avait sans
doute été dessinée par des mains habiles avec exactitude et aurait pu
nous fournir un moyen indubitable d'apprécier l'aptitude des Italiens
dans la construction des caries.
Privé de ce monument nous sommes réduits à recourir à la mappe-
monde ou, suivant la qualification qui lui a été donnée par Sanuto
de mari et terra, dans laquelle, celle de la mer méditerranée se trouve
réduite à une échelle assez petite et enclavée dans la masse des
conlinents. Le soin que décèle la copie parisienne, nous garantit de
Texaclilude de sa réduction.
Nous avons observé que les cartes italiennes furent nautiques, pro-
duits de courses des marins et même dessinées par des marins. La
carie de la mer méditerranée était nautique parcequ'elle représenlait
une mer et avait été confectionnée par des marins. La mappemonde ,
qualifiée de la mappe de mari et terra, par son litre même donnant la
préférence à la mer , doit être considérée comme nautique , comme
œuvre des marins qui donnaient le plus de soin à la mer méditerranée.
Nous pensons que cette mer mérite d'être confrontée avec la connais-
sance qu'on en a aujourd'hui.
Or, pour donner une carte comparative de la carte de cette époque
avec celle d'aujourd'hui , nous extrayons cette mer méditerranée de la
copie parisienne et nous la plaçons sur les positions littorales graduées
32 GEOGR. UTINB, 1350-1410.
(le la mer médittcrrance , suivant les longitudes et les latitudes géogra-
phiques déterminées par nos géographes modernes. A cet efl'et, je me
suis servi de la projection ptoléméenne arbitrairemenl modifiée. Dans
Fexament de la composition des cartes postérieures, j'indiquerai les
motifs de Tarbitraire : en attendant je ferai remarquer que dans une
semblable épreuve on n'applique pas la carte à une projection déter-
minée, maison cherche la projection qui résulte de sa composition.
Aussi pour graduer la carte de Sanuto, afin de comprendre ses propor-
tions et tes situations de ses positions, j'ai tracé les parallèles au rayon
de 165 à partir de Téquateur (voyez n** 75 de notre atlas).
Sur la carte de Sanuto graduée de cette façon , je place les positions
d'après les longitudes et les latitudes actuellement déterminées , et je
trouve dans le nombre d'une trentaine de positions, quelques dévia-
tions, mais le total, l'ensemble de la construction de la mer méditer-
ranée, déploie une admirable conformité avec la connaissance actuelle,
tant dans la latitude que dans la longitude, depuis Alexandrie jusqu'à
Venise et Tana, depuis Geuta jusquà Aniiochie. Les proportions de
toute la mer en sa largeur et sa longueur offrent une dimension
bien réglée.
Le savant Jomard en examinant la belle peinture de la carte parme-
sane des frères Pizigani, faite à Venise en 1567, a admiré l'exactitude de
certaines parties qui présentent un singulier contraste avec la grossière
imperfection d'autres cartes contemporaines. Je pense que si la précision
des parties des cartes bien dessinées de cette époque, est digne d'admi-
ration, l'harmonie et l'exactitude dans l'ensemble de toutes ces parties
en est plus méritoire encore, et je défie de trouver les compositions
de Visconti , de Pizigani ou autres contemporains inférieures à celle de
Sanuto. Qu'on veuille les prendre à la même épreuve (57).
125. Les cartes italiennes de cette époque et celle de Sanuto, étant
nautiques et l'œuvre des mariniers, ceux-ci portaient tout leur soin à
la configuration de la mer, à faire ressortir les promontoires, les golfes,
les petites sinuosités des côtes. Par ce soin spécial, on comprend bien
que la mer gagnait sur la terre , et l'entraînement aquatique se plaisait
à soutenir le courant des fleuves élargis. Par cette disposition des con-
structeurs de cartes, les lacs, les petites îles et péninsules paraissent
agrandis, gonflés: mais le gros de la terre du continent est aminci
quelquefois très-sensiblement. Dans la carte de Sanuto» l'Italie, par la
pression aquatique, perdit de son étendue convenable.
Nous avons aussi observé ce raccourci des accessoires qui était en
usage dans le dessin, dans la peinture, dans la sculpture et qui s'était
installé dans la composition des cartes libres de toute projection et sans
échelle déterminée. Ce raccourci a lieu dans les caries de Sanuto , et
(S7) Mon on'vrage était sons presse lorsque on m*a comxnnniqoé la publication savante de
M. Vivien de Saint-Martin, liist. des découvertes géographiques. Voici ce qu'il y dit des cartes que
nous examinons et analysons : Quoique les marins dont elles sont l'ouvrage, n'eussent pas à leur
disposition le secours si important des observations astronomiques pour en fixer les points prin-
«<inan< dans le sens des lonffitndei. elles n'en nrésentent nas moins un merveilleux deirré d'Avarti.
au-dessous de ce degré
tâcheroDi d'expliquer cette chute remarqoable
SANUTO» 1S6. ' 33
8ur celle de de mari el krra, il est irès-liarmonieux. Sar cette cdrte,
en proportion de la mer méditerranée, TEspagne, la France, FAIle-
magne sont dlniimiées à la suite de la précision de la mer méditerranée
et de ces connaissances de la mer baltique qu'on a voulu préciser. Mais
sous une autre et moindre échelle, les formes de ces parties sont har-
monieuses et admirables (ss).
Par une semblable composition , les distances continentales serrées ,
cédaient à cette pression des constructeurs. Toute leur attention portée
sur la mer centrale s'emparait de la moitié du diaphragme du cercle,
pour y développer exactement ses dimensions, le reste extérieur fut
tracé pour la plupart en raccourci dans de justes formes, suivant les
conceptions conçues par Texpérience des navigateurs , ou par les rela-
tions des voyageurs. Sous ce rapport même la carte de Sanuto de mari
et terra offre un progrès remarquable, parce que personne ne contestera,
je pense, que TËspagne, la France et TÂllemagne, malgré leur con-
traction, sont bien assises ; ^'Angleterre et Flrlande y tiennent leur
position relative au continent. Certainement il a fallu visiter et bien
observer les côtes de ces pa^'S pour tracer une semblable configuration,
qui ne dérive d'aucune forme connue , arabe ou ptoléméenne : elle est
l'œuvre des géographes, cosmographes du siècle.
126. J'ai rédigé mon analyse et mes observations précédentes avant
de recourir à la description des cartes sanutines publiées par Placido
Zurla en 1818. La mer méditerranée de la mappemonde de mari et
terra se présentait naturellement comme réduction d'une carte spéciale
de cette mer qui composait l'assemblage de plusieurs cartes attachées
à ce livre de secretorum fidelium crucis. Celte carte spéciale n'a pas
été publiée, mais elle existe, elle est enfouie dans le manuscrit délia
rinomatissima collezion dcll' abb. Canonici ; manuscrit contemporain de
Sanuto, préparé probablement par l'auteur lui-même à quelque haute
destination. Placido Zurla en donne une notice, et ce qu'il en dit sur-
passe toute idée qu'on a pu se former d'une carte qui est qualifiée de la
première des quatre. Nous en extrayons ce qui est essentiel.
La carte de mari mediterraneo est composée de cinq feuilles ou
cartes (so). La première contient la partie occidentale de l'Europe,
commence de la Flandre, qui avance comme un tronc, commençant par
le nom de Plissa, Flislanda, Vis-à-vis est Inglitera avec les seules
épigraphes de Noligales et Sanbetor. Â côté est tracée l'Irlande ayant à
l'occident un grand golfe avec l'épigraphe gulffo de issole ccclviii béate
et fortunate. On voit sur cette carte la France, l'Espagne et toute
l'étendue de l'Afrique jusqu'à Tunis, et ses côtes occidentales étendues
jusqu'à Saffî et Daman. Les côtes sont remplies de noms des pays litté-
raux, ornés de pavillons coloriés et d'armoiries; toute la carte est
repassée par les rombs des vents.
(88) Un semblable racconrd de la nariie secondaire est nonssd & l'exès sor la carte de ITgrpte et
delà Syrie, où le dessinatenr a tracé rArabie et tontes les Iles jusqu'à Tlle nébuleuse.
(S9) La prima di questo carte, le quali generaleraentc occupano ciascnna due intere t>agine di
fronte coniiene nna parte soltanto dei gran periplo dei mari cognite a que* giomi cbc qui è distinto
in dnque carte , mercate tutte al dissopra colla générale indicazione de mari medlterraoco; di raano
pib recenta, non pcrb àrbitrarir,mentrelo ftesso Sanuto etc. (Znria, p. Id, 800).
54 GÉOGR. LATINE» 1330-1410.
La seconde contient toutes les côtes de Tltalie, les iles de ia mer
ionienne et la partie correspondante de l'Afrique au sud de Tltalie :
ed è da ammirarsi la bellezza délia forma e coniorni di questa , quale
appunlo nei posteriori porlolani si ravvisa : menlre i gcografi soUanlo
alla fine del sec, xvi cominciarono a ben disegnarla suUe loro carte (eo).
La troisième représente l'Asie mineure, la Mésopotamie, la Syrie,
l'Arabie, l'Eygyptc avec les mers rouge et perse, une portion de la mer
indienne avec ses îles; les cours du Tigre et du Nil, les indications et
le dessin des villes intérieures, des monts et des fleuves à couleur ver-
datre, accompagnés de courtes épigraphes (ei).
La quatrième contient le périple de l'archipel et les côtes africaines
vis-à-vis de celui-ci.
La cinquième enfin offre le périple de la mer noire. Suit une figure
d'astrolabe à plusieurs cercles concentriques avec les signes du
zodiac, etc., et un compartiment carré inscrit les noms de ces signes,
le tout de la belle configuration et de couleurs variées.
C'est l'atlas de Sanulo composé de 8 à 9 caries générales, spéciales,
portulanes, topographiques et de plans des villes, accompagné d'une
courte esquisse de géographie. Zurla ne nous a pas averti si ces cinq
cartes de la médilerranee sont de la même échelle, pouvant ainsi se
coordonner et joindre dans un seul tableau; ou si elles sont des périples
de portulans détachées de difiTérenles échelles, à rebords irréguliers :
toujours est-il certain pour nous, qu'elles ont servi à composer la
méditerranée entière délia forma e contorni qtiale appunto nei posteriori
de l'époque de la renaissance des lettres.
Dessinateurs.
127. Marino Sanuto a pu savoir dessiner et connaître la méthode de
la construction des cartes : mais comme il ne le dit pas lui-même, nous
ne devons considérer les cartes de son atlas que comme des copies des
cartes de l'époque et des cartes antérieures, qu'il a fait faire, afin de les
attacher à son ouvrage, pour donner la lumière aux ignorants. Elles sont
de l'école vénitienne, de la fabrique vénitienne. Cette école a pu
fournir à cette époque beaucoup d'exemplaires copiés. Le doge
Franceseo Dandolo (1529-1559), suspendit alors dans la salle ducale
une carte nouvellement exécutée (ea). On ne peut pas contester le
primato dans l'art du dessin géographique aux Vénitiens, dont la puis-
sance, le commerce, les relations, l'activité, les possessions maritimes,
la marine, surpassaient toutes les autres nations : mais on ne peut
refuser une collaboration fructueuses à d'autres cités, surtout aux
Génois, qui se distinguaient par leurs entreprises océaniques. Le petit
atlas de 1518, de Pietro Visconte de Janua (le génois), est là pour
(60) Nous verrons comment ces belles formes se sont perdues et ne reparurent que vers la fin
du XVI* siècle.
(61) Zurla prévient que cette carte est la même qui est publiée par Bongars comme quatrième
qualiuée par Sanuto de terra Egypti : nous la donnons presque entière sous Te titre de littora maris
Syriaci.
(toi) Correva l'anno 1339, quando questo principe, .. . venea morte efu scpellilo nei monastère
de minon. Diccsich' in suo'.tempo, fossero faite le nobilissime carte di cosmografia, chc tuttavia
sono e si vedono se bene dopo rinnovate, e risarcite nella sala ducale (Paolo Morosini, istoria di
Venczia, 1637, p. 233).
PIZIGANI, 128. 55
attester qu'à Gènes existait une fabrique de cartes non moins active :
Pelrus Viseonte de Janua fecit istas tabulas, anno domini mcccxviii, dit
une note de cet atlas (es). La carte castillane de 13iG n'est pas trop
postérieure (ei). Le portulan médicéen de Tannée 1551 est un grand
atlas, grand-folio, composé de huit cartes doubles sur parchemin (es).
Nulle part il ne manquait de dessinateurs plus ou moins exercés.
Partout on copiait les cartes géographiques, il n'y avait à cet égard ni
secret d'état, ni privilège, ni monopole quelconque, ni propriété
intellectuelle, ni brevet d'invention : on dessinait, on copiait. Sanuto fit
préparer plusieurs copies de son atlas et l'exposa à Rome , à Paris ,
à Bruges. Les italiens excellaient dans l'exécution , les Espagnols ne
leur étaient pas inférieurs, et le produit partait de la même source. On
se communiquait, on se recherchait mutuellement. L'école de Venise
avait la connaissance de ce qu'on avait consigné en Sicile : tout le
monde connaissait les récits de Marco Polo et pouvait avoir sous les
yeux les caries de la fabrique vénitienne. Plusieurs noms de dessina-
teurs de cartes de toutes les nations sont connus : mais, à mon avis,
on peut avec plus de certitude les considérer comme copistes que leur
attribuer une composition nouvelle. Peut-être un jour aura-t-on le
bonheur d'exhumer quelque auteur. Mais dans l'état actuel des con-
naissances : comme les copistes et l'auteur de l'atlas de Sanuto nous
sont cachés, de même on n'a aucun droit de qualifier d'auteurs ceux
qui ne s'appellent pas compositeurs eux-mêmes. Yisconli, Marcus ne
sont ni auteurs, ni compositeurs. Ils ont signé la date de l'exécution de
leur copie comme font ordinairement les copistes. Et ceux qui compo-
saient, comme Pizigani, avaient devant eux des compositions, des
matériaux possédés aussi par les autres. Car les compositions ne s'im-
provisent point, elles ne se décèlent pas dans le xiv** siècle , comme
invention récente d'un seul, l'art n'était pas nouveau. Les véritables
auteurs de ces caries , sont ces laborieux cosmographes , qualifiés
d'ignorants, dont on ignore les noms, et qui travaillaient dans l'obscu-
rité du siècle précédent ; le xiv" siècle nous ouvre l'abondante moisson
de leurs labeurs,
Pizigani, 1367.
128. La grande carte de 1567, des deux vénitiens François et
Dominique Pizigani, est certainement de l'école de la fabrique véni-
tienne. Objet d'admiration. La dimension de la carte n'a pas moins
de 158 cent" sur 92 (4 pieds V^ sur 5 moins 2 pouces). Les huils vents
principaux sont figurés et accompagnés de légendes comme beaucoup
d'autres figures. De leurs huit points, sont tirées les lignes à l'usage
des ma^ps. On voit en outre de petits traits accompagnés de points
disséminés en guise d'échelle sur différentes directions de vents. Les
(63) L*at1a9 hydrographique de Viseonte 8* est d'une petite échelle. U est conservé dans la
)>ibliothèqnc de Vienne en Autriche. La copie se trouve depuis plusieurs années à Paris.
(64) Mss de la bibl. nat. de Paris, n* 6846 (Halte-Brun, géogr. de l'édit. de Huot, livre XX, p. 621).
(65) Baldelli Boni del portolano mediceo e délie scoperte dei Genovesi nell* Atiantico, inséré dans
son storia del milione, p. 453-472. — La huitième carte de cet atlas offre un calendrier lunaire
perpétuel, avec divers exemples qui tous se rapportent à l'année 1354, (O'Avezac^ notice des décou-
verte* dans Tocéan atlantique, chap. 5, p. 92, 33).
36 G^OOBj LATINE, 1530-1410.
pavillons des Vénitiens, Génois, Catalans, Portugais, etc., sont placés
aux lieux de leurs domination et dans les mers que sillonnaient leurs
yaisseaux. Les écritures sont nombreuses, variées, d'une grande déli-
catesse, heureusement, presque toujours lisibles, en latin quelque fois
peu intelligent. Per tacere di quanto spetta al Europa, la quale giusta
i limiti di que*giorni si stendo fino al Irlanda : Texactitude de cer-
taines parties présente un singulier contraste avec la grossière imper*-
fection d'autres cartes contemporaines (gg) , sur lesquelles on a voulu
juger la connaissance géographique de Vépoque et mesurer Tignorance
des siècles.
La carte porte à son extrémité orientale la note suivante : hccclxvii
hoc opus compoxuit franciscus pizigano venetiarum cl dominicus ptzt-
fano in venexia mejjfecU Marcus a die xii decembris. Le dessinateur
tait un certain Marcus, et les compositeurs deux Plzigani véni-
tiens (gi). Les compositeurs surveillaient et dirigeaient leur dessina-
teur et peintre : mais ils savaient dessiner eux-mêmes et certes, les
Pizigani ne se sont pas bornés à composer une carte unique. Dans un
code de Tabbaie de S. Michel de Murano se trouve , sur une petite
feuille, le tableau des côtes de la méditerranée et deux autres tableaux
peints de chiffres et de figures astronomiques et relatives à la sphère ; le
premier tableau offre répigraphe suivante : mccclxxhi adi vni du zugno
Francesco Pizigano viniziano in venieœia mefece (es). Nous n'avons pas
été assez heureux pour avoir à notre examen ces précieux monuments,
mais nous ne négligerons pas d'utiliser quelque fragment de leur des-
cription (g9). Le même xiv* siècle a vu paraître un manuscrit du libre
da navegar per mi Antonio Liprando, qui contient plusieurs portulans
de différente grandeur (70).
Ce sont de beaux monuments qui par leur exécution , leur peinture ,
leur scrupuleuse exactitude et la précision des détails, ont conquis
Tadmiration de savants géographes. Tous sont le produit de Tltalie.
Inspirés par Tinfluence des arabes, des byzantins, des franks, les
Italiens cultivaient les connaissances humaines, la poésie, la philoso-
phie, les sciences. Acceptant l'initiative des autres, ils avançaient,
créaient leur goût, leur méthode, leurs idées et façon, et bientôt
initiaient les Initiateurs eux-mêmes dans le mystère des sciences. Les
connaissances géographiques, à dater des efforts rogériens et de la
composition des cartes, étaient du nombre des connaissances qui se
communiquaient de l'Italie à la chrétienté et la péninsule pyrénéenne
se mit en première ligne pour suivre la marche des navigateurs et des
cartographes italiens.
labibl.
(66) lA ctrte des Pizigani passa des mains de Girolamo Zanêtti dans celles de P.Paciaudi, ensuite à
bibl. de Parme où elle est conservée. La bibl. de Paris s'en est procuré une copie en 18IK.— Zanetti
deir origine di alcune arti principali appresso i Viniziani 1788 en a donné une description ; dont ou
a an extrait par Zurla, sulle anticlie mappe idro-geographiche cap. 7-iO.
(67) Voici la conjecture de Formaleoni, sur le modèle qui a pu servir à la composition de Pizigani.
Gonstanlinople porte une couronne et un double pavillon , dont un aux cinq croix, l'antre au lion
ailé. Formaleoni conclut que le modèle fut dessiné immédiatement après la prise de Constantinople
par les croisés en 1202. —■ Une lutte s'est engagée sur l'ancienneté de la carte des Pizigani entre
P. Negnini et Angelo Pezzana.
(68) Voyez la note du chap. 10, suUa antique Aiappe idro-gcograpliicbe, de Zurla.
(69) Voyez ci-dessous cbap. 117-119.
(70) Kurla , ibidem.
CABTE CATALAHfi» 199. 57
Carte catalane 1375-i378.
129. La splandeur à laquelle les Catalans s^étaient élevés sous leurs
comtes, dont le dernier, Raimond Y, monta sur le trône d^Aragon ,
s'accrut encore en 1230 et 1231 par la conquête que le roi Jacq fit de
Tile de Majorque et du royaume de Valence sur les Maures. Toutes les
entreprises royales augmentaient la renommée des Catalans. Ils pas-
saient pour les plus éclairés de la péninsule; leurs courses commer-
ciales et militaires dans un grand nombre de ports des mers noire et
méditerranée, ouvrirent une vaste connaissance de toutes les parties du
monde dont elles étaient entourées. Ils avaient, bien avant 1286, leurs
cartes marines, et se servaient des instruments d*astronomie nautique
propres à trouver sur mer Theure de la nuit par les étoiles. Depuis
Fan 1303, ils succédèrent aux Génois dans la domination du vaste et
faible empire grec et sous leur amiral Roger de Flor, soutinrent les
guerres contre les Turks de ce pays. Majorque, depuis la conquête avait
formé un royaume à part. Elle participait à Tactivilé entreprenante
des Catalans en 1315. L'infant Ferdinand (mort en 1316) se fit nom-
mer à Clarenza souverain de la Morée. Le roi de Majorque Jacq III ,
épousa en 1362, la reine de Naples et pensait à des découvertes de
pays éloignés pour étendre la navigation et le commerce. Les Major-
quins avaient de fréquentes relations avec l'Afrique, faisaient des
courses vers Tocéan et les fies appelées Canaries et autres. C'est dans
l'océan que les investigations majorquines allaient faire de malheu-
reuses expéditions (7i); c'est là que se dirigeait vers le fleuve d'or,
l'expédition de Jacq Ferer, dans l'année 13i6 (72).
Par cette disposition, les Catalans et les Majorquins, s'ils n'étaient
pas supérieurs aux Italiens, leur étaient égaux dans la marine et la
connaissance géographique. Ils avaient d'autant plus besoin de cartes
marines , d'autant plus que les ordonnances royales d'Aragon , prescri-
virent, dès l'année 1359, que chaque galère devait avoir non-seulement
une mais deux cartes marines. Dans la navigation, dans la composition
de leurs portulans, de leurs cartes marines , de leurs mappemondes,
ils suivaient la même méthode des vents et de la boussole que les
Italiens. Leur boussole était italienne et portait les noms italiens des
vents, quoique leur propre idiome et l'idiome provinçat, variassent
tous deux.
Le roi de France Charles Y, le sage, était curieux de connaître le
monde, lequel depuis plus d'un siècle fatiguait la curiosité croissante des
Italiens et des Espagnols. La rondelle surmontée de paradis, qu'on voit
danslachron.de S. Denis (n° 71 de l'atlas), devenait une image suspecte:
il désirait avoir quelque chose de mieux, de plus positif dans sa biblio-
thèque. Il s'adressa donc à l'école catalane, aux cosmographes catalans,
pour en avoir une mappe bien exécutée. La demande pouvait avoir lieu
vers 1375, parceque la composition de la mappemonde s'arrête dans ses
prolégomènes à celte année. On y lit : sachez comme chose certaine
(71) Tatta 6t Bnchon dans la geogr. de Malte-Bron, livre XIX» p. 513, de Tédit. de lluot.
\ii] Voyez le coin de notre copie de la carte catalane et la note.
38 GÉOGR. LATINB, iSSO-iilO.
que ie nombre d'or de Tan 1575 court en viii, une fois arrivé au
janvier, nous laisserons viii et nous prendrons ix, qui est le nombre
d'or de toute cette année 1376 (73).
Ceci prouve que la composition avait lieu en 1375, mais la copie, le
dessin n'a été fait que trois années plus tard en 1378, probablement
mis à exécution à la suite de la demande qui arrivait en 1378. Voici
les indications qu'en donne la carte elle-même.
Dans l'année de la composition 1375, mourut Jacq III roi de Major-
que, en conséquence cette île était réunie au royaume d'Aragon : or,
le dessinateur couvrit le sol de Majorque de pals d'aragon et écartela
son pavillon d'Aragon et de Valence (74).
Rome et Avignon sont dépourvus de pavillons. Cette privation des
deux capitales du chef de la chrétienté est significative. La seule
vacance ordinairement de courte durée ne pouvait pas l'occasionner :
un autre événement plus grave a dû en être la cause. Le pape
Grégoire XF arrivé d'Avignon à Rome le 17 janvier 1377 , mourut dans
cette dernière ville le 28 mars 1378. L'élection d'Urbain VI, son succes-
seur, eut lieu à Rome le 18 avril 1578. Les mécontents , après un cer-
tain délai, élurent, le 20 septembre 1378, à Fundi, Clément VU qui
prit possession d'Avignon ; le schisme se déclara alors et commença à
déchirer la chrétienté. C'est donc l'événement qui a pu priver de pavil-
lons les deux capitales des papes. Le roi d'Aragon et de Majorque
Pierre IV , ne se déclara ni pour l'un ni pour l'autre , et le choix ne
convenait pas au dessinateur catalan. Avignon et Rome sont par consé-
quent privés de pavillon et il est présumable , que cette copie de la
composition de l'année 1375, n'a été commencée et exécutée que
vers la fin de l'année 1378, au plus tôt, ou dans une des années sui-
vantes (74).
Cette privation du pavillon des deux capitales du chef de la chré-
tienté , a lieu sur les dernières cartes, 5™* et 6°^" de l'atlas. A la suite de
quoi le dessinateur ayant marqué sur la première planche de prolégo-
mènes, à l'interruption de la vignette de la bande circulaire, l'année
BicccLxxvi, ajoute à la seconde petite bande les trois indications lxxv, vi,
vu, des années 1575, 1576, 1577, postérieures à la composition de la
carte dont il exécutait la copie.
150. L'atlas se trouvait à Louvre à la chambre par bas vers 1380.
On le voit dans l'indication faite en 1385 par Giles Mallet, gardien de la
bibliothèque; après sa mort il est signalé dans un autre inventaire
de 1411 ; il en est de même dans les années 1415, 1523, 1425, et il se
trouve actuellement compris sous le n** 6846 ancien fonds.
Bien que son existence continue soit aujourd'hui aussi clairement
dépistée, il restait cependant comme un reclus dans une oubliette pendant
(73) L'année courante 1375, est répétée plusieurs fois: sapiats que en lany 1373 cnrra lauro
nomcro en vin ... . qucst ayn de 1573... e sapiat de sert que lavu 1375 corre lauro'nomre en viii, fins
que sarem al primer dia de janer o icxarem vm e pandrcm viin pertot a quel avn de 137C.
lu) La pose des pals d'aragon est singulière.
(75) Tastu semble faire peu de ras des pavillons pour la détermination de l'époqne des cartes;
cependant il tire de cette source dos conclusions décisives pour l'atlas catalan. Au fond nous avons
suivi sa remarque, présumant toutefois une double rédaction de l'atlas : l'une de l'aonôe 1375,
l'autre postérieure à l'année 1378.
CARTE CATALANE, i3i. 59
430 ans. Observé cl examiné pour la première fois par Walckenaer
vers 1804 (le), il ne fut retiré de sa cachette et publié que quarante ans
plus tard par Buchon et Tastu, et il doit reparaître dans la grande
publication des monuments géographiques (77).
Buchon et Tastu en rendant public le fac-similé de Tatlas catalan,
exécuté au moyen de la lithographie, Font pourvu d'une notice de la
version des légendes, et de Fimpression de toute la nomenclature des
lieux, expliqués ou collationiiés avec les dénominations des anciennes
caries, c'est-à-dire de celles du xvi'^ et xvii® siècle. A vrai dire, le colla-
tionnement de ces caries anciennes avec une carie plus ancienne
encore , n'offre que des variantes pour retrouver et déterminer avec
plus de facilîlé les positions sur une carte moderne. C'est sprtoul les
côtes d'Afrique, de la mer noire, de l'archipel, qui avaient Ibesoin de
cette confrontation, partout enfin, où la dénomination nouvelle rem-
plaça ou défigura la nomenclature ancienne. Dans l'inlérieur de
l'Afrique et surtout en Asie, quantité de lieux sont répétés sans expli-
cation. Aussi il n'y a rien d'étonnant quand dans la masse des expliqués
on remarque quelques interprétations hasardeuses ou qui demandent
des reclifications (78).
131. L'atlas se compose de six tableaux en parchemin vélin, collés
sur bois, peints en couleurs or et argent et renfermés en un seul volume
à reliure ancienne. Chaque tableau a 25 pouces de hauteur sur 18 de
largeur; ils se replient dans leur largeur en deux feuilles, chacune de
9 pouces de large. Les deux premiers tableaux contiennent un traité de
cosmographie et d'astrologie en guise de prolégomène à quatre autres
qui composent la mappemonde. Tout le long des replis des tableaux, le
dessin et l'écriture sont plus ou moins affaiblis et endommagées (79).
(76) Voici commeDl Tastu signale celle première iDdication de son existence : Walckenaer, dit-il,
fat le premier qui mcijtionna Texislence de l'allas catalan de 1575. — 1" Dans sa traduction de Pin-
kerton 1804, 6 vol. et atlas, t. Ul, p. 398, 399, IV, p. 504, 561, 554 ; — %' dans les annales des voya-
ges, 1809, p. 211 (voyez la lettre de Malte-Brun à ce sujet, et celle de Graeberg à Malte-Brun sur les
mss. d'Usodimarc) ; — 3" dans ses recherches géogr. sur l'intërieur de l'Afrique , 1819, 8°, p. 18, 19 ;
— 4" dans sa dissertation sur les voyages dos frères Zeni (annales de voyages 1837). — Placido Zuria,
Angcio Pezzana, Gio Bail, Baldelli Boni et Malle Brun répétaient les conclusions de Walckenaer.
(77; Tastu , observant avec une noble émotion cet oubli d'un monument aussi précieux, n'a pas
réfléchi qu'il en rendit la publication presque inaccessible à bien de monde, en la reléguant dans le
XIV* volume d'une collection volumineuse in-4°. — Résidant dans une capitale, je l'eus... pour quel-
ques jours... (dépêchez-vous!) — Il esta regretter que toutes ces publications des monuments et
des sources historiques, d'un prix élevé par leur nature , soient ordinairement excessivement ren-
cbérics par leur insertion dans des recueils énormes, par le peu d'exemplaires qu'on en tire, par
le grand format et le luxe , par des exigences et des spéculations mal entendues. En général, ces
publications ne sont accessibles qu'aux gens opulents. Comment un laborieux indigent pourrait-il
aborder Rubriquis , Edrisi , Marc Polo , Aboulféda , Santarem et tant d'autres ouvrages côtés par 50
et centaines de francs? Au lieu de populariser les connaissances, on élève des barrières insurmon-
tables aux curieux qui veulent s'instruire ou élaborer quelque branche de connaissances humaines.
J'ai va tomber ces publications des mains de gens qui , l'œil mouillé, se détournaient des monu-
ments qui les intéressaient A ces plauiles, à ces émotions on répond: chacun peut trouver ces
ouvrages dans une bibliothèque bien approvisionnée. Oh ! quelle jactance ! quelle dérision !
(78) Nous avons remarqué que la lecture des noms est quelquefois en désaccord avec le fac-similé.
Par exemple , au lieu de Chanfuy je trouve dans le fac-similé Chayansu ; Cimirey se laisse mieux lire
ciait rey ; Godansse , Godanssc (Gdansk, Dautzik et pas Goettingue, qui est loin de la Baltique] ; ins.
Cria, Eria; Goppardia, Boppardia; San d'araicus de Silves en Espagne, est San Dominicus de Silves;
insula de Santé, iusule déserte , etc. Plusieurs épigraphes du fac-similé se laissent lire | lus régu-
lièrement que ne le fait présumer l'interprétation imprimée. (Voyez notre portulan.) — Je signale
ces inadvertances et ces bévues parce qu'ils se trouvent dans la publication : mais ie dois disculper
l'éditeur Tastu , dont les soins éclairés firent disparaître de la publication une énorme quantité
d'antres.
(79) Je prends sous ma responsabilité la lecture et rinterprétation de ce passage presque entière-
iO 6É0GR. LÀTIME, 1330-1410.
Dans son traité de cosmographie et d'astrologie, le cosmographa
catalan parle d*abord de Tunivers et le compare à un œuf; puis de la
création qu'on peut s'imaginer de cinq manières; ensuite des quatre
éléments. Il explique la forme, la position et l'intérieur du globe
terrestre. Le grand cercle de la terre est de 180000 stades, c'est-à-dire
vingt mille cinquante deux milles (se). C'est par l'entremise des arabes
qu'il savait le nombre de stades inusités, nombre puisé dans les rela-
tions ptoléméennes. Les 20052 milles donneraient 9 (8,97) stades à un
mille et 55,7 milles à un degré. L'origine d'une semblable supputation
serait introuvable si l'on n'admettait pas une erreur du cosmographe
ou de son dessinateur. Il semble qu'au lieu de 20052 on donnait 20520
milles à la circonférence de la terre. Ce nombre donnerait 8^3^/i7i p/s).
de stades à un mille, 57 milles à un degré ou 19 parasanges, grandeur
communiquée par les arabes.
Le cosmographe fait ensuite une courte et incomplète revue des trois
parties de la zone ou du cercle de l'habitable, c'est-à-dire de l'Asie, de
l'Europe et de l'Afrique (si). Il y reproduit quelques passages et étymo-
logies d'Isidore de Séville, plus d'une fois nommé dans cet atlas. 11
touche spécialement l'Italie, le Chypre, la Sicile et l'intérieur de
l'Europe. Tout ce qu'y est, vient de la géographie ancienne romaine,
modernisée par le langage catalan.
Yoici ce que dit ce passage purement géographique. — La zone ou le
cercle habitable que nous occupons ou que nous supposons se divise en
trois parties. L'une est l'Asie, l'autre l'Europe et l'autre l'Afrique.
L'Asie est septentrionale ou nord ; l'Afrique s'étend du midi à l'occident
et comprend toute la côte de Barbarie.
L'Italie vient ensuite, qui autrefois s'appelait Grèce, puis Saturnia,
puis .... Latium.... ensuite elle fut appelée Ausonia et prit enfin le nom
d'Italie (cf. Isidori originum XIV, p. 190édit. Paris, 1601).... commence
au pied des montagnes appelées Alpes, qui ont leur penchant du côté
de la Lombardie et se terminent dans la mer Tyrrhenienne. Dans ce
pays se trouve la ville de Rome qui a pris son nom de Romulus, roi, qui
édifia antiquement. On bâtissait les villes en leur donnant la forme de
grands animaux ou bétes sauvages, voilà pourquoi Rome a la forme du
lion dominateur de cent bétes. Cette Rome est la capiialc de toutes les
villes. Tous ses édifices sont faits de brique et de luile , voilà pourquoi
elle est appelée Laternis, ce qui veut dire faîte de briques. Brindes a la
forme d'un cerf; Carlhage a la forme d'un bœuf; Troie, prit la forme
d'un cheval.
L'Afrique prit son nom d'Afer, un des bâtards d'Abraham. Elle est du
côté de l'orient au sud-ouest du fleuve Indus et s'étendant vers le midi,
s'en va vers l'occident.
Ile signifie endroit situé dans l'eau salée (Isidor, orig. p. 192). —
Chypre se trouve dans la mer méditerranée en face de la Syrie; elle a
ment eflhcë aujourd'hui , dit Testimable éditeur de Tatlas catalan , et que j*ai cm pouvoir lire il y a
quelques an nées (notices et extraits de la biblioth., t. XIV, p. W. Il n'y a pas de doute , chaque jour
le temps fait de nouveaux ravages dans ces monuments et la multiplication de leurs copies marche è
pas de tortue , s'ajourne, éprouve des peines inouïes, des obstacles incroyables.
(80) Empcro laredonea de la terra es rocsurada per clxxx millers de stadis, los quais son xx millia
14Ï milles. -►
ffii) La zona o celrcle babitsèile, laquai per nos es tenguda e pensada se dcparteis en m parts.
CARTE CATALAKE, 15!. 41
jitrë son nom d'uDe ville appelée Ciper, qui se trouve dans la dite fie.
Elle est encore appelée Centapole, parce qu'elle renferme cent villes.
Elle est située vis-à-vis la nier Libyenne appelée Adriatique. — Ensuite
vient la Sicile, nommée d'abord Sicania et située de la même manière.
Elle s'appelait aussi Trinacria, des trois monts qui s'y trouvent. Dans
cette île est le mont Etna, où le soufre brûle en tout temps.
La mer rouge sort de la grande mer et prend cette couleur rose de
la terre, qui est presque toute vermeille et vicie tous ses rivages (Isidor,
orig. p. 181).
La mer est appelée mer, parce qu'elle est amère. Elle passe secrète-
ment à les veines de la terre, y dépose son amertume et sort ensuite
travers douce par les sources, après quoi elle reprend sa nature.
L'Europe a pris son nom d'Ëuropus, roi, ou d'Europa, fille d'Agenor.
Dans cette partie du monde , vers le nord , sont les monts Ryphées et le
fleuve Tanaîs, qui doit son nom au roi Tanaïs. Là sont aussi les grands
dépôts de la grande mer, qui se réunissent près de la ville de Theodosium
(Cafa) au fleuve Tanaïs; et celle-ci est située au-dessous du Tanaïs et
s'étend jusqu'au Danube.
Dans cette partie se trouvent les provinces d'AIania, de Dacia et de
Gotbie. Du Danube jusqu'aux Alpes est la grande Germanie , laquelle
est ainsi nommée à cause de la confraternité des peuples; elle finit vers
le couchant au fleuve du Rbônes et au nord au fleuve de Alba. Dans
cette contrée se trouve la région de Sevia, qui est dite Amont (mon-
tante, supérieure). Celle-là est l'AUcmanya, laquelle prit son nom du
bassin dit Alaraan (lac Léman).
La grande mer s'appelle Oeceanus. Océan veut dire la même chose
que lien ou limite de courroies ou cercles en fer.
De semblables notices accompagnaient de temps anciens les mappe-
mondes et les images rondes.
Ayant touché l'océan, le cosmographe abandonne sa revue géogra-
phique pour expliquer le flux cl le reflux, qu'il spécifie particulièrement
sur les côtes opposées de la Manche. Il parle intermédiairement da
«ours du soleil et de la lune ; comment on peut trouver cette dernière
en mesurant les quarts des vents; Fheure de la nuit par les chariots et
les deux frères; le lever et le coucher du soleil relatifs aux quarts des
vents. Suivent les pronostics de tous les jours de la lune, la spécification
•des vents; puis le cosmographe compte le temps et donne pour les
pronostics une flgure humaine aux signes zodiacaux correspondants à
ses membres, d'après ce qu'a dit Plolémée : diu Tolomeu, l'astrolo-
gue (ss). C'est ce que contient le premier tableau.
Le second tableau présente une suite de 57 cercles ou bandes circu-
laires déroulées d'un centre et entourées d'une bordure où flgurentdes
entre lacs arabes qui cachent les informes caractes arabes. Aux quatre
coins sont les flgures des quatre saisons. Dans les bandes on distingue les
noms, les chiffres, les figures représentant : calendrier, zodiaque, mois,
(8S) Thamarat fi alikam al noginm, est le titre cTua abi«gé de ce que Ptolémée a écrit sur l'astro-
logie judiciaire, composé par Saouanl , qui est peut-être un Scverus, que Hadji khalfa prétend
avoir été disciple du même Ptolémée; plusieurs auteurs out fait des scliarh, ou commentaires
anr cet ouvrage : entre autres : \boii Josef al Oclidessi , Abou Mohammed al Schail>aoi, Abou
Saïd al Tbamamr, Ebn Thsub al Djethaliki, al Sarakiisi, etc. (Oherbelot).
II. n
42 GÉOGR. LATIMfi, 1350-1410.
lettres dominicales, nombre d'or, heures, constellations, planètes; corres-
pondant aux trois éléments et le quatrième élément, la terre, se trouve
au centre, où Tastrologue mesure la hauteur du soleil. Les 28 constella-
lions portent les noms arabes en écriture latine et orthographe catalane.
f52. Chez le cosmographe catalan, mapa mondi, avait autant de
valeur que la géographie. Plinus est maestro de mapa mondi , c'est-à-
dire dans la géographie. Cependant , mapa mondi vol dir aylani con
ymage dcl mon e delos diversas dais del mon e de los régions qui son sus
la terra, de diversa^s maneras de gens qui en ela babilen, signifie : image
du monde (imago mundi) des divers états du monde, des régions qui
sont sur la terre et des diverses espèces de gens qui Tbabitent. C'est
donc rimage et la description (ss). Le cosm#grapbe a dessiné l'image
du monde ou de Fhabilable en quatre tableaux ou cartes qui composent
un seul tableau. Chaque carte est sous la rose de seize vents. Cette répéti-
tion de la rose ferait le tableau quatre fois plus long que large, mais ces
roses s'empiètent l'une sur l'autre et diminuent un peu cette longueur;
aussi le cosmographe, dans toute la longueur du tablcau-au nord et au
sud, a-t-il étendu sun dessin au delà de la rose, de façon que son tableau
entier est trois fois plus long que large.
Pour notre examen et notre atlas, nous l'avons réduit à la proportion
de 200 à 49, c'est-à-dire à un quart de l'échelle (v. n«" 80, 81, de l'atlas).
 la suite de quoi, sur toutes les côtes de l'embouchure de l'Elbe, en
côtoyant l'Irlande, l'Angleterre, le continent jusqu'au détroit; la mer
méditerranée et noire, et l'Afrique baignée par l'océan, nous n'avons
inscrit qu'une partie des inscriptions qui chargent trop abondamment
la mappe catalane. De même, j'ai pu désigner toutes les fies de la médi-
terranée, et à peine quelques-unes de celles qui sont dans Fadriatique.
Au reste, dans les autres parties de la mappe et partout dans l'intérieur
du continent toutes les nomenclatures s'y trouvent, à l'exception de deux
ou trois des côtes de la mer caspiennê. Quant aux longues légendes,
elles sont insérées en entier ou en extrait pour autant qu'elles signaient
la nomenclature, la situation géographique, la direction du commerce,
ou qu'elles expliquent les figures; ce qu'elles disent des produits, de la
saison, ou ce qui dérive de l'érudition, a été abandonné ou passé sous
silence faute de place. Les figures, figurines, pavillons y sont tous (84).
Les différences exceptionnelles de constructions, dans Tombouctou,
San Jago de Compostella» Jérusalem, sainte Catherine, Mekke; tour de
Babel, trois églises, Ssiras, Yssicol sont observées; les villes chrétiennes,
(83) Mappemonde, bab mondou, maba mondi ^ a la même valeur chez les arabes : carte et
livre de géographie. Kharthi ou Kbartas cliez eux signifie ordinairement carte marine. — Les
prolégomènes du cosmographe catalan décèlent une confusion de la valeur de mappa mundi :
en effet: mappe, image, présentait une description géographique, partout où elle trouvait une place
vide. La même confusion offre le mot latin descriptit. Au xvi* siècle encore ou dirait : un tel
descripsit regioncm , parce qu'il a publié un volume de sa description ; un autre dcscripsit
eandem, parce qu'il a compose sa carte géographique.
[Si) Quant aux pavillons (disent Buclion et Tastu) nous les avons marqués ne tenant pas
toujours compte du blason , qui ne laisse pas d'être souvent d'une grande exactitude liistorlr
Sue. — A quoi nous répondons : qne c'est dommage que le fac-similé n ait pas garanti l'exécution
es pavillons et y ait laissé beaucoup de doutes. Tous les lions y sont de même forme. Le
cosmographe ne les a-t-il nas distingués? a-t-il Inventé pour tous une figure étrangère à
rhéraldiquc? Car t)artout , au lien de h queue, le lion est décoré (!*une aile. Je suis peiné d'avoir
à l'observer."
i
CARTE CATALANE, 13S. 43
surmontées d'une croix, el non chrétiennes, surmontées d'un globe, sont
désignées. Je pense qu'on distin£;uera toutes les variations des villes
dans leur ûgure, qui a été amoindrie, pour faire plus de place aux
épigraphes, à on tour seulement à coupole ou appointée par une croix ;
à la tour accostée de deux tourelles crénelées; à la tour rehaussée en
un étage ou en deux étages; enfin les figures doublées ou triplées, de
€ambelech, Fes, Paris.
135. La carte, dans sa longueur, se laisse tourner indifféremment,
nord, sud, en bas ou en haut, comme on le voit par les figures, par les
longues inscriptions et les épigraphes en majuscules. Les dénominations
des lieux sont inscrites en tous sens, continentales, comme de rigueur,
sur le continent, à rexceplion extraordinaire. Les dénominations insn-
laires sur la mer, celles de grandes îles, suivent le mode continental.
Toutes ses dénominations partent du point qui indique la situation du
lieu : une autre direction est à peine trouvable. Par ce mode d'inscrire
les dénominations, abstraction faite des fies, se forme une seule série
non interrompue de toute la nomenclature des rivages, qu'on peut
suivre d'un bout à l'autre en tournant la carte à chaque grand pli et
repli des rivages (cette nomencl. est examinée dans le portul. génér.).
Du paradis au sominet du monde, il n'y a pas de question; l'orient
esta droite ou à gauche. Tourner la carte sud en haut, est la méthode
arabe; sud en bas est une nouvelle méthode, introduite depuis l'inven-
tion de la boussole.
Le propos de la mesure de la circonférence du globe, est une vaine
érudition pour cette image du monde. La dite image ou figure est ronde
comme une balle à jouer : ela dila ymago ho figura es rodona a mancra
de pilota (g*5) : mais elle se déroule en tableau oblong, parce que les
lisières septentrionales et méridionales du tableau sont en raccourci;
toute la masse interminable de l'Afrique, qui s'étend du midi à Tocci-
dent est comprimée.
La carte est nautique. Elle avait pour sa partie occidentale tous les
éléments pour une construction de cette nature. Pour la partie orien-
tale elle est accablée par le continent asiatique. Le cours du Tigre et
Baldac ou Bagdad, la Mekkc, l'arche de Noé sur la montagne d'Araral
et la Tour de* Babel, d'où se disporsôrenl les peuples, constituent une
ligne qui divise le tableau en deux moitiés égales. Or, rimmense Asie
est aussi représentée en raccourci. Le cosmographe catalan savait <|n'il
construisit dans la moitié occidentale une carte nautique : quant au
reste, il traça une image figurative. I^ seule mer de Sarra (caspienne)
est dessinée en portulan.
Or, la seule partie occidentale méritiî d'être confrontée avec la con-
oaissance d'aujourd'hui, autant de la mer méditerranée que de côtes
(85) A celte occasion le catalan compare cette balle à un cnnf c a semblant dou : comparaison
analogue k celle d'Ibn al Ouardi. Mais il y a une diiréi-fnre extrême dans cette analogie.
L'arabe comprend par la coquille, le bluno, el le jaune dViMir, Tliabilable, l'océan et le mont
Kaf:la pensée du catalan se rojclle toul de suite dans l'immensité de l'univers : La coquille
c'est le ciel , le blanc l'air pur, le jaune l'air trouble , et la terre est purlnsn dans l'air (trouble)
comme lo scmen est enclos dans le jaune dVnf : e la terra os cn<-lnsa dius laer, axi con lagota
de la grexa es enclosa en lo vermeil. Ce sont les quatre cléments qui s'envrlopjn^nl : la tcrn»,
l'ean, rair et le feu.
44 6É0GE« LATINC9 1330-1410.
extérieures, et pour donner une carte comparative de la carte catalane
avec celle d'aujaurd'hui, nous procédons de la même manière que nous
Tavons fait pour la carte sanutine (voyez n^ 81 de notre atlas). Or, pour
graduer, le méridien étant réglé et tiré par Venise sur la direction d«
Rome, le même rayon de IGo qui a servi à graduer la carte sanutine,
indiqua les parallèles de la carte catalane. Il est évident, par cette
graduation, que la composition de ces deux cartes de Tune et de Fautre
est juste la même, toutes les proportions et poses, à quelques exceptions
près sont les mêmes. De celle façon la portion nautiquement élaborée
de la carte catalane, se trouve placée sur les positions littorales déter-
minées par nos géographes modernes. Chacun peut examiner et juger
jusqu'à quel point elles correspondent avec celles de la carte catalane,
et à quel point d'exactitude est arrivée la méthode nautique pour for-
mer un ensemble d'un espace de 50 degrés en longitude et de 20 en
latitude, sans chercher à déterminer les longitudes ou les latitudes par
des observations astronomiques.
Et je répète le défi de trouver les caries de Visconli , de Pizigani et
d'auires inférieures à celle-ci. Dans la composition de chacune, se
feront sans doute remarquer des déviations, des irrégularités, mais la
composition laborieuse avait déjà ses bases, ses certitudes pour soute-
nir la proportion et la configuration.
154. Il y est clair que le levant est une partie moins solide. Il sem-
ble que les navigateurs et les cosmographes ne purent pas saisir au
juste les deux angles : aigu du golfe d'Alexandreite et obtus du littoral
de l'Egypte et de la Palestine. C'est la cause pour laquelle la composi-
tion catalane s'égare très-sensiblement avec la Grèce et tout l'archi-
pel, avec la mer noire et l'Asie mineure : c'est ainsi queRhod,Constan-
tinople, et tout ce. qui tient les méridiens rapprochées, et la mer
noire, montent presque à un degré trop au nord.
La graduation de ces caries nautiques découvre un autre vice ,
affectant la totalité de la construction. Ce vice charge, je pense, toutes
les cartes nautiques sans exception. C'est la position oblique de la mer,
la déclinaison de la rose des vents : ainsi que la ligne d'est à ouest ,
représente à peu près la direction de E */^ SE à 0 */* NO. Celle obli-
quité parait être un peu plus forte dans la carte de Sanuto et monte à
10 degrés dans la carte catalane. Par conséquent la rose fait incliner
l'Espagne et le détroit dans la direction de 0 V^ SO et fait remonter
la mer noire vers E */* NE.
Cette irrégularité est grave, elle montrerait que les marins ne
savaient pas s'orienter au juste, leurs vents ne répondant pas aux
points cardinaux. Leurs rumbs, partout et toujours dans la mer médi-
lerranée, furent pris dans un sens incliné et tracés obliquement; leur
Est n'était que E V^ SE; leur Nord élait 0 ^4 NO et ainsi de suite, de
toutes les directions des vents. Ce désaccord vient évidemment de la
boussole dont l'aiguille déclinait à l'est. Les marins, dès qu'ils commen-
cèrent à se servir de boussole, remarquèrent certainement cette décli-
naison : mais confiants dans leur instrument, ils s'abandonnaient à
ses directions décorées des appellations des vents, ne se souciaient ni
de l'élévation du pôle, ni des points cardinaux, s'habituant bientôt à
COMPARAISON, 135.. ' 4i$
combiner la viie du ciel avec leur boussole. Les cosmographes n*ayaiit
que les directions de la boussole et les distances rapportées par les
navigateurs, composaient leurs cartes sur la rose de Taimant, qu*ils
qualifiaient rose des vents (se).
En examinant le littoral de Tocéan atlantique, la carte catalane
décèle un autre défaut qui était en train de la régularisation. C'est la
petitesse de proportions extérieures, comparativement à celles de toute
la mer méditerranée. Elles sont très-sensibles dans la carte de Sanuto,
nous les avons qualifiées d*accourcies. Elles sont beaucoup moins dimi-
nuées dans la carte catalane : cependant le cap Boiador serait d'un
degré plus au nord à raison de la graduation que nous avons appliquée
à la mer méditerranée, et Lisbone, Paris, etc., se trouvent trop au sud.
Les cartes postérieures établirent de plus justes dimensions de ces
parages océaniques. Dans leurs compositions laborieuses, les cosmo-
graphes et les hydrographes s'efforçaient sans relâche à perfectionner
les caries nautiques et continuaient à faire un progrès remarquable.
Tous les marins étaient en possession de ces caries. On les dressait,
dessinait et copiait à leur usage, à Venise, à Palerme, à Messine, à
Gènes, à Majorque, à Barcelone et ailleurs. Les marins savaient ce
qu'ils possédaient et les savants ne les comprirent pas, lorsqu'ils se
mirent eux-mêmes à battre la campagne pour devenir cosmographes.
Marche de la cartographie latine, comparée à celle des arares.
155. Personne ne contestera, je pense, que les cosmographes qui
dressaient les caries spéciales , générales et les mappemondes , avaient
à leur usage un bon approvisionnement de matériaux. Les portulans
peints de quelques rivages ne leur auraient point suffi pour composer
Fensemble, s'ils n'avaient eu de la part des marins des données géné-
rales de distances à travers les mers. Le cabotage prépara des maté-
riaux pour la construction des portulans; la navigation hauturière
fournit des distances nécessaires pour la composition de la carte
générale.
Les cosmographes comprenaient bien la position des lieux relative
au pôle ou la latitude géographique, maïs leur méthode de dresser les
cartes ne se souciait pas de tracer les parallèles. Quant aux longitu-
des, elles leur convenaicnl encore moins. Les marins par conséquent,
et les cosmographes, ne voulaient pas entendre de longitudes, et les
cosmographes n'avaient aucun chiffre, ni de longitude, ni de latitude
pour la composrlion des cartes. Leur carie ne se fondait point sur ces
bases scientifiques. La construction sans assiette sur le globe, régulière-
ment couchée sur le plan, se basait sur les dislances parlant d'un point
déterminé, dans la direction déterminée par la rose de la boussole.
(86] n e$t impossible de ne pas admettre que le marin , habitué antérieurement à la direction
du pôle, n'ait pas de suite remarqué la déclinaison de l'aiguille à laquelle il allait se confier.
Colomb, s'avançant dans les hauteurs de Tautre hémisphère, le iZ septembre 1-192, remarqua do
suite que les boussoles , dont les directions avaient été au uora-est , déclinaient vers le
nord-oaest et que cette déclinaison à l'ouest augmentait le matin suivant. Cabot, enli97,
remarqua aussi ce phénomène et indiqua le méridien (à 110 milles italiens de Flores) sur lequel
raigoille montrait le vrai nord (llumboldt, examen de l'hist. de la géogr. do nouveau monde,
t. m, p. %d Si). Dans cette remarque des investigateurs du nouveau in«iide« on ire voit que
rob$ervatioa du contraire de ce qui était Ct>anu.
A6 GéOCR. LATINR, 1330-1410.
Les marins trouvaient la lune, en mesurant les quatre vents; ils
déterminaient Tlieure de la nuit par le cliarriot et les deux frères; ils
observaient le lever et le coucher du soleil de diflcrenles saisons et
relataient les de£;rés aux quatre vents (s 7). Mais ces vents dans leur
direction et leur langage, sont reportés sur Findicalion de la boussole.
Dans la composition des cartes , ils ne fournissent que les indications
de la boussole, de sa rose. La pratique comprit de bonne heure les
rumbs des grandes distances et détermina leur direction et leur
dimension suivant que le navire avançait ou s'allarguait; ou bien elle
les rendait à déterminer aux cosmographes (ss).
Les cosmographes, par des combinaisons laborieuses et judicieuses,
arrivaient à la formation de Tensemble, ils soumettaient toute la carte
à une rose delà boussole et fixaient les distances, Téloignement du
point déterminé sur les rayons pour préparer les moyens les plus
faciles aux dessinateurs et pour les transmettre aux gens de leur école.
Or, les Gosmographes versés dans Tart de la composition des cartes ,
gardaient et conservaient chez eux les notes et les distances nautiques ;
ils gardaient aussi les distances continentales et les transmettaient
toutes à leurs successeurs, à leurs disciples. Ils étaient en possession
de ces matériaux, depuis des temps éloignés, si ce n'est à partir de
récole ravennate, au moins dès Tépoque de Roger. Bien qu*aucune de
leurs nombreuses notes ne nous soit parvenue, elles encombraient
cependant leurs dépôts : les notes rogériennes et des marins posté-
rieurs n'étaient guère perdues. C'est d'après ces notes, que les
connaissances géographiques se développaient, et la cartographie se
perfectionnait dans le cercle de l'habitable examinée par la navigation.
Rien encore n*appelait les cosmographes à réformer la partie
orientale. Pour opérer cette réforme , il fallait ou accepter les cartes
graduées des arabes ou réunir des matériaux suffisants pour convaincre
de la nécessité de la réforme: fournir enfin le moyen de l'accomplir.
Les premières, étant d'une autre nature et fondées sur d'autres bases,
ne convenaient pas aux conceptions des cosmographes : ils se méfiaient
du produit des infidèles, qui aurait ruiné le centre du monde et le
cercle accepté. Par la même raison, ils récusèrent les proportions que
pouvait offrir la grande carte rogérienne : elle était graduée, elle sen-
tait trop l'arabe. Les cosmographes se contentaient des seules figurines
rondes, tant siciliennes qu'arabes, aussi conformes à leur image du
monde.
Quant aux matériaux, au moyen desquels on pouvait opérer la
réforme des conceptions étroites des cosmographes , dès que les pro-
portions et les dimensions arabes étaient désavouées, ils manquèrent
très-longtemps : de nouveaux renseignements n'arrivaient point. Ceux
qu'apportaient les marchands , les moines, les ambassadeurs, étaient
insuffisants; les itinéraires gigantesques de Marco Polo n'offraient
aucun appui connu pour en organiser une construction; les voyageurs
narraient plus de géographie descriptive, que de chiffres nécessaires à
la géographie des mappes. Tout ce qu'on aurait pu extraire pour cette
87) Voyez , prolégomèna de Tallas catalan de 157S, et Pigafetta, de la navigation.
88) Science de martvluïo, voyez cliap. 16t et sa note.
COMPARAISON, 130. 47
partie, se reufermait très-facilement dans la moitié orientale du
monde, avant d*alteindre les flammes et la porte du paradis. EnGii ou
peut à certains égards aecuser à juste titre les cosmographes de négli-
gence impardonnable pour le continent oriental. Les cosmographes
opéraient sous l'impulsion des pilotes qui ne s'enfonçaient pas dans
les terres et ne visilaient point le lourd continent de FAsie et de
l'Afrique.
136. Toutes ces réflexions nous conduisent à distinguer le fond de
la géographie des arabes et des latins. Chacun avait ses préjugés établis,
ses habitudes, ses défauts, ses négligences, ses bases et moyens; le
progrès et le perfectionnement incontestables qu'on remarque par la
construction des cartes, chez les Arabes, la longitude acceptée, la
défiguration de la Syrie, le Nil fantastique, la position houleuse de la
cité d'Ariu et toutes sortes de contes fabuleux débiles avec profusion,
n'empêchaient pas de suivre la théorie scient i Pique, de progresser et de
perfectionner la construction des cartes; chez les latins, le cerceau
océanique entourant le monde, le nombril de l'habitable, le paradis,
l'enfer, n'empochaient point de progresser dans la connaissance géogra-
phique, d'étendre les investigations et de former de plus larges et plus
exactes conceptions pour la construction des cartes.
Les uns et les autres négligeaient ce qui n'était point de leur posses-
sion; cependant celte négligence pesait d'avantage à charge des arabes.
Ils ont précédé les latins dans la pratique géographique. Ardents dans
leur curiosité, ils exploraient d'abord les pays dans le but de s'en emparer.
Leur curiosité se ralentit ensuite et tomba dans l'insouciance louchant
Textérieur de leur possession , où ils ne tenaient plus à l'exactitude, se
contentaient de notions vagues, l'accablaient de fables, déclamant leur
ignorance à cet égard. Les latins, emportés plus tard dans Taréne,
exploraient le monde pour étendre leur connaissance et leurs rela-
tions; cherchaient à connaître Tétranger comme ils connaissaient leur
propre foyer, s'efforçaient de tracer ()ans leurs portulans peinls, dans
leurs cartes générales, les côtes et la figure des pays éloignés avec
autant d'exactitude qu'ils dessinaient les domaiao« «ounus de leur
possession. Et lorsque les arabes calèrent leur mât,, k» latins déployaient
à pleines voiles leurs explorations.
Les arabes, suivant les routes théoriques de la science, avec leur
astrolabe, observaient le ciel , exploraient le continent, invenlaienl les
longitudes et les latitudes géographiques, négligeaient les mers. Les
latins, agités et poussés par les vents, dirigés par la vue du soleil et de
la lune, par la boussole, exploraient les eaux des mers et les parages,
abandonnaient aux retardataires du continent, l'intérieur des pays et
basaient leur connaissance sur les rayons de la rose. La géographie
des arabes, savante mais embrouillée, était éminemment continentale ;
celle des latins d'expérience, mais régulière, exclusivement nautique.
Celle-là suivant les règles de la haute science, sur des bases vicieuses,
fournit des produits variés et discordants, s'emplit d'inextricables
erreurs; cette autre marchant vers le grand chemin , par des sentiers
étroits mais bien battus, élabora l'unique produit pour toutes les écoles
qui se disputaient l'exactitude de son dessin.
48 GÉOGR- LATlMs 1330-lilO.
hiçifinni d'api'ès ces monuments qui sont connus jus<iu*aujourdliui :
les cartes arabes dressées sur les bases nialhémaliques élaient très-
rares et d'aucun usage : elles ont existé eu effet, mais elles sont introo-
Tables. Les cartes latines, dressées sur les bases nautiques, chaque
jour plus nombreuses, étaient d'une immense utilité pour la naviga-
tion : et elles existent malgré toute leur destruction, malgré cette
masse énorme de la composition postérieure, qui les a remplacées.
Les dcssinateui's latins excellèrent de bonne heure dans le dessin des
cartes Gctives et plus encore dans celles de situation, et ils surpassèrent
les arabes, par la finesse de Touvrage et par la justesse des contours
tracées à coup de main , sous Ja direction de la vue et de la bonne con-
ception des formes et des proportions.
Les arabes, par leurs immenses possessions, avaient plus de champ
et ils avaient une avance de plusieurs siècles dans leur exercice géogra-
phique. Les latins, rétrécis dans leurs étroites limites, restreints à une
pratique peu reculée, avaient beaucoup moins d'espace et de res-
sources.
Les cartes géographiques des arabes décèlent une combinaison,
artificiellement coordonnée, soutenue par la gloire des observations
astronomiques; elles offrent des parties de bonne et juste conception et
des monstruosités de leur propre construction; fensemble déployé une
désharmonie inconstante et peu gracieuse. Celles des latins dévelop-
pent un coupd'œil hardi, clair, les parties et Tensemble sont précis,
bien conçus et tracés exactement; là où leur intérêt et leur connais-
sance cessaient, des raccourcis et des difformités empruntées. Il suffit
de confronter la carte nautique des latins de la méditerranée avec les
caries arabes. Cependant les arabes étaient aussi bien que les latins,
possesseurs de cette mer; or, on peut à juste titre exiger des arabes
une connaissance de la méditerranée plus parfaite, et il serait impossi-
ble de prétendre des latins la même connaissance de Fintérieur de
TAsie. Enfin remarquons que les cartes nautiques des latins sont aptes
à accepter la graduation des cartes modernes; graduées elles offrent
un produit satisfaisant pour la méthode mathématique : les cartes con-
tinentales des arabes sont loin d'offrir un semblable résultat , étant
jonchées de difformités nombreuses, qui font tort à Fensemble. Toutes
ces réflexions sont faites sur la culture de la géographie et spéciale-
ment sur la composition des cartes, des mappes, à Tépoque où la
géographie scientifique des arabes, arrivée à son apogée, s'arrêtait
après avoir parcouru de vastes espaces, et où la connaissance géogra-
phique des latins, qui depuis longtemps couvait dans Fombre, apparut,
sortant de son mystérieux berceau. Je pense que le savoir géographi-
que des arabes n'est pas en mesure de se mettre en parallèle avec le
progrès ultérieur des latins.
Continuation de l'examen de la carte catalane 1375-1378.
157. Après celle excursion, qui va clore ce que nous nous sommes
proposés de dire de la géographie arabe, nous revenons à la carte
catalane qui, placée dans notre atlas (n* 80) dans une proportion dimi-
nuée, demande quelque éclaircissementr
CARTE CATALANE, 137.
49
Le cosmographe catalan , suivant rhabitude des temps ant(^rieurs et
de son époque , était un érudit. Il connaissait assez la bible pour
alléguer le prophète Isaïe; il citait Pline et Isidore. Cependant sa
carte n*a rien de Fantiquilé. Tout y est nouveau, moderne, récente, de
répoque. Les seules dénominations de Meroc et de Trapobane, se sont
introduites dans la famille nouvelle : car, les indications de Sebba, de
la tour de Babel, des ruines de Ninive, de Tarchede Noé, du passage
par la mer rouge des enfants d'Israël, etc., ne sont que des notes histo-
riques ou explicatives.
C*est que partout, à Venise, à Gcnes, à Majorque, eu Italie et en
Espagne, les cartes nautiques s'étaient délivrées de la nomenclature
antique, surannée et inutile, qui jetait une confusion et inspirait de
conceptions contraires aux investigations nouvelles. La carte génoise
de Pizigaui ne diffère point à cet égard; pour donner un exemple de
cette conformité, nous mettons les fragments qui nous sont connus de
sa description à côté de Texamen de la carte catalane.
Sur l'océan qui baigne l'Afrique, on voit sur ces deux cartes les
Canaries également rangées en ordre convenable.
La carte catalane nomme plu-
sieurs îles, ensuite :
La carte des Pizigani nomme
LarcnsA (Lancerotto) portantsur
sa surface en guise d'écu, une croix.
La petite Loncio marin (Lobos).
Fortaventura
Zemari (Canaria).
Ysola del infiemo (Tenerifa).
Ysola de Clarie (Gomer).
Ysola Palmie (Palme).
L'île de fer innomée.
Au nord, en montant vers le
septentrion :
Ysola Caprazia,
Ysola Canaria,
Ysde dicte Fortunate.
San Brandany,
Ysole Ponzele,
Près desquelles la figure de S.
Brandan.
Lanzarolo, forme d'écu portant
d'argent croisé de gueules.
Insula dcl megi mari (Lobos).
Forlevenlura,
Insula de Canaria.
Insula de Lanserano (Tenerifa).
Insula de Gomera,
île de Palme, passée, omise.
Insula de la Fera,
Au nord, en montant vers le
septentrion :
Insula Salvalges.
Insuie dcserle,
Insula de legnamc.
Parla sancta.
Tout à côté une longue légende
entretient sur les îles Fortu-
nées (s 9).
(89) Voici la légende : Les iles Fortunée» sont situées sur la grande mer du c<Mc de la main
gauche, touchant la limite de l'occidcot, elles ne sont pas loin on mer. Isidor le dit ainsi
dans son xv* livre : ces iles sont appelées Fortunée», car elles sont abondantes en tous biens ,
CD blés, en fruits et arbres. Les pnïons supposent que là se trouve le paradis , en raison de la
douce chaleur du soleil et de la fertilité de la terre (Isid. xiv, p. 193). Isidor dit aussi que les
arbres y croissent au moins à cent quarante pieds et portent beaucoup de fruits et d'oiseaux.
On y trouve du miel et du lait, surtout dans l'Ile de Capria, ainsi appelée de la multitude de
chèvres qui l'habitent. L'île Canarie s'uppelle ainsi de la multitude de gros et forts chiens qui
riiabitent. Pline , ce maître dans la géographie , dit que parmi les îles Fortunées, il y en a une où
croissent tous les biens de la terre, de. même que tous les fruits sans les semer et sans les
planter. Sur le haut des montagnes sont des arbres très odorants, rouverts en tout temps de
feuilles et de firuits. Les habitants eu mangent une partie do Tannée; puis font la moisson au
1ÎCU de couper l'herbe. Aussi les païens de l'Inde croienl-ils que leurs âmes, après la mort, vont
liabiter ces îles et qu'ils continuent à y vivre éternellement du parfum de cet fruits. Ils croient
que c*cst là leur paradis : mais à dire ^rai : c'est une fable.
50 GëOGR. LATIXR, 1350 UIQ.
A Touest du cap. de S. Vincent, A Touest du cap d(S S, Vincent ,
insula de Brazk, Oceanus magnio, insula de Brazil, H ColunM, insula
Un peu plus au nord sur la ligne de la vcntura, Sanzorzo; plus au
de Finislerre, la légende dit: marc nord , vis-à-vis d'Oporlo H Conigt,
finisUre occidenlalis ; à la marge : insula di corui marini (90).
occidens et dans un cercle une Le catalan ne connaît rien qui
figure tournée vers l'Europe tenant aviserait le danger ou empêcherait
dans la main gauche une largo la navigation. La houssole est là
bande marquée de quelques lettres; pour diriger les navigateurs (91).
et de la droite indiquant Toccident
et «nvisant de ne pas se hasarder
à aller plus loin : à quoi se ratta-
che une légende explicative (92).
158. Les côtes africaines, baignées par Tocéan, sont pleines de noms.
Dans leur suite nombreuse :
La carte des Pizigani , nomme : La carte catalane nomme :
Capo de Conlil. Cauo Cantin.
Safin, Sa/fi,
Mongodor* Mogodor,
Alvel sus, Alluel su.
Capul finis Gozole, Cauo de No, où commence la
région Gozolo.
Les côtes de Gozolo offrent :
Moniste, Menist,
Ansalem, Ansulin,
Alvet nul. Alluet nulL
Danom. Cauo de sabium,
Abac. Plages aronossos.
Fêle Ganuya (93). Vetenille^
Les trois derniers lieux sont Cauo de Buyetder.
marqués par la figure d'un bâti- Buyelder.
ment, de même que les villes tour- Danom.
relées, situées sur la ligne de Mogo- Cap de Finislera occidenlal de
dor et de Contil, dans l'intérieur Affricha.
de la terre , savoir : civilas Fessa, ^--^
31icalenza et ciuilas de Maldechium . >
(90) Voici comment , en 4436, la cinquième carto d'Andrë Bianco range ces îles : Àntilla, a
tinta rossa informa d'isola grande assai , e rettangolare , davari porti intersecala in linea appuuto
dello stretto di Gibelterra. V' è pure indizio d'altra isola grande al nord detta de la man scUanaxio
tagliata dal margine con allre isole ail' ovest délia Spagna appellate : ewrbo marinog, coriioa
(di conigi), de «an Zorst, de bentufla (Ventura), di colombi, de brcuil :ecosi pur altre due più
al sud Chapesa (Caprera), Lobo. Veggonsi poile isole di Porto sancto, de Modéra et altra viciua
dexerta. Poscia le Canarie (Zurla sulle antiche mappe, cap. H).
(91) La rose des vents de la carte catalane, porte la nomemlalure italienne, équivalant à la
catalane comme suit :
tramuntana , traraontana, septentriona N
grego, grecb. (NE), aqiiilo, NNE
levante , levant , lavant , llevant. E
(oxalocft, exaloch, exeloch, axelocl), xaloch SE
metzo-di, migjorn, mitg-jorn, migtndia. S
/tfrefso, Icbcg , lebes,libeg, levés, llebeig SO
ponente, ponent 0
mojjfMfw , mestre , mestral KO
(02) Dans laquelle on lit : est mare sotilc que non poxit tenebont navcs.
(95J Perfide ou mccbantc Guinée ?
S
CART£ CATALANE, 138.
51
Près de Felc Ganuya suivent les
traces (de l'embouchure) de flum
Palolus , lequel prend son origine
d'un vaste lac elliptique situé sur la
ligne de Fembouchure un peu au
sud des Canaries. Son épigraphe
dit : isle lacus exit de mons lune
eiransit per déserta arenosa. Le
fleuve, au milieu de son cours,
fourche son lit pour former une île
dite : insula Palola hic coligilur
auro. En effet, For était appelé
pnïola, et le fleuve Palolus est le
fleuve d'or, d'ouro (95).
Au sud du lac s*étend le mont de
la Lune et les quatre sources qui
se jettent séparément dans le lac.
L'épigraphe dit : fons Nilidis. A
Test du lac sur son bord : ciuilas
Nili, située près du départ du lac
de flum Nilus vers l'est.
Le mont de la Lune est sur la
marge de la carte et la termine de
ce côté. A son ouest : desertum
amosom, et près de la mer, sur la
même ligne, on lit : capul finis
Africe et 1ère ocidentalis. Au-dessus
et sous le fleuve Palolus la légende
porte : incipil aulem Africa a fini-
bus EgypU pergiens iuxta meri-
diem per Thiopiam usque ad
Achlanlcm montem , a scplenlrione
vero mari mediteranco claudli (oe).
La Barbarie de la carte catalane est séparée de l'Afrique méri-
âionale, par une cliaîne de montagnes. Sous sa courbure la légende
JU) La carte de HZ6 d'André Bianco place ce lac sous le méridien do Sicile avec la légende :
hètt prindpaUbus (principinni) flumints Nilli in partibus occidentalis (Zuria, cap. 14).
[|R() Anssi la mappemonde de fra Mauro 14a7, place Tépigraphe de oro de pajola en outre les
bras de flum Mas et canal oro qui vont al magna paindc et d'un lac jusqu'à rocéan
tique (Zurla, de mappemonde de fra Mauro, chap. S5}, et se rapportent plutôt à Sénégal et
iibia. — Les fleuves Main et Citarlis de son dessinateur André Bianco , de U3C, se déchargent
' l'océan au nord de Bojador , où la carte catalane et Dcnincasa 1-167 placent Messa et
nlle. — Le manuscrit de la même époque d'Usodimare (in annali di geografia e di statistica de
îbcrg, t. II, p. 290), confond ces appellations qnan<l il dit : islud tlumen (de l'Oro) , de longi-
linevocatur Fedamel; similiter vocatur riu Auri, quia in co colligitur auri/m depaiola. — Niger
iPlolémce on Nil Gana des arabes, agitait l'imagination des cosmographes et contribuait ensuite
confusion. Les deux Andrcs, Bianco et Bcnincasa, négligèrent de tracer ou de mentionner le
Pove de l'Oro (voycx notre portulan général, 23)»
(9C) Zurla, sulle antichc mappe , idro-gcograficbe cap. 8, 9.
Le long de la marge méridio-
nale, s*élendenl deux fleuves, sor-
tis à Touesl et à Test du lac à
répigraphe : Ormuss siue la eus
iVi/r(94).
Le fleuve occidental innommé ,
sans diviser son lit verse ses eaux
dans Tocéan. A son eraboucbure
est peint un vaisseau à pleines
voiles et sa légende explicative dit :
partie luxer dcn Jac, Ferer per
anar al riu de lor^ al gorn de sen
Lorens , qui es a de agost e fo en
lany 1546. Ce fleuve occidental
innommé est donc le fleuve d'or,
d'ouro; fleuve imaginaire avant
que son appellation fut flxée.
Le fleuve oriental aussi innom-
mé sortant du lac Nil, forme la
branche occidentale du Nil. Forme
en courant vers Test V insula Me-
roem et se réunit avec la branche
orientale à Sohan.
Au-dessus du fleuve occidental
ou de Tor, à son embouchure on
lit : Cap de finistera occidental de
Affricha, issi camença Affricha e
fenex en Alexandria e en Babilonia
qui fa comensament, aci e compren
tola la marina de Barbaria ucs
Allexandria eu^s mig ioan,., An-
tiopi.., e en questcs plages se Iroba
moll ivor per la molli lut oriffans et
roay, qui aci ariban en los plages.
i
5:2 GÉOGR. LATINtl, 1550«1410.
dit : toute cette montagne dm» sa longueur est appelée Caréna par les
Serrayns (Sarrasins) et montes claros (inonls éciatans plutôt Davos)
par les chrétiens et sachez que sur celte chaîne de montagnes il y a
beaucoup de bonnes villes et de châteaux qui se font la guerre les uns avec
U's autres. Celte montagne produit encore abondamment du pain, du vin^
de Vhuile et toute sorte de bons fruits. Dans sa partie occidentale il y a un
défilé : la légeuilc nous en avertit, elle dit : c'est par ici que passent
les marchands qui viennent dans la terre des nègres de Guinoïa et ce
passage s^appelh vall de Darka, La partie orientale de la montagne se
fourche en deux branches : à ce sujet la légende dit : c*est là le milieu
de V embranchement du mont: Sur cette montagne passent aucuns pèlerins
sarrasins de l'occident qui veulent aller à la Mekke pour voir le tombeau
de Mahomet, ce qui est pour eux la loi,
159. L'Afrique méridionale se divise en différents pays. D'abord est
Gozola : tout ce pays est occupé par des gens qui sont enveloppés, de sorte
qu'on ne leur voit que les yeux et ils campent sous des tentes et chevauchent
sur des chameaux. Il y a des animaux qui portent le nom de lemp (97) ,
du cuir desquels on fait les bonnes larges.
Suit le pays Asahra et le désert de hasahra. Ensuite le pays Ginya.
Le seigneur nègre est appelé Musse Melly, seigneur des nègres de Gineua,
Ce roi est le plus riche et le plus illustre seigneur de tout le pays à cause
de la grande abondance d'or qu'on recueille sur ses terres. Aussi la ville
Melli est placée sur les bords du fleuve de Tor ^ou Palolus). Le roi
Musa Melli devint mieux connu par Fembassade récente de 1556 d'Ibu
Batouta de la part de Tempcreur de Maroc.
Ensuite vient le pays Organa : ici règne le roi Organa sarrasin, qui
fait une guerre continuelle aux sarrasins de la côte et à d'autres
Alarahps (Arabes). Ensuite Nybia, le nom ou titre du roi s'est effacé
dans la légende : il en reste : des sarrayns cité de la Nubie. Ce roi est
toujours en guerre avec les chrétiens de Nubie qui sont sous la domina-
lion de l'empereur d'Ethiopie du pays de prêtre Johan (93).
Enfin désert de Egipte et le sultan d'Egypte accompagné de la
légende : ce solda (soudan) de Babylonie est grand et puissant entre les
souverains de ce pays.
Le long de la mer rouge on voit Chos (Cosseïr) et plusieurs autres
villes avec la légende qui dit : c'est dans cette ville de Chos que l'on
(97) I.ani sivc dant ye\ lamth : similitudino bovem referts liujus tergore clrpci fortissimi
conficiuDtur (Léo afric. IX« p. 292).
(98) Dans la carte messine 4511 , provenant de la fabrique catalane : dans rintérieur de
TAfriquc, au sud de l'Atlas, se succèdent d'ouest en est les figures de huit grandes villes disposées
sur deux rangs , savoir, le long de l'Atlas, civita Chiber ^ cirita Buda, Tasich et Calbaidi; et h:
long du bord infcrieur de la carte, civita-Te : :at, civita Meca^ Nuchi et Sudechi. Entre ces
deux rangées de villes sont peintct» trois grandes tentes, sous chacune des quelles est profile
le buste d*un monarque coiffe du turban; la première de ces figures, à gauche, est seule
barbue; immédiatement au dessous est écrite cette légende : a quista proovencia singorigia a
questo ret de Centa, laquaUe tient la mina de lu or » molto poteros, c'est-à-dire, cette contrée
a pour seigneur ce roi de Guinée, lequel possède la mine d'or, est très-puissant; la seconde tente
placée à peu près sous le méridien du Bougie, est accompagnée de la légende que voici :
aquesta fMroovenda sittgorigia questo rei de Nubia lo quale de continoi fa guera cum lo rei de
Organia; enfin , la troisième tente , placée sons le méridien de la grande Syrte , est accompagnée
d'une dernière légende , ainsi conçue : aquesta proovencia singorigia çuesto rêl appellato rei de
Organia (O'Avezac^cartc de la collection Barbie du Bocage).
CARTE CATALANE, 140.
53
-apporte les épiceriei qui viennent des Indes, On les transporte ensuite à
Babylonia et à Alexandria.
140. Les Pizigani inscrivirent quelque chose d*analogue sur la mer
qui baigne Adcm. Naves mercanlibus Indie que descendunl in Addem ,
dimittit ibi décima parlem specierum pro pasagio, postea in(ral in mari
rubro et descendunl ad amnem nominc,,., et ibi exhoncrant, deindc de-
fer tur species ad Alcxandriam,
Une ligne noiràlre donne le contour du rivage de TArabie et du
golfe persique et se termine à la ciuitas Hormisinia (Hormisiou de la
carte catalane) qui est le dernier point de ce côte de la carte des
Pizigani, renfermant toute la mer Caspienne.
Au coin le plus oriental de la Au coin le plus oriental de la
mer Caspienne, la carte des Pizi- mer caspionue, la carte catalane
gani, place Deyslim ou Deyslam;
d'où une ligne courbe trace ses
rivages jusqu'à Geon ou Gion point
le plus septentrional ; à Torient se
trouve une autre ciuitas Vorgasia
située sur le fleuve Vorgasia,
Vers la marge septentrionale on
voit un lac duquel deux fleuves
place Deystani, Les rivages déve-
loppent la nier vers le nord obli-
quement jusqu'à Temboucbure de
Volga, de roiienl vient se perdre
le neuve Organci, sur lequel est
située ciuilal de Organci,
Sur la marge septentrionale, le
lac accompagné de légende : cet
roulent leurs eaux. L'un, le Tanaïs étang s'appelle les or ions et d'au-
tombe dans la mer près de Tana 1res poissons d'une nature étrange
sur laquelle flotte le pavillon por-
tant le lion vénitien.
fy nourrisent: deux fleuves débou-
chent vers Test. L'un , le Tanaïs ,
tombe dans la mer près de Tana,
sur laquelle le pavillon porte
lamga et croissant tatares.
L'autre fleuve se réunit avec la
branche de flum Edil, venant des
los munis de Sebu, baignant les
murs de plusieurs villes. Formant
ensuite une zizera ^j^}^ et passe
sous la ciutat de Ssarra, située non
loin de ses nombreuses embou-
chures. La légende relative porte :
aci esta lemperador de a qucsta
regio septentrional del qualleimperi
en la prouincia de Durgaria et
feneix en la ciutat de Organcio lo
scnyor es appcllat jambelh senyor
del Sarra, Parmi les villes situées
vers le nord-est on voit ciutat de
Marmorea,
Nous avons fait ce rapprochement de quelques fragnienls qui nous
sont connus de la description de la carte des Pizigani avec la carte
L'autre fleuve : hic surgitur (lu-
wnen Tirus magnus (Atel ou Volga),
court majestueusement sans tou-
cher à aucune ville , jusqu'à la
grande civitas regio de Sara, située
non loin de ses nombreuses em-
bouchures. A côté de cette cité la
légende dit : hic residet imperato-
rem de isla regione septentrionalli,
cujus imperium finit in p (provin-
cia) Urgalia, versus occidentem et
finit in Vorgazio versus orientem,
A Textréme coin nord-est se trouve
une autre ville civitas que d(dmlur)
Marmorea (99).
(^} Zorla, suite aotiche nappe idrogeAgrafiehe,t^p. 10.
54 G^.OGB. LATINB, i550-l4IO.
catalane, aûn d'observer Tanalogie et quelquefois ridentitc des légen-
des et des connaissauces, pour faire remarquer que souvent les mêmes
sources servirent à composer les cartes de dififérenles écoles, que par
conséquent il n'y a rien d'extraordinaire, quand on voit Tanalogie et
la conformité des cartes italiennes avec les cartes espagnoles.
ili. Je ne pense pas cependant qu'aucune carie italienne ait donné
TAsie telle qu'elle se présente sur la carte catalane. Je n'entends point
parler de la partie plus rapprochée de l'Europe, mais de la partie plus
éloignée dans laquelle les Italiens vantaient les investigations de Marco
Polo. Nous allons faire une revue rapide de cette partie du monde en
commençant par son point de contact avec l'Europe.
D'abord est Turchia: Asie mineure ou Turchia où se trouve beaucoup
de villes et châteaux, dit la légende. Entre l'Ëufralc et le Tigre Mesopo-
tania appelée Turchia ou Asie mineure. Au-dessus Armenia major. Les
deux fleuves sortent de mont Taurus ou Tabrus; passent séparément
jusqu'à Baldach (Bagdad) où un canal fait communiquer leurs eaux;
ensuite ils vont séparément à leurs embouchures. Un bras s'échappe de
l'Eufrate pour se |)erdre dans la mer méditerranée près d'Anliochic.
Entre la Palestine et l'Arabie, sont les légendes ordinaires siux cartes
de l'époque ; ici est le corps de la vierge Catherine — mont de Sinay sur
lequel Dieu donna la loi à Moyse — c^est par ce détroit que passèrent les
fils d'Israël,' lorsqu'ils sortirent d'Egypte. — Celte mer est appelée mer
Roga (mer rouge) : c'est par là que passèrent les douze tribus d'Israël ;
sachez que l'eau n'y est pas rouge, mais c'est le fond qui est de cette cou-
leur, La plus grande partie des épices qui viennent des Indes à Alexan-
drie passent par cette mer (loo).
142. Dans l'Arabie : ciutat dé Mecha. La Media. Dans celle ville se
trouve le tombeau de Mahomet, prophète des sarrayns, qui y viennent de
tous les pays en pèlerinage et ils disent qu'après avoir vu une aussi
précieuse chose, il n'y <i plus rien qui soit digne d\Ure vu. Et là ils se
brûlent la vue en honneur de Mufarnct. — Arabia Scbba est la pro-
vince que possédait la reine de Sebba. Elle est habitée aujourd'hui par^
des sarraym alharabs. On y trouve beaucoup d'aromates, tels que la
myrrhe et V encens. Elle abonde en or, en argent et en pierres pré-
cieuses. On y trouve, assure-t-on, un oiseau qui s'appelle fenix.
Les trois légendes marines, sont les suivantes : sachez que ces
navires sont appelés inchi (jonques) et ont 60 coudées de carène et 54
coudées au moins d'cBuvre morte; ils ont de quatre à dix mâts, et leurs
voiles sont faites en roseaux et de feuilles de palmier. Dans la mer Indich,
où sont des pêcheries , il y a des îles fort riches : mais les pêcheurs avant
de descendre dans la m£r , font leurs enchantements , lesquets font fuir
les poissons, et si par hasard les pêcheurs plongeaient avant d'avoir fait
leurs enchantements , les poissons les mangeraient : c'est une chose Irès-
prouvée. — Devant l'embouchure du fleuve Baldach (Tigris) dans la mer
(400] Naves mercantorcs Indic defcrunl spnrics ad locca ocridcntalia spccialit (cr) ad duo lora.
(Arabiac vel maris nibri] ubi est Addem i u ]irincipio (Pizigani).
CAUTIL CATALANE, U3. 55
de Indies et de Persia, on pèche des perles, qu'on apporle ensuite dans
la vUle de Baldach, Et les péclicurs avant de descendre au fond de la
mer, disent leurs paroles enchantées , qui font fuir les poissons, (101) —
La légende près de Baldach, conllDue : ici se trouvait Babylone la
grande où régnait Nahuchadenor , elle s'appelle maintenant Baldacha.
Sachez, que dans cette ville on apporte beaucoup d'épiceries cl de belles
choses qui viennent des Indes et se transportent ensuite par la terre de
Suria et particulièrement dans la ville de Domasch,
143. Les côtes de la mer de Perse et Finlérieur de la terre décèlent
la connaissance du cosmographe très-insufTisaulc , égarée par mauvais
renseignements.
Les fleuves Eufrates et Tigris sortent du mont Taurus ou Abrus
(Elbrous), coulent séparément, ayant entre eux Erminia major
la grande Arménie), la ville Moror ou Amar (Mardin), et Mcssopo-
iamia la quai es appellada Turchia 0 Assia minor en la quai, son
molles bones prouenlias et ciutas. L'Eufrate se courbe et s'embrancbc
vers Anliochie, ensuite passe les villes : Malasia (Malatia), Brisam
(ancienne Bersima?), Benzab (ancienne Zcnobia?), Lira (Hit? ou
Hira?) et Serug (Sera? ou Soura?).
Le Tigre ayant à Test archa Noe placée sur monts Ararat , et
/// eceresie, les trois églises (Elchmialzin), traverse Malascarli
(Malasdjert) , PeLsalain (Razeiaïn) , Zizcra (Djczirch) , Mosul : a questa
ciulal es appellada Niniue la gran , la quai es deslrauida per las cupa-
chat; ensuite Arba (Arbelle) et Baldach (Bagdad) où les deux fleuves se
communiquent par un canal et avancent séparément autour de tora
de Babel : TEufrate se jette dans la mer par une double embouchure à
Vesi A'Abdeni (Abadan) et Bassora (Bassora), qui sont toutes les deux
placées sur la mer; quant au Tigre, il se tourne pour verser ses eaux
dans la mer à Test de Tainust (Siniz). C'est la triple embouchure du
fleuve Baldach.
Un autre fleuve coule parallèlement à Test de celui de Baldach,
sortant par deux branches de deux lacs, chacune accompagnée de deux
villes. Capreri ou Caperci et Argis (Ardjis) , sont situées près de
ffiar cTAr^t^ (lac Van); Ormi, (Ourmia), et Marga (Maraga), près de
mar de Marga (lac Ourmia). La branche sortant de ce dernier baigne
les murs de Cremi (Kermanschah) et se réunit avec Tautre, sous les
murs de Kade et formant un seul fleuve (qui représcule le fleuve
Kerkbah), il verse ses eaux dans la mer près de Chesi (llaviza? ou
Chersonnesus des rivages du golfe pcrsique?). Vient ensuite sur les
rivages de la mer Serans (rivière Schirin) , Ussa (Essiiia sur la cour-
bure méridionale) accompagné de insula de Chis (Kaîs) ; puis Creman
(Kerman) ; enfin Hormision et insula de Ormi (Orniouz) : cette ville s'ap-
pelle Ormes : c'est ici que commencent les Indes; sachez, que dans cette
viUe viennent des bâtiments qui ont huit à dix mâts avec des voiles de
cannes.
(101) Mare nrbis et Viasara (Bassora) — mare Indicus, hic piscantnr perlas, quas dcfenint
Vianra postea (Pizigani). — Edrisi (HI , 6, p. S73-377) donne une longue description de la
manière de pécher les perles et no connaît point d'enchantement. Marco Polo (cliap. 47i, UI, SI)
ne l'a pas onbMé, donnant aux enchanteurs ad hoc l'appellation arabe d'abraïaroaîn , abrivamaïu ,
abamnaya.
•56 GtoGR. LATINE, 1330-UlO.
Dans l'intérieur des terres : ciulat Ssiras, aecompaguée de la
légende : celte ville est appelée Ssiras; elle s'appelait autrefois Gracia
(Grèce) ; c'est là que fut premièrement inventée l'astronomie par le très-
savant Tolomeu (Ptolémée le grec).
On y voit le roi de Tauris et ses villes ciutat Rey, Soldania (Soltaniaj
et Tauris, On peut dire que le roi de Tauris n'est pas d'une trop
récente nouvelle. Depuis la mort de Gazan Moiibammed , 1555, tout
était déchiré dans celte possession des djengliiskanides; à Schiraz,
régnait le dernier roi indépendent Zein alabeddin; les autres ailleurs;
Tamerlan menaçait cette contrée.
La Perse se termine, finis Persia, par les monts de Amol (Hindon-
kouh), desquels coule fium d'organci. On pourrait présumer qu'il repré-
sente Sihoun, car le fleuve Amol (Djihoun) est représenté par
Temboucbure de flum Amol : mais Orgauci est situé sur Amol, Dijboun
est donc doublé par les épigraphes. Une semblable confusion se déclare
dans les positions. En apparence, elles font trois suites de routes :
mais Texamen de leurs noms fait découvrir leurs situations confuses.
Trabicha (Djarib gusken entre la Caspienne et Aral?) (102) Calay castra
(Risil kala?), Cara, Zaraspa (Hazrasp), Choya (Khiva?), Faray (Farabr
Amou), tout rapprochées qu'elles se Irouvenlsonten désordre; Fi5<a(Sista
Siistan?), Eui, Amol (Amou proche de Farabr,) obscursissenl l'explica-
tion; Bocar (Bokhara), Samarchali (Samarkand), Coyandi (Khodjenda)
sont placées au sud de Djihoun, comme l'avait dictée le sage Tolomée
de Siraf. Congicanti (lenghikanl), Cotam (Khotan), Timitri (Termed)
et Badalech {Balkh) sont toutes placées au delà des fleuves à l'est. D'ici
la route continue par Ckabol (Kaboul) et Moltas vers Tlnde, passant à
l'ouest de Camar (Kaschmir).
Par tout, (il faut en excepier Camar) flotte la bannière dn roi de
Tauris : mais le pays de cette partie exposée aux ravages de Tamerlan ,
porte le nom de Tarssia (Zagatay). Celle province est appelée Tarssia.
C'est de là que sortirent les trois savants rois qui vinrent à Bethléem en
Judée avec leurs présents; ils adorèrent Jésus-Christ et sont ensevelis
dans la ville de Colognay à deux journées de Bruges (105).
Toul-à-côté on a, à Test, un royaume mal assis dans la carte
catalane : ici règne le roi Chabech , qu'on appelle seigneur de Medein, Il
reste dans le pays Emalech, C'est Armalcch, Almalig (Al-malik, roi
d'Ili), Ilibalig, 111, lié, Ilibalik, Abeile, aujourd'hui, lli Gouldja, chez
les Chinois lîoei-Yuan, sur la rivière lli, capitale du royaume de Kaï-
dou à l'époque de la dissolution de l'empire djinghisknnien, visité par
les Européens, situé au nord de Lop (la carte catalane le place au sud);
sa domination s'étendait au nord de Karail (104).
(109) Oa Otrar ; à Touost d'Otrar on a plusieurs Râla.
(103) Ceci est en désaccord avec le récit de Marco Polo. 11 dit, qu'en Perse est la cité qui est
appelé Sava iSaba, Sabba« Sabada), de laquelle partirent les trois (rois). En ccste cité, suut
soveliz les trois, mais en trois sepoulure moût grant et bêles , et de son la sepuuture a une maison
quares et desonre n'ont nuit biou cures et est le une juste l'autre. Les cors sunt encore tuit
entières et ont chuoilz et barbe (chap. 31, de la version latine 2, i9). Marco Polo les a vu ainsi
chevelus et barbus, sachant sans doute qu'a Cologne se trouvait leur duplicata.
(404) Voyez la carte de Klaproth de l'année 1290 pour l'histoire de la Chine. — Pegoletti et
Paschalis l'33li, 4338, se sout arrêtés un certain temps à Almalig. Marco Polo a signalé son
existence par le nom de Gingitala. Sur les confins orientaux de ce royaume, non loin de Karako-
ronn , est un lac appelé Sanguintalgniu , Sankintalaï, Chinchintalas , et le slope Tzah.intalaï,
eampMS albus (des cartes de d'.Vnville, Hase et autres) qoi ont pu donner origine à la dénomination
GAUTB CATALANE, 143. 57
Dans les limites de Chabecb-Emaicch-Medeia se trouve Yssikol,
situé sur un lac (Issi, Touz, Temourlou, du pays de Tourgouts au
nord de la petite Boukaric). Le lieu qui s'appelle Yssicd (Issi-koul).
Dan4 €€ lieu est un mon<islère de frères arméniens, dans lequel est y dit-on,
le corps de saint Mathieu, apôtre et évangéliste. Sous la domination de
Giiabech paraissent se ranger les villes de Chabot et Caniar, Ce dernier
pourrait dériver de Kamil : mais plutôt tous les deux sont une répéti-
tion et doublure de Kai)oul et de Karscbmir (los). La répétition est
d*autant plus présumable, je dis même évidente, qu'elle est accompa-
gnée de ciutal de Daldassia (Baladescban, Baltistan, Balti, petit Tibet),
Bandasca, Balaxian, Balacian, Balascia, Balasian, Bandasian, des
manuscrits de Marco Polo (cbap. 40, 49, 50; f , 55, 50, 57). H dit encore
et monte Fen (dans sa dépendance Vocan , Vakban) tant que Ten dit
que cel est le plus aut leu deo monde: et quant Ten est en cel baut
leu , adouc Ireuve un plan entre deux montagnes en quel a u flum
mont biaus (fleuve Djiboun). Ce mont est appelé par le catalan mont de
BeUdasiaei u flum mont biaus, qui y prend sa naissance, forme finis
Indie et coule vers le sud jusqu'à lanpa (Ciamba) fleuve Maecaun,
Mecon, fluvius tolius Asiae maximus, dit Ortcl.
La mer Caspienne porte : cette mer est appelée mer de Sara ou de
Bacu. Les Tatars y naviguent et y dominent : mais la forme allongée
de la mer, la péninsule Bakou , le golfe sablonnoux des monuments et
les nombreux détails portulans, démontrent que le commerce italien y
fit d'beureuses investigations.
C'est au nord de la mer Bakou que dominait Tempereur de Saraï ,
dont la capitale ciudat de Ssarra, insulaire Z^zara, V^jj.ar^t ^^j-^
Saraï al djezira, était située non loin de Femboucbure de Volga, Edil ,
et on lit au-dessus de zizera-Saraï : c*est ici que réside V empereur de
celte région septentrionale, dont le commandement commence dans la
province de Burgaria (Boulgaria) et finit à la cille d'Ovf/ancio (Ourgcnz).
Ce souverain est appelé JambecJi (mort 1557), siiijneur de &i m. D'ici
partaient les karavanes. Cette karavane est partie de Vcmpîre dWssara
pour aller en Catayo (Cbine) et voici sa marcbe et roule : sachez que
ceux qui veulent traverser le désert, s arrêtent et se reposent pendant une
semaine entière dans une ville appelée Lop, dans laquelle eux et leurs bûtes
se rafraîchissent et s'approvisionnent de tout ce qui est nécessaire pour
sept mois, car dans le désert un homme peut marcher une tiuit et un jour
avant de pouvoir trouver de Veau bonne à boire : mais ce jour et cette nuit
passés, on en trouve tant qu'elle suffit à cinquante, cent personnes ou
davantage : et s'il arrive que pendant la nuit, quelque voyageur, chevau-
chant s* endorme, soit par la maladie ou pour autre motif et qu'ainsi il
quitte ses camarades, il advient souvent qu'il entend dayis Vair de nom-
breuses voix de diables f semblables aux voix de ses compeignons; encore
rappetent'ils par son propre nom; enfin les diables le conduisent tellement
àe Marco Polo. Ce lac d*abord innommé, disparut ensuite des cartes de Klaproth. Sa grande carte
de l'Asie centrale de 1830, offre, à l'ouest dus possessions d'ili, les positiobs nommées Kliabtsikaï-
gatoalga, Khalban-gatoulga, de mcmu qu'est appelé Gliin gitalu.
(iOI») Cette répétition s'est perpétuée : on la voit daus les compositions publiées par Ortcl ,
Mercator, etc.
II. C
58 GÉOGR. LATINE, 1330-1410.
ça et là par le désert , de même que le feraient ses compagnons , qu'il ne
peut plus les retrouver. Et de ce désert mille nouvelles en sont connues,
A la suite de cette description, ciutat de Lop est accompagnée de légende :
dans cette ville Lop se rendent les marchands de Vempire de Sarra pour
aller au Cataï en droite ligne et ils y viennent avec des bœufs, et avec des
voitures et des chameaux (loe).
144. Dans la partie orientale de FÂsie il nous reste à parcourir :.]es
îles, rinde, le Cataï et le Gog et Magogou Thistoire d'Alexandre-le-
grand.
Dans la mer des Indes sont 7548 Ues , dont nous ne pouvons détailler
ici les merveilleuses richesses qui y sont renfermées , aussi bien d*or et
d* argent , que d'épices et de pierres précieuses. En elTet , il n'y en a de
nommées que quatre.
llla lana, Ceylan, Lanka chez les Indiens. Dans Vile de lana, on trouve
beaucoup d'arbres , bois d'aloës, camphre, sandal, les épices fines, laga-
langa, noix muscade, les arbres de canelle qui est Véjfice la plus précieuse
de toute Vlnde et là se trouvent de même le macis et ses feuiUes, Dans un
coin de cette île se trouve regio feminarum.
A côté de cette île : insula muébrum , des muets ou (nudorum) des
hommes nus , dans laquelle les hommes et les femmes portent une feuille
par devant et une autre par derrière.
La troisième île nommée, est Caynam.
La quatrième illa Trapobana, Soumatra (loi); sur cette île Malao est
accompagnée de cette légende : celte ville est déserte à cause des serpents,
La légende relative à Tîle porte : Vile Trapobana : cette île est appelée
par les Tartres (Tartares) Magno caulii (los), c*est la dernière qu'on
rencontre en orient. Elle est habitée par des hommes bien différents des
autres. Sur quelques montagnes de cette île il y a des hommes d'une
grande taille, c'est-à-dire de douze coudées, comme des géants, très-noirs
et dépourvus déraison; ils mangent les hommes blancs étrangers, quand
ils peuvent les attraper. Chaque année, dans cette île, il y a deux étés et
deux hivers. Les arbres et les herbes y fleurissent deux fois Van, Cest la
dernière île des Indes, Elle abonde en or, en argent et en pierres précieuses,
La mer des îles offre encore deux tableaux et légendes. La première :
mer des îles de Vlnde, oit sont les épices. Dans cette mer naviguent de
nombreux vaisseaux de di/férents peuples. On y trouve deux espèces d'un
poisson qui s'appelle syrène : Vune est moitié femme et moitié poisson ;
Vautre , moitié femme et moitié oiseau. L'autre légende dit : ces hommes
(106) La note sur la ville de Lop et la légende de la karavane sont verbalement conformes avec la
narration de Marco Polo, seulement celui-ci approvisionne la karavane pour un mois, le catalan pour
sept ; et Marco Polo parle de la traversée en général , le catalan détermine le départ de Sara et
la direction vers Kataï. — Voyez Marco Polo, cbap. 57, de la version latine, I, Ai. — Des séductions
diaboliques entretinrent très-longtemps encore les cartes postérieures, comme on le voit par
celle de l'atlas de Fréderik de Vfii, ou on lit : in deserto Lop et Belgiam bomines miris illusio-
nibus et diabolico screatu seduci crcduntur.
(107) Les Portugais admirent cette attribution de nom à l'Ile de Soumatra , comme on le voit
par leurs cartes des xT*etxvi* siècles. Siomatra, over Taprobana, dit i458 fra Mauro dans sa
mappemonde , instruit par les Portugais. — Quant à la carte catalane, sa Taprobana est plutôt
la péninsule Bfalaï. Vo^ez notre portulan vers Ta fin. *
(108) Magna eavMaho, liea ou vous êtes trompé et où sont de grands trompeurs : magni
cavilH f
CART£ CATALANE, 145. 59
sont des sauvages ^ qui vivent de poisson cru, boivent Veau de la mer et
vont tout nus (ioo).
145. Llnde se présente sous la forme d'une presqu'île. Celle forme
inconnue aux cartes italiennes, incompréhensible dans la relation de
Marco Polo, était familière à de bonnes cartes géographiques des arabes
et certainement fut relatée par dilTérents explorateurs du temps. Elle
est divisée en plusieurs royaumes dont trois sont spécifiés.
L'Inde commence de insula de Ormi et de Hormission, de Ilormouz.
Le premier roi qui s'y présente est del rey Dallif de Dely : ici est un
solda (sultan) grand, puissant et fort riche : ce sultan a sept cents éléphants
et cent mille hommes à cheval sous ses ordres ; il a aussi des fantassins
sans nombre. Dans cette partie de la terre il y a beaucoup d'or et de
pierres précieuses. Par le pavillon portant un pal on voit que le sultan
était possesseur d'un spacieux littoral : commençant de Uormouz :
Nocran (Mekran), Chesimo, Damomla (Daybol), Semcnat (Soumenat),
eiutal de Goga (Gogefo), Canbetum (Kanbaïet, Kamboîe) sur un golfe;
2Ver«ato (Nahrval) dans l'intérieur de la terre, aussi bien que de Barga-
lidoa (Fouroukabad au nord de Kanodj), laleym (Gaulna), Hocibelech
(Hosoungabad sur Nerbudda) et de Delly (Delhy) sa résidence; puis
suivant les rivages : Barochi (Baroch), Cocintaya ( ), Paychinor
(Baçaîm) Chintabor (Geîtapour), Nandor (Onor), Pescanor (Bacanor ou
Calianpour), jusqu'à Mangamor (Mangalor). Désert de les Indies sont les
déserts sablonneux à l'orient de l'indus.
Le secoad roi de la péninsule est : ici règne lo rey Colombo (Koulam,
Kou\3im) qui est chrétien. Province de Columbo, et ciutat de Columbo,
Son pavillon flottant sur Elly^ fiiirdcr (Wastara), Diogil (DindiguI?)
porte une croix et un oiseau.
Le troisième roi Etienne est aussi chrétien ; ici règne le roi chrétien
Steve : ici se trouve le corps de Vapôlre saint Thomas : tournes les yeux
vers la cité de BuHflis. Or, ses possessions s'étendaient sur les rives
du Coromandel. Carocam (Karrikal) Setcmelti (sept pagodes), Mirapor
{Meliapour) et Butiflis sus-mentionnéc où repose le corps de saint
Thomas. Son pavillon portant un lion flotte dans Tiatérieur des terres
sur ciutat de Balcia (Baiki près de Beder dans le Dekan) et Carachoïant
^Garrumkonda).
Bengala n'est pas formée en un royaume spécial , mais n'est pas non
plus la dernière des provinces. Son nom est suivi i^vBassia (Bisa ruinée,
SE. d'Assam, au nord d'Ava au pied du mont Tahka); Michcm (Mien,
Pegou); Penta (île Bintang), Thige, Lingo, lanpa (Zampa); après quoi
finis Indie, est fermée par un fleuve qui vient des montagnes Baldassia
(fleuve Meakoun, Mecon) (iio).
(109) ToQt ce que dit le catalan des îlos de la mer de l'Inde est rapporté d'une manière
différente dans la relation de Marco Polo. Ce dernier ne parle pas de Sirènes , ne se sert ni de
l'appellation de Taprobana ni de celle de lana; le catalan ignore les dénominations des îles
énnmérées par Marco Polo qui fait monter leur nombre à 7748, suivant le dire de sages marins
(chap. 161, vers lat. HI, 6), et même à -Ii700 selonc qe moister le compas et la scrilure de sajes
mariner qe nzcnt en cel merde Yndie (i:liap. 492, vers. lat. Ill, 43).
(110) LInde dn catalan commence à Toccident de Nocrau, comme la ^rant, grringnor Indie
de Marco Polo de Ras-macoran , mais la description de chaune est très-differenl^;. i.a m<'re de cinq
rois-rrèrcs de Maabar ne vivait plus, la grante brige faite ensemble , ne put faillir , ils destrucrent
le nn Tautre. D'autres puissances surgirent aux pavillons indiqués par le catalan.
60 GÉOGR. LATINE^ 1330-1410.
i 46. De l'autre côté de rembonchure ciutaî Caynam voisine de Tîle
du même nom, et la fronlière occidentale de Kalaî : açi finU Catayo.
Le paysétaît assujétit auxTatars (Mongoux). La ruine de leur domination
en 1565 était proche, mais le souvenir de leur première puissance
continuait à avoir du retentissement : La léi^ende dit : le plus grand
prince de tous les Tartres : il s* appelle Holubehn (du nom de Houpilaï
ou Koublaï petit (ils de Djenghiskan, premier fondateur de la dynastie,
chez lequel séjournait Marco Polo) qui veut dire grand khan (m). Cet
empereur est beaucoup plus riche que tous les autres empereurs du monde;
il a pour sa garde habituelle douze mille chevaux ; il a quatre capitaines
qui ont chacun douze mille chevaux sous leur commandement; chaque
capitaine se rend à la cour du souverain avec sa compagnie pendant trois
mois de Vannée et ainsi de trois autres, successivement et par ordre. Il
réside à Chambalech , capitale du grand khan de Catayo, — Sachez que
près de la ville Chambalech existait autrefois une grande ville nommée
Guaribalu, Le grand khan trouva par Gastronomie que cette ville se
révolterait un jour contre lui : il la fit donc dépeupler et fil bâtir celte
ville Chambalech (n«). Cette vUle a environ vingt-quatre lieues (ïeguis) et
est enceinte de bons murs. Elle est quadrangulaire : chaque carré à six
lieues et les murs sont hauts de vingt pas et épais de dix. Il y a douze
portes et une grande tour où est placée une grosse cloche qui sonne après
et avant le sommeil, de sorte que dès quelle a sonné personne n*ose aller
par la ville. Il y aà chaque porte mille hommes de garde, non par crainte
mais par respect pour le souverain,
Kataî est traversé par un fleuve ramifié en six immenses bras et six
embouchures. Il y a 46 villes en y comptant celles de la Tartarie jus*-
qu*à Lop, Carachora (Karakoroum), Tanduch (Tenduch), et les villes
(de Tangut) signalées jusqu'au mont Sebur. Il y aurait trop do peine
pour nous, et peut-être sans succès, à les examiner. Les relations de
Marco Polo contribuèrent sans doute à composer ce dénombrement des
villes : mais les renseignements postérieurs s'y mêlent sans doute et
forment les bases de la composition. En effet, une autre disposition des
états de la péninsule indienne, et tout ce qu'on y voit de la Chine met
à l'évidence ces nouveaux renseignements qui méritent d'élre étudiés
et approfondis. La confignraiion donnée aux fleuves et aux pays fait
présumer que les descriptions arabes n'étaient pas inconnues et qu'une
image figurative arabe guidait l'école caialane (au reste, voyez notre
art. sur les cartes de l'Inde et de la Chine, 29, 50, et le porlul. 50-52).
(111) Les éditeurs de la carte catalane indiquent l'origine de liolubeim dans Ouloug-bcig. —
Cublai kaan est apelez, que vaut a dire a nostre leugajc le grant scingnors i Marco Polo, cliap. 76,
vers. lat. Il, 1).
(Ili) Cet événement avait lieu en 1267. Or, vos conterai (dit Marco Polo, cliap. 8î>) de la
grant ville dou Catai, la ou ccstes palais sunt, por coi fui Taite, et cornant il est voir que iluec
avoit une ansiene cite graute et noble que avoit a non Ganbalu, que ce vaut a dire en nostre
lengaje la cite dou scignor ; et le grant kan trcuvoit sez astroniquc que cestc cite se devoit
revelere et faire gran contenire contre l'enpier; et por ccste cliaison le grant kaan fîst faire ceste
cite dcjustre celle qe ne i a qe un flum cmi, et ilst traire les jens de celle cite et mètre en la ville
q'il avoit estoic, qui est apele Taidu. — C'est sur ce passage de Marco Polo (cliap. de la version
latine II, ) que le catalan dit : da piats de esta la ciutat de Chambalech, auia y nagean cioitat
mult gran et ja aja nom Guaribalu; ela gran chan troua per l'estronomia que a quesla ciuit se
dcuia reuelar contra el; ay i qscula desabitar e fe ufer a questa ciuitat de Chabalech. — Marco
Polo savait que Cambalu était situé à 2 journées de l'océan (chap. 94, vers. lat. Il, 20) ; le catalan
l'ignorait et eofonya Chambalech au fond de la terre : erreur qui se perpétua jusqu'au xvi* siècle.
CART£ CATALANE, 147. 61
Ici naissent des hommes petits, qui n*ont que cinq palmes de hauteur et
ainsi soil qu*ils sont petits et incapables de faire des travaux de force;
Us sont cependant aptes et habiles à tisser et à garder du bétail. Et sa^^hez
que ces hommes, dès qu'ils ont atteint douze ans, dès cet âge ils engendrent
et ordinairement vivent jusqu'à quarante ans et ne sont pas trop heureux.
Ils se défendent vaillamment des grues, les prennent et les mangent. Ici
finit le pays du seigneur de Catayo.
Mais au nord ses pavillons avancent jusqu'à Tcnduch. Sachez que les
hommes et les femmes de cette contrée, quant iis sont morts, sont portés au
bûcher au son des instruments et avec de grandes réjouissances. Cepen-
dant les parents du mort pleurent et il arrive quelquefois, mais tardive-
ment, que les femmes des morts se jettent dans les flammes ainsi que leurs
maris, cependant les maris ne s'y jettent jamais avec leurs femmes (us).
 côté de ce pays dans l'océan seplenlrional sont deux grandes îles,
accompagnées de la légende : dans ces îles naissent beaucoup de bons
gerfauts et faucons que les habitants n'osent jamais prendre que pour
l'usage du grand khan seigneur et empereur de Catayo (n4).
m. Nous passons maintenant à Thistoire d^AIexandre, expliquée
dans les légendes d'après les récits des arabes. MoUas ciuitas magni
(Moultan), cette ville édifia Alexandre roi de Macedonia,
Dans les montagnes de Baldasia : ces hommes sont allés chercher des
diamants : mais comme ils ne peuvent pas parvenir sur les montagnes où
se trouvent les diamants, ils jettent adroitement des morceaux de viande
là ou sont les pierres précieuses, et les pierres s'attachent aux morceaux
de viande et les déplacent delà, les pierres attachées aux viandes finissent
par échapper aux oiseaux et ainsi les recueUle-t-on, Alexandre trouva que
cela se fesait ainsi.
Le roi Alexandre, — Montagnes de Caspis , dans lesquelles Alexandre
vit des arbres si hauts, que leur cime touchait aux nues. Là il faillit
mourir : mais satan le tira de danger par son art et à Vaide de ce même
art, il renferma là les Tartres Gag Magog et c'est pour eux qu'Alexandre
fil les deux images du métal ci-dessus décrites. Voici cette description :
ces trompettes sont de métal : c'est Alexandre, roi grand et puissant, qui
les fil fabriquer (us).
Alexandre enferma aussi dans ce lieu diverses espèces dliommes, qui
osent manger de la chair crue : c'est là l'espèce d'hommes avec laquelle
(IIS) Marco Polo fchap. 58, de la version latin*» 1 , 43) raconte towt an long les céronionlos de la
combustion l'bez les Tangnt : mais il ne connaît p; s de iVmmes se hrillaut avec les dépouilles
de leur mari. l\ raconte que les Tangnt ont une cjssie de ta-ble grosses un paitiact, bien (-onjnnte
ensenble tote enpointc noblemant et bi uietent le cors dedens. C'est son cascio ou le cors est. Cette
cassa grossa, cette caisse, le catalan la représente dans son dessin par un vase dans lequel le corps
remise , l'astroilique incantator debout y enfonce sa baguette.
(H4) Marco Polo en parle (chap. 71, vers. lat. 1,60). Kt quant IVn (de llargu, Bangu) alee 40
jomée, adoDC treuve-l'cn le nier Osianc (Océan) et ilnec il ont montagne, la o li taucbonz pèlerin
ont lor nid '.dans les montagnes). Kt en l'^isle que sunt on cel mer environ naisent les jcrfeaucz. le
grant clian en ba tant quant il ne vneit, et ne entendes que celz qe l'aporteut de tcre de
cristiens as Tartarz, les portent au grant cban, mes les portent nu levant ad Argon et a celz
seingnors dou levant. Or, non -seulement au grand kan mais aussi à Argon et aux autres seigneurs
du levant sont livrés ces gerfauts.
(115) Encore an xviii* siècle on ne négligeait pas ces trompettes : bic in monte collocali sunt
duo tnbîciues aerei, dit la carte de l'iillas de Frédérik de >Vit, quos verissimile est Tartaros in
perpeloara vindicalac libertatis memori^m, eo loci posui<S)>, qua persunimps montes in tutiora loca
commigraruui.
62 GÉOGR. LATINE, 1530-UiO*
viendra l'anleckrist ; ils seront enfin détruits par le feu , qui descendra
du ciel et les confondra.
Le grand seigneur, prince de Gog et Magog. Il viendra au temps de
Vantechrisl avec une nombreuse suite. Une légende explicative inscrite
sur Tocéan trace son origine : Antéchrist : ce personnage sera élevé à
Gorayn (Corazaïn) en Galilea et quand il aura trente ans, il commencera
à prêcher à Jérusalem et contre toute vérité, il dira quHl est le Christ fils
du Dieu vivant, et on dit, qu'il réédifiera le temple,
A côté du seigneur de Gog et Magog, dans un compartiment est
représenté le Christ roi, récompensant de la palme immortelle ses
fidèles : roix, peuples, évéques, moines, et la légende relative, inscrite
sur Focéan, dit : îc prophète Isaïe dit dans son chapitre 67 (verset 19) :
de ceux d* entre eux qui seront réchappes, fen enverrai vers les nations
en la mer, en Afrique et en Lydie, Ensuite de quoi , il ajoute : et vers les
îles éloignées, qui n'ont point entendu parler de mon nom et qui n'ont
point vu ma gloire et ils annonceront ma gloire parmi les nations (ne).
i48. La grandeur du globe terrestre, les noms des constellations ,
Ptolémée astrologue, les caractères arabes décorant le dessin cosmo-
graphique, sont des indices que sur cette partie de Fouvrage du cosmo-
graphe catalan rejaillit la lumière mahommédane. C'est suffisamment
connu : le cosmographe dans son traité n'est qu'un écho éloigné de ce
qui était répété avant lui.
On admettait dans la géographie latine Tinfiltration de quelques con-
naissances arabes, spécialement de récits fabuleux, et le cosmographe
n'a pas négligé de les introduire dans sa carte. C'était l'habitude de
toutes les écoles marines, de tous les dresseurs de mappemondes. Il
me semble cependant que la carte catalane décèle plus que les autres
l'impression inaltérée et positive de connaissances arabes. En regardant
la configuration et les formes de l'Asie, je ne vois pas qu'une carte géo-
graphique arabe dressée sur les longitudes et latitudes ait été suivie :
mais une image figurative et quelques descriptions arabes donnaient la
direction aux fleuves, aux rivages, aux golfes, aux péninsules et à
certaines positions.
Le dessinateur ignorait la langue arabe et ne connaissait pas de lettre
de son alphabet. Le pavillon de Grenade en est la preuve : le dessina-
teur n'a pas su y rendre correctement le nom de Grenade ài?LJ Jî3t
(416) Nous avons déjà dit qne le coûte de Gog et Magog est commun aux mahomédans et aux
chrétiens. Les géographes et les cartes maliommédanes ne négligent pas d'en parler. Scharifeddin
alMobareh Afcwtou^ l'arhelien , mort à Mosiil en 1240, dans son nazehat al coloub, raconte
fort au long riiistoire de Jadjoudj et Madjoudj (Dlierbclot}. — Celle de la carte catalane est retrem-
pée de la couleur chrétienne. Elle ne s'accorde pas avec l'opinion de Marco Polo. Celui-ci
en parlant de Tendue, où régnait le lignage de Prêtre Jean , pense , que ce est le leur qe nos
apellon de se euostre païs Gogo et Magogo; mes il l'apellent Ung et Mungul... Ung estoient les
Gog , et en Mungiil demoroit les Tartars (chap. 7A^ vers. lat. I, 65). Le catalan ne connaît de
prêtre Jean qu'en Afrique. Dans l'opinion de Marco Polo les Gog Magog, Talars Mongoux sont
difîércnts des peuples enfermés par Alexandre. A son avis les Talars n'existaient pas alors et la
réclusion avait lieu dans les montagnes du Caucase près de la porte de fer (Derbent) et le
peuple s'appellait Komaiis : et voz di ke Alexandre bi flt fermer une tore et hi fist une forleze
por coi celle jens ne poosent pasere, et fn apello la port dou fer ; et ce est le leu que le livre
Alexandre conte comant il euclouse les Tartars dedens deus montagnes. Et ce ne fut pas voir
qu'il fuiissent Tartarz, mes furent une jens <|ui estoient appelles Comain (Chaynari du texte latin)
et autres jenerasion assez : car Tartarz n'ctoient a celui tens (chap. 23, vers. lat. I , ii). — L'opi-
nion ne cessa de varier sur Gog et Magog. Au xv* siècle on interpréta Gog par ludae. Voyez la
note au chap. 168, et la note 103 du chap. 43.
CARtE CATALANE, 149. 65
et i*a au contraire défiguré horriblement. Probablement l*aiiteur de la
carte n*était pas mieux instruit : mais il a trouvé dans Fécole de ses
prédécesseurs les traditions des idées arabes. Aucun pays n^était plus
susceptible de se laisser influencer par les arabes que FEspagne, même
dans les connaissances géographiques.
Ces connaissances cependant devaient se fondre avec les investiga-
tions plus récentes des européens, et céder aux nouveaux renseigne-
ments apportés par la propagande de Tévangile ou par le commerce.
La carte indique les points où les perquisitions de la propagande ont
abouti, elle indique les chemins édaircis par le commerce. Les commu-
nications par la Perse y sont complètement obscures. Les nouvelles
arrivaient avec les épiceries par mer dans les golfes persique et arabe
(mer rouge); elles relataient les diflerenles directions des courses de
caravanes allant du nord de la Caspienne par Lop en Chine; ou de
marchands qui traversaient les bords de la mer Caspienne, par Mavaral-
Dahar et par Khorasan pour se rendre dans Tlnde. Peut-être les
géographes espagnols possédaient des relations orales de ces rensei-
gnements : mais plus certainement, ils confrontaient les caries ilalien-
Bes qui les avaient tracées, et combinaient avec ce qu*^ils avaient chez
eux d*arabisanl. Il s'ensuivit maintes fois une confusion résultant de
malentendus, de méprises. On serait peut-être disposé à douter de ce
que nous avons fait remarquer là dessus en Asie, à cause que le terrain
y est nK>ins clair : mais nous pouvons signaler de pareilles méprises
dans des pays rapprochés dont la connaissance nous est plus familière,
à Fabri de robscurité,^ d'où arrivaient aux Espagnols des nouvelles
réitérées et soumises à la confrontation.
149. Dans la région septentrionale, l'empire de Sarra s'étendait
vers l'ouest jusqu*au flum lussom, c'est-à-dire jusqu'au Dniepr, appelé
par les mahommédans Ozou, Usom (ti?). La Litvanie avait déjà chassé
la domination tatare loin du Dniepr, mais le cosmographe n'avait pas
d'aussi récentes nouvelles. Divisant la qualification de Sarafdjezira, en
Sarra et zizera, il place dans son voisinage sur le Volga ficrc/iiwam
et planta vers l'ouest les pavillons du senyor sur Baltachinta, Perum,
et Branchicha. Les deux premières appellations sont incompréhensi-
bles pour moi; quant aux deux autres» elles représentent, à mon avis,
Pronsk et Bransk , cette dernière située sur Dzisna, qui se perd dans le
Dniepr Usom.
Bargar et Costroma sont sur le confluent de deux branches de Volga.
En effet,. Boulgar en est peu éloignée, mais Kostroma est très-éioignée
vers l'ouest près de laquelle la branche ouest conduit en la remon-
tant vers Roslov, Twer, Torjek, nommées sur la carte Rostoar^ Tifcr,
Twachi. Cette dernière ville était un marché de la grande et puissante
Novogrod dont Te nom était inconnu au catalan , car les renseignements
qui venaient de Saraî n'avançaient pas plus loin.
Kiov, cité déchue de sa grandeur et de sa prospérité, figure sous le
nom arabe Chiva, Les chemins de son commerce sont déserts. Pour le
commerce de la mer noire toutes les plaines jusque vers l'embouchure
fl rr) Voyes Abouiféëa.
64 GàOGR. LATUIB» 1330-1410.
da Danube offrent peo d^intérét , le catalan ne trouvait aucun rensei-
gnement de ce côté pour spécifier sur la carte quelques détails des
pays de Burgaria et de Rossia. Tous ses renseignements arrivaient par
ceux qui, traversant TAIIemagne remontaient le Danube ou TEIbe, qui
côtoyaient les rivages de la baltiqne. Leurs relations variées , mal rap-
prochées et coordonnées créèrent une complication de rivières danu-
biennes, qui embrouillèrent remplacement des villes et obstruèrent le
nord d'un péle-méle presque inextricable. Cependant les dénomina-
tions pour la plupart ne sont pas méconnaissables, la confusion se laisse
débrouiller.
150. En descendant le Danube, le Uicus Danubii est imaginaire et
on ne commence Tilinéraire qu*à Ralisbona, De là on va par Tusna
(Thunna Stauf sur les bords septentrionaux du Danube), Pasavia
(Passau), Enbrunch (Ens, Burg-Ens), Vuvena (Vienne), Arusvar (Ovar,
Altenburg, ou plutôt sa voisine Hedervar) , Moleno (inconnue), Jaurim
(Javarin, Raab) et son insula Jaurim que de magna (la grande île de
Schût), Canaro (Gran, Strigon), Buda (Ofen, Bouda) et son île, Rogaios
(Raczkevi de ladite île), eniin Dinoba (Danoch? près de Mohatsch)
et insula Sirmium (Sabacz déplacé) terminent cet itinéraire riverain.
A droite en partant de Vienne, Casses (inconnu), caslrum Para
IPhara , Vorau) et le /lum Pingua (Pinka qui tombe dans la Raab) ,
^uuardine (Varasdine au delà de la Drave), /lum Sal (est le fleuve Sava
qui coule au sud des deux villes suivantes:) Casma (Chasma, Tzasma,
Zeschma), et Pasga (Posega , toutes deux dans la Slavouie) ; enfin Elea
(peut-être llloh, Vilak sur le Danube). Ici se termine ce qui est enfermé
par le cours de la Save.
A droite de la Save Bosna (Saraïero, Bosna-Seraï) , Nicordo (Zvornik,
Kornik) , Cleina {inconnu).
A gauche du Danube se rangent d'abord sanclo Vito (saint Veit
vis-à-vis de Vienne) , sancta Maria (trop enfoncée au nord, sainte Marie
vis-à-vis de Presbourg), Bâche (Baks séparée par la Teisse de) Temers-
var (qui est séparé par Marosch de) Canada (Ksanad). Le Catalan avai4
donc des relations qui avançaient jusqu'à Tembouchure de la Sava: il
ignorait le cours ultérieur du Danube mais il en connaissait les bou-
ches (lis).
De Praga, puissante capitale de Boéme on remonte TEIbe par Dres-
den, Missen, Guise (les autres cartes portent Gurse, Wurtzen sur Mulda).
Aquis (inconnu, Acken? près de Zerbst), Mangobros (Magdebourg) ,
Argent munde (Tangermunde), Stendar (Stendal), Lessem (Lentzén)
dernier point sur VEulie (sur TEIbe), d'où Ton se rend sur les bords de
la mer à Wisraar Usmaria ou Ugmaria.
Avant de parcourir le littoral de la baltique nous observons que dans
le pays de Polonia se présentent des répétitions manifestes : Cracouia,
(H8) La rartn Messine de IStl, copie de la fabrique catalaae, présente au N du Danube quatre
figures de villes accompagnées des noms deSantovito, Baocki, Léo et Camadia, ses succédant d'O
en E sans aucun pavillon. Snr le Danube même , trois figures de villes sont désignées par les
noms de Zavra (Javaria), n«tto/t BiM/a et ctHtfaft Bucina avec quatre pavillons, dont deux pour
Boude , tous les quatre semblables offrant un champ fascé de gueules et d'argent de six pièces,
les dnq <lernières adextrées d'azur (D'Avczac, carte de lacollcct. Barbie du Bocage). Bicina , Bitina
est probablement Viddio.
CàRTE CATALAKE» 15i. 65
Polonia , Posna , par deux fois répétés , slagiio Ncrïa et lacus Nêria ,
Pratcnia et Prussia, sont évidemment les doublures. On peut en dire
autant de : Guarpe, Sladin et Stetin, scorpe. Le compositeur de la
carte a tissu ces répétitions par tout où il a mal combiné plusieurs
cartes qu'il confrontait et où il na pas bien compris ditfércnts rensei-
gnemenls qui devaient le guider. Mainlenaul revenons à >Vismar.
Usn*aria (Wismar), lioystoch (Uoslok), Ludiamagna |Ludersbageu
près de Bart dans le pays des anciens Lutices les grands) , Crisoaldia
(Gripsvald), Guarpe probablement un Werf, un jet, une emboucbure
de roder dans lequel tombe la Varia : celle ronjeclure me semble
d'autant plus probable, que la répétition de Guarpe dans Scorpe se
trouve près de Tembouchure du fleuve sur lequel se rangent, comme
nous le verrons, les villes situées sur les bords de TOder et de la Varia.
SUidin et sa répétition Stetin (Stettin), Colberg (Colberg), Alech (Hela).
Ici commencent les autres : Stetin , lacus Neria de Tembouchure
(de roder et de la Varia) et Scarpe. Vient Godanssc (Gdansk, Danlzik)
et ïembouchure de la Vistule, laquelle est complètement privée de ses
villes. Ensuite Albinga (Elbing) et Ncrla avec son stagno dont la répé-
tition précéda sous la dénomination laline lacus (Frisch Nerung). Suit
Finsertion prématurée de Curonia (Curisch Haifet Courland); ensuite
Prutenia et Vcmb<mchure de Pregel, sur lequel, dans l'intérieur de la
terre sont les villes vistuliennes. De ce point, pour donner la suile aux
indications y il faut les prendre alternalivement en avançant au nord;
ensuite reculant vers le sud, embouchure de Niémen et Litefania;
ensuite Riga et Vembouchure de Dzwina ; à reculons suivent : Revalia
(Revel), Cardant paganis (les Kareliens inûdèles).
Cette revue du littoral et du cours danubien, nous conduit à la
remarque, que les situations de ces deux séries se trouvent presque en
contact : Prussia se place sur la ligne de sancla Maria., siluée vis-à-vis
de Presbotirg. Ce contact embrouille considérablement ce pcle-méle
des villes répétées de Potonia. Dans ce mélange, je pense distinguer sur
les rives du fleuve fourchu qui représente TOder et la Varia : Garagena
(Crossen, ou Kargov de Tautre côté un peu éloigné du fleuve), Epoli
(Opole), Ceane (Cieschine, Tescben); double Posna (Poznan, Poseu),
Asna (Gniezno) , Sira (Sieradz).
Parmi les autres , situées près d'un fleuve ou dispersées en désordre,
je pense débrouiller : dans Foczim (Osviecim), Sudona ou Sudoua
(inconnu, Scbidlov?), Sudumera (Sandomir); dans la double Cracovia
(Krakov), dans la double Polonia^ Pollonia (Polanictz). Enfin vient le
dernier point, ciutat de Léo (Lvov , Lembcrg , Leopolis) , accompagnée
de la légende : ville de Léo : dans cette ville viennent des marchands qui
arrivent du levant et se rendent en Flandre par la mer d'Allemagne,
15i. La carte catalane a donc exposé le mouvement commercial
entre Vismar et Lemberg de la Russie rouge. Elle ne sait rien nommer
de ce qui esta Torient, elle y dessine les villes de la Rossia innom-
mées (iio); à Toccident de Vismar elle couvre de silence rinlcrvallc
(il9) La description imprimée nomme entre Canada et Cliina une vjllc Reyia Chrhti?
Par ma copie faite avec précipitation absolument inévitable, je ne puis dire si elle se trouve dans
le fac-simiic.
66 6É06R. LATINS, 1330-1410.
jusqu'à Vuangrega de Frisia (Frisie) (lao); on n^y voit ni Brème ni
Hambourg.
La mer baltique porte une légende comme suit : celle mer e$l appelée
mer de Lamanya et mer de GolUandia el de Susia (Suesia) : sachez que
celle mer esl gelée pendanl six mois de Vannée, c*esl à savoir de la
mi-oclohre à la mi-^mars, lellemenl, que pendanl celle saison on peul
voyager dessus avec des chariols Iraînés par des bœufs , d cause du froid
du nord.
Ses iles sont les suivantes : Oxilia (Oesel), Visby (Visby de la grande
GotiandK BrundoM (Bornholm), Ruya (Rugia), Eria (Arroe), Fanse
(Falster), Langland (Langeland), Finonia (Fionia), Salanda (Zeeland).
Danemark deux fois inscrit par Dasia offre dans Fintérieur Vibor
(Viborg) et sur ses rives : Burgalensis (Borlum), Rica (Ribe, Rib-
beknut), Ripis (Ripen), insula See (Sylt), aqua UUis (golf près de Hus-
sum où Ton a Ulvesbyl).
La Sucssia et la Norvega portent les villes suivantes : Slocolm
(Stokholm), Oslia, Somech, Ifrac (me sont inconnues), Dondina (Lun-
den), Skamor (Skanor), Scarsa (Skara), Maslrando (Mars(rand),
Bregis (Bergen), Tronde et Nidrosia deux noms de Dronlheim divisés
en deux villes. La Norvège est accompagnée de la légende : à quesla
régie de Nurvega es moll aspra e moll freda e munlanyosa > salvalgosa el
plena de boschs ; los habiladors delà quai mes viven de peix el de caça que
de pa\ avenasi sa e forl pochs, perlo gran fret; molles feres hi ha, ço es
çervos, oros blanchs e frigalls (lat).
Les îles au nord de l'Ecosse, sont les suivantes : Chalanes (Schetland).
Archania (Orcades) : dans celle île d'Archania %L y a six mois de jour
pendanl lesquels la nuit est claire, et six mois de nuit, pendant lesquels le
jour esl obscur,
Illa de Scillanda (Skye près d'Ecosse) ; ils parlent la langue de Norvège
el sont chrétiens (hî). •
Enfin une légende raconte les merveilles de l'Irlande : En lubernia
il y a beaucoup d*iles qu'on peut croire merveilleuses, parmi lesquelles il
s* en trouve une petite, où les hommes ne meurent jamais; mais quand ils
(liO) Les points nommés de la Frisie et de la Hollande sont les siûvants : Vuangrega , Wange-
roog; JVcwdtepa, Mars diep, détroit près de Texel ; Ardrohitp Nordivyk; Sealingue, Scbeveling;
Gravesant ; Maxa , embouchure de la Meuse. — Andréas Benincasa inscrivit dans sa carte de 1407,
presque la même nomenclature : Dada, isole faute (Fanoe), Ripis, AguaulUe, Frixia, tieuglie.
yangaroga, OUanda, Masdiepa, Ardrohie, Sealingue, Utrechty Grauesanl, Maxa.
(121) La carte d*André Bianco, 1436, donne cette légende en latin : Norvegia est regnnm asperima
et frigtdissima et montuosa, silcistris el nemoroxa , eujus incole potius de pisckacione et venacione
vivunt, quam de pane; ibi fere multi, albi ursi etgrifalei et alia multa (Zurla» cap. 15). fl a omis :
l'avoine y vient, mais en petite quantité à cause du grand froid : le tout décèle les mêmes matériaux
pour la composition des cartes, chez les italiens et les espaguols » matériaux qui se perpétuaieiift
dans leurs dépôts géographiques.
(ISi) Nellasettima carta (ni Andréa Bianco, 1436) scorgcsi la Dacia... e lacosta sud-ovest detla
Norvegia, alla cui punta verso tal plaga v'è delineata in rosso Vixola ttiles, e solto d'essa è notato :
loehus inabit(^ilis quan i estate nichil potes chrescere per chaloren et i gieme ppter mag frigoris
ch&melatoris... al nord délia sudetta Tile, se vede altra isola, ma tronca dal margiue col nome
StUanda; e più al nord, ancora altra , piu grande, parimenti tronca, avente i due nomi Stoehfis e
Pfovercha (Zurla, cap. 13). Ce ne sont pas les deux noms, les deux appellations, mais une note, qu'on
pèche ici le stokGsch, la merluche qui vient de Norvège : merluche de Norvège. —Sur la sixième
carte de Bianco : presse cui (l'JrlIanda) con circolo dorato v' ha isola de bertil; Fra Mauro, vers 1457,
al NO délia Ibernia colloca l'isola dé/ BerzU, in figura quasi circolare , e dipinta a giallo (Zurla il
mappa monde di fra Haoro, cap. IS). Cette ile n'est pas oubliée par la carte catalane, sa figure ronde
y est sans épigraphe. Cette ile imaginaire est soigneusement reproduite encore par les géographes
du XVI* siècle. Mais la carte catalane connaît une antre Brasil parmi les Azores.
CARTE DE 1400. 67
sont assez vieux pour devoir mourir, on les porte hors de Vile (iss). // ne
s* y trouve ni serpent, ni grenouille, ni aucune araignée venimeuse; la
terre y est plutôt contraire à toute bêle venimeuse. Là aussi est un lac eî
une île. Bien plus, il y a des arbres qui portent des oiseaux, comme
d*aulres arbres portent des fruits mûrs. Il y a là une autre île, dans
laquelle les femmes n'accouchent jamais : mais lorsqu'elles sont arrivées à
terme^ on les parte hors de IHle suivant la coutume ( 194).
Nous nous sommes engagé dans une trop longue description delà carte
catalane. Bien qu'elle se restreigne à la rëpéiiiion des légendes et des
épigraphes > elle n'est pas complète parce qu'elle n'a pas donné de por-
tulan que la description accompagnant le fac-similé avait développé (125).
Notre description s'est étendue, parce qu'elle a essayé de donner quel-
ques explications. Incomplète, elle est insuffisante dans ses explications,
parce qu'elle n'a pas historisé les connaissances de différentes parties
et contrées. Cependant elle est trop longue, parce que notre but
essentiel était de considérer la carte catalane comme carte géogra-
phique construite d'après la méthode compliquée des vents ou de la
boussole. L'examen de cette nature se fait comprendre quand il est
accompagné de la carte elle-même : sans la carte il déclare une opinion
souvent vague et dubitative.
La carte de 1400, acquise 1424, et autres catalanes.
152. La carte catalane est le plus grand monument géographique
que nous ayons en entier pour notre analyse. Il en existe beaucoup
d'autres. Nous connaissons des fragments, des mentions, des descriptions
de plusieurs : quelques-uns de ces fragments sont d'une grande utilité
pour nos études, mais ces mentions, ces descriptions de caries existantes
dans de nombreux dépôts, ne sont presque d'aucune utilité, parce
qu'elles parlent d'une carte qu'on ne voit pas; parce qu'ordinairement
elles s'entretiennent de découvertes réelles ou fictives, de la configu-
ration de parties figuratives, de fables, et n'examinent et n'indiquent
uï les bases de la construction , ni le degré de la perfection géographi-
que (i26). Ne voyant pas ces cartes il ne nous reste qu'à désigner leur
existence sans trop toucher à leur description.
De ce nombre nous allons relater la notice assez circonstanciée
d'Alexandre Humboldt sur une carte de la partie occidentale du monde
(423) Cootes chantés vers 43S5 4367, par Fazio, il ditta mondo Irlanda et Anglctera. — Cosmogr.
de Mnnster de Fr. de Belle Forcstp. 800, edit. 4578 (anuote Tastu).
(l<4j Voici comment est désigne ce lac sur la carte manuscrite de Grathso Benincasa de 4i67 et
de son fils André en 4476. Lacns Fortunatus, ubi sunt insuie que dicuntnr insuie sanctc Béate
cccLXTii. Tastu à cette occasion promit de publier la carte de Gabriel FàUequa do 4i39 où l'on voit
ce lac gros d'îles, comme une vessie pleine de pois. C'est le lac Erin , Erno sur le compte duquel il
existe d'autres légendes : de hoc Erno lacu scribit Gyraldus Cambdcnus, quod olimfons fuerit, scd
ob incolarum nefandam cum bestiis venerem : deo irato, intatam aquarnm dilnviem erupsisse ut
iotum cum traclum cum bonîbus inundatione snbmercit : atqne inreigeste veritatcm, liodiequc,
sereno tempore, etiam nnm templorum turres sub undis hic inde conspici : inscrivit Humfrid
Lbuyd sur sa carte reproduite en 1S60, par Orlcl.
(428) Nous donnons ce portulan, collationné avec les dénominations modernes et plusieurs autres
portulans anciens que nous avons eus à notre disposition, dans un article spécial, intitulé : portulan
général det cartes qui compotent l'atlas. Se trouve à la fin de l'atlas.
(496) Nous devons cependant excepter de ce qui est de notre connaissance , la savante notice
de d'Avezac sur la carte de la collection Barbie du Bocage, laquelle s'engage à examiner les bases de
U consirnciion ; et la notice de Humboldt sur la carte à la date 4424 , que nous allons analyser.
08 GÉOGR. LATINE, 1330-1410.
dont la fabrique remonte jusqu'au xiv* siècle (lii). Elle est conservée
à VVeiinar dans la bibliothèque militaire. Elle est tracée sur parchemin
et collée sur bois, ayant 5i pouces 6 lignes de long et 21 pouces 9
lignes de large. Elle s'étend en latitude depuis 26° ^/4 jusqu'à 02® et en
longitude depuis le méridien de la Mingrelie et de Colcos, c'est-à-dire 2®
à l'est du bord le plus oriental de la mer noire jus(|u'au méridien qui
traverse Tallanlique, 5® à l'ouest du cap Bucedor (Bôjador). Comme la
carte est dépourvue d'échelle graduée (continue Humboldt), j'évalue
les distances d'après celle du cap Finistère au cap S. Vincent. Il n'y a
d'autre titre qu'une bande droite dirigée du sud au nord et séparant
l'Antillia des îles Açores (lis).
On n'y reconnaît que les mots : Contesl,,, compa,,, ancon mccccxxiv :
tout le reste est illisible et effacé par vétusté. Je pense que comparavH
Ancon ii2î, que les débris de l'épigraphe paraissent offrir, ne signiiie
point la composition de la carie mais son acquisition » le dessin étant
antérieur à l'année ii05. Ce chiffre de 1421 se trouve encore une fois
répété sur le bord de la carte vers l'est, mais avec une encre moins
ancienne : autre annotation de la date d'acquisition.
LereœRossidey le soldano di BabilloniaM couvent de Sainte Catherine
du mont Sin;fï , les armes des républiques de Gènes et de Venise soiit
figurés comme ornements dans l'intérieur des terres, où d'ailleurs l'in-
dication des villes est assez rare. Ces ligures de princes assis sur leurs
trônes se trouvent sur des cartes plus récentes (de Mauro, de Bianco).
L'image du soldano di Rabillonia, tenant un perroquet sur le bras
gauche, est indiquée à l'ouest du Nil (comme elle l'est dans la carte
Catalane),
Le pavillon des chevaliers de S* Jean flotte sur l'île de Rhodes. En
mémoire de la croisade de S. Louis, le lieu de l'embarquement
(25 août 12Î8) se trouve indiqué à Aquae morlo, en signalant l'endroit
Sar un immense bras de rivière (sans doute celui d'Arles) qui sort du
Jiône.
Dans l'Asie mineure, quae nunc dicitur Turchia, est assis le sultan
Baixil, le grand Baïazet Ildirim. Comme ce prince régna depuis 1589
et mourut en 1405 après être tombé au pouvoir de Timour à la bataille
d'Ancyre, l'image de Baixit offre la date de la composition de la carte
antérieure à l'année 1424 et à celle de 1405.
Ce qui est remarquable sur celte carte, c'est qu'on y trouve tracé le
canal de communication entre le Nil et la mer rouge détruit depuis 707.
La tradition de son existence se perpétua jusqu'à la (in du xiv*' siècle.
Nous l'avons vu tracé dans l'image du monde de 1119, dans celle de
S. Denis du xiv*" siècle; il est sur la carte contemporaine de Baïazet. Le
canal du Nil est représenté sur la carte de Weimar, en communication
fi47j Homboldt , examen de riiist. de la géogr. du nonvran monde, t. H, p. 180-181.
(128) Cette ostimatiun en degrés est peu satisfaisante pour nous, 21 pouces et i* lignes répondent
à 3S* 15' du grand cercle, or S-l pouces et 6 lignes donneraient en longueur S5, 91 degrés du grand
cercle, ou 67, 09 degrés du parallèle de Rliode. De ces 07* du long retranrbaiit 2* du l>ord oriental
de la mer noire. S" à l'ouest de Uoïador, et 9» lî' de difTcrence entre Doïador et Ccnta, reste entre
Ceuta et le bord oriental de la mer noire ou remboucinire au F*»s 30° 48' pour ta longueur de la
méditerranée, plus ou moins 45*. Mais nous ne connaissons pas l'état des lisières de la carte el à
notre avis l'évaluation du degré entre Fiuislerre et S. Vincent : n'est pas la mesure à déterminer
le degré : il était plus sAr de l'évaluer entre Venise et Rome, à coup sAr il sortirait plus fort. — La
carte porte le nom d'Antilla, mais le nom d'Azores est certainement le nom de la description.
CARTES NAUTIQUES, 153. G9
avee une rivière qui naît en Arménie et coule d'abord du nord au sud à
Test du Liban, en tournant vers l'ouest sous la parallèle de Babylon
oegyptL Cette même rivière a un bras qui débouclie dans la médiler-
ranée près d'Alexandrette. Le Jourdain est figuré séparément avec assez
de précision, tandis que la rivière anonyme qui communique avec le
canal de rKgypte, dans Tlsthme de Suez, naît dans les montagnes, qui,
selon la même carte, donnent naissance à une rivière (le Turak ou Boas
des anciens?) qui coule au NNO vers la mer noire, et à une autre
(le Tigre) qui se dirige au SE. Des cours analogues de fleuves se pré-
sentent dans les copies du xv° siècle de la mappemonde de Sanuto,
(ms. de Bruxelles et publ. de Bongars); en partie dans la carie catalane.
Tout le bassin de la méditerranée, de la carte contemporaine à
Baîazet et comparata 1124; les côtes de la Grèce et la mer noire sont
représentées avec un détail topographique très-remarquable , dit
Humboldt, mais le gîssement relatif ou Torienlation des cotes est très-
erroné. Si Ton trace les méridiens d'après l'ouest de la péninsule
ibérîenne, continue Humboldt, l'est de la Sicile et l'ouest de l'Asie
mineure, on trouve l'Afrique à quelques degrés au nord de l'embou-
chure de l'Ëbre et la direction moyenne de la côte méridionale de la
mer noire coïncidant non avec le parallèle d'Oporlo, mais avec celui de
Lorient en Bretagne. Les parties orientales sont trop au nord, comme
sur les cartes marines des Génois et sur toutes les autres du moyen .âge.
Dans la carte que nous analysons, de même que dans les autres^
l'orientation est vicieuse, fictive; elle est celle de l'aimant, de la
boussole qui ne peut pas servir à la graduation. En commençant par
les méridiens et les longitudes : il faut d'abord examiner les latitudes
des lieux et les parallèles détermineront le défaut et la perfection de la
construction.
155. Dans la suite des cartes que nous allons indiquer, celle du musée
Bourbon à Naples, occupe la première place. Elle remonte vers l'an-
née 1410. L'original est dessiné en travers sur une peau de vélin large
de 8â centimètres et longue de 110 centimètres, non compris une
portion qui se prolonge sur la gauche en se rétrécissant, et qui répond
au cou de l'animal. Le champ de la carte est à peu près le même que
celui des deux premières feuilles de la carte catalane : c'est-à-dire
qu'il représente en grand détail les rivages de la méditerranée avec ses
dépendances, ceux de l'océan entre le cap Boiador et les îles Britanni-
ques avec les Canaries et les Açores, et donne, en outre, quelques indi-
cations plus vagues au nord et au sud de ces limites. Des pavillons
armoriés se déploient sur les diverses capitales, et quelques légendes
explicatives se lisent sur les espaces nus : ces légendes sont en langue
catalane, dont les formes se trouvent d'ailleurs empreintes dans toute
la nomenclature. Celte carte doit être classée dans la catégorie des
cartes hydro-géographiques à projection plate, par développement du
cylindre osculateur de la sphère terrestre. C'est donc encore une carte
catalane : son analyse donnera le témoignage le plus satisfaisant du
progrès : je n'en doute pas (129).
(Ii9) Extrait de la note toe à la société de géogr. i8 août i843 par d'Avezac. — La carte est gravée
par Roïdini et paraîtra accompagaée d'un mémoire de Rossi , qui s'occupe à l'illustrer.
70 GÉOGK- LÂTIBE, ia»-Ul».
Oo eoDiuKsait encore ëe Técole caïaUiBe la carte de runée 1413 de
MATnAS »e YrxAKSTEs, cmserTce aetrelots ai covTeol des duirtrem
de Yal-de-Crislo près Se^Mi^, oè Joaqwfi>Loreim YiUaaiieTa Faiaft
eianinée nais d«Dl oo igoore le sort ollérieor (iso).
On cooDaii deax aoires de la oiéiBe école catalane : one de
Faonée liôO décoorerte en Italie dans le nurqnisat de Sobrello; Fan-
tre de Gabuel Yalscoca de liôi oo 1459, exëcolée à MaîorqDe (i3i).
La fabrîqne catalane était donc très-aetiTC, elle fooraissait à la France,
à Fltalie. On se commaniqaaît réciproquement.
Depuis qoe la marine des deux péninsules augmenta le nombre de
l^alîons, de caraTelles, les portulans se multipliaient à Fosage des
pilotes. Les dessinateurs s>xerçant dans leur art , pragressaient dans
Fexactitude et la précision ; compo»ient les cartes nautiques et don-
naient aux images du monde, aux mappemondes, tonte Feicactitnde de
cartes nautiques. Les cartes spéciales, les portulans, ou les Buppe-
mondes d'une très-grande échelle étaient nécessaires aux matelots.
Cest pourquoi les mappemondes se composent de plusieurs cartes. On
a des allas de cette époque. Les petites mappemondes dessinées sur
une moindre échelle pour satisfaire la curiosité et donner une idée de
la totalité de Fhabitable, n'étaient qu'une diminution des grandes, préa-
lablement élaborées : aussi, pour la partie exécutée arec connaissance,
c'est-à-dire pour la mer méditerranée et FEurope extérieure , offrent-
elles de justes proportions. Quant aux parties éloignées, elles ne chan-
gent pas de formes. Partout cependant la nomenclature antique dimi-
nuait ou disparaissait totalement, pour faire place à la nouTelIe, les
images fi^nratives même reçurent l'empreinte de connaissances aTan-
cées et répandues : mais l'espace y était trop étroit pour ces connais-
sances et ordinairemcut on aimait à reproduire les anciennes traditions,
à inscrire les merveilles, les contes fabuleux et historiques.
Dans un manuscrit de Pomponius Mêla, conservé à Rheims, son
copiste de i 117 décora la graode initiale d'une image du monde (voyez
n* 87 de notre allas). Cest une jolie miniature, fourrée dans une lettre,
cernée d'un 0. Les dénominations des trois parties du monde, des pays,
de plusieurs rivières y sont inscrites; Paris, Rome, Jérusalem, y sont
nommés; Constantitwple y est annoté par les initiales; plusieurs autres
figures de villes restent sans épigraphes, savoir, en Afrique : Fes et
Babilonia (Caîr); en Asie : Cambalech et une ville de l'Asie mineure;
en Europe : probablement Barcellone, Praga, Ratisbone et Bouda.
L'image , décorant le mauuscrit de la géographie de Pomponius
llela, se conforme à l'idée du géographe : or, la mer caspienne n'est
qu'un golfe océanique et le Tanaîs débouche de deux bouts : le géogra-
(130) A la saite de la description de la carte d« cvovest Val-de-Cristo, Villanueva se sonvieitt
â*»yotr va, dans la bibliolbêqne da monastère deSui Mîgnel delos rejes, fondé par Ferdinand le
catholique dans la campagne de Haerta, à ose demi-liene de Valence, une autre carte plate hvdro-
craptiiqtie dn xt* siècle, carte fort endommagée, la date de sa rédaction est détmite par an tro'a. —
SelKistian Minano, dans son dictionnaire gé<^^phiq«e et statistique de l'Espagne, en allègue
reKistence,s«r te parole de Vilianuera. — D^Avezac suppose, dans ses notes, que cette carte est la
même que ceUe de 131 1 de la collection Barbier da Bocage, dont il a donné lui-même nne savante
description.
^151) La première découverte en 1789, fut examinée et décrite de suite par Tabbé Borghi,en
suite en 1794 par Cladera. — L'autre a été insuffisamment décrite en 1789 par Antonio Ravmundo
Pasqnal. — Or, B6 ans se sont écoulés depuis leur première description.
PIERKE d'aILLY, 154. 71
phe Ta dit. Jérusalem est au centre, Torient au sommet, TÂsie com-
prend la moitié du cercle , les deux quarts de l'autre moitié sont pour
rEurope et TAfrique. Malgré ces antériorités, la figure oCTrc les beaux
traits du xiv* siècle, ainsi que ses défauts. Gela se décèle, non par
finsertion de Calhay et de Anglia parmi les dénominations antiques,
ou par la multiplication de India (cinq fois répétée) : mais par la con-
figuration de riiâbitahle et par Tinclination de la mer méditerranée
de ENE à OSO à la ligne de E à 0 de la parallèle.
La figure ronde divisant Thabitable par un diamètre et un rayon
perpendiculaire est reproduite plus d'une fois encore, comme réminis-
cence dans quelques ouvrages des typographies italiennes el alleman-
des, au xiv** siècle. On la voit encore , vers, la fin de ce siècle dans les
publications d'Apien et de Gemma Frisius.
Pierre d'Aillt, 1410.
154. La figure ou la sphère de d'Ailly est très-intéressanle pour
répoque dans laquelle nous entrons. Pierre dWilly , né près d'Abbé-
ville à Gompiègne en 1350, d'une famille obscure, s'éleva par son
mérite aux premières dignités de l'église. Reçu grand-maître du col-
lège de Navarre en 1584, il fut ensuite chancelier de l'université, con-
fesseur de Gharles VI , évêque de Gambrai ; il se distingua en 1409, au
concile de Pise, deux ans après 14ii , il fut nommé cardinal et légat
du saint-siége en Allemagne; au concile de Gonstance (1414) il démon-
tra la nécessité d'une reforme dans l'église; il s'était démis de son
évéché lorsque Martin V le fit légat d'Avignon où il mourut en 1420. Il
a écrit difiérents traités d'astrologie, de chronologie, d'astronomie et de
géographie ou cosmographie qui sont accompagnés d'une figure ou
planisphère (132).
Ge planisphère off"re les cercles ordinaires de la sphère. Sa partie
septentrionale est divisée en sept climats tous pleins de noms de pays,
de monts, de villes, de fleuves, inscrits respectivement aux climats où
ils se trouvent, ou au delà desclimats. Il n'y a aucune trace de contours
de pays, seulement la nomenclature géographique est ainsi distribuée.
Or^ c'est l'ombre d'une carte , simulacre d'une mappemonde soumise à
des latitudes géographiques, à la méthode étrangère aux cosmographes
latins, pratiquée par les arabes, comme dans la géographie de Ptolémée
que d'Ailly a pu facilement connaître , parce qu'il allait souvent en
Italie où cette géographie fesait beaucoup de bruit et où on se préoc-
cupait de la faire traduire en latin (voyez n® 79 de notre atlas).
Je touche d'abord quelques épigraphes un peu obscures de ce pla-
nisphère. Au-dessus des climats on peut lire : hic : climatausque polum,
multas habilationes, insulas continent, qui non polerunl hic conuenienter
designari. Dans le sixième climat, Lumania, lisez Gumania ; dans le
cinquième, SUicia, lisez Gilicia; don y est un fragment de Macedonia;
dans le deuxième climat, Cir, mg. Syrtismagna ; Cir, mi, Syrtis minor.
(13S) L'onvrage a été imprimé en 1480, suÏTaot les apparences à Louvain chez de Westfalie.
Quantité d'autres ouvrages sont en manuscrits. — Le planisphère de Pierre d'Ailly dans notre atlas
est copié d'après la publication de Santarem , diminuée en proportion de 200 à 93 de l'échelle. —
Cette image se trouve tout de môme, bien exécutée dans l'édition susmentionnée. — La notice
btotoriqneet littéraire sur le cardinal P. d'Ailly, par A. Pinaux, Cambray, 4824,in-8, m'est inconnue.
72 GÉOGR. LATINE, 1330-1410.
Âu-dcssous des climats : India fere terdam parlem terre habitalilis
conlinel, usque ad meridiem se eœlendll. Au delà de la ligne équinoxiale :
anliclimala usque equinocUcUem, qui ultra mullas habitationes continent,
ut ex hisloriis autenticis compertum est, — mare rubrum , euius longi-
tudo vix. VI. millics passum vient d*unc variante 1606 de Pline V[ , 53.
— Artm est la coupole Ârine, hindou -arabe, connue par Tétude de la
science arabe (voyez chap. 2^2 et les prolcgom.). — Le reste est clair.
Quand j'examine la dispartilion de la nomenclature entre les
climats sur son planisphère, je vois qu'à l'exception des climats il n'y
a rien d'arabe, et je pense qu'on remarquera facilement que plusieurs
situations ne s'accordent point avec la disposition ptoléméenne. Cette
discordance se rencontre sur tous les points. Yrcania , inscrite exces-
sivement au nord, Baclria redescendante au sud, la Mauritania placée
sous le tropique, Gades touchant le second climat, sont des anomalies
criantes et contraires à l'ordre de Ptolémée. La division en climats est
donc opérée sur une autre construction de l'habitable : elle est tracée
sur une mappemonde dos cosmographes.
La nomenclature est ancienne, c'est-à-dire latine romaine, mais au
nombre des appellations anciennes, se mêlent plusieurs modernes:
Rutenia, Cumania, Francia. Dans sa longueur l'habitable est divisée en
deux moitiés égales. Le méridien de division traverse évidemment et
incontestablement par Palestine et Jérusalem , conformément à l'usage
convenu. Habilatio elephanlum , est une note des mappemondes. L'em-
placement de Yrcania à côté de Cumania, est aussi leur mode. Enfin
l'autre moitié décèle rinclination de la méditerrauée de ENE à OSO,
vice caractéristique des caries nautiques du moyen âge, qui refoulait
Gades et la Mauritanie vers le tropique (133). Or, ce planisphère de
d'Ailly offre une carte nautique, une mappemonde soumise à la divi-
sion en climats, manifeste : qu'on s'essayait de tracer sur les mappe-
mondes les latitudes au hasard.
155. Ces observations se présentent par l'examen direct de Timage
dessinée par d'Ailly. Nous devons encore chercher des renseignements
dans les ouvrages de ce prélat et nous allons rendre compte de ce que
nous y avons remarqué.
Pierre d'Ailly avait écrit en premier lieu un traité de Ymagine mundi
qui fut terminé le 12 août lilO. 11 y parle du système du monde, des
cercles célestes, du soleil et de son année, des quatre éléments, de la
mesure du globe terrestre; il discute jusqu'à quel point la terre est
habitable, indique la situation respective des sept climats, des ante-
climats et des post-climats, signalant que les habitations s'étendent au
delà des climats et se prolongent à l'orient au delà de l'hémisphère
(cap. I — 13). Ensuite il donne une description étendue des trois par-
ties de l'habitable, dans laquelle il fait un dénombrement des régions
de l'Asie (cap. 15-32-37); des montagnes (c. 38), des promontoires
(p. 39), des îles (cap. 40-48), des mers et lacs (cap. 49-54) , des fleuves
(c. 55-59), et distingue les vents (cap. 60). Le fond de cette description
^433) Vérifiez ce que nou« observons, en conrrontant la sphère de (TAUly, avec la carte hydrogra-
phique portugaise de 4500, qui est dans notre aUas.
PIERRE b'aILLY, 15S« 75
esl lire dlsidor de Siville, mais ampli Qé par l'érudition ou les additions
nouvelles et des explications modernes.
A ce traité de imagine mundi , il rattache Vepilogus mappae mundi,
D'Âilly déclare qu'à la suite de son exposition écrite, il est convenable
de dresser à la vue un tableau, une figure qu'on appelle ordinairement
mappa mundi. Qu'en effet il essaya de l'exécuter , guidé par les climats
astronomiques , et pour l'éclaircir , il résume dans une espèce d'épilo-*
gue ce qu'il a dit tout au long dans son traité de imagine mundi (ts^).
Or, cette figure, cette mappemonde, c'est celle qui nous préoccupe.
Elle répond exactement à ce qu'il est dit dans les traités de imagine.
Les Iperborei, Arimaspi, Rullieni, Francia, Cumania, Georgia , Ësperi-
des et différentes expressions s'y retrouvent; les séparations de climats
se conforment exactement au traité de imagine mundi. Il ne reste aucun
doute qu'elle a été faite à la suite des traités sus-mention nés en 1 ilO.
Les traités n'offrent rien de contraire, mais le traité de imagine mundi
redresse par son contenu l'image climatisée du dessin ; il redresse les
cartes des cosmographes précédents, les cartes nautiques. Toute la
description géographique du traité de imagine mundi vient de la même
source que la notice de la mappemonde de Sanuto. La même nature,
la même suite de notions anciennes et modernes, succinctement
extraites par Sanuto, rendue plus amplement par d'Ailly; des passages
verbalement les mêmes, ainsi que la source de la description remonte
vers le xui* siècle (iss).
Tractatus de imagine mundi présente une érudition conforme h cette
époque plus réculée. La bible, les pères de l'église, surtout Jérôme et
rexaemeron d'Ambroise, jettent la lumière sur Pline, Sénèque, Solin,
Martien, Orose, Isidor; Aristote commenté par Averroes; quantité
d'écrivains arabes : Haly, Albategni, Alboumazar, Arzachel, Alfragan,
sont mis à contribution i)our expliquer les points astronomiques ou
astrologiques. Tout porte à croire que c'est par l'inspiration d'Alfra-
gan que d'Ailly soumit la carte des cosmographes à la règle des sept
climats.
D'Ailly connaissait les longitudes géograpliiqiies dont se servaient les
arabes (chap. 11) , mais il ne s'explique nulle part sur l'emploi de cette
longitude, ni dans le traité de imagine, ni dans son epilogus. Il accepte
la grandeur de 700 stades du degré, conformément à la relation de
Tauteur de la sphère approuvé par Ambroise ; mais il ne se déclare
point contre la grandeur de 56 ^/s de milles, connue par Alfragan et
plusieurs autres écrivains, certainement arabes.
Il est présumable que la configuration et composition de l'image du
monde donnée par d'Ailly, n'a rien de nouveau; qu'elle n'est que la
reproduction plus claire de ce que nous avons pu remarquer dans la
(I8i) Post tractatmn de ymaginc mundi, ut rcs ipsa, velut \a spccola clarins apparorct, ncc solum
ocoUsoordis, sed etiam corporis sensibili visione nota fieret, figurai», quac mappa mundi dici solet,
cam astroBomica climatum distinctionc, temptavi dcscribere. In qua, pro cius declarationc utilia
qnedam ttotavi. Que hic pro iUorum delectationc, qui brcvitale gaudent compendioso quodam
epylofo reoollîgere dîgaum duxi. (D'Ailly).
(iSS) Cette identité est surtout frappante là où la notice de Sanuto parle de la division et de la
nomeadatare moderne ; reproduite par d'Ally, cbap. 24, i7, etc., de imagine mundi. — Par exemple :
regDum Ge(»rgie faabet ab orientem magnum'moatem , vocatum Aibzor, ubi multc nationcs habitant
et vocantUT, mons et patria illa Alania. Voyez ci-dessus les notçs 32, 56 des chap. 120, 123.
II. 7
74 GëOGR. LàTINB, 1330-1410.
petite image de Cecco d*A$coli. G*est une copie de l*artificio de Hmagi •
nation de quidam cosmograpln (d'Âilly, compend. cosmogr. I, 27). Elle
met en évidence de quelle façon les connaissances arabes agirent sur
celles des cosmographes précédents.
Nous apprenons par les discussions de d*ÂiIly que les cosmograplies
précédents appellaient Syene le centre de rhémisphère de Tliabitable ,
nommé Arin chez les arabes. Ce n*était pas Syene de TEgypte, mais une
autre ville, qui est la ville Arin, Arym, située près du mont Malcus
sous réquinoxiale, à égale distance de 90° des deux pôles et des deux
derniers méridiens de Thabitable. D*Ailly se garde bien de douter de
Fexistence de la ville aussi symétriquement située : il en conclut plutôt
Terreur de ceux qui veulent expliquer un passage des psaumes en
s^eiTorçant à placer Jérusalem au centre du monde (ise). Cette remar-
que ne Ta pas empêché de laisser sur son image dessinée , Jérusalem
sous le méridien d'Arym ; il Tavait trouvée ainsi placée sur les cartes
des cosmographes qu*il copiait.
Examinant toute son érudition , on voit qu*il connaissait Ptolémée :
mais ce n*était ni un géographe , ni cosmographe : c'est Tastronome
renommé, Fauteur d'almagesta, de quadriparlita. Je n'ai pu trouver
dans le traité de imagine mundi et dans tous les traités de Tannée 1410,
aucune trace de la géographie de Ptolémée (i37).
456. Le laborieux d'Ailly , ayant terminé ses traités géographiques ,
composa dans la même année : tractatus de legibus et sectis contra
supersticiosos astronomes, qu'il termina la veille de Noél, le â4 décem-
bre 1410. Continuant ses travaux, il prépara un traité sur la nécessité
de corriger le calendrier. Nommé en 1411 cardinal, il le dédia à
Jean XXIII et Tadrcssa au concile : exhortatio ad consilium générale
super kalendarii correctionem (iss). Le concile de Trente ne se réunît
qu'en 1414. En attendant, d'Ailly composa le traité de vero cicio lunari,
suivant la doctrine des arabes, et un autre tout nouvel ouvrage géogra-
phique.
11 semble que, dans cet intervalle de temps, le cardinal d'AîIly fit
connaissance de la géographie de Ptolémée qui lui était inconnue anté-
rieurement. Il apprit son existence par une interprétation latine :
secundum Iranslalorem cosmographiœ Plolemei (compeudii cosmogr.
(436) Meridianus vero latus Indie, descendit a tropico capricorui et secat equinoxialem circulum
apud montem Malcum et regiones ei contermioas et transit per Syenem, que nunc Arym vocatar.
Nam in libro cursuum planetarum, dicitiir, quod duplex est Syene, una sub solstitio, alia sub
equinoxiali circulo, et hec est ciuitas Arym, quam ponunt mathemattci in medio habitationis sub
equinoxiali; et distat equaliter ab oriente'et occidcole, septentrione et meridie. Unde patet falsitas
coinsdam vulgaris opinionis, ponentis Hierusalem in medio terre, juxta illud psalmi : « operatus est
salutem in medio terre » qui a loçiuendo simpiiciter non est in medio terre habitabilis ut ostendant
ea que dicta sunt : sed est quasi in medio climatum (de imagine, cap. 45) Et sub eo (equinoctiale)
est Arym ciuitas, eque dtstans ab oriente et occidente, septentrione et meridie (de imagine, epilog.).
— Ascii : et hec gens secundum Plinium in India, Orestes dicuntur et Menodes et Symari, apud quos
est mous Halcus nomine (de imag. mundi, c. II). — Ces passages sont conforme à ce qu en disait
Roger Bacon (opus magus, p. 495), un siècle et demi antérieurement. (Voyez ci-dessus la note t du
chap. 404).
(437) Entre autres citations, on Ut dans son de imagine mundi [cap. 9] : Ptholomeus diuidit per 26
lineas equidistantes, per roinor Britania. — Dans la géographie de Ptolémée il n'y a que il cTequi-
distantes : c'est dans son almageste, que la il equidistans , traverse la petite Bretagne.
(438) Il dit dans sa dédicace : nuper beatissime pater, antequam vcstra apostolica sublimitas , me,
strvorum suorum infimum , in cardinalem sacri romani ccelesie nominaret, tractatolum de correo
tionc kalendarii composiieram.
PIERRE d'aILLY» 157. 75
cap. 2i infine). La traduction était accompagnée de 2$ cartes géogra-
phiques (i49). 11 se mit de suite à étudier cette nouvelle découverte et
en lit un abrégé à sa manière sous le litre de compendium cosmographiœ ,
lequel fut en effet rédigé en 1412 ou 1413, comme le démontre la suiie
de nos considérations.
Revenant pour ainsi dire à ses travaux, d*Âilly dit en tête de son
compendium, qu'il méditait depuis longtemps de composer un traité de
imagine mundi et sept autres où il se proposait de mettre en concor-
dance différentes opinions sur les vérités mathématiques (uo). En ter-
minant en Tannée 1414 ces traités, il rend grâce à Dieu , d'avoir enfin
terminé les huit articles, utilement compulsés, sur ce que les sages
avaient avancé (i4i). Ainsi 11 réunit tous ses traités en un corps com-
posé de la série successive de ses élucubrations. Le compendium cos-
mographiœ s'y trouve, comme suppléant le premier traité de ymagine
mundi, par conséquent composé plus tard, après 1410, et il forme, de
même que le premier , deux traités : le compendium cosmographiœ en
22 chapitres et son résumé en 5 chapitres (i4s).
Dans son compendium cosmographicum, d'Ailly se propose de recueil-
lir de la grande cosmographie de rexcellent Claude Ptolémée, en
abrégé , les longitudes et les latitudes des lieux plus renommés de
rhabitable : mais il ne se borne pas à la simple extraction et abrévia-
tion, il cherche à concilier ses anciennes connaissances avec celles de
la cosmographie et à en opérer la fusion.
157. Il a extrait 553 positions (I, chap. 2-11], en leur donnant un
ordre à la manière des arabes. Sous le rapport de Tiinportance géogra-
phique de ces lieux renommés, son choix ne se recommande pas
beaucoup: la plupart sont des noms obscurs, des milieux de montagnes
et de provinces. Trouvant 22 parallèles dans la cosmographie de Ptolé-
mée, il les réduit à 12, dont sept correspondeni aux sept climats et
passent par le milieu de chacun de ces climats; trois, à savoir, du
mont Barditi , de Raptum et Galtigara et de Besinga , se trouvent dans
les anté-climats; deux traversent dans les post-climats, la Bretagne et
nie Thyle. Il distribue les lieux renommes entre ees 12 parallèles et
c*est Tordre qu'il a donné à 355 positions choisies (i^s). Notons que ,
par cette opération, il substitua aux climats arabes les parallèles
(.189) D'après la table où il désigne le» cartes ,. il parait qiio l'Italie et la Grèce lut naB4j|Ma^c-Dt. — <
Le traducteur estaaus doute Jacq. Angclo qui acheva sa versinn en i40S. .
(440) De vmagine miindi et ejns aescriptiooe traclatum unuiii ^ et de concordante théologie H
astrologie, de concordantia etiam discordantium , Tarieque opiiia«tium circa mathematicam verlta-
tem, tractatus septcm, ex sapieutun scuteutiis, dudum uiilitcr componerc tcniptaui. Pro quorum
tamep elucidatione atqne snpplemeuto» et specialiter prioM tractatus. et octaui (secundi?), iuquibus
plurade devisione partibus orbis terre scripta sont : nunc, etiain hoc compendium superaddere
decreuimus (comp. cosmograph. cap. 0.
(iil) Huic operi finem imponontes, dee gratias agimus» quia 8 tractatus, satis utiles» ex sapicntum
dictis« ipso donante, eollegimus:i,de image mundi, 3, de epilogoejus; S, de correctione kalendaril^
A de vero cicio lunari ; 8 de legib et scctis contra supersiitiosos astronomes, et très ultimes (6, 7, 8)«
deconcordia vere astronomie cum theologica et hislorica Teritate. —Compendium cosmographie,
n'est que le supplementum du traite de imagine mundi.
(liS) L'édition primitive donne par erreur pour titre h ce résumé : tractatus viceaimus nonus
cosmographie ecmpendii. Il Taut lire probablement : vices unns nouus.
(443) sans compter quelques erreurs d'impression, on remarque dans la suite de la liste parallMce
des erreurs palpables qui ont échappe à l'attention de d'Ailly, par exemple médium sarmatie,
médium Taprobane , etc.
76 OÉOGR. LAnNBy 1530-UlO.
grecques; qu*îl soumit la description de Plolémée à la méthode arabe
et réunit les règles des deux méthodes.
Continuant de confronter et de comparer les données de Ptolémée
et des arabes , d'Âîlly trouve des conformités satisfaisantes. Il examine
plus au long (1, 19-21) les opinions de Pline et ses 12 parallèles qui
décèlent une haute connaissance géographique chez les anciens
grecs (144) ; il y aplanit les contradictions, s'évertue à établir les con-
cordances, soutenant toujours que rhabitable est plus spacieuse que ne
le présente le quart du globe; qu'elle s'étend vers Torient au delà, et la
cité Syenc-Anin> centre de Thémisphère y ne divise pas notre habitable
à moitié, par parties égales (145).
La grandeur du globe de la cosmographie de Ptolémée rengage à
reprendre cette question. En la comparant avec celle de Fauteur de la
sphère et d'Âlfragan (cosmogr. comp. II, 4), son esprit conciliateur
ne slnquiète point de leur différence. Dans les grandeurs de degrés
de 500 stades, de 700 stades et de 56 ^/s de mille, il ne voit que la dif-
férente grandeur de stades et de milles , qui varie comme la grandeur
de Faune.
D'Âilly expose les projections de Ptolémée pour le dessin des cartes
in piano (comp. cosmog. 1, 17; IL 1); fait connaître celle qui trace les
parallèles et les méridiens courbes (II, 1) et compare Fautre conique,
avec la méthode dont il s'est servi , imitant les quidam des cosmogra-
phes précédents (I, 17). Il préfère garder son ancienne méthode et
recommande d'y tracer les méridiens arcuales de 15 en 15 degrés; la
ligne droite du méridien central passera par Ârim; il recommande dé-
noter le chiffre de la longitude le long de l'équinoxiale (1, 17, 18), (i46).
HH) Ce chapitre remarquable de Pline VI {Zi) 39, m'a senri de base dans la reconstruction de la
carte grecque an temps des ccsares (recherches géogr. UI, 113-123).
(145) Unde apparct, quod maior est longitude terre versus oriens, quam ponat Ptholomens. Nam
mcridianum latus in die descendit a tropico capricomi et secat equinoctialem apud montem Malum
et transit per Syenem qui nunc Arim dicitur. Mam duplex est Syene, una sub solsUtio, de qua supra,
alia sub equinoxiali, que est Arim, et bec, secundnm mathematicos est in mcdio terre habitabilis,
Mib Cfjninoxiali distans 90 gradibns ab occidente et secundum cos, totidem ab oriente, et a septen-
trionc et racridie , et loquuntnr de habilatione eis nota : sed expertum est, quod Arim non distat ab
oriente 90 gradus tantum , sed magis elongatur, proptcr hoc qnod longitude habitabilis major est
quam roedietas terre et hoc nsque ad orientera (comp. cosmogr. I, 49; répétition de ce qu'il dit de
iroag. mundi, cap. 15, et epilog.; voyez la note précédente 130). Cette assertion avait été avancée
cent cinquante ans auparavant par Roger Bacon, qni, per experientiam itincris et navigationis apud
Plinium et alios naturales (opus majus , p. 195), admottait une extention de l'habitable plus considé-
rable à l'orient. La terra incognita et la carte de Ptolémée vient confirmer cette assertion, et ouvre
l'autre hémisphère aux voyageurs modernes dont les itinera et les nauigations furent négligées par
les cosroographes.
(Ii6) Ilis ita premissis, nostre habitabilis situm ac generalcm descriptionem quam brevius in piano
fierî potest, etiam cum annotatione septem climatum, designare proposuimus : non tamen omnino,
modum, quam Ptbolomeus docuit insequentes. Nam ad banc fignram describendam et ad figurandam
ciaitates famosas in suis locis per distantiam earum ab eqninoxiali, que vocatur latitude civitatis vel
regionis; et per distantiam cius ab occidente in orientera , que longitude regionis dicitur : quidam
cosmographi, utunturartificio, que, locns ciuitatis babetur perdistantiam a meridie in scptentrionem
et ab oriente in occidentcm, et hoc artificium consistit in concursu linee recte equidistantls eqni-
noxiali , signale in piano secundum formam linee recte a numéro graduum latitudinis regionum
signato in quarto coluri, ducta ab equiuoxiali usque ad polum mnndi : in concursu inquam cum arcu
cireuli magni, qni transit per polos mnndi et per numerum longitudinis ciuitatum , signatum in
equinoxiali circule. Uic antem modus mclior est et facilior, et suflicit considerationi locorum mundi
in hnjusmodi significatione scnsibili. Differt antem hic modus describcndi habitabilcm, a modo quo
Ptbolomeus in sua cosmographia utitur : quia iste modus , désignât parallèles per rcctas lineas et
meridianos per lineas arcuales, utpatct in ngnra subscripta : ille vcro e contra Considerandum
quoque est quod secundum banc ngnram, doscribcndo latitudinem secundum gradus coluii circu-
laris, fiunt spacia climatum latiora, quam ad describendum latitudinem secundum gradus roeridiani
recti linei. Ideo, hec figura congruit mcchanice rationi. Omnis tamen difllcultas que coutingit
dcscribendo habitabilcm in piano, excluderetur dcscribcndo cam in spcrico (comp. cosmog. 1, 17).
PIERRE d'aILLY, 158. 77
IhiDS son traité de imagine mundi il négligea de s'occuper tant de méri-
diens que d'échelle.
D'Ailly nous avertit qu'il a'^dessiné une figure donnant figuram orbis,
munie de Téchelle équinoxiale, de méridiens placés à chaque IS*"' degré,
de parallèles tracées par le milieu des climats, par Tyle, par Barditi
(compendii cosmogr. 1, 18) (147). Or, la Hgure que nous avons devant
nous, n'est pas celle-ci. Elle ne répond pas h la description, aux
exigences de compendium cosmographisc. Les Ipcrborei, Arimphi,
Rutheni, Fransia, Cu mania, Georgia, Esperides et dllférentcs expres-
sions de notre image, ne se trouvent nulle part dans le compendium
cosmographiae ; elle est privée de Tyle, de Barditi, privée de méridiens
arcuales, de 4 heures, de Téchellc de i5 degrés, et des douze
parallèles. Nous n'avons pas de figure de la mappemonde, dessinée
en 14>i3, conformément aux renseignements et positions puisés de la
récente connaissance de la géographie de Plolémée. 11 serait curieux
pour nous de savoir Fopinion du cardinal sur la difformité ploléméenne
de la configuration des pays et comment il la conciliait, dans son ima-
r 'nation, avec les mappemondes des cosmographes. Il ne s'explique pas
cet ^rd et garde un silence profond.
158. Après avoir achevé ses compendia cosmographie , d'Ailly
s'adonne entièrement à Tastrologie historique , dont les trois traités
forment un ensemble. Le premier , vigintiloquium de concordise astro-
nomie veritatis cum theologia, divisé en viginti verba (chapitres) fut
achevé à Cologne dans Tannée 1414; le second, de concordia astrono-
mie» veritatis et narralionis historicse, fut terminé à Bâles, le 10 mai
de la même année 1414 ; le troisième, elucidarius astronomic% concor-
diae, cum theologia et historica veritate, suivit de près comme huitième
traité utilement composé sur ce que dirent les sages, exécutés suivant
le plan conçu d'avance par fauteur (us). Au nombre de ces huit traités
les compendia cosmographie ne se comptent pas : ils avaient été conçus
et exécutés après coup comme supplément au traité de imagine mundi
et achevés en 1415, avant que les trois derniers astrologiques fussent
élaborés.
La même année encore, 1414,d'Ailly prépara, le 26 septembre et le 5
octobre deux apologeticœ defensiones asironomice veritatis. 11 écrivit
encore : de concordia discordantium astronomorum. C'est tout ce qu'on
(447) D*Àilly (corou. cosmogr. I. 18), donne la description de sa figure. Equinoxialis eius
diaisiooes, sunt graaus lougiludinis regionura. Duo arcus diuidunt equiuoxialein in très partes,
qnamm qualibet uiciti horas eqninoctialcs, et sic per sîmiles arcus posset subdiuidi equiuoxialis
ita, ntquilibet ISgradibus corresponduret una liora equinoctiulis... l'urallelosautcni eonsignabinius
in figura... et nota, qnod sicut parallelus transiens per Tylem iusulain, versus septeutrionem et
parallelns transiens per montem Barditi versus austrum , terminant latitudinera uostrc habitabilis :
ita, medietas colari versus oriens per metropolim Sinarum... etc. Quia vero loca premissa, a quibus
denominantur septem climata, famosa aliqua, quac priucipaliler notauerunl Alfragauus et ejus
sequaoes, iion tenent précise médium dictorum climatum, ideo, pro maiori cerlitudine in bac figura,
^gnabimiis parallelos dictorum eliniatnm sub gradibus lalitudinis, qui ferc tenent, dictorum
cnmatam média (compend. cosmogr. I, i8).
(148) L'édition primitive place à la suite du compendium, huit tableaux cosmc^raphiques, au
Dombre desquels se trouve aussi la mappmondc. Tous ces tableaux y compris la mappemonde,
fnrent préparés à Tusage du traité de imagine mundi. Comme les compendia sont des suppléments
de ce traité, tons les tableaux cosmographiques se trouvent bien à leur suite : à Texception de la
mappemoiide. Celle qui a été faite expressément pour les compendia n'y étant pas ; ccUc qui s'y
trouve doit 6tre renvoyée exclusivement au traité de imagine mundi.
78 GÉOGR. LATINE, 1330-1410.
connait de cet homme savant qui nous fournit une immense lumière
sur rélat des connaissances géographiques à son époque.
Ce qu'il révèle, présage pour la géographie une nouvelle marche,
une nouvelle direction. Il y avait des quidam, qui rêvaient les longitu-
des et latitudes, le mode de projection sur le plan. Les descriptions des
arabes et leurs climats inspirent leurs pensées, couvrent certaines car-
tes nautiques des cosniographes de l'élément mal assis et peu goûté. Eu
attendant, de plus graves irruptions dans le domaine de la géographie
commencent à clore une direction transformatrice. Elle germe dans la
renaissance des lettres; elle introduit dans la composition des cartes
des éléments hétérogènes, substitue d'autres bases dans leur construc-
tion, propose d'autres formes, provoque à prendre de nouvelles pré-
cautions dans l'appréciation des monuments géographiques suivants.
Des monuments d'une autre nature éclosent et forment une autre suite.
Désormais il faut classer les monuments en deux suites : ceux dus
aux études des cosniographes et ceux qui revêtent des formes ptolé-
méennes, et sans l'avoir vue, on ne saurait dire à quelle suite appartient
la carte.
La nouvelle création et façon, dénoncée en 1415, par l'essai de
d'Âilly trouve de nombreux prosélytes et se répand bientôt par la
fravure en bois ou en métal ; l'ancienne reste ensevelie dans le dessin,
•a pratique du dessin et de la composition , dirigée par la rose des vents,
ne discontinua guère de dresser les caries nautiques. Ce furent les
péninsules qui continuèrent cette composition ; la péninsule pyrénéenne
plus longtemps que l'Italie.
Portugais, surrE des cartes 1410>i4G0.
159. Une nouvelle école , une nouvelle fabrique de cartes devait à
son tour acquérir une réputation spéciale. La poursuile jusqu'en Afri-
que des infidèles, vaincus et expulsés, entraîna les Portugais dans les
eaux plus éloignées de l'océan. Le goût des découvertes s'empara de
leur esprit. Longtemps, une prise de possession, des colonnes plantées
au nom du roi du Portugal, la colonisation quelquefois immédiate,
furent, pour les navigateurs portugais, des découvertes iinporlantes
qui étaient connues antérieurement par d'autres navigateurs. Plus tard,
les navigateurs coururent plus loin et firent des découvertes réelles et
immenses qui leur acquirent une gloire impérissable.
Une prise de possession , l'érection d'un castel ou d'un magasin de
commerce, n'avaient encore aucune consistance, aucune stabilité dans
les parties océaniques. La navigation se bornait plutôt à des excursions
commerciales, à la piraterie, en annotant les accidents de tempête de
ceux qui s'aventuraient dans les hautes mers.
A Lisbooe , vers 1150, une rue portait le nom des Magrourin , qui
s'embarquèrent jadis pour explorer l'océan occidental. Tout ce qu'ils y
virent n'était ni merveilleux ni incroyable. Us n'abordaient qu'à des
îles; d'abord ils virent les moutons, ensuite les insulaires, parmi les-
quels se trouvait un interprète arabe. Arrêté par les insulaires, il furent,
les yeux bandés, conduit et jeté sur les rivages de l'Afrique près d'Asli.
(Edrisi, IV, f , p. 27). Les arabes et les maures visitaient probablement
NAVIGATION, i59. 79
CCS lies; à Lisbone, après leur relraiic, devait rester une tradition
obscure de leurs courses.
On répéta longtemps, qu'en i570 la tempête surprit un Grec et le
porta sur Tile de S. Michel, où il conçut d'abord et abandonna ensuite
le projet de se coloniser (u9). L'infortune de l'Anglais Uobcrt O'Macbin
qui péril vers le même temps (avant i577) sur l'île de Legname (Madère)
était bien connue (tso). La tempête poussa le biscaien Martin Ruiz
d'Avendano (en 1577 ou 1582) sur Lancerolo, où il fut gracieusement
traité par les insulaires; la tempête jeta eu i58â, un autre biscaien
Ferdinand comte d'Uréna , sur File Gomera ; de même l'équipage de
François Lopez fut jeté sur la grande Canaric, où, après sept années de
séjour, ils furent massacrés par les indigènes (isi).
Mais l'hospitalière Lanceloto fut dépeuplée par des Espagnols et
autres corsaires, qui y prirent maintes fois et menèrent en esclavage
les gens (iss). Eu 1595 les vaisseaux équipés à Séville par une associa-
tion formée (en 1590) sous le patronage du roi de Castiilc, et à la tête
de laquelle se trouvait Gonzales Peraza, s'abattirent sur Lanceloto, la
pillèrent et enlevèrent le chef du pays avec sa femme, et 170 de leurs
sujets (iss). De semblables descentes s'étendaient jus(|u'à l'île de
Fer (i«4).
Au reste, les communications avec les Canaries étaient assez suivies :
au mois d'octobre 1402, les nefs espagnoles, commandées par Francisco
Calvo et Fernando Ordonez, venaient traiter aux Canaries (155) : les
navirs d'Espaigne ou d'ailleurs ont accoutumé venir et frecantcr en ces
marches (de l'Afrique) (isg) : et au delà de Bugeder, jusqu'au fleuve de
l'Or (i«7).
Si les communications dieppoises avec l'Afrique, qui offrent tant de
succès et tant d'incertitudes, comme nous l'avons vu, s'étaient ralenties,
de nouveaux projets paraissent s'emparer de l'esprit d'autres Normands,
à la suite de quoi un de leurs barons, Jean de Bethencourt, partit de la
Rochelle le 1^' mai de li02, pour venir es parties de Canare, pour
veoar et visiter tout le pais , en espérance de conquérir les illes et mes-
très les gens à la foy cretienne. Avec un équipage fortement diminué
par sa mauvaise disposition , ayant à bord pour truchemen quelques
Canariens qui se trouvèrent en France, il reprit sa route de Cadix par
(149) Cordcyro, historia insulata, V, p. 427.
(iSO) Robert O'Machio 8*était embarqué à Bristol pour passer co France avec une jeune lady qu'il
avait enlevée : une tempête les poussa a Madire ; là, O'Machin perdit sa maîtresse et en mourut de
chagrin quelques jours après ; ses compagnons ayant repris la mer, abordèrent en Afrique, où,
devenus esclaves des Haures, ils eurent pour compagnon de captivité le pilote sevtUan Jean de
Morales qui, plus tard, devint le guide du portugais Jean Gonçalcs : comme le relate ^epanaphoras
de varia historia portugueza, p. 278) Franciso Manuel descendant du môme Gonçales suivant la rela-
tion de aoD compagnon Francisco Alcaforado. Le nom de Machin s'est perpétué dans Machico, ville
de Madère.
(151} Joseph de Viera y Clavijo, noticias de la historia gênerai de las islas de Canaria, lU, 22, 23,
40; Glass, history of the Canary islands, 2, 6.
(152) Conqncste des Canaries (ouvrage composé par les aumôniers de Bcthencours), chap. 71.
{l53) Viera, noticias, m, 25, IV, 11 ; Glass, 1.
(154) Conqueste des Canaris, G5.
n55J Conqueste des Canaries, 9, 11, 25.
(4561 Conqueste des Canaries , 34.
(157) L'en ne compte du cap de Bugedor jusquez au fleuve de TOr, que cent et chinquantc lieus
françaises, et ainsi Ta monstre la carte; ce n'est singlure que pour trois jours pour naves et pour
barges (car galées qui vont terre a terre prennent plus lonc chemin], et quant pour y alcr d'ioy
(de Canare), nous n'en tenons pas grant compte. Conquestes des Canaries» 58.
80 GÉOGR. LATINE, 1530-1410.
la haute mer pour venir en droilurc aux Canaries et arriva à File Gra-
ciosa, ensuite descendit à Lancelote au mois de juillet (iss).
Beihencourt et son compagnon , le chevalier Gadiffer de la Salle ,
trouvèrent à Lanceloto, ung viel chastel que Lancelot Maloescl avait
jadiz fait faire, selon ce que Ten dit (iso); ils ont trouvé le testament
de 1^ massacrés de Tequipage de Lopez dans la grande Canarie (leo);
ils ont remarqué que la carte dont ils se servaient, donnait une propor-
tion trop grande à Ffle de Palma (i6i); et toutes isles Canariennes il
ont veues et visitées, et aussi ont-il toute la costière des Mores et du
destroit de Ma roch en venant vers les isles; et Bethencourt dit ainsi :
que se aucun noble prince de royaulme de France ou d'ailleurs
vouloient entreprendre aucune grant conqueste par deçà , qui seroit
une chose bien fesable et bien resounable, ilz le pouvoienl faire a pou
de Trais , car Portugal et Espaigne et Aragon les fourniroient pour leur
argent de toutcz vitailles et de navire plus que nul autre pais, et auxi
de pillots qui scevent les pors et les contrées (162).
Plus tard, au retour d'un voyage en France, Bethencourt voulut faire
une descente à la grande Canarie, et il partit de Fortaventure avec
trois navires le 6 octobre liOo (162). Fortune vint dessur la mer, que
les barges furent départies et vindrent toulz trois près des terres sara-
sines bien près du port de Bugedcr (au sud du cap) , et la descendit
monseigneur de Bethencourt et ses gent, et furent bien huit lieus
dedans le pais et prindrent hommes et femmes, qu'ilz amenèrent avec
eulx, et plus de trois mille chamyaulx; mais ilz ne les purent recueil-
lir au navire, et en tuèrent et jarerent, et puis s'en retournèrent a la
grant Canarie. Cette expédition est rappelée dans le récit de Taudience
que le pape Innocent Vil donna quelques mois après à Bethencourt ,
qui venait lui demander un évéque pour les Canaries : ainsi que j'en-
tens, le pais de terre-ferme n'est pas loing d'yla : le pais de Guynee et
le pais de Barbarie ne sont pas a plus de douze leues; encore me
rescripl le roy d'Espaigne que vous aves este dedens le dit pais de
Guynée bien dix lieues et que vous aves tué et amené des Sarazins
d'icellui pais (164).
160. Les Portugais étaient dans une guerre presque continuelle avec
ces Sarrasins : mais ils ne combattaient qu'avec leurs plus proches
voisins. Dans une expédition dirigée contre eux en 1415, Sebthah fut
prise. Henri (né 1504) un des iils du roi Jean,s'informant de l'intérieur
du pays, résolut la conquête de la Guinée. Chaque année il envoya
deux ou trois navires. Ces navires côtoyant le rivage occidental de
(168) Conq. des Canar. i-43. Les interprètos sont nommés : Alfons et femme Yezabel, ibid. 21,
30, 31, 78,84.
(iS9) Conqueste des Canaries, 32, 33.
il60) Conqueste des Canar. -10.
IGl) Conqueste des Canar. 66.
162) Conqueste des Canar. 53.
(163) A Fortaventure existe la ville du nom de Betaneouria : souvenir du ces expéditions
normandes.
(164) Conqueste des Canaries, chap. 82, 89. — Celte relation est composée, comme nous Pavons
mentionné, par les aumôniers de Bethencourt. — Tout ce que nous disons de ces investigations et
découvertes océaniques, nous l'extrayons de l'excellente notice de D'Avezac (Paris, in-8*,184r>). Cette
notice élucidant des questions embrouillées, est en môme temps l'ouvrage de la polémique fatigante
de la priorité des découvertes.
NAVIG ATI yV t i60. 8i
r\frîque parvinrent à dépasser le cap Noun, qu'on croyait le
dernier terme de la navigation espagnole, et arrivèrent jusqu'au cap
Bojador : et tous s'arrêtaient là sans que personne osât se risquer à le
doubler (ics).
Jean Gonçalves Zarco et Tristan Vaz Teixeyra, résolurent de fran-
chir cet obstacle. Mais assaillis par la tenipéte et les vents contraires,
leur petit navire fut emporté au caprice des flots de Tocéan. L'esprit
troublé par la frayeur, ils ne savaient en quel paraij(c ils se trouvaient ,
lorsque la bonne fortune les conduisit à une ile qu'ils appelèrent Porto
Sanlo (elle portait ce nom au moins depuis 50 ans). C'était en
l'année i4i9. L'année suivante i i20, don Henri les renvoya pour colo-
niser cette ile nouvelle. Parmi leur équipage se trouvait Francisco
Âlcaforado et un excellent pilote castillan de Séville, Jean de Morales ,
comme guide. Dans leur exploration ils aperçurent une taclie noire à
l'horizon. C'était l'île de Legname (de la haute futaie). Le guide en
donna l'information et raconta les malheureuses aventures d' O'Machin.
Grande fut la joie qui suivit cxîtte découverte. L'île reçut le nom de
Màdeira (de haute futaie, de bois de construction), à cause des forêts
épaisses dont elle était couverte (lec). On se mit de suite à la coloniser,
à y planter la canne à sucre, des vignobles (ic?).
La marine portugaise, bien que puissante pour combattre les Sarra-
zins, se montre encore assez timide pour la navigation. Les Poçana de
Gènes avec leur état-n)ajor génois, dirigeaient depuis cent ans l'ami-
rauté portugaise sans pouvoir vaincre les préjugés des mariniers portu-
gais; car les mariniers i>ortugais de ce temps n'étaient point accoutu-
més à voguer en pleine mer, toute leur science nautique se bornant à
un cabotage toujours en vue de terre (ics). Aussi la marine portugaise
ne cessait de se servir de pilotes étrangers (leo).
Diegode Séville, pilote du roi de Portugal, dr-œuviil en Tannée Ii27
les Iles Açores (i^o). La reconnaissance et la colonisation de ces îles se
suivirent de près et avec succès. Gonçalve Yelho Cabrai rencontra des
Formigas en li5i; File Sainte Marie fui découverte eu li5!2; peu à
(468) Mac os navios... nain dcscobrrram mais qac atû a cabo Bojador, ci aly paravam todos âcm
algum ousar de comcter a passagcm délie (JoiU de barros, Asia, drc. I, liv. 1, 11).
(166) Os bcrdeiros de Joain Gouçalvez teni escriptui-a miiy purtirulardestc dcscobrimento, guidait
la relation de Barros (decada I, liv. I, 5). Antese meliior que lodos, Francisco .Vlcaforado, escudeiro
do iefaDie d. Ucnriqiie, fez de lodo o successo buraa relaçuo, (juu oler e ceo ao mcsnio infante... Iium
de Baçao castelhana, natural de Seiillia, cujo nome eru Joau dr. Moral'^s h(>in<>m pralico iia arle
denavegar : ajoute Franciiico Manuel un desdesccuduntsde Joaiu Gouralvcs, (dans son epanaphoras
de varia liistoria portugue/a, p. 278, 3il).
(467) Navigazioui di Alvlse da Ca da Mosto, dans Kiinuiiio, 1. 1, p. 106; Pcritsol, itineramuudi,
cap. 16, il.
(i68) E como os mariAhciros na quelle tempo uam eram rostumndos a se engolfar tanto no peguo
do mar, et toda sua navegaçain era per singraduras senipre a vista de terri. . (Harros.dec. I, lih. 1,11).
(169) Castillans, génois, florentins, s'empressent à rendre ce service au Portugal : ils n'étaient
point aussi zélés, pour seconder les Normands.
(170) Aqnestas illes foran trobades per Diego de Sivilla pclot del rcy de Portogall an Tayn
Mccccxxvu. Rcsiate la carte catalane de Gabriel de Valisccqua datée de 145'J (I)'Avi>zac, notice des-
découvertes dans l'océan atlantique, cbap. 5. 31, oi), donnant à ses îles les noms tout diirérenlsde
ceux qu'avait antérieurement connus l'école catalane. Ces noms antérieurs furent communiqués par
recelé italienne ; ceux do Vallsecqua sont certainement donnés d'après la relation portugaise de
Diego, qui essaya de changer les dénominations : sa proposition n'a pas eu de succès. Los dénomina«^
fions proposées sont les suivantes : ylla de Osels (S. Marie), ylla de Fruydols (S. Michel), ylla de
linfierao (Torcèrc) , Quadrila (S. Georges) , illa de Sparla (Pico) , plus un nom ciïacé. Je ne sais
si j*ai bien établi ce collationnemcnt. (D'Avezac , notice, S, p. 32).
11. 8
82 GÉOGR. LATINE t iii0-li70.
peu les autres furent occupées et colonisées (i7i). Le $;énie de Tinfant
Henri a bien compris, que par des colonisations il utilisait les décou-
vertes et donnait une consistance à la navigation de son pays. En même
temps, en 1428, il acquit des Français, conduits par Bethencour, en
échange de certains domaines à Madère, les droits aux Canaries {^^^)f
auxquelles ils renonçaient, ne pouvant poursuivre leurs entreprises
éloignées, à cause des malheurs de leur pays.
En attendant, le cap Bojador résistait aux caboteurs portugais. L*ac-
tion était au fond peu de chose en soi; mais elle fut réputée grande,
tant il fallait de hardiesse pour surmonter les frayeurs invétérées.
Après douze années d'efforts inutiles, Finfant envoya en 1433 son
écuyer Gfl Eannes : celui-ci n'avait pas de courage.' Envoyé pour la
seconde fois Tannée suivante (1431), il accomplit sa tâche, doubla le
cap en tournoyant son récif. Linfant ût alors armer un second bâti-
ment dans lequel il envoya son échanson Alfonso Gonçalves Baldaya ,
conduit par Gil Eannes; tous deux dépassèrent cette fols le cap de
cinquante lieues (113).
L'infant chargea encore Baldaya d'une nouvelle expédition : et dans
ce voyage on alla à 70 et jusqu'à 120 lieues du cap, où l'on trouva une
embouchure comme celle d'un grand fleuve, s'enfonçant de 8 lieues
dans la terre. Poursuivant sa route jusqu'à 50 lieues plus loin encore,
Baldaya arriva à une pointe formée par un rocher qui de loin ressem-
blait à une galère, ce qui a fait appeler désormais ce lieu le port de la
Galère, 0 porto da Gale : c'était en l'année 1430. Cette embouchure de
fleuve n'est autre que le rio do Ouro (it*).
161. L'infant Henri animant la navigation de son pays, comprit la
nécessité de l'instruction. Aussi établit-il, en 1415, une école nautique
au village maritime de Sagres (Tarcanabal, ou villa do infante) dans
l'Algarve. Il fit venir à grands frais, pour enseigner aux officiers portu-
gais l'art de la navigation, un majorquin, maître Jacq, homme très-
vsavant, tant dans l'art de la navigation qu'habile dans la fabrication
des cartes et des instruments (i'^s). La lumière de l'Italie y était appe-
lée aussi. Bien méritée par des connaissances créées à la suite d'une
longue pratique , elle allait apporter à la nouvelle école les idées
anciennes exhumées par la renaissance des lettres.
(171) L'iiistoire de la découverte des Açores est traitée par deux indigènes jésuites: Gaspard
Fructuoso (lié en I5j2 mort en 4591] saudades da terra, servirent de guide à l'autre Antonio
Cordeyro 'né 16iO, ), qui a publie en 1717 son liistoria insulana , das illias a Portugal sugeytas
no oceano occidental. — Joseph Frcire (sous le nom de Caudido Lusitano), vie de l'infant dom Uenri
(traduits en français parCournand) en donne une notice. — Martin Behaïm eu 4492 annota sur son
globe l'année 4431 date de la première découverte.
(172J Barros, dec. I, liv. I, 43; Viera, noticiasde Canaria V, 4S: Zurara, chronica deGuiné, 66.
(173) Gomez Eannes de Zurara, chronica do descobrimcnto e conquista de Guiné, 8-11. Fez o
iffanto armar buum barinel, no quai mandou Affonso Gonçalvez Baldaya, que era seu copiero, e assy
Gil Eannes com sua barcba, mandando que tornassem la outra vez; como de feito fezerom; e passa-
rom a allem do cabo cinquoenta legoas.
(474) Zurara, chron. de Guiné, 40. — Barros, dec. f. Ht. I, 8, prétend que le nom de rio do Ouro,
ne fut donné qu'en 444S : se pourrait-il, que les Portugais n'apprissent le nom du fleuve des autres
navigateurs, qu'en l'année 4442?
(175) Mandou vir da ilba de Malhorca hum mestre Jacome, bomem mui docto na arte de navegar,
que fazia cartas einstrumentos; o quai Ihe custon muils pelo trazer a este réyno pera insinar sua
sciencia aos officiaes portugucses daquelle mester (Barros, dec. I, liv. 1, 46).
CARTES NAUTIQUES» 161. 85
La fabrique de cartes ne manquait pas de préoccuper les Portugais.
Ils pouvaient vérifier à Taide de cartes espagnoles et italiennes jusqu'à
quel point les cosmographes précédents étaient familiarisés avec les
découvertes qui encourageaient leur esprit, et ils y recherchaient
des indications instructives, qui fussent à même de guider leur marche
successive ou de leur inspirer de nouveaux plans. A cet eifei les mappe-
mondes leur étaient plus utiles que les portulans de la médilerranée.
Pour rOrient éloigné et pour Tlnde les mappemondes espagnols don-
naient de nombreuses indications, mais les mappemondes italiennes
devaient ofi'rir des renseiguements plus abondants, plus directs.
Quand, à la suite de la fondation de Tacadémie de Sagrès, les Portu-
gais ramassèrent avec plus d'ardeur les cartes géographiques, la plupart
de ce qu'ils avaient acquis était de date plus ancienne. Jacq, en arrivant
de Majorque à Sagrès, apporta certainement une cane du dessin de la
composition antérieure. Dans le dépôt d'Âlcobaza on distinguait surtout
une carte qui été exécutée vers 1400 (iie). L'infant Pedro, frère aîné
de Henri, voyageant par l'Angleterre et la France à la terre sainte, et re-
tournant par l'Italie , s'arrêta à Rome et à Venise en 1128, d'où il
apporta une mappemonde. Elle était d'une grande autorité chez l'infant
Henri, qui la compulsait avec intérêt (i??). Le fait est que, connais-
sant différentes cartes, il engagea les Portugais à s'adresser à la fabrique
vénitienne, pour avoir une mappe plus parfaite.
Venise et Gênes pouvaient fournir plus facilement que toute autre
ville de l'Italie, des caries instructives. Leur navigaiion était puissante
et elle abondaient en cartographie. A Gênes, en 1417, la description des
cosmographes fut mise en concordance avec les marins : haec est vera
cosmographorum cum marino accordata dcsrriplio : quolUdic frivoUs
narrationibus injeclh 1417. La carte est grande, elle a à peu près trois
pieds de Paris; ses légendes sont latines; elle cite Ptolémée, sans
suivre son opinion, sans se servir de sa nomenclature (its). — A Gênes,
Baclario ou Bedrazio, genovèsc, Baplisla BedraziuSf ciuis lanuae,
composuil hoc, a, d, mille ccccxxxvi (1456) die iulH. Sa carte a 2 pieds
(176) Elle était remarquée par Tinfant don Fcrdiuand, à cause de la configuration do TAfriquc
GODformc h celle que lai ont donnée les découvertes postérieures. En 4 528 don Ferdinand (né 1S07,
mort 1537) montra cette carte à François de Sousa Tavares. Antoin Galvam (ne 1503, mort dans ua
liApital 1S57) Tapprit de la bouche de ce dernier ot le relata dans son Iraîado dos dcscubrimoutos ,
publié à Lisbonne eu 155S et 1731, traduit en anglais, corrigé par Hacluyt, inséré dans sa collection.
(177) Antoin Galvan relate cette acquisition dans son traité de découvertes. Ce quMl ajoute du cap
de bonne Espérance, du détroit de Magelan , n'est qu'une hallucination empruntée d'une misérable
conjecture. Quant aux côtes du dragon : elles figurent à leur nom sur d'autres cartes nidiis abimalion
(voyez les n** 8i, 94, de notre atlas). >
(178) Cette carte se trouve dans la bibl. du grand duc de Toscane h Florence. BaUbdli en a donné
nne description succincte : descrizione délia carta di grand duca di Toscana, che conservarsi nclla
palatina, rappresentante un planisfero di forma ellitica, appuntata uellc due estromità longitu-
dinaii. — Elle fut ft Gènes la propriété d'un particulier comme l'indiquent les armoiries : nelli angoli
esteriori sonovi discgnale due armi , che una sembra quella di Genova , essondovi nello scndo
dipinta una croce rossa in campo argenlo. L'altra arma, è un campo bianco cou sbarra a S(*arhi rossi
cbianclii, sulla qnale ]>08ano due oggetli, che sembrano due teste rosse. — Rddelli remarque
combien la carte est différente, contraire à Ptolémée et à Marin de Tyr : par conM>(|uent, il trouve
dans l'épigraphe baee est vera cosmographorum cum Marino accordata descripth, u-ne erreur d
corregerêi. l\ semble cependant que marinus de l'épigraphe, n'est pas Marin de Tyr, qui est introu-
vable dans la carte, laquelle n'allègue que Ptolémée : marinu» y est pilote. C'est la conconlance de
la mappemonde fcosmographorum) avec les portulans, avec la carte hydrographique (d'un marin) :
pnrgée de frivoles narrations , que chaque jour ajoute (voyez Zurla, disscrlationi, con appen-
dice, p. »97).
84 G&OGR. LATINE» 1410-1470.
de Paris et S*/t pouces de longiienr, 2 pieds de largeur (179). Ces
monuments existent el attendent Fexamen sérieux de leur construc-
tion.
Venise avait alors, par la composition et le dessin des cartes , une
renommée, sans aucune contestation bien méritée; d'autant plus solide
que la république et les particuliers ne cessaient d'explorer le monde.
ANTONIO Zeno, après son long séjour en Frîesland, de retour en 1405 à
Venise, y laissa un portulan des pays et des îles de la mer glaciale,
dressé par son frère Nicolo Zeno (iso) (voyez n" 95 de notre atlas).
Jacq GiROLDO copiait les caries à Venise : Jachobus de Ziroldis de
Veneliis me fecit, anno iiSG (isi).
Après de longues investigations des frères Zeni, Pierre Quirini,
en 1451, parcourant les mers septentrionales, reconnut la Finlundie;
après une tournée de 25 ans, Nicolo di Conlt retournait du fond de
rOrient rendre compte, 1449, au pape Eugène IV, de ce qu'il avait vu
et examiné dans Tlnde; un autre voyageur apportait la narration des
explorations des parages orientaux de l'Afrique et les conquêtes qu'un
roi d'Abissinie avait faites en 1430.
Les matériaux pour construire les cartes s'accumulaient à Venise.
Pte(ro Lorendano en 1444, composa un portolano et Tart de la naviga-
tion, où, après la description de la méditerranée et de l'océan il traita
de la navigation , des flottes , des armées navales et de leur exercice.
Alcune raxion de marineri de mi Ptero di Versi, composées en même
temps 1444, traitent la même matière. Après les notices astronomiques
et météorologiques à l'usage des marins, on y trouve décrites les posi-
tions et les dislances des ports en milles et lieues; le flux et le reflux
de la mer, les ports d'Espagne, de Flandre, des îles britanniques ; la
gabelle prescrite aux galères vénitiens; à quoi est attaché le règlement
de 1428, de la discipline et de l'approvisionnement de la galère du ca-
pitaine Andréa Mocenigo, et la raxion chiamada del marlologio per
navegar a mente (isa).
André Biangho 1456.
162. Les autoritésde la république, les commerçants, les marins, les
particuliers, se procuraient les copies des mappemondes et des portu-
lans, ainsi que les dessinateurs avaient beaucoup d'occupation. Parmi
les copistes et les bons dessinateurs de ce temps-là , on cite André
(i79) Cette carte est consonrée dans la bibl. de Parme; mentionnée par Paciaudi , in stia lettera
ioscrita anihe nel giornalc di Paidova , febr. 1806 ; par Zurla , snlla anticbe mappe idro geograpbicbe,
nota ad cap. 14 et ailleurs. — Sur cette carte de 4456 de Bedrazio, post insulas fortunatas, aliae
conspiciuntur insulae, rudi tamen et indocta circumscriptiooe redditae. Major, longum terrae
tractum « forma pêne rectangula représentât , cui inscribitur JntUUa. Attora, non brevi intervalle
dîstans cjusdem pêne figurae, sic annotatur : Saravagio. Hutc proxima adiacct insnia minor, falcata,
cum lemroate Tantnor. Tandem, pone Antilliam, postrema est quadrat% quasi formae, latere uno
paululum connexe, qnœ obscuro noc nomine doiiatur Royllo. Infra vero scriptom legilur : insulae
de nouo repertae (genlleraan's magazine, 1785, febr. p. 104, apud Ghillany, der Erdgiobus des Mart.
Bebaïm, note de la page 1 1}.
(180| Nous reviendrons sur la carte de Zeno au chap. Î07; voyez aussi Tavoladi navic. dans le 3»v.
(181) Cette carte se trouve enta possession dall' ab. Morelli (Car li, lettera sulla scoperia dell*
America; Zurla, sulle anticbe mappe, idro-geograpbiche, cap. 12).
(182] Zurla, sulla anticbe mappe idro-gcograpbichc , nota ad cap. 18; comparez la note ad cap. 28.
— Les règles des marins de Pierre di Versi', sont en possession dcU ab. Morelli.
\
A. BIAMCnO, 162.
85
BiANCHO, dont OQ coiinaft un atlas : Andréas Biancho de Veneeiis me
fecit 1456, composé de dix cartons : le premier représenle la rose des
vents accompagnée de marteloîo ou instruction de son usage (voyez
n** 86 de notre atlas), et voici ce qu'il eu dit :
Quesio fixe lo amaistramento de
nauegar per la raxon de marteloio,
como apar per questo londo e qua-
dro e per la toleta, per laquai po-
démo sauer chose chomôze la tole-
U\ a mente e sauer andar per ogna
parte de monde senca mexura esen-
ca scslo, choncosia che alguna per-
sona che uora far questa raxon e
lia luogo a sauer ben moltiplicar e
ben partir, amaistraniente del mar
si e per sauer ben nauegar e fisc
uuoi sauer la suma de marteloio
per quesio muodo quanto se auan-
ca per una quarta de uenlo, e
quanto, se alargo chosi per una
quarta, e per do, e per tre, e per
quarte, e se algun te domandase
per queste sume, se pol far tu te
raxon de nauegar, concossa clienni
non podema sauer la raxon chosi
a ponto ma nui soachasleremo ben
al a ueritade.
Anchora tenoso mostrar per to-
tal muodo foxe una naue che uol
andar per ponenle e nonde puol
andar. esi ua quarta una de solo in-
uer cl garbin mia cento e alarga
se mia uinti dal ponento, e auanca
nonanto oto ; e per do quarte se a-
larga mia trenla oto, e auanca
mia nonanta do; per tre quarte
se alarga mia ciuquanta cinque c
auanca mia étante tre; per quarto
quarte se alarga mia selanta un ,
e auanca mia setanta un; per cin-
que quarte alargo mia otanta tre, e
auanco mia ciuquanta cinque; per
sie quarte e alargo mia nonanta do,
e auanco mia trenta otlo ; per sete
quarte alargo mia nonanto do, e
auanca mia uinti ; per oto quarte e
Ceci fixe Finstruction de la navi-
gation par le problème de marte-
loio , comme il apparaît par ce
cercle et carré, et par la toleta, par
laquelle nous pouvons savoir aussi
connaître la toleta par-cœur, et
savoir aller par toutes les parties
du monde, sans échelle et sans com-
pas: attendu que quelconque per-
sonne qui voudrait faire ce pro-
blème dans tel lieu, sache bien
multiplier et bien diviser. L'iu-
struction delà mer ci est par savoir
bien naviguer et si on voulait sa-
voir la somme de marteloîo par ce
moyen, combien on avance par un
quart de vent, et combien on
alargue; aussi par un quart, etpar
deux, et par trois, etpar quatre. Et
si quelqu'un te demandait: parées
sommes peuvent-ils se faire tous
les problèmes de la navigation ?
attendu que nous ne pouvons savoir
le problème exactement, mais nous
nous approchons bien de la vérité*
Encore je liens do montrer par
quel moyen sillonne un navire qui
veut aller par ponenle, et ne peut
aller; et ci va un quart dessous
versgarbino 100 milles et s'alargue
20 milles de ponenle, et avance 98;
et par deuxième quart s'alargue 58
milles etavance 92 milles; par troi-
sième quart s'alargue 55 milles et
avance 83 milles ; par quatrième
quart s'alargue 71 milles ctavance
71 milles; par cinquième quart a-
largue 85 milles, ctavance 55 mil-
les; par sixième quart est alargo 92
milles et avance 58 milles; par
septième quart alargue 92 milles
et avance 20; par huitième quart
est alargo 100 milles et avance
mille nul, et finalement ci est : il
86 GÉOGR. LATlNEy 1410-1470.
alargo mîa ccnto, c auanco mia ne retourne. Ce qui est tracé en la ta-
suri, c pero xeloretorno. lo quai Icta de marteloïo, comme il parait
reschristo in latoleta demarteloio, par ses caselles et ses raies,
chomo a par per lo suo chaxelle al
essno righe.
Biancho donne ces chiffres en tableaux de la manière suivante :
I. Suma de marteloio per interder :
per una qta do uento a largo
mia 20, e auanco 98.
per 2 38, 92.
per 3 55, 83.
per 4 71, 71.
per 5 83, 55.
per 6 92, 38.
per 7 98, 20.
per 8 iOO, 000.
per questeraxonssepuolimauemare mohiplichar tantoquanlo pui uoUe.
II. Âuancar de retorno de mar- III. prima quarla de uento.
teloio.
per 1 quarta, sie 51 auanco 50 me alargo mia 2 auanco 9*1»
per 2 26 24 per 2 quarte sic 3^/5 d^jiz
per 3 18 15 per 3 5 */i2 S^/io
per 4 14 10 per 4 l^jio 7V<o
per 5 12 6*/« per 5 S'/^o 5Vi4
per 6 11 4 per 6 9 */s 3*/s
per 7 10 V» 2V40 per 7 9^8 2
per 8 8 000 per 8 * 10 000
per dexena de marteloio.
Nous avons répété ce que le carton de Biancho dit au sujet de marte-
loio, pour montrer que les rumbs des vents et leur loxodromie étaient
connus par la pratique des marins, et entraient dans la complication de
la composition laborieuse des cartes (183).
Les septs cartons suivants de Touvrage de Biancho, sont les cartes
spéciales qui représentent toute la partie occidentale du monde, savoir
TEurope etTÀfrique; un carton, le neuvième dans Tordre, offre une
mappemonde générale ; enfin le dixième, supplémentaire, offre la map-
pemonde graduée de Ptolémée , à projection conique et méridiens roc-
tilignes.
La mappemonde ou Timage de Thabitable, qui forme la neuvième
carte de Tatlas d*André Biancho, est dressée sur la rose de huit vents,
et offre le défaut d'orientation boussolique commun à toutes les cartes
(183) Ccstle quartier de réduction itourlz résolution des problômos de la navigation, dontritsa^çe
avec le progrès des counaissances mathématiques et astronomiques est devenu plus varié. Voyez
traité de navigation de Bezout 90-96, p. 63-69, de l'édition de de Rosscl , Paris 1814, et les autres
ouvrages de navigation. — Marteloïo, martelogio, mar-teloïo, toile, tissu , canevas, croisement de
mer; toile, tablette marine. Tela, toile, canevas ; telaïo, métier de tisserand , tisserie; de même lèlo,
trait , dard , toile. Cette origine de mar-teloïo désigne et explique Biancho, auand il dessine le
quartier, lo carre de la tolela. /
A. BIAMCIIO, iC3. 87
de répoque (isi). Son diamètre est de 9 pouces cldcux lignes. L'orient,
levante, avec le paradis sont en haut. Le centre se trouve au nord de
Syrie, non loii\,d'Antiochie, comme s*il était :\ Saniosate. La moitié mé-
ridionale est occupée par TAfrique, Fautre moitié se divise entre TÂsie
et TEurope : celle-là forme un quart de Thabitable, celte autre, avec
le vaste océan (atlantique) compose l'autre quart. Toute Thabitable est
pleine de peintures et de petites figures (voyez n^ 8i de notre atlas).
L'Europe n'offre rien de trop extraordinaire ; tout y est à sa place et
à Fexception de Tltalie, les épigraphes des états se suivent assez régu-
lièrement: Irlanda, Engellerra, rex Ispaneo e CastiUe, Paris, rex
Francoron, inperion Romania (Grec); inperiu /îomartoro (d'Allemagne) ;
Dada, Narvegia, Sueda, Rosie, Rosie imperio, Rosie magno , Casterina
(Kostroma), inperion Tarlaroron; Tanaï (Don), de tous les fleuves qui
sont tracés à travers les trois parties de Thabiiable, lui le seul est
nommé. Sous le rapport des fleuves, une chose étrange se présente dans
la configuration de l'Europe : c'est la sortie d'un même lac des fleuves:
le Danube, le Rhin, l'Elbe et la Dvina, qui sont innommés comme tous
les autres.
Au nord une bande portant une sorte de deux signes du zodiaque,
des jumeaux et de la vierge, sépare une portion du continent, inscrit :
in ae parle est masimu frigus, quia est sub tramonlana et nasilur omines
silueslres.
165. L'Asie et l'Afrique renferment plus de curiosités et de bizarre-
ries. L'Asie septentrionale avance par une péninsule jusqu'aux der-
nières extrémités de l'orient. Dans cette péninsule est Gog Magog chest
Alexandcr gie ne rocœn ecarteire, qu'Alexandre jadis dans des rochers
encarcera, de Iribus iudeoron; des tribus de juifs, et ces tribus juives
sont tantôt confondues avec Gog et Magog, tantôt deviennent l'objet
d*autres contes érudits (iss).
Commence la partie visitée par les Vénitiens, où l'on voit trois empires,
tons les trois représentés de la même façon : chaque empereur est
assisté à droite par une garde composée de trois figures, sorties des
tentes, à gauche d'un ministre debout près de la capitale. Le premier,
(IM) L'atlat de Biaocho est conservé dans la bibliothèque de S. Marc à Venise. Sa description ,
acocMnpagnée de trois cartes de l'atlas, a été donnée par Formaleoiii : saggio siilla nauticsi de Veue-
BîaBi, con una illustrazione d*alcunc carte idro-graGciic auticlie délia biblioluca di S. Marco,
Veaex. 1783. — Plos tard, Placido Zurla, sulla antiche roappe idro-geograficbe , 4818, cap. 15-i8,
f'occopa de la description ; Sprengel, geogr. Entdekungon, p. 2i4, et Malte-Brun , gcogr. cap. 3(i
édit. Haot, XIX, p. 5i8, en ont donné une courte notice, et Santarem reproduisit dans son atlas deux
fra^pnents des côtes atlantiques de l'Afrique et des îles. — Je ne puis me procurer l'ouvrage de
Foraialeoni pour mes études, mais j'ai réussi à me procurer les calques des cartes publiées. Mon ami
Alojse Niewiarowicz, dessinateur habile, les a exécutes au crayon. In bibliothèque de Paris ne lui
aynt pas permis de se servir de l'encre. Je serais heureux si ma vue réussirait à distinguer tous les
traits délicats et l'exactitude incontestable de son crayon. Je ne sais pas quelles explications a pu
donner Formaleoni aux épigraphes de la carte : je les essayerais moi-même , autant que je puis
déchiffrer récriture : sauf encore l'inhabile déchiffrement de Formaleoni , dont la légèreté transfor-
■nit bnrlesqaeraent maintes fois les épigraphes (D'Avezac, notice des découvertes dans l'océaD
atlauitiqae, p. 84, 36;. Voyez les notes précédentes, 94, 9o, iii, iSS.
(ISS) n est pfi^Kkble que la prononciation arabe de Jadjoudj, suggéra l'idée d'y voir les juifs ot
leors oit. trilws exilées. Provincia Gog in qua fuerunt Judaei inclusi, dit en USt la carte émaillée de
Bofigpîa-Venetri ; Judaei clansi figurent dans l'hydrographie portugaise de 1504; ils sont à côté de
Gog dans la carte de Ruysch 1507; ils se trouvent sur le globe de Schoner 1531, où (iog sont les
Tatars ; rhistoire de ces juifs , de ces Danites de dix tribus , est inscrite dans la carte de la Tartarie
Çnbliée en 4570, par Ortel, et de laquelle nous donnons un petit échantilloa dans notre atlas n* 137.
oyez la note précédente 1 1 6 du cfaap. 447.
88 GÉOGR. LATIXE, 1410-1470.
inperion Calai, et son lenplon chatai (sépulcre situé sur le mont ÂUai
dans la carie de Mauro); sa capilale est C/ia^aio (Cambalech). — L'autre,
ineprion de lerniax et sa capitale Samarcanle (Samarkand) : or, c'est
Zagalai. Il se dislingue des autres par les tentes qui ne sont pasouverles
et par le minisire qui parait être un moine capuchonné, indiquant
peut-élre la qualilc de chrétien de Tempereur, et nous sommes autorisé
à accuser Formaleoni de la mauvaise leçon : lerniax, étant inventé de
Tarssis, Terssiaz.— Enfm, inperion demedio id (idem?) eliscoc o balech,
où certainement se cache aussi une méprise dans la leçon. C'est Tem-
pire de Medeia, du roi Balec ou Eliscoc (lli gouldji sur Ui, Almalig).
Sa capilale est Curani (Kour, Khara-oussou , en chinois Soui tsching
fou, sur la rivière Kour ou Kouroungle sur la rivière Kaïdou gol NO.
de Lop). — Ensuite vient lenplon inperaloris Sirie (lombeau), hic fuit
inperiu Sirie (Saraï), qui existait encore, mais sapé par l'invasion
récente de Tanierlan.
L'Asie méridionale avance aussi par une péninsule vers les extrémités
orientales. Au bout de celte péninsule est silué paradixo lereslro, d'où
sorlenl les quatre fleuves bibliques; dans leur cours parallèle entre
ospilium macorii (Macarii? beali, yat^xpi^, hospice de bienheureux); et
les hommes, omincs que s (sine) capilelos? qui sont sans télés, le visage
sur leur poitrine; omines parc (ni) alboro se (ri) co? les hommes prépa-
rant des arbres la soie? — Ces fleuves entrent dans l'Inde, où le premier
se détache par le nord et se décharge (Oxus, Djihoun) dans la mer Cas-
pienne. Les trois autres après avoir traversé les trois Indes, se séparent ;
l'un se dirige vers le nord et va se perdre aussi dans la mer Caspienne
(Arax); l'autre (Eufrate), prolongeant son cours vers roccidenl, tourne
autour du centre de l'habitable et se jette (près d'Anliochie) dans la
mer méditerranée; le troisième (Tigris, Dekel, Didjiat) débouche dans
le golfe persique. Outre ces quatre fleuves, l'Asie esi encore arrosée par
le Volga.
Les trois Indes se suivent : India superior conlinelur Uni (54?) regione
el xxnn populi; India média contenilur xiin el xn populi; India minor;
et les villes Udera (Uderex', Aoude?) cniicio osigelus? Lagade.
Entre Djihoun et Arax, sont nommés : ùmedan (Multan? Mimand?),
Segena (Saganian), iVorf/oM (Orgenz), Agrica (Djordjan), A(/o(r (Astrabad),
Toris (Tauris), Zilan (Ghilan). — Entre Arax et Eufrate : Salonia (Sol-
lania), Slraua Saviachi (Samakha du Schirvan); porto de fero
(Derbenl); arca Noe (du mont Araral); Arzero (sur l'Eufrale, Arzan,
Erzerum); enfin dans l'Asie mineure Trabexenda (Trebizonde); inperip
Morali (empire Turk sous Amurat, Mourad II, 14.22-1451).
Baldaco (Bagdad), l'un sur l'Eufrale, l'autre Baldaco un peu éloigné.
Près de ce second est une étoile. Une autre étoile se trouve dessinée
sur les rivages de l'Afrique orientale. Ces étoiles figurent peut-être
réloiie des trois rois-mages, qui vinrent de l'orient (de l'Afrique) et
traversèrent Bagdad. Aussi sous l'étoile (de Baldaco) se trouve balismo
IhuXpi; et les trois mages, dont un agenouillé, se trouvent vis-à-vis de
la Sainte Vierge assise sous la porte de Jérusalem; au sud, déjà en
Afrique, l'église de beata Catarina de monte Sinai, Alleh (Ailath ou Elim),
Sarsia (Larsia? Larisse?), une montagne (Sinaï) el cielo elala montagna,
enfin Arabia, tous inscrits en Afrique. En Ajabie la Mecha (Mecca).
HAURO, iG4. 89
Entre FÂsic et l'Afrique on voit une multitude d'îles dont deux sont
nommées ixola di colonbi et ixola pertina (Taprobana).
La péninsule orientale de TAfrique (Vakvak des arabes) est occupée
par tnperto Basera. Ensuite vient inperin proie Joanis, où prend ses
premières sources le fleuve (Nil), et traverse Vinperiu Emibar (i86);
puis mouille les états de rex ethiop et près de Babclonia (Foslat) tourne
brusquement vers le nord : wldanus Babelenie, pour traverser Chairo
et se jeter dans la mer méditerranée. Mais de son flanc occidental se
forme un embranchement qui continue sa direction vers Toccident
ju^n^ànn lac(CtlaWû), duquel un bras tourne vers le sud, Tautrevers
le nord {Bagrada? ou Moulouîa?) pour se perdre dans la mer méditer-
ranée ; le troisième {CitarlU), se jette dans Fatlantique. A droite de cette
continuation du fleuve on lit: reœ de Tcrmixen (Tremecen de Nubie),
Tunes (Tunis), rex Belmarin (béni Marini ou Mournea, dont la dynastie
s'éteignit en 1585). A gauche du même fleuve on voit rex Maroco et une
épigraphe qui semble dire : hac parie suntomines abent uuUusenlos canis.
Les fies de Tocéan atlantique sont sans dénomination; leurs noms se
troBvent dans les caries spéciales; et les noms d'Anlillia de la man
satana^joio (S. Atanasio?) et de Scorafixa ou Stokafixa, pèche du stokflsch
ou de la merluche dans les mers septentrionales (ist).
Du vaste océan atlantique le vent pousse vers le sud de l'Afrique un
navire qui risciue de loucher le bas-fond qui forme au sud de TAfriquc
un golfe dans lequel sont peints deux dragons avec l'épigraphe : nidus
<i6ima2t(m ; évidemment conte arabe: et le nom du nid doit avoir sa
^lenr. l'espérais y retrouver quelque chose directement relatif aux
«^a.^ navigateurs. Mais roricntalisle versé s'y oppose, et glisse à
leur place le mot de*la malédiction ,.^^jJL>yt père maudit. H est
cependant bien de remarquer -qu'Abimalion pourrait avoir son origine
dans abismo profundidat sin termine, el infierno; abismal, lo que
pertenece al abismo (voyez dicciouario délia lengua casiellana por la
academia espanola).
L'image de l'habitable d'André Biancho appartient à ce système des
images et mappemondes qu'on voit reproduites dans les caries d'Istakhri
etd'IbnHaoukal, des anglo-saxons, du manuscrit de 1119, d'Edrisi 115i,
de Sanuto 1551, de Ranulf 1560, du manuscrit de 8te-Geneviève 1564,
dlbn al Ouardi 1549.
André Biancho vécut encore assez longtemps, puisque vingt-deux ans
plus tard, il était employé comme dessinateur par le camaldolèse Mauro.
•
Mâuro, 1459.
164. Parmi les compositeurs de cartes, le frère Mauro, camaldule
un couvent de saint Michel de Murano, avait acquis une haute réputation.
C'était un cosmographe instruit dans les sciences. La république
rappela en 1444, à la députation des experts pour régulariser le cours
de la Brenta. On a, des années 1445 et 1449, deux cartes chorographi-
(480) Serait il Moabar de Marco Polo, transporté de TFnde en Afrique? — De infime que Basera et
isoladidi Colombi, Icsôtats indiens Bassia et Colombo nommes dans l'Inde par la carte catalane.
(487) Voyez la note iti et notre portulan général i4.
