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Full text of "Géographie du moyen âge"

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-^ 


GEOGRAPHIE 


DU  MOYEN  AGE, 


I^.TUMI^.E   TAU 


J  0  A  C  H  I  M    hEL  E  W  E  L. 


ACCOMPAGNÉ   d'atlas 
F.T   DE    CARTES   DANS   CHAQUE   VOLUME. 


S«Tpe  palcr  dixit ,  sliidiiim ,  qord  inutilo  iPiil^s  ? 
Ovid.  Irist.  IV,  10. 


TOME  H. 


BRUXELLES  ^ 

CHEZ  V  ET  J.  PILLIET,  LIDR AIRES,  SUCC"  DE  P.  J.  VOGLET, 

RUE   DE    I.A    MONTAGNr,    29. 


\.  LATINS. 

PROGRÈS  OCCULTE;  LA  NAVIGATION  PRÉPARE  LES  CARTES 

NAUTIQUES,  1154-1520. 

104.  Revenant  aux  latins,  nous  avons  beaucoup  à  observer  pour  bien 
comprendre  la  marche  de  la  carlographie.  Mais  nous  ne  devons  pas  au 
bout  du  compte  oublier  le  glorieux  ouvrage  de  Sicile.  Les  efforts  de 
Roger  semblaient  s'échapper  de  l'Europe,  pour  aller  se  perdre  en  Asie, 
éblouis  par  la  lumière  de  Torient.  Sur  le  lieu  même,  les  vestiges  de 
leur  produit  se  dérobent  tout  d'abord  à  notre  vue;  nous  nous  trouvons 
longtemps  dans  une  obscurité  profonde  :  mais  ces  efforts  ne  restèrent 
point  stériles,  ils  produirent  des  conséquences  dont  nous  pouvons  heu- 
reusement dépister  les  traces  dans  nos  investigations.  Les  arabes 
coopéraient  à  Tœuvre  sicilienne  et  les  études  latines  ne  cessaient  de 
puiser  dans  la  science  arabe  :  nuiis  d'autres  moyens,  une  autre 
pratique,  d'autres  idées  donnaient  à  la  marche  de  la  cartographie 
latine  une  direction  tout  à  fait  différente  de  celle  des  arabes. 

Depuis  Hipparche  et  Ptolémée  juçqm'iiii  xvi«  siècle,  les  théories  astro- 
nomiques n'ont  fait  aucun  progrès  véritable;  queU[ues  points  fondamen- 
taux ont  été  mieux  déterminés;  chez  k»  arak»,  'Albateni  a  mieux 
connu  la  longueur  de  l'année,  faxceotrlcité  du  aoldt  el l'obliquité  de 
l'écliptique;  d'un  autre  côté,  Tbebit  a  l^t  relîtigrâQl^  k  science  par 
son  système  de  trépidation  des  étoiles.  La  flvenf  avee  laqu^m  o^le 
idée  malheureuse  a  été  reçue  par  tous  les  MtroDOiaesqai  l'ont  saivhâtt 
une  preuve  qu'on  observa  bien  peu,  ou  qu'on  obserfa  bien  mal.  Lé 
vrai  service  que  les  arabes  ont  rendu  à  la  science,  est  la  face  nouvelle 
qu'ils  ont  donnée  à  la  trigonométrie  et  leurs  soins  continuels  pour 
faciliter  le  calcul  de  l'astronomie  sphérique.  Leurs  découvertes  en  ce 
genre,  imparfaitement  connues  et  plus  mal  appréciées,  ont  fait  que  les 
premiers  restaurateurs  de  l'astronomie  en  Europe,  se  sont  traînés 
longtemps  sur  les  pas  des  arabes,  qu'ils  n'ont  pas  égalés  :  ils  ont  len- 
lenient  et  péniblement  retrouvé  ce  qui  était  inventé  500  ans  au-r 
paravant.  C'est  le  résumé  de  la  marche  de  l'astronomie  dans  le  moyen 
âge  (i). 

Les  latins  se  traînaient  péniblement  sur  les  traces  des  arabes,  chez 
lesquels  ils  cherchaient  de  l'instruction  depuis  longtemps.  Leur  marche 
lente  et  nonchalante,  commença  à  se  ranimer  enAn,  çt  voici  ce  que 
décèle  le  xiii*  siècle  sur  plusieurs  points  de  l'Europe. 

(1}  Dehimbre,  lust.  de  l'astron.  p.  4u8. 

II.  1 


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PROGRÈS  OCCULTE,   «(H;.  3 

calendes  de  juin,  jour  où  Âlfons  monta  sur  le  tr<)ne.  Bientôt,  vers  4290, 
se  trouva  Henri  Batcn,  ensuite  d'autres,  capables  de  signaler  et  de 
corriger  les  erreurs  dans  les  tables  alfonsines. 

De  même  que  la  sphère  céleste,  difîérents  instruments  arabes  se 
trouvaient  aussi  dans  les  mains  des  latins  et  on  les  fabriquait  à  Fusage 
des  astronomes  et  des  navigateurs.  Raimond  LuUe,  en  1295,  inventa  et 
décrivit  dans  son  arle  de  navegar,  un  astrolabe,  car  des  instruments 
d'astronomie  nautique,  propres  à  trouver  sur  mer  Theure  de  la  nuit  au 
moyen  des  étoiles,  existaient  vers  la  fin  du  iLiii*  siècle  dans  la  marine 
catalane  et  majorquine. 

Au  xiv«  siècle,  les  byzantins  commencent  à  recommander  leur 
science  aux  latins,  mais  la  semence  arabe  jeta  de  profondes  racines 
et  guidait  les  observateurs  du  ciel.  On  examinait  partout  les  tables 
astronomiques,  le  soleil,  les  astres,  la  sphère,  Tastrolabe;  on  en  écrivait 
des  traités  nouveaux.  À  la  fin  du  xv®  siècle  Marc  benevintin  commenta  le 
système  de  trépidation  de  Thebit,  tout  en  s'occupant  de  très-nouvelles 
découvertes  pour  les  études  terrestres  dans  la  géographie  de  Ptolémée. 

La  marche  était  excessivement  lente,  mais  elle  suivit  les  sentiers 
par  lesquels  pénétra  la  lumière  astronomique  de  Torient.  Cette  lumière 
fit  connaître,  sinon  les  cartes. géographiques  des  arabes,  du  moins  la 
méthode  de  leur  construction.  Chaque  ouvrage  astronomique  traitait 
de  la  manière  de  lever  les  longitudes  et  les  latitudes  géographiques, 
c'en  était  la  partie  intégrante.  Plusieurs  furent  accompagnes  de  tables 
de  positions;  de  la  distribution  des  pays  entre  les  sept  climats;  d'une 
notice  générale  touchant  la  figure  et  la  situation  de  Thabitable.  Cer- 
tainement nous  pouvons  dire  d'avance ,  que  ni  la  méthode*  ni  les  posi- 
tions indiquées  par  les  arabes  n'étaient  admises  dans  la  construction 
des  carte  latines;  mais  vu  celte  infatigable  tenf^ance  de  l'a^itronomie  de 
se  traîner  à  la  remorque  des  arabes,  il  faut  présumer  une  continuité 
des  études  géographiques,  dans  lesquelles  un  progrès,  sinon  rapide,  au 
moins  d'un  certain  mérite,  devait  se  déclarer  un  jour;  et  quand  on 
remarque  quelque  coïncidence  dos  cartes  latines  avec  celles  des  arabes, 
il  faut  conclure  que  les  caries  et  les  connaissances  des  mahommédans 
exerçaient  une  cerlaine  influence  sur  les  géographes  latins. 

lOo.  Les  voyages  des  juifs  de  l'Europe,  de  Benjamin  ben  Jona  de 
Tudèle  (H60-1178),  de  Pelahhia  de  Ratisbonne  (1173-H83),  de  même 
que  les  descriptions  succinctes  du  monde,  de  Groenland  et  d'autres 
parties  du  nord,  chez  les  Islandais;  la  description  de  la  partie  septen- 
trionale de  l'Europe  par  Helmold  le  bozovien  (1175);  la  description  des 
pays  de  Galles  et  d'Irlande  par  Giraud  iîarrt/ (cambrensis  vers  1180); 
la  relation  du  pèlerinage  à  Jérusalem  de  Henri  fils  de  Saemundr,  abbé 
de  Thingôr  en  Island  (1154);  une  autre  détaillée  delà  traversée  de 
Pays-Bas  jusqu'à  la  Palestine  par  Emon,  abbé  de  Werum  dans  Gronin- 
gcn  (1217);  celle  de  Tecmarus  (1218);  le  voyage  (perdu)  de  l'islandais 
Gissur,  fils  de  Hall,  par  les  parties  méridionales  de  l'Europe  (1206);  les 
pèlerinages  des  juifs  Samuel  ben  Simson  de  France  (1220),  de  Jacob 
de  Paris  (1258)  sont  des  monuments  de  la  géographie  descriptive , 
qui  laissent  des  traces  que  la  connaissance  des  pajs  présentait  de 
l'intcrét. 


4  GÉOGR.   LATIMK,   1330-1410. 

Une  plus  haute  étude  des  pays  décèle  un  cadastre  de  Waldemar  H, 
roi  de  Danemark  (1251),  ou  recensement  topographique  de  toutes  les 
provinces  de  son  royaume  ;  et  le  tableau  général  et  détaillé  des  posses- 
sions territoriales  du  clergé  en  Angleterre,  que  fit  élaborer  le  roi 
Edward  II  (1291).  Ces  voyage  et  cadastre  produisirent  les  dessins  de 
cartes  et  de  tableaux. 

On  connaît  deux  dessins  de  Titinéraire  de  Londres  à  Jérusalem. 
Toute  la  route  représente  la  suite  des  stations  de  journée  en  journée, 
les  villes,  dessinées,  accompagnées  d'épigraphes  indiquant  leurs  nom, 
qualité  et  souvent  quelque  singularité  (à)  (voir  n"^  63, 64  de  Fatlas;  5, 4, 
de  la  planche). 

On  rencontre  quelquefois  dans  les  manuscrits  de  cette  époque  les 
tracées  du  fleuve  Jordan  et  de  la  terre  sainte  et  le  plan  de  Jérusalem , 
pour  rinstruction  des  pèlerins  (s)  (voyez  n®  100  de  notre  allas). 

D'après  les  monuments  gé(^raphiques  qui  restent  de  cette  époque, 
il  parait  qu'en  Angleterre  toute  l'attention  se  portait  vers  les  itinéraires. 
On  traçait  les  ébauches  de  ces  itinéraires  (voyez  n*  61,  62  de  notre 
atlas,  n"^  1  et  2  de  la  planche),  et  on  les  marquait  dans  les  cartes  com- 
posées avec  un  grand  soin  et  avec  une  habileté  remarquable ,  lorsqu'on 
réfléchit  que  sans  qu'elles  fussent  basées  sur  des  procédés  géométriques, 
on  se  retrouve  dans  d'innombrables  positions  entre  les  détours  compli- 
qués de  la  multitude  des  rivières.  Je  pense  qu'en  examinant  la  carte 
prise  du  vélin  de  cette  époque  (u""  65  de  notre  atlas,  5  de  la  planche), 
on  trouvera  cette  observation  juste  et  on  admirera  l'habileté  d'un  dessi- 
nateur instruit,  qui  savait  développer  les  cartes  topographiques  et 
chorographiques  en  conservant  les  proportions  des  provinces  et  du 

(i)  Le  desti»  de  l*iihiëraira  à  lëniMleai  m  troare  doaUe  m  Aofdetem ,  atteebë  avx  manvteritt 
et  MaUûea  Paris  dast  les  bibliotk.  royale  de  Londres  et  di  collège  beaet.  Goach  en  pablia  des 
fragments  de  Londres  i  DouTres,  dont  nons  reprodnisons  une  rédaction.  M.  Jomard  les  donnera  en 
entier  dans  sa  grande  publication. 

(5)  Ilovs  donnons  dans  notre  atlas  nn  dessin  très-pen  diroinoé  d*nn  manuscrit  de  Bruxelles  de  la 
bibliotb.  de  Bourgogne.  Du  mons  gaudii  on  Toit  la  Tille  sainte  et  par  :  Tiens  ad  cÏTitatem  on  entre 
dans  la  Tille  par  :  porta  DaTÎd  occidentalis.  Dans  la  cité  :  sepulcrnm  domfni  ;  lapis  scissns  ;  golgota  ; 
calnarie  —  turris  danid  ;'eclesia  latin'a  —  les  deux  quartier»  de  deux  autres  sont  séparés  par  :  Tiens 
porte  s.  Stephant  ;  tIcus  porte  montis  sjon  — Dans  ces  deux  autres  quartiers  on  lit  :  Viens  ad  portam 
losaphat;  iter  ad  portam  spe  gosam^  qui  se  croisent;  piseina;  templum  sancte  Adda;  tempinm 
domini;  templum  salomonis;  Salomonis  claustrum  ;  cambium  monete;  forum  rernm  uenalium.  — 
Par  la  porte  DaTid  :  Tiens  ad  bethlecm  due  leuge  conduisent  à  Bethléem  ;  muni  d'un  :  presepe 
(mangeoir)  pour  les  pèlerins  ;  sepulcrum  rachel;  fons  syloe  ;  mons  syon  ;  cenaculum  ;  porta  Syon 
australis;  aeheldemach  (haceldama  ou  eham  des  sang  :  Jean  Vande  Cotte,  coup-d'œil  p.  156],  sepnl- 
tura  percgiinorum;  betbania  sont  d'un  côté  de  la  cité  ;  de  l'autre  près  de  v  porta  s.  stephani  septen- 
trionalis,  on  a,  sepnlcmm  s.  stephani.  —  An  delà  delà  :  porta  losaphat  orientalis,  coule,  torrens 
cedron.et  on  passe  Tallis  iosapbat,  pour  se  rendre  an  sepulcrum  s.  marie  ;  ecclesia  s.  marie;  mons 
oliTOti  ;  ascensio  domini.  Au  dessus  est  attaché  un  plan  de  la  Palestine  en  raccourci,  où  l'on  Toit  : 
nasareth;  desertum;  mons  exceisus  locus  VI  ;  mon»  chabor;  hiericbo  ;  regio  penthapolis.  —  à  partir 
de  :  mons  seyr  ;  de  mortuum  mare;  on  monte  la  riTière  par  les  :  lacus  genesaret;  mare  tibenadis  ; 
mare  galilee  ;  jusqu'aux  sources  de  :  iordan,  du  mons  liban.  — ubi  dominus  ieiuuauit  locus  XI;  mons 
exceisus  super  quem  assnmptus  fuit  dominus  a  diabolo;  mons  synay;  lapis  percussus  a  Moyse. 

Un  semblable  plan  de  Jérusalem  se  trouTO  dessiné  à  la  fin  du  xiii*  siècle,  chez  les  islandais  (mss. 
ama  magn.  n*  736).  En  entrant  par  la  porte  piscinm  f.  dd  (siTC  DaTÎd),  on  a  à  gauche  :  templum 
sancte  crucis;  sepulcrum  Ade,  sepulcrum  domini  ;  porta  gr^is  et  probacie  (probaticae)  piscine  ; 
Golotba  (Golgotba),  lapis  scitus  (scissus),  caWarie  locus.  —  à  droite  :  turie  Dauids ,  porte  natus 
(natiis?  de  nations)  siue  judiciari.  ecclesia  latina  —  tIcus  porte  Stephani ,  Tiens  porte  montis  Syon, 
séparent  les  deux  autres  quartiers  de  la  Tille.  —  Dans  celui  de  gauche,  au  delà  de  iter  habitanti 
auTulst  se  trouTe,  templum  scte  Marie  (Anne);  de  l'autre  cdté  de  la  rue  qui  conduit  à  la  porte  uallis 
losaphat,  et  nalles  losaphat,  dans  nne  antre  section  du  quartier  on  Toit  :  templum  domini,  sous 
lequel  est  inscrit  le  nom  de  la  Tille  Jorsala  boi^.  Jérusalem.  —  Dans  le  quartier  de  droite  :  habitatio 
régis  et  prophetarum;  habitatio  cinuinm  propharum;  claustra  Salomonis  :  templum  Salomonis  ; 
ermestti  Jérusalem.  Sur  ce  point  la  porte  manque,  seulement  au  delà  de  l'enceinte  on  lit  :  porte 
aurea  per  quam  ingressus  Uicsus  super  a»nam.  (Voyez  fig.  ci-Jointe'. 


PHOGRÈS  OCCULTE,  105.  5 

pays  entier.  L*Ecosse  était  moins  connne  au  dessinateur  anglais.  C'est 
Tunique  monument  de  ce  genre  qui  donne  une  idée  de  l'adresse  de 
répoqiie  et  des  cartographes  postérieurs,  dont  le  produit  lopographi- 
que  est  perdu  pour  nous. 

On  voit  sur  cette  carte  de  vélin  les  routes  erleurs  distances,  les 
fleuves  et  leur  direction  ;  les  provinces  se  laissent  distinguer  et  séparer. 
La  partie  occidentale,  surtout  Sussex ,  Kent,  Essex,  Suffolk,  Norfolk 
sont  remplis  d'inscriptions  qui  deviennent  rares  dans  rintcrieur  et  au 
nord,  et  disparaissent  presque  dans  les  parties  occidentales.  Quantité  de 
ces  inscriptions  ont  été  enlevées  par  le  temps  destructeur;  mais  beau- 
coup plus  de  positions  n'étaient  point  inscrites.  Les  plus  importantes 
manquent  souvent  :  Oxfort,  Coventer,  Lincoln,  Doncaster,  Carlile  y  res- 
tent innommées.  Le  dessin  de  la  carte  n'était  pas  achevé.  L'écriture 
est  très-fine,  quelquefois  trop  petite,  difQcile  à  débrouiller.  Plusieurs 
lettres  ne  se  laissent  pas  distinguer  à  première  vue ,  se  ressemblent 
l'une  à  l'autre.  Les  élisions  des  lettres  et  de  fortes  abréviations,  comme  : 
ncest  (Chichester)  exercent  la  sagacité  des  investigateurs  (voyez  notre 
portulan  général  à  la  fin,  p.  27-29)  (e). 

Mappam  mundi  descripsi  in  pelUs  duodecim  pergameni,  dit  en  1265 
un  dominicain,  annaliste  de  Colmar  :  mais  nous  ne  l'avons  pas,  elle 
est  perdue.  Les  mappemondes  furent  souvent  dessinées  sur  une  très- 
grande  échelle.  Une  assez  grande  carte  existe  dessinée  par  un  chanoine 
Henri  ,  imago  mundi  conlexla  per  Henricum  canonicum  ecdesiœ  sanciœ 
Mariœ  civitalis  Magonliœ,  de  rerum  natura,  imperatoribus ,  regnis, 
regibus  et  ponlificibus  usque  ad  Henricum  imperatorem  filium  Henrici. 
Elle  accompagnait  évidemment  une  chronique  qui  continuait  jusqu*à 
Henri  IV  (mort  1106)  (i). 

(6)  La  plupart  de  ces  carter  de  la  Bretagne  se  trouTent  dans  les  manuscrits  de  Mathieu  de  Paris, 
consenrés  dans  les  bibliothèques  royale  de  Londres,  oottonienne  et  du  collège  benêt.  Richard  Gmigb 
les  a  publiés  dans  son  ouvrage  ibritish  topografiby,  dont  la  première  édition  parut  à  Londres, 
en  4768  in-4%  la  seconde  à  Londres  1780,  de  mèmein-4*,  en  t  volumes;  le  premier  vol.  delà 
troisième  éditjion  a  été  réduit  en  cendres  avec  rétablissement  de  John  Nicbols  en  1808.  On  compte 
7  planches  de  monuments  géographiques  relatirs  à  la  Gr.  Bret.  dans  le  1"  vol.  et  une  8"*  dans  le 
second.  Nous  les  reproduisons  en  grande  partie  dans  notre  atlas.  En  premier  lieu,  les  quatre 
suivants  :  1*  Quatuor  ttratas  per  Britanniam  réduite  en  proportion  de  SS  à  8;  t*  Britannia  nnnc 
dicta  AngUa  quœ  compleetUur  Seodam  GtUeweiam  et  fFàliMm,  réduite  deux  cinquièmes.  On  suppose 

au'elle  est  de  la  main  de  Mathieu  même  (1S69)  parce  qu*on  présume  que  lui-même  donna  à  l'abDaie 
e  s.  Alban  son  manuscrit  qui  passa  ensuite  dans  h  bibl.  royale.  —  3*  Fragment  de  la  mappemonde 
de  Haldingbam.  —  4"  La  plus  importante  dessinée  sur  deux  pièces  du  vélin,  que  nous  avons  réduite 
on  proportion  de  iO  à  3  de  réchclle  et  reproduit  Kent  et  Su*»ex,  sur  la  grandeur  de  l'original  (pi.  VI, 
t  I,  p.  76).  Thomas  Martin  l'a  heureusement  exhumée  et  présentée  en  1768  à  la  société  des  anti- 
quaires ,  prétendant  qu'elle  est  du  temps  d'Edward  III.  Elle  est  oblonsue,  tournée  l'orient  en  haut 
et  elle  parait  être  du  xii*  siècle.  Je  dois  les  calques  de  ces  cartes  à  l'amitié  et  aux  soins  de  mes 
compatriotes,  Pierre  Jastrcembski  et  Valerien  Krasinski,  avantageusement  connu  dans  le  monde 
littéraire ,  par  ses  savantes  publications  sur  l'histoire  et  l'état  politique  des  Slaves.  Je  n'ai  pu  me 
procurer  les  calques  de  deux  cartes  qu'on  voit  dans  l'ouvrage  de  Gough  (t.  I,  p.  64,  pi.  III  ;  et  1. 1, 
p.  67,  pi.  IV,  n*  3),  celle  delà  mappemonde  de  Henri  et  loutre  d'un  manuscrit  de  Matthieu  du 
collège  benêt,  laquelle  contient  beaucoup  de  places  qui  ne  se  trouvent  pas  dans  les  autres.  Gough 
explique  toutes  ces  cartes  et  distingue  leur  mérite.  Mais  ceux  qui  ne  connaissent  pas  l'ouvrage  très- 
difficile  de  Gough,  sont  induits  en  erreur  par  une  étrange  opmion  de  Matthias  Christian  Sprengel 
(Gescb.  dcr  Enldeckungen,  chap.  f  0  p.  230)  fidèlement  répétée  par  Malte-Brun  (XIX,  p.  507  de  l'édit. 
Huot).  Toutes  ces  cartes  sont  condamnées  en  globe ,  très-grossières,  le  dessin  des  principales  villes 
et  des  abbayes  avec  leurs  murailles,  leurs  clochers  et  leurs  portes,  occupe  tant  dVspace,  qu'il  n'a 
pas  été  possible  de  marquer  les  divisions  des  provinces,  les  endroits  peu  considérables  et  les  petites 
rivières.  Ce  n'est  qu'à  l'occasion  de  l'Ecosse  de  Harding  du  xv*  siècle  (Gough.  t.  U,  p.  580,  n*  67  de 
notre  atlas,  7  de  la  planche)  que  Sprengel  se  relève,  ou  plutôt  retombe  dans  une  autre  erreur 
(p.  339)  en  faisant  promener  sur  cette  carte  l'armée  royale  de  station  en  station. 

(7)  Cette  carte  est  conservée  au  collège  benêt.  Gough  a  extrait  de  cette  carte  l'Angleterre  et 
rirlande  pour  sa  publication  (t.  I,  p.  64,  pi.  lU,  n*  1).  Elle  se  trouvera  entière  dans  la  publication 
des  monuments  géogr.  de  N.  Jomard. 


y 


6  GÉOGR.   LATINE,   1330-1410. 

En  Angleterre,  Richard  de  Haldingham  mit  à  exécution  une  immense 
mappemonde.  Rien  de  plus  grossier ,  on  pourrait  dire  de  plus 
monstrueux.  La  description  de  TAsie  mineure  peut  donner  une  idée 
de  son  exécution.  Elle  y  est  d'une  forme  qui  représente  à  peu  près  un 
carré  long,  pouvant  avoir  six  pouces  dans  un  sens  et  sept  à  huit 
dans  l'autre.  La  ville  de  Nicée  est  placée  à  l'angle  supérieur  vis-à-vis 
de  Constantinople  ;  puis  successivement  au-dessous  de  Nicée ,  le  long 
d'une  côte  marquée  verticalement  par  une  ligne  sans  contours,  on  lit 
de  haut  en  bas  les  noms  de  Chalcedonia,  Nicomedia^  Prusias,  Cisicum 
et  Abidos  (ces  deux  derniers  noms  semblent  s'appliquer  à  une  seule 
et  même  ville) ,  Lamsacus,  Lilium  et  enfin  Troja  ciuilas  bellicosa.  Un 
peu  après  Troja,  qui  est  VAlexàndria  Troas ,  la  côte  se  replie  à  angle 
droit;  mais  l'auteur  de  la  mappemonde,  confondant  le  détour  que 
fait  ici  en  effet  la  côle  de  la  Troade  pour  former  le  golfe  Adramylti 
avec  celui  de  la  côte  carienne,  trace  horizonlalemenl,  depuis  Troie 
jusqu'au  golfe  dTssos,  une  nouvelle  ligne  droite,  qui  figure  la  côte 
méridionale  de  la  péninsule  et  sur  cette  côte  il  inscrit  successivement, 
de  gauche  à  droite,  les  noms  de  Prienna ,  Milelus ,  Pacera  (Paiara), 
Mirrea,  Listra,  Telmessus  et  Alalia,  Après  Atalia  il  n'y  a  plus  de 
noms.  Sur  la  côte  septentrionale  il  n'y  en  a  qu'un ,  celui  de 
Heraclea,  inscrit  non  loin  de  Nicca  avec  le  fleuve  Licus.  Dans  l'inlé- 
rieur ,  Ephesus  est  placé  presque  au  centre  du  pays  ;  un  peu  plus 
loin  sont  les  villes  Antiochea ,  Iconium  et  Tarsus ;  puis,  à  l'extré- 
mité vers  l'orient,  Anlioche  de  Syrie  et  le  mons  Cassius,  Une  ligne 
sinueuse  figure  le  fleuve  Halys,  qui  est  écrit  Belles,  Les  noms  des 
anciennes  provinces  :  Phrygia^  Caria,  Paphlagonia  ,  Cappadocia,  etc., 
sont  jetés  pêle-mêle  et  comme  au  hasard.  Du  reste  le  tout  est  exécuté 
avec  un  très-grand  soin  calligraphique  et  les  villes  y  sont  figurées 
suivant  leur  importance  traditionnelle ,  par  une  ou  plusieurs  tours 
parfaitement  dorées  et  coloriées.  Le  Pont  Euxin  et  la  mer  de  Cypre 
sont  représentés  par  d'étroits  canaux  peints  en  vert  :  et  par  une 
sorte  de  compensation  de  ce  que  de  vastes  mers  perdent  ainsi  en 
étendue,  les  détroits  qui  se  prolongent  entre  l'Euxin  et  l'Egée,  y 
compris  la  Propontide ,  ont  reçu  d'énormes  dimensions  (s). 

Cette  description  n'est  pas  flatteuse  pour  la  grande  mappemonde 
de  Haldingham.  Elle  est  ronde;  Jérusalem  y  est  au  centre  et  certes  elle 
n'est  pas"^ moins  intéressante  pour  l'histoire,  pour  la  géographie 
descriptive  et  pour  la  reconnaissance  des  vices  qui  chargent  le  dessin 
des  cartes  postérieures. 

La  carte  d'Angleterre,  d'Ecosse  et  d'Irlande,  qui  est  dans  notre  atlas 
(n<^  69)  prise  de  cette  grande  mappemonde,  donne  aussi  l'idée  de  la 
finesse  du  dessin  et  de  la  grossièreté  de  la  composition.  Haldingham , 
en  qualité  d'Anglais,  a  dû  connaître  les  îles  britanniques,  mais  sa 
composition  prouve  le  contraire.  La  nomenclature  des  positions  y  est 
de  l'époque,  nationale  et  assez  spécifiée;  mais  les  îles  ne  décèlent  leur 
forme  que  d'une  manière  très-incertaine.  Le  fleuve  bande  passe  à  tra- 


(8)  Cette  description  de  l'Asie  est  tirée  de  Touvragc  de  M.  Vivicu  de  Saint-Martin,  histoire  des 
dccouveKcs  géographiques ,  chap.  ii,  t  II,  p.  486,  487. 


MAPPEMONDES,   iOC.  7 

vers  Hibernia  et  divise  Tlrlande  en  deux  îles;  le  fleuve  iveede  sépare 
la  Scoiia  de  la  Bretannia  (9). 

106.  De  la  très-grande  mappemonde,  je  passe  à  de  toutes  petites 
figurines.  Celle  de  Gautier  de  Metz ,  dessinée  dans  différents  manus- 
crits de  son  ouvrage  (u""  50,  57  de  notre  atlas),  est  tout  à  fait  insigni- 
fiante (10).  Celle  qui  accompagne  le  manuscrit  de  la  pharsale  de 
Lucain  conservée  à  Mons,  cnHainaut,  n'offre  plus  d'intérêt  (11).  Mais 
les  trois  autres  que  nous  allons  prendre  en  considération  sont  en  appa- 
rence vides  et  chétives  :  elles  méritent  cependant  un  examen  sérieux. 

La  figurine  extraite  d'un  code  de  la  bibliothèque  nationale  à 
Paris,  est  du  commencement  du  xiii*  siècle  ou  de  la  fin  du  xii% 
(voyez  n®  68  de  notre  atlas)  ;  les  quatre  points  cardinaux  y  sont  nommé- 
ment marqués  ce  qui  la  distingue  des  précédentes.  Lis  nord  y  est  figuré 
par  une  étoile;  le  levant  par  une  croix  qui  désormais  représentera  le 
signe  de  Torient;  le  sud  par  un  M  (meridies)  et  le  couchant  par  un  P 
(ponente) ,  employé  plus  lard  dans  la  navigation.  —  Cette  même 
figurine  offre  une  pose  inusitée  dans  les  images  antérieures,  pose 
arabe,  au  haut  de  laquelle  ne  se  trouve  pas  Torient  avec  son  paradis, 
mais  le  sud.  Enfin  cette  ébauche  de  Thabitable  retire  Jérusalem  du 
centre ,  probablement  par  inadvertance.  La  pose  antérieurement 
inaccoutumée  ,  ferait  croire  que  le  dessinateur  se  trouvait  sous  Tim- 
prcssion  de  la  carte  arabe  (12). 

Une  figurine  islandaise ,  conservée  sur  quelques  feuillets  de  la  fin 
du  XIII»  siècle,  tient  la  même  pose  arabe.  Le  nord  est  en  bas,  le  sud 
en  haut,  le  planisphère  est  divisé  en  deux  demi- cercles,  dont  celui  du 
sud  forme  Synri  bygdJi^  ou  région  méridionale ,  placée  au  delili  de  la 
ligne  équinoxiale  :  au  reste,  il  est  conforme  à  l'image  suivante  de 
Cecco,  que  nous  allons  analyser.  Ce  qui  est  encore  spécial  à  l'ouvrage 
de  la  docte  Islande ,  c'est  que  ce  planisphère  est  traversé  par  une 
bande  qui  représente  i'écliptique  (is). 

(9)  La  carte  de  HaMingham  est  conservée  dans  les  archiyes  do  la  cathédrale  d'Erefbrd ,  enfehnëe 
dans  nne  caisse  ancienne  construite  à  cet  eflet;  elle  ne  remplit  pas  moins  de  douze  planches  pa|Mer 
grand  aigle  ou  six  planches  doubles  dans  la  collection  des  monuments  de  la  géographie  du  moyen 
âge,  dont  la  publication  est  préparée  par  le  savant  Joroard.  —  Notre  copie  des  Iles  britanniqties  de 
celle  carte  a  élé  faite  sur  celle  de  Gougb  t.  1,  p.  74,  pi.  V;  elle  n'est  pas  assez  exacte.  En  4849  parvt 
à  Ilorcrord  :  a  brief  description  of  tbo  map  ofthe  ancient  world  ureserved  in  tiie  cathcdral  chùrch  of 
Hercrord,  by  S.  Bannister,  m.  a.  formely  of  qneen's  collège  Oxford,  with  a  sp^ecimen,  drawn  by 
B.  Nucker  esq.  L'ouvrage  m'est  arrivé  trop  tard.  Le  spécimen  contient  un  l'ac-similc  des  îles  britan* 
niques  et  le  coin  de  la  carte,  voisin  de  ces  iles.  Dans  ce  coin,  on  voit  l'empereur  Auguste  assis; 
au  dessus  de  sa  tiare  on  lit  :  Lucas  in  euangelio  exiit  edictum  ab  Auguste  cesare,  ut  describeretur 
liuniucrsus  orbis.  L'empereur  tient  cet  édit.  et  le  donne  aux  trois  géomètres  :  Archodoxus  (Zeoo- 
dozus),  Theodocus,  Policlinis  Polyclitcs).  L'édit.  porte  :Ite  in  orbem  nninersum  et  de  omni  eius 
continentia,  referte  ad  senatnm  et  ad  istum  confirmandam  (extrait  de  la  cosmogr.  d'Eticns,  p.  S6, 
edit.  de  Gronove).  Le  sceau  suspendu  porte  :  Augusti  ces  arisimperatori,  autour  d'une  main  qni 
tient  un  sceptre.  Au  dessous  est  inscrit.  Tuz  ki  ce$t  estoire  ont,  ou  oyront,  ou  liront,  ou  ueront, 
prient  a  Ihesu  en  de  yce  de  Richard  de  llalding:ham  e  de  lafford  (lord,  seigneur],  ept  pite  (et  prieBt 
pour  ice)  kilat  fet  (qui  l'a  fait)  e  compassé,  ki  ioie  (joie)  en  cel  li  sere  donoe. 

(10)  Nous  en  avons  copié  deux  de  celles  qui  furent  publiées  par  Santarem. 

(ii)  La  figurine  pour  la  pharsale  de  Lucain,  indigne  le  septentrion  par  les  noms  de  denx  vents  : 
boreas  et  cl.  (claudit?)  aquilo  fortis.  (Voyez  ig.  ci-jointe.} 

(12)  Cette  image  que  nous  avons  placée  dans  notre  allas  réduite  i  moitié  à  côté  du  fragment  de 
Haldingham,  se  trouve  dans  un  codfrqui  contient  plusieurs  articles  de  différents  genres,  derécritiire 
du  XII*  siècle.  L'image  n'appartient  à  aucun  de  ces  articles,  elle  doit  être  considérée  comme  isolée, 
volante.  H.  Santarem  la  donne  dans  son  grand  ouvrage  qui  est  tous  presse.  Je  no  sais  pas  à  qu'elle 
époque  ni  à  qui  il  pense  l'attribuer 

(13)  Ce  planisph.  islandais  "est  publié  dans  les  antiq.  amer.  Hafaïao  I8S7,  p.  S7S.  (V.  fig.  ci-jointe.) 


8  GÉOGR.    LATINB,   i350-i410. 

Cecco  (Francesco)  Stabili  d'Ascoli,  naquit  vers  1257;  il  se  livra  plus 
particulièrement  à  l*astrologie,  introduite  depuis  longtemps  d'orient  en 
Europe  et  il  la  professa  publiquement  à  Bologne,  depuis  1522  jusqu'à 
1525.  Dénoncé  au  tribunal  de  Tinquisition  pour  avoir  mal  et  irrégu- 
lièrement parlé  de  la  foi  catbolique,  il  fut  condamné  à  une  pénitence 
publique  et  privé  de  ses  titres  et  de  tous  ses  livres  d'astrologie. 
Le  cbagrin  qu'il  ressentit  de  ce  jugement ,  l'engagea  à  quitter  Bolo- 
gne, pour  se  rendre  à  Florence  où  la  mort  l'attendait.  Traduit  de 
nouveau  devant  l'inquisition ,  il  fut  condamné  au  feu  comme  héréti- 
que et  brûlé  vif  en  1527.  Il  avait  écrit ,  vers  la  fin  du  xiii*  siècle ,  un 
commentaire  sur  la  sphère  de  Sacrobosco  et  ce  livre  contribua  à  sa 
condamnation  (i4). 

Cet  ouvrage  est  accompagné  d'une  petite  image  (m  58  de  notre 
allas),  qui  prouve  les  progrès  des  idées  géographiques  sous  l'influence 
des  connaissances  astronomiques  et  de  la  vue  des  caries  arabes  (is). 
Le  globe  terrestre  y  est  divisé  en  zones  habitables  et  inhabitables. 
L'habitable  y  est  placé  sur  le  quart  du  globe ,  étendu  le  long  de  toute 
la  moitié  de  son  hémisphère.  Elle  est  donc  oblongue  (de  180  degrés)  ; 
le  méridien  de  Jérusalem  la  divise  en  deux  portions  égales.  L'Europe 
et  l'Afrique  sont  séparées  entre  elles  par  la  mer  méditerranée  ,  et  de 
l'Asie  par  le  Tanaïs  et  le  Nil;  dans  le  continent  de  l'Asie  pénètrent 
trois  mers  :  la  mer  Caspienne ,  la  mer  indienne  (rouge  et  persique)  et 
une  de  l'océan  oriental.  Toute  la  figure ,  contrairement  à  l'habitude 
antérieure,  est  tournée,  à  l'iniiiation  des  arabes,  le  nord  en  bas,  le  sud 
en  haut.  Cette  déviation  de  la  méthode  usitée,  en  apparence  insigni- 
fiante, s'explique  de  la  manière  très  grave,  par  l'influence  qu'exer- 
cèrent à  différentes  époques,  sur  les  connaissances  géographiques  des 
latins,  la  géographie  arabe  et  la  géographie  ptoléméenne.  En  ce  cas,  il 
sçrait  difficile  d'admettre  qu'une  description  eût  insinué  à  Cecco  une 
semblable  pose.  N'était-ce  pas  plutôt  la  vue  d'une  carte.  On  pourrait 
dire  que  c'est  le  mode  rogérien  qui  se  maintint  jusqu'à  Cecco ,  et 
pénétra  facilement  en  Islande.  Toutefois  c'est  de  l'arabe. 

Mais  en  observant  la  petite  figurine  de  Cecco ,  on  voit  que  l'habita- 
ble n'est  pas  configuré  sur  la  figure  de  la  carte  rogérienne  ou  de 
quelque  autre  arabe  de  ces  temps  reculés,  mais  évidemment  sur  la 
figure  des  cartes  postérieures,  où  l'Afrique  ne  s'étendait  plus  tout  le 
long  au  sud  de  l'habitable.  Cecco,  en  ébauchant  sa  petite  image,  a  donc 
eu  devant  les  yeux  une  carte  arabe  assez  récente  du  xiii'  siècle ,  et  il 
signala  à  la  fin  de  ce  siècle  l'avancement  des  idées  géographiques, 
élaborées  dans  l'obscurité  de  notre  ignorance. 

Quand  la  géographie  fesait  le  progrès  obscur  pour  nous,  on  ne 
peut  douter  que  c'était  la  cartographie  nautique  qui  avait  le  plus 
grand  succès.  Les  Majorquins  et  les  Catalans  se  servaient  de  cartes  de 
marear  bien  avant  1286  (fenix  del  as  maravillas  de  l'orbe,  Raymundi 
Lullii).  Les  marins  de  l'Italie  ne  pouvaient  se  passer  de  cartes  sem- 
blables :  elles  furent  dessinées  et  perfectionnées.  Lorsque  la  boussole 
était  chez  eux  en  plein  usage  au  commencement  du  xui'  siècle ,  elle 

(14)  Fvt  imprimé  pour  la  première  fois  à  Bàle  1485,  réimprimé  avec  les  commentaires  de  Françoic 
de  Capoue  et  de  Jeao  LefebTre  d'EtapIes.  Venise  i449, 1889,  in-folio. 

(15)  La  figure  de  cette  image  est  copiée  de  la  publication  de  Santarem. 


?iAV|GXT10I!<,   107.  9 

engendra  la  méthode  de  fabriquer  ces  cartes  (le).  Mais  celles-ci  sont 
délruiles  ou  du  moins  n'ont  pas  élé  retrouvées.  Je  ne  veu%  pas  afitici- 
per  sur  ces  indices  très^positifs ,  D*ayant  pas  de  monuments.  Le$ 
monuments  postérieurs  expliqueront  mieux  le  succès  des  cosmogra- 
phes ou  cartographes  et  de  la  marine,  qui  prenait  chaque  jour  des 
dimensions  plus  larges  et  plus  audacieuses. 

107.  La  navigation  s'étant  développée  par  toute  la  mer  méditerra* 
née,  s'élançait  de  cet  enclos  sur  les  eaux  du  vaste  océan  atlantique» 
Des  tempêtes  poussaient  souvent  les  navigateurs  égarés  sur  des  points 
inconnus  et  les  appelaient  à  des  reconnaissances  et  à  des  expéditions 
hardies.  Le  commerce  sur  les  côtes  occidentales  de  TAfrique  et  les 
notions  acquises  sur  Texistence  de  quelques  îles  de  Tocéan ,  détermi- 
nèrent la  république  de  Gênes  à  y  envoyer,  vers  Tannée  1275,  une 
flotte  et  à  prendre  possession  d'une  île,  qui  reçut  le  nom  de  Lanceloie 
du  nom  de  Lancelot  Malocello  (Malus-aucellus,  Maloisel,  Marucelli), 
Génois  d'origine  française ,  qui  bâtit  dans  cette  île  un  château  fort 
appelé  Maloxelo,  Maroxelo  (it). 

Ce  succès  encouragea  les  Génois  à  une  expédition  qui  avait  pour 
but  de  pénétrer  jusqu'à  l'Inde  en  cinglant  autour  de  l'Afrique.  En 
1285,  Thedisio  d'Oria  et  Hugolin  di  Vivaldo ,  avec  Guy,  son  frère  et 
quelques  autres,  tentèrent  ce  voyage  nouveau  et  extraordinaire  :  ils 
armèrent  à  leurs  frais  deux  galères  bien  équipées^  emmenèrent  avec 
eux  deux  moines  franciscains  et  se  mirent  ainsi  en  route  pour  l'Inde. 
Qu'elle  a  été  l'issue  de  leur  entreprise?  on  n'en  a  pas  eu  de  nou* 
velles  (is). 

(16'i  Les  soins  de  DunnboMt  ont  cxhnmô  les  dates  assez  aacionnes  de  Tiisage  de  la  bonssole  cbes 
les  marins  de  la  mer  inéditcrraoée.  —  Jacq  de  Vitri,  entre  1495  et  iil8,  dans  sou  liistoria  bierosoly* 

mitana  dit  :  adamas  iu  ladia  reperitar ferrum  occulta  quadam  natura  ad  se  trahit;  acus  ferrca« 

postquam  adamantein  couiligerit,  ad  steilam  septentriuoalem,  quac  votnt  a\is  firnaanienti  aliis 
vergentibus,  non  movctur,  scmper  convertitur  :  unde,  valde  aecessarins  est  navi^antibus  in  inanH 
(cap.  89,  edit.  Bongars  p.  1106).  Vincent  de  Beauvais,  mort  en  iiSG,  n'a  pas  négligé  d^annoter  cette 
vertu  de  l'aiguille  :  angulus  quidam  eius,  cui  virtus  est  attrahendi  ferrum,  est  ad  zaron,  id  estsep- 

tentrionera  (r^^"^*^'darom,  est  8«d);  angulns  autem  oppositns  ad  afou,  id  est,  meridiem  (l^OV 
Zafon  est  nord,  Peritsol,  cap.  I,  p.  10,  etc.).  Itaqne  proprietatem  habct  magnes ,  quod  si  appro- 
ximes  ei  ferrum  ad  angulum  Spsius  qui  zaron,  id  est  septentrionem  rcspicit,  ad  s(*ptcntrionem  se 
convertit.  Si  vero  ad  angulnm  oppositum  ferrum  admoveris,  ad  afon,  id  est  meridiem  se  movebit 
(Specul.  naturale,  t.  U,  lib.  IX,  19).  Son  contemporain ,  Albert  le  grand,  mort  i28i,  n'a  pas  oublié 
d'en  faire  mention  vers  1S50  :  angtilus  magnetis  cujnsdam  c.<tt ,  cuins  virtus  apprebendi  ferrnm  est  ad 
xoron,  boc  est  septcntrionalem  et  boe  utunturnautae.  Angulus  vero  aliuK  magnetis,  illi  oppositus, 
trahit  ad  apbron,  id  est  polura  meridionatera.  Et  si  approximes  ferrum  versus  angulum  zoron, 
convertit  se  fermm  ad  zoron;  et  si  ad  oppositum  angulum  approximes,  convertit  se  ad  aphroil 
(opéra,  Lugd.  1654,  t.  H,  p.  M3).  L'usage  de  la  boussole  chez  les  marins  n'est  pas  une  chose  nouvelle 
pour  ces  écrivains  et  Albert  le  grand  a  puisé  sa  relation  sur  l'aimant ,  dans  un  ouvrage  apocrjrpbe  de 
mineralibns,  attribué  à  Aristote;  invention  antérieure,  probablement  hébraïque  d'un  joif. 

(17)  Eo  si  quidem,  patrara  memoria,  Januensium  armata  classis  penetravit ,  dit  Petrar(^ae  (dcvita 
solitaria,  U,  11).  Toute  une  génération  avant  sa  naissance  qui  arriva  en  1S04;  or,  l'expédition  eut 
lieu  vers  l'année  1*275.  —  Cette  expédition  explique  pourq^uoi  les  cartes  postérieures  blasonnent  de 
Gènes  l'ile  Lansaroto  :  d'argent  à  la  croix  de  gueules  (pavillon  de  S.  Geoi^cs)  :  la  carte  raédicécnne 
de  1551,  catalane  de  1575,  etc.  Elles  indiquent  au  sud-est  de  Lansaroto  le  fort  deMaloxello, 
Marogello,  et  celle  de  1455  faite  per  le  génois  Barthélémy  Pareto  inscrit  :  Lansaroto  MaroxcUo 
Jauuensis.  —  Les  relations  postérieures  relèvent  en  1409  l'existence  du  castel  que  Lancelot  Maloesei 
avait  jadis  fait  construire  (conquestes  des  Canaries,  SS,  33)  et  les  nobiKères  génois  disent  :  li  Marru- 
celli,  nobili  etautichi  cittadini  genovesi,  hanno  origine  dt  Francia  [D'Avezac,  notice  des  découvcrlet 
dans  l'océan  atlantique,  chap.  8,  p.  •47-53). 

(18)  C'est  ainsi  que  s'est  exprimé  le  contemporain  Cccco  d'Ascoli ,  né  en  13S7,  mort  en  ISiT.  ~ 
Et  questo  anno  Tbcdesio  d'Oria  et  Ugoline  di  Vivaldo,  con  un  suo  fratello  et  alquanti  altri  tentorono 
di  fare  un  viaggio  novo  et  inusitato,  cioë  di  volere  andare  in  India  verso  poncnte,  et  armorono  due 
gallere  molto  ben  ad  ordine,  et  pigliorono  con  loro  doi  frati  di  S.  Franceseo,  et  nsciti  fora  del  strettp 
di  Gibeltnre,  navigarono  verso  llDdia,  et  non  se  B*è  mai  hftvnto  neva  alcana.  Et  di  ^esta  mmjga- 

II.  5 


iO  GÉOGB.   LàTIKBf   I3S0-141O. 

Ces  parages  océaniques  furent  fréquentés  par  toutes  sortes  de  navi- 
res ;  par  ceux  de  Mayorque,  de  Pise,  de  Gènes,  de  Bruges,  de  Séville. 
Mais  c'étaient  ceux  de  l'Espagne  qui  devaient  être  les  plus  nombreux , 
parce  qu'on  donnait  à  toute  la  plage  jusqu'au  cap  Cantin,  le  nom  d'Es- 
pagnole. Arzilla,  Sale,  Niffe,  Zamuro,  Zafli,  sont  piagge  di  Spagna  (lo). 
Mais  les  Italiens  aussi ,  et  spécialement  les  Génois ,  y  avaient  leur 
part,  parce  qu'on  voit  presque  toutes  les  îles,  tant  les  Canaries,  que 
celles  qui  sont  disséminées  vers  le  nord,  portant  des  dénominations 
italiennes  (^%),  Les  navires  français  n'étaient  pas  tout  à  fait  étranger 
à  ces  parages,  car  (entre  1526  et  155i)  une  tempête  les  jetta  sur  la 
grande  Canarie  (<i).  En  même  temps  le  Portugal  méditait  à  y  prendre 
des  possessions. 

Le  Portugal  avait  une  marine  qui  lui  était  indispensable,  dans  sa 
position  maritime ,  pour  défendre  ses  côtes,  participer  aux  croisades, 
combattre  ses  ennemis,  et  pour  les  besoins  d'un  commerce  assez 
étendu.  Mais  il  ne  lui  répugnait  pas  de  chercher  des  étrangers  habiles. 
Le  roi  Denis  appela  de  Gènes,  le  génois  Emmanuel  Pezagno,  et  lui 
accorda  par  un  traité  passé  en  1517  la  charge  héréditaire  d'amiral,  h 
condition  de  fournir  et  de  tenir  toujours  au  complet  un  état-major  de 
vingt  officiers  génois  pour  le  commandement  et  la  conduite  de  ses 
galères  (22).  Quand  le  roi  Alfonse  IV  conçut  le  projet  de  s'emparer 
des  Canaries,  il  équipa  en  15 il,  deux  navires  et  une  barque  chargées 
de  provisions,  et  en  confia  la  conduite  atix  marins  florentins,  génois, 
castillans  et  autres  d'Espagne.  Cette  expédition,  sous  la  direction  du 
génois  Nieoloso  di  Aecco  et  du  florentin  Angelino  del  Tegghia  dei 

tione  fa  mentînne  Cicco  (rA«coli,  nel  comento  délia  speia  (Âgostino  Giustioiano,  casligatissim  i 
aanali  di  GeBovo,  UI,  fol.  IH  verto).  —  La  «lèine  note  rar  Tedisco  Auria  et  Ugolino  Vivaldo,  répète 
Folîeta  :  aaorum  boinintim  qai  fueruat  casiifi,  qurqve  vastorum  coDsiiiorum  exitiis,  nulla  ad  nos 
unquan  uoia  pervenit  (Uberti  Folietae,  historiae  GeoneDsism  libri,  V,  fol.  flO  verso).  -  L'autre 
cootemporaiiiderexpédittoD,  Pierre  d'Apono,  mort  en  -tSIS,  en  fit  aussi  mention  :  dictum  est  etiam 
Arym  civitalem  Iddiae  existere.  Quidam  tamen  aiuuthiAciHvc,  aut  econverso,  non  posse  transitum 
compleri....  Uude  et  parum  aute  ida  tempora  Janueaces  duas  paravere,  omnibus  necessariis 
munitas  galeas;  q«i  per  Gades  Hercnlis  Iraaâere.  Qnid  antem  de  illis  contigerit  jam  spatio  fere 
trigesimo  igaoratur  aoao  (Pelri  d^Abana,  coaciliator  controversiarnm  quae  inter  pbilosopbos  et 
medicos  versaatiir,  differentia  C7,  fol.  102).  —  Presque  deux  siècles  plus  tard,  Antonio  Usodimare, 
explorant  les  parafes  de  l'océan,  y  rencontra  en  1i55,  un  Italien  qui  se  disait  unique  rejeton  de 
l'ancienne  expédition  de  Vivaldo  :  reperi  ibidem  unum  de  natione  nostro  ex  illis  galeae  credo 
Vivalde,  qui  se  amiserunt  snnt  anni  470;  qui  mihi  dixit  et  sic  me  affirmât  iste  secretarius,  Qon 
restabat  ex  isto  semiAe,  salvo  ^)S0,  et  alius  (lettre  de  Lisbone  d'Ant.  Usodimare,  datée  1S  décem- 
bre 4458,  dans  les  anuali  di  geografia  et  di  statistica,  t.  H,  p.  287).  C'est  probablement  à  la  suite  de 
ce  rencontre  qu'Usodimare  a  su  suppléer  TignoraBce  des  contemporains.  Anno  domini  428S  recesse- 
rnnt  de  ciuitate  Januae  duae  galleae  patrouiss^e  per  Hugolinum  et  Guidum  de  Vivaldis  fratrcs, 
voleutcs  ire  in  levanlom,  ad  parles  Indiarum.  Quae  galleae  mullum  navigaverunt  :  sed  quando 
fucrunt  dictae  galleae  in  hoc  mari  de  Gbinoia,  ana  earum  se  reperit  infundo  sicco  per  modum  quod 
non  poterat  ire  necauteaavigare;alia  vero  Bavigawit  et  trausivitper  istud  mare  usquedum  veairent 
ad  civitatcm  unam  Ethiopiae,  aomiae  Menam  :  capli  fuerunt  et  detenti  ab  illis  de  dicta  clvitate  qui 
sunt  christiani  de  Ethiopia  submissi  presbytero  Joaaui  ut  supra.  Civitas  ipsa  est  ad  raarinam, 
prope  flumen  Gion.  Praedicli  f«eruut  taliter  detenti,  quod  nemo  illorum  a  partibus  illis  uaquam 
redivit.  Quae  predicta  narravera^ntoaiotus  Ususmaris,  nobilis  januen«is  (aanali  de  geogr.  edi  statist. 
t.  n,  p.  290,  291).  —  Voyez  d^Avezac,  notice  de  découvertes  dans  la  mer  atlanL  ckap.  -i,  p.  22-28.  — 
Je  [)cnse  qu'on  peut  se  contester  de  Tignorauce  des  cuutcmporaius,  et  de  passer  OMlre  sur  cette 
ingénieuse  amplification  postérievre. 

(49)  Pegoletti,  écrivain  de  l'année  1340,  pratica  délia  mercatura  ;  4eUa  décima  t.  UI,  p.  449,  240, 
SS6.  284,  276-281). 

(20)  La  carte  catalane  de  4578  le  pro«ve,  Hadera  (de  baute  futaye)  est  en  italien  Legname 
(de  haute  fufcaye). 


(24)  Georges  Glas,  history  of  the  Canary  islaad,  p.  1. 
122)  - 


(22)  Coatrato  coumiser  Manuel  Peçanho,  aos  additamento*  a  memorla  sobre  m  vcrdadeiras  epocas 
navegaçoes  e  descobrimeatos  no  oceaao  atlaatico,  por  J.  J.  da  Costa  de  Macedo.  —  Les  amiraux 
Peçanho  s'étieignirent  dans  rarrière-arrière-petit-fils  de  Mttiuel,  vers  1480. 


NAVIGATION,   107.  il 

Gorbizzi,  retourua  la  même  année  en  Portugal,  emmenant  quatre 
indigènes  et  différentes  productions  insulaires  (is). 

L'expédition  était  manquée ,  mais  Âlfonse  IV  ne  renonça  point  à  son 
projet,  et  lorsque  le  pape  Clément  YI  donna,  en  1344,  Finvestiture 
des  îles  Canaries,  à  titre  de  principauté  héréditaire,  à  Louis  d'Espa- 
gne (arrière  petit-fils  d'Alfouse  le  sage  et  de  saint  Louis),  et  le  recom- 
manda par  ses  lettres,  aux  rois  de  France,  de  Sicile,  d'Aragon,  de 
Casliile  et  de  Portugal,  au  dauphin  de  Viennois  et  au  doge  de  Gênes, 
le  roi  de  Portugal,  le  dit  Alfonse  IV,  déclara  dans  sa  réponse  du  12 
février  1545,  que  voyant  ces  fies  plus  voisines  de  ses  états  que  de 
ceux  d'aucun  autre  prince,  il  pensait  qu'elles  pourraient  être  plus 
convenablement  subjuguées  par  lui-même;  qu'en  effet,  dans  l'in- 
tention de  mettre  à  exécution  son  dessein,  il  avait  déjà  envoyé 
quelques  navires  pour  examiner  le  pays,  et  que  la  conquête  n'en 
avait  été  retardée  que  par  la  guerre  quMl  était  obligé  de  soutenir 
contre  l'Espagne  et  les  Sarrazins  (i4).  La  conquête  différée  n'eut  pas 
lieu;  les  Espagnols  et  les  Génois  ne  discontinuaient  point  de  visiter 
toutes  les  îles  bien  connues  (Canaries  et  Azores). 

Les  relations  assez  fréquentes  qui  s'étaient  établies  avec  les  Canaries 
exposaient  les  rivages  de  l'Afrique  au  delà  du  cap  Cantin  jusqu'au  cap 
Boïador  aux  visites  des  navigateurs  :  mais  les  côtes  ultérieures  étaient 
moins  accessibles.  On  sait  qu'au  delà  du  cap  existait  une  petite  anse  de 
Boïador,  refuge  incertain  pour  ceux  qui  tenteraient  de  s'aventurer  vers 
le  sud  ;  on  apprit  l'existence  d'un  fleuve  d'or.  L'insuccès  de  l'expédition 
génoise  n'effrayait  point  ceux  qui  étaient  disposés  à  faire  des  investiga- 
tions. Le  mayorquin  don  Jacq  Ferer  partit  en  effet  le  jour  de  S.  Lorens 
qui  est  le  10  d'août  dans  l'année  1546,  pour  aller  au  fleuve  d'or,  et  oo 
ne  savait  pas  ce  qu'il  est  devenu  (ss). 

(S3)  Annol34i,  a  mercatoribns  floreDtinis  apnd  SobUiam  Ilispanlae  nlterlorfs  cfiiîtatcm  moran- 
tibus,  Ftorentiae  litterae  allatac  stiot...  io  quibus...  continentur.  Aiunt  quidem  primo  die  menso 
Julii  huius  anoi,  duas  naves,  impositis  in  eisdem  a  rege  Porlugalli  opporlanis  ad  transfretandam 
commeatibus,  et  cum  iis  oaTicnla  iioa  munita  :  homines  florentinorum ,  januensium  et  bispanorum 
castrensium,  etatiorum  bispanorum,  à  Lisbona  ciuitale  datis  velis  in  allum  ablisso,  ferentes  insuper 
equoset  arma  et  macbinamenta  bellorum  Taria  ad  ciuitates  et  castra  capienda,  quacrentes  ad  eas 
Insulas  quas  vulgo  rcpertas  dicimus  et  bad  lias  faventc  vento  secundo  post  diem  pervenisse  omnes  : 
et  demum  mensc  novembris  ad  propria  remcasse,  secun»  baec  pariter  aiïerentes  :  primo  quidem 
quatuor  bomincs  ex  incolis  illarum  insularum  dnxère;  pelles  praeterea  pturimas  bircorum  atquo 
caprarum,  scpuni,  oleum  piscis,  et  pbocarum  exuvias,  ligna  mbra  tingentia  fere  ut  vorziuum  ; 
Insuper  et  arbonim  corticcs  ae^uo  modo  in  rubrum  lingentes,  sic  et  tcrram  rubram,  et  hujusmodi 
(de  Canaria  et  de  insulis  reliquis  ultra  Ilispaniam  in  oceano  uouitcr  reperlis,  dans  les  :  monument! 
d'un  ms.  autografo  di  messer  Giov.  Boccaci  de  Certaldo  trovati  cd  ilbislrati  da  Sebastiano  Cianipi, 
pp.  S3,  54).  —  Verum  Niccolosus  de  Recco  jauuensis  alter  ex  ducibus  navium  illarum,  rogatus 
aicbat  a  Sibitia  civilatc  usque  ad  pracdictas  insulas  esse  millîa  passum  fere  nongenta  (ibid.  monu* 
menti,  p.  54).  Le  nom  de  l'autre  capitaine  de  l'expédition,  est  indique  dans  le  manuscrit  de  Boccacio 
par  une  note  marginale  :  Florentious  qui|cnmhis  nauibus  praofuit  est  Angetinus  del  Teggliia  de 
Corbizzis,  consobrinus  ntiorum  Gberardini  Giannis  (ibid.  p.  85).  D'Avezac,  notice  .  .  c.  7. 

(24)  Attendentes  quod  praediclae  insulae  nobis  pins  quam  alicui  principi  propinquiores  existaot, 
quodqne  pcrnos  possenl commodiussubjugariad  boc oculos  diruxerimus  nostrae  mentis etcogitatum 
nostrum  jam  ad  elTectum  perducere  cupientes,  gentes  nostras  et  naves  aliquas  illuc  misimus  ad 
illius  patriac  conditionem  cxptorandum  :  qaae  ad  dictas  insulas  accedentes,  tam  bomines  quam 
animalia  et  res  alias  perviolentiam  occuparunt  et  ad  nostra  régna  cum  ingenti  gaudio  apportaruut.... 
Verum  cum  ad  praefatas  insulas  expngnandas  armatam  nostram  milterc  curaremus,  cum  mililum  et 
pcditum  multitudine  copiosa,  guerra  primum  intcr  nos  et  regem  Castellae,  diende  inter  nos  et  reges 
saracenos  suborta,  nostrum  propositum  iropedivit  (littene  Alf.  regiii,  in  annal,  écoles,  t.  XVI, 
edit.  1652,  anu.  4344,  n*  48). 

(25)  La  carte  catalane  de  137S  annota  le  port  de  Bnietdcrc  au  delà  du  cap ,  et  trace  vaguement  les 
rivages  au  delà  de 
trouve  beaucoup 
dénonça  l'cxpédi 


12  GÉOGIt.   LATINE,   ISS0-14Î0. 

Qiiei<|aesatitiëes{^lu8tard,  d'autres  expéditioiis  eurent  un  meilleur 
succès.  Les  Français  de  la  Normandie  où  les  Normands,  équipèrent  à 
Dieppe  deux  navires;  ils  partirent  au  mois  de  novembre  1564,  et 
dépassant  les  Canaries,  arrivèrent  vers  la  Noél  au  cap  Yert,  sous  lequel 
ils  mouillèrent  dans  une  baie  qui  depuis  ce  temps  a  conservé  le  nom 
de  baie  de  France.  Après  avoir  recueilli  de  Tivoire,  ils  coniinuèrent 
d^avancer  au  sud,  toucbèrent  à  Boulombel  (Sierra  leone),  ensuite  au 
cap  de  Monte  et  s'arrêtèrent  enfin  à  Tembouchure  d'une  petite  rivière 
près  d'un  village,  qu'ils  nommèrent  Petit-Dieppe;  ils  opérèrent  leur 
retour  à  Dieppe  au  mois  de  mai  1565. 

Au  mois  de  septembre  suivant,  1566,  des  marchands  de  Rouen  s'as- 
socièrent avec  ceux  de  Dieppe,  et  il  fut  armé  quatre  navires  pour 
renouer  les  relations  commerciales  avec  les  nègres.  Deux  des  navires 
iirent  leur  traite  au  Petit-Dieppe;  un  troisième  alla  opérer  son  charge- 
ment en  malaguette,  à  l'embouchure  d'une  rivière  plus  éloignée, 
devant  un  village  auquel  ils  donnèrent  le  nom  de  Paris  ;  le  quatrième 
navire  poussa  plus  loin  encore  et  se  procura  une  grande  quantité 
d'ivoire  et  quelque  peu  d'or  chez  des  peuples  moins  sociables. 

Ces  expéditions  furent  continuées  tous  les  ans  par  les  armateurs  de 
Rouen  et  de  Dieppe,  qui  établirent  ainsi  dés  comptoirs  au  cap  Yert,  à 
Boulombel ,  au  cap  de  Monte ,  au  Petit-Dieppe  et  à  Paris. 

Ce  n'est  qu'en  1580,  qu'un  navire  expédié  de  nouveau  de  Rouen 
s'avança  jusqu'au  lieu  d'où  l'on  a  d'abord  rapporté  de  l'or;  il  y  arriva 
en  décembre,  trouva  les  habitants  mieux  disposés  et  revint  à  Dieppe, 
après  un  voyage  de  neuf  mois. 

L'année  suivante,  1581,  le  SS8  septembre,  il  partit  de  Dieppe  trois 
navires.  L'un  s'arrêta  au  point  où  l'on  avait  déjà  traité,  et  qu'on 
appelait  la  Mine,  à  cause  de  la  grande  quantité  d'or  qu'on  y  avait 
recueillie;  l'autre  alla  jusqu'à  Mouré;  le  troisième  jusqu'à  Akara.  On 
envoya  de  nouveau  trois  navires  en  1585,  deux  étaient  chargés  de 
matériaux  de  construction  pour  bâtir  à  Mina  un  comptoir,  où  l'on  laissa 
dix  à  douze  personnes;  le  troisième,  contrarié  dans  ses  opérations  par 
les  marées,  revint  avant  les  autres  et  fut  réexpédié,  pour  ravitailler 
la  Mina. 

Cet  établissement  prospéra  jusqu'en  1410.  A  cette  époque  désas- 
treuse pour  la  France,  les  expéditions  se  ralentirent,  puis  cessèrent 
tout  à  fait  (te). 

delor,  algorn  de  sen  Lorens,  qui  es  a  x  de  agost,  e  fo  en  lany  ■cccxlvi.  —  Cette  expédition  est  con- 
firmée par  une  autre  carie  contemporaine  du  catalan  Macla  de  Viltadestes  de  Tannée  14S7  (Tastu  sur 
la  carte  catalane,  notices  et  extraits,  t.  XIV}.  —  Un  manuscrit  de  la  bibl.  d*Usodimare,  qui  appartenait 
autrefois  aox  archives  secrètes  de  Gènes ,  répète  cette  mention  avec  quelques  variantes  et  expli- 
cations. Recessit  de  ciuîtate  Haiorigarum  galleatia  nna  Joannis  Ferne  catalan!,  in  festo  sancti 
Laurentii ,  quod  est  in  décima  oie  mensis  augusti  a.  d.  4346,  causa  eundi  ad  riu  Auri,  et  de  ipsa 
galleatia  nunquam  postea  aliquld  novum  babuerunt.  Istud  flumen  de  longitudine  vocatur  Vedamet 

(C^)^   et  LL*  fleuve  plein]  ;  simililcr  vocatur  riu  Auri,  quia  in  eo  colligitar  aumm  depaiola- 

(G.  Graeberg,  annali  di  geograkfia  edi  statistica,  t.  U,  p.  190).  Voyei  D'Avezac,  notice,  chap.  4,  p.  Si; 
BIalte-Brun,XIX,  p.  531. 

(t6)  Un  chirurgien  allemand  Samuel  Braun  de  Basle,  pendant  le  séjour  de  trois  années,  qu'il  flt  à 
la  côte  d'or,  de  1617  à  1630,  au  fort  Nassau,  apprit  par  les  récits  des  indigènes  que  les  Français 
avaient  jadis  un  établissement  en  Guinée.  In  dieser  Festung  iNassau  zu  More),  wie  auch  zu  Accara, 
bab  ich  Lcuth  gesebon,  welclie  ISOjahralt  worden.  Die  babcn  mir  gesacbt  :  dass  die  Mina,  sohon 
vor  et  lichen  Jabren,  von  don  Frantzoscn,  so  dahin  gehandiet ,  seye  angefangen  vrorden.  Und  die 
viqW  aile  jabr  3  monat  iang,  ein  solch  Rcgenwetlcr  mit  hartem  Wind  [vrelchen  wtr  Travada  heissen 


NAVIGATION,  i07i  J5 

La  navigation  vénitienne  n^offre  pas  de  dates  aussi  positives  :  mais 
il  n'est  pas  douteux  qu'elle  visitait  les  mers  septentrionales.  Les  Génois, 
d'un  autre  côté,  dominant  sur  la  mer  noire,  établirent  leur  marine  sur 
la  mer  Caspienne  (27). 

La  marine  variée  sur  tant  de  mers,  animait  le  dessin  des  cartes  dans 

entstehet,  in  masscn  viel  Wahrcn  zuschandcn  wcrdeu,  habcn  sic  an  die  Einwohuer  bcgert,  dass  sie 
mogteu  ein  Magasin  oder  Packhauss  bawen.  IVelches  inen  auch  die  Schwaitzen,  so  mit  inen  wol 
xufrieden  sind,  gern  verwilliget  baben.  Haben  also  ein  ximiich  gross  Packbaiiss  geoiacbl,  uud  die 
Wahren  aaf  das  Land  gebracbU  ÂIso  einen  guten  bandel  bekommen,  besonders  weil  damalen  die 
Einwohner  dess  Lands,  das  Gold ,  mit  gewogen,  sonder  beym  Augenmass  verbandiet.  Da  iiun  deo 
Portugaleaern  kund  getban  wordeo,  das»  die  Frantzosen  gnten  bandel  bey  den  Schiirartzen  bekom- 
men,  haben  sie  dieselbigen  obnversehens  iiberfallen,  und  dassPackbauss  eyngenommeu....  Habeo 
also  endlicb  auss  diesem  RaUffliauss ,  eine  Capell  gemacht,  \relcbes  jezt  garfest  ist  (Fiinff  Scbiffàrten, 
Sam.  Brauns,  p.  27,  publiés  à  Frankfort  en  i68i,  par  les  soins  de  Jean  Théodore  de  Bry).  —  Le  sou- 
-venir  de  cet  ancien  établissement  se  conservait  en  même  temps  en  Normandie.  Le  père  George 
Foumier,  né  à  Caen  (1596,  mort  i6SS),  rapporte  ce  qui  suit  :  avant  que  les  Portugns  nous  eussent 
enlevé  la  Mine,  toulte  la  Guinée  était  remplie  de  nos  colonies,  qui  portaient  le  nom  des  villes  de 
France  dont  elles  estoient  sorties  (hydrographie,  p.  202,  de  l'édition  16-i3;  et  p.  iS4,  de  Tédit.  4667). 
—  En  attendant,  sur  le  lieu  même,  les  nouveaux  possesseurs  de  la  Mina,  les  Hollindais,  qui  savaient 
qu'un  magasin  7  avait  été  bâti  par  les  Portugais  en  Tannée  448i,  distinguèrent  les  murailles  et  les 
constructions  du  fort,  antérieurement  érigées  par  des  Français  :  dit  kasteel  (van  de  Mijn)  wort 
geoordeelt  een  zeer  oudt  gebonw  te  zijn,  gelijk  zulx  de  verschillende  jaer-aentekeninge  in  ver- 
scheide  plaetsen  aenwijzen.  Aen  een  vervallen  batery,  byde  onzen  vooreenige  jaren  weer  opgemaekt, 
en  de  Franse  batery  genoemt  (ter  oorzake  bet  een  Fransch  gebouwscheen  en  de  Fransen ,  na  dcr 
inwoondercn  zeggen,  voor  de  komsle  der  Portugesen  daer  gehuistvest  waren},  vinden  d'  onzen  de 
zijfertallen  van't  jaer  dertien  bondert,  zonder  de  twee  volgende  letteren  te  kunnen  bekennen 
(Olivier  Dapper  (mort  en  1690^,  naukeurige  beschrijvinge  der  afrikaenscbe  gevrestcn,Arasterd.  4668, 
p.  439).  —  Le  voyage  de  D'Elbée  en  4669  et  4670,  confirme  cette  observation.  —  Ce  magasin  fran- 
çais transformé  en  église  et  fortifié  par  les  Portugais  gardait  encore  en  4667,  la  trace  de  ses  anciens 
maîtres  :  Villault  de  Bellefon^  qui  visita  alors  ces  parages,  l'atteste  de  la  manière  la  plus  précise  : 
les  Hollandais,  dit-il,  se  servent  aujourd'hui  pour  leurs  prèsches,  de  la  même  église  que  nous  v  bas- 
tismes...  dans  laquelle  on  renàarque  encore  1^  armes  de  France.  Ensuite  il  donne  le  récit  détaillé 
des  expéditions  dieppoises  exécutées  entre  436-i  et  4<i40,  que  nul  n'avait  publié   avant  lui, 

Suoique  on  sût  que  la  Guinée  était  remplie  de  colonies  françaises,  qui  portaient  le  nom  de  villes 
e  France,  avant  l'arrivée  des  Portugais.  Ce  récit  se  trouve  compris  dans  la  relation  qu'il  adressa  à 
Colbert  et  qu'il  fit  imprimer  en  4669  sous  le  titre  de  :  remirques  sur  les  costes  d'Afrique  et  notam- 
ment sur  la  costc  d'Or,  pour  justifier  que  les  Français  y  ont  esté  longtemps  auparavant  les  autres 
nations  (pp.  S,  iiO-429).  —  Ce  récit  est  répété  par  Estancelin ,  recherches  sur  les  voyages  et  décou- 
vertes des  navigateurs  Normands  en  Afrique,  pp.  7  à  4i;  et  par  Vitet,  histoire  des  anciennes  villes 
de  France,  t.  U,  pp.  4  à  36  ;  (D'Avezac  notice  des  découvertes  dans  l'océan  atlantique,  chap.  4  et  10, 
pp.  2-5;  73  84).  —  Comment  s'est  il  fait,  que  des  entreprises  aussi  suivies  de  1364  se  soient  éclipsées 
et  aient  été  ignorées  des  écrivains  jusqu'en  4617;  qu'elles  aient  échappé  à  la  connaissance  des 
marins  génois;  de  manière  qu'aucune  caile  n'a  su  rendre  compte  d'une  acquisition  aussi  immense 
pour  la  géographie;  que  le  baron  normand  Bethencourt  dans  son  entreprise  de  1402,  ignore  la  navi- 
gation dieppoise  et  n'en  fait  aucune  mention?  Il  faut  avouer  qu&  des  doutes  pénibles  chargent  ce 
mystère,  démesurément  agrandi ,  ou  complètement  controuvé.  On  voit  que  c'est  la  prise  en  posses- 
sion de  la  Mina  par  les  Hollandais,  qui  éveille  l'événement  oublié,  ou  l'inventé;  les  récits  des  nègres 
et  la  vue  des  murailles  pouvaient  contribuer  à  illusionner  l'imagination.  La  relation  de  Villault  de 
Bellefond,  il  faut  le  présumer,  a  du  être  puisée  dans  les  registres  de  l'amirauté  de  Dieppe,  détruits 
ensuite  dans  le  bombardement  de  4694.  Mais  le  relateur  n'indiquant  point  ses  sources,  a  pu  être 
séduit  par  quelque  invention  obscure,  qui  précédemment  avait  pu  surprendre  la  confiance  de 
Foumier.  Ces  doutes  ne  sauraient  être  levés  que  par  des  témoignages  contemporains.  Les  registres 
de  l'amirauté  sont  détruits,  mais  ce  n'est  point  là  exclusivement  qu'on  pourrait  trouver  des  témoi* 
gnages.  D'autres  archives  existent,  celles  de  Rouen ,  de  particuliers,  les  rouennais  participaient  aux 
expéditions  dieppoises  qui  étaient  des  expéditions  faites  par  des  particuliers.  Des  entreprises  qui 
durèrent  quarante  ans  ont  dû  laisser  quelques  indices  dans  les  chartes  de  commerce  :  or,  ivoire, 
malaguette,  Afrique,  Guinée,  ne  se  trouvaient-elles  pas  quelque  part  dans  les  documents  de  cette 
époque  ?  Le  moindre  témoignage  contomporain,  directe  ou  indirect,  confirmerait  tout  ce  qu'on  a 
narré  postérieurement.  Il  faut  espérer  qu'un  jour  toute  incertitude  sera  levé  à  cet  égard. 

(27)  Et  encore  voz  di  que  la  mer...  est  appelé  la  mer  de  Gleveshela  (Gheluchelan,  Geluchelan, 
Glebache,  Geluche,  Cechichelam,  Ghelukelar,  Geluchelaz,  Ghebachela,  Gielacbe,  Gelachalat  : 
variantes  du  nom  de  la  mer  Caspienne  ou  Ghilan  des  arabes  et  Khvalin^oïe  des  russes)  et  zire 
environ  sept  cent  milles,  et  est  longe  de  tous  mer,  ben  dose  jornee,  et  hi  met  de  denz  le  fia 
d'Eufrautes  et  maites  autres  fins,  et  est  tout  environee  de  montagne  et  de  terre  :  et  novelement  les 
marchians  de  Jcne,  najerent  por  cel  mer,  car  il  uont  mis  leingn  ou  il  najerent,  et  d'iluech  vint  la  soie 
ke  est  apelle  gelle  :  dit  dans  l'année  1296  Marco  Polo  (diap.  XXUI).  —  La  version  latine  de  ce  passage 
est  assez  infidèle  :  et  sciatis  quod  mare  Cechichelam,  girat  octingenta  miliaria,  et  est  longe  an  omni 
mare  bene  duodecim  dietas.  Et  intrant  ibi,  multa  magna  flumina,  inter  quae,  intrat  fluvius  Enfrates, 
unus  de  fluminibus  paradisi  deliciarnm.  Et  veniunt  mercatores  de  levante  et  navigant  per  lllnd 
mare  :  inde  vcnit  sericum  quod  vocatnr  ghelle  (cap.  15). 


16  GÊOOB.    LATI^ie,  1330-4410. 

La  mélhode  de  dresser  les  eartes  géographiques  par  la  rose  des 
vents  n'élait  pas  nouvelle.  Elle  était  connue  et  pratiquée  dans  Tanti- 
quité  (ss).  Lorsque  la  marine  des  Pisans,  des  Génois,  des  Vénitiens  et 
d'autres,  prit  de  la  croissance,  elle  ne  put  se  passer  de  cartes  géogra- 
phiques. Comme  la  carte  rogérienne  était  continentale ,  elle  ne  pou- 
vait satisfaire  les  pilotes.  Elle  a  pu  servir  de  base  pour  une  mappe- 
monde, mais  les  cartes  nautiques,  tant  spéciales  que  générales,  exigeant 
une  autre  opération,  toute  Tattenlion  des  cartographes  se  porta  vers  la 
direction  des  vents.  Pour  approvisionner  les  marins  de  cette  espèce  de 
cartes  ,  ils  organisèrent  dans  les  villes  maritimes  des  établissements 
géographiques ,  où  Ton  dessinait  toutes  sortes  de  cartes  :  ainsi  il  ne 
manquait  pas  de  portulans  ni  aux  pilotes  majorcains,  ni  aux  pilotes 
italiens  (ss). 

Les  arabes  avaient  leurs  images  figuratives  et  leurs  cartes  géographi- 
ques. De  même  les  latins  ayant  leurs  images  et  connaissant  les  métho- 
des de  la  construction  des  cartes  géographiques,  se  donnaient  la  peine 
de  les  dessiner  quand  le  besoin  s'en  faisait  sentir.  Chez  les  premiers 
c'étaient  les  astronomes,  les  géomètres,  les  savants  géograph.es  versés 
dans  les  mathématiques  qui  dressaient  les  cartes.  Chez  les  latins,  les 
dessinateurs  qui  savaient  manier  un  compas,  qui  comprenaient  les 
courses  des  marins  et  les  itinéraires  des  voyageurs  continentaux  com- 
posaient ces  cartes  et  avaient  à  cet  effet  des  ateliers.  Le  fait  est  avéré 
par  les  monuments  du  xiv*  siècle  qui  en  sont  sortis.  Mais  ils  possé- 
daient des  ateliers  avant  celle  époque,  et  bien  antérieurement  ils  se 
livraient  à  Tart  du  dessin ,  du  temps  de  Roger  et  même  ayant;  ils 
étaient  alors  probablemem  moins  nombreux  qu'au  xiv*  siècle,  et 
quelque  peu  moins  avancés  dans  leur  connaissance,  mais  ils  n'étaient 
point  privés  d'instruction  :  ils  élaboraient  lentement  ce  que  le  xiv« 
siècle  mit  au  jour;  quoique  l'on  ne  connaisse  pas  de  monument  de  leur 
connaissance  et  de  leur  capacité ,  rien  n'autorise  à  les  accuser  d'igno- 
rance. Supposant  même  qu'ils  négligaienl  tolalement  le  dessin  des 
caries  :  les  qualifier  d'ignorants  ce  serait  comme  si  un  savant  auteur 
taxait  d'ignorant  un  homme  instruit,  parce  qu'il  ne  serait  pas  auteur 
comme  lui  et  n'ambitionnerait  pas  la  célébrité  d'écrivain.  Les  latins 
étaient  assez  bons  dessinateurs,  assez  instruits  pour  dresser  et  dessiner 
les  cartes  géographiques ,  et  certainement  aussi  capables  que  les 
arabes.  Ils  différaient  seulement  par  la  méthode  et  par  les  bases  de 
leur  construction  (34). 

(Si)  La  coDStructiou  des  cartel  ^^frapliiques  basée*  «ur  la  rose  des  rents  était  conDue  dans  les 
temps  les  plus  anciens ,  et  pratiquée  par  les  navifatears.  Telle  fut  la  carie  de  Timosthénès.  Elle 
servit  de  modèle  à  Eratoslhénès,  qui  n'eut  qu'à  la  copier  pour  Tusage  de  l'école  alexandrine  (voyez 
mes  recherches  de  géogr.  ancienne  U,  30,  Si-37,  UI,  4a-S7,  Ubula  iS,  43,  34).  Cette  méthode  se 
perpétua  dans  la  pratique  des  navigateurs.  Reprise  au  moyen  âge  elle  porta  à  un  haut  degré  la 
perfection  de  la  composition  des  cartes  maritimes.  Elle  était  connue  chez  les  arabes  qui  dressaient 
les  roses  de  positions  relativement  à  Kaaba  (centre  sacré). 

(33)  Qu'on  ne  dise  pas  que  ce  que  J'avance  ici  est  hasardeux  :  nous  verrons  leur  produit. 

(34)  l\  n'arrive  que  tfop  souvent^  qa*aa  lieu  de  ehereher  et  d'apprécier  le  savoir  et  les  cornais^ 
sances  des  siècles  reculés,  on  sème  sur  eux  avec  profusion  ua  blâme  d'ignorance.  On  fesait  grand 
htaii  d'ignorance  de  rintérieur,  à  cause  qu'en  -1095  les  moines  ignorants  de  Tournay  ne  connais- 
saient pas  la  situation  de  l'abbaye  de  Ferneros.  OneompMnt  parnu  les  découvertes  géographiques 
l'apostolat  d'Otton  de  Bamberg  en  Poméranie,  connue  par  son  commerce,  dont  l'existence  fut 
ébranlée  par  l'influence  continuelle  des  Allemands  et  du  christianisme.  Les  marchands  de  Brème, 
en  il37,  furent  comparés  à  Cabrai,  parce  que  la  tempête  les  avait  jetés  s«r  les  c6iesd'un  pays  con«u, 
dont  ils  ignoraient  les  rivages  (Fergusson,  Sprengel*  Valfce^ini,  etc.). 


CARTES  NAUTIQUES,  109*  17 

109.  La  carie  rogéricnne  s^est  perdue,  mais  la  pratique  de  dessiner 
les  cartes  resta  debout  et  la  culture  de  la  géographie  fut  animée 
d'abord  exclusivement  chez  les  italiens.  Leur  marine  commerciale  et 
guerroyante  comprit  Futilité  et  la  nécessité  de  celte  connaissance. 
Elle  seule  stimulait  suifîsamment  cette  i^tude  et  lui  donnait  Timpulsion 
et  la  direction. 

La  carte  des  géographes  siciliens,  inspirée  par  la  science  ptolé^ 
mécnne  et  la  pratique  arabe ,  s*etaît  basée  sur  les  longitudes  et  les 
latitudes  géographiques,  explorées,  trouvées  ou  convenues,  sur  les 
bases  mathématiques  et  scientiliques.  Pour  les  pilotes  italiens,  cette 
parade  scientifique,  qui  décorait  le  continent,  devenait  superflue  et 
mcme  nuisible  ;  parce  qu'elle  indiquait  de  fausses  proportions,  ils 
renoncèrent  aux  chiifres  des  longitudes  et  latitudes,  ils  ne  voulaient 
guère  graduer  leurs  cartes  !  aussi  je  ne  qualifierai  pas  de  scientifique 
la  culture  qu'ils  ont  faite  de  la  géographie ,  mais  simplement  de  con^ 
naissance  de  la  géographie,  dans  laquelle  ils  ont  progressé  et  excellé  à 
un  haut  peint. 

Les  bons  dessinateurs  et  les  hommes  instruits  préparèrent,  à  Tusage 
des  pilotes,  les  portulans  annotés  ou  dessinés  (vi).  Les  soins  du  dessina* 
leur  se  portèrent  plus  spécialement  sur  le  conlour,  que  sur  la  pein* 
ture;  on  s'évertuait  à  faire  ressortir  les  promontoires,  les  ports,  les 
rades,  les  points  dangereux,  bas-fonds,  écueils;  à  tracer  les  golfes, 
les  sinuosités  des  bords;  à  fixer  les  dislances  et  la  position  relative 
avec  une  certaine  exactitude.  Les  portulans  annotés  suppléaient  le 
dessin  par  des  renseignements  qu'ils  donnaient  sur  les  conditions  de  la 
sécurité  des  ports  et  des  mouillages,  sur  les  moyens  d'approvisionnement, 
sur  la  qualité  de  Teau  de  rivières,  de  citernes  où  de  sources,  sur  les 
dispositions  des  habitants  des  villes  et  des  rivages;  enfin  de  tout  ce 
qui  pouvait  être  utile  au  cabotage  des  marins. 

Les  marins  dessinaient  eux-mêmes,  ou  fournissaient  des  rensei- 
gnements aux  géographes  dessinateurs,  qualifiés  de  cosmographes  (se). 
Ils  se  passaient  d'aslrolabc,  généralement  connu  chez  les  arabes.  Unç 
longue  expérience,  une  vue  exercée,  l'ombre,  les  astres,  le  soleil,  la 
lune,  réloile  polaire  rapporlée  aux  gardes  de  la  petite  ourse,  U 
vitesse  de  la  navigation,  la  direction  ,  les  vents  fixaient  leurs  notices  et 
leurs  conceptions.  Vient  enfin  la  boussole  ou  l'aiguille  aimantée,  dont 
raltribulion  de  la  glorieuse  découverte,  vers  1300,  à  Flavio  Gioïa,  est 
mise  en  déroute  par  l'antique  connaissance  de  la  vertu  de  Taimanl 
et  par  Thenreux  usage  que  depuis  plus  d'un  siècle  déjà  en  faisaient 
les  pilotes  italiens,  qui  ne  pensaient  guère  à  relater  de  qui  et  depuis 
quand  ils  tenaient  ce  mystérieux  secret.  Chez  les  arabes,  l'aimant 
retirait  les  clous  de  leurs  navires,  chez  les  latins  il  était  le  plus  fidèle 
guide  des  marins  (57).  Les  porlulaps  dessinés  et  peipts  furenj;  corjistruijs 

(3ti)  Je  Bc  sais  pas  pour  quelle  raison  on  rcru«oraît  le  titre  de  poilnlan  avv  cartes  littorales  de 
IV-poque  qui  reproduisaient  les  dénominations  des  portulans  écrits.  C'est  juste  comme  les  anciens 
itinéraria  anuotata  et  picta  :  les  portulans  annotés  et  peints. 

{3G)  Qu'on  ne  ra'accnse  d'inadvertance  à  cause  de  la  qualification  prématnrée  de  cosmogniplte^ 
doinuée  aux  dessinateurs  des  cartes  du  xii*  siècle.  Je  le  fais  à  dessein  :  parce  que  je  pense  que  cette 
qualification,  inventée  dans  le  courant  du  vi*  siècle,  ne  discontinua  point  à  honorer  les  dessinateurs 
versés,  les  géographes  de  profession.  Je  suis  certain  qu'uo  jour  6Q  en  trouvera  des  preuves. 

(57)  La  nave  over  Zonclii,  cbe  navegano  qucsto  mar (de l'Inde)....  portano  nno  so)6 timon;  le  quûl 

II.  9 


18  GÉOGR.   LAime,   iS30-U10. 

sur  ces  bases.  Ces  partulans  fournirent  en  grande  partie  des 
matériaux  à  la  composition  des  cartes  générales,  des  mappemondes,  et 
donnaient  à  ces  mappes  un  certain  fondement  d^exactitude  et  de 
perfectionnement. 

110.  De  grands  événements  sur  le  continent,  ébranlèrent  aussi  les 
habitudes  surannées  de  la  géographie,  la  configuration  de  différents 
points  de  la  mappemonde  et  de  toute  sa  figure.  Les  distances  de 
Fintérieur  de  l'Europe ,  réunies  par  les  investigations  rogériennes, 
dirigèrent  longtemps  les  cosmographes.  De  nouveaux  renseignements 
confirmèrent  leurs  chiffres  ou  provoquèrent  des  rectifications.  Quant 
à  Tintérieur  de  l'Afrique  et  de  TAsie,  il  était  plus  difficile  aux  cosmo- 
graphes  de  toucher  à  la  table  ronde  de  Roger.  Mais  TAsie  ouvrit  ses 
entrailles  aux  latins. 

L'invasion  de  Mongoux  dans  le  khalifat  délabré,  fit  espérer  aux 
chrétiens  de  gagner  un  allié  aussi  formidable  à  Tislamisme ,  que  favo- 
rable à  la  religion  de  Tévangile.  Les  espérances  diplomatiques  et  la 
propagande  traversaient  avec  ardeur  les  routes  percées  par  le  com- 
merce. Les  légations  des  frères  cordeliers,  Jean  Plan  de  Carpine 
ritalien-pérousin ,  et  de  son  inlerprèle  Benoil  le  Polonais,  envoyés 
en  1245  par  le  pape  à  la  grande  horde;  du  dominicain  Simon  de 
S,  Quentin,  au  commandant  des  armées  tatars  en  Perse  ;  du  franciscain 
Guillaume  de  Ruysbroek,  brabançon,  envoyé  en  1255  par  le  roi  de 
France  à  la  grande  horde,  apportaient  consécutivement  des  relations 
importantes  qui  changeaient  la  nomenclature  habituelle  de  la  géogra- 
phie latine  (ss).  Tous  les  efforts  diplomatiques  de  la  cour  de  Rome 
étaient  certainement  illusoires.  Les  conquérants  du  khalifat  aimaient 
mieux  simuler  leur  conversion  à  Tislamisme,  afin  d'affermir  leurs 
conquêtes.  Mais  la  propagande  chrétienne  fit  un  progrès  parmi  les 
populations  orientales,  et  les  évéchés,  fondés  jusqu'au  delà  de  l'Indus, 
soutenaient  une  communication  lente  avec  l'Europe,  animée  beaucoup 
plus  par  l'activité  commerciale. 

Souvent  le  marchand,  enrichi  par  ses  expéditions,  jaloux  des  con- 
naissances qu'il  avait  acquises,  se  garda  de  découvrir  ses  perlustrations, 
rebutées  par  des  récits  de  danger  réel  ou  Imaginaire.  Son  heureux 
retour,  ses  succès  excitèrent  cependant  la  curiosité  et  la  cupidité  des 
autres,  qui  s'enflammaient  à  braver  le  péril  et  à  pénétrer  le  mystère. 
Les  marchands  vénitiens  Polo,  eurent  l'audace  de  s'aventurer  dans 
un  voyage  de  vingt  ans  (1250-1270).  De  retour  sains  et  saufs,  ils 
repartirent  pour  une  autre  excursion  de  trois  ans  (1271-1275),  à 

navega  scnza  l)os9olo,  perche  i  portano  uno  astrologo,  el  qaal  sta  in  alto  eseparato,  e  con  Tastrolobio 
in  man,  da  ordene  al  navegar  (légende  de  1459  de  ira  Mauro,  apud  Znrla,  num.  30).  Fra  Mauro  qui  le 
dit,  et  les  Vénitiens  de  son  temps,  avaient  de  nouvelles  et  des  i  enseignements  très-positifs  de  la  mer 
rouge  et  de  celle  de  Tlnde.  L*usage  de  la  boussole  chez  les  arabes  est  tardif.  Les  écrivains  mahommé- 
dans,  qui  aiment  à  jaser  sans  fin  et  à  se  copier  réciproquement,  ne  disent  rien  de  la  boussole  ou  de 
l'aiguille  aimantée,  qui  fut  connue  chez  les  Chinois  tout  au  plus  tard  dans  le  xiii*  siècle.  Voyez  ce 
qu'en  dit  le  savant  Reinaud  dans  son  introd.  à  la  géogra.  d'Aboulf.  p.  202,  et  à  la  fin  du  volume. 

(38)  Mathias  Christian  Sprengel,  Geschichte  der  geographischen  Entdekungen,  Halle,  4792, 
capit.  2S,  26.  —  Halte-Brun,  précis  de  la  géogr.  livre  20.  —  La  profonde  et  l'inappréciable  notice  sur 
les  anciens  voyages  de  Tartarie,  par  d'Âvezac,  dans  le  recueil  de  voyages  et  de  mémoires,  publié  par 
la  société  géogr.  Paris,  i839,  t.  IV,  p.  309-602.  ~-  Le  texte  des  voyages  de  Plan  Carpin  et  de  Rnys- 
broek,  par  Hacluyt,  Rarousio,  etc.,  en  dernier  lieu,  par  d'Avezac  et  Thomas  Wright  dans  le  IV"*  du 
reciieil  susmentionné. 


SANUTO»   lil.  19 

laquelle  prit  part  le  jeune  Marco  Polo.  Conduit  au  fond  de  TAsie,  il 
entra  en  lâ74  au  service  de  Koublaïkhan,  ce  qui  lui  fournit  le  moyen 
d'explorer  la  Chine,  Tlnde,  les  îles.  Quand  il  reparut  en  Europe 
en  1295,  il  s'engagea  dans  la  malheureuse  expédition  qu'entreprit  sa 
patrie  contre  les  Génois.  Grièvement  blessé  dans  la  bataille  de  Curzola, 
il  tomba  au  pouvoir  des  vainqueurs.  Pendant  les  quatre  années  de  sa 
captivité  à  Gènes,  il  fit  venir  les  matériaux  qu'il  avait  rassemblés  et 
dirigea  la  rédaction  du  récit  de  son  voyage,  exécutée  par  le  pisan 
Rusligiello;  les  Génois  d'abord,  ensuite  tous  ceux  qui  prirent  connais- 
sance de  sa  narration,  furent  émerveillés.  Du  vivant  de  Marco  Polo, 
en  1307,  Thibau  de  Cépoy  traduisit  son  ouvrage  en  français,  et  bientôt 
en  1320,  François  Pipin,  bolonésan,  en  prépara  une  version  latine  (39). 
Marine  Sanuto  avait  peu  de  connaissance  de  cette  exploration  de  son 
compatriote,  toute  récente  encore,  du  moins  il  en  fit  peu  de  cas  :  mais 
la  partie  plus  rapprochée  de  l'Asie  était  assez  connue  des  Italiens  pour 
qu'il  ait  pu  former  ses  idées  sur  l'intérêt  qu'elle  devait  offrir  aux 
puissances  chrétiennes. 

r 

Marino  Sanuto,  1320. 

111.  Marino  Sanuto  (ou  Sanudo),  dit  Torsellus,  vénitien  de  Rivoalll, 
s'étant  passionné  dès  son  enfance  pour  la  cause  des  chrétiens  de  l'orient, 
fil  jusqu'à  cinq  voyages  dans  la  Palestine  et  visita  l'Arménie  roubénite, 
l'Egypte,  les  îles  de  Chypre  et  de  Rhodes  et  les  côtes  adjacentes.  A  son 
retour,  il  composa,  en  1306,  l'ouvrage  intitulé  :  liber  secrelorum  fidelium 
erucis,  où  il  expose  ses  connaissances  de  l'orient,  l'état  de  ses  régions 
et  de  l'Egypte ,  le  commerce ,  et  argumente  sur  la  nécessité  et  les 
moyens  d'y  établir  la  domination  chrétienne. 

Il  parcourut  ensuite  diverses  contrées  de  l'occident,  afin  d'exciter  le 
zèle  des  princes  chrétiens  et  essayer  de  les  déterminer  à  une  nouvelle 
croisade.  En  1321,  il  présenta  son  ouvrage  au  pape  Jean  XXII,  et 
quelques  années  plus  tard ,  au  roi  de  France. 

Cet  ouvrage  fut  publié  par  Jacq  Bongars  (gesta  dei  per  Francos , 
Hanau  i6U).  L'éditeur  s'est  servi  de  deux  manuscrits,  l'un  de  Paul 
Petau,  l'autre  deScalîger,  qui  ne  contenait  que  le  troisième  livre;  il  y  a 
joint  trois  cartes,  mais  il  n'a  pu  se  procurer  la  quatrième  qui  repré- 
sentait la  mer  méditerranée.  Plusieurs  bibliothèques  possèdent  les 
manuscrits  de  son  ouvrage  accompagnés  des  cartes.  Le  plus  magnifique 
et  le  plus  authentique  est  celui  de  délia  ricca,  rinomatissima  collezione 
dell'ab.  Canonici.  Placido  Zurla  en  a  donné  une  description  (40).  Une 
carte  d'im  manuscrit  de  Paris  a  été  publiée  par  Santarcm.  La  biblio-^ 
ihèque  de  Bourgogne  possède  deux  copies  manuscrites  avec  les  cartes. 
Nous  n'avons  pas  fait  grand  usage  de  la  publication  de  Bongars,  n'ayant 
pu  que  jeter  momentanément  un  coup-d'œil  sur  ses  cartes.  Nous  nous 


(39)  Sprcngcl, chap.  28.  —  Malte-Brun,  livre  iO.  —Placido  Zurla,  di  Marco  Polo  c  dcgli  altri  viap;- 
giatori  vencziani,  disscrtationi,  vol.  1.  —  Le  texte  publié  en  dernier  lieu  par  Roux,  daDS  le  1"  volumo 
au  rcaieil  de  voyages,  publies  par  la  société  géographique  à  Parts. 

(40)  Sulle  antiche  mappe  idro-geograliche,  lavorate  in  Venezia,  coromentario  dcl  p.  ab.  Placido 
Zurla;  Venezia,  1818.  —  Le  mtme  comtncntaire  inclus  comme  appendice  dans  le  second  volume  de 
di8serlazioni,.p.  f 99-392. 


30  CiOGR.  LATINE,  l3S0-lil0> 

référons  souvent  i  la  description  de  Zurla,  et  nous  allons  faire  une 
longue  analyse  de  trois  copies  de  la  mappemonde  que  nous  avons  sous 
les  yeux,  une  du  manuscrit  de  Paris,  deux  bruxelloises.  Nous  commen- 
çons par  ces  dernières. 

112.  Les  deux  codes  de  la  bibliothèque  dé  Bourgogne  n*"  9404  et  9347, 
sont  de  la  même  époque,  du  xv*  siècle  ou  plutôt;  ils  sont  tous  deux 
conformes  dans  les  moindres  détails.  Les  mêmes  accessoires  se  trouvent 
dans  le  même  ordre  ;  les  figures  et  les  cartes  ont  aussi  le  caractère 
de  ridentilé;  une  notice  sur  le  jeu  d'échecs  et  les  flgures  des  échecs, 
sont  les  mêmes  :  de  façon  qu*il  est  nécessaire  de  conclure  que  les  deux 
codes  sont  des  copies  du  même  original,  ou  qu'ils  ont  été  copiés 
Fun  sur  Tautre.  On  y  voit  la  même  orthographe  des  noms  propres,  et 
les  omissions  du  texte  complétées  par  des  renvois  aux  insertions  mar- 
ginales. 

Quant  au  dessin  des  peintures,  celui  du  n^  9404^  que  nous  désigne- 
rons par  A,  est  plus  fini ,  plus  certain  :  le  dessinateur  comprenait  ce 
qu'il  fesait,  ce  qu'il  achevait.  Le  dessin  du  n°  9547,  que  nous  désigne- 
rons par  B,  décèle  beaucoup  d'incertitude.  Le  dessinateur,  en  voulant 
donner  plus  d'élégance  à  son  ouvrage,  en  amaigrit  la  composition.  Ou 
voit  qu'il  a  suivi  son  modèle  sans  le  comprendre,  d'où  résultent  des 
défauts  et  des  fautes.  Tantôt  il  oublie  de  crayonner  une  jambe,  tantôt 
il  confond  les  têtes.  En  changeant  de  couleur,  il  déborde  par-ci  par-là. 
Asservi  à  son  modèle,  on  voit  qu'il  ne  l'a  pas  bien  discerné  sur  chaque 
point  et  que  maintes  fois  il  ne  l'a  pas  même  compris.  Gela  est  plus 
sensible  encore,  lorsqu'il  se  permet  de  changer  l'attitude.  Cette  diifé- 
renée  dans  les  peintures  des  deux  codes  prouve  l'habileté  du  dessinateur 
de  A  et  le  manque  de  talent  et  de  bon  sens  de  celui  de  B,  et  que  si  l'un 
des  deux  servit  de  modèle  à  l'autre ,  ce  ne  peut  être  A.  Mais  il  est  plus 
probable  que  chacun  de  ces  codes  fut  indépendamment  exécuté  sur  le 
même  modèle ,  comme  l'examen  des  cartes  me  le  fait  présumer. 

Il  y  a  dans  l'un  et  l'autre  code  bruxellois  quatre  cartes  géogra- 
phiques. Une  de  la  Palestine,  une  autre  contenant  les  plans  d'Antio- 
chie  et  de  Jérusalem ,  la  troisième  représente  l'Egypte ,  la  Syrie  et  le 
littoral  jusqu'à  Rhode,  la  quatrième  est  la  mappemonde.  Tout  y  est 
identique,  couleur,  pose  et  direction  des  inscriptions,  pointes  du  litto- 
ral, courbure  des  traits.  Mais  l'exécution  du  B  est  plus  facile,  plus 
déliée,  plus  claire;  celle  du  A  est  pénible,  on  y  remarque  beaucoup  de 
maladresse  malgré  le  soin.  La  Palestine  est  exécutée  dans  tous  les  deux 
de  la  même  manière  :  à  l'aide  des  ligues  en  carreau  dense ,  tracées  au 
crayon.  Le  A  a  omis  le  nom  de  Nicopolis ,  et  son  écriture  est  trem- 
blante, embrouillée.  Au  reste,  les  omissions  des  épigraphes  sont  les 
mêmes  dans  chaque  copie  (voyez  n°  77  de  notre  atlas). 

La  carte  de  l'Egypte  et  du  littoral  de  la  mer  de  Syrie  (voyez  n*'  76  de 
l'atlas)  est  exécutée  dans  les  deux  codes ,  sans  aucune  marque  direc- 
trice. 

Le  A  jette  ses  traits  au  onde  partout  où  la  place  se  présente;  le  B  les 
traîne  avec  circonspection.  Ce  dciniei  a  réussi  à  bien  tracer  le  littoral 
deCilicie,  de  la  Pamphylie,  de  la  Lycie  et  de  la  Carie,  mais  il  s'est 
égaré  dans  l'insertion  des  épigraphes  :  à  la  suite  de  quoi  il  déplace  l'île 


SÂMUTo,  m.  21 

de  Ilhodc  avec  les  autres  îles  adjacentes.  Ces  iles  ei  les  épigraphes  du 
littoral  sont  mieux  placées  dans  le  A  (4i). 

il 5.  La  mappemonde  du  A,  n^'  9404,  offre  une  copie  dans  laquelle  le 
dessinateur  n'a  pas  réussi  à  donner  un  dessin  net  et  clair.  D'abord ,  sur 
deux  pages  désunies,  où  chaque  moitié  de  la  carte  devait  être  dessinée, 
il  a  tracé  les  lignes  croisées  parlant  des  points  cardinaux  avec  inexac- 
titude et  très-irrégulièrement;  puis  il  a  dessiné  en  contours  et  en  cou- 
leurs, le  continent,  les  îles,  les  mers,  les  rivières  et  les  montagnes, 
guidé  dans  tout  par  les  lignes  mal  croisées.  Le  dessin  est  très-grossier. 
Ensuite  il  se  mit  à  placer  les  inscriptions  et  on  ne  sait  dans  quel  but , 
probablement  pour  leur  vider  une  place  plus  claire,  Tinfortuné  dessi- 
nateur fit  gratter,  sur  plusieurs  points  de  la  carte,  les  lignes  croisées, 
les  rivières ,  les  bords  de  la  mer  où  les  inscriptions  passaient  ou  tou- 
chaient (42).  Aucune  inscription  n'a  subi  d'effacement  semblable.  Enfin, 
peu  content  de  son  ouvrage  à  demi  détruit,  il  fit  ressortir  sur  plusieurs 
points,  avec  le  noir,  les  contours  de  la  terre,  et  avec  le  rouge  plusieurs 
traits  de  division  :  ainsi  que  maintes  fois ,  le  rouge  donne  la  couleur 
aux  montagnes  et  aux  rivières. 

Le  copiste  du  B,  n"  9547,  copiant  sur  une  échelle  un  peu  plus  grande, 
évita  un  semblable  embrouillement.  Cependant  il  serait  difficile  de 
dire  s'il  a  suffisamment  distingué  les  contours  du  modèle.  Ce  qui  est 
évident  c'est  que,  sans  se  guider  par  des  lignes  croisées,  il  copia  à  vue 
d'œil  les  deux  parties  de  la  carte  enfoncée  dans  la  reliure  d'un  volume, 
et  que  son  œil  n'a  pas  su  mesurer  la  profondeur  de  l'enfoncement  de  la 
carie  dans  le  dos  du  volume  (43)  :  par  conséquent,  tout  le  diamètre, 
depuis  Sera  jusqu'à  Gades,  offre  un  raccourci  qui  affecte  et  exténue 
toute  la  méditerranée  et  tout  le  diaphragme  ultérieur  de  l'Asie,  jusqu'à 
Sera.  Enfin,  après  avoir  achevé  son  dessin,  il  a  croisé  au  crayon  les 
lignes  des  points  cardinaux. 

En  raison  de  cette  défiguration ,  le  dessin  grossier,  plus  ou  moins 

Ul)  Les  deux  cartes  de  la  Palestine  et  de  l'Egypte  avec  le  littoral  de  la  mer  de  Syrie,  ont  été 
publiées  du  manuscrit  de  Pctau  pcr  Bongars  (t.  11,  de  gesladci  par  Francos,  Uanau  46H).  Nous 
donnons  dans  notre  atlas  (n*  7G,  77)  du  manuscrit  bruxellois,  celle  de  la  Palestine  très-diminuée  ;  do 
l'autre,  le  littoral  de  la  mer  de  Sync  réduit  seulement  d'un  tiers  d'échelle.  Nous  les  reproduisons 
pour  donner  un  exemple  des  cartes  spéciales  de  l'époque  ;  quoique  leur  exécution  ne  se  recommande 

fias  beaucoup.  11  y  eu  avait  pourtant  à  celte  époque  d'une  exécution  supérieure.  L'angle  du  littoral  de 
'Asie  mineure  et  de  la  Syrie  est  excessivement  ouvert,  de  Taçon  qu'il  n'y  a  pas  moyen  de  soumettre 
cette  carte  à  la  graduation  ;  les  autres,  de  meilleure  exécution,  cèdent  à  cette  épreuve. 

La  carte  dudit  littoral  porte  le  titre  :  de  terra  Egypti  :  mais  l'Egypte,  quoique  occupant  avec  son 
Nil  assez  de  place  y  est  presque  nue  et  n'offre  qu'une  ébauche  vide  de  sens.  Le  Nil  se  prolonge 
formant  successivement  deux  iles,  une  innommée,  l'autre  portant  le  nom  de  castrum  degise,  à 
Toricnt  duquel  est  Kayrus,  BabUonia  et  castrum  in  monte.  A  l'occident  du  Nil  il  n'y  a  que  trois 
bâtiments  abbatie  in  deserto  versus  occidens^  avec  une  marque  de  eollectio  aquarum  subter  abbactis  ; 
deux  tours,  istaa.  ii.  turresfecit  pharao  in  capite  soUitu4inis;  et  un  pont,  huncpontem  fecit  bendog- 
dar,  ad  tranceundum  quandoflumen  hahundat  ad  fécundandam  terram.  Enfin  on  y  lit  une  note  ou 
citation  d'érudit  JJonorius.  Ègyptus.  c,  uiUarum  et  inclita  in  teba  prouintia  a  tebe  duitate  dicta, 
quam  catinus  agenoris  filius  edtficauitt  huic  adiacet  maxima  solUudo  in  qua  oUm  cottuersabatur 
monachorum  multitudo.  Nous  ajoutons  qu'à  la  suite  du  mons  Seyr,  est  aqua  marat ,  et  tout  à  côté 
un  carré  attaché  à  la  chaîne  orientale  avec  l'épigraphe  lex,  la  chaîne  de  cette  montagne  est  terminée 
par  un  bâtiment  ecclesiœ  sancte  margarite.  Au  reste  c'est  mecha  et  l'Arabie  avec  le»  mers  adjacentes 
en  raccourci  forcé.  —  Sanuto  sacrifia  dans  son  ouvrage  un  chapitre  (U,  iv,  36,  pour  donner  la  des- 
cription du  littoral  do  cette  carte  :  ce  qui  se  trouve  a  la  p.  85,  88,  ae  l'édit.  Bongars.  Voyez  notre 
portulan  général,  20,  p.  15, 10. 

UiS  De  semblable  gratinures,  se  font  remarquer  sur  sa  carte  de  Palestine. 

(43)  Le  môme  cas  affecta,  comme  nous  l'avons  observé,  la  carte  ronde  d'Edrisi  du  manuscrit 
parisien  d'asselin. 


24  GÉOGR.   LATINE,   1330-UlO. 

cepeudant ,  quoiqu'il  ail  la  même  circonférence  que  la  mappemonde 
parisienne,  chan{i;e  les  proportions  dans  la  configuration  de  la  terre.  Il 
la  diminue  en  donnant  plus  d'espace  entre  la  terre  et  la  circonférence; 
la  mer  méditerranée  est  plus  courte  dans  sa  longueur  et  plus  large 
dans  sa  largeur  que  celle  de  la  mappemonde  parisienne  (4s).  La  mer  do 
Sara  (Caspienne ,  est  plus  éloignée  de  TEuxin ,  diminuée  et  d'une  autre 
forme;  les  Pyrénées  n*y  sont  pas  marquées  et  le  nord  de  T Europe  est 
modernisé  :  les  figures  du  Danemark  et  de  la  Suède  sont  toutes  diffé- 
rentes et  de  nouvelle  invention. 

La  mer  Caspienne,  du  modèle  des  copies  bruxelloises,  est  presque 
triangulaire  et  privée  du  fleuve  Olil  (Volga) ,  et  porte  le  triple  nom  de 
mare  caspis  f  yrcanum ,  de  sara.  Celle  de  la  mappemonde  parisienne 
est  carrée  et  est  accompagnée  d'une  longue  inscription,  pleine  d'abré- 
viations, dont  la  lecture  devient  quelquefois  presque  impossible.  Elle 
parle  d'abord  des  appellations  de  la  mer.  Islud  dicilur  mare  de  Sara , 
propler  civUalem  inqua  imperalor  moral;  quod  dicitur  et  Caspium 
propte  uicinilaks  ad  montes  Caspios;  Gorgianie,  eadem  caussa.  Puis  elle 
raconte  le  danger  de  la  navigation.  In  eô  catct  uorago,vades  reddebanl 
aquas  inaccessibiles,  gressus  propler  urinorum  oplurala  sunl.  In  eo  mari 
tumescil  per  paludem  in  omni  anno  et  iam  plures  hoc  antea  gressi 
destructe  fuerunt,  tandem  ut  quis  deleciarel  inlrare  innatarel  anlea  non 
absque  muUorum  periculo.  Ensuite  elle  signale  le  concours  des  peuples 
et  le  voisinage  sablonneux.  Hic  et  convenits  in  esliua  gens  de  Sara 
usque  Noga,  cum  ponil  mililiam.  Supra  co  mare  est  régie  arenosa 
temishira,  enûn,  fl,  Olil  magnus  palet,  .  al,  .  bat,  (46). 

117.  La  plus  forte  et  la  plus  frappante  différence  entre  la  mappe- 
monde parisienne  et  le  modèle  des  copies  bruxelloises ,  se  présente 
dans  l'Europe  et  spécialement  dans  sa  partie  septentrionale.  Dans  sa 
formation  entière  elle  donne  dans  le  dit  modèle  plus  d'embonpoint  h 
l'Espagne,  à  la  France,  pousse  l'Allemagne  plus  au  nord  des  Alpes  et 
rétrécit  le  continent  au  delà  du  Danube.  Scotia  est  réuni  à  VAnglia  par 
un  isthme  et  conserve  avec  Ybernia,  la  même  position.  A  l'est,  au  delà 
de  Holsalia,  sur  la  péninsule  on  lit:  Datia,  Julia,  et  sur  le  dernier 
coin  des  côtes  prolongées  nord-est  infidèles  Kareli,  Ici  est  attachée  par 
'  un  isthme  une  autre  péninsule  plus  vaste,  qui  se  prolonge  vers  l'occi- 
dent au  dessus  du  Danemark,  vers  la  Scotia  chargée  des  noms  de 
Noruegia,  Skania,  Gocia,  Suecia,  Finlalia,  Alania.  Cette  forme  corres- 
pond avec  la  figure  de  la  Skandinavie  que  donnaient  certaines  cartes 
des  XV®  et  xiv®  siècles  (voyez  le  n**  97  de  notre  atlas). 

La  mappemonde  parisienne,  par  ses  nombreuses  inscriptions,  et 
par  la  construction  des  côtes  et  des  îles  de  cette  partie,  prouve 
qu'elle  avait  soin  de  rendre  d'une  manière  suffisante  ses  conceptions 
sur  la  mer  baltique.  On  y  voit  une  seule  péninsule  excessivement 
prolongée  vers  le  nord.  Près  de  Olsatïa,  dans  sa  gorge,  on    lit  : 

(45)  Il  est  évident  que  les  deux  copies  bruxelloises  dérivant  du  même  modèle  enfoncé  dans  un 
volume  n'ont  pas  su  prendre  la  dimension  de  renFonccment ,  le  B  ne  l'a  pas  sondé  jusqu'au  fond, 
le  A  se  l'imagina  plus  profond  qu'il  ne  l'ctait  réellement. 

(46)  Je  ne  sais  pas  si  j'ai  réussi  à  débrouiller  cette  longue  épigraphe  :  la  map[)emonde  du  code 
deir  ab.  Canonici,  à  sa  place  offre  suivant  Zurla  :  Cofpis,  Yrcanum,  de  Sara,  planicUs  Mogan  in  qua 
Tartari  hyemant. 


«ANUTO,  lia*  25 

inlroUus  dalie,  puis  datia  ou  dana,  ensuite  cpaia  dalia,  qu'il  faut 
probablement  lire  prouincia  iucia  datia  ou  primaria  dacia,  la  pr(^- 
mièrc  danie;  el  vis-à-vis  cp  cP*or,  c'est-à-dire ,  provincia  poslerior 
iucie;  au  delà  vers  Test  sont  les  fies.  La  plus  grande  est  chargée  d'une 
inscription  double  excessivement  difficile  à  débrouiller.  L'une  donne 
le  nom  de  l'île  Zcania  du  iditusme  f.  ol  daeie,  peut-être  Scania 
diuidil  insuie  sunt  orientales  dacie.  L'autre  dit  regio  dacie  freidiliana 
peut-être,  super  ei  duione.  Sur  l'île  suivante  on  lit  :  in  hoc  mari  est 
maœima  copia  alctiorum;  sur  les  deux  petites  :  JRtna  (c'est  Rugia  ou 
Rana)  et  Yslandia,  nom  qui  sur  ce  point  figurait  déjà  dans  plusieurs 
cartes  précédentes. 

Nous  reviendrons  encore  sur  ce  point  de  la  carte  de  Sanuto; 
en  attendant,  sans  s*arrêter  à  de  nombreuses  déviations  moins 
importantes  du  modèle  des  copies  bruxelloises,  nous  allons  examiner 
les  épigraphes. 

118.  Comme  les  copies  bruxelloises,  la  mappemonde  parisienne 
est  atteinte  de  quelques  déplacements  et  oublis ,  parce  qu'il  est 
impossible  de  ne  point  rappeler  à  cette  cause  l'insertion  mal  placée 
de  Pamphilia,  de  Galatia.  Les  oublis  ou  les  négligences  sont  plus 
nombreuses,  parce  qu'on  ne  peut  attribuer  qu'à  celle  cause  les  diffé- 
rences des  copies  bruxelloises ,  que  nous  allons  énumérer. 

En  Afrique ,  le  modèle  des  copies  bruxelloises  avait  toutes  ces 
inscriptions  qu'on  voit  sur  la  mappemonde  parisienne.  Mais  il  avait 
de  plus,  ce  qui  ne  se  trouve  pas  sur  celle-ci  :  Locacc5^tm;  regio 
inhabitabilis  propler  calorem;  Habesse  terra  nigrorum;  Nese;  Chus; 
Haden;  Bedoni;  Zinc  el  imoZinziber  dicitur. 

Entre  les  îles ,  la  mappemonde  parisienne  nomme  les  deux  îles 
Meric  et  Afatie  :  mais  elle  a  négligé  de  nommer  l'île  Kis  que  connaît 
le  modèle  des  copies  bruxelloises  (4t). 

En  Asie,  à  l'exception  de  la  longue  légende  de  la  mer  Caspienne,  du 
fleuve  Atol,  de  la  Media  et  de  la  Mésopotamia ,  ce  modèle  contient 
toutes  les  inscriptions  de  la  mappemonde  parisienne,  étant  chargé  de 
beaucoup  d'autres.  En  commençant  par  le  nord  :  regio  inhabitabilis 
propter  algorem;  Alania;  hic  fuerunt  inclusi  Tartari;  Carab  terra 
destructa;  castrum  Gog  et  Magog;  Sera;  hic  nascuntur  elefantes  (dans 
l'Inde);  h'c  convenit  multitudô  Tartarorum  (dans  le  centre  de  l'Asie); 
ad  Tauris  (as)  ;  Taurisium  (ou  Taurus  mons)  ;  Armenia  (avec  Tépithète) 
magna;  Persia  (répétée  comme  appellation  plus  générale  (49),  terra 
eu  fraies  (vers  l'embouchure  de  ce  fleuve);  porta  ferréa;  (les  villes) 
Trapesunda,  Gerala  ou.  Gerasa,  Ascara,  Sebaste;  Baldac;  Jérusalem; 

(47)  Les  deux  îles  entre  l'Arabie  et  l'Afrique  :  Meric  et  Asfacla,  restent  iHuoinmces  sur  la  carte 
deir  abb.  Canonici  ;  Zurla  donne  nne  autre  lecture  de  quelques  autres.  Au  lieu  de  Laricc  dicta  Camar, 
il  lit  :  ititula  Unee  di  camai  ;  au  lieu  de  Ccltalcs  et  Termelic,  il  a  :  Jettales  et  Timelit. 

(48)  Zurla  y  voit  P.  Tauris  et  au  lieu  de  montes  Sytliie  il  lit  :  mantes  Syriae.  —  La  carte  du  mscrit 
deir  abb.  Canonici  donne  le  nom  du  il.  Gyon,  qu'cm  ne  trouve  pas  dans  nos  co|mcs.  Voici  ce  qu'en  dit 
Zurla  :  finie  Indiae.  Nell'  interne  poi  verso  l'occaso  trovasi  espresso  flu.  Gyon,  nondie  Indus  flu.  e  tra 
questi  due  sta  scritto  hic  cùnvemt  muititudo  Tartarorunit  noucbe  hic  elefantes  pascuntur,  India 
magna,  al  occaso  dell'  lodo  India  parva  que  et  Ethiopia. 

(49)  Nous  apprenons  par  la  carte  de  1  Egypte  et  du  littoral  de  la  mer  Syriaque,  que  tout  le  pays 
jusqu'au  fleuve  Tigre,  portait  le  nom  de  S3rrie,  et  an  delà  du  Tigre  jusqu'à  l'indo  était  la  Partbie, 
Il  y  est  dit  :  Partia  extenditur  lUtra  Tygrum  usque  ud  Indum  fiuvium,  ubi  India  terminatur  et 
£laudit  intra  se  Àsyriatn. 

H.  4 


38  GÉOGR.  LATRIB»  1380-1410. 

Cette  notice  respire  comme  la  carte  elle-même ,  l'érudition  antique , 
qui  n'avait  jamais  été  oubliée  et  commençait  à  reprendre  parmi 
les  Italiens.  La  notice  reproduit  fidèlement  les  mots  d'Isidore  de  Séville, 
des  ravennates  et  des  géographes  antérieurs  :  elle  divise  les  trois  par- 
ties du  monde  en  provmces,  établies  du  temps  de  la  domination 
romaine.  En  Afrique  pas  un  seul  nom  moderne  ne  se  mêle  à  la 
description.  En  Europe,  toutes  les  appellations  postérieures  ou  mo- 
dernes sont  subordonnées  à  l'ancienne  division  et  accidentellement 
rattachées.  La  seule  description  de  l'Asie  offre  en  partie  une  esquisse 
double,  ancienne  et  moderne.  Modemi  aliter  diuidunl,  et  ce  que  la 
notice  a  dit  de  cette  division  moderne  est  à  peine  soulevée  par 
quelque  nom  de  la  mappe  de  mari  et  terra ,  qui  abonde  en  appellations 
modernes  dans  la  seule  Europe. 

Que  cette  notice  marginale  soit  une  partie  intégrante  de  la  carte  de 
Sanuto,  ou  le  voit,  non-scuicment  par  l'aveu  qu'elle  a  faite  elle-même 
à  la  fin,  mais  par  la  conformité  totale  et  partielle  qu'elle  présente 
avec  les  copies  des  cartes ,  surtout  avec  la  copie  parisienne.  La  Médie, 
la  Mésopotamie  se  trouvent  sur  celle-ci,  tandis  qu'elles  sont  passées 
sous  silence  par  les  copies  bruxelloises;  les  Vandales  de  la  notice 
répondent  à  l'appellation  de  la  vistule  Vandalus,  qui  ne  se  trouve 
que  sur  la  copie  parisienne.  La  notice  dit  :  moderni  ponunl  ubi  Sitia 
regnum  Caiay  et  la  seule  copie  parisienne  répète  :  Sitia  siue  regnum 
Catay,  Elle  seule  nomme  les  pays  de  Lacedemonia,  de  Barbarico,  dont 
on  trouve  l'explication  dans  la  notice. 

i21.  D'après  ce  long  examen  des  copies  de  la  carte  de  Sanuto  et  les 
recherches  auxquelles  je  me  suis  livré  sur  l'état  de  leur  original ,  il  est 
temps  d'analyser  la  connaissance  géographique  de  la  carte  et  les 
sources  où  elle  a  pu  puiser. 

Personne  je  pense  ne  contestera  des  connaissances  géographiques  à 
Marino  Sanuto,  s'il  entreprend  de  dessiner  les  cartes  ou  de  les  faire 
dessiner  pour  l'usage  des  ignorants;  que  les  cartes  nautiques  lui 
étaient  certainement  assez  familières  et  qu'il  était  au  courant  des 
explorations  des  voyageurs.  Cependant,  la  notice  qui  accompagne  les 
copies  et  la  carte  elle-même  reposent  sur  les  anciens  antécédents,  c'est 
un  écho  de  ce  qui  a  été  répété  depuis  les  géographes  ravennates  par 
mille  bouches.  On  se  copiait  par  habitude  et  dans  celte  répétition 
infatigable  on  semait  des  nouveautés  et  on  se  perfectionnait.  Les 
géographes  de  Sicile  avec  Edrisi  marchant  plus  indépendants  de  pré- 
ventions ,  ouvrirent  la  voie  à  ce  progrès  imposant  et  fournirent  des 
matériaux  qui  ne  cessaient  d'alimenter  l'exercice  italien.  Nous  avons 
dit  que  la  récolte  abondante  de  leurs  efforts  ne  pouvait  être  perdue 
et  en  analysant  la  carte  de  Sanuto  nous  rencontrons  le  tableau  de  leur 
conception,  et  les  paroles  qu'ils  ont  tracées  sur  leur  carte  ronde. 

Le  premier  coup-d'œil   peut  convaincre  que  la  mappemonde  de 

alignas.  Duc  innt  antcm  Germanie,  snpcrior  jnxta  septentrionalcm  oceanum,  iaferior  circa  Rcnnm 
(d'Ailly,  cap.  26)  :  copié  mot  à  mot  de  ce  que  dit  la  cosmograpliic  du  manuscrit  de  Bruxelles  de 
rannée  iilO  (p.  46);  copié  textuellement  de  originnm  d'Isidor  de  Sevilie.  ^  La  notice  en  entier 
déiive  de  cette  «onrce  :  eUe  est  importante  autant  qu'elle  admet  des  passages  et  des  appellations 
pins  modernes. 


^ 


SANUTO,  U2.  29 

Sanuto  est  calquée  sur  la  carte  rogérienne  dTdrisî.  La  moitié  n'est 
qu'une  simple  imitation  et  copie.  Toute  TÂfrique,  avec  ses  rivières, 
montagnes  et  villes  marquées  sans  noms,  pourrait  être  chargée  d'épi- 
graphes tirées  de  la  description  d'Edrisi  et  de  ces  cartes,  dont  il  a 
fait  la  description,  par  exemple  au  delà  de  Zangucbar,  inscrivez  Sofala 
et  tes  deux  bourgs  qui  s'appellent  suivant  Edrisi  (I,  8,  p.  G5)  Djenlama 
et  Dendema ,  situés  sur  les  bords  de  la  mer  et  qui  sont  marqués  sur  la 
carte  de  Sanuto  dans  le  lieu  désigné.  Toute  TAsie ,  depuis  Tembou- 
chure  du  Nil ,  au  sud  des  montagnes  qui  montent  dans  le  sens  incliné 
vers  nord-est ,  n'est  qu'une  reproduction  de  la  carte  édrisienne ,  ainsi 
que  celle  de  Sanuto  invente  deux  mers  caspiennes,  une  rapprochée  à 
l'Euxin  de  la  nouvelle  exploration,  et  l'autre  édrisienne  plus  éloignée 
et  retirée  vers  l'orient,  conformément  au  dessin  antérieur  des  géogra- 
phes de  Sicile.  Les  nouvelles  explorations  italiennes  prenaient  évidem - 
ment  leur  assiette  sur  la  configuration  édrisienne. 

i^â.  La  notice  parle  d'une  région  Laccdemonia^  qui  s'étendait  en 
Europe  au  midi  du  Danube,  ayant  ce  fleuve  au  nord,  a  seplentrione 
flumen,  située  entre  la  Mésie,  les  Apennins  ou  les  Alpes,  l'Istrie  et  la 
Germanie,  dont  Gallia  belgica  est  une  parlie  (53).  Ce  pays  de  Lacede- 
monia  est  nommé  sur  la  mappemonde  de  la  copie  parisienne  et  c'est 
le  nom  donné  par  les  géographes  de  Sicile  aux  pays  montagneux  depuis 
la  mer  adriatique  jusqu'aux  extrémités  de  Hemus  qui  louchent  l'Euxin. 
De  même  la  mappemonde  parisienne  avance  l'épigraphe  de  Carinthie 
jusqu'aux  sources  du  Danube  et  du  Rhin,  conformément  a  la  descrip- 
tion d'Edrisi.  Les  Talares  inclus  par  Alexandre-le-grand,  Gog  et  Magog, 
sont  des  contes  arabes  qu'Edrisi  fit  connaître  aux  Italiens.  Les  KareU 
avec  l'épilhète  d'infidèles ,  sont  les  Kalovri  madjous  d'Edrisi.  Mais  les 
explorations  récentes  acquirent  de  nouveaux  renseignements,,  taat 
pour  l'Asie  centrale,  que  pour  le  nord. 

Les  tles  de  la  mer  de  l'Inde  sont  latinisées  :  à  peine  reconnaît-on 
quelque  nom  des  écrivains  arabes.  Cependant  elles  se  retrouvent 
en  parlie  par  la  description    d'Edrisi  (1,9,  iO,  il,  6).  Ainsi  l'île 

Kis  est  certainement  ^éS  Kaïs  du  golfe  persiquc;  Meric  (Messireh 

sur  la  côte  d'Arabie) ,  jjlJV  Merlan  d'Edrisi.    CeUalcs ,  répond  à 

èi^  Kclah ,  Kelat;  insula  Piperis ,  est  une  antique  dénomination; 

Nebula,  c'est  v >Lsr*^t  cl  sahab,  ou  des  nuages  des  arabes  (Edrisi ,  I , 

8,  iO,  p.  G8,  91);  insula  Sikdpa  Camar  des  copies  Bruxelloises  est 

sans  doute  Selediba,  Serindib,  Geilan,  vis-à-vis  du  cap  Comorin  et 

confondue  avec  j-^  Komor  des  arabes.  Les  copies  de  Paris  et  d'abb. 

Canonici  ofl*rent  à  la  place  de  Sitedpa  Lince  de  Camar  et  décèlent  la 
même  confusion  de  Ceilon  Lanka  avec  Komor.  En  effet ,  la  carte 
d'Egypte  et  de  Syrie  des  codes  bruxellois,  donnant  à  celle  île  le  nom 
de  Laricc  Comar,  fait  croire  qu'il  y  est  réellement  question  de  l'île 


(oS)  Lacedcroonia,  habet  ab  oriente  Mcssiam,  ab  euro  Yslriam,  ab  affrico  montes  Aponinos ,  ah 
occasuGalliani  bclgicam,  a  septentrione  flumen  quod  Galliamet  Gcnnaniami  dinidit  (à  Lacedemonia). 


50  GÉOGIU   LATINE,   1330-1410. 

Komor  Malaï ,  dont  la  capitale  portait  le  nom  de  Leirane  (d'après  Ibti 
Saîd).  Mais  Komor  Malaï,  sar  la  carte  de  Sanulo  paraît  être  représentée 
plutôt  par  Tcrtnelic,  Esfacie  ou  Afacie  et  Asizia,  sont  plus  embarrassants 
pour  la  comparaison  (54).  Nous  trouvons  dans  Edrisi  (1 ,  7,  p.  59)  à 
côté  de  TAfrique ,  parmi  le  groupe  des  iles  Zaledji ,  une  fie  qui  porte 

le  nom  Andjebeh,  dont  la  capitale  Aa.^t  Anfoudja  répond  assez  à 

Esfacie.  Il  v  a  dans  Edrisi  (YII,  9),  deux  villes  chinoises  qui  portent  le 
nom  de  Asuria,  Askirla,  Asfizia  ou  Asiira,  etc.  (ks),  qui  ont  pu  engeu* 

drer  le  nom  d'une  ile.  Le  nom  d' Asizia  répond  aussi  à  \j^[&  Aschoura 

d'Edrisi  (I,  9).  Quelle  que  soit  Tincertitude  qui  règne  sur  certains 
points,  toujours  est^il  indubitable  que  la  mappemonde  de  Sanuto 
dérive  de  la  table  ronde  rogérienne,  et  que  la  description  d'Edrisi  lui 
donne  certaines  explications. 

123.  Au  centre  de  l'Asie ,  Tarse,  Turquesten,  Sym,  India  superior 
Johannis  presbylcri;  hic  stal  magnus  canis,  tout  le  Ca{hay,  Bclia,  sont 
le  fruit  des  investigations  des  voyageurs  et  des  envoyés.  C'est  par  des 
informations  de  Piano  Carpini  qu'on  s'avait  que  Cumania  s'étendait 
au-dessus  de  la  mer  Caspienne  jusqu'à  un  immense  fleuve ,  dont  il 
ii*existe  pas  le  pareil.  C'est  encore  lui  qui  donna  des  notions  sur  la 
province  russe  Smdalia,  inscrite  p.  iradalia  dans  la  copie  parisienne, 
et  p,  uradalia  dans  les  copies  bruxelloises  (se). 

On  avait  de  nouveaux  renseignements  assez  détaillés  sur  les  côtes 
gud-est  de  la  mer  baltique.  Les  exploits  précédents  des  Danois,  stimu- 
la par  l'esprit  des  croisades,  et  le  nouveau  commerce  des  villes 
anséaliques,  leur  donnèrent  quelque  retentissement.  On  y  marche ,  à 
partir  de  la  gorge  de  Dana  et  de  la  Olsatia,  par  Slavia  (Meklenburg), 
Pomariaon  Pomerania,  qu^avoisiue  l'île  (Rina,  Rugia,  Rana,  Runa); 
traversant  Odra,  on  rencontre  Toronum,  peut-être  Thorn ,  construit 
par  les  chevaliers  teutoniques  en  1255,  sur  la  Yistuie,  qui  est  appellée 
Vandalus  sur  la  carte;  au  delà  de  Yandalus,  on  voit  Prucia  et  les 
pagani  Leioni  (Litvaniens)  ;  Kurland ,  Linlesunia  (Lindanissa ,  nom  de 
Revel),  ville  agrandie  par  les  Danois;  Riga,  construite  vers  ilG3  par 
les  Allemands,  et  les  provinces  Liuonia,  Variant  (Virland,  Vironia), 
Estonia  enfin  Kireli  ou  Kareli  infidèles.  Cette  suite  est  quelque  peu 
dérangée  par  des  transpositions  et  la  situation  en  est  déplacée,  mais  on 
voit  que  des  renseignements  commerciaux  arrivèrent  aux  Italiens  de 
ce  point  éloigné.  On  le  voit  encore  par  la  notice  qui,  à  la  fin  de  la 
description  des  petites  îles  situées  dans  la  méditerranée ,  s'exprime 
ainsi  :  posl  has  insulas..,  Circa  parles  Anglie,  Ybernie  et  Scoliê  sunt 
muUe  instUe,  quarum  nomina  sunt  ignola,  Circa  partes  Datie  et  maxime 
in  mari  quod  apud  indigenas  orientale  vocatur ,  sunt  valde  multe  bone 
insuie  et  bene  habitate,  que  regno  Datie  sunt  subiecte.  In  partibus 
rcgnorum  Suetie  et  Norvegie  sunt  quam  plures  insuie  subjecte  regnis 

(64}  Ptolémée  place  dans  le  golfe  persiquc  une  Uo  Aflania ,  elle  pourrait-ôtre  déplacée ,  comme 
qette  autre  Kis. 

J55)  Asfetira  do  fcrganien  Ibn  Ketiri,  Aspitra  de  Ptolémée  (edit.  Golii,  p.  S5,  notre,  p.  77). 
86}  Regpum  Géorgie  habet  ab  oriente  maffnura  montem  vocatum  Àibzor,  tibt  multe  nationcs 
ntant^  dit  la  aofjce  :  c'est  la  montagqe  de  Gbilan,  Elbrous. 


8ANUT0,  194.  51 

predklis.  Norvège  et  Suède  ne  se  trouvent  pas  nommées  dans  la  copie 
parisienne,  mais  leur  existence  n'était  pas  inconnue  aux  géographes 
de  Sicile ,  du  temps  d'Edrisi. 

Je  ne  touche  pas  à  quelques  épigraphes  de  cette  carte ,  trop  obscu- 
res et  inintelligibles  pour  moi,  et  j'appelle  toute  Fattention  de  mes 
lecteurs  sur  le  progrès,  que  la  connaissance  géographique  avait  fait 
dans  la  construction  des  cartes,  ce  que  décelé  la  mappemonde  de 
Marine  Sanuto. 

12 L  Sanuto  dit  lui-même,  anno  domini  1521,  die  24  mensis  septem- 
bribus,  ego  Marinus  Sanudo  diclus  Torxellus  de  Venetiis,  gratia  dei 
preuia,  introitum  habui  ad  sanclissimum  palrem  nostrum  dominum 
papam,  cuius  sanclitali,  duos  libros  super  terra  recuperatione  et  conser- 
vaiione  fidelium  presenlaui.  Quorum  unus  cooperlus  fuerat  rubeo,  aller 
vero  de  croceo,  Eidem  eliam  presenlaui  quatuor  mappas  mundi  :  unam 
de  mari  mediterraneo  ;  secundam  de  mari  et  terra;  ter  dam  de  terra 
sancta;  quartam  vero  de  (erra  Egipti  :  qu'en  1521 ,  le  21  de  septembre 
il  présenta  au  pape  les  deux  volumes  reliés  en  rouge  et  jaune,  conte- 
nant son  ouvrage  sur  la  récupération  de  la  terre  sainte  et  sur  la 
conservation  des  fidèles;  qu'en  même  temps,  il  lui  présenta  quatre 
mappes,  dont  une  représenlait  la  mer  méditerranée ,  l'autre  la  mer 
cl  le  continent,  de  m^ri  et  terra,  la  troisième  la  Palestine  et  la 
quatrième  l'Egypte;  j'ignore  s'il  y  a  des  manuscrits  de  l'ouvrage  de 
Sanuto,  qui  contiennent  toutes  ces  cartes;  le  manuscrit  de  Paris,  autant 
que  je  sache ,  dont  se  servit  Bongars,  et  ceux  de  Bruxelles  n'en  ont 
que  trois  :  la  carte  de  mari  et  terra,  et  celles  de  Palestine  et -de  l'Egypte, 
Cependant  au  dire  de  l'auteur,  la  carte  de  la  mer  méditerrané  figurait 
au  premier  rang,  comme  si  elle  était  essentielle  et  de  prédilection. 
Pour  nous,  elle  aurait  été  de  la  plus  haute  valeur.  Elle  avait  sans 
doute  été  dessinée  par  des  mains  habiles  avec  exactitude  et  aurait  pu 
nous  fournir  un  moyen  indubitable  d'apprécier  l'aptitude  des  Italiens 
dans  la  construction  des  caries. 

Privé  de  ce  monument  nous  sommes  réduits  à  recourir  à  la  mappe- 
monde ou,  suivant  la  qualification  qui  lui  a  été  donnée  par  Sanuto 
de  mari  et  terra,  dans  laquelle,  celle  de  la  mer  méditerranée  se  trouve 
réduite  à  une  échelle  assez  petite  et  enclavée  dans  la  masse  des 
conlinents.  Le  soin  que  décèle  la  copie  parisienne,  nous  garantit  de 
Texaclilude  de  sa  réduction. 

Nous  avons  observé  que  les  cartes  italiennes  furent  nautiques,  pro- 
duits de  courses  des  marins  et  même  dessinées  par  des  marins.  La 
carie  de  la  mer  méditerranée  était  nautique  parcequ'elle  représenlait 
une  mer  et  avait  été  confectionnée  par  des  marins.  La  mappemonde , 
qualifiée  de  la  mappe  de  mari  et  terra,  par  son  litre  même  donnant  la 
préférence  à  la  mer ,  doit  être  considérée  comme  nautique ,  comme 
œuvre  des  marins  qui  donnaient  le  plus  de  soin  à  la  mer  méditerranée. 
Nous  pensons  que  cette  mer  mérite  d'être  confrontée  avec  la  connais- 
sance qu'on  en  a  aujourd'hui. 

Or,  pour  donner  une  carte  comparative  de  la  carte  de  cette  époque 
avec  celle  d'aujourd'hui ,  nous  extrayons  cette  mer  méditerranée  de  la 
copie  parisienne  et  nous  la  plaçons  sur  les  positions  littorales  graduées 


32  GEOGR.   UTINB,  1350-1410. 

(le  la  mer  médittcrrance ,  suivant  les  longitudes  et  les  latitudes  géogra- 
phiques déterminées  par  nos  géographes  modernes.  A  cet  efl'et,  je  me 
suis  servi  de  la  projection  ptoléméenne  arbitrairemenl  modifiée.  Dans 
Fexament  de  la  composition  des  cartes  postérieures,  j'indiquerai  les 
motifs  de  Tarbitraire  :  en  attendant  je  ferai  remarquer  que  dans  une 
semblable  épreuve  on  n'applique  pas  la  carte  à  une  projection  déter- 
minée, maison  cherche  la  projection  qui  résulte  de  sa  composition. 
Aussi  pour  graduer  la  carte  de  Sanuto,  afin  de  comprendre  ses  propor- 
tions et  tes  situations  de  ses  positions,  j'ai  tracé  les  parallèles  au  rayon 
de  165  à  partir  de  Téquateur  (voyez  n**  75  de  notre  atlas). 

Sur  la  carte  de  Sanuto  graduée  de  cette  façon ,  je  place  les  positions 
d'après  les  longitudes  et  les  latitudes  actuellement  déterminées ,  et  je 
trouve  dans  le  nombre  d'une  trentaine  de  positions,  quelques  dévia- 
tions, mais  le  total,  l'ensemble  de  la  construction  de  la  mer  méditer- 
ranée,  déploie  une  admirable  conformité  avec  la  connaissance  actuelle, 
tant  dans  la  latitude  que  dans  la  longitude,  depuis  Alexandrie  jusqu'à 
Venise  et  Tana,  depuis  Geuta  jusquà  Aniiochie.  Les  proportions  de 
toute  la  mer  en  sa  largeur  et  sa  longueur  offrent  une  dimension 
bien  réglée. 

Le  savant  Jomard  en  examinant  la  belle  peinture  de  la  carte  parme- 
sane  des  frères  Pizigani,  faite  à  Venise  en  1567,  a  admiré  l'exactitude  de 
certaines  parties  qui  présentent  un  singulier  contraste  avec  la  grossière 
imperfection  d'autres  cartes  contemporaines.  Je  pense  que  si  la  précision 
des  parties  des  cartes  bien  dessinées  de  cette  époque,  est  digne  d'admi- 
ration, l'harmonie  et  l'exactitude  dans  l'ensemble  de  toutes  ces  parties 
en  est  plus  méritoire  encore,  et  je  défie  de  trouver  les  compositions 
de  Visconti ,  de  Pizigani  ou  autres  contemporains  inférieures  à  celle  de 
Sanuto.  Qu'on  veuille  les  prendre  à  la  même  épreuve  (57). 

125.  Les  cartes  italiennes  de  cette  époque  et  celle  de  Sanuto,  étant 
nautiques  et  l'œuvre  des  mariniers,  ceux-ci  portaient  tout  leur  soin  à 
la  configuration  de  la  mer,  à  faire  ressortir  les  promontoires,  les  golfes, 
les  petites  sinuosités  des  côtes.  Par  ce  soin  spécial,  on  comprend  bien 
que  la  mer  gagnait  sur  la  terre ,  et  l'entraînement  aquatique  se  plaisait 
à  soutenir  le  courant  des  fleuves  élargis.  Par  cette  disposition  des  con- 
structeurs de  cartes,  les  lacs,  les  petites  îles  et  péninsules  paraissent 
agrandis,  gonflés:  mais  le  gros  de  la  terre  du  continent  est  aminci 
quelquefois  très-sensiblement.  Dans  la  carte  de  Sanuto»  l'Italie,  par  la 
pression  aquatique,  perdit  de  son  étendue  convenable. 

Nous  avons  aussi  observé  ce  raccourci  des  accessoires  qui  était  en 
usage  dans  le  dessin,  dans  la  peinture,  dans  la  sculpture  et  qui  s'était 
installé  dans  la  composition  des  cartes  libres  de  toute  projection  et  sans 
échelle  déterminée.  Ce  raccourci  a  lieu  dans  les  caries  de  Sanuto ,  et 

(S7)  Mon  on'vrage  était  sons  presse  lorsque  on  m*a  comxnnniqoé  la  publication  savante  de 
M.  Vivien  de  Saint-Martin,  liist.  des  découvertes  géographiques.  Voici  ce  qu'il  y  dit  des  cartes  que 
nous  examinons  et  analysons  :  Quoique  les  marins  dont  elles  sont  l'ouvrage,  n'eussent  pas  à  leur 
disposition  le  secours  si  important  des  observations  astronomiques  pour  en  fixer  les  points  prin- 
«<inan<  dans  le  sens  des  lonffitndei.  elles  n'en  nrésentent  nas  moins  un  merveilleux  deirré  d'Avarti. 


au-dessous  de  ce  degré    

tâcheroDi  d'expliquer  cette  chute  remarqoable 


SANUTO»   1S6.         '  33 

8ur  celle  de  de  mari  el  krra,  il  est  irès-liarmonieux.  Sar  cette  cdrte, 
en  proportion  de  la  mer  méditerranée,  TEspagne,  la  France,  FAIle- 
magne  sont  dlniimiées  à  la  suite  de  la  précision  de  la  mer  méditerranée 
et  de  ces  connaissances  de  la  mer  baltique  qu'on  a  voulu  préciser.  Mais 
sous  une  autre  et  moindre  échelle,  les  formes  de  ces  parties  sont  har- 
monieuses et  admirables  (ss). 

Par  une  semblable  composition ,  les  distances  continentales  serrées , 
cédaient  à  cette  pression  des  constructeurs.  Toute  leur  attention  portée 
sur  la  mer  centrale  s'emparait  de  la  moitié  du  diaphragme  du  cercle, 
pour  y  développer  exactement  ses  dimensions,  le  reste  extérieur  fut 
tracé  pour  la  plupart  en  raccourci  dans  de  justes  formes,  suivant  les 
conceptions  conçues  par  Texpérience  des  navigateurs ,  ou  par  les  rela- 
tions des  voyageurs.  Sous  ce  rapport  même  la  carte  de  Sanuto  de  mari 
et  terra  offre  un  progrès  remarquable,  parce  que  personne  ne  contestera, 
je  pense,  que  TËspagne,  la  France  et  TÂllemagne,  malgré  leur  con- 
traction, sont  bien  assises  ;  ^'Angleterre  et  Flrlande  y  tiennent  leur 
position  relative  au  continent.  Certainement  il  a  fallu  visiter  et  bien 
observer  les  côtes  de  ces  pa^'S  pour  tracer  une  semblable  configuration, 
qui  ne  dérive  d'aucune  forme  connue ,  arabe  ou  ptoléméenne  :  elle  est 
l'œuvre  des  géographes,  cosmographes  du  siècle. 

126.  J'ai  rédigé  mon  analyse  et  mes  observations  précédentes  avant 
de  recourir  à  la  description  des  cartes  sanutines  publiées  par  Placido 
Zurla  en  1818.  La  mer  méditerranée  de  la  mappemonde  de  mari  et 
terra  se  présentait  naturellement  comme  réduction  d'une  carte  spéciale 
de  cette  mer  qui  composait  l'assemblage  de  plusieurs  cartes  attachées 
à  ce  livre  de  secretorum  fidelium  crucis.  Celte  carte  spéciale  n'a  pas 
été  publiée,  mais  elle  existe,  elle  est  enfouie  dans  le  manuscrit  délia 
rinomatissima  collezion  dcll'  abb.  Canonici  ;  manuscrit  contemporain  de 
Sanuto,  préparé  probablement  par  l'auteur  lui-même  à  quelque  haute 
destination.  Placido  Zurla  en  donne  une  notice,  et  ce  qu'il  en  dit  sur- 
passe toute  idée  qu'on  a  pu  se  former  d'une  carte  qui  est  qualifiée  de  la 
première  des  quatre.  Nous  en  extrayons  ce  qui  est  essentiel. 

La  carte  de  mari  mediterraneo  est  composée  de  cinq  feuilles  ou 
cartes  (so).  La  première  contient  la  partie  occidentale  de  l'Europe, 
commence  de  la  Flandre,  qui  avance  comme  un  tronc,  commençant  par 
le  nom  de  Plissa,  Flislanda,  Vis-à-vis  est  Inglitera  avec  les  seules 
épigraphes  de  Noligales  et  Sanbetor.  Â  côté  est  tracée  l'Irlande  ayant  à 
l'occident  un  grand  golfe  avec  l'épigraphe  gulffo  de  issole  ccclviii  béate 
et  fortunate.  On  voit  sur  cette  carte  la  France,  l'Espagne  et  toute 
l'étendue  de  l'Afrique  jusqu'à  Tunis,  et  ses  côtes  occidentales  étendues 
jusqu'à  Saffî  et  Daman.  Les  côtes  sont  remplies  de  noms  des  pays  litté- 
raux, ornés  de  pavillons  coloriés  et  d'armoiries;  toute  la  carte  est 
repassée  par  les  rombs  des  vents. 

(88)  Un  semblable  racconrd  de  la  nariie  secondaire  est  nonssd  &  l'exès  sor  la  carte  de  ITgrpte  et 
delà  Syrie,  où  le  dessinatenr  a  tracé  rArabie  et  tontes  les  Iles  jusqu'à  Tlle  nébuleuse. 

(S9)  La  prima  di  questo  carte,  le  quali  generaleraentc  occupano  ciascnna  due  intere  t>agine  di 
fronte  coniiene  nna  parte  soltanto  dei  gran  periplo  dei  mari  cognite  a  que*  giomi  cbc  qui  è  distinto 
in  dnque  carte ,  mercate  tutte  al  dissopra  colla  générale  indicazione  de  mari  medlterraoco;  di  raano 
pib  recenta,  non  pcrb  àrbitrarir,mentrelo  ftesso  Sanuto  etc.  (Znria,  p.  Id,  800). 


54  GÉOGR.   LATINE»  1330-1410. 

La  seconde  contient  toutes  les  côtes  de  Tltalie,  les  iles  de  ia  mer 
ionienne  et  la  partie  correspondante  de  l'Afrique  au  sud  de  Tltalie  : 
ed  è  da  ammirarsi  la  bellezza  délia  forma  e  coniorni  di  questa ,  quale 
appunlo  nei  posteriori  porlolani  si  ravvisa  :  menlre  i  gcografi  soUanlo 
alla  fine  del  sec,  xvi  cominciarono  a  ben  disegnarla  suUe  loro  carte  (eo). 

La  troisième  représente  l'Asie  mineure,  la  Mésopotamie,  la  Syrie, 
l'Arabie,  l'Eygyptc  avec  les  mers  rouge  et  perse,  une  portion  de  la  mer 
indienne  avec  ses  îles;  les  cours  du  Tigre  et  du  Nil,  les  indications  et 
le  dessin  des  villes  intérieures,  des  monts  et  des  fleuves  à  couleur  ver- 
datre,  accompagnés  de  courtes  épigraphes  (ei). 

La  quatrième  contient  le  périple  de  l'archipel  et  les  côtes  africaines 
vis-à-vis  de  celui-ci. 

La  cinquième  enfin  offre  le  périple  de  la  mer  noire.  Suit  une  figure 
d'astrolabe  à  plusieurs  cercles  concentriques  avec  les  signes  du 
zodiac,  etc.,  et  un  compartiment  carré  inscrit  les  noms  de  ces  signes, 
le  tout  de  la  belle  configuration  et  de  couleurs  variées. 

C'est  l'atlas  de  Sanulo  composé  de  8  à  9  caries  générales,  spéciales, 
portulanes,  topographiques  et  de  plans  des  villes,  accompagné  d'une 
courte  esquisse  de  géographie.  Zurla  ne  nous  a  pas  averti  si  ces  cinq 
cartes  de  la  médilerranee  sont  de  la  même  échelle,  pouvant  ainsi  se 
coordonner  et  joindre  dans  un  seul  tableau;  ou  si  elles  sont  des  périples 
de  portulans  détachées  de  difiTérenles  échelles,  à  rebords  irréguliers  : 
toujours  est-il  certain  pour  nous,  qu'elles  ont  servi  à  composer  la 
méditerranée  entière  délia  forma  e  contorni  qtiale  appunto  nei  posteriori 
de  l'époque  de  la  renaissance  des  lettres. 

Dessinateurs. 

127.  Marino  Sanuto  a  pu  savoir  dessiner  et  connaître  la  méthode  de 
la  construction  des  cartes  :  mais  comme  il  ne  le  dit  pas  lui-même,  nous 
ne  devons  considérer  les  cartes  de  son  atlas  que  comme  des  copies  des 
cartes  de  l'époque  et  des  cartes  antérieures,  qu'il  a  fait  faire,  afin  de  les 
attacher  à  son  ouvrage,  pour  donner  la  lumière  aux  ignorants.  Elles  sont 
de  l'école  vénitienne,  de  la  fabrique  vénitienne.  Cette  école  a  pu 
fournir  à  cette  époque  beaucoup  d'exemplaires  copiés.  Le  doge 
Franceseo  Dandolo  (1529-1559),  suspendit  alors  dans  la  salle  ducale 
une  carte  nouvellement  exécutée  (ea).  On  ne  peut  pas  contester  le 
primato  dans  l'art  du  dessin  géographique  aux  Vénitiens,  dont  la  puis- 
sance, le  commerce,  les  relations,  l'activité,  les  possessions  maritimes, 
la  marine,  surpassaient  toutes  les  autres  nations  :  mais  on  ne  peut 
refuser  une  collaboration  fructueuses  à  d'autres  cités,  surtout  aux 
Génois,  qui  se  distinguaient  par  leurs  entreprises  océaniques.  Le  petit 
atlas  de  1518,  de  Pietro  Visconte  de  Janua  (le  génois),  est  là  pour 

(60)  Nous  verrons  comment  ces  belles  formes  se  sont  perdues  et  ne  reparurent  que  vers  la  fin 
du  XVI*  siècle. 

(61)  Zurla  prévient  que  cette  carte  est  la  même  qui  est  publiée  par  Bongars  comme  quatrième 
qualiuée  par  Sanuto  de  terra  Egypti  :  nous  la  donnons  presque  entière  sous  Te  titre  de  littora  maris 
Syriaci. 

(toi)  Correva  l'anno  1339,  quando  questo  principe,  ..  .  venea  morte  efu  scpellilo  nei  monastère 
de  minon.  Diccsich'  in  suo'.tempo,  fossero  faite  le  nobilissime  carte  di  cosmografia,  chc  tuttavia 
sono  e  si  vedono  se  bene  dopo  rinnovate,  e  risarcite  nella  sala  ducale  (Paolo  Morosini,  istoria  di 
Venczia,  1637,  p.  233). 


PIZIGANI,   128.  55 

attester  qu'à  Gènes  existait  une  fabrique  de  cartes  non  moins  active  : 
Pelrus  Viseonte  de  Janua  fecit  istas  tabulas,  anno  domini  mcccxviii,  dit 
une  note  de  cet  atlas  (es).  La  carte  castillane  de  13iG  n'est  pas  trop 
postérieure  (ei).  Le  portulan  médicéen  de  Tannée  1551  est  un  grand 
atlas,  grand-folio,  composé  de  huit  cartes  doubles  sur  parchemin  (es). 
Nulle  part  il  ne  manquait  de  dessinateurs  plus  ou  moins  exercés. 
Partout  on  copiait  les  cartes  géographiques,  il  n'y  avait  à  cet  égard  ni 
secret  d'état,  ni  privilège,   ni  monopole  quelconque,  ni  propriété 
intellectuelle,  ni  brevet  d'invention  :  on  dessinait,  on  copiait.  Sanuto  fit 
préparer  plusieurs  copies  de  son  atlas  et  l'exposa  à  Rome ,  à  Paris , 
à  Bruges.  Les  italiens  excellaient  dans  l'exécution ,  les  Espagnols  ne 
leur  étaient  pas  inférieurs,  et  le  produit  partait  de  la  même  source.  On 
se  communiquait,  on  se  recherchait  mutuellement.  L'école  de  Venise 
avait  la  connaissance  de  ce  qu'on  avait  consigné  en  Sicile  :  tout  le 
monde  connaissait  les  récits  de  Marco  Polo  et  pouvait  avoir  sous  les 
yeux  les  caries  de  la  fabrique  vénitienne.  Plusieurs  noms  de  dessina- 
teurs de  cartes  de  toutes  les  nations  sont  connus  :  mais,  à  mon  avis, 
on  peut  avec  plus  de  certitude  les  considérer  comme  copistes  que  leur 
attribuer  une  composition  nouvelle.  Peut-être  un  jour  aura-t-on  le 
bonheur  d'exhumer  quelque  auteur.  Mais  dans  l'état  actuel  des  con- 
naissances :  comme  les  copistes  et  l'auteur  de  l'atlas  de  Sanuto  nous 
sont  cachés,  de  même  on  n'a  aucun  droit  de  qualifier  d'auteurs  ceux 
qui  ne  s'appellent  pas  compositeurs  eux-mêmes.  Yisconli,  Marcus  ne 
sont  ni  auteurs,  ni  compositeurs.  Ils  ont  signé  la  date  de  l'exécution  de 
leur  copie  comme  font  ordinairement  les  copistes.  Et  ceux  qui  compo- 
saient, comme  Pizigani,  avaient  devant  eux  des  compositions,  des 
matériaux  possédés  aussi  par  les  autres.  Car  les  compositions  ne  s'im- 
provisent point,  elles  ne  se  décèlent  pas  dans  le  xiv**  siècle ,  comme 
invention  récente  d'un  seul,  l'art  n'était  pas  nouveau.  Les  véritables 
auteurs  de  ces  caries ,  sont  ces  laborieux  cosmographes ,  qualifiés 
d'ignorants,  dont  on  ignore  les  noms,  et  qui  travaillaient  dans  l'obscu- 
rité du  siècle  précédent  ;  le  xiv"  siècle  nous  ouvre  l'abondante  moisson 
de  leurs  labeurs, 

Pizigani,  1367. 

128.  La  grande  carte  de  1567,  des  deux  vénitiens  François  et 
Dominique  Pizigani,  est  certainement  de  l'école  de  la  fabrique  véni- 
tienne. Objet  d'admiration.  La  dimension  de  la  carte  n'a  pas  moins 
de  158  cent"  sur  92  (4  pieds  V^  sur  5  moins  2  pouces).  Les  huils  vents 
principaux  sont  figurés  et  accompagnés  de  légendes  comme  beaucoup 
d'autres  figures.  De  leurs  huit  points,  sont  tirées  les  lignes  à  l'usage 
des  ma^ps.  On  voit  en  outre  de  petits  traits  accompagnés  de  points 
disséminés  en  guise  d'échelle  sur  différentes  directions  de  vents.  Les 

(63)  L*at1a9  hydrographique  de  Viseonte  8*  est  d'une  petite  échelle.  U  est  conservé  dans  la 
)>ibliothèqnc  de  Vienne  en  Autriche.  La  copie  se  trouve  depuis  plusieurs  années  à  Paris. 

(64)  Mss  de  la  bibl.  nat.  de  Paris,  n*  6846  (Halte-Brun,  géogr.  de  l'édit.  de  Huot,  livre  XX,  p.  621). 

(65)  Baldelli  Boni  del  portolano  mediceo  e  délie  scoperte  dei  Genovesi  nell*  Atiantico,  inséré  dans 
son  storia  del  milione,  p.  453-472.  —  La  huitième  carte  de  cet  atlas  offre  un  calendrier  lunaire 
perpétuel,  avec  divers  exemples  qui  tous  se  rapportent  à  l'année  1354,  (O'Avezac^  notice  des  décou- 
verte* dans  Tocéan  atlantique,  chap.  5,  p.  92, 33). 


36  G^OOBj  LATINE,  1530-1410. 

pavillons  des  Vénitiens,  Génois,  Catalans,  Portugais,  etc.,  sont  placés 
aux  lieux  de  leurs  domination  et  dans  les  mers  que  sillonnaient  leurs 
yaisseaux.  Les  écritures  sont  nombreuses,  variées,  d'une  grande  déli- 
catesse, heureusement,  presque  toujours  lisibles,  en  latin  quelque  fois 
peu  intelligent.  Per  tacere  di  quanto  spetta  al  Europa,  la  quale  giusta 
i  limiti  di  que*giorni  si  stendo  fino  al  Irlanda  :  Texactitude  de  cer- 
taines parties  présente  un  singulier  contraste  avec  la  grossière  imper*- 
fection  d'autres  cartes  contemporaines  (gg)  ,  sur  lesquelles  on  a  voulu 
juger  la  connaissance  géographique  de  Vépoque  et  mesurer  Tignorance 
des  siècles. 

La  carte  porte  à  son  extrémité  orientale  la  note  suivante  :  hccclxvii 
hoc  opus  compoxuit  franciscus  pizigano  venetiarum  cl  dominicus  ptzt- 

fano  in  venexia  mejjfecU  Marcus  a  die  xii  decembris.  Le  dessinateur 
tait  un  certain  Marcus,  et  les  compositeurs  deux  Plzigani  véni- 
tiens (gi).  Les  compositeurs  surveillaient  et  dirigeaient  leur  dessina- 
teur et  peintre  :  mais  ils  savaient  dessiner  eux-mêmes  et  certes,  les 
Pizigani  ne  se  sont  pas  bornés  à  composer  une  carte  unique.  Dans  un 
code  de  Tabbaie  de  S.  Michel  de  Murano  se  trouve ,  sur  une  petite 
feuille,  le  tableau  des  côtes  de  la  méditerranée  et  deux  autres  tableaux 
peints  de  chiffres  et  de  figures  astronomiques  et  relatives  à  la  sphère  ;  le 
premier  tableau  offre  répigraphe  suivante  :  mccclxxhi  adi  vni  du  zugno 
Francesco  Pizigano  viniziano  in  venieœia  mefece  (es).  Nous  n'avons  pas 
été  assez  heureux  pour  avoir  à  notre  examen  ces  précieux  monuments, 
mais  nous  ne  négligerons  pas  d'utiliser  quelque  fragment  de  leur  des- 
cription (g9).  Le  même  xiv*  siècle  a  vu  paraître  un  manuscrit  du  libre 
da  navegar  per  mi  Antonio  Liprando,  qui  contient  plusieurs  portulans 
de  différente  grandeur  (70). 

Ce  sont  de  beaux  monuments  qui  par  leur  exécution ,  leur  peinture , 
leur  scrupuleuse  exactitude  et  la  précision  des  détails,  ont  conquis 
Tadmiration  de  savants  géographes.  Tous  sont  le  produit  de  Tltalie. 
Inspirés  par  Tinfluence  des  arabes,  des  byzantins,  des  franks,  les 
Italiens  cultivaient  les  connaissances  humaines,  la  poésie,  la  philoso- 
phie, les  sciences.  Acceptant  l'initiative  des  autres,  ils  avançaient, 
créaient  leur  goût,  leur  méthode,  leurs  idées  et  façon,  et  bientôt 
initiaient  les  Initiateurs  eux-mêmes  dans  le  mystère  des  sciences.  Les 
connaissances  géographiques,  à  dater  des  efforts  rogériens  et  de  la 
composition  des  cartes,  étaient  du  nombre  des  connaissances  qui  se 
communiquaient  de  l'Italie  à  la  chrétienté  et  la  péninsule  pyrénéenne 
se  mit  en  première  ligne  pour  suivre  la  marche  des  navigateurs  et  des 
cartographes  italiens. 


labibl. 


(66)  lA  ctrte  des  Pizigani  passa  des  mains  de  Girolamo  Zanêtti  dans  celles  de  P.Paciaudi,  ensuite  à 
bibl.  de  Parme  où  elle  est  conservée.  La  bibl.  de  Paris  s'en  est  procuré  une  copie  en  18IK.— Zanetti 

deir  origine  di  alcune  arti  principali  appresso  i  Viniziani  1788  en  a  donné  une  description  ;  dont  ou 
a  an  extrait  par  Zurla,  sulle  anticlie  mappe  idro-geographiche  cap.  7-iO. 

(67)  Voici  la  conjecture  de  Formaleoni,  sur  le  modèle  qui  a  pu  servir  à  la  composition  de  Pizigani. 
Gonstanlinople  porte  une  couronne  et  un  double  pavillon ,  dont  un  aux  cinq  croix,  l'antre  au  lion 
ailé.  Formaleoni  conclut  que  le  modèle  fut  dessiné  immédiatement  après  la  prise  de  Constantinople 
par  les  croisés  en  1202.  —■  Une  lutte  s'est  engagée  sur  l'ancienneté  de  la  carte  des  Pizigani  entre 
P.  Negnini  et  Angelo  Pezzana. 

(68)  Voyez  la  note  du  chap.  10,  suUa  antique  Aiappe  idro-gcograpliicbe,  de  Zurla. 

(69)  Voyez  ci-dessous  cbap.  117-119. 

(70)  Kurla ,  ibidem. 


CABTE  CATALAHfi»  199.  57 


Carte  catalane  1375-i378. 

129.  La  splandeur  à  laquelle  les  Catalans  s^étaient  élevés  sous  leurs 
comtes,  dont  le  dernier,  Raimond  Y,  monta  sur  le  trône  d^Aragon , 
s'accrut  encore  en  1230  et  1231  par  la  conquête  que  le  roi  Jacq  fit  de 
Tile  de  Majorque  et  du  royaume  de  Valence  sur  les  Maures.  Toutes  les 
entreprises  royales  augmentaient  la  renommée  des  Catalans.  Ils  pas- 
saient pour  les  plus  éclairés  de  la  péninsule;  leurs  courses  commer- 
ciales et  militaires  dans  un  grand  nombre  de  ports  des  mers  noire  et 
méditerranée,  ouvrirent  une  vaste  connaissance  de  toutes  les  parties  du 
monde  dont  elles  étaient  entourées.  Ils  avaient,  bien  avant  1286,  leurs 
cartes  marines,  et  se  servaient  des  instruments  d*astronomie  nautique 
propres  à  trouver  sur  mer  Theure  de  la  nuit  par  les  étoiles.  Depuis 
Fan  1303,  ils  succédèrent  aux  Génois  dans  la  domination  du  vaste  et 
faible  empire  grec  et  sous  leur  amiral  Roger  de  Flor,  soutinrent  les 
guerres  contre  les  Turks  de  ce  pays.  Majorque,  depuis  la  conquête  avait 
formé  un  royaume  à  part.  Elle  participait  à  Tactivilé  entreprenante 
des  Catalans  en  1315.  L'infant  Ferdinand  (mort  en  1316)  se  fit  nom- 
mer à  Clarenza  souverain  de  la  Morée.  Le  roi  de  Majorque  Jacq  III , 
épousa  en  1362,  la  reine  de  Naples  et  pensait  à  des  découvertes  de 
pays  éloignés  pour  étendre  la  navigation  et  le  commerce.  Les  Major- 
quins  avaient  de  fréquentes  relations  avec  l'Afrique,  faisaient  des 
courses  vers  Tocéan  et  les  fies  appelées  Canaries  et  autres.  C'est  dans 
l'océan  que  les  investigations  majorquines  allaient  faire  de  malheu- 
reuses expéditions  (7i);  c'est  là  que  se  dirigeait  vers  le  fleuve  d'or, 
l'expédition  de  Jacq  Ferer,  dans  l'année  13i6  (72). 

Par  cette  disposition,  les  Catalans  et  les  Majorquins,  s'ils  n'étaient 
pas  supérieurs  aux  Italiens,  leur  étaient  égaux  dans  la  marine  et  la 
connaissance  géographique.  Ils  avaient  d'autant  plus  besoin  de  cartes 
marines ,  d'autant  plus  que  les  ordonnances  royales  d'Aragon ,  prescri- 
virent, dès  l'année  1359,  que  chaque  galère  devait  avoir  non-seulement 
une  mais  deux  cartes  marines.  Dans  la  navigation,  dans  la  composition 
de  leurs  portulans,  de  leurs  cartes  marines ,  de  leurs  mappemondes, 
ils  suivaient  la  même  méthode  des  vents  et  de  la  boussole  que  les 
Italiens.  Leur  boussole  était  italienne  et  portait  les  noms  italiens  des 
vents,  quoique  leur  propre  idiome  et  l'idiome  provinçat,  variassent 
tous  deux. 

Le  roi  de  France  Charles  Y,  le  sage,  était  curieux  de  connaître  le 
monde,  lequel  depuis  plus  d'un  siècle  fatiguait  la  curiosité  croissante  des 
Italiens  et  des  Espagnols.  La  rondelle  surmontée  de  paradis,  qu'on  voit 
danslachron.de  S.  Denis  (n°  71  de  l'atlas),  devenait  une  image  suspecte: 
il  désirait  avoir  quelque  chose  de  mieux,  de  plus  positif  dans  sa  biblio- 
thèque. Il  s'adressa  donc  à  l'école  catalane,  aux  cosmographes  catalans, 
pour  en  avoir  une  mappe  bien  exécutée.  La  demande  pouvait  avoir  lieu 
vers  1375,  parceque  la  composition  de  la  mappemonde  s'arrête  dans  ses 
prolégomènes  à  celte  année.  On  y  lit  :  sachez  comme  chose  certaine 

(71)  Tatta  6t  Bnchon  dans  la  geogr.  de  Malte-Bron,  livre  XIX»  p.  513,  de  Tédit.  de  lluot. 
\ii]  Voyez  le  coin  de  notre  copie  de  la  carte  catalane  et  la  note. 


38  GÉOGR.   LATINB,   iSSO-iilO. 

que  ie  nombre  d'or  de  Tan  1575  court  en  viii,  une  fois  arrivé  au 
janvier,  nous  laisserons  viii  et  nous  prendrons  ix,  qui  est  le  nombre 
d'or  de  toute  cette  année  1376  (73). 

Ceci  prouve  que  la  composition  avait  lieu  en  1375,  mais  la  copie,  le 
dessin  n'a  été  fait  que  trois  années  plus  tard  en  1378,  probablement 
mis  à  exécution  à  la  suite  de  la  demande  qui  arrivait  en  1378.  Voici 
les  indications  qu'en  donne  la  carte  elle-même. 

Dans  l'année  de  la  composition  1375,  mourut  Jacq  III  roi  de  Major- 
que, en  conséquence  cette  île  était  réunie  au  royaume  d'Aragon  :  or, 
le  dessinateur  couvrit  le  sol  de  Majorque  de  pals  d'aragon  et  écartela 
son  pavillon  d'Aragon  et  de  Valence  (74). 

Rome  et  Avignon  sont  dépourvus  de  pavillons.  Cette  privation  des 
deux  capitales  du  chef  de  la  chrétienté  est  significative.  La  seule 
vacance  ordinairement  de  courte  durée  ne  pouvait  pas  l'occasionner  : 
un  autre  événement  plus  grave  a  dû  en  être  la  cause.  Le  pape 
Grégoire  XF  arrivé  d'Avignon  à  Rome  le  17  janvier  1377 ,  mourut  dans 
cette  dernière  ville  le  28  mars  1378.  L'élection  d'Urbain  VI,  son  succes- 
seur, eut  lieu  à  Rome  le  18  avril  1578.  Les  mécontents ,  après  un  cer- 
tain délai,  élurent,  le  20  septembre  1378,  à  Fundi,  Clément  VU  qui 
prit  possession  d'Avignon  ;  le  schisme  se  déclara  alors  et  commença  à 
déchirer  la  chrétienté.  C'est  donc  l'événement  qui  a  pu  priver  de  pavil- 
lons les  deux  capitales  des  papes.  Le  roi  d'Aragon  et  de  Majorque 
Pierre  IV ,  ne  se  déclara  ni  pour  l'un  ni  pour  l'autre ,  et  le  choix  ne 
convenait  pas  au  dessinateur  catalan.  Avignon  et  Rome  sont  par  consé- 
quent privés  de  pavillon  et  il  est  présumable ,  que  cette  copie  de  la 
composition  de  l'année  1375,  n'a  été  commencée  et  exécutée  que 
vers  la  fin  de  l'année  1378,  au  plus  tôt,  ou  dans  une  des  années  sui- 
vantes (74). 

Cette  privation  du  pavillon  des  deux  capitales  du  chef  de  la  chré- 
tienté ,  a  lieu  sur  les  dernières  cartes,  5™*  et  6°^"  de  l'atlas.  A  la  suite  de 
quoi  le  dessinateur  ayant  marqué  sur  la  première  planche  de  prolégo- 
mènes, à  l'interruption  de  la  vignette  de  la  bande  circulaire,  l'année 
BicccLxxvi,  ajoute  à  la  seconde  petite  bande  les  trois  indications  lxxv,  vi, 
vu,  des  années  1575,  1576, 1577,  postérieures  à  la  composition  de  la 
carte  dont  il  exécutait  la  copie. 

150.  L'atlas  se  trouvait  à  Louvre  à  la  chambre  par  bas  vers  1380. 
On  le  voit  dans  l'indication  faite  en  1385  par  Giles  Mallet,  gardien  de  la 
bibliothèque;  après  sa  mort  il  est  signalé  dans  un  autre  inventaire 
de  1411  ;  il  en  est  de  même  dans  les  années  1415, 1523,  1425,  et  il  se 
trouve  actuellement  compris  sous  le  n**  6846  ancien  fonds. 

Bien  que  son  existence  continue  soit  aujourd'hui  aussi  clairement 
dépistée,  il  restait  cependant  comme  un  reclus  dans  une  oubliette  pendant 


(73)  L'année  courante  1375,  est  répétée  plusieurs  fois:  sapiats  que  en  lany  1373  cnrra  lauro 
nomcro  en  vin  ... .  qucst  ayn  de  1573...  e  sapiat  de  sert  que  lavu  1375  corre  lauro'nomre  en  viii,  fins 
que  sarem  al  primer  dia  de  janer  o  icxarem  vm  e  pandrcm  viin  pertot  a  quel  avn  de  137C. 

lu)  La  pose  des  pals  d'aragon  est  singulière. 

(75)  Tastu  semble  faire  peu  de  ras  des  pavillons  pour  la  détermination  de  l'époqne  des  cartes; 
cependant  il  tire  de  cette  source  dos  conclusions  décisives  pour  l'atlas  catalan.  Au  fond  nous  avons 
suivi  sa  remarque,  présumant  toutefois  une  double  rédaction  de  l'atlas  :  l'une  de  l'aonôe  1375, 
l'autre  postérieure  à  l'année  1378. 


CARTE  CATALANE,  i3i.  59 

430  ans.  Observé  cl  examiné  pour  la  première  fois  par  Walckenaer 
vers  1804  (le),  il  ne  fut  retiré  de  sa  cachette  et  publié  que  quarante  ans 
plus  tard  par  Buchon  et  Tastu,  et  il  doit  reparaître  dans  la  grande 
publication  des  monuments  géographiques  (77). 

Buchon  et  Tastu  en  rendant  public  le  fac-similé  de  Tatlas  catalan, 
exécuté  au  moyen  de  la  lithographie,  Font  pourvu  d'une  notice  de  la 
version  des  légendes,  et  de  Fimpression  de  toute  la  nomenclature  des 
lieux,  expliqués  ou  collationiiés  avec  les  dénominations  des  anciennes 
caries,  c'est-à-dire  de  celles  du  xvi'^  et  xvii®  siècle.  A  vrai  dire,  le  colla- 
tionnement  de  ces  caries  anciennes  avec  une  carie  plus  ancienne 
encore ,  n'offre  que  des  variantes  pour  retrouver  et  déterminer  avec 
plus  de  facilîlé  les  positions  sur  une  carte  moderne.  C'est  sprtoul  les 
côtes  d'Afrique,  de  la  mer  noire,  de  l'archipel,  qui  avaient  Ibesoin  de 
cette  confrontation,  partout  enfin,  où  la  dénomination  nouvelle  rem- 
plaça ou  défigura  la  nomenclature  ancienne.  Dans  l'inlérieur  de 
l'Afrique  et  surtout  en  Asie,  quantité  de  lieux  sont  répétés  sans  expli- 
cation. Aussi  il  n'y  a  rien  d'étonnant  quand  dans  la  masse  des  expliqués 
on  remarque  quelques  interprétations  hasardeuses  ou  qui  demandent 
des  reclifications  (78). 

131.  L'atlas  se  compose  de  six  tableaux  en  parchemin  vélin,  collés 
sur  bois,  peints  en  couleurs  or  et  argent  et  renfermés  en  un  seul  volume 
à  reliure  ancienne.  Chaque  tableau  a  25  pouces  de  hauteur  sur  18  de 
largeur;  ils  se  replient  dans  leur  largeur  en  deux  feuilles,  chacune  de 
9  pouces  de  large.  Les  deux  premiers  tableaux  contiennent  un  traité  de 
cosmographie  et  d'astrologie  en  guise  de  prolégomène  à  quatre  autres 
qui  composent  la  mappemonde.  Tout  le  long  des  replis  des  tableaux,  le 
dessin  et  l'écriture  sont  plus  ou  moins  affaiblis  et  endommagées  (79). 

(76)  Voici  commeDl Tastu  signale  celle  première  iDdication  de  son  existence  :  Walckenaer,  dit-il, 
fat  le  premier  qui  mcijtionna  Texislence  de  l'allas  catalan  de  1575.  —  1"  Dans  sa  traduction  de  Pin- 
kerton  1804,  6  vol.  et  atlas,  t.  Ul,  p.  398,  399,  IV,  p.  504,  561,  554  ;  —  %'  dans  les  annales  des  voya- 
ges, 1809,  p.  211  (voyez  la  lettre  de  Malte-Brun  à  ce  sujet,  et  celle  de  Graeberg  à  Malte-Brun  sur  les 
mss.  d'Usodimarc)  ;  —  3"  dans  ses  recherches  géogr.  sur  l'intërieur  de  l'Afrique ,  1819,  8°,  p.  18, 19  ; 
—  4"  dans  sa  dissertation  sur  les  voyages  dos  frères  Zeni  (annales  de  voyages  1837). —  Placido  Zuria, 
Angcio  Pezzana,  Gio  Bail,  Baldelli  Boni  et  Malle  Brun  répétaient  les  conclusions  de  Walckenaer. 

(77;  Tastu  ,  observant  avec  une  noble  émotion  cet  oubli  d'un  monument  aussi  précieux,  n'a  pas 
réfléchi  qu'il  en  rendit  la  publication  presque  inaccessible  à  bien  de  monde,  en  la  reléguant  dans  le 
XIV*  volume  d'une  collection  volumineuse  in-4°.  —  Résidant  dans  une  capitale,  je  l'eus...  pour  quel- 
ques jours...  (dépêchez-vous!)  —  Il  esta  regretter  que  toutes  ces  publications  des  monuments  et 
des  sources  historiques,  d'un  prix  élevé  par  leur  nature  ,  soient  ordinairement  excessivement  ren- 
cbérics  par  leur  insertion  dans  des  recueils  énormes,  par  le  peu  d'exemplaires  qu'on  en  tire,  par 
le  grand  format  et  le  luxe  ,  par  des  exigences  et  des  spéculations  mal  entendues.  En  général,  ces 
publications  ne  sont  accessibles  qu'aux  gens  opulents.  Comment  un  laborieux  indigent  pourrait-il 
aborder  Rubriquis ,  Edrisi ,  Marc  Polo ,  Aboulféda ,  Santarem  et  tant  d'autres  ouvrages  côtés  par  50 
et  centaines  de  francs?  Au  lieu  de  populariser  les  connaissances,  on  élève  des  barrières  insurmon- 
tables aux  curieux  qui  veulent  s'instruire  ou  élaborer  quelque  branche  de  connaissances  humaines. 
J'ai  va  tomber  ces  publications  des  mains  de  gens  qui ,  l'œil  mouillé,  se  détournaient  des  monu- 
ments qui  les  intéressaient  A  ces  plauiles,  à  ces  émotions  on  répond:  chacun  peut  trouver  ces 
ouvrages  dans  une  bibliothèque  bien  approvisionnée.  Oh  !  quelle  jactance  !  quelle  dérision  ! 

(78)  Nous  avons  remarqué  que  la  lecture  des  noms  est  quelquefois  en  désaccord  avec  le  fac-similé. 
Par  exemple ,  au  lieu  de  Chanfuy  je  trouve  dans  le  fac-similé  Chayansu  ;  Cimirey  se  laisse  mieux  lire 
ciait  rey  ;  Godansse ,  Godanssc  (Gdansk,  Dautzik  et  pas  Goettingue,  qui  est  loin  de  la  Baltique]  ;  ins. 
Cria,  Eria;  Goppardia,  Boppardia;  San  d'araicus  de  Silves  en  Espagne,  est  San  Dominicus  de  Silves; 
insula  de  Santé,  iusule  déserte ,  etc.  Plusieurs  épigraphes  du  fac-similé  se  laissent  lire  |  lus  régu- 
lièrement que  ne  le  fait  présumer  l'interprétation  imprimée.  (Voyez  notre  portulan.)  —  Je  signale 
ces  inadvertances  et  ces  bévues  parce  qu'ils  se  trouvent  dans  la  publication  :  mais  ie  dois  disculper 
l'éditeur  Tastu ,  dont  les  soins  éclairés  firent  disparaître  de  la  publication  une  énorme  quantité 
d'antres. 

(79)  Je  prends  sous  ma  responsabilité  la  lecture  et  rinterprétation  de  ce  passage  presque  entière- 


iO  6É0GR.   LÀTIME,  1330-1410. 

Dans  son  traité  de  cosmographie  et  d'astrologie,  le  cosmographa 
catalan  parle  d*abord  de  Tunivers  et  le  compare  à  un  œuf;  puis  de  la 
création  qu'on  peut  s'imaginer  de  cinq  manières;  ensuite  des  quatre 
éléments.  Il  explique  la  forme,  la  position  et  l'intérieur  du  globe 
terrestre.  Le  grand  cercle  de  la  terre  est  de  180000  stades,  c'est-à-dire 
vingt  mille  cinquante  deux  milles  (se).  C'est  par  l'entremise  des  arabes 
qu'il  savait  le  nombre  de  stades  inusités,  nombre  puisé  dans  les  rela- 
tions ptoléméennes.  Les  20052  milles  donneraient  9  (8,97)  stades  à  un 
mille  et  55,7  milles  à  un  degré.  L'origine  d'une  semblable  supputation 
serait  introuvable  si  l'on  n'admettait  pas  une  erreur  du  cosmographe 
ou  de  son  dessinateur.  Il  semble  qu'au  lieu  de  20052  on  donnait  20520 
milles  à  la  circonférence  de  la  terre.  Ce  nombre  donnerait  8^3^/i7i  p/s). 
de  stades  à  un  mille,  57  milles  à  un  degré  ou  19  parasanges,  grandeur 
communiquée  par  les  arabes. 

Le  cosmographe  fait  ensuite  une  courte  et  incomplète  revue  des  trois 
parties  de  la  zone  ou  du  cercle  de  l'habitable,  c'est-à-dire  de  l'Asie,  de 
l'Europe  et  de  l'Afrique  (si).  Il  y  reproduit  quelques  passages  et  étymo- 
logies  d'Isidore  de  Séville,  plus  d'une  fois  nommé  dans  cet  atlas.  11 
touche  spécialement  l'Italie,  le  Chypre,  la  Sicile  et  l'intérieur  de 
l'Europe.  Tout  ce  qu'y  est,  vient  de  la  géographie  ancienne  romaine, 
modernisée  par  le  langage  catalan. 

Yoici  ce  que  dit  ce  passage  purement  géographique.  —  La  zone  ou  le 
cercle  habitable  que  nous  occupons  ou  que  nous  supposons  se  divise  en 
trois  parties.  L'une  est  l'Asie,  l'autre  l'Europe  et  l'autre  l'Afrique. 
L'Asie  est  septentrionale  ou  nord  ;  l'Afrique  s'étend  du  midi  à  l'occident 
et  comprend  toute  la  côte  de  Barbarie. 

L'Italie  vient  ensuite,  qui  autrefois  s'appelait  Grèce,  puis  Saturnia, 
puis  ....  Latium....  ensuite  elle  fut  appelée  Ausonia  et  prit  enfin  le  nom 
d'Italie  (cf.  Isidori  originum  XIV,  p.  190édit.  Paris,  1601)....  commence 
au  pied  des  montagnes  appelées  Alpes,  qui  ont  leur  penchant  du  côté 
de  la  Lombardie  et  se  terminent  dans  la  mer  Tyrrhenienne.  Dans  ce 
pays  se  trouve  la  ville  de  Rome  qui  a  pris  son  nom  de  Romulus,  roi,  qui 
édifia  antiquement.  On  bâtissait  les  villes  en  leur  donnant  la  forme  de 
grands  animaux  ou  bétes  sauvages,  voilà  pourquoi  Rome  a  la  forme  du 
lion  dominateur  de  cent  bétes.  Cette  Rome  est  la  capiialc  de  toutes  les 
villes.  Tous  ses  édifices  sont  faits  de  brique  et  de  luile ,  voilà  pourquoi 
elle  est  appelée  Laternis,  ce  qui  veut  dire  faîte  de  briques.  Brindes  a  la 
forme  d'un  cerf;  Carlhage  a  la  forme  d'un  bœuf;  Troie,  prit  la  forme 
d'un  cheval. 

L'Afrique  prit  son  nom  d'Afer,  un  des  bâtards  d'Abraham.  Elle  est  du 
côté  de  l'orient  au  sud-ouest  du  fleuve  Indus  et  s'étendant  vers  le  midi, 
s'en  va  vers  l'occident. 

Ile  signifie  endroit  situé  dans  l'eau  salée  (Isidor,  orig.  p.  192).  — 
Chypre  se  trouve  dans  la  mer  méditerranée  en  face  de  la  Syrie;  elle  a 

ment  eflhcë  aujourd'hui ,  dit  Testimable  éditeur  de  Tatlas  catalan ,  et  que  j*ai  cm  pouvoir  lire  il  y  a 
quelques  an  nées  (notices  et  extraits  de  la  biblioth.,  t.  XIV,  p.  W.  Il  n'y  a  pas  de  doute ,  chaque  jour 
le  temps  fait  de  nouveaux  ravages  dans  ces  monuments  et  la  multiplication  de  leurs  copies  marche  è 
pas  de  tortue ,  s'ajourne,  éprouve  des  peines  inouïes,  des  obstacles  incroyables. 

(80)  Empcro  laredonea  de  la  terra  es  rocsurada  per  clxxx  millers  de  stadis,  los  quais  son  xx  millia 
14Ï  milles.  -► 

ffii)  La  zona  o  celrcle  babitsèile,  laquai  per  nos  es  tenguda  e  pensada  se  dcparteis  en  m  parts. 


CARTE   CATALAKE,   15!.  41 

jitrë  son  nom  d'uDe  ville  appelée  Ciper,  qui  se  trouve  dans  la  dite  fie. 
Elle  est  encore  appelée  Centapole,  parce  qu'elle  renferme  cent  villes. 
Elle  est  située  vis-à-vis  la  nier  Libyenne  appelée  Adriatique.  —  Ensuite 
vient  la  Sicile,  nommée  d'abord  Sicania  et  située  de  la  même  manière. 
Elle  s'appelait  aussi  Trinacria,  des  trois  monts  qui  s'y  trouvent.  Dans 
cette  île  est  le  mont  Etna,  où  le  soufre  brûle  en  tout  temps. 

La  mer  rouge  sort  de  la  grande  mer  et  prend  cette  couleur  rose  de 
la  terre,  qui  est  presque  toute  vermeille  et  vicie  tous  ses  rivages  (Isidor, 
orig.  p.  181). 

La  mer  est  appelée  mer,  parce  qu'elle  est  amère.  Elle  passe  secrète- 
ment à  les  veines  de  la  terre,  y  dépose  son  amertume  et  sort  ensuite 
travers  douce  par  les  sources,  après  quoi  elle  reprend  sa  nature. 

L'Europe  a  pris  son  nom  d'Ëuropus,  roi,  ou  d'Europa,  fille  d'Agenor. 
Dans  cette  partie  du  monde ,  vers  le  nord ,  sont  les  monts  Ryphées  et  le 
fleuve  Tanaîs,  qui  doit  son  nom  au  roi  Tanaïs.  Là  sont  aussi  les  grands 
dépôts  de  la  grande  mer,  qui  se  réunissent  près  de  la  ville  de  Theodosium 
(Cafa)  au  fleuve  Tanaïs;  et  celle-ci  est  située  au-dessous  du  Tanaïs  et 
s'étend  jusqu'au  Danube. 

Dans  cette  partie  se  trouvent  les  provinces  d'AIania,  de  Dacia  et  de 
Gotbie.  Du  Danube  jusqu'aux  Alpes  est  la  grande  Germanie ,  laquelle 
est  ainsi  nommée  à  cause  de  la  confraternité  des  peuples;  elle  finit  vers 
le  couchant  au  fleuve  du  Rbônes  et  au  nord  au  fleuve  de  Alba.  Dans 
cette  contrée  se  trouve  la  région  de  Sevia,  qui  est  dite  Amont  (mon- 
tante, supérieure).  Celle-là  est  l'AUcmanya,  laquelle  prit  son  nom  du 
bassin  dit  Alaraan  (lac  Léman). 

La  grande  mer  s'appelle  Oeceanus.  Océan  veut  dire  la  même  chose 
que  lien  ou  limite  de  courroies  ou  cercles  en  fer. 

De  semblables  notices  accompagnaient  de  temps  anciens  les  mappe- 
mondes et  les  images  rondes. 

Ayant  touché  l'océan,  le  cosmographe  abandonne  sa  revue  géogra- 
phique pour  expliquer  le  flux  cl  le  reflux,  qu'il  spécifie  particulièrement 
sur  les  côtes  opposées  de  la  Manche.  Il  parle  intermédiairement  da 
«ours  du  soleil  et  de  la  lune  ;  comment  on  peut  trouver  cette  dernière 
en  mesurant  les  quarts  des  vents;  Fheure  de  la  nuit  par  les  chariots  et 
les  deux  frères;  le  lever  et  le  coucher  du  soleil  relatifs  aux  quarts  des 
vents.  Suivent  les  pronostics  de  tous  les  jours  de  la  lune,  la  spécification 
•des  vents;  puis  le  cosmographe  compte  le  temps  et  donne  pour  les 
pronostics  une  flgure  humaine  aux  signes  zodiacaux  correspondants  à 
ses  membres,  d'après  ce  qu'a  dit  Plolémée  :  diu  Tolomeu,  l'astrolo- 
gue (ss).  C'est  ce  que  contient  le  premier  tableau. 

Le  second  tableau  présente  une  suite  de  57  cercles  ou  bandes  circu- 
laires déroulées  d'un  centre  et  entourées  d'une  bordure  où  flgurentdes 
entre  lacs  arabes  qui  cachent  les  informes  caractes  arabes.  Aux  quatre 
coins  sont  les  flgures  des  quatre  saisons.  Dans  les  bandes  on  distingue  les 
noms,  les  chiffres,  les  figures  représentant  :  calendrier,  zodiaque,  mois, 

(8S)  Thamarat  fi  alikam  al  noginm,  est  le  titre  cTua  abi«gé  de  ce  que  Ptolémée  a  écrit  sur  l'astro- 
logie judiciaire,  composé  par  Saouanl ,  qui  est  peut-être  un  Scverus,  que  Hadji  khalfa  prétend 
avoir  été  disciple  du  même  Ptolémée;  plusieurs  auteurs  out  fait  des  scliarh,  ou  commentaires 
anr  cet  ouvrage  :  entre  autres  :  \boii  Josef  al  Oclidessi ,  Abou  Mohammed  al  Schail>aoi,  Abou 
Saïd  al  Tbamamr,  Ebn  Thsub  al  Djethaliki,  al  Sarakiisi,  etc.  (Oherbelot). 

II.  n 


42  GÉOGR.   LATIMfi,   1350-1410. 

lettres  dominicales,  nombre  d'or,  heures,  constellations,  planètes;  corres- 
pondant aux  trois  éléments  et  le  quatrième  élément,  la  terre,  se  trouve 
au  centre,  où  Tastrologue  mesure  la  hauteur  du  soleil.  Les  28  constella- 
lions  portent  les  noms  arabes  en  écriture  latine  et  orthographe  catalane. 

f52.  Chez  le  cosmographe  catalan,  mapa  mondi,  avait  autant  de 
valeur  que  la  géographie.  Plinus  est  maestro  de  mapa  mondi ,  c'est-à- 
dire  dans  la  géographie.  Cependant ,  mapa  mondi  vol  dir  aylani  con 
ymage  dcl  mon  e  delos  diversas  dais  del  mon  e  de  los  régions  qui  son  sus 
la  terra,  de  diversa^s  maneras  de  gens  qui  en  ela  babilen,  signifie  :  image 
du  monde  (imago  mundi)  des  divers  états  du  monde,  des  régions  qui 
sont  sur  la  terre  et  des  diverses  espèces  de  gens  qui  Tbabitent.  C'est 
donc  rimage  et  la  description  (ss).  Le  cosm#grapbe  a  dessiné  l'image 
du  monde  ou  de  Fhabilable  en  quatre  tableaux  ou  cartes  qui  composent 
un  seul  tableau.  Chaque  carte  est  sous  la  rose  de  seize  vents.  Cette  répéti- 
tion de  la  rose  ferait  le  tableau  quatre  fois  plus  long  que  large,  mais  ces 
roses  s'empiètent  l'une  sur  l'autre  et  diminuent  un  peu  cette  longueur; 
aussi  le  cosmographe,  dans  toute  la  longueur  du  tablcau-au  nord  et  au 
sud,  a-t-il  étendu  sun  dessin  au  delà  de  la  rose,  de  façon  que  son  tableau 
entier  est  trois  fois  plus  long  que  large. 

Pour  notre  examen  et  notre  atlas,  nous  l'avons  réduit  à  la  proportion 
de  200  à  49,  c'est-à-dire  à  un  quart  de  l'échelle  (v.  n«"  80,  81,  de  l'atlas). 
  la  suite  de  quoi,  sur  toutes  les  côtes  de  l'embouchure  de  l'Elbe,  en 
côtoyant  l'Irlande,  l'Angleterre,  le  continent  jusqu'au  détroit;  la  mer 
méditerranée  et  noire,  et  l'Afrique  baignée  par  l'océan,  nous  n'avons 
inscrit  qu'une  partie  des  inscriptions  qui  chargent  trop  abondamment 
la  mappe  catalane.  De  même,  j'ai  pu  désigner  toutes  les  fies  de  la  médi- 
terranée, et  à  peine  quelques-unes  de  celles  qui  sont  dans  Fadriatique. 
Au  reste,  dans  les  autres  parties  de  la  mappe  et  partout  dans  l'intérieur 
du  continent  toutes  les  nomenclatures  s'y  trouvent,  à  l'exception  de  deux 
ou  trois  des  côtes  de  la  mer  caspiennê.  Quant  aux  longues  légendes, 
elles  sont  insérées  en  entier  ou  en  extrait  pour  autant  qu'elles  signaient 
la  nomenclature,  la  situation  géographique,  la  direction  du  commerce, 
ou  qu'elles  expliquent  les  figures;  ce  qu'elles  disent  des  produits,  de  la 
saison,  ou  ce  qui  dérive  de  l'érudition,  a  été  abandonné  ou  passé  sous 
silence  faute  de  place.  Les  figures,  figurines,  pavillons  y  sont  tous  (84). 
Les  différences  exceptionnelles  de  constructions,  dans  Tombouctou, 
San  Jago  de  Compostella»  Jérusalem,  sainte  Catherine,  Mekke;  tour  de 
Babel,  trois  églises,  Ssiras,  Yssicol  sont  observées;  les  villes  chrétiennes, 

(83)  Mappemonde,  bab  mondou,  maba  mondi ^  a  la  même  valeur  chez  les  arabes  :  carte  et 
livre  de  géographie.  Kharthi  ou  Kbartas  cliez  eux  signifie  ordinairement  carte  marine.  —  Les 
prolégomènes  du  cosmographe  catalan  décèlent  une  confusion  de  la  valeur  de  mappa  mundi  : 
en  effet:  mappe,  image,  présentait  une  description  géographique,  partout  où  elle  trouvait  une  place 
vide.  La  même  confusion  offre  le  mot  latin  descriptit.  Au  xvi*  siècle  encore  ou  dirait  :  un  tel 
descripsit  regioncm ,  parce  qu'il  a  publié  un  volume  de  sa  description  ;  un  autre  dcscripsit 
eandem,  parce  qu'il  a  compose  sa  carte  géographique. 

[Si)  Quant  aux  pavillons  (disent  Buclion  et  Tastu)  nous  les  avons  marqués  ne  tenant  pas 
toujours  compte  du  blason ,  qui  ne  laisse  pas  d'être  souvent  d'une  grande  exactitude  liistorlr 

Sue.  —  A  quoi  nous  répondons  :  qne  c'est  dommage  que  le  fac-similé  n  ait  pas  garanti  l'exécution 
es  pavillons  et  y  ait  laissé  beaucoup  de  doutes.  Tous  les  lions  y  sont  de  même  forme.  Le 
cosmographe  ne  les  a-t-il  nas  distingués?  a-t-il  Inventé  pour  tous  une  figure  étrangère  à 
rhéraldiquc?  Car  t)artout ,  au  lien  de  h  queue,  le  lion  est  décoré  (!*une  aile.  Je  suis  peiné  d'avoir 
à  l'observer." 


i 


CARTE   CATALANE,  13S.  43 

surmontées  d'une  croix,  el  non  chrétiennes,  surmontées  d'un  globe,  sont 
désignées.  Je  pense  qu'on  distin£;uera  toutes  les  variations  des  villes 
dans  leur  ûgure,  qui  a  été  amoindrie,  pour  faire  plus  de  place  aux 
épigraphes,  à  on  tour  seulement  à  coupole  ou  appointée  par  une  croix  ; 
à  la  tour  accostée  de  deux  tourelles  crénelées;  à  la  tour  rehaussée  en 
un  étage  ou  en  deux  étages;  enfin  les  figures  doublées  ou  triplées,  de 
€ambelech,  Fes,  Paris. 

135.  La  carte,  dans  sa  longueur,  se  laisse  tourner  indifféremment, 
nord,  sud,  en  bas  ou  en  haut,  comme  on  le  voit  par  les  figures,  par  les 
longues  inscriptions  et  les  épigraphes  en  majuscules.  Les  dénominations 
des  lieux  sont  inscrites  en  tous  sens,  continentales,  comme  de  rigueur, 
sur  le  continent,  à  rexceplion  extraordinaire.  Les  dénominations  insn- 
laires  sur  la  mer,  celles  de  grandes  îles,  suivent  le  mode  continental. 
Toutes  ses  dénominations  partent  du  point  qui  indique  la  situation  du 
lieu  :  une  autre  direction  est  à  peine  trouvable.  Par  ce  mode  d'inscrire 
les  dénominations,  abstraction  faite  des  fies,  se  forme  une  seule  série 
non  interrompue  de  toute  la  nomenclature  des  rivages,  qu'on  peut 
suivre  d'un  bout  à  l'autre  en  tournant  la  carte  à  chaque  grand  pli  et 
repli  des  rivages  (cette  nomencl.  est  examinée  dans  le  portul.  génér.). 

Du  paradis  au  sominet  du  monde,  il  n'y  a  pas  de  question;  l'orient 
esta  droite  ou  à  gauche.  Tourner  la  carte  sud  en  haut,  est  la  méthode 
arabe;  sud  en  bas  est  une  nouvelle  méthode,  introduite  depuis  l'inven- 
tion de  la  boussole. 

Le  propos  de  la  mesure  de  la  circonférence  du  globe,  est  une  vaine 
érudition  pour  cette  image  du  monde.  La  dite  image  ou  figure  est  ronde 
comme  une  balle  à  jouer  :  ela  dila  ymago  ho  figura  es  rodona  a  mancra 
de  pilota  (g*5)  :  mais  elle  se  déroule  en  tableau  oblong,  parce  que  les 
lisières  septentrionales  et  méridionales  du  tableau  sont  en  raccourci; 
toute  la  masse  interminable  de  l'Afrique,  qui  s'étend  du  midi  à  Tocci- 
dent  est  comprimée. 

La  carte  est  nautique.  Elle  avait  pour  sa  partie  occidentale  tous  les 
éléments  pour  une  construction  de  cette  nature.  Pour  la  partie  orien- 
tale elle  est  accablée  par  le  continent  asiatique.  Le  cours  du  Tigre  et 
Baldac  ou  Bagdad,  la  Mekkc,  l'arche  de  Noé  sur  la  montagne  d'Araral 
et  la  Tour  de*  Babel,  d'où  se  disporsôrenl  les  peuples,  constituent  une 
ligne  qui  divise  le  tableau  en  deux  moitiés  égales.  Or,  rimmense  Asie 
est  aussi  représentée  en  raccourci.  Le  cosmographe  catalan  savait  <|n'il 
construisit  dans  la  moitié  occidentale  une  carte  nautique  :  quant  au 
reste,  il  traça  une  image  figurative.  I^  seule  mer  de  Sarra  (caspienne) 
est  dessinée  en  portulan. 

Or,  la  seule  partie  occidentale  méritiî  d'être  confrontée  avec  la  con- 
oaissance  d'aujourd'hui,  autant  de  la  mer  méditerranée  que  de  côtes 

(85)  A  celte  occasion  le  catalan  compare  cette  balle  à  un  cnnf  c  a  semblant  dou  :  comparaison 
analogue  k  celle  d'Ibn  al  Ouardi.  Mais  il  y  a  une  diiréi-fnre  extrême  dans  cette  analogie. 
L'arabe  comprend  par  la  coquille,  le  bluno,  el  le  jaune  dViMir,  Tliabilable,  l'océan  et  le  mont 
Kaf:la  pensée  du  catalan  se  rojclle  toul  de  suite  dans  l'immensité  de  l'univers  :  La  coquille 
c'est  le  ciel ,  le  blanc  l'air  pur,  le  jaune  l'air  trouble ,  et  la  terre  est  purlnsn  dans  l'air  (trouble) 
comme  lo  scmen  est  enclos  dans  le  jaune  dVnf  :  e  la  terra  os  cn<-lnsa  dius  laer,  axi  con  lagota 
de  la  grexa  es  enclosa  en  lo  vermeil.  Ce  sont  les  quatre  cléments  qui  s'envrlopjn^nl  :  la  tcrn», 
l'ean,  rair  et  le  feu. 


44  6É0GE«   LATINC9   1330-1410. 

extérieures,  et  pour  donner  une  carte  comparative  de  la  carte  catalane 
avec  celle  d'aujaurd'hui,  nous  procédons  de  la  même  manière  que  nous 
Tavons  fait  pour  la  carte  sanutine  (voyez  n^  81  de  notre  atlas).  Or,  pour 
graduer,  le  méridien  étant  réglé  et  tiré  par  Venise  sur  la  direction  d« 
Rome,  le  même  rayon  de  IGo  qui  a  servi  à  graduer  la  carte  sanutine, 
indiqua  les  parallèles  de  la  carte  catalane.  Il  est  évident,  par  cette 
graduation,  que  la  composition  de  ces  deux  cartes  de  Tune  et  de  Fautre 
est  juste  la  même,  toutes  les  proportions  et  poses,  à  quelques  exceptions 
près  sont  les  mêmes.  De  celle  façon  la  portion  nautiquement  élaborée 
de  la  carte  catalane,  se  trouve  placée  sur  les  positions  littorales  déter- 
minées par  nos  géographes  modernes.  Chacun  peut  examiner  et  juger 
jusqu'à  quel  point  elles  correspondent  avec  celles  de  la  carte  catalane, 
et  à  quel  point  d'exactitude  est  arrivée  la  méthode  nautique  pour  for- 
mer un  ensemble  d'un  espace  de  50  degrés  en  longitude  et  de  20  en 
latitude,  sans  chercher  à  déterminer  les  longitudes  ou  les  latitudes  par 
des  observations  astronomiques. 

Et  je  répète  le  défi  de  trouver  les  caries  de  Visconli ,  de  Pizigani  et 
d'auires  inférieures  à  celle-ci.  Dans  la  composition  de  chacune,  se 
feront  sans  doute  remarquer  des  déviations,  des  irrégularités,  mais  la 
composition  laborieuse  avait  déjà  ses  bases,  ses  certitudes  pour  soute- 
nir la  proportion  et  la  configuration. 

154.  Il  y  est  clair  que  le  levant  est  une  partie  moins  solide.  Il  sem- 
ble que  les  navigateurs  et  les  cosmographes  ne  purent  pas  saisir  au 
juste  les  deux  angles  :  aigu  du  golfe  d'Alexandreite  et  obtus  du  littoral 
de  l'Egypte  et  de  la  Palestine.  C'est  la  cause  pour  laquelle  la  composi- 
tion catalane  s'égare  très-sensiblement  avec  la  Grèce  et  tout  l'archi- 
pel, avec  la  mer  noire  et  l'Asie  mineure  :  c'est  ainsi  queRhod,Constan- 
tinople,  et  tout  ce. qui  tient  les  méridiens  rapprochées,  et  la  mer 
noire,  montent  presque  à  un  degré  trop  au  nord. 

La  graduation  de  ces  caries  nautiques  découvre  un  autre  vice , 
affectant  la  totalité  de  la  construction.  Ce  vice  charge,  je  pense,  toutes 
les  cartes  nautiques  sans  exception.  C'est  la  position  oblique  de  la  mer, 
la  déclinaison  de  la  rose  des  vents  :  ainsi  que  la  ligne  d'est  à  ouest , 
représente  à  peu  près  la  direction  de  E  */^  SE  à  0  */*  NO.  Celle  obli- 
quité parait  être  un  peu  plus  forte  dans  la  carte  de  Sanuto  et  monte  à 
10  degrés  dans  la  carte  catalane.  Par  conséquent  la  rose  fait  incliner 
l'Espagne  et  le  détroit  dans  la  direction  de  0  V^  SO  et  fait  remonter 
la  mer  noire  vers  E  */*  NE. 

Cette  irrégularité  est  grave,  elle  montrerait  que  les  marins  ne 
savaient  pas  s'orienter  au  juste,  leurs  vents  ne  répondant  pas  aux 
points  cardinaux.  Leurs  rumbs,  partout  et  toujours  dans  la  mer  médi- 
lerranée,  furent  pris  dans  un  sens  incliné  et  tracés  obliquement;  leur 
Est  n'était  que  E  V^  SE;  leur  Nord  élait  0  ^4  NO  et  ainsi  de  suite,  de 
toutes  les  directions  des  vents.  Ce  désaccord  vient  évidemment  de  la 
boussole  dont  l'aiguille  déclinait  à  l'est.  Les  marins,  dès  qu'ils  commen- 
cèrent à  se  servir  de  boussole,  remarquèrent  certainement  cette  décli- 
naison :  mais  confiants  dans  leur  instrument,  ils  s'abandonnaient  à 
ses  directions  décorées  des  appellations  des  vents,  ne  se  souciaient  ni 
de  l'élévation  du  pôle,  ni  des  points  cardinaux,  s'habituant  bientôt  à 


COMPARAISON,    135..  '  4i$ 

combiner  la  viie  du  ciel  avec  leur  boussole.  Les  cosmographes  n*ayaiit 
que  les  directions  de  la  boussole  et  les  distances  rapportées  par  les 
navigateurs,  composaient  leurs  cartes  sur  la  rose  de  Taimant,  qu*ils 
qualifiaient  rose  des  vents  (se). 

En  examinant  le  littoral  de  Tocéan  atlantique,  la  carte  catalane 
décèle  un  autre  défaut  qui  était  en  train  de  la  régularisation.  C'est  la 
petitesse  de  proportions  extérieures,  comparativement  à  celles  de  toute 
la  mer  méditerranée.  Elles  sont  très-sensibles  dans  la  carte  de  Sanuto, 
nous  les  avons  qualifiées  d*accourcies.  Elles  sont  beaucoup  moins  dimi- 
nuées dans  la  carte  catalane  :  cependant  le  cap  Boiador  serait  d'un 
degré  plus  au  nord  à  raison  de  la  graduation  que  nous  avons  appliquée 
à  la  mer  méditerranée,  et  Lisbone,  Paris,  etc.,  se  trouvent  trop  au  sud. 
Les  cartes  postérieures  établirent  de  plus  justes  dimensions  de  ces 
parages  océaniques.  Dans  leurs  compositions  laborieuses,  les  cosmo- 
graphes  et  les  hydrographes  s'efforçaient  sans  relâche  à  perfectionner 
les  caries  nautiques  et  continuaient  à  faire  un  progrès  remarquable. 

Tous  les  marins  étaient  en  possession  de  ces  caries.  On  les  dressait, 
dessinait  et  copiait  à  leur  usage,  à  Venise,  à  Palerme,  à  Messine,  à 
Gènes,  à  Majorque,  à  Barcelone  et  ailleurs.  Les  marins  savaient  ce 
qu'ils  possédaient  et  les  savants  ne  les  comprirent  pas,  lorsqu'ils  se 
mirent  eux-mêmes  à  battre  la  campagne  pour  devenir  cosmographes. 

Marche  de  la  cartographie  latine,  comparée  à  celle  des  arares. 

155.  Personne  ne  contestera,  je  pense,  que  les  cosmographes  qui 
dressaient  les  caries  spéciales ,  générales  et  les  mappemondes ,  avaient 
à  leur  usage  un  bon  approvisionnement  de  matériaux.  Les  portulans 
peints  de  quelques  rivages  ne  leur  auraient  point  suffi  pour  composer 
Fensemble,  s'ils  n'avaient  eu  de  la  part  des  marins  des  données  géné- 
rales de  distances  à  travers  les  mers.  Le  cabotage  prépara  des  maté- 
riaux pour  la  construction  des  portulans;  la  navigation  hauturière 
fournit  des  distances  nécessaires  pour  la  composition  de  la  carte 
générale. 

Les  cosmographes  comprenaient  bien  la  position  des  lieux  relative 
au  pôle  ou  la  latitude  géographique,  maïs  leur  méthode  de  dresser  les 
cartes  ne  se  souciait  pas  de  tracer  les  parallèles.  Quant  aux  longitu- 
des, elles  leur  convenaicnl  encore  moins.  Les  marins  par  conséquent, 
et  les  cosmographes,  ne  voulaient  pas  entendre  de  longitudes,  et  les 
cosmographes  n'avaient  aucun  chiffre,  ni  de  longitude,  ni  de  latitude 
pour  la  composrlion  des  cartes.  Leur  carie  ne  se  fondait  point  sur  ces 
bases  scientifiques.  La  construction  sans  assiette  sur  le  globe,  régulière- 
ment couchée  sur  le  plan,  se  basait  sur  les  dislances  parlant  d'un  point 
déterminé,  dans  la  direction  déterminée  par  la  rose  de  la  boussole. 

(86]  n  e$t  impossible  de  ne  pas  admettre  que  le  marin ,  habitué  antérieurement  à  la  direction 
du  pôle,  n'ait  pas  de  suite  remarqué  la  déclinaison  de  l'aiguille  à  laquelle  il  allait  se  confier. 
Colomb,  s'avançant  dans  les  hauteurs  de  Tautre  hémisphère,  le  iZ  septembre  1-192,  remarqua  do 
suite  que  les  boussoles ,  dont  les  directions  avaient  été  au  uora-est ,  déclinaient  vers  le 
nord-oaest  et  que  cette  déclinaison  à  l'ouest  augmentait  le  matin  suivant.  Cabot,  enli97, 
remarqua  aussi  ce  phénomène  et  indiqua  le  méridien  (à  110  milles  italiens  de  Flores)  sur  lequel 
raigoille  montrait  le  vrai  nord  (llumboldt,  examen  de  l'hist.  de  la  géogr.  do  nouveau  monde, 
t.  m,  p.  %d  Si).  Dans  cette  remarque  des  investigateurs  du  nouveau  in«iide«  on  ire  voit  que 
rob$ervatioa  du  contraire  de  ce  qui  était  Ct>anu. 


A6  GéOCR.    LATINR,    1330-1410. 

Les  marins  trouvaient  la  lune,  en  mesurant  les  quatre  vents;  ils 
déterminaient  Tlieure  de  la  nuit  par  le  cliarriot  et  les  deux  frères;  ils 
observaient  le  lever  et  le  coucher  du  soleil  de  diflcrenles  saisons  et 
relataient  les  de£;rés  aux  quatre  vents  (s 7).  Mais  ces  vents  dans  leur 
direction  et  leur  langage,  sont  reportés  sur  Findicalion  de  la  boussole. 
Dans  la  composition  des  cartes ,  ils  ne  fournissent  que  les  indications 
de  la  boussole,  de  sa  rose.  La  pratique  comprit  de  bonne  heure  les 
rumbs  des  grandes  distances  et  détermina  leur  direction  et  leur 
dimension  suivant  que  le  navire  avançait  ou  s'allarguait;  ou  bien  elle 
les  rendait  à  déterminer  aux  cosmographes  (ss). 

Les  cosmographes,  par  des  combinaisons  laborieuses  et  judicieuses, 
arrivaient  à  la  formation  de  Tensemble,  ils  soumettaient  toute  la  carte 
à  une  rose  delà  boussole  et  fixaient  les  distances,  Téloignement  du 
point  déterminé  sur  les  rayons  pour  préparer  les  moyens  les  plus 
faciles  aux  dessinateurs  et  pour  les  transmettre  aux  gens  de  leur  école. 
Or,  les  Gosmographes  versés  dans  Tart  de  la  composition  des  cartes , 
gardaient  et  conservaient  chez  eux  les  notes  et  les  distances  nautiques  ; 
ils  gardaient  aussi  les  distances  continentales  et  les  transmettaient 
toutes  à  leurs  successeurs,  à  leurs  disciples.  Ils  étaient  en  possession 
de  ces  matériaux,  depuis  des  temps  éloignés,  si  ce  n'est  à  partir  de 
récole  ravennate,  au  moins  dès  Tépoque  de  Roger.  Bien  qu*aucune  de 
leurs  nombreuses  notes  ne  nous  soit  parvenue,  elles  encombraient 
cependant  leurs  dépôts  :  les  notes  rogériennes  et  des  marins  posté- 
rieurs n'étaient  guère  perdues.  C'est  d'après  ces  notes,  que  les 
connaissances  géographiques  se  développaient,  et  la  cartographie  se 
perfectionnait  dans  le  cercle  de  l'habitable  examinée  par  la  navigation. 

Rien  encore  n*appelait  les  cosmographes  à  réformer  la  partie 
orientale.  Pour  opérer  cette  réforme ,  il  fallait  ou  accepter  les  cartes 
graduées  des  arabes  ou  réunir  des  matériaux  suffisants  pour  convaincre 
de  la  nécessité  de  la  réforme:  fournir  enfin  le  moyen  de  l'accomplir. 
Les  premières,  étant  d'une  autre  nature  et  fondées  sur  d'autres  bases, 
ne  convenaient  pas  aux  conceptions  des  cosmographes  :  ils  se  méfiaient 
du  produit  des  infidèles,  qui  aurait  ruiné  le  centre  du  monde  et  le 
cercle  accepté.  Par  la  même  raison,  ils  récusèrent  les  proportions  que 
pouvait  offrir  la  grande  carte  rogérienne  :  elle  était  graduée,  elle  sen- 
tait trop  l'arabe.  Les  cosmographes  se  contentaient  des  seules  figurines 
rondes,  tant  siciliennes  qu'arabes,  aussi  conformes  à  leur  image  du 
monde. 

Quant  aux  matériaux,  au  moyen  desquels  on  pouvait  opérer  la 
réforme  des  conceptions  étroites  des  cosmographes ,  dès  que  les  pro- 
portions et  les  dimensions  arabes  étaient  désavouées,  ils  manquèrent 
très-longtemps  :  de  nouveaux  renseignements  n'arrivaient  point.  Ceux 
qu'apportaient  les  marchands ,  les  moines,  les  ambassadeurs,  étaient 
insuffisants;  les  itinéraires  gigantesques  de  Marco  Polo  n'offraient 
aucun  appui  connu  pour  en  organiser  une  construction;  les  voyageurs 
narraient  plus  de  géographie  descriptive,  que  de  chiffres  nécessaires  à 
la  géographie  des  mappes.  Tout  ce  qu'on  aurait  pu  extraire  pour  cette 

87)  Voyez ,  prolégomèna  de  Tallas  catalan  de  157S,  et  Pigafetta,  de  la  navigation. 