II. 9
90 G^.OGR. LATINBy 1410-1470.
ques, aiitogra plies , signt^.cs : frater Maurus de Venetiis (iss). On sait,
par les dépenses faites pour Tor de Tendorure et pour différentes autres
couleurs, qu'en 4448 et 1449 il exécuta une mappemonde (i89). Les
matériaux qu'il avait à sa disposition, les cartes exactes : ptu jusla
car ta ho possudo; nuove carte quai ne ho habulo copia, quai hano vista
ad ochio; les renseignements orales : cussi hano opinaio, io ho parkUo
cum persona digrui de fede; les descriptions, le mirent en état de com-
poser de toutes nouvelles cartes, d'une toute nouvelle construction. Il
a fabriqué de cette manière quantité de cartes de TÂsie mineure, de
TArménie, de Mésopotamie, de Syrie et de beaucoup d'autres mieux
détaillées et coordonnées : io ho lassalo amplissimi disegni delule qtleste
parle, zoe, Armenia, Mesopolamia, Siria, Cappadocia, Cilicia, PamphUia,
Licia, Asia propria menor, Bilinia, Galacia, eluta le allre che si sow)
mejo distinte et ordinale (Mauro in suis epigr.).
Les Portugais continuant leurs explorations maritimes, ne cessaient
de rechercher les cartes géographiques. L'âge de l'infant Henri
n'avait pas affaibli son ardeur et il était secondé par son neveu le roi
Âlfonse Y. Il avait à son service des Italiens. Le génois Antoine Noli
dirigeait en 1450 la découverte des îles du cap Vert. Le vénitien
Aloysio de Cada Mosto en 1456, en compagnie de quelques génois ,
spécialement de Antoniotto Usodimare, arriva à l'embouchure de
Gambia, passa le cap Rosso et atteignit rio grande (i9o). Cette nouvelle
découverte donnait une extension à la donation que le Portugal venait
d'obtenir du pape Nicolas Y, par une bulle de janvier 1454, dans
laquelle, gratifiant l'infant Henri des découvertes qu'on avait faites
depuis 25 ans , le pape concède au Portugal toute la Guinée au-delà
des caps Bajador et Nun jusqu'à un certain grand fleuve, communé-
ment réputé Nil (Sénégal), jusqu'à lequel on était parvenu (io«). Cette
nouvelle découverte anima l'esprit du roi Alfonse Y, qui s'imagina que
les côtes au-delà du cap Yert, tournées vers sirocco, allaient le conduire
bientôt à l'Inde ; il crut qu'on avait passé dans cette direction la ligne
de Tunis et peut-être qu'on s'était avancé jusqu'à celle d'Alexandrie.
Il donna des noms aux rivières, golfes, caps et ports de la nouvelle
découverte, fit dresser une carte et l'envoya à Yenise à sou dessinateur
et compositeur de la mappemonde («9a).
(188) Dans les archives da monastère : Mittarelli et CostanJoni , ap. Zurla , di mappa mondo di fra
Mauro, num. -48.
(189) Troviano ne' libri di nostro monastero, non di rado notato il nome di fra Mauro, elespese per
colori, per oro battiito, ec. per forroar mappa mondi, comc ncl rcgistro num. 451 délie spese di d.
Nicolo économe, ncl 4448 fino Inglio, 1449 .... etc. Zurla, supra cit. nom. 48.
(190} Aloysio de Cada Mosto et llbro de la prima navigaziouc par occano a le terre de Negri de la
bassa Aethiopia, per commandamento del illustris signor infante don Heurich de Portugallo,
Vienne, 1507, in-4'; Navigazioni di Aloyze Cada Mosto, ap. Ramusio, t. I, p. IIS; Placido Zurla, di
BfarcoPolo e dcgii a allri viaggiatori vcncziani, dissertzioni. Venez. 1K18, t. II, p. 101-186.
(191) Ultcrius navigantes ad ostium cuisdam magni fluminis, Nili communiter reputati per-
venerunt (Zurla, dissert. t. II, p. 114).
(192) Moite opinion e leture (dit Mauro dans une des épigraphes), se trova che in le parte mcri-
dional l'aqua non circonda questo nostro habitabile e temperado zona : ma aldando moite testimo-
nianzc in contrario et maxime qucli i qnal la maiesta del re de Portogallo (Alfons V) ba mandate cum
Io suo caravele a zercar e vcder ad occhio i quai dire aver circuito le spiaze de garbin pin de 2000 mia
oltra el streto de Zibilter in tanto che a voler segiiir quel camin hano pervcnuto dar la proda quarta
d'ostro in ver sirocho, e per suo zudizio hano passato lidromo de Tunisto, e quasi son zonti aquel de
Alexandria, pertuto trovando bone spiaze, cum puoco fondo, e navegar assae oone sempre senza for-
tuna, e i diti hano fata nuove carte deauel navegar, e hano posto nomi nuovi, a fiumere, colfii, cavi,
porti , di quai ne ho babuto copia , unde sel se vora pertradir a questi i quai hano visto ad ocbto
(Zurla, il mappa mondo di fra Mauro» cap. S9).
MAUROy 16». 91
Cest le frère camaldule Mauro qui reçut la commission de dresser
celte mappemonde. Le malheureux doge François Foscarini, envisa-
geant le succès du voyage de Gada Mosto (1456), el voyant le plan et le
commencement de Touvrage de Mauro, présumait que Tinfant Henri y
trouverait de nouveaux arguments pour continuer ses entreprises (193).
Le roi Alfonse V n'épargnait pas des dépenses. Son or était à la dispo-
sition de Mauro qui payait les calligraphes à raison de 42 à 15 sous par
jour, il devait rémunérer ses collaborateurs, peintres et dessinateurs.
Mauro n'épargnait pas son travail pendant les années 1157, 1158, li59;
le dessinateur expérimenté André Biancho, fut appelé à la participa-
tion active de l'exécution; parmi les peintres est nommé Francesco de
Cherso. La mappemonde fut enfin achevée et expédiée, à la demande
du roi Alfonse V, par renlremise du noble vénitien Stefano Trevisau,
le 24 avril 1459(104).
165. Dans la même année 1450, le 20 octobre, les dessins, les écrits
ei une copie de la mappemonde de fra Mauro furent déposés et enfer-
més dans une caisse, et remis à Tabbé du couvent (los). Il faut en con-
clure que le frère Mauro était mort.
Le cosmographe Mauro, dix ans avant sa mort, avait élaboré une
mappemonde; il est probable que c'était celle qui fut enfermée dans
une caisse avec les autres dessins, et y resta jusqu'à 1464 sous la
garde de l'abbé MaiTeo Gcrardo. Mais le cosmograplie, élaborant une
mappemonde pour le roi Alfonse Y, préparait en même temps une
copie qui devait rester en sa possession et passer au monastère. Elle de-
vait rester sur le lieu , exposée à la vue des doges et des Vénitiens (loe).
(193) Montre che il dotto camaldolese preparava coUe sue fatichc, novi argomonti da conTerroare
rinfonie nella magnanima impresa, la promoveva coll' opcra Luigi da Mosto; (il quale cbbc il vanto
eziandio) d'cssere stato il primo, clie uc assicurasse la memoria cogli scritti. ^Foscarini, lettcr. voa.
ap. Zarla, rallc antidic mappe idro-gcogr. cap. Si}. Le dogu Foscarini Tut dépose et mourut i4S7.
(i94)Tontesccs particularités sootconnucs par les registres et les annotatious jourualières aulogra-
Shesde Tabbc du couvent Maffco Gerardo; il y dit : liS7, adi 8 Tebrer, la majeslad del ru du Portogal,
ie aver adi sopradicto, perche dom Benedetto Miani (cellcrario di monastero), me coiitad iu lioro
doc. S8 i quai souo lasad qui per nome del dicto scgnore per depoxito per supliro a ccrte spuxc le
qnal crano de bixogno fare per compir 1 opcra dul suo mapa mondi cl quai lavora fra Mauro. — 1457,
8 febrer, la majcstad del signer rc de Portugal die dar adi sopradicto, perche io ho dado a sier I.iu
Roao contadi in horo per suo nome per |)agar pcntori per lavorar el suo mapa muudi ; et pur altre
i^exein summa ducati 11. — 1457, adi il hoctubr, chc io ho dado coutad a frar Mauro per pagar
uno scriptor a lavorado over scripto su il mup raun<li zoroi 17, a raxon de seidi 12 al zorno, monta
lire 47, soldi'i, val a soldi iU per duc. — 1458, adi 7 hoctubr, contad a dom Francest^o de Cherso
per pagar un scriptor ol quai scripsc al dicto mapa muudi zorui 4, a soldi 14alzurui. — 145<J,8zeuer,
per nno scriptor soldi 15. — 1459, adi 17 (fubrur) dicto, coutad a dom Fraucesco de Ch(>.rso per far
eomprar a zuro per la dicta opéra val. 1. — i45U, adi 10 marzo, pur duc. 2 tolti in nui per messe pur
Bome de sier Andréa Biancho, ehc lui dovea havere per suo promio del lavorier lui fuce al dicto
mapa mundi val in chassa soldi 4. — 1459, adi 17 marzo, la niajestad del scgnore re de Portogal die
dare adi sopradicto per chassa chc io ho dato a dom Frauccsco da Cherso, chu frar Munro mundu a
domandare per certc spexc lui disse haver faute per el mapa mundi, duc. 3. — 1459, adi 24april,
che dom Nicholo nostro (économe del monastère] me a dicto, che essendo io a capitolo a camaldoli
e stato salda qucsta raxon a messer Stefano Trevixan per nome del dicto scgnore , quando pur el
dieio messer Stefano li fo mandate el suo mapa muudi (Maffeo Gerardo, ap. Zurta, il mapa mundo di
fra Mauro, cap. S3).
(19K) 4489, tO octubrio, memoria fato chôma le copie de mapa mondi, c de descgni, e scripture de
frar Mauro ho depoxitadeal monastier de missier san Zuane de la Zudecha in man del prior del dicto
monasticr zoc don Andréa, le quai s<-ripture cdisegni tutti, sono posti in una chassa over bancho c
aerradi con un luchetto la chiave del quai hc qui apprcsso de mi. Ho habuto tulo indrielo questo
deposîto,adi W octubrio 1464. (Maffco Gerardo, ap. Zurla, il mapa niuudo di fra Mauro, cap. 51).
^96) Questa opcra fatla a conteplaciun de qucsta illuslrissima signoria : dit une légendu de la
carte (Zorla, num 7). François Foscarini n'en a vu que le commencement ; sou successeur Pascal
Malipieri (1487>1460) l'a pu voir achevée ; ensuite Christophe Moro (1460-1471) put l'examiner étalée
et suspendue à la muraille.
93 OfoGS. LATOIB, f4IO-U70.
Cette copie étant înaclieTée aa moroeot de sa mon, elle B^entra pas dans
la caisse, mais oo continua à y traTailler et elle fit terminée en 1460,
adi 26 acoiio fo ehonplido queslo 2aror, comme le dit Tinscripticm d^nne
de ses corniches (197). Or, cette mappemonde ne fut pas scellée dans
une caisse, on la suspendit de suite tantôt dans révise tantôt dan» nne
cour, pendant un laps de temps de 195 années (1460+195=16^1.
Enfin en 1655, le 20 décembre, elle fut placée dans la bibliothèque (t9s).
Le diamètre de la carte , de Torient à Toccident surpasse de 7 lignes
les six pieds de Paris; celui du sud au nord ne remplit pas les six pieds
de Paris. Cette diCTérence résulte ou de Tiusuffisance de Texécution et
de rîmperfectien des instruments, ou plutôt elle est Tefiet de Faction
de plusieurs siècles, de Tair et du bâle du bois sur lequel est collé le
Télln parchemin : car la mappemonde de Thabitable défait offrir an
cercle régulier. Son centre est entre Chaldea et Babilonia sur le T%re
(Bagdad). Cependant HienuaUm e in mezu) de la terra kabiiabiie, se-
conda la kUUudine de la terra habitabUe, benche in ordine la longetudine
la sia piu occideniale : ma perche la parla piu occidental e piu kabitada
per VEuropa, per ko, le in mezo anchora seconda la longeÂudineznon eon-
sederando el spaio délia terra, ma la moUiludine di habitanti (199). Cest
Tai^mentation des cosmi^i^phes, pour soutenir leur thèse.
La mappemonde de Mauro est à la fois et Timage do monde, et un
Tolume de sa description. Il y traite la cosmographie, expose le système
planétaire de Tolomée, explique le flux et le reflux, etc., ne sachant
comment se prononcer sur la grandeur du globe (200). La grandeur du
clobe, du degré, les longitudes et les latitudes géographiques, les zones,
les climats, la graduation, les projections géographiques, lui sont tons
indifférents : car sa carte est aux vents.
Son habitable ronde est tournée le midi en haut, le nord en bas, à la
manière des Arabes, des Siciliens, de Cecco d'Âscoli. Il renvoie Tin-
clusion de Gog et Magog aux fables, se rangeant à Topinion de Saint
Augustin (201). Quant au paradis, il relate les opinions de S. Augus-
tin , de Beda et d'autres, sans discuter, et Texclue de sou image de
rhabi table (ios).
Le cosmographe camaldule est érudit. Il cite souvent les anciens :
Jules César, Strabon, Pomponi Mêla, Pline, Jule Solin, Dionyse, Tolo-
(197) Satie aoticlie mappe, idro-fr<i^raphiclie cap. 19, Zarla relatant cette inarription prëtead
qae le qnali parole spetlando al detto grandioso et dorato contorao ; auqael il serait fastueux de
qaaliâer de lavoro son exécvtkta , qui encadre ane laboriease exéaitiun de la mappemonde. As
reste, quoique les peintres et les raliifrrapbes achevassent, depuis octobre l-iS9 jusqu'au 26 août, œ
qui manquait à la copie, cela nedéroçrea en rien, a gonaino lavoro di fra Mauro
(198} Une main de ce temps inscrivit dans un coin de la carte, pro memoria, ce qui suit : haec
tabula geographica cum per centum nonaginta qninque anuorum curricnla, partira in ecdesia,
partira vero in aula , quae »no nnmini dicala erat, et dicebatnr il mappa mondo, fnisset appensa,
tandero iussu reverendissimi patris domini Francisci Gherardi dicti Errici, abbalis cuins raonasterit
in bac biblioteca, ab ipso insUnrata, ditata et oxomaU, translata et coHocata fuit, anno I65S, die
30 de<-embris Zurla, il mappa mondo di Mauro, num. 44). Les 495 années comptant de décembre
de 165S, arrêtent la première suspension de la mapperaomie {le iO décembre) vers la fia de Tan-
née 4460. Or, on savait qu'elle n était pas enfermée dans la caisse, et on eut le temps de l'achever,
ce qui eut lieu le 24 août de 4M0.
(199) I^ende donnée par Zurla, dans l'ouvrage il raappa mondo di fra Mauro, num. 3S.
(iOO; De questo cin-ura ferenzii, trovo varie opinion, pero non e possibilc verificarla, bencbe el se
dica,(bc la sia 32,500, over 24,000, ovcr piu, over manco. secondo diversa considération, opct
opinion che non molto autentica per non csser expcriment ada Jcgcuda, ap. Zurla, nura. 7).
(201) Légende ap. Zurla, num. 47.
(202; ibid. nom. 49.
MAUBOy 166. 95
mée, le métaare d'Aristolélès , Ârian , Apolonius, etc.; et en fait d'éru-
dition purement chrétienne : la bible, les saints pères Augustin, Ba-
sile, Chrysostome, Jérôme ; et les écrivains renommés : Beda , Raban,
Thomas d'Aquin, Alberlus magnus, Nicolas de Lira, etc., en générai
les historiographi et cosmographi. Quant aux événements historiques,
il mentionne les bibliques, quelques modernes et Alexande-le-grand ,
négligeant ou réprouvant tout ce qui a été dit de fabuleux sur ce
dernier.
166. Mais aucun cosmc^raphe n'y est cité sous son nom. Le cosmo-
graphe camaldule n'a pas jugé à propos de les spécifier ; il néglige
de nommer les voyageurs renommés. Il ne nomme ni Louis Cada
Mosto, dont il connaissait les découvertes récentes par une communi-
cation directe; ni Marco Polo ou quelques autres des voyageurs qui lui
fournirent les matériaux pour son Asie ; il ne sait pas nommer ce roi
d'Abyssinie dont il connaissait les investigations et les conquêtes ; il
ne dit pas comment cette nouvelle lui est arrivée, ni qui l'aurait in-
struit de la course indienne. Le seul, scorse missier Piero Quirini s'y
trouve par hasard nommé près de la Finlandic, qu'il avait visitée eu
1454 (203). La bonne fois du savant camaldule était surprise quand il
croyait que de son temps un navire catalan s'était avancé jusqu'au nord de
laPermia, qui est la province la plusseplentrionale de l'habitable (204).
Le laborieux cosmographe se perd dans l'immensité de l'orient. Ou
guidé par quelque invention antérieure, ou composant à sa guise les
contours, surtout ceux des Indes, il n'a pu se préserver de confusion,
d'embrouillement. Les notices abondantes y sont assises sur une confi-
guration tissue à contre-sens. La portion occidentale de sa mappemonde
est sans contredit élaborée plus heureusement, pour la plupart d'une
toute nouvelle création, surtout pour une grande partie de l'Afrique.
Un roi d'Abassia avait conquit depuis peu (vers 1450) le pays de
Diab et explora ses caps méridionaux. Dix ans auparavant, en 1420,
une jonque indienne passa 2000 milles à travers la mer de l'Inde et
atteignit le cap le plus méridional. Ces nouvelles ont été apportées à
Venise, fra Mauro les accommoda à sa mappemonde, croyant que le pays
Diab touchait à la mer obscure et ténébreuse , et admettant très-con-
séquemment qu'au delà du dernier cap méridional, les rivages tour-
naient à l'occident; il dessina sur ce point un vaisseau, la proue tournée
vers l'occident , pour indiquer jusqu'où arrivèrent la jonque indienne
«t les explorateurs abassins (205).
(903) Zorla,nnin. 43.
(104) Una iiave catalan! carga de corami, in mVo tctnpo scorse di qui c pcr des a sTo manso (disagio
mangio) el suo cargo (légende ap. Znria, num. 48).
(905) Nous extrayons de Zurla (num. S8, 30), la description de cette partie de la mappemonde de
fra Maaro : Al sad est dell Etiopia méridionale e dell Abassia v' ^ in forma di isola quasi triangolare,
una vastissima regione, chiamata Diab, vhe forma l'ostroma parte e punta di Afiicn, bagnata dal mar
îndiano e dall* occano atlantico, cdi cssa scritto ucl dctto mare : nota che questo caiM de Diab e
geparato da Àbauia, per uno canal el quai e circumdado da uno ladi e dal altro de monte altissimi
el aUrori H grandi e speà, che i fano quel canal oscuro, il quai ne la sua insida fa una zirolo perico-
lo9o pcr modo che se nave^ se ne abatesse el pericoisria. Al principio di tal ultima parte d'Africa,
Bresso il sudetto canale, ail est, evvi la città Mogodisso (Magadoxo), solto la quai giace l'isola e citta
di Megîào; al sud est è posto Xengiber (Zanguebar), ove a carattere d'oro e roajuscolo c scritto
jHab; indi ver sud Soffala, et Macdasur; il regno di Chara, Barara, Maabese, Chelve; verso poi
occidente : questa parlée chiamata Saccara, id est mana, et abonda de ogni bene, tra laltre oro
atfaf, — Ncl meio giace, prouincia dita iMgiana, et souuui due laghi, da uno, de quali esce il fiume
94 GiOGR. LâTOIE, 1410-1470.
Poor les rîTa^es oceideotaux de rÂfriqoe, le cosmographe camaldole
avait des dates plus positives, foaraies par le roi de Fortugal et par la
course de Cada Mosto. Mais eu les aceominodaot à sa mappernoode, il y
inséra TopiDioD zudizio dd re de PortogaUo, et loio de le suivre , loin
d'avancer jusqu'à la ligne méridienne d'Alexandrie ou de Tunis , il
spécifie le fleuve d*or, les caps Yert et Rosso, rio grande et suppose
qu'au terme de cette reconnaissance récente, se déploie le golfe éthio-
pique , colfo per luti questi chiamalo eolfo dal ora; golfe familier à tous
les géographes, à Ptolomée, à tous les Arabes, à la table ronde rogé-
rienne, à la mappemonde de SanuCo, ainsi qu'à celle de fra Mauro (206).
Toat ce qui suit vers le sud jusqu'à la jonque indienne est inexploré ;
tous ces rivages du golfe et des côtes spacieuses jusqu'au cap méri-
dional et la mer ténébreuse, conservent la configuration convenue
depuis que l'habitable fut enfermée dans le cercle de l'océan envi-
ronnant.
Ne pas suivre l'opinion du roi était peu courtois ; étaler ce littoral
immense, prolongé du golfe éthiopique d'or jusqu'à la jonque voguant
sur les flots ténébreux, était peu encourageant. La mappemonde du
savant camaldule n'apportait rien de nouveau pour la navigation, qui
ne îùi connu de l'infant Henri et du roi Alfonse V, au moyen des car-
tes antérieurement fabriquées par d'autres. Cependant , on ne peut
douter qu'elle a trouvé un bon accueil à Lisbone. Le cosmographe
renommé confirme et les conceptions de la structure de l'habitable et
la possibilité de traverser l'océan jusqu'à la mer de l'Inde ; il argumente
en faveur de cette opinion qui était celle de la cour, de l'infant et de
navigateurs entreprenants; Pomponius Mêla , Endoxus du temps de
Laturus, personna digna de fede de la jonque indienne, et l'autorité du
cosmographe, sont ces puissants arguments : novi argumenli. — Adon-
cha senza alguna dubitalion, se puo affirmar, che quesla parte austral, e
de garbin sia navigabUe e che quel mar indiano sia oceano e non stagnon :
Iceruer, che si gctta nel mare, verso il nord , e che coU* altro finmc , detto ÀUeeh cbo driviasi per
Test, divide il Xenibar da Soffaia et da Mogodisso. Di là del canale t* è notato : questa région ferti-
Usêhna esta eonguUta nuovamente per el gran re de Abauia eirea el 4450. — In noa punta poi dî
qnesta stessa regione al tad è marcato : qui contenta el mar gcuro, et in uoa nota vicina sopra questo
paese è l*Etiopia méridionale, e sotto alcune sparse isoicttc sta scrilto : pocho lonzi daqueste isole
foreane , comenia aparer le ténèbre, le quai qui oUre questo cauo non impaza$tù i naueganti. Presso
qnesta nota ail* estrcma punta dcU Afrioa dciinea una nave dirutta verso poneule, sotto la quai
osserva : circa JU ani del signor 4420, una nave over wncho de India, discorse per una traversa per
el mar India a la via de le isole de hi homeni et de le done de fuora dal cauo de Diab, e ira le isole
verde e le oscuritade à la via de ponente e de garbin per 40 xomade non trovando mai altro, che aiere
e aqua^ eper suo arbitrio i scorse 2000 mia, e declinata la fortuna, i fece suo ritoma in zomt 70 fina
al êopraaitto cauo Diab e acostandose la nave al rive per suo bisogno, i mari$Mri vedeno uno ove de
uno oseh nominato chrocho, el quai ovo era de la grandcza de una bota d'anfora e la grandeza del
oselo era tanta che da uno pizo del ala altro se diee esser 60 passa, e con gran faciUUa lieva uno
etefante e ogni altro grande animal e fa grand dano ait kabitanti del paexe et e relocissomo nel suo
viare. Toute cette historiette delà jonque indienne, attachée à fanncc 1420, était très-ancicunc-
ment connue par les arabes. Mauro l'avait appris par une narration orale : « aochora io ho parlato
» cnm pcrsona digna de fede che afferma aver scorso, cum una nave de India per rabia de i'ortuna
» de traversa per zorni 40 fuora del mar d'India altro el cavo de Soffaia, e dele insuie verde, eqai
» pur al garbin e al ponunte, c per lo arbitrar dci suo astrologi i quai son lor guida iscorse circa
» 2000 mia » (Zurla, num. S9).
(206) Voyez ci-dessus la note 05. — On lit encore dans le golfe la légende suivante : « Qucli, che
» sono stadi aie rive de questo colfo, affermana esservi moite isole tra habitude e non habitade, c che
» in alguno de qucstc, habitano christiani. » Sur la pointe australe près de Fuudan on lit : « io ho
» piu volte aldido da molti che qui e una colona cum una man, che dimostra cum scritura que de qui
» non se vadi piu avauti : maqui voglio, che Portogalesi, che navegano questo marj dicano scie vero
» quel che ho audito; perche, io non ardisco affermarlo. » (Zurla num. 55).
HAUROy iC7. 95
e cusi affermano iuii queli che navegano quel mar, e che habUano quele
insule (sot). Les Porlugais habitués à faire les découvertes connues déjà
des autres, compulsant les mappes des cosmographes antérieurs, étu-
diaient les assurances du cosmographe camaldule, et brûlaient d'envie
d'aller au devant et de joindre cette aventureuse jonque indienne qui
leur présentait sa proue, afin de conduire leur équipage friandement
ravitaillé par un seul œuf du chrocho jusqu'à la destination de Tlndc.
Toute la configuration de l'Asie et de l'Afrique, de leur intérieur eten
général de leur extérieur, calquée sur les conceptions des cosmographes
précédents, modifiée par quelques renseignements plus ou moins heu-
reusement adaptées, n'offre dans la mappemonde camaldule que le fruit
de l'imagination, absorbé par le vague. L'unique portion où les capa-
cités du géographe pouvaient se dérouler à nos yeux, s'étend de TEufrate
jusqu'à Ta mer atlantique, y compris le littoral septentrional de l'Afrique
et la plus grande partie de l'Europe.
167. Mauro accepte le système planétaire de l'astronome Ploléméc,
mais il ne veut pas de Plolémée géographe; il proleste qu'il ne veut
suivre ni ses formes, ni ses mesures de la longitude ou de la latitude:
11 pense qu'en ne le suivant pas il ne déroge en rien : io non credo de-
rogar a Tolomeo, se io non seguito la sua cosmographia; unde se algun
eontrc^dira a quesla, perche non ho seguito Claudio Tolomco, sine la forma,
corne eliam ne le sue mesure per longeza e per largeza (ses). Protestation
remarquable et néccessaire au moment où la renaissance des lettres
faisait à toute outrance revivre les dépouilles de ce géographe. Mauro
le repousse de sa mappemonde et réprouve ses connaissances surannées,
camMali e corropti (209).
Perlanto, prévient le cosmographe, dico, che io nel tempo mio ho so-
licilado veripcar, la scriptura, des voyageurs, des portolans, des mappe-
mondes, des cartes exactes , des histoires , cum persone degne de fede
lequalhano veduto ad ochio quelo che qui suso fedelmente demoslro (âio);
habi bona geometria e bona intelligentia de desegno .(su). Le compas à
la main, avec une assiduité extrême, il élabora , d'après les plus certains
renseignements, quantité de cartes spéciales de l'Asie occidentale (212)
ei suivit les meilleurs cartes et portolans : benche io habi servalo ogni
diligenciain meter le starce dequeslmar, c'est-à-dire de la mer mediter-
rauée, seconda lapiu justa caria ho possudo, nondimcn queli che sono
experli non faza gran caso, se io me discorda in quai casa, peroche
none possibile metar tuto a ponto (213). Il doutait d'avoir réussi sur ce
point dans sa composition : mais il vit qu'il fallait se distinguer et se
mettre en discordance avec les autres cartes nautiques de la mer mé-
diterranée. Je pense qu'il varia avec avantage et un certain succès.
(S07) Légende, ap. Zurla, nam. <40.
(208) ibid. Dum. *.
(S09 Nota che Tolomeo mcte algune provincie inqucsta Asia, eoe Albania, Ibcria, Cactriana,
Paropsunisades , Dragiana, Arachosia. Gedrosia et oitra Ganges le Sine, de quai tutc non ne fazo
nota, perche sono cambiati e corropti quali nomi, pcra pno bastar, che ho notado altro prouincie de
le quai Tolomeo non ne parla (légende ap. Zurla, num. 20).
(SiO) Légende, ap. Zuria, num. 4.
(214) ibid. num. 7.
(142) ibid. num. 23.
(213) ibid. num. 10.
96 GÊOGR, LATINE, 1410-1470.
La grande mappemonde de Mauro fut publiée en 1806 par Placido
Zurla, sur une échelle trop diminuée pour nous mettre en état d^eo jager
sans réserve («i4). Cependant nous avons recours à ce procédé compa-
ratif dont nous nous sommes servi dans Texamen des cartes sanutine
et catalane : et voici ce qui se présente à notre attention.
Je ne doutais point des proportions de la mer entière, de Tharmonie
conservée entre sa largeur et sa longueur; le cosmographe qui réprouve
les difformités de Piolémée et marche sur les traces établies par ses
prédécesseurs, ne pouvait pas manquer. Cependant il a repris leurs
opérations et donné à la mer une longueur un peu plus étendue. La mer
est sur une direction oblique, comme dans les cartes antérieures: mais
Tobliquité est réduite à 6 degrés. Il est probable qu*à la suite de cette
avantageuse modification de Tobliquité, le cosmographe s*est aperçu,
que, bien qu'il ait mesuré avec toute diligence les tortuosités de la mer,
il se trouva en discordance avec les autres. Une autre discordance
très-avantageuse pour sa composition , se manifeste à Textérieur de la
mer médilerranée. Le volume de TEspagne et de la France est consi-
dérablement augmenté, la position de Paris se rapproche de sa véritable
situation. Je ne pense pas qu'on doive attribuer cette amélioration à la
construction des cartes topographiques de ces pays, mais je crois qu'au
moyen de remaniements réitérés de la mappemonde , on parvenait à
mieux coordonner les portolans des rivages extérieurs.
Dans la partie orientale de la mer méditerranée c'est tout le contraire.
Le cosmographe camaldule porta la mer noire excessivement au nord.
Ce défaut se fait remarquer dans les caries antérieures , mais il a ren-
chéri sur tous ses modèles. Il élabora quantité de cartes topographiques
de Syrie et de l'Asie mineure. Ces compositions continentales augmen-
taient sans aucun doiite le volume de l'Asie mineure et les rivages
montaient forcément vers le nord. L'analyse de l'original, de son fac-
similé, ou de la diminution plus scrupuleusement exécutée que ne l'est
celle de Zurla, découvrira peut-être la cause de l'empoulement de l'Asie
et permettra un jour de discerner le progrès de la cartographie.
Table métallique, 14^2.
168. Lorsque Charlemagne fit graver le tableau de l'habitable sur des
planches d'argent, c'étaildu luxe, et quand Roger de Sicile l'imitait,
c'était sans doute dans le but de conservation, un métal étant en état
de mieux résister à la destruction qu'un dessin sur le vélin ou sur
quelque espèce de peau ou de cuir. Le métal devait être aussi favo-
rable à l'exactitude, il préservait l'ouvrage de la détérioration , de la
défiguration qui se déclarait fâcheusement dans les proportions du
(214) Il mappa moDdo di fra Mauro camaldolcse descritto ed illustrato da d. Placido Zurla dello
stess' ordioe, venczia, i806. — La carte est reproduite dans ses autres ouvrages de 48i8, disser-
tazioni et sullc antiche mappe. — Nous avons réduit cette mappemonde de sa publication pour notre
atlas, presque à moitié, en proportion de 25 à 13 de l'échelle, avant fidèlement conserve toutes les
épigraphes inscrites dans la publication de Zurla. Pour notre carte comparative de la mer méditer-
ranée, la diminution zurlane reste en entier. — L*ample description de la mappemonde, nous a
fourni ces propres paroles de fra Mauro, dont uous nous sommes servi. — En 1804 Guillaume Fraser,
anglais , copia exactement la mappemonde do Mauro, et apporta sa copie à Londres. — On en fait
une pour la bibl. royale de Paris.
TABLE VÊTALLIQtJE, 168. 97
dessin, quand rbumidité ou quelque accident dégradait la peau. Pour
la conservaliou, Targeot, certainement était préférable à d'autres mé-
taux inférieurs, à cause qu'il résiste mieux à Toxydation ; mais sa valeur
le condamnait à la fente et à une toute autre destination dans des
moments de nécessité. Or , on gravait sur d*autres métaux , et cette
gravure demandait des ouvrages jumeaux, parce qu'il fallait remailler,
OQ en remplir le creux de eonleurb. Il est probable que de semblables
tableaux n'étaient pas nombreux, car les écrivains gardent le silence
sur leur existence : cependant la table ronde de Roger n'était pas la
dernière de ce genre; le musée Borgia, à Velletri, possède Vorbis terra-
mm gravé et émaiilé sur métal, au xv' siècle.
Le métal de la table géographique du musée Borgia à Velletri, est de
cuivre jaune , et a deux pieds et un pouce de diamètre ; il est enduit
de couleurs; à l'exception des voiles de navires et des pavillons qui sont
t>lancs et rouges , tous les autres traits creux , les lettres , lignes et
figures, sont enduits de couleur brune. Cette table avait été attachée
autrefois à une muraille ou un plancber, parce qu'elle offre des trous
par lesquels passaient les clous.
Sa grandeur considérable ferait présumer que les pro^rtions de la
terre et des mers sont de l'exactitude géographique : mais nous ne le
savons pas, nous ne la connaissons que par la description qui se résume
aux énumérations de^gures et d'épigraphes : ces derniers en effet ont
quelque valeur ^«iit).
La division de la table en douze sections numérotées à leur bord ,
ferait croire que ce planisphère, cette habitable ronde est dressée sur
les rayons de douze vents. Le sud est en haut, le nord en bas. L'habi-
table baignée par les eaux (océan) tout à l'entour, est divisée, comme
à l'ordinaire , en trois parties : Asia^ Africa, Europa lerlia pars orbis
lerrarum. Il est probable que Siria terra sancia (où Jérusalem n'est pas
nommée) constitue le centre du cercle. Pour les trois parties du monde,
la part du disque n'est pas égale. L'Europe occupe presque la moitié ;
l'autre est partagée entre l'Asie et l'Afrique.
Lecompositeur de ce planisphère est beaucoup préoccupé de l'histoire
ancienne et des événements qui lui sont plus rapproches. Dans l'Asie
mineure : hic Graeci cum polentia unius pojrtis mundi decem annos
prodiaverunl Centra Troianos etaliam partent mundi; quos per inducias
^iruerunt ; ex quibus Troianis , mulla régna et dominia facta sunt.
Ans8i,dans les parties septentionales : terra quondam illustrium mu-
lierum, n'étant pas oubliée, il yajoute : la reine chevauchant à la guerre,
ft^tetilea ad Troia multa bella et Grœcos debellavit, A quelque distance
il nomme une autre reine : hoc Tamaris Scitarum regina Cirum Per-
'^'nm regem, cum trecentis millibus inlerfecit , et attribue la réclusion
de Gog juifs aux Persans : provincia Gog, in qua fuerunt Judei inclusi
^'Wfwre Artaxercis régis Persarum. Magog : in istis duabus, sunt gentes
(Ml) ie cardinal Etienne Rorgia, possesseur du monument métallii[ne, fit exécutor son dossin et
«■Snvare, et avant sa mort, oui arriva en novembre IHOi, il eommaniqua la gravurn à Hooren,
^wlBftns devons la description du monument, inséré dans les commentationes societ. Gotting.
^V»'*' 3tVl, p. i80-t84). — L'exemplaire de In gravure communique a dû passer au\ héritiers de
^''®'' I parce que la bioliolhèqae de l'université jhî le posséda point.
II. 10
M ÇtûCM. L4Tai, uêq-uml
wtmjmi H f tfaafei, plnu ammium ■Mlono» Mon» : fWK Juitm, IrlOJMs
rrx eoUegii ée€mmibms parUbtu Penmrmm («ic).
Le conpofiîiear da pboispbère counji tfots mwarcUes aiOérieores
à Rome : BmkgUm^ priMÊm wumartkia WÊumdi, L'aaire brthagpiioîse, bieD
que son ooa n*j soit pas : stemmda wummnkim^ qm» Umfwt Axtùbal
nomamot mmUmm smfbeamii , qmm âeimée per Ramanoi tote fmii âairmelm^
per Stipkmtm, ei sur la canp^^pe d^AnniM , il sait dftre : près des
Alpes : kU wumies àmdmml Itaiiam ab itfg— ta H GmMim : iroMMitus
Ammibalis emm lxx olifmmiis per Roiammm Aie tu Linâmme (Lof^ano).
Ettsoile eo Italie: iaaitel éebeUamURomamos m rv^iiMie Popto; ensuite:
beilum Camnemu, tu 9110 .4iiiii6al xlit wûUia Rammmoê imUrfteii H ex wU-
lUibms kaimit tria wwdia ammmhrmm, et près de IKiauM, dans la Ro-
nuiDie : kie Aêdrubal eum lui mittibmsCarlkagimiemsimm^ imterfechu esi.
Près de Comsianiinopoli t on lit : kie fuU lereia wumankia wmndi,
per Alexandmm atquisita^ et sor celui-ci on trouve au fond de FÂsie :
super isium wunUem vieius est Ponu rex Indormm t» duHlo per AUxaw-
drum; ailleurs sont : arbores eonserti^ quUms easira loearii Alexanâer ;
rinsertion de Albamia moffiui, lui rappella : kie eames forîiores leonibms
dont fit présent à Aleiandre le roi de FAIbania, enfin tiidus flumus
„.. kie Alexanéer eum ejus militia et pedones, Darium debeUauit eum xw
milUbus kominum tu tribus M/if.
Il relate peu d'éTénements du temps romain. SiuofNi, «vlfu dominia
submisit et Hereulam (Heracleam) debeltarit (probablement Mithridate);
Pampedoius (Pompeius) insipia (insipienlia? in Sinopia ?) Asienm et Eu-
ropam subjugavil. A Tinsertion de Tkessalia il ajoute : kie fuit UMip^um
bdlum Cesaris etPampeii, kie Borna perdidit eammune eemwMdum.
De temps ultérieurs, il n*Y a qu^en France : kie in Alunia (Catalannia)
amno 4Î0 (450) Atita rex Hunnorum emUra Romanos pugnoMerat et tn*
terfecta sunt 180 miUia ex utraque parla.
Il est bon de remarquer que les souvenirs de Charlemagne grandissent
à ses yeux. Près de mons pireneus, il rappelle la bataille de RonceTeaa:
kie fuerunt inierfeeti duodeeim pares Franeiœ , et au milieu de TEa-
pagne il dit : infidelis Ispania ekrislianitaêe nU^missa per Caroium
magnum.
(SI 6. Voici ce que raconte là-dessus la cartede la Tartarie, reprodaite en 157tt par Ortelios, dont
Dons donnons nnc pclit<> ignrt* dans notre atlas n* 437 : elle raconte lonte histoire : Danoram sine
Danitarom borda, 4 (prima) dejecUo sine descensio aut expnisio. — Septhalitanun borda, Neptbalitae
ab nna 40 tribaam Israelis nomine Nnptali dicti sont, et post Danitas qui in castigatione aqnilonari
banmarch dicti snnt ob Racbelis Balhab ins , secundo in loco Hndornm sine lehndonun sant ponti
et 476 sal. anno contra Perosam victores fuere, Entbalitas maie vocant céleri. — Arsaretb (4 Esdr.
cap. 43), hic 10 tribus secessere et Totaromm, sine Tartaromra loco Scrtbicse snbsUtnemnt : nnde
Gauthae sen Ganthay a snmma dei gloria asscrenda ibi dicti snnt et bine Calhay clariss. régnons. —
Tnrcbestan regio, nnde cismontani 40 triknom sodi ante 900 annos sunt accersiti a P«rsis contra
ismaelitae Mahurocdis arma. — Au xti* siècle le pape Clément Yll, en 4533, reçut par l'entremise da
roi de Portugal une missive de David , roi d'Abissinie (rambasciaria di David re del I Etiuopia Bonoai» per
Jac. Keymoîen 4538 in-4*; Paul, /ovius, p. 4i3, S36). Les juifs crurent v voir un envovc mosaiSanfc,
reproduite par OrtHins il paraîtrait qu'un Israélite s'était chargé de continuer le rôle d'un envoyé
de Chabor, parce que cette carte dit : Tabor sen Tvbur, umbilicariane Totaromm regio, nbi licei
olim libros sacros perdidissent, snnt tamen uniti sub uno rege, qui 4540 in Galliam usqne ad regeat
Franciscum id nominis primum venit et postea a Carolo V Mantu% igné suaD infidelitatis poenaa
luit : quia secrète solicitabalnr christianoi principes adjudaisraum . de qnare Carolnm V altooaUM
erat.
TABLE MÉTALIQUE, 168. 99
Quand il qualifie Bagdad, BcUdachia sèdes ealiphœ, c*e$t une ancienne
réminiscence, parce que depuis iâ58 cette yiile cessa d'être la résidence
de ce chef. Seplem ectstra ehrislianorum intra silvas paganonum signale
la colonisation des Allemands dans la TransilTanie. Bordeaux, et tout
près : loannes rex Franciœ hic capitur per principem Valiœ in bello; et
aillenrsen Asie : sedes lambec imperatorit medie, confinai cum Vngaris^
se relatent à des années 1356 et 1557. lambek mourut dans cette der-
nière, il était de Sarai. La carte Catalane et André Biancho distinguent
Tempire de Medeia ou de Media de celui de Sarai : on peut donc
présainer que l'auteur du planisphère veiletri tombe dans une confusion,
en qualifiant lambek d'empereurs de Médie.
Grecia in qua Basac (Balsizei) debellavitchristianos nccclxxxxv (1595)
ex quibus mulli nobiles Franciœ décapitai. Cet aflaire eut lieu près de
Nicopolis, et le sort du vainqueur est précisé sous Sava^tra (Sehnsta,
titre que prenait Ancyre) in qua Tamburlan (Tamerlan), devicil Bazak,
ex ocUngentis hominum millibusy interfecil duo. L'affaire avait lieu en
1401 ôt introduit l'auleur du planisphère dans le xv^ sièice. .
Vandalia (Vendes), Lilefane (Litvaniens), Tarelanl (Garelant, Kare-
lie), Riga et à la suite : hic sunl confinia paganorum et ehrislianorum,
qni in Prussia adinuicem bdlanl , bien que répété depuis quelques
siècles sur ee point, pourrait faire croire qu'il fait allusion à la fameuse
dëiaite des chevaliers teutoniques en 1410, et ferait déterminer en
dernier lieu l'âge de l'auteur du planisphère : si d'autres passages en-
core ne l'avanceraient à la moitié du xv*^ siècle.
liaiia niiens, pinguis, forlis et superba : exquibus caret domino uno
iMilUia uana. Tout en admirant l'Italie il gémitsur son insubordination
k Tempire fondé par Charlemagne. Sedes aposlolica et imperialis (Rome
qui n'est pas nommée) per septingenlos annos in orbe IriumphaviL Or,
à partir de la restauration de l'empire par Charlemagne, les sept cents
aas avanceraient l'âge de l'auteur et l'année 1500. Certainement rien
ne nous oblige à considérer ces sept siècles de trioiiipbe complètement
écoolés : mais il est nécessaire de remarquer dans colle expression, le
septième siècle très-avancé el chercbcrquela pu élre le molif d'une sem-
blable exclamation, qui réunit à la fois le triomphe du siège aposto-
lique et de l'empire.
L^ëglise chrétienne, vivement agitée à cette époque, ouvrit à la cour
de Rome destriompbes. Eugène IV proclama l'union du rite grec avccsa
saprématie; Nicolas V assoupit l'existence du concile de Baie et se hâta
dérégler victorieusement les concordais avec l'empereur. Frédéric III
prenant les rênes de l'empire délabré, allaita Rome en 1452 célé-
brer le double sacre comme roi de Lonibardie le 15 mars, et comme
empereur le 18 mars. La plus parfaite et la plus indifférente harmonie
r^paait entre les deux cours, qui comptaient en commun le septième
siècle (75â années) de leurs succès et triomphes. Je pense que ces évé-
nements déterminent juste l'âge de l'auteur du planisphère. Il ne
dépasse pas de beaucoup cette année, car il ne connaît pas la chute de
Constantinople qui arriva le 29 mai 1455 ; car il fait allusion aux
érénements du jour, il est à présumer qu'il ne l'aurait pas passé sous
silence si ella avait eu lieu de son temps. L'auteur est sans aucun doute
100 GÊOGR. LATINE, 1410-1470.
Italien , parlisan de la cour de Rome , en face des fails qui réjouirent
ritalie , déplorant la dissolution des liens de Tenipire (211).
Quant aux détails géographiques, qui ne sont pas nombreux en pro-
portion de la grandeur de la table , le planisphère ne diflere point des
caries contemporaines et quelque peu antérieures. Le nord de TËurope:
hcBc regio montana inhabilUabilis propter nimium frigus qttod est ab polo
arclico^ aussi extrema Norvegiœ inhabitabilU nimio frigore : hic sufU
ursi et fakones alM et consimilia, L'Europe s'étend jusqu'au Tanai$
fluvius per maximus qui sort d'un lac : in hoc lacu stundi (les thons)
infinili. Bien qu'aux environs de mare Prussiœ (baltique) sont Gothia
magna, Vandalia, Litefani, Carelanl et Riga, cependant Livonia sa
trouve jetée au delà du Tanais.
 la suite de seplem castra (de la Transylvanie) on lit : Bozimia (pro-
bablement Bosna de la carte catalane , Posimia de celle d'André Bénin*
casa, située près de Posega, Bosnia, ainsi déplacée), Rusia, puis : hic
tntanl Sitœ (Scythae) seu Tartari pauperes, qui fUios et filias et parentes
inopia vendunt , sicut inter christianos boues in forts , et puis : hœe per
ampla est déserta propter continua paganorum contra christianos (in-
cursiene). C'est tout ce qui est au nord de : palus Meotida, Capha et
mare pontium.
En Allemagne on lit : Albia fluvium, Sassonia, Dresden; Gurse (Wur-
zen sur Mulda), Magobres (Magdeburg), Standar (Stendal, noms connus
par la carte Catalane) ; ensuite : Ays (Âix-la-Chapelle), Cotonia, Treu-
bourg (Strasbourg), Basla, Baiveria (Bavière), Moravia^ où on lit : ert
(élan, sa figure y est gravée), quando pressatur a canibus, bibit aquam
per os ferventem, super eosemittit (conte allemand, venant d'Allemagne:
ert, hirsch, hart, hert, cerf); ensuite : hic transit sUva boemica quœ se
extendit ad paganos ; puis Austra, Austria de deux côté du Danube, sa
capitale Viana (Vienne), Patama (probablement Pasavia).
De Polonia il ne reste que des débris Po...ta, il y a d'autres points
lésés. Dans chaque autre pays de l'Europe on voit plusieurs villes
nommément signalées. Atena, singulare orbis studium, bonne tradition
très-ré pétée par les arabes. Parissii (Paris), pare bonitati et domtnio,
sed et immensitate plamto et casteUalo (fortifiée et castellée ; plamto , à
plan, pianta; ou planche, palissadée). — En Italie, où coule Paudus
oriens in imchro (val di agrogoa) on ne voit ni Naples, ni Venise, ni
Florence, ni Sienne, ni Milan ; en revanche on trouve : Bononia^ Sàturia
(Saluzzo), Rimini, Ancona, Marchia, toutes dépendances de Rome
triomphante pendant sept siècles. En Apulia on lit : hic quiescit corpus
beali Nicolai de Baro.
L'Asie, Asiamaior, dans sa partie septentrionale offre quelques détails.
Le froid y est intense : hic corpus ponitur , ut semper frigore conserue-'
(117) Le cardinal Borgia pensait qae l'autenr était nn allemand; Heeren adbëra à cette opinion ,
ne remarquant que des apparences faibles. Contre cette opinion cependant milittent le contenu et
l'orthographe do planisphère. Ils sont les mêmes que ceux de toutes les autres productions italien*
nés. Un Allemand ne devait pas au moins laisser Sassonia, Gurse, Magobres, Standar, Viana, sans les
rectifier. Quant au graveur, ciseleur, émailleur, s'il était allemand , c'est indifférent pour nons. —
Nous différons aussi de Heeren, dans quelques autres explications, possédant plus de matériaox qve
ne pouvait avoir ce savant historien. Nous paiisous sous silence la nomenclature trop connue et
claire, aussi bien que certaines épigraphes et explications plus que douteuses, que nom n'avons
hasardé d'examiner, faute de voir l'image du planisphère.
TABLE MÉTALLIQUE, i68. 101
lur ; montes hyperbwrei, in quibus grilfones et tigres inhahitant; ista geus
(qai n'est pas Dommée) sedel eeclesia et faciunl de se sâcrificium , ponen-
éo caput prius sub quodam paio pro aues et tune genubus adorant,
doneeciMdat,
Mare hyreaneum est distingoée de la Caspienne. Elle forme un golfe
de Focéan. Uxores diligentes maritos se faeiunt comburi simul; hic pa-
gant adorant ignem.
Les villes qu'on y voit sont pour la plupart connues dans la carte
calatane et ailleurs: Roslrama, (lisez Kostrama), Roslaos (Roslaor,
Rostov), Torachi (Torjek), £no(/aria (Volgaria, Boulgaria), Berchlina
(Berchinam de la carte catalane), sont voisines de Ediltu fluuius maxi-
mfss (do Volga); de même Sefrur (ville et mont Seburde la carte catalane).
— Ases (Âlani, Osseti), Inlania (?), porte ferrée.
Au nord de la mer Caspienne Tartaria regio maxima, quam, Tarlari
^eacurrunt cum suis iumenlis et bobus quamdiu aestates durant, ciuilalem
eamultis tentoiiis et carutis situant, a.., cum instrumentis obruunlur
corpora. Isicol l€u;us super quem corpus b. Matlhei querilur, Catana
(Khotam); Organli (Urgenz); de Organti usque Calhagium vadunl camelli
in quatuor mensibus; déserta c — lop (ciuitatis lop), chose connue à la
carte catalane.
Ergavil (Ergimul), Ezina, Singin (Singui), lackion, Sugur, villes de
Tangut, connues par les relations de Marco Polo ; les trois dernières
nommées par la carte catalane. Enfin Gog, Magog et Judei.
Les Indes sont privées de détails. India inferior, in qua Cathai
ciuiiasy ubi magni canis imperatoris Tartarorum sedes ; ciuilas Camba-
leeh. tout près sont eœlremi Seres, ex arboribus coHigenles sericum, non
loin lœus deliciarum (paradis).
Hic mons Caucasus, coUibus usque in ôrientem excedil, infinitis nomi-
fUbus appeUalus. — ab hinc usque ad oceanum terra qua>edam inhabita-
bUis , propter comedentes carnem humanam. — Ganges fluuius permaxi-
mus. — Indus ftuuius, ubi oli fautes,, aurum et lapides sine numéro, cum
aUquis eurat de aureis omamentis,
India superior in qua est corpus beati Thomac ; multa régna , sunt
ekrisliani; hic lapides, aromata infinita; hic etiam homines magna
eomua habentes, longitudine quatuorpedum, ut sunt etiam serpentes tanta
fnagnitudine, ut unum bouem comedant integrum. — Taprobane. —
mare indicum in quo insulae septem millia.
Tarsis et Tauris conduisent vers Tigris ftuvius et Eufrates fluvius ,
où : mons Arménie in quo arca Noe. — Niniue vu dierum longitudine. —
Babd in qua lxxu linguae inuerUae, — Syria terra sancta. — transitus
fUiorum Isrtiel. — mons Sinai in quo data est Icx Mosa£. — Arabia vel
Sahea, in qua thus, balsamum, myrrha, cinamonum et aloes; enfin quel-
ques noms des villes et des provinces de Syrie et de TÂsie mineure.
En Affrica se présente en premier lieu Egyptus, dans lequel Alexan-
àriat accompagnée de : hic veniunt plures saraceni peregrini de partibus
wemsis ad Meccham , propter Mechametum eorum prophetam. Au sud
BelwpoUs est accompagnée de phoenix in orbe satis pulchcrrimus
fdiiMius auis , se igné aromatico comburitur et triduo de ejus cinere
recreatur; enfin Soam (Assouan, Syene), proche de : déserta Aegypti,
^ 9^ iunt multa animalia fera. A TEgypte paraît encore appartenir
103 GfOGti. LATIU, fiiO-UTO.
kie iuni momêeê awrei (alahki), in quHms mni déserta wnxima el ab
infinUiê serpenlUms Kabilata.
Côtoyaot par la mer méditerranée, on y ¥oit : Lt&ia» Lari oa Lare
(fractioD de patri-arca? Batrachas), foms soUs^ noete fervens eimane
tepidnt; PenlapoUs, Cohmeia (Tolomeu), Tripdis, Gelulia, TremiH
(Telmîssa), Septa (Ceuu), mélaoge de noms aDciens avec qadqaes
modernes.
Ofir prouineia est à Foocident, looche les bords de Fatlantiqne
(connexe ensaile avec Offero» fie de Fer; Peritsol, cap. 15, p. 89;
cap. 21, p. 141, 154). — Une chaîne de montagnes (atlantique, caréna)
sépare le littoral septentrional de rintérienr de rAfriqae : tu iUi»
numUmiSj habitant plures principes et reges et habitant eontnmo in
tentoriis, et prodiantur contra saraeenos et contra iusta castra^ et dnir-
tates iustas. Par jnsta, traduit en latin , Tantear da planisphère entend
ce que le catalan appellait bones villes e castete, de même qu^André
Denincasa, boue ciuitates et castra. Cette chaîne de montagnes est
interrompue par un défilé : transitas inlerram nigrorum.
An sud des montagnes, le planisphère abonde dans les noms des
Tilles : Hifuret (Hifnret), Teget (Taïgas), Tagost (Taîdent?), Tagaxa
(Tagaze), Fudaur, Ganugia (Ganuia, &na), Tocoror (Tocrur), Tagaxa ,
Organa (21s). Elles avoisinent mare siue terra arenosa (sahara), in qna
répit via modo maris et gentes equitant in tentoriis pergamenis , ne visus
venlu et arena deslruatur; enfin Nubia saracenorum.
Deux grands fleuves traversent TAfrique en sens divers : NUus flutwus
permaximus des extrémités méridionales vers le nord; Tautre sort de
mons lunae septem fratres, se dirige vers Toccident, passe le grand lac
sur lequel on lit : mare, in illa orlus NUi ereditur, et à rembonchure
du fleuve dans Tocéan atlantique on a : fluuius aureus hic habet vm
leucas latitudine (sis).
Au sud de ce fleuve (rio d*oro) : hie régnât Musameli, ditissimns
propter aurum quod dietim reperitur in hoc fluuio; hie incipiunt chris-
tiani Aelhiopes pauperrimi apparere. — A part : hic mulieres irsut€Uf
ferocissimae sine maribus parlum ferunl; à part : Abimichabal rex est
saracenus Aethiopicus , cum populo sno habens faciem caninam el in-
cedunl omnes nudi , propler solis ealorem — les susmentionnés chré-
tiens , rapprochent roccidenl vers TAbissinie et la Nubie où : in Nubia,
chrislianorum sedes presbiteri lohannis cuius imperium ab ostio Gadis
per meridiem usqw ad fluvium auri. — Tout proche : hic dominaiur
(21 R) Sur ces deax dernii-res Uecren observe , qu*on a les mines de sel de Tagaxa suivant Léo
rafricaîD , p. 633, cdit. elzev.; et de Aroan snr la carte de Rennel. — Comparez cette nomeoclatare.
avec celle de la carte catalane (portulan général S3). — Et voici deax passages de Peritsol , relatifs à
cette éoumcration de noms africains : ab hoc loco (capo Cantin) ascendont caravanœ per déserta
magoa ad locam alium magnae habitationis dictae Oden I^^^V ®^ ^ Oden repcriont Tagazzam
NTX^i'*^ et a Tagaza eunt ad Tanbot ^I^^XCi? ^* * Tanbut ad rcgnum magnam Mêle ^'^^n
(Musamelli), sale dcstitnla. — Capo Cantin est principiuro transituum in omnia loca et nt^otiaiiones,
et locas pernoctatorins omnium roercatorum Arabi.iî qui ascendant ad Tagazzan, quod in ligna
oorum est terra onusta auro; et iode ad Tanbut, aut ad magnum regnum Hcle, dcslitnta sale ut
supra mcmoratum est : at est locus anri et argenti (Peritsol, cap. 19, p. 123, IS-i).
(f 19) Cette coordonnance da nsont de la Lune et du Nil Oixidental, avec le dessin de Pixzigant
voyez ciiap. 188.
CAHTE8 MAOTIQUSS, 160. 105
rexpifer (negus d*ÂbissiDie) , enfin au sud, pars ierrm, lorridœ zoruB»
inhabitalmis nimio colore solis.
Avant de reprendre les cartes nautiques , prenons en considération
une petite image de l'habitable qui se trouve attachée au manuscrit de
Salluste du xv^ siècle, conservé dans la bibliothèque de Genève (sto).
(Voyez n* 94 de notre atlas). Elle est réglée par la direction de douze
vents. Le midi est en haut; le centre tout près de Jérusalem. L*Âsie
occupe la moitié du cercle ; les deux autres quarts sont pour TEurope
et rÂfrique, mais le diamètre qui les sépare de TÂsie est incliné
d*africus à aquilo. L'Afrique seule est chargée de la nomenclature
exclusivement antique : mais il n'y a rien dans celle-ci de spécial à
Salluste, l'image du manuscrit de Leipzig est plussallustienne, comme
nous l'avons remarqué. L'Afrique a en outre quelque chose de nouveau
quand elle offre à ses extrémités méridionales le dragon abimalion.
Caution (csesarlensis), lepta (Septa).
Les deux autres parties du monde sont décorées d'épigraphes foutes
modernes : à peine peut-on eu excepter les palus mcolid. et Tile , de
Troia et Macedo, de montagnes Caucasus, Yperborei et Riphei, Parmi
Ie8 noms modernes il est singulier, qu'en Italia, on trouve Venccia,
Bano (Bononia) , Rama, Neapolis, Tarentum, et Gènes n'y est pas : elle
'se trouve représentée sur le mare pontico, par ses armoiries ou son
pavillon près de Cafa et près de Conslantinopolis , où le nom de Pera
est remplacé par Ina (Janua, Gcnua). Le nom de Texia ou Ceœia, près
de Suessia (Suède), désigne Kexholm, partie de Karelie. — Prucia,
St..ia (Saxia?), Olsa (Olsacia), Dnia (Dania), Colo (Golonia), Hollcd
(Hollande) , Fcia (Francia) , Ausla (Austria) , Danube fl, Gmania (Ger-
Bianîa), Va/ocia (Valachie); le reste est clair. — Entre Rodes et Chi^
pre on remarque une île considérable h Tépigraphe coeta ou ciœta, ce
qai est difficile à expliquer (Creta ? plutôt Gaso déplacée).
L'Asie est fâcheusement dépouillée de sa nomenclature. Dans sa
configuration elle offre une forme, une analogie et même une coufor-
mlté très-prononcée avec la carte catalane : mare caspium, les lacs
argis et marga, et tous les fleuves. LesJudei inclusi, sont distingués de
G^ et Magoqe. Les épigraphes de la Syrie et de la Palestine sortirent
de leurs orbites : Damascus se trouve au delà de TEufrat; Anliochia
au delà du Tigre ; Belhania de même ; Nabalhea prit possession de
rEgypte.
Revenons aux cartes nautiques et aux grandes mappemondes.
ScrrE DES CARTES NAUTIQUES DEPUIS 1460. LeS BeNINCASA.
169. Dans l'année 1459, lorsque l'incomparable cosmographe Mauro
terminait ses labeurs et ses jours, le sénat de la république soignait la
conservation d'une plus ancienne mappemonde suspendue dans le palais
ducal. Avant d'abattre la muraille, pour la conserver, il ne fallait rien
moins que la copier et recopier , comme les autres peintures de la
(tSO) La figure gravco dans mon atlns , n* 04, est do la grandeur do l'original dont la copie a cté
préparée par le dessinatettr Diodati. Voyez la note 228 du cbap. 470.
i04 GÉOGR. LATINE, iétO-UTO.
muraille, au milieu desquelles elle se trouvait placée et peinte (î«i)i
Nulle part il ne manquait de copistes, de calligraphes, peintres,
dessinateurs. Du vivant d*Ândré Biancho, son atlas, ses cartes, furent
en 1456 imitées ou copiées, parle génois Bartbolomeo Pareto (sis).
La mappemonde de l'incomparable Mauro fut copiée pour le duc de
Toscane (versU70j, elle décorait le palais de Médieis à Florence. Le
vénitien Pietro Delnno étudia cette carte et traduisit en latin toutes ses
l^endes (225).
Du temps de Mauro et de Biancho le vénitien Antonio Léonardi avec
ses collaborateurs s'occupait à Venise du dessin des cartes. Il copia vers
1457 pour le cardinal Piccolomini, archevêque de Sienne, la mappe-
monde de Ptolémée, mais en forme ronde. Elle fut ensuite léguée et
déposée comme objet très-précieux dans la sacri.stie de Sienne (224).
Le même Antoine Leonardi, cosmographe capable de composer les
cartes, offrit à la république, en 1479, une mappemonde et une carte
spéciale de Tltalie. Ces deux cartes furent consumées en 1483 par un
incendie. Cependant Antonio et son collaborateur Sebastiako Leonardi
les remplacèrent par d'autres, et le conseil des dix, par son décret de
1485 leur confirma la rémunération annuelle qu'ils avaient mérité (tss].
La république qui mettait tous ses soins à de bonnes cartes géographi-
ques, posséda la lavola d*Italia cosi perfetla nelle sue misure, che diversi
principi ne domandavano Vesemplare; elle fut placée, nella sale dell*
anticoUegio (^se).
Venise était un riche dépôt pour les études des cosmographes. L'an-
conitatn GratiosoBenincasa, enl466, 1467,1471, 1480, composait et
exécutait ses atlas dans cette cité : Gratiosus Benincasa ancanilanus^
composuit Veneiiis 1471 (227). L'anconitain Gratioso décorait les lisières
de ses cartes par les latitudes géographiques à la Ptolémée.
(22i) Qaod in muro nove construendo ponantnr et pingantar bistoriae depictaein veleri mnro»
pro ipsius historiae memoria antiquitati» cousenranda; quae anteqaam ipse murus, in quo pictae
sunt, diruatur, excipi et accopiari debeant, ut in maro novo ipsaemet instaurari et depingi possinl.
Etsimiliter reficiatar descriplia orbîs, sive mappa mnndus, qui in medio ipsarum picturarum extare
coosueverat (decretum senatus ii59, p. iZo, ap. Morelli; vide Zurla, sulia antiche mappe, cap. 33).
(m) Se trouve dans la collection geogr. de la bibl. de Paris (rapport 1839).
(i23) Quae olim in pictura orbis annotata, latina feceram... Quod vero petere habeam, atqnis
meo nomine in domo iUa permittatur, annotationes ipsas ex eo orbe , qucm quondam florentini
Kictores ex arebyetypo nostro efBnxerunt describere (epistola Pétri Delfino, 26 maji 4494, ex Fonte
OBO ad Bernard. Gadoli prior. S. Micb. de Marano, apud Zurla, di mapa mondo, num. i33).
(224! Cosmographiam Ptoicmaei, quam mappam muudi appellant lintea tela depictam a clarissimo
eosniographo Antonio Leonardi, pre^ytero veneto cum insignîs Pii , informa rotunda (Pecci , storia
del vescovado di Sieua, p. 344). L'arcbevèque Piccolomini , devenu pape en 44S8 prit le nom de
Pie n, mourut 1464. Le leg qualifie la mappemonde de cosroog. de Ptoléméc|, certainement à titre
d'bonneur : l'autorité de Ptolémée gagnant alors le terrain géographique à pas de géants.
(228) Morelli, ap. Zurla, suileanticbe mappe , cap. 33. — Dans le lecret confirmatoire de 1485 ou
lit : pioxit Italiam, cum tanta doctrina et rerum sciencia, et diligentia ac labore confectara et
demum per ipsum dominio nostra donatam, ntalia in toto mundo indicata fuerit nec pulchrior,nec
speciosior (et Sebastiano Leonardi) quem habuit coaductorem in labore, nec minus de praesenti
habet in secunda pictura Italiae longe angustiore et speciosiore.
(220) Sansovino Venezia.
(227) Deux atlas de 1466 et de 1467, se trouvent dans la collection géographique de la bibl. de
Paris (rapport de 1839). — Le troisième 1471 à Venise dans la bibl. de S. Michel de Murano : on a
dit par erreur, qu'un second exemplaire de ce troisième se conserve dans la bibl. de Genève
(Formaleoni, p. 26, 48; Tiraboschi, storia délia lettcrat. ital. t. YI, p. 118; Sprengel, chap. 20,
p. 229). Celui de 1471 est connu par la publication de Mitarelli. La bibliothèque de Vienne possède
aussi un atlas de Benincasa. Jean Potocki en l'examinant (périple du Pont-Euxin, public en 1796 à
Vienne, réimprimé à Paris 1829, p. 352), en indique la date m.ccc.lxxx, 1380; erreur rectifiée (à la
voyons par notre copie
BENUfCASA, 170. 105
170. Son fils André Benincasa d^Ancone, était aussi eompositenr et
dessinateur de cartes et d*atlas. Un de ses atîas de cartes nautiques de
la méditerranée et des côtes extérieures existe conservé à Genève, com-
posé de cinq cartons, dont deux offrent les côtes extérieures; le troi-
sième la partie occidentale de la méditerranée depuis Gibraltar jusqu^à
Sicile; le quatrième vers TOrient, depuis la Sardaignejusqu^à Gonstan-
tinople et Rhodes; le cinqième contient deux portions, représentant les
côtes de la mer syriaque et de la mer noire. Nous possédons les calques
de ces cinq cartes qui forment une seule unité (voyez n*90-93 de
notre atlas). Chacune est dressée sur une rose de seize vents, de même
échelle. Nous les avons réunies pour en former une seule carte géné-
rale (n* 90), en les réduisant d*un cinquième de Téchelle. On voit, que
pour composer Tunité de cette carte générale, elles s'empiètent mutu-
ellement à cause de la répétition des parties assez considérables entre
2 et 5, entre 3 et 4, entre 4 et 5. Quoique ces parties soient assez consi-
dérables, comme on le voit par la réunion de notre petite copie,
cependant partout, sans exception, les détours des rivages répétés sont
minutieusement les mêmes. Le dessin d'André Benincasa est d'une
exactitude remarquable (sss).
LsL carte porte la date de Tannée 1476 Andréas Benincasa f. (filius)
Gratiosi anœnitanus composuit, an, do, hcccclxxvi. Quand on l'examine
on remarque une singulière conformité avec la carte catalane qui est de
toat un siècle plus ancienne. Non-seulement on y voit les mêmes pro-
portions dans les détails et dans l'ensemble; mais la disposition de
rintérieur de l'Afrique, le cours du Danube et des autres fleuves, et les
légendes sont les mêmes. Nouvelle preuve que les écoles ne se distin-
galent point, puisant réciproquement aux mêmes sources. La pose
convenue d'Antille est la même que celle de la carte de Biancho.
André Benincasa suivit l'ancienne méthode sans aucun appareil des
e»gences de la théorie scientifique. Ses cartes n'ont aucune échelle
latitudinale. Elles sont d'une conformité extrême avec les cartes des
cosmographes antérieurs, autant sous les rapports avantageux de leur
composition, que des défauts vicieux. Elles résultent de la réunion de
portulans partiels dans un ensemble que nous avons examiné par la
graduation générale de la méditerranée des prédécesseurs. Quant à la
composition de Benincasa, j'ai essayé de l'analyser en détail, examinant
quelles projections développait la composition des cosmographes, dans
ces différentes parties.
Cet examen (n*' 92 de notre atlas) me démontre , que dans les mers
plus vastes, plus ouvertes, la composition est beaucoup plus sous l'empire
de la boussole ou des vents, que dans les mers plus rétrécies et com-
primées, où les distances tordent le pointage des vents et courbent les
parallèles de latitude. C'est ainsi que la portion de la mer méditerranée
entre Gibraltar et la Sicile se laisse graduer en lignes droites sur une
projection plane. La portion ultérieure jusqu'aux côtes de Syrie demande
la courbure des parallèles , qui est tracée sur notre carte par le rayon
(ttS) Je tiens la copie de ces cinq cartes à l'intercession de mes compatriotes résidant à Genève.
Le bibliothécaire Chastel s'est gracieusement prêté à leurs instances et un excellant dessinateir,
Diodati , en a exécuté les calques. Ma reconnaissance est sincère pour tant d'obligeances de leur
part.
106 GÊOGE. LATINB, Ut(Mi70.
de 150Vs parties ou degrés à partir delà ligne équinpxiale. Enfin les
parallèles de la mer noire, exigeant une courbure plus forte , résultent
d'un rayon de 98Vs*
La boussole ramenait nécessairement ces parties hétérogènes à la
situation plane : mais les distances maritimes, arrêtant le développe-
ment des rumbs des Ycnts qui n'avaient point d'échelle croissante,
opéraient vers le nord une telle divergence entre ces différentes parties,
que la longitude plus septentrionale grandissait par si par là outre
mesure. On le voit dans les distances continentales entre Oporto et
Barcelone, entre Gênes et Yenise, dans Textension delà Krimée, dans
celle de la France, dans l'enilure de la partie supérieure de Tltalie.
Mais la plus grave difficulté se présente dans la connexion des pro-
jections aussi .variées. Dans cette opération les positions entre Kerkinies
et Gerbi, ramènent évidemment la jonction de différentes directions des
côtes de TÂfrique : l'ouverture du golfe Caps, Cabes, est par conséquent
plus resserrée et Cabes enfoncée, et toute la mer entre Tripoli et Resgio
se trouve retrécie dans sa largeur. Afin de mettre dans l'ensemble l'Asie
et la mer noire avec l'Italie , la Grèce s'interposait avec ses innom-
brables tortuosités et son archipel. Labyrinthe très-fréquenté offrant
cette foule de petites distances , qui, sous la direction de la boussole,
devaient produire la composition de la Grèce et sa pose très-exactement.
Mais placée entre Otranto, Rhodes, Constantinople et autres positions,
déterminées et fixées par d'autres combinaisons, elle céda facilement aux
exigences de son emplacement; ses tortuosités se laissaient plier et
replier : inclinant la Morée, dressant vers le nord le golfe de Saloniki,
tournant le continent par la direction des côtes entre Avelona et Le-
panto, donnant en général à toute la Grèce une situation trop septen-
trionale relativement aux Galabres et à l'Afrique. Ces déviations ne
menaient pas les navigateurs, mais faussaient les directions de l'intérieur
du continent, et laissaient le site de cette partie centrale de la méditer-
rannée moins parfait que les autres (299).
L'autre ancoultain, Hotomands Fredutius, en 1497, mit à exécution
une grande carte de la merméditerranée : cornes HocUymanus Fredutius
do Ancona composuit, anno 1497 (230).
f220) Afin de foire mienx saisir la composition de la Grèce et de rarchipel danslcnr fausse position,
j'ai tracé le segment do la carte d'André Benincasa sur la carte des géographes d'aujourd'hui, dressée
à rédielle de 1 anconitain (voyez n* 93 de l'atlas). tJn coup-dWil peut faire appercevoir très-facilement
comment Constantinople, Ilbode, Athènes, Smyme, Naupacte, Candie, S. Angclo. Matapan, Carisios
et plusieurs iles, par leurs triangles, tiennent solidement l'ensemble. — Cette Grèce du moyen âge,
malgré tons ses défauts, était cependant préférable à celle qu'inventa et remania ensuite la renais-
sance des lettres d'après Ptolémee. La Grèce a donné beaucoup de peine aux géographes modernes.
Les formes qu'elle recevait dans les travaux de Delisle, de D'Anville , de Barbier au Bocage, I78S-
4788, comparées avec celles des cartes tontes récentes, de La Pie 48M, de Lamcau 48S7, et de plus
nouvelles encore , qui ne s'accordent pas, décèlent ces dombreases difficultés qu'on rencontre dans
d'innombrables sinuosités de la Grèce. Nous donnons dans notre atlas, sur une petite écheUe , les
tracées élaborées vers la fin du siècle dernier par d'Anville et Barbier du Bocage sur les matériaux
de l'antiquité et sur les renseiguements de leur époque. — Pour la partie descriptive de cinq cartes
de Benincasa, voves portulan général 4-34, et à la dernière page de supplément aux chapitre 85 et 98.
(130) Conservée à 1¥olfenbuttel. — Jean Potocki l'a examinée et a publié le portolan de la mer
noire sous le titre de périple du Pont-Euxin , Vienne 4796, in-4* ; ce périple a été réimprimé avec la
carte parles soins de Klaproth à Paris 4829, dans un volume du voyage dans l'Astrakhan du même
auteur. Potocki y a collationnc six portulans. La première édition était devenue si rare, qu'on a
payé cent cinquante cinq francs un exemplaire auquel manquait la carte. Ayant on propriété ei
l'original et la réimpression , je donne la copie du portulan de la mer noire freducine , réduite en
{iroportion de 400 à 33 de Téchellc, n* 83 de l'atlas. Ce portulan, tout-à-fait conforme au portulan de
a carte catalane de 4377, fournit une preuve de plus , que toutes les écoles étaient identiques, et
CARTES NAUTIQUES, I7i. i07
Les portulans se multipliaient chaque jour: ceux de Louis CadaMosto;
de PiEBRE Loreoan; risolario de Bembo vers 1480; Fisolario dell E^eo
de Bartolomeo da u Sonetti, exécuté vers 1485; carte di naulica (in
pecora mss.e niiniate) formant une collection de 55 cartons, réunis vers
1489 , et beaucoup d*autres se font admirer aujourd'hui encore à
Venise (ssi).
A Florence Paul Toscanelu, ûls de Dominique, physicus (médecin)
et astronome, (né 1597), arrivé à Tâge de 77 ans, exécuta en 1474 de sa
propre main pintado dasumano, une carte marine, caria de mareary de
Tocéan atlantique, pour le chanoine portugais Fernando Martinez, dont
il adressa un exemplaire à Christophe Colomb, insistant sur la traverse
très-facile par cet océan jusqu'à Tlnde et les pays des épiceries («^i).
Cartes nautiques espagnoles et portugaises.
i 71 . Passons maintenant dans ki péninsule pyrénéenne. Nous y voyons
d*abord, plusieurs fois mentionné : Cada Mosto, qui, de retour de ses
voyages, dessina lui-même les rivages explorés: cosi henotado in la
earta de navigar, facla per me Alovise da Moslo di queslo paese (335).
On conçoit que les écoles majorquine, catalane, castillane, conti-
nuaient à préparer les cartes nautiques à Fusage des marins et'des pilotes.
Le Portugal, augmentant chaque jour sa marine d'exploration, devenait
une fabrique abondante de cartes nautiques (234).
Le Portugal ouvrit même une école spéciale de composition de
cartes, à laquelle la mer méditerranée était indifférente : cette école
s'occupait plus de Thémisphère et du globe, elle faisait ressortir un
autre monde et fournissait les matériaux à de nouvelles constructions.
Mais ces nombreux monuments géographiques sont encore ensevelis
dans les ténèbres ; les investigations ne sont pas trop avancées, on n'a
aujourd'hui que des indications vagues sur Fexistences des cartes ou des
cartographes.
formaicot une sgqIo famillo. N'ayant pas de position de Constantinople : les positions de SInop, do
Trebizonde, de Paliastomo, de Cara,de Soldaïa, de Hcostomo, duturminaient Tapplicalion de la
mduation et nécessitaient la courbure des parallèles. Les degrés do longitudes sont trop forts : De
Booo que le portulan allonge trop la mer refativument à la largeur. Son obliquité est à peu près i2*.
(iSiJ Zurla sulle anticbc mappc idro-geograpbicho , cap. tU-il ; 34, Ai. — Potrus Lauretauus ,
iosigni ad Ropalnm de Jannucnsibns victoriae clarus et Aloysius à Husto, rci nantioaesaeculi XV»
hdle principes, compositis, ut vocant, portulanis, non solum Jonii maris et Acgei oras, sed haec
litiora univcrsa , tnm quae nltra gaditanum fretuni cxcurrunt, usquc ad germanicum mare usu
edocti, aecurate descripserc : (juo auxilio, tutiorem quaque versus nautis tiam pracstiterunt. —
En 4560 Girolamo Ruscelli, écrivait à Venise : et già da moite carte marinarcschc, nauute da alcuni
particolari, cbe banno lungamento nauigalo con esse (espositioni universali, sopni tutta la googr. di
Totomeo, cap. 8).
(tSt) Alex. Hnmboldt, examen crit. de l'bist. de la géogr. du nouveau monde, 1. 1, p. 244,217,
tS3. — La carta de marcar que Toscanclli envio à Colon, se trouvait encore conservée en 4527,
comme le dit le mscrit de la bisloria de las Indias lib. I, cap. 42, de Bartliolomé de I^s Casas, gardiîe
dans la biblibl. de l'acad. d'hist. de Madrid, (Ilumb. ib. p. 2i8). — La lettre au chan. Hartincx, à
bqnelle cette carte était jointe, est datée 25 juin de 4474.
raSS) Zurla, sulla antichc mappe idro-gcographiche, cap. 22, dissert. t. H, p. 451.
(234) L*amiral Cbristopho Colomb, le 25 septembre 4492, se mit à faire son point sur la carte,
conjointoment avec son pilote et ses marins (journal de son voyage dans llumboldt, examen de
Thist. de la géogr. du n. m. t. 1, p. 242). — Amerigo Vcspucci enseignait en 4502 aux pilotes l'usage
d« la carte marine (son S* voyage). — Magellan demanda aux pilotes, quelle route ils pointaient sur
leurs cartes (Pigafetta, p. 64). ^n équipage avait donc nue certaine quantité do cartes.
408 GÉOGR. LATINE, 1410-1470.
Les cartes de Pierre Roselli, de la fabrication majorquine de 1464 (235),
nous introduisent dans ces années, pendant lesquelles (entre 1470 et
1480) se firent distinguer en Espagne les dessinateurs de cartes : un
cantabre Martin Andalouze etFandalous Alfons Sanchez deHnELBA (ise).
En Portugal le licencié Gassaoilla , aidé par les docteurs Rodrigo et
MoYSE , composa une nouvelle mappemonde. Lorsque le roi Jean H
confiait en 1487 à Pietro de Covigliano et Alfonso de Païva, la mission
d'explorer Torient, Tinfant Emmanuel leur donnait une copie de la carte
de Gassadilla, pour qu'ils puissent diriger leurs courses. Cassadilla
obtint ensuite Févéché de Viseo; Rodrigue, médecin, maUiématicien el
cosniographe, fut attaché à la cour, conjointement avec un autre cosmo-
graphe versé Joseph (237).
Lisbone, siège des entreprises, lieu du concours des étrangers entre-
prenants, vit dans ses murs les deux génois: Christophe Colomb y séjourna
depuis 1470 jusqu'à 1484; il y apprit à son frère Bartholomé Colomb,
homme peu lettré. Fart nautique et le dessin des cartes nautiques :
de telle façon que ce dernier put , par le dessin , gagner sa vie à
Lisbone, et envoyé par son frère en Angleterra, il y dessina en 1488
une mappemonde pour Henri VU. Christophe lui-même s'occupait avec
assiduité de la composition des cartes. 11 en dressa une pour son premier
voyage ; pendant le cours de ses explorations il ne négligeait point de
faire les peinturus de ses découvertes, la figura de lo que el almiranie
hahia descubierlOj dit son compagnon de voyage, le pilote Alonzo de
Hojeda (sss).
En Portugal se trouva une carte valencienne (catalane), exécutée vers
1496 par Jean Ortiz (239). Martin Behaîm, allemand, ayant construit à
Nuremberg en 1492 son globe, retourna à Lisbone pour y dessiner les
cartes jusqu'à Fannée de sa mort 1506 ou 1507.
Une mappemonde hydrographique, composée par un amiral portugais
et enrichie vers 1500 par des additions de nouvelles découvertes fût
acquise par le duc de Lorraine René (1475-1508) (240).
(335) Une de ces cartes se trouve dans la bibliothèque de Jean Sigrried HocrI à Nuremberg, elle a
été mentionnée en i803, par Murr; l'autre dans le beau manuscrit de Comaro, passa au musée
britannique : elle contient en deux cartons toute la mer méditerrauée.
(936) Voyez p. 6i, de fasti novi orbis et ordioationem apostolicarnm ad Indias pc-rtinentium bre-
viarum,cum adnotationibus , opéra Cyriaci Horeili presbyteri olim in universitate Neocordubani in
Tucumania professons , Venctiis 1776, in-i". — Le dessinateur Huelba est l'Alonzo Sanchez pilote
de HueWa, qui suivant Inca Garcilasso (comment, reaies, 1, 3), Gomara (hist. de las Indias , 43) et
Acosta (1, 19j : se vantait d'avoir été, dans l'un de ses voyages aux Canaries en 4484, ponssé par le»
vents d'est jusqu'à Haïte, el d'avoir ensuite suggéré à Colomb l'idée de sa découverte. C'était une
fable qui circulait parmi le bas peuple (Humboldt exam. del'hist. de la géogr. du n. m. 1. 1» p. tM).
— Colomb s'entretenait avec Toscanelli de ses projets déjà en 4474.
(337) Il Ramiisio (mort 1537) vol. I, cosi dice : del 4487 alli 7 di maggio, furono spaociati tutti due
(Pietro di Covigliano et Alfonso de Paiva) in Santo arren, essendovi présente sempre il re d'Emma-
nuel, cbe allora era duca , ejgli diedero una charta di navigarre, copiata da un mappa mondo, alfor
dclla qualc v* intervennero il licenziato Cazadiglia, che cvescovo di Viseo ; et il dottore maestro
Rodrigo, abitaute aile Pietrenere ; et il dottore maeslre Moyse (Zuria, il mappa mondi di fra Mauro,
num. 36).
(238) Fernando Colon, vida de don Christobal Colon, 10; Antonio Gallo genovese, de navigatione
Columbi (ap. Muratori, rer. ital. script. XXIII, p. 30i}; Augustin. Giustiniani, collection des psaumes.
— Navarette, t. llI,collect. diplom. p. 839, 583, 586, 587. (Humboldt, exam.de l'hist. de la géogr.
du n. m. 1. 1, p. 85-88).
(239) Cette carte acquise eu Portugal par Percz Bayer est devenue la propriété de Cladera, qui
donna sa description en 4794. -- La famille d'Ortizest castillane.
(240) Elle est dans mon atlas, et je vais l'analyser.
CARTES NAUTIQUES 9 I7S. i09
Il convienl de ranger dans cette catégorie de la péninsule pyrénéenne,
la carte de Messine de 1511, egoj,,.. in la nohile citali di Me.,.na ano
. . . . XI . . . ,je8u œpo amen (iéi). C'est une peau de parchemin rognée en
parallélogramme de 0"',99 de long sur O'^ySG de haut; à Tun des bouts
duquel est resté adhérent un appendice de 0'",99 de long sur 0'",âO de
haut, qui paraît répondre au cou de ranimai. Le cadre de la carte
renferme la médi terra née avec toutes ses dépandances et une partie de
Tocéan atlantique, depuis le nord deTEcosse jusqu'au sud du rio deTor
sur la côte d'Afrique avec Madère et les Canaries, mais non les Açores.
Le cylindre sur lequel s'enroulait la carte était fixé à l'extrémité orien-
tale; l'appendice répondant au cou de l'animal, s'étend à l'extrémité
occidentale de la carte. Les légendes romanes sont mêlées de formes
italiennes et de formes espagnoles. Ces légendes, les peintures et les
épigraphes, tant maritimes que continentales, analogues à toutes cartes
nautiques du moyen âge, correspondent spécialement avec les cata-
lanes (s4s). Je présume que la configuration entière se conforme à celle
qui était établie dans la fabrique catalane.
A mon avis , il faut supposer que c'est une copie d'une ancienne
carte catalane, antérieure d'une centaine d'années, exécutée à Messine,
probablement par un dessinateur sicilien qui transfigurait et italiani-
sait quantité d'épigraphes catalanes, qui ne savait pas rajeunir sa copie
par les connaissances de son temps; savait seulement, conformément
à la date de 1511 qu'il inscrivit, changer les pavillons, et remplacer les
anciens de son modèle par les pavillons contemporains à son dessin
de 1510-1516. La carte, si elle a été composée en l'année 1511,
demandait quelque chose de plus : les monuments de deux géographes
suivants décèlent ce qu'on devait attendre de l'ouvrage de l'époque.
172. Jean de la Cosa, biscaino, d'abord pilote de Christophe Colomb,
ensuite navigateur maestro de hacer carias, dressa une mappemonde
en 1500, comme le prouvent deux légendes, une este cauo (de
S. Augustin de la terra firma) se descubrio en ano de mily ccccxcix (1^99),
por Castilla syendo descobridor Vincenians (Vincent Yanes de Pinzony
retourna de son expédition en septembre de 1500); l'autre dit Juan dé
la Cosa la fizo enel puerto de S. mja (s. Maria) en ano de 1500, (lui-
même revenant de l'expédition au mois de juin 1500); et l'absence
complète de découvertes postérieures (345).
(S4I) Carte de la collectioli Barbier da Bocage, h Paris, décrite et expliquée par D'Avezac, dans
nne note oa mémoire, la à la société géogr. le 45 mai iSH.
{iÂi) Analysant la carte catalane de 4S78-i378, nous atons plus d'une fois annoté cette corres-
pondance. (Voyez note 98 du chap. 159, et note 148 du chap. 450).
(S-43) Jean dé la Cosa, biscaïen, pilote de Colomb, dans l'expédition du tb septembre 4-498, jusqu'au
44 juin 4496 ; fit ensuite un Yoyage avec Alonzo de Hojeda le iO mai 4i99, revint mi-juin 4500 ; après
avoir achevé la carte, repartit cette même année 4600 en octobre avec Roderigo de Bastidas et ne
retoorea qu'en septembre de l'année 4504. Envoyé à Lisbone, il y fut emprisonné. Sorti de prison,
il exécuta son premier voyage 450i-4605, ensuite son second voyage 1C07, 4508; enfin il partit
le 44 novembre 4509 avec Hojeda pour coloniser la terre ferme où il péril à Tarvac ou Tubarco la
même année. — La mappemonde, produit magnifique et important de son travail, était en dernier
lieu en possession de Walckenaer. Elle doit paraître entière dans la première livraison des monu-
ments géographiques préparée par le savant Jomard. De grandes sections de cette carte parurent
d'avance pour notre usage. Santarem publia l'Afrique, dont la petite copie de notre atlas n* 446, est
réduite en proportion de 5 à 4 de l'échelle. — section du nouveau monde se trouve publiée dans
l'oovrage de la Sagra, histoire de Cuba, et dans le cinquième volume de l'examen de riiistoire de la
géographie du nouveau monde de Humboldt. La grande portion de la carte publiée dans ce dernier
no GÉOGR. LATINE, i410-li70.
C'est un des plus importants monuments de la géographie » à cause
de son auteur et de son contenu , élaboré avec exactitude , où Ton voit
que de la Gosa n'était pas un copiste âiais un compositeur ; et il faut le
dire un des plus habiles compositeurs et dessinateurs. Nous avons sous
les yeux son Afrique et le nouveau monde, y compris une portion de
rinde asiatique (voyez n^ il 1-1 14, 116 de Fatlas). On y voit que toute
la mappemonde est dressée sur deux grandes roses de seize vents , de
manière qu'elles forment deux systèmes entourés de seize roses pleines.
L'Europe et TAfrique se trouvent divisées entre ces deux systèmes.
Aussi l'Afrique est rapiécée de deux fractions de deux caries et de
ces deux systèmes, entre lesquels le dessinateur a placé une rose
isolée. Les points du centre de deux grandes roses et de rintermédiairc
suivent le sud du tropique du cancer. De la Cosa jela sur cette juxta
position des roses, la ligne éc^uiuoxiale et le tropique, ayant égard à
la latitude géographique. Le détroit de Gibraltar est porté à 56 degrés
de latitude. A la suite de quoi, à cause de la fausse inclination de la mer
méditerranée , Alexandrie et l'embouchure du Nil se trouvent aussi an
36* degré et Tunis monte jusqu'à 4>0 degrés. Mais ces degrés ne sont pas
marqués. L'école espagnole comprit bientôt cette aberration nautique
aussi invétérée et essaya d'y porter remède, comme nous voyons par les
cartes suivantes de 1527 et 1529.
De la Gosa trace sur sa mappemonde le premier méridien Un*a meri-
dional. Sur quelles hases serait-il fondé? je ne saurais répoudre. Les
îles devant le cabo descubierlo 1499 par Yinccnl Janes Pinzon par Caslilla,
sont certainement figurées sur la découverte fortuite et toute fraîche de
la fin du mois d'août 1500 (du Brasil) par Gabral. Mais ce n'est que plus
tard que cette découverte provoqua le tracé d'un méridien différent des
méridiens précédents. Le méridien de de la Gosa, pour être le méridien
du vrai occident de Tolède à 28® 50' de différence, paraît-être trop rap-
proché; c'est plutôt un méridien arabe des îles, à 22'^ de Tolède; ou un
méridien de la déclinaison de l'aiguille, qui préoccupait Mercator.
G'était l'époque où la longitude géographique devint une question
politique, entrait dans les discussions diplomatiques. Les cosmographes
étaient appelés à concilier la méthode nautique avec la graduation
recommandée par les astronomes et les philologues. La question de la
situation des Molukes, discutée par les partisans des deux méthodes,
engagea certainement l'école espagnole de rectifier les déviations des
cartes nautiques (244). Nous remarquerons cette rectification dans les
cartes de 1527 et de 1529, dont la première dessinée à Séville, est
l'ouvrage d'un cosmographe du roi d'Espagne : caria universal en q%ie
se conliene lodo lo que del mundo se a descubierto hasta aora ,** hizo la un
cosmographo de su mageslad, anno MDXXvn (1527) en Sevilla, L'autre
est dessinée par Diego Ribero, aussi cosmographe du roi d'Espagne. Il
6«t coupée par morceaux, divisée en six fragments. On rencontre quelques petites variantes dans
cette double publication. Nous en avons profité et nous donnons le nouveau monde et Tlnde sur la
même échelle que l'Afrique, c'est-à-dire réduit de 6 à 1 de TéchcUe. L'Inde y est tout-à-fait ptolé-
méenne ; elle se prolonge jusqu'au nouveau monde, et compose le même continent. Notre échelle a
été suffisante pour rendre toutes les inscriptions et la mer atlantique entière avec sa partie septen-
trionale; voyez n' I11-li4, 116 de notre atlas, et la dernière page du portulan général , supplément
;^x chapitres 13 et i8.
(344) En son lieu , ehap. 108, nous parleront de cette fameuse question des Molukes.
CARTES NAUTIQUES, 17ft« ill
avahsa bonne part dans la discussion au sujet des Molnkes. Sa carte
porte la même intitulatîon que la précédente, seulement son auteur y
est nommé : hizo la Diego Ribero eosmographo de su majesUtd, an
de 1539. Cette intitulatîon est continuée dans les extrémités méri-
dionales : la quai se divide en dos partes conformorme a lu capitulacion
que kizieron los catolicos reyes de Espana y el rey don Juan de Porlugal
en la viUa de TordesiUas : indiquant que la carte est divisée en deux ,
conformément à la capitulation conclue en 1494, à TordesiUas, entre
les deux rois. Dans cette division de la carte , Ribero néglige la con-
vention de iSaragosse et passe sous silence ces îles (Marianes et S. Juan
de las Yelas) qu'on y a nommé. Il désigne les courses des Portugais aux
Molukes , mais il les enclave dans la portion espagnole , et répète les
parties du méridien de contestation , ainsi que sur les deux bouts de la
carte, oriental et occidental, on voit le dessin des Molukes et des Philip-
pines, de Gilolo et d'une portion de la Chine.
Nous avons devant nous un fragment de ces deux cartes de 1527
et de 1529, contenant l'Afrique (notre atlas n** 112). L'Europe nous
manque : mais ces fragments sont suffisants pour faire connattre cette
réforme dans l'orientation de la mer méditerranée qu'avait opérée
l'école espagnole dans la composition des cartes nautiques.
Ces fragments du mappemonde de 1527 et 1529, sont dessinés sur
la même échelle, comptant leur longitude du méridien de la démarca-
tion et sont exécutés sur le même système du canevas des vents formé
en cercle de 52 rayons, qui occupe tout l'hémisphère de 180 degrés.
Or, le fragment de Ribero paraît comme copie du cosmographe
anonyme de 1527. Si l'on admettait quelques rectifications introduites
dans le dessin postérieur de Ribero, il faudrait aussi consentir à
quelques inexactitudes de sa part. Dans l'intérieur il fit évacuer les
fleuves et les montagnes hypothétiques et remplit le continent par de
longues légendes, qui ne sont pas inconnus au cosmographe anonyme.
Tous deux sous ce rapport se conformaient à leurs prédécesseurs (s^is).
Mais ce qui est plus important d'observer pour nous, c'est la pose de
la mer méditerranée. Sa fausse inclination y est ramenée vers la direc-
tion de sa latitude géographique. La boussole et la rose des vents des
marins reçurent une violente réprobation , par laquelle les cosmogra-
phes tombaient dans l'excès , puisqu'ils firent descendre Alexandrie et
l'embouchure du Nil au sud jusqu'à 28 degrés.
(948) Les deux Afriqaes du cosmographe 4527 cl de Ribero 4820, sont tirées de la bibliothèjiae
de Weimar et publiés par Santarem. On peut dire quelles sont identiques, copiées sur la même
échelle, do même modèle. La graduation y est appliquée de la même manière, plane, à commencer
po«r la longitude, do méridien de démarcation à 30 degrés ouest do Tîle de Fer : \oyez le u* 447 de
notre atlas. Le cosmographe a placé une grande boussole au 90"* degté sur la ligne ; Ribero retira sa
rose quelque peu vers Test, ainsi que le premier méridien sort vers Touest de l'orbite du cercle des
▼ents : ee qui n'a pas lieu dans la carte de 48i7. Quelques inexactitudes de dessin donnent naissance
à qnelgoes variations partielles. Madagascar est plus avancée vers l'ouest dans la carte de Ribero,
car le littoral de l'Afrique cède chez lui à la mer ainsi que la masse du contiuent est moindre : mais
cette diminution n'est pas sensible. La plus considérable répression du littoral se manifeste dans le
littoral de la mer méditerranée. Dans la suite des épigraphes, Torthograj^he, les méprises et quelques
•missions s'offrent plutôt que les différences réelles. Voyez la dernière page de notre portulan
fénéral, sopplémont aux chapitres tS et 88. — La carte sevillieune de 4827, appartenait jadis à la
ibliot. d'Ebner à Nuremberg, d'où elle est venue surcessivcmcut à Gotha daus la bibl. de Becker
et enin à Weimar, dans la collection du grand duc. Elle se trouve nommée par Mnrr (memorabilia
bibl. norimb. t. H, p. 97| et discutée par Lindenau (Zach, mon. corresp. octobre, 4840). Voyez
H nmboldt, l'examen de l'hist. de la géogr. du nouveau monde, t U, p. 484-486. — On a confondu
q aelqnefois la carte 1827 avec celle de Ribero : cependant elles se distinguent beaucoup dans le
112 GÉOGR. LATINE, 1410*1470.
Toutefois par ces deux cartes de 1527 et 1529, il est claire qu^on
essaya de régler la position de la médilerranée, sans toucher à sa lon-
gueur et £ sa configuration élaborées par les marins du moyen âge. Cet
essai est fait à la rois par les géographes éditeurs publiant les cartes
gravées et par les dessinateurs de Técole espagnole. Plus bas nous
reviendrons sur cette question et nous reprendrons la carte de Ribero.
Au musée britannique , parmi les manuscrits additionnels, figure un
atlas offrant un portulan de la méditerranée en quatre feuilles, dont la
nomenclature est indiquée comme espagnole et la date approximative
rapportée au commencement du xvi* siècle. Mais ce ne sont là que des
renseignements trop imparfaits pour satisfaire notre curiosité (dit
d'Avezac) (t*6).
173. Cependant il est temps de percer les ténèbres et les incertitudes
qui régnent à ce sujet ; là, où il y a de grandes collections, d'examiner,
d'analyser géographiquement , de confronter et comparer; d'établir les
différences et le progrès. On a dit, je ne sais sur quel fondement, que
Facadéfflie portugaise de Sagrès inventa les cartes planes. L'iuaxactitude
de cette assertion conduisit à en attribuer Tinveniion à l'école catalane.
Ni l'une, ni l'autre n'ont mérité cet honneur, car c'était connu depuis
les temps les plus reculés. La question serait donc réduite à la priorité
de l'adoption de cette méthode et le mérite ressortirait de la bonne
application. Les écoles de la péninsule pyrénéenne composaient leurs
cartes nautiques, hydrographiques, à la méthode de la rose des vents,
comme les écoles anlérieures de l'Italie. Toutes ces cartes sont sans
aucune graduation et là où il n'y a pas de degrée de latitude et de longi-
tude, il n'existe pas de projection méditée et choisie. Les cosmographes
constructeurs de cartes , réprouvant la graduation , ne s'accommodaient
à aucune projection, bien qu'ils les connussent. L'astronomie arabe leur
en donna l'idée, avant que la géographie de Ptolémée eùi mis à décou-
vert toute sorte de projections et anima la discussion à ce sujet* La
construction d'une carte géographique se développe nécessairement sur
une projection quelconque, et les cartes des cosmographes en avaient
une : mais soutenir théoriquement d'avance, qu'elles sont sur la pro-
jection plane , est une erreur.
La projection plane nécessite le décroissement de l'échelle sur toute
la ligne méridionale, et Faccroisement sur la ligne septentrionale: d'où
s'ensuit une graduation rectiligne-parallèle. Aucune carte nautique de
dessin da nouveau inonde, les deux années de différence en sont la cause. La première a 2 pieds et
4 1 ponces de hauteur» et 7 pieds et S pouces de longueur ; l'autre, haute de 2 pieds et 9 pouces est
longue 6 pieds 8 et «/t ponces. — M. C. Spreogel a donné une description de la carte de Ribèro
d*après son exemplaire qui se trouvait alors à Jena dans la bibl. de Biittner (Ueber J. Ribero'salteste
Weltoharte, Weimar, im Verlag des Industre-Comptoirs 1795, in-8*). La description est accompagnée
d'une section de sa carte contenant le nouveau monde , copiée par le géographe F. L. Giissefeld.
Nous l'avons réduite pour notre atlas n* 118, à une très-petite échelle en proportion de 20 à 3 de
réchelle afiu de donner l'idée dos connaissances de cette année , des découvertes anglaises et espa
gnôles de Gomcz, d'Ayllon et de Garay : bien que le nouveau monde ne soit pas l'objet de nos inves-
tigations. — On peut se servir (dit Hurr en parlant de la carte de Ribero : hist. diplom. de M. Behaïm)
pour l'intelligence de cette mappemonde, de l'ouvrage intitulé : Simonis Grynsi novus orbis
regionum ac insularum, veteribus incognitarum, Basileac, 1S32, 1837, fol.
(246) Une de ces cartes nautiques dont nous avons fait le dénombrement, carte nautique de la mer
méditerranée et des côtes occidentales de l'Europe , avait été publiée en 1646, à Amsterdam : faites
par G. Blaeux (Blaeuv) sous le titre de l'Europe mantime. Nous en fairons l'analyse en son lieu, dans
une note du chap 248, voyez n" 138 de l'atlas.
CARTES NAUTIQUES, 175. Ii5
ces siècles ne se prêterait à cette graduation ; chacune demande des
courbures (347). Les rayons des vents de la rose dirigeant la combinaison
des distances, déyeloppaient la construction d*un point central, ainsi
que réchelle devenait croissante en tous sens, décroissante vers le
centre. La con^osition se forme à l'instar d'une convexité aplatie par
la pression. Cependant le compositeur opérait dans toute étendue , à
ses «xtréoGiités et au centre, avec la même écbelle. La direction des
vents c^ait quelquefois aux appointations des distances : ailleurs les
distances furent modifiées en faveur de la direction. Ce canevas déter-
minait les inclinations et les espaces , réglait l'ensemble et fixait en
apparence la même édielle à la convexité terrestre aplatie sur le dessin.
Aussi ce ne sont pas les lignes droites d'une projection plane qui déter-
minent les latitudes géographiques de ces cartes, mais les lignes
oourbes d'une projection arbitraire et accidentelle qui ressort de Topé-
ration par laquelle la convexité fut aplatie par la composition et le
dessin (^48).
Les connaissances des mers éloignées, de l'océan, de tout le globe,
lorçMent enfin de se servir d'une projection qufeloonqne, d'adapter la
proje<^tioB plane, cylindrique aux cartes nautiques, de comprendre la
Batnrê de cette projection, enfin de la perfectionner. Il jf^siHait soumettre
les cartes 4 hi graduation, et, sans faire des inventions, choisir et donner
la préférence a certaine projection pour toutes les autres cartes. Quelle
est celle des écoles qui eut la priorité dans cette application d'une
neuvelle théorie? Est-ce Técote italienne, allemande ou portugaise?
de cpielle foçon telle ou telle autre s'est-elle acquitée de ce travail ?
^oila autant de questions qui demandent des investigations sérieuses.
Avant de nous engager dans cette perquisition, je veux clore la liste
des cartes et mappemondes nautiques construites au moyen de la
méthode de la rose des vents, sans alliage d'une autre. Malgré le ravage
datemps elles sont assez nombreuses mais peu connues. La carte hydro-
Sphlque loHN Rotz , datée 1542 , conservée au musée britannique
talogue du musée, n* 20, c. xi; Malte Brun, xxm, p. 651) est, je pense,
de leur nombre. L'atlas de la mer rouge de don Joan dg Castro est
certainement dressé d'après la méthode nautique.
On connaît de nombreux portulans composés en Italie au xvi* siècle:
de Vesconte de Marolla, 1547; di Blaze Venloiidet^ 1558; di Barlolomeo
^îoetttallorquîno,in Yenesia, adi 17 de junnyo, 1559 (249) ; de Villaroel,
1^9; de Mal. Meroni, 1604 (sso]. Tous ces portulans sont certainement
^fessés d'après la méthode nautique.
L'jsolario di Batedetto Bordone 1554, împresse in Yinegia per Nicole
^Aristotile dette Zopino, pliant sur plusieurs points sous les formes
pressées par Ptolémée , traçait toutes ses îles , et toutes ses cartes sous
I2 rose des vents. Cet ouvrage , avant de servir à nos études , demande
(^) Tri jeté la graduation retftîKgne sur la mer médkerrainiéo tle fra Maaro parce que l'échelle
** jj^l'op petite, et que sa oooie ne s'est pas soucié xl'observeT les détails.
j^ Si la giande echeHe de 4a carte de fra Mauro acceptait la graduation rectiligne comme sa
'^^*^B tnilaiie, il fondrait convenir qu'elle se distingue et sescpare de tontes les autres, que son
^°*P<i*>te«r fra Manro porta son attention à la boussole ci appointa ses onctions plus rigoureuse-
"•JJVïe les autres compositeurs.
uS) ^^^* 4i»ert. vol. Il, p. 9î; charte idrogr. c. 31.
l*w; Dépôt des cartes à Paru.
ii4 6É0GE. LATRIE, iiiO-147a.
quelques observations préalables. Il était achevé en 1521 : « lo uescooo
di Racoscia scrive a Leone summo pontifice hauer veduto (fol. uxm).
Le pape Léon X, privilégiant le 5 juin 1521 Féditeur, mourut le 1**
décembre de la même année. Bordone en 1526, s'adressait au sénat de
Venise pour préserver son ouvrage de la contreCaçon. Bordone mourut
en 1551, Tédition de 1534 est donc posthume. Or, toutes ces cartes sont
de Tannée 1521 ou antérieures. €et ouvrage était certainement utile et
assez recherché, puisqu'il fut réimprimé : mais Bordone miniator de
profession, par conséquent bon peintre, paraît être beaucoup plus versé
dans la philologie et dansTérudition que dans les connaissances géogra-
phiques. Nous profitons de ses nombreuses copies que son graveur
exécuta assez grossièrement (25 1).
TomcLso Porcacchi da CasligHoTie, arrctino, se montre plus instruit
dans sa publication de Tisole piu famose del monde 1572 in Yenetia,
appresso Simon Galignani elle graveur GirolamoPorro padovano, inta-
glia les figures avec beaucoup d art.
De ma connaissance est un magnifique atlas espagnol de Tannée
1575 (s52). J'y regarde la marche des découvertes : les rivages qui, à
partir de la terre neuve ne peuvent s'accrocher à la Floride; ceux de la
Californie bien formés en péninsule, vis^-vis de laquelle s^étend la
nouvelle Guinée ; les rivages de China provincia, où au delà de Nanqnin
les deux golfes de mare de Mangi couvrent terra Rasicola (Korée), c'est
le fruit des investigations assez récentes : mais ce que j'admire c^est la
mer méditerranée et les rivages de Toccident du vieux monde, produit
intact du moyen âge, dressé sur une échelle considérable, il offre dans
son ensemble et ses détails cette perfection de la cartographie nautique,
de laquelle étaient loin et très-loin les publications contemporaines
d'Ortelius et de Mercator. Cet atlas formait mes premières idées sur la
marche de la cartographie antérieure et l'examen précédent de plusieurs
cartes confirma tout ce que je pus m'imaginer autrefois.
Bientôt après, en 1584, on a commencé à publier les cartes nautiques
(voyez Texemple dans notre atlas n^* 158) comme on publiait les caries
continentales par la gravure sur cuivre.
Cartes continentales, 1520-1470.
174. La cartographie continentale dans le moyen âge, ne marchait
(iSO On y compte iOS figures insulaires y compris les plans de Venise et de TeaaistotaB, et la
carte de la Grèce toutes nautiques des marins. Six figures tirées de Ptolémée, à savoir : TabrolMUM,
Sicile, les îles Fortunées, Norvège, Bretagne et la partie occidentale de la mer néditemnée et de
l'Europe : sur cette dernière la configuration ptoléméenne de l'Italie et de l'Adriatique est roMiBiée.
Enfin l^universale , ou la mappemonde de Plolémée , avec tous les compléments de l'année IBM
(voyez n' i2G de notre atlas), compléments qu'on voit dans la carte portugaise de iSOI, dani celle
de Sylvano 1514, sur le globe de Schoner 4820. — Voyez les notes suivantes des chap. SOO et Ml.
(SSS) Cet atlas était la propriété de Joseph Sierakowski qui l'a apporté de l'Espagne et le deatlnait
pour la bibliothèque de la société des amis de lettres à Varsovie. 11 est dessiné sur le parchemin
vélin volume grand fulio composé de 18 cartons; 1-4 cartes spé<;iales de rivages visités par te aavl|^<
tion; 46"* carte générale sans épigraphe, presque muette; les trois derniers cartons traiteat dn
système du monde de Ptolémée, du soleil et de la lune, le dernier du calendrier. Gecnlendrier
indique en dernier lieu le premier janvier à A (jeudi), la lettre dominicale D; la pftqne à 11 mars et
tputes les fêtes mobiles de l'aunée, à l'année 4573, or c'est l'année de l'exécution de l'atlat. — Qa'eit
devenu l'atlas après la mort des son propriétaire (décédé en 483!) ? Je l'ignore. J'ai pris dans le temps
le calque du la mer méditerranée ; la copie de la carte générale confrontée avec les cartes spédales
et de plusieurs particularités qu'oflrent ces dernières. Ce n'est que depuis pcn que je rais rentré
en possession de mes copies et que je les ai à ma disposition.
CARTES CONTINENTALES, 174. il5
^ point à pas égal avec la carthographie nautique; elle n*est pas sans
mérite : mais il en reste moins de monuments. Certainement il n'en
manquait pas, mais ils se sont perdus comme inutiles. Quelques pein-
tures de la topographie fictive, ont peu de valeur pour nos investiga-
tions, et celles qui furent basées sur des données métriques des
distances, composées le compas à la main, nous manquent presque
complètement.
La table ronde de Roger II, 1151, qui contenait les positions nom-
breuses énumérées par la description d'Edrisi , s'est perdue. L'unique
exemple de la carte topographique offre la Bretagne, dont la membrane
remonte au xii^ siècle (n® 65 de notre atlas), et la terre sainte dansTatlas
de Sanato 1521 (n"" 77 deTatlas). Les fidèles ont élaboré cette dernière
par prédilection : elle servait plusieurs siècles aux pèlerins et elle jouis-
sait d^an tel crédit, d'une telle autorité et suffisance , qu'elle n'a subi
aucune amélioration jusqu'à l'époque de la renaissance des lettres. On
la publiait alors sans aucun changement en 1482, 1486, 1515, 1520,
45^, dans des éditions de Ptolémée (ass).
Le continent de l'Asie et de l'Afrique dans les mappemondes , décèle
Bne grande indolence dans les compositions topographiques et continen-
tales. Cétaient des pays inabordables ou peu accessibles. Mais les
propres pays des cosmographes demandaient le même soin que la terre
sainte, et se trouvaient a la portée des connaissances nécessaires.
Cependant ce n'est que dans le xv*^ siècle que nous rencontrons les mo-
numents de leur labeur sur ce terrain. Le ca maldu le Jlfauro, avant 1457,
élabora quantité de cartes topographiqnes de l'Asie mineure et de la
Syrie; Leonardi 1479, 1485, élabora une carie topographique de riialie;
la république de Venise possédait une carte d'Italie, modèle à copier.
Je pense que ces compositions perfectionnaient les compositions anté-
rieures.
On ne peut pas attribuer à ce perfectionnement topographique le
développement progressif que la forme de l'Espagne et de la France .
recevaient dans les mappemondes; ce développement de leur forme
opérait directement la mclhode de marine : parce que la composition
des cartes lopographiques, subordonnée à la méthode nautique, s'enca-
drait dans les portulans; ne pouvant franchir ces limites du littoral,
elle marchait de concert avec la cartographie nautique.
Pour concevoir une juste idée de ce que nous observons, nous n'avons
d'autre exemple à reproduire que les cartes topographiques qui se
trouvent dans la publication de Ptolémée, par Uebclin et Essler, à
Strasbourg 1513. Elles y sont comme un supplément, taillées en bois.
En son lieu, nous examinerons le contenu de ce supplément : pour le
moment nous nous occuperons des seules cartes continentales des cos-
raograpbes qui offrent les topographies du vieux monde; elles sont au
nombre de huit, à savoir : Espagne, îles britanniques, France, Alle-
magne, Sarmatie moderne, Italie, Grèce, Asie mineure (254) (voyez
nT 101, 102, 125, 121 de notre atlas).
{VSi) En 4890 elle servit encore de modèle et do tvpe à torra promissionis de Chrétien Adrirho-
mias de Delft, publiée d^abord à Cologne par Arnold ilylius, ensuite à Amsterdam par Henri Uond,
dans son allas. Plusieurs fois copiée en France elle a sa place dans Tatlas de ^'ilt.
(2S4} M. Vivica de Saint Martin, dans son histoire des découvertes, chap. 12, t. H, p. 487, fuit
il6 GÉOGR. LATINB, i4i(M470.
175. Ces cartes pourraient faire un ensemble : mais quelques-unes
ne se laissent pas réunir à cause qu'elles ne sont pas de Torigine com-
mune. L'Espagne et les îles britanniques ne cadrent point aYCC les
autres. Il est juste de considérer cette Espagne (n" i24), comme carte
spéciale, produit de Técole espagnole, tandis que les autres forment un
ensemble , et appartiennent à une autre école. Dans cette même caté-
gorie espagnole se range la carte des îles britanniques (n? 1^), parce
que les formes qu'elle offre sont les mêmes qu'avait tracées en 1575, la
carte catalane. Les six autres sont du même système, de la même école,
de la même mappemonde, ou d*un ensemble que nous avons restitué
(n» 101, 102).
Ces cartes spéciales topographiques des cosmographes étaient tour-
nées nord en bas; les éditeurs ont conservé celte pose par l'écriture
de la carte de France, ils l'ont changée sur toutes les autres. Cette pose
dit que les cartes sont d'origine antérieure. En effet, la Palestine est
de 1521, les Iles britanniques de 1575. L'Italie, l'Asie mineure préten-
dent à la même époque. Quoique ces cartes sont modernisées par les
additions des épigraphes : les îles Azores« Pico, Fayal , étant de Fan-
née 1466; Torchia magna, Bossina, ducatus Athenarum , Âlbania, con-
venables à la même époque et même à l'année 1500; cependant dans
toutes ces cartes l'élément de leur construction bien antérieur, enclavé
dans le littoral nautique, est indélébile. Les seules cartes de la Germanie
et de la Sarmatie moderne sont un produit plus récent.
Les six forment un seul ensemble (n** 101, 102). Quatre de ces cartes
sont justes de la même échelle (255). L'Asie mineure et la Sarmatie ont
une autre échelle toutes deux la même (sse). La réunion de cinq cartes,
dont nous reproduisons l'ensemble, n'offrit aucun empêchement, aucun
obstacle assez grave. Aucun ne s'est présenté pour réunir l'Italie avec
la Grèce et la Dalmatie; quelques irrégularités se rencontrent entre les
autres, ressortant, ou de la grossièreté de l'ouvrage, lorsque le tranchant
du graveur s'abusait, ou de l'insuftisance de l'exactitude du dessin (257).
La carte de la Sarmatie seule (n"" 102) souleva des obstacles moins
couciliables. Toutes les cinq caries sont développées sur la même
parallèle de la médilerranée; cette dernière diffère en ce que les géo-
graphes jugèrent à propos de la réduire au plan de la parallèle plus
sepicnirionale. Les positions longitudinales de Venise, de Belgrade, de
Constantinople et toutes les autres , le manifestent ostensiblement et
observer à juste raison rinégaUté prodigieuse de la marche dans leurs progrès respectifs : de la
géograpbie nautique et des représentations graphiques de la géographie intérieure; il explique ce
fait remarquable. Ses observations sont fondées sur les monuments du xiv* siècle. Nais s'il relate
quantité de cartes nautiques postérieures comme copiées des précédentes et descend jusque la
carte de Freduce 4497, il est à regretter qu'il n'ait pas pris en considération les cartes continentales,
éditées en 1513 à Strasbourg par Ubelin et Essier et ne les ait pas regardées comme copie de pins
anciennes. 11 aurait vu dans le progrès, une inégalité quelque peu moins prodigieuse, et la carte
continentale de l'Asie mineure publiée en 1613, avec son littoral, n'aurait pu manquer de devenir
l'objet de ses savantes explications, comme elle le mérite. Elle a lutté plus que les autres contre
l'installation des cartes postérieures, tombées fort au-dessous de ce degré auquel arrivèrent les
cartes du xv* siècle.
(26.%) Dans notre copie nous les avons réduit en proportion de 400 à 21.
(256) Elle est en proportion de 29 à 7, avec la nôtre.
(S57) L'asic mineure n'avait pas assez de place pour développer ses rivages occidentaux, comme la
carte de la Grèce les ébauche plus amplement; contrairement trois autres cartes s'empiètent réci-
proquement dans les Alpes. Ces irrégularités et quelques autres de moindre importance n'étaient
pas difficiles à régler.
CART£S €OMTIlfEnTALES, 176. 117
témoignent que la posilion longitudinale est d'un tiers moindre que
dans les cinq autres cartes. Dans notre copie nous avons rétabli le déve-
loppement conforme aux autres. Cette ésalité de dimension n'est pas
cependant en mesure d'écarter les obstacles que présentent la Yistule,
rôder et une partie du Danube entre la carte d'Allemagne et de Sar-*
matie; le Danube et le littoral de FEuxin, avec la situation latitudinale
de Gonstantinople entre la carte de la Grèce et de la Sarmatie. Aussi,
dans nos copies, nous avons séparé cette dernière des autres, sans
Toaloîr préjuger de la coordonnance possible (sss).
176. L'ensemble établi, était dessiné et fini sur le cuivre, lorsque je
commençai à réfléchir et examiner sa nature. Je remarquai de suite
Sue les degrés des latitudes tracés à projection plane par les géographes
ans la publication de 1515, étaient trop petits, que l'ensemble ne se
prête pas à la graduation plane. Recherchant l'échelle de la latitude, la
distance entre Gonstantinople et Baffo donnait le degré trop fort; celle
entre Rome et Messine trop faible; enfin l'autre entre Venise et Rome,
on degré moyen. En effet, la distance latitudinale entre Venise et Rome,
^ 35' étant presque sous le même méridien, offre le point le plus positif
poor obtenir le produit certain et tirer des conséquences comparatives.
Le degré étant établi de cette manière, les trois points: Marseille, Rome
et Gonstantinople, parurent propres à indiquer la courbure de paral-
lèles (259).
Voici maintenant ce qui en résulte par nos observations. En premier
lieu nous voyons que la composition de notre carte continentale n'est
pas de nature à se soumettre à la projection plane, mais plutôt à la pro-
jection conique ou quelque autre arbitraire, et qu'elle répond mieux à
Taplanissement de la convexité que ne le ferait la projection plane
recttligne. Ensuite nous observonSi que les parallèles tracées, s'adaptent
admirablement à la portion entre Bordeaux et Gonstantinople, et font
défaut croissant vers l'est en traversant l'Asie mineure. Les cartes nau-
tiques des cosmographes, et par conséquent continentales, soutenues
dans les ornières de ces autres, composées par l'ajustement de petites
portions, sans être dirigées ni par la longitude ni par la latitude, seule-
ment par les points cardinaux et par les vents, étaient, comme nous
l^avons vu plus d'une fois , susceptibles de ces déviations de parties qui
contrarient la graduation satisfaisante pour tous les points.
Ge défaut fait voir l'angle du golfe syriaque d'Alexandrette, de Gara-
mella trop ouvert, et la direction de l'Asie mineure contraire à celle
des parties occidentales. Ge défaut affecte plus ou moins toutes les com-
positions du moyen âge.
L^application des latitudes géographiques décèle un autre défaut,
Femarqué dans toutes les cartes nautiques : c'est la position oblique de
(t58) Tons les contours de cette Sarmatie moderne font partie de la carte publiée par Kobcrger,
dans la chronique de Hartmann Scliedel (fol. 209, 300) n* 410 de notre atlas, par consequeiit sa com-
â Tannée 1498. liais la carte de la chronique schedeliane, étant tout-à-fail plolérocennc, il eu
pinîtion est antérieure résulterait que cette Sarmatie moderne avait été composée en guise de rom
plénent de Ptolémée comme en ont été composées les régions septentrionales skandinavcs.— Cette
carte de la Sarmatie moderne avait été ensuite reproduite, modifiée par féchcUe dans l'édit. lyonnaise
de. Ptolémée 4538, et probablement dans plusieurs autres ouvrages.
(SS9) Cette opération paraîtra aux mathématiciens calculateurs » grossière et trop mécanique.
118 GÉOGR. LATINEt U1(M470.
la mer méditerranëe. Elle paraît moins forte qu*ailleurs, parce qu'on
a essjiyé de la rectifier, de changer la boussole par Torientation polaire,
mais elle continue à embarrasser la belle composition. Il semble que,
par des rectifications partielles, on Ta atténuée, dérangeant sur plusieurs
points Ténsemble de la composition nautique. Cependant, n'ayant pas
à notre examen la mer méditerranëe entière, il est difficile d'accuser
trop la composition. L'Italie tient une bonne position et le méridien de
Venise est justement tracé par la composition du cosmograpbe et par
la publication d'Ubelin. La graduation que nous avons appliquée inoHne
ce méridien dans le sens contraire et décèle encore un défaut dans
l'ensemble de la composition.
La mer méditerranëe n'étant pas entière , on ne peut former qu'une
induction approximative de sa longueur. Or, elle parait être plus longue
qu'à l'ordinaire, c'est-à-dire plus longue que 41® que les cartes nauti-
ques donnaient ordinairement. Cependant je pense qu'elle ne dépasse-
rait pas 45''.
Les cartes nautiques donnaient à la France une dimension insuffi-
sante. Nous avons observé qu'elle grandissait graduellement ; que les
portulans des rivages atlantiques approchaient leur échelle à celle des
portulans de la méditerranëe. La carte continentale ofi're sous ce rap-
port un accord suffisant, et l'intérieur de la France avait assez de place
pour se développer.
Cependant cette dimension convenablement agrandie, ne dériva
nullement de ce développement intérieur. Les opérations géogra-
phiques continentales n'imposaient point de règle aux formes des pays
maritimes; elles étaient subordonnées à celles qu'avait tracées U
géographie nautique.
L'ordre intérieur se formait par les itinéraires. Moins par leurs croi-
sement et triangulation , que par la simple direction des routes. On les
débrouille facilement sur notre carte continentale et plusieurs s'isolent
et se décèlent à tel point qu'ils paraissent traverser les déserts.
177. Considérant le défaut croissant vers l'est pour les latitudes de
l'Asie mineure , qu'offre la graduation appliquée et la courbure des
parallèles que ne demandait pas la mer méditerranëe des cartes précé-
dentes, je pris pour un autre essai de graduation : Rome, Constantinople
et Trebizonde, et tirai le parallèle de 41*> 0' (sso). Il dirige les autres
parallèles d'une manière plus satisfaisante pour l'Asie mineure et pour
la Grèce ; Bafo, Alexandrette, Tenar et tous les autres lieux , se rappro-
chent aux degrés de leurs latitudes respectives.
Mais ces parallèles ne conviendraient par aucun moyen à la France
qui se trouverait trop au nord , Paris dépassant 49** 0' de latitude ;
Calais remontant jusqu'à 52® 0'. Ces parallèles ne rectifient en aucune
manière l'inclination du méridien de Venise, ils l'inclinent au contraire
d'avantage.
La publication d'Ubelin et Esler présente donc une composition
impossible à la graduation généralement satisfaisante. Dans cette
(260) Certaiuement on remarquera des inexactitudes dans les parallèles de ma planche. Elles
résultent de l'iusulfisance de rin&trumcot pour tracer les grands cercles et de l*insuiBsance de
ma vue.
CARTES CONTINENTALES, 177. 119
grande partie, que nous avons réuni de cinq pièces, elle est viciée essen-
tiellement par le contact de TAsie mineure à Tarchipel. La grossièreté
de la gravure en bois pouvait y contribuer : je n'osai pas y intervenir
par mes conjectures. Mais pour Tensemble et pour Fincohérence de
TEspagne, la composition a été viciée, je pense, par les éditeurs eux-
mêmes, ou par ceux qui appliquèrent a la marge de chaque carte les
degrés des latitudes et les climats. Peut-être quils remarquèrent Tobli-
qnité de la mer méditerranée et qu'au lieu de tirer les parallèles incli-
nées, ils essayèrent, par une opération partielle, de remuer les parties»
firent remonter TEspagne vers le nord , ainsi qu'elle est décorée à la
marge par une échelle latitjudiuale appliquée beaucoup mieux que ne
Font les autres cartes. Par ces essais partiellement opérés sortirent
les édielles discordantes et incohérentes , et k composition nautique
Alt dérangée et viciée. A la suite de son dérangement et de l'application
fautive de l'échelle latitudinale , la longueur de la mer méditerranée
s'allongea, à ce qu'il parait, à 45 degrés.
Ecartant ces considérations qui touchent Tensemble nautique de la
carte, on voit cependant par cette carte que la topographie des pays se
trouvait sur une bonne assiette. Sa composition intérieure était loin de
marcher à l'égal avec les compositions nautiques : cependant elle y
trouvait un terrain sûr et bien déterminé pour progresser dans son
développement. Tout fesait espérer un beau succès pour la cartographie.
Mais un auteur ressuscité vint, comme un revenant, arracher les con-
stroctions continentales de leur assiette, jeter un désordre et une perr
tarbation éponvantable dans la géographie, entrainant pour longtemps
la cartographie dans des chemins rétrogrades et vicieux.
VI.
RENAISSANCE DE PTOLÉMÉE , DÉCOUVERTES OCÉANIQUES ,
1409-1470-1550.
178. Les Grecs dcTempire byzantin, par leur horismos ou par leur
coopération à la composition de cet ouvrage , traduit en arabe par uu
khovarezmien , agirent puissamment sur la création de la géographie
arabe. La première lumière qui jaillit pour celle-ci vint de chez eux.
Depuis cet événement , tout notre savoir sur Tétat des connaissances
géographiques dans Fempire s'éclipse presque totalement Pendant plus
de cinq siècles aucun événement géographique n'appelle les byzantins
à une intervention quelconque dans la marche de la géographie.
Nous savons qu'ils fesaient le dénombrement de Tentourage de la
personne sacrée de l'empereur; donnaient la description de palais, de
cérémonies et d'étiquettes de la cour ; composaient les descriptions des-
thèmes et climats de l'empire , des pays et peuples voisins ; touchaient
à leurs relations politiques. C'était cultiver la géographie.
Mais nous ne savons absolument rien de ce qui se passait chez eux
sous le rapport de la construction des cartes. Cependant ils copiaient
les manuscrits ainsi que les anciennes cartes géographiques qui s'y trou-
Tèrent mainte fois. De quelles cartes se servaient-ils à l'usage du jour?
de cartes surannées de Ptolémée, ou de celles de Kosmas, de horismos,.
ou de quelques autres ? on l'ignore.
Si nous ignorons les connaissances de la géographie chez les byzantins,
nous pourrions nous excuser par l'état stationnaire des leurs études
intellectuelles , scientifiques , artistiques : mais nous aimons mieux
avouer que notre ignorance vient du manque de recherches. Aussi nous
passons outre sur ce vide immense pour suivre un autre événement dans
la géographie, où l'intervention byzantine donna l'impulsion à toute une
autre direction de l'activité géographique.
Lorsque au déclin de l'existence de leur empire , les savants allèrent
séjourner ou se domicilier chez les latins, ceux-ci devinrent chaque
jour plus avares de leur savoir. C'était le moment où les connais-
sances géographiques des byzantins devaient se dévoiler : mais alors
même, elles nous échappent. Ou les byzantins étaient à tel point igno-
rants qu'ils n'avaient rien à communiquer , ou les latins négligèrent de
les examiner. Le fait est , qu'au sujet de la géographie, les latins se con-
tentaient de se mettre en possesion de vieux monuments géographiques
que leur apportaient les byzantins, à savoir : le géographe Ilomer,
son scholiaste Eustathe, les orphiques, Dionyse, Strabon , Ptolémée, etc.
iâ3 GÉOGR. LATINE, 1470-1550.
Cest le trésor géographique que les byzantins présentèrent, à la place
de leur propre connaissance, aux études des latins. C'est un grand évé-
nement dans rhistoire de la géographie, car ce trésor moisi, en opérant
une corruption funeste dans la géographie nautique des cosmographes,
ouvrit une mine abondante en grandes et inépuisables conséquences.
179. La géographie de Ptolémée était assez répandue dans Tempire
byzantin. Elle était connue vers 1150 par les géographes de la Sicile,
qui, peuplée en partie par les Grecs, avait des relations intimes avec
Tempire. On eut donc pu espérer de trouver quelque géographe oa
savant latin, connaissant Texistence de cette géographie, possédant son
exemplaire. 11 n'y aurait rien en d'extraordinaire si on eut remarqué
dans quelque monument géographique Tinfluence de cet ouvrage. Mais
rien de tout cela ; ni possession , ni influence , ni connaissance de
l'ouvrage positivement avérée par quelque monument géographique,
ne se décèlent nulle part , durant l'espace de plusieurs siècles. Edrisi
atteste que la cour du roi Ro^er, vers 1150, avait un exemplaire de la
géographie de Ptolémée. La bibliothèque de saint Marc à Yenise, avait
uni code du xni* siècle , comme on Ta déterminé graûquement. Son fron-
tispice, représentant l'astronome géographe dans sa royale couronne,
est accompagné d'un épigramme tetrastiche en deux langues, grecque
et latine. En examinent les constructions qui environnent la figure
debout de Ptolémée, on remarque le goût gothico- mauresque (Georgii
Martini Raidelii, commentatio de Ptol. géogr. 1757, Norimb. p. 10-lâ).
Or, il faudrait conclure que cette copie grecque du xin" siècle avait étié
exécutée par un latin et à l'usage des latins. Cependant plusieurs siècles
se sont écoulés et la géographie de Ptolémée n'a laissée aiicnue trace
parmi les latins.
Ptolémée, comme astronome , était bien connu par tous ceux qui
étudiaient Thebit, Alfragan,et quelques antres arabes. Cependant il est
plus que douteux, que l'ouvrage même de Fastronomie de Ptolémée fât
à cette époque dans les mains de quelques savants latins. Mais la
renommée astronomique de Ptolémée était très-solidement affermie par
les arabes. Les astrologues, les marins, les cosmographes , par tradition
scientifique, connaissaient son nom. Les cosmographes qui extrayaient
Isidore de Séville, qui savaient que Pline était le maître dans la géogra-
phie, Plinus maeslre de mappa mundi, savaient aussi que la ville
persanne de Schiraz, s'appelait autrefois Gracia, que là fut première-
ment inventée l'astronomie par le très-savant Ptolémée : per lo aran
savi Tolomeo ; ils connaissaient de même , comment le savant Ptolémée
avait réparti les signes zodiacaux par les membres du corps humain ,
pour en tirer les pronostics. Ce savant Ptolémée était aussi profond
astrologue; s'il égalait en géographie le maître Pline; s'il a jamais écrit
une géographie comme Isidore, c'est ce que les cosmographes de l'école
la plus avancée semblent ignorer (cartes catal. de 1378).
Cependant, à cette époque de la renaissance des lettres, il y avah
chez les latins une tendance à étudier le grec dans les anciens ouvrages
qui arrivaient à leur connaissance. Toutes les vieilleries grecques parais-
saient merveilleusement excellentes. A mesure que l'empire byzantin
déclinait et diminuait, l'étude de sou idiome et de la science antique
PTOLÉMÉE, 180^. i23
augmenlait chez les lalins. L'empire sollicitait Tappui des occidentaux,
saos succès, ses eofants y trouvaient un refuj^e et chacun d'eux était un
instructeur, apportait des manuscrits recherchés dans Tcmpire même
par des voyageurs latins. Vers la fin du xiv' siècle et du commencement
de xv*, des codes de la géographie de Ptolémée étaient assez nombreux
en Italie. Ghrysoloras en avait, le cardinal Bembo s'en était procuré,
Gemistius Pletho en apportait en arrivant en Italie , les bibliothèques de
Venise, du Vatican et d'autres s'en procurèrent (26t). La péninsule
pyrénéenne n'a certainement pas négligé d'en acquérir.
Mais la connaissance du grec formait les belletristes, les philologues ,
les érudits ; elle était ordinairement étrangère aux hommes de science ,
aux mathématiciens , aux astronomes, aux géographes. Les philologues
regardant les magniOques peintures de 27 caries d'Agatbodaîmon ,
émerveillés de l'exubérance des longitudes et latitudes qui fixaient aussi
admirablement toutes les localités, déploraient l'ignorance des géo-
graphes qui méconnaissaient le précieux monument de l'antiquité; et
quand ils se donnèrent la peine de comparer les mappemondes avec les
cartes du géographe grec, vivement affligés, ils gémirent de ce que les
cosmc^çraphes ignoraient la haute perfection du divin Ptolémée. Pour
éclairer les ignorants il fallait tout d'abord livrer l'ouvrage grec à la
langue latine.
i80. Â l'invitation du cardinal Bembo, le savant grec Mauouel Ghry-
soloras (mort 1415), commença une traductien latine, dont il se désista
lorsqu'il vit que le même travail était entrepris par un homme plus
capable que lui de le conduire à bonne fin. Jacq Angelo le florintin , du
vivant encore de Ghrysoloras, exécuta la version vers 1405, en donnant
à son volume le titre plus attrayant de cosmographie, observant que le
titre grec de géographie ne répondait pas suffisamment à la valeur et au
contenu de l'ouvrage. Il dédia sa version au pape Alexandre V (pape depuis
le 26 juin 1409 jusqu'au 5 mai 1410, jour de sa mort) (362). Les copies
(M4) Aiijoard*bai la biblioth. du Vatican possède 10 codes grecs (parmi lesquels y en a 2 de la
iMbliothèque de Heidclberg , pillés pendant les guerres de trente ans] ; à Florence plosiears, duas
eue ithrum fatnilias; dans l'abbaye florintin un, et dans la bibl. iaurentienne quatre; dans la
bibliothèque de Paris il y en a au moins cinq, dont deux remontent au xiv* siècle; et ailleurs (les
notices de C. F. A. Nobbe, en donnent une ample ënumération).
(263) Ptoiomeus quam multa diuinitus edidit, iuterque et orbis situm diligentissimc ut cetera a
«nathematicis non discedens exbibuit. Hic enim alio quodammodo quam nostri latini , inter quos
Plinius Secundus cosmographorum palmam Terre \idetur, rem hanc.-tractauit. llli enim, licet habita-
bilem universi orbis situm descripserint, non tamen ex eorum pracceptis plane captari potcst, qua
artetotins orbis pictura formari valeat ut proporlio cuiusqne partis ad totura universale servatur ;
preterea nemo ab illis doccri potest , nisi crassiori quodammocfo, que seu quante incliuationes sunt
ad qoataor celi plagas, eorum situm quos in pictara iingere decreveris. Neduni quippe longitudinem
locornm.a fixo quodam totius nostre babitalis termino ductum : aue tamen rara inventio est; sed
mac latitudinem ponunt. Nostrornm etiam nullus precepta tradidit habitabilem ipsum orbem
in plures pictore tabulas posse dividi, mensura cnm toto equo servata. Eorondem etiam nemo prodit
qia ratione orbis ipse noster, qui spericus est, in superficiem planam dedncatur. Non quod nostros
<{ai pTMtantissimi in ca traditione extiterunt viri , arguendos tantisper ccnsearo ^ sed quod suis
contenu luminibus, bistoricorum more , rem suam , summa industria et complexi et prosequuti, qui
et aliaqnedam habent, que ab auctore hoc IHolemeo videntur pretermissa. Ut autem que ab illo
abielnta, divine quodam ingénie sunt, cum nostris etiam habeanlur, in latinam ipsa curavi tranferre
«ernoi^em... Ceterum geographiam, hoc est terre descriptionem , auctor hic noster, boc orane opus,
grece nuncupat, quam appellationem,Tir seculi nostri eruditissirons. Manuel constantinopolitanus...
dan in latinum eloquium id transfère ad verbum licet pariter incipit, non mutauit; sed nos in
coamograpfaiam id vertimus. Quod vocabulum , licet grecum eciam sit tamen apud latines ita usita-
^Qni,ut jam pro nostro habeatur. Credamus que virum eum, si id quod transtniit, emendasset ,
onnio illnd in cosmographiam mutatunim finisse (Jacobi Angeli epist. dedicatoria).
124 GEOGB. LATINE, 1470«1SK0.
de la traduction d'Angclo se multiplièrent et se répandirent dans tous
les états de TEurope. Pendant plus de deux générations on n'avait
d'autre géographie de Ptolémée en latin que la version d'Ângelus (263).
Cette première version n'était ni suffisante , ni satisfaisante. En con-
frontant les codes grecs et les copies latines, on remarquait tant de
fautes, tant de variantes, qu'il fallait continuellement reprendre la
version d'Ângelo. Or , en Allemagne Nicolas Donis , bénédictin de Ret-
chenbach, courut à la charge avec de nouvelles forces et fit une nouvelle
traduction de la géographie de Ptolémée. 11 dessina les cartes confor-
mément à sa traduction, et en 1471 dédia son ouvrage au pape Paul II
(mort le 28 juillet 1471). Les copies de sa traduction. et de ses cartes
se multipliaient et se répandaient, paraissant être préférables à la tra-
duction de l'italien Angelo.
En attendant, la première édition de la version de Jacq Angelo parut
par les soins de Benoît trevisan , et Angelo Mlchaele , imprimée à Vicenze
en 1475 dans la typographie de Herman Levilapis , le colonien.
Dès cette année, les éditions imprimées de la géographie ou cosmo-
graphie de Ptoléniée se succédaient sans relâche. Dans le courant d'un
siècle il en parut 25, élaborées de différentes manières par les italiens
et les allemands. Sur 40 autres qui se suivirent assez rapidement , deux
seulement parurent tardivement en grec, toutes les autres étaient
latines ou italiennes à l'usage du vulgaire (264). Certes, c'est l'Allemagne
et l'Italie qui absorbaient pour la plus grande partie les exemplaires
de ces nombreuses éditions : mais sans contredit , les autres pays ^
comme la France, le Portugal, l'Espague, y avaient leur part. Les
philologues , les bibliothèques , les écoles géographiques, les particuliers,
cosmo^raphes, gens de lettres, dilettanti, possédaient facilement ce
trésor inépuisable, admirant l'efTervescence de la renaissance des lettres.
181. Si jamais de petites circonstances produisirent de grands événe-
ments , il serait difficile d'indiquer quelque autre aussi fertile en résul-
tats inattendus, en conséquences aussi surprenantes, prodigieuses et
prolongées. Des conséquences incalculables s'en suivirent. L'étude de
la géographie est détournée , et lorsque sa marche rétrograde commence
à 1 accabler, elle prend des dimensions gigantesque et les .connais-
sances se dilatent dans tontes les directions: le monde, le globe, l'esprit
humain, l'état social, les souches de la race humaine ébranlés dans leurs
^263) La bibliothèque de Bourgogne à Bruxelles possède iid magniflque code de ces copies,
finitus 4481, décima quarta die mensis febmarii. Mais il n'était toat-à-fait achevé, que anuo
dui 4485, octava die decembris, comme l'atteste l'annotation du copiste. Nous nous sommes senri
plus d'une fois de ce code, à cause de quatre cartes modernes, dont ou voit quelques copies dans
notre atlas. — Ce manuscrit avait été sans doute copié en Italie en 4488, d'un antérieur de 4481,
pour la bibliothèque de Bourgogne. La preuve de cette présomption se fait voir non seulement
dans la double date de la copie et de sa conservation dans la dite bibliothèque : mais dans la carie
de la France de ce magnifique code. Cette carte bien élaborée et finie sur tous les points offre une
singulière lacune pour la Belgique : d'où l'on peut conchire qu'un copiste italien laissa cette portion
vide, afiu qu'elle fât plus exactement remplie et achevée sur le lieu par un homme du pays. — En
Allemagne on a fait grand éloge de la beauté d'un code de la bibliothèque impériale de Vienne ,
copié en 4454 à Florence, par Jean Tbessalo Santariote; de celui de la bibliothèque de S. Marc à
Venise et de celui qui, qualifié de code ebnerien , appartient au comte Apponi : tous accompagnés
de cartes (Heeren , commentatio de fontibus geograpbicorum Ptolemaei , Gottingae 4827). l\ parait
3ue le code bruxellois ne cède en rien à ces codes, s'il n'est plus beau, plus splendidc, parce qu'ii est
écoré de peintures, lorsque les autres sont , sine ferarum et hominum figuris.
(264) Voyez à la fin de ce vol. l'appendice n« 4, les éditions de Ptolomée.
PTOLÉMËB, 181. 125
bases changèrent de face : et partout intervint la géographie de Ptolémée
ressuscitée.
L*idée d'une extension plus considérable de Thabilable vers l'Orient,
germait parmi les savants depuis longtemps. Elle avait été suggérée par
Pline et quelques autres naturalistes. Il n'y avait donc rien de surpre-
nant quand un compositeur de la mappemonde se montrait disposé à
retendre. Nous avons observé comment les découveries continentales ,
nommément celles de Marco "Polo, décidèrent les cosmographes de donner
à rOrient asiatique de plus grandes proportions et à élargir le cercle
océanique qui entourait Thabitable. Les mappemondes du camaldule
¥auro , d'André Bianco , nous en fournissent un exemple sous la forme
ronde; la carte catalane et plusieurs autres sous la forme oblongue.
L'Orient prenait plus de place, et ce développement des mappemondes
s'exécutait sans aucun alliage de l'élément étranger. On ne pensait pas
qu'on y eût fait un pas plus loin , ou quelque opération réformatrice :
on s'imaginait seulement qu'on commençait à mieux explorer ce que
contenaient les mappemondes précédentes, serrées par l'ignorance.
Aucune distance déterminée n'a pu diviser ce nouveau développement;
aucune idée de longitude géographique n'a germé dans cette extension.
L'idée de 180* de la longueur de Thabi table établie du temps de Roger,
se perpétua peut-être par tradition ; la vue des caries arabes la rappelait
à Gecco, à Bacon , à tous ceux qui aimaient à la nourrir, mais les dessi-
nateurs de mappemondes ne se souciaient guère s'ils débordaient cette
longueur ou non. Personne ne s'imaginait que les investigations de
Marco Polo pouvaient s'étendre au delà sur un autre hémisphère. 11 fallait
qu'on eût tiré auparavant du néant le fameux astrologue Ptolémée, pour
rendre ce service au pèlerinage de Marco Polo.
 la vue de Ptolémée, les autorités d'Orose, d'Isidore, de Solin, de
Strabon, de Pline, des itinéraires , déclinèrent infiniment. L'autorité
nautique des pilotes, et les mappemondes des cosmographes parurent
insufiissantes , suspectes. Ptolémée réunissait le langage descriptif aux
données positives , résultat évident des opérations mathématiques et des
observations astronomiques. Les projections et les positions géogra-
phiques lui donnaient une supériorité et une apparence de perfection,
à laquelle ne sont arrivés aucun des anciens connus, aucun des cosmo-
graphes parmi les latins. Or , il ne restait qu'à reprendre cette vieille
perfection, sans condition; à renoncer à ses propres moyens, à ses
propres productions , à retrouver les perlustra tiens modernes sur les
vieilles caries ptoléméennes, ces perluslrations modernes n'étant que
la reconnaissance de l'antique connaissance du divin géographe , éten-
due le long de ISO*" (265).
Mais en confrontant les relations de Marco Polo, il devenait évident
que ces perluslrations étaient allées plus loin. Kataï, Mangou, répon-
dant à Serika et Sinia, se révélèrent au perlustrateur comme régions
d'immense étendue. Serika était trop étroite pour Kataï, Sinia, allongée
sur la lisière de l'habitable, le long d'un seul méridien du 180' degré,
(f68) D»s l*année i4i0 le cardinal d*Ailly ne s'inquiétait guère de Kextension de l'habitable au-
deii de ^uart dû globe. Ce n'est qu'après avoir fait connaissance avec Ptolémée qu'il pensa à la
nécessite d'en étendre la longueur au-delà de 180 degrés. Voyez ci-dessus cbap. i58, i59.
J26 GÉOGR. LATINE, 1470-1550.
n*offraient sur Thémisplière de Thabitable aucune place pour Mangou
et Kalaï. Or , ces régions heureusement perlustrées furent inconnues
aux anciens, parce qu'elles n*ont plus de place sur la carte de Ptolémée :
il ne restait qu'à les ajouter en continuation à Thabitable et de se porter
au delà du 180* degré sur un autre hémisphère. Les cartes du géographe
astronome n'empêchaient point ce procédé ; Ptolémée n'avait pas empri-
sonné son habitable dans un océan enyironnant, son continent était
disposé à s'étendre par des terres inconnues au delà de 180 degrés et
laissait un champ ouvert et un immense espace, un vide pour étendre
les perlustratlons de Marco Polo sur l'hémisphère des antipodes : c'est
là que la Chine, Mangon, Kataï, Soumatra, Zeilon, Zipangou, prirent
à leur aise les assiettes inoccupées jusqu'à 250* de la longitude de l'île
de Fer. Pour compléter l'atlas ptoléméen il ne restait qu'à attacher
les cartes des pays inconnus aux anciens. La Skandinavie eut en effet
la première cet honneur; l'Orient reculé de Marco Polo s'y attendait à
juste titre ; la carte des frères Zeni n'obtint cet honneur insigne que
très--tard.
182. A cette époque de ferveur pour les découvertes de nouvelles
terres , les moindres pulsations dans la géographie sont souvent de la
plus haute importance. Aussi comprendrait-on mieux les grandes consé-
quences si l'on réussissait à déterminer avec certitude , où , quand et
par qui avait été connue cette idée sur Ptqlémée; qui en a donné l'im-
pulsion , et de quelle façon on se prit pour complémenter Ptolémée,
pour se servir de ses cartes à l'usage du siècle.Cette marche de choses
n'a pas anticipé la version latine de sa géographie et je pense qu'elle ne
s'est décélée que vers la fin du xv* siècle.
Pour cette opération et la transfiguration des conceptions géogra-
phiques, il ne fallait ni génie, ni talent, ni coopération de quelque
célébrité extraordinaire dans la géographie. L'ignorance et l'ineptie
des savants philologues y travaillait, illustrait, interprétait admirable-
ment le monde connu par le monde ancien , et petit à petit elle rem-
plaça, sur les cartes ptoléméennes, les épigraphes anciennes par des
modernes. La nomenclature de Ptolémée devenant la base, le guide
des nouveaux géographes, n'était cependant pas dans leurs études
suffisamment comprise sans la confrontation avec Strabon, Pline, Mêla
et autres anciens, sans l'érudition comparative de la nomenclature
moderne, et la géographie moderne, rédigée par ces savants, ordinai-
rement dans la langue latine, n'était pas suffisamment polie, illustrée,
achevée, quand elle était privée des dénominations anciennes dont le
plus riche magasin et le mieux coordonné se trouvait dans la géogra^-
phie de Ptolémée. Cetle invasion de Ptolén)ée dans les régions géogra-
phiques du moyen âge n'a pu se déclarer qu'à la suite de la traduction
latine. Nous allons suivre le progrès de cette invasion et indiquer, au
moyen des cartes qui nous sont connues, les dates du développement
de sa domination.
Nicolas Donis, 1470.
Jacq Angelo mit sa traduction en cours en 1409. Elle existait depuis
longtemps en manuscrit et il s'est écoulé un laps de temps assez consi-
NICOLAS IK)NIS9 I8i. i^l
dérable a?anl qu'elle fût imprimée en 1475. Elle parut sans atlas, sans
aucune carte moderne ou modernisée. En même temps, Nicolas ]>onis,
prépara , en 1470, une version nouvelle et se mit à dessiner des cartes
en guise de celles d'Âgathodaîmon. Il ne dit point s'il avait quelques
caries ptoléméennes latines antérieures aux siennes; il observe seule-
ment que les cartes (grecques d*Âgathodaïmon) souvent ne répondaient
point au texte, n'étaient guère suffisantes, à cause qu'on n'observait
dans leur dessin ni les distances , ni la grandeur des îles ; il a donc
entrepris de les exécuter plus scrupuleusement, ne s'écartant en aucune
manière de Tintention de Ptolémée, mais en rectifiant le dessin, car il
est inadmissible que Ptolémée n'eût dessiné lui-même des tables plus
exactement et plus consciencieusement. En même temps il s'explique
que des deux modes de projection proposés par Ptolémée , il a préféré
et choisi le mode rectiligne aux méridiens inclinés. Et tous ces soins
qu'il se donne avaient évidemment le but de rendre les cartes ancien-
nes propres à l'usage moderne (ses). La géographie de Ptolémée,
latinisée depuis 60 ans , fut par ces soins dotée d'un allas en latin ,
composé de 27 cartes. Nicolas Donis laissait copier et copiait lui-même
ces cartes. Elles furent bientôt attachées à maintes codes manuscrits ,
même de la version d'Ângelo (ae?).
En attendant parurent en Italie, en 1478 et probablement en 1482,
deux éditions de Ptolémée, l'une à Rome, l'autre avec la date erronée
de 1462, à Bologne, toutes deux accompagnées d'atlas, gravés en cuivre.
Je n'ai jamais eu le bonheur de rencontrer et voir ces éditions; aussi
je ne saurai dire si elles avaient leurs cartes conformes au dessin de
Donis, mais je les vois postérieures à l'émission de celles de l'Aile-
(M6} Cam que summo ingenio, cxquisitaque doctrina Ptolomeus cosmographus ptnxisset, îd liis
aUquid nouari attempt«remus fore : ut hic nostcr labor in multoram reprebensiones incurret.
Omnes enim qui bauc nostram picturam , ab ea quam PtotomAUS edidit, paululum abhorrentem,
certe nos , vel imperitie Tel temeritatis arguent : nam plane nos aut ignorasse quid egerimns , aut
temere anses esse, tautum opus contaminare aiïiriaabunt , cum aliqois ex parte iUudimmutatum
cernent, non enim sibi persuadere poterunt, nec fas esse exisiimahunt ut tantum vlrum quanlus
certe is fuit, si quis alius pingendi orbis terrarum melior modus extitisset, is eum fugisset, cum is
soins faerit qui tam iuter multos excellentes cosmographos qui ante se florucrunt, modum videret,
Sio sitam terrarum omnium in tabulis primus pingeret. Quasi vero aut princeps ille poetarum
orneras a Pisislrato in ordinem redigi ; aut Lueretii diviunm opus a Cicérone eroendari ; aut
toUetane tabule ah Alfonso corrigi nequiuerint. Quare hi sane erunt, qui nibil laudabuot, nisi quod
M itttelligere posée confidant, quenque sperabunt animo et cogitatione complecti valere, eundem
bene pingendi orbis modum, esse censebunt. Et cum obruentur crebritate linerum longitndinalinm
Bon eqve distantium , raram illam et vastam Ptolomei picturam , lectis lineis distinctam se malle ,
5nm nanc nostram multiplicem et commodam pendentibus inclioatisque lineis discretam dirent,
eque vero nos hec ideo ounc dicimus, ut quidquid in Ptolomei pictura reperiatur, quod corngi tgI
emeadari, aut in ordinem redigi oporlucrit, cum omuia ita scienter ac pnidenter \ir ille pinxerit,
«t Bibll quod ad rationem sitns terrarum in eius tabulis deese videatur : sed ut illos sue arguercmus
ignorankie, qui et cum nuUa talium rerum scientiam aut cognitionem tencant, tamcninvidia et livore
qnodam moti, si qnid Ttderintab altero editum , quod ingcniiscorum impar sit, statim ad eius
^tttperationem sese eonvertunt. Atsi qui crunt, qui omnino géométrie sivc cosmographie expertes
siot, quiqne ipsum Ptolomeum sepius legerint, ao picturam deiude nostram, placata mente con-
^plaverint, hi certe nos lande dignos, non reprehensionc , ut illi , putabunt. Prospicient enim nos
opas ita difficile atque arduum susccpisse et ita egregic ad exitum produxisse, ut illud mirari
^(igtntnr pressertim, cum uulla in re nos a Ptolomei intentione, licet a pictura paululum, déviasse
oomperient.... Ptolomeus, duplicem pingendi orbis terrarum rationem esse tradit (per rectas et
£^''^'*9).... In pictura, neque distanlias secemi, neque magnitudinem insularum distingnere... etc.
i^colaiBonis, eptla dedicatoria).
^^67) Le code de Bruxelles de la traduction d'Angelo écrit en 1-181 , achevé 1483, est accompagné
^ cartes nouvelles copiées sur celles de Donis. — Gli arcbietipi vetusti (di Tolomeo), con migliora-
^enti aNicolo Donis tedesco, il quale nel 4i68, ne fece un présente in egual numéro di 27, al duca
5^^*^ d*E8te, di che sivegga il Bandini btbl. laur. ove l'autografo si conserva (Zurla, snlle anticbe
?SN[^ idro-geograflche, nota ad. cap. ii). — Ses cartes publiées sont attachées aussi à un manuscrit
*«or«n,b«rg(£idcl).
i28 GÉOGR. LATINE, i470-lS5Q.
mand. Elles propagèrent la connaissance de Touvrage de Ptolémée,
surtout en Italie, et familiarisèrent avec les formes et les proportions
que les cartes de ce géographe donnaient à Thabitable et aux pays.
183. Nicolas Donis parvint enfin à éditer sa version et son atlas,
coupé en bois et imprimé en 1482 à Ulm. Il avait le but de donner le
type parfait de la figure des pays et de la terre connue aux cosmogra-
phes et aux dessinateurs de cartes. Mais dans cette édition , il nous
apprend qu'il s'occupait lui-même de dresser ou copier et de corriger
les cartes modernes de son temps. Il ne fait aucune observation sur la
diversité des bases de la composition et de la structure des cartes con^
temporaines, toutes dififéreutes de celles de Ptolémée; il nous avertit
seulement que le monde étant susceptible de fréquentes mutations,
quantité de lieux nommés par Ptolémée disparurent, pour la plupart
par vétusté : or, par Tamour de la science et des lecteurs, sa sollici-
tude lui suggéra l'idée de donner les cartes nouvelles de TEspagne et
de ritalie, c'est-à-dire portant les dénominations nouvelles, contem-
poraines (268)
Outre ces deux cartes nouvelles (voyez n^ lO^, 124 de notre atlas^,.
nous voyons, dans son édition de Ptolémée, les deux autres : savoir
de la France et de la Palestine. Il ne dit rien dans sa préface sur
leur compte. La Palestine est certainement une copie des cartes anté-
rieures, car elle est toute conforme à celle du xiv' siècle de Marino
Sanuto. Quant à la France, elle est d'une composition affectée de la
disproportion ptoléméenne, la plus sensiblement et trop évidemment
dans sa partie méridionale (voyez n® 105 de notre atlas). Donis ne dit
point s'il était l'auteur de cette défiguratiou, comme il s'en vante au
sujet de sa carte de l'Italie : cependant nous n'avons pas de motif d'eu
accuser un autre que lui.
De ces deux cartes, dont il fait mention dans son épilre dédicatoire,
celle d'Espagne (n« 124 de l'atlas), sans aucun doute, n'est pas de lui,
elle est une simple copie de la carte continentale, chorograpbique, de
la fabrique espagnole. Nous l'attribuons directement à l'école espagnole
parce qu'elle offre une composition qui ne se rattache pas aux autres
cartes chorographiques que les géographes allemands surent réunir par
la juxta-position; parce que la configuration de l'Espagne qu'elle pré-
sente, est toute mauresque, si nous pouvons nous servir de cette
expression, c'est-à-dire qu'elle offre une grande analogie, une confor-
mité avec la configuration de l'Espagne des cartes arabes. Il n'y a rien
de Ptolémée. On peut dire que l'intérieur chorégraphique arabe est
encadré dans le portulan peint des marins, amplifie et rectifié sur'plu-
sieurs points de la péninsule (269).
(i68) Reliquum vero illius tant! viri (Ptolemaei), ut prius eraot intacta relinquimus, nist quantum
studii amor et legentiam sollicitndo suggessit, ut ob mutationes temporum qui Trequenter in oii>e
cootingunt, duas nobilissimas regiones : Hispaniaro videlicet et Ytaliam qnonim loca ab aactoris
vetustate pro maxima eornm parte, a notitia nostra decidcrunt.... certa ratiope iungeudo nostratim
poneremus. (Nie. Donis, eptla dedic).
(Ï69) Nous reviendrons encore sur cette composition. Cette analogie et conformité avec la con-
figuration m'a frappée d'autant plus, que j'avais terminé mes investigations dans la géographie
arabe et achevé le dessin de leur cartes avant de commencer l'examen de la géographie de la restau-
ration des lettres, examen qui a mis sous mes yeux cette carte espagnole de la péninsule.
NICOLAS DOItlS, 183. 129
Nicolas Donis, en mentionnant dans son épitre dédîcatoire les cartes
modernes, ne s'arrose que la composition de Tltalie seule, qui lui
appartient en entier \n^ 101 de Tatlas). 11 y conserva la conflguration
ptoléméenne, supprimant les noms anciens des peuples; il y inséra
nommément les Tilles, bourgs, lacs, pointes marines, ports, montagnes,
fleuves; traça entre leurs détours les plaines, les parties montagneuses
et les Iles adjacentes; ne dérangeant rien dans la dimension certaine,
ni dans la conflguration indubitable de Ptolémée (2to).
Ces quatre cartes n'ont aucune graduation, aucun indice de longi-
tude g^graphique, elles n*ont qu'une échelle de milles et Tindication
descRmats(s7i).
Il y a une cinquième carte nouvelle de laquelle Nicolas Donis nous
entretient dans sa dédicace. Carte des régions de Tocéan sarmatique,
situées sous le cercle arctique, savoir : Daiia, Scania, Norbegia, Gotiia,
Saetia, Gronelandia, les pays adhérents et les îles adjacentes. Ptolémée
lui-même, ni le diligent Strabon, ni qui que ce soit des cosmographes
anciens n'ont donné de description de ces régions; nous la présentons,
dit Nicolas Donis, avec raison à nos lecteurs (272). Cette carte nouvelle
de régions, qui n'entraient pas pour la plupart dans le cadre de Thabi-
table de Ptolémée, étant un supplément à son atlas, la 28™^ carte inté-
grante de Tatlas est graduée par des longitudes et latitudes et accom-
pagnée de tous les détails des climats (voyez n® 97 de Tatlas).
Les cinq nouvelles cartes chorégraphiques que Nicolas Donis attacha
en 148^ et 4486 à ses éditions de Ptolémée, sont donc de plusieurs dif-
férentes espèces. La Palestine remonte avec son origine au xiv' siècle.
Les riions arctiques , comme partie intégrante de Tatlas ptolcraéen ,
farent dressées avant 1471. L'Espagne est de la composition espagnole
aatérieure à cette année. L'Italie est inventée par Donis lui-même
^ere cette même année 1471. La France est défigurée (certainement
par le même Donis) vers 1480. A l'exception de la Palestine, toutes les
autres se trouvent copiées et enclavées dans le code de Ptolémée de la
bibliothèque de Bourgogne à Bruxelles, du manuscrit de l'année 1481,
\m (t75).
La savante Italie, étiucellante de lumières et des beaux-esprits du
siède, accepta le masque que le docte Allemand lui adressa comme
hommage. Admirant le génie tudesque, s'écriant : rari ingenii Tudeschi,
(S7fi) Ha&c regionem (Italiam), obmissis nationum nomlnihns, que bnnc a Ptolonco reoitata sont,
*à Boitra tempora, civitatcs, oppida, lacus, mariuas, porlut; et moDtos, uoiniua etiam iliiuiuin et
Mraaortiis, loca quoque montuosa et campeslria, una ram iiisulis sibi adiarentibus, ut intuo.ri fas
^^diff^sias desuribcrc censui : niehil iohiis,que ab auctori libri huius (Ploiemaei) dimcnsione
**rt»i ac ratione Terissima observala sunt, trausgrcdicudo (Sic. Doiiis, oplla didic).
(*74| LoBgitudinib. et iatitut. privata, tantum climata signantur (Nie. Doo.).
()7lj HigpaDiam et Ytaliara.... ipsa» etiam regioues, que iu occcano sarmatieo se ingcrunt et sub
j^ello per circulum arcticura ductum occurrunt : Datiam utpote, Scauiam , Norbcgiam , Gottiain,
ojietiaai , Gronelandiam et regiones sibi adhérentes, cum insulis adiacentibus, de qiiibus profecto
'^^^OQS ipgc, aut Strabo diligens, nec aliquis cosmographus dcscriptionis mouimuutarellDqait,
<î«rt* ratione, nostratim poneremus 'Nie. Donis, eptia dcdie.).
(I7S) La Palestine , L'Espagne et l'Italie sont reproduites par Essier et Ubelin dans leur Ptolcmëe
^^} ®( 4S20 ; Villanovanus en 4553, reprenant dans son édition de Ptolémée toutes les cartes
flilbeliii, méprisa celle d'Italie de Donis et ne l'a pas reproduit. — A l'exception de la Palcbtinc qui
*^it la répétition de la carte de Sanuto, nous donnons dans notre atlas la copie de quatre autres,
TCooites àooe petite échelle et nous en rendons compte. Leur dimension est petite, mais nous
P***' qu'elle suffit pour donner l'idée des cartes de cette époque et de la direction qu'elles
Fanaient soos l'influence de la renaissance des lettres. {Voyez n" 97, t03, 101, lîi de ûotrc atlas.)
H. 12
130 GÉOGR. LATINB» i470-15K0.
begV ingegni Tudeschi, beUUsimo ingénia Alemano! elle se couvrit le
front et prit la livrée de Ptolémée , pour continuer avec plus de succès
la culture de la géographie. La renommée de Ptolémée, répandue,
grandit parmi les cosmographes; son autorité dans Tastronomie déjà
solidement établie, lui gagnait une plus immense dans la géogra-
phie.
Paul Toscanelli, 1474.
184. L'Italie contribua beaucoup à consolider cette autorité fatale»
Nous ne saurions dire positivement, si Tltalie, par quelque invention,
avait direclement coopéré à son application à la pratique, mais ce qui
est certain, c'est qu'en même temps l'Italie expédiait en Portugal
et en Espagne le complément à la mappemonde de Ptolémée , com-
plément qui donnait une grande extension du vieux continent sur un
autre hémisphère, rapprochait les Indes de l'Europe , laissait entrevoir
la possibilité de la traverse directe du Portugal ou de l'Espagne dans
l'Inde, ne donnant à l'océan atlantique que l'espace d'un tiers de la
circonférence du globe sous cette parallèle.
Le florentin Paolo Toscanelu (né 1597 mort 1482) arrivé à certain
âge, prit du goût aux mathématiques, et ne s'occupa pas seulement de
la correction des tables solaires et lunaires , par des observations gno-
moniques et d'astrolabe, comme tout ce qui pouvait faciliter l'emploi
des méthodes d'astronomie nautique, longuement discutées et rarement
employées jusqu'alors : mais il porta aussi ses vues sur la comparai-
son de la géographie ancienne avec les résultats des découvertes
modernes et sur ruiiliié pratique que le commerce pourrait tirer par
la navigation vers l'ouest au pays des épices.
Il interrogeait tous ceux qui venaient des régions les plus éloignées,
et il y en avait beaucoup en Italie (374). Nicole di Gonti était alors de
retour de ses courses et rendait un compte consciencieux de ce qa*il
avait vu. Toscanelli médita souvent sur la route ouest et encouragea
les projets de Christophe Colomb , qui avait eu recours à ses lumières.
Le roi de Portugal chargea le chanoine Martiuez de questionner le
vieux Toscanelli, qui expédia de Florence sa lettre datée du S5
juin 1474, à laquelle il joignit la carte de son dessin, dont il communi-
qua en même temps une copie à Colomb.
Sur cette carte, semblable aux cartes marines, il dessina lui-même
toute l'extrémité de l'occident, depuis l'Irlande jusqu'à la fin de la
Guinée vers le sud, avec toutes les îles qui se trouvent sur la route. II
plaça vis-à-vis, droit à l'ouest, le commencement des Indes avec les îles
et les lieux où l'on pourrait aborder. On y voyait de combien de milles
il serait bon de s'éloigner du pôle arctique vers l'équateur , et à quelle
distance on arriverait aux régions des épices. De Lisbone à la fameuse
cité de Quinsaî, en prenant le chemin tout droit vers l'ouest, la carte
(274) Si comme moi, dit-il dans sa lettre an chanoioe Martioez, vous aviez eu occasion d^»
fréquenter un grand nombre de personnes qui ont été dans ces pays (des épices]. — Le florentii^
Christoforo Laodino, traducteur de Pline et commentateur de Virgile, le conOrme : ego autem interfaS»
dit-il (georgicon, édit. Laodinus, Venet, iS20, p. 48). cum Florentiae illos Paulus pbysicns diligente^
quaeque intcrrogaret (Humboldt, exam. de l'hist. de la géogr. du n. m. 1. 1, p. 113, S14}.
BEHA'ilf» 185. 131
donnait 26 espacios dont chacun à 150 milles, tandis que de Tîle Ântilla
à Gipango il y a 10 espacios lesquels équivalent à 225 léguas (sis).
Ces espaces sont sans doute de trois degrés chacun (276) : le degré
serait par conséquent évalué à 50 milles. Si Toscanelli comptait
(comme Colomb) le degré du grand cercle à 56 ^/s le chemin indiqué
par le degré de 50 milles serait par 28<* de latitude (i??). D'après cette
Bupputation les 7 ^2 lieues du degré de cette latitude donneraient 8 V^
lieues au degré du grand cercle , suivant Toscanelli : ce seraient des
lieues doubles, de lieues de mer dont on compte 17 ^/â au degré du
grand cercle.
Ces espaces comptent 78 degrés entre Lisbonne et Quinsaï et suppo-
sent, d'après Toscanelli, le rapport du continent à la mer à peu près
comme 4 à 1. Les autres pensaient que Tocéan atlantique occupait uu
tiers de la circonférence (sts). Christophe Colomb, ruminant son expé-
dition, déterra les extravagances de Marin de Tyr, qui portait les der-
nières limites du continent connu jusqu'à 250'' de longitude et ajou-
tant à cette étendue les 70<* que les tiercistes donnaient à partir de 180*^
ptoléméens pour placer Quinsaï, il donnait le rapport du continent à la
mer en proportion de 8 à 1, assez hardi d'accuser d'erreur Ptolémée
lai-méme qui s'évertuait à rectifier à l'extravagance de Marin.
De cette manière les Italiens réglaient l'autre hémisphère et propa-
geaient leur conception en Portugal et en Espagne; Ptolémée entrait
tout entier dans la mappemonde pour donner de l'ampleur à toutes les
parties connues et inconnues, et pour gonfler le continent d'un exces-
sif embonpoint.
Martin Brhaïm, 1492.
185. Dans les mêmes années en Allemagne, Jean Mûller kônisber-
geoîsde Frankonie, Regiomoutanus, habitant quelque temps à Nurem-
berg (1471-1475), ne cessa de répandre l'astrolabe et le météoroscope
de son invention, d'une certaine importance pour la navigation et la
séographie (200). Là, à Nuremberg , se trouva aussi Martin Behaïm, fils
de Martin et d'Agnès Schopper de Schoppershof , d'une famille distin-
gaée et patricienne, dont le nom figure dans les hautes fonctions de la
ville (200). Martin Behaïm avait donc une instruction convenable et
g 18] Humboldt, examen de Thist. gcogr. du nouveau inonde 1. 1, p ïil, 227, 233; t. H, p. 368.
16) Baachc (mëm. de IMnstit. t. VI, p. 8 et 10), observe qu'André Bianro comptait un espace
à8*S3'.-. Les iO espaces entre Antilla et Cinango sont évalues à 30 degrés sur le globe de Behaïm.
Wfl) Colomb pins ou moins suivit ce cliemiu. — Humboldt (exam. de Tbist. de la géogr. du n. m.
tl» p. 237, 252), pense que toman do el camino derecho al poniente, partant de Lisbone signifie
^ooreasement le parallèle de Lisbone.
(S18) Cette opinion figure sur le globe de Behaïm et elle se consolida pour un certain temps, à la
mite aes découvertes du nouveau monde. Voyez Ruysch, Sylvaous, Schoner, Bordone.
(279) Le météorosi-ope , ou l'instrument propre à mesurer les longitudes et les latitudes parle
■oyâi des étoiles, qu'il crut avoir invente d'après l'idée d'un passage de Ptolémée géogr. I, 3;
*insi qu'il le dit dans une lettre au cardinal Bcssarion. Cette lettre se trouve à la suite des œuvres
^Wemer, imprimées in-folio à Norimb. 1514, et in-4" 4537. —En 4463, Begegiomontanus dédia
^ Toscanelli son traité de quadratura circuli. — Mécontent des tables du roi Aifonse, Regiomoutanus
psUia à Nuremberg ses fameuses éphémérides astronomiques, calculées d'avance pour les années
U78à4S06, et qui ont servi sur les côtes d'Afrique, d'Amérique et de l'Inde, dans les premiers
Knnds voyages des découvertes de Bartolomé de Diaz, de Colomb, de Vospucci et de (iama.
(280) De nombreuses conjectures et fables avaient été inventées sur Martin Behaïm. Nous ne
voulons pas y toucher. Nous rapprochons les dates certaines, confrontant les cartes et nous en tirous
des coDsé<}QeQces. — Voyez la notice sur le chevalier Aiartin Behaïm par de Hurr, traduit de l'aWe-
I
I3i GÉOOR. LATINE, 1470-1550.
plusieurs années après la mort de son père (1471-1479), il s'adonnait
encore au commerce de toile en Allemagne, comme il dit lui-même
dans sa lettre à son oncle Léonard, datée d*Ânvers 1479, 8 juin (tsi).
Le commerce continental de toile ne fait présumer aucune instruction
nautique de la part de Martin Bebaîm.
En 1481 il se rendit en Portugal. 11 y trouva les esprits tout préoc-
cupés de grandes entreprises maritimes. Âlfonse V Tafricain régnait
encore (mort en 1481). Les conquêtes récentes d'Âlcazar , de Tanger,
d'Arzilla, plusieurs découvertes des îles de Tocéan prises en possession
et colonisées, illustraient alors le Portugal. L*infant Henri ne vivait
plus (mort 1465), son frère Ferdinand était mort (en 1443), mais la
marine prit des proportions croissantes ; Técole ou Facadémie nautique
qu'ils avaient fondée à Sagrès ne cessait depuis 60 ans de produire des
pilotes instruits, courageux; Finstruction nautique étant en vogue , les
plus puissants seigneurs affectaient à la cour d'y être initiés. L'astro-
labe y était connu et on savait à quel usage il pouvait servir; on l'avait
employé dans l'expédition de 1481, commandée par Jean d'Âzambique.
On dressait les cartes géographiques nautiques, et l'instruction de
Tacadémie de Sagrès recommandait les longitudes et les latitudes géo-
graphiques aux marins. De nombreux renseignements et de nombreuses
cartes encombraient le dépôt du trésor royal, gardé soigneusement,
pour que les connaissances acquises ne pussent transpirer à l'avantage
des autres. Jean II, succédant à son père, méditait de nouvelles explo-
rations, c'était toujours les côles d'Afrique et le commerce avec l'Inde
oriental qu'on avait en vue, pour que Tépicerie et les marchandises de
rinde, passant par 12 mains et par 12 gains, pussent arriver directe-
ment en Portugal.
Depuis 10 ans résidait à Lisbone un génois, Christophe Colomb, de
Terra Rosa (né vers 1456). Il épousa en 1471 Philippine Moniz Peres-
trella, fille d'un capitaine de vaisseau, employé dans son temps (en 1450)
par rinfant Henri dans différentes expéditions, ensuite gouverneur de
Tîle Porto santo. Par cette liaison, Colomb se trouva à portée de
connaître ce que le dépôt nautique contenait de précieux, au moins il
eut eu sa possession les cartes nautiques et les journaux de son beau-
père. Par ces courses avantureuses il se familiarisa avec l'art nautique.
Il visita en 1477Thyle (Islande) et la mer au delà jusqu'à 75®; il se
rendit plusieurs fois au fortin de San Gorge de la mina, construit
en 1481, sur les côtes de Guinée. Nourrissant dans sa pensée l'idée de
se rendre par l'ouest jusqu'à l'Inde et regardant sa sphérille qu'il avait
de maître Paul (una esferilla que embio a maestro Paulo), il conclut,
qu'eu se dirigeant directement à l'ouest à travers l'océan atlantique, on
parviendrait à connaître les nouvelles terres, et cette Inde qu'on cher-
chait à atteindre en doublant l'immense Afrique. Dans sa correspon-
dance épistolaire avec Marc Paul (Toscanelli) il exposa en 1474 ses vues
et ses espérances. Marc Paul pensait que les premières terres qu'on
irait découvrir, seraient le Kathaî ou la Chine, et l'empire du grand
mand par H. J. Jansnn (à la fin du premier voyage autour da monde par Pigafetta, Paris Tan IX);
dcr Erdglobiis der Martin Behaïm und der des Jolian Schoner, Abliaodlung Ton F. W. Ghillany,
Nuremb. 1844, in *•.
(281) Pour son commerce, il était en 1457 à Venise, de 1477 à 1479 à Malines, Anvers et Vienne.
BEHAiH, 186. 155
cham (Herrera, de las Indîas occidentales decas I, livre I, c. S). Colomb
comprenait cette possibilité , mais conformément aux idées des anciens,
il admettait aussi la nécessité de Texistence d*un continent antipode
sur Fan tre hémisphère, comme contre poids. Il exposa en 1482 son
projet au sénat de Gènes sa patrie, qui ne Técouta point (Herrera, ibid.
cap. 7). Il s'adressa ensuite, en 1485, au roi de Portugal Jean II. Une
commission examina ses raisons. Diego de Ortiz, évéque de Ceuta, et
les cosmograpbes Rodrigues et Joseph, désapprouvèrent ces rêveries de
Colomb qui n'étaient fondées à leur avis , que sur Tignorance de terres
inconnues aux Portugais dans la partie occidentale du globe , ou sur
Textravagant projet de partir à Cipangou (Herrera, ibid. decas I,
livre III, cap. I, etc.; Yasconcellos, vida del redon Juan el seconde, en
Madrid 1659, lib. IV). Dans toute celte affaire, ni Tîle Ântilia ou
Brandan, ni quelque autre conte fabuleux ou renseignement obscur,
mais les idées antiques réveillées par la renaissance des lettres , et la
mappemonde de Ptolémée complémentée par les narrations de Marco
Polo, de Conti et d'autres étaient les seules qui enflammaient l'ardeur
de l'intrépide génois.
Frustré dans ses calculs sur ce point, Colomb envoya son frère Bar-
thélémy Colomb en Angleterre, qui, en 1488, le 15 février, présenta au
roi Henri VII une carte du globe terrestre qu'il avait dessinée lui-même,
étant devenu bon géographe et connaissant la navigation (carte citée
par l'éditeur anglais des voyages de Hakluyt). En attendant Christophe
Colomb, depuis 1484, passait les années d'impatience en Espagne, où
ses Tues furent prises en considération.
186. Le Portugal se montrait très-hospitalier pour les étrangers ,
recherchait même les hommes instruits de différentes nations. Italiens,
Flamands , Allemands entraient dans le service et participaient hono-
rablement aux expéditions lointaines , aux études nautiques ou géogra-
phiques (t83). Martin Behaïm arrivé à Lisbonne en 1481 , se fit bientôt
distinguer par ses connaissances mathématiques et fut particulièrement
connu par Rodrigues et Joseph, aussi bien que par Moïse. L'an 1484,
dit Martin Behaïm lui-même (dans une épigraphe de son globe) , don
Joao roi de Portugal , fit équiper deux vaisseaux qu'on appelle caravel-
les (commandées par Diego Cam et Juan Alfons Daveiro) , munis d'hom-
mes avec des vivres et des armes pour trois ans (ass). Il fut ordonné à
Véquipage de naviguer en passant les colonnes plantées par Hercule en
Afrique, toujours vers le midi et vers le lieu où se lève le soleil, aussi
loin qu'il leur serait possible. Étant ainsi équipés, continue Behaïm,
nous sortîmes du port de la ville de Lisbone et fîmes voile vers l'ile de
(tSt) Voici quelques étrangers plus renommés au service de Portugal : Te norvégion Balarte; le
S énois Antoine Nolle en 1450; le vénitien Aloysio de Cada Mosto en 1-456 ; le flamand Jcrge d'Utra
^ob de Heurter]; le français Jean Baptiste; les allemands nurembergeois Martin Behaïm eu 1485; et
Wbif Holzsdmher en 1503; le florintin Âmerigo Vtspucio; le vicenzin Marc Antonio Pigafctta
en 4 BSD.
(S83) Behatm n*a pas nommé Diego Cam dans l'épigraphe de son globe, mais Hartman Schndol,
dans un liber cbronicarum, imprimé à Nuremberg , 1493, pendant que le cosraographc se trouvait
^ncore dans la même ville, réunit les deux noms: praefecit galets bene instructis JolianncsH,
Por tagalîae rex, anno 1483, patronos duos : Jactibum Canum portugalensem,etMartinum Bobemum,
. ^ominem germanum, de bona Bohemorum familia natum, qui superato circulo equinoxiali in alterum
orben exceptisunt.
154 GÉOGR. LATINE» 1410-1470.
Madère, et après avoir doublé les îles Fortunées et les fies sauvages de
Canaries, nous trouvâmes des rois maures. Nous arrivâmes dans le pays
de Gambie. Il est éloigné de 800 milles d*allemagne du Portugal. Âpres
quoi , nous passâmes dans le pays du roi de Fourfour qui en est à 1200
milles. Plus loin encore est un pays où nous trouvâmes Técorce de
cannelle. Nous étions alors éloignés du Portugal de 2500 milles : nous
revînmes chez nous, et le 19"" mois, nous nous retrouvâmes de retour
chez notre roi. — De l'autre côté de la pointe, proche de rîo Tucumero
(Targonero) et de porto Bartholo Yiego, il place sur son globe le pavil-
lon portugais accompagné de l'épigraphe : jusqu'à ce lieu-ci sont venus
les vaisseaux portugais qui y ont élevé leur colonne et au bout de 19
mois ils sont arrivés de retour dans le pays.
Le roi Jean, pour avancer les connaissances des pays éloignés, pré-
para cette expédition et afin de préserver de danger la navigation dans
les mers inconnues, recommanda à ses médecins cosmographes Rodri-
gues et Joseph de se concerter avec Martin Behaïm et d'inventer quel-
que chose, qui dirigerait les navires avec plus de certitude, surtout
lorsqu'ils perdaient de vue les astres connus. Ces trois hommes versés
dans les mathématiques, après de laborieuses études et après une lon-
gue délibération sur l'astrolabe dont se servaient les astronomes, appli-
quèrent son usage à la navigation (234).
De retour de cette expédition, Martin Behaïm épousa en 1486 Jeanne
de Macedo, fille du flamand Job de Huerter de Moer Kirchen, gouver-
neur et possesseur des îles Fayal et Pico, colonisées (depuis 1466) par
les Flamands. En même temps Barthélémy Diaz, conjointement avec
son frère Pierre et l'infant don Joao, atteignit le cap le plus méri-
dional de l'Afrique et le doubla en y plantant, le 18 janvier 1486, les
colonnes du roi de Portugal et donnant à ce cap le nom de Turmentes;
le roi Jean II changea cette dénomination en cap de Bonne-Espérance.
Jean II ne se bornait point aux investigations maritimes. Au mois de
mai 1487, il fit partir à l'orient Pierre de Cavillam et Alfonse de Payva,
qui se rendirent à Alexandrie, d'où le premier alla visiter l'Inde, par
Suez et Adcn, l'autre se rendit en Abyssinie où il mourut. Pour savoir
diriger leur route ils prirent la copie d'une mappemonde, composée par
Cassadilla. Les rapports de Cavillam n'étaient pas encore parvenus à
Lisbone, lorsque des renseignements donnés par deux juifs sur Cal-
cutta, vinrent de nouveau échauffer l'ardeur portugaise à une nouvelle
expédition , afin de pénétrer dans les Indes.
Martin Behaïm, passant ses jours à Fayal ou à Lisbone, où il possédait
toute la confiance de Jean IL se trouva à même de connaître tous ces
renseignements, toutes les découvertes des Portugais. Il connut leurs
cartes nautiques, qu'on qualifiait de hydrographie, leurs mappemondes
copiées sans cesse pour l'usage des marins , de la cour, du conseil , des
(%8i) Ut miDor cum errandi pcriculo ignotum mare uavigari posset , Roderico et Joscplio mcdî-
cissiiis, nec non Martino Bohemo, ea actate peritissimis mathematicis, iniunxit Joannes H , ut
adhibito inter se consilio, excogitarcnt aliquid, qno nautae cursum navium, licet in nostro nonoqae
polago, tutius dirigèrent, nt vcl ahstracti a notis sideribus, cognitisque littoribus, quam coeli ac
pclagi partein tenerent, aliquo modo cngnoscerent : ii post îndeîessum studium, longamqne medi-
tationeni, astrolabium, instrumcntum, quod anteastronomiae tatnm inservicbat , utîlinri inventoad
navigandi artem, roaximo navigantium commode, transtulere : quod beneflcium tota Europa Joanui
debere inficiari non potesl (Emmanuel Tellezins Sjlvius, marchio algretensis, de rébus |^sUs
/oanuis H, Hagae comitis, 1712, p. 99).
BEHAÏMy 187. 135
seigneurs; cartes enrichies par le progrès des découvertes; modifiées
certainement sur quelques points par des investigations et les relations
apportés de différents pays.
Aucune nation, à cette époque, n*était à même de composer les cartes
générales et les cartes spéciales des différents pays éloignés que les
Portugais. Qui eut été en état de donner quelque idée de TAfrique si ce
n'est les seuls Portugais? qui était le plus disposé à se former de nou-
velles conceptions sur Flnde et à les élargir , si ce n'est encore les Por-
tugais? Les géographes catalans, italiens, tout riches qu'ils étaient de
leurs précédentes élaborations , puisaient dans celte nouvelle source ,
qui jaillissait loin du cercle de la connaissance antérieure.
Les récits de Marco Polo fournissaient toujours de plus abondants
matériaux pour l'orient, aux catalans, aux italiens, aux portugais, mais
dans chaque siècle ils étaient autrement compris, autrement figurés. Il
suffit de jeter un coup d'oeil sur les cartes, catalane de 1577, sur celle
de fra Mauro de 1456, enfin sur toutes celles qu'engendrèrent les efforts
que l'on fit pour complcmentcr les connaissances de Ptolémée.
187. Martin Rehaïm, riche de connaissances portugaises, se rendit
en 1490 à Nuremberg, pour y revoir sa famille. On conçoit qu'il avait
bien des choses à raconter aux bourgeois de sa patrie, et pouvait leur
étaler des curiosités inconnues. Le magistrat , désirant conserver ses
connaissances, l'engagea à construire un globe, dont l'exécution fut
achevée en 1492 par Martin Bchaîm et George Holizschucr. Laissons
expliquer l'ouvrage à Behaïm lui-même comme il l'inscrivit au bas du
globe près du pôle antarctique.
A la demande et réquisition, dit-il, des sages et vénérables magis-
trats de la noble ville impériale de Nuremberg qui la gouvernent actuel-
lement, nommés Gabriel Nutzel, P. Volkamer et Nicolas Groland, ce
globe a été inventé et exécuté , d'après les découvertes et les indica-
tions du chevalier Martin Behaïm, très-versé dans l'art de la cosmogra-
phie et qui a navigué autour d'un tiers de la terre. Le tout pris avec
beaucoup de soin dans les livres de Ptoiémce , de Pline , de Strabon , et
de Marco Polo et le tout rassemblé, tant terres que mers, suivant leur
forme et leur situation, ainsi que cela a clé ordonné par les susdits
magistrats à George Holzschuer, qui a concouru à rexéculion de ce
globe en 1492; lequel globe a été laissé par le susdit seigneur Martin
Bebaïm à la ville de Nuremberg, comme un souvenir et un hommage
de sa part, avant qu'il ne retournât chez sa femme qui était dans
une île éloignée de 700 milles, où il a établi sa demeure et où il se
propose de terminer ses jours.
Sur la partie inférieure du globe, au-dessous de la ligne équinoxiale,
îi ajoute : il faut savoir que cette figure du giobe représente toute la
grandeur de la terre, tant en longitude qu'en latitude mesurée géométri-
quement d'après ce que Ptolémée dit dans son livre intitulé: cosmologia
^Holemaei , savoir : une partie , et ensuite le reste d'après le chevalier
Marco Polo, qui de Venise a voyagé dans l'orient, l'an 1250, ainsi que
Japrès ce que le respectable docteur et chevalier Jean de Mandaville a
^î^ » en 1522, dans un livre sur les pays inconnus à Ptolémée dans
I Orient, avec toutes les îles qui y appartiennent, d'où nous viennent
436 GÉ06R. LATm£, «410-1470.
les épiceries et les pierres précieuses. Mais Tillustre don Joao,, roi de
Portugal , a fait visiter en 1485, par ses vaisseaux tout le reste de la
partie du globe, vers le midi, que Ptolémée n'a pas connue : découverte
à laquelle moi, qui ai fait ce globe, me suis trouvé. Vers le couchant
est la mer appelée océan, où Ton a également navigué plus loin que ne
rindique Ptolémée et au delà des colonnes d'Hercule , jusqu'aux îles
d'Açores, Fayal et Pico qui sont habitées par le noble et pieux cheva-
lier Jobst de Huerter de Morkirchen , mon cher beau-père , qui y
demeure avec les colons qu'il y a conduits de Flandres et qui les possède
et les gouverne. Vers la région ténébreuse du nord, on trouve au delà
des bornes indiquées par Ptolémée , l'Islande , la Norvège et la Russie ,
pays qui nous sont aujourd'hui connus, et vers lesquels on envoie tous
les ans des vaisseaux : quoique le monde soit assez simple pour croire
qu'on ne puisse pas aller ou naviguer partout de la même manière
dont le globe est construit.
188. Conformément à cette exposition, le ^lobe représente, à quel-
ques légères modifications près, rhabitable disproportionnée de Ptolé-
mée , couverte de noms modernes et encadrée de quatre côtés dans des
compléments de connaissances modernes ignorées par Ptolémée. Au
nord les parages baltiques fréquentés chaque année par des vaisseaux ;
au sud l'Afrique visitée par les Portugais; à l'ouest, les îles prises en
possession par les Portugais; à l'est le Kataî, les îles indiennes et
Zipangu suivant la relation de Marco Polo. Coyl, Loach , Moabar,
Murfuli, connus par ce voyageur dans la péninsule indienne avec toutes
les îles sont renvoyés au delà de l'échelle ptoléméenne et commencent
à former un nouveau monde d'un autre hémisphère. Les compléments
de l'est et de l'ouest sont séparés par un vide océanique , et avançant
de deux côtés sur un autre hémisphère du globe , sont rapprochés à tel
point qu'ils dévoilèrent, en 4470, à l'imagination ardente de Christophe
Colomb, la traversée possible de l'océan. Dès l'année 141 7 les Portugais
furent appelés à retrouver les îles de l'océan occidental , dont on savait
l'existence; leurs reconnaissances furent terminées vers 1450, depuis
commença leur colonisation en 1466 et 147â, tant des îles Catherides ou
Açores que des îles du Cap vert ou Fortunées ou Canaries. En même
temps les Portugais traçaient sur leurs hydrographies et leurs mappe-
mondes, le complément de l'est et assignaient l'emplacement de
Zipangu sur le globe, et le degré de sa longitude géographieque. Ces
connaissances furent divulguées en 1492, par Martin Behaïm aux alle-
mands (285).
Dans la même année 1492, le 5 août , Colomb mit à la voile de Paies
et découvrit l'Ile Lucaye appelée Guanahanî, à laquelle il donna le nom
de san Salvador. Le 5 mai de l'année suivante 1495, il rentra à Restelo
(aujourd'hui Belem) sur le Tage; mais il en sortit bientôt, après avoir
eu l'audience chez Jean II , qui le reçut gracieusement et le laissa
ensuite partir sans obstacle pour l'Espagne.
(t8S) Voyez dans notre atlas l'hémisphcre du globe de Behaïm de i492; le complément de Ptolémée
tracé lur la carte hydrograpliitiue portugaise de 4500; ce complément publié par Silvanus en 4S11;
et la susdite hydrographie publiée en 1!$1&; enQn l'hémisphère de Schoener do l'anaoe ibiO.
BEHÂÏMy 189. i37
Martin Bebaîm ayant mis la dernière main à son (;lobe terrestre,
retourna en Portugal et apprit la première heureuse issue de Texpédi-
tion de Colomb. Honoré de la confiance de Jean H, il fut envoyé enl494
en Flandres auprès de son fils naturel George. Bebaîm eut le malheur
d'être pris sur mer et fut conduit en Angleterre. Remis en mer il tomba
de nouveau entre les mains d'un corsaire qui le mena en France. Après
avoir payé sa rançon , il se hâta de retourner par Bruges et Anvers en
Portugal , où le roi Jean II était mort le 25 octobre de Tannée de son
départ 1494. Depuis on n'entendit plus parler de Behaïm. Ceriainement
il s'était retiré chez son beau-père et passa le reste de ses jours dans
File de Fayal, d'où il se rendit en 1506 à Lisbone, où il mourut le 29
juillet de la même année ou de Tannée suivante. Pendant les quatorze
ans de sa vie qui s'écoulèrent depuis la confection de son globe , il
apprit dans son âge avancé, chaque année de nouvelles découvertes,
tant dans les nouvelles Indes occidentales que dans les Indes orienlales,
découvertes qui manquaient à son globe , et qui figuraient dans ses
cartes postérieures : car dans sa retraite il les dessinait et elles furent
déposées dans la trésorerie royale. Sur les cartes de son dessin on
voyait les découvertes réelles et les terres, directions, détroits présumés
à découvrir (sse).
Sa renommée en Allemagne était grande déjà de son vivant. Elle
grandit après sa morU Bien méritée par ses connaissances, mais gagnée
spécialement durant son séjour à Nuremberg en 1492, par son globe et
par la mappemonde qu'il y laissa (as 7),
189. Le globe terrestre de Behaïm, couvert d'un vélin noirci, tient
un pied et huit pouces de Paris de diamètre. Les pavillons portant les
armoiries des puissances respectives, sont peintes, ainsi que les
demeures et les figures des habitants de chaque pays qui sont dessinés
avec beaucoup de soin. Les noms des lieux sont écrits à Tencre rouge
et jaune (ou blanc jauni). Le premier méridien passe par Madère. Ni
les méridiens, ni les parallèles ne sont tirés. On y voit seulement
réquateur, les deux tropiques et les deux cercles polaires arctique et
antarctique (voyez n"* 109 de notre atlas). Le méridien mobile de fer et
(386) Le capitaine général (BTagellaD) savait qn'il fallait passer par un détroit fort cacbé mais qn*il
avait vu représenté sur une carte faite par Martin de Bohème (Bebaîm), trcs-excelient cosmographe,
que le roi de Portugal gardait dans sa trésorerie (Pigafetta, voyage, livre I, p. 40). Celte carte dési-
ipsait un détroit au sud de rAmérique, qui a dû être dessiné après le voyage fait en 1504, à la suite
daquel Amerigo avait eu l'idée de le rechercher. Ce détroit supposé est dessiné sur le globe de
Schoener avant sa découverte réelle.
(287) Dans le dépôt des archives de la famille de Behaïm il v a un dessin assez exact et assez
proprement fait de son globe sur deux feuilles de vélin (Murr,p.|^99 de la trad. franc). En Portugal,
oonobstaut toutes les considérations qui l'entouraient^ associe à une multitude d'illustrations nau-
tiques et cosmographiques, c'est à peiue s'il se trouve nommé par un seul écrivain portugais.
Manuel "Tellez de Sylva.* En Allems^ne, au contraire, son nom se trouvait dans toutes les bouches,
préoccupait d'innombrables plumes et l'écho de sa gloire pénétra dans l'Italie et dans l'Espagne. 11
s'était écoulé peu d'années depuis sa mort que déjà on débitait quantité de fables sur son compte et
d'inventions absurdes , remplies d'anachronismcs. On lui attribua toutes les cartes qu'on ne voyait
plus; Colomb, Magellan ne pouvaient rester debout sans la concurrence de Behaïm qui avait des
connaissances préalables à leurs découvertes, qui les devança lui-même avec les découvertes qu'ils
ont faites. On n'a pas réfléchi qu'en débitant de semblables contes, on fesait tort à sa mémoire;
qu'en lui attribuant.tant de connaissances on fesait de lui un imbécile qui ne savait pas les mettre à
l^cvidence et à la portée de tout le monde par son globe. Le globe donnait à chaque instant une
criante dénégalioft à tout ce qu'on inraginait, cependant on se déchaîna dans les mventions avec
tant d'assurance, qu'il fallut enfin combattre l'erreur. Voyez Hurr. — Voyez plus bas la note 337.
138 GÉOGR» LATINE, 1410-1470.
rhorizon de laiton ne furent attachés au globe qu'en 1510 le 5 novembre
suivant, date qu'ils portent. Ce méridien mobile, et Féquateur du globe,
portent les divisions en degrés. Si Ton prend pour premier méridien
celui qui touche Grancanaria et Madère, on aura, en comptant la longi-
tude vers Test, le continent étendu à 260'' de longitude, et la grande île
Zipangut avancée jusqu'à S80\ Entre Zipangut et Madère sont les
eaux innaviguées et les fies Âzores, Fortunées, de capo Verde et quel*
ques autres (sss).
Bebaïm , comme nous l'avons vu , dit lui-même avoir puisé dans le
livre de Ptolémée ; qu'il a représenté toute la grandeur de la terre, tant
en longitude qu'en latitude d'après ce qu'a dit Ptolémée dans son cos-
mologia. Aussi nous avons observé que Ptolémée y est encadré presque
inaltéré dans les nouvelles additions latérales. L'Europe, l'Afrique et la
mer méditerranée renoncent sur son globe aux formes qui leur ont été
données par les cosmographes du moyen âge; elles prennent les dis-
proportions et les difformités ptoléméennes; elles sont avec toute l'Asie
ancienne affublées dans la livrée de Ptolémée, garnie de tous côtés de
nouvelles bordures, de nouvelles franges. Ce travestissement s'était
décelé à nos investigations, vingt ans antérieurement (1492-1470) dans
la transfiguration de l'Italie par Donis. Maintenant nous voyons tous les
points de la géographie du moyen âge plier sous le joug que la renais-
sance des lettres lui impose. Il est bon d'observer que BehaSm , avec
beaucoup de ses contemporains, ayant recours à la sagesse de Ptolémée,
ne renonçait pas aux idées de Thabitable ronde, dont Jérusalem était le
nombril. L'étendue excessive de la méditerranée secondait admirable-
(288) Doppclmayr, historische Nacliricht von dcn Nurnberg. Matliematicis nnd Kûnstler,
Nurnb. 1730, a fait représenter ce globe entier, fort en petit, quoique en général d'une manière
assez fidèle, dit Murr. Ce dernier en a donné l'iiémisphère occidental au méridien de Hadera,
retranchant la partie orientale de Tlnde en y faisant disparaître par une sécante, KO degrés de la
ligne équinoxiale. Ghillany a donné aussi un hémisphère dessiné par Heideloff, qui contient la
partie donnée par Murr et l'Afrique jusqu'au cap de Ronaspei. Nous avons donc devant nous trois
copies de l'hémisphère océanique, toutes les trois discordantes : chacune a ses torts manifestes. —
Dans la publication de Ghillany, Wolf , dessinant l'hémisphère de Schoner a mieux réussi que Heide-
loff, parce qu'il était dirigé par le canevas des méridiens et des parallèles , tracés sur le globe. Le
globe de Bebaïm étant privé du canevas de ces lignes, Heideloff n'a pas su se l'imaginer sons la
direction des échelles équatoriales et du méridien mobile. Les tropiques au moins, demandaient son
attention, cependant le tropique passe au nord de Sicile par l'Italie, la Grèce etc. Je pense aussi,
3ue la graduation de Téquinoxiale est viciée par Heideloff parce qu'elle ne répond pas à la graduation
e deux autres copies, qui sont d'accord. — H nous a paru juste et nécessaire de se conformer avec
l'hémisphère océanique à la copie de Murr, de l'ajuster au dessin assez fidèle de Doppelmayr. Tout a
été assez conciliable à l'exception d'un point très-important, sur lequel Murr commit une méprise
lâcheuse. 11 a placé Madère et les Canaries au sud du tropique. Une erreur semblable ne convient
pas au constructeur du globe ; les deux autres copies donnent un démenti à l'incurie de Murr :
Heideloff place les Canaries sous le tropique. Madère au nord; Doppelmayr les place toute au nord
comme il convient. Mais ce dernier a eu tort d'étendre l'emplacement des Azores, et de les rappro-
cher trop aux iles septentrionales de Zipangri. L'exécution de Doppelmayr, assez fidèle, est malheu-
reusement affectée de négligence qui n'a pu disparaître par la diminution de l'échelle. Nous l'avons
réduit dans notre copie en proportion de 200 à 427. — Le fait est que jusqu'aujourd'hui il n'en existe
ni figure ni description propre à faire connaître le globe bchaïmien comme le demande l'histoire de
phère.
important d'avoir une bonne et complète copie de la mer méditerranée, de la Germanie, etc. —
Annotons pour la copie de notre atlas que , au lieu de burburum Ghillany lit : burburam rot de
genea : ensuite se trouve roi organ, jusqu'où vont chaque année les caravanes des maures de tunis ;
au lieu de burbaru, Ghillany lit : barbarin roi gambia galof; suit le roi mormelli chez lequel nait
l'or que le roi de portugal fait venir ; et le pays du roi furfur, produit le poivre ^ui fut trouvé
en 1485 par le roi de portugal, Va-t-il caput bone Spei? Ghillany ne le dit pas; il termine la nomen-
clature africaine par l'observation, que, an dem von Johan II sogenannten Vorgebirge der guten
Uoffnung steht : hie wurden die Saulen des konigs von Portugal a. domini, 4458, den 48 Januar.
BTDROGR. PORTUGAISE» 190. 139
ment cette idée. Les connaissances nouvelles de parages atlantiques
éloignaient Gibraltar du premier méridien à plus de 20 degrés, auxquels
rétendue de la méditerranée, ou 02 degrés ajoutés, plaçaient Jérusalem
à 90 degrés de longitude, moitié de Thémisphère (389). Ptolémée
confirma le nombril et finalement il s'est installé dans tout le domaine
de la mappemonde.
La carte d'Allemagne et de ses alentours, qu'en 1495 l'imprimeur de
Nuremberg, Antoinhoburger fit élaborer, adhibitis viris malhematicis ,
pingendique carte perilissimis, Michaele Wolgemut et Wilhelmo Pley^
denwurff, et qu'il fit graver sur bois pour la chronique de Hartman
Schedel (fol. 299, 500), est une carte de Ptolémée couverte de noms
modernes peu nombreux. Wolcemut et Pleydenwurf sont peintres,
graveurs, dessinateurs : les mathématiciens auteurs ne sont pas nom-
més. Dans l'intérieur de la composition ils ont modifié les cours de
plusieurs fleuves, en y introduisant les données des cartes continentales
des cosmograpbes antérieurs. Il semble que la carte est développée sur
la projection conique (voyez n® 110 de notre atlas) (390).
Hydrographie portugaise, 1500-1504.
190. La confrontation du globe et de la mappemonde de Bchaîm
avec les cartes contemporaines et antérieures, pourrait nous dévoiler
tout ce qu'il apporta de Portugal et nous faire connaître jusqu'à quel
point et dans quelles années Ptolémée s'empara des consciences géogra-
phiques des Portugais. Malheureusement rien n'est plus obscur que la
cartographie portugaise, qui ne nous est connue que par des copies ou
imitations postérieures répandues en Italie et en Allemagne. Les cartes
de cette reproduction qui nous sont connues, ont été dressées huit à dix
ans après la confection du globe. Ptolémée y règne. Cependant nous ne
pouvons accuser Behaïm de l'avoir installé dans l'école portugaise.
Ptolémée y exerça son autorité sans doute vers 1470, lorsque Colomb
et Toscanelli exposaient leurs projets. En attendant, n'ayant pas des
cartes portugaises plus anciennes, nous allons examiner celles qui sont
quelque peu postérieures à la fabrication du globe.
Dans le courant de ces années, de nouvelles découvertes se succédant
rapidement depuis le premier voyage de Colomb , ouvrirent de grandes
mers et terres aux courses des navigateurs. En 1497, Vasco de Gama^
(380) D*AillyeD 1440, divisant la carte nautique en climats , eut soin de placer Jérusalem dans le
centre 'la vieux monde. Mauro en liSO explique les conditions de ce centre. Le globe de Behaïm
Tobserre en 1409. Abraham Peritêol en lSi5 discute cette question d'après Ptolémée. Pour prouver
que la Palestine est le nombril de la terre V^^XH *1'^]2l0 *' ^ recours aux latitudes et longitudes.
Il compte les degrés 3i ou 83 de latitude de l'habitable donnée par Ptolémée; et iS parties (00*} de
la longitude, qui font moitié de 00 parties (180*) données par le même à la longitude de l'habitable
(Peritsol, itinerarium mund- "-*'* '"■ — ""'*'* 'k— - '*»«• • *» '^-» — ' — =• '
dans ton esprit l'idée d'un (
galion sur l'antre bémisphc
paradis placé à l'antre hémisphère en guise de contre coupole'.
(t90) La carte de la chronique de Schedel , gui a l'honneur de porter le nom de Koburger, ne fait
pas grand honneur à ses auteurs et à ses exécuteurs. Grossière au dernier point, désagréable à la
vraetCU® n'offre que des épigraphes peu nombrenses. Notre toute petite climination, réduite en
proportion de 100 a 17 de l'échelle porte tontes ces épigraphes : on peut les compter.— Weblgemuth,
célèbre en ce qu'il fit avancer la gravure en bois, fut instructeur de Diirrer (Doppclmayr, p. 181).
140 GÉOGB. LATINE, 1470-15S0.
passant le cap de Bonne Espérance , toucha Mozambique , Mombaza ,
Melinde sur les côtes orientales de F Afrique et parvint, le 18 mai 1498,
à Calicut. L^expédition de Pedro Alvarez Cabrai (9 mars 1500 — juil-
let 1501) suivit bientôt ses traces (291). Les flottes portugaises allaient
chaque année avancer les connaissances de la péninsule et se propo-
saient d'avancer un jour dans Timmense archipel qui n'était tracé
encore que d'après les ouï-dire. Par la reconnaissance de Quiloa sur les
côtes de Zanguebar, en 1500, on apprit Texistence de File Madagaskar,
où le roi puissant de Quiloa possédait plusieurs ports de Fîle dont le
nom était vaguement connu. Visitée bientôt par Lorenzo Almeida, elle
reçut le nom de S. Laurent pour un certain temps : ce n'est qu'en 1506
que Tristan d'Acunha examina ses caps, ses ports et tout son rivage.
De l'autre côté, Colomb, reprenant son chemin, reconnaissait mieux
les îles die sa découverte, et s'avançant vers le sud atteignit, le 1"
août 1498, le continent du nouveau monde à l'embouchure d'Orinoco
de la Terre firme. En même temps (1497) les Vénitiens Jean et Sébastien
(père et fils) Cabol (en 1498 Sébastien seul), visitaient sur une flotte
anglaise les côtes septentrionales de ce monde.
Colomb n'était pas encore retourné de son troisième voyage quand
Alonso de Hoyeda fut expédié et partit le 20 mai 1499 vers la Terre
firme; après une course de trois mois, il rentra le 5 septembre 1499 au
port Jaquimo à Haïti et ne retourna en Espagne que mi-juin 1500,
lorsque Vincente Yanez Pinzon, parti en décembre de Fannée 1499,
examinait les côtes de la Terre firme au delà de Féquateur et retourna
à la fin du mois de septembre de 1500. Le florentin Amerigo (Almerik)
(291) Le souvenir d*nn îndivida du hasard se rattache aux expéditions de Gama et de Cabrai*
d'un juif polonais , associé à plusieurs explorateurs des plus renommés. Lorsque Vasco de Gama, à
son retour en Europe, s'arrêta en décembre li08, à la petite île A.njediva (Ankediva), le saîu^o ou
raja, usurpateur mauresque de Goa , traita avec Gama, par l'entremise d'un juif qui savait un peu
l'italien et qu'on prit pour un espion. Le juif fut mis à la question. Vasquo de Gama suspeitando que
era espiu , o mandou prcnder e metter a tormento : o tormento Ibe fez confessar que era judeu de
regno de Polonia da cidade de Posna (Goes, 1, 44). Le tourment lui fit dire qu'il était de Posen de
Pologne, d'où sa famille s'était rétirée en 4456, à cause de la persécution, d'aboi d en Palestine,
ensuite à Alexandrie en Egypte. Du Caire il partit par la mer rouge, faire ses tours dans les vastes
Indes. Cette persécution, si rare en Pologne , avait eu lieu à la suite de la visite et de l'apostolat de
Jean Capistran. Par son intervention en 4454, on abrogea quelques privilèges dont jouirent les juifs
et on prescrivît que, pour les distinguer de la noblesse , ils porteraient de bircts jaunes. Ces dispo-
sitions, avant d'être méprisées et oubliées , mécontentèrent les juifs et suscitèrent momentanément
les populations contre eux. La supposition qu'il était né à Alexandrie d'Egvpte (Barros,dec. I, lib.
il, 1. 1, p. 366-368), semblerait avoir quelque force spécieuse : mais s'il avait atteint 60 ans, au jour
de la torture , il est évident qu'il a dû voir ses jours a Posen , d'où eu 4456 avec sa famille, il partit
dans la plus tendre jeunesse. La question lui donna soudainement envie de se ranger du parti des
Portugais et d'embrasser le christianisme. Baptisé, il reçut le nom de Gaspar da Gama, en réminis-
cence de celui qui l'avait fait appliquer à la torture. En qualité d'interprète il est aussi appelée
Gaspard da India (Goes, 1 , 58, p. 76 ; comp. Barros, dec. I, lib. V. 4, 1. 1, p. 440). Gama se servit
de cet homme expérimenté et intelligent sur la côte orientale d'Afrique , sortent à Melinde eo
février 4499, et le conduisit à Lisbone. Accompagnant Cabrai, avec un antre interprète arabe Gonzalo
Madeira natif de Tanger, il ga^na l'Inde pour la seconde fois. On le voit d'abord a l'arrivée à Calicut,
et plus tard Cabrai s'introduisit chez le roi de Gochim , duce judaeo qui fidcm Christi inducrat
i Lorenzo Cretico, ap. Grynaeum, p. 434). Cabrai retournant de son expédition rencontra an cap Vert,
es navires envoyés pour découvrir la nouvelle terre (Brasil) qu'il avait trouvée au commencement
de son expédition. Amerigo Vespueci s'y trouvant s empressa d'interroger Guasparre ; homme le
plus intelligent de l'équipage , d'un esprit très-attentif, sachant beaucoup de langues. Guasparre
donna des renseignements sur le commerce et sur les pays plus éloignés, c[u'Amerigo espérait
explorer à l'aide du S. Esprit. Sur le champ il écrivit, le 4 juin 4504, de la station du cap Vert une
lettre à Médicis , dans laquelle il résume et commente les relations du touriste Guasparre (lettre
publiée en 4827, par Baldelli Boni , il milione di Marco Polo). Le roi Eramanu*^! faisait Beaucoup de
cas de Gaspar et aimait à se servir de lui, le nommant cavaleiro de sua casa (Damian de Goes, p. 55).
— Notice extraite de l'examen de l'hist. de la ^éogr. du nouveau monde , «l'Alexandre Uumboldt ,
t. V, p. 40-44; 82-87. (Voyez notre portulan général).
HTDROGR» PORTUGAISE, 191. i4i
Vesp%u;ei, attaché depuis plusieurs années à une maison de commerce
en Espagne, accompagna ces deux navigateurs et dans un court espace
de temps accomplit ainsi ses deux premiers voyages.
Rodrigo de Baslidas avec le pilote Juan de la Cosa (1500-1502) poussa
la reconnaissance du nouveau continent dans le golfe d'Uraba jusqu*au
poerto del retrete ou delos escribanos dans Tisthme de Panama , où se
porta Christophe Colomb dans son quatrième et dernier voyage
(11 mai 150â-7 nov. ISO^i). Voyage plus long que les autres, dans
lequel il découvrit la côte depuis Hondouras jusqu'au puerto de Mos- *
quitos* voyage des plus remarquables et presque inapperçu par ses con-
temporains. Le grand homme, après tant de vicissitudes, mourut le 20
mai 1506, honoré mais presque oublié.
Du Portugal Gaspar Cortereal suivit (avril 1500-8 octobre 1501) les
traces de Cabot , dans Tespoir de trouver un passage aux Indes par le
nord. Il reconnut les bo^ds qui portaient le nom de terra Laboratoris, le
golfe Quadrado et terra verde; avançant plus au nord il y périt.
Michel (1502) partit à la recherche de son frère dans la baie de Hudson,
et périt aussi. Les Portugais renoncèrent alors à tenter la fortune dans
ces parages.
191. Pedro Alvarez Cabrai, allant dans Tlnde, donna la nouvelle que
la tempête l'avait jeté, le 24 août 1500, sur les côtes de terra crucis, non
loin du porto Seguro qu'il n'a pu examiner qu'à la pointe Brazil. Une
expédition fut préparée de suite vers celte partie du monde. Amerigo
Tespucci, séduit par le roi de Portugal , quitta brusquement l'Espagne
et accompagna l'expédition dont le commandant n'est point connu :
mais à cause de son ignorance, l'équipage avait recours au savoir de
yespucci. Par l'astrolabe et le quart du cercle, Vespucci acquit une auto-
rité bien méritée (quadrante astrolagico.... mi aquistai non piceiala
gloria) (293). C'était son troisième voyage (10 mai 1501-7 sept. 1502),
dans lequel on avança sur les côtes de la terre sanctae cruels ou du
Brésil jusqu'à 52** austral. Il en exécuta encore un quatrième,
^ont le commandant était certainement Gonzalo Coelho (10 mai 1505-28
joiu 1504). Une tempête arrêta le succès qu'il pouvait avoir. Vespucci
devait de trouver par l'extrémité méridionale du nouveau continent,
uo chemin vers l'Asie. Mais cette entreprise était destinée à un autre.
Amerigo Vespucci mourut en 1512 (293).
L*empressement extraordinaire de plusieurs états et l'envie de faire
des découvertes, dégénéraient en une concurrence ombrageuse. Manuel,
(Î9S) Osant à la longitude (écritil le 4 juin 4601 de \s station du cap Vert, où l'on rencontra
Cabni retournant de son expédition à l'Inde), c'est une chose bien autrement ardue et qu'entendent
pea de personnes excepté celles qui savent s'abstenir du sommeil et observer la conjonction de la
lone et des planètes. G est pour ces déterminations de longitude que j'ai sacritié souvent le sommeil
et racconrci ma vie de dix ans, sacrifice que je ne regrette pas dans l'espoir d'obtenir un renom
po*' des siècles, si je reviens sain et sauf de ce voyage.
(S9S) Ce n'est que depuis peu , que l'historio^phe don Juan baptista Munoz fouilla les archives
qai ponvai^t fournir les documents et les matériaux à l'histoire de grandes découvertes et ce n'est
ose depuis i8SS.que l'ouvrage de don Martin Femandez de Navarrcte, colleccion de los viages y
oetcnbrimientos, les fit connaître. Sur ces matériaux Alexandre de Ilumboldt élabora l'ouvrage
ios^evé : examen critique de l'histoire de la géograhie du nouveau monde, dont cinq volumes sont
pvMîësà Paris 18S6-1889. Nous avons puisé avidemment dans ses lumières pour ce que nous avons
a dire, à mentionner sur Colomb et Vespucci. De même nous devons aux investigations profondes
de cet ouvrage ce que nous allons dire d Ilacomil.
142 GÉOGR. LATINE, 147(M5ttO.
rot de Portugal , par sa lettre du 29 juillet 1501, fit part à Ferdinand
d'Espagne de la découverte du Brésil par Cabrai , mais il mit au secret
toutes les cartes nautiques : déposées dans la marine, elles ne pouvaient
sortir de ses états. Toute la publicité vulgaire était cependant réservée
pour la gloriole de Tétat et des navigateurs. Les relations des voyages se
répandaient à foison dans de brochures et feuilles volantes. On y trou-
vait les aventures des voyageurs et tout ce qui pouvait émerveiller,
mais on n'y voyait presque rien de précis pour fixer les positions. Les
cartes furent dressées pour donner Tirnage des découvertes mais
déblayées de tout ce qui pouvait instruire les marins sur les dangers et
les directions des routes.
Yespucci usait largement de la liberté restreinte. Il rédigeait des
rapports étendus pour les archives du roi Ferdinand et du roi Manuel
et en extrayait de courtes relations pour les communiquer à ses amis
ou aux curieux. La relation de son troisième voyage fut traduite en latin
à Lisbone par Guiliano Bartolomeo del Giocondo et imprimée déjà
en 1504 (à Augsbourg, chez Jean Otmar) (so4). Yespucci dit qu'il a fait
ces extraits et relations de ses quatre voyages à l'instigation de Marc
Benvenuti florentin, pendant le séjour que celui-ci ûtà Lisbone en se
chargeant de le faire passer à Renée, duc de Lorraine : ce qui en effet
eut lieu en 1504. Yespucci rapiéça tout ce qu'il avait écrit pour le roi
de castille Ferdinand, prépara en i500 pour Lorenzo de Pietrofrancesco
de Medicî et le 4 septembre 1504 pour le gonfalonier Soderini et
l'adressa au roi duc Renée. Martin Ilacomilus fit imprimer cette com-
position en 1507 eu Lorraine à S. Die de Yosges dans sa cosmographie,
où, épris des grands exploits des quatre voyages, il propose d'appeler le
nouveau monde Amérique. Son petit ouvrage se répandait avec succès;
réimprimé plusieurs fois dans différents pays, traduit en français et en
allemand , il n'a trouvé aucune contradiction. Ainsi la fortune d'Ame-
rigo, à l'insu de Yespucci , a été faite (29s).
192 Martin Waltzemûller ou Waldseemuller , fribourgeois , étudia
vers 1450 à l'université de sa ville natale. Ensuite professeur au gym-
nase de Sainl-Die dans les Yosges il y fonda une bibliothèque avant 1507.
Grécisant son nom en Hyldcomycus , il publiait ses petits ouvrages et
dressait les cartes géographiques qu'il décorait d'écussons. Orbis
terrarum regiones prœcipuds dominorum insigniis nolare sluduimus ; in
quarlam terrœ partem per inclylos casliliœ et lusilanie reges reperlam,
eorundem ipsorum insignia posuimus (cosmogr. 1507, p. 15). Dans un
ouvrage qu'il publia conjointement avec Philesius, en 1511, sont énu-
mérées les cartes des différents pays d'Europe, dessinées par Hylaco-
(294) Publiée chez Otmar en 4S04, elle fat réimprimée sans indicatioode l'année à Paris, chez
Gilles de Gourmont, ou chez Jean Lambert; parce que l'édition allemande de 1505, chez llathias
Hiipfuff à Strasburg, se dit troisième ; ensuite reproduite à Leipzig i506, chez Martin Landesbergk ;
en Italien en 4507.
(295) L'ouvrage de Ilacomilus parutjd'abord anonyme sous le titre de : cosmographiae introdoctio
cum <|uibusdam geometriae et astronomiae principiis ad eam rem necessariis ; insuper quatuor
Americi Vespucii navigationes. Au dernier feuillet on voit dans un encadrement les lettres G.L.»
N.L., M.L (Nartinus Ilacomilus) et tout autour : finitum vu kal. maij, anno supra sessiquimillesimum
vu (iS07), urbsDeodate, tuo elarescens nomine, praesul, qua Vogesi montis sunt juga pressit
opus,.^ etc., in-i*. — Edité ensuite sous le nom de l'auteur 1509, 1535, 1554, et à Venise ; traduit.»
HTDROG. PORTUGAISE, 193. 143
mylus (296). Avant de mourir il réduisit à une moindre échelle ces
cartes modernes qui se trouvent attachées à l'édition de Ptolémée
de 1515. Laurent Pbrisius fit publier ces cartes réduites à la suite de
sa publication de Ptolémée chez Puninger à Strasbourg 15^2, comme il
le dit lui-même (YIII. 2) : et ne nobis décor alierius elationem inferre
YÎdeatur, bas tabulas e novo à Martine Ilacomylo pie defnncto construc-
tas et in niinorem qnam prius un quam fuere formam redactas esse
notificamus. Huic igitur et non nobis, si bon!» sunt , pacem exopla.
Ilacomilus était intime avec Mathieu Ringman ou Philesius, natif des
Vosges. Il coopéra avec lui à la traduction de la géographie de Ptolémée
qui devait paraître en 1507, aux frais du duc de Lorraine Renée II et
ne fut publiée qu*en 1513, par Uebelin et Essler. Ilacomilus n'y est pas
nommé (s97). S'il contribua par son travail au recueil des cartes
modernes c'est comme simple dessinateur. Aucune invention ne perce
dans la copie de la carte de Donis ou des cartes continentales ou de celle
de la Palestine. Plus tard toutes ces cartes furent par lui de novo con-
strutae et in minorem formam redactae pour une publication posthume
de 15ââ. Peut-être était il compositeur des cartes topographiques de la
Suisse et de la Lorraine. Ilacomilus jouissait de la laveur du duc qui
regardait ses ouvrages avec satisfaction (298).
193. Renée II , duc de Lorraine , roi titulaire de Sicile et de Jérusa-
lem (1473-1508), encourageant les études et Tétude de la géographie,
faisant graver à ses frais les cartes modernes qui devaient accompagner
Ptolémée , désirait avoir une mappemonde et s'en était procuré une
portugaise qui pouvait contenir les connaissances les plus récentes. Le
roi de Portugal Emmanuel (1495-1521) en avait une qui était toujours
déployée sur la muraille de sa chambre : mais celle qu'avait acquise
Renée était une autre, procurée probablement en 1504 par Renvenutî
conjointement avec les quatre voyages de Yespucci. Le duc fit graver
ces cartes portugaises et la carte intitulée hydrographie. Au dire des
éditeurs de l'hydrographie, Jean Essler et George Uebelin , elle avait
d'abord été dressée par un amiral du roi Ferdinand (299). Si leur dicton
(196) Cet ouvrage porte le titre : instructio manuductionem prestans in cartam itinerarlam
Martini Hilacomili cum Inculentiori ipsius Europae enarratione a Ringmanno Philesio vosigena
conscripta, Argentorati ex offic. Johannis Gruningeri 1514. (Mylii , memorab. bibl. acad. jenensis,
p. 139; Freitag analecta Hteraria p. 449). — Ortel mentionne vaguement deux de ses cartes seule-
ment : universalem navigatoriam quam marinam vulgo appellant et Europam , in Germania alicubi
impressas.
(197) n se plaint en 1507 que sa cosmographie éditée anonyme plerique falso sibi passim ascribant.
Cette plainte ne peut pas se rapporter à l'édition de Ptolémëe.
(198) Renatus H Siciliae rex, dit la dédicace d'Hylacomylus , opusculis gcographicis mimm in
modum delectatus fuit : neque obliti sumus quo hilari vultu , generalcm orbis descriptionem , et
alia laboris nostri monnmenta, sibi oblata, a nobis suscepit.
(199) Hjdrograpkia sive ckarta marina, continenstypum orbisuniversalem, juxtabydrograpborum
traditionem. — Charta marina, quam hydrograpkiam vocant, per admiralem quondam Portugaliae
régis Ferdinadi, caeteros denique lustratores verissimos peragrationibus lustrata, ministerio Renati,
dum Tixit, nunc mortui, ducis Lotbaringiae praelograpbatiooi tradita est (Essleri et Ubclini praefat.).
Dans notre atlas, n* 148, nous donnons Ta copie de cette carte hydrographe, réduite en proportion
de 50 à 14 de l'échelle. — Les mêmes éditeurs qui l'ont publiée en 4513, ont fait paraître a la fois
quatre autres cartes portugaises spéciales. Deux de l'Afrique comme ils l'ont dit eux-mêmes : chartis
portngaleusium sumptae ; une du nouveau monde et une des Indes orientales. Ils n'ont pas qualifié
eux-mêmes de portugaises ces deux dernières , mais en les confrontant avec la carte hydrographiçiue
générale, leur origine est indubitable. — Nous avons profité de cette réunion de cartes de même
origine et nous avons élaboré la carte générale hydrographique, extrayant des quatre cartes spé-
ciales tout ce qui a pu se placer sur notre échelle à savoir : celles du nouveau monde, de l'Afrique et
i44 GiOGR. LATINB, l470-i5S0.
était vrai , Tongine de la carte remonterait au xiv' siècle, car Ferdinand
régnait depuis 4567 jusqu*à 1585. Il est évident que c*est leur méprise
qu il faut tout d'abord rectifier par quelques explications.
Le frère d'Alfonse V, Ferdinand de Yiseo (mort 1470), avait des pos*
sessions qui demandaient d'avoir une marine. Le roi son frère, en 1457,
lui conféra toutes les îles qu'on avait découvertes jusqu'alors, avec leur
haute et basse justice, sauf quelques restrictions. En 1460, l'infant
Henri, céda au même Ferdinand qui était son neveu, en l'adoptant pour
son fils, les îles de Jésus et la Graciosa. Le roi ratifia cette cession
(Barros, decas I, lib. II, cap. I). Possesseur de tant d'îles, Ferdinand ne
pouvait se passer d'une carte nautique ou hydrographique : son amiral
la lui prépara et après la mort de Ferdinand, arrivée en 1470, d'autres
géographes s'occupèrent de la corriger ou plutôt à l'enrichir par de
nouvelles découvertes. Ce Ferdinand est l'avant dernier de ce nom dans
la famille royale de Portugal. Il paraît plus naturel d'attribuer l'origine
de la carte à ce prince royal qu'à l'ancien roi. Mais cette explication,
toute. plausible qu'elle paraîtrait, cède devant une autre considération.
Le nom de Ferdinand n'est qu'une méprise des éditeurs de 1515. Le
nom du roi de castille figure chez eux par méprise à la place du roi
Emmanuel , et son quondam amiral est Yespucci (mort 1512), qui
retouche la carte de sa main , peut-être la dessina lui-même et l'envoya
de Lisbone au duc (mort 1508) avec ses quatre voyages, quatuor navi-
gationes, dans lesquelles il relate ad Ferdinandum regem (castille)
scripta (soc).
La carte de l'hydrographie portugaise fut gravée sur bois du vivant
du duc de Lorraine Louis Renée qui mourut en 1508, et elle se trouve
en premier lieu dans l'atlas de Ptolémée publié à Strasbourg en 1515,
ensuite dans ses éditions de 1520 et de 1522. Nous allons examiner de
combien d'années elle peut être antérieure. (V. n° 118 de notre atlas.)
Une note inscrite sur la mer près de Calcutta avertit que la province
de Galicut est lustrata per regem porlugalie. Or, cet événement de 1498
et 1500 est de fraîche date pour l'hydrographie portugaise. Elle ne
nomme point Goa qui fut reconnue plus tard; elle ne sait pas comment
ranger les côtes de l'embouchure de l'Inde, de la péninsule Guzarat, où
Daba (Diu) ne fut occupé qu'en 1509; elle ignore les positions au delà
du Gange, de Malaka, des îles, etc.
Les côtes orientales de l'Afrique reçurent leurs formes, à la suite des
premières courses. Quiloa y est visitée en 1500, et la position de Mada-
gascar est tracée, privée de ces détails qui ne furent perlustrées
qu'en 1506, dès quelle fut baptisée du nom de S. Laurent. En un mot,
tout ce qui est tracé et inscrit dans le vieux monde ne dépasse pas les
connaissances de l'année 1501.
des Indes. On peut encore compter au nombre de cartes portugaises de cette époque, qui pouTent
remplir le vide de rbydrographie, celle de India orientalls et celle de magni cban Tel Tartaria, qui.
se trouvent dans Ptolémée édité chez Trechsel à Lyon I53S. — Voyez la note 32i.
(500) Vespucci, très-instruit dans l'art de la navigation, savait dessiner les cartes comme tant
d'autres navigateurs. Burgensem antistitem (Fonsecam) buius (indicae) nauigalionis confugium, adivi
(dit Angliiera). Inclnsi unocubiculo multos indices habuimus ad manus.... quas nautae chartas
vocant navigalorias : quarum una a portngallensibus dopicta erat, in qua, manom dicitur imposuifis*
Americns Vesputivs florentinus, vir in hac artc peritos. Anghera. dec. U, lib. X, p. 499.
nTDROGR. PORTUGAISE, 194. 145
Lorsque nous collationnons Thydrographie pour le nouveau monde
avec la carte de 1500 de Jean de la Cosa, nous remarquons la même
situation des îles, la même forme de File Cuba ; les mêmes rivages de la
terra noua ou terre firme ; la même absence des découvertes postérieu-
res de Bastidas et de Colomb, faites au fond du golfe jusqu'à Panama.
Mais Tamiral portugais, rapiéçant ces découvertes espagnoles, ne savait
pas donner ce rapprochement des îles à la terre ferme, qui est exacte-
foent indiqué par de la Cosa. Au nord, Thydrographie ignore les décou-
vertes anglaises tracées par de la Cosa : mais il connaît la perluslration
de Gaspar Cortereal, qui retourna de sa course le 8 octobre 1501. 11
connaît de plus Tile Riqua (Tamariqua) et la première reconnaissance
delà Floride. EnOn il connaît la terre de Sainte Croix et toute la côte
jusqu'à 4'0° austral parcourue par Texpédilion portugaise de 1501, 1502,
qui est le sujet du troisième voyage d'Amerigo Vcspucci. L'hydrographie
a donc pu arriver en Lorraine avec la relation du troisième voyage et
avec les quatre voyages expédiés de Lisbone par Benvenuti au duc
Réuée e« 1504. Livrée de suite à la gravure, elle fut coupée sur bois
avant la mort du prince, laquelle eut lieu le 10 décembre la08 (soi).
194. En examinant cette carte (voyez n^ IIS de notre atlas), nous la
voyons dessinée suivant rancienue méthode nautique, sans longitudes
tlsans latitudes : mais elle est passée par la ligne éqtiinoxiale et les
deux tropiques, qui sont jetés tout au long à travers les roses des vents
Cl indiquent que Tattention du dessinateur se portait plus ou moins sur
la graduation possible, sur la projection cylindrique. Aussi, il est bon
de remarquer que, conformément à l'habitude de Ptoléméo, la carte
offre le sud en bas et le nord eu haut.
Quant aux formes ptoléraéennes , elles dominent dans rintérieur de
TAsie, surtout au delà de l'Eufraie. La mer Caspienne et celle de Perse,
feScythie, le golfe de Gange et le Grand golfe, sont calqués sur les
proportions graduées de Ptolémée. Dans Finlérieur de l'Afrique, toutes
les montagnes, char des dieux, Bardite, Aranga, etc.; les fleuves Garama,
Niger, Nil avec les sources sorties des monts de la lune, sont copiées de
Ptolémée. On voit que l'hydrographe portugais, dans l'ignorance de
l'intérieur, préférait l'ancien grec au lieu de suivre les traces du camal-
dolèse Mauro. Partout où la connaissance des pays ou des mers man-
quait à l'hydrographe, il adaptait les données de Ptolémée. Mais il avait
le bon sens de ne pas admettre ces bévues surannées partout où il pos-
sédait des connaissances positives des marins exercés, ou récentes rap-
portées par des voyageurs modernes, et quand ils avaient les cartes
sufiisantes dressées par des cosmographes antérieurs.
^^^} Il «t plus qne probable qnc gravée en 1S07, elle à clc de suite mise en vente. Le savant
beiédictiD Trittenlieim (lils de Jean de Heide.nhcrg), né 1462, mort le 10 «létcrabre lol8, dit dans sa
lettreda i% août 1307, qu'il est trop pauvre comme abbé du couvent de S. Jacq de Wiirtzhurg, pour
acheter ane mappc pulclierrirac depictam qu'on veut lui vendre à Worms pour -iO llorins; que
jamais OD ne lui persuadera qu'une mappomoudc peut valoir autant et qu'il a préféré faire un achat
plu* ipodeste : comparavi autem mibi anle paucos dies aerc mttdii-o, spiiaoram orbis pulcliram, in
qaaBtitateparvannper Argentiuae improssam , simul et in map:na dispositiono globiim terrae in
piano expaasum cum insulis et regionibus novitcr ab Amcrico Vespurio hispauo invenlis in mari
ooddeDtaii, ac versas méridien, ad parallelum ferme deciuiuni ^(luadiagrsinium) (Joli. Trithumii
«Wflndîi» partis cbronira insigniaduo, Francof. IGOl.p. 5o3).
II. 13
146 GÉOGR. LATINE, 1470-1850.
Examinons maintenant le reste de la carte. Les cotes perpendi-
culaires de la Syrie, septentrionales de TAfrique, de toute la mer médi-
terranée, extérieures de l'Europe , toutes sont conformes à la carte
catalane et autres des cosmographes; toutes, à Fexception du Danemark,
qui affecte la forme ptoléméenne, étant prise avec la Skandinavie de la
carte spéciale de ces régions, inventée comme complément de Ptolémée.
Le cours de TEufrate, quoique tracé sous l'impulsion de Ptolémée, cède
à la direction juste des côtes de Syrie. Il faut admirer, je le répète, le
bon sens des hydrographes portugais, de n'avoir pas renoncé à des con-
naissances positives pour se traîner à la remorque du décrépit Ptolémée.
Il faut absolument convenir, que la doctrine de Behaïm ne prévstlut
guère et n'a pas eu de retentissement parmi les Portugais. Cette carte,
postérieure à la construction du globe , le dit positivement.
Le nouveau monde est dessiné en partie d'après les découvertes
espagnoles, en général d'après les propres investigations des Portugais.
L'Afrique entière appartient à eux seuls. L'Inde offre un mélange
bizarre de leurs premières reconnaissances depuis qu'ils y ont pris le
pied à Calcutta, et des narrations de Marco Polo et d'autres, appliquées
aux tracés ptoléméens et complémentaires.
Le vénitien Mauro, composant sa mappemonde, il y a iO ans, n'ayant
sur la mer de l'Inde et sur l'orient entier que des données générales et
tout-à-fait vagues, inventait les détours des côtes, les directions des
fleuves, les contours et les situations respectives des pays et des îles
nombreuses; tout, d'après les relations abondantes de Marco Polo. Il
inventa , il créa à cet effet un monde idéal , réprouvant les extrava-
gances de Ptolémée qui s'accréditait. On peut dire la même chose de la
carte catalane plus ancienne de cent vingt ans aux hydrographes qui
nous préoccupent. Ptolémée n'était qu'un astrologue pour les Catalans.
Les hydrographes portugais, enrichis par différents autres renseigne-
ments apportés de l'orient, distribuèrent les relations de Marco Polo sur
des tracés de Ptolémée, suppléant, par l'adjonction de spacieux pays,
qui manquaient à la connaissance de Ptolémée pour entourer le conti-
nent oriental par les eaux de l'océan et par l'addition des îles qu'on
savait être grandes, et dont on connaissait, par des relations multiples,
les noms et les situations respectives. 11 est probable, comme nous
l'avons observé, qu'ils étaient instruits ainsi par Toscanelli et Colomb.
Confrontant cette partie , comme elle est dressée sur la carte portu-
gaise, avec ce qu'a dessiné Behaïm sur son globe, on voit l'identité
évidente : on peut dire avec certitude, que l'ordre, l'organisation et les
formes de cette partie, reproduites par les géographes postérieurs,
furent enfin réglées et coordonnées en Portugal , et que Behaïm les
apporta de ce dernier pays. La grandeur des île^s, leur éloignement res-
pectif et plus ou moins dispersé, étaient arbitraires, mais la suite et
l'ordre convenu et déterminé jusqu'à ce que des reconnaissances et
découvertes ultérieures rectifiassent l'incertitude ou l'inconnu, sont
fixes et immuables sur les productions variées de Behaïm 1492, de
l'hydrographie et de Ruysch 1507, de Sylvanus 1521, de Essler et
Ubelin 1515, de Schoner 1520, de Bordone 1521 , de Villanovano 1535.
Quant aux rivages asiatiques, qui avançaient vers l'orient en face de ces
îles, toutes les monstruosités de Ptolémée y furent bientôt rayées; le
reste vers le nord dirigea longtemps encore les géographes.
HTDROGR. PORTUGAISE, i9S. i47
195. La carte hydrographique demande encore quelques considéra-
tions sous le rapport de Téchelle. Elle est traversée par la ligne équi-
Qoxiale et les deux tropiques. Les éditeurs placèrent en outre sur son
bord une échelle de latitude, mais très-négligemment et inexatemcnt.
La ligne équinoxiale et les tropiques déterminent mieux son échelle.
C'est une carte plane, présumant une projection cylindrique, la rose
tramontane ou septentrionale est placée au pôle arctique , ou sur la
ligne du pôle, d*où jusqu'à Féquateur on ohtient 90 degrés qui donnent
les 25® aux tropiques. La latitude étant déterminée et fixée, nous avons
cherché Féchelle ou le degré de longitude. Ptolémée, pour Tlnde au delà
do Gange, étant le modèle copié, il est nécessaire d'admettre que Mur-
fuli et Moabar, qui représentent sa Sinie, se trouvent à peu près à i80®
des îles Fortunées ou Canaries, de l'île de Fer. Or, ce nombre de
degrés se trouve sur Thydrographie portugaise entre Tîle de Fer et
Mnrfuli, mais en degrés comptés sur la parallèle de Rhodes, c'est-à-
dire */5 moindre du degré du grand cercle : par conséquent la carte
plane est déroulée sur la parallèle de Rhodes et l'extrémité du continent
avance jusqu'à 220° et 250°. Le degré de la longitude, ainsi réduit, ne
donne pour la longueur de la méditerranée que 40** tout au plus, ce qui
est bien loin de la longueur excessive de Ptolémée qui est de 62<». Encore
faut-il remarquer que les 46° offrent un chiffre trop fort. La carte por-
tugaise de l'Afrique, publiée par Ubelin 1515 (et reproduite dans Tatlas
de Santarem), ne donne à la longueur de la méditerranée que 42°. Or
le surplus de la carte générale de l'hydrographie vient de la grossièreté
de l'ouvrage. Le couteau du graveur ou tailleur de bois dans son ouvrage
grossier de moindre échelle a manqué à la dimension.
Mais si l'on voulait appliquer ce degré de la parallèle de Rhodes, ou
du56"« degré de la latitude, à l'ouest du méridien de Fer, on n'obtien-
drait pas des résultats qui pourraient être facilement confirmés par
d'autres caries. Ou trouverait de l'île de Fer, qui paraît être île du
ffléridien jusqu'au delà de Cuba, 90°, tandis que la carte de de la Cosa
de Î500, ne donne qu'une distance de 75 degrés du grand cercle, et les
cartes qui parurent bientôt graduées, ne comptent ordinairement
<lûe 70°. Or, il doit y en avoir autant sur la carte hydrographique , et
floand on compte sur cette carte à l'ouest du méridien de Fer les degrés
dtt grand cercle, on y retrouve juste ces 70° indiqués par les cartes
graduées (302).
Cette différence de l'échelle de la longitude est et ouest, résulte de la
différence de bases sur lesquelles les parties étaient développées. La
portion de l'ancien monde, assise sur la parallèle de la mer méditerra-
née, 55° et 56°, dérive de la combinaison de petites dislances, par
l^uelle toute cette portion se forme en projection accidentelle, affec-
lâDt le moins possible l'égalité et la proportion des distances. Le reste
du vieux monde emprunté de Ptolémée remplit les 180 degrés dans le
même sens. C'est la composition antérieure aux grandes découvertes de
Muvelles terres. — La seconde portion, celle de nouvelles découvertes,
se trouve assise sur la ligue équinoxiale; ses grandes distances, produit
(SW) CejKmdant Jean Rnysoli (dans l'édition romaine de PloUimcft en 1507, f^raduant celte partie
« » carte, n'a pas ûcsitc de placer le milieu de Cuba à 90° ouest du méridien de Fer.
148 OÉOGB. LATINBy 1470-1550.
de la navigation hantorière, sont développées snr la projection plane
du grand cercle. Ce n'est pas la latitude connue qui les fit grandir, mais
la longitude inconnue et les espaces du développement. — A la suite
de cette double projection réunie, toute TAfrique méridionale, dévelop-
pée sur la projection plane du grand cercle , ne s*aceorde pas avec le
vieux monde. Cetle projeciion fit dépasser les rivages de TAfrique 10
degrés vers Test les proportions ptoléméennes; défigurant TArabie el
la mer rouge, où les navigateurs ne pénétraient pas encore, elle donnait
à la mer rouge une longueur excessive et une inclination trop horizon •
talement couchée (ses). Lorsque les navigateurs portugais, pénétrant dans
la mer rouge, comprirent la pose de son bassin, alors pour éviter celte
fausse déclivité, il devenait indispensable de laisser une extension
monstrueuse à Tisthme de Suez (304).
La composition de la portion du vieux monde , laquelle , avant qu^on
eût fait de grandes découvertes, avait réunie la mer méditerranée deà
cosmographes avec le quart de Thabitable de Ptolémée, décèle une très-
importante et intéressante circonstance : c'est que les compositeurs de
la réunion comprirent très-bien la longitude que la longueur de la
médiicrranée avait relativement à Téchelle des rivages de la carte
entière et qu'elle devait conserver ses proportions : chose méconnue
par les savants adeptes de Ptolémée.
Par la seconde portion , contenant les terres nouvelles , on voit que ,
sur de vastes mers, on a compris que la boussole et les rumbs dévelop-
paient une projection plane. Les hydrographes portugais, avec tous les
navigateurs qui avaient parcouru de vastes mers, portaient leur atten-
tion à la latitude géographique des lieux pour déterminer leur position
relative à la ligne équinoxiale. Cependant dans Tcnsemble de la mappe-
monde, dans la réunion de deux portions hétérogènes par hasard mal
coordonnées, les latitudes du vieux monde sont méconnues.
On ne pensait pas sérieusement à graduer la carte. La ligne équi-
noxiale avec les tropiques sont tracées pour le nouveau monde sans
égard au vieux. Le 50" degré d'Alexandrie y est plus au nord que le
50*" de Gibraltar. L'obliquité de la méditerranée des cosmographes y
est compromise (ses). La carte du vieux monde, avant d'être graduée,
demandait de grandes reclifications, une réforme, car la construction de
de l'ancien monde n'était pas applicable a la projection plane, qui se
déroulait sur de grands espaces, orientés par le pôle el déterminés par
son élévation.
Jean Ruysch, 1507.
iOO. Dans la même année que la carte strasbourgeoise fut taillée en
bois, parût à Rome 4507, 1508 (chez le vénitien Bernardin de Vilali-
bus] , une édition de Ptolémée accompagnée d'une mappemonde de
(505) T.a mômr iléclivitc horizontale de la mer roagc , conserve l'atlas espagnol de 137S. Ses cartes
spéciales lui donnent une longueur presque égale à celle de la méditerranée.
(304) Voyez la carte de l'Afrique de ititl, et de 152i) de Kibero, u" 1 17 de notre atlas.
(505) I/u|tpliration de climats à une carte nautique par d'Aillj, décelait en 1410 cette obliquité.
I.a (sraduatiou de la mer méditerranée de l'atlas de Sauulo 1321, de la c^rte catalane 1375, de celle
de Mauro 14î>9. constatait cette inclination. Nous le voyons en iS04, fichée dans les vastes découvertes
du nouveau monde. Nous la verrons rectifiée dans les cartes de 15S7, 1529.
JEAN RUYSCH, 196. i49
rallemand Jean Ruysch, gravée sur cuivre (voyez n* 119 de notre
allas) (306).
Jeao Ruysch développe, pour sa table universelle, la projection
coDÎquesur tous les 560 degrés de longitude, et jusqu*à i5* de la latitude
australe : de cette façon il déroule toutes les nouvelles découvertes
graduées. Terra sancta crucis sive mundus nonus, ne diffère en rien do
ce qu^oQ voit dans Fhydrograpbie portugaise. On y lit en bas : naute
LusUani partcm hanc terre hujus observerunt cl usque ad élevai ionem
poli antarclici ^0 graduum perveneruni, nondum tamen ad ejus finem
austrinum. Cependant les épigrapbes des côtes n'avancent que jus-
qu'au 40*^ degré, comme dans Fhydrograpbie. Tabula tcrrœ uov:e de cette
hydrographie, reproduite en 1515, 15*20, 15*22, 1555, offre une singu-
lière erreur dans Tépigraphe de abbalia omnium sanclorum, au lieu de
babia , baya , baie. Cette erreur ûgure dans les quatre voyages édités
par llacomil. On croirait que cette erreur est iuventée par Téditeur
ilacomilus, qui probablement coopéra dans la publication de la bydro-
crapbie. Mais la carte de Ruysch, attachée à Tédition romaine de 1508
de Ptolémée, à laquelle est jointe, nova orbis descriptio de Beuvcnuii ,
présente la même erreur : or, elle a sa source dans la traduction
latine de Giocondo, qu'eiK 1504 Benvenuti expédia de Lisbone en Lor-
raine et que lui-même apporta en Italie.
Au nord de ce nouveau monde Ruysch est différent de Thydrographic
portugaise. 11 ignore beaucoup plus les découvertes espagnoles. De
Vouest il couvre le continent de Cuba par uue bande, dont Tinscrip-
tion : hue usque naves Ferdinandi régis hispanniœ pervenerunt, annonce
rincoiinu ultérieure jusqu'à la Chine et Tlnde, où Ton espérait encore
arriver directement. Il n'ose pas indiquer la place pour Sipaugu
(Japon), parce qu'il présume que cette ile est la Spaniola; il ne connaît
pas l'étendue de Cuba , qui pouvait être une portion du continant de
Gâtai, comme le prétendait Christophe Colomb (sot).
(506) Ellea été quelque part reproiluit»», mais j»; ne me rappelle pas dans quel ouvrage ; elle ni'ost
oraatù, quoique je uai jamais vu les éditions roiiiuines du IHuléinée. — On trouve ses irat^nieiits,
^pradaites dans plusieurs ouvrages. L'Afrique daus celui de Saularem , du la priorité portugaise
^j^usles découvertes; le nouveau monde, dnus ceux de Kauion du la Sa{xra, liistoria du la i^la du.
^^ Paris, 18ii, fol. et de Uumboldt, examen de l'Iiistoire de la gèoçrapltiu du nouveau momie
^ '-, ~ Nous dounoQS cette (carte toute entière réduite à s/s de récliulle. Dans rori{$ii)al le»
HUcripUoos sont eu majuscules ou lettres capitales.
1^7) Christophe Colombe était un liomme extraordinaire : avauturenx et studieux, inti'épide et
»ci>iiiistniit, inaltérable dans ses adversités et d'une activité extrême , il exécuta ses projets, vil ua
*^.**' ordre de choses et n'a jamais su se délivrer des idées étroites et de la routine du siècle. Lm
graiedece graud homme n'a pu sortir des ornières tracées par la pratique, imposées par ses propres
preveQiioog. Sa piété monastique pouvait édilier, si elle ne lésait tort à l'humanité, voulant accomplir
uprophéiie d'Isaï (inscrite dans la carte caUdane) avant la fin du monde qui se rapprochait trop :
^P*Odantil aimait celte race d'Indiens, contre laquelle il sévit lui-même et dont il voyait l'exter-
Bioation, impuissant de l'empèc-her. Excellent observateur, il distingua les variétés de ia nature et
î*®y.»t parle changement de l'air remarquer um; éminence sur l'autre hémisphère du pt lit globe,
f|'**ïiiia de retrouver le paradis terrestre indiqué par les pères de l'église au ion»! de l'oiifnt
'V*'! allait traverser en partant de l'ouest. 11 entreprit sa première expédition pour découvrir le
***™»i»qiii laciliterait la prriustralion de l'orient pur l'ouest. Hencontraut les terres, il salua le
'JCttxnjondçqui produit les épiceries, où règne le grand khan. Il lit jurer tout son équipage, (|ue le
r^^. de Cuba est le rivage d'un tontinent Son pilol»- Jean de la Ikisa , dessinait en luOO la forme
n'*i>laiFe de Cuba, et Colomb s'obstinait à chercher la prolongation de son rivage continental jusqu'à
_*••** cl Terra firnia. Il n'a januis voulu aduieltn; l'exislence d'un nouveau monde, heureux de
«««nuer la.i;ecounai8sauce du rivage des pays d»'» épiccs et du grand khan. Ue retour do son dernior
'oyagcii u berçait de l'espoir que bientôt une ambassade espagnole partirait, pour se rend<u aujuès
<>> grand khao parle chemin de sa découverte , et qu'un piéton , parti de Madrid, saurait à j>ied sec
I^f^rir levieux monde justyi'aux rivages qu'il avait si heureusement reconnus.
150 GÉOGR. LATINE, i470«135O.
Cependant il réunit en un seul continent Catai , ses parties sepléB-
trionales, Lopet Bergi, Groenland et la Terre-Neuve, visitée par les
Portugais Cabot et Corlereal , ignorant les découvertes anglaises, détail-
lées dans la carte dedelaCosa. On voit que les nouvelles découvertes ne
se communiquaient pas également aux cartographes; ce qu'avait appris
Tun d*entre eux, ignorait Tautre, et d'après leurs connaissances insuflt*
santés ils hâtaient de former les hypothèses sur de bases peu solides.
La carte portugaise hydrographique n'invente sur ce point aucune
hypothèse : elle y signale sur les vasles mers : regalis domus et terra
laboratoris, appellations inconnues à Ruysch. (Cette indication solitaire
sur le vaste océan, est reproduite par Sylvanus 1511, par Schoner
1520, etc.) Terra Corterealis , de Cortereal, est traduite encorte real,
cour du roi , domus regalis.
En suivant les rivages du Cata! , on voit que Ruysch donnait aux
extrémités orientales de l'Asie et du Calaï la même forme et la même
situation sur Tautre hémisphère, qu'ils ont sur le globe de Behaïm,
dans rhydrographie, chez Sylvanus, Bordone, Schoner; la même posi-
tion des grandes iles extraites de la relation de Polo , et il réprouve par
une légende le bassin de la mer indienne fermée : Indicum koc pelaguê
quod omne cum suis sinihus unde claudi a terra Plolemeus relulit, par^
lent oceani esse, lusUanorum navigationes ostenderunt hoc tempore.
Dans la configuration de trois péninsules indiennes il diffère beau-
coup de Behaîm et de rhydrographie portugaise. Sou India intra Gan^
gem est portugaise : mais India extra Gangem ne dépasse chez lui
autant la ligne équinoxiale que chez les autres; quoique Malagua el
Soumatra descendent beaucoup plus au sud. Sinus magnus de Ptolé-
mée , est chez lui porté au delà de la ligne et réduit à une proportion
très-raccourcie. Il avait donc des motifs assez puissants pour contrecÛre
Ptolémée sur tous les rivages de Tlnde et de sa mer.
Au reste, le vieux monde est de la construction de Ptolémée. Il paratt
que Ruysch , dans cette construction même , admettait quelques recti-
fications spéciales : son Ecosse et les rivages africains de la méditer-
ranée donnent un spécimen frappant de sa déviation du modèle grec.
Mais Tensemble de Tédifice est ptoléméen. Ses longitudes donnent à la
mer méditerranée une longueur de 62 degrés. Ruysch se distingue par
de conceptions qui savaient apprécier les nouvelles découvertes et les
connaissances des cartographes antérieurs qu'avait engendré le moyen
âge : mais il est de Fécole allemande , qui entreprit de soumettre à
Ptolémée toutes les compositions géographiques (sos).
Ptolémée aux prises avec la méthode nautique, 1470-1550.
197. Depuis que l'invasion de Ptolémée s'était déclarée dans la géo-
graphie du moyen âge , deux modes de construction de cartes se sont
trouvés face à l'ace opposés. L'un nouveau de la renaissance des lettres,
(308) Le pôle, les quatre îles et les ccucils arctiques de Ruysch sont autrement figurés par Gérard
Mercator qui admet que l'oceanus id ostiis inter Las (quatuor) insulas irrumpcns 4 euripos facit
quibus indesiuenter sub scptentrioncm fertur, atque ibi in viscera tcrrx; absorbetur. Kupes qusè sàb
pulo est ambitus circiter 33 leucarum babet. D'une de ces îles qui est vis-à-vis de Bargu , le pôle est
visible d'après Marco Polo ; celle qui touche au Groenland est occupée par les Pygmées qu'on appeUe
Scrcliogers; sa voisine à l'ouest optima est et saluberrima totius septcqtriouis."
SYLTAHUS, €98» i5i
ressuscitant la géographie décrépite greco-romainc ; Tautrc ayant son
existence depuis plusieurs siècles, encore jeune, plein de Yigueur,
enrichi d'innombrables connaissances. Le premier soutenu par la cré-
dulité des savants théoriciens et philologues; Fautre par la plus intime
conscience des hydrographes et marins expérimentés. Ces modes mar-
chent un certain temps séparément , ensuite se heurtent et s'embrouil-
lent réciproquement, parce que dans la lutte de préférence qui s*était
engagée , on voulait tirer les avantages du pau'ti adverse » on inventait
des concessions. On comprend bien que Tancien monde était Tunique
terrain de la lutte. Les plus beaux résultats de la géographie du moyen
âge y sont menacés. A la fin , après la résistance prolongée ils cèdent à
la prévention irréfléchie, obstinément^ entêtée.
Les marins, pilotes, hydrographes, cosmographes, ne discontinuaient
point de dessiner les cartes, tant spéciales que générales, suivant leur
méthode (309). Les seuls éditeurs de Ptolémée, publièrent leurs cartes
en taillant en bois ou gravant sur cuivre. Ils copièrent d'abord celles
d*Agathodaimon ou de Ptolémée latinisées, et quelques-uns d'entre
eux y enjoignaient les cartes modernes des cosmographes du moyen
âge, cartes hydrographiques, portulans, chorographlques. S'il avaient
de la besogne à rectifier les premières, ils n'avaient qu'à copier stricte-
ment et exactement les autres, car ils les détérioraient qu^nd ils
essayaient de les perfectionner. Ceux d'entre eux, qui connaissaient le
mérite des cartes des cosmographes de leur époque, regrettaient qu'elles
fussent privées de toutes les décorations théoriques, qu'elles n'étaient
point graduées; ils étaient peines de remarquer leur différence con-
stante avec les formes ptoléméenncs et leur désaccord : ils méditaient
d'y porter remède. Les autres condamnaient ces cartes, substituant
leurs propres contrefaçons de Ptolémée. Editant les cartes gravées en
bois ou en cuivre , suivant leur manière de voir , ils se constituèrent
juges suprêmes de la question et statuèrent de l'avenir de la géographie.
De ce nombre sont les cartes de Schedel, de Munster, et des autres
publiées à Venise, répandu^ sous différents titres, et les caries des édi-
tions de Ptolémée de US% 1486, 1507, 1508, 1511, 1515, 1520, 1555.
Nous avons déjà examiné les produits de Nicolas Donis 1482, 148G,
et de Martin Behaïm 1492, 1605; nous allons suivre la marche des
autres.
198. Bernard Sylvanus, d'Eboli (dans le napolitain), plus géographe
que philologue, édita en 1511 la géographie de Ptolémée d'une manière
toute singulière (510). Il n'a pas voulu déroger à son titre de géogra-
phie et ne Ta pas qualifié de cosmographie comme les autres : mais sous
(309) Les aocoaitains Benincasa et Frediice,RosseUi,Andaloze, Sancbez de Huelba , Cassadilla ,
les Colomb; carte messine 4511, Juan do la Cosa, biscaïen, André de Morales triauain, Diego
Ribero 4529» Jacq de Vaulx dieppois, etc.».etc., sans nombre. En Espagne encore vers la Gn du xvi*
siècle, comme je vois par Tallas de 4573; de même ailleurs comme on voit par les publications bol-
laodaiset à partir de Tannée 4584.
(540) Claudii Ptholomaei alexandrini liber geograpbiae, cnm tabulis et univcrsali figura et una
additione locomm quae a recentioribus reporta sunt, diligcnti euro emendatus et tmprossus, 1511,
Veoetiis, per Jacobum Pentium de Lcucbo. — Ces loct quac a recentioribus reporta sunt, c'est-à-
dire, au sud l'Afrique; à Test les relations do Marco Polo; à l'ouest, terra crucis, les îles du nouveau
monde et terra Laboratoris : sont figurées sur la première carte, mappemonde de Ptolémée. A cet
eilel il a donné un développement de 180* de la longueur de l'habitable, de 70* tant à l'est qu'à
roaest : ainsi qu'elle s'éttnd sur 320* de Iragueur. (Voyez n* ISO de notre atlas).
iâS GÉOGR. LATINE^ 1470-1550.
le titre de Ptolémce, il ioventa un ouvrage remarquable, inulHeet sans
suites. Considérant , dit-il , les positions et les distances de la descrij^
tion de Ptolemée, j^étais étonné du peu d*accord des tables de cet exact
géographe « avec les tables récentes des navigateurs; j'étais d*autant plu»
étonné parce que je savais que Plolémée écrivit aussi basé sur les don-
nées des navigateurs. J'ai réuni de toutes parts les exemplaires grecs et
latins. Je trouvais dans tous la plus grande variété de chiffres qui dési-
gnent les positions des lieux. L'ayant remarqué , j'examinai avec plus
d'atteniion les paroles de Ptoiémée, qui contrariaient plusieurs chiffres;
je reconnus que pres({ue toutes ces paroles répondaient à noa naviga-
teurs et les chiffres nullement. Voyant tout ça je confrontai les paroles-
de Ptoiémée avec les navigateurs, et corrigeai les chiffres (s^ii).
Sylvanus, motivé par ces réflexions, convaincu de la bonne connais-
sance des navigateurs de son temps, enthousiaste de Ptoiémée, ayant
toute conûançe dans son grand et incontestable savoir : ne pouvait
admettre qu'il serait lui-même auteur de toutes ces aberrations et dif*
formilés, qu'on voyait sur les cartes d'Âgathodaîmon , de copistes et
éditeurs récents, dressées sur les tables des longitudes et latitudes*
Voulant retrouver et rétablir l'idée de l'ancien géographe, dont il s'ima-
ginait la conformité, nécessaire avec les bonnes et incontestables con-
naissances nautiques, il négligea les variantes nombreuses des chiffres,
et sans se gêner, inventa arbitrairement et substitua les autres, autant
que ces chiffres de son invention pouvaient s'adapter aux formes nau-
tiques, sans diminuer ni déranger la longitude générale du géographe
comme elle était totale de 180% et de ^i"^ pour la mer méditerranée
(voyez n® 120 de notre atlas).
Or, ce n'est pas un Ptoiémée exact et correct, mais corrigé, ingénieu-
sement refondu et modernisé, costumé en pilote ou cosmographe
moderne. La nomenclature reste intacte, mais toutes les positions se
déplacent, cèdent à un autre ordre dans chaque pays, sans que la lon-
gueur de la longitude établie dans la géographie de Ptoiémée soit dimi->
nuée. Tous les pays reçurent par cette opération, les formes, les pro-
portions rapprochées aux connaissances supérieures de la géographie
nautique : tous les pays du moins qui furent à la portée de ces connais-
sances. La vue et l'examen de ces cartes, leur confrontation avec les
cartes agathodaïmonicnncs ou ptoléméenncs, et avec les cartes nauti-
ques, font mieux comprendre cette transformation fantastique sur tous
les points. Voir l'Albion, la Gaule, l'Italie et la mer adriatique, la mer
syrienne et la Syrie , les côtes de l'Afrique septentrionales et occiden-
tales. La pose horizontale de Kaledonia, se redresse en attitude d'Ecosse;
la déclivité de Syrie devient perpendiculaire; Karthage et Tunis mon-
tent vers le nord et par leur courbe font remonter Palerme et le
museau occidental de Sicile; les rivages perpendiculaires de l'atlantique»
(311). Ego ciim Plholçmaeum , inter alios geographiac scriptoros diligcntissimnm et ntus et
distnnlias locorura scripsisse conliccrcin , admirabar profetlo, cur illiits tabulac paacis ad modum io
rcbus, ciiin nostri tcniporis uavigatioiiibus consentirent; coque m^gis adniiral)ar qnod IHboiemaeum
quoqiie, navigationis coniprimis innixiini, ea quae srripseril, scripsisse arbilraliar. Ciimque diversa
et graeca et lalina excniplaria undique conquircrim , in omnibus, nmximam in nuraeris, qiiibus
locoruDi signanlur intorvalla varictati'm iuvcni. Quod cum aniinadverlissem,coepi dib'geutius ipsa
Plholemaei verba cxamiuarc. Curaque, picrisquc in locis, nnmori verbii ipsis rcpugnarent, cognovi,
navigationibus, prope omuia respondiîre, numéros disscntire. Quae cum vidissem, IHbolemaci vcrba
cum navigationibus ipsis coufcrens, numéros corrcxi (Bcrnh. Silvouus. praefatio).
SYLVANUS, 198. i53
s'^ëlaDceal convenablement vers le nouveau monde. Partout où il possé-
dait des données de carres nautiques il se conforma à ce bon modèle.
Cette composition singulière, baptisée du nom de Ptolémée, considérée
sous un autre point de vue , offre une image des caries nautiques ten-
dues en bande, couvertes de la nomenclature ancienne (ti mises sous le
cannevas de longitudes et latitudes ptoléméeunes. Le monde nouveau
enfermé dans une vieille cage (sis).
Sylvanus rend compte de certaines opérations et ses argumentations
sur chacune sont les suivants. Ptolémée dit positivement quVi partir de
la base méridionale la Bretagne n*a que deux côtés occidental et orien>
tal, ce qui est avéré par les navigations modernes; or, tonte la flexion
de FEcosse de la rivière Vedra jusqu'au promontoire Vervedron, qui
tourne le rivage oriental en un rivage méridional , est contraire à son
opinion et le fruit de Terreur des chiffres qu'il faut corriger. Examinant
bien la description de la situation des peuples au nord de Ligcris, il est
absolument nécessaire de reconnatire , dit-il , que Ptolémée assigne à
rembouchure de Ligeris une position de trois degrés plus méridionale
que ne Tindique le nombre de sa table; et la situation des peuples au
sud de ce fleuve force à faire descendre les Pyrénées, par conséquent
toute l'Espagne, encore plus au midi. De sorte que toute l'Espagne et le
détroit d'Hercule et la Tingitane descendent quatre degrés au sud des
chiffres donnés par les tables de longitudes et de latitudes. Cela n'est
pas contraire aux paroles de Ptolémée et serait sans doute son opinion,
parce que les navigations récentes l'approuvent et la couleur basanée
des habitants de la Betique confirme leur position plus méridionale (5 15).
Les Pyrénées reçoivent par ce changement leur direction de l'ouest à
l'est, et les rivages de la Mauritanie césarienne, leur inclination qui
monte vers le nord. Cette descente de Calpe de 56" 15' à 51** 15 de
latitude, et de toute TEspagne de quatre degrés, résulte de la gradua-
tion rectiligne de la carte nautique, viciée par l'orientation de la
boussole.
Sylvanus remarque le désaccord des chiffres de plusieurs positions
de la Corse avec la description de Ptolémée de leur situation (sii). Il
s'efforce de retrouver dans la description plolcnicenue de la Sicile, sa
(SIS) Raidel trouve les IcgMidcs dos cartes de Sylvanus illisibles. I.oooruin nomiiia, minutiori
charactere îndicaotnr, malu iuterdum divisa, adeo ut vix legi possiut (cuuimcnt. VU, 5, |>. 55). Je nu
sais pas pourquoi? — Les cartes de l'cdîtion de Denis 1482 , 1 i86, soi4 coupccs et taillées en bois,
avec grand soin et très-claires; les cartes do l'édition d'Ubelin luli, iSSO, sont aussi coupées et tail-
lées en bois, mais grossièrement, et les lettres y sont embrouillées, difliciles à distinguer, souvent
endommagées par le traoebant ou inachevées. — Les carlc!» de l'édition de Sylvanus 1511, sont
exécntées de toute autre façon. Elles sont taillées et coupées en bois, bien mieux qiie celles d'Ubelin ,
mais leur bois est privé de toute inscription. Les inscriptions sont imprimées avec des lettres typo-
graphiques à double coup, rouges et noires, par conséquent claires et lisibles. — La carte de Lor*
raine de ioiS, est coloriée par l'impression à plusieurs coups : les contours des montagnes et la
i»lapart des inscriptions sont noires; les signes des villes et quelques épigraphes rouges; les arbrrs,
es montagnes et les rivières, vert jaunâtre. De même les armoiries qui encadrent cette carte de lu
cborograpliie plus spéciale sont coloriées.
(SIS) lior, licet aliorum nnmeris contrarmm sit, nnlla tamen cxparte Ptholemaei verbisadversatur :
immo vero hanc ipsius sententiam esse facile credimus : quia ex nauigationibus ita se se habcre,
compertam habenus.
(314) Corsicam innulam describentes alii Fesiram ciuitatem , Pitaui fluuii hortia et Marianum pro-
inontonum.in meridionali latere locauere, cum tamen a Ptholemaeo in occidentali esse dicantur. —
Syracnsanam etiam porinm, Rnbram ciuitatem, Alistam ciuitatem, Granianum promontorium, ac
Phikinii portum ad orientale latus transtulcre : cum tamen in meridionali iuxta Ptholemaei verborum
sententiam esse debeant.
i54 GÉOGR. LATINE, 147(M550.
positioD, détermincc par les navigations des marins (sis). Il g^étoune
cooiDienl on a pu défigurer rilalie et tourner vers Test ses rivages entre
le mont Gargan et Hydrunt, lorsque Plolémée dit positivement que
ritalie , au septentrion, à partir du fleuve Tilavempt jusqu*à Gai^n et
Hydruut est baignée par l'Adriatique (sie). 11 justifie encore les muta-
tions des chiffres dans les positions de TÂfrique par l'observation que la
terre inconnue , d'après l'expression de Ptolémée, n'est pas au delà du
golfe éthiopique, mais l'entoure (si?); que la position d'Alexandrie
par 51* se de latitude est fausse et contraire à l'opinion de Ptolémce,
parce qu'Alexandrie avec les rivages de la Libye, doit garder son
climat, et la parallèle de celui-ci se trouve par conséquent par 50"* 40'
de latitude, ce qui répond justement à l'expérience des navigateurs (si s).
Motivé par tant de raisons, il se voit autorisé à opérer le déplacement
de tous les rivages et des positions de l'intérieur des cartes de Ptolémée
dans les îles britanniques, dans la Corse, dans la Sicile, et dans les
autres, l'Espagne y comprise; et en commençant du fleuve Rhin, dans
toute la partie septentrionale jusqu'à l'embouchure du Danube; ensuite
à partir de l'embouchure* de Fasis, dans toutes les côtes orientales,
méridionales et océaniques jusqu'à l'hippodrome éthiopien. L'intérieure
de la Libye, le cours du Danube et tout le nord restent intacts.
Le produit de celte opération fournit pour toute la partie réformée
de l'Europe et de la mer médilerranée une bigarrure de vice au trait de
belles apparences de la cartographie nautique. La composition de
Plolémée avait quelque mérite par rapport aux latitudes : elles furent
viciées par l'orientation de la boussole marine. Les compositions des
marins excellaient dans l'ensemble par les proportions de l'étendue
entière , par la largeur et la longueur convenables : elles furent viciées
et ruinées de fond en comble par l'exorbilante longitude.
Afin de mettre en évidence celte opération géographique et le pro-
duit qu'elle engendra , nous extrayons une quarantaine de positions de
Ptolémée et nous les collationnons avec les changements inventés et
substitués par Sylvanus :
Ptolémée. Stlvanos.
longit. latit. longit. kitit.
pr- Taraed. Orcas. 31» SO* 60O15' 15» 20' 61» oo'
p. Vervednim. 31 20 59 40 16 30 61 45
Rheniost. 28 0 54 0 25 0 55 0
Parissii. 23 30 48 30 20 15 48 20
Olisippo. 5 10 40 15 4 0 35 10
(51S) Per omnia latina excmplaria septcntrionalis lateris.... logitnr occidcntalis... qnae lectio facile
falsa esse deprebenditur.... neque occidentale latns appellaudum est... cum meridiojtali recte
apponatar.
(31 6| Qood magis admiror, est, qnod littas omne qood a Gargano monte Hydramtem a«qae
exteuditur, orientali exposuerunt, cum tamen ad seplentrioncm vergat, quod ex nauigatiooibiu
habelur, ac ectiam ex Ptbolemaei verbis comprebalur, dicenlis I Italiam a scptentrione praeter alîa ,
Itttore adriatici sinus a Tilavemptt fluuio ad Garganum monlem et Uydruntem terminan.
(317) Dicitenim Ptbolemaeus, terram incognttam ciogere , id est complecti et coninere ainniii
aethiopicum, non ultra ipsum produci.
(348) Alexandriam etiam, qui aute nos tabulas descripscre, gradibus uno ac semis snpra trîgiata
ab acquinocUali circule distantem locaucre : parallelnm vero per Alexandriam gradibus triginta cnm
tercia tamen... signa verunt... In omnibus enim id observari débet, ut ea loca a qnibos paralleli deao-
minationem sument ab eisdem intersecentnr... Nos itaque ad ipsum cius parallelnm Alexandrisai
omnemaue maris aegyptiad littus contraximus, quod , non modo Ptbolemaei sententia oonsoBvm
esse, sea nostri etiam temporis nauigationibns , omni ex parte responderc compertum babem».
SYLYANUS,
198.
Ptolémée.
Sylvaxos.
longit.
latit.
longit.
latit.
Toletum.
10 0
41 0
10 0
36 30
Gorduba.
9 âo
38 20
8 45
34 10
ls|>alis.
7 15
37 50
7 0
33 30
Gadira.
5 10
36 40
7 20
32 13
m. Calpe.
7 30
36 15
9 15
31 40
Veneiis templum.
23 0
42 20
21 30
41 30
Massilia.
U 30
43 5
25 20
42 50
Genua.
30 0
42 50
30 30
43 10
Pisa.
33 30
42 35
32 40
42 40
Roma.
36 40
41 40
35 5
41 0
Regium.
39 30
38 15
39 40
37 10
Hydra.
43 0
39 5
42 30
40 20
m. Garganus.
42 20
41 0
39 40
41 20
Âncona.
36 30
43 40
36 20
43 10
Titavempti ost.
33 0
44 50
35 15
45 30
Mediolanum.
30 40
44 15
30 50
44 45
pr. Pelori Sicilia;.
39 20
38 30,
39 0
37 13
Panormus.
37 0
37 4)
35 55
36 45
pr. Lilybeum.
37 0
36 0
34 55
35 50
Messana.
39 30
38 10
39 0
37 0
Lissus.
43 0
41 20
43 45
41 0
pr. Tenaria.
Tbessalonica.
50 0
34 20
50 30
34 25
49 50
40 15
49 55
40 45
Byzantion.
56 0
43 5
56 20
42 55
Sacrum Danubii ost.
56 0
46 15
55 0
44 30
Rhodus.
58 20
35 50
58 20
35 50
Phasis ost.
72 30
45 0
72 20
44 50
Trapezus.
70 30
43 5
70 45
43 30
Smyrna.
58 25
38 35
56 0
38 35
Âlexandria Syrise.
69 30
36 10
69 25
36 40
Beritus.
67 30
33 40
68 30
34 5
Ptolemais.
66 50
33 0
68 0
32 55
Âscalon.
65 0
31 40
65 30
30 45
Âlexandria .Egypti.
60 30
31 0
60 15
30 20
Bérénice.
47 50
31 20
47 5
31 10
Tripolis.
42 0
31 40
37 30
30 15
Meninx lotophagorum.
39 40
31 20
34 50
31 20
Gartliago.
34 50
32 40
31 15
34 20
Bagradse ost.
31 0
32 40
31 0
34 45
loi caesarea.
17 0
33 20
17 50
30 20
Halvae ost.
11 10
34 50
13 30
30 0
Tingis.
6 30
35 5
9 10
30 55
L'Asie en général, jusqu'à 180<* de longitude, reste intacte faute de
renseignements nautiques. Sylvanus savait cependant avec tout le
monde que les Portugais s'étaient rendus à Galicuth et avaient fait des
reconnaissances dans l'Inde. Les distances de la première navigation
portaient la position de Galicuth sur le littoral de Garmania , à l'ouest
de rindus. L'espagnol Jean de la Gosa en 1500, lui donnait cette posi-
tion sans toucher au littoral de Garmania. Les Portugais, mieux avisés,
appliquaient dans la composition de Plolémée toute la péninsule de
rinde, avec Galicuth, aux rivages de l'Inde, étendus à l'est de l'Indus,
1j6 GÉOGR* latine, 1470-1550.
comme on le voit par les caries portugaises de 150i, 1507, 1508 (1515),
d'Ubelia et de Ruysch. Sylvanus ne Tignorait point, parce quMi appré-
ciait le savoir de son ami Jean Cotia et blâmait Fignorance du moine
Marc Beneventos, éditeurs en 1507, de Ptolémée et de la carie de
Huysch (5 19). Sylvanus préféra de se conformer à une conjecture conçue
au hasard, et a eu Faudace (comme il le dit lui-même), d'inventer pour
remplacement de Calicuth, contrairement aux chiffres et la description
de Ptolémée, une péniusule carmanique. Mais Strabon, dit-il, et Ârrien
parlent d'une extension de la Carmanie vers le sud; les Portugais»
excellents navigateurs, sont tout récemment parvenus jusqu'à Carmanie
et y ont fait la découverte du fameux Caliculh; et Ptolémée, dans son
premier livre, recommande de suivre plutôt les plus récents : or, Syl-
vanus en est sûr, que, si Ptolémée avait pu connaître Finvention, il lui
eût donné indubitablement son assentiment (320) (n<^121 de notre atlas.)
Singulière destinée de la Carmanie, un continent presque désert,
situé presque dans Tinlérieur de l'Asie, métamorphosé en Inde, en une
péninsule fertile et peuplée, se rapprochant à Téquaieur. Cette bizarre
conception eut ses conséquences. Sylvanus, s'il n'était lui seul auteur
de cette création , il était suivi par quelques autres géographes (Bene-
detto Bordone en 1521, 1551), et cette opinion ou confusion de l'Inde
avec la Carmania consolida les suppositions de l'identité de l'antique
Tabrobana avec Soumatrd; contribua à l'incertitude et à la confusioa
d'idées relativement à l'emplacement de l'iudus et du Gange; incerti-
tude qui fatiguait longtemps la cartographie.
Toute la composition de Bernard Sylvanus pourrait être considérée
comme un jeu d'esprit qui n'aboutit à rien. Cependant dans ces évolu-
tions de la géographie, que nous examinons, nous y voyons cette agita-
tion de l'esprit qui cherchait à amalgamer les éléments hétérogènes et
discordants; nous voyons dans l'idée de Sylvanus le précurseur de ce
qui va arriver et s'accomplir dans une centaine d'années, lorsque le
monde encagé dans de hux méridiens, commencera à recouvrer ses
formes. Substituez sur les cartes de Sylvanus, à la nomenclature
ancienne, celle de son époque et vous aurez les cartes qui circulaient à
foison un siècle plus tard. Cependant les cartes composées par Sylvanus
sous le nom de Ptolémée, sont souvent , au premier coup d'œil, supé-
rieures à ces autres. Elles sont admirables, d'une forme séduisante et
plus proportionnée, plus harmonieuse que les constructions de ce
genre de géographes postérieures. Car Sylvanus était plus hardi, il
puisait à la source encore limpide des caries nautiques et il prélendit
faire de Ptolémée un géographe parfait (321).
(319| Sed primas et sepiimus liber, snnt loannis Cottae, mortui Viterbîe.
(3i0) Uanc '^tabulant Carmaaiae), teincrario quodamansu Dostro, licetnumeris aducrsetur, neqnc>
Ptliolemaci etiam verbis res|M>Ddnat , quam tamen Teritati consonare corlo sfimns ita describr.udain,
satius fore duximus.... li (Strabo, Arrianus Nearelii nanigatiotiom narrans cl Lasitani) n*rcrunt
iUam Camiaiiiae partcm quae ad au$ti'um tendit, sic pnxluclani esse,... quud elsi Ptholeniaei cora-
mentariis adversari cretliderim, cum Jibro primo, ipse etiam dicat, recrnlioribus semper magis crc-
dendara fore. Id ei^u temerario quodam ausu nostro egimus, cui Ptholemaeas etiam, si nos audiret ^
asseosurum fluisse non dubitamus.
Dans sa cooslruction de la péuinsule carmaniqne (de l'Inde) il entre-mèla à Tantiquc nomenclatare
certain nombre de positions uoiivellemeut visitées |>ar les navij^atonrs |>ortugais. Nous la donnons
dans notre atlas n* lil, il suiTil de la fonfronter avec la Carmanie de Ptolémée pour comprendre
son déplacement et la mixture des positions.
(321) Voyez Zurla, suUe anliclic mappe idro geographicke, chap. i8.
UDELIN, ESSLER 199. i57
i09. Jacq Essler et George Ubelîn, édilanl, en iol5, la géographie
des aocieones tradilions de Ptolémce, y joignirent comme supplément,
vingt cartes nouvelles, dont il y à 40 spéciales, particulares , de
TEurope (y inclus celle de Tocéan occidental ou de la terre neuve) :
deux de l'Afrique; trois de TAsie; quatre de la cliorographie plus
spéciale, qualuor dcniquc chorographicœ parlicularim^es ; et une carie
générale suivant les traditions des hydrographes : hydrographia siue
charla marina^conlinenstypum orbis universalcmfiuxtahydrographorum
tradili(mem(^^i),Cesi une des plus intéressantes éditions, parce qu'elle
nous a conservé quantité de cartes du moyen âge, de temps précédents^
tant nautiques que continentales de difTérents pays (525).
Les vingt caries nouvelles, modernlorum ^ se classent en différentes
catégories; !• Les quatre de la cliorographie plus spéciale, savoir : la
Lorraine, la province du Rhin, provincia Ilheni, ou les environs de
Strasbourg, la Suisse et la Crète , sont sans aucun doute d'une compo-
sition très-récente. — 2** Les cartes portugaises ou de la péninsule
pyrénéenne, au nombre de sept, savoir : hydroi;raphie générale, océan
occidental ou terre nouvelle, deux portions de l'Afrique, les Indes
orientales, l'Espagne et les fies britanniques. Leur composition n'est
pas trop ancienne, parce que les cinq premières représentent les nou-
velles découvertes (z%*); sur la carte d'Espagne, sont nommément
dessinés : les Azores, Pico Fayal, îles colonisées en iiGG et reconnues
depuis peu; or, cette carte est retouchée : mais elle existe (elle qu'elle
était en 1181, car elle se trouve dans le code de Piolémée de cette
année, conservé dans la bibliothèque de Bourgogne à Bruxelles (voyez
n** 125 de notre atlas) ; quant à la carte des îles brilanuiques {n° 123
de l'atlas) elle est conforme avec la figure de ces îles de la carte
catalane de 1577 (323).
3" Les cartes des cosmographes antérieurs sont d'une composition
plus ou moins ancienne. Elles sont au nombre de sept. De ce nombre
la carte de la Palestine s'isole, sa composition remonte au xiv*" et au
(322) Claudii Ptolorooi viri alcxandrini, mathematicae disciplinac philosoplii doctissimi , googr»*
iiliiae opns nonissima tradnrtionc c graeronim arclirtvpis, (rastigatissimc. prcssiim; raeteris ante
acubratonim multn presttniitios : pro prima parte cohtinons : 1, CI. Ptolemaoi gengrapliiani per
ocio libros partitam; 2, uua ciim collationc durtioniim gram-ariini c roginnn ad latiiias CKrlissima
graduum calculalioiie : 3, rogistrationem item nouam rcgioiiiini, pracroclurarum. ciiiilatom, fliimi-
nutn, roarium, lacuum, portiium, silvoriim, oppidorHm, villaium ac gciiliiim ad onlincm cliartarum
(il columnarura sin^nla corlissimo inonstrans indice; -i (|iiam brevis ot doclissiina (îrogorii Lilij
sabsoquitariostrattio, de graocnnim niimcrali snpputatiouts in lra<liHti(>ne gracca, rcs sritu anreo;
5, tabalaram deindc auotoris viginli scptcmi, ordo hic; «'st : générale orhis inxla destriptionem
Ptbnicmaei, una ; Eurnpac labulae, tieeem; Aphriraetubulae , quatuor ; Asiao tahiilae, duodecini ;
osi et una corporis sphenei in piano iuxta (incm 7 li. — pars secnnda moderniurnm hislrationnm
viginti tabniis, velutt suppicnicntnm quoddam anliquitnlis obsololao, sno loro , quac vel abstrusa,
vel erronea videbantur resolutissimc pandit : adncxoad linom tractatn, sicnli lertu incundissimo ila
et utilissioio, de variis moribus et ritibus gentium; cornndemquc ac l(M*alium nominnm originibns;
— anno Christi opt. max. 1513, martii 12 pressusbic Ploleniauus, Argcutinau, vigiluutissima castiga*
tiono, iodustriaque Joaonis Schotti, urbis in ligeuae, in folio.
(325} Les mûmes cartes se trouvent reproduites dans Tédilion do iuiO.
(324; L*csscnre de ees «;inq cartes se trouve dans la eopic «le Thydrographic générale on cartft
marine, réduite de 50 à 21 de réchelle (n* 118 de notre atlas). Pour l'enrirhir, nous avons mis à eon-
tributinn les quatre autres comme nous l'avons dit ci-dessus, dans la note 209. — De deux cartes
portugaises de TA Trique, Santarem, pt»ur ses priorités des découvertes, u*a copié qu'une senle, cepen-
dant c'était le seul monument portugais dans sa publication, et il méritait d'iHre reproduit en entier.
(326) Dans notre copie la réduction do l'Espagne est en proportion de 200 (du code bruxellois)
h 33, et la réduction des îles brilinniques (de la publication d'Ubeliii), comme KO à H. — lj» diminu-
tioa de l'Espagne est trop forte pour avoir toutes les inscriptions de l'original Nous n'avons pas
négligé de confronter les dénominations do nos deux modèles.
158 GÉOGU. LATINE, l470-iK50.
xm* siècle, parce qu'elle est conforme avec la Palestine de Marino
Sanuto. Les six autres, savoir: l'Asie mineure, la Grèce, ritalie, la
France, T Allemagne et la carte de Sarmatie, c'est-à-dire de Pologne,
de Hongrie el de Russie, sont élaborées sur les mêmes bases, se ratta-
chent réciproquement, s'enchaînent et forment un ensemble (voyez
n* 401, 102 de notre atlas), auquel ne s'adaptent ni les îles britanni-
ques, ni l'Espagne de la catégorie précédente, ni la Skandinavie de la
catégorie suivante (sse).
4<' La carte de la Skandinavie ou des régions septentrionales, plus
d'une fois rappelée par nos observations, ne se rattache qu'à celle de
la Germanie et de Sarmatie de Plolémée, ayant été inventée comme
complément à la géographie de l'auteur ressuscité (527).
5*» La carte de rilalie, dont Nicolas Donis s'était dit auteur et inven-
teur (n® 104 de l'atlas), forme une catégorie pour elle seule, parce
qu'elle est d'une création de toute autre espèce, genre nouveau de
cartes modernes sous l'empire de Ptolémée (sas).
200. Reproduisant cette dernière, les éditeurs Essler et Ubelin livrè-
rent au public dans leur collection de 20 cartes modernes, deux de
l'Italie : une des cosmographes du moyen âge, l'autre de la composition
récente de Donis (superposées n® 104 dans notre allas), sans dire direc-
tement à laquelle ils donnaient la préférence, laquelle ils étaient dis-
posés d'approuver. Je pense qu'ils préféraient celle de Donis, sans oser
l'approuver. Voici mes motifs et mes argumentations pour juger ainsi.
Ils disent que la seconde partie de leur édition, en son lieu, étale
résolument vingt tables de lustrations modernes, espèce de supplément
(226) Nous avons aussi copie rcnseroblc de ces cartes contincDtalos des cosmographes et nous en
dvoDs déjà examiué et analysé , readaot compte de notre opération , dans Tarticle précédent ,
chap. 174-177.
(527) Ce complément septentrional de 27 cartes de la géographie de Ptolémée, se trouve reproduit
dans les éditions de 1482, l-iKR, 1u15, lu53, etc. Il y est dessine eu projection conique. Sa copie dans
le code bruxellois de l'année 1481, est développcc en plane cylindrique. CVst de ce code que nous
avons pris notre reproduction réduite de &0 à 15 de réchclle (voyez n" 9G de notre atlas). Nons
l'avons confronté avec les cartes publiées qui offrent plus d'épigraphes. — Ce complément septen-
trional qui décore tant d'éditions de Plolémée figure en 4492 sur le globe de Ik'liaïm (voyez n*i09 de
notre atlas), en 4495, dans la carte d'Allemagne de la chronique de Hartman Schedel (voyez n* ilO
de l'atlas}, en 4S01, dans la carie hydrographique portugaise (n* 418 de l'atlas), en 1554, dans
l'isolario de Benedelto Bordone (u* 429 de l'atlas). Voyez tavola di navicare di Nicolo Zeno, dans le
vol. suivant de notre ouvrage.
1528) Les éditeurs de 4515, reproduisant l'Italie de Donis , n'ont pas reproduit la France qu'on
voit dans les éditions donisiennesîle 4482, 1486. Ces deux (tartes se trouvent dans le code bruxelloi*
delà bibliothèque de Bourgogne de l'année 4481. Ayant plus à notre disposition le code que les
éditions donisicnnes, nous avons copié ces cartes d'après le code ; il nous semblait même prél'érable
de se conformer au dessin du siècle qu'à la gravure en bois et de donner quelques variantes cachées
dans un manuscrit, que de reproduire ce qui est publié. Le dessin du code bruxellois est d'une grande
échelle. Notre copie est réduite de 5 à i/so de l'échelle, par conséquent elle n'a pu rendre toutes les
inscriptions, qui an reste sont indifférentes à notre but, et contiennent beaucoup de fautes dans le
dessin bruxellois. — En donnant la copie de ces deux cartes , nous nous sommes proposé d*étaler
l'étrange configuration que la renaissance a donnée à ces deux pays (n* 405, 404 de notre atlas). Sur
cette copie, nous avons tracé les contours des cosmographes précédents, afin d'exhiber la difTerencc
de leurs cartes , pour comparer à vue les proportions , les dimensions et les configurations des cartes
du rooven âge avec celle de la nouvelle invention. Dans cette confrontation, l'Italie des cosmographes
prise de l'atlas d'Ubelin, est je pense, réduite justement à réchclle de celle de Donis, et justement
superposée par le méridien de Venise donnée aux deux toutes différentes compositions (n* 404 de
l'atlas;. Quant à la Gaule (n' 405), j'ai superposé les deux compositions , au moyen de la position
«nique de Lyon, pour laquelle les compositions varient entre elles d'un degré : à la suite de quoi, les
superposées en ont toutes les latitudes dis(H)rdantes d'un degré. Il serait peut-(^tre mieux de se con-
former dans la superposition aux mêmes latitudes, ne tenant que le méridien de Lyon et faire ainsi
ressortir ses discordantes proportions.
UBELIN, ESSLER, 200. i59
à rantiquîié sarannée , ce qui paraîtra oa confus ou erroné : quœ vd
abstrusa, vel erranea videbantur. Or, si je comprends leur phrase, ils
prévoient la réprobation des lustrations modernes , dans lesquelles il
faut débrouiller Terreur et la confusion; ils ne les désapprouvent pas,
mais ils livrent les (^rtes des lustrations modernes pour faire jour à
Terreur et à la confusion. Ailleurs, dans le titre de la seconde partie,
ils recommandent les cartes des lustrations modernes, lesquelles rela-
tent plus régulièrement les spécialités des terres et des mers par des
positions certaines, suivant les pérégrinations de notre temps; modcr--
niorum lustralio terrœ marisque singula, posUionibus ccrlissimis,
reguUUius traâcns, ad sœculi nostri peregrinalioncs. Qu'on ne s'y
méprenne pas. Cette recommandation ne se rapporte pas à toutes les
^ingt cartes de moderniorum; elle s'adresse exclusivement à des cartes
portugaises , contenant les découvertes de nouvelles terres et mers , par
<:onséquent elle rejette tout le blâme de confusion et d'erreurs sur les
^i^rtes'des cosmographes. Or, comme il y a dans leur volume deux
Italie , et que celle des cosmographes est du nombre des accusées et
si'éprouvées, la carte de Nicolas Donis, conforme à l'antiquité surannée,
S^gne évidemment toute préférence dans l'opinion d'Ëssier et d'Ube-
Jiin (sto).
C'est en se relatant à des cartes portugaises ou à de nouvelles décou-
""^rertes que les éditeurs disent de positions nouvelles étrangères à
tolémée; neotericœ posilUmes, Plolemaei alienœ. Le lecteur, en les
royant, ne sera pas étonné quand il apprendra qu'on a observé de ces
ieux la latitude véritable du ciel. Scruter les longitudes des régions est
rop laborieux. En ce cas, la dimension variée cause les situations
ariées. L'indulgence serait donc obligeamment agréée sous le rapport
é l'ajustement de carrés du long : que le censeur ingrat ne suppose ni
^antiquité, ni notre travail (sso).
En effet, toutes les nouvelles cartes portugaises, de la chorégraphie
péciale, des cosmographes et de l'Italie donisicnne, ne sont pas graduées
^(3S9) Editant leur volume à Strasbourg, ils n'ont pas reproduit la France donisienne : parce qu'il
"^^tait impossible de la faire valoir à Strasbourg sur le Uhin. On y savait que les cosmograpbes
^Vnçalent mieux le cours de ce fleuve sur leurs cartes confuses ot erronées, mieux que Ptolemee ou
^3H>iiic. — La même incertitude, qui tourmente ces éditeurs, domine, en ISSI, Uenedctlo Bordone,
"^dansson isolario. A voir là : 1, Ingliilterra figurée, seconde nioderui et seconde Tolomco : differcnza
^n Tolomeo et moderni, per cbe Tolomeo del reame délia Scotia la longUezza pone verso il leuar
<^l sole, et rooderni tutta qucsta isola uerso tramonlana stcndoso : ici il accorde évidemment la
préférence à Ptolémée, parce qu'il donne sa figure tout entière, et dans celle des modernes il
retnache l'Ecosse (fol. ii). — 2, Kgure des Fortunées suivant Ptolémée et ensuite celle dos Canaries.
Si tenpl nostri molto da gl'antichi scrittori si discordando si ncl numéro, corne ancbora nel por
quelle perio vente : percio che gli antichi per ostro le pougono et di numéro essor sei ; conciosia essa
die i marinari per nostri tempi dicono, che sono dieci et délia Libia inferiore alla quale dirincontro
stanao per ponente (fol. xv, xvi). — 3, Sicilia, seconde Tolomeo et seconde moderni , figures mises
en regard sur la même ligne. Verso leuantè dell isola posti nell' ostro Pacbino et ncl scttentrione
Peloro. Di ^oesta parte Tolomeo et moderni sono di uua medesima opiuione : ma perche, qucsta isola
ha forma di triangola , nell' angolo sono discordi, il quale angolo e da volgari posto, nella parte dell
isola pin longa verso ponente , et da Tolomco verso garbiuo in un luoco Eugiaro promoutorio nomi-
nrto (toi. xxii-xxv), — Le géographe italien à Venise, ne risque pas de dire a qui revient l'erreur. —
Voyes sur notre planche, pour Tinclination de la Sicile, le juste-milieu entre les deux opinons
inventé par lacobo Castaldo qui mourut en 4557. Gastaldo restitua les formes aux Calabres et à la
Fouille : mais le napolitain Pyrrhus Lygorio, mort 1583, aima mieux appliquer son pays à la torture
ptoléraéenne.
[VStt^ Tabniaruro barum neotericae positiones, sicuti a Ptolcmaci traditionibus alienae videbantur,
iKn miraberis cnmque didiceris iiihis veram coeli latitudincm observatum. Regionum quippe longi-
todinem scrutari , laboriosum est valde. Hinc variam causât situationem , dimensio quoque varia.
Tamen ait pro grata pietati, quadrata lengis aptare; ne vel illius antiquitatis , vel laboris nostri
ladiceris censor ingratus ;Essl. et Ubcl. pr;jefat.).
Î60 GÉOGR. J.ATÏNE, U70-1350.
dans la publication d'Essler et Ubclin. Toutes ont une échelle, aucune
trace de longitude, la seule latitude y est marquée sur des lignes
latérales, assez irrégulièrement et n'ayant point de fixité. Les climats
Accompagnent ces indices de latitude. L'Incertitude qui se manifesta
dans les indications de la latitude, venait de rinsuflisante exactitude da
dessin (sso), mais souvent de dilîérente opinion d'école ou de géogra-
phe, suivant qu'on se guidait par des observations modernes ou par
des données de Ptolémee; et suivant la préférence qu'on donnait à cer-
tains lieux par lesquels on réglait le degré et la division de la ligne
latitudinale. C'est à cause de cette différence d'opinion et de mode, que
le détroit de Sicile dans le 58* degré de latitude de la carte des cosmo-
graphes, est dans le o9« suivant la carte dressée par Nicolas Donis ; que
Baionne et Narbonne sur la carie d'Espagne de l'école espagnole se
trouvent placées sous le 4G*, presque touchant le 47«, et que sur les
cartes d'autres cosmographes elles restent sous le ^5«,6e rapprochantau
M'' degré. Mais que dire, et comment expliquer, lorsqu'on voit le 47* de
latitude de Daionne, et sur la carte de la configuration espagnole des
îles britanniques, les fies Sorlingues et le bout de la Cornouaille sous
le 49% ainsi que Brest se trouve sous 47"? Certes c'est une erreur de la
numération de degrés : toujours est-il évident qu'on n'avait rien de
positif pour les latitudes qui se présentaient confuses. La graduation
des cartes spéciales des cosmôgraphes se laissait faire en apparence,
mais isolément pour chacune à part. Et quand on voulait rapprocher
ces caries, les ajuster, enchaîner l'une à l'autre, leur graduation ne
correspondait pas sulfisamment et ne répondait en aucune manière à la
longitude de Ptolémee. Pendant de longues années encore on n'eut pas
grande confiance dans la graduation, on n'en eut aucune pour la longi-
tude, et une trop faible pour la latitude. Elle était essayée pour une
vaine parade.
Graduation , latitudes , longitudes.
201. Cependant aucune école, en connaissance de cause, n'a pu con-
tester la convenance de longitudes et latitudes dans la construction de
cartes. Dos essaies furent faits à cet clfet. Examinant les climats tracés
dans un cercle par Pierre d'Ailly, on peut avancer que déjà, vers 1410,
on essaya de jeter au hasard les parallèles de la latitude sur la carte
générale. L'anconilain Gratioso Benincasa 1466-1471, ajustait l'échelle
latitudinale à ses copies. Les régions skandinaves, comme complément
du géographe j^rec, ont une graduation complète; les cartes spéciales
éditées en 1482, 1486, 1515, 1555, sont garnies d'échelles latitudi-
nales. L'orbis universalis en 1492 du globe de Behaïm se relatait aux
divisions de l'équateur et du méridien mobile; les caries générales
éditées en 1508, 1511 etc., parurent complètement graduées; le globe
de Schoener 1521, est croisé par les lignes longitudinales et latitu-
dinales. Chaque jour, parmi les savants de la théorie, augmentait le
nombre de ceux qui s'efforçaient de mettre en pratique la graduation.
(330) C'est ainsi que dans la calôgoric dos cartes des cosmograplies plusieurs positions alpines
dans rajustement des cartes spéciales sont quelque peu incolidreutes ; qu'on voit Belgrad vaciller
de iT tantôt en i6" tantôt en 48"; qu'on voit Conslanlinople de 43» transporte sous 46*.
LATITUDES, LONGITUDES, S03. i61
Le canevas des ligues croisées offrait à la consiruction des cartes une
méthode infioiment plus simple et plus facile, que la multitude des
lignes de la rose qui se sectionnaient en tous sens, s'appointaient sans
fin, demandaient de comptes et réductionsdes nombres, pouvant déjouer,
tous les efforts de Texactitude. La méthode de Ptolémée était recom-
uiandéesans cesse; ses chiffres, ses cartes indiquées comme Tunique
modèle à imiter, à suivre. Les nouveaux géographes-dessinateurs s'en-
hardirent : ils graduaient les cartes résolument et s'avisèrent de chan-
ger les compositions des cartes, donnant à tous les pays les formes ptole-
mécunes, c'est-à-dire en adaptant la graduation de Ptolémée, ils
défiguraient les cartes des cosmographes du moyen âge. Dans la première
moitié du xvi* siècle cette opération s'est accomplie.
Pour arriver à la graduation des mappemondes de la composition du
moyen âge , les géographes de la renaissance rencontraient les plus
nombreuses difiicultés; là, s'accumulaient tous les obstacles. La tâche
en effet devenait impossible sans toucher à la composition, à différentes
directions. Les marins, premiers auteurs de ces mappemondes, avaient
de trop grandes interruptions continentales entre les rivages de leurs
connaissances. Les directions déterminées par une longue expérience
de raîguiile ne se trouvaient pas en harmonie avec les directions de trop
grandes dislances océaniques contrairement inclinées. Voir l'hydrogra-
phie portugaise, où les tropiques et la ligne équinoxiale sont jetés à tra-
vers la carte. Ces lignes ne peuvent, par aucune manière, passer tous
les pays qu'elles encerclent, et traversent quelques autres du sud ou
du nord, qu'elles ne devaient pas toucher. Or, la mappemonde des
hydrographes n'est pas susceptible d'accepter sans réserve la gradua-
tion de la latitude, pour laquelle on avait des observations déterminées.
Il sufBkt d'observer l'inclination de la mer méditerrauée, qui, elle seule
prise isolément, se laisse admirablement graduer. *
L'application de l'échelle latitudinale aux cartes spéciales (de la
publication d'Ubelin 1508, 1515), prouve qu'on a compris la nécessité
elle moyen de rectifier l'orientation ou la boussole des marins, de
redresser le vice de l'inclination. L'intervention des latitudes plolé-
méennes indiquait le moyen de la rectification , mais insinuait les
erreurs qui auraient détruit les compositions nautiques si on les eût
acceptées. Les marins et les hydrographes par eux-mêmes connaissaient
suffisamment les latitudes géographiques de la médilerranée , par con-
séquent ils comprenaient le vice de l'orientation , mais ils étaient très-
indifférents pour cet écart, pourvu que leur dessin fût exact à l'usage et
utile 9UX navigateurs; ils ne se souciaient pas trop de discordances qui
entachaient leurs mappemondes. D'ailleurs, ils rencontraient un autre
obstacle, plus grave (comme nous l'observerons cha p. 204, 205) , pour
l'emplacement convenable de la méditerranéc dans les mappemondes.
Or, tout en connaissant l'irrégularité, ils continuaient à dessiner les
cartes hydrographiques commodes à la navigation (33 1).
202. Je le répète, on ne peut pas admettre l'ignorance absolue de la
(331) La carte marine, qu'en 1560 Rusrelli appliqua à son édition de Ptolémée : earta da navicare,
fiUla êolamente per una mottra et comme per un modelle, offre )o même vice.
II. 14
i62 GÉOGR. LATIMB, Ul(hihbO.
théorie parmi les pilotes et les géographes cosmographes du moyen
âge. Tel qui possédait quelques notions de Tastronomie, sans être savant
de premier ordre, comprenait les exigences des longitudes et des
latitudes géographiques : le fond de la question n^était pas un mystère
pour lui. On écrivit tant sur Tusage de Tastrolabe, on oli^rvaît le soleil
et la lune, les tables de la lune furent dressées, appréciées, révisées; on
levait les latitudes; les différents modes de lever les longitudes furent
connus, à la fin recommandés (Pigafetta, de la navigat. p. â77>279) (sst) :
mais les navigateurs , les pilotes se contentaient de connaître la latHuoe
(de leurs nouvelles découvertes), et d'ailleurs, ils étaient si orgueilleux
qu'ils ne voulaient pas entendre de longitudes (Pigafetta, de la naviga-
tion , p. 274, 275).
Or, les dessinateurs de cartes n'avaient pas de longitudes géographi-
ques. Les érudits, pour l'ancien monde, les trouvèrent en masse dans
l'ouvrage de Ptolémée, et au lieu de les découvrir dans la construction
des cartes nautiques, par l'induction des latitudes et des distances, ils
épuisèrent toutes les billevesées de Ptolémée dans toutes les parties
du monde et tranchaient les difficultés pour la mer méditerranée en
substituant la longueur de 62"* de leur maître à la place de celle des
hydrographes (353). L'hémisphère de 180** était parfaitement rempli
par le sage de l'ancienne Grèce : restait à placer les nouveautés sur un
autre hémisphère entre 180*" et 560". Behaïm, 1492, indiqua lenrs lon-
gitudes; Ruysch 1508, Sylvanus (1511), Sehoner (1520), et les autres
les déterminaient approximativement, chacun suivant son goût ou d*aprè8
le modèle qu'il avait rencontré!
Cependant, sur ce nouvel hémisphère , des contestations très-vives se
sont élevées entre les Portugais et les Espagnols. La ligne de démarca*
tion, désignée par le premier méridien des îles Fortunées devait-calnaer
les parties. Le pape Alexandre VI (1493) fit cadeau de tout le globe des
deux hémisphères infidèles, payennes, partie égale : à l'est aux Por-
tugais, à Touest aux Espagnols. Mais lorsque les Portugais découvrirent
la terre de Sainte-Croix ou le Brésil, et en prirent possession, de nou-
velles réclamations s'élevèrent. Le même pape (1502), intervint d^
rechef et recula le premier méridien à 30*^ vers l'ouest, qui fut appelle
ligne de démarcation ou de répartition.
Cette partition et répartition rencontrèrent de grandes diffîcuttës>
géographiques. L'omnip<>tence papale indiquait à cet eflet le méridîeo.
des Iles Fortunées, connu par la géographie de Ptolémée, où il était
représenté par une enfilade d'un groupe d'Iles au nombre de six. Les
érudits comprirent qu'il s'agissait des Canaries, et ils acceptèrent totti
(33t) Charl Amoretti, éditeur de la description da premier voyage autour du monde» par Pigi-
fetta , présume que , parce que celui-ci ne parle pas du moyen de se servir pour les loiwitades de
l'éclipsé solaire , il est bien claire qu'il no le connaissait pas. Pourquoi l'aurait-il ignore? ^ant il
dit, Pigafetta lui-même l'avoue, qu'il a examiné plusieurs méthodes dont on se sert ponr oooBalûe
la longitude et qu'il en a trouvé trois qu'il a cru plus propres à cet objet. Or, il a connu les autiM,
qui lui semblaient moins propres et celui de l'éclipsé solaire, qui n'était point un mystère pour les
connaissances de son époque, mais à cause des difficultés qui l'obstruaient dans la pratique, iln'apas
cru propre de le recommander.
(33S) La perturbation d'idées géographiques de cette époque se décèle d'une manière singulière
dans l'isolario de Benoit Bordone iSiil, 1534. On y voit une mappemonde, calquée sur la carte portu-
gaise, que nous avons analysée. Seulement Bordone ou son modèle y introduisit la longueur ptolé-
roéenne de la méditerranée. Malgré cet emprunt de Ptolémée on y voit rinchnation vicieuse de la ■
méditerranée scrupuleusement conservée.
LATITUDES, LONGITUDES, 902. 165
d^abord le milieu des îles. Les Portugais le fesaieot passer par Madère ,
comme on Yoit par le globe de Behaim 1492, par Fhydrographie 1504,
parla carte de Ruysch 1507, par le ^lobe de Schoner 1521. Passant
par Madère, le méridien passait Teneriffe. Mais les Espagnols choisirent
pour lui la gran-Canaria. C'est le méridien des îles Fortunées, le même
qoi fut ensuite qualifié d'île de Fer.
En effet, la fiimtion du méridien des îles Fortunées sur une des Cana-
ries, éprouvait de contestations. Sylvanus plaçait Canaria l^SC du
premier méridien. Trouvant dans le texte de la géographie ptoléméenne
Paris à 25* 50' du premier méridien , il opina que c'est une erreur de
eopiste , qu^on ne peut l'attribuer à Ptolémée, qui plaçait Paris à SO*" 15'
du premier méridien des îles Fortunées. En Espagne , Jean de la Cosa
imçaAi le premier méridien entre san Miguel et Tercera des Azores ,
enclavant dans le vieux monde, les Canaries et les îles du cap Vert (354).
Mais l'Espagne prit son nombril Tolède pour le premier méridien, du
quel le méridien des Canaries se trouvait iT*^ ou ÏT* on IG^'^O'.
Ce n^est pas Tolède qui gigoltait ainsi : c'est la trépidation du méridien
des tles Fortunées.
Or, le premier méridien des îles Fortunées, duquel on comptait toutes
les longitudes , était indéterminé. Comment pouvait on fixer les 50
degrés ouest de la ligne de démarcation? On ne songeait point aux
observations astronomiques, on comptait les distances de la navigation à
partir de Madère, de Gomera, de Teneriffe , de gran Canaria ou du cap
Vert L'espagnol Diego Ribero 1529, tira cette ligne à l'ouest de l'em-
honchure de Maragnon. Plus tard (voyez les cartes de Mercator) elle
était tracéee à l'est de cet immense embouchure : différence de 5 degrés.
La ligne de répartition agitait encore les esprits et les longitudes
gé(^i[rapniques, quand une autre question, infiniment plus difiicile, se
pr^nta aux géographes et à leurs longitudes.
Le portugais Ferdinand Magellan, dans son voyage dans l'Inde visitant
Calcutta et Soumatra, apprit que son pays réalisait d'immenses bénéfi-
ces dans le commerce des épiceries des îles Molucques, où les Portugais
commençaient à s'établir. De retour à Lisbone, il continua à étudier la
géographie et la marine, et sous ce titre on lui permit d*e\aminer tout
ce qui avait été recueilli et gardé dans la trésorerie. Cet examen lui
suggéra l'idée de la possession illégale des Molucques par les Portugais,
remarquant que leur position devait se trouver dans l'hémisphère espa-
gnol. Cette idée n'était pas à lui seul, le défaut des mappemondes des-
sinées sur des globes l'assurait assez positivement, le gouvernement
portugais gardait en effet le plus profond silence sur la découverte de
ces lies (Pigaf. p. 176). Magellan, mécontent de la cour, passa en
Espagne et offrit à Charles V de lui livrer, par le chemin de l'ouest,
ces fies qui appartenaient de droit à l'Espagne.
Sans avoir égard à des signaux de vents, des courants de mers, la pos-
sibilité de traverser quelque part au delà du nouveau monde se présen-
(3M) Voye* ci-dewns chap. 472, ce méritlipn de do la Cosa était éloipné de 9, 10 ou H degrôs de
celai des IlcsFortuDéeg.— Pins tard on l'a porté sur les îles du cap Vert, 5* 30' du cap, G" 0' de Madère,
6* SÔ' de Teneriffe. Passant les îles de cap Vert olim Gorgà "
8a1, BuenaTÎsta, Mayo, San jacorao; otde celui-ci on compi
n'était plus an méridieu des Canaricti olim Fortunatae. Voyi
464 OÉOGR. LATINE, i470-i550»
tait tout natnrellement à chacun et était généralement admise comme
infaillible. On conjecturait et traçait des hypothèses sur trois points du
nouveau monde. Avant 1506 Martin Behaïm dessinait à Lisbone ces
passages et le détroit du sud (Magell. apud Pigaf. p. 40). Le glol)e de
Jean Schôner, fabriqué en Allemagne en 1520, dans Tannée du départ
de Magellan (n** 125 de noire allas), exibe les irois hypothèses. Le nou-
veau monde y offre deux détroiu et sa cime pointe au nord dans un océan
ouvert (s55). Le délroit du midi élait celui qui offrait le plus de chan-
ces pour les recherches. Les côtes de Floride avançaient vers rEurope*
et celles de Brasil ou de la terre de la croix, s*inclinaient rapidement
vers les Indes. Amerigo Vespucci en 1501, se proposait déjà d*aller
doubler la pointe du sud (sse). La croyance de la nécessité du contre
poids continenlal pour le globe inondait dans Timagination de Tépoq^^e
riiémisphère arctique de Tocéan (comme on le voit par le globe de
Schôner) , et surchargeait Thémisphère antarctique de terres imagi-
naires : mais elle n'empêchait guère de dessiner préalablement la
pointe méridionale du nouveau monde correspondant au cap de Bonne-
£spérauce, el le délroit qui séparait les terres antarctiques.
A Tappui de Tassertion de Magellan, que les Molucques sont sur
rhémisphère espagnole , Magellan appela Chistophe Hara , qui , ayant
aux Indes des maisons de commerce, disait être assuré par les instruc-
(355^ Quelques années plus tard, à la suite du voyage de Magellan, Scboner changea d*opinioa :
il crut que le nouveau monde jusqu'au détroit n'était que le continent continu de l'Asie. Modo vero
per novissimas navigationes, fartas auno IS19, per Hagellanum, versus Moluocas insulas, in tapremo
oriente positas, eam terram (Americam), invenerunt oontinentein supcrioris Indis quae pars est AsisB.
Sunt auterohuius portionis, regiones Bachaluos dictae, Florida, desertum Lop, Taugnt, Cathay,
Mexico regio, in qua urbs per maxima in magno lacu sita Temistitan « sed apud vetustiorea QyiBMj
erat vocata. Parias, Uraba et Cannibalium regiones; Brasiti» regio se se extendit ad usque Melacham
Ht quid ultra. Incolœ autbropophagi liberis eorum Tliomae nomea imponunt. Adjacet buic regiooi
iusula pcrmaxima 2^nzibar (Joban. Scboneri carlostadii , opuscnlum geograpbicum , Norimb. iSSS,
II, i et 90). Voyez n* iil de notre atlas.
(356) Scboner indiquant sur un globe de IStO.la possibilité de trois passages suivit une hypothèse
assez répandue. Elle formait de nouveaux continents, deux grandes îles. — Benoit Bordone , qvi,
en lS2i, ignorait encore les résultats de U découverte de Magellan , dessina ces deux îles dans son
isolario (n" iS6 de notre aalas), de façon qu'il réunit terram laboratoris aux Florides et au Temistetan
ou Mexique; et, conformément à la supposition de Vespuce, il enferma la terre de sancta crace par
un littoral tout le long du tropique en y enclavant le Pérou. Uu stretto séparait le Mexique da
Pérou ou les deux ilcs : chacune respeirtivement déployant ses spacieux rivages aux eaux de ria>
mense océan (isolaris universalc, et les iles p. vi verso, xi verso). fVoyez ci-dessus la note tSi). —
Chaque voyage, et celui de Magellan, sont des enclumes sur lesquels l'iniagination se plaisait à forcer
force d'inventions. Par d'innombrables conjectures, hypothèses, on embrouilla les plus sinnples qnes-
tions. Les fantastiques mappemondes, muettes et même invisibles, introuvables, fûrlaientà l'oreilto
de l'imagination. Il devenait clair comme le jour, que le cap de Bonne Espérance, le détroit magel-
lauique, avaient été connus avant leur découverte. Regardez cette jonque indienne de la carte de
fra Mauro et vous voyez comme elle double le cap de Itonne Espérance. Sans doute les Kafres et les
Ilultentots doublaient ce eau et les Patagons nageaient dans le délroit, plusieurs siècles avant que
Tignorance européenne se fut décidée à les explorer. — Un Portugais, en tS28, s'imagine de trouver
sur une carte ancienne le contours de ce qu'on vient de découvrir: à l'instant sur ses traces, les
érndits s'évertuent à démontrer que c'était la mappemonde de fra Mauro ; les Portugais n'en avaient
C»as d'autre en 1538. — Que n'a-t-on pas attribué à Bianco et à ce Mauro! Ordinairement, les légendes,
es explications de fra Mauro disaient le contraire : mais la conjecture, l'hypothèse élevait hardiment
son édifice. — La cartographie, et les découvertes portugaises surtout, sont accablées de véritabifs
fantasmagories. On peut dire que les Portugais eux-mêmes en sont la cause. Ils ensevelirent lear
ancienne cartographie et débitèrent de bonne heure de véritables cauchemars. Habitués du coni'
mencement, de faire, comme nous l'avons observé, les découvertes de ce qui était connu par les
autres, et s'appropriant d'abord ce qui était de la connaissance des autres : leur conscience ensuite
troublée, doutait des plus beaux succès , s(Tutait les plus frivoles apparences pour ombrager les pins
positives découvertes. Les Allemands s'empressèrent de suite à pousser eu avant un champion et
rival de leur gloire dans Behaïm. Les Italiens à leur tour, non contents de partager la gloire porttt"
gaise, dégradèrent son œuvre au proiit des images de leur cartographie. (Voyez la note 187). Les
Portugais, réveillés aujourd'hui par tant de tiraillements, réclament ae nombreuses priorités sans
savoir où s'arrêter.
V
LATITUDES, LONGITUDES, 908. i65
lions de ses facteurs de la véritable position géographique de ces lies.
Le savant astrologue Rodcric Faleiro, confirma et corrobora ces assu-
rances le compas à la main , sur une carte nautique , hydrographique.
Charles V était enfin convaincu que ces fies sont placées au deçà de
180* des Iles Canaries, d*autant plus que la ligne de démarcation
avança sa répartition jusqu*à 150* est des lies Canaries.
S03. Magellan , instruit par son ami Tastronome Ruy Falèiro du
lever des Ton^tudes par la déclinaison de la lune et les occultations
d*éloiles, la diflérence de hauteur de la lune et de Jupiter et les oppo-
sitions de la lune et de Vénus (ssi), partit le iO aoOt 1519, entra le âl
octobre 1520 dans le détroit par 5â<^ de la latitude méridionale; le
traversa et en sortit le 38 novembre. Magellan péril le 27 avril 1521
avant d*arriver aux Molucques.
Il était de la plus haute importance dans cette question , de détermi-
ner la situation des Molucques par la longitude, et aucun des voyageurs
précédents n*a donné plus de soins aux positions géographiques que
Magellan et son équipage. Mais examinant la relation d'Antonio Piga-
fetta, on voit que la longitude géographique, moins fréquemment anno-
tée , n'était pas aussi souveut recherchée que la latitude. Son récit ne
détermine point de longitude même du détroit. 11 compte la longitude
de Touest du méridien de ki répartition 50**-à Fouest de cap Vert (s.-ss).
Il dit qu'on a passé la ligne équinoxiale par 122"^ ouest de ce méridien
(288* est du méridien de Fer) et les fies Moluques sont à 161* ouest du
même (191* ouest et 2()9* est du méridien de Fer) : or, elles sont sur
rii^misphère esp^^ole. Les Portugais soutenaient et prouvaient le con-
traire,, allant toujours par le chemin de Test. Ils accusaient les Espa-
gnols d'erreur ou de mauvaise foi. Pour vider les incertitudes, on
choisit (dit plaisamment le milanais Pierre Martyr d'Anghera^ historio-
graphe de la cour d'Espagpe), vingt-quatre astronomes et pilotes tant
portugais qu'espagnols, lesquels, après avoir sillogismé,. conclurent
qa*Oft ne pourrait décider la questioaqu'à coups de cauon (épistol. 797).
Les débats des astronomeset pilotes, auxquels fait allusion d'Anghcra,
ont eu lieu à Saragosse (339). Peu concluants qu'ils étaient, ils prou-
vent que l'esprit vivement préoccupé de la théorie, suocombait sous
l'impuissance de l'application. En effet, on levait alors la longitude
gé<^*aphique au moyen de tel ou tel instrument, de tel ou tel astre,
avec autant d'incertitude, qu'on la trouvait le compas à la main sur les
cartes nautiques. Parce que les observations se fesaient avec des instru-
ments très- imparfaits et particulièrement avec l'astrolabe, le méléoros-
cope, le torquetum, la baguette et l'anneau universel, instruments qui
n'étaient pas sûrs dans les résultats, ni d'un usage facile ou commode.
(U7) PicafetU transonto del trattato di navigazione, p. 949; Herrera, der. H, lib. IV, c. 10; Barrot,
60e, ni, Iib. V, c. 40. — Ruy Falciro composa un traité de longitudes, pour Tusage particulier de
MafHtea. (Voyex Hamboldt, exam. de Thist. de la géogr. do n. m. 1. 1, p. 301, 803).
(S30) La Unea de la repartitione e trenta gradi longi dal meridiouale : el mcridioDale c trc gradi al
kfsale loagi decapo Terde. (Pigaf. p. 66; préface d'Amorulti, p. 31 1.
J3W) Voyex Barrera , historia gênerai de los hei^bos de los Gastellanos en las islas y tierra firina
Bar oceaauo, t. H , decaa 5, p. 478. — On y remarque de la part de TEspagne : Sébastian Cabot ,
Esteran €oaKz, IKego Ribero, Jean Vespucoi, — Ce compromis fût signé le ii avril 45t9, et désigna
les ilaa Marianes (Latroaes) et l'ile I. Juan de las Vélos, pour les termes de séparatiOD , ce qat n'a
tranclié aucanement la question.
166 GÊOGR. LATINE y 1470-im&0«
Pour la longitude, on ne pouTaît alors savoir Thevre précise q«'aa
moyen de sables dans la construction et Fusage desquels rexactitode
est impossible (340). On savait que le sable est inexact (Pigafetta, de la
navigat. f>. 280) et le résultat douteux des longitudes obtenues^ augmen-
tait la méfiance dsms les prévenftions des pilotes, ainsi qu'ils ne vou-
laient pas entendre de longitudes, et les cartes à leur usage conti-
nuaient à rester libres de toute la gêne de longitude graduée (341).
204. Le<!Osmographe Diego Ribero prit part aux débats de Saragosse,
où Ton discutait la longitude géographique (342). Sa carte de 1529 et la
carte sévillane de 1527, antérieure de deux années, sont les premières
cartes espagnoles qu'on connaisse qui soient traversées et croisées par
les échelles, tant latitodinale que longitudinale. Ces cartes, pour la
partie du nouveau monde, diiTcrcnt suivant qu'elles étaient instruites de
nouvelles découvertes : quant à ce fragment de l'ancien monde, que
nous avons devant nous (n** 117 de notre atlas), elles sont identiques,
également viciées par un singulier manque de discernement (345}.
Gertaroement la construction de la méditerranée des marins du moyen
âge n'y est pas défigurée: elle reste entière (voyez n** 117 de notre
atlas)^ mais sa boussole est rectifiée. Les rivages septentrionaux de
l'Afrique Fattestent. Aiexandrette tient à peu près 56<* de latitude,
(56% 15); Alexandrie 28» 20' (Ribero 27<>0; 3iMi'); Tunis SSMO'
(Rîb. 54» 50'; 56* 40'); Ceuta monte jusqu'à 57» 0' (Rib. 56» iO; 55» 36);
le rivage opposé de l'Europe est sans doute porté trop au nord. La
mer méditerranée des marins, placée dans une fausse graduation, que-
nous allons examiner, devait, par sa largeur, déborder les latitudes.
L'échelle de la graduation des deux cartes est de la projection planez
équatoriale, proj<M;tion cylindrique, les degrés de latitude et de longi —
tude sur tous les parallèles et méridiens sont égaux du grand cercle^
On conçoit qu'une carte espagnole de l'Afrique n'est qu'une oopi*-
d'une carte portugaise. Or, cont'ronlant les deux cartes espagnoles ave^
l'hydrographie portugaise (avec l'Afrique éditée en 1515 par Ubelinzi
(n» H8 de notre atlas) nous trouvons : la méditerranée longue (46®) 4^
de la parallèle de Rhode portée dans les cartes espagnoles à 42» du grai
cercle (par conséquent par sa largeur elle déborde les latitudes). Les 8- -
<le l'étendue de l'Afrique depuis le cap Vert jusqu'à Gardafni, dono^^ 4
par l'hydrographie portugaise (comme 65», 50' d'équatoriaux)
réchelle de la parallèle de Rhode , sont comptés par les deux ca
espagnoles 85» du grand cercle. Moyen excellent de faire partir par-
chemin de l'est les Moluks à l'autre hémisphère. N'accusant pas d&
subterfuge les cosmographos espagnols , nous voyons dans leur corn
(3-iO) AmoreUi, p....
(34i) In (la carta da nauigare) necessaria cosa c ch* egli sopra tutto liahbia tre principal! consâ <
rationi : attcso cbe prima avertira al luogo doac si troaa et aquel done liadestinato andare, et qua-zm 1
î'uno sia duil' altro lontano. Di pni in quanta altczza di gradi si troui c in quanta debba andare : ^ i
tiUimo di quai iiento s' babbia a sciuire inquusta sua nauigationc... in mado cbc ciascum loogo ^i
figurato ncl' sno proprio, uero, et certo sito, cosi per rispetlo de uonti, come dcll* altczza. Dit d'jf» M~èi
le parole del dottor Pietro di Mcdina géographe espagnole, Tbomaso Porcacchi da Castigli«
en lo72, dans son l'isole pin famose dcl monde, p. ill. — De la longitude géographique on n'y s
eait p3- " "' ''"■"
(Ui)
(343)
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geait pas à s'enquérir.
(542) Sprengel, Gesc^h. der Entdek. c. 8, p. 29.
Voyez ce que nous avons dit de l'indcntité de ces cartes cUap. 172.
LATITUDES, LOKGITLDES, S04. 167
sîiioD un nouvel exemple jusqu^à quel point on était dans Tincertitude
de graduer en loo{];itude luéme les nouvelles découvertes positives.
On ne savait déterminer si Cnhà s^élancait au delà des Canaries jusqu'à
70 d«^rés ou jusqu'à 90 degrés ouest; fallait-il à l'étendue de rÂfrique
assigner 65» 50^ ou 85^ 0? Par cette dernière extension les cartes de la
projection cylindrique donnaient aux vents d'est et d'ouest un appoin-
tement plus aigu, l'échelle longitudinale de l'est à l'ouest croissante
vers les tropiques et les pôles, arrivait à une extension démesurée. Les
pilotes qui oteervaient les latitudes géographiques étaient certainemeut
en mesure de le comprendre et ils acceptaient cette dissolution des
distances longitudinales.
Ce défaut de la projection cylindrique se fit sentir en premier lieu
par la configuration et la position de l'Afrique, qui agit aussi fâcheuse-
ment sur la pose et l'extension de la mer rouge , comme nous l'avons
observé. Ifais bientôt les navigateurs éprouvèrent d'autres inconvé-
nients aux environs et au delà des tropiques. L'étendue des rivages
Tîsités entre la Terre neuve et les Florides , n'était pas assez forte pour
remplir l'espace vide de la carte. Leur perlustration , avançant de la
Terre neuve , ne pouvait pas atteindre les Florides , dont ils formaient
une continuité, quand on les visitait à partir des Florides. La carte de
Ribero offre cette continuité des rivages visités de ces dernières. L'atlas
espagnol de 1573 les laisse détachés et flottants dans les espaces de
l'océan, quand on les examinait du côté de Terre neuve. Les perlustra-
tiens des rivages de l'Amérique , avancées à partir de Panama vers le
midi, ne se rencontraient point avec les rivages qu'on reconnut au delà
du détroit de Magellan. Une grande brèche de presque 10 degrés s'était
déclarée entre cette double direction , qu'on raccommoda pour un cer-
tain temps par une énorme bosse formé des rivages de Chili (voyez
Munster, n"" lâ9 de notre atlas, et Mercator). L'expérience éprouvait que
pour coordonner le monde sur la projection cylindrique, il fallait abso-
lument régler l'échelle croissante pour les longitudes.
Aussi , afin de donner l'assiette à la mer mediterranée de la compo-
sition des marins du moyen âge dans une mappemonde de la projection
cylindrique, il était nécessaire de rectifier son orientation , ou de lui
dk>nner une nouvelle boussole , et de dissoudre ses distances par l'ac-
iDroissement de la longitude. Cette seconde condition étail très-grave,
elle aurait rendu la carte si non impossible à l'usage des marins, au
Mins fatigante. On ne trouve aucune carte qui l'aurait essayée. Les
deux cartes espagnoles, redressant la boussole, ne se sont point avisées
de toucher aux distances; elles laissent sans scrupule l'espace de 18
degrés du grand cercle au détroit de Suez : les navires n'y passaient
pas, la gorge étroite des piétons était indiflerente pour les navigateurs.
La mer mediterranée, pour qu'elle fât utile à leur usage, restait dans
les mappemondes de projection plane ^ comme un compartiment d'une
tatre nature, accroché par le détroit de Gibraltar à la grande construc-
tion de nouvelles découvertes (344)»
168 GÉOGR. LATINE y 1470-1550.
205. RésumaDt ce que nous avons examiné, nous voyons qoeles
cartes nautiques étaient dessinées partout où la mariné était animée : à
Venise, à Gènes, à Majorque et en Catalogne; à Sagrès et Lisbone, en
Castille, chez les Grecs et les Flamands, partout, et jignore sons quel
point de vue se laisseraient distinguer les écoles de Venise, de Gènes,
Catalane et Majorque, de Sagrès et de Lisbone, si ce n*est par Tidiome
des inscriptions, par Fauteur qui les composait, ou par quelques spé-
cialités dans les positions, dans la configuration des régions trop éloi-
gnées ou dans les indications des découvertes : car ces écoles formaient
une même famille. Tune engendrait Tautre, la fille suivait la méthode
de sa mère-école; elles se communiquaient muluellement et chacune
tirait des avantages du progrès de Tautre; toutes les cartes sont dres-
sées sur les mêmes bases pendant les xiv* xv* et xvi* siècles; plus oo
moins exactement dessinées et exécutées, elles offrent simultanément
les mêmes formes, le même ordre. Et lorsque le mal ptoléméeu com-
mença à ravager la géographie, la contagion pénétrait partout etatter-
guit toutes les écoles : c'est alors que les'^écoles se dessinaient peut-être
plus distinctement par les symptômes de leur commune maladie. Mais
alors elles prirent terre et renièrent la mer. Dans chacune, ceux qui
sillonnaient Tocéan et les mors , restaient conformes entre eux.
Les cartes de ces écoles, considérées comme intermédiaires entre les
simples portulans et les mappemondes systématiques, représentant la
totalité ou une partie seulement du monde, puisqu'elles réunissaient
dans un ensemble quantité de portulans, offraient toutes les qualités
des portulans. Pour qu'elles puissent être utiles, elles devaient être
confectionnées sur une assez grande échelle. Basées sur l'échelle des
distances, elles offraient un développement assez indéterminé et sou-
vant modifié. La méthode de la rose des vents, assujétie à ta boussole et
à son aiguille, leur frayait le chemin au développement cylindrique :
mais elles n'étaient soumises à aucune projection : par conséquent la
graduation , et encore moins le développement cylindrique ne pouraîcnt
saisir, ni ses membres souvent disloqués , ni son ensemble.
Cependant, depuis que la projection cylindrique se déroula sons la
ligne équinoxiale, les anciens portulans et toute la mcditerranée
devaient se raccommoder à cette projection, et, pour figurer dans les
mappemondes des deux hémisphères, subir le changement de bousisole
et de dimension; le changement de la première lui donnait une direc-
tion et position juste, qui s'accordait avec la ligne équinoxiale; mais te
changement de l'autre jetterait une perturbation dans ses bases, c'est-
à-dire dans les distances, et défigurerait tous les contours, si l'on eût
sérieusement raccommodé la méditerranée dans une mappemonde
déroulée sur la projection cylindrique. La mer mcditerranée ne pon-
des ilos Fortunées), de sorte que Ton peut dire qne )e cap est à-peu-près dans le méridien d*Aloxan>
drie. — L'bydrograpbie portugaise, à laquelle probablement Americus manuro imposuit, se couforrae
à cette indication du méridien, lui donnant 55" de longitude; de mùme le scvillien et Ribero variant
Huroboldi
>e de les
Suffit
d'observer que la graduation cylindrique , sans la croissance de latitude , n'a pu au delà du tropique
déterminer les longitudes et que l'accouplement de la mer méditerranée, dressée sur d'autres bases»
avec le reste du monde récemment découvert, rangea Alexaudrie et le cap sobs le même méridien.
LATITUDES» L0K6ITU0ES, 806. 169
vait fi^rer dans une mappemonde de la projection plane» avant que
celie-ci n*eût engendrée les cartes réduites des lonciludes et latitudes
croissantes. Mais pour y arriver, la théorie devait d*abord examiner et
comprendre les rumbs, préalablement prendre en considération les
latitudes connues, reconnaître et admettre la croissance de Téchelle
pour les distances.
206. Incertitude , indécision , désordre , accablaient les mappemon*
des de toutes les écoles. Ordinairement on rapiéçait les parties hétéro-
gènes; on les laissait au contact qu'avait créé par hasard la pratique.
Les éditeurs de Ptolémée expliquaient les projections, dtscuf aient sur
leur valeur et importance , s'excusaient quand ils traçaient les degrés
en lignes droites. Les dessinateurs cosmographes, peut-être moins ver-
sés pour satisfaire les exigences des savants et le besoin croissant dans
les nouvelles découvertes, tiraient à travers leurs mappemondes la
ligne équinoxiale et les tropiques; marquaient les climats et les degrés
de latitude sur les marges des cartes de leur composition. C'était faux,
cela blessait plutôt la vue et la construction des cartes , décelait le
double emploi de la boussole , sans opérer le redressement nécessaire.
Les géographes publicateurs, empruntant de Ptolémée la graduation
de la latitude pour la médilerranée , rectifièrent sa boussole par des
lignes droites , envisageant toutes les compositions antérieures de
marins et de cosmographes comme basées sur la projection plane, et ne
respectèrent pas longtemps les proportions de la construction nautique.
L'école de la péninsule pyrénéenne , qui aimait mieux étendre les
connaissances humaines que d'étudier un géographe hors de saison ,
qni ne s'empressait guère d'éditer un*Ptolémée; l'école de cette pénin-
sule gravait peu, dessinait beaucoup (345), et rectifiant l'assiette du
bassin de la méditerranée, observait ses proportions nautiques, conser-
vait le précieux fruit de labeur précédent, presque abandonné par la
marche générale des opérations géographiques de la renaissance.
L'école allemande, à peine ouverte, adhéra avec une ardear laborieuse
et bruyante à Ptolémée, elle prôna sa méthode, son autorité inaftaquable
et accepta sans réserve ses proportions de la méditerranée, méconnais-
sant ainsi le mérite de travaux antérieurs, elle s'empressa de résumer
et de populariser les connaissances nouvelles.
L'activité de l'école italienne, embrouillée dans sa marche par la
renaissance des lettres, donnant la prépondérance à Ptolémée, à sa
méthode, à sa connaissance géographique, s'engagea dans un dédale
d'incertitude, d'instabilité. Par des moyens variés elle retravailla tous
les produits géographiques. C'est un laboratoire qui élabore d'avance
de nombreux matériaux pour la réforme de la géographie.
Nicolas Zeno, 1555.
207. Parmi les essais de la graduation en latitude et longitude, qu'on
retrouverait dans l'école italienne, celui de la graduation de la carte de
(345) Le cosmofpraphe da roi d'Espagne, Ortel, depuis 1570 jasqu'à sa mort iS98, ne sait indiquer
d*atitres cartes publiées en Espagne que celle provenant de la mauvaise gravure de Pierre de
Medine, connn par un ouvrage médiocre sur la navigation , ou il décèle assez d'ignorance. — En
PortDgal» Ortel ne confiait que Alvarez Secco, et Homen : ce dernier a publié an atlas.
i70 GÉOGR. LATINS, U70-1550»
Zeno mérite d'être distingué. Nicolas Zeno, descendant des frères navi-
gateurs, retrouva dans les archives de sa famille la carte de son
bisaïeul (s^e). Pour qu'elle pût entrer dans la composition d*une mappe-
monde, il entreprit, vers 1555, sa graduation. Il s*imagina que cette
carte , bien qu'elle offrit une espèce de portulan , et qu'ordinairement
on graduait les portulans par la projection plane, il s'imagina, dis-je,
qu'elle offrait une composition susceptible d'accepter la graduation de
la plus parfaite projection de Piolémée , aux parallèles et méndieus
courbes.
Cette opération parut au géographe témoin (Ruscelli), d'une difficulté
extrême^ demandant un homme profondément versé dans la science. 11
fallait posséder à cet effet un savoir, connaître les mathématiques , être
initié dans le mystère de Ptolémée et avoir une application assidue
pour exécuter une semblable graduation. Nicolas Zeno, doué de toutes
ces qualités , tirant le premier méridien par le milieu , qui divisait la
carte en deux moitiés, discerna avec la plus grande attention la paral-
lèle du milieu qu'il détermina par le 68' de latitude, dont le degré de
longitude est en proportion de 3 à 8 au degré du grand cercle. Ayant
établi les parallèles , il croisa ces parallèles par les méridiens inclinés
proportionnellement à la diminution de degrés (s47). Enfin il fit graver
sur bois et publier cette carte par Marcolini en 1558. Depuis cette pre-
mière publication, elle a été reproduite plus d'une fois à Venise et
ailleurs (348). A la suite de cette opération heureusement achevée,
Groenland avança à l'ouest jusqu'à 290^ de longitude, se rapprochant
de Zipaugri ou Japon placé à 280* de longitude. Après cette expérience
de la théorie de Ptolémée, Nicolas Zeno élabora un traité de géographie
qui donnait les solutions de tous les problèmes pour créer une nouvelle
géographie ou réformer celle qui existait (sio).
GiROLiiMO Ruscelli, 1561.
208. Le viterbien Gwolamo Ruscelli , qui nous a donné une ample
relation de la méthode et de l'opération de Nicole Zeno, philologue
instruit, fondateur de l'académie dello sdegno à Rome, correcteur dans
la typographie de Valgrisi à Venise, préparant et soignant l'édition de
(340) Voyez la généalogie de Zeni à la fin dn volnme.
(3.I7) Qaesto disegno riformato, comme si yeâe , s'è hannto de Nicolo Zeno Ion descendente per
driita linoa. Et egli qaesto geutiihuomo.... ha adorno qaesto disegno de paralleli et meridiani , ooo
tQtti le misure chc gli si convcgono.... Questa tavola danqae ba il suo parallelo di mezo lontano dall
eqninottiali 68 gradi, come il Zeno diligentissimamente ba ossenrato. Onde ha queUa proportione al
meridiano, che bauno quasi 3 ad 8 (Girolamo Rascelli, espositioni et intruduttioni oniTersali, nnova
taTola xxxv). Nous devons faire remarquer, que la graduation de la carte qae nous avons copiée n*95
de notre atlas, est loin d'observer ces proportions qa*à voulu établir Zeno d'après les r^lcs prescrites
par Ptolémée.
(348) Touchant la première publication de la carte des frères Zèni , voyez catalogue anglais des
livres de Pinelli n* 4392. Ses reproductions se suivirent à Venise, dans les éditions de Ptolénoée 1561,
par Ruscelli iS62, par Moletto 1874, ISU9, de Ruscelli renouvellécs ; dans viaggio in Persia de
Catherino Zeno i délia scopriroento de lo isola Frislanda, Estlanda, etc., 1588; dans les dissertationi
de Znrla 4808. — La carte reproduite ou commentée : Ramusio, navigationi , 1583, t. il, M Stt ;
Hackluyt, navigat. 1. 11, part. II, iii. Hieronym. Megiser, septentr. novo antiq.; Abraham OrteUos;
Lucas Fox north west Fox, on Fox from north vrest passage, London 46S5; Eggers, sur la vraie
situation de l'ancienne Groenland orientale, dans les mémoires de la société économique de Copen-
hague , IV, p. 239-320; Ruacbe, dans les annales des voyages, t. X ; Malte Rnin , géographie, éditée
par Huot, livre XVIII, p. 489 et suiv.
(349) Omnia docentur in historia nniversali Nicolai Zeni , in qua ettam extat tota geograpUa
fidelissima. Joseph Moletius, commentarior. ad geogr. Ptol. 1, 24, p. liî, cdit. 1562.
RUSCELLI» a08. 171
Ptoléméc qui parut en italien en 1561, entreprit lui-même et commença
Texécution d'un grand ouvrage, qui avait pour but de développer toute
la théorie et la science des cartes nautiques des marins, qualifiées par
quelques modernes d'hydrographiques, et dont il appréciait lui-même
la hante valeur. Il reçut des notes de beaucoup de marins et de parti-
culiers, qui par leur propre expérience, par la pratique et la théorie,
étaient très-versés dans cette matière et dont il y en avait beaucoup à
Venise. Il demanda des renseignements aux Génois, aux Grecs, aux
Flamands, aux Espagnols et aux Portupis. 11 se procura des cartes
marines de quelques particuliers qui avaient longuement navigué et les
avaient successivement corrigées de leur propre main (sso). Riche de
ces conseils et de ces matériaux, il se proposait, dans sa nouvelle géo-
graphie, de flaire un ample traité à sa manière, dans lequel serait
entrée la théorie de toutes les choses qui s'y rattachent. 11 pensait
mettre quinze cartes marines, spéciales aux différentes mers, amplement
détailées avec tous les endroits, avec les informations et descriptions de
leur nature et de leurs qualités, des écueils, des ports et de chaque
■chose à ce sujet; mais surtout très-exactes et avec la mesure des degrés
(de londtude) proportionellement selon les parallèles des lieux (ou de
iatitade), et avec la nouvelle boussole (c'est-à-dire, redressée de sa
^clination sur les points cardinaux), dans laquelle se seraient trouvées
aassi beaucoup d'opérations importantes qu'on ne trouvait pas dans
oenx-ci jusqu'alors. Les caries devaient être exécutées sur une grande
échelle, car, pour qu'elles passent être destinées à l'usage de la naviga-
tion, il fallait qu'elles fussent de la plus grande dimension possible,
soit pour qu'on pût exactement y discerner la direction des vents, ou y
prendre ces mesures (distances) précises avec le compas et les pointer
cfaaqae fois selon les besoins. Lorsqu'il énonçait ce grand projet, il avait
déjà exécuté cinq sections de mers en cinq cartes, croyant qu'on ne
trouve de pareilles, et il espérait les retoucher et améliorer avant de les
livrera la gravure (35 1). Ce beau projet n'a pas eu de suite, il resta
interrompu et inachevé par la mort de Ruscelli, arrivée en 1566.
Rnscelli avait donc conçu le projet de décorer les caries nautiques
hydrographiques par la graduation dont elles étaient privées. (}ucl
aurait été le fruit de cette opération? Il est difficile de le conjecturer.
L'homme qui savait estimer la valeur des caries hydrographiques, leur
rmO) Nel cfae vengo tuttavia Taccndo studio con l'aioto di molli non solamentc marinari, ma ancor
notrili, die per pratica et per artc et soienza ne sono iotendenlissimi, de* quali in questa cittàson
p«r molti; oitre , che da GenoTCsi, da Greci , da Fiaminghi et da SpagnuoH et Portughcsi ^ io vengo
tnitiitia procurando d'baTcr* aiuti ; et già da moite carte roarinaresclic , havute da alciini particolari,
(Aie kanno langamente navigato con esse et le son venute agginstando di volta in voila di roano lor
propria (Rascelli, esposittoiia et introduttioni universali, cap. VUI, délia caria da navicare).
(38i) Délia quai* arte (idrografîa) , io spero ncUa mia nuova gcografla , far un picno trattato à mio
modo, nel quale oltre allateôrieo in lutte quelle cosc, che le si apparlcngono, mcttcrô da xv pczzi
di carte da navigare particolnri di diversi mari , distcsc copiosamente.... ma sopra tutlo fottc giustis*
sime, con le misore di gradi proportionataroentc , sccondo i paralleli de' luoglii , et con un* nuovo
busaolo nel quai* anco sieno moite opération! imporlanlissime, cbe in queslifinqui non si veggono....
Io con consnltatione di pcrsone intendenti , ho faite far cinnuc pezzi di marc in cinque carte «h' io
credo che fin qui ne sien poche altrc tali , oltre che avanti che si facciano inlagliare , per métier ncl
libro, potrb venirle tuttavia raiglorando Percio que le carte vcre d'adoperarc si convengon far
gnskdi qcianto pin si possa, si per poter* in esse discerner' otlimaniente le vie de' venti, si ancora
per potersi col compasso prender giuslamentc le sue misurc cl pnntarla di volta in volta sccondo i
bisogni (Rnscelli, ibid.). — I marinari V usano quanto più grandi lor sia possibilc et hanno ollre alla
gcaeialed UDWersal, più altre carte particolan (Ruscelli nota ad carta mar, 6 da navigarc n* 56).
173 GÉOGR. LATIMB, 1470-15S0.
exactitude corroborée par un long et universel usage , qui estimait Tex-
périence des navigateurs, aurait conservé les proportions des mers,
n'évaluant pas la niéditerranée à 62^, mais uardant sa dimension donnée
par les cartes marines : la carte de Syrie dans son atlas vient à Tappui
de ces présomptions. La nouvelle boussole, rectifiant Forientation et
fixant les latitudes, aurait déterminée la longitude sans recours à
Ptolémée. Mais Ruscelli ne désapprouve pas ceux qui puisaient les lon-
gitudes dans Ptolémée , et les cartes qu'il approuve par sa publication ,
sont sérieusement affectées par les longitudes du géographe grec.
Le contagieux mal-ptoléméen s'était déjà emparé de Fesprit humain ,
que rien ne pouvait sauver la géographie nautique. Partout se déclare
une sujétion complète à la longitude de la méditerranéc de Q2^ (sss),
et presque partout aux formes ploléméenncs (355).
Triomphe de Ptolémée, 1550.
209. Pour exécuter la graduation de plusieurs caries qui devaient
former un ensemble par leur cohésion , et même d'une seule isolément
prise, non-seulement les directions et les inclinations vicieuses des
parties offraient de nombreux obstacles à surmonter : mais aussi T irré-
gularité des cartes , qui approchaient d'une véritable inexactitude ,
multipliaient la confusion d'une manière très-embarrassante. Cette
Inexactitude venait en premier lieu de l'imperfection des instruments
à dessiner. Sur toutes les cartes , même sur celles qui sont dessinées et
inscrites avec la plus minutieuse assiduité, les lignes, les cercles, les
points, les distances vacillent, dirigées et appointées par une main
incertaine. On ne peut attribuer ces déviations qu'à l'imperfection de la
règle et du compas. La règle en bois, cambrée, rejetée par l'humidité;
en métal, tournant sur un plancher insuffisamment dolé, raboteux» sur
le vélin ou la peau , cédant aux inégales applications et pressions,
déroutaient les efforts des plus soigneux dessinateurs. Le compas, grande
et grossière machine ordinairement en fer, à l'ouverture dure, raide,
sautant ou pivotant sans fin, manquait à l'échelle et aux points qu'il
devait marquer (554).
(559] La mappemonde de Katlas de Ruscelli donne ce nombre à la méditerranée ; les cartes spéciales
de son recueil ne purent étendre cette mer qu'à 60*.
(353) Ruscelli a donné , carta marina 5 da navigare, solamente per uno essempio, non percbe in
effeito cos î picciola ella fosse comoda 5 buona d'adoperare ; fatta solamente per una mostra et come
per un modello, clie valeria pochissimo b nulla in adoperaria effetualmente nel navigare. Examinaat
ce modèle on voit que c'est un ouvrage postérieur au voyage de Magellan ; les régions septentrionales
ont une configuration tout-à-lait différente de celle ^u'on donnait avant 45*20; eufia elle est Bosté-
rieure aux années i539, iS41, dans lesquelles la Californie fut reconnue, comme péninsule. Malgré
d'innombrables irrégularités de cette carte négligemment exécutée , elle déroule l« tableau d*une
singulière projection. Sa rose , placée sur l'équateur, représente le cercle de rbémisphère » dont le
rayon répond à 90 degrés. Quand on entreprend d*appfiqucr les longitudes et les latitudes connues
par Ruscelli aux lieux déterminés par la rose, les degrés, en tous sens, du poiut central de la rose,
tant en latitude, qu'en longitude se présentent décroissants. L'autre hémisphère est développé de
deux côtés dans les additions de moins d'un cinquième du diamètre. Chacune présente Ta décrois-
sances de 90 degrés de longitude de l'autre hémisphère. L'embouchure du Gange figure sur la lisière,
comme s'il était à 480* de longitude.
(364) Cette imperfection du compas était écrasante encore au xvi* siècle, comme on peut le
remarquer par l'avertissement donné par Ruscelli. Et sopra tutto convione baver con esse il com-
passé grcude et giustissimo, che nell* a|>rirsi, non sia dttro, onde bisogni far forza et cosi venga à far
salto et aprirsi più che non vogliamo, ne ail' incontro sia molto lento, cbe Dell* adoptarsi si venga à
restriDgere da se medesimo (esposit. et introd. univ. cap. 8).
PTOLÉMÉB» 210. 173
Limpossîbilité de soutenir les mesures d'après Texactitude mathé-
matique, concentra les exigences de Tcxactitude dans le coup-d'œil et
la main qui fesait ressortir, boursoufiler et exagérer les points, les traits
et les formes saillants. L*œil et la main, conduits vers un point mal
assuré, allait parfois au hasard et laissait le vague aux gradueurs.
' Ces défauts affectaient plus ou moins toutes les cartes nautiques sans
les déranger, sans détériorer ni atteindre cette harmonie, de Tensemble
qui les unissait dans un corps; sans introduire des discordances, des
incohérences qui auraient rendu ces cartes plus nuisibles qu'utiles à
Tusage des pilotes et des navigateurs.
Le dérangement n'arriva que lorsque le divin Ptolémée commença
à opérer la grande métamorphose de tous les pays; et sa renaissance ,
décelant le mode et le modèle de la graduation, souleva ces barrières
infranchissables qui s'opposaient à toute graduation possible. Les géo-
graphes ne concevaient point, qu'on eût pu découvrir une graduation
dans les compositions modernes, ils se préparaient à l'appliquer par la
réforme de la carte, de sa boussole et de la configuration des pays. Les
nouvelles découvertes furent gradués; Nicolas Zeno gradua le dessin de
ses ateux : celles-là sur l'expérience des navigateurs; celui-ci hasardeu-
sement : mais la graduation de l'ancien terrain ne pouvait plus s'exé-
cnter sans l'intervention de Ptolémée. Je ne sais pas s'il y eut jamais à
cette époque un géographe quelconque, qui pensa à découvrir les longi-
tudes ou les latitudes des cartes de l'ancien monde de la fabrique du
moyen âge, spécialeîsou générales, indépendamment de la graduation
de Ptolémée. Cependant l'œuvre de la graduation complète gagnait
toujours du terrain et poussait des racines profondes. Chaque carte
spéciale de chaque pays fut mise à la question, et ne répondant pas*
subit la destruction, réformée et affaissée dans les proportions de
Ptolémée. Souvent elles passaient par des épreuves de différents philo-
Icônes qui ne s'entendaient entre eux que sur un seul point, celui de
soumettre chaque pays dans le cadre de longitudes et latitudes chiffrées
par Ptolémée ; de donner à chaque pays les contours conformes à la
configuration ptoléméenne.
SiO. Il me semble que sous ce rapport, les écoles se sont dessinées
par des dissidences et que chacune allait son train. Je ne connais pas
des productions pul)liées des écoles de la péninsule pyrénéenne, qui
avaient eu une pratique spéciale et immense que lui donnaient les
découvertes et les colonies : mais leur distinction me paraît évidente
dans la graduation faile par elles-mêmes de leur propre péninsule, qui
ne s'accommodait point avec les graduations des autres pays effectuées
par les écoles d'Italie et d'Allemagne, et celte distinction dissidente se
prolongea assez longtemps (355). Les longitudes ptoléméennes s'adap-
f3S8) Nous avons observé cette dissension parla carte espagnole de 1481 (n* lt4 de notre atlas).
Elle coDtinae de se manifester dans les atlas de Ruscelli et Uoletto 1661 , 1562, d'Orteliiis 1870 : dans
ce dernier c*est la carte de Cbarl Clusios. Dans les premiers , la carte d'Espagne oiïre pour Bavonne,
lat. 44* Vt long. 15* 20'; pour Narbonne lat. 45* 0', long. 18* 30% et la carte ic France donne à
Bayoane, lat. 43* 40^, long. 14* 30'; à Narbonne, lat. 4i* 0', long. 10* «0'. Dans l'atlas d'Ortelius,
Clusins '.Français), place Bayonne, lat. 44* 50', long. 10* 40'; Narbonne lat. 44* iO*, long. i4* 50'; et
Jolivet en France, Bayonne, lat. 45*20', long. 16* 60'; Narbonne, lat. 41* 50, long. fS" 50'. L'incolio*
lr£nce est palpable et continue.
176 GÉOGR. LATINE, 1470-15$0.
décision. L'ajustement précoce des latitudes à quelques cartes des cos-
mographes, prouva les dispositions de la régularité et de Fensemble.
Mais ces cartes furent bientôt sacrifiées et toute idée des géographes
allemands s'enferma dans Ptolémée et procéda à toutes les opérations
avec assurance, méthode et servilité édifiante. Behaîm, Schedel,
Ruysch, Scbôner, Munster, Apian, Gemma, se succédaient, agissaient
dans le même sens avec une assiduité infatigable, et réussirent à conso-
lider la domination de Ptolémée par leurs publications populaires.
Jean Schônrr, né ii77 à Karlstadt en Frankonie, vir rerum mathe-
malicarum eœcellens (Âpiani, cosmogr. II, p. 55), cultivant la science à
Bamberg, commença à fabriquer les globes. A cet effet, en 1515, il
publia un ouvrage (sso). Il y confectionna en 1520, aux dépends de Jean
Seyier, un globe du diamètre de 2,8 pieds de Paris. Appelé en 1526 à
Nuremberg, comme professeur, il y transporta son globe, qui y est encore.
En 1552, fabriquant un globe pour le duc de Saxe, il publia deux nou-
veaux renseignements sur Tulilité des globes. Il mourut en 1517, et
pendant sa vie ses globes répandaient Timage modernisée de Thabitable
île Ptolémée, nova et quant ante fuit, verior Europae formatio (sec).
Sebastien Munster, né en 1489 à Ingelheim mort en 1552, à Bâle,
par sa cosmographie universelle, publiée d'abord en 1544, souvent
réimprimée en allemand et en latin, traduite en français 1555, en
italien 1558, mit en cours la même image (voyez n° 129 de notre allas).
Son édition de Ptolémée, cinq fois imprimée, 15i0, 1541, 15 il, 1545,
1552, servit de modèle à la nouvelle formation, pour les autres géogra-
phes à rélranger.
Pierre Apien ou Bienevitz, né 1459, à Leisnik en Misnîe, mort
en 1551, professeur de mathématiques et d'astronomie à Ingolstadt en
Bavière, popularisant Taslronomie et sa pratique, par ficelle et papier
mouvant, familiarisa le monde ptoléméen par sa cosmographie. Régner
Gemma, le frison, né 1508, mort 1555, s'empara de ce petit ouvrage, y
introduisit les notions géographiques et une table abondante de longi-
tudes et latitudes géographiques de Ptolémée, pour servir à dresser les
cartes, dont il fit en 1540 lui-même rexpérience à Louvain. Il multiplia
sans fin les éditions commentées de cette cosmographie d'Apien , dans
toutes les langues, latine, flamande, allemande, française 1544,
italienne 1575, espagnole 1575; et il fabriqua les globes (sei).
(359) Luf^lentissima qu^edam terrae totius descriptio, cum muUis utilissimis cosmographiae
initiis, iiovaque et quant anleruit, verior Europae nostrae formatio, praeterea, fluviorum , raontium,
proviociarum, urbinm et gcntium quant plurimoruni , vetustissima noniina recentioribns admixta
vocabulis, niulta etiam, quae diligent lector nova usuiqne futura inveniet, cum globis cosmographi-
cis, Norimbergae 1515, in-i".
(860) Voyez Doppciroajr, von den niirnbergischcn Mathematicis, p. 43-50; Erdglobus Bebaims
nnd der des Johan Schoner, Abhandiung von F. PI. Gbillany, Nurmb. iSiS. Ce dernier adonné
l'autre hémisphère du globe de 1520, que nous reproduisons n* 125 de notre atlas. Il assure que
l'exécution du glnbe est Taite avec grand soin. Le temps fit disparaître maintes épigraphes , mais
d'après la description de l'hémisphère , le globe en proportion de sa grandeur, n'est pas abondant,
ni dans la nomenclature, ni dans lus légendes, dont certaines offrent un intérêt.
(361) Je ne connais pas de cartes élaborées par Apian et Gemma : je ne connais que leurs petites
productions. Le premier présenta une mappemonde à Charles V, mais ceux qui pensent que cette
mappemonde est attachée à sa petite cosmographie sont dans l'erreur : la figure impériale tète-jh
tète avec Jupin ne prouve rien. Elle peut-être une figurine mal exécutée de la mappe présentée à
Charles V. Voyez n* 128 de notre atlas. Pour redresser les grossières erreurs du graveur. Gemma
donne un indicateur dans la série des longitudes et latitudes des lieux. Aidé par cet indicateur nout
donnons l'idée quelque peu avancée de la mappemonde accompagnant sa cosmographie. Apien et
Gemma copiaient d'abord le monde juste tel que Schoncr l'a dessiné sur son globe; ensuite ils
suivirent d'autres modèles.
PTOLÉMÉE, Sll. 177
 force de tant de publications, ia renaissance de Ptoli^méc arriva à
son â^e de puberté et à son âge viril. Aucun géographe ne doutait plus
qu^il n'y avait qu'un seul moyen d'avancer et de perfectionner la science
et les cartes, c'était de rebâtir l'ancien édifice géographique en le
plâtrant et badigeonnant en moderne. Dans ce but, ils commençaient
par ia géographie comparative, par laquelle les connaissances se trou-
vaient basées sur Ptolémée, la mer méditerranée placée et étendue le
long de 6â*. De cette façon se révélait nova et quam anle fuit verior
Europue formatio, où les longitudes et latitudes empruntées de Tancien
monde n'avaient aucun autre fondement que la crédulité des savants ,
leur prévention et leur ignorance, qui s'efforçait d'éblouir leur vue par
une futile décoration, infiniment nuisible et destructive.
Qu'on veuille réfléchir quel coup désastrueux reçut la marche de la
cartographie, combien elle fut lésée sur tous les points, dégradée, ense-
velie dans une foule d'innombrables bévues. La hideuse monstruosité
de Ptolémée écrasa et détruisit de fond en comble l'œuvre précédente
da moyen âge, offusqua la vue des savants, tyrannisa les labeurs des
géographes pendant plusieurs siècles.
II. m
VIL
RÉFORME DE LA GÉOGRAPHIE, 1550.
âiâ. Le triomphe de Plolémée apporta à Tesprit crédule et paralysé
«ne sécurité peu durable. Un malaise ne tarda pas à semer l'inquié-
tude, préparant une lente réaction. Le bon sens reprochait souvent à la
conscience fascinée et séduite, Taveugle confiance; Tincriminait d'une
crédulité puérile. Maintes fois éclairé par des vues lucides, ébahi à l'as-
pect de Tabsurdité patente, dans sa méfiance, il se révoltait contre
Tautorilé tyrannique, aimant mieux marcher indépendamment , renon-
çant à toutes les formes acceptées, ne suivant que les règles de la
théorie.
La défiguralion et la réforme fatale des cartes géographiques occa-
sionna un grand changement dans les opérations géographiques. Les
cartes hydrographiques décréditées, ne trouvèrent, pendant un certain
temps, que peu d'amateurs dans les hautes études (ses), toute l'attention
se tourna vers le continent. La géographie, de nautique qu'elle était,
devint une géographie continentale. Au xvi*" siècle, chaque état, chaque
pays, province, canton, sur tous les points de l'Europe, avaient leurs
topographes, chorographes, géomètres, géographes qui ramassaient avec
la plus grande diligence les nombreuses distances, les combinaient
minutieusement, composant les cartes spéciales. Ces chorographes et
topographes spéciaux ne se souciaient aucunement de longitudes
géographiques, ils redressaient les caries de leurs pays, basées sur la
complication des dislances plus scrupuleusement déterminées. Leurs
certes étaient pour la plupart sans aucune graduation. Restait aux cos-
mographes à rafiner sur cet objet et à appliquer la décoration de degrés;
à rapprocher, ajuster et réunir ces spécialités dans un ensemble, à les
enclaver dans le cadre ptoléméen. Ces cartes spéciales, nouvellement
élaborées, gagnèrent toute confiance et leur crédit mina sur d'innom-
brables points les formes ptoléméennes. C'était une œuvre préparatoire
pour ébranler et renverser l'édifice de l'aveugle prévention. Il fallait à
cet effet nombre d'années et plusieurs générations pour déblayer les
décombres de la dépravation.
(WS) Abraham Ortel n'a pas tu les cartes marines de WaldsoemiiUcr , ni de Laurent Frisius ; cette
deroiere est pour sâr reproNduite en 153S, par Villanovanus, ad culcem Ptolemaei taiiu. totius orbis :
orbu tjfpus anivcrsalis juxta hydrographorura traditionora exactissime depicta 1522. L. F. carte
»»»erable. L'autre de Waldseemiiller est très-probablement cette hydrographie portugaise que nous
~J^' *'aboré par les cartes spéciales (n* «18 de notre atlas) et analysé. — Ortel a peut-être vu la
^1*9 marine deNicolaï; quant à celle de Mercator elle se distinguait de toutes les autres parla
ie Td^'^'^ nouvellement inventée , mais elle n'était pas moins continentale , comme nous allons
i80 RÉFORME, 1S50 ET SUIY.
Déjà les cosmographes du moyen âge et les marins , perfectionnant
leurs cartes , avaient besoin de comparer les mesures variées de diffé-
rents pays : milles, lieues, stades, pas, pieds, aunes, et toute sorte de
mesure de longueur. Les latitudes géographiques venant isolément à
Taide de leur construction : la connaissance de la grandeur du globe et
de son degré devenait nécessaire.. Les traditions, les opinions arabes,
enfin les données fouillées dans les aateurs anciens, dirigeaient Tesprit
des cosmographes, et malgré le désaccord confus de leurs différentes
présomptions hypothétiques, n'affectaient point les cartes qui se pas-
saient de degrés. Depuis que PlOlémée avait prescrit ses lois, toutes ces
précédentes supputations avaient été reléguées de côté, ou confrontées
et adaptées au. chiffre de Ptolémée de Torigine obscure. Surgirent de
nouvelles divergences dans les résultats de cette opération : mais elles
n'eurent aucun effet sur le dessin des cartes, car en même temps
leur confection subit une métamorphose, une déûgnration , sans
être redressée sur quelque base solide. Les essais multipliés de nou-
velles cartes continentales, encombrant de jour en jour le cabinet des
cosmographes, fesaient cependant sentir la nécessité de la connaissance
certaine de la candeur du degré : la confrontation des mesures ne ras-
surant pas suffisamment et Topiniou de Ptolémée devenant suspecte.
On s'attaquait déjà à ses opinions astronomiques , à TeiLactitude de ses
calculs, à l'authenticité de ses observations. Le toruinen Nicolas Kopcr-
nik de Pologne (né 1475, mort 1543) (ses), sapa dans leurs bases son
système du monde, indiquant aux astronomes un point d'appui certain,
immuable. L'astre de Ptolémée pâlit, sa renommée commençait à
chancheller et on se demandait si le globe terrestre avait réellement la
dimension qu'il lui assignait. Mais aucun des cosmographes ou géomètres
n'était assez hardi pour sortir de son cabinet et entreprendre la vérifica-
tion. Un médecin français prit le devant et jeta le brandon à la curiosité
future.
213. Jean Fernel, qualifié d'Âmienois, né à Monldidier en 1485 (sei),
mort 1558, plus médecin et astrologue qu'astronome, aimait les occu-
pations astronomiques. Connaissant quelques discordances des astrono-
mes et des géographes au sujet de la grandeur de la terre, et en les
ei^aminaut, il remarqua que le seul moyen d'en sortir, était de se con-
vaincre par sa propre expérience. Suivant l'opinion de quelques-uns le
degré de 700 stades d'Eratosthènes était 87 */2 milles italiques. Regio-
montamus réduisait les 700 à 640, c'est-à-dire à 80 milles. Ptolémée
ne donnait: au degré que 500 stades ou 62 ^/s milles. D'autres ne
comptaient que 60 milles. Campanus, Thebit, Âlméon, Âlfragan 56 ^/s
milles. Dans une pareille incertitude, Fernel crut devoir répéter lui-
même la mesure. Dans ce but il se rendit à Paris et parcourut la route
vers Chantilly, suffisamment déterminée par sa direction et sa longueur.
Il leva presque sous le même méridien vers le nord de la capitale, à
(363] Ses ouvrages publiés r de revolutionibus orbium coelestium, Noriinbergae4S48,Ba8ilcae iM9,
Amoteiodami i6t7, 46iO ; de lateribus et angulis triangnlorum, Wittebergae 454S.
(564) Suivant les autres à Clermont eu Beauvoisis en 1497. ï) publia, de proportionibos , monale
gpbaerinm, sive astrolabii genus ; generalis borarii structura et nsns, Partsiis 1596 fol.; cosmotàeoria,
Paris 1828, fol.
MERCATORy ORTEL, S14. i81
dîiTérentes distances, plusieurs latitudes et il retrouva par ce moyen,
qu'un degré du grand cercle était de 68 milles 95 pas et un quart, qui
font 5i4 stades romains et 45 ^/4 de pas. Il détermina en conséquence la
circonférence entière de la terre : 24514 milles et 205^/7 pas (ses).
Cette vérification n*a pas tranché la question , ne dispersa point les
incertitudes, ni assoupit la divergence d'opinion. Gérard Mercator, le
coryphée des géographes de cette époque, donnait à la circonférence de
la terre 5400 milles germaniques ou 21600 italiques, ainsi qu'il évaluait
le degré à 12 ^/s milles d'allemagne ou 60 d'Italie. Il pensait que cette
opinion moderne était d'accord avec l'ancienne de Ptolémée (see).
Les Italiens et les Allemands ne se départirent point de leurs travaux
géographiques, ils continuèrent sur leur propre terrain et relatèrent les
produits des découvertes d'Espagne et de Portugal. Venise , Rome et
Norlmberg ne cessaient point de posséder de laborieux publicateurs.
Chaque pays de TEurope, chaque province, comme nous l'avons dit,
comptait de compositeurs de cartes. Ferdinand Âlvar Secco, Diego
Homen en Portugal, Garl Clusius pour l'Espagne, Jolivct en France,
Ilumfred L'huyd en Angleterre, Sébastien Munster en Allemagne, Jacq
Castaldo en Italie, Vincent Grodechi en Pologne, Sigismond Herberstein
pour Moskou, Jean Sambouk et Wolfgang Lazius pour la Hongrie et les
pays adjacents, Nicolas Geno pour la Skandînavie, et multitude d'autres
illustraient l'Europe et alimentaient partout lés études géographiques.
Biais nulle part ces études ne firent plus de bruit et plus de progrès à
celte époque que dans les Pays-Bas. L'activité fervente , prospère et
fructueuse s'y centralisa et anima celle des autres pays.
Les caries topographiques des petites mais florissantes et populeuses
provinces des Pays-Bas, se multipliaient; le dessin, la gravure, rexacti-
tude» assidue s'y développaient; les matériaux de toutes les nations y
avaient des reproducteurs; toutes les méthodes y trouvaient des spécu-
lateurs versés; Anvers, par ses publications géographiques, se mit en
concurrence avec toutes les fabriques de cartes.
Mercator et Ortel, 1537-1598.
214. Souvent la Palestine était l'un des premiers objets d'exercice
des géographes. Gérard Mercator, ne en 1512 à Uupelmonde, s'étunl
établi à Louvain comme support (étudiant) de l'université , devint par
(868) Delambre, liist. de Tastr. p. 383. — Fcmol , rommo grand nombre de gcogra|)lies et astro-
nomes de cette époque, comptait snr le mille italique. Il détermina et compara les mesures ùc
{)lu«ieur8 autres nations. Le grain d'orge, suivant Fcmel, est la petite mesure ; le doigt vaut 4 grains;
a palme 4 doigts, le pied 4 palmes, la coudée 6 palmes; le pas simple 10 palmes; le pus géométrique
5 pieds; la perche est de 10 pieds; le stade italique do IS pas (40 feraient un mille, mille passu^); '
le mille (italique) est de 8 stades; le mille gernrianique de 4000 pas; le mille de Suède du 8000. Var
conséquent le mille germanique était composé de 4 milles italiques. Cette proportion n'était pas
•ecepiîée par les autres. Quant a la lieue de France, Feinel avance qu'elle est plus grande que deux
milles italiques. — L'astronome François Femel, idit Huot, daus son édit. de lagéogr. de Mallc-
Brnn , xxvi, p. 46) eut l'idée singulière de partir de Paris pour Amiens en voilure, et de compter
exactement le nombre de tours de roue faits pendant la route , jusqu'à ce que la hauteur du soleil
fAt diroiDnéo d'an degré , et il trouva par ce moyen que la longueur du degré qu'il avait parcouru
était de 67070 toises. Laraille obtint par des moyens trigonométriques la mesure de S7074 toises.
Ces denx résultats sont remarquables
(366) Iluncorbem continere in circnitu quo maxime patet, millia germanira 8400; sive italica
31600antiquilusdocuit, idem recentior asserit aetas(Abrah. Ortelii,ad orbcni tcrr.). Par conséqueut,
suivant Mercator, le mille d'Allemagne avait 4 so/ei milles italiques.
iSi RÉFORMB» 1550 ET SUiT.
sa propre impulsion, fabricant dinstruments malhcmatîques et gra^
veur. Guidé par les conseils de Gemma Frisius, et commençant par
ses propres études à s'adonner à la géographie , il publia en premier
lieu, 1557, une carte de Palestine. Bientôt, inspiré par le désir de quel-
ques marchands, il dressa, 1540, une carte de Flandre. Se préparant à
devenir exécuteur de nombreuses cartes, il examina, dans une publi-
cation spéciale, en 1541, à Anvers, le caractère italique (de liierarum
quas italicas cursoriasque vocant , scribendarum ratione). Content de
l'accueil qu'eut son opuscule, il fabriqua la même année un globe
terrestre.
D'après le goût de l'époque, les questions théologiques et de l'église
ne lui étaient point indifférents. Voyant les poursuites qu'on soulevait
contre ses familiers, il partit avec ses instruments à Bruxelles, puis à
Gand, et fut en 1544, au commencement de février, appréhendé par le
bailli du pays de Waes , comme fugitif et suspect de (ketterie) hérésie
lu^érienne; il devait subir l'interrogatoire dans le château de Rupel^
monde. Les certificats donnés par le recteur de l'université et par le curé,
sur la bonne conduite du bien famé artiste (artifiicerende van der goeder
famé, van goeden en de eerlycken levene) contribuèrent à son élargis*-
^ment : après quelques mois il fut rendu aux études (sst).
Toujours occupé de la confection d'instruments mathématiques, qu'il
fabriqua deux fois pour Charles V, pendant dix ans qu'il restait encore à
Louvain, il préparait ses crandes publications. Avant de partir, il
acheva en 1552 un globe céleste et publia à cette occasion deux opus-
cules relatifs à ses globes (de usu globi 1551, de usu annuli astrono-
mici 1552). Ensuite il est allé s'établir à Duysbourg avec sa Camille,
dans laquelle il comptait trois fils ses collaborateurs , et avec plusieurs
planches qu'il avait préparé pour sa carte de TEurope.
À Duysbourg, au mois d'octobre 1554, il termina la publication de la
grande carte de l'Europe, réunie de plusieurs feuilles. Pour la compo-
ser, il mit à contribution quantité de cartes spéciales nouvellement
élaborées. Â la mer méditerranée il y assigna une longueur moyenne
de 55 degrés. Ensuite il s'adonna à la gravure des cartes de la Grande
Bretagne, d'après la description d*un anglais son ami. Elles parurent
en 1564. En même temps invité par le duc de Lorraine, il leva le plan
de ce pays, dressa sa carte et envoya son dessin au duc.
Dans tous ses travaux topographiques ou chorégraphiques il s'éver-
tua à régler les discordances et les incohérences pour composer un
ensemble. En dressant sur une grande échelle son Europe, il applanit
les plus nombreuses diflicultés de ce genre ; pour le reste du monde il
avait certainement moins d'embarras, quand il publia sa carte univer-:
selle.
(367) Quelques docameots concernant cette mésavanture de notre géographe, se trouvent dans
lesarchivps de l'élal ; ils m'ont été communiques par M. Pinchard,atUcbeaux arcliives. —Le châtelain
de Rupeïmonde reçoit l'ordre de recevoir le prisonnier (sans date); le iO et le 19 février 1843 (IS44K
la duchesse Marie demande des renseignements au cui-é de l'église S. Pierre près de Louvain et à Tabbé
de S. Gerlrude, conservateur du privilège de l'université; le «5 févr. réponse du curé; le 8 mars Marie
communique au bailli de Waes et au procureur le certificat du recteur; le 84 mai 4S»44 elle
demande encore les lettres de Mcrcator, que les frères minimes à Malinos recevaient autrefois. ~
Cette affaire provoquera , j'espère , de recherches ultérieures. — Mercalor n'a pas renoncé à ses
clucubrations relicieuses; en 1B92 il publia harmoniam evangclicam et laissa des «emmenlairc» sm
plusieurs parties de l'ancien testament.
MCRGATOR, ORTEL, 114. 483
G*est au mois d'août en 1569 que Mercator, à Diiysbourg, termina de
sa propre main la gravure de IMmmense carte intitulée : nova et aucta
orbis terrae descripiio, ad usum navigalium emendate aceomodala. Elle
est dressée d*après une toute nouvelle invention (ses). Le portugais
Pedro Nunez ou Nonnius (né i49â, mort 1577), avait attiré Tatteulion
des géomètres sur les problèmes nouveaux , que lui soggéra Tusage de
la boussole ; Il expliqua les rumbs des vaisseaux sur le globe (^gq). Cette
explication était une belle conquête pour la science, mais la loxodromie
des rumbs était observée par la pratique marine , déterminée par le
quartier de réduction (marteloïo, voyez chap. IGâ et n^ 86 de notre
atlas). Mercator, examinant la pratique, et voyant ces inconvénients
qu'éprouvaient les navigateurs par les longitudes croissantes de la
projection cylindrique, conçut Tidée de développer de même les lati-
tudes croissantes, et inventa la projection à Téchelle croissante qui
porte son nom, projection mercalorienne. Il ne savait pas donner raison
à son invention, il répétait qu'elle manquait d'explication mathé-
matique, mais il savait que c'était l'unique moyen de développer toute
la sphère sur le pian et que son invention est* très commode pour la
navigation.
Les nou vantés ne sont pas recherchées à tout moment. Les marins se
méfiaient des inventions des géographes de la cartographie continen-
tale , ils regardaient avec indifférence celle de Mercator. De longues
années s'écoulaient encore avant qu'elle fut prise en considération. On
ne peut pas dire que le manque de calcul des distances croissantes et
de leur échelle aient été la cause de ce retard : Mercator en avait indi-
3ué le moyen et donna l'instruction suffisante dans les compartiments
e sa carte (distanlie locorum mesurande modus; orgnnum direcio-
rium; usus organi), mais c'était Taversion desmarins pour les opérations
de la cartographie continentale. La carte elle-même, bien que recom-
mandée ad usum navigatium emendate accommodata, avait encoro
moins d'attrait pour les marins. Ils y voyaient les rivages conirouvés
qu'ignoraient leurs cartes nautiques; ilsy remarquaient des proportions
contraires à leur connaissance, et les points saillants de leurs cartes
rendus imperceptibles à leur pratique. Nova hac orbis descripiio n'était
de leur goût, parce qu'elle était continentale.
£ii effet, cette majestueuse carte était continentale comme toutes les
autres de ce genre. Par cette carte; et par toutes les autres qui sont
connues, on voit qu'à celte époque Mercator avait pris son parti, dont
il ne se rétracta plus. Dans l'instabilité du premier méridien, il choisit
d'abord celui de l'ile Gorvomariuo; pour sa grande carte il inventa un
autre , en le reculant vers l'ouest sur le point où la déclinaison de l'ai-
fuille changeait en contraire. Ce méridien passait par les iles de Sa! et
k>navista des iles du Cap vert. Son anti-méridien passait par le pôle de
l'aimant (polus magnelis), dont on présumait connaître rexislence
(3M] i509 mense angvsto : nnivcrsi orbis description'^m , in amplisxima Torma intncntiuin ac
pefefvioaai»ain et vagatinm ocnlis, conspectuiqae exbibiiit, invonlione novn et convenienlissima ,
sphaeram in piano cxtcndendo, qnue sic quadratiirae cin-nli rospondel., ut nihil dcessc videatur,
})r%terqnara, qund demnnstratioiie rarct ut ex illius orc aliqnolics audivi, propha manu srulpsit
(iualter Ghymnius ,. vita fîar^ M«rcat.). — I^d fxrniplairo dcccttn rarti; se trouve dans le dcpàt dca
cartes de la bibk. nationale à Paris : pcut-^.lre Tunique qui existe encore.
(36'J) Delambrc, bist. du l'astron. 5^8-400.
184 RÊFORKE, 1550 ET SUIT.
d'après Tassertion de François de Dieppe. Le premier méridien et la
graduation est la seule différence qui distingue cette carte : au reste
elle est tout-à-fait conforme aux autres qui sortirent du laboratoire
mercatorien (sto).
Mereator proposait de diviser le monde en trois continents : l^ le
vieux (Europe, Asie et Afrique); 2», le nouveau (Amérique); et 3% l'Au-
stralie ou la Magellanie, continent indiqué à la découverte future (su].
Pour composer ce monde il avait de nombreux matériaux. Il ne les dési-
gne pas, personne cependant né lui reproche de copier ou de s'approprier
Touvrage d'autrui. Il discute les opinions des géographes. Gomme le Nil,
le Gange, sont des objets de son argumentation, comme l'amalgame de
Ptolémée, de Marco Polo, avec les connaissances nouvelles, exerce son
esprit, de même chaque carte qui présentait de matériaux à son édifice
passe par son examen. A lui le choix et les rectifications qu'il a pu
faire, ayant à cet effet quelques données positifs : mais il a dû nécessai-
rement adhérer à différentes opinions des autres, s'assimiler les travaux
des cartographes et accepter maintefois leur ouvrage sans réserve, quand
il n'avait pas le moyen d'opérer quelque réforme.
Ainsi, la Flandre et la Lorraine lui appartenaient entières, ((arce que
lui-même leva le plan de ces pays ; la Grande Bretagne offre peut-être
son propre produit, parce que l'anglais, son ami, livrait à sa disposition
de nouveaux matériaux : mais le nouveau monde, la nouvelle Inde,
n'était trouvable que dans les cartes marines ; septentrionalium resio-
num typus (de Geno)? l'Inde orientale et la Ghine furent empruntées,
parce que ces cartes sont en même temps reproduites par Ortel (373). —
Il serait important de savoir comment et combien Mereator avait opéré
dans la partie de la perturbation cartographique du vieux monde , par
qu'elle impulsion il traçait ses rivages et les proportions de la mer
méditerranée. Pour résoudre cette intéressante question, il faudrait con-
naître toutes les productions de son époque et spécialement celles de
l'Italie qui manquent à notre connaissance. [1 y puisa immanquablement
et peut-être il y trouva des modèles à son choix. S'il n'avait qu'à choisir,
il faut avouer qu'il était loin de favoriser les proportions et les contours
(370) Enropa , ad magnae Earopae Gerardi Mercatoris patri imitattonem , Rnmoldi Hercat<Mis
filii cura édita, servato tamen ioitio longitudinis ex ratione magnetis, quod pater in magna soa
noiversali posuii (intilulation de la réduction exécutée par Rnmold). Or, la grande carte d'Europe
de 1854, et probablement sa seconde édition de 457S, aTait une autre graduation que la grande
universelle de 4S69; elle avait la graduation de toutes les autres, sorties des études mercatoriennes.
— Ruroold réduisit la grande carte de l'Europe, et les petits-fils Gérard et Michel , extrairent de la
carte générale et réduirent l'Asie, l'Afrique et l'Amérique, conservant la graduation du méridien
magnetis : ainsi que, dans l'atlas posthume de Mereator, se trouvent à différente échelle et projeciioo
variée , toutes les parties de la grande carte copiées.
(371) Gerardus Mereator, geograpli6rum nostri temporis corypliacns, in sua, nnnqnam satislao-
danda, universali tabula , liunc orbem terrarum in très continentes dividit (Abr. Ortel. ad orbem
terrar.). — Orbem inter très œquales continentes dividere dccn^vcrat, quarum unam Asiam,
Arricam etEuropam constituisset ; alteram Indiam occidentalem ; ttTciam vern, etsi ad hue latentem
et incognitam esse non ignorauerit, solidis tamen rationibns domonstrarc se posse affirmabat , illam
in sua maguitudine et pondère, ex duabus reliquis nuUi cedcre... pnssc, alioquin mnndi constitu-
tionem in suo centre non posse consisterc (Gualt. Ghymniis vita Mercat.)-
(37i) N* 45, 48, de l'édition 1570. — Voyez chap. M de notre arlii;le caries de l'Inde et de la Chine
dans le 111"* vol.; et les n* 133, 13ft de notre atlas. — Mereator incorporait dans son système les cartes
de différents auteurs. Ortel nous en avertit : Elias Camerarius, hnius brandeburgensis marchionatus
exstat in Gerardi Mercatoris (1885) opère. — La carte d'Islande de Velleins reproduite par Ortel se
trouve de même dans l'atlas de Mereator, dans la livraison de 1395. Les variantes de ces deux repro»
ductions sont bonnes à examiner.
HERCATOR, ORT£L, IIS. 185
de Ptolémée, et quand il expliquait le grec, il indiquait ses positions
sur le terrain de sa propre conlruction (575).
215. La gloire de Mercator était faile et sa renommée allait grandir,
parce qu*il ne s*arréla point à la publication de la grande dimension.
Géographorum coryphaeus, appréciait cette immense activité de la
cartographie, qui engendra sur tous les points de FEurope dos matériaux
précieux à ses études; il voyait Tardcur des éditeurs et des reproduc-
teurs de cartes volantes, qu'on copiait à foison pour Tusnge vulgaire et
dont on commençait à Hure des recueils, un assemblage dans un volume.
Son ami Ortel avançait avec une entreprise de ce genre. Mercator , de
sa part, ruminait dans son cabinet d'élaborer les cartes spéciales de tous
les pays et provinces du monde, pour en former un volume auquel il
se proposait de donner le titre d'Atlas, Son œuvre avançait laborieuse-
ment et lentement. Les autres, dans une entreprise analogue, le devan-
çaient facilement, parce qu'ils rassemblaient les publications éparses
et les fesaient copier : lui, Mercator, ne discontinuait à régler le
désordre, à rectifier les écarts qui se laissaient remarquer et travaillait
à Duysbourg seul au sein de sa famille, aidé par ses fils et ses petits-fils.
Non loin de Duysbourg, à Anvers, la fabrique de cartes s'animait de
jour en jour. De chez Jérôme Gock, Jean Liefrink, Christophe Plan tin.
Sylvestre Gile Coppen, Gérard de Iode, les cartes volantes se répan-
daient partout, copiées ou de la toute nouvelle publication. L'activité
de Gérard de Iode (ludseus) de Nimègue surpassait les autres. Deux
graveurs, Luc et Jean, à Deutecum, travaillaient pour lui. En 1569 il a
mis en circulation le recueil d'une quarantaine de cartes pour l'Alle-
magne seule. Il était simple éditeur (prostat apud, excudebat), spécu-
lateur copiste, peut-être un peu négligent, mais il devançait les autres.
Jusqu'où a-t-il avancé son recueil , et combien de temps s'en est-il
occupé? Je ne saurais le dire. Il est probable qu'il était arrêté dans son
activité, par un recueil publié avec plus de soin et de connaissance, par
le theatrum d'Ortel (314).
Abraham Oertel ou Ortelius, né à Anvers en 1527, ayant fini ses
études, parcourut les Pays-Bas, une partie de l'Allemagne, les fies Bri-
tanniques et ritalie, en amateur d'antiquités. Par ces voyages, il parvint
à enrichir sa collection de médailles et d'antiquités; en même temps
Il put voir et réunir grand nombre de cartes géographiques. Son goût
l'appela à connaître la géographie ancienne, à étudier Ptolémée et les
antres géographes de l'antiquité. Par conséquent , la géographie com-
parée et la connaissance de la géographie moderne de son temps, s'of-
frirent d'urgence à ses élucubrations. La connaissance et l'amitié de
(S73) Sanson annote qne pour ks rivages de l'A Trique il s'est servi des cartes do Livio Sanuto , et
avec ces rivages il s'est conformé à Ptolémée ; Mercator an contraire se conforme beaucoup plus aux
cartes marines : voyez u* 139 de notre allas.
(374) Ce que je dis du recueil de de Iode, c'est d'après cette suite de ses cartes (S-37) que la
bonoe fortune m'a procurée. La Pologne et la Noscovie figurent dans ce recueil, au reste c'est
l'Allemagne. Beaucoup de cartes sont privées de limites de provinces. Voyez la confrontation de co
recnc^l avec celui d'Ortel, à la fin du n° Il de l'appendice. — 11 est singulier qu'Ortcl ignore l'existence
de cet éditeur aussi abondant : ce n'est que très-tard , h l'occasion de la carte de Gile Algoet, qu'il
mentione ludaeum (de Iode) publiant à Anvers. Cependant Gérard de Iode pioleslc qu'il nuolic
Uassiae typnm nec ungueante visnm; il donne les deux cartes du tractus Danubii de Christ, sopro-
tbOD, qui' n'est pas indiqué dans le catalogue d'Ortel. Ortel se fâcliait-il de l'activité de de Iode? —
Le graveur Jean a Deutecum, grava les cartes pour de Iode, travaillait pour Ortel vers 1573.
186 REFORME, 1550 ET SUIT.
Gérard Mercalor, plus âpé que lui de 10 ans, juissant d*uue haute
renommée, lui fut très-utile.
Dans le courant de ses études, il composa et dessina les cartes rela-
tives à son objet. Avant 1570 il avait déjà publié FEgypie ancienne et
moderne, en 15G7 il composa et édita une grande carte de TÂsie;
en 1570 une carte de Fempire romain (375).
En même temps il fesait copier et graver par François Hogenberg et
par quelques autres graveurs, comme Ferdinand et Âmbroise Ârsenius,
les caries modernes de différents auteurs de sa collection. Cette gra-
vure en 1570, était montée à remplir 55 feuilles : il en composa un
recueil et tout incomplet qu*il était, il Tédita dans cette année 1.^70
sous le titre de th^alrum orbis terrarum, Anlverpiœ, apud jEgidium
Coppcnium Dieslh,
À Texception de TÂsie , il n'y a dans celle importante publication
presque rien qui soit directement de sa composition ou de ses propres
connaissances géographiques. Il mil à contribution les géographes de
tous les pays, copiant leur production à son module. Quant Tauleur de
la carte était nommé ou connu, il ne la touchait point, à Texceplion de
quelques places maritimes de la Belgique , où la mer avait changé les
rivages. Quand la carte était d*un auteur inconnu, anonyme, il était
quelque peu plus audacieux, ajoutait on changeait ce quil jugeait
nécessaire (376). Dans cette collection de cartes, il endossa celle de
Flandre, dressée depuis 50 ans par le coryphée des géographes Gérard
Mercator. C'est sur celte carte que les parties maritimes , changées par
la mer du côté de W^aterAiet , furent rectifiées d'après les renseigne-
ments de Marc Laurin, seigneur de WaterAiet.
La carte d'Egypte dans son thealrum est anonyme, eœtabulU m
Ilalia impressis. Elle ne s'accordait pas sur tous les points avec l'étude
et la publication préalable d'Ortelius; or, elle subit des changements.
Ces changements sont assez signifiants parce qu'ils consistent dans le
changement de la graduation, et peut-être dans l'insertion de plusieurs
villes et places (377). L'Asie lui appartient spécialement, elle diffère
virtuellement de celle de Mercalor. Quelques tables italiennes et les
cartes marines coopérèrent sans doute à sa construction. Ortel y donne
18 degrés entre Auliochie et Bassora, où Mercalor compte 10 degrés.
(57S) Edidimus nos olim tabulam /Egypti niajnri furma ex antiquis et rcoontidi-ibiis auctoribus,
vetcrcm sininl et novam ejus dclinualiuoeni pro Dosiru modulo eoiiliiicntcm (dit Orlcl lui même
en IS70, ad tab. Aeg. sui theatri n° bi). Nos quoque ejiis (Asiae) descriplioneoi , iu maiori tabula,
ante très annos edidimus (ibid. o" 3). Kdidimus nos hoc auoo tabulam romaui impcrii quum maxime
eflloruit, ofllgiem contiuentem (ibid. n" 35).
(376) Voici commcut il s'explique : nobis animus fuit reprcseotare, quicquid in ujjis geographicîs
aut cborographids chartis hic indc , tam reccntor, quam nupcrrimc, mullis ab hinc annis , in lucem
edilis unquam habueris, vel ctiamnum liabeas, quod ut praeslarcmus bac ralioue sumus opus
aggrcssi... In tabulis,quac auctonim nomina liabeut, nibil est a nobis mutatum, exucplis dnabus
ant tribus belgicarum rcgionum marinis oris, quas mare postquaro ab auctoribus descriptioDos
canim editae sunt, multum mutauit... pro nostro modulo confecimus.... lu allis vcro quae nullam
liabebant auctoris nomcn, fuimus paulo audaciores, in quibus et mutavimus aliquoties pro judlcio
unstro quaedam et quaedam detraximus et quaedam etiam noununquam, pruut res videbatiir
postularc, adiccimus.
(377) Ex tabulis in Italia impressis, RusccUi copia aussi la même Egypte. Elle est àtetpoiot
conforme avec la carte de thealrum ortelianuro , (|ue rieu ne la distingue , sauf la gravure le
manque de certains lieux et la graduation. Dans la longitude entre Alexandrie et Tenez la carte*d6
Ruscelli compte 60* 50', 64" 0' la carte d'Ortelius GO" 0', GO" 0'; daus la latitude entre Siioz et
Larissa, la première 30" 20' — 32' 0', seulement i" 40, l'autre 29" 0' — 32" 0' moutc celte latitiHle à
5 degrés.
]l£RCATOR, ORTEL» «10. 187
Mercator place Nimpo de la Chine à 160'', et fait passer par le mifieu
du Japon le 170* degré, ainsi que Mindanao et Japon touchent à la même
longitude : Ortel éloigne Japon de Mindanao de 20 degrés, place Nimpo
an bout de Thémisphère au 180* degré et élend Japon au delà du 200
et 210" degré de longitude sur Tautrc hémisphère (sts). Ortel essaya
donc ses forces dans la composition de cnrtes nouvelles, mais sou
theatrum n*est qu'une collection , qu'un recueil de cartes de différents
auteurs et mérites. Les noms des auteurs sont pour la plupart connus,
parce quMls sont déclinés par Ortelius lui-même et ordinairement indi-
qués dans les intitulations des copies (570).
Cette publication, quoique incomplète, dont le choix n'était pas éga-
lement recommandable, réunit dans un volume tant de cartes dispersées
et offrit Texécution si supérieure à beaucoup d'originaux qu'elle profita
Infiniment à Ortelius et lui gagna une haute célébrité» Les cartogra-
phes embitionnaient de voir leur nom figurer dans son recueil , s'em-
pressaient de lui communiquer leurs compositions : Jordan, Clusius,
Sambucus. La fortune d'Ortel augmenta, et en 1575, il fut honoré de la
charge de cosmographe du roi d'^pague , lorsque son ami p)us âgé ,
Mercator, n'était que cosmographe d'un duc de Clèves (sso).
216. Les éditions du théâtre d'Ortel se suivaient rapidement et
Gérard Mercator était loin de mettre à exécution ses projets. 11 y avait
des causes à ce retard. La première consistait dans ce qu'il s'occupait
de la chronologie (qu'il publia en 1568) et que la géographie ancienne
n^était pas indifférente à ses études, comme elle était l'objet de prédi-
lection pour Ortelius. Dans la même année 1578, Ortelius publia ses
synonymes géographiques et Mercator édita tabulse geographicœ Ptolé-
maei. L'autre cause du retard existait dans ce que Mercator ne voulait
pas être un copiste, mais il s'évertuait à élaborer suivant ses facultés
les cartes de chaque pays, comme il avait élaboré celles des îles
Britanniques, de Flandre de la Lorraine, de l'ensemble du monde.
Enfin l'insuffisance des ressources pécunières contribua au retard.
Dans la géographie ancienne tous deux eurent des succès. Les tables
ptoléméennes de Mercator étaient longtemps appréciées (38 1). La syno-
nymie a pu obtenir presque immédiatement un succès bien mérité.
Ortelius dès son vivant Ta republiée sous le titre de thésaurus géogra-
phicus (382). Pour sa géographie ancienne il prépara entre 1584 et 1597,
les cartes ex conatibusgéographicisÂbrahami OrteliL Bien que leur
cohérence est maintes lois en défaut, il faut cep^^ndant convenir qu'elles
(S78) Voyez n* 13t, 433,136, 137 de Dotre atlas; portulan général chap. 33; cartes de l'Indoet de
la Chine 36.
(379) Dans sa première édition déjà, Ortc) a donné un catalogue des cartographes de sa connaisr
sance. Il Taugmenta dans les éditions suivantes. Nous en donnons une ample notice , n" U de l'ap-
pendice de ce volume. ,
(380) Les éditions de theatrum orbi* se succédaient rapidement. I.a première 1570, la seconde
f S!7i et la même année avec le texte flamand augmentée jusqu'.i 64 cartes ; celle de 1573 mont à 70;
il en re|»ar«t, 159i,une autre de 108 cartes. Dans l'édit. de 1S05, le nombre de cartes s'accrut à 115.
Après la mort d'Ortelius, à l'édit. 1601, on en ajouta encore plusieurs. Il y a des éditions avec le texte
italien, espagnol, français. — Ortelins lui-même inventa un petit eyitomcn, dont il y a aussi do
nombreuses éditions du vivant et après sa mort : de Coigncts , do Vrients , etc.
(381) Après la mort de Mercator, elles servirent en 1605, à l'édition de Uondius, ensuite 1618,. à
celle de Bertius , et dirigèrent plusieurs éditions de Ptolémce.
(882) En 1587, 1596, réimprimé encore 1611, à llanau.
488 RÉFORIIE, 1550 ET SUIV.
sont élaborées avec assiduité , on peut dire inspirées de rintelligencc
mercaiorienne. Pour la géographie sacrée ou historique, il admit les
cartes ex conatibus Francisci Harsei. Ces cartes parurent plusieurs fois
sous le titre de parergon, et de géographia sacra. La confusion d^idées
cartographiques y perce trop ostensiblement, malgré la tendence de la
régler (sss).
En attendant la famille de Mercator continuait ses opérations géogra-
phiques. La grande carte de FEurope, corrigée , était éditée pour la
seconde fois eu 1572. Arnold fils leva le plan et dessina la carte de
rarchevéchc de Trêves et de la basse-Hesse; après sa mort, 1536, son
fils Jean termina la mesure de toute la Hesse (384). Le père Gérard
déjà trop avancé en âge , pour arriver à son but et ne pas se faire atten-
dre trop longtemps, se décida à publier consécutivement chaque partie
achevée de son atlas projeté. Aidé par son fils Rumold et ses petits-fils
Gérard et Michel, intruits dans les mathématiques, dans la géographie
et dans la gravure, il édita en 1585 les cartes de France et d^Âllemagne;
en 1589, les cartes de Tltalie, et il préparait celles de FEurope septen-
trionale. Mais leur publication était réservée à son fils Rumold. Le
vieux père n*a pas achevé Fallas qu'il avait tant à cœur d'exécuter. Le
succès du thealrum de son ami lui fesait plaisir, il approuvait haute-
ment cette entreprise , on disait même qu'il retardait son atlas pour
ne pas faire tort aux avantages lucratifs qui consolidaient le nom d*Or-
telius (585). Rien ne troubla leur confidence réciproque. Us échan-
geaient leurs pensées, leurs idées; ils se communiquaient mutuelle-
ment leurs planches. Â la fin la mort les a séparés. Gérard Mercator
plus âgé , descendit le premier dans la tombe en 1594; Ortel le suivit
quatre ans après, en 1598.
Vatlas du père Gérard n*a pas été terminé. Rumold fils acheva la
partie de FËtirope septentrionale déjà avancée par le père et Fédita
en 1595, sous le titre d'allanlis pars altéra, géographia nova lolius
mundi, en dédiant cette seconde partie à Elisabeth, reine d'Angleterre.
Il prévient les lecteurs que FEurope septentrionale forme le premier
tome ou la première livraison de la secundo partie de Fatlas. Et comme
(%83] Parci^onà Anvers chez Platitin en 1592; par le soin deBalthaxar Moretus en 4634, clicx le
TOÔme. — La longitude de Venise y varie entre le 34* et le 37' degré ; celle des Morini Î2" 30' à iS' 0*
de Narbo Î4* 0' ù S3* 35', de Baïona 1U* à 48°. La longueur de la médilcrranée moulo à S3 degrés.
Tous deux Ortel et Haneus désavouèreut la déclivité ptoléméenne de la Syrie, recommaDdéc par
Stella et autres : cela n'einpèclie pas cependant que les composition)! de Stella (n* 407 de notre atlas)
s'y trouvent de même. Pour la Grèce, Ortel su laissa prendre par Ptolémëe etSopliianus; à l'iuiita-
tion de ce dernier, il copia la configuration de Ptoicmee.
(38-1) Arooldus archieppatus Ircvercnsis et Cattiinoelibeccnsis comitatus dimcnsioncs diYerso
tempore aggressus absolvit — et le petits fils Jean , Uassiae rcgiouem exactissime absolvil (Gbymn.
vita Ger. Mcrc).
(38S) Tametst (Ger. Mercator] longe antc Abraliamum Ortclium, ideas quasdam mente concepisset,
de edendis aliis tabulis generaiibus ac particularibus, toliusque mundi situm in minorem forraam
rédigera animum induxisset ita ut nibil amplius restaret uuam ut acneis tabulis inciderentnr :
qnandoqnidcm tamen praedictus Ortclius singtilari amicitia ac familiaritatc illi iunctus essct, distulit
igilur de industria eatenus et tantis per inchoatum laborcm , donec exemplaria sui orbis, tbeatro
(1870 etc.), in copiosissimo numéro, cum magno facultatum ac fortunarum suarum incrennento,
vcndidissct, priusquam suas pracdictas minores tabnias in lucem cmittcret (Gualt. Ghymn. vita
Mcrcât.). C'est ce que dit l'ami biographe de Mercator. Mercator lui-même, dans une lettre du SS no-
vembre 4570 félicita Ortelius de l'idée qu'il avait conçue en publiant son thcatrum, car les mauvais
copies se multipliaient et répandaient d'innombrables erreurs : quam ob rem non exiguam laude
mcritus es, qui optimas quasque rcgionum dcscripiiones selcgisti, alquc in unum veluti cuchiridia
rcdegisti; il approuve sou projet de copier quelques cartes spéciales de Lazius. Celle lettre
trouve insérée dans le theatrura Ortelianum de 4592.
MERGATOB» ORTEL, 11«. 189
son père se proposait de publier la partie occidcntHie, c*est-à>(]ire la
péninsule pyrénéenne dans le même cadre, il en formera un second
tome ou livraison composée des cartes d'Espagne. Ensuite il entrepren-
dra les cartes de TÂfrique, de FÂsie et de TÂmérique, suivant le plan de
son père (sse). Mais bientôt il se départit de son projet, li supprima le
titre de secundo vel altenc partis, et transporta la livraison de l'Europe
septentrionale au commencement ; ainsi que le texte de mundi crcatioue,
forme la première partie, et secuuda pars i^eographiam continet, c'est-
à-dire les cartes en quatre livraisons : 1% septentrional ium Europaî
lerrarum (1585); 2% Galliae (f585]; 3», Germauiae (1585); 4», Italia; et
GrseciaB (1589), composées de 107 cartes. L'Espagne ne s'y trouve
pas (387). — Les planches de Mercator et d'Ortel lurent cédées à Josse
Hond et la fabrique d'atlas s'est établie à Amsterdam (sss).
Par ses travaux, Gérard Mercator devint le véritable réformateur de
la géographie et donna l'impulsion à des réformes et aux progrès ulté-
rieurs. Abraham Ortelius, par son érudition et son activité, s'associa à
cette œuvre et ne peut être considéré , à mon avis , que comme secon-
daire (389). Ortel se montre comme philologue versé qui compulse la
géographie moderne pour comprendre l'antiquité et Thistoire. Mercator
agit comme mathématicien et géomètre s'efforçant à organiser. Si l'une
dea choses caractéristiques de la science géographique moderne est
rémde du terrain et des plus petits accidents du sol : on peut dire que
(586) Sic cum Atlantcm rcgem aedore cngitarcm, ejus sccondam parlera , qiiae geographiam
oontinei toae majestrati dedhtare voliii : dit Kuraold à la reiue KlisancUi à cause de uavigateurs
Tliomas Candissliii, Francisoi Draci, Martini Forbisshcri aliorumque lieroum qui perlustraicnt les
parties septeotrionales. - Ensuite, amico lectori; offcrimns nunc sccundam nartem atlantis, primuAi
noTae gec^gnrapbiae tomum, Tidelicct, scplcutrioualium Europae terrarum uescriptiouein à Gerardo
M* re pâtre piae memoriae inclioatum et a me ad fluora pcrdu'-tuni. — Si dcus \itam longiorem
coDcessissct, dccrevcrat (Gerardus pater) partes occidentales, videlicet Ilispaniano cura Portugalia in
minores tabularum formas quoque redigcrc (Gymn. vita Hercal.). Or, Kumold déclare : iam tandem
faoDom etdiua me optatum iuitiura nactus, post liao,.. . secundum gcograpUiae tomum, id est,
Hispaniae descriptioncm aggredior, inde ad Africam, Amcricam, et si aperiatur, utspesest,ad
terciam contÏDcutem quœ liagellanica et terra australis dicitur me accingam et quod in hisce omni-
iMis Ger. H'r patcr piae memorie in choaluni reliqnit... ad finem pcrducam.
(587) Les exemplaires de l'atlas mercatorien, avec le titre de pars altéra sont peu nombreux, à
peine qn*on les rencontre. Les autres déjà ne sont pas trop communs surtout en bon ordre. Mais les
bibliophiles ne s'en soucient pas : ils annotent soigneusement pour les bibliomanes les raretés frivoles
payées au poids d'or et ignorent la perte des plus précieux produits de l'esprit humain. Trouve-t-on
le nom de Mercator dans les ouvrages bibliographiques? Cependant le seul atlas est encore en cours ;
les opuscules du géographe ne se rencontrent pas; ses cartes de l'Europe de la graude dimension,
deux fois éditées, sont-elles connues par une âme vivante? On l'ignore. De la carte de Flandre , de
celle de orbis terne existent encore peut-être un seul exemplaire gardé daus le dépôt national des
cartes à Paris. Les cartes des îles britanniques, 1864, exisleut-elles encore? car colles de ces îles qui
niit dans l'atl: s sont réduites in minorera ibrmam et n'étaient préparées qu'entre i589 et 4696.
(SW) On dit qnc Jodocus Ilondius édita l'atlasde Mercator pour la première fois en 4606. Qu'ensuite
daot la dixième édition , en 46S8 , il augmenta le nombre des cartes à 176. Je n'ai rencontré nul
part dindication suflisante sur ces éditions , mais elles n'offrent pas le produit dans sa pureté
FwjUve. Les Hondius ajoutaient des cartes nouvelles , substituaient les anciennes par d'autres.
Ausi que l'édition de 4633, parut sous le nom de deux auteurs, de Mercator et de Hondius à la fois.
"-Eooore Jean Jausson, daus ses allas qui montaient jusqu'à huit volumes in-folio, s'était servi des
^'^^de Mercator. — Les Hondius inventèrent en 1607, l'atlas minor Mercatoris in-4*, qui fut plus
oiiie que le trop petit epitome d'Ortelius. Avant l'apparition de cet atlas minor, en Italie 4596,
wnlamo Porro à Venise reproduisait les cartes de Mercator sur une petite échelle. L'atlas minor
ftttS*** traduction turque, voycx chap. 103, p. 457.
JfB9) Il y a 80 ans, en 1844 (hist. de la Réogr. chap. 30), j'attribuai la réforme dans la géographie
r^^l^cment a Mercator, ne voyant dans Ortelius qu'un secondaire. Depuis j'ai remarqué que des
T^ts étaient d'un autre avis. « On sait, dit le respectable Jomard (fragment sur les cartes géogra-
jn;9o«s|, que l'époque moderne de la géographie remonte proprement à Abraham Ortel, c'est-à-dire
tonr^^- 4570, date de la première édition de son livre. C'est à ce profond géographe, trop peu
^P^oeié, ^oe remonte la reforme de la science; les changements qu'il y a apportés, ont fait une
^*^Dle révolution. » Cette opinion m'a motivé d'entrer, autant qu'il m'est connu , dans l'histo-
4tte «ir ces deux personnages.
490 RÉrORMB, 1550 ET SUIT.
la famille de Mcrcalor sonda ce terrain. Mais dans les sciences, souvent
il ne suffit pas d'avoir un vrai mérite pour influencer et réformer. Heu-
reusement la fortune honora Ortel dès son vivant et n*euvia pas son
savoir après sa mort : d*autre part, elle favorisa le mérite du modeste
Mercator pendant tout un siècle. Le parergon et le theatrum reparurent
plusieurs fois, jusqu*à ce que les planches fussent usées; avec leur
destruction disparurent les recueils ortéliens et ses titres. Les allai
reparaissaient souvent ; le nom de Mercator devint équivalent au titre
d^atlas qu1l inventa lui-même; les géographes éditeurs s*associaient au
nom de Bfercator et au titre d*atlas qui se perpétua. Preuve ostensible
de cette influence qu'exerçaient sur la science les efforts de Mercator.
Les géographes postérieurs citaient les remarques d*Ortel sur certains
points d'érudition et suivaient la méthode et les traces des cartes de
Mercator, basant leurs études sur ce qu'il avait élaboré dans son atlas.
Ortelius a commencé à faire revivre la curiosité , et Mercator a com-
mencé à donner une suite à la géographie et la réduire en corps (sac).
En examinant les travaux de Mercator et d'Ortel, une foule d'objets
se présentaient à nos considérations. Nous n'avons touché que quelques
uns et nous nous résumerons dans nos observations suivantes. Ils
vivaient dans un temps, dans lequel le globe terrestre parut à décou-
vert au regard humain. Sur toute son étendue accessible, il préselta
toutes ses formes, toutes ses variations et toutes ses étendues. L'ancien
monde parut au génie de Mercator , comme l'unité du triple, comme le
tiers des continents du globe, dont les deux autres parties composent
l'Amérique et la Magellanie ou l'Australie. De nombreux navigateurs
réglaient les formes antérieurement inconnus de ces vastes continents»
comme les nombreux chorographes arpentaient leurs pays, et sans
égard à ce qui avait été dit précédemment, sondaient le terrain et
réglaient leur coordonnance indépendamment l'un de l'antre. Cest à
ces nombreux navigateurs et chorographes que la géographie doit
l'obligation de la réforme. C'est l'impulsion de l'activité de l'époque et
l'esprit du siècle qui opéraient cette réforme : nos deux géographes
l'ont seulement avoué et accepté.
Discrédit de Ptolénée, ruines, les décomrres déblayés.
217. A la suite de celte activité, la théorie scientifique pour la géo-
graphie devenait chaque jour plus indispensable. Déterminer la gran-
deur du globe, des mesures et leur rapport réciproque; mesurer les
cantons et les pays entiers, pour connaître leur étendue et leur super-
ficie; lever les latitudes et obtenir les longitudes. Depuis peu on avait
commencé à se servir de petites horloges, appelées montres; leur mou-
vement durait d'abord près de 24 heures et plus longtemps, pour peu
qu'on les aidait (Gemma fris. c. 18). Ces petites machines, supérieures
au sable pour la détermination du temps, étaient considérées comme
CONSÉQUENCES, 3i7. 191
une importante découverte pour les longitudes (591). En attendant
Tobservation de la longitude ne cessait de présenter tant de difficultés et
d'incertitudes qu'on ne la levait presque pas et celle qu'on levait, parais-
sait douteuse (591). Quand on voulait décorer une carte chorégraphique
de méridiens, on avait toujours recours à Ptolémce (395). Or, nos deux
^(^(raphes flamands se voyaient privés de ces ressources, qui n'étaient
encore que de pia désidéria, n'avaient rien de certain , rien de positif.
Aussi Ortel trouvait bon de publier les caries spéciales sans indication de
degrés; Mercator se montrait plus rigoureux à cet égard, il donnait tout
son soin à la graduation. En effet, dans l'état de la réforme et du progrès
de la géographie, cette décoration devenait utile et nécessaire pour la
composition des cartes générales. Celait l'indication qui enchaînait
Tune à l'autre et encadrait chaque carte spéciale dans la mappemonde,
laquelle tenait l'ensemble des cartes spéciales par la graduation.
Sur la graduation générale, Ptolémée n'avait plus d'empire. On
s'était désabusé de sa disproportion, d'abord par la connaissance des
Indes et de la Chine. Tout le prestige du géographe grec y croula et se
dispersa en poussière. La moitié de l'Afrique et de l'Asie fut abîmée
dans le fond de l'océan. Les érudils et les savants philologues erraient
éperdus avec des mottes de terres ptoléméennes, de climat en climat,
de, méridien eu méridien et répétaient : Ptolémée avait tort. On trans-
portait Taprobana de Ceylan à Soumatra, de Soumatra à Java; on
cfaercbaitCattigorasurles côtes du Pérou; Pegoletti savait que Cattigora
était situé à une douzaine de degrés au nord de l'équateur et Mercator
lui assigna une place dans le Sibir.
Le système de Ptolémée, brisé à l'orient, commença à crouler au cou-
chant. L'hydrographie du moyen âge ne cessait de protester contre les
disproportions du grec : en attendant, la géographie continentale livrait
aux études des cosmographes les dimensions de tous les pays. Bien
qu'ordinairement elles présentaient ces pays dans des proportions agran-
dies, cependant leur ensemble ne passait point à l'exorbitance de GS"*
de la longueur ptoléméenne de la médiierranée , ne pouvait suffire à
cette extension monstrueuse, laissait des vides qui forçaient à réduire
la longueur. En eiïet , elle était réduite , tantôt à 58% tantôt à 53^ C'est
dans cette dernière proportion que la médiierranée se présente sur les
cartes de Mercator et d'Ortelius. C'est encore loin de la juste proportion
que la médiierranée avait déjà dans la géographie en toute plénitude :
mais cette réduction est de la plus haute importance, c'esl la pierre de
touche du progrès des éludes. C'est un pas prodigieux. Â qui l'attribuer?
Je n'ose pas en aveugle désigner Mercator comme auteur. Lui et son
ami ne suivirent peut-être que l'impulsion générale de la connaissance
(894) SoDô per6 hoggi alcuni horologii, comc è quel da ruote; che uon per corda se tira. ma per
alcnoe lame d acciale temprato, et questi sarebbon buooi (Giosepo Molelto, discorso univcrsale, cap.
del modo d'osservare la lunghezza, p. 3S, édit. Ptol. 1S61).
(895) Ma qnantnoqne sia cosi Tacile il modo di pigliare la larghezza délie région! , nondimcno non
da ciô segve, chc facile debba cssere ancora , il modo di osservare la lungbczza , di quelle, et cib non
aooiene délia di£Qculta dclla rcgole, ma d'altre cagioni, corne di solto dircmo... (Gios. Meictto, ibid.,
p. SI -35).
(395) Giacomo Castaldo, lequel dit Ruscelli , in professions dclla geograiia , tien ' o^gi il primo
nome, dressa sa carte nouvelle du Piémont circonscritta con S gradi di lunghezza; il établit ce
nombre de longitude, che tanti se ne vengono assegnati da Tolomco ncl terzo libro. A son exemple,
Girolamo Buscelli y chercha de longitudes pour ses cartes de Toscane et des marches anconitane et
trevisane.
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RÉFORME, 1^0 ET 6UIV.
e TOLEDO
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qui se déclara en faveur de la nécessité de la réduclion. Un géographe
obscur pouvait être aussi audacieux pour se révolter contre Ptoléméc
et proposer les rectifications, qu'un géographe des plus célèbres. Il
serait cependant très-utile pour Thistoire de la géographie de retmuyer
le premier inventeur de la réduction, au moins le premier qui la mit
en circulation. Il a pu le faire avec connaissance de cause, ou s'avisant,
avec rignorance ce qu'il osa. Quant à Mercator, il savait apprécier la
valeur de la dimiuution jusqu'à 55 degrés et il rejeta à jamais Textrava-
gance de Ptolémée.
Par cette réduction à 53 degrés on croyait, je
n'en doute pas, se conformer a la dimension des
cartes marines. Mercator évaluait le degré seule-
ment à GO milles italiques (504). Or ces 53 degrés,
d'après l'évaluation de Fernel , ne donneraient de
longueur que i6 degrés et bien moins. La lati-
tude géographique de Tunis était incertaine et
inconnue; or, elle est déterminée par les pro-
portions que le géographe trouvait dans les cartes
marines, suivant son évaluation de degré. Les 53
degrés appliqués à la méditerranée des cartes
marines, nécessitaient de faire descendre Tunis
vers le sud, de plier les rivages de l'Afrique,
dont les contours sont conformes à ceux des cartes
marines. 11 y a cerlainement beaucoup de déran-
gement dans cette assimilation de l'échelle de 53
degrés à la méditerranée des cartes marines :
mais il n'y a pas de doute que ces cartes décidè-
rent les géographes de la cartographie continen-
tale a réduire la longueur démesurée à 53® (395).
L'étude de la géographie érudite changea de
position. Depuis la renaissance des lettres, on
s'imaginait qu'on la connaissait à fond en possé-
dant son modèle antique ; on 's'efforçait à cons-
truire la nouvelle à son image, à travestir l'an-
cienne en moderne, à expliqueur et éclaircir cette
dernière par l'ancienne. A la suite du progrès,
cette marche prit enfin une direction toute con-
traire. L'étude de la géographie ancienne continua
avec ardeur et n'eut plus d'autre but que de com-
parer l'ancienne avec la moderne , afin de com-
prendre les descriptions des anciens, au moyeim
des connaissances positives. Ce but piréoccuppaic
Ortelius : il voyait que la connaissance de la géo^
graphie moderne pouvait seule jeter la lumière
sur l'étude des anciens.
f394) Voyez les notes précédentes S6S, 366.
(39SJ En effet, depuis la renaissance des lettres la plus fâcheuse per-
turbation demeurait dans les longitudes. En 1644, Miguel Floreniiovai
Langreu, dans son mcmoire présenté au roi d^Espagne Philippe IV, com-
pulsant les cartes pécédentes donne un exemple comme les masgrav«f
astronomos y geographos ponen la diiïcrentia entre Roma y Toledo :
como se conoce por esta linea , que nous reproduisons ci-contre.
ÎO-
30-
9 G. lansonius
O G. Mercator
O I. Schoncrus
O P. I^ntsbcrgins
® T. Brahae
58
O
S
^I.Regiomontanus
ÎOroutius
C. Clavius
Se. Ptolomaeus
A. Argelius
9 A. Maginus
» D. Origanus
CONSÉQUENCES, il8. 193
Le systyème de Plolëmée ane fois brisé et abandonnée , ses erreurs
et ses ignorances avouées, apportèrent un immense soulagement à la
composition des cartes. Les investigations maritimes installèrent sur les
cartes de Mercator des formes toutes différentes de celles de Ptolémée;
rendirent à la mer rouge une plus juste direction en ôtant 10^ de lon-
gitude à répaisseur de l'Afrique. Dans le vieux monde, des formes
connues par les hydrographes reparaissent sans entraves à la place des
difformités de Ptolémée, et commencent à réparer graduellement les
ravages causés par sa renaissance.
âl8. Hais tons ces changements de la restauration s'opérant partiel-
lement, ne pouvaient à la fois délivrer les cartes géographiques de
tontes les vieilleries qui les avaient entachées , grâce à la renaissance.
La géographie avait reçu des blessures trop profondes pour être guérie
soudainement. Les plaies saignèrent et purulèrent longtemps ; tout le
corps géographique fut stigmatisé de nombreuses cicatrices qui deman-
dèrent beaucoup de temps pour être effacées. LMnfatigable Mercator
dérouilla des traits plus frais de Tancien monde, mais ne sachant pas lui
donner tout le poli, ni ramener çon intérieur, il accrédita sa complexiou
dégénérée. Côtoyant la méditerranée sur les cartes de Mercator, nous
rencontrons sans cesse quelques fragments de Ptolémée. DansTintéricur
de TËurope ce grec se présente largement domicilié. Mais c'est surtout
rîDtérieur de FÂsie et de l'Afrique qui en est gorgé. Les montagnes et
toutes les rivières s*y rangent obstinément à Tordre de Ptolémée : et
celles de Fintérieur de F Afrique, et celles qui versaient leurs eaux dans
le golfe pcrsique ou dans la mer Caspienne , et celles qui traversaient
TAsie dans toutes les directions jusqu'à Focéan, toutes sont dessinées et
dirigées par Ptolémée ; Indus et Gange qui traversent les Indes , Daona
et Dorins qui fendent la Chine, Oechardus et Bautissus qui arrosent les
Kalmouks et la Sibérie, y restent avec leurs noms et leurs réminis-
cences (396). L'esprit des géographes, possédé par l'extravagance de
Ptolémée, ne cessait de s'imaginer et d'inventer Fexistence de ramages
bizarres des fleuves. (Voyez n*» 132, 133, 136, 137 de notre atlas).
Qu'on ne me dise pas que le manque de connaissance privait les géo-
graphes de moyens de renoncer à Ptolémée dans Fintérieur de FAsie
et de l'Afrique : la carie de fra Mauro et quelques autres méprisées, et
nombre de renseignements apportés de FAsie, pouvaient les décider à
renoncer à son autorité discréditée : mais le mal était profondément
enraciné, l'habitude appesentit le discernement.
L'histoire est obligée d'observer, d'examiner, d'approfondir toutes
ces questions que nous touchons dans notre aperçu sur la restauration
de la géographie du temps de Mercator. Elle ne peut les négliger, autant
(396) A lire la lettre de Mercator, qu'il écrivit en 1580 h Ri<!hard Hakiuit (BergeroD , voyages faits
en Asie, traité des Tartares chap. 48, p. lli-{17], comme il lui recommande le chemio eo Chine, par
leaord, avec quelle conviction il l'entretient ac l'exii^tonce du gui fe terminé par le promontoire
Tabin , des embouchures des fleuves Bautissus et Ocdiardcs, du pAlo de l'aimant (voyez n* 433 de
notre atlas). l\ y compte beaucoup sur Abouiréda, dont on esp4>rait d'avoir une traduction, ot regrette
que ntinéraire' par toutes, Asie, Afrique et septuntriuu de Jacq Knoieu de Bois-Ie-Duc, lui échappa
et qa'il n'avait pas le voyage entier de Plauo Carpini : (ne sachant qu'un manuscrit de ce dernier so
trouTait à cf.iie époque'dans la bibliothèque de S. Martin à Tournai). — Quelques vieilles cartes
assez grossièrement fuites , venaient aussi raffermir les opiuions du grand géographe de Duysbourg.
16
194 RÉFORMB, 1550 ET SUIV.
pour apprécier le mérite de chaque géographe de Tépoque, de chacun des
postérieurs de rèrenouyeileyque pour la science et le progrès de Fesprit
humain. Elle doit suivre pas à pas cette lente évacution de difformités
contre lesquelles luttaient laborieusement les géographes postérieurs;
courageux ou timides, chacun y prenait sa part : et Terreur, précédem-
ment trop accréditée par un fâcheux revirement, reparaissait maintes
fois dans les conjectures mal conçues chez les plus illustres géographes.
L'atlas de Mercator engendra une longue série d'atlas punliés en
Hollande, par les Hondius et les Bleauw, géographes instruits qui
avaient toujours à rectifier leur modèle. Chaque fois il fallait détruire
quelque portion, ou de Fédifice de Ptolémée, ou de Férudition du
xvi' siècle, ou des inventions imaginaires. Mais le prestige de Ptolémée
était tel, que le retour vers ses proportions et sa configuration âe
déclarait longtemps encore , et malgré la gloire de Mercator dans les
Pays-Bas, la spéculation savante, qui ne discontinuait pas de répandre
les atlas par toute TEurope, n'avait pas de répugnance de les faire
accompagner de plus absurdes déformités. On trouvera dans les allas
de Guillaume Bleauw, mort en 1666, la méditerranée à 62 degrés,
quoique ses propres atlas prouvent qu'on réduisait déjà sa longueur
à 50 degrés (397).
La longitude géographique était, en effet, un véritable tourment de la
science. La marine a bien compris son importance, la cartographie se
masquait seulement de ses apparences; inquiète, elle convoitait le
produit de l'expérience; on imagina de belles théories, d'admirables
propositions, et chaque fois le ciel et la nature déroutaient les experts.
Le mouvement de la lune présentait de plus belles chances; Issdi^
tances lunaires, indiquées en 1514, par Werner de Nuremberg, dé:re-
loppées en 1524 par le saxon Apianus, recommandées en France par
Oronce, furent approuvées par Kepler et tous les astronomes : mais cet
astre, le plus visible et aussi mobile échappait longtemps au calcul qui
pouvait assurer le succès.
La marine espagnole, couvrant le globe de ses voiles, s'agitait pour
conquérir le secret de la verdadera longitud. Phillippe III promit une
récompense de six mille ducats de la rente perpétuelle de chaque année
à celui qui fixerait l'aiguille et les degrés de longitude. Le portugais
Louis de Fonseca Goutiiîo fut le premier qui essaya de mériter cette
récompense. Bientôt, en 1612, le docteur castillan Arias de Loyola,
ensuite, en 1629, le portugais Juan Garavajal , se présentaient comme
concurrents.
Cette dernière année 1629, le jésuite Christoval de Bruno, milanais,
apporta une belle spéculation pour navigueur par tout l'orient au moyen
de la variation de l'aiguille. L'année suivante 1650, Antonio Ricci
genovèse vedait avec ses observations de la longitude sans regarder le
ciel. En même temps l'abbé de Dissemberg, Juan Caramuel Lobcovitz,
natif de Madrid, demanda cien mil ducados de contado pour ses propo-
sitions.
(307) Le savant Israélite Joteph del Medico, crétois, publiant : fons yiridarioram , Incius pan prlor
npressa est Amstelodami , pen " * " ^^ ' " ' — "^ •—•--•-' — .—
tngitude, à Kordou 9* 40, a S(
de longueur à la méditerranée.
impressa est Amstelodami , pênes Manasse ben Israël 1629 in-4*, assignait à Antiochie 76* iV ii
longitude, à Kordou 9* 40, a Seville 9* C. Or, il suivit le conseil d'une carte qui donnait 60 degtém
CONSÉQUENCES , 318. i 95
Pedro de H erena, bon géomètre, n'avait pas de succès quand il voulait
se rapporter avec la longitude au mouvement lunaire. Le florentin
Galileo Galilei en 1631, proposa pour déterminer la longitude les astres
médlcéens ou les satellites de Jupiter. En 1637, le portugais Joseppc
de Moro crut découvrir le secret de la déclinaison de Taiguille pour
avoir la longitude , et on lui promit de grandes récompenses si Fexpé-
rience pouvait le confirmer.
En France, Jean Baptiste Moritf, en 1634, expliqua à la plus grande
satisfaction des mathématiciens le mode connu d^observcr le méri-
dien de la lune avec la distance et la hauteur d'une étoile, si Ton
pouvait surmonter les obstacles de la parallaxe et de la réfraction (sor).
En même temps, dans les états de Philippe IV roi d^Espagne, Miguel
Florencio van Laugren, mathématicien et cosmographe en Flandre,
suivit la même méthode lunaire pour découvrir la dicte longitude
navigante qui a fatiguée tant de bons esprits, et déjà dans Tannée 1621
la misma imaginacion de hallar la longiiud por mar y tierra por medio
de la luna ténia occupado el ingenio del dicho van Langren (390). 11
s*imagiiia qu'il trancha le problème et que nonobstant la parallaxe et la
réfraction il indique le moyen facile pour la pratique des navigateurs
mêmes. El consejo de las Indias en 1632, voyant Tutilité de l'invention,
opina de pourvoir van Langren de 4000 ducats de la rente annuelle
pour les dépenses qu'il peut avoir en perfectionnant les instruments de
son invention. Van Langren communiqua ses observations sous secret à
plusieurs savants versés dans l'astronomie et les mathématiques; trou-
vant leur approbation il se procura des certificats les plus satisfaisants.
Mais en 1644 ses inventions restaient encore sous secret, occultes, et
un des savants l'encourageait : macte igitur animo Langrenc, motuum
lunariam tabulas conde (400).
Cette grande agitation n'avança pas beaucoup la question qui se
brisait dans la pratique, par les obstacles du ciel qu'on n'a pu aplanir;
par l'impossibilité de connaître l'aiguille, par l'insuifisantc connaissance
(SMl) En FnBce trabaxaya coa mâchas veras el docti^simo varon Juan baptista Merin, prorpssor
aatiiematico^del didio re,y, el qu<il tuTO muchos dares y tomares con los matheniatico8_do aqual
rejriioenel ano 46S4 7 quiso imitar loqae Vernero v Oroncio avian escrito machos aîiosantes,
•hienaDdo la lana eo el meridiano con la distancia 7 aUura de algiina estrclla, sio poder salir con la
que avia propuesto, por la incommodid grande que encontruva en cl paralaxis de la luna, mesclada
eoa la refraccion como tambien en la verdadcra tlieoria y forma dcl movimieoto de la luna , no que-
rtenda lof dichos matheoiaticos admitir ninguno de los antiguos, ny delos modernos (dit en 4644 ce
némoire de van Lanp;rcn, la verdadera longitud).
(IM) Sa padre assisto en la« observaciones célestes del famoso astrnnomo Ticho Brahe, de quieu
redbid ana primeras ohsenraciooes , como consta por las obras dcl dicho Ticho ; assi mismo scrvi6 su
Cdre S6 anos en calidad de oosmographo en los estados de Flandres (mémoire do 1644, de van
Dfipren , la verdadera longitud). Miguel Florencio succéda à son père dans la charge de cosmo-
gnpbe.
(4001 Tout ce que j*ai dit de Langren et de la longitude de son époque est extrait de son mémoire :
la Teroadera loogitud por mar y tierra demonstrada y dodicada a su magcstad catholica Philippe IV,
M. F. y&a Langren... con las censuras y panures de algunos renombrados y Tamosos mathematicoa
deste siglo, qne van puestos en orden ae los Techos de sus dichas aprobacioncs , 4044, dont un
exemplaire imprimé et signé de la main de van Langren lui-même, se trouve dans les archives du
roTaune à Bruxelles. Il semble que les obtenrations de Langren furent insérées dans lumina austriaca
philippica. — Dans son mémoire il donne la forma assez biz.zarrcmnnl de sa science occulte , que
explicarâ quando la mandare su magestad. — Ensuite suivent les approbations des doctes, données :
le 5 mars 4631 à Louvain, par Eric Puteanus et Godcfr. Vendeliuns ; le 47 janvier et 47 mars 40*^3,
par Jean de la Faille, qui dit : landandi multorum furre conatus scd noraincm vidi qui.... vulgi pêne
imperitiae acconunodatis satisfacere problemati tam arduo possint, quam van Langren...; le
S mars I63S, à Cordone par Barlhomée Petit: le 4 février 1644 à Uruxolles. par le profcss. Jean de
Bognez, le 9 du môme mois par Tingénieur Jean Heymcns Coock, et le 10 à Anvers, par le profcs.
Gérard Gutiscovius qui l'engageait à calculer la lune.
196 REFORME» 1550 ET SUIV.
du mouvement des astres et par conséquent du calcul , enfin par le
manque d'instruments nécessaires, d'horloges et de pendules. Cette
agitation prouve aussi, que depuis qu'on a compris l'usage pernicieux
de longitudes ptoléméennes on n'avait encore aucune certaine, aucune
qui serait déterminée avec certitude.
La cartographie restait donc dans son désarroi , duquel elle ne pou-
vait sortir par les publications des Pays-Bas. L'impulsion donnée à
la propagande géographique par Orlelius et Mercator, poursuivie avec
succès, n'a pas soutenu les Pays-Bas en première ligne de l'étude.
L'étude se concentra successivement en France , et en terminant nos
considérations sur la restauration de la cartographie, nous renoncerons
volontiers à tous les pays pour porter le dernier coup-d'œil sur les
déroutes de Ptolémée, presque exclusivement dans cette nouvelle école.
219. Mais avant d'exposer cette déroute retardée , je dois rappeler
que la cartographie nautique s'opposait inéhranlablement à toutes ces
avanies de la géographie, et longtemps sans théorie avec sa méthode,
elle ne fut que pratique. La géographie des savants multipliait chaque
jour ses publicalions , et commençait à les remanier, parce qu'elles
étaient trop vicieuses; la géographie de l'expérience pratique des marins
n'était que dessinée toujours de même, à la même méthode, aux mêmes
proportions heureusement établies.
La marine française plaça les dessinateurs de cartes nautiques à la
hauteur des plus beaux produits qu'on connaisse. JiLcq de Vaulx pour le
roi en la marine, 1535; Guillaume Levasseur de Dieppe en 1601 ; Jean
Dupont de Dieppe en 1625; Jean Guerard fait à Dieppe en 1651, ont
laissé d'admirables cartes. Dieppe excellait dans leur exécution (40i);
on se servit en 1650, à Dieppe en premier lieu, de la projection crois-
sante de Mercator pour les cartes marines. Conserver les proportions
établies par la pratique, c'était l'ouvrage des dessinateurs : mais leurs
cartes couraient le danger de la dégradation quand un géographe du
continent s'empara d'elles pour les publier.
Ortcl indique quelques cartes marines publiées avant 1570, celles de
Waldseemûller, llacomilus (1515), de Laurent Frisius (1522), de Nico-
las Nicolaï dauphinois (mort 1585); en Italie, outre les isolario,on
publia aussi quelques cartes marines; Gérard Mercator, mettant en
pratique sa projection croissante, composa une carte continentale qua-
liûée de marine ad usum navigantium. Je n'en ai vu aucune, qui ait
rendu les proportions de leur modèle dessiné. Celle de Mercator , com-
posée par lui-même, n'avait plus les proportions des cartes de la prati-
que marine.
J'ai vu une carte de Du Val, géographe ordinaire du roi, publiée à
Paris vers 1661, où Ton ne remarque que l'appareil des cartes nauti-
ques : tout y est défiguré (ioa). Vers le même temps, on publia à Paris,
chez Antoine de Fer, un atlas nautique de la France, composé de 55
(iOl) Voiries fragments de ces cartes dans l'atlas de SaDlarem, priorité de la découverte de
l'Afrique.
(402) Le tlicàtre des belles actions des chevaliers de Tordre de S. Jean de Jérusalem dit de Malte,
par Du Val, géographe prdinaire du roi. Gravé et mis au jour par Etienne Vouillemeut, içravenr
ordinaire de S. M., pour les cartes géographiques à Paris, en isie du palais, au coin de la me de
.Qarlet, à la fontaine de Jouueoce, 1C6i.
CONSÉQUENCES « S19. 197
cartes. Tons les rivages y sont torturés et assimilés à la cartographie
continentale. Les savants publicaieurs se croyaient autorisés non-seu-
lement à prescrire les règles, mais à dresser une pratique trop contraire
à celle qu'on avait (403).
Les publications consciencieuses des cartes de la marine parurent en
Hollande, et ne discontinuèrent pas pendant plusieurs siècles. Elles
étaient à Fusage des pilotes, ne déviant en rien de leur méthode jusqu*à
la possibilité de la perfectionner et de perfectionner les cartes.
Cette suite d'atlas nautiques, publiées en Hollande, commence
en 1584, par les efforts du pilote Luc Jean Waghenner, latinisé par
Aurigarius. Il est le fondateur des publications nautiques. Il élabora
lui-même les caries pour son atlas, gravées par Jean à Doetinchem,
Douetecum, Douza. La navigation hollandaise, préoccupée des parages
extérieurs de TEurape, se montre d'abord indifférente pour la mer
inéditerranée; kussi les atlas de Waghenaer n'offrent que les côtes occi-
dentales et septentrionales. Les cartes spéciales se suivent , à partir de
la Hollande à gauche jusqu'au fretum de Gibraltar; ensuite à droite
elles entrent dans la mer baltique et côtoyent tous les rivages. Les for-
mes des côtes sont imparfaites; les positions abondent inégalement,
quelque fois m^énije sont très-insuffisantes.
A la tête de ces cartes spéciales se trouve une générale qui présente
toutes ces côtes et une portion de L'Afrique et de la mer méditerranée ,
jusqu'à Tunis et les pointes occidentales de la Sicile. L'Islande y est
ronde, les Feroer conformes à leur petitesse (on ne voit ni. Estoliland »
ni Frisland); les Schjeiland grossières, le golfe botnique (noort bodem),
situé à sa place, se réunit avec la mer glaciale par un fleuve très-large
ou pur un très long détroit montant vers le nord. Cette carte est déco-
rée de plusieurs écussons, dont un à trois lions placé en Norvège ; deux
autres à trois, couronnes en Suède; en Afrique sont deux écussons, dont
UQ'vide, l'autre à trois croissants; deux plus, grands que les autres,
l'un à trois lis en France, l'autre richement blasoné (de Philippe 11)
en Espagne; enfin un petit écusson de Portugal (qui avait été réuni à
l'Espagne tout récemment, en. 1580). Cette carte conserve rorienlation
Tîeieuse de la boussole (404).
(403) Je n*ai qiic la cartn générale de loutee les. côtes de France (de 32 cartes) à Paris , clicz
Antoine de Fer, marchand de taîllc-douce, enlumineur de cartes géographiques, demeurant au
boot dn pont-au-change, devant l'horloge du pallais à Taage de fer. — Prenons Brest pour le sommet
dn triangle et pour base la distance entre Baïonne et Calais représentées par le nombre de 200 : nous
UOQtOQS les deux autres côtés en proportion suivante :
de Brest
à Calais. à Baïonne.
Nos cartes modernes. itH i!(5 ^ 10
g / Carte caUlane 420 140 4" <0
-* I.André Benincasa 133 143 4- 10
g < La carte grossière publiée par Ubelin liO liS -j- 5
g f Plus correcte publiée par Villanovan 115 143 ^ 28
a l G. Bleauw chez Berey 130 150 4- 20
Ger. Mercator 140 130 — 10
Hiic. Sansoa 142 114 — 28
Carte marine, chez A. de Fer 149 112 — 37
Ptoléroée 11^1 107 — 14
Le triangle de ce dernier est formé par Itiuro , embouchure d'Aturus et Gobcon. Ces chiffres. sont
parlants.
(404) Sperulum navigationis per mare occidentale, Lugdu ni batavorum, apnd Christian. Planti-
Qnm 1584, fol. Je n*ai pas vu cette édition latine, mais elle contient pour sûr les mêmes caries
inscrites : Luau Àurigariu* enchu$ianus inventer^ Joannei a Doetinchum fecit^ qui composent
200 RÉFORME) 1550 ET S0IT.
La publication de 4646 a, dans sa composilion nautique, quelques
lignes horizontales irrégulièrement coordonnées et trois boussoles,
venant de deux roses de vents à certaine distance juxta posées : une
près de Tolède, Tautre au nord de Negropont près de Skyros. La bous-
sole près de Sardaigne est orientale ae la première; les deux autres,
méridionales, sont quelque peu irrégulièrement placées, représentant
sirocco (ostrosirocco) et garbino (ostro garbino). Sur la ligne de la
tranche de la carte sont les de{^rés de latitude, présumant une projec-
tion plane cylindrique. L'échelle de ces degrés donne à la longueur de
la méditerranée 40** 50'. Nous avons essayé de graduer cette carte con-
formément à réchelle latitudinale, et afin d'obtenir le succès nous avons
trouvé qu'il fallait prendre le rayon de 150 à partir de la ligne pour
tracer les parallèles (voyez n*" 138 de notre atlas).
Je me suis étendu sur cette carte de misérable contrefaçon de
Nicolas Berey, parce qu'elle est la seule que j'aie pu me procurer de la
publication nautique de cette époque qui contient la mer méditerranée
entière. Elle m'a servi dans le portulan général faute de mieux; et elle
figure dans l'atlas comme pièce de conviction pour ce que j'avance au
sujet de la cartographie («os).
Les atlas préparés par Bleauw circulaient par différentes éditions
après sa mort, et trouvaient un concurrent aclif dans les publications
de Jansen (409). Amsterdam ne discontinuait pas encore d'être une
infatigable fabrique de toutes sortes de cartes géographiques (410).
La projection réduite, tant recommandée par son inventeur Mercator,
ne fut introduite dans le dessin des cartes marines qu'un demi-siècle
après sa mort. Je ne sais si la fabrique hollandaise en a fait un grand
usage, n'ayant pas vu toute la suite de ses publications : mais je vois
qu'elle ne négligeait pas ses anciennes constructions.
La famille de van Keulen, Wylem Johan et ses fils Gérard Hulst et
Corneli Buys van Keulen , se mit à son tour à la fabrique pendant tout
un siècle. Chaque édition de Jean van Keulen était quadruple : te
>veten in duits, frans, engeis en spaens; chacune était composée d'un
recueil de cartes connues depuis longues années, augmentée d'une crois-
sance considérable de cartes nouvelles, parmi lesquelles se trouvaient
les cartes dressées sur la projection réduite et les cartes encadrées
dans l'échelle de leurs latitudes ou latitudes et longitudes à la fois (4t 1).
(i08) Voyez notre avaot-derDière planche. Les rartcs comparatives de Mercator, Sanson , Delisle ,
sont de la même échelle sur la projection ptolémëenne du rayon de ilS de la ligne.
(409) Description du monde maritime ou hydrographie générale de toute la terre , carichie des
particularités de la navigation tant ancienne que n>oderue, Amsterdam, Jansen, 16S7, foho.
(410) Le grand et nouveau miroir ou Oambeau de la mer, contenant la description de toutes les
côtes occidentales, traduit du flamand en français, par Y vonnet , Amsterdam , chez Pierre Goos,
demeurant sur l'eau, anno 1662, fol.
(411) Parut d'abord : zeeatlas ofte watcr weerelt; ensuite de groote nieirwe Uchtende zeefkkel»
toujours le nombre des cartes augmenté , les précédentes corrigées. Jan van Loon , ensuite Claas,
Jansz Vooglit soignaient les rectilications. — Die groote nieuv^e vermeerderde zeeatlas , Johan van
Keulen, Amsterdam, 1685, contient 59 cartes; zeeatlas du mènse 172i, en deux vol. in-folio, donne
118 cartes. Il reparut i7S3, et de Corneli et Gérard en 1764. — De nieuwc groote licbtende zec>
fakel, het eerstc decl beheizende Holland... Finland, Finmarkcn en Rnsland (mer blanche), Ysland ,
Spitzbergeo en Jan Maijen eiland, (Gronland|, de straat Davids en Hudson , de oost knsten va» Enge-
Jand en Schotland , met de ouderlioorige eilanden , als ook de Orcades, Hitland en de eilanden van
Fero, vergadert door wylen Claas Jansz Voogt, geometra en leermeester des wiskonst... vermecrdert
en verbetert door Gérard Hulst van Keulen, te Amsterdam 1780, folio. Cette première partie est
composée de 85 cartes (y comprises les Orcades de Murdoch Mackenzie et les images des monta|;nes
littoralles). La carte générale est privée du golfe botnique. — La seconde partie, m'est iacoonaek
CONSÉQUENCES, 333. 201
Les uombreuses reproductions des recueils de Van Keulcn , n*empé- .
chaient pas les publications plus régulières, où la science était déjà en
état d*offrir avec succès ses puissants secours. Pour éditer le Neptune
français, Pierre Mortier à Amsterdam s'est adressé à Charles Penc,
Cassini, H. Jaillot, Romain de Hooge, de Fer, Nolin , Placide et autres.
La coopération des géographes renommés élait avantageuse pour Ten-
treprise. Les 55 cartes du Neptune sont dressées à la projection de la
latitude croissante et ne contiennent que les côtes extérieures de TEu-
rope. Pour la mer médilerranée, elles sont suppléées par 9 cartes de
Romain de Hooghe, qui parurent à Amsterdam dans la même
année 1695 (413).
]gn 1715, Louis Renard, libraire, éditait à Tinspiration du géographe
Frédéric de Witt et sous les auspices de la Grande Bretagne, un nouvel
atlas à Fusage de la marine (413). Toutes les cartes de la suite des
rivages et la carte générale de TEurope (dépourvue du golfe botnique),
sont dressées à Tancienne méthode, oifrant une projection plane,
garnie d'une échelle latitudinale sans longitude. Le planisphère du
frontispice, représentant Tensembledes cartes, est le seul gradué. Paris
y est à âO* de longitude, le coin oriental de la méditerranée 52°, le
Japon 150% fruit de nouvelles et récentes élaborations géographiques,
conformes à toute la suite des cartes nautiques.
La carte du frontispice, et les autres au nombre de âG, sont accom-
pagnées de nova orbis terrarum tabula et polus arcticus, deux cartes
de Frédéric Witt (produit de la géographie continentale) où la longitude
de Paris est â5<* ou 24**, du coin oriental de la méditerranée 69*. par le
Japon traverse 180°; la mer méditerranée tient une longueur de 56
degrés. Cette carte accompagne Tatlas nautique en 1715!
Ainsi, Witt, Jaillot, de Fer, Nolin, participant aux éditions des
cartes nautiques et connaissant les proportions de la cartographie
marine, avaient une toute autre connaissance pour leurs propres pro-
duits. Mais le temps se rapprochait enfin où les observations astrono-
miques réussirent à réconcilier les deux genres de cartographie, vinrent
à l^appui de la nautique et forcèrent la continentale de rentrer avec
son vieux monde dans de justes bornes.
222. L^activilé des Pays-Bas dans la cartographie continentale éveilla
celle de France et lui donna une certaine impulsion. La fabrique
française ne pouvait longtemps égaler les belles exécutions hollandai-
ses : mais elle acquit bientôt un certain mérite dans la science.
Elle fourmilla de compositeurs de cartes spéciales de son pays :
Jean Surhon, Nicolas Nicolaï, Jean de Reins, Jean Jubrien, Jean
Fayan, Sollon, étaient du nombre de ceux qui dressaient partout les
plans topographiques.
Les éditeurs de cartes copiaient les productions des Pays-Bas et
des autres pays. N. Picart (vers 1610-1650) se servait du burin de
Hugue Picart; Jean le Clerc (vers 159i, 1617), avait recours au même
f41S) Le Neptune français, mis en ordre par Pêne, Cassini , à Paris 1608, fol. Cartes marines, à
rusage des armées de la Grande Bretagne, gravées par Rom. de Hooghe, Amsterdam 1695, fol.
(4iS) Atlas de la navigation et du commerce, à Amsterdam, ches Louis Renard, marchand
libraire, 1715, fol.
202 RÉFORME, 1550 ET SDIV.
OU au burin supérieur de François de la Hoeye. — Jean Boisseau ,
enlumineur du roi pour les cartes géographiques (vers 1659, 1647),
employait à Texécution de ses cartes H. le Roi. En même temps Nicolas
Berey fesait copier toute sorte de cartes. Michel van Lochom , graveur
et imprimeur du roi pour les tailles-douces (vers 1645) suivait le même
exemple. De nombreuses cartes volantes circulaient avec succès pour
les éditeurs de mérite , cartes anonymes ou des auteurs renommés. On
composait des recueils, des atlas de France (414). Dans cette concur*
reuce empressée, deux éditeurs parurent supérieurs aux autres :
Melchior Tavernier, graveur et imprimeur du roi pour les cartes
géographiques et autres tailles-douces (vers 1640, 1647), et Pierrt
Mariette (vers 1651, 1665). Pour le premier gravait ordinairement
A. B. de la Plaets; pour Tautre Jean Sommer, prussien; L*huillier et
A. Peyrounin pour Tun et Tautre.
Mais dans cette foule de publicateurs, les abbevillois étaient les seuls
qui ouvrirent une école de la cartogra^ie française Nicolas Sanson
(né 1600, mort 1667) avec ses fils et fils de sa sœur, Pierre Du Val-
(né 1618, mort 1685) qui suivit ses traces. Sanson mettait à exécution ses
cartes chez lui-même par le graveur abbevillois R. Cordier (1648, 1660)
et laissait éditer à Tavernier (1641, 1645) et à Mariette (1651, 1665)> '
Ses cartes furent élaborées dans un ensemble établi par Mercator,
(par Caslaldo?). Il compulsait les produits de nombreux géographes,
puisait dans les nouveaux mémoires et renseignements et composait
par lui-même; quand il se conformait plus strictement à quelque
auteur il indiquait son nom. L*Ëcosse est chez lui composée d'après
Thimothée Pont et Robert Gordon; Madagascar sur les mémoires de
J. de Flacourt et François Gauche: la Ghine d'après Neroni; les côtes
septentrionales de l'Afrique sont tirées de Livio Sanuto; les autres par-
ties sont prises de Mercator, Marmol, Biommart : il le dit lui-même
dans les intitulalions des cartes.
Le nombre croissant des cartes de l'école Sanson , toutes les parties
du monde élaborées sur de nouveaux documents, établirent la renom-
mée du géographe français, jetant un discrédit sur les cartes précéden-
tes. Un Jacq TAgniet, un G. Jollain (vers 1666) s'emparaient de planches
abandonnées, y substituaient leurs noms et marchandaient encore avec
elles simulant les nouveautés. Mais Sanson seul était un coryphée dans
la géographie et eut pendant tout un siècle une situation solide. On le
copiait en Hollande; à Paris Hubert Jaillot (vers 1681, 1705) (Gordier
graveur) éditait ses cartes avec soin et très-bien exécutées.
En attendant, Pierre du Val ne cessait d'agir pour sa part (chez lui-
même ou chez Mariette), Philippe de la Rue préparait aussi ses
compositions (vers 1651, 1655) pour Mariette. J. B. Noiin publiait
(vers 1692, 1694, 1705) celle de Tillemont et ses propres. Nicolas de
Fer (vers 1695, 1717), graveurs G. Inselin, P. Starckmann, H. vanLoon^
se présente comme émule de l'école sansonienne. La fabrique hollan-
(414) Par exemple la géographie sacrée de Haraens et Ortel fut plusieurs fois copiée, privée des
noms des auteurs. N. Picart copiait Hondius en le noimnant ; le Clerc passait sous sileDce le nom
de Castaldoen reproduisaut ses cartes; son atlas de France (dirigé en partie an moins par Jabrien)»
contenait probablement une quarantaine de cartes; un autre atlas de France, anonyme, snaàt «ne
trentaine ae caries.
CONSÉQUENCES» 1S3. 303
dâîse d'Amsterdam copiant ces productions, rendait hommage aux
géographes français (415).
Vinrent enfin les Delisle et messieurs de l'académie royale des
sciences, pour consommer la réforme de la cartographie continentale
de toute la surface du globe et spécialement celle de l'ancien monde.
L'ordonnance royale qui, en 1645, désignait pour la cartographie fran*
çaise le premier méridien de File de Fer, n'aurait pas avancé beaucoup
les réformes si l'on n'avait pas déterminé les 30® 50' de la longitude de
Paris. L'académie ne perdait son temps et les observations astronomi-
ques, chaque jour plus précises, préparaient les matériaux pour fixer
les longitudes. Les parties accessibles à la navigation française, visitées
par de nouvelles perlustrations de voyageurs et les plans topographi-
ques levés par des géomètres et ingénieurs instruits, apportaient aux
géographes français des matériaux qu'on pouvait enfin coordonner et
enclaver dans les longitudes géographiques, déterminées pas les obser-
vations astronomiques.
225. Mais la marche était lente, et depuis que la réforme était décla-
rée , elle rencontrait les habitudes , les préventions et cette crédulité
invétérée, qui, opposant une méfiance obstinée, avait peur d'adhérer
franchement à la réforme et qui ne cessait de débiter de vieilles com-
positions comme si elles étaient une toute nouvelle invention.
Nicolas Sanson, suivant les traces de Mcrcator, semble s'effrayer d'ac-
cepter les 55 degrés de la longueur de la méditerranée, il lui assigne
56 degrés. Examinant les formes et les proportions qu'il donne à la
Syrie « à l'Asie, aux environs de Rhode, au littoral africain et à Tunis,
à la France elle-même, on peut dire qu'il penchait vers Ptolémée,
(voyez D? 459 de noire atlas). Il dégradait la construction de la méditer^
ranée de son modèle préparée par les réformateurs , pour ne s'éloigner
autant de ce vieux maître.
Claude Delisle (né i6M, mort 1720) et son fils Guillaume (né 1675,
mort 1726) trouvèrent, à côté de quelques autres systèmes de la réfor-
mation géographique, les proportions de l'école sansonienne, jouissant
de tout le crédit de l'autorité acquise : ils les acceptèrent et débutèrent
par 55® 50' de la longueur de la méditerranée. La mer noire seulement
et la Syrie reçurent chez eux des contours tout différents (voyez n^ 140
de notre atlas). Les Delisle méditaient longtemps à réhabiliter le crédit
de Ptolémée.
Mais leur école était destinée à passer par ce revirement varié qui
substituait continuellement des formes nouvelles aux anciennes, dépla-
çait les positions et ébranlait les longitudes géographiques de tout le
vieux monde (voyez n° 155, 140, 141 de notre allas). A partir de Paris
jusqu'à Pékin, toutes les positions de l'hémisphère se rapprochaient à
l'appel irrésistible des astronomes, soulevaient aux géographes des per-
(MS) Pierre Mortier, B. et I. Ottens et les autres éditaient les cartes de Sanson, de de Fer, de
Noiin ; comme plus tard Jean Covens et Corneille Mortier les atlas de Delisle. — Il ne manquait pas à
Amsterdam d'éditeurs de cartes et atlas : Tbeodor Danckerts, Nicolas Visschcr, ensuite Pierre Sclienk
et Gérard Vaick etc.; à Leyde, le libraire Pierre yan der Aa donnait son propre cadre aux cartes
qn'il publiait. — En Allemagne la plus fameuse fabrique de cartes fut établie avec un succès bien
mwité à Nuremberg, par Jean Baptiste Homman , dont les successeurs illustrèrent l'entreprise par
les noms de Jean Matthieu Hase, Tobias Bleyer, ensuite Giisscfeld.
204 RÉFORME» 1550 ET SUIV.
turbations extrêmes et les forçaient à réder leur cartographie sur ces
proportions qu'ils reniaient depuis plus de deux siècles (1470-1700).
Il est nécessaire pour l'histoire de la géographie et de sa cartographie
de connaître les dates précises de toutes ses évolutions qui décidaient
les opérations géographiques de cette époque ; de déterminer Tannée
de la grande réduction de la méditerranée, d'indiquer le géographe qui
dressa et exhiba la première carte refondue , et de savoir si Ton exami-
nait en même temps la cartographie nautique (416). Ce que je sais»
par une carte de de Fer, c*est qu'en 1698 la position de Paris à âO« 50'
de la longitude de l'Ile de Fer était une nouveauté; qu'en 1715 l'atlas
marin édité par Renard , donnant sur l'hémisphère nautique les 41
degrés de longueur à la méditerranée, fichait dans le nombre de ses
cartes une mappemonde de Frederik de Wilt, où cette longueur est
évaluée à ^y 50'; que les atlas de Delisle offrent souvent à la fois une
carte de 41 degrés de longueur, une autre de 55"* 50' de la même médi-
terranée. Je vois enfin qu'un demi-siècle s'est écoulé avant que la juste
grandeur de 41 degrés prévalut décidément. Les caries publiées par
Nolin composées par Cornelli, cosmographe de la république de
Venise, par le Rouge, ingénieur géographe du roi de France, ne s'em-
pressaient guère à renoncer aux 56 degrés de la longueur ; et les vieilles
cartes retouchées avaient leur débit imperturbable comme un nouveau
produit le mieux confectionné.
254. Effleurons encore quelques points disloqués pour la plupart
par la renaissance.
L'obliquité ptoléméenne de la Syrie, prônée par quelques composi-
teurs des cartes de la Palestine, approuvée par la reproduction d'Orte-
lins , continua pendant un certain temps de souiller les atlas.
L'inclination ptoléméenne de Sicile affectait continuellement Fécole
des abbevillois. Ce n'est que Delisle et d'Anville qui firent décidément
disparaître cette difformité (voyez n^ 159, 140, de l'atlas).
Ou est étonné de tant d'indécision dans la conGguration de la
Morée et de la Grèce entière, lorsqu'on examine les cartes de d'Anville
(mort 178â), et de son appologisle Barbie du Bocage (mort 1825), et
autres (voyez n** 145, 144, 145 de notre atlas). Remontant par la con-
frontation de leurs compositions avec les cartes antérieures, on découvre
les sources d'une quantité de discordances dans les configurations pto-
lémécnnes. Dans ces examens , on ne peut se défendre de revenir sur
Ptolémée. La Grèce, l'Asie mineure, la mer noire, la Crimée, variant
dans les études des plus habiles géographes, fournissent surtout de
nombreuses circonstances qui avaient leur origine dans la domination
de Ptolémée, établie par la renaissance des lettres.
Suivons le cours du Danube sur les cartes des abbevillois, de Duval ,
de Delisle, de Bonne, de Goronelli 1788, nous serons toujours ac-
compagné de Ptolémée. Le consentement des indigènes , Madyars ,
Komans, Boulgars, semblait appuyer et perpétuer ses déclivités; les
distances levées de siècle en siècle, ne protestaient guère, conspiraient
(416) Les mémoires de l'académie des sciences pourraient peut-être fournur des rcnseignenacuts-
positifs à cet é^ard.
CONSÉQUENCES, 925. S05
plutôt avec les préventions enracinées; ni Delisle, ni d^Ânville, ne
purent sortir assez victorieux quand ils lenlèrcnl de le redresser et
rectifier.
2^5. De rédîfice de Plolémée, ruiné et déchiré, une portion, aussi
crasse, aussi lourde, aussi considérable dans son ensemble, n'appeseniit
nulle part la géographie, que dans la Perse. Les géographes peu disposés
au néoterisme, n'osaient troubler les eaux de la Caspienne, ni heurter
le méridien de Bagdad. Enfin des doutes sérieux sur la solidité de cette
construction résistant à tant de siècles, commencèrent à gagner et à
inspirer les esprits. Nulle part les cartes de Delisle ne variaient autant
de face qu'en Perse aux environs du fleuve Tigris (voyez n'* 141 de notre
atlas). D'abord il voulut sauver la construction en y introduisant quel-
ques rectifications, restaurations, ou en lui donnant un poli et une
plus spécieuse ornementure : mais en dernier lieu, vers 1720,1727, lui
arriva la connaissance de la Caspienne, déterminée depuis peu par
Tordre de Pierre-le-grand et tout ce qui y restait de Plolémée dut être
évacué. D*Anville déblaya les décombres; cependant Bonne, s'égarant
dans la construction nouvelle, ficelée sur les observations astronomi-
ques discordantes, revient avec le Tigre et rEufrale sur les traces de
Plolémée (voyez n<» 142 de notre allas). Hérisson copiait un certain
temps les illusions de son maître d'étude (41?).
Grâce aux montagnes de la lune et aux sources du Nil , venant de la
Kafrèric; grâce au Gir, dont les eaux s'évaporaient ou allaient être
absorbées par le sable; au majestueux Niger, arrosant les régions des
nègres inaccessibles. Présomptions ineptes, compromises par toute
sorte d'expériences, vieillies et usées, encore grosses de conséquences.
Jusqu'à Job Ludolf (né 1624, mort 170i), les découvertes portugaises,
ni les missions de la propagande chrétienne , n'étaient assez puissantes
pour convaincre que Plolémée avait tort, qu'il n'avait tissu que des
rêves qu'on peut s'imaginera tout moment, d'après les oui-dires qui
viennent de sources fangeuses et se répèlent de siècle en siècle. La
branche bleue reprit enfin les formes tracées sur la carte de Mauro,
(417) L*iDgcniear Robert Bonne, hydrographe de te marine (né 1727, mort 1794\ avait une pleine
confiance dans les observations astronomiques. Elles apportaient déjà pour la géographie des
bases solides. L'ingénieur concevait bien que les longitudes géographiques de Ptolémée n'étaient
d'aucune valeur; il puisait les positions astronomiques des auteurs arabes (des tables de Nassir eddin,
d'Aboulféda, d'Ulugbeig), et de voyageuis qui les levaient dans des pays éloignés, d'astronomes qui
observaient sur diiïérents points du monde. Il y trouva des iucohércnccs, des inexactitudes, croyant
que ses remarques garantiraient désoimais les géographes des erreurs attachées à l'emploi précipité
des observations. Il en donne l'exemple dans l'abbe Greuet qui écrivit que la tin de réclipse de lune
observée à Casbin en plein jour peut y être arrivée SO' plus tard, « et c'est à moi , dit l'ingénieur,
que la Lande répond, qu'il faut que j'uye mis un zéro de trop; puis il s'écrie poliment, quelle
ineptie! il y en a là une asstv. grande.... »'Et l'ingénieur discutaut ces inepties s'altrappe quand il
accepte en pleine conliancc les observations du père de Ucze , du père Guubil et de quelques autres
qui ne les contrariaient pas, parce que la réputation , le savoir profond de l'astronome géographe
Oaubil, ne laisse pas même la liberté de soupçonner une erreur de sa part. Il en a conclu, que le.
sud de la mer caspieunc doit être déplacé et porté plus à l'est d'environ S" i/t que selon les géo-
graphes modernes (Bonne, analyse des cartes, H partie, art. III, 5, p. ii-ie), et il compose' cette
configuration étrange qui lui est propre, de la mer Caspienne et de la Crimée déclives, de la mer
noire et de l'Asie mineure allongées, du Diarbckr et de Djezira éparpillés etc., etc. Bonne, conOanb
toujours dans l'exactitude des observations dont il s'est servi, persista à soutenir cette composition
jusqu'au bout de sa glorieuse carrière. Son élève Hérisson débitait après sa mort encore, en 1795,
cette singulière création. — Les géographes du moyen âge avaient raison de se méfier du produit
qui de leur temps était impraticable , qui poussa dans l'extravagance, Hipparche et Bonne; qui en-
Sendra les aberrations de Marin (Ptolémée); qui tout récemment (par l'observation astronomique de
iebnhr), foillit disperser l'archipel compacte entraînant Rhode presque d'un degré vers l'est.
206 RÉFORME, 1550 ET SUIT.
léguant loutes les mystifications grecques et arabes à la branche
blanche, avec laquelle, par de nouvelles conjectures, on commença
cnHn à procéder avec plus de circonspection et de discernement.
Plus d*une fois le bon sens diclait : à quoi bon courir à Tinconnu
avec Niger etGir, quand on le connaît tout près, au delà de rAltesoùils
signalent clairement le tort de Ptolémée. Les esprits mystifiés, qui
aimaient mieux s'aveugler par des espérances chimériques, renvoyaient
Texistence des fleuves au delà des sables mouvants dans des régions
qu'on entrevoyait à travers des mirages.
Le système, les erreurs et les hallucinations de Ptolémée introduits à
répoqûe de la renaissance des lettres, portant un coup fatal à la géo-
graphie : par son continent oriental exposèrent sur le vide de Tautre
hémisphère un allèchement à Fenvie de découvertes dans le Kataî et le
Japon, et contribuèrent à la découverte du nouveau monde : offrant au
regard crédule le Nil et le Niger, ne cessent d'enflammer la curiosité
des victimes qui se vouent à des éventualités cruelles et ouvrent les
entrailles de l'Afrique.
*—*
APPENDICES.
L
LES ÉDITIONS DE PTOLÉMÉE.
On connaît une édition latine, datée mcccclxh mense junii xxiii,
Bononie impressa , opéra Dominici de Lapis civis bononiensis : mais
Terreur d'impression y est évidente. On ne connait point de plus
ancienne impression bolonaise que de Tannée 1477; de Lapis ne s'est
installée Bologne qu'une douzaine d'années plus tard; les savants qui
soignaient l'édition ne se firent connaître que dans les dernières années
du xv« siècle; l'atlas gravé en cuivre, les registres de la pagination, les
réclames dont est munie l'édition en question , sont d'un usage posté-
rieur et ne paraissent qu'une dizaine ou une vingtaine d'années plus
tard : il faut donc présumer le déplacement de deux xx dans la date et
pour la rectiûer admettre qu'elle devait être MccccLxxxn mense junii ni,
Bononiae (1482) (Raidelii, comment, de geogr. Ptolem. cap. 6, p. 40).
Voici la suite des éditions, dont plusieurs sont de la plus haute im-
portance pour l'étude de l'histoire de la géographie, à cause qu'elles
offrent de nombreuses variétés, et contiennent des renseignements
curieux et les cartes nouvelles pour examiner la marche de la géogra-
phie à cette époque.
1475. Vicenliae, chez Herman Levilapis de Cologne; versio Jacobi Angeli,
sous le patronage de Benoit le trevisan , et de Angelo Michaele; par les
soins Angeli , Vadii et Barnabae Picardi Vicentii.
1478. Romae, (commencée par Conrad Schweinheim, terminée par) Arnoldus
(Panartz) Buckink ; traduite et élaborée par Domitius Calderinus, sur le
code grec Georgii Gemistii Plethonis; atlas gravé sur cuivre.
1482. (1462), Bononiae, impressit Dominicus de Lapis bononiensis; castiga-
verunt Hieronymus Mamfredus et Petrus Bonus; correxerunt Galeottus
Martinus etCoUamontanus; emendauit Philippus Beroaldus; atlas gravé
sur cuivre.
1482. Ulmae, impressit Leonardus Hol; versio Nicolai Bonis; atlas gravé en
bois , le graveur Johan Schnitzer de Arnsheim.
1480. Ulmae, réimpression de la précédente, par Jean Reyer, aux frais du
Vénitien Juste de Albunis.
APPENDICES. 308
1490. Romae, impressit Petrus de Turre, atlas gravé sur cuivre; reprodactioa
de celle de Calderino.
U95. Romae?
1507. Romae, impressit Bernhardinus venelus de Vitalibus, expensis Evan-
gelistae Tossini brixiani hibliopolae; correxerunt, Marcus beneventanus
caelestinus, et Johannes Cotta veronensis ; accompagnée d* atlas.
1508. Romae, reproduclion de la précédente; préface de Thomas Aucuparias
(cum mentlone Johannis Ruyschi ; novae tabulae per Marianum moDacham
et Marianum alterium).
1511. Venetiis, impressit Jocobus Penzius de Leucho; elaboravit Bernardus
Silvanus eboliensis, le texte et l'atlas, qui est gravé en bois. (Cette publi-
cation cependant ne peut être considérée pour une édit. de Ptolémée dont
elle porte le nom , Syivano élabora sous ce titre sa propre production).
1515. Argentorati, impressit Johan Schollus, cura Jacobi Aeszler et Georgii
Ubelini; cooperauit Philesius qui avait fourni un code grec; la version
latine, accompagnée des noms propres en grec; le double atlas, de
Ptolémée et moderne, gravé en bois.
1520. "Argentorati, reimpressit Johannes Scotus, cura Georgii Ubelil, dans le
texte les noms propres en grec sont omis; l'atlas y est de même double
comme dans l'édition précédente.
1522. Argentorati, reimpressit Johannes Grieninger, curante LaurentioFrlsio;
cum neotericorum perlustrationibus; parce qu'il fit monter le nombre
des cartes modernes jusqu'à 20 ; elles sont réduites sur une moindre
échelle que les précédentes par Martin Ilacomil ou WaldseemûUer.
1525. Basileae, impressit Johon Grieninger, communibus Johanni Kobergeyrii
impensis; interprète BiiibaldoPirkheymer; cum annotationibuslobannis
de Regiomonte.
1553. Basileae. grœca, impressit Hieronymus Froben , communibus Nicolai
episcopi impensis; curante Erasmo Roterodamo, secundum exemplar
codicis Theobaldi Felticbii medici ingolstadtnsis; sans atlas.
1555. Lugduni, impresserunt Melchior et Caspar Trechsel; curante Michaele
Villanovano (Serveto); avec atlas double de 50 cartes. Les modernes sont
les mêmes que d'Ubelin et Aeszler, la plupart sur une échelle un peu
moindre; trois nouvelles y sont ajoutées.
1540. Coloniae, impressit Johannes ruremundanus; procurante Johanno
Novioniago, in-8«, sine tabulis.
1540. Basileae, impressit Henric Pétri; curante Sebastiano Munstero; atlas*
1541. Basileae, prfor secundo repetita.
1541. Lugduni aut Viennae in Gallia; ex officine fratrum Trechseliorum ;
sumptibus Hugonis a Porta bibliopolae lugdunensi ; c'est la reproduction
de l'édition de l'année 1535.
1542. Basileae, tercia viceMunsteri.
1545. Yeneliis, atlas cum tabulis novis Jacobi Castaldo. (Zurla, sulle antique
mappe idrogeogr. c. 31).
1545. Basileae, quarto Mu nsteri reimpressa.
1546. Parisiis, grœca, impressit Christianus Wechel. *
1548. Venetiis, italica, imprimée par Giovanni Baptista Pedrezano; version
de Pierre André Mattiole.
1552. Basileae, quinto Munsteri, cum pra^fationeConradi Lycostheni rubea-
quensis.