88)  Science  de  martvluïo,  voyez  cliap.  16t  et  sa  note. 


COMPARAISON,   130.  47 

partie,  se  reufermait  très-facilement  dans  la  moitié  orientale  du 
monde,  avant  d*alteindre  les  flammes  et  la  porte  du  paradis.  EnGii  ou 
peut  à  certains  égards  aecuser  à  juste  titre  les  cosmographes  de  négli- 
gence impardonnable  pour  le  continent  oriental.  Les  cosmographes 
opéraient  sous  l'impulsion  des  pilotes  qui  ne  s'enfonçaient  pas  dans 
les  terres  et  ne  visilaient  point  le  lourd  continent  de  FAsie  et  de 
l'Afrique. 

136.  Toutes  ces  réflexions  nous  conduisent  à  distinguer  le  fond  de 
la  géographie  des  arabes  et  des  latins.  Chacun  avait  ses  préjugés  établis, 
ses  habitudes,  ses  défauts,  ses  négligences,  ses  bases  et  moyens;  le 
progrès  et  le  perfectionnement  incontestables  qu'on  remarque  par  la 
construction  des  cartes,  chez  les  Arabes,  la  longitude  acceptée,  la 
défiguration  de  la  Syrie,  le  Nil  fantastique,  la  position  houleuse  de  la 
cité  d'Ariu  et  toutes  sortes  de  contes  fabuleux  débiles  avec  profusion, 
n'empêchaient  pas  de  suivre  la  théorie  scient i Pique,  de  progresser  et  de 
perfectionner  la  construction  des  cartes;  chez  les  latins,  le  cerceau 
océanique  entourant  le  monde,  le  nombril  de  l'habitable,  le  paradis, 
l'enfer,  n'empochaient  point  de  progresser  dans  la  connaissance  géogra- 
phique, d'étendre  les  investigations  et  de  former  de  plus  larges  et  plus 
exactes  conceptions  pour  la  construction  des  cartes. 

Les  uns  et  les  autres  négligeaient  ce  qui  n'était  point  de  leur  posses- 
sion; cependant  celte  négligence  pesait  d'avantage  à  charge  des  arabes. 
Ils  ont  précédé  les  latins  dans  la  pratique  géographique.  Ardents  dans 
leur  curiosité,  ils  exploraient  d'abord  les  pays  dans  le  but  de  s'en  emparer. 
Leur  curiosité  se  ralentit  ensuite  et  tomba  dans  l'insouciance  louchant 
Textérieur  de  leur  possession ,  où  ils  ne  tenaient  plus  à  l'exactitude,  se 
contentaient  de  notions  vagues,  l'accablaient  de  fables,  déclamant  leur 
ignorance  à  cet  égard.  Les  latins,  emportés  plus  tard  dans  Taréne, 
exploraient  le  monde  pour  étendre  leur  connaissance  et  leurs  rela- 
tions; cherchaient  à  connaître  Tétranger  comme  ils  connaissaient  leur 
propre  foyer,  s'efforçaient  de  tracer  ()ans  leurs  portulans  peinls,  dans 
leurs  cartes  générales,  les  côtes  et  la  figure  des  pays  éloignés  avec 
autant  d'exactitude  qu'ils  dessinaient  les  domaiao«  «ounus  de  leur 
possession.  Et  lorsque  les  arabes  calèrent  leur  mât,,  k»  latins  déployaient 
à  pleines  voiles  leurs  explorations. 

Les  arabes,  suivant  les  routes  théoriques  de  la  science,  avec  leur 
astrolabe,  observaient  le  ciel ,  exploraient  le  continent,  invenlaienl  les 
longitudes  et  les  latitudes  géographiques,  négligeaient  les  mers.  Les 
latins,  agités  et  poussés  par  les  vents,  dirigés  par  la  vue  du  soleil  et  de 
la  lune,  par  la  boussole,  exploraient  les  eaux  des  mers  et  les  parages, 
abandonnaient  aux  retardataires  du  continent,  l'intérieur  des  pays  et 
basaient  leur  connaissance  sur  les  rayons  de  la  rose.  La  géographie 
des  arabes,  savante  mais  embrouillée,  était  éminemment  continentale  ; 
celle  des  latins  d'expérience,  mais  régulière,  exclusivement  nautique. 
Celle-là  suivant  les  règles  de  la  haute  science,  sur  des  bases  vicieuses, 
fournit  des  produits  variés  et  discordants,  s'emplit  d'inextricables 
erreurs;  cette  autre  marchant  vers  le  grand  chemin ,  par  des  sentiers 
étroits  mais  bien  battus,  élabora  l'unique  produit  pour  toutes  les  écoles 
qui  se  disputaient  l'exactitude  de  son  dessin. 


48  GÉOGR-    LATlMs    1330-lilO. 

hiçifinni  d'api'ès  ces  monuments  qui  sont  connus  jus<iu*aujourdliui  : 
les  cartes  arabes  dressées  sur  les  bases  nialhémaliques  élaient  très- 
rares  et  d'aucun  usage  :  elles  ont  existé  eu  effet,  mais  elles  sont  introo- 
Tables.  Les  cartes  latines,  dressées  sur  les  bases  nautiques,  chaque 
jour  plus  nombreuses,  étaient  d'une  immense  utilité  pour  la  naviga- 
tion :  et  elles  existent  malgré  toute  leur  destruction,  malgré  cette 
masse  énorme  de  la  composition  postérieure,  qui  les  a  remplacées. 

Les  dcssinateui's  latins  excellèrent  de  bonne  heure  dans  le  dessin  des 
cartes  Gctives  et  plus  encore  dans  celles  de  situation,  et  ils  surpassèrent 
les  arabes,  par  la  finesse  de  Touvrage  et  par  la  justesse  des  contours 
tracées  à  coup  de  main ,  sous  Ja  direction  de  la  vue  et  de  la  bonne  con- 
ception des  formes  et  des  proportions. 

Les  arabes,  par  leurs  immenses  possessions,  avaient  plus  de  champ 
et  ils  avaient  une  avance  de  plusieurs  siècles  dans  leur  exercice  géogra- 
phique. Les  latins,  rétrécis  dans  leurs  étroites  limites,  restreints  à  une 
pratique  peu  reculée,  avaient  beaucoup  moins  d'espace  et  de  res- 
sources. 

Les  cartes  géographiques  des  arabes  décèlent  une  combinaison, 
artificiellement  coordonnée,  soutenue  par  la  gloire  des  observations 
astronomiques;  elles  offrent  des  parties  de  bonne  et  juste  conception  et 
des  monstruosités  de  leur  propre  construction;  fensemble  déployé  une 
désharmonie  inconstante  et  peu  gracieuse.  Celles  des  latins  dévelop- 
pent un  coupd'œil  hardi,  clair,  les  parties  et  Tensemble  sont  précis, 
bien  conçus  et  tracés  exactement;  là  où  leur  intérêt  et  leur  connais- 
sance cessaient,  des  raccourcis  et  des  difformités  empruntées.  Il  suffit 
de  confronter  la  carte  nautique  des  latins  de  la  méditerranée  avec  les 
caries  arabes.  Cependant  les  arabes  étaient  aussi  bien  que  les  latins, 
possesseurs  de  cette  mer;  or,  on  peut  à  juste  titre  exiger  des  arabes 
une  connaissance  de  la  méditerranée  plus  parfaite,  et  il  serait  impossi- 
ble de  prétendre  des  latins  la  même  connaissance  de  Fintérieur  de 
TAsie.  Enfin  remarquons  que  les  cartes  nautiques  des  latins  sont  aptes 
à  accepter  la  graduation  des  cartes  modernes;  graduées  elles  offrent 
un  produit  satisfaisant  pour  la  méthode  mathématique  :  les  cartes  con- 
tinentales des  arabes  sont  loin  d'offrir  un  semblable  résultat ,  étant 
jonchées  de  difformités  nombreuses,  qui  font  tort  à  Fensemble.  Toutes 
ces  réflexions  sont  faites  sur  la  culture  de  la  géographie  et  spéciale- 
ment sur  la  composition  des  cartes,  des  mappes,  à  Tépoque  où  la 
géographie  scientifique  des  arabes,  arrivée  à  son  apogée,  s'arrêtait 
après  avoir  parcouru  de  vastes  espaces,  et  où  la  connaissance  géogra- 
phique des  latins,  qui  depuis  longtemps  couvait  dans  Fombre,  apparut, 
sortant  de  son  mystérieux  berceau.  Je  pense  que  le  savoir  géographi- 
que des  arabes  n'est  pas  en  mesure  de  se  mettre  en  parallèle  avec  le 
progrès  ultérieur  des  latins. 

Continuation  de  l'examen  de  la  carte  catalane  1375-1378. 

157.  Après  celle  excursion,  qui  va  clore  ce  que  nous  nous  sommes 
proposés  de  dire  de  la  géographie  arabe,  nous  revenons  à  la  carte 
catalane  qui,  placée  dans  notre  atlas  (n*  80)  dans  une  proportion  dimi- 
nuée, demande  quelque  éclaircissementr 


CARTE  CATALANE,  137. 


49 


Le  cosmographe  catalan  ,  suivant  rhabitude  des  temps  ant(^rieurs  et 
de  son  époque ,  était  un  érudit.  Il  connaissait  assez  la  bible  pour 
alléguer  le  prophète  Isaïe;  il  citait  Pline  et  Isidore.  Cependant  sa 
carte  n*a  rien  de  Fantiquilé.  Tout  y  est  nouveau,  moderne,  récente,  de 
répoque.  Les  seules  dénominations  de  Meroc  et  de  Trapobane,  se  sont 
introduites  dans  la  famille  nouvelle  :  car,  les  indications  de  Sebba,  de 
la  tour  de  Babel,  des  ruines  de  Ninive,  de  Tarchede  Noé,  du  passage 
par  la  mer  rouge  des  enfants  d'Israël,  etc.,  ne  sont  que  des  notes  histo- 
riques ou  explicatives. 

C*est  que  partout,  à  Venise,  à  Gcnes,  à  Majorque,  eu  Italie  et  en 
Espagne,  les  cartes  nautiques  s'étaient  délivrées  de  la  nomenclature 
antique,  surannée  et  inutile,  qui  jetait  une  confusion  et  inspirait  de 
conceptions  contraires  aux  investigations  nouvelles.  La  carte  génoise 
de  Pizigaui  ne  diffère  point  à  cet  égard;  pour  donner  un  exemple  de 
cette  conformité,  nous  mettons  les  fragments  qui  nous  sont  connus  de 
sa  description  à  côté  de  Texamen  de  la  carte  catalane. 

Sur  l'océan  qui  baigne  l'Afrique,  on  voit  sur  ces  deux  cartes  les 
Canaries  également  rangées  en  ordre  convenable. 

La  carte  catalane  nomme  plu- 
sieurs îles,  ensuite  : 


La  carte  des  Pizigani  nomme 


LarcnsA  (Lancerotto)  portantsur 
sa  surface  en  guise  d'écu,  une  croix. 
La  petite  Loncio  marin  (Lobos). 
Fortaventura 
Zemari  (Canaria). 
Ysola  del  infiemo  (Tenerifa). 
Ysola  de  Clarie  (Gomer). 
Ysola  Palmie  (Palme). 
L'île  de  fer  innomée. 

Au  nord,  en  montant  vers  le 
septentrion  : 

Ysola  Caprazia, 

Ysola  Canaria, 

Ysde  dicte  Fortunate. 
San  Brandany, 

Ysole  Ponzele, 

Près  desquelles  la  figure  de  S. 
Brandan. 


Lanzarolo,  forme  d'écu  portant 
d'argent  croisé  de  gueules. 
Insula  dcl  megi  mari  (Lobos). 
Forlevenlura, 
Insula  de  Canaria. 
Insula  de  Lanserano  (Tenerifa). 
Insula  de  Gomera, 
île  de  Palme,  passée,  omise. 
Insula  de  la  Fera, 

Au  nord,  en  montant  vers  le 
septentrion  : 

Insula  Salvalges. 

Insuie  dcserle, 

Insula  de  legnamc. 

Parla  sancta. 

Tout  à  côté  une  longue  légende 
entretient  sur  les  îles  Fortu- 
nées (s  9). 


(89)  Voici  la  légende  :  Les  iles  Fortunée»  sont  situées  sur  la  grande  mer  du  c<Mc  de  la  main 
gauche,  touchant  la  limite  de  l'occidcot,  elles  ne  sont  pas  loin  on  mer.  Isidor  le  dit  ainsi 
dans  son  xv*  livre  :  ces  iles  sont  appelées  Fortunée»,  car  elles  sont  abondantes  en  tous  biens  , 
CD  blés,  en  fruits  et  arbres.  Les  pnïons  supposent  que  là  se  trouve  le  paradis ,  en  raison  de  la 
douce  chaleur  du  soleil  et  de  la  fertilité  de  la  terre  (Isid.  xiv,  p.  193).  Isidor  dit  aussi  que  les 
arbres  y  croissent  au  moins  à  cent  quarante  pieds  et  portent  beaucoup  de  fruits  et  d'oiseaux. 
On  y  trouve  du  miel  et  du  lait,  surtout  dans  l'Ile  de  Capria,  ainsi  appelée  de  la  multitude  de 
chèvres  qui  l'habitent.  L'île  Canarie  s'uppelle  ainsi  de  la  multitude  de  gros  et  forts  chiens  qui 
riiabitent.  Pline ,  ce  maître  dans  la  géographie ,  dit  que  parmi  les  îles  Fortunées,  il  y  en  a  une  où 
croissent  tous  les  biens  de  la  terre,  de. même  que  tous  les  fruits  sans  les  semer  et  sans  les 
planter.  Sur  le  haut  des  montagnes  sont  des  arbres  très  odorants,  rouverts  en  tout  temps  de 
feuilles  et  de  firuits.  Les  habitants  eu  mangent  une  partie  do  Tannée;  puis  font  la  moisson  au 
1ÎCU  de  couper  l'herbe.  Aussi  les  païens  de  l'Inde  croienl-ils  que  leurs  âmes,  après  la  mort,  vont 
liabiter  ces  îles  et  qu'ils  continuent  à  y  vivre  éternellement  du  parfum  de  cet  fruits.  Ils  croient 
que  c*cst  là  leur  paradis  :  mais  à  dire  ^rai  :  c'est  une  fable. 


50  GëOGR.    LATIXR,   1350  UIQ. 

A  Touest  du  cap.  de  S.  Vincent,        A  Touest  du  cap  d(S  S,  Vincent , 

insula  de  Brazk,  Oceanus  magnio,  insula  de  Brazil,  H  ColunM,  insula 

Un  peu  plus  au  nord  sur  la  ligne  de  la  vcntura,  Sanzorzo;  plus  au 

de  Finislerre,  la  légende  dit:  marc  nord ,  vis-à-vis  d'Oporlo  H  Conigt, 

finisUre  occidenlalis  ;  à  la  marge  :  insula  di  corui  marini  (90). 
occidens  et  dans  un  cercle   une        Le  catalan  ne  connaît  rien  qui 

figure  tournée  vers  l'Europe  tenant  aviserait  le  danger  ou  empêcherait 

dans  la  main  gauche  une  largo  la  navigation.  La  houssole  est  là 

bande  marquée  de  quelques  lettres;  pour  diriger  les  navigateurs  (91). 
et  de  la  droite  indiquant  Toccident 
et  «nvisant  de  ne  pas  se  hasarder 
à  aller  plus  loin  :  à  quoi  se  ratta- 
che une  légende  explicative  (92). 

158.  Les  côtes  africaines,  baignées  par  Tocéan,  sont  pleines  de  noms. 
Dans  leur  suite  nombreuse  : 

La  carte  des  Pizigani ,  nomme  :        La  carte  catalane  nomme  : 

Capo  de  Conlil.  Cauo  Cantin. 

Safin,  Sa/fi, 

Mongodor*  Mogodor, 

Alvel  sus,  Alluel  su. 

Capul  finis  Gozole,  Cauo  de  No,  où  commence  la 

région  Gozolo. 

Les  côtes  de  Gozolo  offrent  : 

Moniste,  Menist, 

Ansalem,  Ansulin, 

Alvet  nul.  Alluet  nulL 

Danom.  Cauo  de  sabium, 

Abac.  Plages  aronossos. 

Fêle  Ganuya  (93).  Vetenille^ 

Les  trois   derniers  lieux  sont  Cauo  de  Buyetder. 

marqués  par  la  figure  d'un  bâti-  Buyelder. 

ment,  de  même  que  les  villes  tour-  Danom. 

relées,  situées  sur  la  ligne  de  Mogo-  Cap  de  Finislera  occidenlal  de 

dor  et  de  Contil,  dans  l'intérieur  Affricha. 

de  la  terre ,  savoir  :  civilas  Fessa,  ^--^ 

31icalenza  et  ciuilas  de  Maldechium .  > 

(90)  Voici  comment ,  en  4436,  la  cinquième  carto  d'Andrë  Bianco  range  ces  îles  :  Àntilla,  a 
tinta  rossa  informa  d'isola  grande  assai ,  e  rettangolare ,  davari  porti  intersecala  in  linea  appuuto 
dello  stretto  di  Gibelterra.  V'  è  pure  indizio  d'altra  isola  grande  al  nord  detta  de  la  man  scUanaxio 
tagliata  dal  margine  con  allre  isole  ail'  ovest  délia  Spagna  appellate  :  ewrbo  marinog,  coriioa 
(di  conigi),  de  «an  Zorst,  de  bentufla  (Ventura),  di  colombi,  de  brcuil  :ecosi  pur  altre  due  più 
al  sud  Chapesa  (Caprera),  Lobo.  Veggonsi  poile  isole  di  Porto  sancto,  de  Modéra  et  altra  viciua 
dexerta.  Poscia  le  Canarie  (Zurla  sulle  antiche  mappe,  cap.  H). 

(91)  La  rose  des  vents  de  la  carte  catalane,  porte  la  nomemlalure  italienne,  équivalant  à  la 
catalane  comme  suit  : 

tramuntana ,  traraontana,  septentriona N 

grego,  grecb.  (NE),  aqiiilo, NNE 

levante ,  levant ,  lavant ,  llevant. E 

(oxalocft,  exaloch,  exeloch,  axelocl),  xaloch SE 

metzo-di,  migjorn,  mitg-jorn,  migtndia. S 

/tfrefso,  Icbcg  ,  lebes,libeg,  levés,  llebeig SO 

ponente,  ponent 0 

mojjfMfw ,  mestre ,  mestral KO 

(02)  Dans  laquelle  on  lit  :  est  mare  sotilc  que  non  poxit  tenebont  navcs. 
(95J  Perfide  ou  mccbantc  Guinée  ? 


S 


CART£   CATALANE,    138. 


51 


Près  de  Felc  Ganuya  suivent  les 
traces  (de  l'embouchure)  de  flum 
Palolus ,  lequel  prend  son  origine 
d'un  vaste  lac  elliptique  situé  sur  la 
ligne  de  Fembouchure  un  peu  au 
sud  des  Canaries.  Son  épigraphe 
dit  :  isle  lacus  exit  de  mons  lune 
eiransit  per  déserta  arenosa.  Le 
fleuve,  au  milieu  de  son  cours, 
fourche  son  lit  pour  former  une  île 
dite  :  insula  Palola  hic  coligilur 
auro.  En  effet,  For  était  appelé 
pnïola,  et  le  fleuve  Palolus  est  le 
fleuve  d'or,  d'ouro  (95). 


Au  sud  du  lac  s*étend  le  mont  de 
la  Lune  et  les  quatre  sources  qui 
se  jettent  séparément  dans  le  lac. 
L'épigraphe  dit  :  fons  Nilidis.  A 
Test  du  lac  sur  son  bord  :  ciuilas 
Nili,  située  près  du  départ  du  lac 
de  flum  Nilus  vers  l'est. 

Le  mont  de  la  Lune  est  sur  la 
marge  de  la  carte  et  la  termine  de 
ce  côté.  A  son  ouest  :  desertum 
amosom,  et  près  de  la  mer,  sur  la 
même  ligne,  on  lit  :  capul  finis 
Africe  et  1ère  ocidentalis.  Au-dessus 
et  sous  le  fleuve  Palolus  la  légende 
porte  :  incipil  aulem  Africa  a  fini- 
bus  EgypU  pergiens  iuxta  meri- 
diem  per  Thiopiam  usque  ad 
Achlanlcm  montem ,  a  scplenlrione 
vero  mari  mediteranco  claudli  (oe). 

La  Barbarie  de  la  carte  catalane  est  séparée  de  l'Afrique  méri- 
âionale,  par  une  cliaîne  de  montagnes.  Sous  sa  courbure  la  légende 

JU)  La  carte  de  HZ6  d'André  Bianco  place  ce  lac  sous  le  méridien  do  Sicile  avec  la  légende  : 
hètt prindpaUbus  (principinni)  flumints  Nilli  in  partibus  occidentalis  (Zuria,  cap.  14). 
[|R()  Anssi  la  mappemonde  de  fra  Mauro  14a7,  place  Tépigraphe  de  oro  de  pajola  en  outre  les 
bras  de  flum  Mas  et  canal  oro  qui  vont  al  magna  paindc  et  d'un   lac  jusqu'à   rocéan 
tique  (Zurla,  de  mappemonde  de  fra  Mauro,  chap.  S5},  et  se  rapportent  plutôt  à  Sénégal  et 
iibia.  —  Les  fleuves  Main  et  Citarlis  de  son  dessinateur  André  Bianco  ,  de  U3C,  se  déchargent 
'  l'océan   au  nord  de  Bojador ,  où  la  carte    catalane  et  Dcnincasa  1-167   placent  Messa  et 
nlle.  —  Le  manuscrit  de  la  même  époque  d'Usodimare  (in  annali  di  geografia  e  di  statistica  de 
îbcrg,  t.  II,  p.  290),  confond  ces  appellations  qnan<l  il  dit  :  islud  tlumen  (de  l'Oro) ,  de  longi- 
linevocatur  Fedamel;  similiter  vocatur  riu  Auri,  quia  in  co  colligitur  auri/m  depaiola.  —  Niger 
iPlolémce  on  Nil  Gana  des  arabes,  agitait  l'imagination  des  cosmographes  et  contribuait  ensuite 
confusion.  Les  deux  Andrcs,  Bianco  et  Bcnincasa,  négligèrent  de  tracer  ou  de  mentionner  le 
Pove  de  l'Oro  (voycx  notre  portulan  général,  23)» 
(9C)  Zurla,  sulle  antichc  mappe ,  idro-gcograficbe  cap.  8,  9. 


Le  long  de  la  marge  méridio- 
nale, s*élendenl  deux  fleuves,  sor- 
tis à  Touesl  et  à  Test  du  lac  à 
répigraphe  :  Ormuss  siue  la  eus 
iVi/r(94). 

Le  fleuve  occidental  innommé  , 
sans  diviser  son  lit  verse  ses  eaux 
dans  Tocéan.  A  son  eraboucbure 
est  peint  un  vaisseau  à  pleines 
voiles  et  sa  légende  explicative  dit  : 
partie  luxer  dcn  Jac,  Ferer  per 
anar  al  riu  de  lor^  al  gorn  de  sen 
Lorens ,  qui  es  a  de  agost  e  fo  en 
lany  1546.  Ce  fleuve  occidental 
innommé  est  donc  le  fleuve  d'or, 
d'ouro;  fleuve  imaginaire  avant 
que  son  appellation  fut  flxée. 

Le  fleuve  oriental  aussi  innom- 
mé sortant  du  lac  Nil,  forme  la 
branche  occidentale  du  Nil.  Forme 
en  courant  vers  Test  V insula  Me- 
roem  et  se  réunit  avec  la  branche 
orientale  à  Sohan. 

Au-dessus  du  fleuve  occidental 
ou  de  Tor,  à  son  embouchure  on 
lit  :  Cap  de  finistera  occidental  de 
Affricha,  issi  camença  Affricha  e 
fenex  en  Alexandria  e  en  Babilonia 
qui  fa  comensament,  aci  e  compren 
tola  la  marina  de  Barbaria  ucs 
Allexandria  eu^s  mig  ioan,.,  An- 
tiopi..,  e  en  questcs  plages  se  Iroba 
moll  ivor  per  la  molli  lut  oriffans  et 
roay,  qui  aci  ariban  en  los  plages. 


i 


5:2  GÉOGR.    LATINtl,   1550«1410. 

dit  :  toute  cette  montagne  dm»  sa  longueur  est  appelée  Caréna  par  les 
Serrayns  (Sarrasins)  et  montes  claros  (inonls  éciatans  plutôt  Davos) 
par  les  chrétiens  et  sachez  que  sur  celte  chaîne  de  montagnes  il  y  a 
beaucoup  de  bonnes  villes  et  de  châteaux  qui  se  font  la  guerre  les  uns  avec 
U's  autres.  Celte  montagne  produit  encore  abondamment  du  pain,  du  vin^ 
de  Vhuile  et  toute  sorte  de  bons  fruits.  Dans  sa  partie  occidentale  il  y  a  un 
défilé  :  la  légeuilc  nous  en  avertit,  elle  dit  :  c'est  par  ici  que  passent 
les  marchands  qui  viennent  dans  la  terre  des  nègres  de  Guinoïa  et  ce 
passage  s^appelh  vall  de  Darka,  La  partie  orientale  de  la  montagne  se 
fourche  en  deux  branches  :  à  ce  sujet  la  légende  dit  :  c*est  là  le  milieu 
de  V embranchement  du  mont:  Sur  cette  montagne  passent  aucuns  pèlerins 
sarrasins  de  l'occident  qui  veulent  aller  à  la  Mekke  pour  voir  le  tombeau 
de  Mahomet,  ce  qui  est  pour  eux  la  loi, 

159.  L'Afrique  méridionale  se  divise  en  différents  pays.  D'abord  est 
Gozola  :  tout  ce  pays  est  occupé  par  des  gens  qui  sont  enveloppés,  de  sorte 
qu'on  ne  leur  voit  que  les  yeux  et  ils  campent  sous  des  tentes  et  chevauchent 
sur  des  chameaux.  Il  y  a  des  animaux  qui  portent  le  nom  de  lemp  (97) , 
du  cuir  desquels  on  fait  les  bonnes  larges. 

Suit  le  pays  Asahra  et  le  désert  de  hasahra.  Ensuite  le  pays  Ginya. 
Le  seigneur  nègre  est  appelé  Musse  Melly,  seigneur  des  nègres  de  Gineua, 
Ce  roi  est  le  plus  riche  et  le  plus  illustre  seigneur  de  tout  le  pays  à  cause 
de  la  grande  abondance  d'or  qu'on  recueille  sur  ses  terres.  Aussi  la  ville 
Melli  est  placée  sur  les  bords  du  fleuve  de  Tor  ^ou  Palolus).  Le  roi 
Musa  Melli  devint  mieux  connu  par  Fembassade  récente  de  1556  d'Ibu 
Batouta  de  la  part  de  Tempcreur  de  Maroc. 

Ensuite  vient  le  pays  Organa  :  ici  règne  le  roi  Organa  sarrasin,  qui 
fait  une  guerre  continuelle  aux  sarrasins  de  la  côte  et  à  d'autres 
Alarahps  (Arabes).  Ensuite  Nybia,  le  nom  ou  titre  du  roi  s'est  effacé 
dans  la  légende  :  il  en  reste  :  des  sarrayns  cité  de  la  Nubie.  Ce  roi  est 
toujours  en  guerre  avec  les  chrétiens  de  Nubie  qui  sont  sous  la  domina- 
lion  de  l'empereur  d'Ethiopie  du  pays  de  prêtre  Johan  (93). 

Enfin  désert  de  Egipte  et  le  sultan  d'Egypte  accompagné  de  la 
légende  :  ce  solda  (soudan)  de  Babylonie  est  grand  et  puissant  entre  les 
souverains  de  ce  pays. 

Le  long  de  la  mer  rouge  on  voit  Chos  (Cosseïr)  et  plusieurs  autres 
villes  avec  la  légende  qui  dit  :  c'est  dans  cette  ville  de  Chos  que  l'on 


(97)  I.ani  sivc  dant  ye\  lamth  :  similitudino  bovem  referts  liujus  tergore  clrpci  fortissimi 
conficiuDtur  (Léo  afric.  IX«  p.  292). 

(98)  Dans  la  carte  messine  4511  ,  provenant  de  la  fabrique  catalane  :  dans  rintérieur  de 
TAfriquc,  au  sud  de  l'Atlas,  se  succèdent  d'ouest  en  est  les  figures  de  huit  grandes  villes  disposées 
sur  deux  rangs  ,  savoir,  le  long  de  l'Atlas,  civita  Chiber  ^  cirita  Buda,  Tasich  et  Calbaidi;  et  h: 
long  du  bord  infcrieur  de  la  carte,  civita-Te  :  :at,  civita  Meca^  Nuchi  et  Sudechi.  Entre  ces 
deux  rangées  de  villes  sont  peintct»  trois  grandes  tentes,  sous  chacune  des  quelles  est  profile 
le  buste  d*un  monarque  coiffe  du  turban;  la  première  de  ces  figures,  à  gauche,  est  seule 
barbue;  immédiatement  au  dessous  est  écrite  cette  légende  :  a  quista  proovencia  singorigia  a 
questo  ret  de  Centa,  laquaUe  tient  la  mina  de  lu  or  »  molto  poteros,  c'est-à-dire,  cette  contrée 
a  pour  seigneur  ce  roi  de  Guinée,  lequel  possède  la  mine  d'or,  est  très-puissant;  la  seconde  tente 
placée  à  peu  près  sous  le  méridien  du  Bougie,  est  accompagnée  de  la  légende  que  voici  : 
aquesta  fMroovenda  sittgorigia  questo  rei  de  Nubia  lo  quale  de  continoi  fa  guera  cum  lo  rei  de 
Organia;  enfin ,  la  troisième  tente ,  placée  sons  le  méridien  de  la  grande  Syrte ,  est  accompagnée 
d'une  dernière  légende ,  ainsi  conçue  :  aquesta  proovencia  singorigia  çuesto  rêl  appellato  rei  de 
Organia  (O'Avezac^cartc  de  la  collection  Barbie  du  Bocage). 


CARTE   CATALANE,    140. 


53 


-apporte  les  épiceriei  qui  viennent  des  Indes,  On  les  transporte  ensuite  à 
Babylonia  et  à  Alexandria. 

140.  Les  Pizigani  inscrivirent  quelque  chose  d*analogue  sur  la  mer 
qui  baigne  Adcm.  Naves  mercanlibus  Indie  que  descendunl  in  Addem  , 
dimittit  ibi  décima  parlem  specierum  pro  pasagio,  postea  in(ral  in  mari 
rubro  et  descendunl  ad  amnem  nominc,,.,  et  ibi  exhoncrant,  deindc  de- 
fer  tur  species  ad  Alcxandriam, 

Une  ligne  noiràlre  donne  le  contour  du  rivage  de  TArabie  et  du 
golfe  persique  et  se  termine  à  la  ciuitas  Hormisinia  (Hormisiou  de  la 
carte  catalane)  qui  est  le  dernier  point  de  ce  côte  de  la  carte  des 
Pizigani,  renfermant  toute  la  mer  Caspienne. 

Au  coin  le  plus  oriental  de  la  Au  coin  le  plus  oriental  de  la 
mer  Caspienne,  la  carte  des  Pizi-    mer  caspionue,  la  carte  catalane 


gani,  place  Deyslim  ou  Deyslam; 
d'où  une  ligne  courbe  trace  ses 
rivages  jusqu'à  Geon  ou  Gion  point 
le  plus  septentrional  ;  à  Torient  se 
trouve  une  autre  ciuitas  Vorgasia 
située  sur  le  fleuve  Vorgasia, 

Vers  la  marge  septentrionale  on 
voit  un  lac  duquel  deux  fleuves 


place  Deystani,  Les  rivages  déve- 
loppent la  nier  vers  le  nord  obli- 
quement jusqu'à  Temboucbure  de 
Volga,  de  roiienl  vient  se  perdre 
le  neuve  Organci,  sur  lequel  est 
située  ciuilal  de  Organci, 

Sur  la  marge  septentrionale,  le 
lac  accompagné  de  légende  :  cet 


roulent  leurs  eaux.  L'un,  le  Tanaïs    étang  s'appelle les  or  ions  et  d'au- 

tombe  dans  la  mer  près  de  Tana    1res  poissons  d'une  nature  étrange 


sur  laquelle  flotte  le  pavillon  por- 
tant le  lion  vénitien. 


fy  nourrisent:  deux  fleuves  débou- 
chent vers  Test.  L'un ,  le  Tanaïs , 
tombe  dans  la  mer  près  de  Tana, 
sur  laquelle  le  pavillon  porte 
lamga  et  croissant  tatares. 

L'autre  fleuve  se  réunit  avec  la 
branche  de  flum  Edil,  venant  des 
los  munis  de  Sebu,  baignant  les 
murs  de  plusieurs  villes.  Formant 
ensuite  une  zizera  ^j^}^  et  passe 

sous  la  ciutat  de  Ssarra,  située  non 
loin  de  ses  nombreuses  embou- 
chures. La  légende  relative  porte  : 
aci  esta  lemperador  de  a  qucsta 
regio  septentrional  del  qualleimperi 
en  la  prouincia  de  Durgaria  et 
feneix  en  la  ciutat  de  Organcio  lo 
scnyor  es  appcllat  jambelh  senyor 
del  Sarra,  Parmi  les  villes  situées 
vers  le  nord-est  on  voit  ciutat  de 
Marmorea, 

Nous  avons  fait  ce  rapprochement  de  quelques  fragnienls  qui  nous 
sont  connus  de  la  description  de  la  carte  des  Pizigani  avec  la  carte 


L'autre  fleuve  :  hic  surgitur  (lu- 
wnen  Tirus  magnus  (Atel  ou  Volga), 
court  majestueusement  sans  tou- 
cher à  aucune  ville ,  jusqu'à  la 
grande  civitas  regio  de  Sara,  située 
non  loin  de  ses  nombreuses  em- 
bouchures. A  côté  de  cette  cité  la 
légende  dit  :  hic  residet  imperato- 
rem  de  isla  regione  septentrionalli, 
cujus  imperium  finit  in  p  (provin- 
cia)  Urgalia,  versus  occidentem  et 
finit  in  Vorgazio  versus  orientem, 
A  Textréme  coin  nord-est  se  trouve 
une  autre  ville  civitas  que  d(dmlur) 
Marmorea  (99). 


(^}  Zorla,  suite  aotiche  nappe  idrogeAgrafiehe,t^p.  10. 


54  G^.OGB.   LATINB,   i550-l4IO. 

catalane,  aûn  d'observer  Tanalogie  et  quelquefois  ridentitc  des  légen- 
des et  des  connaissauces,  pour  faire  remarquer  que  souvent  les  mêmes 
sources  servirent  à  composer  les  cartes  de  dififérenles  écoles,  que  par 
conséquent  il  n'y  a  rien  d'extraordinaire,  quand  on  voit  Tanalogie  et 
la  conformité  des  cartes  italiennes  avec  les  cartes  espagnoles. 

ili.  Je  ne  pense  pas  cependant  qu'aucune  carie  italienne  ait  donné 
TAsie  telle  qu'elle  se  présente  sur  la  carte  catalane.  Je  n'entends  point 
parler  de  la  partie  plus  rapprochée  de  l'Europe,  mais  de  la  partie  plus 
éloignée  dans  laquelle  les  Italiens  vantaient  les  investigations  de  Marco 
Polo.  Nous  allons  faire  une  revue  rapide  de  cette  partie  du  monde  en 
commençant  par  son  point  de  contact  avec  l'Europe. 

D'abord  est  Turchia:  Asie  mineure  ou  Turchia  où  se  trouve  beaucoup 
de  villes  et  châteaux,  dit  la  légende.  Entre  l'Ëufralc  et  le  Tigre  Mesopo- 
tania  appelée  Turchia  ou  Asie  mineure.  Au-dessus  Armenia  major.  Les 
deux  fleuves  sortent  de  mont  Taurus  ou  Tabrus;  passent  séparément 
jusqu'à  Baldach  (Bagdad)  où  un  canal  fait  communiquer  leurs  eaux; 
ensuite  ils  vont  séparément  à  leurs  embouchures.  Un  bras  s'échappe  de 
l'Eufrate  pour  se  |)erdre  dans  la  mer  méditerranée  près  d'Anliochic. 

Entre  la  Palestine  et  l'Arabie,  sont  les  légendes  ordinaires  siux  cartes 
de  l'époque  ;  ici  est  le  corps  de  la  vierge  Catherine  —  mont  de  Sinay  sur 
lequel  Dieu  donna  la  loi  à  Moyse  —  c^est  par  ce  détroit  que  passèrent  les 
fils  d'Israël,' lorsqu'ils  sortirent  d'Egypte.  —  Celte  mer  est  appelée  mer 
Roga  (mer  rouge)  :  c'est  par  là  que  passèrent  les  douze  tribus  d'Israël  ; 
sachez  que  l'eau  n'y  est  pas  rouge,  mais  c'est  le  fond  qui  est  de  cette  cou- 
leur, La  plus  grande  partie  des  épices  qui  viennent  des  Indes  à  Alexan- 
drie passent  par  cette  mer  (loo). 

142.  Dans  l'Arabie  :  ciutat  dé  Mecha.  La  Media.  Dans  celle  ville  se 
trouve  le  tombeau  de  Mahomet,  prophète  des  sarrayns,  qui  y  viennent  de 
tous  les  pays  en  pèlerinage  et  ils  disent  qu'après  avoir  vu  une  aussi 
précieuse  chose,  il  n'y  <i  plus  rien  qui  soit  digne  d\Ure  vu.  Et  là  ils  se 
brûlent  la  vue  en  honneur  de  Mufarnct.  —  Arabia  Scbba  est  la  pro- 
vince que  possédait  la  reine  de  Sebba.  Elle  est  habitée  aujourd'hui  par^ 
des  sarraym  alharabs.  On  y  trouve  beaucoup  d'aromates,  tels  que  la 
myrrhe  et  V encens.  Elle  abonde  en  or,  en  argent  et  en  pierres  pré- 
cieuses. On  y  trouve,  assure-t-on,  un  oiseau  qui  s'appelle  fenix. 

Les  trois  légendes  marines,  sont  les  suivantes  :  sachez  que  ces 
navires  sont  appelés  inchi  (jonques)  et  ont  60  coudées  de  carène  et  54 
coudées  au  moins  d'cBuvre  morte;  ils  ont  de  quatre  à  dix  mâts,  et  leurs 
voiles  sont  faites  en  roseaux  et  de  feuilles  de  palmier.  Dans  la  mer  Indich, 
où  sont  des  pêcheries ,  il  y  a  des  îles  fort  riches  :  mais  les  pêcheurs  avant 
de  descendre  dans  la  m£r ,  font  leurs  enchantements ,  lesquets  font  fuir 
les  poissons,  et  si  par  hasard  les  pêcheurs  plongeaient  avant  d'avoir  fait 
leurs  enchantements ,  les  poissons  les  mangeraient  :  c'est  une  chose  Irès- 
prouvée.  —  Devant  l'embouchure  du  fleuve  Baldach  (Tigris)  dans  la  mer 


(400]  Naves  mercantorcs  Indic  defcrunl  spnrics  ad  locca  ocridcntalia  spccialit  (cr)  ad  duo  lora. 
(Arabiac  vel  maris nibri]  ubi  est  Addem  i  u  ]irincipio  (Pizigani). 


CAUTIL   CATALANE,   U3.  55 

de  Indies  et  de  Persia,  on  pèche  des  perles,  qu'on  apporle  ensuite  dans 
la  vUle  de  Baldach,  Et  les  péclicurs  avant  de  descendre  au  fond  de  la 
mer,  disent  leurs  paroles  enchantées ,  qui  font  fuir  les  poissons,  (101)  — 
La  légende  près  de  Baldach,  conllDue  :  ici  se  trouvait  Babylone  la 
grande  où  régnait  Nahuchadenor ,  elle  s'appelle  maintenant  Baldacha. 
Sachez,  que  dans  cette  ville  on  apporte  beaucoup  d'épiceries  cl  de  belles 
choses  qui  viennent  des  Indes  et  se  transportent  ensuite  par  la  terre  de 
Suria  et  particulièrement  dans  la  ville  de  Domasch, 

143.  Les  côtes  de  la  mer  de  Perse  et  Finlérieur  de  la  terre  décèlent 
la  connaissance  du  cosmographe  très-insufTisaulc ,  égarée  par  mauvais 
renseignements. 

Les  fleuves  Eufrates  et  Tigris  sortent  du  mont   Taurus  ou  Abrus 

(Elbrous),  coulent  séparément,  ayant  entre  eux  Erminia  major 
la  grande  Arménie),  la  ville  Moror  ou  Amar  (Mardin),  et  Mcssopo- 
iamia  la  quai  es  appellada  Turchia  0  Assia  minor  en  la  quai,  son 
molles  bones  prouenlias  et  ciutas.  L'Eufrate  se  courbe  et  s'embrancbc 
vers  Anliochie,  ensuite  passe  les  villes  :  Malasia  (Malatia),  Brisam 
(ancienne  Bersima?),  Benzab  (ancienne  Zcnobia?),  Lira  (Hit?  ou 
Hira?)  et  Serug  (Sera?  ou  Soura?). 

Le  Tigre  ayant  à  Test  archa  Noe  placée  sur  monts  Ararat ,  et 
///  eceresie,  les  trois  églises  (Elchmialzin),  traverse  Malascarli 
(Malasdjert) ,  PeLsalain  (Razeiaïn) ,  Zizcra  (Djczirch) ,  Mosul  :  a  questa 
ciulal  es  appellada  Niniue  la  gran ,  la  quai  es  deslrauida  per  las  cupa- 
chat;  ensuite  Arba  (Arbelle)  et  Baldach  (Bagdad)  où  les  deux  fleuves  se 
communiquent  par  un  canal  et  avancent  séparément  autour  de  tora 
de  Babel  :  TEufrate  se  jette  dans  la  mer  par  une  double  embouchure  à 
Vesi  A'Abdeni  (Abadan)  et  Bassora  (Bassora),  qui  sont  toutes  les  deux 
placées  sur  la  mer;  quant  au  Tigre,  il  se  tourne  pour  verser  ses  eaux 
dans  la  mer  à  Test  de  Tainust  (Siniz).  C'est  la  triple  embouchure  du 
fleuve  Baldach. 

Un  autre  fleuve  coule  parallèlement  à  Test  de  celui  de  Baldach, 
sortant  par  deux  branches  de  deux  lacs,  chacune  accompagnée  de  deux 
villes.  Capreri  ou  Caperci  et  Argis  (Ardjis) ,  sont  situées  près  de 

ffiar  cTAr^t^  (lac  Van);  Ormi,  (Ourmia),  et  Marga  (Maraga),  près  de 
mar  de  Marga  (lac  Ourmia).  La  branche  sortant  de  ce  dernier  baigne 
les  murs  de  Cremi  (Kermanschah)  et  se  réunit  avec  Tautre,  sous  les 
murs  de  Kade  et  formant  un  seul  fleuve  (qui  représcule  le  fleuve 
Kerkbah),  il  verse  ses  eaux  dans  la  mer  près  de  Chesi  (llaviza?  ou 
Chersonnesus  des  rivages  du  golfe  pcrsique?).  Vient  ensuite  sur  les 
rivages  de  la  mer  Serans  (rivière  Schirin) ,  Ussa  (Essiiia  sur  la  cour- 
bure méridionale)  accompagné  de  insula  de  Chis  (Kaîs)  ;  puis  Creman 
(Kerman)  ;  enfin  Hormision  et  insula  de  Ormi  (Orniouz)  :  cette  ville  s'ap- 
pelle Ormes  :  c'est  ici  que  commencent  les  Indes;  sachez,  que  dans  cette 
viUe  viennent  des  bâtiments  qui  ont  huit  à  dix  mâts  avec  des  voiles  de 
cannes. 

(101)  Mare  nrbis et  Viasara (Bassora)  —  mare  Indicus,  hic  piscantnr  perlas,  quas  dcfenint 

Vianra  postea  (Pizigani).  —  Edrisi  (HI ,  6,  p.  S73-377)  donne  une  longue  description  de  la 
manière  de  pécher  les  perles  et  no  connaît  point  d'enchantement.  Marco  Polo  (cliap.  47i,  UI,  SI) 
ne  l'a  pas  onbMé,  donnant  aux  enchanteurs  ad  hoc  l'appellation  arabe  d'abraïaroaîn ,  abrivamaïu , 
abamnaya. 


•56  GtoGR.   LATINE,  1330-UlO. 

Dans  l'intérieur  des  terres  :  ciulat  Ssiras,  aecompaguée  de  la 
légende  :  celte  ville  est  appelée  Ssiras;  elle  s'appelait  autrefois  Gracia 
(Grèce)  ;  c'est  là  que  fut  premièrement  inventée  l'astronomie  par  le  très- 
savant  Tolomeu  (Ptolémée  le  grec). 

On  y  voit  le  roi  de  Tauris  et  ses  villes  ciutat  Rey,  Soldania  (Soltaniaj 
et  Tauris,  On  peut  dire  que  le  roi  de  Tauris  n'est  pas  d'une  trop 
récente  nouvelle.  Depuis  la  mort  de  Gazan  Moiibammed ,  1555,  tout 
était  déchiré  dans  celte  possession  des  djengliiskanides;  à  Schiraz, 
régnait  le  dernier  roi  indépendent  Zein  alabeddin;  les  autres  ailleurs; 
Tamerlan  menaçait  cette  contrée. 

La  Perse  se  termine,  finis  Persia,  par  les  monts  de  Amol  (Hindon- 
kouh),  desquels  coule  fium  d'organci.  On  pourrait  présumer  qu'il  repré- 
sente Sihoun,  car  le  fleuve  Amol  (Djihoun)  est  représenté  par 
Temboucbure  de  flum  Amol  :  mais  Orgauci  est  situé  sur  Amol,  Dijboun 
est  donc  doublé  par  les  épigraphes.  Une  semblable  confusion  se  déclare 
dans  les  positions.  En  apparence,  elles  font  trois  suites  de  routes  : 
mais  Texamen  de  leurs  noms  fait  découvrir  leurs  situations  confuses. 
Trabicha  (Djarib  gusken  entre  la  Caspienne  et  Aral?)  (102)  Calay  castra 
(Risil  kala?),  Cara,  Zaraspa  (Hazrasp),  Choya  (Khiva?),  Faray  (Farabr 
Amou),  tout  rapprochées  qu'elles  se  Irouvenlsonten  désordre;  Fi5<a(Sista 
Siistan?),  Eui,  Amol  (Amou  proche  de  Farabr,)  obscursissenl  l'explica- 
tion; Bocar  (Bokhara),  Samarchali  (Samarkand),  Coyandi  (Khodjenda) 
sont  placées  au  sud  de  Djihoun,  comme  l'avait  dictée  le  sage  Tolomée 
de  Siraf.  Congicanti  (lenghikanl),  Cotam  (Khotan),  Timitri  (Termed) 
et  Badalech  {Balkh)  sont  toutes  placées  au  delà  des  fleuves  à  l'est.  D'ici 
la  route  continue  par  Ckabol  (Kaboul)  et  Moltas  vers  Tlnde,  passant  à 
l'ouest  de  Camar  (Kaschmir). 

Par  tout,  (il  faut  en  excepier  Camar)  flotte  la  bannière  dn  roi  de 
Tauris  :  mais  le  pays  de  cette  partie  exposée  aux  ravages  de  Tamerlan , 
porte  le  nom  de  Tarssia  (Zagatay).  Celle  province  est  appelée  Tarssia. 
C'est  de  là  que  sortirent  les  trois  savants  rois  qui  vinrent  à  Bethléem  en 
Judée  avec  leurs  présents;  ils  adorèrent  Jésus-Christ  et  sont  ensevelis 
dans  la  ville  de  Colognay  à  deux  journées  de  Bruges  (105). 

Toul-à-côté  on  a,  à  Test,  un  royaume  mal  assis  dans  la  carte 
catalane  :  ici  règne  le  roi  Chabech ,  qu'on  appelle  seigneur  de  Medein,  Il 
reste  dans  le  pays  Emalech,  C'est  Armalcch,  Almalig  (Al-malik,  roi 
d'Ili),  Ilibalig,  111,  lié,  Ilibalik,  Abeile,  aujourd'hui,  lli  Gouldja,  chez 
les  Chinois  lîoei-Yuan,  sur  la  rivière  lli,  capitale  du  royaume  de  Kaï- 
dou  à  l'époque  de  la  dissolution  de  l'empire  djinghisknnien,  visité  par 
les  Européens,  situé  au  nord  de  Lop  (la  carte  catalane  le  place  au  sud); 
sa  domination  s'étendait  au  nord  de  Karail  (104). 

(109)  Oa  Otrar  ;  à  Touost  d'Otrar  on  a  plusieurs  Râla. 

(103)  Ceci  est  en  désaccord  avec  le  récit  de  Marco  Polo.  11  dit,  qu'en  Perse  est  la  cité  qui  est 
appelé  Sava  iSaba,  Sabba«  Sabada),  de  laquelle  partirent  les  trois  (rois).  En  ccste  cité,  suut 
soveliz  les  trois,  mais  en  trois  sepoulure  moût  grant  et  bêles  ,  et  de  son  la  sepuuture  a  une  maison 
quares  et  desonre  n'ont  nuit  biou  cures  et  est  le  une  juste  l'autre.  Les  cors  sunt  encore  tuit 
entières  et  ont  chuoilz  et  barbe  (chap.  31,  de  la  version  latine  2,  i9).  Marco  Polo  les  a  vu  ainsi 
chevelus  et  barbus,  sachant  sans  doute  qu'a  Cologne  se  trouvait  leur  duplicata. 

(404)  Voyez  la  carte  de  Klaproth  de  l'année  1290  pour  l'histoire  de  la  Chine.  —  Pegoletti  et 
Paschalis  l'33li,  4338,  se  sout  arrêtés  un  certain  temps  à  Almalig.  Marco  Polo  a  signalé  son 
existence  par  le  nom  de  Gingitala.  Sur  les  confins  orientaux  de  ce  royaume,  non  loin  de  Karako- 
ronn ,  est  un  lac  appelé  Sanguintalgniu ,  Sankintalaï,  Chinchintalas ,  et  le  slope  Tzah.intalaï, 
eampMS  albus  (des  cartes  de  d'.Vnville,  Hase  et  autres)  qoi  ont  pu  donner  origine  à  la  dénomination 


GAUTB  CATALANE,   143.  57 

Dans  les  limites  de  Chabecb-Emaicch-Medeia  se  trouve  Yssikol, 
situé  sur  un  lac  (Issi,  Touz,  Temourlou,  du  pays  de  Tourgouts  au 
nord  de  la  petite  Boukaric).  Le  lieu  qui  s'appelle  Yssicd  (Issi-koul). 
Dan4  €€  lieu  est  un  mon<islère  de  frères  arméniens,  dans  lequel  est  y  dit-on, 
le  corps  de  saint  Mathieu,  apôtre  et  évangéliste.  Sous  la  domination  de 
Giiabech  paraissent  se  ranger  les  villes  de  Chabot  et  Caniar,  Ce  dernier 
pourrait  dériver  de  Kamil  :  mais  plutôt  tous  les  deux  sont  une  répéti- 
tion et  doublure  de  Kai)oul  et  de  Karscbmir  (los).  La  répétition  est 
d*autant  plus  présumable,  je  dis  même  évidente,  qu'elle  est  accompa- 
gnée de  ciutal  de  Daldassia  (Baladescban,  Baltistan,  Balti,  petit  Tibet), 
Bandasca,  Balaxian,  Balacian,  Balascia,  Balasian,  Bandasian,  des 
manuscrits  de  Marco  Polo  (cbap.  40,  49, 50;  f ,  55,  50,  57).  H  dit  encore 
et  monte  Fen  (dans  sa  dépendance  Vocan ,  Vakban)  tant  que  Ten  dit 
que  cel  est  le  plus  aut  leu  deo  monde:  et  quant  Ten  est  en  cel  baut 
leu ,  adouc  Ireuve  un  plan  entre  deux  montagnes  en  quel  a  u  flum 
mont  biaus  (fleuve  Djiboun).  Ce  mont  est  appelé  par  le  catalan  mont  de 
BeUdasiaei  u  flum  mont  biaus,  qui  y  prend  sa  naissance,  forme  finis 
Indie  et  coule  vers  le  sud  jusqu'à  lanpa  (Ciamba)  fleuve  Maecaun, 
Mecon,  fluvius  tolius  Asiae  maximus,  dit  Ortcl. 

La  mer  Caspienne  porte  :  cette  mer  est  appelée  mer  de  Sara  ou  de 
Bacu.  Les  Tatars  y  naviguent  et  y  dominent  :  mais  la  forme  allongée 
de  la  mer,  la  péninsule  Bakou ,  le  golfe  sablonnoux  des  monuments  et 
les  nombreux  détails  portulans,  démontrent  que  le  commerce  italien  y 
fit  d'beureuses  investigations. 

C'est  au  nord  de  la  mer  Bakou  que  dominait  Tempereur  de  Saraï , 

dont  la  capitale  ciudat  de  Ssarra,  insulaire  Z^zara,  V^jj.ar^t  ^^j-^ 

Saraï  al  djezira,  était  située  non  loin  de  Femboucbure  de  Volga,  Edil , 
et  on  lit  au-dessus  de  zizera-Saraï  :  c*est  ici  que  réside  V empereur  de 
celte  région  septentrionale,  dont  le  commandement  commence  dans  la 
province  de  Burgaria  (Boulgaria)  et  finit  à  la  cille  d'Ovf/ancio  (Ourgcnz). 
Ce  souverain  est  appelé  JambecJi  (mort  1557),  siiijneur  de  &i m.  D'ici 
partaient  les  karavanes.  Cette  karavane  est  partie  de  Vcmpîre  dWssara 
pour  aller  en  Catayo  (Cbine)  et  voici  sa  marcbe  et  roule  :  sachez  que 
ceux  qui  veulent  traverser  le  désert,  s  arrêtent  et  se  reposent  pendant  une 
semaine  entière  dans  une  ville  appelée  Lop,  dans  laquelle  eux  et  leurs  bûtes 
se  rafraîchissent  et  s'approvisionnent  de  tout  ce  qui  est  nécessaire  pour 
sept  mois,  car  dans  le  désert  un  homme  peut  marcher  une  tiuit  et  un  jour 
avant  de  pouvoir  trouver  de  Veau  bonne  à  boire  :  mais  ce  jour  et  cette  nuit 
passés,  on  en  trouve  tant  qu'elle  suffit  à  cinquante,  cent  personnes  ou 
davantage  :  et  s'il  arrive  que  pendant  la  nuit,  quelque  voyageur,  chevau- 
chant  s* endorme,  soit  par  la  maladie  ou  pour  autre  motif  et  qu'ainsi  il 
quitte  ses  camarades,  il  advient  souvent  qu'il  entend  dayis  Vair  de  nom- 
breuses voix  de  diables  f  semblables  aux  voix  de  ses  compeignons;  encore 
rappetent'ils  par  son  propre  nom;  enfin  les  diables  le  conduisent  tellement 

àe  Marco  Polo.  Ce  lac  d*abord  innommé,  disparut  ensuite  des  cartes  de  Klaproth.  Sa  grande  carte 
de  l'Asie  centrale  de  1830,  offre,  à  l'ouest  dus  possessions  d'ili,  les  positiobs  nommées  Kliabtsikaï- 
gatoalga,  Khalban-gatoulga,  de  mcmu  qu'est  appelé  Gliin  gitalu. 

(iOI»)  Cette  répétition  s'est  perpétuée  :  on  la  voit  daus  les  compositions  publiées  par  Ortcl , 
Mercator,  etc. 

II.  C 


58  GÉOGR.   LATINE,   1330-1410. 

ça  et  là  par  le  désert ,  de  même  que  le  feraient  ses  compagnons ,  qu'il  ne 
peut  plus  les  retrouver.  Et  de  ce  désert  mille  nouvelles  en  sont  connues, 
A  la  suite  de  cette  description,  ciutat  de  Lop  est  accompagnée  de  légende  : 
dans  cette  ville  Lop  se  rendent  les  marchands  de  Vempire  de  Sarra  pour 
aller  au  Cataï  en  droite  ligne  et  ils  y  viennent  avec  des  bœufs,  et  avec  des 
voitures  et  des  chameaux  (loe). 

144.  Dans  la  partie  orientale  de  FÂsie  il  nous  reste  à  parcourir  :.]es 
îles,  rinde,  le  Cataï  et  le  Gog  et  Magogou  Thistoire  d'Alexandre-le- 
grand. 

Dans  la  mer  des  Indes  sont  7548  Ues ,  dont  nous  ne  pouvons  détailler 
ici  les  merveilleuses  richesses  qui  y  sont  renfermées ,  aussi  bien  d*or  et 
d* argent ,  que  d'épices  et  de  pierres  précieuses.  En  elTet ,  il  n'y  en  a  de 
nommées  que  quatre. 

llla  lana,  Ceylan,  Lanka  chez  les  Indiens.  Dans  Vile  de  lana,  on  trouve 
beaucoup  d'arbres ,  bois  d'aloës,  camphre,  sandal,  les  épices  fines,  laga- 
langa,  noix  muscade,  les  arbres  de  canelle  qui  est  Véjfice  la  plus  précieuse 
de  toute  Vlnde  et  là  se  trouvent  de  même  le  macis  et  ses  feuiUes,  Dans  un 
coin  de  cette  île  se  trouve  regio  feminarum. 

A  côté  de  cette  île  :  insula  muébrum ,  des  muets  ou  (nudorum)  des 
hommes  nus ,  dans  laquelle  les  hommes  et  les  femmes  portent  une  feuille 
par  devant  et  une  autre  par  derrière. 

La  troisième  île  nommée,  est  Caynam. 

La  quatrième  illa  Trapobana,  Soumatra  (loi);  sur  cette  île  Malao  est 
accompagnée  de  cette  légende  :  celte  ville  est  déserte  à  cause  des  serpents, 
La  légende  relative  à  Tîle  porte  :  Vile  Trapobana  :  cette  île  est  appelée 
par  les  Tartres  (Tartares)  Magno  caulii  (los),  c*est  la  dernière  qu'on 
rencontre  en  orient.  Elle  est  habitée  par  des  hommes  bien  différents  des 
autres.  Sur  quelques  montagnes  de  cette  île  il  y  a  des  hommes  d'une 
grande  taille,  c'est-à-dire  de  douze  coudées,  comme  des  géants,  très-noirs 
et  dépourvus  déraison;  ils  mangent  les  hommes  blancs  étrangers,  quand 
ils  peuvent  les  attraper.  Chaque  année,  dans  cette  île,  il  y  a  deux  étés  et 
deux  hivers.  Les  arbres  et  les  herbes  y  fleurissent  deux  fois  Van,  Cest  la 
dernière  île  des  Indes,  Elle  abonde  en  or,  en  argent  et  en  pierres  précieuses, 

La  mer  des  îles  offre  encore  deux  tableaux  et  légendes.  La  première  : 
mer  des  îles  de  Vlnde,  oit  sont  les  épices.  Dans  cette  mer  naviguent  de 
nombreux  vaisseaux  de  di/férents  peuples.  On  y  trouve  deux  espèces  d'un 
poisson  qui  s'appelle  syrène  :  Vune  est  moitié  femme  et  moitié  poisson  ; 
Vautre ,  moitié  femme  et  moitié  oiseau.  L'autre  légende  dit  :  ces  hommes 

(106)  La  note  sur  la  ville  de  Lop  et  la  légende  de  la  karavane  sont  verbalement  conformes  avec  la 
narration  de  Marco  Polo,  seulement  celui-ci  approvisionne  la  karavane  pour  un  mois,  le  catalan  pour 
sept  ;  et  Marco  Polo  parle  de  la  traversée  en  général ,  le  catalan  détermine  le  départ  de  Sara  et 
la  direction  vers  Kataï.  —  Voyez  Marco  Polo,  cbap.  57,  de  la  version  latine,  I,  Ai.  —  Des  séductions 
diaboliques  entretinrent  très-longtemps  encore  les  cartes  postérieures,  comme  on  le  voit  par 
celle  de  l'atlas  de  Fréderik  de  Vfii,  ou  on  lit  :  in  deserto  Lop  et  Belgiam  bomines  miris  illusio- 
nibus  et  diabolico  screatu  seduci  crcduntur. 

(107)  Les  Portugais  admirent  cette  attribution  de  nom  à  l'Ile  de  Soumatra  ,  comme  on  le  voit 
par  leurs  cartes  des  xT*etxvi*  siècles.  Siomatra,  over  Taprobana,  dit  i458  fra  Mauro  dans  sa 
mappemonde ,  instruit  par  les  Portugais.  —  Quant  à  la  carte  catalane,  sa  Taprobana  est  plutôt 
la  péninsule  Bfalaï.  Vo^ez  notre  portulan  vers  Ta  fin.  * 

(108)  Magna  eavMaho,  liea  ou  vous  êtes  trompé  et  où  sont  de  grands  trompeurs  :  magni 
cavilH  f 


CART£  CATALANE,   145.  59 

sont  des  sauvages ^  qui  vivent  de  poisson  cru,  boivent  Veau  de  la  mer  et 
vont  tout  nus  (ioo). 

145.  Llnde  se  présente  sous  la  forme  d'une  presqu'île.  Celle  forme 
inconnue  aux  cartes  italiennes,  incompréhensible  dans  la  relation  de 
Marco  Polo,  était  familière  à  de  bonnes  cartes  géographiques  des  arabes 
et  certainement  fut  relatée  par  dilTérents  explorateurs  du  temps.  Elle 
est  divisée  en  plusieurs  royaumes  dont  trois  sont  spécifiés. 

L'Inde  commence  de  insula  de  Ormi  et  de  Hormission,  de  Ilormouz. 
Le  premier  roi  qui  s'y  présente  est  del  rey  Dallif  de  Dely  :  ici  est  un 
solda  (sultan)  grand,  puissant  et  fort  riche  :  ce  sultan  a  sept  cents  éléphants 
et  cent  mille  hommes  à  cheval  sous  ses  ordres  ;  il  a  aussi  des  fantassins 
sans  nombre.  Dans  cette  partie  de  la  terre  il  y  a  beaucoup  d'or  et  de 
pierres  précieuses.  Par  le  pavillon  portant  un  pal  on  voit  que  le  sultan 
était  possesseur  d'un  spacieux  littoral  :  commençant  de  Uormouz  : 
Nocran  (Mekran),  Chesimo,  Damomla  (Daybol),  Semcnat  (Soumenat), 
eiutal  de  Goga  (Gogefo),  Canbetum  (Kanbaïet,  Kamboîe)  sur  un  golfe; 
2Ver«ato  (Nahrval)  dans  l'intérieur  de  la  terre,  aussi  bien  que  de  Barga- 
lidoa  (Fouroukabad  au  nord  de  Kanodj),  laleym  (Gaulna),  Hocibelech 
(Hosoungabad  sur  Nerbudda)  et  de  Delly  (Delhy)  sa  résidence;  puis 
suivant  les  rivages  :  Barochi  (Baroch),  Cocintaya  (  ),  Paychinor 

(Baçaîm)  Chintabor  (Geîtapour),  Nandor  (Onor),  Pescanor  (Bacanor  ou 
Calianpour),  jusqu'à  Mangamor  (Mangalor).  Désert  de  les  Indies  sont  les 
déserts  sablonneux  à  l'orient  de  l'indus. 

Le  secoad  roi  de  la  péninsule  est  :  ici  règne  lo  rey  Colombo  (Koulam, 
Kou\3im)  qui  est  chrétien.  Province  de  Columbo,  et  ciutat  de  Columbo, 
Son  pavillon  flottant  sur  Elly^  fiiirdcr  (Wastara),  Diogil  (DindiguI?) 
porte  une  croix  et  un  oiseau. 

Le  troisième  roi  Etienne  est  aussi  chrétien  ;  ici  règne  le  roi  chrétien 
Steve  :  ici  se  trouve  le  corps  de  Vapôlre  saint  Thomas  :  tournes  les  yeux 
vers  la  cité  de  BuHflis.  Or,  ses  possessions  s'étendaient  sur  les  rives 
du  Coromandel.  Carocam  (Karrikal)  Setcmelti  (sept  pagodes),  Mirapor 
{Meliapour)  et  Butiflis  sus-mentionnéc  où  repose  le  corps  de  saint 
Thomas.  Son  pavillon  portant  un  lion  flotte  dans  Tiatérieur  des  terres 
sur  ciutat  de  Balcia  (Baiki  près  de  Beder  dans  le  Dekan)  et  Carachoïant 
^Garrumkonda). 

Bengala  n'est  pas  formée  en  un  royaume  spécial ,  mais  n'est  pas  non 
plus  la  dernière  des  provinces.  Son  nom  est  suivi  i^vBassia  (Bisa  ruinée, 
SE.  d'Assam,  au  nord  d'Ava  au  pied  du  mont  Tahka);  Michcm  (Mien, 
Pegou);  Penta  (île  Bintang),  Thige,  Lingo,  lanpa  (Zampa);  après  quoi 
finis  Indie,  est  fermée  par  un  fleuve  qui  vient  des  montagnes  Baldassia 
(fleuve  Meakoun,  Mecon)  (iio). 

(109)  ToQt  ce  que  dit  le  catalan  des  îlos  de  la  mer  de  l'Inde  est  rapporté  d'une  manière 
différente  dans  la  relation  de  Marco  Polo.  Ce  dernier  ne  parle  pas  de  Sirènes ,  ne  se  sert  ni  de 
l'appellation  de  Taprobana  ni  de  celle  de  lana;  le  catalan  ignore  les  dénominations  des  îles 
énnmérées  par  Marco  Polo  qui  fait  monter  leur  nombre  à  7748,  suivant  le  dire  de  sages  marins 
(chap.  161,  vers  lat.  HI,  6),  et  même  à  -Ii700  selonc  qe  moister  le  compas  et  la  scrilure  de  sajes 
mariner  qe  nzcnt  en  cel  merde  Yndie  (i:liap.  492,  vers.  lat.  Ill,  43). 

(110)  LInde  dn  catalan  commence  à  Toccident  de  Nocrau,  comme  la  ^rant,  grringnor  Indie 
de  Marco  Polo  de  Ras-macoran ,  mais  la  description  de  chaune  est  très-differenl^;.  i.a  m<'re  de  cinq 
rois-rrèrcs  de  Maabar  ne  vivait  plus,  la  grante  brige  faite  ensemble ,  ne  put  faillir ,  ils  destrucrent 
le  nn  Tautre.  D'autres  puissances  surgirent  aux  pavillons  indiqués  par  le  catalan. 


60  GÉOGR.   LATINE^   1330-1410. 

i  46.  De  l'autre  côté  de  rembonchure  ciutaî  Caynam  voisine  de  Tîle 
du  même  nom,  et  la  fronlière  occidentale  de  Kalaî  :  açi  finU  Catayo. 
Le  paysétaît  assujétit  auxTatars  (Mongoux).  La  ruine  de  leur  domination 
en  1565  était  proche,  mais  le  souvenir  de  leur  première  puissance 
continuait  à  avoir  du  retentissement  :  La  léi^ende  dit  :  le  plus  grand 
prince  de  tous  les  Tartres  :  il  s* appelle  Holubehn  (du  nom  de  Houpilaï 
ou  Koublaï  petit  (ils  de  Djenghiskan,  premier  fondateur  de  la  dynastie, 
chez  lequel  séjournait  Marco  Polo)  qui  veut  dire  grand  khan  (m).  Cet 
empereur  est  beaucoup  plus  riche  que  tous  les  autres  empereurs  du  monde; 
il  a  pour  sa  garde  habituelle  douze  mille  chevaux  ;  il  a  quatre  capitaines 
qui  ont  chacun  douze  mille  chevaux  sous  leur  commandement;  chaque 
capitaine  se  rend  à  la  cour  du  souverain  avec  sa  compagnie  pendant  trois 
mois  de  Vannée  et  ainsi  de  trois  autres,  successivement  et  par  ordre.  Il 
réside  à  Chambalech ,  capitale  du  grand  khan  de  Catayo,  —  Sachez  que 
près  de  la  ville  Chambalech  existait  autrefois  une  grande  ville  nommée 
Guaribalu,  Le  grand  khan  trouva  par  Gastronomie  que  cette  ville  se 
révolterait  un  jour  contre  lui  :  il  la  fit  donc  dépeupler  et  fil  bâtir  celte 
ville  Chambalech  (n«).  Cette  vUle  a  environ  vingt-quatre  lieues  (ïeguis)  et 
est  enceinte  de  bons  murs.  Elle  est  quadrangulaire  :  chaque  carré  à  six 
lieues  et  les  murs  sont  hauts  de  vingt  pas  et  épais  de  dix.  Il  y  a  douze 
portes  et  une  grande  tour  où  est  placée  une  grosse  cloche  qui  sonne  après 
et  avant  le  sommeil,  de  sorte  que  dès  quelle  a  sonné  personne  n*ose  aller 
par  la  ville.  Il  y  aà  chaque  porte  mille  hommes  de  garde,  non  par  crainte 
mais  par  respect  pour  le  souverain, 

Kataî  est  traversé  par  un  fleuve  ramifié  en  six  immenses  bras  et  six 
embouchures.  Il  y  a  46  villes  en  y  comptant  celles  de  la  Tartarie  jus*- 
qu*à  Lop,  Carachora  (Karakoroum),  Tanduch  (Tenduch),  et  les  villes 
(de  Tangut)  signalées  jusqu'au  mont  Sebur.  Il  y  aurait  trop  do  peine 
pour  nous,  et  peut-être  sans  succès,  à  les  examiner.  Les  relations  de 
Marco  Polo  contribuèrent  sans  doute  à  composer  ce  dénombrement  des 
villes  :  mais  les  renseignements  postérieurs  s'y  mêlent  sans  doute  et 
forment  les  bases  de  la  composition.  En  effet,  une  autre  disposition  des 
états  de  la  péninsule  indienne,  et  tout  ce  qu'on  y  voit  de  la  Chine  met 
à  l'évidence  ces  nouveaux  renseignements  qui  méritent  d'élre  étudiés 
et  approfondis.  La  confignraiion  donnée  aux  fleuves  et  aux  pays  fait 
présumer  que  les  descriptions  arabes  n'étaient  pas  inconnues  et  qu'une 
image  figurative  arabe  guidait  l'école  caialane  (au  reste,  voyez  notre 
art.  sur  les  cartes  de  l'Inde  et  de  la  Chine,  29,  50,  et  le  porlul.  50-52). 

(111)  Les  éditeurs  de  la  carte  catalane  indiquent  l'origine  de  liolubeim  dans  Ouloug-bcig.  — 
Cublai  kaan  est  apelez,  que  vaut  a  dire  a  nostre  leugajc  le  grant  scingnors  i Marco  Polo,  cliap.  76, 
vers.  lat.  Il,  1). 

(Ili)  Cet  événement  avait  lieu  en  1267.  Or,  vos  conterai  (dit  Marco  Polo,  cliap.  8î>)  de  la 
grant  ville  dou  Catai,  la  ou  ccstes  palais  sunt,  por  coi  fui  Taite,  et  cornant  il  est  voir  que  iluec 
avoit  une  ansiene  cite  graute  et  noble  que  avoit  a  non  Ganbalu,  que  ce  vaut  a  dire  en  nostre 
lengaje  la  cite  dou  scignor  ;  et  le  grant  kan  trcuvoit  sez  astroniquc  que  cestc  cite  se  devoit 
revelere  et  faire  gran  contenire  contre  l'enpier;  et  por  ccste  cliaison  le  grant  kaan  fîst  faire  ceste 
cite  dcjustre  celle  qe  ne  i  a  qe  un  flum  cmi,  et  ilst  traire  les  jens  de  celle  cite  et  mètre  en  la  ville 
q'il  avoit  estoic,  qui  est  apele  Taidu.  —  C'est  sur  ce  passage  de  Marco  Polo  (cliap.  de  la  version 
latine  II,  )  que  le  catalan  dit  :  da  piats  de  esta  la  ciutat  de  Chambalech,  auia  y  nagean  cioitat 
mult  gran  et  ja  aja  nom  Guaribalu;  ela  gran  chan  troua  per  l'estronomia  que  a  quesla  ciuit  se 
dcuia  reuelar  contra  el;  ay  i  qscula  desabitar  e  fe  ufer  a  questa  ciuitat  de  Chabalech. — Marco 
Polo  savait  que  Cambalu  était  situé  à  2  journées  de  l'océan  (chap.  94,  vers.  lat.  Il,  20)  ;  le  catalan 
l'ignorait  et  eofonya  Chambalech  au  fond  de  la  terre  :  erreur  qui  se  perpétua  jusqu'au  xvi*  siècle. 


CART£  CATALANE,   147.  61 

Ici  naissent  des  hommes  petits,  qui  n*ont  que  cinq  palmes  de  hauteur  et 
ainsi  soil  qu*ils  sont  petits  et  incapables  de  faire  des  travaux  de  force; 
Us  sont  cependant  aptes  et  habiles  à  tisser  et  à  garder  du  bétail.  Et  sa^^hez 
que  ces  hommes,  dès  qu'ils  ont  atteint  douze  ans,  dès  cet  âge  ils  engendrent 
et  ordinairement  vivent  jusqu'à  quarante  ans  et  ne  sont  pas  trop  heureux. 
Ils  se  défendent  vaillamment  des  grues,  les  prennent  et  les  mangent.  Ici 
finit  le  pays  du  seigneur  de  Catayo. 

Mais  au  nord  ses  pavillons  avancent  jusqu'à  Tcnduch.  Sachez  que  les 
hommes  et  les  femmes  de  cette  contrée,  quant  iis  sont  morts,  sont  portés  au 
bûcher  au  son  des  instruments  et  avec  de  grandes  réjouissances.  Cepen- 
dant les  parents  du  mort  pleurent  et  il  arrive  quelquefois,  mais  tardive- 
ment,  que  les  femmes  des  morts  se  jettent  dans  les  flammes  ainsi  que  leurs 
maris,  cependant  les  maris  ne  s'y  jettent  jamais  avec  leurs  femmes  (us). 

  côté  de  ce  pays  dans  l'océan  seplenlrional  sont  deux  grandes  îles, 
accompagnées  de  la  légende  :  dans  ces  îles  naissent  beaucoup  de  bons 
gerfauts  et  faucons  que  les  habitants  n'osent  jamais  prendre  que  pour 
l'usage  du  grand  khan  seigneur  et  empereur  de  Catayo  (n4). 

m.  Nous  passons  maintenant  à  Thistoire  d^AIexandre,  expliquée 
dans  les  légendes  d'après  les  récits  des  arabes.  MoUas  ciuitas  magni 
(Moultan),  cette  ville  édifia  Alexandre  roi  de  Macedonia, 

Dans  les  montagnes  de  Baldasia  :  ces  hommes  sont  allés  chercher  des 
diamants  :  mais  comme  ils  ne  peuvent  pas  parvenir  sur  les  montagnes  où 
se  trouvent  les  diamants,  ils  jettent  adroitement  des  morceaux  de  viande 
là  ou  sont  les  pierres  précieuses,  et  les  pierres  s'attachent  aux  morceaux 
de  viande  et  les  déplacent  delà,  les  pierres  attachées  aux  viandes  finissent 
par  échapper  aux  oiseaux  et  ainsi  les  recueUle-t-on,  Alexandre  trouva  que 
cela  se  fesait  ainsi. 

Le  roi  Alexandre,  —  Montagnes  de  Caspis ,  dans  lesquelles  Alexandre 
vit  des  arbres  si  hauts,  que  leur  cime  touchait  aux  nues.  Là  il  faillit 
mourir  :  mais  satan  le  tira  de  danger  par  son  art  et  à  Vaide  de  ce  même 
art,  il  renferma  là  les  Tartres  Gag  Magog  et  c'est  pour  eux  qu'Alexandre 
fil  les  deux  images  du  métal  ci-dessus  décrites.  Voici  cette  description  : 
ces  trompettes  sont  de  métal  :  c'est  Alexandre,  roi  grand  et  puissant,  qui 
les  fil  fabriquer  (us). 

Alexandre  enferma  aussi  dans  ce  lieu  diverses  espèces  dliommes,  qui 
osent  manger  de  la  chair  crue  :  c'est  là  l'espèce  d'hommes  avec  laquelle 

(IIS)  Marco  Polo  fchap.  58,  de  la  version  latin*»  1 ,  43)  raconte  towt  an  long  les  céronionlos  de  la 
combustion  l'bez  les  Tangnt  :  mais  il  ne  connaît  p;  s  de  iVmmes  se  hrillaut  avec  les  dépouilles 
de  leur  mari.  l\  raconte  que  les  Tangnt  ont  une  cjssie  de  ta-ble  grosses  un  paitiact,  bien  (-onjnnte 
ensenble  tote  enpointc  noblemant  et  bi  uietent  le  cors  dedens.  C'est  son  cascio  ou  le  cors  est.  Cette 
cassa  grossa,  cette  caisse,  le  catalan  la  représente  dans  son  dessin  par  un  vase  dans  lequel  le  corps 
remise  ,  l'astroilique  incantator  debout  y  enfonce  sa  baguette. 

(H4)  Marco  Polo  en  parle  (chap.  71,  vers.  lat.  1,60).  Kt  quant  IVn  (de  llargu,  Bangu)  alee  40 
jomée,  adoDC  treuve-l'cn  le  nier  Osianc  (Océan)  et  ilnec  il  ont  montagne,  la  o  li  taucbonz  pèlerin 
ont  lor  nid  '.dans  les  montagnes).  Kt  en  l'^isle  que  sunt  on  cel  mer  environ  naisent  les  jcrfeaucz.  le 
grant  clian  en  ba  tant  quant  il  ne  vneit,  et  ne  entendes  que  celz  qe  l'aporteut  de  tcre  de 
cristiens  as  Tartarz,  les  portent  au  grant  cban,  mes  les  portent  nu  levant  ad  Argon  et  a  celz 
seingnors  dou  levant.  Or,  non -seulement  au  grand  kan  mais  aussi  à  Argon  et  aux  autres  seigneurs 
du  levant  sont  livrés  ces  gerfauts. 

(115)  Encore  an  xviii*  siècle  on  ne  négligeait  pas  ces  trompettes  :  bic  in  monte  collocali  sunt 
duo  tnbîciues  aerei,  dit  la  carte  de  l'iillas  de  Frédérik  de  >Vit,  quos  verissimile  est  Tartaros  in 
perpeloara  vindicalac  libertatis  memori^m,  eo  loci  posui<S)>,  qua  persunimps  montes  in  tutiora  loca 
commigraruui. 


62  GÉOGR.    LATINE,   1530-UiO* 

viendra  l'anleckrist  ;  ils  seront  enfin  détruits  par  le  feu ,  qui  descendra 
du  ciel  et  les  confondra. 

Le  grand  seigneur,  prince  de  Gog  et  Magog.  Il  viendra  au  temps  de 
Vantechrisl  avec  une  nombreuse  suite.  Une  légende  explicative  inscrite 
sur  Tocéan  trace  son  origine  :  Antéchrist  :  ce  personnage  sera  élevé  à 
Gorayn  (Corazaïn)  en  Galilea  et  quand  il  aura  trente  ans,  il  commencera 
à  prêcher  à  Jérusalem  et  contre  toute  vérité,  il  dira  quHl  est  le  Christ  fils 
du  Dieu  vivant,  et  on  dit,  qu'il  réédifiera  le  temple, 

A  côté  du  seigneur  de  Gog  et  Magog,  dans  un  compartiment  est 
représenté  le  Christ  roi,  récompensant  de  la  palme  immortelle  ses 
fidèles  :  roix,  peuples,  évéques,  moines,  et  la  légende  relative,  inscrite 
sur  Focéan,  dit  :  îc  prophète  Isaïe  dit  dans  son  chapitre  67  (verset  19)  : 
de  ceux  d* entre  eux  qui  seront  réchappes,  fen  enverrai  vers  les  nations 
en  la  mer,  en  Afrique  et  en  Lydie,  Ensuite  de  quoi ,  il  ajoute  :  et  vers  les 
îles  éloignées,  qui  n'ont  point  entendu  parler  de  mon  nom  et  qui  n'ont 
point  vu  ma  gloire  et  ils  annonceront  ma  gloire  parmi  les  nations  (ne). 

i48.  La  grandeur  du  globe  terrestre,  les  noms  des  constellations , 
Ptolémée  astrologue,  les  caractères  arabes  décorant  le  dessin  cosmo- 
graphique,  sont  des  indices  que  sur  cette  partie  de  Fouvrage  du  cosmo- 
graphe catalan  rejaillit  la  lumière  mahommédane.  C'est  suffisamment 
connu  :  le  cosmographe  dans  son  traité  n'est  qu'un  écho  éloigné  de  ce 
qui  était  répété  avant  lui. 

On  admettait  dans  la  géographie  latine  Tinfiltration  de  quelques  con- 
naissances arabes,  spécialement  de  récits  fabuleux,  et  le  cosmographe 
n'a  pas  négligé  de  les  introduire  dans  sa  carte.  C'était  l'habitude  de 
toutes  les  écoles  marines,  de  tous  les  dresseurs  de  mappemondes.  Il 
me  semble  cependant  que  la  carte  catalane  décèle  plus  que  les  autres 
l'impression  inaltérée  et  positive  de  connaissances  arabes.  En  regardant 
la  configuration  et  les  formes  de  l'Asie,  je  ne  vois  pas  qu'une  carte  géo- 
graphique  arabe  dressée  sur  les  longitudes  et  latitudes  ait  été  suivie  : 
mais  une  image  figurative  et  quelques  descriptions  arabes  donnaient  la 
direction  aux  fleuves,  aux  rivages,  aux  golfes,  aux  péninsules  et  à 
certaines  positions. 

Le  dessinateur  ignorait  la  langue  arabe  et  ne  connaissait  pas  de  lettre 
de  son  alphabet.  Le  pavillon  de  Grenade  en  est  la  preuve  :  le  dessina- 
teur n'a  pas  su  y  rendre  correctement  le  nom  de  Grenade  ài?LJ  Jî3t 

(416)  Nous  avons  déjà  dit  qne  le  coûte  de  Gog  et  Magog  est  commun  aux  mahomédans  et  aux 
chrétiens.  Les  géographes  et  les  cartes  maliommédanes  ne  négligent  pas  d'en  parler.  Scharifeddin 
alMobareh  Afcwtou^  l'arhelien ,  mort  à  Mosiil  en  1240,  dans  son  nazehat  al  coloub,  raconte 
fort  au  long  riiistoire  de  Jadjoudj  et  Madjoudj  (Dlierbclot}.  —  Celle  de  la  carte  catalane  est  retrem- 
pée de  la  couleur  chrétienne.  Elle  ne  s'accorde  pas  avec  l'opinion  de  Marco  Polo.  Celui-ci 
en  parlant  de  Tendue,  où  régnait  le  lignage  de  Prêtre  Jean  ,  pense ,  que  ce  est  le  leur  qe  nos 
apellon  de  se  euostre  païs  Gogo  et  Magogo;  mes  il  l'apellent  Ung  et  Mungul...  Ung  estoient  les 
Gog ,  et  en  Mungiil  demoroit  les  Tartars  (chap.  7A^  vers.  lat.  I,  65).  Le  catalan  ne  connaît  de 
prêtre  Jean  qu'en  Afrique.  Dans  l'opinion  de  Marco  Polo  les  Gog  Magog,  Talars  Mongoux  sont 
difîércnts  des  peuples  enfermés  par  Alexandre.  A  son  avis  les  Talars  n'existaient  pas  alors  et  la 
réclusion  avait  lieu  dans  les  montagnes  du  Caucase  près  de  la  porte  de  fer  (Derbent)  et  le 
peuple  s'appellait  Komaiis  :  et  voz  di  ke  Alexandre  bi  flt  fermer  une  tore  et  hi  fist  une  forleze 
por  coi  celle  jens  ne  poosent  pasere,  et  fn  apello  la  port  dou  fer  ;  et  ce  est  le  leu  que  le  livre 
Alexandre  conte  comant  il  euclouse  les  Tartars  dedens  deus  montagnes.  Et  ce  ne  fut  pas  voir 
qu'il  fuiissent  Tartarz,  mes  furent  une  jens  <|ui  estoient  appelles  Comain  (Chaynari  du  texte  latin) 
et  autres  jenerasion  assez  :  car  Tartarz  n'ctoient  a  celui  tens  (chap.  23,  vers.  lat.  I ,  ii).  —  L'opi- 
nion ne  cessa  de  varier  sur  Gog  et  Magog.  Au  xv*  siècle  on  interpréta  Gog  par  ludae.  Voyez  la 
note  au  chap.  168,  et  la  note  103  du  chap.  43. 


CARtE  CATALANE,  149.  65 

et  i*a  au  contraire  défiguré  horriblement.  Probablement  l*aiiteur  de  la 
carte  n*était  pas  mieux  instruit  :  mais  il  a  trouvé  dans  Fécole  de  ses 
prédécesseurs  les  traditions  des  idées  arabes.  Aucun  pays  n^était  plus 
susceptible  de  se  laisser  influencer  par  les  arabes  que  FEspagne,  même 
dans  les  connaissances  géographiques. 

Ces  connaissances  cependant  devaient  se  fondre  avec  les  investiga- 
tions plus  récentes  des  européens,  et  céder  aux  nouveaux  renseigne- 
ments apportés  par  la  propagande  de  Tévangile  ou  par  le  commerce. 
La  carte  indique  les  points  où  les  perquisitions  de  la  propagande  ont 
abouti,  elle  indique  les  chemins  édaircis  par  le  commerce.  Les  commu- 
nications par  la  Perse  y  sont  complètement  obscures.  Les  nouvelles 
arrivaient  avec  les  épiceries  par  mer  dans  les  golfes  persique  et  arabe 
(mer  rouge);  elles  relataient  les  diflerenles  directions  des  courses  de 
caravanes  allant  du  nord  de  la  Caspienne  par  Lop  en  Chine;  ou  de 
marchands  qui  traversaient  les  bords  de  la  mer  Caspienne,  par  Mavaral- 
Dahar  et  par  Khorasan  pour  se  rendre  dans  Tlnde.  Peut-être  les 
géographes  espagnols  possédaient  des  relations  orales  de  ces  rensei- 
gnements :  mais  plus  certainement,  ils  confrontaient  les  caries  ilalien- 
Bes  qui  les  avaient  tracées,  et  combinaient  avec  ce  qu*^ils  avaient  chez 
eux  d*arabisanl.  Il  s'ensuivit  maintes  fois  une  confusion  résultant  de 
malentendus,  de  méprises.  On  serait  peut-être  disposé  à  douter  de  ce 
que  nous  avons  fait  remarquer  là  dessus  en  Asie,  à  cause  que  le  terrain 
y  est  nK>ins  clair  :  mais  nous  pouvons  signaler  de  pareilles  méprises 
dans  des  pays  rapprochés  dont  la  connaissance  nous  est  plus  familière, 
à  Fabri  de  robscurité,^  d'où  arrivaient  aux  Espagnols  des  nouvelles 
réitérées  et  soumises  à  la  confrontation. 

149.  Dans  la  région  septentrionale,  l'empire  de  Sarra  s'étendait 
vers  l'ouest  jusqu*au  flum  lussom,  c'est-à-dire  jusqu'au  Dniepr,  appelé 
par  les  mahommédans  Ozou,  Usom  (ti?).  La  Litvanie  avait  déjà  chassé 
la  domination  tatare  loin  du  Dniepr,  mais  le  cosmographe  n'avait  pas 
d'aussi  récentes  nouvelles.  Divisant  la  qualification  de  Sarafdjezira,  en 
Sarra  et  zizera,  il  place  dans  son  voisinage  sur  le  Volga  ficrc/iiwam 
et  planta  vers  l'ouest  les  pavillons  du  senyor  sur  Baltachinta,  Perum, 
et  Branchicha.  Les  deux  premières  appellations  sont  incompréhensi- 
bles pour  moi;  quant  aux  deux  autres»  elles  représentent,  à  mon  avis, 
Pronsk  et  Bransk ,  cette  dernière  située  sur  Dzisna,  qui  se  perd  dans  le 
Dniepr  Usom. 

Bargar  et  Costroma  sont  sur  le  confluent  de  deux  branches  de  Volga. 
En  effet,. Boulgar  en  est  peu  éloignée,  mais  Kostroma  est  très-éioignée 
vers  l'ouest  près  de  laquelle  la  branche  ouest  conduit  en  la  remon- 
tant vers  Roslov,  Twer,  Torjek,  nommées  sur  la  carte  Rostoar^  Tifcr, 
Twachi.  Cette  dernière  ville  était  un  marché  de  la  grande  et  puissante 
Novogrod  dont  Te  nom  était  inconnu  au  catalan ,  car  les  renseignements 
qui  venaient  de  Saraî  n'avançaient  pas  plus  loin. 

Kiov,  cité  déchue  de  sa  grandeur  et  de  sa  prospérité,  figure  sous  le 
nom  arabe  Chiva,  Les  chemins  de  son  commerce  sont  déserts.  Pour  le 
commerce  de  la  mer  noire  toutes  les  plaines  jusque  vers  l'embouchure 

fl  rr)  Voyes  Abouiféëa. 


64  GàOGR.  LATUIB»  1330-1410. 

da  Danube  offrent  peo  d^intérét ,  le  catalan  ne  trouvait  aucun  rensei- 
gnement de  ce  côté  pour  spécifier  sur  la  carte  quelques  détails  des 
pays  de  Burgaria  et  de  Rossia.  Tous  ses  renseignements  arrivaient  par 
ceux  qui,  traversant  TAIIemagne  remontaient  le  Danube  ou  TEIbe,  qui 
côtoyaient  les  rivages  de  la  baltiqne.  Leurs  relations  variées ,  mal  rap- 
prochées et  coordonnées  créèrent  une  complication  de  rivières  danu- 
biennes, qui  embrouillèrent  remplacement  des  villes  et  obstruèrent  le 
nord  d'un  péle-méle  presque  inextricable.  Cependant  les  dénomina- 
tions pour  la  plupart  ne  sont  pas  méconnaissables,  la  confusion  se  laisse 
débrouiller. 

150.  En  descendant  le  Danube,  le  Uicus  Danubii  est  imaginaire  et 
on  ne  commence  Tilinéraire  qu*à  Ralisbona,  De  là  on  va  par  Tusna 
(Thunna  Stauf  sur  les  bords  septentrionaux  du  Danube),  Pasavia 
(Passau),  Enbrunch  (Ens,  Burg-Ens),  Vuvena  (Vienne),  Arusvar  (Ovar, 
Altenburg,  ou  plutôt  sa  voisine  Hedervar) ,  Moleno  (inconnue),  Jaurim 
(Javarin,  Raab)  et  son  insula  Jaurim  que  de  magna  (la  grande  île  de 
Schût),  Canaro  (Gran,  Strigon),  Buda  (Ofen,  Bouda)  et  son  île,  Rogaios 
(Raczkevi  de  ladite  île),  eniin  Dinoba  (Danoch?  près  de  Mohatsch) 
et  insula  Sirmium  (Sabacz  déplacé)  terminent  cet  itinéraire  riverain. 

A  droite  en  partant  de  Vienne,  Casses  (inconnu),  caslrum  Para 

IPhara ,  Vorau)  et  le  /lum  Pingua  (Pinka  qui  tombe  dans  la  Raab) , 
^uuardine  (Varasdine  au  delà  de  la  Drave),  /lum  Sal  (est  le  fleuve  Sava 
qui  coule  au  sud  des  deux  villes  suivantes:)  Casma  (Chasma,  Tzasma, 
Zeschma),  et  Pasga  (Posega ,  toutes  deux  dans  la  Slavouie)  ;  enfin  Elea 
(peut-être  llloh,  Vilak  sur  le  Danube).  Ici  se  termine  ce  qui  est  enfermé 
par  le  cours  de  la  Save. 

A  droite  de  la  Save  Bosna  (Saraïero,  Bosna-Seraï) ,  Nicordo  (Zvornik, 
Kornik) ,  Cleina  {inconnu). 

A  gauche  du  Danube  se  rangent  d'abord  sanclo  Vito  (saint  Veit 
vis-à-vis  de  Vienne) ,  sancta  Maria  (trop  enfoncée  au  nord,  sainte  Marie 
vis-à-vis  de  Presbourg),  Bâche  (Baks  séparée  par  la  Teisse  de)  Temers- 
var  (qui  est  séparé  par  Marosch  de)  Canada  (Ksanad).  Le  Catalan  avai4 
donc  des  relations  qui  avançaient  jusqu'à  Tembouchure  de  la  Sava:  il 
ignorait  le  cours  ultérieur  du  Danube  mais  il  en  connaissait  les  bou- 
ches (lis). 

De  Praga,  puissante  capitale  de  Boéme  on  remonte  TEIbe  par  Dres- 
den,  Missen,  Guise  (les  autres  cartes  portent  Gurse,  Wurtzen  sur  Mulda). 
Aquis  (inconnu,  Acken?  près  de  Zerbst),  Mangobros  (Magdebourg) , 
Argent  munde  (Tangermunde),  Stendar  (Stendal),  Lessem  (Lentzén) 
dernier  point  sur  VEulie  (sur  TEIbe),  d'où  Ton  se  rend  sur  les  bords  de 
la  mer  à  Wisraar  Usmaria  ou  Ugmaria. 

Avant  de  parcourir  le  littoral  de  la  baltique  nous  observons  que  dans 
le  pays  de  Polonia  se  présentent  des  répétitions  manifestes  :  Cracouia, 

(H8)  La  rartn  Messine  de  IStl,  copie  de  la  fabrique  catalaae,  présente  au  N  du  Danube  quatre 
figures  de  villes  accompagnées  des  noms  deSantovito,  Baocki,  Léo  et  Camadia,  ses  succédant  d'O 
en  E  sans  aucun  pavillon.  Snr  le  Danube  même ,  trois  figures  de  villes  sont  désignées  par  les 
noms  de  Zavra  (Javaria),  n«tto/t  BiM/a  et  ctHtfaft  Bucina  avec  quatre  pavillons,  dont  deux  pour 
Boude ,  tous  les  quatre  semblables  offrant  un  champ  fascé  de  gueules  et  d'argent  de  six  pièces, 
les  dnq  <lernières  adextrées  d'azur  (D'Avczac,  carte  de  lacollcct.  Barbie  du  Bocage).  Bicina ,  Bitina 
est  probablement  Viddio. 


CàRTE  CATALAKE»   15i.  65 

Polonia ,  Posna ,  par  deux  fois  répétés ,  slagiio  Ncrïa  et  lacus  Nêria , 
Pratcnia  et  Prussia,  sont  évidemment  les  doublures.  On  peut  en  dire 
autant  de  :  Guarpe,  Sladin  et  Stetin,  scorpe.  Le  compositeur  de  la 
carte  a  tissu  ces  répétitions  par  tout  où  il  a  mal  combiné  plusieurs 
cartes  qu'il  confrontait  et  où  il  na  pas  bien  compris  ditfércnts  rensei- 
gnemenls  qui  devaient  le  guider.  Mainlenaul  revenons  à  >Vismar. 

Usn*aria  (Wismar),  lioystoch  (Uoslok),  Ludiamagna  |Ludersbageu 
près  de  Bart  dans  le  pays  des  anciens  Lutices  les  grands) ,  Crisoaldia 
(Gripsvald),  Guarpe  probablement  un  Werf,  un  jet,  une  emboucbure 
de  roder  dans  lequel  tombe  la  Varia  :  celle  ronjeclure  me  semble 
d'autant  plus  probable,  que  la  répétition  de  Guarpe  dans  Scorpe  se 
trouve  près  de  Tembouchure  du  fleuve  sur  lequel  se  rangent,  comme 
nous  le  verrons,  les  villes  situées  sur  les  bords  de  TOder  et  de  la  Varia. 
SUidin  et  sa  répétition  Stetin  (Stettin),  Colberg  (Colberg),  Alech  (Hela). 

Ici  commencent  les  autres  :  Stetin ,  lacus  Neria  de  Tembouchure 
(de  roder  et  de  la  Varia)  et  Scarpe.  Vient  Godanssc  (Gdansk,  Danlzik) 
et  ïembouchure  de  la  Vistule,  laquelle  est  complètement  privée  de  ses 
villes.  Ensuite  Albinga  (Elbing)  et  Ncrla  avec  son  stagno  dont  la  répé- 
tition précéda  sous  la  dénomination  laline  lacus  (Frisch  Nerung).  Suit 
Finsertion  prématurée  de  Curonia  (Curisch  Haifet  Courland);  ensuite 
Prutenia  et  Vcmb<mchure  de  Pregel,  sur  lequel,  dans  l'intérieur  de  la 
terre  sont  les  villes  vistuliennes.  De  ce  point,  pour  donner  la  suile  aux 
indications  y  il  faut  les  prendre  alternalivement  en  avançant  au  nord; 
ensuite  reculant  vers  le  sud,  embouchure  de  Niémen  et  Litefania; 
ensuite  Riga  et  Vembouchure  de  Dzwina  ;  à  reculons  suivent  :  Revalia 
(Revel),  Cardant  paganis  (les  Kareliens  inûdèles). 

Cette  revue  du  littoral  et  du  cours  danubien,  nous  conduit  à  la 
remarque,  que  les  situations  de  ces  deux  séries  se  trouvent  presque  en 
contact  :  Prussia  se  place  sur  la  ligne  de  sancla  Maria.,  siluée  vis-à-vis 
de  Presbotirg.  Ce  contact  embrouille  considérablement  ce  pcle-méle 
des  villes  répétées  de  Potonia.  Dans  ce  mélange,  je  pense  distinguer  sur 
les  rives  du  fleuve  fourchu  qui  représente  TOder  et  la  Varia  :  Garagena 
(Crossen,  ou  Kargov  de  Tautre  côté  un  peu  éloigné  du  fleuve),  Epoli 
(Opole),  Ceane  (Cieschine,  Tescben);  double  Posna  (Poznan,  Poseu), 
Asna  (Gniezno) ,  Sira  (Sieradz). 

Parmi  les  autres ,  situées  près  d'un  fleuve  ou  dispersées  en  désordre, 
je  pense  débrouiller  :  dans  Foczim  (Osviecim),  Sudona  ou  Sudoua 
(inconnu,  Scbidlov?),  Sudumera  (Sandomir);  dans  la  double  Cracovia 
(Krakov),  dans  la  double  Polonia^  Pollonia  (Polanictz).  Enfin  vient  le 
dernier  point,  ciutat  de  Léo  (Lvov ,  Lembcrg ,  Leopolis) ,  accompagnée 
de  la  légende  :  ville  de  Léo  :  dans  cette  ville  viennent  des  marchands  qui 
arrivent  du  levant  et  se  rendent  en  Flandre  par  la  mer  d'Allemagne, 

15i.  La  carte  catalane  a  donc  exposé  le  mouvement  commercial 
entre  Vismar  et  Lemberg  de  la  Russie  rouge.  Elle  ne  sait  rien  nommer 
de  ce  qui  esta  Torient,  elle  y  dessine  les  villes  de  la  Rossia  innom- 
mées (iio);  à  Toccident  de  Vismar  elle  couvre  de  silence  rinlcrvallc 

(il9)  La  description  imprimée  nomme  entre  Canada  et  Cliina  une  vjllc  Reyia  Chrhti? 
Par  ma  copie  faite  avec  précipitation  absolument  inévitable,  je  ne  puis  dire  si  elle  se  trouve  dans 
le  fac-simiic. 


66  6É06R.   LATINS,  1330-1410. 

jusqu'à  Vuangrega  de  Frisia  (Frisie)  (lao);  on  n^y  voit  ni  Brème  ni 
Hambourg. 

La  mer  baltique  porte  une  légende  comme  suit  :  celle  mer  e$l  appelée 
mer  de  Lamanya  et  mer  de  GolUandia  el  de  Susia  (Suesia)  :  sachez  que 
celle  mer  esl  gelée  pendanl  six  mois  de  Vannée,  c*esl  à  savoir  de  la 
mi-oclohre  à  la  mi-^mars,  lellemenl,  que  pendanl  celle  saison  on  peul 
voyager  dessus  avec  des  chariols  Iraînés  par  des  bœufs ,  d  cause  du  froid 
du  nord. 

Ses  iles  sont  les  suivantes  :  Oxilia  (Oesel),  Visby  (Visby  de  la  grande 
GotiandK  BrundoM  (Bornholm),  Ruya  (Rugia),  Eria  (Arroe),  Fanse 
(Falster),  Langland  (Langeland),  Finonia  (Fionia),  Salanda  (Zeeland). 

Danemark  deux  fois  inscrit  par  Dasia  offre  dans  Fintérieur  Vibor 
(Viborg)  et  sur  ses  rives  :  Burgalensis  (Borlum),  Rica  (Ribe,  Rib- 
beknut),  Ripis  (Ripen),  insula  See  (Sylt),  aqua  UUis  (golf  près  de  Hus- 
sum  où  Ton  a  Ulvesbyl). 

La  Sucssia  et  la  Norvega  portent  les  villes  suivantes  :  Slocolm 
(Stokholm),  Oslia,  Somech,  Ifrac  (me  sont  inconnues),  Dondina  (Lun- 
den),  Skamor  (Skanor),  Scarsa  (Skara),  Maslrando  (Mars(rand), 
Bregis  (Bergen),  Tronde  et  Nidrosia  deux  noms  de  Dronlheim  divisés 
en  deux  villes.  La  Norvège  est  accompagnée  de  la  légende  :  à  quesla 
régie  de  Nurvega  es  moll  aspra  e  moll  freda  e  munlanyosa  >  salvalgosa  el 
plena  de  boschs  ;  los  habiladors  delà  quai  mes  viven  de  peix  el  de  caça  que 
de  pa\  avenasi  sa  e  forl  pochs,  perlo  gran  fret;  molles  feres  hi  ha,  ço  es 
çervos,  oros  blanchs  e  frigalls  (lat). 

Les  îles  au  nord  de  l'Ecosse,  sont  les  suivantes  :  Chalanes  (Schetland). 

Archania  (Orcades)  :  dans  celle  île  d'Archania  %L  y  a  six  mois  de  jour 
pendanl  lesquels  la  nuit  est  claire,  et  six  mois  de  nuit,  pendant  lesquels  le 
jour  esl  obscur, 

Illa  de  Scillanda  (Skye  près  d'Ecosse)  ;  ils  parlent  la  langue  de  Norvège 
el  sont  chrétiens  (hî).  • 

Enfin  une  légende  raconte  les  merveilles  de  l'Irlande  :  En  lubernia 
il  y  a  beaucoup  d*iles  qu'on  peut  croire  merveilleuses,  parmi  lesquelles  il 
s* en  trouve  une  petite,  où  les  hommes  ne  meurent  jamais;  mais  quand  ils 

(liO)  Les  points  nommés  de  la  Frisie  et  de  la  Hollande  sont  les  siûvants  :  Vuangrega ,  Wange- 
roog;  JVcwdtepa,  Mars  diep,  détroit  près  de  Texel  ;  Ardrohitp  Nordivyk;  Sealingue,  Scbeveling; 
Gravesant  ;  Maxa ,  embouchure  de  la  Meuse.  —  Andréas  Benincasa  inscrivit  dans  sa  carte  de  1407, 
presque  la  même  nomenclature  :  Dada,  isole  faute  (Fanoe),  Ripis,  AguaulUe,  Frixia,  tieuglie. 
yangaroga,  OUanda,  Masdiepa,  Ardrohie,  Sealingue,  Utrechty  Grauesanl,  Maxa. 

(121)  La  carte  d*André  Bianco,  1436,  donne  cette  légende  en  latin  :  Norvegia  est  regnnm  asperima 
et  frigtdissima  et  montuosa,  silcistris  el  nemoroxa ,  eujus  incole  potius  de  pisckacione  et  venacione 
vivunt,  quam  de  pane;  ibi  fere  multi,  albi  ursi  etgrifalei  et  alia  multa  (Zurla»  cap.  15).  fl  a  omis  : 
l'avoine  y  vient,  mais  en  petite  quantité  à  cause  du  grand  froid  :  le  tout  décèle  les  mêmes  matériaux 
pour  la  composition  des  cartes,  chez  les  italiens  et  les  espaguols  »  matériaux  qui  se  perpétuaieiift 
dans  leurs  dépôts  géographiques. 

(ISi)  Nellasettima  carta  (ni  Andréa  Bianco,  1436)  scorgcsi  la  Dacia...  e  lacosta  sud-ovest  detla 
Norvegia,  alla  cui  punta  verso  tal  plaga  v'è  delineata  in  rosso  Vixola  ttiles,  e  solto  d'essa  è  notato  : 
loehus  inabit(^ilis  quan  i  estate  nichil  potes  chrescere  per  chaloren  et  i  gieme  ppter  mag  frigoris 
ch&melatoris...  al  nord  délia  sudetta  Tile,  se  vede  altra  isola,  ma  tronca  dal  margiue  col  nome 
StUanda;  e  più  al  nord,  ancora  altra ,  piu  grande,  parimenti  tronca,  avente  i  due  nomi  Stoehfis  e 
Pfovercha  (Zurla,  cap.  13).  Ce  ne  sont  pas  les  deux  noms,  les  deux  appellations,  mais  une  note,  qu'on 
pèche  ici  le  stokGsch,  la  merluche  qui  vient  de  Norvège  :  merluche  de  Norvège.  —Sur  la  sixième 
carte  de  Bianco  :  presse  cui  (l'JrlIanda)  con  circolo  dorato  v'  ha  isola  de  bertil;  Fra  Mauro,  vers  1457, 
al  NO  délia  Ibernia  colloca  l'isola  dé/  BerzU,  in  figura  quasi  circolare ,  e  dipinta  a  giallo  (Zurla  il 
mappa  monde  di  fra  Haoro,  cap.  IS).  Cette  ile  n'est  pas  oubliée  par  la  carte  catalane,  sa  figure  ronde 
y  est  sans  épigraphe.  Cette  ile  imaginaire  est  soigneusement  reproduite  encore  par  les  géographes 
du  XVI*  siècle.  Mais  la  carte  catalane  connaît  une  antre  Brasil  parmi  les  Azores. 


CARTE  DE   1400.  67 

sont  assez  vieux  pour  devoir  mourir,  on  les  porte  hors  de  Vile  (iss).  //  ne 
s* y  trouve  ni  serpent,  ni  grenouille,  ni  aucune  araignée  venimeuse;  la 
terre  y  est  plutôt  contraire  à  toute  bêle  venimeuse.  Là  aussi  est  un  lac  eî 
une  île.  Bien  plus,  il  y  a  des  arbres  qui  portent  des  oiseaux,  comme 
d*aulres  arbres  portent  des  fruits  mûrs.  Il  y  a  là  une  autre  île,  dans 
laquelle  les  femmes  n'accouchent  jamais  :  mais  lorsqu'elles  sont  arrivées  à 
terme^  on  les  parte  hors  de  IHle  suivant  la  coutume  (  194). 

Nous  nous  sommes  engagé  dans  une  trop  longue  description  delà  carte 
catalane.  Bien  qu'elle  se  restreigne  à  la  rëpéiiiion  des  légendes  et  des 
épigraphes  >  elle  n'est  pas  complète  parce  qu'elle  n'a  pas  donné  de  por- 
tulan que  la  description  accompagnant  le  fac-similé  avait  développé  (125). 
Notre  description  s'est  étendue,  parce  qu'elle  a  essayé  de  donner  quel- 
ques explications.  Incomplète,  elle  est  insuffisante  dans  ses  explications, 
parce  qu'elle  n'a  pas  historisé  les  connaissances  de  différentes  parties 
et  contrées.  Cependant  elle  est  trop  longue,  parce  que  notre  but 
essentiel  était  de  considérer  la  carte  catalane  comme  carte  géogra- 
phique construite  d'après  la  méthode  compliquée  des  vents  ou  de  la 
boussole.  L'examen  de  cette  nature  se  fait  comprendre  quand  il  est 
accompagné  de  la  carte  elle-même  :  sans  la  carte  il  déclare  une  opinion 
souvent  vague  et  dubitative. 

La  carte  de  1400,  acquise  1424,  et  autres  catalanes. 

152.  La  carte  catalane  est  le  plus  grand  monument  géographique 
que  nous  ayons  en  entier  pour  notre  analyse.  Il  en  existe  beaucoup 
d'autres.  Nous  connaissons  des  fragments,  des  mentions,  des  descriptions 
de  plusieurs  :  quelques-uns  de  ces  fragments  sont  d'une  grande  utilité 
pour  nos  études,  mais  ces  mentions,  ces  descriptions  de  caries  existantes 
dans  de  nombreux  dépôts,  ne  sont  presque  d'aucune  utilité,  parce 
qu'elles  parlent  d'une  carte  qu'on  ne  voit  pas;  parce  qu'ordinairement 
elles  s'entretiennent  de  découvertes  réelles  ou  fictives,  de  la  configu- 
ration de  parties  figuratives,  de  fables,  et  n'examinent  et  n'indiquent 
uï  les  bases  de  la  construction ,  ni  le  degré  de  la  perfection  géographi- 
que (i26).  Ne  voyant  pas  ces  cartes  il  ne  nous  reste  qu'à  désigner  leur 
existence  sans  trop  toucher  à  leur  description. 

De  ce  nombre  nous  allons  relater  la  notice  assez  circonstanciée 
d'Alexandre  Humboldt  sur  une  carte  de  la  partie  occidentale  du  monde 

(423)  Cootes  chantés  vers  43S5  4367,  par  Fazio,  il  ditta  mondo  Irlanda  et  Anglctera.  —  Cosmogr. 
de  Mnnster  de  Fr.  de  Belle  Forcstp.  800,  edit.  4578  (anuote  Tastu). 

(l<4j  Voici  comment  est  désigne  ce  lac  sur  la  carte  manuscrite  de  Grathso  Benincasa  de  4i67  et 
de  son  fils  André  en  4476.  Lacns  Fortunatus,  ubi  sunt  insuie  que  dicuntnr  insuie  sanctc  Béate 
cccLXTii.  Tastu  à  cette  occasion  promit  de  publier  la  carte  de  Gabriel  FàUequa  do  4i39  où  l'on  voit 
ce  lac  gros  d'îles,  comme  une  vessie  pleine  de  pois.  C'est  le  lac  Erin ,  Erno  sur  le  compte  duquel  il 
existe  d'autres  légendes  :  de  hoc  Erno  lacu  scribit  Gyraldus  Cambdcnus,  quod  olimfons  fuerit,  scd 
ob  incolarum  nefandam  cum  bestiis  venerem  :  deo  irato,  intatam  aquarnm  dilnviem  erupsisse  ut 
iotum  cum  traclum  cum  bonîbus  inundatione  snbmercit  :  atqne  inreigeste  veritatcm,  liodiequc, 
sereno  tempore,  etiam  nnm  templorum  turres  sub  undis  hic  inde  conspici  :  inscrivit  Humfrid 
Lbuyd  sur  sa  carte  reproduite  en  1S60,  par  Orlcl. 

(428)  Nous  donnons  ce  portulan,  collationné  avec  les  dénominations  modernes  et  plusieurs  autres 
portulans  anciens  que  nous  avons  eus  à  notre  disposition,  dans  un  article  spécial,  intitulé  :  portulan 
général  det  cartes  qui  compotent  l'atlas.  Se  trouve  à  la  fin  de  l'atlas. 

(496)  Nous  devons  cependant  excepter  de  ce  qui  est  de  notre  connaissance ,  la  savante  notice 
de  d'Avezac  sur  la  carte  de  la  collection  Barbie  du  Bocage,  laquelle  s'engage  à  examiner  les  bases  de 
U  consirnciion  ;  et  la  notice  de  Humboldt  sur  la  carte  à  la  date  4424 ,  que  nous  allons  analyser. 


08  GÉOGR.    LATINE,   1330-1410. 

dont  la  fabrique  remonte  jusqu'au  xiv*  siècle  (lii).  Elle  est  conservée 
à  VVeiinar  dans  la  bibliothèque  militaire.  Elle  est  tracée  sur  parchemin 
et  collée  sur  bois,  ayant  5i  pouces  6  lignes  de  long  et  21  pouces  9 
lignes  de  large.  Elle  s'étend  en  latitude  depuis  26°  ^/4  jusqu'à  02®  et  en 
longitude  depuis  le  méridien  de  la  Mingrelie  et  de  Colcos,  c'est-à-dire  2® 
à  l'est  du  bord  le  plus  oriental  de  la  mer  noire  jus(|u'au  méridien  qui 
traverse  Tallanlique,  5®  à  l'ouest  du  cap  Bucedor  (Bôjador).  Comme  la 
carte  est  dépourvue  d'échelle  graduée  (continue  Humboldt),  j'évalue 
les  distances  d'après  celle  du  cap  Finistère  au  cap  S.  Vincent.  Il  n'y  a 
d'autre  titre  qu'une  bande  droite  dirigée  du  sud  au  nord  et  séparant 
l'Antillia  des  îles  Açores  (lis). 

On  n'y  reconnaît  que  les  mots  :  Contesl,,,  compa,,,  ancon  mccccxxiv  : 
tout  le  reste  est  illisible  et  effacé  par  vétusté.  Je  pense  que  comparavH 
Ancon  ii2î,  que  les  débris  de  l'épigraphe  paraissent  offrir,  ne  signiiie 
point  la  composition  de  la  carie  mais  son  acquisition  »  le  dessin  étant 
antérieur  à  l'année  ii05.  Ce  chiffre  de  1421  se  trouve  encore  une  fois 
répété  sur  le  bord  de  la  carte  vers  l'est,  mais  avec  une  encre  moins 
ancienne  :  autre  annotation  de  la  date  d'acquisition. 

LereœRossidey  le  soldano  di  BabilloniaM  couvent  de  Sainte  Catherine 
du  mont  Sin;fï ,  les  armes  des  républiques  de  Gènes  et  de  Venise  soiit 
figurés  comme  ornements  dans  l'intérieur  des  terres,  où  d'ailleurs  l'in- 
dication des  villes  est  assez  rare.  Ces  ligures  de  princes  assis  sur  leurs 
trônes  se  trouvent  sur  des  cartes  plus  récentes  (de  Mauro,  de  Bianco). 
L'image  du  soldano  di  Rabillonia,  tenant  un  perroquet  sur  le  bras 
gauche,  est  indiquée  à  l'ouest  du  Nil  (comme  elle  l'est  dans  la  carte 
Catalane), 

Le  pavillon  des  chevaliers  de  S*  Jean  flotte  sur  l'île  de  Rhodes.  En 
mémoire  de  la  croisade  de  S.  Louis,  le  lieu  de  l'embarquement 
(25  août  12Î8)  se  trouve  indiqué  à  Aquae  morlo,  en  signalant  l'endroit 

Sar  un  immense  bras  de  rivière  (sans  doute  celui  d'Arles)  qui  sort  du 
Jiône. 
Dans  l'Asie  mineure,  quae  nunc  dicitur  Turchia,  est  assis  le  sultan 
Baixil,  le  grand  Baïazet  Ildirim.  Comme  ce  prince  régna  depuis  1589 
et  mourut  en  1405  après  être  tombé  au  pouvoir  de  Timour  à  la  bataille 
d'Ancyre,  l'image  de  Baixit  offre  la  date  de  la  composition  de  la  carte 
antérieure  à  l'année  1424  et  à  celle  de  1405. 

Ce  qui  est  remarquable  sur  celte  carte,  c'est  qu'on  y  trouve  tracé  le 
canal  de  communication  entre  le  Nil  et  la  mer  rouge  détruit  depuis  707. 
La  tradition  de  son  existence  se  perpétua  jusqu'à  la  (in  du  xiv*'  siècle. 
Nous  l'avons  vu  tracé  dans  l'image  du  monde  de  1119,  dans  celle  de 
S.  Denis  du  xiv*"  siècle;  il  est  sur  la  carte  contemporaine  de  Baïazet.  Le 
canal  du  Nil  est  représenté  sur  la  carte  de  Weimar,  en  communication 

fi47j  Homboldt ,  examen  de  riiist.  de  la  géogr.  du  nonvran  monde,  t.  H,  p.  180-181. 

(128)  Cette  ostimatiun  en  degrés  est  peu  satisfaisante  pour  nous,  21  pouces  et  i*  lignes  répondent 
à  3S*  15'  du  grand  cercle,  or  S-l  pouces  et  6  lignes  donneraient  en  longueur  S5,  91  degrés  du  grand 
cercle,  ou  67,  09  degrés  du  parallèle  de  Rliode.  De  ces  07*  du  long  retranrbaiit  2*  du  l>ord  oriental 
de  la  mer  noire.  S"  à  l'ouest  de  Uoïador,  et  9»  lî'  de  difTcrence  entre  Doïador  et  Ccnta,  reste  entre 
Ceuta  et  le  bord  oriental  de  la  mer  noire  ou  remboucinire  au  F*»s  30°  48'  pour  ta  longueur  de  la 
méditerranée,  plus  ou  moins  45*.  Mais  nous  ne  connaissons  pas  l'état  des  lisières  de  la  carte  el  à 
notre  avis  l'évaluation  du  degré  entre  Fiuislerre  et  S.  Vincent  :  n'est  pas  la  mesure  à  déterminer 
le  degré  :  il  était  plus  sAr  de  l'évaluer  entre  Venise  et  Rome,  à  coup  sAr  il  sortirait  plus  fort.  —  La 
carte  porte  le  nom  d'Antilla,  mais  le  nom  d'Azores  est  certainement  le  nom  de  la  description. 


CARTES  NAUTIQUES,   153.  G9 

avee  une  rivière  qui  naît  en  Arménie  et  coule  d'abord  du  nord  au  sud  à 
Test  du  Liban,  en  tournant  vers  l'ouest  sous  la  parallèle  de  Babylon 
oegyptL  Cette  même  rivière  a  un  bras  qui  débouclie  dans  la  médiler- 
ranée  près  d'Alexandrette.  Le  Jourdain  est  figuré  séparément  avec  assez 
de  précision,  tandis  que  la  rivière  anonyme  qui  communique  avec  le 
canal  de  rKgypte,  dans  Tlsthme  de  Suez,  naît  dans  les  montagnes,  qui, 
selon  la  même  carte,  donnent  naissance  à  une  rivière  (le  Turak  ou  Boas 
des  anciens?)  qui  coule  au  NNO  vers  la  mer  noire,  et  à  une  autre 
(le  Tigre)  qui  se  dirige  au  SE.  Des  cours  analogues  de  fleuves  se  pré- 
sentent dans  les  copies  du  xv°  siècle  de  la  mappemonde  de  Sanuto, 
(ms.  de  Bruxelles  et  publ.  de  Bongars);  en  partie  dans  la  carie  catalane. 

Tout  le  bassin  de  la  méditerranée,  de  la  carte  contemporaine  à 
Baîazet  et  comparata  1124;  les  côtes  de  la  Grèce  et  la  mer  noire  sont 
représentées  avec  un  détail  topographique  très-remarquable ,  dit 
Humboldt,  mais  le  gîssement  relatif  ou  Torienlation  des  cotes  est  très- 
erroné.  Si  Ton  trace  les  méridiens  d'après  l'ouest  de  la  péninsule 
ibérîenne,  continue  Humboldt,  l'est  de  la  Sicile  et  l'ouest  de  l'Asie 
mineure,  on  trouve  l'Afrique  à  quelques  degrés  au  nord  de  l'embou- 
chure de  l'Ëbre  et  la  direction  moyenne  de  la  côte  méridionale  de  la 
mer  noire  coïncidant  non  avec  le  parallèle  d'Oporlo,  mais  avec  celui  de 
Lorient  en  Bretagne.  Les  parties  orientales  sont  trop  au  nord,  comme 
sur  les  cartes  marines  des  Génois  et  sur  toutes  les  autres  du  moyen  .âge. 

Dans  la  carte  que  nous  analysons,  de  même  que  dans  les  autres^ 
l'orientation  est  vicieuse,  fictive;  elle  est  celle  de  l'aimant,  de  la 
boussole  qui  ne  peut  pas  servir  à  la  graduation.  En  commençant  par 
les  méridiens  et  les  longitudes  :  il  faut  d'abord  examiner  les  latitudes 
des  lieux  et  les  parallèles  détermineront  le  défaut  et  la  perfection  de  la 
construction. 

155.  Dans  la  suite  des  cartes  que  nous  allons  indiquer,  celle  du  musée 
Bourbon  à  Naples,  occupe  la  première  place.  Elle  remonte  vers  l'an- 
née 1410.  L'original  est  dessiné  en  travers  sur  une  peau  de  vélin  large 
de  8â  centimètres  et  longue  de  110  centimètres,  non  compris  une 
portion  qui  se  prolonge  sur  la  gauche  en  se  rétrécissant,  et  qui  répond 
au  cou  de  l'animal.  Le  champ  de  la  carte  est  à  peu  près  le  même  que 
celui  des  deux  premières  feuilles  de  la  carte  catalane  :  c'est-à-dire 
qu'il  représente  en  grand  détail  les  rivages  de  la  méditerranée  avec  ses 
dépendances,  ceux  de  l'océan  entre  le  cap  Boiador  et  les  îles  Britanni- 
ques avec  les  Canaries  et  les  Açores,  et  donne,  en  outre,  quelques  indi- 
cations plus  vagues  au  nord  et  au  sud  de  ces  limites.  Des  pavillons 
armoriés  se  déploient  sur  les  diverses  capitales,  et  quelques  légendes 
explicatives  se  lisent  sur  les  espaces  nus  :  ces  légendes  sont  en  langue 
catalane,  dont  les  formes  se  trouvent  d'ailleurs  empreintes  dans  toute 
la  nomenclature.  Celte  carte  doit  être  classée  dans  la  catégorie  des 
cartes  hydro-géographiques  à  projection  plate,  par  développement  du 
cylindre  osculateur  de  la  sphère  terrestre.  C'est  donc  encore  une  carte 
catalane  :  son  analyse  donnera  le  témoignage  le  plus  satisfaisant  du 
progrès  :  je  n'en  doute  pas  (129). 

(Ii9)  Extrait  de  la  note  toe  à  la  société  de  géogr.  i8  août  i843  par  d'Avezac.  —  La  carte  est  gravée 
par  Roïdini  et  paraîtra  accompagaée  d'un  mémoire  de  Rossi ,  qui  s'occupe  à  l'illustrer. 


70  GÉOGK-   LÂTIBE,   ia»-Ul». 

Oo  eoDiuKsait  encore  ëe  Técole  caïaUiBe  la  carte  de  runée  1413  de 
MATnAS  »e  YrxAKSTEs,  cmserTce  aetrelots  ai  covTeol  des  duirtrem 
de  Yal-de-Crislo  près  Se^Mi^,  oè  Joaqwfi>Loreim  YiUaaiieTa  Faiaft 
eianinée  nais  d«Dl  oo  igoore  le  sort  ollérieor  (iso). 

On  cooDaii  deax  aoires  de  la  oiéiBe  école  catalane  :  one  de 
Faonée  liôO  décoorerte  en  Italie  dans  le  nurqnisat  de  Sobrello;  Fan- 
tre  de  Gabuel  Yalscoca  de  liôi  oo  1459,  exëcolée  à  MaîorqDe  (i3i). 
La  fabrîqne  catalane  était  donc  très-aetiTC,  elle  fooraissait  à  la  France, 
à  Fltalie.  On  se  commaniqaaît  réciproquement. 

Depuis  qoe  la  marine  des  deux  péninsules  augmenta  le  nombre  de 
l^alîons,  de  caraTelles,  les  portulans  se  multipliaient  à  Fosage  des 
pilotes.  Les  dessinateurs  s>xerçant  dans  leur  art ,  pragressaient  dans 
Fexactitude  et  la  précision  ;  compo»ient  les  cartes  nautiques  et  don- 
naient aux  images  du  monde,  aux  mappemondes,  tonte  Feicactitnde  de 
cartes  nautiques.  Les  cartes  spéciales,  les  portulans,  ou  les  Buppe- 
mondes  d'une  très-grande  échelle  étaient  nécessaires  aux  matelots. 
Cest  pourquoi  les  mappemondes  se  composent  de  plusieurs  cartes.  On 
a  des  allas  de  cette  époque.  Les  petites  mappemondes  dessinées  sur 
une  moindre  échelle  pour  satisfaire  la  curiosité  et  donner  une  idée  de 
la  totalité  de  Fhabitable,  n'étaient  qu'une  diminution  des  grandes,  préa- 
lablement élaborées  :  aussi,  pour  la  partie  exécutée  arec  connaissance, 
c'est-à-dire  pour  la  mer  méditerranée  et  FEurope  extérieure ,  offrent- 
elles  de  justes  proportions.  Quant  aux  parties  éloignées,  elles  ne  chan- 
gent pas  de  formes.  Partout  cependant  la  nomenclature  antique  dimi- 
nuait ou  disparaissait  totalement,  pour  faire  place  à  la  nouTelIe,  les 
images  fi^nratives  même  reçurent  l'empreinte  de  connaissances  aTan- 
cées  et  répandues  :  mais  l'espace  y  était  trop  étroit  pour  ces  connais- 
sances et  ordinairemcut  on  aimait  à  reproduire  les  anciennes  traditions, 
à  inscrire  les  merveilles,  les  contes  fabuleux  et  historiques. 

Dans  un  manuscrit  de  Pomponius  Mêla,  conservé  à  Rheims,  son 
copiste  de  i  117  décora  la  graode  initiale  d'une  image  du  monde  (voyez 
n*  87  de  notre  allas).  Cest  une  jolie  miniature,  fourrée  dans  une  lettre, 
cernée  d'un  0.  Les  dénominations  des  trois  parties  du  monde,  des  pays, 
de  plusieurs  rivières  y  sont  inscrites;  Paris,  Rome,  Jérusalem,  y  sont 
nommés;  Constantitwple  y  est  annoté  par  les  initiales;  plusieurs  autres 
figures  de  villes  restent  sans  épigraphes,  savoir,  en  Afrique  :  Fes  et 
Babilonia  (Caîr);  en  Asie  :  Cambalech  et  une  ville  de  l'Asie  mineure; 
en  Europe  :  probablement  Barcellone,  Praga,  Ratisbone  et  Bouda. 

L'image ,  décorant  le  mauuscrit  de  la  géographie  de  Pomponius 
llela,  se  conforme  à  l'idée  du  géographe  :  or,  la  mer  caspienne  n'est 
qu'un  golfe  océanique  et  le  Tanaîs  débouche  de  deux  bouts  :  le  géogra- 

(130)  A  la  saite  de  la  description  de  la  carte  d«  cvovest  Val-de-Cristo,  Villanueva  se  sonvieitt 
â*»yotr  va,  dans  la  bibliolbêqne  da  monastère  deSui  Mîgnel  delos  rejes,  fondé  par  Ferdinand  le 
catholique  dans  la  campagne  de  Haerta,  à  ose  demi-liene  de  Valence,  une  autre  carte  plate  hvdro- 
craptiiqtie  dn  xt*  siècle,  carte  fort  endommagée,  la  date  de  sa  rédaction  est  détmite  par  an  tro'a.  — 
SelKistian  Minano,  dans  son  dictionnaire  gé<^^phiq«e  et  statistique  de  l'Espagne,  en  allègue 
reKistence,s«r  te  parole  de  Vilianuera.  —  D^Avezac  suppose,  dans  ses  notes,  que  cette  carte  est  la 
même  que  ceUe  de  131 1  de  la  collection  Barbier  da  Bocage,  dont  il  a  donné  lui-même  nne  savante 
description. 

^151)  La  première  découverte  en  1789,  fut  examinée  et  décrite  de  suite  par  Tabbé  Borghi,en 
suite  en  1794  par  Cladera.  —  L'autre  a  été  insuffisamment  décrite  en  1789  par  Antonio  Ravmundo 
Pasqnal.  —  Or,  B6  ans  se  sont  écoulés  depuis  leur  première  description. 


PIERKE  d'aILLY,   154.  71 

phe  Ta  dit.  Jérusalem  est  au  centre,  Torient  au  sommet,  TÂsie  com- 
prend la  moitié  du  cercle ,  les  deux  quarts  de  l'autre  moitié  sont  pour 
rEurope  et  TAfrique.  Malgré  ces  antériorités,  la  figure  oCTrc  les  beaux 
traits  du  xiv*  siècle,  ainsi  que  ses  défauts.  Gela  se  décèle,  non  par 
finsertion  de  Calhay  et  de  Anglia  parmi  les  dénominations  antiques, 
ou  par  la  multiplication  de  India  (cinq  fois  répétée)  :  mais  par  la  con- 
figuration de  riiâbitahle  et  par  Tinclination  de  la  mer  méditerranée 
de  ENE  à  OSO  à  la  ligne  de  E  à  0  de  la  parallèle. 

La  figure  ronde  divisant  Thabitable  par  un  diamètre  et  un  rayon 
perpendiculaire  est  reproduite  plus  d'une  fois  encore,  comme  réminis- 
cence dans  quelques  ouvrages  des  typographies  italiennes  el  alleman- 
des, au  xiv**  siècle.  On  la  voit  encore ,  vers,  la  fin  de  ce  siècle  dans  les 
publications  d'Apien  et  de  Gemma  Frisius. 

Pierre  d'Aillt,  1410. 

154.  La  figure  ou  la  sphère  de  d'Ailly  est  très-intéressanle  pour 
répoque  dans  laquelle  nous  entrons.  Pierre  dWilly  ,  né  près  d'Abbé- 
ville  à  Gompiègne  en  1350,  d'une  famille  obscure,  s'éleva  par  son 
mérite  aux  premières  dignités  de  l'église.  Reçu  grand-maître  du  col- 
lège de  Navarre  en  1584,  il  fut  ensuite  chancelier  de  l'université,  con- 
fesseur de  Gharles  VI ,  évêque  de  Gambrai  ;  il  se  distingua  en  1409,  au 
concile  de  Pise,  deux  ans  après  14ii ,  il  fut  nommé  cardinal  et  légat 
du  saint-siége  en  Allemagne;  au  concile  de  Gonstance  (1414)  il  démon- 
tra la  nécessité  d'une  reforme  dans  l'église;  il  s'était  démis  de  son 
évéché  lorsque  Martin  V  le  fit  légat  d'Avignon  où  il  mourut  en  1420.  Il 
a  écrit  difiérents  traités  d'astrologie,  de  chronologie,  d'astronomie  et  de 
géographie  ou  cosmographie  qui  sont  accompagnés  d'une  figure  ou 
planisphère  (132). 

Ge  planisphère  off"re  les  cercles  ordinaires  de  la  sphère.  Sa  partie 
septentrionale  est  divisée  en  sept  climats  tous  pleins  de  noms  de  pays, 
de  monts,  de  villes,  de  fleuves,  inscrits  respectivement  aux  climats  où 
ils  se  trouvent,  ou  au  delà  desclimats.  Il  n'y  a  aucune  trace  de  contours 
de  pays,  seulement  la  nomenclature  géographique  est  ainsi  distribuée. 
Or^  c'est  l'ombre  d'une  carte ,  simulacre  d'une  mappemonde  soumise  à 
des  latitudes  géographiques,  à  la  méthode  étrangère  aux  cosmographes 
latins,  pratiquée  par  les  arabes,  comme  dans  la  géographie  de  Ptolémée 
que  d'Ailly  a  pu  facilement  connaître ,  parce  qu'il  allait  souvent  en 
Italie  où  cette  géographie  fesait  beaucoup  de  bruit  et  où  on  se  préoc- 
cupait de  la  faire  traduire  en  latin  (voyez  n®  79  de  notre  atlas). 

Je  touche  d'abord  quelques  épigraphes  un  peu  obscures  de  ce  pla- 
nisphère. Au-dessus  des  climats  on  peut  lire  :  hic  :  climatausque  polum, 
multas  habilationes,  insulas  continent,  qui  non  polerunl  hic  conuenienter 
designari.  Dans  le  sixième  climat,  Lumania,  lisez  Gumania  ;  dans  le 
cinquième,  SUicia,  lisez  Gilicia;  don  y  est  un  fragment  de  Macedonia; 
dans  le  deuxième  climat,  Cir,  mg.  Syrtismagna  ;  Cir,  mi,  Syrtis  minor. 

(13S)  L'onvrage  a  été  imprimé  en  1480,  suÏTaot  les  apparences  à  Louvain  chez  de  Westfalie. 
Quantité  d'autres  ouvrages  sont  en  manuscrits.  —  Le  planisphère  de  Pierre  d'Ailly  dans  notre  atlas 
est  copié  d'après  la  publication  de  Santarem  ,  diminuée  en  proportion  de  200  à  93  de  l'échelle.  — 
Cette  image  se  trouve  tout  de  môme,  bien  exécutée  dans  l'édition  susmentionnée.  — La  notice 
btotoriqneet  littéraire  sur  le  cardinal  P.  d'Ailly,  par  A.  Pinaux,  Cambray,  4824,in-8,  m'est  inconnue. 


72  GÉOGR.   LATINE,   1330-1410. 

Âu-dcssous  des  climats  :  India  fere  terdam  parlem  terre  habitalilis 
conlinel,  usque  ad  meridiem  se  eœlendll.  Au  delà  de  la  ligne  équinoxiale  : 
anliclimala  usque  equinocUcUem,  qui  ultra  mullas  habitationes  continent, 
ut  ex  hisloriis  autenticis  compertum  est,  —  mare  rubrum ,  euius  longi- 
tudo  vix.  VI.  millics  passum  vient  d*unc  variante  1606  de  Pline  V[ ,  53. 
—  Artm  est  la  coupole  Ârine,  hindou -arabe,  connue  par  Tétude  de  la 
science  arabe  (voyez  chap.  2^2  et  les  prolcgom.).  —  Le  reste  est  clair. 

Quand  j'examine  la  dispartilion  de  la  nomenclature  entre  les 
climats  sur  son  planisphère,  je  vois  qu'à  l'exception  des  climats  il  n'y 
a  rien  d'arabe,  et  je  pense  qu'on  remarquera  facilement  que  plusieurs 
situations  ne  s'accordent  point  avec  la  disposition  ptoléméenne.  Cette 
discordance  se  rencontre  sur  tous  les  points.  Yrcania ,  inscrite  exces- 
sivement au  nord,  Baclria  redescendante  au  sud,  la  Mauritania  placée 
sous  le  tropique,  Gades  touchant  le  second  climat,  sont  des  anomalies 
criantes  et  contraires  à  l'ordre  de  Ptolémée.  La  division  en  climats  est 
donc  opérée  sur  une  autre  construction  de  l'habitable  :  elle  est  tracée 
sur  une  mappemonde  dos  cosmographes. 

La  nomenclature  est  ancienne,  c'est-à-dire  latine  romaine,  mais  au 
nombre  des  appellations  anciennes,  se  mêlent  plusieurs  modernes: 
Rutenia,  Cumania,  Francia.  Dans  sa  longueur  l'habitable  est  divisée  en 
deux  moitiés  égales.  Le  méridien  de  division  traverse  évidemment  et 
incontestablement  par  Palestine  et  Jérusalem ,  conformément  à  l'usage 
convenu.  Habilatio  elephanlum ,  est  une  note  des  mappemondes.  L'em- 
placement de  Yrcania  à  côté  de  Cumania,  est  aussi  leur  mode.  Enfin 
l'autre  moitié  décèle  rinclination  de  la  méditerrauée  de  ENE  à  OSO, 
vice  caractéristique  des  caries  nautiques  du  moyen  âge,  qui  refoulait 
Gades  et  la  Mauritanie  vers  le  tropique  (133).  Or,  ce  planisphère  de 
d'Ailly  offre  une  carte  nautique,  une  mappemonde  soumise  à  la  divi- 
sion en  climats,  manifeste  :  qu'on  s'essayait  de  tracer  sur  les  mappe- 
mondes les  latitudes  au  hasard. 

155.  Ces  observations  se  présentent  par  l'examen  direct  de  Timage 
dessinée  par  d'Ailly.  Nous  devons  encore  chercher  des  renseignements 
dans  les  ouvrages  de  ce  prélat  et  nous  allons  rendre  compte  de  ce  que 
nous  y  avons  remarqué. 

Pierre  d'Ailly  avait  écrit  en  premier  lieu  un  traité  de  Ymagine  mundi 
qui  fut  terminé  le  12  août  lilO.  11  y  parle  du  système  du  monde,  des 
cercles  célestes,  du  soleil  et  de  son  année,  des  quatre  éléments,  de  la 
mesure  du  globe  terrestre;  il  discute  jusqu'à  quel  point  la  terre  est 
habitable,  indique  la  situation  respective  des  sept  climats,  des  ante- 
climats  et  des  post-climats,  signalant  que  les  habitations  s'étendent  au 
delà  des  climats  et  se  prolongent  à  l'orient  au  delà  de  l'hémisphère 
(cap.  I  —  13).  Ensuite  il  donne  une  description  étendue  des  trois  par- 
ties de  l'habitable,  dans  laquelle  il  fait  un  dénombrement  des  régions 
de  l'Asie  (cap.  15-32-37);  des  montagnes  (c.  38),  des  promontoires 
(p.  39),  des  îles  (cap.  40-48),  des  mers  et  lacs  (cap.  49-54) ,  des  fleuves 
(c.  55-59),  et  distingue  les  vents  (cap.  60).  Le  fond  de  cette  description 

^433)  Vérifiez  ce  que  nou«  observons,  en  conrrontant  la  sphère  de  (TAUly,  avec  la  carte  hydrogra- 
phique portugaise  de  4500,  qui  est  dans  notre  aUas. 


PIERRE  b'aILLY,   15S«  75 

esl  lire  dlsidor  de  Siville,  mais  ampli Qé  par  l'érudition  ou  les  additions 
nouvelles  et  des  explications  modernes. 

A  ce  traité  de  imagine  mundi ,  il  rattache  Vepilogus  mappae  mundi, 
D'Âilly  déclare  qu'à  la  suite  de  son  exposition  écrite,  il  est  convenable 
de  dresser  à  la  vue  un  tableau,  une  figure  qu'on  appelle  ordinairement 
mappa  mundi.  Qu'en  effet  il  essaya  de  l'exécuter ,  guidé  par  les  climats 
astronomiques ,  et  pour  l'éclaircir ,  il  résume  dans  une  espèce  d'épilo-* 
gue  ce  qu'il  a  dit  tout  au  long  dans  son  traité  de  imagine  mundi  (ts^). 

Or,  cette  figure,  cette  mappemonde,  c'est  celle  qui  nous  préoccupe. 
Elle  répond  exactement  à  ce  qu'il  est  dit  dans  les  traités  de  imagine. 
Les  Iperborei,  Arimaspi,  Rullieni,  Francia,  Cumania,  Georgia ,  Ësperi- 
des  et  différentes  expressions  s'y  retrouvent;  les  séparations  de  climats 
se  conforment  exactement  au  traité  de  imagine  mundi.  Il  ne  reste  aucun 
doute  qu'elle  a  été  faite  à  la  suite  des  traités  sus-mention  nés  en  1  ilO. 
Les  traités  n'offrent  rien  de  contraire,  mais  le  traité  de  imagine  mundi 
redresse  par  son  contenu  l'image  climatisée  du  dessin  ;  il  redresse  les 
cartes  des  cosmographes  précédents,  les  cartes  nautiques.  Toute  la 
description  géographique  du  traité  de  imagine  mundi  vient  de  la  même 
source  que  la  notice  de  la  mappemonde  de  Sanuto.  La  même  nature, 
la  même  suite  de  notions  anciennes  et  modernes,  succinctement 
extraites  par  Sanuto,  rendue  plus  amplement  par  d'Ailly;  des  passages 
verbalement  les  mêmes,  ainsi  que  la  source  de  la  description  remonte 
vers  le  xui*  siècle  (iss). 

Tractatus  de  imagine  mundi  présente  une  érudition  conforme  h  cette 
époque  plus  réculée.  La  bible,  les  pères  de  l'église,  surtout  Jérôme  et 
rexaemeron  d'Ambroise,  jettent  la  lumière  sur  Pline,  Sénèque,  Solin, 
Martien,  Orose,  Isidor;  Aristote  commenté  par  Averroes;  quantité 
d'écrivains  arabes  :  Haly,  Albategni,  Alboumazar,  Arzachel,  Alfragan, 
sont  mis  à  contribution  i)our  expliquer  les  points  astronomiques  ou 
astrologiques.  Tout  porte  à  croire  que  c'est  par  l'inspiration  d'Alfra- 
gan  que  d'Ailly  soumit  la  carte  des  cosmographes  à  la  règle  des  sept 
climats. 

D'Ailly  connaissait  les  longitudes  géograpliiqiies  dont  se  servaient  les 
arabes  (chap.  11) ,  mais  il  ne  s'explique  nulle  part  sur  l'emploi  de  cette 
longitude,  ni  dans  le  traité  de  imagine,  ni  dans  son  epilogus.  Il  accepte 
la  grandeur  de  700  stades  du  degré,  conformément  à  la  relation  de 
Tauteur  de  la  sphère  approuvé  par  Ambroise  ;  mais  il  ne  se  déclare 
point  contre  la  grandeur  de  56  ^/s  de  milles,  connue  par  Alfragan  et 
plusieurs  autres  écrivains,  certainement  arabes. 

Il  est  présumable  que  la  configuration  et  composition  de  l'image  du 
monde  donnée  par  d'Ailly,  n'a  rien  de  nouveau;  qu'elle  n'est  que  la 
reproduction  plus  claire  de  ce  que  nous  avons  pu  remarquer  dans  la 


(I8i)  Post  tractatmn  de  ymaginc  mundi,  ut  rcs  ipsa,  velut  \a  spccola  clarins  apparorct,  ncc  solum 
ocoUsoordis,  sed  etiam  corporis  sensibili  visione  nota  fieret,  figurai»,  quac  mappa  mundi  dici  solet, 
cam  astroBomica  climatum  distinctionc,  temptavi  dcscribere.  In  qua,  pro  cius  declarationc  utilia 
qnedam  ttotavi.  Que  hic  pro  iUorum  delectationc,  qui  brcvitale  gaudent  compendioso  quodam 
epylofo  reoollîgere  dîgaum  duxi.  (D'Ailly). 

(iSS)  Cette  identité  est  surtout  frappante  là  où  la  notice  de  Sanuto  parle  de  la  division  et  de  la 
nomeadatare  moderne  ;  reproduite  par  d'Ally,  cbap.  24,  i7,  etc.,  de  imagine  mundi.  —  Par  exemple  : 
regDum  Ge(»rgie  faabet  ab  orientem  magnum'moatem ,  vocatum  Aibzor,  ubi  multc  nationcs  habitant 
et  vocantUT,  mons  et  patria  illa  Alania.  Voyez  ci-dessus  les  notçs  32,  56  des  chap.  120, 123. 

II.  7 


74  GëOGR.  LàTINB,   1330-1410. 

petite  image  de  Cecco  d*A$coli.  G*est  une  copie  de  l*artificio  de  Hmagi  • 
nation  de  quidam  cosmograpln  (d'Âilly,  compend.  cosmogr.  I,  27).  Elle 
met  en  évidence  de  quelle  façon  les  connaissances  arabes  agirent  sur 
celles  des  cosmographes  précédents. 

Nous  apprenons  par  les  discussions  de  d*ÂiIly  que  les  cosmograplies 
précédents  appellaient  Syene  le  centre  de  rhémisphère  de  Tliabitable , 
nommé  Arin  chez  les  arabes.  Ce  n*était  pas  Syene  de  TEgypte,  mais  une 
autre  ville,  qui  est  la  ville  Arin,  Arym,  située  près  du  mont  Malcus 
sous  réquinoxiale,  à  égale  distance  de  90°  des  deux  pôles  et  des  deux 
derniers  méridiens  de  Thabitable.  D*Ailly  se  garde  bien  de  douter  de 
Fexistence  de  la  ville  aussi  symétriquement  située  :  il  en  conclut  plutôt 
Terreur  de  ceux  qui  veulent  expliquer  un  passage  des  psaumes  en 
s^eiTorçant  à  placer  Jérusalem  au  centre  du  monde  (ise).  Cette  remar- 
que ne  Ta  pas  empêché  de  laisser  sur  son  image  dessinée ,  Jérusalem 
sous  le  méridien  d'Arym  ;  il  Tavait  trouvée  ainsi  placée  sur  les  cartes 
des  cosmographes  qu*il  copiait. 

Examinant  toute  son  érudition ,  on  voit  qu*il  connaissait  Ptolémée  : 
mais  ce  n*était  ni  un  géographe ,  ni  cosmographe  :  c'est  Tastronome 
renommé,  Fauteur  d'almagesta,  de  quadriparlita.  Je  n'ai  pu  trouver 
dans  le  traité  de  imagine  mundi  et  dans  tous  les  traités  de  Tannée  1410, 
aucune  trace  de  la  géographie  de  Ptolémée  (i37). 

456.  Le  laborieux  d'Ailly ,  ayant  terminé  ses  traités  géographiques , 
composa  dans  la  même  année  :  tractatus  de  legibus  et  sectis  contra 
supersticiosos  astronomes,  qu'il  termina  la  veille  de  Noél,  le  â4  décem- 
bre 1410.  Continuant  ses  travaux,  il  prépara  un  traité  sur  la  nécessité 
de  corriger  le  calendrier.  Nommé  en  1411  cardinal,  il  le  dédia  à 
Jean  XXIII  et  Tadrcssa  au  concile  :  exhortatio  ad  consilium  générale 
super  kalendarii  correctionem  (iss).  Le  concile  de  Trente  ne  se  réunît 
qu'en  1414.  En  attendant,  d'Ailly  composa  le  traité  de  vero  cicio  lunari, 
suivant  la  doctrine  des  arabes,  et  un  autre  tout  nouvel  ouvrage  géogra- 
phique. 

11  semble  que,  dans  cet  intervalle  de  temps,  le  cardinal  d'AîIly  fit 
connaissance  de  la  géographie  de  Ptolémée  qui  lui  était  inconnue  anté- 
rieurement. Il  apprit  son  existence  par  une  interprétation  latine  : 
secundum  Iranslalorem  cosmographiœ  Plolemei  (compeudii  cosmogr. 

(436)  Meridianus  vero  latus  Indie,  descendit  a  tropico  capricorui  et  secat  equinoxialem  circulum 
apud  montem  Malcum  et  regiones  ei  contermioas  et  transit  per  Syenem,  que  nunc  Arym  vocatar. 
Nam  in  libro  cursuum  planetarum,  dicitiir,  quod  duplex  est  Syene,  una  sub  solstitio,  alia  sub 
equinoxiali  circulo,  et  hec  est  ciuitas  Arym,  quam  ponunt  mathemattci  in  medio  habitationis  sub 
equinoxiali;  et  distat  equaliter  ab  oriente'et  occidcole,  septentrione  et  meridie.  Unde  patet  falsitas 
coinsdam  vulgaris  opinionis,  ponentis  Hierusalem  in  medio  terre,  juxta  illud  psalmi  :  «  operatus  est 
salutem  in  medio  terre  »  qui  a  loçiuendo  simpiiciter  non  est  in  medio  terre  habitabilis  ut  ostendant 
ea  que  dicta  sunt  :  sed  est  quasi  in  medio  climatum  (de  imagine,  cap.  45)  Et  sub  eo  (equinoctiale) 
est  Arym  ciuitas,  eque  dtstans  ab  oriente  et  occidente,  septentrione  et  meridie  (de  imagine,  epilog.). 
—  Ascii  :  et  hec  gens  secundum  Plinium  in  India,  Orestes  dicuntur  et  Menodes  et  Symari,  apud  quos 
est  mous  Halcus  nomine  (de  imag.  mundi,  c.  II).  —  Ces  passages  sont  conforme  à  ce  qu  en  disait 
Roger  Bacon  (opus  magus,  p.  495),  un  siècle  et  demi  antérieurement.  (Voyez  ci-dessus  la  note  t  du 
chap.  404). 

(437)  Entre  autres  citations,  on  Ut  dans  son  de  imagine  mundi  [cap.  9]  :  Ptholomeus  diuidit  per  26 
lineas  equidistantes,  per  roinor  Britania.  —  Dans  la  géographie  de  Ptolémée  il  n'y  a  que  il  cTequi- 
distantes  :  c'est  dans  son  almageste,  que  la  il  equidistans ,  traverse  la  petite  Bretagne. 

(438)  Il  dit  dans  sa  dédicace  :  nuper  beatissime  pater,  antequam  vcstra  apostolica  sublimitas ,  me, 
strvorum  suorum  infimum ,  in  cardinalem  sacri  romani  ccelesie  nominaret,  tractatolum  de  correo 
tionc  kalendarii  composiieram. 


PIERRE  d'aILLY»   157.  75 

cap.  2i  infine).  La  traduction  était  accompagnée  de  2$  cartes  géogra- 
phiques (i49).  11  se  mit  de  suite  à  étudier  cette  nouvelle  découverte  et 
en  lit  un  abrégé  à  sa  manière  sous  le  litre  de  compendium  cosmographiœ , 
lequel  fut  en  effet  rédigé  en  1412  ou  1413,  comme  le  démontre  la  suiie 
de  nos  considérations. 

Revenant  pour  ainsi  dire  à  ses  travaux,  d*Âilly  dit  en  tête  de  son 
compendium,  qu'il  méditait  depuis  longtemps  de  composer  un  traité  de 
imagine  mundi  et  sept  autres  où  il  se  proposait  de  mettre  en  concor- 
dance différentes  opinions  sur  les  vérités  mathématiques  (uo).  En  ter- 
minant en  Tannée  1414  ces  traités,  il  rend  grâce  à  Dieu ,  d'avoir  enfin 
terminé  les  huit  articles,  utilement  compulsés,  sur  ce  que  les  sages 
avaient  avancé  (i4i).  Ainsi  11  réunit  tous  ses  traités  en  un  corps  com- 
posé de  la  série  successive  de  ses  élucubrations.  Le  compendium  cos- 
mographiœ s'y  trouve,  comme  suppléant  le  premier  traité  de  ymagine 
mundi,  par  conséquent  composé  plus  tard,  après  1410,  et  il  forme,  de 
même  que  le  premier ,  deux  traités  :  le  compendium  cosmographiœ  en 
22  chapitres  et  son  résumé  en  5  chapitres  (i4s). 

Dans  son  compendium  cosmographicum,  d'Ailly  se  propose  de  recueil- 
lir de  la  grande  cosmographie  de  rexcellent  Claude  Ptolémée,  en 
abrégé ,  les  longitudes  et  les  latitudes  des  lieux  plus  renommés  de 
rhabitable  :  mais  il  ne  se  borne  pas  à  la  simple  extraction  et  abrévia- 
tion, il  cherche  à  concilier  ses  anciennes  connaissances  avec  celles  de 
la  cosmographie  et  à  en  opérer  la  fusion. 

157.  Il  a  extrait  553  positions  (I,  chap.  2-11],  en  leur  donnant  un 
ordre  à  la  manière  des  arabes.  Sous  le  rapport  de  Tiinportance  géogra- 
phique de  ces  lieux  renommés,  son  choix  ne  se  recommande  pas 
beaucoup:  la  plupart  sont  des  noms  obscurs,  des  milieux  de  montagnes 
et  de  provinces.  Trouvant  22  parallèles  dans  la  cosmographie  de  Ptolé- 
mée, il  les  réduit  à  12,  dont  sept  correspondeni  aux  sept  climats  et 
passent  par  le  milieu  de  chacun  de  ces  climats;  trois,  à  savoir,  du 
mont  Barditi ,  de  Raptum  et  Galtigara  et  de  Besinga ,  se  trouvent  dans 
les  anté-climats;  deux  traversent  dans  les  post-climats,  la  Bretagne  et 
nie  Thyle.  Il  distribue  les  lieux  renommes  entre  ees  12  parallèles  et 
c*est  Tordre  qu'il  a  donné  à  355  positions  choisies  (i^s).  Notons  que  , 
par  cette  opération,  il  substitua  aux  climats  arabes  les  parallèles 


(.189)  D'après  la  table  où  il  désigne  le»  cartes ,.  il  parait  qiio  l'Italie  et  la  Grèce  lut  naB4j|Ma^c-Dt.  — < 
Le  traducteur  estaaus  doute  Jacq.  Angclo  qui  acheva  sa  versinn  en  i40S. . 

(440)  De  vmagine  miindi  et  ejns  aescriptiooe  traclatum  unuiii  ^  et  de  concordante  théologie  H 
astrologie,  de  concordantia  etiam  discordantium ,  Tarieque  opiiia«tium  circa  mathematicam  verlta- 
tem,  tractatus  septcm,  ex  sapieutun  scuteutiis,  dudum  uiilitcr  componerc  tcniptaui.  Pro  quorum 
tamep  elucidatione  atqne  snpplemeuto»  et  specialiter  prioM  tractatus.  et  octaui  (secundi?),  iuquibus 
plurade  devisione  partibus  orbis  terre  scripta  sont  :  nunc,  etiain  hoc  compendium  superaddere 
decreuimus  (comp.  cosmograph.  cap.  0. 

(iil)  Huic  operi  finem  imponontes,  dee  gratias  agimus»  quia  8  tractatus,  satis  utiles»  ex  sapicntum 
dictis«  ipso  donante,  eollegimus:i,de  image  mundi,  3, de  epilogoejus;  S,  de  correctione  kalendaril^ 
A  de  vero  cicio  lunari  ;  8  de  legib  et  scctis  contra  supersiitiosos  astronomes,  et  très  ultimes  (6,  7,  8)« 
deconcordia  vere  astronomie  cum  theologica  et  hislorica  Teritate.  —Compendium  cosmographie, 
n'est  que  le  supplementum  du  traite  de  imagine  mundi. 

(liS)  L'édition  primitive  donne  par  erreur  pour  titre  h  ce  résumé  :  tractatus  viceaimus  nonus 
cosmographie  ecmpendii.  Il  Taut  lire  probablement  :  vices  unns  nouus. 

(443)  sans  compter  quelques  erreurs  d'impression,  on  remarque  dans  la  suite  de  la  liste  parallMce 
des  erreurs  palpables  qui  ont  échappe  à  l'attention  de  d'Ailly,  par  exemple  médium  sarmatie, 
médium  Taprobane ,  etc. 


76  OÉOGR.   LAnNBy  1530-UlO. 

grecques;  qu*îl  soumit  la  description  de  Plolémée  à  la  méthode  arabe 
et  réunit  les  règles  des  deux  méthodes. 

Continuant  de  confronter  et  de  comparer  les  données  de  Ptolémée 
et  des  arabes ,  d'Âîlly  trouve  des  conformités  satisfaisantes.  Il  examine 
plus  au  long  (1, 19-21)  les  opinions  de  Pline  et  ses  12  parallèles  qui 
décèlent  une  haute  connaissance  géographique  chez  les  anciens 
grecs  (144)  ;  il  y  aplanit  les  contradictions,  s'évertue  à  établir  les  con- 
cordances, soutenant  toujours  que  rhabitable  est  plus  spacieuse  que  ne 
le  présente  le  quart  du  globe;  qu'elle  s'étend  vers  Torient  au  delà, et  la 
cité  Syenc-Anin>  centre  de  Thémisphère  y  ne  divise  pas  notre  habitable 
à  moitié,  par  parties  égales  (145). 

La  grandeur  du  globe  de  la  cosmographie  de  Ptolémée  rengage  à 
reprendre  cette  question.  En  la  comparant  avec  celle  de  Fauteur  de  la 
sphère  et  d'Âlfragan  (cosmogr.  comp.  II,  4),  son  esprit  conciliateur 
ne  slnquiète  point  de  leur  différence.  Dans  les  grandeurs  de  degrés 
de  500  stades,  de  700  stades  et  de  56  ^/s  de  mille,  il  ne  voit  que  la  dif- 
férente grandeur  de  stades  et  de  milles ,  qui  varie  comme  la  grandeur 
de  Faune. 

D'Âilly  expose  les  projections  de  Ptolémée  pour  le  dessin  des  cartes 
in  piano  (comp.  cosmog.  1, 17;  IL  1);  fait  connaître  celle  qui  trace  les 
parallèles  et  les  méridiens  courbes  (II,  1)  et  compare  Fautre  conique, 
avec  la  méthode  dont  il  s'est  servi ,  imitant  les  quidam  des  cosmogra- 
phes précédents  (I,  17).  Il  préfère  garder  son  ancienne  méthode  et 
recommande  d'y  tracer  les  méridiens  arcuales  de  15  en  15  degrés;  la 
ligne  droite  du  méridien  central  passera  par  Ârim;  il  recommande  dé- 
noter le  chiffre  de  la  longitude  le  long  de  l'équinoxiale  (1, 17, 18),  (i46). 

HH)  Ce  chapitre  remarquable  de  Pline  VI  {Zi)  39,  m'a  senri  de  base  dans  la  reconstruction  de  la 
carte  grecque  an  temps  des  ccsares  (recherches  géogr.  UI,  113-123). 

(145)  Unde  apparct,  quod  maior  est  longitude  terre  versus  oriens,  quam  ponat  Ptholomens.  Nam 
mcridianum  latus  in  die  descendit  a  tropico  capricomi  et  secat  equinoctialem  apud  montem  Malum 
et  transit  per  Syenem  qui  nunc  Arim  dicitur.  Mam  duplex  est  Syene,  una  sub  solsUtio,  de  qua  supra, 
alia  sub  equinoxiali,  que  est  Arim,  et  bec,  secundnm  mathematicos  est  in  mcdio  terre  habitabilis, 
Mib  Cfjninoxiali  distans  90  gradibns  ab  occidente  et  secundum  cos,  totidem  ab  oriente,  et  a  septen- 
trionc  et  racridie ,  et  loquuntnr  de  habilatione  eis  nota  :  sed  expertum  est,  quod  Arim  non  distat  ab 
oriente  90  gradus  tantum ,  sed  magis  elongatur,  proptcr  hoc  qnod  longitude  habitabilis  major  est 
quam  roedietas  terre  et  hoc  nsque  ad  orientera  (comp.  cosmogr.  I,  49;  répétition  de  ce  qu'il  dit  de 
iroag.  mundi,  cap.  15,  et  epilog.;  voyez  la  note  précédente  130).  Cette  assertion  avait  été  avancée 
cent  cinquante  ans  auparavant  par  Roger  Bacon,  qni,  per  experientiam  itincris  et  navigationis  apud 
Plinium  et  alios  naturales  (opus  majus ,  p.  195),  admottait  une  extention  de  l'habitable  plus  considé- 
rable à  l'orient.  La  terra  incognita  et  la  carte  de  Ptolémée  vient  confirmer  cette  assertion,  et  ouvre 
l'autre  hémisphère  aux  voyageurs  modernes  dont  les  itinera  et  les  nauigations  furent  négligées  par 
les  cosroographes. 

(Ii6)  Ilis  ita  premissis,  nostre  habitabilis  situm  ac  generalcm  descriptionem  quam  brevius  in  piano 
fierî  potest,  etiam  cum  annotatione  septem  climatum,  designare  proposuimus  :  non  tamen  omnino, 
modum,  quam  Ptbolomeus  docuit  insequentes.  Nam  ad  banc  fignram  describendam  et  ad  figurandam 
ciaitates  famosas  in  suis  locis  per  distantiam  earum  ab  eqninoxiali,  que  vocatur  latitude  civitatis  vel 
regionis;  et  per  distantiam  cius  ab  occidente  in  orientera ,  que  longitude  regionis  dicitur  :  quidam 
cosmographi,  utunturartificio,  que,  locns  ciuitatis  babetur  perdistantiam  a  meridie  in  scptentrionem 
et  ab  oriente  in  occidentcm,  et  hoc  artificium  consistit  in  concursu  linee  recte  equidistantls  eqni- 
noxiali ,  signale  in  piano  secundum  formam  linee  recte  a  numéro  graduum  latitudinis  regionum 
signato  in  quarto  coluri,  ducta  ab  equiuoxiali  usque  ad  polum  mnndi  :  in  concursu  inquam  cum  arcu 
cireuli  magni,  qni  transit  per  polos  mnndi  et  per  numerum  longitudinis  ciuitatum ,  signatum  in 
equinoxiali  circule.  Uic  antem  modus  mclior  est  et  facilior,  et  suflicit  considerationi  locorum  mundi 
in  hnjusmodi  significatione  scnsibili.  Differt  antem  hic  modus  describcndi  habitabilcm,  a  modo  quo 
Ptbolomeus  in  sua  cosmographia  utitur  :  quia  iste  modus ,  désignât  parallèles  per  rcctas  lineas  et 

meridianos  per  lineas  arcuales,  utpatct  in  ngnra  subscripta  :  ille  vcro  e  contra Considerandum 

quoque  est  quod  secundum  banc  ngnram,  doscribcndo  latitudinem  secundum  gradus  coluii  circu- 
laris,  fiunt  spacia  climatum  latiora,  quam  ad  describendum  latitudinem  secundum  gradus  roeridiani 
recti  linei.  Ideo,  hec  figura  congruit  mcchanice  rationi.  Omnis  tamen  difllcultas  que  coutingit 
dcscribendo  habitabilcm  in  piano,  excluderetur  dcscribcndo  cam  in  spcrico  (comp.  cosmog.  1, 17). 


PIERRE  d'aILLY,    158.  77 

IhiDS  son  traité  de  imagine  mundi  il  négligea  de  s'occuper  tant  de  méri- 
diens que  d'échelle. 

D'Ailly  nous  avertit  qu'il  a'^dessiné  une  figure  donnant  figuram  orbis, 
munie  de  Téchelle  équinoxiale,  de  méridiens  placés  à  chaque  IS*"'  degré, 
de  parallèles  tracées  par  le  milieu  des  climats,  par  Tyle,  par  Barditi 
(compendii  cosmogr.  1, 18)  (147).  Or,  la  Hgure  que  nous  avons  devant 
nous,  n'est  pas  celle-ci.  Elle  ne  répond  pas  h  la  description,  aux 
exigences  de  compendium  cosmographisc.  Les  Ipcrborei,  Arimphi, 
Rutheni,  Fransia,  Cu mania,  Georgia,  Esperides  et  dllférentcs  expres- 
sions de  notre  image,  ne  se  trouvent  nulle  part  dans  le  compendium 
cosmographiae ;  elle  est  privée  de  Tyle,  de  Barditi,  privée  de  méridiens 
arcuales,  de  4  heures,  de  Téchellc  de  i5  degrés,  et  des  douze 
parallèles.  Nous  n'avons  pas  de  figure  de  la  mappemonde,  dessinée 
en  14>i3,  conformément  aux  renseignements  et  positions  puisés  de  la 
récente  connaissance  de  la  géographie  de  Plolémée.  11  serait  curieux 
pour  nous  de  savoir  Fopinion  du  cardinal  sur  la  difformité  ploléméenne 
de  la  configuration  des  pays  et  comment  il  la  conciliait,  dans  son  ima- 

r 'nation,  avec  les  mappemondes  des  cosmographes.  Il  ne  s'explique  pas 
cet  ^rd  et  garde  un  silence  profond. 

158.  Après  avoir  achevé  ses  compendia  cosmographie ,  d'Ailly 
s'adonne  entièrement  à  Tastrologie  historique ,  dont  les  trois  traités 
forment  un  ensemble.  Le  premier ,  vigintiloquium  de  concordise  astro- 
nomie veritatis  cum  theologia,  divisé  en  viginti  verba  (chapitres)  fut 
achevé  à  Cologne  dans  Tannée  1414;  le  second,  de  concordia  astrono- 
mie» veritatis  et  narralionis  historicse,  fut  terminé  à  Bâles,  le  10  mai 
de  la  même  année  1414  ;  le  troisième,  elucidarius  astronomic%  concor- 
diae,  cum  theologia  et  historica  veritate,  suivit  de  près  comme  huitième 
traité  utilement  composé  sur  ce  que  dirent  les  sages,  exécutés  suivant 
le  plan  conçu  d'avance  par  fauteur  (us).  Au  nombre  de  ces  huit  traités 
les  compendia  cosmographie  ne  se  comptent  pas  :  ils  avaient  été  conçus 
et  exécutés  après  coup  comme  supplément  au  traité  de  imagine  mundi 
et  achevés  en  1415,  avant  que  les  trois  derniers  astrologiques  fussent 
élaborés. 

La  même  année  encore,  1414,d'Ailly  prépara,  le  26  septembre  et  le  5 
octobre  deux  apologeticœ  defensiones  asironomice  veritatis.  11  écrivit 
encore  :  de  concordia  discordantium  astronomorum.  C'est  tout  ce  qu'on 

(447)  D*Àilly  (corou.  cosmogr.  I.  18),  donne  la  description  de  sa  figure.  Equinoxialis  eius 
diaisiooes,  sunt  graaus  lougiludinis  regionura.  Duo  arcus  diuidunt  equiuoxialein  in  très  partes, 
qnamm  qualibet  uiciti  horas  eqninoctialcs,  et  sic  per  sîmiles  arcus  posset  subdiuidi  equiuoxialis 
ita,  ntquilibet  ISgradibus  corresponduret  una  liora  equinoctiulis...  l'urallelosautcni  eonsignabinius 
in  figura...  et  nota,  qnod  sicut  parallelus  transiens  per  Tylem  iusulain,  versus  septeutrionem  et 
parallelns  transiens  per  montem  Barditi  versus  austrum ,  terminant  latitudinera  uostrc  habitabilis  : 
ita,  medietas  colari  versus  oriens  per  metropolim  Sinarum...  etc.  Quia  vero  loca  premissa,  a  quibus 
denominantur  septem  climata,  famosa  aliqua,  quac  priucipaliler  notauerunl  Alfragauus  et  ejus 
sequaoes,  iion  tenent  précise  médium  dictorum  climatum,  ideo,  pro  maiori  cerlitudine  in  bac  figura, 
^gnabimiis  parallelos  dictorum  eliniatnm  sub  gradibus  lalitudinis,  qui  ferc  tenent,  dictorum 
cnmatam  média  (compend.  cosmogr.  I,  i8). 

(148)  L'édition  primitive  place  à  la  suite  du  compendium,  huit  tableaux  cosmc^raphiques, au 
Dombre  desquels  se  trouve  aussi  la  mappmondc.  Tous  ces  tableaux  y  compris  la  mappemonde, 
fnrent  préparés  à  Tusage  du  traité  de  imagine  mundi.  Comme  les  compendia  sont  des  suppléments 
de  ce  traité,  tons  les  tableaux  cosmographiques  se  trouvent  bien  à  leur  suite  :  à  Texception  de  la 
mappemoiide.  Celle  qui  a  été  faite  expressément  pour  les  compendia  n'y  étant  pas  ;  ccUc  qui  s'y 
trouve  doit  6tre  renvoyée  exclusivement  au  traité  de  imagine  mundi. 


78  GÉOGR.   LATINE,   1330-1410. 

connait  de  cet  homme  savant  qui  nous  fournit  une  immense  lumière 
sur  rélat  des  connaissances  géographiques  à  son  époque. 

Ce  qu'il  révèle,  présage  pour  la  géographie  une  nouvelle  marche, 
une  nouvelle  direction.  Il  y  avait  des  quidam,  qui  rêvaient  les  longitu- 
des et  latitudes,  le  mode  de  projection  sur  le  plan.  Les  descriptions  des 
arabes  et  leurs  climats  inspirent  leurs  pensées,  couvrent  certaines  car- 
tes nautiques  des  cosniographes  de  l'élément  mal  assis  et  peu  goûté.  Eu 
attendant,  de  plus  graves  irruptions  dans  le  domaine  de  la  géographie 
commencent  à  clore  une  direction  transformatrice.  Elle  germe  dans  la 
renaissance  des  lettres;  elle  introduit  dans  la  composition  des  cartes 
des  éléments  hétérogènes,  substitue  d'autres  bases  dans  leur  construc- 
tion, propose  d'autres  formes,  provoque  à  prendre  de  nouvelles  pré- 
cautions dans  l'appréciation  des  monuments  géographiques  suivants. 
Des  monuments  d'une  autre  nature  éclosent  et  forment  une  autre  suite. 
Désormais  il  faut  classer  les  monuments  en  deux  suites  :  ceux  dus 
aux  études  des  cosniographes  et  ceux  qui  revêtent  des  formes  ptolé- 
méennes,  et  sans  l'avoir  vue,  on  ne  saurait  dire  à  quelle  suite  appartient 
la  carte. 

La  nouvelle  création  et  façon,  dénoncée  en  1415,  par  l'essai  de 
d'Âilly  trouve  de  nombreux  prosélytes  et  se  répand  bientôt  par  la 

fravure  en  bois  ou  en  métal  ;  l'ancienne  reste  ensevelie  dans  le  dessin, 
•a  pratique  du  dessin  et  de  la  composition ,  dirigée  par  la  rose  des  vents, 
ne  discontinua  guère  de  dresser  les  caries  nautiques.  Ce  furent  les 
péninsules  qui  continuèrent  cette  composition  ;  la  péninsule  pyrénéenne 
plus  longtemps  que  l'Italie. 

Portugais,  surrE  des  cartes  1410>i4G0. 

159.  Une  nouvelle  école ,  une  nouvelle  fabrique  de  cartes  devait  à 
son  tour  acquérir  une  réputation  spéciale.  La  poursuile  jusqu'en  Afri- 
que des  infidèles,  vaincus  et  expulsés,  entraîna  les  Portugais  dans  les 
eaux  plus  éloignées  de  l'océan.  Le  goût  des  découvertes  s'empara  de 
leur  esprit.  Longtemps,  une  prise  de  possession,  des  colonnes  plantées 
au  nom  du  roi  du  Portugal,  la  colonisation  quelquefois  immédiate, 
furent,  pour  les  navigateurs  portugais,  des  découvertes  iinporlantes 
qui  étaient  connues  antérieurement  par  d'autres  navigateurs.  Plus  tard, 
les  navigateurs  coururent  plus  loin  et  firent  des  découvertes  réelles  et 
immenses  qui  leur  acquirent  une  gloire  impérissable. 

Une  prise  de  possession ,  l'érection  d'un  castel  ou  d'un  magasin  de 
commerce,  n'avaient  encore  aucune  consistance,  aucune  stabilité  dans 
les  parties  océaniques.  La  navigation  se  bornait  plutôt  à  des  excursions 
commerciales,  à  la  piraterie,  en  annotant  les  accidents  de  tempête  de 
ceux  qui  s'aventuraient  dans  les  hautes  mers. 

A  Lisbooe ,  vers  1150,  une  rue  portait  le  nom  des  Magrourin ,  qui 
s'embarquèrent  jadis  pour  explorer  l'océan  occidental.  Tout  ce  qu'ils  y 
virent  n'était  ni  merveilleux  ni  incroyable.  Us  n'abordaient  qu'à  des 
îles;  d'abord  ils  virent  les  moutons,  ensuite  les  insulaires,  parmi  les- 
quels se  trouvait  un  interprète  arabe.  Arrêté  par  les  insulaires,  il  furent, 
les  yeux  bandés,  conduit  et  jeté  sur  les  rivages  de  l'Afrique  près  d'Asli. 
(Edrisi,  IV,  f ,  p.  27).  Les  arabes  et  les  maures  visitaient  probablement 


NAVIGATION,   i59.  79 

CCS  lies;  à  Lisbone,  après  leur  relraiic,  devait  rester  une  tradition 
obscure  de  leurs  courses. 

On  répéta  longtemps,  qu'en  i570  la  tempête  surprit  un  Grec  et  le 
porta  sur  Tile  de  S.  Michel,  où  il  conçut  d'abord  et  abandonna  ensuite 
le  projet  de  se  coloniser  (u9).  L'infortune  de  l'Anglais  Uobcrt  O'Macbin 
qui  péril  vers  le  même  temps  (avant  i577)  sur  l'île  de  Legname  (Madère) 
était  bien  connue  (tso).  La  tempête  poussa  le  biscaien  Martin  Ruiz 
d'Avendano  (en  1577  ou  1582)  sur  Lancerolo,  où  il  fut  gracieusement 
traité  par  les  insulaires;  la  tempête  jeta  eu  i58â,  un  autre  biscaien 
Ferdinand  comte  d'Uréna ,  sur  File  Gomera  ;  de  même  l'équipage  de 
François  Lopez  fut  jeté  sur  la  grande  Canaric,  où,  après  sept  années  de 
séjour,  ils  furent  massacrés  par  les  indigènes  (isi). 

Mais  l'hospitalière  Lanceloto  fut  dépeuplée  par  des  Espagnols  et 
autres  corsaires,  qui  y  prirent  maintes  fois  et  menèrent  en  esclavage 
les  gens  (iss).  Eu  1595  les  vaisseaux  équipés  à  Séville  par  une  associa- 
tion formée  (en  1590)  sous  le  patronage  du  roi  de  Castiilc,  et  à  la  tête 
de  laquelle  se  trouvait  Gonzales  Peraza,  s'abattirent  sur  Lanceloto,  la 
pillèrent  et  enlevèrent  le  chef  du  pays  avec  sa  femme,  et  170  de  leurs 
sujets  (iss).  De  semblables  descentes  s'étendaient  jus(|u'à  l'île  de 
Fer  (i«4). 

Au  reste,  les  communications  avec  les  Canaries  étaient  assez  suivies  : 
au  mois  d'octobre  1402,  les  nefs  espagnoles,  commandées  par  Francisco 
Calvo  et  Fernando  Ordonez,  venaient  traiter  aux  Canaries  (155)  :  les 
navirs  d'Espaigne  ou  d'ailleurs  ont  accoutumé  venir  et  frecantcr  en  ces 
marches  (de  l'Afrique)  (isg)  :  et  au  delà  de  Bugeder,  jusqu'au  fleuve  de 
l'Or  (i«7). 

Si  les  communications  dieppoises  avec  l'Afrique,  qui  offrent  tant  de 
succès  et  tant  d'incertitudes,  comme  nous  l'avons  vu,  s'étaient  ralenties, 
de  nouveaux  projets  paraissent  s'emparer  de  l'esprit  d'autres  Normands, 
à  la  suite  de  quoi  un  de  leurs  barons,  Jean  de  Bethencourt,  partit  de  la 
Rochelle  le  1^'  mai  de  li02,  pour  venir  es  parties  de  Canare,  pour 
veoar  et  visiter  tout  le  pais ,  en  espérance  de  conquérir  les  illes  et  mes- 
très  les  gens  à  la  foy  cretienne.  Avec  un  équipage  fortement  diminué 
par  sa  mauvaise  disposition ,  ayant  à  bord  pour  truchemen  quelques 
Canariens  qui  se  trouvèrent  en  France,  il  reprit  sa  route  de  Cadix  par 

(149)  Cordcyro,  historia  insulata,  V,  p.  427. 

(iSO)  Robert  O'Machio  8*était  embarqué  à  Bristol  pour  passer  co  France  avec  une  jeune  lady  qu'il 
avait  enlevée  :  une  tempête  les  poussa  a  Madire  ;  là,  O'Machin  perdit  sa  maîtresse  et  en  mourut  de 
chagrin  quelques  jours  après  ;  ses  compagnons  ayant  repris  la  mer,  abordèrent  en  Afrique,  où, 
devenus  esclaves  des  Haures,  ils  eurent  pour  compagnon  de  captivité  le  pilote  sevtUan  Jean  de 
Morales  qui,  plus  tard,  devint  le  guide  du  portugais  Jean  Gonçalcs  :  comme  le  relate  ^epanaphoras 
de  varia  historia  portugueza,  p.  278)  Franciso  Manuel  descendant  du  môme  Gonçales  suivant  la  rela- 
tion de  aoD  compagnon  Francisco  Alcaforado.  Le  nom  de  Machin  s'est  perpétué  dans  Machico,  ville 
de  Madère. 

(151}  Joseph  de  Viera  y  Clavijo,  noticias  de  la  historia  gênerai  de  las  islas  de  Canaria,  lU,  22,  23, 
40;  Glass,  history  of  the  Canary  islands,  2,  6. 

(152)  Conqncste  des  Canaries  (ouvrage  composé  par  les  aumôniers  de  Bcthencours),  chap.  71. 

{l53)  Viera,  noticias,  m,  25,  IV,  11  ;  Glass,  1. 

(154)  Conqueste  des  Canaris,  G5. 

n55J  Conqueste  des  Canaries,  9, 11, 25. 

(4561  Conqueste  des  Canaries ,  34. 

(157)  L'en  ne  compte  du  cap  de  Bugedor  jusquez  au  fleuve  de  TOr,  que  cent  et  chinquantc  lieus 
françaises,  et  ainsi  Ta  monstre  la  carte;  ce  n'est  singlure  que  pour  trois  jours  pour  naves  et  pour 
barges  (car  galées  qui  vont  terre  a  terre  prennent  plus  lonc  chemin],  et  quant  pour  y  alcr  d'ioy 
(de  Canare),  nous  n'en  tenons  pas  grant  compte.  Conquestes  des  Canaries»  58. 


80  GÉOGR.    LATINE,   1530-1410. 

la  haute  mer  pour  venir  en  droilurc  aux  Canaries  et  arriva  à  File  Gra- 
ciosa,  ensuite  descendit  à  Lancelote  au  mois  de  juillet  (iss). 

Beihencourt  et  son  compagnon ,  le  chevalier  Gadiffer  de  la  Salle , 
trouvèrent  à  Lanceloto,  ung  viel  chastel  que  Lancelot  Maloescl  avait 
jadiz  fait  faire,  selon  ce  que  Ten  dit  (iso);  ils  ont  trouvé  le  testament 
de  1^  massacrés  de  Tequipage  de  Lopez  dans  la  grande  Canarie  (leo); 
ils  ont  remarqué  que  la  carte  dont  ils  se  servaient,  donnait  une  propor- 
tion trop  grande  à  Ffle  de  Palma  (i6i);  et  toutes  isles  Canariennes  il 
ont  veues  et  visitées,  et  aussi  ont-il  toute  la  costière  des  Mores  et  du 
destroit  de  Ma roch  en  venant  vers  les  isles;  et  Bethencourt  dit  ainsi  : 
que  se  aucun  noble  prince  de  royaulme  de  France  ou  d'ailleurs 
vouloient  entreprendre  aucune  grant  conqueste  par  deçà ,  qui  seroit 
une  chose  bien  fesable  et  bien  resounable,  ilz  le  pouvoienl  faire  a  pou 
de  Trais ,  car  Portugal  et  Espaigne  et  Aragon  les  fourniroient  pour  leur 
argent  de  toutcz  vitailles  et  de  navire  plus  que  nul  autre  pais,  et  auxi 
de  pillots  qui  scevent  les  pors  et  les  contrées  (162). 

Plus  tard,  au  retour  d'un  voyage  en  France,  Bethencourt  voulut  faire 
une  descente  à  la  grande  Canarie,  et  il  partit  de  Fortaventure  avec 
trois  navires  le  6  octobre  liOo  (162).  Fortune  vint  dessur  la  mer,  que 
les  barges  furent  départies  et  vindrent  toulz  trois  près  des  terres  sara- 
sines  bien  près  du  port  de  Bugedcr  (au  sud  du  cap) ,  et  la  descendit 
monseigneur  de  Bethencourt  et  ses  gent,  et  furent  bien  huit  lieus 
dedans  le  pais  et  prindrent  hommes  et  femmes,  qu'ilz  amenèrent  avec 
eulx,  et  plus  de  trois  mille  chamyaulx;  mais  ilz  ne  les  purent  recueil- 
lir au  navire,  et  en  tuèrent  et  jarerent,  et  puis  s'en  retournèrent  a  la 
grant  Canarie.  Cette  expédition  est  rappelée  dans  le  récit  de  Taudience 
que  le  pape  Innocent  Vil  donna  quelques  mois  après  à  Bethencourt , 
qui  venait  lui  demander  un  évéque  pour  les  Canaries  :  ainsi  que  j'en- 
tens,  le  pais  de  terre-ferme  n'est  pas  loing  d'yla  :  le  pais  de  Guynee  et 
le  pais  de  Barbarie  ne  sont  pas  a  plus  de  douze  leues;  encore  me 
rescripl  le  roy  d'Espaigne  que  vous  aves  este  dedens  le  dit  pais  de 
Guynée  bien  dix  lieues  et  que  vous  aves  tué  et  amené  des  Sarazins 
d'icellui  pais  (164). 

160.  Les  Portugais  étaient  dans  une  guerre  presque  continuelle  avec 
ces  Sarrasins  :  mais  ils  ne  combattaient  qu'avec  leurs  plus  proches 
voisins.  Dans  une  expédition  dirigée  contre  eux  en  1415,  Sebthah  fut 
prise.  Henri  (né  1504)  un  des  iils  du  roi  Jean,s'informant  de  l'intérieur 
du  pays,  résolut  la  conquête  de  la  Guinée.  Chaque  année  il  envoya 
deux  ou  trois  navires.    Ces  navires  côtoyant  le  rivage  occidental  de 

(168)  Conq.  des  Canar.  i-43.  Les  interprètos  sont  nommés  :  Alfons  et  femme  Yezabel,  ibid.  21, 
30,  31,  78,84. 
(iS9)  Conqueste  des  Canaries,  32,  33. 

il60)  Conqueste  des  Canar.  -10. 
IGl)  Conqueste  des  Canar.  66. 
162)  Conqueste  des  Canar.  53. 

(163)  A  Fortaventure  existe  la  ville  du  nom  de  Betaneouria  :  souvenir  du  ces  expéditions 
normandes. 

(164)  Conqueste  des  Canaries,  chap.  82,  89.  —  Celte  relation  est  composée,  comme  nous  Pavons 
mentionné,  par  les  aumôniers  de  Bethencourt.  —  Tout  ce  que  nous  disons  de  ces  investigations  et 
découvertes  océaniques,  nous  l'extrayons  de  l'excellente  notice  de  D'Avezac  (Paris,  in-8*,184r>).  Cette 
notice  élucidant  des  questions  embrouillées,  est  en  môme  temps  l'ouvrage  de  la  polémique  fatigante 
de  la  priorité  des  découvertes. 


NAVIG ATI  yV  t  i60.  8i 

r\frîque  parvinrent  à  dépasser  le  cap  Noun,  qu'on  croyait  le 
dernier  terme  de  la  navigation  espagnole,  et  arrivèrent  jusqu'au  cap 
Bojador  :  et  tous  s'arrêtaient  là  sans  que  personne  osât  se  risquer  à  le 
doubler  (ics). 

Jean  Gonçalves  Zarco  et  Tristan  Vaz  Teixeyra,  résolurent  de  fran- 
chir cet  obstacle.  Mais  assaillis  par  la  tenipéte  et  les  vents  contraires, 
leur  petit  navire  fut  emporté  au  caprice  des  flots  de  Tocéan.  L'esprit 
troublé  par  la  frayeur,  ils  ne  savaient  en  quel  paraij(c  ils  se  trouvaient , 
lorsque  la  bonne  fortune  les  conduisit  à  une  ile  qu'ils  appelèrent  Porto 
Sanlo  (elle  portait  ce  nom  au  moins  depuis  50  ans).  C'était  en 
l'année  i4i9.  L'année  suivante  i  i20,  don  Henri  les  renvoya  pour  colo- 
niser cette  ile  nouvelle.  Parmi  leur  équipage  se  trouvait  Francisco 
Âlcaforado  et  un  excellent  pilote  castillan  de  Séville,  Jean  de  Morales  , 
comme  guide.  Dans  leur  exploration  ils  aperçurent  une  taclie  noire  à 
l'horizon.  C'était  l'île  de  Legname  (de  la  haute  futaie).  Le  guide  en 
donna  l'information  et  raconta  les  malheureuses  aventures  d'  O'Machin. 
Grande  fut  la  joie  qui  suivit  cxîtte  découverte.  L'île  reçut  le  nom  de 
Màdeira  (de  haute  futaie,  de  bois  de  construction),  à  cause  des  forêts 
épaisses  dont  elle  était  couverte  (lec).  On  se  mit  de  suite  à  la  coloniser, 
à  y  planter  la  canne  à  sucre,  des  vignobles  (ic?). 

La  marine  portugaise,  bien  que  puissante  pour  combattre  les  Sarra- 
zins,  se  montre  encore  assez  timide  pour  la  navigation.  Les  Poçana  de 
Gènes  avec  leur  état-n)ajor  génois,  dirigeaient  depuis  cent  ans  l'ami- 
rauté portugaise  sans  pouvoir  vaincre  les  préjugés  des  mariniers  portu- 
gais; car  les  mariniers  i>ortugais  de  ce  temps  n'étaient  point  accoutu- 
més à  voguer  en  pleine  mer,  toute  leur  science  nautique  se  bornant  à 
un  cabotage  toujours  en  vue  de  terre  (ics).  Aussi  la  marine  portugaise 
ne  cessait  de  se  servir  de  pilotes  étrangers  (leo). 

Diegode  Séville,  pilote  du  roi  de  Portugal,  dr-œuviil  en  Tannée  Ii27 
les  Iles  Açores  (i^o).  La  reconnaissance  et  la  colonisation  de  ces  îles  se 
suivirent  de  près  et  avec  succès.  Gonçalve  Yelho  Cabrai  rencontra  des 
Formigas  en  li5i;  File  Sainte  Marie  fui  découverte  eu  li5!2;  peu  à 


(468)  Mac  os  navios...  nain  dcscobrrram  mais  qac  atû  a  cabo  Bojador,  ci  aly  paravam  todos  âcm 
algum  ousar de  comcter  a  passagcm  délie  (JoiU  de  barros,  Asia,  drc.  I,  liv.  1,  11). 

(166)  Os  bcrdeiros  de  Joain  Gouçalvez  teni  escriptui-a  miiy  purtirulardestc  dcscobrimento,  guidait 
la  relation  de  Barros  (decada  I,  liv.  I,  5).  Antese  meliior  que  lodos,  Francisco  .Vlcaforado,  escudeiro 
do  iefaDie  d.  Ucnriqiie,  fez  de  lodo  o  successo  buraa  relaçuo,  (juu  oler  e  ceo  ao  mcsnio  infante...  Iium 

de  Baçao  castelhana,  natural  de  Seiillia,  cujo  nome  eru  Joau  dr.  Moral'^s h(>in<>m  pralico  iia  arle 

denavegar  :  ajoute  Franciiico  Manuel  un  desdesccuduntsde  Joaiu  Gouralvcs,  (dans  son  epanaphoras 
de  varia  liistoria  portugue/a,  p.  278,  3il). 

(467)  Navigazioui  di  Alvlse  da  Ca  da  Mosto,  dans  Kiinuiiio,  1. 1,  p.  106;  Pcritsol,  itineramuudi, 
cap.  16,  il. 

(i68)  E  como  os  mariAhciros  na  quelle  tempo  uam  eram  rostumndos  a  se  engolfar  tanto  no  peguo 
do  mar,  et  toda  sua  navegaçain  era  per  singraduras  senipre  a  vista  de  terri. .  (Harros.dec.  I,  lih.  1,11). 

(169)  Castillans,  génois,  florentins,  s'empressent  à  rendre  ce  service  au  Portugal  :  ils  n'étaient 
point  aussi  zélés,  pour  seconder  les  Normands. 

(170)  Aqnestas  illes  foran  trobades  per  Diego  de  Sivilla  pclot  del  rcy  de  Portogall  an  Tayn 
Mccccxxvu.  Rcsiate  la  carte  catalane  de  Gabriel  de  Valisccqua  datée  de  145'J  (I)'Avi>zac,  notice  des- 
découvertes dans  l'océan  atlantique,  cbap.  5.  31,  oi),  donnant  à  ses  îles  les  noms  tout  diirérenlsde 
ceux  qu'avait  antérieurement  connus  l'école  catalane.  Ces  noms  antérieurs  furent  communiqués  par 
recelé  italienne  ;  ceux  do  Vallsecqua  sont  certainement  donnés  d'après  la  relation  portugaise  de 
Diego,  qui  essaya  de  changer  les  dénominations  :  sa  proposition  n'a  pas  eu  de  succès.  Los  dénomina«^ 
fions  proposées  sont  les  suivantes  :  ylla  de  Osels  (S.  Marie),  ylla  de  Fruydols  (S.  Michel),  ylla  de 
linfierao  (Torcèrc) ,  Quadrila  (S.  Georges) ,  illa  de  Sparla  (Pico) ,  plus  un  nom  ciïacé.  Je  ne  sais 
si  j*ai  bien  établi  ce  collationnemcnt.  (D'Avezac ,  notice,  S,  p.  32). 

11.  8 


82  GÉOGR.  LATINE  t   iii0-li70. 

peu  les  autres  furent  occupées  et  colonisées  (i7i).  Le  $;énie  de  Tinfant 
Henri  a  bien  compris,  que  par  des  colonisations  il  utilisait  les  décou- 
vertes et  donnait  une  consistance  à  la  navigation  de  son  pays.  En  même 
temps,  en  1428,  il  acquit  des  Français,  conduits  par  Bethencour,  en 
échange  de  certains  domaines  à  Madère,  les  droits  aux  Canaries  {^^^)f 
auxquelles  ils  renonçaient,  ne  pouvant  poursuivre  leurs  entreprises 
éloignées,  à  cause  des  malheurs  de  leur  pays. 

En  attendant,  le  cap  Bojador  résistait  aux  caboteurs  portugais.  L*ac- 
tion  était  au  fond  peu  de  chose  en  soi;  mais  elle  fut  réputée  grande, 
tant  il  fallait  de  hardiesse  pour  surmonter  les  frayeurs  invétérées. 
Après  douze  années  d'efforts  inutiles,  Finfant  envoya  en  1433  son 
écuyer  Gfl  Eannes  :  celui-ci  n'avait  pas  de  courage.'  Envoyé  pour  la 
seconde  fois  Tannée  suivante  (1431),  il  accomplit  sa  tâche,  doubla  le 
cap  en  tournoyant  son  récif.  Linfant  ût  alors  armer  un  second  bâti- 
ment dans  lequel  il  envoya  son  échanson  Alfonso  Gonçalves  Baldaya , 
conduit  par  Gil  Eannes;  tous  deux  dépassèrent  cette  fols  le  cap  de 
cinquante  lieues  (113). 

L'infant  chargea  encore  Baldaya  d'une  nouvelle  expédition  :  et  dans 
ce  voyage  on  alla  à  70  et  jusqu'à  120  lieues  du  cap,  où  l'on  trouva  une 
embouchure  comme  celle  d'un  grand  fleuve,  s'enfonçant  de  8  lieues 
dans  la  terre.  Poursuivant  sa  route  jusqu'à  50  lieues  plus  loin  encore, 
Baldaya  arriva  à  une  pointe  formée  par  un  rocher  qui  de  loin  ressem- 
blait à  une  galère,  ce  qui  a  fait  appeler  désormais  ce  lieu  le  port  de  la 
Galère,  0  porto  da  Gale  :  c'était  en  l'année  1430.  Cette  embouchure  de 
fleuve  n'est  autre  que  le  rio  do  Ouro  (it*). 

161.  L'infant  Henri  animant  la  navigation  de  son  pays,  comprit  la 
nécessité  de  l'instruction.  Aussi  établit-il,  en  1415,  une  école  nautique 
au  village  maritime  de  Sagres  (Tarcanabal,  ou  villa  do  infante)  dans 
l'Algarve.  Il  fit  venir  à  grands  frais,  pour  enseigner  aux  officiers  portu- 
gais l'art  de  la  navigation,  un  majorquin,  maître  Jacq,  homme  très- 
vsavant,  tant  dans  l'art  de  la  navigation  qu'habile  dans  la  fabrication 
des  cartes  et  des  instruments  (i'^s).  La  lumière  de  l'Italie  y  était  appe- 
lée aussi.  Bien  méritée  par  des  connaissances  créées  à  la  suite  d'une 
longue  pratique ,  elle  allait  apporter  à  la  nouvelle  école  les  idées 
anciennes  exhumées  par  la  renaissance  des  lettres. 


(171)  L'iiistoire  de  la  découverte  des  Açores  est  traitée  par  deux  indigènes  jésuites:  Gaspard 
Fructuoso  (lié  en  I5j2  mort  en  4591]  saudades  da  terra,  servirent  de  guide  à  l'autre  Antonio 
Cordeyro  'né  16iO,  ),  qui  a  publie  en  1717  son  liistoria  insulana ,  das  illias  a  Portugal  sugeytas 

no  oceano  occidental. —  Joseph  Frcire  (sous  le  nom  de  Caudido  Lusitano),  vie  de  l'infant  dom  Uenri 
(traduits  en  français  parCournand)  en  donne  une  notice.  —  Martin  Behaïm  eu  4492  annota  sur  son 
globe  l'année  4431  date  de  la  première  découverte. 

(172J  Barros,  dec.  I,  liv.  I,  43;  Viera,  noticiasde  Canaria  V,  4S:  Zurara,  chronica  deGuiné,  66. 

(173)  Gomez  Eannes  de  Zurara,  chronica  do  descobrimcnto  e  conquista  de  Guiné,  8-11.  Fez  o 
iffanto  armar  buum  barinel,  no  quai  mandou  Affonso  Gonçalvez  Baldaya,  que  era  seu  copiero,  e  assy 
Gil  Eannes  com  sua  barcba,  mandando  que  tornassem  la  outra  vez;  como  de  feito  fezerom;  e  passa- 
rom  a  allem  do  cabo  cinquoenta  legoas. 

(474)  Zurara,  chron.  de  Guiné,  40.  —  Barros,  dec.  f.  Ht.  I,  8,  prétend  que  le  nom  de  rio  do  Ouro, 
ne  fut  donné  qu'en  444S  :  se  pourrait-il,  que  les  Portugais  n'apprissent  le  nom  du  fleuve  des  autres 
navigateurs,  qu'en  l'année  4442? 

(175)  Mandou  vir  da  ilba  de  Malhorca  hum  mestre  Jacome,  bomem  mui  docto  na  arte  de  navegar, 
que  fazia  cartas  einstrumentos;  o  quai  Ihe  custon  muils  pelo  trazer  a  este  réyno  pera  insinar  sua 
sciencia  aos  officiaes  portugucses  daquelle  mester  (Barros,  dec.  I,  liv.  1, 46). 


CARTES  NAUTIQUES»  161.  85 

La  fabrique  de  cartes  ne  manquait  pas  de  préoccuper  les  Portugais. 
Ils  pouvaient  vérifier  à  Taide  de  cartes  espagnoles  et  italiennes  jusqu'à 
quel  point  les  cosmographes  précédents  étaient  familiarisés  avec  les 
découvertes  qui  encourageaient  leur  esprit,  et  ils  y  recherchaient 
des  indications  instructives,  qui  fussent  à  même  de  guider  leur  marche 
successive  ou  de  leur  inspirer  de  nouveaux  plans.  A  cet  eifei  les  mappe- 
mondes leur  étaient  plus  utiles  que  les  portulans  de  la  médilerranée. 
Pour  rOrient  éloigné  et  pour  Tlnde  les  mappemondes  espagnols  don- 
naient de  nombreuses  indications,  mais  les  mappemondes  italiennes 
devaient  ofi'rir  des  renseiguements  plus  abondants,  plus  directs. 

Quand,  à  la  suite  de  la  fondation  de  Tacadémie  de  Sagrès,  les  Portu- 
gais ramassèrent  avec  plus  d'ardeur  les  cartes  géographiques,  la  plupart 
de  ce  qu'ils  avaient  acquis  était  de  date  plus  ancienne.  Jacq,  en  arrivant 
de  Majorque  à  Sagrès,  apporta  certainement  une  cane  du  dessin  de  la 
composition  antérieure.  Dans  le  dépôt  d'Âlcobaza  on  distinguait  surtout 
une  carte  qui  été  exécutée  vers  1400  (iie).  L'infant  Pedro,  frère  aîné 
de  Henri,  voyageant  par  l'Angleterre  et  la  France  à  la  terre  sainte,  et  re- 
tournant par  l'Italie  ,  s'arrêta  à  Rome  et  à  Venise  en  1128,  d'où  il 
apporta  une  mappemonde.  Elle  était  d'une  grande  autorité  chez  l'infant 
Henri,  qui  la  compulsait  avec  intérêt  (i??).  Le  fait  est  que,  connais- 
sant différentes  cartes,  il  engagea  les  Portugais  à  s'adresser  à  la  fabrique 
vénitienne,  pour  avoir  une  mappe  plus  parfaite. 

Venise  et  Gênes  pouvaient  fournir  plus  facilement  que  toute  autre 
ville  de  l'Italie,  des  caries  instructives.  Leur  navigaiion  était  puissante 
et  elle  abondaient  en  cartographie.  A  Gênes,  en  1417,  la  description  des 
cosmographes  fut  mise  en  concordance  avec  les  marins  :  haec  est  vera 
cosmographorum  cum  marino  accordata  dcsrriplio  :  quolUdic  frivoUs 
narrationibus  injeclh  1417.  La  carte  est  grande,  elle  a  à  peu  près  trois 
pieds  de  Paris;  ses  légendes  sont  latines;  elle  cite  Ptolémée,  sans 
suivre  son  opinion,  sans  se  servir  de  sa  nomenclature  (its).  —  A  Gênes, 
Baclario  ou  Bedrazio,  genovèsc,  Baplisla  BedraziuSf  ciuis  lanuae, 
composuil  hoc,  a,  d,  mille  ccccxxxvi  (1456)  die  iulH.  Sa  carte  a  2  pieds 


(176)  Elle  était  remarquée  par  Tinfant  don  Fcrdiuand,  à  cause  de  la  configuration  do  TAfriquc 
GODformc  h  celle  que  lai  ont  donnée  les  découvertes  postérieures.  En  4 528  don  Ferdinand  (né  1S07, 
mort  1537)  montra  cette  carte  à  François  de  Sousa  Tavares.  Antoin  Galvam  (ne  1503,  mort  dans  ua 
liApital  1S57)  Tapprit  de  la  bouche  de  ce  dernier  ot  le  relata  dans  son  Iraîado  dos  dcscubrimoutos , 
publié  à  Lisbonne  eu  155S  et  1731,  traduit  en  anglais,  corrigé  par  Hacluyt,  inséré  dans  sa  collection. 

(177)  Antoin  Galvan  relate  cette  acquisition  dans  son  traité  de  découvertes.  Ce  quMl  ajoute  du  cap 
de  bonne  Espérance,  du  détroit  de  Magelan ,  n'est  qu'une  hallucination  empruntée  d'une  misérable 
conjecture.  Quant  aux  côtes  du  dragon  :  elles  figurent  à  leur  nom  sur  d'autres  cartes  nidiis  abimalion 
(voyez  les  n**  8i,  94,  de  notre  atlas).  > 

(178)  Cette  carte  se  trouve  dans  la  bibl.  du  grand  duc  de  Toscane  h  Florence.  BaUbdli  en  a  donné 
nne  description  succincte  :  descrizione  délia  carta  di  grand  duca  di  Toscana,  che  conservarsi  nclla 
palatina,  rappresentante  un  planisfero  di  forma  ellitica,  appuntata  uellc  due  estromità  longitu- 
dinaii.  —  Elle  fut  ft  Gènes  la  propriété  d'un  particulier  comme  l'indiquent  les  armoiries  :  nelli  angoli 
esteriori  sonovi  discgnale  due  armi ,  che  una  sembra  quella  di  Genova ,  essondovi  nello  scndo 
dipinta  una  croce  rossa  in  campo  argenlo.  L'altra  arma,  è  un  campo  bianco  cou  sbarra  a  S(*arhi  rossi 
cbianclii,  sulla  qnale  ]>08ano  due  oggetli,  che  sembrano  due  teste  rosse.  — Rddelli  remarque 
combien  la  carte  est  différente,  contraire  à  Ptolémée  et  à  Marin  de  Tyr  :  par  conM>(|uent,  il  trouve 
dans  l'épigraphe  baee  est  vera  cosmographorum  cum  Marino  accordata  descripth,  u-ne  erreur  d 
corregerêi.  l\  semble  cependant  que  marinus  de  l'épigraphe,  n'est  pas  Marin  de  Tyr,  qui  est  introu- 
vable dans  la  carte,  laquelle  n'allègue  que  Ptolémée  :  marinu»  y  est  pilote.  C'est  la  conconlance  de 
la  mappemonde  fcosmographorum)  avec  les  portulans,  avec  la  carte  hydrographique  (d'un  marin)  : 
pnrgée  de  frivoles  narrations ,  que  chaque  jour  ajoute  (voyez  Zurla,  disscrlationi,  con  appen- 
dice, p.  »97). 


84  G&OGR.  LATINE»  1410-1470. 

de  Paris  et  S*/t  pouces  de  longiienr,  2  pieds  de  largeur  (179).  Ces 
monuments  existent  el  attendent  Fexamen  sérieux  de  leur  construc- 
tion. 

Venise  avait  alors,  par  la  composition  et  le  dessin  des  cartes ,  une 
renommée,  sans  aucune  contestation  bien  méritée;  d'autant  plus  solide 
que  la  république  et  les  particuliers  ne  cessaient  d'explorer  le  monde. 
ANTONIO  Zeno,  après  son  long  séjour  en  Frîesland,  de  retour  en  1405  à 
Venise,  y  laissa  un  portulan  des  pays  et  des  îles  de  la  mer  glaciale, 
dressé  par  son  frère  Nicolo  Zeno  (iso)  (voyez  n"  95  de  notre  atlas). 

Jacq  GiROLDO  copiait  les  caries  à  Venise  :  Jachobus  de  Ziroldis  de 
Veneliis  me  fecit,  anno  iiSG  (isi). 

Après  de  longues  investigations  des  frères  Zeni,  Pierre  Quirini, 
en  1451,  parcourant  les  mers  septentrionales,  reconnut  la  Finlundie; 
après  une  tournée  de  25  ans,  Nicolo  di  Conlt  retournait  du  fond  de 
rOrient  rendre  compte,  1449,  au  pape  Eugène  IV,  de  ce  qu'il  avait  vu 
et  examiné  dans  Tlnde;  un  autre  voyageur  apportait  la  narration  des 
explorations  des  parages  orientaux  de  l'Afrique  et  les  conquêtes  qu'un 
roi  d'Abissinie  avait  faites  en  1430. 

Les  matériaux  pour  construire  les  cartes  s'accumulaient  à  Venise. 
Pte(ro  Lorendano  en  1444,  composa  un  portolano  et  Tart  de  la  naviga- 
tion, où,  après  la  description  de  la  méditerranée  et  de  l'océan  il  traita 
de  la  navigation ,  des  flottes ,  des  armées  navales  et  de  leur  exercice. 
Alcune  raxion  de  marineri  de  mi  Ptero  di  Versi,  composées  en  même 
temps  1444,  traitent  la  même  matière.  Après  les  notices  astronomiques 
et  météorologiques  à  l'usage  des  marins,  on  y  trouve  décrites  les  posi- 
tions et  les  dislances  des  ports  en  milles  et  lieues;  le  flux  et  le  reflux 
de  la  mer,  les  ports  d'Espagne,  de  Flandre,  des  îles  britanniques  ;  la 
gabelle  prescrite  aux  galères  vénitiens;  à  quoi  est  attaché  le  règlement 
de  1428,  de  la  discipline  et  de  l'approvisionnement  de  la  galère  du  ca- 
pitaine Andréa  Mocenigo,  et  la  raxion  chiamada  del  marlologio  per 
navegar  a  mente  (isa). 

André  Biangho  1456. 

162.  Les  autoritésde  la  république,  les  commerçants,  les  marins,  les 
particuliers,  se  procuraient  les  copies  des  mappemondes  et  des  portu- 
lans, ainsi  que  les  dessinateurs  avaient  beaucoup  d'occupation.  Parmi 
les  copistes  et  les  bons  dessinateurs  de  ce  temps-là ,  on  cite  André 


(i79)  Cette  carte  est consonrée  dans  la  bibl.  de  Parme;  mentionnée  par  Paciaudi ,  in  stia  lettera 
ioscrita  anihe  nel  giornalc  di  Paidova  ,  febr.  1806  ;  par  Zurla ,  snlla  anticbe  mappe  idro  geograpbicbe, 
nota  ad  cap.  14  et  ailleurs.  —  Sur  cette  carte  de  4456  de  Bedrazio,  post  insulas  fortunatas,  aliae 
conspiciuntur  insulae,  rudi  tamen  et  indocta  circumscriptiooe  redditae.  Major,  longum  terrae 
tractum  «  forma  pêne  rectangula  représentât ,  cui  inscribitur  JntUUa.  Attora,  non  brevi  intervalle 
dîstans  cjusdem  pêne  figurae,  sic  annotatur  :  Saravagio.  Hutc  proxima  adiacct  insnia  minor,  falcata, 
cum  lemroate  Tantnor.  Tandem,  pone  Antilliam,  postrema  est  quadrat%  quasi  formae,  latere  uno 
paululum  connexe,  qnœ  obscuro  noc  nomine  doiiatur  Royllo.  Infra  vero  scriptom  legilur  :  insulae 
de  nouo  repertae  (genlleraan's  magazine,  1785,  febr.  p.  104,  apud  Ghillany,  der  Erdgiobus  des  Mart. 
Bebaïm,  note  de  la  page  1 1}. 

(180|  Nous  reviendrons  sur  la  carte  de  Zeno  au  chap.  Î07;  voyez  aussi  Tavoladi  navic.  dans  le  3»v. 

(181)  Cette  carte  se  trouve  enta  possession  dall' ab.  Morelli  (Car  li,  lettera  sulla  scoperia  dell* 
America; Zurla,  sulle  anticbe  mappe,  idro-geograpbiche,  cap.  12). 

(182]  Zurla,  sulla  anticbe  mappe  idro-gcograpbichc ,  nota  ad  cap.  18;  comparez  la  note  ad  cap.  28. 
—  Les  règles  des  marins  de  Pierre  di  Versi',  sont  en  possession  dcU  ab.  Morelli. 


\ 


A.  BIAMCnO,   162. 


85 


BiANCHO,  dont  OQ  coiinaft  un  atlas  :  Andréas  Biancho  de  Veneeiis  me 
fecit  1456,  composé  de  dix  cartons  :  le  premier  représenle  la  rose  des 
vents  accompagnée  de  marteloîo  ou  instruction  de  son  usage  (voyez 
n**  86  de  notre  atlas),  et  voici  ce  qu'il  eu  dit  : 


Quesio  fixe  lo  amaistramento  de 
nauegar  per  la  raxon  de  marteloio, 
como  apar  per  questo  londo  e  qua- 
dro  e  per  la  toleta,  per  laquai  po- 
démo  sauer  chose  chomôze  la  tole- 
U\  a  mente  e  sauer  andar  per  ogna 
parte  de  monde  senca  mexura  esen- 
ca  scslo,  choncosia  che  alguna  per- 
sona  che  uora  far  questa  raxon  e 
lia  luogo  a  sauer  ben  moltiplicar  e 
ben  partir,  amaistraniente  del  mar 
si  e  per  sauer  ben  nauegar  e  fisc 
uuoi  sauer  la  suma  de  marteloio 
per  quesio  muodo  quanto  se  auan- 
ca  per  una  quarta  de  uenlo,  e 
quanto,  se  alargo  chosi  per  una 
quarta,  e  per  do,  e  per  tre,  e  per 
quarte,  e  se  algun  te  domandase 
per  queste  sume,  se  pol  far  tu  te 
raxon  de  nauegar,  concossa  clienni 
non  podema  sauer  la  raxon  chosi 
a  ponto  ma  nui  soachasleremo  ben 
al  a  ueritade. 


Anchora  tenoso  mostrar  per  to- 
tal muodo  foxe  una  naue  che  uol 
andar  per  ponenle  e  nonde  puol 
andar.  esi  ua  quarta  una  de  solo  in- 
uer  cl  garbin  mia  cento  e  alarga 
se  mia  uinti  dal  ponento,  e  auanca 
nonanto  oto  ;  e  per  do  quarte  se  a- 
larga  mia  trenla  oto,  e  auanca 
mia  nonanta  do;  per  tre  quarte 
se  alarga  mia  ciuquanta  cinque  c 
auanca  mia  étante  tre;  per  quarto 
quarte  se  alarga  mia  selanta  un , 
e  auanca  mia  setanta  un;  per  cin- 
que quarte  alargo  mia  otanta  tre,  e 
auanco  mia  ciuquanta  cinque;  per 
sie  quarte  e  alargo  mia  nonanta  do, 
e  auanco  mia  trenta  otlo  ;  per  sete 
quarte  alargo  mia  nonanto  do,  e 
auanca  mia  uinti  ;  per  oto  quarte  e 


Ceci  fixe  Finstruction  de  la  navi- 
gation par  le  problème  de  marte- 
loio ,  comme  il  apparaît  par  ce 
cercle  et  carré,  et  par  la  toleta,  par 
laquelle  nous  pouvons  savoir  aussi 
connaître  la  toleta  par-cœur,  et 
savoir  aller  par  toutes  les  parties 
du  monde, sans  échelle  et  sans  com- 
pas: attendu  que  quelconque  per- 
sonne qui  voudrait  faire  ce  pro- 
blème dans  tel  lieu,  sache  bien 
multiplier  et  bien  diviser.  L'iu- 
struction  delà  mer  ci  est  par  savoir 
bien  naviguer  et  si  on  voulait  sa- 
voir la  somme  de  marteloîo  par  ce 
moyen,  combien  on  avance  par  un 
quart  de  vent,  et  combien  on 
alargue;  aussi  par  un  quart,  etpar 
deux,  et  par  trois,  etpar  quatre.  Et 
si  quelqu'un  te  demandait:  parées 
sommes  peuvent-ils  se  faire  tous 
les  problèmes  de  la  navigation  ? 
attendu  que  nous  ne  pouvons  savoir 
le  problème  exactement,  mais  nous 
nous  approchons  bien  de  la  vérité* 

Encore  je  liens  do  montrer  par 
quel  moyen  sillonne  un  navire  qui 
veut  aller  par  ponenle,  et  ne  peut 
aller;  et  ci  va  un  quart  dessous 
versgarbino  100  milles  et  s'alargue 
20  milles  de  ponenle,  et  avance  98; 
et  par  deuxième  quart  s'alargue  58 
milles  etavance  92  milles;  par  troi- 
sième quart  s'alargue  55  milles  et 
avance  83  milles  ;  par  quatrième 
quart  s'alargue  71  milles  ctavance 
71  milles;  par  cinquième  quart  a- 
largue  85  milles,  ctavance  55  mil- 
les; par  sixième  quart  est  alargo  92 
milles  et  avance  58  milles;  par 
septième  quart  alargue  92  milles 
et  avance  20;  par  huitième  quart 
est  alargo  100  milles  et  avance 
mille  nul,  et  finalement  ci  est  :  il 


86  GÉOGR.   LATlNEy  1410-1470. 

alargo  mîa  ccnto,  c  auanco  mia  ne    retourne.  Ce  qui  est  tracé  en  la  ta- 
suri,  c  pero  xeloretorno.  lo  quai    Icta  de  marteloïo,  comme  il  parait 
reschristo  in  latoleta  demarteloio,    par  ses  caselles  et  ses  raies, 
chomo  a  par  per  lo  suo  chaxelle  al 
essno  righe. 

Biancho  donne  ces  chiffres  en  tableaux  de  la  manière  suivante  : 

I.  Suma  de  marteloio  per  interder  : 

per  una  qta  do  uento  a  largo 

mia  20,  e  auanco    98. 

per  2  38,  92. 

per  3  55,  83. 

per  4  71,  71. 

per  5  83,  55. 

per  6  92,  38. 

per  7  98,  20. 

per  8           iOO,  000. 

per  questeraxonssepuolimauemare  mohiplichar  tantoquanlo  pui  uoUe. 

II.  Âuancar  de  retorno  de  mar-      III.  prima  quarla  de  uento. 
teloio. 

per  1  quarta,  sie  51     auanco  50       me  alargo  mia  2      auanco    9*1» 

per  2  26  24  per  2  quarte  sic  3^/5  d^jiz 

per  3  18  15  per  3  5  */i2  S^/io 

per  4  14  10  per  4  l^jio  7V<o 

per  5  12  6*/«  per  5  S'/^o  5Vi4 

per  6  11  4  per  6  9  */s  3*/s 

per  7  10  V»  2V40     per  7  9^8  2 

per  8  8                000  per  8      *  10                 000 
per  dexena  de  marteloio. 

Nous  avons  répété  ce  que  le  carton  de  Biancho  dit  au  sujet  de  marte- 
loio, pour  montrer  que  les  rumbs  des  vents  et  leur  loxodromie  étaient 
connus  par  la  pratique  des  marins,  et  entraient  dans  la  complication  de 
la  composition  laborieuse  des  cartes  (183). 

Les  septs  cartons  suivants  de  Touvrage  de  Biancho,  sont  les  cartes 
spéciales  qui  représentent  toute  la  partie  occidentale  du  monde,  savoir 
TEurope  etTÀfrique;  un  carton,  le  neuvième  dans  Tordre,  offre  une 
mappemonde  générale  ;  enfin  le  dixième,  supplémentaire,  offre  la  map- 
pemonde graduée  de  Ptolémée ,  à  projection  conique  et  méridiens  roc- 
tilignes. 

La  mappemonde  ou  Timage  de  Thabitable,  qui  forme  la  neuvième 
carte  de  Tatlas  d*André  Biancho,  est  dressée  sur  la  rose  de  huit  vents, 
et  offre  le  défaut  d'orientation  boussolique  commun  à  toutes  les  cartes 

(183)  Ccstle quartier  de  réduction  itourlz  résolution  des  problômos  de  la  navigation,  dontritsa^çe 
avec  le  progrès  des  counaissances  mathématiques  et  astronomiques  est  devenu  plus  varié.  Voyez 
traité  de  navigation  de  Bezout  90-96,  p.  63-69,  de  l'édition  de  de  Rosscl ,  Paris  1814,  et  les  autres 
ouvrages  de  navigation.  —  Marteloïo,  martelogio,  mar-teloïo,  toile,  tissu ,  canevas,  croisement  de 
mer;  toile,  tablette  marine.  Tela,  toile,  canevas  ;  telaïo,  métier  de  tisserand ,  tisserie;  de  même  lèlo, 
trait ,  dard ,  toile.  Cette  origine  de  mar-teloïo  désigne  et  explique  Biancho,  auand  il  dessine  le 
quartier,  lo  carre  de  la  tolela.  / 


A.   BIAMCIIO,   iC3.  87 

de  répoque  (isi).  Son  diamètre  est  de  9  pouces  cldcux  lignes.  L'orient, 
levante,  avec  le  paradis  sont  en  haut.  Le  centre  se  trouve  au  nord  de 
Syrie,  non  loii\,d'Antiochie,  comme  s*il  était  :\  Saniosate.  La  moitié  mé- 
ridionale est  occupée  par  TAfrique,  Fautre  moitié  se  divise  entre  TÂsie 
et  TEurope  :  celle-là  forme  un  quart  de  Thabitable,  celte  autre,  avec 
le  vaste  océan  (atlantique)  compose  l'autre  quart.  Toute  Thabitable  est 
pleine  de  peintures  et  de  petites  figures  (voyez  n^  8i  de  notre  atlas). 