APPENDICES. 209
i361. Venetiis, italica, apud Vincentium Valgrîsium, trudotta daGirolamo
Ruscelli , con lavole, in-4®.
1563. Venetiis, apud Vincentium Valgrisium; ex emendatione Joseph!
Moletii y in-4o; atlas de la précédente italienne.
iS64. Basileae, Henric Pétri; cartes de Ptolémée petit format, gravées en
bois accompagnant Tétition de Pomp. Mêla.
1571. Basileae, Henric Pétri , donnait les cartes de Ptolémée gravées en bois,
à son édition ^[ylandrine de Strabon.
1573. ou i574, Venetiis, italica, apud Jordanum Ziletti; versio Ruscelli, a
Johan. Malombra revista.
1578. Goloniae, typis Godofredi kempensis, Leonardus Strickius édit. tabulas
Gerhardi Mercatoris.
1584. Goloniae, Agrippinae, Godofredus kempensis, ex emendatione Gode-
fredi Mercatoris.
1596. Venetiis, Johannes Ântonius Maginus, haeres S. Galignani de Karera.
1397. Goloniae, la précédente, reproduite per Petrum Kesçhedt.
1599. Venetiis, italica, apud haeredes Melchioris Sessae; versio Ruscelli,
emendata per Joseplium Rosaccium.
1605. Amstelodami seu Frankofurti grœco-ltkiina , per Jodocum Hondiumet
Cornelium Nicolai ; elaborata (olim) per Gerardum Mercatorem , juxta
exemplar Pétri Montani.
1668. Bononiae, Johannis Aotonii Magini récusa.
1617. Arnheimi , Joh. Ant. Magini, récusa.
1618. Amstelodami seu Frankofurti, ^rspco-latina ; Isaac Elzevir sumptibus
lodoci Hondii, curante PetroBertio.
1621. Padova, italica, sumptibus P»uli et Francisci Galignanorum ; versio
Leonardi Gernoti (antérieurement publiée à Venise).
1695. Franeckerae, atlas mercatorianus.
1698. Trajecti ad Rhenum, atlas Mercatoris per Franciscum Halma et
Guillelmum van de Water. .
1704. Amstelodami, le même reproduit.
1715. Parisiis, variae lectiones graecae, in opère; bibliotheca coisliniana,
olim segueriana, sive manuscriptorum accurata descriptio, studio
Bernard! de Montfaucon.
1730. Amstelodami , tabulae perR. et J. Wetsteniios.
1843. Lipsiae, gracce, Sumpt. Garoli Tauchnitz, edidit Garolus Fridericus
Augustus Nobbe, â vol. in-16, sans cartes.
1847, Le même Nobbe et Wilberg, sont en train de la grande publication
critique avec atlas.
il
IL
CARTOGRAPHES
CONNUS PAR ABRAHAM ORTELIUS EN 1570 ET 1592.
Ortelius, publiant son recueil, voulut indiquer loyalement ses soarees.
Dans ce but, au commencement de son ouvrage, il mit une liste des
cartographes de son époque, antérieur à Tannée 1570. Les composi-
tions de plusieurs remontent à Tannée 1528 et peut-être aux antécéoen*
tes encore. 11 y a là des cartes qu'il n'a pu se procurer ni voir. Sa liste,
quoique nombreuse, n*est pas assez complète. Il en a oublié beaucoup
qu'il cite à d'autres occasions. Reproduisant cette liste des carlograjj^bes
en 1592, il Taugmenta considérablement par le recensement de pro-
ductions postérieures et toutes récentes, mais il ne négligea pas d^ajoii-
ter de plus anciennes, qui échappèrent à sa connaissance en 1570. Je
les arrange par ordre de matière et de pays dont ils dressèrent les
tableaux , marquant d'un astérisque ces cartes qu'Orlel a copié dans
son tbeatrum de 1570 et de 1592.
Petits atlas. Jean HonteruSf à Zurich, chez Christophor FrosdiD-
ver, 1546, et à Anvers, chez Jean Richard 1560; Girolamo RuMedU,
à Venise chez Yinc. Valgrise 1561; Joseph Molettus, ibid. 1562.
Plans de villes : Antoin Dupinet ou Pinetus à Lyon 1564; JuUut
BaUinuê; Georg. Bruno,
Je passe sous silence les cartes historiques.
Cartes marines du monde : Martin WaldseemUUer ou Ilacomilns
fribourgeois; Laurentius FriHus , 1522; Gérard Mereator rapel-
mundanus, ad usum navigantium, Duysburgi 1569. — Europe
marine : Nkolas Nicolaï le dauphinois (mort 1583); laeq Hamm
portugais, à Venise 1569; Luc Aurigarius ou Waghenaer, à Amster-
dam, ap. Clessonium Cornelium. — Isolario : BenoU Bordoneimori 1551),
à Venise, chez Nicolo d'Aristolile detto Zopino, 1554; Thomas Porcaecki^
da Casliglione, arrelino, à Venise, chez Simon Galignanis et Girolamo^
Porro, 1572; Camocio, in Venezia, 1571. — Atlas marins, oceanî^
occidentalis : Luc Aurigarius ou Waghenaer, Lugd. batav. ap. Christs.
Plantin, 1584, 1589.
Mappemondes : Caspar Vopellius Medebach, à Colore; Pierre Apiepm
(mort 1552) à Ingolstadt 1520; Oronee Fine dauphinois (mort 1555), ^
Paris, chez Gormont 1515; Sébastien Cabolus, vénitien, 1544;
Castaldo piémontais, à Venise et à Rome; Jean baptiste Guieeiardii
APPENDICES. 21 f
à Anvers 1549; Je(m Dominiq Meihoneus^ à Yemse^ ap. liratliseuin Paga-
num; Henri Pontanus 1556 (i), et Pierre de Aggere, à Malines; Guil-
laume Postellus, à Paris; Gemma Frison, à Anvers; Gierard Mer-
ccUor 1369, etc.
Europe : Comeil Antonio, à Frankfort-sur-Ie-Mein ; Cagpar Vopeltiui
Medebach, à Nuremberg; Jean Bwcius aenieola, à Paris chez Vi^echel;
Henri ZeU^ à Nuremb. ; Gérard Mercator, à Duysburg 1564, 1572.
Asie : Jaeq Caslaldo, à Venise 1568; Abreûiam Orlel 1567. — Chine :
* iAtdovieus Georgius.
Afrique : /ocg Caslaldo, à Venise; Livius Sanutus, à Venise, ap.
Damian. Zenarum; Pierre Pigafetta vicentin, à Rome.
Amérique : Jérôme Chiauez (inédite); I>t>j|ro Gutierus, à Anvers, chez
Jérôme Cock. — Pérou : * Didacus Mendezius. — Florkies : * Jérôme
Chiauex.
Espagne : Pierre de Médina, à Séville, chez Jean Gutiarnùs 1560;.
Jaeq Caslaldo, à Venise; Thomas Geminus, à Londres; Vincent Corsu-
Umis, à Venise, chez Mathieu Pagano; * Charles de Leclus ou Clusius
d*Arras (mort 1609). — Hisp. antiqua : Henr. Coquus gorchonius, à
Salamanca, 1581. — Canton sévilien : *^ Jérôme Chiauez, — Isie de
Cadix : * George Hœfnaglius, à Anvers.
Portugal : * Ferdinand Alvares Zeccus ou Secco, à Rome,, chez Michel
Tramezzi 1560. — Azores : " Ludovicus Teisera,
Italie : Benoît Bordone; * Jaeq Gastaldo. — Piémont : '^^ Jacq^
Caslaldo. — Lombardie : Bonaventure Castiglione milanais (mort 1555).
— Milanaise : * Jean George SettcUa ou Septala, à Anvers,, chez Jérôme
€!ock. — Toscane : * Jérôme Bellarmalus ^k Rome; Etienne Florenlinus,
à Rome 1584. — Naples : * Pyrrhus Lygorio (mort 158^, à Rome,
cliez Michel Tramezzino^ 1558. — De insuiis itaticis Leafêier Alberti, à
Venise 1568. — Sicile : * Jaeq Caslaldo, — Corse : Augustin Giusli-
niani ou lustiniaaus, évéque de Nebbio^ (mort 1551). — Cartes topogra-
phiques : Friul : Gregoir Amaseo (mort 1541). Trévise : Jean Pina-
dellus. Padouane : * Jaeq Caslaldo, Veronèse : * Benoît Brogndi, à
Venise 1564. Cremonèse. * Antonius Campus, Lacus benacensis :
Georgius lodocus 1546; Dominicus Machaneus, Lacus larius : * Paulus
Jovius (mort 1552). insula Ischia : * Julius lasolinus, Apulia : * Jaeq.
CoitaléU), Abruzzo : * Natalis Bonifacius sebenicensis 1587.
Grèce et Turkie : Nicolas SophUanus, à Rome; Pyrrus Lygorio, à
Rome; * Jaeq Castaldus.
Palestine : Bonaventure Broehard, à Paris,^ chez Poncet le Preux, 1555;
Gérard Mercator , k Anyers 1557; Jaeq Ziegkr (mort 1549), à Slrasb.
chez Wendelin Richel, 1526; Martin de Brion,k Paris, chez Jérôme
Gormont; Wdfgang Wissenburg de Bâle, à Strasb. chez Weud. Richel ;
(I) OcIrmdiD fSjanT. i8S6, pour Henri Pontanns natif de Arnbem en Gueldre^à présent bourgeois
delà Tille de Malines pour imprimer et graver une mappe du monde en forme d'ung aigle de l'em-
pire, borné des noms oes princes, potentats, dignitez et offices concernant le dit empire, avec le»
ydttn impériales ancbiennes et modernes, colloquées selon l'ordre de raiphabcth pour les trouver
pins aysement, ensemble les blasons et armoyeres de chacune dMcellcs avec figuracye de sept
plmetet el d'one bordure crotesques (dans les archives de l'état , conseil privé » r^istre n* Wf.
âl2 APPENDICES.
Chrétien Soret, 1570; * Tileimnnus SieUa de Sigen, à Wilteberg; Arias
MonlanuSy à Anvers; Christian Adrichomius delphensis, Coloniae, ap.
Arnoldum &Iyliuin, 1590.
Hongrie : Lazarus, secretarius cardlnalîs Arigoniensis, quam edidit
logolstadi Apianus I5i8; Georgius Collimitius, quam recognovit
Johannes Spiesshanimer, seu Guspinianus schweinrurtensis franconus,
mortuus 15:29, édita à Pelro Apiano; * Wolfgangus Lazius (mortuus 1565)
Yiennae; Jacq Castaldus, à Venise; * Martin Cynthius vel ZifUkius
noricus, à Nurimberg, 15G7; Johannes Sambucus tymayiensis
(mortuus 1584) Viennae 1570 (voyez Pologne). — Transylvanla : * Joh,
Sambucus^ à Vienne 1566. — Slavonla : Wolfg, Lazius , à Vienne,
* Augustinus Hirsvogelj à Nurimberg, chez Jean Weygel. — Istrie :
Pierre Coppus.
Allemagne : Christianus Schrotl sousbekensis, à Anvers, cbez
Jérôme Gock; Christophorus Pyramius, à Bruxelles 1548; Sébastien
Bîunster (mort 1552), Basiliae, quam Tilemannus Stella emendauît et
locuplelauit, Wittebergae, apud Petrum Zeitz, 1567; Nicolas a Cusa;
— cours du Danube, Christiani Sgrothon; tractus Rheni, anonymi 1569,
et le recueil des cartes d* Allemagne à Anvers, chez Gérard de Jode, de
Nimègue 1569. — Auslria : * Wolfgangus Lazius. — * Tirol; Wolf, Lazius,
Viennœ, ap. Johan. Majorem. — Bavaria : * Erhardus Reysch, lyrolien-
sis, Norimbergse 1540; * Jean Tourmayer ou Aventinus (mort 1584),
Landshuti 1533; * P/«7ipp« Apien, à Ingolsladt 1568. — Salzburg : *
Marc Secsnagel siue Secznagel salzbourgeois. — Suabe : David ZellzUn,
à Ulm, 1562. — Wurtemberg : * Gabriel Gadner ou Garner, à
Anvers (1569) 1575.
— Helvétie : Jean Slumpf, à Zurich, chez Ghristophor Froschover;
* Cille Tschudi (mort 1572), à Bâle, chez Isingrin 1560; Adelberg Saura-
cher, à Bâle, i^4. — Berne : Thomas Scepsius, à Strasb. cbez Bernard
Tobin 1578. — Valais : * Jean Schalbeter, — Franche-comté : * Ferdi-
nand à Lannoy (mort 1579), à Anvers, chez Jérôme Gock ; Cilles Bulûm,
ibidem; Uugo Cusini. — Alsace, Daniel Speckel, à Strasburg, 1576. —
Lorraine : Gérard Mercalor; Joh, ScHlius. — Frankonie : * Sébastien
Rotenhan, à Ingolstadt 1543; David ZellzUn, 1577. — topographie de
Fichtelberg : Caspar Bruseh egeranus, Ulmae, ap. Sebast. Frank.
— Bohème : * Jean Criginger, à Prag, 1568. — Moravie. * PauL
Fabricius, à Vienne 1570. — Silésie : * Martin Helwig neîssin, à.
Neisse 1561. — Luzace et Mîsnie : * Bartholomé Scultet, à Gôrlitz 1569.
— Thuringia : * Jean Mellinger ou Melenger de Hall à Weimar. — Mîs-
nie et Thuringue : Jean Criginger, à Praeg 1568, — topographie de
Mansfeld : Tilemannus Stella , à Gologne chez François Hogenberg. —
Brandenburg : * Elias Camerarius; Léonard Thurneisser, — Poméra-
nie : * Ilenricus Zellius, * Pierre Artonoeius, — Saxe : * Christian
Schroten. — Ditmars : * Pierre Bockel, à Anvers, chez Jean Liefînk 1559.
— Westfalia : * Christian Schrot, Galcarise, ap. Vincent Houdaen, 1572.
— Oldcnburg et Frisia orienlalis : Laurent Michaelis ab Hogenkir-
chen, Anvers, 1579: * Joh, Florianus antwerpianus, Anvers. 1579. —
Munster : * Geofroi Mascopius ou Machop embricensis, Ember ap.
Kemig. Hogenberg 1558. — Hassia : Julius Jasolinus, à Marpurg 1575;
APPENDICES. 213
* Jean Dryander, — Fulda ; Wolfganq Regrwil 1574. — Archieppat.
Colonien. Cornélius Adgerus, Colonise, ap. Francis. Ilogenberg; 1583;
Elias Hofmann, Frankof. ad Menum 1588.
— Pays-Bas. Gilles BuKonius, à Anvers, chez Jean Liefink; Jean Horn,
à Anvers; Malhias Zinck noricus; GaliU belgica, Franciscus Uogenberg
à Cologne. — Gueldre et Cleve : * Chrétien Schrot, à Anvers, chez
Bernhard Putean , et chez Jérôme Cock. — Frlsia occiden : * Sibrandus
Leonis leovardlensis. — Kampen : Georg, Stempelius goudanus.
Colonise 1587. — Brabant, Frise, Hollande, Zeeiand : * Jacquaventria,
à Malines. — Flandres : * Gérard Mercalor, 1540. — Hanonia et
Luxemb : * Jacq Surhonius, — Luxemb : Christian Schrot sousbeken-
sis; Joh, Scillius.
France. Nicolaus Germanus (à Cusa); Jean Stumpf, 1548; Oronce
Fine briançonnais (mort 1555) à Paris, chez Gormont; André Thevet
d*AngouIème (mort 1590); * Jean Jolivet à Paris, chez Oliver Truchet,
1560, 1570; Guillaume Postel (mort 1581), à Paris 1570, 1572. —Bou-
lonais : * Nicolas Nicolaï dauphinois de Lagrave en Oysans , à Paris 1558.
— Yermandois ; * Jean Surhonius, à Anvers , chez Christophor Plantin.
— Picardie : * Jean Surhonius, 1560. — La Maine : Macaeus Ogerus,
Mans, 1539. — Anjou : * Licinius Guyel, à Paris, 1573, — Poitou :
* Petrus Rogierus , Parisiis , ap. Franc. Desprez. — Berri : * Jean Cala-
meus, à Lyon, ap. Gryphium. — Limousin : * Gabriel Simeoni ilorintin
Îmort 1570). — Languedoc : * Charl Lecluse ou Clusius d'Arras
mort 1609). — Venesin : * Slephanus Ghebellinus, — Bourgogne :
Stephanus Tabourotus, — Savoie : * Aegidius Bulioniu^ belga.
Iles britanniques : Gérard Mercator 1564; * Humfred Lhuyd ou
Llwyd, Llhwyd, Lhoyd, denbygien (mort 1570); Christophor Saxton,
Londini 1580.
Skandinavie : iVtcoio Geno, à Venise, chez Vincent Valgrisi, i561, 1562;
Olaus Magnus suédois (mort 1568), à Venise 1363 ; Corneli Antonius, à
Amsterdam; François 3Ionachi, à Anvers, chez Sylvestre a Parisiis;
Levin Algoet, à Anvers, chez Gérard Judeus (de Jode). — Danemark :
Marc Jordan, à Kopenhage, chez Jean Vinilor 1552; Henri Ranlzow,
à Cologne, chez Franc. Hogenberg; * Cornélius Antoni, — Slesivig :
Marc Jordan, à Hamburg. ap. Joachim. Leoninum. — luthia : ilf arc
Jordan. — Islande : * Andréas Velleius,
Moskovie et Russie : Antoin Wied, à Anvers; * Antoin lenkinson
imort 1584), à Londres 1562; Sigismond Herberstein siy rien (mort 1566),
i Bâles, chez Oporin 1556.
Pologne : tabula Sarmatiae, rcgni Poloniae et Ilungariac, utriusque
Valachiae, Turciae, Tartariae, Moscoviae per Florianum, Cracoviae
1528; * Venceslav Grodecki, à Bâle, chez Oporin; Jacomo Castaldo,
favé par Paolo Forlani, à Venise 1568; Andréas Pograbius de Pilzno,
Venise 1569. — Litvania : Mathias Stubitz, à Cologne, 1589. —
Osvietzim et Zator : * Stanislav Por... (Porçbski, Porembski), à Venise
1565. — Prusse : * Henri Zell, à Nuremberg; Caspar Heuneberger
crlichensis, Rcgiomonti, ap. Georg. Osterger, 1576. — Livonie : Marc
Amhroise, à Anvers; * Jean Portantius,
214
APPENDICES.
RECUEIL DE CARTES.
Gérard de Jode nouomagen-
818, 1569.
5. Saxonia inf. Christ. Schrotten.
6. Livonia, loan. Portantius.
Moscqvia, Ant. Jankinson.
7. Polonia, (composit. différente de).
8. Bohemia, Joan. Griguiger.
9. Moravia per... (différente).
Siiesia per... (Mart. Heilwig).
10. Hungaria et Transylv. Matthaeus.
Zinthius.
11. Austria, Wolfg. Lazius.
13. Siavonia, August. Hirsvogel.
13. Stiria.
Carinthia, (Wolf. Lazius).
U. Tiroi, (Wolf. Lazius).
Carniola, (différente).
15. Franconia, (Seb. Rotenhan).
Salzburg, Marc Setznagel.
16. HeWetia, auctorc; .... (différente).
17. Snevia,auctore
18. Vaiesia, loan. Schalbeter.
Basilcae tract. Sebast. Munster.
19. Bavaria, (diffi^epte).
20. Wirtenb.,Georg. Gamer.
Palatin, bavar. Erhard Reysch.
21. 22, Danubius, Christ. Sgrothon.
23. Thuringia, loan. Mellinger.
Misnia, BarthoL Scultet.
24. Hassia, genuinus nec ungue ante-
hae visus typus.
25. 26, 27 trac'tus Rheni , 1569.
28. Clivia.
Mansfeld (différente).
29. Milinster, Godefr. Mascbop.
30. Frisia, (très-différente).
31. Gddria, (différente).
32. Hollande, (échelle réduite).
35. Zeeland. (lo. Dav. mêmeéch. diff.).
34. Brabant, (lo. Daventr.).
5£^. Flandria, (la même échelle).
36. Pays-Bas, Mathias Zinck.
37. Pomerania, Henr. Zellius.
Thietmarsen. Petr. Bockel réd.).
Prussia, Henr. Zellius (réduite).
Abraham Ortelius arUver-
pien8i8 , i^lO,
*idem.
46. Ant. Jenkinson, décoré par d'au-
tres figures.
44. Venceslai Grodecki.
25. (Jean. Griginger, même échdle).
*alia, Pauli Fabricii.
26. Martin. Heilvig.
42. Hungar. Wolfg. Lazius.
45. Transylv. loan. Sambucus.
27. Wolfg. Lazius.
41. Au gustinus Hirsvogel.
*idem.
/'idem.
VWolf. Laz.
24. Sebast. Rotenhan , même échelle.
28. Marc Secznagel.
31. Aegidius Tchudius.
'analogue de Dav. Setzlin 1572.
'idem.
29. loan Aventinus.
30. Tubingse édita l558 (G. Gard.).
Erhard Reysch.
/*idem.
videm.
'alla, Joh. Dryandri.
*alia , Til. Stellae.
24. Godefr. Mascop. (échelle réd.).
20. (lo. à Daventr.?).
15. Christ. Schrot.
19. loan. a Daventria.
18. loan. a Daventria.
16. loan. a Daventria.
17. Gérard Mercator.
14. alla.
*idem.
22. Petr. Bockel.
Henr. Zellius.
Par cette confrontation on voit que sur 52 feuilles numérotées (5-57)
on a 44 cartes. De ce nombre 25 de mêmes auteurs ou différents, repa-
raissent dans le recueil d*Ortel de Tannée 1570; des 21 restantes, 12
entrent dans ses éditions postérieures. Mercator approuve et recofli-
mande à Ortel la reproduction des cartes de Lazius : quelques-unes
furent antérieurement reproduites pour Iode. Il est remarquable comme
APPENDICES. 215
l'accouplement de plusieurs cartes sur la même feuille se rencontre
chez les deux éditeurs, voir les n^ 20, 37, ensuite i4, 23. La position
géographique des pays certainement occasionna cette concordance.
Ortel substitua dans ses éditions postérieures à la Bavière de Jean
Aven tin us, celle de Philippe Âpien, dont la carte est plus analogue à la
Bavière dedeJode; il substitua au Wurtemberg d'anonyme de 1558,
George Gardner qui semble être le même que Tanonyme; il copia la Suabe
de David Setzlin de 1572, dont la carte est très-analogue à celle de de
Jode; et il n'a pas jugé à propos d'introduire dans son recueil les tractus
Rbeni et Danubii dont la reproduction reste à de Jode seul. A Jode seni
restent Saxonia, Yalesia, Glivia et plusieurs cartes d'auteurs qu*Ortel
n'a pas admis dans son iheatrum, à savoir : Polonia, Hungaria, Hel-
vetia, Hessia, Pays-Bas, etc. Iode recommande les cartes de Gueldre,
de Hollande et de Flandre d'une manière singulière, inscrivant au bout
des feuilles : ad exemplar descriptionis quam edidit Romae Mich. Tra-
mesîni , nunc castigatior , prostat Antwerpise apud Gerardum de Iode in
borsa noua. Les cartes de Iode ne sont pas privilégiée , celles d'Ortel
sont sous la sauve-garde de privilège, pendant dix ans personne ne
devait les reproduire. On se demande si cette protection et assurance de
la propriété intellectuelle, venait des égards pour les auteurs copiés ou
pour le copiste des auteurs?
Gérard de Jode, fils d'un mercier, Guillaume, naquit en 1515 à Nimè-
gue. Habile graveur et excellent mathématicien , il s'établit à Anvers ,
où il acquit plusieurs possessions et avait sa boutique. Il publia plu-
sieurs ouvrages pour son ami Ortel. Tous les deux entrèrent en 1547
dans la corporation de S. Luc, l'un comme graveur et marchand d'es-
tampes, l'autre comme enlumineur de cartes. De Jode mourut le 5
février 1791, laissant treize enfants de son premier mariage, et une
Teuve en second. Il est chef d'une famille de graveurs qui ont illustré
l'école d'Anvers. (Ges renseignements sur Iode m'ont été communiqués
par mon ami Yerachter , archiviste de la ville).
Probablement Mercator avait en vue les publications de Iode, quand,
encourageant en 1570 son ami Ortelius à copier les cartes de Lazius :
il accable de réprobation les ignorants qui s'avisent de publier les
cartes, sine ordine, sine proportione, sine discretione , tam falsas et
depredatas, quam genuinas et veras descriptiones in unum corpus con-
gerunt. (Iode edidit genuiuam Hassise).
Cependant Ortelius éprouva que le choix pour former un corps ren-
contrait des obstacles, quand en 1572 il sollicitait d'obtenir le privilège
pour la carte de Hainaut déjà préparée d'après son choix. L'obligeance
de M. Alexandre Pinchart, qui m'a communiqué plusieurs matériaux
des archives de l'état , m'a fait part d'un document à cet égard très-
intéressant : c'est la lettre de Philippe de Sainte Aldegonde, seigneur
deNoircarmes, grand bailli de Hainaut, etc., relative aux publications
d'Ortelius. Voici sa teneur :
Ceulx du conseil prive de sa ma'% m*ont envoie avecq leurs lettres deux
requestes que Abraham OrtoUius, tailleur de figures, leur aurait présente,
afin d*avoir cony! de librement povoir imprimer et vendre la quarte de
Haynnau, et de faict m*en ont faict tenir une ja imprimée, afin que je leur en
216 APPENDICES.
donnisse mon advis, a quoy je n*ay satisfaict pour trouver ce faiet de consé-
quence, et yen meismement que les molles et formes en sont faictes et
dressées. Il m*a semble a correction bien humble d*icelle que cette impri-
merie de quartes du dict pais, ne se doibt permettre, pour les raisons que
yre exce scait, cecy importer au pais. Mais bien d*estre servie escripre aus
dictes du conseil prive, que en tous cas ils fâchent debvoir, par quelle voie
que ce fut, d'avoir du suppliant tant ses patrons, formes, que aultres choses
aprestees pour la susdicte imprimerie, veu certes monseigneur a mon advis,
qu'il n'est requis pour le service de sa dicte majesté, bien et repos du dict
pays, que la dicte quarte soie mise en lumière. Qui est monseigneur, on me
recommondant humblement a la bon' grâce de v« exe*' je prie dieu importer
a cielle en prospérité la sienne sente. Du camp devant Harlem le 20 mars 1572
avant pasques.
Ce n'est qu'en 1579 qu'Orlelius prépara la carte du Hainaut qui
mérita le privilège. Celte carte était celle de Surhonius montois du
Hainaut.
III.
OUVRAGES D'ABRAHAM ORTELIUS
ET LES PUBLICATIONS CONTEMPORAINES A ANVERS.
Supplément au chap, 216, p. i87 ci-dessus.
D'après les indications que M. Félix Van Hiilst réunit dans son
intéressante nolicesur Abraham Ortelius (Liège 18i6), je puis rectifier
et suppléer FinsuiBsance de ce que j'ai dit des éditions de ce bien
mérité anversois, sans épuiser cette question bibliographique.
La première édition de son TheatrumOrbis de 1570 contient 55 cartes;
la seconde de 1571 autant ou augmentée à 64, avec le texte llamand
elle contient 67 caries; la troisième de 1575 montée à 70; la quatrième
parut en 1578.... et une avec le texte français; la cinquième en 1592
compte 108 cartes (avec les cartes de parergon 154); et la sixième du
vivant de Fauteur en 1595, avait 115 cartes (et 52 de parergon). L'édition
^ posthume de 1601 , chez Plantin, était encore augmentée , quod anle
extremum vitse suae postremum recensuit.
Je n'ai jamais vu d'exemplaires accompagnes de quelque langue
vulgaire, flamande, espagnole ou italienne; j'ai vu seulement un
exemplaire du texte allemand : theatrum oder Schaybuch des Erd-
kreizes. Antverpiae 1580, que possédait la bibl. nationale à Varsovie.
L'édition était d'Anvers, où se trouvaient les planches. Une contrefaçon
française est impossible et inadmissible; la seule Italie, à cette époque,
était capable d'essayer une copie. Si une édition à la langue vulgaire
aurait copiée les planches, elle serait une édition licite à l'étranger. Les
cartes et theatrum d'Orlelius sont privilégiés pour un certain nombre
d'années dans le pays où elles paraissaient; ce privilège ne pouvait
étendre son effet à l'étranger, ni même dans le pays après le laps des
années privilégiées (i). Longtemps encore cette liberté de publication
(I) Voici la teneur du privilège de la première édition du theatrum :
Deconincklycke roaiesteyt verbiedt ecnen yoghelycken in aile dese tyne erfnederUmden , dat hem
niemant en venrordere dit boeck, te weten'de tafelen, of te scbriflen desseirs, in tgebeele, oftin
daele, in gheanderleye talen oft sprakcn nae te dmcken ; oft ciders ghedmckt, binnen syne voor-
teyde lamden te brengeo, oft te vercoopen , de tijt van tien iaren naett commende. Op de verbeurte
van aile de selfde naegedructe boeoken, en de boven dien Tjjfcntwintich carolus guldens voor elcken
boeck. Gbclijckt breeder blijckt int original van sijndor majesteyt daerop vericent. Grgheven te
Brossel in den secreten raedt iiit iacr our beeren 4S69 dcn Si ootohris, onde oudcrleeckent.
DE LANGHE,
Eode in don Brabantschen raedt 1569 den 21 Tebruarij, cndc ondcrteeckfint,
DE wrrTE.
Le privilège de la cinquième édition, dft celle de 1592, porte comme suit :
Imp. Rudolphi, Philippi Hisp. rogis, cl cancelbriîC brabanlirr privilogiis, san'ituris est. — N>
II. tR
s 18 APPENDICES.
sans gène continuait, sans inquiéter les entreprises. 11 est assez
plaisant de remarquer vers 1640 les cartes françaises de Jubrien,
éditées à Amsterdam par le républicain Janson, inscrites avec privilège
du roi et se vend à Paris. Il ne manque pas des copies misérables que les
auteurs et les premiers éditeurs devaient désavouer. Berey copiait à
Paris la carte faite à Amsterdam par Blaeuv. Tavernier, Mariette
copiaient les cartes de Janson et soutenaient des relations avec Amster-
dam. La France éditait beaucoup et s'adressait à cet effet à Amsterdam.
Par tous ces temps là la propriété intellectuelle n'était pas encore
inventée (voyez chap. 220, 222 et à la fin de Tappendice précédent).
Le theatrum rappelle les relations mutuelles qui honorent les deux
géographes. La troisième édition du theatrum allait s'épuiser, lorsque,
en 4585, Mercator qualifiait Orlelius de ipse candor et humanilas, qui
quidiispiam labularum nactus fuil , mihi communicavil liberaliter
iametsi in eodem mecum csset instiluto (in Galliœ tab. sludioso Icclori,
sub fine). Us avaient le même dessein de former Tensenible de la
géographie. La question de priorité ne les tourmentait guère, chacun
avait sa tache spéciale, d'un autre genre : Ortelius assemblait , amassait
et formait uu receuil; Mercator élaborait, organisait. La priorité était
à lui , quant en 1569 il édita sa grande carte ad usum navigantium , de
laquelle Ortelius dressa son typus orbis terrarum, qui parut en 1570,
à la tête de son theatrum. Ghymnius fait présumer le magnaniuie
retard de Mercator; je pense que cette présomption n'est pas l'affaire
de conséquence. Ortelius se bâtait comme entrepreneur qui avait du
succès et des moyens. Mercator, au sein de sa famille, ne pouvait pas,
dans son cabinet, élaborer ses produits aussi vite. Je ne sais pas par
quel motif M. Van Hulst suppose les richesses de Mercator. Quand
qtiis alius cuius cuiusque sit conditionit, eas tabulas, qtias Abrahamns Ortclins regiae ntiesUtw
geographus, studio suo descripserit, vol suis impensis primum in lucem edldcrit, tiue eas verum
seorsum dederit, si«e iis tlieati'um suum nuuc auxerit aul postea adbnc addiderit , intra decennium,
à die impretionit ^bsolutoi computandum, typis mandare, vel simili atque eodem qno a dicto Ortelio
«xprimeutur, velaiio cbaractere seu forma excudcre, vei cndendas dare , seu alibi imprexsas adda-
cere, vcndere et dislrahere, paiam sive occulte ausit. Quisquis vero secus l'ecerit, ei statuitur atque
dftconiitur debere non solum adimi vel auferri tabulas et libros imprcssos aut venuiiT expotitot,
quos tilique pnediclus Orlelius, vel eiusdem bxredes, aut mandatum ab eo babentet, auxilio
inagis'vatus cius looi . vel etiam per se ipsi apprebendere et sibi vendicare poterunt , vcrum etiam
irrogari mulctam quae cxpressa est in ipsis dipiomatis dat. annodomini iSOO.
Iroperatof quidem 76 Ratisponae St octobris
subsign. RUDOLPHUS.
Ad mandatum suac rsesar. m. proprium , Estenberger.
Pbilippi vero Hispan. 7tt Antwer]«iae die roeusis Tebr.
signât. SILLE.
Et cancellaria , Bruxcllis die S martii eiusdem anni.
signât. BLYTEUEN.
Je ne sais pas si les douanes étaient châtiées d'empècber l'introduction des réimpressions écran-
gères, m:iis ce qui est évident des privilèges, que par celte mesure l'état se serait privé des amendes
qu'il pouvait avoir des contrevenants vendeurs et le privilégié aurait été dépouille des avantages dn
droit dti coniiSi>atio« que le privilège lui accordait durant un certain uombre d'années. Au reste , le
privilège longtemps n'était qu'une exception : tout le monde ne le demandait pas et à ceux qui
le demandaient on ne l'accordait pas toujours. — Ces privilèges coatinuaieut jusqu'aux temps des
révolulions, pour !20 ans, pour iO, pour 9, pour S; on accordait à des ouvrages considérables pour
!> ans. L'inlroduotinn à la géographie de l'ingénieur Le Rouge, où il y a 91 cartes de demi-feuilles,
gravées en 17i8, n'était privilégiée que pour trois années. Au xviii* siècle parurent en France
les privilèges pour l'auteur et à des hoirs à perpétuité, mais à condition qu'ils ne soient rétrocédés
à personne et s'il plairaitàrunicur d*en faire une cession, le privilège sera , réduit à dix années à
«omptur de ce jour, etc.
api£.>di(.e:$. 219
le célibataire Orlelius avait des moyens à voyager, à faire des collec-
tioDS, d'éditer avec succès et trouvait des éditeurs, certainement rien
ne lui manquait. Les émoluments du cosmographe d'un duc pour la
famille d'un mécanicien d'instruments mathématiques, demandaient
sans doute une rigide économie , quand le cosmographe s'excuse à son
duc, que les ressources lui manquaient pour éditer et quand dans sa
position difficile il faisait tout par lui-même. Le graveur Paseg où
Pascus, qui prépara le frontispice à son allas, n'était pas graveur de
lettres, les inscriptions furent gravées par le père et les fils, et le père
ne cherchait point l'intervention d'Orlelius pour améliorer le matériel
de ses ressources; il puisait seulement dans la collection des cartes
acquises par son ami, qui pouvaient servir à ses lentes et laborieuses
études, et il en lui témoignait une touchante reconnaissance. Ortelius
avait son encouragement, ses conseils, et ses produits s'il lui plairait à
reprodiiire, comme il avait reproduite la carte de Flandre.
^ Parergon contenant les caries de la géographie ancienne et les caries
historiques, parut pour la première fois en 1578, attaché au Iheatrum.
En 1592, faisant de même partie du Iheatrum, il comptait 20 cartes, qui
en même temps forment un volume à pari. Le nombre des caries
moma à 32, qui parurent plusieurs fois, 1609, IGll.... sous le titre de
parergon. Les cartes historiques qui s'y trouvent entraient aussi dans
la géographie sacrée.
Quant à la synonymie des noms, c'était d'abord Arnoud Mylius, qui,
pour la première édition du thealrum , 1570, rogatus ab Abrahamo
Ortelio, e schedis Ortelii in ordinem redegit anliqua nomina, recenlio-
ribus adiecitis. Ensuite Oriel lui-même augmenta cet index et le publia
en 1573, dans son iheatrum, sous le lilre de synonymia locorum. Aug-
mentant encore, il céda ses synonymiasà Plantin, qui en donna une
édition spéciale à Anvers, 1578, 4**. En 1587 Orlelius y mil la dernière
marn et le publia, sous le titre de thésaurus geograpkicus/m-îoïio; le
thésaurus reparut en 1595, 1611 , llanoniai in -4*^. A la place de syno-
nymia, transformée en thésaurus, qui allait former un ouvrage à part,
Ortelius mit à la fin de son thealrum de 1592, nomonclalor ptolcmaicus,
imprimé à Anvers, chez Plantin, 1591.
M. Van Huist compare le trésor synouymique à uire publication
antérieure de breviarium orbis, par Zacharia Lilio, à Florence, 1493;
mais ce petit dictionnaire de géographie ancienne est presque toujours
dépourvu de noms modernes. Nous pouvons rappeler d'autres publi-
cations plus analogues et plus rapprochées à Ortelius. Vers 1550, lo
lexicographe espagnol Aelius Anton i us nebrissensis, publia en langue
espagnole un dictionnaire onomaslicon, de noms anciens, ta ut de
personnes, de divinités, que de lieux et ditï'crcnts autres objets , avec
les interprétations modernes. En 1552, Jean Bellerus extraya de l'ori-
ginal expagnol un dictionnaire géographique de noms modernes;
valgares locoriim appellaliones, interprétée par les noms anciens,
ce qu'il qualifia de synonymie. Le dictionnaire onomaslicon entier
d*André nebrissin reparut augmenté plus correct en latin, vers 1570,
à Anvers, chez les héritiers de Jean Steetius. A celte époque beaucoup
de savants s'excerçaient dans ce genre. Robertus Stephanus , Conradus
Gesnerus, Hermannus Forrctinus, aliique prinii in hoc incubuere.
220 APPENDICES.
Andréas nebrissiensis prépara le plu8 ample onomaslicon , qui fut
encore augmenté après sa mort et édité pour la troisième fois, et pour
la seconde en latin : dictionnarium proprium nominum, à Anvers, in
sedibus viduae et hœredibus Joannis Stclii, i595, 4"*, accompagné de la
synonymie Joannis Bcllerii.
A cette époque des études anciennes, il n'y a rien d'extraordinaire,
quand Ortelius rencontre par tout une émulation sava^nte et de la
haute Instruction. Par son savoir, ses capacités et son infatigable
assiduité , il a su surpasser ses contemporains et gagner Tautorité res-
pectable.
M. Van Hulst annote Touvrage d'Ortelius : auraei scBculi imago, sive
Germanorum velerum vila, mores, ritus et religio cum iconibuSy édité
apudPhilippum Gallseum 1598 4^ produit de sa vieillesse ; mais malgré
la longue insouciance de sa jeunesse, il a publié quelques opuscules
bien antérieurement, et personne ne s'empresse de les rappeller. La
bibliothèque de Louvain , par exemple, possède son itinerarium bélg.,
publié en 1586 à Anvers, 8<».
M. Van Hulst rappelle encore un fait important pour la bibliographie
géographique (que nous avons mentionné, chap. 2, t,l, p. 7). Marc
Yelser, ayant trouvé en 159G la cartes des itinéraires romains de la
collection de Peuiinger, prépara sa copie et l'envoya au vieil Ortelius.
Celui-ci, malgré son âge trop avancé, ne recula point devant la tâche
que lui imposait la confiance de Yelser. La fameuse carie de Peutiuger
sortit des presses de Plantin , dirigées alors par son gendre Moretus,
l'année même de la mort de l'illustre géographe, 1598.
La publication géographique s'animantalorsà Amsterdam, produisis ^'
un petit atlas publié par Pierre Heyns, sous le titre de miroir du mondi
Zacharias Heyns reproduisant ce petit recueil de petites cartes de soi
père , dans Tannée de la mort d'Orlelius , changea le titre en : épitoi
du théâtre d'Abraham Ortelius, à Amsterdam, par Zacharie Heyns,
l'enseigne des Trois Vertus, 1598, petit 4<* oblong de 80 charmani
cartes taillées en bois. Il n'y a presque rien d'Ortel dans ce recuei"'
l'Europe y est marine, les caries ont une autre origine; mais Heyi
décorant son recueil du nom d'Ortclius, voulut honorer la mémoire c
géographe que la mort venait d'enlever.
La pierre tumulaire, érigée par Anne Orteliaà son. frère Abrabai
cielebs caclibi , est trottée par les pieux qui fréquentent la catbédi
d'Anvers; les savants de l'Europe rendent hommage à Fillus'
géographe , et nous ne savons pas nous rendre un compte assez pos
sur ce qu'il a élaboré.
Cependant, à part ses grandes et mémorables publications, il y auK*<SKit
assez à examiner dans la nombreuse livraison des cartes qui circulaà^'ot
isolément. Ortelius changeait et regravait ses planches , et les car
qui composaient les atlas circulaient comme cartes volantes, sans au <:
texte descriptif. Mercator laissait circuler les siennes isolément, con
le prouvent la carte de Orbis terra; 1585, conservée aux archiver à
Bruxelles, et celles de Iialia 1589, deWalachia, Servia, Bulgarmâ,
Remania 1500, de nova tolius Graecise descriptio 1590, de Moc^a
1595, conservées dans le musée britannique à Londres; je possèdo ^
Crète, sa Lorraine, son Alsace, en feuilles volantes. Elles entrai^^n^
APPENDICES. 221
dans la coaiposition de i'allas et circulaient isolément du vivant do
leur auteur (2).
Dans rappendice précédent (p. 215) j*ai mentionné quelques exemples
du changement des cartes dans les theatrum d*Orlelius, et de leur
remplacement par d'autres auteurs. Ces changements et la regravurc
des cartes furent fréquentes. L'Artois de l'édition au texte irauçaîs est
d'une autre gravure que de l'édition latine de i592 ; l'Amérique était
changée, gravée et refaite au moins trois fois , en dernier lieu elle
subit les rectifications à Amsterdam, où (après i615) on y traça le cap
Horn et fretum le Maire. Ces variétés reparaissent dans les cartes
Tolantes qu'Ortelius laissait circuler sans aucun texte. Elles paraissent
ordinairement usées , ainsi que leur émission volante avait lieu après
le tirage que demandaient les volumes du theatrum, et ce tirage
Tolant suivit chaque édition, parce qu'on a des cartes volantes de la
première édition. Souvent ces cartes volantes sont un peu changées ,
leur date raclée, les échelles de la graduation ajoutées où elles n'y
étaient pas; le nombre d'épigraphes augmenta par des additions de
nouvelles dans les places vides ; les cartes doubles sur une feuille ,
y sont autrement accouplées; enfin, regravées, copiées à neuf (s).
La cartographie à Anvers, du vivant d'Ortelius , ne se bornait point
aux seules reproductions de ce géographe. Ortelius lui-même cite les
plus remarquables. Gérard de Jode, formant ses enfants en graveurs ,
continua ses entreprises : en 1577 il publia l'Italie de Castaldo; en 1579
la Frisie orientale de Laurent Michselis ab Hagenkerchen (la même,
n*> 45 du theatrum de 1592); en 1583 l'Autriche supérieure de Aug.
Hirsvogel; entre les années 1587 et 1592 ps^rut chez lui une nouvelle
carte de Pologne avec l'effigie de Sigismond lil , qualifié de hères
proximus Suecise.
Le recueil de Gérard embrassait d'abord l'Allemagne et les pays au
{t) Les cartes de Mcrcator portent ordinairement son nom. Mais la plupart de celles qui se pré-
sentent comme volantes sont postérieures, publiées et republiées par tlond, Janson, Yisscber. Elles
portent les dates 1610, 1619, etc., jusqu'à 1670. Le musée britauique en conserve '22, on les trouve
dans les atlas édités par Hondius, accompagnées de la description.
Quant aux éditions bondicnnes des atlas, leur suite régulière m'est inconnue : Le premier con-
tenant se cartes, parut 1606, a Judoco Houdio auctns, cum noua doscriptiouc P. Montani dispensis
Cornelii Nicolaï (catal. van Hulthem 143^9). Le second, editio secunda 1607 (bibl. nation, à Varsov.);
or, celui de 1690 serait le troisième. Le quatrième auctus porte la date de 1615, (musée britann.)
cette date détermine aussi l'édition allemande qualifiée de quatrième ( j'en ai la 2"* partie). — La
dixième édition est de l'année 1628, et contient i7o cartes (cat. van Huit. 14380). Celle de 1630 porte
le titre d'allas perfectus (musée britann. bibl. nation, à Varsov.). — Après cette dernière édition
l'atlas de Mercator parut en 1633, Ger. Merc et Hcnr. Hond. atlas bisnominis à trois vol. (bibl. nat.
à Varsov.]. Il est aussi connu à la même date avec un texte français (oat. van Huit. 14352). Cette
édition, BU eerstuytbet latyu in onse nederlandsche laie getransiatcert, parut en 1634 by Jan Jasseu
(je Tai). L'édition anglaise by Hexham à Amsterdam 1636, en deux vol. (musée brit.). —C'est ce
que je sais positivement. Par induction je puis présumer l'existence des éditions de 1619, 1620,
1635, 4637, 1640. — La suite de l'allas minor in-4'>, est non moins nombreuse, mais je ne saurais
relater de ce nombre'que l'édition de'1607, qui est probablement la première ; ensuite celle de 1610
à Dordrecbt (musée brit.); Oclle de 1630 (bibl. Lovan.); celle du 1632 sumptibus Job. Cloppenburgii
(catal. Iran Hnltb.); celle de 1634 (bibl. Lovan.) et une allemande sans date (bibl. Lovan).
(3) Ce que j'avance sur les cartes volantes d'Ortelius, est fondé sur l'examen de plus de 50 que je
postiède et qui se trouvaient dans un volume contenant à peu près 200 cartes pour 1 Europe. Dans ce
nombre de 50 les portions de France et d'Allemagne sont à moitié de ce que contiennent les der-
nières éditions du tbeatrum. — Il est quelquefois difficile de distinguer le produit directe d'Ortelius.
Dans ses tbeatrum il y a très-peu de cartes sur lesquelles il plaçait son nom d'éditeur, ainsi qu'on ne
5 eut s'assurer de l'origine qu'en confrontant avec celles des volumes du tbeatrum. Après la mort
'Ortelius, son nom ne ligure que dans les copies des caries de son parergoû. lanson dans son^atlas
de 4638, attribue à Ortelius une carte du Marok.
2â^ APPENDICES.
delà (4). II raiigmcniait cl en même temps préparait lentement \es
cartes pour une autre partie du recueil. Les caries de Hainaul, de
Lorraine; deux de Palestine; trois de FAsie, copiées de Jacq Castaldo ;
celle de Portugal par Alvaro Secco , et celles de Naples et d'Espagne
par Pirrho Ligorio, portent son nom d'éditeur; quantité d'autres
parurent anonyme.
De son vivant Cornélius de ludoeis (son fils), né h Anvers, élabora
une mappemonde, ou plutôt réduisit la carte de Marcator ad usum
navigantium sur la projection cylindrique hane orbis universatem des-
cHplionem Corn, de Judœis anlvcrpien, pridie calend. novemb. in aima
academia duaccnsi a, 1589 perfcil. Après la mort de son père, il se mit
à compléter les cartes pour en faire un atlas. China colleclare Comelio
de ludœis; Americsc pars boréal is a C. de ludœis in lucem édita ; nova
totius Europse tabula ex magnis Gerardi de ludaisp. (patris) desumpta
1593; cette Europe, Asie, Afrique, Croalia, Germania inferior, formis
hœredum Ger. de ludœis, sont les cartes complémentaires préparées
par Corneille {5).
Enfin parut Tatlas sous le titre de spéculum orbis terrarum, dont la
première partie contient 54 cartes; la seconde intitulée Germania
geographicis labulis illustrala per Cornelium de ludœis antverpianum^
au nombre de 49, et deux planches (gravées par Anton. Wierinx)
représentent ordines imperii. A la fin de cette seconde partie on lit :
vidua et hœredes Gerardi de ludœis, suis sumptibus hoc opus geographi-
cum cur avère imprimi apud Arnoldum Coninx, Aniverpiœ, anno 1593»
Un exemplaire de ce spéculum, aussi précieux pour Thistoire de la
cartographie que le theatrum d'Ortelius, se trouve dans la bibliothèque
de rétat à Bruxelles (catal. de Van Hulthem 14356, p. 31).
Le spéculum de 83 cartes contient les cartes confectionnées depuis
25 ans, et tout nouvellement préparées. Plusieurs anciennes de la
seconde partie sont remplacées par de nouvelles (encore par Gérard
père : 6 Prusse, 10 Pologne, 12 Moravie, 30 Frankonie, Ai Pays-Bas,
45 Frisie occid., 46 Hollande); la recommandation de l'origine romaine
disparut, remplacée par cum privilégie, surtout des cartes des Pays-
Bas. Chaque carte est accompagnée d'un texte descriptif, et l'intro-
duction mathématique traite des éléments cosmographiques et carto-
graphiques.
Elle traite de la projection in piano, des cartes hydrographiques,
quibus naut^ in quolidianis navigationibus utunlur; examine son
imperfection et semble vouloir ignorer la projeclîon mercatorienne,.
connue depuis 25 ans. Quand elle traite de la projection stéréo-
graphique de l'hémisphère, elle relate qu'au rapport de ï. Ziegler (ift
(4) La série des rartes lie ce recueil, que j'ai donnée ri-dessus page 21idu II* appenii. doit être
couiplëlée par i , Germania ; 2, Suecia per Livinuin AIçoel ; 3, Dania et Ilolsatia ; 4, déplacée sous le
numéro 37. — Il parait que la 35 et 36» sont les dernières du recueil.
(5) La Chine oollectore C. de ludgnis, offre l'image de celle qu'on voit n* 13i de notre atlas , seule-
ment elle est encore privée de Corea et un peu plus rondement déTeloppée. — Le» cartes de l'Asie
de Castaldo, décèlent qu'Ortelius avait calqué son Asie sur celle de Castaldo, telle est son extension et
analogie, seulement il opéra les changements de plusieurs positions et exposa les connaissances plus
avancées des ilcs. (Voyez uncportiou de cette composition dans les n<" i32 et 137 de notre atlas).
— Il est bien de remarquer comme Rumold inscrivit sur son Europe : ad maguae Europse Gerardr
Mercatoris p. imitalionem édita ; et comme Corneillo en fait un écho, inscrivant sur la sieaoe : ex
raagois Gerardi de lodaeis p. desumpta.
APPENDICES. 235
commentariis quos in sec. uat. liist. C. Pliiiii scripsii) author huius
descriptionis fuit Ârzahel arabs, palria tolelanus. Jean Ziegler, historien
et mathématicien allemand bavarois de Landaw, mort 1549, a été
contemporain de Verner et de Slabius, auxquels est attribué Tinven-
tion de la projeclion slércographique. L'introduction de de Iode ,
donnant son modèle, rinlitule : sequiUir (ip;ura hemispherii Arzahelis,
ensuite elle dit : anle annos aliquot prodiit ex aedibus Gcrardi
Mercaloris viri in cosmographia longe primi, hoc modo descriplus orbis
ierrarum. Elle connaissait cependant les projections examinées par
Yerner, quand elle dit : loh. Yernerus in libello de quatuor modis
describendi terrx superficiem in piano , addidit tertjum (ad duos
Ptolemaei) sed valde irregularem. C'est aux arabistes de constater
combien Arzahel participe à cette invention. — Qui élaii Tauteur de
rintroduction du spéculum? il n'est pas dit : probablement l'étudiant
de l'académie douaisienne, Goreinlle de Iode lui-même (c).
Lorsque le spéculum de Corneille parut, Orlelius était à la cinquième
édition de son lhealrum,et il en vit encore une sixième. Après sa mort,
Planlin , possesseur des planches, en donna, en 1601, une septième.
Theatrum orbis Abrahami Orlelii , extat in officina planliniana encore
en 1612, dit le titre de l'édition, qui contient 197 planches et dont le
parergon n'est composé que de 5 planches. L'éditeur est Moretus, et
le même volume à la fin porte : Anlverpiœ ex officinœ planliniana
Balthasaris Moreli 1624 (?). La double date du volume décèle que les
reproductions du theatrum continuaient à Anvers assez long -temps,
augmentant le nombre des cartes, ne renonçant guère ni à celles
qui portent l'année 1594, ni aux plus anciennes qui remontent à
l'année 1570.
On repète que H(mdius fit acquisition à la fois des planches de
Mercator et d'Ortelius. Mais ces reproductions aussi différées, semblent
contredire cette assertion , et je ne rencontre aucune mention d'une
édition du theatrum à Amsterdam. II faut donc admettre que les
planches d'Ortelius passèrent dans les mains de Hond bien plus tard ,
ou que les Plantins se réservèrent l'énorme tirage, qui le mit en état
de multiplier les éditions. C'est aux bibliographes d'expliquer cette
question; c'est aux bibliographes de collationner toutes les éditions,
d'indiquer les changements dans le texte descriptif. L'histoire de la
géographie s'en réjouira et en saura tirer des conséquences.
Des que les planches d'Ortelius furent transportées à Amsterdam , il
restait aux anversois de l'imiter, de le copier. Jean-Baptiste Vrints ,
graveur en bois, né 1552, mort vers 1615, se qualifia d'abord semulus
studii geographiae d. Abrahami Ortelii , et édita je ne sais combien de
cartes (s). Il publiait 1601, 1602, l'épitome du théâtre d'Ortcl. En
(6) VanHulthem recommande sur Corn, de Iode, un article deFoppens, bibl. bclgica, 1. 1, p. 209.
(7) Je tiens cette notice de l'amitic de M. Van Even, bibliothécaire, de la bibl. de l'universitc de
Louvain, où se trouve l'exemplaire du theatrum de cette date. Le parergon de l'année 162i est
accompagné maintes fois de la table peu linger-Tclser, éditée par Moretus, comme nous l'arout men-
tionne dans la note 1i du cbap. 5.
(8) Jean Baptiste était fils de Gérard Vrints et de Jeanne van Wynterbeke ; il a été rpçu dans la
corporation de S. Luc <S75, épousa Claire van de V^ouwer en 1597, qui lui mit an monde Jf au
Baptiste, qui eu qualité de graveur, entra en <6î4 dans la corporation de S. Luc, dont il fut doyen
déjà 1657.— Parmi l»*s cartes éditées par J. B. Vrints, cmnie d'A. Ort., se trou>o celle du lac Loman,
publiée en iC07, et dédiée à Jacobo Colio Ortcliauu.
224 APPENDICES.
même temps reproduisirent ces épitome» Michel Gognet, mort 1623, et
Philippe Galle, qui éditait déjà en 1585 et 1594, theatri orbis terrarum
enchiridion, apud Ghristoph. Plantinum.
•Philippe, de Gatherine Tolland son épouse, procréa en 1571 Theodor
Galle, Galleiis, Gallaeus, un des plus habiles et des plus laborieux gra-
veurs de son temps. En 1605, mis en possession de la maison appelée
Witte Lelie, située dans la rue des Tanneurs, il reproduisit quantité
de caries du théiktre d'Ortelius et beaucoup d'autres. Les Pays-Bas
surtout demandaient ses soigneuses reproductions. Il mourut 1630 (9).
 cette époque les modèles indiqués par Ortelius allaient céder à
d'autres produits. On le voit par les publications de Pierre Verbist,
quoiqu'il n'indique les sources que très-rarement. Né en 1607, après
la mort de sa mère, dans sa tendre jeunesse, en 1617, il fut mis par son
père en possession de la maison America ou Nouveau Monde, située
dans la rue des Lombards, 011 II allait reproduire ses petites et grandes
cartes jusqu'à sa mort 1674 (10).
Il faut espérer que bientôt on preniira à cœur d'élucider l'importante
époque pour la géographie , où les Pays-Bas avec l'Italie devancèrent
tous les pays dans la publication des cartes géographiques.
(9) Inrerioris Germanise oova dcscriptio ; Job. Bap. Vrinlins, 1606, T. Gallaeus rccndit : proba-
blement après la mort de son premier éditeur. Il copiait Germaniae typus Praacisci Hofreabergii ;
Galliaro Pctri Piautii. — En 1610 T. Galle fut doyen de la corpor. de S. Luc; il épousa CaUkeriBfl
Blaerentorf, fillo de Jean cl de Martin Plantin , petite fi lie du célèbre Christophe Plantin.
(10) Pierre Verbist le jeune naquit de Pierre, mort en 1646, et de Gertrnde Bgbert, morte en 1617,
il entra dans la corporation de S. Luc en 164t, et la même année épousa Catlierine Oliviers , qmi Ivi
mit an monde, en 1647, nue fille Marie, mariée cnsnite an graveur Martin Bourbe. — Je tiens ces
détails sur les familles de mon ami Verachter, archiviste de la villo d'Anvers , qui amassa dans sori
rii-be cabinet à pen près 400 cartons d'échantillons des produits d'autant de graveurs d'Anvers, et
fouillant de nombreux archives et documents, réunit des notes et renseignements tr es -intéressants
sur chacun des graveurs.
IV.
INSCRIPTIONS DES COMPARTIMENTS
DE LA CARTE DE GERARD MERCATOR,
INTITULÉE : AD USUM NAVIGANTIUM,
ÉDITÉE EN 1569.
— LMnscription placée sous la dédicace , porte en deux colonnes :
Inspectori S,
In hac orhis descriptione tria nobis curse fuerunt. Primum sphaerœ
superficiem ita in planum exlendere, ut situs locorum tam secunJum
directionem , distantiamque veram, quamsecundum longitudinem lati-
todinemque débitant undequaque inter se correspondeant, ac regionum
figuras in sphaera apparentes : quatenus fieri potest, seruentur : ad quod
noua meridianorum ad parallèles habitudine et situ opusfuit, quse
enim a geograpbis hactenus aeditis sunt conscriptiones , meridianorum
curuitate et ad invicem inolinationem inidoneae sunt ad nauigationes;
in extremitatibus quoque figuras situsque regionum, propter obliquam
meridianorum in parallelos incidenliam adeo mire dislorquent ut
agnosci non possint, nec distantiarum rationes obseruari. In marinis
nauclererum tabulis gradus Ipngitudtnum per omues parallelos usque
in polum crescunt supra sphsericam rationem , nam perpétue œquales
manent gradibus sequatoris, at gradus latitudinum minime crescunt,
quare ibi quoque dislrahi enormiter figuras regionum necesse est, et
vel longitudines ac latitudines, vel directiones distantiasque a uero
aberrare, et cum magni ea causa errores committantur, ille caput est,
quod trium locorum inscriptione ex une sequinoctialis latere facta
secundum triangularem aliquam dispotionem, si médius quiuis extre-
mis iusta directione et distantia respondeat , impossibile sit extrêmes
similiter inter se respondere, quibus consideratis gradus latitudinum
versus utrumque polum paulatim auximus pro incremento paralle-
iorum supra rationem quam habent ad sequinoctialem, quo id conse-
quuti sumus ut quomodocunque quis duos très pluresue locos inscribat,
modo ex his 4 : diflerentia longitudiuis, differentia latitudinis, distantia
directione, duo qua^Iibet in unoquoque loco ad allerum collato obseruct,
recte se habebunt omnia in cuiuslibet loci ad quemlibet collatione, et
nuUus uspiam error commissus reperietur, quem in vulgaribus nau-
clerorum tabulis multis modis, potissimum in maioribus latitndinibus
admitti necesse est. Altcrum quod intendim fuit ut terrarum situs ma-
XU 19
/
2S6 APPENDICES.
gnitudines locorumque distantias iuxta ipsam veritatem quantum asse-
quilicetexhiberemus^inhocextreinam diligentiam impendimus marinas
Gastcllanorum Portogalensiumque tabulas, tum inter se, tum cum
plerisquc nauigationibus impressis et scriptis conferentes , ex quibiis
omnibus scquabUiter inter se coneiliatis hinc terrarum dimensionem
et situm damus, secundum ea quae hactenus obseruata sunt et ad nos-
tras manus peruenire potuerunt castigatissimum. — Tertium quod
tractandum suscepimus fuit ostendere quae partes orbis et quousque
veteribus innotuerint quo antiquse geographiaî limites non ignorentur,
et priscis ssecuUs summus honos deferatur. Dicimus autem très esse
distinctas continentes, primam e cuius medio creatum muUiplicatum-
que genus humanum in omnem undique terrarum dissiminatum est :
secundum quod noua India dicitur : terciam quae meridiano cardini
subiacet. Harum posteriores duse veteribus ignotse penitus perman-
serunt, uisi forte noua India sit que apud Platonem est Atlaotis.
Prima tametsi tota non fuerit a Ptolomeo in tabulis assumpta
omnis tamen ambitus eius oceano terminari agnitus et maxima
parte a veteribus descriptus est. Et quod ad tabularem Ptolomei
descriptionem attinet, ex bis quœ de Gangis situ demonstrauimus in
hoc opère, constat eam comprehcnsis insulis quas ibi diximus ab
orientali parte ad Thamum usque Cathai promontorium progredi, obi
(ut Melse placet) extremus Indiœ angulus meridionalis lateris ter-
minus inrtiumque orientalis existit. A meridie hinc quidem ad Prassum
Africse promontorium et Madascar insulam, inde ad Hippodroman
Aethiopise in medio sinu Hesperico terminatur. Septentrionalis orae
extrema post Cimbrorum promontorium estLiuonia, sed assvinptis
simul insulis Scandia, Albione, Hibernia, Ebudibus, Orcadibus, et
Islandia, quam certum est esse Thulen ex Plin. lib. 2 , cap. 75 , el
lib. 4, cap. 10. Solino cap. 25, et Pomp. Mêla lib. 5, cap. 6. Reliquas
ambitus septentrionalis a Plinio transcensis Ripheis iugis describitor
et ex sinistro littore Scythici oceani Noruegiam , Suediam , et Finlan-
diam sub nominibus Balthia, Basilia, Scandinavia , et Eningia perla-
strat lib. A, cap. 15, sed tanquam insulas, quod isthmum qui Fianicum
sinum a Granduico distingit ignoraret. Dexlrum littus prosequens
lib 6, cap. 15, primum post Hyperboreas gentes Lytarmem Riphei
montis promontorium ponit, deinde Arimpheos plurimasque alias
nationes quse circum mare Gaspicum eiusque ostia sunt, putabat enim
in oceanum Scythicum erumpere, postea cap. 17 residui littoris condi-
tionibus et populis enarratis, Tabin promontorium superat , et per
conuersam in orientem estiuum littorum fatiem ad Seras procedit,
deniqne in Indiam reuertitur. Quod itemreliquum erat Africae a Prasso
promontorio ad sinum Hespericum, Jubae régis teslimonio circumna-
uigata3 dicit lib. G, cap. 29, assignatis etiam aliquot stationibus eios
nauigationis qua ex India in Mauritaniam itur, et multo antea, ut est
apud Herod. lib. 4 , iussu Nechaonis Aegypti régis Phœnices quidam
Arabico sinu egressi biennio Africam usque ad columnas Herculis
circuranauigarunt. — Et postea Eudoxus quidam apud Melam cum
Lathyrum regem Alexandriae profugeret, Arabico sinu agressus Gades
usque peruectus est. — Gertum est igitur oceano cingi continentem
nostram et a veteribus ambitum eius notum, ac pro maxima part(
APPENDICES. ^7
descriptum esse ipsorum autorilate constat, qiiare manifestum est
errare eos qui Partogalensium nauigationes Asiaticos longe Plolomei
descriptionessuperare aifirmant, cum iuxta ea quœ de Gangis et Âurex
silu adferimus, multum adhue ab eiusdem terniino distare cas constet.
— Les indications de nouvelles découvertes sont annotées dans les
trois suivantes :
Anno 1495 cuui iain ionginqute nauigalionis studium per conten-
tionem ferueret inter Gastellanos et Porlogallcnses, Alexander Poniifox
lirailem statuit merîdianum circulum 100 Icucis distaniem a quolibet
iDSularum capitis Viridis et earum quas vocant Açores, qui utriusquie
partis nauigationes et conquirendi iura determinaret, occiduum orbem
Castellanis, orientaiem Portogallensibus determinans. Retractaloaniem
hoc limite ab utrisque propter incidentes allercationes, anno 4524
constitutus est communis limes meridianus 570 leucis in occasum dis-
tans ab insula S Antonij Gorgadum occidentalissima.
Anno Domini 1497 primus Vasco de Gama superato 20 Novembris
capite Bone spci et Africa circumnauigata Calliculium peruenit
mandante Emanuele I , rege Potogallise 15.
Prima orhis circumnauigalio.
Ferdinandus Magellanus anno Domini 1594 20 Septembris soluens
ex Hispania, sequenti anno 21 octobris ad fretum a se Magellanicum
appellatum, peruenit ac primus illud penetrauit, inde Moluccas petiit,
in Borascis insulis cum 8 hispanis occissus est, reliqua classîs lacera et
mutila orbe deinceps circumnauigato post tri^nnium prope exactum in
Hispaniam reversa est.
— Les trois inscriptions suivantes expliquent les révolutions latares
et les connaissances anciennes , la première et la troisième sont en trois
colonnes :
De Presbilero Joanne Asialico et 'prima dominij Tarlarorum origine.
Eo terapore. quo communibus copijs Antiochia Syriaî a Gbristianis
obsessa et expugnala est, anno 1098 erat monarcha regionum orienta-
liam Asiae Coir Gliam, quo mortuo sacerdos quidam et pastor Nestoria -
nos arripuit dominium populi Naiman in terra Naiam , ac deinceps
totius orientis impcrium, uocatusquse est (ut erat) prcsbiter et rex
Joannes, quo defuncto imperium sibi arrogauit frater ejus Yuth , qui in
Caracoran dominabatur et Gham se vocauit, id estdominum. Hicdum
meluebat succrescentes multitudinem et vires Sumongaiorum hoc est
aquaticorum Mongolorum , qui proprie Tartari dicebantur a Tarlar
flumine patrie, quanquam nec regem nec civitatem habcrent scd pas-
tores tantum essent et tributum annuum pendcrent, voluit illos in
varias regiones dispergere quo rebellandi potentiam frangeret, verum
illi cognationis et mutuse societatis iura relinquere nolentes, conspira-
tioDC facta fugerunt versus aquilonem , amplam ibi et natura munitam
rcgionem occupantes in qua etiam negato tributo tueri se posseni et
228 APPENDICES.
liberlatem vindicare. Post paucos vero annos, ciim (ut habet Gnlielmus
Tripolilanus) gregibus imperatoris sui Vutcham grauarentur cxteri
Mongali, autalioqui forte propter erepluni Tartarorura tributum veia-
rentur, faber quidam ferrarius Mongolus, nomine Chinchis iniorîœ
pellendse et liberlatis asserendie auidus Sumongalos ad defectioDeai
sollicitât, Tartaros revocat et comraunicatis consilijs, omnium consensu
rcx creatur anno Domini 1187, mox eas rcgiones qusc ultra Belgîan
montem erant invadens, facile omnes adeptus est, quoniam ut erat
prudens, recte Victoria ulebatur, in victos minime seviebat, sed uni-
cuiquae lubenter se submittenti et milîlia operam suam communicanti
vitam, coniuges, liberos, et substantiam omnem salvum esse iubebat.
Deinde montem Beigian ubi in oceanum excurrit superans agressus est
regnum Tendue sedem imperialem Vutcham , quo deviclo, foetus est
monarcha orientis, vixit post Vutcham sex annis, in quibus multas
prouincias impcrio suo adiecit. Sic imperium ad Mongalos peruenitet
Tartarorum dicitur, cum quod horum occasione et opéra conquisitum
sit, tum maxime quod communi iure et societate uiventes Mongali
omnes generaliler Tarlari vocarentur. Mansit autera Vutcham cum sua
posteritate rex Tendue, sed sub tributo et Tartarorum imperio. Haec
breviler collegimus ex M. Paulo Ven :, Haitano Armeno, et Gulielm(^
Tripolitano Dominicano Anconensi, qui anno 1275 a Gregorio 10 missus
fuit ad Tartaros, quo prima dominij Tartarici origo et sedes nota esset,
ac de veritate eius Presbiteri Joanne qui in Asia regnare creditut est
bactenus, tum quoque diversum esse eum ab illo, qui usque hodieia
Africa Prête Giam appellatur constaret.
Quod Nigir in Nilum fluat,
Nigirem iluuium cumreliquis in Libyse paludem fluentibus inde cum
Gir fluuio continuari credimus, non solum nominis aiBnitate ducti,
uerum etiam parlim quod tôt tamque longe labentia flumina ab uno
tandem lacu absorberi sine alia deriuatione credibile non sit, partim, et
quidem maxime, quod Solinus cap. 50 et 55. Nili aquas inde produci
ingénue asserat, ac latino id explicans cap. 55 ex autoritate Punicorum
librorum et tradilione Jubse Mauritanie régis dicat Nilum originem
babere ex monte inferioris Mauritaniae qui oceano propinquat, euraquae
in Egypte exundationis incrementa sentire, quando aut copios'or nix
liquescens aut imbres largiores ab bac origine et Mauritaniae montibus
detluxerint. Dicit autem bis eum per cuniculos subterraneos con-
speclum subtcrfugere, prîmum vbi e Nilide lacu eifusus fuerit amplior
mox e Gesariensi specu (ad Vsargalan opiner montem) prorumpens,
deinde ilerum anliquam Nigrim iluuium (qui Gir Plol. dicitur) Africam
ab Aethiopia seiungeniem elTundat. Tertio item absorberi et per sub-
terranea e Nubia palude in aliud fiumen erumpere indicat Ptol. lib. 4,
geogr. cap. 6. Eadem fere que Solinus habet. Plin. lib. 5 cap. 9.
De vèro Gangis et Aureœ chersonesi sUu,
Ea quae longa experientia discuntur si ad perfectam ueritatis cogne- —
tionem progredi non autem falsitate obscurari debeant , sic instituendr
sunt, ut castigaiis quse per manifestas rationes falsa sunt, probabîli
APPENDICES. 2^9
retineantur, donec experientise et ratiocina tiones omnes intersecoiisen-
taneac res ipsas in sua ueritate ob oculos ponant, talis est geographia,
quam si volumus vetcrum inuenta temere quauis occasione transponere
commutare aut invertere, non modo non perficiemus, sed pro unius
erroris emendatione ceatum veritatis depravabimus et confusissîmam
tandem terrarum etnominum congeriem faciemus,in qua, regionessuis
locis nec nomina suis regionibus reponantur, quale quid hodie in Indise
descriptione sit a geographis, dum nimis absurde Gaugem celebralissi-
mum fluuiumoccidenlaliorem faciunl Cincapura promontorio et Tapro-
bana, qui veteribus multo fuit orientalior, atque universam deinceps
Indiae descriplionern qusc apud Ptolomeum est inverlunt et confundunt
nihil illi ullra dictum promonlorium concedentes, quod inpriiuis nobis
refellenduni est, quo Plolomeo sua slet autoritas et geographica veritas
eruatur, quse non minus vera nomina quara veros locorum situs postulat.
Acprimu m constat eam descriptionem non obiter a Ptolomeo congestam
esse, sed inde usque ab Âlcxaudro Magno muUorum terra marique pro-
fectionibus, multorum obseruationibus banc figuram accepisse, et emen-
datius collectam a Marino, inlegritatique a Plolomeo reslitutam, quaFe
cum tôt seculis tôt que artificibus elaborata sit, non est possibile tam
a vero recedere ut tam longi litloris transpositione fallat , noque enim
enormiter poterat tantorum littoris parlium, quanta sunt a Comara pro-
montorio ad Taprobanam adiacensque ei promontorium, ac dehinc ad
Gangem et Aurcam, neque tam frequentarum (ut copiosa locorum ins-
criptio arguit) consequenlia ignorari , ut qui prior erat posterior pone-
retur, et Ganges longo interuallo Taprobanam sequeretur qui (ut nostri
Yolunt) multo antecederc debeat. In directionum cursu falli poterant
Tcteres propter nauigandi arlem adhuc imperfcctam, et quod negleclis
fera directionibus liltora soléant legi. In particularium itidem locorum
transpositione errare poterant, at sane in buiusmodi quam dieimus
eonsequentia nequaquam. Ârrianus grauis autor in Periplo veritalis
nobis iudex est, cui ab Indo in meridiem est Comara, unde iuxla con-
sequeotiam liltorum pcr Colchos , Camarum, Poducam et Sopatmam
peruenit in Taprobanam et adiacentem illi regiouem Azaniam ubi num
Malacha est nostris, et Plolomeo Mesolus fluvius, Arriano item Mazalia
regio, postea per Desarenam, Cirridas, Bargisos, Hippoprosopos demum
ad Gangem fluuium et emporium pertingit. Ad lisec via regia stadiorum
20000, quœ est ab Indo ad Gangem et Palibotram apud Strabonem
lib. 15 non alio loco Gangem admittit quam quo nos cum Plolomeo
posuimus. Non enim intimus recessus Bengalici sinus, quo bodie
vetenim Gangem transferunt , eousque elongari ab Indo potest seruatis
directionibus, et earum dimensionibus , ut proposilam dislantiam
Palibotra Gangi imposila seruet, simul perpenso quod Ganges a Pâli-
botra oricnlem versus mare petat. lam si consideramus 58 dierum itcr
qupd Nicolaus de Conll Yenelus confecit ab intimo sinu Bengalico, et
Auam fluvium, ad quem peruenit, mullo maiorem Guenga Benfralico,
non inepte indicabimus eum ad maximum Indie fluuium celebratissi-
mumque veteribus Gangem pcrvenisse quanquam alio forte ibi nomine
vocatum. Auam quoque urbem eidem fluvio adiacentem credibile erit
Palibotram esse, cum ob magnitudinem , ut que 15 miliarium ambitu
patet, tum ob conuenientem ab ostijs distantiam, 17 enim diebus
250 APPENDICES.
enauigauh Nicolaus cuni 6000 stadiorum ponat Strabo. Et sane cum eo
loco quo nos signavimus sint fonles Guenge Bengalici , idemque qaem
posuimus ipsiusdecursns, nt JoanneindeBarrostestem babemns, qnîd
absurdius dici poterat quam hune esse veterum illum Gangem , cajus
fontes eonstat ijsdem montibus quibus Indum ortos, et ^80 mil. pass.
tantum a Zaradro orientalissimo Indum augentîum fluvio Plinio teste
distare, tum etiam magna parte in meridiem ferri? Qnare cum neqae
fontes Gangis, neque situs, neque longitudo ipsius veterum descriptioni
conveniat , hune esse veterum Gangem negamus, tametsi nomen eias
referre videatur. Quin imo cur ipsî qui eius opinionis autores fuerunt
suœ sententise confidenter stare videntur, cum alterum finxerint Gan-
gem ijsdem cum Guenga oslijs se in Bengalicum sinum exonerantem
ipsa nimirum distentioue arguente. Adde quod oppida aliquot et Moîn
sive Mien regnum huic fluvio, quem nos Gangem esse defendimus,
débita ad suum quoque fictitium Gangem transtulerint, quo perspicue
intelligi datur verum illum et veterum Gangem alibi quam in sinu
Bengalico querendum esse. Prêter solidas quoque istas rationes vel
ûgura ipsa littorum et nomina passim inscripta veritatem ostendere
poterant, Comari enim promontorium et nostri cum Ptol. atque ÂrrianO
ponunt, tum cabo de Colle quid aliud sonat qua'm Collaicum Ptolomei
aut Golchicum Arriani? quid consonantius quam Jameri et Chaberis
sive Camara , Pogu vel Pegu et Paduca , Tanay et Taua , Malanga et
Malaca, Cantan et Gange oppidum cum fluvio maximo qualem veteres
quoque Gangem testantur? Deniquae si hic non est Ganges ubi posuimus,
quo referentur tôt insulse in sinu Gangetico a Ptolomeo positœ cum in
Bengalico sinu non reperiuntur? Tenemus ergo Cantan maximum
fluvium esse Gangem a veteribus celebratum , et Auream esse non quae
nunc Malaca est, sed Japan insulam, ut ex Arriano et Mêla liquet,
tametsi peninsulam faciat Ptolomeus, apud quem et Sabana emporiam
bodiernum insulse nomen videtur obtinere. M. Paul. Yen. lib. 5, cap. %
dicit eam convenienter antiquo nomini suo auro abundantissimam esse.
Pretcrea insulam Burneo esse que Ptol. Bone fortuuae, Celebes, Ambon
et Gilolo esse quae Sindaeappellantur, Mindanao cum vicinis 4 maiorîbus
Barussas vocari refellere non possumus. Nomina item quedam in
recentioribns Tabulis invenio, que Mangi et Cathaium régna Ptolomeo
cognita fuisse manifeste doceant, et ad sinum Magnum quem Plinius
Chrysin vocat pertinere, ut sunt in Mangi regno Pagrasa, Donc, Gara-
caran, Agonara, Tartaho, in Cathaio autem Aspicia et Brema, quibus
apud Ptol. respondent Pagrasa, Daona, Lariagara, Aganagara, Cortacha,
Aspitara, Bramma , ut dubium uullum est Gangem Taprobana orienta*
liorem esse, recteque deinceps Chrysen insuiam et sinum Magnum sequi
uUraque Cattigara sinarum statio postremus Ptolomaicœ descriptionis
terminus orientalem nostrae continentis extremitatem possidere , et in
regnum quod hodie Tenduch vocatur incidere videtur.
— Les doux relatives au pôle , sont les suivantes :
De longitudinum geographicarum et polo magnelis,
Testatur Franciseus Diepanus pcritissimus nauarchus volubiles
libellas, magnetis virtute infectas recta mundi polum respicere in
APPENDICES. 251
insulis G. Viridis, Solis, Bonauista, et Maio, cui proximc astipulantur
qui in Terccra, aut S. Maria (îdsuIx sunt inter Açores) id fieri dicuut,
pauci in earundem occidentalissima Corvi nomine id coniiDgcrc opi-
DaDtur. Quia vero locorum longitudiuis a communi magnetis ei rnuudi
inerîdiano iustis de causis initium sumere oportet, plurium tesliuio-
nium sequutus primuni meridianum per dictas G. Viridis insulas pro-
traxi, et quum alibi plus minusque a polo deuiante magnete polum
aliquum peculiarem esse oporteat quo maguetes ex omiii rnuudi parte
despiciant, euum hoc quo assignaui loco existerc adhibila declinatione
magnetis Ratisl)0Di£ obseruata didici. Supputaui autem eius poli situm
eliam respectu insuia: Gorui, ut iuxta extremo primi uieridiani positus
extremi eliam teriuini, intra quos polum hune inueuiri uccesse est,
conspieui ûerenl, donec ceriius aliquod uauclerorum obseruaiio aiiu-
lerit.
In subinclam septentrionis descriplionem.
Quum iu polum extendi tabula nostra non posset, latitudininis gra-
dibus tandem in inûnitum excurrentibus , et descriptionis aliquid haud
quaquam negligendae sub ipso septentrione haberemus , necessarium
putauimus extrema descriptionis nostruî hic repetere et reliqua ad
polum usque anneclere. Figuram sumpsimus que illi parti orbis
maxime congruebat, quaîque situm et faciem terrarum in spha^ra esset,
redderet. Quod ad descriplionem atlinet, eam nosaccepimus ex itine-
rario Jacobi Gnoxen Buscoducensis , qui quidam ex rébus gestis Ârturi
Britanni citât, maiorem autem partem et poliora a sacerdote quodam
apud regem Noruegix anno D. 15G4 didicit. — Descenderal is quinto
gradu ex illis quos Arlurus ad bas habitandas insulas miserai , et
referebat anno ioGO Minoritam quendam Anglum Oxonienseni mathe-
maticum in cas insulas venisse, ipsisque relictis, ad ulleriora arte
magica profectum descripsisse omnia et astrolabio dimensum esse in
hanc subiectam formam fere, uti ex Jacobo collegimus. — Ëuripos
illos 4 dicebat tanto impetu ad interiorem voragineui rapi, ut naues
semel ingressaî nulle vente retroagi possuut, neque vero unquam lan-
Inm ibi ventum esse ut moïse frumenlariGC circumagendaî sufiiciat.
Simillima his habent Giraldus Gambrensis in lib. de mirabilibus
Hiberniae sic enim scribit : Non procul ab insulis (Ebudibus, Islandia
etc.) ex parle boreali est maris qua:dam miranda vorago ad quaiu a
remotis parlibus onines undique marini fluctus tanquam ex couduclo
confluant, qui in sécréta naturœ penelralia se ibi transfundeutes quasi
in abyssnm vorantur, si vero nauem hanc forte transire conligerit ,
lanta rapitur et atlrahitur flucluum violentia, ut eam stalim irrevoca-
bilîter vis voracilalis absorbeal.
— Enfm les deux trailant des moyens pour dclenniner les direclious
et les distances dans la navigation :
Brcx'is usus organi dircclorij.
Gum inscriptionibus uecessarijs occupatus oceanus sufficienter direc-
toria recipere nequeat , et terra in qua eorundem non exiguus est usus
nulla, coacti fuimus hoc organum directorium addere, ut duorum
S3S APPENDICES.
quorumlibet locorum ad invicem respectus et habitudo iode pati
possit. — Débet autem prior locus , ad quem alterius respectum queri-
mus, latitudineni nolam habere, et in eadeni sub primo organi meri-
diano situs intellegi. — Duo autem huic primo meridiano directoria
applicamas, quorum superius serviet cum prior locus maiorem habet
latitudinem quam secundus, inferius cum minorem, ex utriusque centro
filnm dependeat.
Quaudo igitur secundus locus longitudinis et latitudinis differentiam
a priore nolam habet, nota sunt directio et distantia. Directlo prîmom
si notato situ secundi loci iuxta long, et latit. dififerentiam filum ex
centro directorij ad :equidistantiam duorum locorum extendator,
parallelse enim linese quœcunque in organo eiusdem sunt directionis.
Parallèles autem eadem circini extensio ex utroque loco filum directa
optime indicabat. Distantia deinde per modum alla tabella contentum
invenietur.
Si secundus locus direclionem cum dififerentia alterutra longitudinis
vel latitudinis notam habuerit, ad eam directionem filum extendator,
et ex priori loco circini ductu illi paraliela linea fingetur quae ubi
notam dififerentiam compleuerit, etiam distantiam notam faciet iuxta^
rationem in alia tabella descriptam. — Si secundus locus directionen^
et distantiam a primo notas habuerit innotescent etiam dififerentise lat ^.
et long. Quaeratur directio eandem ab aequatore declinationem habens
quam locorum directio a meridiano in eadem a centre directioneiK
tôt gradus sequatoris mensurentur quot locorum distantia exigit; tur^
meridianus eos gradus terminans in aequatore quoque gradus differei^.^
tise latitudinis a centro direcllonum computaudo terminabit. Hos
addas priori loco in minori latitudine existenti, aut demas ab eadem ^
maiore posito, prodidit latitude secundi loci , ad quam e priore lo
educta directio etiam longitudinis difierentiam notabit, inde videlicet
aequidislantiam a proximo meridiano in sequatorem descendendo. -
Plana maioraque de hoc organo in geographia nostra, deo volente, cl
bimus.
Dislantiœ locorum mesurandœ modus.
Âliud nobis est plaga aliud directio distinctionîs rerum causa. Plaga
vocamus nostri loci ad allerum respectum secundum declination^
circuli maximi per utrumque locum ducti ab aliquo i punctorum cardJ-
nalium. Sic dicimus locum aliquem nobis esse boreozephyrium id ^ist
nordwestium quando cîrculus maximus a nobis per eumductus^<5
gradus in horizonte déclinât a seplentrionali cardine versus occidec:*^-
talem. Directionem vocamus lineam ab une loco in alium sic ductam mM-i
cum quibusuis meridianis aequales angulos faciat, bae perpétue obliqus^^
încuruatur in superficie sphaeraî propter meridianorum ad se invice^^
inclinalionem, atque inde in magnîs distantes, et potissimum circ^ ^
borealiores partes distantia directionalis semper maior est distant ^^
plagali, in mediocribus vero, et maxime uersus sequatorem sitis, nc^'Q
est notabilis dififerentia quare cum plagales distantise sumendse cir^:^
aequatorem non excedunt 20 gradus maximi circuli , aut in cliniSÉ.'^^
Hispanise et Gallias 15 gr. aut in partibus septentrionalibus Europae ^^
Âsiae 8 vel iO connenienter directionalibus distantes pro plagalil^^^^
APPENDICES. S55
sive rectis utemur, alioqui et harum inquirendaruin ratio traddi potest,
sed operosior nec admodum necessaria. Distantiae ergo directionalcs
sic inuenicntur. GoDsideraliir quo nomine appelletur linea imaginaria
ioter duos locos extensa, hoc est cui in tabula scriptsc linese si parallel;3e,
quod per circiaum ex utroque loco in eandem lineam extenso explora-
bitur, deinde qusB sit differentia latitudinis eorundem locorum,quo
inuenietur distantia cuiusque a proximo parallèle latitudinis in
scalam graduum latitudinis transferendo, bis duobus inueutis in aliquo
directorio sequinoctiali imposito linea eodein angulo declinans ab xqui-
noctiali, quo linea imaginaria propositorum locorum a meridiano aller-
utrius et a centro directorii computatis tôt gradibus sequatoris quot
erant in differentia latitudinis, ab extrême graduum ad proximum
meridianum distentus circinus deorsum feratur altero pede seraper
eundem meridianum occupante, relique uero eundem sequidistanter
coraitante donec in inuentam declinationis lineam incidat, ibi tum iste
figatur; ille qui meridiano inhserebat extendatur iu centrum directorii,
** sic distentus circinus utroque pede œquatori applicatur, ac tum gradus
intercepti indicabunt directionalem propositorum locorum distantiam,
muUiplicando numerura graduum per 15 si germanica miliaria quscran-
tnr, per 60 si italica, per 20 si gallica aut hispanica communia. Hsec dis-
tantiae inquirendae ratio per se quidem semper infalibilis est, sed in iis
directionibusquae maxime ad parallelum latitudinis inclinantur incertior
6st circini applicatio propter nimis obliquam directionalium linearum
iacidentiam in parallèles, ideoque in bis alter bic modus erit exactior.
' — Sumetur circino differentia latitudinis assumptorum locorum, et
obseruando quod gradus ibidem circinus intercipiat, sic distentus ex
une loco versus alterum toties reuolualur quoties intercapedo locorum
suscipere potest, siquid residuum est distantise,quod ad integram circini
extensionem non perueuiat id contractior circinus excipiet et in medios
^adus differentiae latitudinis traducetur, notatisque ibi interceptis
gradibus colligentur omnium reuolutionum gradus cum residuo in
unam sumam, qua ut mox diximus multiplicala, proueniunt miliaria
distantiae quœsitse.
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Jean IV, Komnëne, kaloioan-
nes, empereur de Trebi-
zonde ii46-li56, épousa
une fille d'Alexandre , roi
d'Ibérie.
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APPENDICES.
GÉNÉALOGIE DE MERGATOR.
Amoldu», né 1857. mort ( '?*<ï»*ïï' K^o"»^''"®
m?, géomètre, méca- J £«'^î«'î'' fifa'*-"»--
nicien. ) ilfwftaej, graveur.
V et 6 autres.
255
Hubert Mercator
épousa Emerentiana.
Gérard Mercator,
mécanicien , graveur , géo-
graphe, géomètre , né à
Rupelmonde, le 8 mai
4812,mort le f décembre
1 894, épousaBarbe Scbel-
leken 4856, morte 1886.
4 filles.
Bartholomée, né 4840, mort
4868.
\Rumold, géographe, gra-
veur.
Emerence, mariée à Jean
Holan.
Dorothée, mariée 1*. à{^ ... j au
' Alard Six d'Anvers; J ^" * "»"'^^ ^«"* «"«»•
V à Tilman de Neufville
de Wesel.
Catherine , manée à Théo-
dore Yerhaer.
GÉNÉALOGIE DE HOND, JANSSON.
Olivier Hond
épousa
Pétronille Haverluyn. / Henri l'ainé, graveur de
portraits, né 1875, mort
Jof«eJVon(/, Judocus Hon-1
dius^éograph^éditeur, ) ffe^H le jeune, né à Lon
neaWackene4S65,mort< ^^8 4880, mort 4644,
46 février 4612. \ géographe-éditeur.
Fille, mariée à Jean Jansson de Waesberge ,.
impr.[à Amsterdam.
Nieoloê Santon,
né à Abbeville en 4600, <
I mort 4667.
Fille, mar . à Jean Jansson, < '^'"S» "?"•> GiUes Jansson de Waesberge ,
éditeur. ) ï'braire a Leipsig.
Fille, mariée à Théodore Jausson van
Almeloveen, médecin.
GÉNÉALOGIE DE SANSON, VAUGONDY.
Nicolas, né 46Î6, périt
en 4648.
Adrien, mort 4748.
GuiUaume, mort 4705.
Fille , mariée à Robert
Vaugondy.
GiUes-Rchert de Vau-
gondy, né en 4688,
mort 4766.
Robert de Fau-
gondy, né 4725,
mort 4786.
Fille , mariée à Duval. f Pierre Duval^ né à Abbeville 4648, mort 4685.
GÉNÉALOGIE DE DELISLE.
Claude Delisle,
né à Vaocouleurs en Lor-
raine 4644, mort 4720.
Guillaume Delisle, né à ( Fille , mariée à Philippe Buache, né 4700 ,
Paris 4678, mort «726. \ mort 4775.
^Joseph Nicolas, né 4688,
visite Petersbourg 1727,
mort 4768.
Simon Claude, né 4675,
mort 1726, historien.
Louis la Croyere , mort en
1742 dans son voyage
au détroit de Bering , à
Avatcha de Eamschatka.
INDEX ALPHABÉTIQUE
DES NOMS ET IVES MATIÈRES CONTENUS DANS LES DEUX VOLUMES.
Les Duniéros renvoient aax chapitrei. — Dans la suite des chiffres les
dixaines el les centaines ne sont pas répétées.
Abassia 166. Ahbas ibn saïd 15. Abdalla al bekri 46. Abdalgany 46.
Abdal rahman al koraïscbi 103. Abdal razzah 102. Abdolmios 14. Abdour-
mschid bakoui 102. Abimalion 163. Abissinia 166. Abc 53. Aboul abbas
ahmed dimeschki 103. Abou abdallab moharaed 21,46. Aboubekr-ahmed
alkhatîb 26. — al-hazemy 46. — ben iousouf 243. — mohammed 46. Abou-
dalf musir 20. — djafarkhoi-aznii 14,5,9,22.— fazel 103.— Ishak istakhri 23.
— hafs omar ibn al ouardi 93. — hamid garnati 46.
Aboul-abbas abnied 21, 93. — cassem alvakedi 103. — cassem iriahmoudza-
ïûakschari 46. — cassem obeidallah khordadbeh 21. — faradj kodama 21.
r-féda 14, 5, 31, 2, 9, 40.66, 7, 95-101, 226, 33, 43, 5, 6, 54, 60, — hadjadj
iousouf 103. — hassan ali aldaracolbny 46. — hassan ben ali al saïd 105.
"p-hassan raarakaschi 83-226, 44, 5, 54 (v. table de long.) — hassan saïd al
^jordjany 105. — madj ismael al mausseli 46.
Abou-mansour manboub al djavaliki 46. — nasr ali ibn macoula 46. — nasr
'"Mohammed djihani 21. — na vas 103. — obeid ibn Haoukal 103. — osman
anarou djahiri 21. — saïdhamed alsirafii 105. — saad abdalkerim 46. — rihan
*' bîrouni 22, 57-44, 88, 96, 8, 9, 100, 245 (v. caries de l'Inde et table de
»oug.) _zeid 22. Abraham bar Haïia 244, 5, (voyez Uble de long,). Abré-
^«ateurs 94, 101 Abyssinia 166.
Acunha190. Adam de Brème 47 (v. Slavia). Adelis 5, 6,52. Adfari105.
^richomius 174. Aessler, v. Essier. .«Ihicus 255. Afon 106. Afrique 165-8,
^ (v. portulan). Afrodision 4. D'Agnet 222. Agalhodaïmon 1, 14, i79, 82,
?5*- Agrippa 1,229. Ahmed ben iahia abbeladheki al schaer 105. Ahmed
^^nkhalaf 233. Aiguille aimentée 106, 9, 55, 218, 55, 6. D'Ailly 154-8, 256,7.
A^naant, son pôle 261, 2, (v. aiguille). Aïthanarid 4.
Alabdery92. Aladfari 105. Alathar 246. Alberdjendi 105. Albateni 15,4,
**' i04, 259. AJbi carte 255. Albuquerque 105. Alcafordo 160 Alcobaza161.
AjdehebylOl. Alexandre-le-grand 147, 65, 8, 228; —pape 180,202, 62.
^.fxandrie 16, 259. Alfakhal khalathi 70. Alfakhr 70. Alfons-de-castille 104,
203 ; — deportug. 107, 64. Alfragan 104, 55, 7. Alfred 8. Algoet 215. Alhe-
^jy 65. Al hesaïn no boufari 105. Alkomi 241-5. Alikoschgi 102. Ali
^\nerani 65. Ali al scharfi 105. Ali ben aladir 65, 96. Ali ibn isa 15, 24.
fj^abit 104. Almageste 15, 4. Almagrourim 159, 256. Al makrizi 105.
^5aaligl45. Almamoun 12, 5, 254, 5. Almeida 190. Al scharfi 105. Al
^«irazi 95. Alsifakezi 105. Al sobki 95.
^|v^ari 54, 65. Amazones 168, 265. Amerigo vespuzzi 190-5, 202. Amoretti
S*« Amyn ahmed razy 105. Anaximandre217. Andalouze 171. Angelo 180,
*^i' Angleterre, carte membrane 105. Anglo-sax. carte 8-10. Annotations
258 INDEX
arabes 240-5, 60. Ântilia 253. Antipodes 50 , 265 Ansgaire 8, 47. d^Anville
224, 5. Apian 211, 8, 57. Arabes, écrivains 20-4, 46, 65, 82, 92-4, 101-103,
y. annot. ; consulté 210, 25, 31, 40. Arca noe 9, H. Argyre9, 50. Arin,
arine 22,38, 45, 90, 104,55,7,236,7,57. Arislagoras 227. Aristarche 4, 228.
Arras, carte 108. Arsacius 4. Arzakhel 45,78,83,8,104, 260,(v. table de long.)
Astrolabes 13, 24, 53, 245, 5. Astronomie 13, 239, 40. Athanarid 4. Athe-
lard 53. Atlas 215, 6. Atval 37, 96 (v. table de long.). Auguste 229. Aurigar
V. Waghenaer. Aurivillius 94. d^Avezac 107, 53. Ayeen ak beri 24,' 103.
Aziz 96. Azores 160, 261, 2.
Babmondou 82, 132. Baclario 161. Bacouel 108. Bagdad 13, 24, 237-9, 50,
52, 60. Baïazet 152, 68. Bakoui 70, 102 (v. table de long.). Balbus 229.
Baldac 163, 42. Baldaya 160. Balkh 103. Baltique 150, 83. Barbari, barba-
ricon8, 20, 255. Barbie du Bocage 224. Bastides 190. Baten 104. Bateni
V. al-Batboutâ, v.ibn.
Bedrazio 161. Behaïm 185-9, 202, 57. Beins 222. Bekri 46. Bellarma-
tus 210. Bembo 170,9,80. Benjamin de tudèle 105, 266 (v. examen géogr.).
Benincasa 169, 70, 250, 6. Benoît 180; polonais 110. Benvenuti 191, 3, 6.
Berdjendi 103. Berey 220, 2. s.Bertin 51. Bertius 226. Bethencourt 159.
Betalmios 14. Beto 228. Biancho, Bianco 137, 160, 2-4. Bibliothèque de
Bourgogne 112. Biot35. Birouni, v. abourihan.
Blaeuv 218, 20, 58,62. Blantasius4. Bleaux, y. blaeuv. Boîador 107, 59, 60.
Boisseau 222. Bonati 104. Bongars 111. Bonne 225, 59. Bonne espérance
186,204. Bordone 173,200. Borgia 168, 256. Bouchet 261 . Boudhiadeva 57.
Bouides 66. Boussole 106, 9, 204, 8, 55, 6. Bouthinkh 266. Bruno 218.
Busching97, Butimsl45. Byzantins 178,9.
Cabot 190. Cabrai 160, 90, 1. Cadamosto 164, 70, 1. Calendrier 66, 127,
131,56. Calvol59. Cam 186. Cambalech 146. Camerarius 214. Campa 210.
Campanus 53. Canaries 107, 59-61. Canonici 111, 9, 26. Cap vert 164. Cara-
vaïal 218. Carmoly 14, 29, 36. Carpini 110.
Cartes géogr. arabes 14-20, 5-45, 67-92, 94-100, 241-4; anconitaine 152;
catalane 107,29-34,7-51 (v. portulan); comparées arabes et latines 135, 6;
continentales 174-7, 257, 8; espagnole 173, 258, 63; génoise à Florence 161;
itinéraire édrisienne 63, 64 (v. analyse des sect., cartes deFInde, carte sidl.);
hydrographiques, marines, nautiques; delà navigation, 108, 9, 25-8, 33-5,
61, 69-73, 219-21 , 58, 63 (voyez portulan); messine 139, 50, 71 ; métallique
168 ; musée bourbon 153 ; portugaise 190-7 ; sicilienne 47-64, 246-54 ; voyez
les autres sous les noms de leurs auteurs.
Casadilla 171, 86. Caspienne mer 20, 107, 16, 7, 33, 225. Cassini 220,37.
Castaldo 200, 10, 7, 60, 3. Castorius 4. Castro 173. Catalans 129. Cecco 106,
255. CepoyllO. Ceylan 144, 266. Chabert 143. Charl-le-sage 129. Char-
lemagne 7, 255. Chastel 170. Chazelles 237. Cherso 164. Chine 12, 20,105,
223 (v. cartes de IMnde). Chryse9, 50. Chrysolarus 179, 80. Chaumeau26i.
Chionades 66. Ciacorus 4. Clément pape 107. Climat 18-il, 38-9, 60, f , 72,
7, 84, 154, 7, 8, 220, 30, 5, 41, 4, 56. Clusius 213. Cnide 228. Coelho l9i.
Colomb 171, 84-6, 8, 90, 6, 257. Colombo 163,45. Compilateurs 94-101.
Contil61,84. Constantinople 36, 60, 247, 58, 60. Contractus 53. Gorbulo
230, 259. Cordier 222. Coronelli 223, 4. Cortereal 190, 3, 6. Cosa de la 258.
Cosmas2, 252. Cosmographes 109, 10, 31, 2, 5, 57, 8, 80. Coudées 15.
Coupole 22, 38,90, v. arin. Covens 222. Covigliano 171, 86. Crates 128.
Cynchris 4 ; voyez K.
Bacia 183. D'Agniet 222. Daïbol 246, 56. D'Ailly 154-8, 256, 7. Daïra 54.
Damask 24. Dandolo 127. Danemark, Danmarscha 113, 6, 51 (v. Slavia, exam.
des sections). Dankerts 222. Dantzik 130, 50. D'Anville 224-6. Daoud bena-
keti 82. Daveira 186. D'Avezac 107, 53, 9, 71.
ALPHABÉTIQUE. 239
De Castro 175. Dcclinaison deFaiguille 155,52. Découvertes 107, 8, 59,60,
71, 86, 90, 1, 205. Degré 13, 22, 60, 2, 102, 51, 55, 7, 215, 7,28, 50,55-5.
De Fer 219, 28, 5. Deguignes 94, 101. Deheby 101. De la Cosa 172. Delambre
15,24, 184, 240. De la Plaets 222. De la Sale 159. De la Sagra 172. Delfino 169.
Delisle 225-5. Demetr. alexandrid 102, 97. DeslaDe97. Descriptlo2, 105,52.
Détroit 202.
Cy^b 166. Diaz 186. Dicearche 228. Dicuil 1, 7, 52. Diego de séville 160.
Dieppois 107, 59, 219. Dimeschki 95. Diognetus 228. Dionys charac. 226.
Distances 58 (v. exam. des sect.). Djafar abou maschar 22. Djafar ben thaleb
aladfari 105. Djamboudvipa 22. Djamkout 18, 22, 58. Djelali 105. Djihan
nouma 105. Dhar 57. Dherbelot57, 60, 105. Dniepr 149 (v. anal, des sect.;
portulan). Doetecum 215, 62. D*Ohsson 82. Douis 180, 99, 257. J^ooms-
daïbook 55. Doppelmayr 189. Douza219. Dupont 219. Duval 219.
Eannes 160. Eclipses 22, 55, 258. École d'Alexandrie 228; allemande 211,
37; d'Athènes 229; ionienne 227; italienne 258 ; romaine 229. Ecosse 105,
265. Edelvald 4. Edrisi 50, 56-64,96, 121, 2, 46-54, 64, 6 (v. anal, des sect.;
cartes de Tlnde). Edward 105. Egypte 16, 55, 40, 69, 115. Eichhorn 97.
Eleazar ben nathan de mayence 47. Elius gallus 229. Emon de werum 105.
Emmanoiiel 191, 195. Ephore 228. Eresford carte 105, 265, Eratosthènes
226, 8. Espagne 159, 44. Essler 174-7, 195, 9, 200. Ethicus 1, 6, 255.
Eudoxe 166, 228. Eufrat 114, 42, 225. Explorations 20-5, 65, 92, 107,
iO, 59-61.
Faleiro 205. Fayan 222. Fer île 257,62. Ferer 107, 29, 58. Ferdinand
amiral 195. Fernel 215. Feroer v. Frisland. Figurines v. images. Filo 228.
Fleuve d'or 159, 60. Fonseca 218, Fortunataî ins. 137,255. Foscarini 164.
Fostat55. Fiance 183, 265 (v. portul.). Français 107. François de dieppe
262. Frederik 104,255. Freducio 170, 256 (v. portulan.). Frisland 108, 61,
265 (v. tavola di Zeni). Frisius laurent 212 v. gemma.
Gadiffer 159. Galileus 218. s. Galle carte 6. Gamal05,90. Gangdiz 266.
Gaspar da Gama 190 (v. portul.). Gautier de Metz 106. Gcmisthius 179.
Gemma 211, 4. Génois 107, 61. Géographie de ptol. 14, 253. Géographe de
Sicile 64, 246-54. Gérard de crémone 45, 104, 255, 60 (v. table de long.). Ger-
bert 55. Ghaznevides 57. Ghyllany 189. Gbiocondo 191. Gioïa 109. Giraud
rarry 105. Giroldo 161. Gissur 105. Globe 15, 104, 87-9, 228. Gnomon 228,
9,38. Gog et Magog 9, 11, 20, 43, 94, 144, 7, 163, 5, 8, 95. Golfe persique 42,
4, 99, 245, 50. Gondar 66. Gordon 222. Gosselin 226. Gough 105, 264.
Graduation 124, 53, 70, 6, 95, 201-8, 56. Grxvius 97. Grandguillaume 108.
Grandeur du degré 61 , 215, 28, 30, 5, 4. Groddeck264. Grèce 170,224.
Graphique arabe 39-46. Grœnland 183, 96, 207 (v. tavola di Zeni). Guerard
219. Guessefeld 222. Gui de ravenne 2-6. Guillaume, abbé 53; — le-conqué-
rant55; -de Tripoli 108. Gutiscovius 218.
Habitable 18, 58, 227-9, 36. 54. Hadji ahmed 103. Hadji kbalfa 94, 105,31.
I]aflz21. Haldingham 105, 265 (v. portul.). Halifax 104. Hamdallah al mas-
toufi 95. Hamed ibn ali 24. Hamersveldt 262. Hara 202. Haraïr 73 , 96, 8.
Harding 105, 265 (v. portul.) Hase 222. Hassan ben ali al komi 241. Hassan
mollabit 96. Hecatée 227. Hceren 168. Helmold 105. Henri chanoine
cartogr. 105; islandais 105; d'angleterre 171, 85; de porlugal 160, 1, 84.
Haraoui 103. Herbelot v. d'. Herena 218. Hérisson 225. Herodot 257.
Heures 5, 251, 6, 7, 54. Hipparche 228. Higgden 108. Hobaïz 15. Hogenberg
215. Hoidevalde 4. Hollande 219. Holtzschuer 187. Homen 215, Homer
227,52. Uonaïnl5. Hondius216. Honorius 1, 55. Hooge 220. Horismos 4,
16, 9 V. rasm. Horloges 217. Hormesta 8. Houlagou 70. Hoyeda 190.
Hudson 97, Buelba 171, Huen 266, Huerter de moerkerke 181, 6. Humboldt
152, 72, 91. Hydrographes 190-5, 265. Hyggden, hykeden 108. Hvlaïs4.
240 INDEX
lacob de paris. 105, t. J. lahia ibn abou inaiisour 13. Iakout 17, 65, 96,
10:2. lamakota v. Y. lambek 143, 68. lamblich 4, 5. lava !Ie 144. lanson
216, 20, 62. lapon v. J. lava 266 (v. cartes de l'Inde).
Ibn abdullab al zafra 16. —al Athir 46, 94. —al Ouardi 94. — Ayas 105.
— Bathontha 92. — Djobaïr 65. — Foschian 20. — Haoukal 23, 96. — lounis
25-35 (v, table delong.). — Kesouf 13. — Kelir, kotaïr 20, 4(v. table de long.)-
— Mokassem 21. — Noctha 46. — Reschid abdallah alnouschery 92. — Saïd
75-7, 78-81, 6, 91, 6, 8, 108, 243, 6, 54 (v. cartes de l'Inde; table de Io#g.).
— Sprot20, 36. — Schahibl03.
Ibrabim hongrois 103. leboud abenzer 256. Ilacomilus 191, 2, 212. nés
britanniques 105, 34, 265. Ilkhan 70-2.
Images du monde 48-51, 94, 106-8, 54, 232, 55; suivant les mss des
biblioth. d'Albi 255; d'Arras 108; de Bourgogne à Bruxelles 51; de €k>penh.
islandaise 106; deGand (Lambert) 51; de Genève 168; de Leipzig 49; de
Mons en Hainaut 106; nationale à Paris 106 ; de Rheims 153 ; de S. Berlin et
S. Orner 49, 51 ; S. Denis ou S«« Geneviève à Paris 108; de Strasbourg 49 ;
de Turin 50, 263 ; de Vienne Autriche 108 ; voyez les noms des auteurs et
mappemondes.
Inductions 74, 260. Inde et Indiens 12, 22, 37, 8, ^3, 76, 145, 86, 94, 8,
255 (v. cartes de rinde). Iode 215 (v. appendices 3,5). Iordan4. Inselin222.
Investigations arabes 12, 20-2. Irland 6, v. îles brit. Irminion 7. Isaak aben-
sidbasan 104. Ishak ben honaïn 13. Isidor Chirac. 229. Isidor sévill. 2, 120,
31,79. Islandais 105,6 (v. tavoladiZeni). Issicol 168. Istakhri 13. Italiens
107, 9, 83. Itinéraires 5, 21, 229, 32; de Bagdad à Mekke 50 ; à Jérusalem
105. ludaei v. Juifs.
Jacq de Metz 161 ; — raajorq. 129. Jaillot 220, 2. Japon 180, 4, 5, 8, 96,
257, 69. Jaubert 56 (y. anal, des sections). Jean halifax 104; de portug. 185,
8. Jérôme 1, 266. Jérusalem 1, 18, 48, 108, 55, 65, 8, 255; plan 105.
Jomard 58, 63, 246, 64. Jolivet 213. Jollain 222. Jonques 109, 41, 66, 202.
Jubrien 222. Juifs 14, 20, 36, 104, 5, 63, 8, 71, 85. Jules césar 229.
Kaaba 18, 108. Kaboul 143. Kserius 262. Kaf45, 94, 133. Kair 259, 60.
Kanka 38. Kankador 38, 236, 41. Kanoun v. Abouriban. Karmania 198.
Kaschgari 105. Kataï 146, 81, 4, 5, 8. Katib tschelebi 21, 94, 103. Katkedaz
38, 236, 41. Kattigara 217, 53 (v. cartes de l'Inde). Kazimirski 45. Kazvini
93, 102. Kepler 218. Keulcn van 226. Khaled ibn abdalmalik 13, 24.
Kharthi 132. Khasdaï 20, 36. Khovarezm lac 260. Khovarezmi 14, 5, 9, 22,
Kias 74, 96, 98. Kiatan 12. Kiov 149. Koberger 175, 89, 200. Kodama21, 4.
Kodbeddin v. Massoudi. Kœler 97. Komi 241-3. Kopernik 212. Kordadbeh
21, 4. Koschgi 102. Kotroba 246, 52. Kouschiar 45, 66.
Lakedemounia 118, 20, 2. La mina 107, 85. Lancerotto 107, 59. Langren
van 218, 59. Langton 104. Lanka 22,236. Latitude 201, 10, 49, 50; levée
37, 44, 83, 8, 200, 28, 9, 58. Laturus 166. Lazius 213. Lhuyd 213. Leclerc
222. Leilh ben kahlan 103. Leonardi 169. 73. Leroi 222. Lerouge 223.
Letronne 55. Levasseur 219. Levilapis 180. Leyde 25, 6. Libanius 4, 5»
Liginius4. Ligorio210. Liprando 128. Livesl73. Lobab96. Lobcovitz 218.
Lochom 222, Lollian 4,5. Longitudes 3, 79,81.90,191,200, 1-8, 10, 7, 8,
22, 3, 51, 2, 4, 6, 9, 61 , 3 ; chez les arabes 238, 239 ; stadiales 229, 33, 5,7.
Lop 143. Lopez 159. Loredano 161, 70. Louschira 82. Loyola 216. Ludolf
225. Lullius 104. Lvov 150.
Macguckin de slane 97. Madère 159, 60. Madini 24. Mages 143. Magellan
202, 3, 7, 58. Magog v. Gog. Magrourim 159, 236. Mahmoud gaznev 57;
~al zamakschari 103. Majorque 106,7, 39,61. Malcusl04,8.Malem canal03.
Malocello 107. Mânes 66. Mannert 126.
Mappemondes 132, 255; anglo-saxone 8, 9; de Biancho 162, 5; deCastaldo
alpuabëtiqle. . 241
iôO, 3 (v. append.) ; de CbarlemagDe 7, 255: catalane 129-54, 7-51 (v. port.);
de de la Cosa 172 (v. portuL)* du dominicain 105; d'Edrisi v. sic!!.; espa-
gnole 172, 263 ; de Haldingham 105, 265; du chanoine Henri 105; de Maure
164-7 ; de Mercator 214, 62; métallique 168; portugaise 190-5; de Ribero
172; de Roger y. sicil.; de Ruysch 196; de S. Gali 6; de Sanuto 113-86;
sicilienne 54-54, 246-54 ; de Sylvanus 198.
Maraga 70, 258« 9. Marcellus 4, 5. Marchands 110. Marche de la cartogr.
78, 9, 135, 6. Marco, v. Polo. Marconiir 4. Marcus 4; Beneventin 104.
Blariette^22. Marin deTyr 11, 78, 184, 231, 3. Marolla 173. Marpesias 4, 5.
Marteloïo 161, 2. Martinez 184,256. Maschar 18, 22, 66. Massoudi 15, 7, 22,
234, 5. Hastoufi 93. Maurienne 30. Mauro 109, 38, 64-7, 73, 94, 164>i69, 266
(▼. cartes de l'Inde; portul.). Maximinus, Maximus 4, 5.
Medeia 143, 63. Medbiadesa 37. Medico 218. Medine30, 245. Méditerranée
17, 62, 124, 33, 4, 223, 47, 8, 55, 6, 8, 9, 60. Mekke 18, 239, 45, 6. Mêla 226.
MeUsian 4. Merde l'Inde 22, 103; —rouge 114; v. Caspienne, golfe pers.,
méditer. Mercator 103, 213-8, 260-3. Méridien 202, 14, 28, 31, 6, 7; de
raimant261, 2; des Âzores, corvo 261; des tles du cap vert 261; des Fortunées,
de Fer 17, 18,40, 222,61; indien 22; occidental et oriental 236,7,41;
de marcation, partition 202 ; de Venise 256. Merou 22. Mesures 13, 102, 213,
230,3; du degré 13, 228,34. Metateurs 229. Méthode arabe 79, 80. Metius
229. Meulaalikoschgi]03. Meyer 222. Michaêlis 97. Milles 13, 60-2,131,
155, 7, 213, 30, 3-5, 47, 5. Mina 107, 85. Mirza scbah rok 102, Modjireddiu
kaUmi 103.
Mohammed al scharû 103 ; -— ben ali al sifakesi 246, 54; — ben ali sipahi
zadeh 103; —ben schadan 103; — bilouni 92, 101 ; — djaber al bateni 13, 4,
22, 104, 392; — ibn reschid 92; —ibn djozaï alkalbi 92; — kelebi92, 101:
-kharizmil4,5,9, 22.
Mohyeddin 92. Mohyth 103, Moïse 171. Moluques 172, 202. Mongoles 94^
110. Monde homérique 226, 7, 32, y. images, mappemondes. Mone 49, 51.
Morales 160. Mordtmann 25. Moria 226. Morin 218. Morini 50, 1. Mortier 220,
232. Moro 218. Mosul 239. Mousa ibn schaker 13. MousUfaben abdallah 103.
Manozl91. Munster 211. Muratori 97. Murr 185, 9, 256. Muslim horrany 20.
Narbona 58. Nassiieddin tousi 70-1, 8, 94, 6 (v. table de long.). Nava-
nttol91. Navigation 103, 6, 7. Naboufari al mesri 103. Neptune français
m. Neroni222. Nestor 47. Nicolaï 212, 22. Nicolas, pape 164. Niger 215.
Nigidius229. Nil 9, 14, 163,8, 225, 62; dans la mer rouge 52, 152; gana
138, 260. Niskhat 15, 42. Nocera 82. Nogmeddin kazvini 70. Noli 164.
Noiin 220, 8. Nombril 2, 18, 227. Normands 47, 53, 4. Norvège 103, 51, 60
(y. tayola di Zeni). Nou4Jera 82. Novaïri 93.
Observations astr. 13, 22, 200, 18, 30. Observatoires 228. Océan 18, 38
45,227, 62. Occident 237 v. méridien. Oeuf 94, 138, 227. Olympe 227, 36.
Qmâr ben bahr el hafedh et pilote 103. 0 machin 159, 60. Omfalon 2, 18, 227.
Orbis 52, 229 y. mappemonde. Ordonez 159. Organum directorii 262
(y. appendice). Oria 107. Orient 45, 236, 41. Orientation 152, 72, 258.
Oronce 218. Orose 1, 8, 56. Ortelius 215, 6, 60, 1, 3,4 (v. appendice).
Orthographie 39, 46, 77, 240. (v. anal, des secl.). Ortiz 171, 85. 0ther8.
Oadjein 22, 236. Ouloug beg 102, 254. Ouranos 236.
Païolâ, palola 138. Païva 171, 86. Palestine 9, 10, 40, 99, 113, 73, 83, 99,
224, 66. Panchea 236. Papius 226. Paradis 163, 5, 257. Parallela 229.
Parasange 13, 60, 1, 131, 230, 3. Pareto 107, 69. Paris 247. Passus 230, 3,
Pazini 50, 265. Pedro inf. 161. Pentesileus 4, 5, 168. Peraza 159. Peripate-
titiens 228. Peritsol 168. 89. Perles 143. Perse, Persan 60-9, 96, 8, 100, 220
(y. table de longit.). Petakhia 105 (v. anal, des sections). Petronius 229.
Peyrounin 222. Pezzagno 107. Philesius 191. Philippe-d'Esp. 218. Phrisius
V. Laur. et Gemma. Picart 222. Pierre-le-grand 225. Pigafetta 202. Pinzoïi
II. 20
/•
OËOGRAPHIE DU MOYEN AGE.
BRUXELLES. — TYP. DE J -H. DEHQU,
RUE DE LA GRANDE ÎLE , 0.
GEOGRAPHIE
DU MOYEN AGE,
ÉTUDIÉE PAK
JOACIIIM LELEWEL.
AOCOMPAGNÉIS D' ATLAS.
S^'pe pater «lixit , studiuin , quid iuulile tcntab?
Oi'id. tritt. IV, iO.
TOMES 111 ET IV.
BRUXELLES,
CHEZ V« ET J. PILLIET, LIBRAIRES, SUCC" DE P.-J. VOfil.ET,
nUE DE I.A MONTAGNE , S9.
185:2
CE VOLUME COiNTIENT
ï.
Slavia du dixième et du douxièmc siècle.
H.
Analyse de plusieurs sections des vi< et vu'' climats de la description
d*Edrisi, 1154.
III.
Cartes de Tlndc et de la Chine, dressées d'après les relations des arabes et
les inTestigations du moyen âge.
ÏV.
Tavola di navicare di Nicolo et Antonio Zcni, et les cartes des régions
septentrionales à Tépoqne de sa publication, i588.
V.
Examen géographique des courses et de la description de Benjamin de
Tudèle, H 60-1 173.
{fl.
SLAVIA
DU DIXIÈME ET Du DOUZIÈME
SIÈCLE.
K4nsque talitudo slavicae linguap snccrescit,
ni pone canttt aeslimatione.
Helmolb, lib. I, rap. 1, t.
OKDRE DES MATIÈRES.
1, 2, Aperçu général sur la marche des événements; 3, sources histo-
riques.
Khozars, Varegs, — A, Joseph hen Gorion, sa genèse; Khasdaf, Khozars. ,
S, enfants de Dodanim, Varegs, Rouss, Rourik. 6, en&nts Dodanim Slaves.
VnniLES, SoRABES, MoRAVES. — 7, dénominations; 8, nomenclature du
géographe bavarois, des peuples frontières. 9, Bohèmes; 10, Moraves,
11, nomenclature des peuples entre Nisa et Rhin.
Chrobates, Serbes. — 12, Doulebes; 15, Boïki, destruction des Âvars.
14, division de la Kroatie et de la Serbie. 15, nomenclature bavaroise des
Juxta-résidents; zoupanies desKroates; 16, zoupanies des Serbes; Slaves en
Grèce. — 17. Massoudi, peuples slaves et non-slaves; 18, les rois et Yelinana.
Lekbttes. — 19, état social des Slaves, condition des baptisés. 20, Slavie
intérieure : partie orientale; 24, agitation intestine des Lekhites; 22, condi-
tion du peuple slav-roussien. 23, Lekhites, Polaniens; 24, guerre civile , le
peuple succombe. 25, Pomorans, Pologne faible. 26, Yinules succombent.
27, autocratie russe.
Serbes. — 28, monarchie !
(Voyez la carte de la Slavonie du x«« siècle et les jdeux autres : la carte
politique de TËurope de 1144, et celle qui explique la description d*£drisi;
elles se trouvent dans notre atlas de la géographie du moyen âge).
s L A V I A
DU DIXIÈME ET DU DOUZIÈME SIÈCLE.
1. Les Slaves, délivrés par la chute des Huas, des invasions qualifiés
de migrations de peuples, n'ayant plus à subir que le joug des Avares
(depuis 565), qu'ils brisaient petit à petit, et agités probablement dans
leur intérieur, se firent connaître à leurs voisins par le débordement
de leur race ; par ces violences qui dévastaient un certain temps Tempire
byzantin , par ces bandes nomades qui circulaient avec leurs troupeaux
dans les provinces dépeuplées, par ces populations laborieuses qui
inondèrent Tancienne Germanie, pour cultiver la terre sauvage évacuée
par la race germanique, qui aima mieux alors la chasse des hommes que
celle du gibier.
Ce mouvement n*avait aucun caractère de conquête. C'étaient des
essaims de populations mobiles qui allaient s'établir, qui n'avaient aucun
désir de former des états , luais cherchaient l'existence pour vivre en
commun. Les uns apportaient leur nom national qui les prédisposait à
une organisation plus compacte , dans laquelle germait une formation
future; les autres, n'ayant aucun nom spécial, composés souvent du
concours de gens de différentes populations , ne se qualifiaient que du
nom générique do Slaves ou de Vendes, Ylnides (i).
(4) Combien la cultarc d'Allemagne doit anx Vendes Slaves, résumo un scrutateur allemand :
So Tand der Apostcl Bonifactus als cr Tbûringen im J. 724 besuchtc, die Wenden scbon in dem
grade empfanglich, dass er auss ihnen Vorziiglicb die Anbauerder Trankischen Wiisten waehlte. lo
ganzen Scbaaren zogen die Wenden dahin , wobin sie der fromme Bischof rief. Mit ausrodung der
Waeider, vcrbanden sie die kunst des Ackerbaues. Aus Thracien batten sie den Rocken angefUrt ;
Flachsbau und Bienenzucbt gedieben unter ibrer Pflege. Die tbiiringiscben Pferde deren Verediung
mit morgenlaendiscben Rassen sicb die Wenden vorzijgUcb angelegen sein liessen , galten fur die
scbœnsten, schnellsten und krafligsten. Die Wenden -waren es, velcbe die Salzquellen an der Saaie
zn bearbeiten anfingen ; sie -vraren also die ersten Salzwirker, yrie sie die einsigen , Millier nnd
Gaertner, Hirtenund Zimmerleute, Scblosser und Goldscbmiede waren. Auf den Giitern der Kloster
ond Geisilicben, vobin sie ycrsetst worden vcriohren sie auch ihrcn Freiheit nicbt wie unter deù
âbermiitbigen Franken. Sie waren lidi (Leute), die ibre mansos tributales (Zinsaeker) besassen , ein
agrarinm (Ackerzins) zablten, nnd angarias cum carra (Landftibrer) zur Frohne tbaten. Si biessen
casati (Kossati) wen sie eigene Ilaûser besassen, sonst gasindi oder non casati. So Icbten die Wenden
unter der Franken, Tbiiringen und Sachscn (Sprengel,Einflussden die Wendiscbe nation an dieAnbau
des Dcutschlandtgebabt habe, io Kruse's, dcutsche lltertb&mer oder Archiv. Halle, i9W, p» 1-14).
6 Sl.JkMA, «.
Cette expensîon do Li -ouchc >>}u.e, la mit en collision avec des
éléments variés, qui de Ic^rpart I inquiétaient tout à Tentour. Khozars,
Pietscbings, Komans Je forîent. menaçaient et fatiguaient d*invasions.
Les Boulgars, établis î^m- lo Danube, ci les prétentions delà dominaCion
de Tempire grec , déchiraient ses parties méridionales , où les Kroates
et les Serbes prenaient une consistence plus déterminée. De Toccident,
les Franks, ensuite les Saxons, imposaient le joug sur une vaste étendue,
autant sur les populations appelées pour la culture des terres, que sur
celles dont les possessions se trouvèrent exposées à leur glaive. La pro-
pagande chrétienne de sujétion avançait d*un côté jusqu*aux frontières
Boulgares, de Tautre pénétrait jusqu'aux rives de TOder.
AÛa de repousser Tennemi formidable , les peuplades slaves se fédé-
raient momentanément et ipaîntesfois les chefs de fédérations essayaîeac
d'étendre leur domination et d'organiser Tétat, quelquefois plus dociles
d'accepter le protectorat de Tennemi, que disposés à soutenir Tindé-
pendance nationale. Samo (625-658) arrêtait longtemps les tentatives
des Franks. Après sa mort continuait une résistance confuse. Les Karin-
tiens furent les premiers soumis à la Bavière (77S), conservant le
souvenir et les monuments des élections de leurs chefs. Les voisins
Kroates au sud est, se soutenaient avec plus de succès, vacillant entre
rinfluence grecque ou latine. Mais au nord , les possessions slaves se
trouvaient plus exposées à toutes les avanies. Les Franks et les Saxons
pénétraient par la Turingîe dans la Bohême et dans le Sourb, imposiant
leur autorité à ces deux contrées, aussi bien qu'à celle des Yinules, au
delà de TEIbe jusqu'à la Baltique,
Depuis la mort de S^mo, parmi les Spurbs , on ne remarque que des
alliances très-éphémères entre les populations pour résister à l'aggressîon.
En Bohême , plusieurs pçuples commençaient à former un état» qui
s'associa à la grande Moravie , érigée depuis 850 en une puissance qui
s'éleva avec éclat sur une vaste étendue.
Lorsque les barbares s'établirent dans les provinces et y formèrent les
royaumes, ils ne prétendaient pas d'être aiissii indépendants comme ils
étaient dans leurs forêts. Possédant les terres qui ne leur appartenaient
point, ils s'imaginaient qu'ils en étaient redevables et qu'ils étaient
sujets de l'empire, autorisés d'administrer leurs possessions. La hiérar-
chie romaine nourrissait cette idée et le prestige de l'empire dirigeait
les consciences des enfants du nord. Les Slaves, en s'établîssant dans
rillyrie, la Pannonie et le Noric, tenaient d'autant plus à cette pensée,
que les Serbes et les Kroates s'établirent par le consentement des
empereurs, que dans Ip Noric raffluence de la population Slave n'avait
d'autre but que la culture du sol. Ainsi , Findépendance des premiers ne
SLAVIA» 3. 7
vépngnait point de payer tribut et servir Fempire de leur possesstofi.
I^a liberté des autres consistait dans If^s iranchises de s^administrer
€]aii8 leurs communes par eux-mêmes, afin de mieux remplir les rede-
vances. De part et d'autre , les Grecs et les Latins prêchaient révangile,
d les évêchés fondés parmi les convertis, consolidaient ce prestige de
Tempire, qui contribua à faiblir Tamour de Findépendance. Aussi,
^uand la Moravie s'éleva en une puissance, les rois ne voulant pas être
tributaires, soutenant leur indépendance , ne contestaient point le droit
€le Tempire sur la Pannonie.
Cependant, Texistence d'un état aussi prépondérant inquiétait les
Allemands. La Moravie pouvait encore délivrer quelques cantons slaves
^a joug des Allemands; elle ôtait la possibilité d'étendre leur domina-
tion. Il fallait donc, à tout prix, détruire la grande Moravie, et à cet
^ffet, en 886, furent appelés les Magyars, Madiars, Hongrois, qui cam-
paient depuis quelque temps aux environs de la mer noire. La chute de la
JMloravie était une grande catastrophe pour la Slavouie. Grande quaniité
^e population se retirait vers les montagnes et au delà des montagnes.
Une race étrangère de Madiars, qualifiés de Tourk , s'interposa entre les
indigènes, interceptant leurs antiques relations; la Bohême redevint
pour toujours soumise à l'Allemagne et bientôt Otton recevait les hom-
mages de sujétion de toutes les possessions moraves, des deux Moravies
supérieures et de la Chrobalie.
S. Entre le Danube et la Ballique, où l'empire romain n'avait pas des
frontières, le droit des provinces ne pouvait guère valoir. Les traditions
seulement et l'érudition savante, rappelaient aux Allemands qu'à l'épo-
que de leurs rapines dans l'empire ils avaient abandonné volontairement
leur sol. Ils eurent la soif de recouvrer les pays occupés, habités et
CQliivés depuis qu'ils l'eurent entièrement évacué, par pure race slave.
A ce titre ils pénétraient parmi les populations plus faibles ou plus
Pacifiques, imposaient leur autorité de markgravcs et installaient de
Colons allemands. Depuis que les Saxons réunirent sur la même tête
'es couronnes de l'empire et d'Allemagne , le baptême inculquait dans
(^esprit slave l'idée de l'unilé romaine de l'empire et de l'église : la
violence allait accomplir le reste , exterminant les populations obsti-
nées. Nulle part il n'y avait plus de résistence que chez les Vendes ou
finales, qui possédaient les rivages de la Baltique. Les Obotriics,
Wlnlredes s'y distinguaient spécialement par les moyens qu'il avaient
l'*ëiendre leur hégémonie sur les peuplades limitrophes; les quatre
>«uples de Yeletabes ou Villzes (les grands), réunis inlimcmcnt par
^ne fédération qui porta le nom de Louts, Loutitzcs; les Pomoraniens
8 SLAVU, 3.
^es maritimes) et les insul.ilros Rougs. La position maritime fit prospé-
rer leur état, surtout aes Bau^^^ i <les Pomoraniens. Le commerce et la
piraterie des Slaves, Noi rnaiids, Livs, Ests, se croisaient sur la Baltique
et animaien* les relatiou^i ontic ccb peuples. C'étaient spécialement les
Normands, qualifiés de Yaregg sur les eaux baltiques, qui infestaient les
rivages , montaient les fleuves , emportaient le butin , et se colonisaient
quand il était possible. Les populations qui bordaient le golfe oriental,
les Slaves surtout, appelaient maintes fois le secours et rinterventioo
des Yaregs, comme sauve-garde de leur sécurité. Ceux-ci rendaient ce
service avec empressement et un d'eux, Rourik(en 857 et862)y s'in-
stalla à cet effet chez les Slaves de Novogorod et fit connaître le nom
des Yaregs-Rouss, Ross. Un de ses lieutenants, Dir , prit possession de
Kiov (en 861).
Les Yaregs-Rouss trouvèrent cette partie de la slavonle orientale
très-variée. Des populations qui vivaient de la chasse, des peuples
cultivateurs et des villes considérables organisées en républiques
commerçantes. De suite ils participèrent au mouvement de ces
dernières et pénétrèrent jusqu'à Byzant et au fond de FAsie. Des
caravanes arabes, khozares, boulgares se rencontraient et se croisaient
avec des trains de voitures rouss-slaves, et la monnaie koufiqne de
cette époque, enfouie en abondance tout autour de la Baltique et du
golfe finnique, décèle la participation de toutes les races qui s'y
touchaient Tun à Tautrc, et indique les chemins de ces mojivements
du commerce (t).
En même temps, au centre de la Slavonie, se formait un état qui
allait recevoir le nom de Pologne.
5. Toutes les nations annotaient laconiquement, dans leurs annales,
multitude d'événements qui se succédaient sur tous les points et
césultaient de leurs collisions et de leurs relations réciproques avec
les Slaves. Le Normand, Skand, Dan, Islandais; le Germain, Frank,
Longbard, Sax, Bavarois; le Breton, Gaulois, Italien; le Grec
byzantin; l'Arabe, Andalous, Mizr, Fars, Sogd, de Bagdad et du Sind;
(s) La monnaie koufiqne, les dinars des khalifset des Sammanîdes, venait par Boulgar et se répaB— -
daitpar Smolcnsk et Novogorod tout autour de la Baltique : elle se retrouve dans les pays de lan^»
(Finnois), Karcliens, Tchouds (Estoniens), Livs, Kors (Kourland), Prussiens, Pomoraiûens , Obotri
(llcklembourg), Schlesvig, loutbiand, SkSinie, Suède méridionale (à foison aux environs de StidUiolm}
,dans toutes les iUs de la mer. Voyez l'excellant ouvrage de Paul Savcicv : topografia kladov svostot
schnimi mnnetami vr Rossii pri baltitzkicb stranach (en russe), topographie des enfonisscments de I
monnaie orientale du viii* au xi* siècle, en Russie et autour de la Baltique , Potersb. 1846. C'est L
premier volume de l'ouvrage que le savant auteur va continuer sous le titre de la numismaiiqvL
moubamméda&o soxis le rapport deTbisloire russe : moubammcdanskaîa numismatika w otnoache». ■
k ronsskol istorii.
SLAVIÂ, 8. 9
le juif erranl; rindigènc slave lui-même traçait les traditions et les
vicissitudes de la Sïjduche. Le Slave visitait Kordouba, Rome, Byzance
et les rives de la Caspienne. Les empereurs d'orient et d'occident
connaissaient Tidiome des slaves et s'entretenaient avec eux. Sept
langues, dans sept climats du monde entier, parlaient et traitaient les
affaires des Slaves\ et la Slavonie, cette ruche- mère de tant d'essaims,
n^esl pas assez connue, son intérieur, comme l'œuvre des abeilles, est
tout-à-fait ignoré. Cependant , c'est à la suite de grandes commotions
dans ses entrailles, qu'elle vomit tant de populations; c'est à la suite
de la fermentation intellectuelle, sociale, ou de l'intérêt matériel que
sa race inonda tant de pays. Un seul byzantin , Constantin porphyro-
genète, retraçait avec plus de circonstances quelques traits historiques
développés avec plus d'enchaînement; un arabe Massoudi narrait en
même temps l'histoire des révolu lions qui agitaient cette race ; cette
histoire pouvait sans aucun doute porter la lumière à notre ignorance,
mais l'ouvrage n'est pas encore retrouvé.
Le centre de la Slavonie reste , et restera peut-cire pour toujours un
impénétrable mystère : mais tout son circuit possède, surtout pour la
situation géographique , d'abondants matériaux , ainsi qu'on se trouve
continuellement dans ces petites communes , villages et hameaux dont
les noms se sont perpétués jusqu'à nos jours, défigurés par la pronon-
ciation des étrangers.
De nombreuses chroniques et annales signalent une multitude de
localités; les conciles et les actes publiques; les diplômes authentiques
ou faux, et ces derniers très-instruits dans la situation des contrées dont
ils traitaient, fournissent d'innombrables renseignements. Les explora-
tions marines de Wulfstan et d'Olher, contribuèrent à celle description
générale qui se trouve dans la version anglo-saxonne d'Orose , faite et
augmentée par les soins d'Alfred (mort 001).
En même temps (vers 890), une note statistique, qu'on qualifie de
géographie de Bavière, a pu donner beaucoup plus de détails en énu-
mérant les cantons slaves. Ensuile Ditmar de Mersebourg (mort 1018),
Adam de Brème (1076), Helmold de Bozov (1170), expliquaient les
positions des peuples Viuuls et Slaves des embouchures de l'Elbe et
de l'Oder jusqu'au Danube.
L'IIlyrie et les parties danubiennes, soumises ordinairement à la
suprématie de l'empire, étaient parfaitement connues à Byzant et par
l'empereur Constantin porphyrogenèle (mort 959) , qui se plaisait d'en
donner une intéressante description. — Chez les arabes, les explora-
tions d'Abdullah Seid Ghazi (780-800) , de Mouslim ben Abi Mouslim
horrany (840-846), les relations commerciales et les ouvrages grecs
iO SLAVES, 4.
fournirent à Kodbediiiii Mi«^$oudi (947) d'abondants matériaux pour
traiter particulièremeiii it.? '«ffaires slaves, dont il reste une courte
esquisse.
L'existence des peuples du centre n'est pas tout-à-fait ignorée de ces
écrivains, mais c'était la part des indigènes d'en être plus instruits et
d'en parler avec plus de connaissance. Le moine petscherski de KiioT *
Nestor (1116) se distingue spécialement à cet effet, et il est le seul de
cette époque qui porte la lumière capable de suivre les notions acqui-
ses par les arabes sur les peuples du nord.
L'abondance des sources, le mystère de l'origine des peuples» entraî-
nèrent une foule d'écrivains dans ces recberches pénibles, qui, avec de
succès variés, donnaient des résultats les plus satisfaisants, ainsi que
les sources ci-dessus indiquées sont suffisamment expliquées et les
possessions des Slaves minutieusement déterminées (s). Personne ne
s'attend à voir, dans notre mémoire , la répétition du fruit de ces
recherches; Edrisi ne le demande pas. Or, nous nous abstenons de
reproduire trop ce que les autres en ont dit, mais nous désirons avoir
notre part, et continuant l'examen de la Slavonie antérieure à Edrisi,
de la Slavonie du x"** siècle, nous nous attachons spécialement à Joseph
ben Gorion , au géographe de Bavière et à Massoudi.
Khozars, Yaregs.
4. Joseph ben Gorion, ]:^^dv Ungua judaica, d^D^DV in lingua
grœca, ts^ir)>DU '^^ lingua romana (pag. 28), et son ouvrage intitulé :
histoire dos Juifs, sont des énigmes. Lui-même se dît sacerdoce, con-
temporain de la prise de Jérusalem, qu'il défendait, et de son roi
Agrippa; il a connu Nicolas de Damas. Ainsi il serait contempo-
rain de Joseph Flavien. Fiction assez difficile de réconcilier sur ces
indications. Son ouvrage était de bonne heure connu chez les arabes ,
qui qualiGaient loussouf ben Gorion de chef et historiographe renommé
entre les docteurs (4). On conjecture donc qu'il vivait au ix"" siècle (&) •
A la tète de son histoire se trouve une genèse biblique, faisant
(3) L'ovvnfe le plv* ridie en indicatUoiis snr ce qni a été dit pu U SlaiTonîe, âaboré mr vme r
ècMIe ci pleiB <i«s plas heureuses expUcaiîAns , est roarragc de Paul Josepk SuCarik (Sdttbrâik)
domuskë starontBMU 0» antiquités slaves) à Prafr., 1836, ia-S* [traduit en pokwais par Jcift— le
Kapohmn Bimkoiwski, Poseu, ISil). Nous suitoos partout sa Inaiière et ses bous couaeUs, ù q«eki«o
uwCif aaei |MÙ«saui ue uous fiance à le cootrari^.
(4) Vmmffi de beu Goriou crt traduit eu arabe par son co-relistoanaire Zakbaria ben Said
Okmtmi al israili (IMierbelot).
(5) GMlei^Miraîa de Josepk HaleTÎ qui ÀTirait eu M7, et du médedn Zidkjah nort 8M. V^jeu
«u ^*e» «I le srraui Canuolr, dans israebtiscbc Anaaleu, eiu CcatralUatt, berMif. vou Jost.
iPinîkf. «■ ■eiB.ttsf, p. m, ise.
SLAY£S, 4. il
dénombrement des peuples japhéliques de rEuropeetdu*seplentrion
aox environs du Volga. Les manuscrits de Thistoire entière sont très*
variés, on a des abrégés, on a des textes très-amples qui sont privés
de la dite genèse (6). La genèse parait donc être une espèce d'interpo-
lation, d'autant plus qu'elle rapporte quelques événements postérieurs.
Toujours elle porte des teintes d'une baute antiquité, il est assez
évident qu'elle est très-ancienne, du u* siècle au plus tard, donnant un
dénombrement des peuples avec certaine connaissance. Elle se montre
bien instruite sur tous les peuples dont la position nous est mieux
connue, et devient moins claire et incertaine, quand elle traite les
peuples sur lesquels nous ne possédons pas des connaissances suifisan-
les. Cette incertitude vient quelquefois, on ne peut en douter, de la
dépravation des noms, mais il est non moins certain qu'elle nous donne
les noms dont nous ignorons l'existence par d'autres sources.
Joseph explique la dispersion de la postérité de Japheth , d'après les
langues et les générations de la manière suivante :
Les fils de Gomer (d'AschkhenaZy les Franks, étant évidemment con-
sidérés comme Germains, Teutons) sont Frankus, qui habitent le pays
Frantza sur le fleuve Seine; ceux de Rifalfi, sont firetonim, dans le
pays Bretania près du fleuve Lira (Loire). Seine et Lira se perdent dans
l'océan ou la grande mer (i).
Les descendants de Thogarma sont au nombre de dix. Khasdai ibn
Sprot, vésir andalous (958), d'après la narration du roi des Kbozars,
compte le même nombre : mais de la dixaine cinq seulement sont
d'accord avec ceux de Joseph ; Tautre moitié diflerente.
•iriD Khozar, i:i'?D Boulgar, m:i:x Ongori, (Hongrois, Madiars),
^T3 ÎD Bouz ou Bozil (probablement ])^ ji Goz, ou bien Ouç /*«Tàt tûv
(6) L'édition hébraïque de Mantoae serait la plas ancienne, antcricare à Tannée 1-180, (elle est
prW^ de genèse). La première (avec la genèse mais tronquée) est liébraïque de Constantiuople 4490,
éditée par Abraham Conalh. L'aulro hébraïque (pleine) éditée ISIO, par Tbam Abcn Ickhaïa. —
Ensuite réimprimée (accuratior) à Venise ISli, à Craeovie 1S9S; accompagnée de versions latines à
Oxford 1706, par Jean Garnier, et à Gotha 1707 par Breithaupt. — Cette histoire a été traduite en
allemand, en anglais, en langage rabbinique d'Allemagne. Sébastien Munster en a fait un abrégé qui
parut à Worms f 520, ensuite à Bâie 1S4I, 4559. Un abrégé arabe se trouve imprimé à la suite des
|>U)les polyglottes de le Jay et de Walton. — Les manuscrits sont très-nombreux; un des plus amples
qui M trouve dans la bibl. nationale à Paris, est précédé d'une longue introduction donnant de ren-
•eigaements sur l'origine de l'ouvrage qui est intimement lié avec la fameuse histoire d'Alexandre
le fliacédonien , laquelle disposait la conscience historique du moyen Age.
(7) La paraphrasis chaldaica de Joseph recteur de l'acadcmic syriaque vers S74), assigne l'Asie et ta
PerM à Afichkhenaz et Riiath ; et Barbaria à Togarma qui suit chap. I , éditée par David Wilkins ,
Amstelaedami 1748, in-4*. — Suivant les autres, Togarma désigne l'Arménie ou la Géorgie. (Voyez
vos lettres sur Benjamin de Tudèle p. Si). — Mais le père Gomor est expliqué Germania par la dite
paraphrase klialda!qne ; Frank par bon Gorion ; et son fils Aschkenaz est N'cmctz dit rn Espagne , le
Tesir Kbasdal. .
iâ SLAVIA, 4.
(GoDSt. porphy. de jtlni. iipp. r>7), enfin tiXD *^DTZsi1>ooUi» Savow
(probablement pxD j.)!;--^ b-tv.in de Bartas, chez Edrisi VI, 7, p. 4(M,
ou Savour, ville Bouli;iiai\ suivout Ibn Haoukal).
Les cinq autres, suivant Josepu sont ^pni&3 Tourki , "^^s I^^i^^
(Badjinak, Pietschings), Dl^p^^X Alikanus, ^yoT^ ou X3^231 Raffina
ou Ranbona , y'ch'^^ Tilmatz, dont les trois sont assez étranges , échap-
pent à toute conjecture. De cette série de noms, un seul reparaît dans
Fhistoire de ben Gorion, lorsqu'elle relate les conquêtes de Gyms èuM
les parties septentrionales, où il conquit toute la terre yrh^ Âlkhaa el
IXD^X Alsar et les montagnes des ténèbres (p. 27). Les Tilmatz répon-
dent à BopoxoLXfjLUT Yorolalmat ou simplement TaAyoïdcT, horde des F^td-
nakits (Gonst. porphyr. de adm. imp. 57). — De parmi les cinq nommés
parKhasdai, -i^ix Avar indique sans doute lesAvars; xiMn Thartia
coïncide assez bien avec le royaume de Tarse, dont les habitants sont
appelés Jogours (llayton, chap. 2; carte catal. etc.). Quant aux antres
WyTVi Thirus, i">^ix Aounin, Onin et niiî^T Zanor, on peut, je pense,
admettre, que les juifs de ce temps-là savaient nommer les eamps
les hordes qui se distinguaient momentanément dans les limites
Khozars (s).
Le texte de Joseph ajoute que toutes ces tributs dressèrent leu
tentes autour du fleuve ^^^1 Ethel, Ithil, qui est '^xb&DX AtelaU^^
Seulement les Ongres, les Boulgarset les Patzinakhs sont allés campc^T
autour du Danube. Les Patzinakhs n'avancèrent vers rembouchure dk^ v
Danube qu'en 895; Khasdaï ne le connaît point : il est doneinconU
table, que leur établissement et leur nom fut introduit plus tard da:
le texte de Joseph.
Khasdaï fait dire au roi des Khozars qu'il était voisin des Grecs et dl.
Russes. Les habilanls des pays pi^n Thanat (du fleuve Tanaîs, Don),
HDXD Bassa ('Aêaffyta Gonst. porphyr. de adm. imp. 42, Abassia), y
qu'à la mer de Gonstantînople (noire), lui payent le tribut et tre:
peuples vers l'occident jusqu'au grand fleuve ;i7V louzag (Ozou, Dnie|>r)»
et ceux qui demeurent dans des villes sans murailles et occupenC le
désert (entre Dniepr el Danube, les Patzinaks, Gonst. porphyr. de adlm-
imp. 57) jusqu'aux limites de CN'^'^.jD'in Hongrim (Madiars qui détraî-
rent la puissance morave), lui sont tributaires. Possesseur de Tembou-
chure de louzag , il accorde aux Russes le passage (édit. de Garmoly»
p. 5G). Le roi des Khozars rappelle une très-ancienne conquête (anUS-
rieure à 740) de la contrée ^n"^N Ardil et du pays ]5<^n^i Roudelan
(8) Carraoly, itinéraires de la terre sainte, p. 9i, 95.
SLA VIA» 4. 15
(p»5i). La première désigne sans doute le canlon UA ^A .U.t
Arisan, Ârtin, Ârtsa des arabes d'Erss, quiiirréteront notre attention
dans son lieu. Quant à Roudelan , jignore ce q^'on en pourrait dire.
Les fils de Javan sont lonin, qui haljltent la Macédoine; ceux de
Madaï sont DlWx Azralous , qui habitent le pays de pio Borasan.
Ils suivent les Grecs et sont suivis des Italiens; on serait donc peut-être
tntorisé de corriger les noms en D^^'pn^X Ândalous, qui habitent le pays
p*113 Bortan C^I-'V Bortat (pyrénéen) : mais Borsan tire sur Borschan,
Bordjan» pays des Boulgars danubiens suivant les arabes.
Les fils de ThoubcU habitent en Toskana, autour du fleuve ni<t^2
Kaaik («j**-^ Bisch, Pise surÂrno); et ceux de Mesech habitent en
>3)t^ Seni (Sienne) (o).
Les descendants de Thiras sont tS^^on Rousisch (Rouss-Varegs),
>3ana Bosnî (j**o^ Wes, voisins de la Novogorodla grande) (lo),
^^IDK Anglisi (Anglo-saxons) qui habitent près do la grande mer.
U» Ronsîchs déployèrent leurs tentes autour du fleuve x"^'*D Bira
(^0^3 Volga, Ithil), qui se jette dans la mer Gorgan (Djordjan, Cas-
pienne).
Saivent maintenant les fils de lavan Makedonia (ii).
Les fils d'Elisah (dont le iVère est Alam) sont les Âlemania, qui habî-
^nt les monts ou villes Joub et Septimo (Juvavum, Saltzbourg et
►e^aces de Ptolémée dans le Norique au nord). D'eux sont sortis les
ombardi, qui habitent au delà des fleuves Jub et Septimo et ilssubju-
Ei^rent Italiah et habitent jusqu'aujourd'hui autour des fleuves Poo et
•ô«ino. Poo verse ses eaux dans la mer... nxpii"i2 Bondekiah (35^ 'jj
^xise). Borgania habitent autour du grand fleuve Rodani. D'eux sont
^^»lfefc{iTn2 Bardia (probablement (î<">p2 Brizia, Vrises, Frises), qui
^ bitent autour du fleuve Renus, qui se jette dans la mer.
Tharsis sont ceux qui vivaient avec les Makedoniens. Mais lorsque
*^ Ismaélites s'emparèrent de la terre de Tarsous (Cilicie), ils se reli-
^ïent dans les terres de Javan et continuèrent la guerre avec les
^Viaélites de Tarsous.
Les fils de Chillim sont Romim , qui élevèrent leurs places fortes
les plaines de Khampania, autour du fleuve Tiberio.
C^) Àbe0 Esra in psal. cxx » incolas Meschecbi Toskasos appellat. •— La paraphrase khaldaïque de
'^^eph asrigna la Mcdîe à Madaî , et à Thiibal, Mcshech et Thiras : la Bythinîe, la Mocsie et la TLracc.
■ Wa» tard on allait avec Tliubal en Espagne ; avec Mcshoch qui livrait de bons esclaves par les
'oacU caucasiens à Hoskou de Russie.
C^O] Voyei sur ces Wes, Fraehn, U)n Foszlans und anderer araber Berichtc, p. 804-233.
1-il] L'antique paraphrase kbaldaïqne de Joseph , annote donble série de ces fils. Filii vero Make-
^«is : Àlsn et Tarsus, Italien et Dardania; verbis aliis : filii vero Javonis : Elisha, Alam , Tits» ,
>Tia et Dardania , Ridon et Chamen et Antiochos.
14 SLAVIA, ».
5. Les enfants de Dodanim Annt >ts/^n Danischi (Danois), ttui habil-
lent les villes situoi' i <\\*us il.< i: ^Ifes ou péninsules de Focéan danà les
pays de xn Do^-*» \::.rC Mkhba (probablement fc<33D Skhona,
Skania) et {<^n"in: Brof^t^na , a;; milieu de la grande mer. Ils s^engagè-
rent par serment à ue pas servir les Romains, Orent des Sacrifices
dans les lames de Tocéan, et ne purent point : car la domination
romaine pénétra jusqu*aux dernières îles de la mer et jusqu'aux flots
de leurs détroits.
Cest un événement de Tannée 947, dans lequel Otton le grand s*éuît
emparé du Schlesvig et de Jutland jusqu'au golfe d*Ottesund , ainsi
appelé d'Otton, qui, vainqueur, lança son javelot dans le golfe en signe
de souveraineté.
Les Danois avaient acquis depuis un certain temps une grande renom-
mée. Les géographes ravennates répétaient que Dania velocissimos
profert homines : (nam inter ceteras), hoc sua, (licet infiunt), landantor
problemata : laudabatur Parthus in arcu, dum non noverat Gothos;
sed 0? ubi est Danus? Quae Dania modo Normanorum dicitor patrii^
(anonym. raven. lY, 15), à quoi, vers 1119, Guide Pise (mscrit d4
Bruxelles p. 55) ajoute : seu Yuarangorum dicitur patria, et fich
dans le texte des ravennates que le Danois ne devient guère ce qu* '
dit dans son problème. €e passage explique que Bardena de la
josippine désigne les Yuarangs (12).
Dans les annales d'Âdemar (qui écrivait vers 990), un interpoL
tour (vers 1140) insérant une légende de S. Adalbert (ad lib. IK. 1
cap. 51, edit. Pcrlz, t. lY, p. 129) dit: sanctus dcniquc ÂdelberL ^«s
(iS) Au commenceniCDt da précédent mémoire cbap. S, note 3, p. 4, 5)« je signalais Texisteiifi^ de
la description de Gui de Ravenne dans un manuscrit de 1119 de la bibl. de Bourgogne à Brox^llei.
Depuis, le savant G. P. Bock entreprit un examen approfondi du code, et en 1950, sons la form^dt
lettres adressées à son ami L. Bethman, il publia ses observations sur ce manuscrit intulé JUier
Guidonit. Le manuscrit est un fatras d'extraits géographiques, chronologiques, historiques, parai
lesquels se trouve un poëme en rhythme vulgaire qui célèbre un fait d'armes des Pisans aocompagaéf
de Génois contre les Sarrasins en 1088. M. Bock, avec une profonde connaissance de Tëpoque et ue
sagacité extrême prouve que ce recueil d'extraits est en entier l'œuvre d'un PIsan Gnii^oniif
dévoile l'existence et la position. Les preuves sont incontestables, les argumentations irréfataUei; ,
nous adhérons volontiers, même à presque toutes les assertions et conjectures de H. B6ck,à l'eznp»
tion de ce plan prémédité empreiut dans le choix et la réunion de tant de pièces et firagntirtf
hétérogènes. Ce plan se manifeste fortuitement par la prédisposition du pisan rapièceur, qui ainiit
quelque peu digéré les morceaux agglomérés s'il avait conçu une idée politique. Toujours est-il que
dans cet assemblage de monuments historiques, l'Italie du ravennate (d'après Castorius), se treiTt
mieux que dans l'anonyme connu. M. Bock refuse le baptême de Gui au ravennate, lui aussi, il doit
rester anonyme. Au prime abord cette question parait être futile : mais elle touche rexistescedek
description de l'Italie que les savants du xvi* siècle ont vu sous le nom bien connu de Gui, copié an
XI' siècle par l'anonyme , exploité au xii* par un pisan homonyme. Le pisan restera, Je pense, f>pi^
ceur copiste, et Gui de Ravenne source d'où l'ont puisé les scriptcurs postérieurs. L'étude de aotis
«mi Scbajes va immanquablement débrouiller les incertitudes confuses et disperser les obscurités»
SLAtIA, 5. 15
convertit ad fidem Christi, quatuor proyincias, scilicct, Pollîanam,
Sclavonianif Waredoniam, Gracoviam. .Quas postquam fundavit
infide abiit in provincia Pinccnatorum (Pietschings, Prusses). Cette
Waredonia signale les Yaregs Rouss qui dominaient sur la Slavonie
orientale.
A Byzantc les Fargani, Vargani (Const. porphyrog. de cerimon.
anlaell, p. 152), B«p»yyot Varangi (Anna Komn. ap. Stritt. IV, 448),
furent connus comme avantureux , coureurs et mereenaires.
Les Rouss qui s^établirent en Slavonie, étaient qualifiés de Yaregs à
cause qu^ils venaient de parmi les Yaregs, et les Yaregs furent appelés
par les Rouss-slaves comme auxiliaires jusqu'à Tannée 1018 (Nestor
ehron.). Le nom de Rouss, Russes, se perpétua parmi les Slaves, celui
de Yaregs sortit de Tusage.
Les arabes, bien informés sur ce qui se passait chez les Slaves, con-
naissaient les Yaregs. En 1050, Abou Rihan le birouuien, écrivant dans
rinde, donnant dans son ouvrage la description de la mer baltique, rap-
pelait Yareng. 11 y dit : la mer qui baigne à Toccident les pays depuis
Tandja et Andalous, s*appelle la mer environnante. Les anciens
^^tJ^I lounanioun (grecs) rappelaient okeanos. Il n'y a personne
Cfui oserait prendre son large, on tient ses rivages. De ces pays elle
s^étend vers le nord le long des régions de ikJUL^ Saklaba. Au nord
de Saklaba sort de cette mer un canal (un golfe) qui se rapproche jus-
qu'au voisinage dcBoulgar pays moslemine. On rappelle oXJIjjt
"Vareng. Mais c'est un peuple qui habite ses rivages : ensuite Tocéan se
tourne vers Test (Yakout, mort 1229, mscrit ap. Fràhn, Ibn Fozl.
p. 182; confer. Aboulf. versionis Reiske p. 152). Ce peuple est d'une
baute taille et guerrier (ajoute Schirazi , vers 1500).
Les historiens russes-slaves, qui succédaient à Nestor, répétaient le
nom de Yaregs comme ancienne réminiscence histqrique; chez les
arabes ce nom ne discontinuait point à être vivant et n'a pu vieillir.
Habitués à se répéter l'un l'autre d'un écho interminable, ils rappe-
laient les Yaregs et leur mer. Yakout 1229, Nassir eddin 1276,
Schirazi 1500, HamduHah Mestoufi kazvini, Schems eddin dimeschki,
Abonlféda 1521, Ibn al Ouardi 1549, Bakoui 1597, le commentateur
de Nassir eddin scherif djordjani, Ibn Schabib harrani, Schems eddin
dimeschki 1586, Moustafa ben Abdallah 1648, et quantité d'autres
avaient Taflaire géographique avec les Yaregs éphémères. Seulement
le nom minaudait et changeait de tintement , que les écrits des auteurs
et copistes firent résonner : Yzng, Yrng, Yareng, Uzane, Aureng,
Avreng, Yaraîk, Yarenk, Yarang. Moustafa tourk, appelé aussi katib
tsdielebi ou hadji khalfa , trouvant ce nom dans les ouvrages aslrono-
V
i6 SLAVEfc, 6.
miqucs et géographiqiui-s , «expliquai! que c'était le nom de la mer alle-
mande ou baltique et qwc. U... Varoi:^ étaient les Suédois (is).
Déjà Louis le Dé]n'nt):iii'c, recevant les envoyés des Rhos, qui
arrivaient par Byzant A -^a cour, (liliî.'.enlissime invesligans, comperit,
cos gentis esse Sueî^.'in» • (PruJepl. irecensis, annal, bertinian.
ad a. 859). Les recher* ïl^ dfj'ori^îae russe s'appuyèrent sur cette
première investigation et trouvèrent en Suède, près de Birka, un
canton Ros-lagen, conclurent que c'était le berceau et que les Rous ,
Ros Varegs , venaient de Suède.
Mais l'appellation de Varegs pouvait être générique pour les pirates
de la mer baltique, elle convient aux Danois, ils étaient ainsi qualifiée,
de même que les Rhos et on connaît chez ces Danois des chefs qui
portent le nom de Rorik, Rurik, Rourik.
Charles le grand donna à Hrerek ou Rourik , frère de Gormon , roi
des Danois, la Frisie en possession : il est qualifié de dux Frîsonum , et,
fidèle à l'empire, il périt en 810 par une irruption de Normands. Un
de ses neveux, fils de Halfdan, portait aussi le nom de Rorik, lequel
baptisé avec son frère Heriold en 826, obtinrent en possession magoam
partem Frisonum Rusiringen. Expulsé en 841 par l'empereur Lothar ,
il s'empara en 850 de Doresladt et il fut in fidem receptus par le même
Lothar. Appelé en 852 pour rétablir le suédois Âmound à Birka , il
visita de suite fines Slavorum (Remberti vita Ànsgarii, cap. 19). Plus
tard, 859, Rurik à la tête des Varegs Rouss, rançonna les Slaves et les
populations limitrophes (Nestor, manusc. de Kônigsb.). Ensuite, en 862,
invité par ces peuples, il s'installa à Ladoga et conjointement avec
Sineus et Trouver, communique au pays l'appellation de Russie. Rurik
se montre encore en 865 par un pillage de Frisland, de Dorestadt, et
des environs du Rhin jusqu'à Cologne (Hincmar...). Enfin il reparaît
chez les Slaves en 864, se constituant en knez, prince, il y établit
partout ses lieutenants. Après sa mort, arrivée dans la Novogorod
en 879, le nom de Rorik ne se rencontre plus dans les fastes de rocd-
dent. Par celle coïncidence des dates , l'identité de Rurik danois , avec
celui de Novogorod paraît être évidente (ia). C'est ainsi que Rousisch,
compagnons d'armes et de piraterie , établirent leurs tentes , comme
le dit la genèse josippîne , autour du fleuve Beîra (Volga).
6. La genèse de ben Gorion , continuant encore l'énumération des
enfants de Dodanim, compte dans leur nombre : ^^IIXID Kravali
(13) Voyez sur tout ceci Frxlin, Ibn Foszians und andcrer Araber Dcrtchtc ûber die Russcn,
Pctersb. 48i3, iii-4". , .
(14) Ucbcr die Herkonft des altcn russisclien Furstcngcschlcclitcs aus JiiUand , vod Prof. F. Krnse
UDorpat, dans les mémoires de la société des antiquaires du nord, Copcnlia^ie, 1840, p. 321-863.
SLAVES, &. 17
Croates), w^D Salaki (^n^^D Slavaki), CSli^^ telzûm, (c'^DK'»^
JLc(zkhî), u^)2))b Livomim, nXD'HD luiarkhar (iX^lD Khrabar,
Chroates), ]^iû"ir2 Khezramin, (]^D1VD Baïormin, Bavière), D^d^s
Domin (Bohême). Ils établirent leurs places fortes autour de golfes,
depuis les limites des Boulgars jusqu^à la mer Bondekiah, d'où ils s'éten-
dent jusqu'aux extrémités qui atteignent la grande mer : ils s'appellent
'^D^pD Sklaba. Les autres disent , qu'ils sont les descendants de Kha-
naan, mais il est mieux de les considérer pour la postérité de Dbdanim.
Il est claire, que la genèse prend pour les Slaves, ces sept peu-
ples de Dodanim. Les leçons des copistes ou des éditeurs les rendent
presque inintelligibles. Je pense cependant que les Kroatcs, les
Chrobates de Krakovie , la Bohême, se débrouillent très-positivement.
Le Saloki, nom générique des Slaves, avec la terminaison de ak, dési-
gne spécialement les Slavaks du sud des Karpats. Baïormin , à l'époque
où le duché de Bavière avait autant de populations slaves que theutones,
indique les Karintiens et autres Vendes qui sont qualifiés de Bavarois ,
comme habitants du duché de Bavière. Par un nom territorial les
Tschekh sont Bohèmes et les Yendes-Karintiens sont Bavars.
Les noms seuls de Letzfim et Livonim offrent une difficulté très-
obscure. Il serait probable , que les éditeurs avaient en vue les
Litvaniens et les Livoniens, mais une telle production de leur leçon ne
nous autorise pas de suivre leur opinion. Des conjectures qui se pré-
sentent, la leçon de Livonim donnerait c^nb Lahlimim, Lakhmim,
les Lekhs, Lechites, et paraîtrait peut-être moins probable que l'expli-
cation de Livomim par Lîv, Livoniens, qui , bien que d'une autre race,
pouvaient être affiliés à Dodanim par la genèse, à cause des gollcs sur
lesquels ils étaient connus par les Normands et le commerce.
Quant à Letzfim ou Letzkhim : les Lontitzcs des rivages balliques ,
les Loutzaniens de Bohême, les Loutzanicns de Volinie et plusieurs
autres peuples de noms analogues , pourraient prétendre à la sollici-
tude de la genèse. Les exploits de guerre ont illustré les Loutitzes
Veletabes; le commerce fit connaître spécialement les Lontschaniens,
Loutschaniens , AevÇavy]vo(, AevÇevtvoc (Gonst. porphyr. de adm. imp. 9,
57, Nestor...) qui habitaient autour du fleuve Stir, alliés des Kiioviens,
et voisins des Dregovitsches, Ullins et Patzinaks. En descendant les
fleuves (Stir, Pripets, Dniepr) ils visilaient les marchés de Kiiov et
leur ville Loutzk rk Aeourça^ existe jusqu'à nos jours (is). Je pense que
(IS) Scbafarjik (antiquités slaves II, 38, 8] contre l'opinion généralement acceptée et contre les
'adications hisioriqaes sur la situation des Loutsclnnicns,s*c(rorcc à les retrouver dans les Loutsclia-
nîensde la ville de Vielikic Louki. Mais il nous est impossible d'avancer aussi loin la domination d( s
l^atzinaks qui touchait les LoutscbaDicus ; la communicatiou riveraine do Loutzk volinicu avec
18 SLÀVU» 6.
CC6 (krnîcrfi 6oni'le« I.rurim, I.etzkhi étant plus rapprochés des
peuples du midi ^ti: pat:ii!>.^ ni ^m'^occuper la genèse Joséphine, et on
peut dire avec 'rrtiin.lo (;iic ic ■ )mmerce intéressait beaucoup plus
risraéliie que toi... ..i.'ii\: '■ »«f»!inai";e.
Loutzk se troiri.'i-!^ ^ir : it^^suge de communication de Foccident
avec l'orient septentrional. La narration épistolaire de Khasdai nous
en fournit des indices assez positifs. On sait qu'entre les empereurs
byzantins et les khalifs de Kordoue les relations assez fréquentes ne
discontinuaient point. Khasdaî espérait donc de faire passer son envoyé
au roi des Khozars par Byzant. Empêché par les hostilités qui rendaient
la communication dangereuse (p. 59), il savait qu'il aurait pu se
frayer un chemin de Jérusalem par TÂrménie et le Kaukase jusqu'aux
J^hozars (p. 40) : mais il apprit qu'une autre route était praticable. Les
khalifs de Kordoue, n'oubliant point les autres puissances chrétiennes,
soutenaient des relations avec Henri l'oiseleur, roi d'Allemagne. Ces
relations étant pacifiques, les annales en ont fait à peine quelque
mention (.....); Otton-le-grand suivit l'exemple de son père,
et en 955, Jean, abbé de Gorce, fut envoyé à Kordoue, où il a eu à
aplanir quelques obstacles pour sa présentation au khalif Âbder Rahman
(vita Job. gorzien. ap. Perlz, t. lY. p. 557) (le). Il parait qu'en même
temps arrivait un envoyé de la part du roi de 3xbpi^bî< CTW uh
gebalim qui sont Tzklab (p. 57) , accompagné de deux Israélites Ma
Saoul et Mar Jousef , qui se chargèrent de faire passer la lettre d
Khasdai au roi des Khozars (p. 40) (17). En effet, par leur soin m
autre Israélite , Iakob bar Eleazar du pays de v^^ Nemetz (ÂUeman
Aschkcnaz chez les juifs, Nemeiz chez les Slaves, qui communiquèrer
cette qualification (de muet) aux Khozars et aux Arabes), accomplit ?
remise de la lettre au roi des Khozars (p. 47). Ce roi des Tzklabs éi
Kiiov, nous paraît aussi beaucoup plus facile que celle des grands Louki du nord , dont les habitas- ad
devaient d'abord traîner leurs marchandises par terre avant de les faire descendre le long dn Dmlj -Hy
Les grands Louki , assez obscurs dans les fastes de la Russie , n'arrivèrent jamais à l'importanc^s» de
Loutzk volinien.
(16) La monnaie commune, de convention, bilingue, de Ilesdibam 976-1 005, ctdelIcnriniDOS-l 93U,
atteste que les bonnes relations continuaient, d'une manièrs très-intime. Une pièce do cette moïk. Kxaie
avait été exhumée à Trschcbougne près de PloUk en Pologne , ut clic prouve que la monnoLme à
moitié andalouzc passait par l'Allemagne pour se coucher dans les terres slaves. J'ai donné sa & figure
dans ma numism. du moyen âge tab. VU , î. La figure y est bonne mais l'explication de l'épigrapUe
koufique et l'attribution à Henri l'oiseleur, sont réprouvés par le savant orientaliste et profond
numismate Frœhn. Il y trouva^ U / JJb Jo^ I / ^^^jj ' ^' ' / f^ fl^^ t
alimam Heschham émir almoumcnin almouaïd billah; à la fin le nom posthume ^du vezir' Amir,
qui périt en 1001. De l'autre côté HINRICVS. et une croix.
(17) Other embassiesarrived.... one from thcking of the Slavonians, called Ducu, dit, je ne »»it
sur quel témoignage Murphy, history of the mahomtan empire in Spain , p. 101, cité par Carmolj,
note Cl, p. 99, des itinéraires de la terre sainte.
SLÂVIA» T. i9
limilrophc des frontières d'Âschkenaz ^33 peut-être roi des monta-
gnards JUsw L'un et l'autre revient' à un chef des Chrobates
habitants aux pieds des Karpates, à la grande ou blanche Chrobatie
BeAoxpw€aTO( viyoov àanpot x^uCaroi î^ovrlj ràv i^cov dfpx^vra (voïcvoda),
laquelle avec son prince se trouvait sous la domination d'Otton-le-
grand roi des Franks et Saxes (Gonst. porphyrog. de adm. imp. 50, 52,
53). Par ces Gebalim et Loutzkhim on passait d'Aschkenaz au pays des
Khozars (is).
ViNVLES, SORABES, MORAVA.
7. Les indigènes de ces vastes espaces, qui s'étendent autour du
Dniepr, de la Yistule et du Danube, sont, à différentes époques, connus
sous différents noms génériques. Sans rappeler ceux de Gètes ou
Dakes qui tombèrent en désuétude (Theophylact. 46; Pbotius myriobibl.
65), on les qualifiait de Vendes, Yinides, Yenedes. Tout porte à croire
que ce nom leur était donné par les Germains, sans qu'il fut en usage
chez les indigènes mêmes. Chez eux paraissent les appellations de
Serbs, de Chrobs assez répandues, mais la plus en usage et générale
était celle de Slaves, Slavini, Sloveni, (19).
Toutes les nations répétaient ce nom, le rendant ordinairement plus
dur par leur prononciation : Stiabi, Skiabi, ensuite adouci par quelque
autre en Âskiabi, Isklabi. Tout le monde désignait par ce nom les
indigènes de vastes espaces : mais les écrivains de Tempire brisé,
distinguaient deux divisions distinctes de leur race et séparaient les
Ântes des autres Slaves (Jordan, de orig. Getar. 5; Procope, de bello
goth. III, 14). Ces Antes touchaient la mer noire entre Dniestr et
Dniepr et ils s'étendaient vers le nord autour du Dniepr. Un certain
temps plus puissants que les autres, ils formaient une puissance
détruite par les Ostrogothes (Jord. de orig. Goth. 48). Plus tard les
|H)puIatîons Slaves-antes évacuèrent le littoral de la mer et le nom
(48) Je touchais plasicurs fois les lettres de Khasdaï (cartes et gcogr. du moyen âge, chap. 20, 36;
^ans l'ouvrage de Carmoly, itiuéraircs de la terre sainte, note 54, p. 82-45) ; et la genèse de ben
Clorion (en 1845, dans la première lettre de l'cxam. géogr. de Benj. de Tudèle p. 44, 45; en 1845 dans
^olska s'rednich wiekow, 1. 1, p. 478-480], essayant Texplication dont le su.ccès restait douteux : j'ai cru
^onc qu'il fallait revenir encore, compléter ou rectifier les précédentes et retracter les erreurs. Aussi,
^près un nouvel examen, je propose quelques autres explications, et je dis que Loukioun , que j'ai
^H sortir dans ma publication polonaise (du 9"* cliap. p. 63, 64, de ben Gorion), est Lucania de
(49) Dobrovski et Scbafarjik s'efforcent de retrouver le nom des Serbs dans Siropoc de Prokope.
"^e pense qu'il n'y a pas lieu de contrarier leur opinion, parce que cette appellation est très-fortuite,
^^ns appui. Prokope l'infirme quand il dit que c'est l'antiquité , les anciens (et non pas les Slaves
^^x-m^mes), qui appellaient ainsi les Antes et les Slaves : ^nàpouç fOLp t6 uocAoccàv &/i(foripo\Ji
^3cà>0tfv et il en fait un mot grec (de bello gotb. HI, 44].
20 SLAVIÀ» 7.
des Ântes s*est éclipsé : maïs on ne cessait de remarquer la bipartition
de la sonche. En etr^t> clUt se i!ô<:iare dans l'idiome slavon par certai-
nes modulations de \n pr^T'oïKiatlon qui change les voyelles, rend
quelques consonnes silHauics ou nosales, modifle quelques désinences,
introduit certaines cunsoia.rs intruses (d, l,) et varie dans une des
particules inséparables (wy, jiz). Peut être, qu'anciennement cette
différence était plus tranchée, plus déterminée entre les deux portions
de la race qui partageaient ses vastes possessions : mais depuis que,
nomina per varias familias et loca mutuarunt (licet nu ne, dit Jordanes
en 552, de orig. Getar. 5) différents amalgames se sont formés partout,
une œlluvies gentium s'est opérée et engendra des modifications mitoyen-
nes, qui empêchent de discerner Torigine et provenance, contrarient
les témoignages historiques. Conformité de culte, même organisation
sociale, disposition générale à fraterniser , coopéraient à la fusion de
cette double nuance de Tidiome qui distinguaient les populations.
Les noms de rivières, cantons, villes et villages, de peuples et
peuplades, se reproduisent sans fin identiques, on les retrouve oon-
tinuellcment pêle-mêle , comme un écho qui se répète à Tinfinî dans
toutes les espaces de leur terre : quelquefois, cependant, ces appella-
tions se groupent et par leur choix et leur forme ; décèlent Fancienno
existence sur tel ou tel lieu, de telle ou telle prédomination de fune
des deux variétés de Tidiomc. Ces deux variétés sont aujourd'hui repré-
sentées, d'un côté par le dialecte polonais et bohème (Shves), de rautres:
côté par le dialecte serbe , russien , russe (Ântes).
Si donc on trouve les dénominations de Serbes on Kroates, Kharva —
tes, désigner les pays et les nombreuses populations, on ne peut ei
conclure qu'elles sont de la même lignée : ces dénominations valent
peu près autant que celles de Slaves ou Vendes. Encore faut-il obser" —
ver que l'appellation de Serbes est plus générale. La langue des Sorabe^^ <»
Luzaces, Bohèmes, est serbe; les Serbes sortent de la Chrobatie; l^^^s
sicveri (orientaux) sont Serbes. La qualification de Chrobates ne se'
qu'à une distinction spéciale. Si l'on rencontre les peuples du méi
nom, on ne peut pas non plus les considérer comme identique
d'autant moins que ces peuples sont en grande partie appelés d'api
leur possessions : marécageuse (Luiicy), littorale (Pomorcy, Primor<
Morlané), riveraine (Bcrezanc, Brzezanie), plaine (Dolency), idoil'
gneuse (Horiti, zagora, Chlumcy, zachlum), boiseuse (Borane, Drevacmm^
Drevlanic, Krivicze), des lacs (Ozerici, Jeicrcy), des prairies (Luciai.^^^
L§czane, Lçczanie), des champs (Polahe, Opole), des pays fronti&^r<s
(Krajincy, Ukrajincy), des pays-bas (Nizeni, Nize, Nizicy),
Les pays des environs de TElbe jusqu'à l'Oder sont pleins ^
SLAVIAy 8. 31
déaominatioiis de ce {^enrc. Les Vinules ou Vendes, qui s'appellaîent
Slaves enlrc eux daus leurs possessions hsférieures, se distinguaient
par Sourb, Sorab, Serb, dans leurs possessions supérieures et montant
vers le sud , n'avaient que le nom de Slaves de la spécialité incertaine.
Les Vinules et les autres Slaves prirent partout les noms de leur gite
ou des rivières» ainsi que parmi leurs peuplades on remarque à peine
quelque dénomination vraiment nationale d'Obotrites, Stodorans,
Boulebes, Veletabes, etc.
On connaît leur emplacement par les documents et les annales, par
la description anglo-saxonne, par celle d'Adam de Brème et de Helmold
qui suivît Adam , et reproduisit sa description à rebours. Le géogra-
phe bavarois (vers 900), parait le plus inintelligible, énumérant une
soixantaine de peuples et comptant le nombre des villes de chacun. Il
nous conduit dans des petits recoins de leurs possessions, évidemment
assez bien informé, mais il défigure les noms et rend plusieurs
méconnaissables. En suivant son énumération , nous saurous parcourir
et examiner toute la Slavonie occidentale (20). (Voyez dans notre atlas
la carte de la Slavonie du x** siècle).
8. Descriptio ciuitatum et regionum ad septentrionaUm plagam
Iktimbii. — Isti iunt qui propinquiores résident finibus Dan<wrum^
quo voeanl NorUibtrezi, ubi regio, in qua sunt ciui(at€S lui per duces
suosparHte; and be northan him (eald Seaxum), dit en même temps
la relation anglo-saxonne, is Apdrede ; end by eastan him (Dcne) syadon
Aidrede; and Afdrede by suthan (sae) (Alfredi hormesta...) — Abo-
triti (annal, fuld. sub a. 709, 795, 94i, etc; Ademari annal, franc
ob a. 798, 799 808); Apotriti (Ditm. I, p. 526, IH, p. 545, IV, p. 551;
inaL Quedlimb....) ; Abrodili (chronogr. Saxo s. a. 982, 975);
MMirili (annal, fuld. s. a. 804, 819, 858; Adami hist. ccclcs. (64), H.
; Helm. I, 2, etc). Ils avaient leur possessions autour de Mikliuburg,
^opolis (Adam et Helm. passim). Nation endurcie, infatigable et
ssantc, ainsi que maintefois elle occupait la ville Werle (Helm. I. c.)
>triti et Wari vocantur (Ditm. VIII, 4). Les Obolrites s'appellaicut
) Ce précieux fragment géographique se trouTO dans la bibl. de Munich en Bavière , et fut
} assez souvent D'abord par Buat, liist. anc. des peuples de l'Europe, Paris 4772, XI, 10,
t, 149; ensuite par Jean Potocki , frag. hist. et gcogr. XXXIV, t. Il, p. 281. — D'une autre
par Dobrovski, Archiv fur oester. Gesch. Wien, 1827, n* 27-93; par Uonnaîcr, Uertzog
4d, Muncb. 1831 p. 24; Baumer, rcgeala hist. Brand. Berlin , 183C, p. 101 ; par Boczck , cod.
ImutK. 1836, p. 67, et par d'autres. ~ Une nouvelle copie, plus correcte de J. A. Schmetzlcr,
lécairc à Munich, est publiée par Schafarjik , qui dit , que Dobrovski essaya de l'expliquer,
Lelewel avec plus de succès, mais il a négligé la partie la plus difficile. Je veux rendre compte
succès et de mon insuccès.
St^ SLAYIA, 3.
aussi Reregî (Adam , hi.st. ocdes. II, 20, III, SI ; annal. Saxo s. a. 952)
d'une ville Reric ruîiioc en ^')8 (m).
Sont limitrophes, d'uu cnio W/.ïri ou Wagiri avec leur ville Stari-
grad (Aldenburg), de hiqu* lie on voyait Tfle slave Fembre ou Vemere;
et Poiabingi (riverains J: hxhr. Elba) avec leur ville Racisbni^. Ils
sont le plus avancé ^ vcj^ !^ cident et touchent la Nordalbingie
saxonne, de laquelle ils soûl bcpurés à partir de TElbe par la rivière
Mescenreisa (Beyze) par les forôls Deluunder jusqu'à la rivière Delumida
(Steckenitz nommée aussi Delvenau) , ensuite tourne par les forêts de
Travenna, (jusqu'à Oldeslobe), en montant Travenna jusqu'au lac
Kolse (Gollies, duquel Travenna se décharge) , enfin (tournant le lac
Plone) par la rivière Zwentina jusqu'à la mer (près de Kiel) (Adam br.
hist. ecclés. (62) II, 9, 10, (158) III, 22; de situ Danie 226; Helm.
I, 5, 10). — De l'autre côté des Obotrites, au sud, sont Smeldtngî, Lini
et Varnavi (Ad. et Bel. 11. ce).
Vuilci in qua ciuitaies xcv, et regiones mi. Ces quatre pays sont bien
connus et leurs limites déterminées. La rivière Pénales divise, ainsi
que Kicinî et Gircipani, sont au nord et Doienci et Redari au sud.* —
Circipani (Adam, 1, 10, III, 21, 24; Helm. I, 2, 21; 6, 1, etc.; annal.
Saxo s. a. 952), Zcirizspani (annal, s. gall. maj. s. a. 955), Scyrîpenses
(annal, corbei. s. a. 1114), mentionnés dans les diplômes Zerezepani
en 965, Zircipani en 975, Zerezpani en 975. Situés citra Panim, eirca
Panim, à travers, au delà de la rivière Pêne (Gzerez-pani), tenaient
parties maritimes. — Kyzini, Kycini, Kissini (Helm), Chizzini (Ada
brem.; annal. Saxo s. a. 952), touchaient à la mer, s'étendant par I
frontières de Varnaves et Obotrites. — Tholenz en 946, Tolensa
en 965, 975 dans les diplômes, sont appelés Tholosontes (Ad. br. 1, 1(^-
111,24), Tholenzi (Helm. I, 2, 21) dans les annalistes , habitaient L
long de Pené (Tollensee , rivière Doienz) tout le pays plat (Doleàc
jusqu'à Tembouchure de la rivière Ukra. — Riedere (dans les dij^
de 905, 975, 975), Riadzi, Redezi (dans ceux de 956.957), Redevr
(Witikind en 950, 968), Redari, Rederari , Riederun (Ditm. IV, p. 389
Reiheri (Ad. brem. hist. eccl. (66) II, 12, 15), Riaduri, Redarii (Hel
passim), possédaient une ville Rethra , fameux sanctuaire des peuf^
(Ditm.VI, 17; Helm, 1,21).
Ces quatre peuples s'appelaient sua locutione Welatabî, Welei:sfe.S)î
(Einh. vita Garoli m. 12, annal, s. a. 789; Adami de situ Dan. ^2^;
(31) Nonobstant toutes les déductions de l'origine du nom d'Abotrites, 'je pense que bovk» ne
sommes pas autorisés à les appcller Bodrices comme l'a fait Schafarjik (antiq. slaves X, 44, 7)» psmwee
que la reproduction constante et unanime de tous les écrivains commence leor nom par aoo ^^H
faut respecter cette voyelle : l'o, est voyelle-consonne du slave, qui a sa valeur.
SLATIA, 8. â3
anual. 8. galeo. maj. 8. a. 995; Âdemari, ann. franc. 8. a. 789), Vnelitabi
(Noskeras Labeo, paraphr. ia Marc, cap^l. 75), Wiatabi (chronogr.
fiaxo, s. a. 995 997). Mais les Franks et W Saxons, francîca iingua et
consuétudine appellaient ces peuples WiltiL "Wliz (Einh. 11, ce; Witich.
inter Meibom. scrip. germ. 1. 1, p. 647; Adami hist. eccl. II, 9; Âdemari
^nnal. Franc, s. a. 789, 808, 822); Wilti, Willen (Alfredi, hormesta;
Bitm. IV,12 ; annal, nazaç. s. a. 789), Wilzzi (annal, fuld. s. a. 789), Wilci
^Adem. s. a. 759). Ces deux appellations passèrent de Thistoire dans le
domaine des contes populaires, comme de grandeur, d'épouvante et de
monstruosité. Ces Yeletabes , Wiltzes se donnaient à eux-mêmes une
troisième appellation, de Louti, Loutitzi, qui parut plus tard, par
laquelle ils étaient le plus souvent mentionnés par les étrangers. Elle
désignait pour sûr leur union politique, leur fédération. Lutizi (Bruno
vila s. Adalb. 26), Luilici (Dilm. IV, 9, VI, 17, 19, VII, 11, 47), Luizici
(id. VI, 16), Leutici (Adami hist. eccl. (66) II, 12, (140) III, 24, de situ
Daniae 220), Lutitii (Helm. 1, 21), Lithewizi (chron moissiac. s. a. 1179).
Les quatre peuples de Weletabes, Wilces, Lutices étaient Slaves et leur
idiome slave (Bruno vita s. Adalb. 26; Seifr. vita s. Otton, etc.); les
noms propres des localités et des personnes, chez eux, sont slaves; ceux
des divinités et du culte slaves; les épigraphes qui chargent les débris
de pierres inscrites et de ûgurines, imagines mirifice insculptae, pour
la plupart offrent les dénominations slaves : mais ces dernières décèlent
uo singulier mélange de Fidiome et du culte lettes (surtout de Samogi^
tiens). L'origine et Texistence des Veletabes énigmatique, par d'autres^
circonstances, deviennent plus mystérieuses encore par cette réunion
(^'idiome et du culte (22).
Un autre sanctuaire des Slaves vinules s^élevait à Arkon, Arkuni
Vinlandi (knytlinga saga 101), in insula (péninsule) arconensis quae
Withowa dicitur (Saxo gram. 1, 14); presqu'île de Tile quam Rani vel
Kunî possèdent (Ad. brem. hist. eccl. (226) IV, 45), Ruani (Witik,
III, 658), Rivani annal. Saxos, a. 955, p. 298), Rani qui et Rugiani
(Qelm. I, 2, 12; 6, 5; 15, 5; 56, 5). Regio quae a teutonicis Ruiana,
^ «clavis Rana dicitur (Wibald. ad a. 1149, ap. Martens Durand, 11^ 509);
{i9) C'est en vain que de savants allemands prirent tant de soin à infirmer l'authenticité de ces
^^«nnineDts, dont le nombre est déjà très-imposant. Voyez Thunmann , ueber die gottcsdicnstli-
^^en Altherthumer der Obotriten; Hasch und Wogen, Beitraege zur erlaeuteruiig der obotrit»
^Iterthumer, Schwerin, 4774; Jean Potocki, voyage de basse Saxe, Ilamburg, 479Q; Hagenow.
^^schreibnng der auf der geherzogl. Bibl. zu Neustrelitz befindlicbeu Runensteipe , Griefswald 4826;
-^«endt, grherzogl. stretitzisches Georgium nord slaviscber Gottheiten, MindcnH820. — Welet,
'^«'«lot , géant; wilcy, wilki, les loups ; wilzen, welst, walsc, volsung, ensuite wilkinaland le roi wilki-
*^^8 , des contes teutons; établissement des Wiltzes et slaves en Frise , près d'Utrecht , etc., furent
^^ià des sujets traités par les érudits ; Scbafarjik discute assez longuement ces questions ardues dans
>^o antiquités slaves X , 40.
24 SLAVUy 8é
RaciDg, Rc, dont les hab'i.tus sont Rscngjar (knyt), saga 120, 123, etc.).
— Mais revenons au g<M>i;':»i;ho Itavarois.
Linaa est populus q^ti tn, A vailales vu. Linones (Eînh. vîia Car. s.
a. 808, annal, fuld. s. o 80^, SU, 858; Ademar s. a. 808), Lingones,
Linguones (Adaroi hist. ^' < i. îf, ^, III, 22, Hclm. 1, 2, 58), dans qaelques
manuscrits d'Einhard Iîi;i?i:i..os. — En 795, Witzan roi des Obolrites»
avançant au delà de TElbe contre les Franks, s'arrêta dans les pays de
Liuni (annal, fuld. s. a. 795). Suivant toutes les apparences c'était dan&
le Lûneburg, où le canton de Lune et la rivière Luhe sont connus. Mais
il faut distinguer ces Luni et ne pas les confondre avec les Liai.
Seize ans plus tard, 811, €harl-le-grand passait FEIbe pour entrerdans
le pays des Linones. Ces Linones avec les Warnaves étaient ultra les
Obotrites (Adam et Helm. II, ce). Les Warnaves portaient leur nom de
la rivière Varna qui coule vers Rostok et leur nom ne s'est pas effacé
des cartes géographiques. Leurs voisins Lini avaient leur place entre
Eldeet Stekenitz : mais leur pagus, gau, Linnagga, gau qui portait
leur nom, avait une plus considérable extension (Ottonis dipl. a. 946).
Prope illis résident quos vocant Belhenici , ailleurs nous trouvons :
misit Karolus exercitum ultra Albiam ad illos Slaves qui nomioaiitur
Linai et Bethenzr, Bechelenzi, Bethelclcreri (chron. moissiac. s. a. 811,
edit. Petz, 1. 1, 509) : ce sont les Bethcnici , qui disparaissent ensuite»
— On connaît plus tard les mercenaires, satellites dicti slavonice
Yethenici Cukesburgienses (Burgwàchter) (Ditmar, V, 6). Il est probable
que la peuplade Bethenici portait ce nom de i/viteniec, de gardien, à
cause qu'elfe tenait garde-frontière sur l'Elbe, où se trouve Wittenbei^âL—
vis-à-vis de l'embouchure de Yebt.
Et&meldingon, de l'autre côté des Liniens autour d'Elde (annal, fuld.^
s. a. 808, 809; Ademar, s. a. 808; chron. moiss. s. a. 809). Smolin pr«i
d'Elde rappelle leur ancienne existence.
Et Morizani qui habent ciuilales xi, sont voisins de Linagga. Ailleui
Marizzi, More, Murz (dipl. 1170, ap. Lunig, t. II, Anhang p. 152), f
tenaient près du lac Muritz.
Juxta illos (Morizanos) sunt qui vocantur Hebfeldi qui hebent ciuU
viii. Cependant c'est un très- vaste pays. Haefeldan est au sud de Wim
das, et près de la mer, où sont Wylte the man Aefeldan haet, and
eastan him is Winedaland (Alfredi hormesta.). Le fleuve Havela
donnait son nom II éveil um , Ileveldum, et le peuple était appelé de
pays Heveldi. Le peuple lui-même qui habitait les rivages du fleuv(^
nommait Stodor et de son nom on appellait le pays Stoderania , Zt(
rania quam vulgo Ileveidun dicunt (Dîtm. I, 6, lY, 20; chron. qnedl
etchronogr. Saxo, s. a. 997; Adarai hist. eccl. II, 9; Helm,l. ^
SLAVIA, i/, 25
38, i), de gcnlc Luliccnse ex provîncia Sioî<,î (Gosm. prag. p. 56).
Ainsi, Wiltzi-Lutici sont Heveldan, et Slo'Ioi:h>.- de Heveldun Luliees.
SCuderhcjra reste afujourd'hui comme i 'mloisi'.r^ce de leurs anciennes
possessions. In pago Heveldèn, cîuitas \Um «Vuibarg (dipl. a. 919, fun-
dat. eppat. Brand. ap. Ecéard. p. 129; <'tn. iiu^ Ânhang, t. Il, p. 5).
Juxta Ulos (Heveldos) est regio, quœ vonitur .Sur6t, in qua regione
fêlures sunt (aliae), quœ habenl ciuilates i . >in ivc ( Vlfr. horm. 10), Srbi,
Urbi (Fredeg. 68), Surbi, Syrbi, Sorabi (Aûcnar. s, a. 782, 822; annal.
itild. s. a. 789, 806: Adam. brem. et Uelm. 11. ce), région à Test de
Sala (Zdava), très-étendue vers TOder, L'anglo-saxon apprit qu'au
nord de Dalemintzes , nortban Dalomcnsam sindon Surpe , en effet les
indigènes de la Luzace (Luzice) s'appellent jusqu'aujourd'hui Serb,
Serblo, et leur idiome serski , serbski. Mais l'importance de plusieurs
peoples qui possédaient les parties orientales, motiva les étrangers de
M,es exclure de la généralité sorabe, ainsi que même les Nicici, Susili, et
Daleminci sont souvent séparément indiqués.
Sorawe touchait les frontières de Bohême avancées vers l'occident,
^t en montant Sala on traversait Orla et Géra gau ; Yedu ou Veita
spacieux et Tucherîni; ensuite Nedelice ou Neletice, Nudice, Serimund
«t quantité d'autres petits gaus : Plisni et sa ville Plîssur (Altenbourg);
Seuntira et sa ville Breznisa (Priesnitz an der Eyla); Koledizi, Colidizi
^Rôlza) ; Zitici et sa ville Zurbici (Zôrbig).
A l'est, deux pagi, gaue Ghutici, se touchaient, bien que les Dale-
jninces séparent leur territoire aux environs de la réunion de Kaminicl
svec Mulda la blache (Ditm I, 5).
Chntîcî, Gutici orientales ou méridionales. Wisseburg (sur Mulda) et
Xostata , ad Gutici orientalem perlinet , ac fluviis Gaminitz (Kemniz),
Albique distinguitur (Ditm. III , 9) : ils couvraient le nord montagneux
de Bohême. Les rivages de l'Elbe et au delà, tenaient les Niseni
(Ditm. IV, 4) {Nossen, Dresden), Nisenen ultra Albean (dipl. Ottonis
948, et 968, ap. Lunig, t. II, Ânhang p. 96, 97).
Ghutici (occidentales, Skudici), où se trouvent, castellum Medebure
(Melbis, interpretatur autem hoc, mel prohibe, Ditm. II, 25), Zwenkow
in regione Sckeudiz (Zwenkan), Scudici (Schkeudilz), indiquent autour
de Leipzig l'existance du gau Ghutici , qui portait probablement et le
nom de Skudici, dont les frontières sont hérissées par les qualifications
de petits gaues qui se croisent l'un et l'autre dans les indications des
diplômes (ss).
(23) L'archevêque s'clail réserve dans Ckutici : Scudiii (Sckkcuditz), Cotug ( ), Worziii
fWartzen},Bigni (Bichen, Pucchcn), Ilburg(Eilcnburg],Dibni (Dubcu}, Pue (Bocch,Pottcli), Luibanici
(LoebeniU), et Gezcrisca (Gerschitz , Gorschlitz) Ditmar, III , 11.— A^'urcin , Bichin , Pohus, Gerischo,
26 SLÂYIA, a.
Les rivages de TEibe de deux côtés, font partie de deux gaaes : de
gau Nitaze ou Belgor, où près de Belgor se trouvait bui^ard Tresoowa
(Troskau, Drôskau) (Ditm. TI, 58, VII, 44; dipl ) et de gau Nesid,
Nizizi dum Milda intrat/n Albin, sursum ultra provinciam Misici
(fundat. eppat. Misn. 968,. p. Lunig, t. Il, Anh. p. 97; Ditm. YIII, 10),
ou Mezumroka, où Ton trouve Pretokina (Prettîn , ou Pretsch), Clotnie
(Klôden), Gohtzizi (Gotzitzprès de Gomberg), Wissirobi (Iserbeck?) et
les deux burg>\'ards Plozike (Plossig) et Suseletzi (Zûlsdorf) (dlpL
Ottonis, 996, ap. Ëccard. bist. généal. Sax. p. 144).
Ces gaues de la basse-terre (niza) se croisent avec les possessions de
Scititzi et Susli. Celles de Scitici, Citizi, à Test de TElbe et au delà
d*Elster noire (Trebitz, Domuiz, Olsnik, Domuki, Olsint). Les posses-
sions de Siusli sont beaucoup plus considérables. Sclavi qui vocantar
Siusli, Siusili (annal, fuld. s. a. 869, 874, 899); Winedaland the mao
haelSysscle; (Âlfr. bormesta); pagus, terra, urbs, Susili, SuselitK.
Une forêt les séparait de Plisni (Ditm. III, 1, VIII, 10); civilas Ilburg
(Eilenburg), Holm (Golmenz) in pago Susali, et burgward Suseletzi
(Zûlsdorf) regarde les rivages d'Ëlster noire (dipl. 961, ap. Leubemm
de stapula, n*" 1599, et Lunig, deutsch. Ârchiv, continuât, p. 544).
Juxla illos (Surbos) sunl quos vacant Talaminzi, qui hahmt ciuitor
tes lan, Demelcbion (cbron. moissiac. s. a. 805);Dolmatae, Dolmatii
(annal, fuld. s. a. 856, 880) ; Dalomensam (Alfr. borm...) ; Dalmantia
(Witik. s. a. 927, 950, p. 21 5, 21 7 Leibnitzii) ; nom prêté par les étrangeis:
teutonice Delemenzî, slavonice Glomaci, (Ditm. I, 5), Dalmize siv»
Zlomekia (dipl. 981), Glumici (annal, saxo, p. 258). Zlomicl, et
Glomazi (Lommalsch) (Ditm. I, 5). Leur ville importante Ganà (Jahna
(Witik. p. 215, Leibn.);Strela,Boruz, Cirin, Misni (Meissen) ; Gori
(Gohren),Mochowe(Mochau),Mogelini(Mugeln). Hxcprovincia ab Âlbi
nsqueinCaminizifluviumporrectaest (Ditm. 1,5, IV, 4, V, 6,.22,VII,11^
9. Beheimare, in qua sunt ciuitates xv, (B^mer) babitantsda pa
Bobemia : Beehaimi (Einb. annal, s. a. 791), Boemi, Behem
Boemanni, Baemanni, Bobemenses : natio Sclavorum, se qualifia
Lubaniz, dit le dipl. d'Otton HI, en 99S in continuât, spicil. ecclcs. Lonigii, p. 835. — Et dans
donation à l'église de S. Maarice, il est dit : in regionibus et urbibus ita nominatis Neletici , in
est ciuitas quae Guncanston (Giebicbenstein près de Hall] nuncupatur; altéra regio Neletici (il
a deux), ubi est Vurcine (Wurtcen in pago Cliutici) ciuitas; Quieszici, in qua inest ciuitas UJ
(Eilenburg in pago Susali) ; Siusile in qua est ciuitas Dolm (Golmenz); Zitici , quae babet ciur
Zurbici (Zorbig in pago Colidiki); Nudzici ubi incst : Vitin (Wettin) ciuitas, et ciuitas Libnbocr'
(Locbechin,Lebguiu,Locbejun) yocata, et Zputinesburg (Rotenburg sur Saale?). Loponob (Lepem «
Locbnitz?) ciuitas ctTrcbonisi (Trebitz) et ciuitas quae dicitnr Brandunburg (Bcrnaburg?) donaw
atque tradidimus omnem decimam. dipl. Ottonis 964, apud Lunig. dcutsches Archiv, contm i
p. 344.
SLAVU, 9. â7
ainsi elle-même dans la langue latine , elle est composée de plusieurs
peuples. — A Touest se sont assis et construirent leurs siettes (villages,
selo, sedlo, siolo) les Scdlltschans, provinda Sedlic, Sedlicenses
(dipl. 1160, 1168, 1174. ap. Lunig), Zed^ane, Zedelec; per totam
Bohemiam etiam Zedlicih (dipl. 1088), com.^ s'ils fesaient une portion
à part. £n effet , ils étaient au delà des nlontagnes vers les sources
d'Elster et terra Sclavorum, s'étendaient jusqu'à Bamberg (dipl. 846,
889) (24). — Lucsaue, Luczane, qui nunc (1125) a modernis vocitantur
sateenses. — Lemuzi usque ad mediam sylvam qua Bohemia Hmilatur
(cosm. p. 169), on pense que ce sont les forêts du nord (miriquida ,
Ditm. VI9 8) et que la tradition d'un château, Lemus, indique leur
situation dans les environs de Lovositz : Un diplôme morave connaît
aussi Lemusi (Dobneri monum. IV, 259), et les forêts Mure, Âlemure
sont mentionnées sur les frontières de Moravie (Cosm. Il , et Lunig.
contin. 1. 1, p. 250; donatio civ. Schinesg. ap Muratori, antiq. Ital.
t. Y, p. 831). — Lutomerici (dipl. 993), provincia Liutomericensis,
Liutomiritz, conserve son nom. — Psovane ad aquilonem, castellum
PsoY, provincia Slavonum, qua Pssov antiquitus nuncupabatur, nunc
a modernis ex civltate noviler conslructa Micinic (Mielnik) vocitatur
(Christiani leg. de S. Ludmila), autour de la rivière Pszowka. —
Decanane, Dasena, Daciane, castellum Dacin, provincia Decinensis
(dipl. 1128, 1235, 1341). Les traditions du peuple aux environs de
FËlbe conservent encore leur réminiscence.
— Chorvati, Horithi : ad aquilonem hii sunt termini (episcopatus
pragensjs) Psovane, Chorvati et altéra Chorvati, de deux côtés des
montagnes (Riesengebûrge). Ils étaient assez distincts dans ces siècles ,
parce que hormesta d'Alfred indique spécialement leur position :
and be eastan Dalamensan sindon Horithi. il parait qu'ils portaient un
antre nom , parce que la bulle papale du monastère de S. George de
Prag, nomme à leur place Mocropsi et alîa Mocropsi. D'après la tradi-
tion ces Chrovates, Charvates arrivèrent conduits par Czech du pays où
dominait la langue serbe (Dalemili versus). La réminiscence de
l'existence de la population chorvate se conserve dans l'intérieur par
les dénominations de quelques localités.
— Dudlebi, (établis vers 580) formaient une province du diocèse de
(24) In terra Sclavorum, qui sedent inter Moinum et Radantiara fluvios, qui vocaotur Moin winidi
et Ratanz vrinidi (dipl. Ludov. 846); Moin vrinida et Radanz vrioida (dipl. AruolG, 889); tradidit
cuidam thuringo in finibas Parathanorum (paradomtor.) ad id tcmporis crudclium paganorum (vita
s. Emmer. ap. bolland. t. VI , p. 496). — Ut paganismus Sclavorum ioibi ( in diocacsi bamberg.)
destrueretur(synod. frankof. 4007); erat plebs huius cpiscopii (vrucrzoburg.) utpote ex maxima parte
sclavonica (synod. bamberg. 1058, ap. Ilarzbeim , III , 136). Totam illam terram pêne sylvam esse,
Sclavos ibibabitare (Arnold, epp. halborst ad Uenr. cpp. wuerzburg. ap. Ludewig, scr. bamb. 1, 1116).
28 SLA VIA, 9.
Praga. Autrefois pla[;am ad ausiralem contra Tlicutonicos orientale»
has urbes habuit terminales : Chynov, Dudlebî, Notolîezi usque ad
mediam sylvam. Dudlabouscs dt* Dudcleb sont un certain temps men-
tionnés (dipl. 1088, 110^ 1175); aujourd'hui il n*en reste qu*ua
village Daudlebi près dt 3udweys, entre Nottelitz et Gheynow. —
Ces peuples, avaient (haciiu leurs chefs; comme les Leutschaniens^
de même Libitz, Yiioiazi ou civitas Wizlrachi (Weitra, Weitrach)
(Ruodolli fuld. anq. a. 827^ ap. Pertz , 1. 1, p. 370), Pschov et plu-
sieurs autres avaient leurs princes. Pour tous ceux-ci , les iadicatlon^
certaines se trouvent dans quelques diplômes, dans quelques mentions»-
d*annales et de légendes, spécialement dans Thistorien Cosmas d^
Prag, qui écrivit son ouvrage vers 1125; la nomenclature locale
8*est effacée sur le lieu même plus que quelque part de Timmens^
Slavonie^
— En 805, parut terra Sclavorum qui vocantur Beheîmi (EinhardS.
annal.; contin. annal, lauriss.; chron. quedlimb. ap. Pertz, 1. 1, 182, t«.
III, p. 41) vocabanlur Cinu (Cihu) (annales tiliani, 16. p. 223), Cichis
Windones (chron. moissiac. p. 507). Ils étaient conduits par Lecho.
Cichu est évidemment le nom de la peuplade Gzech, Tschekh qui
transpira a l'étranger. L'expédition franke s'arrêta à Kamburg
(Komornibradek dans le pays de Loutschans) et dévasta tout le pays
jusqu'au delà de l'Elbe, parce que les chefs diversarum gentlum
s'étaient réunis pour combattre. Le nom de Gzech , paraît être spécial
à ceux qui possédaient Praga, et la prépondérance qu'ils prirent
ensuite , communiqua la qualification de Tschekhs à toutes les popula-
tions du pays de Bohême. Que la poésie ancienne dans le dialecte
tschckhique (w srbskim iaziku , suivant Dalemil) et dans le dialecte
russien (de la légende de s. Yencesl. et do. Nestor) appelle Tschekhs
les indigènes de Bohême, il n'y a rien d'extraordinaire, c'est la
conséquence de l'idiome slave. Ghez quelques écrivains byzantins ils
sont Kexioty Ktéxot (Chalcoud.), Tçlxo* (Cinnam. p. 47).
Marharii habenl ciuilales xi ; and aest suth (Syssyle), ofer sum me dael
(très loin, dît hormesta d'Alfred , sont) Marvaro. Quoique Moravia était
bien connue par son nom (Einh. annal, s. a. 822; huila Eug. II, 826),
cela n'empêchait point les écrivains de défigurer l'appellation de ses
habitants : Morahi (Adam. brem. hist. ecel. (6G) U, 15), Marahenses,
(annal fuld. s. a. 871, 872), Morawi, Marauani (contin. scdus annal,
fuld. s. a. 895, 897), Marabi (ibid. a. 899), Morami (Ademar, s. a. 822),
Mararenses (Ditm. Vil, 42, 44, 54), Maricrum (id. YI 60), Rama '
hanenses (chron. Saxo, s. a. 800) etc. Ils étaient appelés de la rivière
Morava qui tombe du nord dans le Danube.
SLAVU, 1 ». 29
10. Vulgarii regio est inmensa et populus multus habens ciuitates y,
et}, quod mulliludo magna ex eis sit et non sit eis opus ciuitates habere.
Motre statisticien bavarois pensc-t-il des Boulgarcs ou des indigènes
Slaves qui étaient sous leur dépendance? À^eniblerait qu'il réserve
les villes aux Boulgares moins nombreux eti|u'il indique la multitude
seale à laquelle il ne savait donner de nom , comme il sait nommer
la Moravie qui, avec ses 50 villes était sous la môme dépendance.
Est populus quem vocant Merehanos , ipsi habcnt ciuilales xxx ; et ce
peuple était de la dépendance des Boulgares. Il le distingue de la
sHultitude qui babiiail le pays, regio Yulgarii. Ce peuple est autre que
€3elui de Marharii qu'il a déjà indiqué. 11 y avait plusieurs Moravie qui
prirent leur nom de la rivière Morava. Celle de populus Merehanus qui
liabet 30 ciuitates, la petite Moravie inférieure boulgaro-serbe, située
autour de Morava qui se perd du sud dans le Danube; elle avait son
^vêque au concile de 879 (Assemani, kalend. III, 158), mentionnée par
Constantin porphyrogenèle , sans épilkète de petite (de cerim. aulae»
XI, 48). Pomoravie comme rappelle vers 1208, s. Sava dans la biogra-
phie de son père (manuscrit . . . .) mentionnée souvent dans les fastes
gerbes et byzantins. — La grande Moravie n fieyàXrj Uapaeia (Gdnst.
porpb. de adm. imp. 15), superior Moravia (manuscrit cyrillique chez
>^ssemani, VI, 255) était située autour de Morava qui se jette dans le
Danube, du nord. Son nom s'était étendu du temps de la puissance
tfle Sventoploug, au sud des Karpates (où était Tévéché de Nilra) et sur
conte la Pannonie (du diocèse de Sirmium), ainsi qu'il y avait deux
Moravies supérieures. La version latine d' Assemani du manuscrit cyril-
lique n'est pas exacte et ne rend pas le duel de vischnii Moravie
(proloh du manuscrit du xiii* siècle, chez Kalaîdowitsch , dans son
Jean exarche p. 10), archiebiskop wischnuiu Moravu (Job. exarcbe, 90).
^^ ces deux Moravies supérieures, l'une était la Moravie propre, supra,
^^ ^elà du Danube pour un saltzbourgcois (anon. de convers. Garant.
^P- Kopîtar, 74); l'autre qualifiée de MopaSos tHç wawoviaç (vita S.
démentis, éd. Pampereus, p. 105; catal. archiep. pannon. ap.
■^SSemanl^ 111, 142), xai xaroexouae ^èv oi Toùpy.ot izépaOsv tou AavovCews
«OTfie/4o5 eU Tèv rriç Mopa6i«ç yvsv (Const. porphyr. de adm. imp. 42)
'^^yex dans notre atlas la carte de la Slavonie du x« siècle) («s).
^f^te sunt regiones que terminant in finibus nostris. Ainsi termine le
^^ogfaphe bavarois sa course frontière dans la description des pays au
^ord du Danube. Nous l'avons suivi sans souci. La direction qu'il
**^Una à sa perlustration nous a conduit sans dévier, elle inspira une
^**) Schaferjik, antiquités slaves, UI, 50, 3; IX, 42, t.
l-'**
30 SLAYIA y 10.
telle confiance dans notre guide que nous avons cru comprendre , qu
ne nous entretient que de populations slaves, qu'il marche régulièi
ment, observe riuxtapositipn des peuples et qu'il est bien averti da
le dénombrement des rr^ons et des villes. Ce n'est cependant q
la cinquième partie de saMescription , les quatre suivantes traitent é
peuples qui résident iuxta istorum fines. Le bavarois, dans cette long
nomenclature, observe- t-il Tordre? est-il bien averti? s'enferme-t
exclusivement dans les populations slaves? pour s'en assurer, de gra^
incertitudes se présentent, la lumière s'éteint et nous ne pouvo
plus avancer sans quelques observations préalables.
Isli sunt qui iuxta istorum, fines résident. Ceux qu'il va énuméi
sont iuxta frontières de ceux dont il a passé la revue. Sont-ils ini
fines, par derrières à l'est? ou tout à côté vers le sud où la race sla
abonde? Il commence :
Osterabtrezi in qua ciuitates plus quam c sunt. Ce sont les Obotrit
danubiens connus chez les Franks : Abodriti qui vulgo Praedenecei
vocantur et contermini Bulgaris Daciam Danubio adiacentem incoli
(Einhard s. a. 825). Ils étaient séparés de la Moravie inférieure par 1
Timociani, établis autour de la rivière Timok; par les Guduscai
Goduscani, Cucievienses, dont les possessions montaient du Danu
vers les hauteurs de la rivière Ipek (tous les deux mentionnés p
Einhard); enfin par les Braniceviens. Les ruines de leur ville Branicei
Bransin (ancienne Yiminatium) regardent Kostolatz au confluent
MIava avec le Danube (encore en 1459, cornes Cucievieusis et Branic
vensis dans un diplôme). Ce sont les Praedenecentini , branche d
Oboirites d'au delà du Danube, des Obotrites orientales, Oster-Abtre
Le dernier point d'appui que nous indique le bavarois. — A par
de ce point , il nous conduit par des pays perdus, ce n'est qu'à la fin
sa description qu'une lumière vacillante commence à percer pour n<
avertir, qu'il se trouve aux environs de l'Oder et de Sprée. Or, ne
guide per plagam Danubii septentrionalem, s'engage par derrière ôm.
course frontière, pour revenir sur ses pas vers la mer Baltique. Et p
tout, chemin faisant, il connaît le nombre des villes, l'immensité
possessions. Dans les 15 régions frontières il compte 509 villes; d
les 25 qui sont iuxta, 59G6; dans les dernières 22, seulement 292 vil!
Pour mieux saisir cette étrange différence de connu et d'inconnu &%
bitant, nous rangeons en table ci- jointe en regard, toute la statistii
de notre bavarois.
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52 SLATIA» 11.
Examinant cette liste, j^obsenre quMl donnait ce nombre extraordi-
naire des villes avec conviction qu*il en était bien informé, parce quMl
termine cette énumération en remarquant : que partout il y avait plus
de villes qu'ailleurs, TplusM undique quam de Enisa ad Khenutn. Je vois
que ce undique regarde (v> régions iuxta posées, qui se distinguent de
celles des frontières et de celles qui sont de Enisa ad Rhenum ; enfin je
pense que ces régions aussi remplies de villes forment un ensenoible à
part.
Quelque part que nous voudrions nous tourner avec cette multitude
de villes, leur nombre paraîtrait fantastique si Ton voulait les prendre à la
lettre pour des villes. Pour sauver la bonne foi du bavarois, je présume
que ces ciuitates et nrbes, ne sont que des communes, villages et
hameaux. Les Slaves comptaient certainement les villages de leurs
cantons, relataient le nombre exact ou exagéré : le bavarois, par ces
informations, pouvait être surpris dans les parties moins connues et ce
nombre de villes ne dit rien de positif pour retendue du pays; et ce
nombre trouve à droite et à gauche assez de terres slaves pour disposer
dans un certain ordre tous ces peuples, dès que leur situation serait
éventée.
Les mcmuments historiques des Franks et des Allemands de cette
époque paraissent ignorer Télat intérieur autant de la Slavonie au delà
de la Vistule , au nord du Danube, que de la Slavonie méridionale , an
sud du Danube , où toute leur connaissance se réduit à mentionner les
Kroates et lesSorabes,qui magnam partem Dalmatise obtinent. Pour un
Bavarois qui cherchait des renseignements sur les peuples slaves, ceux
des Kroates et des Serbes étaient plus intéressants et je m'imagine ,
que isti iuxta résidentes de sa description , indiquent les cantons ou
zoupanies des Kroates et Serbes. L'intitulation, ou plutôt Tintroduction
avertit qu'il va décrire les régions ad septeutrionalem plagam Danubii,
cependant en touchant la Yulgarie et les Marehans il a passé au sud du
Danube. L'introduction regarde donc le commencement de la descrip-
tion et ne l'empêche pas d'examiner les parties méridionales : il
prévient en ciTet qu'il se propose d'énumérer les iuxta résidens des
Vulgars et Marehans qui sont an sud du Danube. Je me réserve d*en
donner l'explication dans son lieu, et je vais terminer avec le géographe
bavarois la revue de la partie Vinule septentrionale.
41. Le géographe bavarois, après avoir terminé l'énumération des
peuples iuxta-posécs (au sud), se transporte brusquement dans les
parties Vînulcs, où tout d'abord il signale deux peuples au grand
nombre de villes.
* >.
SLAVU, il* 7^
Priêiiani ciuitates lxx. Brisane, Brîzane (Helm. I, 38> 80, etc.) (Prig-
nitzmark).
Velunzani ciuitates lxx. Tiliai (Adami br. bist. eccl. (64) I, 9; Helm.
I, 2, 5), sur la rivière Welso et peut-étrejoar TOder jusqu'à Wolin >
lalin sur mer. ^
Bruzi, (Bresow, Brisow), dans le cantoor^es Ukranes (Uckermark),
tJehri (Witik. III, p. 658), Urkani (chron. saxo, s. a. 955), Wokronia
(annal, bildeé.), Yeroni , Yerani (cbron. quedl.; annal. Saxo), VuYeri
(dipl. 949).
Plus est (ciuitatum) undique, quam de Enisa (de e Nisa) ad Rhenum^
Nice (Ditm. YI, 16) pagus Nicciti (dipl. 965, ap. Lunig. contin. p. 347),
commence iuxta âprewam et enveloppe la rivière Nisse, Nisa, Enisa. —
Dans le spacieux pays de Heveldun une rivière Dosse communiqua son
nom aux Dosses, Dosseri (dipl. 946), Dassia (dipl. 949), Doxani (Âdami,
br. hist. eccl. (64) II, 9; Helm. I, % 5; annal. Saxo), elle décharge ses
eaux dans le fleuve llavel. À Test, une autre rivière passe de Rinsberg
dans la même direction , se perd dans Havel près de Rinnov et porte le
nom de Rin , Rien , Rhin. C'est donc entre ces deux rivières qu'on doit
espérer de retrouver les peuples suivants.
Sud-ouest entre Havel et Elbe , on avait des cantons Lîgritze,..Lîezizî
(dipl. 957, 946); Zemzizi, Zemclci (dipl. 946, 949), Zamzici (dipl. 1161);
et le plus considérable Morezini iuxta Magdeburg (Ditm. YI, 24),
disputés entre les diocèses de Brandebourg et Magdebourg. Le nom de
ces derniers engendra d'innombrables variantes : Morstan, Moraciani,
Horoszani, Mortzani, Mostefan,Mrocini, Morescini, Mrozini, Mrozani, etc.
(Eccard , hist. généal. p. 49, 129, 156; Meibom, p. 741; Lunig, teutsches
Reîchsarch. contin. p. t. Il , 5, 4, 545; Sagittar, anliq. magdeb. 45).
Hayeldun, qui avait les Sorabes limitrophes, comprenait au sud
Cervisti avec la ville Zirbisti (Zerbst, Ditm. YI, !24); Ploni, Bloni
(autour de la rivière Plunen), Zpriawani , Sprewa ex utraque fluminis
parte quod dicitur Sprawa (dipl. 965, ap. Bekmann, Kurm. Brand. 1. 1,
p. 118; fundatio eppat. ap. Eccard, p. 129; Lunig, t. II, p. 5). — Par
ces parties de Sprewa s'étendait marca Zaucha, Zucha jusque dans le
territoire de Luzitzi, pagus Zitrici se trouvait dedans (dipl. 979, ap.
Eccard p. 141, 142). Plusieurs localités du nom Zaucha attestent que
marca Zaucha s'étendait jusqu'au gau Nisc. Yenaient ensuite Selpuli,
Zara. Cest par ces dénominations que cette région se fit connaître au
milieu du x™' siècle; le géographe bavarois rapporte sa nomenclature
antérieure.
Le bavarois comparant le nombre des villes de peuplades situées
entre Nisa et Rhin, avec la quantité immense dans les possessions des
m. 3
^4 SLAVIA» 11.
peuples qu*il avail énuméré, fait présumer qu'à la suîlc il n'indiquera
que les peuplades enclavées par ces deux rivières. En effet, la plapart
de la dernière vingtaine de sa description, sont évidemment là; mais
il a plu au bavarois d'intelirompre sa tournée par quelques excursions
à Test. fci
Vuizunbeire, inconnu. L& de Weissenburg? Witbrîtzen?
Caxiri, ciuitales c. Cotzyn, Kethûr près de Brandeburg; Ketzin sur
Havel, Kotzin près d'Âda (se).
Ruxzi.
Forsderen, Forsta sur Nisa, et Pforten.
Liudi, Ledeleben sur Spree, Linde slavica, Wendisch Linda près de
lontribog.
Fresiti, Wreîtzen sur Oder, et la rivière Wrietzen qui s'y perd dans
rOder.
Serauici, Zara (Ditm. VI, 21), aujourd'hui Sorau. Provincia Sarowe
avait une extension assez considérable vers 1501 entre Slubbe et Bober
jusqu*au confluent de Quels. — Slubba donna le nom aux Seipuli et à
leur ville Sulpize (dipl. 918, 968, ap. Lunig, p. 96, 97; Ditm. II, 9,
IV, 9, VI , 21). — Plus au nord encore sont Leubusi (Adam. hîst. eccl.
II, 9; Helm. I , % 5). Les Allemands y édifièrent ou plutôt agrandirent
une ville de leur nom : Lebus (Dilm. I, 9), Luibusua, Libusua (id. VI,
39, 48).
Lucolane, aux environs de Lukau et Luckenwald.
Ungare, sur la rivière Unker qui se perd dans celle de Saar.
VuUlane,he eastan Meroaro lande is Wisleland , and be easlan thacm
sind Datia , tha the in vraeron Gottan (Alfr. horm.). C'est la Slavonie
orientale indiquée par son ancien nom de Daks. Les Gottes y séjour-
naient et :
Dhonne Hreada hère heardum sweordum
ymb Wistla wudu wergan sceoldon
eaidre edhel-stol Aetlan leodum.
par ce temps là , l'armée à dure épéc de Reid (goths), dans les forêts
de la Vistule, s'empressait de défendre l'antique trône de l'état contre
le peuple (Hunum) d'Attila , chante le poète anglo-saxon (Priée, p. 28i»
ap. Schafarj. VII , 37, 4). Dans le chef-lieu de Vislane, Vislitza sur Nida,
régnait Vischîslav ou Vischevit BouaseourÇes (Constant, porphyrog. de
adm. imp. 33); idolâtre, il persiflait les chrétiens et leur jouait de mau-
(M) C'est do nom de Cazîri qu*oo pourrait bien tirer Torigine des mots : kietzer, pâchenr ; ki
botte de pAcbenr; kictz, colonie de pâclieurs, qui sont spéciales à Kidiome allemand de
doboui^^.
8LAVU| il. ^
^is tours. L^apétre Méthode depêdia , en 884» uûe missive et lui dit :
baptise-toi mon fils , de bonne volonté dans ton pays , car si tu ne le
ferais pas, tu serais baptisé dans un pays étranger, et tu te souviendrais
de moi. C'est ce qui est arrivé (i?). En qÊme temps Sventopolk de
Moravie fesait une expédition contre les pa^s.
Sleenxane duilates xv. Nemetasi (Nimtsch en Silésie) postta in p^go
Silensi» vocabulo hoc a quodam monte nimis excelso (Tschobota,
Tschopfenbei^), olim sibi indito (Ditm. VII , U), Ciiensi (idem VI, 58).
Les Zlasanea étaient voisins des Mokropses, Hrovates-tschekh.
Lumizi, ciuitales xxx, (Surpe dans hormesta d'Alfred); se qualifiant
euxHoaémes de Luzice (Loujitze) et de Serb, Serbie. Lunsinzani
(Regino, s. a. 965, 1. 1, p. 626), Lusiki (Witik. a. 965), Lusid, Lusizi,
Liicîsi, Luiici (dans les diplômes); Lusîzî (Ditm. II, 9, et chron. Saxo
s. a. 1081, p. 245), Luzici (Ditm. VI, 16, 24, VII, 11), Liudizi (id. V, 10.
annal. Saxo, s. a. 1002,) etc. — in page Luzici Dobrtluh (Ditm. VI, 16),
Ciani (Zinniz), (îd. VII, 11); Mroscina ( ), ErothisU ( ),
Liubsi (Lipten) , Zlupisti (Laubus), Gostewisti (Kottbus) (dipl. 1004, ap.
Escard. hist. généal. p. 151) etc., pays spacieux qui contient plusieurs
ganes. C'est la partie intérieure de la Luzace.
Dadosesani^ ciuUaUs xx, Diedesesi, Diadesesi (Ditm. (V, 28, VII, 15),
Diedcsi (id. VI, 50) Dedosene (limit. app. prag. ap Cosm. p. 18). De^
Milzani on y entrait par Ilva (Halbau) pour arriver à Krosno. — Entre
)es Diedesi et Silensi se trouvaient Boborani et Drebowani ou
Trebowane (limites eppatus prag. ap. Cosm. p. 18; buUa Greg. papa;,
ttionast. S. Greg. in Praga). De ces derniers aucun vestige ne se trouve
sur le lieu. Ce nom cependant qu'ils portaient n'est pas rare ailleurs.
— Les Boboranes avaient leurs possessions autour du fleuve qui Bober
dicitur slavonice, castor latine (Ditm. VI, 19).
Milzane, duilates jxx, (la haute Luzace) leur ville Budissin (Ditm.
V, 6, VI, 11, 24, VIII, 1). Milza (donatio ciu. Schinezghe ap. Muratorî,
antiq. Ital. t. V. p. 851) Milzeni (Ditm. T, 9), Milcini (id. IV. 28),
Ifiizieni (id. V, 10, VI, 11, 56 etc); Miziavia, Milzavia (Âdebold
s. a. 1002, 1005), Milkiani, Milzania (chron. Saxo 1004), plus tard
Mîlsa pagus, Milesko, Miltse.
Bemnzane, duilates n. Dans l'année 1015, Oudalrik duc de Bohême ;
l^arvint avec son contingent jusqu'à la ville Businc et ne put opérer
sa jonction avec l'armée impériale qui ravageait le pays au delà
{VI) Poganesk knçz' silcn welmi sicdç w Wislech , rogaszç sç christianom i pakosti dicjaszç.
l^oclawsek^nemu (Methodius) recze dobro ti sç by krestiti synu, woleJQ swojcjana swojcj zemli; da
Be plouen, nodini kreszczen badeszi na czuzej zcinli i pomcnçszi mç. Jese i byst (vita s. Method. dans
1« moskiritiamo, t. HI, p. 430 journal édité à Moskou par rhistorien Polevoj).
r >
36 SLATIA» 1i.
de roder, limitrophe de Diedcsisi (Dîtm. VU, 11, 15), or, Buntzlau
répond à Businc.
Verizane, ciuitates x, sur Sprée Fehra près Peitz, Were, non loin de
Lubbcn. j*-
Fraganeo, ciuilales xl. \/en d*anaIogue. Serait -il possible de pri-
mer que Fragan suggéra Tidée aux Allemands de donner le nom de
Frank-furt à une ville odérane? (ou Dragan près de Wittenberg?)
LupigltM , duitates xxx. La rivière Lupa se perd dans celle de Mlssa.
Opolini, duilalesxx. Si Ton me dit qu'ils portent e^ indiquent le
nom d'Opole de Silésie je ne puis guère contredire : mais Tordre que
le bavarois observe empêche à mon avis de sortir si loin du cercle étroit
dans lequel il tourne. (Selpuli?).
Golensizi, ciuitates v. Golsen et la rivière Golza qui se jette dans
Sprée.
La description dtJ géographe bavarois est ainsi terminée (ss). Elle
compte parmi les pays frontiers ceux des Boulgares et de la petite
Moravie; or, elle est antérieure à la date de rétablissement définitif des
Madiars (897-907) dans la Moravie supérieure méridionale ou danst
Tancienne Pannonie. Les Allemands ravageaient les population»
Sorabes très-profondément, les évéques et les markgraves y exerçaient
déjà leur autorité, aussi la description se montre très-bien renseignée x
mais plus loin vers la Yistule, au delà de ce fleuve il n'y a que Ylslane^
ensuite un vide. Si même on voulait s'y établir avec les 5966 cités deas
peuples îuxta résidents on n'en profiterait pas beaucoup, on n^avanoe —
rait pas la question.
Ghrobates, Serbes.
12. La petite horde avare , composée (vers 550) de 20,000 combat;-
tants, entrant dans la Slavonie évacuée d'autres étrangers» trouva 1^:
populations slaves secouées, inquiètes et fluctuantes. L'inquiétud
indécise augmenta lorsque la horde grandissant, commença à étend r
(28) Â la fin de la description» dans le manuscrit, sont encore inscrites en petit caractère de«
notes. On pourrait douter si elles appartiennent au géographe mcroe. Sueui non mnt nali ^*
seminati : jeu de mois, de scmino, parce qu'ils sont très-nombreux. — La seconde note : Beire^
dicuntur Bauarii, sed Boioarii a Boia flwvio, sachant que le nom -vulgaire de Ba-varois, Beire et rm it
rendu en lalin par Bavarii ou Boioarii , elle réprouve le premier et recommende le second com^oiae
provenant du fleuve Boia. Peut-être c'est aussi un jeu de mots, et que fluvius couvre la valenr «3e
boia, collier du carcan. — Le savant Schafarjik admettent que Beire sont lesBoulgars et Wr«'«3a»-
Beire les Boulgars blancs, donne une toute antre explication à cette note finale. Suivant son opim.*-^»
la note bavaroise dit, qu'on ne doit pas les Beire (Boulgares) qualifier doBauarii (Bavarois) ncs ait
Boioarii de la rivière Boia, qui est la rivière Buy qui se jette dans Vialka , et cette dernière »^Bt
Volga. "— l'ne petite rivière Boîte se jette dans Tiaue près de Piauc di Cadore non loin de Bav A ^î*
SLAVIA» IS. 37
ses Te3UiUons. Chaque hiver elle fesait faire des tournées pour extor-
quer le tribut des peuples soumis. Les populations slaves se virent
(depuis 560 et 578) exposées à servir en qualité d'alliées ou de
sujettes, dans toutes les rapines et expédions avares , ou forcées de
les entreprendre d'après leur ordre paf^ elles-mêmes, {Menandri
excepta; script, byzant). La domination avare, contrariée par la
résistence des peuples qui défendaient leur indépendence , sévit
contre les vaincus. Les Doulèbes, de ce nombre, subirent un joug
oppressif et humiliant. Chaque Avare violentait impunément et quand
il lui plaisait, attelait à son char les femmes et les filles doulèbes.
(Nestor 11, Schlôtz. II, 121). Les populations en désespoir s'émurent
et émigraient.
Les Doulèbes avaient dans leur voisinage les Boujans (Buianc),
appelles ainsi de la rivière Boug. Eux-mêmes occupant un pays
spacieux autour du fleuve Stir, où s'élevait leur ville Loutzk,
(Dlugos, p. 49) habitaient aussi les deux rives du Boug (ziwiachu po
Bugn) (Nestor, II, 112) et leur possession s'étendait probablement
jusqu'à Vistule et San. Leur nom disparut de ces espaces , cédant aux
autres cultivateurs connus ensuite sous le nom de Volyniens , (ninie
UwLt Yotiniane, Nestor, II, 121), et de Chrobates. Les Doulèbes eux-
iDémes reparurent en Bohême déjà occupée par d'autres slaves, où ils
s'établirent dans les parties méridionales et construiront leurs villages
à Test de Bloldava, dont une grande quantité reçu les appellations
qu'avaieut lies villages abandonnés. (Cet événement a pu arriver vers
l^année 580) (io).
Ce que j'ai dit de l'établissement des Doulèbes paraîtra une hypothèse
tH>ar ceux qui font remonter le peuplement de Bohême à de temps plus
anciens : mais leur assertion serait non moins hypothétique s'ils vou-
^^ient fermer la porte de Bohême trop de bonne heure pour les autres.
t^ colonisation s'accomplit consécutivement. La. colonisation, par de
(S9) La.BohènM eft pleine de nom» identiques aipec ceux de Pologoe. Sovs oe rapport cependant
^«lelqao chose de spéciale se déclare pour les Doulèbes : A l'est de Holdawa, au sud de Sazava, à
'^«ntoar deTabor se trouvent : Biela, Borowsk, Chlnm^Czieskow, Dobra^itz, Domanin, llostin,
l^ureschao-, Krasna-hora» Lomtfitz, Lakau, Lulrawetz,. Prtschitz, Ratkow, Rekscbitz, Rositscb.,
^«mosty» Sedletz, Seltscban, Woïslawitz. De même entre Boug et Vistule dans le palalioat do
t.iibliii et la terre de Kbélm on a : Biala, Borow, Chelm, Czyszkov, Domanitze, Dombrowica, Hostinno,
, Krasno-brod et staw, Lomazy, Lukow, Lnkowek, Parczew» Retb>w, Rçczale, Rososz,
\ Siedice, Siedliszcze, Woïslawice , et beaucoup d'autres. A l'ouest de Moldava, rien de sem-
t^lLable ne se présente plus. — La même portion JDoulebe». fournit ea.Boh(^me les noms de Stiepanow
ClStepan' sur florin), Dobrawitz (s. Horin], Slawîn (Slawuta s. Ilorin), Radinow (Ratno], Rositsch et
1R.otsetsch (Roziszcze s. Stir), Radomisl (en Volynie et s. San); San, Sudomirzitz (Sadomirz, Sando-
aVkirx), PrxemysIaT, Brod (Brody), Zrutsch (Zbrucz), Kamenitz , Bukowsko, Zbraslaw, Sucbdol, Zablot,
r, Doklek, Bediin, et autres qu'on troa^a Ters les Karpates en Pologne, Russie rougo.
58 SLATUy fS.
petits trains de caltivateurs innommés, connus par leur i^pellatlos
générique de Vendes, s*opérait lentement; pour une colonisation
nationale il faut un événement; elle ne distilla pas goutte à goatte,
ordinairement elle se coifVnme à la fois. La Bohême peuplée par ces
deux sortes de colonisation, contient plusieurs assiettes nationales dont
celle des Doulèbes est une de plus prononcées. Pour elle il (Saillait un
événement, Tbistoire en présente un, il n*y a pas lieu dMnveiiter nn
autre. Elle dit que les Doulèbes subirent Toppression dans lent
ancienne patrie et ne dit point qu*ils y fussent exterminés. L'apparition
successive des Doulèbes est trop compacte pour n'être pas la consé^
quence ou d*unc double existence, ou d*un déplacement par quelque
événement. Cette dernière solution me parait très-certaine. Le gros de
la nation reparut eu Bohême accompagné probablement de Chrobates
qui voulurent partager son sort. La nation se déplaça en entier, à
peine voit-on quelque fraction séparée. Doudleipa se fait remarquei* en
Pannonîe (anon. deconv. Carant.; dipl. 891), et en 906, les Doulèbes
se trouvaient dans Farmée russe (sofijski virrem. izdan. Stroleva, 20;
Schlôuer, II, p. 252).
II est probable que d^autres populations fuyant la tyrannie des
vainqueurs, se retiraient avec moins de succès vers Toccideût, quand
on y voit leurs noms nationaux éparpillés, sans pouvoir se concentrer.
Car si l'on a tant d'apparence et presque certitude que les Doulèbes se
retiraient devant les Avares, il faut absolument convenir que plusieurs
autres peuples moins importants suivirent leur exemple et quand on
voit le nom des Stodors et de Sousls, Susles, à droite et à gauche
heurter les frontières occidentales, au nord et au sud des Doulèbes, on
peut je pense admettre, que les Stodors et Sousls sortirent à la suite
^es mêmes vicissitudes des mêmes régions.
Les Stodors s'arrêtèrent dans le plie de Ravela (so], et les Sousls sur
l'Elbe. Mais l'écho de leur malheur retentit dans les vallées de la
Karintie montagneuse. Aux environs de la rivière Stîr, qui donna le
nom à la Stirie, se trouve in parte Slavornm au pied de la montagne
Priel, un canton der Stoder (Yorder und lïinter Stoder bey Windisch
Garsten); ailleurs, près de la montagne deTriglau (Triglav, triade)*
au sud des sources de la Save , une vallée de Stoder. — Au sud de
Grati on a un Saqscl, les vestiges indélébiles des Sousls (dipl. Falzbur*
gensia 970, 1045); sur Yps, qui traversait les possessions des Yinnles
du terroir Siaviuia, on construisit castellum où locus vocatur Zuisila
(30) Ooy voit : Ratenov» Ezcn. PloU, RetzoT, Steppin, Lippe, et dans la PolIsi« ToljoieuM Mut
connu : Batoo, Exero, Ploski, Raïracsc et RastOT, Stepau% LipOTo.
SiATIA» iS. 39
(dlpl. 979). — Les compagnons des peuples brisés et dispersés, les
Cbrobates, avaient aussi leur pagus Crauvati (dipl. 954, 978, entre
Leubacb et Knittelfeld). Ils venaient d*au déjà des Karpates, grossir les
populations laborieuses. ^
13. Les vainqueurs, poursuivant maintefois la retraite des peuples,
essayèrent de pénétrer plus loin jusqu'à la mer. Le succès qu'ils
pouvaient obtenir n'était ni durable, ni constant. Ils appelaient
cependant les plus paisibles à s'associer à leur brigandage (591 )•
(Simokata V, 5, Tbeoph.). Après la défaite et la retraite des peuples»
la résistance des autres ne discontinua point. Les Cbrobates, qui
habitaient la grande Ghrobatie, la Chrobatie blanche, de l'autre
côté les Serbes qui venaient de la grande Serbie ou la Serbie blanche ,
venaient au-devant pour arrêter l'ennemi, pour le détruire. Les
^^nes des Ddulèbes ne cessaient point d'être le champ de bataille et
de combat (Ixnki, bojki), où les armes à la main les nations allaient
décider de leur sort : ainsi que le champ de combat bôjki , situé à l'est
de Chrobatie et au nord des Tonrks (Madiars) devenant patrie commune
lies peuples qui se répandaient à l'ouest et au sud , et gagnant de la
"enommée, fut connu chez les étrangers par son nom slave /Souee,
roiro» /Socx( pols boïki : ce sont les Slaves eux-mêmes qui le qua-
ifiaient ainsi , tra^ aurot« /Soïxc tqtcov Iiroyo/ucç6/t<vov (Constant, porphyrog.
le adm. imp. 52) (si).
I>e la Ghrobatie blanche et des monts Karpates sortit vers 630 /iia ik
•cveà( une tribut, en se dirigeant vers la Dalmatie, dont les ruines
tiaient possédées par les Avares. Après de longs combats les Avares y
"tarent détruits, le reste assujéti. La colonie des Cbrobates, Kroates
prospéra et grandit (Const. porphyr. de adm. imp. 30).
Quelques années plus tard (634-636) une portion des Serbes Se^6Aoc
originaires de la Serbie blanche , qui habitaient le champ boïki , se
proposa de chercher un établissement dans l'empire. On leur permit
i^occuper les vastes provinces à l'est et au sud de la Dalmatie,
(M) le penie f|ttO c'-est la plus tlmple explication qu'on pvlsso donner an lien de boïki. Quel est
le 8Uto qnl se comprendrait pas bcg combat, guerre, bô^ek Taillant, btiiar guerrier, Imjka lutte,
combat. — On donnait le nom bojki à l'épëe de combat, comme on voit par un passage de l'historien
Hattiée évèque de Krakov. «- Dans le boïki de Constantin porphyrogènete on a cm de reconnaître
■i Bohême , mais Scbafarjik a raison de rejeter cette explication. Dans les montagnes des Karpates
existe une population de montagnards qui porte le nom de Boïki, il suppose leur vaste étendue dans
lea temps anciens dans uno région à laquelle ils donnèrent le nom. Supposition difficile, il serait, |e
pense , plus simple d'admettre, que cette petite population apporta ce nom du champ de bataille ou
«Ile s'étidt distinguée, en se retirant dans les montagnes. — Aifoc Ions ceoi-ci , que le wtont Sdia-
fai|ik me pardonne, Ditùke et Vistole n'ont flen de commun.
40 8LAVIA, ii.
dépeuplées et désertes à la suite des rava^ des Avares. Les Serbes s*y
mnliiplièrent et se trouvant en voisinage avec les Boulgares, se virent
forcés de disputer les terres, rarement encore cultivées par de
laborieux Slaves dans la Moravie inférieure (Const. porphyr. de adm,
imp. 52). V
En attendant, les guerres avec les Avares continuaient dans la
Slavonie. Ils étaient exterminés dans les possessions Kroates et Serbes;
an delà des Karpates ils ne pouvaient plus rien entreprendre contre
les indigènes organisés : leur domination cependant bien que restreinte
dans la Pannonie et dans une portion de la Karintie , ne cessait point
d*étre formidable, d'opprimer et d'inquiéter les voisins indépendants,,
contre lesquels ils armaient leurs frères soumis. Dans les combats ils
poussaient ces derniers en avant, en les qualifiant par dérision de
bis-appuie (béfulci), parce que les Slaves, en première ligne,, ne
pouvaient pas reculer, ayant par derrière les Avares, et en cas de â
dernière nécessité avaient leur secours. Les enfants Avares, procréa
de femmes et filles Slaves, furent enfin révoltés de ces procédés et
voyant fes exploits de Samon (jusqu'à 658), prirent les armes
(Fredegar 48). Après tant de guerres prolongées depuis deux siècles,
les Avares furent à la fin vaincus et presque extermines en 799. Une
poignée de leur population confinée au confluant nord de Morava avec
le Danube, s'éteignit lentement comme la flamme d*une lampe e
disparut : périt comme des Obres, dont il n'y a ni génération il
descendant, répétait le proverbe Shve (Nestor 10).
14. La destruction des Avares poursuivie avec tant de succès, ouvn
la Slavonie méridionale à Taggression des Franks. Ils occupèreic
(vers 791) les deux Pannonies, Tlstrie, la Libournie et la Dalmat":
(Kroate) (Einh. viia Karoli, ap Perlz. 1. 1, p. AM) , pénétrèrent jusqw.
Femboucbure de Sava où Sirmium reçut le nom de Frankoehoric:
(Nicet. cboniat. ad a. 1123, 1153, p. 10), et proche de celui-ci Btidali<:
fut appelé Frankavilla (Ansbert. ad a. 1189; ensuite Nagyolas ^
Madielos). Les Kroates subirent ce nouveau joug. Leur soulèveme^.
sous Ludewit (818-822) n'avait pas de succès. Les Franks fesai^i
main basse sur les vaincus , égorgeaient leurs enfants et les jettaiei
aux chiens. Un autre soulèvement sous Porin, avait plus de suco
(vers 850). Les Kroates divisés en deux portions amies (Chorba^
savia ou siscia et dalmatica) , organisèrent un état flottant entre Fis
fluence de Téglise grecque on latine. (Einh. ; Gonst. porphyr. ; tm
Uludov.; annal, fuld.; Fredegar 72; vita s, Eusicii, ap. Bouqa^
t. III, 429).
SLA VIA, 14. 41
lies Boulgares profitaient des embarras des Franks et s'empa-
xalent (827, 829) des pays aux environs de Frankocliorion (Einh...)
Cq même temps, un autre rempart s*éievait contre l*aggression
franko-allemande, dans la grande Moravk (836-898). Rempart un
œrtain temps formidable , qui , malgré s£^.hule , arrête le progrès
allemand.
f^endant ces secousses prolongées, les Kroates et les Serbes, quoi*
<ru*ils se sont baptisés, soutenaient des relations avec leur mère-patrie
k-baptisée , avec la Ghrobatie et la Serbie , qu*ils qualifiaient de
ou blanches. La situation de la première, souvent mentionnée,
^^t Jt>icn connue : elle s'étendait au nord des Karpates et longeait les
I^Pties montagneuses vers TËlbe. La seconde est moins déterminée.
C® Kà*est que par Torgane des Serbes eux-mêmes , qu'on savait qu'elle
^'^it rHi Tovpxicci exsiôev au delà des Madiars, par conséquent au nord*
^^ ^ux environs du Dniestr, ofioioti xai 4 fisy^^^i Xp<aBaxia, où est
aus&i la grande Ghrobatie (Const. de adm. imp. 52). Cette Serbie
aoïào 8*accroche à la grande Ghrobatie, elle forme quelque chose de
^^ïïaiogène avec- elle; elle compose sa partie orientale. On ne peut
^^usitlérer la qualification de la grande Serbie qu'une appellation
S^^^rîque d'une souche qui se distinguait par horvate et serbe (sa).
Noxio])stant cette distinction, dans la Kroatie et la Serbie dalmates,
^^^tes sortes de Slaves allaient s'établir. Geux des pays Boulgares,
Tiixiokans, Koutschans trouvaient un refuge chez eux (Einh. s. a. 818;
^ast. porp. 32, ad a. 954) ; les Serbes se retiraient en difierentes occa-
sioits dans les possessions des Kroates (sous Zacharias entre 924-934);
^^ environs de la rivière vistulane a«tç<x>î Ditzike (lisez Nitzike,
Widzîtza) du pays non baptisé (de la grande Ghrobatie), arriva (885)
^^e tribu ^ ysvca une génération du fils rou ûo& toD BevaeSourç?} de
Jischevit (chef de Vislitza), s'établir sur le fleuve Zakhloum, et lé
7^ baptisé Michael régnait dans le canton Zakhloum (Gonst. porphyr.
^ ^dm. imp. 55; légende de S. Méthode, dans moskvitianin , t. III,
^l -^SO). Par celte fluctuation prolongée, les deux pays et leurs zoupa-
^^^ augmentaient en population; ils pouvaient faire sortir des
^"ïi^es, entreprendre des expéditions maritimes, peupler de leur
^Uohe variée, les villes latines, où l'on distinguait les Dalmates et
'^) Cestla grande Skonf, Skoufla (Skytlii) des Grecs suivant Nestor (chap. 7, 17). — C'est à tort
^ ^^ ^ Toula interpréter la Serbie blanche par la Sorabie de l'Elbe : cette dernière n'est au delà
Tourks, mais au delà des Ckrobates. Si dans le langage do Constantin la Serbie blanche est limi^
^^^« à la France, c'est que l'archonte des Chrobatcs était sujet du roi de France , et la Serbie
^^^^e indépendante. — Au reste, remarque très bien Schafarjik, que Constantin parle con-
r^^*^^«iit de Chrobates et Sorbes non baptisés, et de boiki non baptisé, quand il ne pouvait pas
***^v que la Bobème ot les Sorabes de l'Elbe furent chrétiens depuis longtemp s.
42 sâÂViA, u.
les Slaves (fidrki Y, S). Dans la Serbie se formaient des nuaDoes
d^idiomes de différents cantons; elles sont beaucoup plus prononcées
dans la Kroatie : entre les Morlakbs, Honrates et presque Serbes ters
le sud. j^
Leurs pays étaient dpsés en cantons qui s'appelaient ]o«paii,
zoupa , zoupy, zoupanie, et le chef de chacune iupan, zoupan. Chez les
Kroates on accepta le titre avare de ban, pour un chef à part d'une
province plus considérable. Mais ces joupanies, par une espèce de
fédération, formaient une unité qui avait souvent un joupan général»
grand joupan. Parmi toutes ces petites provinces on ne voit pas
d'autres dissensions, que celles qui décidaient de la dignité d'an Joupan,
elles se prolongeaient lorsque l'intérêt dynastique s'en mêlait, favorisé
par la marche de la civilisation et par la suprématie étrangère.
La division en zoupanies n'était pas constante, elle changeait
mainte fois, avait de sous-divisions, et il n'en manque pas d'obscures
qui n'ont jamais figuré dans l'histoire. Si donc nous acceptons que le
géographe bavarois, dans le dénombrement des peuples jnxta résidants,
annotait les cantons des Serbes et Kroates : nous ne devons pas espérer
de trouver leur conformité avec la division postérieure comme elle est
connue.
15. Nous avons interrompu la revue de sa description an commen-
cement des peuples qui juxta fines résident et dont les premiers sont
Qslerablrexi, in qua ciuitates pltts quam c mnt, et nous avons vu leur
position de deux côtés du Danube, c'est-à-dire des Obotrites orientaux
ou Predenecentins, Branitzovlens. (Voyez dans notre atlas la carte
de la Slavonie du x* siècle).
MUoxi, in qua ciuitates Lxvn. Quand Je vois an nord du Danube
Moliza, au sud près de la rivière Mlava, Milesovitsch ; à l'ouest de
Morava Milatovtze; prèsde Sabatsch, Milovilo : je n'hésite pas d'ad-
mettre, que les Miloxi habitaient presque le même territoire que les
Branitzoviens. Sans vouloir infirmer cette explication, je ferai remar-
quer qu'on trouve dans les ancienne cartes (de succès, de Homman) à
l'est [de Fokia. s. saba de Milosevo, et dans cette contrée existent
Millinovo, Millovistch, dénominations qui ne se répètent pas en
Serbie.
Pheznuzi^ hahent ciuitates Lxx. Hea^vra, tirant le nom de Vezenta
montagne au nord de Jaîtza (Kroatia).
Thadesi, plus quam ce urbes hahent. La rivière Zermagna chez les
Romains s'appelait Tedanius; l'autre,. Chercha, était nommée Titius,
(Kroatia]L
8LATU» 15. 43
Glopmmifinqua cMtaks ggcg, oui eo ampUus. xXMivx Cloania
(dipl. 893) , Livno dans HerUegovine (Kroatia).
Zuireani, habent ciuUate$ GGcxxY,,Zara, Jadera (Kroatie).
Busani^ habent ciuitales ccxxu. x^pî» Bjsaiva, qui grandil eosuile
sons le nom de Bosnie. ^
Sitid^ reffio immensa, papulis et urbibus munitmimis, La Kroatie
formait d*abord deux états, dont un au nord ayait Siscia , Sissel^ pour
capitale : on pourrait donc présumer que r^o Siiici , plaine de cités ,
désigne* celte portion. Mais une autre interprétation se présente par
les zoupanies connues dans l'autre Kroatie. — Elles étaient au nombre
de quatorze , dont les trois premières formaient un banat , à savoir :
r«uTÇ«ixâ(, sur les rivières Gatsk et Gaschiitz; A^rça Likha, Lika;
tptëxcoc, Corbaustuci (dipl. 1078), Corbavia; N^va, autour de la rivière
îedanios, Zermagna; ^lâpoLya, Sidraga terra (dipl. 1050, 1069,1073,
iiS5) circuit de Belogradon; TviAva, Knin sur Kerka; K6va, Âenona,
•Nin, delà péninsule; BpsBipa, Berberistici, Breberstiti (dipl. 1069, 1078),
firibir sur Bribirstitza; napce6a>a9(r<a, Primorîe entre Kerka et Cettignia;
HcacvTffy Yezenta; nitëaj Plieva, Pliva sur Pliva; 'Ufioran^ Imota sur
le lac imotski; x^«6<«va, Livno; enfin T;^vTÇi7va, Ceiinensis cornes
fdipl. 1066, 1076, 1078) autour de la rivière Tilurus, Cettina. Cette
dernière zoupanie répond aussi aux cités de la région Sitici. — Mais
lAOi de cités remparées, accompagnées de 516 villes voisines, me font
ooorir dans les régions plus spacieuses vers la rivière Sitnitza :
S^osition mémorable dans les fastes serbes. Elle tamise ses eaux (dit
nom) à travers les cailloux, et se jette dans Tlber où était la clef
la Serbie du côté de Fempire. Près de Mitrovitz on voit les ruines
Zvetschan, Sphentzanium , petit bourg bien fortifié, et plus haut
XULplana conserve les restes de Tancienne Lipenium, tons deux placés
^ rentrée de la Serbie , près d*une chaîne de montagnes. La capitale
Idte la Serbie n*était pas trop éloignée de cette situation.
Siadicif in qua eiuitate$ bxvi , f>opulu8que infinitus. Par ce peuple
SvifinI, et indéfini, je passe vers le nord, pour descendre successive*
VAéiit vérd le sud.
Sehhiroxit habent eiuitates xc, dlvlslt provincias et regiones regni...
Sd^nndtim cursum aquarnm,... aquas vero quae fluunt in magnum
^damen Donavi (inter Sava et Drin) vocauit Sumbra (Diocleas, ap.
X^Jacsey. app. p. fi), Semberla.
VnliÉÎf pôpuluê muUitê, ciuitatee occxvm. Rivière Unna et la ville
"Oiiatsch (Kroatia).
jferlmil habeni eiuUaiee Lxxvm. Fleuve Orontius ou Naro dans Tantî-
^|fdté» Heretva, Karenta, près duquel au pied des montagnes la ville
44 SLAVIA, 19.
Naresii, Neret formait une Zoupanie de la Podgoria (pied-mont) (DiocL
ap. Luc. p. 295). Mais les fameux Pagani étaient aussi appelés
'AjcevTcxvoc, Narentes, de leur fleuve Naretva, Narenta.
Aitorozi habent cxLYm, pppulus ferocUsimus, La férocité des Narentans-
paganiens était assez a«3ditée , parce qu'ils ne voulaient se faire
baptiser. De leur zoupame Mokron sortaient les flottes qui protégeaient
les îles (ostrovy) qui étaient en leur possession , et semaient Tépouvante
par la mer adriatique. Dans cette zoupanie près du Mokron maritime
au sud se trouve *0(jrpuxj Ostrog(dipl. 1078, 1108), Zaostrog,Zaostroie^
Eptaradici habent ciuitates cQuai , 'Paardirça, Raztok, zoupanie de
Narentan?
Vuillerozi hdbent ciuitales clxxx, BspoùlXta^ Yroulia martime» att
nord de Mokron dans sa zoupanie.
Zàbroci habent ciuitates ccxii, la grande île Bpstri^rn Brazza, en posh
session des Narentes?
Znetalki habent ciuitates Lxim. La partie méridionale de Serbie,
appelée Dioklea ou Doukla, enclavait dans son intérieur un canton
situé aux environs de la rivière Zelta, dont le nom Zenta, Zêta, Zentana,
se communique à Dioklée entière.
Aturezani habent ciuitates cnu xAtrrpov rh *Paov(r(ov, Raguse , apparte-
nait encore à Tempire ; 'Pîorevoc, Resinum , Risan dans la baie de Katera^
se trouvait déjà en possession des Serbes , dans la zoupanie de Terbou-
niates.
Chozirozi habent ciuitates ggl. Aexarefïa, Cattaro, Kotor de la zoupanie
Zente ou Dioklea.
Lendizi habent ciuitates xcui. A6vro, Lunta, Luncza, Linda, Lonto, de
la zoupanie Diokleane.
Thafnezi habent ciuitates cclvii. Aeev^x, Tessen, Teszan, Deschan,
entre Ussora et Bosna? — On a aussi Aearcv^xov capitale de Serbie,
qu'on suppose Trsztenit d'aujourd'hui; peut-être Detschiani sur la
rivière du même nom qui se jette dans Drin blanc.
Zeriuani , quod tantum est regnum , ut ex eo cuncte génies Sclauorîm
exorte sint, et originem, sicut affirmant, ducant, La description du bava-
rois, quand elle indique un pays spacieux par son nom général, n'entre
plus dans les détails de son intérieur : par contre, quand elle énumé-
raît les détails, elle n'avait pas l'occasion de mentionner le nom général.
Or, dans l'énumération des peuples iuxta résidents, le nom général des
Kroates est pour sûr passé sous silence. Mais le géographe, en détail-
lant les petits cantons de Luzitzi, n'a pas négligé de spécifier leur nom»
avec la réserve d'un certain nombre de villes. La même spécification
parait avoir Heu pour la Serbie dans cet empire de Zeriuani, Serviani,
Senrians, Serbiens, Serbes, qui est si grand que suivant l'affirmation
(des Serviani eux-mêmes), tons les Sclaves sortirent de leur pays et en
tirent leur origine. Les Serbes se disant venir de celte commune patrie,
dite Serbie blanche et conservant son nom^ouvaient être considérés
par le bavarois à Tinverse pour la souche ^a race. Mais il ne donne
pas de nombre de villes, le pays des Serviani chez lui est sans limites,
indéfinissable, patrie commune; or, toute la Slavonie orientale, qui
lui sert de transition dans les parties vinules, où sa description va
recommencer rénumération interrompue des peuples in finibus nostris,
fiar les Prissani, Brizani à Tembouchure de Havel : comme nous avons
examiné (ss).
16. Pour expliquer la nomenclature du géographe bavarois, nous
avons eu recours à la relation de Constantin porphyrogenète; elle seule
nous fournit Teusemble qui dessine Tétat des Kroates et Serbes. Con-
stantin raconte que de son temps la Serbie avait été Impitoyablement
€lévastée par les Boulgares , qui conduiront les populations captifs et
les établirent chez eux. Ce n'est qu'après quelques années, 954, que
TTscheslav a pu penser à la restauration de Télat. Les fugitifs rentraient
^ans leur pays et Tscheslav restituait Tordre et Tancienne division.
Cette dévastation n'a touchée que très-peu le littoral, où se distin-
guaient quatre régions serbes.
Les Narentans 'Ape^n&voiy paganiens, itayayoi 6i xoLlowrat, formaient
une république à part, divisée en trois zoupanies, dont celle de AaAiv
(antique Delminium), vallée Dlmno, Doumno, Donvno, est intérieure ;
les deux autres maritimes : 'Pa7Tci»rÇa (l'étang Raztok), avec la ville
AaS^vcTÇa. Labena(dipl. il05);et Uoxpov (Makarska), contenant Ostrok et
Terullia. Les paganiens possédaient de très-belles îles au nombre de
quatre : Bratzo; Kourkoura ou Kike; Fara; et Meleta ou Malozeata
(Gonst. porphyrog. de adm. imp. 50, 56).
(33) Scbafarjik distinguait aussi dans les Zerivani les Serviens , mais d'une toute antre fiaçon : il
s'efforce de déterminer leur assiette positive en Litvanie. — Quant aux autres peuples dn bavarois,
son explication est radicalement différente do la mienne. Il les divise en slavons et non-slavons.
Pbesnaci sont Petzenchi ; Bruszi , Proses ; Wizunbeiri, Boulgars-blans (voyez la note 28); Caziri
Slioiares ; Forsderen et Liudi , de la race finoise. — Avec la liste des autres reconnus slaves , il
parcourt toutes les espaces entre Sala et Volga pour confronter leurs uoms avec les dénominations
géographiques qui se repètent d'un bout à l'autre et quelquefois il opte parmi ces indications pour
fixer un peuple dn bavarois. Ainsi pour leur habitation Glopeani trouvent les Kolps dans le gouver-
nement de Novgorod ; Zwirani un lac Swir en Litvanie ; Sittici, Zitomir ; Stadici la Podolie, Sebbirozt
un lac Sebira dans le gouvcracmcnt de Petcrsbourg ; Willerozi , une rivière Bnlera en Kourland •
Zabroxi, le za-porohy des kozaks; Attarozi les Turocz, Turia, Turzisk etc., de la Polisie; Thafnezi,
«ne rivière Tanev en Pologne ; Ncriuane, Narcv en Mazovie ; Busani, Boug et les Boujans ; Lucolane,
Lukoml dans la Russie blanche; Velunzonie, Vielan' en Pologne ; etc. etc., et Verizane, Fraganeo,
sont Heverenofelda, Fergunna , position trop allemande. — Peut-ôtre je me trompe dans mes expli-
cations compacte : mais ce que Schafarjik propose , n'est pas trop rassurant.
46 SLAVIA, i6.
La principauté âo6 Zakhloumes 4 kpxoixUt rSm ZaxXoôfUà^ s'étendait
au delà de Narenta jusqu'à Raguse, divisée en dix-neuf zoupanies. Sur
une montagne s'élevaient deux villes Bona ot Chium, et les habitants
avec le pays furent appdés Zacblum (au delà de Chlum). La partie
maritime ^tait nommée ^aîna (région, plaine); intérieur podgena
(pied-monl) dans laquelle se trouvait les villes Neret et Rama. Depuis
que Michel, iils de Wischevit s'était établi, Zakhloum n'était pas toujours
dans une bonne intelligence avec la Serbie (54).
Une autre principauté Terbounia ou Trabounia, rsp^owOxy Tpaîm^a^
Treuvunia (dipl. 1195-1250, 1254, etc.), (Trebigne sur Tribinschitza
divisée en neuf zoupanies, portait aussi le nom de KavaA^ à cause qat
la lisière maritime était ainsi appelée (ss).
Enfin Ât6x>cce, se prolongeait de Dckatera (Cattaro), par Ântîbari
Helkynion , Elisso, jusqu'à Dyrachion. La ville Dioklea (Doukla) situ^
sur le confluent de Moratcha avec Zetta ; celte dernière a communiqu*
son nom à la province (se).
C'est au delà de ces quatre provinces que la Serbie dévastée sV
de nouveau oi^nisée. Elle avait peu de villes habitées, Kâmpa elxov/it^^^
rb ÀeoTcv^xov, t6 TÇepvocSouffxiv, rb tleyupérovi rb àpsiTvshfi^ rb Âsav^x ro 2aAs/
dans toute espace depuis Drin noire jusqu'à Sava. Ses frontières hei
taient Ibar; Sitnitza n'était pas dans sa possession; au nord sur 1
frontières de Kroatie se distinguait /uptov hàsava contenant les vi&
rb Kàrepcc, xae rb Âeorviid (Coust. porph. 52) (st). Le pays sc pouplaiv. «
se dépeuplait par une population mobile et alimentait l'élément de
sa grandeur future, secondé par sa race mobile de pâtres, qui promo*
naient leurs troupeaux jusqu'à Thcssalonique , dont le thema reçni le
nom de Serblia.
La Morava inférieure, bien que sujette aux Boulgares, avait son ctft«f
qui recevait les ordres de Byzanze, comme les chefs des Chrobat^^,
(Si) Constattlin (cbap. 53), compte au nombre des villes habitées : Bona» Chlum,
Mokriskik, losle, Galumacnik et Dobriskik. — Le diokleate (ap. Luc. édit. 4666, p. 893), nomiB<^ lei
soupanies suivantes : dans Podçoria, zupania : Onogoste, Moratia, Comerniza, Piua, Gerico, Netot oûaI,
Guisemo, Debreca , Neret et Ramma ; dans Cherenania (kraîna) : juppaniae : Stantaaia , Piv>ana,
Vabsco, Lucca, Vellica , Gorimita (Vclicagor, Imita , ap Peiacsev, p. 06), Veceuike (Vecserigp»''(n)»
Dubrava et Debre.
(38) Coostantin (cbap. 34), compte entre les villes habitées : Terbunia, Hormos, Rhisena,LnkA^te
et Zetlebe. — Le diokleate (ap Luc. p. 293) nomme jupaniae : Lihomir, Vetanica, Rudina, Graw^v^mf
Urmo, Ressena, Draceviza, Canali, Gemoviza.
(36) Constantin (cbap. 35), nomme les grandes villes seulement chez les Diokleates : Grado^^M
s Grade , Lonto et Dokla. — Le diokleate (ap. Luc. p. Î93), compte : Zcntae regio.... et wp*«ïi» :
Lusca, Padiugiae, Gorska, Cupelnicb, Obliquit, Propratna,Cremeaiza, BuduacumCacevaetGiriptli.
(37) Dans la Serbie intérieure , se firent connaître de bonne heurs : Budinil , Decaevallan ITiet-
chitza), Golis (sur la montagne Galitschi près Tscbatscb); Longomiros , Logomir; Scmberity
Subria ; banatus Machovieusis, Macsna provincia Blatschva.
SLAVU» 17. 4T
St Zakhloums, Kanales, Trabouns et Diklcaô (Const. porphyrog.
3in. aulœ, II, 48). Les pays nltra-montains ne cessaient d'attirer
veSy qui se plaisaient à séjourner et à s'établir dans les zagories.
3édoîne depuis trois siècles était pleine de leurs populations. Les
Uratf A^ouyougîrac, Apoyoué^rat, DvLTgqfpady établis Sur la rivière
ritza en Thrace , demeuraient dans les hauteurs de la Macédoine
mir au pied du mont Justendjil, connus depuis 669, 877). —
^me temps se faisaient connaître : Baiowi^rac (Baîna, Vaina près
dovitz); — layovSarotf habitants les plaines de Thessi^onik; —
otf établis sur les rivages de la mer (près de Rondino); —
Uy Baçv]T(a(, assez puissants quelque part dans Tintérieur. — A
: ces peuples, dans la zagoria de Rilo et Rodope, s'assirent ifiolsvot
iâOO, jusqu'à Melenik). — Toute cette partie de l'empire fut
;e aux Slaves, les vallées de Pologos, Pelagonie dépourvues d'ha-
i y servaient de pâturage à leur troupeaux (voyez les écrivains
ins).
\ au sud, autour du golfe Volo (Pagasens sinus) cultivaient le ter-
cXeyeÇ^rae. Dans la Morée, JiLtXviyyoi xai 'EÇepirocc inquiétaient quel-
j (vers 850, 940) cette presqu'île (Gonst. porph. de adm. 50). —
)ms nationaux acquirent de la renommée parmi les populations
, qui, diminuant ou grossissant d'après les circonstances, inon-
l'empire. Ces noms allaient s'éteindre, la race continua plus
mps à dégénérer par la fusion avec les indigènes grecs.
Je vais terminer la revue de la Slavonîe du x"*« siècle, par
len d'un fragment qui nous reste de la relation arabe de Massoudi.
arabes se formafent l'idée de l'existence de la Slavonie par
vestigations faites à cet effet et par des communications directes*
géographes déterminaient sa position et l'étendue. Ibn Ketir le
lien (vers 950), désignant les pays de chaque climat, place la
lie dans le vn'"^, d'où elle s'étend au delà de ce climat vers le nord
9, p. 59 de redit, de Golius). Massoudi compte l'étendue de la
lie, 5500 parasanges en longueur et 420 parasanges en largeur
Deguigne, notices et extraits, 1. 1, p. 54)« Ibn Haoukal (vers 977)
( seulement 2 mois de chemin à la Slavonie, du midi au nord et de
l'ouest (p. 6). Tous y enclavent la Russie et ne la séparent point,.
i Abou Ishak l'istakhrien, parce qu'il ne désigne spécialement la
e dans le dénombrement général des régions, ni dans son aperçu
al des distances (p. i-4); tous ne distinguent aucune région
entale à la Slavonie, qui s'étend jusqu'à l'océan, comme ils distin-
; ailleurs les Roums, les Franks, les Espagnols (Massoudi, p. %7>
A
48 SLAYUy 17.
Âbou Ishak p. i-4). En effet nons verrons que différentes provinces
d'Allemagne , et rAllemagne entière, est enfermée dans la Slavonie,
par ces relations des arabes.
Massoudi (mort en 957)^t un des anciens écrivains arabes qui s^est
préoccupé avec intérêt dâ||felaves et de leurs affaires. Il est probable
quMl est le seul qui prit le soin de réunir les relations à ce sujet. Les
autres après lui se négligeaient ou répétaient subrepticement de qnll a
dit. L'istakbrien Âbou Ishak et le bagdadien Ibn Haoukal ne nons
apprennent rien.
Les ouvrages de Massoudi ne sont pas publiés^ ce qu'il y a sur les
Slaves , n'est connu que par deux extraits d'un ouvrage plus considé-
rable, extraits, dont un moins complet se trouve dans une note da
résumé de l'ouvrage de Massoudi, fait par de Guignes (p. 27); l'antre «
plus complet est inséré dans la compilation de relations arabes, eonh-
posée par D'Ohsson^ sous le titre de voyage (ûctif) d'Abou el Gassim»
ou des peuples du Caucase et des pays au nord de la mer noire
(cbap. 5, p. 85).
Le plus nombreux des peuples Skiabes, dit Massoudi, est celoi
qui s'appelle ^l&S^ à^\b^ Louza'îet, Louza'na, Loudzana, Loud-
bana. Il va trafiquer jusqu'en Audalous, à Gonstanlinople et chez les
Khozars. Ce sout les Loutzaniens de Loutzk sur Stir. Ils avaient des
relations avec Gonstanlinople par Eiiov, et l'embassade des Slaves,
en 955, au khalif de Kordoue , et le nom de Ncmctz (Aschkenaz) connu
en Espagne, confirment l'existence antérieure de relations slaves avec
l'Espagne. Les Loutzaniens pouvaient y prendre leur part , ou bien
l'écrivain arabe se plaît à concentrer et emboîter dans Loutzk ce qui
était commun aux autres populations.
Les autres nations skiabes sont AJl^la^t ^j^L^! Istabouana ou
Istnbrana, dont le roi actuel s'appelle JiHiLo ^jU^ Saklaîdjiou
Saklandji. La lecture Istabrana est pré^ (érable^ et sans doute plus
certaine, car elle nous donne le nom des Obotrites, Abotrites (Einhardi
annal, s. a. 818, 822, S2A) : oiientalium Sclavorum, id est Abotritarum,
qu'on appelait Oster-ablrezi (géogr. bavar.) Ist-abrana, Est-abrata. Ils
avaient leurs possessions au nord du Danube. Cette explication d'Esta-
brana est corroborée par les noms de leurs voisins, relatés par
Massoudi.
Ces voisins sont de l'autre côté du Danube , au sud du fleuve. Enm
premier lieu ^^Ls^ly Brandjabin. Ce sont les Praedecentini de^
latins, Branitzoviens, Bransins, assis aux environs de Mlava, comm»:.
nous l'avons vu. — Ensuite ^Li<k Khaschanin, Guduscani de=
SLAVU» 17.
fetins, Kôutschani. -— Enfin les ^ou^ Serbin, plas éloignés Ser-
bieqs. Les Serbin sont très-redoutables ; cependant ilis relèvent d*an
empire voisin (byzantin). Ghe2 les Serbin, lorsque le tù\ meurt, plu-
sieurs de ses sujets se brûlent avec son co|ps et Ton fait aussi i^rii^
ses cbevaux dans les flammes. — Les Sei^niens s*étant établi sur les
terres de Tempire romain, se reconnaissaient, à Hnstar des autres
peuples dépendants de Tempire.
Les Kroates, situés à Foccident, sont nommés par Massoudi #^*|jipL
Kharvatin, ^b11^(^p ^^ ben Gorion, HpoocTtot, K/^aêarac, x^«>eaTec,
:3Lop€arot dcs Grecs. — Plus loin sont les t^jK^ Morava.
Quelque part se trouvent les ^L^ ^^ MenaliouMenabin, dont
le roi s'appelle ^^a^^Jj Zentobir (De Guignes les appelle Menani et
leur roi Rantbir). — Peut-être c'est une notice inconnue pour les antres
histoires : mais voici ce qui pourrait être applicable à Tinterj^réiatiojS
des noms arabisés. Blastemir régnant heureusement en Serbie, et
mariant (vers 8i0) sa fille à Kraïnan fils de Bêla, zoupan trebuonien, lui
conféra le titre d'archon. Ge titre passa à Falimir, fils de Kraînan , et
à Tzutzemir, fils de Falimir. Le nom de Ti;ouri;rjfitpoç ne difiere pas trop
dé Zentobir, Tzen tomir, et comme les Trebouniens furent appelés
Kanale : ils sont les Menale de Tarabe.
Massoudi connaît les ajÛj^ Douleba (Doulaîah chez De Guignes),
dont le roi s'appelle v^^Lo J)^ Vandj Slava (Thala chez De Guignes).
Les Doulèbes , nous Tavons ^ vu , s^établirent en Bohême : plagam
^Uiaustralem (dioecesis pragensis), contra Teutonicos orientales has
Mrbes hahuit terminales : Chynov, Dudlebi> Noldici, usque ad mediam
^Ivam (dipl. ap. Gosm. prag. p. 54). Les possessions des Doudlèbes ,
IV)alèbes s'étendaient sur les frontières de Bavière (dipl. 1088,1175,
*^pud Schafarjik, VIII, 40, 2). Qr, les Doulèbes composaient le nouvel
^tat des Tschekhs (Bohême), dont le duc (946-929) était Vatslav, Yen-
^esîav, Vandj-slava. Massoudi en est bien informé.
Nous nous sommes prévenu , qu'à cette celte époque les Arabes ne
^ isting^aaient pas les Allemands des Slaves. Or, Massoudi compte au
Nombre des nations slaves, celle des Allemands aussi. Il dit que les
I^las beaux des Slaves, les plus nombreux et les plus formidables sont
l«s N-*Jy Tourks. Chacun y voit, qu'il parle des Madiars, Hongrois,
appelés Tourks par les byzantins. De même comme ces Tourks étran-
^rs, il amalgame aux Slaves les ctranj»ers Allemands. Les Slaves
appellent dans leur idiome un Allemand, Niemelz, et en général tous
les Allemands Nicmtzi. Cette appellation passa aux étrangers khozars,
juifs, arabes : aussi Massoudi nous avertit que les plus braves et les
III. é
tO ^ SLAVU , 18.
meilleurs cavaliers de tons les Sklabes sont les ^^|^ux^U NamdjîDy.
àont le roi s^appelle èô\Ji Grana , nom substitué dans la langue arabe
à oelui de Henri. Ce roi est donc Henri Toiseleur (919^936). (DeGu^nes
lisait Nabdgin ou Namdgin et leur roi Ara).
Du nombre des étran^|rs comptés aux Slaves, sont les ^^^L^
Sassin. Les Saxons, appelés Sassi chez les Slaves , prédominieant en
Allemagne du temps de Henri Toiseleur de la maison de Saxe : les
byzantins qualifiaient son successeur Otto, roi de Saxe , équivalant à
celui d'Allemagne.
18. Qui est le roi ^^^^ ^jXS^ Avandj , qui a beaucoup de villes^
qui fait la guerre aux ^Romains, aux Franks, aux Nogbardes (Lom-
bardes) et aux autres peuples, qui sont tantôt vaincus, tantôt vain-
queurs? L'appellation d'Avandj est la même que de Venceslav, Yan^-
slava, seulement privée de la terminaison. Cependant, il est impossible
de présumer dans ce roi guerrier la répétition du roi des Doulèbcs
Tschekhs , pieux chantre des psaumes dans Téglise , éloigné des Nog«
bardes. C'est un tout différent, un chef de Kroates ou Narentans paga-
niens, à portée de faire la guerre aux Romains, Franks et Lombards.
Un autre puissant roi ^*jJI *^*XJU Dir se retrouve facilement. Dir
vareg, de la suite des Rouss, s'installa à Kiiov vers 8G6, comme libéra-
teur de cette cité du joug des khozars. II se fit connaître à Constanti-
nople, et s'était baptisé; par le commerce il était non moins connu chez
les Arabes. Le rouss Oleg, en 882, Tavait assassiné par trahison et régna
à Kiiov, (jusqu'à 912), ensuite Igor (945) et Sviatoslav (972). Les Arabes,
suivant leurs habitudes , qualifiaient de Dir, ceux qui succédaient et
régnaient à Kiiov. Si le nom de Kiiov ou de Rouss ne l'accompagne
point : c'est que nous ne possédons que de très-faibles fractions de la
narration de Massoudi , qui n'a pas ignoré l'existence des Rouss.
De Guignes assure que Massoudi fit encore (dans le chap. 29), men-
tion d'un pays slave qu'il appelle Noukbard ou Noukirad , Noukard oit
Noukorod (p. 6, et 27) (Novogorod), dont la capitale était Arnkis qui esfl
traversée par un très-grand fleuve Dgiaïnan. Ce passage a échappé s
l'attention D'Ohsson, ou plutôt négligé, il n'en fait aucune mention (ss^
Tous les Sklabes , au rapport des personnes les mieux instruites dk
leur origine, descendent de ^j!-^ Mari, fils de Japhet (probable
ment ^^U Madaï de la genèse, X, 2), et c'est à lui qu'ils fo^
eux-mêmes remonter leur généalogie. — Cette assertion est o^ v
(38) Le lavant Frahn , relatant ce passage (Ibn Foszian , p. 47), regrette : ich bedaare, das» A "^ *
Domina propria, oicht mit arabischcr Scbrift ani^godriickt sind : viclieicht licssco sie i>ich ^.s»
ausmittcln.
SLAVU, tô. 51
trariëe par les relations des autres arabes :Takout, en 1415, savait que
âeklab descendait de Sabthi, fils de Kassoukhim, fils de Tounan, fils
<le Japhet, qu'ils forment plusieurs tribus qui se font la guerre et
^|u'ils sont chrétiens iacobites, d'autres nestofietis, quelques-uns n*ont
aucune religion, d'autres adorent le fei^VII, 5)^ Le géographe
^[azriniy mort 1256, se rapporte à l'opinion d'Ibn el Kouli^ et assure
^ue Roum, Seklab, Ermen (Germain), et Frendj, étaient les quatre
:tfils de Litta , fils de Kelouchim , qui était fils de Jafet. Schems eddin
^imeschki, en 1586, reprend cette descendance, rectifiant que Litta fut
:Als de Jounan (Javan) , qui était le fils de Jafet : mais il rappelle en
:méme temps que les autres firent descendre les Sklabes de Madaî
:£ls de Japhet. Si les Slaves croyaient eux-mêmes descendre de Mari
-4DU Madaî, ce sont les Slaves chrétiens, baptisés, auxquels on a lu la
:^enèse de l'ancien testament. La descendance de Mari n'a d'autre
valeur, que la qualification de DadaQ.ou Khanaan qu'on leur donnait.
Il est probable cependant que Mari trouva une position géographique
'^ians la table de l'astronome Ibn lounis , qui lui assigna 59° W de
longitude et 59<» 56' de latitude.
Les Rouss et Sklabs sont divisés en beaucoup de nations qui ont
chacune leur roi et qui se font souvent la guerre. La principale
nation se nomme UUJj Velinaua; on peut la considérer comme
la souche des Sklabs. Jadis elle les dominait tous, et son roi nommé
OJJkL» Madjek (chez De Guignes Mahak), recevait l'hommage des
autres princes sklabes : mais la désunion survint et afTaibllt la puissance
de CCS peuples en leur donnant à chacun un souverain particulier.
Massoudi y ajoute, que c'est un sujet trop long pour être entamé,
qu'il l'a traité avec étendue dans ses autres ouvrages (Massoudi,
roouroudj. chap. 52). Or, il se dit être instruit sur ce qui s'était
passé en Slavonie, et il en a raconté beaucoup de circonstances.
Voici un fait d'une haute importance pour l'histoire slave et
probablement non moins pour l'histoire de leurs voisins. Cependant
Madjek et Velinanas échappent à toutes les conjectures de nos con-
naissances actuelles. La nation prédominante Yelinana, serait sans
fondement relatée aux Volynicns ou à quelque peuplade de nom
analogue, car aucune n'a jamais pris , aut;^nt qu'elles sont connues,
tant d'ascendant.
Les conjectures basées sur les événement connus dans l'histoire,
ne laissent pas mieux établir l'époque de la domination de Madjek.
L'histoire ofl're deux puissances qui s'étaient formées momentanément
dans la Slavonie. Celle des Moraves sous Sviatopolk (mort en 89/4),
dissoute par les disçentions de ses successeurs; l'autre plus ancienne
52 SLA VI A , 19.
SOUS le chef Samo (mort en 658). Celle des Moraves ne convient pas à
b relation de Massoudi, parce qn*il a nommé lui-même les Moraves
particatièrement, sans rappeler leur puissance momentanée. Celle
de Samo aurait plus de cbances à satisfaire la relation de Massoudr.
Elle durait 35 ans, plus ^gtemps que Taulre, et Samo était qualité
roi ou chef des Vinules, et ce nom est analogue à Velinana. En tortv-
rant un peu Tappellation arabe de Madjek au moyen des habitudes
^aves , on parvient à y retrouver le nom de Samo entier. L^habitude
slave rendait les noms des chefs en forme de diminutif : BdkOi
Prjemko, Leschek, Ylodek, Vanko ou Vatzek, Mieschko ou Mieschek,
ainsi Samko ou Samek, et Tarabe, par la transposition , en a M
Madjek. Probabilité très-douieuse. Massoudi se serait-il préoccupé des
temps aussi reculés?
L'intérieur de la Slavonie , laboratoire qui déversait tant de peuples,
ne cessait point de s*agiter. Depuis la retraite des Doulèbes, Chrobates^
Serbes, il a dû s'y opérer immanquablement de grandes transformations. •
Les traditions populaires nourrirent des réminiscences d'un empire
slave (Matth. chron. pol. lib. I), dont Texistence réelle sous un Madjek
a pu être connue aux arabes, qu'ignore Thisloire écrite en Europe.
L'activité commerciale des Loudzana et l'établissement des Yolyniens
seraient des conséquences de grandes commotions. Quelques légendes
défigurant l'histoire postérieure, font croire que la qualification de ^
Mesko, Mieschek» Madjek, est générique de chef d'état, antérieure anx .sa
Mieschek, Mietziszislav de Pologne. Blueties sorties des ténèbres quip
s'évanouissent aux regards attentifs. Il est à regretter que la narrations
de Massoudi, de la dissidence qui affaiblit la puissance slave, est perdi
ou reste ignorée : elle donnerait certainement une lumière sur Tel
de la Slavonie de cette époque, ferait au moins connaître l'opinion
Arabes au sujet de cette dissention.
Nous avons moins à regretter ce que Massoudi relatait dans i
autres ouvrages sur un philosophe qui vivait anciennement (Zam<
ou Dikenes) parmi les Sklabes et qui par ses artifices et ses adroL^mes
impostures, avait su captiver les cœurs et gouverner les esprits de
tous ces peuples, auquel enfin on attribue la construction d'un tenyle
et de l'idole resplendissante de pierreries précieuses. Massoudi dc^noe
la description de trois de ces magnifiques temples (Arkon , Retra...)
(moroudjc, chap. 62) La relation entachée de la fantaisie orientale,
nous éloignerait trop de notre but géographique.
SLATIA, 19. 53
Lerhites.
19. Malaise, inquiétude morale, appât de «gain, espérance d*uue
aeilleure situation, prédisposent les populations, sonl-elies pasteurs
«agricoles, à devenir plus mobiles, à s<^éplacer, dépayser. Très
nuvent cependant les calamités et les grandes catastrophes d*infor-
me» décident à s'expatrier. Toutes ces causes agirent sur la race
lave, quand elle se dispersait dans toutes les directions jusqu'au Rhin,
i8qa*aux dernières extrémités de la Grèce, s'aventurant par TAsie
lineure. Le grand débordement, grandissant et déclinant, s'était
Dcooipli dans le courant d'un siècle (550-650), mais la mobilité
clraordinaire ne cessait de remuer les peuples par l'instabilité de for-
me et les vicissitudes qui forçaient à l'émigration, qui occasionnaient
e transplantations à la suite des guerres; cette mutabilité de situation
s prolongait plusieurs siècles, jusqu'au x" et xi". L'immense perturba-
on fatiguait les vastes espaces inégalement. Dans certaines parties
lus avancées dans le monde étranger, l'élément slave allait s'assoupir
t 8*éteindre; ailleurs il se manifestait dans toute sa vigueur, et
arloiit il était destiné à des réformes variées, à la suite de climat,
e changement dans l'existence, de la fusion des idées, de la civiJisa-
on avancée : parce qu'ils étaient barbares ces Slaves , ils allaient se
iiiliser. Partout changeait la condition de l'hojnine, et l'ordre social se
rouva en souffrance pour prendre des directions très- variées.
Lies Slaves dans leur patrie, au delà du Danube, étaient libres. Les
risonniers de guerre chez eux (braniec, brance) n'étaient pas esclaves,
la pouvaient se racheter ou naturaliser. Les captifs ou les populations
nievées et enmenées par les excursions (jeniec , jeàce) , trouvaient de
ùile rétablissement civique (culture de terre) et la naturalisation.
>ans leur régime populaire , les Slaves , tous égaux , discutaient les
tflàires prospères ou adverses, agissaient ensuite sans égard à la
léeisioQ arrêtée. Sobres^ de mœurs rigides, ils ne prétendaient ni
richesses, ni bonne chère, labourant les terres pour se suffire;
!siuflorants dans les fatigues, ils aimaient le repos; pour leur sécurité ils
dioislssaîent des gîtes moins accessibles. Adorant le Dieu unique,
3aréateur et tout-puissant, sacriiiaient, tiraient des augures, vénéraient
es rivières et quelques esprits (Procop. de belle goth. III, 14; Mauricii
tmteg. XI, 5; Leonis tactica, XVIII, iOO-107).
Cet état de leur société , conséquence de leur croyance et de leur
ulte, s'était perpétué de siècle en siècle, inquiété par d'autres, sans
i^uiéter les autres. L'étranger en passant secouait l'intérieur, et l'élé-
euLt vital de la race reprenait sa vigueur. On peut, je pense, présumer,
54 SLATIA, «0.
que rage de grandes commotions, Ta trouvé tel quMl était dès son
origine : peu modifié. L'histoire fournit par intervalle , par-ci par-là
Tapparition de Tautorité d'un pontife, d'un chef , d'une puissance»
l'apparence enfin de préUjation dynastique, et de suite tout retombe
dans la dissolution popuiSre, insaisissable pour l'unité de l'action,
pour la vue éblpuie par les mirages historiques; dissolution qui ne
se laisse refaire qu'après d'immenses agitations et par une opération
de six siècles (550-1105).
Le baptême (867-88C) disposa les peuples dispersés par la Grèce, de
renoncer à leur habitude et de se conformer à la soumission des Grecs
(Leonis tactica, iOi). Après la chute de la puissance de la Boulgarie,
gonflée par l'établissement forcée de tant de captifs, les Slaves baptisés
allaient paisiblement (1016) peupler la Grèce sous le nom de Boulgares,
étendre le nom de la grande Boulgarie jusqu'au défilé de Tbermopyles
(Benj. de Tudèle chap. 4); dociles, dressés à toutes les éventualités, à
effacer leur nationalité. Les seuls Kroatcs et Serbes conservaient la
vitalité de la race. La prise en possession de villes maritimes, les rela-
tions avec l'Italie et l'empire, n'affaiblirent leur génie, décidant cepen-^
dant de nombreuses modifications. Les Kroates mieux établis, accep-
tèrent (1091) le régime dynastique de la Hongrie, conservant leur
existence à part. Chez les Serbes, ceux qui parvenaient à la position de
vlastelin (possesseur de domaines), agitaient la nation par leurs dissent-
tiens, le peuple ne perdait pas encore autant qu'ailleurs.
Le baptême a pu sauver Tâme des convertis : mais que dire du sort
terrestre! En Allemagne, en Kariniie, Frankonie, Saxe et chez les
Sorabes et Vinules, les Allemands répétaient encore : liberi, ncut
Sclavi soient esse (dipi. 1116, 1136, ap. Ludevig, script bamb.), mais les
populations laborieuses des slaves passaient graduellement en Leibei-
gene. Un sort plus dur, plus sauvage attendait encore ceux qui défen-
daient leurs autels et leur indépendance. — Chez les Bohèmes, la civi-
lisation matérielle faisant ses progrès, augmentant les richesses et les.
distinctions, inventa la prise de corps et la vente des débiteurs insol-
vables au profit des créanciers (vita s. Adalb. per. Job. canap. 12, per
Brun. 11); on vendait les captifs (Cosm. prag...). Un trafic, contraire
aux principes slaves, souilla momentanément les Pomoraniens mêmes
(Helm. II, 5). Ce sont les symptômes qui touchaient isolément les
individus ou aggravaient la situation trop spéciale : mais le progrès du
temps découvre par toute la Slavonie l'état du peuple dégradé 4'une
manière effrayante.
20. Lorsque les Kroates s'étaient divisé en deux états, ils soutenaient
SLAYIÂ, SO. 6&
leur amitié par des missives réciproques Const porphyr. <)e aduu
împ. 50). A partir des Slaves qui bâtirent Novogorod, des deux côtés du
Dniepr habitaient iesPolotschans, aux environs de Polota et de Polotzk
qu'ils bâtirent ; les Krivitsches , KpiZii-raivou dont la ville s'appelait
Smolensk, Mam^xa; les Pregoviisches , /JbvyougtToe, qui habitaient,
entre Dvina et Pripet;.les Radimitsches et Yiatitsches; ensuite les.
Derevlans, AepêAevtvot, dont la ville était Iskorost; les Loutzans
AsvÇavevoc de la viUc Loutzk , Aovrça ; les Yolynans oùXrevQt; les Polanes,
Polaniens, qui bâtirent Kiiov, KtoaSa ; les Sieviers et i^ep^tot ; les Ulit-
sches et Tivertzes , Te&ipèiayoi (Tyrigèlcs) qui occupaient les rivages du
Dniestr (Tyras, Tourla) et les autres Slaves ; tous ces slaves vivaient
en paix (ziviachu w mirie, 7caxTtâiTa(, Const. porphyrog. de adm..
imp. 9, 57; Nestor, po spisku Lavrentia p. 5, 7). Leurs villes grandirent
par le commerce : Novogorod, S.nolensk, Loutzk, Kiiov, Tschernigov,
Tçeptyûya, Vyschogrod, Bova&ypaSi, et vivaient en paix. Le régime po-
pulaire , rintérct commun animaient leur fraternité. 11 faudrait croire
qu'aux environs de la Ylstule jusqu'aux Pomorans, les peuples avec
leur régime populaire, nourrisaicnt les dispositions pacifiques; que
dans la grande Chrobatic , la délimitation d'idiomes variés s'accomplit
en paix. En effet, ni l'histoire, ni tradition quelconque ne mentionnent
de dissentions continues de peuple à peuple. Les populations s'alliaient,
se fédéraient contre leur ennemi, se séparaient et se divisaient eu paix,
sauf quelques exceptions extraordinaires. Ce n'est que par l'ambition ou
l'animosité des chefs, lorsque le pouvoir restait concentré dans un
chef , que se déclarait l'esprit de dissention, d'invasion, de dominar
tion. De cette façon un peuple se vit momentanément soumi à un chef,
voisin : mais nous ne pouvons pas inventer de conquêtes d'un peuple
par un peuple : pour en avoir des exemples, il fallait changer l'esprit
et la croyance par la civilisation.
Charlemagne transplantait les populations, les rois Boulgars l'imi-
taient; Boleslav, le grand roi de Pologne, Brjetislav duc de Bohême,
colonisaient les captifs. Ces événements dépaysaient les populations,
sans changer leur condition sociale, au moins d'après l'ancien principe,
ne fesaient que déplacer leur civisme. La fortune favorisait les positions-
civiques des individus. Quand nous voyons les Serbes émigrer, nous
pouvons être sûr que c'étaient les vlastelins, proceres, d'une position
plus éminente ; le peuple , vulgus , fut plus exposé à être dépaysé. On
peut dire qu'au sein de chaque peuple la fortune créait une classe plus
éminente, ouverte, accessible à chacun; le peuple n'enviait pas la jouis-
sance de faveurs civiques qui lui étaient moins accessibles , il se con-
tentait de la participation commune dans toutes les affaires publiques,
S6 slàtu, si.
les chef$ agitaient également les deux classes; on ne saurait remarquer
distinctement de collisions intérieures entre les classes civiques, si elles
ne se seraient dessinées dans les réminiscences des fastes visUilans.
21 Les traditions répètent; les événements connus qui se déroulent
en dernier lieu, et la posi^lp postérieure préparée par la marche sécu-
laire, confirment que la condition civique s*était divisée en deux classes,
que les populations étaient agitées plutôt par la prépondérance de Tune
d'elles que par Tascendant de quelque individu. Lutte civique, qui se
prolongea de génération en génération sans déranger Tétat social. Le
peuple, kmet, kmiecie, vulgus, tenait à la possession de petites por-
tions indivisibles qui dépendaient du domaine , gardait Tégalité de ooo-
dition. La classe plus avantureuse des lekhs, lech, lechites, s'emparait
de possessions spacieuses, de domaines, de terres divisibles , qu'elle
qualifiait de libres, vola. Plus d'une fois, diu agitati, non sine predio H
perieulo, les deux classes marchaient ordinairement d'accord, eolti«
vaient et administraient leur patrie en bonne harmonie. Il notait pas
sans exemple que Vadminisiratio reiptiblicœ humililnu et incertU eeuU
personis, nuUa prarsus vel vidgi vel prœerum luggiliante intfidia. On
avait des exemples qu\in originarius, fils d'un captif ou d'un prisonnier
de guerre s'élevait aux plus hautes dignités. Plus souvent la république
restait rege orbata , sine rege claudicans. Le peuple prenant l'ascendant
établissait son souverain conseil, kmet, kmiet, et disposait de la
république, l^es lekhs aimaient mieux avoir on chef, un Leschek, et de
principes sueeedaneos t SOU& lesquels brillait maintes fois, immemitat
imperii (39). La fortune balançant le succès : les séditions éclataient de
part et d'autre et c'était probablement à la suite de ces commotions
que se déclarait la scission des tribus lechites sous la conduite de
Radim et Yiatko,qui s'assirent sur Soj et Oka; qu'un Lekh conduisit,
les Chrobates en Bohème.
ââ. Le sort du peuple des Yiatisches et Radimitsches n*était
avantageux. Exposés aux invasions, ils participaient très-faibiement
trafic et partageaient la destinée des voisins. L'activité slave s'était
centrée dans de grandes villes marchandes où grandirent les
et l'opulence. Là discutait l'esprit populaire, exténuant la vitalité d
campagnes épuisées par les courses des chefs rousses, de knez,
dants de Rourik, de boiars. L'élément byzantin s'associant à celui
fS9) remprante kt exprenioDt de IfaUbée aux armes de cboleva éTéqve de Knkovie, 44
tevï 4ea biftorieu qui , dans yabiiarre narration, donne la clef à expliquer; œqui eit
vert 1 180 par l*lUstofiea Câlins.
SLAVIÀ» 93* 57
Taregs, couvrit de son linceuil Forganisation yivanie. La législation
iTempressa de distinguer les hommes libres, svobodniie, des asservis.
Bieotôt les apanages décliirent tou^ ces Slaves qui reçurent le nom de
Rosses et de Russie, le souffle byzantin glace le génie slave, la trame du
peuple se pelotonne sur un triste avenir, -i
23. En attendant, sur les plaines de la Yistule, la prépondérance des
i^khs se déclarait à tel point , qu*on y distinguait quatre peuples par
lenrs noms. Les Mazoviens, Mazovscbanie ; Luticzi, Lucie (Gall. II, 58),
Licicaviki ou Licicaniki (ap. )Yitik. III, 66), L^czicanie; Polanie,
[Bolaoi, Pulani), et Pomoranie; tous les quatre se sont appelés
Liekhites (siedosza na Yiéiie i prozwaszasia Liachowè, Nestor, po
larv. spisku p. 3). —- Mais les lekhs s'agitaient dans la Ghrobatie
orientale en s'emparant de ses villes (Premisl , Tscherviensk , Gzer-
viensky Russie rouge); ils étaient sans doute assez puissants dans toute
La Chrobatie, d*où ils conduisirent les Ghrovates en Bohême, et ils
i^^rent dans une émînente position chez les Tschekhs. Ils ne préten-
daient point asservir le peuple , cette conception ne s'insinuait point
il lenrs idées qu'à la suite de la civilisation qui dardait ses rayons de
ft*occident. Il semble qu'en Bohème ils réussirent à scinder la classe
lunetone, d'en former les kmetons supérieurs, qui firent cause com-
vrane, et le peuple passa dans une condition analogue à celle du peuple
ma Allemagne.
Dans les peuples lekhites et chez les Ghrobates les affaires n'allaient
pas du même train. Il semble que les lekhites réussirent d'établir et
^e prolonger le régime d'une dynastie sur les Polaniens et leurs
associés Kouiaviens : de Leschek et Popiel (750-860). La tradition
^trlt cette dynastie de nom de popel, cendre, elle qualifia de ce nom
les autres princes de cette époque (Vischevit ou Yislav de Yislitza est
un de popels) , elle répétait : sub cinere mdxima viget viHus scintilla-
TMf» et savait qu'une révolte renversa le régime cendreux , élevant au
trftne un kmeton polanien (rusticus, agricola) Ziemovit fils de Piast,
dont la postérité régna, modérant rintérét et la condition des deux
elasses, soutenue par les lekhs. Ils cherchaient d'étendre la domination,
ei tes laits d'armes consolidaient le droit dynastique des Piasts. Les
Lentschitzaniens et les Maxoviens s'unirent plus facilement, mais les
Pomorans, chez lesquels l'élément populaire avait le dessus, se sépa-
raient de l'union plus d'une fois.
Rien ne fait présumer qu'il y ait eu quelque collision de la domination
des Piasts avec la Moravie, à laquelle Yislitza depuis 894, et la
Chrobatîe paraissent appartenir. Au moins est-il certain , qu*après la
58 SLAVU, ts.
chute de la Morayie, 898, la grande Chrobatic , exposée aux incursions
des Pietschings, des Madiars et des Allemands , se soumit à Otton le
grand (Const. porph. de adm. inip. 50, 51). Methodius y fesait son
apostolat, les chrétiens de Moravie s*y retiraient après sa chute»
Krakov était le chef-Ueii^e cette Ghrobatie. Lorsque révéché de
Praga fut fondé en 966, tout ce qui se trouvait dans la dépendance
d^Otton ou de la Ghrobatie devait composer le diocèse. On comptait à
lui la Ghrobatie jusqu'au fleuve Stir et le pays uUramontain jusqu*au
Danube, o(i la province Vag paraît aussi s'appeller Ruhia, en com-
mémoration des Rougs, dont les débris se laissaient distinguer un
certain temps dans celle partie de la grande Moravie (4o).
Meschko, Mietschislav , roi des lekhiles, cuius poteslalis erant Slatti
qui dicunlur Licicaviki (Wilik. III , 66) , réguant sur les trois peuples
lechiles, par ses possessions à Toccident, au delà de Bober, rencontra
les Allemands, qui s'étaient emparés de Luzices. Vaincu, 965, lui-même
se soumit à Tempire : imperatori fidelis, tribulum usque in Vurkê
fluvium solvens (Ditm. II, 19). Il se fit baptiser et par la qualité de
marchionis, comitis, ducis, raffermit sa domination. Après sa mort, 992,
Boleslav, ne voulant pas sotillrir les prétentions aux apanages :
noverca et fralribus expulsis, excecalisque familiaribus suis Odilieno
atque Pribuvoio, vulpina callidilale, regnum treuil in unum (Ditm.
IV, 57) (41). Par ces temps là Boleslav II duc de Bohème, se félicitait
(40) La l^islatioa bavaroise des années 876-880 et 906, dit : Sclavi qni de Rugis vel de Bohemanis
mercandi causa excunt, etc. (Ant. Fel. Ocrdii, monum, boica 28, II, 103; Âventini, annal, bojor. lY»
p. 288; Goldasti, rer. bioc. script, p. 698, 718). — Termini autcm cjus (scdis pracgcnsis) occidentem
versus hi sunt : Lugast quao tendit ad médium flnminis Chub (Egcr), Zelza et Liuscna , et Dasena,
Liutomerici, Lemuui, usque ad mcdiam sjlvam qua Boemia timitatur. Diende ad aquilonem hi silDt
termini : Psowane, Chrowali, et altéra Chrowati , Zlasane, Trcbowane, Boboranc, Dedosese, luqoo
ad mediam sylvam qua Milciaoorum ocurrunt termini. Inde ad orientem hos fluvios babcl termines :
Buo (Bug) scilicet et Ztir, cum Krakova ciuitate, provinciaque cui Wag nomen est, cum omaibos
regionibus ad prxdictam urbem pertiueutibus quai KrakoYa est. Inde Ungarorum limilibus addilis
usque ad montes quibus nomen est Tritri, dilatata proccdit. Deinede in ca parte quae meridiem
respicit, addita rcgione Moravia usque ad flumcn cui nomen est Wag, et ad mcdiam sylvam cui
nomen est Mure, et eiusdem montis eadem parochia tendit qua B^waria limitatur (ap. Cbsm. prag... •
ap.Lunig teutsche Reichs arch. contin I, p. 230). Le diplôme est fabriqué entre 1037 et i082(Otbkv
vita s. Wolfkangi eppi ratisp. 29) confirmé en 1086.
(41) Un de familiaribus , Dagon , s'est retiré avec la reine noverca Oda et ses fils, à Rome , o& ils
firent cession de leur état à S. Pierre. Cette cession indique les limites de la domination de père
Mieczislav : Dagon index et Ote senatrix, et filii eorum Misca et Lampcrtus (devenu moins), (legna-
tur) sancto Petro contulisse unam civitatem Scbincsghe (Gnezno), cum omnibus suis pertinentiis
intra hos affines : sicut incipit a primo latcre, Longum mare (Pomorauia), fine Pruzza, nsque in loeotti
qui dicitur Russe; et fines Russe extcndcntc usque in Cracoa, et usque ad flumen Odere recte in
locum Alcmure (sylva Mure); et ab ipsa Alemura, usque in tcrram Milzx; et fine Milzao, recte in terra
Odere usque in praedictam ciuilatem Schinesghe (donatio Joh. XV, anno circit. 098. ap. Muratorî
antiq. IUlue medii a}ri, t. V, p. 831; confcr. Ditm. IV«28). — Milzieni, Pomorani «Prusei , Rasai»
KrakoT ou fihrobatia sont exclus, sont limitrophes.
SLAYIA, 33. 59
C|a*fl a pu occuper Krakov et rétablir les limites du diocèse jusqu'au
Stir : mais à peine a-t-il fermé ses paupières , 999, Boleslav le grand
^^empara de Krakov, de toute la Ghrobatie, de la Moravie et de can-
tons de Silésie (4a). Il accepta dan$ son alliance et sous sa domination
les Pomoraniens (Gallus I, 6; Math. II, i5;j^$guph. inter script, siles.
sommersb. II, p. 25) confœderatus cum OUone, omnem Slaviam guae est
ÈjUtra Odoram tribulis subiecit (Helmold, I, 15); pax conlinua fuit,
car tout à Touest de TOdcr était cédé à Otton, et paciûé par la
coopération de Boleslav; les Lutixi furent la pari de Fempereur (Bruno,
^ta S. Adalb. 26).
Au mois de mars de Tannée iOOÛ, Otton III visita en souverain le
corps de Tapôtre Adalbert à Gnezpe, organisa la hiérarchie épiscopale
dans les états de Boleslav, la Ghrobatie allait désormais former un
diocèce à part (Ditm. lY, 28). Emerveillé du faste de la cour et de la
cordialité de Boleslav, il déclara qu'il serait indigne de qualifier de duc
^n monarque aussi grand, et pendant un festin, accipiens impériale
^iadema càpilis sui, capili Boleslavi in amiciciœ fœdus imposuit,
:reconnut sa royauté et se désista de sa souveraineté (Gallus, 1,6;
lilatth. II, il; Ditm. Y, 6; etc). Après sa mort 1002, une longue
guerre s'était engagée avec TAlIemagne. Boleslav ayant ses adhérents
en Bohême, s'était emparé momentanément de ce pays; par le traité de
Boudischin, 1018, il acquit les Milziens, les Louzices, les Loubousches
au delà de TOder (Ditm. lY, 2i, YI, 48, YII, 56; annal. Saxo, p. 460).
Il visita kiiov où il avait aussi ses adhérents : mais il se contenta du
butin et de la soumission tributaire (Ditm. YIII, 16; annal, quedl.
s. a. 1019; Nestor, t. I. p. 125; Gallus, I, 7). A la fin, il se fit solen-
nellement couronner de sa propre autorité en 1025, et bientôt sur le
lit de mort, il présageait les séditions et les grandes commotions.
24. Boleslav le grand désigna pour successeur son fils Meschko,
Mieczislav II, né d'une simple slavone, et à Otto-Bezbraîm', son
premier né d'une princesse de Hongrie, il destina la Ruhie Yag comme
apanage, in Ruhhiam (Russiam) provinciam pepulil (Wippo, édit. 1751,
Pistorii, t. III, p. 470, 477). L'usurpation momentanée d'Otton-
Bezbraîm, qui périt 1052; le retour de Mieczislav II, à condition des
(42) Une l^ende du xiu* siècle détermine les limites des conquêtes du sud, ou de la province Vag
Roubia : termini Polonorum ad littus Danubii, ad ciuitatem Strigouiensem terminabantur ; deia
QMigriensem (in Agriensem] ciuitatem ibaut ; dcin in fluuium qui Cepla nun cupatur, usquc ad
castmm Galis (Ualitsch), ibique inter Ungaros, Ruthenos et Polonos fincm dabant (chron. polon.
nixta vngar. vita S. Steph. 7, mspti p. 354). A partir d'Agria, Erlau, elles toucbaient, Teisse, Cissa,
01 longeaient en montant les rivières Bodrog et TopUa, Cepla, jusqu'à sa souroe ot les montagoos.
60 SLAYU, S4.
apanages à son frère cousin Théodoric qui périt 1055, et à son neveu
Roman, fils d*Otion-Bezbralm , qui rentra dans la possession de Ruhie
Yag (pour la transmettre aux Hongrois : Emericus dux Ruizorum) ; le
divorce de la reine Rixa , n*étaient que les préludes de la conflagraiioii
(Gallus 1, 1, 8; annal. hild|sh. s. a. 1028, 1050,1051, Wippo vita Heor.
salici, p. 470; monach. B^unwiller. vita Ezonis 5; Boguf. ap Som-
mersb. t. II , p. 26; etc) (43).
tjlinam ignem sedilionU accendenles deum et honUnem vereaniur
(Gallus, I, 16) : mais ils n'auraient pu Penflammer, s*il n'y avait
pas de causes, et ces causes irritaient trop longtemps le civisme popu-
laire et national. La reine Rixa allemande, qui gouvernait (1054-1036)
s'enfuit; le jeune Kazimir se retira. Sedicionantur cives (kmeions),
diisipatione dissipatur terra (Matth. Il, 15); advenus episcopos ei
sacerdotes dei, sedicionem inceperunt, eorumque , quosdam gladio,
quasi dignius , peremerunt, quosdam vero, quasi m&rte dignos viUorip.
lapidibus obruerunt; christianitas bene inchoata et roborata^ flebUUer
disperiit (Gallus, 1, 19; annal, hildesh. s. a. 1054). Ensuite, conirm
nobiles (lechitas) , liberali (kmetones) , se ipsos in dominiutn extuleruni,
aliis in servitio versa vice detentis, aliis peremptis (Gallus, I, 19)*
L'invasion bohème aggrava le malheur; elle commit d'effroyables
destructions; la province, surtout des Polaniens, changea en désert
sans habitants; ailleurs on s'organisait en désordre , vindicariœ poUêie^
tes, principes abortivi. La Mazovic seule constitua une unité sous le
chef de son dignitaire Maslav, homme du peuple, sordido famtUUii
génère, avo originario; elle offrit un refuge au peuple. Après plusieurs
années reparut Kazimir pacificateur , non sine proelio. L'accommode-
ment civique fut terminé par une sanglante victoire 1042, et la chute
de Maslav secouru par les Pomoraniens (Gallus, I, 20; Matth. II, 15)«
L'accommodement n'était point à la pleine satisfaction du peuple.
Boleslav II le hardi, tout jeune encore, releva la renommée et la
puissance de ses états. Il réglait les affaires de la Hongrie (44), de la
Russie , sans négliger l'intérieur de ses états où fermentait une noui^
velle explosion. Le peuple ne pensait plus à son antique croyance, il
voulait reconquérir son droit , antiquum mos , sous la sauve-garde de
l'évangile et de son baptême. La nouvelle doctrine et la nouvelle
(•43) Ce que je dis de Vag Ruliia je le dois à l'heureuse explication d'Auguste Bielovski dans goo
ojavrage : introduction critique : vrstçp kriticzny do dzieiow PoUkicb, Lwbw, 1851; ouvrage plein de
justes et ingénieuses observations.
(44) L'apologiste de Boleslav, déversant sa haine contre les lekbites , s'écrie : et licet csset tacen>
dnm, taaen, ne Veritas gestorum obnubilaretur Magaroncs , hoc est Ungari , totam suam potentiam,
• Polonis^habebant et extrahebant et roborc eorum scmper pugnarunt (legenda scti Stepb. iHib fine).
SLA VI A, U. 61
lîdcîpliiie ne cessaient de le contrarier et de rhuroilier » elle soulevait
iains le mariage impedimentum eonditionis : le peuple apprit qu*il
peut être considéré comme esclave. Il conspira et se souleva , s*empa-
*^iit de places munies, il se fortifia : faetio servorum in dominos con--
tpirata, firmant municipia^ dominos^ nopjolum arcenl reversuro$
;e Russia) , sed et rêver sis bellum infligunt, £es insurgés épousaient les
Qlles lekhites qui donnaient volontières leur consentement : filias
iominorum ad sua vota inflectunt, quœ uUro consenserunt (Matth. II,
17, 19). Vladislav Herman, firère du roi, prit alors en mariage une
Bile de peuple (ancillam), une kmetone qui lui mit au monde le
premier né Zbigniev. Boleslav le hardi accourut de son expédition et
prenant le parti du peuple, répétant : plèbe remota quid rex eril! in
9UOS bellum ab hostibus iransiulit (Matth. II, 19). Il sévit contre quel-
qiies-«ns des seigneurs : convocato totius regni concilio, prœcipuos et
ts%aiores capitis abscissione damnauit (vita seti Stanislai ,15): mais il
ii*a pu arrêter les excès , quand le peuplé en colère déshonorait les
fiens conjugales des lekhites, quanJ populus vix expugnatus, fut
exposé à la vengeance , pro singulari tem£ritate , singularibus perdidere
^suppliciis (Matth. II, 19). Boleslav voyant que le peuple, vix expu--
^[nalus , ne pouvait plus résister , cum nullus rusticorum fugilioo
i^iediret, patribus invisus (1079), Vngariam secedit (Gallus, I, â9;
Matth. II, 19).
Malgré la victoire et le châtiment particulièrement infligé, Tagita-
tion continuait longtemps, énervant lentement la vitalité populaire.
¥ladislav H^rman, élevé au trône de son frère par les lekhites, a dû
répudier sa femme et renier son premier né. Mesko fils de Boleslav ,
rappelé, périt empoisonné (1089). Toia Polonia lugebat (eum), sicut
mater uniH mortui filii : rustici, pastores, artifices, operatores, pueri
et puellœ, servi et ancillœ. (Gai. I, 29). Reparut cependant sur la scène
politique (1095), le bien aimé Zhigniev: le tout puissant palatin
Sieciekh, ignobiles nobilibus prœponebat (Gai. II, 4, 16). LUndolant
Vladislav Herman et le misérable Zbigniev témoignaient une singu-
lière prédilection pour la Mazovie et la Kouiavie qui donnaient tant de
ibrce à Maslav. Une sombre agitation préparait un triste dénouement.
lia puissante cité Krouschvitza (109G) succomba presque rasée; les
postes avancées des Pomoraniens , chez lesquels la question populaire
^ concentrait en dernier lieu , cédaient et les plus formidables posi-
tons maritimes (1105-1121) tombaient dans les mains des lekhites.
25. Les Pomoraniens, comptés au nombre des peuples lekhites,
>îen que de la même nationalité que leurs frères Polaniens, formaient
65K SLÀTIA, 95.
«ne spécialité à part, autant par leur situation, que par la direetion
qu*ayait prise chez eux la marche de la civilisation et des relations
extérieures. Éloignés de la sanglante propagande du christianisme,
séparés de la Pologne par d'immenses forêts vierges, à peine étaient-
ils liés par quelques pactes convenus qui les obligeaient de payer oo
subside , d^'assister à quelles expéditions et de la part de la Pologne ,
on ne sait pas s'ils eurent de secours obligés.
Par leur position maritime , ils se trouvaient cependant exposés aux
irruptions étrangères. Le danois Harald blaatand, secondé par le
suédois Stirbiorn, vers 980, prirent une position forte dans une île de
l'embouchure d'Oder. Ils l'appellèrent Hymsburg, Jomsburg (Jomswi*
kinga saga, 25; knyllinga, 1 ; Svain Aagesen, ap. Langebêk, I, p. 51 ;
Saxo, X, p. 182), position très-commode pour la piraterie et pour les
expéditions maritimes des wikings. L'organisation que lui a donné
(vers 988), Palnaioke (mort vers 990), n'était pas de longue durée :
sous son successeur Siguald , la force des wikings fut brisée. Jomsburg
rentra sous l'autorité directe de Danemark. Knout le grand l'a confié
(en 1050) à son fils Sven, qui l'abandonna allant (1054) en Norvège,
(Knout mourut 1056). Les Pomoraniens recouvrant cette possession en
firent une grande et commerçante ville Iulin ou Wolin. Si les danois
depuis Magnus (mort 1048), jusqu'à Nicolas (1107), cherchaient à
regagner leur station, ce -n'est pas qu'ils se seraient emparés de la
cité, mais qu'ils reprenaient une position qui pouvait inquiéter les
Pomorans (45).
Quand Otto III, dans l'année 1000, érigeait un évcché, m partibus
infidclium, à Kolberg, c^était un acte diplomatique, par lequel il
reconnut la souveraineté de Boleslav sur ce pays. En elDfet, l'autorité
de Boleslav et des rois de Pologne n'était point désavouée par les
Pomorans : mais ils restaient fidèles à leur cuite national et à leurs
institutions. Dans leurs sanctuaires restaient debout les idoles ,
sculptoria arle incrcdibili pulchritudine cœlala (vila Ottonis bamb...).
Dans la cité Iulin flamboyait olla Vulcani (znitsch); est sane maxima
omnium quas Europa claudit ciuilalum; urbs mercibus omnium septen-
trionalium nalionum locuples ; quam incolunl Slavi cum aliis gentibus
grœcis (de Novogrod) , et barbaris (Nordmannis , Estonibus , Prussis) ,
nam advenœ Saxones parem cohabilandi legem acceperunt, si tamen
christianitatis litulum, ibimorantes, non publicaverint , (Adami brem.
hisl. ecclcs. cap. (G6) 12).
{iîi) Die Ziigc dcr Danon naiii wndcn, von X.- M. Tetorscn , nl)or»otEt von C. t'inkiack Ilolm
ft'U\, dans los mcmoiros dos autiqnaircs du nord, 18i0, p. 201» et suivanlcs.
SLÂTL4, 8l^, 65
La prospérité' des Pomorans grandît par mer et par terre. On
ignore comment, par des forêts inaccessibles, ils prirent de fortes
positions tout le long de Notelz; profitant des guerres civiles, ils se
barrèrent de TOder jusqu'à la Yistule, contrariant l'esprit lekhite.
Da temps de Zbigniev et de Boleslav III , les Polonais ne possédafient
au delà de Notetz qu'un seul Zantok re^^custodia et clavis (Gai-
tas, II, 17). Les castella Velun (Gall. II, 48), Czarnkov (II, 44),
Ustie (II, 47), Naklo (I, 5; III, i, 26), couvraient les frontières des
Pomorans; le plus formidable Naklo gardait un oppidum (Gall. I, 3).
Sur le bord de la Yistule ils avaient oppidum Wysegrad, castellum
iUtid in angulo silum fluviorum, Mazovienses per Wyslam fluvium
navigio veniehant (Gall. III, 28). De l'autre côté des frontières
Hedzyrzecz castrum, ayant des oppidans était en possession des
Pomorans (Gall. II, 14).
Les Polonais ayant pénétré dans l'intérieur rencontraient partout
des places munies : seplem castellis acquisilis (Gall. III, 4), (n'a castella
cepit (18), aliud castrum (26); castrum Bytom (II, ol). Pour y arriver
il fallait se frayer le chemin par des coupes (ic).
Le chef-lieu des Pomorans était Bialygrod : ad urbem regiam et
egregiam Albam nomine pervcnissel... civitas (Gall. II, ^2), in medio
terrœ, civitas,,. Alba,,, urbs quœ quasi centrum, terrœ médium repu-
iatur (ir, 59), située sur Persanla, à l'embouchure de laquelle, urbs^
civitas, Cholberg, Kolobrjega, non-seulement gardée par un ca^^rum
mari proximum, mais munie du côté de la mer et de la terre;
entourée de suburbia; urbs opulcnta divitiis , munitaque proxidiis ;
divitia suburbii, maritimes divitiœ, opes equorcas (Gall. Il, 28). Cité
émule de celle de Iulin, fut prise en 1107. Iulin ne fcsail pas tant
de résistance , Ulinum civitas dei summi , a christianis capta est
(relatent à Tannée 1099, les annotations du manuscrit de Santko,
p. 15, a; la date paraît-élre anticipée). Les Pomoranicns défendaient
leur sol pied à pied. Enfin Boleslav III, profitant de l'hiver rigou-
reux (1121), traversa la rivière Rega et les marais gelés et s'empara de
la cité Steltin, considérée pour la capitale et réputée imprenable
(Sefridi, vita Ottonis bamb).
Un pacte détermina une dépendance plus intime des Pomoranicns.
Ils devaient payer 500 marcs d'argent annuellement, armer de chaque
dixième chaumière un contingent et devaient, sous leurs propres
(46) Per dcscrlum Cholberg vcniiinl (GaU. H, Î8); ncirms qnod (4124), transihaimis nnlli ante
raortatinm pcrvium orat, nisi qiiod snporioribns annis (4107) dux Poloni.v, sectis, sigoatisquo
arboribus viam cxcrcitus oxcidcrat (Scfr. vi^a Ottonis bamb.)-
64 SLÀTU, 25.
princes, gouverneurs et castellans, compter sur auxUia Polononmi
(Scfridi , vita Oit. bamb. 11,29). Otton, évoque de Bamberg (1124),
alla convertir et baptiser, il visita Piritz, Kamin, Julin, Steltinavec
succès (Sefr. vita Ott. H, 15, 25, 25; Helm. I, 40, 10), institua à si
place un évéque pour ^guel un évéché était fondé jusqu'à Leba,
par laquelle il était sépare du diocèse de Krouscbvitza , qui s'étendait
sur la Pomeranie orientale de Dantzik, baptisée depuis longtemps
(Sefr. vita Ott. II, 40; Dregeri, cod. dipL pom. t. I, 1, 2; Lunig,
t. II. Anhang p. 4).
La soumission et le baptême des Pomoraniens énerva Tesprit
populaire. L'agitation s'était enfin fatiguée et épuisée chez les
Polaniens; les collisions entre les iKiemianîe, terrigenaè, piquaient
une autre direction : mais la séparation sociale parmi les indigènes
ne pouvait s'accomplir aussitôt. La possession des terres et la con-
dition civique ne les distinguaient que trop, mais les liens de famille
les rapprochaient encore. La doctrine de Tinceste : muliereê ingênum
servili prostitutœ incesiui (Matlh. II, 21), ne pouvait prendre d'assez
profondes racines. Quand même elle opérait la triste séparation en
castes, il fallait plusieurs générations pour désapparenter les terrigênm
kmetones, de ceux de bene nali et possessionati leckUœ, qui se quali-
fiaient de z lachcic, slechcic, slachla, schlachta, comme issus et
descendants des lekhs. Les slaves russiens appelaient toujours
nation par leur nom. Dans l'intérieur, l'état qu'ils formaient n\
pas de nom, il formait un état slave de plusieurs peuples.
Allemands et à la suite la cour de Rome, l'appelaient Polonia
toutes les provinces réunies aux Polaniens, acceptaient ce nom.
Pologne seule dans les vastes espaces au nord des karpates,
tant de secousses a su établir un état indépendant, animé par l'éL
ment indigène qui se concentrait dans les descendants des lechiteob
mais son existence chancelait encore quoniam habuU regem, m
autem ducibus gubernaiur; servit et ipsa par l'humili&nt traité <!.«
Kargov 1157, sub Iribulo impcratoriœ maieslatU (Helm. I, 1, 9, 1 O^;
champion de l'église et de l'empire, disposée à fournir pecunkm^ H
milites in auxilium romanœ ecclesiœ (Gall. III, 2), se transformant ^n
préjudice du peuple, elle n'était plus capable d'intervenir dans
affaires des Yinules et de sauver leur existence (47).
26. Les Yinules restaient encore debout, souvent tributaires, (fj
(47) Sur le sort ultérieur du peuple voyex me» considérations sur Tétai politique de VuMsi^^=sa^
Pologne et sur l'histoire de son peuple, qui se trouTentdans mon histoire de Pologne , p«k»l » ^éeà
Lille. 4844. •
SLÀVIA, S8. ^
v» Coroéft du christianîsBM , ils étaient pv^qtie hidéfrendairts »
lient leur culte national et leur organisation. On à pu remar-
quelques divisions parmi les chefs des. Obotrites, mais partout
IFS bonne harmonie , par laquelle prospérait Tonion des puissants
abes Lutioes. Tout d'un coup , ters 1050, de part les Kizins et
Kiiïes éclatent des plaintes contre la domination oppressive â<^â
Redares Dolences. Les séditions sont suivies d'une guerre achar-
les Zrezpanès restent vainqueurs. Les Redares, humiliés et
lués appellent Tassistance des Obotrites, des Danois, des Alle-
Is et écrasent les Zrezpaniens, énervant leur propre vitalité.
II. f, ai). Véritable suicide de la nation. La sainteté du lieu
encore intacte , mais les Redares et les Lutices ne reparaissent
avec leurs drapeaux, leur existence est à peine mentionnée
i*à la ruine totale.
ivarice insatiable des Allemands (dit Helmold), empêchait tou-
. rétablissement du christianisme. Mais Tinfatiguable propagande
ftlftnt les convictions, faiblit les Yinules. Lorsque Boleslav III
t à Teuibouchare de TOder (1121), les Lutices et les Rougs se
ent sous la protection de cet apôtre de Tévangile. Otton de
berg (llâ5) prêcha chez les Lutices, (vita Otionis...). Peut-être
sfHte le sanctuaire redarien fut silencieusement démoli : les
^ restaient payons. L'empire inquiet, réclama (1155) les rodé-
es, tribulum, de la possession qui s'est soumise d'elle-même
> frising. Vif, 19). La croix était implantée dans le centre, et
çros nuages de croisade présageaient de terribles orages. Le
nier essai (1147), n'avait pas de succès (Helm. I, 62; SaxO
a. XIV, p. 255). Mais les Allemands et les Danois jurèrent la
ruction des Vinules; les chefs couronnés et mitres, les évêqucs
^eaient les expéditions successives. Les Vinules se préparaient à
iter, à soutenir les derniers combats, sans alliés, sans secours.
hez les Vagires, les Allemands réussirent (1151-1155) à se for-
r et démolir, non sine metu, le sanctuaire de Prove (droit, jugé
réme) et recesserunt Slavi qui kabitabanl in oppidis, et ven^unt
^mes et habitaverunt illic, Defeceruni que Slavi ptmlaliiH in terra :
nt ergo opus dei in Wagirensi terra, (Hêlm. I, 85). Albert
rs (1152-1162) soumit les Brizans et les Stoderans, dépeuplant
!« pays : ad uUimum deficientibus sensitn Slavis, misit Traieetum
d loca Rheno conligua ; insuper, ad eos qui paliebantur vint maris ,
landos, Seelandos et Flandros et adducil ex eis populum magnum
is , et habitare eos fecit in urbibus et oppidis Slavorwn : ainsi que
Hme aux évêchés de Brandeburg et Havelberg, dont ils étaient
III. 5
66 SLAYIÀ, 37.
prîYéa, augmenta immensément (Helm. I, 88). Le roitelet PribisU^r
sauva son peuple : il en fit cadeau au même markgrave (fragm. chron*
brand. ap. Mader, p. 264).
La terre des Obotrites était assez dévastée, lorsque (1164), à Taide
de Dieu, le pieux Henij-le-lion allait consommer Tœuvre : ierrê
Obotrilorwn et.finilimœ regUmes, navissimo hoc beUo in solitudinem
redaclœ. Si quœ Slavorum extremœ remanserant reliquiœ , tantœ inedia
confecti sunt, ut congregatim ad Pomeranos sive ad Danos confugen
congerentur , q%ios illi , nihil miseranles , Polonis , Sorabis atque
Bohemis vendiderunt. De cette façon sur le continent : omne robur
Slavorum consumpsisset usque ad finem (Helm. II, 5). Cependant les
Danois avaient de longs démêlés avec les petits cbefs des villes mari-
times, Rostok, Bart, Yolgast. Leur héros, Tévéque Âbsalon,pla8
humain que les Allemands, ne voulait point exterminer le peuple
qu'il appelait à la foi. Les insulaires, après une résistance prolongée,
consentirent en 1168 à la destruction de leurs idoles et se soumirent
âux Danois (Helm. II , 12). Le génie slave expira par une longue et
douloureuse agonie; malgré la déconfiture des forces vitales, il n^a
succombé qu'après une résistance opiniâtre et désespérée.
La Pologne n'a rien fait pour sauver de la destruction les frères qui ^
se jettaient sous sa protection : après tant de permutations qui Tont^
agitées, elle était faible. Le baptême n'a pu cependant préserver
race slave de l'aggression civilisatrice. A peine le baptême mit
silence les fêtes populaires aux environs des embouchures de l'Oder*-^
les princes chrétiens se disputaient le territoire. Les ducs de Pomérani*^
partageaient les dépouilles, exposés eux-mêmes aux attaques des Danoï
(1170-1185). Ils fesaient partie de la Pologne par les pactes de soumit
sion et on ne voit pas d'auxiliaires polonais , quand ils furent forcés à
soumettre aux étrangers.
27. Le génie slave allait périr, étoulOfé, accablé, écrasé : mais
dégénérait pas encore dans le sentiment de ses enfants. Ce n'est q_
dans les domaines des Rouriks-rouss que des symptômes de dégéo
ressence commençaient à se déclarer. Encore n'était-ce pas dans
cités républicaines qui l'ont concentré dans leurs soviet, dans le
bruyantes vietza : mais c'était parmi leurs enfants déversés dans
colonies ultra-sylvaines, zaleskie, que la dénaturalisation de l'es
avait lieu. Encore là (à Vladimir sur Klazma , à Souzdal et aillei»
celle génération slave dépaysée, cédant à l'impulsion innée de sa ra
agitait un certain temps son esprit populaire : mais bientôt le lin<^^
byzantin refroidit son âme, pervertit son sentiment en aveugU
SLA VIA, «S. 67
leur, et l*autocratie s'y forma jurant ranéantissement des libertés : et
la sainte Kiiov fut, 1169, sa première victime. Le glaive matricide
ëgoisa ensuite ses limbes pour porter la mort et exterminer successive-
ment partout Tantique vitalité. Plus d'une fois brisé , il se relevait pour
continuer ses ravages. Égorgeant le peuple et ses institutions concen-
trées dans des cités, il rencontra les lekhites. La vitalité de ces derniers
devait se développer spécialement dans les apanages des Piasts : mais
«lie inspirait et gagnait les apanages limitrophes des Rouriks« La sauvage
autocratie ultra-sylvaine n'a pu franchir les ruines et les décombres de
£iov, lorsque l'esprit de Pologne circulait à travers les déserts jusqu'au
Dniepr : pour lui il n'y avait pas des limites. La Pologne au nord des
ICarpates, unique état pur-slave dans sa faiblesse matérielle, n'avait
pas des frontières.
Serbie.
28. Au sud des Karpates existait encore un autre état slave qui
lardait la pureté de sa souche : c'était la Serbie dans les parties ultra-
danubiennes. Elle aussi n'avait pas des limites. L'âme encore crue,
'*ribîbée de quelques pratiques byzantines, fatiguée de l'indolante et
^^éprisable suprématie, étouffant ses commotions intestines, parut à
î^^xtérleur vivace et agile. A la suite des dernières collisions intestines,
^^^rs llâO, vint sur la scène politique la famile de Bêla Ouroscb, qui
l^rit un ascendant au point qu'elle put relever et diriger avec éclat
^"^csprit indépendant, concentrer et régler l'intérieur, former un état
indivisible. Une seule portion de la Serbie, nommée Bosna, ducatus,
l>anatus, resta moins unie , disposée à former un pays à part (Çinnam ,
l. a. 1154).
Etienne Nemaoia (descendant de Bêla Urosius), zoupan de Raska,
!lait peut-être encore confirmé par l'empereur, 1165, dans la charge
la grande zoupanie. Mais il était déjà depuis plusieurs années,
(4159), élevé par les Serbes eux-mêmes à cette dignité suprême : il lui
fallait seulement combattre les partis de ses frères aînées pour con-
solider son autorité. Ensuite il entreprit de recouvrer les usurpations
de l'empire et d'étendre les frontières.
* Son fils Sava, saint évêque de Serbie, relate dans la biographie de son
père (en 1208), que le domaine paternel fut agrandi par l'acquisition
de la terre maritime (primorskiie zemlie) Zetu, avec toutes les villes et
depuis Rabna jusqu'aux deux Pilota (Poulati). C'est la partie septen-
trionale de la zoupanie dioklcate. Nomanla l'a délivré du pouvoir de ses
frères (poiibszuiu nekoïda et nasiliia svoieie iemu diedini). Ensuite par
t'acifuisition faite sur les Grecs des terres : Patkovo, Khvostno et tout U
08 SLAYIA, «7.
Podrîiniie (tout le pays de Drin noir près de Skutari et Zadrim), Koslr^c,
DrYkovinu (Drinato?), Sitnitzu (de la rivière Silnitza), Lab (Laabia snr
une rivière qui se perd dans la Morava orientale), Liplian (Lipeniom),
Grbotschicu (partie monUgneuse de Gliubotin dagb), Riekc (Sahorika
ou Soukha rieka), Ousckod (Ouskoup, Scopi, qu*il ruina en 4492); et le
Pomoravie (le pays de basse Morava), ZagrUatu (Gherlitza et Groschlitza
près de Krabouievatscb), Licvtsche (de la rivière Levazna qui se jette
dans la Morava), Belitziu (mscrit. ap. Schafarj. 50, note 49, p. 614; 52,
p. 662).
Les excursions de Nemania avançaient certainement pins loin , visi-
taient les environs de Timok, descendaient Vardar, mais les acquisitions
plus étendues furent réservées pour ses successeurs. Diaprés la relation
qu'a donné son fils sur les acquisitions positives, on voit qu'il avait
assez à recouvrer dans le pays de Drin , partie méridionale de la zoopa-*
nie diokleate , où l'empire s'était saisie de plusieurs positions que les
Serbes possédaient antérieurement; qu'à l'exception de la zoupaoie
diokleate, Nemania n'avait aucun embarras de la part de zoupanies
maritimes; qu'il s'est emparé de tous les pays le long de la basse
Morava, de ceux qui sont enjambés par Ibar et Morava orientale, enfin
du cantou de Ouskoup en Macédoine. Ainsi commence la puissance
de la dynastie rasse, raske, de Ouroscfa Nemania à illustrer la Serbie.
Une monarchie dans son genre prend sa naissance. Le grand roi
Dragoslav (1257) prit le nom d'Ourosch d'après l'exemple de ses aîeox :
Ouroscb-le-grand.
Ce n'est qu'avec la plus grande réserve que je hasarde l'explication de
quelques assertions arabes, par ce nom d'Ourosch. Arzakhel en Espagne
vers 1170, connaît une capitale d'un roi Erath; la position qu'il loi
assigne par les longitude et latitude géographiques répond à la position
de la Serbie, où le nom d'Ourosch (Erath) était honorifique de la dynas-
tie dont les dynantes résidaient maintes fois à Rasa.
Ibn Saîd, 1276, relate une capitale jlp Araz d'un des rois slaves da
pays occidental ; ce roi s'est rendu maître de tous les pays des Slaves,
des Allemands , des Hankars (Hongrois) et des Baschkirds. La position
d'un semblable roi se trouve très-bien en Serbie, Ourosch-le-grand
avait peu de démêlés avec la Hongrie, mais il en avait et il combattait
les Allemands, quand il secourut la Hongrie contre les Bohèmes. An
reste, les combats se relatent à des Ourosch, les prédécesseurs qui
avaient des démêlés avec les Slaves (Rroales) et les Baschkirs (Tatars
Mongonx. — Ibn Saïd ajoute que la capitale Araz est célèbre, assez
bien rorlificc, an milieu d'un grand lac salé, en sorte qu'on ne peut pas
y passer que par une seule chaussée artificielle; enfin qu'elle est située
SLÀYIA, t7. 69
r rocéao, très au uord d'après la latitude géographique de SS'' 50\
Ml lui assigne. Une semblable situation ne convient ni à la résidence
isa, ni à la Serbie en général.
Il faut cependant remarquer qu*un lac baignant les murs d*une ville
lit été inventé à la curiosité des géographes pour lesquels la Serbie
(tait longtemps inconnue. La carte du xv* siècle, reproduite par
elin 1515, 1520, ensuite par Villanovano 1555, appelle ce lac Sver-
^o , situé au nord de Sitnitza , comme un lac sans issue. Gastaldo
prit qu'une rivière sort du lac, se dirige à Test et perd ses eaux
as Ibar, et que la ville prénommée est située au milieu de ce grand
• Mercator, Hond, Janson, Bleauw, Witt, et tous ceux qui les
liaient, ne négligeaient le lac Suercegno, Suersegno dans sa propor-
Q et situation, avec sa ville aquatique Sitaîza, Sitinza, Sitniza et la
ière qui s'échappait vers le fleuve Ibar. Hommann inscrivit le nom
la rivière Sitnitza. On croyait donc à Texistence de ce lac au milieu
xYUi* siècle et Matthias Seutter à Augsbourg précisait avec soin ses
mes et sa position qui tombe aux environs de Usitza et Posega. La
^yance à Texistence d'une ville sur un lac dans la Serbie était assez
créditée, malgré l'école française qui l'avait réniée depuis Sanson;
cette <;royance remonte vers le moyen âge, comme si elle dérivait
kraz capitale du roi Erath ?
Le lac salé peut se réduire facilement à un fossé de la place forte :
nîs Foçéan? et la latitude? Sa position maritime sur l'océan est
ss-contestée par celle du lac salé : mais la latitude géographique et
climat? Serait-on autorisé de présumer une méprise d'Ibn Saïd qu'il
trait inventé la latitude .« J de la latitude « ^ qui désignerait
climat arabe des Ourosch ? ^ ^
J'ai fini l'examen de la Slavonie des x"* et xu* siècles : il peut
rvir d'introduction à la description sicilienne d'Edrisi, dans laquelle
I a beaucoup sur la Slavie du xui* siècle.
ANALYSE
DE PLUSIEURS SECTIONS
DBS Tl* ET TU* CLIMATS
DE LA DESCRIPTION
D'EDRISI.
CNOM. XT, 17.
(Voyez : 1, les triangulations, n« 40, 43, de Tatlas; 2, tabula itineraria e
codice asseliniano d9 41 en deux planches de Tatlas ; 3, trois cartes expli-
catives, qui se trouvent dans Vatlas.)
ORDRE DES MATIÈRES.
Introduction, i-A, version de Jaubert, noms propres ; 5-8, carte itinéraire.
— Angleterre; 9-10, ses positions. — France; 11-12, sa triangulation. —
Allemagne; 15, capitale, 14-15, provinces, pays de Louvain; 16, Saxe, 17,
Frise et Bavière. — Karintia, Dalmatia, Djeioulia ; 18-19, étendue de Karin-
tie; 20-22, Danube à l'est de Belgrad; 25-24, Slavonie ; 25-26, Dalmatie; 27-
28, Djetoulia. — Berdjan, Romania; 29-51, les environs de Berisklava, 52,
de Kalimalaïa, 55-56, du Danube vers son embouchure, 57-59, triangulation
de la Romaine. — Macédoine; 40-42, positions et routes, 45-44, canal de
Gonstantinople , 4S1-47, pays de la description edrisienne. — Hongrie; 4849»
ses positions. — Boemia; 50-51, son étendue, 52-54, ses positions, 55, son
existence. — Polonia ; 56-58, connue à rétranger, 59, son étendue et ses po-
sitions.— Ritssie méridionale; 65-66!, ses positions. — SXrancItnatne nord; 67,
Danemark, 68-70, positions autour delà baltique. — Jïtime septentrionale;
71-72, inconnue. — Rous tourk, Nibaria; 75-76, trois hordes; 77, positions
des Ibaria et fleuve Rousia. — Komani; 78, établissement des Komans, 7&-80,
étendue; 8i, péninsule; 82-85, mer Manitasch, 84, Petakbia chez eux, 85,
Kaptschak et idiome. — Bartas; 86, leur renommée. — Commerce; 87-95,
commerce , culture sociale spécialement en Pologne et en Russie méridionale,
antérieures à Tépoque d'Edrisi.
x
k
1
ANALYSE DE LA DESCRIPTION D'EDRISL
i. Le savant Aniédée Jaubert, invité par la commissioa centrale
de la société géographique, enireprit la version française de la géogra-
phie d'Edrisi, complète en ce sens, que rien d'essentiel n'y serait omis
(de la préface, p. 10). Grâce à ce plan, nous avons la géograpbie
d'Edrisi entière dans l'impression. A mon avis, cependant, il esta
regretter que le traducteur s'est décidé d'omettre quelques passages
étrangères à la géographie. Lorsque l'auteur a jugé à propos de les
insérer dans sa description, leur publication était convenable et pou-
vait être utile pour ceux qui s'occupent d'autres recherches et même
pour les scrutateurs de la géographie, s'ils voulaient porter leur vue
sur Edrisi extravagant.
Lat version était une tache ardue, non à cause de la langue arabe dont
les obscurités ont été victorieusement surmontées par le traducteur
versé) mais à cause des noms propres et des chiffres. Des milliers de
ttiMn&et des distances se présentaient continuellement dans trois manu-
scrits et dans l'ancienne version latine, qu'il fallait eollatîonner. Le
traducteur le signale, observant qu'un tel ouvrage, composé dans les
ténèbres dnxif siècle, ne nous est par\'enuqu'inftrme, mutilé et transcrit
par d'ignorants copistes en caractères d'écriture , où ïe déplacement de
poiBts diacritiques suffît pour dénaturer le sens des mots, pour défi-
gurer et rendre méconnaissables les noms propres. Il avait donc Fnnique
soin, wm de restaurer le texte, mais de le dégrossir à Taide de plu-
sieurs textes qu'il avait à sa disposition et il a annoté scrupuleusemest
les variantes qui se sont présentées à sa vue , il a inscrit avee effusion,
près de chaque nom propre, le nom en caractère arabe, tant inva-
riablement répété que varié dans sai répétition. Ce soin est inappré-
ciaMe pour les investigateurs. Nous pensons; que le traducteur n*a
p9i» donné le. même soin aux distanee», aussi svsceptibles d'erreurs ,
chea Ves e!0f)iste8.
Noua pensons que les ténèbres du xu* siècle n'ftv»ieBt aucune
ixifloence sur l'exactitude des copistes, qui devaient respecter et
Conserver ce (pie Touvraige teur présent»il, pour nous laisser juger
74 IBDRISI.
Tauleur; et tout porte à croire (fue les copies, difficiles à la lecture à
cause de récriture, sont assez studieuses et exactes. Elles ne sont
pas entières, parce qu'elles suppriment des passages, elles abrègent
maintcfois le texte, mais sans vouloir travestir, rectifier, elles ren-
daient ce qu'elles avaient devant leur plume, avec cette lumière que
robscurité du xu*' siècle accordait également à Tauteur et à ses
copistes. Il y a dans chacune des copies des erreurs évidentes, mais à
voir le peu de variantes données par le traducteur dans les noms
propres et dans le sens du texte, il est certain que les copistes
n'étaient pas tout-à-fait ignorants, qu'ils comprenaient ce qu'ils
copiaient, les copies étant très-conformes, et il nous ont transmis la
production des ténèbres du xii' siècle, mutilée mais très-peu défigurée.
Dans les distances le traducteur a noté encore moins des variations,
ainsi qu'on serait obligé de les considérer intactes, comme provenant
d'Ëdrisi lui-même. Toutefois nonobstant les erreurs, la simple lecture
des chlfiVes se présente souvent incertaine. Elle est pénible pour les
longitudes et les latitudes géographiques, surtout dans 3 et 8 ^ _
pour les itinéraires dans G, 80 et 100 ^' ^ ^^^ ^ ^
2. Ces considérations ne diminuent en rien les peines qu'avait le
savant traducteur en débrouillant la lecture du nombre aussi consi-
dérable des noms de tous les pays. Dans l'écriture arabe négligée,
coulante, hâtive, un point éloigné, omis ou enlevé et dévoré par le
temps , change le nom ou le laisse indéterminé. Sa fixation devient
impossible ou hypothétique. Le traducteur a déterminé la valeur
des lettres pour la prononciation des noms, mais cette prononciation
dépend des voyelles qui l'ont motivé de lire à^xi, Rabna ou Ribna;
^»J^ Lovanos ou Louns, (p. 565, 564-, 565); jjL>J ^iLJ égale-
ment Louban.
Le manuscrit d'Asselin est accompagné de soixante neuf tableaux
ou cartes géographiques. Le traducteur n'a donné que trois de ces
cartes comme spécimen. Sa version va être enrichie encore d*iin
tableau offrant l'assemblage de soixante huit caries manuscrites ,
son savant confrère Jomard s'étant chargé de le dresser. C'est grand
dommage que la version soit privée de ces cartes : leur réduction
par l'assemblage à nne trop petite échelle, ne pouvant pas contenir
toutes les inscriptions. Le traducteur , en confrontant les trois manu-
scrits et l'ancienne édition, recourut rarement à ces tableaux pour
les collationner avec le texte. Cependant Edrisi, dans sa description,
r«nvoit assez souvent le lecteur à ces cartes qui font partie intégrante
INTRODUCTION, 5. 75
4Je i'ouyrage et dans la copie une source abondante de variantes qui
jcaérltaient d'être examinées par un savant exercé dans la lecture de
l'écriture arabe. Ëdrisi lui-même avait composé ces cartes pour
€][ue le lecteur put d'un coup-d'œil et sans peine acquérir la connais-
sance des voies et des peuples , et ces carbes sont suivies par sa
description. Elles contiennent, en outre, quantité de noms qui ne
se trouvent point dans le texte. Le texte, par exemple, mentionne
-trois villes de Norvège , six places fortes du pays de Nibaria , sans les
nommer; ces noms de villes et de places fortes sont inscrites sur
les cartes. La carte, autant que je piiis débrouiller, mentionne Bou~
logne en France qu'on chercherait en vain dans le texte.
Pour nous, ignorant la langue arabe, il est bien de rétléchir sur
ces bizarreries, qui résultent de la prononciation des noms par les
arabes et sur leur écriture en leur caractère. Sans se soucier trop
<]e la prononciation variée persane, turke, arabe, maureske, il nous
est absolument nécessaire d'observer les lettres arabes desquelles $ort
l'orthographe pour rendre ou désigner le son de la voix étrangère.
Sous ce rapport l'orthographe arabe décèle souvent une inconstance
pénible. On y rencontre continuellement le changement des voyelles
et l'abondance des lettres intruses; changement de consonnes et leur
transposition; substitution de sons rauques, gutturaux, sifflants ou
d'aspiration; article ou consonnes aspirantes préposées; tronquation
de syllabes entières ou l'insertion fragmentaire : tout cela défigure
continuellement les noms au dernier point. Rhotakisme, lamisme»
elifisme, sinisme, nunisme, betisme, mettent à l'épreuve l'attention
de ceux qui s'eflforcent à discerner et déterminer ces noms pervertis.
Qu'on me pardonne toutes ces expressions pour la plupart inusitées,
si elles sont impropres, elles n'exagèrent les embarras des scrutateurs,
surtout dans les régions plus éloignées, moins fréquentées des arabes,
dont les idiomes étaient moins familiers aux arabes.
3. Eux-mêmes connaissaient -l'infirmité de leur idiome et de leur
écriture pour rendre les mots étrangers. Deux siècles plus tard ,
Aboulféda rend compte des soins qu'il se donnait à cause de la sylla-
bisation. Il inscrivait les lettres en usage dans les noms et ajoutait
les d'habthong, c'est-àrdire les notes orthographiques pour signaler
avec quelles voyelles elles devaient être prononcées. Puisqu'il y a
des noms barbares que personne ne saurait prononcer sans avoir les
consonnes nettement écrites, accompagnées des voyelles, il observe,
que dans les noms vulgairement connus , souvent le peuple substitue
M change les fatbah et dbamma avec kesrah; les a, u, à la place de e,
EDRISI.
OU te on supprime les consonnes. Tabriz, Tosler, Bariu, Tadmor,
ans la prononciation vulgaire sont Tauriz, Schoster, BaVin, Todmor.
jette inconstance de la prononciation décide Aboulféda par la syllabi-
»ation (vcrsio Reiske, p. 182, 185).
Suivant les Arabes , Venise, Adrianople, Genève, sont : Benadikiaf
Ademoboli ou Drinobdi, Djinibra; Chalon, Evrcux, Langres, Troyes,
Paris , Dyalotf 5 , Abraous, Lanka, Arovs, Abariz ou Abarisch; Arras,
fleuve Araxes, Raiz ou elraiz, Raz; Orléans, Olianos, qui se prononce
aussi Orlianos; Provence est Brabansia; Krakov, Gniezno, Krakal,
Djenazja; Volcan, borkan. Ils peuvent prononcer et écrire Abydos
par Abidah, mais ils aiment mieux l'appeler Andus : parce que les
Arabes aiment à mettre un noun à la place de p ou b, ils écrivent :
Boemia ou Noemia, par un 6 ou un n, indifféremment (Edrisi,
p. 37i). Le nom de la mer noire, Pontus, doit être écrit Nitoêch,
par un noun kesraté , je, iha, noté d'un autre kesra et schin de trois
points. C*est de cette manière qu'on l'écrivit dans les temps anciens
(Abnlf. versio Reiskii, p. 151).
Le changement et la transmutation des consonnes est ane question
plus grave que Tinconstance des notes orthographiques et des voyelles.
L*arabe, écrivant indislinclement Noemia, Nchsa, Nischa, Nabdhos,
Nabrova, Tebsava, Tondjah, ou Boemia, Bensa, Bischa, Baudhos,
Betrova, Betsava, Nondjah, échange b, n, t. Les copistes sont
presque autorisés à cette inconstance qui ne dépend que des points
diacritiques, il n'y a même rien d'improbable, si les copies nom-
breuses sont d'accord sur quelque faux changement, que cette
variation sort de la plume d'Edrisi lui-même, et de l'usage, vu .qu'il
fait observer assez souvent que quantité de noms s'écrivent par
différentes lettres : ^ly V*!^ Boemia, Noemia, iri^f^ Pjf î Paris,
^ysjL» ^JLJI le Mans, à\A^ dKt Skela, iK^ JSll*- Sikla, tjj^
y^Aûo Tebsava , àjjjis ^^ ^ Tarrakona. La permutation de caph
en /ë donne souvent indistinctement .J^ ,y^yh l-»'^ Karran, Far-
ran, au lieu de Fezzan de l'Afrique ulij bLiJ Kokaïa ou Kofaîa;
^^aJjS ^Jf^\ le mont Caucase, Kaïtah ou Faïtah; le même mont
Caucase ^ jji Kabokh ouFeth. Celte dernière dénomination sîgniOe-
raitmont^ de^ victoire, mais l'arabe protesterait qu'il ne ve«t rendre
par Feth que le nom du Caucase.
C'est l'usage et le bon plaisir qui ne blesse pas l'écrivain et le
lecteur arabe. Ces diversités innombrables, dépendent d'un point
diacritique. Négliger les points de la lettre, 6, I, t, n, c'est la laisser
INTRODUCTION , 4 77
sans valeur; négliger le point de kh, dj, c'est laisser un h; négliger
sur X, c'est le changer en r. Comptons maintenant les erreurs, Tin-
ourie des copistes, le caractère négligeant où Ton ne distingue pas
avec certitude un lam peu élevé; un mem d'unfé, nnféd'uïï 6, un
/ca/ d'un noun; où Ton ne débrouille à la fin des noms les ré, fé, dal,
'vnem, be, ie, kaf, lam, ou un sain privé de point, et vous comprendrez
les peines qu'avait le traducteur en fixant la leçon et les variations
€ies noms propres. C'est dommage, et nous ne cessons de regretter ,
ciu'il n'a pas consulté et examiné de même les cartes géographiques,
«|ui n'arrêtaient son attention que rarement.
4. Depuis la publication des extraits maigres de la géographie
^'Edrisi en arabe, à Rome 1592, et à Paris 1619, qui n'offraient qu'une
nomenclature sèche, privée des renseignements que donne la connais-
sance du texte de l'ouvrage entier, les nombreuses localités provo-
quèrent les études et les illustrations de Bochart, d'Ânville, Reiske,
Conde, Casiri, Hartman, Walkenaer. Elles me sont inconnues et il
m'était impossible d'en faire connaissance. Le traducteur les avait
sous ses yeux et s'en servit dans ses explications (préface p. 8); il dit
qu'il est redevable à Willam Piatt l'indication des lieux de l'Angleterre
(p. 425) , il recommande de nombreuses concordances de noms des
lieux de la Remanie grecque, ce qui était l'objet d'un examen très
approfondi de son confrère Hase (p. 28G). Cependant il proteste qu'il
n'avait guère de prétention à l'illustration complète (préf. p. 13).
Cette illustration , bien qu'avancée, demandait des investigations spé-
ciales et trop laborieuses pour chaque région.
Âmédée Jaubert a rendu un service éminent en étudiant son objet à
tel point et en mettant au jour, à chaque page, de nombreuses explica-
tioBs. Il a laissé cependant grand nombre qu'il ne savait pas désigner;
il a hasardé une quantité considérable, qui ne saurait résister à la
réflexion sérieuse. L'homonymie apparente est très-souvent insuflîsante
à décider l'explication : il faut prendre garde à la situation relative, à
l'existence réelle à l'époque d'Ëdrisi; confronter les distances avant
de se déterminer à identifier la ressemblance des noms. Aussi je
pense que l'explication de Montir par Modor est trop hasardée, car
Montir est sur les confins de Pologne , et Modor est au centre de la
Hongrie. Comment avec Zamiou se référer à Zamoéé qui ne fut fondé
et construit que quatre siècles plus tard? Comment Edrisi nommerait-il
Schithov Riiov de Pologne, l'orsqu'il appelle Kiiov russien Kav?
C'est aux investigateurs postérieurs d'éclaircir par ci par là cette
confusion que l'oubli et les méprises rendaient inévitables dans cette
78 EDRISI.
multitude de noms barbares et défigurés, contiouellement répétés. C'est
par inadvertance qu'on trouve Rabna ou Ribna, une fois expliquée
par Raab, une autre fois par Ribnitz (p. 379, 584); Wurza oa Wane et
Niuzbourg ou Nieubourg, deux villes de Saxe, distantes de i5 milles,
expliquées par Odense et Nieborg de Danemark (p. 571, 581, 427). En
premier lieu le traducteur dit : Cali Gala, aujourd'hui Erzeroam;
quelques pages après , Gall Cala est placée sans explication à côté
d'Erzen qui est illustré par Erzeroum , et lorsque de Bidliz on compte
75 milles, cet Erzen comme Erzeroum est éloigné de quatre joaraées
de Meîafarekin (p. 5â0, 5!26, 527). Cependant sur la route de Bidliz à
Meîafarekin, Erzeroum ne se trouve pas, mais la ville d'Arménie Ârzan,
qui est évidemment cet Erzen d*Edrisi. Mais nous retrouvons encore
un Erzeroum dans Arsia , située dans la province de Djaldia ( p. 501 ).
Je n'entreprends pas d'essayer à débrouiller cette confusion qui est en
dehors de mon but (i).
Admirant le beau travail du savant traducteur et puisant dans ses
lumières, si je me permets d'indiquer ces quelques écarts, c'est pour
atténuer les miens. Je pris le courage de chercher le jour où le traduc-
teur laissa une obscurité confuse, et je sais que dans mes hypothèses,
dans mes élucubrations dirigées par des ressources insuffisantes , je ne
manquerai pas de tomber dans les erreurs inévitables. Je serais heureux
si elles mériteraient d'être surprises et corrigées par des investigateurs
versés.
5. Dans le premier volume, nous avons fait connaître la carte itiné-
raire de l'ouvrage d'Edrisi , le nombre de ses sections , leur grandeur et
la grandeur de la carte entière; sa dimension, le manque d'échelle, le
but de leur dessin, ses couleurs, sa peinture. Nous allons ici exploiter
ses dix sections de deux climats, déchiffrer leurs légendes et épigraphes:
par conséquent nous devons avant tout examiner son écriture et rendre
compte de l'exécution de notre copie.
L'écriture de la carte itinéraire offre beaucoup plus d'insuffisance que
ledessin. Rapide, uégligée,ellefatiguelalectureet jette dans l'incertitude.
Les points dfacritiques très-souvent omis, sur la lettre hé finale toujours,
évidemment que le frottement et le temps firent disparaître un nombre
(1) CertaioemcDt Erzeronm est no Erzao romain Arzan -ar-Rouni. Mais il y avait d'antres Anan*
Artan arménien , et Arzaudjan , tous assez rapprocliés qne les géographes arabes ^istingnaient
Quant à Cali Cala, déjà Abouiréda discute sur sa position et son origine, et nommait une montagne
Cali Cala. Reiske énonçait son opinion pour Tbeodosiopolis. Il ne manquait pas d'investigatenri
qui letrouvaient Cali Cala dans Erzeroum. Golius, dans les notes à l'Alfragan, combattait cetU
opinion. La discussion d'AbouIféda roule dans le Djezira; la description d'Edrisi fait ses tours dans
TArménie. (Voyez les climats d'ibn Ketir dans l'atlas, etd'Alkomi, t. I.)
CARTES ITINÉRAIRES, 5. 79
stôsez considérable , mais pour sûr bonue quantité n*était jamais marqué
«t ceux qui sont marqués sont jetés ordinairement trop en avant , trop
«loignés et dispersés. Il est bon d'observer que le point de zé se trouve
quelque fois à sa place, quelque fois est mis au-dessous, en bas. Quant
aux fé et kafih sont ordinairement distingués par un seul point dessous
^t dessus : ainsi que kaf n'est marqué que d'un seul point en haut ^^
«t le fé, suivant récriture arabe africaine, distingué par un point mis
^lessous, en bas. s.^ Cependant on trouve de très-rares exceptions où
Maf est chargé de deux points (s).
Il serait superflu d'insister trop sur les erreurs qui sont à observer sur
«haque section. Le nom du Rhin est inscrit sur le Mein et le nom de
l^eln, Mourin est placé sur le Rhin ; Verdun, Garmisia, Barmon, deux
fois répétés; Sikla, Besanzin, Molsa, sans épigraphes; on peut supposer
quelque déplacement de noms comme de Frankfort. On remarque les
noms privés de terminaison , fracturés par Tomission de syllabes et de
lettres, dépouillées de leur commencement, de leurs initiales : Ankborda
seulement au lieu de Frankborda. Nonobstant les difficultés, les incer-
titudes et les fautes , c'est la récolte abondante de variantes quelque-
fois utiles pour rapprocher et rectifier Toithographe varié.
Quantité de positions nommées dans le texte, ne se trouvent pas in-
diquées dans la carte itinéraire : mais il y a des positions nommées qui
sont passées sous silence dans le texte. Nous l'avons déjà observé que
Russie, Norwège, France, Remanie nous en donnent des exemples.
Au bout du compte le débrouillement de la lecture est excessivement
iatigante pour les plus versés dans l'écriture arabe, et en plusieurs
occasions capable d'épuiser leurs conjectures.
J'avais cependant la témérité de reproduire dans mon atlas ces dix
sections réduites à un tiers de l'échelle, ensemble et lisibles, tout igno-
rant que je suis de l'arabe. J'ai confronté à plusieurs reprises tous les
noms, toutes les inscriptions de la carte itinéraire avec le texte de la
version et partout je les trouvais conformes, au moins rapprochés par
quelque apparence , je conservais la leçon du texte , insérant sur mes
planches en caractère lisible, arabe et latin.
Remarquant une dilTérence patente, je devais la respecter, la conserver
et l'inscrire sur ma planche en double caractère comme ma lecture me
la donnait. Lorsque je pensais que c'était une erreur, tout en reprodui-
sant l'épigraphe arabe de la carte, j'ajoutais le nom latin suivant le
(s) Il semble que les textes des manuscrits consultés par Jaubert, employaient dans leur écritur«
la lettre fé de Talphabct africain , parce que , à l'occasion de Foglia , Falhoua (Padoue) , Fanonsa
(venosa), Janbert observe que les copistes des deux manuscrits ont employé la lettre fé surmonté
é*u» point et non le fé de Talpliabet «rabe africain (p. t'i7, 469).
80 EDRISI.
texte. Quand il in*a été impossible de débrouiller la valeur des lettres,
je copiais les traits de ces inscriptions aussi illisiblement que je les
Toyais. Ce que j'ai ajouté, est ordinairement mis entre parenthèse.
Celte opération produisit certainement nombre d^erreurs : je prie qu^on
me corrige , et j'engage les savants à donner aux gens du monde le fae
simile des 69 sections .
6. La table itinéraire, composée de 70 (68) sections, est une partie
intégrante de la description ; elle avait son existence a^ant la descrip*
tion. Edrisi Tavait sous les yeux , souvent il renvoit le lecteur à la re-
garder. Elle indique les positions relatives des points et la direction des
itinéraires et des distances. Quand la direction de la distance du texte
ne s'accorde pas avec celle de la carte, lui est contraire, reste à juger
laquelle est réelle. C'est ainsi que le texte dit, de Paris à Louns vers
l'occident (p. 564), de Tours à Nifars vers l'occident (p. 557), de Mont-
dugon à Bourges vers le sud (p. 242) : la carte itinéraire trarce tout le
contraire, et c'est juste.
Le texte détermine chaque distance par le nombre des milles; la
carte ne donne aucune échelle pour la confirmer on contrarier; elle
n'a pas d'échelle.
Il n'y a donc de question d'échelle , et en matière de distance règne
une grande incertitude : dans le texte même , Edrisi ne nous donne
aucun éclaircissement de mesure variée. Dans les prolégomènes seale-
ment il indique le rapport des milles aux parasanges. La parasange
compte trois milles. Dans toute la description il se sert ordinairement
de milles, souvent de journées de marche, quelquefois de stations, les
parasanges sont presque oubliées. Il les néglige dans sa description,
car toutes les mesures connues étaient changés en milles déterminés
(prolég. p. 21), les parasanges étant une mesure déterminée , furent
donc très-facilement absorbées par les milles, d'autant plus qu'elles ne
convenaient point aux Italiens et aux Siciliens. Malheureusement les
milles n'étaient pas toujours égaux , leur longueur variait et Edrisi n*y
faisait aucune attention. 11 n'en était pas de même avec les autres me-
sures connues comme avec les parasanges : la réduction de ces autres
en milles présentait des difficultés et des incertitudes. Malgré l'assu-
rance que toutes les mesures furent comptées en milles déterminés,
Edrisi laisse une multitude de journées indéterminées; je dis indéter-
minées, parce que bien qu'ordinairement il compte une journée à 25 ou
30 milles, assez souvent cependant ces journées sont plus longues et
montent à 40 milles et plus; et trop souvent elles sont plus courtes,
surtout dans les intervalles où les points sont trop rapprochés.
€ARTB ITINÉRAIRE ,7. 81
Nous avons observé ailleurs que Tesprit humain agrandit ce qu'il veut
faire plus ostensible, plus détaillé; que les cartes géographiques de tout
temps étaient affectées de cette disposition, de cette inévitable néces-
sité. Aujourd'hui même , nonobstant tout le raffinement de Texactitude
scrupuleuse, comment marquer sur une carte générale, une ville, un
faubourg, sans dépasser leur enceinte ; comment tracer distinctement les
fleuves sans déborder leur largeur , surtout lorsque la carte est dressée
sur unepetite échelle? Anciennement on était moins scrupuleux sous ce
rapport, plus enclin à tracer les détails démesurés, souvent on ne
cherchait point à les réduire à leur juste proportion , à les restreindre
dans leur étendue réelle. Ce défaut affectait les cartes, malgré leur
progrès scientifique. Toutes les parties plus animées, plus habitées,
plus fréquentées , plus connues, figuraient gonflées et élargies. Les
distances apportées par de nombreuses relations contribuaient beau-
ooup à cette défiguration.
7. Les distances provenaient rarement de chemins mesurés. Elles
étaient rapportées par des voyageurs et des marchands. Dans les pays
peu peuplés ils étaient lancés à franchir de grandes distances d'un bond,
et tout ce qu'ils voyaient se présentait rapproché. Dans les pays plus
cultivés, ils s'arrêtaient à chaque instant, ils ont des affaires à régler,
leurs journées se passent dans des hdltes et repattrages : mais ce sont
des journées de distances. Tout se dilate à leur vue ; étourdis de leurs
distractions, ils rapportent de bonne foi des chiffres doubles, triples,
décuples. La cour du roi Roger, en confrontant ces données, les a trou-
vées d'un singulier accord, partout où le mouvement local, le trafic
i^pproché , agitaient les populations. La connaissance des longitudes et
laiiitudes de la table ronde , pourrait nous dire si les géographes sici-
liens savaient se prémunir contre les conséquences de cette désharmo-
^ie des itinéraires ; mais ce qui est sûr, c'est qu'Ëdrisi relate fidèlement
toutes les données gonflées ou exténuées. Ainsi nous voyons dans sa des-
cription les distances aux environs de Belgrade, dans la Remanie, dans
la Crimée, énormes , excessives. On dirait que les milles y étaient
^i^ioindres. La différence des milles contribua sans doute plus d'une fois
^ élever les chiffres des distances , mais au fond , §ur tous ces points
animés, c'est le trafic , c'est la marche lente des marchands qui les em-
;t>oulaient. Par la proportion des mesures itinéraires relatées par
^drisi 9 on peut juger de la culture du pays, de la civilisation matérielle,
<lu mouvement local et du commerce.
Ces considérations me paraissaient nécessaires pour bien apprécier
les mesures d'Edrisi, pour ne pas voir trop souvent d'erreur dans le
III. 6
S2 CDRISf.
texte où il n*y en a pas; poor ne pas exiger une stricte application , le
compas dans la main, à desdistances réelles: pour ne pas les négliger
à causé de leur inégalité, de leur apparente inaptitude; enfin ponr ne
pas s*effrayer des monstraasités que la triangulation composerait. Cette
triangulation mérite d*étre essayée. Souvent elle paraît d'abord impos-
sible, souvent elle est livrée à Parbitraire, quand les itinéraires se
croisent seulement sans former des triangles, ou quand les chiffres s*y
opposent par leur incohérence, leur mauvaise lecture, ou parles er-
reurs qu'on ne saurait rectifier. Cependant ces distances sont sorties
de la triangulation qui composa la table rogérienne : or elles sont aptes
à cette opération et elles donnent des produits* satisfaisants. Quand
même la triangulation devient Impossible , son examen donne des ren-
seignements avantageux aux recherches de la position.
8. Edrisi,dans sa description, ne perd pas de vue les états, les donai-
nations; mais son attention est essentiellement renfermée dans les ré-
gions et les populations qui les occupent. Telle n'a plus d'indépendance,
elle est soumise par un étranger, à peine qu'il en reste le nom; aile
autre est déchirée entre plusieurs états , mais c'est toujours la popula-
tion qui est l'objet de sa description. II est donc possible de déterminer
rétendue ei les frontières des régions, et il devient tout impossible
d*énumérer les états sur sa parole et de tracer leurs frontières. Qauid
il néglige de le dire, restent la région ou sa portion (s).
La carte ne connaît pas de tracement de frontières. Le vague plane
dans ses épigraphes des régions, qui sont déchirées et dispersées
sur plusieurs sections , il faut ramasser ces tranches séparées pour en
faire une totalité. De même la description revient plusieurs fois sur ce^
régions, elle énumère ses villes principales, elle compte ses dépen-
dances, elle nomme les pays limitrophes, elle signale l'étendue par-ci,
par-là , en suivant les routes des marchands et elle laisse maintes fois
du doute , du vague. Les itinéraires dirigent la description. Elle passe
à la fois en revue toutes les voies de la section et des régions que celle-ci
contient; souvent elle déborde sur les routes de la section suivante,
sans dire dans quelle région elle a fait cette irruption. Il y a des régions
à peine mentionnées (Bilkan, Bellim) ensuite oubliées. La multitude de
détails accable et embrouille la plume d'Edrisi. »
(3; I.cs cartes eTpiirotives de la description d'Edrisi oc sont pas politiques, ne présentent que
des limites de provioces, de régions, de certaines populations ; les limites politiques des états étaient
différentes. Pour mettre à l'évidence cette distinction, j'ajoute dans mon atlas nne petite carte
politique sur laquelle on voit les frontières des états juste dans les années d'Edrisi. ElJe « été
préparée il y a vingt trois ans avec les autres pour un atlas historique. Qu'on me pardonne qn*eU«
estfo polonais, extraite d'un atlas polonais.
ANGLETBRM, 8. 83
Ces réflextons sont le résultat de Tanalyse de dix sections des ti* et
ru* climats. Je pense qu*elles sont applicables à toutes les autres, à
^ouvrage entier. Chaque point se disperse , s*empélre , s'enchatne avec
es autres. Je voulus me borner à la région de Pologne, de Russie, de
lohéme; mais bientôt j'ai vu que pour y entrer il fallait sortir d'Aile-
nagne pour courir au fond de la Remanie, suivant les traces des com-
merçants de cette époque , qu'il était nécessaire de s'enfoncer dans la
iongrie. Et comme plusieurs sections des climats vi et vu paraissent
noins illustrées par le traducteur, je me suis décidé à donner le résul-
ai de ce que j'ai pu remarquer, concernant les régions danubiennes et
a Remanie; l'Angleterre et la France ne sont élaborées que parce
[u^elles prennnet une place considérable des sections dont je donne la
^opie« Il suffirait à cet effet de former une nomenclature comparative de
3oints expliqués et de signaler leur position par les cartes gravées.
Mais l'exposition de nos régions, trop confuse dans Edrisi, demande
ibsolument une analyse assez compliquée et il eu fallait rendre compte
rerbal plus ou moins explicite. Sous ce rapport je serai plus circon-
stancié dans le développement des régions qui font l'objet principal de
nés investigations, et plus succinct dans les autres qui ne sont que
secondaires, où je ne prétends guère à dire quelque chose de nouveau ,
3a d'aplanir toutes les difficultés, d'expliquer les obscurités, de vider
les questions; je les effleurerai pour provoquer les autres plus versés,
plus heureux.
Angleterre.
9. Willam Platt donna au traducteur d'Edrisi l'indication des lieux
de l'Angleterre. 11 y a donc peu de motifs à nous arrêter sur ce point
qai figure dans nos sections. Cependant nous avons le plaisir de contra-
TÎer, de contester plusieurs indications, ne pouvant en aucune manière
admettre dans la description d'Edrisi de si exorbitantes transpositions,
qai résulteraient des indications données. Deux cents ans plus tard ,
Tatlas catalan donnait les noms anglais sur sa carte; noms presque mé-
connaissables à cause de leur prononciation et de leur tortueux ortho-
graphe. Ceux d'Edrisi sont au premier coup-d'œil évidemment anglais,
quoique rendus en caractère arabe. Ils sont bien relatés et viennent de
I)ons renseignements. L'Angleterre, à cette époque, avait son doomsdai-
book, sa statistique, ses cartes spéciales. Rome, qui prélevait le denier
de Saint-Pierre , et les Normands de Sicile possédèrent facilement , par
l'entremise des Normands d'Angleterre , une bonne connaissance de
cette île. Dans la répétition officielle d'Edrisi , il ne se glisse que peu
de méprises.
84 EDEISI.
Nous commençons par le point le mîeax établi , par le nord.
sjjo^yl Âfardik et ^La^^ Durhalma, sont Berwik et Darham.
Nous sommes d'accord. 80 milles d* Afardik ^r^j^\ Aghrimes sur
mer, est^Grimesby , et 100 (lisant 80 serait trop) d'Aghrîmes dans lln-
térieur du pays àiyj ou i^j^i Nikole , Nikolas (la carte itinéraire
porte Bikola), Linkoln.
Le fleuve traverse cette dernière ville par le milieu , se dirige ensuite
vers Aghrimes , et décharge ses eaux dans la mer au midi d'Aghrimes.
L*ean qui coule de Linkoln se perd dans la rivière W'itham , qui a son
embouchure au sud de Grimesby près de Boston. Ëdrisi Ta appelée
^iJuj Beschka. En désignant son embouchure 140 milles d*Afardik,
il le nomme de Beska place forte, bâtie sur ses bords, à 12 milles de
la mer, ce qui répond à Boston.
^ 80 milles par mer d' Aghrimes. i^^^ Barghik, ville distante
de 10 milles de la mer. Le texte et la carie itinéraire donnent cette
leçon ; je pense cependant qu'en suivant les pas d'Edrisi , personne ue
s^opposera à la leçon de i^.i'j-' Narghlik, admettant la mutation ordi-
naire de noun en bé. Cette leçon répond à Norwich.
De Narghik à i^^j^ Djartmouda, qui est à rentrée d'un golfe de
forme circulaire vers le nord , le texte compte ^ 90 milles par mer;
en sorte que la distance de Djartmouda à Aghrimes par mer est de
150 milles. Cette somme de deux dislances exige une certaine rectifica-
tion, car si d' Aghrimes à Narghik il y avait 80 milles , pour la distance
de Narghik à Djartmouda il ne resterait que 9 70. Je ne me déconcerte
point par celte erreur ni par Texorbitance que donne la soustraction, et
je vois quâ Djartmoud est Yarmout (4).
10. Au sud de Djartmoud, à iO milles, est Tembouchure de 5jJLl>j
i^j[S:>j Rothaîda ou Rhotanda (ro-Thaud) Tamise. Ce fleuve est con-
sid#able et rapide, il prend sa source près du centre de File, coule
près de iy^T^ Gharkafordh à 50 milles de sa source, passe au midi
de cette ville , se dirige durant l'espace de 40 milles à (»-m Jip
Londres, puis va se perdre dans la mer. A mon avis, pour retrouver
Gharkaford, il faut se détourner de la Tamise par la rivière Lea, vers
Hereford ou Hartford , Heortford.
(4) En lisant d'Aghrimet à Bargliik a 100 au Ueu de 4 ^* <>° aura de Barghik à DjartoiODda
50; et si l'oQ voulait aupposer toute la distance ^ liO au lieu de y3 150 on n'aurait de
Barghik à Djartmouda que ^ lo. Les variantes fixeront peut-être ces chiffres : mais 1» verai<m
français^ se moqtpe trop sobre pour cette sorte de variantes. Yarmout est nommé Artmaa «Uas
les épigraphes de l'atlas catalan. Voyez notre portulan général.
ANGLETERRE, 10. 85
De Djanmoada 60 milles, de Londres 40 et de Tembouebure de
RotjandaâOfODarriveà ^j^^ Dobres, Douvres. De Dobres à ^ySLx..*^
Elastiogs 70 milles. De Hastings à ^UJl. Schorbam 60 milles. De
Bchorcham à àjyjt Haîouna 60 milles \lisez ^j^) Hampton, Hamtun,
Suth-Hampton.
Du côlé de Torient (deroccident) de Haîouna se jeltela rivière j:u^^
3houaester. Elle prend sa source dans les montagnes qui s'étendent au
i^ntre de Tîle. Ghouuester, Winchester, est une ville située dans Tin-
Lériear des terres à 80 milles de Haîouna et à 40 milles de , »^, «jbL»
Balaboures, Salisboury, en se dirigeant du côté de Foccident. Je pense
qae c'est clair.
De la ville et du cap Haîouna à ^^ Gharham , Wareham, 25
milles. '
Ici, à la fin de notre course » nous allons succomber avec Ëdrisi , sans
savoir comment se tirer de ses propres filets. Il dit qu'au nombre des
ailles d'Angleterre , situées à l'extrémité occidentale et dans la partie
la plus étroite de celte île, il faut compter . L^.»mJu^ Sansahnar, à
dâ milles de la mer. Elle est jolie , florissante , et située sur le bord
d'une grande rivière qui vient du côté du nord, et qui se jette dans la
sner à l'orient de la ville. De là à Gharham , Wareham, en suivant le
jrivage, 60 milles, et au cap le plus occidental de l'ile oriental (près
de Djartmouda) 580 milles; au dernier cap de l'île (presqu'île) dite
^t^j^ Kornvalia, Landsend de la Cornouaille 500 milles. Cette par-
tie, la plus étroite, la plus mince, ressemble à un bec d'oiseau. De
Sansahnar à Salaberis, Salisboury, dans les terres du côté du nord,
60 milles , et Salaberis est située sur la rive orientale de la rivière qui
se jette dans la mer près de Sahsenar, Sansahnar. C'est tout ce que le
texte dit de la situation de Sansahnar.
La carte itinéraire lui donne quelque démenti. Salaberis y est à l'oc-
cident du fleuve; outre ce démenti, la rivière Âvon qui coule près de
Salisbury , tombe dans la mer à l'orient de Wareham, et entre Salisbury
et Wareham il y a si peu de distance , qu'il faut désespérer d'y trouver
une ville florissante répondant à Sansahnar. La distance nord de Salis-
bury, relativement à Sansahnar, est donc fortement inclinée et indique
une position plus septentrionale que celle de Sansahnar. Or, Sansahnar
étant placée dans la partie mince du bec, est occidentale à Salis-
bury, et n'a aucune relation avec la rivière qui baigne les murs de
Salisbury. Ces considérations décèlent une confusion dans la relation
d*Edrisi. H est cependant clair et incontestable que la ville florissante
de Sansahnar était à l'occident de Wareham , vers les frontières de la
Ck)rnoiiaille , dans la péninsule qui s'étend vers l'occident en forme de
86 EDRISI.
bec d^oiseau. Dorchester pouvait avoir dans ces temps reculés one
station maritime, qui, dans le langage des commerçants, donnait le
nom à la ville même, qui est appelée Sansahnar par Edrisi.
Nous n*avoDS ancun motif pour nous occuper de Hirlanda , Irlande,
de Reslanda, Thule ou Islande et Frisland; de la mignone Skosia,
Ecosse; elles étaient désertes, inhabitées, dit Edrisi (5).
France.
11. Les illustrations des lieux de la France, données par le traduc-
teur, sont toutes irrécusables. Il a laissé cependant quelques points
dans rincertitude ou abandonnés ; je pense qu'on peut parvenir à les
déterminer.
Dans ce but j'ai essayé la triangulation des distances de la France
(voyez n° 40 de Tatlas). Quatre faisceaux de triangles se sont formés
assez facilement. Un belge, Tautre pyrénéen, le troisième normand,
le quatrième du centre s'étendant depuis Orléans jusqu'aux Alpes. Les
deux premiers sans difficultés et raisonnablement, les deux autres affec-
tés de contrainte, de données inconciliables, et dans le faisceau central
d'une absurdité inadmissible. En écartant cette dernière et empêtrant
tant bien que mal par différentes combinaisons le faisceau normand , il
restait à réunir ces quatre faisceaux et à obtenir de leur réunion pour"
toute la France un réseau général, attaché à la triangulation d
rAllemagne. De nombreux essais m*ont convaincu que cette réunie
était impossible , si Ton ne retouchait pas le nœud normand poiH* l
rattacher à des proportions réelles.
Il est probable que ces nombreuses distances sont comptées en mille
de différentes grandeurs, petits et grands, doubles ou même qua
druples des petits. Les deux journées et 12 milles de Kommînge pa
Toulouse à Morlais répondent à 80 milles, et les 6 milles de Narbono
à St-Gilles répondent à une journée de Narbonne à Arles. Les 50
40 milles d'Avranche au Mans et à Seez , répondent à 70 et 80
(8) Les explications propogées par Willam Plaît, discordantes avec celles que nous avons donoi
sont les suivaolcs : Aghrimes Lynn régis, Baska fleuve Etk, Bargbik ip$wich, Djartmouda iVi
mtUh, Gharkaford ïf^elUngford ^ Ilaïuuna Corte ccutle, Saosabuar Chichester. Edrisi pouvait s'é;
rer avec sa relation sur Sansahnar, mais il serait contre toute vérité s'il se serait égaré jusq
Cbicbester. — Edrisi à l'occasion de l'île Scbaslanda (Antilia) se proposait de parler plus au long
l'Irlande mais il a oublié d'y revenir. Bakoui sait qu'Irlande est une grande ile où demeurent
madjous , elle a 1000 milles de tour (VI , 8). Dans le même climat il connaît l'île J-^ J ^
(Braxmil, Braiil),où l'on trouve de l'ambre; les babitanls vont dans une île voisine tirer leur
riture de l'écorce d'un arbre qu'on nomme maouta ou manha. Il ya une montagne élevée» mtwr
laquelle est une statue qui annonce qu'il ne faut pas aller plus loin sur la mer (VI , 6). V«/es
des géographes, chap. 151, note 13S; prolégomènes chap.
FRANCE, 11. 87
^-Malo à Seez et à Angers. Les 855 de petits milles oa lieues,
mesurant le circuit du sac breton, long de 80 milles bien grands. Ces
onsidéra tiens font, présumer Texistence de milles inégaux. De
'ooloase au Puy 250?... Quels sont ces milles, lieues ou stades aussi
lignons?
Mais comment discerner les différences des milles? comprendre et
éterminer la proportion de leur grandeur? Nous répétons bien de
liSy qee la description d'Edrisi ne donne aucune notice positive pour
ablir ane proportion quelconque, et elle ne fait même aucune dislinc-
on. La triangulation sicilienne d'Edrisi avait été composée sans dis-
notion de la grandeur des milles, et nous avons remarqué ailleurs que
rèa-loDgtemps dans la composition des cartes, la géographie se servait
e ces distances, comme si elles étaient toujours de la même grandeur
e milles.
Des erreurs par omission , par la prise d'une lettre chiffrale pour une
utre, contribuent certainement a Tincohérance de plusieurs points.
6 suppose des omissions fréquentes dans les grandes distances, dont
BS nombres des milles sont insuflisants , parce qu'après la forma-
ion de tous les réseaux de la triangulation , quantité de ces distances
ont en défaut, à cause qu'elles ne sont pas assez longues, et sont ré-
ablies lorsqu'on les complète par dixalnes ou centaines. C'est ainsi que
es^ 40 milles du Mans à Paris montent à J 140 (120); les ^ 60
le Bayeux à Maliz à ^ 160 (150); les j;UoO de Tours à Nevers
i ^ 150; les p 70 de Nevers à Angers à s^j 220. Il est bon d'é-
tendre les ^ 90 milles de la longueur du sac breton à ^ûS 190.
Le choix entre les doubles distances de Seez à St-Malo ou Avranche
Stant nécessaire, l'admission de ^ 100 entre St-Malo et Angers au
lieu de ^ 80, n'est qu'un changement de lecture au reste insignifiant
pour la composition. Une rectification ou correction plus essentielle
existe dans les disUnces de ^ 15 milles de Bayeux à Evreux, et dans
J i.;» 50 ou 45 milles de Bayeux à Rouen. La première de 15 milles,
placerait Evreux sous la porte de Bayeux; l'autre, de 45 milles, est
contrariée par les 90 milles de Dieppe par Tonque, à l'embouchure
d*Esterham ou Orne, qui perd ses eaux près dcBa yeux. En effet , l'insuf-
flsancede ces deux distances empêcherait la jonction de quatre parties
de la triangulation. Ces deux distances sont donc erronées ou offrent des
chiffres inexactement débrouillés. Nous proposons à chacune le même
chiffre de aï 105 milles, ce qui rapproche la distance de Dieppe à
Tembouchure d'Orne, et conserve dans l'écriture la ressemblance de»
lettres chiffrâtes, dés chiffres contestés.
88 EDRISI.
12. La distance de 80 milles de Nevers à Bourges n*est pas en ligne
directe, parce qu'elle est la somme de deux distances, de 40 de Nevers
à Auxères, et de 40 d'Auxères à Bourges, qui forment un angle. Dans
la composition de la triangulation centrale, il y a plus de peine avec les
distances de Nevers à Limoges , à Mont>Luçon et à Clermont. Dans que)
sens qu'on les tourne, on obtient une combinaison inadmissible* On
dirait que la combinaison d'autres triangles, qui place Auxonne sur la
ligne d'Orléans à Nevers , est un obstacle. Elle contribue beaucoup à
l'insuccès de leur coordonation. Mais si même on parvenait à reculer la
position d' Auxères à son emplacement vers le nord , la composition des
distances données de Nevers à Limoges el à Clermont ne serait pins
satisfaisante. C'est qu'il y a peut-être une erreur, ou , ce qui est plus
probable, le concours de milles inégaux. Ceux vers Clermont sont pe*
tils, et les autres vers Limoges sont trop grands, surtout les ^ M
donnés directement de Nevers à Limoges, demandent une extension de
^ 90 ou même de jj 117 en partant par Mont-Luçon.
Dans toute la composition de la triangulation , Nevers est un singu-
lier point central , point de départ , qui rayonne par douze différentes
directions. Malheureusement la moitié est en question, à cause des
omissions, des chiffres inhérents , ou à cause des diversités des milles.
Les rayons dont il sagit sont de grandes distances.
Dans la triangulation belge on voit aussi l'insuffisance de quelques
distances. De Gand à Bruges, de Tournay à St-Omer; Tune et
l'autre de ^ 15 milles sont à rectifier en ^ 55. D'Atringos à St-Omer
les ^ 25 demandent une lecture de ii 55.
On dirait que la triangularisalion des distances édrisiennes pour la
France est une peine perdue, qu'on n'en relire aucun fruits parce
qu'on arrive à l'explication de toutes les localités par le simple récit
de la description, comme l'a prouvé l'heurenx résultat du savait
traducteur. Je ne contesterai pas cette observation juste sous ce rapport.
Je ne dirai pas que la triangulation confirme l'explication de plusieurs
points : que jL-do Kastel est réellement Châteauroux; ^joJL* Màliz,
Meaux, à condition que la distance de Chartres soit en grands milles;
que la triangulation ramène ostensiblement ^y^y Bargosch sur Bazas
ou Baxas, Vesula et ç^l-v>jj Barmani, sur Bernay, Bernacum; que la
triangulation répugne d'accepter le double ^j,\j^ Kamraï, dont 70
milles de Louvain mènent juste dans la position de Cambrai, qui est
l'occident du Bhin , quoiqu'il ne se trouvepas sur ses rivages. En effet, à
Edrisi ne donne qu'une seule fois les conditions de cette ville, qu'elle est
grande et contient de vastes et beaux édifices, et s'il a ajouté cette vagœ
ALLEMAGNE, 15. 8d
Feïiiarqtte ^'ellé est à Toccident du RhiD, il Ta probablement ajouté
dans lé but de rectifier Terreur de la carte itinéraire, qui déplace
KamraS à Toriènt du Rhin, loin de ses rivages.
Tontes ces petites explications ne compenseraient pas ces combinai-
sons laborieuse^ des distances, si Ton n'en retirait pas quelque» autres
ayantages qui dévoilent la marché des connaissances géographiques, si
Ton ne lé$ confrontait pas avec les cartes postérieures et ne savait pas se
<x)nvâincre jusqu'àquel point cesdistanceshétérogènes, sansappréciatlon,
mal eoAG(^d5ttnées, dirigeaient la composition des cartes postérieures, sur-
tout en ItKlie, comririe nous Vavons rémarqué dans le mémoire précédent.
Reste à l^trôntér remplacement de jjXi ou jjHj de Balkir ou
Bal^ir sur mer et ^r^r^**^ Besnis dans le mont jura , et voici ce que
je remarque. Bal^hir se place près d'Olone sur Talmond , Tailemont,
qui à un bavre et la haute mer. Cette ville est située sur les rivages de
la Gtiifiardière, disent les ancieùnes cartes, et signalent de Guières aux
environs. C'est donc de cette dénomination que la station du commerce
avait s6h nom :daiis la Gulnard, dains la Guiere, bal Ghir. Mais aussi il
est très-probable que les barges d'Olone , marquées dans le Neptune
iVançais près de Sable d'Olone , engendrèrent le nom de Balghir : les
appellations obscures gagnent quelquefois Fusage vulgaire. Toujours
est-îl cefiain que Balghir répond à la station d'Ôlonc. — Ouant à Bes-
nis, comme la direction dès distances n*est pas indiquée, si on les
tourne à Tôuest, on trouve entre Dijon et Maçon, à des distancés
proportionnées, Bussy ou Bussy-bourg et Tisnan-bourg. L'un ou l'autre
répond à Sesnis.
Allehàgne.
15. Lorsque j'ai lu dans Edrisi que ^olo Nebsa ou Bensa était ta
capitale d'Allemagne, tout de suite Bamberg s'était présenté à ma vue,
et il devint le point de départ de toutes mes recherches ultérieures.
L'Allemagne n'avait pas de capitale ni de résidence. Aix-la-Chapelle
était déjà déchue de sa priorité, métropole comme Cologne, Mayence,
au moment des élections et des couronnements. La maison de Suabe
Succéda à peine à la maison de Franconie , et sous le règne de celle-ci ,
fiaBiberg, centre de la Franconie, devenait une ville principale, une
Ville de prédilection. Une tradition du goût national fesait monter la
fondation de cette ville à la sœur de Henri l'oiseleur, Baba , inventée à
Cet effet pour donner un lustre à Bamberg, et l'origine de son nom
l^aba, Babenberg, Papeberga, Bamberg.
Cependant Bamberg, du temps des Karlovingiens, était déjà la rési-
dence d'un comté, qui fut supprimé et réuni à la couronne entre 905
m. «•
90 EDEISI.
et 907. Cest au plas tard en 1007 qii*Heiiri II, de la maison de Saie, y
fonda un évéché immédiat du Saint-Siège. Sous la maison de Franconit
la ville et Tévéché acquirent une importance extraordinaire. Pluaîenis
des ducs principaux s*étant emparés du droit de prétaxation » on de la
recommandation du candidat aux élections, devenus ensuite électeurs
de Tempire, voulant donner la splendeur au nouvel évéché, se char-
gèrent des hautes fonctions héréditaires de cette principauté ecclésiasti- ^
que, les faisant remplir par leurs lieutenants, comme ils fonctionnaient ,^^
par eux-mêmes, en qualité de grands officiers du royaume, ainsi que la .^^j
cour épiscopale de Bamberg représentait en miniature la cour royale.^^^
impériale. Aucun autre évéché d'Allemagne n'était honoré de cetta^^^
façon. Les ducs prétaxateurs soumirent certaines villes en vasselage âES ^
révéque. Le duc de Bavière comme grandnsénéchal , la ville d'Amberg.
le duc de Saxe comme grand-maréchal , les villes de Wittembei^ ei
Mûhlberg, le markgraf de Brandebourg, comme grand-chambella^^^ .
prenant son investiture, promettait toujours de rechercher les fiefe poi^^^-^^
rendre Thommage due à Féglisede Bamberg, et il les dierche d*un bo^:^^^
à rautre de PAllemagne, quoiqu'il n'y a plus d'électeurs. De cette ^C^^^^Koi
l'Allemagne relevant de l'évéché, Bamberg acquit le droit de se qua^^^ ^^^
fier de capiule. Du temps d'Edrisi , plusieurs fois , en 4122, 1155, 110^ j^
et 1167, la diète se tenait à Bamberg. Mais ce qui est plusremarqaabii^^jf^
c*est que le commerce y croisait ses chemins, et ce qui le prouve ^^^ jl'
dernière évidence , ce sont les itinéraires indiqués par Edrisî, qui "^ xr^
versaient ^jo^i Babas, Babenberg.
La capitale Bensa, Babenberg, placée au centre, rayonnait cocr^un^
aucune autre ville d'Allemagne , de six chemins dans toutes les d& j^
tions, et ces chemins démontrent tout de suite plusieurs emplaceic^ei)(s
sans réplique. La triangulation débrouille le reste comme nous ra^i^m
tissu , sans toucher à quelque chiffre.
U. Les provinces qui obéissent au roi des Allemands sont au nom^
de quinze (p. 360)
L^y^^ Sasonia, Saxe.
^JjIj Bolonia , Pologne.
aJUj lisez 6^\j^ Boemia(«).
(8) Le traducteur «oppose dans Berania la Poméranie : mais l'errenr y est évidente. Si I'ob wn-
lait y Tôir la Poméranie, on ne l'aurait pas au nombre des proTïnces de Bohème ; cependant, dwt
pages plus bas (p. 371), Edrisi parle de la province Boemia, qui appartient à VJUemagne» etnecoiWH
aucune Berania. La Poméranie fesait alors partie intégrante de la Pologne, et n'accéda à l'cmpiw
qu'en 4180. Edrisi compte an nombre des provinces dépendantes de l'Allemagne, la Pologne. \m
Allemands Je lui ont dit ainsi : lui-raùme il n'insiste pas pour la seconde fois avec c»tt# asserti».
ÀLLBVÀGlfB, 14. 91
èjAliii Kalantarîa, partout ailleurs ajjLJLJjÎ KaranUria, Karin-
thie ()).
li^iQ Akoulia, pays d'Aquilée.
aLûvI Âbernesia.lisezcommeilest partout ailleurs ^<>Uj Bena-
dikta , Venise.
AiL£*«J> Doskana, Toscane.
juaJJ! Afransia , Frankonie.
jjli ja^Lj j^ pair, Babir, Bafir, Bavière.
ài)j^ Souaba, Suabe.
aCjjJ *^j^ Lohrinka, Lotarinka, Lorraine.
aJGj) ij^^Ip t*)^^ Louban, Lovanos, Loubania,paysdeLou>
vain.
•bo Braban,Brabant.
jLj» Haino, Hainaut.
aJj&P Bourgounia , Bourgogne allemande.
Il faut y ajouter ^ V r^t Afrisia, la Frisie, qu'Ëdrisi compte au nom-
bre des treize provinces du roi de France, quoique dans sa narration il la
regarde comme partie d'Allemagne. Les méprises de cette espèce sont
familières à Edrisi. 11 sépare encore une Allemagne ^JL,)) dans TAl-
lemagne (p. 357, 366, 373), en y comprenant certainement la Frankonie
avec la Suabe.
Nous ne nous occuperons point de la Bourgogne allemande, du pays
d*Aqailée; très-peu de plusieurs autres provinces, où le traducteur a
levé les obscurités : nous demanderons seulement s*il ne convient pas
mieux de reconnaître dans bu^l sl^*^\ Aghintz ou Aghista(p. 239,
244, 245, 362), au lieu de Aix en Suisse, Aosta, Augusta praetoria en
Savoie? Il serait aussi difficile , à notre avis , d'admettre Texplication de
Chkela par Bruxelles.
La Flandre appartenait au roi des Français. Elle comprend Tornaï,
Brouges, Sant-Mir, Kamraî, Atringos (Gourtray), Sankola sur la mer (s),
ei la ville principale Kand. Toutes ces villes sont reconnaissables tant
(7) Forme de prononciation connue dans les chroniques. Voyez la carte anglo-saxonne dans notre
*tlas, n* 26. De même dans horroesta d'Alfred on a : an othre liaelfe Donna thaere ea istbaet land
Carendre ; ensuite ao sud le mont qui s'appelle Alpis , près duquel Baegtbwara (Bavière) , land
B«maere and Swefa (Suabe) , and tbonre be eastan Carendran lande begeondan thaem westenne is
^«algara land : à Test est Carinlhie et au delà des déserts Beulgarie.
(S) La table itinéraire, à la place de Sankola, porte dM,^ par erreur et par Maissioa a'a pas
d'épigraphe à Sikla en Frisie.
93 BDBISU
par leujrs noms qiM par les distances. La Flandre touche à la FrisM
si on enferme dans les limites de cette dernière, la Zeeland et la
Hollande.
Dans rénumération des villes, la province de Hainaut est oubliée.
Cependant entre Kamraï, la ville de ^J^y {J^y^ji^ ^^^» Mouis»
Mouisch, Mons, y est renommée; le Hainaut est enclavé dans la
Flandre.
Encore le Brabant qui n'est pas déuillé, semblerait composer une
dépendance de la Flandre , si on voulait accepter la leçon /h»^
Lovanos (Louvain), donnée (p. 366) par le traducteur. Mais c'est
la ville de France ou de Flandre Louns (Laon), (p. 364, 365). De
Louns à Kamraî, en se dirigeant vers Torient, 60 milles (p. 365); de
Kamraï à Louns (et non Lovanos) , dont il a déjà été question vers Toc-
cident, dit Edrisi, 60 milles (p. 366). Ces passages sont identiques, et
Lovanos à la page 366 , est probablement une erreur typographique. —
Aussi lorsque je lis qu*Atringos est au-dessus de Kand et au-dessous de
Liège (p. 366), je suis tenté de présumer que ce Liège, qui est privé de
son nom en arabe, est Loqns ou LîHe. -— Quant au. Brabant, noua le
renvoyons au pays de Louvain.
La Bourgogne allemande monte jusqu'à Berdun (VerdRiJEi), où com-
mence la Lorraine , dans laquelle il n*y a que trois villes 'pommées :
Mas (Metz), ^L) i^L) Liadja (Liège) et Kamraï sur la riveV>GCÎdea-
taleduRhin. Au reste. Lorraine est une province peu consi^iéra1)le»
(p. 363) (9), \
45. Tout à côté de Lorraine s'étend une autre province plus êonsil^
rable, dont les limites poussent dans plusieurs autres circumvoisineP*
C'est le pays de ^IJ -L} *b^ ^^j^ iT^kl^ Lobanos, Looba^
nia, Louban, Liban, Lîan (p. 357, 366, 368, 373). La Flandre est bor-\
née par le pays de Louban (p. 365), et ce pays Lian est limité du côté du
midi par l'Allemagne, et entouré vers l'occident, par la Lorraine et par
la Bourgogne allemande; il confine vers le nord (de la Souabe) avec la
Souabe et la Bavière, et vers l'orient avec la Saxe et une portion de la
Crise (p. 366). On remarque au nombre des principales villes de ce
vaste pays : Bâle, Spire, Worms, Maïanse, Frankford, Mesla (Kassel),
Cologne, Utrecht, Hardbourd (Erfurt) et Bensa (Bamberg) (p. 367).
Or, c'est l'antique France rhénane, ausirasiane, Louvain était un
(0) Komraï est Cambrai. De Liège à Komraï en se dirigeant tcm le norcl.est 70 milles dit Edrisi,
et il nous autorise par centaines d'exemples de prendre celle direction à la renverse. — KomraT est
fitué sur la rive occidentale du Bbin. La carte itinéraire inscrit ce nom sur le Main , et autoriie de
transporter Ondeqard et Cambrai, vers Toccideot, et la rive serait celle de l'Etcauit.
I
ALLEVàGIIB, 15. 9S
tenfA une Tilte principale de cette France, sa capitale. La
aRadttian ea a coasenré le souvenir, et le langage vulgaire donnait
wn nom à tout un pays. Le langage public « ni officiel, ni des
letilnins eu des dinmîques, autant que je sache, n*a jamais compris
«r celte échelle le pays de Leuvain. Les récits des marchands, eom-
nerçants, voyageurs. Font apporté à Edrisi et aux Siciliens, donnant
ï ee pays une extension extraordinaire; du haut Rhin jusqu'à son em-
bouchure , et vers Torient jusqu'au fond de la Saxe, englobant toute la
Franconie, spécialement oubliée par notre géographe. Tous les récils
l'accordaient à lui donner cette extension, qui empiète sur les provinces
ta cenire d'Allemagne.
Le vague de ce langage populaire se déclare en y comptant Bâle, qui
îst une ville de la Bourgogne allemande ou sa dépendance , étant plu-
ùi de Souaba. Aussi Spire , considérée tantôt pour une ville de Bour-
gogne, tantôt pour celle de Souaba. De même Worms est une dépen-
laBce d'Allemagne (p. 362, 567, 569). Cette extension extraordinaire du
iftys de Louvain, dans la bouche des commerçants qui connaissaient
tue existence spéciale de Souaba, de Frankonia, fondée sur la réminis-
aoce de possession des Franks-rhénans, certainement était en même
eops nourri par quelque autre motif commercial ou industriel, qui
»Q<Aait de près l'intérêt, et portait leur vue sur Louvain, partout où
tel élargissaient ses frontières. Louvain , à cette époque , était déjà une
ôlle éminemment industrielle. Ses produits se répandaient au loin; si
»lle n'avait pas de ses propres établissements partout, les commerçants
f rencontraient des dépôts de son industrie. Je présume que c'est, là la
aume de sa colossale renommée. Si la qualification du pays de Louvain
M se décèle pas par d'autres monuments historiques, ^activité corn-
nereiale et industrielle ne pouvait y disparaître au dernier point.
C^osl aux historiens de Louvain de la retrouver.
tob Souaba a peu d'étendue. Ses principales villes sont : Ulm, Aims-
bourg, Bâle, Spire, Akrizav et Eskindja. Cette dernière i^sr^ a;^^^!
est une grande ville, située dans le voisinage du mont Djour (Alpes),
sur une éminence qui fait partie d'où le Danube prend sa source. Entre
cette source du Danube et Eskindja, on compte 12 milles. D'Eskindja
dans la direction nord-est à Ulm, on compte 60 milles et 100 milles à
Bâle ; 35 seulement à Akrizav (p. 246, 569). Les distances d'Eskindja,
60 à Ulm et 100 à Bâle, sont confirmées par deux passages, où la dis-
tance entre Ulm et Bâle est portée à 470 milles (p. 246) ou 460 (p. 567).
La Souaba touche à Karantaria (Karintie) (lo). Akrisar est réellement
(iO) Et Boo TaraBtaise , comme suppose le traducteur.
94 BDRISI.
la ville la plus importaDte de Karintie , et Eskindja fait partie d« coiu
province voisine (p. 249, 569). Askindja est cependant associée avec les
Grizons (p. 239)-
Gomment réconcilier tant de discordances sur cette grande vîUeî
Donau-Eschingen se présente cousonnanl avec Eskindja, éloigné une
couple de lieues d'UIm. Etait-il grand, sur une éminence? 11 faudrait
cependant trouver un espace pour longer le Danube 60 milles. La di&-
tance de Bâle ^ 100 milles, peut être réduite à ^ 80, à ^ 6 milles.
Geyssingen s'y présente rapproché à Bâle et plus éloigné d*Ulm, et il
peut proportionnellement compter 12 milles à la source du Danabe et
60 à Ulm. Mais Geyssingen éiait-il jamais grand, sur une éminence î (ii)
Tous deux appartenaient au comté de Fûrstemberg, dont Texisteiice
restait assez longtemps obscure.
16. C'est un singulier pays que T Allemagne ; indéterminé, il s*abtme
dans sa prétendue capitale. Il y a un roi des Allemands, auquel obéis-
sent quinze provinces , parmi lesquelles TAlIemagne ne se trouve pas.
Ces provinces composent TAllemagne ou sont ses dépendances. Mais
TAllemagne est au sud du pays de Louvain (p. 566) ; elle est entourée
au nord par la Frise, au couchant par le pays de Louvain, à Forient
par la Saxe et au nord (la Frise), par TOcéan (p. 575). Bensa (Bamberg)^^^^»
en est la capitale. Masela ^JUoL» (Kassel) placée au centre d'Allemagne«. ,^=^ ^
à cette dernière, deMayence, en se dirigeant vers Torient, il y s^ «
70 milles (lâ); de Cologne autant, et de Bensa 45. De Masela à Har-rM-.«ir
bourg, ville de frontière de la Saxe, vers Forient 60 nAilles. Masela
donc évidemment Kassel , centre de tout ce pays, qui s'étend jusqa*T
Focéan, Encore Worms est une dépendance d'Allemagne qui s'étend a .é^ ai
couchant de la Souaba (p. 256, 567). L'Allemagne n'a pas d'autre spéc^:» ^d
fication. Son nom est attaché à la Franconie. Englobée par le langa^ .«^^agi
populaire dans le pays de Louvain, elle se divisait en provinces situé» ^^ ^éet
à Forient du Rhin jusqu'à Focéan, qui composaient ses dépendances. «. ^35.
(44) Il 7 a un autre Geyssingen à trois milles d'Ulm, appartenant à cette citée. — > EichiDg'S^^ .^igea,
latine Danubii locio, vulgo Doncschiugcn.
(12) Dans le nombre des cvriositrs que nous relate Bakoui sur les villes des Franks, nous t.^^ troo-
Tons : i^^, LSj» Mafabakha (on pourrait lire Mafandja), grande ville des Franks dont ane p^ ^mrvutîe
liabitée, l'autre ensemencée, auprès d'un fleuve qu'on nomme Afn ou Zin. Il y a beaucoup .^msp jg
plantes aromatiques, poivre, gingembre, girofle; il y a des drachmes frappées à Samarkaod.^^^^ p2;>
K
Nasr eddin al asuani. -— Il faut lire le fleuve ,,^i^ et ,.».)» Rhin et Maïn , et la r///<,
Àçsr'L*^ MagandjOy Maîance, oii circulait la monnaie sammanide? et l'on y vendait Tépicer 5^<»ai
abondance. ~ Ibn Saïd relate qu'une ville d'AUemague , remarquable par les savants et les ph i/sM^
phes dont elle est le rendez-vous, s'appelle , ^.^^^£J Nafsin, Bafsin : c'est le nom de Bensi,Beni^
Bamberg. ^ "
/
ÀLLEXAGMBy IC. 95
La Saxe, du temps d*Edri8i, n^était plus ce pays où Charlemagne
détruisit rexistence nationale des Saxons. Cette antique Saxe, dans le
récit d'Ëdrisi , s'est éclipsée sous le nom d'Allemagne et de Frise. Celle
d^Ëdrisi prit son assiette nouvelle sur le territoire Slave , où elle cher-
:€hait longtemps à déterminer ses frontières. Les habitants de Saxe
étaient les indigènes Slaves et toute sorte d'Allemands. Déjà cent ans
auparavant, lorsque Boleslav-le-grand , en i014, indomitos Saœones
tdomuil, dompta les indomptables Saxons : tn flumine ScUe in medio
terrœorum, meta ferrea fines Poloniœ terminavit (Gallus, 1,6, p. 36), fixa
une borne de fer comme frontière de Pologne dans la rivière de Sala
au centre de leurs terres. La Saxe se centralisa autour de Sala, rivière
de la grande Serbie. Aussi les villes de Saxe nommées par Edrisi, sont
toutes des environs de Sala.
^y J>j& jjjit Harbour ou Hardbourd.
£j^^ ^y^^^ ^tt^j^ Dulbonrh, Dhulbourga ou Dhilbourga,
comme récrit la carte itinéraire.
slSyy^ i^j^jjJ y^tSyyi Nizbourg, Nirezbourgh, Niubourg.
jLû. à]\jb Hala.
^h^ Vurza, Varze.
i^J^y ^y^y Kazlaza, Kazlasa.
ildw» i\lXA ^JLju.» Maschesala, Maschla, Masla (clim. YI , 5, p. 575,
577, 581, YII, 5, p. 427). Cette dernière ville est aussi considérée
pour une ville de Boeme (VI, % p. 571) (15).
De toutes les villes prénommées de la Saxe , Hala seule se conforme
à la Halle de Saxe. Si Ton suivait les consonuances les plus rapprochées
on se porterait avec Niresberg à Mersebourg , avec Harbour à Harburg,
situé vis-à-vis de Hamburg; on trouverait Delbourg entre EmseiLippe
en Yestfalie saxonne, ou Dusbourg sur le Roer. Mais les distances s'y
opposent.
Hardbourd est évidemment Erfurt, éloigné de 70 milles de Kassel et
(0 de Bamberg. Au xvi' siècle, sur les cartes publiées en Italie, Erfurt
est appelé Erdfurd.
Niubourg est au nord de Hala à 40 milles et il faut écrire et lire
OjGjl^ ou ojOjuj Maidebourgou Naîdebourg, comme on appe-
lait cette ville archiépiscopale et principale de Saxe dans la langue
(13) Le traducteur trouve la seule Hala dans Halle, de Saxe. Le reste suivant son interprétation
M disperse et se fixe à l'extérieur. Masla dans Breslau de Silésic , Varze dans Odensée de Tile de
Fionie; Nizbourg, nommé Nirezbonrg, dans Norimberg de Frankonie, et nommé Niubourg dans
Nieborg de Danemark en Fionie (p. 37S, S81, 427, etc.). Qu'on me pardonne quand je contrarie
ces illustrations.
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56tiV
ALLEMAGNE, 17. d?
De Berna à Vourza , ville de Saxe, ^ 100 milles, et Berna est située à
^ 80 milles à Torient de Fembouebure du Rhin. Certes il n'y a pas
lieu de contester que Berna est Bremen,etles iOO milles à Yourza
peuvent être réduits à ^ 6.
Akaroulindja , la Karoulindja (prononcez Krolindja, Grolindgea),
située près de la mer, est éloignée de Brème 7 milles (imraenccs d'Alle-
magne, peut-étrej 17), et de Cologne 100, est évidemment Groningen.
Schwars est une ville agréablement située au bas d'une montagne,
avec des eaux courantes; éloignée de Erbourd 60 milles vers le nord,
et 70 de Sikla. Ce serait une hypotbèse que d'y voir Schverin, dans ce
temps-là érigé en évêché pour les nouveaux baptisés Obotrites Slaves.
Mais nous avons sur Veser, Schwarns, dont la leçon ressort de l'épigraphe
de la table itinéraire (u).
Edrisi dit : de Gand à Skela ou Schkela , ville dépendante de la Frise
^t d.ont nous reparlerons, en se dirigeant vers l'orient, on compte 80
milles (p. 565) (15). Suivant sa promesse, Edrisi revient sur celte ville
le la Frise, en examinant la Frise elle-même où elle est nommée Sikla,
$ikela (p. 575) (ic). C'est la même ville sans aucun doute.
Sikla ou Skela est une importante ville, située dans une plaine, dans
20 territoire agréable, possédant beaucoup d'habitations contigues, des
ptâîzars et du commerce : c'est le cenjlre de la Frise ; aussi , ses commu-
iloations sont rayonnantes de tous les côtés : 80 milles à Gand , 80 à
KJtrecht, 70 à Groningen, 80 à Schavarns, 70 à Quedlimbourg ; parmi
Laates ces villes an centre. Ces distances porteraient sa position vers les
snvirons de Cologne, vers le courant de la rivière Siegen. Mais dans
cette partie, il n'y avait à cette époque là rien qui conviendrait à une
ville importante; en effet, la partie est irop extra-frontière et trop
éloignée du centre de Frisie. Il faudrait reculer avec les distances
d'Ulrecht et de Groningen pour rentrer dans la Frise. Tekelenburg,
Cleves, Gueldre, Schylse localité dans le Ravenslein, Schoelcburg sur
Hase, offrent des cliquetis qui ne peuvent pas satisfaire l'importance de
l'époque. Pourrait-on se rabattre sur Aix-la-Chapelle (Skela, capella)?
je l'ignore.
La Bavière ^^Ij^JLj^ Baïr, Bafir, Babir (p. 246, 568, 570),
pays et province, est restreinte à une petite dimension. Ses principale*
villes sont :
(14) Je ne puis pas adhérer à soo explication par Schwarzbourg eu quelque autre autci obseitre.
(i6] Le traducteur y voit Bruxelles.
(46) En ce cas le traducteur la détermine par Celle ou Zelle de la bassa Saxe.
lit. 7
98 EDRISI.
y^yiji\ >'^^ir^^j Reinschbourg OU Rendjbourg*
^/A^^ïjU» ty^ Tebsava, Tebzava, Batsaa.
iJa Jipl Eîzerkartha, Izerkarta.
iJiki\j>jà i^^j^Ajù A^j^Aé^^ ij^Ay^ Gharmaîsa, Gharmasia, Gharraa**
schia, Gharmaïscha (p. 370). Elle est contestée à Bavière et ren-
voyée à la Karintie (p. 371, 375).
La première est évidemment Ratisbonne,Regensbourg. Quant aux
autres il faut les chercher (n).
Tebsava ou Batsau, à voir les distances *et la description est indnbi^
tablement Passau sur le Danube.
Izerkarta 60 milles de Passau, rappelle la rivière Iser, qui traverse
Bavière et sur laquelle il y avait plusieurs résidences ducales. Une d
plus considérables à cette époque était Landshut, qualifiée de ce
suivant Topinion populaire à la suite du château fort, considéré comm<
gardien (but, hûten) du pays (Land). Ce château avec la ville gardait d
même la rivière Iser et son passage , d*où vient Iscrwart, Isergard
Izerkarta.
Quant à Garmasia , ville d'Allemagne ou de Kariniie , elle est sitm
entre Bamberg et Vienne; Bamberg, éloigné 70 milles vers le no
ouest, Biana ou Vienne, 60 ou iO milles vers Torient. Sur cette
tion, presque à moitié chemin de Bamberg à Vienne, on trouve au
f|u Danube en Bavière un petit bourg Garhaïm, et sur le bord du Dana
à Tembouchure de la rivière KIon, en Autriche, une petite ville a
un château , plus rapprochée à Vienne , nommée Greim ou Grein.
foablement c'est la Garmisia. Krems est trop rapprochée à Vienne , I^oqt
j^uvoir convenir à la situation indiquée.
Karintia, dalmatu, djetoulia (serbia).
48. L'usage populaire, remontant par habitude aux traditions ^'■b-
eiennes, ne donnait aucun égard aux frontières d'Allemagne , que le
duché de Bavière fesait étendre sur ce point; il absorba toute la Bavi^^re
méridionale par la dénomination de Karintie. Cet usage populaire p:
domine tous les récits et les renseignements que les marchands app
talent aux géographes de Sicile, sur les régions formant les dépendaa
d'Allemagne et sur les pays ultérieurs. Bohême, Karintie et les auU:*^
(47) Le traducteiiT n*a pas remarqué ridentité de Tebsara atec Batsan et Ta expliqué une ftc»«»«
ton par Leiptig , une anUe foii par Passan , ce qui est juste. H 9 voulu trouver Stnttgtrd d« I
4aDs la bavaroise Eizerkarta , je ne sais par quel motif.
karihtia, it. 99
qui vont nous occuper, sont déterminés comme le comprenait le vul-
gaire. Mais souvent ces idées vulgaires ne sont pas suffisamment déter-
minées, se tordent dans des biais qui étendent les limites et déplacent
les villes de pays en pays.
Nous allons à la reconnaissance de leurs chancellants récits et nous
entreprenons un long pèlerinage , avançant jusqu'à Tembouchure du
Danube et jusqu'à THellespont. Trois routes seulement attachent à
FAllemagne ces régions immences, variées et jusqu'aujourd'hui mysté-
rieuses à bien d'égards. De ces trois routes, une perce directement
dans la Karintier l'autre parcourt les frontières de la Karintie et de la
Bohême, la troisième traverse la Bohême. Nous nous proposons de
sortir par les deux premières qui conduisent en Karintie ou en Slavo-
nie; à la fin nous rejoindrons l'Allemagne par celle qui traverse la
Bohême.
La Karintie, Karantania, appelée par Edrisi ordinairement Karantam
JSjVLiy (p. 246, 357, 568, 569, 575), ses variantes : ^jLkJy ïjUail^
b JtJlS est un pays et à la fois une province peu considérable; situé entre
e Danube et la Drave, il touche à la Souaba (p. 246). Gomme province
daché de Karintie), elle est peu considérable, sa ville la plus remarqua-
>le est j^j^j^^ Akrizav, à l'extrémité du mont Djouz, 5i milles d'Ulm
it 55 d'Eskindja , en se dirigeant vers le nord-ouest, Eskindja est dans
e voisinage du mont Djouz et fait partie de la Karantara (p. 569).
ilnsl que la Karintie s'étendrait jusqu'aux sources du Danube : mais
:*est une erreur, aussi bien que la distance de 55 milles.
Gomme pays, la Karintie est bornée à l'occident par le pays d'Aquilée»
lu midi par les états des Vénitiens , à l'orient par la Onkaria et au nord
3ar la Boeme (p. 572). Un vaste pays qui a ses subdivisions. Au nombre
le ses villes principales on compte :
îj^ljjo «jt^^ij Bedhvrra, Bedhravara.
ù\\^ Bouzana.
^jJaJ Neitherm.
aSjj^ Schebrouna.
^\j1Sj jjj"^!^ Kalgradoun, Belgraba.
ir^y^ ^y^T* ^^°<>1^> SinoUvi.
yjy 9j^ Bouza, Boura.
%^Lj Bilvar.
èù^yi^\ Estergouna, Ostrikouna.
Tillus.
\j^y^
iOO EDRISÎ.
iL^ .jXy y3 \ JLj s.*Xi li t Afraqk-bila , Afrabakbila.
" • • ^ •• • ^
/ v-JJ^j! y:^^] Abranbata , Âbrandes.
&..»•*>• ^ Gharmasia. ''
jhjJO Akrizav.
a.^)jl Akoulia; >^j Balam.
. y^\y y 31 ^^^ '>Jj-> \^ Frizizak , Afrizizak. Ces trois dernières villes
sont limitrophes de la Karintie (p. 372 , 375, 576, 378).
Mais il faut retrancher de ce nombre Neitherm, Ostrigouna et Scbe-
brouna, villes de la Bohême ; Titlus, ville de la Hongrie ; aussi plusieurs
de la Slavonie , située au delà de la Drave, qui est seulement enclavée
dans la récsion de Karantara et ne forme que sa subdivision; enfin G9r-
misia, ville d'Allemagne et de Bavière (\%).
Nous allons maintenant a la reconnaissance de tous ces lieux, saa^^h.
pouvoir dire jusqu'à quel point nous sortirons de la confusion.
19. Lorsque nous voyons sur la carte itinéraire Ostriboun (Gra
sur les bords du Danube, supérieur à Biana (Vienne); Agm placé
nord de Neulra; Tilul au midi du Danube, énormément éloigné
Be^grad , nous pouvons dire que les positions sont extrêmement dép
cées. Le texte de la description ne nous apporte pas de remède , ct^
ordinairement d'accord avec la carte. Réfléchissant sur les distanc
il est nécessaire de présumer dilférentes espèces de milles, de sortQ
la triangulation avec tous ces déplacements est possible, mais rap{^^
cbée à la réalité, devient presque impossible. Cette discordance et
embrouillement résultent des nombreux récits rapportés par des nfc--^ '^
chands. Ils étaient d'accord, mais l'interprète dont on se servi!, ne jf^^^
bien comprendre leurs narrations, les coordonner et trier : les géop^ï*-^"
phes n'étaient pas plus heureux dans leurs combinaisons. Cependant. U f
a des points certains qui peuvent guider la recherche, expliquer l'erreur,
et les investigateurs plus approfondis, avec des matériaux dont noos
sommes privés , ne manqueront pas d'achever l'explication.
/IS; Le traducteur à trôs-lieureusemcnt distingué plusieurs de ces villos, mais je ne pais consentir
à illuKlror Uedhwarn par Pctcrvaradein , Scliebro'ina pir Soprouy, Rouzana par Bcsclika , Biths par
Peths; Akonli» par Wuknwar, Sinolav par SohUiin, Kalam par Agram et Balam par Bello^r,
lorsque le tradu» leur lui-même retrouve rc dernier dans Bilvar : à toutes ces attribntions s'oppo-
sent les positions et les distances. — Continuons notre protestation sur ce point, duquel Dons
déborderons un peu vers l'orient. Banssin ne s'explique pas par Pantzova; ni Kalgradoun (qni n'est
que Belgradoun) par Galgotzium ; ni Raluia par Baab ; ni Kavorz par Karlovitz; ou KavorzoTa par
Kovar.
KARINTIA, 90. 10 i
De ce nombre assez considérable do villes énuraérées , il y en a peu
4]ui appartiennent à la Karintie, située entre la Drave cl le Danube, au
pays qui ne porle d'autre nom que celui de Karantara.
Nous avons déjà nommé Âkrizav (Gratz), placé au pied du mont
Djouz : ce n*est qu'à la fin que nous arriverons dans nos investigations
à Frizizak, situé dans son voisinage.
Nous pensons que Bouza est Petz (cinq), Quinquecclesiœ, Fûnfkir-
chen, Pietkosciol, cinq églises. Nous le signalons seulement pour le
moment, sa situation sera fixée, comme celle de plusieurs autres, par
des combinaisons ultérieures.
Belgraba est une ville remarquable par la beauté de ses édifices , est
ODlonrée de fortes murailles et pourvue de bazars. Elle est commer-
çante, industrieuse et fréquentée. Ses champs bien ensemencés pro-
duisent du blé et des légumes en abondance. On ne peut pas se mépren-
dre sur cette ville. L'unique de ce nom à laquelle elle peut être référée
est Belgrad, Bialygrod, Albaregia, Alba regalis, Stulweissemburg,
Szekesfcyerwar ; ancienne capiiale et résidence des rois de Hongrie.
Elle est éloignée d'Ostrikouna (Gran) 50 milles, de Bouzana 55 (p. 576),
et son emplacement est fixé.
Bouzana, ville de moyenne grandeur, sur le bord du Danube, est sur ce
poij3t la dernière dépendance de Karintie. C'est Boudzin , Bouda, Ofen.
De Bouzana à Bedhvara ou Bedhrava sur le même fleuve, on compte
60 milles. Le Danube coule au midi à partir de la ville Bouzana, puis à
i*orienl vers Bedhvara, puis se dirige vers le nord. La distance de 60
Xïiilles défend d'enfermer ces détours du Danube dans un trop étroit
espace, c'est l'indication du cours entier du Danube. Il va vers l'orient
jusqu'à Bouzana, se tourne vers midi jusqu'à Bedwara où il revient à
^51 direction vers l'orient, enfin (depuis Rossocastro) il monte vers le
ï>ord. Le nom de Voukovar est le seul peut-être, dans ce repli méri-
dional du I>ainube,qui se rapproche à l'euphonie de Bedhvara, Bedhrava.
Kl est dit que la Drave se jette dans le Danube entre Bouzana et
^teedhvara (p. 576), aussi confond-elle ses eaux avec le Danube non loin
^e Youkovar; le Danube venant de Boudzin, la reçoit entre ces deux
Avilies avant d'atteindre Voukovar.
20. En suivant le cours du Danube de Bedhvara à Titlous, on compte
"75 milles. Titlous, située sur la rive septentrionale du fleuve, est une
^illc extrêmement riche et peuplée. C'est une ville de la Hongrie, limi-
trophe de l'Esklavonie. Si ce n'est sa grandeur, au moins son emplace-
laent et son nom se sont conservés jusqu'aujourd'hui. Cette ville n'ap-
partenait plus à la Karintie, et nous nous trouvons dans sa portion qui
102 EDBIM.
porte U nom de ij^l&^l Sklavonia, dont Titloos est limitrophe, ef'
nous nous rapprochons à un coin de terre limitrophe à plosienrs ré^
gions. Il offre dans la description d*Edrisi des dlfiBcultés extrêmement
graves qu*on ne peut résoudre à la fois. G*est un dédale à peine extrica*
ble. 11 est étonnant comment Edrisi , sa carie , et certainement la table
ronde rogcrienne , ont pu y laisser tant d'obscurité et se noyer dans une
telle confusion.
Ce coin était à celte époque très-fréquenté et animé. Les croisées y
passaient en masse; les marchands s'y rendaient nombreux; une foole
de relations avait été sans doute apportée à Tinvestigaiion du roi Roger :
mais on n'a pas su les coordonner. Il semble qu'en les confrontant, on
a compris l'accord de différents récits, qui passaient et s'arrêtaient sar
différents points. Les uns, des narrateurs, s'arrêtaient à Belgrad, à Gra-
diska, à Ribnitza et leur récit fut à cet égard d'accord; les autres 8*ar-
relaient dans des localités intermédiaires, à Branitzova, à Kavortzoya,
et leur relation conforme, donna un autre accord. Tous étaient d*aecord
sous le rapport de tout petits milles , qui éloignaient ces places à des
distances excessives. On n'a pas conçu qu'il fallait faire fusion de denx
narrations : en les acceptant , on enchaîna seulement leurs renseigne-
ments par juxta position. D'abord ceux sur Bansin et Kavors, ensuite
ceux sur Belgrad, Gradiska et Ribnitza. Les distances déjà énormes par
leur nature , se doublaient par cette opération , et pour les adapter à la
longitude géographique, les géographes de la table ronde étaient néces-
sairement forcés à procéder à une réduction considérable que nous
ne connaissons pas , mais nous la retrouvons dans les indications de
journées de chemin. Au prime abord , nous allotts commencer par ûa
point connu de Belgrad, Alba graeca, Grlechisch ^eissenburg, Nand^
alba.
21 . De Titlous, en descendant le Danube, on arrive à Belgradoun. C'est
une ville florissante et très-peuplée où l'on voit de vastes églises. De là
à ljL»»^j&\ ou Uwjj J) Afrideska ou Âgridiska (Gradiska, Fandeu
Cuppae, à l'embouchure d'Ipek, Bek, Pincus), ville sur le bord de ce
fleuve, également importante et peuplée, par terre 75 milles et pap U.
rivière 2 journées ou 1 journée. D'Agradiska à Rabna ou Ri1k3B&
(Ribnitz), 2 fortes journées, équivalant à ce qu'on dit à 100 milles ^ ott
seulement 1 et demi-journée. Et de Belgrad à Ribna par terre 459
milles. Agradiska est située dans une plaine cultivée, riche, fertiieeii
grains et bien arrosée , elle est commerçante. Mais cette plaine est for-
mée par des montagnes qui s'étendent le long du Danube, c'est à lear
sommet que cette ville florissante est bâtie : on la compte au nombre
KARINTIA,^!. i05
des dépendances de Makedonia (p. 29i, 579), c'est-à-dire à Tempire
grec.
Ces trois villes florissantes n'étaient pas les seules à cette époque qui
iouvraient les rives méridionales du Danube. Il y en avait une qui sur-
assait leur importance. Branilzova, Bouranilzova , Brandiz (ancien
iminacium), située près de Tembouchure de la Mlava au Danube, vis-
-vis de Koslolatz , qui existe encore à Torienl de Tembouchure, regar-
ant les ruines de Tancien Brandiz, ville d'une ancienne peuplade slave
ranitzevtzi, Branitscbevtzi, que les latins appelaient Praedecenti,
raedevecenti, Praedenescenti. Les croisées du xi<^et xn* siècle, traver-
ient cette ville pour se rendre de Belgrad à Nissa. Possédée par les
>ulgares, avec la cbute de leur royaume en 1018, elle entra sous la
imination des empereurs grecs. Nommée par les écrivains byzantins,
beophylacle en 1081 , Anne Komnène en 1114, Kinname et autres,
irce qu'il fallait la fortiûcr et garder des attaques, elle était prise et
prise par des voisins. Reconquise par les Grecs, elle fut, en 1154,
taquée par les Hongrois qui s'en emparèrent en 1185, et la resti-
lèrent en 1186, quoique les Boulgares la comptaient dans la même
inée 1186, au nombre de leurs dominations. Cependant l'empereur
rédérik II, allant en Palestine, y trouva un lieutenant grec. Lorsque
s frontièreâ des Boulgars reculaient devant les Serbiens, Branitzova,
>inine capitale d'un canton , d'un palatinat, entra dans les mains des
erbiens. Il est probable que vers 1189, Nemania, chef ou roi des
erbes, l'occupa avec quantité d'autres places au delà de la Morava.
.e lieutenant de l'empire grec cessa d'y fonctionner, les Serbiens pos-
édaient le canton et sa capitale encore en 1275, puis les Hongrois,
«''importance commença à décliner, et sous la domination turque, Id
ille tomba en ruine : une portion seulement prolonge son humble
existence sous le nom de Koslolatz (Schafarjik, Slovien. Slaros. II , 5,
[30, p. 612,615).
Vers l'orient, au canton de Bransin, touchait un autre aussi très-
renommé àla même époque, avec sa capitale Koutshevo. LesKoulschans,
Koutschevans , appelés par les latins Guduscani , Goduscani , lui don-
nèrent l'origine. Dans le xn* et xni* siècle , les fastes de la Hongrie et
dfe la Serbie en font une mention fréquente. Les Grecs, les Hongrois,
les Boulgares , à la fin les Serbiens se mettaient en possession de ce
canton. En dernier lieu il est mentionné en 1459, un comes Cucie-
wiensis et Branicevensis. La rivière Pek ou Bek, Ipek, traversait ce
canton pour se jeter dans le Danube près de Gradiska. Aujourd'hui il
n^en reste qu'un souvenir dans la montagne appelée Koutschaî, et dans
un hameau nommé Koutschaîna (Schafarjik , p. 615, 614). On y voit les
104 EDAISI.
villages de ce canton , Krousevitsch et Krivatscha. Je pense que no
trouvons ces deux cantons avec leurs capitales, appelées par Edris
Bansin et Kavortzova. Ces deux villes sont situées sur le Danu
sur ses rives méridionales ; elles sont populeuses , riches et considéré,
comme les mieux habilées du pays des Hongrois (p. 577).
22. De Titlous à Bansin on compte , en se dirigeant vers Toriei
75 milles (p. 578). Bansin ,.,^>^^i:j ,.yi^^ /.v^^^'s^ située sur la r ^
méridionale du Danube (io), ville célèbre, comptée au nombre
plus anciennes résidences (des.au lorilés, d'un lieutenant); commerçai
industrieuse, habitée par de savants Grecs, ,.t«Jb .^t LJi:^ •••!
entourée de cultures et d'habitations, où le prix des grains est
tammeut modéré, à cause de leur abondance. De Bansin à Kavorv.^ ^
Kavortzova JU jjli jj^l? 'jj^j'-^ ^'*^*^ importante sur le Daa^K .^
vers Torient 60 milles (p. 577), et de Belgrad à Kavorz 70 mill^s^ ^^
2 fortes journées; par le fleuve la distance est moindre (p. 579). Ti&l^^^^
est donc à Toccident de Kavorz , aussi le fleuve Tessia se jette dans /^
Danube , à Toccident de Kavorz et de Bansin (p. 580) (se).
De CCS données de deux relations juxtaposées par Edrisi, les distancés
s'enclavent de cette manière :
Titlous.
Belgrad. Bansin. Gradiska.
Kavorz.
.
7S mitlei. 60 milles.
70 milles, 2 joarnées.
Ribna.
60 milles.
i joui née, 78 railles.
S j. i </s j. iOO m.
Neokaatro.
S </a journées.
FraBkbiU.
480 milles.
70 milles.
0
70 milles ou iOO milles.
Les journées y sont comptées par 55 milles, 50, 66 et 75 millM.
En comparant les journées, on a de Ribna à Kavorz une ou une defli-
journée; de Kavorz à Gradiska, une journée; de Gradiska parBaDSin
à Belgrad, une journée, celte dernière double. Chacune comptée à
25 ou 50 milles, il en restera de Belgrad à Titlous une 40"* de miltos.
(49) Car ce n'est pas Arinia , mais Banssin qui est situé sur la rive méridionale.
(10; La traduction dit entre KaTorz et Banssio , la caite itinéraire le confirme : il fout coapltf (i
au nombre d'erreurs.
SLAVONIA, 25. 105
Atre ou trois et demi-journées entre Belgrad et Ribna, font
lies; or, une journée est réellement montée à 55 milles. Cette
itation explique les bords du Danube, où se jettent Sava,
j Mlava, Pek; elle détermine les situations de Bansin, de
oya. On ne peut pas arriver à un résultat sérieux et positif, en
mant dans la consonnance des noms, rapprochant à des localités
eurement renommées, dont rexistence, du temps dTdrisi, serait
se. Bansin, résidence de savants Graîkioun (Grecs), est sans
doute Branzin, où résidait un lieutenant de Tempereur grec, et
e de trouver ou d'inventer pour Bansin une autre position,
ation de la situation de Kavorz , est une conséquence de celle-ci.
les qui nous ont arrêté si longtemps, ne sont pas de Karintie ou
renie, elles sont plutôt villes de la Hongrie, momentanément
îes par les Hongrois. H me fallait cependant y pénétrer et déler-
leur position, car de ce point nous allons faire des courses dans
ie de Karintie qui porte le nom de Slavonie , ensuite nous ferons
s excursions.
Mais avant de m*engagcr dans Texplication de la Slavonie,
. prévenir mes lecteurs que la triangulation n° 42 de mon atlas,
cartes explicatives, offrent une grave inexactitude et de fausses
"étations qu'il faut rectifier et corriger. A peine écrivais-je la
[ue, qu'il ne suffit point de confronter les consonnances des noms
les pour expliquer les anciens , que je me trouvais privé de ren-
nents antérieurs pour distinguer les positions indiquées par
dans la Slavonie. Réduit aux indications mod*ernes , je trouvais
bila d'Edrisi dans le seul Yragolevitsch de Serbie , le seul lieu
es .consonnes correspondaient suffisamment avec Âfrankbila.
it de cette découverte , je claquais victoire ; triangulation tor-
, explications controuvées furent inventées avec le succès qu'en-
une imagination étourdie. C'est trop tard enfin que Frankavilla
sente à mon attention, pour expliquer et indiquer la position
•ankbila. Il est donc nécessaire de reprendre l'explication
sitions de la Slavonie et avant tout de coordonner sa triangu-
et la rendre plus conforme à la description d'Edrisi. Par
pération, nous arrivons , comme le prouve la figure ci-contre,
rocher Frlsisakà la distance de 100 milles de Rendjbourg, à
le la composition antérieure, n'* 4-2 de mon atlas , n'a pu parvenir,
e de cette triangulation , appuyés sur les positions danubiennes
ms avons fixées , nous allons examiner la Slavonie.
III, 7.
.u-^^^'*"""-
f Cuw " *^ t *
Vive»»''"" „ »* «' '" ^; m »'>°*'" »«" "
SLAVOIIIA, 94. 107
chercher Sinolays dans la partie occidentale, où, dans la chaîne des
montagnes , on trouve ça et là des gisements de diCTércnts métaux , et
particulièrement de fer; ils sont aujourd'hui peu exploités. On y trouve
Saladnak, Selidnik des cartes anciennes, Slatina des modernes, et
plusieurs noms analogues.
De ce point de Sinolav, deux chemins noua dirigent par la Slavonie.
De Sinolav à Akoulia, il y a 70 milles, à Afrankbila 80, et d'Âfrankbila
en se dirigeant vers le sud-ouest à Âkoulia 70 milles (p. 577, 578).
Frankbila est située au midi de Tilious , car la route à cette ville allait
de Titlous vers le sud. Frankbila est éloignée de Bansin 70 milles,
également autant de Kavorz; mais comme Kavorz se trouve plus ;\
Torient, on comptait de Kavorz à Frankbila 100 milles (p. 577, 578).
Toutes ces directions s'appointent sur Frankavitia dans Francocliorion,
ancien Sirmium, Mitrovicz d'aujourd'hui (âi). Frankabila est considé-
rable, ses habitants boivent de l'eau de puits et de fonlaine, jouissent
d'abondantes sources. Mais ce qui est plus important à notifier, c'est
que pour la plupart ils mènent une vie nomade s.^1.à3I L^t 1&
ïjtJu)) (p. 577). Cette remarque opportune pour les citadins de
Frankbila s'étend aux habitants des campagnes de nombreux pays, et
explique bien des choses.
24. De Frankbila (Milrovitsch) vers le sud-ouest à Âkoulia 70 milles.
Autant il y a d' Akoulia à Kalam ou Balam ; 50 seulement vers l'occident
de Balam à Frizizak et de Afrizizak 100 jusqu'à Ratisbonne, ville de
Bavière. Celte série de villes est limitrophe de la Karintie (p. 578);
elle forme une chaîne correspondant à ses frontières occidentales.
Koalia, possédant de vastes dépendances, assise sur le penchant d'une
Qiontagne, également éloignée de Sinolav, Frankbila et Balam, est
fortifiée contre les attaques des Vénitiens (p. 578). Balam ou Kalam,
grande et belle ville, entourée d'eaux courantes et de vastes dépen-
ianees, est située sur les bords de la Drava (p. 575). Frizizak enfin , sur
le cbemin qui conduit vers Ratisbonne, est sans aucune contestation
Pr^sak, ville dépendante jadis de Tarchevéché de Saitzbourg, située
(M) Je trouve dans Schafarjik ^staroztt. slav. V, S3, note 18, p. 667), qu'on dislingiie Frauka-
villa de Frankocborion. Ce dernier mentionné dans les années ilS'f, 4154, par Nicetas cboniates
[ed. Yen. p. 10], indiquerait Sirmium. L'autre mentionné dans l'année 4189, par Ansbert, serait
t*aDGien Badalis ou Pudalia appelé dans les temps modernes Nagy-Olasc, >iaygaI1as, Nangelos;
lladielos, dont la situation est presque sous les murs de Sirmium , Hitrovitscb. Je pense , que cette
^sUnction a été faite par précaution de ne pas confondre les noms différents en apparence et que
i^rankbila d*Edrisi rend cette distinction inutile. Franka villa n'est pas Pudalia, Madielos, mais
^fmiaoi Mitrovitsch , située dans Frankocborion , dans une contrée franke, dans laquelle vers l'an-
née 790, les Franks occupèrent Sirmium qui est leur ville , Franka villa , Afrankbila.
J08 EDRISI.
dans le voisinage d'Âgradiska , Gratz. Kalam oa Balam était ani emri'
rons de Waradein, pour sûr Pettau, Poetovio. Quant à Koulia, je pro-
pose Louka-Bania, Bania-louka, Vlamme-louka, Yania-louka (ss); mai»
je ne défendrais point mon assertion si l'on trouverait quelque dioee
de mieux. Cette série de villes passe par le milieu de la spacieuse
Karintie, et cependant Edrisi dit qu'elles sont frontières. Ofi le lui a dit
ainsi, parce que ces villes se rangent sur la frontière de Windisch-mark,
(Windisch-Gratz, — Landsberg, — Feistritz ou Bistrscbitz, etc.), Marca-
vcndica entre Save et Drave.
De la ville des Nomades Frankbila , à Abrandes ou Branbata , od
compte 50 milles. Les apparences phonétiques portent ma vue sur la
ville Nerenta, et je pense que c'est juste, quoique la distance parait
ctre insuffisante. La population de cette ville est sédentaire, possédant
des bazars, et la ville est située dans un bas-fond, juste au pied d'une
montagne (p. 577), comme c'est effectivement avec la ville Narenta.
De Branbata à Bania 75 milles. Bania est une petite ville bien fortifiée
sur les bords de la rivière Lina ^ qui a son embouchure (dans le
Danube) entre Ravorz et Belgrad (p. 578, 579). Cette rivière Lin, nom-
mée par son propre nom, se jette dans la grande rivière nommée Drin,
qui elle même se perd dans la Save; cette dernière tombe dans le
Danube sous les mnrs de Belgrad. Bania est une dénomination gêné- -
rique d'un grand nombre de places. Tout près de la ville PrelKH, sur ^
les cartes modernes, on trouve sur la rivière Lin une localité assez -a
obscure, Bana, qui a p« avoir plus d'importance dans les tempSiSK
anciens. En effet, de ce point de Bania (Bana) à Belgrad vers le nord ^r
5 journées, et à Kavorz iOO railles (p. 579).
De Bania à Al bana, ville florissante, 90 milles, et d'Albana à Babiu^j
(Ribnitza) iâ9 milles (p. 579). Ces distances facilitent à déterminer Is^
position d'Ablana, Blana, Bel lina, située non loin de i'embouchun^^
de Drin, vers l'occident.
De Blana, en se dirigeant vers le sud à Ghano^U ville prise ^^
ruinée par les Vénitiens, située sur les bords d'une grande rivière, ««
4- jouruées par terre et à 2 journées par eau; de Nissova 4 joui
(p. 579). Je ne puis constater par les événements connus dans I ^ t
chroniques, si les Vénitiens, qui conquirent à celte époque la meillen^^Eiy
partie de l'Esklavonie, pénétrèrent jusqu'aux rives et au delà de
Drina; je ne sais pas non plus si Ghauo, une fois ruinée, s'était dei^ ws
relevée de sa destruction ; mais ce qui est certain, c'est qu'aux envir ^dds
(22) Il semble que la carte qoi se trouve daD» 1 édition de Ptolémée de 4813, l'appeUe Md^fe
regalis.
i
DALKATIA, i5. 109
4Je Possega od ge trouve à égale dislance de Bellina et de Nissa, et que
c^est là que devait être Ghano ruiné ; jo vois enfin dans Tensemble
«Dtier, que ce réseau de distances , que nous avons composé pour la
Slavonie, répond à toutes les conditions de la description d'Ëdrisi,
vetrace retendue que la voix vulgaire donnait au pays, et détermine la
situation des villes , dont les noms se sont conservés ou subirent les
changements qui effacèrent les anciens, en substituant d'autres noms
aujourd'hui connus (^5).
25. On voit que sous le nom de Karantara , de Karintie sont décrits
les pays au sud du Danube ; que la Karantara renferme tous ces pays ,
où au sud du Danube, s'était établi la race Slave, pour cultiver la terre
dans les parties occidentales , pour les cultiver et profiter des pâturages
dans les parties orientales. La partie occidentale est la Karintie propre-
ment dite, d'abord incorporée dans la Bavière, ensuite détachée comme
duché. La partie orientale décèle une certaine subdivision. La Moravie
panonienne porte le nom général de Karintie, ensuite la Skiavonie, qui
s'étend au sud de Drava : elle contient la Kroatie et la Serbie dans les
limites qu'elles avaient anciennement, du temps de Constant. Porphyre-
genète; leurs frontières orientales passent à l'ouest d'Ibar et de Morava,
et jusqu'aux embouchures de Sava et Drava. (Voyez Slavie du \* siècle
et comparez les cartes de notre atlas). Le langage vulgaire tenait à celte
ancienne délimitation. Edrisi connaît et dislingue les Kroates et les
Serbes , mais il néglige de distinguer leurs possessions; elles sont com-
prises sous le nom de Skiavonie. Mais les géographes de Sicile, suivant
Tancienne habitude romaine, distinguaient les rivages des possessions
Kroato-Serbes , par le nom de Dalmatie , ainsi que dans la description
d'Edrisi figure encore un pays spécial , Dalmasia, où les conquêtes des
Vénitiens faisaient des progrès. Dans ce pays il connaît la ségrégation
(23) Le traducteur proposait de voir dans Àkoulia, Wukowav; dans Afrizizak, Verotze; dans
Ablana , Albana ; et dans Ghano, Novi. — Je ne sais pas à quel Novi pense le traducteur. On sait
que les Vénitiens possédaient Novi situé dans la Eroatie au fond du golfe adriatique. Dans l'in-
térieur il y a plusieurs Novi. — Les anciennes cartes (Ptolémée édit. 4543}, donnent dans l'intérieur
des terres en Serbie , Novi , placé à côté de Montenovo, entre les sources d'Ibar et Drin , non loin
du mont Noir. En compulsant les cartes postérieures je trouve le nom de Novi remplacé par Houi
et transporté à l'occident de Drin (Ptol. deRuscelli, 4664), ou bien en lui conservant le même
emplacement on l'appellait China (Grsecia Jac. Castaldo in theatro ortel. 4750). Cette dernière
appellation répond , on ne peut pas mieux à Ghano. Mais Montenovo par toute la suite des cartes :
de Mcrcator, Hond , lansen , Blcauw, Witt , Coronelli , Delisle, Vangondy, est régulièrement place
en Serbie ou en Bosmie, au sud ouest de Novi bazar, ainsi que Novi , China , ne serait point à égale
distance de Nissa et Bellina , et ce Novi proche de Montenovo paraît y prendre le nom de Lodi-
novi. Au reste tout y est conftis , obscure, à rechercher historiquement. Les Vénitiens en guerre
avec les Hongrois , ont-ilt pénétré dans la Serbie 7 je ne puis plus m'enga^er i résoudre cette
qiiMUoii.
ilO EDaisi.
de la Kroatio, il indique ses limites sans mentionner qu&du reste les
Serbiens étaient possesseurs. Ce pays étant une portion de la Slavonie,
nous allons le parcourir par un examen rapide.
Edrisi parle des conquêtes des Vénitiens et de leurs possessions,
mais ni sa carte itinéraire, ni son texte n'ont indiqué la position de
la cité elle-même. Il dit que de èJiL^ Kamalga (Gomacchio) , il y a
44 milles à !yli Fatoua (Padoua), ajoutant que cette Tille (continen-
tale) est de tous côtés cnlource par la mer. Ensuite, de Fatoua il y a
25 milles à Jb J^t Alrila (Trevisc), et 18 milles d*Âtrilla à ^^y,
Bonsa (Mourano, ainsi appelé par son porto Bouso) ; vient ensuite tr»^\S
Gradis (Grado, vîs-ù-vis d'Aquilée), 50 milles de Bonsa; et^CJI^Lls^l
Âstidjanko (Starazano) à 5 milles de Gradis, place forte , bâtie sur les
bords d'une rivière dont le volume des eaux est considérable , bien que
sa source soit peu éloignée (Timavo fons et porius). Cette ville impor-
tante, habitée par des militaires, des marchands et des fabricants, où
Ton équipe des ttottcs pour des expéditions guerrières , est Tentrepôt
principal du pays de ^^^ t Âukoulaia (d'Âquilée) (Y, % p. 247, 248).
Ainsi il a tourné Venise sans la nommer. On peut présumer que soo
texte, dans ce passage , est dépouillé de la description de Venise, de
laquelle il ne reste que la mer qui entoure Padoue de tous côtés. Cette
présomption devient à mon avis une certitude, lorsqu'on rencontre à la
fin de ce passage une lacune, qui se retrouve dans Tabrégé de la des-
cription d'Edrisi et dans le manuscrit asselin.
Jaubert s*est borné à donner la transcription de cette lacune d'après
la version latine, p. 222, 225, sans aucun examen (p. 248). Cette lacune
cependant contient une description de Tlstrie, dont les rivages sont
détaillés par la carte itinéraire. Voici ce qu'elle dit. De regionibus auiem
medilerramis Aquileiœ sunl Verona quœ et Verana dicilur Ajy e|
i^jiij»lL (Bufalo et Tamtos, Taïamento, Tagliamento). Urbs Verana
magna est distatque à [^yaj>lL êtatione hrevi (de même que de
Bufalo) : et iam ah urbeeadcm (Verona) ad urbcm aLo (Bulalojix m.p.
et ah hoc ad Ammelam sive Angelam, cujus incolœ sunt de gente franco-
rum, m m. p. ab Ammela ad aL^ (Kandila) francorum, m m. p.
et ah hoc ad Veronam seu Veranam, n m. p. Ce sont les éublissements
francks, entre Vérone et Boubalo. Il est remarquable comme Edrisi^
distingue ces Franks des indigènes Italiens ou Slaves. Vérone et Bon- —
halo ne se trouvent pas dans les cartes modernes ni anciennes, et j
n'ose pas hasarder l'explication par quelque appellation analogique
petites localités; on y trouve cependant les villafranca, castelfranca ,
existent jusqu'aujourd'hui, comme souvenirdes anciens établissemen
DALMATIA, 26. ili
Verum de maritimis regionibus est d'hiria (Capo d'Istrîa) ^itcB diilai
^^^pUb (Taîamentoj urhe AquUeiae xxxiii m. p. Â la place d'Istria, la
carte poMe #-»JL^ Saliros (S. Hllario?) — Ab hoc, ad urbem Moglo quœ
et Vmago didtum m. p. La carie porle^L*^! (Umago, Humago). Parilet
àb urbe Verona medilerranea ad urbem Vmago marilimam, cujus incclœ
tunt franci, xviii m. p. Ab hoc ad urbem Geniebona, quœ rencens est et
ad francos pertineL II faut lire ^^Xss. Djentenoba (Citta nova) :
et a Gentenabo (Citta nova) ad Parengio, quœ eliam Parenzo vocatur,
xu m. p. La carte porte inexactement ^9 JjJ (Parenzo). Et ab hac ad
Ruigo, dans la carte y^j. Rigno, ou^iL^j Robigno (Rovigno) qiue ad
frankosquoque spectat, xv m. p. Ab hac ad urbem Polam, Jo xii m. p.
Ab hac ad Molodiamy la carte porte ^^^j^y Molodnia (Medolina)
XVI m. p. Ab hac ad Albon (Albona, omis dans la carte) xi m. p. Ab hac
ad Flamona d^\ Aima de la carte (Fianona) vi m. p. A Flamona ad
Yrana àjjyi] et Âvrana (Yrana) quœ ullima est inter regiones Aquileiœ
maritimes , iv m. p. (Edrisi, p. 248 de la version de Jaubert).
26. D'el Avrana ou l.b^ Lobara (de la p. 285, V. 4.) à ^jS.y Boukari
(Buccari), 10 milles. Cest la première dépendance de la ^Uâ.
Khroasia, qu'on appelle aussi L^U^ Dalmasia.
De là à »^^ Koubara ïjjLS Kabra (de la p. 261) (Fabra, Pribour),*
ville considérable, sur le penchant d'une montagne, 16 milles.
De là à h^ Sounna , uL^ Sana (de la p. 288, V. 4.) (Segna, Zeng),
jolie ville, dont les habitants sont Slaves, et possèdent beaucoup de
navires, 50 milles.
De là à i£JL:uMd Kastilaska, petite ville, dont la population slave
ne possède que peu de navires, 15 milles.
^*
De là à ïh..^ Maskala a^^tj Ja/^^ Maskala weasia (Maluicin,
Malvesin des anciennes cartes , Smoliana plus correctement des mo-
dernes), appartenant aux Dalmates, 20 milles.
De là à jjûJil Arnes (Vroniak au sud d'Iablanalz), ville de moyenne
grandeur appartenant aux Dalmates et possédant quantité de navires,
15 milles.
De là à \^L^ ^Lâ Sato ou Satva (Zusan au sud de Carlopago),
appartenant aux Dalmates , qui y possèdent des navires dont ils se
servent pour des expéditions militaires, 20 milles. (V. 5. p. 266, 267).
Vient ici ^j^j^j^^^ Santoboulos (p. 261 ), qui indique les scopuli,
scopulis, à rentrée du golfe de Novograd*
112 BDRISI.
De Salo à jjJ Nouna, qu'on nomme aussi ^jo:^ Ninos (Nina,
Nona), ville considérable et naturellement très-forte, 20 milles.
De là à 9j^Lx Djadra (Zara), ville étendue et vaste, dont les habi-
tants sont Dalmates. La mer baigne les murs de la ville, (il paraît que
c'est Zara ta nouvelle).
DeZaraà^!^^ Dograta (Dratschevatsch , vis-à-vis de Novigrad),
ville dont la population est mélangée de Dalmates et de Slaves, 50 milles.
De là à ^LjLw Sanadji (Sebennik), ville considérable, rendez-
vous des marchands qui y font des expéditions par mer et par terre,
20 milles.
De là à ^j^jjl Ourgouri, qu'on appelle aussi jj!^ J Lourgaro,
(l'ancien Prsetorium, vieux Trau près de Rogoznilza), ville remarquable
par ses agréments et par ses fortifications, peuplée de Dalmates qui se
livrent au commerce et entreprennent des voyages lointains, ainsi que
des expéditions militaire^, 50 milles.
De là à ij^jàJ Targoris, jjj^jf Borgorouz (lisez Targoronz,
qu'on nomme aussi yj,jàJ Targori (Tragurium, Trau), lieu dont les
habitants, d'origine dalmate, sont constructeurs de navires , guerriers
ou marchands, 6 milles.
De là à ^Lwt Asbalato (Spalatro), ville florissante, vaste, com-
merçante, possédant des vaisseaux de guerre, 12 milles.
De là à jxju^ Sigano, leçon fautive, la carte et un autre passage du
texte (V» i, p. 287) portent yxZw Stagne (Stagne dans la gorge de
Sabionccllo), ville peuplée de Slaves, qui sont pour la plupart naviga-
teurs, 25 milles.
De là à ^^j iPj^\ Ragorsa, qu'on nomme Iwj&j Ragousa,
dont les habilanls sont Dalmates et possèdent des navires de guerre,
50 milles. C'est ici que se termine la Khroasia (Y. 5, p. 267, 268).
De Ragousa à jjJ^Ld Kattaro ou jj^li Kadharo (Cattaro), ville
florissante et peuplée de Dalmates guerriers et voyageurs, qui possède
certain nombre de navires, 20 milles.
De Ik k ^jLp\ Antibaro (Ântivari), lieu habité par des Slaves,
50 milles.
De là à iu2k^>> Deloudja (Dulcigno), ville importante de l'Esklavoni
peuplée d'habitants de Ladhikioun (à cause de la ressemblance du no
d'Oieinium), 70 milles (distance excessive) (V. 5, p. 268).
Vient ici Leso à l'embouchure de Strina (Drin), et de Delon
à Owtj^t Âdrast (Durazzo) des Franks, 80 milles.
DALVATIA » t«. lis
Dans la description de la chatne de montagnes qui trarerse la
Dalmatle, Edrisi indique quelques villes de Fintérieur. La chaîne da
mont yJi Leso s*étend dans la direction de w^^l .^ Drast (Dourazzo)
jusqu'à 40 milles de Djadra (Zara). Elle est située à 15 milles de Dou-
razzo. De la yille de Leso à Deldjînia la maritime on compte 50 milles,
et deDeldjinia à la montagne 12 milles; elle se prolonge jusqu'auprès
l'Antibari, Kataro et Ragous ; elle se rapproche à 5 milles de Kataro.
I^is-à-vis de la ville de Kadara et au delà de la montagne, à une distance
lelSmilIes, est ^'J Kamio, ville florissante située sur un embran-
:±ement et enlourée de montagnes qui affectent la forme d*un sjS'kief^
3n sorte qu'on ne peut y parvenir que d'un seul côté (V, 4, p. 287).
Cest \jXfil3 Kamanova (de la p. 261, Y, 5), située dans le canton Zêta
[de Monténégro, Tscharnogora , Tschernitza), où l'on a la haute et la
basse Komani sur la rivière Kinilza ou Sibnitza^ qui se perd dans
lloraka (34).
La chaîne se dirige ensuite vers Stagne et là il s^en détache un pie
très-élevé; puis vers Sbalato (Spalatro), situé à 6 milles de la montagne
derrière laquelle sont deux villes, savoir jLsr^ Nidjaou (Klissa, ancien
Anderilum) et lijXS Kitra, ijS Kira (à la p. 261) (Koupritz situé
non loin de la montagne Kourtal); la première 12 milles de Spalato, et
à une journée de la seconde. L'une et l'autre sont environnées de mon-
tagnes d'un difficile accè&
La qhaîne se prolonge après vers Targouri (Trau) et vers -a^lar^
Sindjadji» Sinadji , ville bâtie sur un contre-fort de montagnes (Sing
cfa Sign? proche de la rivière Cettigna) (25). Puis vers Djadera (Zara),
Bituée dans une plaine à 1 journée des montagnes; puis vers Nouna
la maritime (Nona), située à 12 milles: puis vers Sana (Segna) sur
le penchant d'un coteau. Là ces montagnes atteignent par une ligne
droite les environs de Lobara (Lovrano), lieu situé ^ur une agréable
coUine (V, 4, p. 288).
Nous allons maintenant entrer dans une province tout-à-fait spéciale
à la description d'Edrisi , appelée Dj^eloulia , qu'on ne peut pas mieux
interpréter que par Serbia.
(14) Edrisi (p. S87) iKt que rembrànchemeat le plus voisin d^Adrinople ^ de la ville de Lo Li
Bania (p. S61, t8i), (c'esH dire eotre ces deux Tilles placées à deux bouts), se dirige vers les bords
^e la mer de Peloponèse (mer occidentale de la Grèce) , et se termine à 80 milles d'Astibos,
Thcdbes. — On ne peut pas confondre Kania avec Kamio. Cesi une antre position. Kiua se trouve en
Jktbamie, an sud du moni Galitska : sur ce poiat deux chaînes se dirigent vers le sud. La carte itkië-
«aire n'offre rien qui expliquerait la difficulté relative à Kania, bien qu'elle donne plusieurs aoaas qal
ae se trouvent point dans le texte.— Jaubert, p. 261, lit Bouterla , c'est Taberla comme ailleurs.
(tV) Je risque cette supposition malgré ridentité des noms avec Sebenico.
III •
i7. U aJj^ GetlHmlia , DJeioalia , s^élend Te» l*orîeiit. Lm filles
indiMiles de cette région , sont les goivintes :
^«^ Nissoo , Nissova.
JjjJl ^^y^ Ijjy'j)/' Atrova, Atroubi , Âtrouni.
^«xJ y<xo v^"^ Bendi, Bidenou, Nidenou.
^y^ Banva.
A«M^ jJL^ ^y&^ Nischa , Bischa , Bisa.
IjL.Jl) J! Akridiska.
tj»yiyf^ (r-ji^' Aghrioz , Aghranzinos.
^1^1 Atralsa.
JjjyL^t J^t^^t Stobouni, Estoboni.
IjjX^vj:.^ j^yu^is^^ j^^c^u^ Montekastro» Bontekastro. <,
Bestkastrova.
jijujy Neokastro.
^«-yJL^Ub ^mQm>,oi Lb ^Mft^:^ L)^ Bouliakbiskos, BooliadJ? ^î-
miskos, Bouliadjiskomos (p. 291, 382, 583).
La route qui traverse la Djetulie, dans la direction sad, iinlinr^ Je
quelque peu vers Test, conduit dans la Remanie. De Ribna (Ribnilz^ .^ssaj
50 milles ou 1 journée jusqu*à Nissou ou Nissova, ville remarquable |r war
son étendue, par Fabondance et le bas prix des provisions, telles que li
viande, le poisson, le laitage et les fruits. Elle est située sur les boi di
de la \i\\y Morafa, ou plutôt elle est dans le voisinage de cette
qui descend des montagnes de oj^ Serbia, nommées incorreeU
Jjjj^ Serina. Sur la rivière près de laquelle est située Nissa, on a
struit un grand pont destiné aux allants et aux venants (p. 291,
De Nissa à Trova ou Tronbi vers Torient, 40 milles on 1 journée,
description nous assure une fois , qu*elle est située sur une monl
d*oà découle un cours d*eau qui se dirige vers la Morava; une autre Wék
elle dit que cette ville est bâtie sur les bords d*une petite rivière prov9«
nant des montagnes de Serbie, coulant à Torient d* Atrova, se jetlmi
ensuite dans la Morava (p. 291, 383). Or, pour déterminer son emplies
ment il faut suivre la route ordinaire en remontant la rivière Nison,
qui se dirige vers la Morava , et avançant jusque vers Zaribrad. Id, I»
nom d*A trova. Trouva se retrouve, et vient de Turres, ad turres.de
Tantique itinéraire romaine (table pentinger. segm. 7). Cest la ville
DJBTOULU, SS. 115
TorriSy qu'en 546 Jastinien Toalut oonfier aux Slaves, à condilioo de
préserver sur ce point Tempire des irruptions des Hans-Boulgares
(Procop. de bell. goth. lU, i4). Sur les bords de cette rivière (Nisova),
on voit des moulins à farine , des vignobles et des jardins.
De Trouva à Atralsa 40 milles ou i journée. Tralsa est un lieu bien
peuplé et situé dans une plaine fertile (p. 291, 583). Sur la route par
laquelle nous avonçons , Tancienne Sardica avait été appelée chez les
Slaves Sredetz, nom transformé par les Grecs en Triadilza (Léo dîacon.,
Skylitzes, Zonaras, Theofylakt.; Anne Kommene). Les croisés rappe-
laient Straliz, Stralizta (Ansbert, With. tyrias), de même Edrisi Tralsa,
Atralsa (Schafarj. II, 3, § 30, p. 619). Aujourd'hui Sophia.
D* Atralsa à Estoboni 1 journée. Stobouni est une jolie ville ou village.
Cette place était sans doute où est aujourd'hui Iktiman , Ischliman, au
pied du deûlé par lequel on entre en Remanie. Le deôlé passé, le
chemin se divise : à gauche il longe les chaînes des montagnes Balkan
par Tschamagora (Montagne noire), située sur la rive de Troutscha
eers Kaloper pour arriver à Kabrova, placé au delà des montagnes, sur
leurs penchants septentrionaui. C'est dans cette direction que se trou-
vait, à 6 journées de Stobouni, Akartous, Rartous ou Rarnous, Rranous,
yille située sur une haute montagne : ce qui vient au défilé Schimka
da Schipka qui s'ouvre vers les sources de latros. Les six journées de
chemin, poussent Akarnous sur ce défilé : mais il est plus que probable
qa^Âkarnous s'élevait plus près sur un défilé où d'An ville indiqua
L*ancien ad montem Haemi (Cornus (Sgroton), Corinuâ (Mercator), sur
Stramich qui tombe dans Mariza près de Filippop.) : ce passage ouvre
le dhemin vers les sources d'Osma. La ville Akarnous n'appartient plus
à la Djetoulie.
98. Revenant sur nos pas, nous nous transportons vers l'embouchure
de la Iforava, pour longer le Danube. Morafa confond ses eaux avec le
Danube auprès d'Akradiska. D'Akradiska (Gradiska) à Ribna (Ribnitza,
^Journées ou une et demie; et d'Agradisca à Neokastroâjoyrnées et
d^iie. Neokastro est dans une contrée fertile , les vivres y sont à bon
nuurché, les vignobles et les vergers nombreux; le Danube baigne ses
murs du côté du midi (p. 385). Les distances données assignent l'em-
placement de ce château neuf sur le territoire d'Orsova.
De Neokastro 1 journée et demie , près du fleuve Bideni , ancienne
Bononia; dans le moyen âge B'din, Bydinum (Theophyl.), Bidini
(Redren); B'dyn dans une lettre du roi Asan ; appelé B'din par l'arche-
vêque Daniel (Schafarj. II, 5, §30, p. 619); Widdin. Et (de Bideni)
même distance vers rorient sur le fleuve, Jusqu^à Best kastrova, jolie
116 BDRISL
TÎUe de laquelle, à la même distance vers Torieut, Deristra oo Odestnu
ville qui est déjà au delà de la frontière de Djetoulie (p. 586) (te).
Entre ces deux dernières villes se perd dans le Danube la rivière
^^y.^^ Mesinos (Osma), à laquelle réunit ses eaux la rivière qui
sort d*une montagne, dans le voisinage de laquelle est la ville Beulta-
djimiskos ou Bouliadjiskos ou Bouliakhiskos (p. 587). En remontant
Osma vers les montagnes, on trouve aujourd'hui Koulodjcritza on
Kalogeritza, dont le nom est analogue, où il ne manque pas de rivières
qui se réunissent avec la Osma, Osmen, Osmus (27).
La ville d'Osma, Ozma, ancienne Melta, est nommée par Edrisi
Hessinos, Mesinos, comme située sur une montagne; grande et
ancienne ville commerçante , où Ton fait beaucoup d'affaires et où Ton
trouve d'abondantes ressources (p. 584, 488).
De Mesinos il y a 40 milles à Âghranzinos ou Anghrio (Gavardin sur
Yoda ou Plevena, Utus, Yid), de laquelle 2 journées ou 70 milles à
Bontekastro (p. 588) ou Beslkastro.
Bischa ou Bisa , aujourd'hui Belz sur Iskra! ou Isker, ancien OescnSt
est au centre des autres. Le texte d'Edrisi donne 5 milles nord-ouest
Bideni, 5 milles de Messinos, 4 milles vers le sud d'Akarnus (p. 584)... ^.
Nous tâcherons bientôt d'apprécier ces distances entassant sur un p<HnV.^l
tant de villes! (Bods de Sgroton, Bilz de Mercator, etc.).
De Bischa à Banva 6 journées dans la direction nord-est et d'Âtroi
au même Banva dans la même direction nord-est 90 milles (p. 584).
nous voudrions avancer avec ces distances de 6 journées 150 milles,
90 milles dans la direction indiquée , nous nous transporterions au del.
des limites de Djetoulia, au delà du Danube et nous ne réussirons jami
à appointer ces deux distances sur un point; il est donc indispensabl
d'admettre que dans ces données gît une erreur; que la direction
Bischa à Banva, n'est pas nord-est, mais plutôt nord-ouest, et qu*il fà'
par quelque raison réduire les distances trop énormes. En partie
d'Atrova et de Bisch dans les directions opposées, à des distances pi
portionnées, on arrive à une ville ancienne située sur la rivière appeH ^
Skisul, Ognit, Igoustoul, connue du temps d'Edrisi sous le nomdeBo'^,
Boîon (dans Kedren en 1015), qui existe aujourd'hui sous le noiit ëe
(26) Le souTcnir de Best-KastroTa , se conserve peut-être dans Peslikoî, Peslikoy, viliaire situé
sur le Danube , non loin de l'embouchure de Iskra , ouest. Quant à Odestra , nous y reviendront
fine tard.
(27) Laphonesis de Bouliakhiskos ou Bouliadjiskos-djimishos, me paraît aussi grecque que je
présume ce nom composé de jSouAvi conseil , ^ovXtoç conseillers ^ouAta lien dm cùueU;
xe9Tv2 cassette ou ^vwti vase» coupe; 9i9noç disque, assiette; ^vp-vioç ecdweux.
BERDJAH, ROMAIflA, M. 117
EVilmia. Cependant je ne saurais diresî elle est bâtie sur une émin«nce,
comme Banva , ville peu considérable , sur une monlagne.
EIdrisi nous avertit que Ribnitza , Nissa , par conséquent tout ce qui
3St à Test de Morava, sont les dépendances de Makedonia (p. 579); cepen-
dant il étend la Djetoulie ou le pays des nomades au delà de la rivière
Osma. Toutes ces dépendances sont contigucs, suivant son expression, à
ta Germanie ^ Djermanie. Cetle Djermanie englobe la Remanie et la
partie orientale de la Boulgarie, dont le nom est inconnu à la description
d'Edrisi. Quant à Makedonia, elle s*étend vers le sud, elle n'a pas
trouvé dans la description de séparation spéciale, mais les chemins qui
la traversent y sont spécifiées; nous nous proposons de les parcourir.
Berdjan, Romania.