L'Europe  n'offre  rien  de  trop  extraordinaire  ;  tout  y  est  à  sa  place  et 
à  Fexception  de  Tltalie,  les  épigraphes  des  états  se  suivent  assez  régu- 
lièrement: Irlanda,  Engellerra,  rex  Ispaneo  e  CastiUe,  Paris,  rex 
Francoron,  inperion  Romania  (Grec);  inperiu  /îomartoro  (d'Allemagne) ; 
Dada,  Narvegia,  Sueda,  Rosie,  Rosie  imperio,  Rosie  magno ,  Casterina 
(Kostroma),  inperion  Tarlaroron;  Tanaï  (Don),  de  tous  les  fleuves  qui 
sont  tracés  à  travers  les  trois  parties  de  Thabiiable,  lui  le  seul  est 
nommé.  Sous  le  rapport  des  fleuves,  une  chose  étrange  se  présente  dans 
la  configuration  de  l'Europe  :  c'est  la  sortie  d'un  même  lac  des  fleuves: 
le  Danube,  le  Rhin,  l'Elbe  et  la  Dvina,  qui  sont  innommés  comme  tous 
les  autres. 

Au  nord  une  bande  portant  une  sorte  de  deux  signes  du  zodiaque, 
des  jumeaux  et  de  la  vierge,  sépare  une  portion  du  continent,  inscrit  : 
in  ae  parle  est  masimu  frigus,  quia  est  sub  tramonlana  et  nasilur  omines 
silueslres. 

165.  L'Asie  et  l'Afrique  renferment  plus  de  curiosités  et  de  bizarre- 
ries. L'Asie  septentrionale  avance  par  une  péninsule  jusqu'aux  der- 
nières extrémités  de  l'orient.  Dans  cette  péninsule  est  Gog  Magog  chest 
Alexandcr  gie  ne  rocœn  ecarteire,  qu'Alexandre  jadis  dans  des  rochers 
encarcera,  de  Iribus  iudeoron;  des  tribus  de  juifs,  et  ces  tribus  juives 
sont  tantôt  confondues  avec  Gog  et  Magog,  tantôt  deviennent  l'objet 
d*autres  contes  érudits  (iss). 

Commence  la  partie  visitée  par  les  Vénitiens,  où  l'on  voit  trois  empires, 
tons  les  trois  représentés  de  la  même  façon  :  chaque  empereur  est 
assisté  à  droite  par  une  garde  composée  de  trois  figures,  sorties  des 
tentes,  à  gauche  d'un  ministre  debout  près  de  la  capitale.  Le  premier, 

(IM)  L'atlat  de  Biaocho  est  conservé  dans  la  bibliothèque  de  S.  Marc  à  Venise.  Sa  description , 
acocMnpagnée  de  trois  cartes  de  l'atlas,  a  été  donnée  par  Formaleoiii  :  saggio  siilla  nauticsi  de  Veue- 
BîaBi,  con  una  illustrazione  d*alcunc  carte  idro-graGciic  auticlie  délia  biblioluca  di  S.  Marco, 
Veaex.  1783.  —  Plos  tard,  Placido  Zurla,  sulla  antiche  roappe  idro-geograficbe ,  4818,  cap.  15-i8, 
f'occopa  de  la  description  ;  Sprengel,  geogr.  Entdekungon,  p.  2i4,  et  Malte-Brun ,  gcogr.  cap.  3(i 
édit.  Haot,  XIX,  p.  5i8,  en  ont  donné  une  courte  notice,  et  Santarem  reproduisit  dans  son  atlas  deux 
fra^pnents  des  côtes  atlantiques  de  l'Afrique  et  des  îles.  —  Je  ne  puis  me  procurer  l'ouvrage  de 
Foraialeoni  pour  mes  études,  mais  j'ai  réussi  à  me  procurer  les  calques  des  cartes  publiées.  Mon  ami 
Alojse  Niewiarowicz,  dessinateur  habile,  les  a  exécutes  au  crayon.  In  bibliothèque  de  Paris  ne  lui 
aynt  pas  permis  de  se  servir  de  l'encre.  Je  serais  heureux  si  ma  vue  réussirait  à  distinguer  tous  les 
traits  délicats  et  l'exactitude  incontestable  de  son  crayon.  Je  ne  sais  pas  quelles  explications  a  pu 
donner  Formaleoni  aux  épigraphes  de  la  carte  :  je  les  essayerais  moi-même ,  autant  que  je  puis 
déchiffrer  récriture  :  sauf  encore  l'inhabile  déchiffrement  de  Formaleoni ,  dont  la  légèreté  transfor- 
■nit  bnrlesqaeraent  maintes  fois  les  épigraphes  (D'Avezac,  notice  des  découvertes  dans  l'océaD 
atlauitiqae,  p.  84,  36;.  Voyez  les  notes  précédentes,  94,  9o,  iii,  iSS. 

(ISS)  n  est  pfi^Kkble  que  la  prononciation  arabe  de  Jadjoudj,  suggéra  l'idée  d'y  voir  les  juifs  ot 
leors  oit.  trilws  exilées.  Provincia  Gog  in  qua  fuerunt  Judaei  inclusi,  dit  en  USt  la  carte  émaillée  de 
Bofigpîa-Venetri  ;  Judaei  clansi  figurent  dans  l'hydrographie  portugaise  de  1504;  ils  sont  à  côté  de 
Gog  dans  la  carte  de  Ruysch  1507;  ils  se  trouvent  sur  le  globe  de  Schoner  1531,  où  (iog  sont  les 
Tatars  ;  rhistoire  de  ces  juifs ,  de  ces  Danites  de  dix  tribus ,  est  inscrite  dans  la  carte  de  la  Tartarie 

Çnbliée  en  4570,  par  Ortel,  et  de  laquelle  nous  donnons  un  petit  échantilloa  dans  notre  atlas  n*  137. 
oyez  la  note  précédente  1 1 6  du  cfaap.  447. 


88  GÉOGR.    LATIXE,   1410-1470. 

inperion  Calai,  et  son  lenplon  chatai  (sépulcre  situé  sur  le  mont  ÂUai 
dans  la  carie  de  Mauro);  sa  capilale  est  C/ia^aio  (Cambalech).  —  L'autre, 
ineprion  de  lerniax  et  sa  capitale  Samarcanle  (Samarkand)  :  or,  c'est 
Zagalai.  Il  se  dislingue  des  autres  par  les  tentes  qui  ne  sont  pasouverles 
et  par  le  minisire  qui  parait  être  un  moine  capuchonné,  indiquant 
peut-élre  la  qualilc  de  chrétien  de  Tempereur,  et  nous  sommes  autorisé 
à  accuser  Formaleoni  de  la  mauvaise  leçon  :  lerniax,  étant  inventé  de 
Tarssis,  Terssiaz.—  Enfm,  inperion  demedio  id  (idem?)  eliscoc  o  balech, 
où  certainement  se  cache  aussi  une  méprise  dans  la  leçon.  C'est  Tem- 
pire  de  Medeia,  du  roi  Balec  ou  Eliscoc  (lli  gouldji  sur  Ui,  Almalig). 
Sa  capilale  est  Curani  (Kour,  Khara-oussou ,  en  chinois  Soui  tsching 
fou,  sur  la  rivière  Kour  ou  Kouroungle  sur  la  rivière  Kaïdou  gol  NO. 
de  Lop).  —  Ensuite  vient  lenplon  inperaloris  Sirie  (lombeau),  hic  fuit 
inperiu  Sirie  (Saraï),  qui  existait  encore,  mais  sapé  par  l'invasion 
récente  de  Tanierlan. 

L'Asie  méridionale  avance  aussi  par  une  péninsule  vers  les  extrémités 
orientales.  Au  bout  de  celte  péninsule  est  silué  paradixo  lereslro,  d'où 
sorlenl  les  quatre  fleuves  bibliques;  dans  leur  cours  parallèle  entre 
ospilium  macorii  (Macarii?  beali,  yat^xpi^,  hospice  de  bienheureux);  et 
les  hommes,  omincs  que  s  (sine)  capilelos?  qui  sont  sans  télés,  le  visage 
sur  leur  poitrine;  omines  parc  (ni)  alboro  se  (ri)  co?  les  hommes  prépa- 
rant des  arbres  la  soie?  —  Ces  fleuves  entrent  dans  l'Inde,  où  le  premier 
se  détache  par  le  nord  et  se  décharge  (Oxus,  Djihoun)  dans  la  mer  Cas- 
pienne. Les  trois  autres  après  avoir  traversé  les  trois  Indes,  se  séparent  ; 
l'un  se  dirige  vers  le  nord  et  va  se  perdre  aussi  dans  la  mer  Caspienne 
(Arax);  l'autre  (Eufrate),  prolongeant  son  cours  vers  roccidenl,  tourne 
autour  du  centre  de  l'habitable  et  se  jette  (près  d'Anliochie)  dans  la 
mer  méditerranée;  le  troisième  (Tigris,  Dekel,  Didjiat)  débouche  dans 
le  golfe  persique.  Outre  ces  quatre  fleuves,  l'Asie  esi  encore  arrosée  par 
le  Volga. 

Les  trois  Indes  se  suivent  :  India  superior  conlinelur  Uni  (54?)  regione 
el  xxnn  populi;  India  média  contenilur  xiin  el  xn  populi;  India  minor; 
et  les  villes  Udera  (Uderex',  Aoude?)  cniicio  osigelus?  Lagade. 

Entre  Djihoun  et  Arax,  sont  nommés  :  ùmedan  (Multan?  Mimand?), 
Segena  (Saganian),  iVorf/oM  (Orgenz),  Agrica  (Djordjan),  A(/o(r  (Astrabad), 
Toris  (Tauris),  Zilan  (Ghilan).  —  Entre  Arax  et  Eufrate  :  Salonia  (Sol- 
lania),  Slraua  Saviachi  (Samakha  du  Schirvan);  porto  de  fero 

(Derbenl);  arca  Noe  (du  mont  Araral);  Arzero  (sur  l'Eufrale,  Arzan, 
Erzerum);  enfin  dans  l'Asie  mineure  Trabexenda  (Trebizonde);  inperip 
Morali  (empire  Turk  sous  Amurat,  Mourad  II,  14.22-1451). 

Baldaco  (Bagdad),  l'un  sur  l'Eufrale,  l'autre  Baldaco  un  peu  éloigné. 
Près  de  ce  second  est  une  étoile.  Une  autre  étoile  se  trouve  dessinée 
sur  les  rivages  de  l'Afrique  orientale.  Ces  étoiles  figurent  peut-être 
réloiie  des  trois  rois-mages,  qui  vinrent  de  l'orient  (de  l'Afrique)  et 
traversèrent  Bagdad.  Aussi  sous  l'étoile  (de  Baldaco)  se  trouve  balismo 
IhuXpi;  et  les  trois  mages,  dont  un  agenouillé,  se  trouvent  vis-à-vis  de 
la  Sainte  Vierge  assise  sous  la  porte  de  Jérusalem;  au  sud,  déjà  en 
Afrique,  l'église  de  beata  Catarina  de  monte  Sinai,  Alleh  (Ailath  ou  Elim), 
Sarsia  (Larsia?  Larisse?),  une  montagne  (Sinaï)  el  cielo  elala  montagna, 
enfin  Arabia,  tous  inscrits  en  Afrique.  En  Ajabie  la  Mecha  (Mecca). 


HAURO,    iG4.  89 

Entre  FÂsic  et  l'Afrique  on  voit  une  multitude  d'îles  dont  deux  sont 
nommées  ixola  di  colonbi  et  ixola  pertina  (Taprobana). 

La  péninsule  orientale  de  TAfrique  (Vakvak  des  arabes)  est  occupée 
par  tnperto  Basera.  Ensuite  vient  inperin  proie  Joanis,  où  prend  ses 
premières  sources  le  fleuve  (Nil),  et  traverse  Vinperiu  Emibar  (i86); 
puis  mouille  les  états  de  rex  ethiop  et  près  de  Babclonia  (Foslat)  tourne 
brusquement  vers  le  nord  :  wldanus  Babelenie,  pour  traverser  Chairo 
et  se  jeter  dans  la  mer  méditerranée.  Mais  de  son  flanc  occidental  se 
forme  un  embranchement  qui  continue  sa  direction  vers  Toccident 
ju^n^ànn  lac(CtlaWû),  duquel  un  bras  tourne  vers  le  sud,  Tautrevers 
le  nord  {Bagrada?  ou  Moulouîa?)  pour  se  perdre  dans  la  mer  méditer- 
ranée ;  le  troisième  {CitarlU),  se  jette  dans  Fatlantique.  A  droite  de  cette 
continuation  du  fleuve  on  lit:  reœ  de  Tcrmixen  (Tremecen  de  Nubie), 
Tunes  (Tunis),  rex  Belmarin  (béni  Marini  ou  Mournea,  dont  la  dynastie 
s'éteignit  en  1585).  A  gauche  du  même  fleuve  on  voit  rex  Maroco  et  une 
épigraphe  qui  semble  dire  :  hac  parie  suntomines  abent  uuUusenlos  canis. 

Les  fies  de  Tocéan  atlantique  sont  sans  dénomination;  leurs  noms  se 
troBvent  dans  les  caries  spéciales;  et  les  noms  d'Anlillia  de  la  man 
satana^joio  (S.  Atanasio?)  et  de  Scorafixa  ou  Stokafixa,  pèche  du  stokflsch 
ou  de  la  merluche  dans  les  mers  septentrionales  (ist). 

Du  vaste  océan  atlantique  le  vent  pousse  vers  le  sud  de  l'Afrique  un 
navire  qui  risciue  de  loucher  le  bas-fond  qui  forme  au  sud  de  TAfriquc 
un  golfe  dans  lequel  sont  peints  deux  dragons  avec  l'épigraphe  :  nidus 
<i6ima2t(m  ;  évidemment  conte  arabe:  et  le  nom  du  nid  doit  avoir  sa 
^lenr.  l'espérais  y  retrouver  quelque  chose  directement  relatif  aux 

«^a.^  navigateurs.  Mais  roricntalisle  versé  s'y  oppose,  et  glisse  à 

leur  place  le  mot  de*la  malédiction  ,.^^jJL>yt  père  maudit.  H  est 

cependant  bien  de  remarquer -qu'Abimalion  pourrait  avoir  son  origine 
dans  abismo  profundidat  sin  termine,  el  infierno;  abismal,  lo  que 
pertenece  al  abismo  (voyez  dicciouario  délia  lengua  casiellana  por  la 
academia  espanola). 

L'image  de  l'habitable  d'André  Biancho  appartient  à  ce  système  des 
images  et  mappemondes  qu'on  voit  reproduites  dans  les  caries  d'Istakhri 
etd'IbnHaoukal,  des  anglo-saxons,  du  manuscrit  de  1119,  d'Edrisi  115i, 
de  Sanuto  1551,  de  Ranulf  1560,  du  manuscrit  de  8te-Geneviève  1564, 
dlbn  al  Ouardi  1549. 

André  Biancho  vécut  encore  assez  longtemps,  puisque  vingt-deux  ans 
plus  tard,  il  était  employé  comme  dessinateur  par  le  camaldolèse  Mauro. 

• 

Mâuro,  1459. 

164.  Parmi  les  compositeurs  de  cartes,  le  frère  Mauro,  camaldule 
un  couvent  de  saint  Michel  de  Murano,  avait  acquis  une  haute  réputation. 
C'était  un  cosmographe  instruit  dans  les  sciences.  La  république 
rappela  en  1444,  à  la  députation  des  experts  pour  régulariser  le  cours 
de  la  Brenta.  On  a,  des  années  1445  et  1449,  deux  cartes  chorographi- 

(480)  Serait  il  Moabar  de  Marco  Polo,  transporté  de  TFnde  en  Afrique?  —  De  infime  que  Basera  et 
isoladidi  Colombi,  Icsôtats  indiens  Bassia  et  Colombo  nommes  dans  l'Inde  par  la  carte  catalane. 
(487)  Voyez  la  note  iti  et  notre  portulan  général  i4. 

II.  9 


90  G^.OGR.   LATINBy   1410-1470. 

ques,  aiitogra plies ,  signt^.cs  :  frater  Maurus  de  Venetiis  (iss).  On  sait, 
par  les  dépenses  faites  pour  Tor  de  Tendorure  et  pour  différentes  autres 
couleurs,  qu'en  4448  et  1449  il  exécuta  une  mappemonde  (i89).  Les 
matériaux  qu'il  avait  à  sa  disposition,  les  cartes  exactes  :  ptu  jusla 
car  ta  ho  possudo;  nuove  carte  quai  ne  ho  habulo  copia,  quai  hano  vista 
ad  ochio;  les  renseignements  orales  :  cussi  hano  opinaio,  io  ho  parkUo 
cum  persona  digrui  de  fede;  les  descriptions,  le  mirent  en  état  de  com- 
poser de  toutes  nouvelles  cartes,  d'une  toute  nouvelle  construction.  Il 
a  fabriqué  de  cette  manière  quantité  de  cartes  de  TÂsie  mineure,  de 
TArménie,  de  Mésopotamie,  de  Syrie  et  de  beaucoup  d'autres  mieux 
détaillées  et  coordonnées  :  io  ho  lassalo  amplissimi  disegni  delule  qtleste 
parle,  zoe,  Armenia,  Mesopolamia,  Siria,  Cappadocia,  Cilicia,  PamphUia, 
Licia,  Asia  propria  menor,  Bilinia,  Galacia,  eluta  le  allre  che  si  sow) 
mejo  distinte  et  ordinale  (Mauro  in  suis  epigr.). 

Les  Portugais  continuant  leurs  explorations  maritimes,  ne  cessaient 
de  rechercher  les  cartes  géographiques.  L'âge  de  l'infant  Henri 
n'avait  pas  affaibli  son  ardeur  et  il  était  secondé  par  son  neveu  le  roi 
Âlfonse  Y.  Il  avait  à  son  service  des  Italiens.  Le  génois  Antoine  Noli 
dirigeait  en  1450  la  découverte  des  îles  du  cap  Vert.  Le  vénitien 
Aloysio  de  Cada  Mosto  en  1456,  en  compagnie  de  quelques  génois , 
spécialement  de  Antoniotto  Usodimare,  arriva  à  l'embouchure  de 
Gambia,  passa  le  cap  Rosso  et  atteignit  rio  grande  (i9o).  Cette  nouvelle 
découverte  donnait  une  extension  à  la  donation  que  le  Portugal  venait 
d'obtenir  du  pape  Nicolas  Y,  par  une  bulle  de  janvier  1454,  dans 
laquelle,  gratifiant  l'infant  Henri  des  découvertes  qu'on  avait  faites 
depuis  25  ans ,  le  pape  concède  au  Portugal  toute  la  Guinée  au-delà 
des  caps  Bajador  et  Nun  jusqu'à  un  certain  grand  fleuve,  communé- 
ment réputé  Nil  (Sénégal),  jusqu'à  lequel  on  était  parvenu  (io«).  Cette 
nouvelle  découverte  anima  l'esprit  du  roi  Alfonse  Y,  qui  s'imagina  que 
les  côtes  au-delà  du  cap  Yert,  tournées  vers  sirocco,  allaient  le  conduire 
bientôt  à  l'Inde  ;  il  crut  qu'on  avait  passé  dans  cette  direction  la  ligne 
de  Tunis  et  peut-être  qu'on  s'était  avancé  jusqu'à  celle  d'Alexandrie. 
Il  donna  des  noms  aux  rivières,  golfes,  caps  et  ports  de  la  nouvelle 
découverte,  fit  dresser  une  carte  et  l'envoya  à  Yenise  à  sou  dessinateur 
et  compositeur  de  la  mappemonde  («9a). 

(188)  Dans  les  archives  da  monastère  :  Mittarelli  et  CostanJoni ,  ap.  Zurla ,  di  mappa  mondo  di  fra 
Mauro,  num.  -48. 

(189)  Troviano  ne'  libri  di  nostro  monastero,  non  di  rado  notato  il  nome  di  fra  Mauro,  elespese  per 
colori,  per  oro  battiito,  ec.  per  forroar  mappa  mondi,  comc  ncl  rcgistro  num.  451  délie  spese  di  d. 
Nicolo  économe,  ncl  4448  fino  Inglio,  1449  ....  etc.  Zurla,  supra  cit.  nom.  48. 

(190}  Aloysio  de  Cada  Mosto  et  llbro  de  la  prima  navigaziouc  par  occano  a  le  terre  de  Negri  de  la 
bassa  Aethiopia,  per  commandamento  del  illustris  signor  infante  don  Heurich  de  Portugallo, 
Vienne,  1507,  in-4';  Navigazioni  di  Aloyze  Cada  Mosto,  ap.  Ramusio,  t.  I,  p.  IIS;  Placido  Zurla,  di 
BfarcoPolo  e  dcgii  a  allri  viaggiatori  vcncziani,  dissertzioni.  Venez.  1K18,  t.  II,  p.  101-186. 

(191)  Ultcrius  navigantes  ad  ostium  cuisdam  magni  fluminis,  Nili  communiter  reputati  per- 
venerunt  (Zurla,  dissert.  t.  II,  p.  114). 

(192)  Moite  opinion  e  leture  (dit  Mauro  dans  une  des  épigraphes),  se  trova  che  in  le  parte  mcri- 
dional  l'aqua  non  circonda  questo  nostro  habitabile  e  temperado  zona  :  ma  aldando  moite  testimo- 
nianzc  in  contrario  et  maxime  qucli  i  qnal  la  maiesta  del  re  de  Portogallo  (Alfons  V)  ba  mandate  cum 
Io  suo  caravele  a  zercar  e  vcder  ad  occhio  i  quai  dire  aver  circuito  le  spiaze  de  garbin  pin  de  2000  mia 
oltra  el  streto  de  Zibilter  in  tanto  che  a  voler  segiiir  quel  camin  hano  pervcnuto  dar  la  proda  quarta 
d'ostro  in  ver  sirocho,  e  per  suo  zudizio  hano  passato  lidromo  de  Tunisto,  e  quasi  son  zonti  aquel  de 
Alexandria,  pertuto  trovando  bone  spiaze,  cum  puoco  fondo,  e  navegar  assae  oone  sempre  senza  for- 
tuna,  e  i  diti  hano  fata  nuove  carte  deauel  navegar,  e  hano  posto  nomi  nuovi,  a  fiumere,  colfii,  cavi, 
porti ,  di  quai  ne  ho  babuto  copia ,  unde  sel  se  vora  pertradir  a  questi  i  quai  hano  visto  ad  ocbto 
(Zurla,  il  mappa  mondo  di  fra  Mauro»  cap.  S9). 


MAUROy  16».  91 

Cest  le  frère  camaldule  Mauro  qui  reçut  la  commission  de  dresser 
celte  mappemonde.  Le  malheureux  doge  François  Foscarini,  envisa- 
geant le  succès  du  voyage  de  Gada  Mosto  (1456),  el  voyant  le  plan  et  le 
commencement  de  Touvrage  de  Mauro,  présumait  que  Tinfant  Henri  y 
trouverait  de  nouveaux  arguments  pour  continuer  ses  entreprises  (193). 
Le  roi  Alfonse  V  n'épargnait  pas  des  dépenses.  Son  or  était  à  la  dispo- 
sition de  Mauro  qui  payait  les  calligraphes  à  raison  de  42  à  15  sous  par 
jour,  il  devait  rémunérer  ses  collaborateurs,  peintres  et  dessinateurs. 
Mauro  n'épargnait  pas  son  travail  pendant  les  années  1157, 1158,  li59; 
le  dessinateur  expérimenté  André  Biancho,  fut  appelé  à  la  participa- 
tion active  de  l'exécution;  parmi  les  peintres  est  nommé  Francesco  de 
Cherso.  La  mappemonde  fut  enfin  achevée  et  expédiée,  à  la  demande 
du  roi  Alfonse  V,  par  renlremise  du  noble  vénitien  Stefano  Trevisau, 
le  24  avril  1459(104). 

165.  Dans  la  même  année  1450,  le  20  octobre,  les  dessins,  les  écrits 
ei  une  copie  de  la  mappemonde  de  fra  Mauro  furent  déposés  et  enfer- 
més dans  une  caisse,  et  remis  à  Tabbé  du  couvent  (los).  Il  faut  en  con- 
clure que  le  frère  Mauro  était  mort. 

Le  cosmographe  Mauro,  dix  ans  avant  sa  mort,  avait  élaboré  une 
mappemonde;  il  est  probable  que  c'était  celle  qui  fut  enfermée  dans 
une  caisse  avec  les  autres  dessins,  et  y  resta  jusqu'à  1464  sous  la 
garde  de  l'abbé  MaiTeo  Gcrardo.  Mais  le  cosmograplie,  élaborant  une 
mappemonde  pour  le  roi  Alfonse  Y,  préparait  en  même  temps  une 
copie  qui  devait  rester  en  sa  possession  et  passer  au  monastère.  Elle  de- 
vait rester  sur  le  lieu ,  exposée  à  la  vue  des  doges  et  des  Vénitiens  (loe). 

(193)  Montre  che  il  dotto  camaldolese  preparava  coUe  sue  fatichc,  novi  argomonti  da  conTerroare 
rinfonie  nella  magnanima  impresa,  la  promoveva  coll'  opcra  Luigi  da  Mosto;  (il  quale  cbbc  il  vanto 
eziandio)  d'cssere  stato  il  primo,  clie  uc  assicurasse  la  memoria  cogli  scritti.  ^Foscarini,  lettcr.  voa. 
ap.  Zarla,  rallc  antidic  mappe  idro-gcogr.  cap.  Si}.  Le  dogu  Foscarini  Tut  dépose  et  mourut  i4S7. 

(i94)Tontesccs  particularités  sootconnucs  par  les  registres  et  les  annotatious  jourualières  aulogra- 

Shesde  Tabbc  du  couvent  Maffco  Gerardo;  il  y  dit  :  liS7,  adi  8  Tebrer,  la  majeslad  del  ru  du  Portogal, 
ie  aver  adi  sopradicto,  perche  dom  Benedetto  Miani  (cellcrario  di  monastero),  me  coiitad  iu  lioro 
doc.  S8  i  quai  souo  lasad  qui  per  nome  del  dicto  scgnore  per  depoxito  per  supliro  a  ccrte  spuxc  le 
qnal  crano  de  bixogno  fare  per  compir  1  opcra  dul  suo  mapa  mondi  cl  quai  lavora  fra  Mauro.  — 1457, 
8  febrer,  la  majcstad  del  signer  rc  de  Portugal  die  dar  adi  sopradicto,  perche  io  ho  dado  a  sier  I.iu 
Roao  contadi  in  horo  per  suo  nome  per  |)agar  pcntori  per  lavorar  el  suo  mapa  muudi  ;  et  pur  altre 
i^exein  summa  ducati  11.  —  1457,  adi  il  hoctubr,  chc  io  ho  dado  coutad  a  frar  Mauro  per  pagar 
uno  scriptor  a  lavorado  over  scripto  su  il  mup  raun<li  zoroi  17,  a  raxon  de  seidi  12  al  zorno,  monta 
lire  47,  soldi'i,  val  a  soldi  iU  per  duc.  —  1458,  adi  7  hoctubr,  contad  a  dom  Francest^o  de  Cherso 
per  pagar  un  scriptor  ol  quai  scripsc  al  dicto  mapa  muudi  zorui  4,  a  soldi  14alzurui.  —  145<J,8zeuer, 
per  nno  scriptor  soldi  15.  —  1459,  adi  17  (fubrur)  dicto,  coutad  a  dom  Fraucesco  de  Ch(>.rso  per  far 
eomprar  a  zuro  per  la  dicta  opéra  val.  1.  —  i45U,  adi  10  marzo,  pur  duc.  2  tolti  in  nui  per  messe  pur 
Bome  de  sier  Andréa  Biancho,  ehc  lui  dovea  havere  per  suo  promio  del  lavorier  lui  fuce  al  dicto 
mapa  mundi  val  in  chassa  soldi  4.  —  1459,  adi  17  marzo,  la  niajestad  del  scgnore  re  de  Portogal  die 
dare  adi  sopradicto  per  chassa  chc  io  ho  dato  a  dom  Frauccsco  da  Cherso,  chu  frar  Munro  mundu  a 
domandare  per  certc  spexc  lui  disse  haver  faute  per  el  mapa  mundi,  duc.  3.  —  1459,  adi  24april, 
che  dom  Nicholo  nostro  (économe  del  monastère]  me  a  dicto,  che  essendo  io  a  capitolo  a  camaldoli 
e  stato  salda  qucsta  raxon  a  messer  Stefano  Trevixan  per  nome  del  dicto  scgnore  ,  quando  pur  el 
dieio  messer  Stefano  li  fo  mandate  el  suo  mapa  muudi  (Maffeo  Gerardo,  ap.  Zurta,  il  mapa  mundo  di 
fra  Mauro,  cap.  S3). 

(19K)  4489,  tO  octubrio,  memoria  fato  chôma  le  copie  de  mapa  mondi,  c  de  descgni,  e  scripture  de 
frar  Mauro  ho  depoxitadeal  monastier  de  missier  san  Zuane  de  la  Zudecha  in  man  del  prior  del  dicto 
monasticr  zoc  don  Andréa,  le  quai  s<-ripture  cdisegni  tutti,  sono  posti  in  una  chassa  over  bancho  c 
aerradi  con  un  luchetto  la  chiave  del  quai  hc  qui  apprcsso  de  mi.  Ho  habuto  tulo  indrielo  questo 
deposîto,adi  W  octubrio  1464.  (Maffco  Gerardo,  ap.  Zurla,  il  mapa  niuudo  di  fra  Mauro,  cap.  51). 

^96)  Questa  opcra  fatla  a  conteplaciun  de  qucsta  illuslrissima  signoria  :  dit  une  légendu  de  la 
carte  (Zorla,  num  7).  François  Foscarini  n'en  a  vu  que  le  commencement  ;  sou  successeur  Pascal 
Malipieri  (1487>1460)  l'a  pu  voir  achevée  ;  ensuite  Christophe  Moro  (1460-1471)  put  l'examiner  étalée 
et  suspendue  à  la  muraille. 


93  OfoGS.   LATOIB,  f4IO-U70. 

Cette  copie  étant  înaclieTée  aa  moroeot  de  sa  mon,  elle  B^entra  pas  dans 
la  caisse,  mais  oo  continua  à  y  traTailler  et  elle  fit  terminée  en  1460, 
adi  26  acoiio  fo  ehonplido  queslo  2aror,  comme  le  dit  Tinscripticm  d^nne 
de  ses  corniches  (197).  Or,  cette  mappemonde  ne  fut  pas  scellée  dans 
une  caisse,  on  la  suspendit  de  suite  tantôt  dans  révise  tantôt  dan»  nne 
cour,  pendant  un  laps  de  temps  de  195  années  (1460+195=16^1. 
Enfin  en  1655,  le  20  décembre,  elle  fut  placée  dans  la  bibliothèque  (t9s). 

Le  diamètre  de  la  carte ,  de  Torient  à  Toccident  surpasse  de  7  lignes 
les  six  pieds  de  Paris;  celui  du  sud  au  nord  ne  remplit  pas  les  six  pieds 
de  Paris.  Cette  diCTérence  résulte  ou  de  Tiusuffisance  de  Texécution  et 
de  rîmperfectien  des  instruments,  ou  plutôt  elle  est  Tefiet  de  Faction 
de  plusieurs  siècles,  de  Tair  et  du  bâle  du  bois  sur  lequel  est  collé  le 
Télln  parchemin  :  car  la  mappemonde  de  Thabitable  défait  offrir  an 
cercle  régulier.  Son  centre  est  entre  Chaldea  et  Babilonia  sur  le  T%re 
(Bagdad).  Cependant  HienuaUm  e  in  mezu)  de  la  terra  kabiiabiie,  se- 
conda la  kUUudine  de  la  terra  habitabUe,  benche  in  ordine  la  longetudine 
la  sia  piu  occideniale  :  ma  perche  la  parla  piu  occidental  e  piu  kabitada 
per  VEuropa,  per  ko,  le  in  mezo  anchora  seconda  la  longeÂudineznon  eon- 
sederando  el  spaio  délia  terra,  ma  la  moUiludine  di  habitanti  (199).  Cest 
Tai^mentation  des  cosmi^i^phes,  pour  soutenir  leur  thèse. 

La  mappemonde  de  Mauro  est  à  la  fois  et  Timage  do  monde,  et  un 
Tolume  de  sa  description.  Il  y  traite  la  cosmographie,  expose  le  système 
planétaire  de  Tolomée,  explique  le  flux  et  le  reflux,  etc.,  ne  sachant 
comment  se  prononcer  sur  la  grandeur  du  globe  (200).  La  grandeur  du 
clobe,  du  degré,  les  longitudes  et  les  latitudes  géographiques,  les  zones, 
les  climats,  la  graduation,  les  projections  géographiques,  lui  sont  tons 
indifférents  :  car  sa  carte  est  aux  vents. 

Son  habitable  ronde  est  tournée  le  midi  en  haut,  le  nord  en  bas,  à  la 
manière  des  Arabes,  des  Siciliens,  de  Cecco  d'Âscoli.  Il  renvoie  Tin- 
clusion  de  Gog  et  Magog  aux  fables,  se  rangeant  à  Topinion  de  Saint 
Augustin  (201).  Quant  au  paradis,  il  relate  les  opinions  de  S.  Augus- 
tin ,  de  Beda  et  d'autres,  sans  discuter,  et  Texclue  de  sou  image  de 
rhabi  table  (ios). 

Le  cosmographe  camaldule  est  érudit.  Il  cite  souvent  les  anciens  : 
Jules  César,  Strabon,  Pomponi  Mêla,  Pline,  Jule  Solin,  Dionyse,  Tolo- 

(197)  Satie  aoticlie  mappe,  idro-fr<i^raphiclie  cap.  19,  Zarla  relatant  cette  inarription  prëtead 
qae  le  qnali  parole  spetlando  al  detto  grandioso  et  dorato  contorao  ;  auqael  il  serait  fastueux  de 
qaaliâer  de  lavoro  son  exécvtkta ,  qui  encadre  ane  laboriease  exéaitiun  de  la  mappemonde.  As 
reste,  quoique  les  peintres  et  les  raliifrrapbes  achevassent,  depuis  octobre  l-iS9  jusqu'au  26  août,  œ 
qui  manquait  à  la  copie,  cela  nedéroçrea  en  rien,  a  gonaino  lavoro  di  fra  Mauro 

(198}  Une  main  de  ce  temps  inscrivit  dans  un  coin  de  la  carte,  pro  memoria,  ce  qui  suit  :  haec 
tabula  geographica  cum  per  centum  nonaginta  qninque  anuorum  curricnla,  partira  in  ecdesia, 
partira  vero  in  aula ,  quae  »no  nnmini  dicala  erat,  et  dicebatnr  il  mappa  mondo,  fnisset  appensa, 
tandero  iussu  reverendissimi  patris  domini  Francisci  Gherardi  dicti  Errici,  abbalis  cuins  raonasterit 
in  bac  biblioteca,  ab  ipso  insUnrata,  ditata  et  oxomaU,  translata  et  coHocata  fuit,  anno  I65S,  die 
30  de<-embris  Zurla,  il  mappa  mondo  di  Mauro,  num.  44).  Les  495  années  comptant  de  décembre 
de  165S,  arrêtent  la  première  suspension  de  la  mapperaomie  {le  iO  décembre)  vers  la  fia  de  Tan- 
née 4460.  Or,  on  savait  qu'elle  n  était  pas  enfermée  dans  la  caisse,  et  on  eut  le  temps  de  l'achever, 
ce  qui  eut  lieu  le  24  août  de  4M0. 

(199)  I^ende  donnée  par  Zurla,  dans  l'ouvrage  il  raappa  mondo  di  fra  Mauro,  num.  3S. 

(iOO;  De  questo  cin-ura  ferenzii,  trovo  varie  opinion,  pero  non  e  possibilc  verificarla,  bencbe  el  se 
dica,(bc  la  sia  32,500,  over  24,000,  ovcr  piu,  over  manco.  secondo  diversa  considération,  opct 
opinion  che  non  molto  autentica  per  non  csser  expcriment  ada  Jcgcuda,  ap.  Zurla,  nura.  7). 

(201)  Légende  ap.  Zurla,  num.  47. 

(202;  ibid.  nom.  49. 


MAUBOy  166.  95 

mée,  le  métaare  d'Aristolélès ,  Ârian ,  Apolonius,  etc.;  et  en  fait  d'éru- 
dition purement  chrétienne  :  la  bible,  les  saints  pères  Augustin,  Ba- 
sile, Chrysostome,  Jérôme  ;  et  les  écrivains  renommés  :  Beda ,  Raban, 
Thomas  d'Aquin,  Alberlus  magnus,  Nicolas  de  Lira,  etc.,  en  générai 
les  historiographi  et  cosmographi.  Quant  aux  événements  historiques, 
il  mentionne  les  bibliques,  quelques  modernes  et  Alexande-le-grand , 
négligeant  ou  réprouvant  tout  ce  qui  a  été  dit  de  fabuleux  sur  ce 
dernier. 

166.  Mais  aucun  cosmc^raphe  n'y  est  cité  sous  son  nom.  Le  cosmo- 
graphe camaldule  n'a  pas  jugé  à  propos  de  les  spécifier  ;  il  néglige 
de  nommer  les  voyageurs  renommés.  Il  ne  nomme  ni  Louis  Cada 
Mosto,  dont  il  connaissait  les  découvertes  récentes  par  une  communi- 
cation directe;  ni  Marco  Polo  ou  quelques  autres  des  voyageurs  qui  lui 
fournirent  les  matériaux  pour  son  Asie  ;  il  ne  sait  pas  nommer  ce  roi 
d'Abyssinie  dont  il  connaissait  les  investigations  et  les  conquêtes  ;  il 
ne  dit  pas  comment  cette  nouvelle  lui  est  arrivée,  ni  qui  l'aurait  in- 
struit de  la  course  indienne.  Le  seul,  scorse  missier  Piero  Quirini  s'y 
trouve  par  hasard  nommé  près  de  la  Finlandic,  qu'il  avait  visitée  eu 
1454  (203).  La  bonne  fois  du  savant  camaldule  était  surprise  quand  il 
croyait  que  de  son  temps  un  navire  catalan  s'était  avancé  jusqu'au  nord  de 
laPermia,  qui  est  la  province  la  plusseplentrionale  de  l'habitable (204). 

Le  laborieux  cosmographe  se  perd  dans  l'immensité  de  l'orient.  Ou 
guidé  par  quelque  invention  antérieure,  ou  composant  à  sa  guise  les 
contours,  surtout  ceux  des  Indes,  il  n'a  pu  se  préserver  de  confusion, 
d'embrouillement.  Les  notices  abondantes  y  sont  assises  sur  une  confi- 
guration tissue  à  contre-sens.  La  portion  occidentale  de  sa  mappemonde 
est  sans  contredit  élaborée  plus  heureusement,  pour  la  plupart  d'une 
toute  nouvelle  création,  surtout  pour  une  grande  partie  de  l'Afrique. 

Un  roi  d'Abassia  avait  conquit  depuis  peu  (vers  1450)  le  pays  de 
Diab  et  explora  ses  caps  méridionaux.  Dix  ans  auparavant,  en  1420, 
une  jonque  indienne  passa  2000  milles  à  travers  la  mer  de  l'Inde  et 
atteignit  le  cap  le  plus  méridional.  Ces  nouvelles  ont  été  apportées  à 
Venise,  fra  Mauro  les  accommoda  à  sa  mappemonde, croyant  que  le  pays 
Diab  touchait  à  la  mer  obscure  et  ténébreuse ,  et  admettant  très-con- 
séquemment  qu'au  delà  du  dernier  cap  méridional,  les  rivages  tour- 
naient à  l'occident;  il  dessina  sur  ce  point  un  vaisseau,  la  proue  tournée 
vers  l'occident ,  pour  indiquer  jusqu'où  arrivèrent  la  jonque  indienne 
«t  les  explorateurs  abassins  (205). 

(903)  Zorla,nnin.  43. 

(104)  Una  iiave  catalan!  carga  de  corami,  in  mVo  tctnpo  scorse  di  qui  c  pcr  des  a  sTo  manso  (disagio 
mangio)  el  suo  cargo  (légende  ap.  Znria,  num.  48). 

(905)  Nous  extrayons  de  Zurla  (num.  S8,  30),  la  description  de  cette  partie  de  la  mappemonde  de 
fra  Maaro  :  Al  sad  est  dell  Etiopia  méridionale  e  dell  Abassia  v'  ^  in  forma  di  isola  quasi  triangolare, 
una  vastissima  regione,  chiamata  Diab,  vhe  forma  l'ostroma  parte  e  punta  di  Afiicn,  bagnata  dal  mar 
îndiano  e  dall*  occano  atlantico,  cdi  cssa  scritto  ucl  dctto  mare  :  nota  che  questo  caiM  de  Diab  e 
geparato  da  Àbauia,  per  uno  canal  el  quai  e  circumdado  da  uno  ladi  e  dal  altro  de  monte  altissimi 
el  aUrori  H  grandi  e  speà,  che  i  fano  quel  canal  oscuro,  il  quai  ne  la  sua  insida  fa  una  zirolo  perico- 
lo9o  pcr  modo  che  se  nave^  se  ne  abatesse  el  pericoisria.  Al  principio  di  tal  ultima  parte  d'Africa, 
Bresso  il  sudetto  canale,  ail  est,  evvi  la  città  Mogodisso  (Magadoxo),  solto  la  quai  giace  l'isola  e  citta 
di  Megîào;  al  sud  est  è  posto  Xengiber  (Zanguebar),  ove  a  carattere  d'oro  e  roajuscolo  c  scritto 
jHab;  indi  ver  sud  Soffala,  et  Macdasur;  il  regno  di  Chara,  Barara,  Maabese,  Chelve;  verso  poi 
occidente  :  questa  parlée  chiamata  Saccara,  id est  mana,  et  abonda  de  ogni  bene,  tra  laltre oro 
atfaf,  —  Ncl  meio  giace,  prouincia  dita  iMgiana,  et  souuui  due  laghi,  da  uno,  de  quali  esce  il  fiume 


94  GiOGR.  LâTOIE,  1410-1470. 

Poor  les  rîTa^es  oceideotaux  de  rÂfriqoe,  le  cosmographe  camaldole 
avait  des  dates  plus  positives,  foaraies  par  le  roi  de  Fortugal  et  par  la 
course  de  Cada  Mosto.  Mais  eu  les  aceominodaot  à  sa  mappernoode,  il  y 
inséra  TopiDioD  zudizio  dd  re  de  PortogaUo,  et  loio  de  le  suivre ,  loin 
d'avancer  jusqu'à  la  ligne  méridienne  d'Alexandrie  ou  de  Tunis ,  il 
spécifie  le  fleuve  d*or,  les  caps  Yert  et  Rosso,  rio  grande  et  suppose 
qu'au  terme  de  cette  reconnaissance  récente,  se  déploie  le  golfe  éthio- 
pique ,  colfo  per  luti  questi  chiamalo  eolfo  dal  ora;  golfe  familier  à  tous 
les  géographes,  à  Ptolomée,  à  tous  les  Arabes,  à  la  table  ronde  rogé- 
rienne,  à  la  mappemonde  de  SanuCo,  ainsi  qu'à  celle  de  fra  Mauro  (206). 
Toat  ce  qui  suit  vers  le  sud  jusqu'à  la  jonque  indienne  est  inexploré  ; 
tous  ces  rivages  du  golfe  et  des  côtes  spacieuses  jusqu'au  cap  méri- 
dional et  la  mer  ténébreuse,  conservent  la  configuration  convenue 
depuis  que  l'habitable  fut  enfermée  dans  le  cercle  de  l'océan  envi- 
ronnant. 

Ne  pas  suivre  l'opinion  du  roi  était  peu  courtois  ;  étaler  ce  littoral 
immense,  prolongé  du  golfe  éthiopique  d'or  jusqu'à  la  jonque  voguant 
sur  les  flots  ténébreux,  était  peu  encourageant.  La  mappemonde  du 
savant  camaldule  n'apportait  rien  de  nouveau  pour  la  navigation,  qui 
ne  îùi  connu  de  l'infant  Henri  et  du  roi  Alfonse  V,  au  moyen  des  car- 
tes antérieurement  fabriquées  par  d'autres.  Cependant ,  on  ne  peut 
douter  qu'elle  a  trouvé  un  bon  accueil  à  Lisbone.  Le  cosmographe 
renommé  confirme  et  les  conceptions  de  la  structure  de  l'habitable  et 
la  possibilité  de  traverser  l'océan  jusqu'à  la  mer  de  l'Inde  ;  il  argumente 
en  faveur  de  cette  opinion  qui  était  celle  de  la  cour,  de  l'infant  et  de 
navigateurs  entreprenants;  Pomponius  Mêla ,  Endoxus  du  temps  de 
Laturus,  personna  digna  de  fede  de  la  jonque  indienne,  et  l'autorité  du 
cosmographe,  sont  ces  puissants  arguments  :  novi  argumenli.  —  Adon- 
cha  senza  alguna  dubitalion,  se  puo  affirmar,  che  quesla  parte  austral,  e 
de  garbin  sia  navigabUe  e  che  quel  mar  indiano  sia  oceano  e  non  stagnon  : 

Iceruer,  che  si  gctta  nel  mare,  verso  il  nord ,  e  che  coU*  altro  finmc ,  detto  ÀUeeh  cbo  driviasi  per 
Test,  divide  il  Xenibar  da  Soffaia  et  da  Mogodisso.  Di  là  del  canale  t*  è  notato  :  questa  région  ferti- 
Usêhna  esta  eonguUta  nuovamente  per  el  gran  re  de  Abauia  eirea  el  4450.  —  In  noa  punta  poi  dî 
qnesta  stessa  regione  al  tad  è  marcato  :  qui  contenta  el  mar  gcuro,  et  in  uoa  nota  vicina  sopra  questo 
paese  è  l*Etiopia  méridionale,  e  sotto  alcune  sparse  isoicttc  sta  scrilto  :  pocho  lonzi  daqueste  isole 
foreane ,  comenia  aparer  le  ténèbre,  le  quai  qui  oUre  questo  cauo  non  impaza$tù  i  naueganti.  Presso 
qnesta  nota  ail*  estrcma  punta  dcU  Afrioa  dciinea  una  nave  dirutta  verso  poneule,  sotto  la  quai 
osserva  :  circa  JU  ani  del  signor  4420,  una  nave  over  wncho  de  India,  discorse  per  una  traversa  per 
el  mar  India  a  la  via  de  le  isole  de  hi  homeni  et  de  le  done  de  fuora  dal  cauo  de  Diab,  e  ira  le  isole 
verde  e  le  oscuritade  à  la  via  de  ponente  e  de  garbin  per  40  xomade  non  trovando  mai  altro,  che  aiere 
e  aqua^  eper  suo  arbitrio  i  scorse  2000  mia,  e  declinata  la  fortuna,  i  fece  suo  ritoma  in  zomt  70  fina 
al  êopraaitto  cauo  Diab  e  acostandose  la  nave  al  rive  per  suo  bisogno,  i  mari$Mri  vedeno  uno  ove  de 
uno  oseh  nominato  chrocho,  el  quai  ovo  era  de  la  grandcza  de  una  bota  d'anfora  e  la  grandeza  del 
oselo  era  tanta  che  da  uno  pizo  del  ala  altro  se  diee  esser  60  passa,  e  con  gran  faciUUa  lieva  uno 
etefante  e  ogni  altro  grande  animal  e  fa  grand  dano  ait  kabitanti  del  paexe  et  e  relocissomo  nel  suo 
viare.  Toute  cette  historiette  delà  jonque  indienne,  attachée  à  fanncc  1420,  était  très-ancicunc- 
ment  connue  par  les  arabes.  Mauro  l'avait  appris  par  une  narration  orale  :  «  aochora  io  ho  parlato 
»  cnm  pcrsona  digna  de  fede  che  afferma  aver  scorso,  cum  una  nave  de  India  per  rabia  de  i'ortuna 
»  de  traversa  per  zorni  40  fuora  del  mar  d'India  altro  el  cavo  de  Soffaia,  e  dele  insuie  verde,  eqai 
»  pur  al  garbin  e  al  ponunte,  c  per  lo  arbitrar  dci  suo  astrologi  i  quai  son  lor  guida  iscorse  circa 
»  2000  mia  »  (Zurla,  num.  S9). 

(206)  Voyez  ci-dessus  la  note  05.  —  On  lit  encore  dans  le  golfe  la  légende  suivante  :  «  Qucli,  che 
»  sono  stadi  aie  rive  de  questo  colfo,  affermana  esservi  moite  isole  tra  habitude  e  non  habitade,  c  che 
»  in  alguno  de  qucstc,  habitano  christiani.  »  Sur  la  pointe  australe  près  de  Fuudan  on  lit  :  «  io  ho 
»  piu  volte  aldido  da  molti  che  qui  e  una  colona  cum  una  man,  che  dimostra  cum  scritura  que  de  qui 
»  non  se  vadi  piu  avauti  :  maqui  voglio,  che  Portogalesi,  che  navegano questo  marj  dicano  scie  vero 
»  quel  che  ho  audito;  perche,  io  non  ardisco  affermarlo.  »  (Zurla  num.  55). 


HAUROy   iC7.  95 

e  cusi  affermano  iuii  queli  che  navegano  quel  mar,  e  che  habUano  quele 
insule  (sot).  Les  Porlugais  habitués  à  faire  les  découvertes  connues  déjà 
des  autres,  compulsant  les  mappes  des  cosmographes  antérieurs,  étu- 
diaient les  assurances  du  cosmographe  camaldule,  et  brûlaient  d'envie 
d'aller  au  devant  et  de  joindre  cette  aventureuse  jonque  indienne  qui 
leur  présentait  sa  proue,  afin  de  conduire  leur  équipage  friandement 
ravitaillé  par  un  seul  œuf  du  chrocho  jusqu'à  la  destination  de  Tlndc. 
Toute  la  configuration  de  l'Asie  et  de  l'Afrique,  de  leur  intérieur  eten 
général  de  leur  extérieur,  calquée  sur  les  conceptions  des  cosmographes 
précédents,  modifiée  par  quelques  renseignements  plus  ou  moins  heu- 
reusement adaptées,  n'offre  dans  la  mappemonde  camaldule  que  le  fruit 
de  l'imagination,  absorbé  par  le  vague.  L'unique  portion  où  les  capa- 
cités du  géographe  pouvaient  se  dérouler  à  nos  yeux,  s'étend  de  TEufrate 
jusqu'à  Ta  mer  atlantique,  y  compris  le  littoral  septentrional  de  l'Afrique 
et  la  plus  grande  partie  de  l'Europe. 

167.  Mauro  accepte  le  système  planétaire  de  l'astronome  Ploléméc, 
mais  il  ne  veut  pas  de  Plolémée  géographe;  il  proleste  qu'il  ne  veut 
suivre  ni  ses  formes,  ni  ses  mesures  de  la  longitude  ou  de  la  latitude: 
11  pense  qu'en  ne  le  suivant  pas  il  ne  déroge  en  rien  :  io  non  credo  de- 
rogar  a  Tolomeo,  se  io  non  seguito  la  sua  cosmographia;  unde  se  algun 
eontrc^dira  a  quesla,  perche  non  ho  seguito  Claudio  Tolomco,  sine  la  forma, 
corne  eliam  ne  le  sue  mesure  per  longeza  e  per  largeza  (ses).  Protestation 
remarquable  et  néccessaire  au  moment  où  la  renaissance  des  lettres 
faisait  à  toute  outrance  revivre  les  dépouilles  de  ce  géographe.  Mauro 
le  repousse  de  sa  mappemonde  et  réprouve  ses  connaissances  surannées, 
camMali  e  corropti  (209). 

Perlanto,  prévient  le  cosmographe,  dico,  che  io  nel  tempo  mio  ho  so- 
licilado  veripcar,  la  scriptura,  des  voyageurs,  des  portolans,  des  mappe- 
mondes, des  cartes  exactes ,  des  histoires ,  cum  persone  degne  de  fede 
lequalhano  veduto  ad  ochio  quelo  che  qui  suso  fedelmente  demoslro  (âio); 
habi  bona  geometria  e  bona  intelligentia  de  desegno  .(su).  Le  compas  à 
la  main,  avec  une  assiduité  extrême,  il  élabora ,  d'après  les  plus  certains 
renseignements,  quantité  de  cartes  spéciales  de  l'Asie  occidentale  (212) 
ei  suivit  les  meilleurs  cartes  et  portolans  :  benche  io  habi  servalo  ogni 
diligenciain  meter  le  starce  dequeslmar,  c'est-à-dire  de  la  mer  mediter- 
rauée,  seconda  lapiu  justa  caria  ho  possudo,  nondimcn  queli  che  sono 
experli  non  faza  gran  caso,  se  io  me  discorda  in  quai  casa,  peroche 
none  possibile  metar  tuto  a  ponto  (213).  Il  doutait  d'avoir  réussi  sur  ce 
point  dans  sa  composition  :  mais  il  vit  qu'il  fallait  se  distinguer  et  se 
mettre  en  discordance  avec  les  autres  cartes  nautiques  de  la  mer  mé- 
diterranée.  Je  pense  qu'il  varia  avec  avantage  et  un  certain  succès. 

(S07)  Légende,  ap.  Zurla,  nam.  <40. 

(208)  ibid.  Dum.  *. 

(S09  Nota  che  Tolomeo  mcte  algune  provincie  inqucsta  Asia,  eoe  Albania,  Ibcria,  Cactriana, 
Paropsunisades ,  Dragiana,  Arachosia.  Gedrosia  et  oitra  Ganges  le  Sine,  de  quai  tutc  non  ne  fazo 
nota,  perche  sono  cambiati  e  corropti  quali  nomi,  pcra  pno  bastar,  che  ho  notado  altro  prouincie  de 
le  quai  Tolomeo  non  ne  parla  (légende  ap.  Zurla,  num.  20). 

(SiO)  Légende,  ap.  Zuria,  num.  4. 

(214)       ibid.     num.  7. 

(142)       ibid.     num.  23. 

(213)       ibid.     num.  10. 


96  GÊOGR,   LATINE,   1410-1470. 

La  grande  mappemonde  de  Mauro  fut  publiée  en  1806  par  Placido 
Zurla,  sur  une  échelle  trop  diminuée  pour  nous  mettre  en  état  d^eo  jager 
sans  réserve  («i4).  Cependant  nous  avons  recours  à  ce  procédé  compa- 
ratif dont  nous  nous  sommes  servi  dans  Texamen  des  cartes  sanutine 
et  catalane  :  et  voici  ce  qui  se  présente  à  notre  attention. 

Je  ne  doutais  point  des  proportions  de  la  mer  entière,  de  Tharmonie 
conservée  entre  sa  largeur  et  sa  longueur;  le  cosmographe  qui  réprouve 
les  difformités  de  Piolémée  et  marche  sur  les  traces  établies  par  ses 
prédécesseurs,  ne  pouvait  pas  manquer.  Cependant  il  a  repris  leurs 
opérations  et  donné  à  la  mer  une  longueur  un  peu  plus  étendue.  La  mer 
est  sur  une  direction  oblique,  comme  dans  les  cartes  antérieures:  mais 
Tobliquité  est  réduite  à  6  degrés.  Il  est  probable  qu*à  la  suite  de  cette 
avantageuse  modification  de  Tobliquité,  le  cosmographe  s*est  aperçu, 
que,  bien  qu'il  ait  mesuré  avec  toute  diligence  les  tortuosités  de  la  mer, 
il  se  trouva  en  discordance  avec  les  autres.  Une  autre  discordance 
très-avantageuse  pour  sa  composition ,  se  manifeste  à  Textérieur  de  la 
mer  médilerranée.  Le  volume  de  TEspagne  et  de  la  France  est  consi- 
dérablement augmenté,  la  position  de  Paris  se  rapproche  de  sa  véritable 
situation.  Je  ne  pense  pas  qu'on  doive  attribuer  cette  amélioration  à  la 
construction  des  cartes  topographiques  de  ces  pays,  mais  je  crois  qu'au 
moyen  de  remaniements  réitérés  de  la  mappemonde ,  on  parvenait  à 
mieux  coordonner  les  portolans  des  rivages  extérieurs. 

Dans  la  partie  orientale  de  la  mer  méditerranée  c'est  tout  le  contraire. 
Le  cosmographe  camaldule  porta  la  mer  noire  excessivement  au  nord. 
Ce  défaut  se  fait  remarquer  dans  les  caries  antérieures  ,  mais  il  a  ren- 
chéri sur  tous  ses  modèles.  Il  élabora  quantité  de  cartes  topographiques 
de  Syrie  et  de  l'Asie  mineure.  Ces  compositions  continentales  augmen- 
taient sans  aucun  doiite  le  volume  de  l'Asie  mineure  et  les  rivages 
montaient  forcément  vers  le  nord.  L'analyse  de  l'original,  de  son  fac- 
similé,  ou  de  la  diminution  plus  scrupuleusement  exécutée  que  ne  l'est 
celle  de  Zurla,  découvrira  peut-être  la  cause  de  l'empoulement  de  l'Asie 
et  permettra  un  jour  de  discerner  le  progrès  de  la  cartographie. 

Table  métallique,  14^2. 

168.  Lorsque  Charlemagne  fit  graver  le  tableau  de  l'habitable  sur  des 
planches  d'argent,  c'étaildu  luxe,  et  quand  Roger  de  Sicile  l'imitait, 
c'était  sans  doute  dans  le  but  de  conservation,  un  métal  étant  en  état 
de  mieux  résister  à  la  destruction  qu'un  dessin  sur  le  vélin  ou  sur 
quelque  espèce  de  peau  ou  de  cuir.  Le  métal  devait  être  aussi  favo- 
rable à  l'exactitude,  il  préservait  l'ouvrage  de  la  détérioration ,  de  la 
défiguration  qui  se  déclarait  fâcheusement  dans  les  proportions  du 

(214)  Il  mappa  moDdo  di  fra  Mauro  camaldolcse  descritto  ed  illustrato  da  d.  Placido  Zurla  dello 
stess' ordioe,  venczia,  i806.  —  La  carte  est  reproduite  dans  ses  autres  ouvrages  de  48i8,  disser- 
tazioni  et  sullc  antiche  mappe.  —  Nous  avons  réduit  cette  mappemonde  de  sa  publication  pour  notre 
atlas,  presque  à  moitié,  en  proportion  de  25  à  13  de  l'échelle,  avant  fidèlement  conserve  toutes  les 
épigraphes  inscrites  dans  la  publication  de  Zurla.  Pour  notre  carte  comparative  de  la  mer  méditer- 
ranée, la  diminution  zurlane  reste  en  entier.  —  L*ample  description  de  la  mappemonde,  nous  a 
fourni  ces  propres  paroles  de  fra  Mauro,  dont  uous  nous  sommes  servi.  —  En  1804  Guillaume  Fraser, 
anglais ,  copia  exactement  la  mappemonde  do  Mauro,  et  apporta  sa  copie  à  Londres.  —  On  en  fait 
une  pour  la  bibl.  royale  de  Paris. 


TABLE  VÊTALLIQtJE,  168.  97 

dessin,  quand  rbumidité  ou  quelque  accident  dégradait  la  peau.  Pour 
la  conservaliou,  Targeot,  certainement  était  préférable  à  d'autres  mé- 
taux inférieurs,  à  cause  qu'il  résiste  mieux  à  Toxydation  ;  mais  sa  valeur 
le  condamnait  à  la  fente  et  à  une  toute  autre  destination  dans  des 
moments  de  nécessité.  Or ,  on  gravait  sur  d*autres  métaux ,  et  cette 
gravure  demandait  des  ouvrages  jumeaux,  parce  qu'il  fallait  remailler, 
OQ  en  remplir  le  creux  de  eonleurb.  Il  est  probable  que  de  semblables 
tableaux  n'étaient  pas  nombreux,  car  les  écrivains  gardent  le  silence 
sur  leur  existence  :  cependant  la  table  ronde  de  Roger  n'était  pas  la 
dernière  de  ce  genre;  le  musée  Borgia,  à  Velletri,  possède  Vorbis  terra- 
mm  gravé  et  émaiilé  sur  métal,  au  xv'  siècle. 

Le  métal  de  la  table  géographique  du  musée  Borgia  à  Velletri,  est  de 
cuivre  jaune  ,  et  a  deux  pieds  et  un  pouce  de  diamètre  ;  il  est  enduit 
de  couleurs;  à  l'exception  des  voiles  de  navires  et  des  pavillons  qui  sont 
t>lancs  et  rouges ,  tous  les  autres  traits  creux ,  les  lettres ,  lignes  et 
figures,  sont  enduits  de  couleur  brune.  Cette  table  avait  été  attachée 
autrefois  à  une  muraille  ou  un  plancber,  parce  qu'elle  offre  des  trous 
par  lesquels  passaient  les  clous. 

Sa  grandeur  considérable  ferait  présumer  que  les  pro^rtions  de  la 
terre  et  des  mers  sont  de  l'exactitude  géographique  :  mais  nous  ne  le 
savons  pas,  nous  ne  la  connaissons  que  par  la  description  qui  se  résume 
aux  énumérations  de^gures  et  d'épigraphes  :  ces  derniers  en  effet  ont 
quelque  valeur  ^«iit). 

La  division  de  la  table  en  douze  sections  numérotées  à  leur  bord , 
ferait  croire  que  ce  planisphère,  cette  habitable  ronde  est  dressée  sur 
les  rayons  de  douze  vents.  Le  sud  est  en  haut,  le  nord  en  bas.  L'habi- 
table baignée  par  les  eaux  (océan)  tout  à  l'entour,  est  divisée,  comme 
à  l'ordinaire ,  en  trois  parties  :  Asia^  Africa,  Europa  lerlia  pars  orbis 
lerrarum.  Il  est  probable  que  Siria  terra  sancia  (où  Jérusalem  n'est  pas 
nommée)  constitue  le  centre  du  cercle.  Pour  les  trois  parties  du  monde, 
la  part  du  disque  n'est  pas  égale.  L'Europe  occupe  presque  la  moitié  ; 
l'autre  est  partagée  entre  l'Asie  et  l'Afrique. 

Lecompositeur  de  ce  planisphère  est  beaucoup  préoccupé  de  l'histoire 

ancienne  et  des  événements  qui  lui  sont  plus  rapproches.  Dans  l'Asie 

mineure  :   hic  Graeci  cum  polentia  unius  pojrtis  mundi  decem  annos 

prodiaverunl  Centra  Troianos  etaliam  partent  mundi;  quos  per  inducias 

^iruerunt  ;  ex  quibus  Troianis ,  mulla  régna  et  dominia  facta  sunt. 

Ans8i,dans  les  parties  septentionales  :  terra  quondam  illustrium  mu- 

lierum,  n'étant  pas  oubliée,  il  yajoute  :  la  reine  chevauchant  à  la  guerre, 

ft^tetilea  ad  Troia  multa  bella  et  Grœcos  debellavit,  A  quelque  distance 

il  nomme  une  autre  reine  :  hoc  Tamaris  Scitarum  regina  Cirum  Per- 

'^'nm  regem,  cum  trecentis  millibus  inlerfecit ,  et  attribue  la  réclusion 

de  Gog  juifs  aux  Persans  :  provincia  Gog,  in  qua  fuerunt  Judei  inclusi 

^'Wfwre  Artaxercis  régis  Persarum.  Magog  :  in  istis  duabus,  sunt  gentes 

(Ml)  ie  cardinal  Etienne  Rorgia,  possesseur  du  monument  métallii[ne,  fit  exécutor  son  dossin  et 
«■Snvare,  et  avant  sa  mort,  oui  arriva  en  novembre  IHOi,  il  eommaniqua  la  gravurn  à  Hooren, 
^wlBftns  devons  la  description  du  monument,  inséré  dans  les  commentationes  societ.  Gotting. 
^V»'*'  3tVl,  p.  i80-t84).  —  L'exemplaire  de  In  gravure  communique  a  dû  passer  au\  héritiers  de 
^''®'' I  parce  que  la  bioliolhèqae  de  l'université  jhî  le  posséda  point. 

II.  10 


M  ÇtûCM.  L4Tai,  uêq-uml 

wtmjmi  H  f tfaafei,  plnu  ammium  ■Mlono»  Mon»  :  fWK  Juitm,  IrlOJMs 
rrx  eoUegii  ée€mmibms  parUbtu  Penmrmm  («ic). 

Le  conpofiîiear  da  pboispbère  counji  tfots  mwarcUes  aiOérieores 
à  Rome  :  BmkgUm^  priMÊm  wumartkia  WÊumdi,  L'aaire  brthagpiioîse,  bieD 
que  son  ooa  n*j  soit  pas  :  stemmda  wummnkim^  qm»  Umfwt  Axtùbal 
nomamot  mmUmm  smfbeamii ,  qmm  âeimée  per  Ramanoi  tote  fmii  âairmelm^ 
per  Stipkmtm,  ei  sur  la  canp^^pe  d^AnniM ,  il  sait  dftre  :  près  des 
Alpes  :  kU  wumies  àmdmml  Itaiiam  ab  itfg— ta  H  GmMim  :  iroMMitus 
Ammibalis  emm  lxx  olifmmiis  per  Roiammm  Aie  tu  Linâmme  (Lof^ano). 
Ettsoile  eo  Italie:  iaaitel  éebeUamURomamos  m  rv^iiMie  Popto; ensuite: 
beilum  Camnemu,  tu  9110 .4iiiii6al  xlit  wûUia  Rammmoê  imUrfteii  H  ex  wU- 
lUibms  kaimit  tria  wwdia  ammmhrmm,  et  près  de  IKiauM,  dans  la  Ro- 
nuiDie  :  kie  Aêdrubal  eum  lui  mittibmsCarlkagimiemsimm^  imterfechu  esi. 

Près  de  Comsianiinopoli  t  on  lit  :  kie  fuU  lereia  wumankia  wmndi, 
per  Alexandmm  atquisita^  et  sor  celui-ci  on  trouve  au  fond  de  FÂsie  : 
super  isium  wunUem  vieius  est  Ponu  rex  Indormm  t»  duHlo  per  AUxaw- 
drum;  ailleurs  sont  :  arbores  eonserti^  quUms  easira  loearii  Alexanâer  ; 
rinsertion  de  Albamia  moffiui,  lui  rappella  :  kie  eames  forîiores  leonibms 
dont  fit  présent  à  Aleiandre  le  roi  de  FAIbania,  enfin  tiidus  flumus 
„..  kie  Alexanéer  eum  ejus  militia  et  pedones,  Darium  debeUauit  eum  xw 
milUbus  kominum  tu  tribus  M/if. 

Il  relate  peu  d'éTénements  du  temps  romain.  SiuofNi,  «vlfu  dominia 
submisit  et  Hereulam  (Heracleam)  debeltarit  (probablement  Mithridate); 
Pampedoius  (Pompeius)  insipia  (insipienlia?  in  Sinopia  ?)  Asienm  et  Eu- 
ropam  subjugavil.  A  Tinsertion  de  Tkessalia  il  ajoute  :  kie  fuit  UMip^um 
bdlum  Cesaris  etPampeii,  kie  Borna  perdidit  eammune  eemwMdum. 
De  temps  ultérieurs,  il  n*Y  a  qu^en  France  :  kie  in  Alunia  (Catalannia) 
amno  4Î0  (450)  Atita  rex  Hunnorum  emUra  Romanos  pugnoMerat  et  tn* 
terfecta  sunt  180  miUia  ex  utraque  parla. 

Il  est  bon  de  remarquer  que  les  souvenirs  de  Charlemagne  grandissent 
à  ses  yeux.  Près  de  mons  pireneus,  il  rappelle  la  bataille  de  RonceTeaa: 
kie  fuerunt  inierfeeti  duodeeim  pares  Franeiœ ,  et  au  milieu  de  TEa- 
pagne  il  dit  :  infidelis  Ispania  ekrislianitaêe  nU^missa  per  Caroium 
magnum. 

(SI 6.  Voici  ce  que  raconte  là-dessus  la  cartede  la  Tartarie,  reprodaite  en  157tt  par  Ortelios,  dont 
Dons  donnons  nnc  pclit<>  ignrt*  dans  notre  atlas  n*  437  :  elle  raconte  lonte  histoire  :  Danoram  sine 
Danitarom  borda,  4  (prima)  dejecUo  sine  descensio  aut  expnisio.  —  Septhalitanun  borda,  Neptbalitae 
ab  nna  40  tribaam  Israelis  nomine  Nnptali  dicti  sont,  et  post  Danitas  qui  in  castigatione  aqnilonari 
banmarch  dicti  snnt  ob  Racbelis  Balhab  ins ,  secundo  in  loco  Hndornm  sine  lehndonun  sant  ponti 
et  476  sal.  anno  contra  Perosam  victores  fuere,  Entbalitas  maie  vocant  céleri.  —  Arsaretb  (4  Esdr. 
cap.  43),  hic  10  tribus  secessere  et  Totaromm,  sine  Tartaromra  loco  Scrtbicse  snbsUtnemnt  :  nnde 
Gauthae  sen  Ganthay  a  snmma  dei  gloria  asscrenda  ibi  dicti  snnt  et  bine  Calhay  clariss.  régnons.  — 
Tnrcbestan  regio,  nnde  cismontani  40  triknom  sodi  ante  900  annos  sunt  accersiti  a  P«rsis  contra 
ismaelitae  Mahurocdis  arma.  —  Au  xti*  siècle  le  pape  Clément  Yll,  en  4533,  reçut  par  l'entremise  da 
roi  de  Portugal  une  missive  de  David ,  roi  d'Abissinie  (rambasciaria  di  David  re  del  I  Etiuopia  Bonoai»  per 
Jac.  Keymoîen  4538  in-4*;  Paul,  /ovius,  p.  4i3,  S36).  Les  juifs  crurent  v  voir  un  envovc  mosaiSanfc, 


reproduite  par  OrtHins  il  paraîtrait  qu'un  Israélite  s'était  chargé  de  continuer  le  rôle  d'un  envoyé 
de  Chabor,  parce  que  cette  carte  dit  :  Tabor  sen  Tvbur,  umbilicariane  Totaromm  regio,  nbi  licei 
olim  libros  sacros  perdidissent,  snnt  tamen  uniti  sub  uno  rege,  qui  4540  in  Galliam  usqne  ad  regeat 
Franciscum  id  nominis  primum  venit  et  postea  a  Carolo  V  Mantu%  igné  suaD  infidelitatis  poenaa 
luit  :  quia  secrète  solicitabalnr  christianoi  principes  adjudaisraum .  de  qnare  Carolnm  V  altooaUM 
erat. 


TABLE  MÉTALIQUE,  168.  99 

Quand  il  qualifie  Bagdad,  BcUdachia  sèdes  ealiphœ,  c*e$t  une  ancienne 
réminiscence,  parce  que  depuis  iâ58  cette  yiile  cessa  d'être  la  résidence 
de  ce  chef.  Seplem  ectstra  ehrislianorum  intra  silvas  paganonum  signale 
la  colonisation  des  Allemands  dans  la  TransilTanie.  Bordeaux,  et  tout 
près  :  loannes  rex  Franciœ  hic  capitur  per  principem  Valiœ  in  bello;  et 
aillenrsen  Asie  :  sedes  lambec  imperatorit  medie,  confinai  cum  Vngaris^ 
se  relatent  à  des  années  1356  et  1557.  lambek  mourut  dans  cette  der- 
nière, il  était  de  Sarai.  La  carte  Catalane  et  André  Biancho  distinguent 
Tempire  de  Medeia  ou  de  Media  de  celui  de  Sarai  :  on  peut  donc 
présainer  que  l'auteur  du  planisphère  veiletri  tombe  dans  une  confusion, 
en  qualifiant  lambek  d'empereurs  de  Médie. 

Grecia  in  qua  Basac  (Balsizei)  debellavitchristianos  nccclxxxxv  (1595) 
ex  quibus  mulli  nobiles  Franciœ  décapitai.  Cet  aflaire  eut  lieu  près  de 
Nicopolis,  et  le  sort  du  vainqueur  est  précisé  sous  Sava^tra  (Sehnsta, 
titre  que  prenait  Ancyre)  in  qua  Tamburlan  (Tamerlan),  devicil  Bazak, 
ex  ocUngentis  hominum  millibusy  interfecil  duo.  L'affaire  avait  lieu  en 
1401  ôt  introduit  l'auleur  du  planisphère  dans  le  xv^  sièice. . 

Vandalia  (Vendes),  Lilefane  (Litvaniens),  Tarelanl  (Garelant,  Kare- 
lie),  Riga  et  à  la  suite  :  hic  sunl  confinia  paganorum  et  ehrislianorum, 
qni  in  Prussia  adinuicem  bdlanl ,  bien  que  répété  depuis  quelques 
siècles  sur  ee  point,  pourrait  faire  croire  qu'il  fait  allusion  à  la  fameuse 
dëiaite  des  chevaliers  teutoniques  en  1410,  et  ferait  déterminer  en 
dernier  lieu  l'âge  de  l'auteur  du  planisphère  :  si  d'autres  passages  en- 
core ne  l'avanceraient  à  la  moitié  du  xv*^  siècle. 

liaiia  niiens,  pinguis,  forlis  et  superba  :  exquibus  caret  domino  uno 
iMilUia  uana.  Tout  en  admirant  l'Italie  il  gémitsur  son  insubordination 
k  Tempire  fondé  par  Charlemagne.  Sedes  aposlolica  et  imperialis  (Rome 
qui  n'est  pas  nommée)  per  septingenlos  annos  in  orbe  IriumphaviL  Or, 
à  partir  de  la  restauration  de  l'empire  par  Charlemagne,  les  sept  cents 
aas  avanceraient  l'âge  de  l'auteur  et  l'année  1500.  Certainement  rien 
ne  nous  oblige  à  considérer  ces  sept  siècles  de  trioiiipbe  complètement 
écoolés  :  mais  il  est  nécessaire  de  remarquer  dans  colle  expression,  le 
septième  siècle  très-avancé  el  chercbcrquela  pu  élre  le  molif  d'une  sem- 
blable exclamation,  qui  réunit  à  la  fois  le  triomphe  du  siège  aposto- 
lique et  de  l'empire. 

L^ëglise  chrétienne,  vivement  agitée  à  cette  époque,  ouvrit  à  la  cour 
de  Rome  destriompbes.  Eugène  IV  proclama  l'union  du  rite  grec  avccsa 
saprématie;  Nicolas  V  assoupit  l'existence  du  concile  de  Baie  et  se  hâta 
dérégler  victorieusement  les  concordais  avec  l'empereur.  Frédéric  III 
prenant  les  rênes  de  l'empire  délabré,  allaita  Rome  en  1452  célé- 
brer le  double  sacre  comme  roi  de  Lonibardie  le  15  mars,  et  comme 
empereur  le  18  mars.  La  plus  parfaite  et  la  plus  indifférente  harmonie 
r^paait  entre  les  deux  cours,  qui  comptaient  en  commun  le  septième 
siècle  (75â  années)  de  leurs  succès  et  triomphes.  Je  pense  que  ces  évé- 
nements déterminent  juste  l'âge  de  l'auteur  du  planisphère.  Il  ne 
dépasse  pas  de  beaucoup  cette  année,  car  il  ne  connaît  pas  la  chute  de 
Constantinople  qui  arriva  le  29  mai  1455  ;  car  il  fait  allusion  aux 
érénements  du  jour,  il  est  à  présumer  qu'il  ne  l'aurait  pas  passé  sous 
silence  si  ella  avait  eu  lieu  de  son  temps.  L'auteur  est  sans  aucun  doute 


100  GÊOGR.   LATINE,   1410-1470. 

Italien ,  parlisan  de  la  cour  de  Rome ,  en  face  des  fails  qui  réjouirent 
ritalie ,  déplorant  la  dissolution  des  liens  de  Tenipire  (211). 

Quant  aux  détails  géographiques,  qui  ne  sont  pas  nombreux  en  pro- 
portion de  la  grandeur  de  la  table ,  le  planisphère  ne  diflere  point  des 
caries  contemporaines  et  quelque  peu  antérieures.  Le  nord  de  TËurope: 
hcBc  regio  montana  inhabilUabilis  propter  nimium  frigus  qttod  est  ab  polo 
arclico^  aussi  extrema  Norvegiœ  inhabitabilU  nimio  frigore  :  hic  sufU 
ursi  et  fakones  alM  et  consimilia,  L'Europe  s'étend  jusqu'au  Tanai$ 
fluvius  per  maximus  qui  sort  d'un  lac  :  in  hoc  lacu  stundi  (les  thons) 
infinili.  Bien  qu'aux  environs  de  mare  Prussiœ  (baltique)  sont  Gothia 
magna,  Vandalia,  Litefani,  Carelanl  et  Riga,  cependant  Livonia  sa 
trouve  jetée  au  delà  du  Tanais. 

  la  suite  de  seplem  castra  (de  la  Transylvanie)  on  lit  :  Bozimia  (pro- 
bablement Bosna  de  la  carte  catalane ,  Posimia  de  celle  d'André  Bénin* 
casa,  située  près  de  Posega,  Bosnia,  ainsi  déplacée),  Rusia,  puis  :  hic 
tntanl  Sitœ  (Scythae)  seu  Tartari  pauperes,  qui  fUios  et  filias  et  parentes 
inopia  vendunt ,  sicut  inter  christianos  boues  in  forts ,  et  puis  :  hœe  per 
ampla  est  déserta  propter  continua  paganorum  contra  christianos  (in- 
cursiene).  C'est  tout  ce  qui  est  au  nord  de  :  palus  Meotida,  Capha  et 
mare  pontium. 

En  Allemagne  on  lit  :  Albia  fluvium,  Sassonia,  Dresden;  Gurse  (Wur- 
zen  sur  Mulda),  Magobres  (Magdeburg),  Standar  (Stendal,  noms  connus 
par  la  carte  Catalane)  ;  ensuite  :  Ays  (Âix-la-Chapelle),  Cotonia,  Treu- 
bourg  (Strasbourg),  Basla,  Baiveria  (Bavière),  Moravia^  où  on  lit  :  ert 
(élan,  sa  figure  y  est  gravée),  quando  pressatur  a  canibus,  bibit  aquam 
per  os  ferventem,  super  eosemittit  (conte  allemand,  venant  d'Allemagne: 
ert,  hirsch,  hart,  hert,  cerf);  ensuite  :  hic  transit  sUva  boemica  quœ  se 
extendit  ad  paganos  ;  puis  Austra,  Austria  de  deux  côté  du  Danube,  sa 
capitale  Viana  (Vienne),  Patama  (probablement  Pasavia). 

De  Polonia  il  ne  reste  que  des  débris  Po...ta,  il  y  a  d'autres  points 
lésés.  Dans  chaque  autre  pays  de  l'Europe  on  voit  plusieurs  villes 
nommément  signalées.  Atena,  singulare  orbis  studium,  bonne  tradition 
très-ré  pétée  par  les  arabes.  Parissii  (Paris),  pare  bonitati  et  domtnio, 
sed  et  immensitate  plamto  et  casteUalo  (fortifiée  et  castellée  ;  plamto ,  à 
plan,  pianta;  ou  planche,  palissadée). —  En  Italie,  où  coule  Paudus 
oriens  in  imchro  (val  di  agrogoa)  on  ne  voit  ni  Naples,  ni  Venise,  ni 
Florence,  ni  Sienne,  ni  Milan  ;  en  revanche  on  trouve  :  Bononia^  Sàturia 
(Saluzzo),  Rimini,  Ancona,  Marchia,  toutes  dépendances  de  Rome 
triomphante  pendant  sept  siècles.  En  Apulia  on  lit  :  hic  quiescit  corpus 
beali  Nicolai  de  Baro. 

L'Asie,  Asiamaior,  dans  sa  partie  septentrionale  offre  quelques  détails. 
Le  froid  y  est  intense  :  hic  corpus  ponitur ,  ut  semper  frigore  conserue-' 


(117)  Le  cardinal  Borgia  pensait  qae  l'autenr  était  nn  allemand;  Heeren  adbëra  à  cette  opinion  , 
ne  remarquant  que  des  apparences  faibles.  Contre  cette  opinion  cependant  milittent  le  contenu  et 
l'orthographe  do  planisphère.  Ils  sont  les  mêmes  que  ceux  de  toutes  les  autres  productions  italien* 
nés.  Un  Allemand  ne  devait  pas  au  moins  laisser  Sassonia,  Gurse,  Magobres,  Standar,  Viana,  sans  les 
rectifier.  Quant  au  graveur,  ciseleur,  émailleur,  s'il  était  allemand ,  c'est  indifférent  pour  nons.  — 
Nous  différons  aussi  de  Heeren,  dans  quelques  autres  explications,  possédant  plus  de  matériaox  qve 
ne  pouvait  avoir  ce  savant  historien.  Nous  paiisous  sous  silence  la  nomenclature  trop  connue  et 
claire,  aussi  bien  que  certaines  épigraphes  et  explications  plus  que  douteuses,  que  nom  n'avons 
hasardé  d'examiner,  faute  de  voir  l'image  du  planisphère. 


TABLE  MÉTALLIQUE,  i68.  101 

lur  ;  montes  hyperbwrei,  in  quibus  grilfones  et  tigres  inhahitant;  ista  geus 
(qai  n'est  pas  Dommée)  sedel  eeclesia  et  faciunl  de  se  sâcrificium ,  ponen- 
éo  caput  prius  sub  quodam  paio  pro  aues  et  tune  genubus  adorant, 
doneeciMdat, 

Mare  hyreaneum  est  distingoée  de  la  Caspienne.  Elle  forme  un  golfe 
de  Focéan.  Uxores  diligentes  maritos  se  faeiunt  comburi  simul;  hic  pa- 
gant  adorant  ignem. 

Les  villes  qu'on  y  voit  sont  pour  la  plupart  connues  dans  la  carte 
calatane  et  ailleurs:  Roslrama,  (lisez  Kostrama),  Roslaos  (Roslaor, 
Rostov),  Torachi  (Torjek),  £no(/aria  (Volgaria,  Boulgaria),  Berchlina 
(Berchinam  de  la  carte  catalane),  sont  voisines  de  Ediltu  fluuius  maxi- 
mfss  (do  Volga);  de  même  Sefrur  (ville  et  mont  Seburde  la  carte  catalane). 
—  Ases  (Âlani,  Osseti),  Inlania  (?),  porte  ferrée. 

Au  nord  de  la  mer  Caspienne  Tartaria  regio  maxima,  quam,  Tarlari 
^eacurrunt  cum  suis  iumenlis  et  bobus  quamdiu  aestates  durant,  ciuilalem 
eamultis  tentoiiis  et  carutis  situant,  a..,  cum  instrumentis  obruunlur 
corpora.  Isicol  l€u;us  super  quem  corpus  b.  Matlhei  querilur,  Catana 
(Khotam);  Organli  (Urgenz);  de  Organti  usque  Calhagium  vadunl  camelli 
in  quatuor  mensibus;  déserta  c  —  lop  (ciuitatis  lop),  chose  connue  à  la 
carte  catalane. 

Ergavil  (Ergimul),  Ezina,  Singin  (Singui),  lackion,  Sugur,  villes  de 
Tangut,  connues  par  les  relations  de  Marco  Polo  ;  les  trois  dernières 
nommées  par  la  carte  catalane.  Enfin  Gog,  Magog  et  Judei. 

Les  Indes  sont  privées  de  détails.  India  inferior,  in  qua  Cathai 
ciuiiasy  ubi  magni  canis  imperatoris  Tartarorum  sedes  ;  ciuilas  Camba- 
leeh.  tout  près  sont  eœlremi  Seres,  ex  arboribus  coHigenles  sericum,  non 
loin  lœus  deliciarum  (paradis). 

Hic  mons  Caucasus,  coUibus  usque  in  ôrientem  excedil,  infinitis  nomi- 
fUbus  appeUalus.  —  ab  hinc  usque  ad  oceanum  terra  qua>edam  inhabita- 
bUis ,  propter  comedentes  carnem  humanam.  —  Ganges  fluuius  permaxi- 
mus.  —  Indus  ftuuius,  ubi  oli fautes,,  aurum  et  lapides  sine  numéro,  cum 
aUquis  eurat  de  aureis  omamentis, 

India  superior  in  qua  est  corpus  beati  Thomac  ;  multa  régna ,  sunt 
ekrisliani;  hic  lapides,  aromata  infinita;  hic  etiam  homines  magna 
eomua  habentes,  longitudine  quatuorpedum,  ut  sunt  etiam  serpentes  tanta 
fnagnitudine,  ut  unum  bouem  comedant  integrum.  —  Taprobane.  — 
mare  indicum  in  quo  insulae  septem  millia. 

Tarsis  et  Tauris  conduisent  vers  Tigris  ftuvius  et  Eufrates  fluvius , 
où  :  mons  Arménie  in  quo  arca  Noe.  —  Niniue  vu  dierum  longitudine.  — 
Babd  in  qua  lxxu  linguae  inuerUae,  —  Syria  terra  sancta.  —  transitus 
fUiorum  Isrtiel.  —  mons  Sinai  in  quo  data  est  Icx  Mosa£.  —  Arabia  vel 
Sahea,  in  qua  thus,  balsamum,  myrrha,  cinamonum  et  aloes;  enfin  quel- 
ques noms  des  villes  et  des  provinces  de  Syrie  et  de  TÂsie  mineure. 

En  Affrica  se  présente  en  premier  lieu  Egyptus,  dans  lequel  Alexan- 
àriat  accompagnée  de  :  hic  veniunt  plures  saraceni  peregrini  de  partibus 

wemsis  ad  Meccham ,  propter  Mechametum  eorum  prophetam.  Au  sud 

BelwpoUs  est  accompagnée  de  phoenix  in  orbe  satis  pulchcrrimus 

fdiiMius  auis ,  se  igné  aromatico  comburitur  et  triduo  de  ejus  cinere 

recreatur;  enfin  Soam  (Assouan,  Syene),  proche  de  :  déserta  Aegypti, 

^  9^  iunt  multa  animalia  fera.  A  TEgypte  paraît  encore  appartenir 


103  GfOGti.  LATIU,  fiiO-UTO. 

kie  iuni  momêeê  awrei  (alahki),  in  quHms  mni  déserta  wnxima  el  ab 
infinUiê  serpenlUms  Kabilata. 

Côtoyaot  par  la  mer  méditerranée,  on  y  ¥oit  :  Lt&ia»  Lari  oa  Lare 
(fractioD  de  patri-arca?  Batrachas),  foms  soUs^  noete  fervens  eimane 
tepidnt;  PenlapoUs,  Cohmeia  (Tolomeu),  Tripdis,  Gelulia,  TremiH 
(Telmîssa),  Septa  (Ceuu),  mélaoge  de  noms  aDciens  avec  qadqaes 
modernes. 

Ofir  prouineia  est  à  Foocident,  looche  les  bords  de  Fatlantiqne 
(connexe  ensaile  avec  Offero»  fie  de  Fer;  Peritsol,  cap.  15,  p.  89; 
cap.  21,  p.  141, 154).  —  Une  chaîne  de  montagnes  (atlantique,  caréna) 
sépare  le  littoral  septentrional  de  rintérienr  de  rAfriqae  :  tu  iUi» 
numUmiSj  habitant  plures  principes  et  reges  et  habitant  eontnmo  in 
tentoriis,  et  prodiantur  contra  saraeenos  et  contra  iusta  castra^  et  dnir- 
tates  iustas.  Par  jnsta,  traduit  en  latin ,  Tantear  da  planisphère  entend 
ce  que  le  catalan  appellait  bones  villes  e  castete,  de  même  qu^André 
Denincasa,  boue  ciuitates  et  castra.  Cette  chaîne  de  montagnes  est 
interrompue  par  un  défilé  :  transitas  inlerram  nigrorum. 

An  sud  des  montagnes,  le  planisphère  abonde  dans  les  noms  des 
Tilles  :  Hifuret  (Hifnret),  Teget  (Taïgas),  Tagost  (Taîdent?),  Tagaxa 
(Tagaze),  Fudaur,  Ganugia  (Ganuia,  &na),  Tocoror  (Tocrur),  Tagaxa , 
Organa  (21s).  Elles  avoisinent  mare  siue  terra  arenosa  (sahara),  in  qna 
répit  via  modo  maris  et  gentes  equitant  in  tentoriis  pergamenis ,  ne  visus 
venlu  et  arena  deslruatur;  enfin  Nubia  saracenorum. 

Deux  grands  fleuves  traversent  TAfrique  en  sens  divers  :  NUus  flutwus 
permaximus  des  extrémités  méridionales  vers  le  nord;  Tautre  sort  de 
mons  lunae  septem  fratres,  se  dirige  vers  Toccident,  passe  le  grand  lac 
sur  lequel  on  lit  :  mare,  in  illa  orlus  NUi  ereditur,  et  à  rembonchure 
du  fleuve  dans  Tocéan  atlantique  on  a  :  fluuius  aureus  hic  habet  vm 
leucas  latitudine  (sis). 

Au  sud  de  ce  fleuve  (rio  d*oro)  :  hie  régnât  Musameli,  ditissimns 
propter  aurum  quod  dietim  reperitur  in  hoc  fluuio;  hie  incipiunt  chris- 
tiani  Aelhiopes  pauperrimi  apparere.  —  A  part  :  hic  mulieres  irsut€Uf 
ferocissimae  sine  maribus  parlum  ferunl;  à  part  :  Abimichabal  rex  est 
saracenus  Aethiopicus ,  cum  populo  sno  habens  faciem  caninam  el  in- 
cedunl  omnes  nudi ,  propler  solis  ealorem  —  les  susmentionnés  chré- 
tiens ,  rapprochent  roccidenl  vers  TAbissinie  et  la  Nubie  où  :  in  Nubia, 
chrislianorum  sedes  presbiteri  lohannis  cuius  imperium  ab  ostio  Gadis 
per  meridiem  usqw  ad  fluvium  auri.  —  Tout  proche  :  hic  dominaiur 


(21 R)  Sur  ces  deax  dernii-res  Uecren  observe ,  qu*on  a  les  mines  de  sel  de  Tagaxa  suivant  Léo 
rafricaîD  ,  p.  633,  cdit.  elzev.;  et  de  Aroan  snr  la  carte  de  Rennel.  —  Comparez  cette  nomeoclatare. 
avec  celle  de  la  carte  catalane  (portulan  général  S3).  —  Et  voici  deax  passages  de  Peritsol ,  relatifs  à 
cette  éoumcration  de  noms  africains  :  ab  hoc  loco  (capo  Cantin)  ascendont  caravanœ  per  déserta 
magoa  ad  locam  alium  magnae  habitationis  dictae  Oden  I^^^V  ®^  ^  Oden  repcriont  Tagazzam 
NTX^i'*^  et  a  Tagaza  eunt  ad  Tanbot  ^I^^XCi?  ^*  *  Tanbut  ad  rcgnum  magnam  Mêle  ^'^^n 

(Musamelli),  sale  dcstitnla.  —  Capo  Cantin  est  principiuro  transituum  in  omnia  loca  et  nt^otiaiiones, 
et  locas  pernoctatorins  omnium  roercatorum  Arabi.iî  qui  ascendant  ad  Tagazzan,  quod  in  ligna 
oorum  est  terra  onusta  auro;  et  iode  ad  Tanbut,  aut  ad  magnum  regnum  Hcle,  dcslitnta  sale  ut 
supra  mcmoratum  est  :  at  est  locus  anri  et  argenti  (Peritsol,  cap.  19,  p.  123,  IS-i). 

(f  19)  Cette  coordonnance  da  nsont  de  la  Lune  et  du  Nil  Oixidental,  avec  le  dessin  de  Pixzigant 
voyez  ciiap.  188. 


CAHTE8  MAOTIQUSS,  160.  105 

rexpifer  (negus  d*ÂbissiDie) ,  enfin  au  sud,  pars  ierrm,  lorridœ  zoruB» 
inhabitalmis  nimio  colore  solis. 

Avant  de  reprendre  les  cartes  nautiques ,  prenons  en  considération 
une  petite  image  de  l'habitable  qui  se  trouve  attachée  au  manuscrit  de 
Salluste  du  xv^  siècle,  conservé  dans  la  bibliothèque  de  Genève  (sto). 
(Voyez  n*  94  de  notre  atlas).  Elle  est  réglée  par  la  direction  de  douze 
vents.  Le  midi  est  en  haut;  le  centre  tout  près  de  Jérusalem.  L*Âsie 
occupe  la  moitié  du  cercle  ;  les  deux  autres  quarts  sont  pour  TEurope 
et  rÂfrique,  mais  le  diamètre  qui  les  sépare  de  TÂsie  est  incliné 
d*africus  à  aquilo.  L'Afrique  seule  est  chargée  de  la  nomenclature 
exclusivement  antique  :  mais  il  n'y  a  rien  dans  celle-ci  de  spécial  à 
Salluste,  l'image  du  manuscrit  de  Leipzig  est  plussallustienne,  comme 
nous  l'avons  remarqué.  L'Afrique  a  en  outre  quelque  chose  de  nouveau 
quand  elle  offre  à  ses  extrémités  méridionales  le  dragon  abimalion. 
Caution  (csesarlensis),  lepta  (Septa). 

Les  deux  autres  parties  du  monde  sont  décorées  d'épigraphes  foutes 
modernes  :  à  peine  peut-on  eu  excepter  les  palus  mcolid.  et  Tile ,  de 
Troia  et  Macedo,  de  montagnes  Caucasus,  Yperborei  et  Riphei,  Parmi 
Ie8  noms  modernes  il  est  singulier,  qu'en  Italia,  on  trouve  Venccia, 
Bano  (Bononia) ,  Rama,  Neapolis,  Tarentum,  et  Gènes  n'y  est  pas  :  elle 
'se  trouve  représentée  sur  le  mare  pontico,  par  ses  armoiries  ou  son 
pavillon  près  de  Cafa  et  près  de  Conslantinopolis ,  où  le  nom  de  Pera 
est  remplacé  par  Ina  (Janua,  Gcnua).  Le  nom  de  Texia  ou  Ceœia,  près 
de  Suessia  (Suède),  désigne  Kexholm,  partie  de  Karelie.  —  Prucia, 
St..ia  (Saxia?),  Olsa  (Olsacia),  Dnia  (Dania),  Colo  (Golonia),  Hollcd 
(Hollande) ,  Fcia  (Francia) ,  Ausla  (Austria) ,  Danube  fl,  Gmania  (Ger- 
Bianîa),  Va/ocia  (Valachie);  le  reste  est  clair.  —  Entre  Rodes  et  Chi^ 
pre  on  remarque  une  île  considérable  h  Tépigraphe  coeta  ou  ciœta,  ce 
qai  est  difficile  à  expliquer  (Creta  ?  plutôt  Gaso  déplacée). 

L'Asie  est  fâcheusement  dépouillée  de  sa  nomenclature.  Dans  sa 
configuration  elle  offre  une  forme,  une  analogie  et  même  une  coufor- 
mlté  très-prononcée  avec  la  carte  catalane  :  mare  caspium,  les  lacs 
argis  et  marga,  et  tous  les  fleuves.  LesJudei  inclusi,  sont  distingués  de 
G^  et  Magoqe.  Les  épigraphes  de  la  Syrie  et  de  la  Palestine  sortirent 
de  leurs  orbites  :  Damascus  se  trouve  au  delà  de  TEufrat;  Anliochia 
au  delà  du  Tigre  ;  Belhania  de  même  ;  Nabalhea  prit  possession  de 
rEgypte. 

Revenons  aux  cartes  nautiques  et  aux  grandes  mappemondes. 

ScrrE  DES  CARTES  NAUTIQUES  DEPUIS  1460.   LeS  BeNINCASA. 

169.  Dans  l'année  1459,  lorsque  l'incomparable  cosmographe  Mauro 
terminait  ses  labeurs  et  ses  jours,  le  sénat  de  la  république  soignait  la 
conservation  d'une  plus  ancienne  mappemonde  suspendue  dans  le  palais 
ducal.  Avant  d'abattre  la  muraille,  pour  la  conserver,  il  ne  fallait  rien 
moins  que  la  copier  et  recopier ,  comme  les  autres  peintures  de  la 

(tSO)  La  figure  gravco  dans  mon  atlns ,  n*  04,  est  do  la  grandeur  do  l'original  dont  la  copie  a  cté 
préparée  par  le  dessinatettr  Diodati.  Voyez  la  note  228  du  cbap.  470. 


i04  GÉOGR.   LATINE,   iétO-UTO. 

muraille,  au  milieu  desquelles  elle  se  trouvait  placée  et  peinte  (î«i)i 

Nulle  part  il  ne  manquait  de  copistes,  de  calligraphes,  peintres, 
dessinateurs.  Du  vivant  d*Ândré  Biancho,  son  atlas,  ses  cartes,  furent 
en  1456  imitées  ou  copiées,  parle  génois  Bartbolomeo  Pareto  (sis). 
La  mappemonde  de  l'incomparable  Mauro  fut  copiée  pour  le  duc  de 
Toscane  (versU70j,  elle  décorait  le  palais  de  Médieis  à  Florence.  Le 
vénitien  Pietro  Delnno  étudia  cette  carte  et  traduisit  en  latin  toutes  ses 
l^endes  (225). 

Du  temps  de  Mauro  et  de  Biancho  le  vénitien  Antonio  Léonardi  avec 
ses  collaborateurs  s'occupait  à  Venise  du  dessin  des  cartes.  Il  copia  vers 
1457  pour  le  cardinal  Piccolomini,  archevêque  de  Sienne,  la  mappe- 
monde de  Ptolémée,  mais  en  forme  ronde.  Elle  fut  ensuite  léguée  et 
déposée  comme  objet  très-précieux  dans  la  sacri.stie  de  Sienne  (224). 

Le  même  Antoine  Leonardi,  cosmographe  capable  de  composer  les 
cartes,  offrit  à  la  république,  en  1479,  une  mappemonde  et  une  carte 
spéciale  de  Tltalie.  Ces  deux  cartes  furent  consumées  en  1483  par  un 
incendie.  Cependant  Antonio  et  son  collaborateur  Sebastiako  Leonardi 
les  remplacèrent  par  d'autres,  et  le  conseil  des  dix,  par  son  décret  de 
1485  leur  confirma  la  rémunération  annuelle  qu'ils  avaient  mérité  (tss]. 
La  république  qui  mettait  tous  ses  soins  à  de  bonnes  cartes  géographi- 
ques, posséda  la  lavola  d*Italia  cosi  perfetla  nelle  sue  misure,  che  diversi 
principi  ne  domandavano  Vesemplare;  elle  fut  placée,  nella  sale  dell* 
anticoUegio  (^se). 

Venise  était  un  riche  dépôt  pour  les  études  des  cosmographes.  L'an- 
conitatn  GratiosoBenincasa,  enl466,  1467,1471,  1480,  composait  et 
exécutait  ses  atlas  dans  cette  cité  :  Gratiosus  Benincasa  ancanilanus^ 
composuit  Veneiiis  1471  (227).  L'anconitain  Gratioso  décorait  les  lisières 
de  ses  cartes  par  les  latitudes  géographiques  à  la  Ptolémée. 

(22i)  Qaod  in  muro  nove  construendo  ponantnr  et  pingantar  bistoriae  depictaein  veleri  mnro» 
pro  ipsius  historiae  memoria  antiquitati»  cousenranda;  quae  anteqaam  ipse  murus,  in  quo  pictae 
sunt,  diruatur,  excipi  et  accopiari  debeant,  ut  in  maro  novo  ipsaemet  instaurari  et  depingi  possinl. 
Etsimiliter  reficiatar  descriplia  orbîs,  sive  mappa  mnndus,  qui  in  medio  ipsarum  picturarum  extare 
coosueverat  (decretum  senatus  ii59,  p.  iZo,  ap.  Morelli;  vide  Zurla,  sulia  antiche  mappe,  cap.  33). 

(m)  Se  trouve  dans  la  collection  geogr.  de  la  bibl.  de  Paris  (rapport  1839). 

(i23)  Quae  olim  in  pictura  orbis  annotata,  latina  feceram...  Quod  vero  petere  habeam,  atqnis 
meo  nomine  in  domo  iUa  permittatur,  annotationes  ipsas  ex  eo  orbe ,  qucm  quondam  florentini 

Kictores  ex  arebyetypo  nostro  efBnxerunt  describere  (epistola  Pétri  Delfino,  26  maji  4494,  ex  Fonte 
OBO  ad  Bernard.  Gadoli  prior.  S.  Micb.  de  Marano,  apud  Zurla,  di  mapa  mondo,  num.  i33). 

(224!  Cosmographiam  Ptoicmaei,  quam  mappam  muudi  appellant  lintea  tela  depictam  a  clarissimo 
eosniographo  Antonio  Leonardi,  pre^ytero  veneto  cum  insignîs  Pii ,  informa  rotunda  (Pecci ,  storia 
del  vescovado  di  Sieua,  p.  344).  L'arcbevèque  Piccolomini ,  devenu  pape  en  44S8  prit  le  nom  de 
Pie  n,  mourut  1464.  Le  leg  qualifie  la  mappemonde  de  cosroog.  de  Ptoléméc|,  certainement  à  titre 
d'bonneur  :  l'autorité  de  Ptolémée  gagnant  alors  le  terrain  géographique  à  pas  de  géants. 

(228)  Morelli,  ap.  Zurla,  suileanticbe  mappe ,  cap.  33.  —  Dans  le  lecret  confirmatoire  de  1485  ou 
lit  :  pioxit  Italiam,  cum  tanta  doctrina  et  rerum  sciencia,  et  diligentia  ac  labore  confectara  et 
demum  per  ipsum  dominio  nostra donatam,  ntalia  in  toto  mundo  indicata  fuerit  nec  pulchrior,nec 

speciosior (et  Sebastiano  Leonardi)  quem  habuit  coaductorem  in  labore,  nec  minus  de  praesenti 

habet  in  secunda  pictura  Italiae  longe  angustiore  et  speciosiore. 

(220)  Sansovino  Venezia. 

(227)  Deux  atlas  de  1466  et  de  1467,  se  trouvent  dans  la  collection  géographique  de  la  bibl.  de 
Paris  (rapport  de  1839).  —  Le  troisième  1471  à  Venise  dans  la  bibl.  de  S.  Michel  de  Murano  :  on  a 
dit  par  erreur,  qu'un  second  exemplaire  de  ce  troisième  se  conserve  dans  la  bibl.  de  Genève 
(Formaleoni,  p.  26,  48;  Tiraboschi,  storia  délia  lettcrat.  ital.  t.  YI,  p.  118;  Sprengel,  chap.  20, 
p.  229).  Celui  de  1471  est  connu  par  la  publication  de  Mitarelli.  La  bibliothèque  de  Vienne  possède 
aussi  un  atlas  de  Benincasa.  Jean  Potocki  en  l'examinant  (périple  du  Pont-Euxin,  public  en  1796  à 
Vienne,  réimprimé  à  Paris  1829,  p.  352),  en  indique  la  date  m.ccc.lxxx,  1380;  erreur  rectifiée  (à  la 


voyons  par  notre  copie 


BENUfCASA,   170.  105 

170.  Son  fils  André  Benincasa  d^Ancone,  était  aussi  eompositenr  et 
dessinateur  de  cartes  et  d*atlas.  Un  de  ses  atîas  de  cartes  nautiques  de 
la  méditerranée  et  des  côtes  extérieures  existe  conservé  à  Genève,  com- 
posé de  cinq  cartons,  dont  deux  offrent  les  côtes  extérieures;  le  troi- 
sième la  partie  occidentale  de  la  méditerranée  depuis  Gibraltar  jusqu^à 
Sicile;  le  quatrième  vers  TOrient,  depuis  la Sardaignejusqu^à  Gonstan- 
tinople  et  Rhodes;  le  cinqième  contient  deux  portions,  représentant  les 
côtes  de  la  mer  syriaque  et  de  la  mer  noire.  Nous  possédons  les  calques 
de  ces  cinq  cartes  qui  forment  une  seule  unité  (voyez  n*90-93  de 
notre  atlas).  Chacune  est  dressée  sur  une  rose  de  seize  vents,  de  même 
échelle.  Nous  les  avons  réunies  pour  en  former  une  seule  carte  géné- 
rale (n*  90),  en  les  réduisant  d*un  cinquième  de  Téchelle.  On  voit,  que 
pour  composer  Tunité  de  cette  carte  générale,  elles  s'empiètent  mutu- 
ellement à  cause  de  la  répétition  des  parties  assez  considérables  entre 
2  et  5,  entre  3  et  4,  entre  4  et  5.  Quoique  ces  parties  soient  assez  consi- 
dérables, comme  on  le  voit  par  la  réunion  de  notre  petite  copie, 
cependant  partout,  sans  exception,  les  détours  des  rivages  répétés  sont 
minutieusement  les  mêmes.  Le  dessin  d'André  Benincasa  est  d'une 
exactitude  remarquable  (sss). 

LsL  carte  porte  la  date  de  Tannée  1476  Andréas  Benincasa  f.  (filius) 
Gratiosi  anœnitanus  composuit,  an,  do,  hcccclxxvi.  Quand  on  l'examine 
on  remarque  une  singulière  conformité  avec  la  carte  catalane  qui  est  de 
toat  un  siècle  plus  ancienne.  Non-seulement  on  y  voit  les  mêmes  pro- 
portions dans  les  détails  et  dans  l'ensemble;  mais  la  disposition  de 
rintérieur  de  l'Afrique,  le  cours  du  Danube  et  des  autres  fleuves,  et  les 
légendes  sont  les  mêmes.  Nouvelle  preuve  que  les  écoles  ne  se  distin- 
galent  point,  puisant  réciproquement  aux  mêmes  sources.  La  pose 
convenue  d'Antille  est  la  même  que  celle  de  la  carte  de  Biancho. 

André  Benincasa  suivit  l'ancienne  méthode  sans  aucun  appareil  des 
e»gences  de  la  théorie  scientifique.  Ses  cartes  n'ont  aucune  échelle 
latitudinale.  Elles  sont  d'une  conformité  extrême  avec  les  cartes  des 
cosmographes  antérieurs,  autant  sous  les  rapports  avantageux  de  leur 
composition,  que  des  défauts  vicieux.  Elles  résultent  de  la  réunion  de 
portulans  partiels  dans  un  ensemble  que  nous  avons  examiné  par  la 
graduation  générale  de  la  méditerranée  des  prédécesseurs.  Quant  à  la 
composition  de  Benincasa,  j'ai  essayé  de  l'analyser  en  détail,  examinant 
quelles  projections  développait  la  composition  des  cosmographes,  dans 
ces  différentes  parties. 

Cet  examen  (n*'  92  de  notre  atlas)  me  démontre ,  que  dans  les  mers 
plus  vastes,  plus  ouvertes,  la  composition  est  beaucoup  plus  sous  l'empire 
de  la  boussole  ou  des  vents,  que  dans  les  mers  plus  rétrécies  et  com- 
primées, où  les  distances  tordent  le  pointage  des  vents  et  courbent  les 
parallèles  de  latitude.  C'est  ainsi  que  la  portion  de  la  mer  méditerranée 
entre  Gibraltar  et  la  Sicile  se  laisse  graduer  en  lignes  droites  sur  une 
projection  plane.  La  portion  ultérieure  jusqu'aux  côtes  de  Syrie  demande 
la  courbure  des  parallèles ,  qui  est  tracée  sur  notre  carte  par  le  rayon 

(ttS)  Je  tiens  la  copie  de  ces  cinq  cartes  à  l'intercession  de  mes  compatriotes  résidant  à  Genève. 
Le  bibliothécaire  Chastel  s'est  gracieusement  prêté  à  leurs  instances  et  un  excellant  dessinateir, 
Diodati ,  en  a  exécuté  les  calques.  Ma  reconnaissance  est  sincère  pour  tant  d'obligeances  de  leur 
part. 


106  GÊOGE.   LATINB,  Ut(Mi70. 

de  150Vs  parties  ou  degrés  à  partir  delà  ligne  équinpxiale.  Enfin  les 
parallèles  de  la  mer  noire,  exigeant  une  courbure  plus  forte ,  résultent 
d'un  rayon  de  98Vs* 

La  boussole  ramenait  nécessairement  ces  parties  hétérogènes  à  la 
situation  plane  :  mais  les  distances  maritimes,  arrêtant  le  développe- 
ment des  rumbs  des  Ycnts  qui  n'avaient  point  d'échelle  croissante, 
opéraient  vers  le  nord  une  telle  divergence  entre  ces  différentes  parties, 
que  la  longitude  plus  septentrionale  grandissait  par  si  par  là  outre 
mesure.  On  le  voit  dans  les  distances  continentales  entre  Oporto  et 
Barcelone,  entre  Gênes  et  Yenise,  dans  Textension  delà  Krimée,  dans 
celle  de  la  France,  dans  l'enilure  de  la  partie  supérieure  de  Tltalie. 

Mais  la  plus  grave  difficulté  se  présente  dans  la  connexion  des  pro- 
jections aussi  .variées.  Dans  cette  opération  les  positions  entre  Kerkinies 
et  Gerbi,  ramènent  évidemment  la  jonction  de  différentes  directions  des 
côtes  de  TÂfrique  :  l'ouverture  du  golfe  Caps,  Cabes,  est  par  conséquent 
plus  resserrée  et  Cabes  enfoncée,  et  toute  la  mer  entre  Tripoli  et  Resgio 
se  trouve  retrécie  dans  sa  largeur.  Afin  de  mettre  dans  l'ensemble  l'Asie 
et  la  mer  noire  avec  l'Italie ,  la  Grèce  s'interposait  avec  ses  innom- 
brables tortuosités  et  son  archipel.  Labyrinthe  très-fréquenté  offrant 
cette  foule  de  petites  distances ,  qui,  sous  la  direction  de  la  boussole, 
devaient  produire  la  composition  de  la  Grèce  et  sa  pose  très-exactement. 
Mais  placée  entre  Otranto,  Rhodes,  Constantinople  et  autres  positions, 
déterminées  et  fixées  par  d'autres  combinaisons,  elle  céda  facilement  aux 
exigences  de  son  emplacement;  ses  tortuosités  se  laissaient  plier  et 
replier  :  inclinant  la  Morée,  dressant  vers  le  nord  le  golfe  de  Saloniki, 
tournant  le  continent  par  la  direction  des  côtes  entre  Avelona  et  Le- 
panto,  donnant  en  général  à  toute  la  Grèce  une  situation  trop  septen- 
trionale relativement  aux  Galabres  et  à  l'Afrique.  Ces  déviations  ne 
menaient  pas  les  navigateurs,  mais  faussaient  les  directions  de  l'intérieur 
du  continent,  et  laissaient  le  site  de  cette  partie  centrale  de  la  méditer- 
rannée  moins  parfait  que  les  autres  (299). 

L'autre  ancoultain,  Hotomands  Fredutius,  en  1497,  mit  à  exécution 
une  grande  carte  de  la  merméditerranée  :  cornes  HocUymanus  Fredutius 
do  Ancona  composuit,  anno  1497  (230). 

f220)  Afin  de  foire  mienx  saisir  la  composition  de  la  Grèce  et  de  rarchipel  danslcnr  fausse  position, 
j'ai  tracé  le  segment  do  la  carte  d'André  Benincasa  sur  la  carte  des  géographes  d'aujourd'hui,  dressée 
à  rédielle  de  1  anconitain  (voyez  n*  93  de  l'atlas).  tJn  coup-dWil  peut  faire  appercevoir  très-facilement 
comment  Constantinople,  Ilbode,  Athènes,  Smyme,  Naupacte,  Candie,  S.  Angclo.  Matapan,  Carisios 
et  plusieurs  iles,  par  leurs  triangles,  tiennent  solidement  l'ensemble.  —  Cette  Grèce  du  moyen  âge, 
malgré  tons  ses  défauts,  était  cependant  préférable  à  celle  qu'inventa  et  remania  ensuite  la  renais- 
sance des  lettres  d'après  Ptolémee.  La  Grèce  a  donné  beaucoup  de  peine  aux  géographes  modernes. 
Les  formes  qu'elle  recevait  dans  les  travaux  de  Delisle,  de  D'Anville ,  de  Barbier  au  Bocage,  I78S- 
4788,  comparées  avec  celles  des  cartes  tontes  récentes,  de  La  Pie  48M,  de  Lamcau  48S7,  et  de  plus 
nouvelles  encore ,  qui  ne  s'accordent  pas,  décèlent  ces  dombreases  difficultés  qu'on  rencontre  dans 
d'innombrables  sinuosités  de  la  Grèce.  Nous  donnons  dans  notre  atlas,  sur  une  petite  écheUe ,  les 
tracées  élaborées  vers  la  fin  du  siècle  dernier  par  d'Anville  et  Barbier  du  Bocage  sur  les  matériaux 
de  l'antiquité  et  sur  les  renseiguements  de  leur  époque.  —  Pour  la  partie  descriptive  de  cinq  cartes 
de  Benincasa,  voves  portulan  général  4-34,  et  à  la  dernière  page  de  supplément  aux  chapitre  85  et  98. 

(130)  Conservée  à  1¥olfenbuttel.  —  Jean  Potocki  l'a  examinée  et  a  publié  le  portolan  de  la  mer 
noire  sous  le  titre  de  périple  du  Pont-Euxin ,  Vienne  4796,  in-4*  ;  ce  périple  a  été  réimprimé  avec  la 
carte  parles  soins  de  Klaproth  à  Paris  4829,  dans  un  volume  du  voyage  dans  l'Astrakhan  du  même 
auteur.  Potocki  y  a  collationnc  six  portulans.  La  première  édition  était  devenue  si  rare,  qu'on  a 
payé  cent  cinquante  cinq  francs  un  exemplaire  auquel  manquait  la  carte.  Ayant  on  propriété  ei 
l'original  et  la  réimpression ,  je  donne  la  copie  du  portulan  de  la  mer  noire  freducine ,  réduite  en 

{iroportion  de  400  à  33  de  Téchellc,  n*  83  de  l'atlas.  Ce  portulan,  tout-à-fait  conforme  au  portulan  de 
a  carte  catalane  de  4377,  fournit  une  preuve  de  plus ,  que  toutes  les  écoles  étaient  identiques,  et 


CARTES  NAUTIQUES,  I7i.  i07 

Les  portulans  se  multipliaient  chaque  jour:  ceux  de  Louis  CadaMosto; 
de  PiEBRE  Loreoan;  risolario  de  Bembo  vers  1480;  Fisolario  dell  E^eo 
de  Bartolomeo  da  u  Sonetti,  exécuté  vers  1485;  carte  di  naulica  (in 
pecora  mss.e  niiniate)  formant  une  collection  de  55  cartons,  réunis  vers 
1489 ,  et  beaucoup  d*autres  se  font  admirer  aujourd'hui  encore  à 
Venise  (ssi). 

A  Florence  Paul  Toscanelu,  ûls  de  Dominique,  physicus  (médecin) 
et  astronome,  (né  1597),  arrivé  à  Tâge  de  77  ans,  exécuta  en  1474  de  sa 
propre  main  pintado  dasumano,  une  carte  marine,  caria  de  mareary  de 
Tocéan  atlantique,  pour  le  chanoine  portugais  Fernando  Martinez,  dont 
il  adressa  un  exemplaire  à  Christophe  Colomb,  insistant  sur  la  traverse 
très-facile  par  cet  océan  jusqu'à  Tlnde  et  les  pays  des  épiceries  («^i). 


Cartes  nautiques  espagnoles  et  portugaises. 

i  71 .  Passons  maintenant  dans  ki  péninsule  pyrénéenne.  Nous  y  voyons 
d*abord,  plusieurs  fois  mentionné  :  Cada  Mosto,  qui,  de  retour  de  ses 
voyages,  dessina  lui-même  les  rivages  explorés:  cosi  henotado  in  la 
earta  de  navigar,  facla  per  me  Alovise  da  Moslo  di  queslo  paese  (335). 

On  conçoit  que  les  écoles  majorquine,  catalane,  castillane,  conti- 
nuaient à  préparer  les  cartes  nautiques  à  Fusage  des  marins  et'des  pilotes. 
Le  Portugal,  augmentant  chaque  jour  sa  marine  d'exploration,  devenait 
une  fabrique  abondante  de  cartes  nautiques  (234). 

Le  Portugal  ouvrit  même  une  école  spéciale  de  composition  de 
cartes,  à  laquelle  la  mer  méditerranée  était  indifférente  :  cette  école 
s'occupait  plus  de  Thémisphère  et  du  globe,  elle  faisait  ressortir  un 
autre  monde  et  fournissait  les  matériaux  à  de  nouvelles  constructions. 
Mais  ces  nombreux  monuments  géographiques  sont  encore  ensevelis 
dans  les  ténèbres  ;  les  investigations  ne  sont  pas  trop  avancées,  on  n'a 
aujourd'hui  que  des  indications  vagues  sur  Fexistences  des  cartes  ou  des 
cartographes. 

formaicot  une  sgqIo  famillo.  N'ayant  pas  de  position  de  Constantinople  :  les  positions  de  SInop,  do 
Trebizonde,  de  Paliastomo,  de  Cara,de  Soldaïa,  de  Hcostomo,  duturminaient  Tapplicalion  de  la 
mduation  et  nécessitaient  la  courbure  des  parallèles.  Les  degrés  do  longitudes  sont  trop  forts  :  De 
Booo  que  le  portulan  allonge  trop  la  mer  refativument  à  la  largeur.  Son  obliquité  est  à  peu  près  i2*. 
(iSiJ  Zurla  sulle  anticbc  mappc  idro-geograpbicho ,  cap.  tU-il  ;  34,  Ai.  —  Potrus  Lauretauus , 
iosigni  ad  Ropalnm  de  Jannucnsibns  victoriae  clarus  et  Aloysius  à  Husto,  rci  nantioaesaeculi  XV» 
hdle  principes,  compositis,  ut  vocant,  portulanis,  non  solum  Jonii  maris  et  Acgei  oras,  sed  haec 
litiora  univcrsa ,  tnm  quae  nltra  gaditanum  fretuni  cxcurrunt,  usquc  ad  germanicum  mare  usu 
edocti,  aecurate  descripserc  :  (juo  auxilio,  tutiorem  quaque  versus  nautis  tiam  pracstiterunt.  — 
En  4560  Girolamo  Ruscelli,  écrivait  à  Venise  :  et  già  da  moite  carte  marinarcschc,  nauute  da  alcuni 
particolari,  cbe  banno  lungamento  nauigalo  con  esse  (espositioni  universali,  sopni  tutta  la  googr.  di 
Totomeo,  cap.  8). 

(tSt)  Alex.  Hnmboldt,  examen  crit.  de  l'bist.  de  la  géogr.  du  nouveau  monde,  1. 1,  p.  244,217, 
tS3.  —  La  carta  de  marcar  que  Toscanclli  envio  à  Colon,  se  trouvait  encore  conservée  en  4527, 
comme  le  dit  le  mscrit  de  la  bisloria  de  las  Indias  lib.  I,  cap.  42,  de  Bartliolomé  de  I^s  Casas,  gardiîe 
dans  la  biblibl.  de  l'acad.  d'hist.  de  Madrid,  (Ilumb.  ib.  p.  2i8).  —  La  lettre  au  chan.  Hartincx,  à 
bqnelle  cette  carte  était  jointe,  est  datée  25  juin  de  4474. 
raSS)  Zurla,  sulla  antichc  mappe  idro-gcographiche,  cap.  22,  dissert.  t.  H,  p.  451. 
(234)  L*amiral  Cbristopho  Colomb,  le  25  septembre  4492,  se  mit  à  faire  son  point  sur  la  carte, 
conjointoment  avec  son  pilote  et  ses  marins  (journal  de  son  voyage  dans  llumboldt,  examen  de 
Thist.  de  la  géogr.  du  n.  m.  t.  1,  p.  242).  —  Amerigo  Vcspucci  enseignait  en  4502  aux  pilotes  l'usage 
d«  la  carte  marine  (son  S*  voyage).  —  Magellan  demanda  aux  pilotes,  quelle  route  ils  pointaient  sur 
leurs  cartes  (Pigafetta,  p.  64).  ^n  équipage  avait  donc  nue  certaine  quantité  do  cartes. 


408  GÉOGR.  LATINE,  1410-1470. 

Les  cartes  de  Pierre  Roselli,  de  la  fabrication  majorquine  de  1464  (235), 
nous  introduisent  dans  ces  années,  pendant  lesquelles  (entre  1470  et 
1480)  se  firent  distinguer  en  Espagne  les  dessinateurs  de  cartes  :  un 
cantabre  Martin  Andalouze  etFandalous  Alfons  Sanchez  deHnELBA  (ise). 
En  Portugal  le  licencié  Gassaoilla  ,  aidé  par  les  docteurs  Rodrigo  et 
MoYSE ,  composa  une  nouvelle  mappemonde.  Lorsque  le  roi  Jean  H 
confiait  en  1487  à  Pietro  de  Covigliano  et  Alfonso  de  Païva,  la  mission 
d'explorer  Torient,  Tinfant  Emmanuel  leur  donnait  une  copie  de  la  carte 
de  Gassadilla,  pour  qu'ils  puissent  diriger  leurs  courses.  Cassadilla 
obtint  ensuite  Févéché  de  Viseo;  Rodrigue,  médecin,  maUiématicien  el 
cosniographe,  fut  attaché  à  la  cour,  conjointement  avec  un  autre  cosmo- 
graphe  versé  Joseph  (237). 

Lisbone,  siège  des  entreprises,  lieu  du  concours  des  étrangers  entre- 
prenants, vit  dans  ses  murs  les  deux  génois:  Christophe  Colomb  y  séjourna 
depuis  1470  jusqu'à  1484;  il  y  apprit  à  son  frère  Bartholomé  Colomb, 
homme  peu  lettré.  Fart  nautique  et  le  dessin  des  cartes  nautiques  : 
de  telle  façon  que  ce  dernier  put ,  par  le  dessin ,  gagner  sa  vie  à 
Lisbone,  et  envoyé  par  son  frère  en  Angleterra,  il  y  dessina  en  1488 
une  mappemonde  pour  Henri  VU.  Christophe  lui-même  s'occupait  avec 
assiduité  de  la  composition  des  cartes.  11  en  dressa  une  pour  son  premier 
voyage  ;  pendant  le  cours  de  ses  explorations  il  ne  négligeait  point  de 
faire  les  peinturus  de  ses  découvertes,  la  figura  de  lo  que  el  almiranie 
hahia  descubierlOj  dit  son  compagnon  de  voyage,  le  pilote  Alonzo  de 
Hojeda  (sss). 

En  Portugal  se  trouva  une  carte  valencienne  (catalane),  exécutée  vers 
1496  par  Jean  Ortiz  (239).  Martin  Behaîm,  allemand,  ayant  construit  à 
Nuremberg  en  1492  son  globe,  retourna  à  Lisbone  pour  y  dessiner  les 
cartes  jusqu'à  Fannée  de  sa  mort  1506  ou  1507. 

Une  mappemonde  hydrographique,  composée  par  un  amiral  portugais 
et  enrichie  vers  1500  par  des  additions  de  nouvelles  découvertes  fût 
acquise  par  le  duc  de  Lorraine  René  (1475-1508)  (240). 


(335)  Une  de  ces  cartes  se  trouve  dans  la  bibliothèque  de  Jean  Sigrried  HocrI  à  Nuremberg,  elle  a 
été  mentionnée  en  i803,  par  Murr;  l'autre  dans  le  beau  manuscrit  de  Comaro,  passa  au  musée 
britannique  :  elle  contient  en  deux  cartons  toute  la  mer  méditerrauée. 

(936)  Voyez  p.  6i,  de  fasti  novi  orbis  et  ordioationem  apostolicarnm  ad  Indias  pc-rtinentium  bre- 
viarum,cum  adnotationibus ,  opéra  Cyriaci  Horeili  presbyteri olim  in  universitate  Neocordubani  in 
Tucumania  professons ,  Venctiis  1776,  in-i".  —  Le  dessinateur  Huelba  est  l'Alonzo  Sanchez  pilote 
de  HueWa,  qui  suivant  Inca  Garcilasso  (comment,  reaies,  1,  3),  Gomara  (hist.  de  las  Indias ,  43)  et 
Acosta  (1, 19j  :  se  vantait  d'avoir  été,  dans  l'un  de  ses  voyages  aux  Canaries  en  4484,  ponssé  par  le» 
vents  d'est  jusqu'à  Haïte,  el  d'avoir  ensuite  suggéré  à  Colomb  l'idée  de  sa  découverte.  C'était  une 
fable  qui  circulait  parmi  le  bas  peuple  (Humboldt  exam.  del'hist.  de  la  géogr.  du  n.  m.  1. 1»  p.  tM). 

—  Colomb  s'entretenait  avec  Toscanelli  de  ses  projets  déjà  en  4474. 

(337)  Il  Ramiisio  (mort  1537)  vol.  I,  cosi  dice  :  del  4487  alli  7  di  maggio,  furono  spaociati  tutti  due 
(Pietro  di  Covigliano  et  Alfonso  de  Paiva)  in  Santo  arren,  essendovi  présente  sempre  il  re  d'Emma- 
nuel, cbe  allora  era  duca ,  ejgli  diedero  una  charta  di  navigarre,  copiata  da  un  mappa  mondo,  alfor 
dclla  qualc  v*  intervennero  il  licenziato  Cazadiglia,  che  cvescovo  di  Viseo  ;  et  il  dottore  maestro 
Rodrigo,  abitaute  aile  Pietrenere ;  et  il  dottore  maeslre  Moyse  (Zuria,  il  mappa  mondi  di  fra  Mauro, 
num.  36). 

(238)  Fernando  Colon,  vida  de  don  Christobal  Colon,  10;  Antonio  Gallo  genovese,  de  navigatione 
Columbi  (ap.  Muratori,  rer.  ital.  script.  XXIII,  p.  30i};  Augustin.  Giustiniani,  collection  des  psaumes. 

—  Navarette,  t.  llI,collect.  diplom.  p.  839,  583,  586,  587.  (Humboldt,  exam.de  l'hist.  de  la  géogr. 
du  n.  m.  1. 1,  p.  85-88). 

(239)  Cette  carte  acquise  eu  Portugal  par  Percz  Bayer  est  devenue  la  propriété  de  Cladera,  qui 
donna  sa  description  en  4794.  --  La  famille  d'Ortizest  castillane. 

(240)  Elle  est  dans  mon  atlas,  et  je  vais  l'analyser. 


CARTES  NAUTIQUES  9  I7S.  i09 

Il  convienl  de  ranger  dans  cette  catégorie  de  la  péninsule  pyrénéenne, 
la  carte  de  Messine  de  1511,  egoj,,..  in  la  nohile  citali  di  Me.,.na  ano 
. . . .  XI . . .  ,je8u  œpo  amen  (iéi).  C'est  une  peau  de  parchemin  rognée  en 
parallélogramme  de  0"',99  de  long  sur  O'^ySG  de  haut;  à  Tun  des  bouts 
duquel  est  resté  adhérent  un  appendice  de  0'",99  de  long  sur  0'",âO  de 
haut,  qui  paraît  répondre  au  cou  de  ranimai.  Le  cadre  de  la  carte 
renferme  la  médi  terra  née  avec  toutes  ses  dépandances  et  une  partie  de 
Tocéan  atlantique,  depuis  le  nord  deTEcosse  jusqu'au  sud  du  rio  deTor 
sur  la  côte  d'Afrique  avec  Madère  et  les  Canaries,  mais  non  les  Açores. 
Le  cylindre  sur  lequel  s'enroulait  la  carte  était  fixé  à  l'extrémité  orien- 
tale; l'appendice  répondant  au  cou  de  l'animal,  s'étend  à  l'extrémité 
occidentale  de  la  carte.  Les  légendes  romanes  sont  mêlées  de  formes 
italiennes  et  de  formes  espagnoles.  Ces  légendes,  les  peintures  et  les 
épigraphes,  tant  maritimes  que  continentales,  analogues  à  toutes  cartes 
nautiques  du  moyen  âge,  correspondent  spécialement  avec  les  cata- 
lanes (s4s).  Je  présume  que  la  configuration  entière  se  conforme  à  celle 
qui  était  établie  dans  la  fabrique  catalane. 

A  mon  avis ,  il  faut  supposer  que  c'est  une  copie  d'une  ancienne 
carte  catalane,  antérieure  d'une  centaine  d'années,  exécutée  à  Messine, 
probablement  par  un  dessinateur  sicilien  qui  transfigurait  et  italiani- 
sait quantité  d'épigraphes  catalanes,  qui  ne  savait  pas  rajeunir  sa  copie 
par  les  connaissances  de  son  temps;  savait  seulement,  conformément 
à  la  date  de  1511  qu'il  inscrivit,  changer  les  pavillons,  et  remplacer  les 
anciens  de  son  modèle  par  les  pavillons  contemporains  à  son  dessin 
de  1510-1516.  La  carte,  si  elle  a  été  composée  en  l'année  1511, 
demandait  quelque  chose  de  plus  :  les  monuments  de  deux  géographes 
suivants  décèlent  ce  qu'on  devait  attendre  de  l'ouvrage  de  l'époque. 

172.  Jean  de  la  Cosa,  biscaino,  d'abord  pilote  de  Christophe  Colomb, 
ensuite  navigateur  maestro  de  hacer  carias,  dressa  une  mappemonde 
en  1500,  comme  le  prouvent  deux  légendes,  une  este  cauo  (de 
S.  Augustin  de  la  terra  firma)  se  descubrio  en  ano  de  mily  ccccxcix  (1^99), 
por  Castilla  syendo  descobridor  Vincenians  (Vincent  Yanes  de  Pinzony 
retourna  de  son  expédition  en  septembre  de  1500);  l'autre  dit  Juan  dé 
la  Cosa  la  fizo  enel  puerto  de  S.  mja  (s.  Maria)  en  ano  de  1500,  (lui- 
même  revenant  de  l'expédition  au  mois  de  juin  1500);  et  l'absence 
complète  de  découvertes  postérieures  (345). 

(S4I)  Carte  de  la  collectioli  Barbier  da  Bocage,  h  Paris,  décrite  et  expliquée  par  D'Avezac,  dans 
nne  note  oa  mémoire,  la  à  la  société  géogr.  le  45  mai  iSH. 

{iÂi)  Analysant  la  carte  catalane  de  4S78-i378,  nous  atons  plus  d'une  fois  annoté  cette  corres- 
pondance. (Voyez  note  98  du  chap.  159,  et  note  148  du  chap.  450). 

(S-43)  Jean  dé  la  Cosa,  biscaïen,  pilote  de  Colomb,  dans  l'expédition  du  tb  septembre  4-498,  jusqu'au 
44  juin  4496  ;  fit  ensuite  un  Yoyage  avec  Alonzo  de  Hojeda  le  iO  mai  4i99,  revint  mi-juin  4500  ;  après 
avoir  achevé  la  carte,  repartit  cette  même  année  4600  en  octobre  avec  Roderigo  de  Bastidas  et  ne 
retoorea  qu'en  septembre  de  l'année  4504.  Envoyé  à  Lisbone,  il  y  fut  emprisonné.  Sorti  de  prison, 
il  exécuta  son  premier  voyage  450i-4605,  ensuite  son  second  voyage  1C07,  4508;  enfin  il  partit 
le  44  novembre  4509  avec  Hojeda  pour  coloniser  la  terre  ferme  où  il  péril  à  Tarvac  ou  Tubarco  la 
même  année.  —  La  mappemonde,  produit  magnifique  et  important  de  son  travail,  était  en  dernier 
lieu  en  possession  de  Walckenaer.  Elle  doit  paraître  entière  dans  la  première  livraison  des  monu- 
ments géographiques  préparée  par  le  savant  Jomard.  De  grandes  sections  de  cette  carte  parurent 
d'avance  pour  notre  usage.  Santarem  publia  l'Afrique,  dont  la  petite  copie  de  notre  atlas  n*  446,  est 
réduite  en  proportion  de  5  à  4  de  l'échelle.  —  section  du  nouveau  monde  se  trouve  publiée  dans 
l'oovrage  de  la  Sagra,  histoire  de  Cuba,  et  dans  le  cinquième  volume  de  l'examen  de  riiistoire  de  la 
géographie  du  nouveau  monde  de  Humboldt.  La  grande  portion  de  la  carte  publiée  dans  ce  dernier 


no  GÉOGR.  LATINE,  i410-li70. 

C'est  un  des  plus  importants  monuments  de  la  géographie  »  à  cause 
de  son  auteur  et  de  son  contenu ,  élaboré  avec  exactitude ,  où  Ton  voit 
que  de  la  Gosa  n'était  pas  un  copiste  âiais  un  compositeur  ;  et  il  faut  le 
dire  un  des  plus  habiles  compositeurs  et  dessinateurs.  Nous  avons  sous 
les  yeux  son  Afrique  et  le  nouveau  monde,  y  compris  une  portion  de 
rinde  asiatique  (voyez  n^  il  1-1 14,  116  de  Fatlas).  On  y  voit  que  toute 
la  mappemonde  est  dressée  sur  deux  grandes  roses  de  seize  vents ,  de 
manière  qu'elles  forment  deux  systèmes  entourés  de  seize  roses  pleines. 
L'Europe  et  TAfrique  se  trouvent  divisées  entre  ces  deux  systèmes. 

Aussi  l'Afrique  est  rapiécée  de  deux  fractions  de  deux  caries  et  de 
ces  deux  systèmes,  entre  lesquels  le  dessinateur  a  placé  une  rose 
isolée.  Les  points  du  centre  de  deux  grandes  roses  et  de  rintermédiairc 
suivent  le  sud  du  tropique  du  cancer.  De  la  Cosa  jela  sur  cette  juxta 
position  des  roses,  la  ligne  éc^uiuoxiale  et  le  tropique,  ayant  égard  à 
la  latitude  géographique.  Le  détroit  de  Gibraltar  est  porté  à  56  degrés 
de  latitude.  A  la  suite  de  quoi,  à  cause  de  la  fausse  inclination  de  la  mer 
méditerranée ,  Alexandrie  et  l'embouchure  du  Nil  se  trouvent  aussi  an 
36*  degré  et  Tunis  monte  jusqu'à  4>0  degrés.  Mais  ces  degrés  ne  sont  pas 
marqués.  L'école  espagnole  comprit  bientôt  cette  aberration  nautique 
aussi  invétérée  et  essaya  d'y  porter  remède,  comme  nous  voyons  par  les 
cartes  suivantes  de  1527  et  1529. 

De  la  Gosa  trace  sur  sa  mappemonde  le  premier  méridien  Un*a  meri- 
dional.  Sur  quelles  hases  serait-il  fondé?  je  ne  saurais  répoudre.  Les 
îles  devant  le  cabo  descubierlo  1499  par  Yinccnl  Janes  Pinzon  par  Caslilla, 
sont  certainement  figurées  sur  la  découverte  fortuite  et  toute  fraîche  de 
la  fin  du  mois  d'août  1500  (du  Brasil)  par  Gabral.  Mais  ce  n'est  que  plus 
tard  que  cette  découverte  provoqua  le  tracé  d'un  méridien  différent  des 
méridiens  précédents.  Le  méridien  de  de  la  Gosa,  pour  être  le  méridien 
du  vrai  occident  de  Tolède  à  28®  50'  de  différence,  paraît-être  trop  rap- 
proché; c'est  plutôt  un  méridien  arabe  des  îles,  à  22'^  de  Tolède;  ou  un 
méridien  de  la  déclinaison  de  l'aiguille,  qui  préoccupait  Mercator. 

G'était  l'époque  où  la  longitude  géographique  devint  une  question 
politique,  entrait  dans  les  discussions  diplomatiques.  Les  cosmographes 
étaient  appelés  à  concilier  la  méthode  nautique  avec  la  graduation 
recommandée  par  les  astronomes  et  les  philologues.  La  question  de  la 
situation  des  Molukes,  discutée  par  les  partisans  des  deux  méthodes, 
engagea  certainement  l'école  espagnole  de  rectifier  les  déviations  des 
cartes  nautiques  (244).  Nous  remarquerons  cette  rectification  dans  les 
cartes  de  1527  et  de  1529,  dont  la  première  dessinée  à  Séville,  est 
l'ouvrage  d'un  cosmographe  du  roi  d'Espagne  :  caria  universal  en  q%ie 
se  conliene  lodo  lo  que  del  mundo  se  a  descubierto  hasta  aora  ,**  hizo  la  un 
cosmographo  de  su  mageslad,  anno  MDXXvn  (1527)  en  Sevilla,  L'autre 
est  dessinée  par  Diego  Ribero,  aussi  cosmographe  du  roi  d'Espagne.  Il 

6«t  coupée  par  morceaux,  divisée  en  six  fragments.  On  rencontre  quelques  petites  variantes  dans 
cette  double  publication.  Nous  en  avons  profité  et  nous  donnons  le  nouveau  monde  et  Tlnde  sur  la 
même  échelle  que  l'Afrique,  c'est-à-dire  réduit  de  6  à  1  de  TéchcUe.  L'Inde  y  est  tout-à-fait  ptolé- 
méenne  ;  elle  se  prolonge  jusqu'au  nouveau  monde,  et  compose  le  même  continent.  Notre  échelle  a 
été  suffisante  pour  rendre  toutes  les  inscriptions  et  la  mer  atlantique  entière  avec  sa  partie  septen- 
trionale; voyez  n'  I11-li4, 116  de  notre  atlas,  et  la  dernière  page  du  portulan  général ,  supplément 
;^x  chapitres  13  et  i8. 
(344)  En  son  lieu ,  ehap.  108,  nous  parleront  de  cette  fameuse  question  des  Molukes. 


CARTES  NAUTIQUES,  17ft«  ill 

avahsa  bonne  part  dans  la  discussion  au  sujet  des  Molnkes.  Sa  carte 
porte  la  même  intitulatîon  que  la  précédente,  seulement  son  auteur  y 
est  nommé  :  hizo  la  Diego  Ribero  eosmographo  de  su  majesUtd,  an 
de  1539.  Cette  intitulatîon  est  continuée  dans  les  extrémités  méri- 
dionales :  la  quai  se  divide  en  dos  partes  conformorme  a  lu  capitulacion 
que  kizieron  los  catolicos  reyes  de  Espana  y  el  rey  don  Juan  de  Porlugal 
en  la  viUa  de  TordesiUas  :  indiquant  que  la  carte  est  divisée  en  deux , 
conformément  à  la  capitulation  conclue  en  1494,  à  TordesiUas,  entre 
les  deux  rois.  Dans  cette  division  de  la  carte ,  Ribero  néglige  la  con- 
vention de  iSaragosse  et  passe  sous  silence  ces  îles  (Marianes  et  S.  Juan 
de  las  Yelas)  qu'on  y  a  nommé.  Il  désigne  les  courses  des  Portugais  aux 
Molukes ,  mais  il  les  enclave  dans  la  portion  espagnole ,  et  répète  les 
parties  du  méridien  de  contestation ,  ainsi  que  sur  les  deux  bouts  de  la 
carte,  oriental  et  occidental,  on  voit  le  dessin  des  Molukes  et  des  Philip- 
pines, de  Gilolo  et  d'une  portion  de  la  Chine. 

Nous  avons  devant  nous  un  fragment  de  ces  deux  cartes  de  1527 
et  de  1529,  contenant  l'Afrique  (notre  atlas  n**  112).  L'Europe  nous 
manque  :  mais  ces  fragments  sont  suffisants  pour  faire  connattre  cette 
réforme  dans  l'orientation  de  la  mer  méditerranée  qu'avait  opérée 
l'école  espagnole  dans  la  composition  des  cartes  nautiques. 

Ces  fragments  du  mappemonde  de  1527  et  1529,  sont  dessinés  sur 
la  même  échelle,  comptant  leur  longitude  du  méridien  de  la  démarca- 
tion et  sont  exécutés  sur  le  même  système  du  canevas  des  vents  formé 
en  cercle  de  52  rayons,  qui  occupe  tout  l'hémisphère  de  180  degrés. 
Or,  le  fragment  de  Ribero  paraît  comme  copie  du  cosmographe 
anonyme  de  1527.  Si  l'on  admettait  quelques  rectifications  introduites 
dans  le  dessin  postérieur  de  Ribero,  il  faudrait  aussi  consentir  à 
quelques  inexactitudes  de  sa  part.  Dans  l'intérieur  il  fit  évacuer  les 
fleuves  et  les  montagnes  hypothétiques  et  remplit  le  continent  par  de 
longues  légendes,  qui  ne  sont  pas  inconnus  au  cosmographe  anonyme. 
Tous  deux  sous  ce  rapport  se  conformaient  à  leurs  prédécesseurs  (s^is). 

Mais  ce  qui  est  plus  important  d'observer  pour  nous,  c'est  la  pose  de 
la  mer  méditerranée.  Sa  fausse  inclination  y  est  ramenée  vers  la  direc- 
tion de  sa  latitude  géographique.  La  boussole  et  la  rose  des  vents  des 
marins  reçurent  une  violente  réprobation ,  par  laquelle  les  cosmogra- 
phes tombaient  dans  l'excès ,  puisqu'ils  firent  descendre  Alexandrie  et 
l'embouchure  du  Nil  au  sud  jusqu'à  28  degrés. 

(948)  Les  deux  Afriqaes  du  cosmographe  4527  cl  de  Ribero  4820,  sont  tirées  de  la  bibliothèjiae 
de  Weimar  et  publiés  par  Santarem.  On  peut  dire  quelles  sont  identiques,  copiées  sur  la  même 
échelle,  do  même  modèle.  La  graduation  y  est  appliquée  de  la  même  manière,  plane,  à  commencer 
po«r  la  longitude,  do  méridien  de  démarcation  à  30  degrés  ouest  do  Tîle  de  Fer  :  \oyez  le  u*  447  de 
notre  atlas.  Le  cosmographe  a  placé  une  grande  boussole  au  90"*  degté  sur  la  ligne  ;  Ribero  retira  sa 
rose  quelque  peu  vers  Test,  ainsi  que  le  premier  méridien  sort  vers  Touest  de  l'orbite  du  cercle  des 
▼ents  :  ee  qui  n'a  pas  lieu  dans  la  carte  de  48i7.  Quelques  inexactitudes  de  dessin  donnent  naissance 
à  qnelgoes  variations  partielles.  Madagascar  est  plus  avancée  vers  l'ouest  dans  la  carte  de  Ribero, 
car  le  littoral  de  l'Afrique  cède  chez  lui  à  la  mer  ainsi  que  la  masse  du  contiuent  est  moindre  :  mais 
cette  diminution  n'est  pas  sensible.  La  plus  considérable  répression  du  littoral  se  manifeste  dans  le 
littoral  de  la  mer  méditerranée.  Dans  la  suite  des  épigraphes,  Torthograj^he,  les  méprises  et  quelques 
•missions  s'offrent  plutôt  que  les  différences  réelles.  Voyez  la  dernière  page  de  notre  portulan 

fénéral,  sopplémont  aux  chapitres  tS  et  88.  —  La  carte  sevillieune  de  4827,  appartenait  jadis  à  la 
ibliot.  d'Ebner  à  Nuremberg,  d'où  elle  est  venue  surcessivcmcut  à  Gotha  daus  la  bibl.  de  Becker 
et  enin  à  Weimar,  dans  la  collection  du  grand  duc.  Elle  se  trouve  nommée  par  Mnrr  (memorabilia 
bibl.  norimb.  t.  H,  p.  97|  et  discutée  par  Lindenau  (Zach,  mon.  corresp.  octobre,  4840).  Voyez 
H  nmboldt,  l'examen  de  l'hist.  de  la  géogr.  du  nouveau  monde,  t  U,  p.  484-486.  —  On  a  confondu 
q  aelqnefois  la  carte  1827  avec  celle  de  Ribero  :  cependant  elles  se  distinguent  beaucoup  dans  le 


112  GÉOGR.  LATINE,  1410*1470. 

Toutefois  par  ces  deux  cartes  de  1527  et  1529,  il  est  claire  qu^on 
essaya  de  régler  la  position  de  la  médilerranée,  sans  toucher  à  sa  lon- 
gueur et  £  sa  configuration  élaborées  par  les  marins  du  moyen  âge.  Cet 
essai  est  fait  à  la  rois  par  les  géographes  éditeurs  publiant  les  cartes 
gravées  et  par  les  dessinateurs  de  Técole  espagnole.  Plus  bas  nous 
reviendrons  sur  cette  question  et  nous  reprendrons  la  carte  de  Ribero. 

Au  musée  britannique ,  parmi  les  manuscrits  additionnels,  figure  un 
atlas  offrant  un  portulan  de  la  méditerranée  en  quatre  feuilles,  dont  la 
nomenclature  est  indiquée  comme  espagnole  et  la  date  approximative 
rapportée  au  commencement  du  xvi*  siècle.  Mais  ce  ne  sont  là  que  des 
renseignements  trop  imparfaits  pour  satisfaire  notre  curiosité  (dit 
d'Avezac)  (t*6). 

173.  Cependant  il  est  temps  de  percer  les  ténèbres  et  les  incertitudes 
qui  régnent  à  ce  sujet  ;  là,  où  il  y  a  de  grandes  collections,  d'examiner, 
d'analyser  géographiquement ,  de  confronter  et  comparer;  d'établir  les 
différences  et  le  progrès.  On  a  dit,  je  ne  sais  sur  quel  fondement,  que 
Facadéfflie  portugaise  de  Sagrès  inventa  les  cartes  planes.  L'iuaxactitude 
de  cette  assertion  conduisit  à  en  attribuer  Tinveniion  à  l'école  catalane. 
Ni  l'une,  ni  l'autre  n'ont  mérité  cet  honneur,  car  c'était  connu  depuis 
les  temps  les  plus  reculés.  La  question  serait  donc  réduite  à  la  priorité 
de  l'adoption  de  cette  méthode  et  le  mérite  ressortirait  de  la  bonne 
application.  Les  écoles  de  la  péninsule  pyrénéenne  composaient  leurs 
cartes  nautiques,  hydrographiques,  à  la  méthode  de  la  rose  des  vents, 
comme  les  écoles  anlérieures  de  l'Italie.  Toutes  ces  cartes  sont  sans 
aucune  graduation  et  là  où  il  n'y  a  pas  de  degrée  de  latitude  et  de  longi- 
tude, il  n'existe  pas  de  projection  méditée  et  choisie.  Les  cosmographes 
constructeurs  de  cartes ,  réprouvant  la  graduation ,  ne  s'accommodaient 
à  aucune  projection,  bien  qu'ils  les  connussent.  L'astronomie  arabe  leur 
en  donna  l'idée,  avant  que  la  géographie  de  Ptolémée  eùi  mis  à  décou- 
vert toute  sorte  de  projections  et  anima  la  discussion  à  ce  sujet*  La 
construction  d'une  carte  géographique  se  développe  nécessairement  sur 
une  projection  quelconque,  et  les  cartes  des  cosmographes  en  avaient 
une  :  mais  soutenir  théoriquement  d'avance,  qu'elles  sont  sur  la  pro- 
jection plane ,  est  une  erreur. 

La  projection  plane  nécessite  le  décroissement  de  l'échelle  sur  toute 
la  ligne  méridionale,  et  Faccroisement  sur  la  ligne  septentrionale:  d'où 
s'ensuit  une  graduation  rectiligne-parallèle.  Aucune  carte  nautique  de 

dessin  da  nouveau  inonde,  les  deux  années  de  différence  en  sont  la  cause.  La  première  a  2  pieds  et 
4 1  ponces  de  hauteur»  et  7  pieds  et  S  pouces  de  longueur  ;  l'autre,  haute  de  2  pieds  et  9  pouces  est 
longue  6  pieds  8  et  «/t  ponces.  —  M.  C.  Spreogel  a  donné  une  description  de  la  carte  de  Ribèro 
d*après  son  exemplaire  qui  se  trouvait  alors  à  Jena  dans  la  bibl.  de  Biittner  (Ueber  J.  Ribero'salteste 
Weltoharte,  Weimar,  im  Verlag  des  Industre-Comptoirs  1795,  in-8*).  La  description  est  accompagnée 
d'une  section  de  sa  carte  contenant  le  nouveau  monde ,  copiée  par  le  géographe  F.  L.  Giissefeld. 
Nous  l'avons  réduite  pour  notre  atlas  n*  118,  à  une  très-petite  échelle  en  proportion  de  20  à  3  de 
réchelle  afiu  de  donner  l'idée  dos  connaissances  de  cette  année ,  des  découvertes  anglaises  et  espa 
gnôles  de  Gomcz,  d'Ayllon  et  de  Garay  :  bien  que  le  nouveau  monde  ne  soit  pas  l'objet  de  nos  inves- 
tigations. —  On  peut  se  servir  (dit  Hurr  en  parlant  de  la  carte  de  Ribero  :  hist.  diplom.  de  M.  Behaïm) 
pour  l'intelligence  de  cette  mappemonde,  de  l'ouvrage  intitulé  :  Simonis  Grynsi  novus  orbis 
regionum  ac  insularum,  veteribus  incognitarum,  Basileac,  1S32, 1837,  fol. 

(246)  Une  de  ces  cartes  nautiques  dont  nous  avons  fait  le  dénombrement,  carte  nautique  de  la  mer 
méditerranée  et  des  côtes  occidentales  de  l'Europe ,  avait  été  publiée  en  1646,  à  Amsterdam  :  faites 
par  G.  Blaeux  (Blaeuv)  sous  le  titre  de  l'Europe  mantime.  Nous  en  fairons  l'analyse  en  son  lieu,  dans 
une  note  du  chap  248,  voyez  n"  138  de  l'atlas. 


CARTES  NAUTIQUES,  175.  Ii5 

ces  siècles  ne  se  prêterait  à  cette  graduation  ;  chacune  demande  des 
courbures  (347).  Les  rayons  des  vents  de  la  rose  dirigeant  la  combinaison 
des  distances,  déyeloppaient  la  construction  d*un  point  central,  ainsi 
que  réchelle  devenait  croissante  en  tous  sens,  décroissante  vers  le 
centre.  La  con^osition  se  forme  à  l'instar  d'une  convexité  aplatie  par 
la  pression.  Cependant  le  compositeur  opérait  dans  toute  étendue ,  à 
ses  «xtréoGiités  et  au  centre,  avec  la  même  écbelle.  La  direction  des 
vents  c^ait  quelquefois  aux  appointations  des  distances  :  ailleurs  les 
distances  furent  modifiées  en  faveur  de  la  direction.  Ce  canevas  déter- 
minait les  inclinations  et  les  espaces ,  réglait  l'ensemble  et  fixait  en 
apparence  la  même  édielle  à  la  convexité  terrestre  aplatie  sur  le  dessin. 
Aussi  ce  ne  sont  pas  les  lignes  droites  d'une  projection  plane  qui  déter- 
minent les  latitudes  géographiques  de  ces  cartes,  mais  les  lignes 
oourbes  d'une  projection  arbitraire  et  accidentelle  qui  ressort  de  Topé- 
ration  par  laquelle  la  convexité  fut  aplatie  par  la  composition  et  le 
dessin  (^48). 

Les  connaissances  des  mers  éloignées,  de  l'océan,  de  tout  le  globe, 

lorçMent  enfin  de  se  servir  d'une  projection  qufeloonqne,  d'adapter  la 

proje<^tioB  plane,  cylindrique  aux  cartes  nautiques,  de  comprendre  la 

Batnrê  de  cette  projection,  enfin  de  la  perfectionner.  Il  jf^siHait  soumettre 

les  cartes  4  hi  graduation,  et,  sans  faire  des  inventions,  choisir  et  donner 

la  préférence  a  certaine  projection  pour  toutes  les  autres  cartes.  Quelle 

est  celle  des  écoles  qui  eut  la  priorité  dans  cette  application  d'une 

neuvelle théorie?  Est-ce  Técote  italienne,  allemande  ou  portugaise? 

de  cpielle  foçon  telle  ou  telle  autre  s'est-elle  acquitée  de  ce  travail  ? 

^oila  autant  de  questions  qui  demandent  des  investigations  sérieuses. 

Avant  de  nous  engager  dans  cette  perquisition,  je  veux  clore  la  liste 
des  cartes  et  mappemondes  nautiques  construites  au  moyen  de  la 
méthode  de  la  rose  des  vents,  sans  alliage  d'une  autre.  Malgré  le  ravage 
datemps  elles  sont  assez  nombreuses  mais  peu  connues.  La  carte hydro- 

Sphlque  loHN  Rotz  ,  datée  1542 ,  conservée  au  musée  britannique 
talogue  du  musée,  n*  20,  c.  xi;  Malte  Brun,  xxm,  p.  651)  est,  je  pense, 
de  leur  nombre.  L'atlas  de  la  mer  rouge  de  don  Joan  dg  Castro  est 
certainement  dressé  d'après  la  méthode  nautique. 

On  connaît  de  nombreux  portulans  composés  en  Italie  au  xvi*  siècle: 
de  Vesconte  de  Marolla,  1547;  di  Blaze  Venloiidet^  1558;  di  Barlolomeo 
^îoetttallorquîno,in  Yenesia,  adi  17  de  junnyo,  1559  (249)  ;  de  Villaroel, 
1^9;  de  Mal.  Meroni,  1604  (sso].  Tous  ces  portulans  sont  certainement 
^fessés  d'après  la  méthode  nautique. 

L'jsolario  di  Batedetto  Bordone  1554,  împresse  in  Yinegia  per  Nicole 
^Aristotile  dette  Zopino,  pliant  sur  plusieurs  points  sous  les  formes 
pressées  par  Ptolémée ,  traçait  toutes  ses  îles ,  et  toutes  ses  cartes  sous 
I2  rose  des  vents.  Cet  ouvrage ,  avant  de  servir  à  nos  études ,  demande 

(^)  Tri  jeté  la  graduation  retftîKgne  sur  la  mer  médkerrainiéo  tle  fra  Maaro  parce  que  l'échelle 
** jj^l'op  petite,  et  que  sa  oooie  ne  s'est  pas  soucié  xl'observeT  les  détails. 

j^  Si  la  giande  echeHe  de  4a  carte  de  fra  Mauro  acceptait  la  graduation  rectiligne  comme  sa 
'^^*^B  tnilaiie,  il  fondrait  convenir  qu'elle  se  distingue  et  sescpare  de  tontes  les  autres,  que  son 
^°*P<i*>te«r  fra  Manro  porta  son  attention  à  la  boussole  ci  appointa  ses  onctions  plus  rigoureuse- 
"•JJVïe  les  autres  compositeurs. 
uS)  ^^^*  4i»ert.  vol.  Il,  p.  9î;  charte  idrogr.  c.  31. 

l*w;  Dépôt  des  cartes  à  Paru. 


ii4  6É0GE.  LATRIE,  iiiO-147a. 

quelques  observations  préalables.  Il  était  achevé  en  1521  :  «  lo  uescooo 
di  Racoscia  scrive  a  Leone  summo  pontifice  hauer  veduto  (fol.  uxm). 
Le  pape  Léon  X,  privilégiant  le  5  juin  1521  Féditeur,  mourut  le  1** 
décembre  de  la  même  année.  Bordone  en  1526,  s'adressait  au  sénat  de 
Venise  pour  préserver  son  ouvrage  de  la  contreCaçon.  Bordone  mourut 
en  1551,  Tédition  de  1534  est  donc  posthume.  Or,  toutes  ces  cartes  sont 
de  Tannée  1521  ou  antérieures.  €et  ouvrage  était  certainement  utile  et 
assez  recherché,  puisqu'il  fut  réimprimé  :  mais  Bordone  miniator  de 
profession,  par  conséquent  bon  peintre,  paraît  être  beaucoup  plus  versé 
dans  la  philologie  et  dansTérudition  que  dans  les  connaissances  géogra- 
phiques. Nous  profitons  de  ses  nombreuses  copies  que  son  graveur 
exécuta  assez  grossièrement  (25 1). 

TomcLso  Porcacchi  da  CasligHoTie,  arrctino,  se  montre  plus  instruit 
dans  sa  publication  de  Tisole  piu  famose  del  monde  1572  in  Yenetia, 
appresso  Simon  Galignani  elle  graveur  GirolamoPorro  padovano,  inta- 
glia  les  figures  avec  beaucoup  d  art. 

De  ma  connaissance  est  un  magnifique  atlas  espagnol  de  Tannée 
1575  (s52).  J'y  regarde  la  marche  des  découvertes  :  les  rivages  qui, à 
partir  de  la  terre  neuve  ne  peuvent  s'accrocher  à  la  Floride;  ceux  de  la 
Californie  bien  formés  en  péninsule,  vis^-vis  de  laquelle  s^étend  la 
nouvelle  Guinée  ;  les  rivages  de  China  provincia,  où  au  delà  de  Nanqnin 
les  deux  golfes  de  mare  de  Mangi  couvrent  terra  Rasicola  (Korée),  c'est 
le  fruit  des  investigations  assez  récentes  :  mais  ce  que  j'admire  c^est  la 
mer  méditerranée  et  les  rivages  de  Toccident  du  vieux  monde,  produit 
intact  du  moyen  âge,  dressé  sur  une  échelle  considérable,  il  offre  dans 
son  ensemble  et  ses  détails  cette  perfection  de  la  cartographie  nautique, 
de  laquelle  étaient  loin  et  très-loin  les  publications  contemporaines 
d'Ortelius  et  de  Mercator.  Cet  atlas  formait  mes  premières  idées  sur  la 
marche  de  la  cartographie  antérieure  et  l'examen  précédent  de  plusieurs 
cartes  confirma  tout  ce  que  je  pus  m'imaginer  autrefois. 

Bientôt  après,  en  1584,  on  a  commencé  à  publier  les  cartes  nautiques 
(voyez  Texemple  dans  notre  atlas  n^*  158)  comme  on  publiait  les  caries 
continentales  par  la  gravure  sur  cuivre. 

Cartes  continentales,  1520-1470. 

174.  La  cartographie  continentale  dans  le  moyen  âge,  ne  marchait 

(iSO  On  y  compte  iOS  figures  insulaires  y  compris  les  plans  de  Venise  et  de  TeaaistotaB,  et  la 
carte  de  la  Grèce  toutes  nautiques  des  marins.  Six  figures  tirées  de  Ptolémée,  à  savoir  :  TabrolMUM, 
Sicile,  les  îles  Fortunées,  Norvège,  Bretagne  et  la  partie  occidentale  de  la  mer  néditemnée  et  de 
l'Europe  :  sur  cette  dernière  la  configuration  ptoléméenne  de  l'Italie  et  de  l'Adriatique  est  roMiBiée. 
Enfin  l^universale ,  ou  la  mappemonde  de  Plolémée ,  avec  tous  les  compléments  de  l'année  IBM 
(voyez  n'  i2G  de  notre  atlas),  compléments  qu'on  voit  dans  la  carte  portugaise  de  iSOI,  dani  celle 
de  Sylvano  1514,  sur  le  globe  de  Schoner  4820.  —  Voyez  les  notes  suivantes  des  chap.  SOO  et  Ml. 

(SSS)  Cet  atlas  était  la  propriété  de  Joseph  Sierakowski  qui  l'a  apporté  de  l'Espagne  et  le  deatlnait 
pour  la  bibliothèque  de  la  société  des  amis  de  lettres  à  Varsovie.  11  est  dessiné  sur  le  parchemin 
vélin  volume  grand  fulio  composé  de  18  cartons;  1-4  cartes  spé<;iales  de  rivages  visités  par  te  aavl|^< 
tion;  46"*  carte  générale  sans  épigraphe,  presque  muette;  les  trois  derniers  cartons  traiteat  dn 
système  du  monde  de  Ptolémée,  du  soleil  et  de  la  lune,  le  dernier  du  calendrier.  Gecnlendrier 
indique  en  dernier  lieu  le  premier  janvier  à  A  (jeudi),  la  lettre  dominicale  D;  la  pftqne  à  11  mars  et 
tputes  les  fêtes  mobiles  de  l'aunée,  à  l'année  4573,  or  c'est  l'année  de  l'exécution  de  l'atlat.  —  Qa'eit 
devenu  l'atlas  après  la  mort  des  son  propriétaire  (décédé  en  483!)  ?  Je  l'ignore.  J'ai  pris  dans  le  temps 
le  calque  du  la  mer  méditerranée  ;  la  copie  de  la  carte  générale  confrontée  avec  les  cartes  spédales 
et  de  plusieurs  particularités  qu'oflrent  ces  dernières.  Ce  n'est  que  depuis  pcn  que  je  rais  rentré 
en  possession  de  mes  copies  et  que  je  les  ai  à  ma  disposition. 


CARTES  CONTINENTALES,  174.  il5 

^ point  à  pas  égal  avec  la  carthographie  nautique;  elle  n*est  pas  sans 
mérite  :  mais  il  en  reste  moins  de  monuments.  Certainement  il  n'en 
manquait  pas,  mais  ils  se  sont  perdus  comme  inutiles.  Quelques  pein- 
tures de  la  topographie  fictive,  ont  peu  de  valeur  pour  nos  investiga- 
tions, et  celles  qui  furent  basées  sur  des  données  métriques  des 
distances,  composées  le  compas  à  la  main,  nous  manquent  presque 
complètement. 

La  table  ronde  de  Roger  II,  1151,  qui  contenait  les  positions  nom- 
breuses énumérées  par  la  description  d'Edrisi ,  s'est  perdue.  L'unique 
exemple  de  la  carte  topographique  offre  la  Bretagne,  dont  la  membrane 
remonte  au  xii^  siècle  (n®  65  de  notre  atlas),  et  la  terre  sainte  dansTatlas 
de  Sanato  1521  (n""  77  deTatlas).  Les  fidèles  ont  élaboré  cette  dernière 
par  prédilection  :  elle  servait  plusieurs  siècles  aux  pèlerins  et  elle  jouis- 
sait d^an  tel  crédit,  d'une  telle  autorité  et  suffisance  ,  qu'elle  n'a  subi 
aucune  amélioration  jusqu'à  l'époque  de  la  renaissance  des  lettres.  On 
la  publiait  alors  sans  aucun  changement  en  1482,  1486,  1515,  1520, 
45^,  dans  des  éditions  de  Ptolémée  (ass). 

Le  continent  de  l'Asie  et  de  l'Afrique  dans  les  mappemondes ,  décèle 
Bne  grande  indolence  dans  les  compositions  topographiques  et  continen- 
tales. Cétaient  des  pays  inabordables  ou  peu  accessibles.  Mais  les 
propres  pays  des  cosmographes  demandaient  le  même  soin  que  la  terre 
sainte,  et  se  trouvaient  a  la  portée  des  connaissances  nécessaires. 

Cependant  ce  n'est  que  dans  le  xv*^  siècle  que  nous  rencontrons  les  mo- 
numents de  leur  labeur  sur  ce  terrain.  Le  ca maldu le  Jlfauro,  avant  1457, 
élabora  quantité  de  cartes  topographiqnes  de  l'Asie  mineure  et  de  la 
Syrie;  Leonardi  1479, 1485,  élabora  une  carie  topographique  de  riialie; 
la  république  de  Venise  possédait  une  carte  d'Italie,  modèle  à  copier. 
Je  pense  que  ces  compositions  perfectionnaient  les  compositions  anté- 
rieures. 

On  ne  peut  pas  attribuer  à  ce  perfectionnement  topographique  le 
développement  progressif  que  la  forme  de  l'Espagne  et  de  la  France . 
recevaient  dans  les  mappemondes;  ce  développement  de  leur  forme 
opérait  directement  la  mclhode  de  marine  :  parce  que  la  composition 
des  cartes  lopographiques,  subordonnée  à  la  méthode  nautique,  s'enca- 
drait dans  les  portulans;  ne  pouvant  franchir  ces  limites  du  littoral, 
elle  marchait  de  concert  avec  la  cartographie  nautique. 

Pour  concevoir  une  juste  idée  de  ce  que  nous  observons,  nous  n'avons 
d'autre  exemple  à  reproduire  que  les  cartes  topographiques  qui  se 
trouvent  dans  la  publication  de  Ptolémée,  par  Uebclin  et  Essler,  à 
Strasbourg  1513.  Elles  y  sont  comme  un  supplément,  taillées  en  bois. 
En  son  lieu,  nous  examinerons  le  contenu  de  ce  supplément  :  pour  le 
moment  nous  nous  occuperons  des  seules  cartes  continentales  des  cos- 
raograpbes  qui  offrent  les  topographies  du  vieux  monde;  elles  sont  au 
nombre  de  huit,  à  savoir  :  Espagne,  îles  britanniques,  France,  Alle- 
magne, Sarmatie  moderne,  Italie,  Grèce,  Asie  mineure  (254)  (voyez 
nT  101,  102, 125,  121  de  notre  atlas). 

{VSi)  En  4890  elle  servit  encore  de  modèle  et  do  tvpe  à  torra  promissionis  de  Chrétien  Adrirho- 
mias  de  Delft,  publiée  d^abord  à  Cologne  par  Arnold  ilylius,  ensuite  à  Amsterdam  par  Henri  Uond, 
dans  son  allas.  Plusieurs  fois  copiée  en  France  elle  a  sa  place  dans  Tatlas  de  ^'ilt. 

(2S4}  M.  Vivica  de  Saint  Martin,  dans  son  histoire  des  découvertes,  chap.  12,  t.  H,  p.  487,  fuit 


il6  GÉOGR.  LATINB,  i4i(M470. 

175.  Ces  cartes  pourraient  faire  un  ensemble  :  mais  quelques-unes 
ne  se  laissent  pas  réunir  à  cause  qu'elles  ne  sont  pas  de  Torigine  com- 
mune. L'Espagne  et  les  îles  britanniques  ne  cadrent  point  aYCC  les 
autres.  Il  est  juste  de  considérer  cette  Espagne  (n"  i24),  comme  carte 
spéciale,  produit  de  Técole  espagnole,  tandis  que  les  autres  forment  un 
ensemble ,  et  appartiennent  à  une  autre  école.  Dans  cette  même  caté- 
gorie espagnole  se  range  la  carte  des  îles  britanniques  (n?  1^),  parce 
que  les  formes  qu'elle  offre  sont  les  mêmes  qu'avait  tracées  en  1575,  la 
carte  catalane.  Les  six  autres  sont  du  même  système,  de  la  même  école, 
de  la  même  mappemonde,  ou  d*un  ensemble  que  nous  avons  restitué 
(n»  101, 102). 

Ces  cartes  spéciales  topographiques  des  cosmographes  étaient  tour- 
nées nord  en  bas;  les  éditeurs  ont  conservé  celte  pose  par  l'écriture 
de  la  carte  de  France,  ils  l'ont  changée  sur  toutes  les  autres.  Cette  pose 
dit  que  les  cartes  sont  d'origine  antérieure.  En  effet,  la  Palestine  est 
de  1521,  les  Iles  britanniques  de  1575.  L'Italie,  l'Asie  mineure  préten- 
dent à  la  même  époque.  Quoique  ces  cartes  sont  modernisées  par  les 
additions  des  épigraphes  :  les  îles  Azores«  Pico,  Fayal ,  étant  de  Fan- 
née  1466;  Torchia  magna,  Bossina,  ducatus  Athenarum ,  Âlbania,  con- 
venables à  la  même  époque  et  même  à  l'année  1500;  cependant  dans 
toutes  ces  cartes  l'élément  de  leur  construction  bien  antérieur,  enclavé 
dans  le  littoral  nautique,  est  indélébile.  Les  seules  cartes  de  la  Germanie 
et  de  la  Sarmatie  moderne  sont  un  produit  plus  récent. 

Les  six  forment  un  seul  ensemble  (n**  101, 102).  Quatre  de  ces  cartes 
sont  justes  de  la  même  échelle  (255).  L'Asie  mineure  et  la  Sarmatie  ont 
une  autre  échelle  toutes  deux  la  même  (sse).  La  réunion  de  cinq  cartes, 
dont  nous  reproduisons  l'ensemble,  n'offrit  aucun  empêchement,  aucun 
obstacle  assez  grave.  Aucun  ne  s'est  présenté  pour  réunir  l'Italie  avec 
la  Grèce  et  la  Dalmatie;  quelques  irrégularités  se  rencontrent  entre  les 
autres,  ressortant,  ou  de  la  grossièreté  de  l'ouvrage,  lorsque  le  tranchant 
du  graveur  s'abusait,  ou  de  l'insuftisance  de  l'exactitude  du  dessin  (257). 

La  carte  de  la  Sarmatie  seule  (n""  102)  souleva  des  obstacles  moins 
couciliables.  Toutes  les  cinq  caries  sont  développées  sur  la  même 
parallèle  de  la  médilerranée;  cette  dernière  diffère  en  ce  que  les  géo- 
graphes jugèrent  à  propos  de  la  réduire  au  plan  de  la  parallèle  plus 
sepicnirionale.  Les  positions  longitudinales  de  Venise,  de  Belgrade,  de 
Constantinople  et  toutes  les  autres ,  le  manifestent  ostensiblement  et 

observer  à  juste  raison  rinégaUté  prodigieuse  de  la  marche  dans  leurs  progrès  respectifs  :  de  la 
géograpbie  nautique  et  des  représentations  graphiques  de  la  géographie  intérieure;  il  explique  ce 
fait  remarquable.  Ses  observations  sont  fondées  sur  les  monuments  du  xiv*  siècle.  Nais  s'il  relate 
quantité  de  cartes  nautiques  postérieures  comme  copiées  des  précédentes  et  descend  jusque  la 
carte  de  Freduce  4497,  il  est  à  regretter  qu'il  n'ait  pas  pris  en  considération  les  cartes  continentales, 
éditées  en  1513  à  Strasbourg  par  Ubelin  et  Essier  et  ne  les  ait  pas  regardées  comme  copie  de  pins 
anciennes.  11  aurait  vu  dans  le  progrès,  une  inégalité  quelque  peu  moins  prodigieuse,  et  la  carte 
continentale  de  l'Asie  mineure  publiée  en  1613,  avec  son  littoral,  n'aurait  pu  manquer  de  devenir 
l'objet  de  ses  savantes  explications,  comme  elle  le  mérite.  Elle  a  lutté  plus  que  les  autres  contre 
l'installation  des  cartes  postérieures,  tombées  fort  au-dessous  de  ce  degré  auquel  arrivèrent  les 
cartes  du  xv*  siècle. 

(26.%)  Dans  notre  copie  nous  les  avons  réduit  en  proportion  de  400  à  21. 

(256)  Elle  est  en  proportion  de  29  à  7,  avec  la  nôtre. 

(S57)  L'asic  mineure  n'avait  pas  assez  de  place  pour  développer  ses  rivages  occidentaux,  comme  la 
carte  de  la  Grèce  les  ébauche  plus  amplement;  contrairement  trois  autres  cartes  s'empiètent  réci- 
proquement dans  les  Alpes.  Ces  irrégularités  et  quelques  autres  de  moindre  importance  n'étaient 
pas  difficiles  à  régler. 


CART£S  €OMTIlfEnTALES,   176.  117 

témoignent  que  la  posilion  longitudinale  est  d'un  tiers  moindre  que 
dans  les  cinq  autres  cartes.  Dans  notre  copie  nous  avons  rétabli  le  déve- 
loppement conforme  aux  autres.  Cette  ésalité  de  dimension  n'est  pas 
cependant  en  mesure  d'écarter  les  obstacles  que  présentent  la  Yistule, 
rôder  et  une  partie  du  Danube  entre  la  carte  d'Allemagne  et  de  Sar-* 
matie;  le  Danube  et  le  littoral  de  FEuxin,  avec  la  situation  latitudinale 
de  Gonstantinople  entre  la  carte  de  la  Grèce  et  de  la  Sarmatie.  Aussi, 
dans  nos  copies,  nous  avons  séparé  cette  dernière  des  autres,  sans 
Toaloîr  préjuger  de  la  coordonnance  possible  (sss). 

176.  L'ensemble  établi,  était  dessiné  et  fini  sur  le  cuivre,  lorsque  je 
commençai  à  réfléchir  et  examiner  sa  nature.  Je  remarquai  de  suite 

Sue  les  degrés  des  latitudes  tracés  à  projection  plane  par  les  géographes 
ans  la  publication  de  1515,  étaient  trop  petits,  que  l'ensemble  ne  se 
prête  pas  à  la  graduation  plane.  Recherchant  l'échelle  de  la  latitude,  la 
distance  entre  Gonstantinople  et  Baffo  donnait  le  degré  trop  fort;  celle 
entre  Rome  et  Messine  trop  faible;  enfin  l'autre  entre  Venise  et  Rome, 
on  degré  moyen.  En  effet,  la  distance  latitudinale  entre  Venise  et  Rome, 
^  35'  étant  presque  sous  le  même  méridien,  offre  le  point  le  plus  positif 
poor  obtenir  le  produit  certain  et  tirer  des  conséquences  comparatives. 
Le  degré  étant  établi  de  cette  manière,  les  trois  points:  Marseille,  Rome 
et  Gonstantinople,  parurent  propres  à  indiquer  la  courbure  de  paral- 
lèles (259). 

Voici  maintenant  ce  qui  en  résulte  par  nos  observations.  En  premier 
lieu  nous  voyons  que  la  composition  de  notre  carte  continentale  n'est 
pas  de  nature  à  se  soumettre  à  la  projection  plane,  mais  plutôt  à  la  pro- 
jection conique  ou  quelque  autre  arbitraire,  et  qu'elle  répond  mieux  à 
Taplanissement  de  la  convexité  que  ne  le  ferait  la  projection  plane 
recttligne.  Ensuite  nous  observonSi  que  les  parallèles  tracées,  s'adaptent 
admirablement  à  la  portion  entre  Bordeaux  et  Gonstantinople,  et  font 
défaut  croissant  vers  l'est  en  traversant  l'Asie  mineure.  Les  cartes  nau- 
tiques des  cosmographes,  et  par  conséquent  continentales,  soutenues 
dans  les  ornières  de  ces  autres,  composées  par  l'ajustement  de  petites 
portions,  sans  être  dirigées  ni  par  la  longitude  ni  par  la  latitude,  seule- 
ment par  les  points  cardinaux  et  par  les  vents,  étaient,  comme  nous 
l^avons  vu  plus  d'une  fois ,  susceptibles  de  ces  déviations  de  parties  qui 
contrarient  la  graduation  satisfaisante  pour  tous  les  points. 

Ge  défaut  fait  voir  l'angle  du  golfe  syriaque  d'Alexandrette,  de  Gara- 
mella  trop  ouvert,  et  la  direction  de  l'Asie  mineure  contraire  à  celle 
des  parties  occidentales.  Ge  défaut  affecte  plus  ou  moins  toutes  les  com- 
positions du  moyen  âge. 

L^application  des  latitudes  géographiques  décèle  un  autre  défaut, 
Femarqué  dans  toutes  les  cartes  nautiques  :  c'est  la  position  oblique  de 

(t58)  Tons  les  contours  de  cette  Sarmatie  moderne  font  partie  de  la  carte  publiée  par  Kobcrger, 
dans  la  chronique  de  Hartmann  Scliedel  (fol.  209,  300)  n*  410  de  notre  atlas,  par  consequeiit  sa  com- 
â  Tannée  1498.  liais  la  carte  de  la  chronique  schedeliane,  étant  tout-à-fail  plolérocennc,  il  eu 
pinîtion  est  antérieure  résulterait  que  cette  Sarmatie  moderne  avait  été  composée  en  guise  de  rom 
plénent  de  Ptolémée  comme  en  ont  été  composées  les  régions  septentrionales  skandinavcs.— Cette 
carte  de  la  Sarmatie  moderne  avait  été  ensuite  reproduite,  modifiée  par  féchcUe  dans  l'édit.  lyonnaise 
de.  Ptolémée  4538,  et  probablement  dans  plusieurs  autres  ouvrages. 

(SS9)  Cette  opération  paraîtra  aux  mathématiciens  calculateurs  »  grossière  et  trop  mécanique. 


118  GÉOGR.   LATINEt  U1(M470. 

la  mer  méditerranëe.  Elle  paraît  moins  forte  qu*ailleurs,  parce  qu'on 
a  essjiyé  de  la  rectifier,  de  changer  la  boussole  par  Torientation  polaire, 
mais  elle  continue  à  embarrasser  la  belle  composition.  Il  semble  que, 
par  des  rectifications  partielles,  on  Ta  atténuée,  dérangeant  sur  plusieurs 
points  Ténsemble  de  la  composition  nautique.  Cependant,  n'ayant  pas 
à  notre  examen  la  mer  méditerranëe  entière,  il  est  difficile  d'accuser 
trop  la  composition.  L'Italie  tient  une  bonne  position  et  le  méridien  de 
Venise  est  justement  tracé  par  la  composition  du  cosmograpbe  et  par 
la  publication  d'Ubelin.  La  graduation  que  nous  avons  appliquée  inoHne 
ce  méridien  dans  le  sens  contraire  et  décèle  encore  un  défaut  dans 
l'ensemble  de  la  composition. 

La  mer  méditerranëe  n'étant  pas  entière ,  on  ne  peut  former  qu'une 
induction  approximative  de  sa  longueur.  Or,  elle  parait  être  plus  longue 
qu'à  l'ordinaire,  c'est-à-dire  plus  longue  que  41®  que  les  cartes  nauti- 
ques donnaient  ordinairement.  Cependant  je  pense  qu'elle  ne  dépasse- 
rait pas  45''. 

Les  cartes  nautiques  donnaient  à  la  France  une  dimension  insuffi- 
sante. Nous  avons  observé  qu'elle  grandissait  graduellement  ;  que  les 
portulans  des  rivages  atlantiques  approchaient  leur  échelle  à  celle  des 
portulans  de  la  méditerranëe.  La  carte  continentale  ofi're  sous  ce  rap- 
port un  accord  suffisant,  et  l'intérieur  de  la  France  avait  assez  de  place 
pour  se  développer. 

Cependant  cette  dimension  convenablement  agrandie,  ne  dériva 
nullement  de  ce  développement  intérieur.  Les  opérations  géogra- 
phiques continentales  n'imposaient  point  de  règle  aux  formes  des  pays 
maritimes;  elles  étaient  subordonnées  à  celles  qu'avait  tracées  U 
géographie  nautique. 

L'ordre  intérieur  se  formait  par  les  itinéraires.  Moins  par  leurs  croi- 
sement et  triangulation ,  que  par  la  simple  direction  des  routes.  On  les 
débrouille  facilement  sur  notre  carte  continentale  et  plusieurs  s'isolent 
et  se  décèlent  à  tel  point  qu'ils  paraissent  traverser  les  déserts. 

177.  Considérant  le  défaut  croissant  vers  l'est  pour  les  latitudes  de 
l'Asie  mineure ,  qu'offre  la  graduation  appliquée  et  la  courbure  des 
parallèles  que  ne  demandait  pas  la  mer  méditerranëe  des  cartes  précé- 
dentes, je  pris  pour  un  autre  essai  de  graduation  :  Rome,  Constantinople 
et  Trebizonde,  et  tirai  le  parallèle  de  41*>  0'  (sso).  Il  dirige  les  autres 
parallèles  d'une  manière  plus  satisfaisante  pour  l'Asie  mineure  et  pour 
la  Grèce  ;  Bafo,  Alexandrette,  Tenar  et  tous  les  autres  lieux ,  se  rappro- 
chent aux  degrés  de  leurs  latitudes  respectives. 

Mais  ces  parallèles  ne  conviendraient  par  aucun  moyen  à  la  France 
qui  se  trouverait  trop  au  nord ,  Paris  dépassant  49**  0'  de  latitude  ; 
Calais  remontant  jusqu'à  52®  0'.  Ces  parallèles  ne  rectifient  en  aucune 
manière  l'inclination  du  méridien  de  Venise,  ils  l'inclinent  au  contraire 
d'avantage. 

La  publication  d'Ubelin  et  Esler  présente  donc  une  composition 
impossible  à  la  graduation   généralement  satisfaisante.  Dans  cette 

(260)  Certaiuement  on  remarquera  des  inexactitudes  dans  les  parallèles  de  ma  planche.  Elles 
résultent  de  l'iusulfisance  de  rin&trumcot  pour  tracer  les  grands  cercles  et  de  l*insuiBsance  de 
ma  vue. 


CARTES  CONTINENTALES,  177.  119 

grande  partie,  que  nous  avons  réuni  de  cinq  pièces,  elle  est  viciée  essen- 
tiellement par  le  contact  de  TAsie  mineure  à  Tarchipel.  La  grossièreté 
de  la  gravure  en  bois  pouvait  y  contribuer  :  je  n'osai  pas  y  intervenir 
par  mes  conjectures.  Mais  pour  Tensemble  et  pour  Fincohérence  de 
TEspagne,  la  composition  a  été  viciée,  je  pense,  par  les  éditeurs  eux- 
mêmes,  ou  par  ceux  qui  appliquèrent  a  la  marge  de  chaque  carte  les 
degrés  des  latitudes  et  les  climats.  Peut-être  quils  remarquèrent  Tobli- 
qnité  de  la  mer  méditerranée  et  qu'au  lieu  de  tirer  les  parallèles  incli- 
nées, ils  essayèrent,  par  une  opération  partielle,  de  remuer  les  parties» 
firent  remonter  TEspagne  vers  le  nord ,  ainsi  qu'elle  est  décorée  à  la 
marge  par  une  échelle  latitjudiuale  appliquée  beaucoup  mieux  que  ne 
Font  les  autres  cartes.  Par  ces  essais  partiellement  opérés  sortirent 
les  édielles  discordantes  et  incohérentes ,  et  k  composition  nautique 
Alt  dérangée  et  viciée.  A  la  suite  de  son  dérangement  et  de  l'application 
fautive  de  l'échelle  latitudinale ,  la  longueur  de  la  mer  méditerranée 
s'allongea,  à  ce  qu'il  parait,  à  45  degrés. 

Ecartant  ces  considérations  qui  touchent  Tensemble  nautique  de  la 
carte,  on  voit  cependant  par  cette  carte  que  la  topographie  des  pays  se 
trouvait  sur  une  bonne  assiette.  Sa  composition  intérieure  était  loin  de 
marcher  à  l'égal  avec  les  compositions  nautiques  :  cependant  elle  y 
trouvait  un  terrain  sûr  et  bien  déterminé  pour  progresser  dans  son 
développement.  Tout  fesait  espérer  un  beau  succès  pour  la  cartographie. 
Mais  un  auteur  ressuscité  vint,  comme  un  revenant,  arracher  les  con- 
stroctions  continentales  de  leur  assiette,  jeter  un  désordre  et  une  perr 
tarbation  éponvantable  dans  la  géographie,  entrainant  pour  longtemps 
la  cartographie  dans  des  chemins  rétrogrades  et  vicieux. 


VI. 


RENAISSANCE  DE  PTOLÉMÉE ,  DÉCOUVERTES  OCÉANIQUES , 

1409-1470-1550. 


178.  Les  Grecs  dcTempire  byzantin,  par  leur  horismos  ou  par  leur 
coopération  à  la  composition  de  cet  ouvrage ,  traduit  en  arabe  par  uu 
khovarezmien ,  agirent  puissamment  sur  la  création  de  la  géographie 
arabe.  La  première  lumière  qui  jaillit  pour  celle-ci  vint  de  chez  eux. 
Depuis  cet  événement ,  tout  notre  savoir  sur  Tétat  des  connaissances 
géographiques  dans  Fempire  s'éclipse  presque  totalement  Pendant  plus 
de  cinq  siècles  aucun  événement  géographique  n'appelle  les  byzantins 
à  une  intervention  quelconque  dans  la  marche  de  la  géographie. 

Nous  savons  qu'ils  fesaient  le  dénombrement  de  Tentourage  de  la 
personne  sacrée  de  l'empereur;  donnaient  la  description  de  palais,  de 
cérémonies  et  d'étiquettes  de  la  cour  ;  composaient  les  descriptions  des- 
thèmes  et  climats  de  l'empire ,  des  pays  et  peuples  voisins  ;  touchaient 
à  leurs  relations  politiques.  C'était  cultiver  la  géographie. 

Mais  nous  ne  savons  absolument  rien  de  ce  qui  se  passait  chez  eux 
sous  le  rapport  de  la  construction  des  cartes.  Cependant  ils  copiaient 
les  manuscrits  ainsi  que  les  anciennes  cartes  géographiques  qui  s'y  trou- 
Tèrent  mainte  fois.  De  quelles  cartes  se  servaient-ils  à  l'usage  du  jour? 
de  cartes  surannées  de  Ptolémée,  ou  de  celles  de  Kosmas,  de  horismos,. 
ou  de  quelques  autres  ?  on  l'ignore. 

Si  nous  ignorons  les  connaissances  de  la  géographie  chez  les  byzantins, 
nous  pourrions  nous  excuser  par  l'état  stationnaire  des  leurs  études 
intellectuelles ,  scientifiques ,  artistiques  :  mais  nous  aimons  mieux 
avouer  que  notre  ignorance  vient  du  manque  de  recherches.  Aussi  nous 
passons  outre  sur  ce  vide  immense  pour  suivre  un  autre  événement  dans 
la  géographie,  où  l'intervention  byzantine  donna  l'impulsion  à  toute  une 
autre  direction  de  l'activité  géographique. 

Lorsque  au  déclin  de  l'existence  de  leur  empire ,  les  savants  allèrent 
séjourner  ou  se  domicilier  chez  les  latins,  ceux-ci  devinrent  chaque 
jour  plus  avares  de  leur  savoir.  C'était  le  moment  où  les  connais- 
sances géographiques  des  byzantins  devaient  se  dévoiler  :  mais  alors 
même,  elles  nous  échappent.  Ou  les  byzantins  étaient  à  tel  point  igno- 
rants qu'ils  n'avaient  rien  à  communiquer ,  ou  les  latins  négligèrent  de 
les  examiner.  Le  fait  est ,  qu'au  sujet  de  la  géographie,  les  latins  se  con- 
tentaient de  se  mettre  en  possesion  de  vieux  monuments  géographiques 
que  leur  apportaient  les  byzantins,  à  savoir  :  le  géographe  Ilomer, 
son  scholiaste  Eustathe,  les  orphiques,  Dionyse,  Strabon ,  Ptolémée,  etc. 


iâ3  GÉOGR.   LATINE,   1470-1550. 

Cest  le  trésor  géographique  que  les  byzantins  présentèrent,  à  la  place 
de  leur  propre  connaissance,  aux  études  des  latins.  C'est  un  grand  évé- 
nement dans  rhistoire  de  la  géographie,  car  ce  trésor  moisi,  en  opérant 
une  corruption  funeste  dans  la  géographie  nautique  des  cosmographes, 
ouvrit  une  mine  abondante  en  grandes  et  inépuisables  conséquences. 

179.  La  géographie  de  Ptolémée  était  assez  répandue  dans  Tempire 
byzantin.  Elle  était  connue  vers  1150  par  les  géographes  de  la  Sicile, 
qui,  peuplée  en  partie  par  les  Grecs,  avait  des  relations  intimes  avec 
Tempire.  On  eut  donc  pu  espérer  de  trouver  quelque  géographe  oa 
savant  latin,  connaissant  Texistence  de  cette  géographie,  possédant  son 
exemplaire.  11  n'y  aurait  rien  en  d'extraordinaire  si  on  eut  remarqué 
dans  quelque  monument  géographique  Tinfluence  de  cet  ouvrage.  Mais 
rien  de  tout  cela  ;  ni  possession ,  ni  influence ,  ni  connaissance  de 
l'ouvrage  positivement  avérée  par  quelque  monument  géographique, 
ne  se  décèlent  nulle  part ,  durant  l'espace  de  plusieurs  siècles.  Edrisi 
atteste  que  la  cour  du  roi  Ro^er,  vers  1150,  avait  un  exemplaire  de  la 
géographie  de  Ptolémée.  La  bibliothèque  de  saint  Marc  à  Yenise,  avait 
uni  code  du  xni*  siècle ,  comme  on  Ta  déterminé  graûquement.  Son  fron- 
tispice, représentant  l'astronome  géographe  dans  sa  royale  couronne, 
est  accompagné  d'un  épigramme  tetrastiche  en  deux  langues,  grecque 
et  latine.  En  examinent  les  constructions  qui  environnent  la  figure 
debout  de  Ptolémée,  on  remarque  le  goût  gothico- mauresque  (Georgii 
Martini  Raidelii,  commentatio  de  Ptol.  géogr.  1757,  Norimb.  p.  10-lâ). 
Or,  il  faudrait  conclure  que  cette  copie  grecque  du  xin"  siècle  avait  étié 
exécutée  par  un  latin  et  à  l'usage  des  latins.  Cependant  plusieurs  siècles 
se  sont  écoulés  et  la  géographie  de  Ptolémée  n'a  laissée  aiicnue  trace 
parmi  les  latins. 

Ptolémée,  comme  astronome ,  était  bien  connu  par  tous  ceux  qui 
étudiaient  Thebit,  Alfragan,et  quelques  antres  arabes.  Cependant  il  est 
plus  que  douteux,  que  l'ouvrage  même  de  Fastronomie  de  Ptolémée  fât 
à  cette  époque  dans  les  mains  de  quelques  savants  latins.  Mais  la 
renommée  astronomique  de  Ptolémée  était  très-solidement  affermie  par 
les  arabes.  Les  astrologues,  les  marins,  les  cosmographes ,  par  tradition 
scientifique,  connaissaient  son  nom.  Les  cosmographes  qui  extrayaient 
Isidore  de  Séville,  qui  savaient  que  Pline  était  le  maître  dans  la  géogra- 
phie, Plinus  maeslre  de  mappa  mundi,  savaient  aussi  que  la  ville 
persanne  de  Schiraz,  s'appelait  autrefois  Gracia,  que  là  fut  première- 
ment inventée  l'astronomie  par  le  très-savant  Ptolémée  :  per  lo  aran 
savi  Tolomeo  ;  ils  connaissaient  de  même ,  comment  le  savant  Ptolémée 
avait  réparti  les  signes  zodiacaux  par  les  membres  du  corps  humain  , 
pour  en  tirer  les  pronostics.  Ce  savant  Ptolémée  était  aussi  profond 
astrologue;  s'il  égalait  en  géographie  le  maître  Pline;  s'il  a  jamais  écrit 
une  géographie  comme  Isidore,  c'est  ce  que  les  cosmographes  de  l'école 
la  plus  avancée  semblent  ignorer  (cartes  catal.  de  1378). 

Cependant,  à  cette  époque  de  la  renaissance  des  lettres,  il  y  avah 
chez  les  latins  une  tendance  à  étudier  le  grec  dans  les  anciens  ouvrages 
qui  arrivaient  à  leur  connaissance.  Toutes  les  vieilleries  grecques  parais- 
saient merveilleusement  excellentes.  A  mesure  que  l'empire  byzantin 
déclinait  et  diminuait,  l'étude  de  sou  idiome  et  de  la  science  antique 


PTOLÉMÉE,    180^.  i23 

augmenlait  chez  les  lalins.  L'empire  sollicitait  Tappui  des  occidentaux, 
saos  succès,  ses  eofants  y  trouvaient  un  refuj^e  et  chacun  d'eux  était  un 
instructeur,  apportait  des  manuscrits  recherchés  dans  Tcmpire  même 
par  des  voyageurs  latins.  Vers  la  fin  du  xiv'  siècle  et  du  commencement 
de  xv*,  des  codes  de  la  géographie  de  Ptolémée  étaient  assez  nombreux 
en  Italie.  Ghrysoloras  en  avait,  le  cardinal  Bembo  s'en  était  procuré, 
Gemistius  Pletho  en  apportait  en  arrivant  en  Italie ,  les  bibliothèques  de 
Venise,  du  Vatican  et  d'autres  s'en  procurèrent  (26t).  La  péninsule 
pyrénéenne  n'a  certainement  pas  négligé  d'en  acquérir. 

Mais  la  connaissance  du  grec  formait  les  belletristes,  les  philologues , 
les  érudits  ;  elle  était  ordinairement  étrangère  aux  hommes  de  science , 
aux  mathématiciens ,  aux  astronomes,  aux  géographes.  Les  philologues 
regardant  les  magniOques  peintures  de  27  caries  d'Agatbodaîmon , 
émerveillés  de  l'exubérance  des  longitudes  et  latitudes  qui  fixaient  aussi 
admirablement  toutes  les  localités,  déploraient  l'ignorance  des  géo- 
graphes qui  méconnaissaient  le  précieux  monument  de  l'antiquité;  et 
quand  ils  se  donnèrent  la  peine  de  comparer  les  mappemondes  avec  les 
cartes  du  géographe  grec,  vivement  affligés,  ils  gémirent  de  ce  que  les 
cosmc^çraphes  ignoraient  la  haute  perfection  du  divin  Ptolémée.  Pour 
éclairer  les  ignorants  il  fallait  tout  d'abord  livrer  l'ouvrage  grec  à  la 
langue  latine. 

i80.  Â  l'invitation  du  cardinal  Bembo,  le  savant  grec  Mauouel  Ghry- 
soloras (mort  1415),  commença  une  traductien  latine,  dont  il  se  désista 
lorsqu'il  vit  que  le  même  travail  était  entrepris  par  un  homme  plus 
capable  que  lui  de  le  conduire  à  bonne  fin.  Jacq  Angelo  le  florintin ,  du 
vivant  encore  de  Ghrysoloras,  exécuta  la  version  vers  1405,  en  donnant 
à  son  volume  le  titre  plus  attrayant  de  cosmographie,  observant  que  le 
titre  grec  de  géographie  ne  répondait  pas  suffisamment  à  la  valeur  et  au 
contenu  de  l'ouvrage.  Il  dédia  sa  version  au  pape  Alexandre  V  (pape  depuis 
le  26  juin  1409  jusqu'au  5  mai  1410,  jour  de  sa  mort) (362).  Les  copies 

(M4)  Aiijoard*bai  la  biblioth.  du  Vatican  possède  10  codes  grecs  (parmi  lesquels  y  en  a  2  de  la 
iMbliothèque  de  Heidclberg ,  pillés  pendant  les  guerres  de  trente  ans]  ;  à  Florence  plosiears,  duas 
eue  ithrum  fatnilias;  dans  l'abbaye  florintin  un,  et  dans  la  bibl.  iaurentienne  quatre;  dans  la 
bibliothèque  de  Paris  il  y  en  a  au  moins  cinq,  dont  deux  remontent  au  xiv*  siècle;  et  ailleurs  (les 
notices  de  C.  F.  A.  Nobbe,  en  donnent  une  ample  ënumération). 

(263)  Ptoiomeus  quam  multa  diuinitus  edidit,  iuterque  et  orbis  situm  diligentissimc  ut  cetera  a 

«nathematicis  non  discedens  exbibuit.  Hic  enim  alio  quodammodo  quam  nostri  latini ,  inter  quos 

Plinius  Secundus  cosmographorum  palmam  Terre  \idetur,  rem  hanc.-tractauit.  llli  enim,  licet  habita- 

bilem  universi  orbis  situm  descripserint,  non  tamen  ex  eorum  pracceptis  plane  captari  potcst,  qua 

artetotins  orbis  pictura  formari  valeat  ut  proporlio  cuiusqne  partis  ad  totura  universale  servatur  ; 

preterea  nemo  ab  illis  doccri  potest ,  nisi  crassiori  quodammocfo,  que  seu  quante  incliuationes  sunt 

ad  qoataor  celi  plagas,  eorum  situm  quos  in  pictara  iingere  decreveris.  Neduni  quippe  longitudinem 

locornm.a  fixo  quodam  totius  nostre  babitalis  termino  ductum  :  aue  tamen  rara  inventio  est;  sed 

mac  latitudinem  ponunt.  Nostrornm  etiam  nullus  precepta  tradidit  habitabilem  ipsum  orbem 

in  plures  pictore  tabulas  posse  dividi,  mensura  cnm  toto  equo  servata.  Eorondem  etiam  nemo  prodit 

qia  ratione  orbis  ipse  noster,  qui  spericus  est,  in  superficiem  planam  dedncatur.  Non  quod  nostros 

<{ai  pTMtantissimi  in  ca  traditione  extiterunt  viri ,  arguendos  tantisper  ccnsearo  ^  sed  quod  suis 

contenu  luminibus,  bistoricorum  more ,  rem  suam ,  summa  industria  et  complexi  et  prosequuti,  qui 

et  aliaqnedam  habent,  que  ab  auctore  hoc  IHolemeo  videntur  pretermissa.  Ut  autem  que  ab  illo 

abielnta,  divine  quodam  ingénie  sunt,  cum  nostris  etiam  habeanlur,  in  latinam  ipsa  curavi  tranferre 

«ernoi^em...  Ceterum  geographiam,  hoc  est  terre  descriptionem ,  auctor  hic  noster,  boc  orane  opus, 

grece  nuncupat,  quam  appellationem,Tir  seculi  nostri  eruditissirons.  Manuel  constantinopolitanus... 

dan  in  latinum  eloquium  id  transfère  ad  verbum  licet  pariter  incipit,  non  mutauit;  sed  nos  in 

coamograpfaiam  id  vertimus.  Quod  vocabulum ,  licet  grecum  eciam  sit  tamen  apud  latines  ita  usita- 

^Qni,ut  jam  pro  nostro  habeatur.  Credamus  que  virum  eum,  si  id  quod  transtniit,  emendasset , 

onnio  illnd  in  cosmographiam  mutatunim  finisse  (Jacobi  Angeli  epist.  dedicatoria). 


124  GEOGB.    LATINE,  1470«1SK0. 

de  la  traduction  d'Angclo  se  multiplièrent  et  se  répandirent  dans  tous 
les  états  de  TEurope.  Pendant  plus  de  deux  générations  on  n'avait 
d'autre  géographie  de  Ptolémée  en  latin  que  la  version  d'Ângelus  (263). 

Cette  première  version  n'était  ni  suffisante ,  ni  satisfaisante.  En  con- 
frontant les  codes  grecs  et  les  copies  latines,  on  remarquait  tant  de 
fautes,  tant  de  variantes,  qu'il  fallait  continuellement  reprendre  la 
version  d'Ângelo.  Or ,  en  Allemagne  Nicolas  Donis  ,  bénédictin  de  Ret- 
chenbach,  courut  à  la  charge  avec  de  nouvelles  forces  et  fit  une  nouvelle 
traduction  de  la  géographie  de  Ptolémée.  11  dessina  les  cartes  confor- 
mément à  sa  traduction,  et  en  1471  dédia  son  ouvrage  au  pape  Paul  II 
(mort  le  28  juillet  1471).  Les  copies  de  sa  traduction. et  de  ses  cartes 
se  multipliaient  et  se  répandaient,  paraissant  être  préférables  à  la  tra- 
duction de  l'italien  Angelo. 

En  attendant,  la  première  édition  de  la  version  de  Jacq  Angelo  parut 
par  les  soins  de  Benoît  trevisan ,  et  Angelo  Mlchaele ,  imprimée  à  Vicenze 
en  1475  dans  la  typographie  de  Herman  Levilapis ,  le  colonien. 

Dès  cette  année,  les  éditions  imprimées  de  la  géographie  ou  cosmo- 
graphie de  Ptoléniée  se  succédaient  sans  relâche.  Dans  le  courant  d'un 
siècle  il  en  parut  25,  élaborées  de  différentes  manières  par  les  italiens 
et  les  allemands.  Sur  40  autres  qui  se  suivirent  assez  rapidement ,  deux 
seulement  parurent  tardivement  en  grec,  toutes  les  autres  étaient 
latines  ou  italiennes  à  l'usage  du  vulgaire  (264).  Certes,  c'est  l'Allemagne 
et  l'Italie  qui  absorbaient  pour  la  plus  grande  partie  les  exemplaires 
de  ces  nombreuses  éditions  :  mais  sans  contredit ,  les  autres  pays  ^ 
comme  la  France,  le  Portugal,  l'Espague,  y  avaient  leur  part.  Les 
philologues ,  les  bibliothèques ,  les  écoles  géographiques,  les  particuliers, 
cosmo^raphes,  gens  de  lettres,  dilettanti,  possédaient  facilement  ce 
trésor  inépuisable,  admirant  l'efTervescence  de  la  renaissance  des  lettres. 

181.  Si  jamais  de  petites  circonstances  produisirent  de  grands  événe- 
ments ,  il  serait  difficile  d'indiquer  quelque  autre  aussi  fertile  en  résul- 
tats inattendus,  en  conséquences  aussi  surprenantes,  prodigieuses  et 
prolongées.  Des  conséquences  incalculables  s'en  suivirent.  L'étude  de 
la  géographie  est  détournée ,  et  lorsque  sa  marche  rétrograde  commence 
à  1  accabler,  elle  prend  des  dimensions  gigantesque  et  les  .connais- 
sances se  dilatent  dans  tontes  les  directions:  le  monde,  le  globe,  l'esprit 
humain,  l'état  social,  les  souches  de  la  race  humaine  ébranlés  dans  leurs 

^263)  La  bibliothèque  de  Bourgogne  à  Bruxelles  possède  iid  magniflque  code  de  ces  copies, 
finitus  4481,  décima  quarta  die  mensis  febmarii.  Mais  il  n'était  toat-à-fait  achevé,  que  anuo 
dui  4485,  octava  die  decembris,  comme  l'atteste  l'annotation  du  copiste.  Nous  nous  sommes  senri 
plus  d'une  fois  de  ce  code,  à  cause  de  quatre  cartes  modernes,  dont  ou  voit  quelques  copies  dans 
notre  atlas.  —  Ce  manuscrit  avait  été  sans  doute  copié  en  Italie  en  4488,  d'un  antérieur  de  4481, 
pour  la  bibliothèque  de  Bourgogne.  La  preuve  de  cette  présomption  se  fait  voir  non  seulement 
dans  la  double  date  de  la  copie  et  de  sa  conservation  dans  la  dite  bibliothèque  :  mais  dans  la  carie 
de  la  France  de  ce  magnifique  code.  Cette  carte  bien  élaborée  et  finie  sur  tous  les  points  offre  une 
singulière  lacune  pour  la  Belgique  :  d'où  l'on  peut  conchire  qu'un  copiste  italien  laissa  cette  portion 
vide,  afiu  qu'elle  fât  plus  exactement  remplie  et  achevée  sur  le  lieu  par  un  homme  du  pays.  —  En 
Allemagne  on  a  fait  grand  éloge  de  la  beauté  d'un  code  de  la  bibliothèque  impériale  de  Vienne , 
copié  en  4454  à  Florence,  par  Jean  Tbessalo  Santariote;  de  celui  de  la  bibliothèque  de  S.  Marc  à 
Venise  et  de  celui  qui,  qualifié  de  code  ebnerien ,  appartient  au  comte  Apponi  :  tous  accompagnés 
de  cartes  (Heeren ,  commentatio  de  fontibus  geograpbicorum  Ptolemaei ,  Gottingae  4827).  l\  parait 

3ue  le  code  bruxellois  ne  cède  en  rien  à  ces  codes,  s'il  n'est  plus  beau,  plus  splendidc,  parce  qu'ii  est 
écoré  de  peintures,  lorsque  les  autres  sont ,  sine  ferarum  et  hominum  figuris. 
(264)  Voyez  à  la  fin  de  ce  vol.  l'appendice  n«  4,  les  éditions  de  Ptolomée. 


PTOLÉMËB,   181.  125 

bases  changèrent  de  face  :  et  partout  intervint  la  géographie  de  Ptolémée 
ressuscitée. 

L*idée  d'une  extension  plus  considérable  de  Thabilable  vers  l'Orient, 
germait  parmi  les  savants  depuis  longtemps.  Elle  avait  été  suggérée  par 
Pline  et  quelques  autres  naturalistes.  Il  n'y  avait  donc  rien  de  surpre- 
nant quand  un  compositeur  de  la  mappemonde  se  montrait  disposé  à 
retendre.  Nous  avons  observé  comment  les  découveries  continentales , 
nommément  celles  de  Marco  "Polo,  décidèrent  les  cosmographes  de  donner 
à  rOrient  asiatique  de  plus  grandes  proportions  et  à  élargir  le  cercle 
océanique  qui  entourait  Thabitable.  Les  mappemondes  du  camaldule 
¥auro ,  d'André  Bianco ,  nous  en  fournissent  un  exemple  sous  la  forme 
ronde;  la  carte  catalane  et  plusieurs  autres  sous  la  forme  oblongue. 
L'Orient  prenait  plus  de  place,  et  ce  développement  des  mappemondes 
s'exécutait  sans  aucun  alliage  de  l'élément  étranger.  On  ne  pensait  pas 
qu'on  y  eût  fait  un  pas  plus  loin ,  ou  quelque  opération  réformatrice  : 
on  s'imaginait  seulement  qu'on  commençait  à  mieux  explorer  ce  que 
contenaient  les  mappemondes  précédentes,  serrées  par  l'ignorance. 
Aucune  distance  déterminée  n'a  pu  diviser  ce  nouveau  développement; 
aucune  idée  de  longitude  géographique  n'a  germé  dans  cette  extension. 
L'idée  de  180*  de  la  longueur  de  Thabi table  établie  du  temps  de  Roger, 
se  perpétua  peut-être  par  tradition  ;  la  vue  des  caries  arabes  la  rappelait 
à  Gecco,  à  Bacon ,  à  tous  ceux  qui  aimaient  à  la  nourrir,  mais  les  dessi- 
nateurs de  mappemondes  ne  se  souciaient  guère  s'ils  débordaient  cette 
longueur  ou  non.  Personne  ne  s'imaginait  que  les  investigations  de 
Marco  Polo  pouvaient  s'étendre  au  delà  sur  un  autre  hémisphère.  11  fallait 
qu'on  eût  tiré  auparavant  du  néant  le  fameux  astrologue  Ptolémée,  pour 
rendre  ce  service  au  pèlerinage  de  Marco  Polo. 

  la  vue  de  Ptolémée,  les  autorités  d'Orose,  d'Isidore, de  Solin,  de 
Strabon,  de  Pline,  des  itinéraires ,  déclinèrent  infiniment.  L'autorité 
nautique  des  pilotes,  et  les  mappemondes  des  cosmographes  parurent 
insufiissantes ,  suspectes.  Ptolémée  réunissait  le  langage  descriptif  aux 
données  positives ,  résultat  évident  des  opérations  mathématiques  et  des 
observations  astronomiques.  Les  projections  et  les  positions  géogra- 
phiques lui  donnaient  une  supériorité  et  une  apparence  de  perfection, 
à  laquelle  ne  sont  arrivés  aucun  des  anciens  connus,  aucun  des  cosmo- 
graphes parmi  les  latins.  Or ,  il  ne  restait  qu'à  reprendre  cette  vieille 
perfection,  sans  condition;  à  renoncer  à  ses  propres  moyens,  à  ses 
propres  productions ,  à  retrouver  les  perlustra tiens  modernes  sur  les 
vieilles  caries  ptoléméennes,  ces  perluslrations  modernes  n'étant  que 
la  reconnaissance  de  l'antique  connaissance  du  divin  géographe ,  éten- 
due le  long  de  ISO*"  (265). 

Mais  en  confrontant  les  relations  de  Marco  Polo,  il  devenait  évident 
que  ces  perluslrations  étaient  allées  plus  loin.  Kataï,  Mangou,  répon- 
dant à  Serika  et  Sinia,  se  révélèrent  au  perlustrateur  comme  régions 
d'immense  étendue.  Serika  était  trop  étroite  pour  Kataï,  Sinia,  allongée 
sur  la  lisière  de  l'habitable,  le  long  d'un  seul  méridien  du  180'  degré, 


(f68)  D»s  l*année  i4i0  le  cardinal  d*Ailly  ne  s'inquiétait  guère  de  Kextension  de  l'habitable  au- 
deii  de  ^uart  dû  globe.  Ce  n'est  qu'après  avoir  fait  connaissance  avec  Ptolémée  qu'il  pensa  à  la 
nécessite  d'en  étendre  la  longueur  au-delà  de  180  degrés.  Voyez  ci-dessus  cbap.  i58,  i59. 


J26  GÉOGR.   LATINE,   1470-1550. 

n*offraient  sur  Thémisplière  de  Thabitable  aucune  place  pour  Mangou 
et  Kalaï.  Or ,  ces  régions  heureusement  perlustrées  furent  inconnues 
aux  anciens,  parce  qu'elles  n*ont  plus  de  place  sur  la  carte  de  Ptolémée  : 
il  ne  restait  qu'à  les  ajouter  en  continuation  à  Thabitable  et  de  se  porter 
au  delà  du  180*  degré  sur  un  autre  hémisphère.  Les  cartes  du  géographe 
astronome  n'empêchaient  point  ce  procédé  ;  Ptolémée  n'avait  pas  empri- 
sonné son  habitable  dans  un  océan  enyironnant,  son  continent  était 
disposé  à  s'étendre  par  des  terres  inconnues  au  delà  de  180  degrés  et 
laissait  un  champ  ouvert  et  un  immense  espace,  un  vide  pour  étendre 
les  perlustratlons  de  Marco  Polo  sur  l'hémisphère  des  antipodes  :  c'est 
là  que  la  Chine,  Mangon,  Kataï,  Soumatra,  Zeilon,  Zipangou,  prirent 
à  leur  aise  les  assiettes  inoccupées  jusqu'à  250*  de  la  longitude  de  l'île 
de  Fer.  Pour  compléter  l'atlas  ptoléméen  il  ne  restait  qu'à  attacher 
les  cartes  des  pays  inconnus  aux  anciens.  La  Skandinavie  eut  en  effet 
la  première  cet  honneur;  l'Orient  reculé  de  Marco  Polo  s'y  attendait  à 
juste  titre  ;  la  carte  des  frères  Zeni  n'obtint  cet  honneur  insigne  que 
très--tard. 

182.  A  cette  époque  de  ferveur  pour  les  découvertes  de  nouvelles 
terres ,  les  moindres  pulsations  dans  la  géographie  sont  souvent  de  la 
plus  haute  importance.  Aussi  comprendrait-on  mieux  les  grandes  consé- 
quences si  l'on  réussissait  à  déterminer  avec  certitude ,  où ,  quand  et 
par  qui  avait  été  connue  cette  idée  sur  Ptqlémée;  qui  en  a  donné  l'im- 
pulsion ,  et  de  quelle  façon  on  se  prit  pour  complémenter  Ptolémée, 
pour  se  servir  de  ses  cartes  à  l'usage  du  siècle.Cette  marche  de  choses 
n'a  pas  anticipé  la  version  latine  de  sa  géographie  et  je  pense  qu'elle  ne 
s'est  décélée  que  vers  la  fin  du  xv*  siècle. 

Pour  cette  opération  et  la  transfiguration  des  conceptions  géogra- 
phiques, il  ne  fallait  ni  génie,  ni  talent,  ni  coopération  de  quelque 
célébrité  extraordinaire  dans  la  géographie.  L'ignorance  et  l'ineptie 
des  savants  philologues  y  travaillait,  illustrait,  interprétait  admirable- 
ment le  monde  connu  par  le  monde  ancien ,  et  petit  à  petit  elle  rem- 
plaça, sur  les  cartes  ptoléméennes,  les  épigraphes  anciennes  par  des 
modernes.  La  nomenclature  de  Ptolémée  devenant  la  base,  le  guide 
des  nouveaux  géographes,  n'était  cependant  pas  dans  leurs  études 
suffisamment  comprise  sans  la  confrontation  avec  Strabon,  Pline,  Mêla 
et  autres  anciens,  sans  l'érudition  comparative  de  la  nomenclature 
moderne,  et  la  géographie  moderne,  rédigée  par  ces  savants,  ordinai- 
rement dans  la  langue  latine,  n'était  pas  suffisamment  polie,  illustrée, 
achevée,  quand  elle  était  privée  des  dénominations  anciennes  dont  le 
plus  riche  magasin  et  le  mieux  coordonné  se  trouvait  dans  la  géogra^- 
phie  de  Ptolémée.  Cetle  invasion  de  Ptolén)ée  dans  les  régions  géogra- 
phiques du  moyen  âge  n'a  pu  se  déclarer  qu'à  la  suite  de  la  traduction 
latine.  Nous  allons  suivre  le  progrès  de  cette  invasion  et  indiquer,  au 
moyen  des  cartes  qui  nous  sont  connues,  les  dates  du  développement 
de  sa  domination. 

Nicolas  Donis,  1470. 

Jacq  Angelo  mit  sa  traduction  en  cours  en  1409.  Elle  existait  depuis 
longtemps  en  manuscrit  et  il  s'est  écoulé  un  laps  de  temps  assez  consi- 


NICOLAS  IK)NIS9  I8i.  i^l 

dérable  a?anl  qu'elle  fût  imprimée  en  1475.  Elle  parut  sans  atlas,  sans 
aucune  carte  moderne  ou  modernisée.  En  même  temps,  Nicolas  ]>onis, 
prépara ,  en  1470,  une  version  nouvelle  et  se  mit  à  dessiner  des  cartes 
en  guise  de  celles  d'Âgathodaîmon.  Il  ne  dit  point  s'il  avait  quelques 
caries  ptoléméennes  latines  antérieures  aux  siennes;  il  observe  seule- 
ment que  les  cartes  (grecques  d*Âgathodaïmon)  souvent  ne  répondaient 
point  au  texte,  n'étaient  guère  suffisantes,  à  cause  qu'on  n'observait 
dans  leur  dessin  ni  les  distances ,  ni  la  grandeur  des  îles  ;  il  a  donc 
entrepris  de  les  exécuter  plus  scrupuleusement,  ne  s'écartant  en  aucune 
manière  de  Tintention  de  Ptolémée,  mais  en  rectifiant  le  dessin,  car  il 
est  inadmissible  que  Ptolémée  n'eût  dessiné  lui-même  des  tables  plus 
exactement  et  plus  consciencieusement.  En  même  temps  il  s'explique 
que  des  deux  modes  de  projection  proposés  par  Ptolémée ,  il  a  préféré 
et  choisi  le  mode  rectiligne  aux  méridiens  inclinés.  Et  tous  ces  soins 
qu'il  se  donne  avaient  évidemment  le  but  de  rendre  les  cartes  ancien- 
nes propres  à  l'usage  moderne  (ses).  La  géographie  de  Ptolémée, 
latinisée  depuis  60  ans ,  fut  par  ces  soins  dotée  d'un  allas  en  latin , 
composé  de  27  cartes.  Nicolas  Donis  laissait  copier  et  copiait  lui-même 
ces  cartes.  Elles  furent  bientôt  attachées  à  maintes  codes  manuscrits , 
même  de  la  version  d'Ângelo  (ae?). 