29. Le traducteur d'Edrist, tout satisfait des explications communia
qnées par son confrère Hase, pour la Grèce, la Macédoine et les parages
de la Remanie (p. 286), n'a pas touché ces points de Djetoulie que nous
avons fixés; ensuite arrivé à la relation édrisienne de la reconstruction
d'Aghirmini par Tempereur Heraklius, il donne le texte arabe du pas-
sage de la relation, qui lui parait extrêmement obscure, ainsi que tout ce
qui suit jusqu'à la fin de la section (p. 587), et de ce point il n'ose hasar-
der presque aucune explication aux positions de l'intérieur de la Boul-
garie et de la Remanie. En effet, il fallait bien réfléchir et analyser les
difficultés très-variées, avant de pouvoir discerner les renseignements
donnés par Edrisi. Je dis qu'Edrisi nous donne des renseignements sur
ces régions là , car, bien que sa description demande des illustrations
approfondies, elle doit de sa part fournir des renseignements instructifs
pour l'époque, et nulle part elle n'est plus abondante sous ce rapport,
que pour la partie qui nous occupe et spécialement pour la Remanie.
Nous avons pu remarquer que les localités de toutes ces régions
danubiennes portent de noms diflférents, prononcés et écrits ou ortho-
graphiés d'une manière très-variée. Le globe terrestre n'a peut-être
nulle part autant de diversité inconstante et indéterminée. Il y a des
Tilles, des rivières qui portent des noms de différents idiomes, de diffé-
rentes époques, de l'usage varié : par dixaines et par vingtaines. Les
indigènes grécisés, plus tard latinisés par les Romains, disparurent
pour toujours lorsque leurs pays dévastés, se peuplèrent par d'autres
souches. Slavonisés avec toute la Grèce, bientôt magyarisés, valakhisés,
ils changèrent de face. La race slave surtout sema avec profusion ses
dénominations, des rives du Danube jusqu'au Tenar. Les dénominations
slaves déblayèrent celles des Grecs, Romains, Byzantins ,^ ou s'associe*
448 EDRI«.
rent avec elles pour mnltiplier la confusion. Intervinrent les commer-
çants italiens, les belliqueux Francs, qui, conjointement avec les
byzantins, modifiaient les dénominations, imposaient les leurs. Les
Arabes, lesTatars, les Turks travestirent une multitude dans leurs
langages. Enfin les géographes modernes, de ce chaos, reproduisant ces
dénominations tant de fois transformées : allemands, français, italiens,
russes, chacun suivant son orthographe inconstant, qui s*embrouilla
avec TorUiographe slave, turk ou magyare, sans savoir réduire tanCde
diversités à une règle clairement déterminée et fixe.
Pour épurer Tembrouillement , il faut étudier Thistoire et les cartes
géographiques de différentes époques. Car il est claire qu*on ne peut
pas sans condition suivre le description d'Ëdrisi conformément à la
connaissance et Tétat actuel : mais quMl est nécessaire de se rapporter
à répoque dans laquelle il rédigeait sa description, chercher des
lumières dans les temps antérieurs plutôt que postérieurs. Pour fixer
cependant les explications el les renseignements retrouvés, il faut s*ap-
puyer sur les cartes modernes censées d*étre exactes et capables de
reproduire le terrain des pays comme il est.
Nous n*avons pas négligé de consulter à cet effet toutes les cartes qui
s*égaraient par quelque circonstance dans notre retraite. Les cartes de
Tatlas catalan de 4577; d'EssIer et d*Ubelin (attachées à Tatlas de
Ptolémée de 4515); italiennes de Tannée 4564 (attachées à Fatlasde
Ptolémée de Ruscelli et de Moletius); celles de Christian Sgrothonos
(du recueil de Jode 1569); de Wolfgang Lazius, d*Âugustin Hirsvogel,
de Jacq Castaldus (dans Tatlas d'Abraham Ortelius 4570); de Mercator,
de Hondius, de Janson, de Blaeuw, de Wit, de Guillaume Delisle (dans
leurs atlas); de Coronelli, Yaugondy, Le Rouge « Bonne, Hérisson,
d*AnvilIe, Reichard; de Schûlz viennois reproduite par Weiland
Woimar; de Danielov à Vienne 1815 ; de La Pie 1822 (grande carte); d
Lameau 1827, — présentaient et rappelaient la marche et le progrès d
la géographie dans cette partie du continent européen moins accessibl
aux géomètres. Les cartes anciennes, presque jusqu'à la fin du xvui*siècle.
répondaient mieux à la désharmonie des distances d*Edrisi. C'était la
conséquence inévitable de conceptions basées encore sur ces itinérai
dont les notions furent réunies en premier lien en Sicile pour Ym
d^Edrisi. Ces cartes cependant ne pouvaient satisfaire, et leur irope
fection devait céder à des investigations et à la connaissance modem»
LMncertitude accable souvent ces investigations récentes. Les
modernes, dressées par des ingénieurs habiles, sont suffisamment d*i
cord sur le littoral , mais dans Tintérieur du continent elles s'égarent
discordances très-sensibles. Le cours des fleuves et des rivières, l'ét^n.
BEfiMAN, EOMANIA, 30. 119
dae discordante des montagnes, déplacent les positions, changent les
distances et les directions des Itinéraires. La Boulgarie et la Remanie
6ont encore le plus affectées de cette incertitude. Pour dresser notre
carte explicative des pays danubiens (pi. 15 de notre atlas)^ nous avons
pris pour modèle la carte de Lameau.
30. Il y a là, dans ces cartes récentes , de nombreux points contestés.
Un des plus remarquables est celui de la position de Perislavia, ville
dans son temps renommée. Preslav, appelé par les Grecs byzantins
Prestblava , Presthlavon , Persthlava, Peristhlava, Parasthiava (Constan-
tin porphyrogen. Léon le diacre , Kedren , Zonaras et autres) ; par Tan-
naliste russien Nestor, Pereiaslavietz ; dans le diplôme de 1186 du roi
Asan , Praslav ; par Edrisi Berisklaba , était la résidence des premiers
roisdeBoulgarie jusqu'à 971. Sa position se retrouve-t>elledans le Provat
qui existe encore , ou dans les ruines de Tantique Marcianopolis? Les
mines et Provat existent; cependant on les confond , regardant Provat
comme Tantique Marcianopolis. Certaines cartes rapprochent les ruines
à Provat; les autres les placent très-éioignées,à une distance très-consi-
dérable. Les investigateurs d'Allemagne et de Russie s'accordent de
les distinguer; les géographes français (La Pie, Lameau), s'obstinent à
les confondre , et à placer Provat sur les décombres de Marcianopolis.
En effet, Provat, situé non loin de Preslav, est assez ancien, lorsqu'on
1186, il faisait partie de l'apanage du prince Pierre, qui possédait aussi
Preslav (géogr. akropolit.). Les byzantins qualifiaient Preslav de grand,
et Kedren avec Zonaras signalent positivement l'existence du petit
Preslav, qui disparut comme le grand (Schafarj. II , 5, § 50, p. 618).
Edrisi distingue aussi les deux Berisklaba. d^^SL»jj Berisklaba et
io^SLji ^^ Mighali Berisklaba (p. 38â), jiùyaXi, nspiv^XaBa, il les
distingue dans son texte et sur sa carte itinéraire. On a dit que la situa-
tion de la petite Perislava est inconnue; la situation de la grande,
relatée à Provat ou à Marcianopolis , autant que je sache , n'est qu^une
pure conjecture. Aucun écrivain du temps de l'existence des deux Pères*
lavas, n*a fourni d'indications positives sur leurs positions; le seul
Edrisi vient nous donner quelques explications, et si nous ne savons
tout de suite tirer tous les avantages possibles de ces renseignements,
aoas pouvons dire avec certitude, qu'ils sont en partie contraires aux
conjectures discordantes.
liais le désaccord des conjectures se manifeste encore sous un autre
aspect sur les cartes récentes. Les portulans des navigateurs indiquaient
les embouchures des petites et des grandes rivières. La tâche de les
iaire remonter à leurs sources, d^acconrcir ou de prolonger leurs
ISO EDRI8I.
eours, appartenait à la connaissaDce des géographes. Dans le xn* siècle
on savait qu'une rivière mouillait les murs de Varna et on s*imagiha que
Provat est situé sur le fleuve Panizus, qui tombe dans la mer plus au
sud. Dans le xvni* siècle , on y multiplia les embouchures et on déplaça
les localités. Provat et Devina avec leur rivière et leur lac, se trouYèrent
au nord de Varna. Les murs de Varna étaient baignés au sud par
le fleuve Varna, sur lequel on avait Marcianopolis» et plus haut
Provadtschik (ou petit Provat). Ce fleuve recevait deux rivières, dont
une Dafné, coulant près d'Eskistamboul; Schoumla se trouvait entre
ces rivières. Plus au sud coulait le fleuve Kamtschik ou Panysus. Il
semble que cette partie, depuis Dclislc et d*Anville, est mieux connue
aujourd'hui, puisqu*on s'accorde qu'au nord de Varna n'existe aucune
rivière assez considérable. Varna (Cruni) est baignée au sud par la
rivière de Provat (Zyras), qui, renforcée par quelques autres affluences,
traverse les deux lacs Devna; sur ses bords sont situés Deyenaet
Provat. Au midi, deux Kamché ; grande et petite, ou blanche et noire
(Potamos et Panysos) se réunissent pour porter les eaux de Kamché ou
Panysos dans la mer ; Eski Stamboul se trouve sur la grande Kamché
(Vrana de Delisle).Suivantd'Ânville,Marcianopolis est située sur la grande
Kamché (Vrana), et la petite porte le nom de Panysos (Fiza de Delîsle). «. •.
Ainsi, comme le géographe de Ravenne dit qu'au milieu de Marciano-
polis passe le fleuve appelé Potamia : per quant Mareianopolim medio ^i^o
transit fluvius qui dicilur Potamia (IV, 6, p. 57). La station de Panysos»
sur la rivière de Panysos (Kamché petite), f^t éloignée de 12 milles
romains au sud (table pentigerienne). Le m3nt Balkan s'interpose
ce Kamché et Karnobat, qui coulent parallèlement. Le terrain est donc
assez assuré pour comprendre les renseignements d'Edrisi. Je disasseza
parce que La Pie et Lameau, dans les détails surtout du fleave Kamdiér
ne sont pas d'accord, et les branches de Kamché sont chez eax diffé-.
remment hérissées. Celles de Lameau sont plus conformes à la conntis^^ s-
sance de d'Anville.
51 . Berisklava (petite), comme le dit Edrisi, est une ville sur les honF^ "b
d'une rivière et près d'un marais (p. 586). Cette indication fixe la peti^"^ le
Berisklava à l'embouchure d'une petite rivière, qui se perd dans h
petit lac Devna au sud d'Âladin, où est aujourd'hui le Yiliage Emereles^r.
Je pense qu'on s'efi'orcera en vain de proposer une autre positlc»ji.
C'est vis-à-vis de Varna. Les deux lacs séparent Varna de Berisklava^..
Edrisi s'étant arrêté sur ce point, donne la route par terre de
Bidhlos à Konstantinoplc. Bidhios ^Ji^ si la lecture est incontestable;
serait Baldjik ou Baltelôuk d*aujourd'hui (ancien Cruni). Bidhles est
BERDJAIf, ROMAMIA, SS. 121
noinmé deux fois (p. 585, 388), dans Fitinéraire maritime. Pour la
troisième fois, cet itinéraire maritime nomme à sa place Barnas (r*i^
(Varna) (p. 594). La carte itinéraire ne connaît que Barnas. Barnas et
Bidhlos sont à la même hauteur, 50 milles au nord d'Emineh.
Par la route par terre, de Bidhlos on se rend d*abord à Jb Bouthra
(p. 586). Cette jolie ville n'existe plus, ou bien a changé de nom. Cest
nn nom boulgar ou slave, car en 1085, suivant Anne Kommènc, une
ville boulgare Vetren, dont la poshion est inconnue, se trouvait non
loin du Danube (Schafarjik, p. 619) (ss). En avançant de Bidhlos
50 milles dans l'intérieur, dans la direction vers le Danube , nous nous
trouvons aux environs de Hadji Ogiou BazardjiL II est probable que
Bootra s'y trouvait , la route tournoyant quelque peu.
De Boutra à j^^ »f Berkanto , on a la même distance de 50 milles
oa une journée. Entre ces deux villes coule une ririère, se dirigeant
vers le midi, traverse ^bll5w Sklafa (petite Berisklava), puis se jette
dans la mer (p. 586). Je crois que ce passage confirme l'emplacement
que nous avons indiqué à la petite Berisklava. Berkanto est située sur
le penchant d'une agréable colline. La carte itinéraire d'Edrisi déplace
les points diacritiques , et ferait croire que le nom de Berkanto n'est pas
mez solidement établi. Elle semble écrire Kerkanto ; il est probable
qu'il doit èlre écrit y^y Barafanto, Baravanto. Quelle que soit la
lecture véritable, je pense que cette ville est Berkamis du géographe
lavennate (IV, 7, p. 58), et la lecture Berkanto suffît pour remarquer
Tanalogie et l'identité de ce nom avec Prauadi , Paravadi , Pravati , Pra-
vata , Pravat, ville ancienne , située sur la rivière Paravat , qui jette ses
eaux dans le même petit lac Devna, dans lequel se perd la rivière qui
traverse Slava ou petite Beriskava.
- De Berkanto à AibiC-u vj'^^ Mighali Berisklava, ville de gran-
dear moyenne, dans le voisinage de laquelle est une petite rivière,
1 journée (p. 586). Or, la grande Preslava ne touchait point les bords
de la rivière Provat, ni d'aucune rivière considérable, elle n'était que
dans le voisinage d'un courant. Elle se trouvait à une journée ou 25 à
30 milles éloignée des rives de Provat aux environs de Tschalikavak,
quelque part entre les deux Kamchés, non loin du courant de l'une
d'elles, non loin des ruines de Markianopolis, dont l'emplacement et
les ruines sont sur la rivière considérable de Potamos Kamtche.
5â. Afin d'avancer de Mighali Berisklava vers Gonstantinople , il fal-
lait franchir la montagne Baikan. Il semble qu'à cet effet on traversait
Vu) On coanait aussi à l'ouett de Silistrie , Vetcrnize.
lU 8.
S«Vvaôite^<>^^ liaVoài-*;'Ï;ifteanV ^*''\,opW«''if lî. à^^^^
« vouT"*^ ixaTtasset , ^ , ^ guA V^" . ^- Bai»*"
*e Ve'»' ?,e iaos Va A^tec ^,v a* . eao* '^
Jet A»»* ^* « î'»-»^" C^t^s'-^^Ce^-JÎ
„jml de »•» «aiao » " i ccU»"" ' v..u **'
BBRDJAN, ROMÀHIÂ, 13. if S
De Kalimalaia nous passons à 12 milles vers ToHent par i^^J^L^
Madhanios, jolie ville pour se rendre à Betrova, éloignée vers le sud
50 milles (p. 587).
Plusieurs fois nommée, la ville considérable, commerçante , indus-
Irieuse ,3m^ Betrova ^jv^ Nebrova (p. 582, 584, 585, 587), appelée
Bartizon par le géographe de Ravenne (IV, 6, p. 57), se trouve dans
ntinéraire de la table pentingérienne sous le nom de Burtiha , entre
Hadrianople et Bergala ou Pyrgos, Ârkadiopolis à 18 milles de ce der-
nier et le double du premier. Or, c*est Eski Baba ou Baba la vieille d'au-
jourd'hui. Burtiho, Burtizon, Betrova, Nebrova, (Burtudizus des cartos
de Mercator), par une dégénération continuelle de son nom produisit
le nom de Baba , ville très-ancienne, (vieille eski , Sicibaba de la carte
de Jacq Castaldo). De Nebrova une route directe conduit à Kostantinie.
55. De cette excursion vers la grande capitale, revenant au delà du
Balkan, nous sommes obligé de remarquer que la carte itinéraire
d'Edrisi, reproduisant le nom de deux Berisklava , les place dans le
sens inverse de remplacement que nous leur avons assigné. La petite
Berisklava y est située près des sources de la rivière qui passe entre
Boutra et Berkanto. Si Ton voulait, conformément à cette indication,
sans égard aux marais, à un étang, à un lac rechercher la situation de
la petite Berisklava au fond de la terre : je ne m'y opposerais pas.
Gomme la carte itinéraire nomme deux Berisklava dans les sections
4 et 5 du YI' climat, de même dans les mêmes sections elle répète par
deux foisRekran ou Rcknova, Odeslra ou Vestrinos, Barmanou ou Bar>
mos. Nous verrons que cette dernière répétition est réellement une
répétition de la même ville. Quant aux autres, nous ne trouvons pas de
motifs en faveur de vaines répétitions. Au contraire, à notre avis tout
porte à croire qu'elles signalent l'existence de villes homonymes, toutes
différentes.
Pour résoudre cette double apparition , nous nous mettrons en route
très^-fréquentée par des commerçants, qui conduit de la Djetoulie de
Mesinos (Osma), à des véritables dépôts de marchandises. Cette route
a dû laisser des traces indélébiles : cependant avant d'atteindre les
stations déterminées, nous sommes obligé d'errer plusieurs jours dans
un pays spacieux, fertile en inconstance de fortune, en indications
variées de positions, en incertitudes qu'offrent les cartes des géographes
discordants, en nombreuses nomenclatures, tantôt slaves, tantôt lurks,
copiées par des géographes d'une manière indéterminée.
Nous partons donc de Messinous (Osma) d'où à ^JLJ^ Dhinoboli
^JJ^ Denbeli , bourg situé dans une plaine, 1 journée. C'est Nikopotis
iU EDRISI.
sur lastros, Nikoup, Nikopi. Cette station est préservée de Urate conte»-
tation » puisque on ne trouverait d*autre nom terminé en polis que la
seule Nikopolis. Mais de Dhinoboli, faut-il se tourner tout de suite ver»
le Danube ou traverser l'intérieur de la Boulgarie? c*est ce que doqb ne
saurions résoudre assez positivement.
De Dhinoboli à JLJL^jIJ Karatamenial on JL»jJ Krimial , dans
une plaine, près d'une colline, vers Torient, 1 journée. Si l*on se diri-
gerait vers le Danube ce serait Triraanium (de la table peuting. et du
ravennatc YI, 7, p. 58), aujourd'hui Rouschlscbouk sur le Danube. Si
Ton voulait passer directement vers Torient par Tinlérienr de la Boul-
garie, on y rencontre une foule de noms commençant par Kara, pour la
plupart turks. Leur origine turke, postérieure, ne convient pas à Tépo-
que d'Edrisi , à moins que quelques-uns de ces noms ne seraient d'une
autre origine seulement turkiscs. A Test de Razgrad (appellation slave),
nons remarquons, Krinaudje, Karakargoîe, sans savoir à quoi s'en tenir.
Cependant eu égard à la station suivante, éloignée des bords du Danube»
nous aimons mieux rester avec Karatamenial aux environs de Krinaudje,
que de s'aventurer par Rouschtschouk.
De Karatamenial à /r'-v^' Elmas, ville bien peuplée, vers Torient
une demi-journée; celle ville avait de vastes dépendances. En descen-
dant sur la rive du Danube on ne trouve rien de satisfaisant pour une
ville aussi considérable , si Ton ne voulait pas s'y arrêter dans un
appellation obscure de Mechemalis. Avançant par l'intérieur de I
Boulgarie, pour Elmas se présente Palmas, Palmatis, Palmaïae, Pal-
mata, ville assez considérable des itinéraires romaines, 14 milles d
Durostoro et 45 de Marcianopolis (tabula penlig; Procop. de aedifi
IV, 7). Elmas, Palmatis répond à Ballakioi ou Baitakidi des cari
modernes (si).
5i. De Elmas à yj,^^j Reknova (ou ^j^j Zakatra p. 582,59*^,
près d'une montagne, nue demi-journée. Admettant la lecture c7e
Reknova, à laquelle est analogue celle de la carte itinéraire ^yS^
Rekran, on pourrait présumer, si l'on voulait suivre le Danube, cfue
celte situation existe dans Trakan, situé presque sous les murs de
Silistrie, parce qu'il n'y a pas d'autre nom assez analogue. Suivant /a
direction intérieure de Palmatis ou de Elmas, on s'empèlre de noofeau
dans les Kara , offrant une simple transposition des consonnes dans
Garoane, Karanova, Karaulik, Karana. Cette dernière est trop retirée
de la direction indiquée au chemin que nous suivons.
fSf ) D'Anville assigne à Palmatis une sitnation qnciqno peu plus méridionale.
BERDJAN, ROMAMU, Se. iiS
De Rekrau k mJUS^^^^j Rossokastro, ville importaDle, dans ud6
plaine vers l'orient, une demi-journée. Cest trop évident Rassova, et
c'est la première station fixée et déterminée sur les rives du Danube ,
qui nous préserve de s'égarer.
' De Rossokastra à SU J. J.x^ Mishali therme, petite ville, ceinte de
murs, une demi-journée ou i5 milles. Le nom grec /uyaX^ âepfiatf
proclame; la renommée, des grands bains de cette petite ville. Ce nom
pouvait être remplacé postérieurement par un autre analogue, depuis
qpie les bains disparurent. Aussi je présume que les megaletherme se
retrouvent aujourd'hui près de Rassova, dans le nom slave de la
Tschernàvoda (eau noire), située sur le point du Danube d'où, dans les
siècles reculés s'échappait un bras du fleuve qui, courant vers la mer et
irorsant ses eaux dans le Pont, formait une embouchure méridionale du
BâDube. Ce bras se dessine à présent par des lacs, étangs et marais
jusqu'à la mer; un courant d'eau noire, Tschernàvoda, fend la terre
4lans un sens contraire et se perd dans le Danube.
Des Grands bains à jJl^S^J ^ ^^jxJ Linokastro, place forte, com-
merçante et centre de communication pour les voyageurs vers l'orient,
une demi-journée. La qualification de Lino est encore sonnante du
grec; faisant probablement allusion ou à ce que cette place était.bien
munie: >a<vos, construit de pierres; ou à la position aquatique : Avjvo;,
canal, retraite de l'eau d'un fleuve, marais, étang (53). Doïan a pu rem-
placer celte place forte. La lecture de jjj:**3jil Neokastro^ (p. 597),
au lieu de Linokastro est fautive.
De Linokastro à Ghorlou , joli pays très-fréquenté par les marchands
qui y apportent divers objets de commerce , vers l'orient une journée.
La lecture inconstante et variée de ce nom est diflicile à déterminer :
jijp Ghorlou, J^ji Ghorli, ^X& Gholouni (p. 582, 588, 597),
%«U Gholoun (tabula itiner.). Si les dernières sont plus justes, on
pourrait fixer ce dépôt de marchandises par la position romaine Dino*
gellia (suivant la carte de Reichard), aujourd'hui llnitza, où le Danube
86 tourne pour la dernière fois vers ses embouchures (53).
De Ghouloun à ^b Baska, ou ^^yi^ Bastres (p. 582), une
demi-journée.
De Baska à ,^1 Âkli ou ^Idl Akliba (p. 592), une demi-journée.
Akla est dtuée dans une plaine fertile et cultivée; ses dépendances
sont considérables et bien arrosées; il y a de l'industrie et les ouvriers
(3t) Aevov filet, Xusm; mugil, poisson de mer, d*eau doac«.
(33) Sur ce poiat la carte de 1318, de Tatlas d'Essler et dUbelin, place Cbenlia , mais de l'autr»
c^té du Danube.
i 26 EDRISI.
y sont irès-habiles surtout en fait de fabrication d^ouTrages en fir.
Au nord sont des hautes montagnes au delà desquelles coule le Danube.
Nonobstant cette dernière circonstance de la description , il n*y a da
doute, à mon avis, qu'Akla, est Rilia, Eskikilia, Kilia ancienne, au sud
du Danube et les montagnes sont au delà du Danube. Akli, Akliba es^
très-rapprocbéc de la mer, sur ses bords même, parce qu'on y arrive
d'Ârmonkastro (par mer) dans une journée de navigation (p. 592).
D' Akli à /rir^jj-^^t i^^à1'à^\ Stlifanos 1 journée. Stlifanosest
une ville considérable et elle était plus importante encore avant
répoque actuelle. La carte itinéraire place cette ville de Fautre côté
du Danube au nord, mais Tindication des roules qui conduisent de
cette ville aux pays circum-voisins, exige absolument son emplacement
au sud. Cest peut-être Fancienne Salsovia (tab. peuting.; géogr.
ravenn. IV, 5, p. 56). Mais Stlifanos cnfavoi est un nom grec A la
pointe occidentale du lac Ilaimyris ou Marasch Rassein se trouve Zebili,
Sebel, Stebil; signale probablement la position de Stlifanos. Stebil est
une de formes slaves pour le nom d'Etienne, Stephauos.
55. Voici maintenant le chemin aux pays circum-voisins, pays qua-
lifiés de ,o'^jf Bcrdjan. Stlifanos est à Torient de ^J^^y*^ï Aksoun-
boli ou ^yySj] Aniksoboli, distante à i journée. On a près do
Danube le nom analogue dans Ignitza (si).
D'Aniksoboli à ^J^L^l Agathoboli vers Torient 1 journée .^.
Agathoboli était donc située non loin de Stlifanos vers le sud.
D*Agathoboli à ^^^^^j^ Kirkisia i journée. Nous voyons à on^^ ^o
petite distance de Hirsova , Karakla.
De Kirkisia à ^cu^^ Desina, à.x^^ Delsina vers Torient 1 joumée^^ ^,
Desina, à ajournées de Berisklava la petite, comme nousTavons vu
est fixée avec toute certitude par Devlschinou, bourg située av
Devtscha ou Devtschinki sur une petite rivière Devtscha qui se pei
dans le Danube au delà de Tscherna voda (eau noire). Gertainemei
c'était un établissement Boulgare portant Fappellation slave de vi
et de virginale ou de petites vierges (35). Desina est non loin de Te
bouchure du Danube : c'esl-à-dire, tout près de ce bras de Tembo
chure la plus méridionale, qui autrefois sortait du Danube ent
Rassova et Tscherna voda. Desina est en effet à tel point non loin
Fembouchure, quelle est éloignée de la mer 40 milles seulement.
40 milles sont les 2 journées de Desina à Armonkastro (Karli).
(Si) On a daDS ces pays Axiopolis, mais placée sar le Danube plus haut, elle est Irop ëloifs '
(S5) La capitale de la grande Moravie portait le nom de Dieva, viei^e.
BERDUN, UOMANU, S6. 427
Ou Yoitque Berdjan à cette époque était très -coinmerçant, ne res-
semblait guère ni à Tantiqne Scythie moesienne, ni au Sendjak mo-
derne de Silistrie. Berdjan s*étendait jusqu'à Reknova, qui se trouvait
sar la route de Messinos (Osma). Nous avons recherché les traces de
celte route , et je pense que les traces de sa direction jusqu'à Rosso-
kastro sont préférables par Fintérieur de la Boulgarie que sur les bords
du Danube. Aussi en tenant la direction intérieure on comprend mieux
rindicaiion d'Edrisi, qu'il y a de Rossokastro à Bestrinos 15 milles, et
de Zakanra (Reknova) une journée (20 milles) (p. 397).
Bestrinos ^«4^ jl^j dans l'écriture de la carte itinéraire, peut être
la ^**xj ju-j Veslrinos ou ^^yi^^ Bestrinos. Celte dernière lec-
ture est préférable à toutes les autres, puisque c'est Durostorus des
Romains, Durostol des Boulgares , Drista des indigènes, aujourd'hui
Silistria des Turks.
Cependant nous avons déjà nommé une ville de la description
édrisienne, dont les rues sont larges , les bazars nombreux et les res-
sources abondantes, appelée Derislra , située sur le Danube à i ^/s jour-
nées de Viddin vers l'orient (p. 386). Cette y^*-.^ Deristra est
séparément indiquée par la carte itinéraire, ainsi qu'on peut lire son
nom y^^^^ Odestra (VI, 4). Toujours c'est le même nom. D'après la
distance donnée de Yiddin 4 V^ journées, et les indications que la des-
cription édrisienne nous fournit, Odestra était non loin de l'embouchure
d'Osmus et de Nikopolis ad lastrum, ainsi qu'on ne peut, par aucune
manière avancer plus loin que jusqu'à Schistova près d'Osma, ou
Zisto (de la carte de Delisle) près d'iantra. Â l'époque d'Edrisi, les
Boulgares avaient dans cette position une ville considérable Koriska.
Cette ville ne devait pas échapper à la connaissance d'Edrisi, elle a pu
donner occasion à cette apparente répétition double du nom de
Deristra. Au reste Odestra vient de ad lastrum ou ad Istrum. Je pense
que nous sommes suffisamment autorisés à suivre les distances du
texte et l'indication de la carte itinéraire , afin de distinguer dans le
texte si même Edrisi y a commis une confusion : Deristr (Odestra,
Koriskos) Zisto (ou Nicopolis ad Istrum); de Deristra (Yestrinos),
Dorostol, Silistra.
56. Si le même cas a lieu avec Reknova , il est plus difficile à décider.
JLa. carte itinéraire donne deux noms presque identiques, l'un à côté
de l'autre ^Sj Rekran et ^^^j Reknova autant qu'on peut les
débrouiller. Le premier est inscrit sur le chemin -d'Osma, entre Elmas
^i Rossokastro (VI, 4), et il se trouve dans le texte orthographié par
xSj^) ^al^atra ^j^ '^^^^^^ ^y^j Reknova (p. 382, 588, 397),
i^g EDRISI.
par conséquent le texte confond Reknova avec Rekran , accuse la carte
itinéraire de répétition inutile du même lieu, et admet Tindentité de
Rekran avec Reknova. Cependant , en faveur de Ja séparation de ces
deux noms , on peut se récrier sur la multitude des qualifications
commençant par Kara, et sur la méprise dans la description d'Edrisi,
qui n'a pas remarqué la distinction existant entre Rekran et Reknova,
ainsi que par inadvertance il a écrit Reknova ou Zakanra an lieu de
Rekran. En disjoignant ces deux noms , Rekran répondrait à Kranova
d'aujourd'hui et Reknova plus éloigné du Danube à Karabova.
Examinant la carte itinéraire d'Edrisi, on remarque une route qui
n'est pas mentionnée dans la description. Elle vient de Bcriskiava à
Desina. Cette route, certainement de 4 journées, avait trois stations,
dont deux sont nommées, une est privée de nom. La première est dans
Reknova (Karabova), de laquelle nous avons parlé. L'autre à mi-chemio
àij^là^ Dagkadartha, tomberait sur Dok d'aujourd'hui, appelé autre-
ment Satsch ou Dokour-Âghadji , ou Dokosatsch. Le nom de la deuxième
station, omis par le dessinateur de la carte itinéraire, était peutrét
^LL^i? Tamtana, placée déjà sur un embranchement de la route d
Desina à Bidhlos et Damas (p. 582) (se).
Enfin nous avons achevé nos courses dans la Djermanie, dont Berd—
jan est une portion ; nous avons terminé nos investigations routières ai
nord du Balkan, dans cette partie qui porte le nom de Boulgarie. Il nou:
reste à jeter un coup-d'œil sur une autre partie méridionale, située ar
delà du Balkan, appelée Remanie. Nous y avons fait déjà une irruptioi
s'emparant de plusieurs positions déterminées , et nous avons avan
jusqu'à Kalimalaïa et Nebrova. Je pensequ'en fixant leurs situations,
grandes obscurités sont déjà dispersées. Le reste sera compris par .'
triangulation (n"" 42 de l'atlas et sa carte explicative), que je réussi
composer des données relatées par Edrisi. Je dois cependant r
compte de ma composition, ce qui me donnera le moyen de m*exp
quer sur certaines diificullés.
57. Après la triangulation des distances d'Allemagne, je m'essay*^^
plusieurs fois de régler une triangulation pour les pays dapobi^ Ji&
Longtemps tous mes efforts se brisaient contre le déplacement de [» Jir*
meurs points de la Hongrie, surtout de Bassan , Neitren, Bansin , Katc^ii.
Avec ce déplacement ne se présente aucune issue, même conforme
à la conception d'Edrisi. 11 était à présumer, ce qui est évident, que les
distances discordantes se contrariaient réciproquement, et Vinéffiliié
(U) reut-4ir« Tacham de la c«rU de 1515, dans Tallu d*EMler et d'Ubelis.
BERDJAn, AOMAKU, 37. 4^
des miiles, doot je ne puis comprendre la proportion , y mettaient un
obstacle invincible. Cependant les distances devaient se prêter aune
combinaison quelconque, plus raisonnable , si le déplacement serait
rectifié. A la fin après de nombreux essais , je suis parvenu à construire
rédifice tant bien que mal, sens touchera des mesures, observant
scrupuleusement les chiiTres dont retendue diminuait par la longueur
des milles inconnus. Je ne propose, en faveur de quelques modifications,
que de lire la distance entre Âgra à Arinia ^ 100, à la place de
^^ 80. Le déplacement de Neitra et Bassan ne se hisse rectifi<)r sans
appréciation douteuse ou impossible de la grandeur des milles. Le
choix de distances variées, entre Belgradoun et Ribna, offrit un point
d*appui à Forganisation des distances de la Slavonie.
La triangulation pour la Djetoulie, de la Makedonia et de tout le
pays jusqu'à Berdjau et Temboucbure du Danube, est impraticable, car
dans tout cet espace la description d*£drisi n'offre que des itinéraires
qui se suivent, s*embranchent et ne se croisent guère; à peine qu'on
jf trouve un couple de triangles isolés.
La Remanie enfin , réunie par de nombreuses avenues avec les pays
circumvoisins, se présente riche en itinéraires, distances et triangles,
mais pleine d'écueilset de précipices, qui pénètrent jusque dans une
"partie de Djetoulie. Cependant il n'est pas impossible de les surmonter
«t de les franchir.
D'abord il faut observer les erreurs aussi faciles pour l'écriture que
pour la lecture, et je le répète, qu'il faut s'étonner qu'il y en a si peu :
11 y en a cependant. En premier lieu , je compte au nombre des erreurs
Toutes les distances de 4>, 5 ou 6 milles. Lorsque je trouve eu Italie de
semblables distances rapprochées, je conçois qu'elles sont données pour
telles par Edrisi même, parce qu'il y poursuit les détails minutieux;
mais quand, dans un pays plus éloigné, dans la foule de grandes et
de courtes distances, exagérées en longueur, je rencontre les 4, 5 et 6
xnilles, je doute de leur existence inaltérable, et l'erreur se confirme
lorsqu'elles n'entrent pas dans le cadre des autres, lorsque, par leur in-
cohérence, ils empêchent la composition des nœuds des itinéraires. Dans
le cas des erreurs trop évidentes, je pense qu'au lieu de j six milles il faut
lire ^^ 80; qu'à la place de ^ quatre milles, il est nécessaire d'écrire
.« 50; et les s cinq milles seront très -bien remplacés par ^ 40.
C^&st le procédé que je suivis pour rectifier ces erreurs, et le résultat est
satisfaisant.
L'orsqu'on voit de Philippopoli à Arkadiopoli 100 milles, de Karvi à
Constantinople 160 milles, et de Philoppopoli à Constantinople ^ 40
III. 9 ^
!
il 30 EDRISI.
seulement, on n*aura pas tort, je pense, de sopposer que la een-
taine est omise dans cette dernière distance, que de Philfppopôli i
Gonstantinople, on comptait J 140 milles. Je me suis servi de cette
rectification dans .la triangulation. L^orsqu'on lit que de ^ortora à
Zagoria il y a 160 milles, et de Zagoria à Salonik 140, on remarquera
Terreur dans ce second chiffre. Il devait y être 240 , ou bien qu'an lieu
de Saloniki il y avait Saloni; dans ce cas les 140 conviendraient. On
peut présumer d'autres erreurs , mais comme elles ne nous ont pas
gêné , nous n'oserons les accuser.
58. Il y a des chiff'res qui ne se laissent pas combiner avec les antres
trop grands ou trop petits. Les premiers sont probablement une eiagé-
ratiou, les seconds résultent d'une autre espèce de milles pluB grands.
Dans la première catégorie, je mettrai la distance de 90 milles
d*Âtrova i Banva , 70 milles de Bestkastro k Aghramzîn. Le littoral dé-
taillé eu milles, est affecté de Texagération sans fin. Les itinéraires dé-
terminés assez souvent en journées , surtout lorsqu'elles doublent»
triplent et quadruplent les journées, offrent des exagérations difficiles
dans rinlérieur de la Macédoine.
Les 25 milles sont un chiffre privilégié pour la moindre distance da
littoral. Observez les distances entre Emineh et Agathoboll,
Saloniki et Saint-George. Philippi esta 8 milles de la mer. Cette
exacte et scrupuleuse , s'échappe des exagérations; en attendant, Edi
dit que de Philippi à Kalah (Cavallc) il y a une journée on 25 milli
Un fait remarquable fait présumer l'existence réelle de la secom
catégorie, c'est-à-dire de l'existence des milles plus grands que cei
qui sont généralement comptés. Edrisi dit que de Nebrova à Ck)n8tant
nople on a 28 ou 50 milles. La répétition de ces chiffres préserve de
porter à faux. Mais autre part, Edrisi dit que de Nebrova à Kh\ouf^::^FJik
(Philopatium) on compte 50 milles , et d'Âbloughis k CoostanlinoiHP' pie
25, en tout 75 milles, en supposant un chemin dont la ligne directe de
Nebrova à Conslantinople serait 60 milles. La proportion de ces mil^Hlei
ordinaires 75 et 60 avec les milles 50 et 28, donnés spédalemei^=3l i
cette distance , semble dévoiler l'existence de grands milles mmpi n^d
de 2 */3 milles ordinaires.
Dans la même catégorie se rangent les 12 milles trois fois repro^ ti/cs
entre Roussie, Kobsila, Rodosto et Constantinople. Ces milles sont fc^ivÀ
fois plus grands que les ordinaires. Il fallait négliger ces chlinre» ^ oa
bien les doubler ou tripler pour les raccommoder aux autres. En ^Son-
grie on parviendrait à rétablir la position de Neitrem en doublai! C ses
distances d'Âgra et de Bedhvarn.
BERDIAtf, EOHANIA, SO. iSi
Les 100 milles de KalUboli à Saint-George , applicables dans la direo-
tion droite, désignent certainement les détours du littoral. La distance
de 90 railles de Nebrova à Karvi , un peu courte pour s^appliquer aux
autres» offre peu d*embarras, parce que dans cette nombreuse compli-
cation» cette distance ne monte réellement qu'à 100 milles.
A Texception de Tltalie , aucune région, dans la description d*Edrisi,
il*a autant de détails et de ressources pour dresser le réseau des itiné-
raires, pour composer la triangulation des distances, que la Remanie.
Pour ce pays il y a quantité de renseignements , car la description des
noDtagnes, des fleuves, du littoral, de la position, vient souvent
Sclaircir et confirmer la complication des mesures. Nous avons désigné
:ous les points où il nous fallait rectifier leur cbiffre ou apprécier leur
râleur. Toute la masse reste intacte; nous nous sommes servi de ces
mesures comme elles sont énumérées dans le texte.
Une opération cependant était immanquable dans Tappréciation de
la valeur, pour changer les journées en milles. L'inconstance d'Edrisi
daos ce calcul est manifeste, quand il compte ajournées de Bontekastro
& Agbramzin 70 milles , et les 3 journées de Bouliadjiskomos à Nebrova
de même 70 milles. Pour nous, il n'était pas licite de manier continuel-
lement avec cette inconstance dans notre triangulation. Nous nous
Bommes efforcé de compter toujours 25 milles la journée. Le minimum
SO, le maximum 50, comme il est entre Roussie et Sorlova. Nous
Bravons dérogé à cette règle que quand Edrisi nous y autorisait en
donnant lui-même l'équivalant de la journée en milles, plus fort qu'à
Fordinaire. Dans ce cas le choix était à nous.
»
39. Une autre opération géographique, la réduction des distances,
pouvait nous conduire dans l'arbitraire; aussi l'avons-nous évité,
en prenant toutes les mesures telles qu'elles sont données. Nous
ayons déjà dit que des temps anciens. Marin de Tyr, Plolémée, les
arabes antérieurs et postérieurs à Edrisi diminuaient les distances d'un
cinquième, afin de les dégager des déviations des voyageurs et de les
employer en ligne directe, ta moindre distance est susceptible à cette
réduction, les grandes beaucoup plus. Il est -à présumer que les géo-
graphes de Sicile n'ont pas négligé cette réduction dans les grands
intervalles, dont les mesures se trouvent dans la description d'Edrisi.
LMtinéraire littoral de la Remanie , donné en détail , n'est pas soumi$
à cette réduction. Cependant de Rodosto à Gonstantinople , la somme
des distances des stations monte à 110 milles; cette distance est
évaluée par Edrisi de 12 milles de la grande mesure au moins? mais ces
v,^^ 12 milles donneraient J 56 des milles ordinaires et ne répon-
.M ^
15:2 FDRISI.
draieDt guère à la méthode géographique usitée. Les iiO milles dimi-
nués d'un cinquième, donnent ^^ 98 ou rondement ^ 90 milles.
Cette dernière réduction géogra^phique seule a pu répondre à notre
construction. LVxactitiide du chiffre de 12 milles nous est suspecte,
parce qu'il faudrait les multiplier par 8 pour avoir la nonantaine.
Peut-être au lieu de s^^ 12 il y avait J 56. Ces trente-six multi-
pliés par 2 *;a donnent les nouante désirés. Peut-être les *^^>o 12
«a»
dérivent tout simplement de la copie erronée de ^ 90. Par la même
opération , nous avons réduit en distance directe le littoral entre Ablon-
ghis et Sizeboli, ses 150 milles nous ont donné en ligne directe
120 milles.
Nous avons seulement opéré sur ces deux points pour établir les
distances droites. La dernière nécessité de la réduction se présenta
dans la distance de Zagoria à Sorlova. Elle est donnée 160 milles,
réduite d'un cinquième elle est 120 milles. L'autre, plus considérable,
de Zagoria à Saloniki, si elle est 2i0 milles au Heu de 140, réduite
d*un cinquième à 200 milles, s'accommode h notre construction. Enfin,
de toutes les autres nombreuses distances, seulement les deux rectifiées
entre Emineh et Kalimataïa demandent d'être réduites.
Terminant mes explications, je puis observer qu'on pourrait éviter
ces dernières réductions en donnant une extension plus considérable
au Bcrdjan, à quoi sont susceptibles les distances et les itinéraires, si
l'on donnait depuis Sizoboli et Emineh une inclination vers Test, et si
l'on augmenterait la valeur des journées de chemin.
On remarquera cerlaincment que ma triangulation se rapporte à d
cartes récentes. Je dois donc faire observer que mon intention n'étai
pas de rétablir la caiHe d'Edrisi, mais d'analyser et d'éclaircir par
moyen sa description.
La triangulation confectionnée et la carte dressée sur la connais
sance moderne du terrain , réunies ensemble , offrent le. résultâtes
mes recherches. Mais les connaissances récentes du terrain ne sont
d'accord, comme nous l'avons remarqué. Cette discordance est grave
très -embarrassante pour les chemins à travers la Macédoine. Ma ca
accompagnée de la triangulation, est dessinée d'après Lameau et rep
duit les cours et les directions des fleuves suivant les renseigneme
qu'il a réuni. L'autre plus générale, sur la moindre échelle, se confori
plus aux connaissances antérieures, détaillées dans l'atlas de La Pie*
Makedonia.
40. Partant de Douraza on passe par Teberla (Bouterla de la p.^^fj
(Elbessan), et on arrive à Okhrida. D'Okhrida à gauche, on arrive ^
MAkEDOMU, 40. i53
Sorghoura, aujourd'hui vilfôge Boulgare et Kelliga boulgar, à Test de
Blagarovo sur la rivière de KaQdrisi. De là on monte jusqu'à Skonia ou
Skobia ; c'est Skopia ou Uskup. Ensuite on traverse le fleuve Vardar
pour se rendre à Korlos.
Uskup est situé sur Vardar. C'est donc pour entrer à Skobia qu'il
laut traverser le fleuve. D'Uskup on passe le fleuve Psigna pour arriver
à Kortos, aujourd'hui Karatova ou Stoutzaïtza, située sur Braunista. —
Lameau place Karatova au nord des montagnes de ce nom sur la rivière
Strouma, au sud de Giusiendjil, ce qui n'est pas d'accord avec la des-
cription et les renseignements d'Edrisi.
De Kortos la route se fourche. A gauche elle tourne au pied des mon-
tagnes de Serbia. Je ne saurais pas donner l'explication de cette route ,
mais à mon avis il est impossible de la faire monter jusqu'à Vrania
pour arriver par Stobouni à Triadiza. Elle passait sans aucun doute
par Giustendjil et Doubnitza. Elle touchait le canton montagneux
Mademites, lorsqu'elle traversait Formendos, situé sur le sommet d'une
montagne, ensuite au delà de Jusiiniana ou Giustendjil elle avait sa
station dans Malsouda. Avançant par Verbonik et Doubnitza ou Duonitza
ou Bouzaïtza jusqu'à Samakov, où la dernière station Bermania se place
à la distance de Stobouni (Iktiman), quelque part près d'une crevasse de
la montagne. Le nom de Bermania répond à berzmania , birziminum ,
brezimenuem de la langue albanaise, qui désigne en albanais, un lieu
voisin des précipices. — Que de monuments à découvrir dans ces en-
droits solitaires! s'écria justement Malte-Brun (se).
La carte itinéraire (Y , 4) ofl're quelques noms de Macédoine qu'on ne
trouve pas dans le texte. Non loin de Formendos elle inscrit s^ iIj \
Ablandjor: c'est, je pense, Bylazora, aujourd'hui Strazin. Plus au sud,
à côté de Skobia, se trouve ojjt ou ^t Ilio ou Aîanio. A l'ouest de
Scopia existait Vellii (où est aujourd'hui Kalkandere). Mais on pourrait
renvoyer Ilio au delà des montagnes à l'ancien Gabuleum, aujourdh'ui
Ghilan ou Morava. — Entre Okrhida et Toulili , au sud de Boulgar, on
débrouille y^^ ou y.^\3 Kavolir ou Kavartir, et au sud d'Okhrida et
de la rivière (Likostomi) près d'Astibes (Thèbes), aaj3 Katina, Kaniua.
La route de Kortos à droite se dirige par des villes connues jusqu'à
Kbrisoboli la maritime, par Slrinaou Stranissa, aujourd'hui Stromia ou
Ostroumia, Stroumnitza sur le fleuve Stroumitza ou Radovit; puis par
Raghoria, aujourd'hui Doîran, ancien Assoros, parce que Raghoria est
nue des plus anciennes de la Remanie , elle est au pied des montagnes
(S7) Malte-Brun , géogr. éditée par HuAt, livre 448, p. 740, 747.
i34 EDRISI.
d*où partent quatre rivières pour se jeter au nord dans le Vardar (sa) ;
puis la route passe à Seres, puis à Rabua, aujourd'hui Drama; enfin
atteint Khrisoboli, grande ville située sur les bords du détroit de
Gonstantinople (p. 289, 290).
Partant d'Ochrida à droite, on arrive à Toutili, aujourd'hui Monastir
ou Bitolia; après à Âberlis, Berlis, aujourd'hui Florîna; puis à Ostro-
bon, Ostrovo; puisa Boudiana, aujourd'hui Yodina.Vodena; ensuite à
Salonik, Thessalouika , Saioniki.
Salonik est située sur le détroit de Gonstantinople (p. âOOy. De Salo-
nik à Rendina, Rentina des byzantins, aujourd'hui Rendino on
Yastra (39).
De Rentina on vient enfin à , ij«^^f Akbrisoboli la maritime,
grande ville située sur les bords du détroit de Gonstantinople, agréable,
remarquable par la beauté de ses marchés et par Fimportance de aon
commerce; auprès de ses murs coule une rivière connue sous le nom de
^•L»^ Marmari.
De Khrisoboli à ^Jb^^ .ô. t Khristobelis on compte 25 milles (40}.
41. Ârrétons-nous un moment dans ce canton arrosé par Marmari»
car notre géographe nous donne des renseignements précieux sur cette
portion de l'empire byzantin , laquelle , à ce que je vois par quantité de
cartes, est obscure. Des portulans italiens fournissent peut-être des
données explicites. Je ne les ai pas à ma disposition, mais les cartes de
Mercalor et des postérieurs me préviennent qu'on n'en a pas tiré Tavan-
tage désiré, et le canton nommé littoral de la Macédoine, restait pour
la connaissance des géographes modernes plongé dans les ténèbres. «
La comparaison des cartes, et, en leur absence, du littoral connu ^
peuvent convaincre qu'un désordre y était à débrouiller. Je ne me pro~
pose pas d'y faire paraître toute la lumière, je veux comprendre c»
qu'Edrisi relate, ot, à cet effet, je commence par la comparaison
cartes. Nous y suivons le littoral , et ce qui est dans l'intérieur du
nous le mettons entre parenthèse.
(S8] La version française d'Edrisi dit : an nord de cette vill« , coulent quatre riviènts.
(39) Sandino par erreur dans la carte de Castaldo ; ensuite reproduite par plusieurs autres.
(40) Sur plusieurs points de mon explication , je ne suis pas d'accord avec Jaubert , car cott'
J'i n*ai pas jugé à propos de voir Bermania dans Vrania : de même, je n'accepte le rapprocbem
des Bouighar, Rbagoria, Toutili, à Pologos, Ropelia» Tonrboli, ni la conrusioa de la rivière 1
avec Maritza; ni de Christopolis avec CbrjsopoHs. — Le traducteur y dit : « évidemment il y
quelque confusion » : non , dans le texte d'Edrisi il n'y a aucune.
Atlas ecMan
de 1378.
Golfo di contessa
Carcala
Lastromola
Crisopolli
Locrero
Christopolli
MàKBDOMIA, 41.
André Benincasa
1467 (ii).
g. de confessa
nicalidi
radino
Lastromola
Grixopoli
Leeteropoli
Castopoli
Langistro
g. aurilli
g. de Asperosa
Asperosa
iU
Carti publiée
en 1513 (it).
g. de contessa
Langistrum
(Seres)
emboucb. de Strumon
(Philippi)
Grisopol
Lesteropol
Christopol
Langistro
Asperosa
Ce sont les indicaiions directes des portulans que nous avons derant
nous. Insuffisantes mais intactes, qui ne subirent aucune défiguration ni
altération. L*acceptation des cartes Ptoléméennes embrouilla les con-
naissances des portulans ou les fit négliger et oublier. Le piémontais
Jacq Gastaido , entre autres, dressa une carte de la Grèce ou delà
Turkie européenne; pour le littoral il ne s'écarta pas des portulans ,
mais bientôt Gérard Mercator, voulant les étudier, mit le comble à la
confusion, qu'ion ne s'est avisé de ramener à Tordre. Cartes de
Castàldo (is).
Saodino
(Philippi)
(Carcala)
embouchure.
Contesta
Mercator {n),
Sandino
(Philippi)
(Agastidi)
emb. d*un bras
Strimon
Contessa
Intermédiaires {à s) . Modernes (i o) .
Rondino
de
Christopoli et mines
d'Ëmboli (47).
(Ceres ou Marmara)
emb. de Marmara
ou Veratasar.
Contessa
(Seres on Mairmara)
(Tricala)
ruines d'Eione
(Orsova)
emb. de Strouma
ou Radovitz.
ruines d*Amphi-
polis et Contessa
(Seres)
(lenitsavi)
(41) La carte Bâuiiqtie publiée en 4648» sous le titre de TEarope maritime par G. Blaeuir » chez
Berey, h Paris» est conforme arec Beoincasa» sans les variantes et les erreurs : voyet notre portulan
gënërale» 16, à la fin de Tatlas.
(45) Dans Téditiou de Ptolémée, d'Essler et d'Ubelin, à Strasbourg.
(43) Reproduit en 4870, par Ortelius.
J44) Mercator était suivi et copié par Hend , Janson» Blaeuw; et il est suivi sur ce point par les
etries de la Grèce moderne, anonyme publiée à Paris, chez Pierre Mariette ; et par celle de Philippe
de la Rue, publiée en 1631 , chez le même.
(48) Witt, Delisle, Vaugondy , Horoman et ses successeurs etc.» dérangent l'ancien ordre chacun
à son tour : il y a donc chez eux assez de discordance.
(46) La Pie et Lameau sont assez conformes sur ce point : en a plus de détails dais le premier.
(42^ Christopoli' suivant Delisle.
i36
EDRISI.
Arethosa
emb. de Fautre bras
du Striinon.
(Amphipolis)
Rofini
Orfano
CaTala
Cavalla
Cavalla
Cavalla, ancienne
(Iraiûocastro)
(Iraniocastro)
Neapolis
embouchure
erob. de Carisso
Langistro
Langistro
(Anghista)
(Phillppi)
(Pbilippi)
(Drama)
(Drama)
(Prahoasta)
Neapolis
La Ca?alla («s)
La Cavalla
Gisopoli (49).
Grisopoli
Lesteropoli
Sevastopolî
Christopoli
Cristopoii
(Lesterocori)
(Macedonia)
(Boni)
(GumuUza ou
(Comergena)
Gumulzina)
(Rusio)
(Rousio)
Castropoli
embouchure
Sarpente
Saramont
cap Asperosa
(Rusio)
Sarizahan.
(Nicopolis)
(Rousio)
(Topyros)
(Tschanglalk)
embouchure
emb. de fiume
emb. de Mestro.
emb. de Nestos
LaDgista
de Marmara.
(Nicopolis)
(Nicopolis)
Gauriii
Abdera
ruines d*Abdeia.
Asperosa
Asperosa Asperosa (50)
Sans s*arréier sur la répétitioQ et la irausposition de rivage en rivage
d*Angisla, de Philippi, de Seres et Marmara et d*autres, on se
demande d*où vient cette foule de polis? Neapoli , Grisopoli , Lesteropoli
Savastopoli, Christopoli , Castropoli , entassés entre Cavalla et Sarpento
où il n'y a pas de place. Ces noms grecs sont de Tempire byzantin, an-
térieurs à rinvasion des Latins. Du temps de Mercator, ils n'avaient plas
de distance. Les géographes retrouvant ces noms dans les portulans des
marins, dans Edrisi, fesaient des conjectures et souvent ne savaient pas
indiquer leur emplacement.
42. A une journée ou 25 milles de Rondino , Edrisi nous mène à
l^embouchure de la rivière Marmara , aujourd'hui appelée Stroamitia,
(48) DeVavgoady.
(49) Gisopoli au lieu de Grisopoli , erreur depuis répétée. — Ruscelli et Moletins , dans lecm
éditions de Ptolémée 1561, lS6f, laissent en confusion Grisopolis, Pliilippe et Neapolis cranidei
«■omne identiques.
(50) J. Laureuberg(dans Tatlas de ^'itt 1671) , donne une toute autre suite de lieux et de 0
du golfe Strymonicus di Contessa. Embouchure sud de Strimcna, Stagira, Eion » Aretnsa i au
«mboucliure nord (venant d'Anipbipolis , baignant Strimena); rivière Ganga, Çavala, rit*
Zrgiatus, Neopnlis, Pastus, fleuve Ncssus , Abdera.
MAKE]>ONIA, 42. 157
Rarason, Radovitz, dans rantiqnité Ponlus, qui entre près du bourg
marmara dans le lac Kerkineou Takiuos, qualifié aussi Marmara, et sot-
tani de ce lac , se jeiie dans la mer au midi des ruines d'Ampbipolis.
Cest ici tout à côté des décombres de cette antique ville, qu'était debout
Âkhrisoboli la maritime Xpu<ro7coJL^, Grisopoli, ville d*or,à laquelle les
Latins donnèrent le nom de Gontessa, Inquelle, déplacée par difTérents
désastres, conserve son nom dans Orfano.
De Chrysoboli à Rhana (Drama) dans Tintérieur de la terre , il y a une
journée (p« 289), et de Chrysoboli à Akbristoboli , Xpi^ronoXiçy 25 milles
(p. 297). Sa situation est indiquée par la description tout près de Pra-
kousta (si). Ëdrisi dit que yis-à-vis de Ghrislopoli et dans son voisinage
est une montagne (Pouubardagh , ancien Pangeus) (5â), au delà de
laquelle est un pays connu sous le nom de ^^-U Filibes (Philippi),
où il y a beaucoup d'industrie et de commerce , soit d'exportation , soit
d'importation. Ce pays, couvert de vignes et de plantations de toute
espèce, est situé sur une éminence à 8 milles de la mer. (Distance ainsi
donnée entre les ruines de Philippi et la Cavale nouvelle d'aujourd'hui).
Entre Christopolis et Philippi coule une rivière connue sous le nom
de ç^^Ju» Magrobolami Uaxpono^oc/xoi rivière la grande. De la
rivière en question à Christopolis on compte 12 milles (p. 297). Cette
petite rivière, qualiliée de grande, qui traverse les plaines de Philippi,
prend ses sources près de Prahousta et baigne s«{s murs, mais elle se
jette dans le fleuve Anghisla^ juste 12 milles de Prahousta , prenani la
proportion de la grandeur de 8 milles qui séparent Filibes de la mer.
Lès 25 milles de la même grandeur conduisent de Prahousta , CJuis-
lopolis , aux ruines de Contessa, Chrysopolis.
fie Filibes à Kalah ville maritime , fort jolie, 25 milles (p. 297). Ce
Kalah n'est point Cavala d'aujourd'hui, mais Eski Cavala, vieille Cavalla,
située près de Telfere, a l'est de Prahousta (»3).
De Kalah k j^j^ wU*- Sant. Djordji, ville importante, avec de
magnifiques bazars, de larges rues, de belles maisons, peuplée, riche
et commerçante, 25 milles (p. 297). Cette distance placerait cette ville
importante à la place de Saritschouban ou Serizaham , non loin de
l^embouchure de Mesto ou Nestos , vis-à-vis de Thasos {$*),
"(M) Prahousta offre sans aucun douto une appellation slave, boalgaro-slave. Pra, antéricHr
^*aieax,de siècles; h99t, gott , logement, gîte, hospitalière.
(K2) .Delisle place ici mont Malaca , où il y a des mines d'argent.
(53} Voyez la carte de La Pie. — Il paraît doue que le nom de Cavala existe sur ce point. Castaldo
^-t Mercator Tout déplacé vers l'ouest.
{9A\ A l'époqne d'Edrisi il y avait grande quantité de places du nom de S. George, qui disparurent
■• M retrouvent pins dans les cartes postérieures. U «st probable qa« l'appellation de S. George
III. 9.
1
\
P*^" *'J^rU'^«''*''''o«s donnons «<>«;^;Sp%*OV i,.du
S^sUuée sur «s^^ ^„, ve d^^He «v deMacédojneé^"^ ^*ç,, ^
de »»è«« ''m-S de laKo»'»",*! Coust^nVinop «• f'' \o„siaotiooî
MAKEDOmA, 43. 159
tn dehors dô cette gorge, parce qu^elle est à rentrée du détroit
(p. 296). En résument Tidée d*Edrisi sur la parole de sa description*
on douterait peut-être de ravoir bien saisie, si l'image de la table itiné-
raire ne venait ostensiblement confirmer Tindolente conception , cal-
quée sur la qualification donnée à une portion de la mer par les marins
et les voyageurs.
La rivière Âkhlioun prend ses sources dans les montagnes de
i^y^jA^S el Lakoudemounia (appellation dérivant du mont Lakmon,
séparant Epire de Macédoine et dominant au nord le mont Parnasse).
Âkhlioun prend son origine là où ces montagnes s'embranchent, venant
du midi de Larissa et de Test de Zagoria. Ligolgho (Rodoïl), ville con-
sidérable et importante , se trouve au sommet d'une montagne située
non loin de la rivière Âkhlioun (et de ses sources) (p. 293, 285). Cette
rivière descend de Ligolgho à Karvi, ville au pied d'une montagne et
sur la rivière d'Âkhlioun. Les montagnes du nord dominent la ville, et
la montagne qui va du nord au midi (et réunit les chaînes de Zagoria et
de Lakoadcmounia), est à 20 milles de Karvi (là est le défilé de
Stobouoi). Celle qui se prolonge du nord au midi (là où elle touche une
autre branche à l'est de la montagne de Doubnitza, au delà de Rodoïl),
est à la distance de 40 milles de Karvi et ^Jli 125 (lisez isS 185) de
Constantinople. Cependant de cette montagne de Lakoudemounia à la
montagne la plus voisine (de la chaîne de Zagoria) on compte 50 milles.
(C'est l'espace où est le défilé de Slobouni , entre les monts Rilo el
Tourdjan, où commence la chaîne de Zagoria). D'ici les deux cliatnes
sont séparées par la rivière Âkhlioun (p. 294). Pour comprendre celte
séparation fluviale, il faut savoir que la montagne Lakoudemounia se
croise évidemment avec l'embranchement qui vient de Lesso vers
l'orient, passe au nord de Kastoria et se termine à 50 milles d'Âdri-
nople (p. 286). Ce point est éloigné de 120 milles de Constantinople
^p. 291). La rivière Âkhlioun sépare les montagnes; au nord s'étend la
chaîne de Zagoria (Balkan); au sud les chaînes de Lakoudemounia et
Lesso (Rhodope). *
Âkhlioun coule non loin de Ligolgho (Rodoïl), près de Karvi (ancienne
Bessapara, aux environs de Tatarbazardjik, ou peut-être Birva) et du
nord au midi passe dans le voisinage de Filiboboli et baigne Âdriuoboli.
Elle passe à 12 milles de Filiboboli (p. 294, 585). Ces 12 milles s(n)t
probablement la distance de Karvi à Filiboboli.
Une autre branche de la rivière Âkhlioun vient de Sorlova (Tschor-
lou, ancien Turulus); elle passe de Sorlova vers Ârkadioboli (p. 295,
58i), ainsi qu'on la traverse pour aller à Âdrinoboli (p. 292). Les deux
branches réunies ensemble prennent le nom de ^^ jL» Mariso (Marîtza),
celle "Mcti^
l' SECTIO'' "''
MaKEDONIA, 44. m
44.. Heureusement la table itinéraire vient confirmer ces étranges
coDceptions d'Edrisi, que nous avons débrouillé, consultant les cartes
postérieures et modernes. On voit qu*it y a un véritable tourment pour
comprendre celle relation et sa version française. Ce près de Kbriso-
boli, signifie dans le même canal sur lequel est silué Khrisoboli. Les
appellaiions du détroit de Constantinople ou d'Âbydos, des courants de
rivières et des détroits qualifiés de Marmari, sont devenues génériques.
On a Marmari sous les murs de Grizoboli , à Tembouchure de Maritza ,
dans le détroit d'Abydos ou Gallipoli , et sur toute la mer Marmara
(Propontide) jusqu'à Constantinople.
Quelques renseignements peu exactes, corroborés ou influencés par
la croyance dans Ptolémée, ont suggéré aux géographes Tidée de
placer Tscborlou sur une rivière qui verse ses eaux dans la mer Mar-
mara. La rivière appelée par Ptolémée Arzos, reçut chez eux le nom de
la ville en question : mais ils ne purent s'accorder sur le point de son
embouchure. Gastaldo Tassigne à Ghiurlich, à Touest de Selimbria, près
de Congerbo; plusieurs autres cartes italiennes font perdre leur
Ghorelich dans la mer entre Heractée et Rodosto; Mercator l'introduit
dans la mer près de Selymbria; Delisle place la même rivière, nommée
Chivourli ou Tourzoul, à Touest de Rodosto, près de Gora; Sanson et
Vaugondy rapprochent leur Tschourlou à Selyvria; D'Anville place
Turullus sur la rivière qui se perd près de Heraclea; La Pie lui donne
le nom Tschourlou et la fait entrer dans la mer près de Rodosto ; Lameau
donna enfin congé à cet embouchure inconstante, ce qui est conforme
à la relation d'Edrisi.
Le nom d'AkhIioun est donc donné aux deux rivières des anciens, à
Contadesdus et Agrianes d'un côté, et à une partie de Hebrus de l'autre
côté. C'est une appellation singulière, qui n'a aucune analogie avec les
noms qui sont propres à ces rivières. Des appellations toutes spéciales,
inconnues, extraordinaires, toutes inattendues, se présentent fréquem-
ment dans la description d'Edrisi > surtout pour les rivières. Elles sont
Souvent une conséquence de l'écriture du caractère arabe; il y en a
d^autres qui dérivent du langage populaire des indigènes et des corn-
Qierçants. Leur origine est nécessairement latine ou grecque, quelque-
fois dérivant des idiomes des indigènes : jamais de l'arabe, qui n'a pas
(pénétré dans les régions de notre analyse. Quant à l'appellation
extraordinaire d'Akhioloun , le mol est sans doute grec et l'énigme
Mï'esi pas difficile à résoudre. Dans la description d'Edrisi, l'ancienne
Anchiale est nommée Akhiolou. Or, le nom du fleuve Akhiiou,
Akhiolou est le même AyyixXoi le maritime en grec, Marmara en
latin , Maritza en vulgaire du latin.
i4i EDRISI.
45. Le pays entre le DaDul>e et la mer, ^ers remliouchare do Ûémiê
nommé Berdjan, plus tard appelé du slavon Dobroudje, offre une un*
filière illusion étymologique. Dans le langage des marins, bord,
bordage , jouent un rôle très-varié. De bord a pu chez eux se former
Bordjan, pays maritime, littoral, qui borde la mer, plein d^abords, où se
concentrait un mouvement commercial très-considérable, où nombre
de navires abordaient continuellement. On peut déduire ée même le
nom de Berdjan du Slavon, ce qui reviendrait au même, k la même
signiAcaiion de pays littoral. Bcreg en slavon est le bord, la rive. Le
défilé d*£mineb portait le nom de Beregava, parce quMi toudiait le
bord de la mer. Aussi le pays de Berdjan bordant , bordain en slaven,
serait Beregan, Berezan, Berejan , Brejan. — Mais cette apparence
illusoire s'évanouit quand on voit dans Tappellation de ^j^-T^jf Bi*r-
djan, nommé également .i--^j^ Borschan, un nom de la tradition
ancienne et obscure qui se perpétua chez les arabes. Borsdian ou Ber-
djan figure toujours chez les géographes arabes. Nommé d*abord
en 835 dans le rasm du khovarezmien , ensuite en 950 par Ibn Kelir,
en 1008 par Ibn lounis, en 1050 par Âbou Rihan, vers 1250 par le
géographe persan, en 1274 par Ibn Saîd, en 1551 par Aboalféda,
en 1597 par le Bakouin et par les autres. Son extension est très-con-
sidérable, il couvre Toccident et le nord du Roum byzantin , ainsi
qu*au sud il traversait le vi« climat et au nord le vu"** et an delà, n a
une capitale du même nom , dont la position est fixée par les géogra-
phes en longitude et latitude géographiques à Toccident de Constanti-
nople. Aboulféda savait que Texistence de ce pays ne durait pas tou-
jours, qu'il était conquit par les Allemands : cependant le Bakouin
relate que les Bordjaniens ressemblent aux Franks et combattent les
Slaves leurs voisins. Toutes ces répétitions ne sont que la reproduction
d*un nom traditionnel, dontTorigine se perd dans Tignorance, et qui
fourni l'appellation arabe à un coin très-restreint de Fempire b3rzantiD,.
aux géographes de Sicile, ou plutôt à Edrisi lui-même, qui Ta tir^
des écrivains de sa langue. Cependant, mieux instruit que fous les
autres mahomraédans sur l'état des pays byzantins et danubiens , n*
trouvant plus de Berdjan, n'imposa ce nom qu'à un canton de Tempi
à l'embouchure du Danube. L'emplacement assigné au vaste Borscba
du IX* siècle, répond à la position des Bouighars danubiens qui y étaiei
déjà étaf)lis : on pourrait donc supposer que Berdjan n'est rien que
défiguration de Bourgar (5$). Mais les écrivains arabes semblent to
(S8) Borgao, bos crédit dMIerbelot , p. 1 18, SI 1 , 217, SS6, majores Burgiiodionum esM. Sed
Bulgari (dit Reiske] , aut Bargari : sic enim olim diccbantur. Le sire de Vïllerval, dans ses to;
/apud du CaDgium ad Joinvillc) « nominal la Bonrgdrie nbi Cangius addit esse BulgariaiB. " L*
MAK£DONIA, 46. 143
distinguer leur Berdjau de Boulghar {5«). Au ix* siècle la domina-
avares était encore formidable. Ebranlée par des soulèvements
Tes des Slaves, elle succomba sous le glaive Allemand lorsque
> détruisit leur camp. Cet événement ne devait point rester
rabes, et probablement ce sont les Avares qui portent
n de Borschau, Berdjau. Les Slaves appelaient les
Obrjinieiis; les Arabes, instruits par leurs relations
"^ >om d'Obrzin, Obrzan, Borschan.
lalification de oL>*j.!:k Djerraanie, Germania, paraît plus
.uaire et vraiment étrange. Qui a pu porter ce nom et Tlmposer
.ue partie de Tempire grec jusqu*aux portes de la capitale? qui aurait
pu faire croire aux Siciliens et à un écrivain de Sicile, tout arabe qu'il
était, queTempercur grec de Byzance avait sa Germanie? Certes, cette
Djermanie n'est pas des Germains allemands , et je ne conçois guère
qu'on penserait d'extraire ce nom de quelques établissements des Ger-
mains Golhs. Cette appellation ne dérive d'aucune érudition. On a cer-
tains géographes italiens , comme Mauro, qui semblent enclaver tout le
Itanabe dans l'Allemagne. Mais les Italiens appellent les Allemands
Tedesco, Allemano, et leur érudition ne se permettrait point de caser
Fantique Germania sur les rivages de la mer noire. Mauro place les
Gothes qui vinrent s'établir en Italie à l'emboucbure du Dniepr, quand
Ojçrmania d'Ëdrisi est le Berdjan et la Bomania jusqu'à Conslantinople.
Il £iut donc chercher une autre issue avec cette appellation étrange.
Si on lirait ^ ''-^j^ Djerhania? Celte leçon , je pense , n'offenserait
point l'épigraphe de la carte itinéraire, elle donnerait l'appellation slave
ûe tzarania, tscharania, pays césarien, tzarien, royal, impérial, où
réside le tzar, l'empereur. Le peuple a pu donner ce nom au saint
empire, et spécialement à la Remanie, comme il donnait le nom de
Tzarc^rod, de la ville du tzar, à la capitale Constantinople.
Nous avons observé l'importance de la remarque d'Ëdrisi, que les
«tatalMk éê iS77, iMorîTit au sud du Danube Bulgaria et au nord Bnrgaria. — Schafarjik dans ses
iwtii|nitnt slaves DI, 99, 4» feurait plus d'exemples d'identité do Boi^ian et des Bouliers par la
tnaailiou de consonnances. Fraehu, Ibn Fozlan, p. 236, 237.
(BiQ i<e roi des fionlgars, dit Massoudi (cbap. 15), et les autres 16 répètent : à la tète de cinquante
'■nttl* iKMBties, it une iaTasioa dane l'empire romain et poussa ses ravages jusqu'au pays de Bordjan,
de France, etc. — LesBoulgars, voisins de Kiev, sont-ils ceux du Volga ou du Danube; on discute
(^rtebn, Ibn Fozlan, p. iS4, 246). — Bakoui explique admirablement la double situation des Boul-
firt? jBtfd[f(tii diti), est très au nord où le jour n'est que de 4 heures, ils sont madjoos, et font la
g«eft« aat Seklabs ; ils ressemblent à bien d'égards aux Franks, ont de l'intelligence pour les arts et
eontrttisent des vaisseaux (VU, 2}. C'est l'espèce méditerranée assise sur Voiga : et les autres.
Boiter, ville sur la mer Nitascb, environnée des tourks. Ily a deux mois de chemin à Kostantinich ;
» IMM te fMrrè « KostatttUiick ; la toagoear do jMf y tH de to heortt (Vil , *). ReiattoM arabes.
144 BDRisr.
habilanls dWfraiikbila (de FraiikaTîlla), étaient nomades, peu iéden-
taires (p. 577). 1/cuipirc i;rec éiuit plein de hordes errantes, cherchant
des piUuragesavec leurs iroupeauxsur les uionlaf;ncs ou dans les plaines.
Boulgars, Vabks, Serbiens et ditl'érentes peuplades slaves rodaient
pacifiquement , avec sécurité , dans la Komanic et jusqu'au fond de la
Grèce, avec leui-s moutuns et leur bétail, de façon qn*ils tournoyaient
au delà du Danube. Ils aimaient mieux s'enfoncer dans les pays cul-
tivés et peuplés, où il avait assez de pâturages, panuï que dans ces pays
il leur était plus facile do se procurer des vêlements et de uiodesies
commodités de la vie. Le thème de Thessalonik ne discontinuait point
d'être qnaliiié par les byzantins eux-i|icme de thème Serbe. Les monta-
gnes au nord de Justiniana, sont Serbes. Les Serbiens surtout grandis-
saient alors en force, se fesaieut remarquer plus distinctement par iear
disposition mobile. Leur propre pays entre la Drave et la Morava, où
résidait toute leur force vitale, paraît, d'après la description d'Edrisi,
sans villes, comme un désert. L'hû^toirc civile et ecclésiastique y
connaît quantité de villes et paroisses : mais elles semblent
ignorées par les relations commerciales. Cependant, de ce pays, U
populations se répandaient et ménagaient les pnrrrTJnnr limntinnri mi
aux environs de la Morava, d*où les frontières de l'empire demeaf ^:mu
reculer à tout jamais, perdant jusqu'au simulacre d'autorité. Getltt^.v.AI
population Serbe, Serve, qualifiée par excellence de nomades, obtin^iH^if
le nom érudit des africains getulcs, qui était chez les latins ideDtiqu.K^^a
avec la qualification de nomades, numides : il ne restait à Edrisi qvm^m ^n
de le répéter et d'appeler les Serbiens : Getulcs, Djetouli. Je pense qicv j^n
cette explication est incontestable et qu'on ne voudrait pas iaiv M min
dériver les Serbiens Getoules de là dénomination des anciens Getea.
•47. Il est vraiment curieux d*obser^'er dans la narration d'
comment on distinguait dans les villes littorales de l'Adriatique,
populations kroates, slaves, dalmatcs. Elles devaient se distinguer
quelque extérieur. Ce mélange de populations rend les frontièi
des pays incertaines. Dans le golfe d'Istrie, les îles sont kroates el
pays contigue est kroatic : mais on l'appelle aussi Dalmatie. La
se termine avec Kaguse; cependant, en commençant de Sonna (SignS.
dans les villes maritimes, partout la population dalmate est prédoi
nante encore.
Les relations apportées aux géographes de Sicile, prennent 1«
source, ou de l'usage invétéré du vulgaire, ou de la vue de la popiil
tion qui prévalait les autres en nombre ou en activité; déplaçaient sii
gulièrement les frontières des pays et des états connus par Thistoi
MAKEDOHU, 47. 145
Les Serbiens, à cette époque, formaient un état indépendant, puissant,
grandissant. Leur domination s'étendait depuis Gradiska , au sud de la
Save, jusqu'à rÂdrîatique; ils possédaient tout jusqi^'au delà de Lesso;
à Test les possessions ne dépassaient pas encore Ibar et Morava : ce n'est
que quelques années plus tard, vers 1180, qu'ils avancèrent leurs fron-
tières dans l'empire grec, occupèrent Nisa et les cantons voisins. Cepen-
dant la description d'Edrisi ne connaît pas de Djetoules Serbes dans le
pays traversé par le grand iQeuyeDrin, elle l'emplit par la population des
Sklavons, et elle peuple de Djetoules la moitié de la Boulgarie jusqu'au
delà d'Osma. C'est parce que les commerçants voyaient une muliiiude
de pasteurs nomades des Djetoules Serbiens , errer dans l'empire aux
environs d'Iskraî, de Yoda, d'Osma, qui offusquaient les indigènes
Grées, Boulgares, Valaks (s7).
Par-ci par-là Edrisi (ait sentir cette différence des limites et glisse
des renseignements sur les possessions des états. Il ne nomme ni
les Boulgars, ni les Yalaks, parce qu'ils étaient trop soumis à la tcba-
nnia, à l'empire, et n'avaient aucun terrain d'indépendance. H sait que
Ribna, Nîssa et les autres ville à l'est de la Morava, n'appartenaient
point à la domination des Serbiens , qu'elles fesaient partie de la Make-
donla , parce qu'elles restaient encore sous la domination des tzars ou
des empereurs de Coustaniinople, de la Remanie. Les noms de Remania
et de Makedonia n'ont aucune limite déterminée. Les Grecs sont les
Graîkbioun. Le littoral oriental de la Djermania ou de la Remanie est
aussi le littoral oriental de la Makedonia , traversé par les montagnes
La^oudemonnia.
De même Edrisi fait connaître, qu'il sait très-bien que la Sklavonie,
dans laquelle les Vénitiens avançaient profondément leurs Irruptions,
appartenait aux Hongrois. 11 sait que la plus grande partie de la
Karintie et des pays qualifiés Boemia , Noemia , composaient l'état de
doDgrie. Mais il parie de la Hongrie , Oukaria , comme d'un pays séparé
<3e la Karintie , qualifiant cette dernière de dépendance de l'état des
.ItloDgrois. Cette distinction des pays du domaine des Hongrois demande
€Jles considérations spéciales, pour la Karintie, pour la Hongrie et pour
la Bohême. Nous avons déjà traité la question karintienne, restent
^i^Ues de Hongrie et de Bohême. En revenant à cet effet sur nos pas
le Danube, entrons d'abord dans Onkaria.
(S7) Pour mieux compreudre cette observation et cette différence des frontières des états avec les
Wontières des pays édrisicns, je joins à mon atlas une carte historique de l'année 1144, par consé*
^oent de l'époque du roi Roger. Qu'on nous pardonne qn'ellç est en polonais. Elle était préparée il
^ a Tingt ans pour une publication polonaise qui ne paraîtra plus. Si les cartes de Tatla* offrent
«l«ellqwsi inexactitudes, lé texte de mon ouvrage indique, eiq[>UqBe et corrige en dernier lieu.
III. 10
i46 EDRISI.
Hongrie.
48. On range, dit Edrisi, au nombre des dépendances de la Hongrie,
les villes suivantes :
y^ Montir, Montiour ou ^^^ Manbou.
^j^^uii, Schent.
^jûxi Baghs.
ijlJii^ ajIJu*^ HerngrabaouDjertgraba.
I • ; , .'J ; t *L3 Kavorz ou Kavorzova.
,yj^\M Kalgradoun, plutôt jjj^'jÂb Bclgradoun.
LL..^^! Akridiska, Agradiska.
^^-»*^* jL^*>o* Tensinou ou Tensibou.
iljlj Zanla (VI, 3, p. 575, 577, 579. 580).
tr*'!i^ Titlous est aussi une ville de Hongrie (p. 578), comme nous
Fa vous dit, et ce nombre se grossit encore par^jj i! Arinia, comme
nous allons le voir.
La ville de Baghs est certainement Baks d'aujourd'hui, située non loin
des rives du Danube , vis-à-vis de Youkovar, parce que la Hongrie
d'Edrisi, du côté de Touest, touche le Danube.
Nous avons fixé les positions des villes de Bclgradoun (Belgrad),Baii8-
sin (Brandiz) , Akridiska (Gradiska), Kavorz (Koutschaî) sur les rives
méridionales du grand fleuve; c'était pour nous d'importance, parée
que Banssin et Kavorz sont les points de départ pour les distances qai
déterminent la position des villes restantes de la Hongrie.
On compte 160 milles de Kavorz directement à Agra : en se dirigeant
d'Agra vers le sud et en inclinant cette direction vers Torient il y a ^
80 milles (plutôt ^ 100); d'Agra jusqu'à une petite ville Arinia, et
d' Arinia à Banssin 60 milles (p. 577). Par ces distances nous sommes
conduits et arrêtés à Arad, d'où sort un embranchement de Marosdi
appelé Aranka, pour se jeter par un autre lit dans la Teisse.
Deux passages dans Edrisi donnent la description du courant de la
Teisse. Nous les mettrons en regard , pour les mieux confronter.
àlap, 579, 580. à la p. 590.
La majeure partie de la Hongrie Les rivières principales de la
est arrosée par le o^JJ^ Boutent Pologne «u>^ (de la Hongrie sor-
et par la L*Jj Tissa. Ces rivières tant des frontières de la Pologne),
prennent l'une et l'autre leurs sont la vj:^.^^ Butent et la i^
sources dans les montagnes de dS Tessia. Elles prennent leurs sour-
HONGRIE, 49. 147
IKard qui séparent la Hongrie de la ces dans les montagnes (de Kard),
Pologne à^^ et du pays des qui séparent la Pologne de la Rus-
Byfj^Lt Madjous; elles coulent sie (Hongrie) du nord an sud.
vers le couchant. Parvenues à 8 Elles coulent vers Toccident ; puis
journées de distances de leurs se réunissent et ne forment plus
sources, elles ne forment plus qu'un seul cours d'eau, qui se
qu'un seul cours d'eau qui se jette dans le Danube à Toccident
dirige vers le midi et finit par se de Kavorz.
jeter dans le Danube entre Kavorz
et Banssin.
La différence et les méprises des deux relations ne nous paraissent
pas élever quelque embarras ou incertitude. Comme Fembouchure
entre Banssin et Kavorz est une méprise dans la première, aussi la
position des montagnes entre la Russie et la Pologne dans la seconde ,
est une confusion d'idées. Peut-être Tarabe a voulu dire que les mon-
tagnes séparent la Pologne et la Russie (madjous) de la Hongrie. En
attendant , coAime la Russie placée avec la Pologne au delà des monta-
gnes, se présente séparée, de même Banssin, situé avec Kavorz au delà
de l'embouchure, sont séparés. Ces méprises sont analogues. Dans la
seconde relation , ces fleuves hongrois sont en Pologne. La vue de la
carte itinéraire a pu donner occasion à cette méprise , en rejettant les
fleuves, leurs sources et les montagnes de Kard au delà des montagnes
Balavat (Karpates), dans les espaces où se suivent les villes de Pologne.
Les Kard sptft évidemment les chaînes des Karpates, qui pénètrent
vers le sud Bans la Transylvanie. Le nom de Boutent pourrait être
uppuyé et justifié par quelques appellations consonnantes de localité ou
lie rivière de la partie orientale de la Hongrie; mais il est mieux d'ob-
^rver que ce nom *de Boutent n'est rien autre que le nom réel
lie la Teisse , appelée Tibiscus. De cette appellation latine, par la trans-
position des lettres, ou plutôt par la transposition des points diacri-
Uques, s'est formé Bitisk, Boutent. Ainsi, quand il est dit que la Teisse
tombe dans Boutent, c'est une branche de Tissa qui perd ses enux dans
Tibiscus.
49. De Kavorz à Schent , lieu situé sur la rive occidentale du fleuve
(Bâtent), 4 journées (p. 580). II n'y a que Zent qui peut répondre à cette
condition.
De Schent à Djertgraba ou Herengraba , ville considérable et commer-
çante , par eau 5 journées. En montant la Boutent nous devons abso-
lument nous arrêter à Ksongrad, et, changeant la ppnctuatioi^ arabe ,
rétablir le nom de la Ville en ^IJuiâ. ou àj\jijy^ Elle est presque
i 48 EDRISI.
à l^emboucliure de Koros dans la Teisse, Or, par cette rivière* aussi
par eau, à 5 journées ou 120 milles (sur le Koros), se trouve Tensinova,
ville agréable, offrant d'abondantes ressources et située au midi de la
rivière Tissia (Koros). À Tépoqued^Edrisi, Waradin ou Warasdin sur le
Koros était déjà considérable. Ce Koros est qualifié de Tissia , mais d^où
vient le nom de Tensibou Tensinou ? je ne levlevine pas.
Il est possible de se rendre de Kzongrad à Zanla en 5 journées ,
savoir : de Kzongrad à Temboucbure de la Teisse une forte journée.
Cette embouchure est celle d'un bras de Koros, embranché da
côté du nord. Puis en remontant la Boutent à Zanla 4 journées. Cette
ville est florissante, peuplée et située sur les bores dans la partie
septentrionale de Boutent (Teisse). Zanla est donc Zatmar. De là à
Tensinon (Warasdin), en se dirigeant vers le sud , 4 fortes journées,
en traversant des contrées cultivées et fertiles, situées entre les deux
rivières, la Boutent et la Tissia (Tibiscus et Koros).
De Zanla (Zatmar) à Montir ou Mombou, grande ville sur les fron-
tières de Pologne , en se dirigeant vers Toccident , 5 journées (p. 380,
575). Voici un point en apparence difficile. Toute la difficulté réside
dans rincertitude du nom de la ville. L9 variante trop forte de son
appellation prévient que nous ne le possédons pas dans sa pureté.
L'écriture de. la carte itinéraire présente encore une variante «^
excessivement discordante avec les deux autres. Elle donnerait j-tf
y^ Fouhbon, Foukhbar, et répondrait à Voukovar, seule Tille
avancée sur ce point, capable de remplir les conditions de frontières
aux pieds de Kard , située entre les rivières Tissa , Bodrog et Tsepla,
dans un coin reculé de la Hongrie, que nous allons bientôt reconnattre
en particulier , en parcourant la Bohême,
BOEMIA.
50. Il est connu que les appellations de Bavaria et de Boemia,
Bohemia, tirent leur origine commune du nom du Gaulois Bo!. Edrisi
nomme l'un Baïr, Bafir ou Babir (p. 246, 557, 568, 570), l'autre a^!^
Noamia, qu'on écrit aussi, dit-il, par 6, a^Uj Boemia, province
très-vaste, très-peuplée, très-fertile (p. 571).
Les peuplades Slaves s'étaient établies dans la Bohême; Lemouzes,
Loutitsches, Sedlitzans, Psovans, Mokropsi, Datzanes, Doudlebes,
qualifiées, comme la masse des autres, des noms génériques de Tendes,
Kroates, Chrabates ou Serbes. Avec le temps, le nom de Tschekh pré-
valut entre elles et depuis l'introduction du christianisme, toutes se
qualifiaient de Tschekh. La dénomination des Tschekhs, d'abord res-
BOEtfIA,50. 149
treinte, prenait de temps en temps des dimensions extraordinaires,
ÀTorisée par la propagande de Févangile. Le doc Boléslav II , en 999,
déclara sur son lit de mort, qa*il conquit les pays au delà de l'Oder,
. jnsqn^aux frontières des Russes, avec les villes Yrotslav et Krakov
(Gosmas prag. hoc anno). Malgré celte étendue de son domaine, il
dépendait de Tempire , comme membre du royaume d'Allemagne.
Après la mort de Boleslav II , prévalut chez les Tschekhs le parti
polonais, qui songeait à l'indépendance , à l'existence indépendante
d'Allemagne. Le roi de Pologne, Boleslav-le-grand , s'empara de Krakov,
de Yrolslav et de toutes les conquêtes éphémères des Tschekhs , et sem-
blait devenir l'arbitre de leur sort, s'établissant momentanément, en
1002, dans leur capitale comme souverain. A la suite de cette extension
de l'état de la Pologne, Boleslav-le-grand se trouva voisin et limitrophe
des Hongrois , fixant ses frontières au delà des monls Karpates, sur les
rives du Danube (chron. polon. mixta ungar. cap. iâ).
Les ducs régnants en Bohême , ne manquèrent pas de tirer une ven-
geance épouvantable de la Pologne dès que l'occasion favorable s'en
présenta. Sans songer à reconquérir les pertes, ils ravagèrent en 1058
la Pologne, et y mirent tout à feu et à sang, s'emparant des captifs,
d'an butin immense et du corps de St-Adalbert, qui fut solennellement
transporté de Gnezne à Praga (Cosm. prag. II, p. 2017; anonym inter
script. Menken. t. III, cap. 55; chronogr. Saxo, s. a. 1054, édit. Leibnilz.
in access. historicar. t. I, p. 244; annal. Saxo, s. a. 1059, in corp.
historicor. Eckhardi 1. 1, p. 471).
Cette translation des dépouilles mortelles de l'apôtre , suggéra certai-
nement une singulière invention , à cause que l'apôtre Adalbert était
évéque de Praga. On a dit que l'empereur Otto, ami de Tévêque, avait
kmdé l'évêché de Praga avant de mourir , et lui assigna un immense
diocèse par le diplôme de Tannée 975, fabriqué à cet effet. Ce diplôme
4Qrait été Inventé à l'époque de la susdite translation, sans aucun
doute, parce qu'il est connu par Othlo, qui, entre 1057 et 1052,
écrivait la vie de Saint Wolfkang, évêquede Ratisbonne, et dans sa
^lation fait sonner les expressions du diplôme même (cap. 29, t. IV,
>. 558, édit. Perlz) (ss).
Ge privilège, contraire aux événements historiques, fut bientôt consi-
lërée comme authentique. Il a été déposé en 1086 à l'empereur Henri lY,
l\ÈÏ Ta confirmé, et l'historien Kosmas de Praga, en 1125, l'inséra
jOiH entier dans sa chronique (lib. II, p. 42; in Lunigii, teutschen Reichs
^Tchiv, Continuât. 1. 1, p. 250).
(8É| Parodûa eztitit, episoc^tnm (Otto) , efficit : cumque peragendi coBcambii tempos tenisset ,
•^nU tviil alacritute, nt ipse privilegiam componertt.
i50 EDRISK
Ce priTilége contient pour la géc^apbie deux parties. Dans la
première, il foit un dénombrement des districts ou paroisses, oh des
peuplades de la Bohême |eUe-méme et de ses possessions , qui , par
rirruption récente de 1058, restaient encore en possession des Tschekhs,
aux environs de TOder. Dans la seconde partie , le diplôme désigne
retendue de la province de Krakov, à laquelle Téglise de Boliéme
acquit un certain droit par son apostolat antérieur et par l'occupa-
tion de la Moravie. Parce que le clergé bohème y prêchait Tévangile,
révéque Adalbert , diaprés la tradition , ne négligeait point les ouailles
de ce pays éloigné. Depuis la chute de la grande Moravie et la dépré-
dation des Hongrois , Farchevéché de Moravie et Févéché de Neutni
disparurent, et les premières étincelles du christianisme pouvaient
s'éteindre, si le nombre modique des convertis, privés de leur pasteur,
n'avaient cherché l'intervention des évêques limitrophes. Us s'adres-
saient aux évêques de Juvavum ou Salzburg, de Passau et de Praga.
Chacun y avait sa part, ses prétentions. Aux environs des Karpates le
clergé de Bohème était le plus actif et ne discontinuait pas de servir
les fidèles.
51. Le diplôme, en déterminant l'étendue du diocèse de Bohème,
après avoir détaillé son intérieur, continue : tnde, ad orientem koi
fluvios habet lerminos : Bug scilicel et Ztir, cum Cracoua civilaU , pro-
vineiaque cui Wag nomen est , cum omnibus ad prœdictam urbem perU-
nentibus , quœ Craeova est ; inde , Ungarorum limitibtu addilis tuque ad
montes qnibus nomen Tritri, dilalata procedit; deinde, in ea parte qum
meridiem respicit addita regione Moravia, usque ad fluvium cui nome»
est Wag et ad mediam silvam cui nomen est Mure et ejusdem monltf
eadem paroekia tendit , qua Bavaria limitalur (Cosm. et Lunig. H. ee).
Or, à l'extérieur de Bohême , son diocèse s'étendait des deux côtés des
Karpates; au midi sur la province Wag, et au nord sur celle de Krakov
jusqu'aux deux rivières de Volynie , Boug et Stir. C'est aussi i'élendae
de la conquête éphémère du duc Boleslav II.
Cette invention, attachée à la mémoire de Saint Adalbert, donna ori-
giue à un antre conte qui se transforma en tradition. On a cm que
Saint Adalbert inîervint dans les contestations qu'avait la Pologne avec
Saint Etienne, roi de Hongrie , et qu'il détermina les frontières de ces
deux pays, en leur indiquant le mont Tatour, les montagnes Tairi,
pour limite commune (anon. iater script, ver. hungar. t. I, p. 37). Les
Hongrois et les Polonais d'accord , observaient religieusement cette
décision du saint évéque. Leur traité, en 1191, se relatait à la disposi-
tion des saints, c'est-à-dire du bienheureux roi Etienne et du très-saint
BOBIIU, SI. iëi
patron de la Pologne Âdalbert (foedus a. il91 , apud Vincent. Kadlub.
cap. 18 , p. 797). Les Hongrois ont gagné par cette croyance
inotoelle, étant en possession de la province de Wag, et les écrivains,
ennmérant les conquêtes de Boleslav-le-grand, disaient qu'il avait
conquis une portion de la Hongrie (Gall. I, 6 ; Matth. II, 15).
L*étendue de cette conquête, faite entre 999 et 1000 sur les Tschektis
(et non pas sur les Hongrois), est déterminée géograpliiquement par
une légende ou chronique écrite vers lâiO, comme suit : nam termini
PoUmorum ctd liUus Danubii ad civitatem Sirigoniensem lerminabantur ;
dein, Magriensem (lisez in Agriensem) civitatem ibant ; dein in fluvium
qui Cepla nuncupatur usque ad castrum Galis ; ibique inter Ungaros ,
Ruthenos et Polonos finem datant (vita S. Steph. vel cronica ungaror.
mîxta pplonor. cap. 7, p. 554 du mscr). Or, ce sont les limites de la pro-
vince Wag qui passaient près de Strigonium ou Cran, touchaient et
enclavaient le canton de la ville Magria, c'est-à-dire Agra; ensuite
montaient les rivières Teisse , Bodrog, jusqu'à Gepla ou Toplia , où elles
se perdaient dans les Karapates, au delà desquelles le district de Galis
ou Halitsch regardait le contact des frontières de trois états. Là Boies-
lav-le-bardi, roi de Pologne, faisant ses grandes chasses aux environs
de Galis, surveillait à la fois les affaires de la Hongrie et de la Russie
(chron. pol. mixta ungar).
La province de Wag portait encore une autre appellation, celle de
Ruhia, Ruzzia, Rusia, Rugia, qui lui était donnée dans la grande Mora-
vie , à cause de quelques débris des anciens Rugs ou Ruhs qu'on y dis-
tinguait (telon. bavar. de a. 876, 906, ap. Oefel. monum. boica , 28,
II, 105; Aventin. annal, boior. IV, p. 188; Goldast. rer. boic. script,
p. 698, 718). La popuisrtion slave , slavake y était différente de celle de
Pologne , formait une province à part, limitrophe de la Hongrie. Otton
Bezbraïm , fils d'une princesse hongroise , éloigné de la succession du
trône de Boleslav-le-grand son père, fut en 1025 relégué in Ruhhiam
provineiam, in Russiam (Wlppo, vita. com. salici, p. 470, 477, édil.
iMsterii, 1751 , t. III). Il paraît que la province était destinée à la Hon-
grie , parce que son frère, cousin Emerik, fils du roi Etienne, portail
le titre duds Auûorum (annal, hildesh. ap. Pertz, III. 98). Après la
«tiort d'Emerik (1051) et de Bezbraïm Ollo (1052), le fils de ce dernier
tioinan prit possession de la province et de la principauté Russia comme
apanage (Wippo, p. 578; Bogufal. inter. ser.siles. Sommersb. 1. 11,26).
^près sa mort, la province Wag, Ruhia, entra en possession des Hon-
grois , sans contestations connues , et les montagnes Tritri , Tatri et les
ICarpates séparaient la Pologne de la Hongrie.
La possession de la province de Wag par la Hongrie , n'était pas de
152 EDRISl.
longue durée ; cependant une tradition se conserve dans le peuple jus-
qu'aujourd'hui. Surtout aux environs d'Orava ou Ârva , qui perd ses
eaux dans le Wag, la population la répète. La possession antérieure des
Tscbekhs était plus courte, mais elle héritait de la grande Moravie; son
influence, par Tactivité ecclésiastique, continuait d'être plus durable;
ridiome bohème jusq'aujourd'hui y est Tidiome liturgique : les livres de
prières bohèmes et la poésie bohème y sont généralement répandus et re-
cherchés avec prédilection. Allez-y sonder les pensées de la population et
vous apprendrez jusqu'à quel point elle sympathise avec les Tscbekhs,
comment elle compte sur Tavenir des Tscbekhs , qui sera le sien.
J'espère que cette longue déduction ne paraîtra guère déplacée,
quand nous nous proposons d'expliquer la description de la Bobcme
d'Ëdrisi.
52. Il compte au nombre des villes de Bohême, les suivantes :
yjX^y^S^ ^^ J'^CT^ ^^\iL\r^ Djikelbourka, Djikelbourgo, Dji-
kelbourg.
jjjk^ Schbrouna.
aSI )3 A.^t ^LjLJ Diana, Abia, Dbiana.
y^h» vob Bassau, Massau.
^flj^ iT*^ iT^^ Bilhs , Neilhs , Bis.
UratJ) 5^t Agra, Agrakta.
JL«L^ i\^\j* akU/i jJL*^ Mesla, Maschela, Maschesala, (qu'il
compte aussi à la Saxe).
ij^y^\ Eslergona, Ostrikouna , Ostrigoun.
t ^•bJy^MW Sinolavs (VI, % p. 371; 5, p. 575). Schebronna, Ustrikonn
et Sinolavs, sont aussi mises au nombre des villes de Karintic. La der-
nière avec raison , ce n'est que par méprise qu'elle s'est égarée dans ce
nombre, sa position orientale est déterminée très au midi et même en
dehors de la Kroatie , dans la Slavonie. Quant à Schebrouna , c'est tout
le contraire : ce n'est que par erreur; elle est donnée pour la ville de
Karintie parce qu'elle n'est pas au sud mais au nord du Danube. Djikel-
bourga a donné peut-être occasion à cet erreur si elle-même ferait par-
tie de Karintie, dont nous observerons la probabilité. Dans cette énu-
mération des villes de Bohème il ne pouvaît pas manquer d'erreurs de ce
genre, qui sont assez familières à la description d'Ëdrisi , comme nous
l'avons signalé , indiquant les causes. Au nombre de ces erreurs il faut
encore ranger l'oubli de ^J^^ Neitrem, qu'Edrisi veut enclaver dans
la Karintie, contrairement à toute sa relation.
BOEMU, S3. i55
Biana, Vienne et Ostrikoon, sont situées sur le Danube au sud.
Biana est à 60 ou 40 milles à Torient de la ville de Bavière Garmaîscha
(p. 570, 571); et de Biana à Ostrikoun, vers le sud, on compte 50 milles.
De toutes les villes de Bohême , Oslrîkoun est la plus vaste et la plus
populeuse; elle est la capitale et le chef-lieu du gouvernement (p. 571).
Gran, Strigonium en latin, Esziergon chez les Hongrois et Ostrihom
chez les Slaves, est considéré pour la capitale (59). Cest près de cette
ville que les rois Boleslav-le-grand et Etienne ont eu une entrevue
(cron. hung. mixta pol. cap...); c*est la frontière de la Bohême, éloignée
30 milles d*une autre capitale Belgraba (Âlba regia).
D'Ostrihom, à 50 milles vers le nord, sont situées deux villes : Sche-
l)ronna et Djikelbourga. De Bouza à ces deux villes aussi vers le nord, on
compte ^ 5 journées, et de Biana, encore vers le nord, à Schebronna
Il y a 40 milles. Ces deux villes au noi*d de Bouza, d'Ostrihom et de
Tienne, sont donc au nord du Danube, à la distance Tune de l'autre de
60 milles. Schebrouna est une ville remarquable, dont les dépendances
sont cultivées et fertiles, les marchés fréquentés,. les maisons hautes et
les agréments renommés. Elle est située dans une belle plaine à âO
milles du fleuve (p. 571, 575). Ce fleuve innommé ne peut pas être le
Danube, parce que Biana, située sur le fleuve Danube, est éloignée 40
milles : c'est donc un autre fleuve plus rapproché.
55. Les distances données de Biana et d'Oslrikoun ,. dirigent vers le
nord sur Brun ou Berna en Moravie et je pense qu'elles sont assez puis-
santes pour y fixer la position de Schebrouna. Cet emplacement de
Sefaebrouna étant déterminé , il devient presque impossible d'indiquer
à Djikelbourga la situation en Mdravie, et même au nord du Danube.
Il me semble très-présumable que Djikelbourga n'est autre chose ^e
Salzbourg de Karintie. Il est vrai qu'à cette présomption la distance de
80 milles s'oppose, car elle ne suffirait pas pour celle d'Ostrihom à
Salzbourg. Cependant il faut observer que presque toutes les mesures,
milles ou journées, se présentent d'une grandeur excessive partout,
depuis la Bavière jusqu'à l'embouchure de la Drava. Aussi les journées
de Bouza, que nous avons fixée sur Petz ou Gin-qéglises , sont exces-
sives et demandent 150 milles : chaque journée double de 50 milles.
Mais quant à ces dernières distances de 5 journées, on pourrait
présumer que l'exorbitance des journées prend peut-être sou origine
dans rincertitude de la lecture des chiffres : car, si on lirait au
lieu de ^ 5 journées, ^ Sjournées^on n'aurait à compter que de
(59) L*appelIatiou est purement ilate : ostri-bom, sommet fortifié, oo monticule pointue.
154 EDRIST.
petites journées, des journées ordinaires de 20 milles, pour avoir de
Bouza à Schebrouna et à Djikelbourga les 160 milles nécessaires.
Schebrouna (Brun, situé presque au confluent de deux rivières) est
éloigné 40 milles du Danube et 20 milles d'un autre fleuve de la
Bohème. Ce fleuve , auquel Edrisi relate la situation de la ville , doit se
trouver désigné par sa description. En effet, ailleurs Edrisi raconte que
deux rivières prennent leur source dans la Bohême, et après avoir
coulé vers le sud-ouest, vont se jeter dans le Danube. Elles descendent
des montagnes sJl^'^^ Balavat, qui séparent la Bohême delà Pologne.
Après avoir coulé séparément, elles se réunissent et versent, comme
nous rindiquons, leurs eaux dans le Danube. Les villes d'Agra et de
Biths sont bâties sur leurs bords (p. 576). Réellement la rivière Arva,
Orava, Oraviiza, descend de la montagne karpatienne, nommée lalovek,
Balavat {yZ^\Jj lalavat), qui sépare la Pologne de la province bohème
Yag. Elle coule, de même que la rivière Vag, vers le sud-ouest et se
réunit à cette dernière qui porte ses eaux dans le Danube. Cette rivière,
ce fleuve important, donnant son nom de Vag à toute la province, se
rapproche à 20 milles de Brûu.
C'est juste. Mais la conception d'Edrisi est évidemment confuse sMl
range Biths et Agra sur les bords de ce fleuve. Il est contrarié par la
carie itinéraire dont il donne la description. Elle place ces villes avec
Neitrem entre les rivières venant de Balavat (Karpates), vers le Danube,
par conséquent dans Tintérieur d'une mésopotamie. Il y a en effet
plusieurs rivières : Neitra, Cran, Ipola qui coulent dans la même direc-
tion que le fleuve Vag ; c'est entre ces rivières qu'il faut chercher la
situation de plusieurs villes. Mais la confusion d'Edrisi va plus loin et
ne s'accorde guère avec la carte itinéraire; car ces villes nommées
soiR assez éloignées de Vag et trop dispersées dans la mésopotamie
pour se trouver ensemble entre les rivières de la direction sud-ouest.
11 est probable qu'il nous serait impossible de sortir de toutes ces diva-
gations, si les noms de Neitrem et d'Agra ne nous rassuraient que l'un
est Nitria , Neuira, l'autre Erlau , en latin Agria, chez les Slaves, lager,
et chez les Hongrois Eger.
54. Neitrem , suivant Edrisi, est à 40 milles au sud d'Agra (p. 576),
quoique ces deux villes sont presque à la même hauteur : Nitria à
l'occident , quelque peu plus septentrional. De Neitrem à Bouzana et
à Bedhvara, également 70 milles en se dirigeant vers le nord ou nord-
est (p. 578). C'est tout le contraire. Bouzana (Boudzin, Bouda) sur le
Danube , à 55 milles de Belgraba (Alba regalis), est au sud-est de
Neitrem; et Bedhvara (Voukovar), placée sur le Danube, à double
distance, de même au sud-est.
BOEMU, 54. 455
Sur le Danube ^ trouve Bassan ou Massan , à 80 milles vers le sud-
ouest d*Âgra (p. 577) ; 80 milles vers le sud-est de Scbebrouna et 40 vers
Torient d*Ostribom (p. 572) qui est à 80 milles au sud de Scbebrouna.
Prenons ici partout le sud pour le nord, et Forient pour Toccidcnt, et
nous nous trouverons avec Bassan à Presbourg , cbez les Slaves Prespo-
rek et cbez les Hongrois Poson, situés sur le Danube. Je ne vois pas
d^autre issue à tant de farfouillement.
Quant à Bitbs , la question est encore plus obscure. Bitbs est située à
40 milles vers le sud-est de Neitra, sur le même fleuve qu*Agra (p. 576,
577). Il en résulterait que Bilhs est dans le même canton qu^Agra ,
rapprocbée aux mêmes rivières qui se perdent dans le Danube , placée
presque à la même distance de Neitren comme Agra. On pourrait pro-
poser une multitude d'hypotbèses pour cette position , parce quUl ne
manque pas sur tous les points de la Hongrie , des noms analogues à
Bitbs. Mais aucun de ces Bitbs ne répondrait aux deux conditions
relatives à Neitra et Agra. La petite rivière Agria, qui se jette dans
Teisse, n^offre aucune place pour une autre ville; il faut absolument
écarter cette condition du même fleuve pour Agra et Bitbs.
Agra et Bitbs se trouvent tous deux (de même que Neitra) dans un
pays où les rivières coulent dans la même direction , et les villes de ce
pays se trouvent sur les mêmes, c'est-à-dire entre les mêmes rivières.
Ainsi , je pense qu'à 40 milles sud-est de Neitra , nous nous trouvons
très-bien avec Bitbs, sur les bords du Danube, dans Voczen, Yazia
Waitzen et insula Yizze, non loin à Test de Temboucbure d'ipola. La
rivière Zagyva roule ses eaux vers le midi, à égale distance d'Agra et de
Bitbs. Ainsi Bitbs comme Agra se trouve sur les frontières de Bobéme.
Tout cela est la Bobéme, la province Vag, dépendance et possession
hongroise, dont Osiribom est la capitale; séparée de la Hongrie par
Teisse , Bodrog et Toplia, frontière avancée vers la ville Ungwar (Mon-
tir, Manbou), qui , dans le point d'Onkaria culminant au nord , toucbe
la limite scabreuse de la Pologne et de la Russie. Pologne , Russie ,
Hongrie, Bobéme s'appointent entre les villes frontières Ungwar et
Galis.
De Bassan (Poson), voisine d'Ostrihom , et de Bitbs voisine de Nei-
trem, également vers le nord, à 5 journées ou 150 milles, se trouve
Masela, Mascbela, Mascbesala, ville agréable, entourée de vastes et fer-
tiles dépendances et ceinte de fortes murailles (p. 577 , 578). Elle est
rapprocbée à la Saxe, à l'Allemagne, considérée même pour une ville
de Sasonia, éloignée de Halla 80 milles, et de Kazlaza (Saalfeld)
100 milles (p. 575, 581 ). Ces distances nous poussent forcément dans
le centre de Bobéme proprement dite.
456 EDRISI.
55. Daos la description éparpillée des tableaux coupés par sections,
Edrisi reprend sans cesse ses courses interrompues , pour continuer
ou achever ce qu'il avait commencé; il se répète et s'égare dans ce
dédale de routes, au point d'oublier les provinces et les places les plus
importantes. C'est ainsi qu'il parle des Iles de mer , des possessions,
des conquêtes des Vénitiens , qu'il travarse en observations les localités
de leur lagune, et la ville capitale elle-même, Venise, se dérobe à sa
diction. Il serait probable qu'en parlant de la Bohême , content du
chef-lieu d'une des provinces, il a passé sous silence sa capitale Praga.
Cependant , les quatre distances «opposées s'appointant , nous ont en-
foncé dans le centre de la Bohême proprement dite, qui relevait de la
Saxe ou du royaume d'Allemagne, et nous enferment dans une ville
bohème -saxe , ceinte de fortes murailles. Nous sommes donc forcés
d'assigner à Masla l'emplacement dans la Bohême, et à cet effet, à mon
avis, aucune ville ne répond mieux que la capitale Praga. Pourquoi son
nom est-il remplacé par un autre, par celui de Masla ? je ne saurais le
dire, je ne sais former aucune hypothèse géographique pour l'expli-
quer, mais je n'y vois rien qui conviendrait à Masla, que la seule Praga.
Cette capitale était forte et commerçante, avait des marchés, de
grandes foires; en allemand jahrmark, messe, messel. Peut-être que les
marchands , qui donnaient des renseignements, étaient habitués de
nommer Praga par ses messe (eo).
Edrisi, en parlant de Bohême, s'était écrié avec une certaine indigna-
tion : tout ce pays appartient à l'Allemand. C'est lui qui perçoit les im-
pôts, qui veille à la sûreté publique, qui gouverne à sa volonté , duquel
émanent les ordres suprêmes , qui nomme et dépose les agents de son
autorité, sans que personne ose s'y opposer ni enfreindre ses lois (p. 571).
A rinstant même il s'occupe d'Ostrihom , chef-lieu de la Bohême qui
était le siège du gouvernement des Hongrois Magyars. Il y aurait donc
en apparence de doutes, qu'il avait l'intention de signaler la sujétion
des Magyars à l'Allemagne. Serait-il possible pour nous d'y consentir?
On sait que depuis cent ans la Hongrie s'était émancipée de l'in-
fluence directe de l'Allemagne, qui lui a d'abord imposé le christia-
nisme de l'empire. Anno 1055 romana respublica subejctionem regni
hungariœ perdidit (Wibert, vita scti Leonis, II, 4). Depuis, la Pologne
sous Boleslav-le-hardi , veillait à l'indépendance de la Hongrie. Le
(60) On a dans la haute Sflésie an Tillage Hassel , Maslova , situé ;à i milles de Bresla^. On y
trouTe dans son terrain sablonneux quantité de dépouilles humaines et des antiquités , de menues
reliques qui s'y rattachent. Pas de doute que ce lieu avait quelque importance |du temps anti'Chié-
Uen ; mais aucune de temps postérieurs connus par Thistoire , ni commerce , ni murailles, ni quel*
que qualité que ce soit qui répondrait à Masela édrisienne.
POLOMUy 56. 157
pape Grégoire YH, en 1074, fulmine le roi Salomon : tu a regia virtute
et moribus longe diicedens jm et Iwnorem a rege teutonico in beneficium
skut audivimus suscepisti (epitr. II, 13). Salomon fut en effet dépouillé
du trône par Boleslav-le-hardi, occupé ensuite par des rois indépen-
dants. L'écrivain de la légende hongroise ,»traçant Tapologie de Boles-
lav-Ie-bardi (assassin d'un évéque), et plein de colère contre la noblesse
remuante de Pologne , termine sa narration par Paveu suivant : et
lieet essel lenendum, tamen, ne veritcis gestorum obnubilaretur, Magaro^
nés hoc est Ungari totam suam potentiam (leur indépendance), à Polonis
habebant et extrahebant et robore eorum semper pugnarent (chron. un-
gar. mixta polon. cap. II).
Edrisi donne la description de deux Bohèmes , de celle qui formait
une province de la domination Magyare , dont le chef-lieu était Ostri-
houn (de la province Yag ou Buhia), et de Ta utre proprement dite
(Tschekhie), intimement liée avec la Saxe, c'est-à-dire avec TAllemagne
dont il connaissait la ville Masla , ceinle de fortes murailles. C'est de
cette autre que les marchands et les voyageurs pouvaient relater à
Cdrisi de quelle façon l'Allemand y dispose de tout. Lui , dans sa diction
embrouillée ne les a pas distingué et semble dire des Hongrois, lors-
que parle de la Bohème proprement dite, où était située la ville for-
tifiée Masla ou la capitale Praga. De Masla à Krakov, ville de Pologne ,
il y a 150 railles (p. 581).
POLONIA. '^
56. Un écrivain de cette époque (1110-1140), ecclésiastique en
Pobgne, appelé Gallus, certainement arrivé de France, considérant
^pwd regio Polonorum ab itineribus peregrinorum est remota et nisi
iranseuntibus in Russiam pro mercimonio, paucis nota : entreprend de
donner sa description , croyant qu'une courte description ne sera pas
réprouvée : si brevUer inde disseratur, nuUi videeUur absurdum.
Cette description est en effet extrêmement laconique. Il y dit que
la Pologne compose la partie septentrionale de la Slavonie ; touche à
Forieut la Russie, au midi la Hongrie, du sud-ouest la Moravie, de
l'occident la Saxe et le Danemark; au nord, trois peuples, des pays
barbares et sauvages la séparent de la mer; les Seleuciens (Lutices),
les Poméraniens et les Prussiens. Il ajoute qu'au delà de la mer, d'autres
pays barbares possèdent les golfes et autres sinuosités, où enfin
sont les îles inhabitées, couvertes de neiges et de glaces perpétuelles.
Il divise toute la Slavonie en trois zones ; septentrionale (Pologne),
çui 6*éteQd dès Sarmaticos ou Getes (Prussiena) jusqu'à la Dace (Dane-
158 EDRISI.
mark) et la Saxe ; Taulre depais la Trace (Romanie) , traverse la Hon-
grie, où les Huns Hongrois Toccupent, puis par la Karintie, et se ter-
mine sur la Bavière ; méridionale (la troisième) touche la méditerran-
née (Adriatique), commençant de TEpire, passe par la Dalmatie, ta
Kroatie et T (strie jusqu'à la On de la mer Adriatique , où sont Venise et
Aquilée, et l'Italie la clore.
Enfin cette région peu connue , visitée seulement par la traverse des
marchands , quoique silveuse , est suffisamment pourvue d'or et d'ar-
gent, de pain et de viande, de poisson et de miel, et supérieure aux
autres, ce qu'étant entourée de sus-mentionnés peuples chrétiens ou
payens, et par tous ces peuples conjointement ou séparément, bien de
fois attaquée, elle n'a éié subjuguée par aucun. Pays, patrîa, où l'air
est salubre , le sol fertile , les forêts mieilleuses , les eaux poisson-
neuses, les guerriers belliqueux, les paysans laborieux , les chevaux
durables, les bœufs labourables, les vaches laiteuses, les brebis lai-
neuses (Gallus, cliron. Polon. proem. p. 14-17).
Voici à quoi se réduit toute la tirade de Gallus. Il dit que la Pologne
n'était connue à cette époque que de peu de gens qui la traversaient;
mais il y a quelque chose à redire contre cette assertion. Admise par le
baptême a la société des états chrétiens, elle se faisait connaître , lors-
qu'on 992 les princes expulsés avec leur mère , allaient offrir au pape
le pays qu'ils ne possédaient plus (Murator. antip. fiai, medii sévi , t. V,
p. 851) ; lorsque les émissaires de Boleslav-le-grand circulaient en Lor-
raine, en Italie, fomentant le marquis d'Ivrea au pied des Alpes et le
pape à Rome contre l'empereur roi d'Allemagne (Ditmar, VI, 56, et
passim); lorsque le même Boleslav-le-grand en 1018 , forçait l'empire
à conclure la paix honteuse à Bautzen et se fit donner un contingent à
TAllemagne contre ses ennemis (Ditm. VIII, 1, 16, p. 861; annal,
quedlimb. sub. a. 1029 , t. III, p. 81, édit. Pertz); lorsque Boleslay-le-
hardi, secondé par Grégoire VII, assura l'indépendance de la Hongrie
(epist. Gr^. VII pape, 11 , 15, 65, 70; chron. Ungaror. mixta Polonor),
et les moines de St -Gilles en Provence , recevaient de Vladislav Herman
en 1084, les statuettes d'or fabriquées en Pologne (Gall. 1 , 50, p. 4^).
Gomment un pays néophyte pouvait-il être aussi peu connu? Quantité
considérable d'apôtres, multitude d'ecclésiastiques inondaient laPologne;
voir les suites des évêques pour la plupart Italiens ou Français, les
légats des papes; l'écrivain Gallus lui-même a vu eu 1105 l'évéque de
Beauvais venant en cette qualité (Gallus, II, âl, p. 188); lui-même a va
un autre Gallus , constructeur de places fortes (Gall. II, 59, p. 214).
L'empereur Otton III visita dans l'année 1000 la cour de Boleslav-
le-grand , accompagné d*une foule de ligueurs (Ditm. IV, 20; Gall. I,
POLONIA, 57. i5d
6, p. 58-43). Plusieurs reines en Pologne étaient allemandes, dont une
passa ses dernières années, jusqu^en i0â5, à S. Gall en Suisse (annal,
quedlimb. t. III , p. 88, édit. de Pertz) ; Tautre , fameuse par son règne
et ses donations, morte en i068 à Brunviller, aux environs du Rhin
(vita Ezonis et Richezae cap. 5, etc; annal, brumvillar. t. II, p. 100,
édit. Pertzi; Lacomblet Urkunden , p. 18i, 186. 189, 192, 244, 457).
Des seigneurs allemands mécontents, trouvaient un abri en Pologne ,
des ambassadeurs et envoyés de l'empereur Henri II y allaient traiter;
les irruptions des Polonais pénétraient dans le cœur de la Saxe , et la
renommée porta leur nom jusque vers Aix-la-Chapelle et la Lorraine
(interpolator Ademari, ad III, 51, t. IV, p. 150, édit. Pertz). Dans
toute cette étendue de Tempire, à Korvei, Merzebourg, Quedlimbourg,
Hildesheim , Fulda , des événements arrivés en Pologne étaient insérés
dans des cartulaires le jour même que la nouvelle arrivait; des nécrolo-
guesqu*on y soutenait dans les couvents, la Pologne apprend ses faits
d'armes de Tépoque. Elle était assez connue , du moins en Allemagne
et en Italie. Il faut cependant convenir, que noyée dans la qua-
lification générale des Slaves, elle est rarement nommée dans de mai-
gres monuments géographiques. Ses événements sont rapportés par de
courtes notices, et comme ces siècles ne s'adonnaient guère aux
descriptions des pays, elle est négligée plus qu'aucun pays.
57. Des Allemands qui s'entretenaient de l'histoire de la Pologne,
^dam de Brème (hist. eccles.), notifia sa position, et Helmold deBozov
«n 1175, reproduisant les paroles de son prédécesseur, déplore la dis-
position des Polonais à la rapine (chron. Slav. 1 . 1 , § 9 , 10). Vers le
même temps. Benjamin de Tudèle , dans son voyage fictif entre 1160
et 1175 ne Ta pas nommé. Il connaît le pays de Otx^2 Bohême appelé
nSK'lB Praga, qui est le commencement de x^^n^p^^N l'Esklavonie,
^ue les juifs qui y habitaient appelaient ]y^^ Kanaan, à cause que les
habitants vendaient leurs fils et leurs filles à toutes les nations, de
même que ceux de x^d^"^ Russie, qui est un grand royaume, s'étendant
depuis la porte de Prague jusqu'à la porte de ^^ Pin ou Fin , cette
^ande ville (citée , état), qui est à l'extrémité du royaume. C'est jusque
là que s'étend le royaume de Russie (p. 246 de l'édit. de Baratier).
La Russie s'étendait donc depuis la porte ou les frontières de Bohème
(Praga), jusqu'aux portes ou frontières des Finnois, de la race finnoise.
En effet , nous l'avons vu : la Bohème s'étendant avec sa province Yag»
au sud des Karpates, touchait aux environs des sources de Cepla, à la
province russienne où était Galis et Przemisl, rapproché aux sources du
Dniester, comme nous le verrons.
1 60 BDRISI.
11 De faut pas s'étonner que Benjamin et ses co-religionnaires savaient
da commerce des esclaves. Lorsque les Bohèmes vendaient les prison-
niers qu'ils emmenaient de Pologne, lorsqu'on 1160, les Pomoraniens
vendaient aux Polonais, aux Sorabes et aux Bohèmes les malheureux
Obotriles qui cherchaient chez eux un refuge, fuyant le joug allemand
(Helni. Il , 5), c'était un véritable trafic des enfants slavons. Les juifs, •
regardant Tunité de la race , ne pouvaient dire autrement, et ne pas
négliger d'en tirer leur profit. La mère de Boleslav-bouche-torse, la
reine Judith, morte en 1085, racheta , autant que ses moyens le lui
permettaient, grand nombre de chrétiens de la servitude juive (Gall.
II, 1 , p. 151), puisque les juifs profitaient de ce trafic, et rien ne les
empêchait encore d'eu tirer tous les avantages.
La même année qui termine la narration du voyage de Benjamin 1 1 73,
un autre juif, Petakhia deRatisbonne, se mit en route vers l'orient.
Il vint en premier lieu à n^dhid jH^^B P'^^ig ^^ Bohemia, d'où (dit le
narrateur de son voyage louda Khasid) x\3lSlDb JJDi HfiOBpi il va en
^X^D1")3K^ DVdS X^^I^pIBDI îl va en Pologne , et de la Pologne à Riior
(sibbub h'oiam , public par Garmoly, p. 9).
Les juifs et les Allemands, voyageant à leur aise dans tonte la
Pologne, s'y casaient avec sécurité, mais les avenues furent difficiles
par les armes des Allemands.
En 1109, inspiré par Zbigniev, l'empereur Henri Y entreprit une
expédition eu Pologne. Il remua toutes les armées de l'Allemagne. Les
Bohèmes étaient leur guide (Gall. III, 3, p. 257) et le conduirent en
Silésie vers Glogov; ensuite il pénétra jusqu'à Yrotsiav, d'où s'évadant
de son camp de chiens (llundsfeld), il retourna par la Bohème dans ses
foyers (Gall. 111,2-15).
Cinquante ans après, en 1157, non sans difficulté , avançait vers
l'Oder avec sa puissante armée , Frédéric Barberousse. On savait par
tradition , que les armées de l'empire passaient jadis ce fleuve , mais le
souvenir s'en était perdu. En Mfet, Frédéric pénétra dans le diocèse de
Poznan et à la grande allégresse de ses guerriers , recula à pas préci-
pités (Frederici eptla ad Wibald. abbat. in momum. vet. Idart. et Du-
vandi, t. H, p. 393; Radevici vita Frider. I, 1-5). Ces expéditions
furtivement terminées , ne pouvaient suffisamment faire connaître la
Pologne aux étrangers, leur séjour paisible était plus à même de don-
ner les renseignements nécessaires à Roger roi de Sicile et à ses
géographes.
58. Edrisi revient deux fois sur la Pologne (p. 580 , 389). La Pologne,
dit-il , est un pays remarquable par le nombre des savants qu'il ren-
POLONU, 58. 161
ferme. Beaucoup de ^^\ Romains (ei), amateurs des sciences, y sont
irenus de toutes parts. Ce pays est florissant et peuplé, ceint de tous
côtés par des montagnes , qui le séparent de la ^|y Bohême, de la
6^yA^ Sassonia et de la fwji Roussie. L'une de ces villes les plus
importantes est JitJ Krakal (Krakov), remarquable par le nombre de
fies édifices et de ses marchés, de ses vignobles et de ses jardins (p. 9^).
— Pologne, pays de la science et des savants Roums, est fertile, sillonné
de cours d'eau , couvert de villes et de villages. La vigne et Tolivier y
croissent, ainsi que toute espèce d'arbres à fruits. Ses villes principales
sont toutes belles, florissantes et célèbres, particulièrement en ce
qu'elles sont habitées par des hommes versés dans la connaissance des
sciences et de la religion roum, et par des ouvriers habiles autant
qu'intelligents. Krakal, Djenazia et les autres villes sont remplies
d'habitations contigues , présentent beaucoup de ressources et se res-
semblent singulièrement entre elles, sous le rapport de l'étendue et
de l'aspect; les objets qu'on y fabrique sont à peu près tous de même
nature. Cette contrée est séparée de la Saxe , de la Bohême et de la
Aussie, par des montagnes qi/i Tenvironnent de toutes parts (p. 589).
Il ne manquait pas d'instruction à la Pologne de celte époque reculée.
Cent ans auparavant, vers 1030, Karimir fut placé par Mieczislav II et
iiixa ses parents, dans un couvent poury recevoir Tinstruction (Gallus,
1 , 21 , p. 98), avant d'aller continuer ses éludes à Liège , d'où il sortit
<«n homme lettré ou savant, h(ymo litteralus (Gall. I, 19, p. 92). Le
clergé était appelé à soutenir les écoles. Un autre prince royal, Zbigniev,
adulte, fréquenta l'école à Krakov, in Craeovia lileris daltts /utï, ensuite
«sa marâtre l'envoya dans un couvent de Saxe (Oall. H, 4, p. 139), où il
-se forme en bon rhétoricien, ul lUeratus rheiorice coloravU (GaJl. II, 16,
p. 163). Des étrangers lettrés venaient s'y établir : Mirzva, anglo-saxon,
TerslOS5, apportant les historiens de son pays (Dlugoss. clcnod. msclpi.
p. 5; Paprocki gniazdo enoty, p. 506, herby rycerstwa, p. 462);
iîallus arrivait pour écrire l'histoire des événements dont il était té-
moin. A la cour on aimait la lecture. A cet efiet, on rédigeait en latin
tes événements du jour, pour les translater oralement en langue vul-
gaire (Gall. m, p. 243), et au nombre du clergé de la cour, nous
voyons l'écrivain Gallus que nous avons mentionné , dont l'ouvrage
(€1) le ne comprends pas pourquoi le savant traducteur s*cst décide de rendre les Roumc >a.
par Grecs. Pourquoi ne s*cst-il rappelé comment Edrisi qualifia quelques pages précédentes ' les
«tants résidants à Banssin, qui sont
Pologne soia les iatins. Ils y sont veous
«eax-ci aous avons Texplication , mais pour les Grecs aucune.
III, ii
eie commeni, carisi quaiiua quelques pages preceaenies ' les
..••^ j^l (p. 577], Graïkioun , Grecs. Or, les Ronm« ea
us de toutes parts, de Tltalie, de France, d'Allemagae. Pour
4^3 BDRISI.
historique , décoré de la verbosité poétique , enduit de la couleur apo*
iogétique , est un des plus remarquables entre autres contemporains.
Otton, ensuite évéque de Bamberg, apprit la langue vulgaire pouf
diriger une école à Krakov (Sefridi vita Scli Otlonis, cap. 7).
A Amalfi , dans les domaines du roi Roger, on avait fait avec grand
fracas la découverte des digestes romains : en quelques années, leor
copie se trouva en Pologne et empoula Térudition extraordinaire de
rbistorien Matthée, évéque de Krakov (voyez sa chronique, liv. II et Itif.
Ce sont quelques exemples, que les études du siècle furent cultivées
en Pologne et que les Italiens pouvaient informer la curiosité du roi
Roger et d'Edrisi.
La Pologne, bien que pleine de forêts, possède des villes renommées ,
bien bâties, commerçantes, industrieuses, où les arts et les métiers
sont cultivés avec plein succès. Nous nous entretiendrons plus bas
sur cette industrie et spécialement sur le commerce. Quant à la culture
du pays et aux produits des jardins, il y a peu de motifs de s'y arrêter
longtemps. Edrisi parle de la culture de vignes et d'oliviers. En effet,
dans le pays nouvellement baptisé on* s'efforçait à planter les vignes.
Le clergé encourageait ces efforts pour qu'il ne manquait à l'autel du vin
pur cultivé sur le lieu même. Otlofn de Bamberg , ayant converti les Po-
méraniens, planta les vignes sur les bords de la Baltique (Siefr. vita scti
Otton). En Pologne, jusqu'au xV" siècle, on rencontre des mentions de
vin fabriqué des vendanges du pays , vin très-acidulé , qualifié dans
les documents de vin aigre. 11 est bon de remarquer cependant, q«e
vignes et vignobles sont si familières à la description d'Edrlsi et repa-
raissent si souvent dans différents pays, à tel point au nord, qu'il est
difficile de se rendre compte de ce qu'il s'imaginait par leur prétendue
culture. Quelque tiges de raisin remarquées dans un jardin par des
voyageurs, suifireul peut-être à convaincre la curiosité des géographes
de la cour de Roger, sur la culture du vin. Quant à l'olivier, dans de ^
jardins de Pologne, une observation analogue pouvait assez facile- —
ment égarer l'imagina tion des Siciliens, qui, avant tout, accablaient.^^
chaque voyageur de questions comparatives avec ce qu'ils connaissaient.^^ .
et possédaient dans leur propre pays. Au reste , il suffît de remarquecsK: i
que les informations qu'Edrisi avait des produits de la Pologne, viennenir^ ^i
de jardins visités par des étrangers , et la relation de Gallus voit
campagnes, la culture et l'abondance du pays entier qu'il avait sou
ses yeux.
59. Tous les deux, Gallus et Edrisi, s'accordent que la Pologne es/
entourée par la Saxe, la Bohême et la Russie; Gallus spécifie encore /^
Hongrie et k Danemark; Edrisî sait aussi que h Hongrie atteint les
frontières de Pologne et sa carte itinéraire étend la PoI<^e jusqu^au
Danemark. Gaiius, ses contemporains d'Allemagne et les historiens
postérieurs de Pologne, nous expliquent ce Toisinage immédiat de la
Polc^e avec lé Danemark. Après la sujétion de la Pomeranie, Bi^eslav-
bouche-torse, vers l'an ilâi, prit possession de tout le littoral des
Lntices, qui s'éclipsèrent à tout jamais ; il se mit à la fois en possession
de nie de Roughia (Sefridi vita scti Ott. 40; Otto fresing. Yfl, 19;
Dregeri, cod. pomer. 1. 1, i,%, Lunig, t. II, Anhang, p. 4). Par mer et
|>ar terre il devenait voisin des Danois , car ces derniers occupaient sur
le continent le royaume des Obotriies. Les géographes du siècle , infor-
més de cette extension, traçaient les limites de la Pologne sur les
[Vootière du Danemark, et le nom de Pomorania, englobé dans ces
limites , leur était inconnu.
On chercherait eb vain des Prussiens, des PomoraniensdansEdnsi(ei);
ceci n'offre aucune difficulté : la Pomoranie formait une dépendance de
la Pologne; mais sur ce point d'autres circontances fâcheuses pour
notre curiosité se présentent. Regardant la carte itinéraire (clim. vu,
sec. 5, 4), on remarque une connaissance de la Baltique peu commune
pour cette époque, mais en même temps une cruelle confusion.
LA Suède n'est pas placée à côté de la Norvège, mais vis-à-vis, sur le
<!ontinent , ayant à la suite, vers l'orient, la Finland et la Livonie, for-
■nnt tout au sud de la mer un parage continu sans golfes. La Suède
tient la place des Prussiens , sépare la Pologne de la mer, située elle-
néme sur les bras du fleuve Katlou, ou Kalcrlou qui sort de la Pologne,
et» divisée, rend ses eaux à la mer par deux branches très-cioignées.
Un fleuve semblable, sorti de la Pologne, répond à la Yistule. Le
nom de jlJaii Katlou ou ^ J33 Katerlou pouvait se former très-facile-
ment de ^JLkd jLâd Fisslou , Yisla , ou de JU23 Fitzlou , Yisiula, et il
«''y à pas de doute que ce fleuve est réellement la Vistulc : seulement
lâ Suède est déplacée et ses rivières confondues avec la Yistule. Nous
y Ireviendrons dans son lieu.
Les villes de la Pologne de cette époque sont connues par les événe-
ments historiques et par dificrentes chartes. Les événements de plu-
sieurs années, sont racontés par le témoin occulaire GalIus, souvent
avec de minutieux détails. De sa narration résulte que la Pologne était
(<6S) Le traducteur, dans une variaute de la p. 368, à^ ] ^3 Berania, voulut reconnaître le nom
de Poaiërania : mais une simple réflexion, que dans renumération des provinces sar cette page SCS,
la Bohème manquerait, petft convaincre, que ce n'est qu'une variante erronée de à^ ' aJ Boemia.
Dajif la même ^umcratioa, Karantai-ia offre une variante erronée dans Kaktnkurin
i64 EDRISI.
formée de plusieurs régions distinctes, dont la division tirait son origine
de différentes relations qui rapprochaient anciennement plusieurs peu*
pies. Les pays des Polauiens formaient le noyau de Télat , y compris les
pays de Sieradz , de Lentschitza , Lucia , et de Kouiavia. Les autres
régions composaient des provinces à part. Mazovie, administrée par on
gouverneur ou duc ; Krakovie avec toutes les terres appuyées sur les
Karpates, constituait une province à part ; Yrotslav, érigée eu province,
tout le long de FOder, administrée par un duc ; enGn la nouvelle acqui-
sition de Pomeranie , à laquelle il fallait bientôt donner des gouver-
neurs-ducs. En outre, quelques territoires séparés, divisés en castel-
lanies, comme la Luzace et Lubousch.
GO. Quoique le pays des Polaniens était le noyau de Tétat , les deux
principales capitales furent cependant choisies dans une province
extérieure, plus considérable que la Pologne, autant par son étendue,
que par sa population. Les deux capitales furent Krakov et Sandomir,
duœ sedes regni principales (Gall. II, 8, 16, 21, p. 151, 167, 178).
Chaque province avait aussi une capitale spéciale, un chef-lieu : Yroti-
lav pour la province odérane (II, 8, p. 151; III, 10, 15, p. 271, S80);
Plotzk pour Mazovie (II, 21, p. 177); Belgrad ou Âlba, ur6« r«<)r{ael
egregia, quoH centrum terrœ repulalur chez les Pomoraniens (II, 22, 39,
p. 179, 215). Mais bientôt, à la suite de la réunion de la Pomoranîe
avec la Pologne, elle céda sa prééminence à deux autres : à Schtschet-
sine ou Stettin , et à Gdansk ou Dantzik. En Pologne , le pays Polanien
avait pour chef-lieu Gniezno Gnezdno sedes (II, 58, p. 212); Tautre
Krouschvitza, déchue de sa puissance (II, 4, 5, p. 144, 146); Loutziti
(Lucie), ou Lèntschitz, sedes (II, 58, p, 212), et sans aucun doute
Sieradz, était du nombre des chef -lieux de la province.
Edrisi retouche quatre fois le dénombrement des villes de Pol(^ne.
D*abord il en compte cinq (p. 575), puis détermine la position de trois par
leurs distances (p. 581); pour la troisième fois il en nomme six (p. 589),
enfin, parcourant les itinéraires, il y ajoute quelques autres (p. 589, 590).
Il en résulte qu*il compte, au nombre des villes de Pologne, les
suivantes :
Jiiji Krakal, hj^ Djenazia,
^bUfiit ao^lUlij Benklaîaou Anklaîa,
Tijhj^ Serdava, »j|^ Negrada,
j:uL Schitov, j^]\ Zamiou,
^^j^ Sermeli , Hj [j^ Soubara ,
A^wttÉ^lg Galisia,
POLOHIA, €0. 465
Eufin Js-«y ^yy^ ^yji ^^yji LT^yt Barmos, Barmonsa,
Bermova , Barinounia , Barmouni , (ces trois dernières sont encore
mentionnées (YI, 6, p. 597).
La division politique des états n*entrait point dans le plan des
géographes de Sicile: cependant Edrisi savait, que les villes princi-
pales de la Pologne étaient Krakov et Gnezno, Krakal et Djenazîa,
distantes de 80 à 100 milles Tune de Tautre, vers Forient (Y[, 3, 4,
p. 571, 589) (63).
Krakov est à 100 mille de Masla, à 100 milles également de Hala et
de Nieuzbourg (Magdebourg) (p. 581). Ces deux distances de 100 milles
méritent évidemment d'être au moins doublées; en même temps elles
nous préparent à ne pas retrouver des villes intermédiaires entre Hala
et Krakov, abîmées dans ces distances. Aussi nous ne remarquons dans
la description d'Edrisi, aucune ville dé la province étendue le long de
l*Oder, niBreslau même, ou son chef-lieu Vrolzlav, ni Glogov, ni Opolé,
mi rien qu'on rencontre dans la direction de Krakov à Hala et Magde-
liourg. Les relations des commerçants y ont passé outre. Ces relations
apportaient maintes fois de petits détails, des noms moins célèbres et
abandonnaient de plus considérables à Toubli.
Serdava ou Seradava, est évidement Seraz, Seradz, sur la roule de
Krakov à Gnezno.
Negrada offre le nom de Novogrod, inconnu à la Pologne. La Pomo-
ranie seule fournit ce nom dans une ville de peu d'importance, mais
située près de deux autres qui furent renommées par leur commerce
continental et maritime. 11 est bon de remarquer que Negrada a
pu se former très-facilement de Belgrada , qui désignerait la capitale
pomoranienne de Belgrad, Âlbaurbs egregia.
Schitoa est une des villes remarquables de la Pomoranie, et il est
probable qu'il faut lire dans Edrisi ^^y^ Schitin ou ^^y:^ Stsitin ,
Schtscbetzin , Stettin.
61. Zamiou. Sans admettre le changement on plutôt la suppression
et la disparition de quelques lettres ou syllabes, il est impossible de
donner une explication à ce nom. Cependant cette ville devait être assez
considérable , puisqu'elle se présente avant les autres. On trouve peut-
être ailleurs sa variante , au lieu de Zamiou, nommée y^\\ Zamir, qui
confirmerait que c'est le nom tronqué et contracté de Sa-ndo-mir.
(SS) Noas sommes d'accord sur ces points avec le savant tradactcur : mais nous ne pouvons
admettre ses antres explications. Zami/im , n'est pas Zamosc, qu'on a fondé dans le xvi* siècle ;
SekUkou, n'est pas Eiiov, car il est ailleurs nommé Kev ; Benklata, ne répond pas i Doukia, ni Sou-
baro, à Sievier. Quant à GaUMia, d'accord, c'est Halitsdi, Galicia.
166 EDRISl» 6i»
Benklaîa el ses variantes Anklaîa (plutôt Ab-klaîa), est à 60 milles de
GnezDO et à 100 milles de Sermeli (p. 581 , 589). Sans hésiter, je vois
dans Nklaïa, Bklaïa, Pklaîa, la capitale de Mazovie Plotzk (q4). Tontes
les lettres , tontes les consonnes répondent et les distances de Gnezno et
de Premisl à Plotzk sont d'accord et me confirment.
Sermeli est non-seulement réunie par la distance avec Bklaîa
(Plotzk), mais rattachée par des dislances à d'autres localités, et sa
situation est bien déterminée parce qu'il est dit, qu'elle est la ville de la
province a.Lj^ Soubara (p. 581) et située sur le Dniestr s.i^*.*JJ
dans la partie septentrionale du cours de ce fleuve, qui coule vers
l'orient (p. 590). Or, dans le canton de Sambor, le Dniestr, sorti de ses
sources, prend la direction de Torient. Quelques lieues au nord de ce
fleuve est la ville de la province Presmil, Prjemisl, située sur la rivière
San, et c'est la ville nommée Sermeli, dans la description d'Ëdrisi.
De Sermeli (Prjemisl), la route de 12 jours conduit à Zaka, Zana ou
Zala (il y a tant de variantes), ville située sur le Dniestr, près de son
emboucbiire , puisque ce fleuve des environs de Sermeli court 12 jours
jusqu'à Zana (VI, 4, p. 589, 590).
Zana ou Zala , avec le Dniestr s'avance dans le pays où l^ mpntagoe
Kard (Karpate) tournant sa chaîne vers le sud , donne le commence-
ment au fleuve Tissa et sépare la Hongrie de la Pologne (p. 580, 589).
La carte itinéraire place Zaka loin de l'embouchure du Dniestr :
mais sa discordance sur ce point avec notre induction, n'a aucune
valeur, parce qu'elle sème les villes de toutes ces régions, que noas
allons parcourir, dans un désordre qui ne s'accorde guère avec la
description. Douze journées suflisent pour le cours entier du Dniestr;
l'emplacement de la ville Zaka est près de son embouchure. Eniin de
trois variantes qu'ofl're le nom de la ville , la seule Zaka peut trouver
un appui et certaine confirmation par la relation ancienne de Constan-
tin porphyrogenète , qui nomme parmi les villes, que possédaient les
Patzinaks, dans les ruines vers l'embouchure du Dniestr, la ville de Souia
ou laxa-iLoLprK (de admin. imp. 57).
La carte itinéraire place non loin de Zaka, au snd de Dniestr, la ville
de ^^t JC- Seklasi (VI, 5). C'est la ville de ^Ij^ Seklabî du
texte (p. 597), qui ne donne aucun autre renseignement de sa position.
La ressemblance extrême de ce nom avec la ville de Moldavie Szegalaz,
(64} Sur la porte de bronze , fabriquée en illîi, et suspendue dans la tzerkicv de sainto Sophie a
Novogorod la grande , i'créque de Plotzk Alexandre y est représenté nommé et intitulé episcopas
de Blueieh (Frid. Adelung, korsunisclie, Thiiren, Berlin, 1833). Dans la confirmation d'un couveafc
ea 115S, du pape Adrien iV, Plotzk est appelé Plotiea. Plus tard les Italiens, fur leurs cartes
géographiques écrivaient ce nom PloUAo (Plotko), on Nocenza du latin, plooeiuis.
rOLONU» 69. 167
située au sud du Dnieslr, sur le Kouialnik, suffit à mon avis pour déter-
miner remplacement de Seklahi. Tout ce pays, sous la domination de
Pelzeneh» abandonné par les indigènes Slaves Tivertz ou Tirivetz, était
tin désert presque inhabité pendant 150 années. Depuis que la horde
de Petzeneh était détruite et que la Polovtzi se tenaient à Técart de ce
pays, il commençait à se repeupler. L'histoire connaît déjà la ville Berlad
dans ce pays et sait que tout, jusqu'aux embouchures du Dniestr et du
Danube, était sous la domination du duché de Halilsch.
Galisia , nommée dans le texte (p. 389, 390, 397), est placée sur la
carte itinéraire au nord du Dniestr, plus rapprochée à son embouchure.
Cependant, malgré ce déplacement, il est évident que c'est Galis,
Halitsch, capitale du duché.
62. Par la description des montagnes Kard et du fleuve Dnieslr,
Edrisi prouve que les Italiens savaient par des relations de voyageurs,
que le nom de Pologne s'étend jusqu'à la mer noire. Ils savaient en
outre, que de Zaka à Bermova, il y avait 180 milles, de Bermova à
Galisia 200 ; ils remarquaient que les deux pays, de Zaka et de Bermova
appartenaient à la Russie; ils avisent qu'il faut mettre au nombre des
villes de la Russie, les villes de Sermeli, Zaka, Barmounia et Galisia
(p. 389, 390). En effet, dans le dénombrement des villes de Russie, ils
nomment : Zaka , Barmonsa et Galisia (YI, 5, p. 397), réservant Sermeli
pour la Pologne (p. 375, 381). Plus tard cependant, Edrisi mentionne,
que Sermeli est appelée ^^ Touia par les Grecs, observant que
même cette ville appartient à la Russie (VII , 4, p. 433) (es).
Cette incertitude, dans ce qui appartient à la Pologne ou à la Russie,
rapportée par les commerçants, annonce une opinion vulgaire, popu-
laire, qui est de la plus haute valeur pour l'histoire et tient aune
quantité de données historiques antérieures et postérieures.
Sitôt que Boleslav-le-grand , en 1018, mit en fuite Jaroslav, il fut
salué par tous les indigènes et honoré de leur hommage; sitôt qu'il entra
^ Kîioy, il donna congé aux contingents d'Allemagne , de la Hongrie,
des Petzenegs, préférant compter sur la fidélité des indigènes (Ditm.
Vin> 16). Il avait donc dans ces pays de nombreux partisans, comme il
ea avait en Bohême.
Depuis ce temps là s'ouvrit une luUe entre les Lekhites et les Russes
(d'origine Varègue) dans toute cette étendue des terres, jusqu'au delà
du Dniepr. Elles restaient sans nom , sans dénomination arrêtée. Les
<
(<Mi) Les grecs ont-ils ioterprélé le nom de Prjemisl par leur Soxi^oSf ^otaÇ'^i, délibère ? ou
par iatoç pmdens, pehtusY .
i 68 EDRISI.
étrangers les appelaient Roussia ; sur le lieu même, elles étaient distin-
guées de la Russie et les chroniques russiennes sont pleines de cette
distinction. Halitsch spécialement est excepté de la Roussie (lietopis
kiievska, sous Tannée 1045, ap. Karamzin, p. 48, 49; sofiîski vremian.
p. 219). Le nom de Roussia, apporté par la race princîère de Rourik*
ne se naturalisa pas, ni s'enracina sitôt sur le lieu même, comme on
se Fimaginait à Textérieur, chez les étrangers. Le nom de Roussia était
spécialement attribué à celte partie on Ton voyait la résidence de la
race des Rousses. On accorda de plus bonne heure la qualification de
Roussia aux environs de Kiiov. Comme la province de Halitsch, de
même celle de Novogrod la grande et même les colonies qui allaient
s'établir vers Klazma cl Volga , ne portaient point le nom de Roussia
(voyez Â. Feodotov, dans le journal : ruskii istoritscheski sobornik,
Moskva 1838, t. L). Mais au loin les étrangers qualifiaient tout de
Roussie et par un contraste singulier, les Polonais appelaient Rous,
les cantons de Prjemisl, de- Halitsch, de Volyn, quand Tannaliste de
Kiiov, Nestor (contemporain d'Edrisi), nomme ces cantons lekhites
(polonais). En efiet, quand le roi Roger, en Sicile, scrutait Tétat de ces
pays , il a pu apprendre que Trembovla , Halitsch , Prjemisl dans la
terre de Sambor avaient des ducs spéciaux de la race russe , mais que
la nationalité lekhite y fesait des progrès et les métamorphosaient en
Pologne.
Roussia, méridionale,
65. Le nom de Russie , Roussia , jouissait d'une grande renommée^
Depuis un siècle il est connu aux Byzantins, aux Boulgars, aux Mahom-
médans , sur les bords de la Caspienne et aux environs du Kaukase.
Aussi Edrisi est informé, que Roussia est limitrophe de Hongrie et de
Djetoulia (Serbie); qu'elle chassa de leurs pays respectifs, les Bartas,
les Boulgars et le Khozares (en 1016); elle s'est emparée de leurs pos-
sessions, en sorte, qu'aux yeux des autres peuples il ne reste d'eux sur
)a terre absolument rien que leur nom (YI, 6, p. 404). Or, la Russie est
une vaste contrée qui s'étend beaucoup , soit en longueur, soit en lar-
geur (VII, 4, p. 445); où les villes sont peu nombreuses et les habitan
éparses, en sorte que pour aller d'un pays à l'autre il faut parcourir
d'immenses dislances à travers des lieux inhabités. Les Russes sont e
guerre et en dispute continuelles, soil entre eux, soit avec leurs voisi
(VI, 4, p. 390). La Russie s'étendait depuis les portes de Bohême ju
qu'aux portes des Finois (Benjamin de Tudèle, p. 245, 24G). Dans
description d'Edrisi elle revient continuellement sous sa plume; sur
ROUSIA, 64. 469
carte ilînéraire, elle n'a trouvé que très- peu d'espace pour ses grandes
distances, et ses villes y sont péle-méle placées en désordre. On peut
présumer qu'Edrisl connaissait plus de dislances et négligea de les
indiquer, en sorte que sa description est maintes fois insuffisante à
débrouiller le désordre de la carte.
Une seule fois il fit le dénombrement des villes de Fimmense Russie.
Il en compte 18, comme appartenant à la 5* section du vi* climat
(p. 597), ce qui n'est pas exact comme on le voit, tant par l'immensité
dn pays, que par différents passages de sa description. Les villes de la
Russie sont les suivantes :
i^^ Lonsa (Loubetsch).
Jlj ^tj Aj\j Zana, Zaka,ZaIa.
jb^SL, ^^^^SL, Seklasi , Seklahi (Szegalah).
à^^^mJ^ Galisia (Halilscba).
yX>y^ Sinoboli , possédée par les Komans.
d^y»^ try*y^ ^yy ^j^y \SyA Bermova,Rarmounia,
Barmouni, Barmos, Barmonsa (Smolensk).
^.\ Ârmen, (^^Ij Zamiou de Pologne).
AM0L.L9 ^««JLmLj Barasansa , Narasansa , (Percsopnitza).
&xx^ Loudjaga (Loutzk).
' iiw!^ Saska, ^^^.^.t Âvsia.
^ ^ Kiiev, Kav, (Kiiev, Kiiov).
AJjjy Berizoula.
^\yi Berizlav (Periaslav).
^li Kano (Kaniov), ^^ Tiver (Tourov, Tivrov).
JCJ! Âleska (Olesche, Alaki).
jiCw J^ jlC- Sekni, Seknimil, (Kalamila en Krimée).
uJSy ^y Moules, Molsa (Cherson).
Les communications entre ces villes étaient sans doute bien organi-
sées, de sorte que les commerçants connaissaient et savaient relater
les distances et les itinéraires. (Voyez la petite carte à la page 177.)
64. Barmon, Barmos, Barmonsa, est une belle ville, bâtie sur les
^rds de ^^^LJJ Dnabros, très-éloignée des autres, car pour dcter-
^uiner sa position il n'y a que de très-grandes distances , et il y en a
plusieurs (VI, 5, p. 598; 4, p. 589, 598). De Barm, en descendant le
170 EDRISI.
Dniepr à Kiiov 6 journées
à SÎDoboli située sur le Dniepr 6
à Galisia près de Dniestr 200 milles
à Zaka (à Tembouch. du Dniestr) 180
Or, c^est Smolensk, appelé par les Grecs mx&Kneh (Const. porphyr.
de admin. imp. 9). D'où vient ce nom singulier de Barm donné à
Smoleusk? les monuments historiques, autant que je sache, ne le diront
pas de sitôt. L'étymologic de la langue slave peut fournir différentes
explications. Barm, Barmon, villes des portes bram; lieu où.Fon fait
passer le fleuve par le bac, passe-bac, porom^pram, prom; lieu au
fond de forêts d'arbres résineux (bôr) horma ; lieu ouvert dans les forêts
par la hache, coup, poromb, porom, etc., etc. (ee).
Les Grecs de Byzance savaient que les bacs descendaient par le
Dniepr de Miliniska, de Lioutza, de Tzernigoga et Youschgrada et arri-
vaient à Kiiov, où tout le monde s'assemblait dans de (ra/Agara^ (sovietas);
xaarpo'/ ro Kioitx, rà inofojjLOL^àjjLs^o^ ax/jL^xroi (Constant, porphyr, de adm.
imp. 9). Le concours de la mnhïiude sav' viel, donnait le nom aux places
où elle s'assemblait pour trafiquer en samvata, sovieta.
Edrisi ne connaît de Tzernigoga , il mentionne la ville t^^ Lobsa
Loubsa, Loubetsch, située sur le Dniepr, où les knez (princes), à cette
époque, avaient leur station et tenaient leurs conciliabules.
KcoàSa, Kiiov, Kiicv, aussi sur le Dniepr, cité encore splendide,
concours des peuples et du commerce. Visitée par les seuls Lakhes
(Polonais), objet d'envie pour les princes de la race rousse à cause de
sa suprématie; considérée comme mère, métropole des toutes les autres
villes possédées par les princes rousses, cité sainte.
De Kiiov à Berizoula , ville au nord du fleuve Dniepr, 50 milles. Ces
milles sont d'une petitesse extrême. Les Grecs savaient que les mar-
chands , arrivés à Kiiov par le Dniepr, abandonnaient leurs bacs et
transportaient les marchandises à /3<TeTÇè6>7, où ils avaient leurs
bateaux légers (viiz, vitzina) pour descendre les cataractes (porohy).
Yitelzev, vitz, vitzina, vitzitza (vitka, vicinka, et autres diminutifs),
vi^zitschev ou préparative de vitzi, était donc sur les rives du Dniepr.
Berizoula devait être voisine , ville du bord, berezna, brjcjna, du petit
(66) Bârmon, Barmos, offre nnc singulière homonymie avec Biarmie sur laquelle on a donné tant
de lumière : cependant la position déterminée ne pourrait jamais atteindre la Biarmie. Dans tout
ce qn'on a dit de Biarmie, no se trouverait-il pas quelque chose à réclamer pour Smolensk? Les
Krivitsch qui bâtirent Smolensk, prirent leur nom de leur situation boiseuse ; n*appeUient-ils pas
leurchef-Ueu d'un terrain essarté , d'une coupe?— Au reste, Smolensk, lieu de la lysine, de la poix,
■éjour de cenx qui fabriquent pu vendent de la poix, tire son origio« dfl'tmola, résine, poix.
JI0U8IA» 65. 171
bord brjezoula (vis-à-vis de Rjischev),d'où s'embranchaient les chemins
par le fleuve vers la mer, et par le continent, vers Toccident.
De Berizoula à Âvsia, petite ville bien peuplée, par terre, â journées.
De Âvsia à Barasansa par terre, â journées.
Le nom de Âvsia m'est incompréhensible. Je ne trouve rien d'analo-
gue aux environs de Zitomir, vers lequel elle est dirigée par les dis-
tances. Barasansa (Barasabsa) est sans aucun doute Peresopnitza ,
aujourd'hui village , à l'époque d'Edrisi ville assez importante , connue
dans les fastes de ce pays.
De Barasansa à Loudjaga, vers le nord, 2 journées. Il y a moins de
Peresopnitra à Loulzk dans la direction nord-ouest. Ville des Loutza-
niens, appelée par les Byzantins Aev$ay?,vo«, AevÇjv^vot et leur ville
AïowrÇa (reXeouTÇa) Communiquait par (Siir, Pripetzet) Dniepr avec Kiiov
(Consl. porphyr. de adm. imp. 9, 57)(67); ville renommée chez les
arabes ^13^ Loudza'aïa (Massoud, ap. d'Ohsson...). D'où, en se diri-
geant vers l'occident, 3 faibles journées, Ârmen. Il n'en faut pas autant
pour arriver à Vladimir, et il y a peu pour aboutir jusqu'à Sandomir,
Zamiou ou Zamir. Peut-être au lieu de 5 on pourrait lire 8 journées,
mais ce serait presque le double de ce qu'il en faut. L'itinéraire que
nous suivons, est de la route, par laquelle on allait de l'occident d'Alle-
magne, par Krakov à Kiiov. Dans l'incertitude des frontières qui divi-
saient les Polonais de la Russie , ceux qui traversaient la Pologne pour
se rendre en Russie , pensaient facilement , qu'entrant à Sandomir, ils
touchaient le sol de l'immense Russie.
65. Revenant à Kiiov, nous y apprenons que de Berizoula on comp-
tait une journée sur le Dniepr pour arriver à Berizlava. Â vrai dire,
ce n'était pas la ville même Periaslav, éloignée du Dniepr, mais sa
station riveraine, où elle avait des dépôts et le point d'expédition. De
cette station , une journée et demie par le même fleuve , est située la
^illede Kano, Kaniov, de laquelle à Âleska , située sur l'embouchure
du Dniepr, quatre journées (p. 598). Âleska, Olesche est bien connue
durant plusieurs siècles comme passage du Dniepr toujours pratiqué.
Ce passage est nommé 2a<va par les byzantins (Gonst. porph. de adm.
(87) Scbafarjik, daoi son éradit et profond ouvrage (starojitu. slav. H, t , § S8, p. S93) oiaoireslc
nne autre opiDion sur Lrntzanicns des byzantins : il pense le retrouver dans Velikic Louki, ou
grandes Louki. Hais on ignore l'existence de cette ville à cette cpnqne, elle ne se fait connaître que
trèt tard et toujoura peu marquante ; elle est éloignée du Dniepr, et il y a plus de dilBcuUéà Tranchir
la distance par terre et par eau de Veliki Louki à Kiiov, que le détour fluvial de Loutzk à Kiiov-
Les Ttcbemigogiens de môme déviaient par le fleuve Dùsna, pour entrer dans le courant du Dniepr.
A«sai les Lou4tanieos de Loutik descendaient par SUr, Pripetz, avant d'arriver au Dniepr. Cette
navigatioa est plus facile que la traverse d« Veliki jLouM à Kiiov. ~ Aussi je ne saie paa pourqoui
Liontza de ConftaDtin est expliquée par Loobettcb. *
172 EDRISl.
imp. 9), et dans les temps modernes, avait était gardé par des Tatars
sous le nom de Tavan. Aleska était située vis-à-vis de Temboachure de
Ingouletz iwyouX et de la petite rivière Tehinka , qui donnait le nom au
passage tatare , aussi bien que la ville Tavan , située au-dessus.
La descente difficile par les cataractes du Dniepr, avait été connue
aux byzantins. Edrisi n*en était point informé; il sait cependant qu'on
allait par le fleuve en 6 jours et demideBerizoula à Aleska (p. 598) :
lorsque les voyageurs traversaient de Kiiov au passage (d* Aleska) par le
continent 6 journées (Petakhia p. 4). De Barasansa (Peresopnitza) par
le continent à Molsa 5 journées. Molsa est aussi située à Tembouchure
du Dniepr (p. 598), vis-à-vis d' Aleska, tout près de Ingouletz , où com-
mence le XifiTiv de Temboucbure du Dniepr.
Le littoral de la mer noire, compté à la Russie, est indiqué de la
manière suivante :
Akliba ou Akli (Kilia) , située à une mille seulement de Fembouchure
du Dniestr (p. 595). Ce mille unique 1, résulte certainement du
chiffre J 50. Puis à ijJ djJ Karta , Krata ou Karia , 50 milles.
Kpûtxvaxarce dcs byzantins (Gonst. porph. de adm. imp. 57). A Moules
on Molsa 50 milles. Là est Fembouchure de sr**^^^ Dnabros. Puis
Seknimil (Galamila des portulans italiens). Puis à ùy^^ Kersona
(Cherson), un peu moins de 1 journée de navigation, c'est-à-dire
80 milles (p. 595). Tout ce passage était désert. Dans les parties rap-
prochées, les Ghersonites avaient des salines. Entre le Dniepr et le
Danube, toute cette côte d'or xp«><ro$ alycaAo^ est dévastée. On y voyait les
ruines des villes anciennes. Sur les décombres des églises, brillaient
les croix, manifestant leur origine romaine et le christianisme. (Gonst.
de adm. imp. 57 , 42).
Les Petzeneh tenaient un siècle et demi le littoral et connaissaient
les noms de ces ruines. Ges noms, au nombre de six, sont conservés par
Goustantin porphyrogenète(68). Gomme le premier offre la qualificatiOD
de Blanche ^Aairpo^j qui répond à Bialigrod (citée blanche , Moncastro,
Akerman) : il est évident que leur énumération est sans ordre. Toug,
Krakna, Salma , Saka, Ghiaîou, privées de la terminaison petzeneh
kataï, pouvaient se conserver dans de temps postérieurs , ce qui nous
autorise à rapprocher auxdénominations édrisiennes, nonimément à Saka
(68) *IffTsov ort Êvô'fiv ToD AavâTT^ew; icoray-ou Tzpbç rb à.noQXenrO'f f*-ipoç tJ>»
BovXyapix'/ elç rx irepâ/xaTa tou «wtoO Ttoroc/JLOÎJ «iaiv ipififiôxocstpct., KaoTpov
itp(âxori x'o ovofioLaâh iiapcx. tOv IlaTÇtvaxtTûiv *Aff7rpov, cièt rb toùç Xiâou^ auroû
^atvea^at y.xzocXsù).ovi. KaaTjOOv ^evTe/?ov. ro TouyyâTae. Kaarpav rptrov , xo
kpaxvaxscrat , Kavrpo-t réraÇTOv t6 EaXfiaxxron. K.a7T/90v 'Kéfinxov xb^axeuxtac
Kaarpov îxrov rcâtouxârae, de admin. imper. 87.
ROUSIA» 66. 173
et à Karta (Krakoa). Après la destruction de la horde des Pelscheneh,
les Komans, retirés vers le Dniepr, ouvrirent un champ libre au
rétablissement des populations, d*abord slaves, ensuite valakhes. Aussi
du temps d'Edrisi sont connus : Berlad, où naquit Jean Berladin, fils de
Roscislav II duc de Prjemisl ; Seklahi, Zaka, Karta, Molsa, Olesche,
toutes dans les possessions des Slaves de la Russie.
66. Au nombre des villes de la Russie, sans que leur position serait
indiquée par quelque distance, nous trouvons Ti ver et Saska. — Userait
probable, que Tiver est Tourov, ville de la Polisie, à cette époque
renommée, épiscopale. Il n'y a rien d'improbable cependant, que c'est
Tivrov, située sur le Boug, Boh , ville moins importante mais connue
à cause qu'elle se trouvait sur la route de Barasansa à Molsa (ee).
Nous ne trouvons aucun nom correspondant à iSL»L^ Saska ; Nassir-
eddin, en 4261, connaît une ville peu éloignée de ioli^ Kouiaba ,
Kiiov, appelée ^^^S^ Saksin , et lui donne une position occidentale
éloignée d'un demi-degré ou d'une douzaine de milles de Kiiov (70). —
Ce rapprochement peut être contesté, à cause que suivant les écrivains
latins Rubriquis et Vincent de Beauvais, un peuple Saxi ou Sacxi ré-
sista virilement à l'invasion des Tartars et sauva son indépendance ,
tandis que les orientaux comptent les ^*.l^ Saksin au nombre des
subjugués (71). La position de ces Saksin est assignée par Bakoui, qui
(69) Le traducteur se transporte avec Tiver sur Tver. Je pense que l'enseinble de nos explications
démontre l'impossibilité de se porter si loin dans les pays ou Edrisi avouait l'ignorance des dénomi-
nation des villes.
(70) Par quelque erreur ou inadvertance, il a placé la Russie sur la mer kaspienne. Oulougbeg
l*a copié sans rectification ; voici de quel façon :
Balandjar longit. 88* W latit. 46* 80'
Babelabvab(Derbent) — 85 0 — 43 0
Kouiaba _ 87 0 — 4S 0
Saksin — 86 30 — 43 0
^uo ntvaxeç'b fjnv Naaaip *E$âhOi h ik Ovlovy intii iitifiiXelK £iYi/JLtirpto\J *AAe|av-
^ptiov 1807 editae per firatr. Zozimades, ad calcem Abulfedae, Viennse 18i7, in-8*, p. 44, 16 ; 46, 48.
(71) Voici ce que dit le savant D'Avezac (p. 876, 577). Quant aux Saxi ou Sacxi, l'homonymie est si
complète qu'il semble difficile de ne les point identifier avec les Sacsyn des auteurs orientaux, peuple
voisin des Khazars et des grands Boulghârs, et probablement d'origine finnoise comme eux.
D'Ohsson, hist. des Mongols, t. I, p. 346, 440, t. H, p. 16, 113; Abou el faragi, hist. compend.
dynastiar. p. Î8S, 306; Charmoy, relation de Mas'oudy, etc., dans les mémoires de Petersb. sciences
polit, t. n, p. 344, 555, 358, 359; Baquoy, dans les notices et extraits des mss. de la bibl. du roi,
1. II, p. 836; Fraebn, Ibn Foscbl. Bericbte, p. 39; Aboulfeda, édit. arabe de Reinaud et Slane,
p. SOS. — Mais une grande difficulté milite contre la légitimité de cette concordance , en ce que let
Sacsyn sont désignés par les historiens, comme ayant été assujétis par les Mongols; il faudrait dèi
lors supposer, qu'une partie au moins de ce peuple était parvenue à sauver son indépendance. —
Vincent de Beauvais (XXX, 87, f. 146, de l'hist. orient, de Reineck) répète, peut être d'après une
autre source : plurimis itaqne terris i^ servitutem eorum (Tatarorum) redactis , quaedam viriliter
rettiterunt eis| videlicet.....et gens Saxorum : quindam «nim eorum ciuitatem, Tartari obsederunt , '
ted cis praeralere non potuerunt.
il A EDRISI.
copia en 1415 les longitudes et latitudes de Nassireddin, dans le terri-
toire des Khozars : ^^'^^•â^ Saksin, grande ville du pays des Khbzars ,
la plupart musulmans; il y a un fleuve qui gèle (Bakou! YI, 27). Ce
fleuve qui gèle est indiqué dans le Don par Schemseddin Dimcschki^
compilateur dans Tannée 1586. Entre Itil et Kourr, il connaît un flen|ts
des Seklab et Rous, qui vient des montagnes de ^.M»fl.>» Saksin et de
ik^bli5ol Kelabia, lequel reçoit les eaux des autres fleuves venant des
^\^jt ^bl) pays Sourdak et gèle mieux en hiver qu'ïtil (p. 57 apud
Fraehû, Ibn Foschl. Berichte, p. 59). Est-ce la description du Don ou
du Terek ? on ne sait pas : en attendant il faut avouer que Saska des
Siciliens reste dans Tobscurité.
Edrisi connaît encore une ville de la Russie , située près des sources
du ^J:.-^^^ Dniestr, qu'il nomme ^jjjy Martori, éloignée 4 journées
de Sermeli (Prjemisl) en se dirigeant ver le sud (VII, 4, p. 455).
La carte itinéraire confirme et ne laisse ancun doute , qu'Edrisi
rattache Martori et Sermeli (Prjemisl) au fleuve Dniestr (is). Edrisi
ajoute que Sermeli porte en grec le nom de Touia ainsi que Martori
(VII, 4, p. 455). Or, Martori portant aussi le nom de Touia, on pourrait
présumer qu'au lieu de ^^ il serait mieux de lire aj J? Tiria, et que
les grecs appelaient Martori et Prjemisl , à cause de leur situation,
Tiria, Tiras, du nom de fleuve Tyrus, Dniestr. En ce cas il faudrait
chercher Martori près du Dniestr, non pas à ses sources où Sermeli a
déjà pris sa place (Edrisi, VI, 4. p. 590), mais à 4 journées des sources,
où (au nord de Kamienielz Podoiski), sur la rivière Smotritsch , eziste
une ville Smotritsch , Martori.
Mais Edrisi afiirme positivement que Martori est au nord de Sermeli,
il le place dane le vh°*^ climat et rapproche aux villes septentrionales
de la baltique ; il trace le cours de Pripetz comme s'il le détournait
vers l'ouest, pour le faire entrer dans le Dniestr tout près de Sermeli.
Il faut donc chercher Martori dans les parties marécageuses de Pripetz.
Les quatre journées de Prjemisl au nord, conduisent vers la Polisie et
le Pripetz. Divisez les points réunis sur te et marquez par un d'eux
le risch, vous transformerez le nom de la ville en ySjyj^ Maznori„
Mozir. Les quatre journées de Prjemisl à Mozir paraîtront insufiisantesr
mais elles sont juste de la grandeur de cinq qui séparent Barasansa d*
Molsa. Près de Mozir il n'y a pas de sources d'aucune rivière , mais ce ^
sources dérivent de la confusion de celles qui accompagnent Se:
meli. Mozir est sur la route qui conduit de Prjemisl et Halitsch,
['i) Cependait le traducteur Jaubort n'hésite pas à expliquer Doiest ^ar Pxma H «oppose qfM^
qualification grecque Ae Towia pourrait désigner Toula.
SKANDINAVIA, 67. 475
Barmon ou Smolensk, il esta peu près à moitié chemin, donc à 100
milles de Halitsch et Prjemisl, et ces 100 milles font juste les l
journées.
Edrisi se montre avec de meilleures dispositions pour parler de la
Russie septentrionale. En effet il en parle, mais sa narration est
tellement enlassée dans le voisinage, que pour la suivre avec quelque
succès, nous ferons bien en commençant par Texamen de la mer
Baltique.
. Sk^ndinavia, nord,
67. La mer Baltique est appelée J,LyiJ! ^y^t ys:^\ mer occi-
dentale septentrionale. Le premier coup-d'œil sur le carte et le premier
aperçu de la description , riche en noms propres , où Ton remarque
Saktouna (Sigtoun), Kalmar avec la Sfada (Svèdc), Finmark, Tebest,
(Tavastia) etc., (VU, 4, p. 451 , 452), décèle qu'on avait en Sicile des
renseignements peu communs sur la Baltique. Les Normands Skandi-
naves les ont communiqués aux Normands de Sicile. Dans la relation
d'Edrisi, il n*y a rien sur les Prussiens, sur les Kourons, rien de
déterminé sur les Livons ou sur Tembouchure de Dvina , où allaient
s'établir les Allemands; on a peu , presque rien du littoral méridional :
mais le sinueux littoral au nord, possédé par les Normands, est visité
avec soin.
En commençant par la péninsule Xi^jb Darmarscha (p. 427),
Awj3 Dharmascha, ^«^^ ^jij^ Danmarscha, Danemark, on la
voit figurée de la façon comme elle était figurée sur les cartes anglo-
saxonnes. Ronde, réunie avec le continent par un col étroit, éloigné 60
milles de Fembouchure de »jjj Varze (Vezer).
Entrant par ce col, par cette gorge (introitus), on a à 25 milles une
ville florissante, nommée ^JL^JI Sila, ou Silia (fie Sylt),
De là 50 milles à »^^J? Tordira (Tonder, Tounder), port abrité
contre tous les vents.
De là 100 milles àj^^à^ Khav, Khof, port également sûr (Kiôb,
Ringkiôbing).
De là 200 milles à s^'JLJ^^!^ Yendilskada. Cest la pointe de
Skagen (windel, windsel, bande, langue de terre), qualiûé encore
de port.
De là 200 milles à o^/Ar>^ Horschhont, ville peu considérable
(Horsens près d'Âarhus).
De là 80 milles à ^ j^ Landvina , fort qbi cherche en vain sa
position aux environs de Holding, dans le détroit entre la péninsule et
i 76 EiwiSf.
rtle Fionie, Founeû, Fyn, dans un passage étroit, où les terres
rapprochées sont séparées par un flot Fenux (vina).
De là 100 milles à J^^^*»^ Sisaboli ou ^Ju^ Sisloî, Sislova
(Slesvih sur la Slye) (is).
De ce dernier lieu à Textrëmité de la péninsule , 12 milles. — La
circonférence totale de la péninsule est de 750 milles (p. 427, 428).
. La A&LjJ Norbega, tjjy Norbeza, est une île très^onsidérable,
mais en majeure partie déserte. Cette île a deux caps, dont Tun occi-
dental, touche à la péninsule ^j«j1^ Darmardja (Dannemark) et fait
face au port nommé Yendleskada, situé à une demi -journée de
navigation, et Tautre touche à la grande côte de Finmark (p. 429). La
carte itinéraire nomme trois villes de Norvège : ^ ^^ Berk-Ni, Ber-
kena (Bergen) ; yJi Ghinou (Quins , baie , vallée et hauteur de Quins
fiord, Quiensdaal, Quiens heet); la troisième ville est ^yU^ Scha-
schouna , et nous devons nous contenter de remarquer ses traces dans
Schaerswik(VII,4).
La Norvège est accostée de plusieurs îles innommées. Elles sont pour
la pluspart désertes. Il y en a cependant deux dans Tocéan ténébreux,
qui sont habitées et qui portent le nom des fies /^^s-^t tr^^j^\
Âmraines - madjous. La plus occidentale est peuplée d*bommes
seulement ; Tautre n*est habitée que par des femmes (YII, 4, p. 455).
Suivant la carte itinéraire JUa. Jt iy\^ l*lle des hommes est File
i^y?^ J'-^t" CA^j^' iî-j^ Amazonius, des hommes infidèles.
L'autre est sjj^ \ ï^^ l*île al banak , ou Tile d'entrevue et de
commerce des Amazonios, qui, chaque printemps, allaient cohabiter
avec les femmes tout un mois. — Cette fable antique est placée sur les ^
îles Aland (ia),
(75) Bakoui (en UI8] norome dans le VI* climat une grande tille^) ji»JLi» SchelescliTik^siUiée .^^
sur la mer océan , où il y a peu de chrétiens; ils mangent du poisson et ils admettent la répudia — ^^^^
tion (VI, 28).
(74) Je pense qu'à TUe de Norvège on peut rapporter ce que Ibn Saïd relate de l'ile ou presqn'il^ur jp
slave L»k^jj L>^u&^ Bergadhma ou Bergarma. On sait que les arabes ne distinguaient ]
toujours les pays à l'occident de la Slavonie qui s'étendait jusqu'à l'océan. Or » l'ile Bergar(
Norgar, Norige, longue 700 milles, large 500, habitée vers le sud par une race d'hommes (no <
slaves) avec la tète attachée tout-à-fait aux épaules, qui demeurent ordinairement dans les tro^
de grands arbres, a pour capiule Bergarma (Bergen) dont les ♦ Lc lJ I Baghara (Bargars, Nor»--
gicDs) ont pris le nom : on l«s suppose en effet (les Norvégiens) originaires de cette ville. — Si n^c^^if
explication n'est pas acceptable, il est au moins certain qu'il ne s'agit pas ici de Boulgars, mai^^ «^,
Bargars , qui habitaient l'Ile et la ville capitale ; issus d« la ville, eux-mêmes et l'ile sont appelés ~ pj^
le nom d« la capitale- — Bakou! parle des Amazones comme suit : LmJj t AJJ Jl^ la ville — .1^49
(des femmes), d'une tl* habitée par des femmes ; elles ont des esclaves qui passent la nuit avec^ W/eg
■uis lorsqu'elles accouchent d'un enfant mâle, elles le tuent (VI, 38). * '
1
SKANDIMÀVIA, 68. 177
Jusqu'à ce point nous avons suivi avec un certain succès, je pense,
la description d'Edrisi ; la suivante ne nous offrira pas autant de satis-
faction, elle résiste en grande partie à tous nos efforts.
68. Nous avons dit, que par une étrange aberration, Edrisi pensait
que Svada (Suède) et Fiumark sont situés au sud de la mer, sur le
continent de Pologne et de Prusse. Egaré par cette idée, il ne sait pas
distinguer les dislances par mer ou par terre, et s'embrouille dans des
contradictions; ainsi toutes nos ressources pour sortir quelque peu de ce
dédale se réduisent aux noms propres et à quelques distances isolément
prises. Sa description est comme suit :
A partir de la gorge de Danmarscha, en suivant la côte jusqu'à ^'^sw
Djartaou ù*y^ Djesta ou aJjâ. Djouna, ville maritime bien peuplée
avec marchés florissants, on compte 200 milles.
De là à ^^y^JjJ Landschouden , ville considérable et florissante
200 milles.
De cette ville à Tembouchure de la jJLLil Kallou , sur les bords de
laquelle est bâtie une jolie ville, nommée ji^ialw Saktoun, 190
milles.
De cette ville à .1^1$ Kalmar, en se dirigeant vers Toccident (la
carte itinéraire indique à Torient), 200 milles.
De Djerta la maritime à la ville v^\j\ Zouada ou ^^li; Zfada,en se
dirigeant vers Torient, on compte 100 milles. Cette ville, qui est consi-
dérable et peuplée, donne son nom à toute une contrée, remarquable
par son peu de population et par la rigueur de son climat.
De Zouada à iJ\ Ëlba, en se dirigeant vers Torient, 100 milles.
Et delà, en suivant la même direction, à <9^.wwi Fimia ou ^L^^Ji
Felmia, ville située à 100 milles de la mer, 100 milles.
Elba est vis-à-vis de Landschouden , en se dirigeant vers le nord et
vers l'océan ténébreux.
De l'embouchure de Kallou , rivière dont le nom se prononce aussi
JLLS Katerlou, à jLJlS Kalmar, on compte 200 milles.
Katerlou est également le nom d'une ville, bâti^ sur les bords de
cette rivière qui est très-grande, et qui, après avoir coulé de l'ouest à
l'est, se jette dans Tocéan ténébreux par deux embouchures, distantes
Tune de l'autre de 500 milles. De Kalmar à la seconde des embouchures,
on compte 80 milles
Le Finmark sjS\l^:^ contient beaucoup de villages, d'habitations
et de troupeaux : mais on n'y remarque pas d'autres villes que vXj^\
Abreza et Calmax, qui sont l'une et l'autre assez grandes, mais mal
lit. iî
p«vpléw M miiérakln. L« roi de Finnark postèds Ats tisus habilii
dani la Nonr^ (Tll, S, p. ItS, «9; 4, p. 431).
Cette description noDB conduit, dn premier coap-d'ϔl, de Djaita
vers l'est par deux directions, qui par conséquent se fourchent quelque
pen: une par Landschouden à Saktoun(peB éloignée de la mer); l'autre
par Zvada, Elba, Fimia, jusqu'aux rivages de la mer : chacnoe contiml
MO milles. Landachouden et Elba les dÎTisent par moitié ;'or, Elbacsl
Tifr-à-TÎE de Landschouden ; il serait difficile de décider au sud on as
nord, et il est plus difficile encore de trouver un pays dont la titoatiui
répondrait à une semblable dispariiiion des positions.
Il est probable que par le déplacement et par la conrusion de ti
Suède avec le littoral de la Vislule, parmi les villes nommées, les dm*
■ont de la Suède , les autres du littoral méridional. En snpposant la
lectorcds t^ja. oo ùya. DJarU ou DjoooaoDpoDvaillfi«-G
SKAMDtifATiA, 09. 179
litHiver ai Ja; Djlëana, Gidanie, GdaAsk, Dantzik, confirmer par eon-
séquènt Fanalogie de L)t Elba avec Elbing : mai» il paraîtrait que
Svada ou Fimia, intercalées sur cette direction, s*y opposent.
69. Katlou, nous Tavons admis, est un nom dégénéré de Yistule. Mais
cette Yistule Katlou , serait donc à une antre embouchure , éloignée de
300 milles.
De Tembouchure de Katlou (Yistule) à 80 milles (par mer) se trouve
Kalmar, par laquelle nous entrons en Suède. De Kalmar on compte 200
milles à Saktoun , située sur Tautrc embouchure de Katlou. Cette dis-
tance nous conduit à Sigtouna ou BIrka, citée encore puissante,
immense, gigantesque et double (7s). Ville de la plus hante antiquité,
bâtie sur les bords du lac Màler. Odin y éleva un temple , /uj^to morem
€uarum (Snorro Sturles, 1. 1, p. 6; Wallin, p. 192, 199; Langebek,
p. 446). Elle devint la résidence des rois. En 851, S. Ansgaire y prêcha
l*éyangile , et institua Tévéque Simon pour la répandre ; le culte chré-
tien [cependant n*a pris de racines solides que vers Tan 1000, par les
«oins de Févéque Sigurd.
Avec la décadence de Tancienne Sigtoune, disparut son nom de
Birka. La nouvelle, au xn« siècle , s'étendit de Tautre côté du lac : elle
grandit et diminua la grandeur de Tanclenne , laquelle , avec le temps ,
^ut réduite à un village qu'on nomme Fôr-Forn-Fornu-Sigtuna , anté-
neore ou ancienne Sigtouna.
Au commencement du xi** siècle, Tancienne Sigtouna ou Birka fut
TQinée par Olaf-le-gros , unde siô-konung ou rois-marins de Norvège.
Hais en 1055 et 1045 , les rois de Suède y résidaient encore , ainsi que
^Q temps d'Edrisi existaient à la fois deux grandes villes Sigtouna ,
la nouvelle gardée par une place forte Almarstâck. La nouvelle
devenant plus puissante , voyait dans son port, inaccessible aux pirates,
les navires de toutes les nations dn nord ; elle avait ses flottes, comptait
iSyOOO boui^eois opulents ; ses édifices s'élevaient avec orgueil, comme
^attestent les ruines gigantesques dans l'espace de plusieurs lieues.
(7S) Sur ellfloa a an ouvrage excetstvement rare de George Wallin , rédigé en six mëmoiret tct-
déniqacA «lepois 1729 jusqu'à 4732. Ses titres sont les suivants : I, urbs antiqua ruit multos domi-
nata perannos^hoc est, Sitguna stau et cadens, aetas prima, Upsaliae 1720; H, aetas secunda 1729;
ni, antiqnae Svionum prolopoleosSigtnnae; aetas tertia 1850; IV, aetatis tfertiac cootiDDatio, 1730;
Y, oriM aitfiq. etc. aetas quarta et nltima 1782; VI, aetatis quartae pars ultimal752. Ces mémoires
flMt reproduits dans la collection non moins rare des œuvres académiques de Wallio, p. 187-4S6.
— Luigd)ek; script, rer. danicar. medii aevi, 1. 1, p. 448, 446, a inséré dans les notes les plas remar-
^^■Uet obserratiotts d« Wallin. — Wallin et Rasmusen (de orien. commer. p. 48), relatent le
jUMmn d'Edriai sur la Tersion latine : insula Bicerko (Landschuden dans Ra8mua.}.et ab bac urba
ad oftiam fluBinU Catolo (Gotbaelv dans Raamns. Katlou], cui adiacel urbs Siktuaa, ete. H. C, Minu-
te, tiipHr. iVmidit d«r MHixt b, p. 9, par BiipriM ittribM Imr titatira à Ab«alfédt.
180 EDRIM.
Sous le règne de Knout Erikson, le 14 juillet 1187, les pirates de
différentes nations, pénétrant dans Tintérieur du pays» s^emparèrem
d*abord d'Âlmarstâck, ensuite surprirent la citée même, la saccagèrent
et emportèrent un butin immense. Après cette catastrophe , Sigtouna
fut rebâtie, mais négligée et successivement abandonnée; elle déclina
et ne compte que de huttes au milieu d'immenses ruines. Ici se décharge
une embouchure de Katlou (du lac Mêler où est Telga). De cette embou-
chure à Kalmar il y a 200 milles et de Kalmar à Tautre embouchure de
Katlou (Vistule) 80 milles, ainsi entre les deux embouchures de Katlou
se trouvent 500 milles.
A 190 milles de Saktoun est situé Landschouden, composé de deux
noms dans lesquels on distingue Lounden (Lund ou Land), et Schonen
(sehouden), de la Skanie.
De Landschouden à Djouna (Dantzik) 200 milles, et de Djounaà
Zvada (Suède) 100 milles. La ville Zvada, qui donne le nom au pays, est
tout-à-fait fictive. Cest la Svede et de Zvada (Suède) 100 milles vers
Torient, se trouve Elba (Elblong), Elbing. Elblong était une position
depuis longtemps fréquentée. Deux cent cinquante ans avant Edrisi,
Wulstan, anglo-saxon, visitant les embouchures de la Yistule occiden-
tale, Weichselmûde, orientale Ilfing, indiqua la situation dllfing
(Elbing) ou Trusa , sur un lac de ce nom (lac Drausen). Elba est vis-à-
vis de Landschouden, parce qu'elle est de Fautre côté de la mer.
De Elba (Elblong) à Fimia (Fellin) vers Torlent 100 milles. La carte
itinéraire rend son nom très-distictement Felmia. Je pense que c'est la
position qui est nommée dans une autre section (¥11,4, p. 432) Felmous.
Il est vrai que dans la carte itinéraire (VIT , 3, 4), Felmia et Felmoos
sont inscrites comme deux positions différentes, et le texte d'Edrisi ne
nous prévient pas de l'identité : mais cette identité décèlent le nom, et
l'indication de la position. Edrisi dirige continuellement vers Torient,
il dit que la ville Felmia est à 100 milles de la mer, sans donner sa des-
cription (Vn , 3, p. 429), après il répète que le fort Felmous est situé à
une 'certaine distance du rivage, c'est-à-dire 100 milles, qui Téloignent
de Bernova maritime, et il y donne la description de Felmous (VII, 4,
p. 432), qui manquait à la première mention de cette position. Les lOC
milles sont insu£Ssants pour la distance entre Elblong et Fellin, mai
ils marchent dans la direction indiquée.
La description d'Edrisi, confondant les deux côtés opposés de
Baltique, confond aussi Suède avec Finmark , quand il dit que le roi
Finmark possédait Kalmars et une portion de la Norvège. Cette con
sion soulève pour nous une incertitude quand nous voulons débrouil
là position d'Abreza, ville de Finmark, Arboga ou Abroga, ville anti>
6KAlf DINÀYIA , 70. 181
de Suède porte un nom analogue. Mais si Ton suit récriture de la carte
itinéraire, Abreza porterait le nom de 9jj}\ Aboura ou Abouza,qui
répondrait à la yille Tourkou, appelée par les Suédois et les indigènes
Finnois, Abo ou Aboé, située sur la rivière Aûro, Auroïaki.
70. A Finmark confine la Tavastie. Edrisi le connaît. Il dit que
i^-,^it^ Tebest est un pays où Ton trouve beaucoup de bourgs et vil-
lages, mais très-peu de villes. De ce nombre, il nomme la ville 9^)j&!^
Dagvada, considérable et très-peuplée, située sur les bords de la mer.
Ne trouvant rien d^aualogue qui pourrait expliquer et déterminer la
position de Dagvada, Dagoada, il faut accepter la relation d*£drisi à la
lettre. Expliquer Dagvada par Tile Dago, serait accuser notre auteur
d*une nouvelle confusion : à moins qu*on se convaincrait qu'à cette
époque Tlle Dago avait été en possession des Tavastiens et fesait partie
de Tebest. Dagvada est éloigné des tles des Amazones à i et V* journée
(p. 433).
A croire aux chiffres de la description, Dagoada et Tebest furent très-
éloignés de Estlanda et plus rapprochés à Tembouchure de Katlou :
car de cette dernière la distance de Dagvada est portée seulement à 100
milles, et de Dagvada à Anho, ville de Estlanda, elle monte à 300 milles
(p. 431, 452)).
Estlanda sjj^l:^) est cependant Estonie, de laquelle Edrisi avait
des relations assez abondantes, un peu fantastiques, qui donnaient une
peinture des villes dans de riantes couleurs.
Anho ^ t ville de Estlanda , remarquable par la beauté de ses
édifices et par son état florissant, 200 milles éloignée de Dagoada. Cette
distance ne nous dit rien , mais les autres plus déterminées s'appoin-
tent aux environs de Revel , qui portait des noms variables : Linda-
nissa, Dani pillis, Danilin, qui n'ont aucune analogie avec Anho.
Cependant les distances de 6 journées vers Torient à Kalovri, et de 50
milles en côtoyant jusqu'à l'embouchure de Bernova et à la ville du
même nom, fixent Anho dans le territoire de Revel.
Kalovri ^i^ lieu de l'Ëstland, fortifié, peu important , dont le$
habitants se livrent aux travaux de l'agriculture avec peu d'avantage ,
mais élèvent de nombreux troupeaux. C'est Kexholm, Kekkisari,
Korelenborg, Karelogrod, Korelskojgrod sur Ladoga, villes des
Kareliens.
Bernova I J^ près de l'embouchure de Bernov yj} Parnava
(p. 432).
D*i€i eommencent des contes toujours plus ei^travagants et plus fabu-
i8î IMtlM.
leux. De Beriiofa (Parnaya) à tj^y^ Felmons (Vilîende, Fellin) Kitaé
aune certaine distance da rivage, 100 milles. Ce fort est ahandonné
durant l'hiver. Dans cette saison les habitants se réfugient dan» des
cavernes éloignées de la mer, on ils allument du feu qu'ils ne cessent
d'entretenir, tant que dure la rigueur du froid. Quand Tété revient et
que les brouillards épais et les pluies cessent de régner sur la côte,
ils reviennent à leurs demeures. G*est la ville Felmia déjà nommée
(p. 4â9), distante 100 milles d'Elba (Elblong).
De Feintons à aj^x* Madsouna, ville considérable et très-peuplée,
dont les habitants sont madjous, c*cst-à-dire infidèles et ignrcolés, 300
milles (Mesothen en Kaurlande , aujourd'hui Mittau). Je pense qu'il n'y
a pas d'erreur quand on lira la distance de ^ 500 milles par ^60.
De là à i^j^ Sounon , dépendance des Madjous , sur la cote 70
milles. Au nombre des lieux de cette contrée les plus éloignés de la mer
il faut ranger c^^ Kabi, ville qui est distante de 6 journées et I
journées de Kalovri. Sounon est une position maritime ; comme £dri8i
parle en continuité de la distance de 6 journées de la mer Kobi, on
en peut conclure que la distance de 6 journées est de Sounon. Pcéso-
mant la position de Sounon à l'embouchure de Hasau en Kourlaode,
on aura pour Kobi une ville assez importante, dans son temps Kebela
(des cartes d'Ortel), Kobola, à Test de la gorge du lac Peypous (où les
cartes moins détaillées aiment mieux inscrire Salatski). Je préfère
cette situation à celle de Copio do Savolax. (On a un Kobel tout prés
de Pskov, c*est une petite localité, Smitniegorod Gobel; de Faalre
côté de la rivière on a Kambi). Et de Kalovri 7 journées , vers le midii
X^P^ Djintiar (Ingria , et Ischora sur Ischora) ville considérable sar
le sommet d'une montagne inaccessible , où les habitants se défendent
contre les attaques des magiciens de Russie. Cette ville n'est sons b
domination d'aucun roi (Vil, 4, p. 452 , 455). Toutes ces villes et pays
n'appartiennent pas à la Roussia.
Roussi A, septentrionale.
71. La Russie septentrionale est une vaste contrée, qui s'étend
beaucoup, soit en longueur, soit en largeur (Vil, 4, p. 455), environii^
de montagnes; les lieux habiles y sont rares et personne, dit Edrisi, n*d
pu nous indiquer les noms avec certitude. (Les trois villes sont marquées
dans la carte itinéraire (VII, 5), mais anonymes, sans qu'aucun nom y
soit inscrit). L'extrémité occidentale de l'océan ténébreux touche à la
partie septentrionale de la Russie et s'étend du côté du nord , puis se
détourne v^rs l'occldeat. Là il n'existe aucun liear^seeptible d^tre
trayersé par les naTigaleurs (TU, â, p. 454). Un grand aemiirt dt cours
d*eaux découleot dss montagnes el vont se perdre dans le lae ^^
T^nnif lao très-considérable, au mlUieu duquel est une haute mon-
tagne, peuplée de chèvres sauvagps et d'autres animaux nouMoés ferber
ou herber (castor) (76). La longueur de Test à Touest est de 2>00 milles
et la largeur de 100 milles (VI, 6, p. 405). De la Tille Boulgar, située
sur Ithil, à la frontière orientale de cette Russie, il y a iO stations
(p. 403). Les auteurs postérieurs ne néglîgaient point de s'entretenir de
ce lac avec quelques difiérence. IbnSaid, 1276, détermine par Ion-
guitude et latitude la position de âjûU iidî château fort de File qui
se trouve sur le lac Uj^ Touma, qui est long 630 milles de l'ouest à
Test, et large à peu près 300 milles. Au millieu de ce lac il y a Ttle de
babr (castor) de presque 150 milles en long et 70 en large. Un château
fort est bâti sur une montagne de cette tle et on y garde les trésors du
«iltan des régions des ^^L«^Ji Toumaniens. ANBihaki parlait de nom-
breuses rivières qui se déchargent dans ce lac (Abulf., texte arabi p. 225).
Nous ne nous efforcerons pas de rechercher les sources de tous ces
c2>ntes, ni ce qui a pu donner Forigine au lac Termi, ou Touma ; si
c'est Peipons, Ladoga, Onega, ou les marais de la Polisie; nous remar-
querons seulement, qu'Edrisi se plaint du manque de connaissance ,
avoue son ignorance sur toute la Russie septentrionale. En effet, il n'y
a rien d'étonnant s'il n'a connu Fexistence de formidables colonies
skivo-russes, transsylvanlennes, zaleskie, qui n'étaient éloignées que dix
stations de Boulgar; mais il est surprenant que ceux qui lui ont fourni
des renseignements sur la mer Baltique, ne Font pas instruit de Fexis-
tence de Novogrod. Ces renseignements cependant venaient directe-
ment de la mer Baltique , où Novogrod soutenait des communications
avec les Normands, développait son commerce là, où les Normands-
skandinaves et les Pomoraniens donnaient Fhospitalité à ses marchands :
yeiM gTŒwmm t'n Julino (Adami; brem. hist. eccies. Il, 12)» Le souvenir
des courses des Varègs, Russes, et de leurs passages par la Novogrod,.
n'était pas encore oublié.
72. Cependant les Arabes, par leur chemin ordinaire, que les rela-
(70) JiqlMrt traduisit ^3 on yj tigre. & oftUM que te tigre est appelé berber par 1» Parsant*
VaUii Tarabo empruntait du partan, ii empruotait aussi d'autres idioitaes pour désigner les objets
étrangers. Dans le climat de Boussla le tigre n'existe pas. Dana ce climat les Slates connaissent le
k«ber, bebr. en allitmand Biber, en fiançait bièvre, du grec et lalln castor. L'idiome arabe n*a pas is
nom pour le castor, dit Fraehn (Um Foesl. Berkbte, p. 87), U «e sert ou de l'appellation tatare Umn-
éufu oo de Mlle dee slates Mr. — Abonlflida relate «ne singulière description de cet animal, il
rwseabte, dil-U. an Uoo par la force et au guépard par sa faite, aussi dit-«B , «et il généré par, ces
étox espècis d'animanx.
i9à EDRiSf.
tioDS commerciales soutenaient encore, avaient des notions plus détail-
lées sur ces parties septentrionales, comnïe on le Voit par quelques
mentions subreptices. Ainsi Ibn Saîd raconte que le prince de la ville
Ajti^ Maschqa, était Slave et qu'il possédait un royaume étendu et
une armée nombreuse, (ap. Âbnlf.) et d'après la longitude et la latitude
qu-il donne de sa position, elle est pour sûre dans Tintérieur des terres
Slaves. Bakou i ajoute que Mascliaqa , ou Maschafa, est une grande ville
du pays des Slaves (le pays), sur le bord de la mer , entre des Ifeui que
les armées ne peuvent traverser. Il y a beaucoup des vivres, du miel,
de la viande, des poissons; on se sert d'hommes au lieu de^chevanl.
Il faut l'agrément du roi pour s'y marier; ce prince est absolu pour
ses sujets (VII, 6). — Moskva, Moskou, fondée en 1147, était déjà une
ville considérable du temps d'Ibn Saïd, mais il n'est pas croyable
qu'elle aurait donné alors son nom au prince et au pays , n'étant pas
encore résidence. Les Tatars et les Arabes orthographiaient son nom
par j'X*4/» I^C^^^Cw» Maskva, Quel est donc cet empire Slave
Maschqa?
La même incertitude offre jLs Araz, qu'Ibn Saîd place prés de
l'Océan : nous l'avons cherchée en Servie:
La même présente Ja^^^ Sousith, forteresse dans le pays des Sklab,
où il y a une fontaine salée dont on tire le sel , et une source de mie!
(Bakoui VII , 4). Toutes ces relations arabes, au lieu de fournir
quelques renseignements, demandent des explications hasardeuses.
On se trouve mieux avec ^^^ t^^j Vaïsoua ou Valsou, pays situé
au delà des Boulgars, distant de 5 mois de chemin. C'est là que les
Boulgars font un échange muet. Les peuples Vaïsou n'entrent pas dans
le pays des Boulgas , parce qu'en été ils y périraient (Bakoui VII, 8)* ^-^j.
Ces Vaisou sont les Vess, voisins de Novogorod.
De même on n'a pas d'embarras avec K^ loura iL^ lahra , pays der
Tourks, musulmans, chrétiens, juifs, mages, payens, 40 journées d
marche, près de la mer des ténèbres. Ils ne sèment plus, mais ils o
beaucoup de forêts, vivent de poisson et de chasse; on dit que 1g
Boulgars y portent des sabres. Ces peuples vont vers la mer des ténèbr»
pêcher de très- gros poissons, qui sont chassés par d'autres enco
plus gros. (Bakoui, VI, 25, VII, 10). Les loura habitent à l'est de Peri
Ves et loura ne sont pas de la race Slave. Ils ne sont pas nommés
Edrisi, il semble qu'ils lui sont inconnus. Mais il connaît quelques autr
peut-être par des relations directes avec les Komans, mais plus certair
meut il les a trouvés dans les géographes arabes, au moins ce qu'il
desRouss,qui ne sont pas Rouss-slaves, est puisé dans les ouvrages ara
^^s
>
ROUS-TOimK, 75. i85
Rous-tourfc, NiBARU.
75. Le fleave Âthil, Ithil, venant de la Russie (inconnue) et passant par
les pays des Boulgars, déchaîne ses eaux dans la merde Kbozarou
Dilem (Caspienne). La source de ce fleuve est vers Torient, dans une
contrée déserte et fétide, d*où il coule vers Toccident et vers les
Boulgars, se détourne ensuite vers Torient, traverse la Russie, la
Boulgarie et le pays de Bartas , parvient enfin à la Khozarie, où il se
jette dans la mer. On dit qu'il se divise en plus de soixante et dix
bras, formant ensemble le fleuve qui coule en Khozarie (VI, 6. p. 405).
Le fleuve Sakir dérive du fleuve Ithil et se dirige séparément vers le
Pont (p. 400).
De Boulgar à la frontière de Roussie, iO stations; et du même
Boulgar à Kokianah, environ 20 stations.
Kokiana ^L^^ est une dépendance du pays de Boulgar, habile par
des Tourks, connu sous le nom de Lw«t Roussa. Ces Rousas sont divisés
en trois hordes, dont Tune se nomme rr*^l;J Beravs. Son roi réside à
Kokiana. La seconde horde se nomme ^^j!^ Slavia, et son roi de-
meure à Hj^^ Slava, ville sur le sommet d'une montagne. La troi-
sième est àJUjI Arlhania ou Arsania, ou c^Wï al Trania, jolie
ville bâtie sur une montagne escarpée entre Slava et Kokianah , c'est-
à-dire , à 4 journées de la première et de la seconde de ces villes. Les
marchands musulmans parviennent à Kokianah : quant à Ârthania
(d'après le rapport d'Ibn Haoukal), aucun étranger n'y peut pénétrer,
car les habitants mettraient infailliblement à mort quiconque oserait
s'introduire dans leur pays. On en tire des peaux de berber (castor)
noirs , de renards et du plomb. Ce sont les marchands de Kokianah qui
se livrent à ce commerce. Les Rouss (Tourks) brûlent leurs morts et ne
les enterrent pas. Quelques-uns se rasent la barbe , d'autres la réunis-
sent et la tressent à la manière des Arabes du Douab. Leur habille-
ment est court et de l'espèce de ceux qu'on nomme kourtak : tandis
que celui des Khozars, des Boulgars et des Badjinaks est le kourtak
complet, tissu de soie, de coton, de lin ou de laine (YI, 6, p. 401, 402).
Et il y a deux espèces de Rouss. Les uns sont ceux, dont nous traitons
dans la présente section (les Tourks); les autres ceux qui habitent dans
le voisinage de la Hongrie et de la Djetoulie (p. 404). Les Badjinaks sont
en guerre avec les Rouss, quoiqu'ils ont les mêmes mœurs et
suivent les mêmes coutumes que les Rouss. Ils brûlent leurs morts,
quelques-uns se rasent, d'autres se tressent la barbe; leur vêtement
consiste en manteaux courts (tout comme Rouss),«et leur langue diffère
tant de la langue rousse , que de celle que parlent les Basdjirt (Bascb*
186 BDBISI»
kirs) (VII, p. i57). C'est tout ce qu^drisi relate de cette espeee des
Rouss-Tourks. En les plaçant sur une distance de 8 jouraées sur les
confins des Bouigars, il leur assigne un domicile rapproché à Ithil et les
^pare des Rouss de Kiiov par de spacieuses possessions des Komans.
Edrisi proteste que rien n'a été admis dans sa discriptioii qui ne serait
pas attesté à Tunanimité par des voyageurs. Blende fois il met en doute
sa déclaration, et cette fois-ci ce doute change en certitude : qu*il ne
relate pas ce que des rapports oraux, lui ont apportés, mais il foit copier
ce qu'ont dit ses devanciers, et lui-même indique Fauteur copié dans
Ibn Haoukal. La copie, quant aux paroles, est fidèle, mais rendue dans
un autre sens et interprétée d'une manière toute différente. Avant de
l'examiner, nous allons résumer l'histoire de la marche des investiga*
tiens savantes, pour découvrir les sources de la connaissance de trois
souches de Rouss.
74. En 1800 )Villiam Ouseley publia à Londres une géographie arabe,
lui donnant pour auteur Ibn Haoukal. On y a remarqué les trois sou-
ches des Rouss. Ewers (kritische verarbeilungen zur Geschichte der
Russen, p. 78, sq.) se mit en campagne d'en profiter et inventer se^
vues. En 1023, Fràhn, guidé par sa parfaite connaissance de l'idiome
oriental, analysa les textes , confrontant les passages d'Ibn al Ouardi et
d'Bdrîsi. Le passage de ce dernier lui était connu par l'intermédiaire de
Schemseddin de Damaschk, géographe, grand érudit, mort en 1^06,
attestant qu'Edrlsi distinguait quatre sortes de Slaves.
En attendant, du fond du dépôt de Leyde, Ibn Haoukal souleva des
réclamations. On s'était persuadé que la géographie, publiée par Ouseley,
était quelque peu plus ancienne : Ces présomptions furent avérées
quarante ans plus tard. La publication d'Ouseley offre une géographie
d'Abou Ishak, Persan d'Istakhar, vivant vers 950. Le texte arabe de cet
auteur, lithographie en 1859 par Môller, fut traduit en Allemand par
Mordtmann à Hambourg, 1845. Préalablement cependant Fràhn réussit
à donner à la fin de ses investigations les passages en question, aussi
bien d'Istakhri que d*lbn al Ouardi. — En même temps, 1856-1840»
paraissait la description d'Ëdrisi , et on pouvait se convaincre qu'Edrlsi
n'a jamais dit ce que lui imputait Schemseddin dimeschki.
Or, dans l'état actuel des connaissances, on sait que la pre-
mière source de la narration de différentes souches ou hordes de
Rouss se trouve dans Abou Ishak d'Istakhar. Dans le chaipitro o& il
traite de la mer Khozar, il dit que sur les bords d'Iihil et dans les
contrées peu éloignées, habitaient : -Khozar, Bartas et Rouss. Des
Rouss, dit-il , il y a trois ^U«o) sortes : dont une estra^rocheeà
ROUS-TOOAK, 7S. 187
Doulgar, son roi réside à AjbjS' {^}^j^ ^}^»^ àiU^ Kouthaba ,
Kousaba, Koalaba), ville plus grande que Boulgar. La seconde, la plus
considérable, s'appelle ^.j^ Salavia (dont le roi demeure à Slava y.
La troisième population porte le nom de IJIJy^l Arthania , Ersauia
et son roi réside à bit îj\jj\ {àjljj\) Ersana, Ârta(Ujt Ersa). Les
marchands parviennent jusqu'à Koutbaba ; aucun d'eux ne va à Ârba
(Ersa), car les habitants mettent les étrangers à mort et les noyent.
Par consé<iuent personne ne peut dire ce qui se passe là , car il n*y a
pas de communications. De Ârba (Ersa) on tire des peaux de zibeline
noire et du plomb. Les Rouss brûlent leurs morts avec le mobilier,
pour le salut de leurs âmes. Leur habillement est court. Ârba (Ersa) est
située entre le pays des Khozars et des grands Boulgars, qui confinent
au Roum , au nord de ceux-ci. Ces Boulgars sont nombreux et à tel
point puissants, qu'ils imposent le tribut aux provinces limitrophes du
Roum. Les Boulgars intérieurs sont chrétiens (Istakhri, version de
Mordtmann, p. 106 ; comparez Frâhn , Ibn Foszl. Berichte, p. 264 : le
passage d'Ibn Haoukal, ibid. p. 257, 258; code persan de la bibl.
de Gotha, ibid. p. 265, 266; etc.). Âbon Ishak Istakhri ajoute que de
Tembouchure dlthil à Boulgar, il y a deux mois de chemin parles
déserts; et 20 journées en descendant le fleuve. De Boulgar aux
premières frontières de Roum (Russie), iO stations; et de Boulgar à
koutbaba, 20 stations; et à Basdjird, 26 stations (p. 107).
Qui sont ces Rouss, d'après cette relation primitive? Quels sont leurs
rois aussi distingués? où sont leurs résidences? — On était d'accord
que Koutaba est Kouiaba , Kiiov. Outania et Ârba , reconnues pour
Âvtania et Ârta, Ersania et Ersa, décelaient palpablement les Ersans,
souche de Mordva. Mais Siavia, Slava et non Sklaba, qu'indique-t-elle ?
offre-t-elle les Slaves, les Lithuaniens ou quelques autres?
75. Koutaba ou Kouiaba est éloignée 20 stallous de Boulgar. Istakhri
indique souvent des distances par mirhaba, stations. De station eu
station il circule dans le Mavaralnahar ; il compte 10 stations de Balkh
à Bamian, etc. Les stations de cette mesure, au nombre de 20, pourraient
à peine répondre à un tiers des distances entre Boulgar et Kiiov. Mais
Istakhri dit aussi qu'on évaluait toute la longueur de l'habitable à 400
stations, équivalentes par conséquent à 180 degrés, à chaque degré 2,22
stations. Une vingtaine de semblables stations ne suffissent pas à la
distance de Boulgar à Kiiov, mais pourraient la représenter en dernière
nécessité.
Âbon Ishak témoignant beaucoup d'amitié à Ibn Haoukal , favorisait
ses études géographiques. Ibn Haonkal réprouvant hautement l'habi-
i88 EDRISI.
tude des emprunts littéraires, a dû spécialment estimer Tourrige
â*Aboa Ishak, parce qu*il Texploila et le copia dans son traité, com-
posé vers 977. Le passage de trois espèces de Roass y est introduit
mot à mot de l'ouvrage d'Abou Ishak. La lecture de Kouthaba (Kouiaba),
de Slavia et d*Artania y est conflrmée par les copies plus répandues
et plus connues que celles de Fouvrage de son prédécesseur.
Edrisi, en 1154, puisa dans les écrits plus connus dlbn Haoukal: mais
il acommode ses paroles à quelque autre relation, leur donne une
interprétation toute différente denosérudits modernes, et distingue
les Rouss autrement que ses prédécesseurs.
En 921, Ibn Foszlan a vu de ses propres yeux les Rouss venant dans
le pays des Khozars. Ces Rouss certainement n'étaient pas Slaves, mais
Skandinaves Yarègs.
En 947 Masoudi semble méconnaître les Rouss, traitant plus soigneu-
sement que personne les affaires des Slaves.
Vers 950 et 977, Abou Ishak et Ibn Haoukal connaissent les Sklabons
et les trois espèces de Rouss, et ne les confondent point avec les
Slaves. D'accord Ersania est de la souche de Mordva : or, Koutaba n*est
pas slave (^^).
Moukadessi (le jerosoliraîtain Schemscddin Abou Abdallah Moham-
med, mort 1052), rapporte qu'ils (les Rouss) habitent une île (péninsule)
malsaine , où ils sont à l'abri de toute attaque. Leur population est
d'environ cent mille âmes. Us n'ont ni maisons , ni troupeaux. Les
Sklabes font des incursions dans leur pays (à l'abri de toute attaque?)
et les pillent (apud Iakoul). — Or, ces Rouss ne sont pas Slaves, ne
possèdent rien dans la Slavonie, habitants maritimes des îles, sont
Rouss Yarègs.
(77) Mordva est an ancien peuple, antrcfois pins important, iordanos, 85«, lea appelle Merdeiu.
Constantin porphyrogenètc , vers 945 , sait que le pays de M.opSia était éloigné 10 journées des
Petschenegs. Nestor 11 10, avertit l'emplacement de Mordva sur le fleuve Oka. lis firent face en 4fSt
et iS83 au grand duc de Russie George Vscbevolodovitsch, et succombèrent en ifSO sous KinvaaioB
des Hongoux. Les Mokâcha étaient forcés de suivre les vainqueurs. Plan tllarpin iftW^conaait la
défaite de Morduins. Rubriquis 4253, connaît le sort de Moxel situé au delà du Don. Ad aquilonen.
sunt silvae maximae , quas habitant duo gênera hominum Moxel (Moxes) scilicet qui sunt sine lege»
puri pagani. ... Post istos sunt alii, qui dicuntur Merda* (Herclas) quos latinl vocant Merdmig
(Merdues, Mardes) et sunt saraceni. Post istos est Etilla fluvius (Ruysbr. p. 251, 152). Marco Polo
avait encore nommé Mordui et Josef Barbare Moxia et Moxii, — Aucun des latins n'a connu les Er$ae.
Les investigations faites en Russie sur le lieu (de Rytschkov, Pallas, Lepecbin, Georgi) trouvent à la
fois Hokscha et Ersa (Erse, lersian, au pluriel Ersad, Erdsad) qui se distinguaient par l'habillerneBl
des femmes et quelques coutumes. Les Ersa demeurent sur Piana. Plusieurs de leurs villages se
trouvent sur Mokscba et dans la partie supérieure de Soura oii demeurent les Hokscha. Le long ds
Volga, de Sok, de Tscheremschan et aux environs des parties kazaniennes et orenbonrgiennes, leàr
colonisation offre un mélangeKFraebn , Ibn Foszl. Berichte, p. 468-161). Arsamesan tud deN^ia
Bovogrod et Mokschan au nord de Pensa, sent certainement les restes de leurs ckeMieai. — Piv
tettt eipKeation de Enania, Il n'y a pas de place pour Kouthaba A Kakiaaa.
ROUS-TOURX, 70. i89
76. Enfiû la qualification de Rouss s'est solidement établie dans la
Slayonie ; les renseignements relatés par Edrisi connaissent une im-
mense Russie, pays Slave, et c'est de ces Rouss -slaves qu'Edrîsi
distingue les trois populations d'autres Rouss-tourks. Et il y a deux
espèces de Rouss, les uns dans le voisinage de la Hongrie , les autres ,
dont la langue diffère tant de la langue rousse, que de celle que
parlent les Basdjird (Edrisi, YH, 7, p. 457). Les trois populations ou
hordes de ces Rouss sont : Arlhani , Slava et Bervars, qui ont pour chef-
lieu Kokiana (Koutaba , Kouiaba). A quelques détails inconnus à ses
prédécesseurs, il applique les dislances en stations, énumérées par
Abou Isbak et Ibn Haoukal.
Iakout, en 1229, a la place de stations, substitua à la distance de
Kouiaba à Boulgar les 20 journées : c'était doubler cette distance favo-
rablement à l'interprétation de Kouiaba par Kiiov.
Ibn al Ouardi en 1549, relate les trois s^l^ hordes de Rouss,
conformément à ce qu'il a trouvé dans les anciens; seulement les appel-
lations se défigurent : De ces trois populations, l'une s'appelle ^a^j^
Kerkian, avec sa ville àj^-^S Kerkiana; l'autre i^)i^\ Atlava,avec
sa ville JX Talau (|JLt Talva); la troisième J.l Arani ( ^j\
Arti), et la ville du même nom (llyland, Ausg. part. XVHI, p. 150;
Fràhn, Ibn Foszl. Berichle, p. 142).
Le changement ou la défiguration la plus grave des appellations, est
plutôt l'ouvrage des auteurs que de simples copistes. Les manuscrits
d'Abou Ishak et d'ibn Haoukal offrent ajIJ^ ajG^ Kounaïa, Koutaba
et même Àjb«^ Kouïaba: ceuxd'Edrisi &iL^(4> Kokiana ; ceux d'Ibn
al Ouardi wLTJ^ Kerkiana; enfin Dimeschki nomme bJjS\S Kera-
kertia.
Yoicl ce que dit Schems eddin dimeschki dans sa très-érudite cos-
mographie (p. 155 verso) : Edrisi, dit-il, rapporte, que de son temps
il y avait quatre genres aJUUs)! ^^..Uswt de Saklaba, nommément :
Sj^bLo Slavia , 3L-oLj Berasia (Bervars), 6^^\S Karakertia (Ko-
kiana) et ^Uit Ersania. Tous portent les noms de leurs pays, à l'ex-
ception de Ersania. Ceux-ci dévorent les étrangers qui y pénètrent ,
et à l'instar des animaux sauvages, ils habitent les forêts et les roseaux
de rivage de la mer environnante (Fràhn. Ibn Foszl. Berichte p. 145)
Tissu de niaiserie de l'invention du cosmographe, quia surpris plus
d*une fois la confiance du savant Fràhn.
77. Suivant les conceptions qu'Edrisi développe , au delà de la ville
boulgare ji^L? Taboun, qui est forte, située sur le sommet d'une
490
montagne et entourée de champs fertiles et d*liabitatioiis(Y8)«au delà
de cette ville, sont les monts bliJi Kokaia,au delà desqoels on ne
trouve ni habitations, ni être animés , à cause de la rigueur du frokl
(VU, 6, p. 456). Ces montagnes s'étendent depuis la mer ténébreuse
jusqu'aux extrémités du monde habité; elles atteignent et dépassent
les pays de ladjoudj et Madjoudj à Textréme orient , puis se prolongent
du côté du midi jusqu'à Nitasch et la mer ténébreuse, connue sous le
nom de poix résine; elles sont inaccessibles, à cause de l'excès du
froid et de la permanence des neiges sur leurs sommets. Les vallées
sont habitées par le peuple dit ajjjIJ Nibaria, qui possède six places
fortes et qui sait tellement bien se défendre dans leurs retraites ,
qu'ils y sont inexpugnables. Ils ont pour coutume constante de ne point
se séparer de leurs armes et sont extrêmement belliqueux. Nous en re^
parlerons, ajoute Edrisi, dans la description du septième climat (YI, 5,
p. 396). Mais il a oublié de s'acquitter de son engagement et il n*en
dit rien du tout dans le septième climat. La carte itinéraire, n'ayant
pas négligé de marquer la position do pays de Nibaria ; fournit les noms
de six places fortes, où je crois débrouiller :
Tabarkoumouka (Temnikov) ,
9^*j lavosora ou lousara (Insara),
Aj^y larovna (Saransk),
AS[y Lovaka , ou Louka (Loukoîan) ,
0^Lw Sarada (Ârdatov),
9^L«Jt Anaada ou Âbaada.
Toutes ces places fortes sont placées entre les branches d'un fleuve
qui vient des monts Kokaïa et porte le nom de la ville située sur ses
bords A^M Rousia (tabl. itin. YII, 5, 6). Dans la description il est dit
là dessus , que les six grandes rivières , dont les sources sont dans leç
montagnes Kokaïa, mêlent leurs eaux à celles du fleuve Rousia (VI, 5,
p. 596); et la ville Rousia, ennemie de Matrakha, qui se trouve sur la
mer Nitasch, est située sur les bords d'une grande rivière provenant
du mont Kokaïa (YI, 6. p. 400).
Dans un autre passage , Edrisi rapporte qu'à 70 milles de Trebizonde
vers l'orient , est l'embouchure de ^^ jj Rousio , qui prend sa source
dans les montagnes i^t Kabk, coule au nord (du nord) du pays
aJ^I jaA desAlanes. Il n'existe sur ses rives aucune ville célèbre,
^71) t« inscrit d*Awelin , porlt c^jpLi Vaa«uii, tt !• Yirliei latiHt BtUna.
MIBAIIA, 77. 194
Mais quantité d« villages bien peuplés et de cultures Ce fleuve se
dirige ensuite vers le couchant, puis se jette dans la mer, auprès du
lieu ci-dessus indiqué, à savoir^ Rousio, à 70 milles de Treblzonde. Il
est navigable pour les petites embarcations et sert au transport des
marchandises de peu de poids, et à celui des objets d*approvisionnement
d'une habitation à une autre (YI, 6, p. 599). Yis-à-vis de Trebizonde
est la mer i^jj Rousia, éloignée à 5 journées de distance (YI, 5,
p. 394). C'est la distance de 70 milles de Fembouchure de Rousio (79).
Cette notice indique, que la mer Rousia est la mer Zabach on Âzof ;
le fleuve Rouss, Rusia ou Rousio est le Don, et son embouchure est
déterminée près de Matrakha, où la mer Zabach entre dans le Pont.
Cette embouchure n'offre aucune difficulté. Très -longtemps le
Bosphor , le détroit de Kertsch, étaient considérés comme embouchure
du Tanaîs, du Don : la mer Zabach ou Âzof n'était qu'un lac qui se for-
mait à l'embouchure , lac impraticable pour les grands navires (se).
Quant au pay5 de Nibaria , son emplacement est forcément renvoyé
vers le haut du Don à côté de Tambov (Taboun), aux environs de
(79) Fraehn (Ibn Fonl. Berichte, p. S9), accepte la distinction des flsavet ^>.» ^ . Rousi^ou
.. -y
/ M»* t Rouss et ft,jYv . t Rousio,' qu'on remarque dans la description d'Edrisi , motive par difle*
rentes désinaisons. Il pense que le dernier Rousio est Fas, Fasis, que les indigènes appellent Roubia
os Rioni. Si Ton voulait admettre l'assertion d*Edrisi,on n*a pas besoin d'aller si loin, on trouve près
deT rebizonde un fleuve du nom plus analogue Risso, Rizo, Russo. Ce fleuve induit peut-être les
géographes siciliens et Edrist en erreur et confusion, que nous examinerons bientôt. — Le traduo-
Unr Jaubert s'évertue de sa part de distinguer les deux fleuves Rouss, à quoi il avait raison , sur-
toDtà cause qu'Edrisi lui-même conçut cette idée. Jaubert pense que le mont Kabk, lequel donne
ici l'origine au fleuve (p. 399), est le véritable Kaukase, et Kikaîa est imaginaire des frimes du nord.
Ia version certainement est scrupuleusement exacte et rend bien l'aberration d'EdrisI : mais cette
jexplic»Uon de Kabk n'éclaircit l'embrouillement de la description de celui-ci. L'origine kaukasienne
d'un fleuve Rouss est controuvée. — Ce sont les obscurités que répand la description edrisienne ;
d'un autre genre sont celles qu'a fourni en 4S86, l'érudition du très-savant Scbems eddin dimescbki,
«lir une certaine rivière Seklab et Rous qui coule entre iLliil et Kour (voyez ci dessus cbap 66). —
Il j « encore dans la description qnelqaes distances as8«< curieuses entre Trcbizond et l'embonehure
de Rousio. Par exemple : de Uatrakha à l'ile Saranba une journée ; de Saranba vers le sud on compte
40 milles à l'j^e Gftrdia et de Gardia à Trebizond 8 journées de navigation (c'est iO milles et 7 jour-
nées, l'ont la traverse de 8 journées ou de 70 milles). Hais de Gardia à l'Ile Azela il y a tO journées
Ters l'orient et Azela est située à mi-chemin entre Trebizonde et Matrakha, et il est nécessaire de la
toodier quand on se rend de l'une à l'autre de ces villes (p. 396). Or, de Trebizonde à llatrakha on
t%ait au moins iO journées de traverse. Cette traverie n'est pas directement par la haute mer : mais
en cOtoyani les rivages d'Âbassie et d'Imiretie, où sont àchereher les prénommées iles on presque
net. —La largeur du Pont 300 ou 400. milles (VI, 6, p. i05), signale la partie lai ge, rapprochée de
Constantinople.
(80) Adorie&tem, est civitas, qne dicitur Hatrica, ubi cadit flnviusTanaisin mare Ponti, per
orifidum habens latitudinem xn railiariam. lUe enim fluvins , ante quam ingrediatur mare PontI ,
boit quoddam mare, versus aquilonem . habens in latitudine et longitudine septingcnta miliaria ;
Dusquam habens profùnditatem ultra sex paasus :unde, magna asasa non iogrediuntur illud, led
niercatores de Constantinopolim applicantet ad preedietam eivitatem Hatricam, mittunt barcas suas
«•que ad flumea Ttaaim, ut emaat piaeei itoeatâi, sUriones sciUcêt et hosas beebttât et alios pitees
iefliHt aultltadliis (Rnbriquis en ISH, p. SIS, de l'édit. dt Michel «t Wright. — Bt flièao p. Hl.
192 EDRisr.
Vorooej, Ycrs Orel, Toula, Roslov, où les prétendues Kokaîa coloriaient
l'ignorance par ses cimes blanches. Au reste, cherchant dans toute
rimmensitéde la Russie les six places fortes nibariennes, on ne retrouve
de noms quelque peu analogues, à la fois réunis ensemble, que sur les
confins de la goubernie de Penza. Ces noms ^'éloignent quelque peu du
Don , mais ils indiquent les places qui couvraient le pays nibarien des
incursions des Boulgars. L'écriture arabe , flexible aux changements
imprévues, livre ^iLj» Nibaria à des conjectures. Ajoutez un point
diacritique et vous y trouvez ajjLj Benazia, Penazia, Penza. Plus
heureux que moi, peut-être un jour retrouvera un emplacement plus
convenable pour cette curieuse Nibaria.
K 0 M A N I A.
au dire d'Edrisi et de Pelakhia.
78. Les Kangly, Kangars,nsTÇ«vàxo«, narçtvaxot, narçcvaxira*, Petinei,
Pincinati, Piucinnaturi, vjJ^Usf Badjinak, Pietschinghi, partisans
et satellites de Boleslav-le-grand, dominaient cent cinquante ans su
les stèpes de la mer noire. Konstantin porphyrogenète nomma lenr^
hordes et indiqua leur emplacement depuis le Danube, jusqu'au delè^
du Dniepr vers le Don. Elles possédaient à elles seules des espaces ra
vagées , remplies de décombres. Il n'y avait que de hordes sans vill
sans établissements fixes. La domination de cette nature, mettait de
obstacles à la communication continentale. Les Russes, pour se rende
à la mer, descendaient le Dniepr , forcés mainte fois de combattre la
mauvaises dispositions des hordes. Vers Tannée 1050, les hordes d»
Komans vinrent combattre leurs confrères Pietschings et détruisirer
leur domination. Depuis cette époque le nom de Pietsching ou de Ba»
jinak n'était connu que dans leur camp antique, dans leur gite pri
tif, dans le voisinage des Boulgars et des Baschkirs, au delà de Vol
éloigné de l'Europe. Sur les stèpes de la mer noire, à leur pi
gagnèrent la renommée les Komans, Koumans, Polovtsi, Pla'uci, Pa
ainsi variablement qualifiés.
Les Polovtsi établis sur les stèpes du Dniepr , faisaient de fréque
excursions en Pologne. Sur trois ou quatre points éloignés ils exécu
le passage nocturne par la Vistule, et, pillant, emportaient le butin
leur camp (Gallus, II, 19, p, 74). Boleslav-le-hardi cberchait
Polovtses jusque dans leurs stèpes, pêne transpartanis (Mattb. II,
Sous le règne de Vladislav Herman, en 1190, il renouvelèrent
incursion. Le jeune Boleslav - bouche-'torse , à peine ceint chevaV 1er,
ilétruisit leur irruption et jeta une telle épouvante quMli n'osèrervl u
KOMANIA, 79. 493
montrer, jusqu'à la mort de Boleslat 1139 (Gall. II, 17, p. 175; Matth.
II , 29). Après on les revit en Pologne à la suite des Russes, quand
ils étaient leurs alliés (Vinc. Kadiubconides, 24, p. 549). Ils étaient
ennemis des Russes et secouraient les knezs (princes) dans leurs que-
relles, ce qui était de mauvais augure pour Kiiov.
Les Komans, appelés Polovtsi et Parti, gagnèrent une certaine célé-
brité et personne n'a porté son observation sur l'état de leur élablisse-
ment. Un seul, Edrisi, autant que je sache, en a dit plus que les autres.
Sa description a donné l'impulsion à plusieurs historiens modernes,
d'avancer que les Polovtsi étaient plus fixés à la glèbe que les autres
hordes et qu'ils ne s'adonnaient autant au brigandage : mais leurs pos-
sessions restaient indéterminées.
Quand on entreprend de chercher des renseignements dans la descrip-
tion d'Edrisi , afin de les déterminer, deux difficultés ses présentent :
l'une c'est la manque de positions indicatrices et le vide de la localité,
l'autre, la confusion et l'erreur dans lesquelles s'abîmèrent Edrisi et
les géographes de Sicile, en coordonnant les relations qu'on leur avait
fourni.
Les Komans possédaient les terres successivement inondées par des
hordes qui orninairement ne laissaient aucun nom, aucune trace de leur
séjour après leurdisparitiou. A peine quelques fleuves considérables con-
servaient leur appellation : la terre sur tous les points restait anonyme.
Les hordes précédentes n'ont fixé aucun nom au sol abandonné. Pour-
rait-on donc espérer que quelques dénominations komanes se seraient
eonservées et perpétuées sous la domination postérieure des Mongoux ?
79, Edrisi sait que trf^^^ Danabros prend ses sources au nord
du lac Termi (ou Touma); au delà de ce lac (VI, 6, p. 405, voyez la
carte itinéraire) (si). De l'autre côte du lac, c'est-à-dire de celui du
midi (sa), le fleuve Dnabros prend sa source au milieu de prairies et
de forêts, et là il porte le nom de ^jA) Beltes (VII, 5, p. 454) (ss).
La carte itinéraire ne connaît pas des sources au sud, elle trace le
conrs du Dnabros, indiquant les sources rapprochées aux monts Kokaïa,
Siccompagnées de l'épigraphe ^ji^^^ j^^ ^^^ ^^^ ^^"^ *^" fleuve
(81) Jaubert traduisit le texte : fleuve provenant du lac Termi : la carte s'oppose à cette interpré
talion.
(8î) Le traducteur dit : de l'autre côté, c'est à-dire, vers le midi ; la carte itinéraire contrarie
celte version.
(83) On peut inventer quantité d'hypollièscs sur le nom de Beltes^ rivière plus considérable , plus
grande boUchaia; venant du côte de la baltiqtie, ou de la Polisie, Podlasie, poliska; sortant ou pas-
sât par des marais boueux, (boue bloto), elle-mêaie boueuse, holotna, blotna.
III. 15
494 EDRISI.
Dnabros, et le conduit autour du lac Tcrmi, courbé vers le sud-est
(Yiï, 5, Vï, 5).
Edrisi rapporte que la Russie avait plusieurs villes sur 1er rives du
Dniepr: Barmos (Smolensk),Kiiov,Berizoula,BerisIav (Periaslav), Kano
(Kaniov); il sait que Zaka, près de Tembouchure du Dniestr et du Dnabros,
Molsa et xVlcska , étaient en la possession de la Russie; toutes ces villes
n'appartenaient point aux Komans (84). Dans Tannée 1175, Petakhia
va directement de Kiiov, G journées par le continent jusqu'au passage
du Dniepr, par les terres russiennes sans rencontrer un Koman (Tour
du monde de Pctakh. par Carmoly, Paris 1851, p. 8, 9). C'est la distance
donnée par Edrisi, de Kiiov ù Alcska. En attendant, Edrisi en exami-
nant le cours et les sources du Dnabros, tracés sur la carte itinéraire
rogéricnnc, remarque tout au nord , sur ses rives rapprochées au lac
Tcrmi, deux vill'^s florissantes des Komans, appelées ^}jy^ Sinoboli
et àlt^j* Mounischka, et il décide que la majeure partie du lac du cété
de Torient, dépend de la Komanie (VII, 5, p. 45i). L'histoire ne connaît
aucune Komanie aussi enfoncée dans le nord de la Russie, le lac Termi
n'a aucune existence; or , toute cette exposition des géographes de
Sicile s'évanouit, manifeste une méprise, une erreur qui demande
une toute autre explication.
La diction d'Edrisi fournit le moyen de rectifier le malentendu. Il
avait dit que de Barmonsa, qui est une belle ville, bâtie sur les bords
du Dnabros , à Sinoboli, grande ville, bâtie sur la rive occidentale du
Danube (Dnabros), on compte 6 journées (VI, 5. p. 597, 454) (85). Si-
noboli , ville russe (p. 597) , située sur le Dniepr et dépendante de U
Komanie (p. 45i) , avait par conséquent son emplacement quelque
pan au midi, dans une position peu éloignée de Kiiov. On ne saurait
indiquer aucun autre emplacement plus probable, que tout de suite au
delà de Berislav ou Periaslav. A la suite, en descendant, une autre ville
Mounischka sur le bord occidental du niénie fleuve.
De Kiiov à ^^U Naï, ville de Komanie, G journées (VI, 5, p. 598).
De Naï à 5j^ Kirah ou Firah, vers l'orient, 25 milles.
De Kirah à /yjjL) Narous, vers l'orient, 50 milles.
8-i) Si'kninnil.oncorn en Kriméo, appartenait aux Rouss. Kd outre ils cnnsf'rTaîrnt certainMBCBl
lt>ur oiablisscmcDt vareg, sur les langues de Tcudcr, ancien Dromos Aiiiillcos près du golfe Segal-
tM-liouk. Les (îrecs appelaient ces Varegs Dromites (Simon logotheta, ap. Stritter, II, 958, 967}; le
gol.e ^•■gallscliouk , sur la carte de 1318, se nomme rarangolimena, de même sur la carte catalane
de 1577; ensuite cette appellation continuait à se (aire connaître au sud de la pointe Rosicoeo
Krimée, oii l'on voit sur la carte de 1497, de Fredutio, Varangida; de même sur une carte de 151*
(Scliafarjik , slav. slarojitn. II, 2, §27, p. 50G, note G6]; les certes du xvii* siècle continuaient encore
d'indiquer dans la Tauridc un bourg f'arangito près du promontoire Rosofar, Rosico ou Eskiforoi.
(8S) L'erreur de l'api ellation du Danube au lieu du Dnabroi est trop évidente.
KOMAICIA, 80. '495
De Narous à jbL» Slaya , ville des Rouss-toorks (rapprochée à
Volga) 155 milles (Vf, 6, p. 401). Il est évident que c'est la direction
de la route commerciale de Kiiov. Dans cette direction, le nom de la
ville de Kharkov seul sonne, comme s'il conserverait la dénomina-
tion deKirah. £n ce cas Naï serait Bielogrod russe, possédée par les
Komans, qui tracèrent jusqu'à ce point là leurs limites.
80. Mais dans la Komanie intérieure existaient encore deux villes,
savoir : Ljjji» Troïa, et A^t Akliba, Tune et l'autre florissantes et
comparables entre elles sous le rapport des ressources et de l'apparence;
l'une de l'autre éloignée de 8 journées. Âkliba était la dernière dépen-
dance, (vers le nord -est) des Komans, à l'époque d'Edrisi.
De Troïa à .jULo Silan, en se dirigeant vers le sud, à travers des
plaines désertes, ou du moins peu habitées, on compte 100 milles (VII
6, p. 455). Si Ton admettait que Silan reste dans le nom de la ville
lelansk, située sur le Don, les frontières septentrionales de la Komanie
se dessineraient suffisamment (se).
Dans cette partie septentrionale de la Komanie, on voit (sur la carte
itinéraire) le lac ^^^ Ganoun, dont les eaux sont gelées à leur
surface en tout temps , excepté durant un petit nombre de jours d'été.
Ce lac reçoit les eaux de huit rivières, dont une, la ^jjt» Scherva,
n'est susceptible d'être traversée qu'en été, à cause de l'extrême
rigueur du froid de ses eaux, et elle nourrit dans son sein beaucoup de
poissons, dont on extrait une grande quantité de colle.
Dans les forêts environnantes on trouve le berber (castor) (p. 455).
La rivière Scherva répond bien à Choper. Quant au lac Ganoun, il est
l'œuvre de l'imagination, qui n'a point d'existence, aussi bien que la
montagne lojis Tout , de laquelle coulent les rivières vers le dit lac
(carte itin. VII, 6).
Narous est une ville commerçante quoique petite : mais vers le sud-
est, à 108 milles, se trouvait ^y Nouschi, plus considérable, envi-
ronnée de cultures, arrosséepar une rivière et située à 100 milles ou 4
journées de ^^jlJ Kiniov, ville considérable, au pied d'une haute mon-
moDlagne, placée vers le nord-est. De Nouschi à la ^ys^Jl vU^
Komanie blanche, vers le sud 50 milles (VI, 6, p. 401). — Assigner
l'emplacement à tontes ces villes, suivant les distances données, n'est
pas difficile, parce que dégagé de toute contrainte, il peut prendre de
positions commodes sur les stèpes déblayées de l'appellation quel-
(M^) Cepeuilant il serait impossible d'avancer avec Troïa jusqu'à Troïtsk , comme le tra hicUur i«
-veut : impMfiblt de livrer «ette ville dans la possession d<.-8 libiuaDs.
496 EDRISI.
coDqa«. Mais pour comprendre et expliquer le reste, retrouver les
positions des places suivantes, s*élève dans la confusion et dans la
déviation des géographes de Sicile des obstacles difficiles à sormonter.
Nous avons remarqué une mention faite à Timproviste de la mer
Rousia, appelée anciennement ^fJLJL» Manitasch, Maeotis, plus tard
Ozak ou Âzof, enfin Zabach (st). Elleétait vis-à-vis de Trebizond (p. 394).
Cependant la carte itinéraire ne lui assigne aucune place, et Edrisi ne
la fait connaître par aucun renseignement spécial , par ancon détail.
En entendant, examinant sur la carte ^^^^j^ i<V^~^ renfoncement
oriental du Nitasch, le dernier coin du Pont, on y voit sur les côtes
entre Matrakha et Trcbizond une suite de noms appertenants aux pays ^
étendus entre les mers Zabach et Kaspienne , entre les fleuves Don , ^^
Yolga et les montagnes Kaukase : comme si ces pays et leurs peoples^^
avaient besoin d'avoir des représentants spéciaux sur ces côtes , qo*oi
ne saurait confirmer ni constater par aucune donnée historique. Or, L
est nécessaire de convenir qu'ils y sont mal placés , qu'ils
présentent un embrouillement d'idées des géographes de Sicile, et qu*
faut absolument les replacer aux positions qu'ils avaient réellement
81. De l'embouchure du Dniepr, Edrisi passe plus de 80 milles
cultivés , jusqu'à ùy^S Rersona. De ce point il côtoyé la péninsu^^^
et connaît une suite de localités entassées sur un court
auquel il assigne de longues distances.
De Kersona à ^iJUw Djalita (Jalta) (ss) dans le pays des
30 milles;
A ^j\^ Garzouni (Goriam de Benincasa , Gorezus (so) , ff3mf
d'aujourd'hui), ville florissante sur le bord de la mer, 12 milles;
A ^^L^tf Bertabiti (Pagropol, Nagropoli, Pangropoli, PairlB/l
d'aujourd'hui), ville petite, mais bien peuplée, où l'on construit dieg
navires, 10 milles;
A ^w^L) Lebadha, Lebata (Lambat), jolie ville, 8 milles;
(87) lam ie mari Nitasch et adjacente ei palude MaDiUscb, quae bodio ol Ozaki appelbtar ib ol
Ozak urbe, in ejus Htore sepUntrionali sita (A.bulf. latina Reiskii vcrsio, in BûscfaiogiIbliiîB,
t. IV, p. 44S-4S0). Tan fluvius .. effunditur in illam partcm Nitasch, quae hodie mare Azak appeUatir
ab Azak quod est emporinm (id. ibid. p. 173). Ton in mare azokensc, quod in libris antîqviSBMre
Manitasch appellatur (id. ibid., t. V, p. 363). — Reiske par méprise dit dans une note (t. IY,p* l<ii
ol Ozak, nostri OtscbakoT diount, car il sait partout ailleurs qu*Ozak est Azof. — Du tenpidliàia
cette appellation n'existait pas encore , mais celle de Manitasch lui était bien connue par l'oniait
de Ptolémée.
(88) Laïa, Lota, Loîa, Laïra, de différoots portulans ; Lagyra de Ptolémée. — Voyez Jean Fotocki,
périple du Pont-Euxin, chap. t, p. 363, de Pédit. de Klaproth, et le portulan général de notre ^
(89) Fortifié du temps de lustinien (Procop. de tdificiis,ni, 7). - Voyez I. Potocki,péripi
p. 863, 464.
KOMAMIÂ, 8t. 497
À Jb^^Li:. Schalousta (Lasla, Lusla , Lusiia, Lastra, Âlouchta) (s9),
tille importante, près de la mer, 10 milles.
A ^iJULiL» Scholtatia , Soldadia, (Soldaïa» Soudâk), près de la mer»
SO milles.
^yy. Bouter, Bov/^ar des Byzantius) (oi), 20 milles ; et de Bouter
à Tembouchure du fleuve ^m Rousia, 20 milles (VI, 5, p. 395).
Toutes ces places, comme la première, sans aucun doute, étaient de la
possession des Komans, dépendance de la Romaine; elles prouvent à
quel point le commerce avait été animé dans cette partie de la mer.
Bientôt les républiques italiennes convoitèrent la possession de ces lieux
et y trouvèrent un nombre de populations, d*idiomes différents.
Près de cette embouchure , à 20 milles , se trouve la ville ^ Ja^»
Matrakha, qu'on appelle aussi et qu'on écrit ^^^ Matrika, située
sur les bords d'une grande rivière nommée wXw Sakir, qui dérive du
fleuve Ithil (Volga). C'est une ville très-ancienne , on ignore le nom de
son fondateur; elle est grande, très-peuplée et très-florissante. Il y a
des bazars et des foires, où l'on vient de toute la contrée environnante ,
comme aussi des pays les plus éloignés. Ses dépendances vastes, entou-
rées de cultures et de vignobles; les villages sont nombreux. Ses princes,
connus sous la dénomination de ir*^^jij\ Olou Abbas (grand Abas)
et renommées par leur force, leur courage et leur ardeur guerrière ,
se sont rendus très-redoutables à leurs voisins (VI, 5, p. 39S; 6, p. 400).
On voit par ce passage , que cette ville , appelée TafAurapxK par les
Byzantins (Constant, porphyr. de adm. imp. 42), Tmoutarakan, par les
Russes, qui l'ont visitée et possédée, fut depuis peu perdue pour eux et
entra sous la domination des voisins Abases (9s).
Non loin de Matrakha, à l'autre côté de l'embouchure de Rousia,
entre Matrakha et Bouter (aux environs de Kertsch), se trouve une
ville ^jt Rouschia, Rousia, dont les habitants sont en guerre conti-
nuelle avec ceux de Matrakha (VI, 6, p. 400, et tab. îtiuér. VII , 6).
D'où l'on pourrait conclure que lesVarèg-rouss, ayant perdu la posses-
sion de Tmoutarahan, soutenaient encore, vis-à-vis de cette cité, un
poste militaire.
(90) Fortifié par JustiDien (Procop de edificiis HI, 7).
(91) n est probable qneCaffa remplaça Bouter. C'est la seule position que je ne puis déterminer
par attcnne sitaation indiquée sur quelque carte du moyen âge ou moderne. De toutes les cartes
modernes celle de Dezaucbe 4788, m'a servi le mieux.
(99) Tmoutarakan est entré sous la domination des Russes 965, il échut en partage à Mscislat fils
de Vladimirle-grand. Après sa mort 1034, plusieurs princes s'emparèrent successivement de la
ville. Le dernier d'entre eux fut Roscislav Izaslavitacb, cousin des ducs dePrjcmisl. Vers 1011
Taeniaurak»!! ftit perdu pour les princes russes, les ibases y dominaient.
iOB EDRISt.
82. De Matrakha à à3jJaj> Matlouka, qui porte aussi le nom de
Lo^Jt v'l^ Komania la blanche, ville considérable et peuplée, une
journée de navigation ou 100 milles (p. 400) (93). Or, pour arriver à
la Komania blanche, il faut passer la mer, et de cette Komania blanche
on traverse par terre 50 milles au nord, pour atteindre Nouschi (p. 401).
Il est donc indispensable de chercher la Komanie blanche, sur les
bords septentrionaux de la mer Azov, qui s'étendait entre Matrakha et
Nouschi. Les cartes du moyen âge, de Vesconle 1518, et toutes les
suivantes, indiquent constamment remplacement de cette Komania,
sous le nom de Gomania, Chumania, au nord de la mer d'Azov et à peu
près aux environs du lac nommé par les Russes Molotschnoî-ozero,
c'est-à-dire (lacus, lacteus, lactearius, lactans, aquae lactarise), lac au
lait ou du lait, qualification qui répond à la dénomination de la blandie
(Klaproth, voyage au Caucase, chap. 5, 1. 1, p. lOâ). Les cartes posté-
rieures, italiennes et autres, du xvi® siècle, et les cartes de Mercator
continuaient à signaler la ville de Comanîa dans cette position et
quelque lois une autre du même nom , que nous allons voir tantôt. Or,
la position de la Komanie blanche est fixée d'une manière possitive, et
elle dirige avec certitude la détermination d'autres lieux.
Cinquante milles de la Komanie blanche il y a une autre Komanie,
ville qui porte le nom de I^^aJI LiUd Komania la noire; on lui
donne ce nom de noir, parce que son territoire montueux et boisé, est
traversé par une rivière dont les eaux, avant d'arriver à la mer, sont
noires comme la fumée. C'est un fait connu et incontestable (p. 400)(94).
Une montagne escarpée sépare la Komanie noire de HjS Kira, qui
n'est éloignée qu'à 25 milles. Mais de Kira à la ville de ^jU^ Khazarîa,
25 milles. La ville Khazaria est considérable , bien arrosée sur le bord
d'une rivière et d'où dérive le nom de Khozars (p. 400).
Je pense qu'on ne réprouvera pas, si nous nous portons avec Khozaria
sur Sarkcl, possession des Khozars, située sur le Don. Ils l'appelaient
Sarkel , ce qui signifiait dans leur idiome, auberge la blanche, demeure
blanche de l'hospitalité : Uapk avroiç rb SapxeA àffTcpov ovntriov. ElIc
était construite entre 830 et 840. Pour la bâtir, à la demande des
Khozars, l'empereur Théophile envoya de Byzant l'architecte Pétrone,
dit Kamateros (le laborieux) (C. porph. de a. imp. 42). Elle était assez
(03) Dans Je tourk chez Nogaï Quaratschaï Qoomouq et le Tourk do Tobolk , pierre à fea est :
Otlouk-atlouk-iitlyq-tascli / ^Lj 4*^3'
(91) La carte de Piprre Vesconte et quelques autres du xyi* siècle doublent le nom de Comania»
ainsi Komania la noire y a sa part. Mais je cherchais en vain quelque vestige de son épitèthed*
noire. Près de Zacharievskaïa deux petites rivières noires , qualifiées de noires Kara-touch et Kara-
tjsch, perdent leurs eaux dans laBerdi, mais sont encore trop rapprochées à Molotscbnaïa.
KOMAMIA, 83. 199
éloignée de Fembouchure du Don, car celle embouchure restaii en
possession dps Alains , qui pouvaient inlercepler les communicalions
desKhozars avec la mer el Temboucbure (id. ibid. cap. II). Les Russes
Tappelèrenl Bialoviéja, lour la blanche. Elle appartenait toujours aux
Khozars. Les Petschenegs ni les Komans ne Tont jamais occupée (os).
Partant de Tembouchure de Rousia (Bospor) à k.^^LS^\ Âskisia,
place forte du pays des Âlaius, on compte 150 milles (Eskoï, Jeskoï, sur
la Eia, leia); d'où on a 20 milles à J'JC^t Askala, ville peu considé-
rable mais bien peuplée du même pays des Âlains, située à peu près de
6 milles de la mer (p. 599).
85. Pour retrouver la position d' Askala , il ne faut que remonter à
peu près 6 milles le Don, six milles de son embouchure dans la mer
Rousia, nous nous engagerons entre ses deux bras, dont un est le fleuve
Don, Taulre s'appelle Oksaî ou Aksaï. Il s'échappe de la droite du Don
à 50 verstes au dessous du confluent de ce fleuve et de Sieviernoï
Donietz (le petit Don septentrional); il coule d'abord au nord puisa
Fouest et finit par se réunir au Don à dix verstes au dessous de Tscher-
kask , à dix verstes au dessus du fort S. Dimitri rostovski. Il y a sur ce
bras à 15 verstes de Tscherkask un gros bourg Oksaïskaï stanilza ou
station d'Oxaï (Klaproth, voyage au Caucase, chap. 5, p. 51). Or, celle
station est 6 milles de la mer d'Azov, parce que du fort S. Dimitri , il y
a encore une douzaine de verstes jusqu'à l'embouchure. C'est Aschka la,
Askala d'Edrisi. Les Allans la possédaient avec l'embouchure du Don à
tout temps, à l'époque des Pielschings ils pouvaient interrompre les com-
municalions entre Sarkel et Kherson, plaçant sur la roule des embus-
cades, surprenant les traversants : xaiô^ous hsSp&ùoiw, xai àfuXxxnoi kùtou
(desKhozars) inn^i/xv^oa 6v Tw SdpXifs'^tx.i Tzphi te tô SapxeA xai toc xX-rj/xarx xolI
T^v yjpyù^oL (C. porp.de a. imp. H). De même les Allans tenaient celte posi-
tion à l'époque des Komans, et le Don, sous le nom de Rousia, traverse
le pays des Allans, dirigeant son cours vers le couchant entre quantité
de villages bien peuplés el entre des cultures : n'était navigable que pour
de petites embarcations : déchargeant ses eaux dans la mer de Rousia
6 milles dessous Askala; ensuite dans celle de Nitasch, a 70 milles vis-
à-vis de Trebizond (VI, 6, p. 599). Ni les Pietschings, ni les Komans ne
possédaient le canton de sa bouche, il était toujours aux Allans.
D' Askala en suivant le littoral 20 milles à &)j^::^l Istiberia, située au
bord de la mer, florissante el peuplée. Ses marchés sont fréquentés,
(OS) Jean Polocki, voyage dans les slèpes d'Astrakhan , I, 47; Rararazin, t. r, 51, 00, V, 135;
Klaproth, tableau de l'Asie p. Vli ; le même dans le nouveau journal asiatique , U, 413; Fraelin,
Magasin ftkr die Littéral, d. Ausl. 1836, N. 7U; Scliafarjik, sUroj. slav. U,i, § 27, p. 494.
200 EDBISl.
ses rues larges, ses maisoos solidement bâties, ses habitants pour la
plupart commerçants et riches (p. 599, 400). Magnifique description,
avec laquelle s'étant engagé dans les sinuosités du Don, nous n'avons pas
d'espérance de se fixer quelque part dans les stèpes planes et désertes.
En suivant le littoral du Don et puis du fleuve Mantisch , nous arrivons
au lac ou à la mer de Manitsch, le Manitasch, qui est aussi le nom de la
mer d'Azof ou Maeotis, Manitasch. Cest sur les bords de cette mer
oblongue que devait se trouver Istiheria, Sliberia, de laquelle une route
conduisant à ^^ I Allania, ville d'où les Allans ont pris leur nom, et
M
tellement ancienne , qu'on ignore le nom de son fondateur ; distante de
Istiberia 2i milles et de Khozaria (Sarkel) 45 milles (p. 400).
Quantité d'orientaux parlent de la ville Allania : cependant leurs
relations ne sufiisent pour déterminer son emplacement. Elle est au
delà du défilé. Le défilé allan ^^tw^b baballan est évidemment le
défilé Dariel , appelé par les Arméniens Tourn Alanats , ou porte des
Alains. Masoudi vers l'an 947, a donné sa description ; Edrisi en 1451,
lacompteau nombre de nombreux défilés; Alboufédaen 1551, le distin-
gue des autres comme le plus grand des passages. La ville Allania devait
donc se trouver au nord, à l'issue du défilé» sur les plaines de Terek.
Les Allans qui s'appelaient eux-mêmes Os, As , ont obtenu le nom des
Allans de la ville Allan, très-ancienne, qui devait être assez connue»
parce que le nom d'AUans est connu dans l'antiquité (96).
Au bout du compte je pense avoir prouvé et suffisamment établi, que
sur la carte itinéraire des géographes de Sicile , tout le littoral de
Nitasch , entre Trebizonde et Matrakha , formant un recoin de la mer,
^c^f^ d'une mer, un lieu (remotus, recessus, dissitus) retiré, relégué
(VI, 6), est tissu de relations mal entendues, mal comprises, et repré-
sente pour la plupart le Manitasch, la mer de Zabach. Les géographes
semblent n'avoir rien pour la portion littorale entre Matrakha et Trebi-
zond , et s'ils en ont eu quelque chose , ils ont tout divisé en îles. Quel-
ques, capes, pointes, presqu'îles , sur leur carte se sont formées en îles
Saranba, Andiseran, Gardia, Azela (97), et la description déroule les
(OG) Edrisi (p. SiO, S30) compte onze défiles fortifies daos le Kaoukase par leurs Doms, maisso *
désordre. La carie ilitiérariu (Y, 6), n'iudiqueque huit babs, et u'a pas inscrit tous les noms. La
ville d'AUan s'; trouve au sud de bab, du défilé.
(<J7) I.a confronlntiou dos noms do ces îles avne les noms connus à difTércntes époques sur ce
parafe, n'ofl'rc de résultats satisfaisants. Sarauba (vis-à-vis de Kborson) répondrait à Coreto du
moyen <tgc, à peu près Auapa; Andiseraix renibuucliure de la rivière l'Audio et la ville continentale;
«i/2 journée Siousa, à Zikkia; vient ensuite Gardia, promontoire Giro, enfin Azela à mi-chemin
du Trebizonde n'a pas de moindre analogie. Un certain temps près de Seuastopol figuraient !<*»
Apsiios. — C^uand à Anhala et la fameuse youneschka, il parait qu'il faut les chercher dans les esux
de Manitasch.
ROMANIA, 84. 201
positions komaoes , khozares et alanes. L'examen de leur description
assure que les komans, possédant de vastes terres cultivées , ne tou-
chaient point à la direction occidentale du Don. Si leurs possessions
étaient avancées jusqu*au Don, c'est plus au nord où ils avaient pour
voisins les Rouss-tourks et les Bartas.
84. Petakhia , dans sa langue hébraïque , appelle les Komans y^p
Kedar. Il a vu ces Kedariens, demeurant sous des tentes dans des plaines
cultivées qui exhalent une odeur agréable. Ils ont la vue perçante et de
beaux yeux, non seulement ils aperçoivent des objets éloignés d'une'
journée de marche, mais encore ils les reconnaissent. Ils sont excellents
archers , au point qu'ils percent de leurs flèches les oiseaux en vol.
Ils ne mangent point du sel ni du pain , mais du riz et du millet
cuits dans du lait, ainsi que du beurre et du fromage. Quant à la viande,
ils la découpent en morceaux, la placent sous leurs selles, puis font
galoper leurs chevaux jusqu'à les mettre en sueur, et, ainsi échauffée ,
ils la mangent avidemment. Ils laissent aux femmes déplorer jour et
nuit leurs mères et leurs pères morts, et elles continuent ces honneurs
funèbres jusqu'à ce que quelqu'un des fils ou des filles ou des proches
parents soit atteint de la mort. Ceux qui restent, pleurent ceux qui les
premiers sont sortis de la vie. Les mères enseignent des élégies à leurs
filles et la nuit elles gémissent et se lamentent. Les chiens y mêlent
leurs aboiements et leurs hurlements. Les Kedariens n'ont pas des rois
mais des princes et des familles nobles.
Ils n'ont point des navires : ils cousent ensemble une dizaine de peaux
de cheval étendus et passent une corde tout autour du bord. Ils se
placent au milieu avec leurs chariots et leurs effets, attachant la corde
à la queue (de peaux) de plusieurs chevaux et traversent ainsi le fleuve
(Dniepr).
On ne peut voyager dans ce pays , qu'à la suite d'un guide. Et voici
comment le Kedarien se lie par serment : il se pique le doigt avec une
aiguille, et donne son sang à sucer à celui qu'il doit conduire, pensant
ainsi introduire en quelque sorte son sang et sa chaire dans le corps
de l'étranger. Ils ont encore une autre manière de se lier par serment :
on remplit de lait un vase d'airain, en forme de figure humaine, le
guide et le voyageur y boivent ensemble et jamais ils ne violent la foi
ainsi jurée. Dans le pays de Kedar, Petakhia n'a pas trouvé de véri-
tables juifs, seulement des hérétiques qui n'avaient jamais entendu dire
ce que c'est que le talmoud (98).
(98) Les juifs, ou plutôt mosaïsaDS saus talmoud, sont tes Karaïtcs, qui se servcut jusqu'aujour-
d'hui de la langue tourk-komane.
202 EDRISI.
Petâkhja traversa le pays de Kedar dans toute sa largeur en seize
jours (y comptant le repos, ainsi qu'il restait dans le pays 16 jours). Â
une journée de marche (du passage du Dniepr) dans le pays de Kedar,
la mer s'avance dans les terres (c'est la mer Zabach , Azov ou Rousia),
et sépare ce pays de la Khazarie. Il y a (sur la route traversée, côtoyant
celte mer), d'un côté une mer (un lac) qui répand au loin une odeur
fétide (Gniîoïe more), et de l'autre côté il y a une seconde qui n'a
point d'exhalaison méphitique. Ces deux mers (lacs) sont à la distance
^ d'une journée de marche. Si quelqu'un essaye de traverser la mer
putride, il meurt sur-le-champ et beaucoup sont même frappés de
mort, quand le vent souffle seulement de cette mer vers l'autre. C'est
pourquoi l'on ne hasarde aucune traversée sur celle-ci , que lorsque le
vent souffle du côté opposé à la première. Pour traverser le pays (du
passage du Dniepr, jusqu'à l'extrémité qui touche la Khazarie) Petakhia
employa 8 jours. A l'extrémité de la Khazarie coulent dîx-sept'rivières,
qui finissent par se réunir en une seule (c'est le Don ou Rousia qui se
forme de six fleuves au dire d'Edrisi). C'est ici que se rassemblent tous
ceux qui veulent partir sur des vaisseaux pour les régions lointaines.
De la x^'ii'îD Khozaria, Petakhia se rendit dans le pays de Thogarma
(Géorgie) (Petakh. Tour du monde, publié par Carmoly, p. 8-15).
85. A peu près cent ans plus tard , après la destruction de la horde
Komane par les Mongoux, en 1245, parcourant ces stèpes,les deux
franciscains Jean Piano di Carpini, Italien, et Benoît, Polonais, cd
qualité d'ambassadeur à la grande horde de la part du pape , et bientôt
en 1255, le Flamand Guillaume Ruysbroeck, comme ambassadeur du
roi de France, ont vu les restes des Komans, et en font mention.
Ru ysbroeck, frappé de la quantité de monuments tumulaires disséminés
sur une immense étendue du pays, construits à difl'érentes époques,
par différentes hordes, s'imagina qu'ils étaient tous élevés par des
Komans. Cependant il a vu l'enterrement d'un mort, sur la tombe
duquel les Komans suspendirent seize peaux de chevaux, par quatre de
chaque côté des quatre points cardinaux, et ils placèrent sur cette tombe
leur boisson et leur viande. Il apprit qu'un Koman malade s'enfermait
avec son serviteur dans sa lente et ne laissait y entrer personne. Plus
riches , ils s'entouraient de gardes , pour empêcher à qui que ce soit de
se rapprocher à la demeure, parce qu'on craignait, qa'on n'apporte
l'esprit malin ou un mauvais vent, qui nuirait au malade. Ils qualifient
de prêtre leurs enchanteurs (Ruysb. édit. Francisci Michel et Thoma
Wright , de la société géogr. de Paris, 4839 , p. 257. 258).
Edrisi , au nombre des hordes de l'intérieur de l'Asie , nomme
KOMANIA, 88. 205
celle de -:.L1â^ Khafschakh (VI, 9, p. 44 G). Personne ne présume-
merail de corrélation de ce nom avec les Komans, s*il n*était devenu
depuis d'une grande renommée. RuysBroeck sait, qu'on a de Comani
qui dicuntur Caplhac (p. 245) et que tout le pays inhabilabatur a Com-
manis Capthac eietiam ultra a Tanaïs usqueEliliam (p. 246); habitabant
Commani Capchac » aniequam Tarlari occuparenl eas (p. 255). Les
orientaux parlent beaucoup à cette époque de »3*L«-:^ Kabtschak,
Kiblschak (Aboul el Faragi, hist. comp. dynast. orient, p. 97, 577, 578,
465, 467; Abu Arabellah, hist. de Tamerl. p. 76, 77, 80-84), et le pays
obtint la dénomination de decht kiptscliak , ou stèpes de Kaptschak
(Aboulaghazi bahadourcan, hist. généal. des Tatars, p. 41, 85-89). D'où
on a conclu que les Komans portaient le nom de Kaptschak.
Les Petschenegs, appelés par les byzantins Patzinatzi Kangar, et par
les orientaux Badjinak Kangli, parlaient la même langue que les
Komans itpàaeiai ^oiAxvotç éii ofxoyyoxToiç (Anna Komn.alexias Vin,p.252).
C'étaient donc deux hordes de la même souche. Kanghar ou Kangli,
venant vers 894 du fond de l'Asie, des rives de laïÊ, et entrant en
Europe, prirent le nom de Pelzings (Const. porphyr. de adm. imp. il).
Leur noyau resta dans leur patrie primitive , au delà de laïk , incipil
terra Kangilarum (Piano Carpioi Viïl, 1, § 15, p. 749; Bened. Polon.
5, p. 277) el leur parenté avec les Komans était avérée : quidam
Comani qui dicuntur Cangle ; Cangle quœdam parentcla Commanorum
(Ruysbr. p. 265, 274) (99).
(99) L'idiome koman-tourk , peut ôtrc coddu sufiisamraeut, parce qu'on a de lai un monument
littéraire, parce qu'il répandit sa semence, tX il est probable qu'il n'est pas tout à fait éteint. Du
temps de l'indépendance des Komans, les Italiens l'étudiaient, l'intérêt du commerce demandait sa
connaissance. On connaît les éléments de cet idiome et un petit vocabulaire composé de plus
de 2500 mots, arrange sans doute à l'usage des marchands „le choix des mots du Yocabolaire y est à
leur avantage), réiligés en iSOS. Ces éléments et vocabulaire Turent la propriété de PetrarcUa,leqiieI,
à sa mort, i37i, en lit don à la république de Venise. En iSi-i le bibliothécaire Salvi communiqua
leur copie à Klaproth , lequel les publia en i828 (mémoires relatifs à l'Asie, t. UI , p. i2i-2S6). l\
examina soigneusement le vocabulaire, indiquant l'analogie des mots avec les autres dialectes tourks.
Un nombre considérable sont retrouvés dans les dialectes sil ériens : mais on nombre plus considérable
se retrouve dans le dialecte constautinopolitain. Cette singulière coïncidence s'explique. Forcés de
le«rt camps par les Uongoux» multitude innombrable de Komans se retira dans la Gazarie et se
dispersa aux environs de la mer Noire. Une portion se retira en Hongrie oii , établie , elle renonça à
son idiome. La masse de la population séjournant dans la Bulgarie et la Romanie, rencontra les
Tourks-ottomans et influença la formation du dialecte qui est devenu dialecte de la capitale, dès que
les Ottomans se sont emparés de Goustantinople. L'influence de l'idiome koman se décèle dans les
langues d'autres souches. Les dialectes slaves , russicn , polonais, ont pris du koroau : touman ,
tourbillon de poussière; kart, noir ;maclaf, pleine; ftatofran (faucon) ficr-à-bras ; 6aifa, hache de
guerre etc., (réciproquement le koman du slave : ii^a, chambre, konon, légal, etc., de l'italien etc.).
EnGn on peut présumer que les mozaïsans karaïtes venus de la Komanie, parlent jusqu'aujourd'hui
le koman. — J'essayais de chercher dans le vocabulaire l'explication des noms rapportés dans la
description d'Edrisi. Ce «vocabulaire, sobre en n, m, n'offrit de grandet chances à mes perquisitions.
l\ serait trop fort de proposer un changement de la lecture à cet effet, de lire lulieu de Narotis
904 EDRISI.
Les noms de Knngl et Kiptschah sont connus jusqu*aujourd'iiiii
parmi les hordes Nogaï, pour les distinguer (Klaprolh , voyage du
Caucase, 5, p. iOO).
Depuis que les Mongoux étendirent Tappellation des Kiplschaks qui
leur étaient voisins sur un immense pays, les Komans devinrent
Kaptschaks , bien qu'avant personne ne les connaissait sous ce nom et
eux-mêmes ne se le donnaient point, étant seulement de la même
souche avec les hordes de Kafschah et de Kangli, dont une partie donna
Torigineaux Pietschings. Les possessions des Komans et de leur nom,
quand ils étaient indépendants en Europe, s'étendaient au levant
jusqu'au Don et Volga atteignant du couchant aux Russes. Après leur
chute leur nom s'étendit immensément, fut imposé (par les commen-
çants de l'Europe) à différentes autres hordes apparentées et disséminées
sur la surface des slèpes Kaptschak. Jean Piano de Garpini et le frère
Benoit Polonais, voyaient partout les Komans, jusqu'à laïk, et ils
appellent Gomania , tout le pays depuis Gazarie jusqu'à laïk (Garpini
hist. Mongol, p. 7t7-749: Benoît Polon. 4, 5, p. 776, 777) (lOo).
^ A ^!j larous, au mojCD de quoi ce doid donnerait . a * • L> laroak , Irig , lumière. Je irow*
Cun %S jour; cun tusin, orient, Kan y[3 sang, peut-être d'un de cet mots \ieni a^JU9
KinieT. Je trouve Chirac (Kirak) ^ O chaux, peut-être elle a créé le nom de 9kO Un. Je
trouve karisurmcn Je défends, karis (/ r»i^) défendez, c'est l'origine peut-être de 9 y>3 Kira
^^ « it 'f"., „»
comme fortifié.— Tolamac, sanctifié, est peut-être ^ •JUbP Uatlouka, autre nom de A^i) L^ f ^ ^
àkkomania de la Komanie blanche. — Pourrait-on jamais de (jJL>v„.^Julw) scninbila , teeum, et
de monincfaibi (monin kibi] taiw, extraire les noms de SinoboH et de Mounischka (meaia, meut,
manegi, Utius). Avec plus de succès nous traversons bcspor Bourlik (bui^il, torque, bai^l vade) où
dominaitOlu abas {yji oulou. magnus) le grand Abas, parce qu'au delà , quand nous séparons U
qualification komane de sarr ^^.«v ville, des prétendues îles, nous nous trouvonscoafirmé dans notre
emplacement de SarAnba sur le point d'Anapa, et de Andi sera, Audi ville sur la rivière de TAndio.
(100) De la narration de Benoît polonais, on ne connaît que le texte du code colbcrtin n* t4T7 «de
la bibliot. de Pari». U n'y avait rien à corriger on l'éditant : tout y est supportable , style et orthogra-
phe. Le savant éditeur d'Avezac s'est donné trop de peine en entreprenant de le rectifier. Une de
ses rectifications est la conséquence d'une méprise. La narration de Benoît avait : à Baii principe,
post duas hehdomadas, ingrcssi sunt Comaniam (cap. 4, p. 76). L'éditeur y trouve qdo erreur ei
corrige : egresn sunt de Comania. Cependant Benoit continue à chevaucher par la Comanie jnsqn'à
laïk, cap. 6, p. 477). Il faut donc absolument restituer : ingressi sunt Comaniam (interiorem, nlte-
riorem). D'Avezac, dans sa savante et profonde notice sur les anciens voyages, admirable sous tous
les rapports, dit p. 481 : les trois missionnaires, conduits aux frais de Boleslav, arrivèrent ^suite à
Cracovie chez Conrad duc de Lenczy. et (p. 488), il désaprouve avec raison l'assertion de Matbtas de
Micchov, qui substitua Boleslav le pudique à Conrad contre le témoignage du voyageur. Cependant
notre judicieux savant ne s'est pas tiré de ce point obscur quand il dit (p. 48t) : qu'il en résulte ,
que Conrad et son fils Losko étaient alors à Cracovie avec la duchesse Grimislava. Conrad n'avait
aucun fils du uom de Lesko. Si la vieille Grimislava était encore en vie, il yavait trois duchesses qui
pouvaient porter le litre de duchesse de Krakovie, la mère Grimislava, puis la belle fille Kunigoade,
femme de Boleslav le pudique, et Agasie, femme do Conrad, qui était en possession de Krakovie.
Sous le rapport de ce personnage le point est obscur. Si l'on admet, suivant le dire de Mathias de
Miechov, que Grimislava se trouvait alors à Krakovie, le fils de Conrad serait Kazimir ou Ziemovtt.
depuis duc de llazovie.
BARTAS, 8C. S05
B ▲ R T 4S.
86. Suivant les contes sur les guerres d*Âlexandr6-le-grand , relatés
et répétés par losef Gorionide, le roi de Macédoine soumit les susmen-
tionnés Bartas. Après la conquête de N'>02X Absia , il alla contre
nx^k2l3 Bartiah et la conquit. Après, ayant renversé Olynth, il alla
dans les terres de Kanaan (des Slaves) et il les a soumi. Il alla dans la
terre ]'>^ikq Meotin (près de TemlMnchure du Don) et l'occupa . Dans
celte terre, la faim fit des ravages parmi les Macédoniens ; grande
quantité moururent, ils dévoraient leurs chevaux, et les cavaliers,
privés de leurs montures , murmoraiem hautement. D*ici il se portait
de pays en pays jusqu'à la terre de QVp'^':) LoukioUm (Lucanie), d*où
iJ passa à Akrakantus en Sicile (losip ben Gorion, cap. 9, p. G4). C'est
l'expédition septentrionale d'Alexandre.
Le nom de Bartiah , Bourtas , Bartas, (Partes) , n'était pas ignoré des
écrivains arabes, avait même une certaine célébrité. Istakhri, Ibn
Haoukal, Masoudi, Edirsi, s'empressent de l'inscrire ; il est connu dans
les fastes de Russie. Istakhri indique leur position géographique. Ils
habitent , dit-il , dispersés dans des maisons de bois et forment deux
hordes, dont l'une habite sur les frontières de Goz; elle ne compte que
âOOO âmes et personne ne peut les dompter; ils relèvent des Boulgars.
L'autre, assise sur les plaines d'Ithil, voisine des Khozars, touche aux
Badjinaks qui sont voisins des Romains. Leur langue ressemble à celle
des Boulgars et des Khozars; ils sont mahommédan&(versio Mordtmann,
p. 105 , 106). Le fleuve Atel, rapproché au pays des Rouss , tourne vers
l'est, et, sorti du pays des Boulgars, traverse les Bertas, et son embou-
chure principale est dans le pays des Khozars. De l'embouchure aux
Bertas, il y a 20 journées; de ce point les Bertas l'occupent dans
l'espace de 15 journées. De l'embouchure d'Atel on compte un mois
jusqu'aux Badjinaks (de la mer noire) et des frontières des Bertas aux
mêmes Badjinaks 20 stations (Istakhr. p. 101, 106, 107). Ibn Haoukal
répète cette relation d'islakhri n'y ajoutant rien de nouveau (ap. Garm.
revue orientale, t. III, p. 260, 262; itinér. de la terre sainte p. 18, 20).
Masoudi connaît une rivière Bourtas , qui se jette dans le fleuve des
Khozars (dans Ithil), par laquelle les barques des Boulgars et des
Khozars descendent et remontent sans cesse. (C'est un bras du Volga).
Les populations tourks y sont fixées. Les Bourtas sont un peuple tourk
qui demeure sur les bords de cette rivière , à laquelle il a donné son
nom (ap. Carmoly, revue orient, p. 266, itinér. de la ter«s. p. 28). Dans
Tannée 921 lesRouss-Yarègs, après leur défaite aux environs de la
Caspienne, subirent un nouveau désastre en passant le pays des Bourtas.
206 EDBISI.
Edrisi (VI, 6, p. 403), quant aux distances, reproduit exactement ce
qu'Ibn Haoukal répétait autre fois. Les 20 et les 15 journées par IthzL
ne sont pas reprochabies : mais un mois et 20 stations pour atteindre
les Badjinaks , sont dirigés par Edrisi dans un pays perdu : il n'y avait
plus de Badjinaks sur la mer noire, ils furent remplacés par les Komans:
cependant Edrisi par cette répétition copiste , commune aux écrivains
arabes , déclare les Badjinaks voisins des RoUss même au vu*" climat
(p. 457). Si donc on voulait détourner ces distances d'un mois et de 20
stations vers les Badjinaks de Test, Badjinaks intérieurs , il faudrait les
refaire , les régler sur une autre proportion. — Mais à la suite de sa
répétition, Edrisi ajoute que les villes des /^LL>p Bartas, sont au
nombre de deux ^jl^ t^Usy Bartas et Sa van, et qu'ils parlent une
langue qui diffère de celle des Kbozars et des Rouss (VI , 6, p. 404).
Sa carte itinéraire (VI , 6) place ces deux villes également le long
d'Ithil; or, toutes les deux sont de la horde occidentale assise sur Ithil;
de l'autre aussi inexpugnable suivant Istakhri, assise sur les frontières
de Goz, il n'y a plus de question. En effet, Edrisi remarque que les
Rouss (slaves) qui habitent dans le voisinage de la Hongrie, subjuguèrent
les Rouss (tourk), les Bartas, les Bulgars et les Khozars, les ont chassés
de leurs pays, se sont emparés de leurs possessions, en sorte qu'aux
yeux des autres peuples il ne reste d'eux sur la terre absolument rien
que leur nom.
En effet, ces noms continuent à figurer dans les répétitions, et,
dépaysés qu'ils furent par les conquêtes russes, ils figurent décelant
l'existence des hordes après leur défaite. Même les Bourtas ne dispa-
rurent sitôt, et sont comptés au nombre des peuples conquis par les
Mongoux : Brutachi qui sunt judœi (Piano Carpini, VII, 3). Bakoui (en
4415), ne les a point oublié dans sa^compilation : tÀ^j> Barkas (lisez
^li? j du pays des Khozars le long du fleuve Athel; ses habitants sont
musulmans, ont une langue qui diffère des autres. Il y a chez eux de
beaux renards, des ouabr rouges (VI, 7) (loo).
(401) Ensoite il aoiiote le pays ^jJ'Lsr^^jb Bahbak (lisez s^> Liarf Badjinak), race
de Tourks qui demeurent près du pays des Seklabs. Ces peuples outune longue barbe, ne payent
de tribut à personne et vivent avec leurs femmes comme des animaux (VI, 8). Ensuite se rengent
. cher lui à la long. 6S» O', et à la latit. 42» 0' le pays de Bodja qui sont T«urk du vi« climat (VI, 9), et il
faut les retrouver en Afrique comme les long, et latit. l'indiquent. — Paul Savelev (dans sa topogra-
phie des fouilles de la monnaie arabe en Russie, p. 61 66), motivé par plusieurs localités qui portent
le nom de Burtas entre Kazari, Volga et la rivière Mokscha, et remarquant que les arabes ignoraient
ies Moksckans sous leur propre nom, veut conclure que les Bartas sont les Mokschans. Il est
probable que les localités Burtas sont des réminiscences du séjour des Bartas à Toucst du Volga.
Istakhri autorisa de le croire, car il indique les possessions des Bartas assez étendues , mais il les
iiejid aussi à l'ast du fleuve jusqu'aux Gozs : at le principal siège de Bartas était sur Volga entre les
COMMERCE, ÉTAT SOCIAL, 87. SOT
En effet , ces petites hordes de Bartas avaient quelque retentissement
qui perçait à travers les Komans, Polovtzi, et motivait peut-être
plusieurs écrivains latins de donner aux Polovtzi le nom de Partes.
Ce retentissement était plus remarquable en orient, et c*est à cause
des peaux de renards noirs et rouges, qui, sortant des pays des Bartas,
portaient Tappellation de bourtasiah , bourtasit. Les rouges n'étaient
pas d'une grande valeur, mais les noirs étaient préférés aux hermelines,
aux zibelines, et à toute sorte de fourrure. On les payait énormément :
recherchés par les émirs arabes et persans , afin de couvrir Thabil-
lemenl, les bonnets, les robes, ainsi qu'il est difficile de voir un émir
qui n'aurait d'habillement doublé de renard bourtasien. (Masoudi , ap.
Carmoly, ilinér. de la terre sainte, p. 28).
Commerce, État social.
87. Examinant les relations d'Edrisi, dans le but de déterminer les|
itinéraires, les emplacements des localités, les limites des pays, nous
avons rencontré à chaque pas des notices sur le commerce. Ces relations
venaient en effet de commerçants, de marchands qui observaient
spécialement les objets de leur vocation. Certes, nous ne pouvons pas
espérer d'y trouver l'énumération de toutes les marchandises , mais ce
qu'on annota de leurs narrations peut former l'idée de l'état com-
mercial de différents pays et des changements dans le négoce, qui
décidaient de la prospérité et de l'existence des états. Nos consi-
dérations sur Edrisi se bornaient aux vi*' et vu* climats; aussi
l'examen du commerce s'attache presque exclusivement à la Russie et
à la Pologne.
Chaque pays avait son industrie, car si les étoffes demandaient des
fabricants, les fourrures ne pouvaient entrer dans le commerce sans une
préparation industrielle. La première est supérieure et par excellence.
Nous pensons que nous ne tombons pas dans l'erreur, quand nous
avançons qu'elle doit être spécialement réservée à l'empire byzantin,
le seul pays dont les produits de l'industrie et des arts se répandaient
très-loin de tous côtés. Les latins fournissaient des objets plus communs,
à l'usage plus ordinaire, et ces objets ne se répandaient pas autant,
pas aussi loin. Les fruits de la terre étaient consommés sur le lieu, ou
Khoxars et les Boulgars. Les Mokschans étaient-ils là et au delà du fleuve ? — Peut-être les arabes
u'ignoraient pas le nom de Mokscha; on pourrait le retrouver dans leur Maschaqa. Au reste, les
Bartas firent détruits comme les autres hordes. — Klaproth (tableau du Caucase, p. 92, et Asia
polyglotta , p. 1S6), distingue les Brutacbi do Piano Carpini, présumant que c'est une peuplade du
Kaukase.
208 BDRI8I.
dans le voisinage , car bien que tout le pays du nord n'était pas
surcharge de population, les pays les plus peuplés avaient en abondance
de quoi vivre chez eux. Les métiers seulement avaient Tavantage de
fournir aux peuples plus éloignés , les vêtements , riiabillement et
quelques commodités plus communes. L'industrie de Torient avait pour
elle un terrain spacieux en Asie même , cependant ses produits péné-
traient vers Toccident et se mêlaient aux byzantins. Le trafic local et
limitrophe consistait en céréales, bétail, commestibles , vêtements,
ustensiles, vases, esclaves (ios). Et le grand commerce, le négoce
étendu, était du luxe, ses marchandises consistaient en objets précieux,
de haute valeur.
Ce luxe siégeait dans les églises, dans les cours, et celles des rois de
Pologne, des deux Boleslav et de Miecislav II, surpassaient toutes les
autres : incredibile, ineffabile. Il y a peu , la Pologne lavée de l'eau
baptismale, encombra les sanctuaires de richesses, comme on peut le
voir par le fameux pillage de Gnezne par les Bohèmes. Les cloches de
bronze, croix, tables coulées d'or et d'argent, les apparats (Cosm. sub. a
4034, edit. Menken, t. II, p. 2017). Ces objets de luxe des églises
étaient pour la plupart fondus et fabriqués en Pologne. Lorsque, en
1085, Yladislav Herman envoyait sa pieuse missive à S. Gilles eu
Provence, il fit battre un calice d'or, et fit fondre une statue de l'enfant
en or; il y ajouta les apparats de l'église d'or et d'argent (brodés) : nec
mora puerilis ymago, cum calice de auro purissimo fabricalur, aurum
argentum, pallia, sacrœ vestes prœperaiur (Gallus, I, 50); admodum
pueri imaginem fabricata (id. ibid.).
La pénitence de Boleslav III bouche-torse (1117-1120), enrichit
l'église de S. Adelbert à Gnezne. Il décora l'église et ses autels ; il fit
fabriquer une chasse pour les reliques, pour le chef du saint, dont les
perles etles pierres précieuses n'étaient de moindre valeur quel'or pur
de 80 marcs : per ecclesiam et in allaribus ornamenta prœsentavil . . . ,
in illo ferelro auri parissimi 80 marcœ continenlur, exceplis perlis.
gemmisque prœciosis, quœ minoris quam aurum prœcii non videnlur
(Gai. III, 25). L'église fut décorée par une porte de bronze représentant
dans 18 tableaux l'histoire du saint, encadrés dans des châssis d'une
(iOa) 'AyopàÇouai ef aÙTtSv ^ôkç xai Innouçy xat itpàëxraf les KiioTîiens de Pet-
ïMielis (Const. porpb. de adm. imp. 2); de même auprès des Romans. Les Kbozars achetaient des
Russes, lenniel et la cire ;Ibn Ilaoukal). Le sel entrait en Pologne de Halitscli : conrerimns eliam
eidem claustre, singulis annis, tredecim planstratas salis integraliter sicut de Rnssia ducuntnr, de
teloneo in Sandomiria recipiendas (donation de H76, 10 août à Soulciov par Kazimir le juste ëdil4
en 1845, à Varsovie, n' iv, p. 42). Les environs de Krakov avaient leur sel (dipl. (HOS) UtO, io
iinecia Szczygielscii i bulla 1I3C, in dipl. mag. pol. Raczynscii). — Sur l'achat des esclaves nous
••ut«xpliqiiotts ailUurs : ta traite était inconnue, le nord n'était pat k tel point de ciTilisation.
COMMBllCE, ETAT SOCUL, 88. 109
rîehe composition. Les deux battants longs de 9 */t pieds de Paris, sont
ehaque d'une seule fonte (ios).
Il est probable que pour confectionner de semblables objets, on fesait
venir mainte fois des artisans étrangers, surtout allemands, car TÂlle-
roagne à cette époque était renommée pour ses fonderies; le produit des
fonderies allemandes allaient en Italie (104). Ces fonderies exécutaient
des ouvrages gigantesques: cloches, statues, portes d*églises. Mais pour
la fabrication des battants de Gnèzne, les artistes allemands pour sûr n*y
coopéraient guère : car la Pologne avait en même temps une porte de
leur ouvrage, dans le style et le goût byzantino-allemand, généralement
pratiqué enAUemagne, et les battantsde Gnèzne soutd'un tout aulrcgenre.
Alexandre, évéque de Plotzk (vers il 54), fit venir les fondeurs Riquin
et Waïsmulh de Magdebourg, qui lui fabriquèrent une porte de bronze
en 24 tableaux de Tbistoire du Christ , encadrés sur deux battants de
bois (ios). En même temps Otto, évéque deBamberg, connaisseur de
Part de son pays, détruisit (en 1124 et 1125) les idoles des Pomoraniens
sculptoria arte ineredilnli pulcritudine celata,
88. A côté du luxe et de Topulence siège ordinairement , sinon la
misère au moins la pauvreté. En Pologne, à cette époque , agricole ,
«ans industrie, il n*y avait pas de misère, d'indigence, mais la pauvreté,
la modicité; une fortune médiocre mais suffisante, raillait le luxe
opulent qu'on qualifiait de richesse.
Les marchands et les voyageurs qui connaissaient différentes parties
du monde, furent d'accord que la Pologne est un pays de lait et de miel;
ils y virent les rues des villes formées par des maisons contigues; les
terres cultivées , des jardins , des arbres fruitiers : la nourriture des
liabitants ne demandait rien de l'étranger. Cependant les poissons
étrangers arrivaient de différents pays : maritima divitia, opes
equoreas des Pomoraniens ; l'huile de poisson des Komans , poisson de
Tolga de la Khozarie (ioe). Sans doute on aimait à assaisonner les plats
âvec des épices : poivre xcp^ov'^cdVTov/xcaôdv... Tcencpcvxai irc/^a (Const.
(lOT) Voyez la figare et la description dans mon ouvrage polonak: la Pologne dn moyen âge,
t. IV, p. t96-Sâ9, publié à Poscn 1851.
(4<I4}/Quidquid in auri argeoti cupri et Terri, lignoroni. lapiduniTe snbtilitate solers laudet Ger-
mania, dit le moine Theopbil. — 0 Germania gloriosi ! tu vasa et aarichako ad nos subinde miltis ,
chante un des anciens poètes Fiorillo, Gescb. der zeichnende Kiinste in Deutscbland, H, p. 81).
(405) La figure et la description de cette porte étaient publiées par Frcdcrik Adelung : die korsu-
niacbe Thttren in Kathedralkirche lur heil. Sopbien in Novgorod, Berlin, 18*5, in-A*. — Celte port
était donnée comme cadeau ii la sointe Sopbic par un duc de litTanie , et transportée à Novogrod
Y«rt 4500. Voyez dans ma Pologne du moyen âge , t. IV, p. 969 295.
(405) Noineschka d'Edrisi, VI, 5, p. 404, 405.
UI. i*
SfO EDEI81.
•
porp. de adm. iinp. 6), gingembre, oranges, (conf. Edrisi VI, 6, p. 405).
Le vin nécesaire à la célébration des messes. SulTant toutes les appa-
rences, on était pins porté à Taprovisionnement d'une excellente boisson,
qu'à Tamélioration de la cuisine, parce qu'on voit de bonne beure on
échanson parmi les dignitaires de la couronne, et la fonction du dignitaire
de la table ne s'étendait guère à la cuisine, seulement à la couverture
de table. (Le dignitaire de la cuisine ne parut qu'au xv* siècle). En
effet, quand la boisson dans les festins coulait en abondance, les
couvertures des tables brillaient de luxe et de magnificence.
Lorsque Gallus,un des chapelains de la cour de Boleslav III, rappelle
que du temps de Bolcslav-le-grand vasa et supeUeclUiay nullaligma
habebalur (I, G, p. 41), il est évident que de son temps la table ro^rale
était chargée de vases et d'ustensiles de bois, et ceux du temps de
Bolcslav-le-grand , n'étaient que d'or ou d'argent, de métal ou de
corne (ici). Boleslav III, célébrant huit jours le festin de sa noce, distri-
buait seulement ceux qui étaient en or ou enargent(GaU.II,23,p.l8i).
La couverture de la table exigeait différentes marchandises qui dé-
ployaient un luxe recherché pour éblouir la vue ; demandait des tapis et
des tissus(t08).De même les sièges, les planchers, les murs, rentrée, le
vestibule et la cour brillaient de toutes sortes de couleurs, d*or et d'ar-
gent (109). Les chevaux harnachés, rayonnaient d'or et d'argent (iio),
et le cavalier ne négligeait point sa propre personne; les rangs des
guerriers éblouissaient par la couleur de différents régiments (lii).
Du temps de Boleslav-le-grand, personne n'osait se présenterai
cour habillé simplement eu toile de lin ou de laine; personne n'y
allait dans sa simple pelisse : chacun était surchargé d'habillement;
la pelisse ou la fourrure avaient de précieuses couvertures, brodées
en or (tis). Les hommes, chargés de la chaîné d'or sur le cou, mar-
chaient dans les habits royaux , car le roi distribuait diaque jour des *
(407) Cet Ttses étaient : crpha , cappae, lances, scultells, cornaa mensae.
(408) Callut (I, 6} fit une apëcification de pallia extensa , nappes ; cortinae « porte as«iett«i ; tapéda^B m
et slrata, courte-poinlet et hou«a«« ; mantilia «t mannteria, serviettes et essnie»iiUHnt.
(iOd) Baldekioi de samnitis, divcrsisqne praeclosis sericis oroamentis, coname on a dëoftrë près d».^E3
Gnèzne le ebemin du pèlerinage nu-pieds de l'empereur Otto UI, (miracula scti Adalb. cap. 9, édii^ .^m
Pertx , t. IV, p. 61 S). Les étoffes de Bagdad , Baldak, et de soie. — Bolealav II, tributa ia tapeC^Bi
strata prospectabat (Gall. I , fc, p. 40S;. Les rois tenaient leurs coaseils , donnaient Ica avdieneai^^^si
devant leur maison sous des tentes.
(i,10) Frementium equorum auro et argento futgentia frena (Joh. canap. vita seli Adalb. «••p- 7
edit. Pertz, t. Iv, p. 886).
(441) Acies, divcrsitas induraeutorum discolor yariavit (Gall. 1, 6, p. 30).
(442) Milites et Teminae curiales, pro lineis vestibus et laneis utebantur.... née pelles tiae pallia» «|
aurifrisio portabatur (Gall. I, 6, p. 89). Pallium, n'est pas un menteau mais une espèce d'é
pallia Tont partie des apparats de l'église ; les pelisses , pelles palUls coopert»; pallia loat
sur les tables, pallia exiensa; pallia répondent aux liueis tt laneii Testibvf.
COMMERCE, ÉTAT SOCIAL, 88. 21 (
soubes et des zoupans (iis). Les dames de la cour, eouronnéès d'or,
ayant à leur cou des colliers et des boucles enfilés; des bracelets à
leàrs bras ; vêtues de robes brodées en or, décorées d'agraphes , de bou-
tons, de pierres précieuses, se trouvaient à tel point surchargées qu'on
les soutenait, pour qu'elles puissent se tenir debout (114). On ne peut
pas considérer cette relation pour une trop forte exagération , pour ce
Siècle d'or. L'ecclésiastique près de l'autel, se tournait avec peine,
accablé de la pesanteur de l'apparat; le guerrier se remuait lourdement
sous son armure et sous sa chaîne; les dames se courbaient sous le poids
des pierreries et des métaux qui décoraient leurs membres et leur
coiffure. Luxe effréné, incroyable et ineffable pour les autres cours.
La reine Rixa (en 1036) fuyait de Pologne, ennuyée et dégoûtée de
l'intolérable faste de la cour et de la barbare étiquette des Slaves (11s).
Ce luxe, avec le temps, déchut de sa hauteur. Le chapelain de la cour
de Boleslav IIl voyait comme milites et fcBminœ ctiriales lineis veslibus
'vel laneis utebantur et pelles (1 , 6, p. 59); il a vu comme le roi, aux fes-
tins de huit jo«irs de sa noce , distribuait de son vestiaire , à la manière
antique, les zoupans et les soubes couverts de soierie et décorés de
])roderies en or : renoues et pelles palliis coopertas et aurifrisiis delim»
éatas (n»23, p. 181). Ce luxe déclina à la cour, non pas qu'il y eut moins
^e matières dans la circulation pour le satisfaire, mais parce qu'il n'y
ayait plus de ressources à disposer de ce qui se divisait et se dispersait
parmi les hommes qui avaient leurs jardins et leurs châteaux; il perdit
son éclat, parce qu'au lieu de décorer et couvrir la grossièreté d'une
toile ou d'une pelisse, il entra dans leur confection et améliora celle-ei
en loi donnant un certain lustre. Il y avait encore d'autres circonstances
qui changaient la nature du luxe, que nous voulons exposer.
. Les métiers de Pologne ne pouvaient point fournir tout ce que deman-*
dait ce luxe. Il fallait acheter chez d'autres à l'étranger, et payer argent
(143) Tordues fuvefe inmensi ponderis (GtU. 1,43, 40, p. 6é, 83); indumeutis regalibus ad«rnat
(id. I, 18, p 70); qui Testes (zoupany) mutabatis cottidio (I. 46, p. 83) : cenxde la Yeillf étaient pro-
)MB^em«nt roportés dans le vestiaire.
(414) Mnlieres Terocariales coronibus aureis, monilibus, marenolis, bracbialibus , aurifrisiis et
gfinaûs Ua opust» precedebant, quod, ai sustentarentur ab aliis, pondus metalli sustinere nou vale-
Ikgg^l (Cî^l. I, 48, p. 6i, $K). Vof matronse, que coronas gestabatis anreas et quae vestes habebatis
totas aarifiriseay (I, 49, p. 83). — A voir Tbabilleraent moins clinquant de la dame Strjezislava,
modeste mère de saint Adalbert, eouchce sur sa chaise-longue dans un compartiment de la porte do
Végliae à Gnèzne. — Il y a peu de temps, en ABU, on a trouvé dans la grande Pologne près d'Obrjitzko,
quantité de boutons, d'agrapbes, d'annelets, de boucles et4'autres pendants, d'un ouvrage très-fin ,
enfouis vers 980, dont on voil les figures dans la description de Jules Friediander : Fund von
Obrzitzko, Beilin, 4844, in-4*. On retrouvait déjà de semblables en Poméranie. C'est probablement
ronvragebyaanttn, ocHinm aussi en orient. Ce qu'on a retrouvé jusqu'aujourd'hui est tout en argent.
(44S) Dicta incredibile, m ineffabile (Ditm. IV, f»}; ntpote fastn ejus intolerabiles, simul et bar-
baros slavonim pertasa ritus (vita Eionis, cap. 8, inter script, brunsv. Leibniizfl, t. 1.<i>> 830).
342 EDRISI.
eempunt bien d'objets des fabriques étraugères. Non loin de Rrakovie et
de Biton, près de.Zwierszov ou Sieverz, la Pologne possédait des mines
d'argent(ii6).0n ne peut pas présumer qu'elles aient données une suffi-
sante quantité de métal pour payer tout. Les ressources à cette fin exis-
taient dans les cérales, dans Tabondance des produits du travail et dans
Texportation limitrophe. Le sol était fertile et cultivé, les villes florissantes
remplies d'ouvriers aussi habiles qu'intelligents (Bdrisi , YI, 4, p. 589).
89. L'or et l'argent qui donnait tout l'éclat au luxe des églises et de
la cour, étaient un objet de commerce, une marchandise, nécessaire en
partie pour le vaste négoce, quand il était acquis par échange et trans-
porté en lingots; il n'avait pas de valeur pour le petit trafic. Les Prussiens
n'y attachaient aucune importance, ils ne demandaient que des tissus
en laine (ni). Les insulaires Roughiens ne voulaient point admettre du
numéraire, ils se contentaient de la valeur des toiles (iis). La Poli^ne^
était plus accessible à la circulation de la monnaie , et moyennant ses
ressources, elle achetait des masses d'or. On avait du temps de Boleslav-
le-grand, super fluitatem pecuniœ, aurum commune; c'est avec le temps
que son éclat s'affaiblit devant la luisante pâleur de l'argent (iio).
C'était la conséquence de ce changement dans le commerce, qù l'or et
l'argent, principale marchandise , céda la place aux marchandises d'in-
dustrie, conséquence de ce progrès qui dispersait le restant des métaux
précieux dans des mains nombreuses, dans toutes les parties du pays.
Pour l'habillement, les garnitures de la parure, les étoffes, les orfè-
vreries venaient longtemps presque exclusivement de la Grèce, de
Byzance, de Rherson (iso). Là étaient les manufactures des étoffes de
soie, serici; de velours, sammeta, de pourpre, /SÀaTrta, en général des
étoffes de différente couleur, pallia; là on brodait en or, aurifrisia; là
on fabriquait tapis, rideaux, pavillons, ceintures, upav^w , bracelets,
(416) Villa ante Biton (dans la haute Silisic) quœ ZnersoT dicitor cum rusticis argent! fossoribas
buila lonoc. papas 41S6 , in cod. maj. pol. Raczyn. n' é).
(ii7) Pruzi auram et argentum pro minimo ducunt... pro laiieis indumentls effarant praecioios
martures (U«ln). 1, i, B).
(448) Apud Banos non habetur moneta, née est in comparandis rebns eonsuetudo numerarani, ted
qulcquid in foro mercari voluerif, panne lineo comparabis. Aurum et argentum , qued forte per
rapines et captiones bomioum, vcl andecunquaeadepti snnt,aut uxbrum cultibus împendant, ant
in srarium dei sui conferunt (Uelm. I, 38, 7).
(449) Pecunia, dans la relation de Gallus, désigne non seulement la monnaie conrante , maisea
même temps des lingots d'or et d'argent.
(180) Xs^saovtTûi/ Tov /xta&ov... 010 f ^XàtTT ioc y 7r^av^«a, x^P^f"'^* ffT^/*evT«...
$ep/xarca xXXri^ivà, TzapiiKoc iCeikiL porph. de adm. imp. 6). Cela passait du temps de Con-
stantin par les possessions des Petscheneghs ; après leur destruction, passait de Kherson directemeni
dans les terres des Russiens. A la suite de ee commerce, les Russes, qualiièreat d*«uyrag« k»r«o«-
Bien, tous les monuments et ol^ets artistement élaborés.
\
COMMERCE, ÉTAT SOCIAL, 90. 245
xu^pia, brachiales, et mullilude de parures de ce genre o^fjit>*rx, qui
s'attachaient à différentes parties du corps, à tous les bords d'habillement,
franges, annelets, boucles, boutons, agraphes. A cette époque, les fabri-
cations exécutées en Perse, en Asie, à Timitation des Grecs, ou par les
Grecs eux-mêmes, restaient encore sur le lieu, n'arrivaient pas à une
telle quantité aux rivages du Volga et du Don comme postérieurement ,
ne se mettaient pasencore en concurrence avec les manufactures byzan-
tines. Les soieries baldakines, et les tissus de coton de Torient eurent
plus de fortune plus talrd. Des environs du Don et du Volga arrivaient
pliltôt les poissons, et, ce qui était plus important, For et la fourrure.
. Byzance a pu transmettre de l'Afrique les peaux de léopards et quelques
dépouilles des animaux du sud; mais les fourrures de martres, de
belettes, de zibelines, de renards rouges et noirs, heurtasses, le castor,
sortaient des environs du Volga et du Don, pelles prœciosas {Gall. I, G,
p. 36), dont l'aspect et l'odeur furent du goûc de l'occident (Helm.1, 1).
Ces fourrures arrivaient par de grands chemins, et se dispersaient
par des chemins particuliers. Par ce dernier moyen, les Prussiens
pouvaient, de leurs forêts marécageux, fournir certaine quantité au
monde chrétien : pelles abundanl, peregrinis offerunt, tam prœciosos
marlures (Helm. I , i , 8). Sur le grand chemin se trouvaient les
Klloviens et chez eux le gros du commerce.
90. Dans chaque siècle il ne manquait pas de mouvement commer-
cial dans ces immences distances du nord; il était lent, traînant, mais
il rapprochait les peuples éloignés. L'invasion du mahométanisme et
les perlustrations des Arabes l'ont animé sans doute; mais c'est par
l'activité de la dynastie sammanide (890-1 OOi) et par le concours de
ces événements, qui déplaçaient les situations de la race Slave, qu'il
prit une extension considérable, et, grandissant, coopéra à la permu-
tation de l'état social et politique de plusieurs pays et nations. Sur les
rives du Volga , les marchands des côtes de la Baltique se rencontraient
avec les marchands des côtes de la mer rouge et du golfe persique. Les
peuples du nord, prenant l'or et l'argent des mahommédans , donnaient
en échange ces précieuses fourrures, qui émerveillaient les climats plus
échauffés. D'un autre côté, ces précieuses fourrures, de même que l'or
et l'argent , acquis par le traûc , furent échangés avec les occidentaux ,
pour le vêtement ordinaire, pour de petites commodités de la vie, qui
manquaient au peuple du nord. La Slavonie du Dniepr, où les Varèg-
Rouss se sont casernes , par sa situation forma bientôt un entrepôt,
et devint l'intermédiaire de toutes les opérations du négoce occidental.
L'esprit mercantiU s'empara des peuples, les villes et les cités grandi-
314 EDRISI.
rent rapidement en population, en métiers, eo trafic, eo extension; 9
côté des chaumières, pleines de nombreuses familles, les architectes
grecs élevaient des édifices en pierre , d^épaisses murailles et fortifica-
tions, des basiliques, des cerkievs, décorées de mozaïque la plus recher-
chée. Les marchandises étrangères traversaient continuellement, s'arrê-
taient sur les marchés et encombraient les dépôts; les marchandises
principales consistaient en sacsdefourrures, en or et enobjetsde luxe La
soif de gain animait tout le monde, mais pour jouir de la surabondance!
11 n'y avait aucune inclination. La grossièreté rustique, regardant les
monceaux d'or accaparés, n'avait aucune disposition au luxe, ne l'inventa
point, et, guidée par l'avaricemercantile , ramassait pour garder (iti).
On savait que la Russie était riche, surtout sa métropole l^iiov.
En 1018, le 15 août, Boleslav-le-grand entra dans cette capiule, capui
et arx regni, Kiiov. Â l'instar de Byzance , elle avait ss) porte d'or, civi-
tatem nutgnam et opukntam vigrediens, evaginato gladio, in aurea porta
pereuliens (Gall. 1 , 7, p. 44, 46). Dans G«(te immens0 cité on comptait
400 églises, cerkievs, huit marchés oa/^eaTa^ ; une population innom-
brable , car l'affluence dans la ville et vers ses environ» était énorme ;
des indigènes, des esclaves qui y trouvaient leur refuge, des étranger»
et spécialement des Danaens ou Grecs (des juifs), et de dangereux
voisins Petschenehs. L*incendie avait endommagée l'année précédeot^
la principale basilique, la cerkiev de sainte Sophie : elle fut déjà res-
taurée. La cité entourée d'une muraille , capable de se défendre « après
une courte résistence fut prise. On y montra à Boleslav une quantité
ineffable de précieux métaux , ineffabilis pecunia ostendilwr^ le trésor
ducal , avec lequel le duc ne savait que faire. C'est ce que disent les
publicistes de l'époque, ce qu'ils annotaient avant que Boleslav eut Le
temps de se reconnaître dans sa nouvelle acquisition (Ditm. iX, 16) (is«)-
Boleslav-le^rand prit conseil, s'il devait garder avec une poignée de
guerriers une cité aussi vaste et populeuse, urhem^ dilissimamj regnum-
que ruthenorum potentissimum. Dans ses états il n'y avait aucune com-
parable. Il se décida à confier son administration à un Russe et de
Fabandonner : decem mensibus inde pecuniam in Poloniam trawmit-
(491) Du temps de Boleslav-le-grand, dans la poissante et opulente Kiiov, au moment de sa pins
haute splendeur : Rutenorum rex , simplicitate gentis lllius, s'amusaK de ta pèche ordinaire de
poisson. 1— Avec le temps, Kiiov déclina et succomba et on ne connaît aucun luxe des duca jrvs^ieiw.
Le luxe se tournait vers les églises et les édifices.
(Iti) In magna bac civitate, quœ istius regni captit est et plus quam quadringcnta habentur
eoelesiae et mercatns octo ; populi autem ignota mauus : quœ sicut omnis bse provincia, Ajgitivorom
robore servorum, hue undiqne affluentium et maxime ex velocibus Panais, multomquo voceiktib^s
Petin^is bactenus consistebat, ei alias vincebat. — Boleslav entra dans Kiiov le IS août, le contin-
gent allemand, domum remittebat en septembre au plus tôt. Ces Allemands pouvaient donc aa mois
d'oclebra retouroer «a Allemagno et racoolcr conme Beirious aiilea incljFtus ex uostris (allaa|uiM)i,
COMMBRCB» ÉTAT SOCIAL, 9t. 215
tendo, le onzièniô, eum thezauro residno Poloniam remeabai (Gall. I, 7,
p. 47). Ex eo tempore Russia Poloniœ vesligalis diu fuit (ibid. p. 51) (fis).
Cet érénement favorisa le fastueux luxe des six dernières années de
Boieslav-le-gfànd, ensuite les années du règne de sonfiIsMietschisIavII,
fcutus intolerabiles el barharos rilus qui devenaient insupportables à la
reine Rixa allemande (vita Ëzonis, cap. 3).
Pendant Tassaut de Kiiov, mctgna urbs incendio ftiinoratur (Ditm.
IX, iO). Cet incendie ne diminua pas son existence; sa prospérité con-
tinua ; la cité fut rebâtie : melropolis Chive, œmula sceptris Cotislanlino-
politani, clarisàimum decus Grobciœ, de Russie, du rit grec (Âdami brem.
hist. eccles (66) II, 15). La Russie est toujours ricbe et opulente parce
qu'elle a à sa disposition nombre de sacs de fourrures et de lingots d'or.
Elle n'avait point de monnaie, elle jettait celle de byzaûce ou koufique
dans les creusets pour avoir des lingots d'or et d'argent. En 1041, le roi
Kazimir épousa Russianobilem magnis diuitiis nxorem (Gall. I, â0,p.92).
Boleslav-ie-hardi ou libéral contemplait tributaRulenorum, aliorumque
veciigalium in tapetis slrata (I, 26, p. 105); pour un baiser de paix et la
secousse de sa barbe, le duc, Vnei , comptitatis largi Boleslai passibus
equi, de slacione ad locum conventions , lotidem marûas aureas posuit
(I, 25, p. 101). C'était peu de chose pour le duc de Russie de jeter l'or
avec cette profusion, car il ne connaissait ni le charme d'une bonne chère
exquise , ni l'attrait du luxe. Cependant le trésor commença à s'épuiser
par de fréquentes 'visites. Le duc porta plainte au pape Grégoire YII ,
lequel dans sa lettre de 1075, apostrophant Boleslav, exige et sollicite
la restitution , pecuniœ quam régi Russorwn abstulit (epist. II, 75) (ii4).
9i. Le trésor du knez se dispersa et se vida; en attendant Tor dis-
paraissait du commerce et cédait la place aux lingots d'argent; ce qui
restait d'or se disséminait plus facilement dans les mains particulières;
le commerce des autres villes commençait en même temps à se placer
au niveau de Kiiov et se détournait de sa direction vers cette cité.
oppetiit dans un combat, et ils narraient tout£s ces choses inimaginables qu'ils ont tus «t qu'ils
apprirent de inefibbili pecunia qa'on avait montré à Boleslav. En même temps arrivait ad imperato-
rem dilectns Boleelavi abbas, cum muneribus, conditionnant un nouveau contingent impérial, en cas
de demande, ut suum ampliusauxilium acquireret. — Tout ceci est noté par l'évèque de Bferseburg
Ditmar, presque à l'instant même, sur son lit de mort, car il mourut le 4 décembre. Boleslav-le-grand
séjournait encore à Kii«v. Dans cette nouvelle il n'y a rien d'exagéré. Les villes de Russie devenaient
un refuge de la liberté , foyer de franchises et du lucre , grandissaient oomrae par eachantement.
(123) Diu, par conséquent dans l'année 11 10, dans laquelle écrivait Gallus; du temps de Vladislav
Hefman et de Boleslav la Russie n'était plus tributaire.
{tu) Inter otfiàll servanda vobis est caritàs, quam, quod inviti diciiius, iu pecunia <|ttam
Russorum régi abstulisti s violasse videmini. Quapropter, condolentos robis multum vos rogamus et
admonemus, ut pro aAort dei et sancti Pétri, quidqnid sibi a tobis el vestris ablatum eet, restitui
faelM»*.
216 ^Risi.
Cependant Kiiov continuait encore de rester le centre du mouvement
commercial, qui croisait en tout sens et traversait cette cité.
La navigation sur le Volga était utile aux peuples reculés vers les
déserts nord-est; celle du Don, commode à tous ceux qui bordaient ce
Oeuvc; les petits bâtiments de son embouchure apportaient des trans-
ports aux grandes constructions de Matrakha ou de Bertabiti, pour être
expédiés par la mer noire. Mais le cours du Dniepr, renforcé par de nom-
breux bras navigables, roulant ses eaux par les pays inspirés du génie
mercantile, favorisait mieux la cité Kiiov par les communications rive-
raines. Il fesait descendre les marchandises de la Slavonie septentrio-
nale, des Pomoraniens, des Normands-skandioaves, des Anglo-saxons,
marchandises qui venaient de la mer baltique et traversaient Novo-
gorod et Smolensk. Tout descendait vers Kiiov pour être expédié aux
bâtiments de la mer noire, d'où les marchandises de Byzance et de
Kherson remontaient par le même chemin vers Kiiov, pour être dépo-
sées jusqu'à ce qu'elles aient pu se disperser dans toutes les directions.
Plusieurs villes des rives du Dniepr pouvaient tirer un semblable avan-
tage ; la fortune préféra Kiiov, elle était seule qui en profita parce que
les^grandes communications continentales se croisaient avec la riveraine
le plus commodément dans ses environs.
La Pologne, dans sa position, était privée de semblables avantages.
Ses principaux fleuves roulaient les eaux dans un sçns contraire; elle ne
possédait pas directement le littoral de la Baltique. La Hongrie était plus
rapprochécaux objets de luxe et du commerce byzantin, le Danube y était
à donner une direction au négoce ; ses rives méridionales et ses embou-
chures furent animées. La Pologne, entourée de ce grand mouvement,
sans être appelée à la participation, servait de passage et tenait un rang
inférieur. Ce passage se frayait cependant différentes routes commer-
ciales par son territoire. De Magdebourg et Halla (par Posen) à Gnèzne;
de Magdebourg et Halla (par Breslav) à Krakovie. Dans Tintérieur du
pays elles se croisaient, et de Gnèzne et de Krakovie elles s'étendaient
irès-loin. De Gnèzne par Sandomir, à Prjemisl, Sambor, à Halitsch,
d'où l'on descendait avec le Dniestr jusqu'à la mer noire. De Krakovie
par Sandomir jusqu'à Kiiov. Cette dernière était le chemin du grand
commerce et son principal passage qui animait Loutzk et Peresopnitza.
De ces routes nous avons les distances que les marchands, vers 1154,
rapportaient aux géographes de Sicile et à Edrisi.
Sur les immenses plaines de la Slavonie russienne, l'esprit mercantile
détermina aussi les distances pour les marchands. De Kiiov on passait
le continent avec sécurité jusqu'à l'embouchure du Dniepr, et on remon-
tait vers Smolensk. Barmon ou Smolensk est évidemment un point très-
COMMERCE, ÉTAT SOCIAL, 93. 217
important pour le commerce da nord , d^ôù rayonnaient les commani-
cations continentales dans toutes les directions. De Test par les pays de
Mordva et Mourom, se communiquaient les Boulgars ; du nord, Novogorod
et les Kareliens. Vers Touest deux chemins avançaient jusqu'à la mer
Baltique : un par Kabi à Ânho (Reyel) ; Tautre en longeant Dvina vers
Madsouna et Sounon (125). Vers le sud, par Mozir et Loutzk versHalitsch
et Prjemisl, s*embraucbant de Loutzk et de Peresopnitza , par Tiver, le
long du Boh vers leis embçucbures du Dniepr et du Dniestr; croisant le
grand chemin le plus fréquenté, qui venait de Krakov par Sandomir à
Kiiov; d'où ce chemin avançait par les plaines dés Komans jusqu'au Volga.
Ainsi les communications continentales se croisaient à Kiiov avec les
communications riveraines; elles facilitaient ce concours des quatre
plages du monde dans un point central. Les géographes de Sicile ne
rignoraient point : quoique la description d'Edrisi n'est pas assez claire,
elle est assez explicite pour indiquer les positions connues; elle confirme
Texfstence de toutes ces avenues qui formaient la grandeur et la pros-
périté de Kiiov. Elle en a profité : mais il ne dépendait d'elle, quand
l'aurore des autres commença, à éteindre la lumière de son astre.
92. Les enfants d'Israël partageaient avec ferveur l'activité commer-
ciale, surtout ceux d'Allemagne, qui inondaient le sol hospitalier de la
Slavonie. Ils retrouvaient leurs confrères au fond de l'Asie et soutenaient
infatigablement leurs communications lointaines^ Ils étaient nombreux
dans les villes des Boulgars et Khozars, sur les bords du Yolga; les
Khakans des Khozars jusqu'à la chute de leur empire (990 et 1016) sui-
virent la doctrine de Moïse. Les juifs d'Allemagne y avaient par consé-
quent un point d'appui. Toute la route jusqu'à Kiiov se peupla d'Israé-
lites. Ils n'avaient pas besoin de s'arrêter en Pologne , où ils étaient
encore peu nombreux ; ils la passaient pour se rendre au plus tôt dans
le point central de Kiiov, où ils trouvaient tout le profil. Les indigènes
étaient contents de leur coopération, jusqu'à Tépoque où se déroulèrent
les circonstances inattendues, que l'œil le plus exercé ne sait prévoir.
Le commerce transitoire, concentré à Kiiov^ commença à se diviser et
à tourner par différents chemins. Les routes multipliées à droite et à
gauche, pouvaient déjà agir sur celle division : mais de plus grandes
diversions à cet égard commençaient à se développer de deux côtés de la
(i2o) Les renseignements d'Edrisi offrent ici une lacnnc, une interruption. Elle est reraplic non
•culement par la situation des lieux sus-mentiouné», mais avec évidence incontestable par les
trouvailles de monnaies kouGques. La monnaie koufîqne allait ensuite s'accumuler dans les îles de
la Baltique, aux environs de Sigtouna, sur les rivages des Pomoraniens et dans leur voisinage, près
d'Elba (Elblong), visrà-vis Landschouden (Skanic], et chez les Vinules. — Voyez la carte de Savelov
et ce qu'il en dit p. I3S-201, et comparez avec la figure ci-dessus p. 178, au chap. 08.
III. IN
3t8 BMUSI.
direction kiiOTienne. D'an côté les coionîes rasftîennes^ établies a« ëeH
des forêts « uleskie, fediltàient et aninaient leseommiiuicationsdes
bords daTolga paf la NoTogorod vers la kner Baltique» oà commençait à
percer la concurrence allemande. De Tautre côté, les Italiens Mquen-
laienl plus soutent Gonstantinople et commençaient à animer les coa*
manications deremboucfanre du Don. Par d'autres circonstances encore
le mouTement commercial se trouvait dérangé et gravement compromis.
Les conquêtes ne le favorisent pas toujours. L'extermination des
Boulgars, Bartas, Khozars par les Russes, dépouilla les mardiés rus-
siens des avantages qu'ils tiraient des hordes et peuples dont il ne
restait que le nom. La dévastation du pays des Vinules et la soumissioa
des Pomoraniens portaient une semblable atteinte aux marchés du nord»
La chute des Sammanides, le débordement des hordes tourkes du fond
de l'Asie dans les possessions mahommédanes, déchirait ou anéantissait
les communications établies. La monnaie arabe, depuis 1013, disparut
de la circulation dans la Slavonie; peu après, vers 1050, la monnaie
allemande et anglo-saxonne cessa d'inonder ces pa}'&, ensuite l'ordispafut
du commerce , on ne saurait assex expliquer ce déchet. Tous les élé-
ments du transit se détournaient des marchés russiens, et aucune ville
marchande ne se ressentait plus de ce dérangement que l'opnlente Kirov.
Les juifs étaient entraînés dans ce délabrement de fortune, mais
meilleurs spéculateurs que les autres, ils savaient se tirer d'affaire : les
indigènes, gênés, s'en irritaient et accusaient les opérations juives comme
cause du malaise. Les esprits s'envenimaient ; à chaque émeute, le peuple
égorgeait les juifs; pour les sauver du massacre, Yladiroir monomane,
ordonna aux juifs d'évacuer Kiiov (lli4) : le peuple bénit le knez qui le
délivrait de ce fléau : mais le malaise ne cessa de travailler et de préparer
le triste dénouement (i te). Le peuple n'ayant plus d'objet de prévention,
devenait plus inquiet , plus mutin dans les affaires de rintérleur. Sa
prospérité disparut : agité par les passions, Kiiov était malheoreuse et
la politique hideuse de Sonzdal éguisait l'épée meurtrier. En 1467, le fils
dégénéré de la Russie, Ândré-aimant-dieu (bogolubski) la livra au pil-*
lage. Cette cité sainte, respectée par les siens et par les étrangers qui la
visitaient , fut victime de l'engeance dénaturée. Cinquante ans après,
en 1204, les Romans Polovtzi, enhardis par le forûiit souzdalien, sacca-
gèrent et dépeuplèrent Kiiov. Le prestige de la cité-mère faiblit, sa gloire
déclina ; Kiiov ne se releva plus. Souzdal se réjouit; Riga et Loubeka^
pas
les
tint nombreuse qu'était la popolati^- j».. «.»..»., «i» »..« «m..» «.>•«.»■«,«», iuivv«r utiT«ca««
Kiiov, elle retonrai d'où elle était veoue, en Allemagne et en orient, les orientaax étant les pim
nombreux.
^
COMMERCE, ÉTAT SOCIAL, 93. 2ld
ft^élévaîent, Novogôrod gratidissoit et Géttes atec les Yénitlens allaient
foire des établissements de leur^ comptoirs sur les côtes de la mer noire.
93. Du temps de Boleslav III, Tâge d'or était passé depuis un siècle;
d'autres relations, une autre position sociale s'étaient formées par la
marche, par le progrès de la civilisation. C'est surtout depuis la guerre
intestine, depuis la guerre sociale de 4080, que l'état de choses se déroula
tout différent de celui qu'on glorifiait à l'époque de Boleslav-le-grand.
L'ancienne coutume et l'ancien ordre cédèrent au nouveau. Les
objets de luxe et de l'opulence se sont dispersés en parcelles et cessè-
rent de constituer ce luxe ; ils décoraient et couvraient d'une manière
plus commune. Lorsque Boleslav III distribuait les vêtements festi-
vaux , il y avait des particuliers qui en étaient investi à leurs propres
frais et pouvaient les distribuer de leur part. Boleslav-le-grand séjourna
dans différentes communes et tenait des tables publiques lui-même ou
par ses commis, pour engager le peuple à s'y établir (12?). Boleslav lll
n'était plus à même de l'imiter, car cette ancienne coutume compensait
les villes et les cités pleines de rues à construction continue. Si les
premiers Boleslav pouvaient entreprendre d'innombrables incursions
et expéditions dans des pays éloignés, Boleslav III et ses successeurs
ne pouvaient plus s'engager trop, ni en Russie, ni en Hongrie, ni en
Bohême ; parce qu'il leur était plus difficile de sortir de leur propre pays
et de pénétrer dans les états voisins. En Pologne et chez les voisins , le
pays devenant plein, offrait plus d'entraves, et de nombreuses occupa-
tions, multipliées sur le lieu, retenait chacun dans ses foyers.
Les constructions de tant de bâtiments, entassés ensemble, les murs
et les fondations des églises et des couvents , occupaient quantité de
monde; les habitants, rapprochés et concentrés, développaient l'activité
des métiers et des fabriques, qui surpasse beaucoup l'activité précédente.
Partout le trafic, l'achat et la vente, varia et prenait un surcrois; de
petites nécessités de la vie se multipliaient partout. Les cours des
seigneurs, tant séculiers qu'ecclésiastiques, recherchaient ce que jadis
formait exclusivement le luxe royal. La monnaie et le numéraire
devenait à chacun plus nécessaire , et sa fabrication locale augmenta
beaucoup. Tout cela avait lieu, l'ensemble des événements le démontre.
Du temps de Mietschislav on construisit à la hâte quelques églises et
chapelles en bois. Les cathédrales de St-Pierre à Posen, de la Trinité
à Gnèzne, le couvent sur la montagne de Sainte-Croix, furent construits
(4i7) BolesltY-le-grand , in civitatibas et castris frequentius habitabat (1 , 12 , p. 63), et omni die
privato, quadraginta mensas principales, exceptis minoribos erigi factebat(l, ii, p. 7i), de sait
tvniliaribus , singulos singulis civitatibas vel castellis deputabat, qood loco sui,>cafclellani8 et civi-
tatibui (M est, civibus et civitateosibus) convivia celebrarent (1, 16, p. 7S).
ââO EDRISI.
en pierre , par Boleslav-le-grand ; à Krakovie , Téglise de St-Venceslav,
commencée (llOâ) par Yladislav Herman, fut achevée par Boleslay III»
en 1159. Chaque évêque s'efforçait à fonder une église; le pécunier
Pierre Danois en fonda un grand nombre (iss). Arrivaient les destruc-
tions qui déblayaient Fancien ordre, pour faire place au nouveau.
Les villes, plus inclinées au nouveau, prenaient une croîssanse remar-
quable; celles qui tenaient plus obstinément à Fancien, succombaient
et s'épuisaient. C'est la raison de la destruction de la florissante et
puissante Krouschvitza , de la chûle de Bialigrod et d'Ioulin.
La culture des terres subit aussi des changements. L'augmentation
de la population sédentaire dans les villes , était pour cette culture
avantageuse. Le cultivateur devenait plus assidu , plus attaché à la
glèbe, moins mobile; sur plusieurs points il perdait Finclination à la
permutation de domicile, et la culture en jachère l'emportait sur oeHe
en friche. Les grands propriétaires prenaient plus de soin de retenir
dans leurs domaines la population laborieuse. Le peuple cultivateur,
les kmetons, gagnaient matériellement, mais son civisme y trouvait la
mort. Il prit la nouvelle coutume en aversion et ne participait pas
à Finstruction latine étrangère. Le progrès du nouvel ordre , de la
civilisation , fut immense et rapide , il changeait les relations sociales,
ainsi que dans un intervalle peu éloigué , on savait que le temps de
Boleslav III, était tout différent de celui de Boleslav-le-grand. Avant
Fintroduction du christianisme, hospitcditas gentilium, rapprochait les
conditions sociales : neque rusticosuo dux invitaluSfComcenderededignor
tur:n(mdum enim princeps tanto fastu superMe tumescebat (Gallus, 1,2,
p. â4). — Du temps des deux premiers Boleslav, quamvis multis
cuneis magnalum constipatus , rusticum quasi proprium filium adma^
nehat (I, 7, p. 55); aurum eo tempore commune (I, 6, p. 39) ; rex fama
vivit, ditatus pauper ohivil (I, 26, p. 108); et le roi répétait : sine plèbe
quid rex erit. — Du temps de Boleslav II! Fopulence royale se montra
octodies avant et après sa noce , ou quand il remplit sa pénitence
(11,25, HF, 25); et sapiens et nohilis vir inportabilia exercebat, dum
ignobiles nobilibus prœponebat (II, 4, 16, p. 159, 160).
(Voyez les derniers chapitres du mémoire précédent, Slavia du xii* siècle; ensuite eontidératioBS
sur l'état politique de l'ancienne Pologne et sur l'histoire de son peuple , d«ns l'histoire d« Pologne»
publiée à Lille , iStt).
(i28) En 4064, gneznensis ecclesia consecratur (annal, monach. in cod. gnezn. santconis, p. 3f8;
dzirzv. p. 101) (décorée 1147, par une porte); 1065, moaasterium mogilnousc (Dingos, p. 258); IIM,
ecclesia in Czerviensk fundata; 1138, cocnobium trinitatis sancti Beiiedii.-ti , à Sochatscbev étaH od«
rérente fondation ; 1139 l'église de S. Veuceslav achevée ; 1 140, claustrum iu Andrzciov edificalor;
1143 ectlesja kathedralis piocrusis consc<Tata (1145 porte de l'église); 1154 in Zagoszcz fundata; 1155
abbacia de Czcrvinsk; 1161 in Lanrzic conscrata ; 1104, rlaustrum in Lubcns ediûiatur; 1176, dan-
strum Suleiov edificatur; 1185 claustrum Coprivnitza edifiuntur, etc., etc.
CARTES
DE L'INDE ET DE LA CHINE,
DRESSÉES
D'APRÈS LES RELATIONS DES ARABES
ET LES INVESTIGATIONS DU MOYEN AGE.
InUctis opulentior
Tliesauris Arabum. . . — tamen
CurtaD nescio qiiid semper abest ret,
HoiiAT. ode xxnr.
IV.
CARTES
DE L'INDE ET DE LA CHINE.
1. Après avoir dressé une carte de Flnde pour la relation du birou-
nien; après avoir construit une autre pour débrouiller les description^
confuses d^Edrisi, j'aurais dû, semble-t-il, à la suite de ces essais, rendre
un compte détaillé et étendu de mes opérations. Mais ma tâche est déjà
trop lourde pour m' engager encore dans de longues considérations, je
serai donc succinct, je me résumerai dans des généralités essentielles,
ne touchant à tous les détails, n'arrêtant, que pour surmonter les ob-
stacles ou les Incertitudes. De toutes les observations qui ont été faites
jusqu'aujourd'hui , je ne connais que l'opinion de Klaproth sur l'empla*
cernent de Khanfou ou Gampou et les explications de M. Reynaud qui
accompagnent la version de la relation des voyages faits par les Arabes
dans l'Inde et à la Chine, et sa version de la description de l'Inde par
Abou Rihan. La lumière de ses explications me guide, elle a pu cepen-
dant m'écbapper par les intervalles de temps où j'ai été privé de ces
précieux opuscules.
Certainement, des temps les plus reculés, des relations ont existé
entre les occidentaux de l'Asie et les Indiens et Chinois; continentales
et maritimes, animées ou ralenties, ne discontinuaient jamais : dans
aucun siècle, les Arabes n'ont ignoré l'existence des pays de l'Inde , des
tles et de la Chine.
Toutes sortes de communications devinrent plus fréquentes, plus
suivies du temps des khalifs; des explorations furent faites, des descrip^
tions et des relations sur les pays éloignés furent rédigées.
Le marchand Soleyman, après plusieurs voyages en Chine, racontait*
en 851, sa longue traversée par sept mers. Plus tard, 907, Aboûzeid ou
Jezid, prépara une autre narration. Sortis de bahr Fares, ils travcr-
saieui parla mer ^^j^^ Deiaravl yj,^ji Larevi (près des côtes de la
région Lar). Passant Koulam du Malaï JL> J^ Koulam Bfelli, Mala-
bar et Quiloa), ils entraient dans la mer de Herkend (du Kcnd). L^îie
CARTES DE L INDE
Serindib est sur cette mer. On remarque dans Tile la montagne al Ro-
houn sur laquelle on voit Tempreinle du pied d'Adam. Au delà com-
mence la qualrième mer appelée Schelaliei. Une île <;'»Ul el Rami
ou Rammy était baignée à la fois par les deux mers; elle est partagée
entre plusieurs rois. Parmi les îles de sa dépendance estTîle j^L^l al
Neyan (ou Binani).
2. Soleyman parle ensuite des îles nommées /ri^L>^ Lendjeha-
lous (/^^b uJ Lenkhialous) ; il fait mention de deux îles qui étaient
séparées des précédentes par une mer qu'il appelle »L*!jj! Andamân
( «L»Ljt Abraman de la mauvaise leçon de Massoudi). Ce nom de la
mer vient du nom des îles mêmes d'Andaman , et les îles Lendjialous,
sont Langkevi.
C'est vers celle île que les navires se dirigeaient et vers le lieu
nommé Kalahbar où se trouve l'empire de ^l>v ^î<l''^<lj résidant dans
l'île Zabedj. ^^
De Koulam Meli, qui est un mois de Maskate à Kalahbar, il y a un mois
de navigation. De Koulam les navigateurs se rendent dans un lieu
nommé ^^^Betoumah (beit Tou ma, Saint-Thomas, près de MelLapour),
et de Betoumah en 10 journées on arrivait à J^\^ Kedrendj (Goda-
veri, Coringa). Après dix autres journées les navires atteignaient le pays
Senef et la sixième mer Senef où se trouve l'île Zabedj, de laquelleil y a
un mois à Sin , et moins , quand le vent est favorable.
De Senef les bâtiments se rendaient en dix journées dans une île ou
presqu'île nommée Senderfoulat, d'où ils mettaient à la voile par la mer
Sandji vers Sin el arrivaient à Khanfou,au bout d'un mois. Sur ce mois
sept journées sont employées à franchir les portes de la Chine, mon-
tagnes baignées par la mer. Entre Senef et Sin, il n'y a que Mabet
(Habet) séparé de Sin par des montagnes.
Admettant que Kedrendj soit aux environs de Koringa'et de Tembou —
chure de Godaveri ; que Senef soit aux environs de Martaban; que Sen —
derfoulat, par conséquent, se trouve aux environs de Sinkapore aubou^
de la péninsule Malaï : on se demande où commence , où se termine Ir
mer Senef? baigne-t-elle la péninsule Malaï de deux côtés ou seul(
ment d'un côté à l'ouest ou à l'est? où sont ces frontières de Sin au-de
de Mabed? sont-ce des frontières politiques de l'époque ou convenui
et acceptées par des voyageurs et géographes? Questions à résoud
dans le vide des espaces..
Ce qui est évident, c'est que Sin ne commençait guère à rerabocr^ff-
chure du Gange, mais qu'il était séparé par Senef, par Djaba, par /^
rois Mabed qui comptent un grand nombre de villes, dont les pos^^^.
sions s'étendent jusqu'au pays des Moudjah blancs; au-delà de Mab-^*ur
il n'y avait que les montagnes qui les séparaient de la Chine.
ET DB LA CHINE. 5
)
L*empîre de la dynastie Thang tenait à cette époque presque les
mêmes frontières du sud qu*aujourd*hui. Ngan nan ou An nam
(Tonquiu) était en sa possession ou passait dans les possessions des
rois voisins Nantschao. C*était au-delà des montagnes qui séparaient
Sin de ,>jL> Mabed(JjU Habet, jjL> Mabar, mauvaise leçon, Kambod).
Yingt-cinq ans après Soleyman, en 876, Ibn vahab, arrivant à
Khanfou, se rendait dans la capitale de Thang en qualité d'ambassa-
deur du khalif. La capitale d'alors portait le nom de Tschlian ngan. Les
nestoriens de Syrie qui y furent établis rappelaient Khomdan. Ce nom
passa aux Arabes qui qualifièrent du même nom le fleuve jaune. Bientôt
Tschban ngan, avec la chute de la dynastie de Thaug , cessa d'être ca-
pitale et changea de uom plusieurs fois (King tschao, Ngan si , Singan).
5. C'est presque dans la même année, 9i5 : le khalif expédiait une
ambassade en Chine délabrée; Mas'oudi retournait de son voyage au
Siud et au Hind et Ibn Haoukal, portant avec lui les descriptions géo-
graphiques de Khordadbeh, de Kodama et les renseignements d'Ibu
Ishak, se dirigeait vers le Sind afin d'y faire une perlustration pour son
compte.
Mas'oudi connaissait la relation de Soleyman et d'autres voyageurs et
il a pu vérifier et compléter sur le lieu dans le Hind , ce que Soleyman
relate sur l'intérieur de Illndouslan.
Sous la dynastie de Brahman, dit-il, le Hind formait un état, dont
la capitale était appelée lijys^] Houza ou au centre. Mais cet état
8*est divisé à la fin, en 607, par des dissensions intestines, en plusieurs
royaumes. Mas'oudi apprit qu'au nord était située Kaschmir, tout cerné
de montagnes. Ensuite Bourouh ou Kanoudj , un des plus puissants
royaumes qui résista a Moultan, aux musulmans et au balhara.
La résidence de balhara, qui est le roi des rois, était à Mankir (Mon-
ghir), autrement nommé ^v^' «jjs-Jl Haouza la grande, éloignée
de 80 parasanges de la mer (t). Ses domaines s'étendaient vers le sud
€t l'ouest, où ils louchaient aux possessions musulmanes dans le Siud.
Au nombre des autres royaumes de l'Inde, on compte les suivants :
J 1^ Djiorz Djiozr (dans le Coromandel), à côté duquel est Thafec ^^^U»
Taban, j^Li> Tafen, j^l-i> .jLsLL Takan, (la meilleure leçon est
Takan, Dekan). ^j Rohmy; ^^^j Ouahman, était conligu aux
balhara, Takan et Djiorz, et touchait à la mer.
Dans l'intérieur de la péninsule, Soleyman connaît v^^^iL.!.^ Kaschîb,
Raschibin, que le manuscrit de Mas'oudi rend par ^\SJ\ Alkameu ,
qui parait toucher au royaume de ^t^ll Kirendj ou Firendj.
Le dernier roi du continent indien^est SJlib ^U Hated ou Mabed.
(1) C*est ainsi que disent les extraits de de Gnignes (p. 9\ Reiuatid trouve que Kanodj, suivant
Has'oudi , fut considéré comme Uaouza. — Abou Ishak istakhri Tait de Balhara le nom de la capitale.
Les villes portant ce nom se trouvent dans l'Inde , mais istakhri parle de Kanodj.
6
CABTES DE L IN DS
L'Inde (du midi) est uu vaste pays, entouré de mers, il confine au
royaume de Zanedj, Zabedj , Ranab. Celui-ci est couverné par un roi
qui porte le titre de mih radj (maha-rala, le grand roi). 11 possède les
lies situées entre Finde et la Chine. Le roi Komar est en guerre avec le
mib radj.
L Les conquêtes de Mahmoud deGazna, ouvrirent Tintérienr du
Hind à des perlustrations plus approfondies. L'astronome birounîen
Abou Rihan, après un long séjour dans ce pays, à la suite d'études
sérieuses du sanskrit et de longues investigations, rédigea, en i051,
une description du Sind et du Hind. Les ouvrages de cette époque n'of-
frent probablement aucun autre produit aussi clair et correct pour la
géographie descriptive. Huit siècles se sont écoulés et les noms des
lieux se relrouveut presque tous aux distances indiquées tout vivants.
Dresser une carte d'après la description d'Abou Rihan , est une tâche
facile, (planche xvi de notre atlas), aussi il n'y a pas lieu pour moi d'en
rendre compte, ce qui demanderait une répétition de la description
elle-même, rendue lucide par la version française (s).
(9) Poar prouver ce que j'aTance , je vais repasser quelques routes indiquées par Abou Ribao , ci
ajoutant entre parenthèses les noms des cartes modernes.
A partir de Konodj (Kanodj) :
Dyamon, parasangcs. 10
Gaty (Gartolee sur le Gange), 10
Abar '.Aliar sur le Gange), 10
Myrat (Myrut , Merut s. Callee Nnddee)» 40
Paniput (Paniput au-delà de Jumna), 40
Koutayl (Kbythul], 40
Sanani ',Soonam), 40
Adatbor, 9
Hadjannyr, 6
Maydahoukour, capitale de Lalior, sur la
rive d'Iradlia (Ravi), g
riviore Djnndrabah fCbnnab), 4S
rivière Djyinm (Ihyluro), qui coule à l'oc-
cident de B<îyut (Veyul), 8
Ouaybend (Vaïbcnd), a l'occid. del'lndus, SO
Borscbaver (Peyscbaver, Pesbawar), 44
Dinbour (Odvnabpoor), 49
Kaboul (Kaboul), li
Gbasna (Gazna), 47
Vn autre chemin de Kanodj :
Schirscharbab (Sirsanab ou Sirsawa, près
de Seharumpoor), 80
Pindjor (Pindjor), en facedeTanaser (Toa-
nessour), 48
Dabmala, capitale de Djalandhar (Jnltn-
dour, Jalendber), 48
Baladara , 40
Lidda (Latta , au-delà de Ravi), 43
Radjakiry (Radjour, Rajawur), 8
Cacbemir (Kashcmir), H
Ces doux dernières distances compromettent gravement la nomenclature. Mais la montagne à pic
Kclardjeli , située au nord de Radjakiry, n'est distante de Kaschmir que de i parasanges , et à S pa-
rasangcs de Radjakiry se trouve une autre place forte Radjady. I.a carte des ingénieurs anglais de
Bombay et de Bengal , dressée et publiée en 4842 par Jobn Walker, désigne à l'occident de Rajawar :
castle of Kambar, Radjabdilian singlis, qui répond à Radjadi. Les deux distances en qncstion sont
probahlcmcnt lésées. — La carte des ingénieurs indique plusieurs pics rapprochés de Kaschmir ,
mai;; aucun ne semble répondre aux conditions de la sus-mentionnée Kelardjob.
Il faut considérer les deux journées de distance de Kasrbmir à la montagne, non pas de lafroa-
tière , mais de la capitale Addascblan ; en ce cas , la montagne Kelardjcb serait la section la plus
élevée de Panjal, Pendjal , couvrant Kascbmir de l'ouest, sous le nom de Pir Pendjal et s'élevant
jusqu'à 43,500 pieds. Dans son bout méridional s'ouvre le défilé par lequel de Radjakiri on entraiti
daus Kanclimir. Le premier village apn s la descente était Bcberlian (cnlrance to Kasbmir by tbe
Bimburraad , sur la rivière Huripur, qui s'y embranche en Ramy et Rembeara). Ce vilhge est M
égale dislance de Sind (Kascbuiiricn) et de i)jilum qui descend des montagnes Hazroakout (Fut .
Panj.il oii sont les sources de Jylum ou Vesbaa) et traverse tout le Kascbmir. De ce village au pou'
construit au confluent de Kosury (qui passe par Kotybar) et Nabry (Lidur) 8 parasanges. (Le pontes
les ruines d'un autre pont sont assez éloignés du confluent , on les voit près des ruines de Lido'^
Après avoir quitté les montagnes et avoir coulé l'espace de deux journées, le Djilum trave
AddnscliUm ^Sirinagur), capitale du Kaschmir. A 4 parasanges de là, il entre dans un étang 'b
AViilur <|ui est d'une purasangc. Sorti de l'étang , il traverse la ville Ouscbkar (Baramula), qui est
\;lle Haranioula , et atteint le dctilé oii se trouve la ville Douar el morsad , située sur les deux eût—
de la rivière (Bunihar et Scbcukbiir, Sikb forts) > vovez planche xvi de notre atlas;.
Je pense à retrouver .Mandari (par 15* 0" de latit.), Djatraour, Radjaury, Djandara, Bhaîlesan , d»
Mundogour (par 15* 0' de latit. |, Djittore, Radjigonr, Djendari, Bbilsab. Je ne trouve rien ponr Je
Srande ville Doadahy et pour plusieurs autres. Quelques autres rapprocbomcnts de la nomcndatLr^v
'AbouRiban, avec celle de cartes récentes vont faire ressortir dans l'examen que nous allons entre-
prendre , des difficultés dans le texte.
— M
^ 1
ET DE L4 CmilB. 7
robscrverai seulettient quelques difficultés ou des Incertitudes eih-
barrassantes, qui ne sont pas Dombreuses.
Lorsque nous trouvons que Tanasser est placé à environ 80 parasanges
de Kanodj et à-peu-près 50 de Mahoura, je pense que nous sortîmes au-
torisés d'y voir une erreur typographique et de prendre ces chiffres Fun
à la place de Tautre. En effet, ajoutant la distance de Kanodj à Mahoura
qui est de 28 parasanges , aux 50, ou aux environs 80 de Mahoura à Ta-
nasser (Kourouschetra)»
A partir de Kanodj jusqu*à Prayaga, AbûuRihan donne en détail cinq
distances (12, 8, 8, 8, 12) (|ul font 48 parasanges, et il dit ailleurs que
de Mahoura (qui est vis-à^vis de Prayaga) à Kanodj on compte 28 para-
sanges. Différence trop forte. On serait tenté d'opérer une certaine ré-
duction dans le chiffre détaillé afin de le ramener à la somme de 28« En
effet, si les trois premiers, jusqu'à Hadjamava (lisez Dja^jamava), Apha-
pouri, et Karhah, répondent aux distances jusqu'à Jaujemow, Futteh-
pour et Kurrah sont trop forts : à cause qu'il ne reste jusqu'Allahabad
que 8 parasanges de la môme mesure, or, à Barhamschal (Alumchun)
il y a 3 et jusqu'à Prayaga (Allahabad) 5, ce qui réduit la somme totale
à 56. Ensuile de ce nombre 56, 6lons un cinquième pour les biais de la
roule , c'est-à-dire 7, on oblieudra pour la direction directe 29 paras,
de Kanodj à Prayaga, nombre assez conforme à 28 de Kanodj à Mahoura.
5. Mais de ce point se présente une autre incompatibilité des dis-
tances, beaucoup plus grave el qui retomberait sur Abou Rihan s^il n'y
avait pas d'issues pour en sortir. Il aurait dit que les distances entre
Mahourah et Kanodj, entre Mahoura et Bazanah sont égales, c'est-à-dire
de 28 parasanges. Je ne sais pas si les cartes modernes indiquent la po-
sition de Bazanah : mais les autres distances signalées par le birou-
nien poussent forcément la position de Bazanah appelé aussi Naraïan ,
vers Onearah, Ouniara et même vers Agimere, ce qui tient Bazanah
éloigné de Mahoura au moins de 50 parasanges. Il y a donc Une erreur
à rectifier, observant qu'il y a autant de Kanodj (et non pas de Ma-
houra) à Bazanah que de Mahoura à Kanodj.
Je ne m'arrête pas sur les distances du Sind, où dans tous les géo-
graphes arabes ou rencontre une différence assez marquante de mesures;
je ferai seulement observer que la distance de Dhar à la rivière Nimiah,
7 parasanges n'appartiennent pas à cette dernière. Nimiah est incontes-
taolement la rivière Mhye dans toute autre direction. Pour la distance
indiquée il faut absolument à Nimiah substituer le nom de Narmada (s).
Au-delà en avançant 18 et 25 parasanges on arrive par Mahratdessa à
^^53^ iS^^ Koukan ou Kounaka , dont la capitale Talah la maritime
est quelque part au nord de Konkan (Tullah au sud de Bombai). Au nord
est S^ Laran ou c^J^j^î Lardessa (Lar), à l'est >»iXib Danaka
(Dekan) (4).
(3) Une semblable méprise, je pense , est admissible,, quand on remarque dans le texte édité
4*Aboii Riban , une autre trop palpable. Ce texte p1a(^e Sendan au nord de Soubara. Cette méprise
est aYérée par les latitudes géographiques du recueil d'Aboulféda. La latitude de Sofara, Soubara y
est 49* S8; de Sendan 19* 50', mais il y eist dit de suite qu'ailleurs Abou Rihan plaçait Sendan paf
t9* V de Ittrtude.
(i) Sans m'arrôler longtemps sur ce point de Gouzcrat et de Lar, j'obsenre qu'à partir de Kambaye
8 CARTES DE L*UfDE
Des distances exorbitantes se présentent entre Bahroudj et Sindan,
50 parasanges, qu'on pourrait lire 10 parasauges. Entre Dhar et Nama
(Narnavar sur Narmada, vis-à-vis de Hindia), trois fois âO paras, égale-
raient la longueur du cours de Nerboudda. Pour substituer au chiffre
exorbitant de s.^âO, n*y aurait-il pas ^ 4? (k). Le chemin passe par
Âlbospour (Ellitschpour) jusqu'à Matdakar (Maddapoour sur Godaveri.
6. Quand Abou Rihan sort de Kanodj vers le sud, il ne suit pas la rive
occidentale du Gange , mais il parcourt évidemment les régions occi-
dentales. Il se trouve tout d'abord dans le royaume Djadjahouty (qui est
appelé Kallindjer dans la carte de Klaproth pour l'histoire de Chine de
Tannée 1000), dont la capitale est nommée Kadjouraha (Kotrah?sur
Betwa). Âbou Rihan pasae ensuite à Dhal (Talinga), dont la capitale est
Bitoura (Beder).
On compte de là, dit-il, âO parasanges au royaume :fjSo Kannakara,
dont la position indéterminée est quelque peu indiquée lorsque vien-
nent ensuite Oupsour(yisapour)et Banouas (Pounah) qui se trouve sur
les bords de la mer.
D'après ses investigations, Abou Rihan avait dressé une carte dans
laquelle se trouvaient à côlé du Hind, les lies et le Sin, et il a laissé des
longitudes et latitudes, de plusieurs localités de cette immense étendue
de pays. Il avait levé la hauteur du pôle de plusieurs lieux du Hind et
sut lui donner une position déterminée. Quant aux parties océaniques et
de la Chine , les renseignements insuffisants furent fourrés dans des
idées ptoloméennes. Le littoral de l'Afrique prolongé vers l'est à Tinfini,
se trouvait au sud de l'Inde, peu éloigné de ses rivages, et les Iles de
Djaba ou Zabadj, possession de mihradj , et celle de Kamroun se trou-
vaient rapprochées du mystérieux Vakvak , près duquel s'ouvrait une
issue aux sept mers dans l'océan qui environne l'habitable, un espace
assez étroit se formait entre les rivages et fesait descendre les échelles
de la Chine vers le sud jusque dans le premier climat par H^ et 15® de
latitude (Voyez n° 43 de notre allas).
7. Edrisi en Sicile n'a pas connu les dr^^ri-îptions du birounien, mais
il en connaissait pluàlcuis aalres qui reproduisaient ces conceptions
ptoléméennes; et possédant la géographie de Ptolémée elle-même, il
prit à tâche de la corriger d'après des renseignements qui ne se contre-
disaient point et s'accordaient incontestablement.
Nous avons sa carte et la description de cette carte. Quelques noms
de plus ou de moins ajoutés ou omis, forment cette différence entre la
carte et la description, qui fournit des matériaux pour suppléer ce qui
manque à l'une ou à l'autre, alin de remplir les lacunes ou de rectifier
réciproquement les erreurs. Malgré loules ces additions que la descrip-
tion peut fournir, la carte n'est pas assez pleine , elle resie privée d'une
Asaoul (est Saowle), JjUa^ Djenaoul (Usez JjLxdL Koutaoul est Koudwaoul), Doulka (est
TouUoukwarr sur Nerboudha] conservent leurs noms jusqu'aujourd'hui {le mont Oundaran, Vindias,
ne commence qu'à TouUoukwarr). Soubara, Sofara (Sourate), Sindan (Soudjoun), Seimour ou Dji-
mour (Jooneer, Djunirc),Banvas (Punab), Talab , n'en ont pas plus perdu les leurs.
(6) Dans cet intervalle Kondouhou su retrouve probablement dans Choondoopoora» Tschaandoa^
poura.
BT DE LA CaiNE.
9
quantité de nomenclatures de positions, qui prouvent qu*Edrisi avait à
sa disposition des matériaux, beaucoup plus amples, que pour la sienne
il n'a fait que des extraits fracturés.
Le premier coup-d'œil jeté sur la carte décèle qu'on regarde une bi-
zarrerie géographique , le plus léger examen découvre que c'est une
monstruosité dont on a peu d'exemples. Kandahar est à l'orient du
Moultan; Lahor et Nahrvara sont sur le Gange; la péninsule Malaï est
une île touchant aux échelles presque les plus éloignées de la Chine.
Sa carte figura ainsi et le texte de la description l'affirme positive-
ment (e).
Je donne la copie de la carte (n® 45 de notre allas). Elle se compose
de 8 sections du I"' et II'' climat, de chaque climat quatre, 7 à 10, cou-
tenant Sind, Hind, Sin et les îles. J'y ai marqué les distances, inscri-
vant quelques noms de plus qu'on trouve dans le texte de la des-
cription (7).
Cet extrême gâchis géographique prit sa naissance de rapiècements
incohérents des fragments de différentes descriptions affublés dans
l'image ptoléméenne. Koulam melli y remplace Simylla; fleuve Meso-
lous, mont Kaukase, Katigora, Asfiria, Sinia, y sont à leurs places. Pto-
lémée décoré d'épigraphes arabes est tacheté d'une multitude d'îles et
cours d'eaux que l'imagination arabe s'était créés.
8. Pour débrouiller ce pêle-mêle, il fallait tout d'abord s'emparer de
positions certaines et incontestables. De Kandahar, de Moultan, de Ka-
nodi; de Kaleri, Mansoura, Biroun, Daïbol, Nahrvara, de Kanbaîet,
Soubara, Sendan, Seimour, Barouh, etc., de Serindib et de quantité
d'autres dont les positions sont fixées et connues. Nous pouvons compter
dans ce nombre lanasser (Tanasser), jl-J^L» Madîar (Mahoura, Ma-
(6) On a dans l'Inde un Kandahar non loin du golfe Kambaïe; an dans le Dekan et probablement
plusieurs autres : mais Edrisi parle uniquement du Kandabar occidental situé non loin de Hindmend,
et l'incorpore à THindoustau aussi bien que Kaboul.
(7) Dans la 7* section se trouve tout le Mekrau partie du Sind. Je ne suis pas arrivé à fixer ses
positions ; je me borne à en collationner les itinéraires tracés par Abou Isbak et Edrisi , d'après les
traductions de Hordtmann et Jaubert. En journées :
de Tiz à Kis .
à Firiun . .
Darek . .
Rasek . .
Faba mahuie
Aszgafa . .
Bend. . .
Bah,Nah .
Kund uf. .
de Sirdjan
à Fardin . .
Mahan . .
de Valasdjerd
à Surika . .
Maserkan .
Djirakan
Kesnian.
Darin .
Tarom .
de Kisnakh à Armatil
à Kabili
Dibol.
Mendiaheri
paras
8
S
3
3
3
2
de Taïz à Kir .
à Firabouz .
Darck . .
Rasek . .
Fahlafahra .
Asfaka . .
Bend. . .
Kasribend .
Kiira . . .
Ferdan.
Mebiak.
de Valasdjerd Kerman,
à Suri.
Hasourdjan.
de Ermaïl.
à Kanbeli.
Dibal. .
Menhaberi
de Dibal à Tis , i journées , dit Abou Ishak.
de Bedaha à Tiz .
. 19
de Nedha à Taïz
. 10
de Mansoura
de Mansoura
à Bedaba . . .
. S
à Nedha . .
. . 6
à Turan . . .
. 18
à Touberan .
. 15
à Balis. . . .
. 10
à Candaïl . . .
. 10
à Kabul . . .
. 8
à Kandabar . .
. 8
de Dibol à Birur.
. 3
de Dibal à Biroun
i . S
à Mansura. . .
. 8
à Mansoura .
. . 3
Kalleri . . .
. 1
Kaleri . .
. 1
Enneri.Atri .
. 2
. 3
Atri . . .
. . a
Rud ....
Dour . . .
1
Basmend . .
Besmok , Semend. 3
Multan . . .
. 3
Moultan.
Kandahar . .
. 10
Tuberan . .
. 10
de Mansura
de Mansoura
à Babend. . .
. 1
à Bania. . . .
. . s
Famihol
Mamehel
. 6
Kambaia . .
. 4
Kanbaîet ,
. 5
Suriana. . .
. i
Soubara.
. 5
Sindan . . .
. 8
Sendan . ,
. . 5
Szaimur. . .
. 5
Seimour.
. 8
de Szaimur à Senndib 18 journées, dit Abou Isbak
et n'avance point avec les itinér. dans le Hind.
10 CARTES DE L^INDE
thoura) (s), Malva (Dhar), Monrides (Mirout), Atnsa (Haïras), Tata
(Toda), Dada (Dotleah). Les autres vont se découYiir par les distances
ou par quelques autres considérations.
Toutes ces distances sont évaluées en journées. Pour former le Hin-
doustan elles se laissent appointer et pousser en toute direction (n* AA
de notre atlas). Les seules distances : celles de Kanbaïet par Aubkin à
Daïbol , et celle de Nahrvara à Kandahar sont trop insuffisantes. Cette
dernière est du reste une erreur, au lieu de 8 5, il faut lire L 9. La
plupart des distances du Sind, sont au contraire d'une mesure excessi-
vement pelite. De Daïbol à Moultan le long de Mahran, on a âO jo^^
nées où il n*y a au compas que 10; de Kambaïet à Seimour il ^ a 14 ou
17 journées, où par d'autres distances on compte à peine 4 journées.
Cette anomalie contradictoire comme ailleurs contribua à la bizarrerie
de la conception d'Edrisi. Les premières 20 journées s'expliquent par
des biais de ileuve; les autres difficilement par des stations fréquentes
et courtes, Abou Rîhan compte de Kambaïet àSiudan 5 journées et
50 milles; Istakhri 9 journées.
9. La construction de la carte itinéraire d'Edrisi n'a pas d'échelle, les
dislances y sont réglées à coup de main. Si Ton voulait les coordonner
à l'aide d'un compas, on n'obtiendrait aucune explication : ce serait
élaborer l'idée vicieuse que le géographe s'était formée; l'idée qu'il
inventa en se servant des relations de voyageurs qui examinaient les
formes toutes différentes de la localité. Or, ann d'obtenir quelque expli-
cation, il nous faut décomposer l'idée vicieuse et dresser une toute
autre composition , d'après les relations que le géographe avait conser-
vées, une composition qui se rapprocherait des formes des pays et
rivages visitées par les voyageurs. Une triangulation tissue dans ce sens
ramènera nécessairement les positions indiquées j)ar des voyageurs à
leur véritable emplacement.
Mais il y a peu d'éléments pour une triangulation réelle dans les dis-
tances énumérées à travers l'Inde et la Chine par Edrisi; elles n'offrent
que de longues chaînes qui se croisent quelquefois. Pour coordonner
leur croisement dans le Hindoustan, je me suis servi des latitudes géo-
graphiques indiquées par Abou Rihan : et il n'y avait pas de difficulté à
les combiner avec les distances qui se pliaient d'accord.
Les distances du circuit de la péninsule Hind, à partir de Seymour
jusqu'à l'embouchure du Gange, se montrent ou lésées ou mal cueillies
ou mal coordonnées à la suite de ce gâchis qu'offrent la carte et le texte
sur tout ce rivage.
(8) Dans l'énuméralion des villes du Hind, outre Madiar, Edrisi nomme 5 « Jl^ qui pourrait aussi
Basser pour Hatboura , d'autant plus qu'elle est rangée entre Kasclimir inférieur (on intérienr
longliir) et Karmaut : mais elle est privée de distances , sa situation est inconnue et Matlioura reste
parfaitement bien occupée par Madiar. — Dans l'énumération des villes , le texte donne encore le
nom de Xsr^ Nidjeh , c'est peut-être Nuddea , située entre Mourdjedabad et Kaikoutta. — La
carte fournit aussi le nom d'une ville JjJft l J.P Melli al Hind ou JJLl) 1 X^ Klioulial
Hind . et le place non loin et dans la position septentrionale de Kascbmir intérieur ou iufcrienr (de
Monghir).
l
ET DE LA CHINE. 41
Le texte dit qu*en face de Koulam Mely se trouve Tîle JL* Mely
grande, produisant le poivre. La carte lui donne le nom de S^ Meud
qui n'est éloignée, au dire du texte, que de G milles de Kanbaïet. Le
texte reprenant pour la seconde fois File en question, la trouve vis-à-vis
de la ville maritime de fiarouh à deux journées de Sindan et sous le
nom de ^U Moulan, elle produit le poivre. La carte est d'accord et lui
donne le nom de Meli. Or Tile presque unique pour la production du
poivre voyage par mer jusqu*aux ports de Barouh et de Kanbaïet, lors-
qu'elle n'est éloignée des fies Balank et Serindib que de 2 journées. Et
Barouh (voyez la carte,) a déserté sa place pour se ranger dans le Ma-
nibar vis-à-vis de Tile au poivre, voisine de Balank ou Balab^k.
Les côtes occidentales du Hind sont fâcheusement désordonnées :
cependant les positions dérangées étant connues, se laissent coordonner
par leur suite. Sindapour, à moitié chemin de Barouh à Banah, répond
à Koundapour d'aujourd'hui.
10. Quant à des positions ultérieures jusqu'au Gange, il serait proba-
blement bien d'observer leur suite, mais les distances y sont corrom-
pues. ÀJb Banah (Bounmad d'aujourd'hui), situé vis-à-vis de Tile
Balank ou Balabek (îlolYalediva) (9). Vient ensuite *^>M Fanderina
ou Kanderina (Travankor) bâtie à l'embouchure d'une rivière qui sort
du Manibar (rivière Kaveri qui vient de Malabar). Puis .j)^^j9^ Djer-
batan(Drouradjapatan). Enfin ^s^^ Sandji eijLySS Keikasar situés
près de la montagne ^ y^ al Omri qui monte vers le nord et forme
un grand rescif, où Mesolus ptoléméen se décharge, seraient sur les
côtes des embouchures de Kistna (Mesolus) et de Godaveri, et des monts
Oroudi, où au-delà, vis-à-vis de Vizagapatam , existe un récif appelé
Neptune; rocks of Conar or Santapilly.
Viennent ensuite tljl^lK^ Kalkaîan qui se range à Gîcacola ou Ghi-
cocol; puis^^) Loulou ou Loulova et àsr^ Kandjeh ou Gandjeh, qui
trouvent leur place à Ganjan; enfin .tj^.y^ Semindar île et ville con-
tinentale à l'embouchure d'un fleuve qui vient de Karamaut des envi-
rons du Kaschmir extérieur (Hougly du Gange), d'où , de Semindar par
Kaschmir intérieur (Monghir) on se rend à Kanodj duquel dépend ledit
Semindar. Il figure sous le nom de Mandarcm dans les cartes anciennes
(9) àlasnite de Hlo Balank sont nommées: Jlîlj Jî* Tervaklidj cl JL^m^ Mosnah. Pour sûr
eUet sont voisines des Ilotes qui se rangent ^dans la baie des perles, ^Mansou-dÎTa est Mosnab.
La carte de sa part offre quelques îles à Toccident de la pcuiusulc Hind. ,^1, XX^^O Kisnekmad
est probablement Okamoundel à rentrée du golfe Kutsch. Les trois îles jL^A- 1 uJ 1 al Nardjil ,
placées à l'oncst de Serindib et au nord des Roïbahat , et ^ fXJ I àJ Jba) i al Kotroba Tocci-
dcntale lit* ou plutôt 92* de longitude et 10* de latitude, sont des énigmes pour moi.
13 CARTES DE L*INDE
de Hond, Blaeuw, Sanson, Witt; Manderaw d'Arraco-Sniith , situé à
Toucst de Chandernagor. C'est en nous conformant à cette explication,
que nous avons formé le littoral de la péninsule du Hind.
Avec Semindar, les distances littorales sont interrompues. Elles re-
prennent leur suite de Tilc et de la ville Aourschin, de laquelle 5 jour-
nées à Loukin (Loukipour à Torient du Magna de Gange) , de là 4 jou^
nées à ^^^j^^J^ Tarigourgan; ensuite 6 journées à LjJL» Katigora;
puis 5 journées à n^âJL^ Seuf ou se déclare une nouvelle interruptioo
des dislances. Ces distances conduisent jusqu'à Merghî et Tanasserim
où Ton désignait la position de Senf et de Kxmyopx de Ptoléiuée.
11. Il y a beaucoup plus d'embarras avec le reste de la composition :
c'est-à-dire avec les îles et la Sinie.
Quand on confronte la cçirte avec le texte on remarque que c'est sur-
tout dans le dénombrement des îles qu'il y a ou plus ou moins sur la
carte de nombreuses positions restant sans épigraphes. Dans cette partie
de la carte, nous avons eu le plaisir d'insérer une quantité de noms
que nous a fourni le texte, et des considérations très-simples nous ont,
je pense, préservé de l'erreur.
L'île Rami éloignée de 3 (lisez 8) journées de Ceylan, est très-grande;
sa longueur est, à ce qu'on dit, de 700 parasanges; elle produit le
camphre. De l'autre côté, il y a 5 à 6 journées de Laukhialious à
l'île àiS^ Keleh. Celle-ci est très-grande, son roi se nomme Djaba
(mihradj); elle produit d'excellent camphre. En regardant la carte il
faut comprendre que ces deux extraits parlent de la même île qui por-
tait le camphre. La carte le veut ainsi. D'ailleurs nous savons qu'à Rami
était situé Faufour (Camper) et qu'au sud de cette île se trouve Kalah
(Ibn Saïd, Aboulféda, etc.). C'est Sarira d'Abou Rihan, la plus grande
des îles Zabedj. Aboulféda la distingue de Djaba sans nécessité (lo). Le
roi djaba possédait en outre les îles Djaba, Selahet, Heridj et Maït, et
toutes étaient Djaba.
L'île Malaï est grande; elle s'étend de l'occident à l'orient, son roi
demeure dans une ville nommée Melik djezr (Malaï djezr). La carte re-
trace sa figure oblongue. Un autre passage de la description porte que
l'île dej^ Komor est éloignée de 7 journées des îles Roîbahat. Elle est
longue; son roi demeure dans la ville de Malaï; les habitants disent
qu'elle s'étend en longueur de 4 journées vers l'est; elle commence
auprès des îles Roîbahat et se termine en face des îles de la Chine du
côté du nord. Or Komor est Malaï et Malaï est Komor; c'est évident : la-
carte le dit explicitement en inscrivant sur les deux bouts de la longue
île, d'un côté près de la ville de Malaï ^LU ^V V?^ clT^^J^' ^J^)^
et au-delà de la ville Komar, sur les à^Jù extrémités orientales, que
c'est l'île Komar qui est Malaï. Le roi Komor qui souvent est en guerre
(iO) Toute cette île est inventée de la portion du milieu de Soumatra élancée vers l'est. Kamperest
Fanfour à roccident des autres positions ; Ramorarao , Rami; vient ensuite lambi , Lamri (appelé
Lameri, par Marco Polo); enfin Kelek trouvait la position la plus méridionale et la plus orientale, là
où le rivage tourne plus rapidement au sud vers Palcmbank.
ET DE LA CIIIKE. 15
avec mihradj de Djaba claii komor de Malaï. C'est Sendirfoulat des pre-
miers navigateurs.
Le texte signale en outre Fîle jL^i Komar à 3 milles d'intervalle de
Scnf et la carte l'indique toute petite. Il y a, dans cette Ile Komar, un
roi qui se nomme jj ^ ranid, de la famille j.^^ semer. Mais ce roi, aussi
bien qu son île Komar, paraissent avoir quelque intimité et une certaine
identité avec le roi Ju-j resed, plutôt jJj zenbid (ranid), roi de Sen-
difoulat. Faut-il accuser Edrisi de Tinadvertance , ou admettre Texis-
tence de deux îles Komor, Komar; de deux îles Sendifoulat; de deux
rois ranid ou zenbid? Au bout du compte ce roi Komar est ce petit jeune
étourdi de la relation soleimanienne, qui désirait avoir la tête de Mah-
radj sur son plat. Maradj de Djaba par 10 journées de chemin lui rendit
visite en montant une rivière sur laquelle la résidence de Komar était
située.
12. On a observé que les positions qualifiées d'îles peuvent être des
péninsules, pointes, langues de terre, à cause que Tidiome arabe ne
distingue point Tîle de la péninsule. Aussi voit-on de nombreuses posi-
tions riveraines qui sont accompagnées d'îles homonymes : Sendan ,
Sonbara, Melli, Aourschiu, Semindar, Senf, marchent en compagnie
de leurs homonymes. La grande île Malaï-Komor, en effet, n'est autre
chose qu'une grande péninsule Malaï. Décrite et représentée comme île,
séparée du continent, plus rapprochée des rivages imaginaires de Sofala,
dont elle n'est éloignée que d'une journée, que du continent de l'Indeou
de la Chine dont on ignore l'éloignement. Cependant les navigateurs ne
passaient pas son isthme Krah, ils côtoyaient tout au long de l'immense
Malaï pour apprendre que c'était une ^j^y^ péninsule. Malaï se ratta-
chait par un bout au continent. Edrisi ne l'indique point. C'est cepen-
dant indispensable de sîivoir pour débrouiller ses relations (ii).
Par le détachement de la péninsule Malaï une rupture des distances
riveraines a dû se déclarer. La carte d'Edrisi offre deux ruptures : une
au-delà de Semindar, l'autre à partir de Senf. Mais cette dernière est
remplie par une distance marine de l'île de Senef au continent, distance
de 5 journées seulement. On conçoit, en outre, que la lacune a pu être
(11) La relation d'un Ihn Fatliima, qui se dit voyageur et venant de Hic Komr Malaï, fixe la po<
sition édrisienne de cette île. L'île de Komr est longue et large; on lui attribue 4 mois de long et
SO journées de large. EIU> commence à l'orient de Seyonnah. On cite parmi ses villes Leirane qui
e^an pouvoir des musulmans, aussi bien que Makdaschou , Levrane se trouve sur les bords de la
mer par 103' 0 de longitude, et 0 32' de lat. A 5 degrés au-delà [à l'est) est sous la même latitude, la
ville de Malaï (107" 0' de long. 0 32' de lat.) où réside un des rois de l'île. L'île se prolonge à l'est :
Komorie , qui fut jadis la capitale de la plus grande partie de l'île , se trouve sous le 184" 0' de long,
et le 3* 0' de lat. sud. Un canal sépare cette île des rivages de Sofala. A l'orient de la ville Seyounab,
située sous 99" de long, et 2" 31' de latit. sud, commence la montagne Almolattham. (battue p-ir les
vents du nord) qui s'ctond à SGO milles le long do la côte. La montagne de Komr (de 1 autre côté du
canal) se prolonge dans la m^me direction. La race nègre finit au midi sous le 100" 0' de lon^. et
le 16" 0' de latit. sud. Là s'élève la montagne Alnedara (du repentir de ceux des navigateurs qui s'y
«ttgagent), elle s'étend jusque sous le 117" 30' de long. Sur te versant de cette montagne, du côté du
nord 109* 0' de long, et 13" 0 de lat. sud, est la ville Daghoutbah la plus reculée des villes de Sofala;
e*e6t la saillie la plus avancée du continent de ce côté. Ainsi le canal se dirige par le sud-est et se
tormioe à la montagne du repentir , large en cet endroit d'environ 300 milles. C'est ce qu'a relaté ,
l'ayant vu de ses propres yeux , Ibn Fatbima , probablement postérieur à Edrisi. Ejçl 137<( Ibn Saïd
répétait sa narration, en toute confiance (Roinaud , introd. à la géogr. d'AbimIf. p. 317, 318). (Voyez
n* 19 de notre atlas). «
14 CARTES DE l'iNDE
comblée par la cooiposiiion de la carte et que le géographe a pu inventer
une distance géographique en chiffre d'échelle.
Dans celle partie de la carte d'Edrîsi , il y a trois espèces de distances:
Tune des distances coniinenlales d'itinéraires; Tautre, des distances
nautiques relatées par des navigateurs; enfin, la troisième espèce des
distances géographiques nécessaires à la construction de la carte, résul-
tant de la réduction des précédentes, on de la composition de la carte-,
qu'à la suilc le compas levait sur l'échelle et dont il déterminait le
chiffre. Edrisi distingue quelquefois les deux premières espèces : il ne
dislingue pas cette dernière, cependant la plupart de distances sont de
cette nature géographique, et il est indispensable de les accepter
comme telles et de s'y conformer en les. appointant à la direction que
leur ont donné les géographes de l'époque, par l'inclinaison à la ren-
verse de la péninsule Malaï et par la descente jusqu'au premier climat
du principal port de la Chine. Puisque l'interruption des distances
riveraines a pu être comblée par le compositeur de la carte, il faut
donc par d'autres conjectures déterminer l'endroit sur lequel les Arabes
ont perforé l'isthme Malaï Krah. A cet effet, je prends eu considération
Kaltigora , Loukin et Senf.
15. Nous avons suivi les rivages du Hind jusqu'à Kattigora et Senf,
qui nous ont menés jusqu^aux environs de Tanasserim, Senf, Kattigora,
Tarigourgan. Edrisi compte à la Chine Kattigora situé à i'emboudnure
d'une rivière, c'est une dépendance de la Chine; Senf est une île chi-
noise : ces positions ne font pas partie de la Chine, mais sont du
nombre de ses dépendances; elles font parlie du Hind, beaucoup plos
spacieux que la Chine, séparés par les montagnes. Hind s'étendait
jusque-là, y compris Zabedj, Moudja, Mobed (dil Soleyman). Or,
Loukin ^^j^ (Loukipour), à l'embouchure d'une rivière qui vient de
Karamaut ou Kazamaut, se trouve sur les côtes de l'Hindoustan , et on
compte de Loukin jusqu'à Senf 15 journées de dislance. C'est ce qui se
passe dans le second climat (11, 9, p. 185, 188, 100).
Dans le second climat (I, 9, p. 84), le lexte d'Ëdrisi relate que de
Senf à Loukin il n'y a que trois journées, et que ce Loukin est la
mière échelle de la Chine, d'où l'on se rend à Khanfou. Cet apparente
désaccord est levé par sa carte. Ce Loukin n'est pas celui des côtes».
hindoustaniennes, mais JJLi^ (vtM^ Loukikin, Loukiked (Loui-.
tscheou) situé au-delà de Kattigora et de Senf.
La carie donnant une solution irréfutable pour le double Loukin ov
Loukikin, se met cependant en désaccord avec le texte quand elle priv
Loukin du second climat du fleuve qui vient de Karamaut, et
Loukikin sous le premier climat près de l'embouchure d'un fleuve doi
le texte n'a fait aucune mention. La première échelle de la Chine n*er
plus une dépendance, mais une partie intégrante de l'empire.
Du temps d'Ëdrisi dominait la dynastie de Soung. Ses frontièr
touchaient an sud le royaume de Kaotschi, et ne dépassaient point ~
limites de la Chine propre, déjà fixées. Edrisi pouvait avoir quelq
relations orales, toutes récentes, mais transcrivant les passages de
prédécesseurs^ de Soleiman, de Kordadbeh et d'autres, etmétant
£T DE LA CHiriË. 15
unes avec les autres, il rapporlait plutôt les connaissances bien anté-
rieures et probablement des premiers navigateurs, du siècle même de
la dynastie de Thang : du moins, comme il confond les opinions de
Ptolémée avec celles des Arabes , de même il ne distin&ue point les
anciens des postérieurs : cependant, dans ces régions éloignées, les
positions cbangeaîent de nom et d'importance. Loui-tscbeou (Loukikin)
ngure avec son existence et son importance sur les cartes de Klaproth
pour les temps de la dynastie Soung.
ii. Kattigora est un nom ptoléméen. Sur quel point en orient Ta
retrouvé Edrisi? à Fouest ou à Fest de Malaï? L'ingénieur Bonne, en
indiquant les positions de Ptolémée ,. place Kattigora , même sur la
carte moderne, au sud de Cochinchin, sur les rivages de Djampa.
Klaproth, par des combinaisons érudites, dans ses cartes historiques,
lui indique une position proche de Tembouchure de Maïkong ou Kam-
boîa. Je ne sais si c'était l'opinion d'Edrisi , mais si l'on accepte la pre-
mière échelle chinoise Loukikin, à Loui-tscbeou, on n^aura rien à
objecter contre cette position de la dépendance chinoise. Edrisi évalue
à six journées son éloignement de Loukikin, à moitié chemin se trou-
vait Senf ; or, Senf , d'après Edrisi, serait sur les côtes de Gochinchine,
où se trouve le port Xouandry.
Edrisi dit qu'à trois milles de Senf résidait, dans une ile, le roi
Komar ranid. Tout près au nord de Xouandri , on voit deux îles Kambir
di mar et da terra ; non loin , vers le sud, se trouve la baie de Romarin.
Je ne prétends pas chercher dans cette coïncidence des noms, de con-
firmation pour la position de Senf : l'île du roi Komar ranid est assez
douteuse elle-même : mais je ferai observer qu'on ne trouverait point
de semblable analogie dans les parages où les premiers navigateurs
paraissent avoir touché au Senf.
Ce qui est indubitable, c'est que la première échelle de la Chine
Loukin , Loukikin , n'étant pas une dépendance , mais située dans la
Chine même, fut éloignée de Khanfou de âO journées de marche par
terre; par une grossière erreur, le texte donne la même distance,
4 journées par mer. Qu'elle était au-delà de Tarigourgan , de Kattigora
et de Senf» qu'étant éloignée de Senf de 5 journées (et même si l'on
voulait de 8), eUe entraîne Senf d'Edrisi sur les côtes de Cochinchine,
à Test de Malaka. Enfin , que File Malaï touchait au continent par son
isthme péninsulaire sur la position du ptoléméen Kattigora.
La situation de Senf, fixée ainsi, facilite à Finfini la dispersion des
distances qui rayonnent de ce point par toutes les directions. Celle de
4 journées, qui se dirige par le continent,, conduit à Lxtl^Kaschgora,
qui e^t Ketschou ou Keskho du Tonquin, qu4 était, du temps d'Edrisi,
capitale du royaume Kaotscha, d'où plusieurs chemins se répandent
dans Fintérieur des régions du nord.
IS» Les distances de Siiûa sont tout à fait isolées. £Ues forment un
réseau distinct et séparé. Partant de Sinia, elles se dirigent vers le
nordhiuest,. avançant très profondément dans le pays, sans se commu-
niquer afv>ee aueune autre distance sortant de FHindoustan ; car on ne
peut pas considérer pour une disUnce giéograt»biiqtte les deux mois de
\6 CARTES DE l'nDB
marche pour arriver de Khanfou à Badja, capitale de ^%^ Bagboug
(ou ,^ix3 Fagfour).
Sinîa est située à l'extrémité orientale de la Chine. C*est ce que la vingt-
sixième carte de Ptolémée indique. Ce n*est pas la capitale , seulement
la résidence d'un vassal. Aucune ville ne Tégale et elle se trouve dans
une plaine marécageuse. Ne serait-elle donc Hang, Quinsay, qui, dans
des temps très- reculés, portait le nom de Tsian, proche de Kanfou
(Gampou)?
La capitale de la dynastie de Soung était Pian (Kaîfong), située sur le
fleuve Khamdan. Mais Edrisi donne une telle distance de Sinia ou de
rextrémité de la Chine à la capitale io.b Badja, qu*il est impossible
de s'arrêter à Pian et de ne pas avancer jusqu'à Khamdan ou rancienne
capitale des Thangs , visitée par les premiers navigateurs. Le nom de
Badja dérive cependant de Pian, appelé Pian tschéou avant qu'il devint
capitale; il est écrit ysr^, Pandjou par Nassir Eddin et ses copistes , et il
faut convenir que cette capitale a été de bonne heure connue chez les
Arabes; vers 958 Ibn Ketir la plaçait sous le nom de Melik al Sin ou la
royale de Sin, dans le premier climat; de même en 1005, l'astronome
égyptien Ibn lounis déterminait l'emplacement de Melik al Sin , par la
longitude géographique 164<^ 40' et la latitude 18® 0', lesquelles résul-
tent de 6 journées de distance entre la royale et Khanfou.
Quant aux autres positions littorales, qui sont certainement du
nombre de douze échelles, leur emplacement flotte entre une succession
régulièrement suivie ou dérangée Jb \^ ^y^ Kouanla ou Kivanla
et t^lJ Lkili Kaîtova ou Kabatova, supposant qu^elles précèdent
Khanfou, seraient l'île Hai-lin et Kouangtoung (Canton). Si l'on voulait
admettre un plus ^rand désordre dans les positions littorales, Kouanla
trouverait Uou-lei vis-à-vis de Fornose. Si l'on avait confiance dans
l'ordre de la carte, il faudrait renvoyer ces deux échelles au-delà de
Khanfou (lâ).
10. Ma composition édrisienne a été construite lorsque j'entrepris
d'en faire la confrontation avec les grandes cartes de KlaproUi, delà
Chine et du Japon, de l'Asie centrale en quatre feuilles, et avec plu-
sieurs spéciales d'autres auteurs, d'Âssem, de Himalaya, etc. Cette con-
frontation m'a déterminé la leçon de plusieurs épigraphes qui ne se
trouvent pas dans le texte édrisien ; elle confirma la situation de plu-
sieurs positions par des noms analogues.
A partir de Tarigourgan (Arakan) et de Kaschgar (Keshko), les dis-
tances 4 au lieu de 7 et 8 s'appointent sur Asfira (Cospur, Khaspour).
D'où par j^Uiat Atragan appelé par la carte ^IJU.! Ahlaragan
(qui ofifre ^ \X^ I Adjalragan, un mot assez tibétain Djal ou Dziang la
rzédzong!) : on se rend à Atraga où s'appointe la route venant de
(It) I^ leçon de Kivanla et de phineors autres noms de localités inconnues est arbitraire. La ctftfl
- qui enrichit la nomenclature édnsienne force à des conjectures basiurdeusas. Son dessinateur a mine
méconnus plusieurs dénominatioqs ; à la place de Khandfon et Kbanjon il a substitué des appelli-
tions postiches qu'on ne saurait qualiier de variantes : Khanfou n*a plus be8<^n de semblables.
ET DE LA CHINE. 17
Loukîn par Kakela sur une branche de Bahanek (Brahmapoulra). Kakela
est sur le chemin de Loukin à Khashmir, sur lequel aucune rivière ne se
retourne vers Bahanek. On y trouve Coïlle à ceruine distance ouest ô&
Bogmuitty, Bognautl. CeUe rivière a peut^tre engendré par confusion
Tappellation de la rivière qui baigne Âsfira.
Bien que Boutbinkh j^ sur «;.L»^ Schcrmakh (Batang sur
Briischou, Mourous oussou, Kin-scha-kiang), ait conservé son nom,
cependant je ne puis tirer rien de satisfaisant pour le Tibet, où les prin-
cipales positions Oudj, Bervan, la capitale même Tibet, sont attachées à
un lac de 40 parasanges, alluvion de nombreuses rivières, appelé
Bervan, et éloigné de 5 journées seulement de Bouthinkh (is). Bouthinkh
est le point par lequel on entrait du Tibet en Chine; or, c*est sur cette
route que se trouve Ihoutischer (Ya, Ya-stcheoufou) d'Abou Riban.
Dans le pays de Tibet se placent les postes avancés des Chinois
Lk^Lw 1-Â.jL^ Siaoukha ou Saoukha (Sok-dzoung, ^sr^^^ Sokdjou
du Persan) et Lili Kascfaa (canton Khâschi,^s^Uk Khadjou du Persan).
€e dernier éloigné de 8 journées de jL^JLo Beschiar (Betschouan ing,
Pe-tcbuen-pou sur la lisière de la muraille chinoise près de Sining)«
place forte érigée sur la frontière chinoise contre les Turks Bagargars.
Ces Turks avaient dressés leurs tentes près du lac s^jtj^ Kovareth
(Koukou noor). Au sud se trouvait Ls^ Tokha (canton des anciens,
Touk et Toukan des cartes historiques de Klaproth), et tout près
t^j!^ Darkhoun (mont Amui ou darghia), dernière dépendance ûe
Chin sur ce point (Edr« III, 9).
17. Les montagnes Karamaut (Hazmakout d^'Abou Rihan , Djamautri
du Himalaya) sUnclinent vers le sud et laissent le nord à l'appellation
de Karen (Kharanggoui tak, à partir du défilé Karakoroum) et pour Sin,
la carte inscrivit plusieurs noms de montagnes: ^:iJt Zedanikh
(Drloddzouk tsien toungra, touche Hoangho au nord de^ Tibet); JL^j^Ut
Lonibarhat (Lonibar couvre du nord la langue du Tibet qui pousse
vers Test dans la Chine); »4j*^La. Henûbrun (ou Djenli tzun? mon-
tagne de Neige Sine-phei-schan s'élève tout près de Tscliangtou). Cette
dernière fixe la position d'Askiria ou Asfiria (Tschangtou ?) d'où on se
rendait par ^^;:^ Khaïgoun (ou Djïgon , Tschinkiang) a Kascbgara
(Kethso).
De Kascbgara s^ouvre encore un chemin qui se dirige vers uy Boura
(Bhanmo, Panmo, Bhamno)en tout temps lieu de traverse de Tlnde
inférieure dans la Chine par Mola , près de Santa , Tsanta sivan fu szu,
(f s) n parait qu'un cofnpotitcur de cartcc an xvr* siêde, a puisé dans l'ouvrage d'Edrisi pour fa-
briquer çertaioes positions de l'Hindoustan : quand il placK Lahor et Delli près d'un grand ilcuve
Emdjesd'Edrisi, chez lui Maodoua) ; quand il ran^e Caboi , Tacan (Touka), Mojku (Bora), Ausuii
laoud), Cangigu (Kanodj), Àruagu (\traga), Calbaca (Kakela], Scoruita (Karamant], prè^du fleuve
geo« Canton. Cette composition, sous le titre de India orientalie, est reproduite par Ortel
(lOt* carte de l'édition i492). Mercaior l'a accepté ea bloc, la modifiant très Icgèremeat.
nr. «
i8 CARTES DE l'iNDE
Mola zanda santa. Les montagnes de Kattigora ^*^^ Kasa-kan, comme
la nomme Tcpigraphc de la carte (du Casi cassay canton d'Âva) , restent
à Toccident. Vers le nord, à 4 journées par terre, 2 journées par eau, se
trouve Ld^^ Toukhaou Ld;.v._Âl»Tarkha, suivant l'épigraphe de la carte
(à Pouest on voit non loin la montagne de Takkah, Tliikitaon, Tukutkfaa;
le pays d'Assam porte aussi le nom de Taeklia). Boura et Toukha, situés
tous deux sur ^^ Kaihy (Iravadi des Birmans, Kiang nga, Takin
tscha, Pinlang, Yarou tzaugbo tsin des Chinois, Sri lohit des Assames,
passe au nord-est d*Assam par un défilé Singghian-Khial (14).
Enfin, quoiqu'on ne puisse pas prétendre retrouver les noms chinois
sous Tenveloppe arabe, nous remarquons cependant que par ce triangle,
qui se forme des distances de Sin, plusieurs noms rencontrent leurscon-
sonnantes :^3JL»Schedhkhour(Setschou); l&jL Taouga (Tengan),*^^
Sola (Tschelilou appelé Tou, Tou-tscheou dans les cartes de Kiaproth).
Au lieu de Askhara, Aschtakhou, Aschtakhak qu'offrent les manuscrits de
Paris, la version latine propose une leçon préférable Asahda et Asanho
^asT^— I (Siking).
C'est tout ce que nous avons pu remarquer dans Tintérieur de TAsie
centrale.
48. De toutes les positions littorales, Khanfou et Djanfou seules sont
déterminées par distances. Entre ces deux échelles, il y avait 5 jour-
nées, Djanfou est donc Hoaïiigan à l'embouchure de Khamdao.
De Senf et de son île contiguêRomar, il y a 10 journées à Sendîfoulat,
et de cette fie 4 encore à Khanfou. La posilion de Sendifoulat est toute
différente de celle de Sendirfoulat, indiquée par les premiers navigateurs.
Cette position édrisienne conduit vers l'île Formosa. Peut-être que son
nom chinois Manti (Maïd) n'était pas inconnu aux Arabes, à qui il fallait,
à partir de Maiaï à travers les îles et les rochers (qui sont nombreux en
pleine mer), un mois entier avant d'atteindre Khanfou : mais Edrisi
confond les relations de différentes époques et change les appellations.
De Senf à Malaî, il y a à travers les îles 42 journées. Ces journées sont^>
spécifiées de la manière suivante. De Sent 4 à l'île J^Lw SchameB
(Kondor), qui est une^tation chinoise; puis 4 (par erreur, au lieu de 7^
nécessaires pour évaluer les 12) à l'île Ij^^lc Aaschoura (Aor); euûtm
1 journée jusqu'à Malaï (cap Romania).
Les navigateurs disaient qu'à partir de Malaï, il fallait passer, à tra-
vers les îles et les rochers, un mois entier pour arriver à Khanfou. Les
géographes ont pris au sérieux, et géographiquement à la lettre, cette
relation. Abou Riban et ses successeurs, ainsi que le géographe persan,
comptaient entre Keleh et Khanfou 30 degrés de distance. Ce sont les
50 journées dans lesquelles se trouve cette traversée d'un mois. Edrisi
(r») Pcul-ôtrc ce Khial, cache le nom de Kalhy et la position de Toukha sur les confins da Tibet.
— Je dois remarquer qu'à rexplication des positions qui se présente à mes examens , mainte fois les
distances ne répondent pas sumsammcnt. Je pense que plusieurs do ces distances sont engendréei
par la composition de fa carte, déterminées ensuite-sur l'échelle au compas. U est xum remit-
qnable d observer en Chine et au Tibet, un singulier concours de chiiTres douteux*, 3, *, 6, 7 , «,
siiscpplibles de double sens et de la leçon dubitative.
KT DB LA CHINE. 19
Ta spécifié par 42, le et 4 jouroéos (en somme 26) par Senf et Sendi-
foulai à travers les îles de la mer Senf.
19. L*lie du camphre, qui avait à Poeeident Fanfour (Kamper)» au midi
Keleh, longue du nord au sud, la grande Sarlra (Djaba) , la plus grande
des Zabadj, fut ùiée par Âbou Rihan et le persan à 6 et 8 d^rés (ou
fumées) , à Test de Serindib. Sa partie seplentrionMc de même à Test
a 6 degrés de longitude relative, et 9* de latitude nord; enfin la par-
tie méridionale Keleh, de 8 degrés de longitude difiérettUelle et 3
degrés de latitude nord. Edrisî relate cette position, quand il dît que de
Serindib à Keleh il y a 3 (lisez 8) journées.
On a 10 jou/nées de Serindib à (^jJLSci Lankialîous (Lankevî),
qu*on nomme aussi (^^Jlsr^ Landjalious (Langkava), et de Lankia-
tous Keleh, 5 ou 6 journées. Ces six journées sont spécifiées par deux
journées à File s^^Ia Djalous (Djara), ensuite par deux journées à
«b^ Binan ou ^û^^ Binoman. Cette dernière est à 3 (lisez 8 journées)
(de la distance géographique en degrés) de Serindib, et avec sa grande
ville est située au sud de Rami (Keleh). Or, Binoman est éloignée de
Lankialious autant que Keleh, c'est-à-dire de 6 journées. L'une des
deux distances de 2 journées est lésée et c'est la seconde , au lieu de v^
elle doit être ^ 4 , ou j 6. C'est une des tics adjacentes à Soumatrâ :
Bangkalis, ou Linga, ou Bangha.
Le mihradj possède la grande Rami (Soumatrâ) et les fies du voisi-
nage qui ne sont éloignées Tune de l'autre que d'environ â parasauges.
Ce sont ladbL» Selahet (Salanga, Sejnbiiang,Djounkseylon), qui donne
son nom à la mer Selahet (is); ^ j» Heridj (un tlot Djardjak, Djiradja
situé entre Malaî et l'île Pinang, ^donnant son nom à cette dernière),
^jla. Djaba et LjL» Maîtou LjU Habet (Bintang?).
A gauche de Maît (au nord), à 1 journée se trouve iajXj Tenouma
(Natouna), éloignée de 5 journées de l'île jL^i Komar (probablement
c*est y^ Komor, dont le roi fesait la guerre au mihradj de Djaba ; si
c*étalt Komar ranid, la distance serait censée de 10 journées) (ic).
Les possessions de mihradj Djaba sont sur les rivages de la mer Senf,
et l'île >b! Âïam ou >Ut Ânam (Anamba) se trouve à l'entrée de cette
mer : eJle s'ouvre à l'est de Malal jusqu'à la mer de Sin et sa
partie méridionale porte le nom de ^j^^j^^ sS^y^J^^ ^^J^J^^
(4B) Selat en Malaye e«t détroit. Les Malais appellent la mer aux cnTÎrons ée Singapour» Selat,
c*est-à<dire détroit. Il est probable que l*ile Selahet est l'île dii détroit et la mer Selahet n'est rien
qoe le détroit Malaî, dont les Arabes étendaient là dénomination à la mer entière par laquelle ils se
rapprochaient pour entrer dans Selat on détroit.
(46) Je pense que l'ouvrage de l'amiral tourk Sidi-Ali , qui sous le titre de Mobyih, traite cii 4SSi«
de la navigation dans les mers de llnde, n'offire rien de contraire aux indications que je viens de
donner, au contraire, il les confirme. Les navires arrivés vers Adicm de Soumatrâ, montent la mer
Sour se rapprodier des rivages de la pâainsnle et ils aiment mieux ta côtoyer q«c la tourner le long
e SoHaatra. (Reiaaud, introd. à la géogr. d'AboalC p. 4S4-4SI4}.
20 CARTES DB L^I«DE
Darlazoui, Darlaroui, Darladeri (mer au sud de Bornéo), sur laquelle la
situation des iles est indiquée moins positivement.
20. On a observé les pointes et les langues de terre se métamorpho-
sant en iles; de même une île, abordée sur plusieurs points, a pu se
crevasser en plusieurs îles dans les descriptions arabes. Â Hle Ramî, à
File Kelch il ne manquait pas beaucoup de se fendre en deux îles diffé-
rentes. Ces iles sont en effet des sections de Souraatra et nous allons voir
que ces sections ne forment pas encore le total de Soumatra qui produit
du camphre, d'excellent camphre, du camphre supérieur à tout autre.
D'Anam (Anamba), qui est à Feutrée de la mer Senf, il y a pari
journées à File ^fy^ Souma ou t^j^ Soborma et à File ^y
Modja, éloignées de 2 journées Fune de Fautre. Quand on veut disposer
de ces distances on se trouve dans une perplexité fâcheuse. Cependant
nous sommes forcés d'entrer encore dans Fîle Soumatra, divisée en plu-
sieurs états et disséquée en plusieurs îles par la narration des Arabes.
Souma ou Soborma, Schoborna, est entourée d'un grand nombre
d'îles, petites mais peuplées. Son roi se nomme ^^y^ Kamroun. Il
existe dans quelques-unes de ces îles un peuple nommé vJl.'ss^
Foundjet. Les montagnes de Souma produisent du camphre supérieur
à celui de tous les autres pays (de Soumatra). C'est donc la partie méri-
dionale de Soumatra jusqu'à la baie Samoun^ka, possédée par le roi Kam-
roun (Samang et Kavar, cantons du sud), qui en même temps tient sous
son obéissance les îles L^^^^ F^mousa (Pana itan ou du Prince?) et
Ly^^ Lasma.
A l'extrémité de cette mer (Darlazonî), qui est basse sur les rivages,
du côté de la Chine (c'est-à-dire de Fest), se trouve l'île jjL» Maïd
(Java), éloignée de Souma de 4 journées. Elle contient iiîn grand
nombre de villes, formant Fune des possessions de mihradj-djaba. Les
Chinois y ont une station. Leurs navires venant des îles chinoises
(LieoukieoQ? Formosa? Kondor), (ces îles sont
Sahara), s'y rassemblent et c'est de celte île^
dirigent pour se rendre ailleurs (par Sound à Keleh (Galle) de Ceylon,
dans FInde et autres lieux). A 3 faibles journées de Maïd en tirant vers
Fest, on a l'île éF^^ Sandji (Celebes). Au-delà sont encore les îles
ir'ys:*^ de brigands.
De cette île (Sandji) on peut se rendre aux îles iLw Siia ou Saïla (la
mer Soulou entre Bornéo, Celebes et Mindanao et l'archipel de 162 îles
Soulou), lesquelles sont en grand nombre et se rapprochent les unes
des autres. 11 y existe une ville 5^5lil Ankouah (îlote Nanka, ou du
groupe de Tavi-tavi, Nankaan).
Moudja (K'iematan, Bornéo) obéit aux rois qui sont de couleur blan-
che. Cette île touche aux lieux où le soleil se lève. De Moudja à celle
s^lssr*^ sahab, des nuages, il y a 4 journées et plus.
* Nous devons faire remarquer que la carte d'Edrisi s'oppose à notre
interprétation. Elle place Maïd, possession du roi Djaba, tout près du
^;l^ Namandj, y.Lw
|C^ Maïd (Java), qu'ils se
ET DE LA CHINE. 21
rivage de la Chine, et le texte dit que les états du roi Ramroun (qui
sont enclavés dans les possessions de mihradj Djaba) touchent la Chine.
Le rapprochement de la Chine en est la cause (17).
Cette opinion prévalut très longtemps parmi les géographes. Il est
probable que le géographe persan ne rapprochait plus le Yakvak à la
Chine : mais il ne savait pas élever la Chine à sa hauteur. Cependant à
cette époque on a compris cette erreur. La position de Khambaleh
par 46® de latitude étant admise, Khanfon et toute la Chine remontent
et se portent vers le cinquième climat, ainsi que le milieu de Sin, est
donné 50<* de latitude par l'astronome marokain Aboulhassan en i^50;
la Chine s'étend, par plusieurs climats, de 14® jusqu'à 4G° de latitude,
et Khanfon se trouvant entre les i" et 5^ climats, est placé par 58® 55' de
latitude suivant Aboulféda; Abou al akoul fixait une autre échelle
Khansa par 25® 50^ de latitude (1G4® 0' de longitude). Au xiv^" siècle, il
n'y avait que des ignorants, comme Ibn Ouardi, qui redressaient les
images et les figurines réprouvées par la géographie.
C'est tout ce que nous voulions dire des cartes mahomédanes ; main-
tenant nous allons examiner les cartes chrétiennes.
21. Avant l'incomparable perlustration de Polo, la nomenclature
géographique de l'intérieur de l'Asie était trop maigre; après sa perlus-
tration, elle devint trop abondante et sans point d'appui pour les géo-
graphes. La connaissance de cette perlustration s'était répandue bientôt
et les cartes postérieures décèlent les efforts des cartographes pour
composer une image de la grande perlustration. Les cartes catalane, de
Mauro, de Behaîm , traçaient le continent oriental d'après son impul-
sion, renseignées par quelques nouvelles investigations. Pour apprécier
ces compositions géographiques, il faut avant tout comprendre la nar-
ration de Polo. Tâche difficile, heureusement avancée par de multiples
observations qui sont assez connues par des publications populaires.
A l'exception de Sprengel (chap. 28, et de son interprète Malte
Brun, xx), je ne connais point d'érudits ouvrages qui se sont évertués à
expliquer la description de Polo, et par des indications incomplètes de
publications vulgaires, je ne sais pas si l'on est arrivé à l'explication de
tous les points. Sprengel observe qu'il reste pour la Chine tant d'ob-
scurité dans la narration de Polo, que des missionnaires comme Gaubil
et Magalhaens, sur le lieu même, ne purent donner d'explication. C'est
donc de l'audace à vouloir l'éclairer. Cependant la carte catalane et
toutes les suivantes, jusqu'à l'âge des missionnaires et des premières
découvertes portugaises, demandent avant tout l'examen de la narration
(47) Je pense guc la situation du roi Kamroun à Souroatra , est sufllsammeut établie. Ccpondant ,
si l'on voulait réduire sa puissance on pourrait lui assigner une île analogue à son titre, dans les îles
Kariman et Karimata. Si 1 on voulait, au contraire, en faire un puissant voisin de la Chine , il faudrait
le transporter dans les iies Philippines; dans l'ile Samar (Souma) voisine de Kamariues Kaniroun),
partie méridionale de Luzon (I.asma) où l'on retrouve même le peuple Fingnian (Foundjct) : le seul
camphre y manque. Comme le roi Kamroun est voisin de Vakvak , il prctcudruit peut-être prendre
f»o3scssion des îles komorines; il y retrouverait, près des rivages de Mozambique et Zauguebar,
es îles Fourno (Famousa) et Latham (Lasma). C'est un jeu de consonnance qui ne se prèle pas dans
la question embrouillée de Moudja et Maïd. Le vague de la narration de Soleiman n'ompèclic pas du
retrouver Moudja dans Bornéo; dans cette position les Moujahs peuvent être appelés voisins des Mo-
bed qui sont séparés de la Chine par une chaîne de montagnes. Mais la station chinoise Maïd paraît
être Mobed du continent. C'est diCBcile pour les distances qu'indique Edrisi ; l'identité apparente y
est démentie. '
23 CARTES ms L*inDB
de Polo, pour comprendre ces métamorphoses et transfigurations varices
par lesquelles passait le continent oriental dans la cartographie.
22. L*ouvrage de Polo n'étant pas la description de TAsie entière,
contient le récit de la perlustralion faite par tonte FÂsie, d'un bout à
Fautre, circulant à droite et à gauche, loin de pénétrer ses espaces
démesurés. Ce qu'il dit des expéditions mercantiles de sa famille
(chap. 1-19, version latine I, i-10) forme une introduction; ce qu'il
raconte de guerres, ce sont des épisodes de sa diction, qui revient tou-
jours à la description des pays. Il traverse d'abord (voyez planche xvn de
noire atlas) la petite Arménie jusqu'à lasdi (Yezd) et Formosa, €ar-
mosa (Ormuz, c. 20-57; I» 11-24); ensuite il suit l'itinéraire de Cormos,
à travers la haute Asie , jusqu'au bout de Tenduch et aux portes de
Kataï, biaisant quelque peu et déviant par deux excursions, l'une de
Khorassan dans l'Inde, l'autre du Tangout vers les régions septentrio-
nales (c. 57-82; I, 24, II, 8). Après avoir examiné Kambalou , capitale
du Kataï, il trace son propre itinéraire de Kambalou jusqu'à Tibet; il
s'y arrête pour donner une description de quelques pays, situés au sud
et revient sur ses pasà Kataî{c. 82-151; H, 9-51). Ces itinéraires sont
soutenus par des distances en journées de chemin ou milles. La des-
cription ultérieure de la Chine indique ordinairement de nombreuses
distances de positions rapprochées, mais la marche irrégulière de ses
réminiscences ne leur a donné aucun nœud , a laissé dé fâcheuses inter-
ruptions et lacunes, et si l'on suivait à la lettre les directions indiquées
par ponente, sirocco, levante et autres vents de la boussole, on disper-
serait les positions les plus rapprochées dans des distances démesurées.
Polo s'occupe d'abord de la description de Kataï (c. 1 52-1 57; 1 1, 51-52];
ensuite il entre dans les provinces de Mangi , où il pénètre jusqu à
Nangui (Nankin) (c. 158-145; II, 55-58) , d'où il jette ses regards dans
l'intérieur de la Chine et indique vaguement quelques positions plus
importantes (c. 159-151; II, 59-64). Lui-même il a passé trois années à
Mankin et il le quitte pour décrire les particularités de la province de
Quinsaï (c. 152-154; II, 65, 67); ensuite de celle de Foukin (c. 155-157;
II, 68-71). Or, il n'a donné que la description de Katai et de trois pro-
vinces de Mangi , le reste de la Chine est un espace presque vide.
Dans la province de Foukin, arrivé à Zaïton, Polo s'embarque pour
aller dans 1 Inde, qui devait terminer sa narration, d'après la promesse
qu'il avait faite (c. 49: 156), lorsque son récit fesait une irruption vers
le Gange. Par cette expédition maritime il exécute une revue des îles, ne
s'arrêtant lui-même qu'à Java (c. 158-175, III 1-20). Cependant la des-
cription de la grande Inde et de la petite ou de Rasmacoran (du Mecran)
(c. 174-189 ; III, 21-58) ne termine guère son récit : il le prolonge pour
s'entretenir de l'Abissinie , des îles africaines, et des rivages commer-
çants de l'Arabie (c. 190-197); IH, 59, 49); enfin de la Tarlarie (Kap-
tscbak) et du septentrion jusqu'à la Russie (c. 210-227; III, 50-64).
Tout le monde aujourd'hui comprend ainsi les relations de Polo, mais
les cartographes anciens donnaient d'autres interprétations, chacun
à sa guise, ils s'efforçaient d'en faire l'Asie pleine, ne laissant aucun
espace par les déserts mêmes qu'il fallait traverser des mois entiers, ni
pour les régions que Polo n'avait ni visitées ni mentionnées.
ET DE LA CHINE. 25
25. Je vais suivre Marco Polo à partir de Lop et je TabaDdonnerai dès
qu'il entrera dans llndouslan, ou plutôt dès qu'il mettra à voiles,
parce que sa perlustralion des îles se trouve dans mon portulan. Je me
bornerai à la nomenclature et aux distances, sans vouloir défendre les po-
sitions arbitrairement indiquées, mais je ne manquerai point d'affirmer
mes allégations par des remarques positionnaires , quand elles se pré-
senteront pour guider la route parcourue.
Marco Polo de Lop se rend par le désert (Gobi) à Sacchion
(Schatscbeou), provinces situées sur les confins occidentales de Tangut
d'où, après avoir fait une excursion vers Gamul (Hamil)et Ghingilala
(Âimalig, Iligouidja), il retourne dans le Tangut par une autre de ses
provinces Sictin, Suctam, Suctang, Suctur, Suceur (Soutschou). Ensuite
il se rend à Gampition (Gamexu, Kamtschik, Ran, Kantscbeou), où il
passe toute une année.
Une nouvelle excursion le conduit à 60 journées vers le nord. Il tra-
verse la province de Tangut appelé Egina, Ezina, (Schitschona situé
sur la rivière Edzine, Etschine), pour se rendre a Garacorum. De
retour, il part de Gampition et se dirige par Er^imul, Ergigul(Liang),
province de Tangut, voisine de Fingui, Tingi, Gingui, Singui (Sining),
et par une autre province du Tangut, appelée Grigaïa, Egigaïa, longeant
la muraille qu'il passe sous silence et le fleuve Hoang, (touchant au
monument Tschagan, Egigaïa?) jusqu'à la grande ville Galatia (un bras
de Hoang, porte le nom de Galooton Ralotou). Enfin il quitte Tangut
pour entrer dans le Tenduch du prêtre Jean.
Tenduch s'étend au nord de la Ghine et du Kataï et ses villes se sui-
vent dans la direction de l'est : la grande ville Tenduch (Thian-te de
la carte 1125, 1226, des tableaux historiques de l'Asie de Klaproth);
ensuite on atteint en 7 journées Sindatus, Sindacui; en 5 journées,
Giagamor , Giangamor , Singamor (on a Tschangoun Khamar près de
Tota, mais cette localité se trouve trop rapprochée de Tenduch); enfin
en 5 journées Giandu (la carte 1568 de Klaproth des tableaux historiques
de l'Asie, place Ghang-tousurGhang-tououSchampira au nord de Pékin
près du lac Dolon; les 15 journées de Tenduch peuvent y atteindre. J'in-
dique sur ma carte deux supputations sur les quatre positions de Ten-
duch). Giandu possédait un palais de plaisance d'une récente construc-
tion. La montagne Ydifu fait partie de la chaîne de In, de In-schan.
21. A Taîdu, Gambalu (Pékin), Marco Polo reçoit une mission au
Tibet et nous allons suivre son itinéraire de 4 mois. Partant directe-
ment vers le couchant, à 10 milles, il passe le fleuve Pulizangin, (le
pont Loukeou Khiao sur Yang ou Sangkan), ensuite, à 50 milles,
la ville Giogui, Gin, Gingui, Quingui (....); puis, à 10 journées,
Taîanfu (Taïyuen-fou; puisa 7 journées Païnfu, Pianfu (Pinyang); à
2 journées un château Gaïcui (Kie, Ky-tscheou); d'où à 20 milles passe
le fleuve Garamoran (nom mongoux de Hoang, Hwang, du fleuve jaune).
A partir de ce point l'itinéraire devient embarrassé, presque sans guide :
à 5 journées se présente Gacianfu (Fou sur Lo,. au sud de Kantsiouen),
à 8 journées se trouve Guingui, Gingui, Guenghian, Quengian (Kinyang),
un fou et capitale de la province du même nom , dont les frontières à
5 journées touchent la province Guucur (la rivière Tao, porte le nom
24 CARtËS DE L^IMDE
Coco oussou et Courcorson, d'après la carie de James Wyld). Etant entré
dans cette province, Poio traverse 20 journées et arrive à une contrée
de la province achalech Mangi ou des confins du Mangi. Cette contrée,
cet achaiecli n'a que deux journées d'étendue. Elle s*étend du versant
orientai de Lonibar vers le sud, rasant cette langue du Sifan ou Tibet
qui se prolonge dans Tintérieur de la Chine. Delà à 20 journées, Polo se
trouve dans une grande ville de la province Âuchota, qui est aussi aux
extrémités occidentales du Mangi. La grande ville porte le nom de
Sardanfu,Sindafu,Sindinfu, Sindifu (Tchang-tou-fou). Un fleuve la
traverse; éloigné de la mer où il se perd de 80 à 100 milles, appelé
Quingia-fu, Quian, Kyam (Kiang). Par Tschaugtou Polo passe la rivière
Mahou,qui verse ses eaux dans Kiang; croyant quMl passe le grand fleuve
Kiang même; de ce point en 5 journ. (par Batang) il entre dans le Tibet.
2o. Des nombreuses positions de Fimmense Tibet, des villes, lacs,
châteaux, fleuves, montagnes, Polo ne donne aucune particularité. Il a
traversé 20 journées par un pays ruiné, avant d'arriver au centre pré-
servé de la destruction. 11 quitte le Tibet sans dire de quel côté et sans
faire connaître de combien de journées il s'est éloigné de ses frontières;
il parte de Ciandu, Caindu , Gaindu , province qui est vers ponent. Ce
ponent n'est pas au couchant do Tibet, mais de la Chine et du groupe
des provinces qu'il entreprend de passer en revue , qu'il va en partie
parcourir lui-même : Qui s'aviserait de suivre ce ponent à partir du
bout occidental du Tibet, arriverait facilement jusqu'au centre de
l'Europe, sous les murs de Paris ou de Rome. Aussi cherchons et trou-
vons-nous le ponent de Caindu, au sud d'Assam,en fixant nos regards sur
la plaine spacieuse de Kunduyun^ (voyez la carte de l'Inde au-delà du
Gange de Juste Perthes) , plaine limitrophe de la Chine, située à l'occi-
dent. Elle semble conserver le nom de Caindu, (Bisa en était probable-
ment la capitale); et c'est en descendant de cette plaine que nous re-
commençons à compter les journées de Polo.
A 10 journées, sur les limites de Caïndu, Polo passe un fleuve qui
court vers l'océan ; son nom est Brins, Brunis ou Ligays ^Iravaddi, près
de Bhamo; Kaungtoon, Kountoung et Kountoun, dernières limites de
Caindu). De l'autre côté de ce fleuve, Polo trouve la province Caracham,
Caragian, Caraian, Karman (Karaîayn limitrophe de la Chine). Cette
province contient sept régions; sa capitale est lacin (Ava) , il s'y trouve
un lac de cent milles de longueur (lac Sandagando au nord d'Ava : en
vain en chercherait-on un autre). En avançant 10 journées vers l'occi-
dent, on rencontre la province et sa capitale Karacham (Arakan) et, à
5 journées de ce point, toujours vers l'occident, la province Ardandan,
Cardanda, Zardandan (Djatagom). Il parait que cette dernière est assez
voisine de Bengala , parce que Polo parle immédiatement d'une expé-
dition que les rois coalisés de Bengala et de Mien (Pegou) firent contre
Yociam, ville de Caraîan.
En descendant de Caraîan vers le midi , on entre dans la province
Anniz (Siam)? située par 15 journées sur les confins de l'Inde; et en
parlant de cette province, à 15 journées on trouve Mien (Pegou). Il y a
là au bout de l'Inde encore une province très-méridionale que le grand
kau mongoux n'a pas conquise.
ET DB LA CHINE. 25
A Test est une province soumise, appelée Caigu , Ghangi , Cangigu ,
Gagigu, Gangiga, Emugiuga, Talugigia, Galugigla, Gaiigula (telles sont
les variantes, choisissez!) (Junzalaen près du fleuve Hululhaluen, au nord
de Martaban), elle fait peu d'aflaires à cause de son éloigneraent de la
mer (les provinces précédentes devaient donc être plus rapprochées à
la mer).
Encore au levant est la province Amu , Camu (Kema-lataïn) et on
compte de Camu, 15 journées à Gaiigula, âO à Bengala, et 8 à Toloman
(Tali). De cette dernière province qui est orientale (relativement à Tlnde,
à Karaîan, etc.] , on entre dans une autre orientale, appelée Gingui,
Guingui, Cagui, Cugui, par laquelle, longeant 12 journées un fleuve
^Kinscha Kiang), on arrive à Sinugul, Fungul, Sinulglu, Funigul
(Soutscbeou) , ville considérable, d*où, par le même fleuve (Mahou) on
revient à Sindifu (Tschiug-tou), ville jusqu*à laquelle Polo, en partant
de Cambula et Gingui, avait parcouru 70 journées de route (les jour-
nées spécifiées de Guingui jusqu^à Sindifu , montent en somme jusqu'à
73 journées).
26. Ce long voyage de 4 mois, (autant pour se rendre au lieu de la
destination et plus pour retourner,) étant terminé, la relation de Polo
fait un recensement des villes du Kata!, dont la plus grande partie
paraît avoir changé de nom. Elle indique à 4 journées au sud de Guin-
gui, qui est éloigné de 40 milles de Cambalu, la position d'une ville
considérable Tacanfam, Gacansu (Hokien); ensuite les deux villes Gin-
glu, GiangIu,Giunglu (Kolan) et Siangli, Ginamgli, Giangli (Yulin?) éloi-
gnées de 5 journées Tune de Tautre; leur terrain est traversé par un fleuve
(Garamoran?). Vient ensuite Singui, Singuimatu (Lintschin, Lintein)
dont les habitants divisèrent la rivière de manière qu'un bras se dirige
vers le levant (canal vers Mangi) , l'autre , occiental, vers Kataï et vers
Gambalu (rivièreYuntiang)(i8). A 3 journées au nord est située Tadinfu,
Godifu , Sindifu , Gondifu (Tsching-fing?), cité puissante qui est chef de
15 villes. De Singui 8 journées vers le sud à Lingui (Lou), ensuite
3 journées à Pingui (Pi) qui est situé à l'entrée de Mangi, Manzi.
En entrant dans Mangi, on passe le fleuve Garamoran, lequel a une
cité deçà et une delà : ce est en contre le una à l'autre. La una a nom
Goigangui (Hoïaïngan) et l'autre a nom Quanzu, Gagui, Gaigni (Tsinho
bien), que le une estgrant cité et la autre est pitete et desormes quant l'on
passe ceste flum , adonc entre en la granl province de Mangi, La grande
province est composée de 9 provinces. Dans cette première, une à une
journée de Goigang, par Panchin (Pao in hieou), par Gain (Kaoîeou),
par Tingui, Gongui (Taï) distante de 3 journées de l'océan; enfin, par
Langui , Yangui , (Yanstscheou) qui a 27 villes sous sa dépendance, on
arrive à la capitale de Ta province Manghin, Naînghin, Nanghin (Nan-
king). Polo demeura 3 années à Yangui suivant le texte vulgaire , ou à
Nanghi, comme le dit la version latine. Les textes vulgaire et latin
appellent cette première province du Mangi indifiëremment Nanghi et
Manghi.
(48| Singni-matu se "retrouve dans la relation d'Oderich : Sunzotnaco , Sumacoto , Suzupato et
dans le resumé^de Glaz , Sucumat ; dans Manderille on a : Sugarmago, Sugiomago.
26 CARTES DB l'iMDB
27. Le narraleur profite de cette pause de ses pèlerinages, et entre-
prend de fournir quelques indications sur Fintérieur du spacieux
Mangi (c. 146-154). Cette partie de son ouvrage est la plus obscure. Le
texte vulgaire et la version latine sont en désharmonie; les variantes y
sont fâcheuses. Tout ce qu'on peut discerner avec certitude , c'est que
sa narration revient encore une fois à Guenghian, d'où à 5 ou 4 journées
se trouve Gingliianfu, Singianfu (Singan), où les nestoriens avaient
plusieurs églises, (c'est leur Khomdan).
Celle position certaine n'a aucun rapport avec les autres, si ce n'est par
la remarque que, pour se rendre à Taygui, Qucuî, Caîgui (Kieu, Kiang),
il faut passer le fleuve. Caïgu est une piteleciteet a ceste cite se recuite
grandisme quantité des blés et se porte jusqua Cambalu a la cort deou
grant kan por eive, ne entendes por mer, mes per flus et por lac. Il est
donc évident que cette petite ville se trouve sur le rivage méridional du
Quian, et il cstprésumable qu'elle précède le lac (Poyang) , situé sur la
frontière du grenier de l'empire (de la grande province de Houkouang|.
De mémeSingui est placé sur le Quian, à 15 milles d'Ângui (cap. 147),
(la version latine supprime ce nom et laisse croire que les 15 milles se
rapportent à Saïanfu). Cette ville Singui, ne est mie trop grant mes ele
est de grant naïves et de grant mercandies, de milliers de navires
stationnent sur ses rivages. Le fleuve est large, passe par un lac
(Poyang), ayant plus de 100 journées de cours; elle traverse 16 pro-
vinces et âOO villes, ses eaux sont conduites vers la capitale, ainsi qu'en
suivant ses eaux on peut se rendre à Singui (comme de Caîgui) jusqu'à
Cambalu, à la cort du grant kan. Il paraît aussi qu'avec d'autres posi-
tions, la narration de Polo rôde encore près du Quian.
Voici une autre cité (province) Singui, Tingui, Sugui, cité immense
de 40 milles de circuit, dont la population pourrait conquérir et cou-
vrir le monde, qui a 1,600 ou 6,000 ponts dominant les galées, et dont
les montagnes produisent la rhubarbe et le gingembre. C'est donc
encore une cité riveraine , le gingembre la porterait vers le sud , la
rhubarbe vers le nord. Et sachiez qe le nom de ceste cité qui est apellé
Sugui, vaut a dir en franzois, la terre et un autre cité que est près de
ci, est apelles le ciel, et cesti non ont elles par lo grant nobililé. Polo
promit de s'entretenir de la cité du ciel et s'il ne l'a pas oublié, il faut
la distinguer dansSiangan, Ciangan (cap. 151, p. 167) cité mont grant
etrige, passée sous silence dans la version latine (II, 64). — Honan,
considérée comme centre de la terre, pourrait prétendre à cette insigne
épithète de terre , mais dans toute cette province rien ne répond à la
grandeur et à la position de Singui, Sugui. Elles ne passent qu'à l'une
des 200 villes mouillées par le Kiang (Voutscheou ?) ; et la ville du ciel ,
Ciangan probablement, n'est pas trop éloignée (Tengan? une montagne
Thian-mu et un hian, Thianmen, au nord et au sud de Tengan, pa-
raissent porter le nom de célestes). A une journée de la cité terresti'e
est Yngui, Yugui (Hoang tscheou), et il y a , en outre, Unghi, Unghim,
Yguin (Nganking?).
Enfin on trouve encore au centre de la Chine, Cynfani, Cianfu,
Sianfu, Saïanfu, Sagianfa (Siang yang fou?) chef-lieu de 12 villes qui,
repoussant trois années les attaques des Mongoux, fut à la lin prise à
l'aide de la machine construite par les Polo.
ET DE LA CHINE. 27
28. Dans la provioce de Quinsay, se trouvent la grande capitale
Quinsaï (Hang-tscheou) ; le port Garapu, Ganfu (Kanpou). A i journée
de Quinsa!, Tarapini^ui, Tapinzu ( . . . ); à 5 journées Ungui
(Ning po?); à 5 journées Chengui, Gengui, Gbingui (Kinhoa) , à 4 jour-
nées, Ciansian, Ciancian, Ciangiara (Koangsin, Kouang sin) traversé par
une rivière située sus un mont (rivière et canal Kouang, au nord granit
bills, à Test Poulsching mounts et pass); à 5 journées encore, Cingui,
Cagui (Tschou tscheou).
Enfin, à partir de Cugui royaume de Quinsay, s*étend de 6 à 7 jour-
nées le royaume Fuchin (Foukian) ; à moitié de sa longueur se trouve
une grande ville Qiielifu,Quenlifu (Ting tscheou fou près des montagnes
Taïouling); à 15 millesou 3 journées est une fabrique de sucre à Unquen
(Youn tschoun sur Nanganan); à 15 milles de ce lieu est Fiigui (Foul-
scheou), capitale du royaume Concha, Chonka (Kiang-tsche de la carte
1290 de Klaproth, tableaux histor. de TAsie), située sur une large
rivière (Min). Une fabrique de porcelaine existe à Timigui (Tong mou
koeu, dans les montagnes Sia hialing, près de Fun shuey kuon pass);
à 5 journées de Fugui se trouve Féchelle de Zaîton (Thsiuan tscheou ,
Tseou toung, or Chinchew et Harb).
Qui voudrait examiner ce quanquan chinois serait certainement fati-
gué. J*avoue que ma fatigue est à son comble. Peut-être plusieurs
positions qui m'ont donné tant de peines infructueuses, ont été depuis
longtemps déterminées par d'autres. Je Tignore, et j'étais forcé d'ana-
lyser la narration de Polo pour pouvoir observer les compositions pos-
térieures.
La revue de la situation des îles se trouve dans le portulan; les
positions de l'Inde ne demandent plus d'examen ; le reste explique la
petite carte de notre atlas et plusieurs passages du texte ou des notes de
l'ouvrage (lo).
29. Marco Polo n'était pas le seul qui voyageait et fesait ses affaires
au fond de l'Asie. D'autres, en grand nombre, suivaient ses chemins en
toute direction, et plusieurs de ces voyageurs , rendaient compte de ce
qu'ils avaient observés. Oderich de Portenau (mort 1531), retrouvait
dans son apostolat les positions indiquées par Polo. Sa relation était
copiée et résumée en 1340 par Henri Glaz. En même temps, l'aventu-
reux Jean Mandeville, depuis 1327 voyageur, composait sa narration et
la terminait en 1356. Us firent route par l'Inde jusqu'aux Mangi et Ka-
taï. François Balducci Pegoletti, en 1335, prit un autre chemin vers la
Chine; le franciscain Paschalis, en 1338, le suivit et le journal de leur
route fut connu. Ils passaient à travers l'immense continent, prenant
une direction plus au nord par Almalik et Ramoul.
La relation de ces derniers touchait des positions ignorées de Polo ;
celle des autres suppléait ses connaissances par quelques nouvelles ob-
servations, augmentait la variété de la prononciation et de l'orthographe
des noms , et engendrait l'incertitude par de maladroites répétitions.
Mandeville, ne s'éloignanten rien de la relation d' Oderich, entreprit de
(19) Voyez plusieurs notes des chap. 143-147 cartes des géographes du moyen âge ; examen géogr.
de Benj. de Tudele , etc.
28 CARTES DE l'iMDE
la décorer de tout<s sortes de contes et fables populaires pour en faire
une lecture divertissante, et le monde de cette époque goûtait ces mer-
veilles fantastiques et peu croyables.
La possession du prêtre Jean, Tendoucb, se changea, dans la relation
de Mandeville en îles et provinces de Bacchus. Il y nomme le fleuve
Thebe (de sa naissance), les villes Nyse et Suse (de ses tournées par le
monde); une province Milstorac, du dissipateur de la mollesse (à ntXXoç
mollis et vropiuç strator); et les îles Taprobana , Bragman et Pentaxoire,
de cinq chœurs de son culte (Tcsvraxopoç ou ««vraxw/soj de cinq contrées.
Les compositeurs des cartes étaient souvent embarrassés pour discer-
ner ces bijoux populaires de ce qui était essentiel ; il leur était difficile
de renoncer au paradis, aux mages visitant le Christ, aux pygmées, à
rhistoire d'Âlexandre-le-Grand , à Tante-Christ. La carte catalane
de 1377 ofire un beau spectacle sous ce rapport : mais en même temps
elle offre, comme nous Tavons observé, quantité de renseignements
inconnus aux précédents voyageurs. Tana disparut dans les posses-
sions du roi de Delly. Il semble que le nombre de 13 puissants royaumes
s*était réduit à un nombre très-inférieur. Les enfants charnels d'une
mère qui calmait leurs dissentions, ne vivaient plus et leur postérité
ne rappelait plus ni Yar, ni Coîl : un roi de Colunbo paraît posséder
Elly et tout le sud de la péninsule. Le roi Etienne (de Moabar),
garde le Koromandel et le tombeau de S. Thomas. La carte catalane pos-
sède des renseignements au delà de Bengala , jusqu'au finis Indiae et
Katayo, jusqu'au Zayion, où la narration de Polo laissait une lacune
vide pour tout le rivage (20).
30. Nous avons remarqué plus d'une fois, dans la composition du ca-
talan, un désordre et des doublures de positions. Au premier cou p-d'œil
son Catayo (Chine), décèle le desordre. La question relative à la répé-
tition des noms qui se ressemblent tant l'un à l'autre, exigeait donc
la plus sérieuse attention dans le colla tionnement avec la nomenclature
de Polo. Le résultat que je réussis à obtenir pour le portulan et pour la
carte explicative a dispersé pour moi toutes les apparences de répétitions
et débrouilla quelques nouveaux renseignements.
Pour Tenduch, les quatre positions visitées par Polo, sont au grand
complet et il semble que Zazaber (Dourban?) est encore une cinquième
position de Tenduch. Pour Tangut elles sont incomplètes : mais Camuell,
Cigicalaf (Gingitala) et Carachora ne sont pas oubliés, bien que ce der-
nier soit inscrit entre Emelecb, Lop et Elbeit (Eleut), dans un péle-méle
de positions placées en désordre.
Les connaissances acquises pour Marco Polo furent mongou-chinoises.
C'est par leur organe qu'il les avait acquise et communiquées à l'Eu-
rope. Les voyageurs suivants purent facilement les retrouver et véri-
fier un certain temps, jusqu'à la dislocation de l'empire du grand kan.
Cet empire une fois en ruine, les routes centrales cessèrent d'être pra-
ticables, toute l'attention des commerçants se porta vers l'Inde et ses
épiceries. On cessa de pénétrer jusqu'en Chine. Le nouveau langage
hindou, sinslallant dans la géographie, allait se rencontrer avec les
(20) Voyez : cartes des géogr. du moyen âge, chap. 145, 144, 145 ; le portulan général M, 51, 5f .
ET DE LA CHINE. 29
connaissances du Vénitien , dont le langage devenait inintelligible. Les
renseignements que le catalan étala sur sa carte, offrent ce passage des
investigations de Forgane mongou-chinois à celui de l'hindou.
31. Le camaldolèse Mauro avait des renseignements plus nombreux
encore que le catalan, plus récents et plus hindoux. Il était érudit. En
rejettant les monstrueuses proportions de Ptolémée, il tacheta sa carte
moderne des noms de Citia et Sitia de mont Imaus, des provinces Sace,
Serica , monts Hyperboraei et Riphaei : mais il étudia la narration de
Polo. Examinant celte suite de noms qu*il a extraits de cette narration,
il faut avouer qu'il la comprit à peu d'exception près, quand il règle les
régions maritimes de la Chine' et de Tlnde jusqu'à Mahabar, Tana et
Guzirat. Seulement les provinces intermédiaires entre Chine et Bengala,
sont singulièrement déplacées. Ghindu (Caïndu), Caraian , Charazan,
(Carachan), sont portées vers levante; Mihen, (Mien), vers tramontana,
et Âmui vers le sud. Gelbacha (Galigula) reste au milieu, mais Siachene
(lacin) est porté vers ponente.
Dans rintérieur central de FÂsie, règne chez lui nn désordre. On
marche cependant sur les traces de Polo, par Cremaïn ( Kerman et
lago Zera), Thym'chian (Tunacaïu, Kouhestan), Hera, Tharse, Balch,
Jerchan, et vers ponente? Gothan (Kothan) au nord de Samarcand, à
l'ouest d'Otrar, Otrar au nord d'Insicol (Issikol); enfin, on arrive à Lop,
Tangut, Tenduch.
De nouveaux renseignements, et les plus remarquables, s'étalent dans
l'Inde. Au nord de Guzirat par le désert au delà de l'indus, on passe
Soltanfur (Sultanpour au delà de Lahore), ensuite Thate (Toda) et Deli.
Autre part, au delà de Chalecut, Melibar et Mahabar, on voit plusieurs
places de Bisnagar et Talenga. Bisenegal (Bisnagar ou Narsiuga), Tur-
mili (Trinomallij, Peligondi (Bellunconda), Ordirgiri (Gourlangerri). —
Au delà de Bengala, paraissent Pegu, Ava, Mognan (Ayangama au nord
de Siam) et les îles Divi-amoal, Sumatra.
Pour réunir ces nouveaux renseignements avec les précédents, et
surtout avec les données de Polo, il fallait bien comprendre les situa-
tions des positions qui se présentaient maintes fois sous différentes dé-
nominations, étant réellement les mêmes. Les compositeurs des cartes,
souvent ne savaient pas discerner l'identité entre les dénominations trop
variées. Aussi Marco plaçant sur sa carte Pegu, Ava, Sumatra, et de
nouveau à part, Mien, Caraian, lava maior, doublait les mêmes posi-
tions. (Baluch et Balch probablement sont le même Baikh). Rapprochant
etmetlant en contact les situations très-éloignées, il inventaitdes com-
binaisons fabuleuses. Il détourna le fleuve Amu (Djihon), vers l'est et,
l'indentifiant avec la rivière Polisanchin, il en fit un fleuve qui mouille
les murs de la cité maritime Carabalech. Par Bengala , c'est l'indus qui
verse ses eaux dans l'océan. Le fleuve de nouvelle connaissance, le
Mandus peguan, s'interpose entre cet Indus et le Gange, et ce der-
nier s'échappe dans un golfe au delà de Zampa. (Prévenance encou-
rageant l'explication prochaine de Ptolémée (si).
(t1) La disposition de ces grands fleures dans la mappemonde de Mauro, explione la position de
Calicut à l'ouest de l'indus dans la carte de De la Cosa, et rin?ention de la péninsule Inde-Car-
mania par Bemardo SylTano.
50 CARTES DB l'iNDE
52. Par les deux exemples du catalan et de Mauro, on voit que la
narration de Marco Polo était sujette à différentes interprétations qui ser-
vaient de modèle aux cartographes de la renaissance. Mais ees carto-
graphes étaient plus érudits que leurs prédécesseurs, ils avaient toute
confiance dans leur savoir, parce qu'ils avaient exhumé Fantique science
des sages de la Grèce ; blâmant Tignorance de leurs prédécesseurs, ils
puisaient k cette source pour produire des interprétations de leur pro-
pre création.
Ils comprirent que les investigations de Polo dépassaient les limites
de la connaissance antique, fermée par le méridien de 180® de longi-
tude du calcul de Plolémée. Par conséquent, Gataî et Mangî sortirent
de leur orbite pour se placer dans un autre hémisphère du globe.
Zipangu, avança par 240 à 250 degrés de longitude. C'était pardonnable
quand on réfléchit sur les matériaux qu'ils avaient à leur disposition.
Deux inconnus s'étaient présentés à leur examen. L'un ostensible à
la vue, à la face hideuse, plein d'une science caduque, d'une sagesse
éleiute; l'autre sans physionomie visible, fruit de l'expérience, se fèsait
entendre dans un langage presque inintelligible. Des renseignements
que donnaient ces deux inconnus ils essayèrent de tracer les vastes
espaces qu'il fallait de nouveau explorer. Le renvoi des séjours de Polo
sur un autre hémisphère est donc une conséquence très justifiable à
laquelle la narration de Polo n'offrit aucune contradiction, et le tableau
de Ptolémée en frayait le développement démesuré.
Mais il est difficile d'expliquer comment ces érudits de la renaissance
réussirent à interpréter la narration de Polo, jusqu'à procréer deux
Moabar, deux Seylon, deux sépulcres de S. Thomas, deux Indes, dont
une est transférée au-delà de Sinia et Kattigara du divin Plolémée. La
narration de Polo, ayant fait irruption dans l'Inde où elle mentionne
Dilavar (Delli) et Quesimur (Kaschmir), prévient de son plan : je ne y
voit entrer or a cestui point, dit-elle (en Yndie), por ce que au retorner
de noslre voie, vos conteron, toutes les couses d'Yndie por orde
(chap. 49). Or, discedamus bine (ex India), quia in reditu nostrse via»,
computabimus omnia facta Indîœ per ordinem (1, 56|. Or, revenant de sa
voie et de son séjour en Chine, Polo, conformément a sa promesse, avant
de rentrer à Ormuz et en Perse , compte par ordre à partir de Moabar
et de S. Thomas, treize grandismes roi aumes de l'Yndie gregnor
(chap. 188, 192 ; II, 55, 45), tous situés entre Bengala et la mer persane,
et se touchant l'un à l'autre. Leur situation était parfaitement connue
par de nombreux voyageurs, comme on le voit par la carte de Mauro
de 1460. Mais les érudits de la renaissance jugeant autrement, déchirè-
rent la continuité de l'Inde par des espaces figurées sur Favant-dernière
carte de Ptolémée. Telle Inde de leur invention parut dans les mappe-
monde du globe de Bebaïm 1492; de l'hydrographie portugaise 1504; dans
les cartes de Ruysch 1507, de Schener 1520, de Bordone 1520, de
Thomas Aucuparius 1521, et de quantités d'autres.
55. Erreur utile, parce qu'elle donnait l'impulsion aux découvertes
du côté de l'ouest et les animait en fascinant l'attention antérieurement
mieux avisée. Mais ce stimulant ne pouvait pas durer ni abuser long-
temps la conscience humaine. Les découvertes de Test lui apportaient
ET DE LA CniNE. 31
chaque année de nouveaux démentis, qui lui préparèrent le sort des
îles nébuleuses. Les Portugais passèrent la revue de tous les rivages de
rinde et tracèrent bientôt leur forme avec exactitude. Ils arrivèrent
en 1518 à Kanton en Chine. La reconnaissance de ce pays n'allait pas
bien vite, les exploits d'un Antoin Faria y Suza 1540, ne firent que la
ralentir : mais la création de la renaissance n'avait plus de fond dans la
géographie et s'abîma dans les profondeurs de l'océan et dans les ténè-
bres de l'ignorance présomptueuse.
Les Portugais, avec leur idiome et l'accent de leur prononciation ,
indiquaient les villes chinoises qu'ils visitaient successivement, mais ils
y cherchaient en vain le baragouinage du vénitien : ils ne retrouvaient,
ni Zaîton , ni Quinsaï. Us ne purent reconnaître Quinsaï sur le lieu
même, cette belle espérance pleine de prestige pour Colomb qui échoua
de la retrouver à Temistetan au Mexique. Les investigateurs portugais
expliquèrent leur insuccès, en supposant que les villes indiquées par
Polo n'existaient plus. La civitas antiqua (Cambalou innommé) de Man-
deville fut portée sur Quinsaï, laquelle en qualité d'antiqua, a dû être
ou submergée ou détruite par quelque autre accident. Muiti urbem
Quinsay bello diruptam, vel alia gravi calamitate destructam esse
f autant, disent les cartes de Hond], repète le dantzikois Philippe Cluver
V, 6) et autres.
54. Les découvertes portugaises ont frappé de mort les deux iuconnus
qui exerçaient la curiosité des compositeurs de cartes. La larve difforme
de l'un fut brisée et mise à néant; l'autre fut réduit au mutisme. Ce-
pendant les découvertes récentes ne pouvaient contenter les érudits;
les renseignements sur l'intérieur de l'Inde et de la Chine demandaient
quelques explications des deux inconnus et les compositeurs de cartes
essayèrent encore leur fortune, en conciliant et réglant toutes les con-
naissances antiques , du bas-âge et récentes. Us tournaient et retour-
naient les fleuves et les montagnes de l'intérieur pour les coordonner
dans le sens ptoléméen; ils mirent à contribution toute la nomenclature
de Polo et de ses successeurs, ainsi que différentes images du moyen
âge; il paraît même qu'ils puisèrent dans quelques notices arabes
(d'Edrisi) et ils amalgamèrent le tout avec les relations récentes; des
compositions très-variées furent inventées, mais chacune avait le défaut
de l'ignorance complète du terrain qu'on voulait remplir par une no-
menclature très hétérogène (ii).
Les yilles de Trapobana, ou Malaï (de la carte catalane) parurent au
Japon encore inexploré; le fleuve du Kanton fut qualifié d'olim Ganges
(porté préalablement sur ce point par Mauro), parce qu'on croyait que
son embouchure était par 145^ de longitude , comme les embouchures
du Gange de. Ptolémée; le branchage du Gange et de l'Indus fut em-
prunté de Ptolémée; il fallait former son grand golfe, de mare Sin,
(21) Pour faciliter Texamen de ce qnft nous allons dire et de ce que nous avons dit dans notre
portulan , nous avons donné plusieurs tableaux gé(^^phiques du xvi* siècle dans notre atlas : deux
sous le titre Asia aquilonaris de la Tartario et de la Chine , reproduites l'une par Ortel, l'autre par
Mercator; l'AUbozzo de Zurla d'une carte vénitienne ; ensuite deux de l'Inde, l'une de l'Asia
d'Ortel (a* S), l'autre de son India orientalis (n* 1<M)), suivie par Mercator; puis la Gbine de l'atlas
de Hond (produit de la composition sino-portugaise), enfin , «ne double carte de Hindostan de
I>elisle.
53 CARTES DB L^INDB
pour les embouchures des fleuves ploléméens tombant dans le sinus
magnus; il fallait rcplièremcnt faire passer les montages sous la
parallèle de ^Q" de latitude pour ne pas contrarier Ptolémee. Un grand
lac, vomissant de grands fleuves devenait partout indispensable au nord
de Malaï, pour représenter le lac de 100 milles de la narration du vé-
nitien ; des lacs plus ou moins nombreux , des fleuves prenaient de dif-
férentes directions inventées, on ne sait sur quel fondement et par
quelle impulsion. Leur singulier ramage et tissu variaient les compo-
sitions. Deily cherchait une place sur Nerboudda. On ne sait par quelle
inspiration arabe (edrisienne?) Moultan, Lahor, Kandahar marchaient
d'accord vers le golfe gangétique.
55. Les relations de Polo n'ayant plus d'assiette certaine parmi les
nouveautés portugaises et les vieilleries ptoléméennes , furent pour la
plupart expédiées en masse à tramontana du Tibet et de la muraille
chinoise. Quinsay, Zayton, Caraîan, Cambalu, avec leurs cortèges,
composèrent un Catay qui ne trouva de place , ni dans la nouvelle
Espagne, ni en Chine. Des doubles à double place accablèrent les com-
positions : Xandu et Xandu, Caindu et Gaindu (Mercaior), Mien et Pegu
(partout), Cambalu et Pékin (abbozzo zurl.) etc. Ces répétitions por-
taient aussi des variantes des nombreuses copies de la narration de Polo.
Les variantes avaient leur origine dans Torthographe et dans la mau-
vaise leçon des noms. L'échange continuel des t et j^ ne fait pas grand
tort, mais les opérations orthographiques avec les c et ^ ont des consé-
quences fâcheuses. L'insconstance de la valeur de ces deux lettres, dont
une valait tantôt k tantôt Iz ou s; l'autre, le g dur ou mol ouji les mit
à la merci des copistes de difierentes nations. L'italien , pour désigner
le k, écrivait ch; un autre essayait de le rendre par q, par gh. Pour
rendre une autre valeur dec, V> certains copistes pensaient mieux
écrire à leur guise s ou x, ou remplaçaient un s par e, ç. De même
g par k, servit au jeu de l'orthographe. L'italien le fesait accompagner
de h ou u; gh, gu, pour désigner sa valeur dure, par conséquent les u,
les h, se remplaçaient chez les copistes, et les q, ch^ prenaient la place
de^/t, gu : et quand le g, restant seul, devait répondre à la valeur
de dj ou ji ; un tel le changeait en 2, un autre le remplaçait par d ou s.
Guin, ghin, quin, chin, çin, sinfZin, s'échangent, rapprochant jusqu'à
l'identité des noms tout difierenls, ou créant d'un seul et même nom
plusieurs noms difl'érents. Les méprises de leçon contribuèrent immen-
sément à cet embrouillement , quand on se méprenait dans la leçon ou
de n, u ; ou de c , ( , prenant l'un pour l'autre ; quand on ne distinguait
pas le C majuscule du G; quand on ne remarquait point l'élision den
par abréviation; quand on transposait les lettres ou élimait les syllabes.
Enfin, les voyageurs postérieurs à Polo en reproduisant par leur propres
prononciation et orthographe les mêmes noms , secondèrent puissam-
ment la multiplication de noms et de positions, lorsqu'ils étaient con«
suites et mal compris,
36. Toutes les compositions du xvi* siècle ofi*rent pour la Chine et l'in-
térieur de l'Inde et de l'Asie centrale ce fatras confus et inextricable.
Parmi les cartes republiées par Ortel (1570-1592) on a cinq n<^ (1 , 5,
ET DE LA CHINE. 55
100, iOi , iOâ, de redit. 159^), où Ton voit la Chine, seule ou conjoin-
tement avec rinde ou la Tarlarie. On y distingue deux différentes com-
positions pour rinde et cinq pour la Chine (n<" 152, 153, 157 de notre
atlas), auxquelles on peut ajouter une sixième : celle d'un manuscrit de
Venise (abbozzo zurl.) {u'* 151 de notre atlas) et une septième : celle qui
est empruntée par Mercator et qui se distingue encore (n^ 156 de notre
atlas). Dans ce nombre on débrouille, outre la série toute nouvelle de po-
sitions maritimes (n° 101), deux systèmes pour les rivagesdela Chine, où
sont intercalées quelques nouvelles positions, et les positions antiques
de Plolémée, parmi celles de Polo. L'un de ces deux systèmes semble
réclamer la priorité, parce que le Japon y est garni plutôt de positions
hypothétiques (édrisiennes) que de ses propres positions. 11 est dans le
orbis lerrarum d'Orlei (n^ 1), dans son India orientalis (n<^ 102) et dans
la composition empruntée jpar Marcator (a^' 155, 156 de notre allas). Ce
système se conforme mieux a la narration de Polo que Tautre, déroulé dans
les caries ortéliennes de TAsieet de la Tartarie(n°»5,100),(n°M52, 157
de notre atlas), où le Japon est délivré de positions hypothétiques et dé-
cèle des investigations avancées; or, la création de ce système et la com-
position de ces cartes ont eu lieu entre 1545 et 1570. Quant aux régions
intermédiaires entre la Chine et Tlnde, toutes les cartes ortéliennes se
conforment mieux avec la relation de Polo que celle de Mercator (22).
Des deux compositions de Tlnde, Tune se trouve dans TAsie orté-
lienue (n<^ 5) , (n° 152 de notre atlas); Tautre dan^ Tlndia orientalis
(n* 102), (n* 153 de notre atlas); Mercator approuva cette dernière,
Hond aima mieux suivre la première. Mais bientôt un itinéraire de Sou-
rate, par firampour, Dely, Lahor, jusqu'à Kaboul, força à changer ou
rectifier Tintérieur. On voit cette rectification dans les cartes de Hond,
deSanson, de Blaeuw, deWitt, de Duval 1682. Delisle se modelait
encore sur le calque de ses prédécesseurs (voyez sa double composition
n? 155 de notre atlas) et fut copié par Homman, Seuter, LoKer, Mathieu
Hase 1744, Tobie Mayer 17i8. Enfin les caries de Bonne , de d'Anville
indiquent la direction réelle du Gange.
La Chine depuis des siècles, pour l'Europe énigme insaisissable, dans
le crépuscule de l'aube du levant, devenu un nouvel énigme par la re-
lation de Polo, commença enfin à prendre sa consistance dans la car-
tographie européenne par les découvertes portugaises. Vers le milieu
du XVI* siècle , Louis Géorgie (1570) composa, d'après les matériaux
portugais, une carte de la Chine qui servit plus d'un siècle de type aux
géographes et sur lequel ils purent élaborer leurs amplifications en dé-
gageant le premier modèle de quelques noms surannés et de contes
controuvés qui le décoraient d'abord. Ce t^pe, ainsi modifié et enrichi de
connaissances chaque jour mieux acquises, se trouve dans les atlas de
Houd (n° 154 de notre atlas), Blaeuw, Sanson (avant 1654), Witt (1670),
Duval (1682). H paraît que, pour la composition primitive, une carte
chinoise servit de modèle (ts).
(42) Pour qu'on ptiisse suivre nos observations , nous avons donne', dans notre atlas six figures
à l'examen des curieux : {' abbozzo Znrlana d*une carte de Venise ; 2* Inde de l'Asie orlélienne;
y Inde de India orientalis ortélienne et de Mercator ; 4° Chine de Mercator ; 8* Chine de la Tartaric
oitélienne ; 6' Chine de l'atlas de Hond. — Voyez le portulan général , 3î.
(Î5) Cette carte, dont on connaissait l'impprfftction à caus? qu'on continuait les investigations diiTt
IV. 3
3i CARTES DB l'iKDE
57. Mais le perfecUonnement de la carte de la Chine devait avancer
par les études faites sur les lieux. Des cartes et des atlas furent prépa*
rés sur les matériaux antérieurement inconnus, sur les cartes chinoises
mieux examinées et sur les investigations et les renseignements des
missionnaires. De ceux qui furent déposés vers 1590 à Rome, Matheo
Ncroni, aidé par Michel Ruggieri, exécutait un atlas; en même temps
Marlinius (mort 1651) mettait au jour 16 caries de Tempire chinois et
Bouyn l'élaborait à sa manière. Sanson, en 1656, commença à popula-
riser la carte de Neroni par sa publication réduite. Cette carte avança
infiniment la connaissance de la position de la Chine sur le globe ter-
restre; elle élucida son intérieur, ses divisions et même sa nomencla-
ture : mais elle présentait un grand défaut en ce qu'elle n'ayait pas
tout à fait rompu avec les cartes précédentes et en ce qu'elle avait
inventé, à leur exemple, des réseaux de fleuves que les renseignements
du lieu ne pouvaient confirmer. Cette carte décèle un soin tout particu-
lier des compositeurs dans l'indicalion des rochers et des montagnes
(négligés par d'Ânville).
La Chine, cependant, était sur le point d'obtenir la plus haute posi-
tion dans la géographie, à laquelle, à cette époque, aucune portion dv
globe terrestre de celte étendue n'a pu atteindre. L'empereur de Chine
Kanghi, appela les jésuites à dresser une carte de l'empire et de ses
dépendances. Bouvet, Régis, Jartoux, Fridelli, Cardoso, Bonjours, de
Tartre, Maïlia, Headeres, levaient pendant huit années (1708-1716), les
plans de ces vastes régions et (en 1716-1718), sous la direction de Jar-
toux , ils élaborèrent les cartes spéciales et une carte générale. Le fmit
de cet immense travail parut en 1757 dans l'atlas de du Halde, dressé
par d'An vil le , et ses réductions par Jean Mathias Hase et par Tobias
Meyer (1759, 1742, 1748), chez les héritiers de Homman, répandaient
le succès heureusement obtenu. A cette époque , l'Europe même était
loin encore d'offrir à la géographie un tel ensemble et un plan aussi
achevé que la carte de la Chine.
cilcs.étaitsujetteanxremaniementsàchaqucDouvene publication. Louis G«oi|^o donnait les latitndes:
à KaDtoD 23* 30'; à Liampo 31* 30'; ci Nanliin 3S" 0; à Pékin 18* 0', et au delà de la muraille il inscri-
vait de Touest à l'est la nomenclature de nombreuses stations d'un double itinéraire. C'était trop
fatigant pour ses successeurs. — La carte de Hond (que nous donnons n* I3<l dans notre aths),
donnant congé à cet itinéraire, inscrivit à sa place plusieurs noms de Polo, rapprocha de la maraiHe,
Lop,Pcim, et donna unelautre latitude : à Kanton S3*0', à Liampo 30* 0'; à Nankin 35* 0'; à Pékin 4S* 0';
élimina les quatre positions précédentes : Tenchco, Cincheo, Richeo et-Liamto, ajouta la Corée et
Xuutim par 47* 0' de latit. — La carte de Blaeuw diffère par les latitudes de Kanton S3* 30'; Liampo
%9* 0'; Nankin 34* 30'; Pékin 48* 30', place Xanlin Samton par 43* 30'; reprenant les quatre positions
éliminées, elle les plaee au delà de la muraille et de la Corée, et donnant congé à la nomenclatiire de
Polo, retient tout près de la muraille Lop avec tout son cortège. — La carte publiée par Sanaoa
dégage le tissu des rivières , donne aux rivages un contour moins raide et fait descendre les latitudes
de Kanton à 23* 0', de Liampo à S6* 30'; de Nankin à 33* 40'; de Pékin à 4S* O'. — Ce remanienent
s'exécutait sur un type qui, dès son origine , décèle une disposition susceptible de tous le* redres-
sements nécessaires; c'est ce ^ui me fit supposer qu'une grossière carte chinoise avait pu lui servir
de modèle. Mes présomptions à cet égard ont été raffermies par la vue d'une carte chinoise, que je
possède, fabriquée récemment à Pékin pour le vulgaire : tant la conformation des parties y est eon-
forme à la composition dressée sur les matérieaux portugais. Les parties que le chinois laisse
empoulées pour ses nombreuses inscriptions ; les fleuves grosièrement tournés et leur ramage bouffi
pour former les ilcs continentales ; la raideur des rivages ; la Corée couvrant et pressant le front
allongé de la Chine jusqu'au Japon , assimilent singulièrement le type européen aux traits chinois.
L'insuffisance de l'exactitude et les vices des anciennes cartes chinoises, offrit certainement une
figure plus défeolueuse que celle qui se présente dans la composition chinoise actueUe.
EXAMEN 6Ë06BAPHIQUË
DES COURSES ET DE LA DESCRIPTION
DE
BENJAMIN DE TUDÈLE,
1160-1175.
Plusieurs lettres
adressées à M, Carmoly.
AVANT-PROPOS.
Une tradition , relatée vers la fin du xvi* siècle par Abraham Zakout,
astronome et historiographe du roi de Portugal ( juchasin, fol. 151, de
l'édition de Cracovie), fixe le voyage de BENJAMIN DE TUDÈLE fils de
lonaj entre les années 1160 et 1175. Cette tradition fut répétée par le
premier éditeur du voyage en 1543; par Gedalia, fils de Joseph Jacchia
(in sehalschelet hakobhala) 1587; par David Gantz (tsemat David,
fol. 59) 159â. En effet, la relation du vovase ne contient rien de pos-
térieur à Tannée 1175; elle soutient les événements et les positions de
cette époque, et confirme par elle-même qu'elle a été rédigée vers 1175,
qui est aussi Tannée de la mort de Benjamin.
11 y avait à cette époque beaucoup de voyageurs, mais peu d'entre
eux donnaient une description de leurs courses. G^le de Benjamin
acquit de très-bonne heure une certaine vogue parmi ses co-relîgion-
nalres ; elle fut assez répandue; quelquefois contrefaçonnée par d'autres
et défigurée, comme cela eut lieu dans une relation de Gerson, en 1650.
Les doutes qu'on a soulevés sur la réalité du voyage de Benjamin , qui ,
peut-être, n'a pas bougé de sa chambre, tombent devant l'intérêt qu'offre
sa narration rédigée sous la forme d^un voyage.
Plusieurs éditions s'étaient succédées : la première en 1515, à Con-
stantinople, chez les Soncini; ensuite en 1586, à Ferrare, chez Abra-
ham Oschke; en 1585, à Friboui^en Brisgovie, chez Hetzfroni, lorsque
parut, en 1575, à Anvers, une version latine de Benoît Arias Montanus,
reproduite en 1656, à Helmstadt. Cette version livra Touvrage aux
études des chrétiens ignorant Thébreu ou versés dans cette langue.
Les explications, les éditions accompagnées de «otes ou sans notes,
se multiplièrent dans le courant du xvii* siècle : surtout en Hollande
et en Allemagne. L'édition de Bâle précéda celles de Leyde, qui parti-
rent en 1655, au nombre de trois, accompagnées d'une nouvelle version
latine et de commentaires de Constantin L'Empereur, qui fut ensuite
commentée par d'autres. La version hollandaise de Bara, 1666 et 1698,
donna origine aux versions allemandes 1691 , 1711 , et française 1729.
Le voyage devint la proie de différentes opinions et son texte la pâture de
commentateurs : Montanus, Constantin L'Empereur, Buxtorf, Renaudot,
Richard Simon, Bergeron, Wagenseil, Eisenmenger, Schutt, Hottinger,
Kircher, de la Rocque, Spanheim, Gaspar Barthius, Reinesius appré-
cièrent Touvrage chacun à sa guise. On comptait déjà 14 éditions, dont
40 BENJAMIN DE TUDÈLE.
otlomau, publiées en 182:2, à Paris, chez Picquel, par Lapie, d^api-ès
les matériaux de Guillemot et Tromelin;et en 1827, à Paris, par Lameaa
et Dufour. J'espère que vous ne désapprouverez pas le choix de ces
cartes, dressées par d'habiles officiers et ingénieurs et que vous y verrez
un appareil qui doit faire frémir Timposteur.
Il est à peu près admis par Baratier que Benjamin confond Salouski
avec Saloniki. J'adhère à cette confusion et je prends un compas dans
la main pour le faire promener sur les cartes. De Thèbes il y a, suivant
Benjamin, une journée à ]r)n^:iJ< Egripont, Negropont : voilà une
échelle de journée. A trois journées de Corinthe se trouve , suivant sa
relation, Thèbes : mon compas fait trois pas et l'échelle est constatée :
c'est juste (i).
Maintenant d' Egripont à SaUmski , je compte les journées données
par Benjamin : il y a par mer et par terre 10 journées. Je marche
avec mon compas de Negropont par la Thessalie et par mer jusqu'à
Saloniki et j'y trouve juste »ces dix journées. Quant à la distance géné-
rale je ne puis donc réprouver cette fois la relation de Benjamin : il ne
reste qu'à apprécier les lieux indiquées dans sa relation, tenant toujours
l'inapp réciable compas à la mains.
Il faut observer, que depuis l'invasion des barbares dans l'empire
d'Orient, dans le courant des siècles, la nomenclature géographique a
subi d'innombrables changements. Comparez Janjah, avec l'antique
Thessalie, comparez Morée avec l'ancienne Péloponèse, chaque partie de
la Grèce d'aujourd'hui avec Tancienne et vous serez convaincu qu'il
s'est accomplie une véritable métamorphose dans cette partie du globe.
Les dénominations de l'origine slave fourmillent avant tout et il y a
tant d'italiques, de romanes, etc. De temps à autre , il ne manquait pas
de dénominations éphémères. Lorsque aux environs du mont Olympe,
dominaient les Slaves, les Yalaches, les Bulgares, les Serviens, enfin
les Franks et les Turks, chaque fois différentes localités changeaient de
nom dans le vulgaire.
Après avoir prédisposé votre attention à des dénominations toutes
inattendues, j'avance avec mon compas. En parlant de Negropont à une
journée j r\D^'^\û\^)Z'* Jo,bouslerisa répond à Proschina, (sur d'autres
cartes Proscina, Frescîna). Ce nom est tout à fait slave , désignant , sans
changer de prononciation, poudre, une toute petite parcelle de poudre;
et on appelle une toute petite chose, un tout petit objet proschina, prous*
china, proszyna. — On a dans les possessions slaves de Prosua, Proschna,
Prochnitza et analogues, dont la dérivation de la valeur peut varier.
De même de Jabousterisa , ôlez Icjod euphonique et vous avez un nom
purement slave, Bystritza (rapide, pénétrante) donné aux rivières, aux
(I) Celle (échelle continentale n'est pas en défaut pour les distances prcccdcntes, pas plus que
l'cdiello de journées par mer. D'Olranto à Q^^^^p KrofoM, Corfou i y, èi J^H^ Lebat, Lenkate,
Ducato, santa Maura, î j.; à ]1^>;;X ''cAtton, fl. \chelous, Aspropotanus, 1 j.; à ]>n^^l^J
NatolUcon, Actolikon, Analolikon, i/« j ; à n"lL}D Patra, Patras, Patrae, i j.; à ^^^5*^ Upanto,
Naiipklos, Lepantoi/sj.; n ÎS^'^p Kors,an pied du mont Parnasse, Krisia, i i/«j.; à l^^^'lp
Korinto, Korinlh, 3 j.; à t^H*»^ Tibeé, Thèbe 3 jmirnécs.
€KfeCK.
bourgs et villages, aux hommes {i). D*ici une journée à n'!5j^Dn Robe-
ni ka, et mon compas s'arrête tout près de Tornilza (Marlitsa,' Thronium);
ensuite une journée à if2ir*D|iri5^ Sinon polmo, avec lequel j'arrive à
Boudounitza ou Modounîtza. Je ne vous entretiendrez pas de la termi-
naison slave t'fza, {fca, ni de Robenica qui pourrait dériver du slave
couper^ tailler, où Ton se battait, où Ton a abattu les arbres, les bois (s);
ni de Boudounitza, Boudniiza, Boudzin, Bouda, bouda, hutte, échoppe,
noms de villes et villages infiniment nombreux dans les possessions
slaves. En ni*arrêtant ici je dois avoler que je marchais avec mon
convpasà trop petites journées. Je puis et je devais avancer plus loin,
pour ne pas perdre les distances : mais la relation suivante de Ben-
jamin me force de ralentir mes pas (s).
Ici commence. la XC^3 ^«^<*fe^î<ï» Valakhia, dit Benjamin et cela
révolterait toutes ces conceptions étroites qui se borneraient à la Vala-
chie d'aujourd'hui. Mais si Ton demande l'histoire, on apprendra qu'il y
avait une Valachie sur le Niestr, une Valakhie dans l'intérieur de la
Hongrie, une Yalakhie en Macédoine, en Remanie, en Thessalie , et
c'est la Grande Valakhie. Fouillez les écrivains byzantins et vous y
trouverez que les Valaches , en descendant de Zagora (nom slave des
montagnes , d'au delà des montagnes) se répandirent aussi bien dans
l'intérieur de la Grèce , comme vers le Danube ; que leurs bandes
vagabondes , leurs hordes errantes étaient connues en Macédoine, en
Thessalie, avant qu'elles ne le fussent au nord de Hemus, Gora ,
Zagora; que par conséquent on appelait le pays aux environs de Zeitoun
Grande Valakhie, Or, en partant de Boudounitza, on entrait du temps
de Benjamin dans la grande Valakhie.
A deux journées >:;ni;i Gradigi, ville ruinée. Vous me direz , à quoi
bon chercher une ville ruinée? elle n'existe plus, encore portant une
dénomination slave : Gradigi, comme Gradiska, Grodziska, Bellgrad,
Nov-grad, Vcli-grad, Vyscho-grad, et mille appellations analogues.
N'importe, je grimpe les montagnes où je passe le défilé de Thermo
pyle, je pénétre dans la Thessalie et cherchant des ruines, je rencontre
sur les cartes tout près de Zeitoun, au pied de l'antique Othrys aujour-
d'hui Goura (montagne en slave), un petit village Gardaki et je suppose,
non sans raison, que c'est Gradigi de Benjamin. Avant d'aller plus loin,
je vous ferai remarquer qu'on trouve sur la carte des indices du séjour
{2) Proscioa est Panoionnc I.arymna. Pv/j.vjy impulsion, impétuosilé ; pùjj.tyq torrents, ont pu
donner origine à la Bystritza slavonu. Dans la suite les interprétations possibles paraîtront plus
ostensibles.
(3} n y a qaeique analogie entre Rubcnîka et l'antique nom du mont et ^u cap Kncmis (xwj/iios,
arduus, salluosus) qui bordent Tbrouium. Kv^/;.{, j'incise, je creuse, je racle, je Tends ; traduit par
Ruheuika.
(4) Voici encore pour le compte de rétymologie. Boudounitza, Vodonitza, pourrait dériver du slave
voda, eau ; Vod'nitza, aquatique, ce qui répondrait à potmos norct/xoç» — M. Reinaud présume
que Sinon-potmo indique la rivière Sperchios, et propose le changement des lettres de Sinon. Je ne
combattrai pas l'attribution de ce nom à Sperchios, mais j'opposerai à la proposition de changement
trop forcé, la remarque que Sinon-potmo parait être tout à fait grec, qualification de circonstance :
rivière de désolation, de dévastation , de ravage, atvo^ ttotk/ao^, traversant le pays ravagé par les
courses slaves, boulgars,valakhes; ou bien rivière extérieure, ^îvoi, |'«tvoj TrOTa/xog, frontière
de la Grèce, au delà de laquelle commence la Valakhie.
A^ BENJAHIN DE TUDÈLE.
Edrisi (cliiii. vi, scct. 4, p. 585, 58 i), en suivant le cours de Maritza,
dit qu'elle passe à Adrinoplc, puis à Sorlova, puis à Arkadioboli, puis
se jette dans le canal d*Abydos vyj\ auprès de la yille Akhrisoboli la
maritime, où elle porte le nom de Marmara. Il est évident que dans sa
relation, Edrisi indique à la fois le cours de deux rivières, de Marilza et
de Erkéné, qui se réunissent au midi d'Adrinople; Tune a sa source
près de Ligolgo, Tautre près de Sorlova. Il manifeste en même temps
une espèce de confusion de Maritza avec Marmara qui est le fleuve Ro-
dovitsch (Strimon) sur lequel est situé Seres (Metressi). Akhrisobpli ou
Ghrysopoli est loin de Maritza, étant à Tembouclire de Marmara. Nous
discuterons ailleurs ces questions et positions. Pour le moment il nous
suffit d'alléguer que les embouchures de Maritza et de Marmara, et la
ville Chrysopolis et même Saloniki et Armiro, sont toutes sur les bords
du canal de Constantinople, nommé de môme canal d'Abvdos. Toute
cette mer, depuis Saloniki jusqu'à Gallipoli et Abydos s appelle, au
témoignage d'Edrisi : canal d* Abydos ou de Consta'ntinople (Edrisi, vi, 4,
p. 58d, 58i, 290, 291, 292). Les navigateurs la qualifiaient ainsi. Il est
donc évident que le nom d' Abydos était connu à l'époque de Benjamin,
à l'embouchure de Maritza, quatre journées de Drama. Benjamin, pas-
sant par terre, arrivé au bord de la mer, s'est servi du nom de golfe
pour qualifier sa station maritime. De l'embouchure de Maritza on peut
se rendre très-facilement à Constantinople en cinq journées.
Enfin nous sommes à Constantinople avec notre Benjamin. Nous y
voyons avec lui les marchands de l'Orient, du Nord et de l'Occident.
Ceux du nord sont : Canaan, les Slaves en général, puis ceux des pays
Russiens, de la Hongrie, enfin de >pvD^5 Pasianke et de X'^'^D Bauria,
La Russie est plus orientale que la Hongrie; Pasianke, Fasianke serait
aussi plus orientale que Bouria , selon Tordre dans lequel Benjamin
décrit ici les peuples, commençant par l'orient et finissant par l'occident,
disent ses commentateurs. En admettant cet ordre on est peu consé-
quent, à mon avis, si l'on pense à retrouver les deux dernières popula-
tions dans les anciennes Liburnie et Pannonie, et on s'embrouille si on
a recours à Joseph ben Gorion pour constater une semblable assertion.
A propos de ben Gorion, dont vous avez établi l'époque, vraiment il
ne sert que de prôte-nom à cette histoire judaïque qui est connue sous
son nom. Le premier chapitre ou l'introduction n'est que trop suffi-
sante pour prouver par l'énumération des peuples descendant de Noé ,
que la rédaction de l'ouvrage est du xn« siècle. Cette énumération est
curieuse : mais les explications données jusqu'aujourd'hui, ne sont pas
toutes satisfaisantes , surtout celles de Thogorma et de Dodanim. Sous
ce dernier, ne pourrait-on pas, au lieu de Mekhba et Bardena, ^'^Zll et
NH'^D lire et distinguer la Skanie et les Varègues? nom donné aux
Normands Skandinaviens de la Baltique. Ce nom de Varègues éuit
connu à l'occident, même depuis un temps assez reculé, puisque je
trouve que Guido de Ravenne, écrivain de la fin du ix« siècle, lésa
nommés. Son ouvrage inédit se trouve dans une copie de iH9, entre
les manuscrits de la bibliothèque de Bourgogne à Bruxelles.
Le prétendu ben Gorion aime mieux qualifier les Slaves Dodanim,
que Rhanaan. II en fait un dénombrement. Si l'on peut admettre qu'eu
GRÈCE. 45
les éniiinéraut sous les uoins do Letsphim et Livoiiim il a voulu com-
prendre les Lilvaniens et les Livoniens, il serait impossible dans
Khazaramin de soulever la Bessarabie, ce nom étant d'un siècle trop
postérieur : j'aimerais mieux y voir une répétition de Kbazars ou
mieux supposer une défiguration de nom inextricable. Bczamin,
Bohème ou Pozamin, Poznan, Posen; comme Charchar, iTliarkar,
Krakar, Krakow; Salaki ne serait-il pas mieux Polaki, Polonais, au
lieu de Valakbi comme on a supposé.
Quant à Tbogarma, ben Gorion dit positivement que les seuls Ongar,
Bulgar et Parsinaks, établirent leurs tentes sur le Danube, tous les
autres sont sur la Volga. Je désirerais donc de retrouver des emplace-
ments convenables dans ces régions-là pour Alikanus (al Ikanus), Rag-
bina, Buz, Zabukh et Tilmats, sans descendre au Danube; de les trouver
dans ces régions où Ton connaît les Khozars et les Tourks près du fleuve
Itel ou Alclach (Wolga) (n).
Les ^y^)i^ 1:'-Î?"1D Patzinakh, Partzinakh, appelés par les Polonais
Plelchinghi, sont les s.*/Lirsr•^ Badjnaks d'Edrisi et Phasiânke de Ben-
jamin, la Bourie, serait la Boulgarie, Boulgria, Bougria, Bouria, établis
toutes deux sur le Danube.
Ces Pielcbinghi n'offrent que les débris des anciennes hordes puis-
santes sur les steppéâ de la mer Noire. Elles avaient été détruites
vers 1050, par les Komans ou Polovtzes: les débris se retrouvent en
partie au delà du Don, signalés par Edrisi sous le nom de Badjnaks; en
partie ils se sont réfugiés vers les frontières de la Boulgarie et de la
Hongrie, où ils se fondirent avec les populations locales.
Pethakhia, passant en 1175 de Kiov vers la Tauride, n*a vu dans ce
qu'il appelle Kcdar, que les Polovtzi, Komans, habitants très-paisibles
à cette époque , vivant sous leurs tentes et cultivant le pays. Il n'a vu
là, ni Patzihak,.ni Khozars. Ceux-ci ont été déroutés encore vers 1016,
quelques hordes de Khàzars existaient aussi au delà du Don et dans la
Tauride, à laquelle elles ont donné le nom de Ghazarie. C'est pourquoi
Pethakhia dit que la mer s'avance dans les terres et sépare Kédar de la
Khazarie. C'est l'isthme qui reçut postérieurement le nom de Perekop.