En  attendant  parurent  en  Italie,  en  1478  et  probablement  en  1482, 
deux  éditions  de  Ptolémée,  l'une  à  Rome,  l'autre  avec  la  date  erronée 
de  1462,  à  Bologne,  toutes  deux  accompagnées  d'atlas,  gravés  en  cuivre. 
Je  n'ai  jamais  eu  le  bonheur  de  rencontrer  et  voir  ces  éditions;  aussi 
je  ne  saurai  dire  si  elles  avaient  leurs  cartes  conformes  au  dessin  de 
Donis,  mais  je  les  vois  postérieures  à  l'émission  de  celles  de  l'Aile- 

(M6}  Cam  que  summo  ingenio,  cxquisitaque  doctrina  Ptolomeus  cosmographus  ptnxisset,  îd  liis 
aUquid  nouari  attempt«remus  fore  :  ut  hic  nostcr  labor  in  multoram  reprebensiones  incurret. 
Omnes  enim  qui  bauc  nostram  picturam ,  ab  ea  quam  PtotomAUS  edidit,  paululum  abhorrentem, 
certe  nos ,  vel  imperitie  Tel  temeritatis  arguent  :  nam  plane  nos  aut  ignorasse  quid  egerimns ,  aut 
temere  anses  esse,  tautum  opus  contaminare  aiïiriaabunt ,  cum  aliqois  ex  parte  iUudimmutatum 
cernent,  non  enim  sibi  persuadere  poterunt,  nec  fas  esse  exisiimahunt  ut  tantum  vlrum  quanlus 
certe  is  fuit,  si  quis  alius  pingendi  orbis  terrarum  melior  modus  extitisset,  is  eum  fugisset,  cum  is 
soins  faerit  qui  tam  iuter  multos  excellentes  cosmographos  qui  ante  se  florucrunt,  modum  videret, 

Sio  sitam  terrarum  omnium  in  tabulis  primus  pingeret.  Quasi  vero  aut  princeps  ille  poetarum 
orneras  a  Pisislrato  in  ordinem  redigi  ;  aut  Lueretii  diviunm  opus  a  Cicérone  eroendari  ;  aut 
toUetane  tabule  ah  Alfonso  corrigi  nequiuerint.  Quare  hi  sane  erunt,  qui  nibil  laudabuot,  nisi  quod 
M  itttelligere  posée  confidant,  quenque  sperabunt  animo  et  cogitatione  complecti  valere,  eundem 
bene  pingendi  orbis  modum,  esse  censebunt.  Et  cum  obruentur  crebritate  linerum  longitndinalinm 
Bon  eqve  distantium ,  raram  illam  et  vastam  Ptolomei  picturam ,  lectis  lineis  distinctam  se  malle , 

5nm  nanc  nostram  multiplicem  et  commodam  pendentibus  inclioatisque  lineis  discretam  dirent, 
eque  vero  nos  hec  ideo  ounc  dicimus,  ut  quidquid  in  Ptolomei  pictura  reperiatur,  quod  corngi  tgI 
emeadari,  aut  in  ordinem  redigi  oporlucrit,  cum  omuia  ita  scienter  ac  pnidenter  \ir  ille  pinxerit, 
«t  Bibll  quod  ad  rationem  sitns  terrarum  in  eius  tabulis  deese  videatur  :  sed  ut  illos  sue  arguercmus 
ignorankie,  qui  et  cum  nuUa  talium  rerum  scientiam  aut  cognitionem  tencant,  tamcninvidia  et  livore 
qnodam  moti,  si  qnid  Ttderintab  altero  editum ,  quod  ingcniiscorum  impar  sit,  statim  ad  eius 
^tttperationem  sese  eonvertunt.  Atsi  qui  crunt,  qui  omnino  géométrie  sivc  cosmographie  expertes 
siot,  quiqne  ipsum  Ptolomeum  sepius  legerint,  ao  picturam deiude  nostram,  placata  mente  con- 
^plaverint,  hi  certe  nos  lande  dignos,  non  reprehensionc ,  ut  illi ,  putabunt.  Prospicient  enim  nos 
opas  ita  difficile  atque  arduum  susccpisse  et  ita  egregic  ad  exitum  produxisse,  ut  illud  mirari 
^(igtntnr  pressertim,  cum  uulla  in  re  nos  a  Ptolomei  intentione,  licet  a  pictura  paululum,  déviasse 
oomperient....  Ptolomeus,  duplicem  pingendi  orbis  terrarum  rationem  esse  tradit  (per  rectas  et 
£^''^'*9)....  In  pictura,  neque  distanlias  secemi,  neque  magnitudinem  insularum  distingnere...  etc. 
i^colaiBonis,  eptla  dedicatoria). 

^^67)  Le  code  de  Bruxelles  de  la  traduction  d'Angelo  écrit  en  1-181 ,  achevé  1483,  est  accompagné 
^  cartes  nouvelles  copiées  sur  celles  de  Donis.  —  Gli  arcbietipi  vetusti  (di  Tolomeo),  con  migliora- 
^enti  aNicolo  Donis  tedesco,  il  quale  nel  4i68,  ne  fece  un  présente  in  egual  numéro  di  27,  al  duca 
5^^*^  d*E8te,  di  che  sivegga  il  Bandini  btbl.  laur.  ove  l'autografo  si  conserva  (Zurla,  snlle  anticbe 
?SN[^  idro-geograflche,  nota  ad.  cap.  ii).  —  Ses  cartes  publiées  sont  attachées  aussi  à  un  manuscrit 
*«or«n,b«rg(£idcl). 


i28  GÉOGR.  LATINE,   i470-lS5Q. 

mand.  Elles  propagèrent  la  connaissance  de  Touvrage  de  Ptolémée, 
surtout  en  Italie,  et  familiarisèrent  avec  les  formes  et  les  proportions 
que  les  cartes  de  ce  géographe  donnaient  à  Thabitable  et  aux  pays. 

183.  Nicolas  Donis  parvint  enfin  à  éditer  sa  version  et  son  atlas, 
coupé  en  bois  et  imprimé  en  1482  à  Ulm.  Il  avait  le  but  de  donner  le 
type  parfait  de  la  figure  des  pays  et  de  la  terre  connue  aux  cosmogra- 
phes et  aux  dessinateurs  de  cartes.  Mais  dans  cette  édition ,  il  nous 
apprend  qu'il  s'occupait  lui-même  de  dresser  ou  copier  et  de  corriger 
les  cartes  modernes  de  son  temps.  Il  ne  fait  aucune  observation  sur  la 
diversité  des  bases  de  la  composition  et  de  la  structure  des  cartes  con^ 
temporaines,  toutes  dififéreutes  de  celles  de  Ptolémée;  il  nous  avertit 
seulement  que  le  monde  étant  susceptible  de  fréquentes  mutations, 
quantité  de  lieux  nommés  par  Ptolémée  disparurent,  pour  la  plupart 
par  vétusté  :  or,  par  Tamour  de  la  science  et  des  lecteurs,  sa  sollici- 
tude lui  suggéra  l'idée  de  donner  les  cartes  nouvelles  de  TEspagne  et 
de  ritalie,  c'est-à-dire  portant  les  dénominations  nouvelles,  contem- 
poraines (268) 

Outre  ces  deux  cartes  nouvelles  (voyez  n^  lO^,  124  de  notre  atlas^,. 
nous  voyons,  dans  son  édition  de  Ptolémée,  les  deux  autres  :  savoir 
de  la  France  et  de  la  Palestine.  Il  ne  dit  rien  dans  sa  préface  sur 
leur  compte.  La  Palestine  est  certainement  une  copie  des  cartes  anté- 
rieures, car  elle  est  toute  conforme  à  celle  du  xiv'  siècle  de  Marino 
Sanuto.  Quant  à  la  France,  elle  est  d'une  composition  affectée  de  la 
disproportion  ptoléméenne,  la  plus  sensiblement  et  trop  évidemment 
dans  sa  partie  méridionale  (voyez  n®  105  de  notre  atlas).  Donis  ne  dit 
point  s'il  était  l'auteur  de  cette  défiguratiou,  comme  il  s'en  vante  au 
sujet  de  sa  carte  de  l'Italie  :  cependant  nous  n'avons  pas  de  motif  d'eu 
accuser  un  autre  que  lui. 

De  ces  deux  cartes,  dont  il  fait  mention  dans  son  épilre  dédicatoire, 
celle  d'Espagne  (n«  124  de  l'atlas),  sans  aucun  doute,  n'est  pas  de  lui, 
elle  est  une  simple  copie  de  la  carte  continentale,  chorograpbique,  de 
la  fabrique  espagnole.  Nous  l'attribuons  directement  à  l'école  espagnole 
parce  qu'elle  offre  une  composition  qui  ne  se  rattache  pas  aux  autres 
cartes  chorographiques  que  les  géographes  allemands  surent  réunir  par 
la  juxta-position;  parce  que  la  configuration  de  l'Espagne  qu'elle  pré- 
sente, est  toute  mauresque,  si  nous  pouvons  nous  servir  de  cette 
expression,  c'est-à-dire  qu'elle  offre  une  grande  analogie,  une  confor- 
mité avec  la  configuration  de  l'Espagne  des  cartes  arabes.  Il  n'y  a  rien 
de  Ptolémée.  On  peut  dire  que  l'intérieur  chorégraphique  arabe  est 
encadré  dans  le  portulan  peint  des  marins,  amplifie  et  rectifié  sur'plu- 
sieurs  points  de  la  péninsule  (269). 


(i68)  Reliquum  vero  illius  tant!  viri  (Ptolemaei),  ut  prius  eraot  intacta  relinquimus,  nist  quantum 
studii  amor  et  legentiam  sollicitndo  suggessit,  ut  ob  mutationes  temporum  qui  Trequenter  in  oii>e 
cootingunt,  duas  nobilissimas  regiones  :  Hispaniaro  videlicet  et  Ytaliam  qnonim  loca  ab  aactoris 
vetustate  pro  maxima  eornm  parte,  a  notitia  nostra  decidcrunt....  certa  ratiope  iungeudo  nostratim 
poneremus.  (Nie.  Donis,  eptla  dedic). 

(Ï69)  Nous  reviendrons  encore  sur  cette  composition.  Cette  analogie  et  conformité  avec  la  con- 
figuration m'a  frappée  d'autant  plus,  que  j'avais  terminé  mes  investigations  dans  la  géographie 
arabe  et  achevé  le  dessin  de  leur  cartes  avant  de  commencer  l'examen  de  la  géographie  de  la  restau- 
ration des  lettres,  examen  qui  a  mis  sous  mes  yeux  cette  carte  espagnole  de  la  péninsule. 


NICOLAS   DOItlS,  183.  129 

Nicolas  Donis,  en  mentionnant  dans  son  épitre  dédîcatoire  les  cartes 
modernes,  ne  s'arrose  que  la  composition  de  Tltalie  seule,  qui  lui 
appartient  en  entier  \n^  101  de  Tatlas).  11  y  conserva  la  conflguration 
ptoléméenne,  supprimant  les  noms  anciens  des  peuples;  il  y  inséra 
nommément  les  Tilles,  bourgs,  lacs,  pointes  marines,  ports,  montagnes, 
fleuves;  traça  entre  leurs  détours  les  plaines,  les  parties  montagneuses 
et  les  Iles  adjacentes;  ne  dérangeant  rien  dans  la  dimension  certaine, 
ni  dans  la  conflguration  indubitable  de  Ptolémée  (2to). 

Ces  quatre  cartes  n'ont  aucune  graduation,  aucun  indice  de  longi- 
tude g^graphique,  elles  n*ont  qu'une  échelle  de  milles  et  Tindication 
descRmats(s7i). 

Il  y  a  une  cinquième  carte  nouvelle  de  laquelle  Nicolas  Donis  nous 
entretient  dans  sa  dédicace.  Carte  des  régions  de  Tocéan  sarmatique, 
situées  sous  le  cercle  arctique,  savoir  :  Daiia,  Scania,  Norbegia,  Gotiia, 
Saetia,  Gronelandia,  les  pays  adhérents  et  les  îles  adjacentes.  Ptolémée 
lui-même,  ni  le  diligent  Strabon,  ni  qui  que  ce  soit  des  cosmographes 
anciens  n'ont  donné  de  description  de  ces  régions;  nous  la  présentons, 
dit  Nicolas  Donis,  avec  raison  à  nos  lecteurs  (272).  Cette  carte  nouvelle 
de  régions,  qui  n'entraient  pas  pour  la  plupart  dans  le  cadre  de  Thabi- 
table  de  Ptolémée,  étant  un  supplément  à  son  atlas,  la  28™^  carte  inté- 
grante de  Tatlas  est  graduée  par  des  longitudes  et  latitudes  et  accom- 
pagnée de  tous  les  détails  des  climats  (voyez  n®  97  de  Tatlas). 

Les  cinq  nouvelles  cartes  chorégraphiques  que  Nicolas  Donis  attacha 
en  148^  et  4486  à  ses  éditions  de  Ptolémée,  sont  donc  de  plusieurs  dif- 
férentes espèces.  La  Palestine  remonte  avec  son  origine  au  xiv'  siècle. 
Les  riions  arctiques ,  comme  partie  intégrante  de  Tatlas  ptolcraéen , 
farent  dressées  avant  1471.  L'Espagne  est  de  la  composition  espagnole 
aatérieure  à  cette  année.  L'Italie  est  inventée  par  Donis  lui-même 
^ere  cette  même  année  1471.  La  France  est  défigurée  (certainement 
par  le  même  Donis)  vers  1480.  A  l'exception  de  la  Palestine,  toutes  les 
autres  se  trouvent  copiées  et  enclavées  dans  le  code  de  Ptolémée  de  la 
bibliothèque  de  Bourgogne  à  Bruxelles,  du  manuscrit  de  l'année  1481, 
\m  (t75). 

La  savante  Italie,  étiucellante  de  lumières  et  des  beaux-esprits  du 
siède,  accepta  le  masque  que  le  docte  Allemand  lui  adressa  comme 
hommage.  Admirant  le  génie  tudesque,  s'écriant  :  rari  ingenii  Tudeschi, 

(S7fi)  Ha&c  regionem  (Italiam),  obmissis  nationum  nomlnihns,  que  bnnc  a  Ptolonco  reoitata  sont, 
*à  Boitra  tempora,  civitatcs,  oppida,  lacus,  mariuas,  porlut;  et  moDtos,  uoiniua  etiam  iliiuiuin  et 
Mraaortiis,  loca  quoque  montuosa  et  campeslria,  una  ram  iiisulis  sibi  adiarentibus,  ut  intuo.ri  fas 
^^diff^sias  desuribcrc  censui  :  niehil  iohiis,que  ab  auctori  libri  huius  (Ploiemaei)  dimcnsione 
**rt»i  ac  ratione  Terissima  observala  sunt,  trausgrcdicudo  (Sic.  Doiiis,  oplla  didic). 

(*74|  LoBgitudinib.  et  iatitut.  privata,  tantum  climata  signantur  (Nie.  Doo.). 

()7lj  HigpaDiam  et  Ytaliara....  ipsa»  etiam  regioues,  que  iu  occcano  sarmatieo  se  ingcrunt  et  sub 
j^ello  per  circulum  arcticura  ductum  occurrunt  :  Datiam  utpote,  Scauiam ,  Norbcgiam ,  Gottiain, 
ojietiaai , Gronelandiam  et  regiones  sibi  adhérentes,  cum  insulis  adiacentibus,  de  qiiibus  profecto 
'^^^OQS  ipgc,  aut  Strabo  diligens,  nec  aliquis  cosmographus  dcscriptionis  mouimuutarellDqait, 
<î«rt*  ratione,  nostratim  poneremus  'Nie.  Donis,  eptia  dcdie.). 

(I7S)  La  Palestine ,  L'Espagne  et  l'Italie  sont  reproduites  par  Essier  et  Ubelin  dans  leur  Ptolcmëe 
^^}  ®(  4S20  ;  Villanovanus  en  4553,  reprenant  dans  son  édition  de  Ptolémée  toutes  les  cartes 
flilbeliii,  méprisa  celle  d'Italie  de  Donis  et  ne  l'a  pas  reproduit.  —  A  l'exception  de  la  Palcbtinc  qui 
*^it  la  répétition  de  la  carte  de  Sanuto,  nous  donnons  dans  notre  atlas  la  copie  de  quatre  autres, 
TCooites  àooe  petite  échelle  et  nous  en  rendons  compte.  Leur  dimension  est  petite,  mais  nous 
P***'  qu'elle  suffit  pour  donner  l'idée  des  cartes  de  cette  époque  et  de  la  direction  qu'elles 
Fanaient  soos  l'influence  de  la  renaissance  des  lettres.  {Voyez  n"  97,  t03, 101,  lîi  de  ûotrc  atlas.) 

H.  12 


130  GÉOGR.   LATINB»  i470-15K0. 

begV  ingegni  Tudeschi,  beUUsimo  ingénia  Alemano!  elle  se  couvrit  le 
front  et  prit  la  livrée  de  Ptolémée ,  pour  continuer  avec  plus  de  succès 
la  culture  de  la  géographie.  La  renommée  de  Ptolémée,  répandue, 
grandit  parmi  les  cosmographes;  son  autorité  dans  Tastronomie  déjà 
solidement  établie,  lui  gagnait  une  plus  immense  dans  la  géogra- 
phie. 

Paul  Toscanelli,  1474. 

184.  L'Italie  contribua  beaucoup  à  consolider  cette  autorité  fatale» 
Nous  ne  saurions  dire  positivement,  si  Tltalie,  par  quelque  invention, 
avait  direclement  coopéré  à  son  application  à  la  pratique,  mais  ce  qui 
est  certain,  c'est  qu'en  même  temps  l'Italie  expédiait  en  Portugal 
et  en  Espagne  le  complément  à  la  mappemonde  de  Ptolémée ,  com- 
plément qui  donnait  une  grande  extension  du  vieux  continent  sur  un 
autre  hémisphère,  rapprochait  les  Indes  de  l'Europe ,  laissait  entrevoir 
la  possibilité  de  la  traverse  directe  du  Portugal  ou  de  l'Espagne  dans 
l'Inde,  ne  donnant  à  l'océan  atlantique  que  l'espace  d'un  tiers  de  la 
circonférence  du  globe  sous  cette  parallèle. 

Le  florentin  Paolo  Toscanelu  (né  1597  mort  1482)  arrivé  à  certain 
âge,  prit  du  goût  aux  mathématiques,  et  ne  s'occupa  pas  seulement  de 
la  correction  des  tables  solaires  et  lunaires ,  par  des  observations  gno- 
moniques  et  d'astrolabe,  comme  tout  ce  qui  pouvait  faciliter  l'emploi 
des  méthodes  d'astronomie  nautique,  longuement  discutées  et  rarement 
employées  jusqu'alors  :  mais  il  porta  aussi  ses  vues  sur  la  comparai- 
son de  la  géographie  ancienne  avec  les  résultats  des  découvertes 
modernes  et  sur  ruiiliié  pratique  que  le  commerce  pourrait  tirer  par 
la  navigation  vers  l'ouest  au  pays  des  épices. 

Il  interrogeait  tous  ceux  qui  venaient  des  régions  les  plus  éloignées, 
et  il  y  en  avait  beaucoup  en  Italie  (374).  Nicole  di  Gonti  était  alors  de 
retour  de  ses  courses  et  rendait  un  compte  consciencieux  de  ce  qa*il 
avait  vu.  Toscanelli  médita  souvent  sur  la  route  ouest  et  encouragea 
les  projets  de  Christophe  Colomb ,  qui  avait  eu  recours  à  ses  lumières. 

Le  roi  de  Portugal  chargea  le  chanoine  Martiuez  de  questionner  le 
vieux  Toscanelli,  qui  expédia  de  Florence  sa  lettre  datée  du  S5 
juin  1474,  à  laquelle  il  joignit  la  carte  de  son  dessin,  dont  il  communi- 
qua en  même  temps  une  copie  à  Colomb. 

Sur  cette  carte,  semblable  aux  cartes  marines,  il  dessina  lui-même 
toute  l'extrémité  de  l'occident,  depuis  l'Irlande  jusqu'à  la  fin  de  la 
Guinée  vers  le  sud,  avec  toutes  les  îles  qui  se  trouvent  sur  la  route.  II 
plaça  vis-à-vis,  droit  à  l'ouest,  le  commencement  des  Indes  avec  les  îles 
et  les  lieux  où  l'on  pourrait  aborder.  On  y  voyait  de  combien  de  milles 
il  serait  bon  de  s'éloigner  du  pôle  arctique  vers  l'équateur ,  et  à  quelle 
distance  on  arriverait  aux  régions  des  épices.  De  Lisbone  à  la  fameuse 
cité  de  Quinsaî,  en  prenant  le  chemin  tout  droit  vers  l'ouest,  la  carte 

(274)  Si  comme  moi,  dit-il  dans  sa  lettre  an  chanoioe  Martioez,  vous  aviez  eu  occasion  d^» 
fréquenter  un  grand  nombre  de  personnes  qui  ont  été  dans  ces  pays  (des  épices].  —  Le  florentii^ 
Christoforo  Laodino,  traducteur  de  Pline  et  commentateur  de  Virgile,  le  conOrme  :  ego  autem  interfaS» 
dit-il  (georgicon,  édit.  Laodinus,  Venet,  iS20,  p.  48).  cum  Florentiae  illos  Paulus  pbysicns  diligente^ 
quaeque  intcrrogaret  (Humboldt,  exam.  de  l'hist.  de  la  géogr.  du  n.  m.  1. 1,  p.  113,  S14}. 


BEHA'ilf»  185.  131 

donnait 26  espacios  dont  chacun  à  150  milles,  tandis  que  de  Tîle  Ântilla 
à  Gipango  il  y  a  10  espacios  lesquels  équivalent  à  225  léguas  (sis). 

Ces  espaces  sont  sans  doute  de  trois  degrés  chacun  (276)  :  le  degré 
serait  par  conséquent  évalué  à  50  milles.  Si  Toscanelli  comptait 
(comme  Colomb)  le  degré  du  grand  cercle  à  56  ^/s  le  chemin  indiqué 
par  le  degré  de  50  milles  serait  par  28<*  de  latitude  (i??).  D'après  cette 
Bupputation  les  7  ^2  lieues  du  degré  de  cette  latitude  donneraient  8  V^ 
lieues  au  degré  du  grand  cercle ,  suivant  Toscanelli  :  ce  seraient  des 
lieues  doubles,  de  lieues  de  mer  dont  on  compte  17  ^/â  au  degré  du 
grand  cercle. 

Ces  espaces  comptent  78  degrés  entre  Lisbonne  et  Quinsaï  et  suppo- 
sent, d'après  Toscanelli,  le  rapport  du  continent  à  la  mer  à  peu  près 
comme  4  à  1.  Les  autres  pensaient  que  Tocéan  atlantique  occupait  uu 
tiers  de  la  circonférence  (sts).  Christophe  Colomb,  ruminant  son  expé- 
dition, déterra  les  extravagances  de  Marin  de  Tyr,  qui  portait  les  der- 
nières limites  du  continent  connu  jusqu'à  250''  de  longitude  et  ajou- 
tant à  cette  étendue  les  70<*  que  les  tiercistes  donnaient  à  partir  de  180*^ 
ptoléméens  pour  placer  Quinsaï,  il  donnait  le  rapport  du  continent  à  la 
mer  en  proportion  de  8  à  1,  assez  hardi  d'accuser  d'erreur  Ptolémée 
lai-méme  qui  s'évertuait  à  rectifier  à  l'extravagance  de  Marin. 

De  cette  manière  les  Italiens  réglaient  l'autre  hémisphère  et  propa- 
geaient leur  conception  en  Portugal  et  en  Espagne;  Ptolémée  entrait 
tout  entier  dans  la  mappemonde  pour  donner  de  l'ampleur  à  toutes  les 
parties  connues  et  inconnues,  et  pour  gonfler  le  continent  d'un  exces- 
sif embonpoint. 

Martin  Brhaïm,  1492. 

185.  Dans  les  mêmes  années  en  Allemagne,  Jean  Mûller  kônisber- 
geoîsde  Frankonie,  Regiomoutanus,  habitant  quelque  temps  à  Nurem- 
berg (1471-1475),  ne  cessa  de  répandre  l'astrolabe  et  le  météoroscope 
de  son  invention,  d'une  certaine  importance  pour  la  navigation  et  la 
séographie  (200).  Là,  à  Nuremberg ,  se  trouva  aussi  Martin  Behaïm,  fils 
de  Martin  et  d'Agnès  Schopper  de  Schoppershof ,  d'une  famille  distin- 
gaée  et  patricienne,  dont  le  nom  figure  dans  les  hautes  fonctions  de  la 
ville  (200).  Martin  Behaïm  avait  donc  une  instruction  convenable  et 

g  18]  Humboldt,  examen  de  Thist.  gcogr.  du  nouveau  inonde  1. 1,  p  ïil,  227, 233;  t.  H,  p.  368. 
16)  Baachc  (mëm.  de  IMnstit.  t.  VI,  p.  8  et  10),  observe  qu'André  Bianro  comptait  un  espace 
à8*S3'.-.  Les  iO  espaces  entre  Antilla  et  Cinango  sont  évalues  à  30  degrés  sur  le  globe  de  Behaïm. 
Wfl)  Colomb  pins  ou  moins  suivit  ce  cliemiu.  —  Humboldt  (exam.  de  Tbist.  de  la  géogr.  du  n.  m. 
tl»  p.  237,  252),  pense  que  toman  do  el  camino  derecho  al  poniente,  partant  de  Lisbone  signifie 
^ooreasement  le  parallèle  de  Lisbone. 

(S18)  Cette  opinion  figure  sur  le  globe  de  Behaïm  et  elle  se  consolida  pour  un  certain  temps,  à  la 
mite aes découvertes  du  nouveau  monde.  Voyez  Ruysch,  Sylvaous,  Schoner,  Bordone. 

(279)  Le  météorosi-ope ,  ou  l'instrument  propre  à  mesurer  les  longitudes  et  les  latitudes  parle 
■oyâi  des  étoiles,  qu'il  crut  avoir  invente  d'après  l'idée  d'un  passage  de  Ptolémée  géogr.  I,  3; 
*insi  qu'il  le  dit  dans  une  lettre  au  cardinal  Bcssarion.  Cette  lettre  se  trouve  à  la  suite  des  œuvres 
^Wemer,  imprimées  in-folio  à  Norimb.  1514,  et  in-4"  4537.  —En  4463,  Begegiomontanus  dédia 
^  Toscanelli  son  traité  de  quadratura  circuli.  —  Mécontent  des  tables  du  roi  Aifonse,  Regiomoutanus 
psUia  à  Nuremberg  ses  fameuses  éphémérides  astronomiques,  calculées  d'avance  pour  les  années 
U78à4S06,  et  qui  ont  servi  sur  les  côtes  d'Afrique,  d'Amérique  et  de  l'Inde,  dans  les  premiers 
Knnds  voyages  des  découvertes  de  Bartolomé  de  Diaz,  de  Colomb,  de  Vospucci  et  de  (iama. 

(280)  De  nombreuses  conjectures  et  fables  avaient  été  inventées  sur  Martin  Behaïm.  Nous  ne 
voulons  pas  y  toucher.  Nous  rapprochons  les  dates  certaines,  confrontant  les  cartes  et  nous  en  tirous 
des  coDsé<}QeQces.  —  Voyez  la  notice  sur  le  chevalier  Aiartin  Behaïm  par  de  Hurr,  traduit  de  l'aWe- 


I 


I3i  GÉOOR.  LATINE,  1470-1550. 

plusieurs  années  après  la  mort  de  son  père  (1471-1479),  il  s'adonnait 
encore  au  commerce  de  toile  en  Allemagne,  comme  il  dit  lui-même 
dans  sa  lettre  à  son  oncle  Léonard,  datée  d*Ânvers  1479,  8  juin  (tsi). 
Le  commerce  continental  de  toile  ne  fait  présumer  aucune  instruction 
nautique  de  la  part  de  Martin  Bebaîm. 

En  1481  il  se  rendit  en  Portugal.  11  y  trouva  les  esprits  tout  préoc- 
cupés de  grandes  entreprises  maritimes.  Âlfonse  V  Tafricain  régnait 
encore  (mort  en  1481).  Les  conquêtes  récentes  d'Âlcazar ,  de  Tanger, 
d'Arzilla,  plusieurs  découvertes  des  îles  de  Tocéan  prises  en  possession 
et  colonisées,  illustraient  alors  le  Portugal.  L*infant  Henri  ne  vivait 
plus  (mort  1465),  son  frère  Ferdinand  était  mort  (en  1443),  mais  la 
marine  prit  des  proportions  croissantes  ;  Técole  ou  Facadémie  nautique 
qu'ils  avaient  fondée  à  Sagrès  ne  cessait  depuis  60  ans  de  produire  des 
pilotes  instruits,  courageux;  Finstruction  nautique  étant  en  vogue ,  les 
plus  puissants  seigneurs  affectaient  à  la  cour  d'y  être  initiés.  L'astro- 
labe y  était  connu  et  on  savait  à  quel  usage  il  pouvait  servir;  on  l'avait 
employé  dans  l'expédition  de  1481,  commandée  par  Jean  d'Âzambique. 

On  dressait  les  cartes  géographiques  nautiques,  et  l'instruction  de 
Tacadémie  de  Sagrès  recommandait  les  longitudes  et  les  latitudes  géo- 
graphiques aux  marins.  De  nombreux  renseignements  et  de  nombreuses 
cartes  encombraient  le  dépôt  du  trésor  royal,  gardé  soigneusement, 
pour  que  les  connaissances  acquises  ne  pussent  transpirer  à  l'avantage 
des  autres.  Jean  II,  succédant  à  son  père,  méditait  de  nouvelles  explo- 
rations, c'était  toujours  les  côles  d'Afrique  et  le  commerce  avec  l'Inde 
oriental  qu'on  avait  en  vue,  pour  que  Tépicerie  et  les  marchandises  de 
rinde,  passant  par  12  mains  et  par  12  gains,  pussent  arriver  directe- 
ment en  Portugal. 

Depuis  10  ans  résidait  à  Lisbone  un  génois,  Christophe  Colomb,  de 
Terra  Rosa  (né  vers  1456).  Il  épousa  en  1471  Philippine  Moniz  Peres- 
trella,  fille  d'un  capitaine  de  vaisseau,  employé  dans  son  temps  (en  1450) 
par  rinfant  Henri  dans  différentes  expéditions,  ensuite  gouverneur  de 
Tîle  Porto  santo.  Par  cette  liaison,  Colomb  se  trouva  à  portée  de 
connaître  ce  que  le  dépôt  nautique  contenait  de  précieux,  au  moins  il 
eut  eu  sa  possession  les  cartes  nautiques  et  les  journaux  de  son  beau- 
père.  Par  ces  courses  avantureuses  il  se  familiarisa  avec  l'art  nautique. 
Il  visita  en  1477Thyle  (Islande)  et  la  mer  au  delà  jusqu'à  75®;  il  se 
rendit  plusieurs  fois  au  fortin  de  San  Gorge  de  la  mina,  construit 
en  1481,  sur  les  côtes  de  Guinée.  Nourrissant  dans  sa  pensée  l'idée  de 
se  rendre  par  l'ouest  jusqu'à  l'Inde  et  regardant  sa  sphérille  qu'il  avait 
de  maître  Paul  (una  esferilla  que  embio  a  maestro  Paulo),  il  conclut, 
qu'eu  se  dirigeant  directement  à  l'ouest  à  travers  l'océan  atlantique,  on 
parviendrait  à  connaître  les  nouvelles  terres,  et  cette  Inde  qu'on  cher- 
chait à  atteindre  en  doublant  l'immense  Afrique.  Dans  sa  correspon- 
dance épistolaire  avec  Marc  Paul  (Toscanelli)  il  exposa  en  1474  ses  vues 
et  ses  espérances.  Marc  Paul  pensait  que  les  premières  terres  qu'on 
irait  découvrir,  seraient  le  Kathaî  ou  la  Chine,  et  l'empire  du  grand 

mand  par  H.  J.  Jansnn  (à  la  fin  du  premier  voyage  autour  da  monde  par  Pigafetta,  Paris  Tan  IX); 
dcr  Erdglobiis  der  Martin  Behaïm  und  der  des  Jolian  Schoner,  Abliaodlung  Ton  F.  W.  Ghillany, 
Nuremb.  1844,  in  *•. 
(281)  Pour  son  commerce,  il  était  en  1457  à  Venise,  de  1477  à  1479  à  Malines,  Anvers  et  Vienne. 


BEHAiH,   186.  155 

cham  (Herrera,  de  las  Indîas  occidentales  decas  I,  livre  I,  c.  S).  Colomb 
comprenait  cette  possibilité ,  mais  conformément  aux  idées  des  anciens, 
il  admettait  aussi  la  nécessité  de  Texistence  d*un  continent  antipode 
sur  Fan tre  hémisphère,  comme  contre  poids.  Il  exposa  en  1482  son 
projet  au  sénat  de  Gènes  sa  patrie,  qui  ne  Técouta  point  (Herrera,  ibid. 
cap.  7).  Il  s'adressa  ensuite,  en  1485,  au  roi  de  Portugal  Jean  II.  Une 
commission  examina  ses  raisons.  Diego  de  Ortiz,  évéque  de  Ceuta,  et 
les  cosmograpbes  Rodrigues  et  Joseph,  désapprouvèrent  ces  rêveries  de 
Colomb  qui  n'étaient  fondées  à  leur  avis ,  que  sur  Tignorance  de  terres 
inconnues  aux  Portugais  dans  la  partie  occidentale  du  globe ,  ou  sur 
Textravagant  projet  de  partir  à  Cipangou  (Herrera,  ibid.  decas  I, 
livre  III,  cap.  I,  etc.;  Yasconcellos,  vida  del  redon  Juan  el seconde,  en 
Madrid  1659,  lib.  IV).  Dans  toute  celte  affaire,  ni  Tîle  Ântilia  ou 
Brandan,  ni  quelque  autre  conte  fabuleux  ou  renseignement  obscur, 
mais  les  idées  antiques  réveillées  par  la  renaissance  des  lettres ,  et  la 
mappemonde  de  Ptolémée  complémentée  par  les  narrations  de  Marco 
Polo,  de  Conti  et  d'autres  étaient  les  seules  qui  enflammaient  l'ardeur 
de  l'intrépide  génois. 

Frustré  dans  ses  calculs  sur  ce  point,  Colomb  envoya  son  frère  Bar- 
thélémy Colomb  en  Angleterre,  qui,  en  1488,  le  15  février,  présenta  au 
roi  Henri  VII  une  carte  du  globe  terrestre  qu'il  avait  dessinée  lui-même, 
étant  devenu  bon  géographe  et  connaissant  la  navigation  (carte  citée 
par  l'éditeur  anglais  des  voyages  de  Hakluyt).  En  attendant  Christophe 
Colomb,  depuis  1484,  passait  les  années  d'impatience  en  Espagne,  où 
ses  Tues  furent  prises  en  considération. 

186.  Le  Portugal  se  montrait  très-hospitalier  pour  les  étrangers , 
recherchait  même  les  hommes  instruits  de  différentes  nations.  Italiens, 
Flamands ,  Allemands  entraient  dans  le  service  et  participaient  hono- 
rablement aux  expéditions  lointaines ,  aux  études  nautiques  ou  géogra- 
phiques (t83).  Martin  Behaïm  arrivé  à  Lisbonne  en  1481 ,  se  fit  bientôt 
distinguer  par  ses  connaissances  mathématiques  et  fut  particulièrement 
connu  par  Rodrigues  et  Joseph,  aussi  bien  que  par  Moïse.  L'an  1484, 
dit  Martin  Behaïm  lui-même  (dans  une  épigraphe  de  son  globe) ,  don 
Joao  roi  de  Portugal ,  fit  équiper  deux  vaisseaux  qu'on  appelle  caravel- 
les (commandées  par  Diego  Cam  et  Juan  Alfons  Daveiro) ,  munis  d'hom- 
mes avec  des  vivres  et  des  armes  pour  trois  ans  (ass).  Il  fut  ordonné  à 
Véquipage  de  naviguer  en  passant  les  colonnes  plantées  par  Hercule  en 
Afrique,  toujours  vers  le  midi  et  vers  le  lieu  où  se  lève  le  soleil,  aussi 
loin  qu'il  leur  serait  possible.  Étant  ainsi  équipés,  continue  Behaïm, 
nous  sortîmes  du  port  de  la  ville  de  Lisbone  et  fîmes  voile  vers  l'ile  de 

(tSt)  Voici  quelques  étrangers  plus  renommés  au  service  de  Portugal  :  Te  norvégion  Balarte;  le 

S énois  Antoine  Nolle  en  1450;  le  vénitien  Aloysio  de  Cada  Mosto  en  1-456  ;  le  flamand  Jcrge  d'Utra 
^ob  de  Heurter];  le  français  Jean  Baptiste;  les  allemands  nurembergeois  Martin  Behaïm  eu  1485;  et 
Wbif  Holzsdmher  en  1503;  le  florintin  Âmerigo  Vtspucio;  le  vicenzin  Marc  Antonio  Pigafctta 
en  4  BSD. 

(S83)  Behatm  n*a  pas  nommé  Diego  Cam  dans  l'épigraphe  de  son  globe,  mais  Hartman  Schndol, 
dans  un  liber  cbronicarum,  imprimé  à  Nuremberg ,  1493,  pendant  que  le  cosraographc  se  trouvait 
^ncore  dans  la  même  ville,  réunit  les  deux  noms:  praefecit  galets  bene  instructis  JolianncsH, 
Por  tagalîae  rex,  anno  1483,  patronos  duos  :  Jactibum  Canum  portugalensem,etMartinum  Bobemum, 
.  ^ominem  germanum,  de  bona  Bohemorum  familia  natum,  qui  superato  circulo  equinoxiali  in  alterum 
orben  exceptisunt. 


154  GÉOGR.  LATINE»  1410-1470. 

Madère,  et  après  avoir  doublé  les  îles  Fortunées  et  les  fies  sauvages  de 
Canaries,  nous  trouvâmes  des  rois  maures.  Nous  arrivâmes  dans  le  pays 
de  Gambie.  Il  est  éloigné  de  800  milles  d*allemagne  du  Portugal.  Âpres 
quoi ,  nous  passâmes  dans  le  pays  du  roi  de  Fourfour  qui  en  est  à  1200 
milles.  Plus  loin  encore  est  un  pays  où  nous  trouvâmes  Técorce  de 
cannelle.  Nous  étions  alors  éloignés  du  Portugal  de  2500  milles  :  nous 
revînmes  chez  nous,  et  le  19""  mois,  nous  nous  retrouvâmes  de  retour 
chez  notre  roi.  —  De  l'autre  côté  de  la  pointe,  proche  de  rîo  Tucumero 
(Targonero)  et  de  porto  Bartholo  Yiego,  il  place  sur  son  globe  le  pavil- 
lon portugais  accompagné  de  l'épigraphe  :  jusqu'à  ce  lieu-ci  sont  venus 
les  vaisseaux  portugais  qui  y  ont  élevé  leur  colonne  et  au  bout  de  19 
mois  ils  sont  arrivés  de  retour  dans  le  pays. 

Le  roi  Jean,  pour  avancer  les  connaissances  des  pays  éloignés,  pré- 
para cette  expédition  et  afin  de  préserver  de  danger  la  navigation  dans 
les  mers  inconnues,  recommanda  à  ses  médecins  cosmographes  Rodri- 
gues  et  Joseph  de  se  concerter  avec  Martin  Behaïm  et  d'inventer  quel- 
que chose,  qui  dirigerait  les  navires  avec  plus  de  certitude,  surtout 
lorsqu'ils  perdaient  de  vue  les  astres  connus.  Ces  trois  hommes  versés 
dans  les  mathématiques,  après  de  laborieuses  études  et  après  une  lon- 
gue délibération  sur  l'astrolabe  dont  se  servaient  les  astronomes,  appli- 
quèrent son  usage  à  la  navigation  (234). 

De  retour  de  cette  expédition,  Martin  Behaïm  épousa  en  1486  Jeanne 
de  Macedo,  fille  du  flamand  Job  de  Huerter  de  Moer  Kirchen,  gouver- 
neur et  possesseur  des  îles  Fayal  et  Pico,  colonisées  (depuis  1466)  par 
les  Flamands.  En  même  temps  Barthélémy  Diaz,  conjointement  avec 
son  frère  Pierre  et  l'infant  don  Joao,  atteignit  le  cap  le  plus  méri- 
dional de  l'Afrique  et  le  doubla  en  y  plantant,  le  18  janvier  1486,  les 
colonnes  du  roi  de  Portugal  et  donnant  à  ce  cap  le  nom  de  Turmentes; 
le  roi  Jean  II  changea  cette  dénomination  en  cap  de  Bonne-Espérance. 

Jean  II  ne  se  bornait  point  aux  investigations  maritimes.  Au  mois  de 
mai  1487,  il  fit  partir  à  l'orient  Pierre  de  Cavillam  et  Alfonse  de  Payva, 
qui  se  rendirent  à  Alexandrie,  d'où  le  premier  alla  visiter  l'Inde,  par 
Suez  et  Adcn,  l'autre  se  rendit  en  Abyssinie  où  il  mourut.  Pour  savoir 
diriger  leur  route  ils  prirent  la  copie  d'une  mappemonde,  composée  par 
Cassadilla.  Les  rapports  de  Cavillam  n'étaient  pas  encore  parvenus  à 
Lisbone,  lorsque  des  renseignements  donnés  par  deux  juifs  sur  Cal- 
cutta, vinrent  de  nouveau  échauffer  l'ardeur  portugaise  à  une  nouvelle 
expédition ,  afin  de  pénétrer  dans  les  Indes. 

Martin  Behaïm,  passant  ses  jours  à  Fayal  ou  à  Lisbone,  où  il  possédait 
toute  la  confiance  de  Jean  IL  se  trouva  à  même  de  connaître  tous  ces 
renseignements,  toutes  les  découvertes  des  Portugais.  Il  connut  leurs 
cartes  nautiques,  qu'on  qualifiait  de  hydrographie,  leurs  mappemondes 
copiées  sans  cesse  pour  l'usage  des  marins ,  de  la  cour,  du  conseil ,  des 

(%8i)  Ut  miDor  cum  errandi  pcriculo  ignotum  mare  uavigari  posset ,  Roderico  et  Joscplio  mcdî- 
cissiiis,  nec  non  Martino  Bohemo,  ea  actate  peritissimis  mathematicis,  iniunxit  Joannes  H ,  ut 
adhibito  inter  se  consilio,  excogitarcnt  aliquid,  qno  nautae  cursum  navium,  licet  in  nostro  nonoqae 
polago,  tutius  dirigèrent,  nt  vcl  ahstracti  a  notis  sideribus,  cognitisque  littoribus,  quam  coeli  ac 
pclagi  partein  tenerent,  aliquo  modo  cngnoscerent  :  ii  post  îndeîessum  studium,  longamqne  medi- 
tationeni,  astrolabium,  instrumcntum,  quod  anteastronomiae  tatnm  inservicbat ,  utîlinri  inventoad 
navigandi  artem,  roaximo  navigantium  commode,  transtulere  :  quod  beneflcium  tota  Europa  Joanui 
debere  inficiari  non  potesl  (Emmanuel  Tellezins  Sjlvius,  marchio  algretensis,  de  rébus  |^sUs 
/oanuis  H,  Hagae  comitis,  1712,  p.  99). 


BEHAÏMy    187.  135 

seigneurs;  cartes  enrichies  par  le  progrès  des  découvertes;  modifiées 
certainement  sur  quelques  points  par  des  investigations  et  les  relations 
apportés  de  différents  pays. 

Aucune  nation,  à  cette  époque,  n*était  à  même  de  composer  les  cartes 
générales  et  les  cartes  spéciales  des  différents  pays  éloignés  que  les 
Portugais.  Qui  eut  été  en  état  de  donner  quelque  idée  de  TAfrique  si  ce 
n'est  les  seuls  Portugais?  qui  était  le  plus  disposé  à  se  former  de  nou- 
velles conceptions  sur  Flnde  et  à  les  élargir ,  si  ce  n'est  encore  les  Por- 
tugais? Les  géographes  catalans,  italiens,  tout  riches  qu'ils  étaient  de 
leurs  précédentes  élaborations ,  puisaient  dans  celte  nouvelle  source , 
qui  jaillissait  loin  du  cercle  de  la  connaissance  antérieure. 

Les  récits  de  Marco  Polo  fournissaient  toujours  de  plus  abondants 
matériaux  pour  l'orient,  aux  catalans,  aux  italiens,  aux  portugais,  mais 
dans  chaque  siècle  ils  étaient  autrement  compris,  autrement  figurés.  Il 
suffit  de  jeter  un  coup  d'oeil  sur  les  cartes,  catalane  de  1577,  sur  celle 
de  fra  Mauro  de  1456,  enfin  sur  toutes  celles  qu'engendrèrent  les  efforts 
que  l'on  fit  pour  complcmentcr  les  connaissances  de  Ptolémée. 

187.  Martin  Rehaïm,  riche  de  connaissances  portugaises,  se  rendit 
en  1490  à  Nuremberg,  pour  y  revoir  sa  famille.  On  conçoit  qu'il  avait 
bien  des  choses  à  raconter  aux  bourgeois  de  sa  patrie,  et  pouvait  leur 
étaler  des  curiosités  inconnues.  Le  magistrat ,  désirant  conserver  ses 
connaissances,  l'engagea  à  construire  un  globe,  dont  l'exécution  fut 
achevée  en  1492  par  Martin  Bchaîm  et  George  Holizschucr.  Laissons 
expliquer  l'ouvrage  à  Behaïm  lui-même  comme  il  l'inscrivit  au  bas  du 
globe  près  du  pôle  antarctique. 

A  la  demande  et  réquisition,  dit-il,  des  sages  et  vénérables  magis- 
trats de  la  noble  ville  impériale  de  Nuremberg  qui  la  gouvernent  actuel- 
lement, nommés  Gabriel  Nutzel,  P.  Volkamer  et  Nicolas  Groland,  ce 
globe  a  été  inventé  et  exécuté ,  d'après  les  découvertes  et  les  indica- 
tions du  chevalier  Martin  Behaïm,  très-versé  dans  l'art  de  la  cosmogra- 
phie et  qui  a  navigué  autour  d'un  tiers  de  la  terre.  Le  tout  pris  avec 
beaucoup  de  soin  dans  les  livres  de  Ptoiémce ,  de  Pline ,  de  Strabon ,  et 
de  Marco  Polo  et  le  tout  rassemblé,  tant  terres  que  mers,  suivant  leur 
forme  et  leur  situation,  ainsi  que  cela  a  clé  ordonné  par  les  susdits 
magistrats  à  George  Holzschuer,  qui  a  concouru  à  rexéculion  de  ce 
globe  en  1492;  lequel  globe  a  été  laissé  par  le  susdit  seigneur  Martin 
Bebaïm  à  la  ville  de  Nuremberg,  comme  un  souvenir  et  un  hommage 
de  sa  part,  avant  qu'il  ne  retournât  chez  sa  femme  qui  était  dans 
une  île  éloignée  de  700  milles,  où  il  a  établi  sa  demeure  et  où  il  se 
propose  de  terminer  ses  jours. 

Sur  la  partie  inférieure  du  globe, au-dessous  de  la  ligne  équinoxiale, 
îi  ajoute  :  il  faut  savoir  que  cette  figure  du  giobe  représente  toute  la 
grandeur  de  la  terre,  tant  en  longitude  qu'en  latitude  mesurée  géométri- 
quement d'après  ce  que  Ptolémée  dit  dans  son  livre  intitulé:  cosmologia 
^Holemaei ,  savoir  :  une  partie ,  et  ensuite  le  reste  d'après  le  chevalier 
Marco  Polo,  qui  de  Venise  a  voyagé  dans  l'orient,  l'an  1250,  ainsi  que 
Japrès  ce  que  le  respectable  docteur  et  chevalier  Jean  de  Mandaville  a 
^î^  »  en  1522,  dans  un  livre  sur  les  pays  inconnus  à  Ptolémée  dans 
I Orient,  avec  toutes  les  îles  qui  y  appartiennent,  d'où  nous  viennent 


436  GÉ06R.  LATm£,  «410-1470. 

les  épiceries  et  les  pierres  précieuses.  Mais  Tillustre  don  Joao,,  roi  de 
Portugal ,  a  fait  visiter  en  1485,  par  ses  vaisseaux  tout  le  reste  de  la 
partie  du  globe,  vers  le  midi,  que  Ptolémée  n'a  pas  connue  :  découverte 
à  laquelle  moi,  qui  ai  fait  ce  globe,  me  suis  trouvé.  Vers  le  couchant 
est  la  mer  appelée  océan,  où  Ton  a  également  navigué  plus  loin  que  ne 
rindique  Ptolémée  et  au  delà  des  colonnes  d'Hercule ,  jusqu'aux  îles 
d'Açores,  Fayal  et  Pico  qui  sont  habitées  par  le  noble  et  pieux  cheva- 
lier Jobst  de  Huerter  de  Morkirchen ,  mon  cher  beau-père ,  qui  y 
demeure  avec  les  colons  qu'il  y  a  conduits  de  Flandres  et  qui  les  possède 
et  les  gouverne.  Vers  la  région  ténébreuse  du  nord,  on  trouve  au  delà 
des  bornes  indiquées  par  Ptolémée ,  l'Islande ,  la  Norvège  et  la  Russie , 
pays  qui  nous  sont  aujourd'hui  connus,  et  vers  lesquels  on  envoie  tous 
les  ans  des  vaisseaux  :  quoique  le  monde  soit  assez  simple  pour  croire 
qu'on  ne  puisse  pas  aller  ou  naviguer  partout  de  la  même  manière 
dont  le  globe  est  construit. 

188.  Conformément  à  cette  exposition,  le  ^lobe  représente,  à  quel- 
ques légères  modifications  près,  rhabitable  disproportionnée  de  Ptolé- 
mée ,  couverte  de  noms  modernes  et  encadrée  de  quatre  côtés  dans  des 
compléments  de  connaissances  modernes  ignorées  par  Ptolémée.  Au 
nord  les  parages  baltiques  fréquentés  chaque  année  par  des  vaisseaux  ; 
au  sud  l'Afrique  visitée  par  les  Portugais;  à  l'ouest,  les  îles  prises  en 
possession  par  les  Portugais;  à  l'est  le  Kataî,  les  îles  indiennes  et 
Zipangu  suivant  la  relation  de  Marco  Polo.  Coyl,  Loach ,  Moabar, 
Murfuli,  connus  par  ce  voyageur  dans  la  péninsule  indienne  avec  toutes 
les  îles  sont  renvoyés  au  delà  de  l'échelle  ptoléméenne  et  commencent 
à  former  un  nouveau  monde  d'un  autre  hémisphère.  Les  compléments 
de  l'est  et  de  l'ouest  sont  séparés  par  un  vide  océanique ,  et  avançant 
de  deux  côtés  sur  un  autre  hémisphère  du  globe ,  sont  rapprochés  à  tel 
point  qu'ils  dévoilèrent,  en  4470,  à  l'imagination  ardente  de  Christophe 
Colomb,  la  traversée  possible  de  l'océan.  Dès  l'année  141 7 les  Portugais 
furent  appelés  à  retrouver  les  îles  de  l'océan  occidental ,  dont  on  savait 
l'existence;  leurs  reconnaissances  furent  terminées  vers  1450,  depuis 
commença  leur  colonisation  en  1466  et  147â,  tant  des  îles  Catherides  ou 
Açores  que  des  îles  du  Cap  vert  ou  Fortunées  ou  Canaries.  En  même 
temps  les  Portugais  traçaient  sur  leurs  hydrographies  et  leurs  mappe- 
mondes, le  complément  de  l'est  et  assignaient  l'emplacement  de 
Zipangu  sur  le  globe,  et  le  degré  de  sa  longitude  géographieque.  Ces 
connaissances  furent  divulguées  en  1492,  par  Martin  Behaïm  aux  alle- 
mands (285). 

Dans  la  même  année  1492,  le  5  août ,  Colomb  mit  à  la  voile  de  Paies 
et  découvrit  l'Ile  Lucaye  appelée  Guanahanî,  à  laquelle  il  donna  le  nom 
de  san  Salvador.  Le  5  mai  de  l'année  suivante  1495,  il  rentra  à  Restelo 
(aujourd'hui  Belem)  sur  le  Tage;  mais  il  en  sortit  bientôt,  après  avoir 
eu  l'audience  chez  Jean  II ,  qui  le  reçut  gracieusement  et  le  laissa 
ensuite  partir  sans  obstacle  pour  l'Espagne. 

(t8S)  Voyez  dans  notre  atlas  l'hémisphcre  du  globe  de  Behaïm  de  i492;  le  complément  de  Ptolémée 
tracé  lur  la  carte  hydrograpliitiue  portugaise  de  4500;  ce  complément  publié  par  Silvanus  en  4S11; 
et  la  susdite  hydrographie  publiée  en  1!$1&;  enQn  l'hémisphère  de  Schoener  do  l'anaoe  ibiO. 


BEHÂÏMy  189.  i37 

Martin  Bebaîm  ayant  mis  la  dernière  main  à  son  (;lobe  terrestre, 
retourna  en  Portugal  et  apprit  la  première  heureuse  issue  de  Texpédi- 
tion  de  Colomb.  Honoré  de  la  confiance  de  Jean  H,  il  fut  envoyé  enl494 
en  Flandres  auprès  de  son  fils  naturel  George.  Bebaîm  eut  le  malheur 
d'être  pris  sur  mer  et  fut  conduit  en  Angleterre.  Remis  en  mer  il  tomba 
de  nouveau  entre  les  mains  d'un  corsaire  qui  le  mena  en  France.  Après 
avoir  payé  sa  rançon ,  il  se  hâta  de  retourner  par  Bruges  et  Anvers  en 
Portugal ,  où  le  roi  Jean  II  était  mort  le  25  octobre  de  Tannée  de  son 
départ  1494.  Depuis  on  n'entendit  plus  parler  de  Behaïm.  Ceriainement 
il  s'était  retiré  chez  son  beau-père  et  passa  le  reste  de  ses  jours  dans 
File  de  Fayal,  d'où  il  se  rendit  en  1506  à  Lisbone,  où  il  mourut  le  29 
juillet  de  la  même  année  ou  de  Tannée  suivante.  Pendant  les  quatorze 
ans  de  sa  vie  qui  s'écoulèrent  depuis  la  confection  de  son  globe ,  il 
apprit  dans  son  âge  avancé,  chaque  année  de  nouvelles  découvertes, 
tant  dans  les  nouvelles  Indes  occidentales  que  dans  les  Indes  orienlales, 
découvertes  qui  manquaient  à  son  globe ,  et  qui  figuraient  dans  ses 
cartes  postérieures  :  car  dans  sa  retraite  il  les  dessinait  et  elles  furent 
déposées  dans  la  trésorerie  royale.  Sur  les  cartes  de  son  dessin  on 
voyait  les  découvertes  réelles  et  les  terres,  directions,  détroits  présumés 
à  découvrir  (sse). 

Sa  renommée  en  Allemagne  était  grande  déjà  de  son  vivant.  Elle 
grandit  après  sa  morU  Bien  méritée  par  ses  connaissances,  mais  gagnée 
spécialement  durant  son  séjour  à  Nuremberg  en  1492,  par  son  globe  et 
par  la  mappemonde  qu'il  y  laissa  (as 7), 

189.  Le  globe  terrestre  de  Behaïm,  couvert  d'un  vélin  noirci,  tient 
un  pied  et  huit  pouces  de  Paris  de  diamètre.  Les  pavillons  portant  les 
armoiries  des  puissances  respectives,  sont  peintes,  ainsi  que  les 
demeures  et  les  figures  des  habitants  de  chaque  pays  qui  sont  dessinés 
avec  beaucoup  de  soin.  Les  noms  des  lieux  sont  écrits  à  Tencre  rouge 
et  jaune  (ou  blanc  jauni).  Le  premier  méridien  passe  par  Madère.  Ni 
les  méridiens,  ni  les  parallèles  ne  sont  tirés.  On  y  voit  seulement 
réquateur,  les  deux  tropiques  et  les  deux  cercles  polaires  arctique  et 
antarctique  (voyez  n"*  109  de  notre  atlas).  Le  méridien  mobile  de  fer  et 

(386)  Le  capitaine  général  (BTagellaD)  savait  qn'il  fallait  passer  par  un  détroit  fort  cacbé  mais  qn*il 
avait  vu  représenté  sur  une  carte  faite  par  Martin  de  Bohème  (Bebaîm),  trcs-excelient  cosmographe, 
que  le  roi  de  Portugal  gardait  dans  sa  trésorerie  (Pigafetta,  voyage,  livre  I,  p.  40).  Celte  carte  dési- 
ipsait  un  détroit  au  sud  de  rAmérique,  qui  a  dû  être  dessiné  après  le  voyage  fait  en  1504,  à  la  suite 
daquel  Amerigo  avait  eu  l'idée  de  le  rechercher.  Ce  détroit  supposé  est  dessiné  sur  le  globe  de 
Schoener  avant  sa  découverte  réelle. 

(287)  Dans  le  dépôt  des  archives  de  la  famille  de  Behaïm  il  v  a  un  dessin  assez  exact  et  assez 
proprement  fait  de  son  globe  sur  deux  feuilles  de  vélin  (Murr,p.|^99  de  la  trad.  franc).  En  Portugal, 
oonobstaut  toutes  les  considérations  qui  l'entouraient^  associe  à  une  multitude  d'illustrations  nau- 
tiques et  cosmographiques,  c'est  à  peiue  s'il  se  trouve  nommé  par  un  seul  écrivain  portugais. 
Manuel  "Tellez  de  Sylva.* En  Allems^ne,  au  contraire,  son  nom  se  trouvait  dans  toutes  les  bouches, 
préoccupait  d'innombrables  plumes  et  l'écho  de  sa  gloire  pénétra  dans  l'Italie  et  dans  l'Espagne.  11 
s'était  écoulé  peu  d'années  depuis  sa  mort  que  déjà  on  débitait  quantité  de  fables  sur  son  compte  et 
d'inventions  absurdes ,  remplies  d'anachronismcs.  On  lui  attribua  toutes  les  cartes  qu'on  ne  voyait 
plus;  Colomb,  Magellan  ne  pouvaient  rester  debout  sans  la  concurrence  de  Behaïm  qui  avait  des 
connaissances  préalables  à  leurs  découvertes,  qui  les  devança  lui-même  avec  les  découvertes  qu'ils 
ont  faites.  On  n'a  pas  réfléchi  qu'en  débitant  de  semblables  contes,  on  fesait  tort  à  sa  mémoire; 
qu'en  lui  attribuant.tant  de  connaissances  on  fesait  de  lui  un  imbécile  qui  ne  savait  pas  les  mettre  à 
l^cvidence  et  à  la  portée  de  tout  le  monde  par  son  globe.  Le  globe  donnait  à  chaque  instant  une 
criante  dénégalioft  à  tout  ce  qu'on  inraginait,  cependant  on  se  déchaîna  dans  les  mventions  avec 
tant  d'assurance,  qu'il  fallut  enfin  combattre  l'erreur.  Voyez  Hurr.  —  Voyez  plus  bas  la  note 337. 


138  GÉOGR»  LATINE,   1410-1470. 

rhorizon  de  laiton  ne  furent  attachés  au  globe  qu'en  1510  le  5  novembre 
suivant,  date  qu'ils  portent.  Ce  méridien  mobile,  et  Féquateur  du  globe, 
portent  les  divisions  en  degrés.  Si  Ton  prend  pour  premier  méridien 
celui  qui  touche  Grancanaria  et  Madère,  on  aura,  en  comptant  la  longi- 
tude vers  Test,  le  continent  étendu  à  260''  de  longitude,  et  la  grande  île 
Zipangut  avancée  jusqu'à  S80\  Entre  Zipangut  et  Madère  sont  les 
eaux  innaviguées  et  les  fies  Âzores,  Fortunées,  de  capo  Verde  et  quel* 
ques  autres  (sss). 

Bebaïm ,  comme  nous  l'avons  vu ,  dit  lui-même  avoir  puisé  dans  le 
livre  de  Ptolémée  ;  qu'il  a  représenté  toute  la  grandeur  de  la  terre,  tant 
en  longitude  qu'en  latitude  d'après  ce  qu'a  dit  Ptolémée  dans  son  cos- 
mologia.  Aussi  nous  avons  observé  que  Ptolémée  y  est  encadré  presque 
inaltéré  dans  les  nouvelles  additions  latérales.  L'Europe,  l'Afrique  et  la 
mer  méditerranée  renoncent  sur  son  globe  aux  formes  qui  leur  ont  été 
données  par  les  cosmographes  du  moyen  âge;  elles  prennent  les  dis- 
proportions et  les  difformités  ptoléméennes;  elles  sont  avec  toute  l'Asie 
ancienne  affublées  dans  la  livrée  de  Ptolémée,  garnie  de  tous  côtés  de 
nouvelles  bordures,  de  nouvelles  franges.  Ce  travestissement  s'était 
décelé  à  nos  investigations,  vingt  ans  antérieurement  (1492-1470)  dans 
la  transfiguration  de  l'Italie  par  Donis.  Maintenant  nous  voyons  tous  les 
points  de  la  géographie  du  moyen  âge  plier  sous  le  joug  que  la  renais- 
sance des  lettres  lui  impose.  Il  est  bon  d'observer  que  BehaSm ,  avec 
beaucoup  de  ses  contemporains,  ayant  recours  à  la  sagesse  de  Ptolémée, 
ne  renonçait  pas  aux  idées  de  Thabitable  ronde,  dont  Jérusalem  était  le 
nombril.  L'étendue  excessive  de  la  méditerranée  secondait  admirable- 


(288)  Doppclmayr,  historische  Nacliricht  von  dcn  Nurnberg.  Matliematicis  nnd  Kûnstler, 
Nurnb.  1730,  a  fait  représenter  ce  globe  entier,  fort  en  petit,  quoique  en  général  d'une  manière 
assez  fidèle,  dit  Murr.  Ce  dernier  en  a  donné  l'iiémisphère  occidental  au  méridien  de  Hadera, 
retranchant  la  partie  orientale  de  Tlnde  en  y  faisant  disparaître  par  une  sécante,  KO  degrés  de  la 
ligne  équinoxiale.  Ghillany  a  donné  aussi  un  hémisphère  dessiné  par  Heideloff,  qui  contient  la 
partie  donnée  par  Murr  et  l'Afrique  jusqu'au  cap  de  Ronaspei.  Nous  avons  donc  devant  nous  trois 
copies  de  l'hémisphère  océanique,  toutes  les  trois  discordantes  :  chacune  a  ses  torts  manifestes.  — 
Dans  la  publication  de  Ghillany,  Wolf ,  dessinant  l'hémisphère  de  Schoner  a  mieux  réussi  que  Heide- 
loff, parce  qu'il  était  dirigé  par  le  canevas  des  méridiens  et  des  parallèles ,  tracés  sur  le  globe.  Le 
globe  de  Bebaïm  étant  privé  du  canevas  de  ces  lignes,  Heideloff  n'a  pas  su  se  l'imaginer  sons  la 
direction  des  échelles  équatoriales  et  du  méridien  mobile.  Les  tropiques  au  moins,  demandaient  son 
attention,  cependant  le  tropique  passe  au  nord  de  Sicile  par  l'Italie,  la  Grèce  etc.  Je  pense  aussi, 

3ue  la  graduation  de  Téquinoxiale  est  viciée  par  Heideloff  parce  qu'elle  ne  répond  pas  à  la  graduation 
e  deux  autres  copies,  qui  sont  d'accord.  —  H  nous  a  paru  juste  et  nécessaire  de  se  conformer  avec 
l'hémisphère  océanique  à  la  copie  de  Murr,  de  l'ajuster  au  dessin  assez  fidèle  de  Doppelmayr.  Tout  a 
été  assez  conciliable  à  l'exception  d'un  point  très-important,  sur  lequel  Murr  commit  une  méprise 
lâcheuse.  11  a  placé  Madère  et  les  Canaries  au  sud  du  tropique.  Une  erreur  semblable  ne  convient 
pas  au  constructeur  du  globe  ;  les  deux  autres  copies  donnent  un  démenti  à  l'incurie  de  Murr  : 
Heideloff  place  les  Canaries  sous  le  tropique.  Madère  au  nord;  Doppelmayr  les  place  toute  au  nord 
comme  il  convient.  Mais  ce  dernier  a  eu  tort  d'étendre  l'emplacement  des  Azores,  et  de  les  rappro- 
cher trop  aux  iles  septentrionales  de  Zipangri.  L'exécution  de  Doppelmayr,  assez  fidèle,  est  malheu- 
reusement affectée  de  négligence  qui  n'a  pu  disparaître  par  la  diminution  de  l'échelle.  Nous  l'avons 
réduit  dans  notre  copie  en  proportion  de  200  à  427.  —  Le  fait  est  que  jusqu'aujourd'hui  il  n'en  existe 
ni  figure  ni  description  propre  à  faire  connaître  le  globe  bchaïmien  comme  le  demande  l'histoire  de 


phère. 

important  d'avoir  une  bonne  et  complète  copie  de  la  mer  méditerranée,  de  la  Germanie,  etc. — 
Annotons  pour  la  copie  de  notre  atlas  que ,  au  lieu  de  burburum  Ghillany  lit  :  burburam  rot  de 
genea  :  ensuite  se  trouve  roi  organ,  jusqu'où  vont  chaque  année  les  caravanes  des  maures  de  tunis  ; 
au  lieu  de  burbaru,  Ghillany  lit  :  barbarin  roi  gambia  galof;  suit  le  roi  mormelli  chez  lequel  nait 
l'or  que  le  roi  de  portugal  fait  venir  ;  et  le  pays  du  roi  furfur,  produit  le  poivre  ^ui  fut  trouvé 
en  1485  par  le  roi  de  portugal,  Va-t-il  caput  bone  Spei?  Ghillany  ne  le  dit  pas;  il  termine  la  nomen- 
clature africaine  par  l'observation,  que,  an  dem  von  Johan  II  sogenannten  Vorgebirge  der  guten 
Uoffnung  steht  :  hie  wurden  die  Saulen  des  konigs  von  Portugal  a.  domini,  4458,  den  48  Januar. 


BTDROGR.   PORTUGAISE»   190.  139 

ment  cette  idée.  Les  connaissances  nouvelles  de  parages  atlantiques 
éloignaient  Gibraltar  du  premier  méridien  à  plus  de  20  degrés,  auxquels 
rétendue  de  la  méditerranée,  ou  02  degrés  ajoutés,  plaçaient  Jérusalem 
à  90  degrés  de  longitude,  moitié  de  Thémisphère  (389).  Ptolémée 
confirma  le  nombril  et  finalement  il  s'est  installé  dans  tout  le  domaine 
de  la  mappemonde. 

La  carte  d'Allemagne  et  de  ses  alentours,  qu'en  1495  l'imprimeur  de 
Nuremberg,  Antoinhoburger  fit  élaborer,  adhibitis  viris  malhematicis , 
pingendique  carte  perilissimis,  Michaele  Wolgemut  et  Wilhelmo  Pley^ 
denwurff,  et  qu'il  fit  graver  sur  bois  pour  la  chronique  de  Hartman 
Schedel  (fol.  299,  500),  est  une  carte  de  Ptolémée  couverte  de  noms 
modernes  peu  nombreux.  Wolcemut  et  Pleydenwurf  sont  peintres, 
graveurs,  dessinateurs  :  les  mathématiciens  auteurs  ne  sont  pas  nom- 
més. Dans  l'intérieur  de  la  composition  ils  ont  modifié  les  cours  de 
plusieurs  fleuves,  en  y  introduisant  les  données  des  cartes  continentales 
des  cosmograpbes  antérieurs.  Il  semble  que  la  carte  est  développée  sur 
la  projection  conique  (voyez  n®  110  de  notre  atlas)  (390). 

Hydrographie  portugaise,  1500-1504. 

190.  La  confrontation  du  globe  et  de  la  mappemonde  de  Bchaîm 
avec  les  cartes  contemporaines  et  antérieures,  pourrait  nous  dévoiler 
tout  ce  qu'il  apporta  de  Portugal  et  nous  faire  connaître  jusqu'à  quel 
point  et  dans  quelles  années  Ptolémée  s'empara  des  consciences  géogra- 
phiques des  Portugais.  Malheureusement  rien  n'est  plus  obscur  que  la 
cartographie  portugaise,  qui  ne  nous  est  connue  que  par  des  copies  ou 
imitations  postérieures  répandues  en  Italie  et  en  Allemagne.  Les  cartes 
de  cette  reproduction  qui  nous  sont  connues,  ont  été  dressées  huit  à  dix 
ans  après  la  confection  du  globe.  Ptolémée  y  règne.  Cependant  nous  ne 
pouvons  accuser  Behaïm  de  l'avoir  installé  dans  l'école  portugaise. 
Ptolémée  y  exerça  son  autorité  sans  doute  vers  1470,  lorsque  Colomb 
et  Toscanelli  exposaient  leurs  projets.  En  attendant,  n'ayant  pas  des 
cartes  portugaises  plus  anciennes,  nous  allons  examiner  celles  qui  sont 
quelque  peu  postérieures  à  la  fabrication  du  globe. 

Dans  le  courant  de  ces  années,  de  nouvelles  découvertes  se  succédant 
rapidement  depuis  le  premier  voyage  de  Colomb ,  ouvrirent  de  grandes 
mers  et  terres  aux  courses  des  navigateurs.  En  1497,  Vasco  de  Gama^ 

(380)  D*AillyeD  1440,  divisant  la  carte  nautique  en  climats  ,  eut  soin  de  placer  Jérusalem  dans  le 
centre  'la  vieux  monde.  Mauro  en  liSO  explique  les  conditions  de  ce  centre.  Le  globe  de  Behaïm 
Tobserre  en  1409.  Abraham  Peritêol  en  lSi5  discute  cette  question  d'après  Ptolémée.  Pour  prouver 

que  la  Palestine  est  le  nombril  de  la  terre  V^^XH  *1'^]2l0  *'  ^  recours  aux  latitudes  et  longitudes. 

Il  compte  les  degrés  3i  ou  83  de  latitude  de  l'habitable  donnée  par  Ptolémée;  et  iS  parties  (00*}  de 
la  longitude,  qui  font  moitié  de  00  parties  (180*)  données  par  le  même  à  la  longitude  de  l'habitable 

(Peritsol,  itinerarium  mund-  "-*'*  '"■ —  ""'*'*  'k— -  '*»«• •  *»        '^-» — ' — =• ' 

dans  ton  esprit  l'idée  d'un  ( 
galion  sur  l'antre  bémisphc 
paradis  placé  à  l'antre  hémisphère  en  guise  de  contre  coupole'. 

(t90)  La  carte  de  la  chronique  de  Schedel ,  gui  a  l'honneur  de  porter  le  nom  de  Koburger,  ne  fait 
pas  grand  honneur  à  ses  auteurs  et  à  ses  exécuteurs.  Grossière  au  dernier  point,  désagréable  à  la 
vraetCU®  n'offre  que  des  épigraphes  peu  nombrenses.  Notre  toute  petite  climination,  réduite  en 
proportion  de  100  a  17  de  l'échelle  porte  tontes  ces  épigraphes  :  on  peut  les  compter.— Weblgemuth, 
célèbre  en  ce  qu'il  fit  avancer  la  gravure  en  bois,  fut  instructeur  de  Diirrer  (Doppclmayr,  p.  181). 


140  GÉOGB.   LATINE,  1470-15S0. 

passant  le  cap  de  Bonne  Espérance ,  toucha  Mozambique ,  Mombaza , 
Melinde  sur  les  côtes  orientales  de  F  Afrique  et  parvint,  le  18  mai  1498, 
à  Calicut.  L^expédition  de  Pedro  Alvarez  Cabrai  (9  mars  1500  —  juil- 
let 1501)  suivit  bientôt  ses  traces  (291).  Les  flottes  portugaises  allaient 
chaque  année  avancer  les  connaissances  de  la  péninsule  et  se  propo- 
saient d'avancer  un  jour  dans  Timmense  archipel  qui  n'était  tracé 
encore  que  d'après  les  ouï-dire.  Par  la  reconnaissance  de  Quiloa  sur  les 
côtes  de  Zanguebar,  en  1500,  on  apprit  Texistence  de  File  Madagaskar, 
où  le  roi  puissant  de  Quiloa  possédait  plusieurs  ports  de  Fîle  dont  le 
nom  était  vaguement  connu.  Visitée  bientôt  par  Lorenzo  Almeida,  elle 
reçut  le  nom  de  S.  Laurent  pour  un  certain  temps  :  ce  n'est  qu'en  1506 
que  Tristan  d'Acunha  examina  ses  caps,  ses  ports  et  tout  son  rivage. 

De  l'autre  côté,  Colomb,  reprenant  son  chemin,  reconnaissait  mieux 
les  îles  die  sa  découverte,  et  s'avançant  vers  le  sud  atteignit,  le  1" 
août  1498,  le  continent  du  nouveau  monde  à  l'embouchure  d'Orinoco 
de  la  Terre  firme.  En  même  temps  (1497)  les  Vénitiens  Jean  et  Sébastien 
(père  et  fils)  Cabol  (en  1498  Sébastien  seul),  visitaient  sur  une  flotte 
anglaise  les  côtes  septentrionales  de  ce  monde. 

Colomb  n'était  pas  encore  retourné  de  son  troisième  voyage  quand 
Alonso  de  Hoyeda  fut  expédié  et  partit  le  20  mai  1499  vers  la  Terre 
firme;  après  une  course  de  trois  mois,  il  rentra  le  5  septembre  1499  au 
port  Jaquimo  à  Haïti  et  ne  retourna  en  Espagne  que  mi-juin  1500, 
lorsque  Vincente  Yanez  Pinzon,  parti  en  décembre  de  Fannée  1499, 
examinait  les  côtes  de  la  Terre  firme  au  delà  de  Féquateur  et  retourna 
à  la  fin  du  mois  de  septembre  de  1500.  Le  florentin  Amerigo  (Almerik) 

(291)  Le  souvenir  d*nn  îndivida  du  hasard  se  rattache  aux  expéditions  de  Gama  et  de  Cabrai* 
d'un  juif  polonais ,  associé  à  plusieurs  explorateurs  des  plus  renommés.  Lorsque  Vasco  de  Gama,  à 
son  retour  en  Europe,  s'arrêta  en  décembre  li08,  à  la  petite  île  A.njediva  (Ankediva),  le  saîu^o  ou 
raja,  usurpateur  mauresque  de  Goa ,  traita  avec  Gama,  par  l'entremise  d'un  juif  qui  savait  un  peu 
l'italien  et  qu'on  prit  pour  un  espion.  Le  juif  fut  mis  à  la  question.  Vasquo  de  Gama  suspeitando  que 
era  espiu ,  o  mandou  prcnder  e  metter  a  tormento  :  o  tormento  Ibe  fez  confessar  que  era  judeu  de 
regno  de  Polonia  da  cidade  de  Posna  (Goes,  1,  44).  Le  tourment  lui  fit  dire  qu'il  était  de  Posen  de 
Pologne,  d'où  sa  famille  s'était  rétirée  en  4456,  à  cause  de  la  persécution,  d'aboi d  en  Palestine, 
ensuite  à  Alexandrie  en  Egypte.  Du  Caire  il  partit  par  la  mer  rouge,  faire  ses  tours  dans  les  vastes 
Indes.  Cette  persécution,  si  rare  en  Pologne ,  avait  eu  lieu  à  la  suite  de  la  visite  et  de  l'apostolat  de 
Jean  Capistran.  Par  son  intervention  en  4454,  on  abrogea  quelques  privilèges  dont  jouirent  les  juifs 
et  on  prescrivît  que,  pour  les  distinguer  de  la  noblesse ,  ils  porteraient  de  bircts  jaunes.  Ces  dispo- 
sitions, avant  d'être  méprisées  et  oubliées ,  mécontentèrent  les  juifs  et  suscitèrent  momentanément 
les  populations  contre  eux.  La  supposition  qu'il  était  né  à  Alexandrie  d'Egvpte  (Barros,dec.  I,  lib. 
il,  1. 1,  p.  366-368),  semblerait  avoir  quelque  force  spécieuse  :  mais  s'il  avait  atteint  60  ans,  au  jour 
de  la  torture ,  il  est  évident  qu'il  a  dû  voir  ses  jours  a  Posen  ,  d'où  eu  4456  avec  sa  famille,  il  partit 
dans  la  plus  tendre  jeunesse.  La  question  lui  donna  soudainement  envie  de  se  ranger  du  parti  des 
Portugais  et  d'embrasser  le  christianisme.  Baptisé,  il  reçut  le  nom  de  Gaspar  da  Gama,  en  réminis- 
cence de  celui  qui  l'avait  fait  appliquer  à  la  torture.  En  qualité  d'interprète  il  est  aussi  appelée 
Gaspard  da  India  (Goes,  1 ,  58,  p.  76  ;  comp.  Barros,  dec.  I,  lib.  V.  4, 1. 1,  p.  440).  Gama  se  servit 
de  cet  homme  expérimenté  et  intelligent  sur  la  côte  orientale  d'Afrique ,  sortent  à  Melinde  eo 
février  4499,  et  le  conduisit  à  Lisbone.  Accompagnant  Cabrai,  avec  un  antre  interprète  arabe  Gonzalo 
Madeira  natif  de  Tanger,  il  ga^na  l'Inde  pour  la  seconde  fois.  On  le  voit  d'abord  a  l'arrivée  à  Calicut, 
et  plus  tard  Cabrai  s'introduisit  chez  le  roi  de  Gochim ,  duce  judaeo  qui  fidcm  Christi  inducrat 

i  Lorenzo  Cretico,  ap.  Grynaeum,  p.  434).  Cabrai  retournant  de  son  expédition  rencontra  an  cap  Vert, 
es  navires  envoyés  pour  découvrir  la  nouvelle  terre  (Brasil)  qu'il  avait  trouvée  au  commencement 
de  son  expédition.  Amerigo  Vespueci  s'y  trouvant  s  empressa  d'interroger  Guasparre  ;  homme  le 
plus  intelligent  de  l'équipage ,  d'un  esprit  très-attentif,  sachant  beaucoup  de  langues.  Guasparre 
donna  des  renseignements  sur  le  commerce  et  sur  les  pays  plus  éloignés,  c[u'Amerigo  espérait 
explorer  à  l'aide  du  S.  Esprit.  Sur  le  champ  il  écrivit,  le  4  juin  4504,  de  la  station  du  cap  Vert  une 
lettre  à  Médicis ,  dans  laquelle  il  résume  et  commente  les  relations  du  touriste  Guasparre  (lettre 
publiée  en  4827,  par  Baldelli  Boni ,  il  milione  di  Marco  Polo).  Le  roi  Eramanu*^!  faisait  Beaucoup  de 
cas  de  Gaspar  et  aimait  à  se  servir  de  lui,  le  nommant  cavaleiro  de  sua  casa  (Damian  de  Goes,  p.  55). 
—  Notice  extraite  de  l'examen  de  l'hist.  de  la  ^éogr.  du  nouveau  monde ,  «l'Alexandre  Uumboldt , 
t.  V,  p.  40-44;  82-87.  (Voyez  notre  portulan  général). 


HTDROGR»    PORTUGAISE,   191.  i4i 

Vesp%u;ei,  attaché  depuis  plusieurs  années  à  une  maison  de  commerce 
en  Espagne,  accompagna  ces  deux  navigateurs  et  dans  un  court  espace 
de  temps  accomplit  ainsi  ses  deux  premiers  voyages. 

Rodrigo  de  Baslidas  avec  le  pilote  Juan  de  la  Cosa  (1500-1502)  poussa 
la  reconnaissance  du  nouveau  continent  dans  le  golfe  d'Uraba  jusqu*au 
poerto  del  retrete  ou  delos  escribanos  dans  Tisthme  de  Panama ,  où  se 
porta  Christophe  Colomb  dans  son  quatrième  et  dernier  voyage 
(11  mai  150â-7  nov.  ISO^i).  Voyage  plus  long  que  les  autres,  dans 
lequel  il  découvrit  la  côte  depuis  Hondouras  jusqu'au  puerto  de  Mos-  * 
quitos*  voyage  des  plus  remarquables  et  presque  inapperçu  par  ses  con- 
temporains. Le  grand  homme,  après  tant  de  vicissitudes,  mourut  le  20 
mai  1506,  honoré  mais  presque  oublié. 

Du  Portugal  Gaspar  Cortereal  suivit  (avril  1500-8  octobre  1501)  les 
traces  de  Cabot ,  dans  Tespoir  de  trouver  un  passage  aux  Indes  par  le 
nord.  Il  reconnut  les  bo^ds  qui  portaient  le  nom  de  terra  Laboratoris,  le 

golfe  Quadrado  et  terra  verde;  avançant  plus  au   nord  il  y  périt. 

Michel  (1502)  partit  à  la  recherche  de  son  frère  dans  la  baie  de  Hudson, 

et  périt  aussi.  Les  Portugais  renoncèrent  alors  à  tenter  la  fortune  dans 

ces  parages. 

191.  Pedro  Alvarez  Cabrai,  allant  dans  Tlnde,  donna  la  nouvelle  que 
la  tempête  l'avait  jeté,  le  24  août  1500,  sur  les  côtes  de  terra  crucis,  non 
loin  du  porto  Seguro  qu'il  n'a  pu  examiner  qu'à  la  pointe  Brazil.  Une 
expédition  fut  préparée  de  suite  vers  celte  partie  du  monde.  Amerigo 
Tespucci,  séduit  par  le  roi  de  Portugal ,  quitta  brusquement  l'Espagne 
et  accompagna  l'expédition  dont  le  commandant  n'est  point  connu  : 
mais  à  cause  de  son  ignorance,  l'équipage  avait  recours  au  savoir  de 
yespucci.  Par  l'astrolabe  et  le  quart  du  cercle,  Vespucci  acquit  une  auto- 
rité bien  méritée  (quadrante  astrolagico....  mi  aquistai  non  piceiala 
gloria)  (293).  C'était  son  troisième  voyage  (10  mai  1501-7  sept.  1502), 
dans  lequel  on  avança  sur  les  côtes  de  la  terre  sanctae  cruels  ou  du 
Brésil  jusqu'à  52**  austral.  Il  en  exécuta  encore  un  quatrième, 
^ont  le  commandant  était  certainement  Gonzalo  Coelho  (10  mai  1505-28 
joiu  1504).  Une  tempête  arrêta  le  succès  qu'il  pouvait  avoir.  Vespucci 
devait  de  trouver  par  l'extrémité  méridionale  du  nouveau  continent, 
uo  chemin  vers  l'Asie.  Mais  cette  entreprise  était  destinée  à  un  autre. 
Amerigo  Vespucci  mourut  en  1512  (293). 

L*empressement  extraordinaire  de  plusieurs  états  et  l'envie  de  faire 
des  découvertes,  dégénéraient  en  une  concurrence  ombrageuse.  Manuel, 

(Î9S)  Osant  à  la  longitude  (écritil  le  4  juin  4601  de  \s  station  du  cap  Vert,  où  l'on  rencontra 
Cabni  retournant  de  son  expédition  à  l'Inde),  c'est  une  chose  bien  autrement  ardue  et  qu'entendent 
pea  de  personnes  excepté  celles  qui  savent  s'abstenir  du  sommeil  et  observer  la  conjonction  de  la 
lone  et  des  planètes.  G  est  pour  ces  déterminations  de  longitude  que  j'ai  sacritié  souvent  le  sommeil 
et  racconrci  ma  vie  de  dix  ans,  sacrifice  que  je  ne  regrette  pas  dans  l'espoir  d'obtenir  un  renom 
po*'  des  siècles,  si  je  reviens  sain  et  sauf  de  ce  voyage. 

(S9S)  Ce  n'est  que  depuis  peu ,  que  l'historio^phe  don  Juan  baptista  Munoz  fouilla  les  archives 
qai  ponvai^t  fournir  les  documents  et  les  matériaux  à  l'histoire  de  grandes  découvertes  et  ce  n'est 
ose  depuis  i8SS.que  l'ouvrage  de  don  Martin  Femandez  de  Navarrcte,  colleccion  de  los  viages  y 
oetcnbrimientos,  les  fit  connaître.  Sur  ces  matériaux  Alexandre  de  Ilumboldt  élabora  l'ouvrage 
ios^evé  :  examen  critique  de  l'histoire  de  la  géograhie  du  nouveau  monde,  dont  cinq  volumes  sont 
pvMîësà  Paris  18S6-1889.  Nous  avons  puisé  avidemment  dans  ses  lumières  pour  ce  que  nous  avons 
a  dire,  à  mentionner  sur  Colomb  et  Vespucci.  De  même  nous  devons  aux  investigations  profondes 
de  cet  ouvrage  ce  que  nous  allons  dire  d  Ilacomil. 


142  GÉOGR.   LATINE,   147(M5ttO. 

rot  de  Portugal ,  par  sa  lettre  du  29  juillet  1501,  fit  part  à  Ferdinand 
d'Espagne  de  la  découverte  du  Brésil  par  Cabrai ,  mais  il  mit  au  secret 
toutes  les  cartes  nautiques  :  déposées  dans  la  marine,  elles  ne  pouvaient 
sortir  de  ses  états.  Toute  la  publicité  vulgaire  était  cependant  réservée 
pour  la  gloriole  de  Tétat  et  des  navigateurs.  Les  relations  des  voyages  se 
répandaient  à  foison  dans  de  brochures  et  feuilles  volantes.  On  y  trou- 
vait les  aventures  des  voyageurs  et  tout  ce  qui  pouvait  émerveiller, 
mais  on  n'y  voyait  presque  rien  de  précis  pour  fixer  les  positions.  Les 
cartes  furent  dressées  pour  donner  Tirnage  des  découvertes  mais 
déblayées  de  tout  ce  qui  pouvait  instruire  les  marins  sur  les  dangers  et 
les  directions  des  routes. 

Yespucci  usait  largement  de  la  liberté  restreinte.  Il  rédigeait  des 
rapports  étendus  pour  les  archives  du  roi  Ferdinand  et  du  roi  Manuel 
et  en  extrayait  de  courtes  relations  pour  les  communiquer  à  ses  amis 
ou  aux  curieux.  La  relation  de  son  troisième  voyage  fut  traduite  en  latin 
à  Lisbone  par  Guiliano  Bartolomeo  del  Giocondo  et  imprimée  déjà 
en  1504  (à  Augsbourg,  chez  Jean  Otmar)  (so4).  Yespucci  dit  qu'il  a  fait 
ces  extraits  et  relations  de  ses  quatre  voyages  à  l'instigation  de  Marc 
Benvenuti  florentin,  pendant  le  séjour  que  celui-ci  ûtà  Lisbone  en  se 
chargeant  de  le  faire  passer  à  Renée,  duc  de  Lorraine  :  ce  qui  en  effet 
eut  lieu  en  1504.  Yespucci  rapiéça  tout  ce  qu'il  avait  écrit  pour  le  roi 
de  castille  Ferdinand,  prépara  en  i500  pour  Lorenzo  de  Pietrofrancesco 
de  Medicî  et  le  4  septembre  1504  pour  le  gonfalonier  Soderini  et 
l'adressa  au  roi  duc  Renée.  Martin  Ilacomilus  fit  imprimer  cette  com- 
position en  1507  eu  Lorraine  à  S.  Die  de  Yosges  dans  sa  cosmographie, 
où,  épris  des  grands  exploits  des  quatre  voyages,  il  propose  d'appeler  le 
nouveau  monde  Amérique.  Son  petit  ouvrage  se  répandait  avec  succès; 
réimprimé  plusieurs  fois  dans  différents  pays,  traduit  en  français  et  en 
allemand ,  il  n'a  trouvé  aucune  contradiction.  Ainsi  la  fortune  d'Ame- 
rigo,  à  l'insu  de  Yespucci ,  a  été  faite  (29s). 

192  Martin  Waltzemûller  ou  Waldseemuller ,  fribourgeois ,  étudia 
vers  1450  à  l'université  de  sa  ville  natale.  Ensuite  professeur  au  gym- 
nase de  Sainl-Die  dans  les  Yosges  il  y  fonda  une  bibliothèque  avant  1507. 
Grécisant  son  nom  en  Hyldcomycus ,  il  publiait  ses  petits  ouvrages  et 
dressait  les  cartes  géographiques  qu'il  décorait  d'écussons.  Orbis 
terrarum  regiones  prœcipuds  dominorum  insigniis  nolare  sluduimus  ;  in 
quarlam  terrœ  partem  per  inclylos  casliliœ  et  lusilanie  reges  reperlam, 
eorundem  ipsorum  insignia  posuimus  (cosmogr.  1507,  p.  15).  Dans  un 
ouvrage  qu'il  publia  conjointement  avec  Philesius,  en  1511,  sont  énu- 
mérées  les  cartes  des  différents  pays  d'Europe,  dessinées  par  Hylaco- 

(294)  Publiée  chez  Otmar  en  4S04,  elle  fat  réimprimée  sans  indicatioode  l'année  à  Paris,  chez 
Gilles  de  Gourmont,  ou  chez  Jean  Lambert;  parce  que  l'édition  allemande  de  1505,  chez  llathias 
Hiipfuff  à  Strasburg,  se  dit  troisième  ;  ensuite  reproduite  à  Leipzig  i506,  chez  Martin  Landesbergk  ; 
en  Italien  en  4507. 

(295)  L'ouvrage  de  Ilacomilus  parutjd'abord  anonyme  sous  le  titre  de  :  cosmographiae  introdoctio 
cum  <|uibusdam  geometriae  et  astronomiae  principiis  ad  eam  rem  necessariis  ;  insuper  quatuor 
Americi  Vespucii  navigationes.  Au  dernier  feuillet  on  voit  dans  un  encadrement  les  lettres  G.L.» 
N.L.,  M.L  (Nartinus  Ilacomilus)  et  tout  autour  :  finitum  vu  kal.  maij,  anno  supra  sessiquimillesimum 
vu  (iS07),  urbsDeodate,  tuo  elarescens  nomine,  praesul,  qua  Vogesi  montis  sunt  juga  pressit 
opus,.^  etc.,  in-i*.  —  Edité  ensuite  sous  le  nom  de  l'auteur  1509, 1535, 1554,  et  à  Venise  ;  traduit.» 


HTDROG.  PORTUGAISE,  193.  143 

mylus  (296).  Avant  de  mourir  il  réduisit  à  une  moindre  échelle  ces 
cartes  modernes  qui  se  trouvent  attachées  à  l'édition  de  Ptolémée 
de  1515.  Laurent  Pbrisius  fit  publier  ces  cartes  réduites  à  la  suite  de 
sa  publication  de  Ptolémée  chez  Puninger  à  Strasbourg  15^2,  comme  il 
le  dit  lui-même  (YIII.  2)  :  et  ne  nobis  décor  alierius  elationem  inferre 
YÎdeatur,  bas  tabulas  e  novo  à  Martine  Ilacomylo  pie  defnncto  construc- 
tas  et  in  niinorem  qnam  prius  un  quam  fuere  formam  redactas  esse 
notificamus.  Huic  igitur  et  non  nobis,  si  bon!»  sunt ,  pacem  exopla. 

Ilacomilus  était  intime  avec  Mathieu  Ringman  ou  Philesius,  natif  des 
Vosges.  Il  coopéra  avec  lui  à  la  traduction  de  la  géographie  de  Ptolémée 
qui  devait  paraître  en  1507,  aux  frais  du  duc  de  Lorraine  Renée  II  et 
ne  fut  publiée  qu*en  1513,  par  Uebelin  et  Essler.  Ilacomilus  n'y  est  pas 
nommé  (s97).  S'il  contribua  par  son  travail  au  recueil  des  cartes 
modernes  c'est  comme  simple  dessinateur.  Aucune  invention  ne  perce 
dans  la  copie  de  la  carte  de  Donis  ou  des  cartes  continentales  ou  de  celle 
de  la  Palestine.  Plus  tard  toutes  ces  cartes  furent  par  lui  de  novo  con- 
strutae  et  in  minorem  formam  redactae  pour  une  publication  posthume 
de  15ââ.  Peut-être  était  il  compositeur  des  cartes  topographiques  de  la 
Suisse  et  de  la  Lorraine.  Ilacomilus  jouissait  de  la  laveur  du  duc  qui 
regardait  ses  ouvrages  avec  satisfaction  (298). 

193.  Renée  II ,  duc  de  Lorraine ,  roi  titulaire  de  Sicile  et  de  Jérusa- 
lem (1473-1508),  encourageant  les  études  et  Tétude  de  la  géographie, 
faisant  graver  à  ses  frais  les  cartes  modernes  qui  devaient  accompagner 
Ptolémée ,  désirait  avoir  une  mappemonde  et  s'en  était  procuré  une 
portugaise  qui  pouvait  contenir  les  connaissances  les  plus  récentes.  Le 
roi  de  Portugal  Emmanuel  (1495-1521)  en  avait  une  qui  était  toujours 
déployée  sur  la  muraille  de  sa  chambre  :  mais  celle  qu'avait  acquise 
Renée  était  une  autre,  procurée  probablement  en  1504  par  Renvenutî 
conjointement  avec  les  quatre  voyages  de  Yespucci.  Le  duc  fit  graver 
ces  cartes  portugaises  et  la  carte  intitulée  hydrographie.  Au  dire  des 
éditeurs  de  l'hydrographie,  Jean  Essler  et  George  Uebelin ,  elle  avait 
d'abord  été  dressée  par  un  amiral  du  roi  Ferdinand  (299).  Si  leur  dicton 

(196)  Cet  ouvrage  porte  le  titre  :  instructio  manuductionem  prestans  in  cartam  itinerarlam 
Martini  Hilacomili  cum  Inculentiori  ipsius  Europae  enarratione  a  Ringmanno  Philesio  vosigena 
conscripta,  Argentorati  ex  offic.  Johannis  Gruningeri  1514.  (Mylii ,  memorab.  bibl.  acad.  jenensis, 
p.  139;  Freitag  analecta  Hteraria  p.  449).  —  Ortel  mentionne  vaguement  deux  de  ses  cartes  seule- 
ment :  universalem  navigatoriam  quam  marinam  vulgo  appellant  et  Europam ,  in  Germania  alicubi 
impressas. 

(197)  n  se  plaint  en  1507  que  sa  cosmographie  éditée  anonyme  plerique  falso  sibi  passim  ascribant. 
Cette  plainte  ne  peut  pas  se  rapporter  à  l'édition  de  Ptolémëe. 

(198)  Renatus  H  Siciliae  rex,  dit  la  dédicace  d'Hylacomylus ,  opusculis  gcographicis  mimm  in 
modum  delectatus  fuit  :  neque  obliti  sumus  quo  hilari  vultu  ,  generalcm  orbis  descriptionem ,  et 
alia  laboris  nostri  monnmenta,  sibi  oblata,  a  nobis  suscepit. 

(199)  Hjdrograpkia  sive  ckarta  marina,  continenstypum  orbisuniversalem,  juxtabydrograpborum 
traditionem.  —  Charta  marina,  quam  hydrograpkiam  vocant,  per  admiralem  quondam  Portugaliae 
régis  Ferdinadi,  caeteros  denique  lustratores  verissimos  peragrationibus  lustrata,  ministerio  Renati, 
dum  Tixit,  nunc  mortui,  ducis  Lotbaringiae  praelograpbatiooi  tradita  est  (Essleri  et  Ubclini  praefat.). 
Dans  notre  atlas,  n*  148,  nous  donnons  Ta  copie  de  cette  carte  hydrographe,  réduite  en  proportion 
de  50  à  14  de  l'échelle.  —  Les  mêmes  éditeurs  qui  l'ont  publiée  en  4513,  ont  fait  paraître  a  la  fois 
quatre  autres  cartes  portugaises  spéciales.  Deux  de  l'Afrique  comme  ils  l'ont  dit  eux-mêmes  :  chartis 
portngaleusium  sumptae  ;  une  du  nouveau  monde  et  une  des  Indes  orientales.  Ils  n'ont  pas  qualifié 
eux-mêmes  de  portugaises  ces  deux  dernières ,  mais  en  les  confrontant  avec  la  carte  hydrographiçiue 
générale,  leur  origine  est  indubitable.  —  Nous  avons  profité  de  cette  réunion  de  cartes  de  même 
origine  et  nous  avons  élaboré  la  carte  générale  hydrographique,  extrayant  des  quatre  cartes  spé- 
ciales tout  ce  qui  a  pu  se  placer  sur  notre  échelle  à  savoir  :  celles  du  nouveau  monde,  de  l'Afrique  et 


i44  GiOGR.  LATINB,  l470-i5S0. 

était  vrai ,  Tongine  de  la  carte  remonterait  au  xiv'  siècle,  car  Ferdinand 
régnait  depuis  4567  jusqu*à  1585.  Il  est  évident  que  c*est  leur  méprise 
qu  il  faut  tout  d'abord  rectifier  par  quelques  explications. 

Le  frère  d'Alfonse  V,  Ferdinand  de  Yiseo  (mort  1470),  avait  des  pos* 
sessions  qui  demandaient  d'avoir  une  marine.  Le  roi  son  frère,  en  1457, 
lui  conféra  toutes  les  îles  qu'on  avait  découvertes  jusqu'alors,  avec  leur 
haute  et  basse  justice,  sauf  quelques  restrictions.  En  1460,  l'infant 
Henri,  céda  au  même  Ferdinand  qui  était  son  neveu,  en  l'adoptant  pour 
son  fils,  les  îles  de  Jésus  et  la  Graciosa.  Le  roi  ratifia  cette  cession 
(Barros,  decas  I,  lib.  II,  cap.  I).  Possesseur  de  tant  d'îles,  Ferdinand  ne 
pouvait  se  passer  d'une  carte  nautique  ou  hydrographique  :  son  amiral 
la  lui  prépara  et  après  la  mort  de  Ferdinand,  arrivée  en  1470,  d'autres 
géographes  s'occupèrent  de  la  corriger  ou  plutôt  à  l'enrichir  par  de 
nouvelles  découvertes.  Ce  Ferdinand  est  l'avant  dernier  de  ce  nom  dans 
la  famille  royale  de  Portugal.  Il  paraît  plus  naturel  d'attribuer  l'origine 
de  la  carte  à  ce  prince  royal  qu'à  l'ancien  roi.  Mais  cette  explication, 
toute. plausible  qu'elle  paraîtrait,  cède  devant  une  autre  considération. 
Le  nom  de  Ferdinand  n'est  qu'une  méprise  des  éditeurs  de  1515.  Le 
nom  du  roi  de  castille  figure  chez  eux  par  méprise  à  la  place  du  roi 
Emmanuel ,  et  son  quondam  amiral  est  Yespucci  (mort  1512),  qui 
retouche  la  carte  de  sa  main ,  peut-être  la  dessina  lui-même  et  l'envoya 
de  Lisbone  au  duc  (mort  1508)  avec  ses  quatre  voyages,  quatuor  navi- 
gationes,  dans  lesquelles  il  relate  ad  Ferdinandum  regem  (castille) 
scripta  (soc). 

La  carte  de  l'hydrographie  portugaise  fut  gravée  sur  bois  du  vivant 
du  duc  de  Lorraine  Louis  Renée  qui  mourut  en  1508,  et  elle  se  trouve 
en  premier  lieu  dans  l'atlas  de  Ptolémée  publié  à  Strasbourg  en  1515, 
ensuite  dans  ses  éditions  de  1520  et  de  1522.  Nous  allons  examiner  de 
combien  d'années  elle  peut  être  antérieure.  (V.  n°  118  de  notre  atlas.) 

Une  note  inscrite  sur  la  mer  près  de  Calcutta  avertit  que  la  province 
de  Galicut  est  lustrata  per  regem  porlugalie.  Or,  cet  événement  de  1498 
et  1500  est  de  fraîche  date  pour  l'hydrographie  portugaise.  Elle  ne 
nomme  point  Goa  qui  fut  reconnue  plus  tard;  elle  ne  sait  pas  comment 
ranger  les  côtes  de  l'embouchure  de  l'Inde,  de  la  péninsule  Guzarat,  où 
Daba  (Diu)  ne  fut  occupé  qu'en  1509;  elle  ignore  les  positions  au  delà 
du  Gange,  de  Malaka,  des  îles,  etc. 

Les  côtes  orientales  de  l'Afrique  reçurent  leurs  formes,  à  la  suite  des 
premières  courses.  Quiloa  y  est  visitée  en  1500,  et  la  position  de  Mada- 
gascar est  tracée,  privée  de  ces  détails  qui  ne  furent  perlustrées 
qu'en  1506,  dès  quelle  fut  baptisée  du  nom  de  S.  Laurent.  En  un  mot, 
tout  ce  qui  est  tracé  et  inscrit  dans  le  vieux  monde  ne  dépasse  pas  les 
connaissances  de  l'année  1501. 


des  Indes.  On  peut  encore  compter  au  nombre  de  cartes  portugaises  de  cette  époque,  qui  pouTent 
remplir  le  vide  de  rbydrographie,  celle  de  India  orientalls  et  celle  de  magni  cban  Tel  Tartaria,  qui. 
se  trouvent  dans  Ptolémée  édité  chez  Trechsel  à  Lyon  I53S.  —  Voyez  la  note  32i. 

(500)  Vespucci,  très-instruit  dans  l'art  de  la  navigation,  savait  dessiner  les  cartes  comme  tant 
d'autres  navigateurs.  Burgensem  antistitem  (Fonsecam)  buius  (indicae)  nauigalionis  confugium,  adivi 
(dit  Angliiera).  Inclnsi  unocubiculo  multos  indices  habuimus  ad  manus....  quas  nautae  chartas 
vocant  navigalorias  :  quarum  una  a  portngallensibus  dopicta  erat,  in  qua,  manom  dicitur  imposuifis* 
Americns  Vesputivs  florentinus,  vir  in  hac  artc  peritos.  Anghera.  dec.  U,  lib.  X,  p.  499. 


nTDROGR.    PORTUGAISE,   194.  145 

Lorsque  nous  collationnons  Thydrographie  pour  le  nouveau  monde 
avec  la  carte  de  1500  de  Jean  de  la  Cosa,  nous  remarquons  la  même 
situation  des  îles,  la  même  forme  de  File  Cuba  ;  les  mêmes  rivages  de  la 
terra  noua  ou  terre  firme  ;  la  même  absence  des  découvertes  postérieu- 
res de  Bastidas  et  de  Colomb,  faites  au  fond  du  golfe  jusqu'à  Panama. 
Mais  Tamiral  portugais,  rapiéçant  ces  découvertes  espagnoles,  ne  savait 
pas  donner  ce  rapprochement  des  îles  à  la  terre  ferme,  qui  est  exacte- 
foent  indiqué  par  de  la  Cosa.  Au  nord,  Thydrographie  ignore  les  décou- 
vertes anglaises  tracées  par  de  la  Cosa  :  mais  il  connaît  la  perluslration 
de  Gaspar  Cortereal,  qui  retourna  de  sa  course  le  8  octobre  1501.  11 
connaît  de  plus  Tile  Riqua  (Tamariqua)  et  la  première  reconnaissance 
delà  Floride.  EnOn  il  connaît  la  terre  de  Sainte  Croix  et  toute  la  côte 
jusqu'à  4'0°  austral  parcourue  par  Texpédilion  portugaise  de  1501, 1502, 
qui  est  le  sujet  du  troisième  voyage  d'Amerigo  Vcspucci.  L'hydrographie 
a  donc  pu  arriver  en  Lorraine  avec  la  relation  du  troisième  voyage  et 
avec  les  quatre  voyages  expédiés  de  Lisbone  par  Benvenuti  au  duc 
Réuée  e«  1504.  Livrée  de  suite  à  la  gravure,  elle  fut  coupée  sur  bois 
avant  la  mort  du  prince,  laquelle  eut  lieu  le  10  décembre  la08  (soi). 

194.  En  examinant  cette  carte  (voyez  n^  IIS  de  notre  atlas),  nous  la 
voyons  dessinée  suivant  rancienue  méthode  nautique,  sans  longitudes 
tlsans  latitudes  :  mais  elle  est  passée  par  la  ligne  éqtiinoxiale  et  les 
deux  tropiques,  qui  sont  jetés  tout  au  long  à  travers  les  roses  des  vents 
Cl  indiquent  que  Tattention  du  dessinateur  se  portait  plus  ou  moins  sur 
la  graduation  possible,  sur  la  projection  cylindrique.  Aussi,  il  est  bon 
de  remarquer  que,  conformément  à  l'habitude  de  Ptoléméo,  la  carte 
offre  le  sud  en  bas  et  le  nord  eu  haut. 

Quant  aux  formes  ptoléraéennes ,  elles  dominent  dans  rintérieur  de 
TAsie,  surtout  au  delà  de  l'Eufraie.  La  mer  Caspienne  et  celle  de  Perse, 
feScythie,  le  golfe  de  Gange  et  le  Grand  golfe,  sont  calqués  sur  les 
proportions  graduées  de  Ptolémée.  Dans  Finlérieur  de  l'Afrique,  toutes 
les  montagnes,  char  des  dieux,  Bardite,  Aranga,  etc.;  les  fleuves  Garama, 
Niger,  Nil  avec  les  sources  sorties  des  monts  de  la  lune,  sont  copiées  de 
Ptolémée.  On  voit  que  l'hydrographe  portugais,  dans  l'ignorance  de 
l'intérieur,  préférait  l'ancien  grec  au  lieu  de  suivre  les  traces  du  camal- 
dolèse  Mauro.  Partout  où  la  connaissance  des  pays  ou  des  mers  man- 
quait à  l'hydrographe,  il  adaptait  les  données  de  Ptolémée.  Mais  il  avait 
le  bon  sens  de  ne  pas  admettre  ces  bévues  surannées  partout  où  il  pos- 
sédait des  connaissances  positives  des  marins  exercés,  ou  récentes  rap- 
portées par  des  voyageurs  modernes,  et  quand  ils  avaient  les  cartes 
sufiisantes  dressées  par  des  cosmographes  antérieurs. 

^^^}  Il  «t  plus  qne  probable  qnc  gravée  en  1S07,  elle  à  clc  de  suite  mise  en  vente.  Le  savant 
beiédictiD  Trittenlieim  (lils  de  Jean  de  Heide.nhcrg),  né  1462,  mort  le  10  «létcrabre  lol8,  dit  dans  sa 
lettreda  i%  août  1307,  qu'il  est  trop  pauvre  comme  abbé  du  couvent  de  S.  Jacq  de  Wiirtzhurg,  pour 
acheter  ane  mappc  pulclierrirac  depictam  qu'on  veut  lui  vendre  à  Worms  pour -iO  llorins;  que 
jamais  OD  ne  lui  persuadera  qu'une  mappomoudc  peut  valoir  autant  et  qu'il  a  préféré  faire  un  achat 
plu*  ipodeste  :  comparavi  autem  mibi  anle  paucos  dies  aerc  mttdii-o,  spiiaoram  orbis  pulcliram,  in 
qaaBtitateparvannper  Argentiuae  improssam ,  simul  et  in  map:na  dispositiono  globiim  terrae  in 
piano  expaasum  cum  insulis  et  regionibus  novitcr  ab  Amcrico  Vespurio  hispauo  invenlis  in  mari 
ooddeDtaii,  ac  versas  méridien,  ad  parallelum  ferme  deciuiuni  ^(luadiagrsinium)  (Joli.  Trithumii 
«Wflndîi» partis cbronira  insigniaduo,  Francof.  IGOl.p.  5o3). 

II.  13 


146  GÉOGR.  LATINE,  1470-1850. 

Examinons  maintenant  le  reste  de  la  carte.  Les  cotes  perpendi- 
culaires de  la  Syrie,  septentrionales  de  TAfrique,  de  toute  la  mer  médi- 
terranée,  extérieures  de  l'Europe ,  toutes  sont  conformes  à  la  carte 
catalane  et  autres  des  cosmographes;  toutes,  à  Fexception  du  Danemark, 
qui  affecte  la  forme  ptoléméenne,  étant  prise  avec  la  Skandinavie  de  la 
carte  spéciale  de  ces  régions,  inventée  comme  complément  de  Ptolémée. 
Le  cours  de  TEufrate,  quoique  tracé  sous  l'impulsion  de  Ptolémée,  cède 
à  la  direction  juste  des  côtes  de  Syrie.  Il  faut  admirer,  je  le  répète,  le 
bon  sens  des  hydrographes  portugais,  de  n'avoir  pas  renoncé  à  des  con- 
naissances positives  pour  se  traîner  à  la  remorque  du  décrépit  Ptolémée. 
Il  faut  absolument  convenir,  que  la  doctrine  de  Behaïm  ne  prévstlut 
guère  et  n'a  pas  eu  de  retentissement  parmi  les  Portugais.  Cette  carte, 
postérieure  à  la  construction  du  globe ,  le  dit  positivement. 

Le  nouveau  monde  est  dessiné  en  partie  d'après  les  découvertes 
espagnoles,  en  général  d'après  les  propres  investigations  des  Portugais. 
L'Afrique  entière  appartient  à  eux  seuls.  L'Inde  offre  un  mélange 
bizarre  de  leurs  premières  reconnaissances  depuis  qu'ils  y  ont  pris  le 
pied  à  Calcutta,  et  des  narrations  de  Marco  Polo  et  d'autres,  appliquées 
aux  tracés  ptoléméens  et  complémentaires. 

Le  vénitien  Mauro,  composant  sa  mappemonde,  il  y  a  iO  ans,  n'ayant 
sur  la  mer  de  l'Inde  et  sur  l'orient  entier  que  des  données  générales  et 
tout-à-fait  vagues,  inventait  les  détours  des  côtes,  les  directions  des 
fleuves,  les  contours  et  les  situations  respectives  des  pays  et  des  îles 
nombreuses;  tout,  d'après  les  relations  abondantes  de  Marco  Polo.  Il 
inventa ,  il  créa  à  cet  effet  un  monde  idéal ,  réprouvant  les  extrava- 
gances de  Ptolémée  qui  s'accréditait.  On  peut  dire  la  même  chose  de  la 
carte  catalane  plus  ancienne  de  cent  vingt  ans  aux  hydrographes  qui 
nous  préoccupent.  Ptolémée  n'était  qu'un  astrologue  pour  les  Catalans. 
Les  hydrographes  portugais,  enrichis  par  différents  autres  renseigne- 
ments apportés  de  l'orient,  distribuèrent  les  relations  de  Marco  Polo  sur 
des  tracés  de  Ptolémée,  suppléant,  par  l'adjonction  de  spacieux  pays, 
qui  manquaient  à  la  connaissance  de  Ptolémée  pour  entourer  le  conti- 
nent oriental  par  les  eaux  de  l'océan  et  par  l'addition  des  îles  qu'on 
savait  être  grandes,  et  dont  on  connaissait,  par  des  relations  multiples, 
les  noms  et  les  situations  respectives.  11  est  probable,  comme  nous 
l'avons  observé,  qu'ils  étaient  instruits  ainsi  par  Toscanelli  et  Colomb. 

Confrontant  cette  partie ,  comme  elle  est  dressée  sur  la  carte  portu- 
gaise, avec  ce  qu'a  dessiné  Behaïm  sur  son  globe,  on  voit  l'identité 
évidente  :  on  peut  dire  avec  certitude,  que  l'ordre,  l'organisation  et  les 
formes  de  cette  partie,  reproduites  par  les  géographes  postérieurs, 
furent  enfin  réglées  et  coordonnées  en  Portugal ,  et  que  Behaïm  les 
apporta  de  ce  dernier  pays.  La  grandeur  des  île^s,  leur  éloignement  res- 
pectif et  plus  ou  moins  dispersé,  étaient  arbitraires,  mais  la  suite  et 
l'ordre  convenu  et  déterminé  jusqu'à  ce  que  des  reconnaissances  et 
découvertes  ultérieures  rectifiassent  l'incertitude  ou  l'inconnu,  sont 
fixes  et  immuables  sur  les  productions  variées  de  Behaïm  1492,  de 
l'hydrographie  et  de  Ruysch  1507,  de  Sylvanus  1521,  de  Essler  et 
Ubelin  1515,  de  Schoner  1520,  de  Bordone  1521 ,  de  Villanovano  1535. 
Quant  aux  rivages  asiatiques,  qui  avançaient  vers  l'orient  en  face  de  ces 
îles,  toutes  les  monstruosités  de  Ptolémée  y  furent  bientôt  rayées;  le 
reste  vers  le  nord  dirigea  longtemps  encore  les  géographes. 


HTDROGR.  PORTUGAISE,  i9S.  i47 

195.  La  carte  hydrographique  demande  encore  quelques  considéra- 
tions sous  le  rapport  de  Téchelle.  Elle  est  traversée  par  la  ligne  équi- 
Qoxiale  et  les  deux  tropiques.  Les  éditeurs  placèrent  en  outre  sur  son 
bord  une  échelle  de  latitude,  mais  très-négligemment  et  inexatemcnt. 
La  ligne  équinoxiale  et  les  tropiques  déterminent  mieux  son  échelle. 
C'est  une  carte  plane,  présumant  une  projection  cylindrique,  la  rose 
tramontane  ou  septentrionale  est  placée  au  pôle  arctique ,  ou  sur  la 
ligne  du  pôle,  d*où  jusqu'à  Féquateur  on  ohtient  90  degrés  qui  donnent 
les  25®  aux  tropiques.  La  latitude  étant  déterminée  et  fixée,  nous  avons 
cherché  Féchelle  ou  le  degré  de  longitude.  Ptolémée,  pour  Tlnde  au  delà 
do  Gange,  étant  le  modèle  copié,  il  est  nécessaire  d'admettre  que  Mur- 
fuli  et  Moabar,  qui  représentent  sa  Sinie,  se  trouvent  à  peu  près  à  i80® 
des  îles  Fortunées  ou  Canaries,  de  l'île  de  Fer.  Or,  ce  nombre  de 
degrés  se  trouve  sur  Thydrographie  portugaise  entre  Tîle  de  Fer  et 
Mnrfuli,  mais  en  degrés  comptés  sur  la  parallèle  de  Rhodes,  c'est-à- 
dire  */5  moindre  du  degré  du  grand  cercle  :  par  conséquent  la  carte 
plane  est  déroulée  sur  la  parallèle  de  Rhodes  et  l'extrémité  du  continent 
avance  jusqu'à  220°  et  250°.  Le  degré  de  la  longitude,  ainsi  réduit,  ne 
donne  pour  la  longueur  de  la  méditerranée  que  40**  tout  au  plus,  ce  qui 
est  bien  loin  de  la  longueur  excessive  de  Ptolémée  qui  est  de  62<».  Encore 
faut-il  remarquer  que  les  46°  offrent  un  chiffre  trop  fort.  La  carte  por- 
tugaise de  l'Afrique,  publiée  par  Ubelin  1515  (et  reproduite  dans  Tatlas 
de  Santarem),  ne  donne  à  la  longueur  de  la  méditerranée  que  42°.  Or 
le  surplus  de  la  carte  générale  de  l'hydrographie  vient  de  la  grossièreté 
de  l'ouvrage.  Le  couteau  du  graveur  ou  tailleur  de  bois  dans  son  ouvrage 
grossier  de  moindre  échelle  a  manqué  à  la  dimension. 

Mais  si  l'on  voulait  appliquer  ce  degré  de  la  parallèle  de  Rhodes,  ou 
du56"«  degré  de  la  latitude,  à  l'ouest  du  méridien  de  Fer,  on  n'obtien- 
drait pas  des  résultats  qui  pourraient  être  facilement  confirmés  par 
d'autres  caries.  Ou  trouverait  de  l'île  de  Fer,  qui  paraît  être  île  du 
ffléridien  jusqu'au  delà  de  Cuba,  90°,  tandis  que  la  carte  de  de  la  Cosa 
de  Î500,  ne  donne  qu'une  distance  de  75  degrés  du  grand  cercle,  et  les 
cartes  qui  parurent  bientôt  graduées,  ne  comptent  ordinairement 
<lûe  70°.  Or,  il  doit  y  en  avoir  autant  sur  la  carte  hydrographique ,  et 
floand  on  compte  sur  cette  carte  à  l'ouest  du  méridien  de  Fer  les  degrés 
dtt  grand  cercle,  on  y  retrouve  juste  ces  70°  indiqués  par  les  cartes 
graduées  (302). 

Cette  différence  de  l'échelle  de  la  longitude  est  et  ouest,  résulte  de  la 
différence  de  bases  sur  lesquelles  les  parties  étaient  développées.  La 
portion  de  l'ancien  monde,  assise  sur  la  parallèle  de  la  mer  méditerra- 
née, 55°  et  56°,  dérive  de  la  combinaison  de  petites  dislances,  par 
l^uelle  toute  cette  portion  se  forme  en  projection  accidentelle,  affec- 
lâDt  le  moins  possible  l'égalité  et  la  proportion  des  distances.  Le  reste 
du  vieux  monde  emprunté  de  Ptolémée  remplit  les  180  degrés  dans  le 
même  sens.  C'est  la  composition  antérieure  aux  grandes  découvertes  de 
Muvelles  terres.  —  La  seconde  portion,  celle  de  nouvelles  découvertes, 
se  trouve  assise  sur  la  ligue  équinoxiale;  ses  grandes  distances,  produit 

(SW)  CejKmdant  Jean  Rnysoli  (dans  l'édition  romaine  de  PloUimcft  en  1507,  f^raduant  celte  partie 
«  »  carte,  n'a  pas  ûcsitc  de  placer  le  milieu  de  Cuba  à  90°  ouest  du  méridien  de  Fer. 


148  OÉOGB.  LATINBy  1470-1550. 

de  la  navigation  hantorière,  sont  développées  snr  la  projection  plane 
du  grand  cercle.  Ce  n'est  pas  la  latitude  connue  qui  les  fit  grandir,  mais 
la  longitude  inconnue  et  les  espaces  du  développement.  —  A  la  suite 
de  cette  double  projection  réunie,  toute  TAfrique  méridionale,  dévelop- 
pée sur  la  projection  plane  du  grand  cercle ,  ne  s*aceorde  pas  avec  le 
vieux  monde.  Cetle  projeciion  fit  dépasser  les  rivages  de  TAfrique  10 
degrés  vers  Test  les  proportions  ptoléméennes;  défigurant  TArabie  el 
la  mer  rouge,  où  les  navigateurs  ne  pénétraient  pas  encore,  elle  donnait 
à  la  mer  rouge  une  longueur  excessive  et  une  inclination  trop  horizon  • 
talement  couchée  (ses).  Lorsque  les  navigateurs  portugais,  pénétrant  dans 
la  mer  rouge,  comprirent  la  pose  de  son  bassin,  alors  pour  éviter  celte 
fausse  déclivité,  il  devenait  indispensable  de  laisser  une  extension 
monstrueuse  à  Tisthme  de  Suez  (304). 

La  composition  de  la  portion  du  vieux  monde ,  laquelle ,  avant  qu^on 
eût  fait  de  grandes  découvertes,  avait  réunie  la  mer  méditerranée  deà 
cosmographes  avec  le  quart  de  Thabitable  de  Ptolémée,  décèle  une  très- 
importante  et  intéressante  circonstance  :  c'est  que  les  compositeurs  de 
la  réunion  comprirent  très-bien  la  longitude  que  la  longueur  de  la 
médiicrranée  avait  relativement  à  Téchelle  des  rivages  de  la  carte 
entière  et  qu'elle  devait  conserver  ses  proportions  :  chose  méconnue 
par  les  savants  adeptes  de  Ptolémée. 

Par  la  seconde  portion ,  contenant  les  terres  nouvelles ,  on  voit  que , 
sur  de  vastes  mers,  on  a  compris  que  la  boussole  et  les  rumbs  dévelop- 
paient une  projection  plane.  Les  hydrographes  portugais,  avec  tous  les 
navigateurs  qui  avaient  parcouru  de  vastes  mers,  portaient  leur  atten- 
tion à  la  latitude  géographique  des  lieux  pour  déterminer  leur  position 
relative  à  la  ligne  équinoxiale.  Cependant  dans  Tcnsemble  de  la  mappe- 
monde, dans  la  réunion  de  deux  portions  hétérogènes  par  hasard  mal 
coordonnées,  les  latitudes  du  vieux  monde  sont  méconnues. 

On  ne  pensait  pas  sérieusement  à  graduer  la  carte.  La  ligne  équi- 
noxiale avec  les  tropiques  sont  tracées  pour  le  nouveau  monde  sans 
égard  au  vieux.  Le  50"  degré  d'Alexandrie  y  est  plus  au  nord  que  le 
50*"  de  Gibraltar.  L'obliquité  de  la  méditerranée  des  cosmographes  y 
est  compromise  (ses).  La  carte  du  vieux  monde,  avant  d'être  graduée, 
demandait  de  grandes  reclifications,  une  réforme,  car  la  construction  de 
de  l'ancien  monde  n'était  pas  applicable  a  la  projection  plane,  qui  se 
déroulait  sur  de  grands  espaces,  orientés  par  le  pôle  el  déterminés  par 
son  élévation. 

Jean  Ruysch,  1507. 

iOO.  Dans  la  même  année  que  la  carte  strasbourgeoise  fut  taillée  en 
bois,  parût  à  Rome  4507,  1508  (chez  le  vénitien  Bernardin  de  Vilali- 
bus] ,  une  édition  de  Ptolémée  accompagnée  d'une  mappemonde  de 

(505)  T.a  mômr  iléclivitc  horizontale  de  la  mer  roagc ,  conserve  l'atlas  espagnol  de  137S.  Ses  cartes 
spéciales  lui  donnent  une  longueur  presque  égale  à  celle  de  la  méditerranée. 

(304)  Voyez  la  carte  de  l'Afrique  de  ititl,  et  de  152i)  de  Kibero,  u"  1 17  de  notre  atlas. 

(505)  I/u|tpliration  de  climats  à  une  carte  nautique  par  d'Aillj,  décelait  en  1410  cette  obliquité. 
I.a  (sraduatiou  de  la  mer  méditerranée  de  l'atlas  de  Sauulo  1321,  de  la  c^rte  catalane  1375,  de  celle 
de  Mauro  14î>9.  constatait  cette  inclination.  Nous  le  voyons  en  iS04,  fichée  dans  les  vastes  découvertes 
du  nouveau  monde.  Nous  la  verrons  rectifiée  dans  les  cartes  de  15S7,  1529. 


JEAN  RUYSCH,   196.  i49 

rallemand  Jean  Ruysch,  gravée  sur  cuivre  (voyez  n*  119  de  notre 
allas)  (306). 

Jeao  Ruysch  développe,  pour  sa  table  universelle,  la  projection 
coDÎquesur  tous  les  560  degrés  de  longitude,  et  jusqu*à  i5*  de  la  latitude 
australe  :  de  cette  façon  il  déroule  toutes  les  nouvelles  découvertes 
graduées.  Terra  sancta  crucis  sive  mundus  nonus,  ne  diffère  en  rien  do 
ce  qu^oQ  voit  dans  Fhydrograpbie  portugaise.  On  y  lit  en  bas  :  naute 
LusUani  partcm  hanc  terre  hujus  observerunt  cl  usque  ad  élevai  ionem 
poli  antarclici  ^0  graduum  perveneruni,  nondum  tamen  ad  ejus  finem 
austrinum.  Cependant  les  épigrapbes  des  côtes  n'avancent  que  jus- 
qu'au 40*^  degré,  comme  dans  Fhydrograpbie.  Tabula  tcrrœ  uov:e  de  cette 
hydrographie,  reproduite  en  1515, 15*20,  15*22, 1555,  offre  une  singu- 
lière erreur  dans  Tépigraphe  de  abbalia  omnium  sanclorum,  au  lieu  de 
babia ,  baya ,  baie.  Cette  erreur  ûgure  dans  les  quatre  voyages  édités 
par  llacomil.  On  croirait  que  cette  erreur  est  iuventée  par  Téditeur 
ilacomilus,  qui  probablement  coopéra  dans  la  publication  de  la  bydro- 
crapbie.  Mais  la  carte  de  Ruysch,  attachée  à  Tédition  romaine  de  1508 
de  Ptolémée,  à  laquelle  est  jointe,  nova  orbis  descriptio  de  Beuvcnuii , 
présente  la  même  erreur  :  or,  elle  a  sa  source  dans  la  traduction 
latine  de  Giocondo,  qu'eiK  1504  Benvenuti  expédia  de  Lisbone  en  Lor- 
raine et  que  lui-même  apporta  en  Italie. 

Au  nord  de  ce  nouveau  monde  Ruysch  est  différent  de  Thydrographic 

portugaise.  11  ignore  beaucoup  plus  les  découvertes  espagnoles.  De 

Vouest  il  couvre  le  continent  de  Cuba  par  uue  bande,  dont  Tinscrip- 

tion  :  hue  usque  naves  Ferdinandi  régis  hispanniœ  pervenerunt,  annonce 

rincoiinu  ultérieure  jusqu'à  la  Chine  et  Tlnde,  où  Ton  espérait  encore 

arriver  directement.  Il   n'ose  pas  indiquer  la   place  pour  Sipaugu 

(Japon),  parce  qu'il  présume  que  cette  ile  est  la  Spaniola;  il  ne  connaît 

pas  l'étendue  de  Cuba ,  qui  pouvait  être  une  portion  du  continant  de 

Gâtai,  comme  le  prétendait  Christophe  Colomb  (sot). 

(506)  Ellea  été  quelque  part  reproiluit»»,  mais  j»;  ne  me  rappelle  pas  dans  quel  ouvrage  ;  elle  ni'ost 
oraatù,  quoique  je  uai  jamais  vu  les  éditions  roiiiuines  du  IHuléinée.  —  On  trouve  ses  irat^nieiits, 
^pradaites  dans  plusieurs  ouvrages.  L'Afrique  daus  celui  de  Saularem ,  du  la  priorité  portugaise 
^j^usles  découvertes;  le  nouveau  monde,  dnus  ceux  de  Kauion  du  la  Sa{xra,  liistoria  du  la  i^la  du. 
^^ Paris,  18ii,  fol.  et  de  Uumboldt,  examen  de  l'Iiistoire  de  la  gèoçrapltiu  du  nouveau  momie 
^  '-,  ~  Nous  dounoQS  cette  (carte  toute  entière  réduite  à  s/s  de  récliulle.  Dans  rori{$ii)al  le» 
HUcripUoos  sont  eu  majuscules  ou  lettres  capitales. 

1^7)  Christophe  Colombe  était  un  liomme extraordinaire  :  avauturenx  et  studieux,  inti'épide  et 
»ci>iiiistniit,  inaltérable  dans  ses  adversités  et  d'une  activité  extrême ,  il  exécuta  ses  projets,  vil  ua 
*^.**'  ordre  de  choses  et  n'a  jamais  su  se  délivrer  des  idées  étroites  et  de  la  routine  du  siècle.  Lm 
graiedece  graud  homme  n'a  pu  sortir  des  ornières  tracées  par  la  pratique,  imposées  par  ses  propres 
preveQiioog.  Sa  piété  monastique  pouvait  édilier,  si  elle  ne  lésait  tort  à  l'humanité,  voulant  accomplir 
uprophéiie  d'Isaï  (inscrite  dans  la  carte  caUdane)  avant  la  fin  du  monde  qui  se  rapprochait  trop  : 
^P*Odantil  aimait  celte  race  d'Indiens,  contre  laquelle  il  sévit  lui-même  et  dont  il  voyait  l'exter- 
Bioation,  impuissant  de  l'empèc-her.  Excellent  observateur,  il  distingua  les  variétés  de  ia  nature  et 
î*®y.»t  parle  changement  de  l'air  remarquer  um;  éminence  sur  l'autre  hémisphère  du  pt  lit  globe, 

f|'**ïiiia  de  retrouver  le  paradis  terrestre  indiqué  par  les  pères  de  l'église  au  ion»!  de  l'oiifnt 
'V*'!  allait  traverser  en  partant  de  l'ouest.  11  entreprit  sa  première  expédition  pour  découvrir  le 
***™»i»qiii  laciliterait  la  prriustralion  de  l'orient  pur  l'ouest.  Hencontraut  les  terres,  il  salua  le 
'JCttxnjondçqui  produit  les  épiceries,  où  règne  le  grand  khan.  Il  lit  jurer  tout  son  équipage,  (|ue  le 
r^^.  de  Cuba  est  le  rivage  d'un  tontinent  Son  pilol»-  Jean  de  la  Ikisa ,  dessinait  en  luOO  la  forme 
n'*i>laiFe  de  Cuba,  et  Colomb  s'obstinait  à  chercher  la  prolongation  de  son  rivage  continental  jusqu'à 
_*••** cl  Terra  firnia.  Il  n'a  januis  voulu  aduieltn;  l'exislence  d'un  nouveau  monde,  heureux  de 
«««nuer  la.i;ecounai8sauce  du  rivage  des  pays  d»'»  épiccs  et  du  grand  khan.  Ue  retour  do  son  dernior 
'oyagcii  u  berçait  de  l'espoir  que  bientôt  une  ambassade  espagnole  partirait,  pour  se  rend<u  aujuès 
<>>  grand  khao  parle  chemin  de  sa  découverte ,  et  qu'un  piéton  ,  parti  de  Madrid,  saurait  à  j>ied  sec 
I^f^rir  levieux  monde  justyi'aux  rivages  qu'il  avait  si  heureusement  reconnus. 


150  GÉOGR.   LATINE,  i470«135O. 

Cependant  il  réunit  en  un  seul  continent  Catai ,  ses  parties  sepléB- 
trionales,  Lopet  Bergi,  Groenland  et  la  Terre-Neuve,  visitée  par  les 
Portugais  Cabot  et  Corlereal ,  ignorant  les  découvertes  anglaises,  détail- 
lées dans  la  carte  dedelaCosa.  On  voit  que  les  nouvelles  découvertes  ne 
se  communiquaient  pas  également  aux  cartographes;  ce  qu'avait  appris 
Tun  d*entre  eux,  ignorait  Tautre,  et  d'après  leurs  connaissances insuflt* 
santés  ils  hâtaient  de  former  les  hypothèses  sur  de  bases  peu  solides. 

La  carte  portugaise  hydrographique  n'invente  sur  ce  point  aucune 
hypothèse  :  elle  y  signale  sur  les  vasles  mers  :  regalis  domus  et  terra 
laboratoris,  appellations  inconnues  à  Ruysch.  (Cette  indication  solitaire 
sur  le  vaste  océan,  est  reproduite  par  Sylvanus  1511,  par  Schoner 
1520,  etc.)  Terra  Corterealis ,  de  Cortereal,  est  traduite  encorte  real, 
cour  du  roi ,  domus  regalis. 

En  suivant  les  rivages  du  Cata! ,  on  voit  que  Ruysch  donnait  aux 
extrémités  orientales  de  l'Asie  et  du  Calaï  la  même  forme  et  la  même 
situation  sur  Tautre  hémisphère,  qu'ils  ont  sur  le  globe  de  Behaïm, 
dans  rhydrographie,  chez  Sylvanus,  Bordone,  Schoner;  la  même  posi- 
tion des  grandes  iles  extraites  de  la  relation  de  Polo ,  et  il  réprouve  par 
une  légende  le  bassin  de  la  mer  indienne  fermée  :  Indicum  koc  pelaguê 
quod  omne  cum  suis  sinihus  unde  claudi  a  terra  Plolemeus  relulit,  par^ 
lent  oceani  esse,  lusUanorum  navigationes  ostenderunt  hoc  tempore. 

Dans  la  configuration  de  trois  péninsules  indiennes  il  diffère  beau- 
coup de  Behaîm  et  de  rhydrographie  portugaise.  Sou  India  intra  Gan^ 
gem  est  portugaise  :  mais  India  extra  Gangem  ne  dépasse  chez  lui 
autant  la  ligne  équinoxiale  que  chez  les  autres;  quoique  Malagua  el 
Soumatra  descendent  beaucoup  plus  au  sud.  Sinus  magnus  de  Ptolé- 
mée ,  est  chez  lui  porté  au  delà  de  la  ligne  et  réduit  à  une  proportion 
très-raccourcie.  Il  avait  donc  des  motifs  assez  puissants  pour  contrecÛre 
Ptolémée  sur  tous  les  rivages  de  Tlnde  et  de  sa  mer. 

Au  reste,  le  vieux  monde  est  de  la  construction  de  Ptolémée.  Il  paratt 
que  Ruysch ,  dans  cette  construction  même ,  admettait  quelques  recti- 
fications spéciales  :  son  Ecosse  et  les  rivages  africains  de  la  méditer- 
ranée  donnent  un  spécimen  frappant  de  sa  déviation  du  modèle  grec. 
Mais  Tensemble  de  Tédifice  est  ptoléméen.  Ses  longitudes  donnent  à  la 
mer  méditerranée  une  longueur  de  62  degrés.  Ruysch  se  distingue  par 
de  conceptions  qui  savaient  apprécier  les  nouvelles  découvertes  et  les 
connaissances  des  cartographes  antérieurs  qu'avait  engendré  le  moyen 
âge  :  mais  il  est  de  Fécole  allemande ,  qui  entreprit  de  soumettre  à 
Ptolémée  toutes  les  compositions  géographiques  (sos). 

Ptolémée  aux  prises  avec  la  méthode  nautique,  1470-1550. 

197.  Depuis  que  l'invasion  de  Ptolémée  s'était  déclarée  dans  la  géo- 
graphie du  moyen  âge ,  deux  modes  de  construction  de  cartes  se  sont 
trouvés  face  à  l'ace  opposés.  L'un  nouveau  de  la  renaissance  des  lettres, 

(308)  Le  pôle,  les  quatre  îles  et  les  ccucils  arctiques  de  Ruysch  sont  autrement  figurés  par  Gérard 
Mercator  qui  admet  que  l'oceanus  id  ostiis  inter  Las  (quatuor)  insulas  irrumpcns  4  euripos  facit 
quibus  indesiuenter  sub  scptentrioncm  fertur,  atque  ibi  in  viscera  tcrrx;  absorbetur.  Kupes  qusè  sàb 
pulo  est  ambitus  circiter  33  leucarum  babet.  D'une  de  ces  îles  qui  est  vis-à-vis  de  Bargu  ,  le  pôle  est 
visible  d'après  Marco  Polo  ;  celle  qui  touche  au  Groenland  est  occupée  par  les  Pygmées  qu'on  appeUe 
Scrcliogers;  sa  voisine  à  l'ouest  optima  est  et  saluberrima  totius  septcqtriouis." 


SYLTAHUS,  €98»  i5i 

ressuscitant  la  géographie  décrépite  greco-romainc  ;  Tautrc  ayant  son 
existence  depuis  plusieurs  siècles,  encore  jeune,  plein  de  Yigueur, 
enrichi  d'innombrables  connaissances.  Le  premier  soutenu  par  la  cré- 
dulité des  savants  théoriciens  et  philologues;  Fautre  par  la  plus  intime 
conscience  des  hydrographes  et  marins  expérimentés.  Ces  modes  mar- 
chent un  certain  temps  séparément ,  ensuite  se  heurtent  et  s'embrouil- 
lent réciproquement,  parce  que  dans  la  lutte  de  préférence  qui  s*était 
engagée ,  on  voulait  tirer  les  avantages  du  pau'ti  adverse  »  on  inventait 
des  concessions.  On  comprend  bien  que  Tancien  monde  était  Tunique 
terrain  de  la  lutte.  Les  plus  beaux  résultats  de  la  géographie  du  moyen 
âge  y  sont  menacés.  A  la  fin ,  après  la  résistance  prolongée  ils  cèdent  à 
la  prévention  irréfléchie,  obstinément^  entêtée. 

Les  marins,  pilotes,  hydrographes,  cosmographes,  ne  discontinuaient 
point  de  dessiner  les  cartes,  tant  spéciales  que  générales,  suivant  leur 
méthode  (309).  Les  seuls  éditeurs  de  Ptolémée,  publièrent  leurs  cartes 
en  taillant  en  bois  ou  gravant  sur  cuivre.  Ils  copièrent  d'abord  celles 
d*Agathodaimon  ou  de  Ptolémée  latinisées,  et  quelques-uns  d'entre 
eux  y  enjoignaient  les  cartes  modernes  des  cosmographes  du  moyen 
âge,  cartes  hydrographiques,  portulans,  chorographlques.  S'il  avaient 
de  la  besogne  à  rectifier  les  premières,  ils  n'avaient  qu'à  copier  stricte- 
ment et  exactement  les  autres,  car  ils  les  détérioraient  qu^nd  ils 
essayaient  de  les  perfectionner.  Ceux  d'entre  eux,  qui  connaissaient  le 
mérite  des  cartes  des  cosmographes  de  leur  époque,  regrettaient  qu'elles 
fussent  privées  de  toutes  les  décorations  théoriques,  qu'elles  n'étaient 
point  graduées;  ils  étaient  peines  de  remarquer  leur  différence  con- 
stante avec  les  formes  ptoléméenncs  et  leur  désaccord  :  ils  méditaient 
d'y  porter  remède.  Les  autres  condamnaient  ces  cartes,  substituant 
leurs  propres  contrefaçons  de  Ptolémée.  Editant  les  cartes  gravées  en 
bois  ou  en  cuivre ,  suivant  leur  manière  de  voir ,  ils  se  constituèrent 
juges  suprêmes  de  la  question  et  statuèrent  de  l'avenir  de  la  géographie. 
De  ce  nombre  sont  les  cartes  de  Schedel,  de  Munster,  et  des  autres 
publiées  à  Venise,  répandu^  sous  différents  titres,  et  les  caries  des  édi- 
tions de  Ptolémée  de  US%  1486,  1507, 1508,  1511, 1515,  1520,  1555. 

Nous  avons  déjà  examiné  les  produits  de  Nicolas  Donis  1482,  148G, 
et  de  Martin  Behaïm  1492,  1605;  nous  allons  suivre  la  marche  des 
autres. 

198.  Bernard  Sylvanus,  d'Eboli  (dans  le  napolitain),  plus  géographe 
que  philologue,  édita  en  1511  la  géographie  de  Ptolémée  d'une  manière 
toute  singulière  (510).  Il  n'a  pas  voulu  déroger  à  son  titre  de  géogra- 
phie et  ne  Ta  pas  qualifié  de  cosmographie  comme  les  autres  :  mais  sous 

(309)  Les  aocoaitains  Benincasa  et  Frediice,RosseUi,Andaloze,  Sancbez  de  Huelba ,  Cassadilla , 
les  Colomb;  carte  messine  4511,  Juan  do  la  Cosa,  biscaïen,  André  de  Morales  triauain,  Diego 
Ribero  4529»  Jacq  de  Vaulx  dieppois,  etc.».etc.,  sans  nombre.  En  Espagne  encore  vers  la  Gn  du  xvi* 
siècle,  comme  je  vois  par  Tallas  de  4573;  de  même  ailleurs  comme  on  voit  par  les  publications  bol- 
laodaiset  à  partir  de  Tannée  4584. 

(540)  Claudii  Ptholomaei  alexandrini  liber  geograpbiae,  cnm  tabulis  et  univcrsali  figura  et  una 
additione  locomm  quae  a  recentioribus  reporta  sunt,  diligcnti  euro  emendatus  et  tmprossus,  1511, 
Veoetiis,  per  Jacobum  Pentium  de  Lcucbo.  —  Ces  loct  quac  a  recentioribus  reporta  sunt,  c'est-à- 
dire,  au  sud  l'Afrique;  à  Test  les  relations  do  Marco  Polo;  à  l'ouest,  terra  crucis,  les  îles  du  nouveau 
monde  et  terra  Laboratoris  :  sont  figurées  sur  la  première  carte,  mappemonde  de  Ptolémée.  A  cet 
eilel  il  a  donné  un  développement  de  180*  de  la  longueur  de  l'habitable,  de  70*  tant  à  l'est  qu'à 
roaest  :  ainsi  qu'elle  s'éttnd  sur  320*  de  Iragueur.  (Voyez  n*  ISO  de  notre  atlas). 


iâS  GÉOGR.  LATINE^   1470-1550. 

le  titre  de  Ptolémce,  il  ioventa  un  ouvrage  remarquable,  inulHeet  sans 
suites.  Considérant ,  dit-il ,  les  positions  et  les  distances  de  la  descrij^ 
tion  de  Ptolemée,  j^étais  étonné  du  peu  d*accord  des  tables  de  cet  exact 
géographe  «  avec  les  tables  récentes  des  navigateurs;  j'étais  d*autant  plu» 
étonné  parce  que  je  savais  que  Plolémée  écrivit  aussi  basé  sur  les  don- 
nées des  navigateurs.  J'ai  réuni  de  toutes  parts  les  exemplaires  grecs  et 
latins.  Je  trouvais  dans  tous  la  plus  grande  variété  de  chiffres  qui  dési- 
gnent les  positions  des  lieux.  L'ayant  remarqué ,  j'examinai  avec  plus 
d'atteniion  les  paroles  de  Ptoiémée,  qui  contrariaient  plusieurs  chiffres; 
je  reconnus  que  pres({ue  toutes  ces  paroles  répondaient  à  noa  naviga- 
teurs et  les  chiffres  nullement.  Voyant  tout  ça  je  confrontai  les  paroles- 
de  Ptoiémée  avec  les  navigateurs,  et  corrigeai  les  chiffres  (s^ii). 

Sylvanus,  motivé  par  ces  réflexions,  convaincu  de  la  bonne  connais- 
sance des  navigateurs  de  son  temps,  enthousiaste  de  Ptoiémée,  ayant 
toute  conûançe  dans  son  grand  et  incontestable  savoir  :  ne  pouvait 
admettre  qu'il  serait  lui-même  auteur  de  toutes  ces  aberrations  et  dif* 
formilés,  qu'on  voyait  sur  les  cartes  d'Âgathodaîmon ,  de  copistes  et 
éditeurs  récents,  dressées  sur  les  tables  des  longitudes  et  latitudes* 
Voulant  retrouver  et  rétablir  l'idée  de  l'ancien  géographe,  dont  il  s'ima- 
ginait la  conformité,  nécessaire  avec  les  bonnes  et  incontestables  con- 
naissances nautiques,  il  négligea  les  variantes  nombreuses  des  chiffres, 
et  sans  se  gêner,  inventa  arbitrairement  et  substitua  les  autres,  autant 
que  ces  chiffres  de  son  invention  pouvaient  s'adapter  aux  formes  nau- 
tiques, sans  diminuer  ni  déranger  la  longitude  générale  du  géographe 
comme  elle  était  totale  de  180%  et  de  ^i"^  pour  la  mer  méditerranée 
(voyez  n®  120  de  notre  atlas). 

Or,  ce  n'est  pas  un  Ptoiémée  exact  et  correct,  mais  corrigé,  ingénieu- 
sement refondu  et  modernisé,  costumé  en  pilote  ou  cosmographe 
moderne.  La  nomenclature  reste  intacte,  mais  toutes  les  positions  se 
déplacent,  cèdent  à  un  autre  ordre  dans  chaque  pays,  sans  que  la  lon- 
gueur de  la  longitude  établie  dans  la  géographie  de  Ptoiémée  soit  dimi-> 
nuée.  Tous  les  pays  reçurent  par  cette  opération,  les  formes,  les  pro- 
portions rapprochées  aux  connaissances  supérieures  de  la  géographie 
nautique  :  tous  les  pays  du  moins  qui  furent  à  la  portée  de  ces  connais- 
sances. La  vue  et  l'examen  de  ces  cartes,  leur  confrontation  avec  les 
cartes  agathodaïmonicnncs  ou  ptoléméenncs,  et  avec  les  cartes  nauti- 
ques, font  mieux  comprendre  cette  transformation  fantastique  sur  tous 
les  points.  Voir  l'Albion,  la  Gaule,  l'Italie  et  la  mer  adriatique,  la  mer 
syrienne  et  la  Syrie ,  les  côtes  de  l'Afrique  septentrionales  et  occiden- 
tales. La  pose  horizontale  de  Kaledonia,  se  redresse  en  attitude  d'Ecosse; 
la  déclivité  de  Syrie  devient  perpendiculaire;  Karthage  et  Tunis  mon- 
tent vers  le  nord  et  par  leur  courbe  font  remonter  Palerme  et  le 
museau  occidental  de  Sicile;  les  rivages  perpendiculaires  de  l'atlantique» 

(311).  Ego  ciim  Plholçmaeum  ,  inter  alios  geographiac  scriptoros  diligcntissimnm  et  ntus  et 
distnnlias  locorura  scripsisse  conliccrcin ,  admirabar  profetlo,  cur  illiits  tabulac  paacis  ad  modum  io 
rcbus,  ciiin  nostri  tcniporis  uavigatioiiibus  consentirent;  coque m^gis adniiral)ar  qnod  IHboiemaeum 
quoqiie,  navigationis  coniprimis  innixiini,  ea  quae  srripseril,  scripsisse  arbilraliar.  Ciimque  diversa 
et  graeca  et  lalina  excniplaria  undique  conquircrim ,  in  omnibus,  nmximam  in  nuraeris,  qiiibus 
locoruDi  signanlur  intorvalla  varictati'm  iuvcni.  Quod  cum  aniinadverlissem,coepi  dib'geutius  ipsa 
Plholemaei  verba  cxamiuarc.  Curaque,  picrisquc  in  locis,  nnmori  verbii  ipsis  rcpugnarent,  cognovi, 
navigationibus,  prope  omuia  respondiîre,  numéros  disscntire.  Quae  cum  vidissem,  IHbolemaci  vcrba 
cum  navigationibus  ipsis  coufcrens,  numéros  corrcxi  (Bcrnh.  Silvouus.  praefatio). 


SYLVANUS,   198.  i53 

s'^ëlaDceal  convenablement  vers  le  nouveau  monde.  Partout  où  il  possé- 
dait des  données  de  carres  nautiques  il  se  conforma  à  ce  bon  modèle. 
Cette  composition  singulière,  baptisée  du  nom  de  Ptolémée,  considérée 
sous  un  autre  point  de  vue ,  offre  une  image  des  caries  nautiques  ten- 
dues en  bande,  couvertes  de  la  nomenclature  ancienne  (ti  mises  sous  le 
cannevas  de  longitudes  et  latitudes  ptoléméeunes.  Le  monde  nouveau 
enfermé  dans  une  vieille  cage  (sis). 

Sylvanus  rend  compte  de  certaines  opérations  et  ses  argumentations 
sur  chacune  sont  les  suivants.  Ptolémée  dit  positivement  quVi  partir  de 
la  base  méridionale  la  Bretagne  n*a  que  deux  côtés  occidental  et  orien> 
tal,  ce  qui  est  avéré  par  les  navigations  modernes;  or,  tonte  la  flexion 
de  FEcosse  de  la  rivière  Vedra  jusqu'au  promontoire  Vervedron,  qui 
tourne  le  rivage  oriental  en  un  rivage  méridional ,  est  contraire  à  son 
opinion  et  le  fruit  de  Terreur  des  chiffres  qu'il  faut  corriger.  Examinant 
bien  la  description  de  la  situation  des  peuples  au  nord  de  Ligcris,  il  est 
absolument  nécessaire  de  reconnatire ,  dit-il ,  que  Ptolémée  assigne  à 
rembouchure  de  Ligeris  une  position  de  trois  degrés  plus  méridionale 
que  ne  Tindique  le  nombre  de  sa  table;  et  la  situation  des  peuples  au 
sud  de  ce  fleuve  force  à  faire  descendre  les  Pyrénées,  par  conséquent 
toute  l'Espagne,  encore  plus  au  midi.  De  sorte  que  toute  l'Espagne  et  le 
détroit  d'Hercule  et  la  Tingitane  descendent  quatre  degrés  au  sud  des 
chiffres  donnés  par  les  tables  de  longitudes  et  de  latitudes.  Cela  n'est 
pas  contraire  aux  paroles  de  Ptolémée  et  serait  sans  doute  son  opinion, 
parce  que  les  navigations  récentes  l'approuvent  et  la  couleur  basanée 
des  habitants  de  la  Betique  confirme  leur  position  plus  méridionale  (5 15). 
Les  Pyrénées  reçoivent  par  ce  changement  leur  direction  de  l'ouest  à 
l'est,  et  les  rivages  de  la  Mauritanie  césarienne,  leur  inclination  qui 
monte  vers  le  nord.  Cette  descente  de  Calpe  de  56"  15'  à  51**  15  de 
latitude,  et  de  toute  TEspagne  de  quatre  degrés,  résulte  de  la  gradua- 
tion rectiligne  de  la  carte  nautique,  viciée  par  l'orientation  de  la 
boussole. 

Sylvanus  remarque  le  désaccord  des  chiffres  de  plusieurs  positions 
de  la  Corse  avec  la  description  de  Ptolémée  de  leur  situation  (sii).  Il 
s'efforce  de  retrouver  dans  la  description  plolcnicenue  de  la  Sicile,  sa 


(SIS)  Raidel  trouve  les  IcgMidcs  dos  cartes  de  Sylvanus  illisibles.  I.oooruin  nomiiia,  minutiori 
charactere  îndicaotnr,  malu  iuterdum  divisa,  adeo  ut  vix  legi  possiut  (cuuimcnt.  VU,  5,  |>.  55).  Je  nu 
sais  pas  pourquoi?  —  Les  cartes  de  l'cdîtion  de  Denis  1482 , 1  i86,  soi4  coupccs  et  taillées  en  bois, 
avec  grand  soin  et  très-claires;  les  cartes  do  l'édition  d'Ubelin  luli,  iSSO,  sont  aussi  coupées  et  tail- 
lées en  bois,  mais  grossièrement,  et  les  lettres  y  sont  embrouillées,  difliciles  à  distinguer,  souvent 
endommagées  par  le  traoebant  ou  inachevées.  —  Les  carlc!»  de  l'édition  de  Sylvanus  1511,  sont 
exécntées  de  toute  autre  façon.  Elles  sont  taillées  et  coupées  en  bois,  bien  mieux  qiie  celles  d'Ubelin  , 
mais  leur  bois  est  privé  de  toute  inscription.  Les  inscriptions  sont  imprimées  avec  des  lettres  typo- 
graphiques à  double  coup,  rouges  et  noires,  par  conséquent  claires  et  lisibles.  —  La  carte  de  Lor* 
raine  de  ioiS,  est  coloriée  par  l'impression  à  plusieurs  coups  :  les  contours  des  montagnes  et  la 

i»lapart  des  inscriptions  sont  noires;  les  signes  des  villes  et  quelques  épigraphes  rouges;  les  arbrrs, 
es  montagnes  et  les  rivières,  vert  jaunâtre.  De  même  les  armoiries  qui  encadrent  cette  carte  de  lu 
cborograpliie  plus  spéciale  sont  coloriées. 

(SIS)  lior,  licet  aliorum  nnmeris  contrarmm  sit,  nnlla  tamen  cxparte  Ptholemaei  verbisadversatur  : 
immo  vero  hanc  ipsius  sententiam  esse  facile  credimus  :  quia  ex  nauigationibus  ita  se  se  habcre, 
compertam  habenus. 

(314)  Corsicam  innulam  describentes  alii  Fesiram  ciuitatem  ,  Pitaui  fluuii  hortia  et  Marianum  pro- 
inontonum.in  meridionali  latere  locauere,  cum  tamen  a  Ptholemaeo  in  occidentali  esse  dicantur. — 
Syracnsanam  etiam  porinm,  Rnbram  ciuitatem,  Alistam  ciuitatem,  Granianum  promontorium,  ac 
Phikinii  portum  ad  orientale  latus  transtulcre  :  cum  tamen  in  meridionali  iuxta  Ptholemaei  verborum 
sententiam  esse  debeant. 


i54  GÉOGR.  LATINE,   147(M550. 

positioD,  détermincc  par  les  navigations  des  marins  (sis).  Il  g^étoune 
cooiDienl  on  a  pu  défigurer  rilalie  et  tourner  vers  Test  ses  rivages  entre 
le  mont  Gargan  et  Hydrunt,  lorsque  Plolémée  dit  positivement  que 
ritalie ,  au  septentrion,  à  partir  du  fleuve  Tilavempt  jusqu*à  Gai^n  et 
Hydruut  est  baignée  par  l'Adriatique  (sie).  11  justifie  encore  les  muta- 
tions des  chiffres  dans  les  positions  de  TÂfrique  par  l'observation  que  la 
terre  inconnue ,  d'après  l'expression  de  Ptolémée,  n'est  pas  au  delà  du 
golfe  éthiopique,  mais  l'entoure  (si?);  que  la  position  d'Alexandrie 
par  51*  se  de  latitude  est  fausse  et  contraire  à  l'opinion  de  Ptolémce, 
parce  qu'Alexandrie  avec  les  rivages  de  la  Libye,  doit  garder  son 
climat,  et  la  parallèle  de  celui-ci  se  trouve  par  conséquent  par  50"*  40' 
de  latitude,  ce  qui  répond  justement  à  l'expérience  des  navigateurs  (si s). 

Motivé  par  tant  de  raisons,  il  se  voit  autorisé  à  opérer  le  déplacement 
de  tous  les  rivages  et  des  positions  de  l'intérieur  des  cartes  de  Ptolémée 
dans  les  îles  britanniques,  dans  la  Corse,  dans  la  Sicile,  et  dans  les 
autres,  l'Espagne  y  comprise;  et  en  commençant  du  fleuve  Rhin,  dans 
toute  la  partie  septentrionale  jusqu'à  l'embouchure  du  Danube;  ensuite 
à  partir  de  l'embouchure* de  Fasis,  dans  toutes  les  côtes  orientales, 
méridionales  et  océaniques  jusqu'à  l'hippodrome  éthiopien.  L'intérieure 
de  la  Libye,  le  cours  du  Danube  et  tout  le  nord  restent  intacts. 

Le  produit  de  celte  opération  fournit  pour  toute  la  partie  réformée 
de  l'Europe  et  de  la  mer  médilerranée  une  bigarrure  de  vice  au  trait  de 
belles  apparences  de  la  cartographie  nautique.  La  composition  de 
Plolémée  avait  quelque  mérite  par  rapport  aux  latitudes  :  elles  furent 
viciées  par  l'orientation  de  la  boussole  marine.  Les  compositions  des 
marins  excellaient  dans  l'ensemble  par  les  proportions  de  l'étendue 
entière ,  par  la  largeur  et  la  longueur  convenables  :  elles  furent  viciées 
et  ruinées  de  fond  en  comble  par  l'exorbilante  longitude. 

Afin  de  mettre  en  évidence  celte  opération  géographique  et  le  pro- 
duit qu'elle  engendra ,  nous  extrayons  une  quarantaine  de  positions  de 
Ptolémée  et  nous  les  collationnons  avec  les  changements  inventés  et 
substitués  par  Sylvanus  : 

Ptolémée.  Stlvanos. 

longit.        latit.  longit.        kitit. 

pr- Taraed.  Orcas.  31»  SO*  60O15'  15»  20'  61»  oo' 

p.  Vervednim.  31  20    59  40  16  30    61  45 

Rheniost.  28    0    54    0  25    0    55    0 

Parissii.  23  30    48  30  20  15    48  20 

Olisippo.                              5  10    40  15  4    0    35  10 

(51S)  Per  omnia  latina  excmplaria  septcntrionalis  lateris....  logitnr  occidcntalis...  qnae  lectio  facile 
falsa  esse  deprebenditur....  neque  occidentale  latns  appellaudum  est...  cum  meridiojtali  recte 
apponatar. 

(31 6|  Qood  magis  admiror,  est,  qnod  littas  omne  qood  a  Gargano  monte  Hydramtem  a«qae 
exteuditur,  orientali  exposuerunt,  cum  tamen  ad  seplentrioncm  vergat,  quod  ex  nauigatiooibiu 
habelur,  ac  ectiam  ex  Ptbolemaei  verbis  comprebalur,  dicenlis  I  Italiam  a  scptentrione  praeter  alîa , 
Itttore  adriatici  sinus  a  Tilavemptt  fluuio  ad  Garganum  monlem  et  Uydruntem  terminan. 

(317)  Dicitenim  Ptbolemaeus,  terram  incognttam  ciogere ,  id  est  complecti  et  coninere  ainniii 
aethiopicum,  non  ultra  ipsum  produci. 

(348)  Alexandriam  etiam,  qui  aute  nos  tabulas  descripscre,  gradibus  uno  ac  semis  snpra  trîgiata 
ab  acquinocUali  circule  distantem  locaucre  :  parallelnm  vero  per  Alexandriam  gradibus  triginta  cnm 
tercia  tamen...  signa verunt...  In  omnibus  enim  id  observari  débet,  ut  ea  loca  a  qnibos  paralleli  deao- 
minationem  sument  ab  eisdem  intersecentnr...  Nos  itaque  ad  ipsum  cius  parallelnm  Alexandrisai 
omnemaue  maris  aegyptiad  littus  contraximus,  quod ,  non  modo  Ptbolemaei  sententia  oonsoBvm 
esse,  sea  nostri  etiam  temporis  nauigationibns ,  omni  ex  parte  responderc  compertum  babem». 


SYLYANUS, 

198. 

Ptolémée. 

Sylvaxos. 

longit. 

latit. 

longit. 

latit. 

Toletum. 

10    0 

41    0 

10    0 

36  30 

Gorduba. 

9  âo 

38  20 

8  45 

34  10 

ls|>alis. 

7  15 

37  50 

7    0 

33  30 

Gadira. 

5  10 

36  40 

7  20 

32  13 

m.  Calpe. 

7  30 

36  15 

9  15 

31  40 

Veneiis  templum. 

23    0 

42  20 

21  30 

41  30 

Massilia. 

U  30 

43    5 

25  20 

42  50 

Genua. 

30    0 

42  50 

30  30 

43  10 

Pisa. 

33  30 

42  35 

32  40 

42  40 

Roma. 

36  40 

41  40 

35    5 

41     0 

Regium. 

39  30 

38  15 

39  40 

37  10 

Hydra. 

43    0 

39    5 

42  30 

40  20 

m.  Garganus. 

42  20 

41    0 

39  40 

41  20 

Âncona. 

36  30 

43  40 

36  20 

43  10 

Titavempti  ost. 

33    0 

44  50 

35  15 

45  30 

Mediolanum. 

30  40 

44  15 

30  50 

44  45 

pr.  Pelori  Sicilia;. 

39  20 

38  30, 

39    0 

37  13 

Panormus. 

37    0 

37    4) 

35  55 

36  45 

pr.  Lilybeum. 

37    0 

36    0 

34  55 

35  50 

Messana. 

39  30 

38  10 

39    0 

37    0 

Lissus. 

43    0 

41  20 

43  45 

41     0 

pr.  Tenaria. 
Tbessalonica. 

50    0 

34  20 

50  30 

34  25 

49  50 

40  15 

49  55 

40  45 

Byzantion. 

56    0 

43    5 

56  20 

42  55 

Sacrum  Danubii  ost. 

56    0 

46  15 

55    0 

44  30 

Rhodus. 

58  20 

35  50 

58  20 

35  50 

Phasis  ost. 

72  30 

45    0 

72  20 

44  50 

Trapezus. 

70  30 

43    5 

70  45 

43  30 

Smyrna. 

58  25 

38  35 

56    0 

38  35 

Âlexandria  Syrise. 

69  30 

36  10 

69  25 

36  40 

Beritus. 

67  30 

33  40 

68  30 

34    5 

Ptolemais. 

66  50 

33    0 

68    0 

32  55 

Âscalon. 

65    0 

31  40 

65  30 

30  45 

Âlexandria  .Egypti. 

60  30 

31     0 

60  15 

30  20 

Bérénice. 

47  50 

31  20 

47    5 

31  10 

Tripolis. 

42    0 

31  40 

37  30 

30  15 

Meninx  lotophagorum. 

39  40 

31  20 

34  50 

31  20 

Gartliago. 

34  50 

32  40 

31  15 

34  20 

Bagradse  ost. 

31    0 

32  40 

31     0 

34  45 

loi  caesarea. 

17    0 

33  20 

17  50 

30  20 

Halvae  ost. 

11  10 

34  50 

13  30 

30    0 

Tingis. 

6  30 

35    5 

9  10 

30  55 

L'Asie  en  général,  jusqu'à  180<*  de  longitude,  reste  intacte  faute  de 
renseignements  nautiques.  Sylvanus  savait  cependant  avec  tout  le 
monde  que  les  Portugais  s'étaient  rendus  à  Galicuth  et  avaient  fait  des 
reconnaissances  dans  l'Inde.  Les  distances  de  la  première  navigation 
portaient  la  position  de  Galicuth  sur  le  littoral  de  Garmania ,  à  l'ouest 
de  rindus.  L'espagnol  Jean  de  la  Gosa  en  1500,  lui  donnait  cette  posi- 
tion sans  toucher  au  littoral  de  Garmania.  Les  Portugais,  mieux  avisés, 
appliquaient  dans  la  composition  de  Plolémée  toute  la  péninsule  de 
rinde,  avec  Galicuth,  aux  rivages  de  l'Inde,  étendus  à  l'est  de  l'Indus, 


1j6  GÉOGR*  latine,  1470-1550. 

comme  on  le  voit  par  les  caries  portugaises  de  150i,  1507, 1508  (1515), 
d'Ubelia  et  de  Ruysch.  Sylvanus  ne  Tignorait  point,  parce  quMi  appré- 
ciait le  savoir  de  son  ami  Jean  Cotia  et  blâmait  Fignorance  du  moine 
Marc  Beneventos,  éditeurs  en  1507,  de  Ptolémée  et  de  la  carie  de 
Huysch  (5 19).  Sylvanus  préféra  de  se  conformer  à  une  conjecture  conçue 
au  hasard,  et  a  eu  Faudace  (comme  il  le  dit  lui-même),  d'inventer  pour 
remplacement  de  Calicuth,  contrairement  aux  chiffres  et  la  description 
de  Ptolémée,  une  péniusule  carmanique.  Mais  Strabon,  dit-il,  et  Ârrien 
parlent  d'une  extension  de  la  Carmanie  vers  le  sud;  les  Portugais» 
excellents  navigateurs,  sont  tout  récemment  parvenus  jusqu'à  Carmanie 
et  y  ont  fait  la  découverte  du  fameux  Caliculh;  et  Ptolémée,  dans  son 
premier  livre,  recommande  de  suivre  plutôt  les  plus  récents  :  or,  Syl- 
vanus en  est  sûr,  que,  si  Ptolémée  avait  pu  connaître  Finvention,  il  lui 
eût  donné  indubitablement  son  assentiment  (320)  (n<^121  de  notre  atlas.) 

Singulière  destinée  de  la  Carmanie,  un  continent  presque  désert, 
situé  presque  dans  Tinlérieur  de  l'Asie,  métamorphosé  en  Inde,  en  une 
péninsule  fertile  et  peuplée,  se  rapprochant  à  Téquaieur.  Cette  bizarre 
conception  eut  ses  conséquences.  Sylvanus,  s'il  n'était  lui  seul  auteur 
de  cette  création ,  il  était  suivi  par  quelques  autres  géographes  (Bene- 
detto  Bordone  en  1521,  1551),  et  cette  opinion  ou  confusion  de  l'Inde 
avec  la  Carmania  consolida  les  suppositions  de  l'identité  de  l'antique 
Tabrobana  avec  Soumatrd;  contribua  à  l'incertitude  et  à  la  confusioa 
d'idées  relativement  à  l'emplacement  de  l'iudus  et  du  Gange;  incerti- 
tude qui  fatiguait  longtemps  la  cartographie. 

Toute  la  composition  de  Bernard  Sylvanus  pourrait  être  considérée 
comme  un  jeu  d'esprit  qui  n'aboutit  à  rien.  Cependant  dans  ces  évolu- 
tions de  la  géographie,  que  nous  examinons,  nous  y  voyons  cette  agita- 
tion de  l'esprit  qui  cherchait  à  amalgamer  les  éléments  hétérogènes  et 
discordants;  nous  voyons  dans  l'idée  de  Sylvanus  le  précurseur  de  ce 
qui  va  arriver  et  s'accomplir  dans  une  centaine  d'années,  lorsque  le 
monde  encagé  dans  de  hux  méridiens,  commencera  à  recouvrer  ses 
formes.  Substituez  sur  les  cartes  de  Sylvanus,  à  la  nomenclature 
ancienne,  celle  de  son  époque  et  vous  aurez  les  cartes  qui  circulaient  à 
foison  un  siècle  plus  tard.  Cependant  les  cartes  composées  par  Sylvanus 
sous  le  nom  de  Ptolémée,  sont  souvent ,  au  premier  coup  d'œil,  supé- 
rieures à  ces  autres.  Elles  sont  admirables,  d'une  forme  séduisante  et 
plus  proportionnée,  plus  harmonieuse  que  les  constructions  de  ce 
genre  de  géographes  postérieures.  Car  Sylvanus  était  plus  hardi,  il 
puisait  à  la  source  encore  limpide  des  caries  nautiques  et  il  prélendit 
faire  de  Ptolémée  un  géographe  parfait  (321). 

(319|  Sed  primas  et  sepiimus  liber,  snnt  loannis  Cottae,  mortui  Viterbîe. 

(3i0)  Uanc '^tabulant  Carmaaiae),  teincrario  quodamansu  Dostro,  licetnumeris  aducrsetur,  neqnc> 
Ptliolemaci  etiam  verbis  res|M>Ddnat ,  quam  tamen  Teritati  consonare  corlo  sfimns  ita  describr.udain, 
satius  fore  duximus....  li  (Strabo,  Arrianus  Nearelii  nanigatiotiom  narrans  cl  Lasitani)  n*rcrunt 
iUam  Camiaiiiae  partcm  quae  ad  au$ti'um  tendit,  sic  pnxluclani  esse,...  quud  elsi  Ptholeniaei  cora- 
mentariis  adversari  cretliderim,  cum  Jibro  primo,  ipse  etiam  dicat,  recrnlioribus  semper  magis  crc- 
dendara  fore.  Id  ei^u  temerario  quodam  ausu  nostro  egimus,  cui  Ptholemaeas  etiam,  si  nos  audiret  ^ 
asseosurum  fluisse  non  dubitamus. 

Dans  sa  cooslruction  de  la  péuinsule  carmaniqne  (de  l'Inde)  il  entre-mèla  à  Tantiquc  nomenclatare 
certain  nombre  de  positions  uoiivellemeut  visitées  |>ar  les  navij^atonrs  |>ortugais.  Nous  la  donnons 
dans  notre  atlas  n*  lil,  il  suiTil  de  la  fonfronter  avec  la  Carmanie  de  Ptolémée  pour  comprendre 
son  déplacement  et  la  mixture  des  positions. 

(321)  Voyez  Zurla,  suUe  anliclic  mappe  idro  geographicke,  chap.  i8. 


UDELIN,   ESSLER   199.  i57 

i09.  Jacq  Essler  et  George  Ubelîn,  édilanl,  en  iol5,  la  géographie 
des  aocieones  tradilions  de  Ptolémce,  y  joignirent  comme  supplément, 
vingt  cartes  nouvelles,  dont  il  y  à  40  spéciales,  particulares ,  de 
TEurope  (y  inclus  celle  de  Tocéan  occidental  ou  de  la  terre  neuve)  : 
deux  de  l'Afrique;  trois  de  TAsie;  quatre  de  la  cliorographie  plus 
spéciale,  qualuor  dcniquc  chorographicœ  parlicularim^es ;  et  une  carie 
générale  suivant  les  traditions  des  hydrographes  :  hydrographia  siue 
charla  marina^conlinenstypum  orbis  universalcmfiuxtahydrographorum 
tradili(mem(^^i),Cesi  une  des  plus  intéressantes  éditions,  parce  qu'elle 
nous  a  conservé  quantité  de  cartes  du  moyen  âge,  de  temps  précédents^ 
tant  nautiques  que  continentales  de  difTérents  pays  (525). 

Les  vingt  caries  nouvelles,  modernlorum  ^  se  classent  en  différentes 
catégories;  !•  Les  quatre  de  la  cliorographie  plus  spéciale,  savoir  :  la 
Lorraine,  la  province  du  Rhin,  provincia  Ilheni,  ou  les  environs  de 
Strasbourg,  la  Suisse  et  la  Crète ,  sont  sans  aucun  doute  d'une  compo- 
sition très-récente.  —  2**  Les  cartes  portugaises  ou  de  la  péninsule 
pyrénéenne,  au  nombre  de  sept,  savoir  :  hydroi;raphie  générale,  océan 
occidental  ou  terre  nouvelle,  deux  portions  de  l'Afrique,  les  Indes 
orientales,  l'Espagne  et  les  fies  britanniques.  Leur  composition  n'est 
pas  trop  ancienne,  parce  que  les  cinq  premières  représentent  les  nou- 
velles découvertes  (z%*);  sur  la  carte  d'Espagne,  sont  nommément 
dessinés  :  les  Azores,  Pico  Fayal,  îles  colonisées  en  iiGG  et  reconnues 
depuis  peu;  or,  cette  carte  est  retouchée  :  mais  elle  existe  (elle  qu'elle 
était  en  1181,  car  elle  se  trouve  dans  le  code  de  Piolémée  de  cette 
année,  conservé  dans  la  bibliothèque  de  Bourgogne  à  Bruxelles  (voyez 
n**  125  de  notre  atlas)  ;  quant  à  la  carte  des  îles  brilanuiques  {n°  123 
de  l'atlas)  elle  est  conforme  avec  la  figure  de  ces  îles  de  la  carte 
catalane  de  1577  (323). 

3"  Les  cartes  des  cosmographes  antérieurs  sont  d'une  composition 
plus  ou  moins  ancienne.  Elles  sont  au  nombre  de  sept.  De  ce  nombre 
la  carte  de  la  Palestine  s'isole,  sa  composition  remonte  au  xiv*"  et  au 

(322)  Claudii  Ptolorooi  viri  alcxandrini,  mathematicae  disciplinac  philosoplii  doctissimi ,  googr»* 

iiliiae  opns  nonissima  tradnrtionc  c  graeronim  arclirtvpis,  (rastigatissimc.  prcssiim;  raeteris  ante 
acubratonim  multn  presttniitios  :  pro  prima  parte  cohtinons  :  1,  CI.  Ptolemaoi  gengrapliiani  per 
ocio  libros  partitam;  2,  uua  ciim  collationc  durtioniim  gram-ariini  c  roginnn  ad  latiiias  CKrlissima 
graduum  calculalioiie  :  3,  rogistrationem  item  nouam  rcgioiiiini,  pracroclurarum.  ciiiilatom,  fliimi- 
nutn,  roarium,  lacuum,  portiium,  silvoriim,  oppidorHm,  villaium  ac  gciiliiim  ad  onlincm  cliartarum 
(il  columnarura  sin^nla  corlissimo  inonstrans  indice;  -i  (|iiam  brevis  ot  doclissiina  (îrogorii  Lilij 
sabsoquitariostrattio,  de  graocnnim  niimcrali  snpputatiouts  in  lra<liHti(>ne  gracca,  rcs  sritu  anreo; 
5,  tabalaram  deindc  auotoris  viginli  scptcmi,  ordo  hic;  «'st  :  générale  orhis  inxla  destriptionem 
Ptbnicmaei,  una  ;  Eurnpac  labulae,  tieeem;  Aphriraetubulae  ,  quatuor  ;  Asiao  tahiilae,  duodecini  ; 
osi  et  una  corporis  sphenei  in  piano  iuxta  (incm  7  li.  —  pars  secnnda  moderniurnm  hislrationnm 
viginti  tabniis,  velutt  suppicnicntnm  quoddam  anliquitnlis  obsololao,  sno  loro  ,  quac  vel  abstrusa, 
vel  erronea  videbantur  resolutissimc  pandit  :  adncxoad  linom  tractatn,  sicnli  lertu  incundissimo  ila 
et  utilissioio,  de  variis  moribus  et  ritibus  gentium;  cornndemquc  ac  l(M*alium  nominnm  originibns; 
—  anno  Christi  opt.  max.  1513,  martii  12  pressusbic  Ploleniauus,  Argcutinau,  vigiluutissima  castiga* 
tiono,  iodustriaque  Joaonis  Schotti,  urbis  in  ligeuae,  in  folio. 
(325}  Les  mûmes  cartes  se  trouvent  reproduites  dans  Tédilion  do  iuiO. 

(324;  L*csscnre  de  ees  «;inq  cartes  se  trouve  dans  la  eopic  «le  Thydrographic  générale  on  cartft 
marine,  réduite  de  50  à  21  de  réchelle  (n*  118  de  notre  atlas).  Pour  l'enrirhir,  nous  avons  mis  à  eon- 
tributinn  les  quatre  autres  comme  nous  l'avons  dit  ci-dessus,  dans  la  note  209.  —  De  deux  cartes 
portugaises  de  TA  Trique,  Santarem,  pt»ur  ses  priorités  des  découvertes,  u*a  copié  qu'une  senle,  cepen- 
dant c'était  le  seul  monument  portugais  dans  sa  publication,  et  il  méritait  d'iHre  reproduit  en  entier. 
(326)  Dans  notre  copie  la  réduction  do  l'Espagne  est  en  proportion  de  200  (du  code  bruxellois) 
h  33,  et  la  réduction  des  îles  brilinniques  (de  la  publication  d'Ubeliii), comme  KO  à  H.  —  lj»  diminu- 
tioa  de  l'Espagne  est  trop  forte  pour  avoir  toutes  les  inscriptions  de  l'original  Nous  n'avons  pas 
négligé  de  confronter  les  dénominations  do  nos  deux  modèles. 


158  GÉOGU.   LATINE,   l470-iK50. 

xm*  siècle,  parce  qu'elle  est  conforme  avec  la  Palestine  de  Marino 
Sanuto.  Les  six  autres,  savoir:  l'Asie  mineure,  la  Grèce,  ritalie,  la 
France,  T Allemagne  et  la  carte  de  Sarmatie,  c'est-à-dire  de  Pologne, 
de  Hongrie  el  de  Russie,  sont  élaborées  sur  les  mêmes  bases,  se  ratta- 
chent réciproquement,  s'enchaînent  et  forment  un  ensemble  (voyez 
n*  401,  102  de  notre  atlas),  auquel  ne  s'adaptent  ni  les  îles  britanni- 
ques, ni  l'Espagne  de  la  catégorie  précédente,  ni  la  Skandinavie  de  la 
catégorie  suivante  (sse). 

4<'  La  carte  de  la  Skandinavie  ou  des  régions  septentrionales,  plus 
d'une  fois  rappelée  par  nos  observations,  ne  se  rattache  qu'à  celle  de 
la  Germanie  et  de  Sarmatie  de  Plolémée,  ayant  été  inventée  comme 
complément  à  la  géographie  de  l'auteur  ressuscité  (527). 

5*»  La  carte  de  rilalie,  dont  Nicolas  Donis  s'était  dit  auteur  et  inven- 
teur (n®  104  de  l'atlas),  forme  une  catégorie  pour  elle  seule,  parce 
qu'elle  est  d'une  création  de  toute  autre  espèce,  genre  nouveau  de 
cartes  modernes  sous  l'empire  de  Ptolémée  (sas). 

200.  Reproduisant  cette  dernière,  les  éditeurs  Essler  et  Ubelin  livrè- 
rent au  public  dans  leur  collection  de  20  cartes  modernes,  deux  de 
l'Italie  :  une  des  cosmographes  du  moyen  âge,  l'autre  de  la  composition 
récente  de  Donis  (superposées  n®  104  dans  notre  allas),  sans  dire  direc- 
tement à  laquelle  ils  donnaient  la  préférence,  laquelle  ils  étaient  dis- 
posés d'approuver.  Je  pense  qu'ils  préféraient  celle  de  Donis,  sans  oser 
l'approuver.  Voici  mes  motifs  et  mes  argumentations  pour  juger  ainsi. 

Ils  disent  que  la  seconde  partie  de  leur  édition,  en  son  lieu,  étale 
résolument  vingt  tables  de  lustrations  modernes,  espèce  de  supplément 

(226)  Nous  avons  aussi  copie  rcnseroblc  de  ces  cartes  contincDtalos  des  cosmographes  et  nous  en 
dvoDs  déjà  examiué  et  analysé ,  readaot  compte  de  notre  opération ,  dans  Tarticle  précédent , 
chap.  174-177. 

(527)  Ce  complément  septentrional  de  27  cartes  de  la  géographie  de  Ptolémée,  se  trouve  reproduit 
dans  les  éditions  de  1482,  l-iKR,  1u15,  lu53,  etc.  Il  y  est  dessine  eu  projection  conique.  Sa  copie  dans 
le  code  bruxellois  de  l'année  1481,  est  développcc  en  plane  cylindrique.  CVst  de  ce  code  que  nous 
avons  pris  notre  reproduction  réduite  de  &0  à  15  de  réchclle  (voyez  n"  9G  de  notre  atlas).  Nons 
l'avons  confronté  avec  les  cartes  publiées  qui  offrent  plus  d'épigraphes.  —  Ce  complément  septen- 
trional qui  décore  tant  d'éditions  de  Plolémée  figure  en  4492  sur  le  globe  de  Ik'liaïm  (voyez  n*i09  de 
notre  atlas),  en  4495,  dans  la  carte  d'Allemagne  de  la  chronique  de  Hartman  Schedel  (voyez  n*  ilO 
de  l'atlas},  en  4S01,  dans  la  carie  hydrographique  portugaise  (n*  418  de  l'atlas),  en  1554,  dans 
l'isolario  de  Benedelto  Bordone  (u*  429  de  l'atlas).  Voyez  tavola  di  navicare  di  Nicolo  Zeno,  dans  le 
vol.  suivant  de  notre  ouvrage. 

1528)  Les  éditeurs  de  4515,  reproduisant  l'Italie  de  Donis ,  n'ont  pas  reproduit  la  France  qu'on 
voit  dans  les  éditions  donisiennesîle  4482,  1486.  Ces  deux  (tartes  se  trouvent  dans  le  code  bruxelloi* 
delà  bibliothèque  de  Bourgogne  de  l'année  4481.  Ayant  plus  à  notre  disposition  le  code  que  les 
éditions  donisicnnes,  nous  avons  copié  ces  cartes  d'après  le  code  ;  il  nous  semblait  même  prél'érable 
de  se  conformer  au  dessin  du  siècle  qu'à  la  gravure  en  bois  et  de  donner  quelques  variantes  cachées 
dans  un  manuscrit,  que  de  reproduire  ce  qui  est  publié.  Le  dessin  du  code  bruxellois  est  d'une  grande 
échelle.  Notre  copie  est  réduite  de  5  à  i/so  de  l'échelle,  par  conséquent  elle  n'a  pu  rendre  toutes  les 
inscriptions,  qui  an  reste  sont  indifférentes  à  notre  but,  et  contiennent  beaucoup  de  fautes  dans  le 
dessin  bruxellois.  —  En  donnant  la  copie  de  ces  deux  cartes ,  nous  nous  sommes  proposé  d*étaler 
l'étrange  configuration  que  la  renaissance  a  donnée  à  ces  deux  pays  (n*  405,  404  de  notre  atlas).  Sur 
cette  copie,  nous  avons  tracé  les  contours  des  cosmographes  précédents,  afin  d'exhiber  la  difTerencc 
de  leurs  cartes ,  pour  comparer  à  vue  les  proportions ,  les  dimensions  et  les  configurations  des  cartes 
du  rooven  âge  avec  celle  de  la  nouvelle  invention.  Dans  cette  confrontation,  l'Italie  des  cosmographes 
prise  de  l'atlas  d'Ubelin,  est  je  pense,  réduite  justement  à  réchclle  de  celle  de  Donis,  et  justement 
superposée  par  le  méridien  de  Venise  donnée  aux  deux  toutes  différentes  compositions  (n*  404  de 
l'atlas;.  Quant  à  la  Gaule  (n'  405),  j'ai  superposé  les  deux  compositions ,  au  moyen  de  la  position 
«nique  de  Lyon,  pour  laquelle  les  compositions  varient  entre  elles  d'un  degré  :  à  la  suite  de  quoi,  les 
superposées  en  ont  toutes  les  latitudes  dis(H)rdantes  d'un  degré.  Il  serait  peut-(^tre  mieux  de  se  con- 
former dans  la  superposition  aux  mêmes  latitudes,  ne  tenant  que  le  méridien  de  Lyon  et  faire  ainsi 
ressortir  ses  discordantes  proportions. 


UBELIN,   ESSLER,   200.  i59 

à  rantiquîié  sarannée ,  ce  qui  paraîtra  oa  confus  ou  erroné  :  quœ  vd 
abstrusa,  vel  erranea  videbantur.  Or,  si  je  comprends  leur  phrase,  ils 
prévoient  la  réprobation  des  lustrations  modernes ,  dans  lesquelles  il 
faut  débrouiller  Terreur  et  la  confusion;  ils  ne  les  désapprouvent  pas, 
mais  ils  livrent  les  (^rtes  des  lustrations  modernes  pour  faire  jour  à 
Terreur  et  à  la  confusion.  Ailleurs,  dans  le  titre  de  la  seconde  partie, 
ils  recommandent  les  cartes  des  lustrations  modernes,  lesquelles  rela- 
tent plus  régulièrement  les  spécialités  des  terres  et  des  mers  par  des 
positions  certaines,  suivant  les  pérégrinations  de  notre  temps;  modcr-- 
niorum  lustralio  terrœ  marisque    singula,   posUionibus   ccrlissimis, 
reguUUius   traâcns,   ad  sœculi  nostri  peregrinalioncs.  Qu'on  ne  s'y 
méprenne  pas.  Cette  recommandation  ne  se  rapporte  pas  à  toutes  les 
^ingt  cartes  de  moderniorum;  elle  s'adresse  exclusivement  à  des  cartes 
portugaises ,  contenant  les  découvertes  de  nouvelles  terres  et  mers ,  par 
<:onséquent  elle  rejette  tout  le  blâme  de  confusion  et  d'erreurs  sur  les 
^i^rtes'des  cosmographes.  Or,  comme  il  y  a  dans  leur  volume  deux 
Italie ,  et  que  celle  des  cosmographes  est  du  nombre  des  accusées  et 
si'éprouvées,  la  carte  de  Nicolas  Donis,  conforme  à  l'antiquité  surannée, 
S^gne  évidemment  toute  préférence  dans  l'opinion  d'Ëssier  et  d'Ube- 
Jiin  (sto). 

C'est  en  se  relatant  à  des  cartes  portugaises  ou  à  de  nouvelles  décou- 
""^rertes  que  les  éditeurs  disent  de  positions  nouvelles  étrangères  à 
tolémée;  neotericœ  posilUmes,  Plolemaei  alienœ.  Le  lecteur,  en  les 
royant,  ne  sera  pas  étonné  quand  il  apprendra  qu'on  a  observé  de  ces 
ieux  la  latitude  véritable  du  ciel.  Scruter  les  longitudes  des  régions  est 
rop  laborieux.  En  ce  cas,  la  dimension  variée  cause  les  situations 
ariées.  L'indulgence  serait  donc  obligeamment  agréée  sous  le  rapport 
é  l'ajustement  de  carrés  du  long  :  que  le  censeur  ingrat  ne  suppose  ni 
^antiquité,  ni  notre  travail  (sso). 

En  effet,  toutes  les  nouvelles  cartes  portugaises,  de  la  chorégraphie 
péciale,  des  cosmographes  et  de  l'Italie  donisicnne,  ne  sont  pas  graduées 


^(3S9)  Editant  leur  volume  à  Strasbourg,  ils  n'ont  pas  reproduit  la  France  donisienne  :  parce  qu'il 

"^^tait  impossible  de  la  faire  valoir  à  Strasbourg  sur  le  Uhin.  On  y  savait  que  les  cosmograpbes 

^Vnçalent  mieux  le  cours  de  ce  fleuve  sur  leurs  cartes  confuses  ot  erronées,  mieux  que  Ptolemee  ou 

^3H>iiic.  —  La  même  incertitude,  qui  tourmente  ces  éditeurs,  domine,  en  ISSI,  Uenedctlo  Bordone, 

"^dansson  isolario.  A  voir  là  :  1,  Ingliilterra  figurée,  seconde  nioderui  et  seconde  Tolomco  :  differcnza 

^n  Tolomeo  et  moderni,  per  cbe  Tolomeo  del  reame  délia  Scotia  la  longUezza  pone  verso  il  leuar 

<^l  sole,  et  rooderni  tutta  qucsta  isola  uerso  tramonlana  stcndoso  :  ici  il  accorde  évidemment  la 

préférence  à  Ptolémée,  parce  qu'il  donne  sa  figure  tout  entière,  et  dans  celle  des  modernes  il 

retnache  l'Ecosse  (fol.  ii).  —  2,  Kgure  des  Fortunées  suivant  Ptolémée  et  ensuite  celle  dos  Canaries. 

Si  tenpl  nostri  molto  da  gl'antichi  scrittori  si  discordando  si  ncl  numéro,  corne  ancbora  nel  por 

quelle  perio  vente  :  percio  che  gli  antichi  per  ostro  le  pougono  et  di  numéro  essor  sei  ;  conciosia  essa 

die  i  marinari  per  nostri  tempi  dicono,  che  sono  dieci  et  délia  Libia  inferiore  alla  quale  dirincontro 

stanao  per  ponente  (fol.  xv,  xvi).  —  3,  Sicilia,  seconde  Tolomeo  et  seconde  moderni ,  figures  mises 

en  regard  sur  la  même  ligne.  Verso  leuantè  dell  isola  posti  nell'  ostro  Pacbino  et  ncl  scttentrione 

Peloro.  Di  ^oesta  parte  Tolomeo  et  moderni  sono  di  uua  medesima  opiuione  :  ma  perche,  qucsta  isola 

ha  forma  di  triangola ,  nell'  angolo  sono  discordi,  il  quale  angolo  e  da  volgari  posto,  nella  parte  dell 

isola  pin  longa  verso  ponente ,  et  da  Tolomco  verso  garbiuo  in  un  luoco  Eugiaro  promoutorio  nomi- 

nrto  (toi.  xxii-xxv),  —  Le  géographe  italien  à  Venise,  ne  risque  pas  de  dire  a  qui  revient  l'erreur.  — 

Voyes  sur  notre  planche,  pour  Tinclination  de  la  Sicile,  le  juste-milieu  entre  les  deux  opinons 

inventé  par  lacobo  Castaldo  qui  mourut  en  4557.  Gastaldo  restitua  les  formes  aux  Calabres  et  à  la 

Fouille  :  mais  le  napolitain  Pyrrhus  Lygorio,  mort  1583,  aima  mieux  appliquer  son  pays  à  la  torture 

ptoléraéenne. 

[VStt^  Tabniaruro  barum  neotericae  positiones,  sicuti  a  Ptolcmaci  traditionibus  alienae  videbantur, 
iKn  miraberis  cnmque  didiceris  iiihis  veram  coeli  latitudincm  observatum.  Regionum  quippe  longi- 
todinem  scrutari ,  laboriosum  est  valde.  Hinc  variam  causât  situationem ,  dimensio  quoque  varia. 
Tamen  ait  pro  grata  pietati,  quadrata  lengis  aptare;  ne  vel  illius  antiquitatis ,  vel  laboris  nostri 
ladiceris  censor  ingratus  ;Essl.  et  Ubcl.  pr;jefat.). 


Î60  GÉOGR.  J.ATÏNE,   U70-1350. 

dans  la  publication  d'Essler  et  Ubclin.  Toutes  ont  une  échelle,  aucune 
trace  de  longitude,  la  seule  latitude  y  est  marquée  sur  des  lignes 
latérales,  assez  irrégulièrement  et  n'ayant  point  de  fixité.  Les  climats 
Accompagnent  ces  indices  de  latitude.  L'Incertitude  qui  se  manifesta 
dans  les  indications  de  la  latitude,  venait  de  rinsuflisante  exactitude  da 
dessin  (sso),  mais  souvent  de  dilîérente  opinion  d'école  ou  de  géogra- 
phe, suivant  qu'on  se  guidait  par  des  observations  modernes  ou  par 
des  données  de  Ptolémee;  et  suivant  la  préférence  qu'on  donnait  à  cer- 
tains lieux  par  lesquels  on  réglait  le  degré  et  la  division  de  la  ligne 
latitudinale.  C'est  à  cause  de  cette  différence  d'opinion  et  de  mode,  que 
le  détroit  de  Sicile  dans  le  58*  degré  de  latitude  de  la  carte  des  cosmo- 
graphes, est  dans  le  o9«  suivant  la  carte  dressée  par  Nicolas  Donis  ;  que 
Baionne  et  Narbonne  sur  la  carie  d'Espagne  de  l'école  espagnole  se 
trouvent  placées  sous  le  4G*,  presque  touchant  le  47«,  et  que  sur  les 
cartes  d'autres  cosmographes  elles  restent  sous  le  ^5«,6e  rapprochantau 
M'' degré.  Mais  que  dire,  et  comment  expliquer,  lorsqu'on  voit  le  47*  de 
latitude  de  Daionne,  et  sur  la  carte  de  la  configuration  espagnole  des 
îles  britanniques,  les  fies  Sorlingues  et  le  bout  de  la  Cornouaille  sous 
le  49%  ainsi  que  Brest  se  trouve  sous  47"?  Certes  c'est  une  erreur  de  la 
numération  de  degrés  :  toujours  est-il  évident  qu'on  n'avait  rien  de 
positif  pour  les  latitudes  qui  se  présentaient  confuses.  La  graduation 
des  cartes  spéciales  des  cosmôgraphes  se  laissait  faire  en  apparence, 
mais  isolément  pour  chacune  à  part.  Et  quand  on  voulait  rapprocher 
ces  caries,  les  ajuster,  enchaîner  l'une  à  l'autre,  leur  graduation  ne 
correspondait  pas  sulfisamment  et  ne  répondait  en  aucune  manière  à  la 
longitude  de  Ptolémee.  Pendant  de  longues  années  encore  on  n'eut  pas 
grande  confiance  dans  la  graduation,  on  n'en  eut  aucune  pour  la  longi- 
tude, et  une  trop  faible  pour  la  latitude.  Elle  était  essayée  pour  une 
vaine  parade. 

Graduation  ,  latitudes  ,  longitudes. 

201.  Cependant  aucune  école,  en  connaissance  de  cause,  n'a  pu  con- 
tester la  convenance  de  longitudes  et  latitudes  dans  la  construction  de 
cartes.  Dos  essaies  furent  faits  à  cet  clfet.  Examinant  les  climats  tracés 
dans  un  cercle  par  Pierre  d'Ailly,  on  peut  avancer  que  déjà,  vers  1410, 
on  essaya  de  jeter  au  hasard  les  parallèles  de  la  latitude  sur  la  carte 
générale.  L'anconilain  Gratioso  Benincasa  1466-1471,  ajustait  l'échelle 
latitudinale  à  ses  copies.  Les  régions  skandinaves,  comme  complément 
du  géographe  j^rec,  ont  une  graduation  complète;  les  cartes  spéciales 
éditées  en  1482,  1486,  1515,  1555,  sont  garnies  d'échelles  latitudi- 
nales.  L'orbis  universalis  en  1492  du  globe  de  Behaïm  se  relatait  aux 
divisions  de  l'équateur  et  du  méridien  mobile;  les  caries  générales 
éditées  en  1508,  1511  etc.,  parurent  complètement  graduées;  le  globe 
de  Schoener  1521,  est  croisé  par  les  lignes  longitudinales  et  latitu- 
dinales.  Chaque  jour,  parmi  les  savants  de  la  théorie,  augmentait  le 
nombre  de  ceux  qui  s'efforçaient  de  mettre  en  pratique  la  graduation. 

(330)  C'est  ainsi  que  dans  la  calôgoric  dos  cartes  des  cosmograplies  plusieurs  positions  alpines 
dans  rajustement  des  cartes  spéciales  sont  quelque  peu  incolidreutes  ;  qu'on  voit  Belgrad  vaciller 
de  iT  tantôt  en  i6"  tantôt  en  48";  qu'on  voit  Conslanlinople  de  43»  transporte  sous  46*. 


LATITUDES,   LONGITUDES,  S03.  i61 

Le  canevas  des  ligues  croisées  offrait  à  la  consiruction  des  cartes  une 
méthode  infioiment  plus  simple  et  plus  facile,  que  la  multitude  des 
lignes  de  la  rose  qui  se  sectionnaient  en  tous  sens,  s'appointaient  sans 
fin,  demandaient  de  comptes  et  réductionsdes  nombres,  pouvant  déjouer, 
tous  les  efforts  de  Texactitude.  La  méthode  de  Ptolémée  était  recom- 
uiandéesans  cesse;  ses  chiffres,  ses  cartes  indiquées  comme  Tunique 
modèle  à  imiter,  à  suivre.  Les  nouveaux  géographes-dessinateurs  s'en- 
hardirent :  ils  graduaient  les  cartes  résolument  et  s'avisèrent  de  chan- 
ger les  compositions  des  cartes,  donnant  à  tous  les  pays  les  formes  ptole- 
mécunes,  c'est-à-dire  en  adaptant  la  graduation  de  Ptolémée,  ils 
défiguraient  les  cartes  des  cosmographes  du  moyen  âge.  Dans  la  première 
moitié  du  xvi*  siècle  cette  opération  s'est  accomplie. 

Pour  arriver  à  la  graduation  des  mappemondes  de  la  composition  du 
moyen  âge ,  les  géographes  de  la  renaissance  rencontraient  les  plus 
nombreuses  difiicultés;  là,  s'accumulaient  tous  les  obstacles.  La  tâche 
en  effet  devenait  impossible  sans  toucher  à  la  composition,  à  différentes 
directions.  Les  marins,  premiers  auteurs  de  ces  mappemondes,  avaient 
de  trop  grandes  interruptions  continentales  entre  les  rivages  de  leurs 
connaissances.  Les  directions  déterminées  par  une  longue  expérience 
de  raîguiile  ne  se  trouvaient  pas  en  harmonie  avec  les  directions  de  trop 
grandes  dislances  océaniques  contrairement  inclinées.  Voir  l'hydrogra- 
phie portugaise,  où  les  tropiques  et  la  ligne  équinoxiale  sont  jetés  à  tra- 
vers la  carte.  Ces  lignes  ne  peuvent,  par  aucune  manière,  passer  tous 
les  pays  qu'elles  encerclent,  et  traversent  quelques  autres  du  sud  ou 
du  nord,  qu'elles  ne  devaient  pas  toucher.  Or,  la  mappemonde  des 
hydrographes  n'est  pas  susceptible  d'accepter  sans  réserve  la  gradua- 
tion de  la  latitude,  pour  laquelle  on  avait  des  observations  déterminées. 
Il  sufBkt  d'observer  l'inclination  de  la  mer  méditerrauée,  qui,  elle  seule 
prise  isolément,  se  laisse  admirablement  graduer.  * 

L'application  de  l'échelle  latitudinale  aux  cartes  spéciales  (de  la 
publication  d'Ubelin  1508,  1515),  prouve  qu'on  a  compris  la  nécessité 
elle  moyen  de  rectifier  l'orientation  ou  la  boussole  des  marins,  de 
redresser  le  vice  de  l'inclination.  L'intervention  des  latitudes  plolé- 
méennes  indiquait  le  moyen  de  la  rectification ,  mais  insinuait  les 
erreurs  qui  auraient  détruit  les  compositions  nautiques  si  on  les  eût 
acceptées.  Les  marins  et  les  hydrographes  par  eux-mêmes  connaissaient 
suffisamment  les  latitudes  géographiques  de  la  médilerranée ,  par  con- 
séquent ils  comprenaient  le  vice  de  l'orientation ,  mais  ils  étaient  très- 
indifférents  pour  cet  écart,  pourvu  que  leur  dessin  fût  exact  à  l'usage  et 
utile  9UX  navigateurs;  ils  ne  se  souciaient  pas  trop  de  discordances  qui 
entachaient  leurs  mappemondes.  D'ailleurs,  ils  rencontraient  un  autre 
obstacle,  plus  grave  (comme  nous  l'observerons  cha p.  204, 205) ,  pour 
l'emplacement  convenable  de  la  méditerranéc  dans  les  mappemondes. 
Or,  tout  en  connaissant  l'irrégularité,  ils  continuaient  à  dessiner  les 
cartes  hydrographiques  commodes  à  la  navigation  (33 1). 

202.  Je  le  répète,  on  ne  peut  pas  admettre  l'ignorance  absolue  de  la 

(331)  La  carte  marine,  qu'en  1560  Rusrelli  appliqua  à  son  édition  de  Ptolémée  :  earta  da  navicare, 
fiUla  êolamente  per  una  mottra  et  comme  per  un  modelle,  offre  )o  même  vice. 

II.  14 


i62  GÉOGR.  LATIMB,  Ul(hihbO. 

théorie  parmi  les  pilotes  et  les  géographes  cosmographes  du  moyen 
âge.  Tel  qui  possédait  quelques  notions  de  Tastronomie,  sans  être  savant 
de  premier  ordre,  comprenait  les  exigences  des  longitudes  et  des 
latitudes  géographiques  :  le  fond  de  la  question  n^était  pas  un  mystère 
pour  lui.  On  écrivit  tant  sur  Tusage  de  Tastrolabe,  on  oli^rvaît  le  soleil 
et  la  lune,  les  tables  de  la  lune  furent  dressées,  appréciées,  révisées;  on 
levait  les  latitudes;  les  différents  modes  de  lever  les  longitudes  furent 
connus,  à  la  fin  recommandés  (Pigafetta,  de  la  navigat.  p.  â77>279)  (sst)  : 
mais  les  navigateurs ,  les  pilotes  se  contentaient  de  connaître  la  latHuoe 
(de  leurs  nouvelles  découvertes),  et  d'ailleurs,  ils  étaient  si  orgueilleux 
qu'ils  ne  voulaient  pas  entendre  de  longitudes  (Pigafetta,  de  la  naviga- 
tion ,  p.  274,  275). 

Or,  les  dessinateurs  de  cartes  n'avaient  pas  de  longitudes  géographi- 
ques. Les  érudits,  pour  l'ancien  monde,  les  trouvèrent  en  masse  dans 
l'ouvrage  de  Ptolémée,  et  au  lieu  de  les  découvrir  dans  la  construction 
des  cartes  nautiques,  par  l'induction  des  latitudes  et  des  distances,  ils 
épuisèrent  toutes  les  billevesées  de  Ptolémée  dans  toutes  les  parties 
du  monde  et  tranchaient  les  difficultés  pour  la  mer  méditerranée  en 
substituant  la  longueur  de  62"*  de  leur  maître  à  la  place  de  celle  des 
hydrographes  (353).  L'hémisphère  de  180**  était  parfaitement  rempli 
par  le  sage  de  l'ancienne  Grèce  :  restait  à  placer  les  nouveautés  sur  un 
autre  hémisphère  entre  180*"  et  560".  Behaïm,  1492,  indiqua  lenrs  lon- 
gitudes; Ruysch  1508,  Sylvanus  (1511),  Sehoner  (1520),  et  les  autres 
les  déterminaient  approximativement,  chacun  suivant  son  goût  ou  d*aprè8 
le  modèle  qu'il  avait  rencontré! 

Cependant,  sur  ce  nouvel  hémisphère ,  des  contestations  très-vives  se 
sont  élevées  entre  les  Portugais  et  les  Espagnols.  La  ligne  de  démarca* 
tion,  désignée  par  le  premier  méridien  des  îles  Fortunées  devait-calnaer 
les  parties.  Le  pape  Alexandre  VI  (1493)  fit  cadeau  de  tout  le  globe  des 
deux  hémisphères  infidèles,  payennes,  partie  égale  :  à  l'est  aux  Por- 
tugais, à  Touest  aux  Espagnols.  Mais  lorsque  les  Portugais  découvrirent 
la  terre  de  Sainte-Croix  ou  le  Brésil,  et  en  prirent  possession,  de  nou- 
velles réclamations  s'élevèrent.  Le  même  pape  (1502),  intervint  d^ 
rechef  et  recula  le  premier  méridien  à  30*^  vers  l'ouest,  qui  fut  appelle 
ligne  de  démarcation  ou  de  répartition. 

Cette  partition  et  répartition  rencontrèrent  de  grandes  diffîcuttës> 
géographiques.  L'omnip<>tence  papale  indiquait  à  cet  eflet  le  méridîeo. 
des  Iles  Fortunées,  connu  par  la  géographie  de  Ptolémée,  où  il  était 
représenté  par  une  enfilade  d'un  groupe  d'Iles  au  nombre  de  six.  Les 
érudits  comprirent  qu'il  s'agissait  des  Canaries,  et  ils  acceptèrent  totti 

(33t)  Charl  Amoretti,  éditeur  de  la  description  da  premier  voyage  autour  du  monde»  par  Pigi- 
fetta ,  présume  que ,  parce  que  celui-ci  ne  parle  pas  du  moyen  de  se  servir  pour  les  loiwitades  de 
l'éclipsé  solaire ,  il  est  bien  claire  qu'il  no  le  connaissait  pas.  Pourquoi  l'aurait-il  ignore?  ^ant  il 
dit,  Pigafetta  lui-même  l'avoue,  qu'il  a  examiné  plusieurs  méthodes  dont  on  se  sert  ponr  oooBalûe 
la  longitude  et  qu'il  en  a  trouvé  trois  qu'il  a  cru  plus  propres  à  cet  objet.  Or,  il  a  connu  les  autiM, 
qui  lui  semblaient  moins  propres  et  celui  de  l'éclipsé  solaire,  qui  n'était  point  un  mystère  pour  les 
connaissances  de  son  époque,  mais  à  cause  des  difficultés  qui  l'obstruaient  dans  la  pratique,  iln'apas 
cru  propre  de  le  recommander. 

(33S)  La  perturbation  d'idées  géographiques  de  cette  époque  se  décèle  d'une  manière  singulière 
dans  l'isolario  de  Benoit  Bordone  iSiil,  1534.  On  y  voit  une  mappemonde,  calquée  sur  la  carte  portu- 
gaise, que  nous  avons  analysée.  Seulement  Bordone  ou  son  modèle  y  introduisit  la  longueur  ptolé- 
roéenne  de  la  méditerranée.  Malgré  cet  emprunt  de  Ptolémée  on  y  voit  rinchnation  vicieuse  de  la  ■ 
méditerranée  scrupuleusement  conservée. 


LATITUDES,   LONGITUDES,   902.  165 

d^abord  le  milieu  des  îles.  Les  Portugais  le  fesaieot  passer  par  Madère , 
comme  on  Yoit  par  le  globe  de  Behaim  1492,  par  Fhydrographie  1504, 
parla  carte  de  Ruysch  1507,  par  le  ^lobe  de  Schoner  1521.  Passant 
par  Madère,  le  méridien  passait  Teneriffe.  Mais  les  Espagnols  choisirent 
pour  lui  la  gran-Canaria.  C'est  le  méridien  des  îles  Fortunées,  le  même 
qoi  fut  ensuite  qualifié  d'île  de  Fer. 

En  effet,  la  fiimtion  du  méridien  des  îles  Fortunées  sur  une  des  Cana- 
ries, éprouvait  de  contestations.  Sylvanus  plaçait  Canaria  l^SC  du 
premier  méridien.  Trouvant  dans  le  texte  de  la  géographie  ptoléméenne 
Paris  à  25*  50'  du  premier  méridien ,  il  opina  que  c'est  une  erreur  de 
eopiste ,  qu^on  ne  peut  l'attribuer  à  Ptolémée,  qui  plaçait  Paris  à  SO*"  15' 
du  premier  méridien  des  îles  Fortunées.  En  Espagne ,  Jean  de  la  Cosa 
imçaAi  le  premier  méridien  entre  san  Miguel  et  Tercera  des  Azores , 
enclavant  dans  le  vieux  monde,  les  Canaries  et  les  îles  du  cap  Vert  (354). 
Mais  l'Espagne  prit  son  nombril  Tolède  pour  le  premier  méridien,  du 
quel  le  méridien  des  Canaries  se  trouvait  iT*^  ou  ÏT*  on  IG^'^O'. 
Ce  n^est  pas  Tolède  qui  gigoltait  ainsi  :  c'est  la  trépidation  du  méridien 
des  tles  Fortunées. 

Or,  le  premier  méridien  des  îles  Fortunées,  duquel  on  comptait  toutes 
les  longitudes ,  était  indéterminé.  Comment  pouvait  on  fixer  les  50 
degrés  ouest  de  la  ligne  de  démarcation?  On  ne  songeait  point  aux 
observations  astronomiques,  on  comptait  les  distances  de  la  navigation  à 
partir  de  Madère,  de  Gomera,  de  Teneriffe ,  de  gran  Canaria  ou  du  cap 
Vert  L'espagnol  Diego  Ribero  1529,  tira  cette  ligne  à  l'ouest  de  l'em- 
honchure  de  Maragnon.  Plus  tard  (voyez  les  cartes  de  Mercator)  elle 
était  tracéee  à  l'est  de  cet  immense  embouchure  :  différence  de  5  degrés. 
La  ligne  de  répartition  agitait  encore  les  esprits  et  les  longitudes 
gé(^i[rapniques,  quand  une  autre  question,  infiniment  plus  difiicile,  se 
pr^nta  aux  géographes  et  à  leurs  longitudes. 

Le  portugais  Ferdinand  Magellan,  dans  son  voyage  dans  l'Inde  visitant 
Calcutta  et  Soumatra,  apprit  que  son  pays  réalisait  d'immenses  bénéfi- 
ces dans  le  commerce  des  épiceries  des  îles  Molucques,  où  les  Portugais 
commençaient  à  s'établir.  De  retour  à  Lisbone,  il  continua  à  étudier  la 
géographie  et  la  marine,  et  sous  ce  titre  on  lui  permit  d*e\aminer  tout 
ce  qui  avait  été  recueilli  et  gardé  dans  la  trésorerie.  Cet  examen  lui 
suggéra  l'idée  de  la  possession  illégale  des  Molucques  par  les  Portugais, 
remarquant  que  leur  position  devait  se  trouver  dans  l'hémisphère  espa- 
gnol. Cette  idée  n'était  pas  à  lui  seul,  le  défaut  des  mappemondes  des- 
sinées sur  des  globes  l'assurait  assez  positivement,  le  gouvernement 
portugais  gardait  en  effet  le  plus  profond  silence  sur  la  découverte  de 
ces  lies  (Pigaf.  p.  176).  Magellan,  mécontent  de  la  cour,  passa  en 
Espagne  et  offrit  à  Charles  V  de  lui  livrer,  par  le  chemin  de  l'ouest, 
ces  fies  qui  appartenaient  de  droit  à  l'Espagne. 

Sans  avoir  égard  à  des  signaux  de  vents,  des  courants  de  mers,  la  pos- 
sibilité de  traverser  quelque  part  au  delà  du  nouveau  monde  se  présen- 

(3M)  Voye*  ci-dewns  chap.  472,  ce  méritlipn  de  do  la  Cosa  était  éloipné  de  9, 10  ou  H  degrôs  de 
celai  des  IlcsFortuDéeg.— Pins  tard  on  l'a  porté  sur  les  îles  du  cap  Vert,  5*  30' du  cap,  G"  0' de  Madère, 
6*  SÔ'  de  Teneriffe.  Passant  les  îles  de  cap  Vert  olim  Gorgà  " 
8a1,  BuenaTÎsta,  Mayo,  San  jacorao;  otde  celui-ci  on  compi 
n'était  plus  an  méridieu  des  Canaricti  olim  Fortunatae.  Voyi 


464  OÉOGR.  LATINE,  i470-i550» 

tait  tout  natnrellement  à  chacun  et  était  généralement  admise  comme 
infaillible.  On  conjecturait  et  traçait  des  hypothèses  sur  trois  points  du 
nouveau  monde.  Avant  1506  Martin  Behaïm  dessinait  à  Lisbone  ces 
passages  et  le  détroit  du  sud  (Magell.  apud  Pigaf.  p.  40).  Le  glol)e  de 
Jean  Schôner,  fabriqué  en  Allemagne  en  1520,  dans  Tannée  du  départ 
de  Magellan  (n**  125  de  noire  allas),  exibe  les  irois  hypothèses.  Le  nou- 
veau monde  y  offre  deux  détroiu  et  sa  cime  pointe  au  nord  dans  un  océan 
ouvert  (s55).  Le  délroit  du  midi  élait  celui  qui  offrait  le  plus  de  chan- 
ces pour  les  recherches.  Les  côtes  de  Floride  avançaient  vers  rEurope* 
et  celles  de  Brasil  ou  de  la  terre  de  la  croix,  s*inclinaient  rapidement 
vers  les  Indes.  Amerigo  Vespucci  en  1501,  se  proposait  déjà  d*aller 
doubler  la  pointe  du  sud  (sse).  La  croyance  de  la  nécessité  du  contre 
poids  continenlal  pour  le  globe  inondait  dans  Timagination  de  Tépoq^^e 
riiémisphère  arctique  de  Tocéan  (comme  on  le  voit  par  le  globe  de 
Schôner) ,  et  surchargeait  Thémisphère  antarctique  de  terres  imagi- 
naires :  mais  elle  n'empêchait  guère  de  dessiner  préalablement  la 
pointe  méridionale  du  nouveau  monde  correspondant  au  cap  de  Bonne- 
£spérauce,  el  le  délroit  qui  séparait  les  terres  antarctiques. 

A  Tappui  de  Tassertion  de  Magellan,  que  les  Molucques  sont  sur 
rhémisphère  espagnole ,  Magellan  appela  Chistophe  Hara ,  qui ,  ayant 
aux  Indes  des  maisons  de  commerce,  disait  être  assuré  par  les  instruc- 

(355^  Quelques  années  plus  tard,  à  la  suite  du  voyage  de  Magellan,  Scboner  changea  d*opinioa  : 
il  crut  que  le  nouveau  monde  jusqu'au  détroit  n'était  que  le  continent  continu  de  l'Asie.  Modo  vero 
per  novissimas  navigationes,  fartas  auno  IS19,  per  Hagellanum,  versus  Moluocas  insulas,  in  tapremo 
oriente  positas,  eam  terram  (Americam),  invenerunt  oontinentein  supcrioris  Indis  quae  pars  est  AsisB. 
Sunt  auterohuius  portionis,  regiones  Bachaluos  dictae,  Florida,  desertum  Lop,  Taugnt,  Cathay, 
Mexico  regio,  in  qua  urbs  per  maxima  in  magno  lacu  sita  Temistitan  «  sed  apud  vetustiorea  QyiBMj 
erat  vocata.  Parias,  Uraba  et  Cannibalium  regiones;  Brasiti»  regio  se  se  extendit  ad  usque  Melacham 
Ht  quid  ultra.  Incolœ  autbropophagi  liberis  eorum  Tliomae  nomea  imponunt.  Adjacet  buic  regiooi 
iusula  pcrmaxima  2^nzibar  (Joban.  Scboneri  carlostadii ,  opuscnlum  geograpbicum ,  Norimb.  iSSS, 
II,  i  et  90).  Voyez  n*  iil  de  notre  atlas. 

(356)  Scboner  indiquant  sur  un  globe  de  IStO.la  possibilité  de  trois  passages  suivit  une  hypothèse 
assez  répandue.  Elle  formait  de  nouveaux  continents,  deux  grandes  îles.  — Benoit  Bordone ,  qvi, 
en  lS2i,  ignorait  encore  les  résultats  de  U  découverte  de  Magellan ,  dessina  ces  deux  îles  dans  son 
isolario  (n"  iS6  de  notre  aalas),  de  façon  qu'il  réunit  terram  laboratoris  aux  Florides  et  au  Temistetan 
ou  Mexique;  et,  conformément  à  la  supposition  de  Vespuce,  il  enferma  la  terre  de  sancta  crace  par 
un  littoral  tout  le  long  du  tropique  en  y  enclavant  le  Pérou.  Uu  stretto  séparait  le  Mexique  da 
Pérou  ou  les  deux  ilcs  :  chacune  respeirtivement  déployant  ses  spacieux  rivages  aux  eaux  de  ria> 
mense  océan  (isolaris  universalc,  et  les  iles  p.  vi  verso,  xi  verso).  fVoyez  ci-dessus  la  note  tSi).  — 
Chaque  voyage,  et  celui  de  Magellan,  sont  des  enclumes  sur  lesquels  l'iniagination  se  plaisait  à  forcer 
force  d'inventions.  Par  d'innombrables  conjectures,  hypothèses,  on  embrouilla  les  plus  sinnples  qnes- 
tions.  Les  fantastiques  mappemondes,  muettes  et  même  invisibles,  introuvables,  fûrlaientà  l'oreilto 
de  l'imagination.  Il  devenait  clair  comme  le  jour,  que  le  cap  de  Bonne  Espérance,  le  détroit  magel- 
lauique,  avaient  été  connus  avant  leur  découverte.  Regardez  cette  jonque  indienne  de  la  carte  de 
fra  Mauro  et  vous  voyez  comme  elle  double  le  cap  de  Itonne  Espérance.  Sans  doute  les  Kafres  et  les 
Ilultentots  doublaient  ce  eau  et  les  Patagons  nageaient  dans  le  délroit,  plusieurs  siècles  avant  que 
Tignorance  européenne  se  fut  décidée  à  les  explorer.  —  Un  Portugais,  en  tS28,  s'imagine  de  trouver 
sur  une  carte  ancienne  le  contours  de  ce  qu'on  vient  de  découvrir:  à  l'instant  sur  ses  traces,  les 
érndits  s'évertuent  à  démontrer  que  c'était  la  mappemonde  de  fra  Mauro  ;  les  Portugais  n'en  avaient 

C»as  d'autre  en  1538.  — Que  n'a-t-on  pas  attribué  à  Bianco  et  à  ce  Mauro!  Ordinairement,  les  légendes, 
es  explications  de  fra  Mauro  disaient  le  contraire  :  mais  la  conjecture,  l'hypothèse  élevait  hardiment 
son  édifice.  — La  cartographie,  et  les  découvertes  portugaises  surtout,  sont  accablées  de  véritabifs 
fantasmagories.  On  peut  dire  que  les  Portugais  eux-mêmes  en  sont  la  cause.  Ils  ensevelirent  lear 
ancienne  cartographie  et  débitèrent  de  bonne  heure  de  véritables  cauchemars.  Habitués  du  coni' 
mencement,  de  faire,  comme  nous  l'avons  observé,  les  découvertes  de  ce  qui  était  connu  par  les 
autres,  et  s'appropriant  d'abord  ce  qui  était  de  la  connaissance  des  autres  :  leur  conscience  ensuite 
troublée,  doutait  des  plus  beaux  succès ,  s(Tutait  les  plus  frivoles  apparences  pour  ombrager  les  pins 
positives  découvertes.  Les  Allemands  s'empressèrent  de  suite  à  pousser  eu  avant  un  champion  et 
rival  de  leur  gloire  dans  Behaïm.  Les  Italiens  à  leur  tour,  non  contents  de  partager  la  gloire  porttt" 
gaise,  dégradèrent  son  œuvre  au  proiit  des  images  de  leur  cartographie.  (Voyez  la  note  187).  Les 
Portugais,  réveillés  aujourd'hui  par  tant  de  tiraillements,  réclament  ae  nombreuses  priorités  sans 
savoir  où  s'arrêter. 