La Khazarie de Pethakhia n'est que la Tauride. S'il dit qu'à son extré-
mité coulent dix-sept rivières qui finissent par se réunir : il perd de
vue l'espace de la mer Zabach qui sépare la Khazarie de l'embouchure
véritable du Don, et il répète sur cette réunion de nombreuses
rivières un conte attaché au Don ou Tanais. J'ai ajouté l'épithète de
véritable à l'embouchure du Don près d'Azof , ancien Tana, parce que
le détroit de Jenikale, qui sépare la Krimée de l'Asie, était aussi
considéré comme embouchure du Tanais : c'est l'extrémité de la
Khazarie. Les eaux du Tanais roulent, dit-on, par la mer Zabach jusqu'à
celte embouchure. De même on distingue sur les eaux de la mer Noire
le courant de plusieurs fleuves. Les eaux du Danube se font riemarquer
jusqu'à Consianiinople: aussi quelques écrivains, à différentes époques,
considéraient le détroit de Conslantinoplc comme l'embouchure du
Danube.
(11) KUasdaï énumérant ces enfanrts de Thogarma, subslilue Avar, Aumin el Savour, à la pince de
Ikanus, Raghina et Xabucli.
46 BENJAMIN DE TUDÉLE.
Pardonnez-moi celte petite excursion qui traverse le passage de
Petakhia de la Khazarie à Thogorma : parce que je ne voulais pas
perdre de vue votre savante publication de son voyage, que vous allez
reproduire.
Je reviens encore à Benjamin, ou plutôt à ses commentateurs qui
Faccusent dimposture, de fourberie, et qui, avec leur colère et leur
maladresse, font rire quelquefois le bon sens. Voici la preuve.
Benjamin ayant parlé de la Bohême qu*il a qualifiée de pays de y^^f)
Praga, remarque que la Russie est un grand royaume, qui s*étend
depuis la porte de Praga jusqu'à la porte de p^ Pin ou Fin, celte
grande ville qui est à Textrémité du royaume. Les commentateurs se
cassaient la tète afin de retrouver cette porte d'une grande ville à
l'extrémité de la Russie et ils i*ont cherchée, où? dans Pinga ou Pinko,
dans Pinsk en Litvanie, dans Saint-Nicolas sur la Dvina; ils l'ont
reconnue dans Pin , Pape Nicolas par abréviation. Sommes-noas avec
tous ces commentateurs près de la porte d'une grande ville? sommes-
nous à l'extrémité de la- Russie? n'avons-nous pas le droit de crier
contre l'imposture qui voudrait nous faire voir à l'autre extrémité de
la Russie ou Pinsk ou un pape Nicolas en abrégé! (li).
La ville de Praga , dans le langage de Benjamin , est le pays de
Bohème; la porte de Praga, ce sont les frontières de Bohême, par
conséquent la porte de la grande ville , de la cité de Fin , ce sont les
frontières du pays de Fin, de Finois, Finlandais, Finland, Finmark,
situé à l'extrémité de la Russie. Au reste , sans toucher à la porte du
génie de langues orientales, tournez quelques pages de Benjamin et
vous trouverez les portes de provinces persanes.
Voici les réflexions , que je me proposais de soumettre à votre jnge-
ment. Approuvez-les, ou désapprouvez-les, et veuillez conserver dans
vos amitiés inaltérables. Votre dévoué*
(il) Spreofel (Gesch. ùer gëogr. Entdekttngen p. S77, S7S) au sujet de la ville de Fin lève toute
difficulté, mit einer kleineo Bucfaataben veraeaderung, et la change en V!3 Chive on Kiiov capital
aituëe an centre des pays russiens. — S Ificoks (couvent)» et Pingo situés aux environs d'Ardian-
gelsk, ont été découverts par les anglais en I5S3, et figureat sur toutes les cartes.
ASIE.
DEUXIÈME LETTRE.
Braielles , 8 août 1847.
En demandant mon avis sur quelques points obscurs de Benjamin de
Tudèle, vous m^avez provoqué tout d'abord à reprendre de nouveau la
lecture de son ouvrage. Ma foi , je ne sais pas m*expliquer, quelle furie
s^est emparée de plusieurs de ses commentateurs qui , tout en puisant
de son ouvrage des renseignements importants pour celte époque
reculée, s'acharnaient à ternir sa mémoire et la sincérité de ses témoi-
gnages. Ma lecture, au contraire, me faisait croire que je voyageais
avec lui, que sa compagnie me frayait le chemin à travers les obstacles
déversés dans l'espace ; qu'il m'indiquait à regarder ce qu'il avait vu;
qu'il me présentait les personnes de sa connaissance. Il est vrai que tout
y est d'une extraordinaire insuffisance, souvent présenté dans un vague
ou une confusion presque inextricables, mais appuyé sur une certaine
connaissance qui exige des recherches. On a dit que le pèlerinage n'était
qu'une forme de sa narration. C'est indubitable. Mais quoiqu'il n'in-
dique ni jour, ni mois de ses traverses, ni direction des distances et
des routes : on se voit avec lui dans un voyage réel, quand il déclare
avoir vu quelque objet , ou quelque personne. S'il a voyagé et vu bien
des choses, certainement il n'a pas visité, ni les (echabites, ni le pays
de Tzin, ni la mer Nikfat, ni l'intérieur des montagnes Hallon. Il s'ar-
rête obscurément pour nous, dans certains lieux, pour entrer dans la
description des environs et du reste du monde, pour rapporter quelque
relation véritable ou fabuleuse , afln de donner uu recensement et la
situation des enfants d'Israël de sa connaissance. C'était son but essen-
tiel. Partout où l'on peut constater sa présence on ne saurait lui repro-
cher rexagcraiion dans le nombre. Sur sa route en Europe : 1,500 à
Palcrme; 2,000 à Thèbes; â,500 à Constantinople , sont les plus hauts
chiffres; ailleurs il donne des chiffres inférieurs : quelques cents ou
dizaines, en tout 12,765. Il est à regretter qu'il n'ait donné aucun
renseignement sur ceux de l'Espagne, son pays natal , ni sur ceux de
Hongrie, de Pologne, d'Allemagne, où il n'alla pas. Ce qu'il relate des
populations en Asie, est certainement fondé, en partie seulement, sur
des relations positives, eu partie sur des ouï dire. Le nombre le plus
considérable à Hamdan et à Samarkand, monte dans chacune de ces
48 BENJAMIN DE TUDÈLE.
villes OU de leurs cantons, à 50,000 : chiffre assez rond. Il y en a autant
à Khebar et beaucoup plus de rechabites.
Vous savez retrouver les princes, les savants de la connaissance de
Benjamin qui dominaient par leur sagesse les enfants dispersés, et vous
avez plus d'une fois suivi votre voyageur de station à station jusqu^à
Ilaleb et au delà de Tigre. C'est dans" cette description ultérieure que
vous me signalez quelques difficultés géographiques, sur lesquelles vous
êtes curieux d'avoir mon avis.
Gomme indicateur de ces points obscurs vous me recommandez ton-
jours par préférence, le commentaire de Baratier. Cet enfant précoce,
qui, avant d'aboutir à Tàge de l'adolescence, par son savoir, par ses
connaissances prématurées avança beaucoup plus que ses prédécesseurs
l'explication du voyage de Benjamin, répète mainte fois : ce nom m'est
inconnu; nous imitons volontiers cet aveu, quand les renseignements
ou les connaissances nous feront défaut. Mais souvent le docte adoles-
cent de onze ans , entraîné par l'opinion de l'époque, qui guidait sa
conscience, s'emporte, vocifère contre l'inventeur, le menteur; mal
avisé il condamne le juif errant. Partant avec Benjamin de Haleb, tout
d*abord, à nos premières stations, de Balilz, Kalah gaber, et Rakka,
nous sommes accablés de ces injustes déclamations. Avec Balitz il se
porte sur Bira ; il a pu cependant trouver sur les cartes de Sanson et
d*autres de son temps Baies sur l'Ëufrate. Les cartes de Sanson dési-
gnent Kalahgaber, sous le nom de Dauser; celles de Delisle inscrivirent
l'appellation de Giabar. Le docte adolescent ne trouvant pas de nom
analogue sur la place, annote en passant (note 15, du cbap. yhi,
page lâ8) que l'appellation de Kalahgaber répond à Krach de Montréal,
et examinant ensuite la route de Tadmor jusqu*à Bagdad (note \ du
chap. xn, p. 156 et suiv.), persifle le voltigeur assez ingénieusement,
niais avec peu de prudence. Je ne veux pas entrer en polémique avec
le jeune homme de mérite, je veux simplement vous exposer ce que
j'ai remarqué.
Balilz ou Fethora n"linD V^^NS (wh''^ ^«^*« chez le copiste Gerson)
est Baies d'aujourd'hui et j>JL^ des écrivains arabes. Nommé par
Edrisi (m, 7, p. 555) p«u d'années avant Benjamin, il se Ireuve déterminé
en longitude et latitude géographiques, par Kias, ouvrage du xm* siècle,
cité par Aboulféda.
L'auteur de Kias détermine de même la position de y^DI ll^iy'^p
n'^21î2 Kalahgaber ou Selah midbara, de Kelat djebar j^^^ a»1^ ;
voici ce qu'en dit Aboulféda : Kalatdjabar,ou le fort de Djabar s'appelait
anciennement Daousariah, du nom de Daouser, employé de Noman ben
Mondjari, roi de Hira,qui le fit construire quand il administrait les fron-
tières de la Syrie. Ensuite il s'empara du fort Saboheddin Djabar le
kaschirien et le posséda jusqu'à sa vieillesse qui le priva de la lumière.
Depuis ce temps, le fort changea de nom. Les deux fils du dit Djabar,
dont le brigandage causait des inquiétudes, furent dépossédés par le
seldjonk Melik schah (vers 1060). Enfin, ce fort abandonné, tomba
en ruine. Il est dans le Djezira (diar Bekr) sur les rives septentrionales
de l'Eufrat, sur un rocher inaccessible^ entre Baies et Rakka. Benjamin
ASIE. 49
a pu par conséquent connaître le nom de Djebcr. Avant lui , Edrisi
n'en avait parlé que sous le nom de Daouser. Pour se rendre d'Aleppe
à Rakka, dit-il, il y a deux chemins, dont un passe par Khoschab, Baies,
j^^^ Daouser à Rakka (IV, 5, p. 156). C'est le chemin suivi par notre
voyageur.
Sur la gauche du voyageur s'étend le désert de Khaschab ou Semava
(Edrisi, IV, p. 555). C'est sur les plaines de ce déserl que fut mesuré le
degré du temps de Mamoun, 855 : entre Tadmor et Vasit, comme le dit
Ibn lounis (en 1007), et spécialement entre Tadmor, (qui est entre
Irak et Syrie) et Rakka, comme l'explique Massoudi (en 957), où Ton
observa le soleil dans le désert de Sandjar, dépendant de diar Rabia
(notices et extraits, t. I, p. 49, 52). La mesure avait été exécutée,
répète Aboulféda (eu 1551), sur la plaine de Sandjar (Reiskii vcrsio,
p. 156). Or, Rakka est à l'entrée de la terre de Sandjar, dit positive-
ment Benjamin, et sépare le pays de Sandjar du royaume des Turks
(chap. VIII, p. 128), qui dominaient dans le Djezira.
Deux journées de Rakka est mn Haran, et 2 journées de ces anciens
Carres, l'endroit où est la source de "i^^D^X Alkhabor ou Chaboras, d'où
Ton arrive en 2 journées à ]'»2''î{;3 Nitzibin. Cet endroit est Ras-el-aïn
j^-jul ^«,tj qui est unç ville considérable, dit Edrisi. On y voit près
de trois cents sources, environnées de grillages en fer, pour qu'on ne
puisse y tomber. Ces eaux forment la source du j^L=^ Khabour, rivière
qui va se jeter dans l'Eufrate auprès de Kirkesia (IV, 6, p. 150). 11 y a,
ajoute-l-il, de Harran à Ras-el-aïn, 5 journées , et de Ras-el-aïn à JNis-
sibin, 5 journées (p. 155).
Je ne saurais vous dire, d'où Benjamin a pu tirer l'assertion bizarre,
que Khabor , après avoir traversée le pays des Mèdes , tombe dans la
montagne de Gozan. Certainement elle n'est pas le produit de ses pro-
pres explorations, mais plutôt d'une érudition mal conçue et maladroi-
tement appliquée. La montagne Gozan est un produit biblique : du
temps de David, on disait que Khabor était un fleuve du pays de Gosan ;
Madaï vient d'un autre point de l'érudition, où au nombre des terres de
l'exil, Habor, Gozan et Madaï se trouvent dans les mômes versets. Le
ravennate du ix** ou x« siècle dit avoir lu dans l'ouvrage du philosophe-
cosmographc romain, du vi*' siècle, nommé Castorius, que Media minor
et Gozar (Gozan) dicitur, per quara plurima transeunl flumina, inter
caeleros Nabor (Chabor) (anonym. ravenn. II, 10, p. 29, 50). Singulière
consonnance !
Nous passons sans obstacle par Guezir bcn Omar, par Almolzal, à
travers les ruines de Ninive, où V ohscnve Arbal, à 1 parasange de
Ninive, embrouille notre itinéraire. Baratier a signalé à cet effet trois
Arbal, dont une grande ville, Arbelles, estais parasanges de Mo-
soul, au midi, située effectivement sur la route de Mosoul à Rehobot.
Nous ne savons pas où est cette grande ville dans les déserts, ni d'où
Baratier aurait appris son existence. J'ai examiné les caries publiées
dans les Pays-Bas , et celles de Sanson , de Duval , De la Rue , Delisle
et quantité de postérieures, d'Arrowsmilh , et d'autres. J'ai fouillé dans
les descriptions de Djezira qui me sont connues, sans pouvoir rencontrer
aucun vestige de celle ville. Il est aussi douteux , à mon avis, si Arbal,
IV. 4
50 BENJAMIN DE TUDÊLE.
distante i parasange de Ninive, serait sur le chemin de Rehobot. Ben-
jamin la nomme accidentellement , l'indiquant comme proche des rui-
nes. La fameuse Arbelle n'est pas trop éloignée. Ensuite il retourne à
la description de Niuive, d'où il compte 5 journées à Rehobot,
Je ne m'arrête pas sur les distances qu'il donne ordinairement insuf-
fisantes. 11 n'exagère pas. Il compte de Rohobot à Karkemis i journée;
de Karkemis à Poumbedilha 2 journées seulement. S'il copiait les
descriptions des arabes, il a pu être surpris plus d'une fois par des
chiffres incertains ou erronés. Quoique moins, les chiffres du caractère
hébreu présentent les mêmes surprises.
Harda rrnr\ distante de 5 journées de Poumbeditha, est sans doute
j^^\ Alhathr, Hatra. Okbara rTQp^V |r^ située sur l'Eufrate, déjà
dans l'Irak , 2 journées de Hathra. Ces villes peu considérables méri-
taient d'être signalées par le voyageur, si elles possédaient une popula-
tion Israélite l'une de 15000 l'autre de iOOOO. C'est la première fois que
la description du voyageur offre des sommes aussi élevées.
D' Okbara, en descendant l'Eufrat, nous entrons dans Bagdad. Je
vous abandonne la confrontation de la description avec celle des écri-
vains arabes : en attendant je prendrai en considération quelques
pays de la terre, où le chef de la captivité donne la permission d'éta-
blir des rabbins et des chantres (Denj. chap. XII, p. 149, 150).
La Djezira se divisait en trois diars (habitations) : Rabiah , Modhar
el une portion de Dekri. Un contemporain de Benjamin, Ali ben Aladir
le djezirien (mort en 1255), dit dans son lobab : que la Djezira com-
prenait quantité de villes et toute la province de Diar-bekr (Aboulf.
Reiskii, p. 257). Or, il distingue le Diarbekr de Djezira , dans laquelle
il était inclus. Aussi Benjamin sépare Diarbekr de Mésopotamie dans
son énumération des terres où le chef de captivité installait les rabbins.
Les cartes modernes négligent d'inscrire le Diarbekr comme province.
Les cartes des xvi et xvn" siècles, tout au contraire, donnaient le nom
de Diarbekr à toute la Mésopotamie et elles passent sous silence l'ap-
pellation de Djezira.
La terre ^p Kout, dont les populations habitent le mont Ararat, n'est
autre chose qu'Imiret, et le pays jusqu'à l'embouchure du Fas dans
la mer noire; Imiret appelle Koutais, qu'on écrivait anciennement
Gotiana. La chaîne de montagnes venant du pic d'Ararat s'y pro-
longe vers le nord , pour se rapprocher par différentes branches du
Kaukase, du pays de ^''^b^< Alania (des Os ou Ossetes), pays environné
de montagnes qui n'ont d'autre issue que par les portes de fer nytfi'
^nZ3 «w^l^^lw'l-^J qu'y a fait Alexandre, où est la nation appelée
Alains, C'est par cette porte qu'on se rendait anciennement chez les
Khozars, dont le khan suivait la loi de Moïse.
De plus, continue Benjamin, dans les synagogues du pays de Sikharia
K''1D"'D jusqu'aux montagnes ô'Assona HjDN' As-sona, toutes les synago-
gues reçoivent, du chef de la captivité, la permission d'avoir des rab-
bins. Recardez la carte du Kaukase de Klaproth , vous y voyez au nord
de Kout (Imiret), à l'ouest du défilé de Dariel, une immense chaîne de
montagnes Brouts sabdseli ou Sekara, où le fleuve Terek et quantité
d'autres rivières qui coulent vers le nord et vers le sud, prennent leurs
ASIE. 51
sources. Massoudi , en 957, avance qu'il y avait dans le Kaukase 300
différents idiomes; Ibn Haoukal s'étant rendu en 977 dans divers villa-
ges de cette chaîne , s'est convaincu de la vérité de cette assertion ;
Alhassan ben Ahmed le mollabite , Tazzizieu eu 980, dit que cette mon-
tagne porte le nom de djebal al soni ^^y**^^^ J^=^ djehal-assoni
(mont d'idiomes), à cause de cette énorme quantité de peuples et de
langues {Edrisi, V, 6, p. 530; Abulf. Reiskii , p. 179). Al-soni ,
As-soni, prononciation connue.
Le texte de la première édition de Benjamin donne encore après
Sikaria le nom du pays C^Dilinn Halhorgamim, Thogarma, nom bibli-
que des Géorgiens , qui sont nommés de suite par leurs propres déno-
minations.
Etaient comprises encore dans le ressort du chef de la captivité les
synagogues du pays de V^^y)^ Ghergheniens y jusqu^aux fleuve yijy^^
Ghihoun, ce sont les ]>t^;i'i;in Ghergheséens, Pour rétablir cette phrase
embrouillée, il n'y a qu'à déplacer et échanger les deux noms de peu-
ples. Ghergheséens sont les Thogarmim Géorgiens, et Ghergheniens les
Djordjans de l'autre côté de la mer kaspienne rapprochée à Djihoun.
Et tout relevait du chef, jusqu'aux ninDH nyi^ portes (limites,
frontières) des provinces et aux contrées du n'^^^tû Toboth ou Tibet et
jusqu'au n^n hind.
Ayant heureusement achevé le petit tour du monde, nous nous rejoi-
gnons à Bagdad, où, dans cette résidence du chef de la captivité, il n'y
a que 1000 de ses fidèles, tandis que tout près, à 2 Jouruées, une grande
ville , Resen ou Ghehiagan, en possède 5000, et à 1 journée de là Babel,
2000, et à 5 milles delà, Hela, 10000, et peu éloignée Kou/a, 7000
(chap. Xni).Ce pays de Babylonie fut peuplé à la suite des discordes et
de la dispersion des séjournants dans le pays d'Ararat. Petahhia ne fait
monter toute cette population qu'à 6000 (p. 34) et les jouruées de
chemin de Petahhia sont différentes des autres, parce qu'il compte 1 i/a
de Bagdad au tombeau d'Ezechiel (p. 42); â de Bagdad à Babylone
(p. 70).
Babel, aussi peuple, n'est cependant qu'un village qui remplace une
ville importante, dit le contemporain Edrisi, dont les édifices royaux
ont subi les effets des révolutions du temps, mais il en subsiste des
vestiges encore debout, qui attestent que c'était dans les temps anciens
une ville immense (IV, 6, p. 161). Le palais ruiné de Naboukadnezar
occupe un terrain de 30 milles; la synagogue est éloignée du palais de
20 milles : tandis qu'entre HiUa et Babel , il n'y a que 5 milles. Ces
milles sont évidemment très-différents. Un semblable désordre dans la
différence des milles obscurcit les descriptions d'Edrisi et des autres
écrivains arabes. Peut-être trouverez-vous un jour une variante raison-
nable, qui donnera au palais, au lieu de o 30, seulement n 4 milles, et
à la place de n ^0 d'éloignement de la synagogue, 3 2 milles. Ces
variantes feraient disparaître la discordance des milles.
Je vous laisse étudier la carte des situations spéciales pour les environs
du tombeau d'Ezechiel : je ferai seulement remarquer qu'on ne peut,
en aucune manière, se porter avec la rivière ^2D i^hober, sur quelque
fleuve ou rivière de nom identique, ordinairement éloigne (Petahh.
52 BENJAMIN DE TUDÉLB.
note 54). Cest le nom d'une petite rivière, d'un canal ou d'un ruisseau
qui mouille le sol sépulcral et mêle ses eaux avec Maarsares , ancien
bras de TEufrat. Peut-être c'est le Romyma de la carte d'Arrowsmith,
qui est en même temps un embranchement de l'autre bras de l'Eufrat.
Benjamin poursuit sa description positive ou sa course par Neardea
jusqu'à Elnahar ou Poumbedilha, comme s'il allait retourner. Ce pas
rétrograde mérite d'être observé : il paraîtrait que Benjamin termina
ses courses vers l'orient et rétrograda pour se rendre en Egypte.
De Poumbeditha il a déjà parlé ci-dessus p. 135, dit Baratier, (note, 27,
p. 167), mais ce récit est dilférent : les deux principales contradictions
qui sautent aux yeux sont: 1* que là il appelle i:nv':>5< Aljubar, ici "i33^î<
Elnabar, et ^*» ci-dessus il place 2000 juifs, ici 3000; on aurait bien
dispensé notre savant voyageur de faire de telles répétitions jointes à
des contradictions. A mon avis, elles ne méritent pas tant de courroux.
Benjamin ne suivit pas uniquement les narrations orales des arabes,
mais il puisa plus d'une fois dans leurs ouvrages. S'il n'y trouvait point
de nom de Poumbedilha, il y trouvait » L J , LJ ! » L) ! l'autre nom donne
également Jubar, Anbar, Nabar, et même Ambar, comme il est presque
accepté dans nos cartes récentes. Nous ne sommes que trop habitués à
ces dédiacritisisations arabes.
Mais vous saurez mieux désarmer l'humeur de notre savant commen-
tateur, quand vous arriverez à établir Torigine de cette contradiction
dans la dépravation du texte par le copiste, à quoi vous possédez une
indication certaine.
Benjamin sort de la savante Poumbeditha et s'engage par imagination
dans les déserls de Seba, ayant au nord le pays de Sinear, au sud l'heu-
reux Yemen, qui touche aux Indes (à leurs mers). Après 21 journées de
marche, il se trouve au milieu des sables et des déserts, dans le pays
fort vaste des 23'^ rechabiles, où il y a 40 villes, 200 villages; des villes
de 15 milles de longueur et d'autant de largeur; des palais, des vergers;
une population guerrière de 450,000 âmes, sans compter les pillards
arabes : le tout dans le désert sablonneux et aride. Il rattache cet
empire à la ville arabe -^^o Khaïbar j^^ peu considérable, à la
place forte UJ Taïma î<o^n ^l peut-être à à^)\ Thania D''i<Jn
Tannais, qui se trouve sur la route de Jamama à la Mekke (Edrisi, II,
6, p. 155); enfin Tilimas est comparé à Salma par Baratier (diss. VI, 9).
Certainement le conte concernant les rechabites, n'est pas de son inven-
tion, losip ben Gorion (II, 9) l'avait relaté antérieurement. Benjamin
désigne l'Arabie comme domicile des rechabites. Pctahhia qui le suivit,
le fait habiter dans le pays de Gog et Magog au delà des montagnes
ténébreuses (p. 76), conformément à l'opinion de losip ben Gorion. On
voit que deux opinions divisaient les croyants : l'une plaçait les recha-
bites dans le désert des mystérieux Themoudites, les autres dans les
ténèbres des Tibétains, descendant, suivant les Arabes, de Toba
d'Yemen , voisins de Gog et Magog , objet de la prédilection arabe. Je
présume quelque analogie dans celte coïncidence décentes mystérieux,
qui aurait pu agir dès l'origine sur différentes opinions.
Mais nous nous engageons trop légèrement dans ces régions fantas-
tiques et clûmériques, sans savoir comment en sortir. Benjamin nous
ASIE. 55
conduit à la rivière Viray où se baignent environ 50,000 israélites;
puis en 7 journées dans la ville ^DXi Nasl, Nasel, où il compte 10,000
israélites. Naset est évidemment une erreur d'impression ; il faut lire
tCDXI Vaset, d'où en 5 journées on arrive à Basra.
Vous dites (note à Petahliia, p. 62) que dans le pays de Havizah, vis-
à-vis de Korna et près de la rivière de Senne, on voit encore aujourd'hui
un vieux bâtiment qui passe pour être le tombeau du prophète Esdras.
Cette rivière Senne des cartes anciennes, porte, sur les cartes récentes
le nom de Kerkhah. Benjamin rappelle niiDD Xl^D ^Hj wa/ir Somra,
Samoura. Jehuda Kharizi explique ces différences en ajoutant que ce
lieu s'appellait en hébreu Ahava ou Nahr-ahava (fleuve Hauweza). En
examinant la suite de nombreuses cartes de différentes époques, on peut
remarquer qu'on lui donnait d'autres noms encore : Simiée, Syennéie,
Sahna, Senne, Tiritri, Tiripari, Zeymare, Hawera, Sous, Schouz,
Schousch, Karouza, enfin Rarha, Kerah, Kerhia, Kerkhah. D'où pro-
viennent tant de noms? les uns d'erreurs, les autres (Sahna ou Senne)
de la confusion, les autres encore de l'appellation locale ou d'une ville.
Quanta Samoura ou Zeymare, pour retrouver l'origine de ce nom,
Baraticr a eu recours à une ville assez considérable de Laurestan, nom-
mée Semira ou Semiran, éloignée de 15 milles dlsbahan. Ce nom se fait
connaître' sur ce point avec plus de certitude dans la chaîne de la mon-
tagne ^j^^^A^ Samira, qui se déroule au sud d'Isbtihan (Edrisi, III, 7,
p. 556). Mais le fleuve Kerkhah ne vient pas de là. Il sort en plusieurs
branches des monts Ëlevend , non loin de Hamdan ; roule ses eaux près
de Sous et Havez, traverse ce canton et tombe dans le Tigre non loin de
Korne, où le nom Seimare est aussi fréquent que l'appellation de Kerkhah.
Les marécages de^amarga, situés au sud de Tib, louchent Kerkhah ; la
rivière qui baigne Seimarra, située au nord de Tib, se jette dans Kerkhah.
Il faut chercher ces renseignements sur les cartes toutes récentes.
Les dernières explorations ont changé l'intérieur de l'immense Iran ,
elles ont trouvé un bien différent ordre de ses viscères, et c'est à tel
point qu'il est dangereux quelquefois de consulter sans réserve les
cartes précédentes et plus anciennes. Si j'ai recours à la carte d'Ar-
rowsmith, c'est que je n'en ai pas de plus détaillée. Elle est bonne pour
comprendre le cours du fleuve Kouran vers lequel nous nous approchons.
Vous savez que du temps de Benjamin et de Petahhia, les arabes,
depuis plus de deux siècles déjà, répétaient, qu'à l'époque de la
conquête, après la prise de Touster en 641, Abou Mousa el Akhari
tpouva le cercueil de Daniel au fond de la rivière Zab (Touster), et que
l'ayant transporté par le canal à Sous, il le ût submerger sous les eaux
du fleuve (Kerkhah). La narration la plus ancienne diffère dans les
circonstances de la submersion, assigne Irak comme le lieu de la trou-
vaille, Ischtakhri en 950, Ibn Haoukal en 977 (versio Ouseley, p. 76),
Edrisi, en 1154 (III, 6, versio Jauberti, p. 582), sont unanimes dans
leurs relations. Jusqu'aujourd'hui on n'a pas élevé de doutes : on croit
que le corps de Daniel repose submergé à Sous, où une construction
moderne de peu d'apparence représente le tombeau du prophète.
Touster, où pendant un certain temps le cercueil de Daniel resta
expo^, est situé sur une éminence près du fleuve Touster. Les ruines
en attestent l'ancienne magnificence; celles du château sont surtout
54 BENJAMIN DE TUDÈLE.
remarquables. Sous est aussi en ruine. Ses ruines occupent un espace
immense, qui ne comprend pas moins de 12 milles de longueur et
n'offrent aucun vestige de quelque place forte ou château (Hammer,
mémoire sur la Perse, dans le recueil de voy. t. II, p. 535-539).
Le fleuve qui coule près de Tousler porte des noms très-variés :
Touster, Abischouster , Didjele (Tigris), Didjeleischouster, Ahvaz,
Didjele ahvaz (Abulf. p. ov, oa, versionis Reiskii, p. 171); Karoum et
parfois chez les écrivains les noms de ses affluents : Mouschrikan,
Mesirkan, Abizal, Dizfoul, Zable, etc. (L'antiquité rappelait Choaspes,
Euleus, Pasitigris).
Voyons maintenant ce que nous disent Benjamin et Petabbla. Suivant
le premier, du tombeau d'Ësdras il y a 4 milles (distance qui ne peut
servir à rien) à Khouzestan, qui est Elam, celte grande ville ; mais elle
n*e8t pas toute habitée, car elle est déserte et ruinée en partie. A son
extrémité, au milieu de ses ruines , est ]t^it^ Schouschan ou Soussan,
château, autrefois palais d'Assuerus; il y a encore là un grand et bel
édifice dont Torigine remonte aux temps anciens. Le Tigre traverse la
ville, et c'est là que se trouve le tombeau de Daniel (xv, p. 172, 175).
De même Petahhia place le tombeau au dessus du fleuve Tigre ^nr^n
(p. 64-67). »
En admettant que Khousistan qui est Elam, qualifié de la ville ruinée,
désigne une provitfce ruinée, il serait évident à mon avis, que le
château Sousan, situé sur le Tigre à l'extrémité des ruines, est le même
qu'on voit aujourd'hui dans ses restes importants sur une colline située
entre les ruines de Touster. Or, tous les deux. Benjamin et Petahhia,
parlent de l'antique emplacement du tombeau , antérieur à l'invasion
des arabes.
Touster est situé à l'est du Tigre. Nos deux narrateurs nous disent
que dans des dissidences qui s'élevèrent entre les habitants Israélites,
on s'arracha le cercueil et qu'on le plaça de l'autre côté du fleuve. Ce
propos répond à la translation du cercueil à Sous, eflectuée par Abou
Mousa; et il pourrait s'expliquer par la confusion d'idées qui enleva de
Touster avec le cercueil à la fois et le nom du Tigre et le château
d'Ahasferus en les transportant à Sous sur les rives de Kerkhah.
Mais que dire de pieux voyageurs qui assurent avoir vu le cercueil
submergé, suspendu au dessus du pont? L'un assure que c'est Sanigar-
schah, roi régnant alors qui ordonna de le suspendre et de bâtir une
synagogue en l'air; l'autre vit le cercueil et doutant de sa piété, ou ne
voulant la mettre à l'évidence, n'osa passer sous le pont. (Ben j. xv,
p. 174-175; Petahh. p. 64-67).
Faudrait-il donc, afin de défendre les assertions de nos voyageurs,
supposer qu'à un certain temps, on ne sait quand, le cercueil aurait été
de nouveau retiré des eaux et serait resté à Sous, qui prospérant sur ses
antiques ruines à l'est, aurait souffert une pénurie à l'ouest de Kerkhah;
qu'un arrangement, appaisant les dissensions au sujet du cercueil,
aurait soulagé la misère d'outre-riverains, jusqu'au moment où Sanigar-
schah intervint avec ses chaînes de suspension ? C'est dur, c'est difficile.
Tout ce qu'on pourrait dire, c'est : qu'abusés eux-mêmes, ils abusaient
les autres en donnant une forme de témoignage occujaire à ce qu'ifs
n'avaient jamais vu. Il y avait encore d'autres contes arabes au sujet
ASIE. B»5
du tombeau de Daniel, comme oo le voit, par ce qu*en 1555, relate le
persau Ahmed de Tous (Hammer, mémoire sur la Perse, t. H, du recueil
de voyages, p. 555, 556). Il s'agit toujours de la submersion.
Pardonnez, mon ami, si je fouille le sol où votre lumière entreprend
de débrouiller le chaos. Je ne Tai fait que dans Tespoir de fixer ma
plante géographique sur les décombres de Sous ou de Touster. Le
terrain y est scabreux : je vais courir les déserts salés.
La domination du roi de Perse (Sanigarschah nxt^l^^DD) s'étend
depuis Tembouchure de Samara ou Somra (Kherkah), jusqu'à n3D"lDD
Samarkand; jusqu'à la province ]^3D^i T2D^^ T3D^^ Gisbor, Nisbor,
Nisbon (Nisabor), tout le long du fleuve ]'\^^ Gozan. Ce nom bliblique
est attaché cette fois-ci au fleuve Atrok (au delà duquel est le désert
Gazos). Il n'y a pas de motif pour attribuer ce nom à Oxus, parce que
Benjamin Ta déjà signalé par son propre nom de Djihoun, et Nischa-
bour est trop éloigné d'Oxus pour s'étendre tout le long de ce fleuve.
Dans une autre direction, la longueur de l'empire persan s'étend de
l'occident sur Madaï, au centre il enferme les montagnes de ("insin
Hafton; à l'orient il embrasse les provinces de niZ3lW Tobol C^
D'Elam et de son château Sousan (Toster), il y a 5 journées à nDinn
Roubadbar, où l'on a 20,000 Israélites; de là 2 journées à la rivière
n3N3"ini Vdnth; de celle-ci 4 journées au pays de nxn'PIO Molhal, où
réside le vieillard de ]^t^>t^D^x alkhaschischin, des assasins. J'avoue que
je ne sais point quel parti prendre au sujet delà populeuse Roubadbar.
De Toster à Roudbar au Dilem, vers lequel on a voulu diriger l'itiné-
raire mentionné, on n'arrivait pas en trois journées. Essayant cepen-
dant cette traverse , nous remarquons qu'Aboulféda observe qu'il y a
plusieurs Roudbar, parmi lesquels un village du canton de Ilamdan
(Reiskii, p. 550). Mais un village ne convient pas à une population
de 20,000 Israélites, Il est bien de remarquer que la relation de notre
voyageur, depuis sa visite au pays des rachabites, trouve partout des
populations Israélites surabondantes : ce qui est suspect.
Prenant une autre direction à 5 journées vers nord-est de Toster on
' trouve sur la carte d'Arrowsraith , à l'est de Kaschan, /{u(fa6ad, qui
pouvait servir de station et de lieu de conscription des Israélites du
canton de Kaschan. Ensuite vient à 2 journées la rivière Yanth , qui
arrose un point du désert entre Yezd et Tubus; la carte ofl*re plusieurs
eaux du désert. Ce désert s'étend à 4 journées de large, il est appelé
pays de Molhat, ^^-JiPj^ c'est-à-dire salé ( JLy3! sel en arabe). Au
bout de ce pays, ^ sur de hautes montagnes, ^demeurent les ismaé-
lites khaschischin et de leurs quatre assemblées on compte 4 journées
jusqu'à n^nxj? *Aria, i\y> Herat et les montagnes Hafton, desquelles,
vers l'occident, s'étend la Médie (chap. xv, p. 177, 178), Eldad le daniie
appelait la ville x"^"n Hara et la montagne CD^nn Theom, l'abime
(chap. 5, p. 54, verso de votre édition) (i5).
(13) Les assasins établirent leur domination dans les montagnes à partir de Gbilan jusqji'à Herat.
Leurs chefs résidaient ordinairement à Roudbar dans le Taberistan et à Âlmout dans le Gbilan. Les
déserts étaient limitrophes surtout de Khouestan Ils étaient appelés ismaliens , batheniens, molhe-
donn (ceux qui ont renoncé au mo8lemisme),etalgebaI (des montagnes). Les assassins furent détruite
par Houlagon en 1S65.
56 BENJAllIN DE TUDÈLE.
Enfin je me retourne dans mes explorations encore plus vers le midi.
J'ai cherché la situation de Roubadbar d'après les distances données
par Benjamin : mais ces distances doivent céder aux indications posi-
tives de Marco Polo, lequel , contrariant les distances, va confirmer les
relations antérieures et nos explications. Cent ans après Benjamin,
Polo visita ce pays et traversa le chemin de molhat. D'après ses ren-
seignements les deux journées de Sousan à Roubadbar sont une erreur;
les autres distances ne sont pas suffisantes , mais les allégations de
Benjamin sont pleinement confirmées.
Marco Polo sait qu'en parlant de lasdie (Yezd) on chevauche 7 jour-
nées jusqu'à Creman (Kerman) (chap. 54, I, 21). De Creman il che-
vaucha 7 autres journées à travers les villes jusqu'à une montagne, de
laquelle, après deux journées de marche descendante, il entra dans une
grande ville Camadu (Khomda ou Hemedan) située dans une plaine qui
s'appelle Reorbales, Reobarle, Reobarbe, Rebales (chap. 55, 56,
I, 22, 23). A Texlrémité de cette plaine, qui s'étend 5 journées vers le
midi, on se trouve dans une autre plaine Formosa, où, sur les bords de
l'océan, est situé Carmos (Hormouz de Mogistan) (chap. 57, I, 24).
Il dit encore, que de son temps, la grandeur de Camadu avait été
dégradée par les incursions fréquentes desTartares; que les habitants
sont des sorciers, qui changent des jours clairs en des nuits sombres,
qu'une fois surpris lui-même par un semblable sortilège, il n'échappa
au danger de l'obscurité qu'en se réfugiant dans un château appelle
Toloformis ou Conosalmi (chap. 56, I, 55) (i4).
Ajoutons à celle narration que, selon la tradiiion des juifs, le tom-
beau de la belle Ester et du sage Mardochée se trouve dans ce Hamedan
ou Khomda , rui»é aujourd'hui (Malle-Brun cxx, t. vni, p. 586), appelé
par Marco Polo Camadu du pays de Reobarbe (Roudbar d'Edrisi), et
le chiffre de 20,000 Israélites fixés à Roubadbar sera suffisamment
expliqué.
De Roubadbar (Camadu), à 2 journées (comptons 20) se trouve la
rivière Vanth ; c'est la rivière Debala de la vallée Bast qui traverse
Yezd.
A partir de Kerman, Marco Polo chevauche 7 journées par un
chemin Irès-mauvais, et arrive à Gobian, Cobian (Kubbis, Khebis) d'où
il continue par la province Thunacaim (de Kouhislau où est Toun et
Kain) le long de 8 journées jusqu'à la montagne Melete où se trouvent
le vieux de la montagne et les assassins; ensuite il voyage 7 journées
encore avant d'arriver à Sapurgam (Schibergan) qui est à l'ouest de
Balk (chap. M, I, 50). Or, il a traversé le pays salé, molhat, et donne à
la montagne Haflon le nom du pays molhat en la qualifiant Melete.
* De ces montagnes (Ilafion), à travers la Médie on arrive en 10 jour-
nées à Hamdan (Ekbatana). Delà 4 journées à ]xnT1Dl Dabreztan
tLxw^L Taberistan, où sont les Israélites sur le bord de Gozan
[H] Cependant les géographes arabes ne font pas grand cas de la grandeur de Camadu. Istakhri ,
désignant le désert Roudbar au nord de la chaîne de Kofs, signale Koumin situé non loin de Djirofl
et de Honnouz (p. 78;. Edrisi sur la route de Valasgherd nomme Kounein, ville de moyenne grrn-
deur, tres-bien bâtie et trcsagréable, éloignée 4 journées de Hormour (IH, 7, p. 428 sans rappeler
son désert Roudbar. ' "
ASIE. 57
(Âtrok, fleuve qui termine le Taberistan : est inter Gorgan et Cha-
^arezim, in ultime termine Thabarestanae , dit Aboulféda, versionis
Reiskii, p. 554).
De Tabristan à ]i<nDDX Isbahan il y a 7 journées. C'est une capitale
de 12 milles de circuit; on y compte environ 15,000 Israélites.
Isbahan, à cette époque-là, se composait de deux villes, dont une
nommée àj^j^\ el lehoudia, l'autre Schehriana, situées à la distance
de 2 milles Tune de Taulre. La première est plus grande que l'autre
(Edrisi, IV, 6, p. 167). Elle porte le nom de Ichoudia, à cause qu'elle
est peuplée d'israélites : il n'y a donc rien d'extraordinaire, si leur
nombre montait à 15,000 : ils devaient être au nombre de 50,000
à Hamdau et Herat et les arabes semblent l'ignorer.
De Isbaban, on se rend à Samarkand en 15 journées, passant par
Ti^r^^i^ Schifaz, qui est une province persane éloignée 4 journées seu-
lement d'Isbahan. Ces quatre journées parcourues par cette direction
dans le désert salé, ne pouvaient faire découvrir aucune province,
aucun canton. Je me suis avancé d'avantage jusqu'aux montagnes. En
les fouillant de même que leurs alentours, à droite et à gauche, aucune
trace ne s'est montrée, aucun écho ne m'a répondu. Les routes
y sont incertaines, dangereuses. Sur celle qui conduit de Kerman vers
Nisabor, le fort ^jj^^ Sebvard ruiné, avait été délaissé par crainte
des voleurs (Edrisi , lU , 7, p. 456). La route d'Isbahan a Korin vers
Nischabour, est dangereuse el peu fréquentée à cause des voleurs
(Edrisi, p. 459). Au delà de Nischabour, je voh, comme dépendance
i^\s]^ Askaras (Edrisi, IV, 7, p. 185, 186), qui pourrait fournir le
nom de Schifaz. Je vous signale ce nom, parce que sa lecture peut
changer kaf en fe : cas analogue à la lecture de Aljubar ou Alnabar.
Sur la route de Herat à Sedjestan, dit Edrisi en 1154, il y avait à 5 t^
journées de Herat dans son territoire »!JL-I Askaran (IV, 7, p. 185),
ou %Lft--»l Asfaran (IIÏ, 7, p. 448). Cette ville a ses dépendances
comme si elle était chef-lieu d'un district.
Le géographe persan du xui** siècle place sur ce point Asfezar, Eu
même temps, Ali ben Aladir le djezirien, mort 1255, dit dans son
lobab qu'entre Herat et Sedjestan sont quatre villes voisines , toutes
du nomde jtji*-| Asfezar, éloignées entre elles tout au plus d'une
journée. Aboulféda, 1551, en a conclu qu'elles formaient un korah, un
canton de Herat (versio Reiskii, p. 544). Delisle, qui consultait les écrits
arabes et avait des renseignements sur la Perse , communiqués par
l'ambassade européenne à Téhéran , en fait une province à part Esfe-
rairij mais les cartes modernes semblent négliger ou méconnaître
l'existence de ce nom, à moins qu'elles ne le désignent par le nom
Sekher. S'il vous plaisait d'y reconnaître Schifaz de Benjamin , je vous
recommanderai ce groupe de villes cantonales, cousonnantes, pouvant
représenter une province.
L'édifice construit avec des matériaux fragiles , sur des bases peu
solides, croule au premier soufle; aussi ce que j'avance sur l'analogie
de Schifaz et Asfazar peut s'abîmer à la voix du texte de la première
58 BENUmil D£ TUDÈLE.
édilion de Benjamin. Cependant Je continue hardiment. Ce texte dh
(ce qui manque dans la traduction de Baralier) , que de Schifaz les 7
journées conduisent d'abord à n^^^ Ghina, situe sur le fleuve Gozan, et
que de là il n'y a que 4 journées à Samarkand. A i journée au nord
de Nischabour se trouve j.^^jj jl-s^ iîC^an-rovan ou zovan (Edrisi, IV,
7, p. 182, 184, 186), il n'est pas sur le fleuve (Atrok), mais aussi rap-
proché au nord de Nischabour; il est dans ces parties montagneuses
où sont les sources du fleuve; il est dans cette province qui s'étend le
long du fleuve Gozan. Ces conditions rapprochent et identifient l'ana-
logie de Khan avec Ghina. Mais le fondement de la narration de Ben-
jamin est si peu solide , qu'on joue au hasard en voulant pénétrer ses
mystères.
Dans l'hypothèse que nous avons lancée , la distance de 4 journées
de Ghina jusqu'à Samarkand, ni celle de 7, ni cette autre de 4, ni en
somme celle de 15 n'est pas de nature à faire d'obstacles. Le triple
pour les chameaux volants, ne suffirait pas. Ces distances, comme celle
de Samarkand à Tibet, qui est évaluée à 4 journées, sont le résultat de
la leçon erronée des chiff^res. Ces chiffres déterminent par détours,
d'Isbahan à Tibet, 19 journées, tandis que de Tibet à Nischabour,
Benjamin en donne 28 en ligne directe (chap. XYIII, p. 191).
Vous dites , dans votre savante introduction à l'ouvrage d'Eliah de
Ferrare (p. 526), que l'opinion du talmoud et des arabes n'était pas tout-
à-fait d'accord quand à l'emplacement des dix tributs conduits par le roi
d'Assyrie à Halah , à Habor , à Hara et à nehar Gozan ou montagne
Gozan , aussi bien que dans celle de la Médie (H, rois, XVIl , 6, XYIH,
Il ; I chron. V, 27). La différence consiste en ce que les traditions du
talmoud enfermaient toute la population des tributs dans la Médie
seule et une partie d'Adherbidjan : tandis que les arabes disloquent
une partie dans le Khorassan , à Herat et à Balk. Qu'elle opinion
Benjamin a-t-il suivi? il ne s'explique pas. Il semble cependant qu'il
s'inclinait davantage à celle des arabes , parce qu'il relate que les
Israélites du pays de Nisbor et de la montagne de cette province
(mont Tourok), prétendaient descendre de quatre tributs : par consé-
quent le fleuve (Atrok) qui baigne les montagnes, est appelée Gozan,
répondant à l'exil de la bible dans le nahar Gozan. Les traditions
talmoudiques paraissent mériter plus de confiance que les assertions
postérieures des arabes; mais la dispersion ultérieure des enfhnts
d'Israël, qui ne rentrèrent pas dans la terre sainte, a dû donner origine
à d'autres traditions au nombre desquelles est celle qu'avait recueillie
Benjamin chez les Nischabouriens avec toutes les conséquences qui se
présentent dans sa narration.
Je ne connais pas le motif qui fit décider Rawlinson à placer Hafton
dans la chaîne de Zagros et à retrouver Amaria dans Ali-ilahis holva-
nien. Je ne réfuterai pas les déductions contraires de Baratier, je
n'analyserai pas non plus ses heureux aperçus, ni sa remarque que
Benjamin est ici bien meilleur géographe que son interprète latin
(dissert. VI , 1 1-45). Mais je vois que toute la narration de Benjamin
roule sur ce qu'il a appris des Nischabouriens et se rattache à ce
point ; que les distances de pays éloignés sont altérées et réduites à des
ASIE. 59
proportions phlhîsiqnes: mais tout ce qui se rattache à Niscliabour est jus-
tement resserré; à Nischabouretses montagnes septentrionales Tourok,
dont la chaîne, qui se prolonge vers le sud, sous le nom deHafion,
se dirige (innommée sur les cartes modernes) vers Herat (15). Les
Israélites habitent ces montagnes justiu'au royaume de Perse, touchent
aux frontières de la Médie et sont tributaires (chap. XY, p. 478). Les
montagnes de Nisbor (Tourok), sont sur le fleuve Gozan ei les guerriers
Israélites montagnards, alliés avec les infidèles Tourks y^.tSyi\ jH^
(^.c^ja>j jJ^ kaferi ou infidèles) (le), font la guerre aux Kousch,
aux Persans du Farsistan, traversant le désert (salé, molhat). Les
Persans, arrivant aux montagnes de Nisbor, se trouvaient auprès des
fontaines qui sont le long de Gozan (XVUI, p. 191, 196). Toute cette
description est d'accord avec ce que Eldad le danite avançait trois
siècles antérieurement. Il savait que les montagnards des montagnes
d'abîme ne supportaient aucunement la domination de goïm (chap. 5,
de votre édition, p. 34, 5 verso).
C'est là, dans ces contrées que David el Roï d'Omaria en 1155,
souleva les Israélites contre le roi (Sanigar-schah). La ville d'où il
naquit n'est éloignée qu'une journée du mont Hafton (XV, p. 178).
Les montagnards se soulevèrent. Leur chef Roi, surpris par le roi, est
mis en prison dans la ville de ixplDD'l t^abestan , sur le grand fleuve
Gozan. Roi reparaît de sa prison devant le roi (la scène se passe près
de Dabestan, sur le fleuve Gozan) : à la vue du roi il traverse le fleuve
et dans ce même jour il fait le chemin de dix journées jusqu'à Amaria ,
située à 1 journée de Hafton.
Observons maintenant : le fleuve Gozan étant Atrok , Dabestan est
évidemment 4|j:«««a>^ Dahestan, canton entre les deux fleuves qui
dépend de Âbeskoun, situé dans le Tabaristan , sur les bords de la
kaspienne. Dahistan est une ville ou plutôt un village (Edrisi, Y, 7, p.
354) chef-lieu d'un district et porte le nom de Achor ou Ashor,
(non loin de la mer kaspienne au confluent de Sumbor avec Atrok ,)
sur les derniers confins de Tabaristan où commence le Khovarezm.
(Abulf., vers. Reiskii, p. 554).
A dix journées de là on peut se rapprocher du mont Hafton , en
coupant le chemin qui conduit de Nischabour à Merv-schahdjan. Sur
ce chemin, à 55 milles de Nischabour et à 54 de Merv, se trouve
Lyar^! el Hamra (Edrisi, IV, 7, p. 186), d'où, par une forte journée
ou parvient à atteindre le versant est de Hafton. Cette place ne se
trouve plus sur les cartes modernes. On y remarque plus loin que
Nischabour, un peu à droite, Mili-omari : mais cet emplacement ne se
coordonne pas dans les distances d'Amara. Vous m'objecterez que
l'orthographe de n^'ni<Dj; ne répond pas à l'orthographe de \j^ss.,
(15) Les cartes modernes ne nous fournissent aucune dénomination pour cette cliaine. H est
probable que Haflon est le nom d'une montagne particulière de la chaîne. Sur quelques cartes toutes
récentes on remarque un nom assez analogue à HaFlon dans un bouig ou localité appelée Huftan-
seaub , située sur le versant est entre Herat et Nisabour.
(16) C'est ainsi dans Aboulféda Vlaki kareri, Kaptschakenses kaferi. —Le Tourk est qualifié de
Kafer pour le distinguer des fidèles mahoroédans Thogarmim de TAsie mineure.
60 BENJAMIN DE TUDÈLE.
C'est vrai, mais le mal n'est pas si grand. (Ali-ilahis n'y ressemble plus).
Tout ce que dit Benjamin de David Roï , n'est pas copié de quelque
ouvrage orthographié , mais vient de relations orales qu'il n'a su régu-
lièrement orthographier. Peut-être que vous trouverez quelque chose
de mieux ) en attendant, considérant les explications qu'ocrent à la
narration de Benjamin les emplacements assignés, vous direz, je
l'espère : si non è vero, è ben trovato. Et s'il vous arrivait de repren-
dre et réfuter quelques-unes de mes assertions, veuillez vous rappeler
qu'elles ne cherchaient qu'à confirmer voire propre opinion , que vous
avez habilement émise en 4838, dans votre première édition de la
relation d'Eldad le danite : ce souvenir vous dira qu'au fond de la
question, nous sommes d'accord.
Avant de se retirer de ces montagnes agitées, je vous demande,
que veut un prêtre ou sacrificateur des idoles, dans ce que Benjamin
dit : que les Persans campés près des fontaines de Gozan , s'informaient
touchant les ]nDD Comarins enfants de Y*\^ Go/z , d'entre les kofr al
Torks? où, dans les comarins, Constantin l'Empereur voyait simple-
ment les idolâtres (Baratier, nota 7, ad Benj. XVIIl, p. 196, 197). Ne
s'agit-il pas ici plutôt de Komans? Les Persans s'informaient de ^l^
Komans (peuples tourks) enfants de j& Gozzes (nation tourke), qui
sont d'entre les infidèles Tourks (qui sont de la race to.yrke). L'ortho-
graphe s'y oppose de nouveau. En ce cas je vous recommande une horde
de la race tourke appelée jL^ Kimar, comme elle est plus tard
nommée, en 1415, par le compilateur Takout ou Bakouï (notices et
extraits, VI, 22). En effet, Baratier lui-même dit : ajoutez qu'il y a
effectivement là des peuples de ce nom (note 7, p. 197].
Enfin, fatigué des ces explorations continentales, je vais retourner
avec Benjamin à Khousislan, d'où par les eaux du limpide Choaspes
j'aurai le plaisir de vous rejoindre, afin de vous féliciter tout d'abord
de ce que vous avez eu la complaisance de purger l'île de Kis de ce
fatras de lettres, qui surchargeaient sa tête, obstruaient son intérieur,
tourmentaient plusieurs siècles l'esprit des érudits. J'espère que
votre île est délivrée du brigand, qui, du temps d'Edrisi, inquiétait
les voyageurs, gênait la pêche des perles, et qu'ainsi vous regardez
Kalifa en toute sécurité. Mais avant d'aller nous plonger, comme les
deux pêcheurs katifiens, laissez boire, je vous en prie, aux huîtres
l'eau de la pluie, et, recevant l'échange de paroles d'une amitié sin-
cère, permettez-moi de me reposer.
AFRIQUE, EUROPE.
TROISIÈME LETTRE.
Bruxelles, 30 août 1847.
Amédée Jaubert, dans sa traduction d'Edrisi, dit eu poursuivant la
version de la description de TÉgypte : notre texte contient ici une anecdote
fabuleuse et sans intérêt, que nous nous abstenons de traduire (p. 320).
lia laissé quantité de semblables lacunes dans le gros ouvrage de géogra-
phie arabe, en donnant son texte plein, mais incomplet. Heureusement
Benjamin n'est pas aussi purgé par ses interprètes : nous Tavons en
entier, véridique ou relatant des fables chimériques. On ne s'est pas
abstenu de traduire dans sa description de l'Egypte, l'anecdote fabu-
leuse du capitaine Soteros,- qui cassa le miroir de la tour alexandrinc;
maison peut s'abstenir de toutes exclamations contre lui, quand on
réfléchit qu'à celle époque le peuple romain comptait parmi ses illustra-
tions antiques le comte Brutus, et se gloriflait de son fameux capitaine
Ânnîbal : et il ne manquait pas de savants annalistes qui l'affirmaient
tout de même.
Le pèlerin Benjamin n'était pas géographe et ne pensait pas écrire
une géographie ou une description du monde, complète et bien rangée.
Il entreprit cependant de donner à la lecture de ses co-religionnaires
une notice générale sur le monde de leur dispersion. Dans ce qu'il a
parcouru lui-même, il a pu donner de petites distances et des circon-
stances vérifiables. Je présume qu'il courut jusqu'au tombeau d'Ezechiel,
d'où il rebroussa chemin par l'Egypte. C'est de ces derniers points,
qu'il s'avise de faire un aperçu du reste du monde, ramassant à tort et
à travers difl'érenles relations sur la Perse, sur l'Inde, sur le noir Rousch
ou l'Afrique; répétant les relations orales ou écrites, isolées, incohé-
rentes. Gare de supposer son invention, il reproduit bonnement les
choses comme il les a apprises. La relation concernant le tombeau de
Daniel pourrait seule être accusée d'invention, mais simultanément
relatée par Pelnhhia, toute récente qu'elle paraisse, elle vient évidem-
ment d'une autre source que de la cervelle de quelque voyageur. Ne
serait- il pas possible que la turbulence de quelque population Israélite,
mécontentant le conquérant Seldjouk rendait dangereux le pèlerinage au
tombeau de Daniel, à la suite de quoi on débita de fables, émerveillant les
pèlerins qui les répétaient avec empressement? ce que Benjamin dit des
62 BEKJAMIN DE TUDÈLE.
rcchabiles, du tombeau de Daniel, des Nisbouriens, ce sont des contes
de ses co-religîonnaires , placés confusément dans TArabie et la Perse.
Ce qu'il dit de Tlnde ce sont des contes arabes; enfin, ce qu*il avance
de TÂfrique est le produit des commerçants.
Il est incontestable que Benjamin puisait à beaucoup de sources arabes.
En qualité d'Espagnol, certainement il pouvait connaître la langue arabe :
mais sa continuelle arabisation , si je puis me servir de cette expres-
sion , prouve le mieux à mon avis, qu'il a réellement parcouru Forient
et s'est soulé d'arabisme, enfin qu'il raconte souvent sous la dictée de
l'idiome arabe. Lorsque quantité de noms de localités orientales sont
signalées dans la forme arabe, cela n'est pas ei^traordinaire, mais cette
forme se retrouve aussi dans des noms purement bébreux, dans les
appellations de ses co-refigionnaires; les mots arabes sont reproduits
dans kofer al Tourk, alboula, etc., comme on les répète en orient. Il ne
se sépare de l'idiome arabe , que lorsque les arabes lui manquent. En
Sicile , à Palerme , il retrouve encore les arabes et les mots : de perle ,
al-marga , de bain, al-behira. Dix années plus tard, eh 1185, l'espagnol
Aboul Hossein Mohammed ibn Djobaïr examinait la cour de Palerme ,
composée à moitié de mahommédans avec lesquels Benjamin a dû s'en-
tretenir. Il y apprit que le premier dignitaire de la couronne, qu'il
appelle lui-même gouverneur ou vice-roi , portait à la cour le titre
arabe al-hezeina (chap. XX, 111) trésorier : titre connu aujourd'hui à|la
la cour du sultan à Gonstantinople et donné aux fonctionnaires de la
trésorerie : hazua-agazi, gardien du trésor, hazna-krabaîasi, vicaire da
gardien, hazna-dar-baschi, trésorier en chef; titre connu dans l'empire
russe : kaznatschei, receveur du fisc dans un district, le fisc étant qua-
lifié du mot arabe ^ J^ kazn.
On a fait déjà des hypothèses sur ce que Benjamin dit de l'Inde. Je
ne veux pas trop les contrarier. Je ferai seulement remarquer , qu'évi-
demment notre pèlerin y avait en vue de tracer une esquisse de deux
cultes : des adorateurs du soleil et des adorateurs du feu. A cet effet il a
choisi deux exemples peu connus, ou peut-être inconnus à la géographie
positive, extraits probablement de quelque obscur ouvrage arabe trai-
tant des merveilles, tissues fantastiquement pour une lecture amusante.
Pour donner à ces exemples une plus spécieuse apparence de réalité, il
a choisi quelques noms de positions géographiques auxquelles il assigne
les distances qui augmentent la confusion des noms défigurés. Yoici
comme on pourrait les expliquer, nonobstant les profondes observations
des commentateurs précédents.
De Kalif, 7 journées à cblNH*? hOulam, qui est avec son poivre Koulam
dit île. Ensuite 22 journées aux îles y^y^ Khinrag , dont les habitants
sont les DOIin Dogbims : ces appellations sont engendrées de ^!»^^
^Uw mihradj djaba. A partir de ces îles, 40 journées jusqu'à Tzin,
au delà à l'extrémité de l'orient, la mer nikpha, coagulée, ou sont les
griphons.
C'est de Tzin qu'on compte 3 journées par terre et 15 journées par
mer à rh^y^^ Ghingala, d'où 7 journées par mer à Koulan. Ghingala est
donc sur le continent : serait-ce Galigula de Marco Polo, situé quelque
AFRIQUE, EUROPE. 63
part entre Ava et Siam? Toutefois les nombres des distances offrent
une fâcheuse désbarmonle. Si Ton était disposé à corriger le texte , on
substituerait à ;i 3 journées 3 50, de même à 1 7 journées ^ 50, et les
amateurs d'opérations de ce genre pourraient, je pense, être satisfaits.
Vous savez que Hind et Kousch , sont des généralités nuageant le
lumineux orient et Tardent sud. Aussi Benjamin place Kousch en
Perse, en Arabie, dans les Indes et dans toute retendue de l'Afrique
méridionale ; il fait placer Hind sur toutes les mers, jusqu'au Farsistan,
TArabie et l'Afrique : en effet, ces mers portent le nom de la mer Hind
chez les arabes : mais à la suite de semblables généralisations , le récit
de Benjamin est confus, ses idées confuses : et il les embrouille encore
par ses réminiscences bibliques, n'ayant aucun rapport avec les lieux
et les circonstances.
n sait qu'en 12 journées on se rend de Koulam à ^^^i Zabid Juj;
ville de Yemen. Elle est grande, dit Edrisi, très-peuplée, très-opulente.
H y a un grand concours d'étrangers et de marchands de Hedjaz , de
Habesch , de l'Egypte qui y arrivent de Djedda. On exporte diverses
espèces d'aromates de Hind et diverses marchandises de Sin et autres
(ï, 6, p. 49).
De Zabid (on traverse la mer rouge ou le golfe de la mer de Hind ,
la mer Hind encore) en 8 journées pour arriver (directement ou par
Djidda) à p];^ Ba*dan ^.^f Bedja, Bodja, Badja, Badjan des arabes.
Benjamin y ajoute plusieurs explications. D'abord, c'est suivant lui,
cette partie de Hind qui est en terre ferme : cela se comprend que c'est
cette partie de la mer Hind, qui forme un golfe en terre ferme. Ensuite
il ajoute entre paranthèses : c'est ]H^]^ *Adan qui est à "itfi'X'Stû
Telassar, renseignement biblique confus et déplacé : cet *Adcn et
Telassar étant du pays d'Aram, Syrie du temps du roi David.
B'adan, Badja, est un pays montagneux, dit très-bien Benjamin; un
vrai désert entre Habesch , Nubie et Saïd , qui sert de passage et de
réunion pour les marchands. Le principal bourg à cet effet est dans la
vallée de cl Alaki, où se fait le commerce entre les habitants de la haute
Egypte et ceux de Badja. Dans ses montagnes sont les mines d'or. Un
autre bourg est à 8 journées au nord, Aïdhab, situé vis-à-vis de Djidda
qui est le port delà Mekke, et lieu ou reposent les restes mortels
d'Eve, mère de la race humaine. Par Aîdab traversent les pèlerins qui
vont visiter la Mekke. Edrisi expose tout au long cette situation com-
merciale et de passage (I, 5, H, 5; Abulf. Reiskii, p. 196, 197). Plus tard
dans le pays de Badja acquit de la renommée Souakem (Abulf. p. 147).
Les israélites domiciliés à Badan, vont en Perse, en Egypte, et
descendent dans le pays de Qi^yon ^omma(om appelé x''^^S tjmina.
Cette appellation érudite de l'antiquité grecque désigne l'Afrikia des
arabes. Ces israélites se rendaient donc à Tounis, où, à 1 forte journée,
se trouvait c^L»L,^ Hamamat^ séparé de Tounis parla péninsule
Bascheh, pointée vis-à-vis de la Sicile par le cap Bon (Edrisi, 111, %
p. 270; Abulf. p. 205). Les cartes du moyen âge appellent : Mameta,
Mahometa, Hammameta (Sauson), Hamamet, et ce nom s'est conservé
jus<iu'aujourd'hui. Voilà les courses que font les israélites de Bedja.
Pour se rendre de Badan, d'Alalaki à |t(iDK Assouan, il faut
64 BENJAMIN DE TUDÈLB.
traverser le désert x!3tî' Seba , ensuite longer le pt^f^Q Fison, Nil ; la
traverse dure 20 journées. On peut se former une idée de cette
traverse, par différents passages d'Edrisi, et comment on longeait le
Nil depuis les cataractes (I, 4, p. 55). Quand on allait directement, on
arrivait d'Alaki à Assouan en 12 journées (Abulf. p. 196). N'importe, si
le nom de Seba convient au désert, tel nom lui est donné par ceux qui
nous renseignent.
D'Assouan à Yh*\r\ Holvan il y a 12 journées; de Holvan à Kous
13 journées, dit le texte de Benjamin. Erreur évidente d'un chiffre. Au
lieu de ':}i 12 il serait mieux :n^ 22. Il y a d' Assouan 25 journées à
Fostat. Holvan est un bourg à Torient du Nil, à 2 parasanges de Fostat
(Abulf p. 190). De ce point partaient leskaravanes dans le magreb.
Ces karavanes traversent en 50 journées le désert de xinîi Tzahara,
pour se rendre à t<S^*iT Zouilaf Zavila. C'est juste. A cette distance
dans le pays de Fezzan (qu'on nommait aussi Ferran, Karran,
Kazzan) se trouve Jb^j Zavila, en tout temps connue des arabes
(Edrisi, III, 5, p. 289 ; Abulf. p. 212). — D'ici les karavanes allaient
dans le Soudan, où est ^li Gana. Zavila n'est pas encore dans la terre
<lc r[)M Gana, elle est dans le désert de Llsc-^ Sahara, tennis h^
al Tzahara, qu'il faut traverser, Gana étant au delà de ce désert.
Benjamin pense que Zavila est n'P^in Havila de la bible.
Il est clair, qu'étant en Egypte, il a rencontré les Israélites deBedja,
les marchands venant du fond de Magreb, mais en relatant ce qu'ils lui
ont dit, il s'embrouille et enveloppe leurs renseignements dans ses
explications bibliques. Ainsi biblisant,il donne une excessive extension
à î^2n Uabesch, parce qu'il pense que c'est Kousch; Havila et Kousch
étant Soudan où est Gana, il en résulte que Habesch s'étend du côté de
l'occident (chap. xx, xxi).
Kous ^jo^ ville considérable, insalubre, mais commerçante, la plus
considérable après Fostat, avait à 5 journées de distance un port de
mer Koseïr (Edrisi, 11, 4, p. 127; Abulf. p. 195). Ceux qui entraient en
Egypte par ce port, pouvaient consciencieusement rapportera Benjamin
que Kous se trouvait au commencement de l'Egypte et lui apprendre
qu'elle comptait 50,000 juifs (cap. XX, p. 225).
A n 5 journées de Y^p Koulz, Kous, est Qi^D Fioum, autrefois
D^n^D Fitoum. Puisque Benjamin ajoute qu'on y voit encore les restes
des anciens édifices bâtis par nos pères, il n'y a donc pas de raison à
chercher quelque autre Fioum ou Fitoum, que la grande ville bien
connue Faioum, mais il faut étendre sa dislance de Kous : au lieu
de n 5 journées, lire p. 8 journées, de grandes journées, forcées, telles
que les trois entre Kous et Koseïr. De Fioum à Misr il y a 4 (petites)
journées (xxxi, p. 225).
Nous voilà dans cette grande et multiple capitale, pleine de grands
souvenirs de toute époque et de différents peuples, d'antiques ruines et
de constructions modernes. Vous y êtes comme chez vous; vous m'indi-
quez tout ce que Benjamin avait vu et examiné. Enfin vous me con-
duisez dans le pays de "^'^^^ Gosen, où Benjamin trouve une grande
ville, qu'il appelle b^2^DTD^12 Bolsir-salbis. Sans doute elle n'est
AFRIQUE, EUROPE. 65
autre que Gyzeh, mais pourquoi lui donne-t-il un nom que nous ne
retrouvons pas ailleurs? Aussi la distance de Misr monte dans son texte
à n ^ pàrasanges; réduite à n ^ elle serait encore exorbitante, puisque
la distance réelle excède à peine une parasange; en partant même de
Boulak, il serait difficile de compter ^ â pàrasanges. Les distances
suivantes offrent aussi plusieurs diflicuUés sous le rapport de Finsuffî-
sance ou de la surabondance. Je ne saurais proposer de remède pour
toutes.
De Gosen, Gyzeh, en une demi-joumce on arrive à ^x ]^y b^pVV
DOIS' ^-fefl^ «*'* alschams, c'est juste, ^r^^ ij-^^ Aïn schams, source
du soleil, est ainsi appelée de Tancienne "VLltoTtohi Heliopolis des Grecs,
dont les ruines se font voir près de Mataryeh, de façon que Benjamin,
avec les autres, a pu s*imaginer de remarquer, parmi les cdilices bûlis
par les Israélites, des édifices de Rameses et qualifier la ville de ce nom.
Les tours de briques sont appelées éguiile de Faraon par les arabes
(Abulf. p. i99). Quant à Izkal, j'observerai qu'Ibn al Ouardî parle d'une
grande ville ^^^ Kalioub, située à l'occident d'Ain Schems. Elle
comptait 1700 jardins, et il n'en reste que peu et son nom célèbre.
Peut-être celte Kal voisine, parvenue à un haut degré de puissance et
de grandeur JiVft a-t-elle fourni à Benjamin l'appellation de îzkal.
Une (petite) journée de là ;i^x^3')I}^i< ^^ Aboubicg aura sans doute
ainsi défiguré le nom de ^m^JU! al Belbcis, Felbes des koptes, nom-
mée vicu« jWeorum , entourée de ruines. Défiguration résultant de la
prononciation orale.
A une demi-journée de là j^'^^^c ^^^^ Zifta, Séparez le pléonasme
arabe y de i^'sj et vous trouverez Zifla sur la branche damiattine
du Nil, d'où ^ de 6::h\ Zifta, on traversait, dit le texte de Benjamin,
la distance de ^ pàrasanges pour arriver à Bamira.
C'est insuffisant. Corrigez les -; i pàrasanges par n 8 et rr^^oi
Ramira par ni^OI Daiiura et vous aurez »^-^^ Damira, fabrique
d'étoffes appelées schoroubes, éloignée de 10 milles de Daraiat
(Edrisi, 111, 5, p. 520, 521, 525). Nous sommes d'accord que ce point
est bien fixé.
De Damira, il y à n 5 journées à n^HD^ Lmahala , éloignée ée^ ^
journées d'Alexadrie (XXII, p. 252). Il y a en Egypte une' centaine de
Sls-^ Mahajats (d'habitations), dit Aboulféda (p. 201). Aucune de celles
de la basse Egypte n'a besoin de 5 journées pour arriver de Damira;
plusieurs de ces Mahalats se trouvent à la distance de 2 journées
d'Alexandrie. Du temps d' Aboulféda, la plus renommée était Mahalat
dakla, aujourd'hui c'est Mahalat al kebir, située presque sous les murs
de Damira. Dans celte abondance d'habitations égyptiennes, je pense
que Mahalat Meleh, située sur le bras du Nil de Bosetle, en suivant le
chemin vers Alexandrie, est préférable à toutes les autres. Mais en ce
cas il faut absolument corriger les 5 journées du texte en n 8 pàra-
sanges. A la suite sont les 2 (petites) journées jusqu'à Alexandrie.
IV. 5
66 BENJAMIN DE TUDÈLE.
Alexandrie, rendez-vous des marchands de toutes les nations. II est
diflicile de les distinguer tous dans la foule. Les uns viennent des pays
chrétiens de Toccident, d*autres des pays moslemines de Torient; il en
arrive des péninsules apenine et pyrénéenne et du fond de TEurope.
Ceux de la péninsule apenine sont Toskans, Lombards, Génois,
Pisans, Fouilles; ceux de la péninsule pyrénéenne, de Valence X^D2^^2
Balensia ^u^^^Jl» de Malaga ^n^^ Malkhi d^SiL» encore sous la domi-
•• •
nation des ismaélites ; Aragon , Navarais , Espagnoles x^^^DX Esfania.
Le nom de oL^t Asbania se bornait alors au sud de la montagne de
Sierra et de Kastille (Edrisi, IV, i, p. 15). Kordou était déjà en possession
des chrétiens de Toccidcnt, mais en supposant le texte inaltéré, il
serait difficile de voir dans n^^lD Karloïah ^J la Kortouba,
Kartoiah pourrait-elle convenir à Grotone ou Gortone , àjjjhs Kotrona,
J^ Ja5 Kotroni, ville de Kalabre , dont les constructions sont ancien-
nés, retendue vaste et la population considérable (Edrisi, IV, 5, p. 118);
ou à lY^j^ Kretes, à l'île de Grete, Kredin? je n'oserai le décider.
Choisissez selon votre humeur, si rien ne se présente de mieux. Kar-
toïah , aussi bien que n^^lpl Roukoufia sont à chercher, suivant toutes
les probabilités, dans les péninsules. Dans Rakoufiaon a voulu retrouver
Raguse, en ce cas Kartoîah donnerait les Kroates? Mais non : Kartoïah
est Carta'ienia, Gartagène d'Espagne.
Dans la liste des pays de Tintérieur de l'Europe d'où venaient les
marchands , se distinguent : Rousia , Allemagna , puis ni<jtt^1t&^
Sosannah , sans aucun doute jJ^^^aw Sosania, Saxe. Ensuite Danemark
et y^h^ Gelalz qui répond à Holsat, figurant de bonne heure sur les
cartes du moyen âge. Ensuite Flandre et ■nco'^n Hiier que je ne connais
pas. On supposait y distinguer Artois ou Hainaut. Si l'arabisant Ben-
jamin consultait les ouvrages arabes, il a pu de J^ Haïno, faire
^^ HUer : mais il est plus probable qu'il écrivit d'après les relations
orales.
Vient ensuite la France : x^^3t<"nB Frania, île de France, Poitou,
Angou (Anjou) , Bourgonia , Probintzia , qui se distinguent suffisam-
ment. Restent : n^X^D 3/cdtana , indubitablement France moyenne,
centrale , Media, Mediana, appellation karlovingienne encore ineffacée,
et N>3?D"nS Larmania, qui pourrait donner le nom de Remania
(de l'Italie) , d'Armaniac et de Normandie ; j'adhère à cette ^dernière
explication.
De ceux qui venaient des possessions ismaélites ou de l'orient, les
seuls de nny^tc al *Arva ne s'expliquent pas suffisamment; cepen-
dant placés tout à côté d'Andaiouse ils décèlent le nom de la der-
nière possession mosleraine en Portugal, appelée al Garbe, Algarve.
Benjamin qui va bientôt terminer ses courses, avant de quitter
l'Egypte pour ne pas assister à la chute fatale , déjà trop rapprochée
de la domination de Fatemides, appelle notre attention sur le littoral
et la course au mont Sinaï. Il compte 4 embouchures du Nil. D'abord
AFRIQUE. 67
le Nil se divise en deux branches principales, dont une va à Roscheid,
Tautre à Damiat. Toutes les deux se divisent par des embranchements,
parmi lesquels celui de ]^Dt2^x A.smon est indiqué par Aboulféda
(p. 161) comme versant ses eaux dans le lac tanitique. La quatrième
embouchure, qui manque dans le texte de Benjamin, pourrait être
ou alexandrine dans le lac maréotide , ou orientale dans le lac
tanitique.
Il compte d'Alexandrie à Damiat 2 énormes journées. On en comptait
alors 3, dont une à Roscheid, valait GO milles, les deux autres
jusqu'à Damiat plus longues (Edrisi, ill, 4, p. 515, 537). — Le lac
tanitique contient plusieurs fies industrieuses , dans lesquelles on
remarque beaucoup de ruines; Benjamin indique très-bien à 1 et ^/s
journée de Damiat, D^i')^ Tounis ou o^n Hanes, île sur les contins de
TEgyple. (Test ^j^' Tennis (Edrisi, p. 517, 520; Benj. XXIIÏ, p. 259).
De Damiat, autrefois Kaflor, il y a une (grande) journée et demie
^ ^X2^1D Sounbat, dont les habitants cultivent le lin, se livrent
au commerce et sont fort riches (Edrisi, III, 4, p. 517; Benj. XXIII,
p. 259). De Sounbat LL:^ il y a 4 journées à la station de ct^^'^^Elam,
Aïlam, dans le désert,* sur le chemin conduisant au mont Sinaï. Je
remarque dans différentes cartes plusieurs Elim sur les rivages
de la mer rouge; je pense que c'est une de celles-ci, par laquelle
on arrivait en 2 journées à cn^Sl Refidim, village situé au sud,
presque au pied du mont Sinaï, appelé par les arabes %^ J^oi.
djebel Tour (Edrisi , III , 5 , p. 552; Aboulféda, p. 177). Benjamin
connaît au pied d'une montagne un bourg >;i^Din '^^^^ Sinaï, ce
bQurg existe toujours sur les rivages de la mer.
Pardonnez-moi si je me suis étendu à l'infini dans l'analyse de
l'itinéraire suivi par le tudélien en Egvpte. Probablement que cet
itinéraire avait déjà été expliqué par d autres élucubrations qui ne
me sont pas connues. Baratier, que vous m'avez donné pour guider
mon observation avait dit : tous ces noms de villes me sont inconnus :
or, je les ai cherchés, n'ayant que peu de ressources. Je pense
cependant que ces indications, qui se sont présentées assez facile-
ment, sont conformes à ce qui a été dit ailleurs, qu'elles seront
constatées dans vos études. Le respectable Makrizi , avec lequel
vous vous entretenez souvent, ne les démentira pas. Son démenti
m'affligerait beaucoup.
Maintenant nous allons partir de l'antique possession des Faraons
pour la Sicile. Sicile, puissante encore et florissante, où tous les
points sont ouverts et faciles à traverser. Arrivés à Messine, nous
regardons yyh VIonid, la ionide, la mer ionienne, dont le détroit
sépare la Sicile de la Kalabre. Palerme, Catane, Syracuse ou Scala-
graeca, Mazara, Trapani, nX^l^^D Pctalriah ou Petralia, sont des
villes connues.
Ensuite sur le continent Roma et Louka (XXIII, p. 212) (17), d'où
(17) Puisque nous repassons la péninsule Italique, je toucherai à deux position de Benjamin, dont
l'une est passée sous silence par Baratier; l'autre examinée par un peut-être. A partir de Bcnevent
vers Âscoli, est Makhi, sans aucun doute Mel0, dans Basilicata sur la frontière de la Fouille. — Dans
68 BENJAMIN DE TUBÈLE.
par Morena, par les passages d'Itània et la ville de Berden ou Bredîn,
on entre en Allemagne (XXIY, p. 242, 245).
Vous savez que j'ai essayé un jour de contitiriek' Teiplication dis
Constantin TEmpereur^ en s'efiorçant de pénétrer en Allema^e par
Meran, aux environs dUdi ne. Secondant cette idée, vous avez suivi
la route de Tempereur Lolbaire II et vous m'indi«iuez Bredin, ville
où cet empereur mourut en 1157. Cette ville n'existe plus, on croît
(pie c*est Rettenau , dans Tlnnital duTirol, non loin de Meran, tout
près des sources du Lech. La ville a pu gagner de la célébrité , un
certain temps, par la mort de Tauguste persontiage ; entre Meran et
la ville il ne manque pas de passages, dans un pays montagneux se
trouve cette indication ingénieuse, mais de ma part j'avoue que
j'adhère plutôt à l'explication d'abord contestée. Pas d'autre issue :
ni^^XI^O Moraena, Moraîna ou Moriana est Maurienne; x^;3to^Ç
Ilania est le petit passage saint Bernard, qualifié Itania de lignes,
village qui se trouve à droite. Enfin la ville de ]ni2 Berdin indique
le grand passage du mont saint Bernard avec son hospice qui , dans
les peintures des cartes du moyen âge, figure comme une ville. Benja-
min n'y est pas allé ; il qualifie de ville ce qu'on lui disait de l'hospice.
Ici commence l'Aschkenaz, Allemagne (is).
Cologne en est la capitale et il y a 15 journées jusqu'à la ville de
i"^^D3tt^p Kassenbourg, qui est aux frontières d'Aschkenaz. A mon
avis pas d'autre point pour cette ville de frontière que Kutlenberg ,
Koulna-gora en Bohême, lieu renommé par ses mines d'argent , dont la
ville était une des plus considérables et réellement frontière, la Silésie
ne faisant pas encore partie de l'Allemagne.
Quant à quelques autres villes d'Aschkenaz, qui voilent leur front,
riant de nos incertitudes , je n'ai en général qu'à adhérer à ce qui a
été avancé par d'autres. Le texte de Benjamin ofi're des noms défigurés,
ce qui est trop ordinaire dans les ouvrages géographiques. Benjamin
était espagnol, se trouvant en Italie, il se procurait des renseigne-
ment auprès des Italiens. Les noms se défiguraient sous sa plume,
comme ils se défiguraient sous la plume de l'africain Edrîsi. Celui-là
écrivit le nom de Worms de Wormacie, ïw^ti Kormiza, celui-ci
HD^OlIi Garraisa. Chez l'un Batisbone eôt ^jSj^ i_r^) Binschbourg, chez
l'autre :ii'^2:5îi^i Baschenbourg. L'un et l'autre écrivaient ^Jjliwt
îs^^i^zbpli^X Esklavonia , le nom de slavonie voilé par l'élif emphati-
que. Souvent pour les noms qui n'ont pas de position indiquée, il ne
reste que des hypothèses hasardées, ou l'impossible.
Mikilaa de Bcer, il n*y a rien à changer : c'est Nicolas Mikolaï cbez les Busses, les Polonais, etc.
En 1087, le corps de S. Nicolas fat transporté de Myra (Asie Mineure) à Bari et placé dans la cathé
dralc. La renommée de ces reliques attirail les pèlerins des pays les plus éloignés (Ugbelli Italia
sacra, t. VIU, col. 598). L'abbé de Tbingor, Nicolas fils de Saemundr (mort H59), de retour de son
pèlerinage de la terre sainte, narrait en ilS-i, aux Islandais ses compatriotes, Nicholaus i Bar, /txir
hvilir hann, Nicolas de Bar, qui y repose (ap. Werlauff, symbola ad geogr. ex mnnumentis islandicis,
]i. 26, i8, 49). L'orbe terrestre' du musée borgieu à Velletri, gravé et émaillé en 1452, nommant
Apulia , dit expressément , au lieu de Bar : hic quiescit corpu» beati Nicolai de Bar (voyez explicatio
planiglobii musei borg. Velit. auctoretllecren, commcntationes goetting. i804, t. XVI, p. 268).
(18) C'est le passage généralement pratiqué par Frackar (Frankais), Flemingiar, Valir (Vallons),
Englar, Saxar, Nordmcnn (Skandinaves), dit en 1154, l'Islandais Nicolas fils de Saemundr, abbé de
Tbingor. Mais en descendaut de Biarnads Spitals (Benlin), il ne s'arrêta en Italie qu'à Tliraelathorp
(Restopolis, Estrouble) : (ap. Werlauff, symbola ad geogr. ex monum. island. p. i8, 40).
k
. ^uJi^çpiS. 69
Bep|uxiiQ offre deux groupes de: villes d'A$c|ikenaz qu'il a énumé-
ré^, J)9(o^ 1^ premier ^e trouvent les villes situées aux environs de la
Moselle et du Rhin. Ce sept li^s ^ujyaptçs . ; x>r.^p Kolonia^ Cologne;
Ifi^WSlp Houfien9, Konfl/sp^, Confluensia, Coblenu, ro:m:N Ander-
tia^Àa>'Àndernach; n^^p ^pnaoun^p Kob^, ce qui est mieux, Caub,
Caup , Cub ; É<>3fi0"*^p ICroima ou ^^^îoip Kolnia, La première leçon
donnerait Kreutznach, Vautre Baltejâbeim ou Hattene vis-à-vis dln-
gelheim; :y^y2 ^iwô'a, Bingen; nD^D'liy Garmisa, Worms (XXIY,
p. ?*3).
L'autre groupe est composé des villes dispersées par tout TÀschkenaz.
Constantin TEmpereur en a donné Texplication. A mon avis, il faut
l'accepter et retrouver ce qu'il a désigné. Il n'avait pas de nom
de ]^(*>^t£^0 Maslran, qui est certainement Mastrakh, Mastricht, sur
la Meuse. Suivent encore deux villes rhénanes, l'une, p'1^2DTn
Douidsbourg^ Duisburg, donl l'origine est basée sur Teutoburg; l'autre,
pl")33"lt5ti'X Astranbourg, rectifiez Âstrazbourg et vous trouvez le nom
'correct de Strasbourg. Ensuite nommées : "I^IjO Mandrahh ou
'TnCCn^D Mandlrahh, Mantern.
lî^HD^DD Fesinges, Freisingen; p*)"^::^^ Banhourg, Baraberg; nxj Tzor
Zurich; ensuite :i"^'^33ti^n Raschenhourg , ortographiée Ueginaburg,
Rexinaburg, Regensburg, Ratisbone où Petahbia se préparait à son
voyage, ville située aux frontières de l'empire (XXIV, p. 245), de même
que Kassenbourg ou Kuttenberg , à la porte de Prague, située en avant
dans le pays de Bohême, qui est le commencement de l'Esklavonic,
que les juifs, qui y habitent, appellent pays de Khanaan.
Tout porte à croire que Benjamin s'était procuré ses renseignements
sur l'Allemagne auprès des marchands ou voyageurs qui venaient des
environs de la Moselle. Ces mêmes marchands lui ont narré du pays de
Tzofarad, qu'ils avaient visité. Il s'élend depuis ^-iiD'^x «^ Sodo, le
chemin de 6 journées jusqu'à Paris. Or, les mosellans passaient par
Sedan pour se rendre dans la capitale.
A peine sommes-nous à bout de nos courses, et nous avons à com-
battre des réclamations. C'est Mayance en premier lieu qui se présente
avec ses prétentions. Mais il est* impossible de la débrouiller dans la
foule de noms dictés par les mosellans. Benjamin ne Ta pas nommée.
Sa négligence en est-elle la cause? ou la malveillance des mosellans?
en effet ils étaient en dissidence avec les mayançois, dissidence com-
merciale, industrielle, de synagogue? n'importe, Mayance n'y est pas.
Venise non plus; l'Anglelerre pas plus; Vienne et Joudenbourg sont
oubliés ou inconnus. Mais ce qui est pis encore, Kordouba et Sefarad
sont évidemment négligés par l'auteur lui-même qui venait de là. Et la
Pologne, ce paradis des enfants d'israél est aussi passée sous silence :
elle ne réclame pas, parce qu'elle comprend que Benjamin de Tudèle,
en donnant la description des routes qu'il a parcourues, ajoute parfois
à grands traits quelques contes ou notices sur les pays non visités, sans
avoir aucun plan arrêté de donner en géographe la description du
monde.
Vous m'avez dit plus d'une fois qu'on pourrait former loule une
bibliothèque de oe qu'on a écrit sur Benjamin. Les Ganiz, les Grégoire
70 BEN JÀXm ra TUDÈLB*
et ane foule d*aatres Tont commenté; les Gersons, des géographes
da xvn* siècle et nombre d*auteurs se sont servis des renseignements
de notre pèlerin. Or, ne sachant que très-peu de ce qui a été expli-
qué dans Benjamin, je répète sans doute, à mon insu, dans les lettres
Sue je vous adresse , beaucoup de choses qui ont déjà été dites par
'autres. Vous-même en vous jetant avec tant de bonheur dans cette
arène d*investigations , vous donnez un nouveau jour à ces obscurités
que la maladresse de multiples perquisitions avait augmentés, et
malgré moi, je répète vos idées sur plusieurs points de mon exposition.
Pour vous communiquer mon avis géographique, je n*ai pu, en suivant
Fensemble de la description du pèlerin, éviter des répétitions. Vous me
comprenez j'espère et m'excuserez.
Achevant enfin cette rapide revue épistolaire , j'aime à vous réitérer
mes félicitations sur le succès de vos travaux et à recommander à votre
amitié votre tout dévoué*
N
PALESTINE.
QUATRlfeMR LETTRE.
Bruxelles, 1« tO août 1849.
Vous avez voulu soumettre à mon géographique examen la carte de
la Palestine qui va accompagner votre savant ouvrage; en même temps
vous me communiquez les matériaux qui la composent et vos profondes
élucnbrations qui dissipent les obscurités et les incertitudes. Je doi»
donc vous rendre compte de ce que j'ai remarqué.
Les matériaux sont extraits des narrations de pèlerins de différentes
époques qui, pour la plupart, étaient sur les lieux. Benjamin de
Tudèle, 1165; Petahhia de Ratisbone, 1175; Samuel bar Simson de
France, 1210; Jakob de Paris, 1258; Isbak Khelo de Laresa d'Ara-
gon, 1554; Eliah de Ferrare, 1458; Gerson fils de Moseh Ascher de
Skarmela, 1561; Ouri de Biel (Biala Pologne) 1564. Huit descriptions
de la Palestine, dont les deux dernières contiennent une liste abondante
de tombeaux, les autres de précieux renseignements; mais de tous ces
pèlerins aucun n'a réuni de dates certaines pour la construction d'une
carte géographique. Deux seulement d'entre eux se dirigent par des itiné-
raire» : Khelo, qui indique plusieurs routes ordinairement fréquentées»
sans s'occuper de leurs distances ou de leurs directions; et le plus
ancien. Benjamin, qui détermine les distances^ s'inquiétant le moins
de leur direction.
Il ne restait donc qu'à confronter les descriptions de ces pèlerins avec-
une bonne carte de la Palestine, bien élaborée par de nombreuses
études. A cet effet, vous avez choisi la carte de Rîlter. Choix admirable.
Cette carte est inappréciable et abondante en indications modernes.
Cependant elle ne peut suffire aux exigences du cimetière de la Galilée
inférieure, où, faute de direction et de distances, l'emplacement
de quelques tombeaux ne peut être désigné qu'hypothéliquement et
au hasard. La magnifique carte de Ritter n'a pas assez circonstancié
le moyen âge, par conséquent elle n'est pas en état d'expliquer tout ce
que nous relate Benjamin , qui s'est servi plus d'une fois de dénomina-
tions en usage parmi les croisés. Le temps me manque pour me
procurer les sources de cette époque qui seraient à même de corroborer
ce que Benjamin avance. Sur les chemins pour nous mieux connus ,
son itinéraire est d*une exactitude remarquable; or, sur les routes moins
72 BEKJAUIN DE TUDÈLE.
connues, W convient de suivre à la lettre ses allégations, ses rensei-
gnements cl ses écarts. Sur les points où son itinéraire s'embrouille,
la faute souvent n^est pas à lui : la corruption du texte en est très-
probablement la cause.
Parlant d'Antiocbie, Benjamin suit le chemin du littoral jusqu'à
Césarée, d'où il se dirige vers Samarie. A une demi-journée de Césarée
Ti^r'^T Sézarié, conformément à la prononciation des croisés, il trouve
\}pp Kakon ou rh^'V? ^^^^^^* Kaïla. La carte de Ritter nous offre juste
Kaiion. De ce point, il n'y a qu'une autre demi-journée à Samaria.
Cependant le texte nomme à une-demi journée Sargorg Louz, éloigné
d'une journée entière de Saniaria (Vlll, p. 76, 77). le présume que
sur ce point le texte est interrompu. Une journée, Sargorg Louz et deux
teinturiers ne sont pas à leur place. Cette présomption grandit et se
confirme lorsqu'on confronte ce passage avec la corruption de l'autre,
où Segores Loud avec 1 journée et */2 et d'autres circonstances aggra-
vantes (X, p. 105), reparaissent bien misérablement.
De Samarie Benjamin compte les distances en parasanges, qui ne
sont que les lieues des croisés, dont 25 a peu près répondent à un degré.
Au t^ommencement de son ouvrage il a donné ce nom oriental aux
lieues en désignant les distances entre les villes en France. A 4 para-
sanges de Sicheni il se trouve au monle Gilboë, Benjamin se conforme
trop souvent à une étrange version de la bible pour qu'il soit nécessaire
de remarquer qu'il ne s'agit pas ici de la montagne véritable de Gilboa
(éloignée de 8 parasanges de Sichem), mais de quelques hauteurs
arides du mont Efraim, au del;\ de Libua, qualifiée quelquefois de Gibba.
De ces hauteurs arides. Benjamin trouve 5 parasanges jusqu'à Aïalan
ou Yala située sur la plaine Val de luna, A 1 parasange il passe r^^'S)^
"in ]N")y^^^ï^*^ 9^^^ David, qui est la grande ville Ga6oan, d'où il y
à 5 parasanges jusqu'à Jérusalem.
Notre compas observant l'échelle qu'il a trouvée jusqu'à Jérusalem,
en partant de ce point nous conduit d'abord à Bethléem, ensuite à Hebron,
d'où se tournant vers Belk djebra el sans s'arrêter à la 5°" parasange
il se trouve à Zanva ou Zanoah, appelée par Benjamin Sounem, et qui
portait aussi le nom de tr'"''^^'7D^ l^'î':' ^1 ]"^*ùO Toron de los gabral
larisch ou Toron de los cavalleris. De ce point à 5 parasanges il est à
S. Samuel de Silo, qui n'est éloigné de Jérusalem que de 2 parasanges
et ^de ni^^îî^î Fasifoua ou mont n'''^'^^ Moria, qui est Gibeat, Je ne
sais ce qu^on a dit de ce point embrouillé dans la description de Benja-
min, mais les distances ramènent à Moria grand David et indiquent que
c'est Moria fasifua S'il l'a bien qualifié de Gabaon la première fois,
cette fois-ci il s'égare quand il veut le distinguer par Gibeah qui est
éloigné de plus d'une parasange vers l'est.
Ëcartanl les noms bibliques de Sounem, de Gabaon, de Gibeab, restent
à fixer les positions des appellations latines du langage des croisés:
de la tour des chevaliers ; de la place morte grand David ; de la place
morte pacifiée ou autrement qualifiée, de pacis fuga, par exemple. Nous
suivons les distances sans savoir confirmer l'emplacement par quelque
date du siècle des croisades. Dans le xvu* siècle vers 1G50, le géographe
Philippe de la Rue le parisien, qui avait hardiment abordé la réforme
de la monstrueuse Palestine de ses prédécesseurs, aussi bien que sos
PALESTINE. 75
copistes ou imitateurs, comme Nicolas de Fer, eo 1707; le jeune
Baratier 1752, et autres, sans avoir égard aux distances, suivirent les
qualifications bibliques : Chez eux Sounem d'Issakhar est Toron de Los
Gabraleris; Gabaon, Garaan dauid; Gaboa de Saul reste pour Pasifuah.
Peut-être eurent-ils raison. Votre carte offre ces deux opinions proba-
blement pour vos recherches ultérieures (19).
De Moria pasifuah à 5 parasanges est >n''3 p.^n Belh Nobi, Beîth
Nuba , d'où nous passons par ^»;2-^. Rames ou Ramleh, Jafon, Jafne ou
Eblin, d'où il y a 2 parasanges à nnifi'i^ D^?O^D P(ilniis Asdod, Ce point
de la description est curieux et tout ce qui suit. Les deux parasanges
ne nous emmènent pas de Jafna jusqu'à Azot; elles nous arrêtent :\
plus d'une parasange sur le chemin. Or, un vieil itinéraire romain (dit
Baratier), confirme cette position en comptant deJafna20millesàPalmis
et dé Palmis 12 milles à Azot. De Palmis il y a 2 parasanges à Askalon
la nouvelle, éloignée de l'ancienne de 4 parasanges. S'il faut qn croire la
traduction , Benjamin parlerait comme s'il venait dans des temps très-
rapprochés d'Ësdras le sacrificateur, qui, à la place de Benibra édifia
Askalon la nouvelle, plus rapprochée d'Azot, ainsi que l'ancienne, plus
éloignée, tomba en ruine. 11 semble cependant qu'il faut croire tout le
contraire : considérer celle qui est à À parasanges de Jafna pour l'an-
cienne ruinée, laquelle en effet est détruite; et celle qui existe à 8
parasanges de Jafna et continue de former une grande ville, pour la
nouvelle. C'est ainsi que sont inscrites sur la carte les deux Askalons et
je pense que la version du texte peut débrouiller cette confusion et
rectifier la relation du pèlerin.
Ici, dans ce qui suit, il y a une lacune dans le texte : je n'en doute
pas. Nous nous y trouvons d'un coup déplacés et d'un seul bond trans-
portés à 50 parasanges d' Askalon à lezreel; Cette lacune est d'autant
plus remarquable, qu'elle correspond avec la corruption d'un autre
endroit du texte, signalé ci-dessus (VIlï, p. 77). En premier lieu ;;-i'i:i'itî^
T*)^ Sargorg Louz (St-Georges de Lidda) se trouve nommé sur le chemin
de Césarée à une parasange de Samaria. En second lieu (X, p. 105),
sur le chemin d' Askalon, san$ qu'aucune distance soit indiquée, ti^i'î^'o
■"^S Segoures Loud se trouve à une et demi parasange de lezreel.
De lezreel les distances de l'itinéraire reconimencentde mieux con-
duire à travers la Galilée inférieure. Il faut cependant se tenir en garde
pour ne pas s'égarer. D'abord de lezreel à pni Zarzin ou nmS^K^
Sifourieh, les ^ 5 parasanges sont à corriger en ^ 6. Ensuite viennent
les 5 parasanges à Tiberias, d'où en 2 journées on arrivait à ]>D''tû
TimiHy Timmiu, Timnatha, qui est éloignée 1 journée de Giskala, Ces
dislances fixent la position de Timin.
De Giskala à Kades-nefihali , on passe par ]no Meron et par Aima.
Mais il faut corriger les ) 6 parasanges de Giskala en ;; 5 (petites).
(49) Je pense qu*oii peut se demander k jastc titre : i*il faudriiit prendre au séricrax toutes ces
interprétations bibliques que donne le voyageur, suffisamment familiarisé avec les appeUatiei^s de
son époque; on plutôt ne convient-il pas de les considérer comme des rêverie? Jetées quelquefois
au hasard roênoe dans la Palestine. Aden et Telassar transportés en AlHque, ko nom de Togorma (qui
est l'appellation do Géorgie) appliqué aux Tonrks sedjouks , ne sont-iis pas des Qualifications
capricieuses? De même Sunem, Gilboa, Cibeali, Gabaon, contrariant les distances positives, lie sont
que des pi>ète-noms improprement empruntés, qui embi^euiHenl et déteufuent l'atteatiofl , en hisi
nuant de fausses indjcations.
74 BfiKiAMUl D£ TUDÈLE.
De même y 6 autres de Meron à Âlma en ;i 3. De T\chy A^**^ ^ Kades,
il y a une demi journée. Benjamin suscite un imbroglio par sa mauvaise
réminiscence. Il dit que Meron s*appelait autrefois Vn^)^ Mdron, où
sont les grottes de Hillel et de Schammai : il semble ainsi confondre
Meron avec Meiron. Iakob, voyageant en 1258 (p. 184) semble adopter
la même confusion. Nonobstant cette obscurité, l'itinéraire de Benjamin
reste utile pour la construction de la carte et indique la situation de
TImmin et de Aima. Cette dernière situation est encore coordonnée par
la suite routière donnée par Khelo, qui place 'Âlma entre Delata et
Kades (p. 263).
Les indications de distances ont encore servi à remplacement
hypothétique de plusieurs lieux. Hères est entre Havarta et Silo à 2
lieues de Sichem, dans les montagnes d'Efraîm (p. 186, 212, n<^99
et 100). Or, Havarta étant à deux lieues de Sichem, Hères est nécessai-
rement à la hauteur de Havarta déclinant un peu au sud.
Ras hen amis est à une demi-parasange de Tabaria (p. 385), il est
évident que c'est de l'ouest , certainement un peu au nord quand on
passe par ce lieu pour entrer dans l'intérieur de la Galice. — De Tabaria
le pèlerin Samouel fait l'excursion d'une journée à Hanouim en retour-
nant par Arbel (p. 130) : or, Hanouim est encore plus loin vers l'ouest,
s*élevant vers le nord.
Aïn el zeitoun est à un terme sabbatique de Tzafeth; on y passe pour
se rendre au sud à Arbel (Akhbar, Kadoumia) (p. 185, 381, 427) : or,
A!n el zeitoum est sud-est de Tzafeth. Amouka est à 2 parasanges de
Faraam (p. 394, n« 53) et à 2 lieues de Tzafeth (p. 394 , n» 57) : elle
est vers le nord parce qu'elle est toujours rapprochée de Dalata, de
Fareh.
Pour les emplacements hypothétiques, l'itinéraire de Samouel bar
Simson donne encore quelques indications. Il place Kisma sur le chemin
de Tzefad à Giskala (p. 133). En partant de Tabarieh, avant d'arriver à
Hanania, il trouve kefar Houkok ou Iakouk (p. 131). Iakouk reçoit donc
sa situation lorsqu'il est établi que ]^n n^^\*l Hanania , Hanan est le
py "^M kefar 'Anan (p. 131, 184, 151, n« 74). Samouel partant d'Anan
passe le village Loud avant d'arriver à Tzefad , d'où il se dirige par
Bar*am, Amouka et par Neharla, retournant à Tzefad (p. 131, 132).
Dans une autre tournée, de Delata il entre à Bar'am, pour se rendre
de là à Kades (p. 135, 136).
Iakob est moins explicite dans ses excursions et y jette parfois du
désordre. Cependant, en descendant d'Alma vers le sud, il donne une
suite de noms qui se succèdent évidemment sans interruption : Aima,
Delata, Nebarta (Tzefath?) Aïn-elzeitoun, Akhbar, Iakouk, Hiltin, Arbel,
Tiberias. Cette suite coordonne les renseignements que nous avons
réunis.
Gerson et Ouri de Biel, dans leurs énumérations de tombeaux,
copiant ce que les pèlerins en ont relaté, n'observent point de suites
itinéraires, mais sauf quelque distraction, ils groupent les places plus
rapprochées de la Galilée inférieure. Leurs relations ne sont donc pas
aussi utiles que les autres pour l'emplacement des lieux. Kadoumia
seule est inscrite au hasard dans la carte sur la foi de leur indication :
la place pour cette insertion est assez serrée. Quant à plusieurs lieux
PALESTINE. 75
entre Tiberias et Albon, Tcspace est trop vaste et Tîde pour profiter à
FaTenture de leurs renseiguemenls.
Vos connaissances sauront perfectionner ce premier essai d'une carte
destinée exclusivement aux pieux pèlerinages des enfants dlsraél; en
attendant la lumière jaillit à beaux traits et chaque lecteur judicieux
vous sera sincèrement obligé.
*4^^
î:
iî
TAVOLA DI NAVICARE
Dl
MCOLO ET ANTONIO ZENI
ET LES CARTES
DES RÉGIONS SEPTENTRIONALES
A L'ÉPOQUE DE SA PUBLICATION
EN 1558.
ORDRE DES MATIÈRES.
I, Possessions des Skandinaves, 2, découvertes, 3, destruction du Groen-
land ; 4, Zeni, les cartes, 5, carte de Zeno, Scocia ; 6, Dania ; 7, îles de la
Baltique; 8, Suède et Norvège de Zeno, 9, Suède, 10, Norvège de la carte
complémentaire; 11, cartes de Flslande, i2, côtes occidentales et septentrio-
nales, 13, îles et côtes orientales et méridionales ; 14, Groenland de Zeno,
15, du complément collatlonné ; 16, couvent de S. Thomas; i7, Scfaetland;
i8, Foeroe, Frisland, i9, ses localités ; 20, Estotiland, 21, Drogeo, Icaria,
22 , leur emplacement ; 23, Jean de Kolno, Cabot, Gortereal;24, Labrador
commence à figurer, carte de Zeno publiée, 25, celle de regionum septen-
trionaiium descriptio ; recherches.
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TA VOLA DI ZENI.
CE QUE LES ZENI TROUVÈRENT DE CONNIT.
' 1. Les cartes des parages septentrionaux, celle des Zeni et celle du
complément de Ptolémée , sont assez connues par les fréquentes publi-
cations qu^on en a faites. On a discuté beaucoup sur celle des Zeni.
Traitée de pure fantaisie ou d'imposture , elle eut ses défenseurs et ses
explicateurs. Je ne sais pas si Tautre attira autant Taltention des investi-
gateurs. Reproduisant ces deux cartes dans mon atlas et plusieurs autres
configurations de ces froides régions , je pense d'en donner quelques
explications; mais avant de m'occuper des cartes elles-mêmes, il me faut
résumer les événements antérieurs au voyage des Vénitiens (i).
Les populations des pays septentrionaux sortant de dessous les
neiges, et de leur fumée, se fesaient connaître aux latins par des
Irruptions et des brigandages. Elles se répandaient au delà des mers,
établissant des colonies en Irlande, en Bretagne, sur le continent, dans
les îles habitées et inhabitées. Leur piraterie et leurs courses aventu-
reuses furent suivies de découvertes de pays inconnus au reste du
monde baptisé.
Une des plus anciennes découvertes inhabitées était : les petites îles
Ferœr, Fœrœr, Fœroe, où un navigateur audacieux arriva par hasard
vers Fan 861. Cet archipel aussi avancé dans les mers, semblait
annoncer d'autres terres dont l'existence était confirmée par le vol de
corbeaux. En effet, l'Islande fut découverte en 865, par Gardar, danois
d*on^ine suédoise, domicilié en Sélande. Douze ans plus tard, 875, le
norvégien Ingolfr s'établit le premier sur cette grande île, pleine de
volcans et de feu, couverte de laves et de neiges, arrosée par des eaux
chaudes et bouillantes, l'île des glaces, Islandia, La nouvelle colonie
augmenta bientôt en population, n'ayant à combattre que le climat et
ïes ours blancs; prospérant par son activité, elle étendit bientôt la
connaissance des pays plus éloignés.
(I) Voyez ce que nous avons dit dans notre traité de la cartographie du moyen âge sur Zeno
(chap. 161, 197) et sur la carte complémentaire (chap. 180» 193]. — Différentes configurations des
régions glaciales se trouvent dans notre atlas sur les cartes : anglo-saxonne du x* siècle, de plusieurs
iipages rondes, d'EdrisI llSi, de Sanuto 1320, catalane 1577, Mauro 1469, du globe de Bebaïm li9S»
Dorimbergeoise ii93, de Thydrograpbie portugaise 1501, etc. Leur explication est donnée pour la
plupart dans le traité de la cartographie qui raccompagne. Ce petit mémoire sur Zeno peut sup-
pléer nos explications précédentes. — Ce que nous disons des événements antérieurs au voy^e ae
Zeni est en partie extrait de la géographie de Malte-Brun (livre xviii et lxxv de Tédit. de Huot),
ensuite augmenté par de nouvelles explications de Rafn » traduites en italien par le savant suédois
Jacq Gra'berg de Hemsoe , qui a rendu de grands services à la géographie : memoria sulla scoperta
dell America nel secolo dezimo dettata in Tingua danese da Carlo Christiano Rafn, Pisa 1839 ; enfin
complété par tout ce que contient la grande publication : antiquitates American» , sive scriptores
septentrionales rerum ante columbianarum in America , edidit societas regia antiquariorum septen-
trionalium , Hafnise, tipis offic. Schultzian» 1837, 4* maj.
80 CARTE 1300.
Son navigateur Erik rauda (le rouge) fils de Thorvald, ayant heureu-
sement en 982 doublé une pointe verdoyante de la mer glaciale , s'éta-
blit en 986 au delà et donna naissance à la colonie de Groenland (terre
verte). Il s'établit dans le Braltahlid, et son compagnon Heriulfr, fils de
Bardo et parent d'Ingolfr, dans une autre baie un peu au sud. On y
fonda deux villes Garda et Brallahlid. Il n'est pas dit si les islandais y
trouvèrent quelques indigènes, mais postérieurement ils avaient dans
leur voisinage des Kalalils (Esquimaux), répandus sur les côtes orien-
tales du spacieux Groenland.
Pour se rendre au Groenland, les islandais évitaient une côte
entourée de glaces, vue par un de leurs navigateurs, Gunbiorn, et ils
doublaient la pointe verdoyante de Ilvarf, faisant ensuite voile au nord-
ouest où se trouvait la colonie. En partant de Bergen en Norvège pour
aller à celte pointe de Hvarf on naviguait droit à l'ouest en vue des tles
Schelland et Fœroer.
Les Normands s'emparèrent des îles Schctland, lelland ou Hiallland,
vers l'année 961. Ils chassèrent et exterminèrent les anciens habitants
nommés Peii et Papa (s).
La province la plus septentrionale de l'Ecosse, nommée Caithenes,
formait avec les Orcades un état à part, qui résista aux attaques des
Normands et ne fut englobé dans l'Ecosse qu'en 1195.
Les Hebudes furent conquises par les Normands en 895 et restèrent
sous la dépendance de la Norvège jusqu'en 1266.
Les communications entre ces îles plus rapprochées étaient animées,
mais avec les colonies plus éloignées, difiiciles et moins suivies. On
fonda des évcchés en Islande et au Groenland, à cause de leur éloigne-
ment. Des années se passaient sans communication , sans que des nou-
velles arrivassent à la mère patrie (s). Les découvertes encore plus
éloignées ne se conservaient que dans les souvenirs de tradition, tom-
baient dans l'oubli et des navigateurs hardis, après un laps considérable
de temps, allaient à la recherche des pays autrefois connus.
â. En 985, Biarne , fils dé Heriulf Bardoen , cherchant son père au
Groenland, fut poussé par un vent du nord fort loin au sud-ouest et
aperçut un pays plat tout couvert de bois et revint par le nord-est au
Groenland. Son récit enflamma Leifr hinn heppin (le fortuné), fils
d'Erik le rouge. Tous les deux équipèrent ensemble un vaisseau et se
dirigèrent vers la côte précédemment remarquée. Ils donnent le nom
de Helleland à une île couverte de rochers; et celui de Markland à une
terre basse sablonneuse, couverte de bois. Deux jours après, ils rencon-
trèrent une nouvelle côte, au nord de laquelle s'étendait une île;
(2) Ces noms se sont pcrpctncs dans les appellations do plusieurs localités insulaires de Scbct-
laud , d'Orkneis, d'Hébrides et même d'Islande -r 11 paraît même que les islandais donnaient à
toute l'Ecosse le nom de Pettoland. — Je ne sais si Ton a remarqué une singulière analogie de
noms de deux tributs canadiennes aux environs de la rivière Snguenaï, de Pikouagamis et dePapi-
nacbois. — Les papas (quelques moines irlandais) qui séjournaient en Islande, se retirèrent lorsque
les Norvégiens commencèrent â s'y établir.
(3) Les vojages pour aller et revenir duraient quelquefois cinq ans, dit Malte-Brnn. En 1383 un
bâtiment apporta en Norvège la première noi^Velle de la mort de l'évêque de Groenland , décédé
depuié six ans. — Cet exemple ne prouve pas que le voyage durait cinq ans , mais que depuis six
ans on n'avait pas eu de nouvelles de Groenland , et que ce bâtiment norvégien faisait ses affaires
pendant cinq ans avant de retourner dans son pays.
DE N. ET A. ZEMI, 9. 81
ensuite ils remontèrent une rivière , dont les bords sont couverts de
buissons qui portaient des fruits très-agréables; la température de Taîr
paraissait douce aux Groenlandais , le sol semblait fertile et la rivière
abondait en poissons, surtout en beaux saumons. Parvenu à un lac d'où
la rivière sortait, les voyageurs résolurent d*y passer Tbiver et ils y
construisirent des huttes de Leifr, leifsbudhir. Dans le jour le plus
court, ils virent le soleil rester neuf heures sur Tborizon : ce qui fait
supposer que cette contrée devrait être à peu près par 41<^ 25' de
latitude. Un allemand Tyrker, qui était du voyage, y trouva des raisins
sauvages; il en expliqua Tusage aux navigateurs skandinaves, qui en
prirent occasion de nommer le pays Vinland, ou pays de vin. (Les
environs du fleuve Tau mon).
Une expédition sous la conduite de Thorvaldr, autre fils d'Erik le
rouge, s'établit en 1002 à Leifsbudhir, afîn d*explorer les beaux pays
des environs. Le troisième été, 1004, les Normands côtoyèrent une
langue de terre qu'ils appellèrentkialarnes (cap de la coquille); ensuite
avançant leur reconnaissance au delà d'une baie, prirent terre près
d'un cap et virent arriver dans des bateaux de cuir quelques indigènes
de petite taille, qu'ils nommèrent Skroelings, c'est-à-dire nains (4).
Les ayant massacrés ils se virent attaqués par toute la tribu qu'ils
avaient si gratuitement offensée. Celle-ci fut forcée à la retraite : mais
Thorvaldr mortellement blessé succomba, et le cap où il fut enseveli
reçut le nom de Krossanes (de la croix) (Gurnet point au sud de Boston).
Un troisième ûls d'Erik le rouge, Thorstcin , alla à Vinland accom-
pagné de sa femme Gudridha, fille de Thorbiarn : mais il mourut avant
d'être arrivé au large.
La veuve Gudridha alla se marier à Thorfinnr karlsefni (à devenir
supérieur) fils de Thordar. Pendant les festins de la noce, célébrée à
Brattahlid, on s^entretinl de Vinland et on arrêta une expédition, à
laquelle s'assosièrent le père Thorbiorn, et Freidisa fille naturelle
d'Erik le rouge, avec son mari Thorvadr. Celte expédition longea
en 1007 Vestribygd jusqu'à Biarney (Disco), d'où tournant vers autan,
toucha Helluland où l'on vit une grande quantité de loups, et à deux
journées au sud parurent les forêts de Markland remplies d'animaux.
 partir de Markland on côtoya dans la direction SO les rivages à
droite, jusqu'à Kialarnes (Nausel et cap Cod). Ensuite on observa des
rivages sauvages, arides, qui reçurent le nom de Furdhustrandir.
Au delà s'ouvrait un golfe. Les deux Ecossais Hake et Hakia rais à terre,
apportèrent le troisième jour des grappes de raisin. Après on rencon-
tra une masse énorme de canards (Egg) et un violent courant de mer;
une Ile y fut appelée Straumey et le golfe Straums fiord. Au delà
l'expédition s'arrêta dans le but d'examiner le continent. IMais
l'islandais Thôrhallr Gamlason de Austfirdhir se sépara avec son
navire de ses compagnons, et près de Kialarnes, emporté par un
furieux vent de l'est vers les rivages de l'Irlande, il fut saisi et réduit
en esclavage par quelques marchands.
(4) La petite race d'hommes nains n*existe pins dans rAmériqua : mais an fond du continent, tout
le long du Hississipi on retrouve des masses de leurs squelettes et de nombreuses fortiflcations qui
témoignent d'extraordinaires capacités de cette population.
lY. 6
83 CAATB ISdO.
L*expédition 8*établit près d*un fleave qui formait an lac à son
embouchure. On appela le pays Hop et le lac HopsYatn (Mont baup
bay des fleuves Pocasset, Gohannet, Taunton); on y bâtit dés buttes
d^hiTcr. Un matin parurent en grand nombre des sauvages, mais ils
partirent en paix. Au commencement de Tannée i008 ils arrivèrent
{)lus nombreux et avaient ouvert pacifiquement un trafic d^éobange,
orsque par basard un taureau, écbappé du camp normand, jeta
répouvante parmi eux : ils s'enfuirent (s). Mais à l'entrée de Tbivcr
ils arrivent en ennemi. Un combat s'engage , une espèce de fronde
gigantesque des Skrœlings, répand une terreur panique dans les rangs
Normands : le courage seul de Freidisa empêcha la déroute; la vue
d'une femme courageuse arrêta inopinément les Skrœlings dans leur
poursuite. Pour ne pas s'exposer à de semblables algarades, on se
décida à la retraite et l'équipage alla passer l'hiver dans l'Ile Straumsey
(€apawock), avec le nouveau né Snorro que Gadridha venait de mettre
au monde à Hop et dont la descendance illustra l'Islande (s).
Thorfinnr karlsefni retournant à Groenland, longea le continent
de la gauche, continuellement couvert d'épaisses forêts, s'empara à
Markland de cinq garçons skrœlings, et entra la quatrième année au
port d'Eriks fiord. Les garçons skrœlings instruits en langue norde
et baptisés , racontaient les particularités de leur pays.
L'année suivante, 1011, parurent, venant de Norvège, les deux
islandais d' Austfirdhir , les frères Helge et Finnboge. Freidisa les
engagea d'aller en Vinland. L'orgueil de cette femme ayant excité des
querelles, les islandais furent assassinés et l'expédition ne réussit
point.
Aucun témoignage positif^ aucun fait n'indiquent que ces naviga-
teurs aient fondé des établissements stables. Gette race de pirates,
(alignée de ses exploits el de la renommée , cherchait la paix et la
sécurité pour son trafic. S'éloignant du bruit du vieux monde, elle
se dispersait au delà des mers où elle trouvait les terres très
variées ouvertes au premier occupant Elle y préferait le sol plus
ingrat mais inhabité où elle n'avait à combattre que le climat, et
fuyait les beaux pays où elle rencontrait les indigènes qui pouvaient
(B) Le9 Normands (Mit perpétaé cette scène par une description contemporaiae et de suite sur le
Heu même par un tableau qu'ils ont taillé sur un roc d'Assone ta remboncbure de Smiths creek dans
le Taunton. Ce tableau grossier, encore assez préservé de la destruction , présente, conformément à
la description, la figure du chef Thorfinnr et de son nouveau né Snorro distingué par un S; sons une
figure indéterminée, le chiffre CXXXI (131), nombre d'équipage et NAH. ORFINS, possessions
d'Orfins. En avant, le bouclier blanc qu'il avait suspendu en signe de paix, et le taureau qui court
vers les Skroelings dont on voix deux figures au delà de quelques traits confus représentants proln-
blement les objets d'échange. — Sur plusieurs rochers des environs on remarque de nombreuses
entailles des Normands mais endommagées ou ioachoTées. Plusieurs pierres qui étaient chaînées
de leur ouvrage dans le Rhode island, sent complètement détruites.
(0) Thorfinnr karlsefni descendait par la ligne masculine en dixième ^[énération de Sigurd ring
navie 380« — Thorfinnr depuis 1015 s'établit en Islande où dans la terre acquise de Glaumboc, la
■veuve Gudridha fonda une église. Halfrida fille de son fils Snorro était mère du savant évèque
Thorlakr Runolfson, né en i085, qui dota l'Islande d'un code canonique en 1133. Les évèques Biom
et Brand étaient de la quatrième génération de Thorfinnr; dans la neuTième, -vers l'année 1800, le
Juge Hauk, auteur de plusieurs sagas et spécialement de bauks-bok ou annales d'Island. Le prof.
Finn Magnusscn et le sculpteur Bertel Thorvaldsen , oé en 4770, sont da nombre de la descendanée
de karlsefni.
DE N. ET A. ZENI. 2. 83
rinquîétor. Aussi Yinland et tout le parage des environs n'étaient
que visités et des accidents imprévus rappellaieni leur existence.
En liai, un évéque, Erik, se rendit du Groenland au Yinland dans
l'intention de convertir au christianisme ses compatriotes encore
payons qui y séjournaient. Quelques inscriptions runiques sur de
roches , rappellent ces anciennes excursions des enfants du nord.
En 1547 une expédition allait de Groenland à Markland comme
dans un pays connu (?).
Mais on avait des relations sur des pays plus éloignés que Yinland.
C'est encore un chef islandais de Reikianes, Are Marsson qui, en 983,
découvrit le pays Hvilramannaland; ainsi que sa connaissance n'était
pas ignorée à la fois, ni à Limerick, ni dans les Orkades. Are
Marsson trouva à Hvitramannaland des habitants d'origine irlandaise ,
qui le prirent en affection et l'empêchèrent de s'en retourner.
Biôrn breidhvikingakappi (lutteur à grande échelle), fils d'Asbrand,
célèbre par ses exploits dans la mer Baltique et en Suède, à la suite
d'aventures amoureuses en Islande, prenant la résolution de s'expa-
trier, partit en 999 de Hraunhôfn-Sniofellsnes ; poussé par un bon
vent NO, il aborda une terre où, reienu par les indigènes, il s'éleva
bientôt au rang de chef du pays et y vécut pendant près de 30 ans.
Par ce temps l'islandais Gudhleifr Gudhlaugson (s) revenant en i027
de Dublin, où il fesait des affaires de commerce, se vit emporté par
des vents contraires et jeté sur les rivages de ce pays. Les indigènes
s'emparent de lui, indécis s'ils le mettraient à mort ou le réduiraient
en esclavage : il lui semblait qu'ils parlaient l'irlandais. Heureusement
leur chef Biorn arrive, il s'entretient avec le captif, le délivre et le
charge de porter une bague à son ancienne amante Thurida et une
épée à son fils Kiartau qu'il avait d'elle, dissuadant à ses compatriotes de
visiter ce pays , où il allait déposer bientôt dans la tombe ses cheveux
blanchis. Gudhleifr remplit les commissions l'année suivante 1028. —
C'est encore Hvilramannaland , ou friand it mikla (Albania).
Le manque d'établissements et la rareté des expéditions chan-
geaient les abords de voyageurs en découvertes; ainsi les deux
ecclésiastiques islandais les frères Brandr et Thorvaldr fils de Helge,
crurent faire une nouvelle découverte quand ils abordèrent en 1285 à
une terre située à l'ouest d'Irlande.
3. Des relations plus suivies s'étaient établies vers le nord du
Groenland. On y allait chaque année à la chasse et à la pèche, chaque
Groenlandais à l'aise. avait un canot à cet effet. Les habitants
d'Eysturbygd , du bout méridional de Groenland , avaient des stations
le long des rivages occidentales de Yestribygd et de Nordhr setur qui
(7) Voici une position postérieure qui se rattache à la situation de Markland. En descendant par le
fleuve Saint-Laurent, nous voyons à droite une contrée bien boisée, bien arrosée, mais assiégée de
brumes maritimes , qui seuls en dénaturent la température. C'est le Gaspé ou la Geupésie, patrie
ancienne d'une tribu indienne, remarquable par ses mœurs policées et parle culte qu'elle rendait au
soleil. Les Gaspésiens distinguaient les aires de vent, connaissaient quelques étoiles et traçaient
des cartes assez justes de leur pays. Une partie de cette tribu adorait la croix avant Tarrivée des
missionnaires au xvii* siècle et conservaient une tradition curieuse sur un homme vénérable , qui ,
en leur apportant ce signe sacré, les avait délivrés du fléau d'une épidémie (nouvelle relation de la
Gaspésie par le père Leclercq, Paris 1693, — Malte-Brun, lxxvi, p. 465, édit. Huot).
(8) Frère de Tborfinnr duquel descendait l'historien Snorro bturlesop.
84 CARTE 1S90.
avançaient jasqu^à *7â^ 55' de latitude, où, dans l'île Kingikiorsoak, on
a trouvé une inscription riinique qui dit : Erling Sigualson , et Biorn
Hordeson, et Ëndride Addon, le samedi avant gangday (25 avril)
élevèrent cet amas de pierres et nettoyèrent cette place en Tannée 4155.
Si Ton se donnait la peine d*y nettoyer le terrain , on avait soin de se
servir de cette partie réculée (9).
Cependant on avançait plus au nord encore, et en 1266 Tévéque de
Gardar envoya quelques prêtres explorer les parties les plus réculées.
Ils partirent de la dernière station Kroksfiordhar heidhi et bientôt
ils furent entraînés par un vent du sud dans un golfe où ils distinguaient
des îles, des rivages, des traces de Texistence d'indigènes et partout
glaces, ours et phoques. Le jour de S. Jacques, ils observèrent la
hauteur du soleil et toute leur narration se rapporte aux détroits de
Lankaster et Wellington , découverts par 75° de latitude par Parry et
Ross.
Les côtes orientales du Groenland, hérissées de glaçons moins abor-
dables, n'étaient pas tout-à-fait négligées. On les évitait à cause des
dangers : mais la curiosité des marins et des apôtres brava maintefois
les périls. Les rivages découverts en i 194 au nord de Tlsland reçurent
le nom de Svalbarde (Scoresby Liverpool coast).
Le Groenland grandit et prospéra plusieurs siècles : mais sa sécurité
devenait incertaine. Inquiété par les irruptions des Skrœlings
(Esquimaux, Kalalits), il n'a pu résister suffisamment, commençait à
subir des perles. Il lui fallut d'abord abandonner 90 établissements et
quatre églises qu'on avait dans le vaste Yesterbygd. Ensuite on évacua
un canton de la frontière d'Austerbygd , et l'église Stensnes, autre-
fois cathédrale de l'évéché. Les Skrœlings prirent possession de toute
cette contrée. Pour les chasser, une expédition avait été faite, vers la fin
du xiv*' siècle , mais ils s'étaient retirés momentanément et l'expédition
retourna, n'apportant que moutons, bétail et gibier, dont elle put
s'emparer et charger ses navires. Ivar Bardsen à partir de l'année 1540,
administrateur pendant de longues années de l'évéché de Gardar ,
assistait à cette infructueuse campagne (10).
Ravagé par d'autres calamités, d'abord affaibli, ensuite dépeuplé par
la grande peste du xiv" siècle, le Groenland se rangea en 1586 sous
la protection de la reine de Skandinavie Marguerite, et du Danemark.
C'était presque à la veille de sa destruction. Encore en 1418 les Groen-
landais payaient à Rome leur dîme et le denier de saint Pierre, et
dans la même année vint, on ne sait d'où, une flotte de pirates
attaquer la colonie déjà débile : tout fut détruit par le fer et le feu ;
(9) Voici les mots de Tidiome d« la pierre : EHigr. Siguajasson : r : ok. Bianne. Tortarson. — ok
Enri]oi. Odssoa : laukartak. infyrir gakndag — blodu vartate okmdu : 4l3f(.
(10) Ivar Bardsen lui-même nous avertit de cette expédition, dans sa description du Groenland.
Inter Osterbygd et Vesterbygd 12 milliaria maritiroa interjacent, quod totum litoris spatium ab
incolis vacuum est. Et protinus in Vesterbjgd , stat magnum templum dietnm Stensnes quod
aliquauto tempore cathédrale sedesque episcopalis fuit. Nunc Skrellingi totum tractum occidcntalem
tencnt ; est tamen illic affatim, equorum, caprarum, boum, ovium , quae omnia animalia fera sunt .
nuUi bomines, neque christiani, ncque pagani. Ivar Bardsen Groenlandus, qui Gardorum, sedis
episcopalis Groenlandie procarator multos per annos fuit, nobis retulit, unum fuisse ex iis qui a
praetore delecti erant, ut in tractum occidcntalem profecti, Skrelingos inde expellerent. Quo cnm
Tsnissent, nuUum hominem, ncque christianum, neqne paganum invenenint, tantum modo fera
pecora et oves deprehenderunt, ex quibus, quantum naves ferre potcrant in has deportato domnm
redirent (Groenl. descr. in antiquit. àmeric. édita, p. S4B).
DE rf. ET A. ZENr. 4. 85
les indigènes Kalalits firent main basse sur ce qui restait encore.
Depuis ce temps-là on ne connut plus d'établissement européen
dans ce parage (ii). Il fallut de nouvelles découvertes et des investi-
gations pénibles pour retrouver les vestiges de la destruction. Aujour-
d'hui, entre les caps Farevel et de la Désolation, on voit les restes de
sept églises et de beaucoup d'édifices de l'ancien Eysterbygd. Plus au
nord, un peu moins; au delà, les pierres remuées par les bras d'une
population vigoureuse, et chez les indigènes Kalalits aucun souvenir
de l'antique existence.
On présume, non sans raison, que le pirate destrucleur était Zicbmni
ou Zicno, chez lequel séjournèrent pendant de longues années les
vénitiens Zeni.
4. Nicole Zeno, dans ses investigations de la mer septentrionale,
en 1580, fut poussé par une tempête vers l'île Frisland où régnait
Zicbmni, chef de pirates, qualifié de roi. Il se mit en familiarité avec
lui et s'attacha à sa fortune, appellant en 1591 de Venise son frère
Antonio pour l'accompagner. Pendant de longues années, tous deux
virent et apprirent beaucoup. Nicole, plus actif, dressa une carte ou
portulan des pays et des îles qu'il visita lui-même ou dont il apprit
l'existence, et en rédigea une relation. Antonio vivait dix ans encore
après la mort de son frère et restait en Frisland. Avant de quitter ce
monde, il envoya, en HOS, le portulan et la relation de Nicole à sou
troisième frère Carlo, à Venise.
Un de leurs descendants, vers 1555, se donna la peine de copier le
portulan et de le graduer. Marcolini le publia en 1558. Réduit sur une
moindre échelle ce portulan reparut chez Valgrisi en 1561, 1562, 1574,
attaché aux éditions de Ptolémée. De suite, en 1588, on commença à
discuter sur ce que le portulan de Zeno offrait d'inconnu à d'autres
cartes et d'introuvable en apparence pour les navigateurs, à savoir,
sur Frisland, Estotiland, Droceo, etc. (12) (voyez n° 95 de noire atlas).
A l'époque de la graduation de Zeno, vers 1550, on connaissait deux
différentes cartes des régions seplenlentrionales. La première, en
qualité de complément à l'atlas de Ptolémée, connue depuis soixante-
dix ou quatre-vingts ans (n° 96) ; l'autre (Schonlandia nuova), attachée
au système de Ptolémée, offrant des connaissances plus avancées vers le
septentrion (n** 98), servit de base à d'autres compositions de cette époque.
Chacune offre une différente configuration des régions septentrionales.
Suède, Norvège, Groenland, Island varient dans leurs formes, qui ne
ressemblent point aux formes données par le portulan de Zeno, et sont
différemment coordonnées. L'une et l'autre méconnaissent également
les Frisland , Estland , Droceo et autres îles que Zeno étala dans son
portulan. Or, chacune des deux cartes est composée sur d'autres maté-
(11) Quoique dans la série des évoques du Groenland ou n*en nomme pas au delà de l'année 1406,
il parait pourtant que le pape Eugène IV en avait désigné encore en 1453. On a même trouvé une
lettre de Nicolas V à un évèque ^roenlaudais datée de l'année 1448 (Graab, p. 8 et 7; voyez Hum-
boldt, examen de l'Iiist. de la geogr. du n. m. t. II, p. 104}. Ces évèques pouvaient être privés de
leur diocèse, du nombre de ces antres in partibns infidelium.
(13) Viaggi da Persia di Catherine Zeuo et dello scoprlmento de laîsla Frislanda , Estlanda , etc.
Venise, 1888.
86 CARTB 1590
riâUK, sur d'aulres renseignements et conceptions étrangères à Zeno,
aucune n*a puisé à son portulan.
Cette observation me paraît importante, autant pour apprécier le
mérite de Zeno , que pour discerner les sources des cartes postérieures.
C'est ainsi qu'on peut avancer avec certitude, que la carte septentriona-
liorum regionum , copiée dans le theatrum d'Orlel et introduite dans
les compositions de Mercator, est une combinaison, une fusion de celle
de Schonlandise novae, avec celle de Zeno (is).
5. Chacune de ces trois différentes compositions a ses vices autant
dans les formes de pays que dans Fensemble et les positions respectives
des parties.
C'est dans la composition de Zeno que ces vices sont le moins cho-
quants. Vouloir la graduer serait vouloir Timpossible. Il suffît de remar-
quer la parallèle du 60'' degré , également pour les bouts de Groenland
et de Scocia et pour Pergeu en Norvège. Nicolo Zeno était peut-être un
bon dessinateur; si on lui attribue la composition des formes, bon con-
figurateur de plusieurs sections de sa carte : mais je pense plutôt qu'il
avait les portulans de ces sections (préparés par des pilotes islandais,
danois ou norvégiens) dont il disposait la situation relative à coups de
main sans échelle, sans égards suffisants aux distances de la navigation
hauturière. Quant aux petits détails de son séjour et de sa résidence , il
les exagérait monstrueusement, donnant des proportions vagues, inéga-
lement exorbitantes, désordonnées, qui firent reculer et déplacer les
pointes de l'Ecosse. C'est une image sans échelle, qui réunit les grandes
parties bien connues par les autres , les petites de l'imagination gigan-
tesque du dessinateur et quelques points relatés par des ouï dire mar-
qués à l'aveugle (i4).
Le bout septentrional de scocia est accompagné de quatre îles (Orcneis)
et de quatre épigraphes.
Contanio (Conlanit de Ruscelli), est Kaiihenes, Catnes écossais.
lo Papia, réellement l'île Papa , Papalveslr.
Ara, Ro sur le bord septentrional de l'Ecosse.
Teu , Tew , situé en Ecosse sur la petite rivière Toungo, au dessus de
Tougeca (m).
(13) Nous avons reproduit dans notre atlas le portulan de Zeno; ensuite la carte complémentaire
de Ptoléméc dont nous ignorons l'auteur, elle se manifeste à notre connaissance depuis H70 jusqu'à
1530 dans toutes les publications, exclusivement seule. EnGn nous donnons (n" 98) un petit spécimen
de la troisième, de Scbonlandia ouova, attachée au système de Plolémée, extraite de l'atlas de Ruscelli
et Molette, chez Valgrisi 1561, 1562. Son auteur nous est inconnu. Sa composition précéda nécessaire-
ment de beaucoup d'années les publications de Valgrisi , parce que à cette époque , sa manière est
suivie et perfectionnée par d'antres cartographes. Je vois ses formes dans les compositions de
Castaido mort 1557, et dans la composition reproduite par Mercator et Ortel. J'ignore le nom de
l'auteur de cette dernière qui élabora la fusion de Zeni tiré de l'oubhe vers 1655, 1557. — La Schon-
landia nuova parait grossièrement sous une Ggure plus oblongue en 1555 dans l'ouvrage d'Olaus
Magnns mort 1586. Il semble que ses contours étaient alors généralement acceptés. lenkinson
s'accommodait à ses contours; de même Portantins avec sa Livonie. — Les cartes de Corneli Ântoni,
de Monachi, d'Algoet, me sont inconnues.
(U) Excluant l'Ecosse mal assise, la graduation devient moins impossible. Les degrés de la gra-
duation de Zeno trop petits, répondent, le 60 a 55, le 62 à 56, le 64 à 58, le 67 à 60, le 69 à 63. Dans
cette évaluation, l'Islande fait défaut, mais la pointe de Groenland , juste à l'ouest de Bergen , reste
presque sous la même parallèle , ce que les compositeurs des cartes du xvi' siècle ne savaient pas
observer.
(15) La carte complémentaire contient toute la figure ptoléméenne de Scotia et des îles adjacentes :
substituant aux Uebrides les noms modernes de cette façon : à Ricina de Ptolémée, LevUt, Levis; à
llalleos, reisl, Eust ; à Ebuda, Birie, Barrakjloum ; à l'autre Ebuda, Eg, Egg ; à Engaritan« > Y, Yla ;
DB N. BT A. ZBMI. 5. 87
DÂNU.
6. En montant vers le nord, le littoral ouest de Dania, se rangent les
lies suivantes :
Fuy, Foehr, Vour.
Amere, Amrom, Ameron.
Sali, Sy\i.
Ruin (Ruit de Ruscelli), Romeo, Rem.
Manu, Man,Manoe.
Famé (Fanu de Ruse), Fanoe , Panu.
Ulhoe, îlot et pointe de la péninsule, Dodebergh, Doode-burg.
Munit, Numet et fie ou langue de terre, landt van Numet, étendue
jusqu'à Bomienhergen, Bovensoerg (te).
Pour le reste les épigraphes manquent , mais de Tautre côté de la
péninsule Dania , on distingue les îles : Lello, Ânholt, Funen, Zeeland,
Langeiand, Laaiand; les petites îles qui entourent Funen, à savoir :
Hielm, Wedderoe, Samsoe, Ebelo, Alsen, Arr (i?), Tussing; près de
Zeeland Ueselo, toutes à leurs places quoique innommées, mais coor-
données dans un sens raisonnable et harmonieux pour rœîl.
Les cartes postérieures , tant celle qui est complémentaire de Ptolé-
mée, que celle de Schonlandia nuova, sont très-inférieures à la confi-
guration de Dania tracée par Zeno , parce qu'elles reproduisent le
malitorn de Ptolémée. La carte complémentaire le remplit des épi-
graphes suivantes :
Hanburg, Hambourg.
Otfacia, Holsace.
Socer (Stade? Stader sand , à Tembouchure de TElbe).
Thicumer, Ditmarsia.
Frigie liltus, rivages de Strandefresen.
Rupis, Rvpen.
Burgbra nodie litttu, Bovenburg et au delà Uarbourg, qualifié fie sur
les cartes de Delisle. La remarque , hodie liltus , fait croire qu'à cette
époque s'était opéré sur ce point quelque changement sur le littoral.
Calinge.
Herl, cap Hanwit ou Hertberg.
Sundesusel, cap Herlzhals ou Robsnout, Robbeknuyt deWensyssel. —
Sur toute cette côte il n'y a d'îles que les Saxones et Alocise de Ptolémée.
Scane, Skagen.
Uiberg (Niberg) , Viborg.
Arus, Aarhus.
Candinga, Golding.
Oberlo, Apenrade.
promont. Also, île d' Alsen.
à Bpidia, Serra, Barre on Ronft; à Vonaln», Duroff, Turrie. Entre l'Ecosse et Tlrlando : à Edri,
Adreoêt Àrran ; à Mona , Mona» Man. Le manuscrit de Bruxelles place les 80 Oreade» en pleine mer
les éditions lenr assignent strictement la place ptoléméenienne» donnant les noms à Dumna Farat,
à Ocitis. Herlant. Au dessus des Orcades sur le rivage de Norvegia est Thyle sur laquelle nous
reviendrons.
(16) Cornélius Antoni avait bonne confiance dans la carte deSCeno, car il lui emprunte toute cette
série des lies pour sa carte du Danemark. Voves sa reproduction par Ortel.
(17) Nommée Eria ou Cria dans les cartes ou moyen âge.
88 CARTB 1390
Sirsehor , Sunderburg.
Selesia , Sley , Slye ou SIesvîg.
Jgenefiord, Ekelforde, Ekernforde.
PUma, Ploen en Holsace.
Chors , Horsdorf , près de Lubek.
Trauen, Travemûnde.
Lubich, Lubeka.
Sur le littoral méridioDal, vers Test, on voit Rosloch (Roslok), Stenin
(Stettin), Ileil (Hela), Dantzig et les embouchures des fleuves Calusus,
Spre (Pena?), Viadus (Odra), Illusla (Yistula), Chronon, ensuite primum
Prusie lilus.
LES ILES.
7. Les fies de la carte complémentaire sont assez nombreuses et quel-
quefois difficiles à distinguer.
Tred, Lesu, Lessow ou Loessoe, ainsi nommée à cause de Trend ,
Trendei , sable qui se trouve au nord.
Anaol et Anhol, deux fois nommée Anholt.
Idnagor, probablement Hasele; Samsoe reste innommée.
Feonia (Teonia), Funen , Fyn , Fionia, sur laquelle Nuban (Nyburg),
Sunbors (Svenborg), Aspres (Assens), Fidel far (Middelfart), Bergas
(Bowens ou Bogones), Aronia (Huriua, vis^à-vis de Tilot Romps) (is).
Scandia (Seeland), sur laquelle on remarque les places suivantes :
Falsingar (Elsingoer), Cobenamenia , Cobenauia (Copenhagen, Kioben-
haven), Tonga ou Melonga, lisez couga, Kuyl, Keug, Kogge, Keug-
boght), An/î^ (inconnu), F%(o^a (dans le domaine Steffens on voit
quantité de localités terminés en lof), Anberg Nauti, dans l'édition
seulement nardi, dérive de Uardianberg (Varding borg), Nestued
(NestvedK Rorsur, korsur (Casseur, Corsoe), Rolesing, kolesing (Cal-
iumborç), Holdoch, beldoch de Tcdition (Holbek), Raslil (Roskild).
AU, Alsen.
Femercn, Femeren, Vemern.
Rurà, Rugia.
Lalant, Langeland.
Lalant, Laaland.
Falsler, deux fois, Falsler.
Menb, Môen.
Sicholm, Saltholm.
Bornholen, Bornholm.
Berholen Oelanth, Oeland et sa ville Borgholm.
Oxilia, Oesel, vis-à-vis de primus Prussie sinus. Ensuite une île sans
nom (Dago) vis-à-vis de primus Livonie sinus. La Liuonia s'étend droit
au nord avec cinq épigraphes : Rigri (Riga), Migardia, Nugardia,
(Morgedro ou Nargho île vis-à-vis de Revel, à Test de celte île les sables,
Middel grond et Nieuwe grond); Nirona Virona (ressemble au nom de
la province Wiria, mais c'est île Wrango), Flanlena (ressemble au nom
(18) Aronia, Oroma, Orconia,mal indiqué dans le manuscrU de Bruxelles est mieux placé dans les
éditions.
DEN. ET À* ZEJNI, 8, 9. 89
du canton Alentakia), Roderin (montagne Rodenbcrg, appelée par les
Russes Krasna gorka, la belle; vis-à-vis vers Test, File Retusari, sur
laquelle est bâti Gronstadt).
GoUia (Goltland), dont je puis retrouver la seule Wisbe dans les cartes
modernes, les autres Segur, Erig, fl, Miseg, Terefer, Alegerech, fl, Seu,
Vulltty fl. porta ou porti, Rumefalk, Voleher, ne reparaissent pas dans les
cartes ordinaires, ni dans celles des atlas marins, de Tancienne publi-
cation hollandaise. Cober est un écueil situé au nord de Gotland.
SUÈDE ET NORVÈGE.
8. Pour la Suède la carte de Zeno ne donne que les noms de Svecia
et Gocia; pour la Norvegia dix-huit appellations du littoral. Les con-
tours qu'il a donnés au Danemark nous engagent à avoir égard à ceux
de la Suède et de la Norvège. En effet, le plus léger examen saura
convaincre que leurs détours ne sont pas tracés au hasard. G'est en
examinant ces détours , je pense , que :
Geranes est File Hitteroe. Mais les noms qui se suivent en montant
vers le nord, sont introuvables pour moi : Tland, Raceveit, Esceset (ou
Escesct), Gasendel (i9).
Seule et Sculenes, île de ce nom Skutenes, ainsi nommée Ftle Garmen,
de sa pointe méridionale Schutenes. — D'ici sur la carte de Zeno se
perd une distance assez considérable, jusqu'à :
Pergen, Bergen.
Slefont, plutôt Stesont, Steensund, Steersund.
Slat, Norre udden af Stad, Statland, et simplement Stadt.
Riue ou Rruc, Breed-sund.
Score, Stor-dal (Roemes dal).
Slopel, Stoppel.
Drulen, Titteren.
Trondej Drontheim.
Engal, Engelvaer.
Langaresj Langenes, sur File Langoen.
Irons, Trônes sur File Hindoen. D'ici la carte marque mare et terre
incognite, signalant cette croyance assez répandue qui admettait une
réunion continentale du Groenland avec la Norvège. Cette croyance est
fermement acceptée par la carte complémentaire de Ptolémée (se).
9. Cette carte complémentaire, quant à la figure du Danemark, infé-
rieure à la carie de Zeno, est même très-inférieure sous le rapport de
la figure de Suède et de Norvège. Elle forme un triangle et ressemble à
une feuille de trèfle dont la tige sort de PhUappelanth ou Pilappelant,
[i9) On retrouve jusqu'à de "villages , tels que Gcuendél ou Giesdal, dit Malte-Brun, sans indiquer
remplacement de ce village que les cartes ordinaires ne donnent pas. 11 ne faut pas oublier ^ue la
carte de Zeno est de la nature des portulans qui ne s'occupent que du littoral, lequel sur ce point ne
me présente rien de satisfaisant. Tlant peut être Haaiand, ou les Lunde près de Syre; Raceveit la
petite île Bott ; Esceset Stavanger, Gasendel Gestdal à l*est de Stavanger (Gansendael de Mercat.).
(20) De la même époque, que la carte supplémentaire, est la mappemonde de Mauro 4460. Elle ne
connaît i)as de Groenland. Au dessus de Norvepia, Mauro place IsUtnd, pays de Salten, ensuite
Scand, péninsule Skonland où est Ofoden , vis-à-vis de l'île Hindoen. Enfin cavo de Rossia. X càié
de Norvège on y voit une grande ile Ixlandia, c'est l'Island ; puis StiUanda, Schetland ; enfin au
nord datât Gisoen au sud de Bergen.
90 GARTB 1390
et est iuscrit de GoUia orientcUis , à quoi rédîtioo ajoute FifUappelanL
Celte feuille de trèfle abonde eu épigraphes, les voici :
Vermelant, Yermeland.
Emlanl , Upland , et sa ville.
Arosia, Oregrund.
En descendant vers le sud , les deux fleuves : Trediena et Pierdena ,
ont quelque analogie avec les noms de deux cantons Altundrîa et
Fiedrundria.
Agaria, Aker.
Schokalna ou Scokalna, Stokholm.
Suivent les embouchures de deux rivières , qui sortent du lac Seokoï,
une d'entre elles porte le nom de Sera ou Seta (Am).
Le lac Seokoï est le lac Weter placé dans Tintérieur de GoUia meri-
dionalis, reçoit plusieurs rivières, dont une est nommée ft. Alvena, elle
est entre :
Alous, Ols-hammer? et
Nascola, Askersund? vient ensuite
Scening, Skcninge ou Schenninge. Au sud
Sucricobirg ou Suericobing.
Sur les bords de la mer Calmar, Calmar.
Aosia, Abus.
Dans la Scania et Dacia, nous trouvons :
fl. Tursca, Helge-an.
Islrade, Ystad ou Usteda.
Falslerde, Falsterbo.
Sianock, pointe Skaner, Schoner oste, ancien Falsterbo.
Lunda, Lund.
Elcehorgeir, Ellebogen (Mal moe).
Eria, Raa, Raboo.
Elsiborg, Helsingborg.
Ensuite commence Gallandia pleine de rivières :
fl. Forsca, Renne; fl, Anga Nissa-an.
Cimulis ou Amutis, Halmstad?
Oral, les îles nord et sud Hertô.
fl, For8l,fl. Auga, Astran (il semble une double répétion de mêmes
noms).
fl, Trodia, Wiska.
fl. Sumorsan, Monsterson (Gotaelf, Gothalbe).
Lodesia, ancienne appellation de Gotheburg.
Bahus , Bohus.
fl, Suslar ou Sunstar.
Asco, Askum.
10. Ensuite Tembouchure du fleuve lona qui vient du lac lona ou
Serese ou Serefe. Ce lac est celui de Wener, placé dans la Suetia que et
Gottia ocidentalis. Ce lac reçoit plusieurs rivières dont une vient de
Ussalia, Upsal; Tautre de
Lincopia, Linkoping; et au sud du fleuve lona , est placé
Farensis ou Faronis, Skara?
Une grande confusion vient enfin embrouiller quantité de noms
DE N.ET A. ZENI, 10. 91
défigurés ou étrangers à Tusage ordinaire, comme sont les noms des lacs
et de presque toutes les rivières. Le fleuve lona qui devait représenter
le Goia elf, dénote le Glommen de Norvège.
Ici commence la spacieuse Norwegia, Norbegia, le long du fleuve
lona (Glommen) , qui s'étend
(i(M* Tumefror, à partir de Tune sur Hommen, jusqu'au Tonsberg,
Tunsberg, et Tunsheim.
Camorensis ou Damorengis, Drammen , à Tembouchure de Drammen
au nord de Tunsberg.
fl. Optenif Louven Lougen , Lôgr, qui vient des environs d'Opdal.
II. Mita ou Nicta (Nitta), Nid, qui se décharge près d'Arendal.
Repuris, Reperwyk, mouillage.
Lufle Gi promont, Lufte mons (lisez Luste), sont Lister, Lusterland ou
Listerland (qui couvre l'île Hitteroe , Geranes , d'où commence le por-
tulan de Zeno).
Slauargelenlis , Stavanger , stavangerensis , fleuve qui vient se jeter
dans la mer, vis-à-vis d'une île plus considérable nommée Thyle
et qui sort d'un lac nommé lacus Penarum, L'île au nom antique
fourni par Ptolémée est Skute (agrandie dans le portulan de
Zeno) et le fleuve est la rivière Longcn elf, qui tombe dans Buken-
fiord , sortant près de Vennio de Roisdals vatne des eaux du lac Pena-
rum, qui est entre Roildal et Vennio (Penio).
Bergensis, Bergen, bergensis.
fl, Buri, fi, Archeus, sont les seuls qui se présentent dans tout l'es-
pace jusqu'à Drontheim. Le premier serait le fleuve Roemsdaal , ainsi
appelé de Breesond ou Beeresond, entre lesquels il se décharge dans
la mer; l'autre serait Golan qui débouche près d'Urkedal, d'où dérive
son nom Archius?
Nodrosia , Nidrosia ou Drontheim.
Les deux îles vis-à-vis de Nodrosia Ferensis et Feinas, sont probable-
ment à diviser. La première est Froyen située vis-à-vis de Drontheim ,
l'autre , égarée peut-être si loin des côtes du Danemark, Fanoe.
Se suivent sur le parage sinueux : fl, Nitis (Namsen), promont, Oplena
mons, fOttenos Mercatori),prow. Nustre (ou Uustre, Veslenfiord),/ï. Selhi
{S>iech) y prom. Selecros ou Selceros (Salten, Saltensfiord), /Z. Trogue,
fl. Termœ (Malangar près de Tromsoe), Tion, fi, Enog, ces trois der-
nières positions forment le canton d'Engronelant (dont le nom n'existe
pas dans l'édition d'Ubelin et Essler) , au delà duquel est un autre
nommé Ventelant,
Vis-à-vis sont placées les îles Holcelanl et Margarester; cette dernière
est certainement Mageroe , au nord de Norvège.
Le géographe constructeur de la carte complémentaire s'imagine
qu'un golfe étroit sépare la Norvège du Groenland. Le Groenland,
sous la forme ovale, se développe comme un fruit au-dessus de la
feuille dont nous avons examiné les épigraphes abondantes. Zeno savait
au contraire que Groenland, très-éloigné à l'ouest, était séparé de
Norvège par de vastes mers et par l'île Islande (21). Aussi, avant de
nous entretenir du Groenland, nous allons examiner cette grande île.
(Si) Puisque nous ayons reproduit dans notre atlas (n* 98} la Schonlandia nuova, ou la carte posté-
92 GARTB i39a
ISLANDIA.
il. Vhlande, dessinée par ZeDO dans une pose un peu Inclinée,
figure perpendiculairement sur la carte coropiémentaire. L'arretino
Thomasso Porcacctii da Castiglione, en 1572, reproduisit la figure de
Zeno , enrichie de plusieurs insertions introduites avec une certaine
connaissance de positions (ââ). Le géographe qui opéra la fusion de la
carte de Zeuo avec la carte des régions septentrionales ou de Schonlandia
nuova recliOa par ses connaissances quelques points de la composilion
de Zeno, comme on peut le voir en observant les reproductions de sa
carte, vers 1570 par Ortel et Mercator. Mais les caries nautiques bataves
publiées en 1585, 1589, 1599, par Luc Jans Waghenacr (Aurigarius) ,
donnaient à flslande une forme toute ronde ou ennéagonale chargée de
la nomenclature de seize noms étranges, la plupart ignorés par toutes les
autres connaissances (23). A cette époque cependant, parut une carte
spéciale d'André Velleius, reproduite de même vers 1570 par Ortel et
Mercator. Elle servit de base pour les compositions postérieures; rectifiée
elle reparut chez Blaeuw et dans différentes autres fabriques de cartes
ainsi que dans les études de Sanson. Les cartes marines publiées
rieure à la carte complémentaire au Ptolëmëe : nous allons faire une revue de ses épigraphes, qui au
fond n'offrent pas de difficultés , sauf quatre positions à observer. — Taveutia» Tavastie ; Nov. castr.
Nysliantzou Nie; Viburg, Viburg; Àho, Abo; CtMto (transposé) Kasto, dont les ruines existent au
iud d'Abo ; Korsholm, Korsnas ou Cornis ; Chimen, Kimi , Kemi ; Gefle, Gaefle ; Upsalia, Upsal ;
Suderkopia, Suderkocping, au sud; SteckhoUn, Stokholm.auuord (transposition); Cannar, Calmar;
Mabnogia, Malmoe ; HeUenburg, Helsinborg ; Kongelle, Eongel au sud , Salsburg, Elsboi^ on Gotten-
burg au nord (transposition); ^<iota, Obslo ou Christiania; Stafanger, Stavauger; prom. Scane,
Scutenes; ata Brigitta .... ; Bergù, Bergen; fiyr«en, Beersend; Mendelhu», lAeilhnjs ou Melhus;
Ncu, Naes au uorà» Nidrosia, Drontheim au sud (transposition); Skongen, prom. Schonien ; Brynnia,
Bronoe; Rodboo,^Rodoei SaUen, Salten; RoUm, Rollen; RodheUe, Rodhelle; Fnagh, Kynnes?
Hanoniz, Onmegan^? Matkur, Matkorf ; yharhug, Wardhuus. — Les îles : Stappen, Stappen près de
Mageroe; RodeshoUm, Rindo et Holmoe; Sanyion, Senyen; Vcutral, Wcsrol; Londina, Luudland;
f^aro, Varoe. — Oaeu, Uns, Hettand, Maïnland , Farenaist Faire, ces trois de Schetland. — j^locie etc.
de Ptolémée. Nerpia, Biorko ou Herpen ou Querken etc. — Le t^pe de cette carte servit longtemps
de modèle aux géographes dans leurs compositions. La première carte de Suède et de Norvège ,
supérieurement élaborée, est sans doute celle d'André ^ureus, suédois, du commencement du
XVII* siècle, vers 46fO.
(S2| L'isolo piu famose del mondo descritte da Thomaso Porcacchi da Castiglione arretino a
intagliate da Girolamo Porro padovano, in Venetia, apprcsso Simon Galignani et Girolamo
Porro 4572, petit folio, p. 77, 78. Les positions ajoutées à celles de Zeno sont les suivantes : mons
sanctus ou abatia Hegeitl, le lac Borghem,oripto orticus, mons crncis, mons Helafiel au centre de
l'île, Vestrabord tout à fait au sud ; le nom de Cenesol est doublé , Aisel , négligé. — Porcaccbi lui-
même n'est pas un ignorant, il cherchait de bonnes informations et semble suivre un écrivain la
mieux renseigné à Venise. A part sa discussion sur Tbile , Tule', il reconnaît l'insuffisance de ses
connaissances : ne diro quel poco chen ho trouato , certiGcando ogniuno cbe legge, ch 'io piu ne
tratterei, se piu ne sapessi. L Isola Islanda è dunque posta fra P. et T. di la dalle Orcadi nel grande
oceano aggbiaciato, cento uenti miglia oltra il circolo artico : et di lunghezia dicono ch' c fra TA. e'I
B : intorno a seicento miglia : ben che io trouo alcuni, che con molto gran disuano non uogliono,
ch' ella sia luoga piu che ccnto uenti miglia uerso T : et di circuito dicono che non passa 280. Ë' isola
montuosa, et con moltifiumi. — Ora dell* Islanda si seriuono moite marauiglie : fra le quali dicono
esscrui una balza, che chiamano Hegleberg , che da questa escono pcrpetui fuochi et pensano, cbe sia
una prigione d'animé immonde. Dicono, che ui si trouano aochora spiriti, i quali... Quest' isola non
produce grano, uino, ne olio : mt in cambio di uino usano ceruogia et dal grasso de' pesci fanno olio
per abbruciare. Ha intorno alcuni scogli : ma di tanto uil pregio, che non son nominati dagli auttori.
(23) La moitié appartient à la partie septentrionale de 1 île et se laisse comprendre un peu. Le
point le plus déterminé est Langenet, h partir de ce point vers l'ouest, Roemhoek répond à Oudcman
des cartes bataves postérieures; Seueroart change eu Swanswyck, ensuite en Sutungswick , déjà de
l'autre côté du golfe Pistils (golfes Lons et Tbiful); t. Grinae et vis-à-vis d'elle-même Grinsa (Grim);
Rouhoeck, figure dans les cartes postérieures dans Roohoeck et change ensuite en Roodehoeck
(Raudarhofo); Windal (district de Vadle); Haddestrant (des golfes Eya et Ilicdins); Scage (golf
Skagar et Skagastrand); Bere atrant (au fond du golfe Houtray, Baer, dans le district de Strand). Sur
tout ce parage les Bataves avaient probablement leur pêche. En tournant vers le sud , vient t. Sleto,
ensuite Srenich, Robena, Midal (Medalland), Side (Sida près de Kirkioubae), vis-à-vis, l'île ff^ibeni
(ainsi nommée Westmanna). A l'est sont Bergvoél et Ooaterhoeck, formant les angles de cette Island
ennéagonale.
D£ N. ET A. ZEKI, 1S. Oi»
par van Kealen élaboraient toutes les sinuosité des rivages. Assujettie à
Tarpentage des ingénieurs, terminée en 1754, elle avait toutes ses
formes sinueuses et hérissées suffisamment déterminées, reproduites
par différents fabricants de caries et spécialement par les héritiers
de Homman. Il lui manquait cependant une position fixée par des
observations astronomiques. Il paraît par la carte publiée par Horrebow
qu'elles étaient levées par les Anglais. Mais les observations mieux
connues par la pratique géographique sont dues aux français Borda,
Pingre et Verdun de la Crenne, quf les ont levées en 1778. De nom-
breuses descriptions, nous ne mentionnerons que celle du voyage en
Island fait par ordre du roi de Danemark, publiée en 1802, parce que
nous y avons eu à notre disposition une carte très-détailléc (24).
12. Notre allas a réuni les trois petites figures de Tlsland : celle de
Zeno, celle de la carte complémentaire et celle de la carte reproduite
par Mercator et Orlel , qui opéra la fusion des connaissances de Zeno
avec la Schonlandia nuova. Nous allons collationner ces trois, consul-
tant les cartes précitées, pour expliquer la situation de leurs positions :
comme nous les avons tracées dans notre atlas, et que nous résumons
en commençant par Skalhold et se portant de suite à Anafiord pour
faire le tour de l'île (as).
Scalodin, Scaloldin (de Porcacchi), Scalhodin (de la repr. de 0. et M.)
Skalholt résidence de l'évêque.
Anaford , Anafiord (repr. de 0. et M.) Hanefiord baie sur lequel était
situé Hanar.
Tuchosy Tirchos (de la carte complém.), Tulios (de Porcacchi et de la
repr. d'O. et M.), ne se retrouve pas dans aucune carte postérieure, ni
dans celle de la division républicaine du X^ siècle, composée par Biôrn
Gcumloegson, géographe d'Islande, Finn Magnusen et plusieurs autres
savants d'Islande.
lovel ou louci, de la leçon de Ruscelli et de Porcacchi; lokelei
Snaueliokel , de la reprod. d'O. et M. Snebels-hokel of ïokuls-berg ,
Snabels hokel ou Sneffîaeldness.
louci, de 0. et M. est une répétition du précédant, dérivant de la
différente leçon des épigraphes de la carte de Zeno.
Volrabor, Westrabord (de 0. M.), rivages du district Bardestrand ,
faisant partie de Westlendinga fiordung, ou Westland, quartier occi-
dental.
Wilsare mons (0. M.) , écueil dans la mer vis-à-vis de
Ifafiord (0. M.) , Isafiord et canton de ce nom.
(24) L'exécution de cette carte est assez plaisante. Elle indique nombre considérable de positions
•ans épigraphes : ce défaut est commun, par un singulier hasard à la publication dos cartes anté-
rieures : mais ce qui est plus curieux et spécial à la carte du voyage par ordre de sa majesté , que
vous n'y trouvez, ni mont Hecla, ni Skalholt, ni Holura, ni la carte u'a prison considération,
que de nombreux glaciers, les noms d'innombrables petits fiords (qu'elle qualifie de golfes) et d'insi-
gnifiantes petites positions.
(25) Le nom d'IsUtnd^ pays de glaces, n*C8t pas nouveau dans cette partie du monde. La carte
auglo-saxone du x* sicele» le donne à une partie de Norvège, qu'elle représente entière comme île.
Cette appellation d'une partie de la Norvège confirme la carte de Mauro 1460. L'île même d'Island
•st signalée en 4184 dans la carte rogerienne par Edrisi; cette tie porte le nom de Ixeland dans h
carte de Mauro.
94 CARTE 1390
prom. Rag (0. M.), cap Nord; à son ouest Rakbaay entre Rakhal
et cap Nord, indiquent les cartes maritimes des van Keulen (âo).
Klesol (du complément) ne se trouve nulle part. Peut être (Rlesol)
Relis bool, au fond du golf Hounan.
Nicole Zeno ignore Texislence de cette portion de Tlslande qui
s'étend entre Votrabor et Honos.
fi, Honos, Hanos (du corapl.), rivière de Hounavals, qui tombe
dans Yalsdals ou rivière de la vallée Vats, nommée aussi Hounan ; elle
donne son nom au golfe Houna.
Cenesol, Fuesol (du complem.), Tindasfoll?
abalia Hegeial, mens sanctus (de la carte de Porcaccbi), couvent de
Reinestadr , Reniestad.
Canesol (de Porcac. certainement n'est qu'une répétition).
Cackerfier (0 M), golfe de Skagar, Skagafiord dans lequel se perd, par
deux bras, le fleuve Vestra ou Horats formant une île ou le delta Krip.
Olensis , Holensis (de Porc), Hollesis (du compl.), Holen (placé au
fond de l'île dans la reprod. de 0 et M) , Holi ou Halar, résidence de
révêque, cpiscopi holensis.
Hauis, Hauos (de Porc.) (Hanesco de^ anciennes caries bataves), île
Heis ou Huisley, à l'embouchure de plusieurs rivières dans le golfe
Eya , vis-à-vis de Modrouval.
Macre (du compléro.), Mokrufeld de la carte de Velleius, à l'est de
la rivière qui perd ses eaux dans le golfe Eya. La carte des explora-
tions royales d'accord , donne sur ce point Moedrafell, au sud du cou-
vent Mounkeaa, appelé Munketuere par Yelleins, et Mankapuera dans
les anciennes cartes bataves.
Noder, Nadar (du compl.) , Moder , Modurvaller , Modruveller ,
Modrouval couvent (au nord du couvent Mounkeaa). Porcaccbi fait de
Noder un grand district et le place à l'est.
Du lac Sor^/icm, duquel un fleuve s'enfourche vers le nord et par
ses deux embouchures forme une grande île. Ce lac est Kalfborga ou
Vatnbregge, qui communique avec le fleuve de la vallée Reike,
lequel avec un autre très-rapproché , étreint une presqu'île élancée
entre les golfes de Skalfanda et d'Eya , où Modrouval se trouve à
l'ouest.
Mane, ou Manedos (mais il faut séparer Dos), Minotu de la carie de
Blaeuw; Myvatr de la carie des explorations i*oyales; non loin de
Myvaln, du lac My ou des mouches, inscrit Mynotn dans la carte de
Velleius. — Porcaccbi de Mane fait une leçon de Marie et place à son
côté ouest cripto orlicus, un eclos probablement de quelque culture
remarquable, au sud mons crucis, près de Dos. Cette montagne de la
croix est indiquée Cruisberg, dans une position incertaine^ dans la
carte reproduite par Ortel et Mercator.
Os de la carte complémentaire est certainement Dos de Zeno, qu'elle
répète elle-même.
(26) Island dressée par les père et fils van Kealcn , se trouve répétée plusieurs fois dans l'atlas
maritime de 4780, de nieuWe groote lichtende Zee-fakkel, eerste deel, publiée par Gérard Hulst, van
Keulen, à Amsterdam. Le mieux élaboré par le père Wylem Johan van Keulen et gravé par
A. Trysz ITiff, offre dans la nomenclature littorale, quantité de noms inconnus sur les autres cartes,
ces noms furent en usage chez les marins des Pays-l^s, ignorés par les autres.
DE N. ET A. ZENI, 15. 95
Dos (Os et I>os du complément) , Do$ comme grand district chez
Porcacchi , Aas sur le fleuve d'Oxanrdi , ou Axar , ou Sand.
15. En face de ce rivage septentrional on distingue vers le nord
plusieurs îles.
Grimse (de 0. M.), Grim» lancée dans la mer» les autres tout près
du riva ce.
Tscip(0. M.), Fiat, Platey.
Donbart, Denboot (de 0. M.) Lounden, Lundey, ou peut-être le
rivage même.
Mimant ou Munant ou Minant (de Porc), les îles Meinaar, ou
peut-être Tîle Moisen lancée dans la mer. Mimant seule de la carte de
Zeno doit être considérée comme une île réelle : les autres sont plutôt
formées par des courants supposés des fleuves. La carte reproduite
par Ortel et Mercator le confirme; le lac renommé Lagar, où fut situé
le couvent Skrida ou Skirda, donna origine à celte supposition. La
revue des cartes modernes explique ces îles par les noms des fleuves
et des golfes du rivage oriental , très-faiblement connus par les cartes
de Blaeuw et Yelleius. Les appellations de ces îles sont passées sous
silence dans le complément de Ptolémée.
pr, Langnes (de 0. M.), Langenes.
Bres, embouchure des fleuves Brou ou Brou isekul et Lagar, sur le
lae de ce dernier Bersa-stadr situé au nord du couvent Skrida.
Tala, lalas (de Porc), Dala Tangoe.
Watlinckfier (de 0. M.), Yeltanes situé entre les deux positions sui-
vantes, transposées dans les épigraphes de Zeno.
Iscant au sud , est au nord golfe Eski , Eskafiord.
Brous au nord-est au sud golfe Berou , Beroufiord et Berounes.
prom, depoorte (de 0. M.) est le port du golfe de Berou ou Beroufiord.
Irons, Trans (de Porc.) ne se trouve pas.
Bergen (situé dans Tinlérieur de la reprod. d'Ort. et Merc.) Borgar.
Waluisch (de 0. M.) île de la baleine, est Tîle de poisson Tvisker.
Aisel, ïïarscl (du compl.) Oroeso.
Valen, Uelonit (du comp\.),Vallen (O.M.) place du district RanaaYalla.
Helgfial (de 0. M.), nom connu ailleurs ne se trouve pas sur le point
indiqué. Cest sans doute (Helafiel, montagne embrasée et ardente,
placée au centre de Tîle par la carte de Porcacchi (volcan Hekla).
Les six positions suivantes de Zeno , y compris Skalhold , sont
passées sous silence, de même que la côte orientale dans la carte
complémentaire à Tallas de Ptolémée.
Westmone (0. M.) île de Westman. La même portait le nom de
Grislada, Grislanda, (0. M.) d'où la carte reproduite par Ortel et
Mercator inventa deux îles difierentes, sachant peut-être qu'au
nord de Grislanda (Westman) se trouve une autre Yoomula , à laquelle
elle attribua le nom de Westmone.
Westrabord de Porcacchi , sont les rivages vis-à-vis de Grislada ou
Westmone, les environs de Thorlaks ou Porlaks hafien des cartes
bataves. Cette dénomination n'est réinscrite nulle part.
Sleloth, slelocth (de Porc.), Selvoge ensuite Sildvog des cartes mari-
nes bataves, Siglavuk du district de Ranaa près des sables de Rangaar.
96 CARTB 1390
Flogoêcer, Fuglastcr, Gucirfurglaster, île d'oiseau
Ochos , Aas ?
Ostrabord (0. M.) côte orientale.
Rok, Roeck, île (0. M.), île on sables de Rangaar à l'embouchure de
Raoc dont un bras est oricnlal , l'autre occidental.
Wespeno (0. M.) du couchant.
prom, Hekelfort (0. M.) indique évidemment Reikianes.
Foglasler (0. M.) île, le dernier îlot des écueils des oiseaux nommés
YOgelschaaren , Geie fuelasker, Geye puglasker, Gueir fougla. Suit
Ânafiord et Skalhol , d'où nous avons commencé notre tour de l'Is-
lande.
GROENLAND.
14. Jusqu'à ce moment nous avons marché sur un terrain connu,
qui explique ce que Nicolo Zeno voulut signaler, et nous fait com-
prendre ses connaissances; ce terrain était vivant, plein du langage
constant, ininterrompu. Les explications qu'il nous a données sont,
je pense, de nature à inspirer confiance dans ce que Zeno relate. Un
semblable terrain nous manque pour examiner le Groenland. Ce
pays après lui disparut bientôt, échappant pour longtemps aux inves-
tigations des marins. Retrouvé par Forbischer, Davis, en 1586, 1607,
Mank, 1619, Bylot et Baffîn en 1622, jusqu'aujourd'hui, sur sa côte
orientale insufBsamment examinée, offrirait un terrain muet, mort, si
les indigènes n'avaient indiqué dans son temps, quantité de positions
par leurs noms anciens et n'avaient conservé es souvenir des anciens
établissements. Mais cette vie qui animait les indigènes échappe
aux scrutateurs de la carte contemporaine de Zeno. Les descriptions
islandaises qui sont connues, indiquent les iiords, la situation et
les possessions des églises, les îles, les lacs, les provinces et les
districts, les couvents et les domaines; elles indiquent aussi leur
position topographique et fournissent leur nomenclature; à peine y
trouve-t-on une rivière ou un promontoire. Aucune carte dressée
pour servir à ces descriptions ne s'est conservée (î7). Zeno, au
contraire, donne une carte, un portulan peint, qui indique les rivières
et les promontoires , trace leur position riveraine. Les groenlandais
et les islandais devaient avoir des cartes semblables, mais aucune
ne s'est conservée. Pour expliquer les positions indiquées par les
(27) On a trois notices ou descriptions du Groenland, toutes les trois reproduites dans les anti-
quitatcs americanse , Hafnia: 4837, pp. 284-318. L'une fait un compte des églises ; l'autre contient
une abondante nomenclature de fiords; la troisième, la plus étendue, dont l'auteur est Ivar Bardson,
rédigée vers la un du xnr* siècle, traite une description d'Oestribygd seul. Les deux autres sont
indubitablement plus anciennes, que cette dernière , parce qu'elles traitent avec le même intérêt
Veslraby^d et Seta , tandis que ces parages sont indifférents pour Ivar, à cause qu'ils n'étaient plus
fréquentes comme jadis. — Je ne sais pas si les savants Skandinaves ont réussi de déterminer toutes
les positions qu'indiquent ces trois notices. Une bonne connaissance de ruines et du terrain, pourrait
diriger dans ce qu'elles offrent d'incertain et d'obscur. Elles diffèrent entre elles dans plusieurs
occasions; il est clair que certains fiords et positions portaient plusieurs noms ; aussi les cantons
adjacentes à ces fiords sont qualifiés de même, fiord. — On a retrouvé les ruines de Gardar, Brat-
tablid , Vogar, Foss, et autres. J'ignore si la carte d'Oestribygd est déjà dressée ; la toute récente de
Graah ne désigne pas assez clairement ces ruines reconiaus. A l'aide de ces ruines l'illustration
d'Oestribygd devient très-positive ; celle de Vestribygd est dans un vague que les distances littoras
des journées ne peuvent applanir pour indiquer les positions de trois églises nommées par une autre
notice.
DE N. ET A. ZEMI, i5. 97
chorograpbîes, se présentent à la fois et les situations du pays et
les ruines, les débris encore palpitauts de la description. Pour com-
prendre le portulan il n'y a que les rivages inanimés de la décou-
verte assez récente.
NicoloZeno passa de longues années sous le climat de Groenland;
dans ses courses, il aborda rislande et toucha on ne sait à quel point
du Groenland même; il a vu ce pays de ses propres yeux et les
marins lui communiquèrent les renseignements de toute leur con-
naissance.
Deux siècles environ , on ne savait mieux faire que copier le
dessin de Zeno; ensuite ou ne cessait de soulever des doutes :
conséquences inévitable de Tignorance qui se prolongeait trop. Enfin
le progrès des explorations nouvelles, déterminèrent la figure du pays
et rétablirent les formes connues antérieurement, il y a cinq siècles,
par le vénitien Zeno. Si Ton est satisfait de ses contours, de Fembou-
chure de TEIbe jusqu'au delà de Drontbeim, on est plus frappé de la
conformité de son Groenland avec le Groenland déterminé par l(ss
explorations récentes. Gertes , ce n'est <pas un hasard aveugle qui
aurait pu créer une semblable conformité, mais une bonne connais-
sance des Skandinaves, des Normands. On peut suivre de promontoire
en promontoire , de rivière ou baie en rivière ou baie , la côte
occidentale plus accessible , mieux connue, et y retrouver ces cour-
bures et sinuosités qu'indique le portulan de Zeno. Le même succès
offre la côte orientale moins accessible et jusqu'aujourd'hui imparfaite-
ment parcourue.
i5. A part de ce que Zeno fournit, il y a cinq cents ans, aux géogra-
phes de Venise, une autre description du Groenland s't«t postérieure-
ment trouvée dans les mains des géographes, comme on le voit par la
carte complémentaire à la géographie de Plolémée. Cette description
contenait un portulan écrit mais privé du portulan dessiné. Le compo-
siteur de la carte complémentaire ne l'a pas bien compris, il traça sur
sa carte une figure bombée, fausse et déplacée. Daus la suite des pro-
montoires et des rivières, sur seize positions, onze répondent à la suite
indiquée par Zeno, cinq autres, dont deux aux noms variés, sont dépla-
cés (28).
Nous les collationnons en ajoutant Findication de leur position par
les noms de la carte moderne; signalant aussi quelques positions des
descriptions islandaises, qui semblent reparaître dans le portulan de
Zeno.
(Les trois descriptions ou notices islandaises sur le Groenland, se
trouvent à la fin de notre article).
(28) J'insiste sur cette difiFcrence d'emplacement et de forme du Grnouland , qui distingue les
cartes de Zeno et du complément. Les reproductions nombreuses du la carte complémentaire,
conservent cette fausse différence, à l'exception de l'hydrograpbie portugais(>. de laOi, qui varie par
la configuration du Groenland cxccssivcrocnt prolonger, ce ijui la rapproche plutôt de l'idée de
Zeno.
IV. 7
98
CARTE 1390
Zeno (<9)
pr. Neum.
pr. Vlia, Nlia , Nà.
pr. Sadi.
fl. Diuer.
fl. Peder, Feder.
pr. Hit.
fl. Fiste, Eleste.
pr. Diauer.
fl. Han.
pr. Hoen.
fl. Nice,
pr. Ar.
tt. Aver (se).
pr. Tin, Trin (57).
fl. Han.
pr. Munder.
fl. Lande.
pr. Giii, Giu («s).
pr. Hian.
fl. Nuf.
pr. €han, Chon.
fl. Boîer.
pr. Thoï, Thor.
cenob. s. Thomas.
carte complévMn-
taire (so).
Na.
Sadi.
(Aver).
fl. Fieste.
pr. Mirdum.
Hic.
(Fieste).
fl. Aver.
Cauer.
Han.
Af (s»).
fl. Spichbod.
Mundi.
Sade.
Ji.
(Hien).
Boïer (39).
pr. Hien.
Ther.
noms modernes,
cap Seddon.
cap Svartehuk (si).
cap BlackhulL ou cap
Cranstown (ss).
dans la baie lacob.
dans la baie Sud-est(s5).
cap Chidley.
fleuve Baal (34).
cap Comfort.
Bearsund.
cap Christian.
Frideriksiiord.
cap Désolation.
Tessermiut (Ketilsfiord
plein de rivières),
cap Farewel.
cap Discord.
Eriksfiord.
Rams hoogde.
Heriolfsnes.
côte inconnue,
cap Galesland.
Scoresby sund.
cap Parry.
golfe au delà de Fîle
Bonieko.
Je pense que dans cette suite de noms on en remarque quelques-uns
analogues avec la suite de noms des descriptions islandaises, dont la
position est suffisamment déterminée.
1^
(3
f29) Les noms doublei Tiennent de la leçon variée de Ruscelli et de Zurla.
(30) Les noms entre parenthèse sont les positions rétablies à leur ordre.
(3i I Les Islandais appelaient les dernières stations de Nordhr-seta : Aedanes et Eysnnes, on les toi l
dans Neum et Na.
(32) En se tournant vers le détroit Waygat qui sépare l'île Disco d*Oumenaksland dans la spacieuse
baie lacob. C'est le spacieux parage Biarne, chez les islandais, Biarne-seta de North-seta, Sadi.
(38) Davis donnait aux rivières de cette baie les noms de Fisce et Boss.
(84) Ou bien LysuGord des islandais, aujourd'hui Isertok, dans le district Sukkertop, an nord de
Baais river.
(85) Haf-grims-fiord. — Mercator, collationnant les découvertes de Davis avec la carte de Zeno,
explique aussi le cap Désolation, par Af; mais il avance avec pr. Hoen jusqu'au cap Chidley et
suppose que pr. Hit est le cap Sanderson on Hope.
(36) Harjoirsnes sed Hvarrsgnipa proxime versus occidentcm, ibi fluxus maris (vertex) est Hafliverf
dictus, dit une ancienne notice in per vetusto libello.
(37) Huit serkr des islandais? Trin pourrait être un mot italien : trina, crépine du continent.
(38) GuBnbiarnarskcr, les îles qu'on évitait?
(39) Dans Obygdhir des islandais.
DE N • ET A. ZEMI , 16, 09
16. Zeno a donné dans sa description de grandes proportions et quel-
que peu fantastiques à ce couvent de Saint Thomas. Des moines de
Norvège, de Suède et d'autres pays, mais principalement d'Islande, se
rendent à ce monastère. On y trouve toujours en été et en hiver, un
grand nombre de petits navires , venant de Trondan (Droniheim), des
iles voisines et du cap qui est au-dessus de la Norvège, chargés de
toutes sortes d'objets d'agrément ou d'utilités, destinés pour les moines.
C'est un commerce suivi. Ces moines donnent de peaux d'animaux et
de poissons, et reçoivent en échange du bois pour le chauffage et des
ustensiles de bois très-ingénieusement sculptés, avec différents grains
et du drap pour se vêtir. Ils sont très-respeclés par les indigènes.
Un volcan et une source d'eau bouillante fout merveille dans leurs
constructions, dans leurs jardins, dans réchauffage et dans tout I6 ménage
du monasière (4o).
C'est Tunique établissement relaté avec une singulière prédilection
par Zeno^ inconnu par les fastes du nord, qui appellent cette contrée
Svalbarde, visitée au moins eu 1194. Le compositeur de la carte des
régions septentrionales (copiée par Ortel et Mercator), en réunissant les
données de Zeno avec Schonlandia nuova , assez instruit pour tracer
une meilleure composition d'Islande, savait qu'entre le promontoire
Thor et le fleuve Boïer, non loin du couvent à l'ouest, existait un autre
établissement, une ville considérable, qu'il appelle Alba,
Zeno n'indique parmi les principaux endroits du point le plus habité,
ni Gardar, ni Brattahlid ; il n'a devant lui que le portulan général, qui
n'a point tracé les petites sinuosités des rivages d'Austerbygd : mais il a
formulé le corps entier de la grande péninsule, comme il est enfin
déterminé par les investigations récentes. Ce portulan lui était fourni
par des pirates du roi Zichuini.
Les terres et les mers entre Norvège et Groenland lui sont inconnues.
Il doute de la réunion du Groenland avec le continent de l'Europe, il
connaît cependant cette opinion, qui paraît être généralement acceptée
chez les Islandais, lis rattachaient le Groenland à Biarmaland et Gar-
darik, et plusieurs d'entre eux présumaient que les rivages ultérieurs de
Vinland et de Huitraraannaland se prolongeaient jusqu'à leur jonction
avec les rivages de l'Afrique (^i).
(40) On ne connaît atijourd*hni dans le Groenland occidental que les source* thermales de Tile
Ooartok (Egede, tagebuch , p. 64, et Giescke, dans brewster's encyclop. X, p. 489). Leur tempéra-
ture n*e8t que de 40* centigrades. Plus au nord, entre les 69* et 70* de latitude, le Groenland occi-
dental est presque entièrement basaltique, mais aussi dépourvu d'eaux thermales ^e toute la
Scandinavie. — Oa dirait que le couvent, décrit si minutieusement par les frères Zeni, a si^rvi de
prototype aux grands ëtaulissements de chauiïage exécutés dans la petite ville de Chaudes-aigles,
dans le département du Gantai. Aux bains de Toepiitz en Bohème , le jardinage commence aussi i
profiter de rinfluence des eaux souteraines qui ont 40* à 47* de dialeur (voyez, Humboldt, examen
de Thist. de la géogr. du n. m. t. H, p. 425-i27].
(4i) A borea Noreg (Norvège) est Finmark : in de flectitur litus versus euroaquilonom , ac deinde
ad orientera, priusquam tangatur Biarmalands quas Gardakonung (Russiœ, uni sunt Holmgard,
Pallteskia, Smalenskia) est tributaria. A Biarmalandi extenduntur terrae ad déserta, borealem
plagam versus, usque ad Groenland terminos. Ulterius quam Groenland! , meridiem versos est
Helluland, deinde Markland , inde non longuro iter ad Vinland, quam nnnnulli horoines ab AfTrica
exporrigi opinantur (Orbis tcrrar in fine XUI sacculi descrip. in capsula 756 servata. — item ^Verlauff
syrabola etc.).
100 GARTB 1390
SCHETLAND.
i7. Nous alloQS-nous porter maintenant d'île en fl6, qui sont nom-
breuses dans la carte de Zeno. Dispersées par toutes les mers , elles
remplissent le vide par leur enflure, car le premier coup-d'œil prévient
que leur grandeur est disproportionnée. Les Orcades n'intéressaient
poiftt le navigateur vénitien , à peine les a-t-il indiquées par quelques
tlots. Mais les lies Schetiand, Hialtland, Hitland^ letland, dont il
inscrivit le nom Illand, reçurent une position respectueuse, et la
grande Maïnland, appellée EstlarU, n'a pas perdu sa figure. En
confrontant les situations des lies qui l'entourent et les noms des
localités avec ce que relatent les caries modernes, on peut établir
l'explication suivante :
Ploch (Piolh), île Fellar.
Lonibies ou Lombies, péninsule Lunna, du canton Lunes-ting de
Maïnland; vLw-vis de la péninsule, au nord un îlot Lunnabolm, au
sud Luninghead de Lunesiing (*%).
Briituna, Brassasund, entre Maïnland et l'île Brassa.
Scaluogi, Skailoway, ville occidentale de Maïnland, à la hauteur de
Brassasund; marquée par Zeno, au centre d'Estland.
S. Magnus^ baie de St-Magne. Cette baie se trouve réellement à
l'occident de l'île Maïnland.
Sumbercauil (Sumber hovt), le point le plus méridional de Maïnland;
Swenburg ou Sumburg head ou Symburger hoft, tête de Sumburg.
A partir de ce point et côtoyant vers le nord-ouest de Maïnland ,
règne une grande obscurité ; à peine de faibles analogies de noms se
présentent, a mon avis plus satisfaisantes dans les appellations de firth
et voe, de petites baies et rades, que dans les appellations des villes
dont les signes chargent i'Estland de Zeno.
Eledere serait le nom des îles situées à l'occident de Maïnland :
Colsay, S. Ravens (Ninian), Havery, House, Burra, Tondra (ces trois
les plus considérables), Green, Papa, Oxua, Chaness, Longa, Heldazoo.
Aucune ne répond au nom de Eledere, si ce n'est quelque peu la der-
nière, située entre Skailoway et Skelde ness de Sands ling.
Elesford ou Oloford, suivant l'emplacement de l'épigraphe, répon-
drait à Valey sund de l'île Valey à l'ouest de Skelde ness; et par son
appellation à la ville Ylesbourg.
Onlefort, rade d'Onsifirt.
Incafort (Hamna voe de l'île Papa, où l'on mouille; Youvefiord
off'rent certaines cartes).
Sonverat, Sandwik de Nord Maven, au nord de S. Magnus baie.
Incafort (Hamna voe, de Nord Maven, mouillage en sortant de la baie).
Sanderal ou Sandevie (suivant la leçon de Ruscelli), Sand voe, mouil-
lage de Nord Maven près de la pointe septentrionale de Maïnland (ou
Sandowit, Sandwliot, ville de l'île Yell).
(43) De deux côtés de ce canton péninsulaire, se trouvent deux tlots Linga, un SE, près de
Whalsey, Tautre NO, sur la côte de Maïnland ; en avançant vers NO, on voit dans Yell-sand , Tilot
Lamba. — Différentes cartes défigurent ces noms et en font confusion. Nous avons consulté en
dernier lieu la carte marine de Uitland, de Murdocb Nakenzie, copiée à Amsterdam en 4764, par
Jean van Keulen.
DE M. ET A. ZEMI, 18. iOi
Podalida, tle Faire, Feril, Fayerhill, au sud de Matnland.
Neome, île Foula, Foelo, Fulo, à Touest de Maïnland (45).
FOEROE.
18. A Touest de Schelland, nord-ouest de TEcosse, à mi-chemin de
Norvège au Groenland , par conséquent dans la vaste mer au sud de
rislande, est une immense île, Frisland, distante de vingt journées
de navigation du cap méridional de Engroenland; domaine et rési-
dence du roi-pirate Zichmni. Sur cette vaste mer, il n'y a pas d'autres
fies que Tarchipel des petits îlots Foeroe. Or, Frisland avec son entou-
rage, sont les Foeroe, Fereysland, Frees-land, Frisland. Mais si Far-
chipel des Schetland a pris sur la carte un emplacement démesuré,
Frisland, avec ses proportions eitraordinairement exorbitantes, allour-
dit monstrueusement la carte du Vénitien (a*).
C'était la résidence de Zichmni. Zeno y passa plus de vingt ans ; on
peut donc croire qu'il connaissait les moindres situations de l'archipel ,
ses promontoii*es, ses détroits, ses pointes, ses écueils, ses villes, ses
villages. En voyant l'exorbitance de l'île, on peut présumer qu'il a
voulu l'agrandir, aGn de donner un ample développement à tous les
détails à sa connaissance. En effet , les détails ne manquent pas :
58 épigraphes demandent leur explication. Mais au lieu de trouver une
gradation douce d'une vingtaine d'îles et îlots de l'archipel Foeroe, nous
voyons l'immense Frisland, entouré d'un nombre considérable d'îles,
toutes petites, dont sept ou huit seulement offrent quelque importance.
On suppose que la carte dessinée vers 1590, ayant été extraite des
archives delà iimnlle, cent cinquante ans plus tard, était lésée sur
ce point, que les divisions des îles intérieures de rarchipel disparu-
rent et formèrent celte immensité de Frisland , qu'avaient publié
Zeno postérieur et Marcolini eu 1558. C'est très- probable.
Les Foeroe se composent d*un groupe d'îles très-rapprochées,
divisées et frangées par les sund et les fiords, délroils et petits golfes^
très-étroits, ressemblant plutôt à des canaux et gorges, à des fissures,
que le vénitien n'a peut-être pas voulu indiquer; il n'indique que deux
golfes qui sont en effet les deux sunds plus larges que les autres.
Les vesliges de la supposition ou de la juxtaposition de ces fiords
et sund , disparurent de la carte de Zeno ou ne fui*ent jamais tracés
(43) Les appellations étranges de Ncomo et Podalida ne trouvent anonn Tcstigc dans les dénomi-
nations locales et ne s'adaptent pas aux idiomes germaniques. On povrrait donc supposer qu'elles
sont une interprétation des noms en usa^e. Neo, netH), eu italien, est une tâche, une ninucbe sur
la peau, sur quelque partie du corps Aussi en hollandais vuil, sale, mal-propre, plein d'ordure ; en
allemand, FtM, fauve, Fe/i/, Taute, font présumer dans Foulo une signification analogue (vIck,
vlak, plek, Fleck, flecken]. — En italien : pedtile, semelle; pedata, tran?, vestige, suivre les traces;
pedoto pedetto, pilote guide (singulier piéton de la marine,. En hollandais voeren, voiturer par eau
on par terre ; 'f voeren, cliariage ; voerman, Fuhrman, charretier en allemand ; FAhrer, conducteur ;
Fvhre, charriage; fahren^ aller en voiture ou en bateau , Fahre, bac; fahrbar^ vaurbar^ navigable;
Fahrt^ vcutrt^ navigation, vogue, échelle; Fàhr hali^ Fahr-heil, salut do passage. — L'idiome nord
créa peut-être par d'autres racines les ippcllations de Pair et Fulo : mais le vénitien a pn
caramboler sur les autres pour inventer ses interprétations, comme nous le présumons.
(44) Le nom de Fresland, Frisland puraît-ètrc connu en Italie plus de deux siècles avant Zeno. Edrisi
en iiS4, entre Skosia et Islanda, au nord de Skosia, plaçait une lie Retlanda, qui n'est certaine-
ment quelque autre que Fresland, Foorocr. — De même l'image du monde qui accompagne le polv-
cbronicon du moine Ranulf de Hyggeden, mort 4360, nomme an sud de Tile (Toula), fP'riêlad, qui
est évidemment Frisland située entre Dacia (Danemark) et Islanda.
103 CARTE 1900
par le dessinateur; il faudrait diviser Frisland au moins en cinq lies ,
restituant et redressant les gorces, les sund et flord qui sé[>arent
les ties. D*al>ord de Sudero colfo au golfe de Godmee, tracez ie
Suderoe^und ou Snriafiôrur le plus lai^e. Ensuite de colfo nordero
d'au delà de Bondendea , tirez un autre qui serait West manna sund et
Skopinafiorur. Divisez cette section par nne ouvenure vers sudero
colfo qui séparerait Sanestol de Banar et Bondendea et représenterait
VAafiérur. Enfln la portion septentrionale restante, exigerait encore
nne division par un long passage depuis Cabaria jusqu'à Doffais et
Godmee : ce passage représenterait le sund le plus étroit (uj Sundinun)
qui sépare Osteroe de Stromoe.
19. Nous allons parcourir maintenant les 58 épigraphes, pour les
confronter avec les appellations modernes autant qu'elles sont con-
nues (45). Â partir du sud :
Monaco, Munknrin, le moine, rocher au sud de rarchipel.
Porlanda, Holmarin, Ilot à l'entrée de Sumba , ville de Suderoe.
Sorand , Suroj , Suthrey, Sudro, Suderoe, Suydroe, tle considérable,
méridionale de Tarcbipel. — Spirige ou Sputige, Porkieri, Porcbyre;
AneseSf pointe méridionale Mavan^; (kibor, éravujik?; c. Cunala.^
lisez Cnuala , Kwala , répondant à Kwalba , Kvalbja aji , baie de
l'ouest de Kvalbiaiiérur; VenaX, pointe la plus occidentale Willemes, sont
les positions de Suderoe.
Sudero^olfo, Surjatiôrur, Suderoe sund, sépare cette tle de
SanesUÀ (ou Sane-scol), Sandoj, Sandey, Sandoe, qui a entre autres
deux villes Sand et Skala-vujk.
Ledeuo, lisez l'Edeuo (THedcuo) tle, et vous trouvez un îlot
Trôdl-hoddi ou TroUo baven, séparé de Sandoe par un Hôdda-sund ,
sund de tête.
Jlofe fie, petite île, serait Koltir.
c. Deria, Dràa-sund qui sépare deux flots de Yaagoe. — Banar,
inconnue.
Bondendera porii, lisez Bou de Udera, B6 sur un fiorur, ville de
l'île Vaojdj , Wage, Waargœ, Yaagoe.
eolfo Nordero, baigne les côles de Yaagoe.
Avant d'entrer dans Stromoe et Osteroe faisons une revue des
petites fies, qui s'avancent au nord; à l'est il y |cn a six et elles s'ap-
pellent Norderoe , Norlhr eyjar Iles du nord.
Pigiu, la plus orientale Fugloj, Piglu, Fulo, Fugloe. — Irbini ou
Ibini, sa pointe Bispurin, Bispen.
Vâdin , Sle Yiojdj , Windeœre , Yideroe et sa ville Yiaraje.
(.48) Roasavons consatté trae carte danoise (Kort over Fseroeroe), d'one demi fenille assez détaillée.
Les noms y sont en dialecte foeroe (navocne cre i den faeroiske dialect) ; dont qnelqncs-ans sont
nccompagnés de noms entre parenthèse dans la langoc ancienne du nord (de indklarorefd ère garnie
■ordiweT. — Ces noms différent des noms acceptés par les publications géc^rapbiqnes ; l'orthographe
et la prononciation sont la caose des différences. Et quelle est l'orthographe de Zeno, qnelle est sa
prononciation ? — Observons qne la prononciation doace de d, de r, les fit à peine sentir ou dispa-
raître; les nombreuses Toyelles on dîphthongnes : â,à,6,Ô,é,è,Ù, sont nne sonrce abondante
pour toutes sortes de variations; le g, le j, le oe, le j ont quelque fois la même valeur suivant
l'orthographe et la prononciation. — Nous avons aussi collationné tontes les positions avec la carte
maritime de ces îles, de l'atlas hollandais de Gerhard Hulst van Kenlen» de nicnwe groole lichtende
Ze» fakkel, eerste deel, Amsterdam, 4780.
DE N. ET ▲• ZENI, 20. i03
DuUoj Deble ou Ditele, ville de Tile Foreati ou ForcUi, Boroj,
Bordoe, qui est la plus considérable de Norderoe, Northreyjar.
Rane, lisez Kane? tle Kunoj , avec sa ville Kuni.
Longastlos, lisez Longosclos, Blaokskala, ville au sud de Tile Kadisoj »
Calsoo. — Dolfor, présume Dol-fiord , sund près de Mikla-dàl , située
au nord de Kadisoj.
Streme près d*une petite île. Gomme ce nom de la carte de Zeno
répond à Tappellation de la grande tle Stremoe, je supposais que ce
Streme appartient à la ville marquée sur la grande ile, et que
Godmee est Tépigraphe de la petite tle qui est Nôlsoj , Mulso ,
Nolsoe. Ma supposition se confirme sans réplique : la côte ouest de
Noisoe, qui regarde la côte de Stroemoe en face de Thorsiiaven
s'appelle Kjôdunnès (Godmee, Godinec,); Quidenes, nom de la pointe
méridionale d'Ostrœ, qui se dirige vers Nolsoe. Or :
Streme, est Stremoj, Straumsey, Stromoe, et spécialement sa ville,
toujours une des plus considérables, Thorshôfn.
Reste à diviser quelques appellations que nous n^avons pas encore
examinées , entre les fies Streme et Osteroe. Heureusement les indica-
tions ne manquent pas.
DoffaiSf lisez Doftais, offre Tofiir, ville méridionale de Estroj,
Austroj, Oestroe, Osteroe, et Tétang Toftvatn, eau de Toft, qui
débouche à Test et au nord dans la mer, formant de Tofiir une
espèce d*ne attachée au sud de Tile Ostroe.
Frisland, ville (probablement résidence de Zichmni) serait donc
située tout à côté au nord, (où sont Glifrar, Lambba, Sôhnundafer)
dans rtle de Oestroe. Les explications positives me manquent pour
Rouea (Larvujk?), Rifu (Rutewik?), Campa, Alanco (Lambba?); mais :
Andeford est Andafer situé au nord-est d'Oslroe. Pour
Aqua anonyme, il ne manque pas d'eau.
c. Vidil, lisez Kvidil, représenterait Kadlurin, pointe septenlrionaic
d'Ostroe.
Spagia, Svujnajir, encore de Tilc Ostroe, laquelle comme princi-
pale et résidence est plus spécifiée que les autres.
Caharia, inconnue.
c. Bouet répond à la pointe Mujlingur, la plus septentrionale de
Stromoe. Je pense que Texplication que nous avons pu donner aux
positions de la grande ile Frislanda, suffit pour se convaincre qu'elle
est composée du groupe de Foeroe (46).
ESTOTILAND, DROGEO.
âO. Une barque de pêcheurs de Frisland, jelée par une tempête très-
loin à Fouest , atterrit à une île nommée E$lotiland, dont les habitants
conduisirent les frislandais dans une ville bien bâtie et peuplée, où de-
(46) Baache (mem. sur Tile de Frisland , Paris 1787, dans l*bist. de l'acad. des sciences pour 1784),
fut le premier peut-être , qui, d'après la position expliqua Frislaod par l'archipel Foeroe. Eggers
(mem. sur Tanaenne Groenland, couronné en 179t par la société économique de Copenbaguel, s'est
plus attaché (dit Malte-Brun, XVHI, p. 40t, ëdit. de Huot), à dànontrer l'identité des noms tels que
Monaco ou le Moine, rocher au sud de cet archipel ; Sorand on Sorrev, pour Sudereyan, Tile la plus
méridionale ; Sudero golfo, encore aujourd'hui appelée détroit de Suderoc ; Andeford ou AndefionJ ,
baie des canards et d'autres ressemblances moins évidentes.
104 CARTE 1300
meorait le souverain. Un interprète qui parlait kitin et qui avait égale-'
ment été jeté par hasard sur celte côte, se it comprendre des naufragés
et leur intima l'ordre de rester dans nie. Ils apprirent la langue du pays.
L'an deux, ayant pénétré dans Tintérieur, s'assura que Tile, moins
étendue que rislande, était beaucoup plus fertile, qu'elle abondait en
toutes sortes de denrées et que le centre était occupé par une haute
montagne, d'où sortaient quatre rivières. Les habitants exerçaient
divers arts et métiers; ils avaient des caractères d'écriture* qui leur
étaient particuliers. Dans la bibliothèque du roi se trouvaient des livres
latins qu'ils n'entendaient point. Le commerce avec l'Engroenland leur
fournissait du soufre, de la poix et des fourrures. Ces insulaires se-
maient du blé, buvaient de la bière, demeuraient dans des maisons
de pierre et naviguaient, quoique sans le secours de la boussole.
Le voilà! à l'ouest, très-loin à l'ouest, les habitants d'une île émi-
nemment civilisés qui faisaient un commerce avec le Groenland, situé
au nord de leur île. Ils avaient une bibliothèque dans laquelle les
ouvrages latins leur étaient incompréhensibles : mais cette bibliothè-
que était composée d'ouvrages de leur propre idiome , qui avait sa
propre écriture. L'île porte un nom skandinave, normand, cast-out-
land , en anglais signifierait : terre extérieure d'est. Mais l'idiome des
habitants était incompréhensible aux Normands de Frisland et ils
n'ont remarqué aucune affinité avec leur langue, quoique ils l'appri-
rent. La possibilité d'une population d'insulaires s'explique cepen-
dant par ces relations que les Groenlandais soutenaient depuis deux
siècles avec Viuland et plus encore avec Markland et les environs de
l'embouchure du fleuve Saint-Laurent et de Gaspe. Une population
d'indigènes d'Anticosti ou de l'Ile Gap Breton, qui est Ëstotiland,
pays situé à l'est du continent, a pu, dans le courant de deux siècles,
s'instruire par l'impulsion des Islandais et Groenlandais et conserver
quelques volumes latins, apportés par l'évéque Erik en liât, par
les fils de Helge iâ85, ou par quelque autre apôtre de l'évangile. Les
Frislandais apprirent que l'île s'appellait Ëstotiland.
21. Le roi d' Ëstotiland , voyant que les Frislandais se servaient de
boussole, les engagea dans une expédition maritime vers un pays situé
au sud, et nommé Drogeo ou Droceo. Le malheur les fit tomber entre
les mains d'une nation d'anthropophages; un seul frislandais, épargné
à cause de son habileté dans la pèche , devint un sujet de guerre
entre les chefs de ces sauvages; chacun voulut posséder un esclave
aussi utile; transféré d'un maître à l'autre , il fut à même de connaître
toute cette contrée. II assura que c'était un pays fort étendu et comme
un nouveau monde. Les habitants , ignorants et grossiers , ne savaient
pas même se couvrir avec les peaux des bêles qu'ils tuaient à la
chasse. Armés d'un arc et d'une lance de bois, ils se livraient des com-
bats continuels. Le vainqueur dévorait le vaincu. Plus loin, au sud-
ouest, des peuples un peu plus civilisés, connaissaient l'usage des
métaux précieux, bâtissaient des villes et des temples, offraient
cependant des sacrifices humains à leurs affreuses idoles.
Drogeo était donc un continent connu aux insulaires estotilandais,
où ils allaient combattre les habitants sauvages. En supposant que
DE N. ET A. ZENI, 32, ^3. 105
rîle Estoliland est une de remboucluire deSahit-Laiirenl, il ify a pas
d'hypothèse pour Drogeo : c'est la Nouvelle Ecosse , i'Âcadia , la
Nouvelle Angleterre , etc. (47).
Après de longues années Taventureux frislandais retourna dans son
pays au Foeroe; il le trouva assujelli au roi Zichmni qui s'était emparé
en son absence de l'autorité et exerçait son métier de piraterie
certainement de longues années. Le récit du frislandais stimula
l'entreprenant chef à visiter ces terres occidentales aussi éloignées.
II équipa une expédition qui découvrit une île nommée Icaria et fut
ensuite poussé vers les parages d'Engroenland.
22. Il n'y a d'autre île dans ces espaces que les îles situées à l'em-
bouchure du fleuve Saint-Laurent, et Terre-Neuve se présente en
premier lieu pour l'expédition de ceux qui furent ensuite poussés
vers les parages du Groenland. Au lieu de trouver la résidence dn
roi d'Estotiland , ils touchèrent le point d'une autre île. Elle ne
pouvait être spacieuse s'ils comprirent par eux-mêmes que c'était une
Ile; si elle était grande et spacieuse ils purent l'apprendre des indigè-
nes, mais plutôt cherchant une île, ils qualifièrent d'île le point de
terre qu'ils atteignirent. Nous ignorons par qui cette fie fut nommée
et de quelle portée elle parut à l'équipage et au chef Zichmni, attendu
que la suite de la relation de Zeno n'a pu être retrouvée. Sa carte
semble nous assurer que la chose est .restée à ce point et n'a pas
avancé. Estoliland, Drogeo, Icaria étaient des pays connus par des
oui-dires d'un pécheur et des marins, dont l'expédition prit une
fâcheuse issue. Zeno les a placés sur sa carte dans la direction
occidentale, au hasard , sans se soucier des distances (as),
Zichmni s'empara de l'archipel Foeroer avant l'arrivée de Zeno,
antérieurement à 1380, d'où il exerça son métier de longues années, un
demi-siècle si on lui attribue la destruction du Groenland après 1418.
Dans cette hypothèse on pourrait admettre, qu'ensuite il a dépisté
Estotiland , qui avait ses relations avec le Groenland , et l'ayant
trouvé affaibli par les mêmes calamités qui aflaiblirent le Groenland ,
il détruisit l'Estotiland de fond en comble. On peut attribuer
tout à un pirate passé sous silence dans les fastes du nord, et
qui serait resté inconnu à la renommée de l'histoire si les frères Zeni
ne l'avaient éventé fortuitement (49).
Recherches.
25. Peut-être la destruction du Groenland fut à l'instant même
connue en Norvège et en Danemark. Mais Tinierruption de toute
(il) Si Estotiland n'était pas qualifiée d'ile par l'exploration de ceux qui y passaient desannées, on
serait tenté de retrouver Estotiland dans la Gaspésie civilisée sur le continent. Hais an cas semblable
de la civilisation normande a pu se déclarer dans son temps dans une population insulaire voisine.
assez <
convenir
mais elles donnent assez de petites îles , Belle-ilc, Ficot, Ronge , des oiseaux , Bacalao, trcs-rappro ■
ehécs au rivage de Terre-neuve : et la péninsule Avalon pourrait passer pour Icaria.
(49) Un comte Sinclair, possesMur des Orcades vers la fin du xiv* siècle, n'a rien de commun avec
le possesseur de Foeroe ; Forster (découvertes faites au Nord, U, 3, sect. iS), a tort de les confondre.
La carte de Zeno ne connaît pas d'Orcades qui seraient en possession de Zichmni.
106 CARTB 1S90
communication depuis cinquante ans devait remplir la mère-patrie
d'anxiétés sur le sort de sa fille, le silence de la mort appelait au
moins à retrouver son gîte glacé. Dans ce but le roi de Danemark ,
Christiern II , fit équiper en 1476 un navire norvégien et le confia
au pilote polonais Jean Scolnus, z Kolna, de Kolno (so), lequel, en se
dirigeant vers Fouest , reconnut les côtes septentrionales du spacieux
continent, et du détroit qu'elles fesaient avec une terre étendue au
nord. On ne sait pas s'il a baptisé sa découverte par quelque appel-
lation : mais ce n'était ni Groenland, ni Yinland, mais le Labrador
et le détroit Auiau (Hudson) qu'il parcourut. La nouvelle de cette
découverte s'était répandue dans le monde; elle fut bientôt connue
en Espagne et en Portugal.
L'Islande avait son commerce avec l'Angleterre. Les navires de
Bristol se rendaient aussi souvent dans son Tborlaks-bafn, comme
dans le port de Lisbonne, d'où Christophe Colomb, avant de décou-
vrir le nouveau monde , fesait de nombreuses courses dans les mers
connues. L'an 1477, au mois de février, je n'aviguais, dit-il, dans
son traité des cinq zôues habitables (cinco zonas) , (à une tie) plus
de cent lieues au delà de Tile (Frisland, Feroe); dont la partie
méridionale (de l'Islande) est éloignée de l'équateur de 75 degrés et
non de 63. comme le prétendent quelques géographes , et Tile
(Frisland, Foeroc) u'cst pas placé en dedans de la ligne (sur la ligne)
qui enclave (encluic) l'occident de Ptolémée. Les Anglais, princi-
palement ceux de BrisloI, vont avec leurs marchandises à cette île
(Islande) , qui est aussi grande que l'Angleterre. Lorsque je m'y
trouvais , la mer n'était pas gelée , quoique les marées y fussent si
fortes qu'elles y montaient à 26 brasses et descendaient autant.
Il est aussi vrai que le Tile dont parle Ptolémée, se trouve là où il
la place et se nomme aujourd'hui Frislande (Feroe). Ce voyage de
Colomb n'avait d'autre but que de se convaincre que la parallèle de
Tile n'était pas une ligne qui clôturait le monde habitable, comme le
prétendaient Ptolémée et quelques géographes (si).
D'autres navigateurs allèrent à la reconnaissance des terres de
l'ouest, dont l'existence était confirmée par des marins qui aimaient
à rappeler les courses anléricnres. Vingt ans après l'expédition de
Jean de Kolno, 1476, Jean et Sébastien Cabot, en 1497, sur une flotte
anglaise allaient à la reconnaissance de ces terres.
Pour trouver le passage aux Indes par le nord de l'autre hémisphère,
Gaspar Cortereal , navigateur portugais, en 1500, se rendit à Terre
Neuve (Estotiland, Icaria), examina le fleuve Saint-Laurent (Markland),
(sol Les marins polonais de Kolno forent au service de la république de DanUik. Jean de cette
famille passa comme pilote en Norvège. Kolno, leur lieu natal, est un petit bourg de MazoTie sur les
frontières de Pmsse. — Dans maintes publications nouvelles, italiennes, allemandes, danoises
mêmes, le nom de Scolnus se trouve défiguré jusqu'à le méconnaître.
(51) Colomb parle d'une seule Tile-Frislande, et passe la grande île (Islande) innommée. — A mon
anSt c est aussi clair que la date de sa course aventureuse. Je ne sais pourquoi la mettre en doute
comme on le fait. Celte course ne fut pas de longue durée; s'il a pu aller 'mncbas veccs) plusieurs
fois de Lisbonne en Guinée, il a eu le temps, en U77, par une seule course, de se convaincre que
Frisland-Tile n'était pas l'enclavure de l'habitable. — Son pilote Jean De la Cosa, dessinant sa carte
I nord de l'Ecosse ysla de Estelanda (Schetland),
grande Frislanda décorée du pavillon d'Ecosse ;
en iSOO, donne à Islande le nom de isia Tille, place au nord de l'Ecosse ysla de Estelanda (Schetland),
et pousse sur l'océan septentrional vers l'ouest la grande Frislanda décoréi
ignorant la figure et le nom de Groenland
DE tf. ET A. ZENI, îi. 107
et côtoya le contiueut (Helleland) , qu*il appella Terra de Labrador ,
c'est-à-dire terre de laboureur, <les agriculteurs, jusqu'au détroit
(visité par Jean de Koino), auquel il imposa le Dom d'Anian (aujour-
d'hui Hudson). Il retourua en Portugal pour annoncer la découverio
du passage, qui semblait ouvrir une route nouvelle aux Indes : mais
dans un second voyage, il périt ou disparut. L'un de ses frères,
Michel, étant allé à sa recherche, éprouva le même sort. Le trosième
frère voulut se sacrifier à la gloire nationale et à la piété fraternelle,
lorsque le roi de Portugal, par une défense formelle, rendit soa
dévouement inutile (ss).
24. Labrador, Terra Laboratoris, commença à figurer dans les
cartes depuis 1500, comme une île qualifiée par les géographes alle-
mands de terra Corterealis ; accompagnée maintefois de traces d'un
continent inconnu, elle se trouvait isolée seule, dans un vaste océan.
De cette façon on la voit dans l'hydrographie portugaise de 1504, dans
le Ptoléméede Sylvanus 1511, sur le globe de Schôner 1520. Mais
en même temps il ne manquait pas de géographes hardis qui réuni-
rent la terre Lauoradore à Temistetan (au Mexiq), comme on le
voit en 1521 dans l'isolario de Bordone. Cette réunion fut constatée
par les découvertes qui ne cessaient de se succéder, tout le long du
Mexique jusqu'au Labrador (voyez la carte de De la Gosa 1500). Mais
au delà, vers le nord, depuis le malheur des Cortereal on ne connaît
pas un seul marin assez hardi pour s'engager jusqu'à Forbischer et
Davis.
En attendant, d'innombrables hypothèses et inventions accablaient
et tourmentaient le nord de l' Amérique et tout le climat glacial. La
carte de Zeno contribua beaucoup à ces aberrations. Elle était graduée
vers 1555, et jusqu'à ce moment enfouie dans les archives de la
famille, elle fut rendue publique 1558.
Je ne sais si quelque monument géographique existe qui prouve-
rait on ferait présumer sa connaissance antérieure dans les composi-
tions cartographiques. Mauro Bianco, De la Cosa ne la connaissaient
pas; la carte complémentaire à Ptolémée non plus; ni les nombreux
cartographes qui la copiaient, ni le compositeur de la Schonlandia
(Si) Tiena de Labrado En esta ticrra pncs rislas audan ▼ viuon Bretoncs, qnc conforman muclio
COB su tierra ; y estan en nna mcsma altura y temple. TambicD au idi alla ombres de Nnrvega con el
pilote Joan Scolno, Einglescs con Sébastian Gaboto : disait en 1So3, l'espagnol Gomara (p. SO,
bistoria de las ludias en Saragoca, fol.). — La terre da Labour et d'EstotlIandia. Crste dcruière
partie de la terre indienne Tut la première découverte 1390 (par les pécheurs fï'islandais et seconde-
ment à Jean Scolne Polonais, qui navigeant outre la Norvège, Groenland et Islande Tan 4477, quatre-
vingt-six ans après ceste première navigation entre ceste mer septentrionale qui est mise directe
ment sous le cercle arctique et vient abordes a ces terres d'Estotilundc. Apres liiy Ton n'y a guerres
navigé durant le cours de quelques années a cause de l'asprc froidure et de continuelles tempcstes
qui en détournent les mariniers : dit vers 4600, le lovanien Cornélius Wytfiiet (descriptionis ptole-
maicae aogmentum, Lovanii , 4599, p. 488; version française histoire des Indes, à Donay, 4604, 460S,
p. S5). De même Pontanus; George Hom (Ulyssea, Lugd. batav. 4673}. — Les notices dos voyages
des Cortereal, se trouvent dans Ant. Galvano, discovcries or the^'orld unts the year 4685 in thc
earl of Oxfords collection, t. II, p. 575; Jobst Rncliamers, Sammlung van Reiscn, Nurnberg, 4508,
Abscbn. 4S6 ; Purchas, pilgrims, Londre 46S5, t. IV, p. 809. — Voyez à ce sujet Fleurieu, voyage de
Marchand, introd. p. iii; Sprengel, 35, p. il3, 444; Malte-Brun, 'livre XXIU, p. 6i4, 6fS, cdit. de
lluot ; eufin ce qu'à dit : Alexandre Humboldt (Kritische Untersuchungen der geogr. Kcnntnisse von
der neun Welt^ aus dem franzos ûbersctzt v. Jul. L. Idoler, t. I. p. 395), à l'occasion de ce que
j'avais resuscite la mémoire du pilote polonais Jean de Kolno dans ma publication polonaise en 4844,
traduite en allemand par Karl Neu, en 4836.
i08 CARTE 1390, DE N. ET A. ZENI, 35.
nuova, ni Schoner, ni Âpianus, ni Munster, ni Gemma Frisius, instruc-
teurs dans la géographie (ss).
25. Dès que la carte de Zeno parut, elle fit beaucoup de bruit, elle
décela aux cartographes d'autres formes, de positions, appellations,
pays, dont ils ignoraient Texistence. Frisland , Icaria , Ëstotiland,
Droceo parurent comme une lumière éteinte qu'il fallut rallumer. Un
cartographe s'empressa d'introduire toutes les anciennes connaissan-
ces de Zeno dans sa composition de la carte des régions septentrionales,
septentrional ium rcgionum descriptio : Ortclius Ta copié en 1570 et
Mercalor Taccepla sans réserve.
Ce compositeur, connaissant bien la position des fies Schetland et
Foeroe n'a pu concevoir que ces lernières se seraient métamorphosées
en une région insulaire; or, il recula vers l'ouest de Foeroe, les îles
Neome, Podalida, Frisland, Icaria, Ëstotiland, Drc^eo, ne préjugeant
rien de leur existence; seulement il a cru réduire le grand continent
Drogeo en une île médiocre (s4) et étendre l'île Ëstotiland en un conti-
nent qui n'est antre que terra Laboratoris, Labrador de la découverte
récente. Le compositeur de la carte savait retoucher Estland et
Island de la carte de Zeno, et laissa intact le Groenland, dont il n'a pu
avoir de meilleurs renseignements.
L'imagination des géographes postérieurs donnant des attitudes fan-
tastiques aux régions arctiques, sévit longtemps sur Groenland en le
trafisfigurant , tantôt en un feston qui réunit le nouveau monde avec
l'ancien, tantôt en un archipel, jusqu'à ce que de nouvelles découvertes
restituassent son existence , dans toutes la forme et l'étendue que lui
assignait la carie de Zeno.
Il n'en était pas ainsi avec Frisland, devenu pays de mystère,
insaisissable. On allait à sa recherche, comme on recherchait les
Antilles, Cattigara, les détroits crayonnés d'avance, comme on s'était
efforcé à retrouver le Niger et les sources du Nil dans les proportions
et la position que leur assigna Ptolémée. Ailleurs, à la place de l'objet
cherché on a rencontré quelque autre chose : mais Frisland déplacée
échappait aux navigateurs , elle se submergea comme l'Atlantide
platonique : il n'en resta ni vestige, ni le moindre atome; seulement
la tache assez difficile de la réduire à Téchelle de Foeroe. Bien qu'elle
fût encore connue du temps de Colomb et son pilote De la Cosa lui
assigna la même position que la carte de Zeno : on remonta avec la
date de la submersion d'une île de cette position : insula baec anno
1456 fuit totaliler combustà, dit en 1507 la carte de l'Allemand Jean
Ruysch. Les caries marines bataves répétèrent longtemps : 't versonken
land van Bus, is heedendaags al brandinge ^/4 myl langmethol water.
Dit is veele iaren een groot eyland geweest en was genaamt Freesland,
en besloeg wel 100 myl int rond, waar op verschyde dorpen lagen.
(53) So findct sich , dit Spreiigol (Gosch. der geogr. Entdek. 20, p. 220), auf dcr sicbcnten Cliartc,
de Biaiico, Aveldic die Nordisclien Roiclie Island, iind das von Zcdo in dicsc Gegond gerabeltc
Frisland vorstellt, die loscl SlockTiscIi. Cela fairait croire que Bianco copia la carte de Zono : mais il
suffît de voir la mappemonde de Uianco pour se convainere qu'élit ignore l'existence des Zeui.
(54) Enjoignant Texplication : Dus Cimes Gallis.
TROIS NOTICES DES 1S[,ANDAIS
SUR GROENLAND.
T. Tôt sunt Gronlaudiac templa : in Herjolvsneso , quod longissime in
orientem vergit, templum est in Herjolvs Qôrdo (éros); alterum Vatsdali in
KetilsQôrdo; tertium Vikae (monasterii?) quoaue in KetilsQôrdo, quartum
Vogis in- Sigluljordo; quintum sub Hôfdio (Foss) in OEstfjôrdo, sextum
templum cathédrale Gardis in Einarsljôrdo; septimumad Hardsteinabergum;
octayuni firattabiidae quoque in EiriksQôrdo; nonum sub SoiarQaliis, in
Isafjôrdo et decimum ; undecimum in HvalseyarQôrdo (Hvalsoer); duodecimum
Gardanesi in Midijôrdo. — Haec puntin prov. occidentali : umim Sandnesi in
LysuQôrdo; alterum Hopi Agnafjôrdo; tercium Anavikae in Rangafjôrdo.
II. Grœnlandia libanotum spectat, maxime australe est Herjolvsnesum sed
Hvarfsgnipa proxime versus occidentem (eo pervenit Eirekus rufus. longis-
sime, atquese tumputavit intimumEiriksQôrdi recessum superasse), ibi fluxus
maris (currens v. vertex) est Hafhverf dictus, ad orientale terrae litus, deinde
Spalsundum, deinde Drangeya, deinde Sôlvadalus, qui ex tractibus habitatis
orientaiissimus est, tum Tovafjôrdus, lum Melrakkanesum, tum templum
HerjolvsQôrdi {Aros\ tum Helliseya et Helliseyarfjordus , tum KetilsQôrdus
(ubi) duo templa {Fatsdal et Fikn), lum Hrakbjarnareya , Lundeya, Syllcnda
ex EireksQôrdo, tum AIplaQôrdus, Siglufjôrdus, (ubi) templum (Fogi)^ Rafns-
Ijôrdus; tum SlettuQôrdus procedit ex RafnsQôrdo, HornaQôrdus, Ofundinn-
tjôrdus, ubi sedes est eppalis {Garda); lum templum Eireksfjôrdi (BrailahUd),
ex illo procedit OEstkarsQôrdus (ubi) templum {Solarfiall?), HafgrimsQôrdus,
HvalseyarQôrdus (teniplum Ilvalsœr) f.... f.... (templum Dyurenes),., f...
ex Dyrneso, tum IsaQôrdns; inde procedit UtibliksQôrdus (isthmi); tum
Strandaijôrdus, tum MidQôrdi proxime habitati sunt, deinde unus dicitur
KoUufjôrdus, aller DyraQôrdus, tum Thorvalds Qôrdus,Steinsfjôrdus (templum
Stensnes), Berghthorsfjôrdus , deinde viris, bumerim agitantibus, sex dierum
remigatio est in Vestbygdam (tum ibi sinus recensentur); deinde ex Vestbygda;
terminis ad LysuQôrdum sex dierum remigatio est, inde sex dierum remi-
gatio ad Karlsbudas, tum trium dierum remigatio ad Bjarneyam, duodecim
dierum remigatio circa Bjarneyam , Eysunesum , Aedanesum a borea. Sic
numeralum est centum nonaginta villas esse in OËstbygda, nonaginta in
Vestbygda.
III. IvARi Bardi FH.n, Groenlandiae, descriptio, p. 502t-518.
Sic dicunt viri perili, qui in Groenlandia nati sunt et nuperrime ex Groen-
landia advenerunt, ex boreali parte Stadi Norvegiae septem dierum nauiga-
tionem esse, recta versus occidentem ad Hornum, inorientali Islandiae litore
situm.
Ab Snefelsneso Islandiae qua brevissimus in Groenlandium trajectus est ,
duorum dierum et duarum noctium spatio navigandum est recto cursu versus
occidentem , ibiquc Gunnbjôrnis scopulos invenies, inler Grôniandiam et
iiO NOTICES
Islandiam medio situ inicrjaccntes. Hic cursus antiquus frequentabatur,
nunc verro glacies ei recessu oceani euroaquilonari delata scopulos ante
memoratas, tani prope atligit, ut neino sine vitaî discrimine antiquum
cursum tenere possit.
Ab Langaneso qiiod in Islandia maxime septentrionem versus juxta Homum
situm est, diioruni dierum et duanim noctium navigatio est ad Svalbardum
in llavsbotnis.
Qui Uergis recto cursu in Groenlandiam navigare, ncque ad Islandiam
api)ellere volunt, tiis recta versus occidentem navigandum est donec venerint
e regione Reylcencsi australis Islandix promontorii, ita ut duodecim miilia-
ria maritima ab australi parte bujus promontorii absint, atque ita cursu,
ut modo dictum. occidentem versus continuato ad altam Grôniandiae terram
qu£ tharvum dicitur pervenient. Pridie qiiam ante dictum Hvarvum cons-
pexeris, alium excelsum montem qui lividserkns api>ellatus conspexisse
debes. Sed sub ante dictis dnob montibus Hvarvum et Hvidserlius , promon-
toriumjacet, llerjnlvsnesuni dictum, cui adjacet portus nomine Sandtis Nor-
vegis ac mercatoribus communis.
Si quis ab islandia navigat, ab Snefelsneso, qui 12 milliaribus maritimis
longius versus occidentem in Islandia jacet quam antedictum Reykenesum
cursum dirigere del)et et recta versus occidentem navigare une die etuna
nocte,sed postea in libanotum cursum dirigere, ut glaciemscopulis GunnbjÔr-
nis adhaerentem evitet, deindeque uno die etuna nocte recta versus iapygem;
sic recto cursu ad altum terram Grôniandiuî, Hvarvum, sub qua antedictum
Herjulfsnesujn et Sandhavnia sita sunl, perveniet.
Tractus habitatus Grôniandie maxime in orientem vergens, Herjulfsneso
proximus ab oriente est Skagcfiordus dictus, qui locus magnopere frequen-
tatus est.
Longo ab Sliagetiordo spatio versus orientem sinus est nullis coloniîs
frequentatus, dictus Berefjordus in cujus sinus ostio longae syrtes intransver-
sum patent, ut nnlla majora navigia, nisi niaximis xstibus, ingredipossint;
maximo vero xstu incidente, inimensa cetorum multitudo in sinum incurrit:
eodem Berefjordo copia piscium nunquam deest. Est in eodem sinu publica
cetorum captura, tamen cum venia eppi, nam sinus teniplo cathedrali proprius
est. In hoc si nu ingeus est vorago, cetorum dicta, inquam ceti recedente îBsttt
incurnint.
Longius versus orientem ab antedicto Berefjordo alius sinus est dictus
Ollumtengri (omnium-longissimus) qui ab anguslo aditu in vastius spatium
di£fusus, tantum in longitudinem patet, ut finem ejus nemo noverit. Hicnullo
sestu agitatus, parvis insulis scatet, magna avium et ovorum abundantia
utrinque planities campestris, quae quantum progrediare viridi gramine
vestita est.
Longius versus orientem ad molem usqne glacialem portus est, dictus
Finnsbudœ, ita dictus, quod jam xtate Olavi sancti navis aliqua eo loco
naufragium fecit qua navi vectum sancti Olavi ministrum, cum nonnulUs aliis
mari perilsse vulgata adhunc in Grônlandia fama refert, superstites vero
mortuos sepelivisse et super horumsepulcriscruces magnas lapineas erexisse,
quae bodieque ibi stant. (Fuga probabiliter Finni parvi famuli régis Roereki
ab Olavo 1017 cxcœcati in Islandia deportati).
Longius orientem versus proficiscenti ad molem glacialem obvia est magna
insula, dicta Korsôa, ubi publica est alborum ursorum captura, permissu
tamen eppi, quod ea insula peculium est sedis cathedralis. Longius versus
orientem nihil praeter glaciem et nivem terra marive.
Ut ad rem, de coloniis Grôniandiae redeamus, jam supra provinciarum
Grôniandiae mentionem facientes indicavimus, Skagefjordum, ab orientali
latere Heijulvsncsi situm, ex habitatis tractibus orienti esse proximum.
SUR GROENLAND. 111
Ab occidentâli latere Heijulvsnesi est Kelilsfjord totus coloniîs refertus,
Sinum ingredienti a dextra ingens ostium situm est in quod magni fluvii se
exonérant. Prope ab hoc ostio templum est, Ârosi, sacrai crucis consecratnm,
quod templum ab exteriori parte omnia ad Heijulfsnesum usque possidet,
insulas, scopulos, marisque ejactamenta, ab interiori parte omnia ad sinum
usque Pétri.
Ad sinum Pétri {Peilers vig) tractus habitatus est Fatsdalus, prope quem
amplus lacus, piscibus abundans, la tus duo miiliaria maritima. Templum
Pétri totum tractum Vatsdalensem possedit.
Haud procul ab hoc tractu ingens monastcrium situm est a canonicis regu-
larlbus habitatum, 5. Olavo cl S. Jugmtino consecratum. Monasterium a parte
interiori omnia ad finem sinus, omniaqiieexteriusab opposite latere possidet.
Proximus KetilsQordo, est Rafnsfjord (Ranipnesf. Ranipnesf. Rampef.
Rumpeyarf.), in cujus interiori recessu cœnobium sororum ordinis sti
Benedicti situm est. Quod coenobium a parte interiori omnia possidet ad
finem usque sinus, a parte exteriore ab templo usque Vogensi quod scto régi
Olavo sacrum est. Templum Vogense omnem terram ab exteriori sinus parte
possidet. Insinu interiori, multaesunt parvse insulae, quarum omnium partem
dimidiam caenobium, alteram dimidiam templum cathédrale possidet. Hse
parvse insulae calida aqua abundant quse hycmeadeo fervent, ut nemini prope
accedere fas sit; aestatse temperatse sunt, ut lavacri usum prsestent, multiquc
sanitati restituantur et eae morbis convalescant.
Proximus huic si tus est Einars fjord, inter qiiem et antedictum Rafns-
fjordum, magna jacet villa principalis, quae régi est; ei villx nomen Foss.
Hic splendidum templum (Hofdio), stat, scto Nicolao sacrum, cui rex
sacerdotes praeficit. Jacet ibi in vicinia ingens lacus, piscibus abundans, qui
cum sestu marine et imbre restagnavit, aqua refluente et decrescente magna
piscium copia in arena remanet.
Einarsfjordum ad sinislrumingredientibusbrachium maLTÏsesiT/iorvaldsvig;
adhuc magis introrsum ad idem sinus latus promontorium jacet, dictum
Klining; inde magis introrsum brachium se inscrit, dictum Grauevig intra
quam aliquanto spatio magna villa est, dicta Dater (vallis), templi cathédrale
possessio. Sinum ingredienti pelentique templum cathédrale (Garda), in
intime sinus recessu situm a dextra est ingens sylva, acdi cathedrali
propria, in qua sylva omnia templi cathedralis pecora pascuntur. Templum
cathédrale totum Einarsljordum possidet, item ingentem illam insulam
que EinarsQordum prœjacet, diclam Rensfie (rangiferorum), quod tem pore
autumnali multi eo maclides concurrant; ibidem venatio communis; neque
tamen nisi permittente eppo. In eadam insula sunt saxa sectilia omnium
quse Groenlandia fert prsestantissima , tam sequaci materia, ut inde oUœ
et canthari conficiantur, tamque durabili natura, ut injuriam ignis contem-
nant ; ex une tali saxo canthari, decem velduodecim doliorum capaces confici-
untur. Longius versus occidentem insula contineutem praejacet dicta LangÔe
(longa), in qua octo grandia prsedia rusticana sunt. Templum cathédrale
totum insulam possidet, exceptis decimis quae templi Hvalsôensis sunt.
Proximus EinarsQordo est Mvatsôerfjord (sin. insulae ceti), in quo templum
est hvalsôefjordense, quod totum hoc sinum, totumque qui proxime adjacet
Kambstadefiord possidet. In hoc sinu magnum jacet praedium regium dictum
Thjodhildestad (sica nomine uxoris Erici rufi vocatum).
Huic proximus est Eriksfjord, in cujus ostio iusula qusedam sita est, dicta
Eriksôe, cujus pars dimidiae templo cathedrali, altéra dimidia templo Dyur-
nesensi subjacet. Csetuum sacrorum qui in Grônlandia sunt, templi Dyurenes
(promont, animalium) frequentissimus est, quod templum ab sinistro latere
Eriksfiordum ingredienti situm est. Templo Dyurnesensi , omnia Mitlfjord
(médius sin.) ex EriksQordo recta in japygem infunditur. Longius inde in
EriksQordo situm est templum Solefjellds , cui totus Mittfjord subjectus est.