V 


LATITUDES,  LONGITUDES,   908.  i65 

lions  de  ses  facteurs  de  la  véritable  position  géographique  de  ces  lies. 
Le  savant  astrologue  Rodcric  Faleiro,  confirma  et  corrobora  ces  assu- 
rances le  compas  à  la  main ,  sur  une  carte  nautique ,  hydrographique. 
Charles  V  était  enfin  convaincu  que  ces  fies  sont  placées  au  deçà  de 
180*  des  Iles  Canaries,  d*autant  plus  que  la  ligne  de  démarcation 
avança  sa  répartition  jusqu*à  150*  est  des  lies  Canaries. 

S03.  Magellan ,  instruit  par  son  ami  Tastronome  Ruy  Falèiro  du 
lever  des  Ton^tudes  par  la  déclinaison  de  la  lune  et  les  occultations 
d*éloiles,  la  diflérence  de  hauteur  de  la  lune  et  de  Jupiter  et  les  oppo- 
sitions de  la  lune  et  de  Vénus  (ssi),  partit  le  iO  aoOt  1519,  entra  le  âl 
octobre  1520  dans  le  détroit  par  5â<^  de  la  latitude  méridionale;  le 
traversa  et  en  sortit  le  38  novembre.  Magellan  péril  le  27  avril  1521 
avant  d*arriver  aux  Molucques. 

Il  était  de  la  plus  haute  importance  dans  cette  question ,  de  détermi- 
ner la  situation  des  Molucques  par  la  longitude,  et  aucun  des  voyageurs 
précédents  n*a  donné  plus  de  soins  aux  positions  géographiques  que 
Magellan  et  son  équipage.  Mais  examinant  la  relation  d'Antonio  Piga- 
fetta,  on  voit  que  la  longitude  géographique,  moins  fréquemment  anno- 
tée ,  n'était  pas  aussi  souveut  recherchée  que  la  latitude.  Son  récit  ne 
détermine  point  de  longitude  même  du  détroit.  11  compte  la  longitude 
de  Touest  du  méridien  de  ki  répartition  50**-à  Fouest  de  cap  Vert  (s.-ss). 
Il  dit  qu'on  a  passé  la  ligne  équinoxiale  par  122"^  ouest  de  ce  méridien 
(288*  est  du  méridien  de  Fer)  et  les  fies  Moluques  sont  à  161*  ouest  du 
même  (191*  ouest  et  2()9*  est  du  méridien  de  Fer)  :  or,  elles  sont  sur 
rii^misphère  esp^^ole.  Les  Portugais  soutenaient  et  prouvaient  le  con- 
traire,, allant  toujours  par  le  chemin  de  Test.  Ils  accusaient  les  Espa- 
gnols d'erreur  ou  de  mauvaise  foi.  Pour  vider  les  incertitudes,  on 
choisit  (dit  plaisamment  le  milanais  Pierre  Martyr  d'Anghera^  historio- 
graphe de  la  cour  d'Espagpe),  vingt-quatre  astronomes  et  pilotes  tant 
portugais  qu'espagnols,  lesquels,  après  avoir  sillogismé,.  conclurent 
qa*Oft  ne  pourrait  décider  la  questioaqu'à  coups  de  cauon  (épistol.  797). 

Les  débats  des  astronomeset  pilotes,  auxquels  fait  allusion  d'Anghcra, 
ont  eu  lieu  à  Saragosse  (339).  Peu  concluants  qu'ils  étaient,  ils  prou- 
vent que  l'esprit  vivement  préoccupé  de  la  théorie,  suocombait  sous 
l'impuissance  de  l'application.  En  effet,  on  levait  alors  la  longitude 
gé<^*aphique  au  moyen  de  tel  ou  tel  instrument,  de  tel  ou  tel  astre, 
avec  autant  d'incertitude,  qu'on  la  trouvait  le  compas  à  la  main  sur  les 
cartes  nautiques.  Parce  que  les  observations  se  fesaient  avec  des  instru- 
ments très- imparfaits  et  particulièrement  avec  l'astrolabe,  le  méléoros- 
cope,  le  torquetum,  la  baguette  et  l'anneau  universel,  instruments  qui 
n'étaient  pas  sûrs  dans  les  résultats,  ni  d'un  usage  facile  ou  commode. 

(U7)  PicafetU  transonto  del  trattato  di  navigazione,  p.  949;  Herrera,  der.  H,  lib.  IV,  c.  10;  Barrot, 
60e,  ni,  Iib.  V,  c.  40.  —  Ruy  Falciro  composa  un  traité  de  longitudes,  pour  Tusage  particulier  de 
MafHtea.  (Voyex  Hamboldt,  exam.  de  Thist.  de  la  géogr.  do  n.  m.  1. 1,  p.  301,  803). 

(S30)  La  Unea  de  la  repartitione  e  trenta  gradi  longi  dal  meridiouale  :  el  mcridioDale  c  trc  gradi  al 
kfsale  loagi  decapo  Terde.  (Pigaf.  p.  66;  préface  d'Amorulti,  p.  31 1. 

J3W)  Voyex  Barrera ,  historia  gênerai  de  los  hei^bos  de  los  Gastellanos  en  las  islas  y  tierra  firina 
Bar  oceaauo,  t.  H ,  decaa  5,  p.  478.  —  On  y  remarque  de  la  part  de  TEspagne  :  Sébastian  Cabot , 
Esteran  €oaKz,  IKego  Ribero,  Jean  Vespucoi,  —  Ce  compromis  fût  signé  le  ii  avril  45t9,  et  désigna 
les  ilaa  Marianes  (Latroaes)  et  l'ile  I.  Juan  de  las  Vélos,  pour  les  termes  de  séparatiOD ,  ce  qat  n'a 
tranclié  aucanement  la  question. 


166  GÊOGR.  LATINE  y  1470-im&0« 

Pour  la  longitude,  on  ne  pouTaît  alors  savoir  Thevre  précise  q«'aa 
moyen  de  sables  dans  la  construction  et  Fusage  desquels  rexactitode 
est  impossible  (340).  On  savait  que  le  sable  est  inexact  (Pigafetta,  de  la 
navigat.  f>.  280)  et  le  résultat  douteux  des  longitudes  obtenues^  augmen- 
tait la  méfiance  dsms  les  prévenftions  des  pilotes,  ainsi  qu'ils  ne  vou- 
laient pas  entendre  de  longitudes,  et  les  cartes  à  leur  usage  conti- 
nuaient à  rester  libres  de  toute  la  gêne  de  longitude  graduée  (341). 

204.  Le<!Osmographe  Diego  Ribero  prit  part  aux  débats  de  Saragosse, 
où  Ton  discutait  la  longitude  géographique  (342).  Sa  carte  de  1529  et  la 
carte  sévillane  de  1527,  antérieure  de  deux  années,  sont  les  premières 
cartes  espagnoles  qu'on  connaisse  qui  soient  traversées  et  croisées  par 
les  échelles,  tant  latitodinale  que  longitudinale.  Ces  cartes,  pour  la 
partie  du  nouveau  monde,  diiTcrcnt  suivant  qu'elles  étaient  instruites  de 
nouvelles  découvertes  :  quant  à  ce  fragment  de  l'ancien  monde,  que 
nous  avons  devant  nous  (n**  117  de  notre  atlas),  elles  sont  identiques, 
également  viciées  par  un  singulier  manque  de  discernement  (345}. 

Gertaroement  la  construction  de  la  méditerranée  des  marins  du  moyen 
âge  n'y  est  pas  défigurée:  elle  reste  entière  (voyez  n**  117  de  notre 
atlas)^  mais  sa  boussole  est  rectifiée.  Les  rivages  septentrionaux  de 
l'Afrique  Fattestent.  Aiexandrette  tient  à  peu  près  56<*  de  latitude, 
(56%  15);  Alexandrie  28»  20'  (Ribero  27<>0;  3iMi');  Tunis  SSMO' 
(Rîb.  54»  50';  56*  40');  Ceuta  monte  jusqu'à  57»  0'  (Rib.  56»  iO;  55»  36); 
le  rivage  opposé  de  l'Europe  est  sans  doute  porté  trop  au  nord.  La 
mer  méditerranée  des  marins,  placée  dans  une  fausse  graduation,  que- 
nous  allons  examiner,  devait,  par  sa  largeur,  déborder  les  latitudes. 

L'échelle  de  la  graduation  des  deux  cartes  est  de  la  projection  planez 
équatoriale,  proj<M;tion  cylindrique,  les  degrés  de  latitude  et  de  longi — 
tude  sur  tous  les  parallèles  et  méridiens  sont  égaux  du  grand  cercle^ 
On  conçoit  qu'une  carte  espagnole  de  l'Afrique  n'est  qu'une  oopi*- 
d'une  carte  portugaise.  Or,  cont'ronlant  les  deux  cartes  espagnoles  ave^ 
l'hydrographie  portugaise  (avec  l'Afrique  éditée  en  1515  par  Ubelinzi 
(n»  H8  de  notre  atlas)  nous  trouvons  :  la  méditerranée  longue  (46®)  4^ 
de  la  parallèle  de  Rhode  portée  dans  les  cartes  espagnoles  à  42»  du  grai 


cercle  (par  conséquent  par  sa  largeur  elle  déborde  les  latitudes).  Les  8-  - 
<le  l'étendue  de  l'Afrique  depuis  le  cap  Vert  jusqu'à  Gardafni,  dono^^  4 
par  l'hydrographie  portugaise  (comme  65»,  50'  d'équatoriaux) 
réchelle  de  la  parallèle  de  Rhode ,  sont  comptés  par  les  deux  ca 
espagnoles  85»  du  grand  cercle.  Moyen  excellent  de  faire  partir  par- 
chemin de  l'est  les  Moluks  à  l'autre  hémisphère.  N'accusant  pas  d& 
subterfuge  les  cosmographos  espagnols ,  nous  voyons  dans  leur  corn 


(3-iO)  AmoreUi,  p.... 

(34i)  In  (la  carta  da  nauigare)  necessaria  cosa  c  ch*  egli  sopra  tutto  liahbia  tre  principal!  consâ  < 


rationi  :  attcso  cbe  prima  avertira  al  luogo  doac  si  troaa  et  aquel  done  liadestinato  andare,  et  qua-zm  1 
î'uno  sia  duil'  altro  lontano.  Di  pni  in  quanta  altczza  di  gradi  si  troui  c  in  quanta  debba  andare  :  ^  i 
tiUimo  di  quai  iiento  s'  babbia  a  sciuire  inquusta  sua  nauigationc...  in  mado  cbc  ciascum  loogo  ^i 
figurato  ncl'  sno  proprio,  uero,  et  certo  sito,  cosi  per  rispetlo  de  uonti,  come  dcll*  altczza.  Dit  d'jf»  M~èi 
le  parole  del  dottor  Pietro  di  Mcdina  géographe  espagnole,  Tbomaso  Porcacchi  da  Castigli« 
en  lo72,  dans  son  l'isole  pin  famose  dcl  monde,  p.  ill.  —  De  la  longitude  géographique  on  n'y  s 

eait  p3-  "  "' ''"■" 

(Ui) 

(343) 


„  „    „    »   ^ ^^«>ii- 

geait  pas  à  s'enquérir. 
(542)  Sprengel,  Gesc^h.  der  Entdek.  c.  8,  p.  29. 

Voyez  ce  que  nous  avons  dit  de  l'indcntité  de  ces  cartes  cUap.  172. 


LATITUDES,  LOKGITLDES,  S04.  167 

sîiioD  un  nouvel  exemple  jusqu^à  quel  point  on  était  dans  Tincertitude 
de  graduer  en  loo{];itude  luéme  les  nouvelles  découvertes  positives. 
On  ne  savait  déterminer  si  Cnhà  s^élancait  au  delà  des  Canaries  jusqu'à 
70  d«^rés  ou  jusqu'à  90  degrés  ouest;  fallait-il  à  l'étendue  de  rÂfrique 
assigner  65»  50^  ou  85^  0?  Par  cette  dernière  extension  les  cartes  de  la 
projection  cylindrique  donnaient  aux  vents  d'est  et  d'ouest  un  appoin- 
tement  plus  aigu,  l'échelle  longitudinale  de  l'est  à  l'ouest  croissante 
vers  les  tropiques  et  les  pôles,  arrivait  à  une  extension  démesurée.  Les 
pilotes  qui  oteervaient  les  latitudes  géographiques  étaient  certainemeut 
en  mesure  de  le  comprendre  et  ils  acceptaient  cette  dissolution  des 
distances  longitudinales. 

Ce  défaut  de  la  projection  cylindrique  se  fit  sentir  en  premier  lieu 
par  la  configuration  et  la  position  de  l'Afrique,  qui  agit  aussi  fâcheuse- 
ment sur  la  pose  et  l'extension  de  la  mer  rouge ,  comme  nous  l'avons 
observé.  Ifais  bientôt  les  navigateurs  éprouvèrent  d'autres  inconvé- 
nients aux  environs  et  au  delà  des  tropiques.  L'étendue  des  rivages 
Tîsités  entre  la  Terre  neuve  et  les  Florides ,  n'était  pas  assez  forte  pour 
remplir  l'espace  vide  de  la  carte.  Leur  perlustration ,  avançant  de  la 
Terre  neuve ,  ne  pouvait  pas  atteindre  les  Florides ,  dont  ils  formaient 
une  continuité,  quand  on  les  visitait  à  partir  des  Florides.  La  carte  de 
Ribero  offre  cette  continuité  des  rivages  visités  de  ces  dernières.  L'atlas 
espagnol  de  1573  les  laisse  détachés  et  flottants  dans  les  espaces  de 
l'océan,  quand  on  les  examinait  du  côté  de  Terre  neuve.  Les  perlustra- 
tiens  des  rivages  de  l'Amérique ,  avancées  à  partir  de  Panama  vers  le 
midi,  ne  se  rencontraient  point  avec  les  rivages  qu'on  reconnut  au  delà 
du  détroit  de  Magellan.  Une  grande  brèche  de  presque  10  degrés  s'était 
déclarée  entre  cette  double  direction ,  qu'on  raccommoda  pour  un  cer- 
tain temps  par  une  énorme  bosse  formé  des  rivages  de  Chili  (voyez 
Munster,  n""  lâ9  de  notre  atlas,  et  Mercator).  L'expérience  éprouvait  que 
pour  coordonner  le  monde  sur  la  projection  cylindrique,  il  fallait  abso- 
lument régler  l'échelle  croissante  pour  les  longitudes. 

Aussi ,  afin  de  donner  l'assiette  à  la  mer  mediterranée  de  la  compo- 
sition des  marins  du  moyen  âge  dans  une  mappemonde  de  la  projection 
cylindrique,  il  était  nécessaire  de  rectifier  son  orientation ,  ou  de  lui 
dk>nner  une  nouvelle  boussole ,  et  de  dissoudre  ses  distances  par  l'ac- 
iDroissement  de  la  longitude.  Cette  seconde  condition  étail  très-grave, 
elle  aurait  rendu  la  carte  si  non  impossible  à  l'usage  des  marins,  au 
Mins  fatigante.  On  ne  trouve  aucune  carte  qui  l'aurait  essayée.  Les 
deux  cartes  espagnoles,  redressant  la  boussole,  ne  se  sont  point  avisées 
de  toucher  aux  distances;  elles  laissent  sans  scrupule  l'espace  de  18 
degrés  du  grand  cercle  au  détroit  de  Suez  :  les  navires  n'y  passaient 
pas,  la  gorge  étroite  des  piétons  était  indiflerente  pour  les  navigateurs. 
La  mer  mediterranée,  pour  qu'elle  fât  utile  à  leur  usage,  restait  dans 
les  mappemondes  de  projection  plane  ^  comme  un  compartiment  d'une 
tatre  nature,  accroché  par  le  détroit  de  Gibraltar  à  la  grande  construc- 
tion de  nouvelles  découvertes  (344)» 


168  GÉOGR.  LATINE  y  1470-1550. 

205.  RésumaDt  ce  que  nous  avons  examiné,  nous  voyons  qoeles 
cartes  nautiques  étaient  dessinées  partout  où  la  mariné  était  animée  :  à 
Venise,  à  Gènes,  à  Majorque  et  en  Catalogne;  à  Sagrès  et  Lisbone,  en 
Castille,  chez  les  Grecs  et  les  Flamands,  partout,  et  jignore  sons  quel 
point  de  vue  se  laisseraient  distinguer  les  écoles  de  Venise,  de  Gènes, 
Catalane  et  Majorque,  de  Sagrès  et  de  Lisbone,  si  ce  n*est  par  Tidiome 
des  inscriptions,  par  Fauteur  qui  les  composait,  ou  par  quelques  spé- 
cialités dans  les  positions,  dans  la  configuration  des  régions  trop  éloi- 
gnées ou  dans  les  indications  des  découvertes  :  car  ces  écoles  formaient 
une  même  famille.  Tune  engendrait  Tautre,  la  fille  suivait  la  méthode 
de  sa  mère-école;  elles  se  communiquaient  muluellement  et  chacune 
tirait  des  avantages  du  progrès  de  Tautre;  toutes  les  cartes  sont  dres- 
sées sur  les  mêmes  bases  pendant  les  xiv*  xv*  et  xvi*  siècles;  plus  oo 
moins  exactement  dessinées  et  exécutées,  elles  offrent  simultanément 
les  mêmes  formes,  le  même  ordre.  Et  lorsque  le  mal  ptoléméeu  com- 
mença à  ravager  la  géographie,  la  contagion  pénétrait  partout  etatter- 
guit  toutes  les  écoles  :  c'est  alors  que  les'^écoles  se  dessinaient  peut-être 
plus  distinctement  par  les  symptômes  de  leur  commune  maladie.  Mais 
alors  elles  prirent  terre  et  renièrent  la  mer.  Dans  chacune,  ceux  qui 
sillonnaient  Tocéan  et  les  mors ,  restaient  conformes  entre  eux. 

Les  cartes  de  ces  écoles,  considérées  comme  intermédiaires  entre  les 
simples  portulans  et  les  mappemondes  systématiques,  représentant  la 
totalité  ou  une  partie  seulement  du  monde,  puisqu'elles  réunissaient 
dans  un  ensemble  quantité  de  portulans,  offraient  toutes  les  qualités 
des  portulans.  Pour  qu'elles  puissent  être  utiles,  elles  devaient  être 
confectionnées  sur  une  assez  grande  échelle.  Basées  sur  l'échelle  des 
distances,  elles  offraient  un  développement  assez  indéterminé  et  sou- 
vant  modifié.  La  méthode  de  la  rose  des  vents,  assujétie  à  ta  boussole  et 
à  son  aiguille,  leur  frayait  le  chemin  au  développement  cylindrique  : 
mais  elles  n'étaient  soumises  à  aucune  projection  :  par  conséquent  la 
graduation ,  et  encore  moins  le  développement  cylindrique  ne  pouraîcnt 
saisir,  ni  ses  membres  souvent  disloqués ,  ni  son  ensemble. 

Cependant,  depuis  que  la  projection  cylindrique  se  déroula  sons  la 
ligne  équinoxiale,  les  anciens  portulans  et  toute  la  mcditerranée 
devaient  se  raccommoder  à  cette  projection,  et,  pour  figurer  dans  les 
mappemondes  des  deux  hémisphères,  subir  le  changement  de  bousisole 
et  de  dimension;  le  changement  de  la  première  lui  donnait  une  direc- 
tion et  position  juste,  qui  s'accordait  avec  la  ligne  équinoxiale;  mais  te 
changement  de  l'autre  jetterait  une  perturbation  dans  ses  bases,  c'est- 
à-dire  dans  les  distances,  et  défigurerait  tous  les  contours,  si  l'on  eût 
sérieusement  raccommodé  la  méditerranée  dans  une  mappemonde 
déroulée  sur  la  projection  cylindrique.  La  mer  mcditerranée  ne  pon- 


des ilos  Fortunées),  de  sorte  que  Ton  peut  dire  qne  )e  cap  est  à-peu-près  dans  le  méridien  d*Aloxan> 
drie.  —  L'bydrograpbie  portugaise,  à  laquelle  probablement  Americus  manuro  imposuit,  se  couforrae 
à  cette  indication  du  méridien,  lui  donnant  55"  de  longitude;  de  mùme  le  scvillien  et  Ribero  variant 

Huroboldi 

>e  de  les 

Suffit 

d'observer  que  la  graduation  cylindrique ,  sans  la  croissance  de  latitude ,  n'a  pu  au  delà  du  tropique 
déterminer  les  longitudes  et  que  l'accouplement  de  la  mer  méditerranée,  dressée  sur  d'autres  bases» 
avec  le  reste  du  monde  récemment  découvert,  rangea  Alexaudrie  et  le  cap  sobs  le  même  méridien. 


LATITUDES»  L0K6ITU0ES,   806.  169 

vait  fi^rer  dans  une  mappemonde  de  la  projection  plane»  avant  que 
celie-ci  n*eût  engendrée  les  cartes  réduites  des  lonciludes  et  latitudes 
croissantes.  Mais  pour  y  arriver,  la  théorie  devait  d*abord  examiner  et 
comprendre  les  rumbs,  préalablement  prendre  en  considération  les 
latitudes  connues,  reconnaître  et  admettre  la  croissance  de  Téchelle 
pour  les  distances. 

206.  Incertitude ,  indécision ,  désordre ,  accablaient  les  mappemon* 
des  de  toutes  les  écoles.  Ordinairement  on  rapiéçait  les  parties  hétéro- 
gènes; on  les  laissait  au  contact  qu'avait  créé  par  hasard  la  pratique. 
Les  éditeurs  de  Ptolémée  expliquaient  les  projections,  dtscuf aient  sur 
leur  valeur  et  importance ,  s'excusaient  quand  ils  traçaient  les  degrés 
en  lignes  droites.  Les  dessinateurs  cosmographes,  peut-être  moins  ver- 
sés pour  satisfaire  les  exigences  des  savants  et  le  besoin  croissant  dans 
les  nouvelles  découvertes,  tiraient  à  travers  leurs  mappemondes  la 
ligne  équinoxiale  et  les  tropiques;  marquaient  les  climats  et  les  degrés 
de  latitude  sur  les  marges  des  cartes  de  leur  composition.  C'était  faux, 
cela  blessait  plutôt  la  vue  et  la  construction  des  cartes ,  décelait  le 
double  emploi  de  la  boussole ,  sans  opérer  le  redressement  nécessaire. 

Les  géographes  publicateurs,  empruntant  de  Ptolémée  la  graduation 
de  la  latitude  pour  la  médilerranée ,  rectifièrent  sa  boussole  par  des 
lignes  droites ,  envisageant  toutes  les  compositions  antérieures  de 
marins  et  de  cosmographes  comme  basées  sur  la  projection  plane,  et  ne 
respectèrent  pas  longtemps  les  proportions  de  la  construction  nautique. 

L'école  de  la  péninsule  pyrénéenne ,  qui  aimait  mieux  étendre  les 
connaissances  humaines  que  d'étudier  un  géographe  hors  de  saison , 
qni  ne  s'empressait  guère  d'éditer  un*Ptolémée;  l'école  de  cette  pénin- 
sule gravait  peu,  dessinait  beaucoup  (345),  et  rectifiant  l'assiette  du 
bassin  de  la  méditerranée,  observait  ses  proportions  nautiques,  conser- 
vait le  précieux  fruit  de  labeur  précédent,  presque  abandonné  par  la 
marche  générale  des  opérations  géographiques  de  la  renaissance. 

L'école  allemande,  à  peine  ouverte,  adhéra  avec  une  ardear laborieuse 
et  bruyante  à  Ptolémée,  elle  prôna  sa  méthode,  son  autorité  inaftaquable 
et  accepta  sans  réserve  ses  proportions  de  la  méditerranée,  méconnais- 
sant ainsi  le  mérite  de  travaux  antérieurs,  elle  s'empressa  de  résumer 
et  de  populariser  les  connaissances  nouvelles. 

L'activité  de  l'école  italienne,  embrouillée  dans  sa  marche  par  la 
renaissance  des  lettres,  donnant  la  prépondérance  à  Ptolémée,  à  sa 
méthode,  à  sa  connaissance  géographique,  s'engagea  dans  un  dédale 
d'incertitude,  d'instabilité.  Par  des  moyens  variés  elle  retravailla  tous 
les  produits  géographiques.  C'est  un  laboratoire  qui  élabore  d'avance 
de  nombreux  matériaux  pour  la  réforme  de  la  géographie. 

Nicolas  Zeno,  1555. 

207.  Parmi  les  essais  de  la  graduation  en  latitude  et  longitude,  qu'on 
retrouverait  dans  l'école  italienne,  celui  de  la  graduation  de  la  carte  de 

(345)  Le  cosmofpraphe  da  roi  d'Espagne,  Ortel,  depuis  1570  jasqu'à  sa  mort  iS98,  ne  sait  indiquer 
d*atitres  cartes  publiées  en  Espagne  que  celle  provenant  de  la  mauvaise  gravure  de  Pierre  de 
Medine,  connn  par  un  ouvrage  médiocre  sur  la  navigation ,  ou  il  décèle  assez  d'ignorance.  —  En 
PortDgal»  Ortel  ne  confiait  que  Alvarez  Secco,  et  Homen  :  ce  dernier  a  publié  an  atlas. 


i70  GÉOGR.   LATINS,  U70-1550» 

Zeno  mérite  d'être  distingué.  Nicolas  Zeno,  descendant  des  frères  navi- 
gateurs, retrouva  dans  les  archives  de  sa  famille  la  carte  de  son 
bisaïeul  (s^e).  Pour  qu'elle  pût  entrer  dans  la  composition  d*une  mappe- 
monde, il  entreprit,  vers  1555,  sa  graduation.  Il  s*imagina  que  cette 
carte ,  bien  qu'elle  offrit  une  espèce  de  portulan ,  et  qu'ordinairement 
on  graduait  les  portulans  par  la  projection  plane,  il  s'imagina,  dis-je, 
qu'elle  offrait  une  composition  susceptible  d'accepter  la  graduation  de 
la  plus  parfaite  projection  de  Piolémée ,  aux  parallèles  et  méndieus 
courbes. 

Cette  opération  parut  au  géographe  témoin  (Ruscelli),  d'une  difficulté 
extrême^  demandant  un  homme  profondément  versé  dans  la  science.  11 
fallait  posséder  à  cet  effet  un  savoir,  connaître  les  mathématiques ,  être 
initié  dans  le  mystère  de  Ptolémée  et  avoir  une  application  assidue 
pour  exécuter  une  semblable  graduation.  Nicolas  Zeno,  doué  de  toutes 
ces  qualités ,  tirant  le  premier  méridien  par  le  milieu ,  qui  divisait  la 
carte  en  deux  moitiés,  discerna  avec  la  plus  grande  attention  la  paral- 
lèle du  milieu  qu'il  détermina  par  le  68'  de  latitude,  dont  le  degré  de 
longitude  est  en  proportion  de  3  à  8  au  degré  du  grand  cercle.  Ayant 
établi  les  parallèles ,  il  croisa  ces  parallèles  par  les  méridiens  inclinés 
proportionnellement  à  la  diminution  de  degrés  (s47).  Enfin  il  fit  graver 
sur  bois  et  publier  cette  carte  par  Marcolini  en  1558.  Depuis  cette  pre- 
mière publication,  elle  a  été  reproduite  plus  d'une  fois  à  Venise  et 
ailleurs  (348).  A  la  suite  de  cette  opération  heureusement  achevée, 
Groenland  avança  à  l'ouest  jusqu'à  290^  de  longitude,  se  rapprochant 
de  Zipaugri  ou  Japon  placé  à  280*  de  longitude.  Après  cette  expérience 
de  la  théorie  de  Ptolémée,  Nicolas  Zeno  élabora  un  traité  de  géographie 
qui  donnait  les  solutions  de  tous  les  problèmes  pour  créer  une  nouvelle 
géographie  ou  réformer  celle  qui  existait  (sio). 

GiROLiiMO  Ruscelli,  1561. 

208.  Le  viterbien  Gwolamo  Ruscelli  ,  qui  nous  a  donné  une  ample 
relation  de  la  méthode  et  de  l'opération  de  Nicole  Zeno,  philologue 
instruit,  fondateur  de  l'académie  dello  sdegno  à  Rome,  correcteur  dans 
la  typographie  de  Valgrisi  à  Venise,  préparant  et  soignant  l'édition  de 

(340)  Voyez  la  généalogie  de  Zeni  à  la  fin  dn  volnme. 

(3.I7)  Qaesto  disegno  riformato,  comme  si  yeâe ,  s'è  hannto  de  Nicolo  Zeno  Ion  descendente  per 
driita  linoa.  Et  egli  qaesto  geutiihuomo....  ha  adorno  qaesto  disegno  de  paralleli  et  meridiani ,  ooo 
tQtti  le  misure  chc  gli  si  convcgono....  Questa  tavola  danqae  ba  il  suo  parallelo  di  mezo  lontano  dall 
eqninottiali  68  gradi,  come  il  Zeno  diligentissimamente  ba  ossenrato.  Onde  ha  queUa  proportione  al 
meridiano,  che  bauno  quasi  3  ad  8  (Girolamo  Rascelli,  espositioni  et  intruduttioni  oniTersali,  nnova 
taTola  xxxv).  Nous  devons  faire  remarquer,  que  la  graduation  de  la  carte  qae  nous  avons  copiée  n*95 
de  notre  atlas,  est  loin  d'observer  ces  proportions  qa*à  voulu  établir  Zeno  d'après  les  r^lcs  prescrites 
par  Ptolémée. 

(348)  Touchant  la  première  publication  de  la  carte  des  frères  Zèni ,  voyez  catalogue  anglais  des 
livres  de  Pinelli  n*  4392.  Ses  reproductions  se  suivirent  à  Venise,  dans  les  éditions  de  Ptolénoée  1561, 
par  Ruscelli  iS62,  par  Moletto  1874,  ISU9,  de  Ruscelli  renouvellécs ;  dans  viaggio  in  Persia  de 
Catherino  Zeno  i  délia  scopriroento  de  lo  isola  Frislanda,  Estlanda,  etc.,  1588;  dans  les  dissertationi 
de  Znrla  4808.  —  La  carte  reproduite  ou  commentée  :  Ramusio,  navigationi ,  1583,  t.  il,  M  Stt ; 
Hackluyt,  navigat.  1. 11,  part.  II,  iii.  Hieronym.  Megiser,  septentr.  novo  antiq.;  Abraham  OrteUos; 
Lucas  Fox  north  west  Fox,  on  Fox  from  north  vrest  passage,  London  46S5;  Eggers,  sur  la  vraie 
situation  de  l'ancienne  Groenland  orientale,  dans  les  mémoires  de  la  société  économique  de  Copen- 
hague ,  IV,  p.  239-320;  Ruacbe,  dans  les  annales  des  voyages,  t.  X  ;  Malte  Rnin ,  géographie,  éditée 
par  Huot,  livre  XVIII,  p.  489  et  suiv. 

(349)  Omnia  docentur  in  historia  nniversali  Nicolai  Zeni ,  in  qua  ettam  extat  tota  geograpUa 
fidelissima.  Joseph  Moletius,  commentarior.  ad  geogr.  Ptol.  1, 24,  p.  liî,  cdit.  1562. 


RUSCELLI»  a08.  171 

Ptoléméc  qui  parut  en  italien  en  1561,  entreprit  lui-même  et  commença 
Texécution  d'un  grand  ouvrage,  qui  avait  pour  but  de  développer  toute 
la  théorie  et  la  science  des  cartes  nautiques  des  marins,  qualifiées  par 
quelques  modernes  d'hydrographiques,  et  dont  il  appréciait  lui-même 
la  hante  valeur.  Il  reçut  des  notes  de  beaucoup  de  marins  et  de  parti- 
culiers, qui  par  leur  propre  expérience,  par  la  pratique  et  la  théorie, 
étaient  très-versés  dans  cette  matière  et  dont  il  y  en  avait  beaucoup  à 
Venise.  Il  demanda  des  renseignements  aux  Génois,  aux  Grecs,  aux 
Flamands,  aux  Espagnols  et  aux  Portupis.  11  se  procura  des  cartes 
marines  de  quelques  particuliers  qui  avaient  longuement  navigué  et  les 
avaient  successivement  corrigées  de  leur  propre  main  (sso).  Riche  de 
ces  conseils  et  de  ces  matériaux,  il  se  proposait,  dans  sa  nouvelle  géo- 
graphie, de  flaire  un  ample  traité  à  sa  manière,  dans  lequel  serait 
entrée  la  théorie  de  toutes  les  choses  qui  s'y  rattachent.  11  pensait 
mettre  quinze  cartes  marines,  spéciales  aux  différentes  mers,  amplement 
détailées  avec  tous  les  endroits,  avec  les  informations  et  descriptions  de 
leur  nature  et  de  leurs  qualités,  des  écueils,  des  ports  et  de  chaque 
■chose  à  ce  sujet;  mais  surtout  très-exactes  et  avec  la  mesure  des  degrés 
(de  londtude)  proportionellement  selon  les  parallèles  des  lieux  (ou  de 
iatitade),  et  avec  la  nouvelle  boussole  (c'est-à-dire,  redressée  de  sa 
^clination  sur  les  points  cardinaux),  dans  laquelle  se  seraient  trouvées 
aassi  beaucoup  d'opérations  importantes  qu'on  ne  trouvait  pas  dans 
oenx-ci  jusqu'alors.  Les  caries  devaient  être  exécutées  sur  une  grande 
échelle,  car,  pour  qu'elles  passent  être  destinées  à  l'usage  de  la  naviga- 
tion, il  fallait  qu'elles  fussent  de  la  plus  grande  dimension  possible, 
soit  pour  qu'on  pût  exactement  y  discerner  la  direction  des  vents,  ou  y 
prendre  ces  mesures  (distances)  précises  avec  le  compas  et  les  pointer 
cfaaqae  fois  selon  les  besoins.  Lorsqu'il  énonçait  ce  grand  projet,  il  avait 
déjà  exécuté  cinq  sections  de  mers  en  cinq  cartes,  croyant  qu'on  ne 
trouve  de  pareilles,  et  il  espérait  les  retoucher  et  améliorer  avant  de  les 
livrera  la  gravure  (35 1).  Ce  beau  projet  n'a  pas  eu  de  suite,  il  resta 
interrompu  et  inachevé  par  la  mort  de  Ruscelli,  arrivée  en  1566. 

Rnscelli  avait  donc  conçu  le  projet  de  décorer  les  caries  nautiques 
hydrographiques  par  la  graduation  dont  elles  étaient  privées.  (}ucl 
aurait  été  le  fruit  de  cette  opération?  Il  est  difficile  de  le  conjecturer. 
L'homme  qui  savait  estimer  la  valeur  des  caries  hydrographiques,  leur 


rmO)  Nel  cfae  vengo  tuttavia  Taccndo  studio  con  l'aioto  di  molli  non  solamentc  marinari,  ma  ancor 
notrili,  die  per  pratica  et  per  artc  et  soienza  ne  sono  iotendenlissimi,  de*  quali  in  questa  cittàson 
p«r  molti;  oitre ,  che  da  GenoTCsi,  da  Greci ,  da  Fiaminghi  et  da  SpagnuoH  et  Portughcsi  ^  io  vengo 
tnitiitia  procurando  d'baTcr*  aiuti  ;  et  già  da  moite  carte  roarinaresclic ,  havute  da  alciini  particolari, 
(Aie  kanno  langamente  navigato  con  esse  et  le  son  venute  agginstando  di  volta  in  voila  di  roano  lor 
propria (Rascelli,  esposittoiia et  introduttioni  universali,  cap.  VUI,  délia  caria  da navicare). 

(38i)  Délia  quai*  arte  (idrografîa) ,  io  spero  ncUa  mia  nuova  gcografla ,  far  un  picno  trattato  à  mio 
modo,  nel  quale  oltre  allateôrieo  in  lutte  quelle  cosc,  che  le  si  apparlcngono,  mcttcrô  da  xv  pczzi 
di  carte  da  navigare  particolnri  di  diversi  mari ,  distcsc  copiosamente....  ma  sopra  tutlo  fottc  giustis* 
sime,  con  le  misore  di  gradi  proportionataroentc ,  sccondo  i  paralleli  de'  luoglii ,  et  con  un*  nuovo 
busaolo  nel  quai* anco  sieno  moite  opération!  imporlanlissime,  cbe  in  queslifinqui  non  si  veggono.... 
Io  con  consnltatione  di  pcrsone  intendenti ,  ho  faite  far  cinnuc  pezzi  di  marc  in  cinque  carte  «h'  io 
credo  che  fin  qui  ne  sien  poche  altrc  tali ,  oltre  che  avanti  che  si  facciano  inlagliare ,  per  métier  ncl 

libro,  potrb  venirle  tuttavia  raiglorando Percio  que  le  carte  vcre  d'adoperarc  si  convengon  far 

gnskdi  qcianto  pin  si  possa,  si  per  poter*  in  esse  discerner'  otlimaniente  le  vie  de'  venti,  si  ancora 
per  potersi  col  compasso  prender  giuslamentc  le  sue  misurc  cl  pnntarla  di  volta  in  volta  sccondo  i 
bisogni (Rnscelli,  ibid.).  —  I  marinari  V  usano  quanto  più  grandi  lor  sia  possibilc  et  hanno  ollre  alla 
gcaeialed  UDWersal,  più  altre  carte  particolan  (Ruscelli  nota  ad  carta  mar,  6  da  navigarc  n*  56). 


173  GÉOGR.   LATIMB,  1470-15S0. 

exactitude  corroborée  par  un  long  et  universel  usage ,  qui  estimait  Tex- 
périence  des  navigateurs, aurait  conservé  les  proportions  des  mers, 
n'évaluant  pas  la  niéditerranée  à  62^,  mais  uardant  sa  dimension  donnée 
par  les  cartes  marines  :  la  carte  de  Syrie  dans  son  atlas  vient  à  Tappui 
de  ces  présomptions.  La  nouvelle  boussole,  rectifiant  Forientation  et 
fixant  les  latitudes,  aurait  déterminée  la  longitude  sans  recours  à 
Ptolémée.  Mais  Ruscelli  ne  désapprouve  pas  ceux  qui  puisaient  les  lon- 
gitudes dans  Ptolémée ,  et  les  cartes  qu'il  approuve  par  sa  publication , 
sont  sérieusement  affectées  par  les  longitudes  du  géographe  grec. 
Le  contagieux  mal-ptoléméen  s'était  déjà  emparé  de  Fesprit  humain , 
que  rien  ne  pouvait  sauver  la  géographie  nautique.  Partout  se  déclare 
une  sujétion  complète  à  la  longitude  de  la  méditerranéc  de  Q2^  (sss), 
et  presque  partout  aux  formes  ploléméenncs  (355). 

Triomphe  de  Ptolémée,  1550. 

209.  Pour  exécuter  la  graduation  de  plusieurs  caries  qui  devaient 
former  un  ensemble  par  leur  cohésion ,  et  même  d'une  seule  isolément 
prise,  non-seulement  les  directions  et  les  inclinations  vicieuses  des 
parties  offraient  de  nombreux  obstacles  à  surmonter  :  mais  aussi  T irré- 
gularité des  cartes ,  qui  approchaient  d'une  véritable  inexactitude , 
multipliaient  la  confusion  d'une  manière  très-embarrassante.  Cette 
Inexactitude  venait  en  premier  lieu  de  l'imperfection  des  instruments 
à  dessiner.  Sur  toutes  les  cartes ,  même  sur  celles  qui  sont  dessinées  et 
inscrites  avec  la  plus  minutieuse  assiduité,  les  lignes,  les  cercles,  les 
points,  les  distances  vacillent,  dirigées  et  appointées  par  une  main 
incertaine.  On  ne  peut  attribuer  ces  déviations  qu'à  l'imperfection  de  la 
règle  et  du  compas.  La  règle  en  bois,  cambrée,  rejetée  par  l'humidité; 
en  métal,  tournant  sur  un  plancher  insuffisamment  dolé,  raboteux»  sur 
le  vélin  ou  la  peau ,  cédant  aux  inégales  applications  et  pressions, 
déroutaient  les  efforts  des  plus  soigneux  dessinateurs.  Le  compas,  grande 
et  grossière  machine  ordinairement  en  fer,  à  l'ouverture  dure,  raide, 
sautant  ou  pivotant  sans  fin,  manquait  à  l'échelle  et  aux  points  qu'il 
devait  marquer  (554). 

(559]  La  mappemonde  de  Katlas  de  Ruscelli  donne  ce  nombre  à  la  méditerranée  ;  les  cartes  spéciales 
de  son  recueil  ne  purent  étendre  cette  mer  qu'à  60*. 

(353)  Ruscelli  a  donné ,  carta  marina  5  da  navigare,  solamente  per  uno  essempio,  non  percbe  in 
effeito  cos  î  picciola  ella  fosse  comoda  5  buona  d'adoperare  ;  fatta  solamente  per  una  mostra  et  come 
per  un  modello,  clie  valeria  pochissimo  b  nulla  in  adoperaria  effetualmente  nel  navigare.  Examinaat 
ce  modèle  on  voit  que  c'est  un  ouvrage  postérieur  au  voyage  de  Magellan  ;  les  régions  septentrionales 
ont  une  configuration  tout-à-lait  différente  de  celle  ^u'on  donnait  avant  45*20;  eufia  elle  est  Bosté- 
rieure  aux  années  i539, iS41,  dans  lesquelles  la  Californie  fut  reconnue,  comme  péninsule.  Malgré 
d'innombrables  irrégularités  de  cette  carte  négligemment  exécutée ,  elle  déroule  l«  tableau  d*une 
singulière  projection.  Sa  rose ,  placée  sur  l'équateur,  représente  le  cercle  de  rbémisphère  »  dont  le 
rayon  répond  à  90  degrés.  Quand  on  entreprend  d*appfiqucr  les  longitudes  et  les  latitudes  connues 
par  Ruscelli  aux  lieux  déterminés  par  la  rose,  les  degrés,  en  tous  sens,  du  poiut  central  de  la  rose, 
tant  en  latitude,  qu'en  longitude  se  présentent  décroissants.  L'autre  hémisphère  est  développé  de 
deux  côtés  dans  les  additions  de  moins  d'un  cinquième  du  diamètre.  Chacune  présente  Ta  décrois- 
sances de  90  degrés  de  longitude  de  l'autre  hémisphère.  L'embouchure  du  Gange  figure  sur  la  lisière, 
comme  s'il  était  à  480*  de  longitude. 

(364)  Cette  imperfection  du  compas  était  écrasante  encore  au  xvi*  siècle,  comme  on  peut  le 
remarquer  par  l'avertissement  donné  par  Ruscelli.  Et  sopra  tutto  convione  baver  con  esse  il  com- 
passé grcude  et  giustissimo,  che  nell*  a|>rirsi,  non  sia  dttro,  onde  bisogni  far  forza  et  cosi  venga  à  far 
salto  et  aprirsi  più  che  non  vogliamo,  ne  ail'  incontro  sia  molto  lento,  cbe  Dell*  adoptarsi  si  venga  à 
restriDgere  da  se  medesimo  (esposit.  et  introd.  univ.  cap.  8). 


PTOLÉMÉB»  210.  173 

Limpossîbilité  de  soutenir  les  mesures  d'après  Texactitude  mathé- 
matique, concentra  les  exigences  de  Tcxactitude  dans  le  coup-d'œil  et 
la  main  qui  fesait  ressortir,  boursoufiler  et  exagérer  les  points,  les  traits 
et  les  formes  saillants.  L*œil  et  la  main,  conduits  vers  un  point  mal 
assuré,  allait  parfois  au  hasard  et  laissait  le  vague  aux  gradueurs. 
'  Ces  défauts  affectaient  plus  ou  moins  toutes  les  cartes  nautiques  sans 
les  déranger,  sans  détériorer  ni  atteindre  cette  harmonie,  de  Tensemble 
qui  les  unissait  dans  un  corps;  sans  introduire  des  discordances,  des 
incohérences  qui  auraient  rendu  ces  cartes  plus  nuisibles  qu'utiles  à 
Tusage  des  pilotes  et  des  navigateurs. 

Le  dérangement  n'arriva  que  lorsque  le  divin  Ptolémée  commença 
à  opérer  la  grande  métamorphose  de  tous  les  pays;  et  sa  renaissance , 
décelant  le  mode  et  le  modèle  de  la  graduation,  souleva  ces  barrières 
infranchissables  qui  s'opposaient  à  toute  graduation  possible.  Les  géo- 
graphes ne  concevaient  point,  qu'on  eût  pu  découvrir  une  graduation 
dans  les  compositions  modernes,  ils  se  préparaient  à  l'appliquer  par  la 
réforme  de  la  carte,  de  sa  boussole  et  de  la  configuration  des  pays.  Les 
nouvelles  découvertes  furent  gradués;  Nicolas  Zeno  gradua  le  dessin  de 
ses  ateux  :  celles-là  sur  l'expérience  des  navigateurs;  celui-ci  hasardeu- 
sement  :  mais  la  graduation  de  l'ancien  terrain  ne  pouvait  plus  s'exé- 
cnter  sans  l'intervention  de  Ptolémée.  Je  ne  sais  pas  s'il  y  eut  jamais  à 
cette  époque  un  géographe  quelconque,  qui  pensa  à  découvrir  les  longi- 
tudes ou  les  latitudes  des  cartes  de  l'ancien  monde  de  la  fabrique  du 
moyen  âge,  spécialeîsou  générales,  indépendamment  de  la  graduation 
de  Ptolémée.  Cependant  l'œuvre  de  la  graduation  complète  gagnait 
toujours  du  terrain  et  poussait  des  racines  profondes.  Chaque  carte 
spéciale  de  chaque  pays  fut  mise  à  la  question,  et  ne  répondant  pas* 
subit  la  destruction,  réformée  et  affaissée  dans  les  proportions  de 
Ptolémée.  Souvent  elles  passaient  par  des  épreuves  de  différents  philo- 
Icônes  qui  ne  s'entendaient  entre  eux  que  sur  un  seul  point,  celui  de 
soumettre  chaque  pays  dans  le  cadre  de  longitudes  et  latitudes  chiffrées 
par  Ptolémée  ;  de  donner  à  chaque  pays  les  contours  conformes  à  la 
configuration  ptoléméenne. 

SiO.  Il  me  semble  que  sous  ce  rapport,  les  écoles  se  sont  dessinées 
par  des  dissidences  et  que  chacune  allait  son  train.  Je  ne  connais  pas 
des  productions  pul)liées  des  écoles  de  la  péninsule  pyrénéenne,  qui 
avaient  eu  une  pratique  spéciale  et  immense  que  lui  donnaient  les 
découvertes  et  les  colonies  :  mais  leur  distinction  me  paraît  évidente 
dans  la  graduation  faile  par  elles-mêmes  de  leur  propre  péninsule,  qui 
ne  s'accommodait  point  avec  les  graduations  des  autres  pays  effectuées 
par  les  écoles  d'Italie  et  d'Allemagne,  et  celte  distinction  dissidente  se 
prolongea  assez  longtemps  (355).  Les  longitudes  ptoléméennes  s'adap- 

f3S8)  Nous  avons  observé  cette  dissension  parla  carte  espagnole  de  1481  (n*  lt4  de  notre  atlas). 
Elle  coDtinae  de  se  manifester  dans  les  atlas  de  Ruscelli  et  Uoletto  1661 ,  1562,  d'Orteliiis  1870  :  dans 
ce  dernier  c*est  la  carte  de  Cbarl  Clusios.  Dans  les  premiers ,  la  carte  d'Espagne  oiïre  pour  Bavonne, 
lat.  44*  Vt  long.  15*  20';  pour  Narbonne  lat.  45*  0',  long.  18*  30%  et  la  carte  ic  France  donne  à 
Bayoane,  lat.  43*  40^,  long.  14*  30';  à  Narbonne,  lat.  4i*  0',  long.  10*  «0'.  Dans  l'atlas  d'Ortelius, 
Clusins  '.Français),  place  Bayonne,  lat.  44*  50',  long.  10*  40';  Narbonne  lat.  44*  iO*,  long.  i4*  50';  et 
Jolivet  en  France,  Bayonne,  lat.  45*20',  long.  16*  60';  Narbonne,  lat.  41*  50,  long.  fS"  50'.  L'incolio* 
lr£nce  est  palpable  et  continue. 


176  GÉOGR.  LATINE,  1470-15$0. 

décision.  L'ajustement  précoce  des  latitudes  à  quelques  cartes  des  cos- 
mographes, prouva  les  dispositions  de  la  régularité  et  de  Fensemble. 
Mais  ces  cartes  furent  bientôt  sacrifiées  et  toute  idée  des  géographes 
allemands  s'enferma  dans  Ptolémée  et  procéda  à  toutes  les  opérations 
avec  assurance,  méthode  et  servilité  édifiante.  Behaîm,  Schedel, 
Ruysch,  Scbôner,  Munster,  Apian,  Gemma,  se  succédaient,  agissaient 
dans  le  même  sens  avec  une  assiduité  infatigable,  et  réussirent  à  conso- 
lider la  domination  de  Ptolémée  par  leurs  publications  populaires. 

Jean  Schônrr,  né  ii77  à  Karlstadt  en  Frankonie,  vir  rerum  mathe- 
malicarum  eœcellens  (Âpiani,  cosmogr.  II,  p.  55),  cultivant  la  science  à 
Bamberg,  commença  à  fabriquer  les  globes.  A  cet  effet,  en  1515,  il 
publia  un  ouvrage  (sso).  Il  y  confectionna  en  1520,  aux  dépends  de  Jean 
Seyier,  un  globe  du  diamètre  de  2,8  pieds  de  Paris.  Appelé  en  1526  à 
Nuremberg,  comme  professeur,  il  y  transporta  son  globe,  qui  y  est  encore. 
En  1552,  fabriquant  un  globe  pour  le  duc  de  Saxe,  il  publia  deux  nou- 
veaux renseignements  sur  Tulilité  des  globes.  Il  mourut  en  1517,  et 
pendant  sa  vie  ses  globes  répandaient  Timage  modernisée  de  Thabitable 
île  Ptolémée,  nova  et  quant  ante  fuit,  verior  Europae  formatio  (sec). 

Sebastien  Munster,  né  en  1489  à  Ingelheim  mort  en  1552,  à  Bâle, 
par  sa  cosmographie  universelle,  publiée  d'abord  en  1544,  souvent 
réimprimée  en  allemand  et  en  latin,  traduite  en  français  1555,  en 
italien  1558,  mit  en  cours  la  même  image  (voyez  n°  129  de  notre  allas). 
Son  édition  de  Ptolémée,  cinq  fois  imprimée,  15i0,  1541, 15 il,  1545, 
1552,  servit  de  modèle  à  la  nouvelle  formation,  pour  les  autres  géogra- 
phes à  rélranger. 

Pierre  Apien  ou  Bienevitz,  né  1459,  à  Leisnik  en  Misnîe,  mort 
en  1551,  professeur  de  mathématiques  et  d'astronomie  à  Ingolstadt  en 
Bavière,  popularisant  Taslronomie  et  sa  pratique,  par  ficelle  et  papier 
mouvant,  familiarisa  le  monde  ptoléméen  par  sa  cosmographie.  Régner 
Gemma,  le  frison,  né  1508,  mort  1555,  s'empara  de  ce  petit  ouvrage,  y 
introduisit  les  notions  géographiques  et  une  table  abondante  de  longi- 
tudes et  latitudes  géographiques  de  Ptolémée,  pour  servir  à  dresser  les 
cartes,  dont  il  fit  en  1540  lui-même  rexpérience  à  Louvain.  Il  multiplia 
sans  fin  les  éditions  commentées  de  cette  cosmographie  d'Apien ,  dans 
toutes  les  langues,  latine,  flamande,  allemande,  française  1544, 
italienne  1575,  espagnole  1575;  et  il  fabriqua  les  globes  (sei). 

(359)  Luf^lentissima  qu^edam  terrae  totius  descriptio,  cum  muUis  utilissimis  cosmographiae 
initiis,  iiovaque  et  quant  anleruit,  verior  Europae  nostrae  formatio,  praeterea,  fluviorum ,  raontium, 
proviociarum,  urbinm  et  gcntium  quant  plurimoruni ,  vetustissima  noniina  recentioribns  admixta 
vocabulis,  niulta  etiam,  quae  diligent  lector  nova  usuiqne  futura  inveniet,  cum  globis  cosmographi- 
cis,  Norimbergae  1515,  in-i". 

(860)  Voyez  Doppciroajr,  von  den  niirnbergischcn  Mathematicis,  p.  43-50;  Erdglobus  Bebaims 
nnd  der  des  Johan  Schoner,  Abhandiung  von  F.  PI.  Gbillany,  Nurmb.  iSiS.  Ce  dernier  adonné 
l'autre  hémisphère  du  globe  de  1520,  que  nous  reproduisons  n*  125  de  notre  atlas.  Il  assure  que 
l'exécution  du  glnbe  est  Taite  avec  grand  soin.  Le  temps  fit  disparaître  maintes  épigraphes ,  mais 
d'après  la  description  de  l'hémisphère ,  le  globe  en  proportion  de  sa  grandeur,  n'est  pas  abondant, 
ni  dans  la  nomenclature,  ni  dans  lus  légendes,  dont  certaines  offrent  un  intérêt. 

(361)  Je  ne  connais  pas  de  cartes  élaborées  par  Apian  et  Gemma  :  je  ne  connais  que  leurs  petites 
productions.  Le  premier  présenta  une  mappemonde  à  Charles  V,  mais  ceux  qui  pensent  que  cette 
mappemonde  est  attachée  à  sa  petite  cosmographie  sont  dans  l'erreur  :  la  figure  impériale  tète-jh 
tète  avec  Jupin  ne  prouve  rien.  Elle  peut-être  une  figurine  mal  exécutée  de  la  mappe  présentée  à 
Charles  V.  Voyez  n*  128  de  notre  atlas.  Pour  redresser  les  grossières  erreurs  du  graveur.  Gemma 
donne  un  indicateur  dans  la  série  des  longitudes  et  latitudes  des  lieux.  Aidé  par  cet  indicateur  nout 
donnons  l'idée  quelque  peu  avancée  de  la  mappemonde  accompagnant  sa  cosmographie.  Apien  et 
Gemma  copiaient  d'abord  le  monde  juste  tel  que  Schoncr  l'a  dessiné  sur  son  globe;  ensuite  ils 
suivirent  d'autres  modèles. 


PTOLÉMÉE,   Sll.  177 

  force  de  tant  de  publications,  ia  renaissance  de  Ptoli^méc  arriva  à 
son  â^e  de  puberté  et  à  son  âge  viril.  Aucun  géographe  ne  doutait  plus 
qu^il  n'y  avait  qu'un  seul  moyen  d'avancer  et  de  perfectionner  la  science 
et  les  cartes,  c'était  de  rebâtir  l'ancien  édifice  géographique  en  le 
plâtrant  et  badigeonnant  en  moderne.  Dans  ce  but,  ils  commençaient 
par  ia  géographie  comparative,  par  laquelle  les  connaissances  se  trou- 
vaient basées  sur  Ptolémée,  la  mer  méditerranée  placée  et  étendue  le 
long  de  6â*.  De  cette  façon  se  révélait  nova  et  quam  anle  fuit  verior 
Europue  formatio,  où  les  longitudes  et  latitudes  empruntées  de  Tancien 
monde  n'avaient  aucun  autre  fondement  que  la  crédulité  des  savants , 
leur  prévention  et  leur  ignorance,  qui  s'efforçait  d'éblouir  leur  vue  par 
une  futile  décoration,  infiniment  nuisible  et  destructive. 

Qu'on  veuille  réfléchir  quel  coup  désastrueux  reçut  la  marche  de  la 
cartographie,  combien  elle  fut  lésée  sur  tous  les  points,  dégradée,  ense- 
velie dans  une  foule  d'innombrables  bévues.  La  hideuse  monstruosité 
de  Ptolémée  écrasa  et  détruisit  de  fond  en  comble  l'œuvre  précédente 
da  moyen  âge,  offusqua  la  vue  des  savants,  tyrannisa  les  labeurs  des 
géographes  pendant  plusieurs  siècles. 


II.  m 


VIL 


RÉFORME  DE  LA  GÉOGRAPHIE,  1550. 


âiâ.  Le  triomphe  de  Plolémée  apporta  à  Tesprit  crédule  et  paralysé 
«ne  sécurité  peu  durable.  Un  malaise  ne  tarda  pas  à  semer  l'inquié- 
tude, préparant  une  lente  réaction.  Le  bon  sens  reprochait  souvent  à  la 
conscience  fascinée  et  séduite,  Taveugle  confiance;  Tincriminait  d'une 
crédulité  puérile.  Maintes  fois  éclairé  par  des  vues  lucides,  ébahi  à  l'as- 
pect de  Tabsurdité  patente,  dans  sa  méfiance,  il  se  révoltait  contre 
Tautorilé  tyrannique,  aimant  mieux  marcher  indépendamment ,  renon- 
çant à  toutes  les  formes  acceptées,  ne  suivant  que  les  règles  de  la 
théorie. 

La  défiguralion  et  la  réforme  fatale  des  cartes  géographiques  occa- 
sionna un  grand  changement  dans  les  opérations  géographiques.  Les 
cartes  hydrographiques  décréditées,  ne  trouvèrent,  pendant  un  certain 
temps,  que  peu  d'amateurs  dans  les  hautes  études  (ses),  toute  l'attention 
se  tourna  vers  le  continent.  La  géographie,  de  nautique  qu'elle  était, 
devint  une  géographie  continentale.  Au  xvi*"  siècle,  chaque  état,  chaque 
pays,  province,  canton,  sur  tous  les  points  de  l'Europe,  avaient  leurs 
topographes,  chorographes,  géomètres,  géographes  qui  ramassaient  avec 
la  plus  grande  diligence  les  nombreuses  distances,  les  combinaient 
minutieusement,  composant  les  cartes  spéciales.  Ces  chorographes  et 
topographes  spéciaux   ne   se  souciaient  aucunement   de  longitudes 
géographiques,  ils  redressaient  les  caries  de  leurs  pays,  basées  sur  la 
complication  des  dislances  plus  scrupuleusement  déterminées.  Leurs 
certes  étaient  pour  la  plupart  sans  aucune  graduation.  Restait  aux  cos- 
mographes  à  rafiner  sur  cet  objet  et  à  appliquer  la  décoration  de  degrés; 
à  rapprocher,  ajuster  et  réunir  ces  spécialités  dans  un  ensemble,  à  les 
enclaver  dans  le  cadre  ptoléméen.  Ces  cartes  spéciales,  nouvellement 
élaborées,  gagnèrent  toute  confiance  et  leur  crédit  mina  sur  d'innom- 
brables points  les  formes  ptoléméennes.  C'était  une  œuvre  préparatoire 
pour  ébranler  et  renverser  l'édifice  de  l'aveugle  prévention.  Il  fallait  à 
cet  effet  nombre  d'années  et  plusieurs  générations  pour  déblayer  les 
décombres  de  la  dépravation. 

(WS)  Abraham  Ortel  n'a  pas  tu  les  cartes  marines  de  WaldsoemiiUcr ,  ni  de  Laurent  Frisius  ;  cette 
deroiere  est  pour  sâr  reproNduite  en  153S,  par  Villanovanus,  ad  culcem  Ptolemaei  taiiu.  totius  orbis  : 
orbu  tjfpus  anivcrsalis  juxta  hydrographorura  traditionora  exactissime  depicta  1522.  L.  F.  carte 
»»»erable.  L'autre  de  Waldseemiiller  est  très-probablement  cette  hydrographie  portugaise  que  nous 
~J^'  *'aboré  par  les  cartes  spéciales  (n*  «18  de  notre  atlas)  et  analysé.  —  Ortel  a  peut-être  vu  la 
^1*9  marine  deNicolaï;  quant  à  celle  de  Mercator  elle  se  distinguait  de  toutes  les  autres  parla 
ie  Td^'^'^  nouvellement  inventée ,  mais  elle  n'était  pas  moins  continentale ,  comme  nous  allons 


i80  RÉFORME,   1S50   ET  SUIY. 

Déjà  les  cosmographes  du  moyen  âge  et  les  marins ,  perfectionnant 
leurs  cartes ,  avaient  besoin  de  comparer  les  mesures  variées  de  diffé- 
rents pays  :  milles,  lieues,  stades,  pas,  pieds,  aunes,  et  toute  sorte  de 
mesure  de  longueur.  Les  latitudes  géographiques  venant  isolément  à 
Taide  de  leur  construction  :  la  connaissance  de  la  grandeur  du  globe  et 
de  son  degré  devenait  nécessaire..  Les  traditions,  les  opinions  arabes, 
enfin  les  données  fouillées  dans  les  aateurs  anciens,  dirigeaient  Tesprit 
des  cosmographes,  et  malgré  le  désaccord  confus  de  leurs  différentes 
présomptions  hypothétiques,  n'affectaient  point  les  cartes  qui  se  pas- 
saient de  degrés.  Depuis  que  PlOlémée  avait  prescrit  ses  lois,  toutes  ces 
précédentes  supputations  avaient  été  reléguées  de  côté,  ou  confrontées 
et  adaptées  au. chiffre  de  Ptolémée  de  Torigine  obscure.  Surgirent  de 
nouvelles  divergences  dans  les  résultats  de  cette  opération  :  mais  elles 
n'eurent  aucun  effet  sur  le  dessin  des  cartes,  car  en  même  temps 
leur  confection  subit  une  métamorphose,  une  déûgnration ,  sans 
être  redressée  sur  quelque  base  solide.  Les  essais  multipliés  de  nou- 
velles cartes  continentales,  encombrant  de  jour  en  jour  le  cabinet  des 
cosmographes,  fesaient  cependant  sentir  la  nécessité  de  la  connaissance 
certaine  de  la  candeur  du  degré  :  la  confrontation  des  mesures  ne  ras- 
surant pas  suffisamment  et  Topiniou  de  Ptolémée  devenant  suspecte. 
On  s'attaquait  déjà  à  ses  opinions  astronomiques ,  à  TeiLactitude  de  ses 
calculs,  à  l'authenticité  de  ses  observations.  Le  toruinen  Nicolas  Kopcr- 
nik  de  Pologne  (né  1475,  mort  1543)  (ses),  sapa  dans  leurs  bases  son 
système  du  monde,  indiquant  aux  astronomes  un  point  d'appui  certain, 
immuable.  L'astre  de  Ptolémée  pâlit,  sa  renommée  commençait  à 
chancheller  et  on  se  demandait  si  le  globe  terrestre  avait  réellement  la 
dimension  qu'il  lui  assignait.  Mais  aucun  des  cosmographes  ou  géomètres 
n'était  assez  hardi  pour  sortir  de  son  cabinet  et  entreprendre  la  vérifica- 
tion. Un  médecin  français  prit  le  devant  et  jeta  le  brandon  à  la  curiosité 
future. 

213.  Jean  Fernel,  qualifié  d'Âmienois,  né  à  Monldidier  en  1485  (sei), 
mort  1558,  plus  médecin  et  astrologue  qu'astronome,  aimait  les  occu- 
pations astronomiques.  Connaissant  quelques  discordances  des  astrono- 
mes et  des  géographes  au  sujet  de  la  grandeur  de  la  terre,  et  en  les 
ei^aminaut,  il  remarqua  que  le  seul  moyen  d'en  sortir,  était  de  se  con- 
vaincre par  sa  propre  expérience.  Suivant  l'opinion  de  quelques-uns  le 
degré  de  700  stades  d'Eratosthènes  était  87  */2  milles  italiques.  Regio- 
montamus  réduisait  les  700  à  640,  c'est-à-dire  à  80  milles.  Ptolémée 
ne  donnait:  au  degré  que  500  stades  ou  62  ^/s  milles.  D'autres  ne 
comptaient  que  60  milles.  Campanus,  Thebit,  Âlméon,  Âlfragan  56 ^/s 
milles.  Dans  une  pareille  incertitude,  Fernel  crut  devoir  répéter  lui- 
même  la  mesure.  Dans  ce  but  il  se  rendit  à  Paris  et  parcourut  la  route 
vers  Chantilly,  suffisamment  déterminée  par  sa  direction  et  sa  longueur. 
Il  leva  presque  sous  le  même  méridien  vers  le  nord  de  la  capitale,  à 

(363]  Ses  ouvrages  publiés  r  de  revolutionibus  orbium  coelestium,  Noriinbergae4S48,Ba8ilcae  iM9, 
Amoteiodami  i6t7, 46iO  ;  de  lateribus  et  angulis  triangnlorum,  Wittebergae  454S. 

(564)  Suivant  les  autres  à  Clermont  eu  Beauvoisis  en  1497.  ï)  publia,  de  proportionibos ,  monale 
gpbaerinm,  sive  astrolabii  genus  ;  generalis  borarii  structura  et  nsns,  Partsiis  1596  fol.;  cosmotàeoria, 
Paris  1828,  fol. 


MERCATORy  ORTEL,  S14.  i81 

dîiTérentes  distances,  plusieurs  latitudes  et  il  retrouva  par  ce  moyen, 
qu'un  degré  du  grand  cercle  était  de  68  milles  95  pas  et  un  quart,  qui 
font  5i4  stades  romains  et  45  ^/4  de  pas.  Il  détermina  en  conséquence  la 
circonférence  entière  de  la  terre  :  24514  milles  et  205^/7  pas  (ses). 

Cette  vérification  n*a  pas  tranché  la  question ,  ne  dispersa  point  les 
incertitudes,  ni  assoupit  la  divergence  d'opinion.  Gérard  Mercator,  le 
coryphée  des  géographes  de  cette  époque,  donnait  à  la  circonférence  de 
la  terre  5400  milles  germaniques  ou  21600  italiques,  ainsi  qu'il  évaluait 
le  degré  à  12  ^/s  milles  d'allemagne  ou  60  d'Italie.  Il  pensait  que  cette 
opinion  moderne  était  d'accord  avec  l'ancienne  de  Ptolémée  (see). 

Les  Italiens  et  les  Allemands  ne  se  départirent  point  de  leurs  travaux 
géographiques,  ils  continuèrent  sur  leur  propre  terrain  et  relatèrent  les 
produits  des  découvertes  d'Espagne  et  de  Portugal.  Venise ,  Rome  et 
Norlmberg  ne  cessaient  point  de  posséder  de  laborieux  publicateurs. 
Chaque  pays  de  TEurope,  chaque  province,  comme  nous  l'avons  dit, 
comptait  de  compositeurs  de  cartes.  Ferdinand  Âlvar  Secco,  Diego 
Homen  en  Portugal,  Garl  Clusius  pour  l'Espagne,  Jolivct  en  France, 
Ilumfred  L'huyd  en  Angleterre,  Sébastien  Munster  en  Allemagne,  Jacq 
Castaldo  en  Italie,  Vincent  Grodechi  en  Pologne,  Sigismond  Herberstein 
pour  Moskou,  Jean  Sambouk  et  Wolfgang  Lazius  pour  la  Hongrie  et  les 
pays  adjacents,  Nicolas  Geno  pour  la  Skandînavie,  et  multitude  d'autres 
illustraient  l'Europe  et  alimentaient  partout  lés  études  géographiques. 
Biais  nulle  part  ces  études  ne  firent  plus  de  bruit  et  plus  de  progrès  à 
celte  époque  que  dans  les  Pays-Bas.  L'activité  fervente ,  prospère  et 
fructueuse  s'y  centralisa  et  anima  celle  des  autres  pays. 

Les  caries  topographiques  des  petites  mais  florissantes  et  populeuses 
provinces  des  Pays-Bas,  se  multipliaient;  le  dessin,  la  gravure,  rexacti- 
tude»  assidue  s'y  développaient;  les  matériaux  de  toutes  les  nations  y 
avaient  des  reproducteurs;  toutes  les  méthodes  y  trouvaient  des  spécu- 
lateurs versés;  Anvers,  par  ses  publications  géographiques,  se  mit  en 
concurrence  avec  toutes  les  fabriques  de  cartes. 

Mercator  et  Ortel,  1537-1598. 

214.  Souvent  la  Palestine  était  l'un  des  premiers  objets  d'exercice 
des  géographes.  Gérard  Mercator,  ne  en  1512  à  Uupelmonde,  s'étunl 
établi  à  Louvain  comme  support  (étudiant)  de  l'université ,  devint  par 

(868)  Delambre,  liist.  de  Tastr.  p.  383.  —  Fcmol ,  rommo  grand  nombre  de  gcogra|)lies  et  astro- 
nomes de  cette  époque,  comptait  snr  le  mille  italique.  Il  détermina  et  compara  les  mesures  ùc 
{)lu«ieur8  autres  nations.  Le  grain  d'orge,  suivant  Fcmel,  est  la  petite  mesure  ;  le  doigt  vaut  4  grains; 
a  palme 4  doigts,  le  pied  4  palmes,  la  coudée  6  palmes;  le  pas  simple  10  palmes;  le  pus  géométrique 
5  pieds;  la  perche  est  de  10  pieds;  le  stade  italique  do  IS  pas  (40  feraient  un  mille,  mille  passu^);  ' 
le  mille  (italique)  est  de  8  stades;  le  mille  gernrianique  de  4000  pas;  le  mille  de  Suède  du  8000.  Var 
conséquent  le  mille  germanique  était  composé  de  4  milles  italiques.  Cette  proportion  n'était  pas 
•ecepiîée  par  les  autres.  Quant  a  la  lieue  de  France,  Feinel  avance  qu'elle  est  plus  grande  que  deux 
milles  italiques.  — L'astronome  François  Femel,  idit  Huot,  daus  son  édit.  de  lagéogr.  de  Mallc- 
Brnn  ,  xxvi,  p.  46)  eut  l'idée  singulière  de  partir  de  Paris  pour  Amiens  en  voilure,  et  de  compter 
exactement  le  nombre  de  tours  de  roue  faits  pendant  la  route ,  jusqu'à  ce  que  la  hauteur  du  soleil 
fAt  diroiDnéo  d'an  degré ,  et  il  trouva  par  ce  moyen  que  la  longueur  du  degré  qu'il  avait  parcouru 
était  de  67070  toises.  Laraille  obtint  par  des  moyens  trigonométriques  la  mesure  de  S7074  toises. 
Ces  denx  résultats  sont  remarquables 

(366)  Iluncorbem  continere  in  circnitu  quo  maxime  patet,  millia  germanira  8400;  sive  italica 
31600antiquilusdocuit,  idem  recentior  asserit  aetas(Abrah.  Ortelii,ad  orbcni  tcrr.).  Par  conséqueut, 
suivant  Mercator,  le  mille  d'Allemagne  avait  4  so/ei  milles  italiques. 


iSi  RÉFORMB»  1550  ET   SUiT. 

sa  propre  impulsion,  fabricant  dinstruments  malhcmatîques  et  gra^ 
veur.  Guidé  par  les  conseils  de  Gemma  Frisius,  et  commençant  par 
ses  propres  études  à  s'adonner  à  la  géographie ,  il  publia  en  premier 
lieu,  1557,  une  carte  de  Palestine.  Bientôt,  inspiré  par  le  désir  de  quel- 
ques marchands,  il  dressa,  1540,  une  carte  de  Flandre.  Se  préparant  à 
devenir  exécuteur  de  nombreuses  cartes,  il  examina,  dans  une  publi- 
cation spéciale,  en  1541,  à  Anvers,  le  caractère  italique  (de  liierarum 
quas  italicas  cursoriasque  vocant ,  scribendarum  ratione).  Content  de 
l'accueil  qu'eut  son  opuscule,  il  fabriqua  la  même  année  un  globe 
terrestre. 

D'après  le  goût  de  l'époque,  les  questions  théologiques  et  de  l'église 
ne  lui  étaient  point  indifférents.  Voyant  les  poursuites  qu'on  soulevait 
contre  ses  familiers,  il  partit  avec  ses  instruments  à  Bruxelles,  puis  à 
Gand,  et  fut  en  1544,  au  commencement  de  février,  appréhendé  par  le 
bailli  du  pays  de  Waes ,  comme  fugitif  et  suspect  de  (ketterie)  hérésie 
lu^érienne;  il  devait  subir  l'interrogatoire  dans  le  château  de  Rupel^ 
monde.  Les  certificats  donnés  par  le  recteur  de  l'université  et  par  le  curé, 
sur  la  bonne  conduite  du  bien  famé  artiste  (artifiicerende  van  der  goeder 
famé,  van  goeden  en  de  eerlycken  levene)  contribuèrent  à  son  élargis*- 
^ment  :  après  quelques  mois  il  fut  rendu  aux  études  (sst). 

Toujours  occupé  de  la  confection  d'instruments  mathématiques,  qu'il 
fabriqua  deux  fois  pour  Charles  V,  pendant  dix  ans  qu'il  restait  encore  à 
Louvain,  il  préparait  ses  crandes  publications.  Avant  de  partir,  il 
acheva  en  1552  un  globe  céleste  et  publia  à  cette  occasion  deux  opus- 
cules relatifs  à  ses  globes  (de  usu  globi  1551,  de  usu  annuli  astrono- 
mici  1552).  Ensuite  il  est  allé  s'établir  à  Duysbourg  avec  sa  Camille, 
dans  laquelle  il  comptait  trois  fils  ses  collaborateurs ,  et  avec  plusieurs 
planches  qu'il  avait  préparé  pour  sa  carte  de  TEurope. 

À  Duysbourg,  au  mois  d'octobre  1554,  il  termina  la  publication  de  la 
grande  carte  de  l'Europe,  réunie  de  plusieurs  feuilles.  Pour  la  compo- 
ser, il  mit  à  contribution  quantité  de  cartes  spéciales  nouvellement 
élaborées.  Â  la  mer  méditerranée  il  y  assigna  une  longueur  moyenne 
de  55  degrés.  Ensuite  il  s'adonna  à  la  gravure  des  cartes  de  la  Grande 
Bretagne,  d'après  la  description  d*un  anglais  son  ami.  Elles  parurent 
en  1564.  En  même  temps  invité  par  le  duc  de  Lorraine,  il  leva  le  plan 
de  ce  pays,  dressa  sa  carte  et  envoya  son  dessin  au  duc. 

Dans  tous  ses  travaux  topographiques  ou  chorégraphiques  il  s'éver- 
tua à  régler  les  discordances  et  les  incohérences  pour  composer  un 
ensemble.  En  dressant  sur  une  grande  échelle  son  Europe,  il  applanit 
les  plus  nombreuses  diflicultés  de  ce  genre  ;  pour  le  reste  du  monde  il 
avait  certainement  moins  d'embarras,  quand  il  publia  sa  carte  univer-: 
selle. 

(367)  Quelques  docameots  concernant  cette  mésavanture  de  notre  géographe,  se  trouvent  dans 
lesarchivps  de  l'élal  ;  ils  m'ont  été  communiques  par  M.  Pinchard,atUcbeaux  arcliives.  —Le  châtelain 
de  Rupeïmonde  reçoit  l'ordre  de  recevoir  le  prisonnier  (sans  date);  le  iO  et  le  19  février  1843  (IS44K 
la  duchesse  Marie  demande  des  renseignements  au  cui-é  de  l'église  S.  Pierre  près  de  Louvain  et  à  Tabbé 
de  S.  Gerlrude,  conservateur  du  privilège  de  l'université;  le  «5  févr.  réponse  du  curé;  le  8  mars  Marie 
communique  au  bailli  de  Waes  et  au  procureur  le  certificat  du  recteur;  le  84  mai  4S»44  elle 
demande  encore  les  lettres  de  Mcrcator,  que  les  frères  minimes  à  Malinos  recevaient  autrefois.  ~ 
Cette  affaire  provoquera ,  j'espère ,  de  recherches  ultérieures.  —  Mercalor  n'a  pas  renoncé  à  ses 
clucubrations  relicieuses;  en  1B92  il  publia  harmoniam  evangclicam  et  laissa  des  «emmenlairc»  sm 
plusieurs  parties  de  l'ancien  testament. 


MCRGATOR,   ORTEL,  114.  483 

G*est  au  mois  d'août  en  1569  que  Mercator,  à  Diiysbourg,  termina  de 
sa  propre  main  la  gravure  de  IMmmense  carte  intitulée  :  nova  et  aucta 
orbis  terrae  descripiio,  ad  usum  navigalium  emendate  aceomodala.  Elle 
est  dressée  d*après  une  toute  nouvelle  invention  (ses).  Le  portugais 
Pedro  Nunez  ou  Nonnius  (né  i49â,  mort  1577),  avait  attiré  Tatteulion 
des  géomètres  sur  les  problèmes  nouveaux ,  que  lui  soggéra  Tusage  de 
la  boussole  ;  Il  expliqua  les  rumbs  des  vaisseaux  sur  le  globe  (^gq).  Cette 
explication  était  une  belle  conquête  pour  la  science,  mais  la  loxodromie 
des  rumbs  était  observée  par  la  pratique  marine ,  déterminée  par  le 
quartier  de  réduction  (marteloïo,  voyez  chap.  IGâ  et  n^  86  de  notre 
atlas).  Mercator,  examinant  la  pratique,  et  voyant  ces  inconvénients 
qu'éprouvaient  les  navigateurs  par  les  longitudes  croissantes  de  la 
projection  cylindrique,  conçut  Tidée  de  développer  de  même  les  lati- 
tudes croissantes,  et  inventa  la  projection  à  Téchelle  croissante  qui 
porte  son  nom,  projection  mercalorienne.  Il  ne  savait  pas  donner  raison 
à  son  invention,  il  répétait  qu'elle  manquait  d'explication  mathé- 
matique, mais  il  savait  que  c'était  l'unique  moyen  de  développer  toute 
la  sphère  sur  le  pian  et  que  son  invention  est*  très  commode  pour  la 
navigation. 

Les  nou vantés  ne  sont  pas  recherchées  à  tout  moment.  Les  marins  se 
méfiaient  des  inventions  des  géographes  de  la  cartographie  continen- 
tale ,  ils  regardaient  avec  indifférence  celle  de  Mercator.  De  longues 
années  s'écoulaient  encore  avant  qu'elle  fut  prise  en  considération.  On 
ne  peut  pas  dire  que  le  manque  de  calcul  des  distances  croissantes  et 
de  leur  échelle  aient  été  la  cause  de  ce  retard  :  Mercator  en  avait  indi- 

3ué  le  moyen  et  donna  l'instruction  suffisante  dans  les  compartiments 
e  sa  carte  (distanlie  locorum  mesurande  modus;  orgnnum  direcio- 
rium;  usus  organi),  mais  c'était  Taversion  desmarins  pour  les  opérations 
de  la  cartographie  continentale.  La  carte  elle-même,  bien  que  recom- 
mandée ad  usum  navigatium  emendate  accommodata,  avait  encoro 
moins  d'attrait  pour  les  marins.  Ils  y  voyaient  les  rivages  conirouvés 
qu'ignoraient  leurs  cartes  nautiques;  ilsy  remarquaient  des  proportions 
contraires  à  leur  connaissance,  et  les  points  saillants  de  leurs  cartes 
rendus  imperceptibles  à  leur  pratique.  Nova  hac  orbis  descripiio  n'était 
de  leur  goût,  parce  qu'elle  était  continentale. 

£ii  effet,  cette  majestueuse  carte  était  continentale  comme  toutes  les 
autres  de  ce  genre.  Par  cette  carte;  et  par  toutes  les  autres  qui  sont 
connues,  on  voit  qu'à  celte  époque  Mercator  avait  pris  son  parti,  dont 
il  ne  se  rétracta  plus.  Dans  l'instabilité  du  premier  méridien,  il  choisit 
d'abord  celui  de  l'ile  Gorvomariuo;  pour  sa  grande  carte  il  inventa  un 
autre ,  en  le  reculant  vers  l'ouest  sur  le  point  où  la  déclinaison  de  l'ai- 

fuille  changeait  en  contraire.  Ce  méridien  passait  par  les  iles  de  Sa!  et 
k>navista  des  iles  du  Cap  vert.  Son  anti-méridien  passait  par  le  pôle  de 
l'aimant  (polus  magnelis),  dont  on  présumait  connaître  rexislence 

(3M]  i509  mense  angvsto  :  nnivcrsi  orbis  description'^m ,  in  amplisxima  Torma  intncntiuin  ac 
pefefvioaai»ain  et  vagatinm  ocnlis,  conspectuiqae  exbibiiit,  invonlione  novn  et  convenienlissima , 
sphaeram  in  piano  cxtcndendo,  qnue  sic  quadratiirae  cin-nli  rospondel.,  ut  nihil  dcessc  videatur, 

})r%terqnara,  qund  demnnstratioiie  rarct  ut  ex  illius  orc  aliqnolics  audivi,  propha  manu  srulpsit 
(iualter  Ghymnius ,.  vita  fîar^  M«rcat.).  —  I^d  fxrniplairo  dcccttn  rarti;  se  trouve  dans  le  dcpàt  dca 
cartes  de  la  bibk.  nationale  à  Paris  :  pcut-^.lre  Tunique  qui  existe  encore. 
(36'J)  Delambrc,  bist.  du  l'astron.  5^8-400. 


184  RÊFORKE,   1550  ET  SUIT. 

d'après  Tassertion  de  François  de  Dieppe.  Le  premier  méridien  et  la 
graduation  est  la  seule  différence  qui  distingue  cette  carte  :  au  reste 
elle  est  tout-à-fait  conforme  aux  autres  qui  sortirent  du  laboratoire 
mercatorien  (sto). 

Mereator  proposait  de  diviser  le  monde  en  trois  continents  :  l^  le 
vieux  (Europe,  Asie  et  Afrique);  2»,  le  nouveau  (Amérique);  et  3%  l'Au- 
stralie ou  la  Magellanie,  continent  indiqué  à  la  découverte  future  (su]. 
Pour  composer  ce  monde  il  avait  de  nombreux  matériaux.  Il  ne  les  dési- 
gne pas,  personne  cependant  né  lui  reproche  de  copier  ou  de  s'approprier 
Touvrage  d'autrui.  Il  discute  les  opinions  des  géographes.  Gomme  le  Nil, 
le  Gange,  sont  des  objets  de  son  argumentation,  comme  l'amalgame  de 
Ptolémée,  de  Marco  Polo,  avec  les  connaissances  nouvelles,  exerce  son 
esprit,  de  même  chaque  carte  qui  présentait  de  matériaux  à  son  édifice 
passe  par  son  examen.  A  lui  le  choix  et  les  rectifications  qu'il  a  pu 
faire,  ayant  à  cet  effet  quelques  données  positifs  :  mais  il  a  dû  nécessai- 
rement adhérer  à  différentes  opinions  des  autres,  s'assimiler  les  travaux 
des  cartographes  et  accepter  maintefois  leur  ouvrage  sans  réserve,  quand 
il  n'avait  pas  le  moyen  d'opérer  quelque  réforme. 

Ainsi,  la  Flandre  et  la  Lorraine  lui  appartenaient  entières,  ((arce  que 
lui-même  leva  le  plan  de  ces  pays  ;  la  Grande  Bretagne  offre  peut-être 
son  propre  produit,  parce  que  l'anglais,  son  ami,  livrait  à  sa  disposition 
de  nouveaux  matériaux  :  mais  le  nouveau  monde,  la  nouvelle  Inde, 
n'était  trouvable  que  dans  les  cartes  marines  ;  septentrionalium  resio- 
num  typus  (de  Geno)?  l'Inde  orientale  et  la  Ghine  furent  empruntées, 
parce  que  ces  cartes  sont  en  même  temps  reproduites  par  Ortel  (373).  — 
Il  serait  important  de  savoir  comment  et  combien  Mereator  avait  opéré 
dans  la  partie  de  la  perturbation  cartographique  du  vieux  monde ,  par 
qu'elle  impulsion  il  traçait  ses  rivages  et  les  proportions  de  la  mer 
méditerranée.  Pour  résoudre  cette  intéressante  question,  il  faudrait  con- 
naître toutes  les  productions  de  son  époque  et  spécialement  celles  de 
l'Italie  qui  manquent  à  notre  connaissance.  [1  y  puisa  immanquablement 
et  peut-être  il  y  trouva  des  modèles  à  son  choix.  S'il  n'avait  qu'à  choisir, 
il  faut  avouer  qu'il  était  loin  de  favoriser  les  proportions  et  les  contours 


(370)  Enropa ,  ad  magnae  Earopae  Gerardi  Mercatoris  patri  imitattonem ,  Rnmoldi  Hercat<Mis 
filii  cura  édita,  servato  tamen  ioitio  longitudinis  ex  ratione  magnetis,  quod  pater  in  magna  soa 
noiversali  posuii  (intilulation  de  la  réduction  exécutée  par  Rnmold).  Or,  la  grande  carte  d'Europe 
de  1854,  et  probablement  sa  seconde  édition  de  457S,  aTait  une  autre  graduation  que  la  grande 
universelle  de  4S69;  elle  avait  la  graduation  de  toutes  les  autres,  sorties  des  études  mercatoriennes. 
—  Ruroold  réduisit  la  grande  carte  de  l'Europe,  et  les  petits-fils  Gérard  et  Michel ,  extrairent  de  la 
carte  générale  et  réduirent  l'Asie,  l'Afrique  et  l'Amérique,  conservant  la  graduation  du  méridien 
magnetis  :  ainsi  que,  dans  l'atlas  posthume  de  Mereator,  se  trouvent  à  différente  échelle  et  projeciioo 
variée ,  toutes  les  parties  de  la  grande  carte  copiées. 

(371)  Gerardus  Mereator,  geograpli6rum  nostri  temporis  corypliacns,  in  sua,  nnnqnam  satislao- 
danda,  universali  tabula ,  liunc  orbem  terrarum  in  très  continentes  dividit  (Abr.  Ortel.  ad  orbem 
terrar.).  —  Orbem  inter  très  œquales  continentes  dividere  dccn^vcrat,  quarum  unam  Asiam, 
Arricam  etEuropam  constituisset  ;  alteram  Indiam  occidentalem  ;  ttTciam  vern,  etsi  ad  hue  latentem 
et  incognitam  esse  non  ignorauerit,  solidis  tamen  rationibns  domonstrarc  se  posse  affirmabat ,  illam 
in  sua  maguitudine  et  pondère,  ex  duabus  reliquis  nuUi  cedcre...  pnssc,  alioquin  mnndi  constitu- 
tionem  in  suo  centre  non  posse  consisterc  (Gualt.  Ghymniis  vita  Mercat.)- 

(37i)  N*  45, 48,  de  l'édition  1570.  —  Voyez  chap.  M  de  notre  arlii;le  caries  de  l'Inde  et  de  la  Chine 
dans  le  111"*  vol.;  et  les  n*  133, 13ft  de  notre  atlas.  — Mereator  incorporait  dans  son  système  les  cartes 
de  différents  auteurs.  Ortel  nous  en  avertit  :  Elias  Camerarius,  hnius  brandeburgensis  marchionatus 
exstat  in  Gerardi  Mercatoris  (1885)  opère.  —  La  carte  d'Islande  de  Velleins  reproduite  par  Ortel  se 
trouve  de  même  dans  l'atlas  de  Mereator,  dans  la  livraison  de  1395.  Les  variantes  de  ces  deux  repro» 
ductions  sont  bonnes  à  examiner. 


HERCATOR,   ORT£L,   IIS.  185 

de  Ptolémée,  et  quand  il  expliquait  le  grec,  il  indiquait  ses  positions 
sur  le  terrain  de  sa  propre  conlruction  (575). 

215.  La  gloire  de  Mercator  était  faile  et  sa  renommée  allait  grandir, 
parce  qu*il  ne  s*arréla  point  à  la  publication  de  la  grande  dimension. 
Géographorum  coryphaeus,  appréciait  cette  immense  activité  de  la 
cartographie,  qui  engendra  sur  tous  les  points  de  FEurope  dos  matériaux 
précieux  à  ses  études;  il  voyait  Tardcur  des  éditeurs  et  des  reproduc- 
teurs de  cartes  volantes,  qu'on  copiait  à  foison  pour  Tusnge  vulgaire  et 
dont  on  commençait  à  Hure  des  recueils,  un  assemblage  dans  un  volume. 
Son  ami  Ortel  avançait  avec  une  entreprise  de  ce  genre.  Mercator ,  de 
sa  part,  ruminait  dans  son  cabinet  d'élaborer  les  cartes  spéciales  de  tous 
les  pays  et  provinces  du  monde,  pour  en  former  un  volume  auquel  il 
se  proposait  de  donner  le  titre  d'Atlas,  Son  œuvre  avançait  laborieuse- 
ment et  lentement.  Les  autres,  dans  une  entreprise  analogue,  le  devan- 
çaient facilement,  parce  qu'ils  rassemblaient  les  publications  éparses 
et  les  fesaient  copier  :  lui,  Mercator,  ne  discontinuait  à  régler  le 
désordre,  à  rectifier  les  écarts  qui  se  laissaient  remarquer  et  travaillait 
à  Duysbourg  seul  au  sein  de  sa  famille,  aidé  par  ses  fils  et  ses  petits-fils. 

Non  loin  de  Duysbourg,  à  Anvers,  la  fabrique  de  cartes  s'animait  de 
jour  en  jour.  De  chez  Jérôme  Gock,  Jean  Liefrink,  Christophe  Plan  tin. 
Sylvestre  Gile  Coppen,  Gérard  de  Iode,  les  cartes  volantes  se  répan- 
daient partout,  copiées  ou  de  la  toute  nouvelle  publication.  L'activité 
de  Gérard  de  Iode  (ludseus)  de  Nimègue  surpassait  les  autres.  Deux 
graveurs,  Luc  et  Jean,  à  Deutecum,  travaillaient  pour  lui.  En  1569  il  a 
mis  en  circulation  le  recueil  d'une  quarantaine  de  cartes  pour  l'Alle- 
magne seule.  Il  était  simple  éditeur  (prostat  apud,  excudebat),  spécu- 
lateur copiste,  peut-être  un  peu  négligent,  mais  il  devançait  les  autres. 
Jusqu'où  a-t-il  avancé  son  recueil ,  et  combien  de  temps  s'en  est-il 
occupé?  Je  ne  saurais  le  dire.  Il  est  probable  qu'il  était  arrêté  dans  son 
activité,  par  un  recueil  publié  avec  plus  de  soin  et  de  connaissance,  par 
le  theatrum  d'Ortel  (314). 

Abraham  Oertel  ou  Ortelius,  né  à  Anvers  en  1527,  ayant  fini  ses 
études,  parcourut  les  Pays-Bas,  une  partie  de  l'Allemagne,  les  fies  Bri- 
tanniques et  ritalie,  en  amateur  d'antiquités.  Par  ces  voyages,  il  parvint 
à  enrichir  sa  collection  de  médailles  et  d'antiquités;  en  même  temps 
Il  put  voir  et  réunir  grand  nombre  de  cartes  géographiques.  Son  goût 
l'appela  à  connaître  la  géographie  ancienne,  à  étudier  Ptolémée  et  les 
antres  géographes  de  l'antiquité.  Par  conséquent ,  la  géographie  com- 
parée et  la  connaissance  de  la  géographie  moderne  de  son  temps,  s'of- 
frirent d'urgence  à  ses  élucubrations.  La  connaissance  et  l'amitié  de 

(S73)  Sanson  annote  qne  pour  ks  rivages  de  l'A  Trique  il  s'est  servi  des  cartes  do  Livio  Sanuto ,  et 
avec  ces  rivages  il  s'est  conformé  à  Ptolémée  ;  Mercator  an  contraire  se  conforme  beaucoup  plus  aux 
cartes  marines  :  voyez  u*  139  de  notre  allas. 

(374)  Ce  que  je  dis  du  recueil  de  de  Iode,  c'est  d'après  cette  suite  de  ses  cartes  (S-37)  que  la 
bonoe  fortune  m'a  procurée.  La  Pologne  et  la  Noscovie  figurent  dans  ce  recueil,  au  reste  c'est 
l'Allemagne.  Beaucoup  de  cartes  sont  privées  de  limites  de  provinces.  Voyez  la  confrontation  de  co 
recnc^l  avec  celui  d'Ortel,  à  la  fin  du  n°  Il  de  l'appendice.  — 11  est  singulier  qu'Ortcl  ignore  l'existence 
de  cet  éditeur  aussi  abondant  :  ce  n'est  que  très-tard ,  h  l'occasion  de  la  carte  de  Gile  Algoet,  qu'il 
mentione  ludaeum  (de  Iode)  publiant  à  Anvers.  Cependant  Gérard  de  Iode  pioleslc  qu'il  nuolic 
Uassiae  typnm  nec  ungueante  visnm;  il  donne  les  deux  cartes  du  tractus  Danubii  de  Christ,  sopro- 
tbOD,  qui' n'est  pas  indiqué  dans  le  catalogue  d'Ortel.  Ortel  se  fâcliait-il  de  l'activité  de  de  Iode?  — 
Le  graveur  Jean  a  Deutecum,  grava  les  cartes  pour  de  Iode,  travaillait  pour  Ortel  vers  1573. 


186  REFORME,  1550  ET   SUIT. 

Gérard  Mercalor,  plus  âpé  que  lui  de  10  ans,  juissant  d*uue  haute 
renommée,  lui  fut  très-utile. 

Dans  le  courant  de  ses  études,  il  composa  et  dessina  les  cartes  rela- 
tives à  son  objet.  Avant  1570  il  avait  déjà  publié  FEgypie  ancienne  et 
moderne,  en  15G7  il  composa  et  édita  une  grande  carte  de  TÂsie; 
en  1570  une  carte  de  Fempire  romain  (375). 

En  même  temps  il  fesait  copier  et  graver  par  François  Hogenberg  et 
par  quelques  autres  graveurs,  comme  Ferdinand  et  Âmbroise  Ârsenius, 
les  caries  modernes  de  différents  auteurs  de  sa  collection.  Cette  gra- 
vure en  1570,  était  montée  à  remplir  55  feuilles  :  il  en  composa  un 
recueil  et  tout  incomplet  qu*il  était,  il  Tédita  dans  cette  année  1.^70 
sous  le  titre  de  th^alrum  orbis  terrarum,  Anlverpiœ,  apud  jEgidium 
Coppcnium  Dieslh, 

À  Texception  de  TÂsie ,  il  n'y  a  dans  celle  importante  publication 
presque  rien  qui  soit  directement  de  sa  composition  ou  de  ses  propres 
connaissances  géographiques.  Il  mil  à  contribution  les  géographes  de 
tous  les  pays,  copiant  leur  production  à  son  module.  Quant  Tauleur  de 
la  carte  était  nommé  ou  connu,  il  ne  la  touchait  point,  à  Texceplion  de 
quelques  places  maritimes  de  la  Belgique ,  où  la  mer  avait  changé  les 
rivages.  Quand  la  carte  était  d*un  auteur  inconnu,  anonyme,  il  était 
quelque  peu  plus  audacieux,  ajoutait  on  changeait  ce  quil  jugeait 
nécessaire  (376).  Dans  cette  collection  de  cartes,  il  endossa  celle  de 
Flandre,  dressée  depuis  50  ans  par  le  coryphée  des  géographes  Gérard 
Mercator.  C'est  sur  celte  carte  que  les  parties  maritimes ,  changées  par 
la  mer  du  côté  de  W^aterAiet ,  furent  rectifiées  d'après  les  renseigne- 
ments de  Marc  Laurin,  seigneur  de  WaterAiet. 

La  carte  d'Egypte  dans  son  thealrum  est  anonyme,  eœtabulU  m 
Ilalia  impressis.  Elle  ne  s'accordait  pas  sur  tous  les  points  avec  l'étude 
et  la  publication  préalable  d'Ortelius;  or,  elle  subit  des  changements. 
Ces  changements  sont  assez  signifiants  parce  qu'ils  consistent  dans  le 
changement  de  la  graduation,  et  peut-être  dans  l'insertion  de  plusieurs 
villes  et  places  (377).  L'Asie  lui  appartient  spécialement,  elle  diffère 
virtuellement  de  celle  de  Mercalor.  Quelques  tables  italiennes  et  les 
cartes  marines  coopérèrent  sans  doute  à  sa  construction.  Ortel  y  donne 
18  degrés  entre  Auliochie  et  Bassora,  où  Mercalor  compte  10  degrés. 

(57S)  Edidimus  nos  olim  tabulam  /Egypti  niajnri  furma  ex  antiquis  et  rcoontidi-ibiis  auctoribus, 
vetcrcm  sininl  et  novam  ejus  dclinualiuoeni  pro  Dosiru  modulo  eoiiliiicntcm  (dit  Orlcl  lui  même 
en  IS70,  ad  tab.  Aeg.  sui  theatri  n°  bi).  Nos  quoque  ejiis  (Asiae)  descriplioneoi ,  iu  maiori  tabula, 
ante  très  annos  edidimus  (ibid.  o"  3).  Kdidimus  nos  hoc  auoo  tabulam  romaui  impcrii  quum  maxime 
eflloruit,  ofllgiem  contiuentem  (ibid.  n"  35). 

(376)  Voici  commcut  il  s'explique  :  nobis  animus  fuit  reprcseotare,  quicquid  in  ujjis  geographicîs 
aut  cborographids  chartis  hic  indc ,  tam  reccntor,  quam  nupcrrimc,  mullis  ab  hinc  annis ,  in  lucem 
edilis  unquam  habueris,  vel  ctiamnum  liabeas,  quod  ut  praeslarcmus  bac  ralioue  sumus  opus 
aggrcssi...  In  tabulis,quac  auctonim  nomina  liabeut,  nibil  est  a  nobis  mutatum,  exucplis  dnabus 
ant  tribus  belgicarum  rcgionum  marinis  oris,  quas  mare  postquaro  ab  auctoribus  descriptioDos 
canim  editae  sunt,  multum  mutauit...  pro  nostro  modulo  confecimus....  lu  allis  vcro  quae  nullam 
liabebant  auctoris  nomcn,  fuimus  paulo  audaciores,  in  quibus  et  mutavimus  aliquoties  pro  judlcio 
unstro  quaedam  et  quaedam  detraximus  et  quaedam  etiam  noununquam,  pruut  res  videbatiir 
postularc,  adiccimus. 

(377)  Ex  tabulis  in  Italia  impressis,  RusccUi  copia  aussi  la  même  Egypte.  Elle  est  àtetpoiot 
conforme  avec  la  carte  de  thealrum  ortelianuro ,  (|ue  rieu  ne  la  distingue ,  sauf  la  gravure  le 
manque  de  certains  lieux  et  la  graduation.  Dans  la  longitude  entre  Alexandrie  et  Tenez  la  carte*d6 
Ruscelli  compte  60*  50',  64"  0'  la  carte  d'Ortelius  GO"  0',  GO"  0';  daus  la  latitude  entre  Siioz  et 
Larissa,  la  première  30"  20'  —  32'  0',  seulement  i"  40,  l'autre  29"  0'  —  32"  0'  moutc  celte  latitiHle  à 
5  degrés. 


]l£RCATOR,  ORTEL»  «10.  187 

Mercator  place  Nimpo  de  la  Chine  à  160'',  et  fait  passer  par  le  mifieu 
du  Japon  le  170*  degré,  ainsi  que  Mindanao  et  Japon  touchent  à  la  même 
longitude  :  Ortel  éloigne  Japon  de  Mindanao  de  20  degrés,  place  Nimpo 
an  bout  de  Thémisphère  au  180*  degré  et  élend  Japon  au  delà  du  200 
et  210"  degré  de  longitude  sur  Tautrc  hémisphère  (sts).  Ortel  essaya 
donc  ses  forces  dans  la  composition  de  cnrtes  nouvelles,  mais  sou 
theatrum  n*est  qu'une  collection ,  qu'un  recueil  de  cartes  de  différents 
auteurs  et  mérites.  Les  noms  des  auteurs  sont  pour  la  plupart  connus, 
parce  quMls  sont  déclinés  par  Ortelius  lui-même  et  ordinairement  indi- 
qués dans  les  intitulations  des  copies  (570). 

Cette  publication,  quoique  incomplète,  dont  le  choix  n'était  pas  éga- 
lement recommandable,  réunit  dans  un  volume  tant  de  cartes  dispersées 
et  offrit  Texécution  si  supérieure  à  beaucoup  d'originaux  qu'elle  profita 
Infiniment  à  Ortelius  et  lui  gagna  une  haute  célébrité»  Les  cartogra- 
phes embitionnaient  de  voir  leur  nom  figurer  dans  son  recueil ,  s'em- 
pressaient de  lui  communiquer  leurs  compositions  :  Jordan,  Clusius, 
Sambucus.  La  fortune  d'Ortel  augmenta,  et  en  1575,  il  fut  honoré  de  la 
charge  de  cosmographe  du  roi  d'^pague ,  lorsque  son  ami  p)us  âgé , 
Mercator,  n'était  que  cosmographe  d'un  duc  de  Clèves  (sso). 

216.  Les  éditions  du  théâtre  d'Ortel  se  suivaient  rapidement  et 
Gérard  Mercator  était  loin  de  mettre  à  exécution  ses  projets.  11  y  avait 
des  causes  à  ce  retard.  La  première  consistait  dans  ce  qu'il  s'occupait 
de  la  chronologie  (qu'il  publia  en  1568)  et  que  la  géographie  ancienne 
n^était  pas  indifférente  à  ses  études,  comme  elle  était  l'objet  de  prédi- 
lection pour  Ortelius.  Dans  la  même  année  1578,  Ortelius  publia  ses 
synonymes  géographiques  et  Mercator  édita  tabulse  geographicœ  Ptolé- 
maei.  L'autre  cause  du  retard  existait  dans  ce  que  Mercator  ne  voulait 
pas  être  un  copiste,  mais  il  s'évertuait  à  élaborer  suivant  ses  facultés 
les  cartes  de  chaque  pays,  comme  il  avait  élaboré  celles  des  îles 
Britanniques,  de  Flandre  de  la  Lorraine,  de  l'ensemble  du  monde. 
Enfin  l'insuffisance  des  ressources  pécunières  contribua  au  retard. 

Dans  la  géographie  ancienne  tous  deux  eurent  des  succès.  Les  tables 
ptoléméennes  de  Mercator  étaient  longtemps  appréciées  (38 1).  La  syno- 
nymie a  pu  obtenir  presque  immédiatement  un  succès  bien  mérité. 
Ortelius  dès  son  vivant  Ta  republiée  sous  le  titre  de  thésaurus  géogra- 
phicus  (382).  Pour  sa  géographie  ancienne  il  prépara  entre  1584  et  1597, 
les  cartes  ex  conatibusgéographicisÂbrahami  OrteliL  Bien  que  leur 
cohérence  est  maintes  lois  en  défaut,  il  faut  cep^^ndant  convenir  qu'elles 

(S78)  Voyez  n*  13t,  433,136, 137  de  Dotre  atlas;  portulan  général  chap.  33;  cartes  de  l'Indoet  de 
la  Chine  36. 

(379)  Dans  sa  première  édition  déjà,  Ortc)  a  donné  un  catalogue  des  cartographes  de  sa  connaisr 
sance.  Il  Taugmenta  dans  les  éditions  suivantes.  Nous  en  donnons  une  ample  notice ,  n"  U  de  l'ap- 
pendice de  ce  volume.  , 

(380)  Les  éditions  de  theatrum  orbi*  se  succédaient  rapidement.  I.a  première  1570,  la  seconde 
f  S!7i  et  la  même  année  avec  le  texte  flamand  augmentée  jusqu'.i  64  cartes  ;  celle  de  1573  mont  à  70; 
il  en  re|»ar«t,  159i,une  autre  de  108  cartes.  Dans  l'édit.  de  1S05,  le  nombre  de  cartes  s'accrut  à  115. 
Après  la  mort  d'Ortelius,  à  l'édit.  1601,  on  en  ajouta  encore  plusieurs.  Il  y  a  des  éditions  avec  le  texte 
italien,  espagnol,  français.  —  Ortelins  lui-même  inventa  un  petit  eyitomcn,  dont  il  y  a  aussi  do 
nombreuses  éditions  du  vivant  et  après  sa  mort  :  de  Coigncts ,  do  Vrients ,  etc. 

(381)  Après  la  mort  de  Mercator,  elles  servirent  en  1605,  à  l'édition  de  Uondius,  ensuite  1618,. à 
celle  de  Bertius ,  et  dirigèrent  plusieurs  éditions  de  Ptolémce. 

(882)  En  1587, 1596,  réimprimé  encore  1611,  à  llanau. 


488  RÉFORIIE,   1550  ET   SUIV. 

sont  élaborées  avec  assiduité ,  on  peut  dire  inspirées  de  rintelligencc 
mercaiorienne.  Pour  la  géographie  sacrée  ou  historique,  il  admit  les 
cartes  ex  conatibus  Francisci  Harsei.  Ces  cartes  parurent  plusieurs  fois 
sous  le  titre  de  parergon,  et  de  géographia  sacra.  La  confusion  d^idées 
cartographiques  y  perce  trop  ostensiblement,  malgré  la  tendence  de  la 
régler  (sss). 

En  attendant  la  famille  de  Mercator  continuait  ses  opérations  géogra- 
phiques. La  grande  carte  de  FEurope,  corrigée ,  était  éditée  pour  la 
seconde  fois  eu  1572.  Arnold  fils  leva  le  plan  et  dessina  la  carte  de 
rarchevéchc  de  Trêves  et  de  la  basse-Hesse;  après  sa  mort,  1536,  son 
fils  Jean  termina  la  mesure  de  toute  la  Hesse  (384).  Le  père  Gérard 
déjà  trop  avancé  en  âge ,  pour  arriver  à  son  but  et  ne  pas  se  faire  atten- 
dre trop  longtemps,  se  décida  à  publier  consécutivement  chaque  partie 
achevée  de  son  atlas  projeté.  Aidé  par  son  fils  Rumold  et  ses  petits-fils 
Gérard  et  Michel,  intruits  dans  les  mathématiques,  dans  la  géographie 
et  dans  la  gravure,  il  édita  en  1585  les  cartes  de  France  et  d^Âllemagne; 
en  1589,  les  cartes  de  Tltalie,  et  il  préparait  celles  de  FEurope  septen- 
trionale. Mais  leur  publication  était  réservée  à  son  fils  Rumold.  Le 
vieux  père  n*a  pas  achevé  Fallas  qu'il  avait  tant  à  cœur  d'exécuter.  Le 
succès  du  thealrum  de  son  ami  lui  fesait  plaisir,  il  approuvait  haute- 
ment cette  entreprise ,  on  disait  même  qu'il  retardait  son  atlas  pour 
ne  pas  faire  tort  aux  avantages  lucratifs  qui  consolidaient  le  nom  d*Or- 
telius  (585).  Rien  ne  troubla  leur  confidence  réciproque.  Us  échan- 
geaient leurs  pensées,  leurs  idées;  ils  se  communiquaient  mutuelle- 
ment leurs  planches.  Â  la  fin  la  mort  les  a  séparés.  Gérard  Mercator 
plus  âgé ,  descendit  le  premier  dans  la  tombe  en  1594;  Ortel  le  suivit 
quatre  ans  après,  en  1598. 

Vatlas  du  père  Gérard  n*a  pas  été  terminé.  Rumold  fils  acheva  la 
partie  de  FËtirope  septentrionale  déjà  avancée  par  le  père  et  Fédita 
en  1595,  sous  le  titre  d'allanlis  pars  altéra,  géographia  nova  lolius 
mundi,  en  dédiant  cette  seconde  partie  à  Elisabeth,  reine  d'Angleterre. 
Il  prévient  les  lecteurs  que  FEurope  septentrionale  forme  le  premier 
tome  ou  la  première  livraison  de  la  secundo  partie  de  Fatlas.  Et  comme 

(%83]  Parci^onà  Anvers  chez  Platitin  en  1592;  par  le  soin  deBalthaxar  Moretus  en  4634,  clicx  le 
TOÔme.  —  La  longitude  de  Venise  y  varie  entre  le  34*  et  le  37'  degré  ;  celle  des  Morini  Î2"  30'  à  iS'  0* 
de  Narbo  Î4*  0'  ù  S3*  35',  de  Baïona  1U*  à  48°.  La  longueur  de  la  médilcrranée  moulo  à  S3  degrés. 
Tous  deux  Ortel  et  Haneus  désavouèreut  la  déclivité  ptoléméenne  de  la  Syrie,  recommaDdéc  par 
Stella  et  autres  :  cela  n'einpèclie  pas  cependant  que  les  composition)!  de  Stella  (n*  407  de  notre  atlas) 
s'y  trouvent  de  même.  Pour  la  Grèce,  Ortel  su  laissa  prendre  par  Ptolémëe  etSopliianus;  à  l'iuiita- 
tion  de  ce  dernier,  il  copia  la  configuration  de  Ptoicmee. 

(38-1)  Arooldus  archieppatus  Ircvercnsis  et  Cattiinoelibeccnsis  comitatus  dimcnsioncs  diYerso 
tempore  aggressus  absolvit  —  et  le  petits  fils  Jean ,  Uassiae  rcgiouem  exactissime  absolvil  (Gbymn. 
vita  Ger.  Mcrc). 

(38S)  Tametst  (Ger.  Mercator]  longe  antc  Abraliamum  Ortclium,  ideas  quasdam  mente  concepisset, 
de  edendis  aliis  tabulis  generaiibus  ac  particularibus,  toliusque  mundi  situm  in  minorem  forraam 

rédigera  animum  induxisset ita  ut  nibil  amplius  restaret  uuam  ut  acneis  tabulis  inciderentnr  : 

qnandoqnidcm  tamen  praedictus  Ortclius  singtilari  amicitia  ac  familiaritatc  illi  iunctus  essct,  distulit 
igilur  de  industria  eatenus  et  tantis  per  inchoatum  laborcm  ,  donec  exemplaria  sui  orbis,  tbeatro 
(1870  etc.),  in  copiosissimo  numéro,  cum  magno  facultatum  ac  fortunarum  suarum  incrennento, 
vcndidissct,  priusquam  suas  pracdictas  minores  tabnias  in  lucem  cmittcret  (Gualt.  Ghymn.  vita 
Mcrcât.).  C'est  ce  que  dit  l'ami  biographe  de  Mercator.  Mercator  lui-même,  dans  une  lettre  du  SS  no- 
vembre 4570  félicita  Ortelius  de  l'idée  qu'il  avait  conçue  en  publiant  son  thcatrum,  car  les  mauvais 
copies  se  multipliaient  et  répandaient  d'innombrables  erreurs  :  quam  ob  rem  non  exiguam  laude 
mcritus  es,  qui  optimas  quasque  rcgionum  dcscripiiones  selcgisti,  alquc  in  unum  veluti  cuchiridia 
rcdegisti;  il  approuve  sou  projet  de  copier  quelques  cartes  spéciales  de  Lazius.  Celle  lettre 
trouve  insérée  dans  le  theatrura  Ortelianum  de  4592. 


MERGATOB»   ORTEL,   11«.  189 

son  père  se  proposait  de  publier  la  partie  occidcntHie,  c*est-à>(]ire  la 
péninsule  pyrénéenne  dans  le  même  cadre,  il  en  formera  un  second 
tome  ou  livraison  composée  des  cartes  d'Espagne.  Ensuite  il  entrepren- 
dra les  cartes  de  TÂfrique,  de  FÂsie  et  de  TÂmérique,  suivant  le  plan  de 
son  père  (sse).  Mais  bientôt  il  se  départit  de  son  projet,  li  supprima  le 
titre  de  secundo  vel  altenc  partis,  et  transporta  la  livraison  de  l'Europe 
septentrionale  au  commencement  ;  ainsi  que  le  texte  de  mundi  crcatioue, 
forme  la  première  partie,  et  secuuda  pars  i^eographiam  continet,  c'est- 
à-dire  les  cartes  en  quatre  livraisons  :  1%  septentrional ium  Europaî 
lerrarum  (1585);  2%  Galliae  (f585];  3»,  Germauiae  (1585);  4»,  Italia;  et 
GrseciaB  (1589),  composées  de  107  cartes.  L'Espagne  ne  s'y  trouve 
pas  (387).  —  Les  planches  de  Mercator  et  d'Ortel  lurent  cédées  à  Josse 
Hond  et  la  fabrique  d'atlas  s'est  établie  à  Amsterdam  (sss). 

Par  ses  travaux,  Gérard  Mercator  devint  le  véritable  réformateur  de 
la  géographie  et  donna  l'impulsion  à  des  réformes  et  aux  progrès  ulté- 
rieurs. Abraham  Ortelius,  par  son  érudition  et  son  activité,  s'associa  à 
cette  œuvre  et  ne  peut  être  considéré ,  à  mon  avis ,  que  comme  secon- 
daire (389).  Ortel  se  montre  comme  philologue  versé  qui  compulse  la 
géographie  moderne  pour  comprendre  l'antiquité  et  Thistoire.  Mercator 
agit  comme  mathématicien  et  géomètre  s'efforçant  à  organiser.  Si  l'une 
dea  choses  caractéristiques  de  la  science  géographique  moderne  est 
rémde  du  terrain  et  des  plus  petits  accidents  du  sol  :  on  peut  dire  que 

(586)  Sic  cum  Atlantcm  rcgem  aedore  cngitarcm,  ejus  sccondam  parlera ,  qiiae  geographiam 
oontinei  toae  majestrati  dedhtare  voliii  :  dit  Kuraold  à  la  reiue  KlisancUi  à  cause  de  uavigateurs 
Tliomas  Candissliii,  Francisoi  Draci,  Martini  Forbisshcri  aliorumque  lieroum  qui  perlustraicnt  les 
parties  septeotrionales.  -  Ensuite,  amico  lectori;  offcrimns  nunc  sccundam  nartem  atlantis,  primuAi 
noTae  gec^gnrapbiae  tomum,  Tidelicct,  scplcutrioualium  Europae  terrarum  uescriptiouein  à  Gerardo 
M*  re  pâtre  piae  memoriae  inclioatum  et  a  me  ad  fluora  pcrdu'-tuni.  —  Si  dcus  \itam  longiorem 
coDcessissct,  dccrevcrat  (Gerardus  pater)  partes  occidentales,  videlicet  Ilispaniano  cura  Portugalia  in 
minores  tabularum  formas  quoque  redigcrc  (Gymn.  vita  Hercal.).  Or,  Kumold  déclare  :  iam  tandem 
faoDom  etdiua  me  optatum  iuitiura  nactus,  post  liao,..  .  secundum  gcograpUiae  tomum,  id  est, 
Hispaniae  descriptioncm  aggredior,  inde  ad  Africam,  Amcricam,  et  si  aperiatur,  utspesest,ad 
terciam  contÏDcutem  quœ  liagellanica  et  terra  australis  dicitur  me  accingam  et  quod  in  hisce  omni- 
iMis  Ger.  H'r  patcr  piae  memorie  in  choaluni  reliqnit...  ad  finem  pcrducam. 

(587)  Les  exemplaires  de  l'atlas  mercatorien,  avec  le  titre  de  pars  altéra  sont  peu  nombreux,  à 

peine  qn*on  les  rencontre.  Les  autres  déjà  ne  sont  pas  trop  communs  surtout  en  bon  ordre.  Mais  les 

bibliophiles  ne  s'en  soucient  pas  :  ils  annotent  soigneusement  pour  les  bibliomanes  les  raretés  frivoles 

payées  au  poids  d'or  et  ignorent  la  perte  des  plus  précieux  produits  de  l'esprit  humain.  Trouve-t-on 

le  nom  de  Mercator  dans  les  ouvrages  bibliographiques?  Cependant  le  seul  atlas  est  encore  en  cours  ; 

les  opuscules  du  géographe  ne  se  rencontrent  pas;  ses  cartes  de  l'Europe  de  la  graude  dimension, 

deux  fois  éditées,  sont-elles  connues  par  une  âme  vivante?  On  l'ignore.  De  la  carte  de  Flandre ,  de 

celle  de  orbis  terne  existent  encore  peut-être  un  seul  exemplaire  gardé  daus  le  dépôt  national  des 

cartes  à  Paris.  Les  cartes  des  îles  britanniques,  1864,  exisleut-elles  encore?  car  colles  de  ces  îles  qui 

niit  dans  l'atl:  s  sont  réduites  in  minorera  ibrmam  et  n'étaient  préparées  qu'entre  i589  et  4696. 

(SW)  On  dit  qnc  Jodocus  Ilondius  édita  l'atlasde  Mercator  pour  la  première  fois  en  4606.  Qu'ensuite 

daot  la  dixième  édition ,  en  46S8 ,  il  augmenta  le  nombre  des  cartes  à  176.  Je  n'ai  rencontré  nul 

part  dindication  suflisante  sur  ces  éditions ,  mais  elles  n'offrent  pas  le  produit  dans  sa  pureté 

FwjUve.  Les  Hondius  ajoutaient  des  cartes  nouvelles ,  substituaient  les  anciennes  par  d'autres. 

Ausi  que  l'édition  de  4633,  parut  sous  le  nom  de  deux  auteurs,  de  Mercator  et  de  Hondius  à  la  fois. 

"-Eooore  Jean  Jausson,  daus  ses  allas  qui  montaient  jusqu'à  huit  volumes  in-folio,  s'était  servi  des 

^'^^de  Mercator.  —  Les  Hondius  inventèrent  en  1607,  l'atlas  minor  Mercatoris  in-4*,  qui  fut  plus 

oiiie  que  le  trop  petit  epitome  d'Ortelius.  Avant  l'apparition  de  cet  atlas  minor,  en  Italie  4596, 

wnlamo  Porro  à  Venise  reproduisait  les  cartes  de  Mercator  sur  une  petite  échelle.  L'atlas  minor 

ftttS***  traduction  turque,  voycx  chap.  103,  p.  457. 

JfB9)  Il  y  a  80  ans,  en  1844  (hist.  de  la  Réogr.  chap.  30),  j'attribuai  la  réforme  dans  la  géographie 

r^^l^cment  a  Mercator,  ne  voyant  dans  Ortelius  qu'un  secondaire.  Depuis  j'ai  remarqué  que  des 

T^ts  étaient  d'un  autre  avis.  «  On  sait,  dit  le  respectable  Jomard  (fragment  sur  les  cartes  géogra- 

jn;9o«s|,  que  l'époque  moderne  de  la  géographie  remonte  proprement  à  Abraham  Ortel,  c'est-à-dire 

tonr^^-     4570,  date  de  la  première  édition  de  son  livre.  C'est  à  ce  profond  géographe,  trop  peu 

^P^oeié,  ^oe  remonte  la  reforme  de  la  science;  les  changements  qu'il  y  a  apportés,  ont  fait  une 

^*^Dle  révolution.  »  Cette  opinion  m'a  motivé  d'entrer,  autant  qu'il  m'est  connu ,  dans  l'histo- 

4tte  «ir  ces  deux  personnages. 


490  RÉrORMB,   1550  ET  SUIT. 

la  famille  de  Mcrcalor  sonda  ce  terrain.  Mais  dans  les  sciences,  souvent 
il  ne  suffit  pas  d'avoir  un  vrai  mérite  pour  influencer  et  réformer.  Heu- 
reusement la  fortune  honora  Ortel  dès  son  vivant  et  n*euvia  pas  son 
savoir  après  sa  mort  :  d*autre  part,  elle  favorisa  le  mérite  du  modeste 
Mercator  pendant  tout  un  siècle.  Le  parergon  et  le  theatrum  reparurent 
plusieurs  fois,  jusqu*à  ce  que  les  planches  fussent  usées;  avec  leur 
destruction  disparurent  les  recueils  ortéliens  et  ses  titres.  Les  allai 
reparaissaient  souvent  ;  le  nom  de  Mercator  devint  équivalent  au  titre 
d^atlas  qu1l  inventa  lui-même;  les  géographes  éditeurs  s*associaient  au 
nom  de  Bfercator  et  au  titre  d*atlas  qui  se  perpétua.  Preuve  ostensible 
de  cette  influence  qu'exerçaient  sur  la  science  les  efforts  de  Mercator. 
Les  géographes  postérieurs  citaient  les  remarques  d*Ortel  sur  certains 
points  d'érudition  et  suivaient  la  méthode  et  les  traces  des  cartes  de 
Mercator,  basant  leurs  études  sur  ce  qu'il  avait  élaboré  dans  son  atlas. 
Ortelius  a  commencé  à  faire  revivre  la  curiosité ,  et  Mercator  a  com- 
mencé à  donner  une  suite  à  la  géographie  et  la  réduire  en  corps  (sac). 
En  examinant  les  travaux  de  Mercator  et  d'Ortel,  une  foule  d'objets 
se  présentaient  à  nos  considérations.  Nous  n'avons  touché  que  quelques 
uns  et  nous  nous  résumerons  dans  nos  observations  suivantes.  Ils 
vivaient  dans  un  temps,  dans  lequel  le  globe  terrestre  parut  à  décou- 
vert au  regard  humain.  Sur  toute  son  étendue  accessible,  il  préselta 
toutes  ses  formes,  toutes  ses  variations  et  toutes  ses  étendues.  L'ancien 
monde  parut  au  génie  de  Mercator ,  comme  l'unité  du  triple,  comme  le 
tiers  des  continents  du  globe,  dont  les  deux  autres  parties  composent 
l'Amérique  et  la  Magellanie  ou  l'Australie.  De  nombreux  navigateurs 
réglaient  les  formes  antérieurement  inconnus  de  ces  vastes  continents» 
comme  les  nombreux  chorographes  arpentaient  leurs  pays,  et  sans 
égard  à  ce  qui  avait  été  dit  précédemment,  sondaient  le  terrain  et 
réglaient  leur  coordonnance  indépendamment  l'un  de  l'antre.  Cest  à 
ces  nombreux  navigateurs  et  chorographes  que  la  géographie  doit 
l'obligation  de  la  réforme.  C'est  l'impulsion  de  l'activité  de  l'époque  et 
l'esprit  du  siècle  qui  opéraient  cette  réforme  :  nos  deux  géographes 
l'ont  seulement  avoué  et  accepté. 

Discrédit  de  Ptolénée,  ruines,  les  décomrres  déblayés. 

217.  A  la  suite  de  celte  activité,  la  théorie  scientifique  pour  la  géo- 
graphie devenait  chaque  jour  plus  indispensable.  Déterminer  la  gran- 
deur du  globe,  des  mesures  et  leur  rapport  réciproque;  mesurer  les 
cantons  et  les  pays  entiers,  pour  connaître  leur  étendue  et  leur  super- 
ficie; lever  les  latitudes  et  obtenir  les  longitudes.  Depuis  peu  on  avait 
commencé  à  se  servir  de  petites  horloges,  appelées  montres;  leur  mou- 
vement durait  d'abord  près  de  24  heures  et  plus  longtemps,  pour  peu 
qu'on  les  aidait  (Gemma  fris.  c.  18).  Ces  petites  machines,  supérieures 
au  sable  pour  la  détermination  du  temps,  étaient  considérées  comme 


CONSÉQUENCES,   3i7.  191 

une  importante  découverte  pour  les  longitudes  (591).  En  attendant 
Tobservation  de  la  longitude  ne  cessait  de  présenter  tant  de  difficultés  et 
d'incertitudes  qu'on  ne  la  levait  presque  pas  et  celle  qu'on  levait,  parais- 
sait douteuse  (591).  Quand  on  voulait  décorer  une  carte  chorégraphique 
de  méridiens,  on  avait  toujours  recours  à  Ptolémce  (395).  Or,  nos  deux 
^(^(raphes  flamands  se  voyaient  privés  de  ces  ressources,  qui  n'étaient 
encore  que  de  pia  désidéria,  n'avaient  rien  de  certain ,  rien  de  positif. 
Aussi  Ortel  trouvait  bon  de  publier  les  caries  spéciales  sans  indication  de 
degrés;  Mercator  se  montrait  plus  rigoureux  à  cet  égard,  il  donnait  tout 
son  soin  à  la  graduation.  En  effet,  dans  l'état  de  la  réforme  et  du  progrès 
de  la  géographie,  cette  décoration  devenait  utile  et  nécessaire  pour  la 
composition  des  cartes  générales.  Celait  l'indication  qui  enchaînait 
Tune  à  l'autre  et  encadrait  chaque  carte  spéciale  dans  la  mappemonde, 
laquelle  tenait  l'ensemble  des  cartes  spéciales  par  la  graduation. 

Sur  la  graduation  générale,  Ptolémée  n'avait  plus  d'empire.  On 
s'était  désabusé  de  sa  disproportion,  d'abord  par  la  connaissance  des 
Indes  et  de  la  Chine.  Tout  le  prestige  du  géographe  grec  y  croula  et  se 
dispersa  en  poussière.  La  moitié  de  l'Afrique  et  de  l'Asie  fut  abîmée 
dans  le  fond  de  l'océan.  Les  érudils  et  les  savants  philologues  erraient 
éperdus  avec  des  mottes  de  terres  ptoléméennes,  de  climat  en  climat, 
de, méridien  eu  méridien  et  répétaient  :  Ptolémée  avait  tort.  On  trans- 
portait Taprobana  de  Ceylan  à  Soumatra,  de  Soumatra  à  Java;  on 
cfaercbaitCattigorasurles  côtes  du  Pérou;  Pegoletti  savait  que  Cattigora 
était  situé  à  une  douzaine  de  degrés  au  nord  de  l'équateur  et  Mercator 
lui  assigna  une  place  dans  le  Sibir. 

Le  système  de  Ptolémée,  brisé  à  l'orient,  commença  à  crouler  au  cou- 
chant. L'hydrographie  du  moyen  âge  ne  cessait  de  protester  contre  les 
disproportions  du  grec  :  en  attendant,  la  géographie  continentale  livrait 
aux  études  des  cosmographes  les  dimensions  de  tous  les  pays.  Bien 
qu'ordinairement  elles  présentaient  ces  pays  dans  des  proportions  agran- 
dies, cependant  leur  ensemble  ne  passait  point  à  l'exorbitance  de  GS"* 
de  la  longueur  ptoléméenne  de  la  médiierranée ,  ne  pouvait  suffire  à 
cette  extension  monstrueuse,  laissait  des  vides  qui  forçaient  à  réduire 
la  longueur.  En  eiïet ,  elle  était  réduite ,  tantôt  à  58%  tantôt  à  53^  C'est 
dans  cette  dernière  proportion  que  la  médiierranée  se  présente  sur  les 
cartes  de  Mercator  et  d'Ortelius.  C'est  encore  loin  de  la  juste  proportion 
que  la  médiierranée  avait  déjà  dans  la  géographie  en  toute  plénitude  : 
mais  cette  réduction  est  de  la  plus  haute  importance,  c'esl  la  pierre  de 
touche  du  progrès  des  éludes.  C'est  un  pas  prodigieux.  Â  qui  l'attribuer? 
Je  n'ose  pas  en  aveugle  désigner  Mercator  comme  auteur.  Lui  et  son 
ami  ne  suivirent  peut-être  que  l'impulsion  générale  de  la  connaissance 

(894)  SoDô  per6  hoggi  alcuni  horologii,  comc  è  quel  da  ruote;  che  uon  per corda  se  tira. ma  per 
alcnoe  lame  d  acciale  temprato,  et  questi  sarebbon  buooi  (Giosepo  Molelto,  discorso  univcrsale,  cap. 
del  modo  d'osservare  la  lunghezza,  p.  3S,  édit.  Ptol.  1S61). 

(895)  Ma  qnantnoqne  sia  cosi  Tacile  il  modo  di  pigliare  la  larghezza  délie  région! ,  nondimcno  non 
da  ciô  segve,  chc  facile  debba  cssere  ancora ,  il  modo  di  osservare  la  lungbczza ,  di  quelle,  et  cib  non 
aooiene  délia  di£Qculta  dclla  rcgole,  ma  d'altre  cagioni,  corne  di  solto  dircmo...  (Gios.  Meictto,  ibid., 
p.  SI -35). 

(395)  Giacomo  Castaldo,  lequel  dit  Ruscelli ,  in  professions  dclla  geograiia ,  tien  '  o^gi  il  primo 
nome,  dressa  sa  carte  nouvelle  du  Piémont  circonscritta  con  S  gradi  di  lunghezza;  il  établit  ce 
nombre  de  longitude,  che  tanti  se  ne  vengono  assegnati  da  Tolomco  ncl  terzo  libro.  A  son  exemple, 
Girolamo  Buscelli  y  chercha  de  longitudes  pour  ses  cartes  de  Toscane  et  des  marches  anconitane  et 
trevisane. 


idi 


RÉFORME,   1^0   ET   6UIV. 


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qui  se  déclara  en  faveur  de  la  nécessité  de  la  réduclion.  Un  géographe 
obscur  pouvait  être  aussi  audacieux  pour  se  révolter  contre  Ptoléméc 
et  proposer  les  rectifications,  qu'un  géographe  des  plus  célèbres.  Il 
serait  cependant  très-utile  pour  Thistoire  de  la  géographie  de  retmuyer 
le  premier  inventeur  de  la  réduction,  au  moins  le  premier  qui  la  mit 
en  circulation.  Il  a  pu  le  faire  avec  connaissance  de  cause,  ou  s'avisant, 
avec  rignorance  ce  qu'il  osa.  Quant  à  Mercator,  il  savait  apprécier  la 
valeur  de  la  dimiuution  jusqu'à  55  degrés  et  il  rejeta  à  jamais  Textrava- 
gance  de  Ptolémée. 

Par  cette  réduction  à  53  degrés  on  croyait,  je 
n'en  doute  pas,  se  conformer  a  la  dimension  des 
cartes  marines.  Mercator  évaluait  le  degré  seule- 
ment à  GO  milles  italiques  (504).  Or  ces  53  degrés, 
d'après  l'évaluation  de  Fernel ,  ne  donneraient  de 
longueur  que  i6  degrés  et  bien  moins.  La  lati- 
tude géographique  de  Tunis  était  incertaine  et 
inconnue;  or,  elle  est  déterminée  par  les  pro- 
portions que  le  géographe  trouvait  dans  les  cartes 
marines,  suivant  son  évaluation  de  degré.  Les  53 
degrés  appliqués  à  la  méditerranée  des  cartes 
marines,  nécessitaient  de  faire  descendre  Tunis 
vers  le  sud,  de  plier  les  rivages  de  l'Afrique, 
dont  les  contours  sont  conformes  à  ceux  des  cartes 
marines.  11  y  a  cerlainement  beaucoup  de  déran- 
gement dans  cette  assimilation  de  l'échelle  de  53 
degrés  à  la  méditerranée  des  cartes  marines  : 
mais  il  n'y  a  pas  de  doute  que  ces  cartes  décidè- 
rent les  géographes  de  la  cartographie  continen- 
tale a  réduire  la  longueur  démesurée  à  53®  (395). 

L'étude  de  la  géographie  érudite  changea  de 
position.  Depuis  la  renaissance  des  lettres,  on 
s'imaginait  qu'on  la  connaissait  à  fond  en  possé- 
dant son  modèle  antique  ;  on  's'efforçait  à  cons- 
truire la  nouvelle  à  son  image,  à  travestir  l'an- 
cienne en  moderne,  à  expliqueur  et  éclaircir  cette 
dernière  par  l'ancienne.  A  la  suite  du  progrès, 
cette  marche  prit  enfin  une  direction  toute  con- 
traire. L'étude  de  la  géographie  ancienne  continua 
avec  ardeur  et  n'eut  plus  d'autre  but  que  de  com- 
parer l'ancienne  avec  la  moderne ,  afin  de  com- 
prendre les  descriptions  des  anciens,  au  moyeim 
des  connaissances  positives.  Ce  but  piréoccuppaic 
Ortelius  :  il  voyait  que  la  connaissance  de  la  géo^ 
graphie  moderne  pouvait  seule  jeter  la  lumière 
sur  l'étude  des  anciens. 

f394)  Voyez  les  notes  précédentes  S6S,  366. 

(39SJ  En  effet,  depuis  la  renaissance  des  lettres  la  plus  fâcheuse  per- 
turbation demeurait  dans  les  longitudes.  En  1644,  Miguel  Floreniiovai 
Langreu,  dans  son  mcmoire  présenté  au  roi  d^Espagne Philippe  IV,  com- 
pulsant les  cartes  pécédentes  donne  un  exemple  comme  les  masgrav«f 
astronomos  y  geographos  ponen  la  diiïcrentia  entre  Roma  y  Toledo  : 
como  se  conoce  por  esta  linea ,  que  nous  reproduisons  ci-contre. 


ÎO- 


30- 


9  G.  lansonius 


O  G.  Mercator 

O  I.  Schoncrus 
O  P.  I^ntsbcrgins 
®  T.  Brahae 

58 

O 
S 


^I.Regiomontanus 

ÎOroutius 
C.  Clavius 

Se.  Ptolomaeus 
A.  Argelius 


9  A.  Maginus 
»  D.  Origanus 


CONSÉQUENCES,   il8.  193 

Le  systyème  de  Plolëmée  ane  fois  brisé  et  abandonnée ,  ses  erreurs 
et  ses  ignorances  avouées,  apportèrent  un  immense  soulagement  à  la 
composition  des  cartes.  Les  investigations  maritimes  installèrent  sur  les 
cartes  de  Mercator  des  formes  toutes  différentes  de  celles  de  Ptolémée; 
rendirent  à  la  mer  rouge  une  plus  juste  direction  en  ôtant  10^  de  lon- 
gitude à  répaisseur  de  l'Afrique.  Dans  le  vieux  monde,  des  formes 
connues  par  les  hydrographes  reparaissent  sans  entraves  à  la  place  des 
difformités  de  Ptolémée,  et  commencent  à  réparer  graduellement  les 
ravages  causés  par  sa  renaissance. 

âl8.  Hais  tons  ces  changements  de  la  restauration  s'opérant  partiel- 
lement, ne  pouvaient  à  la  fois  délivrer  les  cartes  géographiques  de 
tontes  les  vieilleries  qui  les  avaient  entachées ,  grâce  à  la  renaissance. 
La  géographie  avait  reçu  des  blessures  trop  profondes  pour  être  guérie 
soudainement.  Les  plaies  saignèrent  et  purulèrent  longtemps  ;  tout  le 
corps  géographique  fut  stigmatisé  de  nombreuses  cicatrices  qui  deman- 
dèrent beaucoup  de  temps  pour  être  effacées.  LMnfatigable  Mercator 
dérouilla  des  traits  plus  frais  de  Tancien  monde,  mais  ne  sachant  pas  lui 
donner  tout  le  poli,  ni  ramener  çon  intérieur,  il  accrédita  sa  complexiou 
dégénérée.  Côtoyant  la  méditerranée  sur  les  cartes  de  Mercator,  nous 
rencontrons  sans  cesse  quelques  fragments  de  Ptolémée.  DansTintéricur 
de  TËurope  ce  grec  se  présente  largement  domicilié.  Mais  c'est  surtout 
rîDtérieur  de  FÂsie  et  de  l'Afrique  qui  en  est  gorgé.  Les  montagnes  et 
toutes  les  rivières  s*y  rangent  obstinément  à  Tordre  de  Ptolémée  :  et 
celles  de  Fintérieur  de  F  Afrique,  et  celles  qui  versaient  leurs  eaux  dans 
le  golfe  pcrsique  ou  dans  la  mer  Caspienne ,  et  celles  qui  traversaient 
TAsie  dans  toutes  les  directions  jusqu'à  Focéan,  toutes  sont  dessinées  et 
dirigées  par  Ptolémée  ;  Indus  et  Gange  qui  traversent  les  Indes ,  Daona 
et  Dorins  qui  fendent  la  Chine,  Oechardus  et  Bautissus  qui  arrosent  les 
Kalmouks  et  la  Sibérie,  y  restent  avec  leurs  noms  et  leurs  réminis- 
cences (396).  L'esprit  des  géographes,  possédé  par  l'extravagance  de 
Ptolémée,  ne  cessait  de  s'imaginer  et  d'inventer  Fexistence  de  ramages 
bizarres  des  fleuves.  (Voyez  n*»  132,  133,  136,  137  de  notre  atlas). 
Qu'on  ne  me  dise  pas  que  le  manque  de  connaissance  privait  les  géo- 
graphes de  moyens  de  renoncer  à  Ptolémée  dans  Fintérieur  de  FAsie 
et  de  l'Afrique  :  la  carie  de  fra  Mauro  et  quelques  autres  méprisées,  et 
nombre  de  renseignements  apportés  de  FAsie,  pouvaient  les  décider  à 
renoncer  à  son  autorité  discréditée  :  mais  le  mal  était  profondément 
enraciné,  l'habitude  appesentit  le  discernement. 

L'histoire  est  obligée  d'observer,  d'examiner,  d'approfondir  toutes 
ces  questions  que  nous  touchons  dans  notre  aperçu  sur  la  restauration 
de  la  géographie  du  temps  de  Mercator.  Elle  ne  peut  les  négliger,  autant 

(396)  A  lire  la  lettre  de  Mercator,  qu'il  écrivit  en  1580  h  Ri<!hard  Hakiuit  (BergeroD ,  voyages  faits 
en  Asie,  traité  des  Tartares  chap.  48,  p.  lli-{17],  comme  il  lui  recommande  le  chemio  eo  Chine,  par 
leaord,  avec  quelle  conviction  il  l'entretient  ac  l'exii^tonce  du  gui fe  terminé  par  le  promontoire 
Tabin  ,  des  embouchures  des  fleuves  Bautissus  et  Ocdiardcs,  du  pAlo  de  l'aimant  (voyez  n*  433 de 
notre  atlas).  l\  y  compte  beaucoup  sur  Abouiréda,  dont  on  esp4>rait  d'avoir  une  traduction,  ot  regrette 
que  ntinéraire' par  toutes,  Asie,  Afrique  et  septuntriuu  de  Jacq  Knoieu  de  Bois-Ie-Duc,  lui  échappa 
et  qa'il  n'avait  pas  le  voyage  entier  de  Plauo  Carpini  :  (ne  sachant  qu'un  manuscrit  de  ce  dernier  so 
trouTait  à  cf.iie  époque'dans  la  bibliothèque  de  S.  Martin  à  Tournai).  —  Quelques  vieilles  cartes 
assez  grossièrement  fuites ,  venaient  aussi  raffermir  les  opiuions  du  grand  géographe  de  Duysbourg. 

16 


194  RÉFORMB,   1550  ET  SUIV. 

pour  apprécier  le  mérite  de  chaque  géographe  de  Tépoque,  de  chacun  des 
postérieurs  de  rèrenouyeileyque  pour  la  science  et  le  progrès  de  Fesprit 
humain.  Elle  doit  suivre  pas  à  pas  cette  lente  évacution  de  difformités 
contre  lesquelles  luttaient  laborieusement  les  géographes  postérieurs; 
courageux  ou  timides,  chacun  y  prenait  sa  part  :  et  Terreur,  précédem- 
ment trop  accréditée  par  un  fâcheux  revirement,  reparaissait  maintes 
fois  dans  les  conjectures  mal  conçues  chez  les  plus  illustres  géographes. 

L'atlas  de  Mercator  engendra  une  longue  série  d'atlas  punliés  en 
Hollande,  par  les  Hondius  et  les  Bleauw,  géographes  instruits  qui 
avaient  toujours  à  rectifier  leur  modèle.  Chaque  fois  il  fallait  détruire 
quelque  portion,  ou  de  Fédifice  de  Ptolémée,  ou  de  Férudition  du 
xvi'  siècle,  ou  des  inventions  imaginaires.  Mais  le  prestige  de  Ptolémée 
était  tel,  que  le  retour  vers  ses  proportions  et  sa  configuration  âe 
déclarait  longtemps  encore ,  et  malgré  la  gloire  de  Mercator  dans  les 
Pays-Bas,  la  spéculation  savante,  qui  ne  discontinuait  pas  de  répandre 
les  atlas  par  toute  TEurope,  n'avait  pas  de  répugnance  de  les  faire 
accompagner  de  plus  absurdes  déformités.  On  trouvera  dans  les  allas 
de  Guillaume  Bleauw,  mort  en  1666,  la  méditerranée  à  62  degrés, 
quoique  ses  propres  atlas  prouvent  qu'on  réduisait  déjà  sa  longueur 
à  50  degrés  (397). 

La  longitude  géographique  était,  en  effet,  un  véritable  tourment  de  la 
science.  La  marine  a  bien  compris  son  importance,  la  cartographie  se 
masquait  seulement  de  ses  apparences;  inquiète,  elle  convoitait  le 
produit  de  l'expérience;  on  imagina  de  belles  théories,  d'admirables 
propositions,  et  chaque  fois  le  ciel  et  la  nature  déroutaient  les  experts. 
Le  mouvement  de  la  lune  présentait  de  plus  belles  chances;  Issdi^ 
tances  lunaires,  indiquées  en  1514,  par  Werner  de  Nuremberg,  dé:re- 
loppées  en  1524  par  le  saxon  Apianus,  recommandées  en  France  par 
Oronce,  furent  approuvées  par  Kepler  et  tous  les  astronomes  :  mais  cet 
astre,  le  plus  visible  et  aussi  mobile  échappait  longtemps  au  calcul  qui 
pouvait  assurer  le  succès. 

La  marine  espagnole,  couvrant  le  globe  de  ses  voiles,  s'agitait  pour 
conquérir  le  secret  de  la  verdadera  longitud.  Phillippe  III  promit  une 
récompense  de  six  mille  ducats  de  la  rente  perpétuelle  de  chaque  année 
à  celui  qui  fixerait  l'aiguille  et  les  degrés  de  longitude.  Le  portugais 
Louis  de  Fonseca  Goutiiîo  fut  le  premier  qui  essaya  de  mériter  cette 
récompense.  Bientôt,  en  1612,  le  docteur  castillan  Arias  de  Loyola, 
ensuite,  en  1629,  le  portugais  Juan  Garavajal ,  se  présentaient  comme 
concurrents. 

Cette  dernière  année  1629,  le  jésuite  Christoval  de  Bruno,  milanais, 
apporta  une  belle  spéculation  pour  navigueur  par  tout  l'orient  au  moyen 
de  la  variation  de  l'aiguille.  L'année  suivante  1650,  Antonio  Ricci 
genovèse  vedait  avec  ses  observations  de  la  longitude  sans  regarder  le 
ciel.  En  même  temps  l'abbé  de  Dissemberg,  Juan  Caramuel  Lobcovitz, 
natif  de  Madrid,  demanda  cien  mil  ducados  de  contado  pour  ses  propo- 
sitions. 


(307)  Le  savant  Israélite  Joteph  del  Medico,  crétois,  publiant  :  fons  yiridarioram ,  Incius  pan  prlor 

npressa est  Amstelodami ,  pen      "  *       "     ^^  '     "        ' — "^  •—•--•-' —  .— 

tngitude,  à  Kordou  9*  40,  a  S( 
de  longueur  à  la  méditerranée. 


impressa  est  Amstelodami ,  pênes  Manasse  ben  Israël  1629  in-4*,  assignait  à  Antiochie  76*  iV  ii 
longitude,  à  Kordou  9*  40,  a  Seville  9*  C.  Or,  il  suivit  le  conseil  d'une  carte  qui  donnait  60  degtém 


CONSÉQUENCES ,  318.  i  95 

Pedro  de  H erena,  bon  géomètre,  n'avait  pas  de  succès  quand  il  voulait 
se  rapporter  avec  la  longitude  au  mouvement  lunaire.  Le  florentin 
Galileo  Galilei  en  1631,  proposa  pour  déterminer  la  longitude  les  astres 
médlcéens  ou  les  satellites  de  Jupiter.  En  1637,  le  portugais  Joseppc 
de  Moro  crut  découvrir  le  secret  de  la  déclinaison  de  Taiguille  pour 
avoir  la  longitude ,  et  on  lui  promit  de  grandes  récompenses  si  Fexpé- 
rience  pouvait  le  confirmer. 

En  France,  Jean  Baptiste  Moritf,  en  1634,  expliqua  à  la  plus  grande 
satisfaction  des  mathématiciens  le  mode  connu  d^observcr  le  méri- 
dien de  la  lune  avec  la  distance  et  la  hauteur  d'une  étoile,  si  Ton 
pouvait  surmonter  les  obstacles  de  la  parallaxe  et  de  la  réfraction  (sor). 

En  même  temps,  dans  les  états  de  Philippe  IV  roi  d^Espagne,  Miguel 
Florencio  van  Laugren,  mathématicien  et  cosmographe  en  Flandre, 
suivit  la  même  méthode  lunaire  pour  découvrir  la  dicte  longitude 
navigante  qui  a  fatiguée  tant  de  bons  esprits,  et  déjà  dans  Tannée  1621 
la  misma  imaginacion  de  hallar  la  longiiud  por  mar  y  tierra  por  medio 
de  la  luna  ténia  occupado  el  ingenio  del  dicho  van  Langren  (390).  11 
s*imagiiia  qu'il  trancha  le  problème  et  que  nonobstant  la  parallaxe  et  la 
réfraction  il  indique  le  moyen  facile  pour  la  pratique  des  navigateurs 
mêmes.  El  consejo  de  las  Indias  en  1632,  voyant  Tutilité  de  l'invention, 
opina  de  pourvoir  van  Langren  de  4000  ducats  de  la  rente  annuelle 
pour  les  dépenses  qu'il  peut  avoir  en  perfectionnant  les  instruments  de 
son  invention.  Van  Langren  communiqua  ses  observations  sous  secret  à 
plusieurs  savants  versés  dans  l'astronomie  et  les  mathématiques;  trou- 
vant leur  approbation  il  se  procura  des  certificats  les  plus  satisfaisants. 
Mais  en  1644  ses  inventions  restaient  encore  sous  secret,  occultes,  et 
un  des  savants  l'encourageait  :  macte  igitur  animo  Langrenc,  motuum 
lunariam  tabulas  conde  (400). 

Cette  grande  agitation  n'avança  pas  beaucoup  la  question  qui  se 
brisait  dans  la  pratique,  par  les  obstacles  du  ciel  qu'on  n'a  pu  aplanir; 
par  l'impossibilité  de  connaître  l'aiguille,  par  l'insuifisantc  connaissance 

(SMl)  En  FnBce  trabaxaya  coa  mâchas  veras  el  docti^simo  varon  Juan  baptista  Merin,  prorpssor 
aatiiematico^del  didio  re,y,  el  qu<il  tuTO  muchos  dares  y  tomares  con  los  matheniatico8_do  aqual 
rejriioenel  ano  46S4  7  quiso  imitar  loqae  Vernero  v  Oroncio  avian  escrito  machos  aîiosantes, 
•hienaDdo  la  lana  eo  el  meridiano  con  la  distancia  7  aUura  de  algiina  estrclla,  sio  poder  salir  con  la 
que  avia  propuesto,  por  la  incommodid  grande  que  encontruva  en  cl  paralaxis  de  la  luna,  mesclada 
eoa  la  refraccion  como  tambien  en  la  verdadcra  tlieoria  y  forma  dcl  movimieoto  de  la  luna ,  no  que- 
rtenda  lof  dichos  matheoiaticos  admitir  ninguno  de  los  antiguos,  ny  delos  modernos  (dit  en  4644  ce 
némoire  de  van  Lanp;rcn,  la  verdadera  longitud). 

(IM)  Sa  padre  assisto  en  la«  observaciones  célestes  del  famoso  astrnnomo  Ticho  Brahe,  de  quieu 
redbid  ana  primeras  ohsenraciooes ,  como  consta  por  las  obras  dcl  dicho  Ticho  ;  assi  mismo  scrvi6  su 

Cdre  S6  anos  en  calidad  de  oosmographo  en  los  estados  de  Flandres  (mémoire  do  1644,  de  van 
Dfipren ,  la  verdadera  longitud).  Miguel  Florencio  succéda  à  son  père  dans  la  charge  de  cosmo- 
gnpbe. 

(4001  Tout  ce  que  j*ai  dit  de  Langren  et  de  la  longitude  de  son  époque  est  extrait  de  son  mémoire  : 
la  Teroadera  loogitud  por  mar  y  tierra  demonstrada  y  dodicada  a  su  magcstad  catholica  Philippe  IV, 
M.  F.  y&a  Langren...  con  las  censuras  y  panures  de  algunos  renombrados  y  Tamosos  mathematicoa 
deste  siglo,  qne  van  puestos  en  orden  ae  los  Techos  de  sus  dichas  aprobacioncs ,  4044,  dont  un 
exemplaire  imprimé  et  signé  de  la  main  de  van  Langren  lui-même,  se  trouve  dans  les  archives  du 
roTaune à  Bruxelles.  Il  semble  que  les  obtenrations  de  Langren  furent  insérées  dans  lumina  austriaca 
philippica.  —  Dans  son  mémoire  il  donne  la  forma  assez  biz.zarrcmnnl  de  sa  science  occulte ,  que 
explicarâ  quando  la  mandare  su  magestad.  —  Ensuite  suivent  les  approbations  des  doctes,  données  : 
le  5  mars  4631  à  Louvain,  par  Eric  Puteanus  et  Godcfr.  Vendeliuns  ;  le  47  janvier  et  47  mars  40*^3, 
par  Jean  de  la  Faille,  qui  dit  :  landandi  multorum  furre  conatus  scd  noraincm  vidi  qui....  vulgi  pêne 
imperitiae  acconunodatis  satisfacere  problemati  tam  arduo  possint,  quam  van  Langren...;  le 
S  mars  I63S,  à  Cordone  par  Barlhomée  Petit:  le  4  février  1644  à  Uruxolles.  par  le  profcss.  Jean  de 
Bognez,  le  9  du  môme  mois  par  Tingénieur  Jean  Heymcns  Coock,  et  le  10  à  Anvers,  par  le  profcs. 
Gérard  Gutiscovius  qui  l'engageait  à  calculer  la  lune. 


196  REFORME»   1550  ET   SUIV. 

du  mouvement  des  astres  et  par  conséquent  du  calcul ,  enfin  par  le 
manque  d'instruments  nécessaires,  d'horloges  et  de  pendules.  Cette 
agitation  prouve  aussi,  que  depuis  qu'on  a  compris  l'usage  pernicieux 
de  longitudes  ptoléméennes  on  n'avait  encore  aucune  certaine,  aucune 
qui  serait  déterminée  avec  certitude. 

La  cartographie  restait  donc  dans  son  désarroi ,  duquel  elle  ne  pou- 
vait sortir  par  les  publications  des  Pays-Bas.  L'impulsion  donnée  à 
la  propagande  géographique  par  Orlelius  et  Mercator,  poursuivie  avec 
succès,  n'a  pas  soutenu  les  Pays-Bas  en  première  ligne  de  l'étude. 
L'étude  se  concentra  successivement  en  France ,  et  en  terminant  nos 
considérations  sur  la  restauration  de  la  cartographie,  nous  renoncerons 
volontiers  à  tous  les  pays  pour  porter  le  dernier  coup-d'œil  sur  les 
déroutes  de  Ptolémée,  presque  exclusivement  dans  cette  nouvelle  école. 

219.  Mais  avant  d'exposer  cette  déroute  retardée ,  je  dois  rappeler 
que  la  cartographie  nautique  s'opposait  inéhranlablement  à  toutes  ces 
avanies  de  la  géographie,  et  longtemps  sans  théorie  avec  sa  méthode, 
elle  ne  fut  que  pratique.  La  géographie  des  savants  multipliait  chaque 
jour  ses  publicalions ,  et  commençait  à  les  remanier,  parce  qu'elles 
étaient  trop  vicieuses;  la  géographie  de  l'expérience  pratique  des  marins 
n'était  que  dessinée  toujours  de  même,  à  la  même  méthode,  aux  mêmes 
proportions  heureusement  établies. 

La  marine  française  plaça  les  dessinateurs  de  cartes  nautiques  à  la 
hauteur  des  plus  beaux  produits  qu'on  connaisse.  JiLcq  de  Vaulx  pour  le 
roi  en  la  marine,  1535;  Guillaume  Levasseur  de  Dieppe  en  1601  ;  Jean 
Dupont  de  Dieppe  en  1625;  Jean  Guerard  fait  à  Dieppe  en  1651,  ont 
laissé  d'admirables  cartes.  Dieppe  excellait  dans  leur  exécution  (40i); 
on  se  servit  en  1650,  à  Dieppe  en  premier  lieu,  de  la  projection  crois- 
sante de  Mercator  pour  les  cartes  marines.  Conserver  les  proportions 
établies  par  la  pratique,  c'était  l'ouvrage  des  dessinateurs  :  mais  leurs 
cartes  couraient  le  danger  de  la  dégradation  quand  un  géographe  du 
continent  s'empara  d'elles  pour  les  publier. 

Ortcl  indique  quelques  cartes  marines  publiées  avant  1570,  celles  de 
Waldseemûller,  llacomilus  (1515),  de  Laurent  Frisius  (1522),  de  Nico- 
las Nicolaï  dauphinois  (mort  1585);  en  Italie,  outre  les  isolario,on 
publia  aussi  quelques  cartes  marines;  Gérard  Mercator,  mettant  en 
pratique  sa  projection  croissante,  composa  une  carte  continentale  qua- 
liûée  de  marine  ad  usum  navigantium.  Je  n'en  ai  vu  aucune,  qui  ait 
rendu  les  proportions  de  leur  modèle  dessiné.  Celle  de  Mercator ,  com- 
posée par  lui-même,  n'avait  plus  les  proportions  des  cartes  de  la  prati- 
que marine. 

J'ai  vu  une  carte  de  Du  Val,  géographe  ordinaire  du  roi,  publiée  à 
Paris  vers  1661,  où  Ton  ne  remarque  que  l'appareil  des  cartes  nauti- 
ques :  tout  y  est  défiguré  (ioa).  Vers  le  même  temps,  on  publia  à  Paris, 
chez  Antoine  de  Fer,  un  atlas  nautique  de  la  France,  composé  de  55 

(iOl)  Voiries  fragments  de  ces  cartes  dans  l'atlas  de  SaDlarem,  priorité  de  la  découverte  de 
l'Afrique. 

(402)  Le  tlicàtre  des  belles  actions  des  chevaliers  de  Tordre  de  S.  Jean  de  Jérusalem  dit  de  Malte, 
par  Du  Val,  géographe  prdinaire  du  roi.  Gravé  et  mis  au  jour  par  Etienne  Vouillemeut,  içravenr 
ordinaire  de  S.  M.,  pour  les  cartes  géographiques  à  Paris,  en  isie  du  palais,  au  coin  de  la  me  de 
.Qarlet,  à  la  fontaine  de  Jouueoce,  1C6i. 


CONSÉQUENCES  «   S19.  197 

cartes.  Tons  les  rivages  y  sont  torturés  et  assimilés  à  la  cartographie 
continentale.  Les  savants  publicaieurs  se  croyaient  autorisés  non-seu- 
lement à  prescrire  les  règles,  mais  à  dresser  une  pratique  trop  contraire 
à  celle  qu'on  avait  (403). 

Les  publications  consciencieuses  des  cartes  de  la  marine  parurent  en 
Hollande,  et  ne  discontinuèrent  pas  pendant  plusieurs  siècles.  Elles 
étaient  à  Fusage  des  pilotes,  ne  déviant  en  rien  de  leur  méthode  jusqu*à 
la  possibilité  de  la  perfectionner  et  de  perfectionner  les  cartes. 

Cette  suite  d'atlas  nautiques,  publiées  en  Hollande,  commence 
en  1584,  par  les  efforts  du  pilote  Luc  Jean  Waghenner,  latinisé  par 
Aurigarius.  Il  est  le  fondateur  des  publications  nautiques.  Il  élabora 
lui-même  les  caries  pour  son  atlas,  gravées  par  Jean  à  Doetinchem, 
Douetecum,  Douza.  La  navigation  hollandaise,  préoccupée  des  parages 
extérieurs  de  TEurape,  se  montre  d'abord  indifférente  pour  la  mer 
inéditerranée;  kussi  les  atlas  de  Waghenaer  n'offrent  que  les  côtes  occi- 
dentales et  septentrionales.  Les  cartes  spéciales  se  suivent ,  à  partir  de 
la  Hollande  à  gauche  jusqu'au  fretum  de  Gibraltar;  ensuite  à  droite 
elles  entrent  dans  la  mer  baltique  et  côtoyent  tous  les  rivages.  Les  for- 
mes des  côtes  sont  imparfaites;  les  positions  abondent  inégalement, 
quelque  fois  m^énije  sont  très-insuffisantes. 

A  la  tête  de  ces  cartes  spéciales  se  trouve  une  générale  qui  présente 
toutes  ces  côtes  et  une  portion  de  L'Afrique  et  de  la  mer  méditerranée , 
jusqu'à  Tunis  et  les  pointes  occidentales  de  la  Sicile.  L'Islande  y  est 
ronde,  les  Feroer  conformes  à  leur  petitesse  (on  ne  voit  ni.  Estoliland  » 
ni  Frisland);  les Schjeiland  grossières,  le  golfe  botnique  (noort  bodem), 
situé  à  sa  place,  se  réunit  avec  la  mer  glaciale  par  un  fleuve  très-large 
ou  pur  un  très  long  détroit  montant  vers  le  nord.  Cette  carte  est  déco- 
rée de  plusieurs  écussons,  dont  un  à  trois  lions  placé  en  Norvège  ;  deux 
autres  à  trois,  couronnes  en  Suède;  en  Afrique  sont  deux  écussons,  dont 
UQ'vide,  l'autre  à  trois  croissants;  deux  plus,  grands  que  les  autres, 
l'un  à  trois  lis  en  France,  l'autre  richement  blasoné  (de  Philippe  11) 
en  Espagne;  enfin  un  petit  écusson  de  Portugal  (qui  avait  été  réuni  à 
l'Espagne  tout  récemment,  en.  1580).  Cette  carte  conserve  rorienlation 
Tîeieuse  de  la  boussole  (404). 

(403)  Je  n*ai  qiic  la  cartn  générale  de  loutee  les.  côtes  de  France  (de  32  cartes)  à  Paris ,  clicz 
Antoine  de  Fer,  marchand  de  taîllc-douce,  enlumineur  de  cartes  géographiques,  demeurant  au 
boot  dn  pont-au-change,  devant  l'horloge  du  pallais  à  Taage  de  fer.  —  Prenons  Brest  pour  le  sommet 
dn  triangle  et  pour  base  la  distance  entre  Baïonne  et  Calais  représentées  par  le  nombre  de  200  :  nous 
UOQtOQS  les  deux  autres  côtés  en  proportion  suivante  : 

de  Brest 
à  Calais.  à  Baïonne. 

Nos  cartes  modernes. itH  i!(5    ^    10 

g  /  Carte  caUlane 420  140    4"    <0 

-*  I.André  Benincasa 133  143    4-    10 

g  <  La  carte  grossière  publiée  par  Ubelin liO  liS     -j-      5 

g  f  Plus  correcte  publiée  par  Villanovan 115  143    ^    28 

a  l  G.  Bleauw  chez  Berey 130  150    4-    20 

Ger.  Mercator 140  130    —    10 

Hiic.  Sansoa 142  114    —    28 

Carte  marine,  chez  A.  de  Fer 149  112    —    37 

Ptoléroée 11^1  107     —    14 

Le  triangle  de  ce  dernier  est  formé  par  Itiuro ,  embouchure  d'Aturus  et  Gobcon.  Ces  chiffres. sont 
parlants. 

(404)  Sperulum  navigationis  per  mare  occidentale,  Lugdu ni  batavorum,  apnd  Christian.  Planti- 
Qnm  1584,  fol.  Je  n*ai  pas  vu  cette  édition  latine,  mais  elle  contient  pour  sûr  les  mêmes  caries 
inscrites  :  Luau  Àurigariu*  enchu$ianus  inventer^  Joannei  a  Doetinchum  fecit^  qui  composent 


200  RÉFORME)    1550  ET   S0IT. 

La  publication  de  4646  a,  dans  sa  composilion  nautique,  quelques 
lignes  horizontales  irrégulièrement  coordonnées  et  trois  boussoles, 
venant  de  deux  roses  de  vents  à  certaine  distance  juxta  posées  :  une 
près  de  Tolède,  Tautre  au  nord  de  Negropont  près  de  Skyros.  La  bous- 
sole près  de  Sardaigne  est  orientale  ae  la  première;  les  deux  autres, 
méridionales,  sont  quelque  peu  irrégulièrement  placées,  représentant 
sirocco  (ostrosirocco)  et  garbino  (ostro  garbino).  Sur  la  ligne  de  la 
tranche  de  la  carte  sont  les  de{^rés  de  latitude,  présumant  une  projec- 
tion plane  cylindrique.  L'échelle  de  ces  degrés  donne  à  la  longueur  de 
la  méditerranée  40**  50'.  Nous  avons  essayé  de  graduer  cette  carte  con- 
formément à  réchelle  latitudinale,  et  afin  d'obtenir  le  succès  nous  avons 
trouvé  qu'il  fallait  prendre  le  rayon  de  150  à  partir  de  la  ligne  pour 
tracer  les  parallèles  (voyez  n*"  138  de  notre  atlas). 

Je  me  suis  étendu  sur  cette  carte  de  misérable  contrefaçon  de 
Nicolas  Berey,  parce  qu'elle  est  la  seule  que  j'aie  pu  me  procurer  de  la 
publication  nautique  de  cette  époque  qui  contient  la  mer  méditerranée 
entière.  Elle  m'a  servi  dans  le  portulan  général  faute  de  mieux;  et  elle 
figure  dans  l'atlas  comme  pièce  de  conviction  pour  ce  que  j'avance  au 
sujet  de  la  cartographie  («os). 

Les  atlas  préparés  par  Bleauw  circulaient  par  différentes  éditions 
après  sa  mort,  et  trouvaient  un  concurrent  aclif  dans  les  publications 
de  Jansen  (409).  Amsterdam  ne  discontinuait  pas  encore  d'être  une 
infatigable  fabrique  de  toutes  sortes  de  cartes  géographiques  (410). 

La  projection  réduite,  tant  recommandée  par  son  inventeur  Mercator, 
ne  fut  introduite  dans  le  dessin  des  cartes  marines  qu'un  demi-siècle 
après  sa  mort.  Je  ne  sais  si  la  fabrique  hollandaise  en  a  fait  un  grand 
usage,  n'ayant  pas  vu  toute  la  suite  de  ses  publications  :  mais  je  vois 
qu'elle  ne  négligeait  pas  ses  anciennes  constructions. 

La  famille  de  van  Keulen,  Wylem  Johan  et  ses  fils  Gérard  Hulst  et 
Corneli  Buys  van  Keulen ,  se  mit  à  son  tour  à  la  fabrique  pendant  tout 
un  siècle.  Chaque  édition  de  Jean  van  Keulen  était  quadruple  :  te 
>veten  in  duits,  frans,  engeis  en  spaens;  chacune  était  composée  d'un 
recueil  de  cartes  connues  depuis  longues  années,  augmentée  d'une  crois- 
sance considérable  de  cartes  nouvelles,  parmi  lesquelles  se  trouvaient 
les  cartes  dressées  sur  la  projection  réduite  et  les  cartes  encadrées 
dans  l'échelle  de  leurs  latitudes  ou  latitudes  et  longitudes  à  la  fois  (4t  1). 

(i08)  Voyez  notre  avaot-derDière  planche.  Les  rartcs  comparatives  de  Mercator,  Sanson ,  Delisle , 
sont  de  la  même  échelle  sur  la  projection  ptolémëenne  du  rayon  de  ilS  de  la  ligne. 

(409)  Description  du  monde  maritime  ou  hydrographie  générale  de  toute  la  terre ,  carichie  des 
particularités  de  la  navigation  tant  ancienne  que  n>oderue,  Amsterdam,  Jansen,  16S7,  foho. 

(410)  Le  grand  et  nouveau  miroir  ou  Oambeau  de  la  mer,  contenant  la  description  de  toutes  les 
côtes  occidentales,  traduit  du  flamand  en  français,  par  Y vonnet ,  Amsterdam ,  chez  Pierre  Goos, 
demeurant  sur  l'eau,  anno  1662,  fol. 

(411)  Parut  d'abord  :  zeeatlas  ofte  watcr  weerelt;  ensuite  de  groote  nieirwe  Uchtende  zeefkkel» 
toujours  le  nombre  des  cartes  augmenté ,  les  précédentes  corrigées.  Jan  van  Loon ,  ensuite  Claas, 
Jansz  Vooglit  soignaient  les  rectilications.  —  Die  groote  nieuv^e  vermeerderde  zeeatlas ,  Johan  van 
Keulen,  Amsterdam,  1685,  contient  59  cartes;  zeeatlas  du  mènse  172i,  en  deux  vol.  in-folio,  donne 
118  cartes.  Il  reparut  i7S3,  et  de  Corneli  et  Gérard  en  1764.  —  De  nieuwc  groote  licbtende  zec> 
fakel,  het  eerstc  decl  beheizende  Holland...  Finland,  Finmarkcn  en  Rnsland  (mer  blanche),  Ysland , 
Spitzbergeo  en  Jan  Maijen  eiland,  (Gronland|,  de  straat  Davids  en  Hudson ,  de  oost  knsten  va»  Enge- 
Jand  en  Schotland ,  met  de  ouderlioorige  eilanden ,  als  ook  de  Orcades,  Hitland  en  de  eilanden  van 
Fero,  vergadert door  wylen  Claas  Jansz  Voogt,  geometra  en  leermeester  des  wiskonst...  vermecrdert 
en  verbetert  door  Gérard  Hulst  van  Keulen,  te  Amsterdam  1780,  folio.  Cette  première  partie  est 
composée  de  85  cartes  (y  comprises  les  Orcades  de  Murdoch  Mackenzie  et  les  images  des  monta|;nes 
littoralles).  La  carte  générale  est  privée  du  golfe  botnique.  —  La  seconde  partie,  m'est  iacoonaek 


CONSÉQUENCES,   333.  201 

Les  uombreuses  reproductions  des  recueils  de  Van  Keulcn ,  n*empé- . 
chaient  pas  les  publications  plus  régulières,  où  la  science  était  déjà  en 
état  d*offrir  avec  succès  ses  puissants  secours.  Pour  éditer  le  Neptune 
français,  Pierre  Mortier  à  Amsterdam  s'est  adressé  à  Charles  Penc, 
Cassini,  H.  Jaillot,  Romain  de  Hooge,  de  Fer,  Nolin ,  Placide  et  autres. 
La  coopération  des  géographes  renommés  élait  avantageuse  pour  Ten- 
treprise.  Les  55  cartes  du  Neptune  sont  dressées  à  la  projection  de  la 
latitude  croissante  et  ne  contiennent  que  les  côtes  extérieures  de  TEu- 
rope.  Pour  la  mer  médilerranée,  elles  sont  suppléées  par  9  cartes  de 
Romain  de  Hooghe,  qui  parurent  à  Amsterdam  dans  la  même 
année  1695  (413). 

]gn  1715,  Louis  Renard,  libraire,  éditait  à  Tinspiration  du  géographe 
Frédéric  de  Witt  et  sous  les  auspices  de  la  Grande  Bretagne,  un  nouvel 
atlas  à  Fusage  de  la  marine  (413).  Toutes  les  cartes  de  la  suite  des 
rivages  et  la  carte  générale  de  TEurope  (dépourvue  du  golfe  botnique), 
sont  dressées  à  Tancienne  méthode,  oifrant  une  projection  plane, 
garnie  d'une  échelle  latitudinale  sans  longitude.  Le  planisphère  du 
frontispice,  représentant  Tensembledes  cartes,  est  le  seul  gradué.  Paris 
y  est  à  âO*  de  longitude,  le  coin  oriental  de  la  méditerranée  52°,  le 
Japon  150%  fruit  de  nouvelles  et  récentes  élaborations  géographiques, 
conformes  à  toute  la  suite  des  cartes  nautiques. 

La  carte  du  frontispice,  et  les  autres  au  nombre  de  âG,  sont  accom- 
pagnées de  nova  orbis  terrarum  tabula  et  polus  arcticus,  deux  cartes 
de  Frédéric  Witt  (produit  de  la  géographie  continentale)  où  la  longitude 
de  Paris  est  â5<*  ou  24**,  du  coin  oriental  de  la  méditerranée  69*.  par  le 
Japon  traverse  180°;  la  mer  méditerranée  tient  une  longueur  de  56 
degrés.  Cette  carte  accompagne  Tatlas  nautique  en  1715! 

Ainsi,  Witt,  Jaillot,  de  Fer,  Nolin,  participant  aux  éditions  des 
cartes  nautiques  et  connaissant  les  proportions  de  la  cartographie 
marine,  avaient  une  toute  autre  connaissance  pour  leurs  propres  pro- 
duits. Mais  le  temps  se  rapprochait  enfin  où  les  observations  astrono- 
miques réussirent  à  réconcilier  les  deux  genres  de  cartographie,  vinrent 
à  l^appui  de  la  nautique  et  forcèrent  la  continentale  de  rentrer  avec 
son  vieux  monde  dans  de  justes  bornes. 

222.  L^activilé  des  Pays-Bas  dans  la  cartographie  continentale  éveilla 
celle  de  France  et  lui  donna  une  certaine  impulsion.  La  fabrique 
française  ne  pouvait  longtemps  égaler  les  belles  exécutions  hollandai- 
ses :  mais  elle  acquit  bientôt  un  certain  mérite  dans  la  science. 

Elle  fourmilla  de  compositeurs  de  cartes  spéciales  de  son  pays  : 
Jean  Surhon,  Nicolas  Nicolaï,  Jean  de  Reins,  Jean  Jubrien,  Jean 
Fayan,  Sollon,  étaient  du  nombre  de  ceux  qui  dressaient  partout  les 
plans  topographiques. 

Les  éditeurs  de  cartes  copiaient  les  productions  des  Pays-Bas  et 
des  autres  pays.  N.  Picart  (vers  1610-1650)  se  servait  du  burin  de 
Hugue  Picart;  Jean  le  Clerc  (vers  159i,  1617),  avait  recours  au  même 

f41S)  Le  Neptune  français,  mis  en  ordre  par  Pêne,  Cassini ,  à  Paris  1608,  fol.  Cartes  marines,  à 
rusage  des  armées  de  la  Grande  Bretagne,  gravées  par  Rom.  de  Hooghe,  Amsterdam  1695,  fol. 

(4iS)  Atlas  de  la  navigation  et  du  commerce,  à  Amsterdam,  ches  Louis  Renard,  marchand 
libraire,  1715,  fol. 


202  RÉFORME,  1550  ET   SDIV. 

OU  au  burin  supérieur  de  François  de  la  Hoeye.  —  Jean  Boisseau , 
enlumineur  du  roi  pour  les  cartes  géographiques  (vers  1659,  1647), 
employait  à  Texécution  de  ses  cartes  H.  le  Roi.  En  même  temps  Nicolas 
Berey  fesait  copier  toute  sorte  de  cartes.  Michel  van  Lochom ,  graveur 
et  imprimeur  du  roi  pour  les  tailles-douces  (vers  1645)  suivait  le  même 
exemple.  De  nombreuses  cartes  volantes  circulaient  avec  succès  pour 
les  éditeurs  de  mérite ,  cartes  anonymes  ou  des  auteurs  renommés.  On 
composait  des  recueils,  des  atlas  de  France  (414).  Dans  cette  concur* 
reuce  empressée,  deux  éditeurs  parurent  supérieurs  aux  autres  : 
Melchior  Tavernier,  graveur  et  imprimeur  du  roi  pour  les  cartes 
géographiques  et  autres  tailles-douces  (vers  1640,  1647),  et  Pierrt 
Mariette  (vers  1651,  1665).  Pour  le  premier  gravait  ordinairement 
A.  B.  de  la  Plaets;  pour  Tautre  Jean  Sommer,  prussien;  L*huillier  et 
A.  Peyrounin  pour  Tun  et  Tautre. 

Mais  dans  cette  foule  de  publicateurs,  les  abbevillois  étaient  les  seuls 
qui  ouvrirent  une  école  de  la  cartogra^ie  française  Nicolas  Sanson 
(né  1600,  mort  1667)  avec  ses  fils  et  fils  de  sa  sœur,  Pierre  Du  Val- 
(né  1618,  mort  1685)  qui  suivit  ses  traces.  Sanson  mettait  à  exécution  ses 
cartes  chez  lui-même  par  le  graveur  abbevillois  R.  Cordier  (1648, 1660) 
et  laissait  éditer  à  Tavernier  (1641, 1645)  et  à  Mariette  (1651,  1665)>  ' 
Ses  cartes  furent  élaborées  dans  un  ensemble  établi  par  Mercator, 
(par  Caslaldo?).  Il  compulsait  les  produits  de  nombreux  géographes, 
puisait  dans  les  nouveaux  mémoires  et  renseignements  et  composait 
par  lui-même;  quand  il  se  conformait  plus  strictement  à  quelque 
auteur  il  indiquait  son  nom.  L*Ëcosse  est  chez  lui  composée  d'après 
Thimothée  Pont  et  Robert  Gordon;  Madagascar  sur  les  mémoires  de 
J.  de  Flacourt  et  François  Gauche:  la  Ghine  d'après  Neroni;  les  côtes 
septentrionales  de  l'Afrique  sont  tirées  de  Livio  Sanuto;  les  autres  par- 
ties sont  prises  de  Mercator,  Marmol,  Biommart  :  il  le  dit  lui-même 
dans  les  intitulalions  des  cartes. 

Le  nombre  croissant  des  cartes  de  l'école  Sanson ,  toutes  les  parties 
du  monde  élaborées  sur  de  nouveaux  documents,  établirent  la  renom- 
mée du  géographe  français,  jetant  un  discrédit  sur  les  cartes  précéden- 
tes. Un  Jacq  TAgniet,  un  G.  Jollain  (vers  1666)  s'emparaient  de  planches 
abandonnées,  y  substituaient  leurs  noms  et  marchandaient  encore  avec 
elles  simulant  les  nouveautés.  Mais  Sanson  seul  était  un  coryphée  dans 
la  géographie  et  eut  pendant  tout  un  siècle  une  situation  solide.  On  le 
copiait  en  Hollande;  à  Paris  Hubert  Jaillot  (vers  1681, 1705)  (Gordier 
graveur)  éditait  ses  cartes  avec  soin  et  très-bien  exécutées. 

En  attendant,  Pierre  du  Val  ne  cessait  d'agir  pour  sa  part  (chez  lui- 
même  ou  chez  Mariette),  Philippe  de  la  Rue  préparait  aussi  ses 
compositions  (vers  1651,  1655)  pour  Mariette.  J.  B.  Noiin  publiait 
(vers  1692,  1694, 1705)  celle  de  Tillemont  et  ses  propres.  Nicolas  de 
Fer  (vers  1695, 1717),  graveurs  G.  Inselin,  P.  Starckmann,  H.  vanLoon^ 
se  présente  comme  émule  de  l'école  sansonienne.  La  fabrique  hollan- 

(414)  Par  exemple  la  géographie  sacrée  de  Haraens  et  Ortel  fut  plusieurs  fois  copiée,  privée  des 
noms  des  auteurs.  N.  Picart  copiait  Hondius  en  le  noimnant  ;  le  Clerc  passait  sous  sileDce  le  nom 
de  Castaldoen  reproduisaut  ses  cartes;  son  atlas  de  France  (dirigé en  partie  an  moins  par  Jabrien)» 
contenait  probablement  une  quarantaine  de  cartes;  un  autre  atlas  de  France,  anonyme,  snaàt  «ne 
trentaine  ae  caries. 


CONSÉQUENCES»    1S3.  303 

dâîse  d'Amsterdam  copiant  ces  productions,  rendait  hommage  aux 
géographes  français  (415). 

Vinrent  enfin  les  Delisle  et  messieurs  de  l'académie  royale  des 
sciences,  pour  consommer  la  réforme  de  la  cartographie  continentale 
de  toute  la  surface  du  globe  et  spécialement  celle  de  l'ancien  monde. 
L'ordonnance  royale  qui,  en  1645,  désignait  pour  la  cartographie  fran* 
çaise  le  premier  méridien  de  File  de  Fer,  n'aurait  pas  avancé  beaucoup 
les  réformes  si  l'on  n'avait  pas  déterminé  les  30®  50'  de  la  longitude  de 
Paris.  L'académie  ne  perdait  son  temps  et  les  observations  astronomi- 
ques, chaque  jour  plus  précises,  préparaient  les  matériaux  pour  fixer 
les  longitudes.  Les  parties  accessibles  à  la  navigation  française,  visitées 
par  de  nouvelles  perlustrations  de  voyageurs  et  les  plans  topographi- 
ques levés  par  des  géomètres  et  ingénieurs  instruits,  apportaient  aux 
géographes  français  des  matériaux  qu'on  pouvait  enfin  coordonner  et 
enclaver  dans  les  longitudes  géographiques,  déterminées  pas  les  obser- 
vations astronomiques. 

225.  Mais  la  marche  était  lente,  et  depuis  que  la  réforme  était  décla- 
rée ,  elle  rencontrait  les  habitudes ,  les  préventions  et  cette  crédulité 
invétérée,  qui,  opposant  une  méfiance  obstinée,  avait  peur  d'adhérer 
franchement  à  la  réforme  et  qui  ne  cessait  de  débiter  de  vieilles  com- 
positions comme  si  elles  étaient  une  toute  nouvelle  invention. 

Nicolas  Sanson,  suivant  les  traces  de  Mcrcator,  semble  s'effrayer  d'ac- 
cepter les  55  degrés  de  la  longueur  de  la  méditerranée,  il  lui  assigne 
56  degrés.  Examinant  les  formes  et  les  proportions  qu'il  donne  à  la 
Syrie  «  à  l'Asie,  aux  environs  de  Rhode,  au  littoral  africain  et  à  Tunis, 
à  la  France  elle-même,  on  peut  dire  qu'il  penchait  vers  Ptolémée, 
(voyez  D?  459  de  noire  atlas).  Il  dégradait  la  construction  de  la  méditer^ 
ranée  de  son  modèle  préparée  par  les  réformateurs ,  pour  ne  s'éloigner 
autant  de  ce  vieux  maître. 

Claude  Delisle  (né  i6M,  mort  1720)  et  son  fils  Guillaume  (né  1675, 
mort  1726)  trouvèrent,  à  côté  de  quelques  autres  systèmes  de  la  réfor- 
mation géographique,  les  proportions  de  l'école  sansonienne,  jouissant 
de  tout  le  crédit  de  l'autorité  acquise  :  ils  les  acceptèrent  et  débutèrent 
par  55®  50'  de  la  longueur  de  la  méditerranée.  La  mer  noire  seulement 
et  la  Syrie  reçurent  chez  eux  des  contours  tout  différents  (voyez  n^  140 
de  notre  atlas).  Les  Delisle  méditaient  longtemps  à  réhabiliter  le  crédit 
de  Ptolémée. 

Mais  leur  école  était  destinée  à  passer  par  ce  revirement  varié  qui 
substituait  continuellement  des  formes  nouvelles  aux  anciennes,  dépla- 
çait les  positions  et  ébranlait  les  longitudes  géographiques  de  tout  le 
vieux  monde  (voyez  n°  155,  140, 141  de  notre  allas).  A  partir  de  Paris 
jusqu'à  Pékin,  toutes  les  positions  de  l'hémisphère  se  rapprochaient  à 
l'appel  irrésistible  des  astronomes,  soulevaient  aux  géographes  des  per- 

(MS)  Pierre  Mortier,  B.  et  I.  Ottens  et  les  autres  éditaient  les  cartes  de  Sanson,  de  de  Fer,  de 
Noiin  ;  comme  plus  tard  Jean  Covens  et  Corneille  Mortier  les  atlas  de  Delisle.  —  Il  ne  manquait  pas  à 
Amsterdam  d'éditeurs  de  cartes  et  atlas  :  Tbeodor  Danckerts,  Nicolas  Visschcr,  ensuite  Pierre  Sclienk 
et  Gérard  Vaick  etc.;  à  Leyde,  le  libraire  Pierre  yan  der  Aa  donnait  son  propre  cadre  aux  cartes 
qn'il  publiait.  —  En  Allemagne  la  plus  fameuse  fabrique  de  cartes  fut  établie  avec  un  succès  bien 
mwité  à  Nuremberg,  par  Jean  Baptiste  Homman ,  dont  les  successeurs  illustrèrent  l'entreprise  par 
les  noms  de  Jean  Matthieu  Hase,  Tobias  Bleyer,  ensuite  Giisscfeld. 


204  RÉFORME»   1550  ET  SUIV. 

turbations  extrêmes  et  les  forçaient  à  réder  leur  cartographie  sur  ces 
proportions  qu'ils  reniaient  depuis  plus  de  deux  siècles  (1470-1700). 

Il  est  nécessaire  pour  l'histoire  de  la  géographie  et  de  sa  cartographie 
de  connaître  les  dates  précises  de  toutes  ses  évolutions  qui  décidaient 
les  opérations  géographiques  de  cette  époque  ;  de  déterminer  Tannée 
de  la  grande  réduction  de  la  méditerranée,  d'indiquer  le  géographe  qui 
dressa  et  exhiba  la  première  carte  refondue ,  et  de  savoir  si  Ton  exami- 
nait en  même  temps  la  cartographie  nautique  (416).  Ce  que  je  sais» 
par  une  carte  de  de  Fer,  c*est  qu'en  1698  la  position  de  Paris  à  âO«  50' 
de  la  longitude  de  l'Ile  de  Fer  était  une  nouveauté;  qu'en  1715  l'atlas 
marin  édité  par  Renard ,  donnant  sur  l'hémisphère  nautique  les  41 
degrés  de  longueur  à  la  méditerranée,  fichait  dans  le  nombre  de  ses 
cartes  une  mappemonde  de  Frederik  de  Wilt,  où  cette  longueur  est 
évaluée  à  ^y  50';  que  les  atlas  de  Delisle  offrent  souvent  à  la  fois  une 
carte  de  41  degrés  de  longueur,  une  autre  de  55"*  50'  de  la  même  médi- 
terranée. Je  vois  enfin  qu'un  demi-siècle  s'est  écoulé  avant  que  la  juste 
grandeur  de  41  degrés  prévalut  décidément.  Les  caries  publiées  par 
Nolin  composées  par  Cornelli,  cosmographe  de  la  république  de 
Venise,  par  le  Rouge,  ingénieur  géographe  du  roi  de  France,  ne  s'em- 
pressaient guère  à  renoncer  aux  56  degrés  de  la  longueur  ;  et  les  vieilles 
cartes  retouchées  avaient  leur  débit  imperturbable  comme  un  nouveau 
produit  le  mieux  confectionné. 

254.  Effleurons  encore  quelques  points  disloqués  pour  la  plupart 
par  la  renaissance. 

L'obliquité  ptoléméenne  de  la  Syrie,  prônée  par  quelques  composi- 
teurs des  cartes  de  la  Palestine,  approuvée  par  la  reproduction  d'Orte- 
lins ,  continua  pendant  un  certain  temps  de  souiller  les  atlas. 

L'inclination  ptoléméenne  de  Sicile  affectait  continuellement  Fécole 
des  abbevillois.  Ce  n'est  que  Delisle  et  d'Anville  qui  firent  décidément 
disparaître  cette  difformité  (voyez  n^  159, 140,  de  l'atlas). 

Ou  est  étonné  de  tant  d'indécision  dans  la  conGguration  de  la 
Morée  et  de  la  Grèce  entière,  lorsqu'on  examine  les  cartes  de  d'Anville 
(mort  178â),  et  de  son  appologisle  Barbie  du  Bocage  (mort  1825),  et 
autres  (voyez  n**  145,  144,  145  de  notre  atlas).  Remontant  par  la  con- 
frontation de  leurs  compositions  avec  les  cartes  antérieures,  on  découvre 
les  sources  d'une  quantité  de  discordances  dans  les  configurations  pto- 
lémécnnes.  Dans  ces  examens ,  on  ne  peut  se  défendre  de  revenir  sur 
Ptolémée.  La  Grèce,  l'Asie  mineure,  la  mer  noire,  la  Crimée,  variant 
dans  les  études  des  plus  habiles  géographes,  fournissent  surtout  de 
nombreuses  circonstances  qui  avaient  leur  origine  dans  la  domination 
de  Ptolémée,  établie  par  la  renaissance  des  lettres. 

Suivons  le  cours  du  Danube  sur  les  cartes  des  abbevillois,  de  Duval , 
de  Delisle,  de  Bonne,  de  Goronelli  1788,  nous  serons  toujours  ac- 
compagné de  Ptolémée.  Le  consentement  des  indigènes ,  Madyars , 
Komans,  Boulgars,  semblait  appuyer  et  perpétuer  ses  déclivités;  les 
distances  levées  de  siècle  en  siècle,  ne  protestaient  guère,  conspiraient 

(416)  Les  mémoires  de  l'académie  des  sciences  pourraient  peut-être  fournur  des  rcnseignenacuts- 
positifs  à  cet  é^ard. 


CONSÉQUENCES,   925.  S05 

plutôt  avec  les  préventions  enracinées;  ni  Delisle,  ni  d^Ânville,  ne 
purent  sortir  assez  victorieux  quand  ils  lenlèrcnl  de  le  redresser  et 
rectifier. 

2^5.  De  rédîfice  de  Plolémée,  ruiné  et  déchiré,  une  portion,  aussi 
crasse,  aussi  lourde,  aussi  considérable  dans  son  ensemble,  n'appeseniit 
nulle  part  la  géographie,  que  dans  la  Perse.  Les  géographes  peu  disposés 
au  néoterisme,  n'osaient  troubler  les  eaux  de  la  Caspienne,  ni  heurter 
le  méridien  de  Bagdad.  Enfin  des  doutes  sérieux  sur  la  solidité  de  cette 
construction  résistant  à  tant  de  siècles,  commencèrent  à  gagner  et  à 
inspirer  les  esprits.  Nulle  part  les  cartes  de  Delisle  ne  variaient  autant 
de  face  qu'en  Perse  aux  environs  du  fleuve  Tigris  (voyez  n'*  141  de  notre 
atlas).  D'abord  il  voulut  sauver  la  construction  en  y  introduisant  quel- 
ques rectifications,  restaurations,  ou  en  lui  donnant  un  poli  et  une 
plus  spécieuse  ornementure  :  mais  en  dernier  lieu,  vers  1720,1727,  lui 
arriva  la  connaissance  de  la  Caspienne,  déterminée  depuis  peu  par 
Tordre  de  Pierre-le-grand  et  tout  ce  qui  y  restait  de  Plolémée  dut  être 
évacué.  D*Anville  déblaya  les  décombres;  cependant  Bonne,  s'égarant 
dans  la  construction  nouvelle,  ficelée  sur  les  observations  astronomi- 
ques discordantes,  revient  avec  le  Tigre  et  rEufrale  sur  les  traces  de 
Plolémée  (voyez  n<»  142  de  notre  allas).  Hérisson  copiait  un  certain 
temps  les  illusions  de  son  maître  d'étude  (41?). 

Grâce  aux  montagnes  de  la  lune  et  aux  sources  du  Nil ,  venant  de  la 
Kafrèric;  grâce  au  Gir,  dont  les  eaux  s'évaporaient  ou  allaient  être 
absorbées  par  le  sable;  au  majestueux  Niger,  arrosant  les  régions  des 
nègres  inaccessibles.  Présomptions  ineptes,  compromises  par  toute 
sorte  d'expériences,  vieillies  et  usées,  encore  grosses  de  conséquences. 

Jusqu'à  Job  Ludolf  (né  1624,  mort  170i),  les  découvertes  portugaises, 
ni  les  missions  de  la  propagande  chrétienne ,  n'étaient  assez  puissantes 
pour  convaincre  que  Plolémée  avait  tort,  qu'il  n'avait  tissu  que  des 
rêves  qu'on  peut  s'imaginera  tout  moment,  d'après  les  oui-dires  qui 
viennent  de  sources  fangeuses  et  se  répèlent  de  siècle  en  siècle.  La 
branche  bleue  reprit  enfin  les  formes  tracées  sur  la  carte  de  Mauro, 

(417)  L*iDgcniear  Robert  Bonne,  hydrographe  de  te  marine  (né  1727,  mort  1794\  avait  une  pleine 
confiance  dans  les  observations  astronomiques.  Elles  apportaient  déjà  pour  la  géographie  des 
bases  solides.  L'ingénieur  concevait  bien  que  les  longitudes  géographiques  de  Ptolémée  n'étaient 
d'aucune  valeur;  il  puisait  les  positions  astronomiques  des  auteurs  arabes  (des  tables  de  Nassir  eddin, 
d'Aboulféda,  d'Ulugbeig),  et  de  voyageuis  qui  les  levaient  dans  des  pays  éloignés,  d'astronomes  qui 
observaient  sur  diiïérents  points  du  monde.  Il  y  trouva  des  iucohércnccs,  des  inexactitudes,  croyant 
que  ses  remarques  garantiraient  désoimais  les  géographes  des  erreurs  attachées  à  l'emploi  précipité 
des  observations.  Il  en  donne  l'exemple  dans  l'abbe  Greuet  qui  écrivit  que  la  tin  de  réclipse  de  lune 
observée  à  Casbin  en  plein  jour  peut  y  être  arrivée  SO'  plus  tard,  «  et  c'est  à  moi ,  dit  l'ingénieur, 
que  la  Lande  répond,  qu'il  faut  que  j'uye  mis  un  zéro  de  trop;  puis  il  s'écrie  poliment,  quelle 
ineptie!  il  y  en  a  là  une  asstv.  grande....  »'Et  l'ingénieur  discutaut  ces  inepties  s'altrappe  quand  il 
accepte  en  pleine  conliancc  les  observations  du  père  de  Ucze ,  du  père  Guubil  et  de  quelques  autres 
qui  ne  les  contrariaient  pas,  parce  que  la  réputation ,  le  savoir  profond  de  l'astronome  géographe 
Oaubil,  ne  laisse  pas  même  la  liberté  de  soupçonner  une  erreur  de  sa  part.  Il  en  a  conclu,  que  le. 
sud  de  la  mer  caspieunc  doit  être  déplacé  et  porté  plus  à  l'est  d'environ  S"  i/t  que  selon  les  géo- 
graphes modernes  (Bonne,  analyse  des  cartes,  H  partie,  art.  III,  5,  p.  ii-ie),  et  il  compose' cette 
configuration  étrange  qui  lui  est  propre,  de  la  mer  Caspienne  et  de  la  Crimée  déclives,  de  la  mer 
noire  et  de  l'Asie  mineure  allongées,  du  Diarbckr  et  de  Djezira  éparpillés  etc.,  etc.  Bonne,  conOanb 
toujours  dans  l'exactitude  des  observations  dont  il  s'est  servi,  persista  à  soutenir  cette  composition 
jusqu'au  bout  de  sa  glorieuse  carrière.  Son  élève  Hérisson  débitait  après  sa  mort  encore,  en  1795, 
cette  singulière  création.  —  Les  géographes  du  moyen  âge  avaient  raison  de  se  méfier  du  produit 
qui  de  leur  temps  était  impraticable ,  qui  poussa  dans  l'extravagance,  Hipparche  et  Bonne;  qui  en- 

Sendra  les  aberrations  de  Marin  (Ptolémée);  qui  tout  récemment  (par  l'observation  astronomique  de 
iebnhr),  foillit  disperser  l'archipel  compacte  entraînant  Rhode  presque  d'un  degré  vers  l'est. 


206  RÉFORME,   1550  ET   SUIT. 

léguant  loutes  les  mystifications  grecques  et  arabes  à  la  branche 
blanche,  avec  laquelle,  par  de  nouvelles  conjectures,  on  commença 
cnHn  à  procéder  avec  plus  de  circonspection  et  de  discernement. 

Plus  d*une  fois  le  bon  sens  diclait  :  à  quoi  bon  courir  à  Tinconnu 
avec  Niger  etGir,  quand  on  le  connaît  tout  près,  au  delà  de  rAltesoùils 
signalent  clairement  le  tort  de  Ptolémée.  Les  esprits  mystifiés,  qui 
aimaient  mieux  s'aveugler  par  des  espérances  chimériques,  renvoyaient 
Texistence  des  fleuves  au  delà  des  sables  mouvants  dans  des  régions 
qu'on  entrevoyait  à  travers  des  mirages. 

Le  système,  les  erreurs  et  les  hallucinations  de  Ptolémée  introduits  à 
répoqûe  de  la  renaissance  des  lettres,  portant  un  coup  fatal  à  la  géo- 
graphie :  par  son  continent  oriental  exposèrent  sur  le  vide  de  Tautre 
hémisphère  un  allèchement  à  Fenvie  de  découvertes  dans  le  Kataî  et  le 
Japon,  et  contribuèrent  à  la  découverte  du  nouveau  monde  :  offrant  au 
regard  crédule  le  Nil  et  le  Niger,  ne  cessent  d'enflammer  la  curiosité 
des  victimes  qui  se  vouent  à  des  éventualités  cruelles  et  ouvrent  les 
entrailles  de  l'Afrique. 


*—* 


APPENDICES. 


L 


LES  ÉDITIONS  DE  PTOLÉMÉE. 

On  connaît  une  édition  latine,  datée  mcccclxh  mense  junii  xxiii, 
Bononie  impressa ,  opéra  Dominici  de  Lapis  civis  bononiensis  :  mais 
Terreur  d'impression  y  est  évidente.  On  ne  connait  point  de  plus 
ancienne  impression  bolonaise  que  de  Tannée  1477;  de  Lapis  ne  s'est 
installée  Bologne  qu'une  douzaine  d'années  plus  tard;  les  savants  qui 
soignaient  l'édition  ne  se  firent  connaître  que  dans  les  dernières  années 
du  xv«  siècle;  l'atlas  gravé  en  cuivre,  les  registres  de  la  pagination,  les 
réclames  dont  est  munie  l'édition  en  question ,  sont  d'un  usage  posté- 
rieur et  ne  paraissent  qu'une  dizaine  ou  une  vingtaine  d'années  plus 
tard  :  il  faut  donc  présumer  le  déplacement  de  deux  xx  dans  la  date  et 
pour  la  rectiûer  admettre  qu'elle  devait  être  MccccLxxxn  mense  junii  ni, 
Bononiae  (1482)  (Raidelii,  comment,  de  geogr.  Ptolem.  cap.  6,  p.  40). 

Voici  la  suite  des  éditions,  dont  plusieurs  sont  de  la  plus  haute  im- 
portance pour  l'étude  de  l'histoire  de  la  géographie,  à  cause  qu'elles 
offrent  de  nombreuses  variétés,  et  contiennent  des  renseignements 
curieux  et  les  cartes  nouvelles  pour  examiner  la  marche  de  la  géogra- 
phie à  cette  époque. 

1475.  Vicenliae,  chez  Herman  Levilapis  de  Cologne;  versio  Jacobi  Angeli, 
sous  le  patronage  de  Benoit  le  trevisan ,  et  de  Angelo  Michaele;  par  les 
soins  Angeli ,  Vadii  et  Barnabae  Picardi  Vicentii. 

1478.  Romae,  (commencée  par  Conrad  Schweinheim,  terminée  par)  Arnoldus 
(Panartz)  Buckink  ;  traduite  et  élaborée  par  Domitius  Calderinus,  sur  le 
code  grec  Georgii  Gemistii  Plethonis;  atlas  gravé  sur  cuivre. 

1482.  (1462),  Bononiae,  impressit  Dominicus  de  Lapis  bononiensis;  castiga- 
verunt  Hieronymus  Mamfredus  et  Petrus  Bonus;  correxerunt  Galeottus 
Martinus  etCoUamontanus;  emendauit  Philippus  Beroaldus;  atlas  gravé 
sur  cuivre. 

1482.  Ulmae,  impressit  Leonardus  Hol;  versio  Nicolai  Bonis;  atlas  gravé  en 
bois ,  le  graveur  Johan  Schnitzer  de  Arnsheim. 

1480.  Ulmae,  réimpression  de  la  précédente,  par  Jean  Reyer,  aux  frais  du 
Vénitien  Juste  de  Albunis. 


APPENDICES.  308 

1490.  Romae,  impressit  Petrus  de  Turre,  atlas  gravé  sur  cuivre;  reprodactioa 
de  celle  de  Calderino. 

U95.  Romae? 

1507.  Romae,  impressit  Bernhardinus  venelus  de  Vitalibus,  expensis  Evan- 
gelistae  Tossini  brixiani  hibliopolae;  correxerunt,  Marcus  beneventanus 
caelestinus,  et  Johannes  Cotta  veronensis  ;  accompagnée  d* atlas. 

1508.  Romae,  reproduclion  de  la  précédente;  préface  de  Thomas  Aucuparias 
(cum  mentlone  Johannis  Ruyschi  ;  novae  tabulae  per  Marianum  moDacham 
et  Marianum  alterium). 

1511.  Venetiis,  impressit  Jocobus  Penzius  de  Leucho;  elaboravit  Bernardus 
Silvanus  eboliensis,  le  texte  et  l'atlas,  qui  est  gravé  en  bois.  (Cette  publi- 
cation cependant  ne  peut  être  considérée  pour  une  édit.  de  Ptolémée  dont 
elle  porte  le  nom ,  Syivano  élabora  sous  ce  titre  sa  propre  production). 

1515.  Argentorati,  impressit  Johan  Schollus,  cura  Jacobi  Aeszler  et  Georgii 
Ubelini;  cooperauit  Philesius  qui  avait  fourni  un  code  grec;  la  version 
latine,  accompagnée  des  noms  propres  en  grec;  le  double  atlas,  de 
Ptolémée  et  moderne,  gravé  en  bois. 

1520.  "Argentorati,  reimpressit  Johannes  Scotus,  cura  Georgii  Ubelil,  dans  le 
texte  les  noms  propres  en  grec  sont  omis;  l'atlas  y  est  de  même  double 
comme  dans  l'édition  précédente. 

1522.  Argentorati,  reimpressit  Johannes  Grieninger,  curante  LaurentioFrlsio; 
cum  neotericorum  perlustrationibus;  parce  qu'il  fit  monter  le  nombre 
des  cartes  modernes  jusqu'à  20  ;  elles  sont  réduites  sur  une  moindre 
échelle  que  les  précédentes  par  Martin  Ilacomil  ou  WaldseemûUer. 

1525.  Basileae,  impressit  Johon  Grieninger,  communibus  Johanni  Kobergeyrii 
impensis;  interprète  BiiibaldoPirkheymer;  cum  annotationibuslobannis 
de  Regiomonte. 

1553.  Basileae.  grœca,  impressit  Hieronymus  Froben ,  communibus  Nicolai 
episcopi  impensis;  curante  Erasmo  Roterodamo,  secundum  exemplar 
codicis  Theobaldi  Felticbii  medici  ingolstadtnsis;  sans  atlas. 

1555.  Lugduni,  impresserunt  Melchior  et  Caspar  Trechsel;  curante  Michaele 
Villanovano  (Serveto);  avec  atlas  double  de  50  cartes.  Les  modernes  sont 
les  mêmes  que  d'Ubelin  et  Aeszler,  la  plupart  sur  une  échelle  un  peu 
moindre;  trois  nouvelles  y  sont  ajoutées. 

1540.  Coloniae,  impressit  Johannes  ruremundanus;  procurante  Johanno 
Novioniago,  in-8«,  sine  tabulis. 

1540.  Basileae,  impressit  Henric  Pétri;  curante  Sebastiano  Munstero;  atlas* 

1541.  Basileae,  prfor  secundo  repetita. 

1541.  Lugduni  aut  Viennae  in  Gallia;  ex  officine  fratrum  Trechseliorum  ; 
sumptibus  Hugonis  a  Porta  bibliopolae  lugdunensi  ;  c'est  la  reproduction 
de  l'édition  de  l'année  1535. 

1542.  Basileae,  tercia  viceMunsteri. 

1545.  Yeneliis,  atlas  cum  tabulis  novis  Jacobi  Castaldo.  (Zurla,  sulle  antique 
mappe  idrogeogr.  c.  31). 

1545.  Basileae,  quarto  Mu nsteri  reimpressa. 

1546.  Parisiis,  grœca,  impressit  Christianus  Wechel.  * 

1548.  Venetiis,  italica,  imprimée  par  Giovanni  Baptista  Pedrezano;  version 
de  Pierre  André  Mattiole. 

1552.  Basileae,  quinto  Munsteri,  cum  pra^fationeConradi  Lycostheni  rubea- 
quensis. 


APPENDICES.  209 

i361.  Venetiis,  italica,  apud  Vincentium  Valgrîsium,  trudotta  daGirolamo 
Ruscelli ,  con  lavole,  in-4®. 

1563.  Venetiis,  apud  Vincentium  Valgrisium;  ex  emendatione  Joseph! 
Moletii  y  in-4o;  atlas  de  la  précédente  italienne. 

iS64.  Basileae,  Henric  Pétri;  cartes  de  Ptolémée  petit  format,  gravées  en 
bois  accompagnant  Tétition  de  Pomp.  Mêla. 

1571.  Basileae,  Henric  Pétri ,  donnait  les  cartes  de  Ptolémée  gravées  en  bois, 
à  son  édition  ^[ylandrine  de  Strabon. 

1573.  ou  i574,  Venetiis,  italica,  apud  Jordanum  Ziletti;  versio  Ruscelli,  a 
Johan.  Malombra  revista. 

1578.  Goloniae,  typis  Godofredi  kempensis,  Leonardus Strickius  édit.  tabulas 
Gerhardi  Mercatoris. 

1584.  Goloniae,  Agrippinae,  Godofredus  kempensis,  ex  emendatione Gode- 
fredi  Mercatoris. 

1596.  Venetiis,  Johannes  Ântonius  Maginus,  haeres  S.  Galignani  de  Karera. 

1397.  Goloniae,  la  précédente,  reproduite  per  Petrum  Kesçhedt. 

1599.  Venetiis,  italica,  apud  haeredes  Melchioris  Sessae;  versio  Ruscelli, 
emendata  per  Joseplium  Rosaccium. 

1605.  Amstelodami  seu  Frankofurti  grœco-ltkiina ,  per  Jodocum  Hondiumet 
Cornelium  Nicolai  ;  elaborata  (olim)  per  Gerardum  Mercatorem ,  juxta 
exemplar  Pétri  Montani. 

1668.  Bononiae,  Johannis  Aotonii  Magini  récusa. 

1617.  Arnheimi ,  Joh.  Ant.  Magini,  récusa. 

1618.  Amstelodami  seu  Frankofurti,  ^rspco-latina ;  Isaac  Elzevir  sumptibus 
lodoci  Hondii,  curante  PetroBertio. 

1621.  Padova,  italica,  sumptibus  P»uli  et  Francisci  Galignanorum  ;  versio 
Leonardi  Gernoti  (antérieurement  publiée  à  Venise). 

1695.  Franeckerae,  atlas  mercatorianus. 

1698.  Trajecti  ad  Rhenum,  atlas  Mercatoris  per  Franciscum  Halma  et 
Guillelmum  van  de  Water. . 

1704.  Amstelodami,  le  même  reproduit. 

1715.  Parisiis,  variae  lectiones  graecae,  in  opère;  bibliotheca  coisliniana, 
olim  segueriana,  sive  manuscriptorum  accurata  descriptio,  studio 
Bernard!  de  Montfaucon. 

1730.  Amstelodami ,  tabulae  perR.  et  J.  Wetsteniios. 

1843.  Lipsiae,  gracce,  Sumpt.  Garoli  Tauchnitz,  edidit  Garolus  Fridericus 
Augustus  Nobbe,  â  vol.  in-16,  sans  cartes. 

1847,  Le  même  Nobbe  et  Wilberg,  sont  en  train  de  la  grande  publication 
critique  avec  atlas. 


il 


IL 


CARTOGRAPHES 


CONNUS  PAR  ABRAHAM  ORTELIUS  EN  1570  ET  1592. 


Ortelius,  publiant  son  recueil,  voulut  indiquer  loyalement  ses  soarees. 
Dans  ce  but,  au  commencement  de  son  ouvrage,  il  mit  une  liste  des 
cartographes  de  son  époque,  antérieur  à  Tannée  1570.  Les  composi- 
tions de  plusieurs  remontent  à  Tannée  1528  et  peut-être  aux  antécéoen* 
tes  encore.  11  y  a  là  des  cartes  qu'il  n'a  pu  se  procurer  ni  voir.  Sa  liste, 
quoique  nombreuse,  n*est  pas  assez  complète.  Il  en  a  oublié  beaucoup 
qu'il  cite  à  d'autres  occasions.  Reproduisant  cette  liste  des  carlograjj^bes 
en  1592,  il  Taugmenta  considérablement  par  le  recensement  de  pro- 
ductions postérieures  et  toutes  récentes,  mais  il  ne  négligea  pas  d^ajoii- 
ter  de  plus  anciennes,  qui  échappèrent  à  sa  connaissance  en  1570.  Je 
les  arrange  par  ordre  de  matière  et  de  pays  dont  ils  dressèrent  les 
tableaux ,  marquant  d'un  astérisque  ces  cartes  qu'Orlel  a  copié  dans 
son  tbeatrum  de  1570  et  de  1592. 

Petits  atlas.  Jean  HonteruSf  à  Zurich,  chez  Christophor  FrosdiD- 
ver,  1546,  et  à  Anvers,  chez  Jean  Richard  1560;  Girolamo  RuMedU, 
à  Venise  chez  Yinc.  Valgrise  1561;  Joseph  Molettus,  ibid.  1562. 

Plans  de  villes  :  Antoin  Dupinet  ou  Pinetus  à  Lyon  1564;  JuUut 
BaUinuê;  Georg.  Bruno, 

Je  passe  sous  silence  les  cartes  historiques. 

Cartes  marines  du  monde  :  Martin  WaldseemUUer  ou  Ilacomilns 
fribourgeois;    Laurentius   FriHus ,    1522;    Gérard   Mereator  rapel- 
mundanus,   ad   usum   navigantium,    Duysburgi   1569.   —    Europe 
marine  :  Nkolas  Nicolaï  le  dauphinois  (mort  1583);  laeq  Hamm 
portugais,  à  Venise  1569;  Luc  Aurigarius  ou  Waghenaer,  à  Amster- 
dam, ap.  Clessonium Cornelium.  —  Isolario : BenoU Bordoneimori  1551), 
à  Venise,  chez  Nicolo  d'Aristolile  detto  Zopino,  1554;  Thomas  Porcaecki^ 
da  Casliglione,  arrelino,  à  Venise,  chez  Simon  Galignanis  et  Girolamo^ 
Porro,  1572;  Camocio,  in  Venezia,  1571.  —  Atlas  marins,  oceanî^ 
occidentalis  :  Luc  Aurigarius  ou  Waghenaer,  Lugd.  batav.  ap.  Christs. 
Plantin,  1584,  1589. 

Mappemondes  :  Caspar  Vopellius  Medebach,  à  Colore;  Pierre  Apiepm 
(mort  1552)  à  Ingolstadt  1520;  Oronee  Fine  dauphinois  (mort  1555),  ^ 
Paris,  chez  Gormont  1515;  Sébastien  Cabolus,  vénitien,  1544; 
Castaldo  piémontais,  à  Venise  et  à  Rome;  Jean  baptiste  Guieeiardii 


APPENDICES.  21  f 

à  Anvers  1549;  Je(m  Dominiq  Meihoneus^  à  Yemse^  ap.  liratliseuin  Paga- 
num;  Henri  Pontanus  1556  (i),  et  Pierre  de  Aggere,  à  Malines;  Guil- 
laume Postellus,  à  Paris;  Gemma  Frison,  à  Anvers;  Gierard  Mer- 
ccUor  1369,  etc. 

Europe  :  Comeil  Antonio,  à  Frankfort-sur-Ie-Mein  ;  Cagpar  Vopeltiui 
Medebach,  à  Nuremberg;  Jean  Bwcius  aenieola,  à  Paris  chez  Vi^echel; 
Henri  ZeU^  à  Nuremb.  ;  Gérard  Mercator,  à  Duysburg  1564, 1572. 

Asie  :  Jaeq  Caslaldo,  à  Venise  1568;  Abreûiam  Orlel  1567.  —  Chine  : 
*  iAtdovieus  Georgius. 

Afrique  : /ocg  Caslaldo,  à  Venise;  Livius  Sanutus,  à  Venise,  ap. 
Damian.  Zenarum;  Pierre  Pigafetta  vicentin,  à  Rome. 

Amérique  :  Jérôme  Chiauez  (inédite);  I>t>j|ro  Gutierus,  à  Anvers,  chez 
Jérôme  Cock.  —  Pérou  :  *  Didacus  Mendezius.  —  Florkies  :  *  Jérôme 
Chiauex. 

Espagne  :  Pierre  de  Médina,  à  Séville,  chez  Jean  Gutiarnùs  1560;. 
Jaeq  Caslaldo,  à  Venise;  Thomas  Geminus,  à  Londres;  Vincent  Corsu- 
Umis,  à  Venise,  chez  Mathieu  Pagano;  *  Charles  de  Leclus  ou  Clusius 
d*Arras  (mort  1609).  —  Hisp.  antiqua  :  Henr.  Coquus  gorchonius,  à 
Salamanca,  1581.  —  Canton  sévilien  :  *^  Jérôme  Chiauez,  —  Isie  de 
Cadix  :  *  George  Hœfnaglius,  à  Anvers. 

Portugal  :  *  Ferdinand  Alvares  Zeccus  ou  Secco,  à  Rome,,  chez  Michel 
Tramezzi  1560.  —  Azores  :  "  Ludovicus  Teisera, 

Italie  :  Benoît  Bordone;  *  Jaeq  Gastaldo.  —  Piémont  :  '^^  Jacq^ 
Caslaldo.  —  Lombardie  :  Bonaventure  Castiglione  milanais  (mort  1555). 
—  Milanaise  :  *  Jean  George  SettcUa  ou  Septala,  à  Anvers,, chez  Jérôme 
€!ock.  —  Toscane  :  *  Jérôme  Bellarmalus ^k  Rome;  Etienne Florenlinus, 
à  Rome  1584.  —  Naples  :  *  Pyrrhus  Lygorio  (mort  158^,  à  Rome, 
cliez  Michel  Tramezzino^  1558.  —  De  insuiis  itaticis  Leafêier  Alberti,  à 
Venise  1568.  —  Sicile  :  *  Jaeq  Caslaldo,  —  Corse  :  Augustin  Giusli- 
niani  ou  lustiniaaus,  évéque  de  Nebbio^  (mort  1551).  —  Cartes  topogra- 
phiques :  Friul  :  Gregoir  Amaseo  (mort  1541).  Trévise  :  Jean  Pina- 
dellus.  Padouane  :  *  Jaeq  Caslaldo,  Veronèse  :  *  Benoît  Brogndi,  à 
Venise  1564.  Cremonèse.  *  Antonius  Campus,  Lacus  benacensis  : 
Georgius  lodocus  1546;  Dominicus  Machaneus,  Lacus  larius  :  *  Paulus 
Jovius  (mort  1552).  insula  Ischia  :  *  Julius  lasolinus,  Apulia  :  *  Jaeq. 
CoitaléU),  Abruzzo  :  *  Natalis  Bonifacius  sebenicensis  1587. 

Grèce  et  Turkie  :  Nicolas  SophUanus,  à  Rome;  Pyrrus  Lygorio,  à 
Rome;  *  Jaeq  Castaldus. 

Palestine  :  Bonaventure  Broehard,  à  Paris,^  chez  Poncet  le  Preux,  1555; 
Gérard  Mercator ,  k  Anyers  1557;  Jaeq  Ziegkr  (mort  1549),  à  Slrasb. 
chez  Wendelin  Richel,  1526;  Martin  de  Brion,k  Paris,  chez  Jérôme 
Gormont;  Wdfgang  Wissenburg  de  Bâle,  à  Strasb.  chez  Weud.  Richel  ; 


(I)  OcIrmdiD  fSjanT.  i8S6,  pour  Henri  Pontanns  natif  de  Arnbem  en  Gueldre^à  présent  bourgeois 
delà  Tille  de  Malines  pour  imprimer  et  graver  une  mappe  du  monde  en  forme  d'ung  aigle  de  l'em- 
pire,  borné  des  noms  oes  princes,  potentats,  dignitez  et  offices  concernant  le  dit  empire,  avec  le» 
ydttn  impériales  ancbiennes  et  modernes,  colloquées  selon  l'ordre  de  raiphabcth  pour  les  trouver 
pins  aysement,  ensemble  les  blasons  et  armoyeres  de  chacune  dMcellcs  avec  figuracye  de  sept 
plmetet  el  d'one  bordure  crotesques  (dans  les  archives  de  l'état ,  conseil  privé  »  r^istre  n*  Wf. 


âl2  APPENDICES. 

Chrétien  Soret,  1570;  *  Tileimnnus  SieUa  de  Sigen,  à  Wilteberg;  Arias 
MonlanuSy  à  Anvers;  Christian  Adrichomius  delphensis,  Coloniae,  ap. 
Arnoldum  &Iyliuin,  1590. 

Hongrie  :  Lazarus,  secretarius  cardlnalîs  Arigoniensis,  quam  edidit 
logolstadi  Apianus  I5i8;  Georgius  Collimitius,  quam  recognovit 
Johannes  Spiesshanimer,  seu  Guspinianus  schweinrurtensis  franconus, 
mortuus  15:29, édita  à  Pelro  Apiano;  *  Wolfgangus  Lazius (mortuus  1565) 
Yiennae;  Jacq  Castaldus,  à  Venise;  *  Martin  Cynthius  vel  ZifUkius 
noricus,  à  Nurimberg,  15G7;  Johannes  Sambucus  tymayiensis 
(mortuus  1584)  Viennae  1570  (voyez  Pologne).  —  Transylvanla  :  *  Joh, 
Sambucus^  à  Vienne  1566.  —  Slavonla  :  Wolfg,  Lazius ,  à  Vienne, 

*  Augustinus  Hirsvogelj  à  Nurimberg,  chez  Jean  Weygel.  —  Istrie  : 
Pierre  Coppus. 

Allemagne  :  Christianus  Schrotl  sousbekensis,  à  Anvers,  cbez 
Jérôme  Gock;  Christophorus  Pyramius,  à  Bruxelles  1548;  Sébastien 
Bîunster  (mort  1552),  Basiliae,  quam  Tilemannus  Stella  emendauît  et 
locuplelauit,  Wittebergae,  apud  Petrum  Zeitz,  1567;  Nicolas  a  Cusa; 

—  cours  du  Danube,  Christiani  Sgrothon;  tractus  Rheni,  anonymi  1569, 
et  le  recueil  des  cartes  d* Allemagne  à  Anvers,  chez  Gérard  de  Jode,  de 
Nimègue  1569.  —  Auslria  :  *  Wolfgangus  Lazius.  —  *  Tirol;  Wolf,  Lazius, 
Viennœ,  ap.  Johan.  Majorem.  —  Bavaria  :  *  Erhardus  Reysch,  lyrolien- 
sis,  Norimbergse  1540;  *  Jean  Tourmayer  ou  Aventinus  (mort  1584), 
Landshuti  1533;  *  P/«7ipp«  Apien,  à  Ingolsladt  1568.  —  Salzburg  :  * 
Marc  Secsnagel  siue  Secznagel  salzbourgeois.  —  Suabe  :  David  ZellzUn, 
à  Ulm,  1562.  —  Wurtemberg  :  *  Gabriel  Gadner  ou  Garner,  à 
Anvers  (1569)  1575. 

—  Helvétie  :  Jean  Slumpf,  à  Zurich,  chez  Ghristophor  Froschover; 

*  Cille  Tschudi  (mort  1572),  à  Bâle,  chez  Isingrin  1560;  Adelberg  Saura- 
cher,  à  Bâle,  i^4.  —  Berne  :  Thomas  Scepsius,  à  Strasb.  cbez  Bernard 
Tobin  1578.  —  Valais  :  *  Jean  Schalbeter,  —  Franche-comté  :  *  Ferdi- 
nand à  Lannoy  (mort  1579),  à  Anvers,  chez  Jérôme  Gock  ;  Cilles  Bulûm, 
ibidem;  Uugo  Cusini.  —  Alsace,  Daniel  Speckel,  à  Strasburg,  1576.  — 
Lorraine  :  Gérard  Mercalor;  Joh,  ScHlius.  —  Frankonie  :  *  Sébastien 
Rotenhan,  à  Ingolstadt  1543;  David  ZellzUn,  1577.  —  topographie  de 
Fichtelberg  :  Caspar  Bruseh  egeranus,  Ulmae,  ap.  Sebast.  Frank. 

—  Bohème  :  *  Jean  Criginger,  à  Prag,  1568.  —  Moravie.  *  PauL 
Fabricius,  à  Vienne  1570.  —  Silésie  :  *  Martin  Helwig  neîssin,  à. 
Neisse  1561.  —  Luzace  et  Mîsnie  :  *  Bartholomé  Scultet,  à  Gôrlitz  1569. 

—  Thuringia  :  *  Jean  Mellinger  ou  Melenger  de  Hall  à  Weimar.  —  Mîs- 
nie et  Thuringue  :  Jean  Criginger,  à  Praeg  1568,  —  topographie  de 
Mansfeld  :  Tilemannus  Stella ,  à  Gologne  chez  François  Hogenberg.  — 
Brandenburg  :  *  Elias  Camerarius;  Léonard  Thurneisser,  —  Poméra- 
nie  :  *  Ilenricus  Zellius,  *  Pierre  Artonoeius,  —  Saxe  :  *  Christian 
Schroten.  —  Ditmars  :  *  Pierre  Bockel,  à  Anvers,  chez  Jean  Liefînk  1559. 

—  Westfalia  :  *  Christian  Schrot,  Galcarise,  ap.  Vincent  Houdaen,  1572. 

—  Oldcnburg  et  Frisia  orienlalis  :  Laurent  Michaelis  ab  Hogenkir- 
chen,  Anvers,  1579:  *  Joh,  Florianus  antwerpianus,  Anvers.  1579.  — 
Munster  :  *  Geofroi  Mascopius  ou  Machop  embricensis,  Ember  ap. 
Kemig.  Hogenberg  1558.  —  Hassia  :  Julius  Jasolinus,  à  Marpurg  1575; 


APPENDICES.  213 

*  Jean  Dryander,  —  Fulda  ;  Wolfganq  Regrwil  1574.  —  Archieppat. 
Colonien.  Cornélius  Adgerus,  Colonise,  ap.  Francis.  Ilogenberg;  1583; 
Elias  Hofmann,  Frankof.  ad  Menum  1588. 

— Pays-Bas.  Gilles  BuKonius,  à  Anvers,  chez  Jean  Liefink;  Jean  Horn, 
à  Anvers;  Malhias  Zinck  noricus;  GaliU  belgica,  Franciscus  Uogenberg 
à  Cologne.  —  Gueldre  et  Cleve  :  *  Chrétien  Schrot,  à  Anvers,  chez 
Bernhard  Putean ,  et  chez  Jérôme  Cock.  —  Frlsia  occiden  :  *  Sibrandus 
Leonis  leovardlensis.  —  Kampen  :  Georg,  Stempelius  goudanus. 
Colonise  1587.  —  Brabant,  Frise,  Hollande,  Zeeiand  :  *  Jacquaventria, 
à  Malines.  —  Flandres  :  *  Gérard  Mercalor,  1540.  —  Hanonia  et 
Luxemb  :  *  Jacq  Surhonius,  —  Luxemb  :  Christian  Schrot  sousbeken- 
sis;  Joh,  Scillius. 

France.  Nicolaus  Germanus  (à  Cusa);  Jean  Stumpf,  1548;  Oronce 
Fine  briançonnais  (mort  1555)  à  Paris,  chez  Gormont;  André  Thevet 
d*AngouIème  (mort  1590);  *  Jean  Jolivet  à  Paris,  chez  Oliver  Truchet, 
1560,  1570;  Guillaume  Postel  (mort  1581),  à  Paris  1570, 1572.  —Bou- 
lonais  :  *  Nicolas  Nicolaï  dauphinois  de  Lagrave  en  Oysans ,  à  Paris  1558. 

—  Yermandois  ;  *  Jean  Surhonius,  à  Anvers ,  chez  Christophor  Plantin. 

—  Picardie  :  *  Jean  Surhonius,  1560.  —  La  Maine  :  Macaeus  Ogerus, 
Mans,  1539.  —  Anjou  :  *  Licinius  Guyel,  à  Paris,  1573,  —  Poitou  : 

*  Petrus  Rogierus ,  Parisiis ,  ap.  Franc.  Desprez.  —  Berri  :  *  Jean  Cala- 
meus,  à  Lyon,  ap.  Gryphium.  —  Limousin  :  *  Gabriel  Simeoni  ilorintin 

Îmort  1570).  —  Languedoc  :  *  Charl  Lecluse  ou  Clusius  d'Arras 
mort  1609).  —  Venesin  :  *  Slephanus  Ghebellinus,  —  Bourgogne  : 
Stephanus  Tabourotus,  —  Savoie  :  *  Aegidius  Bulioniu^  belga. 

Iles  britanniques  :  Gérard  Mercator  1564;  *  Humfred  Lhuyd  ou 
Llwyd,  Llhwyd,  Lhoyd,  denbygien  (mort  1570);  Christophor  Saxton, 
Londini  1580. 

Skandinavie  :  iVtcoio  Geno,  à  Venise,  chez  Vincent  Valgrisi,  i561, 1562; 
Olaus  Magnus  suédois  (mort  1568),  à  Venise  1363  ;  Corneli  Antonius,  à 
Amsterdam;  François  3Ionachi,  à  Anvers,  chez  Sylvestre  a  Parisiis; 
Levin  Algoet,  à  Anvers,  chez  Gérard  Judeus  (de  Jode).  —  Danemark  : 
Marc  Jordan,  à  Kopenhage,  chez  Jean  Vinilor  1552;  Henri  Ranlzow, 
à  Cologne,  chez  Franc.  Hogenberg;  *  Cornélius  Antoni,  —  Slesivig  : 
Marc  Jordan,  à  Hamburg.  ap.  Joachim.  Leoninum.  —  luthia  :  ilf arc 
Jordan.  —  Islande  :  *  Andréas  Velleius, 

Moskovie  et  Russie  :  Antoin  Wied,  à  Anvers;  *  Antoin  lenkinson 

imort  1584),  à  Londres  1562;  Sigismond  Herberstein  siy rien  (mort  1566), 
i  Bâles,  chez  Oporin  1556. 

Pologne  :  tabula  Sarmatiae,  rcgni  Poloniae  et  Ilungariac,  utriusque 
Valachiae,  Turciae,  Tartariae,  Moscoviae  per  Florianum,  Cracoviae 
1528;  *  Venceslav  Grodecki,  à  Bâle,  chez  Oporin;  Jacomo  Castaldo, 

favé  par  Paolo  Forlani,  à  Venise  1568;  Andréas  Pograbius  de  Pilzno, 
Venise  1569.  —  Litvania  :  Mathias  Stubitz,  à  Cologne,  1589.  — 
Osvietzim  et  Zator  :  *  Stanislav  Por...  (Porçbski,  Porembski),  à  Venise 
1565.  —  Prusse  :  *  Henri  Zell,  à  Nuremberg;  Caspar  Heuneberger 
crlichensis,  Rcgiomonti,  ap.  Georg.  Osterger,  1576.  —  Livonie  :  Marc 
Amhroise,  à  Anvers;  *  Jean  Portantius, 


214 


APPENDICES. 


RECUEIL  DE  CARTES. 


Gérard  de  Jode  nouomagen- 
818,  1569. 

5.  Saxonia  inf.  Christ.  Schrotten. 

6.  Livonia,  loan.  Portantius. 
Moscqvia,  Ant.  Jankinson. 

7.  Polonia,  (composit.  différente  de). 

8.  Bohemia,  Joan.  Griguiger. 

9.  Moravia  per...  (différente). 
Siiesia  per...  (Mart.  Heilwig). 

10.  Hungaria  et  Transylv.  Matthaeus. 
Zinthius. 

11.  Austria,  Wolfg.  Lazius. 

13.  Siavonia,  August.  Hirsvogel. 
13.  Stiria. 

Carinthia,  (Wolf.  Lazius). 
U.  Tiroi,  (Wolf.  Lazius). 

Carniola,  (différente). 

15.  Franconia,  (Seb.  Rotenhan). 
Salzburg,  Marc  Setznagel. 

16.  HeWetia,  auctorc; ....  (différente). 

17.  Snevia,auctore 

18.  Vaiesia,  loan.  Schalbeter. 
Basilcae  tract.  Sebast.  Munster. 

19.  Bavaria,  (diffi^epte). 

20.  Wirtenb.,Georg.  Gamer. 
Palatin,  bavar.  Erhard  Reysch. 

21.  22,  Danubius,  Christ.  Sgrothon. 

23.  Thuringia,  loan.  Mellinger. 
Misnia,  BarthoL  Scultet. 

24.  Hassia,  genuinus  nec  ungue  ante- 

hae  visus  typus. 

25.  26,  27  trac'tus  Rheni ,  1569. 

28.  Clivia. 

Mansfeld  (différente). 

29.  Milinster,  Godefr.  Mascbop. 

30.  Frisia,  (très-différente). 

31.  Gddria,  (différente). 

32.  Hollande,  (échelle  réduite). 

35.  Zeeland.  (lo.  Dav.  mêmeéch.  diff.). 
34.  Brabant,  (lo.  Daventr.). 

5£^.  Flandria,  (la  même  échelle). 

36.  Pays-Bas,  Mathias  Zinck. 

37.  Pomerania,  Henr.  Zellius. 
Thietmarsen.  Petr.  Bockel  réd.). 
Prussia,  Henr.  Zellius  (réduite). 


Abraham  Ortelius  arUver- 
pien8i8 ,  i^lO, 

*idem. 
46.  Ant.  Jenkinson,  décoré  par  d'au- 
tres figures. 

44.  Venceslai  Grodecki. 

25.  (Jean.  Griginger,  même  échdle). 
*alia,  Pauli  Fabricii. 

26.  Martin.  Heilvig. 

42.  Hungar.  Wolfg.  Lazius. 

45.  Transylv.  loan.  Sambucus. 

27.  Wolfg.  Lazius. 

41.  Au gustinus  Hirsvogel. 

*idem. 
/'idem. 
VWolf.  Laz. 
24.  Sebast.  Rotenhan ,  même  échelle. 

28.  Marc  Secznagel. 
31.  Aegidius  Tchudius. 

'analogue  de  Dav.  Setzlin  1572. 

'idem. 

29.  loan  Aventinus. 

30.  Tubingse  édita  l558  (G.  Gard.). 
Erhard  Reysch. 

/*idem. 
videm. 
'alla,  Joh.  Dryandri. 


*alia ,  Til.  Stellae. 
24.  Godefr.  Mascop.  (échelle  réd.). 
20.  (lo.  à  Daventr.?). 

15.  Christ.  Schrot. 
19.  loan.  a  Daventria. 
18.  loan.  a  Daventria. 

16.  loan.  a  Daventria. 

17.  Gérard  Mercator. 
14.  alla. 

*idem. 
22.  Petr.  Bockel. 
Henr.  Zellius. 


Par  cette  confrontation  on  voit  que  sur  52  feuilles  numérotées  (5-57) 
on  a  44  cartes.  De  ce  nombre  25  de  mêmes  auteurs  ou  différents,  repa- 
raissent dans  le  recueil  d*Ortel  de  Tannée  1570;  des  21  restantes,  12 
entrent  dans  ses  éditions  postérieures.  Mercator  approuve  et  recofli- 
mande  à  Ortel  la  reproduction  des  cartes  de  Lazius  :  quelques-unes 
furent  antérieurement  reproduites  pour  Iode.  Il  est  remarquable  comme 


APPENDICES.  215 

l'accouplement  de  plusieurs  cartes  sur  la  même  feuille  se  rencontre 
chez  les  deux  éditeurs,  voir  les  n^  20,  37,  ensuite  i4,  23.  La  position 
géographique  des  pays  certainement  occasionna  cette  concordance. 
Ortel  substitua  dans  ses  éditions  postérieures  à  la  Bavière  de  Jean 
Aven  tin  us,  celle  de  Philippe  Âpien,  dont  la  carte  est  plus  analogue  à  la 
Bavière  dedeJode;  il  substitua  au  Wurtemberg  d'anonyme  de  1558, 
George  Gardner  qui  semble  être  le  même  que  Tanonyme;  il  copia  la  Suabe 
de  David  Setzlin  de  1572,  dont  la  carte  est  très-analogue  à  celle  de  de 
Jode;  et  il  n'a  pas  jugé  à  propos  d'introduire  dans  son  recueil  les  tractus 
Rbeni  et  Danubii  dont  la  reproduction  reste  à  de  Jode  seul.  A  Jode  seni 
restent  Saxonia,  Yalesia,  Glivia  et  plusieurs  cartes  d'auteurs  qu*Ortel 
n'a  pas  admis  dans  son  iheatrum,  à  savoir  :  Polonia,  Hungaria,  Hel- 
vetia,  Hessia,  Pays-Bas,  etc.  Iode  recommande  les  cartes  de  Gueldre, 
de  Hollande  et  de  Flandre  d'une  manière  singulière,  inscrivant  au  bout 
des  feuilles  :  ad  exemplar  descriptionis  quam  edidit  Romae  Mich.  Tra- 
mesîni ,  nunc  castigatior ,  prostat  Antwerpise  apud  Gerardum  de  Iode  in 
borsa  noua.  Les  cartes  de  Iode  ne  sont  pas  privilégiée ,  celles  d'Ortel 
sont  sous  la  sauve-garde  de  privilège,  pendant  dix  ans  personne  ne 
devait  les  reproduire.  On  se  demande  si  cette  protection  et  assurance  de 
la  propriété  intellectuelle,  venait  des  égards  pour  les  auteurs  copiés  ou 
pour  le  copiste  des  auteurs? 

Gérard  de  Jode,  fils  d'un  mercier,  Guillaume,  naquit  en  1515  à  Nimè- 
gue.  Habile  graveur  et  excellent  mathématicien ,  il  s'établit  à  Anvers , 
où  il  acquit  plusieurs  possessions  et  avait  sa  boutique.  Il  publia  plu- 
sieurs ouvrages  pour  son  ami  Ortel.  Tous  les  deux  entrèrent  en  1547 
dans  la  corporation  de  S.  Luc,  l'un  comme  graveur  et  marchand  d'es- 
tampes, l'autre  comme  enlumineur  de  cartes.  De  Jode  mourut  le  5 
février  1791,  laissant  treize  enfants  de  son  premier  mariage,  et  une 
Teuve  en  second.  Il  est  chef  d'une  famille  de  graveurs  qui  ont  illustré 
l'école  d'Anvers.  (Ges  renseignements  sur  Iode  m'ont  été  communiqués 
par  mon  ami  Yerachter ,  archiviste  de  la  ville). 

Probablement  Mercator  avait  en  vue  les  publications  de  Iode,  quand, 
encourageant  en  1570  son  ami  Ortelius  à  copier  les  cartes  de  Lazius  : 
il  accable  de  réprobation  les  ignorants  qui  s'avisent  de  publier  les 
cartes,  sine  ordine,  sine  proportione,  sine  discretione ,  tam  falsas  et 
depredatas,  quam  genuinas  et  veras  descriptiones  in  unum  corpus  con- 
gerunt.  (Iode  edidit  genuiuam  Hassise). 

Cependant  Ortelius  éprouva  que  le  choix  pour  former  un  corps  ren- 
contrait des  obstacles,  quand  en  1572  il  sollicitait  d'obtenir  le  privilège 
pour  la  carte  de  Hainaut  déjà  préparée  d'après  son  choix.  L'obligeance 
de  M.  Alexandre  Pinchart,  qui  m'a  communiqué  plusieurs  matériaux 
des  archives  de  l'état ,  m'a  fait  part  d'un  document  à  cet  égard  très- 
intéressant  :  c'est  la  lettre  de  Philippe  de  Sainte  Aldegonde,  seigneur 
deNoircarmes,  grand  bailli  de  Hainaut,  etc.,  relative  aux  publications 
d'Ortelius.  Voici  sa  teneur  : 

Ceulx  du  conseil  prive  de  sa  ma'%  m*ont  envoie  avecq  leurs  lettres  deux 
requestes  que  Abraham  OrtoUius,  tailleur  de  figures,  leur  aurait  présente, 
afin  d*avoir  cony!  de  librement  povoir  imprimer  et  vendre  la  quarte  de 
Haynnau,  et  de  faict  m*en  ont  faict  tenir  une  ja  imprimée,  afin  que  je  leur  en 


216  APPENDICES. 

donnisse  mon  advis,  a  quoy  je  n*ay  satisfaict  pour  trouver  ce  faiet  de  consé- 
quence, et  yen  meismement  que  les  molles  et  formes  en  sont  faictes  et 
dressées.  Il  m*a  semble  a  correction  bien  humble  d*icelle  que  cette  impri- 
merie de  quartes  du  dict  pais,  ne  se  doibt  permettre,  pour  les  raisons  que 
yre  exce  scait,  cecy  importer  au  pais.  Mais  bien  d*estre  servie  escripre  aus 
dictes  du  conseil  prive,  que  en  tous  cas  ils  fâchent  debvoir,  par  quelle  voie 
que  ce  fut,  d'avoir  du  suppliant  tant  ses  patrons,  formes,  que  aultres  choses 
aprestees  pour  la  susdicte  imprimerie,  veu  certes  monseigneur  a  mon  advis, 
qu'il  n'est  requis  pour  le  service  de  sa  dicte  majesté,  bien  et  repos  du  dict 
pays,  que  la  dicte  quarte  soie  mise  en  lumière.  Qui  est  monseigneur,  on  me 
recommondant  humblement  a  la  bon'  grâce  de  v«  exe*'  je  prie  dieu  importer 
a  cielle  en  prospérité  la  sienne  sente.  Du  camp  devant  Harlem  le  20  mars  1572 
avant  pasques. 

Ce  n'est  qu'en  1579  qu'Orlelius  prépara  la  carte  du  Hainaut  qui 
mérita  le  privilège.  Celte  carte  était  celle  de  Surhonius  montois  du 
Hainaut. 


III. 

OUVRAGES  D'ABRAHAM  ORTELIUS 

ET    LES   PUBLICATIONS   CONTEMPORAINES   A   ANVERS. 

Supplément  au  chap,  216,  p.  i87  ci-dessus. 

D'après  les  indications  que  M.  Félix  Van  Hiilst  réunit  dans  son 
intéressante  nolicesur  Abraham  Ortelius  (Liège  18i6),  je  puis  rectifier 
et  suppléer  FinsuiBsance  de  ce  que  j'ai  dit  des  éditions  de  ce  bien 
mérité  anversois,  sans  épuiser  cette  question  bibliographique. 

La  première  édition  de  son  TheatrumOrbis  de  1570  contient  55  cartes; 
la  seconde  de  1571  autant  ou  augmentée  à  64,  avec  le  texte  llamand 
elle  contient  67  caries;  la  troisième  de  1575  montée  à  70;  la  quatrième 
parut  en  1578....  et  une  avec  le  texte  français;  la  cinquième  en  1592 
compte  108  cartes  (avec  les  cartes  de  parergon  154);  et  la  sixième  du 
vivant  de  Fauteur  en  1595,  avait  115  cartes  (et  52  de  parergon).  L'édition 
^  posthume  de  1601 ,  chez  Plantin,  était  encore  augmentée ,  quod  anle 
extremum  vitse  suae  postremum  recensuit. 

Je  n'ai  jamais  vu  d'exemplaires  accompagnes  de  quelque  langue 
vulgaire,  flamande,  espagnole  ou  italienne;  j'ai  vu  seulement  un 
exemplaire  du  texte  allemand  :  theatrum  oder  Schaybuch  des  Erd- 
kreizes.  Antverpiae  1580,  que  possédait  la  bibl.  nationale  à  Varsovie. 
L'édition  était  d'Anvers,  où  se  trouvaient  les  planches.  Une  contrefaçon 
française  est  impossible  et  inadmissible;  la  seule  Italie,  à  cette  époque, 
était  capable  d'essayer  une  copie.  Si  une  édition  à  la  langue  vulgaire 
aurait  copiée  les  planches,  elle  serait  une  édition  licite  à  l'étranger.  Les 
cartes  et  theatrum  d'Orlelius  sont  privilégiés  pour  un  certain  nombre 
d'années  dans  le  pays  où  elles  paraissaient;  ce  privilège  ne  pouvait 
étendre  son  effet  à  l'étranger,  ni  même  dans  le  pays  après  le  laps  des 
années  privilégiées  (i).  Longtemps  encore  cette  liberté  de  publication 

(I)  Voici  la  teneur  du  privilège  de  la  première  édition  du  theatrum  : 

Deconincklycke  roaiesteyt  verbiedt  ecnen  yoghelycken  in  aile  dese  tyne  erfnederUmden ,  dat  hem 
niemant  en  venrordere  dit  boeck,  te  weten'de  tafelen,  of  te  scbriflen  desseirs,  in  tgebeele,  oftin 
daele,  in  gheanderleye  talen  oft  sprakcn  nae  te  dmcken  ;  oft  ciders  ghedmckt,  binnen  syne  voor- 
teyde  lamden  te  brengeo,  oft  te  vercoopen ,  de  tijt  van  tien  iaren  naett  commende.  Op  de  verbeurte 
van  aile  de  selfde  naegedructe  boeoken,  en  de  boven  dien  Tjjfcntwintich  carolus  guldens  voor  elcken 
boeck.  Gbclijckt  breeder  blijckt  int  original  van  sijndor  majesteyt  daerop  vericent.  Grgheven  te 
Brossel  in  den  secreten  raedt  iiit  iacr  our  beeren  4S69  dcn  Si  ootohris,  onde  oudcrleeckent. 

DE  LANGHE, 
Eode  in  don  Brabantschen  raedt  1569  den  21  Tebruarij,  cndc  ondcrteeckfint, 

DE  wrrTE. 

Le  privilège  de  la  cinquième  édition,  dft  celle  de  1592,  porte  comme  suit  : 

Imp.  Rudolphi,  Philippi  Hisp.  rogis,  cl  cancelbriîC  brabanlirr  privilogiis,  san'ituris  est.  —  N> 

II.  tR 


s  18  APPENDICES. 

sans  gène  continuait,  sans  inquiéter  les  entreprises.  11  est  assez 
plaisant  de  remarquer  vers  1640  les  cartes  françaises  de  Jubrien, 
éditées  à  Amsterdam  par  le  républicain  Janson,  inscrites  avec  privilège 
du  roi  et  se  vend  à  Paris.  Il  ne  manque  pas  des  copies  misérables  que  les 
auteurs  et  les  premiers  éditeurs  devaient  désavouer.  Berey  copiait  à 
Paris  la  carte  faite  à  Amsterdam  par  Blaeuv.  Tavernier,  Mariette 
copiaient  les  cartes  de  Janson  et  soutenaient  des  relations  avec  Amster- 
dam. La  France  éditait  beaucoup  et  s'adressait  à  cet  effet  à  Amsterdam. 
Par  tous  ces  temps  là  la  propriété  intellectuelle  n'était  pas  encore 
inventée  (voyez  chap.  220,  222  et  à  la  fin  de  Tappendice  précédent). 

Le  theatrum  rappelle  les  relations  mutuelles  qui  honorent  les  deux 
géographes.  La  troisième  édition  du  theatrum  allait  s'épuiser,  lorsque, 
en  4585,  Mercator  qualifiait  Orlelius  de  ipse  candor  et  humanilas,  qui 
quidiispiam  labularum  nactus  fuil ,  mihi  communicavil  liberaliter 
iametsi  in  eodem  mecum  csset  instiluto  (in  Galliœ  tab.  sludioso  Icclori, 
sub  fine).  Us  avaient  le  même  dessein  de  former  Tensenible  de  la 
géographie.  La  question  de  priorité  ne  les  tourmentait  guère,  chacun 
avait  sa  tache  spéciale,  d'un  autre  genre  :  Ortelius  assemblait ,  amassait 
et  formait  uu  receuil;  Mercator  élaborait,  organisait.  La  priorité  était 
à  lui ,  quant  en  1569  il  édita  sa  grande  carte  ad  usum  navigantium ,  de 
laquelle  Ortelius  dressa  son  typus  orbis  terrarum,  qui  parut  en  1570, 
à  la  tête  de  son  theatrum.  Ghymnius  fait  présumer  le  magnaniuie 
retard  de  Mercator;  je  pense  que  cette  présomption  n'est  pas  l'affaire 
de  conséquence.  Ortelius  se  bâtait  comme  entrepreneur  qui  avait  du 
succès  et  des  moyens.  Mercator,  au  sein  de  sa  famille,  ne  pouvait  pas, 
dans  son  cabinet,  élaborer  ses  produits  aussi  vite.  Je  ne  sais  pas  par 
quel  motif  M.  Van  Hulst  suppose  les  richesses  de  Mercator.  Quand 

qtiis  alius  cuius  cuiusque  sit  conditionit,  eas  tabulas,  qtias  Abrahamns  Ortclins  regiae ntiesUtw 
geographus,  studio  suo  descripserit,  vol  suis  impensis  primum  in  lucem  edldcrit,  tiue  eas  verum 
seorsum  dederit,  si«e  iis  tlieati'um  suum  nuuc  auxerit  aul  postea  adbnc  addiderit ,  intra  decennium, 
à  die  impretionit  ^bsolutoi  computandum,  typis  mandare,  vel  simili  atque  eodem  qno  a  dicto  Ortelio 
«xprimeutur,  velaiio  cbaractere  seu  forma  excudcre,  vei  cndendas  dare ,  seu  alibi  imprexsas  adda- 
cere,  vcndere  et  dislrahere,  paiam  sive  occulte  ausit.  Quisquis  vero  secus  l'ecerit,  ei  statuitur  atque 
dftconiitur  debere  non  solum  adimi  vel  auferri  tabulas  et  libros  imprcssos  aut  venuiiT  expotitot, 
quos  tilique  pnediclus  Orlelius,  vel  eiusdem  bxredes,  aut  mandatum  ab  eo  babentet,  auxilio 
inagis'vatus  cius  looi .  vel  etiam  per  se  ipsi  apprebendere  et  sibi  vendicare  poterunt ,  vcrum  etiam 
irrogari  mulctam  quae  cxpressa  est  in  ipsis  dipiomatis  dat.  annodomini  iSOO. 

Iroperatof  quidem  76  Ratisponae  St  octobris 

subsign.  RUDOLPHUS. 

Ad  mandatum  suac  rsesar.  m.  proprium ,  Estenberger. 

Pbilippi  vero  Hispan.  7tt  Antwer]«iae  die  roeusis  Tebr. 

signât.  SILLE. 

Et  cancellaria ,  Bruxcllis  die  S  martii  eiusdem  anni. 

signât.  BLYTEUEN. 

Je  ne  sais  pas  si  les  douanes  étaient  châtiées  d'empècber  l'introduction  des  réimpressions  écran- 
gères,  m:iis  ce  qui  est  évident  des  privilèges,  que  par  celte  mesure  l'état  se  serait  privé  des  amendes 
qu'il  pouvait  avoir  des  contrevenants  vendeurs  et  le  privilégié  aurait  été  dépouille  des  avantages  dn 
droit  dti  coniiSi>atio«  que  le  privilège  lui  accordait  durant  un  certain  uombre  d'années.  Au  reste ,  le 
privilège  longtemps  n'était  qu'une  exception  :  tout  le  monde  ne  le  demandait  pas  et  à  ceux  qui 
le  demandaient  on  ne  l'accordait  pas  toujours.  —  Ces  privilèges  coatinuaieut  jusqu'aux  temps  des 
révolulions,  pour  !20  ans,  pour  iO,  pour  9,  pour  S;  on  accordait  à  des  ouvrages  considérables  pour 
!>  ans.  L'inlroduotinn  à  la  géographie  de  l'ingénieur  Le  Rouge,  où  il  y  a  91  cartes  de  demi-feuilles, 
gravées  en  17i8,  n'était  privilégiée  que  pour  trois  années.  Au  xviii*  siècle  parurent  en  France 
les  privilèges  pour  l'auteur  et  à  des  hoirs  à  perpétuité,  mais  à  condition  qu'ils  ne  soient  rétrocédés 
à  personne  et  s'il  plairaitàrunicur  d*en  faire  une  cession,  le  privilège  sera  , réduit  à  dix  années  à 
«omptur  de  ce  jour,  etc. 


api£.>di(.e:$.  219 

le  célibataire  Orlelius  avait  des  moyens  à  voyager,  à  faire  des  collec- 
tioDS,  d'éditer  avec  succès  et  trouvait  des  éditeurs,  certainement  rien 
ne  lui  manquait.  Les  émoluments  du  cosmographe  d'un  duc  pour  la 
famille  d'un  mécanicien  d'instruments  mathématiques,  demandaient 
sans  doute  une  rigide  économie ,  quand  le  cosmographe  s'excuse  à  son 
duc,  que  les  ressources  lui  manquaient  pour  éditer  et  quand  dans  sa 
position  difficile  il  faisait  tout  par  lui-même.  Le  graveur  Paseg  où 
Pascus,  qui  prépara  le  frontispice  à  son  allas,  n'était  pas  graveur  de 
lettres,  les  inscriptions  furent  gravées  par  le  père  et  les  fils,  et  le  père 
ne  cherchait  point  l'intervention  d'Orlelius  pour  améliorer  le  matériel 
de  ses  ressources;  il  puisait  seulement  dans  la  collection  des  cartes 
acquises  par  son  ami,  qui  pouvaient  servir  à  ses  lentes  et  laborieuses 
études,  et  il  en  lui  témoignait  une  touchante  reconnaissance.  Ortelius 
avait  son  encouragement,  ses  conseils,  et  ses  produits  s'il  lui  plairait  à 
reprodiiire,  comme  il  avait  reproduite  la  carte  de  Flandre. 

^  Parergon  contenant  les  caries  de  la  géographie  ancienne  et  les  caries 
historiques,  parut  pour  la  première  fois  en  1578,  attaché  au  Iheatrum. 
En  1592,  faisant  de  même  partie  du  Iheatrum,  il  comptait  20  cartes,  qui 
en  même  temps  forment  un  volume  à  pari.  Le  nombre  des  caries 
moma  à  32,  qui  parurent  plusieurs  fois,  1609,  IGll....  sous  le  titre  de 
parergon.  Les  cartes  historiques  qui  s'y  trouvent  entraient  aussi  dans 
la  géographie  sacrée. 

Quant  à  la  synonymie  des  noms,  c'était  d'abord  Arnoud  Mylius,  qui, 
pour  la  première  édition  du  thealrum  ,  1570,  rogatus  ab  Abrahamo 
Ortelio,  e  schedis  Ortelii  in  ordinem  redegit  anliqua  nomina,  recenlio- 
ribus  adiecitis.  Ensuite  Oriel  lui-même  augmenta  cet  index  et  le  publia 
en  1573,  dans  son  iheatrum,  sous  le  lilre  de  synonymia  locorum.  Aug- 
mentant encore,  il  céda  ses  synonymiasà  Plantin,  qui  en  donna  une 
édition  spéciale  à  Anvers,  1578,  4**.  En  1587  Orlelius  y  mil  la  dernière 
marn  et  le  publia,  sous  le  titre  de  thésaurus geograpkicus/m-îoïio;  le 
thésaurus  reparut  en  1595,  1611 ,  llanoniai  in -4*^.  A  la  place  de  syno- 
nymia, transformée  en  thésaurus,  qui  allait  former  un  ouvrage  à  part, 
Ortelius  mit  à  la  fin  de  son  thealrum  de  1592,  nomonclalor  ptolcmaicus, 
imprimé  à  Anvers,  chez  Plantin,  1591. 

M.  Van  Huist  compare  le  trésor  synouymique  à  uire  publication 
antérieure  de  breviarium  orbis,  par  Zacharia  Lilio,  à  Florence,  1493; 
mais  ce  petit  dictionnaire  de  géographie  ancienne  est  presque  toujours 
dépourvu  de  noms  modernes.  Nous  pouvons  rappeler  d'autres  publi- 
cations plus  analogues  et  plus  rapprochées  à  Ortelius.  Vers  1550,  lo 
lexicographe  espagnol  Aelius  Anton i  us  nebrissensis,  publia  en  langue 
espagnole  un  dictionnaire  onomaslicon,  de  noms  anciens,  ta  ut  de 
personnes,  de  divinités,  que  de  lieux  et  ditï'crcnts  autres  objets ,  avec 
les  interprétations  modernes.  En  1552,  Jean  Bellerus  extraya  de  l'ori- 
ginal expagnol  un  dictionnaire  géographique  de  noms  modernes; 
valgares  locoriim  appellaliones,  interprétée  par  les  noms  anciens, 
ce  qu'il  qualifia  de  synonymie.  Le  dictionnaire  onomaslicon  entier 
d*André  nebrissin  reparut  augmenté  plus  correct  en  latin,  vers  1570, 
à  Anvers,  chez  les  héritiers  de  Jean  Steetius.  A  celte  époque  beaucoup 
de  savants  s'excerçaient  dans  ce  genre.  Robertus  Stephanus ,  Conradus 
Gesnerus,  Hermannus  Forrctinus,  aliique  prinii  in  hoc  incubuere. 


220  APPENDICES. 

Andréas  nebrissiensis  prépara  le  plu8  ample  onomaslicon ,  qui  fut 
encore  augmenté  après  sa  mort  et  édité  pour  la  troisième  fois,  et  pour 
la  seconde  en  latin  :  dictionnarium  proprium  nominum,  à  Anvers,  in 
sedibus  viduae  et  hœredibus  Joannis  Stclii,  i595,  4"*,  accompagné  de  la 
synonymie  Joannis  Bcllerii. 

A  cette  époque  des  études  anciennes,  il  n'y  a  rien  d'extraordinaire, 
quand  Ortelius  rencontre  par  tout  une  émulation  sava^nte  et  de  la 
haute  Instruction.  Par  son  savoir,  ses  capacités  et  son  infatigable 
assiduité ,  il  a  su  surpasser  ses  contemporains  et  gagner  Tautorité  res- 
pectable. 

M.  Van  Hulst  annote  Touvrage  d'Ortelius  :  auraei  scBculi  imago,  sive 
Germanorum  velerum  vila,  mores,  ritus  et  religio  cum  iconibuSy  édité 
apudPhilippum  Gallseum  1598  4^  produit  de  sa  vieillesse  ;  mais  malgré 
la  longue  insouciance  de  sa  jeunesse,  il  a  publié  quelques  opuscules 
bien  antérieurement,  et  personne  ne  s'empresse  de  les  rappeller.  La 
bibliothèque  de  Louvain ,  par  exemple,  possède  son  itinerarium  bélg., 
publié  en  1586  à  Anvers,  8<». 

M.  Van  Hulst  rappelle  encore  un  fait  important  pour  la  bibliographie 
géographique  (que  nous  avons  mentionné,  chap.  2,  t,l,  p.  7).  Marc 
Yelser,  ayant  trouvé  en  159G  la  cartes  des  itinéraires  romains  de  la 
collection  de  Peuiinger,  prépara  sa  copie  et  l'envoya  au  vieil  Ortelius. 
Celui-ci,  malgré  son  âge  trop  avancé,  ne  recula  point  devant  la  tâche 
que  lui  imposait  la  confiance  de  Yelser.  La  fameuse  carie  de  Peutiuger 
sortit  des  presses  de  Plantin ,  dirigées  alors  par  son  gendre  Moretus, 
l'année  même  de  la  mort  de  l'illustre  géographe,  1598. 

La  publication  géographique  s'animantalorsà  Amsterdam,  produisis  ^' 
un  petit  atlas  publié  par  Pierre  Heyns,  sous  le  titre  de  miroir  du  mondi 
Zacharias  Heyns  reproduisant  ce  petit  recueil  de  petites  cartes  de  soi 
père ,  dans  Tannée  de  la  mort  d'Orlelius ,  changea  le  titre  en  :  épitoi 
du  théâtre  d'Abraham  Ortelius,  à  Amsterdam,  par  Zacharie  Heyns, 
l'enseigne  des  Trois  Vertus,  1598,  petit  4<*  oblong  de  80  charmani 
cartes  taillées  en  bois.  Il  n'y  a  presque  rien  d'Ortel  dans  ce  recuei"' 
l'Europe  y  est  marine,  les  caries  ont  une  autre  origine;  mais  Heyi 
décorant  son  recueil  du  nom  d'Ortclius,  voulut  honorer  la  mémoire  c 
géographe  que  la  mort  venait  d'enlever. 

La  pierre  tumulaire,  érigée  par  Anne  Orteliaà  son. frère  Abrabai 
cielebs  caclibi ,  est  trottée  par  les  pieux  qui  fréquentent  la  catbédi 
d'Anvers;   les  savants    de    l'Europe    rendent   hommage  à  Fillus' 
géographe ,  et  nous  ne  savons  pas  nous  rendre  un  compte  assez  pos 
sur  ce  qu'il  a  élaboré. 

Cependant,  à  part  ses  grandes  et  mémorables  publications,  il  y  auK*<SKit 
assez  à  examiner  dans  la  nombreuse  livraison  des  cartes  qui  circulaà^'ot 
isolément.  Ortelius  changeait  et  regravait  ses  planches ,  et  les  car 
qui  composaient  les  atlas  circulaient  comme  cartes  volantes,  sans  au  <: 
texte  descriptif.  Mercator  laissait  circuler  les  siennes  isolément,  con 
le  prouvent  la  carte  de  Orbis  terra;  1585,  conservée  aux  archiver  à 
Bruxelles,  et  celles  de  Iialia  1589,  deWalachia,  Servia,  Bulgarmâ, 
Remania  1500,  de  nova  tolius  Graecise  descriptio  1590,  de  Moc^a 
1595,  conservées  dans  le  musée  britannique  à  Londres;  je  possèdo  ^ 
Crète,  sa  Lorraine,  son  Alsace,  en  feuilles  volantes.  Elles  entrai^^n^ 


APPENDICES.  221 

dans  la  coaiposition  de  i'allas  et  circulaient  isolément  du  vivant  do 
leur  auteur  (2). 

Dans  rappendice  précédent  (p.  215)  j*ai  mentionné  quelques  exemples 
du  changement  des  cartes  dans  les  theatrum  d*Orlelius,  et  de  leur 
remplacement  par  d'autres  auteurs.  Ces  changements  et  la  regravurc 
des  cartes  furent  fréquentes.  L'Artois  de  l'édition  au  texte  irauçaîs  est 
d'une  autre  gravure  que  de  l'édition  latine  de  i592  ;  l'Amérique  était 
changée,  gravée  et  refaite  au  moins  trois  fois ,  en  dernier  lieu  elle 
subit  les  rectifications  à  Amsterdam,  où  (après  i615)  on  y  traça  le  cap 
Horn  et  fretum  le  Maire.  Ces  variétés  reparaissent  dans  les  cartes 
Tolantes  qu'Ortelius  laissait  circuler  sans  aucun  texte.  Elles  paraissent 
ordinairement  usées  ,  ainsi  que  leur  émission  volante  avait  lieu  après 
le  tirage  que  demandaient  les  volumes  du  theatrum,  et  ce  tirage 
Tolant  suivit  chaque  édition,  parce  qu'on  a  des  cartes  volantes  de  la 
première  édition.  Souvent  ces  cartes  volantes  sont  un  peu  changées , 
leur  date  raclée,  les  échelles  de  la  graduation  ajoutées  où  elles  n'y 
étaient  pas;  le  nombre  d'épigraphes  augmenta  par  des  additions  de 
nouvelles  dans  les  places  vides  ;  les  cartes  doubles  sur  une  feuille , 
y  sont  autrement  accouplées;  enfin,  regravées,  copiées  à  neuf  (s). 

La  cartographie  à  Anvers,  du  vivant  d'Ortelius  ,  ne  se  bornait  point 
aux  seules  reproductions  de  ce  géographe.  Ortelius  lui-même  cite  les 
plus  remarquables.  Gérard  de  Jode,  formant  ses  enfants  en  graveurs , 
continua  ses  entreprises  :  en  1577  il  publia  l'Italie  de  Castaldo;  en  1579 
la  Frisie  orientale  de  Laurent  Michselis  ab  Hagenkerchen  (la  même, 
n*>  45  du  theatrum  de  1592);  en  1583  l'Autriche  supérieure  de  Aug. 
Hirsvogel;  entre  les  années  1587  et  1592  ps^rut  chez  lui  une  nouvelle 
carte  de  Pologne  avec  l'effigie  de  Sigismond  lil ,  qualifié  de  hères 
proximus  Suecise. 

Le  recueil  de  Gérard  embrassait  d'abord  l'Allemagne  et  les  pays  au 

{t)  Les  cartes  de  Mcrcator  portent  ordinairement  son  nom.  Mais  la  plupart  de  celles  qui  se  pré- 
sentent comme  volantes  sont  postérieures,  publiées  et  republiées  par  tlond,  Janson,  Yisscber.  Elles 
portent  les  dates  1610, 1619,  etc.,  jusqu'à  1670.  Le  musée  britauique  en  conserve  '22,  on  les  trouve 
dans  les  atlas  édités  par  Hondius,  accompagnées  de  la  description. 

Quant  aux  éditions  bondicnnes  des  atlas,  leur  suite  régulière  m'est  inconnue  :  Le  premier  con- 
tenant se  cartes,  parut  1606,  a  Judoco  Houdio  auctns,  cum  noua  doscriptiouc  P.  Montani  dispensis 
Cornelii  Nicolaï  (catal.  van  Hulthem  143^9).  Le  second,  editio  secunda  1607  (bibl.  nation,  à  Varsov.); 
or,  celui  de  1690  serait  le  troisième.  Le  quatrième  auctus  porte  la  date  de  1615,  (musée  britann.) 
cette  date  détermine  aussi  l'édition  allemande  qualifiée  de  quatrième  (  j'en  ai  la  2"*  partie).  —  La 
dixième  édition  est  de  l'année  1628,  et  contient  i7o  cartes  (cat.  van  Huit.  14380).  Celle  de  1630  porte 
le  titre  d'allas  perfectus  (musée  britann.  bibl.  nation,  à  Varsov.).  —  Après  cette  dernière  édition 
l'atlas  de  Mercator  parut  en  1633,  Ger.  Merc  et  Hcnr.  Hond.  atlas  bisnominis  à  trois  vol.  (bibl.  nat. 
à  Varsov.].  Il  est  aussi  connu  à  la  même  date  avec  un  texte  français  (oat.  van  Huit.  14352).  Cette 
édition,  BU  eerstuytbet  latyu  in  onse  nederlandsche  laie  getransiatcert,  parut  en  1634  by  Jan  Jasseu 
(je  Tai).  L'édition  anglaise  by  Hexham  à  Amsterdam  1636,  en  deux  vol.  (musée  brit.).  —C'est  ce 
que  je  sais  positivement.  Par  induction  je  puis  présumer  l'existence  des  éditions  de  1619, 1620, 
1635,  4637,  1640.  —  La  suite  de  l'allas  minor  in-4'>,  est  non  moins  nombreuse,  mais  je  ne  saurais 
relater  de  ce  nombre'que  l'édition  de'1607,  qui  est  probablement  la  première  ;  ensuite  celle  de  1610 
à  Dordrecbt  (musée  brit.);  Oclle  de  1630  (bibl.  Lovan.);  celle  du  1632  sumptibus  Job.  Cloppenburgii 
(catal.  Iran  Hnltb.);  celle  de  1634  (bibl.  Lovan.)  et  une  allemande  sans  date  (bibl.  Lovan). 

(3)  Ce  que  j'avance  sur  les  cartes  volantes  d'Ortelius,  est  fondé  sur  l'examen  de  plus  de  50  que  je 
postiède  et  qui  se  trouvaient  dans  un  volume  contenant  à  peu  près  200  cartes  pour  1  Europe.  Dans  ce 
nombre  de  50  les  portions  de  France  et  d'Allemagne  sont  à  moitié  de  ce  que  contiennent  les  der- 
nières éditions  du  tbeatrum.  —  Il  est  quelquefois  difficile  de  distinguer  le  produit  directe  d'Ortelius. 
Dans  ses  tbeatrum  il  y  a  très-peu  de  cartes  sur  lesquelles  il  plaçait  son  nom  d'éditeur,  ainsi  qu'on  ne 

5 eut  s'assurer  de  l'origine  qu'en  confrontant  avec  celles  des  volumes  du  tbeatrum.  Après  la  mort 
'Ortelius,  son  nom  ne  ligure  que  dans  les  copies  des  caries  de  son  parergoû.  lanson  dans  son^atlas 
de  4638,  attribue  à  Ortelius  une  carte  du  Marok. 


2â^  APPENDICES. 

delà  (4).  II  raiigmcniait  cl  en  même  temps  préparait  lentement  \es 
cartes  pour  une  autre  partie  du  recueil.  Les  caries  de  Hainaul,  de 
Lorraine;  deux  de  Palestine;  trois  de  FAsie,  copiées  de  Jacq  Castaldo  ; 
celle  de  Portugal  par  Alvaro  Secco ,  et  celles  de  Naples  et  d'Espagne 
par  Pirrho  Ligorio,  portent  son  nom  d'éditeur;  quantité  d'autres 
parurent  anonyme. 

De  son  vivant  Cornélius  de  ludoeis  (son  fils),  né  h  Anvers,  élabora 
une  mappemonde,  ou  plutôt  réduisit  la  carte  de  Marcator  ad  usum 
navigantium  sur  la  projection  cylindrique  hane  orbis  universatem  des- 
cHplionem  Corn,  de  Judœis  anlvcrpien,  pridie  calend.  novemb.  in  aima 
academia  duaccnsi  a,  1589  perfcil.  Après  la  mort  de  son  père,  il  se  mit 
à  compléter  les  cartes  pour  en  faire  un  atlas.  China  colleclare  Comelio 
de  ludœis;  Americsc  pars  boréal is  a  C.  de  ludœis  in  lucem  édita  ;  nova 
totius  Europse  tabula  ex  magnis  Gerardi  de  ludaisp.  (patris)  desumpta 
1593;  cette  Europe,  Asie,  Afrique,  Croalia,  Germania  inferior,  formis 
hœredum  Ger.  de  ludœis,  sont  les  cartes  complémentaires  préparées 
par  Corneille  {5). 

Enfin  parut  Tatlas  sous  le  titre  de  spéculum  orbis  terrarum,  dont  la 
première  partie  contient  54  cartes;  la  seconde  intitulée  Germania 
geographicis  labulis  illustrala  per  Cornelium  de  ludœis  antverpianum^ 
au  nombre  de  49,  et  deux  planches  (gravées  par  Anton.  Wierinx) 
représentent  ordines  imperii.  A  la  fin  de  cette  seconde  partie  on  lit  : 
vidua  et  hœredes  Gerardi  de  ludœis,  suis  sumptibus  hoc  opus  geographi- 
cum  cur avère  imprimi  apud  Arnoldum  Coninx,  Aniverpiœ,  anno  1593» 
Un  exemplaire  de  ce  spéculum,  aussi  précieux  pour  Thistoire  de  la 
cartographie  que  le  theatrum  d'Ortelius,  se  trouve  dans  la  bibliothèque 
de  rétat  à  Bruxelles  (catal.  de  Van  Hulthem  14356,  p.  31). 

Le  spéculum  de  83  cartes  contient  les  cartes  confectionnées  depuis 
25  ans,  et  tout  nouvellement  préparées.  Plusieurs  anciennes  de  la 
seconde  partie  sont  remplacées  par  de  nouvelles  (encore  par  Gérard 
père  :  6  Prusse,  10  Pologne,  12  Moravie,  30  Frankonie,  Ai  Pays-Bas, 
45  Frisie  occid.,  46  Hollande);  la  recommandation  de  l'origine  romaine 
disparut,  remplacée  par  cum  privilégie,  surtout  des  cartes  des  Pays- 
Bas.  Chaque  carte  est  accompagnée  d'un  texte  descriptif,  et  l'intro- 
duction mathématique  traite  des  éléments  cosmographiques  et  carto- 
graphiques. 

Elle  traite  de  la  projection  in  piano,  des  cartes  hydrographiques, 
quibus  naut^  in  quolidianis  navigationibus  utunlur;  examine  son 
imperfection  et  semble  vouloir  ignorer  la  projeclîon  mercatorienne,. 
connue  depuis  25  ans.  Quand  elle  traite  de  la  projection  stéréo- 
graphique  de  l'hémisphère,  elle  relate  qu'au  rapport  de  ï.  Ziegler  (ift 

(4)  La  série  des  rartes  lie  ce  recueil,  que  j'ai  donnée  ri-dessus  page  21idu  II*  appenii.  doit  être 
couiplëlée  par  i ,  Germania  ;  2,  Suecia  per  Livinuin  AIçoel  ;  3,  Dania  et  Ilolsatia  ;  4,  déplacée  sous  le 
numéro  37.  —  Il  parait  que  la  35  et  36»  sont  les  dernières  du  recueil. 

(5)  La  Chine  oollectore  C.  de  ludgnis,  offre  l'image  de  celle  qu'on  voit  n*  13i  de  notre  atlas ,  seule- 
ment elle  est  encore  privée  de  Corea  et  un  peu  plus  rondement  déTeloppée.  —  Le»  cartes  de  l'Asie 
de  Castaldo,  décèlent  qu'Ortelius  avait  calqué  son  Asie  sur  celle  de  Castaldo,  telle  est  son  extension  et 
analogie,  seulement  il  opéra  les  changements  de  plusieurs  positions  et  exposa  les  connaissances  plus 
avancées  des  ilcs.  (Voyez  uncportiou  de  cette  composition  dans  les  n<"  i32  et  137  de  notre  atlas). 
—  Il  est  bien  de  remarquer  comme  Rumold  inscrivit  sur  son  Europe  :  ad  maguae  Europse  Gerardr 
Mercatoris  p.  imitalionem  édita  ;  et  comme  Corneillo  en  fait  un  écho,  inscrivant  sur  la  sieaoe  :  ex 
raagois  Gerardi  de  lodaeis  p.  desumpta. 


APPENDICES.  235 

commentariis  quos  in  sec.  uat.  liist.  C.  Pliiiii  scripsii)  author  huius 
descriptionis  fuit  Ârzahel  arabs,  palria  tolelanus.  Jean  Ziegler,  historien 
et  mathématicien  allemand  bavarois  de  Landaw,  mort  1549,  a  été 
contemporain  de  Verner  et  de  Slabius,  auxquels  est  attribué  Tinven- 
tion  de  la  projeclion  slércographique.  L'introduction  de  de  Iode , 
donnant  son  modèle,  rinlitule  :  sequiUir  (ip;ura  hemispherii  Arzahelis, 
ensuite  elle  dit  :  anle  annos  aliquot  prodiit  ex  aedibus  Gcrardi 
Mercaloris  viri  in  cosmographia  longe  primi,  hoc  modo  descriplus  orbis 
ierrarum.  Elle  connaissait  cependant  les  projections  examinées  par 
Yerner,  quand  elle  dit  :  loh.  Yernerus  in  libello  de  quatuor  modis 
describendi  terrx  superficiem  in  piano ,  addidit  tertjum  (ad  duos 
Ptolemaei)  sed  valde  irregularem.  C'est  aux  arabistes  de  constater 
combien  Arzahel  participe  à  cette  invention.  —  Qui  élaii  Tauteur  de 
rintroduction  du  spéculum?  il  n'est  pas  dit  :  probablement  l'étudiant 
de  l'académie  douaisienne,  Goreinlle  de  Iode  lui-même  (c). 

Lorsque  le  spéculum  de  Corneille  parut,  Orlelius  était  à  la  cinquième 
édition  de  son  lhealrum,et  il  en  vit  encore  une  sixième.  Après  sa  mort, 
Planlin ,  possesseur  des  planches,  en  donna,  en  1601,  une  septième. 
Theatrum  orbis  Abrahami  Orlelii ,  extat  in  officina  planliniana  encore 
en  1612,  dit  le  titre  de  l'édition,  qui  contient  197  planches  et  dont  le 
parergon  n'est  composé  que  de  5  planches.  L'éditeur  est  Moretus,  et 
le  même  volume  à  la  fin  porte  :  Anlverpiœ  ex  officinœ  planliniana 
Balthasaris  Moreli  1624  (?).  La  double  date  du  volume  décèle  que  les 
reproductions  du  theatrum  continuaient  à  Anvers  assez  long -temps, 
augmentant  le  nombre  des  cartes,  ne  renonçant  guère  ni  à  celles 
qui  portent  l'année  1594,  ni  aux  plus  anciennes  qui  remontent  à 
l'année  1570. 

On  repète  que  H(mdius  fit  acquisition  à  la  fois  des  planches  de 
Mercator  et  d'Ortelius.  Mais  ces  reproductions  aussi  différées,  semblent 
contredire  cette  assertion ,  et  je  ne  rencontre  aucune  mention  d'une 
édition  du  theatrum  à  Amsterdam.  II  faut  donc  admettre  que  les 
planches  d'Ortelius  passèrent  dans  les  mains  de  Hond  bien  plus  tard , 
ou  que  les  Plantins  se  réservèrent  l'énorme  tirage,  qui  le  mit  en  état 
de  multiplier  les  éditions.  C'est  aux  bibliographes  d'expliquer  cette 
question;  c'est  aux  bibliographes  de  collationner  toutes  les  éditions, 
d'indiquer  les  changements  dans  le  texte  descriptif.  L'histoire  de  la 
géographie  s'en  réjouira  et  en  saura  tirer  des  conséquences. 

Des  que  les  planches  d'Ortelius  furent  transportées  à  Amsterdam ,  il 
restait  aux  anversois  de  l'imiter,  de  le  copier.  Jean-Baptiste  Vrints  , 
graveur  en  bois,  né  1552,  mort  vers  1615,  se  qualifia  d'abord  semulus 
studii  geographiae  d.  Abrahami  Ortelii ,  et  édita  je  ne  sais  combien  de 
cartes  (s).  Il  publiait  1601,  1602,  l'épitome  du  théâtre  d'Ortcl.  En 

(6)  VanHulthem  recommande  sur  Corn,  de  Iode,  un  article  deFoppens,  bibl.  bclgica,  1. 1,  p.  209. 

(7)  Je  tiens  cette  notice  de  l'amitic  de  M.  Van  Even,  bibliothécaire,  de  la  bibl.  de  l'universitc  de 
Louvain,  où  se  trouve  l'exemplaire  du  theatrum  de  cette  date.  Le  parergon  de  l'année  162i  est 
accompagné  maintes  fois  de  la  table  peu linger-Tclser, éditée  par  Moretus,  comme  nous  l'arout  men- 
tionne dans  la  note  1i  du  cbap.  5. 

(8)  Jean  Baptiste  était  fils  de  Gérard  Vrints  et  de  Jeanne  van  Wynterbeke  ;  il  a  été  rpçu  dans  la 
corporation  de  S.  Luc  <S75,  épousa  Claire  van  de  V^ouwer  en  1597,  qui  lui  mit  an  monde  Jf au 
Baptiste,  qui  eu  qualité  de  graveur,  entra  en  <6î4  dans  la  corporation  de  S.  Luc,  dont  il  fut  doyen 
déjà  1657.— Parmi  l»*s  cartes  éditées  par  J.  B.  Vrints,  cmnie  d'A.  Ort.,  se  trou>o  celle  du  lac  Loman, 
publiée  en  iC07,  et  dédiée  à  Jacobo  Colio  Ortcliauu. 


224  APPENDICES. 

même  temps  reproduisirent  ces  épitome»  Michel  Gognet,  mort  1623,  et 
Philippe  Galle,  qui  éditait  déjà  en  1585  et  1594,  theatri  orbis  terrarum 
enchiridion,  apud  Ghristoph.  Plantinum. 

•Philippe,  de  Gatherine  Tolland  son  épouse,  procréa  en  1571  Theodor 
Galle,  Galleiis,  Gallaeus,  un  des  plus  habiles  et  des  plus  laborieux  gra- 
veurs de  son  temps.  En  1605,  mis  en  possession  de  la  maison  appelée 
Witte  Lelie,  située  dans  la  rue  des  Tanneurs,  il  reproduisit  quantité 
de  caries  du  théiktre  d'Ortelius  et  beaucoup  d'autres.  Les  Pays-Bas 
surtout  demandaient  ses  soigneuses  reproductions.  Il  mourut  1630  (9). 

  cette  époque  les  modèles  indiqués  par  Ortelius  allaient  céder  à 
d'autres  produits.  On  le  voit  par  les  publications  de  Pierre  Verbist, 
quoiqu'il  n'indique  les  sources  que  très-rarement.  Né  en  1607,  après 
la  mort  de  sa  mère,  dans  sa  tendre  jeunesse,  en  1617,  il  fut  mis  par  son 
père  en  possession  de  la  maison  America  ou  Nouveau  Monde,  située 
dans  la  rue  des  Lombards,  011  II  allait  reproduire  ses  petites  et  grandes 
cartes  jusqu'à  sa  mort  1674  (10). 

Il  faut  espérer  que  bientôt  on  preniira  à  cœur  d'élucider  l'importante 
époque  pour  la  géographie ,  où  les  Pays-Bas  avec  l'Italie  devancèrent 
tous  les  pays  dans  la  publication  des  cartes  géographiques. 

(9)  Inrerioris  Germanise  oova  dcscriptio  ;  Job.  Bap.  Vrinlins,  1606,  T.  Gallaeus  rccndit  :  proba- 
blement après  la  mort  de  son  premier  éditeur.  Il  copiait  Germaniae  typus  Praacisci  Hofreabergii  ; 
Galliaro  Pctri  Piautii.  —  En  1610  T.  Galle  fut  doyen  de  la  corpor.  de  S.  Luc;  il  épousa  CaUkeriBfl 
Blaerentorf,  fillo  de  Jean  cl  de  Martin  Plantin ,  petite  fi  lie  du  célèbre  Christophe  Plantin. 

(10)  Pierre  Verbist  le  jeune  naquit  de  Pierre,  mort  en  1646,  et  de  Gertrnde  Bgbert,  morte  en  1617, 
il  entra  dans  la  corporation  de  S.  Luc  en  164t,  et  la  même  année  épousa  Catlierine  Oliviers  ,  qmi  Ivi 
mit  an  monde,  en  1647,  nue  fille  Marie,  mariée  cnsnite  an  graveur  Martin  Bourbe.  —  Je  tiens  ces 
détails  sur  les  familles  de  mon  ami  Verachter,  archiviste  de  la  villo  d'Anvers ,  qui  amassa  dans  sori 
rii-be  cabinet  à  pen  près  400  cartons  d'échantillons  des  produits  d'autant  de  graveurs  d'Anvers,  et 
fouillant  de  nombreux  archives  et  documents,  réunit  des  notes  et  renseignements  tr  es -intéressants 
sur  chacun  des  graveurs. 


IV. 

INSCRIPTIONS  DES  COMPARTIMENTS 

DE  LA  CARTE  DE  GERARD  MERCATOR, 

INTITULÉE  :  AD  USUM  NAVIGANTIUM, 
ÉDITÉE  EN  1569. 

—  LMnscription  placée  sous  la  dédicace ,  porte  en  deux  colonnes  : 

Inspectori  S, 

In  hac  orhis  descriptione  tria  nobis  curse  fuerunt.  Primum  sphaerœ 
superficiem  ita  in  planum  exlendere,  ut  situs  locorum  tam  secunJum 
directionem ,  distantiamque  veram,  quamsecundum  longitudinem  lati- 
todinemque  débitant  undequaque  inter  se  correspondeant,  ac  regionum 
figuras  in  sphaera  apparentes  :  quatenus  fieri  potest,  seruentur  :  ad  quod 
noua  meridianorum  ad  parallèles  habitudine  et  situ  opusfuit,  quse 
enim  a  geograpbis  hactenus  aeditis  sunt  conscriptiones ,  meridianorum 
curuitate  et  ad  invicem  inolinationem  inidoneae  sunt  ad  nauigationes; 
in extremitatibus  quoque  figuras  situsque  regionum,  propter  obliquam 
meridianorum  in  parallelos  incidenliam  adeo  mire  dislorquent  ut 
agnosci  non  possint,  nec  distantiarum  rationes  obseruari.  In  marinis 
nauclererum  tabulis  gradus  Ipngitudtnum  per  omues  parallelos  usque 
in  polum  crescunt  supra  sphsericam  rationem ,  nam  perpétue  œquales 
manent  gradibus  sequatoris,  at  gradus  latitudinum  minime  crescunt, 
quare  ibi  quoque  dislrahi  enormiter  figuras  regionum  necesse  est,  et 
vel  longitudines  ac  latitudines,  vel  directiones  distantiasque  a  uero 
aberrare,  et  cum  magni  ea  causa  errores  committantur,  ille  caput  est, 
quod  trium  locorum  inscriptione  ex  une  sequinoctialis  latere  facta 
secundum  triangularem  aliquam  dispotionem,  si  médius  quiuis  extre- 
mis iusta  directione  et  distantia  respondeat ,  impossibile  sit  extrêmes 
similiter  inter  se  respondere,  quibus  consideratis  gradus  latitudinum 
versus  utrumque  polum  paulatim  auximus  pro  incremento  paralle- 
iorum  supra  rationem  quam  habent  ad  sequinoctialem,  quo  id  conse- 
quuti  sumus  ut  quomodocunque  quis  duos  très  pluresue  locos  inscribat, 
modo  ex  his  4  :  diflerentia  longitudiuis,  differentia  latitudinis,  distantia 
directione,  duo  qua^Iibet  in  unoquoque  loco  ad  allerum  collato  obseruct, 
recte  se  habebunt  omnia  in  cuiuslibet  loci  ad  quemlibet  collatione,  et 
nuUus  uspiam  error  commissus  reperietur,  quem  in  vulgaribus  nau- 
clerorum  tabulis  multis  modis,  potissimum  in  maioribus  latitndinibus 
admitti  necesse  est.  Altcrum  quod  intendim  fuit  ut  terrarum  situs  ma- 

XU  19 

/ 


2S6  APPENDICES. 

gnitudines  locorumque  distantias  iuxta  ipsam  veritatem  quantum  asse- 
quilicetexhiberemus^inhocextreinam  diligentiam  impendimus  marinas 
Gastcllanorum  Portogalensiumque  tabulas,  tum  inter  se,  tum  cum 
plerisquc  nauigationibus  impressis  et  scriptis  conferentes ,  ex  quibiis 
omnibus  scquabUiter  inter  se  coneiliatis  hinc  terrarum  dimensionem 
et  situm  damus,  secundum  ea  quae  hactenus  obseruata  sunt  et  ad  nos- 
tras  manus  peruenire  potuerunt  castigatissimum.  —  Tertium  quod 
tractandum  suscepimus  fuit  ostendere  quae  partes  orbis  et  quousque 
veteribus  innotuerint  quo  antiquse  geographiaî  limites  non  ignorentur, 
et  priscis  ssecuUs  summus  honos  deferatur.  Dicimus  autem  très  esse 
distinctas  continentes,  primam  e  cuius  medio  creatum  muUiplicatum- 
que  genus  humanum  in  omnem  undique  terrarum  dissiminatum  est  : 
secundum  quod  noua  India  dicitur  :  terciam  quae  meridiano  cardini 
subiacet.  Harum  posteriores  duse  veteribus  ignotse  penitus  perman- 
serunt,  uisi  forte  noua  India  sit  que  apud  Platonem  est  Atlaotis. 
Prima  tametsi  tota  non  fuerit  a  Ptolomeo  in  tabulis  assumpta 
omnis  tamen  ambitus  eius  oceano  terminari  agnitus  et  maxima 
parte  a  veteribus  descriptus  est.  Et  quod  ad  tabularem  Ptolomei 
descriptionem  attinet,  ex  bis  quœ  de  Gangis  situ  demonstrauimus  in 
hoc  opère,  constat  eam  comprehcnsis  insulis  quas  ibi  diximus  ab 
orientali  parte  ad  Thamum  usque  Cathai  promontorium  progredi,  obi 
(ut  Melse  placet)  extremus  Indiœ  angulus  meridionalis  lateris  ter- 
minus  inrtiumque  orientalis  existit.  A  meridie  hinc  quidem  ad  Prassum 
Africse  promontorium  et  Madascar  insulam,  inde  ad  Hippodroman 
Aethiopise  in  medio  sinu  Hesperico  terminatur.  Septentrionalis  orae 
extrema  post  Cimbrorum  promontorium  estLiuonia,  sed  assvinptis 
simul  insulis  Scandia,  Albione,  Hibernia,  Ebudibus,  Orcadibus,  et 
Islandia,  quam  certum  est  esse  Thulen  ex  Plin.  lib.  2 ,  cap.  75 ,  el 
lib.  4,  cap.  10.  Solino  cap.  25,  et  Pomp.  Mêla  lib.  5,  cap.  6.  Reliquas 
ambitus  septentrionalis  a  Plinio  transcensis  Ripheis  iugis  describitor 
et  ex  sinistro  littore  Scythici  oceani  Noruegiam ,  Suediam ,  et  Finlan- 
diam  sub  nominibus  Balthia,  Basilia,  Scandinavia  ,  et  Eningia  perla- 
strat  lib.  A,  cap.  15,  sed  tanquam  insulas,  quod  isthmum  qui  Fianicum 
sinum  a  Granduico  distingit  ignoraret.  Dexlrum  littus  prosequens 
lib  6,  cap.  15,  primum  post  Hyperboreas  gentes  Lytarmem  Riphei 
montis  promontorium  ponit,  deinde  Arimpheos  plurimasque  alias 
nationes  quse  circum  mare  Gaspicum  eiusque  ostia  sunt,  putabat  enim 
in  oceanum  Scythicum  erumpere,  postea  cap.  17  residui  littoris  condi- 
tionibus  et  populis  enarratis,  Tabin  promontorium  superat ,  et  per 
conuersam  in  orientem  estiuum  littorum  fatiem  ad  Seras  procedit, 
deniqne  in  Indiam  reuertitur.  Quod  itemreliquum  erat  Africae  a  Prasso 
promontorio  ad  sinum  Hespericum,  Jubae  régis  teslimonio  circumna- 
uigata3  dicit  lib.  G,  cap.  29,  assignatis  etiam  aliquot  stationibus  eios 
nauigationis  qua  ex  India  in  Mauritaniam  itur,  et  multo  antea,  ut  est 
apud  Herod.  lib.  4 ,  iussu  Nechaonis  Aegypti  régis  Phœnices  quidam 
Arabico  sinu  egressi  biennio  Africam  usque  ad  columnas  Herculis 
circuranauigarunt.  —  Et  postea  Eudoxus  quidam  apud  Melam  cum 
Lathyrum  regem  Alexandriae  profugeret,  Arabico  sinu  agressus  Gades 
usque  peruectus  est.  —  Gertum  est  igitur  oceano  cingi  continentem 
nostram  et  a  veteribus  ambitum  eius  notum,  ac  pro  maxima  part( 


APPENDICES.  ^7 

descriptum  esse  ipsorum  autorilate  constat,  qiiare  manifestum  est 
errare  eos  qui  Partogalensium  nauigationes  Asiaticos  longe  Plolomei 
descriptionessuperare  aifirmant,  cum  iuxta  ea  quœ  de  Gangis  et  Âurex 
silu  adferimus,  multum  adhue  ab  eiusdem  terniino  distare  cas  constet. 

—  Les  indications  de  nouvelles  découvertes  sont  annotées  dans  les 
trois  suivantes  : 

Anno  1495  cuui  iain  ionginqute  nauigalionis  studium  per  conten- 
tionem  ferueret  inter  Gastellanos  et  Porlogallcnses,  Alexander  Poniifox 
lirailem  statuit  merîdianum  circulum  100  Icucis  distaniem  a  quolibet 
iDSularum  capitis  Viridis  et  earum  quas  vocant  Açores,  qui  utriusquie 
partis  nauigationes  et  conquirendi  iura  determinaret,  occiduum  orbem 
Castellanis,  orientaiem  Portogallensibus  determinans.  Retractaloaniem 
hoc  limite  ab  utrisque  propter  incidentes  allercationes,  anno  4524 
constitutus  est  communis  limes  meridianus  570  leucis  in  occasum  dis- 
tans  ab  insula  S  Antonij  Gorgadum  occidentalissima. 

Anno  Domini  1497  primus  Vasco  de  Gama  superato  20  Novembris 
capite  Bone  spci  et  Africa  circumnauigata  Calliculium  peruenit 
mandante  Emanuele  I ,  rege  Potogallise  15. 

Prima  orhis  circumnauigalio. 

Ferdinandus  Magellanus  anno  Domini  1594  20  Septembris  soluens 
ex  Hispania,  sequenti  anno  21  octobris  ad  fretum  a  se  Magellanicum 
appellatum,  peruenit  ac  primus  illud  penetrauit,  inde  Moluccas  petiit, 
in  Borascis  insulis  cum  8  hispanis  occissus  est,  reliqua  classîs  lacera  et 
mutila  orbe  deinceps  circumnauigato  post  tri^nnium  prope  exactum  in 
Hispaniam  reversa  est. 

—  Les  trois  inscriptions  suivantes  expliquent  les  révolutions  latares 
et  les  connaissances  anciennes ,  la  première  et  la  troisième  sont  en  trois 
colonnes  : 

De  Presbilero  Joanne  Asialico  et  'prima  dominij  Tarlarorum  origine. 

Eo  terapore.  quo  communibus  copijs  Antiochia  Syriaî  a  Gbristianis 
obsessa  et  expugnala  est,  anno  1098  erat  monarcha  regionum  orienta- 
liam  Asiae  Coir  Gliam,  quo  mortuo  sacerdos  quidam  et  pastor  Nestoria  - 
nos  arripuit  dominium  populi  Naiman  in  terra  Naiam ,  ac  deinceps 
totius  orientis  impcrium,  uocatusquse  est  (ut  erat)  prcsbiter  et  rex 
Joannes,  quo  defuncto  imperium  sibi  arrogauit  frater  ejus  Yuth ,  qui  in 
Caracoran  dominabatur  et  Gham  se  vocauit,  id  estdominum.  Hicdum 
meluebat  succrescentes  multitudinem  et  vires  Sumongaiorum  hoc  est 
aquaticorum  Mongolorum ,  qui  proprie  Tartari  dicebantur  a  Tarlar 
flumine  patrie,  quanquam  nec  regem  nec  civitatem  habcrent  scd  pas- 
tores  tantum  essent  et  tributum  annuum  pendcrent,  voluit  illos  in 
varias  regiones  dispergere  quo  rebellandi  potentiam  frangeret,  verum 
illi  cognationis  et  mutuse  societatis  iura  relinquere  nolentes,  conspira- 
tioDC  facta  fugerunt  versus  aquilonem ,  amplam  ibi  et  natura  munitam 
rcgionem  occupantes  in  qua  etiam  negato  tributo  tueri  se  posseni  et 


228  APPENDICES. 

liberlatem  vindicare.  Post  paucos  vero  annos,  ciim  (ut  habet  Gnlielmus 
Tripolilanus)  gregibus  imperatoris  sui  Vutcham  grauarentur  cxteri 
Mongali,  autalioqui  forte  propter  erepluni  Tartarorura  tributum  veia- 
rentur,  faber  quidam  ferrarius  Mongolus,  nomine  Chinchis  iniorîœ 
pellendse  et  liberlatis  asserendie  auidus  Sumongalos  ad  defectioDeai 
sollicitât,  Tartaros  revocat  et  comraunicatis  consilijs,  omnium  consensu 
rcx  creatur  anno  Domini  1187,  mox  eas  rcgiones  qusc  ultra  Belgîan 
montem  erant  invadens,  facile  omnes  adeptus  est,  quoniam  ut  erat 
prudens,  recte  Victoria  ulebatur,  in  victos  minime  seviebat,  sed  uni- 
cuiquae  lubenter  se  submittenti  et  milîlia  operam  suam  communicanti 
vitam,  coniuges,  liberos,  et  substantiam  omnem  salvum  esse  iubebat. 
Deinde  montem  Beigian  ubi  in  oceanum  excurrit  superans  agressus  est 
regnum  Tendue  sedem  imperialem  Vutcham ,  quo  deviclo,  foetus  est 
monarcha  orientis,  vixit  post  Vutcham  sex  annis,  in  quibus  multas 
prouincias  impcrio  suo  adiecit.  Sic  imperium  ad  Mongalos  peruenitet 
Tartarorum  dicitur,  cum  quod  horum  occasione  et  opéra  conquisitum 
sit,  tum  maxime  quod  communi  iure  et  societate  uiventes  Mongali 
omnes  generaliler  Tarlari  vocarentur.  Mansit  autera  Vutcham  cum  sua 
posteritate  rex  Tendue,  sed  sub  tributo  et  Tartarorum  imperio.  Haec 
breviler  collegimus  ex  M.  Paulo  Ven  :,  Haitano  Armeno,  et  Gulielm(^ 
Tripolitano  Dominicano  Anconensi,  qui  anno  1275  a  Gregorio  10  missus 
fuit  ad  Tartaros,  quo  prima  dominij  Tartarici  origo  et  sedes  nota  esset, 
ac  de  veritate  eius  Presbiteri  Joanne  qui  in  Asia  regnare  creditut  est 
bactenus,  tum  quoque  diversum  esse  eum  ab  illo,  qui  usque  hodieia 
Africa  Prête  Giam  appellatur  constaret. 

Quod  Nigir  in  Nilum  fluat, 

Nigirem  iluuium  cumreliquis  in  Libyse  paludem  fluentibus  inde  cum 
Gir  fluuio  continuari  credimus,  non  solum  nominis  aiBnitate  ducti, 
uerum  etiam  parlim  quod  tôt  tamque  longe  labentia  flumina  ab  uno 
tandem  lacu  absorberi sine  alia  deriuatione  credibile  non  sit,  partim,  et 
quidem  maxime,  quod  Solinus  cap.  50  et  55.  Nili  aquas  inde  produci 
ingénue  asserat,  ac  latino  id  explicans  cap.  55  ex  autoritate  Punicorum 
librorum  et  tradilione  Jubse  Mauritanie  régis  dicat  Nilum  originem 
babere  ex  monte  inferioris  Mauritaniae  qui  oceano  propinquat,  euraquae 
in  Egypte  exundationis  incrementa  sentire,  quando  aut  copios'or  nix 
liquescens  aut  imbres  largiores  ab  bac  origine  et  Mauritaniae  montibus 
detluxerint.  Dicit  autem  bis  eum  per  cuniculos  subterraneos  con- 
speclum  subtcrfugere,  prîmum  vbi  e  Nilide  lacu  eifusus  fuerit  amplior 
mox  e  Gesariensi  specu  (ad  Vsargalan  opiner  montem)  prorumpens, 
deinde  ilerum  anliquam  Nigrim  iluuium  (qui  Gir  Plol.  dicitur)  Africam 
ab  Aethiopia  seiungeniem  elTundat.  Tertio  item  absorberi  et  per  sub- 
terranea  e  Nubia  palude  in  aliud  fiumen  erumpere  indicat  Ptol.  lib.  4, 
geogr.  cap.  6.  Eadem  fere  que  Solinus  habet.  Plin.  lib.  5  cap.  9. 

De  vèro  Gangis  et  Aureœ  chersonesi  sUu, 

Ea  quae  longa  experientia  discuntur  si  ad  perfectam  ueritatis  cogne- — 
tionem  progredi  non  autem  falsitate  obscurari  debeant ,  sic  instituendr 
sunt,  ut  castigaiis  quse  per  manifestas  rationes  falsa  sunt,  probabîli 


APPENDICES.  2^9 

retineantur,  donec  experientise  et  ratiocina tiones  omnes  intersecoiisen- 
taneac  res  ipsas  in  sua  ueritate  ob  oculos  ponant,  talis  est  geographia, 
quam  si  volumus  vetcrum  inuenta  temere  quauis  occasione  transponere 
commutare  aut  invertere,  non  modo  non  perficiemus,  sed  pro  unius 
erroris  emendatione  ceatum  veritatis  depravabimus  et  confusissîmam 
tandem  terrarum  etnominum  congeriem  faciemus,in  qua,  regionessuis 
locis  nec  nomina  suis  regionibus  reponantur,  quale  quid  hodie  in  Indise 
descriptione  sit  a  geographis,  dum  nimis  absurde  Gaugem  celebralissi- 
mum  fluuiumoccidenlaliorem  faciunl  Cincapura  promontorio  et  Tapro- 
bana,  qui  veteribus  multo  fuit  orientalior,  atque  universam  deinceps 
Indiae  descriplionern  qusc  apud  Ptolomeum  est  inverlunt  et  confundunt 
nihil  illi  ullra  dictum  promonlorium  concedentes,  quod  inpriiuis  nobis 
refellenduni  est,  quo  Plolomeo  sua  slet  autoritas  et  geographica  veritas 
eruatur,  quse  non  minus  vera  nomina  quara  veros  locorum  situs  postulat. 
Acprimu m  constat  eam  descriptionem  non  obiter  a  Ptolomeo  congestam 
esse,  sed  inde  usque  ab  Âlcxaudro  Magno  muUorum  terra  marique  pro- 
fectionibus,  multorum  obseruationibus  banc  figuram  accepisse,  et  emen- 
datius  collectam  a  Marino,  inlegritatique  a  Plolomeo  reslitutam,  quaFe 
cum  tôt  seculis  tôt  que  artificibus  elaborata  sit,  non  est  possibile  tam 
a  vero  recedere  ut  tam  longi  litloris  transpositione  fallat ,  noque  enim 
enormiter  poterat  tantorum  littoris  parlium,  quanta  sunt  a  Comara  pro- 
montorio ad  Taprobanam  adiacensque  ei  promontorium,  ac  dehinc  ad 
Gangem  et  Aurcam,  neque  tam  frequentarum  (ut  copiosa  locorum  ins- 
criptio  arguit)  consequenlia  ignorari ,  ut  qui  prior  erat  posterior  pone- 
retur,  et  Ganges  longo  interuallo  Taprobanam  sequeretur  qui  (ut  nostri 
Yolunt)  multo  antecederc  debeat.  In  directionum  cursu  falli  poterant 
Tcteres  propter  nauigandi  arlem  adhuc  imperfcctam,  et  quod  negleclis 
fera  directionibus  liltora  soléant  legi.  In  particularium  itidem  locorum 
transpositione  errare  poterant,  at  sane  in  buiusmodi  quam  dieimus 
eonsequentia  nequaquam.  Ârrianus  grauis  autor  in  Periplo  veritalis 
nobis  iudex  est,  cui  ab  Indo  in  meridiem  est  Comara,  unde  iuxla  con- 
sequeotiam  liltorum  pcr  Colchos ,  Camarum,  Poducam  et  Sopatmam 
peruenit  in  Taprobanam  et  adiacentem  illi  regiouem  Azaniam  ubi  num 
Malacha  est  nostris,  et  Plolomeo  Mesolus  fluvius,  Arriano  item  Mazalia 
regio,  postea  per  Desarenam,  Cirridas,  Bargisos,  Hippoprosopos  demum 
ad  Gangem  fluuium  et  emporium  pertingit.  Ad  lisec  via  regia  stadiorum 
20000,  quœ  est  ab  Indo  ad  Gangem  et  Palibotram  apud  Strabonem 
lib.  15  non  alio  loco  Gangem  admittit  quam  quo  nos  cum  Plolomeo 
posuimus.  Non  enim  intimus  recessus  Bengalici  sinus,  quo  bodie 
vetenim  Gangem  transferunt ,  eousque  elongari  ab  Indo  potest  seruatis 
directionibus,  et  earum  dimensionibus ,  ut  proposilam  dislantiam 
Palibotra  Gangi  imposila  seruet,  simul  perpenso  quod  Ganges  a  Pâli- 
botra  oricnlem  versus  mare  petat.  lam  si  consideramus  58  dierum  itcr 
qupd  Nicolaus  de  Conll  Yenelus  confecit  ab  intimo  sinu  Bengalico,  et 
Auam  fluvium,  ad  quem  peruenit,  mullo  maiorem  Guenga  Benfralico, 
non  inepte  indicabimus  eum  ad  maximum  Indie  fluuium  celebratissi- 
mumque  veteribus  Gangem  pcrvenisse  quanquam  alio  forte  ibi  nomine 
vocatum.  Auam  quoque  urbem  eidem  fluvio  adiacentem  credibile  erit 
Palibotram  esse,  cum  ob  magnitudinem ,  ut  que  15  miliarium  ambitu 
patet,   tum  ob  conuenientem  ab  ostijs  distantiam,  17  enim  diebus 


250  APPENDICES. 

enauigauh  Nicolaus  cuni  6000  stadiorum  ponat  Strabo.  Et  sane  cum  eo 
loco  quo  nos  signavimus  sint  fonles  Guenge  Bengalici ,  idemque  qaem 
posuimus  ipsiusdecursns,  nt  JoanneindeBarrostestem  babemns,  qnîd 
absurdius  dici  poterat  quam  hune  esse  veterum  illum  Gangem ,  cajus 
fontes  eonstat  ijsdem  montibus  quibus  Indum  ortos,  et  ^80  mil.  pass. 
tantum  a  Zaradro  orientalissimo  Indum  augentîum  fluvio  Plinio  teste 
distare,  tum  etiam  magna  parte  in  meridiem  ferri?  Qnare  cum  neqae 
fontes  Gangis,  neque  situs,  neque  longitudo  ipsius  veterum  descriptioni 
conveniat ,  hune  esse  veterum  Gangem  negamus,  tametsi  nomen  eias 
referre  videatur.  Quin  imo  cur  ipsî  qui  eius  opinionis  autores  fuerunt 
suœ  sententise  confidenter  stare  videntur,  cum  alterum  finxerint  Gan- 
gem ijsdem  cum  Guenga  oslijs  se  in  Bengalicum  sinum  exonerantem 
ipsa  nimirum  distentioue  arguente.  Adde  quod  oppida  aliquot  et  Moîn 
sive  Mien  regnum  huic  fluvio,  quem  nos  Gangem  esse  defendimus, 
débita  ad  suum  quoque  fictitium  Gangem  transtulerint,  quo  perspicue 
intelligi  datur  verum  illum  et  veterum  Gangem  alibi  quam  in  sinu 
Bengalico  querendum  esse.  Prêter  solidas  quoque  istas  rationes  vel 
ûgura  ipsa  littorum  et  nomina  passim  inscripta  veritatem  ostendere 
poterant,  Comari  enim  promontorium  et  nostri  cum  Ptol.  atque  ÂrrianO 
ponunt,  tum  cabo  de  Colle  quid  aliud  sonat  qua'm  Collaicum  Ptolomei 
aut  Golchicum  Arriani?  quid  consonantius  quam  Jameri  et  Chaberis 
sive  Camara ,  Pogu  vel  Pegu  et  Paduca ,  Tanay  et  Taua ,  Malanga  et 
Malaca,  Cantan  et  Gange  oppidum  cum  fluvio  maximo  qualem  veteres 
quoque  Gangem  testantur?  Deniquae  si  hic  non  est  Ganges  ubi  posuimus, 
quo  referentur  tôt  insulse  in  sinu  Gangetico  a  Ptolomeo  positœ  cum  in 
Bengalico  sinu  non  reperiuntur?  Tenemus  ergo  Cantan   maximum 
fluvium  esse  Gangem  a  veteribus  celebratum ,  et  Auream  esse  non  quae 
nunc  Malaca  est,  sed  Japan  insulam,  ut  ex  Arriano  et  Mêla  liquet, 
tametsi  peninsulam  faciat  Ptolomeus,  apud  quem  et  Sabana  emporiam 
bodiernum  insulse  nomen  videtur  obtinere.  M.  Paul.  Yen.  lib.  5,  cap.  % 
dicit  eam  convenienter  antiquo  nomini  suo  auro  abundantissimam  esse. 
Pretcrea  insulam  Burneo  esse  que  Ptol.  Bone  fortuuae,  Celebes,  Ambon 
et  Gilolo  esse  quae  Sindaeappellantur,  Mindanao  cum  vicinis  4  maiorîbus 
Barussas  vocari  refellere  non  possumus.    Nomina   item  quedam  in 
recentioribns  Tabulis  invenio,  que  Mangi  et  Cathaium  régna  Ptolomeo 
cognita  fuisse  manifeste  doceant,  et  ad  sinum  Magnum  quem  Plinius 
Chrysin  vocat  pertinere,  ut  sunt  in  Mangi  regno  Pagrasa,  Donc,  Gara- 
caran,  Agonara,  Tartaho,  in  Cathaio  autem  Aspicia  et  Brema,  quibus 
apud  Ptol.  respondent  Pagrasa,  Daona,  Lariagara,  Aganagara,  Cortacha, 
Aspitara,  Bramma ,  ut  dubium  uullum  est  Gangem  Taprobana  orienta* 
liorem  esse,  recteque  deinceps  Chrysen  insuiam  et  sinum  Magnum  sequi 
uUraque  Cattigara  sinarum  statio  postremus  Ptolomaicœ  descriptionis 
terminus  orientalem  nostrae  continentis  extremitatem  possidere ,  et  in 
regnum  quod  hodie  Tenduch  vocatur  incidere  videtur. 

—  Les  doux  relatives  au  pôle ,  sont  les  suivantes  : 

De  longitudinum  geographicarum  et  polo  magnelis, 

Testatur    Franciseus    Diepanus    pcritissimus    nauarchus  volubiles 
libellas,  magnetis  virtute  infectas  recta  mundi  polum  respicere  in 


APPENDICES.  251 

insulis  G.  Viridis,  Solis,  Bonauista,  et  Maio,  cui  proximc  astipulantur 
qui  in  Terccra,  aut  S.  Maria  (îdsuIx  sunt  inter  Açores)  id  fieri  dicuut, 
pauci  in  earundem  occidentalissima  Corvi  nomine  id  coniiDgcrc  opi- 
DaDtur.  Quia  vero  locorum  longitudiuis  a  communi  magnetis  ei  rnuudi 
inerîdiano  iustis  de  causis  initium  sumere  oportet,  plurium  tesliuio- 
nium  sequutus  primuni  meridianum  per  dictas  G.  Viridis  insulas  pro- 
traxi,  et  quum  alibi  plus  minusque  a  polo  deuiante  magnete  polum 
aliquum  peculiarem  esse  oporteat  quo  maguetes  ex  omiii  rnuudi  parte 
despiciant,  euum  hoc  quo  assignaui  loco  existerc  adhibila  declinatione 
magnetis  Ratisl)0Di£  obseruata  didici.  Supputaui  autem  eius  poli  situm 
eliam  respectu  insuia:  Gorui,  ut  iuxta  extremo  primi  uieridiani  positus 
extremi  eliam  teriuini,  intra  quos  polum  hune  inueuiri  uccesse  est, 
conspieui  ûerenl,  donec  ceriius  aliquod  uauclerorum  obseruaiio  aiiu- 
lerit. 

In  subinclam  septentrionis  descriplionem. 

Quum  iu  polum  extendi  tabula  nostra  non  posset,  latitudininis  gra- 
dibus  tandem  in  inûnitum  excurrentibus ,  et  descriptionis  aliquid  haud 
quaquam  negligendae  sub  ipso  septentrione  haberemus ,  necessarium 
putauimus  extrema  descriptionis  nostruî  hic  repetere  et  reliqua  ad 
polum  usque  anneclere.  Figuram  sumpsimus  que  illi  parti  orbis 
maxime  congruebat,  quaîque  situm  et  faciem  terrarum  in  spha^ra  esset, 
redderet.  Quod  ad  descriplionem  atlinet,  eam  nosaccepimus  ex  itine- 
rario  Jacobi  Gnoxen  Buscoducensis ,  qui  quidam  ex  rébus  gestis  Ârturi 
Britanni  citât,  maiorem  autem  partem  et  poliora  a  sacerdote  quodam 
apud  regem  Noruegix  anno  D.  15G4  didicit.  —  Descenderal  is  quinto 
gradu  ex  illis  quos  Arlurus  ad  bas  habitandas  insulas  miserai ,  et 
referebat  anno  ioGO  Minoritam  quendam  Anglum  Oxonienseni  mathe- 
maticum  in  cas  insulas  venisse,  ipsisque  relictis,  ad  ulleriora  arte 
magica  profectum  descripsisse  omnia  et  astrolabio  dimensum  esse  in 
hanc  subiectam  formam  fere,  uti  ex  Jacobo  collegimus.  —  Ëuripos 
illos  4  dicebat  tanto  impetu  ad  interiorem  voragineui  rapi,  ut  naues 
semel  ingressaî  nulle  vente  retroagi  possuut,  neque  vero  unquam  lan- 
Inm  ibi  ventum  esse  ut  moïse  frumenlariGC  circumagendaî  sufiiciat. 
Simillima  his  habent  Giraldus  Gambrensis  in  lib.  de  mirabilibus 
Hiberniae  sic  enim  scribit  :  Non  procul  ab  insulis  (Ebudibus,  Islandia 
etc.)  ex  parle  boreali  est  maris  qua:dam  miranda  vorago  ad  quaiu  a 
remotis  parlibus  onines  undique  marini  fluctus  tanquam  ex  couduclo 
confluant,  qui  in  sécréta  naturœ  penelralia  se  ibi  transfundeutes  quasi 
in  abyssnm  vorantur,  si  vero  nauem  hanc  forte  transire  conligerit , 
lanta  rapitur  et  atlrahitur  flucluum  violentia,  ut  eam  stalim  irrevoca- 
bilîter  vis  voracilalis  absorbeal. 

—  Enfm  les  deux  trailant  des  moyens  pour  dclenniner  les  direclious 
et  les  distances  dans  la  navigation  : 

Brcx'is  usus  organi  dircclorij. 

Gum  inscriptionibus  uecessarijs  occupatus  oceanus  sufficienter  direc- 
toria  recipere  nequeat ,  et  terra  in  qua  eorundem  non  exiguus  est  usus 
nulla,  coacti  fuimus  hoc  organum  directorium  addere,  ut  duorum 


S3S  APPENDICES. 

quorumlibet  locorum  ad  invicem  respectus  et  habitudo  iode  pati 
possit.  —  Débet  autem  prior  locus ,  ad  quem  alterius  respectum  queri- 
mus,  latitudineni  nolam  habere,  et  in  eadeni  sub  primo  organi  meri- 
diano  situs  intellegi.  —  Duo  autem  huic  primo  meridiano  directoria 
applicamas,  quorum  superius  serviet  cum  prior  locus  maiorem  habet 
latitudinem  quam  secundus,  inferius  cum  minorem,  ex  utriusque  centro 
filnm  dependeat. 

Quaudo  igitur  secundus  locus  longitudinis  et  latitudinis  differentiam 
a  priore  nolam  habet,  nota  sunt  directio  et  distantia.  Directlo  prîmom 
si  notato  situ  secundi  loci  iuxta  long,  et  latit.  dififerentiam  filum  ex 
centro  directorij  ad  :equidistantiam  duorum  locorum  extendator, 
parallelse  enim  linese  quœcunque  in  organo  eiusdem  sunt  directionis. 
Parallèles  autem  eadem  circini  extensio  ex  utroque  loco  filum  directa 
optime  indicabat.  Distantia  deinde  per  modum  alla  tabella  contentum 
invenietur. 

Si  secundus  locus  direclionem  cum  dififerentia  alterutra  longitudinis 
vel  latitudinis  notam  habuerit,  ad  eam  directionem  filum  extendator, 
et  ex  priori  loco  circini  ductu  illi  paraliela  linea  fingetur  quae  ubi 
notam  dififerentiam  compleuerit,  etiam  distantiam  notam  faciet  iuxta^ 
rationem  in  alia  tabella  descriptam.  —  Si  secundus  locus  directionen^ 
et  distantiam  a  primo  notas  habuerit  innotescent  etiam  dififerentise  lat  ^. 
et  long.  Quaeratur  directio  eandem  ab  aequatore  declinationem  habens 
quam  locorum  directio  a  meridiano  in  eadem  a  centre  directioneiK 

tôt  gradus  sequatoris  mensurentur  quot  locorum  distantia  exigit;  tur^ 
meridianus  eos  gradus  terminans  in  aequatore  quoque  gradus  differei^.^ 
tise  latitudinis  a  centro  direcllonum  computaudo  terminabit.  Hos 
addas  priori  loco  in  minori  latitudine  existenti,  aut  demas  ab  eadem  ^ 
maiore  posito,  prodidit  latitude  secundi  loci ,  ad  quam  e  priore  lo 
educta  directio  etiam  longitudinis  difierentiam  notabit,  inde  videlicet 
aequidislantiam  a  proximo  meridiano  in  sequatorem  descendendo.  - 
Plana  maioraque  de  hoc  organo  in  geographia  nostra,  deo  volente,  cl 
bimus. 

Dislantiœ  locorum  mesurandœ  modus. 

Âliud  nobis  est  plaga  aliud  directio  distinctionîs  rerum  causa.  Plaga 
vocamus  nostri  loci  ad  allerum  respectum  secundum  declination^ 
circuli  maximi  per  utrumque  locum  ducti  ab  aliquo  i  punctorum  cardJ- 
nalium.  Sic  dicimus  locum  aliquem  nobis  esse  boreozephyrium  id  ^ist 
nordwestium  quando  cîrculus  maximus  a  nobis  per  eumductus^<5 
gradus  in  horizonte  déclinât  a  seplentrionali  cardine  versus  occidec:*^- 
talem.  Directionem  vocamus  lineam  ab  une  loco  in  alium  sic  ductam  mM-i 
cum  quibusuis  meridianis  aequales  angulos  faciat,  bae  perpétue  obliqus^^ 
încuruatur  in  superficie  sphaeraî  propter  meridianorum  ad  se  invice^^ 
inclinalionem,  atque  inde  in  magnîs  distantes,  et  potissimum  circ^ ^ 
borealiores  partes  distantia  directionalis  semper  maior  est  distant  ^^ 
plagali,  in  mediocribus  vero,  et  maxime  uersus  sequatorem  sitis,  nc^'Q 
est  notabilis  dififerentia  quare  cum  plagales  distantise  sumendse  cir^:^ 
aequatorem  non  excedunt  20  gradus  maximi  circuli ,  aut  in  cliniSÉ.'^^ 
Hispanise  et  Gallias  15  gr.  aut  in  partibus  septentrionalibus  Europae  ^^ 
Âsiae  8  vel  iO  connenienter  directionalibus  distantes  pro  plagalil^^^^ 


APPENDICES.  S55 

sive  rectis  utemur,  alioqui  et  harum  inquirendaruin  ratio  traddi  potest, 

sed  operosior  nec  admodum  necessaria.  Distantiae  ergo  directionalcs 

sic  inuenicntur.  GoDsideraliir  quo  nomine  appelletur  linea  imaginaria 

ioter  duos  locos  extensa,  hoc  est  cui  in  tabula  scriptsc  linese  si  parallel;3e, 

quod  per  circiaum  ex  utroque  loco  in  eandem  lineam  extenso  explora- 

bitur,  deinde  qusB  sit  differentia  latitudinis  eorundem  locorum,quo 

inuenietur   distantia   cuiusque  a   proximo    parallèle    latitudinis    in 

scalam  graduum  latitudinis  transferendo,  bis  duobus  inueutis  in  aliquo 

directorio  sequinoctiali  imposito  linea  eodein  angulo  declinans  ab  xqui- 

noctiali,  quo  linea  imaginaria  propositorum  locorum  a  meridiano  aller- 

utrius  et  a  centro  directorii  computatis  tôt  gradibus  sequatoris  quot 

erant  in  differentia  latitudinis,  ab  extrême  graduum  ad  proximum 

meridianum  distentus  circinus  deorsum  feratur  altero  pede  seraper 

eundem  meridianum  occupante,  relique  uero  eundem  sequidistanter 

coraitante  donec  in  inuentam  declinationis  lineam  incidat,  ibi  tum  iste 

figatur;  ille  qui  meridiano  inhserebat  extendatur  iu  centrum  directorii, 

**  sic  distentus  circinus  utroque  pede  œquatori  applicatur,  ac  tum  gradus 

intercepti  indicabunt  directionalem  propositorum  locorum  distantiam, 

muUiplicando  numerura  graduum  per  15  si  germanica  miliaria  quscran- 

tnr,  per  60  si  italica,  per  20 si  gallica  aut  hispanica  communia.  Hsec  dis- 

tantiae  inquirendae  ratio  per  se  quidem  semper  infalibilis  est,  sed  in  iis 

directionibusquae  maxime  ad  parallelum  latitudinis  inclinantur  incertior 

6st  circini  applicatio  propter  nimis  obliquam  directionalium  linearum 

iacidentiam  in  parallèles,  ideoque  in  bis  alter  bic  modus  erit  exactior. 

' — Sumetur  circino  differentia  latitudinis  assumptorum  locorum,  et 

obseruando  quod  gradus  ibidem  circinus  intercipiat,  sic  distentus  ex 

une  loco  versus  alterum  toties  reuolualur  quoties  intercapedo  locorum 

suscipere  potest,  siquid  residuum  est  distantise,quod  ad  integram  circini 

extensionem  non  perueuiat  id  contractior  circinus  excipiet  et  in  medios 

^adus  differentiae  latitudinis  traducetur,  notatisque  ibi  interceptis 

gradibus  colligentur  omnium  reuolutionum  gradus  cum  residuo  in 

unam  sumam,  qua  ut  mox  diximus  multiplicala,  proueniunt  miliaria 

distantiae  quœsitse. 


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Jean  IV,  Komnëne,  kaloioan- 
nes,  empereur  de  Trebi- 
zonde  ii46-li56,  épousa 
une  fille  d'Alexandre ,  roi 
d'Ibérie. 


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APPENDICES. 
GÉNÉALOGIE  DE  MERGATOR. 

Amoldu»,  né  1857.  mort  ( '?*<ï»*ïï' K^o"»^''"® 
m?,  géomètre,  méca- J  £«'^î«'î'' fifa'*-"»-- 
nicien.  )  ilfwftaej,  graveur. 

V  et  6  autres. 


255 


Hubert  Mercator 
épousa  Emerentiana. 

Gérard  Mercator, 

mécanicien ,  graveur ,  géo- 
graphe, géomètre ,  né  à 
Rupelmonde,  le  8  mai 
4812,mort  le f  décembre 
1 894,  épousaBarbe  Scbel- 
leken  4856,  morte  1886. 


4  filles. 


Bartholomée,  né  4840,  mort 
4868. 

\Rumold,  géographe,  gra- 
veur. 

Emerence,  mariée  à  Jean 
Holan. 


Dorothée,    mariée   1*.   à{^    ...  j        au 

'     Alard  Six  d'Anvers;        J  ^"  *    "»"'^^  ^«"*  «"«»• 

V  à  Tilman  de  Neufville 

de  Wesel. 

Catherine ,  manée  à  Théo- 
dore Yerhaer. 


GÉNÉALOGIE  DE  HOND,  JANSSON. 

Olivier  Hond 
épousa 
Pétronille  Haverluyn.     /  Henri  l'ainé,  graveur  de 

portraits,  né  1875,  mort 

Jof«eJVon(/,  Judocus  Hon-1 
dius^éograph^éditeur,  )  ffe^H  le  jeune,  né  à  Lon 
neaWackene4S65,mort<     ^^8  4880,   mort  4644, 
46  février  4612.  \     géographe-éditeur. 


Fille,  mariée  à  Jean  Jansson  de  Waesberge ,. 
impr.[à  Amsterdam. 


Nieoloê  Santon, 
né  à  Abbeville  en  4600, < 
I  mort  4667. 


Fille,  mar .  à  Jean  Jansson,  <  '^'"S»  "?"•>  GiUes  Jansson  de  Waesberge , 
éditeur.  )     ï'braire  a  Leipsig. 

Fille,    mariée  à  Théodore  Jausson   van 
Almeloveen,  médecin. 

GÉNÉALOGIE  DE  SANSON,  VAUGONDY. 

Nicolas,  né  46Î6,  périt 
en  4648. 

Adrien,  mort  4748. 

GuiUaume,  mort  4705. 

Fille ,  mariée  à  Robert 
Vaugondy. 


GiUes-Rchert  de  Vau- 
gondy,  né  en  4688, 
mort  4766. 


Robert  de  Fau- 
gondy,  né  4725, 
mort  4786. 


Fille ,  mariée  à  Duval.     f  Pierre  Duval^  né  à  Abbeville  4648,  mort  4685. 

GÉNÉALOGIE  DE  DELISLE. 


Claude  Delisle, 
né  à  Vaocouleurs  en  Lor- 
raine 4644,  mort  4720. 


Guillaume    Delisle,  né  à  (  Fille ,  mariée  à  Philippe  Buache,  né  4700 , 
Paris  4678,  mort  «726.    \      mort  4775. 

^Joseph  Nicolas,  né  4688, 
visite  Petersbourg  1727, 
mort  4768. 

Simon  Claude,  né  4675, 
mort  1726,  historien. 

Louis  la  Croyere ,  mort  en 
1742  dans  son  voyage 
au  détroit  de  Bering  ,  à 
Avatcha  de  Eamschatka. 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 

DES   NOMS    ET   IVES   MATIÈRES   CONTENUS   DANS   LES   DEUX  VOLUMES. 


Les  Duniéros  renvoient  aax  chapitrei.  —  Dans  la  suite  des  chiffres  les 
dixaines  el  les  centaines  ne  sont  pas  répétées. 


Abassia  166.  Ahbas  ibn  saïd  15.  Abdalla  al  bekri  46.  Abdalgany  46. 
Abdal  rahman  al  koraïscbi  103.  Abdal  razzah  102.  Abdolmios  14.  Abdour- 
mschid  bakoui  102.  Abimalion  163.  Abissinia  166.  Abc  53.  Aboul  abbas 
ahmed  dimeschki  103.  Abou  abdallab  moharaed  21,46.  Aboubekr-ahmed 
alkhatîb  26.  — al-hazemy  46.  —  ben  iousouf  243.  — mohammed  46.  Abou- 
dalf  musir  20.  —  djafarkhoi-aznii  14,5,9,22.— fazel  103.— Ishak  istakhri  23. 
— hafs  omar  ibn  al  ouardi  93.  —  hamid  garnati  46. 

Aboul-abbas  abnied  21,  93.  — cassem  alvakedi  103.  — cassem  iriahmoudza- 
ïûakschari  46.  — cassem  obeidallah  khordadbeh  21.  — faradj  kodama  21. 
r-féda  14,  5,  31,  2,  9, 40.66,  7,  95-101,  226,  33,  43,  5,  6,  54,  60,  — hadjadj 
iousouf  103.  — hassan  ali  aldaracolbny  46.  —  hassan  ben  ali  al  saïd  105. 
"p-hassan  raarakaschi  83-226,  44,  5,  54  (v.  table  de  long.)  — hassan  saïd  al 
^jordjany  105.  —  madj  ismael  al  mausseli  46. 

Abou-mansour  manboub  al  djavaliki  46.  — nasr  ali  ibn  macoula  46.  — nasr 
'"Mohammed  djihani  21.  — na vas  103.  — obeid  ibn  Haoukal  103.  — osman 
anarou  djahiri  21.  — saïdhamed  alsirafii  105.  — saad  abdalkerim  46.  — rihan 
*'  bîrouni  22,  57-44,  88, 96,  8,  9, 100,  245  (v.  caries  de  l'Inde  et  table  de 
»oug.)  _zeid  22.  Abraham  bar  Haïia  244,  5,  (voyez  Uble  de  long,).  Abré- 
^«ateurs  94,  101    Abyssinia  166. 

Acunha190.  Adam  de  Brème  47  (v.  Slavia).  Adelis  5,  6,52.  Adfari105. 
^richomius  174.  Aessler,  v.  Essier.  .«Ihicus  255.  Afon  106.  Afrique  165-8, 
^  (v.  portulan).  Afrodision  4.  D'Agnet  222.  Agalhodaïmon  1,  14,  i79,  82, 
?5*-  Agrippa  1,229.  Ahmed  ben  iahia  abbeladheki  al  schaer  105.  Ahmed 
^^nkhalaf  233.  Aiguille  aimentée  106,  9,  55,  218,  55,  6.  D'Ailly  154-8,  256,7. 
A^naant,  son  pôle  261,  2,  (v.  aiguille).  Aïthanarid  4. 

Alabdery92.  Aladfari  105.  Alathar  246.  Alberdjendi  105.  Albateni  15,4, 
**'  i04,  259.  AJbi  carte  255.  Albuquerque  105.  Alcafordo  160  Alcobaza161. 
AjdehebylOl.  Alexandre-le-grand  147,  65,  8,  228;  —pape  180,202,  62. 
^.fxandrie  16,  259.  Alfakhal  khalathi  70.  Alfakhr  70.  Alfons-de-castille  104, 
203  ;  — deportug.  107,  64.  Alfragan  104,  55,  7.  Alfred  8.  Algoet  215.  Alhe- 
^jy  65.  Al  hesaïn  no  boufari  105.  Alkomi  241-5.  Alikoschgi  102.  Ali 
^\nerani  65.  Ali  al  scharfi  105.  Ali  ben  aladir  65,  96.  Ali  ibn  isa  15,  24. 
fj^abit  104.  Almageste  15,  4.  Almagrourim  159,  256.  Al  makrizi  105. 
^5aaligl45.  Almamoun  12,  5,  254,  5.  Almeida  190.  Al  scharfi  105.  Al 
^«irazi  95.  Alsifakezi  105.  Al  sobki  95. 

^|v^ari  54,  65.  Amazones  168,  265.  Amerigo  vespuzzi  190-5,  202.  Amoretti 
S*«  Amyn  ahmed  razy  105.  Anaximandre217.  Andalouze  171.  Angelo  180, 
*^i'  Angleterre,  carte  membrane  105.  Anglo-sax.  carte  8-10.  Annotations 


258  INDEX 

arabes  240-5,  60.  Ântilia  253.  Antipodes  50 ,  265  Ansgaire  8,  47.  d^Anville 
224,  5.  Apian  211,  8, 57.  Arabes,  écrivains  20-4,  46,  65, 82,  92-4,  101-103, 
y.  annot.  ;  consulté  210,  25,  31,  40.  Arca  noe  9,  H.  Argyre9,  50.  Arin, 
arine 22,38,  45,  90,  104,55,7,236,7,57.  Arislagoras  227.  Aristarche  4,  228. 
Arras,  carte  108.  Arsacius  4.  Arzakhel  45,78,83,8,104, 260,(v.  table  de  long.) 
Astrolabes  13,  24,  53,  245,  5.  Astronomie  13,  239,  40.  Athanarid  4.  Athe- 
lard  53.  Atlas  215,  6.  Atval  37,  96  (v.  table  de  long.).  Auguste  229.  Aurigar 
V.  Waghenaer.  Aurivillius  94.  d^Avezac  107,  53.  Ayeen  ak  beri  24,' 103. 
Aziz  96.  Azores  160,  261,  2. 

Babmondou  82, 132.  Baclario  161.  Bacouel  108.  Bagdad  13,  24,  237-9, 50, 
52,  60.  Baïazet  152,  68.  Bakoui  70,  102  (v.  table  de  long.).  Balbus  229. 
Baldac  163,  42.  Baldaya  160.  Balkh  103.  Baltique  150,  83.  Barbari,  barba- 
ricon8,  20,  255.  Barbie  du  Bocage  224.  Bastides  190.  Baten  104.  Bateni 
V.  al-Batboutâ,  v.ibn. 

Bedrazio  161.  Behaïm  185-9,  202,  57.  Beins  222.  Bekri  46.  Bellarma- 
tus  210.  Bembo  170,9,80.  Benjamin  de  tudèle  105,  266  (v.  examen  géogr.). 
Benincasa  169,  70,  250,  6.  Benoît  180;  polonais  110.  Benvenuti  191,  3,  6. 
Berdjendi  103.  Berey  220,  2.  s.Bertin  51.  Bertius  226.  Bethencourt  159. 
Betalmios  14.  Beto  228.  Biancho,  Bianco  137,  160,  2-4.  Bibliothèque  de 
Bourgogne  112.  Biot35.  Birouni,  v.  abourihan. 

Blaeuv  218, 20, 58,62.  Blantasius4.  Bleaux,  y.  blaeuv.  Boîador  107,  59,  60. 
Boisseau  222.  Bonati  104.  Bongars  111.  Bonne  225,  59.  Bonne  espérance 
186,204.  Bordone  173,200.  Borgia  168, 256.  Bouchet  261 .  Boudhiadeva  57. 
Bouides  66.  Boussole  106,  9,  204,  8,  55,  6.  Bouthinkh  266.  Bruno  218. 
Busching97,  Butimsl45.  Byzantins  178,9. 

Cabot  190.  Cabrai  160,  90,  1.  Cadamosto  164,  70,  1.  Calendrier  66,  127, 
131,56.  Calvol59.  Cam  186.  Cambalech  146.  Camerarius  214.  Campa  210. 
Campanus  53.  Canaries  107,  59-61.  Canonici  111,  9,  26.  Cap  vert  164.  Cara- 
vaïal  218.  Carmoly  14,  29,  36.  Carpini  110. 

Cartes  géogr.  arabes  14-20,  5-45,  67-92,  94-100,  241-4;  anconitaine  152; 
catalane  107,29-34,7-51  (v.  portulan);  comparées  arabes  et  latines  135,  6; 
continentales  174-7,  257,  8;  espagnole  173,  258, 63;  génoise  à  Florence  161; 
itinéraire  édrisienne  63,  64  (v.  analyse  des  sect.,  cartes  deFInde,  carte  sidl.); 
hydrographiques,  marines,  nautiques;  delà  navigation,  108,  9,  25-8,  33-5, 
61,  69-73,  219-21 ,  58,  63  (voyez  portulan);  messine  139,  50,  71  ;  métallique 
168  ;  musée  bourbon  153  ;  portugaise  190-7  ;  sicilienne  47-64,  246-54  ;  voyez 
les  autres  sous  les  noms  de  leurs  auteurs. 

Casadilla  171,  86.  Caspienne  mer  20, 107, 16,  7,  33,  225.  Cassini  220,37. 
Castaldo  200, 10,  7,  60, 3.  Castorius  4.  Castro  173.  Catalans  129.  Cecco  106, 
255.  CepoyllO.  Ceylan  144,  266.  Chabert  143.  Charl-le-sage  129.  Char- 
lemagne  7, 255.  Chastel  170.  Chazelles  237.  Cherso  164.  Chine  12,  20,105, 
223  (v.  cartes  de  IMnde).  Chryse9,  50.  Chrysolarus  179,  80.  Chaumeau26i. 
Chionades  66.  Ciacorus  4.  Clément  pape  107.  Climat  18-il,  38-9,  60,  f ,  72, 
7,  84, 154,  7,  8, 220,  30,  5,  41,  4,  56.  Clusius  213.  Cnide  228.  Coelho  l9i. 
Colomb  171,  84-6,  8,  90,  6,  257.  Colombo  163,45.  Compilateurs  94-101. 
Contil61,84.  Constantinople  36,  60,  247,  58,  60.  Contractus  53.  Gorbulo 
230,  259.  Cordier  222.  Coronelli  223,  4.  Cortereal  190,  3, 6.  Cosa  de  la  258. 
Cosmas2,  252.  Cosmographes  109,  10,  31,  2,  5,  57,  8,  80.  Coudées  15. 
Coupole  22,  38,90,  v.  arin.  Covens  222.  Covigliano  171,  86.  Crates  128. 
Cynchris  4  ;  voyez  K. 

Bacia  183.  D'Agniet  222.  Daïbol  246,  56.  D'Ailly  154-8,  256,  7.  Daïra  54. 
Damask  24.  Dandolo  127.  Danemark,  Danmarscha  113,  6,  51  (v.  Slavia,  exam. 
des  sections).  Dankerts  222.  Dantzik  130,  50.  D'Anville  224-6.  Daoud  bena- 
keti  82.  Daveira  186.  D'Avezac  107,  53,  9,  71. 


ALPHABÉTIQUE.  239 

De  Castro  175.  Dcclinaison  deFaiguille  155,52.  Découvertes  107,  8,  59,60, 
71,  86,  90,  1,  205.  Degré  13,  22,  60,  2,  102,  51,  55,  7,  215,  7,28,  50,55-5. 
De  Fer  219, 28,  5.  Deguignes  94, 101.  Deheby  101.  De  la  Cosa  172.  Delambre 
15,24, 184, 240.  De  la  Plaets  222.  De  la  Sale  159.  De  la  Sagra  172.  Delfino  169. 
Delisle  225-5.  Demetr.  alexandrid  102,  97.  DeslaDe97.  Descriptlo2, 105,52. 
Détroit  202. 

Cy^b  166.  Diaz  186.  Dicearche  228.  Dicuil  1,  7,  52.  Diego  de  séville  160. 
Dieppois  107,  59,  219.  Dimeschki  95.  Diognetus  228.  Dionys  charac.  226. 
Distances  58  (v.  exam.  des  sect.).  Djafar  abou  maschar  22.  Djafar  ben  thaleb 
aladfari  105.  Djamboudvipa  22.  Djamkout  18,  22,  58.  Djelali  105.  Djihan 
nouma  105.  Dhar  57.  Dherbelot57,  60,  105.  Dniepr  149  (v.  anal,  des  sect.; 
portulan).  Doetecum  215,  62.  D*Ohsson  82.  Douis  180,  99,  257.  J^ooms- 
daïbook  55.  Doppelmayr  189.  Douza219.  Dupont  219.  Duval  219. 

Eannes  160.  Eclipses  22,  55,  258.  École  d'Alexandrie  228;  allemande  211, 
37;  d'Athènes  229;  ionienne  227;  italienne  258  ;  romaine  229.  Ecosse  105, 
265.  Edelvald  4.  Edrisi  50,  56-64,96, 121,  2,  46-54,  64,  6  (v.  anal,  des  sect.; 
cartes  de  Tlnde).  Edward  105.  Egypte  16,  55,  40,  69,  115.  Eichhorn  97. 
Eleazar  ben  nathan  de  mayence  47.  Elius  gallus  229.  Emon  de  werum  105. 
Emmanoiiel  191,  195.  Ephore  228.  Eresford  carte  105,  265,  Eratosthènes 
226,  8.  Espagne  159,  44.  Essler  174-7,  195,  9,  200.  Ethicus  1,  6,  255. 
Eudoxe  166,  228.  Eufrat  114,  42,  225.  Explorations  20-5,  65,  92,  107, 
iO,  59-61. 

Faleiro  205.  Fayan  222.  Fer  île  257,62.  Ferer  107,  29,  58.  Ferdinand 
amiral  195.  Fernel  215.  Feroer  v.  Frisland.  Figurines  v.  images.  Filo  228. 
Fleuve  d'or  159,  60.  Fonseca  218,  Fortunataî  ins.  137,255.  Foscarini  164. 
Fostat55.  Fiance  183,  265  (v.  portul.).  Français  107.  François  de  dieppe 
262.  Frederik  104,255.  Freducio  170,  256  (v.  portulan.).  Frisland  108,  61, 
265  (v.  tavola  di  Zeni).  Frisius  laurent  212  v.  gemma. 

Gadiffer  159.  Galileus  218.  s.  Galle  carte  6.  Gamal05,90.  Gangdiz  266. 
Gaspar  da  Gama  190  (v.  portul.).  Gautier  de  Metz  106.  Gcmisthius  179. 
Gemma  211,  4.  Génois  107,  61.  Géographie  de  ptol.  14,  253.  Géographe  de 
Sicile  64, 246-54.  Gérard  de  crémone  45,  104,  255, 60  (v.  table  de  long.).  Ger- 
bert  55.  Ghaznevides  57.  Ghyllany  189.  Gbiocondo  191.  Gioïa  109.  Giraud 
rarry  105.  Giroldo  161.  Gissur  105.  Globe  15,  104,  87-9,  228.  Gnomon  228, 
9,38.  Gog  et  Magog  9,  11,  20,  43,  94, 144,  7, 163,  5,  8,  95.  Golfe  persique  42, 
4,  99,  245,  50.  Gondar  66.  Gordon  222.  Gosselin  226.  Gough  105,  264. 
Graduation  124,  53,  70,  6,  95,  201-8,  56.  Grxvius  97.  Grandguillaume  108. 
Grandeur  du  degré  61 ,  215,  28,  30,  5,  4.  Groddeck264.  Grèce  170,224. 
Graphique  arabe  39-46.  Grœnland  183,  96,  207  (v.  tavola  di  Zeni).  Guerard 
219.  Guessefeld  222.  Gui  de  ravenne  2-6.  Guillaume,  abbé  53;  —  le-conqué- 
rant55;  -de  Tripoli  108.  Gutiscovius  218. 

Habitable  18, 58,  227-9,  36.  54.  Hadji  ahmed  103.  Hadji  kbalfa  94, 105,31. 
I]aflz21.  Haldingham  105,  265  (v.  portul.).  Halifax  104.  Hamdallah  al  mas- 
toufi  95.  Hamed  ibn  ali  24.  Hamersveldt  262.  Hara  202.  Haraïr  73  ,  96,  8. 
Harding  105,  265  (v.  portul.)  Hase  222.  Hassan  ben  ali  al  komi  241.  Hassan 
mollabit  96.  Hecatée  227.  Hceren  168.  Helmold  105.  Henri  chanoine 
cartogr.  105;  islandais  105;  d'angleterre  171,  85;  de  porlugal  160, 1,  84. 
Haraoui  103.  Herbelot  v.  d'.  Herena  218.  Hérisson  225.  Herodot  257. 
Heures  5, 251,  6,  7,  54.  Hipparche  228.  Higgden  108.  Hobaïz  15.  Hogenberg 
215.  Hoidevalde  4.  Hollande  219.  Holtzschuer  187.  Homen  215,  Homer 
227,52.  Uonaïnl5.  Hondius216.  Honorius  1,  55.  Hooge  220.  Horismos  4, 
16,  9  V.  rasm.  Horloges  217.  Hormesta  8.  Houlagou  70.  Hoyeda  190. 
Hudson  97,  Buelba  171,  Huen  266,  Huerter  de  moerkerke  181,  6.  Humboldt 
152,  72,  91.  Hydrographes  190-5,  265.  Hyggden,  hykeden  108.  Hvlaïs4. 


240  INDEX 

lacob  de  paris.  105,  t.  J.  lahia  ibn  abou  inaiisour  13.  Iakout  17,  65,  96, 
10:2.  lamakota  v.  Y.  lambek  143,  68.  lamblich  4,  5.  lava  !Ie  144.  lanson 
216,  20,  62.  lapon  v.  J.  lava  266  (v.  cartes  de  l'Inde). 

Ibn  abdullab  al  zafra  16.  —al  Athir  46,  94.  —al  Ouardi  94.  — Ayas  105. 
— Bathontha  92.  — Djobaïr  65.  — Foschian  20.  — Haoukal  23,  96.  — lounis 
25-35  (v,  table  delong.).  — Kesouf  13.  — Kelir,  kotaïr  20,  4(v.  table  de  long.)- 
—  Mokassem  21.  — Noctha  46.  —  Reschid  abdallah  alnouschery  92.  — Saïd 
75-7,  78-81,  6,  91, 6,  8,  108,  243, 6,  54  (v.  cartes  de  l'Inde;  table  de  Io#g.). 
— Sprot20,  36.  — Schahibl03. 

Ibrabim  hongrois  103.  leboud  abenzer  256.  Ilacomilus  191,  2,  212.  nés 
britanniques  105,  34,  265.  Ilkhan  70-2. 

Images  du  monde  48-51,  94,  106-8,  54,  232,  55;  suivant  les  mss  des 
biblioth.  d'Albi  255;  d'Arras  108;  de  Bourgogne  à  Bruxelles  51;  de  €k>penh. 
islandaise  106;  deGand  (Lambert)  51;  de  Genève  168;  de  Leipzig  49;  de 
Mons  en  Hainaut  106;  nationale  à  Paris  106  ;  de  Rheims  153  ;  de  S.  Berlin  et 
S.  Orner  49,  51  ;  S.  Denis  ou  S««  Geneviève  à  Paris  108;  de  Strasbourg  49  ; 
de  Turin  50,  263  ;  de  Vienne  Autriche  108  ;  voyez  les  noms  des  auteurs  et 
mappemondes. 

Inductions  74,  260.  Inde  et  Indiens  12,  22,  37,  8,  ^3,  76, 145,  86,  94, 8, 
255  (v.  cartes  de  rinde).  Iode  215  (v.  appendices  3,5).  Iordan4.  Inselin222. 
Investigations  arabes  12,  20-2.  Irland  6,  v.  îles  brit.  Irminion  7.  Isaak  aben- 
sidbasan  104.  Ishak  ben  honaïn  13.  Isidor  Chirac.  229.  Isidor  sévill.  2,  120, 
31,79.  Islandais  105,6  (v.  tavoladiZeni).  Issicol  168.  Istakhri  13.  Italiens 
107,  9,  83.  Itinéraires  5,  21,  229,  32;  de  Bagdad  à  Mekke  50  ;  à  Jérusalem 
105.  ludaei  v.  Juifs. 

Jacq  de  Metz  161  ;  — raajorq.  129.  Jaillot  220,  2.  Japon  180,  4,  5,  8,  96, 
257,  69.  Jaubert  56  (y.  anal,  des  sections).  Jean  halifax  104;  de  portug.  185, 
8.  Jérôme  1,  266.  Jérusalem  1,  18,  48,  108,  55,  65,  8,  255;  plan  105. 
Jomard  58,  63,  246,  64.  Jolivet  213.  Jollain  222.  Jonques  109,  41,  66,  202. 
Jubrien  222.  Juifs  14,  20,  36,  104,  5,  63,  8,  71,  85.  Jules  césar  229. 

Kaaba  18,  108.  Kaboul  143.  Kserius  262.  Kaf45,  94,  133.  Kair  259,  60. 
Kanka  38.  Kankador  38,  236,  41.  Kanoun  v.  Abouriban.  Karmania  198. 
Kaschgari  105.  Kataï  146,  81,  4,  5,  8.  Katib  tschelebi  21,  94,  103.  Katkedaz 
38,  236,  41.  Kattigara  217,  53  (v.  cartes  de  l'Inde).  Kazimirski  45.  Kazvini 
93,  102.  Kepler  218.  Keulcn  van  226.  Khaled  ibn  abdalmalik  13,  24. 
Kharthi  132.  Khasdaï  20,  36.  Khovarezm  lac  260.  Khovarezmi  14,  5,  9,  22, 
Kias  74,  96,  98.  Kiatan  12.  Kiov  149.  Koberger  175,  89,  200.  Kodama21,  4. 
Kodbeddin  v.  Massoudi.  Kœler  97.  Komi  241-3.  Kopernik  212.  Kordadbeh 

21,  4.  Koschgi  102.  Kotroba  246,  52.  Kouschiar  45,  66. 

Lakedemounia  118,  20,  2.  La  mina  107,  85.  Lancerotto  107,  59.  Langren 
van  218,  59.  Langton  104.  Lanka  22,236.  Latitude  201,  10,  49,  50;  levée 
37,  44,  83,  8,  200,  28, 9,  58.  Laturus  166.  Lazius  213.  Lhuyd  213.  Leclerc 
222.  Leilh  ben  kahlan  103.  Leonardi  169.  73.  Leroi  222.  Lerouge  223. 
Letronne  55.  Levasseur  219.  Levilapis  180.  Leyde  25,  6.  Libanius  4,  5» 
Liginius4.  Ligorio210.  Liprando  128.  Livesl73.  Lobab96.  Lobcovitz  218. 
Lochom  222,  Lollian  4,5.  Longitudes  3,  79,81.90,191,200,  1-8,  10,  7,  8, 

22,  3,  51, 2, 4,  6,  9,  61 ,  3  ;  chez  les  arabes  238,  239  ;  stadiales  229, 33, 5,7. 
Lop  143.  Lopez  159.  Loredano  161,  70.  Louschira  82.  Loyola  216.  Ludolf 
225.  Lullius  104.  Lvov  150. 

Macguckin  de  slane  97.  Madère  159,  60.  Madini  24.  Mages  143.  Magellan 
202,  3,  7,  58.  Magog  v.  Gog.  Magrourim  159,  236.  Mahmoud  gaznev  57; 
~al  zamakschari  103.  Majorque  106,7,  39,61.  Malcusl04,8.Malem  canal03. 
Malocello  107.  Mânes  66.  Mannert  126. 

Mappemondes  132, 255;  anglo-saxone  8,  9;  de  Biancho  162,  5;  deCastaldo 


alpuabëtiqle.  .    241 

iôO,  3  (v.  append.)  ;  de  CbarlemagDe  7,  255:  catalane  129-54, 7-51  (v.  port.); 
de  de  la  Cosa  172  (v.  portuL)*  du  dominicain  105;  d'Edrisi  v.  sic!!.;  espa- 
gnole 172,  263  ;  de  Haldingham  105,  265;  du  chanoine  Henri  105;  de  Maure 
164-7  ;  de  Mercator  214,  62;  métallique  168;  portugaise  190-5;  de  Ribero 
172;  de  Roger  y.  sicil.;  de  Ruysch  196;  de  S.  Gali  6;  de  Sanuto  113-86; 
sicilienne  54-54,  246-54  ;  de  Sylvanus  198. 

Maraga  70,  258«  9.  Marcellus  4,  5.  Marchands  110.  Marche  de  la  cartogr. 
78,  9,  135,  6.  Marco,  v.  Polo.  Marconiir  4.  Marcus  4;  Beneventin  104. 
Blariette^22.  Marin  deTyr  11,  78,  184,  231,  3.  Marolla  173.  Marpesias  4,  5. 
Marteloïo  161,  2.  Martinez  184,256.  Maschar  18,  22,  66.  Massoudi  15,  7,  22, 
234,  5.  Hastoufi  93.  Maurienne  30.  Mauro  109, 38,  64-7, 73,  94,  164>i69,  266 
(▼.  cartes  de  l'Inde;  portul.).  Maximinus,  Maximus  4,  5. 

Medeia  143,  63.  Medbiadesa  37.  Medico  218.  Medine30,  245.  Méditerranée 
17,  62,  124,  33, 4,  223,  47,  8,  55, 6,  8,  9,  60.  Mekke  18, 239, 45, 6.  Mêla  226. 
MeUsian  4.  Merde  l'Inde  22,  103; —rouge  114;  v.  Caspienne,  golfe  pers., 
méditer.  Mercator  103,  213-8,  260-3.  Méridien  202,  14,  28,  31,  6,  7;  de 
raimant261, 2;  des  Âzores,  corvo  261;  des  tles  du  cap  vert  261;  des  Fortunées, 
de  Fer  17,  18,40,  222,61;  indien  22;  occidental  et  oriental  236,7,41; 
de  marcation,  partition  202  ;  de  Venise  256.  Merou  22.  Mesures  13, 102,  213, 
230,3;  du  degré  13,  228,34.  Metateurs  229.  Méthode  arabe  79,  80.  Metius 
229.  Meulaalikoschgi]03.  Meyer  222.  Michaêlis  97.  Milles  13,  60-2,131, 
155,  7,  213,  30,  3-5,  47,  5.  Mina  107,  85.  Mirza  scbah  rok  102,  Modjireddiu 
kaUmi  103. 

Mohammed  al  scharû  103  ;  -— ben  ali  al  sifakesi  246,  54;  — ben  ali  sipahi 
zadeh  103;  —ben  schadan  103;  — bilouni  92,  101  ;  — djaber  al  bateni  13,  4, 
22, 104,  392;  — ibn  reschid  92;  —ibn  djozaï  alkalbi  92;  — kelebi92, 101: 
-kharizmil4,5,9,  22. 

Mohyeddin  92.  Mohyth  103,  Moïse  171.  Moluques  172,  202.  Mongoles  94^ 
110.  Monde  homérique  226,  7,  32,  y.  images,  mappemondes.  Mone  49,  51. 
Morales  160.  Mordtmann  25.  Moria  226.  Morin  218.  Morini  50, 1.  Mortier  220, 
232.  Moro  218.  Mosul  239.  Mousa  ibn  schaker  13.  MousUfaben  abdallah  103. 
Manozl91.  Munster  211.  Muratori  97.  Murr  185, 9,  256.  Muslim  horrany  20. 

Narbona  58.  Nassiieddin  tousi  70-1,  8,  94,  6  (v.  table  de  long.).  Nava- 
nttol91.  Navigation  103,  6,  7.  Naboufari  al  mesri  103.  Neptune  français 
m.  Neroni222.  Nestor  47.  Nicolaï  212,  22.  Nicolas,  pape  164.  Niger  215. 
Nigidius229.  Nil  9, 14,  163,8,  225,  62;  dans  la  mer  rouge  52,  152;  gana 
138,  260.  Niskhat  15,  42.  Nocera  82.  Nogmeddin  kazvini  70.  Noli  164. 
Noiin  220,  8.  Nombril  2, 18,  227.  Normands  47,  53,  4.  Norvège  103,  51,  60 
(y.  tayola  di  Zeni).  Nou4Jera  82.  Novaïri  93. 

Observations  astr.  13,  22,  200,  18,  30.  Observatoires  228.  Océan  18,  38 
45,227,  62.  Occident  237  v.  méridien.  Oeuf  94,  138,  227.  Olympe  227,  36. 
Qmâr  ben  bahr  el  hafedh  et  pilote  103.  0  machin  159,  60.  Omfalon  2, 18, 227. 
Orbis  52,  229  y.  mappemonde.  Ordonez  159.  Organum  directorii  262 
(y.  appendice).  Oria  107.  Orient  45,  236,  41.  Orientation  152,  72,  258. 
Oronce  218.  Orose  1,  8,  56.  Ortelius  215,  6,  60,  1,  3,4  (v.  appendice). 
Orthographie  39,  46,  77,  240.  (v.  anal,  des  secl.).  Ortiz  171,  85.  0ther8. 
Oadjein  22,  236.  Ouloug  beg  102,  254.  Ouranos  236. 

Païolâ,  palola  138.  Païva  171,  86.  Palestine  9,  10,  40,  99, 113,  73,  83, 99, 
224,  66.  Panchea  236.  Papius  226.  Paradis  163,  5,  257.  Parallela  229. 
Parasange  13,  60,  1, 131,  230,  3.  Pareto  107,  69.  Paris  247.  Passus  230,  3, 
Pazini  50,  265.  Pedro  inf.  161.  Pentesileus  4,  5,  168.  Peraza  159.  Peripate- 
titiens  228.  Peritsol  168.  89.  Perles  143.  Perse,  Persan  60-9,  96,  8, 100,  220 
(y.  table  de  longit.).  Petakhia  105  (v.  anal,  des  sections).  Petronius  229. 
Peyrounin  222.  Pezzagno  107.  Philesius  191.  Philippe-d'Esp.  218.  Phrisius 
V.  Laur.  et  Gemma.  Picart  222.  Pierre-le-grand  225.  Pigafetta  202.  Pinzoïi 
II.  20 


/• 


OËOGRAPHIE  DU  MOYEN  AGE. 


BRUXELLES.  —  TYP.  DE  J  -H.  DEHQU, 

RUE  DE  LA  GRANDE  ÎLE  ,    0. 


GEOGRAPHIE 


DU  MOYEN  AGE, 


ÉTUDIÉE  PAK 


JOACIIIM    LELEWEL. 


AOCOMPAGNÉIS    D' ATLAS. 


S^'pe  pater  «lixit ,  studiuin ,  quid  iuulile  tcntab? 
Oi'id.  tritt.  IV,  iO. 


TOMES  111  ET  IV. 


BRUXELLES, 

CHEZ  V«  ET  J.  PILLIET,  LIBRAIRES,  SUCC"  DE  P.-J.  VOfil.ET, 

nUE  DE  I.A  MONTAGNE ,  S9. 

185:2 


CE  VOLUME  COiNTIENT 

ï. 

Slavia  du  dixième  et  du  douxièmc  siècle. 

H. 

Analyse  de  plusieurs  sections  des  vi<  et  vu''  climats  de  la  description 
d*Edrisi,  1154. 

III. 

Cartes  de  Tlndc  et  de  la  Chine,  dressées  d'après  les  relations  des  arabes  et 
les  inTestigations  du  moyen  âge. 

ÏV. 

Tavola  di  navicare  di  Nicolo  et  Antonio  Zcni,  et  les  cartes  des  régions 
septentrionales  à  Tépoqne  de  sa  publication,  i588. 

V. 

Examen  géographique  des  courses  et  de  la  description  de  Benjamin  de 
Tudèle,  H  60-1 173. 


{fl. 


SLAVIA 


DU   DIXIÈME  ET   Du   DOUZIÈME 


SIÈCLE. 


K4nsque  talitudo  slavicae  linguap  snccrescit, 
ni  pone  canttt  aeslimatione. 

Helmolb,  lib.  I,  rap.  1,  t. 


OKDRE  DES  MATIÈRES. 


1,  2,  Aperçu  général  sur  la  marche  des  événements;  3,  sources  histo- 
riques. 

Khozars,  Varegs,  —  A,  Joseph  hen  Gorion,  sa  genèse;  Khasdaf,  Khozars. , 
S,  enfants  de  Dodanim,  Varegs,  Rouss,  Rourik.  6,  en&nts  Dodanim  Slaves. 

VnniLES,  SoRABES,  MoRAVES.  —  7,  dénominations;  8,  nomenclature  du 
géographe  bavarois,  des  peuples  frontières.  9,  Bohèmes;  10,  Moraves, 
11,  nomenclature  des  peuples  entre  Nisa  et  Rhin. 

Chrobates,  Serbes.  —  12,  Doulebes;  15,  Boïki,  destruction  des  Âvars. 
14,  division  de  la  Kroatie  et  de  la  Serbie.  15,  nomenclature  bavaroise  des 
Juxta-résidents;  zoupanies  desKroates;  16,  zoupanies  des  Serbes;  Slaves  en 
Grèce.  —  17.  Massoudi,  peuples  slaves  et  non-slaves;  18,  les  rois  et  Yelinana. 

Lekbttes.  —  19,  état  social  des  Slaves,  condition  des  baptisés.  20,  Slavie 
intérieure  :  partie  orientale;  24,  agitation  intestine  des  Lekhites;  22,  condi- 
tion  du  peuple  slav-roussien.  23,  Lekhites,  Polaniens;  24,  guerre  civile ,  le 
peuple  succombe.  25,  Pomorans,  Pologne  faible.  26,  Yinules  succombent. 
27,  autocratie  russe. 

Serbes.  —  28,  monarchie  ! 


(Voyez  la  carte  de  la  Slavonie  du  x««  siècle  et  les  jdeux  autres  :  la  carte 
politique  de  TËurope  de  1144,  et  celle  qui  explique  la  description  d*£drisi; 
elles  se  trouvent  dans  notre  atlas  de  la  géographie  du  moyen  âge). 


s  L  A  V  I  A 


DU  DIXIÈME  ET  DU  DOUZIÈME  SIÈCLE. 

1.  Les  Slaves,  délivrés  par  la  chute  des  Huas,  des  invasions  qualifiés 
de  migrations  de  peuples,  n'ayant  plus  à  subir  que  le  joug  des  Avares 
(depuis  565),  qu'ils  brisaient  petit  à  petit,  et  agités  probablement  dans 
leur  intérieur,  se  firent  connaître  à  leurs  voisins  par  le  débordement 
de  leur  race  ;  par  ces  violences  qui  dévastaient  un  certain  temps  Tempire 
byzantin ,  par  ces  bandes  nomades  qui  circulaient  avec  leurs  troupeaux 
dans  les  provinces  dépeuplées,  par  ces  populations  laborieuses  qui 
inondèrent  Tancienne  Germanie,  pour  cultiver  la  terre  sauvage  évacuée 
par  la  race  germanique,  qui  aima  mieux  alors  la  chasse  des  hommes  que 
celle  du  gibier. 

Ce  mouvement  n*avait  aucun  caractère  de  conquête.  C'étaient  des 
essaims  de  populations  mobiles  qui  allaient  s'établir,  qui  n'avaient  aucun 
désir  de  former  des  états ,  luais  cherchaient  l'existence  pour  vivre  en 
commun.  Les  uns  apportaient  leur  nom  national  qui  les  prédisposait  à 
une  organisation  plus  compacte ,  dans  laquelle  germait  une  formation 
future;  les  autres,  n'ayant  aucun  nom  spécial,  composés  souvent  du 
concours  de  gens  de  différentes  populations ,  ne  se  qualifiaient  que  du 
nom  générique  do  Slaves  ou  de  Vendes,  Ylnides  (i). 

(4)  Combien  la  cultarc  d'Allemagne  doit  anx  Vendes  Slaves,  résumo  un  scrutateur  allemand  : 
So  Tand  der  Apostcl  Bonifactus  als  cr  Tbûringen  im  J.  724  besuchtc,  die  Wenden  scbon  in  dem 
grade  empfanglich,  dass  er  auss  ihnen  Vorziiglicb  die  Anbauerder  Trankischen  Wiisten  waehlte.  lo 
ganzen  Scbaaren  zogen  die  Wenden  dahin ,  wobin  sie  der  fromme  Bischof  rief.  Mit  ausrodung  der 
Waeider,  vcrbanden  sie  die  kunst  des  Ackerbaues.  Aus  Thracien  batten  sie  den  Rocken  angefUrt  ; 
Flachsbau  und  Bienenzucbt  gedieben  unter  ibrer  Pflege.  Die  tbiiringiscben  Pferde  deren  Verediung 
mit  morgenlaendiscben  Rassen  sicb  die  Wenden  vorzijgUcb  angelegen  sein  liessen ,  galten  fur  die 
scbœnsten,  schnellsten  und  krafligsten.  Die  Wenden  -waren  es,  velcbe  die  Salzquellen  an  der  Saaie 
zn  bearbeiten  anfingen  ;  sie  -vraren  also  die  ersten  Salzwirker,  yrie  sie  die  einsigen ,  Millier  nnd 
Gaertner,  Hirtenund  Zimmerleute,  Scblosser  und  Goldscbmiede  waren.  Auf  den  Giitern  der  Kloster 
ond  Geisilicben,  vobin  sie  ycrsetst  worden  vcriohren  sie  auch  ihrcn  Freiheit  nicbt  wie  unter  deù 
âbermiitbigen  Franken.  Sie  waren  lidi  (Leute),  die  ibre  mansos  tributales  (Zinsaeker)  besassen ,  ein 
agrarinm  (Ackerzins)  zablten,  nnd  angarias  cum  carra  (Landftibrer)  zur  Frohne  tbaten.  Si  biessen 
casati  (Kossati)  wen  sie  eigene  Ilaûser  besassen,  sonst  gasindi  oder  non  casati.  So  Icbten  die  Wenden 
unter  der  Franken, Tbiiringen  und  Sachscn  (Sprengel,Einflussden  die  Wendiscbe  nation  an  dieAnbau 
des  Dcutschlandtgebabt  habe,  io  Kruse's,  dcutsche  lltertb&mer  oder  Archiv.  Halle,  i9W,  p»  1-14). 


6  Sl.JkMA,   «. 

Cette  expensîon  do  Li  -ouchc  >>}u.e,  la  mit  en  collision  avec  des 
éléments  variés,  qui  de  Ic^rpart  I  inquiétaient  tout  à  Tentour.  Khozars, 
Pietscbings,  Komans  Je  forîent.  menaçaient  et  fatiguaient  d*invasions. 
Les Boulgars,  établis  î^m-  lo  Danube,  ci  les  prétentions  delà  dominaCion 
de  Tempire  grec ,  déchiraient  ses  parties  méridionales ,  où  les  Kroates 
et  les  Serbes  prenaient  une  consistence  plus  déterminée.  De  Toccident, 
les  Franks,  ensuite  les  Saxons,  imposaient  le  joug  sur  une  vaste  étendue, 
autant  sur  les  populations  appelées  pour  la  culture  des  terres,  que  sur 
celles  dont  les  possessions  se  trouvèrent  exposées  à  leur  glaive.  La  pro- 
pagande chrétienne  de  sujétion  avançait  d*un  côté  jusqu*aux  frontières 
Boulgares,  de  Tautre  pénétrait  jusqu'aux  rives  de  TOder. 

AÛa  de  repousser  Tennemi  formidable ,  les  peuplades  slaves  se  fédé- 
raient momentanément  et  ipaîntesfois  les  chefs  de  fédérations  essayaîeac 
d'étendre  leur  domination  et  d'organiser  Tétat,  quelquefois  plus  dociles 
d'accepter  le  protectorat  de  Tennemi,  que  disposés  à  soutenir  Tindé- 
pendance  nationale.  Samo  (625-658)  arrêtait  longtemps  les  tentatives 
des  Franks.  Après  sa  mort  continuait  une  résistance  confuse.  Les  Karin- 
tiens  furent  les  premiers  soumis  à  la  Bavière  (77S),  conservant  le 
souvenir  et  les  monuments  des  élections  de  leurs  chefs.  Les  voisins 
Kroates  au  sud  est,  se  soutenaient  avec  plus  de  succès,  vacillant  entre 
rinfluence  grecque  ou  latine.  Mais  au  nord ,  les  possessions  slaves  se 
trouvaient  plus  exposées  à  toutes  les  avanies.  Les  Franks  et  les  Saxons 
pénétraient  par  la  Turingîe  dans  la  Bohême  et  dans  le  Sourb,  imposiant 
leur  autorité  à  ces  deux  contrées,  aussi  bien  qu'à  celle  des  Yinules,  au 
delà  de  TEIbe  jusqu'à  la  Baltique, 

Depuis  la  mort  de  S^mo,  parmi  les  Spurbs ,  on  ne  remarque  que  des 
alliances  très-éphémères  entre  les  populations  pour  résister  à  l'aggressîon. 
En  Bohême ,  plusieurs  pçuples  commençaient  à  former  un  état»  qui 
s'associa  à  la  grande  Moravie ,  érigée  depuis  850  en  une  puissance  qui 
s'éleva  avec  éclat  sur  une  vaste  étendue. 

Lorsque  les  barbares  s'établirent  dans  les  provinces  et  y  formèrent  les 
royaumes,  ils  ne  prétendaient  pas  d'être  aiissii  indépendants  comme  ils 
étaient  dans  leurs  forêts.  Possédant  les  terres  qui  ne  leur  appartenaient 
point,  ils  s'imaginaient  qu'ils  en  étaient  redevables  et  qu'ils  étaient 
sujets  de  l'empire,  autorisés  d'administrer  leurs  possessions.  La  hiérar- 
chie romaine  nourrissait  cette  idée  et  le  prestige  de  l'empire  dirigeait 
les  consciences  des  enfants  du  nord.  Les  Slaves,  en  s'établîssant  dans 
rillyrie,  la  Pannonie  et  le  Noric,  tenaient  d'autant  plus  à  cette  pensée, 
que  les  Serbes  et  les  Kroates  s'établirent  par  le  consentement  des 
empereurs,  que  dans  Ip  Noric  raffluence  de  la  population  Slave  n'avait 
d'autre  but  que  la  culture  du  sol.  Ainsi ,  Findépendance  des  premiers  ne 


SLAVIA»   3.  7 

vépngnait  point  de  payer  tribut  et  servir  Fempire  de  leur  possesstofi. 
I^a  liberté  des  autres  consistait  dans  If^s  iranchises  de  s^administrer 
€]aii8  leurs  communes  par  eux-mêmes,  afin  de  mieux  remplir  les  rede- 
vances. De  part  et  d'autre ,  les  Grecs  et  les  Latins  prêchaient  révangile, 
d  les  évêchés  fondés  parmi  les  convertis,  consolidaient  ce  prestige  de 
Tempire,  qui  contribua  à  faiblir  Tamour  de  Findépendance.  Aussi, 
^uand  la  Moravie  s'éleva  en  une  puissance,  les  rois  ne  voulant  pas  être 
tributaires,  soutenant  leur  indépendance ,  ne  contestaient  point  le  droit 
€le  Tempire  sur  la  Pannonie. 

Cependant,  Texistence  d'un  état  aussi  prépondérant  inquiétait  les 
Allemands.  La  Moravie  pouvait  encore  délivrer  quelques  cantons  slaves 
^a  joug  des  Allemands;  elle  ôtait  la  possibilité  d'étendre  leur  domina- 
tion. Il  fallait  donc,  à  tout  prix,  détruire  la  grande  Moravie,  et  à  cet 
^ffet,  en  886,  furent  appelés  les  Magyars,  Madiars,  Hongrois,  qui  cam- 
paient depuis  quelque  temps  aux  environs  de  la  mer  noire.  La  chute  de  la 
JMloravie  était  une  grande  catastrophe  pour  la  Slavouie.  Grande  quaniité 
^e  population  se  retirait  vers  les  montagnes  et  au  delà  des  montagnes. 
Une  race  étrangère  de  Madiars,  qualifiés  de  Tourk ,  s'interposa  entre  les 
indigènes,  interceptant  leurs  antiques  relations;  la  Bohême  redevint 
pour  toujours  soumise  à  l'Allemagne  et  bientôt  Otton  recevait  les  hom- 
mages de  sujétion  de  toutes  les  possessions  moraves,  des  deux  Moravies 
supérieures  et  de  la  Chrobalie. 

S.  Entre  le  Danube  et  la  Ballique,  où  l'empire  romain  n'avait  pas  des 
frontières,  le  droit  des  provinces  ne  pouvait  guère  valoir.  Les  traditions 
seulement  et  l'érudition  savante,  rappelaient  aux  Allemands  qu'à  l'épo- 
que de  leurs  rapines  dans  l'empire  ils  avaient  abandonné  volontairement 
leur  sol.  Ils  eurent  la  soif  de  recouvrer  les  pays  occupés,  habités  et 
CQliivés  depuis  qu'ils  l'eurent  entièrement  évacué,  par  pure  race  slave. 
A  ce  titre  ils  pénétraient  parmi  les  populations  plus  faibles  ou  plus 
Pacifiques,  imposaient  leur  autorité  de  markgravcs  et  installaient  de 
Colons  allemands.  Depuis  que  les  Saxons  réunirent  sur  la  même  tête 
'es  couronnes  de  l'empire  et  d'Allemagne ,  le  baptême  inculquait  dans 
(^esprit  slave  l'idée  de  l'unilé  romaine  de  l'empire  et  de  l'église  :  la 
violence  allait  accomplir  le  reste ,  exterminant  les  populations  obsti- 
nées. Nulle  part  il  n'y  avait  plus  de  résistence  que  chez  les  Vendes  ou 
finales,  qui  possédaient  les  rivages  de  la  Baltique.  Les  Obotriics, 
Wlnlredes  s'y  distinguaient  spécialement  par  les  moyens  qu'il  avaient 
l'*ëiendre  leur  hégémonie  sur  les  peuplades  limitrophes;  les  quatre 
>«uples  de  Yeletabes  ou  Villzes  (les  grands),  réunis  inlimcmcnt  par 
^ne  fédération  qui  porta  le  nom  de  Louts,  Loutitzcs;  les  Pomoraniens 


8  SLAVU,    3. 

^es  maritimes)  et  les  insul.ilros  Rougs.  La  position  maritime  fit  prospé- 
rer leur  état,  surtout  aes  Bau^^^  i  <les  Pomoraniens.  Le  commerce  et  la 
piraterie  des  Slaves,  Noi  rnaiids,  Livs,  Ests,  se  croisaient  sur  la  Baltique 
et  animaien*  les  relatiou^i  ontic  ccb  peuples.  C'étaient  spécialement  les 
Normands,  qualifiés  de  Yaregg  sur  les  eaux  baltiques,  qui  infestaient  les 
rivages ,  montaient  les  fleuves ,  emportaient  le  butin ,  et  se  colonisaient 
quand  il  était  possible.  Les  populations  qui  bordaient  le  golfe  oriental, 
les  Slaves  surtout,  appelaient  maintes  fois  le  secours  et  rinterventioo 
des  Yaregs,  comme  sauve-garde  de  leur  sécurité.  Ceux-ci  rendaient  ce 
service  avec  empressement  et  un  d'eux,  Rourik(en  857  et862)y  s'in- 
stalla à  cet  effet  chez  les  Slaves  de  Novogorod  et  fit  connaître  le  nom 
des  Yaregs-Rouss,  Ross.  Un  de  ses  lieutenants,  Dir ,  prit  possession  de 
Kiov  (en  861). 

Les  Yaregs-Rouss  trouvèrent  cette  partie  de  la  slavonle  orientale 
très-variée.  Des  populations  qui  vivaient  de  la  chasse,  des  peuples 
cultivateurs  et  des  villes  considérables  organisées  en  républiques 
commerçantes.  De  suite  ils  participèrent  au  mouvement  de  ces 
dernières  et  pénétrèrent  jusqu'à  Byzant  et  au  fond  de  FAsie.  Des 
caravanes  arabes,  khozares,  boulgares  se  rencontraient  et  se  croisaient 
avec  des  trains  de  voitures  rouss-slaves,  et  la  monnaie  koufiqne  de 
cette  époque,  enfouie  en  abondance  tout  autour  de  la  Baltique  et  du 
golfe  finnique,  décèle  la  participation  de  toutes  les  races  qui  s'y 
touchaient  Tun  à  Tautrc,  et  indique  les  chemins  de  ces  mojivements 
du  commerce  (t). 

En  même  temps,  au  centre  de  la  Slavonie,  se  formait  un  état  qui 
allait  recevoir  le  nom  de  Pologne. 

5.  Toutes  les  nations  annotaient  laconiquement,  dans  leurs  annales, 
multitude  d'événements  qui  se  succédaient  sur  tous  les  points  et 
césultaient  de  leurs  collisions  et  de  leurs  relations  réciproques  avec 
les  Slaves.  Le  Normand,  Skand,  Dan,  Islandais;  le  Germain,  Frank, 
Longbard,  Sax,  Bavarois;  le  Breton,  Gaulois,  Italien;  le  Grec 
byzantin;  l'Arabe,  Andalous,  Mizr,  Fars,  Sogd,  de  Bagdad  et  du  Sind; 

(s)  La  monnaie  koufiqne,  les  dinars  des  khalifset  des  Sammanîdes,  venait  par  Boulgar  et  se  répaB— - 
daitpar  Smolcnsk  et  Novogorod  tout  autour  de  la  Baltique  :  elle  se  retrouve  dans  les  pays  de  lan^» 
(Finnois),  Karcliens,  Tchouds  (Estoniens),  Livs,  Kors  (Kourland),  Prussiens,  Pomoraiûens ,  Obotri 
(llcklembourg),  Schlesvig,  loutbiand,  SkSinie,  Suède  méridionale  (à  foison  aux  environs  de  StidUiolm} 
,dans  toutes  les  iUs  de  la  mer.  Voyez  l'excellant  ouvrage  de  Paul  Savcicv  :  topografia  kladov  svostot 
schnimi  mnnetami  vr  Rossii  pri  baltitzkicb  stranach  (en  russe),  topographie  des  enfonisscments  de  I 
monnaie  orientale  du  viii*  au  xi*  siècle,  en  Russie  et  autour  de  la  Baltique ,  Potersb.  1846.  C'est  L 
premier  volume  de  l'ouvrage  que  le  savant  auteur  va  continuer  sous  le  titre  de  la  numismaiiqvL 
moubamméda&o  soxis  le  rapport  deTbisloire  russe  :  moubammcdanskaîa  numismatika  w  otnoache».  ■ 
k  ronsskol  istorii. 


SLAVIÂ,   8.  9 

le  juif  erranl;  rindigènc  slave  lui-même  traçait  les  traditions  et  les 
vicissitudes  de  la  Sïjduche.  Le  Slave  visitait  Kordouba,  Rome,  Byzance 
et  les  rives  de  la  Caspienne.  Les  empereurs  d'orient  et  d'occident 
connaissaient  Tidiome  des  slaves  et  s'entretenaient  avec  eux.  Sept 
langues,  dans  sept  climats  du  monde  entier,  parlaient  et  traitaient  les 
affaires  des  Slaves\  et  la  Slavonie,  cette  ruche- mère  de  tant  d'essaims, 
n^esl  pas  assez  connue,  son  intérieur,  comme  l'œuvre  des  abeilles,  est 
tout-à-fait  ignoré.  Cependant ,  c'est  à  la  suite  de  grandes  commotions 
dans  ses  entrailles,  qu'elle  vomit  tant  de  populations;  c'est  à  la  suite 
de  la  fermentation  intellectuelle,  sociale,  ou  de  l'intérêt  matériel  que 
sa  race  inonda  tant  de  pays.  Un  seul  byzantin ,  Constantin  porphyro- 
genète,  retraçait  avec  plus  de  circonstances  quelques  traits  historiques 
développés  avec  plus  d'enchaînement;  un  arabe  Massoudi  narrait  en 
même  temps  l'histoire  des  révolu  lions  qui  agitaient  cette  race  ;  cette 
histoire  pouvait  sans  aucun  doute  porter  la  lumière  à  notre  ignorance, 
mais  l'ouvrage  n'est  pas  encore  retrouvé. 

Le  centre  de  la  Slavonie  reste ,  et  restera  peut-cire  pour  toujours  un 
impénétrable  mystère  :  mais  tout  son  circuit  possède,  surtout  pour  la 
situation  géographique ,  d'abondants  matériaux ,  ainsi  qu'on  se  trouve 
continuellement  dans  ces  petites  communes ,  villages  et  hameaux  dont 
les  noms  se  sont  perpétués  jusqu'à  nos  jours,  défigurés  par  la  pronon- 
ciation des  étrangers. 

De  nombreuses  chroniques  et  annales  signalent  une  multitude  de 
localités;  les  conciles  et  les  actes  publiques;  les  diplômes  authentiques 
ou  faux,  et  ces  derniers  très-instruits  dans  la  situation  des  contrées  dont 
ils  traitaient,  fournissent  d'innombrables  renseignements.  Les  explora- 
tions marines  de  Wulfstan  et  d'Olher,  contribuèrent  à  celle  description 
générale  qui  se  trouve  dans  la  version  anglo-saxonne  d'Orose ,  faite  et 
augmentée  par  les  soins  d'Alfred  (mort  001). 

En  même  temps  (vers  890),  une  note  statistique,  qu'on  qualifie  de 
géographie  de  Bavière,  a  pu  donner  beaucoup  plus  de  détails  en  énu- 
mérant  les  cantons  slaves.  Ensuile  Ditmar  de  Mersebourg  (mort  1018), 
Adam  de  Brème  (1076),  Helmold  de  Bozov  (1170),  expliquaient  les 
positions  des  peuples  Viuuls  et  Slaves  des  embouchures  de  l'Elbe  et 
de  l'Oder  jusqu'au  Danube. 

L'IIlyrie  et  les  parties  danubiennes,  soumises  ordinairement  à  la 
suprématie  de  l'empire,  étaient  parfaitement  connues  à  Byzant  et  par 
l'empereur  Constantin  porphyrogenèle  (mort  959) ,  qui  se  plaisait  d'en 
donner  une  intéressante  description.  —  Chez  les  arabes,  les  explora- 
tions d'Abdullah  Seid  Ghazi  (780-800) ,  de  Mouslim  ben  Abi  Mouslim 
horrany  (840-846),  les  relations  commerciales  et  les  ouvrages  grecs 


iO  SLAVES,   4. 

fournirent  à  Kodbediiiii  Mi«^$oudi  (947)  d'abondants  matériaux  pour 
traiter  particulièremeiii  it.?  '«ffaires  slaves,  dont  il  reste  une  courte 
esquisse. 

L'existence  des  peuples  du  centre  n'est  pas  tout-à-fait  ignorée  de  ces 
écrivains,  mais  c'était  la  part  des  indigènes  d'en  être  plus  instruits  et 
d'en  parler  avec  plus  de  connaissance.  Le  moine  petscherski  de  KiioT  * 
Nestor  (1116)  se  distingue  spécialement  à  cet  effet,  et  il  est  le  seul  de 
cette  époque  qui  porte  la  lumière  capable  de  suivre  les  notions  acqui- 
ses par  les  arabes  sur  les  peuples  du  nord. 

L'abondance  des  sources,  le  mystère  de  l'origine  des  peuples»  entraî- 
nèrent une  foule  d'écrivains  dans  ces  recberches  pénibles,  qui,  avec  de 
succès  variés,  donnaient  des  résultats  les  plus  satisfaisants,  ainsi  que 
les  sources  ci-dessus  indiquées  sont  suffisamment  expliquées  et  les 
possessions  des  Slaves  minutieusement  déterminées  (s).  Personne  ne 
s'attend  à  voir,  dans  notre  mémoire ,  la  répétition  du  fruit  de  ces 
recherches;  Edrisi  ne  le  demande  pas.  Or,  nous  nous  abstenons  de 
reproduire  trop  ce  que  les  autres  en  ont  dit,  mais  nous  désirons  avoir 
notre  part,  et  continuant  l'examen  de  la  Slavonie  antérieure  à  Edrisi, 
de  la  Slavonie  du  x"**  siècle,  nous  nous  attachons  spécialement  à  Joseph 
ben  Gorion ,  au  géographe  de  Bavière  et  à  Massoudi. 

Khozars,  Yaregs. 

4.  Joseph  ben  Gorion,  ]:^^dv  Ungua  judaica,  d^D^DV  in  lingua 
grœca,  ts^ir)>DU  '^^  lingua  romana  (pag.  28),  et  son  ouvrage  intitulé  : 
histoire  dos  Juifs,  sont  des  énigmes.  Lui-même  se  dît  sacerdoce,  con- 
temporain de  la  prise  de  Jérusalem,  qu'il  défendait,  et  de  son  roi 
Agrippa;  il  a  connu  Nicolas  de  Damas.  Ainsi  il  serait  contempo- 
rain de  Joseph  Flavien.  Fiction  assez  difficile  de  réconcilier  sur  ces 
indications.  Son  ouvrage  était  de  bonne  heure  connu  chez  les  arabes  , 
qui  qualiGaient  loussouf  ben  Gorion  de  chef  et  historiographe  renommé 
entre  les  docteurs  (4).  On  conjecture  donc  qu'il  vivait  au  ix""  siècle  (&)  • 

A  la  tète  de  son  histoire  se  trouve  une  genèse  biblique,  faisant 


(3)  L'ovvnfe  le  plv*  ridie  en  indicatUoiis  snr  ce  qni  a  été  dit  pu  U  SlaiTonîe,  âaboré  mr  vme  r 

ècMIe  ci  pleiB  <i«s  plas  heureuses  expUcaiîAns ,  est  roarragc  de  Paul  Josepk  SuCarik  (Sdttbrâik) 
domuskë  starontBMU  0»  antiquités  slaves)  à  Prafr.,  1836,  ia-S*  [traduit  en  pokwais  par  Jcift— le 
Kapohmn  Bimkoiwski,  Poseu,  ISil).  Nous  suitoos  partout  sa  Inaiière  et  ses  bous  couaeUs,  ù  q«eki«o 
uwCif  aaei  |MÙ«saui  ue  uous  fiance  à  le  cootrari^. 

(4)  Vmmffi  de  beu  Goriou  crt  traduit  eu  arabe  par  son  co-relistoanaire  Zakbaria  ben  Said 
Okmtmi  al  israili  (IMierbelot). 

(5)  GMlei^Miraîa  de  Josepk  HaleTÎ  qui  ÀTirait  eu  M7,  et  du  médedn  Zidkjah  nort  8M.  V^jeu 
«u  ^*e»  «I  le  srraui  Canuolr,  dans  israebtiscbc  Anaaleu,  eiu  CcatralUatt,  berMif.  vou  Jost. 

iPinîkf.  «■  ■eiB.ttsf,  p.  m,  ise. 


SLAY£S,  4.  il 

dénombrement  des  peuples  japhéliques  de  rEuropeetdu*seplentrion 
aox  environs  du  Volga.  Les  manuscrits  de  Thistoire  entière  sont  très* 
variés,  on  a  des  abrégés,  on  a  des  textes  très-amples  qui  sont  privés 
de  la  dite  genèse  (6).  La  genèse  parait  donc  être  une  espèce  d'interpo- 
lation, d'autant  plus  qu'elle  rapporte  quelques  événements  postérieurs. 
Toujours  elle  porte  des  teintes  d'une  baute  antiquité,  il  est  assez 
évident  qu'elle  est  très-ancienne,  du  u*  siècle  au  plus  tard,  donnant  un 
dénombrement  des  peuples  avec  certaine  connaissance.  Elle  se  montre 
bien  instruite  sur  tous  les  peuples  dont  la  position  nous  est  mieux 
connue,  et  devient  moins  claire  et  incertaine,  quand  elle  traite  les 
peuples  sur  lesquels  nous  ne  possédons  pas  des  connaissances  suifisan- 
les.  Cette  incertitude  vient  quelquefois,  on  ne  peut  en  douter,  de  la 
dépravation  des  noms,  mais  il  est  non  moins  certain  qu'elle  nous  donne 
les  noms  dont  nous  ignorons  l'existence  par  d'autres  sources. 

Joseph  explique  la  dispersion  de  la  postérité  de  Japheth ,  d'après  les 
langues  et  les  générations  de  la  manière  suivante  : 

Les  fils  de  Gomer  (d'AschkhenaZy  les  Franks,  étant  évidemment  con- 
sidérés comme  Germains,  Teutons)  sont  Frankus,  qui  habitent  le  pays 
Frantza  sur  le  fleuve  Seine;  ceux  de  Rifalfi,  sont  firetonim,  dans  le 
pays  Bretania  près  du  fleuve  Lira  (Loire).  Seine  et  Lira  se  perdent  dans 
l'océan  ou  la  grande  mer  (i). 

Les  descendants  de  Thogarma  sont  au  nombre  de  dix.  Khasdai  ibn 
Sprot,  vésir  andalous  (958),  d'après  la  narration  du  roi  des  Kbozars, 
compte  le  même  nombre  :  mais  de  la  dixaine  cinq  seulement  sont 
d'accord  avec  ceux  de  Joseph  ;  Tautre  moitié  diflerente. 

•iriD  Khozar,  i:i'?D  Boulgar,  m:i:x  Ongori,  (Hongrois,  Madiars), 
^T3  ÎD  Bouz  ou  Bozil  (probablement  ])^  ji  Goz,  ou  bien  Ouç  /*«Tàt  tûv 

(6)  L'édition  hébraïque  de  Mantoae  serait  la  plas  ancienne,  antcricare  à  Tannée  1-180,  (elle  est 
prW^  de  genèse).  La  première  (avec  la  genèse  mais  tronquée)  est  liébraïque  de  Constantiuople  4490, 
éditée  par  Abraham  Conalh.  L'aulro  hébraïque  (pleine)  éditée  ISIO,  par  Tbam  Abcn  Ickhaïa. — 
Ensuite  réimprimée  (accuratior)  à  Venise  ISli,  à  Craeovie  1S9S;  accompagnée  de  versions  latines  à 
Oxford  1706,  par  Jean  Garnier,  et  à  Gotha  1707  par  Breithaupt.  —  Cette  histoire  a  été  traduite  en 
allemand,  en  anglais,  en  langage  rabbinique  d'Allemagne.  Sébastien  Munster  en  a  fait  un  abrégé  qui 
parut  à  Worms  f  520,  ensuite  à  Bâie  1S4I,  4559.  Un  abrégé  arabe  se  trouve  imprimé  à  la  suite  des 
|>U)les  polyglottes  de  le  Jay  et  de  Walton.  —  Les  manuscrits  sont  très-nombreux;  un  des  plus  amples 
qui  M  trouve  dans  la  bibl.  nationale  à  Paris,  est  précédé  d'une  longue  introduction  donnant  de  ren- 
•eigaements  sur  l'origine  de  l'ouvrage  qui  est  intimement  lié  avec  la  fameuse  histoire  d'Alexandre 
le  fliacédonien ,  laquelle  disposait  la  conscience  historique  du  moyen  Age. 

(7)  La  paraphrasis  chaldaica  de  Joseph  recteur  de  l'acadcmic  syriaque  vers  S74),  assigne  l'Asie  et  ta 
PerM  à  Afichkhenaz  et  Riiath  ;  et  Barbaria  à  Togarma  qui  suit  chap.  I ,  éditée  par  David  Wilkins , 
Amstelaedami  1748,  in-4*.  —  Suivant  les  autres,  Togarma  désigne  l'Arménie  ou  la  Géorgie.  (Voyez 
vos  lettres  sur  Benjamin  de  Tudèle  p.  Si).  —  Mais  le  père  Gomor  est  expliqué  Germania  par  la  dite 
paraphrase  klialda!qne  ;  Frank  par  bon  Gorion  ;  et  son  fils  Aschkenaz  est  N'cmctz  dit  rn  Espagne ,  le 
Tesir  Kbasdal.    . 


iâ  SLAVIA,  4. 

(GoDSt.  porphy.  de  jtlni.  iipp.  r>7),  enfin  tiXD  *^DTZsi1>ooUi»  Savow 
(probablement  pxD  j.)!;--^  b-tv.in  de Bartas,  chez  Edrisi  VI,  7,  p.  4(M, 
ou  Savour,  ville  Bouli;iiai\  suivout  Ibn  Haoukal). 

Les  cinq  autres,  suivant  Josepu  sont  ^pni&3  Tourki ,  "^^s  I^^i^^ 
(Badjinak,  Pietschings),  Dl^p^^X  Alikanus,  ^yoT^  ou  X3^231  Raffina 
ou  Ranbona ,  y'ch'^^  Tilmatz,  dont  les  trois  sont  assez  étranges ,  échap- 
pent à  toute  conjecture.  De  cette  série  de  noms,  un  seul  reparaît  dans 
Fhistoire  de  ben  Gorion,  lorsqu'elle  relate  les  conquêtes  de  Gyms  èuM 
les  parties  septentrionales,  où  il  conquit  toute  la  terre  yrh^  Âlkhaa  el 
IXD^X  Alsar  et  les  montagnes  des  ténèbres  (p.  27).  Les  Tilmatz  répon- 
dent à  BopoxoLXfjLUT  Yorolalmat  ou  simplement  TaAyoïdcT,  horde  des  F^td- 
nakits  (Gonst.  porphyr.  de  adm.  imp.  57).  —  De  parmi  les  cinq  nommés 
parKhasdai,  -i^ix  Avar  indique  sans  doute  lesAvars;  xiMn  Thartia 
coïncide  assez  bien  avec  le  royaume  de  Tarse,  dont  les  habitants  sont 
appelés  Jogours  (llayton,  chap.  2;  carte  catal.  etc.).  Quant  aux  antres 
WyTVi  Thirus,  i">^ix  Aounin,  Onin  et  niiî^T  Zanor,  on  peut,  je  pense, 
admettre,  que  les  juifs  de  ce  temps-là  savaient  nommer  les  eamps 
les  hordes  qui  se  distinguaient  momentanément  dans  les  limites 
Khozars  (s). 

Le  texte  de  Joseph  ajoute  que  toutes  ces  tributs  dressèrent  leu 
tentes  autour  du  fleuve  ^^^1  Ethel,  Ithil,  qui  est  '^xb&DX  AtelaU^^ 
Seulement  les  Ongres,  les  Boulgarset  les  Patzinakhs  sont  allés  campc^T 
autour  du  Danube.  Les  Patzinakhs  n'avancèrent  vers  rembouchure  dk^  v 
Danube  qu'en  895;  Khasdaï  ne  le  connaît  point  :  il  est  doneinconU 
table,  que  leur  établissement  et  leur  nom  fut  introduit  plus  tard  da: 
le  texte  de  Joseph. 

Khasdaï  fait  dire  au  roi  des  Khozars  qu'il  était  voisin  des  Grecs  et  dl. 
Russes.  Les  habilanls  des  pays  pi^n  Thanat  (du  fleuve  Tanaîs,  Don), 
HDXD  Bassa  ('Aêaffyta  Gonst.  porphyr.  de  adm.  imp.  42,  Abassia),  y 
qu'à  la  mer  de  Gonstantînople  (noire),  lui  payent  le  tribut  et  tre: 
peuples  vers  l'occident  jusqu'au  grand  fleuve  ;i7V  louzag  (Ozou,  Dnie|>r)» 
et  ceux  qui  demeurent  dans  des  villes  sans  murailles  et  occupenC    le 
désert  (entre  Dniepr  el  Danube,  les  Patzinaks,  Gonst.  porphyr.  de  adlm- 
imp.  57)  jusqu'aux  limites  de  CN'^'^.jD'in  Hongrim  (Madiars  qui  détraî- 
rent  la  puissance  morave),  lui  sont  tributaires.  Possesseur  de  Tembou- 
chure  de  louzag ,  il  accorde  aux  Russes  le  passage  (édit.  de  Garmoly» 
p.  5G).  Le  roi  des  Khozars  rappelle  une  très-ancienne  conquête  (anUS- 
rieure  à  740)  de  la  contrée  ^n"^N  Ardil  et  du  pays  ]5<^n^i  Roudelan 

(8)  Carraoly,  itinéraires  de  la  terre  sainte,  p.  9i,  95. 


SLA  VIA»   4.  15 

(p»5i).  La  première  désigne  sans  doute  le  canlon  UA  ^A  .U.t 
Arisan,  Ârtin,  Ârtsa  des  arabes  d'Erss,  quiiirréteront  notre  attention 
dans  son  lieu.  Quant  à  Roudelan ,  jignore  ce  q^'on  en  pourrait  dire. 

Les  fils  de  Javan  sont  lonin,  qui  haljltent  la  Macédoine;  ceux  de 
Madaï  sont  DlWx  Azralous ,  qui  habitent  le  pays  de  pio  Borasan. 
Ils  suivent  les  Grecs  et  sont  suivis  des  Italiens;  on  serait  donc  peut-être 
tntorisé  de  corriger  les  noms  en  D^^'pn^X  Ândalous,  qui  habitent  le  pays 
p*113  Bortan  C^I-'V  Bortat  (pyrénéen)  :  mais  Borsan  tire  sur  Borschan, 
Bordjan»  pays  des  Boulgars  danubiens  suivant  les  arabes. 

Les  fils  de  ThoubcU  habitent  en  Toskana,  autour  du  fleuve  ni<t^2 
Kaaik  («j**-^  Bisch,  Pise  surÂrno);  et  ceux  de  Mesech  habitent  en 
>3)t^  Seni  (Sienne)  (o). 

Les  descendants  de  Thiras  sont  tS^^on  Rousisch  (Rouss-Varegs), 
>3ana  Bosnî  (j**o^  Wes,  voisins  de  la  Novogorodla  grande)  (lo), 
^^IDK  Anglisi  (Anglo-saxons)  qui  habitent  près  do  la  grande  mer. 
U»  Ronsîchs  déployèrent  leurs  tentes  autour  du  fleuve  x"^'*D  Bira 
(^0^3  Volga,  Ithil),  qui  se  jette  dans  la  mer  Gorgan  (Djordjan,  Cas- 
pienne). 
Saivent  maintenant  les  fils  de  lavan  Makedonia  (ii). 
Les  fils  d'Elisah  (dont  le  iVère  est  Alam)  sont  les  Âlemania,  qui  habî- 
^nt  les  monts  ou  villes  Joub  et  Septimo  (Juvavum,  Saltzbourg  et 
►e^aces  de  Ptolémée  dans  le  Norique  au  nord).  D'eux  sont  sortis  les 
ombardi,  qui  habitent  au  delà  des  fleuves  Jub  et  Septimo  et  ilssubju- 
Ei^rent  Italiah  et  habitent  jusqu'aujourd'hui  autour  des  fleuves  Poo  et 
•ô«ino.  Poo  verse  ses  eaux  dans  la  mer...  nxpii"i2  Bondekiah  (35^ 'jj 
^xise).  Borgania  habitent  autour  du  grand  fleuve  Rodani.  D'eux  sont 
^^»lfefc{iTn2  Bardia  (probablement  (î<">p2  Brizia,  Vrises,  Frises),  qui 
^  bitent  autour  du  fleuve  Renus,  qui  se  jette  dans  la  mer. 

Tharsis  sont  ceux  qui  vivaient  avec  les  Makedoniens.  Mais  lorsque 
*^  Ismaélites  s'emparèrent  de  la  terre  de  Tarsous  (Cilicie),  ils  se  reli- 
^ïent  dans  les  terres  de  Javan  et  continuèrent  la  guerre  avec  les 
^Viaélites  de  Tarsous. 

Les  fils  de  Chillim  sont  Romim ,  qui  élevèrent  leurs  places  fortes 
les  plaines  de  Khampania,  autour  du  fleuve  Tiberio. 


C^)  Àbe0  Esra  in  psal.  cxx  »  incolas  Meschecbi  Toskasos  appellat.  •—  La  paraphrase  khaldaïque  de 
'^^eph  asrigna  la  Mcdîe  à  Madaî ,  et  à  Thiibal,  Mcshech  et  Thiras  :  la  Bythinîe,  la  Mocsie  et  la  TLracc. 
■  Wa»  tard  on  allait  avec  Tliubal  en  Espagne  ;  avec  Mcshoch  qui  livrait  de  bons  esclaves  par  les 
'oacU  caucasiens  à  Hoskou  de  Russie. 

C^O]  Voyei  sur  ces  Wes,  Fraehn,  U)n  Foszlans  und  anderer  araber  Berichtc,  p.  804-233. 
1-il]  L'antique  paraphrase  kbaldaïqne  de  Joseph ,  annote  donble  série  de  ces  fils.  Filii  vero  Make- 
^«is  :  Àlsn  et  Tarsus,  Italien  et  Dardania;  verbis  aliis  :  filii  vero  Javonis  :  Elisha,  Alam ,  Tits» , 
>Tia  et  Dardania ,  Ridon  et  Chamen  et  Antiochos. 


14  SLAVIA,   ». 

5.  Les  enfants  de  Dodanim  Annt  >ts/^n  Danischi  (Danois),  ttui  habil- 
lent les  villes  situoi'  i  <\\*us  il.<  i:  ^Ifes  ou  péninsules  de  Focéan  danà  les 
pays  de  xn  Do^-*»  \::.rC  Mkhba  (probablement  fc<33D  Skhona, 
Skania)  et  {<^n"in:  Brof^t^na ,  a;;  milieu  de  la  grande  mer.  Ils  s^engagè- 
rent  par  serment  à  ue  pas  servir  les  Romains,  Orent  des  Sacrifices 
dans  les  lames  de  Tocéan,  et  ne  purent  point  :  car  la  domination 
romaine  pénétra  jusqu*aux  dernières  îles  de  la  mer  et  jusqu'aux  flots 
de  leurs  détroits. 

Cest  un  événement  de  Tannée  947,  dans  lequel  Otton  le  grand  s*éuît 
emparé  du  Schlesvig  et  de  Jutland  jusqu'au  golfe  d*Ottesund ,  ainsi 
appelé  d'Otton,  qui,  vainqueur,  lança  son  javelot  dans  le  golfe  en  signe 
de  souveraineté. 

Les  Danois  avaient  acquis  depuis  un  certain  temps  une  grande  renom- 
mée. Les  géographes  ravennates  répétaient  que  Dania  velocissimos 
profert  homines  :  (nam  inter  ceteras),  hoc  sua,  (licet  infiunt),  landantor 
problemata  :  laudabatur  Parthus  in  arcu,  dum  non  noverat  Gothos; 
sed  0?  ubi  est  Danus?  Quae  Dania  modo  Normanorum  dicitor  patrii^ 
(anonym.  raven.  lY,  15),  à  quoi,  vers  1119,  Guide  Pise  (mscrit  d4 
Bruxelles  p.  55)  ajoute  :  seu  Yuarangorum  dicitur  patria,  et  fich 
dans  le  texte  des  ravennates  que  le  Danois  ne  devient  guère  ce  qu*  ' 
dit  dans  son  problème.  €e  passage  explique  que  Bardena  de  la 
josippine  désigne  les  Yuarangs  (12). 

Dans  les  annales  d'Âdemar  (qui  écrivait  vers  990),  un  interpoL 
tour  (vers  1140)  insérant  une  légende  de  S.  Adalbert  (ad  lib.  IK.  1 
cap.  51,  edit.  Pcrlz,  t.  lY,  p.  129)  dit:  sanctus  dcniquc  ÂdelberL  ^«s 

(iS)  Au  commenceniCDt  da  précédent  mémoire  cbap.  S,  note  3,  p.  4, 5)«  je  signalais  Texisteiifi^  de 
la  description  de  Gui  de  Ravenne  dans  un  manuscrit  de  1119  de  la  bibl.  de  Bourgogne  à  Brox^llei. 
Depuis,  le  savant  G.  P.  Bock  entreprit  un  examen  approfondi  du  code,  et  en  1950,  sons  la  form^dt 
lettres  adressées  à  son  ami  L.  Bethman,  il  publia  ses  observations  sur  ce  manuscrit  intulé    JUier 
Guidonit.  Le  manuscrit  est  un  fatras  d'extraits  géographiques,  chronologiques,  historiques,  parai 
lesquels  se  trouve  un  poëme  en  rhythme  vulgaire  qui  célèbre  un  fait  d'armes  des  Pisans  aocompagaéf 
de  Génois  contre  les  Sarrasins  en  1088.  M.  Bock,  avec  une  profonde  connaissance  de  Tëpoque  et  ue 
sagacité  extrême  prouve  que  ce  recueil  d'extraits  est  en  entier  l'œuvre  d'un  PIsan  Gnii^oniif 
dévoile  l'existence  et  la  position.  Les  preuves  sont  incontestables,  les  argumentations  irréfataUei;       , 
nous  adhérons  volontiers,  même  à  presque  toutes  les  assertions  et  conjectures  de  H.  B6ck,à  l'eznp» 
tion  de  ce  plan  prémédité  empreiut  dans  le  choix  et  la  réunion  de  tant  de  pièces  et  firagntirtf 
hétérogènes.  Ce  plan  se  manifeste  fortuitement  par  la  prédisposition  du  pisan  rapièceur,  qui  ainiit 
quelque  peu  digéré  les  morceaux  agglomérés  s'il  avait  conçu  une  idée  politique.  Toujours  est-il  que 
dans  cet  assemblage  de  monuments  historiques,  l'Italie  du  ravennate  (d'après  Castorius),  se  treiTt 
mieux  que  dans  l'anonyme  connu.  M.  Bock  refuse  le  baptême  de  Gui  au  ravennate,  lui  aussi, il  doit 
rester  anonyme.  Au  prime  abord  cette  question  parait  être  futile  :  mais  elle  touche  rexistescedek 
description  de  l'Italie  que  les  savants  du  xvi*  siècle  ont  vu  sous  le  nom  bien  connu  de  Gui,  copié  an 
XI'  siècle  par  l'anonyme ,  exploité  au  xii*  par  un  pisan  homonyme.  Le  pisan  restera,  Je  pense,  f>pi^ 
ceur  copiste,  et  Gui  de  Ravenne  source  d'où  l'ont  puisé  les  scriptcurs  postérieurs.  L'étude  de  aotis 
«mi  Scbajes  va  immanquablement  débrouiller  les  incertitudes  confuses  et  disperser  les  obscurités» 


SLAtIA,   5.  15 

convertit  ad  fidem  Christi,  quatuor  proyincias,  scilicct,  Pollîanam, 
Sclavonianif  Waredoniam,  Gracoviam.  .Quas  postquam  fundavit 
infide  abiit  in  provincia  Pinccnatorum  (Pietschings,  Prusses).  Cette 
Waredonia  signale  les  Yaregs  Rouss  qui  dominaient  sur  la  Slavonie 
orientale. 

A  Byzantc  les  Fargani,  Vargani  (Const.  porphyrog.  de  cerimon. 
anlaell,  p.  152),  B«p»yyot  Varangi  (Anna  Komn.  ap.  Stritt.  IV,  448), 
furent  connus  comme  avantureux ,  coureurs  et  mereenaires. 

Les  Rouss  qui  s^établirent  en  Slavonie,  étaient  qualifiés  de  Yaregs  à 
cause  qu^ils  venaient  de  parmi  les  Yaregs,  et  les  Yaregs  furent  appelés 
par  les  Rouss-slaves  comme  auxiliaires  jusqu'à  Tannée  1018  (Nestor 
ehron.).  Le  nom  de  Rouss,  Russes,  se  perpétua  parmi  les  Slaves,  celui 
de  Yaregs  sortit  de  Tusage. 

Les  arabes,  bien  informés  sur  ce  qui  se  passait  chez  les  Slaves,  con- 
naissaient les  Yaregs.  En  1050,  Abou  Rihan  le  birouuien,  écrivant  dans 
rinde,  donnant  dans  son  ouvrage  la  description  de  la  mer  baltique,  rap- 
pelait Yareng.  11  y  dit  :  la  mer  qui  baigne  à  Toccident  les  pays  depuis 
Tandja  et  Andalous,  s*appelle  la  mer  environnante.  Les  anciens 
^^tJ^I  lounanioun  (grecs)  rappelaient  okeanos.  Il  n'y  a  personne 
Cfui  oserait  prendre  son  large,  on  tient  ses  rivages.  De  ces  pays  elle 
s^étend  vers  le  nord  le  long  des  régions  de  ikJUL^  Saklaba.  Au  nord 
de  Saklaba  sort  de  cette  mer  un  canal  (un  golfe)  qui  se  rapproche  jus- 
qu'au voisinage  dcBoulgar  pays  moslemine.  On  rappelle  oXJIjjt 
"Vareng.  Mais  c'est  un  peuple  qui  habite  ses  rivages  :  ensuite  Tocéan  se 
tourne  vers  Test  (Yakout,  mort  1229,  mscrit  ap.  Fràhn,  Ibn  Fozl. 
p.  182;  confer.  Aboulf.  versionis  Reiske  p.  152).  Ce  peuple  est  d'une 
baute  taille  et  guerrier  (ajoute  Schirazi ,  vers  1500). 

Les  historiens  russes-slaves,  qui  succédaient  à  Nestor,  répétaient  le 
nom  de  Yaregs  comme  ancienne  réminiscence  histqrique;  chez  les 
arabes  ce  nom  ne  discontinuait  point  à  être  vivant  et  n'a  pu  vieillir. 
Habitués  à  se  répéter  l'un  l'autre  d'un  écho  interminable,  ils  rappe- 
laient  les  Yaregs  et  leur  mer.  Yakout  1229,   Nassir  eddin   1276, 
Schirazi  1500,  HamduHah  Mestoufi  kazvini,  Schems  eddin  dimeschki, 
Abonlféda  1521,  Ibn  al  Ouardi  1549,  Bakoui  1597,  le  commentateur 
de  Nassir  eddin  scherif  djordjani,  Ibn  Schabib  harrani,  Schems  eddin 
dimeschki  1586,  Moustafa  ben  Abdallah  1648,  et  quantité  d'autres 
avaient  Taflaire  géographique  avec  les  Yaregs  éphémères.  Seulement 
le  nom  minaudait  et  changeait  de  tintement ,  que  les  écrits  des  auteurs 
et  copistes  firent  résonner  :  Yzng,  Yrng,  Yareng,  Uzane,  Aureng, 
Avreng,  Yaraîk,  Yarenk,  Yarang.  Moustafa  tourk,  appelé  aussi  katib 
tsdielebi  ou  hadji  khalfa ,  trouvant  ce  nom  dans  les  ouvrages  aslrono- 


V 


i6  SLAVEfc,    6. 

miqucs  et  géographiqiui-s ,  «expliquai!  que  c'était  le  nom  de  la  mer  alle- 
mande ou  baltique  et  qwc.  U...  Varoi:^  étaient  les  Suédois  (is). 

Déjà  Louis  le  Dé]n'nt):iii'c,  recevant  les  envoyés  des  Rhos,  qui 
arrivaient  par  Byzant  A  -^a  cour,  (liliî.'.enlissime  invesligans,  comperit, 
cos  gentis  esse  Sueî^.'in»  •  (PruJepl.  irecensis,  annal,  bertinian. 
ad  a.  859).  Les  recher*  ïl^  dfj'ori^îae  russe  s'appuyèrent  sur  cette 
première  investigation  et  trouvèrent  en  Suède,  près  de  Birka,  un 
canton  Ros-lagen,  conclurent  que  c'était  le  berceau  et  que  les  Rous , 
Ros  Varegs ,  venaient  de  Suède. 

Mais  l'appellation  de  Varegs  pouvait  être  générique  pour  les  pirates 
de  la  mer  baltique,  elle  convient  aux  Danois,  ils  étaient  ainsi  qualifiée, 
de  même  que  les  Rhos  et  on  connaît  chez  ces  Danois  des  chefs  qui 
portent  le  nom  de  Rorik,  Rurik,  Rourik. 

Charles  le  grand  donna  à  Hrerek  ou  Rourik ,  frère  de  Gormon ,  roi 
des  Danois,  la  Frisie  en  possession  :  il  est  qualifié  de  dux  Frîsonum ,  et, 
fidèle  à  l'empire,  il  périt  en  810  par  une  irruption  de  Normands.  Un 
de  ses  neveux,  fils  de  Halfdan,  portait  aussi  le  nom  de  Rorik,  lequel 
baptisé  avec  son  frère  Heriold  en  826,  obtinrent  en  possession  magoam 
partem  Frisonum  Rusiringen.  Expulsé  en  841  par  l'empereur  Lothar , 
il  s'empara  en  850  de  Doresladt  et  il  fut  in  fidem  receptus  par  le  même 
Lothar.  Appelé  en  852  pour  rétablir  le  suédois  Âmound  à  Birka ,  il 
visita  de  suite  fines  Slavorum  (Remberti  vita  Ànsgarii,  cap.  19).  Plus 
tard,  859,  Rurik  à  la  tête  des  Varegs  Rouss,  rançonna  les  Slaves  et  les 
populations  limitrophes  (Nestor,  manusc.  de  Kônigsb.).  Ensuite,  en  862, 
invité  par  ces  peuples,  il  s'installa  à  Ladoga  et  conjointement  avec 
Sineus  et  Trouver,  communique  au  pays  l'appellation  de  Russie.  Rurik 
se  montre  encore  en  865  par  un  pillage  de  Frisland,  de  Dorestadt,  et 
des  environs  du  Rhin  jusqu'à  Cologne  (Hincmar...).  Enfin  il  reparaît 
chez  les  Slaves  en  864,  se  constituant  en  knez,  prince,  il  y  établit 
partout  ses  lieutenants.  Après  sa  mort,  arrivée  dans  la  Novogorod 
en  879,  le  nom  de  Rorik  ne  se  rencontre  plus  dans  les  fastes  de  rocd- 
dent.  Par  celle  coïncidence  des  dates ,  l'identité  de  Rurik  danois ,  avec 
celui  de  Novogorod  paraît  être  évidente  (ia).  C'est  ainsi  que  Rousisch, 
compagnons  d'armes  et  de  piraterie ,  établirent  leurs  tentes ,  comme 
le  dit  la  genèse  josippîne ,  autour  du  fleuve  Beîra  (Volga). 

6.  La  genèse  de  ben  Gorion ,  continuant  encore  l'énumération  des 
enfants  de  Dodanim,  compte  dans  leur  nombre  :  ^^IIXID  Kravali 

(13)  Voyez  sur  tout  ceci  Frxlin,  Ibn  Foszians  und  andcrer  Araber  Dcrtchtc  ûber  die  Russcn, 
Pctersb.  48i3,  iii-4".  ,      . 

(14)  Ucbcr  die  Herkonft  des  altcn  russisclien  Furstcngcschlcclitcs  aus  JiiUand ,  vod  Prof.  F.  Krnse 
UDorpat,  dans  les  mémoires  de  la  société  des  antiquaires  du  nord,  Copcnlia^ie,  1840, p.  321-863. 


SLAVES,  &.  17 

Croates),  w^D  Salaki  (^n^^D  Slavaki),  CSli^^  telzûm,  (c'^DK'»^ 
JLc(zkhî),   u^)2))b   Livomim,   nXD'HD   luiarkhar   (iX^lD   Khrabar, 
Chroates),  ]^iû"ir2  Khezramin,  (]^D1VD  Baïormin,  Bavière),  D^d^s 
Domin  (Bohême).  Ils  établirent  leurs  places  fortes  autour  de  golfes, 
depuis  les  limites  des  Boulgars  jusqu^à  la  mer  Bondekiah,  d'où  ils  s'éten- 
dent jusqu'aux  extrémités  qui  atteignent  la  grande  mer  :  ils  s'appellent 
'^D^pD  Sklaba.  Les  autres  disent ,  qu'ils  sont  les  descendants  de  Kha- 
naan,  mais  il  est  mieux  de  les  considérer  pour  la  postérité  de  Dbdanim. 
Il  est  claire,  que  la  genèse  prend  pour  les  Slaves,  ces  sept  peu- 
ples de  Dodanim.  Les  leçons  des  copistes  ou  des  éditeurs  les  rendent 
presque  inintelligibles.  Je  pense  cependant  que   les  Kroatcs,  les 
Chrobates  de  Krakovie ,  la  Bohême,  se  débrouillent  très-positivement. 
Le  Saloki,  nom  générique  des  Slaves,  avec  la  terminaison  de  ak,  dési- 
gne spécialement  les  Slavaks  du  sud  des  Karpats.  Baïormin ,  à  l'époque 
où  le  duché  de  Bavière  avait  autant  de  populations  slaves  que  theutones, 
indique  les  Karintiens  et  autres  Vendes  qui  sont  qualifiés  de  Bavarois , 
comme  habitants  du  duché  de  Bavière.  Par  un  nom  territorial  les 
Tschekh  sont  Bohèmes  et  les  Yendes-Karintiens  sont  Bavars. 

Les  noms  seuls  de  Letzfim  et  Livonim  offrent  une  difficulté  très- 
obscure.  Il  serait  probable ,  que  les  éditeurs  avaient  en  vue  les 
Litvaniens  et  les  Livoniens,  mais  une  telle  production  de  leur  leçon  ne 
nous  autorise  pas  de  suivre  leur  opinion.  Des  conjectures  qui  se  pré- 
sentent, la  leçon  de  Livonim  donnerait  c^nb  Lahlimim,  Lakhmim, 
les  Lekhs,  Lechites,  et  paraîtrait  peut-être  moins  probable  que  l'expli- 
cation de  Livomim  par  Lîv,  Livoniens,  qui ,  bien  que  d'une  autre  race, 
pouvaient  être  affiliés  à  Dodanim  par  la  genèse,  à  cause  des  gollcs  sur 
lesquels  ils  étaient  connus  par  les  Normands  et  le  commerce. 

Quant  à  Letzfim  ou  Letzkhim  :  les  Lontitzcs  des  rivages  balliques , 
les  Loutzaniens  de  Bohême,  les  Loutzanicns  de  Volinie  et  plusieurs 
autres  peuples  de  noms  analogues ,  pourraient  prétendre  à  la  sollici- 
tude de  la  genèse.  Les  exploits  de  guerre  ont  illustré  les  Loutitzes 
Veletabes;  le  commerce  fit  connaître  spécialement  les  Lontschaniens, 
Loutschaniens ,  AevÇavy]vo(,  AevÇevtvoc  (Gonst.  porphyr.  de  adm.  imp.  9, 
57,  Nestor...)  qui  habitaient  autour  du  fleuve  Stir,  alliés  des  Kiioviens, 
et  voisins  des  Dregovitsches,  Ullins  et  Patzinaks.  En  descendant  les 
fleuves  (Stir,  Pripets,  Dniepr)  ils  visilaient  les  marchés  de  Kiiov  et 
leur  ville  Loutzk  rk  Aeourça^  existe  jusqu'à  nos  jours  (is).  Je  pense  que 

(IS)  Scbafarjik  (antiquités  slaves  II,  38,  8]  contre  l'opinion  généralement  acceptée  et  contre  les 
'adications  hisioriqaes  sur  la  situation  des  Loutsclnnicns,s*c(rorcc  à  les  retrouver  dans  les  Loutsclia- 
nîensde  la  ville  de  Vielikic  Louki.  Mais  il  nous  est  impossible  d'avancer  aussi  loin  la  domination  d(  s 
l^atzinaks  qui  touchait  les  LoutscbaDicus  ;  la  communicatiou  riveraine  do  Loutzk  volinicu  avec 


18  SLÀVU»  6. 

CC6  (krnîcrfi  6oni'le«  I.rurim,  I.etzkhi  étant  plus  rapprochés  des 
peuples  du  midi  ^ti:  pat:ii!>.^  ni  ^m'^occuper  la  genèse  Joséphine,  et  on 
peut  dire  avec  'rrtiin.lo  (;iic  ic  ■  )mmerce  intéressait  beaucoup  plus 
risraéliie  que  toi...  ..i.'ii\:  '■  »«f»!inai";e. 

Loutzk  se  troiri.'i-!^  ^ir  :  it^^suge  de  communication  de  Foccident 
avec  l'orient  septentrional.  La  narration  épistolaire  de  Khasdai  nous 
en  fournit  des  indices  assez  positifs.  On  sait  qu'entre  les  empereurs 
byzantins  et  les  khalifs  de  Kordoue  les  relations  assez  fréquentes  ne 
discontinuaient  point.  Khasdaî  espérait  donc  de  faire  passer  son  envoyé 
au  roi  des  Khozars  par  Byzant.  Empêché  par  les  hostilités  qui  rendaient 
la  communication  dangereuse  (p.  59),  il  savait  qu'il  aurait  pu  se 
frayer  un  chemin  de  Jérusalem  par  TÂrménie  et  le  Kaukase  jusqu'aux 
J^hozars  (p.  40)  :  mais  il  apprit  qu'une  autre  route  était  praticable.  Les 
khalifs  de  Kordoue,  n'oubliant  point  les  autres  puissances  chrétiennes, 
soutenaient  des  relations  avec  Henri  l'oiseleur,  roi  d'Allemagne.  Ces 
relations  étant  pacifiques,  les  annales  en  ont  fait  à  peine  quelque 
mention  (.....);  Otton-le-grand  suivit  l'exemple  de  son  père, 
et  en  955,  Jean,  abbé  de  Gorce,  fut  envoyé  à  Kordoue,  où  il  a  eu  à 
aplanir  quelques  obstacles  pour  sa  présentation  au  khalif  Âbder  Rahman 
(vita  Job.  gorzien.  ap.  Perlz,  t.  lY.  p.  557)  (le).  Il  parait  qu'en  même 
temps  arrivait  un  envoyé  de  la  part  du  roi  de  3xbpi^bî<  CTW  uh 
gebalim  qui  sont  Tzklab  (p.  57) ,  accompagné  de  deux  Israélites  Ma 
Saoul  et  Mar  Jousef ,  qui  se  chargèrent  de  faire  passer  la  lettre  d 
Khasdai  au  roi  des  Khozars  (p.  40)  (17).  En  effet,  par  leur  soin  m 
autre  Israélite ,  Iakob  bar  Eleazar  du  pays  de  v^^  Nemetz  (ÂUeman 
Aschkcnaz  chez  les  juifs,  Nemeiz  chez  les  Slaves,  qui  communiquèrer 
cette  qualification  (de  muet)  aux  Khozars  et  aux  Arabes),  accomplit  ? 
remise  de  la  lettre  au  roi  des  Khozars  (p.  47).  Ce  roi  des  Tzklabs  éi 


Kiiov,  nous  paraît  aussi  beaucoup  plus  facile  que  celle  des  grands  Louki  du  nord ,  dont  les  habitas-     ad 
devaient  d'abord  traîner  leurs  marchandises  par  terre  avant  de  les  faire  descendre  le  long  dn  Dmlj        -Hy 
Les  grands  Louki ,  assez  obscurs  dans  les  fastes  de  la  Russie ,  n'arrivèrent  jamais  à  l'importanc^s»  de 
Loutzk  volinien. 

(16)  La  monnaie  commune,  de  convention,  bilingue,  de  Ilesdibam  976-1 005,  ctdelIcnriniDOS-l  93U, 
atteste  que  les  bonnes  relations  continuaient,  d'une  manièrs  très-intime.  Une  pièce  do  cette  moïk.  Kxaie 
avait  été  exhumée  à  Trschcbougne  près  de  PloUk  en  Pologne ,  ut  clic  prouve  que  la  monnoLme  à 
moitié  andalouzc  passait  par  l'Allemagne  pour  se  coucher  dans  les  terres  slaves.  J'ai  donné  sa  &  figure 
dans  ma  numism.  du  moyen  âge  tab.  VU ,  î.  La  figure  y  est  bonne  mais  l'explication  de  l'épigrapUe 
koufique  et  l'attribution  à  Henri  l'oiseleur,  sont  réprouvés  par  le  savant  orientaliste  et  profond 

numismate  Frœhn.  Il  y  trouva^  U  /  JJb  Jo^  I  /  ^^^jj  '  ^'  '  /  f^    fl^^  t 

alimam  Heschham  émir  almoumcnin  almouaïd  billah;  à  la  fin  le  nom  posthume  ^du  vezir'  Amir, 

qui  périt  en  1001.  De  l'autre  côté  HINRICVS.  et  une  croix. 
(17)  Other  embassiesarrived....  one  from  thcking  of  the  Slavonians,  called  Ducu,  dit,  je  ne  »»it 

sur  quel  témoignage  Murphy,  history  of  the  mahomtan  empire  in  Spain  ,  p.  101,  cité  par  Carmolj, 

note  Cl,  p.  99,  des  itinéraires  de  la  terre  sainte. 


SLÂVIA»  T.  i9 

limilrophc  des  frontières  d'Âschkenaz  ^33  peut-être  roi  des  monta- 
gnards JUsw  L'un  et  l'autre  revient' à  un  chef  des  Chrobates 
habitants  aux  pieds  des  Karpates,  à  la  grande  ou  blanche  Chrobatie 

BeAoxpw€aTO(  viyoov   àanpot  x^uCaroi  î^ovrlj  ràv  i^cov  dfpx^vra  (voïcvoda), 

laquelle  avec  son  prince  se  trouvait  sous  la  domination  d'Otton-le- 
grand  roi  des  Franks  et  Saxes  (Gonst.  porphyrog.  de  adm.  imp.  50,  52, 
53).  Par  ces  Gebalim  et  Loutzkhim  on  passait  d'Aschkenaz  au  pays  des 
Khozars  (is). 

ViNVLES,   SORABES,   MORAVA. 

7.  Les  indigènes  de  ces  vastes  espaces,  qui  s'étendent  autour  du 
Dniepr,  de  la  Yistule  et  du  Danube,  sont,  à  différentes  époques,  connus 
sous  différents  noms  génériques.  Sans  rappeler  ceux  de  Gètes  ou 
Dakes  qui  tombèrent  en  désuétude  (Theophylact.  46;  Pbotius  myriobibl. 
65),  on  les  qualifiait  de  Vendes,  Yinides,  Yenedes.  Tout  porte  à  croire 
que  ce  nom  leur  était  donné  par  les  Germains,  sans  qu'il  fut  en  usage 
chez  les  indigènes  mêmes.  Chez  eux  paraissent  les  appellations  de 
Serbs,  de  Chrobs  assez  répandues,  mais  la  plus  en  usage  et  générale 
était  celle  de  Slaves,  Slavini,  Sloveni,  (19). 

Toutes  les  nations  répétaient  ce  nom,  le  rendant  ordinairement  plus 
dur  par  leur  prononciation  :  Stiabi,  Skiabi,  ensuite  adouci  par  quelque 
autre  en  Âskiabi,  Isklabi.  Tout  le  monde  désignait  par  ce  nom  les 
indigènes  de  vastes  espaces  :  mais  les  écrivains  de  Tempire  brisé, 
distinguaient  deux  divisions  distinctes  de  leur  race  et  séparaient  les 
Ântes  des  autres  Slaves  (Jordan,  de  orig.  Getar.  5;  Procope,  de  bello 
goth.  III,  14).  Ces  Antes  touchaient  la  mer  noire  entre  Dniestr  et 
Dniepr  et  ils  s'étendaient  vers  le  nord  autour  du  Dniepr.  Un  certain 
temps  plus  puissants  que  les  autres,  ils  formaient  une  puissance 
détruite  par  les  Ostrogothes  (Jord.  de  orig.  Goth.  48).  Plus  tard  les 
|H)puIatîons  Slaves-antes  évacuèrent  le  littoral  de  la  mer  et  le  nom 

(48)  Je  touchais  plasicurs  fois  les  lettres  de  Khasdaï  (cartes  et  gcogr.  du  moyen  âge,  chap.  20, 36; 
^ans  l'ouvrage  de  Carmoly,  itiuéraircs  de  la  terre  sainte,  note  54,  p.  82-45)  ;  et  la  genèse  de  ben 
Clorion  (en  1845,  dans  la  première  lettre  de  l'cxam.  géogr.  de  Benj.  de  Tudèle  p.  44,  45;  en  1845  dans 
^olska  s'rednich  wiekow,  1. 1,  p.  478-480],  essayant  Texplication  dont  le  su.ccès  restait  douteux  :  j'ai  cru 
^onc  qu'il  fallait  revenir  encore,  compléter  ou  rectifier  les  précédentes  et  retracter  les  erreurs.  Aussi, 
^près  un  nouvel  examen,  je  propose  quelques  autres  explications,  et  je  dis  que  Loukioun ,  que  j'ai 
^H  sortir  dans  ma  publication  polonaise  (du  9"*  cliap.  p.  63,  64,  de  ben  Gorion),  est  Lucania  de 

(49)  Dobrovski  et  Scbafarjik  s'efforcent  de  retrouver  le  nom  des  Serbs  dans  Siropoc  de  Prokope. 
"^e  pense  qu'il  n'y  a  pas  lieu  de  contrarier  leur  opinion,  parce  que  cette  appellation  est  très-fortuite, 
^^ns  appui.  Prokope  l'infirme  quand  il  dit  que  c'est  l'antiquité ,  les  anciens  (et  non  pas  les  Slaves 
^^x-m^mes),  qui  appellaient  ainsi  les  Antes  et  les  Slaves  :  ^nàpouç  fOLp  t6  uocAoccàv  &/i(foripo\Ji 
^3cà>0tfv  et  il  en  fait  un  mot  grec  (de  bello  gotb.  HI,  44]. 


20  SLAVIÀ»  7. 

des  Ântes  s*est  éclipsé  :  maïs  on  ne  cessait  de  remarquer  la  bipartition 
de  la  sonche.  En  etr^t>  clUt  se  i!ô<:iare  dans  l'idiome  slavon  par  certai- 
nes modulations  de  \n  pr^T'oïKiatlon  qui  change  les  voyelles,  rend 
quelques  consonnes  silHauics  ou  nosales,  modifle  quelques  désinences, 
introduit  certaines  cunsoia.rs  intruses  (d,  l,)  et  varie  dans  une  des 
particules  inséparables  (wy,  jiz).  Peut  être,  qu'anciennement  cette 
différence  était  plus  tranchée,  plus  déterminée  entre  les  deux  portions 
de  la  race  qui  partageaient  ses  vastes  possessions  :  mais  depuis  que, 
nomina  per  varias  familias  et  loca  mutuarunt  (licet  nu  ne,  dit  Jordanes 
en  552,  de  orig.  Getar.  5)  différents  amalgames  se  sont  formés  partout, 
une  œlluvies  gentium  s'est  opérée  et  engendra  des  modifications  mitoyen- 
nes, qui  empêchent  de  discerner  Torigine  et  provenance,  contrarient 
les  témoignages  historiques.  Conformité  de  culte,  même  organisation 
sociale,  disposition  générale  à  fraterniser ,  coopéraient  à  la  fusion  de 
cette  double  nuance  de  Tidiome  qui  distinguaient  les  populations. 
Les  noms  de  rivières,  cantons,  villes  et  villages,  de  peuples  et 
peuplades,  se  reproduisent  sans  fin  identiques,  on  les  retrouve  oon- 
tinuellcment  pêle-mêle ,  comme  un  écho  qui  se  répète  à  Tinfinî  dans 
toutes  les  espaces  de  leur  terre  :  quelquefois,  cependant,  ces  appella- 
tions se  groupent  et  par  leur  choix  et  leur  forme  ;  décèlent  Fancienno 
existence  sur  tel  ou  tel  lieu,  de  telle  ou  telle  prédomination  de  fune 
des  deux  variétés  de  Tidiomc.  Ces  deux  variétés  sont  aujourd'hui  repré- 
sentées, d'un  côté  par  le  dialecte  polonais  et  bohème  (Shves),  de  rautres: 
côté  par  le  dialecte  serbe ,  russien ,  russe  (Ântes). 

Si  donc  on  trouve  les  dénominations  de  Serbes  on  Kroates,  Kharva — 
tes,  désigner  les  pays  et  les  nombreuses  populations,  on  ne  peut  ei 
conclure  qu'elles  sont  de  la  même  lignée  :  ces  dénominations  valent 
peu  près  autant  que  celles  de  Slaves  ou  Vendes.  Encore  faut-il  obser"  — 
ver  que  l'appellation  de  Serbes  est  plus  générale.  La  langue  des  Sorabe^^  <» 
Luzaces,  Bohèmes,  est  serbe;  les  Serbes  sortent  de  la  Chrobatie;  l^^^s 
sicveri  (orientaux)  sont  Serbes.  La  qualification  de  Chrobates  ne  se' 
qu'à  une  distinction  spéciale.  Si  l'on  rencontre  les  peuples  du  méi 
nom,  on  ne  peut  pas  non  plus  les  considérer  comme  identique 
d'autant  moins  que  ces  peuples  sont  en  grande  partie  appelés  d'api 
leur  possessions  :  marécageuse  (Luiicy),  littorale  (Pomorcy,  Primor< 
Morlané),  riveraine  (Bcrezanc,  Brzezanie),  plaine  (Dolency),  idoil' 
gneuse  (Horiti,  zagora,  Chlumcy,  zachlum),  boiseuse  (Borane,  Drevacmm^ 
Drevlanic,  Krivicze),  des  lacs  (Ozerici,  Jeicrcy),  des  prairies  (Luciai.^^^ 
L§czane,  Lçczanie),  des  champs  (Polahe,  Opole),  des  pays  fronti&^r<s 
(Krajincy,  Ukrajincy),  des  pays-bas  (Nizeni,  Nize,  Nizicy), 

Les  pays  des  environs  de  TElbe  jusqu'à   l'Oder  sont  pleins      ^ 


SLAVIAy   8.  31 

déaominatioiis  de  ce  {^enrc.  Les  Vinules  ou  Vendes,  qui  s'appellaîent 
Slaves  enlrc  eux  daus  leurs  possessions  hsférieures,  se  distinguaient 
par  Sourb,  Sorab,  Serb,  dans  leurs  possessions  supérieures  et  montant 
vers  le  sud ,  n'avaient  que  le  nom  de  Slaves  de  la  spécialité  incertaine. 
Les  Vinules  et  les  autres  Slaves  prirent  partout  les  noms  de  leur  gite 
ou  des  rivières»  ainsi  que  parmi  leurs  peuplades  on  remarque  à  peine 
quelque  dénomination  vraiment  nationale  d'Obotrites,  Stodorans, 
Boulebes,  Veletabes,  etc. 

On  connaît  leur  emplacement  par  les  documents  et  les  annales,  par 
la  description  anglo-saxonne,  par  celle  d'Adam  de  Brème  et  de  Helmold 
qui  suivît  Adam ,  et  reproduisit  sa  description  à  rebours.  Le  géogra- 
phe bavarois  (vers  900),  parait  le  plus  inintelligible,  énumérant  une 
soixantaine  de  peuples  et  comptant  le  nombre  des  villes  de  chacun.  Il 
nous  conduit  dans  des  petits  recoins  de  leurs  possessions,  évidemment 
assez  bien  informé,  mais  il  défigure  les  noms  et  rend  plusieurs 
méconnaissables.  En  suivant  son  énumération ,  nous  saurous  parcourir 
et  examiner  toute  la  Slavonie  occidentale  (20).  (Voyez  dans  notre  atlas 
la  carte  de  la  Slavonie  du  x**  siècle). 

8.  Descriptio  ciuitatum   et   regionum  ad   septentrionaUm  plagam 

Iktimbii.  —  Isti  iunt  qui  propinquiores  résident  finibus  Dan<wrum^ 

quo  voeanl  NorUibtrezi,  ubi  regio,  in  qua  sunt  ciui(at€S  lui  per  duces 

suosparHte;  and  be  northan  him  (eald  Seaxum),  dit  en  même  temps 

la  relation  anglo-saxonne,  is  Apdrede  ;  end  by  eastan  him  (Dcne)  syadon 

Aidrede;  and  Afdrede  by  suthan  (sae)  (Alfredi  hormesta...)  —  Abo- 

triti  (annal,  fuld.  sub  a.  709,  795,  94i,  etc;  Ademari  annal,  franc 

ob  a.  798,  799  808);  Apotriti  (Ditm.  I,  p.  526,  IH,  p.  545,  IV,  p.  551; 

inaL    Quedlimb....)  ;   Abrodili   (chronogr.   Saxo  s.   a.   982,   975); 

MMirili  (annal,  fuld.  s.  a.  804,  819,  858;  Adami  hist.  ccclcs.  (64),  H. 

;  Helm.  I,  2,  etc).  Ils  avaient  leur  possessions  autour  de  Mikliuburg, 

^opolis  (Adam  et  Helm.  passim).  Nation  endurcie,  infatigable  et 

ssantc,  ainsi  que  maintefois  elle  occupait  la  ville  Werle  (Helm.  I.  c.) 

>triti  et  Wari  vocantur  (Ditm.  VIII,  4).  Les  Obolrites  s'appellaicut 


)  Ce  précieux  fragment  géographique  se  trouTO  dans  la  bibl.  de  Munich  en  Bavière ,  et  fut 

} assez  souvent  D'abord  par  Buat,  liist.  anc.  des  peuples  de  l'Europe,  Paris  4772,  XI,  10, 

t,  149;  ensuite  par  Jean  Potocki ,  frag.  hist.  et  gcogr.  XXXIV,  t.  Il,  p.  281.  —  D'une  autre 

par  Dobrovski,  Archiv  fur  oester.  Gesch.  Wien,  1827,  n*  27-93;  par  Uonnaîcr,  Uertzog 

4d,  Muncb.  1831  p.  24;  Baumer,  rcgeala  hist.  Brand.  Berlin ,  183C,  p.  101  ;  par  Boczck ,  cod. 

ImutK.  1836,  p.  67,  et  par  d'autres.  ~  Une  nouvelle  copie,  plus  correcte  de  J.  A.  Schmetzlcr, 

lécairc  à  Munich,  est  publiée  par  Schafarjik ,  qui  dit ,  que  Dobrovski  essaya  de  l'expliquer, 

Lelewel  avec  plus  de  succès,  mais  il  a  négligé  la  partie  la  plus  difficile.  Je  veux  rendre  compte 

succès  et  de  mon  insuccès. 


St^  SLAYIA,    3. 

aussi  Reregî  (Adam ,  hi.st.  ocdes.  II,  20,  III,  SI  ;  annal.  Saxo  s.  a.  952) 
d'une  ville  Reric  ruîiioc  en  ^')8  (m). 

Sont  limitrophes,  d'uu  cnio  W/.ïri  ou  Wagiri  avec  leur  ville  Stari- 
grad  (Aldenburg),  de  hiqu*  lie  on  voyait  Tfle  slave  Fembre  ou  Vemere; 
et  Poiabingi  (riverains  J:  hxhr.  Elba)  avec  leur  ville  Racisbni^.  Ils 
sont  le  plus  avancé  ^  vcj^  !^  cident  et  touchent  la  Nordalbingie 
saxonne,  de  laquelle  ils  soûl  bcpurés  à  partir  de  TElbe  par  la  rivière 
Mescenreisa  (Beyze)  par  les  forôls  Deluunder  jusqu'à  la  rivière  Delumida 
(Steckenitz  nommée  aussi  Delvenau) ,  ensuite  tourne  par  les  forêts  de 
Travenna,  (jusqu'à  Oldeslobe),  en  montant  Travenna  jusqu'au  lac 
Kolse  (Gollies,  duquel  Travenna  se  décharge) ,  enfin  (tournant  le  lac 
Plone)  par  la  rivière  Zwentina  jusqu'à  la  mer  (près  de  Kiel)  (Adam  br. 
hist.  ecclés.  (62)  II,  9,  10,  (158)  III,  22;  de  situ  Danie  226;  Helm. 
I,  5, 10).  —  De  l'autre  côté  des  Obotrites,  au  sud,  sont  Smeldtngî,  Lini 
et  Varnavi  (Ad.  et  Bel.  11.  ce). 

Vuilci  in  qua  ciuitaies  xcv,  et  regiones  mi.  Ces  quatre  pays  sont  bien 
connus  et  leurs  limites  déterminées.  La  rivière  Pénales  divise, ainsi 
que  Kicinî  et  Gircipani,  sont  au  nord  et  Doienci  et  Redari  au  sud.* — 
Circipani  (Adam,  1, 10,  III,  21,  24;  Helm.  I,  2,  21;  6, 1,  etc.;  annal. 
Saxo  s.  a.  952),  Zcirizspani  (annal,  s.  gall.  maj.  s.  a.  955),  Scyrîpenses 
(annal,  corbei.  s.  a.  1114),  mentionnés  dans  les  diplômes  Zerezepani 
en  965,  Zircipani  en  975,  Zerezpani  en  975.  Situés  citra  Panim,  eirca 
Panim,  à  travers,  au  delà  de  la  rivière  Pêne  (Gzerez-pani),  tenaient 
parties  maritimes.  —  Kyzini,  Kycini,  Kissini  (Helm),  Chizzini  (Ada 
brem.;  annal.  Saxo  s.  a.  952),  touchaient  à  la  mer,  s'étendant  par  I 
frontières  de  Varnaves  et  Obotrites.  —  Tholenz  en  946,  Tolensa 
en  965,  975  dans  les  diplômes,  sont  appelés  Tholosontes  (Ad.  br.  1, 1(^- 
111,24),  Tholenzi  (Helm.  I,  2,  21)  dans  les  annalistes ,  habitaient  L 
long  de  Pené  (Tollensee ,  rivière  Doienz)  tout  le  pays  plat  (Doleàc 
jusqu'à  Tembouchure  de  la  rivière  Ukra.  —  Riedere  (dans  les  dij^ 
de  905,  975,  975),  Riadzi,  Redezi  (dans  ceux  de  956.957),  Redevr 
(Witikind  en  950, 968),  Redari,  Rederari ,  Riederun  (Ditm.  IV,  p.  389 
Reiheri  (Ad.  brem.  hist.  eccl.  (66)  II,  12, 15),  Riaduri,  Redarii  (Hel 
passim),  possédaient  une  ville  Rethra ,  fameux  sanctuaire  des  peuf^ 
(Ditm.VI,  17;  Helm,  1,21). 

Ces  quatre  peuples  s'appelaient  sua  locutione  Welatabî,  Welei:sfe.S)î 
(Einh.  vita  Garoli  m.  12,  annal,  s.  a.  789;  Adami  de  situ  Dan.  ^2^; 

(31)  Nonobstant  toutes  les  déductions  de  l'origine  du  nom  d'Abotrites,  'je  pense  que  bovk»      ne 
sommes  pas  autorisés  à  les  appcller  Bodrices  comme  l'a  fait  Schafarjik  (antiq.  slaves  X,  44,  7)»  psmwee 
que  la  reproduction  constante  et  unanime  de  tous  les  écrivains  commence  leor  nom  par  aoo   ^^H 
faut  respecter  cette  voyelle  :  l'o,  est  voyelle-consonne  du  slave,  qui  a  sa  valeur. 


SLATIA,   8.  â3 

anual.  8.  galeo.  maj.  8.  a.  995;  Âdemari,  ann.  franc.  8.  a.  789),  Vnelitabi 

(Noskeras  Labeo,  paraphr.  ia  Marc,  cap^l.  75),  Wiatabi  (chronogr. 

fiaxo,  s.  a.  995  997).  Mais  les  Franks  et  W Saxons,  francîca  iingua  et 

consuétudine  appellaient  ces  peuples  WiltiL  "Wliz  (Einh.  11,  ce;  Witich. 

inter  Meibom.  scrip.  germ.  1. 1,  p.  647;  Adami  hist.  eccl.  II,  9;  Âdemari 

^nnal.  Franc,  s.  a.  789,  808,  822);  Wilti,  Willen  (Alfredi,  hormesta; 

Bitm.  IV,12  ;  annal,  nazaç.  s.  a.  789),  Wilzzi  (annal,  fuld.  s.  a.  789),  Wilci 

^Adem.  s.  a.  759).  Ces  deux  appellations  passèrent  de  Thistoire  dans  le 

domaine  des  contes  populaires,  comme  de  grandeur,  d'épouvante  et  de 

monstruosité.  Ces  Yeletabes ,  Wiltzes  se  donnaient  à  eux-mêmes  une 

troisième  appellation,  de  Louti,  Loutitzi,  qui  parut  plus  tard,  par 

laquelle  ils  étaient  le  plus  souvent  mentionnés  par  les  étrangers.  Elle 

désignait  pour  sûr  leur  union  politique,  leur  fédération.  Lutizi  (Bruno 

vila  s.  Adalb.  26),  Luilici  (Dilm.  IV,  9,  VI,  17, 19,  VII,  11, 47),  Luizici 

(id.  VI,  16),  Leutici  (Adami  hist.  eccl.  (66)  II,  12,  (140)  III,  24,  de  situ 

Daniae  220),  Lutitii  (Helm.  1, 21),  Lithewizi  (chron  moissiac.  s.  a.  1179). 

Les  quatre  peuples  de  Weletabes,  Wilces,  Lutices  étaient  Slaves  et  leur 

idiome  slave  (Bruno  vita  s.  Adalb.  26;  Seifr.  vita  s.  Otton,  etc.);  les 

noms  propres  des  localités  et  des  personnes,  chez  eux,  sont  slaves;  ceux 

des  divinités  et  du  culte  slaves;  les  épigraphes  qui  chargent  les  débris 

de  pierres  inscrites  et  de  ûgurines,  imagines  mirifice  insculptae,  pour 

la  plupart  offrent  les  dénominations  slaves  :  mais  ces  dernières  décèlent 

uo  singulier  mélange  de  Fidiome  et  du  culte  lettes  (surtout  de  Samogi^ 

tiens).  L'origine  et  Texistence  des  Veletabes  énigmatique,  par  d'autres^ 

circonstances,  deviennent  plus  mystérieuses  encore  par  cette  réunion 

(^'idiome  et  du  culte  (22). 

Un  autre  sanctuaire  des  Slaves  vinules  s^élevait  à  Arkon,  Arkuni 

Vinlandi  (knytlinga  saga  101),  in  insula  (péninsule)  arconensis  quae 

Withowa  dicitur  (Saxo  gram.  1, 14);  presqu'île  de  Tile  quam  Rani  vel 

Kunî  possèdent  (Ad.  brem.  hist.  eccl.  (226)  IV,  45),  Ruani  (Witik, 

III,  658),  Rivani  annal.  Saxos,  a.  955,  p.  298),  Rani  qui  et  Rugiani 

(Qelm.  I,  2,  12;  6,  5;  15,  5;  56,  5).  Regio  quae  a  teutonicis  Ruiana, 

^  «clavis  Rana  dicitur  (Wibald.  ad  a.  1149,  ap.  Martens  Durand,  11^  509); 

{i9)  C'est  en  vain  que  de  savants  allemands  prirent  tant  de  soin  à  infirmer  l'authenticité  de  ces 
^^«nnineDts,  dont  le  nombre  est  déjà  très-imposant.  Voyez  Thunmann ,  ueber  die  gottcsdicnstli- 
^^en  Altherthumer  der  Obotriten;  Hasch  und  Wogen,  Beitraege  zur  erlaeuteruiig  der  obotrit» 
^Iterthumer,  Schwerin,  4774;  Jean  Potocki,  voyage  de  basse  Saxe,  Ilamburg,  479Q;  Hagenow. 
^^schreibnng  der  auf  der  geherzogl.  Bibl.  zu  Neustrelitz  befindlicbeu  Runensteipe ,  Griefswald  4826; 
-^«endt,  grherzogl.  stretitzisches  Georgium  nord  slaviscber  Gottheiten,  MindcnH820.  —  Welet, 
'^«'«lot ,  géant;  wilcy,  wilki,  les  loups  ;  wilzen,  welst,  walsc,  volsung,  ensuite  wilkinaland  le  roi  wilki- 
*^^8 ,  des  contes  teutons;  établissement  des  Wiltzes  et  slaves  en  Frise ,  près  d'Utrecht ,  etc.,  furent 
^^ià  des  sujets  traités  par  les  érudits  ;  Scbafarjik  discute  assez  longuement  ces  questions  ardues  dans 
>^o  antiquités  slaves  X ,  40. 


24  SLAVUy   8é 

RaciDg,  Rc,  dont  les  hab'i.tus  sont  Rscngjar  (knyt),  saga  120, 123,  etc.). 

—  Mais  revenons  au  g<M>i;':»i;ho  Itavarois. 

Linaa  est  populus  q^ti  tn,  A  vailales  vu.  Linones  (Eînh.  vîia  Car.  s. 
a.  808,  annal,  fuld.  s.  o  80^,  SU,  858;  Ademar  s.  a.  808),  Lingones, 
Linguones  (Adaroi  hist.  ^' <  i.  îf,  ^,  III,  22,  Hclm.  1, 2,  58),  dans  qaelques 
manuscrits  d'Einhard  Iîi;i?i:i..os.  —  En  795,  Witzan  roi  des  Obolrites» 
avançant  au  delà  de  TElbe  contre  les  Franks,  s'arrêta  dans  les  pays  de 
Liuni  (annal,  fuld.  s.  a.  795).  Suivant  toutes  les  apparences  c'était  dan& 
le  Lûneburg,  où  le  canton  de  Lune  et  la  rivière  Luhe  sont  connus.  Mais 
il  faut  distinguer  ces  Luni  et  ne  pas  les  confondre  avec  les  Liai. 
Seize  ans  plus  tard,  811,  €harl-le-grand  passait  FEIbe  pour  entrerdans 
le  pays  des  Linones.  Ces  Linones  avec  les  Warnaves  étaient  ultra  les 
Obotrites  (Adam  et  Helm.  II,  ce).  Les  Warnaves  portaient  leur  nom  de 
la  rivière  Varna  qui  coule  vers  Rostok  et  leur  nom  ne  s'est  pas  effacé 
des  cartes  géographiques.  Leurs  voisins  Lini  avaient  leur  place  entre 
Eldeet  Stekenitz  :  mais  leur  pagus,  gau,  Linnagga,  gau  qui  portait 
leur  nom,  avait  une  plus  considérable  extension  (Ottonis  dipl.  a.  946). 

Prope  illis  résident  quos  vocant  Belhenici ,  ailleurs  nous  trouvons  : 
misit  Karolus  exercitum  ultra  Albiam  ad  illos  Slaves  qui  nomioaiitur 
Linai  et  Bethenzr,  Bechelenzi,  Bethelclcreri  (chron.  moissiac.  s.  a.  811, 
edit.  Petz,  1. 1,  509)  :  ce  sont  les  Bethcnici ,  qui  disparaissent  ensuite» 

—  On  connaît  plus  tard  les  mercenaires,  satellites  dicti  slavonice 
Yethenici  Cukesburgienses  (Burgwàchter)  (Ditmar,  V,  6).  Il  est  probable 
que  la  peuplade  Bethenici  portait  ce  nom  de  i/viteniec,  de  gardien,  à 
cause  qu'elfe  tenait  garde-frontière  sur  l'Elbe,  où  se  trouve  Wittenbei^âL— 
vis-à-vis  de  l'embouchure  de  Yebt. 

Et&meldingon,  de  l'autre  côté  des  Liniens  autour  d'Elde  (annal,  fuld.^ 
s.  a.  808,  809;  Ademar,  s.  a.  808;  chron.  moiss.  s.  a.  809).  Smolin  pr«i 
d'Elde  rappelle  leur  ancienne  existence. 

Et  Morizani  qui  habent  ciuilales  xi,  sont  voisins  de  Linagga.  Ailleui 
Marizzi,  More,  Murz  (dipl.  1170,  ap.  Lunig,  t.  II,  Anhang  p.  152),  f 
tenaient  près  du  lac  Muritz. 

Juxta  illos  (Morizanos)  sunt  qui  vocantur  Hebfeldi  qui  hebent  ciuU 
viii.  Cependant  c'est  un  très- vaste  pays.  Haefeldan  est  au  sud  de  Wim 
das,  et  près  de  la  mer,  où  sont  Wylte  the  man  Aefeldan  haet,  and 
eastan  him  is  Winedaland  (Alfredi  hormesta.).  Le  fleuve  Havela 
donnait  son  nom  II éveil um ,  Ileveldum,  et  le  peuple  était  appelé  de 
pays  Heveldi.  Le  peuple  lui-même  qui  habitait  les  rivages  du  fleuv(^ 
nommait  Stodor  et  de  son  nom  on  appellait  le  pays  Stoderania ,  Zt( 
rania  quam  vulgo  Ileveidun  dicunt  (Dîtm.  I,  6,  lY,  20;  chron.  qnedl 
etchronogr.  Saxo,  s.  a.  997;  Adarai  hist.  eccl.  II,  9;  Helm,l.  ^ 


SLAVIA,   i/,  25 

38,  i),  de  gcnlc  Luliccnse  ex  provîncia  Sioî<,î  (Gosm.  prag.  p.  56). 

Ainsi,  Wiltzi-Lutici  sont  Heveldan,  et  Slo'Ioi:h>.-  de  Heveldun  Luliees. 

SCuderhcjra  reste  afujourd'hui  comme  i  'mloisi'.r^ce  de  leurs  anciennes 

possessions.  In  pago  Heveldèn,  cîuitas  \Um  «Vuibarg  (dipl.  a.  919,  fun- 

dat.  eppat.  Brand.  ap.  Ecéard.  p.  129;  <'tn.    iiu^  Ânhang,  t.  Il,  p.  5). 

Juxta  Ulos  (Heveldos)  est  regio,  quœ  vonitur  .Sur6t,  in  qua  regione 

fêlures  sunt  (aliae),  quœ  habenl  ciuilates  i .  >in  ivc  (  Vlfr.  horm.  10),  Srbi, 

Urbi  (Fredeg.  68),  Surbi,  Syrbi,  Sorabi  (Aûcnar.  s,  a.  782, 822;  annal. 

itild.  s.  a.  789,  806:  Adam.  brem.  et  Uelm.  11.  ce),  région  à  Test  de 

Sala  (Zdava),  très-étendue  vers  TOder,  L'anglo-saxon  apprit  qu'au 

nord  de  Dalemintzes ,  nortban  Dalomcnsam  sindon  Surpe ,  en  effet  les 

indigènes  de  la  Luzace  (Luzice)  s'appellent  jusqu'aujourd'hui  Serb, 

Serblo,  et  leur  idiome  serski ,  serbski.  Mais  l'importance  de  plusieurs 

peoples  qui  possédaient  les  parties  orientales,  motiva  les  étrangers  de 

M,es  exclure  de  la  généralité  sorabe,  ainsi  que  même  les  Nicici,  Susili,  et 

Daleminci  sont  souvent  séparément  indiqués. 

Sorawe  touchait  les  frontières  de  Bohême  avancées  vers  l'occident, 
^t  en  montant  Sala  on  traversait  Orla  et  Géra  gau  ;  Yedu  ou  Veita 
spacieux  et  Tucherîni;  ensuite  Nedelice  ou  Neletice,  Nudice,  Serimund 
«t  quantité  d'autres  petits  gaus  :  Plisni  et  sa  ville  Plîssur  (Altenbourg); 
Seuntira  et  sa  ville  Breznisa  (Priesnitz  an  der  Eyla);  Koledizi,  Colidizi 
^Rôlza)  ;  Zitici  et  sa  ville  Zurbici  (Zôrbig). 

A  l'est,  deux  pagi,  gaue  Ghutici,  se  touchaient,  bien  que  les  Dale- 
jninces  séparent  leur  territoire  aux  environs  de  la  réunion  de  Kaminicl 
svec  Mulda  la  blache  (Ditm  I,  5). 

Chntîcî,  Gutici  orientales  ou  méridionales.  Wisseburg  (sur  Mulda)  et 
Xostata ,  ad  Gutici  orientalem  perlinet ,  ac  fluviis  Gaminitz  (Kemniz), 
Albique  distinguitur  (Ditm.  III ,  9)  :  ils  couvraient  le  nord  montagneux 
de  Bohême.  Les  rivages  de  l'Elbe  et  au  delà,  tenaient  les  Niseni 
(Ditm.  IV,  4)  {Nossen,  Dresden),  Nisenen  ultra  Albean  (dipl.  Ottonis 
948,  et  968,  ap.  Lunig,  t.  II,  Ânhang  p.  96,  97). 

Ghutici  (occidentales,  Skudici),  où  se  trouvent,  castellum  Medebure 
(Melbis,  interpretatur  autem  hoc,  mel  prohibe,  Ditm.  II,  25),  Zwenkow 
in  regione  Sckeudiz  (Zwenkan),  Scudici  (Schkeudilz),  indiquent  autour 
de  Leipzig  l'existance  du  gau  Ghutici ,  qui  portait  probablement  et  le 
nom  de  Skudici,  dont  les  frontières  sont  hérissées  par  les  qualifications 
de  petits  gaues  qui  se  croisent  l'un  et  l'autre  dans  les  indications  des 
diplômes  (ss). 

(23)  L'archevêque  s'clail  réserve  dans  Ckutici  :  Scudiii  (Sckkcuditz),  Cotug  (  ),  Worziii 

fWartzen},Bigni  (Bichen,  Pucchcn),  Ilburg(Eilcnburg],Dibni  (Dubcu},  Pue  (Bocch,Pottcli),  Luibanici 
(LoebeniU),  et  Gezcrisca  (Gerschitz ,  Gorschlitz)  Ditmar,  III ,  11.— A^'urcin ,  Bichin ,  Pohus,  Gerischo, 


26  SLÂYIA,   a. 

Les  rivages  de  TEibe  de  deux  côtés,  font  partie  de  deux  gaaes  :  de 
gau  Nitaze  ou  Belgor,  où  près  de  Belgor  se  trouvait  bui^ard  Tresoowa 

(Troskau,  Drôskau)  (Ditm.  TI,  58,  VII,  44;  dipl )  et  de  gau  Nesid, 

Nizizi  dum  Milda  intrat/n  Albin,  sursum  ultra  provinciam  Misici 
(fundat.  eppat.  Misn.  968,.  p.  Lunig,  t.  Il,  Anh.  p.  97;  Ditm.  YIII,  10), 
ou  Mezumroka,  où  Ton  trouve  Pretokina  (Prettîn ,  ou  Pretsch),  Clotnie 
(Klôden),  Gohtzizi  (Gotzitzprès  de  Gomberg),  Wissirobi  (Iserbeck?)  et 
les  deux  burg>\'ards  Plozike  (Plossig)  et  Suseletzi  (Zûlsdorf)  (dlpL 
Ottonis,  996,  ap.  Ëccard.  bist.  généal.  Sax.  p.  144). 

Ces  gaues  de  la  basse-terre  (niza)  se  croisent  avec  les  possessions  de 
Scititzi  et  Susli.  Celles  de  Scitici,  Citizi,  à  Test  de  TElbe  et  au  delà 
d*Elster  noire  (Trebitz,  Domuiz,  Olsnik,  Domuki,  Olsint).  Les  posses- 
sions de  Siusli  sont  beaucoup  plus  considérables.  Sclavi  qui  vocantar 
Siusli,  Siusili  (annal,  fuld.  s.  a.  869,  874,  899);  Winedaland  the  mao 
haelSysscle;  (Âlfr.  bormesta);  pagus,  terra,  urbs,  Susili,  SuselitK. 
Une  forêt  les  séparait  de  Plisni  (Ditm.  III,  1,  VIII,  10);  civilas  Ilburg 
(Eilenburg),  Holm  (Golmenz)  in  pago  Susali,  et  burgward  Suseletzi 
(Zûlsdorf)  regarde  les  rivages  d'Ëlster  noire  (dipl.  961,  ap.  Leubemm 
de  stapula,  n*"  1599,  et  Lunig,  deutsch.  Ârchiv,  continuât,  p.  544). 

Juxla  illos  (Surbos)  sunl  quos  vacant  Talaminzi,  qui  hahmt  ciuitor 
tes  lan,  Demelcbion  (cbron.  moissiac.  s.  a.  805);Dolmatae,  Dolmatii 
(annal,  fuld.  s.  a.  856,  880)  ;  Dalomensam  (Alfr.  borm...)  ;  Dalmantia 
(Witik.  s.  a.  927, 950,  p.  21 5, 21 7  Leibnitzii)  ;  nom  prêté  par  les  étrangeis: 
teutonice  Delemenzî,  slavonice  Glomaci,  (Ditm.  I,  5),  Dalmize  siv» 
Zlomekia  (dipl.  981),  Glumici  (annal,  saxo,  p.  258).  Zlomicl,  et 
Glomazi  (Lommalsch)  (Ditm.  I,  5).  Leur  ville  importante  Ganà  (Jahna 
(Witik.  p.  215,  Leibn.);Strela,Boruz,  Cirin,  Misni  (Meissen) ;  Gori 
(Gohren),Mochowe(Mochau),Mogelini(Mugeln).  Hxcprovincia  ab  Âlbi 
nsqueinCaminizifluviumporrectaest  (Ditm.  1,5,  IV,  4,  V,  6,.22,VII,11^ 

9.  Beheimare,  in  qua  sunt  ciuitates  xv,  (B^mer)  babitantsda  pa 
Bobemia  :  Beehaimi  (Einb.  annal,  s.  a.  791),  Boemi,  Behem 
Boemanni,  Baemanni,  Bobemenses  :  natio  Sclavorum,  se  qualifia 

Lubaniz,  dit  le  dipl.  d'Otton  HI,  en  99S  in  continuât,  spicil.  ecclcs.  Lonigii,  p.  835.  —  Et  dans 
donation  à  l'église  de  S.  Maarice,  il  est  dit  :  in  regionibus  et  urbibus  ita  nominatis  Neletici ,  in 
est  ciuitas  quae  Guncanston  (Giebicbenstein  près  de  Hall]  nuncupatur;  altéra  regio  Neletici  (il 
a  deux),  ubi  est  Vurcine (Wurtcen  in  pago  Cliutici)  ciuitas;  Quieszici,  in  qua  inest  ciuitas UJ 
(Eilenburg  in  pago  Susali)  ;  Siusile  in  qua  est  ciuitas  Dolm  (Golmenz);  Zitici ,  quae  babet  ciur 
Zurbici  (Zorbig  in  pago  Colidiki);  Nudzici  ubi  incst  :  Vitin  (Wettin)  ciuitas,  et  ciuitas  Libnbocr' 
(Locbechin,Lebguiu,Locbejun)  yocata,  et  Zputinesburg  (Rotenburg  sur  Saale?).  Loponob  (Lepem  « 
Locbnitz?)  ciuitas  ctTrcbonisi  (Trebitz)  et  ciuitas  quae  dicitnr  Brandunburg  (Bcrnaburg?)  donaw 
atque  tradidimus  omnem  decimam.  dipl.  Ottonis  964,  apud  Lunig.  dcutsches  Archiv,  contm  i 
p.  344. 


SLAVU,   9.  â7 

ainsi  elle-même  dans  la  langue  latine ,  elle  est  composée  de  plusieurs 

peuples.  — A  Touest  se  sont  assis  et  construirent  leurs  siettes  (villages, 

selo,  sedlo,  siolo)  les  Scdlltschans,  provinda  Sedlic,  Sedlicenses 

(dipl.  1160,  1168,  1174.  ap.  Lunig),  Zed^ane,  Zedelec;  per  totam 

Bohemiam  etiam  Zedlicih  (dipl.  1088),  com.^  s'ils  fesaient  une  portion 

à  part.  £n  effet ,  ils  étaient  au  delà  des  nlontagnes  vers  les  sources 

d'Elster  et  terra  Sclavorum,  s'étendaient  jusqu'à  Bamberg  (dipl.  846, 

889)  (24).  —  Lucsaue,  Luczane,  qui  nunc  (1125)  a  modernis  vocitantur 

sateenses.  —  Lemuzi  usque  ad  mediam  sylvam  qua  Bohemia  Hmilatur 

(cosm.  p.  169),  on  pense  que  ce  sont  les  forêts  du  nord  (miriquida , 

Ditm.  VI9  8)  et  que  la  tradition  d'un  château,  Lemus,  indique  leur 

situation  dans  les  environs  de  Lovositz  :  Un  diplôme  morave  connaît 

aussi  Lemusi  (Dobneri  monum.  IV,  259),  et  les  forêts  Mure,  Âlemure 

sont  mentionnées  sur  les  frontières  de  Moravie  (Cosm.  Il ,  et  Lunig. 

contin.  1. 1,  p.  250;  donatio  civ.  Schinesg.  ap  Muratori,  antiq.   Ital. 

t.  Y,  p.  831).  —  Lutomerici  (dipl.  993),  provincia  Liutomericensis, 

Liutomiritz,  conserve  son  nom.  —  Psovane  ad  aquilonem,  castellum 

PsoY,  provincia  Slavonum,  qua  Pssov  antiquitus  nuncupabatur,  nunc 

a  modernis  ex  civltate  noviler  conslructa  Micinic  (Mielnik)  vocitatur 

(Christiani  leg.  de  S.  Ludmila),  autour  de  la  rivière  Pszowka.  — 

Decanane,  Dasena,  Daciane,  castellum  Dacin,  provincia  Decinensis 

(dipl.  1128,  1235, 1341).  Les  traditions  du  peuple  aux  environs  de 

FËlbe  conservent  encore  leur  réminiscence. 

—  Chorvati,  Horithi  :  ad  aquilonem  hii  sunt  termini  (episcopatus 
pragensjs)  Psovane,  Chorvati  et  altéra  Chorvati,  de  deux  côtés  des 
montagnes  (Riesengebûrge).  Ils  étaient  assez  distincts  dans  ces  siècles , 
parce  que  hormesta  d'Alfred  indique  spécialement  leur  position  : 
and  be  eastan  Dalamensan  sindon  Horithi.  il  parait  qu'ils  portaient  un 
antre  nom ,  parce  que  la  bulle  papale  du  monastère  de  S.  George  de 
Prag,  nomme  à  leur  place  Mocropsi  et  alîa  Mocropsi.  D'après  la  tradi- 
tion ces  Chrovates,  Charvates  arrivèrent  conduits  par  Czech  du  pays  où 
dominait  la  langue  serbe  (Dalemili  versus).  La  réminiscence  de 
l'existence  de  la  population  chorvate  se  conserve  dans  l'intérieur  par 
les  dénominations  de  quelques  localités. 

—  Dudlebi,  (établis  vers  580)  formaient  une  province  du  diocèse  de 

(24)  In  terra  Sclavorum,  qui  sedent  inter  Moinum  et  Radantiara  fluvios,  qui  vocaotur  Moin  winidi 
et  Ratanz  vrinidi  (dipl.  Ludov.  846);  Moin  vrinida  et  Radanz  vrioida  (dipl.  AruolG,  889);  tradidit 
cuidam  thuringo  in  finibas  Parathanorum  (paradomtor.)  ad  id  tcmporis  crudclium  paganorum  (vita 
s.  Emmer.  ap.  bolland.  t.  VI ,  p.  496).  —  Ut  paganismus  Sclavorum  ioibi  (  in  diocacsi  bamberg.) 
destrueretur(synod.  frankof.  4007);  erat  plebs  huius  cpiscopii  (vrucrzoburg.)  utpote  ex  maxima  parte 
sclavonica  (synod.  bamberg.  1058,  ap.  Ilarzbeim ,  III ,  136).  Totam  illam  terram  pêne  sylvam  esse, 
Sclavos  ibibabitare  (Arnold,  epp.  halborst  ad  Uenr.  cpp.  wuerzburg.  ap.  Ludewig,  scr.  bamb.  1, 1116). 


28  SLA  VIA,   9. 

Praga.  Autrefois  pla[;am  ad  ausiralem  contra  Tlicutonicos  orientale» 
has  urbes  habuit  terminales  :  Chynov,  Dudlebî,  Notolîezi  usque  ad 
mediam  sylvam.  Dudlabouscs  dt*  Dudcleb  sont  un  certain  temps  men- 
tionnés (dipl.  1088,   110^  1175);  aujourd'hui  il  n*en  reste  qu*ua 
village  Daudlebi  près  dt    3udweys,  entre  Nottelitz  et  Gheynow.  — 
Ces  peuples,  avaient  (haciiu  leurs  chefs;  comme  les  Leutschaniens^ 
de  même  Libitz,  Yiioiazi  ou  civitas  Wizlrachi  (Weitra,  Weitrach) 
(Ruodolli  fuld.  anq.  a.  827^  ap.  Pertz ,  1. 1,  p.  370),  Pschov  et  plu- 
sieurs autres  avaient  leurs  princes.  Pour  tous  ceux-ci ,  les  iadicatlon^ 
certaines  se  trouvent  dans  quelques  diplômes,  dans  quelques  mentions»- 
d*annales  et  de  légendes,  spécialement  dans  Thistorien  Cosmas  d^ 
Prag,   qui  écrivit  son  ouvrage  vers  1125;  la  nomenclature  locale 
8*est  effacée  sur  le  lieu  même  plus  que  quelque  part  de  Timmens^ 
Slavonie^ 

—  En  805,  parut  terra  Sclavorum  qui  vocantur  Beheîmi  (EinhardS. 
annal.;  contin.  annal,  lauriss.;  chron.  quedlimb.  ap.  Pertz,  1. 1, 182,  t«. 
III,  p.  41)  vocabanlur  Cinu  (Cihu)  (annales  tiliani,  16.  p.  223),  Cichis 
Windones  (chron.  moissiac.  p.  507).  Ils  étaient  conduits  par  Lecho. 
Cichu  est  évidemment  le  nom  de  la  peuplade  Gzech,  Tschekh  qui 
transpira    a   l'étranger.    L'expédition    franke   s'arrêta   à   Kamburg 
(Komornibradek  dans  le  pays  de  Loutschans)  et  dévasta  tout  le  pays 
jusqu'au  delà  de  l'Elbe,  parce  que   les  chefs  diversarum  gentlum 
s'étaient  réunis  pour  combattre.  Le  nom  de  Gzech ,  paraît  être  spécial 
à  ceux  qui  possédaient  Praga,  et  la  prépondérance  qu'ils  prirent 
ensuite ,  communiqua  la  qualification  de  Tschekhs  à  toutes  les  popula- 
tions du  pays  de  Bohême.  Que  la  poésie  ancienne  dans  le  dialecte 
tschckhique  (w  srbskim  iaziku ,  suivant  Dalemil)  et  dans  le  dialecte 
russien  (de  la  légende  de  s.  Yencesl.  et  do.  Nestor)  appelle  Tschekhs 
les  indigènes  de  Bohême,  il  n'y  a   rien  d'extraordinaire,  c'est  la 
conséquence  de  l'idiome  slave.  Ghez  quelques  écrivains  byzantins  ils 
sont  Kexioty  Ktéxot  (Chalcoud.),  Tçlxo*  (Cinnam.  p.  47). 

Marharii  habenl  ciuilales  xi  ;  and  aest  suth  (Syssyle),  ofer  sum  me  dael 
(très  loin,  dît  hormesta  d'Alfred ,  sont)  Marvaro.  Quoique  Moravia  était 
bien  connue  par  son  nom  (Einh.  annal,  s.  a.  822;  huila  Eug.  II,  826), 
cela  n'empêchait  point  les  écrivains  de  défigurer  l'appellation  de  ses 
habitants  :  Morahi  (Adam.  brem.  hist.  ecel.  (6G)  U,  15),  Marahenses, 
(annal  fuld.  s.  a.  871,  872),  Morawi,  Marauani  (contin.  scdus  annal, 
fuld.  s.  a.  895,  897),  Marabi  (ibid.  a.  899),  Morami  (Ademar,  s.  a.  822), 
Mararenses  (Ditm.  Vil,  42,  44,  54),  Maricrum  (id.  YI  60),  Rama  ' 
hanenses  (chron.  Saxo,  s.  a.  800)  etc.  Ils  étaient  appelés  de  la  rivière 
Morava  qui  tombe  du  nord  dans  le  Danube. 


SLAVU,  1  ».  29 

10.  Vulgarii  regio  est  inmensa  et  populus  multus  habens  ciuitates  y, 
et},  quod  mulliludo  magna  ex  eis  sit  et  non  sit  eis  opus  ciuitates  habere. 
Motre  statisticien  bavarois  pensc-t-il  des  Boulgarcs  ou  des  indigènes 
Slaves  qui  étaient  sous  leur  dépendance?  À^eniblerait  qu'il  réserve 
les  villes  aux  Boulgares  moins  nombreux  eti|u'il  indique  la  multitude 
seale  à  laquelle  il  ne  savait  donner  de  nom ,  comme  il  sait  nommer 
la  Moravie  qui,  avec  ses  50  villes  était  sous  la  môme  dépendance. 

Est  populus  quem  vocant  Merehanos ,  ipsi  habcnt  ciuilales  xxx  ;  et  ce 
peuple  était  de  la  dépendance  des  Boulgares.  Il  le  distingue  de  la 
sHultitude  qui  babiiail  le  pays,  regio  Yulgarii.  Ce  peuple  est  autre  que 
€3elui  de  Marharii  qu'il  a  déjà  indiqué.  11  y  avait  plusieurs  Moravie  qui 
prirent  leur  nom  de  la  rivière  Morava.  Celle  de  populus  Merehanus  qui 
liabet  30  ciuitates,  la  petite  Moravie  inférieure  boulgaro-serbe,  située 
autour  de  Morava  qui  se  perd  du  sud  dans  le  Danube;  elle  avait  son 
^vêque  au  concile  de  879  (Assemani,  kalend.  III,  158),  mentionnée  par 
Constantin  porphyrogenèle ,  sans  épilkète  de  petite  (de  cerim.  aulae» 
XI,  48).  Pomoravie  comme  rappelle  vers  1208,  s.  Sava  dans  la  biogra- 
phie de  son  père  (manuscrit . . . .)  mentionnée  souvent  dans  les  fastes 
gerbes  et  byzantins.  —  La  grande  Moravie  n  fieyàXrj  Uapaeia  (Gdnst. 
porpb.  de  adm.  imp.  15),  superior  Moravia  (manuscrit  cyrillique  chez 
>^ssemani,  VI,  255)  était  située  autour  de  Morava  qui  se  jette  dans  le 
Danube,  du  nord.  Son  nom  s'était  étendu  du  temps  de  la  puissance 
tfle  Sventoploug,  au  sud  des  Karpates  (où  était  Tévéché  de  Nilra)  et  sur 
conte  la  Pannonie  (du  diocèse  de  Sirmium),  ainsi  qu'il  y  avait  deux 
Moravies  supérieures.  La  version  latine  d' Assemani  du  manuscrit  cyril- 
lique n'est  pas  exacte  et  ne  rend  pas  le  duel  de  vischnii  Moravie 
(proloh  du  manuscrit  du  xiii*  siècle,  chez  Kalaîdowitsch ,  dans  son 
Jean  exarche  p.  10),  archiebiskop  wischnuiu  Moravu  (Job.  exarcbe,  90). 
^^  ces  deux  Moravies  supérieures,  l'une  était  la  Moravie  propre,  supra, 
^^   ^elà  du  Danube  pour  un  saltzbourgcois  (anon.  de  convers.  Garant. 
^P-    Kopîtar,  74);  l'autre  qualifiée  de  MopaSos  tHç  wawoviaç  (vita  S. 
démentis,   éd.   Pampereus,    p.   105;   catal.   archiep.   pannon.  ap. 

■^SSemanl^  111,  142),  xai  xaroexouae  ^èv  oi  Toùpy.ot  izépaOsv  tou   AavovCews 

«OTfie/4o5  eU  Tèv  rriç  Mopa6i«ç  yvsv  (Const.  porphyr.  de  adm.  imp.  42) 
'^^yex  dans  notre  atlas  la  carte  de  la  Slavonie  du  x«  siècle)  («s). 

^f^te  sunt  regiones  que  terminant  in  finibus  nostris.  Ainsi  termine  le 
^^ogfaphe  bavarois  sa  course  frontière  dans  la  description  des  pays  au 
^ord  du  Danube.  Nous  l'avons  suivi  sans  souci.  La  direction  qu'il 
**^Una  à  sa  perlustration  nous  a  conduit  sans  dévier,  elle  inspira  une 

^**)  Schaferjik,  antiquités  slaves,  UI,  50,  3;  IX,  42,  t. 


l-'** 


30  SLAYIA  y  10. 

telle  confiance  dans  notre  guide  que  nous  avons  cru  comprendre ,  qu 
ne  nous  entretient  que  de  populations  slaves,  qu'il  marche  régulièi 
ment,  observe  riuxtapositipn  des  peuples  et  qu'il  est  bien  averti  da 
le  dénombrement  des  rr^ons  et  des  villes.  Ce  n'est  cependant  q 
la  cinquième  partie  de  saMescription ,  les  quatre  suivantes  traitent  é 
peuples  qui  résident  iuxta  istorum  fines.  Le  bavarois,  dans  cette  long 
nomenclature,  observe- t-il  Tordre?  est-il  bien  averti?  s'enferme-t 
exclusivement  dans  les  populations  slaves?  pour  s'en  assurer,  de  gra^ 
incertitudes  se  présentent,  la  lumière  s'éteint  et  nous  ne  pouvo 
plus  avancer  sans  quelques  observations  préalables. 

Isli  sunt  qui  iuxta  istorum,  fines  résident.  Ceux  qu'il  va  énuméi 
sont  iuxta  frontières  de  ceux  dont  il  a  passé  la  revue.  Sont-ils  ini 
fines,  par  derrières  à  l'est?  ou  tout  à  côté  vers  le  sud  où  la  race  sla 
abonde?  Il  commence  : 

Osterabtrezi  in  qua  ciuitates  plus  quam  c  sunt.  Ce  sont  les  Obotrit 
danubiens  connus  chez  les  Franks  :  Abodriti  qui  vulgo  Praedenecei 
vocantur  et  contermini  Bulgaris  Daciam  Danubio  adiacentem  incoli 
(Einhard  s.  a.  825).  Ils  étaient  séparés  de  la  Moravie  inférieure  par  1 
Timociani,  établis  autour  de  la  rivière  Timok;  par  les  Guduscai 
Goduscani,  Cucievienses,  dont  les  possessions  montaient  du  Danu 
vers  les  hauteurs  de  la  rivière  Ipek  (tous  les  deux  mentionnés  p 
Einhard);  enfin  par  les  Braniceviens.  Les  ruines  de  leur  ville  Branicei 
Bransin  (ancienne  Yiminatium)  regardent  Kostolatz  au  confluent 
MIava  avec  le  Danube  (encore  en  1459,  cornes  Cucievieusis  et  Branic 
vensis  dans  un  diplôme).  Ce  sont  les  Praedenecentini ,  branche  d 
Oboirites  d'au  delà  du  Danube,  des  Obotrites  orientales,  Oster-Abtre 

Le  dernier  point  d'appui  que  nous  indique  le  bavarois.  —  A  par 
de  ce  point ,  il  nous  conduit  par  des  pays  perdus,  ce  n'est  qu'à  la  fin 
sa  description  qu'une  lumière  vacillante  commence  à  percer  pour  n< 
avertir,  qu'il  se  trouve  aux  environs  de  l'Oder  et  de  Sprée.  Or,  ne 
guide  per  plagam  Danubii  septentrionalem,  s'engage  par  derrière  ôm. 
course  frontière,  pour  revenir  sur  ses  pas  vers  la  mer  Baltique.  Et  p 
tout,  chemin  faisant,  il  connaît  le  nombre  des  villes,  l'immensité 
possessions.  Dans  les  15  régions  frontières  il  compte  509  villes;  d 
les  25  qui  sont  iuxta,  59G6;  dans  les  dernières  22,  seulement  292  vil! 
Pour  mieux  saisir  cette  étrange  différence  de  connu  et  d'inconnu  &% 
bitant,  nous  rangeons  en  table  ci- jointe  en  regard,  toute  la  statistii 
de  notre  bavarois. 


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52  SLATIA»  11. 

Examinant  cette  liste,  j^obsenre  quMl  donnait  ce  nombre  extraordi- 
naire des  villes  avec  conviction  qu*il  en  était  bien  informé,  parce  quMl 
termine  cette  énumération  en  remarquant  :  que  partout  il  y  avait  plus 
de  villes  qu'ailleurs,  TplusM  undique  quam  de  Enisa  ad  Khenutn.  Je  vois 
que  ce  undique  regarde  (v>  régions  iuxta  posées,  qui  se  distinguent  de 
celles  des  frontières  et  de  celles  qui  sont  de  Enisa  ad  Rhenum  ;  enfin  je 
pense  que  ces  régions  aussi  remplies  de  villes  forment  un  ensenoible  à 
part. 

Quelque  part  que  nous  voudrions  nous  tourner  avec  cette  multitude 
de  villes,  leur  nombre  paraîtrait  fantastique  si  Ton  voulait  les  prendre  à  la 
lettre  pour  des  villes.  Pour  sauver  la  bonne  foi  du  bavarois,  je  présume 
que  ces  ciuitates  et  nrbes,  ne  sont  que  des  communes,  villages  et 
hameaux.  Les  Slaves  comptaient  certainement  les  villages  de  leurs 
cantons,  relataient  le  nombre  exact  ou  exagéré  :  le  bavarois,  par  ces 
informations,  pouvait  être  surpris  dans  les  parties  moins  connues  et  ce 
nombre  de  villes  ne  dit  rien  de  positif  pour  retendue  du  pays;  et  ce 
nombre  trouve  à  droite  et  à  gauche  assez  de  terres  slaves  pour  disposer 
dans  un  certain  ordre  tous  ces  peuples,  dès  que  leur  situation  serait 
éventée. 

Les  mcmuments  historiques  des  Franks  et  des  Allemands  de  cette 
époque  paraissent  ignorer  Télat  intérieur  autant  de  la  Slavonie  au  delà 
de  la  Vistule ,  au  nord  du  Danube,  que  de  la  Slavonie  méridionale ,  an 
sud  du  Danube ,  où  toute  leur  connaissance  se  réduit  à  mentionner  les 
Kroates  et  lesSorabes,qui  magnam  partem  Dalmatise  obtinent.  Pour  un 
Bavarois  qui  cherchait  des  renseignements  sur  les  peuples  slaves,  ceux 
des  Kroates  et  des  Serbes  étaient  plus  intéressants  et  je  m'imagine , 
que  isti  iuxta  résidentes  de  sa  description ,  indiquent  les  cantons  ou 
zoupanies  des  Kroates  et  Serbes.  L'intitulation,  ou  plutôt  Tintroduction 
avertit  qu'il  va  décrire  les  régions  ad  septeutrionalem  plagam  Danubii, 
cependant  en  touchant  la  Yulgarie  et  les  Marehans  il  a  passé  au  sud  du 
Danube.  L'introduction  regarde  donc  le  commencement  de  la  descrip- 
tion et  ne  l'empêche  pas  d'examiner  les  parties  méridionales  :  il 
prévient  en  ciTet  qu'il  se  propose  d'énumérer  les  iuxta  résidens  des 
Vulgars  et  Marehans  qui  sont  an  sud  du  Danube.  Je  me  réserve  d*en 
donner  l'explication  dans  son  lieu,  et  je  vais  terminer  avec  le  géographe 
bavarois  la  revue  de  la  partie  Vinule  septentrionale. 

41.  Le  géographe  bavarois,  après  avoir  terminé  l'énumération  des 
peuples  iuxta-posécs  (au  sud),  se  transporte  brusquement  dans  les 
parties  Vînulcs,  où  tout  d'abord  il  signale  deux  peuples  au  grand 
nombre  de  villes. 


*  >. 


SLAVU,  il*  7^ 

Priêiiani  ciuitates  lxx.  Brisane,  Brîzane  (Helm.  I,  38>  80,  etc.)  (Prig- 

nitzmark). 

Velunzani  ciuitates  lxx.  Tiliai  (Adami  br.  bist.  eccl.  (64)  I,  9;  Helm. 

I,  2,  5),  sur  la  rivière  Welso  et  peut-étrejoar  TOder  jusqu'à  Wolin  > 
lalin  sur  mer.  ^ 

Bruzi,  (Bresow,  Brisow),  dans  le  cantoor^es  Ukranes  (Uckermark), 
tJehri  (Witik.  III,  p.  658),  Urkani  (chron.  saxo,  s.  a.  955),  Wokronia 
(annal,  bildeé.),  Yeroni ,  Yerani  (cbron.  quedl.;  annal.  Saxo),  VuYeri 
(dipl.  949). 

Plus  est  (ciuitatum)  undique,  quam  de  Enisa  (de  e  Nisa)  ad  Rhenum^ 
Nice  (Ditm.  YI,  16)  pagus  Nicciti  (dipl.  965,  ap.  Lunig.  contin.  p.  347), 
commence  iuxta  âprewam  et  enveloppe  la  rivière  Nisse,  Nisa,  Enisa.  — 
Dans  le  spacieux  pays  de  Heveldun  une  rivière  Dosse  communiqua  son 
nom  aux  Dosses,  Dosseri  (dipl.  946),  Dassia  (dipl.  949),  Doxani  (Âdami, 
br.  hist.  eccl.  (64)  II,  9;  Helm.  I,  %  5;  annal.  Saxo),  elle  décharge  ses 
eaux  dans  le  fleuve  llavel.  À  Test,  une  autre  rivière  passe  de  Rinsberg 
dans  la  même  direction ,  se  perd  dans  Havel  près  de  Rinnov  et  porte  le 
nom  de  Rin ,  Rien ,  Rhin.  C'est  donc  entre  ces  deux  rivières  qu'on  doit 
espérer  de  retrouver  les  peuples  suivants. 

Sud-ouest  entre  Havel  et  Elbe ,  on  avait  des  cantons  Lîgritze,..Lîezizî 
(dipl.  957,  946);  Zemzizi,  Zemclci  (dipl.  946,  949),  Zamzici  (dipl.  1161); 
et  le  plus  considérable  Morezini  iuxta  Magdeburg  (Ditm.  YI,  24), 
disputés  entre  les  diocèses  de  Brandebourg  et  Magdebourg.  Le  nom  de 
ces  derniers  engendra  d'innombrables  variantes  :  Morstan,  Moraciani, 
Horoszani,  Mortzani,  Mostefan,Mrocini,  Morescini,  Mrozini,  Mrozani,  etc. 
(Eccard ,  hist.  généal.  p.  49, 129, 156;  Meibom,  p.  741;  Lunig,  teutsches 
Reîchsarch.  contin.  p.  t.  Il ,  5,  4,  545;  Sagittar,  anliq.  magdeb.  45). 

Hayeldun,  qui  avait  les  Sorabes  limitrophes,  comprenait  au  sud 
Cervisti  avec  la  ville  Zirbisti  (Zerbst,  Ditm.  YI,  !24);  Ploni,  Bloni 
(autour  de  la  rivière  Plunen),  Zpriawani ,  Sprewa  ex  utraque  fluminis 
parte  quod  dicitur  Sprawa  (dipl.  965,  ap.  Bekmann,  Kurm.  Brand.  1. 1, 
p.  118;  fundatio  eppat.  ap.  Eccard,  p.  129;  Lunig,  t.  II,  p.  5).  — Par 
ces  parties  de  Sprewa  s'étendait  marca  Zaucha,  Zucha  jusque  dans  le 
territoire  de  Luzitzi,  pagus  Zitrici  se  trouvait  dedans  (dipl.  979,  ap. 
Eccard  p.  141, 142).  Plusieurs  localités  du  nom  Zaucha  attestent  que 
marca  Zaucha  s'étendait  jusqu'au  gau  Nisc.  Yenaient  ensuite  Selpuli, 
Zara.  Cest  par  ces  dénominations  que  cette  région  se  fit  connaître  au 
milieu  du  x™'  siècle;  le  géographe  bavarois  rapporte  sa  nomenclature 
antérieure. 

Le  bavarois  comparant  le  nombre  des  villes  de  peuplades  situées 

entre  Nisa  et  Rhin,  avec  la  quantité  immense  dans  les  possessions  des 
m.  3 


^4  SLAVIA»  11. 

peuples  qu*il  avail  énuméré,  fait  présumer  qu'à  la  suîlc  il  n'indiquera 
que  les  peuplades  enclavées  par  ces  deux  rivières.  En  effet,  la  plapart 
de  la  dernière  vingtaine  de  sa  description,  sont  évidemment  là;  mais 
il  a  plu  au  bavarois  d'intelirompre  sa  tournée  par  quelques  excursions 
à  Test.  fci 

Vuizunbeire,  inconnu.  L&  de  Weissenburg?  Witbrîtzen? 

Caxiri,  ciuitales  c.  Cotzyn,  Kethûr  près  de  Brandeburg;  Ketzin  sur 
Havel,  Kotzin  près  d'Âda  (se). 

Ruxzi. 

Forsderen,  Forsta  sur  Nisa,  et  Pforten. 

Liudi,  Ledeleben  sur  Spree,  Linde  slavica,  Wendisch  Linda  près  de 
lontribog. 

Fresiti,  Wreîtzen  sur  Oder,  et  la  rivière  Wrietzen  qui  s'y  perd  dans 
rOder. 

Serauici,  Zara  (Ditm.  VI,  21),  aujourd'hui  Sorau.  Provincia  Sarowe 
avait  une  extension  assez  considérable  vers  1501  entre  Slubbe  et  Bober 
jusqu*au  confluent  de  Quels.  —  Slubba  donna  le  nom  aux  Seipuli  et  à 
leur  ville  Sulpize  (dipl.  918,  968,  ap.  Lunig,  p.  96,  97;  Ditm.  II,  9, 
IV,  9,  VI ,  21).  —  Plus  au  nord  encore  sont  Leubusi  (Adam.  hîst.  eccl. 
II,  9;  Helm.  I ,  %  5).  Les  Allemands  y  édifièrent  ou  plutôt  agrandirent 
une  ville  de  leur  nom  :  Lebus  (Dilm.  I,  9),  Luibusua,  Libusua  (id.  VI, 
39,  48). 

Lucolane,  aux  environs  de  Lukau  et  Luckenwald. 

Ungare,  sur  la  rivière  Unker  qui  se  perd  dans  celle  de  Saar. 

VuUlane,he  eastan  Meroaro  lande  is  Wisleland ,  and  be  easlan  thacm 
sind  Datia ,  tha  the  in  vraeron  Gottan  (Alfr.  horm.).  C'est  la  Slavonie 
orientale  indiquée  par  son  ancien  nom  de  Daks.  Les  Gottes  y  séjour- 
naient et  : 

Dhonne  Hreada  hère  heardum  sweordum 

ymb  Wistla  wudu  wergan  sceoldon 

eaidre  edhel-stol  Aetlan  leodum. 

par  ce  temps  là ,  l'armée  à  dure  épéc  de  Reid  (goths),  dans  les  forêts 
de  la  Vistule,  s'empressait  de  défendre  l'antique  trône  de  l'état  contre 
le  peuple  (Hunum)  d'Attila ,  chante  le  poète  anglo-saxon  (Priée,  p.  28i» 
ap.  Schafarj.  VII ,  37, 4).  Dans  le  chef-lieu  de  Vislane,  Vislitza  sur  Nida, 
régnait  Vischîslav  ou  Vischevit  BouaseourÇes  (Constant,  porphyrog.  de 
adm.  imp.  33);  idolâtre,  il  persiflait  les  chrétiens  et  leur  jouait  de  mau- 


(M)  C'est  do  nom  de  Cazîri  qu*oo  pourrait  bien  tirer  Torigine  des  mots  :  kietzer,  pâchenr  ;  ki 
botte  de  pAcbenr;  kictz,  colonie  de  pâclieurs,  qui  sont  spéciales  à  Kidiome  allemand  de 
doboui^^. 


8LAVU|  il.  ^ 

^is  tours.  L^apétre  Méthode  depêdia ,  en  884»  uûe  missive  et  lui  dit  : 
baptise-toi  mon  fils ,  de  bonne  volonté  dans  ton  pays ,  car  si  tu  ne  le 
ferais  pas,  tu  serais  baptisé  dans  un  pays  étranger,  et  tu  te  souviendrais 
de  moi.  C'est  ce  qui  est  arrivé  (i?).  En  qÊme  temps  Sventopolk  de 
Moravie  fesait  une  expédition  contre  les  pa^s. 

Sleenxane  duilates  xv.  Nemetasi  (Nimtsch  en  Silésie)  postta  in  p^go 
Silensi»  vocabulo  hoc  a  quodam  monte  nimis  excelso  (Tschobota, 
Tschopfenbei^),  olim  sibi  indito  (Ditm.  VII ,  U),  Ciiensi  (idem  VI,  58). 
Les  Zlasanea  étaient  voisins  des  Mokropses,  Hrovates-tschekh. 

Lumizi,  ciuitales  xxx,  (Surpe  dans  hormesta  d'Alfred);  se  qualifiant 
euxHoaémes  de  Luzice  (Loujitze)  et  de  Serb,  Serbie.  Lunsinzani 
(Regino,  s.  a.  965, 1. 1,  p.  626),  Lusiki  (Witik.  a.  965),  Lusid,  Lusizi, 
Liicîsi,  Luiici  (dans  les  diplômes);  Lusîzî  (Ditm.  II,  9,  et  chron.  Saxo 
s.  a.  1081,  p.  245),  Luzici  (Ditm.  VI,  16,  24,  VII,  11),  Liudizi  (id.  V,  10. 
annal.  Saxo,  s.  a.  1002,)  etc.  —  in  page  Luzici  Dobrtluh  (Ditm.  VI,  16), 
Ciani  (Zinniz),  (îd.  VII,  11);  Mroscina  (  ),  ErothisU  (         ), 

Liubsi  (Lipten) ,  Zlupisti  (Laubus),  Gostewisti  (Kottbus)  (dipl.  1004,  ap. 
Escard.  hist.  généal.  p.  151)  etc.,  pays  spacieux  qui  contient  plusieurs 
ganes.  C'est  la  partie  intérieure  de  la  Luzace. 

Dadosesani^  ciuUaUs  xx,  Diedesesi,  Diadesesi  (Ditm.  (V,  28,  VII,  15), 
Diedcsi  (id.  VI,  50)  Dedosene  (limit.  app.  prag.  ap  Cosm.  p.  18).  De^ 
Milzani  on  y  entrait  par  Ilva  (Halbau)  pour  arriver  à  Krosno.  —  Entre 
)es  Diedesi  et  Silensi  se  trouvaient  Boborani  et  Drebowani  ou 
Trebowane  (limites eppatus  prag.  ap.  Cosm.  p.  18;  buUa  Greg.  papa;, 
ttionast.  S.  Greg.  in  Praga).  De  ces  derniers  aucun  vestige  ne  se  trouve 
sur  le  lieu.  Ce  nom  cependant  qu'ils  portaient  n'est  pas  rare  ailleurs. 
—  Les  Boboranes  avaient  leurs  possessions  autour  du  fleuve  qui  Bober 
dicitur  slavonice,  castor  latine  (Ditm.  VI,  19). 

Milzane,  duilates  jxx,  (la  haute  Luzace)  leur  ville  Budissin  (Ditm. 
V,  6,  VI,  11,  24,  VIII,  1).  Milza  (donatio  ciu.  Schinezghe  ap.  Muratorî, 
antiq.  Ital.  t.  V.  p.  851)  Milzeni  (Ditm.  T,  9),  Milcini  (id.  IV.  28), 
Ifiizieni  (id.  V,  10,  VI,  11,  56  etc);  Miziavia,  Milzavia  (Âdebold 
s.  a.  1002,  1005),  Milkiani,  Milzania  (chron.  Saxo  1004),  plus  tard 
Mîlsa  pagus,  Milesko,  Miltse. 

Bemnzane,  duilates  n.  Dans  l'année  1015,  Oudalrik  duc  de  Bohême  ; 
l^arvint  avec  son  contingent  jusqu'à  la  ville  Businc  et  ne  put  opérer 
sa  jonction  avec  l'armée  impériale  qui  ravageait  le  pays  au  delà 

{VI)  Poganesk  knçz'  silcn  welmi  sicdç  w  Wislech ,  rogaszç  sç  christianom  i  pakosti  dicjaszç. 
l^oclawsek^nemu  (Methodius)  recze  dobro  ti  sç  by  krestiti  synu,  woleJQ  swojcjana  swojcj  zemli;  da 
Be  plouen,  nodini  kreszczen  badeszi  na  czuzej  zcinli  i  pomcnçszi  mç.  Jese  i  byst  (vita  s.  Method.  dans 
1«  moskiritiamo,  t.  HI,  p.  430  journal  édité  à  Moskou  par  rhistorien  Polevoj). 


r  > 


36  SLATIA»  1i. 

de  roder,  limitrophe  de  Diedcsisi  (Dîtm.  VU,  11,  15),  or,  Buntzlau 
répond  à  Businc. 

Verizane,  ciuitates  x,  sur  Sprée  Fehra  près  Peitz,  Were,  non  loin  de 
Lubbcn.  j*- 

Fraganeo,  ciuilales  xl.  \/en  d*anaIogue.  Serait -il  possible  de  pri- 
mer que  Fragan  suggéra  Tidée  aux  Allemands  de  donner  le  nom  de 
Frank-furt  à  une  ville  odérane?  (ou  Dragan  près  de  Wittenberg?) 

LupigltM ,  duitates  xxx.  La  rivière  Lupa  se  perd  dans  celle  de  Mlssa. 

Opolini,  duilalesxx.  Si  Ton  me  dit  qu'ils  portent  e^  indiquent  le 
nom  d'Opole  de  Silésie  je  ne  puis  guère  contredire  :  mais  Tordre  que 
le  bavarois  observe  empêche  à  mon  avis  de  sortir  si  loin  du  cercle  étroit 
dans  lequel  il  tourne.  (Selpuli?). 

Golensizi,  ciuitates  v.  Golsen  et  la  rivière  Golza  qui  se  jette  dans 
Sprée. 

La  description  dtJ  géographe  bavarois  est  ainsi  terminée  (ss).  Elle 
compte  parmi  les  pays  frontiers  ceux  des  Boulgares  et  de  la  petite 
Moravie;  or,  elle  est  antérieure  à  la  date  de  rétablissement  définitif  des 
Madiars  (897-907)  dans  la  Moravie  supérieure  méridionale  ou  danst 
Tancienne    Pannonie.    Les  Allemands   ravageaient  les   population» 
Sorabes  très-profondément,  les  évéques  et  les  markgraves  y  exerçaient 
déjà  leur  autorité,  aussi  la  description  se  montre  très-bien  renseignée  x 
mais  plus  loin  vers  la  Yistule,  au  delà  de  ce  fleuve  il  n'y  a  que  Ylslane^ 
ensuite  un  vide.  Si  même  on  voulait  s'y  établir  avec  les  5966  cités  deas 
peuples  îuxta  résidents  on  n'en  profiterait  pas  beaucoup,  on  n^avanoe — 
rait  pas  la  question. 

Ghrobates,  Serbes. 

12.  La  petite  horde  avare ,  composée  (vers  550)  de  20,000  combat;- 
tants,  entrant  dans  la  Slavonie  évacuée  d'autres  étrangers»  trouva  1^: 
populations  slaves  secouées,  inquiètes  et  fluctuantes.  L'inquiétud 
indécise  augmenta  lorsque  la  horde  grandissant,  commença  à  étend r 

(28)  Â  la  fin  de  la  description»  dans  le  manuscrit,  sont  encore  inscrites  en  petit  caractère  de« 
notes.  On  pourrait  douter  si  elles  appartiennent  au  géographe  mcroe.  Sueui  non  mnt  nali  ^* 
seminati  :  jeu  de  mois,  de  scmino,  parce  qu'ils  sont  très-nombreux.  —  La  seconde  note  :  Beire^ 
dicuntur  Bauarii,  sed  Boioarii  a  Boia  flwvio,  sachant  que  le  nom  -vulgaire  de  Ba-varois,  Beire  et  rm  it 
rendu  en  lalin  par  Bavarii  ou  Boioarii ,  elle  réprouve  le  premier  et  recommende  le  second  com^oiae 
provenant  du  fleuve  Boia.  Peut-être  c'est  aussi  un  jeu  de  mots,  et  que  fluvius  couvre  la  valenr     «3e 
boia,  collier  du  carcan.  —  Le  savant  Schafarjik  admettent  que  Beire  sont  lesBoulgars  et  Wr«'«3a»- 
Beire  les  Boulgars  blancs,  donne  une  toute  antre  explication  à  cette  note  finale.  Suivant  son  opim.*-^» 
la  note  bavaroise  dit,  qu'on  ne  doit  pas  les  Beire  (Boulgares)  qualifier  doBauarii  (Bavarois)  ncs ait 
Boioarii  de  la  rivière  Boia,  qui  est  la  rivière  Buy  qui  se  jette  dans  Vialka ,  et  cette  dernière  »^Bt 
Volga.  "—  l'ne  petite  rivière  Boîte  se  jette  dans  Tiaue  près  de  Piauc  di  Cadore  non  loin  de  Bav A  ^î* 


SLAVIA»    IS.  37 

ses  Te3UiUons.  Chaque  hiver  elle  fesait  faire  des  tournées  pour  extor- 
quer le  tribut  des  peuples  soumis.  Les  populations  slaves  se  virent 
(depuis  560  et  578)  exposées  à  servir  en  qualité  d'alliées  ou  de 
sujettes,  dans  toutes  les  rapines  et  expédions  avares ,  ou  forcées  de 
les  entreprendre  d'après  leur  ordre  paf^ elles-mêmes,  {Menandri 
excepta;  script,  byzant).  La  domination  avare,  contrariée  par  la 
résistence  des  peuples  qui  défendaient  leur  indépendence ,  sévit 
contre  les  vaincus.  Les  Doulèbes,  de  ce  nombre,  subirent  un  joug 
oppressif  et  humiliant.  Chaque  Avare  violentait  impunément  et  quand 
il  lui  plaisait,  attelait  à  son  char  les  femmes  et  les  filles  doulèbes. 
(Nestor  11,  Schlôtz.  II,  121).  Les  populations  en  désespoir  s'émurent 
et  émigraient. 

Les  Doulèbes  avaient  dans  leur  voisinage  les  Boujans  (Buianc), 

appelles  ainsi  de  la  rivière  Boug.   Eux-mêmes  occupant  un  pays 

spacieux   autour  du  fleuve  Stir,  où   s'élevait   leur  ville  Loutzk, 

(Dlugos,  p.  49)  habitaient  aussi  les  deux  rives  du  Boug  (ziwiachu  po 

Bugn)  (Nestor,  II,  112)  et  leur  possession  s'étendait  probablement 

jusqu'à  Vistule  et  San.  Leur  nom  disparut  de  ces  espaces ,  cédant  aux 

autres  cultivateurs  connus  ensuite  sous  le  nom  de  Volyniens ,  (ninie 

UwLt  Yotiniane,  Nestor,  II,  121),  et  de  Chrobates.  Les  Doulèbes  eux- 

iDémes  reparurent  en  Bohême  déjà  occupée  par  d'autres  slaves,  où  ils 

s'établirent  dans  les  parties  méridionales  et  construiront  leurs  villages 

à  Test  de  Bloldava,  dont  une  grande  quantité  reçu  les  appellations 

qu'avaieut  lies  villages  abandonnés.  (Cet  événement  a  pu  arriver  vers 

l^année  580)  (io). 

Ce  que  j'ai  dit  de  l'établissement  des  Doulèbes  paraîtra  une  hypothèse 
tH>ar  ceux  qui  font  remonter  le  peuplement  de  Bohême  à  de  temps  plus 
anciens  :  mais  leur  assertion  serait  non  moins  hypothétique  s'ils  vou- 
^^ient  fermer  la  porte  de  Bohême  trop  de  bonne  heure  pour  les  autres. 
t^  colonisation  s'accomplit  consécutivement.  La.  colonisation,  par  de 


(S9)  La.BohènM  eft  pleine  de  nom»  identiques  aipec  ceux  de  Pologoe.  Sovs  oe  rapport  cependant 
^«lelqao  chose  de  spéciale  se  déclare  pour  les  Doulèbes  :  A  l'est  de  Holdawa,  au  sud  de  Sazava,  à 
'^«ntoar  deTabor  se  trouvent  :  Biela,  Borowsk,  Chlnm^Czieskow,  Dobra^itz,  Domanin,  llostin, 
l^ureschao-,  Krasna-hora»  Lomtfitz,  Lakau,  Lulrawetz,.  Prtschitz,  Ratkow,  Rekscbitz,  Rositscb., 
^«mosty»  Sedletz,  Seltscban,  Woïslawitz.  De  même  entre  Boug  et  Vistule  dans  le  palalioat  do 
t.iibliii  et  la  terre  de  Kbélm  on  a  :  Biala,  Borow,  Chelm,  Czyszkov,  Domanitze,  Dombrowica,  Hostinno, 
,  Krasno-brod  et  staw,  Lomazy,  Lukow,  Lnkowek,  Parczew»  Retb>w,  Rçczale,  Rososz, 
\  Siedice,  Siedliszcze,  Woïslawice ,  et  beaucoup  d'autres.  A  l'ouest  de  Moldava,  rien  de  sem- 
t^lLable  ne  se  présente  plus.  —  La  même  portion JDoulebe». fournit  ea.Boh(^me  les  noms  de  Stiepanow 
ClStepan'  sur  florin),  Dobrawitz  (s.  Horin],  Slawîn  (Slawuta  s.  Ilorin),  Radinow  (Ratno],  Rositsch  et 
1R.otsetsch  (Roziszcze  s.  Stir),  Radomisl  (en  Volynie  et  s.  San);  San,  Sudomirzitz  (Sadomirz,  Sando- 
aVkirx),  PrxemysIaT,  Brod  (Brody),  Zrutsch  (Zbrucz),  Kamenitz ,  Bukowsko,  Zbraslaw,  Sucbdol,  Zablot, 
r,  Doklek,  Bediin,  et  autres  qu'on  troa^a  Ters  les  Karpates  en  Pologne,  Russie  rougo. 


58  SLATUy  fS. 

petits  trains  de  caltivateurs  innommés,  connus  par  leur  i^pellatlos 
générique  de  Vendes,  s*opérait  lentement;  pour  une  colonisation 
nationale  il  faut  un  événement;  elle  ne  distilla  pas  goutte  à  goatte, 
ordinairement  elle  se  coifVnme  à  la  fois.  La  Bohême  peuplée  par  ces 
deux  sortes  de  colonisation,  contient  plusieurs  assiettes  nationales  dont 
celle  des  Doulèbes  est  une  de  plus  prononcées.  Pour  elle  il  (Saillait  un 
événement,  Tbistoire  en  présente  un,  il  n*y  a  pas  lieu  dMnveiiter  nn 
autre.  Elle  dit  que  les  Doulèbes  subirent  Toppression  dans  lent 
ancienne  patrie  et  ne  dit  point  qu*ils  y  fussent  exterminés.  L'apparition 
successive  des  Doulèbes  est  trop  compacte  pour  n'être  pas  la  consé^ 
quence  ou  d*unc  double  existence,  ou  d*un  déplacement  par  quelque 
événement.  Cette  dernière  solution  me  parait  très-certaine.  Le  gros  de 
la  nation  reparut  eu  Bohême  accompagné  probablement  de  Chrobates 
qui  voulurent  partager  son  sort.  La  nation  se  déplaça  en  entier,  à 
peine  voit-on  quelque  fraction  séparée.  Doudleipa  se  fait  remarquei*  en 
Pannonîe  (anon.  deconv.  Carant.;  dipl.  891),  et  en  906,  les  Doulèbes 
se  trouvaient  dans  Farmée  russe  (sofijski  virrem.  izdan.  Stroleva,  20; 
Schlôuer,  II,  p.  252). 

II  est  probable  que  d^autres  populations  fuyant  la  tyrannie  des 
vainqueurs,  se  retiraient  avec  moins  de  succès  vers  Toccideût,  quand 
on  y  voit  leurs  noms  nationaux  éparpillés,  sans  pouvoir  se  concentrer. 
Car  si  l'on  a  tant  d'apparence  et  presque  certitude  que  les  Doulèbes  se 
retiraient  devant  les  Avares,  il  faut  absolument  convenir  que  plusieurs 
autres  peuples  moins  importants  suivirent  leur  exemple  et  quand  on 
voit  le  nom  des  Stodors  et  de  Sousls,  Susles,  à  droite  et  à  gauche 
heurter  les  frontières  occidentales,  au  nord  et  au  sud  des  Doulèbes,  on 
peut  je  pense  admettre,  que  les  Stodors  et  Sousls  sortirent  à  la  suite 
^es  mêmes  vicissitudes  des  mêmes  régions. 

Les  Stodors  s'arrêtèrent  dans  le  plie  de  Ravela  (so],  et  les  Sousls  sur 
l'Elbe.  Mais  l'écho  de  leur  malheur  retentit  dans  les  vallées  de  la 
Karintie  montagneuse.  Aux  environs  de  la  rivière  Stîr,  qui  donna  le 
nom  à  la  Stirie,  se  trouve  in  parte  Slavornm  au  pied  de  la  montagne 
Priel,  un  canton  der  Stoder  (Yorder  und  lïinter  Stoder  bey  Windisch 
Garsten);  ailleurs,  près  de  la  montagne  deTriglau  (Triglav,  triade)* 
au  sud  des  sources  de  la  Save ,  une  vallée  de  Stoder.  —  Au  sud  de 
Grati  on  a  un  Saqscl,  les  vestiges  indélébiles  des  Sousls  (dipl.  Falzbur* 
gensia  970, 1045);  sur  Yps,  qui  traversait  les  possessions  des  Yinnles 
du  terroir  Siaviuia,  on  construisit  castellum  où  locus  vocatur  Zuisila 


(30)  Ooy  voit  :  Ratenov»  Ezcn.  PloU,  RetzoT,  Steppin,  Lippe,  et  dans  la  PolIsi«  ToljoieuM  Mut 
connu  :  Batoo,  Exero,  Ploski,  Raïracsc  et  RastOT,  Stepau%  LipOTo. 


SiATIA»  iS.  39 

(dlpl.  979).  —  Les  compagnons  des  peuples  brisés  et  dispersés,  les 
Cbrobates,  avaient  aussi  leur  pagus  Crauvati  (dipl.  954,  978,  entre 
Leubacb  et  Knittelfeld).  Ils  venaient  d*au  déjà  des  Karpates,  grossir  les 
populations  laborieuses.  ^ 

13.  Les  vainqueurs,  poursuivant  maintefois  la  retraite  des  peuples, 
essayèrent  de  pénétrer  plus  loin  jusqu'à  la  mer.  Le  succès  qu'ils 
pouvaient  obtenir  n'était  ni  durable,  ni  constant.  Ils  appelaient 
cependant  les  plus  paisibles  à  s'associer  à  leur  brigandage  (591  )• 
(Simokata  V,  5,  Tbeoph.).  Après  la  défaite  et  la  retraite  des  peuples» 
la  résistance  des  autres  ne  discontinua  point.  Les  Cbrobates,  qui 
habitaient  la  grande  Ghrobatie,  la  Chrobatie  blanche,  de  l'autre 
côté  les  Serbes  qui  venaient  de  la  grande  Serbie  ou  la  Serbie  blanche , 
venaient  au-devant  pour  arrêter  l'ennemi,  pour  le  détruire.  Les 
^^nes  des  Ddulèbes  ne  cessaient  point  d'être  le  champ  de  bataille  et 
de  combat  (Ixnki,  bojki),  où  les  armes  à  la  main  les  nations  allaient 
décider  de  leur  sort  :  ainsi  que  le  champ  de  combat  bôjki ,  situé  à  l'est 
de  Chrobatie  et  au  nord  des  Tonrks  (Madiars)  devenant  patrie  commune 
lies  peuples  qui  se  répandaient  à  l'ouest  et  au  sud ,  et  gagnant  de  la 
"enommée,  fut  connu  chez  les  étrangers  par  son  nom  slave  /Souee, 
roiro»  /Socx(  pols  boïki  :  ce  sont  les  Slaves  eux-mêmes  qui  le  qua- 
ifiaient  ainsi ,  tra^  aurot«  /Soïxc  tqtcov  Iiroyo/ucç6/t<vov  (Constant,  porphyrog. 
le  adm.  imp.  52)  (si). 

I>e  la  Ghrobatie  blanche  et  des  monts  Karpates  sortit  vers  630  /iia  ik 
•cveà(  une  tribut,  en  se  dirigeant  vers  la  Dalmatie,  dont  les  ruines 
tiaient  possédées  par  les  Avares.  Après  de  longs  combats  les  Avares  y 
"tarent  détruits,  le  reste  assujéti.  La  colonie  des  Cbrobates,  Kroates 
prospéra  et  grandit  (Const.  porphyr.  de  adm.  imp.  30). 

Quelques  années  plus  tard  (634-636)  une  portion  des  Serbes  Se^6Aoc 
originaires  de  la  Serbie  blanche ,  qui  habitaient  le  champ  boïki ,  se 
proposa  de  chercher  un  établissement  dans  l'empire.  On  leur  permit 
i^occuper  les  vastes  provinces  à  l'est  et  au  sud  de  la  Dalmatie, 


(M)  le  penie  f|ttO  c'-est  la  plus  tlmple  explication  qu'on  pvlsso  donner  an  lien  de  boïki.  Quel  est 

le  8Uto  qnl  se  comprendrait  pas  bcg  combat,  guerre,  bô^ek  Taillant,  btiiar  guerrier,  Imjka  lutte, 

combat.  —  On  donnait  le  nom  bojki  à  l'épëe  de  combat,  comme  on  voit  par  un  passage  de  l'historien 

Hattiée  évèque  de  Krakov.  «-  Dans  le  boïki  de  Constantin  porphyrogènete  on  a  cm  de  reconnaître 

■i  Bohême ,  mais  Scbafarjik  a  raison  de  rejeter  cette  explication.  Dans  les  montagnes  des  Karpates 

existe  une  population  de  montagnards  qui  porte  le  nom  de  Boïki,  il  suppose  leur  vaste  étendue  dans 

lea  temps  anciens  dans  uno  région  à  laquelle  ils  donnèrent  le  nom.  Supposition  difficile,  il  serait, |e 

pense ,  plus  simple  d'admettre,  que  cette  petite  population  apporta  ce  nom  du  champ  de  bataille  ou 

«Ile  s'étidt  distinguée,  en  se  retirant  dans  les  montagnes.  —  Aifoc  Ions  ceoi-ci ,  que  le  wtont  Sdia- 

fai|ik  me  pardonne,  Ditùke  et  Vistole  n'ont  flen  de  commun. 


40  8LAVIA,    ii. 

dépeuplées  et  désertes  à  la  suite  des  rava^  des  Avares.  Les  Serbes  s*y 
mnliiplièrent  et  se  trouvant  en  voisinage  avec  les  Boulgares,  se  virent 
forcés  de  disputer  les  terres,  rarement  encore  cultivées  par  de 
laborieux  Slaves  dans  la  Moravie  inférieure  (Const.  porphyr.  de  adm, 
imp.  52).  V 

En  attendant,  les  guerres  avec  les  Avares  continuaient  dans  la 
Slavonie.  Ils  étaient  exterminés  dans  les  possessions  Kroates  et  Serbes; 
an  delà  des  Karpates  ils  ne  pouvaient  plus  rien  entreprendre  contre 
les  indigènes  organisés  :  leur  domination  cependant  bien  que  restreinte 
dans  la  Pannonie  et  dans  une  portion  de  la  Karintie ,  ne  cessait  point 
d*étre  formidable,  d'opprimer  et  d'inquiéter  les  voisins  indépendants,, 
contre  lesquels  ils  armaient  leurs  frères  soumis.  Dans  les  combats  ils 
poussaient  ces  derniers  en  avant,  en  les  qualifiant  par  dérision  de 
bis-appuie  (béfulci),  parce  que  les  Slaves,  en  première  ligne,,  ne 
pouvaient  pas  reculer,  ayant  par  derrière  les  Avares,  et  en  cas  de  â 
dernière  nécessité  avaient  leur  secours.  Les  enfants  Avares,  procréa 
de  femmes  et  filles  Slaves,  furent  enfin  révoltés  de  ces  procédés  et 
voyant  fes  exploits  de  Samon  (jusqu'à  658),  prirent  les  armes 
(Fredegar  48).  Après  tant  de  guerres  prolongées  depuis  deux  siècles, 
les  Avares  furent  à  la  fin  vaincus  et  presque  extermines  en  799.  Une 
poignée  de  leur  population  confinée  au  confluant  nord  de  Morava  avec 
le  Danube,  s'éteignit  lentement  comme  la  flamme  d*une  lampe  e 
disparut  :  périt  comme  des  Obres,  dont  il  n'y  a  ni  génération  il 
descendant,  répétait  le  proverbe  Shve  (Nestor  10). 

14.  La  destruction  des  Avares  poursuivie  avec  tant  de  succès,  ouvn 
la  Slavonie  méridionale  à  Taggression  des  Franks.  Ils  occupèreic 
(vers  791)  les  deux  Pannonies,  Tlstrie,  la  Libournie  et  la  Dalmat": 
(Kroate)  (Einh.  viia  Karoli,  ap  Perlz.  1. 1,  p.  AM) ,  pénétrèrent  jusqw. 
Femboucbure  de  Sava  où  Sirmium  reçut  le  nom  de  Frankoehoric: 
(Nicet.  cboniat.  ad  a.  1123, 1153,  p.  10),  et  proche  de  celui-ci  Btidali<: 
fut  appelé  Frankavilla  (Ansbert.  ad  a.  1189;  ensuite  Nagyolas  ^ 
Madielos).  Les  Kroates  subirent  ce  nouveau  joug.  Leur  soulèveme^. 
sous  Ludewit  (818-822)  n'avait  pas  de  succès.  Les  Franks  fesai^i 
main  basse  sur  les  vaincus ,  égorgeaient  leurs  enfants  et  les  jettaiei 
aux  chiens.  Un  autre  soulèvement  sous  Porin,  avait  plus  de  suco 
(vers  850).  Les  Kroates  divisés  en  deux  portions  amies  (Chorba^ 
savia  ou  siscia  et  dalmatica) ,  organisèrent  un  état  flottant  entre  Fis 
fluence  de  Téglise  grecque  on  latine.  (Einh.  ;  Gonst.  porphyr.  ;  tm 
Uludov.;  annal,  fuld.;  Fredegar  72;  vita  s,  Eusicii,  ap.  Bouqa^ 
t.  III,  429). 


SLA  VIA,  14.  41 

lies  Boulgares  profitaient  des  embarras  des  Franks  et  s'empa- 
xalent  (827,  829)  des  pays  aux  environs  de  Frankocliorion  (Einh...) 

Cq  même  temps,  un  autre  rempart  s*éievait  contre  l*aggression 
franko-allemande,  dans  la  grande  Moravk  (836-898).  Rempart  un 
œrtain  temps  formidable ,  qui ,  malgré  s£^.hule ,  arrête  le  progrès 
allemand. 

f^endant  ces  secousses  prolongées,  les  Kroates  et  les  Serbes,  quoi* 

<ru*ils  se  sont  baptisés,  soutenaient  des  relations  avec  leur  mère-patrie 

k-baptisée ,  avec  la  Ghrobatie  et  la  Serbie ,  qu*ils  qualifiaient  de 

ou  blanches.  La  situation  de  la  première,  souvent  mentionnée, 

^^t  Jt>icn  connue  :  elle  s'étendait  au  nord  des  Karpates  et  longeait  les 

I^Pties  montagneuses  vers  TËlbe.  La  seconde  est  moins  déterminée. 

C®    Kà*est  que  par  Torgane  des  Serbes  eux-mêmes ,  qu'on  savait  qu'elle 

^'^it    rHi  Tovpxicci  exsiôev  au  delà  des  Madiars,  par  conséquent  au  nord* 

^^     ^ux  environs  du  Dniestr,  ofioioti  xai  4  fisy^^^i  Xp<aBaxia,  où  est 

aus&i    la  grande  Ghrobatie  (Const.  de  adm.  imp.  52).  Cette  Serbie 

aoïào    8*accroche  à  la  grande  Ghrobatie,  elle  forme  quelque  chose  de 

^^ïïaiogène  avec- elle;  elle  compose  sa  partie  orientale.  On  ne  peut 

^^usitlérer  la  qualification  de  la  grande  Serbie  qu'une  appellation 

S^^^rîque  d'une  souche  qui  se  distinguait  par  horvate  et  serbe  (sa). 

Noxio])stant  cette  distinction,  dans  la  Kroatie  et  la  Serbie  dalmates, 

^^^tes  sortes  de  Slaves  allaient  s'établir.  Geux  des  pays  Boulgares, 

Tiixiokans,  Koutschans  trouvaient  un  refuge  chez  eux  (Einh.  s.  a.  818; 

^ast.  porp.  32,  ad  a.  954)  ;  les  Serbes  se  retiraient  en  difierentes  occa- 

sioits  dans  les  possessions  des  Kroates  (sous  Zacharias  entre  924-934); 

^^    environs  de  la  rivière  vistulane  a«tç<x>î  Ditzike  (lisez  Nitzike, 

Widzîtza)  du  pays  non  baptisé  (de  la  grande  Ghrobatie),  arriva  (885) 

^^e    tribu  ^  ysvca  une  génération  du  fils  rou  ûo&  toD  BevaeSourç?}  de 

Jischevit  (chef  de  Vislitza),  s'établir  sur  le  fleuve  Zakhloum,  et  lé 

7^  baptisé  Michael  régnait  dans  le  canton  Zakhloum  (Gonst.  porphyr. 

^   ^dm.  imp.  55;  légende  de  S.  Méthode,  dans  moskvitianin ,  t.  III, 

^l  -^SO).  Par  celte  fluctuation  prolongée,  les  deux  pays  et  leurs  zoupa- 

^^^     augmentaient  en   population;  ils    pouvaient  faire  sortir  des 

^"ïi^es,  entreprendre  des  expéditions  maritimes,  peupler  de  leur 

^Uohe  variée,  les  villes  latines,  où  l'on  distinguait  les  Dalmates  et 

'^)   Cestla  grande  Skonf,  Skoufla  (Skytlii)  des  Grecs  suivant  Nestor  (chap.  7, 17).  —  C'est  à  tort 

^  ^^  ^  Toula  interpréter  la  Serbie  blanche  par  la  Sorabie  de  l'Elbe  :  cette  dernière  n'est  au  delà 

Tourks,  mais  au  delà  des  Ckrobates.  Si  dans  le  langage  do  Constantin  la  Serbie  blanche  est  limi^ 

^^^«  à  la  France,  c'est  que  l'archonte  des  Chrobatcs  était  sujet  du  roi  de  France ,  et  la  Serbie 

^^^^e  indépendante.  —  Au  reste,  remarque  très  bien  Schafarjik,  que  Constantin  parle  con- 

r^^*^^«iit  de  Chrobates  et  Sorbes  non  baptisés,  et  de  boiki  non  baptisé,  quand  il  ne  pouvait  pas 

***^v  que  la  Bobème  ot  les  Sorabes  de  l'Elbe  furent  chrétiens  depuis  longtemp  s. 


42  sâÂViA,  u. 

les  Slaves  (fidrki  Y,  S).  Dans  la  Serbie  se  formaient  des  nuaDoes 
d^idiomes  de  différents  cantons;  elles  sont  beaucoup  plus  prononcées 
dans  la  Kroatie  :  entre  les  Morlakbs,  Honrates  et  presque  Serbes  ters 
le  sud.  j^ 

Leurs  pays  étaient  dpsés  en  cantons  qui  s'appelaient  ]o«paii, 
zoupa ,  zoupy,  zoupanie,  et  le  chef  de  chacune  iupan,  zoupan.  Chez  les 
Kroates  on  accepta  le  titre  avare  de  ban,  pour  un  chef  à  part  d'une 
province  plus  considérable.  Mais  ces  joupanies,  par  une  espèce  de 
fédération,  formaient  une  unité  qui  avait  souvent  un  joupan  général» 
grand  joupan.  Parmi  toutes  ces  petites  provinces  on  ne  voit  pas 
d'autres  dissensions,  que  celles  qui  décidaient  de  la  dignité  d'an  Joupan, 
elles  se  prolongeaient  lorsque  l'intérêt  dynastique  s'en  mêlait,  favorisé 
par  la  marche  de  la  civilisation  et  par  la  suprématie  étrangère. 

La  division  en  zoupanies  n'était  pas  constante,  elle  changeait 
mainte  fois,  avait  de  sous-divisions,  et  il  n'en  manque  pas  d'obscures 
qui  n'ont  jamais  figuré  dans  l'histoire.  Si  donc  nous  acceptons  que  le 
géographe  bavarois,  dans  le  dénombrement  des  peuples  jnxta  résidants, 
annotait  les  cantons  des  Serbes  et  Kroates  :  nous  ne  devons  pas  espérer 
de  trouver  leur  conformité  avec  la  division  postérieure  comme  elle  est 
connue. 

15.  Nous  avons  interrompu  la  revue  de  sa  description  an  commen- 
cement des  peuples  qui  juxta  fines  résident  et  dont  les  premiers  sont 
Qslerablrexi,  in  qua  ciuitates  pltts  quam  c  mnt,  et  nous  avons  vu  leur 
position  de  deux  côtés  du  Danube,  c'est-à-dire  des  Obotrites  orientaux 
ou  Predenecentins,  Branitzovlens.  (Voyez  dans  notre  atlas  la  carte 
de  la  Slavonie  du  x*  siècle). 

MUoxi,  in  qua  ciuitates  Lxvn.  Quand  Je  vois  an  nord  du  Danube 
Moliza,  au  sud  près  de  la  rivière  Mlava,  Milesovitsch  ;  à  l'ouest  de 
Morava  Milatovtze;  prèsde  Sabatsch,  Milovilo  :  je  n'hésite  pas  d'ad- 
mettre, que  les  Miloxi  habitaient  presque  le  même  territoire  que  les 
Branitzoviens.  Sans  vouloir  infirmer  cette  explication,  je  ferai  remar- 
quer qu'on  trouve  dans  les  ancienne  cartes  (de  succès,  de  Homman)  à 
l'est  [de  Fokia.  s.  saba  de  Milosevo,  et  dans  cette  contrée  existent 
Millinovo,  Millovistch,  dénominations  qui  ne  se  répètent  pas  en 
Serbie. 

Pheznuzi^  hahent  ciuitates  Lxx.  Hea^vra,  tirant  le  nom  de  Vezenta 
montagne  au  nord  de  Jaîtza  (Kroatia). 

Thadesi,  plus  quam  ce  urbes  hahent.  La  rivière  Zermagna  chez  les 
Romains  s'appelait  Tedanius;  l'autre,.  Chercha,  était  nommée  Titius, 
(Kroatia]L 


8LATU»  15.  43 

Glopmmifinqua  cMtaks  ggcg,  oui  eo  ampUus.  xXMivx  Cloania 
(dipl.  893) ,  Livno  dans  HerUegovine  (Kroatia). 
Zuireani,  habent  ciuUate$  GGcxxY,,Zara,  Jadera  (Kroatie). 
Busani^  habent  ciuitales  ccxxu.  x^pî»  Bjsaiva,  qui  grandil  eosuile 
sons  le  nom  de  Bosnie.  ^ 

Sitid^  reffio  immensa,  papulis  et  urbibus  munitmimis,  La  Kroatie 

formait  d*abord  deux  états,  dont  un  au  nord  ayait  Siscia ,  Sissel^  pour 

capitale  :  on  pourrait  donc  présumer  que  r^o  Siiici ,  plaine  de  cités , 

désigne*  celte  portion.  Mais  une  autre  interprétation  se  présente  par 

les  zoupanies  connues  dans  l'autre  Kroatie.  —  Elles  étaient  au  nombre 

de  quatorze ,  dont  les  trois  premières  formaient  un  banat ,  à  savoir  : 

r«uTÇ«ixâ(,  sur  les  rivières  Gatsk  et  Gaschiitz;  A^rça  Likha,  Lika; 

tptëxcoc,  Corbaustuci  (dipl.  1078),  Corbavia;  N^va,  autour  de  la  rivière 

îedanios,  Zermagna;  ^lâpoLya,  Sidraga  terra  (dipl.  1050, 1069,1073, 

iiS5)  circuit  de  Belogradon;  TviAva,  Knin  sur  Kerka;  K6va,  Âenona, 

•Nin,  delà  péninsule;  BpsBipa,  Berberistici,  Breberstiti  (dipl.  1069, 1078), 

firibir  sur  Bribirstitza;  napce6a>a9(r<a,  Primorîe  entre  Kerka  et  Cettignia; 

HcacvTffy  Yezenta;  nitëaj  Plieva,  Pliva  sur  Pliva;  'Ufioran^  Imota  sur 

le   lac  imotski;  x^«6<«va,  Livno;  enfin  T;^vTÇi7va,  Ceiinensis  cornes 

fdipl.  1066, 1076,  1078)  autour  de  la  rivière  Tilurus,  Cettina.  Cette 

dernière  zoupanie  répond  aussi  aux  cités  de  la  région  Sitici.  —  Mais 

lAOi  de  cités  remparées,  accompagnées  de  516  villes  voisines,  me  font 

ooorir  dans  les  régions  plus  spacieuses  vers  la  rivière  Sitnitza  : 

S^osition  mémorable  dans  les  fastes  serbes.  Elle  tamise  ses  eaux  (dit 

nom)  à  travers  les  cailloux,  et  se  jette  dans  Tlber  où  était  la  clef 

la  Serbie  du  côté  de  Fempire.  Près  de  Mitrovitz  on  voit  les  ruines 

Zvetschan,  Sphentzanium ,  petit  bourg  bien  fortifié,  et  plus  haut 

XULplana  conserve  les  restes  de  Tancienne  Lipenium,  tons  deux  placés 

^  rentrée  de  la  Serbie ,  près  d*une  chaîne  de  montagnes.  La  capitale 

Idte  la  Serbie  n*était  pas  trop  éloignée  de  cette  situation. 

Siadicif  in  qua  eiuitate$  bxvi  ,  f>opulu8que  infinitus.  Par  ce  peuple 
SvifinI,  et  indéfini,  je  passe  vers  le  nord,  pour  descendre  successive* 
VAéiit  vérd  le  sud. 

Sehhiroxit  habent  eiuitates  xc,  dlvlslt  provincias  et  regiones  regni... 
Sd^nndtim  cursum  aquarnm,...  aquas  vero  quae  fluunt  in  magnum 
^damen  Donavi  (inter  Sava  et  Drin)  vocauit  Sumbra  (Diocleas,  ap. 
X^Jacsey.  app.  p.  fi),  Semberla. 

VnliÉÎf  pôpuluê  muUitê,  ciuitatee  occxvm.  Rivière  Unna  et  la  ville 
"Oiiatsch  (Kroatia). 

jferlmil  habeni  eiuUaiee  Lxxvm.  Fleuve  Orontius  ou  Naro  dans  Tantî- 
^|fdté»  Heretva,  Karenta,  près  duquel  au  pied  des  montagnes  la  ville 


44  SLAVIA,  19. 

Naresii,  Neret  formait  une  Zoupanie  de  la  Podgoria  (pied-mont)  (DiocL 
ap.  Luc.  p.  295).  Mais  les  fameux  Pagani  étaient  aussi  appelés 
'AjcevTcxvoc,  Narentes,  de  leur  fleuve  Naretva,  Narenta. 

Aitorozi  habent  cxLYm,  pppulus  ferocUsimus,  La  férocité  des  Narentans- 
paganiens  était  assez  a«3ditée ,  parce  qu'ils  ne  voulaient  se  faire 
baptiser.  De  leur  zoupame  Mokron  sortaient  les  flottes  qui  protégeaient 
les  îles  (ostrovy)  qui  étaient  en  leur  possession ,  et  semaient  Tépouvante 
par  la  mer  adriatique.  Dans  cette  zoupanie  près  du  Mokron  maritime 
au  sud  se  trouve  *0(jrpuxj  Ostrog(dipl.  1078, 1108),  Zaostrog,Zaostroie^ 

Eptaradici  habent  ciuitates  cQuai ,  'Paardirça,  Raztok,  zoupanie  de 

Narentan? 

Vuillerozi  hdbent  ciuitales  clxxx,  BspoùlXta^  Yroulia  martime»  att 
nord  de  Mokron  dans  sa  zoupanie. 

Zàbroci  habent  ciuitates  ccxii,  la  grande  île  Bpstri^rn  Brazza,  en  posh 
session  des  Narentes? 

Znetalki  habent  ciuitates  Lxim.  La  partie  méridionale  de  Serbie, 
appelée  Dioklea  ou  Doukla,  enclavait  dans  son  intérieur  un  canton 
situé  aux  environs  de  la  rivière  Zelta,  dont  le  nom  Zenta,  Zêta,  Zentana, 
se  communique  à  Dioklée  entière. 

Aturezani  habent  ciuitates  cnu  xAtrrpov  rh  *Paov(r(ov,  Raguse ,  apparte- 
nait encore  à  Tempire  ;  'Pîorevoc,  Resinum ,  Risan  dans  la  baie  de  Katera^ 
se  trouvait  déjà  en  possession  des  Serbes ,  dans  la  zoupanie  de  Terbou- 
niates. 

Chozirozi  habent  ciuitates  ggl.  Aexarefïa,  Cattaro,  Kotor  de  la  zoupanie 
Zente  ou  Dioklea. 

Lendizi  habent  ciuitates  xcui.  A6vro,  Lunta,  Luncza,  Linda,  Lonto,  de 
la  zoupanie  Diokleane. 

Thafnezi  habent  ciuitates  cclvii.  Aeev^x,  Tessen,  Teszan,  Deschan, 
entre  Ussora  et  Bosna?  —  On  a  aussi  Aearcv^xov  capitale  de  Serbie, 
qu'on  suppose  Trsztenit  d'aujourd'hui;  peut-être  Detschiani  sur  la 
rivière  du  même  nom  qui  se  jette  dans  Drin  blanc. 

Zeriuani ,  quod  tantum  est  regnum ,  ut  ex  eo  cuncte  génies  Sclauorîm 
exorte  sint,  et  originem,  sicut  affirmant,  ducant,  La  description  du  bava- 
rois, quand  elle  indique  un  pays  spacieux  par  son  nom  général,  n'entre 
plus  dans  les  détails  de  son  intérieur  :  par  contre,  quand  elle  énumé- 
raît  les  détails,  elle  n'avait  pas  l'occasion  de  mentionner  le  nom  général. 
Or,  dans  l'énumération  des  peuples  iuxta  résidents,  le  nom  général  des 
Kroates  est  pour  sûr  passé  sous  silence.  Mais  le  géographe,  en  détail- 
lant les  petits  cantons  de  Luzitzi,  n'a  pas  négligé  de  spécifier  leur  nom» 
avec  la  réserve  d'un  certain  nombre  de  villes.  La  même  spécification 
parait  avoir  Heu  pour  la  Serbie  dans  cet  empire  de  Zeriuani,  Serviani, 


Senrians,  Serbiens,  Serbes,  qui  est  si  grand  que  suivant  l'affirmation 
(des  Serviani  eux-mêmes),  tons  les  Sclaves  sortirent  de  leur  pays  et  en 
tirent  leur  origine.  Les  Serbes  se  disant  venir  de  celte  commune  patrie, 
dite  Serbie  blanche  et  conservant  son  nom^ouvaient  être  considérés 
par  le  bavarois  à  Tinverse  pour  la  souche  ^a  race.  Mais  il  ne  donne 
pas  de  nombre  de  villes,  le  pays  des  Serviani  chez  lui  est  sans  limites, 
indéfinissable,  patrie  commune;  or,  toute  la  Slavonie  orientale,  qui 
lui  sert  de  transition  dans  les  parties  vinules,  où  sa  description  va 
recommencer  rénumération  interrompue  des  peuples  in  finibus  nostris, 
fiar  les  Prissani,  Brizani  à  Tembouchure  de  Havel  :  comme  nous  avons 
examiné  (ss). 

16.  Pour  expliquer  la  nomenclature  du  géographe  bavarois,  nous 
avons  eu  recours  à  la  relation  de  Constantin  porphyrogenète;  elle  seule 
nous  fournit  Teusemble  qui  dessine  Tétat  des  Kroates  et  Serbes.  Con- 
stantin raconte  que  de  son  temps  la  Serbie  avait  été  Impitoyablement 
€lévastée  par  les  Boulgares ,  qui  conduiront  les  populations  captifs  et 
les  établirent  chez  eux.  Ce  n'est  qu'après  quelques  années,  954,  que 
TTscheslav  a  pu  penser  à  la  restauration  de  Télat.  Les  fugitifs  rentraient 
^ans  leur  pays  et  Tscheslav  restituait  Tordre  et  Tancienne  division. 
Cette  dévastation  n'a  touchée  que  très-peu  le  littoral,  où  se  distin- 
guaient quatre  régions  serbes. 

Les  Narentans  'Ape^n&voiy  paganiens,  itayayoi  6i  xoLlowrat,  formaient 
une  république  à  part,  divisée  en  trois  zoupanies,  dont  celle  de  AaAiv 
(antique  Delminium),  vallée  Dlmno,  Doumno,  Donvno,  est  intérieure  ; 
les  deux  autres  maritimes  :  'Pa7Tci»rÇa  (l'étang  Raztok),  avec  la  ville 
AaS^vcTÇa.  Labena(dipl.  il05);et  Uoxpov  (Makarska),  contenant  Ostrok et 
Terullia.  Les  paganiens  possédaient  de  très-belles  îles  au  nombre  de 
quatre  :  Bratzo;  Kourkoura  ou  Kike;  Fara;  et  Meleta  ou  Malozeata 
(Gonst.  porphyrog.  de  adm.  imp.  50,  56). 

(33)  Scbafarjik  distinguait  aussi  dans  les  Zerivani  les  Serviens ,  mais  d'une  toute  antre  fiaçon  :  il 
s'efforce  de  déterminer  leur  assiette  positive  en  Litvanie.  —  Quant  aux  autres  peuples  dn  bavarois, 
son  explication  est  radicalement  différente  do  la  mienne.  Il  les  divise  en  slavons  et  non-slavons. 
Pbesnaci  sont  Petzenchi  ;  Bruszi ,  Proses  ;  Wizunbeiri,  Boulgars-blans  (voyez  la  note  28);  Caziri 
Slioiares  ;  Forsderen  et  Liudi ,  de  la  race  finoise.  —  Avec  la  liste  des  autres  reconnus  slaves ,  il 
parcourt  toutes  les  espaces  entre  Sala  et  Volga  pour  confronter  leurs  uoms  avec  les  dénominations 
géographiques  qui  se  repètent  d'un  bout  à  l'autre  et  quelquefois  il  opte  parmi  ces  indications  pour 
fixer  un  peuple  dn  bavarois.  Ainsi  pour  leur  habitation  Glopeani  trouvent  les  Kolps  dans  le  gouver- 
nement de  Novgorod  ;  Zwirani  un  lac  Swir  en  Litvanie  ;  Sittici,  Zitomir  ;  Stadici  la  Podolie,  Sebbirozt 
un  lac  Sebira  dans  le  gouvcracmcnt  de  Petcrsbourg  ;  Willerozi ,  une  rivière  Bnlera  en  Kourland  • 
Zabroxi,  le  za-porohy  des  kozaks;  Attarozi  les  Turocz,  Turia,  Turzisk  etc.,  de  la  Polisie;  Thafnezi, 
«ne  rivière  Tanev  en  Pologne  ;  Ncriuane,  Narcv  en  Mazovie  ;  Busani,  Boug  et  les  Boujans  ;  Lucolane, 
Lukoml  dans  la  Russie  blanche;  Velunzonie,  Vielan'  en  Pologne  ;  etc.  etc.,  et  Verizane,  Fraganeo, 
sont  Heverenofelda,  Fergunna ,  position  trop  allemande.  —  Peut-ôtre  je  me  trompe  dans  mes  expli- 
cations compacte  :  mais  ce  que  Schafarjik  propose ,  n'est  pas  trop  rassurant. 


46  SLAVIA,  i6. 

La  principauté  âo6  Zakhloumes  4  kpxoixUt  rSm  ZaxXoôfUà^  s'étendait 
au  delà  de  Narenta  jusqu'à  Raguse,  divisée  en  dix-neuf  zoupanies.  Sur 
une  montagne  s'élevaient  deux  villes  Bona  ot  Chium,  et  les  habitants 
avec  le  pays  furent  appdés  Zacblum  (au  delà  de  Chlum).  La  partie 
maritime  ^tait  nommée ^aîna  (région,  plaine);  intérieur  podgena 
(pied-monl)  dans  laquelle  se  trouvait  les  villes  Neret  et  Rama.  Depuis 
que  Michel,  iils  de  Wischevit  s'était  établi,  Zakhloum  n'était  pas  toujours 
dans  une  bonne  intelligence  avec  la  Serbie  (54). 

Une  autre  principauté  Terbounia  ou  Trabounia,  rsp^owOxy  Tpaîm^a^ 
Treuvunia  (dipl.  1195-1250, 1254,  etc.),  (Trebigne  sur  Tribinschitza 
divisée  en  neuf  zoupanies,  portait  aussi  le  nom  de  KavaA^  à  cause  qat 
la  lisière  maritime  était  ainsi  appelée  (ss). 

Enfin  Ât6x>cce,  se  prolongeait  de  Dckatera  (Cattaro),  par  Ântîbari 
Helkynion ,  Elisso,  jusqu'à  Dyrachion.  La  ville  Dioklea  (Doukla)  situ^ 
sur  le  confluent  de  Moratcha  avec  Zetta  ;  celte  dernière  a  communiqu* 
son  nom  à  la  province  (se). 

C'est  au  delà  de  ces  quatre  provinces  que  la  Serbie  dévastée  sV 
de  nouveau  oi^nisée.  Elle  avait  peu  de  villes  habitées,  Kâmpa  elxov/it^^^ 

rb  ÀeoTcv^xov,  t6  TÇepvocSouffxiv,  rb  tleyupérovi  rb  àpsiTvshfi^  rb  Âsav^x  ro  2aAs/ 

dans  toute  espace  depuis  Drin  noire  jusqu'à  Sava.  Ses  frontières  hei 
taient  Ibar;  Sitnitza  n'était  pas  dans  sa  possession;  au  nord  sur  1 
frontières  de  Kroatie  se  distinguait  /uptov  hàsava  contenant  les  vi& 
rb  Kàrepcc,  xae  rb  Âeorviid  (Coust.  porph.  52)  (st).  Le  pays  sc  pouplaiv.  « 
se  dépeuplait  par  une  population  mobile  et  alimentait  l'élément  de 
sa  grandeur  future,  secondé  par  sa  race  mobile  de  pâtres,  qui  promo* 
naient  leurs  troupeaux  jusqu'à  Thcssalonique ,  dont  le  thema  reçni  le 
nom  de  Serblia. 

La  Morava  inférieure,  bien  que  sujette  aux  Boulgares,  avait  son  ctft«f 
qui  recevait  les  ordres  de  Byzanze,  comme  les  chefs  des  Chrobat^^, 


(Si)  Constattlin  (cbap.  53),  compte  au  nombre  des  villes  habitées  :  Bona»  Chlum, 
Mokriskik,  losle,  Galumacnik  et  Dobriskik.  —  Le  diokleate  (ap.  Luc.  édit.  4666,  p.  893),  nomiB<^  lei 
soupanies  suivantes  :  dans  Podçoria,  zupania  :  Onogoste,  Moratia,  Comerniza,  Piua,  Gerico,  Netot  oûaI, 
Guisemo,  Debreca ,  Neret  et  Ramma  ;  dans  Cherenania  (kraîna)  :  juppaniae  :  Stantaaia ,  Piv>ana, 
Vabsco,  Lucca,  Vellica ,  Gorimita  (Vclicagor,  Imita ,  ap  Peiacsev,  p.  06),  Veceuike  (Vecserigp»''(n)» 
Dubrava  et  Debre. 

(38)  Coostantin  (cbap.  34),  compte  entre  les  villes  habitées  :  Terbunia,  Hormos,  Rhisena,LnkA^te 
et  Zetlebe. — Le  diokleate  (ap  Luc.  p.  293)  nomme  jupaniae  :  Lihomir,  Vetanica,  Rudina,  Graw^v^mf 
Urmo,  Ressena,  Draceviza,  Canali,  Gemoviza. 

(36)  Constantin  (cbap.  35),  nomme  les  grandes  villes  seulement  chez  les  Diokleates  :  Grado^^M 
s  Grade ,  Lonto  et  Dokla.  —  Le  diokleate  (ap.  Luc.  p.  Î93),  compte  :  Zcntae  regio....  et  wp*«ïi»  : 

Lusca,  Padiugiae,  Gorska,  Cupelnicb,  Obliquit,  Propratna,Cremeaiza,  BuduacumCacevaetGiriptli. 

(37)  Dans  la  Serbie  intérieure ,  se  firent  connaître  de  bonne  heurs  :  Budinil ,  Decaevallan  ITiet- 
chitza),  Golis  (sur  la  montagne  Galitschi  près  Tscbatscb);  Longomiros ,  Logomir;  Scmberity 
Subria  ;  banatus  Machovieusis,  Macsna  provincia  Blatschva. 


SLAVU»  17.  4T 

St  Zakhloums,  Kanales,  Trabouns  et  Diklcaô  (Const.  porphyrog. 
3in.  aulœ,  II,  48).  Les  pays  nltra-montains  ne  cessaient  d'attirer 
veSy  qui  se  plaisaient  à  séjourner  et  à  s'établir  dans  les  zagories. 
3édoîne  depuis  trois  siècles  était  pleine  de  leurs  populations.  Les 
Uratf  A^ouyougîrac,  Apoyoué^rat,  DvLTgqfpady  établis  Sur  la  rivière 
ritza  en  Thrace ,  demeuraient  dans  les  hauteurs  de  la  Macédoine 
mir  au  pied  du  mont  Justendjil,  connus  depuis  669,  877). — 
^me  temps  se  faisaient  connaître  :  Baiowi^rac  (Baîna,  Vaina  près 
dovitz);  —  layovSarotf  habitants  les  plaines  de  Thessi^onik;  — 
otf  établis  sur  les  rivages  de  la  mer  (près  de  Rondino);  — 
Uy  Baçv]T(a(,  assez  puissants  quelque  part  dans  Tintérieur.  —  A 
:  ces  peuples,  dans  la  zagoria  de  Rilo  et  Rodope,  s'assirent  ifiolsvot 

iâOO,  jusqu'à  Melenik).  —  Toute  cette  partie  de  l'empire  fut 
;e  aux  Slaves,  les  vallées  de  Pologos,  Pelagonie  dépourvues  d'ha- 
i  y  servaient  de  pâturage  à  leur  troupeaux  (voyez  les  écrivains 
ins). 

\  au  sud,  autour  du  golfe  Volo  (Pagasens  sinus)  cultivaient  le  ter- 
cXeyeÇ^rae.  Dans  la  Morée,  JiLtXviyyoi  xai  'EÇepirocc  inquiétaient  quel- 
j  (vers  850,  940)  cette  presqu'île  (Gonst.  porph.  de  adm.  50).  — 
)ms  nationaux  acquirent  de  la  renommée  parmi  les  populations 
,  qui,  diminuant  ou  grossissant  d'après  les  circonstances,  inon- 

l'empire.  Ces  noms  allaient  s'éteindre,  la  race  continua  plus 
mps  à  dégénérer  par  la  fusion  avec  les  indigènes  grecs. 

Je  vais  terminer  la  revue  de  la  Slavonîe  du  x"*«  siècle,  par 
len  d'un  fragment  qui  nous  reste  de  la  relation  arabe  de  Massoudi. 

arabes  se  formafent  l'idée  de  l'existence  de  la  Slavonie  par 
vestigations  faites  à  cet  effet  et  par  des  communications  directes* 

géographes  déterminaient  sa  position  et  l'étendue.  Ibn  Ketir  le 
lien  (vers  950),  désignant  les  pays  de  chaque  climat,  place  la 
lie  dans  le  vn'"^,  d'où  elle  s'étend  au  delà  de  ce  climat  vers  le  nord 

9,  p.  59  de  redit,  de  Golius).  Massoudi  compte  l'étendue  de  la 
lie,  5500  parasanges  en  longueur  et  420  parasanges  en  largeur 
Deguigne,  notices  et  extraits,  1. 1,  p.  54)«  Ibn  Haoukal  (vers  977) 
(  seulement  2  mois  de  chemin  à  la  Slavonie,  du  midi  au  nord  et  de 

l'ouest  (p.  6).  Tous  y  enclavent  la  Russie  et  ne  la  séparent  point,. 
i  Abou  Ishak  l'istakhrien,  parce  qu'il  ne  désigne  spécialement  la 
e  dans  le  dénombrement  général  des  régions,  ni  dans  son  aperçu 
al  des  distances  (p.  i-4);  tous  ne  distinguent  aucune  région 
entale  à  la  Slavonie,  qui  s'étend  jusqu'à  l'océan,  comme  ils  distin- 
;  ailleurs  les  Roums,  les  Franks,  les  Espagnols  (Massoudi,  p.  %7> 


A 
48  SLAYUy   17. 

Âbou  Ishak  p.  i-4).  En  effet  nons  verrons  que  différentes  provinces 
d'Allemagne ,  et  rAllemagne  entière,  est  enfermée  dans  la  Slavonie, 
par  ces  relations  des  arabes. 

Massoudi  (mort  en  957)^t  un  des  anciens  écrivains  arabes  qui  s^est 
préoccupé  avec  intérêt  dâ||felaves  et  de  leurs  affaires.  Il  est  probable 
quMl  est  le  seul  qui  prit  le  soin  de  réunir  les  relations  à  ce  sujet.  Les 
autres  après  lui  se  négligeaient  ou  répétaient  subrepticement  de  qnll  a 
dit.  L'istakbrien  Âbou  Ishak  et  le  bagdadien  Ibn  Haoukal  ne  nons 
apprennent  rien. 

Les  ouvrages  de  Massoudi  ne  sont  pas  publiés^  ce  qu'il  y  a  sur  les 
Slaves ,  n'est  connu  que  par  deux  extraits  d'un  ouvrage  plus  considé- 
rable, extraits,  dont  un  moins  complet  se  trouve  dans  une  note  da 
résumé  de  l'ouvrage  de  Massoudi,  fait  par  de  Guignes  (p.  27);  l'antre  « 
plus  complet  est  inséré  dans  la  compilation  de  relations  arabes,  eonh- 
posée  par  D'Ohsson^  sous  le  titre  de  voyage  (ûctif)  d'Abou  el  Gassim» 
ou  des  peuples  du  Caucase  et  des  pays  au  nord  de  la  mer  noire 
(cbap.  5,  p.  85). 

Le  plus  nombreux  des  peuples  Skiabes,  dit  Massoudi,  est  celoi 
qui  s'appelle  ^l&S^  à^\b^  Louza'îet,  Louza'na,  Loudzana,  Loud- 
bana.  Il  va  trafiquer  jusqu'en  Audalous,  à  Gonstanlinople  et  chez  les 
Khozars.  Ce  sout  les  Loutzaniens  de  Loutzk  sur  Stir.  Ils  avaient  des 
relations  avec  Gonstanlinople  par  Eiiov,  et  l'embassade  des  Slaves, 
en  955,  au  khalif  de  Kordoue ,  et  le  nom  de  Ncmctz  (Aschkenaz)  connu 
en  Espagne,  confirment  l'existence  antérieure  de  relations  slaves  avec 
l'Espagne.  Les  Loutzaniens  pouvaient  y  prendre  leur  part ,  ou  bien 
l'écrivain  arabe  se  plaît  à  concentrer  et  emboîter  dans  Loutzk  ce  qui 
était  commun  aux  autres  populations. 

Les  autres  nations  skiabes  sont  AJl^la^t  ^j^L^!  Istabouana  ou 
Istnbrana,  dont  le  roi  actuel  s'appelle  JiHiLo  ^jU^  Saklaîdjiou 
Saklandji.  La  lecture  Istabrana  est  pré^  (érable^  et  sans  doute  plus 
certaine,  car  elle  nous  donne  le  nom  des  Obotrites,  Abotrites  (Einhardi 
annal,  s.  a.  818,  822,  S2A)  :  oiientalium  Sclavorum,  id  est  Abotritarum, 
qu'on  appelait  Oster-ablrezi  (géogr.  bavar.)  Ist-abrana,  Est-abrata.  Ils 
avaient  leurs  possessions  au  nord  du  Danube.  Cette  explication  d'Esta- 
brana  est  corroborée  par  les  noms  de  leurs  voisins,  relatés  par 
Massoudi. 

Ces  voisins  sont  de  l'autre  côté  du  Danube ,  au  sud  du  fleuve.  Enm 
premier  lieu  ^^Ls^ly  Brandjabin.  Ce  sont  les  Praedecentini  de^ 
latins,  Branitzoviens,  Bransins,  assis  aux  environs  de  Mlava,  comm»:. 
nous  l'avons  vu.  —  Ensuite  ^Li<k  Khaschanin,  Guduscani  de= 


SLAVU»  17. 

fetins,  Kôutschani.  -—  Enfin  les  ^ou^  Serbin,  plas  éloignés  Ser- 
bieqs.  Les  Serbin  sont  très-redoutables  ;  cependant  ilis  relèvent  d*an 
empire  voisin  (byzantin).  Ghe2  les  Serbin,  lorsque  le  tù\  meurt,  plu- 
sieurs de  ses  sujets  se  brûlent  avec  son  co|ps  et  Ton  fait  aussi  i^rii^ 
ses  cbevaux  dans  les  flammes.  —  Les  Sei^niens  s*étant  établi  sur  les 
terres  de  Tempire  romain,  se  reconnaissaient,  à  Hnstar  des  autres 
peuples  dépendants  de  Tempire. 

Les  Kroates,  situés  à  Foccident,  sont  nommés  par  Massoudi  #^*|jipL 
Kharvatin,  ^b11^(^p  ^^  ben  Gorion,  HpoocTtot,  K/^aêarac,  x^«>eaTec, 
:3Lop€arot  dcs  Grecs.  —  Plus  loin  sont  les  t^jK^  Morava. 

Quelque  part  se  trouvent  les  ^L^  ^^  MenaliouMenabin,  dont 
le  roi  s'appelle  ^^a^^Jj  Zentobir  (De  Guignes  les  appelle  Menani  et 
leur  roi  Rantbir).  —  Peut-être  c'est  une  notice  inconnue  pour  les  antres 
histoires  :  mais  voici  ce  qui  pourrait  être  applicable  à  Tinterj^réiatiojS 
des  noms  arabisés.  Blastemir  régnant  heureusement  en  Serbie,  et 
mariant  (vers  8i0)  sa  fille  à  Kraïnan  fils  de  Bêla,  zoupan  trebuonien,  lui 
conféra  le  titre  d'archon.  Ge  titre  passa  à  Falimir,  fils  de  Kraînan ,  et 
à  Tzutzemir,  fils  de  Falimir.  Le  nom  de  Ti;ouri;rjfitpoç  ne  difiere  pas  trop 
dé  Zentobir,  Tzen  tomir,  et  comme  les  Trebouniens  furent  appelés 
Kanale  :  ils  sont  les  Menale  de  Tarabe. 

Massoudi  connaît  les  ajÛj^  Douleba  (Doulaîah  chez  De  Guignes), 

dont  le  roi  s'appelle  v^^Lo    J)^  Vandj  Slava  (Thala  chez  De  Guignes). 

Les  Doulèbes ,  nous  Tavons  ^  vu ,  s^établirent  en    Bohême  :  plagam 

^Uiaustralem  (dioecesis  pragensis),  contra  Teutonicos  orientales  has 

Mrbes  hahuit  terminales  :  Chynov,  Dudlebi>  Noldici,  usque  ad  mediam 

^Ivam  (dipl.  ap.  Gosm.  prag.  p.  54).  Les  possessions  des  Doudlèbes , 

IV)alèbes  s'étendaient  sur  les  frontières  de  Bavière  (dipl.  1088,1175, 

*^pud  Schafarjik,  VIII,  40,  2).  Qr,  les  Doulèbes  composaient  le  nouvel 

^tat  des  Tschekhs  (Bohême),  dont  le  duc  (946-929)  était  Vatslav,  Yen- 

^esîav,  Vandj-slava.  Massoudi  en  est  bien  informé. 

Nous  nous  sommes  prévenu ,  qu'à  cette  celte  époque  les  Arabes  ne 

^  isting^aaient  pas  les  Allemands  des  Slaves.  Or,  Massoudi  compte  au 

Nombre  des  nations  slaves,  celle  des  Allemands  aussi.  Il  dit  que  les 

I^las  beaux  des  Slaves,  les  plus  nombreux  et  les  plus  formidables  sont 

l«s  N-*Jy  Tourks.  Chacun  y  voit,  qu'il  parle  des  Madiars,  Hongrois, 

appelés  Tourks  par  les  byzantins.  De  même  comme  ces  Tourks  étran- 

^rs,  il  amalgame  aux  Slaves  les  ctranj»ers  Allemands.  Les  Slaves 

appellent  dans  leur  idiome  un  Allemand,  Niemelz,  et  en  général  tous 

les  Allemands  Nicmtzi.  Cette  appellation  passa  aux  étrangers  khozars, 

juifs,  arabes  :  aussi  Massoudi  nous  avertit  que  les  plus  braves  et  les 

III.  é 


tO  ^  SLAVU  ,   18. 

meilleurs  cavaliers  de  tons  les  Sklabes  sont  les  ^^|^ux^U  NamdjîDy. 
àont  le  roi  s^appelle  èô\Ji  Grana ,  nom  substitué  dans  la  langue  arabe 
à  oelui  de  Henri.  Ce  roi  est  donc  Henri  Toiseleur  (919^936).  (DeGu^nes 
lisait  Nabdgin  ou  Namdgin  et  leur  roi  Ara). 

Du  nombre  des  étran^|rs  comptés  aux  Slaves,  sont  les  ^^^L^ 
Sassin.  Les  Saxons,  appelés  Sassi  chez  les  Slaves ,  prédominieant  en 
Allemagne  du  temps  de  Henri  Toiseleur  de  la  maison  de  Saxe  :  les 
byzantins  qualifiaient  son  successeur  Otto,  roi  de  Saxe ,  équivalant  à 
celui  d'Allemagne. 

18.  Qui  est  le  roi  ^^^^  ^jXS^  Avandj ,  qui  a  beaucoup  de  villes^ 
qui  fait  la  guerre  aux  ^Romains,  aux  Franks,  aux  Nogbardes  (Lom- 
bardes) et  aux  autres  peuples,  qui  sont  tantôt  vaincus,  tantôt  vain- 
queurs? L'appellation  d'Avandj  est  la  même  que  de  Venceslav,  Yan^- 
slava,  seulement  privée  de  la  terminaison.  Cependant,  il  est  impossible 
de  présumer  dans  ce  roi  guerrier  la  répétition  du  roi  des  Doulèbcs 
Tschekhs ,  pieux  chantre  des  psaumes  dans  Téglise ,  éloigné  des  Nog« 
bardes.  C'est  un  tout  différent,  un  chef  de  Kroates  ou  Narentans  paga- 
niens,  à  portée  de  faire  la  guerre  aux  Romains,  Franks  et  Lombards. 

Un  autre  puissant  roi  ^*jJI  *^*XJU  Dir  se  retrouve  facilement.  Dir 
vareg,  de  la  suite  des  Rouss,  s'installa  à  Kiiov  vers  8G6,  comme  libéra- 
teur de  cette  cité  du  joug  des  khozars.  II  se  fit  connaître  à  Constanti- 
nople,  et  s'était  baptisé;  par  le  commerce  il  était  non  moins  connu  chez 
les  Arabes.  Le  rouss  Oleg,  en  882,  Tavait  assassiné  par  trahison  et  régna 
à  Kiiov,  (jusqu'à  912),  ensuite  Igor  (945)  et  Sviatoslav  (972).  Les  Arabes, 
suivant  leurs  habitudes ,  qualifiaient  de  Dir,  ceux  qui  succédaient  et 
régnaient  à  Kiiov.  Si  le  nom  de  Kiiov  ou  de  Rouss  ne  l'accompagne 
point  :  c'est  que  nous  ne  possédons  que  de  très-faibles  fractions  de  la 
narration  de  Massoudi ,  qui  n'a  pas  ignoré  l'existence  des  Rouss. 

De  Guignes  assure  que  Massoudi  fit  encore  (dans  le  chap.  29),  men- 
tion d'un  pays  slave  qu'il  appelle  Noukbard  ou  Noukirad ,  Noukard  oit 
Noukorod  (p.  6,  et  27)  (Novogorod),  dont  la  capitale  était  Arnkis  qui  esfl 
traversée  par  un  très-grand  fleuve  Dgiaïnan.  Ce  passage  a  échappé  s 
l'attention  D'Ohsson,  ou  plutôt  négligé,  il  n'en  fait  aucune  mention  (ss^ 

Tous  les  Sklabes ,  au  rapport  des  personnes  les  mieux  instruites  dk 
leur  origine,  descendent  de  ^j!-^  Mari,  fils  de  Japhet  (probable 
ment  ^^U  Madaï  de  la  genèse,  X,  2),  et  c'est  à  lui  qu'ils  fo^ 
eux-mêmes  remonter  leur  généalogie.  —  Cette  assertion  est  o^  v 

(38)  Le  lavant  Frahn ,  relatant  ce  passage  (Ibn  Foszian  ,  p.  47),  regrette  :  ich  bedaare,  das»  A  "^  * 
Domina  propria,  oicht  mit  arabischcr  Scbrift  ani^godriickt  sind  :  viclieicht  licssco  sie  i>ich  ^.s» 
ausmittcln. 


SLAVU,   tô.  51 

trariëe  par  les  relations  des  autres  arabes  :Takout,  en  1415,  savait  que 

âeklab  descendait  de  Sabthi,  fils  de  Kassoukhim,  fils  de  Tounan,  fils 

<le  Japhet,  qu'ils  forment  plusieurs  tribus  qui  se  font  la  guerre  et 

^|u'ils  sont  chrétiens  iacobites,  d'autres  nestofietis,  quelques-uns  n*ont 

aucune  religion,   d'autres  adorent  le  fei^VII,  5)^   Le  géographe 

^[azriniy  mort  1256,  se  rapporte  à  l'opinion  d'Ibn  el  Kouli^  et  assure 

^ue  Roum,  Seklab,  Ermen  (Germain),  et  Frendj,  étaient  les  quatre 

:tfils  de  Litta ,  fils  de  Kelouchim ,  qui  était  fils  de  Jafet.  Schems  eddin 

^imeschki,  en  1586,  reprend  cette  descendance,  rectifiant  que  Litta  fut 

:Als  de  Jounan  (Javan) ,  qui  était  le  fils  de  Jafet  :  mais  il  rappelle  en 

:méme  temps  que  les  autres  firent  descendre  les  Sklabes  de  Madaî 

:£ls  de  Japhet.  Si  les  Slaves  croyaient  eux-mêmes  descendre  de  Mari 

-4DU  Madaî,  ce  sont  les  Slaves  chrétiens,  baptisés,  auxquels  on  a  lu  la 

:^enèse  de  l'ancien  testament.  La  descendance  de  Mari  n'a  d'autre 

valeur,  que  la  qualification  de  DadaQ.ou  Khanaan  qu'on  leur  donnait. 

Il  est  probable  cependant  que  Mari  trouva  une  position  géographique 

'^ians  la  table  de  l'astronome  Ibn  lounis ,  qui  lui  assigna  59°  W  de 

longitude  et  59<»  56'  de  latitude. 

Les  Rouss  et  Sklabs  sont  divisés  en  beaucoup  de  nations  qui  ont 
chacune  leur  roi  et  qui  se  font  souvent  la  guerre.  La  principale 
nation  se  nomme  UUJj  Velinaua;  on  peut  la  considérer  comme 
la  souche  des  Sklabs.  Jadis  elle  les  dominait  tous,  et  son  roi  nommé 
OJJkL»  Madjek  (chez  De  Guignes  Mahak),  recevait  l'hommage  des 
autres  princes  sklabes  :  mais  la  désunion  survint  et  afTaibllt  la  puissance 
de  CCS  peuples  en  leur  donnant  à  chacun  un  souverain  particulier. 
Massoudi  y  ajoute,  que  c'est  un  sujet  trop  long  pour  être  entamé, 
qu'il  l'a  traité  avec  étendue  dans  ses  autres  ouvrages  (Massoudi, 
roouroudj.  chap.  52).  Or,  il  se  dit  être  instruit  sur  ce  qui  s'était 
passé  en  Slavonie,  et  il  en  a  raconté  beaucoup  de  circonstances. 

Voici  un  fait  d'une  haute  importance  pour  l'histoire  slave  et 
probablement  non  moins  pour  l'histoire  de  leurs  voisins.  Cependant 
Madjek  et  Velinanas  échappent  à  toutes  les  conjectures  de  nos  con- 
naissances actuelles.  La  nation  prédominante  Yelinana,  serait  sans 
fondement  relatée  aux  Volynicns  ou  à  quelque  peuplade  de  nom 
analogue,  car  aucune  n'a  jamais  pris ,  aut;^nt  qu'elles  sont  connues, 
tant  d'ascendant. 

Les  conjectures  basées  sur  les  événement  connus  dans  l'histoire, 
ne  laissent  pas  mieux  établir  l'époque  de  la  domination  de  Madjek. 
L'histoire  ofl're  deux  puissances  qui  s'étaient  formées  momentanément 
dans  la  Slavonie.  Celle  des  Moraves  sous  Sviatopolk  (mort  en  89/4), 
dissoute  par  les  disçentions  de  ses  successeurs;  l'autre  plus  ancienne 


52  SLA VI A  ,  19. 

SOUS  le  chef  Samo  (mort  en  658).  Celle  des  Moraves  ne  convient  pas  à 
b  relation  de  Massoudi,  parce  qn*il  a  nommé  lui-même  les  Moraves 
particatièrement,  sans  rappeler  leur  puissance  momentanée.  Celle 
de  Samo  aurait  plus  de  cbances  à  satisfaire  la  relation  de  Massoudr. 
Elle  durait  35  ans,  plus ^gtemps  que  Taulre,  et  Samo  était  qualité 
roi  ou  chef  des  Vinules,  et  ce  nom  est  analogue  à  Velinana.  En  tortv- 
rant  un  peu  Tappellation  arabe  de  Madjek  au  moyen  des  habitudes 
^aves ,  on  parvient  à  y  retrouver  le  nom  de  Samo  entier.  L^habitude 
slave  rendait  les  noms  des  chefs  en  forme  de  diminutif  :  BdkOi 
Prjemko,  Leschek,  Ylodek,  Vanko  ou  Vatzek,  Mieschko  ou  Mieschek, 
ainsi  Samko  ou  Samek,  et  Tarabe,  par  la  transposition ,  en  a  M 
Madjek.  Probabilité  très-douieuse.  Massoudi  se  serait-il  préoccupé  des 
temps  aussi  reculés? 

L'intérieur  de  la  Slavonie ,  laboratoire  qui  déversait  tant  de  peuples, 
ne  cessait  point  de  s*agiter.  Depuis  la  retraite  des  Doulèbes,  Chrobates^ 
Serbes,  il  a  dû  s'y  opérer  immanquablement  de  grandes  transformations.  • 
Les  traditions  populaires  nourrirent  des  réminiscences  d'un  empire 
slave  (Matth.  chron.  pol.  lib.  I),  dont  Texistence  réelle  sous  un  Madjek 
a  pu  être  connue  aux  arabes,  qu'ignore  Thisloire  écrite  en  Europe. 
L'activité  commerciale  des  Loudzana  et  l'établissement  des  Yolyniens 
seraient  des  conséquences  de  grandes  commotions.  Quelques  légendes 
défigurant  l'histoire  postérieure,  font  croire  que  la  qualification  de    ^ 
Mesko,  Mieschek»  Madjek,  est  générique  de  chef  d'état,  antérieure  anx .sa 
Mieschek,  Mietziszislav  de  Pologne.  Blueties  sorties  des  ténèbres  quip 
s'évanouissent  aux  regards  attentifs.  Il  est  à  regretter  que  la  narrations 
de  Massoudi,  de  la  dissidence  qui  affaiblit  la  puissance  slave,  est  perdi 
ou  reste  ignorée  :  elle  donnerait  certainement  une  lumière  sur  Tel 
de  la  Slavonie  de  cette  époque,  ferait  au  moins  connaître  l'opinion 
Arabes  au  sujet  de  cette  dissention. 

Nous  avons  moins  à  regretter  ce  que  Massoudi  relatait  dans  i 
autres  ouvrages  sur  un  philosophe  qui  vivait  anciennement  (Zam< 
ou  Dikenes)  parmi  les  Sklabes  et  qui  par  ses  artifices  et  ses  adroL^mes 
impostures,  avait  su  captiver  les  cœurs  et  gouverner  les  esprits  de 
tous  ces  peuples,  auquel  enfin  on  attribue  la  construction  d'un  tenyle 
et  de  l'idole  resplendissante  de  pierreries  précieuses.  Massoudi  dc^noe 
la  description  de  trois  de  ces  magnifiques  temples  (Arkon ,  Retra...) 
(moroudjc,  chap.  62)  La  relation  entachée  de  la  fantaisie  orientale, 
nous  éloignerait  trop  de  notre  but  géographique. 


SLATIA,  19.  53 

Lerhites. 

19.  Malaise,  inquiétude  morale,  appât  de  «gain,  espérance  d*uue 
aeilleure  situation,  prédisposent  les  populations,  sonl-elies  pasteurs 
«agricoles,  à  devenir  plus  mobiles,  à  s<^éplacer,  dépayser.  Très 
nuvent  cependant  les  calamités  et  les  grandes  catastrophes  d*infor- 
me»  décident  à  s'expatrier.  Toutes  ces  causes  agirent  sur  la  race 
lave,  quand  elle  se  dispersait  dans  toutes  les  directions  jusqu'au  Rhin, 
i8qa*aux  dernières  extrémités  de  la  Grèce,  s'aventurant  par  TAsie 
lineure.  Le  grand  débordement,  grandissant  et  déclinant,  s'était 
Dcooipli  dans  le  courant  d'un  siècle  (550-650),  mais  la  mobilité 
clraordinaire  ne  cessait  de  remuer  les  peuples  par  l'instabilité  de  for- 
me et  les  vicissitudes  qui  forçaient  à  l'émigration,  qui  occasionnaient 
e  transplantations  à  la  suite  des  guerres;  cette  mutabilité  de  situation 
s  prolongait  plusieurs  siècles,  jusqu'au  x"  et  xi".  L'immense  perturba- 
on  fatiguait  les  vastes  espaces  inégalement.  Dans  certaines  parties 
lus  avancées  dans  le  monde  étranger,  l'élément  slave  allait  s'assoupir 
t  8*éteindre;  ailleurs  il  se  manifestait  dans  toute  sa  vigueur,  et 
arloiit  il  était  destiné  à  des  réformes  variées,  à  la  suite  de  climat, 
e  changement  dans  l'existence,  de  la  fusion  des  idées,  de  la  civiJisa- 
on  avancée  :  parce  qu'ils  étaient  barbares  ces  Slaves ,  ils  allaient  se 
iiiliser.  Partout  changeait  la  condition  de  l'hojnine,  et  l'ordre  social  se 
rouva  en  souffrance  pour  prendre  des  directions  très- variées. 

Lies  Slaves  dans  leur  patrie,  au  delà  du  Danube,  étaient  libres.  Les 
risonniers  de  guerre  chez  eux  (braniec,  brance)  n'étaient  pas  esclaves, 
la  pouvaient  se  racheter  ou  naturaliser.  Les  captifs  ou  les  populations 
nievées  et  enmenées  par  les  excursions  (jeniec ,  jeàce) ,  trouvaient  de 
ùile  rétablissement  civique  (culture  de  terre)  et  la  naturalisation. 
>ans  leur  régime  populaire ,  les  Slaves ,  tous  égaux ,  discutaient  les 
tflàires  prospères  ou  adverses,  agissaient  ensuite  sans  égard  à  la 
léeisioQ  arrêtée.  Sobres^  de  mœurs  rigides,  ils  ne  prétendaient  ni 
richesses,  ni  bonne  chère,  labourant  les  terres  pour  se  suffire; 
!siuflorants  dans  les  fatigues,  ils  aimaient  le  repos;  pour  leur  sécurité  ils 
dioislssaîent  des  gîtes  moins  accessibles.  Adorant  le  Dieu  unique, 
3aréateur  et  tout-puissant,  sacriiiaient,  tiraient  des  augures,  vénéraient 
es  rivières  et  quelques  esprits  (Procop.  de  belle  goth.  III,  14;  Mauricii 
tmteg.  XI,  5;  Leonis  tactica,  XVIII,  iOO-107). 

Cet  état  de  leur  société ,  conséquence  de  leur  croyance  et  de  leur 
ulte,  s'était  perpétué  de  siècle  en  siècle,  inquiété  par  d'autres,  sans 
i^uiéter  les  autres.  L'étranger  en  passant  secouait  l'intérieur,  et  l'élé- 
euLt  vital  de  la  race  reprenait  sa  vigueur.  On  peut,  je  pense,  présumer, 


54  SLATIA,  «0. 

que  rage  de  grandes  commotions,  Ta  trouvé  tel  quMl  était  dès  son 
origine  :  peu  modifié.  L'histoire  fournit  par  intervalle ,  par-ci  par-là 
Tapparition  de  Tautorité  d'un  pontife,  d'un  chef ,  d'une  puissance» 
l'apparence  enfin  de  préUjation  dynastique,  et  de  suite  tout  retombe 
dans  la  dissolution  popuiSre,  insaisissable  pour  l'unité  de  l'action, 
pour  la  vue  éblpuie  par  les  mirages  historiques;  dissolution  qui  ne 
se  laisse  refaire  qu'après  d'immenses  agitations  et  par  une  opération 
de  six  siècles  (550-1105). 

Le  baptême  (867-88C)  disposa  les  peuples  dispersés  par  la  Grèce,  de 
renoncer  à  leur  habitude  et  de  se  conformer  à  la  soumission  des  Grecs 
(Leonis  tactica,  iOi).  Après  la  chute  de  la  puissance  de  la  Boulgarie, 
gonflée  par  l'établissement  forcée  de  tant  de  captifs,  les  Slaves  baptisés 
allaient  paisiblement  (1016)  peupler  la  Grèce  sous  le  nom  de  Boulgares, 
étendre  le  nom  de  la  grande  Boulgarie  jusqu'au  défilé  de  Tbermopyles 
(Benj.  de  Tudèle  chap.  4);  dociles,  dressés  à  toutes  les  éventualités,  à 
effacer  leur  nationalité.  Les  seuls  Kroatcs  et  Serbes  conservaient  la 
vitalité  de  la  race.  La  prise  en  possession  de  villes  maritimes,  les  rela- 
tions avec  l'Italie  et  l'empire,  n'affaiblirent  leur  génie,  décidant  cepen-^ 
dant  de  nombreuses  modifications.  Les  Kroates  mieux  établis,  accep- 
tèrent (1091)  le  régime  dynastique  de  la  Hongrie,  conservant  leur 
existence  à  part.  Chez  les  Serbes,  ceux  qui  parvenaient  à  la  position  de 
vlastelin  (possesseur  de  domaines),  agitaient  la  nation  par  leurs  dissent- 
tiens,  le  peuple  ne  perdait  pas  encore  autant  qu'ailleurs. 

Le  baptême  a  pu  sauver  Tâme  des  convertis  :  mais  que  dire  du  sort 
terrestre!  En  Allemagne,  en  Kariniie,  Frankonie,  Saxe  et  chez  les 
Sorabes  et  Vinules,  les  Allemands  répétaient  encore  :  liberi,  ncut 
Sclavi  soient  esse  (dipi.  1116, 1136,  ap.  Ludevig,  script  bamb.),  mais  les 
populations  laborieuses  des  slaves  passaient  graduellement  en  Leibei- 
gene.  Un  sort  plus  dur,  plus  sauvage  attendait  encore  ceux  qui  défen- 
daient leurs  autels  et  leur  indépendance.  —  Chez  les  Bohèmes,  la  civi- 
lisation matérielle  faisant  ses  progrès,  augmentant  les  richesses  et  les. 
distinctions,  inventa  la  prise  de  corps  et  la  vente  des  débiteurs  insol- 
vables au  profit  des  créanciers  (vita  s.  Adalb.  per.  Job.  canap.  12,  per 
Brun.  11);  on  vendait  les  captifs  (Cosm.  prag...).  Un  trafic,  contraire 
aux  principes  slaves,  souilla  momentanément  les  Pomoraniens  mêmes 
(Helm.  II,  5).  Ce  sont  les  symptômes  qui  touchaient  isolément  les 
individus  ou  aggravaient  la  situation  trop  spéciale  :  mais  le  progrès  du 
temps  découvre  par  toute  la  Slavonie  l'état  du  peuple  dégradé  4'une 
manière  effrayante. 

20.  Lorsque  les  Kroates  s'étaient  divisé  en  deux  états,  ils  soutenaient 


SLAYIÂ,    SO.  6& 

leur  amitié  par  des  missives  réciproques  Const  porphyr.  <)e  aduu 
împ.  50).  A  partir  des  Slaves  qui  bâtirent  Novogorod,  des  deux  côtés  du 
Dniepr  habitaient  iesPolotschans,  aux  environs  de  Polota  et  de  Polotzk 
qu'ils  bâtirent  ;  les  Krivitsches ,  KpiZii-raivou  dont  la  ville  s'appelait 
Smolensk,  Mam^xa;  les  Pregoviisches ,  /JbvyougtToe,  qui  habitaient, 
entre  Dvina  et  Pripet;.les  Radimitsches  et  Yiatitsches;  ensuite  les. 
Derevlans,  AepêAevtvot,  dont  la  ville  était  Iskorost;  les  Loutzans 
AsvÇavevoc  de  la  viUc  Loutzk ,  Aovrça  ;  les  Yolynans  oùXrevQt;  les  Polanes, 
Polaniens,  qui  bâtirent  Kiiov,  KtoaSa  ;  les  Sieviers  et  i^ep^tot  ;  les  Ulit- 
sches  et  Tivertzes ,  Te&ipèiayoi  (Tyrigèlcs)  qui  occupaient  les  rivages  du 
Dniestr  (Tyras,  Tourla)  et  les  autres  Slaves  ;  tous  ces  slaves  vivaient 
en  paix  (ziviachu  w  mirie,  7caxTtâiTa(,  Const.  porphyrog.  de  adm.. 
imp.  9, 57;  Nestor,  po  spisku  Lavrentia  p.  5,  7).  Leurs  villes  grandirent 
par  le  commerce  :  Novogorod,  S.nolensk,  Loutzk,  Kiiov,  Tschernigov, 
Tçeptyûya,  Vyschogrod,  Bova&ypaSi,  et  vivaient  en  paix.  Le  régime  po- 
pulaire ,  rintérct  commun  animaient  leur  fraternité.  11  faudrait  croire 
qu'aux  environs  de  la  Ylstule  jusqu'aux  Pomorans,  les  peuples  avec 
leur  régime  populaire,  nourrisaicnt  les  dispositions  pacifiques;  que 
dans  la  grande  Chrobatic ,  la  délimitation  d'idiomes  variés  s'accomplit 
en  paix.  En  effet,  ni  l'histoire,  ni  tradition  quelconque  ne  mentionnent 
de  dissentions  continues  de  peuple  à  peuple.  Les  populations  s'alliaient, 
se  fédéraient  contre  leur  ennemi,  se  séparaient  et  se  divisaient  eu  paix, 
sauf  quelques  exceptions  extraordinaires.  Ce  n'est  que  par  l'ambition  ou 
l'animosité  des  chefs,  lorsque  le  pouvoir  restait  concentré  dans  un 
chef ,  que  se  déclarait  l'esprit  de  dissention,  d'invasion,  de  dominar 
tion.  De  cette  façon  un  peuple  se  vit  momentanément  soumi  à  un  chef, 
voisin  :  mais  nous  ne  pouvons  pas  inventer  de  conquêtes  d'un  peuple 
par  un  peuple  :  pour  en  avoir  des  exemples,  il  fallait  changer  l'esprit 
et  la  croyance  par  la  civilisation. 

Charlemagne  transplantait  les  populations,  les  rois  Boulgars  l'imi- 
taient; Boleslav,  le  grand  roi  de  Pologne,  Brjetislav  duc  de  Bohême, 
colonisaient  les  captifs.  Ces  événements  dépaysaient  les  populations, 
sans  changer  leur  condition  sociale,  au  moins  d'après  l'ancien  principe, 
ne  fesaient  que  déplacer  leur  civisme.  La  fortune  favorisait  les  positions- 
civiques  des  individus.  Quand  nous  voyons  les  Serbes  émigrer,  nous 
pouvons  être  sûr  que  c'étaient  les  vlastelins,  proceres,  d'une  position 
plus  éminente  ;  le  peuple ,  vulgus ,  fut  plus  exposé  à  être  dépaysé.  On 
peut  dire  qu'au  sein  de  chaque  peuple  la  fortune  créait  une  classe  plus 
éminente,  ouverte, accessible  à  chacun;  le  peuple  n'enviait  pas  la  jouis- 
sance de  faveurs  civiques  qui  lui  étaient  moins  accessibles ,  il  se  con- 
tentait de  la  participation  commune  dans  toutes  les  affaires  publiques, 


S6  slàtu,  si. 

les  chef$  agitaient  également  les  deux  classes;  on  ne  saurait  remarquer 
distinctement  de  collisions  intérieures  entre  les  classes  civiques,  si  elles 
ne  se  seraient  dessinées  dans  les  réminiscences  des  fastes  visUilans. 

21  Les  traditions  répètent;  les  événements  connus  qui  se  déroulent 
en  dernier  lieu,  et  la  posi^lp  postérieure  préparée  par  la  marche  sécu- 
laire, confirment  que  la  condition  civique  s*était  divisée  en  deux  classes, 
que  les  populations  étaient  agitées  plutôt  par  la  prépondérance  de  Tune 
d'elles  que  par  Tascendant  de  quelque  individu.  Lutte  civique,  qui  se 
prolongea  de  génération  en  génération  sans  déranger  Tétat  social.  Le 
peuple,  kmet,  kmiecie,  vulgus,  tenait  à  la  possession  de  petites  por- 
tions indivisibles  qui  dépendaient  du  domaine ,  gardait  Tégalité  de  ooo- 
dition.  La  classe  plus  avantureuse  des  lekhs,  lech,  lechites,  s'emparait 
de  possessions  spacieuses,  de  domaines,  de  terres  divisibles ,  qu'elle 
qualifiait  de  libres,  vola.  Plus  d'une  fois,  diu  agitati,  non  sine  predio  H 
perieulo,  les  deux  classes  marchaient  ordinairement  d'accord,  eolti« 
vaient  et  administraient  leur  patrie  en  bonne  harmonie.  Il  notait  pas 
sans  exemple  que  Vadminisiratio  reiptiblicœ  humililnu  et  incertU  eeuU 
personis,  nuUa  prarsus  vel  vidgi  vel  prœerum  luggiliante  intfidia.  On 
avait  des  exemples  qu\in  originarius,  fils  d'un  captif  ou  d'un  prisonnier 
de  guerre  s'élevait  aux  plus  hautes  dignités.  Plus  souvent  la  république 
restait  rege  orbata ,  sine  rege  claudicans.  Le  peuple  prenant  l'ascendant 
établissait  son  souverain  conseil,  kmet,  kmiet,  et  disposait  de  la 
république,  l^es  lekhs  aimaient  mieux  avoir  on  chef,  un  Leschek,  et  de 
principes  sueeedaneos t  SOU&  lesquels  brillait  maintes  fois,  immemitat 
imperii  (39).  La  fortune  balançant  le  succès  :  les  séditions  éclataient  de 
part  et  d'autre  et  c'était  probablement  à  la  suite  de  ces  commotions 
que  se  déclarait  la  scission  des  tribus  lechites  sous  la  conduite  de 
Radim  et  Yiatko,qui  s'assirent  sur  Soj  et  Oka;  qu'un  Lekh  conduisit, 
les  Chrobates  en  Bohème. 

ââ.  Le  sort  du  peuple  des  Yiatisches  et  Radimitsches  n*était 
avantageux.  Exposés  aux  invasions,  ils  participaient  très-faibiement 
trafic  et  partageaient  la  destinée  des  voisins.  L'activité  slave  s'était 
centrée  dans  de  grandes  villes  marchandes  où  grandirent  les 
et  l'opulence.  Là  discutait  l'esprit  populaire,  exténuant  la  vitalité  d 
campagnes  épuisées  par  les  courses  des  chefs  rousses,  de  knez, 
dants  de  Rourik,  de  boiars.  L'élément  byzantin  s'associant  à  celui 

fS9)  remprante  kt  exprenioDt  de  IfaUbée  aux  armes  de  cboleva  éTéqve  de  Knkovie,  44 
tevï  4ea  biftorieu  qui ,  dans  yabiiarre  narration,  donne  la  clef  à  expliquer;  œqui  eit 
vert  1 180  par  l*lUstofiea  Câlins. 


SLAVIÀ»  93*  57 

Taregs,  couvrit  de  son  linceuil  Forganisation  yivanie.  La  législation 
iTempressa  de  distinguer  les  hommes  libres,  svobodniie,  des  asservis. 
Bieotôt  les  apanages  décliirent  tou^  ces  Slaves  qui  reçurent  le  nom  de 
Rosses  et  de  Russie,  le  souffle  byzantin  glace  le  génie  slave,  la  trame  du 
peuple  se  pelotonne  sur  un  triste  avenir,    -i 

23.  En  attendant,  sur  les  plaines  de  la  Yistule,  la  prépondérance  des 
i^khs  se  déclarait  à  tel  point ,  qu*on  y  distinguait  quatre  peuples  par 
lenrs  noms.  Les  Mazoviens,  Mazovscbanie  ;  Luticzi,  Lucie  (Gall.  II,  58), 
Licicaviki  ou  Licicaniki  (ap.  )Yitik.  III,  66),  L^czicanie;  Polanie, 
[Bolaoi,  Pulani),  et  Pomoranie;  tous  les  quatre  se  sont  appelés 
Liekhites  (siedosza  na  Yiéiie  i  prozwaszasia  Liachowè,  Nestor,  po 
larv.  spisku  p.  3).  —-  Mais  les  lekhs  s'agitaient  dans  la  Ghrobatie 
orientale  en  s'emparant  de  ses  villes  (Premisl ,  Tscherviensk ,  Gzer- 
viensky  Russie  rouge);  ils  étaient  sans  doute  assez  puissants  dans  toute 
La  Chrobatie,  d*où  ils  conduisirent  les  Ghrovates  en  Bohême,  et  ils 
i^^rent  dans  une  émînente  position  chez  les  Tschekhs.  Ils  ne  préten- 
daient point  asservir  le  peuple ,  cette  conception  ne  s'insinuait  point 
il  lenrs  idées  qu'à  la  suite  de  la  civilisation  qui  dardait  ses  rayons  de 
ft*occident.  Il  semble  qu'en  Bohème  ils  réussirent  à  scinder  la  classe 
lunetone,  d'en  former  les  kmetons  supérieurs,  qui  firent  cause  com- 
vrane,  et  le  peuple  passa  dans  une  condition  analogue  à  celle  du  peuple 
ma  Allemagne. 

Dans  les  peuples  lekhites  et  chez  les  Ghrobates  les  affaires  n'allaient 
pas  du  même  train.  Il  semble  que  les  lekhites  réussirent  d'établir  et 
^e  prolonger  le  régime  d'une  dynastie  sur  les  Polaniens  et  leurs 
associés  Kouiaviens  :  de  Leschek  et  Popiel  (750-860).  La  tradition 
^trlt  cette  dynastie  de  nom  de  popel,  cendre,  elle  qualifia  de  ce  nom 
les  autres  princes  de  cette  époque  (Vischevit  ou  Yislav  de  Yislitza  est 
un  de  popels) ,  elle  répétait  :  sub  cinere  mdxima  viget  viHus  scintilla- 
TMf»  et  savait  qu'une  révolte  renversa  le  régime  cendreux ,  élevant  au 
trftne  un  kmeton  polanien  (rusticus,  agricola)  Ziemovit  fils  de  Piast, 
dont  la  postérité  régna,  modérant  rintérét  et  la  condition  des  deux 
elasses,  soutenue  par  les  lekhs.  Ils  cherchaient  d'étendre  la  domination, 
ei  tes  laits  d'armes  consolidaient  le  droit  dynastique  des  Piasts.  Les 
Lentschitzaniens  et  les  Maxoviens  s'unirent  plus  facilement,  mais  les 
Pomorans,  chez  lesquels  l'élément  populaire  avait  le  dessus,  se  sépa- 
raient de  l'union  plus  d'une  fois. 

Rien  ne  fait  présumer  qu'il  y  ait  eu  quelque  collision  de  la  domination 
des  Piasts  avec  la  Moravie,  à  laquelle  Yislitza  depuis  894,  et  la 
Chrobatîe  paraissent  appartenir.  Au  moins  est-il  certain ,  qu*après  la 


58  SLAVU,  ts. 

chute  de  la  Morayie,  898,  la  grande  Chrobatic ,  exposée  aux  incursions 
des  Pietschings,  des  Madiars  et  des  Allemands ,  se  soumit  à  Otton  le 
grand  (Const.  porph.  de  adm.  inip.  50,  51).  Methodius  y  fesait  son 
apostolat,  les  chrétiens  de  Moravie  s*y  retiraient  après  sa  chute» 
Krakov  était  le  chef-Ueii^e  cette  Ghrobatie.  Lorsque  révéché  de 
Praga  fut  fondé  en  966,  tout  ce  qui  se  trouvait  dans  la  dépendance 
d^Otton  ou  de  la  Ghrobatie  devait  composer  le  diocèse.  On  comptait  à 
lui  la  Ghrobatie  jusqu'au  fleuve  Stir  et  le  pays  uUramontain  jusqu*au 
Danube,  o(i  la  province  Vag  paraît  aussi  s'appeller  Ruhia,  en  com- 
mémoration des  Rougs,  dont  les  débris  se  laissaient  distinguer  un 
certain  temps  dans  celle  partie  de  la  grande  Moravie  (4o). 

Meschko,  Mietschislav ,  roi  des  lekhiles,  cuius  poteslalis  erant  Slatti 
qui  dicunlur  Licicaviki  (Wilik.  III ,  66) ,  réguant  sur  les  trois  peuples 
lechiles,  par  ses  possessions  à  Toccident,  au  delà  de  Bober,  rencontra 
les  Allemands,  qui  s'étaient  emparés  de  Luzices.  Vaincu,  965,  lui-même 
se  soumit  à  Tempire  :  imperatori  fidelis,  tribulum  usque  in  Vurkê 
fluvium  solvens  (Ditm.  II,  19).  Il  se  fit  baptiser  et  par  la  qualité  de 
marchionis,  comitis,  ducis,  raffermit  sa  domination.  Après  sa  mort,  992, 
Boleslav,  ne  voulant  pas  sotillrir  les  prétentions  aux  apanages  : 
noverca  et  fralribus  expulsis,  excecalisque  familiaribus  suis  Odilieno 
atque  Pribuvoio,  vulpina  callidilale,  regnum  treuil  in  unum  (Ditm. 
IV,  57)  (41).  Par  ces  temps  là  Boleslav  II  duc  de  Bohème,  se  félicitait 


(40)  La  l^islatioa  bavaroise  des  années  876-880  et  906,  dit  :  Sclavi  qni  de  Rugis  vel  de  Bohemanis 
mercandi  causa  excunt,  etc.  (Ant.  Fel.  Ocrdii,  monum,  boica  28,  II,  103;  Âventini,  annal,  bojor.  lY» 
p.  288;  Goldasti,  rer.  bioc.  script,  p.  698,  718).  —  Termini  autcm  cjus  (scdis  pracgcnsis)  occidentem 
versus  hi  sunt  :  Lugast  quao  tendit  ad  médium  flnminis  Chub  (Egcr),  Zelza  et  Liuscna ,  et  Dasena, 
Liutomerici,  Lemuui,  usque  ad  mcdiam  sjlvam  qua  Boemia  timitatur.  Diende  ad  aquilonem  hi  silDt 
termini  :  Psowane,  Chrowali,  et  altéra  Chrowati ,  Zlasane,  Trcbowane,  Boboranc,  Dedosese,  luqoo 
ad  mediam  sylvam  qua  Milciaoorum  ocurrunt  termini.  Inde  ad  orientem  hos  fluvios  babcl  termines  : 
Buo  (Bug)  scilicet  et  Ztir,  cum  Krakova  ciuitate,  provinciaque  cui  Wag  nomen  est,  cum  omaibos 
regionibus  ad  prxdictam  urbem  pertiueutibus  quai  KrakoYa  est.  Inde  Ungarorum  limilibus  addilis 
usque  ad  montes  quibus  nomen  est  Tritri,  dilatata  proccdit.  Deinede  in  ca  parte  quae  meridiem 
respicit,  addita  rcgione  Moravia  usque  ad  flumcn  cui  nomen  est  Wag,  et  ad  mcdiam  sylvam  cui 
nomen  est  Mure,  et  eiusdem  montis  eadem  parochia  tendit  qua  B^waria  limitatur  (ap.  Cbsm.  prag...  • 
ap.Lunig  teutsche  Reichs  arch.  contin  I,  p.  230).  Le  diplôme  est  fabriqué  entre  1037  et  i082(Otbkv 
vita  s.  Wolfkangi  eppi  ratisp.  29)  confirmé  en  1086. 

(41)  Un  de  familiaribus ,  Dagon ,  s'est  retiré  avec  la  reine  noverca  Oda  et  ses  fils,  à  Rome ,  o&  ils 
firent  cession  de  leur  état  à  S.  Pierre.  Cette  cession  indique  les  limites  de  la  domination  de  père 
Mieczislav  :  Dagon  index  et  Ote  senatrix,  et  filii  eorum  Misca  et  Lampcrtus  (devenu  moins),  (legna- 
tur)  sancto  Petro  contulisse  unam  civitatem  Scbincsghe  (Gnezno),  cum  omnibus  suis  pertinentiis 
intra  hos  affines  :  sicut  incipit  a  primo  latcre,  Longum  mare  (Pomorauia),  fine  Pruzza,  nsque  in  loeotti 
qui  dicitur  Russe;  et  fines  Russe  extcndcntc  usque  in  Cracoa,  et  usque  ad  flumen  Odere  recte  in 
locum  Alcmure  (sylva  Mure);  et  ab  ipsa  Alemura,  usque  in  tcrram  Milzx;  et  fine  Milzao,  recte  in  terra 
Odere  usque  in  praedictam  ciuilatem  Schinesghe  (donatio  Joh.  XV,  anno  circit.  098.  ap.  Muratorî 
antiq.  IUlue  medii  a}ri,  t.  V,  p.  831;  confcr.  Ditm.  IV«28).  —  Milzieni,  Pomorani  «Prusei ,  Rasai» 
KrakoT  ou  fihrobatia  sont  exclus,  sont  limitrophes. 


SLAYIA,   33.  59 

C|a*fl  a  pu  occuper  Krakov  et  rétablir  les  limites  du  diocèse  jusqu'au 
Stir  :  mais  à  peine  a-t-il  fermé  ses  paupières ,  999,  Boleslav  le  grand 
^^empara  de  Krakov,  de  toute  la  Ghrobatie,  de  la  Moravie  et  de  can- 
tons de  Silésie  (4a).  Il  accepta  dan$  son  alliance  et  sous  sa  domination 
les  Pomoraniens  (Gallus  I,  6;  Math.  II,  i5;j^$guph.  inter  script,  siles. 
sommersb.  II,  p.  25)  confœderatus  cum  OUone,  omnem  Slaviam  guae  est 
ÈjUtra  Odoram  tribulis  subiecit  (Helmold,  I,  15);  pax  conlinua  fuit, 
car  tout  à  Touest  de  TOdcr  était  cédé  à  Otton,  et  paciûé  par  la 
coopération  de  Boleslav;  les  Lutixi  furent  la  pari  de  Fempereur  (Bruno, 
^ta  S.  Adalb.  26). 

Au  mois  de  mars  de  Tannée  iOOÛ,  Otton  III  visita  en  souverain  le 
corps  de  Tapôtre  Adalbert  à  Gnezpe,  organisa  la  hiérarchie  épiscopale 
dans  les  états  de  Boleslav,  la  Ghrobatie  allait  désormais  former  un 
diocèce  à  part  (Ditm.  lY,  28).  Emerveillé  du  faste  de  la  cour  et  de  la 
cordialité  de  Boleslav,  il  déclara  qu'il  serait  indigne  de  qualifier  de  duc 
^n  monarque  aussi  grand,  et  pendant  un  festin,  accipiens  impériale 
^iadema   càpilis   sui,   capili  Boleslavi  in  amiciciœ  fœdus  imposuit, 
:reconnut  sa  royauté  et  se  désista  de  sa  souveraineté  (Gallus,  1,6; 
lilatth.  II,  il;  Ditm.  Y,  6;  etc).  Après  sa  mort  1002,  une  longue 
guerre  s'était  engagée  avec  TAlIemagne.  Boleslav  ayant  ses  adhérents 
en  Bohême,  s'était  emparé  momentanément  de  ce  pays;  par  le  traité  de 
Boudischin,  1018,  il  acquit  les  Milziens,  les  Louzices,  les  Loubousches 
au  delà  de  TOder  (Ditm.  lY,  2i,  YI,  48,  YII,  56;  annal.  Saxo,  p.  460). 
Il  visita  kiiov  où  il  avait  aussi  ses  adhérents  :  mais  il  se  contenta  du 
butin  et  de  la  soumission  tributaire  (Ditm.  YIII,  16;  annal,  quedl. 
s.  a.  1019;  Nestor,  t.  I.  p.  125;  Gallus,  I,  7).  A  la  fin,  il  se  fit  solen- 
nellement couronner  de  sa  propre  autorité  en  1025,  et  bientôt  sur  le 
lit  de  mort,  il  présageait  les  séditions  et  les  grandes  commotions. 

24.  Boleslav  le  grand  désigna  pour  successeur  son  fils  Meschko, 
Mieczislav  II,  né  d'une  simple  slavone,  et  à  Otto-Bezbraîm',  son 
premier  né  d'une  princesse  de  Hongrie,  il  destina  la  Ruhie  Yag  comme 
apanage,  in  Ruhhiam  (Russiam)  provinciam  pepulil  (Wippo,  édit.  1751, 
Pistorii,  t.  III,  p.  470,  477).  L'usurpation  momentanée  d'Otton- 
Bezbraîm,  qui  périt  1052;  le  retour  de  Mieczislav  II,  à  condition  des 


(42)  Une  l^ende  du  xiu*  siècle  détermine  les  limites  des  conquêtes  du  sud,  ou  de  la  province  Vag 
Roubia  :  termini  Polonorum  ad  littus  Danubii,  ad  ciuitatem  Strigouiensem  terminabantur  ;  deia 
QMigriensem  (in  Agriensem]  ciuitatem  ibaut  ;  dcin  in  fluuium  qui  Cepla  nun  cupatur,  usquc  ad 
castmm  Galis  (Ualitsch),  ibique  inter  Ungaros,  Ruthenos  et  Polonos  fincm  dabant  (chron.  polon. 
nixta  vngar.  vita  S.  Steph.  7,  mspti  p.  354).  A  partir  d'Agria,  Erlau,  elles  toucbaient,  Teisse,  Cissa, 
01  longeaient  en  montant  les  rivières  Bodrog  et  TopUa,  Cepla,  jusqu'à  sa  souroe  ot  les  montagoos. 


60  SLAYU,    S4. 

apanages  à  son  frère  cousin  Théodoric  qui  périt  1055,  et  à  son  neveu 
Roman,  fils  d*Otion-Bezbralm ,  qui  rentra  dans  la  possession  de  Ruhie 
Yag  (pour  la  transmettre  aux  Hongrois  :  Emericus  dux  Ruizorum)  ;  le 
divorce  de  la  reine  Rixa ,  n*étaient  que  les  préludes  de  la  conflagraiioii 
(Gallus  1, 1,  8;  annal.  hild|sh.  s.  a.  1028, 1050,1051,  Wippo  vita  Heor. 
salici,  p.  470;  monach.  B^unwiller.  vita  Ezonis  5;  Boguf.  ap  Som- 
mersb.  t.  II ,  p.  26;  etc)  (43). 

tjlinam  ignem  sedilionU  accendenles  deum  et  honUnem  vereaniur 
(Gallus,  I,  16)  :  mais  ils  n'auraient  pu  Penflammer,  s*il  n'y  avait 
pas  de  causes,  et  ces  causes  irritaient  trop  longtemps  le  civisme  popu- 
laire et  national.  La  reine  Rixa  allemande,  qui  gouvernait  (1054-1036) 
s'enfuit;  le  jeune  Kazimir  se  retira.  Sedicionantur  cives  (kmeions), 
diisipatione  dissipatur  terra  (Matth.  Il,  15);  advenus  episcopos  ei 
sacerdotes  dei,  sedicionem  inceperunt,  eorumque ,  quosdam  gladio, 
quasi  dignius ,  peremerunt,  quosdam  vero,  quasi  m&rte  dignos  viUorip. 
lapidibus  obruerunt;  christianitas  bene  inchoata  et  roborata^  flebUUer 
disperiit  (Gallus,  1, 19;  annal,  hildesh.  s.  a.  1054).  Ensuite,  conirm 
nobiles  (lechitas) ,  liberali  (kmetones) ,  se  ipsos  in  dominiutn  extuleruni, 
aliis  in  servitio  versa  vice  detentis,  aliis  peremptis  (Gallus,  I,  19)* 
L'invasion  bohème  aggrava  le  malheur;  elle  commit  d'effroyables 
destructions;  la  province,  surtout  des  Polaniens,  changea  en  désert 
sans  habitants;  ailleurs  on  s'organisait  en  désordre ,  vindicariœ  poUêie^ 
tes,  principes  abortivi.  La  Mazovic  seule  constitua  une  unité  sous  le 
chef  de  son  dignitaire  Maslav,  homme  du  peuple,  sordido  famtUUii 
génère,  avo  originario;  elle  offrit  un  refuge  au  peuple.  Après  plusieurs 
années  reparut  Kazimir  pacificateur ,  non  sine  proelio.  L'accommode- 
ment civique  fut  terminé  par  une  sanglante  victoire  1042,  et  la  chute 
de  Maslav  secouru  par  les  Pomoraniens  (Gallus,  I,  20;  Matth.  II,  15)« 
L'accommodement  n'était  point  à  la  pleine  satisfaction  du  peuple. 

Boleslav  II  le  hardi,  tout  jeune  encore,  releva  la  renommée  et  la 
puissance  de  ses  états.  Il  réglait  les  affaires  de  la  Hongrie  (44),  de  la 
Russie ,  sans  négliger  l'intérieur  de  ses  états  où  fermentait  une  noui^ 
velle  explosion.  Le  peuple  ne  pensait  plus  à  son  antique  croyance,  il 
voulait  reconquérir  son  droit ,  antiquum  mos ,  sous  la  sauve-garde  de 
l'évangile  et  de  son  baptême.  La  nouvelle  doctrine  et  la  nouvelle 


(•43)  Ce  que  je  dis  de  Vag  Ruliia  je  le  dois  à  l'heureuse  explication  d'Auguste  Bielovski  dans  goo 
ojavrage  :  introduction  critique  :  vrstçp  kriticzny  do  dzieiow  PoUkicb,  Lwbw,  1851;  ouvrage  plein  de 
justes  et  ingénieuses  observations. 

(44)  L'apologiste  de  Boleslav,  déversant  sa  haine  contre  les  lekbites ,  s'écrie  :  et  licet  csset  tacen> 
dnm,  taaen,  ne  Veritas  gestorum  obnubilaretur  Magaroncs ,  hoc  est  Ungari ,  totam  suam  potentiam, 
•  Polonis^habebant  et  extrahebant  et  roborc  eorum  scmper  pugnarunt  (legenda  scti  Stepb.  iHib  fine). 


SLA VI A,  U.  61 

lîdcîpliiie  ne  cessaient  de  le  contrarier  et  de  rhuroilier  »  elle  soulevait 
iains  le  mariage  impedimentum  eonditionis  :  le  peuple  apprit  qu*il 
peut  être  considéré  comme  esclave.  Il  conspira  et  se  souleva ,  s*empa- 
*^iit  de  places  munies,  il  se  fortifia  :  faetio  servorum  in  dominos  con-- 
tpirata,  firmant  municipia^  dominos^  nopjolum  arcenl  reversuro$ 
;e  Russia) ,  sed  et  rêver  sis  bellum  infligunt,  £es  insurgés  épousaient  les 
Qlles  lekhites  qui  donnaient  volontières  leur  consentement  :  filias 
iominorum  ad  sua  vota  inflectunt,  quœ  uUro  consenserunt  (Matth.  II, 
17,  19).  Vladislav  Herman,  firère  du  roi,  prit  alors  en  mariage  une 
Bile  de  peuple  (ancillam),  une  kmetone  qui  lui  mit  au  monde  le 
premier  né  Zbigniev.  Boleslav  le  hardi  accourut  de  son  expédition  et 
prenant  le  parti  du  peuple,  répétant  :  plèbe  remota  quid  rex  eril!  in 
9UOS  bellum  ab  hostibus  iransiulit  (Matth.  II,  19).  Il  sévit  contre  quel- 
qiies-«ns  des  seigneurs  :  convocato  totius  regni  concilio,  prœcipuos  et 
ts%aiores  capitis  abscissione  damnauit  (vita  seti  Stanislai  ,15):  mais  il 
ii*a  pu  arrêter  les  excès ,  quand  le  peuplé  en  colère  déshonorait  les 
fiens  conjugales  des  lekhites,  quanJ  populus  vix  expugnatus,  fut 
exposé  à  la  vengeance ,  pro  singulari  tem£ritate ,  singularibus  perdidere 
^suppliciis  (Matth.  II,  19).  Boleslav  voyant  que  le  peuple,  vix  expu-- 
^[nalus ,  ne  pouvait  plus  résister ,  cum  nullus  rusticorum  fugilioo 
i^iediret,  patribus  invisus  (1079),  Vngariam  secedit  (Gallus,  I,  â9; 
Matth.  II,  19). 

Malgré  la  victoire  et  le  châtiment  particulièrement  infligé,  Tagita- 
tion  continuait  longtemps,  énervant  lentement  la  vitalité  populaire. 
¥ladislav  H^rman,  élevé  au  trône  de  son  frère  par  les  lekhites,  a  dû 
répudier  sa  femme  et  renier  son  premier  né.  Mesko  fils  de  Boleslav , 
rappelé,  périt  empoisonné  (1089).  Toia  Polonia  lugebat  (eum),  sicut 
mater  uniH  mortui  filii  :  rustici,  pastores,  artifices,  operatores,  pueri 
et  puellœ,  servi  et  ancillœ.  (Gai.  I,  29).  Reparut  cependant  sur  la  scène 
politique    (1095),  le  bien  aimé  Zhigniev:  le  tout  puissant  palatin 
Sieciekh,  ignobiles  nobilibus  prœponebat  (Gai.  II,  4,  16).  LUndolant 
Vladislav  Herman  et  le  misérable  Zbigniev  témoignaient  une  singu- 
lière prédilection  pour  la  Mazovie  et  la  Kouiavie  qui  donnaient  tant  de 
ibrce  à  Maslav.  Une  sombre  agitation  préparait  un  triste  dénouement. 
lia  puissante  cité  Krouschvitza  (109G)  succomba  presque  rasée;  les 
postes  avancées  des  Pomoraniens ,  chez  lesquels  la  question  populaire 
^  concentrait  en  dernier  lieu ,  cédaient  et  les  plus  formidables  posi- 
tons maritimes  (1105-1121)  tombaient  dans  les  mains  des  lekhites. 

25.  Les  Pomoraniens,  comptés  au  nombre  des  peuples  lekhites, 
>îen  que  de  la  même  nationalité  que  leurs  frères  Polaniens,  formaient 


65K  SLÀTIA,  95. 

«ne  spécialité  à  part,  autant  par  leur  situation,  que  par  la  direetion 
qu*ayait  prise  chez  eux  la  marche  de  la  civilisation  et  des  relations 
extérieures.  Éloignés  de  la  sanglante  propagande  du  christianisme, 
séparés  de  la  Pologne  par  d'immenses  forêts  vierges,  à  peine  étaient- 
ils  liés  par  quelques  pactes  convenus  qui  les  obligeaient  de  payer  oo 
subside ,  d^'assister  à  quelles  expéditions  et  de  la  part  de  la  Pologne , 
on  ne  sait  pas  s'ils  eurent  de  secours  obligés. 

Par  leur  position  maritime ,  ils  se  trouvaient  cependant  exposés  aux 
irruptions  étrangères.  Le  danois  Harald  blaatand,  secondé  par  le 
suédois  Stirbiorn,  vers  980,  prirent  une  position  forte  dans  une  île  de 
l'embouchure  d'Oder.  Ils  l'appellèrent  Hymsburg,  Jomsburg  (Jomswi* 
kinga  saga,  25;  knyllinga,  1  ;  Svain  Aagesen,  ap.  Langebêk,  I,  p.  51  ; 
Saxo,  X,  p.  182),  position  très-commode  pour  la  piraterie  et  pour  les 
expéditions  maritimes  des  wikings.  L'organisation  que  lui  a  donné 
(vers  988),  Palnaioke  (mort  vers  990),  n'était  pas  de  longue  durée  : 
sous  son  successeur  Siguald ,  la  force  des  wikings  fut  brisée.  Jomsburg 
rentra  sous  l'autorité  directe  de  Danemark.  Knout  le  grand  l'a  confié 
(en  1050)  à  son  fils  Sven,  qui  l'abandonna  allant  (1054)  en  Norvège, 
(Knout  mourut  1056).  Les  Pomoraniens  recouvrant  cette  possession  en 
firent  une  grande  et  commerçante  ville  Iulin  ou  Wolin.  Si  les  danois 
depuis  Magnus  (mort  1048),  jusqu'à  Nicolas  (1107),  cherchaient  à 
regagner  leur  station,  ce  -n'est  pas  qu'ils  se  seraient  emparés  de  la 
cité,  mais  qu'ils  reprenaient  une  position  qui  pouvait  inquiéter  les 
Pomorans  (45). 

Quand  Otto  III,  dans  l'année  1000,  érigeait  un  évcché,  m  partibus 
infidclium,  à  Kolberg,  c^était  un  acte  diplomatique,  par  lequel  il 
reconnut  la  souveraineté  de  Boleslav  sur  ce  pays.  En  elDfet,  l'autorité 
de  Boleslav  et  des  rois  de  Pologne  n'était  point  désavouée  par  les 
Pomorans  :  mais  ils  restaient  fidèles  à  leur  cuite  national  et  à  leurs 
institutions.  Dans  leurs  sanctuaires  restaient  debout  les  idoles , 
sculptoria  arle  incrcdibili  pulchritudine  cœlala  (vila  Ottonis  bamb...). 
Dans  la  cité  Iulin  flamboyait  olla  Vulcani  (znitsch);  est  sane  maxima 
omnium  quas  Europa  claudit  ciuilalum;  urbs  mercibus  omnium  septen- 
trionalium  nalionum  locuples  ;  quam  incolunl  Slavi  cum  aliis  gentibus 
grœcis  (de  Novogrod) ,  et  barbaris  (Nordmannis ,  Estonibus ,  Prussis) , 
nam  advenœ  Saxones  parem  cohabilandi  legem  acceperunt,  si  tamen 
christianitatis  litulum,  ibimorantes,  non  publicaverint ,  (Adami  brem. 
hisl.  ecclcs.  cap.  (G6)  12). 


{iîi)  Die  Ziigc  dcr  Danon  naiii  wndcn,  von  X.- M.  Tetorscn ,  nl)or»otEt  von  C.  t'inkiack  Ilolm 
ft'U\,  dans  los  mcmoiros  dos  autiqnaircs  du  nord,  18i0,  p.  201»  et  suivanlcs. 


SLÂTL4,   8l^,  65 

La  prospérité' des  Pomorans  grandît  par  mer  et  par  terre.  On 
ignore  comment,  par  des  forêts  inaccessibles,  ils  prirent  de  fortes 
positions  tout  le  long  de  Notelz;  profitant  des  guerres  civiles,  ils  se 
barrèrent  de  TOder  jusqu'à  la  Yistule,  contrariant  l'esprit  lekhite. 
Da  temps  de  Zbigniev  et  de  Boleslav  III ,  les  Polonais  ne  possédafient 
au  delà  de  Notetz  qu'un  seul  Zantok  re^^custodia  et  clavis  (Gai- 
tas,  II,  17).  Les  castella  Velun  (Gall.  II,  48),  Czarnkov  (II,  44), 
Ustie  (II,  47),  Naklo  (I,  5;  III,  i,  26),  couvraient  les  frontières  des 
Pomorans;  le  plus  formidable  Naklo  gardait  un  oppidum  (Gall.  I,  3). 
Sur  le  bord  de  la  Yistule  ils  avaient  oppidum  Wysegrad,  castellum 
iUtid  in  angulo  silum  fluviorum,  Mazovienses  per  Wyslam  fluvium 
navigio  veniehant  (Gall.  III,  28).  De  l'autre  côté  des  frontières 
Hedzyrzecz  castrum,  ayant  des  oppidans  était  en  possession  des 
Pomorans  (Gall.  II,  14). 

Les  Polonais  ayant  pénétré  dans  l'intérieur  rencontraient  partout 
des  places  munies  :  seplem  castellis  acquisilis  (Gall.  III,  4),  (n'a  castella 
cepit  (18),  aliud  castrum  (26);  castrum  Bytom  (II,  ol).  Pour  y  arriver 
il  fallait  se  frayer  le  chemin  par  des  coupes  (ic). 

Le  chef-lieu  des  Pomorans  était  Bialygrod  :  ad  urbem  regiam  et 
egregiam  Albam  nomine  pervcnissel...  civitas  (Gall.  II,  ^2),  in  medio 
terrœ,  civitas,,.  Alba,,,  urbs  quœ  quasi  centrum,  terrœ  médium  repu- 
iatur  (ir,  59),  située  sur  Persanla,  à  l'embouchure  de  laquelle,  urbs^ 
civitas,  Cholberg,  Kolobrjega,  non-seulement  gardée  par  un  ca^^rum 
mari  proximum,  mais  munie  du  côté  de  la  mer  et  de  la  terre; 
entourée  de  suburbia;  urbs  opulcnta  divitiis ,  munitaque  proxidiis  ; 
divitia  suburbii,  maritimes  divitiœ,  opes  equorcas  (Gall.  Il,  28).  Cité 
émule  de  celle  de  Iulin,  fut  prise  en  1107.  Iulin  ne  fcsail  pas  tant 
de  résistance ,  Ulinum  civitas  dei  summi ,  a  christianis  capta  est 
(relatent  à  Tannée  1099,  les  annotations  du  manuscrit  de  Santko, 
p.  15,  a;  la  date  paraît-élre  anticipée).  Les  Pomoranicns  défendaient 
leur  sol  pied  à  pied.  Enfin  Boleslav  III,  profitant  de  l'hiver  rigou- 
reux (1121),  traversa  la  rivière  Rega  et  les  marais  gelés  et  s'empara  de 
la  cité  Steltin,  considérée  pour  la  capitale  et  réputée  imprenable 
(Sefridi,  vita  Ottonis  bamb). 

Un  pacte  détermina  une  dépendance  plus  intime  des  Pomoranicns. 
Ils  devaient  payer  500  marcs  d'argent  annuellement,  armer  de  chaque 
dixième  chaumière  un  contingent  et  devaient,  sous  leurs  propres 


(46)  Per  dcscrlum  Cholberg  vcniiinl  (GaU.  H,  Î8);  ncirms  qnod  (4124),  transihaimis  nnlli  ante 
raortatinm  pcrvium  orat,  nisi  qiiod  snporioribns  annis  (4107)  dux  Poloni.v,  sectis,  sigoatisquo 
arboribus  viam  cxcrcitus  oxcidcrat  (Scfr.  vi^a  Ottonis  bamb.)- 


64  SLÀTU,  25. 

princes,  gouverneurs  et  castellans,  compter  sur  auxUia  Polononmi 
(Scfridi ,  vita  Oit.  bamb.  11,29).  Otton,  évoque  de  Bamberg  (1124), 
alla  convertir  et  baptiser,  il  visita  Piritz,  Kamin,  Julin,  Steltinavec 
succès  (Sefr.  vita  Ott.  H,  15,  25,  25;  Helm.  I,  40,  10),  institua  à  si 
place  un  évéque  pour  ^guel  un  évéché  était  fondé  jusqu'à  Leba, 
par  laquelle  il  était  sépare  du  diocèse  de  Krouscbvitza ,  qui  s'étendait 
sur  la  Pomeranie  orientale  de  Dantzik,  baptisée  depuis  longtemps 
(Sefr.  vita  Ott.  II,  40;  Dregeri,  cod.  dipL  pom.  t.  I,  1,  2;  Lunig, 
t.  II.  Anhang  p.  4). 

La  soumission  et  le  baptême  des  Pomoraniens  énerva  Tesprit 
populaire.  L'agitation  s'était  enfin  fatiguée  et  épuisée  chez  les 
Polaniens;  les  collisions  entre  les  iKiemianîe,  terrigenaè,  piquaient 
une  autre  direction  :  mais  la  séparation  sociale  parmi  les  indigènes 
ne  pouvait  s'accomplir  aussitôt.  La  possession  des  terres  et  la  con- 
dition civique  ne  les  distinguaient  que  trop,  mais  les  liens  de  famille 
les  rapprochaient  encore.  La  doctrine  de  Tinceste  :  muliereê  ingênum 
servili  prostitutœ  incesiui  (Matlh.  II,  21),  ne  pouvait  prendre  d'assez 
profondes  racines.  Quand  même  elle  opérait  la  triste  séparation  en 
castes,  il  fallait  plusieurs  générations  pour  désapparenter  les  terrigênm 
kmetones,  de  ceux  de  bene  nali  et  possessionati  leckUœ,  qui  se  quali- 
fiaient de  z  lachcic,  slechcic,  slachla,  schlachta,  comme  issus  et 
descendants  des  lekhs.  Les  slaves  russiens  appelaient  toujours 
nation  par  leur  nom.  Dans  l'intérieur,  l'état  qu'ils  formaient  n\ 
pas  de  nom,  il  formait  un  état  slave  de  plusieurs  peuples. 
Allemands  et  à  la  suite  la  cour  de  Rome,  l'appelaient  Polonia 
toutes  les  provinces  réunies  aux  Polaniens,  acceptaient  ce  nom. 
Pologne  seule  dans  les  vastes  espaces  au  nord  des  karpates, 
tant  de  secousses  a  su  établir  un  état  indépendant,  animé  par  l'éL 
ment  indigène  qui  se  concentrait  dans  les  descendants  des  lechiteob 
mais  son  existence  chancelait  encore  quoniam  habuU  regem,  m 
autem  ducibus  gubernaiur;  servit  et  ipsa  par  l'humili&nt  traité  <!.« 
Kargov  1157,  sub  Iribulo  impcratoriœ  maieslatU  (Helm.  I,  1,  9, 1  O^; 
champion  de  l'église  et  de  l'empire,  disposée  à  fournir  pecunkm^  H 
milites  in  auxilium  romanœ  ecclesiœ  (Gall.  III,  2),  se  transformant  ^n 
préjudice  du  peuple,  elle  n'était  plus  capable  d'intervenir  dans 
affaires  des  Yinules  et  de  sauver  leur  existence  (47). 

26.  Les  Yinules  restaient  encore  debout,  souvent  tributaires,  (fj 

(47)  Sur  le  sort  ultérieur  du  peuple  voyex  me»  considérations  sur  Tétai  politique  de  VuMsi^^=sa^ 
Pologne  et  sur  l'histoire  de  son  peuple,  qui  se  trouTentdans  mon  histoire  de  Pologne ,  p«k»l »  ^éeà 
Lille.  4844.  • 


SLÀVIA,  S8.  ^ 

v»  Coroéft  du  christianîsBM ,  ils  étaient  pv^qtie  hidéfrendairts  » 

lient  leur  culte  national  et  leur  organisation.  On  à  pu  remar- 

quelques  divisions  parmi  les  chefs  des.  Obotrites,  mais  partout 

IFS  bonne  harmonie ,  par  laquelle  prospérait  Tonion  des  puissants 

abes  Lutioes.  Tout  d'un  coup ,  ters  1050,  de  part  les  Kizins  et 

Kiiïes  éclatent  des  plaintes  contre  la  domination  oppressive  â<^â 

Redares  Dolences.  Les  séditions  sont  suivies  d'une  guerre  achar- 

les  Zrezpanès  restent  vainqueurs.  Les  Redares,  humiliés  et 

lués  appellent  Tassistance  des  Obotrites,  des  Danois,  des  Alle- 

Is  et  écrasent  les  Zrezpaniens,  énervant  leur  propre  vitalité. 

II.  f,  ai).  Véritable  suicide  de  la  nation.  La  sainteté  du  lieu 

encore  intacte ,  mais  les  Redares  et  les  Lutices  ne  reparaissent 

avec  leurs  drapeaux,  leur  existence  est  à  peine  mentionnée 

i*à  la  ruine  totale. 

ivarice  insatiable  des  Allemands  (dit  Helmold),  empêchait  tou- 
.  rétablissement  du  christianisme.  Mais  Tinfatiguable  propagande 
ftlftnt  les  convictions,  faiblit  les  Yinules.  Lorsque  Boleslav  III 
t  à  Teuibouchare  de  TOder  (1121),  les  Lutices  et  les  Rougs  se 
ent   sous  la  protection  de   cet  apôtre  de  Tévangile.  Otton  de 
berg  (llâ5)  prêcha  chez  les  Lutices,  (vita  Otionis...).  Peut-être 
sfHte  le  sanctuaire  redarien  fut  silencieusement  démoli  :  les 
^  restaient  payons.  L'empire  inquiet,  réclama  (1155)  les  rodé- 
es, tribulum,  de  la  possession  qui  s'est  soumise   d'elle-même 
>  frising.  Vif,   19).  La  croix  était  implantée  dans  le  centre,  et 
çros  nuages  de  croisade  présageaient  de  terribles   orages.    Le 
nier  essai  (1147),   n'avait  pas    de   succès  (Helm.  I,  62;  SaxO 
a.  XIV,  p.  255).  Mais  les  Allemands  et  les  Danois  jurèrent  la 
ruction  des  Vinules;  les  chefs  couronnés  et  mitres,  les  évêqucs 
^eaient  les  expéditions  successives.  Les  Vinules  se  préparaient  à 
iter,  à  soutenir  les  derniers  combats,  sans  alliés,  sans  secours. 
hez  les  Vagires,  les  Allemands  réussirent  (1151-1155)  à  se  for- 
r  et  démolir,  non  sine  metu,  le  sanctuaire  de  Prove  (droit,  jugé 
réme)  et  recesserunt  Slavi  qui  kabitabanl  in  oppidis,  et  ven^unt 
^mes  et  habitaverunt  illic,  Defeceruni  que  Slavi  ptmlaliiH  in  terra  : 
nt  ergo  opus  dei  in   Wagirensi   terra,   (Hêlm.  I,   85).   Albert 
rs  (1152-1162)  soumit  les  Brizans  et  les  Stoderans,  dépeuplant 
!«  pays  :  ad  uUimum  deficientibus  sensitn  Slavis,  misit  Traieetum 
d  loca  Rheno  conligua  ;  insuper,  ad  eos  qui  paliebantur  vint  maris , 
landos,  Seelandos  et  Flandros  et  adducil  ex  eis  populum  magnum 
is ,  et  habitare  eos  fecit  in  urbibus  et  oppidis  Slavorwn  :  ainsi  que 
Hme  aux  évêchés  de  Brandeburg  et  Havelberg,  dont  ils  étaient 
III.  5 


66  SLAYIÀ,    37. 

prîYéa,  augmenta  immensément  (Helm.  I,  88).  Le  roitelet  PribisU^r 
sauva  son  peuple  :  il  en  fit  cadeau  au  même  markgrave  (fragm.  chron* 
brand.  ap.  Mader,  p.  264). 

La  terre  des  Obotrites  était  assez  dévastée,  lorsque  (1164),  à  Taide 
de  Dieu,  le  pieux  Henij-le-lion  allait  consommer  Tœuvre  :  ierrê 
Obotrilorwn  et.finilimœ  regUmes,  navissimo  hoc  beUo  in  solitudinem 
redaclœ.  Si  quœ  Slavorum  extremœ  remanserant  reliquiœ ,  tantœ  inedia 
confecti  sunt,  ut  congregatim  ad  Pomeranos  sive  ad  Danos  confugen 
congerentur ,  q%ios  illi ,  nihil  miseranles ,  Polonis ,  Sorabis  atque 
Bohemis  vendiderunt.  De  cette  façon  sur  le  continent  :  omne  robur 
Slavorum  consumpsisset  usque  ad  finem  (Helm.  II,  5).  Cependant  les 
Danois  avaient  de  longs  démêlés  avec  les  petits  cbefs  des  villes  mari- 
times, Rostok,  Bart,  Yolgast.  Leur  héros,  Tévéque  Âbsalon,pla8 
humain  que  les  Allemands,  ne  voulait  point  exterminer  le  peuple 
qu'il  appelait  à  la  foi.  Les  insulaires,  après  une  résistance  prolongée, 
consentirent  en  1168  à  la  destruction  de  leurs  idoles  et  se  soumirent 
âux  Danois  (Helm.  II ,  12).  Le  génie  slave  expira  par  une  longue  et 
douloureuse  agonie;  malgré  la  déconfiture  des  forces  vitales,  il  n^a 
succombé  qu'après  une  résistance  opiniâtre  et  désespérée. 

La  Pologne  n'a  rien  fait  pour  sauver  de  la  destruction  les  frères  qui  ^ 
se  jettaient  sous  sa  protection  :  après  tant  de  permutations  qui  Tont^ 
agitées,  elle  était  faible.  Le  baptême  n'a  pu  cependant  préserver 
race  slave  de  l'aggression  civilisatrice.  A  peine  le  baptême  mit 
silence  les  fêtes  populaires  aux  environs  des  embouchures  de  l'Oder*-^ 
les  princes  chrétiens  se  disputaient  le  territoire.  Les  ducs  de  Pomérani*^ 
partageaient  les  dépouilles,  exposés  eux-mêmes  aux  attaques  des  Danoï 
(1170-1185).  Ils  fesaient  partie  de  la  Pologne  par  les  pactes  de  soumit 
sion  et  on  ne  voit  pas  d'auxiliaires  polonais ,  quand  ils  furent  forcés  à 
soumettre  aux  étrangers. 

27.  Le  génie  slave  allait  périr,  étoulOfé,  accablé,  écrasé  :  mais 
dégénérait  pas  encore  dans  le  sentiment  de  ses  enfants.  Ce  n'est  q_ 
dans  les  domaines  des  Rouriks-rouss  que  des  symptômes  de  dégéo 
ressence  commençaient  à  se  déclarer.  Encore  n'était-ce  pas  dans 
cités  républicaines  qui  l'ont  concentré  dans  leurs  soviet,  dans  le 
bruyantes  vietza  :  mais  c'était  parmi  leurs  enfants  déversés  dans 
colonies  ultra-sylvaines,  zaleskie,  que  la  dénaturalisation  de  l'es 
avait  lieu.  Encore  là  (à  Vladimir  sur  Klazma ,  à  Souzdal  et  aillei» 
celle  génération  slave  dépaysée,  cédant  à  l'impulsion  innée  de  sa  ra 
agitait  un  certain  temps  son  esprit  populaire  :  mais  bientôt  le  lin<^^ 
byzantin  refroidit  son  âme,  pervertit  son  sentiment  en  aveugU 


SLA  VIA,  «S.  67 

leur,  et  l*autocratie  s'y  forma  jurant  ranéantissement  des  libertés  :  et 
la  sainte  Kiiov  fut,  1169,  sa  première  victime.  Le  glaive  matricide 
ëgoisa  ensuite  ses  limbes  pour  porter  la  mort  et  exterminer  successive- 
ment partout  Tantique  vitalité.  Plus  d'une  fois  brisé ,  il  se  relevait  pour 
continuer  ses  ravages.  Égorgeant  le  peuple  et  ses  institutions  concen- 
trées dans  des  cités,  il  rencontra  les  lekhites.  La  vitalité  de  ces  derniers 
devait  se  développer  spécialement  dans  les  apanages  des  Piasts  :  mais 
«lie  inspirait  et  gagnait  les  apanages  limitrophes  des  Rouriks«  La  sauvage 
autocratie  ultra-sylvaine  n'a  pu  franchir  les  ruines  et  les  décombres  de 
£iov,  lorsque  l'esprit  de  Pologne  circulait  à  travers  les  déserts  jusqu'au 
Dniepr  :  pour  lui  il  n'y  avait  pas  des  limites.  La  Pologne  au  nord  des 
ICarpates,  unique  état  pur-slave  dans  sa  faiblesse  matérielle,  n'avait 
pas  des  frontières. 

Serbie. 

28.  Au  sud  des  Karpates  existait  encore  un  autre  état  slave  qui 
lardait  la  pureté  de  sa  souche  :  c'était  la  Serbie  dans  les  parties  ultra- 
danubiennes.  Elle  aussi  n'avait  pas  des  limites.  L'âme  encore  crue, 
'*ribîbée  de  quelques  pratiques  byzantines,  fatiguée  de  l'indolante  et 
^^éprisable  suprématie,  étouffant  ses  commotions  intestines,  parut  à 
î^^xtérleur  vivace  et  agile.  A  la  suite  des  dernières  collisions  intestines, 
^^^rs  llâO,  vint  sur  la  scène  politique  la  famile  de  Bêla  Ouroscb,  qui 
l^rit  un  ascendant  au  point  qu'elle  put  relever  et  diriger  avec  éclat 
^"^csprit  indépendant,  concentrer  et  régler  l'intérieur,  former  un  état 
indivisible.  Une  seule  portion  de  la  Serbie,  nommée  Bosna,  ducatus, 
l>anatus,  resta  moins  unie ,  disposée  à  former  un  pays  à  part  (Çinnam , 
l.  a.  1154). 

Etienne  Nemaoia  (descendant  de  Bêla  Urosius),  zoupan  de  Raska, 
!lait  peut-être  encore  confirmé  par  l'empereur,  1165,  dans  la  charge 
la  grande  zoupanie.  Mais  il  était  déjà  depuis  plusieurs  années, 
(4159),  élevé  par  les  Serbes  eux-mêmes  à  cette  dignité  suprême  :  il  lui 
fallait  seulement  combattre  les  partis  de  ses  frères  aînées  pour  con- 
solider son  autorité.  Ensuite  il  entreprit  de  recouvrer  les  usurpations 
de  l'empire  et  d'étendre  les  frontières. 

*  Son  fils  Sava,  saint  évêque  de  Serbie,  relate  dans  la  biographie  de  son 
père  (en  1208),  que  le  domaine  paternel  fut  agrandi  par  l'acquisition 
de  la  terre  maritime  (primorskiie  zemlie)  Zetu,  avec  toutes  les  villes  et 
depuis  Rabna  jusqu'aux  deux  Pilota  (Poulati).  C'est  la  partie  septen- 
trionale de  la  zoupanie  dioklcate.  Nomanla  l'a  délivré  du  pouvoir  de  ses 
frères  (poiibszuiu  nekoïda  et  nasiliia  svoieie  iemu  diedini).  Ensuite  par 
t'acifuisition  faite  sur  les  Grecs  des  terres  :  Patkovo,  Khvostno  et  tout  U 


08  SLAYIA,  «7. 

Podrîiniie  (tout  le  pays  de  Drin  noir  près  de  Skutari  et  Zadrim),  Koslr^c, 
DrYkovinu  (Drinato?),  Sitnitzu  (de  la  rivière  Silnitza),  Lab  (Laabia  snr 
une  rivière  qui  se  perd  dans  la  Morava  orientale),  Liplian  (Lipeniom), 
Grbotschicu  (partie  monUgneuse  de  Gliubotin  dagb),  Riekc  (Sahorika 
ou  Soukha  rieka),  Ousckod  (Ouskoup,  Scopi,  qu*il  ruina  en  4492);  et  le 
Pomoravie  (le  pays  de  basse  Morava),  ZagrUatu  (Gherlitza  et  Groschlitza 
près  de  Krabouievatscb),  Licvtsche  (de  la  rivière  Levazna  qui  se  jette 
dans  la  Morava),  Belitziu  (mscrit.  ap.  Schafarj.  50,  note  49,  p.  614;  52, 
p.  662). 

Les  excursions  de  Nemania  avançaient  certainement  pins  loin ,  visi- 
taient les  environs  de  Timok,  descendaient  Vardar,  mais  les  acquisitions 
plus  étendues  furent  réservées  pour  ses  successeurs.  Diaprés  la  relation 
qu'a  donné  son  fils  sur  les  acquisitions  positives,  on  voit  qu'il  avait 
assez  à  recouvrer  dans  le  pays  de  Drin ,  partie  méridionale  de  la  zoopa-* 
nie  diokleate ,  où  l'empire  s'était  saisie  de  plusieurs  positions  que  les 
Serbes  possédaient  antérieurement;  qu'à  l'exception  de  la  zoupaoie 
diokleate,  Nemania  n'avait  aucun  embarras  de  la  part  de  zoupanies 
maritimes;  qu'il  s'est  emparé  de  tous  les  pays  le  long  de  la  basse 
Morava,  de  ceux  qui  sont  enjambés  par  Ibar  et  Morava  orientale,  enfin 
du  cantou  de  Ouskoup  en  Macédoine.  Ainsi  commence  la  puissance 
de  la  dynastie  rasse,  raske,  de  Ouroscfa  Nemania  à  illustrer  la  Serbie. 
Une  monarchie  dans  son  genre  prend  sa  naissance.  Le  grand  roi 
Dragoslav  (1257)  prit  le  nom  d'Ourosch  d'après  l'exemple  de  ses  aîeox  : 
Ouroscb-le-grand. 

Ce  n'est  qu'avec  la  plus  grande  réserve  que  je  hasarde  l'explication  de 
quelques  assertions  arabes,  par  ce  nom  d'Ourosch.  Arzakhel  en  Espagne 
vers  1170,  connaît  une  capitale  d'un  roi  Erath;  la  position  qu'il  loi 
assigne  par  les  longitude  et  latitude  géographiques  répond  à  la  position 
de  la  Serbie,  où  le  nom  d'Ourosch  (Erath)  était  honorifique  de  la  dynas- 
tie dont  les  dynantes  résidaient  maintes  fois  à  Rasa. 

Ibn  Saîd,  1276,  relate  une  capitale  jlp  Araz  d'un  des  rois  slaves da 
pays  occidental  ;  ce  roi  s'est  rendu  maître  de  tous  les  pays  des  Slaves, 
des  Allemands ,  des  Hankars  (Hongrois)  et  des  Baschkirds.  La  position 
d'un  semblable  roi  se  trouve  très-bien  en  Serbie,  Ourosch-le-grand 
avait  peu  de  démêlés  avec  la  Hongrie,  mais  il  en  avait  et  il  combattait 
les  Allemands,  quand  il  secourut  la  Hongrie  contre  les  Bohèmes.  An 
reste,  les  combats  se  relatent  à  des  Ourosch,  les  prédécesseurs  qui 
avaient  des  démêlés  avec  les  Slaves  (Rroales)  et  les  Baschkirs  (Tatars 
Mongonx.  —  Ibn  Saïd  ajoute  que  la  capitale  Araz  est  célèbre,  assez 
bien  rorlificc,  an  milieu  d'un  grand  lac  salé,  en  sorte  qu'on  ne  peut  pas 
y  passer  que  par  une  seule  chaussée  artificielle;  enfin  qu'elle  est  située 


SLÀYIA,   t7.  69 

r  rocéao,  très  au  uord  d'après  la  latitude  géographique  de  SS''  50\ 
Ml  lui  assigne.  Une  semblable  situation  ne  convient  ni  à  la  résidence 
isa,  ni  à  la  Serbie  en  général. 

Il  faut  cependant  remarquer  qu*un  lac  baignant  les  murs  d*une  ville 
lit  été  inventé  à  la  curiosité  des  géographes  pour  lesquels  la  Serbie 
(tait  longtemps  inconnue.  La  carte  du  xv*  siècle,  reproduite  par 
elin  1515, 1520,  ensuite  par  Villanovano  1555,  appelle  ce  lac  Sver- 
^o ,  situé  au  nord  de  Sitnitza ,  comme  un  lac  sans  issue.  Gastaldo 
prit  qu'une  rivière  sort  du  lac,  se  dirige  à  Test  et  perd  ses  eaux 
as  Ibar,  et  que  la  ville  prénommée  est  située  au  milieu  de  ce  grand 
•  Mercator,  Hond,  Janson,  Bleauw,  Witt,  et  tous  ceux  qui  les 
liaient,  ne  négligeaient  le  lac  Suercegno,  Suersegno  dans  sa  propor- 
Q  et  situation,  avec  sa  ville  aquatique  Sitaîza,  Sitinza,  Sitniza  et  la 
ière  qui  s'échappait  vers  le  fleuve  Ibar.  Hommann  inscrivit  le  nom 
la  rivière  Sitnitza.  On  croyait  donc  à  Texistence  de  ce  lac  au  milieu 
xYUi*  siècle  et  Matthias  Seutter  à  Augsbourg  précisait  avec  soin  ses 
mes  et  sa  position  qui  tombe  aux  environs  de  Usitza  et  Posega.  La 
^yance  à  Texistence  d'une  ville  sur  un  lac  dans  la  Serbie  était  assez 
créditée,  malgré  l'école  française  qui  l'avait  réniée  depuis  Sanson; 
cette  <;royance  remonte  vers  le  moyen  âge,  comme  si  elle  dérivait 
kraz  capitale  du  roi  Erath  ? 

Le  lac  salé  peut  se  réduire  facilement  à  un  fossé  de  la  place  forte  : 
nîs  Foçéan?  et  la  latitude?  Sa  position  maritime  sur  l'océan  est 
ss-contestée  par  celle  du  lac  salé  :  mais  la  latitude  géographique  et 
climat?  Serait-on  autorisé  de  présumer  une  méprise  d'Ibn  Saïd  qu'il 
trait  inventé  la  latitude    .«     J  de  la  latitude    «  ^  qui  désignerait 

climat  arabe  des  Ourosch  ?  ^  ^ 

J'ai  fini  l'examen  de  la  Slavonie  des  x"*  et  xu*  siècles  :  il  peut 
rvir  d'introduction  à  la  description  sicilienne  d'Edrisi,  dans  laquelle 
I  a  beaucoup  sur  la  Slavie  du  xui*  siècle. 


ANALYSE 


DE    PLUSIEURS    SECTIONS 


DBS   Tl*   ET   TU*   CLIMATS 


DE   LA   DESCRIPTION 


D'EDRISI. 


CNOM.   XT,   17. 


(Voyez  :  1,  les  triangulations,  n«  40, 43,  de  Tatlas;  2,  tabula  itineraria  e 
codice  asseliniano  d9  41  en  deux  planches  de  Tatlas  ;  3,  trois  cartes  expli- 
catives, qui  se  trouvent  dans  Vatlas.) 


ORDRE  DES  MATIÈRES. 


Introduction,  i-A,  version  de  Jaubert,  noms  propres  ;  5-8,  carte  itinéraire. 
—  Angleterre;  9-10,  ses  positions.  —  France;  11-12,  sa  triangulation.  — 
Allemagne;  15,  capitale,  14-15,  provinces,  pays  de  Louvain;  16,  Saxe,  17, 
Frise  et  Bavière.  —  Karintia,  Dalmatia,  Djeioulia  ;  18-19,  étendue  de  Karin- 
tie;  20-22,  Danube  à  l'est  de  Belgrad;  25-24,  Slavonie  ;  25-26,  Dalmatie;  27- 
28,  Djetoulia.  —  Berdjan,  Romania;  29-51,  les  environs  de  Berisklava,  52, 
de  Kalimalaïa,  55-56,  du  Danube  vers  son  embouchure,  57-59,  triangulation 
de  la  Romaine.  — Macédoine;  40-42,  positions  et  routes,  45-44,  canal  de 
Gonstantinople ,  4S1-47,  pays  de  la  description  edrisienne.  —  Hongrie;  4849» 
ses  positions. — Boemia;  50-51,  son  étendue,  52-54,  ses  positions,  55,  son 
existence.  —  Polonia  ;  56-58,  connue  à  rétranger,  59,  son  étendue  et  ses  po- 
sitions.— Ritssie  méridionale;  65-66!,  ses  positions.  —  SXrancItnatne  nord;  67, 
Danemark,  68-70,  positions  autour  delà  baltique.  —  Jïtime septentrionale; 
71-72,  inconnue.  —  Rous  tourk,  Nibaria;  75-76,  trois  hordes;  77,  positions 
des  Ibaria  et  fleuve  Rousia.  — Komani;  78,  établissement  des  Komans,  7&-80, 
étendue;  8i,  péninsule;  82-85,  mer  Manitasch,  84,  Petakbia  chez  eux,  85, 
Kaptschak  et  idiome.  — Bartas;  86,  leur  renommée.  —  Commerce;  87-95, 
commerce ,  culture  sociale  spécialement  en  Pologne  et  en  Russie  méridionale, 
antérieures  à  Tépoque  d'Edrisi. 


x 
k 


1 


ANALYSE  DE  LA  DESCRIPTION  D'EDRISL 


i.  Le  savant  Aniédée  Jaubert,  invité  par  la  commissioa  centrale 
de  la  société  géographique,  enireprit  la  version  française  de  la  géogra- 
phie d'Edrisi,  complète  en  ce  sens,  que  rien  d'essentiel  n'y  serait  omis 
(de  la  préface,  p.  10).  Grâce  à  ce  plan,  nous  avons  la  géograpbie 
d'Edrisi  entière  dans  l'impression.  A  mon  avis,  cependant,  il  esta 
regretter  que  le  traducteur  s'est  décidé  d'omettre  quelques  passages 
étrangères  à  la  géographie.  Lorsque  l'auteur  a  jugé  à  propos  de  les 
insérer  dans  sa  description,  leur  publication  était  convenable  et  pou- 
vait être  utile  pour  ceux  qui  s'occupent  d'autres  recherches  et  même 
pour  les  scrutateurs  de  la  géographie,  s'ils  voulaient  porter  leur  vue 
sur  Edrisi  extravagant. 

Lat  version  était  une  tache  ardue,  non  à  cause  de  la  langue  arabe  dont 
les  obscurités  ont  été  victorieusement  surmontées  par  le  traducteur 
versé)  mais  à  cause  des  noms  propres  et  des  chiffres.  Des  milliers  de 
ttiMn&et  des  distances  se  présentaient  continuellement  dans  trois  manu- 
scrits et  dans  l'ancienne  version  latine,  qu'il  fallait  eollatîonner.  Le 
traducteur  le  signale,  observant  qu'un  tel  ouvrage,  composé  dans  les 
ténèbres  dnxif  siècle,  ne  nous  est  par\'enuqu'inftrme,  mutilé  et  transcrit 
par  d'ignorants  copistes  en  caractères  d'écriture ,  où  ïe  déplacement  de 
poiBts  diacritiques  suffît  pour  dénaturer  le  sens  des  mots,  pour  défi- 
gurer et  rendre  méconnaissables  les  noms  propres.  Il  avait  donc  Fnnique 
soin,  wm  de  restaurer  le  texte,  mais  de  le  dégrossir  à  Taide  de  plu- 
sieurs textes  qu'il  avait  à  sa  disposition  et  il  a  annoté  scrupuleusemest 
les  variantes  qui  se  sont  présentées  à  sa  vue ,  il  a  inscrit  avee  effusion, 
près  de  chaque  nom  propre,  le  nom  en  caractère  arabe,  tant  inva- 
riablement répété  que  varié  dans  sai  répétition.  Ce  soin  est  inappré- 
ciaMe  pour  les  investigateurs.  Nous  pensons;  que  le  traducteur  n*a 
p9i»  donné  le.  même  soin  aux  distanee»,  aussi  svsceptibles  d'erreurs , 
chea  Ves  e!0f)iste8. 

Noua  pensons  que  les  ténèbres  du  xu*  siècle  n'ftv»ieBt  aucune 
ixifloence  sur  l'exactitude  des  copistes,  qui  devaient  respecter  et 
Conserver  ce  (pie  Touvraige  teur  présent»il,  pour  nous  laisser  juger 


74  IBDRISI. 

Tauleur;  et  tout  porte  à  croire  (fue  les  copies,  difficiles  à  la  lecture  à 
cause  de  récriture,  sont  assez  studieuses  et  exactes.  Elles  ne  sont 
pas  entières,  parce  qu'elles  suppriment  des  passages,  elles  abrègent 
maintcfois  le  texte,  mais  sans  vouloir  travestir,  rectifier,  elles  ren- 
daient ce  qu'elles  avaient  devant  leur  plume,  avec  cette  lumière  que 
robscurité  du  xu*'  siècle  accordait  également  à  Tauteur  et  à  ses 
copistes.  Il  y  a  dans  chacune  des  copies  des  erreurs  évidentes,  mais  à 
voir  le  peu  de  variantes  données  par  le  traducteur  dans  les  noms 
propres  et  dans  le  sens  du  texte,  il  est  certain  que  les  copistes 
n'étaient  pas  tout-à-fait  ignorants,  qu'ils  comprenaient  ce  qu'ils 
copiaient,  les  copies  étant  très-conformes,  et  il  nous  ont  transmis  la 
production  des  ténèbres  du  xii'  siècle,  mutilée  mais  très-peu  défigurée. 
Dans  les  distances  le  traducteur  a  noté  encore  moins  des  variations, 
ainsi  qu'on  serait  obligé  de  les  considérer  intactes,  comme  provenant 
d'Ëdrisi  lui-même.  Toutefois  nonobstant  les  erreurs,  la  simple  lecture 
des  chlfiVes  se  présente  souvent  incertaine.  Elle  est  pénible  pour  les 
longitudes  et  les  latitudes  géographiques,  surtout  dans  3  et  8  ^  _ 
pour  les  itinéraires  dans  G,  80  et  100  ^'  ^  ^^^  ^  ^ 

2.  Ces  considérations  ne  diminuent  en  rien  les  peines  qu'avait  le 
savant  traducteur  en  débrouillant  la  lecture  du  nombre  aussi  consi- 
dérable des  noms  de  tous  les  pays.  Dans  l'écriture  arabe  négligée, 
coulante,  hâtive,  un  point  éloigné,  omis  ou  enlevé  et  dévoré  par  le 
temps ,  change  le  nom  ou  le  laisse  indéterminé.  Sa  fixation  devient 
impossible  ou  hypothétique.  Le  traducteur  a  déterminé  la  valeur 
des  lettres  pour  la  prononciation  des  noms,  mais  cette  prononciation 
dépend  des  voyelles  qui  l'ont  motivé  de  lire  à^xi,  Rabna  ou  Ribna; 
^»J^  Lovanos  ou  Louns,  (p.  565,  564-,  565);  jjL>J  ^iLJ  égale- 
ment Louban. 

Le  manuscrit  d'Asselin  est  accompagné  de  soixante  neuf  tableaux 
ou  cartes  géographiques.  Le  traducteur  n'a  donné  que  trois  de  ces 
cartes  comme  spécimen.  Sa  version  va  être  enrichie  encore  d*iin 
tableau  offrant  l'assemblage  de  soixante  huit  caries  manuscrites , 
son  savant  confrère  Jomard  s'étant  chargé  de  le  dresser.  C'est  grand 
dommage  que  la  version  soit  privée  de  ces  cartes  :  leur  réduction 
par  l'assemblage  à  nne  trop  petite  échelle,  ne  pouvant  pas  contenir 
toutes  les  inscriptions.  Le  traducteur ,  en  confrontant  les  trois  manu- 
scrits et  l'ancienne  édition,  recourut  rarement  à  ces  tableaux  pour 
les  collationner  avec  le  texte.  Cependant  Edrisi,  dans  sa  description, 
r«nvoit  assez  souvent  le  lecteur  à  ces  cartes  qui  font  partie  intégrante 


INTRODUCTION,  5.  75 

4Je  i'ouyrage  et  dans  la  copie  une  source  abondante  de  variantes  qui 
jcaérltaient  d'être  examinées  par  un  savant  exercé  dans  la  lecture  de 
l'écriture   arabe.    Ëdrisi    lui-même  avait    composé  ces  cartes  pour 
€][ue  le  lecteur  put  d'un  coup-d'œil  et  sans  peine  acquérir  la  connais- 
sance des  voies  et  des  peuples ,  et  ces  carbes  sont  suivies  par  sa 
description.  Elles  contiennent,  en  outre,  quantité  de  noms  qui  ne 
se  trouvent  point  dans  le  texte.  Le  texte,  par  exemple,  mentionne 
-trois  villes  de  Norvège ,  six  places  fortes  du  pays  de  Nibaria ,  sans  les 
nommer;  ces  noms  de  villes  et  de  places  fortes  sont  inscrites  sur 
les  cartes.  La  carte,  autant  que  je  piiis  débrouiller,  mentionne  Bou~ 
logne  en  France  qu'on  chercherait  en  vain  dans  le  texte. 

Pour  nous,  ignorant  la  langue  arabe,  il  est  bien  de  rétléchir  sur 

ces  bizarreries,  qui  résultent  de  la  prononciation  des  noms  par  les 

arabes  et  sur  leur  écriture  en  leur  caractère.  Sans  se  soucier  trop 

<]e  la  prononciation  variée  persane,  turke,  arabe,  maureske,  il  nous 

est  absolument  nécessaire  d'observer  les  lettres  arabes  desquelles  $ort 

l'orthographe  pour  rendre  ou  désigner  le  son  de  la  voix  étrangère. 

Sous  ce  rapport  l'orthographe  arabe  décèle  souvent  une  inconstance 

pénible.  On  y  rencontre  continuellement  le  changement  des  voyelles 

et  l'abondance  des  lettres  intruses;  changement  de  consonnes  et  leur 

transposition;  substitution  de  sons  rauques,  gutturaux,  sifflants  ou 

d'aspiration;  article  ou  consonnes  aspirantes  préposées;  tronquation 

de  syllabes  entières  ou  l'insertion  fragmentaire  :  tout  cela  défigure 

continuellement  les  noms  au  dernier  point.  Rhotakisme,  lamisme» 

elifisme,  sinisme,  nunisme,  betisme,  mettent  à  l'épreuve  l'attention 

de  ceux  qui  s'eflforcent  à  discerner  et  déterminer  ces  noms  pervertis. 

Qu'on  me  pardonne  toutes  ces  expressions  pour  la  plupart  inusitées, 

si  elles  sont  impropres,  elles  n'exagèrent  les  embarras  des  scrutateurs, 

surtout  dans  les  régions  plus  éloignées,  moins  fréquentées  des  arabes, 

dont  les  idiomes  étaient  moins  familiers  aux  arabes. 

3.  Eux-mêmes  connaissaient -l'infirmité  de  leur  idiome  et  de  leur 
écriture  pour  rendre  les  mots  étrangers.  Deux  siècles  plus  tard , 
Aboulféda  rend  compte  des  soins  qu'il  se  donnait  à  cause  de  la  sylla- 
bisation.  Il  inscrivait  les  lettres  en  usage  dans  les  noms  et  ajoutait 
les  d'habthong,  c'est-àrdire  les  notes  orthographiques  pour  signaler 
avec  quelles  voyelles  elles  devaient  être  prononcées.  Puisqu'il  y  a 
des  noms  barbares  que  personne  ne  saurait  prononcer  sans  avoir  les 
consonnes  nettement  écrites,  accompagnées  des  voyelles,  il  observe, 
que  dans  les  noms  vulgairement  connus ,  souvent  le  peuple  substitue 
M  change  les  fatbah  et  dbamma  avec  kesrah;  les  a,  u,  à  la  place  de  e, 


EDRISI. 

OU  te  on  supprime  les  consonnes.  Tabriz,  Tosler,  Bariu,  Tadmor, 
ans  la  prononciation  vulgaire  sont  Tauriz,  Schoster,  BaVin,  Todmor. 
jette  inconstance  de  la  prononciation  décide  Aboulféda  par  la  syllabi- 
»ation  (vcrsio  Reiske,  p.  182,  185). 

Suivant  les  Arabes ,  Venise,  Adrianople,  Genève,  sont  :  Benadikiaf 
Ademoboli  ou  Drinobdi,  Djinibra;  Chalon,  Evrcux,  Langres,  Troyes, 
Paris ,  Dyalotf 5 ,  Abraous,  Lanka,  Arovs,  Abariz  ou  Abarisch;  Arras, 
fleuve  Araxes,  Raiz  ou  elraiz,  Raz;  Orléans,  Olianos,  qui  se  prononce 
aussi  Orlianos;  Provence  est  Brabansia;  Krakov,  Gniezno,  Krakal, 
Djenazja;  Volcan,  borkan.  Ils  peuvent  prononcer  et  écrire  Abydos 
par  Abidah,  mais  ils  aiment  mieux  l'appeler  Andus  :  parce  que  les 
Arabes  aiment  à  mettre  un  noun  à  la  place  de  p  ou  b,  ils  écrivent  : 
Boemia  ou  Noemia,  par  un  6  ou  un  n,  indifféremment  (Edrisi, 
p.  37i).  Le  nom  de  la  mer  noire,  Pontus,  doit  être  écrit  Nitoêch, 
par  un  noun  kesraté ,  je,  iha,  noté  d'un  autre  kesra  et  schin  de  trois 
points.  C*est  de  cette  manière  qu'on  l'écrivit  dans  les  temps  anciens 
(Abnlf.  versio  Reiskii,  p.  151). 

Le  changement  et  la  transmutation  des  consonnes  est  ane  question 
plus  grave  que  Tinconstance  des  notes  orthographiques  et  des  voyelles. 
L*arabe,  écrivant  indislinclement  Noemia,  Nchsa,  Nischa,  Nabdhos, 
Nabrova,  Tebsava,  Tondjah,  ou  Boemia,  Bensa,  Bischa,  Baudhos, 
Betrova,  Betsava,  Nondjah,  échange  b,  n,  t.  Les  copistes  sont 
presque  autorisés  à  cette  inconstance  qui  ne  dépend  que  des  points 
diacritiques,  il  n'y  a  même  rien  d'improbable,  si  les  copies  nom- 
breuses sont  d'accord  sur  quelque  faux  changement,  que  cette 
variation  sort  de  la  plume  d'Edrisi  lui-même,  et  de  l'usage,  vu  .qu'il 
fait  observer  assez  souvent  que  quantité  de  noms  s'écrivent  par 
différentes  lettres  :  ^ly  V*!^  Boemia,  Noemia,  iri^f^  Pjf  î  Paris, 
^ysjL»  ^JLJI  le  Mans,  à\A^  dKt  Skela,  iK^  JSll*-  Sikla,  tjj^ 
y^Aûo  Tebsava ,  àjjjis  ^^ ^  Tarrakona.  La  permutation  de  caph 
en /ë  donne  souvent  indistinctement  .J^  ,y^yh  l-»'^  Karran,  Far- 
ran,  au  lieu  de  Fezzan  de  l'Afrique  ulij  bLiJ  Kokaïa  ou  Kofaîa; 
^^aJjS  ^Jf^\  le  mont  Caucase,  Kaïtah  ou  Faïtah;  le  même  mont 
Caucase  ^  jji  Kabokh  ouFeth.  Celte  dernière  dénomination  sîgniOe- 

raitmont^  de^ victoire,  mais  l'arabe  protesterait  qu'il  ne  ve«t  rendre 
par  Feth  que  le  nom  du  Caucase. 

C'est  l'usage  et  le  bon  plaisir  qui  ne  blesse  pas  l'écrivain  et  le 
lecteur  arabe.  Ces  diversités  innombrables,  dépendent  d'un  point 
diacritique.  Négliger  les  points  de  la  lettre,  6,  I,  t,  n,  c'est  la  laisser 


INTRODUCTION ,  4  77 

sans  valeur;  négliger  le  point  de  kh,  dj,  c'est  laisser  un  h;  négliger 
sur  X,  c'est  le  changer  en  r.  Comptons  maintenant  les  erreurs,  Tin- 
ourie  des  copistes,  le  caractère  négligeant  où  Ton  ne  distingue  pas 
avec  certitude  un  lam  peu  élevé;  un  mem  d'unfé,  nnféd'uïï  6,  un 
/ca/ d'un  noun;  où  Ton  ne  débrouille  à  la  fin  des  noms  les  ré,  fé,  dal, 
'vnem,  be,  ie,  kaf,  lam,  ou  un  sain  privé  de  point,  et  vous  comprendrez 
les  peines  qu'avait  le  traducteur  en  fixant  la  leçon  et  les  variations 
€ies  noms  propres.  C'est  dommage,  et  nous  ne  cessons  de  regretter , 
ciu'il  n'a  pas  consulté  et  examiné  de  même  les  cartes  géographiques, 
«|ui  n'arrêtaient  son  attention  que  rarement. 

4.  Depuis  la  publication  des  extraits  maigres   de  la  géographie 
^'Edrisi  en  arabe,  à  Rome  1592,  et  à  Paris  1619,  qui  n'offraient  qu'une 
nomenclature  sèche,  privée  des  renseignements  que  donne  la  connais- 
sance du  texte  de  l'ouvrage  entier,  les  nombreuses  localités  provo- 
quèrent les  études  et  les  illustrations  de  Bochart,  d'Ânville,  Reiske, 
Conde,  Casiri,  Hartman,  Walkenaer.  Elles  me  sont  inconnues  et  il 
m'était  impossible  d'en  faire  connaissance.  Le  traducteur  les  avait 
sous  ses  yeux  et  s'en  servit  dans  ses  explications  (préface  p.  8);  il  dit 
qu'il  est  redevable  à  Willam  Piatt  l'indication  des  lieux  de  l'Angleterre 
(p.  425) ,  il  recommande  de  nombreuses  concordances  de  noms  des 
lieux  de  la  Remanie  grecque,  ce  qui  était  l'objet  d'un  examen  très 
approfondi  de  son  confrère  Hase  (p.  28G).  Cependant  il  proteste  qu'il 
n'avait  guère  de  prétention  à  l'illustration  complète  (préf.  p.  13). 
Cette  illustration ,  bien  qu'avancée,  demandait  des  investigations  spé- 
ciales et  trop  laborieuses  pour  chaque  région. 

Âmédée  Jaubert  a  rendu  un  service  éminent  en  étudiant  son  objet  à 
tel  point  et  en  mettant  au  jour,  à  chaque  page,  de  nombreuses  explica- 
tioBs.  Il  a  laissé  cependant  grand  nombre  qu'il  ne  savait  pas  désigner; 
il  a  hasardé  une  quantité  considérable,  qui  ne  saurait  résister  à  la 
réflexion  sérieuse.  L'homonymie  apparente  est  très-souvent  insuflîsante 
à  décider  l'explication  :  il  faut  prendre  garde  à  la  situation  relative,  à 
l'existence  réelle  à  l'époque  d'Ëdrisi;  confronter  les  distances  avant 
de  se  déterminer  à  identifier  la  ressemblance  des  noms.  Aussi  je 
pense  que  l'explication  de  Montir  par  Modor  est  trop  hasardée,  car 
Montir  est  sur  les  confins  de  Pologne ,  et  Modor  est  au  centre  de  la 
Hongrie.  Comment  avec  Zamiou  se  référer  à  Zamoéé  qui  ne  fut  fondé 
et  construit  que  quatre  siècles  plus  tard?  Comment  Edrisi  nommerait-il 
Schithov  Riiov  de  Pologne,  l'orsqu'il  appelle  Kiiov  russien  Kav? 

C'est  aux  investigateurs  postérieurs  d'éclaircir  par  ci  par  là  cette 
confusion  que  l'oubli  et  les  méprises  rendaient  inévitables  dans  cette 


78  EDRISI. 

multitude  de  noms  barbares  et  défigurés,  contiouellement  répétés.  C'est 
par  inadvertance  qu'on  trouve  Rabna  ou  Ribna,  une  fois  expliquée 
par  Raab,  une  autre  fois  par  Ribnitz  (p.  379,  584);  Wurza  oa  Wane  et 
Niuzbourg  ou  Nieubourg,  deux  villes  de  Saxe,  distantes  de  i5  milles, 
expliquées  par  Odense  et  Nieborg  de  Danemark  (p.  571,  581,  427).  En 
premier  lieu  le  traducteur  dit  :  Cali  Gala,  aujourd'hui  Erzeroam; 
quelques  pages  après ,  Gall  Cala  est  placée  sans  explication  à  côté 
d'Erzen  qui  est  illustré  par  Erzeroum ,  et  lorsque  de  Bidliz  on  compte 
75  milles,  cet  Erzen  comme  Erzeroum  est  éloigné  de  quatre  joaraées 
de  Meîafarekin  (p.  5â0,  5!26,  527).  Cependant  sur  la  route  de  Bidliz  à 
Meîafarekin,  Erzeroum  ne  se  trouve  pas,  mais  la  ville  d'Arménie  Ârzan, 
qui  est  évidemment  cet  Erzen  d*Edrisi.  Mais  nous  retrouvons  encore 
un  Erzeroum  dans  Arsia ,  située  dans  la  province  de  Djaldia  (  p.  501  ). 
Je  n'entreprends  pas  d'essayer  à  débrouiller  cette  confusion  qui  est  en 
dehors  de  mon  but  (i). 

Admirant  le  beau  travail  du  savant  traducteur  et  puisant  dans  ses 
lumières,  si  je  me  permets  d'indiquer  ces  quelques  écarts,  c'est  pour 
atténuer  les  miens.  Je  pris  le  courage  de  chercher  le  jour  où  le  traduc- 
teur laissa  une  obscurité  confuse,  et  je  sais  que  dans  mes  hypothèses, 
dans  mes  élucubrations  dirigées  par  des  ressources  insuffisantes ,  je  ne 
manquerai  pas  de  tomber  dans  les  erreurs  inévitables.  Je  serais  heureux 
si  elles  mériteraient  d'être  surprises  et  corrigées  par  des  investigateurs 
versés. 

5.  Dans  le  premier  volume,  nous  avons  fait  connaître  la  carte  itiné- 
raire de  l'ouvrage  d'Edrisi ,  le  nombre  de  ses  sections ,  leur  grandeur  et 
la  grandeur  de  la  carte  entière;  sa  dimension,  le  manque  d'échelle,  le 
but  de  leur  dessin,  ses  couleurs,  sa  peinture.  Nous  allons  ici  exploiter 
ses  dix  sections  de  deux  climats,  déchiffrer  leurs  légendes  et  épigraphes: 
par  conséquent  nous  devons  avant  tout  examiner  son  écriture  et  rendre 
compte  de  l'exécution  de  notre  copie. 

L'écriture  de  la  carte  itinéraire  offre  beaucoup  plus  d'insuffisance  que 
ledessin.  Rapide,  uégligée,ellefatiguelalectureet  jette  dans  l'incertitude. 
Les  points  dfacritiques  très-souvent  omis,  sur  la  lettre  hé  finale  toujours, 
évidemment  que  le  frottement  et  le  temps  firent  disparaître  un  nombre 

(1)  CertaioemcDt  Erzeronm  est  no  Erzao  romain  Arzan -ar-Rouni.  Mais  il  y  avait  d'antres  Anan* 
Artan  arménien ,  et  Arzaudjan ,  tous  assez  rapprocliés  qne  les  géographes  arabes  ^istingnaient 
Quant  à  Cali  Cala,  déjà  Abouiréda  discute  sur  sa  position  et  son  origine,  et  nommait  une  montagne 
Cali  Cala.  Reiske  énonçait  son  opinion  pour  Tbeodosiopolis.  Il  ne  manquait  pas  d'investigatenri 
qui  letrouvaient  Cali  Cala  dans  Erzeroum.  Golius,  dans  les  notes  à  l'Alfragan,  combattait  cetU 
opinion.  La  discussion  d'AbouIféda  roule  dans  le  Djezira;  la  description  d'Edrisi  fait  ses  tours  dans 
TArménie.  (Voyez  les  climats  d'ibn  Ketir  dans  l'atlas,  etd'Alkomi,  t.  I.) 


CARTES  ITINÉRAIRES,  5.  79 

stôsez  considérable ,  mais  pour  sûr  bonue  quantité  n*était  jamais  marqué 
«t  ceux  qui  sont  marqués  sont  jetés  ordinairement  trop  en  avant ,  trop 
«loignés  et  dispersés.  Il  est  bon  d'observer  que  le  point  de  zé  se  trouve 
quelque  fois  à  sa  place,  quelque  fois  est  mis  au-dessous,  en  bas.  Quant 
aux  fé  et  kafih  sont  ordinairement  distingués  par  un  seul  point  dessous 
^t  dessus  :  ainsi  que  kaf  n'est  marqué  que  d'un  seul  point  en  haut  ^^ 
«t  le  fé,  suivant  récriture  arabe  africaine,  distingué  par  un  point  mis 
^lessous,  en  bas.  s.^  Cependant  on  trouve  de  très-rares  exceptions  où 
Maf  est  chargé  de  deux  points  (s). 

Il  serait  superflu  d'insister  trop  sur  les  erreurs  qui  sont  à  observer  sur 
«haque  section.  Le  nom  du  Rhin  est  inscrit  sur  le  Mein  et  le  nom  de 
l^eln,  Mourin  est  placé  sur  le  Rhin  ;  Verdun,  Garmisia,  Barmon,  deux 
fois  répétés;  Sikla,  Besanzin,  Molsa,  sans  épigraphes;  on  peut  supposer 
quelque  déplacement  de  noms  comme  de  Frankfort.  On  remarque  les 
noms  privés  de  terminaison ,  fracturés  par  Tomission  de  syllabes  et  de 
lettres,  dépouillées  de  leur  commencement,  de  leurs  initiales  :  Ankborda 
seulement  au  lieu  de  Frankborda.  Nonobstant  les  difficultés,  les  incer- 
titudes et  les  fautes ,  c'est  la  récolte  abondante  de  variantes  quelque- 
fois utiles  pour  rapprocher  et  rectifier  Toithographe  varié. 

Quantité  de  positions  nommées  dans  le  texte,  ne  se  trouvent  pas  in- 
diquées dans  la  carte  itinéraire  :  mais  il  y  a  des  positions  nommées  qui 
sont  passées  sous  silence  dans  le  texte.  Nous  l'avons  déjà  observé  que 
Russie,  Norwège,  France,  Remanie  nous  en  donnent  des  exemples. 
Au  bout  du  compte  le  débrouillement  de  la  lecture  est  excessivement 
iatigante  pour  les  plus  versés  dans  l'écriture  arabe,  et  en  plusieurs 
occasions  capable  d'épuiser  leurs  conjectures. 

J'avais  cependant  la  témérité  de  reproduire  dans  mon  atlas  ces  dix 
sections  réduites  à  un  tiers  de  l'échelle,  ensemble  et  lisibles,  tout  igno- 
rant que  je  suis  de  l'arabe.  J'ai  confronté  à  plusieurs  reprises  tous  les 
noms,  toutes  les  inscriptions  de  la  carte  itinéraire  avec  le  texte  de  la 
version  et  partout  je  les  trouvais  conformes,  au  moins  rapprochés  par 
quelque  apparence ,  je  conservais  la  leçon  du  texte ,  insérant  sur  mes 
planches  en  caractère  lisible,  arabe  et  latin. 

Remarquant  une  dilTérence  patente,  je  devais  la  respecter,  la  conserver 
et  l'inscrire  sur  ma  planche  en  double  caractère  comme  ma  lecture  me 
la  donnait.  Lorsque  je  pensais  que  c'était  une  erreur,  tout  en  reprodui- 
sant l'épigraphe  arabe  de  la  carte,  j'ajoutais  le  nom  latin  suivant  le 

(s)  Il  semble  que  les  textes  des  manuscrits  consultés  par  Jaubert,  employaient  dans  leur  écritur« 
la  lettre  fé  de  Talphabct  africain ,  parce  que ,  à  l'occasion  de  Foglia ,  Falhoua  (Padoue) ,  Fanonsa 
(venosa),  Janbert  observe  que  les  copistes  des  deux  manuscrits  ont  employé  la  lettre  fé  surmonté 
é*u»  point  et  non  le  fé  de  Talpliabet  «rabe  africain  (p.  t'i7,  469). 


80  EDRISI. 

texte.  Quand  il  in*a  été  impossible  de  débrouiller  la  valeur  des  lettres, 
je  copiais  les  traits  de  ces  inscriptions  aussi  illisiblement  que  je  les 
Toyais.  Ce  que  j'ai  ajouté,  est  ordinairement  mis  entre  parenthèse. 
Celte  opération  produisit  certainement  nombre  d^erreurs  :  je  prie  qu^on 
me  corrige ,  et  j'engage  les  savants  à  donner  aux  gens  du  monde  le  fae 
simile  des  69  sections  . 

6.  La  table  itinéraire,  composée  de  70  (68)  sections,  est  une  partie 
intégrante  de  la  description  ;  elle  avait  son  existence  a^ant  la  descrip* 
tion.  Edrisi  Tavait  sous  les  yeux ,  souvent  il  renvoit  le  lecteur  à  la  re- 
garder. Elle  indique  les  positions  relatives  des  points  et  la  direction  des 
itinéraires  et  des  distances.  Quand  la  direction  de  la  distance  du  texte 
ne  s'accorde  pas  avec  celle  de  la  carte,  lui  est  contraire,  reste  à  juger 
laquelle  est  réelle.  C'est  ainsi  que  le  texte  dit,  de  Paris  à  Louns  vers 
l'occident  (p.  564),  de  Tours  à  Nifars  vers  l'occident  (p.  557),  de  Mont- 
dugon  à  Bourges  vers  le  sud  (p.  242)  :  la  carte  itinéraire  trarce  tout  le 
contraire,  et  c'est  juste. 

Le  texte  détermine  chaque  distance  par  le  nombre  des  milles;  la 
carte  ne  donne  aucune  échelle  pour  la  confirmer  on  contrarier;  elle 
n'a  pas  d'échelle. 

Il  n'y  a  donc  de  question  d'échelle ,  et  en  matière  de  distance  règne 
une  grande  incertitude  :  dans  le  texte  même ,  Edrisi  ne  nous  donne 
aucun  éclaircissement  de  mesure  variée.  Dans  les  prolégomènes  seale- 
ment  il  indique  le  rapport  des  milles  aux  parasanges.  La  parasange 
compte  trois  milles.  Dans  toute  la  description  il  se  sert  ordinairement 
de  milles,  souvent  de  journées  de  marche,  quelquefois  de  stations,  les 
parasanges  sont  presque  oubliées.  Il  les  néglige  dans  sa  description, 
car  toutes  les  mesures  connues  étaient  changés  en  milles  déterminés 
(prolég.  p.  21),  les  parasanges  étant  une  mesure  déterminée ,  furent 
donc  très-facilement  absorbées  par  les  milles,  d'autant  plus  qu'elles  ne 
convenaient  point  aux  Italiens  et  aux  Siciliens.  Malheureusement  les 
milles  n'étaient  pas  toujours  égaux ,  leur  longueur  variait  et  Edrisi  n*y 
faisait  aucune  attention.  11  n'en  était  pas  de  même  avec  les  autres  me- 
sures connues  comme  avec  les  parasanges  :  la  réduction  de  ces  autres 
en  milles  présentait  des  difficultés  et  des  incertitudes.  Malgré  l'assu- 
rance que  toutes  les  mesures  furent  comptées  en  milles  déterminés, 
Edrisi  laisse  une  multitude  de  journées  indéterminées;  je  dis  indéter- 
minées, parce  que  bien  qu'ordinairement  il  compte  une  journée  à  25  ou 
30  milles,  assez  souvent  cependant  ces  journées  sont  plus  longues  et 
montent  à  40  milles  et  plus;  et  trop  souvent  elles  sont  plus  courtes, 
surtout  dans  les  intervalles  où  les  points  sont  trop  rapprochés. 


€ARTB  ITINÉRAIRE  ,7.  81 

Nous  avons  observé  ailleurs  que  Tesprit  humain  agrandit  ce  qu'il  veut 
faire  plus  ostensible,  plus  détaillé;  que  les  cartes  géographiques  de  tout 
temps  étaient  affectées  de  cette  disposition,  de  cette  inévitable  néces- 
sité. Aujourd'hui  même ,  nonobstant  tout  le  raffinement  de  Texactitude 
scrupuleuse,  comment  marquer  sur  une  carte  générale,  une  ville,  un 
faubourg,  sans  dépasser  leur  enceinte  ;  comment  tracer  distinctement  les 
fleuves  sans  déborder  leur  largeur ,  surtout  lorsque  la  carte  est  dressée 
sur  unepetite  échelle?  Anciennement  on  était  moins  scrupuleux  sous  ce 
rapport,  plus  enclin  à  tracer  les  détails  démesurés,  souvent  on  ne 
cherchait  point  à  les  réduire  à  leur  juste  proportion ,  à  les  restreindre 
dans  leur  étendue  réelle.  Ce  défaut  affectait  les  cartes,  malgré  leur 
progrès  scientifique.  Toutes  les  parties  plus  animées,  plus  habitées, 
plus  fréquentées ,  plus  connues,  figuraient  gonflées  et  élargies.  Les 
distances  apportées  par  de  nombreuses  relations  contribuaient  beau- 
ooup  à  cette  défiguration. 

7.  Les  distances  provenaient  rarement  de  chemins  mesurés.  Elles 
étaient  rapportées  par  des  voyageurs  et  des  marchands.  Dans  les  pays 
peu  peuplés  ils  étaient  lancés  à  franchir  de  grandes  distances  d'un  bond, 
et  tout  ce  qu'ils  voyaient  se  présentait  rapproché.  Dans  les  pays  plus 
cultivés,  ils  s'arrêtaient  à  chaque  instant,  ils  ont  des  affaires  à  régler, 
leurs  journées  se  passent  dans  des  hdltes  et  repattrages  :  mais  ce  sont 
des  journées  de  distances.  Tout  se  dilate  à  leur  vue  ;  étourdis  de  leurs 
distractions,  ils  rapportent  de  bonne  foi  des  chiffres  doubles,  triples, 
décuples.  La  cour  du  roi  Roger,  en  confrontant  ces  données,  les  a  trou- 
vées d'un  singulier  accord,  partout  où  le  mouvement  local,  le  trafic 
i^pproché ,  agitaient  les  populations.  La  connaissance  des  longitudes  et 
laiiitudes  de  la  table  ronde ,  pourrait  nous  dire  si  les  géographes  sici- 
liens savaient  se  prémunir  contre  les  conséquences  de  cette  désharmo- 
^ie  des  itinéraires  ;  mais  ce  qui  est  sûr,  c'est  qu'Ëdrisi  relate  fidèlement 
toutes  les  données  gonflées  ou  exténuées.  Ainsi  nous  voyons  dans  sa  des- 
cription les  distances  aux  environs  de  Belgrade,  dans  la  Remanie,  dans 
la  Crimée,  énormes ,  excessives.  On  dirait  que  les  milles  y  étaient 
^i^ioindres.  La  différence  des  milles  contribua  sans  doute  plus  d'une  fois 
^  élever  les  chiffres  des  distances ,  mais  au  fond ,  §ur  tous  ces  points 
animés,  c'est  le  trafic ,  c'est  la  marche  lente  des  marchands  qui  les  em- 
;t>oulaient.  Par  la  proportion  des  mesures  itinéraires   relatées  par 
^drisi  9  on  peut  juger  de  la  culture  du  pays,  de  la  civilisation  matérielle, 
<lu  mouvement  local  et  du  commerce. 

Ces  considérations  me  paraissaient  nécessaires  pour  bien  apprécier 
les  mesures  d'Edrisi,  pour  ne  pas  voir  trop  souvent  d'erreur  dans  le 
III.  6 


S2  CDRISf. 

texte  où  il  n*y  en  a  pas;  poor  ne  pas  exiger  une  stricte  application ,  le 
compas  dans  la  main,  à  desdistances  réelles:  pour  ne  pas  les  négliger 
à  causé  de  leur  inégalité,  de  leur  apparente  inaptitude;  enfin  ponr  ne 
pas  s*effrayer  des  monstraasités  que  la  triangulation  composerait.  Cette 
triangulation  mérite  d*étre  essayée.  Souvent  elle  paraît  d'abord  impos- 
sible, souvent  elle  est  livrée  à  Parbitraire,  quand  les  itinéraires  se 
croisent  seulement  sans  former  des  triangles,  ou  quand  les  chiffres  s*y 
opposent  par  leur  incohérence,  leur  mauvaise  lecture,  ou  parles  er- 
reurs qu'on  ne  saurait  rectifier.  Cependant  ces  distances  sont  sorties 
de  la  triangulation  qui  composa  la  table  rogérienne  :  or  elles  sont  aptes 
à  cette  opération  et  elles  donnent  des  produits*  satisfaisants.  Quand 
même  la  triangulation  devient  Impossible ,  son  examen  donne  des  ren- 
seignements avantageux  aux  recherches  de  la  position. 

8.  Edrisi,dans  sa  description,  ne  perd  pas  de  vue  les  états,  les  donai- 
nations;  mais  son  attention  est  essentiellement  renfermée  dans  les  ré- 
gions et  les  populations  qui  les  occupent.  Telle  n'a  plus  d'indépendance, 
elle  est  soumise  par  un  étranger,  à  peine  qu'il  en  reste  le  nom;  aile 
autre  est  déchirée  entre  plusieurs  états ,  mais  c'est  toujours  la  popula- 
tion qui  est  l'objet  de  sa  description.  II  est  donc  possible  de  déterminer 
rétendue  ei  les  frontières  des  régions,  et  il  devient  tout  impossible 
d*énumérer  les  états  sur  sa  parole  et  de  tracer  leurs  frontières.  Qauid 
il  néglige  de  le  dire,  restent  la  région  ou  sa  portion  (s). 

La  carte  ne  connaît  pas  de  tracement  de  frontières.  Le  vague  plane 
dans  ses  épigraphes  des  régions,  qui  sont  déchirées  et  dispersées 
sur  plusieurs  sections ,  il  faut  ramasser  ces  tranches  séparées  pour  en 
faire  une  totalité.  De  même  la  description  revient  plusieurs  fois  sur  ce^ 
régions,  elle  énumère  ses  villes  principales,  elle  compte  ses  dépen- 
dances, elle  nomme  les  pays  limitrophes,  elle  signale  l'étendue  par-ci, 
par-là ,  en  suivant  les  routes  des  marchands  et  elle  laisse  maintes  fois 
du  doute ,  du  vague.  Les  itinéraires  dirigent  la  description.  Elle  passe 
à  la  fois  en  revue  toutes  les  voies  de  la  section  et  des  régions  que  celle-ci 
contient;  souvent  elle  déborde  sur  les  routes  de  la  section  suivante, 
sans  dire  dans  quelle  région  elle  a  fait  cette  irruption.  Il  y  a  des  régions 
à  peine  mentionnées  (Bilkan,  Bellim)  ensuite  oubliées.  La  multitude  de 
détails  accable  et  embrouille  la  plume  d'Edrisi.  » 

(3;  I.cs  cartes  eTpiirotives  de  la  description  d'Edrisi  oc  sont  pas  politiques,  ne  présentent  que 
des  limites  de  provioces,  de  régions,  de  certaines  populations  ;  les  limites  politiques  des  états  étaient 
différentes.  Pour  mettre  à  l'évidence  cette  distinction,  j'ajoute  dans  mon  atlas  nne  petite  carte 
politique  sur  laquelle  on  voit  les  frontières  des  états  juste  dans  les  années  d'Edrisi.  ElJe  «  été 
préparée  il  y  a  vingt  trois  ans  avec  les  autres  pour  un  atlas  historique.  Qu'on  me  pardonne  qn*eU« 
estfo  polonais,  extraite  d'un  atlas  polonais. 


ANGLETBRM,   8.  83 

Ces  réflextons  sont  le  résultat  de  Tanalyse  de  dix  sections  des  ti*  et 
ru*  climats.  Je  pense  qu*elles  sont  applicables  à  toutes  les  autres,  à 
^ouvrage  entier.  Chaque  point  se  disperse ,  s*empélre ,  s'enchatne  avec 
es  autres.  Je  voulus  me  borner  à  la  région  de  Pologne,  de  Russie,  de 
lohéme;  mais  bientôt  j'ai  vu  que  pour  y  entrer  il  fallait  sortir  d'Aile- 
nagne  pour  courir  au  fond  de  la  Remanie,  suivant  les  traces  des  com- 
merçants de  cette  époque ,  qu'il  était  nécessaire  de  s'enfoncer  dans  la 
iongrie.  Et  comme  plusieurs  sections  des  climats  vi  et  vu  paraissent 
noins  illustrées  par  le  traducteur,  je  me  suis  décidé  à  donner  le  résul- 
ai  de  ce  que  j'ai  pu  remarquer,  concernant  les  régions  danubiennes  et 
a  Remanie;  l'Angleterre  et  la  France  ne  sont  élaborées  que  parce 
[u^elles  prennnet  une  place  considérable  des  sections  dont  je  donne  la 
^opie«  Il  suffirait  à  cet  effet  de  former  une  nomenclature  comparative  de 
3oints  expliqués  et  de  signaler  leur  position  par  les  cartes  gravées. 
Mais  l'exposition  de  nos  régions,  trop  confuse  dans  Edrisi,  demande 
ibsolument  une  analyse  assez  compliquée  et  il  eu  fallait  rendre  compte 
rerbal  plus  ou  moins  explicite.  Sous  ce  rapport  je  serai  plus  circon- 
stancié dans  le  développement  des  régions  qui  font  l'objet  principal  de 
nés  investigations,  et  plus  succinct  dans  les  autres  qui  ne  sont  que 
secondaires,  où  je  ne  prétends  guère  à  dire  quelque  chose  de  nouveau , 
3a  d'aplanir  toutes  les  difficultés,  d'expliquer  les  obscurités,  de  vider 
les  questions;  je  les  effleurerai  pour  provoquer  les  autres  plus  versés, 
plus  heureux. 

Angleterre. 

9.  Willam  Platt  donna  au  traducteur  d'Edrisi  l'indication  des  lieux 
de  l'Angleterre.  11  y  a  donc  peu  de  motifs  à  nous  arrêter  sur  ce  point 
qai  figure  dans  nos  sections.  Cependant  nous  avons  le  plaisir  de  contra- 
TÎer,  de  contester  plusieurs  indications,  ne  pouvant  en  aucune  manière 
admettre  dans  la  description  d'Edrisi  de  si  exorbitantes  transpositions, 
qai  résulteraient  des  indications  données.  Deux  cents  ans  plus  tard , 
Tatlas  catalan  donnait  les  noms  anglais  sur  sa  carte;  noms  presque  mé- 
connaissables à  cause  de  leur  prononciation  et  de  leur  tortueux  ortho- 
graphe. Ceux  d'Edrisi  sont  au  premier  coup-d'œil  évidemment  anglais, 
quoique  rendus  en  caractère  arabe.  Ils  sont  bien  relatés  et  viennent  de 
I)ons  renseignements.  L'Angleterre,  à  cette  époque,  avait  son  doomsdai- 
book,  sa  statistique,  ses  cartes  spéciales.  Rome,  qui  prélevait  le  denier 
de  Saint-Pierre ,  et  les  Normands  de  Sicile  possédèrent  facilement ,  par 
l'entremise  des  Normands  d'Angleterre ,  une  bonne  connaissance  de 
cette  île.  Dans  la  répétition  officielle  d'Edrisi ,  il  ne  se  glisse  que  peu 
de  méprises. 


84  EDEISI. 

Nous  commençons  par  le  point  le  mîeax  établi ,  par  le  nord. 

sjjo^yl  Âfardik  et  ^La^^  Durhalma,  sont  Berwik  et  Darham. 
Nous  sommes  d'accord. 80  milles  d* Afardik  ^r^j^\  Aghrimes  sur 
mer,  est^Grimesby ,  et  100  (lisant  80  serait  trop)  d'Aghrîmes  dans  lln- 
térieur  du  pays  àiyj  ou  i^j^i  Nikole ,  Nikolas  (la  carte  itinéraire 
porte  Bikola),  Linkoln. 

Le  fleuve  traverse  cette  dernière  ville  par  le  milieu ,  se  dirige  ensuite 
vers  Aghrimes ,  et  décharge  ses  eaux  dans  la  mer  au  midi  d'Aghrimes. 
L*ean  qui  coule  de  Linkoln  se  perd  dans  la  rivière  W'itham ,  qui  a  son 
embouchure  au  sud  de  Grimesby  près  de  Boston.  Ëdrisi  Ta  appelée 
^iJuj  Beschka.  En  désignant  son  embouchure  140  milles  d*Afardik, 
il  le  nomme  de  Beska  place  forte,  bâtie  sur  ses  bords,  à  12  milles  de 
la  mer,  ce  qui  répond  à  Boston. 

^  80  milles  par  mer  d' Aghrimes.  i^^^  Barghik,  ville  distante 
de  10  milles  de  la  mer.  Le  texte  et  la  carie  itinéraire  donnent  cette 
leçon  ;  je  pense  cependant  qu'en  suivant  les  pas  d'Edrisi ,  personne  ue 
s^opposera  à  la  leçon  de  i^.i'j-'  Narghlik,  admettant  la  mutation  ordi- 
naire de  noun  en  bé.  Cette  leçon  répond  à  Norwich. 

De  Narghik  à  i^^j^  Djartmouda,  qui  est  à  rentrée  d'un  golfe  de 
forme  circulaire  vers  le  nord ,  le  texte  compte  ^  90  milles  par  mer; 
en  sorte  que  la  distance  de  Djartmouda  à  Aghrimes  par  mer  est  de 
150  milles.  Cette  somme  de  deux  dislances  exige  une  certaine  rectifica- 
tion, car  si  d' Aghrimes  à  Narghik  il  y  avait  80  milles ,  pour  la  distance 
de  Narghik  à  Djartmouda  il  ne  resterait  que  9  70.  Je  ne  me  déconcerte 
point  par  celte  erreur  ni  par  Texorbitance  que  donne  la  soustraction,  et 
je  vois  quâ  Djartmoud  est  Yarmout  (4). 

10.  Au  sud  de  Djartmoud,  à  iO  milles,  est  Tembouchure  de  5jJLl>j 
i^j[S:>j  Rothaîda  ou  Rhotanda  (ro-Thaud)  Tamise.  Ce  fleuve  est  con- 
sid#able  et  rapide,  il  prend  sa  source  près  du  centre  de  File,  coule 
près  de  iy^T^  Gharkafordh  à  50  milles  de  sa  source,  passe  au  midi 
de  cette  ville ,  se  dirige  durant  l'espace  de  40  milles  à  (»-m  Jip 
Londres,  puis  va  se  perdre  dans  la  mer.  A  mon  avis,  pour  retrouver 
Gharkaford,  il  faut  se  détourner  de  la  Tamise  par  la  rivière  Lea,  vers 
Hereford  ou  Hartford ,  Heortford. 

(4)  En  lisant  d'Aghrimet  à  Bargliik      a  100  au  Ueu  de        4  ^*  <>°  aura  de  Barghik  à  DjartoiODda 

50;  et  si  l'oQ  voulait  aupposer  toute  la  distance     ^  liO  au  lieu  de      y3  150  on  n'aurait  de 

Barghik  à  Djartmouda  que  ^  lo.  Les  variantes  fixeront  peut-être  ces  chiffres  :  mais  1»  verai<m 

français^  se  moqtpe  trop  sobre  pour  cette  sorte  de  variantes.  Yarmout  est  nommé  Artmaa  «Uas 
les  épigraphes  de  l'atlas  catalan.  Voyez  notre  portulan  général. 


ANGLETERRE,  10.  85 

De  Djanmoada  60  milles,  de  Londres  40  et  de  Tembouebure  de 
RotjandaâOfODarriveà  ^j^^  Dobres,  Douvres.  De  Dobres  à  ^ySLx..*^ 
Elastiogs  70  milles.  De  Hastings  à  ^UJl.  Schorbam  60  milles.  De 
Bchorcham  à  àjyjt  Haîouna  60  milles \lisez  ^j^)  Hampton,  Hamtun, 
Suth-Hampton. 

Du  côlé  de  Torient  (deroccident)  de  Haîouna  se  jeltela  rivière  j:u^^ 
3houaester.  Elle  prend  sa  source  dans  les  montagnes  qui  s'étendent  au 
i^ntre  de  Tîle.  Ghouuester,  Winchester,  est  une  ville  située  dans  Tin- 
Lériear  des  terres  à  80  milles  de  Haîouna  et  à  40  milles  de  ,  »^,  «jbL» 
Balaboures,  Salisboury,  en  se  dirigeant  du  côté  de  Foccident.  Je  pense 
qae  c'est  clair. 

De  la  ville  et  du  cap  Haîouna  à  ^^  Gharham ,  Wareham,  25 
milles.  ' 

Ici,  à  la  fin  de  notre  course  »  nous  allons  succomber  avec  Ëdrisi ,  sans 
savoir  comment  se  tirer  de  ses  propres  filets.  Il  dit  qu'au  nombre  des 
ailles  d'Angleterre ,  situées  à  l'extrémité  occidentale  et  dans  la  partie 
la  plus  étroite  de  celte  île,  il  faut  compter  . L^.»mJu^  Sansahnar,  à 
dâ  milles  de  la  mer.  Elle  est  jolie ,  florissante ,  et  située  sur  le  bord 
d'une  grande  rivière  qui  vient  du  côté  du  nord,  et  qui  se  jette  dans  la 
sner  à  l'orient  de  la  ville.  De  là  à  Gharham ,  Wareham,  en  suivant  le 
jrivage,  60  milles,  et  au  cap  le  plus  occidental  de  l'ile  oriental  (près 
de  Djartmouda)  580  milles;  au  dernier  cap  de  l'île  (presqu'île)  dite 
^t^j^  Kornvalia,  Landsend  de  la  Cornouaille  500  milles.  Cette  par- 
tie, la  plus  étroite,  la  plus  mince,  ressemble  à  un  bec  d'oiseau.  De 
Sansahnar  à  Salaberis,  Salisboury,  dans  les  terres  du  côté  du  nord, 
60  milles ,  et  Salaberis  est  située  sur  la  rive  orientale  de  la  rivière  qui 
se  jette  dans  la  mer  près  de  Sahsenar,  Sansahnar.  C'est  tout  ce  que  le 
texte  dit  de  la  situation  de  Sansahnar. 

La  carte  itinéraire  lui  donne  quelque  démenti.  Salaberis  y  est  à  l'oc- 
cident du  fleuve;  outre  ce  démenti,  la  rivière  Âvon  qui  coule  près  de 
Salisbury ,  tombe  dans  la  mer  à  l'orient  de  Wareham,  et  entre  Salisbury 
et  Wareham  il  y  a  si  peu  de  distance ,  qu'il  faut  désespérer  d'y  trouver 
une  ville  florissante  répondant  à  Sansahnar.  La  distance  nord  de  Salis- 
bury, relativement  à  Sansahnar,  est  donc  fortement  inclinée  et  indique 
une  position  plus  septentrionale  que  celle  de  Sansahnar.  Or,  Sansahnar 
étant  placée  dans  la  partie  mince  du  bec,  est  occidentale  à  Salis- 
bury, et  n'a  aucune  relation  avec  la  rivière  qui  baigne  les  murs  de 
Salisbury.  Ces  considérations  décèlent  une  confusion  dans  la  relation 
d*Edrisi.  H  est  cependant  clair  et  incontestable  que  la  ville  florissante 
de  Sansahnar  était  à  l'occident  de  Wareham ,  vers  les  frontières  de  la 
Ck)rnoiiaille ,  dans  la  péninsule  qui  s'étend  vers  l'occident  en  forme  de 


86  EDRISI. 

bec  d^oiseau.  Dorchester  pouvait  avoir  dans  ces  temps  reculés  one 
station  maritime,  qui,  dans  le  langage  des  commerçants,  donnait  le 
nom  à  la  ville  même,  qui  est  appelée  Sansahnar  par  Edrisi. 

Nous  n*avoDS  ancun  motif  pour  nous  occuper  de  Hirlanda ,  Irlande, 
de  Reslanda,  Thule  ou  Islande  et  Frisland;  de  la  mignone  Skosia, 
Ecosse;  elles  étaient  désertes,  inhabitées,  dit  Edrisi  (5). 

France. 

11.  Les  illustrations  des  lieux  de  la  France,  données  par  le  traduc- 
teur, sont  toutes  irrécusables.  Il  a  laissé  cependant  quelques  points 
dans  rincertitude  ou  abandonnés  ;  je  pense  qu'on  peut  parvenir  à  les 
déterminer. 

Dans  ce  but  j'ai  essayé  la  triangulation  des  distances  de  la  France 
(voyez  n°  40  de  Tatlas).  Quatre  faisceaux  de  triangles  se  sont  formés 
assez  facilement.  Un  belge,  Tautre  pyrénéen,  le  troisième  normand, 
le  quatrième  du  centre  s'étendant  depuis  Orléans  jusqu'aux  Alpes.  Les 
deux  premiers  sans  difficultés  et  raisonnablement,  les  deux  autres  affec- 
tés de  contrainte,  de  données  inconciliables,  et  dans  le  faisceau  central 
d'une  absurdité  inadmissible.  En  écartant  cette  dernière  et  empêtrant 
tant  bien  que  mal  par  différentes  combinaisons  le  faisceau  normand ,  il 
restait  à  réunir  ces  quatre  faisceaux  et  à  obtenir  de  leur  réunion  pour" 
toute  la   France  un  réseau  général,  attaché  à  la  triangulation  d 
rAllemagne.  De  nombreux  essais  m*ont  convaincu  que  cette  réunie 
était  impossible ,  si  Ton  ne  retouchait  pas  le  nœud  normand  poiH*  l 
rattacher  à  des  proportions  réelles. 

Il  est  probable  que  ces  nombreuses  distances  sont  comptées  en  mille 
de  différentes  grandeurs,  petits  et  grands,  doubles  ou  même  qua 
druples  des  petits.  Les  deux  journées  et  12  milles  de  Kommînge  pa 
Toulouse  à  Morlais  répondent  à  80  milles,  et  les  6  milles  de  Narbono 
à  St-Gilles  répondent  à  une  journée  de  Narbonne  à  Arles.  Les  50 
40  milles  d'Avranche  au  Mans  et  à  Seez ,  répondent  à  70  et  80 

(8)  Les  explications  propogées  par  Willam  Plaît,  discordantes  avec  celles  que  nous  avons  donoi 
sont  les  suivaolcs  :  Aghrimes  Lynn  régis,  Baska  fleuve  Etk,  Bargbik  ip$wich,  Djartmouda  iVi 
mtUh,  Gharkaford  ïf^elUngford  ^  Ilaïuuna  Corte  ccutle,  Saosabuar  Chichester.  Edrisi  pouvait  s'é; 
rer  avec  sa  relation  sur  Sansahnar,  mais  il  serait  contre  toute  vérité  s'il  se  serait  égaré  jusq 
Cbicbester.  —  Edrisi  à  l'occasion  de  l'île  Scbaslanda  (Antilia)  se  proposait  de  parler  plus  au  long 
l'Irlande  mais  il  a  oublié  d'y  revenir.  Bakoui  sait  qu'Irlande  est  une  grande  ile  où  demeurent 

madjous ,  elle  a  1000  milles  de  tour  (VI ,  8).  Dans  le  même  climat  il  connaît  l'île  J-^  J  ^ 

(Braxmil,  Braiil),où  l'on  trouve  de  l'ambre;  les  babitanls  vont  dans  une  île  voisine  tirer  leur 

riture  de  l'écorce  d'un  arbre  qu'on  nomme  maouta  ou  manha.  Il  ya  une  montagne  élevée»      mtwr 

laquelle  est  une  statue  qui  annonce  qu'il  ne  faut  pas  aller  plus  loin  sur  la  mer  (VI ,  6).  V«/es 

des  géographes,  chap.  151,  note  13S;  prolégomènes  chap. 


FRANCE,  11.  87 

^-Malo  à  Seez  et  à  Angers.  Les  855  de  petits  milles  oa  lieues, 
mesurant  le  circuit  du  sac  breton,  long  de  80  milles  bien  grands.  Ces 
onsidéra tiens  font,  présumer  Texistence  de  milles  inégaux.  De 
'ooloase  au  Puy  250?...  Quels  sont  ces  milles,  lieues  ou  stades  aussi 
lignons? 

Mais  comment  discerner  les  différences  des  milles?  comprendre  et 
éterminer  la  proportion  de  leur  grandeur?  Nous  répétons  bien  de 
liSy  qee  la  description  d'Edrisi  ne  donne  aucune  notice  positive  pour 
ablir  ane  proportion  quelconque,  et  elle  ne  fait  même  aucune  dislinc- 
on.  La  triangulation  sicilienne  d'Edrisi  avait  été  composée  sans  dis- 
notion  de  la  grandeur  des  milles,  et  nous  avons  remarqué  ailleurs  que 
rèa-loDgtemps  dans  la  composition  des  cartes,  la  géographie  se  servait 
e  ces  distances,  comme  si  elles  étaient  toujours  de  la  même  grandeur 
e  milles. 

Des  erreurs  par  omission ,  par  la  prise  d'une  lettre  chiffrale  pour  une 
utre,  contribuent  certainement  a  Tincohérance  de  plusieurs  points. 
6  suppose  des  omissions  fréquentes  dans  les  grandes  distances,  dont 
BS  nombres  des  milles  sont  insuflisants ,  parce  qu'après  la  forma- 
ion  de  tous  les  réseaux  de  la  triangulation ,  quantité  de  ces  distances 
ont  en  défaut,  à  cause  qu'elles  ne  sont  pas  assez  longues,  et  sont  ré- 
ablies  lorsqu'on  les  complète  par  dixalnes  ou  centaines.  C'est  ainsi  que 
es^  40  milles  du  Mans  à  Paris  montent  à  J  140  (120);  les  ^  60 
le  Bayeux  à  Maliz  à  ^  160  (150);  les  j;UoO  de  Tours  à  Nevers 
i  ^  150;  les  p  70  de  Nevers  à  Angers  à  s^j  220.  Il  est  bon  d'é- 
tendre les  ^  90  milles  de  la  longueur  du  sac  breton  à  ^ûS  190. 

Le  choix  entre  les  doubles  distances  de  Seez  à  St-Malo  ou  Avranche 
Stant  nécessaire,  l'admission  de  ^  100  entre  St-Malo  et  Angers  au 
lieu  de  ^  80,  n'est  qu'un  changement  de  lecture  au  reste  insignifiant 
pour  la  composition.  Une  rectification  ou  correction  plus  essentielle 
existe  dans  les  disUnces  de  ^  15  milles  de  Bayeux  à  Evreux,  et  dans 
J  i.;»  50  ou  45  milles  de  Bayeux  à  Rouen.  La  première  de  15  milles, 
placerait  Evreux  sous  la  porte  de  Bayeux;  l'autre,  de  45  milles,  est 
contrariée  par  les  90  milles  de  Dieppe  par  Tonque,  à  l'embouchure 
d*Esterham  ou  Orne,  qui  perd  ses  eaux  près  dcBa yeux.  En  effet ,  l'insuf- 
flsancede  ces  deux  distances  empêcherait  la  jonction  de  quatre  parties 
de  la  triangulation.  Ces  deux  distances  sont  donc  erronées  ou  offrent  des 
chiffres  inexactement  débrouillés.  Nous  proposons  à  chacune  le  même 
chiffre  de  aï  105  milles,  ce  qui  rapproche  la  distance  de  Dieppe  à 
Tembouchure  d'Orne,  et  conserve  dans  l'écriture  la  ressemblance  de» 
lettres  chiffrâtes,  dés  chiffres  contestés. 


88  EDRISI. 

12.  La  distance  de  80  milles  de  Nevers  à  Bourges  n*est  pas  en  ligne 
directe,  parce  qu'elle  est  la  somme  de  deux  distances,  de  40  de  Nevers 
à  Auxères,  et  de  40  d'Auxères  à  Bourges,  qui  forment  un  angle.  Dans 
la  composition  de  la  triangulation  centrale,  il  y  a  plus  de  peine  avec  les 
distances  de  Nevers  à  Limoges ,  à  Mont>Luçon  et  à  Clermont.  Dans  que) 
sens  qu'on  les  tourne,  on  obtient  une  combinaison  inadmissible*  On 
dirait  que  la  combinaison  d'autres  triangles,  qui  place  Auxonne  sur  la 
ligne  d'Orléans  à  Nevers ,  est  un  obstacle.  Elle  contribue  beaucoup  à 
l'insuccès  de  leur  coordonation.  Mais  si  même  on  parvenait  à  reculer  la 
position  d' Auxères  à  son  emplacement  vers  le  nord ,  la  composition  des 
distances  données  de  Nevers  à  Limoges  el  à  Clermont  ne  serait  pins 
satisfaisante.  C'est  qu'il  y  a  peut-être  une  erreur,  ou ,  ce  qui  est  plus 
probable,  le  concours  de  milles  inégaux.  Ceux  vers  Clermont  sont  pe* 
tils,  et  les  autres  vers  Limoges  sont  trop  grands,  surtout  les  ^  M 
donnés  directement  de  Nevers  à  Limoges,  demandent  une  extension  de 
^  90  ou  même  de  jj  117  en  partant  par  Mont-Luçon. 

Dans  toute  la  composition  de  la  triangulation ,  Nevers  est  un  singu- 
lier point  central ,  point  de  départ ,  qui  rayonne  par  douze  différentes 
directions.  Malheureusement  la  moitié  est  en  question,  à  cause  des 
omissions,  des  chiffres  inhérents ,  ou  à  cause  des  diversités  des  milles. 
Les  rayons  dont  il  sagit  sont  de  grandes  distances. 

Dans  la  triangulation  belge  on  voit  aussi  l'insuffisance  de  quelques 
distances.  De  Gand  à  Bruges,  de  Tournay  à  St-Omer;  Tune  et 
l'autre  de  ^  15  milles  sont  à  rectifier  en  ^  55.  D'Atringos  à  St-Omer 
les  ^  25  demandent  une  lecture  de  ii  55. 

On  dirait  que  la  triangularisalion  des  distances  édrisiennes  pour  la 
France  est  une  peine  perdue,  qu'on  n'en  relire  aucun  fruits  parce 
qu'on  arrive  à  l'explication  de  toutes  les  localités  par  le  simple  récit 
de  la  description,  comme  l'a  prouvé  l'heurenx  résultat  du  savait 
traducteur.  Je  ne  contesterai  pas  cette  observation  juste  sous  ce  rapport. 
Je  ne  dirai  pas  que  la  triangulation  confirme  l'explication  de  plusieurs 
points  :  que  jL-do  Kastel  est  réellement  Châteauroux;  ^joJL*  Màliz, 
Meaux,  à  condition  que  la  distance  de  Chartres  soit  en  grands  milles; 
que  la  triangulation  ramène  ostensiblement  ^y^y  Bargosch  sur  Bazas 
ou  Baxas,  Vesula  et  ç^l-v>jj  Barmani,  sur  Bernay,  Bernacum;  que  la 
triangulation  répugne  d'accepter  le  double  ^j,\j^  Kamraï,  dont  70 
milles  de  Louvain  mènent  juste  dans  la  position  de  Cambrai,  qui  est 
l'occident  du  Bhin ,  quoiqu'il  ne  se  trouvepas  sur  ses  rivages.  En  effet,  à 
Edrisi  ne  donne  qu'une  seule  fois  les  conditions  de  cette  ville,  qu'elle  est 
grande  et  contient  de  vastes  et  beaux  édifices,  et  s'il  a  ajouté  cette  vagœ 


ALLEMAGNE,  15.  8d 

Feïiiarqtte  ^'ellé  est  à  Toccident  du  RhiD,  il  Ta  probablement  ajouté 
dans  lé  but  de  rectifier  Terreur  de  la  carte  itinéraire,  qui  déplace 
KamraS  à  Toriènt  du  Rhin,  loin  de  ses  rivages. 

Tontes  ces  petites  explications  ne  compenseraient  pas  ces  combinai- 
sons laborieuse^  des  distances,  si  Ton  n'en  retirait  pas  quelque»  autres 
ayantages  qui  dévoilent  la  marché  des  connaissances  géographiques,  si 
Ton  ne  lé$  confrontait  pas  avec  les  cartes  postérieures  et  ne  savait  pas  se 
<x)nvâincre  jusqu'àquel  point  cesdistanceshétérogènes,  sansappréciatlon, 
mal  eoAG(^d5ttnées,  dirigeaient  la  composition  des  cartes  postérieures,  sur- 
tout en  ItKlie,  comririe  nous  Vavons  rémarqué  dans  le  mémoire  précédent. 

Reste  à  l^trôntér  remplacement  de  jjXi  ou  jjHj  de  Balkir  ou 
Bal^ir  sur  mer  et  ^r^r^**^  Besnis  dans  le  mont  jura ,  et  voici  ce  que 
je  remarque.  Bal^hir  se  place  près  d'Olone  sur  Talmond ,  Tailemont, 
qui  à  un  bavre  et  la  haute  mer.  Cette  ville  est  située  sur  les  rivages  de 
la  Gtiifiardière,  disent  les  ancieùnes  cartes,  et  signalent  de  Guières  aux 
environs.  C'est  donc  de  cette  dénomination  que  la  station  du  commerce 
avait  s6h  nom  :daiis  la  Gulnard,  dains  la  Guiere,  bal  Ghir.  Mais  aussi  il 
est  très-probable  que  les  barges  d'Olone ,  marquées  dans  le  Neptune 
iVançais  près  de  Sable  d'Olone ,  engendrèrent  le  nom  de  Balghir  :  les 
appellations  obscures  gagnent  quelquefois  Fusage  vulgaire.  Toujours 
est-îl  cefiain  que  Balghir  répond  à  la  station  d'Ôlonc.  —  Ouant  à  Bes- 
nis, comme  la  direction  dès  distances  n*est  pas  indiquée,  si  on  les 
tourne  à  Tôuest,  on  trouve  entre  Dijon  et  Maçon,  à  des  distancés 
proportionnées,  Bussy  ou  Bussy-bourg  et  Tisnan-bourg.  L'un  ou  l'autre 
répond  à  Sesnis. 

Allehàgne. 

15.  Lorsque  j'ai  lu  dans  Edrisi  que  ^olo  Nebsa  ou  Bensa  était  ta 
capitale  d'Allemagne,  tout  de  suite  Bamberg  s'était  présenté  à  ma  vue, 
et  il  devint  le  point  de  départ  de  toutes  mes  recherches  ultérieures. 

L'Allemagne  n'avait  pas  de  capitale  ni  de  résidence.  Aix-la-Chapelle 

était  déjà  déchue  de  sa  priorité,  métropole  comme  Cologne,  Mayence, 

au  moment  des  élections  et  des  couronnements.  La  maison  de  Suabe 

Succéda  à  peine  à  la  maison  de  Franconie ,  et  sous  le  règne  de  celle-ci , 

fiaBiberg,  centre  de  la  Franconie,  devenait  une  ville  principale,  une 

Ville  de  prédilection.  Une  tradition  du  goût  national  fesait  monter  la 

fondation  de  cette  ville  à  la  sœur  de  Henri  l'oiseleur,  Baba ,  inventée  à 

Cet  effet  pour  donner  un  lustre  à  Bamberg,  et  l'origine  de  son  nom 

l^aba,  Babenberg,  Papeberga,  Bamberg. 

Cependant  Bamberg,  du  temps  des  Karlovingiens,  était  déjà  la  rési- 
dence d'un  comté,  qui  fut  supprimé  et  réuni  à  la  couronne  entre  905 
m.  «• 


90  EDEISI. 

et  907.  Cest  au  plas  tard  en  1007  qii*Heiiri  II,  de  la  maison  de  Saie,  y 
fonda  un  évéché  immédiat  du  Saint-Siège.  Sous  la  maison  de  Franconit 
la  ville  et  Tévéché  acquirent  une  importance  extraordinaire.  Pluaîenis 
des  ducs  principaux  s*étant  emparés  du  droit  de  prétaxation  »  on  de  la 
recommandation  du  candidat  aux  élections,  devenus  ensuite  électeurs 
de  Tempire,  voulant  donner  la  splendeur  au  nouvel  évéché,  se  char- 
gèrent des  hautes  fonctions  héréditaires  de  cette  principauté  ecclésiasti-       ^ 
que,  les  faisant  remplir  par  leurs  lieutenants,  comme  ils  fonctionnaient    ,^^ 
par  eux-mêmes,  en  qualité  de  grands  officiers  du  royaume,  ainsi  que  la  .^^j 
cour  épiscopale  de  Bamberg  représentait  en  miniature  la  cour  royale.^^^ 
impériale.  Aucun  autre  évéché  d'Allemagne  n'était  honoré  de  cetta^^^ 
façon.  Les  ducs  prétaxateurs  soumirent  certaines  villes  en  vasselage  âES    ^ 
révéque.  Le  duc  de  Bavière  comme  grandnsénéchal ,  la  ville  d'Amberg. 
le  duc  de  Saxe  comme  grand-maréchal ,  les  villes  de  Wittembei^  ei 
Mûhlberg,  le  markgraf  de  Brandebourg,  comme  grand-chambella^^^ . 
prenant  son  investiture,  promettait  toujours  de  rechercher  les  fiefe  poi^^^-^^ 
rendre  Thommage  due  à  Féglisede  Bamberg,  et  il  les  dierche  d*un  bo^:^^^ 
à  rautre  de  PAllemagne,  quoiqu'il  n'y  a  plus  d'électeurs.  De  cette  ^C^^^^Koi 
l'Allemagne  relevant  de  l'évéché,  Bamberg  acquit  le  droit  de  se  qua^^^  ^^^ 
fier  de  capiule.  Du  temps  d'Edrisi ,  plusieurs  fois ,  en  4122, 1155, 110^  j^ 
et  1167,  la  diète  se  tenait  à  Bamberg.  Mais  ce  qui  est  plusremarqaabii^^jf^ 
c*est  que  le  commerce  y  croisait  ses  chemins,  et  ce  qui  le  prouve  ^^^  jl' 
dernière  évidence ,  ce  sont  les  itinéraires  indiqués  par  Edrisî,  qui  "^     xr^ 
versaient  ^jo^i  Babas,  Babenberg. 

La  capitale  Bensa,  Babenberg,  placée  au  centre,  rayonnait  cocr^un^ 
aucune  autre  ville  d'Allemagne ,  de  six  chemins  dans  toutes  les  d&  j^ 
tions,  et  ces  chemins  démontrent  tout  de  suite  plusieurs  emplaceic^ei)(s 
sans  réplique.  La  triangulation  débrouille  le  reste  comme  nous  ra^i^m 
tissu ,  sans  toucher  à  quelque  chiffre. 

U.  Les  provinces  qui  obéissent  au  roi  des  Allemands  sont  au  nom^ 
de  quinze  (p.  360) 

L^y^^  Sasonia,  Saxe. 

^JjIj  Bolonia ,  Pologne. 

aJUj  lisez  6^\j^  Boemia(«). 

(8)  Le  traducteur  «oppose  dans  Berania  la  Poméranie  :  mais  l'errenr  y  est  évidente.  Si  I'ob  wn- 
lait  y  Tôir  la  Poméranie,  on  ne  l'aurait  pas  au  nombre  des  proTïnces  de  Bohème  ;  cependant,  dwt 
pages  plus  bas  (p.  371),  Edrisi  parle  de  la  province  Boemia,  qui  appartient  à  VJUemagne»  etnecoiWH 
aucune  Berania.  La  Poméranie  fesait  alors  partie  intégrante  de  la  Pologne,  et  n'accéda  à  l'cmpiw 
qu'en  4180.  Edrisi  compte  an  nombre  des  provinces  dépendantes  de  l'Allemagne,  la  Pologne.  \m 
Allemands  Je  lui  ont  dit  ainsi  :  lui-raùme  il  n'insiste  pas  pour  la  seconde  fois  avec  c»tt#  asserti». 


ÀLLBVÀGlfB,  14.  91 

èjAliii  Kalantarîa,  partout  ailleurs  ajjLJLJjÎ  KaranUria,  Karin- 
thie  ()). 

li^iQ  Akoulia,  pays d'Aquilée. 

aLûvI  Âbernesia.lisezcommeilest  partout  ailleurs  ^<>Uj  Bena- 

dikta ,  Venise. 
AiL£*«J>  Doskana,  Toscane. 
juaJJ!  Afransia ,  Frankonie. 
jjli  ja^Lj  j^  pair,  Babir,  Bafir,  Bavière. 
ài)j^  Souaba,  Suabe. 

aCjjJ  *^j^  Lohrinka,  Lotarinka,  Lorraine. 
aJGj)  ij^^Ip  t*)^^  Louban,  Lovanos,  Loubania,paysdeLou> 

vain. 

•bo  Braban,Brabant. 
jLj»  Haino,  Hainaut. 
aJj&P  Bourgounia ,  Bourgogne  allemande. 

Il  faut  y  ajouter  ^  V  r^t  Afrisia,  la  Frisie,  qu'Ëdrisi  compte  au  nom- 
bre des  treize  provinces  du  roi  de  France,  quoique  dans  sa  narration  il  la 
regarde  comme  partie  d'Allemagne.  Les  méprises  de  cette  espèce  sont 
familières  à  Edrisi.  11  sépare  encore  une  Allemagne  ^JL,))  dans  TAl- 
lemagne  (p.  357, 366, 373),  en  y  comprenant  certainement  la  Frankonie 
avec  la  Suabe. 

Nous  ne  nous  occuperons  point  de  la  Bourgogne  allemande,  du  pays 
d*Aqailée;  très-peu  de  plusieurs  autres  provinces,  où  le  traducteur  a 
levé  les  obscurités  :  nous  demanderons  seulement  s*il  ne  convient  pas 
mieux  de  reconnaître  dans  bu^l  sl^*^\  Aghintz  ou  Aghista(p.  239, 
244,  245,  362),  au  lieu  de  Aix  en  Suisse,  Aosta,  Augusta  praetoria  en 
Savoie?  Il  serait  aussi  difficile ,  à  notre  avis ,  d'admettre  Texplication  de 
Chkela  par  Bruxelles. 

La  Flandre  appartenait  au  roi  des  Français.  Elle  comprend  Tornaï, 
Brouges,  Sant-Mir,  Kamraî,  Atringos  (Gourtray),  Sankola  sur  la  mer  (s), 
ei  la  ville  principale  Kand.  Toutes  ces  villes  sont  reconnaissables  tant 

(7)  Forme  de  prononciation  connue  dans  les  chroniques.  Voyez  la  carte  anglo-saxonne  dans  notre 
*tlas,  n*  26.  De  même  dans  horroesta  d'Alfred  on  a  :  an  othre  liaelfe  Donna  thaere  ea  istbaet  land 
Carendre  ;  ensuite  ao  sud  le  mont  qui  s'appelle  Alpis ,  près  duquel  Baegtbwara  (Bavière) ,  land 
B«maere  and  Swefa  (Suabe) ,  and  tbonre  be  eastan  Carendran  lande  begeondan  thaem  westenne  is 
^«algara  land  :  à  Test  est  Carinlhie  et  au  delà  des  déserts  Beulgarie. 

(S)  La  table  itinéraire,  à  la  place  de  Sankola,  porte  dM,^  par  erreur  et  par  Maissioa  a'a  pas 
d'épigraphe  à  Sikla  en  Frisie. 


93  BDBISU 

par  leujrs  noms  qiM  par  les  distances.  La  Flandre  touche  à  la  FrisM 
si  on  enferme  dans  les  limites  de  cette  dernière,  la  Zeeland  et  la 
Hollande. 

Dans  rénumération  des  villes,  la  province  de  Hainaut  est  oubliée. 
Cependant  entre  Kamraï,  la  ville  de  ^J^y  {J^y^ji^  ^^^»  Mouis» 
Mouisch,  Mons,  y  est  renommée;  le  Hainaut  est  enclavé  dans  la 
Flandre. 

Encore  le  Brabant  qui  n'est  pas  déuillé,  semblerait  composer  une 
dépendance  de  la  Flandre ,  si  on  voulait  accepter  la  leçon  /h»^ 
Lovanos  (Louvain),  donnée  (p.  366)  par  le  traducteur.  Mais  c'est 
la  ville  de  France  ou  de  Flandre  Louns  (Laon),  (p.  364,  365).  De 
Louns  à  Kamraî,  en  se  dirigeant  vers  Torient,  60  milles  (p.  365);  de 
Kamraï  à  Louns  (et  non  Lovanos) ,  dont  il  a  déjà  été  question  vers  Toc- 
cident,  dit  Edrisi,  60  milles  (p.  366).  Ces  passages  sont  identiques,  et 
Lovanos  à  la  page  366 ,  est  probablement  une  erreur  typographique.  — 
Aussi  lorsque  je  lis  qu*Atringos  est  au-dessus  de  Kand  et  au-dessous  de 
Liège  (p.  366),  je  suis  tenté  de  présumer  que  ce  Liège,  qui  est  privé  de 
son  nom  en  arabe,  est  Loqns  ou  LîHe.  -—  Quant  au.  Brabant,  noua  le 
renvoyons  au  pays  de  Louvain. 

La  Bourgogne  allemande  monte  jusqu'à  Berdun  (VerdRiJEi),  où  com- 
mence la  Lorraine ,  dans  laquelle  il  n*y  a  que  trois  villes  'pommées  : 
Mas  (Metz),  ^L)  i^L)  Liadja  (Liège)  et  Kamraï  sur  la  riveV>GCÎdea- 
taleduRhin.  Au  reste.  Lorraine  est  une  province  peu  consi^iéra1)le» 
(p.  363)  (9),  \ 

45.  Tout  à  côté  de  Lorraine  s'étend  une  autre  province  plus  êonsil^ 
rable,  dont  les  limites  poussent  dans  plusieurs  autres  circumvoisineP* 
C'est  le  pays  de  ^IJ     -L}     *b^  ^^j^  iT^kl^  Lobanos,  Looba^ 
nia,  Louban,  Liban,  Lîan  (p.  357,  366,  368,  373).  La  Flandre  est  bor-\ 
née  par  le  pays  de  Louban  (p.  365),  et  ce  pays  Lian  est  limité  du  côté  du 
midi  par  l'Allemagne,  et  entouré  vers  l'occident,  par  la  Lorraine  et  par 
la  Bourgogne  allemande;  il  confine  vers  le  nord  (de  la  Souabe)  avec  la 
Souabe  et  la  Bavière,  et  vers  l'orient  avec  la  Saxe  et  une  portion  de  la 
Crise  (p.  366).  On  remarque  au  nombre  des  principales  villes  de  ce 
vaste  pays  :  Bâle,  Spire,  Worms,  Maïanse,  Frankford,  Mesla  (Kassel), 
Cologne,  Utrecht,  Hardbourd  (Erfurt)  et  Bensa  (Bamberg)  (p.  367). 
Or,  c'est    l'antique  France  rhénane,    ausirasiane,  Louvain  était  un 

(0)  Komraï  est  Cambrai.  De  Liège  à  Komraï  en  se  dirigeant  tcm  le  norcl.est  70  milles  dit  Edrisi, 
et  il  nous  autorise  par  centaines  d'exemples  de  prendre  celle  direction  à  la  renverse.  —  KomraT  est 
fitué  sur  la  rive  occidentale  du  Bbin.  La  carte  itinéraire  inscrit  ce  nom  sur  le  Main ,  et  autoriie  de 
transporter  Ondeqard  et  Cambrai,  vers  Toccideot,  et  la  rive  serait  celle  de  l'Etcauit. 


I 


ALLEVàGIIB,  15.  9S 

tenfA  une  Tilte  principale  de  cette  France,  sa  capitale.  La 
aRadttian  ea  a  coasenré  le  souvenir,  et  le  langage  vulgaire  donnait 
wn  nom  à  tout  un  pays.  Le  langage  public  «  ni  officiel,  ni  des 
letilnins  eu  des  dinmîques,  autant  que  je  sache,  n*a  jamais  compris 
«r  celte  échelle  le  pays  de  Leuvain.  Les  récits  des  marchands,  eom- 
nerçants,  voyageurs.  Font  apporté  à  Edrisi  et  aux  Siciliens,  donnant 
ï  ee  pays  une  extension  extraordinaire;  du  haut  Rhin  jusqu'à  son  em- 
bouchure ,  et  vers  Torient  jusqu'au  fond  de  la  Saxe,  englobant  toute  la 
Franconie,  spécialement  oubliée  par  notre  géographe.  Tous  les  récils 
l'accordaient  à  lui  donner  cette  extension,  qui  empiète  sur  les  provinces 
ta  cenire  d'Allemagne. 

Le  vague  de  ce  langage  populaire  se  déclare  en  y  comptant  Bâle,  qui 
îst  une  ville  de  la  Bourgogne  allemande  ou  sa  dépendance ,  étant  plu- 
ùi  de  Souaba.  Aussi  Spire ,  considérée  tantôt  pour  une  ville  de  Bour- 
gogne, tantôt  pour  celle  de  Souaba.  De  même  Worms  est  une  dépen- 
laBce  d'Allemagne  (p.  362,  567,  569).  Cette  extension  extraordinaire  du 
iftys  de  Louvain,  dans  la  bouche  des  commerçants  qui  connaissaient 
tue  existence  spéciale  de  Souaba,  de  Frankonia,  fondée  sur  la  réminis- 
aoce  de  possession  des  Franks-rhénans,  certainement  était  en  même 
eops  nourri  par  quelque  autre  motif  commercial  ou  industriel,  qui 
»Q<Aait  de  près  l'intérêt,  et  portait  leur  vue  sur  Louvain,  partout  où 
tel  élargissaient  ses  frontières.  Louvain ,  à  cette  époque ,  était  déjà  une 
ôlle  éminemment  industrielle.  Ses  produits  se  répandaient  au  loin;  si 
»lle  n'avait  pas  de  ses  propres  établissements  partout,  les  commerçants 
f  rencontraient  des  dépôts  de  son  industrie.  Je  présume  que  c'est,  là  la 
aume  de  sa  colossale  renommée.  Si  la  qualification  du  pays  de  Louvain 
M  se  décèle  pas  par  d'autres  monuments  historiques,  ^activité  corn- 
nereiale  et  industrielle  ne  pouvait  y  disparaître  au  dernier  point. 
C^osl  aux  historiens  de  Louvain  de  la  retrouver. 

tob  Souaba  a  peu  d'étendue.  Ses  principales  villes  sont  :  Ulm,  Aims- 

bourg,  Bâle,  Spire,  Akrizav  et  Eskindja.  Cette  dernière  i^sr^  a;^^^! 
est  une  grande  ville,  située  dans  le  voisinage  du  mont  Djour  (Alpes), 
sur  une  éminence  qui  fait  partie  d'où  le  Danube  prend  sa  source.  Entre 
cette  source  du  Danube  et  Eskindja,  on  compte  12  milles.  D'Eskindja 
dans  la  direction  nord-est  à  Ulm,  on  compte  60  milles  et  100  milles  à 
Bâle  ;  35  seulement  à  Akrizav  (p.  246,  569).  Les  distances  d'Eskindja, 
60  à  Ulm  et  100  à  Bâle,  sont  confirmées  par  deux  passages,  où  la  dis- 
tance entre  Ulm  et  Bâle  est  portée  à  470  milles  (p.  246)  ou  460  (p.  567). 
La  Souaba  touche  à  Karantaria  (Karintie)  (lo).  Akrisar  est  réellement 

(iO)  Et  Boo  TaraBtaise ,  comme  suppose  le  traducteur. 


94  BDRISI. 

la  ville  la  plus  importaDte  de  Karintie ,  et  Eskindja  fait  partie  d«  coiu 
province  voisine  (p.  249,  569).  Askindja  est  cependant  associée  avec  les 
Grizons  (p.  239)- 

Gomment  réconcilier  tant  de  discordances  sur  cette  grande  vîUeî 
Donau-Eschingen  se  présente  cousonnanl  avec  Eskindja,  éloigné  une 
couple  de  lieues  d'UIm.  Etait-il  grand,  sur  une  éminence?  11  faudrait 
cependant  trouver  un  espace  pour  longer  le  Danube  60  milles.  La  di&- 
tance  de  Bâle  ^  100  milles,  peut  être  réduite  à  ^  80,  à  ^  6  milles. 
Geyssingen  s'y  présente  rapproché  à  Bâle  et  plus  éloigné  d*Ulm,  et  il 
peut  proportionnellement  compter  12  milles  à  la  source  du  Danabe  et 
60  à  Ulm.  Mais  Geyssingen  éiait-il  jamais  grand,  sur  une  éminence î  (ii) 
Tous  deux  appartenaient  au  comté  de  Fûrstemberg,  dont  Texisteiice 
restait  assez  longtemps  obscure. 

16.  C'est  un  singulier  pays  que  T Allemagne  ;  indéterminé,  il  s*abtme 
dans  sa  prétendue  capitale.  Il  y  a  un  roi  des  Allemands,  auquel  obéis- 
sent quinze  provinces ,  parmi  lesquelles  TAlIemagne  ne  se  trouve  pas. 
Ces  provinces  composent  TAllemagne  ou  sont  ses  dépendances.  Mais 
TAllemagne  est  au  sud  du  pays  de  Louvain  (p.  566)  ;  elle  est  entourée 
au  nord  par  la  Frise,  au  couchant  par  le  pays  de  Louvain,  à  Forient 
par  la  Saxe  et  au  nord  (la  Frise),  par  TOcéan  (p.  575).  Bensa  (Bamberg)^^^^» 
en  est  la  capitale.  Masela  ^JUoL»  (Kassel)  placée  au  centre  d'Allemagne«.  ,^=^  ^ 
à  cette  dernière,  deMayence,  en  se  dirigeant  vers  Torient,  il  y  s^  « 
70  milles  (lâ);  de  Cologne  autant,  et  de  Bensa  45.  De  Masela  à  Har-rM-.«ir 
bourg,  ville  de  frontière  de  la  Saxe,  vers  Forient  60  nAilles.  Masela 
donc  évidemment  Kassel ,  centre  de  tout  ce  pays,  qui  s'étend  jusqa*T 
Focéan,  Encore  Worms  est  une  dépendance  d'Allemagne  qui  s'étend  a  .é^  ai 
couchant  de  la  Souaba  (p.  256,  567).  L'Allemagne  n'a  pas  d'autre  spéc^:»  ^d 
fication.  Son  nom  est  attaché  à  la  Franconie.  Englobée  par  le  langa^  .«^^agi 
populaire  dans  le  pays  de  Louvain,  elle  se  divisait  en  provinces  situé» ^^  ^éet 
à  Forient  du  Rhin  jusqu'à  Focéan,  qui  composaient  ses  dépendances.  «.  ^35. 

(44)  Il  7  a  un  autre  Geyssingen  à  trois  milles  d'Ulm,  appartenant  à  cette  citée.  — >  EichiDg'S^^  .^igea, 
latine  Danubii  locio,  vulgo  Doncschiugcn. 

(12)  Dans  le  nombre  des  cvriositrs  que  nous  relate  Bakoui  sur  les  villes  des  Franks,  nous  t.^^       troo- 

Tons  :  i^^,  LSj»  Mafabakha  (on  pourrait  lire  Mafandja),  grande  ville  des  Franks  dont  ane  p^  ^mrvutîe 
liabitée,  l'autre  ensemencée,  auprès  d'un  fleuve  qu'on  nomme  Afn  ou  Zin.  Il  y  a  beaucoup    .^msp  jg 
plantes  aromatiques,  poivre,  gingembre,  girofle;  il  y  a  des  drachmes  frappées  à  Samarkaod.^^^^ p2;> 


K 


Nasr  eddin  al  asuani.  -—  Il  faut  lire  le  fleuve    ,,^i^    et    ,.».)»    Rhin  et  Maïn ,  et  la  r///<, 

Àçsr'L*^  MagandjOy  Maîance,  oii  circulait  la  monnaie  sammanide?  et  l'on  y  vendait  Tépicer 5^<»ai 

abondance.  ~  Ibn  Saïd  relate  qu'une  ville  d'AUemague ,  remarquable  par  les  savants  et  les  ph    i/sM^ 

phes  dont  elle  est  le  rendez-vous,  s'appelle    ,  ^.^^^£J  Nafsin,  Bafsin  :  c'est  le  nom  de  Bensi,Beni^ 
Bamberg.  ^  " 


/ 


ÀLLEXAGMBy  IC.  95 

La  Saxe,  du  temps  d*Edri8i,  n^était  plus  ce  pays  où  Charlemagne 
détruisit  rexistence  nationale  des  Saxons.  Cette  antique  Saxe,  dans  le 
récit  d'Ëdrisi ,  s'est  éclipsée  sous  le  nom  d'Allemagne  et  de  Frise.  Celle 
d^Ëdrisi  prit  son  assiette  nouvelle  sur  le  territoire  Slave ,  où  elle  cher- 
:€hait  longtemps  à  déterminer  ses  frontières.  Les  habitants  de  Saxe 
étaient  les  indigènes  Slaves  et  toute  sorte  d'Allemands.  Déjà  cent  ans 
auparavant,  lorsque  Boleslav-le-grand ,  en  i014,  indomitos  Saœones 
tdomuil,  dompta  les  indomptables  Saxons  :  tn  flumine  ScUe  in  medio 
terrœorum,  meta  ferrea  fines  Poloniœ  terminavit  (Gallus,  1,6,  p.  36),  fixa 
une  borne  de  fer  comme  frontière  de  Pologne  dans  la  rivière  de  Sala 
au  centre  de  leurs  terres.  La  Saxe  se  centralisa  autour  de  Sala,  rivière 
de  la  grande  Serbie.  Aussi  les  villes  de  Saxe  nommées  par  Edrisi,  sont 
toutes  des  environs  de  Sala. 

^y J>j&  jjjit  Harbour  ou  Hardbourd. 

£j^^    ^y^^^    ^tt^j^   Dulbonrh,  Dhulbourga  ou  Dhilbourga, 

comme  récrit  la  carte  itinéraire. 
slSyy^  i^j^jjJ  y^tSyyi  Nizbourg,  Nirezbourgh,  Niubourg. 
jLû.  à]\jb  Hala. 
^h^  Vurza,  Varze. 
i^J^y  ^y^y  Kazlaza,  Kazlasa. 

ildw»  i\lXA  ^JLju.»  Maschesala,  Maschla,  Masla  (clim.  YI ,  5,  p.  575, 
577,  581,  YII,  5,  p.  427).  Cette  dernière  ville  est  aussi  considérée 
pour  une  ville  de  Boeme  (VI,  %  p.  571)  (15). 

De  toutes  les  villes  prénommées  de  la  Saxe ,  Hala  seule  se  conforme 
à  la  Halle  de  Saxe.  Si  Ton  suivait  les  consonuances  les  plus  rapprochées 
on  se  porterait  avec  Niresberg  à  Mersebourg ,  avec  Harbour  à  Harburg, 
situé  vis-à-vis  de  Hamburg;  on  trouverait  Delbourg  entre  EmseiLippe 
en  Yestfalie  saxonne,  ou  Dusbourg  sur  le  Roer.  Mais  les  distances  s'y 
opposent. 

Hardbourd  est  évidemment  Erfurt,  éloigné  de  70  milles  de  Kassel  et 
(0  de  Bamberg.  Au  xvi'  siècle,  sur  les  cartes  publiées  en  Italie,  Erfurt 
est  appelé  Erdfurd. 

Niubourg  est  au  nord  de  Hala  à  40  milles  et  il  faut  écrire  et  lire 
OjGjl^  ou  ojOjuj  Maidebourgou  Naîdebourg,  comme  on  appe- 
lait cette  ville  archiépiscopale  et  principale  de  Saxe  dans  la  langue 

(13)  Le  traducteur  trouve  la  seule  Hala  dans  Halle,  de  Saxe.  Le  reste  suivant  son  interprétation 
M  disperse  et  se  fixe  à  l'extérieur.  Masla  dans  Breslau  de  Silésic ,  Varze  dans  Odensée  de  Tile  de 
Fionie;  Nizbourg,  nommé  Nirezbonrg,  dans  Norimberg  de  Frankonie,  et  nommé  Niubourg  dans 
Nieborg  de  Danemark  en  Fionie  (p.  37S,  S81,  427,  etc.).  Qu'on  me  pardonne  quand  je  contrarie 
ces  illustrations. 


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ALLEMAGNE,  17.  d? 

De  Berna  à  Vourza ,  ville  de  Saxe,  ^  100  milles,  et  Berna  est  située  à 
^  80  milles  à  Torient  de  Fembouebure  du  Rhin.  Certes  il  n'y  a  pas 
lieu  de  contester  que  Berna  est  Bremen,etles  iOO  milles  à  Yourza 
peuvent  être  réduits  à  ^  6. 

Akaroulindja ,  la  Karoulindja  (prononcez  Krolindja,  Grolindgea), 
située  près  de  la  mer,  est  éloignée  de  Brème  7  milles  (imraenccs  d'Alle- 
magne, peut-étrej  17),  et  de  Cologne  100,  est  évidemment  Groningen. 

Schwars  est  une  ville  agréablement  située  au  bas  d'une  montagne, 
avec  des  eaux  courantes;  éloignée  de  Erbourd  60  milles  vers  le  nord, 
et  70  de  Sikla.  Ce  serait  une  hypotbèse  que  d'y  voir  Schverin,  dans  ce 
temps-là  érigé  en  évêché  pour  les  nouveaux  baptisés  Obotrites  Slaves. 
Mais  nous  avons  sur  Veser,  Schwarns,  dont  la  leçon  ressort  de  l'épigraphe 
de  la  table  itinéraire  (u). 

Edrisi  dit  :  de  Gand  à  Skela  ou  Schkela ,  ville  dépendante  de  la  Frise 
^t  d.ont  nous  reparlerons,  en  se  dirigeant  vers  l'orient,  on  compte  80 
milles  (p.  565)  (15).  Suivant  sa  promesse,  Edrisi  revient  sur  celte  ville 
le  la  Frise,  en  examinant  la  Frise  elle-même  où  elle  est  nommée  Sikla, 
$ikela  (p.  575)  (ic).  C'est  la  même  ville  sans  aucun  doute. 

Sikla  ou  Skela  est  une  importante  ville,  située  dans  une  plaine,  dans 
20  territoire  agréable,  possédant  beaucoup  d'habitations  contigues,  des 
ptâîzars  et  du  commerce  :  c'est  le  cenjlre  de  la  Frise  ;  aussi ,  ses  commu- 
iloations  sont  rayonnantes  de  tous  les  côtés  :  80  milles  à  Gand ,  80  à 
KJtrecht,  70  à  Groningen,  80  à  Schavarns,  70 à  Quedlimbourg ;  parmi 
Laates  ces  villes  an  centre.  Ces  distances  porteraient  sa  position  vers  les 
snvirons  de  Cologne,  vers  le  courant  de  la  rivière  Siegen.  Mais  dans 
cette  partie,  il  n'y  avait  à  cette  époque  là  rien  qui  conviendrait  à  une 
ville  importante;  en  effet,  la  partie  est  irop  extra-frontière  et  trop 
éloignée  du  centre  de  Frisie.  Il  faudrait  reculer  avec  les  distances 
d'Ulrecht  et  de  Groningen  pour  rentrer  dans  la  Frise.  Tekelenburg, 
Cleves,  Gueldre,  Schylse  localité  dans  le  Ravenslein,  Schoelcburg  sur 
Hase,  offrent  des  cliquetis  qui  ne  peuvent  pas  satisfaire  l'importance  de 
l'époque.  Pourrait-on  se  rabattre  sur  Aix-la-Chapelle  (Skela,  capella)? 
je  l'ignore. 

La  Bavière  ^^Ij^JLj^  Baïr,  Bafir,  Babir  (p.  246,  568,  570), 
pays  et  province,  est  restreinte  à  une  petite  dimension.  Ses  principale* 
villes  sont  : 


(14)  Je  ne  puis  pas  adhérer  à  soo  explication  par  Schwarzbourg  eu  quelque  autre  autci  obseitre. 

(i6]  Le  traducteur  y  voit  Bruxelles. 

(46)  En  ce  cas  le  traducteur  la  détermine  par  Celle  ou  Zelle  de  la  bassa  Saxe. 

lit.  7 


98  EDRISI. 

y^yiji\  >'^^ir^^j  Reinschbourg OU Rendjbourg* 

^/A^^ïjU»  ty^  Tebsava,  Tebzava,  Batsaa. 

iJa  Jipl  Eîzerkartha,  Izerkarta. 

iJiki\j>jà  i^^j^Ajù  A^j^Aé^^  ij^Ay^  Gharmaîsa,  Gharmasia,  Gharraa** 
schia,  Gharmaïscha  (p.  370).  Elle  est  contestée  à  Bavière  et  ren- 
voyée à  la  Karintie  (p.  371,  375). 

La  première  est  évidemment  Ratisbonne,Regensbourg.  Quant  aux 
autres  il  faut  les  chercher  (n). 

Tebsava  ou  Batsau,  à  voir  les  distances  *et  la  description  est  indnbi^ 
tablement  Passau  sur  le  Danube. 

Izerkarta  60  milles  de  Passau,  rappelle  la  rivière  Iser,  qui  traverse 
Bavière  et  sur  laquelle  il  y  avait  plusieurs  résidences  ducales.  Une  d 
plus  considérables  à  cette  époque  était  Landshut,  qualifiée  de  ce 
suivant  Topinion  populaire  à  la  suite  du  château  fort,  considéré  comm< 
gardien  (but,  hûten)  du  pays  (Land).  Ce  château  avec  la  ville  gardait  d 
même  la  rivière  Iser  et  son  passage ,  d*où  vient  Iscrwart,  Isergard 
Izerkarta. 

Quant  à  Garmasia ,  ville  d'Allemagne  ou  de  Kariniie ,  elle  est  sitm 
entre  Bamberg  et  Vienne;  Bamberg,  éloigné  70  milles  vers  le  no 
ouest,  Biana  ou  Vienne,  60  ou  iO  milles  vers  Torient.  Sur  cette 
tion,  presque  à  moitié  chemin  de  Bamberg  à  Vienne,  on  trouve  au 
f|u  Danube  en  Bavière  un  petit  bourg  Garhaïm,  et  sur  le  bord  du  Dana 
à  Tembouchure  de  la  rivière  KIon,  en  Autriche,  une  petite  ville  a 
un  château ,  plus  rapprochée  à  Vienne ,  nommée  Greim  ou  Grein. 
foablement  c'est  la  Garmisia.  Krems  est  trop  rapprochée  à  Vienne ,  I^oqt 
j^uvoir  convenir  à  la  situation  indiquée. 

Karintia,  dalmatu,  djetoulia  (serbia). 

48.  L'usage  populaire,  remontant  par  habitude  aux  traditions  ^'■b- 
eiennes,  ne  donnait  aucun  égard  aux  frontières  d'Allemagne ,  que  le 
duché  de  Bavière  fesait  étendre  sur  ce  point;  il  absorba  toute  la  Bavi^^re 
méridionale  par  la  dénomination  de  Karintie.  Cet  usage  populaire  p: 
domine  tous  les  récits  et  les  renseignements  que  les  marchands  app 
talent  aux  géographes  de  Sicile,  sur  les  régions  formant  les  dépendaa 
d'Allemagne  et  sur  les  pays  ultérieurs.  Bohême,  Karintie  et  les  auU:*^ 

(47)  Le  traducteiiT  n*a  pas  remarqué  ridentité  de  Tebsara  atec  Batsan  et  Ta  expliqué  une  ftc»«»« 
ton  par  Leiptig ,  une  anUe  foii  par  Passan ,  ce  qui  est  juste.  H  9  voulu  trouver  Stnttgtrd  d«  I 
4aDs  la  bavaroise  Eizerkarta ,  je  ne  sais  par  quel  motif. 


karihtia,  it.  99 

qui  vont  nous  occuper,  sont  déterminés  comme  le  comprenait  le  vul- 
gaire. Mais  souvent  ces  idées  vulgaires  ne  sont  pas  suffisamment  déter- 
minées, se  tordent  dans  des  biais  qui  étendent  les  limites  et  déplacent 
les  villes  de  pays  en  pays. 

Nous  allons  à  la  reconnaissance  de  leurs  chancellants  récits  et  nous 
entreprenons  un  long  pèlerinage ,  avançant  jusqu'à  Tembouchure  du 
Danube  et  jusqu'à  THellespont.  Trois  routes  seulement  attachent  à 
FAllemagne  ces  régions  immences,  variées  et  jusqu'aujourd'hui  mysté- 
rieuses à  bien  d'égards.  De  ces  trois  routes,  une  perce  directement 
dans  la  Karintier  l'autre  parcourt  les  frontières  de  la  Karintie  et  de  la 
Bohême,  la  troisième  traverse  la  Bohême.  Nous  nous  proposons  de 
sortir  par  les  deux  premières  qui  conduisent  en  Karintie  ou  en  Slavo- 
nie;  à  la  fin  nous  rejoindrons  l'Allemagne  par  celle  qui  traverse  la 
Bohême. 

La  Karintie,  Karantania,  appelée  par  Edrisi  ordinairement  Karantam 
JSjVLiy  (p.  246,  357,  568,  569,  575),  ses  variantes  :  ^jLkJy  ïjUail^ 
b  JtJlS  est  un  pays  et  à  la  fois  une  province  peu  considérable;  situé  entre 
e  Danube  et  la  Drave,  il  touche  à  la  Souaba  (p.  246).  Gomme  province 
daché  de  Karintie),  elle  est  peu  considérable,  sa  ville  la  plus  remarqua- 
>le  est  j^j^j^^  Akrizav,  à  l'extrémité  du  mont  Djouz,  5i  milles  d'Ulm 
it  55  d'Eskindja ,  en  se  dirigeant  vers  le  nord-ouest,  Eskindja  est  dans 
e  voisinage  du  mont  Djouz  et  fait  partie  de  la  Karantara  (p.  569). 
ilnsl  que  la  Karintie  s'étendrait  jusqu'aux  sources  du  Danube  :  mais 
:*est  une  erreur,  aussi  bien  que  la  distance  de  55  milles. 

Gomme  pays,  la  Karintie  est  bornée  à  l'occident  par  le  pays  d'Aquilée» 
lu  midi  par  les  états  des  Vénitiens ,  à  l'orient  par  la  Onkaria  et  au  nord 
3ar  la  Boeme  (p.  572).  Un  vaste  pays  qui  a  ses  subdivisions.  Au  nombre 
le  ses  villes  principales  on  compte  : 

îj^ljjo  «jt^^ij  Bedhvrra,  Bedhravara. 

ù\\^  Bouzana. 

^jJaJ  Neitherm. 

aSjj^  Schebrouna. 

^\j1Sj  jjj"^!^  Kalgradoun,  Belgraba. 

ir^y^  ^y^T*  ^^°<>1^>  SinoUvi. 
yjy  9j^  Bouza,  Boura. 
%^Lj  Bilvar. 

èù^yi^\  Estergouna,  Ostrikouna. 
Tillus. 


\j^y^ 


iOO  EDRISÎ. 

iL^  .jXy  y3  \  JLj  s.*Xi  li  t  Afraqk-bila ,  Afrabakbila. 

"  •       •  ^         ••  •         ^ 

/  v-JJ^j!  y:^^]  Abranbata ,  Âbrandes. 

&..»•*>•  ^  Gharmasia.  '' 

jhjJO  Akrizav. 
a.^)jl  Akoulia;   >^j  Balam. 
.   y^\y  y  31  ^^^  '>Jj->  \^  Frizizak ,  Afrizizak.  Ces  trois  dernières  villes 
sont  limitrophes  de  la  Karintie  (p.  372  ,  375,  576,  378). 

Mais  il  faut  retrancher  de  ce  nombre  Neitherm,  Ostrigouna  et  Scbe- 
brouna,  villes  de  la  Bohême  ;  Titlus,  ville  de  la  Hongrie  ;  aussi  plusieurs 
de  la  Slavonie ,  située  au  delà  de  la  Drave,  qui  est  seulement  enclavée 
dans  la  récsion  de  Karantara  et  ne  forme  que  sa  subdivision;  enfin  G9r- 
misia,  ville  d'Allemagne  et  de  Bavière  (\%). 

Nous  allons  maintenant  a  la  reconnaissance  de  tous  ces  lieux,  saa^^h. 
pouvoir  dire  jusqu'à  quel  point  nous  sortirons  de  la  confusion. 

19.  Lorsque  nous  voyons  sur  la  carte  itinéraire  Ostriboun  (Gra 
sur  les  bords  du  Danube,  supérieur  à  Biana  (Vienne);  Agm  placé 
nord  de  Neulra;  Tilul  au  midi  du  Danube,  énormément  éloigné 
Be^grad ,  nous  pouvons  dire  que  les  positions  sont  extrêmement  dép 
cées.  Le  texte  de  la  description  ne  nous  apporte  pas  de  remède ,  ct^ 
ordinairement  d'accord  avec  la  carte.  Réfléchissant  sur  les  distanc 
il  est  nécessaire  de  présumer  dilférentes  espèces  de  milles,  de  sortQ 
la  triangulation  avec  tous  ces  déplacements  est  possible,  mais  rap{^^ 
cbée  à  la  réalité,  devient  presque  impossible.  Cette  discordance  et 
embrouillement  résultent  des  nombreux  récits  rapportés  par  des  nfc--^  '^ 
chands.  Ils  étaient  d'accord,  mais  l'interprète  dont  on  se  servi!,  ne  jf^^^ 
bien  comprendre  leurs  narrations,  les  coordonner  et  trier  :  les  géop^ï*-^" 
phes  n'étaient  pas  plus  heureux  dans  leurs  combinaisons.  Cependant.  U  f 
a  des  points  certains  qui  peuvent  guider  la  recherche,  expliquer  l'erreur, 
et  les  investigateurs  plus  approfondis,  avec  des  matériaux  dont  noos 
sommes  privés ,  ne  manqueront  pas  d'achever  l'explication. 


/IS;  Le  traducteur  à  trôs-lieureusemcnt  distingué  plusieurs  de  ces  villos,  mais  je  ne  pais  consentir 
à  illuKlror  Uedhwarn  par  Pctcrvaradein  ,  Scliebro'ina  pir  Soprouy,  Rouzana  par  Bcsclika ,  Biths  par 
Peths;  Akonli»   par  Wuknwar,  Sinolav  par  SohUiin,  Kalam  par  Agram  et  Balam    par  Bello^r, 
lorsque  le  tradu» leur  lui-même  retrouve  rc  dernier  dans  Bilvar  :  à  toutes  ces   attribntions  s'oppo- 
sent les  positions  et  les  distances.  —  Continuons  notre  protestation  sur  ce  point,   duquel  Dons 
déborderons  un  peu  vers  l'orient.  Banssin  ne  s'explique  pas  par  Pantzova;  ni  Kalgradoun  (qni  n'est 
que  Belgradoun)  par  Galgotzium  ;  ni  Raluia  par  Baab  ;  ni  Kavorz  par  Karlovitz;  ou  KavorzoTa  par 
Kovar. 


KARINTIA,  90.  10  i 

De  ce  nombre  assez  considérable  do  villes  énuraérées ,  il  y  en  a  peu 
4]ui  appartiennent  à  la  Karintie,  située  entre  la  Drave  cl  le  Danube,  au 
pays  qui  ne  porle  d'autre  nom  que  celui  de  Karantara. 

Nous  avons  déjà  nommé  Âkrizav  (Gratz),  placé  au  pied  du  mont 
Djouz  :  ce  n*est  qu'à  la  fin  que  nous  arriverons  dans  nos  investigations 
à  Frizizak,  situé  dans  son  voisinage. 

Nous  pensons  que  Bouza  est  Petz  (cinq),  Quinquecclesiœ,  Fûnfkir- 
chen,  Pietkosciol,  cinq  églises.  Nous  le  signalons  seulement  pour  le 
moment,  sa  situation  sera  fixée,  comme  celle  de  plusieurs  autres,  par 
des  combinaisons  ultérieures. 

Belgraba  est  une  ville  remarquable  par  la  beauté  de  ses  édifices ,  est 
ODlonrée  de  fortes  murailles  et  pourvue  de  bazars.  Elle  est  commer- 
çante, industrieuse  et  fréquentée.  Ses  champs  bien  ensemencés  pro- 
duisent du  blé  et  des  légumes  en  abondance.  On  ne  peut  pas  se  mépren- 
dre sur  cette  ville.  L'unique  de  ce  nom  à  laquelle  elle  peut  être  référée 
est  Belgrad,  Bialygrod,  Albaregia,  Alba  regalis,  Stulweissemburg, 
Szekesfcyerwar  ;  ancienne  capiiale  et  résidence  des  rois  de  Hongrie. 
Elle  est  éloignée  d'Ostrikouna  (Gran)  50  milles,  de  Bouzana  55  (p.  576), 
et  son  emplacement  est  fixé. 

Bouzana,  ville  de  moyenne  grandeur,  sur  le  bord  du  Danube,  est  sur  ce 
poij3t  la  dernière  dépendance  de  Karintie.  C'est  Boudzin ,  Bouda,  Ofen. 
De  Bouzana  à  Bedhvara  ou  Bedhrava  sur  le  même  fleuve,  on  compte 
60  milles.  Le  Danube  coule  au  midi  à  partir  de  la  ville  Bouzana,  puis  à 
i*orienl  vers  Bedhvara,  puis  se  dirige  vers  le  nord.  La  distance  de  60 
Xïiilles  défend  d'enfermer  ces  détours  du  Danube  dans  un  trop  étroit 
espace,  c'est  l'indication  du  cours  entier  du  Danube.  Il  va  vers  l'orient 
jusqu'à  Bouzana,  se  tourne  vers  midi  jusqu'à  Bedwara  où  il  revient  à 
^51  direction  vers  l'orient,  enfin  (depuis  Rossocastro)  il  monte  vers  le 
ï>ord.  Le  nom  de  Voukovar  est  le  seul  peut-être,  dans  ce  repli  méri- 
dional du  I>ainube,qui  se  rapproche  à  l'euphonie  de  Bedhvara,  Bedhrava. 
Kl   est  dit  que  la  Drave  se  jette  dans  le  Danube  entre  Bouzana  et 
^teedhvara  (p.  576),  aussi  confond-elle  ses  eaux  avec  le  Danube  non  loin 
^e  Youkovar;  le  Danube  venant  de  Boudzin,  la  reçoit  entre  ces  deux 
Avilies  avant  d'atteindre  Voukovar. 

20.  En  suivant  le  cours  du  Danube  de  Bedhvara  à  Titlous,  on  compte 
"75  milles.  Titlous,  située  sur  la  rive  septentrionale  du  fleuve,  est  une 
^illc  extrêmement  riche  et  peuplée.  C'est  une  ville  de  la  Hongrie,  limi- 
trophe de  l'Esklavonie.  Si  ce  n'est  sa  grandeur,  au  moins  son  emplace- 
laent  et  son  nom  se  sont  conservés  jusqu'aujourd'hui.  Cette  ville  n'ap- 
partenait plus  à  la  Karintie,  et  nous  nous  trouvons  dans  sa  portion  qui 


102  EDBIM. 

porte  U  nom  de  ij^l&^l  Sklavonia,  dont  Titloos  est  limitrophe,  ef' 
nous  nous  rapprochons  à  un  coin  de  terre  limitrophe  à  plosienrs  ré^ 
gions.  Il  offre  dans  la  description  d*Edrisi  des  dlfiBcultés  extrêmement 
graves  qu*on  ne  peut  résoudre  à  la  fois.  G*est  un  dédale  à  peine  extrica* 
ble.  11  est  étonnant  comment  Edrisi ,  sa  carie ,  et  certainement  la  table 
ronde  rogcrienne ,  ont  pu  y  laisser  tant  d'obscurité  et  se  noyer  dans  une 
telle  confusion. 

Ce  coin  était  à  celte  époque  très-fréquenté  et  animé.  Les  croisées  y 
passaient  en  masse;  les  marchands  s'y  rendaient  nombreux;  une  foole 
de  relations  avait  été  sans  doute  apportée  à  Tinvestigaiion  du  roi  Roger  : 
mais  on  n'a  pas  su  les  coordonner.  Il  semble  qu'en  les  confrontant,  on 
a  compris  l'accord  de  différents  récits,  qui  passaient  et  s'arrêtaient  sar 
différents  points.  Les  uns,  des  narrateurs,  s'arrêtaient  à  Belgrad,  à  Gra- 
diska,  à  Ribnitza  et  leur  récit  fut  à  cet  égard  d'accord;  les  autres  8*ar- 
relaient  dans  des  localités  intermédiaires,  à  Branitzova,  à  Kavortzoya, 
et  leur  relation  conforme,  donna  un  autre  accord.  Tous  étaient  d*aecord 
sous  le  rapport  de  tout  petits  milles ,  qui  éloignaient  ces  places  à  des 
distances  excessives.  On  n'a  pas  conçu  qu'il  fallait  faire  fusion  de  denx 
narrations  :  en  les  acceptant ,  on  enchaîna  seulement  leurs  renseigne- 
ments par  juxta  position.  D'abord  ceux  sur  Bansin  et  Kavors,  ensuite 
ceux  sur  Belgrad,  Gradiska  et  Ribnitza.  Les  distances  déjà  énormes  par 
leur  nature ,  se  doublaient  par  cette  opération ,  et  pour  les  adapter  à  la 
longitude  géographique,  les  géographes  de  la  table  ronde  étaient  néces- 
sairement forcés  à  procéder  à  une  réduction  considérable  que  nous 
ne  connaissons  pas ,  mais  nous  la  retrouvons  dans  les  indications  de 
journées  de  chemin.  Au  prime  abord ,  nous  allotts  commencer  par  ûa 
point  connu  de  Belgrad,  Alba  graeca,  Grlechisch  ^eissenburg,  Nand^ 
alba. 

21 .  De  Titlous,  en  descendant  le  Danube,  on  arrive  à  Belgradoun.  C'est 
une  ville  florissante  et  très-peuplée  où  l'on  voit  de  vastes  églises.  De  là 
à  ljL»»^j&\  ou  Uwjj  J)  Afrideska  ou  Âgridiska  (Gradiska,  Fandeu 
Cuppae,  à  l'embouchure  d'Ipek,  Bek,  Pincus),  ville  sur  le  bord  de  ce 
fleuve,  également  importante  et  peuplée,  par  terre  75  milles  et  pap  U. 
rivière  2  journées  ou  1  journée.  D'Agradiska  à  Rabna  ou   Ri1k3B& 
(Ribnitz),  2  fortes  journées,  équivalant  à  ce  qu'on  dit  à  100  milles  ^  ott 
seulement  1  et  demi-journée.  Et  de  Belgrad  à  Ribna  par  terre     459 
milles.  Agradiska  est  située  dans  une  plaine  cultivée,  riche,  fertiieeii 
grains  et  bien  arrosée ,  elle  est  commerçante.  Mais  cette  plaine  est   for- 
mée par  des  montagnes  qui  s'étendent  le  long  du  Danube,  c'est  à  lear 
sommet  que  cette  ville  florissante  est  bâtie  :  on  la  compte  au  nombre 


KARINTIA,^!.  i05 

des  dépendances  de  Makedonia  (p.  29i,  579),  c'est-à-dire  à  Tempire 

grec. 

Ces  trois  villes  florissantes  n'étaient  pas  les  seules  à  cette  époque  qui 
iouvraient  les  rives  méridionales  du  Danube.  Il  y  en  avait  une  qui  sur- 
assait  leur  importance.  Branilzova,  Bouranilzova ,  Brandiz  (ancien 
iminacium),  située  près  de  Tembouchure  de  la  Mlava  au  Danube,  vis- 
-vis  de  Koslolatz ,  qui  existe  encore  à  Torienl  de  Tembouchure,  regar- 
ant les  ruines  de  Tancien  Brandiz,  ville  d'une  ancienne  peuplade  slave 
ranitzevtzi,  Branitscbevtzi,  que  les  latins  appelaient  Praedecenti, 
raedevecenti,  Praedenescenti.  Les  croisées  du  xi<^et  xn* siècle,  traver- 
ient  cette  ville  pour  se  rendre  de  Belgrad  à  Nissa.  Possédée  par  les 
>ulgares,  avec  la  cbute  de  leur  royaume  en  1018,  elle  entra  sous  la 
imination  des  empereurs  grecs.  Nommée  par  les  écrivains  byzantins, 
beophylacle  en  1081 ,  Anne  Komnène  en  1114,  Kinname  et  autres, 
irce  qu'il  fallait  la  fortiûcr  et  garder  des  attaques,  elle  était  prise  et 
prise  par  des  voisins.  Reconquise  par  les  Grecs,  elle  fut,  en  1154, 
taquée  par  les  Hongrois  qui  s'en  emparèrent  en  1185,  et  la  resti- 
lèrent  en  1186,  quoique  les  Boulgares  la  comptaient  dans  la  même 
inée  1186,  au  nombre  de  leurs  dominations.  Cependant  l'empereur 
rédérik  II,  allant  en  Palestine,  y  trouva  un  lieutenant  grec.  Lorsque 
s  frontièreâ  des  Boulgars  reculaient  devant  les  Serbiens,  Branitzova, 
>inine  capitale  d'un  canton ,  d'un  palatinat,  entra  dans  les  mains  des 
erbiens.  Il  est  probable  que  vers  1189,  Nemania,  chef  ou  roi  des 
erbes,  l'occupa  avec  quantité  d'autres  places  au  delà  de  la  Morava. 
.e  lieutenant  de  l'empire  grec  cessa  d'y  fonctionner,  les  Serbiens  pos- 
édaient  le  canton  et  sa  capitale  encore  en  1275,  puis  les  Hongrois, 
«''importance  commença  à  décliner,  et  sous  la  domination  turque,  Id 
ille  tomba  en  ruine  :  une  portion  seulement  prolonge  son  humble 
existence  sous  le  nom  de  Koslolatz  (Schafarjik,  Slovien.  Slaros.  II ,  5, 
[30,  p.  612,615). 

Vers  l'orient,  au  canton  de  Bransin,  touchait  un  autre  aussi  très- 
renommé  àla  même  époque,  avec  sa  capitale  Koutshevo.  LesKoulschans, 
Koutschevans ,  appelés  par  les  latins  Guduscani ,  Goduscani ,  lui  don- 
nèrent l'origine.  Dans  le  xn*  et  xni*  siècle ,  les  fastes  de  la  Hongrie  et 
dfe  la  Serbie  en  font  une  mention  fréquente.  Les  Grecs,  les  Hongrois, 
les  Boulgares ,  à  la  fin  les  Serbiens  se  mettaient  en  possession  de  ce 
canton.  En  dernier  lieu  il  est  mentionné  en  1459,  un  comes  Cucie- 
wiensis  et  Branicevensis.  La  rivière  Pek  ou  Bek,  Ipek,  traversait  ce 
canton  pour  se  jeter  dans  le  Danube  près  de  Gradiska.  Aujourd'hui  il 
n^en  reste  qu'un  souvenir  dans  la  montagne  appelée  Koutschaî,  et  dans 
un  hameau  nommé  Koutschaîna  (Schafarjik ,  p.  615,  614).  On  y  voit  les 


104  EDAISI. 

villages  de  ce  canton ,  Krousevitsch  et  Krivatscha.  Je  pense  que  no 
trouvons  ces  deux  cantons  avec  leurs  capitales,  appelées  par  Edris 
Bansin  et  Kavortzova.  Ces  deux  villes  sont  situées  sur  le  Danu 
sur  ses  rives  méridionales  ;  elles  sont  populeuses ,  riches  et  considéré, 
comme  les  mieux  habilées  du  pays  des  Hongrois  (p.  577). 

22.  De  Titlous  à  Bansin  on  compte ,  en  se  dirigeant  vers  Toriei 
75  milles  (p.  578).  Bansin  ,.,^>^^i:j   ,.yi^^  /.v^^^'s^  située  sur  la  r  ^ 
méridionale  du  Danube  (io),  ville  célèbre,  comptée  au  nombre 
plus  anciennes  résidences  (des.au lorilés,  d'un  lieutenant);  commerçai 
industrieuse,  habitée  par  de  savants  Grecs,  ,.t«Jb  .^t  LJi:^  •••! 
entourée  de  cultures  et  d'habitations,  où  le  prix  des  grains  est 
tammeut  modéré,  à  cause  de  leur  abondance.  De  Bansin  à  Kavorv.^      ^ 
Kavortzova  JU  jjli  jj^l?  'jj^j'-^  ^'*^*^  importante  sur  le  Daa^K  .^ 
vers  Torient  60  milles  (p.  577),  et  de  Belgrad  à  Kavorz  70  mill^s^    ^^ 
2  fortes  journées;  par  le  fleuve  la  distance  est  moindre  (p.  579).  Ti&l^^^^ 
est  donc  à  Toccident  de  Kavorz ,  aussi  le  fleuve  Tessia  se  jette  dans  /^ 
Danube  ,  à  Toccident  de  Kavorz  et  de  Bansin  (p.  580)  (se). 

De  CCS  données  de  deux  relations  juxtaposées  par  Edrisi,  les  distancés 
s'enclavent  de  cette  manière  : 


Titlous. 

Belgrad.                Bansin.             Gradiska. 

Kavorz. 

. 

7S  mitlei.                                      60  milles. 

70  milles,  2  joarnées. 

Ribna. 

60  milles. 

i  joui  née,  78  railles. 

S  j.  i  </s  j.  iOO  m. 

Neokaatro. 

S  </a  journées. 

FraBkbiU. 

480  milles. 

70  milles. 

0 

70  milles  ou  iOO  milles. 

Les  journées  y  sont  comptées  par  55  milles,  50,  66  et  75  millM. 
En  comparant  les  journées,  on  a  de  Ribna  à  Kavorz  une  ou  une  defli- 
journée;  de  Kavorz  à  Gradiska,  une  journée;  de  Gradiska  parBaDSin 
à  Belgrad,  une  journée,  celte  dernière  double.  Chacune  comptée  à 
25  ou  50  milles,  il  en  restera  de  Belgrad  à  Titlous  une  40"*  de  miltos. 


(49)  Car  ce  n'est  pas  Arinia ,  mais  Banssin  qui  est  situé  sur  la  rive  méridionale. 
(10;  La  traduction  dit  entre  KaTorz  et  Banssio ,  la  caite  itinéraire  le  confirme  :  il  fout  coapltf  (i 
au  nombre  d'erreurs. 


SLAVONIA,   25.  105 

Atre  ou  trois  et  demi-journées  entre  Belgrad  et  Ribna,  font 
lies;  or,  une  journée  est  réellement  montée  à  55  milles.  Cette 
itation  explique  les  bords  du  Danube,  où  se  jettent  Sava, 
j  Mlava,  Pek;  elle  détermine  les  situations  de  Bansin,  de 
oya.  On  ne  peut  pas  arriver  à  un  résultat  sérieux  et  positif,  en 
mant  dans  la  consonnance  des  noms,  rapprochant  à  des  localités 
eurement renommées,  dont  rexistence,  du  temps  dTdrisi,  serait 
se.  Bansin,  résidence  de  savants  Graîkioun  (Grecs),  est  sans 
doute  Branzin,  où  résidait  un  lieutenant  de  Tempereur  grec,  et 
e  de  trouver  ou  d'inventer  pour  Bansin  une  autre  position, 
ation  de  la  situation  de  Kavorz ,  est  une  conséquence  de  celle-ci. 
les  qui  nous  ont  arrêté  si  longtemps,  ne  sont  pas  de  Karintie  ou 
renie,  elles  sont  plutôt  villes  de  la  Hongrie,  momentanément 
îes  par  les  Hongrois.  H  me  fallait  cependant  y  pénétrer  et  déler- 
leur  position,  car  de  ce  point  nous  allons  faire  des  courses  dans 
ie  de  Karintie  qui  porte  le  nom  de  Slavonie ,  ensuite  nous  ferons 
s  excursions. 

Mais  avant  de  m*engagcr  dans  Texplication  de  la  Slavonie, 
.  prévenir  mes  lecteurs  que  la  triangulation  n°  42  de  mon  atlas, 
cartes  explicatives,  offrent  une  grave  inexactitude  et  de  fausses 
"étations  qu'il  faut  rectifier  et  corriger.  A  peine  écrivais-je  la 
[ue,  qu'il  ne  suffit  point  de  confronter  les consonnances  des  noms 
les  pour  expliquer  les  anciens ,  que  je  me  trouvais  privé  de  ren- 
nents  antérieurs  pour  distinguer  les  positions  indiquées  par 
dans  la  Slavonie.  Réduit  aux  indications  mod*ernes ,  je  trouvais 
bila  d'Edrisi  dans  le  seul  Yragolevitsch  de  Serbie ,  le  seul  lieu 
es  .consonnes  correspondaient  suffisamment  avec  Âfrankbila. 
it  de  cette  découverte ,  je  claquais  victoire  ;  triangulation  tor- 
,  explications  controuvées  furent  inventées  avec  le  succès  qu'en- 
une  imagination  étourdie.  C'est  trop  tard  enfin  que  Frankavilla 
sente  à  mon  attention,  pour  expliquer  et  indiquer  la  position 
•ankbila.  Il  est  donc  nécessaire  de  reprendre  l'explication 
sitions  de  la  Slavonie  et  avant  tout  de  coordonner  sa  triangu- 
et  la  rendre  plus  conforme  à  la  description  d'Edrisi.  Par 
pération,  nous  arrivons ,  comme  le  prouve  la  figure  ci-contre, 
rocher  Frlsisakà  la  distance  de  100  milles  de  Rendjbourg,  à 
le  la  composition  antérieure,  n'*  4-2  de  mon  atlas ,  n'a  pu  parvenir, 
e  de  cette  triangulation ,  appuyés  sur  les  positions  danubiennes 
ms  avons  fixées ,  nous  allons  examiner  la  Slavonie. 

III,  7. 


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Vive»»''""  „  »*  «'  '"  ^;  m  »'>°*'"    »«"  " 


SLAVOIIIA,  94.  107 

chercher  Sinolays  dans  la  partie  occidentale,  où,  dans  la  chaîne  des 
montagnes ,  on  trouve  ça  et  là  des  gisements  de  diCTércnts  métaux ,  et 
particulièrement  de  fer;  ils  sont  aujourd'hui  peu  exploités.  On  y  trouve 
Saladnak,  Selidnik  des  cartes  anciennes,  Slatina  des  modernes,  et 
plusieurs  noms  analogues. 

De  ce  point  de  Sinolav,  deux  chemins  noua  dirigent  par  la  Slavonie. 
De  Sinolav  à  Akoulia,  il  y  a  70  milles,  à  Afrankbila  80,  et  d'Âfrankbila 
en  se  dirigeant  vers  le  sud-ouest  à  Âkoulia  70  milles  (p.  577,  578). 
Frankbila  est  située  au  midi  de  Tilious ,  car  la  route  à  cette  ville  allait 
de  Titlous  vers  le  sud.  Frankbila  est  éloignée  de  Bansin  70  milles, 
également  autant  de  Kavorz;  mais  comme  Kavorz  se  trouve  plus  ;\ 
Torient,  on  comptait  de  Kavorz  à  Frankbila  100  milles  (p.  577,  578). 
Toutes  ces  directions  s'appointent  sur  Frankavitia  dans  Francocliorion, 
ancien  Sirmium,  Mitrovicz  d'aujourd'hui  (âi).  Frankabila  est  considé- 
rable, ses  habitants  boivent  de  l'eau  de  puits  et  de  fonlaine,  jouissent 
d'abondantes  sources.  Mais  ce  qui  est  plus  important  à  notifier,  c'est 
que  pour  la  plupart  ils  mènent  une  vie  nomade  s.^1.à3I  L^t  1& 
ïjtJu))  (p.  577).  Cette  remarque  opportune  pour  les  citadins  de 
Frankbila  s'étend  aux  habitants  des  campagnes  de  nombreux  pays,  et 
explique  bien  des  choses. 

24.  De  Frankbila  (Milrovitsch)  vers  le  sud-ouest  à  Âkoulia  70  milles. 
Autant  il  y  a  d' Akoulia  à  Kalam  ou  Balam  ;  50  seulement  vers  l'occident 
de  Balam  à  Frizizak  et  de  Afrizizak  100  jusqu'à  Ratisbonne,  ville  de 
Bavière.  Celte  série  de  villes  est  limitrophe  de  la  Karintie  (p.  578); 
elle  forme  une  chaîne  correspondant  à  ses  frontières  occidentales. 
Koalia,  possédant  de  vastes  dépendances,  assise  sur  le  penchant  d'une 
Qiontagne,  également  éloignée  de  Sinolav,  Frankbila  et  Balam,  est 
fortifiée  contre  les  attaques  des  Vénitiens  (p.  578).  Balam  ou  Kalam, 
grande  et  belle  ville,  entourée  d'eaux  courantes  et  de  vastes  dépen- 
ianees,  est  située  sur  les  bords  de  la  Drava  (p.  575).  Frizizak  enfin ,  sur 
le  cbemin  qui  conduit  vers  Ratisbonne,  est  sans  aucune  contestation 
Pr^sak,  ville  dépendante  jadis  de  Tarchevéché  de  Saitzbourg,  située 


(M)  Je  trouve  dans  Schafarjik  ^staroztt.  slav.  V,  S3,  note  18,  p.  667),  qu'on  dislingiie  Frauka- 
villa  de  Frankocborion.  Ce  dernier  mentionné  dans  les  années  ilS'f,  4154,  par  Nicetas  cboniates 
[ed.  Yen.  p.  10],  indiquerait  Sirmium.  L'autre  mentionné  dans  l'année  4189,  par  Ansbert,  serait 
t*aDGien  Badalis  ou  Pudalia  appelé  dans  les  temps  modernes  Nagy-Olasc,  >iaygaI1as,  Nangelos; 
lladielos,  dont  la  situation  est  presque  sous  les  murs  de  Sirmium ,  Hitrovitscb.  Je  pense ,  que  cette 
^sUnction  a  été  faite  par  précaution  de  ne  pas  confondre  les  noms  différents  en  apparence  et  que 
i^rankbila  d*Edrisi  rend  cette  distinction  inutile.  Franka  villa  n'est  pas  Pudalia,  Madielos,  mais 
^fmiaoi  Mitrovitsch ,  située  dans  Frankocborion ,  dans  une  contrée  franke,  dans  laquelle  vers  l'an- 
née 790,  les  Franks  occupèrent  Sirmium  qui  est  leur  ville ,  Franka  villa ,  Afrankbila. 


J08  EDRISI. 

dans  le  voisinage  d'Âgradiska ,  Gratz.  Kalam  oa  Balam  était  ani  emri' 
rons  de  Waradein,  pour  sûr  Pettau,  Poetovio.  Quant  à  Koulia,  je  pro- 
pose Louka-Bania,  Bania-louka,  Vlamme-louka,  Yania-louka  (ss);  mai» 
je  ne  défendrais  point  mon  assertion  si  l'on  trouverait  quelque  dioee 
de  mieux.  Cette  série  de  villes  passe  par  le  milieu  de  la  spacieuse 
Karintie,  et  cependant  Edrisi  dit  qu'elles  sont  frontières.  Ofi  le  lui  a  dit 
ainsi,  parce  que  ces  villes  se  rangent  sur  la  frontière  de  Windisch-mark, 
(Windisch-Gratz,  — Landsberg,  — Feistritz  ou  Bistrscbitz,  etc.),  Marca- 
vcndica  entre  Save  et  Drave. 

De  la  ville  des  Nomades  Frankbila ,  à  Abrandes  ou  Branbata ,  od 
compte  50  milles.  Les  apparences  phonétiques  portent  ma  vue  sur  la 
ville  Nerenta,  et  je  pense  que  c'est  juste,  quoique  la  distance  parait 
ctre  insuffisante.  La  population  de  cette  ville  est  sédentaire,  possédant 
des  bazars,  et  la  ville  est  située  dans  un  bas-fond,  juste  au  pied  d'une 
montagne  (p.  577),  comme  c'est  effectivement  avec  la  ville  Narenta. 
De  Branbata  à  Bania  75  milles.  Bania  est  une  petite  ville  bien  fortifiée 
sur  les  bords  de  la  rivière  Lina  ^  qui  a  son  embouchure  (dans  le 
Danube)  entre  Ravorz  et  Belgrad  (p.  578,  579).  Cette  rivière  Lin,  nom- 
mée par  son  propre  nom,  se  jette  dans  la  grande  rivière  nommée  Drin, 
qui  elle  même  se  perd  dans  la  Save;  cette  dernière  tombe  dans  le 
Danube  sous  les  mnrs  de  Belgrad.  Bania  est  une  dénomination  gêné-     - 
rique  d'un  grand  nombre  de  places.  Tout  près  de  la  ville  PrelKH,  sur   ^ 
les  cartes  modernes,  on  trouve  sur  la  rivière  Lin  une  localité  assez -a 
obscure,    Bana,  qui  a  p«  avoir  plus  d'importance  dans  les  tempSiSK 
anciens.  En  effet,  de  ce  point  de  Bania  (Bana)  à  Belgrad  vers  le  nord  ^r 
5  journées,  et  à  Kavorz  iOO  railles  (p.  579). 

De  Bania  à  Al  bana,  ville  florissante,  90  milles,  et  d'Albana  à  Babiu^j 
(Ribnitza)  iâ9  milles  (p.  579).  Ces  distances  facilitent  à  déterminer  Is^ 
position  d'Ablana,  Blana,  Bel  lina,  située  non  loin  de  i'embouchun^^ 
de  Drin,  vers  l'occident. 

De  Blana,  en  se  dirigeant  vers  le  sud  à  Ghano^U  ville  prise  ^^ 
ruinée  par  les  Vénitiens,  située  sur  les  bords  d'une  grande  rivière,  «« 
4-  jouruées  par  terre  et  à  2  journées  par  eau;  de  Nissova  4  joui 


(p.  579).  Je  ne  puis  constater  par  les  événements  connus  dans  I  ^  t 
chroniques,  si  les  Vénitiens,  qui  conquirent  à  celte  époque  la  meillen^^Eiy 
partie  de  l'Esklavonie,  pénétrèrent  jusqu'aux  rives  et  au  delà  de 
Drina;  je  ne  sais  pas  non  plus  si  Ghauo,  une  fois  ruinée,  s'était  dei^  ws 
relevée  de  sa  destruction  ;  mais  ce  qui  est  certain,  c'est  qu'aux  envir  ^dds 


(22)  Il  semble  que  la  carte  qoi  se  trouve  daD»  1  édition  de  Ptolémée   de  4813,  l'appeUe     Md^fe 
regalis. 


i 


DALKATIA,   i5.  109 

4Je  Possega  od  ge  trouve  à  égale  dislance  de  Bellina  et  de  Nissa,  et  que 
c^est  là  que  devait  être  Ghano  ruiné  ;  jo  vois  enfin  dans  Tensemble 
«Dtier,  que  ce  réseau  de  distances ,  que  nous  avons  composé  pour  la 
Slavonie,  répond  à  toutes  les  conditions  de  la  description  d'Ëdrisi, 
vetrace  retendue  que  la  voix  vulgaire  donnait  au  pays,  et  détermine  la 
situation  des  villes ,  dont  les  noms  se  sont  conservés  ou  subirent  les 
changements  qui  effacèrent  les  anciens,  en  substituant  d'autres  noms 
aujourd'hui  connus  (^5). 

25.  On  voit  que  sous  le  nom  de  Karantara ,  de  Karintie  sont  décrits 
les  pays  au  sud  du  Danube  ;  que  la  Karantara  renferme  tous  ces  pays , 
où  au  sud  du  Danube,  s'était  établi  la  race  Slave,  pour  cultiver  la  terre 
dans  les  parties  occidentales ,  pour  les  cultiver  et  profiter  des  pâturages 
dans  les  parties  orientales.  La  partie  occidentale  est  la  Karintie  propre- 
ment dite,  d'abord  incorporée  dans  la  Bavière,  ensuite  détachée  comme 
duché.  La  partie  orientale  décèle  une  certaine  subdivision.  La  Moravie 
panonienne  porte  le  nom  général  de  Karintie,  ensuite  la  Skiavonie,  qui 
s'étend  au  sud  de  Drava  :  elle  contient  la  Kroatie  et  la  Serbie  dans  les 
limites  qu'elles  avaient  anciennement,  du  temps  de  Constant.  Porphyre- 
genète;  leurs  frontières  orientales  passent  à  l'ouest  d'Ibar  et  de  Morava, 
et  jusqu'aux  embouchures  de  Sava  et  Drava.  (Voyez  Slavie  du  \*  siècle 
et  comparez  les  cartes  de  notre  atlas).  Le  langage  vulgaire  tenait  à  celte 
ancienne  délimitation.  Edrisi  connaît  et  dislingue  les  Kroates  et  les 
Serbes ,  mais  il  néglige  de  distinguer  leurs  possessions;  elles  sont  com- 
prises sous  le  nom  de  Skiavonie.  Mais  les  géographes  de  Sicile,  suivant 
Tancienne  habitude  romaine,  distinguaient  les  rivages  des  possessions 
Kroato-Serbes ,  par  le  nom  de  Dalmatie ,  ainsi  que  dans  la  description 
d'Edrisi  figure  encore  un  pays  spécial ,  Dalmasia,  où  les  conquêtes  des 
Vénitiens  faisaient  des  progrès.  Dans  ce  pays  il  connaît  la  ségrégation 

(23)  Le  traducteur  proposait  de  voir  dans  Àkoulia,  Wukowav;  dans  Afrizizak,  Verotze;  dans 
Ablana ,  Albana ;  et  dans  Ghano,  Novi.  —  Je  ne  sais  pas  à  quel  Novi  pense  le  traducteur.  On  sait 
que  les  Vénitiens  possédaient  Novi  situé  dans  la  Eroatie  au  fond  du  golfe  adriatique.  Dans  l'in- 
térieur il  y  a  plusieurs  Novi.  —  Les  anciennes  cartes  (Ptolémée  édit.  4543},  donnent  dans  l'intérieur 
des  terres  en  Serbie ,  Novi ,  placé  à  côté  de  Montenovo,  entre  les  sources  d'Ibar  et  Drin ,  non  loin 
du  mont  Noir.  En  compulsant  les  cartes  postérieures  je  trouve  le  nom  de  Novi  remplacé  par  Houi 
et  transporté  à  l'occident  de  Drin  (Ptol.  deRuscelli,  4664),  ou  bien  en  lui  conservant  le  même 
emplacement  on  l'appellait  China  (Grsecia  Jac.  Castaldo  in  theatro  ortel.  4750).  Cette  dernière 
appellation  répond ,  on  ne  peut  pas  mieux  à  Ghano.  Mais  Montenovo  par  toute  la  suite  des  cartes  : 
de Mcrcator,  Hond ,  lansen  ,  Blcauw,  Witt ,  Coronelli ,  Delisle,  Vangondy,  est  régulièrement  place 
en  Serbie  ou  en  Bosmie,  au  sud  ouest  de  Novi  bazar,  ainsi  que  Novi ,  China ,  ne  serait  point  à  égale 
distance  de  Nissa  et  Bellina ,  et  ce  Novi  proche  de  Montenovo  paraît  y  prendre  le  nom  de  Lodi- 
novi.  Au  reste  tout  y  est  conftis ,  obscure,  à  rechercher  historiquement.  Les  Vénitiens  en  guerre 
avec  les  Hongrois ,  ont-ilt  pénétré  dans  la  Serbie  7  je  ne  puis  plus  m'enga^er  i  résoudre  cette 
qiiMUoii. 


ilO  EDaisi. 

de  la  Kroatio,  il  indique  ses  limites  sans  mentionner  qu&du  reste  les 
Serbiens  étaient  possesseurs.  Ce  pays  étant  une  portion  de  la  Slavonie, 
nous  allons  le  parcourir  par  un  examen  rapide. 

Edrisi  parle  des  conquêtes  des  Vénitiens  et  de  leurs  possessions, 
mais  ni  sa  carte  itinéraire,  ni  son  texte  n'ont  indiqué  la  position  de 
la  cité  elle-même.  Il  dit  que  de  èJiL^  Kamalga  (Gomacchio) ,  il  y  a 
44  milles  à  !yli  Fatoua  (Padoua),  ajoutant  que  cette  Tille  (continen- 
tale) est  de  tous  côtés  cnlource  par  la  mer.  Ensuite,  de  Fatoua  il  y  a 
25  milles  à  Jb  J^t  Alrila  (Trevisc),  et  18  milles  d*Âtrilla  à  ^^y, 
Bonsa  (Mourano,  ainsi  appelé  par  son  porto  Bouso)  ;  vient  ensuite  tr»^\S 
Gradis  (Grado,  vîs-ù-vis  d'Aquilée),  50  milles  de  Bonsa;  et^CJI^Lls^l 
Âstidjanko  (Starazano)  à  5  milles  de  Gradis,  place  forte ,  bâtie  sur  les 
bords  d'une  rivière  dont  le  volume  des  eaux  est  considérable ,  bien  que 
sa  source  soit  peu  éloignée  (Timavo  fons  et  porius).  Cette  ville  impor- 
tante, habitée  par  des  militaires,  des  marchands  et  des  fabricants,  où 
Ton  équipe  des  ttottcs  pour  des  expéditions  guerrières ,  est  Tentrepôt 
principal  du  pays  de  ^^^  t  Âukoulaia  (d'Âquilée)  (Y,  %  p.  247,  248). 
Ainsi  il  a  tourné  Venise  sans  la  nommer.  On  peut  présumer  que  soo 
texte,  dans  ce  passage ,  est  dépouillé  de  la  description  de  Venise,  de 
laquelle  il  ne  reste  que  la  mer  qui  entoure  Padoue  de  tous  côtés.  Cette 
présomption  devient  à  mon  avis  une  certitude,  lorsqu'on  rencontre  à  la 
fin  de  ce  passage  une  lacune,  qui  se  retrouve  dans  Tabrégé  de  la  des- 
cription d'Edrisi  et  dans  le  manuscrit  asselin. 

Jaubert  s*est  borné  à  donner  la  transcription  de  cette  lacune  d'après 
la  version  latine,  p.  222,  225,  sans  aucun  examen  (p.  248).  Cette  lacune 
cependant  contient  une  description  de  Tlstrie,  dont  les  rivages  sont 
détaillés  par  la  carte  itinéraire.  Voici  ce  qu'elle  dit.  De  regionibus  auiem 
medilerramis  Aquileiœ  sunl  Verona  quœ  et  Verana  dicilur  Ajy  e| 
i^jiij»lL  (Bufalo  et  Tamtos,  Taïamento,  Tagliamento).  Urbs  Verana 
magna  est  distatque  à  [^yaj>lL  êtatione  hrevi  (de  même  que  de 
Bufalo)  :  et  iam  ah  urbeeadcm  (Verona)  ad  urbcm  aLo  (Bulalojix  m.p. 
et  ah  hoc  ad  Ammelam  sive  Angelam,  cujus  incolœ  sunt  de  gente  franco- 
rum,  m  m.  p.  ab  Ammela  ad  aL^  (Kandila)  francorum,  m  m.  p. 
et  ah  hoc  ad  Veronam  seu  Veranam,  n  m.  p.  Ce  sont  les  éublissements 
francks,  entre  Vérone  et  Boubalo.  Il  est  remarquable  comme  Edrisi^ 
distingue  ces  Franks  des  indigènes  Italiens  ou  Slaves.  Vérone  et  Bon- — 
halo  ne  se  trouvent  pas  dans  les  cartes  modernes  ni  anciennes,  et  j 
n'ose  pas  hasarder  l'explication  par  quelque  appellation  analogique 
petites  localités;  on  y  trouve  cependant  les  villafranca,  castelfranca , 
existent  jusqu'aujourd'hui,  comme  souvenirdes  anciens  établissemen 


DALMATIA,   26.  ili 

Verum  de  maritimis  regionibus  est  d'hiria  (Capo  d'Istrîa)  ^itcB  diilai 
^^^pUb  (Taîamentoj  urhe  AquUeiae  xxxiii  m.  p.  Â  la  place  d'Istria,  la 
carte  poMe  #-»JL^  Saliros  (S.  Hllario?)  —  Ab  hoc,  ad  urbem  Moglo  quœ 
et  Vmago  didtum  m.  p.  La  carie  porle^L*^!  (Umago, Humago). Parilet 
àb  urbe  Verona  medilerranea  ad  urbem  Vmago  marilimam,  cujus  incclœ 
tunt  franci,  xviii  m.  p.  Ab  hoc  ad  urbem  Geniebona,  quœ  rencens  est  et 
ad  francos  pertineL  II  faut  lire  ^^Xss.  Djentenoba  (Citta  nova)  : 
et  a  Gentenabo  (Citta  nova)  ad  Parengio,  quœ  eliam  Parenzo  vocatur, 
xu  m.  p.  La  carte  porte  inexactement  ^9  JjJ  (Parenzo).  Et  ab  hac  ad 
Ruigo,  dans  la  carte y^j.  Rigno,  ou^iL^j  Robigno  (Rovigno)  qiue  ad 
frankosquoque  spectat,  xv  m.  p.  Ab  hac  ad  urbem  Polam,  Jo  xii  m.  p. 
Ab  hac  ad  Molodiamy  la  carte  porte  ^^^j^y  Molodnia  (Medolina) 
XVI  m.  p.  Ab  hac  ad  Albon  (Albona,  omis  dans  la  carte)  xi  m.  p.  Ab  hac 
ad  Flamona  d^\  Aima  de  la  carte  (Fianona)  vi  m.  p.  A  Flamona  ad 
Yrana  àjjyi]  et  Âvrana  (Yrana)  quœ  ullima  est  inter  regiones  Aquileiœ 
maritimes ,  iv  m.  p.  (Edrisi,  p.  248  de  la  version  de  Jaubert). 

26.  D'el  Avrana  ou  l.b^  Lobara  (de  la  p.  285,  V.  4.)  à  ^jS.y  Boukari 
(Buccari),  10  milles.  Cest  la  première  dépendance  de  la  ^Uâ. 
Khroasia,  qu'on  appelle  aussi  L^U^  Dalmasia. 

De  là  à  »^^  Koubara  ïjjLS  Kabra  (de  la  p.  261)  (Fabra,  Pribour),* 
ville  considérable,  sur  le  penchant  d'une  montagne,  16  milles. 

De  là  à  h^  Sounna ,  uL^  Sana  (de  la  p.  288,  V.  4.)  (Segna,  Zeng), 
jolie  ville,  dont  les  habitants  sont  Slaves,  et  possèdent  beaucoup  de 
navires,  50  milles. 

De  là  à  i£JL:uMd  Kastilaska,  petite  ville,  dont  la  population  slave 

ne  possède  que  peu  de  navires,  15  milles. 

^* 

De  là  à  ïh..^  Maskala  a^^tj  Ja/^^  Maskala  weasia  (Maluicin, 
Malvesin  des  anciennes  cartes ,  Smoliana  plus  correctement  des  mo- 
dernes), appartenant  aux  Dalmates,  20  milles. 

De  là  à  jjûJil  Arnes  (Vroniak  au  sud  d'Iablanalz),  ville  de  moyenne 
grandeur  appartenant  aux  Dalmates  et  possédant  quantité  de  navires, 
15  milles. 

De  là  à  \^L^  ^Lâ  Sato  ou  Satva  (Zusan  au  sud  de  Carlopago), 
appartenant  aux  Dalmates ,  qui  y  possèdent  des  navires  dont  ils  se 
servent  pour  des  expéditions  militaires,  20  milles.  (V.  5.  p.  266,  267). 

Vient  ici  ^j^j^j^^^  Santoboulos  (p.  261  ),  qui  indique  les  scopuli, 
scopulis,  à  rentrée  du  golfe  de  Novograd* 


112  BDRISI. 

De  Salo  à  jjJ  Nouna,  qu'on  nomme  aussi  ^jo:^  Ninos  (Nina, 
Nona),  ville  considérable  et  naturellement  très-forte,  20  milles. 

De  là  à  9j^Lx  Djadra  (Zara),  ville  étendue  et  vaste,  dont  les  habi- 
tants sont  Dalmates.  La  mer  baigne  les  murs  de  la  ville,  (il  paraît  que 
c'est  Zara  ta  nouvelle). 

DeZaraà^!^^  Dograta  (Dratschevatsch ,  vis-à-vis  de  Novigrad), 
ville  dont  la  population  est  mélangée  de  Dalmates  et  de  Slaves,  50  milles. 

De  là  à  ^LjLw  Sanadji  (Sebennik),  ville  considérable,  rendez- 
vous  des  marchands  qui  y  font  des  expéditions  par  mer  et  par  terre, 
20  milles. 

De  là  à  ^j^jjl  Ourgouri,  qu'on  appelle  aussi  jj!^  J  Lourgaro, 
(l'ancien  Prsetorium,  vieux  Trau  près  de  Rogoznilza),  ville  remarquable 
par  ses  agréments  et  par  ses  fortifications,  peuplée  de  Dalmates  qui  se 
livrent  au  commerce  et  entreprennent  des  voyages  lointains,  ainsi  que 
des  expéditions  militaire^,  50  milles. 

De  là  à  ij^jàJ  Targoris,  jjj^jf  Borgorouz  (lisez  Targoronz, 
qu'on  nomme  aussi  yj,jàJ  Targori  (Tragurium,  Trau),  lieu  dont  les 
habitants,  d'origine  dalmate,  sont  constructeurs  de  navires ,  guerriers 
ou  marchands,  6  milles. 

De  là  à  ^Lwt  Asbalato  (Spalatro),  ville  florissante,  vaste,  com- 
merçante, possédant  des  vaisseaux  de  guerre,  12  milles. 

De  là  à  jxju^  Sigano,  leçon  fautive,  la  carte  et  un  autre  passage  du 
texte  (V»  i,  p.  287)  portent  yxZw  Stagne  (Stagne  dans  la  gorge  de 
Sabionccllo),  ville  peuplée  de  Slaves,  qui  sont  pour  la  plupart  naviga- 
teurs, 25  milles. 

De  là  à  ^^j  iPj^\  Ragorsa,  qu'on  nomme  Iwj&j  Ragousa, 
dont  les  habilanls  sont  Dalmates  et  possèdent  des  navires  de  guerre, 
50  milles.  C'est  ici  que  se  termine  la  Khroasia  (Y.  5,  p.  267,  268). 

De  Ragousa  à  jjJ^Ld   Kattaro  ou  jj^li  Kadharo  (Cattaro),  ville 
florissante  et  peuplée  de  Dalmates  guerriers  et  voyageurs,  qui  possède 
certain  nombre  de  navires,  20  milles. 

De  Ik  k  ^jLp\  Antibaro  (Ântivari),  lieu  habité  par  des  Slaves, 
50  milles. 

De  là  à  iu2k^>>  Deloudja  (Dulcigno),  ville  importante  de  l'Esklavoni 
peuplée  d'habitants  de  Ladhikioun  (à  cause  de  la  ressemblance  du  no 
d'Oieinium),  70  milles  (distance  excessive)  (V.  5,  p.  268). 

Vient  ici  Leso  à  l'embouchure  de  Strina  (Drin),  et  de  Delon 
à  Owtj^t  Âdrast  (Durazzo)  des  Franks,  80  milles. 


DALVATIA  »  t«.  lis 

Dans  la  description  de  la  chatne  de  montagnes  qui  trarerse  la 
Dalmatle,  Edrisi  indique  quelques  villes  de  Fintérieur.  La  chaîne  da 
mont  yJi  Leso  s*étend  dans  la  direction  de  w^^l  .^  Drast  (Dourazzo) 
jusqu'à  40  milles  de  Djadra  (Zara).  Elle  est  située  à  15  milles  de  Dou- 
razzo. De  la  yille  de  Leso  à  Deldjînia  la  maritime  on  compte  50  milles, 
et  deDeldjinia  à  la  montagne  12  milles;  elle  se  prolonge  jusqu'auprès 
l'Antibari,  Kataro  et  Ragous  ;  elle  se  rapproche  à  5  milles  de  Kataro. 
I^is-à-vis  de  la  ville  de  Kadara  et  au  delà  de  la  montagne,  à  une  distance 
lelSmilIes,  est  ^'J  Kamio,  ville  florissante  située  sur  un  embran- 
:±ement  et  enlourée  de  montagnes  qui  affectent  la  forme  d*un  sjS'kief^ 
3n  sorte  qu'on  ne  peut  y  parvenir  que  d'un  seul  côté  (V,  4,  p.  287). 
Cest  \jXfil3  Kamanova  (de  la  p.  261,  Y,  5),  située  dans  le  canton  Zêta 
[de  Monténégro,  Tscharnogora ,  Tschernitza),  où  l'on  a  la  haute  et  la 
basse  Komani  sur  la  rivière  Kinilza  ou  Sibnitza^  qui  se  perd  dans 
lloraka  (34). 

La  chaîne  se  dirige  ensuite  vers  Stagne  et  là  il  s^en  détache  un  pie 
très-élevé;  puis  vers  Sbalato  (Spalatro),  situé  à  6  milles  de  la  montagne 
derrière  laquelle  sont  deux  villes,  savoir  jLsr^  Nidjaou  (Klissa,  ancien 
Anderilum)  et  lijXS  Kitra,  ijS  Kira  (à  la  p.  261)  (Koupritz  situé 
non  loin  de  la  montagne  Kourtal);  la  première  12  milles  de  Spalato,  et 
à  une  journée  de  la  seconde.  L'une  et  l'autre  sont  environnées  de  mon- 
tagnes d'un  difficile  accè& 

La  qhaîne  se  prolonge  après  vers  Targouri  (Trau)  et  vers  -a^lar^ 
Sindjadji»  Sinadji ,  ville  bâtie  sur  un  contre-fort  de  montagnes  (Sing 
cfa  Sign?  proche  de  la  rivière  Cettigna)  (25).  Puis  vers  Djadera  (Zara), 
Bituée  dans  une  plaine  à  1  journée  des  montagnes;  puis  vers  Nouna 
la  maritime  (Nona),  située  à  12  milles:  puis  vers  Sana  (Segna)  sur 
le  penchant  d'un  coteau.  Là  ces  montagnes  atteignent  par  une  ligne 
droite  les  environs  de  Lobara  (Lovrano),  lieu  situé  ^ur  une  agréable 
coUine  (V,  4,  p.  288). 

Nous  allons  maintenant  entrer  dans  une  province  tout-à-fait  spéciale 
à  la  description  d'Edrisi ,  appelée  Dj^eloulia ,  qu'on  ne  peut  pas  mieux 
interpréter  que  par  Serbia. 

(14)  Edrisi  (p.  S87)  iKt  que  rembrànchemeat  le  plus  voisin  d^Adrinople  ^  de  la  ville  de  Lo  Li 
Bania  (p.  S61,  t8i),  (c'esH  dire  eotre  ces  deux  Tilles  placées  à  deux  bouts),  se  dirige  vers  les  bords 
^e  la  mer  de  Peloponèse  (mer  occidentale  de  la  Grèce) ,  et  se  termine  à  80  milles  d'Astibos, 
Thcdbes.  —  On  ne  peut  pas  confondre  Kania  avec  Kamio.  Cesi  une  antre  position.  Kiua  se  trouve  en 
Jktbamie,  an  sud  du  moni  Galitska  :  sur  ce  poiat  deux  chaînes  se  dirigent  vers  le  sud.  La  carte  itkië- 
«aire  n'offre  rien  qui  expliquerait  la  difficulté  relative  à  Kania,  bien  qu'elle  donne  plusieurs aoaas  qal 
ae  se  trouvent  point  dans  le  texte.— Jaubert,  p.  261,  lit  Bouterla ,  c'est  Taberla  comme  ailleurs. 

(tV)  Je  risque  cette  supposition  malgré  ridentité  des  noms  avec  Sebenico. 

III  • 


i7.  U  aJj^  GetlHmlia ,  DJeioalia ,  s^élend  Te»  l*orîeiit.  Lm  filles 
indiMiles  de  cette  région ,  sont  les  goivintes  : 

^«^  Nissoo ,  Nissova. 

JjjJl    ^^y^  Ijjy'j)/'  Atrova,  Atroubi ,  Âtrouni. 
^«xJ  y<xo  v^"^  Bendi,  Bidenou,  Nidenou. 
^y^  Banva. 

A«M^  jJL^  ^y&^  Nischa ,  Bischa ,  Bisa. 
IjL.Jl)  J!  Akridiska. 
tj»yiyf^  (r-ji^'  Aghrioz ,  Aghranzinos. 

^1^1  Atralsa. 

JjjyL^t     J^t^^t  Stobouni,  Estoboni. 
IjjX^vj:.^  j^yu^is^^  j^^c^u^  Montekastro»  Bontekastro.      <, 

Bestkastrova. 
jijujy  Neokastro. 
^«-yJL^Ub  ^mQm>,oi  Lb  ^Mft^:^  L)^  Bouliakbiskos,  BooliadJ?  ^î- 

miskos,  Bouliadjiskomos  (p.  291,  382,  583). 

La  route  qui  traverse  la  Djetulie,  dans  la  direction  sad,  iinlinr^  Je 
quelque  peu  vers  Test,  conduit  dans  la  Remanie.  De  Ribna  (Ribnilz^  .^ssaj 
50  milles  ou  1  journée  jusqu*à  Nissou  ou  Nissova,  ville  remarquable  |r     war 
son  étendue,  par  Fabondance  et  le  bas  prix  des  provisions,  telles  que         li 
viande,  le  poisson,  le  laitage  et  les  fruits.  Elle  est  située  sur  les  boi        di 
de  la  \i\\y  Morafa,  ou  plutôt  elle  est  dans  le  voisinage  de  cette 
qui  descend  des  montagnes  de  oj^  Serbia,  nommées  incorreeU 
Jjjj^  Serina.  Sur  la  rivière  près  de  laquelle  est  située  Nissa,  on  a 


struit  un  grand  pont  destiné  aux  allants  et  aux  venants  (p.  291, 

De  Nissa  à  Trova  ou  Tronbi  vers  Torient,  40  milles  on  1  journée, 
description  nous  assure  une  fois ,  qu*elle  est  située  sur  une  monl 
d*oà  découle  un  cours  d*eau  qui  se  dirige  vers  la  Morava;  une  autre  Wék 
elle  dit  que  cette  ville  est  bâtie  sur  les  bords  d*une  petite  rivière  prov9« 
nant  des  montagnes  de  Serbie,  coulant  à  Torient  d* Atrova,  se  jetlmi 
ensuite  dans  la  Morava  (p.  291,  383).  Or,  pour  déterminer  son  emplies 
ment  il  faut  suivre  la  route  ordinaire  en  remontant  la  rivière  Nison, 
qui  se  dirige  vers  la  Morava ,  et  avançant  jusque  vers  Zaribrad.  Id,  I» 
nom  d*A trova.  Trouva  se  retrouve,  et  vient  de  Turres,  ad  turres.de 
Tantique  itinéraire  romaine  (table  pentinger.  segm.  7).  Cest  la  ville 


DJBTOULU,  SS.  115 

TorriSy  qu'en 546  Jastinien  Toalut  oonfier  aux  Slaves,  à  condilioo  de 
préserver  sur  ce  point  Tempire  des  irruptions  des  Hans-Boulgares 
(Procop.  de  bell.  goth.  lU,  i4).  Sur  les  bords  de  cette  rivière  (Nisova), 
on  voit  des  moulins  à  farine ,  des  vignobles  et  des  jardins. 

De  Trouva  à  Atralsa  40  milles  ou  i  journée.  Tralsa  est  un  lieu  bien 
peuplé  et  situé  dans  une  plaine  fertile  (p.  291, 583).  Sur  la  route  par 
laquelle  nous  avonçons ,  Tancienne  Sardica  avait  été  appelée  chez  les 
Slaves  Sredetz,  nom  transformé  par  les  Grecs  en  Triadilza  (Léo  dîacon., 
Skylitzes,  Zonaras,  Theofylakt.;  Anne  Kommene).  Les  croisés  rappe- 
laient Straliz,  Stralizta  (Ansbert,  With.  tyrias),  de  même  Edrisi  Tralsa, 
Atralsa  (Schafarj.  II,  3,  §  30,  p.  619).  Aujourd'hui  Sophia. 

D* Atralsa  à  Estoboni  1  journée.  Stobouni  est  une  jolie  ville  ou  village. 
Cette  place  était  sans  doute  où  est  aujourd'hui  Iktiman ,  Ischliman,  au 
pied  du  deûlé  par  lequel  on  entre  en  Remanie.  Le  deôlé  passé,  le 
chemin  se  divise  :  à  gauche  il  longe  les  chaînes  des  montagnes  Balkan 
par  Tschamagora  (Montagne  noire),  située  sur  la  rive  de  Troutscha 
eers  Kaloper  pour  arriver  à  Kabrova,  placé  au  delà  des  montagnes,  sur 
leurs  penchants  septentrionaui.  C'est  dans  cette  direction  que  se  trou- 
vait, à  6  journées  de  Stobouni,  Akartous,  Rartous  ou  Rarnous,  Rranous, 
yille  située  sur  une  haute  montagne  :  ce  qui  vient  au  défilé  Schimka 
da  Schipka  qui  s'ouvre  vers  les  sources  de  latros.  Les  six  journées  de 
chemin,  poussent  Akarnous  sur  ce  défilé  :  mais  il  est  plus  que  probable 
qa^Âkarnous  s'élevait  plus  près  sur  un  défilé  où  d'An  ville  indiqua 
L*ancien  ad  montem  Haemi  (Cornus  (Sgroton),  Corinuâ  (Mercator),  sur 
Stramich  qui  tombe  dans  Mariza  près  de  Filippop.)  :  ce  passage  ouvre 
le  dhemin  vers  les  sources  d'Osma.  La  ville  Akarnous  n'appartient  plus 
à  la  Djetoulie. 

98.  Revenant  sur  nos  pas,  nous  nous  transportons  vers  l'embouchure 
de  la  Iforava,  pour  longer  le  Danube.  Morafa  confond  ses  eaux  avec  le 
Danube  auprès  d'Akradiska.  D'Akradiska  (Gradiska)  à  Ribna  (Ribnitza, 
^Journées  ou  une  et  demie;  et d'Agradisca  à  Neokastroâjoyrnées et 
d^iie.  Neokastro  est  dans  une  contrée  fertile ,  les  vivres  y  sont  à  bon 
nuurché,  les  vignobles  et  les  vergers  nombreux;  le  Danube  baigne  ses 
murs  du  côté  du  midi  (p.  385).  Les  distances  données  assignent  l'em- 
placement de  ce  château  neuf  sur  le  territoire  d'Orsova. 

De  Neokastro  1  journée  et  demie ,  près  du  fleuve  Bideni ,  ancienne 
Bononia;  dans  le  moyen  âge  B'din,  Bydinum  (Theophyl.),  Bidini 
(Redren);  B'dyn  dans  une  lettre  du  roi  Asan  ;  appelé  B'din  par  l'arche- 
vêque Daniel  (Schafarj.  II,  5,  §30,  p.  619);  Widdin.  Et  (de  Bideni) 
même  distance  vers  rorient  sur  le  fleuve,  Jusqu^à  Best  kastrova,  jolie 


116  BDRISL 

TÎUe  de  laquelle,  à  la  même  distance  vers  Torieut,  Deristra  oo  Odestnu 
ville  qui  est  déjà  au  delà  de  la  frontière  de  Djetoulie  (p.  586)  (te). 

Entre  ces  deux  dernières  villes  se  perd  dans  le  Danube  la  rivière 
^^y.^^  Mesinos  (Osma),  à  laquelle  réunit  ses  eaux  la  rivière  qui 
sort  d*une  montagne,  dans  le  voisinage  de  laquelle  est  la  ville  Beulta- 
djimiskos  ou  Bouliadjiskos  ou  Bouliakhiskos  (p.  587).  En  remontant 
Osma  vers  les  montagnes,  on  trouve  aujourd'hui  Koulodjcritza  on 
Kalogeritza,  dont  le  nom  est  analogue,  où  il  ne  manque  pas  de  rivières 
qui  se  réunissent  avec  la  Osma,  Osmen,  Osmus  (27). 

La  ville  d'Osma,  Ozma,  ancienne  Melta,  est  nommée  par  Edrisi 
Hessinos,  Mesinos,  comme  située  sur  une  montagne;  grande  et 
ancienne  ville  commerçante ,  où  Ton  fait  beaucoup  d'affaires  et  où  Ton 
trouve  d'abondantes  ressources  (p.  584,  488). 

De  Mesinos  il  y  a  40  milles  à  Âghranzinos  ou  Anghrio  (Gavardin  sur 
Yoda  ou  Plevena,  Utus,  Yid),  de  laquelle  2  journées  ou  70  milles  à 
Bontekastro  (p.  588)  ou  Beslkastro. 

Bischa  ou  Bisa ,  aujourd'hui  Belz  sur  Iskra!  ou  Isker,  ancien  OescnSt 
est  au  centre  des  autres.  Le  texte  d'Edrisi  donne  5  milles  nord-ouest 
Bideni,  5  milles  de  Messinos,  4  milles  vers  le  sud  d'Akarnus  (p.  584)...  ^. 
Nous  tâcherons  bientôt  d'apprécier  ces  distances  entassant  sur  un  p<HnV.^l 
tant  de  villes!  (Bods  de  Sgroton,  Bilz  de  Mercator,  etc.). 

De  Bischa  à  Banva  6  journées  dans  la  direction  nord-est  et  d'Âtroi 
au  même  Banva  dans  la  même  direction  nord-est  90  milles  (p.  584). 
nous  voudrions  avancer  avec  ces  distances  de  6  journées  150  milles, 
90  milles  dans  la  direction  indiquée ,  nous  nous  transporterions  au  del. 
des  limites  de  Djetoulia,  au  delà  du  Danube  et  nous  ne  réussirons  jami 
à  appointer  ces  deux  distances  sur  un  point;  il  est  donc  indispensabl 
d'admettre  que  dans  ces  données  gît  une  erreur;  que  la  direction 
Bischa  à  Banva,  n'est  pas  nord-est,  mais  plutôt  nord-ouest,  et  qu*il  fà' 
par  quelque  raison  réduire  les  distances  trop  énormes.  En  partie 
d'Atrova  et  de  Bisch  dans  les  directions  opposées,  à  des  distances  pi 
portionnées,  on  arrive  à  une  ville  ancienne  située  sur  la  rivière  appeH  ^ 
Skisul,  Ognit,  Igoustoul,  connue  du  temps  d'Edrisi  sous  le  nomdeBo'^, 
Boîon  (dans  Kedren  en  1015),  qui  existe  aujourd'hui  sous  le  noiit    ëe 


(26)  Le  souTcnir  de  Best-KastroTa ,  se  conserve  peut-être  dans  Peslikoî,  Peslikoy,  viliaire  situé 
sur  le  Danube ,  non  loin  de  l'embouchure  de  Iskra ,  ouest.  Quant  à  Odestra ,  nous  y  reviendront 
fine  tard. 

(27)  Laphonesis  de  Bouliakhiskos  ou  Bouliadjiskos-djimishos,  me  paraît  aussi  grecque  que  je 
présume  ce  nom  composé  de  jSouAvi  conseil ,  ^ovXtoç  conseillers  ^ouAta  lien  dm  cùueU; 
xe9Tv2  cassette  ou  ^vwti  vase»  coupe;  9i9noç  disque,  assiette;  ^vp-vioç  ecdweux. 


BERDJAH,  ROMAIflA,  M.  117 

EVilmia.  Cependant  je  ne  saurais  diresî  elle  est  bâtie  sur  une  émin«nce, 
comme  Banva ,  ville  peu  considérable ,  sur  une  monlagne. 

EIdrisi  nous  avertit  que  Ribnitza ,  Nissa ,  par  conséquent  tout  ce  qui 
3St  à  Test  de  Morava,  sont  les  dépendances  de  Makedonia  (p.  579);  cepen- 
dant il  étend  la  Djetoulie  ou  le  pays  des  nomades  au  delà  de  la  rivière 
Osma.  Toutes  ces  dépendances  sont  contigucs,  suivant  son  expression,  à 
ta  Germanie  ^  Djermanie.  Cetle  Djermanie  englobe  la  Remanie  et  la 
partie  orientale  de  la  Boulgarie,  dont  le  nom  est  inconnu  à  la  description 
d'Edrisi.  Quant  à  Makedonia,  elle  s*étend  vers  le  sud,  elle  n'a  pas 
trouvé  dans  la  description  de  séparation  spéciale,  mais  les  chemins  qui 
la  traversent  y  sont  spécifiées;  nous  nous  proposons  de  les  parcourir. 

Berdjan,  Romania. 

29.  Le  traducteur  d'Edrist,  tout  satisfait  des  explications  communia 
qnées  par  son  confrère  Hase,  pour  la  Grèce,  la  Macédoine  et  les  parages 
de  la  Remanie  (p.  286),  n'a  pas  touché  ces  points  de  Djetoulie  que  nous 
avons  fixés;  ensuite  arrivé  à  la  relation  édrisienne  de  la  reconstruction 
d'Aghirmini  par  Tempereur  Heraklius,  il  donne  le  texte  arabe  du  pas- 
sage de  la  relation,  qui  lui  parait  extrêmement  obscure,  ainsi  que  tout  ce 
qui  suit  jusqu'à  la  fin  de  la  section  (p.  587),  et  de  ce  point  il  n'ose  hasar- 
der presque  aucune  explication  aux  positions  de  l'intérieur  de  la  Boul- 
garie et  de  la  Remanie.  En  effet,  il  fallait  bien  réfléchir  et  analyser  les 
difficultés  très-variées,  avant  de  pouvoir  discerner  les  renseignements 
donnés  par  Edrisi.  Je  dis  qu'Edrisi  nous  donne  des  renseignements  sur 
ces  régions  là ,  car,  bien  que  sa  description  demande  des  illustrations 
approfondies,  elle  doit  de  sa  part  fournir  des  renseignements  instructifs 
pour  l'époque,  et  nulle  part  elle  n'est  plus  abondante  sous  ce  rapport, 
que  pour  la  partie  qui  nous  occupe  et  spécialement  pour  la  Remanie. 

Nous  avons  pu  remarquer  que  les  localités  de  toutes  ces  régions 
danubiennes  portent  de  noms  diflférents,  prononcés  et  écrits  ou  ortho- 
graphiés d'une  manière  très-variée.  Le  globe  terrestre  n'a  peut-être 
nulle  part  autant  de  diversité  inconstante  et  indéterminée.  Il  y  a  des 
Tilles,  des  rivières  qui  portent  des  noms  de  différents  idiomes,  de  diffé- 
rentes époques,  de  l'usage  varié  :  par  dixaines  et  par  vingtaines.  Les 
indigènes  grécisés,  plus  tard  latinisés  par  les  Romains,  disparurent 
pour  toujours  lorsque  leurs  pays  dévastés,  se  peuplèrent  par  d'autres 
souches.  Slavonisés  avec  toute  la  Grèce,  bientôt  magyarisés,  valakhisés, 
ils  changèrent  de  face.  La  race  slave  surtout  sema  avec  profusion  ses 
dénominations,  des  rives  du  Danube  jusqu'au  Tenar.  Les  dénominations 
slaves  déblayèrent  celles  des  Grecs,  Romains,  Byzantins ,^  ou  s'associe* 


448  EDRI«. 

rent  avec  elles  pour  mnltiplier  la  confusion.  Intervinrent  les  commer- 
çants italiens,  les  belliqueux  Francs,  qui,  conjointement  avec  les 
byzantins,  modifiaient  les  dénominations,  imposaient  les  leurs.  Les 
Arabes,  lesTatars,  les  Turks  travestirent  une  multitude  dans  leurs 
langages.  Enfin  les  géographes  modernes,  de  ce  chaos,  reproduisant  ces 
dénominations  tant  de  fois  transformées  :  allemands,  français,  italiens, 
russes,  chacun  suivant  son  orthographe  inconstant,  qui  s*embrouilla 
avec  TorUiographe  slave,  turk  ou  magyare,  sans  savoir  réduire  tanCde 
diversités  à  une  règle  clairement  déterminée  et  fixe. 

Pour  épurer  Tembrouillement ,  il  faut  étudier  Thistoire  et  les  cartes 
géographiques  de  différentes  époques.  Car  il  est  claire  qu*on  ne  peut 
pas  sans  condition  suivre  le  description  d'Ëdrisi  conformément  à  la 
connaissance  et  Tétat  actuel  :  mais  quMl  est  nécessaire  de  se  rapporter 
à  répoque  dans  laquelle  il  rédigeait  sa  description,  chercher  des 
lumières  dans  les  temps  antérieurs  plutôt  que  postérieurs.  Pour  fixer 
cependant  les  explications  el  les  renseignements  retrouvés,  il  faut  s*ap- 
puyer  sur  les  cartes  modernes  censées  d*étre  exactes  et  capables  de 
reproduire  le  terrain  des  pays  comme  il  est. 

Nous  n*avons  pas  négligé  de  consulter  à  cet  effet  toutes  les  cartes  qui 
s*égaraient  par  quelque  circonstance  dans  notre  retraite.  Les  cartes  de 
Tatlas  catalan  de  4577;  d'EssIer  et  d*Ubelin  (attachées  à  Tatlas  de 
Ptolémée  de  4515);  italiennes  de  Tannée  4564  (attachées  à  Fatlasde 
Ptolémée  de  Ruscelli  et  de  Moletius);  celles  de  Christian  Sgrothonos 
(du  recueil  de  Jode  1569);  de  Wolfgang  Lazius,  d*Âugustin  Hirsvogel, 
de  Jacq  Castaldus  (dans  Tatlas  d'Abraham  Ortelius  4570);  de  Mercator, 
de  Hondius,  de  Janson,  de  Blaeuw,  de  Wit,  de  Guillaume  Delisle  (dans 
leurs  atlas);  de  Coronelli,  Yaugondy,  Le  Rouge  «  Bonne,  Hérisson, 
d*AnvilIe,  Reichard;  de  Schûlz  viennois  reproduite  par  Weiland 
Woimar;  de  Danielov  à  Vienne  1815  ;  de  La  Pie  1822  (grande  carte);  d 
Lameau  1827,  —  présentaient  et  rappelaient  la  marche  et  le  progrès  d 
la  géographie  dans  cette  partie  du  continent  européen  moins  accessibl 
aux  géomètres.  Les  cartes  anciennes,  presque  jusqu'à  la  fin  du  xvui*siècle. 
répondaient  mieux  à  la  désharmonie  des  distances  d*Edrisi.  C'était  la 
conséquence  inévitable  de  conceptions  basées  encore  sur  ces  itinérai 
dont  les  notions  furent  réunies  en  premier  lien  en  Sicile  pour  Ym 
d^Edrisi.  Ces  cartes  cependant  ne  pouvaient  satisfaire,  et  leur  irope 
fection  devait  céder  à  des  investigations  et  à  la  connaissance  modem» 
LMncertitude  accable  souvent  ces  investigations  récentes.  Les 
modernes,  dressées  par  des  ingénieurs  habiles,  sont  suffisamment  d*i 
cord  sur  le  littoral ,  mais  dans  Tintérieur  du  continent  elles  s'égarent 
discordances  très-sensibles.  Le  cours  des  fleuves  et  des  rivières,  l'ét^n. 


BEfiMAN,  EOMANIA,  30.  119 

dae  discordante  des  montagnes,  déplacent  les  positions,  changent  les 
distances  et  les  directions  des  Itinéraires.  La  Boulgarie  et  la  Remanie 
6ont  encore  le  plus  affectées  de  cette  incertitude.  Pour  dresser  notre 
carte  explicative  des  pays  danubiens  (pi.  15  de  notre  atlas)^  nous  avons 
pris  pour  modèle  la  carte  de  Lameau. 

30.  Il  y  a  là,  dans  ces  cartes  récentes ,  de  nombreux  points  contestés. 
Un  des  plus  remarquables  est  celui  de  la  position  de  Perislavia,  ville 
dans  son  temps  renommée.  Preslav,  appelé  par  les  Grecs  byzantins 
Prestblava ,  Presthlavon ,  Persthlava,  Peristhlava,  Parasthiava  (Constan- 
tin porphyrogen.  Léon  le  diacre ,  Kedren ,  Zonaras  et  autres)  ;  par  Tan- 
naliste  russien  Nestor,  Pereiaslavietz  ;  dans  le  diplôme  de  1186  du  roi 
Asan ,  Praslav  ;  par  Edrisi  Berisklaba ,  était  la  résidence  des  premiers 
roisdeBoulgarie  jusqu'à  971.  Sa  position  se  retrouve-t>elledans  le  Provat 
qui  existe  encore ,  ou  dans  les  ruines  de  Tantique  Marcianopolis?  Les 
mines  et  Provat  existent;  cependant  on  les  confond ,  regardant  Provat 
comme  Tantique  Marcianopolis.  Certaines  cartes  rapprochent  les  ruines 
à  Provat;  les  autres  les  placent  très-éioignées,à  une  distance  très-consi- 
dérable. Les  investigateurs  d'Allemagne  et  de  Russie  s'accordent  de 
les  distinguer;  les  géographes  français  (La  Pie,  Lameau),  s'obstinent  à 
les  confondre ,  et  à  placer  Provat  sur  les  décombres  de  Marcianopolis. 
En  effet,  Provat,  situé  non  loin  de  Preslav,  est  assez  ancien,  lorsqu'on 
1186,  il  faisait  partie  de  l'apanage  du  prince  Pierre,  qui  possédait  aussi 
Preslav  (géogr.  akropolit.).  Les  byzantins  qualifiaient  Preslav  de  grand, 
et  Kedren  avec  Zonaras  signalent  positivement  l'existence  du  petit 
Preslav,  qui  disparut  comme  le  grand  (Schafarj.  II ,  5,  §  50,  p.  618). 
Edrisi  distingue  aussi  les  deux  Berisklaba.  d^^SL»jj  Berisklaba  et 
io^SLji  ^^  Mighali  Berisklaba  (p.  38â),  jiùyaXi,  nspiv^XaBa,  il  les 
distingue  dans  son  texte  et  sur  sa  carte  itinéraire.  On  a  dit  que  la  situa- 
tion de  la  petite  Perislava  est  inconnue;  la  situation  de  la  grande, 
relatée  à  Provat  ou  à  Marcianopolis ,  autant  que  je  sache ,  n'est  qu^une 
pure  conjecture.  Aucun  écrivain  du  temps  de  l'existence  des  deux  Pères* 
lavas,  n*a  fourni  d'indications  positives  sur  leurs  positions;  le  seul 
Edrisi  vient  nous  donner  quelques  explications,  et  si  nous  ne  savons 
tout  de  suite  tirer  tous  les  avantages  possibles  de  ces  renseignements, 
aoas  pouvons  dire  avec  certitude,  qu'ils  sont  en  partie  contraires  aux 
conjectures  discordantes. 

liais  le  désaccord  des  conjectures  se  manifeste  encore  sous  un  autre 
aspect  sur  les  cartes  récentes.  Les  portulans  des  navigateurs  indiquaient 
les  embouchures  des  petites  et  des  grandes  rivières.  La  tâche  de  les 
iaire  remonter  à  leurs  sources,  d^acconrcir  ou  de  prolonger  leurs 


ISO  EDRI8I. 

eours,  appartenait  à  la  connaissaDce  des  géographes.  Dans  le  xn*  siècle 
on  savait  qu'une  rivière  mouillait  les  murs  de  Varna  et  on  s*imagiha  que 
Provat  est  situé  sur  le  fleuve  Panizus,  qui  tombe  dans  la  mer  plus  au 
sud.  Dans  le  xvni*  siècle ,  on  y  multiplia  les  embouchures  et  on  déplaça 
les  localités.  Provat  et  Devina  avec  leur  rivière  et  leur  lac,  se  trouYèrent 
au  nord  de  Varna.  Les  murs  de  Varna  étaient  baignés  au  sud  par 
le  fleuve  Varna,  sur  lequel  on  avait  Marcianopolis»  et  plus  haut 
Provadtschik  (ou  petit  Provat).  Ce  fleuve  recevait  deux  rivières,  dont 
une  Dafné,  coulant  près  d'Eskistamboul;  Schoumla  se  trouvait  entre 
ces  rivières.  Plus  au  sud  coulait  le  fleuve  Kamtschik  ou  Panysus.  Il 
semble  que  cette  partie,  depuis  Dclislc  et  d*Anville,  est  mieux  connue 
aujourd'hui,  puisqu*on  s'accorde  qu'au  nord  de  Varna  n'existe  aucune 
rivière  assez  considérable.  Varna  (Cruni)  est  baignée  au  sud  par  la 
rivière  de  Provat  (Zyras),  qui,  renforcée  par  quelques  autres  affluences, 
traverse  les  deux  lacs  Devna;  sur  ses  bords  sont  situés  Deyenaet 
Provat.  Au  midi,  deux  Kamché  ;  grande  et  petite,  ou  blanche  et  noire 
(Potamos  et  Panysos)  se  réunissent  pour  porter  les  eaux  de  Kamché  ou 
Panysos  dans  la  mer  ;  Eski  Stamboul  se  trouve  sur  la  grande  Kamché 
(Vrana  de  Delisle).Suivantd'Ânville,Marcianopolis  est  située  sur  la  grande 
Kamché  (Vrana),  et  la  petite  porte  le  nom  de  Panysos  (Fiza  de  Delîsle).         «.  •. 

Ainsi,  comme  le  géographe  de  Ravenne  dit  qu'au  milieu  de  Marciano-       

polis  passe  le  fleuve  appelé  Potamia  :  per  quant  Mareianopolim  medio     ^i^o 
transit  fluvius  qui  dicilur  Potamia  (IV,  6,  p.  57).  La  station  de  Panysos» 
sur  la  rivière  de  Panysos  (Kamché  petite),  f^t  éloignée  de  12  milles 
romains  au  sud  (table  pentigerienne).  Le  m3nt  Balkan  s'interpose 
ce  Kamché  et  Karnobat,  qui  coulent  parallèlement.  Le  terrain  est  donc 
assez  assuré  pour  comprendre  les  renseignements  d'Edrisi.  Je  disasseza 
parce  que  La  Pie  et  Lameau,  dans  les  détails  surtout  du  fleave  Kamdiér 
ne  sont  pas  d'accord,  et  les  branches  de  Kamché  sont  chez  eax  diffé-. 
remment  hérissées.  Celles  de  Lameau  sont  plus  conformes  à  la  conntis^^  s- 
sance  de  d'Anville. 

51 .  Berisklava  (petite),  comme  le  dit  Edrisi,  est  une  ville  sur  les  honF^    "b 
d'une  rivière  et  près  d'un  marais  (p.  586).  Cette  indication  fixe  la  peti^"^  le 
Berisklava  à  l'embouchure  d'une  petite  rivière,  qui  se  perd  dans        h 
petit  lac  Devna  au  sud  d'Âladin,  où  est  aujourd'hui  le  Yiliage  Emereles^r. 
Je  pense  qu'on  s'efi'orcera  en  vain  de  proposer  une  autre  positlc»ji. 
C'est  vis-à-vis  de  Varna.  Les  deux  lacs  séparent  Varna  de  Berisklava^.. 

Edrisi  s'étant  arrêté  sur  ce  point,  donne  la  route  par  terre    de 
Bidhlos  à  Konstantinoplc.  Bidhios  ^Ji^  si  la  lecture  est  incontestable; 
serait  Baldjik  ou  Baltelôuk  d*aujourd'hui  (ancien  Cruni).  Bidhles  est 


BERDJAIf,  ROMAMIA,  SS.  121 

noinmé  deux  fois  (p.  585,  388),  dans  Fitinéraire  maritime.  Pour  la 
troisième  fois,  cet  itinéraire  maritime  nomme  à  sa  place  Barnas  (r*i^ 
(Varna)  (p.  594).  La  carte  itinéraire  ne  connaît  que  Barnas.  Barnas  et 
Bidhlos  sont  à  la  même  hauteur,  50  milles  au  nord  d'Emineh. 

Par  la  route  par  terre,  de  Bidhlos  on  se  rend  d*abord  à  Jb  Bouthra 
(p.  586).  Cette  jolie  ville  n'existe  plus,  ou  bien  a  changé  de  nom.  Cest 
nn  nom  boulgar  ou  slave,  car  en  1085,  suivant  Anne  Kommènc,  une 
ville  boulgare  Vetren,  dont  la  poshion  est  inconnue,  se  trouvait  non 
loin  du  Danube  (Schafarjik,  p.  619)  (ss).  En  avançant  de  Bidhlos 
50  milles  dans  l'intérieur,  dans  la  direction  vers  le  Danube ,  nous  nous 
trouvons  aux  environs  de  Hadji  Ogiou  BazardjiL  II  est  probable  que 
Bootra  s'y  trouvait ,  la  route  tournoyant  quelque  peu. 

De  Boutra  à  j^^  »f  Berkanto ,  on  a  la  même  distance  de  50  milles 
oa  une  journée.  Entre  ces  deux  villes  coule  une  ririère,  se  dirigeant 
vers  le  midi,  traverse  ^bll5w  Sklafa  (petite  Berisklava),  puis  se  jette 
dans  la  mer  (p.  586).  Je  crois  que  ce  passage  confirme  l'emplacement 
que  nous  avons  indiqué  à  la  petite  Berisklava.  Berkanto  est  située  sur 
le  penchant  d'une  agréable  colline.  La  carte  itinéraire  d'Edrisi  déplace 
les  points  diacritiques ,  et  ferait  croire  que  le  nom  de  Berkanto  n'est  pas 
mez  solidement  établi.  Elle  semble  écrire  Kerkanto  ;  il  est  probable 
qu'il  doit  èlre  écrit  y^y  Barafanto,  Baravanto.  Quelle  que  soit  la 
lecture  véritable,  je  pense  que  cette  ville  est  Berkamis  du  géographe 
lavennate  (IV,  7,  p.  58),  et  la  lecture  Berkanto  suffît  pour  remarquer 
Tanalogie  et  l'identité  de  ce  nom  avec  Prauadi ,  Paravadi ,  Pravati ,  Pra- 
vata ,  Pravat,  ville  ancienne ,  située  sur  la  rivière  Paravat ,  qui  jette  ses 
eaux  dans  le  même  petit  lac  Devna,  dans  lequel  se  perd  la  rivière  qui 
traverse  Slava  ou  petite  Beriskava. 

-  De  Berkanto  à  AibiC-u  vj'^^  Mighali  Berisklava,  ville  de  gran- 
dear  moyenne,  dans  le  voisinage  de  laquelle  est  une  petite  rivière, 
1  journée  (p.  586).  Or,  la  grande  Preslava  ne  touchait  point  les  bords 
de  la  rivière  Provat,  ni  d'aucune  rivière  considérable,  elle  n'était  que 
dans  le  voisinage  d'un  courant.  Elle  se  trouvait  à  une  journée  ou  25  à 
30  milles  éloignée  des  rives  de  Provat  aux  environs  de  Tschalikavak, 
quelque  part  entre  les  deux  Kamchés,  non  loin  du  courant  de  l'une 
d'elles,  non  loin  des  ruines  de  Markianopolis,  dont  l'emplacement  et 
les  ruines  sont  sur  la  rivière  considérable  de  Potamos  Kamtche. 

5â.  Afin  d'avancer  de  Mighali  Berisklava  vers  Gonstantinople ,  il  fal- 
lait franchir  la  montagne  Baikan.  Il  semble  qu'à  cet  effet  on  traversait 

Vu)  On  coanait  aussi  à  l'ouett  de  Silistrie ,  Vetcrnize. 

lU  8. 


S«Vvaôite^<>^^  liaVoài-*;'Ï;ifteanV  ^*''\,opW«''if  lî.  à^^^^ 

«  vouT"*^       ixaTtasset ,  ^       ,  ^  guA  V^"    .  ^-  Bai»*" 
*e  Ve'»'  ?,e  iaos  Va  A^tec  ^,v  a*  .  eao*  '^ 

Jet  A»»*  ^*  «  î'»-»^"  C^t^s'-^^Ce^-JÎ 

„jml  de  »•»      «aiao  »  "        i  ccU»""  '        v..u  **' 


BBRDJAN,  ROMÀHIÂ,  13.  if  S 

De  Kalimalaia  nous  passons  à  12  milles  vers  ToHent  par  i^^J^L^ 
Madhanios,  jolie  ville  pour  se  rendre  à  Betrova,  éloignée  vers  le  sud 
50  milles  (p.  587). 

Plusieurs  fois  nommée,  la  ville  considérable,  commerçante  ,  indus- 
Irieuse  ,3m^  Betrova  ^jv^  Nebrova  (p.  582,  584,  585,  587),  appelée 
Bartizon  par  le  géographe  de  Ravenne  (IV,  6,  p.  57),  se  trouve  dans 
ntinéraire  de  la  table  pentingérienne  sous  le  nom  de  Burtiha ,  entre 
Hadrianople  et  Bergala  ou  Pyrgos,  Ârkadiopolis  à  18  milles  de  ce  der- 
nier et  le  double  du  premier.  Or,  c*est  Eski  Baba  ou  Baba  la  vieille  d'au- 
jourd'hui. Burtiho,  Burtizon,  Betrova,  Nebrova,  (Burtudizus  des  cartos 
de  Mercator),  par  une  dégénération  continuelle  de  son  nom  produisit 
le  nom  de  Baba ,  ville  très-ancienne,  (vieille  eski ,  Sicibaba  de  la  carte 
de  Jacq  Castaldo).  De  Nebrova  une  route  directe  conduit  à  Kostantinie. 

55.  De  cette  excursion  vers  la  grande  capitale,  revenant  au  delà  du 
Balkan,  nous  sommes  obligé  de  remarquer  que  la  carte  itinéraire 
d'Edrisi,  reproduisant  le  nom  de  deux  Berisklava ,  les  place  dans  le 
sens  inverse  de  remplacement  que  nous  leur  avons  assigné.  La  petite 
Berisklava  y  est  située  près  des  sources  de  la  rivière  qui  passe  entre 
Boutra  et  Berkanto.  Si  Ton  voulait,  conformément  à  cette  indication, 
sans  égard  aux  marais,  à  un  étang,  à  un  lac  rechercher  la  situation  de 
la  petite  Berisklava  au  fond  de  la  terre  :  je  ne  m'y  opposerais  pas. 

Gomme  la  carte  itinéraire  nomme  deux  Berisklava  dans  les  sections 
4  et  5  du  YI'  climat,  de  même  dans  les  mêmes  sections  elle  répète  par 
deux  foisRekran  ou  Rcknova,  Odeslra  ou  Vestrinos,  Barmanou  ou  Bar> 
mos.  Nous  verrons  que  cette  dernière  répétition  est  réellement  une 
répétition  de  la  même  ville.  Quant  aux  autres,  nous  ne  trouvons  pas  de 
motifs  en  faveur  de  vaines  répétitions.  Au  contraire,  à  notre  avis  tout 
porte  à  croire  qu'elles  signalent  l'existence  de  villes  homonymes,  toutes 
différentes. 

Pour  résoudre  cette  double  apparition ,  nous  nous  mettrons  en  route 
très^-fréquentée  par  des  commerçants,  qui  conduit  de  la  Djetoulie  de 
Mesinos  (Osma),  à  des  véritables  dépôts  de  marchandises.  Cette  route 
a  dû  laisser  des  traces  indélébiles  :  cependant  avant  d'atteindre  les 
stations  déterminées,  nous  sommes  obligé  d'errer  plusieurs  jours  dans 
un  pays  spacieux,  fertile  en  inconstance  de  fortune,  en  indications 
variées  de  positions,  en  incertitudes  qu'offrent  les  cartes  des  géographes 
discordants,  en  nombreuses  nomenclatures,  tantôt  slaves,  tantôt  lurks, 
copiées  par  des  géographes  d'une  manière  indéterminée. 

Nous  partons  donc  de  Messinous  (Osma)  d'où  à  ^JLJ^  Dhinoboli 
^JJ^  Denbeli ,  bourg  situé  dans  une  plaine,  1  journée.  C'est  Nikopotis 


iU  EDRISI. 

sur  lastros,  Nikoup,  Nikopi.  Cette  station  est  préservée  de  Urate  conte»- 
tation  »  puisque  on  ne  trouverait  d*autre  nom  terminé  en  polis  que  la 
seule  Nikopolis.  Mais  de  Dhinoboli,  faut-il  se  tourner  tout  de  suite  ver» 
le  Danube  ou  traverser  l'intérieur  de  la  Boulgarie?  c*est  ce  que  doqb  ne 
saurions  résoudre  assez  positivement. 

De  Dhinoboli  à  JLJL^jIJ  Karatamenial  on  JL»jJ  Krimial ,  dans 
une  plaine,  près  d'une  colline,  vers  Torient,  1  journée.  Si  l*on  se  diri- 
gerait vers  le  Danube  ce  serait  Triraanium  (de  la  table  peuting.  et  du 
ravennatc  YI,  7,  p.  58),  aujourd'hui  Rouschlscbouk  sur  le  Danube.  Si 
Ton  voulait  passer  directement  vers  Torient  par  Tinlérienr  de  la  Boul- 
garie, on  y  rencontre  une  foule  de  noms  commençant  par  Kara,  pour  la 
plupart  turks.  Leur  origine  turke,  postérieure,  ne  convient  pas  à  Tépo- 
que  d'Edrisi ,  à  moins  que  quelques-uns  de  ces  noms  ne  seraient  d'une 
autre  origine  seulement  turkiscs.  A  Test  de  Razgrad  (appellation  slave), 
nons  remarquons,  Krinaudje,  Karakargoîe,  sans  savoir  à  quoi  s'en  tenir. 
Cependant  eu  égard  à  la  station  suivante,  éloignée  des  bords  du  Danube» 
nous  aimons  mieux  rester  avec  Karatamenial  aux  environs  de  Krinaudje, 
que  de  s'aventurer  par  Rouschtschouk. 

De  Karatamenial  à  /r'-v^'  Elmas,  ville  bien  peuplée,  vers  Torient 
une  demi-journée;  celle  ville  avait  de  vastes  dépendances.  En  descen- 
dant sur  la  rive  du  Danube  on  ne  trouve  rien  de  satisfaisant  pour  une 
ville  aussi  considérable ,  si  Ton  ne  voulait  pas  s'y  arrêter  dans  un 
appellation  obscure  de  Mechemalis.  Avançant  par  l'intérieur  de  I 
Boulgarie,  pour  Elmas  se  présente  Palmas,  Palmatis,  Palmaïae,  Pal- 
mata,  ville  assez  considérable  des  itinéraires  romaines,  14  milles d 
Durostoro  et  45  de  Marcianopolis  (tabula  penlig;  Procop.  de  aedifi 
IV,  7).   Elmas,  Palmatis  répond  à  Ballakioi  ou  Baitakidi  des  cari 
modernes  (si). 

5i.  De  Elmas  à  yj,^^j  Reknova  (ou  ^j^j  Zakatra  p.  582,59*^, 
près  d'une  montagne,  nue  demi-journée.  Admettant  la  lecture    c7e 
Reknova,  à  laquelle  est  analogue  celle  de  la  carte  itinéraire  ^yS^ 
Rekran,  on  pourrait  présumer,  si  l'on  voulait  suivre  le  Danube,  cfue 
celte  situation  existe  dans  Trakan,  situé  presque  sous  les  murs  de 
Silistrie,  parce  qu'il  n'y  a  pas  d'autre  nom  assez  analogue.  Suivant /a 
direction  intérieure  de  Palmatis  ou  de  Elmas,  on  s'empèlre  de  noofeau 
dans  les  Kara ,  offrant  une  simple  transposition  des  consonnes  dans 
Garoane,  Karanova,  Karaulik,  Karana.  Cette  dernière  est  trop  retirée 
de  la  direction  indiquée  au  chemin  que  nous  suivons. 

fSf  )  D'Anville  assigne  à  Palmatis  une  sitnation  qnciqno  peu  plus  méridionale. 


BERDJAN,   ROMAMU,   Se.  iiS 

De  Rekrau  k  mJUS^^^^j  Rossokastro,  ville  importaDle,  dans  ud6 
plaine  vers  l'orient,  une  demi-journée.  Cest  trop  évident  Rassova,  et 
c'est  la  première  station  fixée  et  déterminée  sur  les  rives  du  Danube , 
qui  nous  préserve  de  s'égarer. 

'  De  Rossokastra  à  SU  J.  J.x^  Mishali  therme,  petite  ville,  ceinte  de 
murs,  une  demi-journée  ou  i5  milles.  Le  nom  grec  /uyaX^  âepfiatf 
proclame;  la  renommée,  des  grands  bains  de  cette  petite  ville.  Ce  nom 
pouvait  être  remplacé  postérieurement  par  un  autre  analogue,  depuis 
qpie  les  bains  disparurent.  Aussi  je  présume  que  les  megaletherme  se 
retrouvent  aujourd'hui  près  de  Rassova,  dans  le  nom  slave  de  la 
Tschernàvoda  (eau  noire),  située  sur  le  point  du  Danube  d'où,  dans  les 
siècles  reculés  s'échappait  un  bras  du  fleuve  qui,  courant  vers  la  mer  et 
irorsant  ses  eaux  dans  le  Pont,  formait  une  embouchure  méridionale  du 
BâDube.  Ce  bras  se  dessine  à  présent  par  des  lacs,  étangs  et  marais 
jusqu'à  la  mer;  un  courant  d'eau  noire,  Tschernàvoda, fend  la  terre 
4lans  un  sens  contraire  et  se  perd  dans  le  Danube. 

Des  Grands  bains  à  jJl^S^J  ^  ^^jxJ  Linokastro,  place  forte,  com- 
merçante et  centre  de  communication  pour  les  voyageurs  vers  l'orient, 
une  demi-journée.  La  qualification  de  Lino  est  encore  sonnante  du 
grec;  faisant  probablement  allusion  ou  à  ce  que  cette  place  était.bien 
munie:  >a<vos,  construit  de  pierres;  ou  à  la  position  aquatique  :  Avjvo;, 
canal,  retraite  de  l'eau  d'un  fleuve,  marais,  étang  (53).  Doïan  a  pu  rem- 
placer celte  place  forte.  La  lecture  de  jjj:**3jil  Neokastro^  (p.  597), 
au  lieu  de  Linokastro  est  fautive. 

De  Linokastro  à  Ghorlou ,  joli  pays  très-fréquenté  par  les  marchands 
qui  y  apportent  divers  objets  de  commerce ,  vers  l'orient  une  journée. 
La  lecture  inconstante  et  variée  de  ce  nom  est  diflicile  à  déterminer  : 
jijp  Ghorlou,  J^ji  Ghorli,  ^X&  Gholouni  (p.  582,  588,  597), 
%«U  Gholoun  (tabula  itiner.).  Si  les  dernières  sont  plus  justes,  on 
pourrait  fixer  ce  dépôt  de  marchandises  par  la  position  romaine  Dino* 
gellia  (suivant  la  carte  de  Reichard),  aujourd'hui  llnitza,  où  le  Danube 
86  tourne  pour  la  dernière  fois  vers  ses  embouchures  (53). 

De  Ghouloun  à  ^b  Baska,  ou  ^^yi^  Bastres  (p.  582),  une 
demi-journée. 

De  Baska  à  ,^1  Âkli  ou  ^Idl  Akliba  (p.  592),  une  demi-journée. 
Akla  est  dtuée  dans  une  plaine  fertile  et  cultivée;  ses  dépendances 
sont  considérables  et  bien  arrosées;  il  y  a  de  l'industrie  et  les  ouvriers 

(3t)  Aevov  filet,  Xusm;  mugil,  poisson  de  mer,  d*eau  doac«. 

(33)  Sur  ce  poiat  la  carte  de  1318,  de  Tatlas  d'Essler  et  dUbelin,  place  Cbenlia ,  mais  de  l'autr» 
c^té  du  Danube. 


i  26  EDRISI. 

y  sont  irès-habiles  surtout  en  fait  de  fabrication  d^ouTrages  en  fir. 
Au  nord  sont  des  hautes  montagnes  au  delà  desquelles  coule  le  Danube. 
Nonobstant  cette  dernière  circonstance  de  la  description ,  il  n*y  a  da 
doute,  à  mon  avis,  qu'Akla,  est  Rilia,  Eskikilia,  Kilia  ancienne,  au  sud 
du  Danube  et  les  montagnes  sont  au  delà  du  Danube.  Akli,  Akliba  es^ 
très-rapprocbéc  de  la  mer,  sur  ses  bords  même,  parce  qu'on  y  arrive 
d'Ârmonkastro  (par  mer)  dans  une  journée  de  navigation  (p.  592). 

D' Akli  à  /rir^jj-^^t  i^^à1'à^\  Stlifanos  1  journée.  Stlifanosest 
une  ville  considérable  et  elle  était  plus  importante  encore  avant 
répoque  actuelle.  La  carte  itinéraire  place  cette  ville  de  Fautre  côté 
du  Danube  au  nord,  mais  Tindication  des  roules  qui  conduisent  de 
cette  ville  aux  pays  circum-voisins,  exige  absolument  son  emplacement 
au  sud.  Cest  peut-être  Fancienne  Salsovia  (tab.  peuting.;  géogr. 
ravenn.  IV,  5,  p.  56).  Mais  Stlifanos  cnfavoi  est  un  nom  grec  A  la 
pointe  occidentale  du  lac  Ilaimyris  ou  Marasch  Rassein  se  trouve  Zebili, 
Sebel,  Stebil;  signale  probablement  la  position  de  Stlifanos.  Stebil  est 
une  de  formes  slaves  pour  le  nom  d'Etienne,  Stephauos. 

55.  Voici  maintenant  le  chemin  aux  pays  circum-voisins,  pays  qua- 
lifiés de  ,o'^jf  Bcrdjan.  Stlifanos  est  à  Torient  de  ^J^^y*^ï  Aksoun- 
boli  ou  ^yySj]  Aniksoboli,  distante  à  i  journée.  On  a  près  do 
Danube  le  nom  analogue  dans  Ignitza  (si). 

D'Aniksoboli    à     ^J^L^l    Agathoboli    vers   Torient  1    journée .^. 

Agathoboli  était  donc  située  non  loin  de  Stlifanos  vers  le  sud. 

D*Agathoboli    à    ^^^^^j^  Kirkisia  i  journée.  Nous  voyons  à  on^^  ^o 
petite  distance  de  Hirsova ,  Karakla. 

De  Kirkisia  à  ^cu^^  Desina,  à.x^^  Delsina  vers  Torient  1  joumée^^  ^, 
Desina,  à  ajournées  de  Berisklava  la  petite,  comme  nousTavons  vu 
est  fixée  avec  toute  certitude  par  Devlschinou,  bourg  située  av 
Devtscha  ou  Devtschinki  sur  une  petite  rivière  Devtscha  qui  se  pei 
dans  le  Danube  au  delà  de  Tscherna  voda  (eau  noire).  Gertainemei 
c'était  un  établissement  Boulgare  portant  Fappellation  slave  de  vi 
et  de  virginale  ou  de  petites  vierges  (35).  Desina  est  non  loin  de  Te 
bouchure  du  Danube  :  c'esl-à-dire,  tout  près  de  ce  bras  de  Tembo 
chure  la  plus  méridionale,  qui  autrefois  sortait  du  Danube  ent 
Rassova  et  Tscherna  voda.  Desina  est  en  effet  à  tel  point  non  loin 
Fembouchure,  quelle  est  éloignée  de  la  mer  40  milles  seulement. 
40  milles  sont  les  2  journées  de  Desina  à  Armonkastro  (Karli). 

(Si)  On  a  daDS  ces  pays  Axiopolis,  mais  placée  sar  le  Danube  plus  haut,  elle  est  Irop  ëloifs ' 
(S5)  La  capitale  de  la  grande  Moravie  portait  le  nom  de  Dieva,  viei^e. 


BERDUN,    UOMANU,    S6.  427 

Ou  Yoitque  Berdjan  à  cette  époque  était  très -coinmerçant,  ne  res- 
semblait guère  ni  à  Tantiqne  Scythie  moesienne,  ni  au  Sendjak  mo- 
derne de  Silistrie.  Berdjan  s*étendait  jusqu'à  Reknova,  qui  se  trouvait 
sar  la  route  de  Messinos  (Osma).  Nous  avons  recherché  les  traces  de 
celte  route ,  et  je  pense  que  les  traces  de  sa  direction  jusqu'à  Rosso- 
kastro  sont  préférables  par  Fintérieur  de  la  Boulgarie  que  sur  les  bords 
du  Danube.  Aussi  en  tenant  la  direction  intérieure  on  comprend  mieux 
rindicaiion  d'Edrisi,  qu'il  y  a  de  Rossokastro  à  Bestrinos  15  milles,  et 
de  Zakanra  (Reknova)  une  journée  (20  milles)  (p.  397). 

Bestrinos  ^«4^  jl^j  dans  l'écriture  de  la  carte  itinéraire,  peut  être 
la  ^**xj  ju-j  Veslrinos  ou  ^^yi^^  Bestrinos.  Celte  dernière  lec- 
ture est  préférable  à  toutes  les  autres,  puisque  c'est  Durostorus  des 
Romains,  Durostol  des  Boulgares ,  Drista  des  indigènes,  aujourd'hui 
Silistria  des  Turks. 

Cependant  nous  avons  déjà  nommé  une  ville  de  la  description 
édrisienne,  dont  les  rues  sont  larges ,  les  bazars  nombreux  et  les  res- 
sources abondantes,  appelée  Derislra ,  située  sur  le  Danube  à  i  ^/s  jour- 
nées de  Viddin  vers  l'orient  (p.  386).  Cette  y^*-.^  Deristra  est 
séparément  indiquée  par  la  carte  itinéraire,  ainsi  qu'on  peut  lire  son 
nom  y^^^^  Odestra  (VI,  4).  Toujours  c'est  le  même  nom.  D'après  la 
distance  donnée  de  Yiddin  4  V^  journées,  et  les  indications  que  la  des- 
cription édrisienne  nous  fournit,  Odestra  était  non  loin  de  l'embouchure 
d'Osmus  et  de  Nikopolis  ad  lastrum,  ainsi  qu'on  ne  peut,  par  aucune 
manière  avancer  plus  loin  que  jusqu'à  Schistova  près  d'Osma,  ou 
Zisto  (de  la  carte  de  Delisle)  près  d'iantra.  Â  l'époque  d'Edrisi,  les 
Boulgares  avaient  dans  cette  position  une  ville  considérable  Koriska. 
Cette  ville  ne  devait  pas  échapper  à  la  connaissance  d'Edrisi,  elle  a  pu 
donner  occasion  à  cette  apparente  répétition  double  du  nom  de 
Deristra.  Au  reste  Odestra  vient  de  ad  lastrum  ou  ad  Istrum.  Je  pense 
que  nous  sommes  suffisamment  autorisés  à  suivre  les  distances  du 
texte  et  l'indication  de  la  carte  itinéraire ,  afin  de  distinguer  dans  le 
texte  si  même  Edrisi  y  a  commis  une  confusion  :  Deristr  (Odestra, 
Koriskos)  Zisto  (ou  Nicopolis  ad  Istrum);  de  Deristra  (Yestrinos), 
Dorostol,  Silistra. 

56.  Si  le  même  cas  a  lieu  avec  Reknova ,  il  est  plus  difficile  à  décider. 
JLa.  carte  itinéraire  donne  deux  noms  presque  identiques,  l'un  à  côté 
de  l'autre  ^Sj  Rekran  et  ^^^j  Reknova  autant  qu'on  peut  les 
débrouiller.  Le  premier  est  inscrit  sur  le  chemin -d'Osma,  entre  Elmas 
^i  Rossokastro  (VI,  4),  et  il  se  trouve  dans  le  texte  orthographié  par 
xSj^)  ^al^atra  ^j^  '^^^^^^  ^y^j  Reknova  (p.  382,  588,  397), 


i^g  EDRISI. 

par  conséquent  le  texte  confond  Reknova  avec  Rekran ,  accuse  la  carte 
itinéraire  de  répétition  inutile  du  même  lieu,  et  admet  Tindentité  de 
Rekran  avec  Reknova.  Cependant ,  en  faveur  de  Ja  séparation  de  ces 
deux  noms ,  on  peut  se  récrier  sur  la  multitude  des  qualifications 
commençant  par  Kara,  et  sur  la  méprise  dans  la  description  d'Edrisi, 
qui  n'a  pas  remarqué  la  distinction  existant  entre  Rekran  et  Reknova, 
ainsi  que  par  inadvertance  il  a  écrit  Reknova  ou  Zakanra  an  lieu  de 
Rekran.  En  disjoignant  ces  deux  noms ,  Rekran  répondrait  à  Kranova 
d'aujourd'hui  et  Reknova  plus  éloigné  du  Danube  à  Karabova. 

Examinant  la  carte  itinéraire  d'Edrisi,  on  remarque  une  route  qui 
n'est  pas  mentionnée  dans  la  description.  Elle  vient  de  Bcriskiava  à 
Desina.  Cette  route,  certainement  de  4  journées,  avait  trois  stations, 
dont  deux  sont  nommées,  une  est  privée  de  nom.  La  première  est  dans 
Reknova  (Karabova),  de  laquelle  nous  avons  parlé.  L'autre  à  mi-chemio 
àij^là^  Dagkadartha,  tomberait  sur  Dok  d'aujourd'hui,  appelé  autre- 
ment Satsch  ou  Dokour-Âghadji ,  ou  Dokosatsch.  Le  nom  de  la  deuxième 
station,  omis  par  le  dessinateur  de  la  carte  itinéraire,  était  peutrét 
^LL^i?  Tamtana,  placée  déjà  sur  un  embranchement  de  la  route  d 
Desina  à  Bidhlos  et  Damas  (p.  582)  (se). 

Enfin  nous  avons  achevé  nos  courses  dans  la  Djermanie,  dont  Berd— 
jan  est  une  portion  ;  nous  avons  terminé  nos  investigations  routières  ai 
nord  du  Balkan,  dans  cette  partie  qui  porte  le  nom  de  Boulgarie.  Il  nou: 
reste  à  jeter  un  coup-d'œil  sur  une  autre  partie  méridionale,  située  ar 
delà  du  Balkan,  appelée  Remanie.  Nous  y  avons  fait  déjà  une  irruptioi 
s'emparant  de  plusieurs  positions  déterminées ,  et  nous  avons  avan 
jusqu'à  Kalimalaïa  et  Nebrova.  Je  pensequ'en  fixant  leurs  situations, 
grandes  obscurités  sont  déjà  dispersées.  Le  reste  sera  compris  par .' 
triangulation  (n""  42  de  l'atlas  et  sa  carte  explicative),  que  je  réussi 
composer  des  données  relatées  par  Edrisi.  Je  dois  cependant  r 
compte  de  ma  composition,  ce  qui  me  donnera  le  moyen  de  m*exp 
quer  sur  certaines  diificullés. 

57.  Après  la  triangulation  des  distances  d'Allemagne,  je  m'essay*^^ 
plusieurs  fois  de  régler  une  triangulation  pour  les  pays  dapobi^  Ji& 
Longtemps  tous  mes  efforts  se  brisaient  contre  le  déplacement  de  [»  Jir* 
meurs  points  de  la  Hongrie,  surtout  de  Bassan ,  Neitren,  Bansin ,  Katc^ii. 
Avec  ce  déplacement  ne  se  présente  aucune  issue,  même  conforme 
à  la  conception  d'Edrisi.  11  était  à  présumer,  ce  qui  est  évident,  que  les 
distances  discordantes  se  contrariaient  réciproquement,  et  Vinéffiliié 

(U)  reut-4ir«  Tacham  de  la  c«rU  de  1515,  dans  Tallu  d*EMler  et  d'Ubelis. 


BERDJAn,   AOMAKU,   37.  4^ 

des  miiles,  doot  je  ne  puis  comprendre  la  proportion ,  y  mettaient  un 
obstacle  invincible.  Cependant  les  distances  devaient  se  prêter  aune 
combinaison  quelconque,  plus  raisonnable ,  si  le  déplacement  serait 
rectifié.  A  la  fin  après  de  nombreux  essais ,  je  suis  parvenu  à  construire 
rédifice  tant  bien  que  mal,  sens  touchera  des  mesures,  observant 
scrupuleusement  les  chiiTres  dont  retendue  diminuait  par  la  longueur 
des  milles  inconnus.  Je  ne  propose,  en  faveur  de  quelques  modifications, 
que  de  lire  la  distance  entre  Âgra  à  Arinia  ^  100,  à  la  place  de 
^^  80.  Le  déplacement  de  Neitra  et  Bassan  ne  se  hisse  rectifi<)r  sans 
appréciation  douteuse  ou  impossible  de  la  grandeur  des  milles.  Le 
choix  de  distances  variées,  entre  Belgradoun  et  Ribna,  offrit  un  point 
d*appui  à  Forganisation  des  distances  de  la  Slavonie. 

La  triangulation  pour  la  Djetoulie,  de  la  Makedonia  et  de  tout  le 
pays  jusqu'à  Berdjau  et  Temboucbure  du  Danube,  est  impraticable,  car 
dans  tout  cet  espace  la  description  d*£drisi  n'offre  que  des  itinéraires 
qui  se  suivent,  s*embranchent  et  ne  se  croisent  guère;  à  peine  qu'on 
jf  trouve  un  couple  de  triangles  isolés. 

La  Remanie  enfin ,  réunie  par  de  nombreuses  avenues  avec  les  pays 
circumvoisins,  se  présente  riche  en  itinéraires,  distances  et  triangles, 
mais  pleine  d'écueilset  de  précipices,  qui  pénètrent  jusque  dans  une 
"partie  de  Djetoulie.  Cependant  il  n'est  pas  impossible  de  les  surmonter 
«t  de  les  franchir. 

D'abord  il  faut  observer  les  erreurs  aussi  faciles  pour  l'écriture  que 
pour  la  lecture,  et  je  le  répète,  qu'il  faut  s'étonner  qu'il  y  en  a  si  peu  : 
11  y  en  a  cependant.  En  premier  lieu ,  je  compte  au  nombre  des  erreurs 
Toutes  les  distances  de  4>,  5  ou  6  milles.  Lorsque  je  trouve  eu  Italie  de 
semblables  distances  rapprochées,  je  conçois  qu'elles  sont  données  pour 
telles  par  Edrisi  même,  parce  qu'il  y  poursuit  les  détails  minutieux; 
mais  quand,  dans  un  pays  plus  éloigné,  dans  la  foule  de  grandes  et 
de  courtes  distances,  exagérées  en  longueur,  je  rencontre  les  4,  5  et  6 
xnilles,  je  doute  de  leur  existence  inaltérable,  et  l'erreur  se  confirme 
lorsqu'elles  n'entrent  pas  dans  le  cadre  des  autres,  lorsque,  par  leur  in- 
cohérence, ils  empêchent  la  composition  des  nœuds  des  itinéraires.  Dans 
le  cas  des  erreurs  trop  évidentes,  je  pense  qu'au  lieu  de  j  six  milles  il  faut 
lire  ^^  80;  qu'à  la  place  de  ^  quatre  milles,  il  est  nécessaire  d'écrire 
.«  50;  et  les  s  cinq  milles  seront  très -bien  remplacés  par  ^  40. 
C^&st  le  procédé  que  je  suivis  pour  rectifier  ces  erreurs,  et  le  résultat  est 
satisfaisant. 

L'orsqu'on  voit  de  Philippopoli  à  Arkadiopoli  100  milles,  de  Karvi  à 
Constantinople  160  milles,  et  de  Philoppopoli  à  Constantinople  ^  40 

III.  9     ^ 


! 


il  30  EDRISI. 

seulement,  on  n*aura  pas  tort,  je  pense,  de  sopposer  que  la  een- 
taine  est  omise  dans  cette  dernière  distance,  que  de  Philfppopôli  i 
Gonstantinople,  on  comptait  J  140  milles.  Je  me  suis  servi  de  cette 
rectification  dans  .la  triangulation.  L^orsqu'on  lit  que  de  ^ortora  à 
Zagoria  il  y  a  160  milles,  et  de  Zagoria  à  Salonik  140,  on  remarquera 
Terreur  dans  ce  second  chiffre.  Il  devait  y  être  240 ,  ou  bien  qu'an  lieu 
de  Saloniki  il  y  avait  Saloni;  dans  ce  cas  les  140  conviendraient.  On 
peut  présumer  d'autres  erreurs ,  mais  comme  elles  ne  nous  ont  pas 
gêné ,  nous  n'oserons  les  accuser. 

58.  Il  y  a  des  chiff'res  qui  ne  se  laissent  pas  combiner  avec  les  antres 
trop  grands  ou  trop  petits.  Les  premiers  sont  probablement  une  eiagé- 
ratiou,  les  seconds  résultent  d'une  autre  espèce  de  milles  pluB  grands. 
Dans  la  première  catégorie,  je  mettrai  la  distance  de  90  milles 
d*Âtrova  i  Banva ,  70  milles  de  Bestkastro  k  Aghramzîn.  Le  littoral  dé- 
taillé eu  milles,  est  affecté  de  Texagération  sans  fin.  Les  itinéraires  dé- 
terminés assez  souvent  en  journées ,  surtout  lorsqu'elles  doublent» 
triplent  et  quadruplent  les  journées,  offrent  des  exagérations  difficiles 
dans  rinlérieur  de  la  Macédoine. 

Les  25  milles  sont  un  chiffre  privilégié  pour  la  moindre  distance  da 
littoral.  Observez  les  distances  entre  Emineh  et  Agathoboll, 
Saloniki  et  Saint-George.  Philippi  esta  8  milles  de  la  mer.  Cette 
exacte  et  scrupuleuse ,  s'échappe  des  exagérations;  en  attendant,  Edi 
dit  que  de  Philippi  à  Kalah  (Cavallc)  il  y  a  une  journée  on  25  milli 

Un  fait  remarquable  fait  présumer  l'existence  réelle  de  la  secom 
catégorie,  c'est-à-dire  de  l'existence  des  milles  plus  grands  que  cei 
qui  sont  généralement  comptés.  Edrisi  dit  que  de  Nebrova  à  Ck)n8tant 
nople  on  a  28  ou  50  milles.  La  répétition  de  ces  chiffres  préserve  de 
porter  à  faux.  Mais  autre  part,  Edrisi  dit  que  de  Nebrova  à  Kh\ouf^::^FJik 
(Philopatium)  on  compte  50  milles ,  et  d'Âbloughis  k  CoostanlinoiHP'  pie 
25,  en  tout  75  milles,  en  supposant  un  chemin  dont  la  ligne  directe  de 

Nebrova  à  Conslantinople  serait  60  milles.  La  proportion  de  ces  mil^Hlei 
ordinaires  75  et  60  avec  les  milles  50  et  28,  donnés  spédalemei^=3l  i 

cette  distance ,  semble  dévoiler  l'existence  de  grands  milles  mmpi n^d 

de  2  */3  milles  ordinaires. 

Dans  la  même  catégorie  se  rangent  les  12  milles  trois  fois  repro^  ti/cs 
entre  Roussie,  Kobsila,  Rodosto  et  Constantinople.  Ces  milles  sont  fc^ivÀ 
fois  plus  grands  que  les  ordinaires.  Il  fallait  négliger  ces  chlinre»  ^  oa 
bien  les  doubler  ou  tripler  pour  les  raccommoder  aux  autres.  En  ^Son- 
grie  on  parviendrait  à  rétablir  la  position  de  Neitrem  en  doublai!  C  ses 
distances  d'Âgra  et  de  Bedhvarn. 


BERDIAtf,  EOHANIA,  SO.  iSi 

Les  100  milles  de  KalUboli  à  Saint-George ,  applicables  dans  la  direo- 
tion  droite,  désignent  certainement  les  détours  du  littoral.  La  distance 
de  90  railles  de  Nebrova  à  Karvi ,  un  peu  courte  pour  s^appliquer  aux 
autres»  offre  peu  d*embarras,  parce  que  dans  cette  nombreuse  compli- 
cation» cette  distance  ne  monte  réellement  qu'à  100  milles. 

A  Texception  de  Tltalie ,  aucune  région,  dans  la  description  d*Edrisi, 
il*a  autant  de  détails  et  de  ressources  pour  dresser  le  réseau  des  itiné- 
raires, pour  composer  la  triangulation  des  distances,  que  la  Remanie. 
Pour  ce  pays  il  y  a  quantité  de  renseignements ,  car  la  description  des 
noDtagnes,  des  fleuves,  du  littoral,  de  la  position,  vient  souvent 
Sclaircir  et  confirmer  la  complication  des  mesures.  Nous  avons  désigné 
:ous  les  points  où  il  nous  fallait  rectifier  leur  cbiffre  ou  apprécier  leur 
râleur.  Toute  la  masse  reste  intacte;  nous  nous  sommes  servi  de  ces 
mesures  comme  elles  sont  énumérées  dans  le  texte. 

Une  opération  cependant  était  immanquable  dans  Tappréciation  de 
la  valeur,  pour  changer  les  journées  en  milles.  L'inconstance  d'Edrisi 
daos  ce  calcul  est  manifeste,  quand  il  compte  ajournées  de  Bontekastro 
&  Agbramzin  70  milles ,  et  les  3  journées  de  Bouliadjiskomos  à  Nebrova 
de  même  70  milles.  Pour  nous,  il  n'était  pas  licite  de  manier  continuel- 
lement avec  cette  inconstance  dans  notre  triangulation.  Nous  nous 
Bommes  efforcé  de  compter  toujours  25  milles  la  journée.  Le  minimum 
SO,  le  maximum  50,  comme  il  est  entre  Roussie  et  Sorlova.  Nous 
Bravons  dérogé  à  cette  règle  que  quand  Edrisi  nous  y  autorisait  en 
donnant  lui-même  l'équivalant  de  la  journée  en  milles,  plus  fort  qu'à 
Fordinaire.  Dans  ce  cas  le  choix  était  à  nous. 

» 

39.  Une  autre  opération  géographique,  la  réduction  des  distances, 
pouvait  nous  conduire  dans  l'arbitraire;  aussi  l'avons-nous  évité, 
en  prenant  toutes  les  mesures  telles  qu'elles  sont  données.  Nous 
ayons  déjà  dit  que  des  temps  anciens.  Marin  de  Tyr,  Plolémée,  les 
arabes  antérieurs  et  postérieurs  à  Edrisi  diminuaient  les  distances  d'un 
cinquième,  afin  de  les  dégager  des  déviations  des  voyageurs  et  de  les 
employer  en  ligne  directe,  ta  moindre  distance  est  susceptible  à  cette 
réduction,  les  grandes  beaucoup  plus.  Il  est -à  présumer  que  les  géo- 
graphes de  Sicile  n'ont  pas  négligé  cette  réduction  dans  les  grands 
intervalles,  dont  les  mesures  se  trouvent  dans  la  description  d'Edrisi. 

LMtinéraire  littoral  de  la  Remanie ,  donné  en  détail ,  n'est  pas  soumi$ 
à  cette  réduction.  Cependant  de  Rodosto  à  Gonstantinople ,  la  somme 
des  distances  des  stations  monte  à  110  milles;  cette  distance  est 
évaluée  par  Edrisi  de  12  milles  de  la  grande  mesure  au  moins?  mais  ces 
v,^^  12  milles  donneraient  J  56  des  milles  ordinaires  et  ne  répon- 

.M  ^ 


15:2  FDRISI. 

draieDt  guère  à  la  méthode  géographique  usitée.  Les  iiO  milles  dimi- 
nués d'un  cinquième,  donnent  ^^  98  ou  rondement  ^  90  milles. 
Cette  dernière  réduction  géogra^phique  seule  a  pu  répondre  à  notre 
construction.  LVxactitiide  du  chiffre  de  12  milles  nous  est  suspecte, 
parce  qu'il  faudrait  les  multiplier  par  8  pour  avoir  la  nonantaine. 
Peut-être  au  lieu  de  s^^  12  il  y  avait  J  56.  Ces  trente-six  multi- 
pliés par  2   *;a  donnent  les  nouante  désirés.  Peut-être  les  *^^>o  12 

«a» 

dérivent  tout  simplement  de  la  copie  erronée  de  ^  90.  Par  la  même 
opération ,  nous  avons  réduit  en  distance  directe  le  littoral  entre  Ablon- 
ghis  et  Sizeboli,  ses  150  milles  nous  ont  donné  en  ligne  directe 
120  milles. 

Nous  avons  seulement  opéré  sur  ces  deux  points  pour  établir  les 
distances  droites.  La  dernière  nécessité  de  la  réduction  se  présenta 
dans  la  distance  de  Zagoria  à  Sorlova.  Elle  est  donnée  160  milles, 
réduite  d'un  cinquième  elle  est  120  milles.  L'autre,  plus  considérable, 
de  Zagoria  à  Saloniki,  si  elle  est  2i0  milles  au  Heu  de  140,  réduite 
d*un  cinquième  à  200  milles,  s'accommode  h  notre  construction.  Enfin, 
de  toutes  les  autres  nombreuses  distances,  seulement  les  deux  rectifiées 
entre  Emineh  et  Kalimataïa  demandent  d'être  réduites. 

Terminant  mes  explications,  je  puis  observer  qu'on  pourrait  éviter 
ces  dernières  réductions  en  donnant  une  extension  plus  considérable 
au  Bcrdjan,  à  quoi  sont  susceptibles  les  distances  et  les  itinéraires,  si 
l'on  donnait  depuis  Sizoboli  et  Emineh  une  inclination  vers  Test,  et  si 
l'on  augmenterait  la  valeur  des  journées  de  chemin. 

On  remarquera  cerlaincment  que  ma  triangulation  se  rapporte  à  d 
cartes  récentes.  Je  dois  donc  faire  observer  que  mon  intention  n'étai 
pas  de  rétablir  la  caiHe  d'Edrisi,  mais  d'analyser  et  d'éclaircir  par 
moyen  sa  description. 

La  triangulation  confectionnée  et  la  carte  dressée  sur  la  connais 
sance  moderne  du  terrain ,  réunies  ensemble ,  offrent  le.  résultâtes 
mes  recherches.  Mais  les  connaissances  récentes  du  terrain  ne  sont 
d'accord,  comme  nous  l'avons  remarqué.  Cette  discordance  est  grave 
très -embarrassante  pour  les  chemins  à  travers  la  Macédoine.  Ma  ca 
accompagnée  de  la  triangulation,  est  dessinée  d'après  Lameau  et  rep 
duit  les  cours  et  les  directions  des  fleuves  suivant  les  renseigneme 
qu'il  a  réuni.  L'autre  plus  générale,  sur  la  moindre  échelle,  se  confori 
plus  aux  connaissances  antérieures,  détaillées  dans  l'atlas  de  La  Pie* 

Makedonia. 

40.  Partant  de  Douraza  on  passe  par  Teberla  (Bouterla  de  la  p.^^fj 
(Elbessan),  et  on  arrive  à  Okhrida.  D'Okhrida  à  gauche,  on  arrive  ^ 


MAkEDOMU,   40.  i53 

Sorghoura,  aujourd'hui  vilfôge  Boulgare  et  Kelliga  boulgar,  à  Test  de 
Blagarovo  sur  la  rivière  de  KaQdrisi.  De  là  on  monte  jusqu'à  Skonia  ou 
Skobia  ;  c'est  Skopia  ou  Uskup.  Ensuite  on  traverse  le  fleuve  Vardar 
pour  se  rendre  à  Korlos. 

Uskup  est  situé  sur  Vardar.  C'est  donc  pour  entrer  à  Skobia  qu'il 
laut  traverser  le  fleuve.  D'Uskup  on  passe  le  fleuve  Psigna  pour  arriver 
à  Kortos,  aujourd'hui  Karatova  ou  Stoutzaïtza,  située  sur  Braunista.  — 
Lameau  place  Karatova  au  nord  des  montagnes  de  ce  nom  sur  la  rivière 
Strouma,  au  sud  de  Giusiendjil,  ce  qui  n'est  pas  d'accord  avec  la  des- 
cription et  les  renseignements  d'Edrisi. 

De  Kortos  la  route  se  fourche.  A  gauche  elle  tourne  au  pied  des  mon- 
tagnes de  Serbia.  Je  ne  saurais  pas  donner  l'explication  de  cette  route , 
mais  à  mon  avis  il  est  impossible  de  la  faire  monter  jusqu'à  Vrania 
pour  arriver  par  Stobouni  à  Triadiza.  Elle  passait  sans  aucun  doute 
par  Giustendjil  et  Doubnitza.  Elle  touchait  le  canton  montagneux 
Mademites,  lorsqu'elle  traversait Formendos,  situé  sur  le  sommet  d'une 
montagne,  ensuite  au  delà  de  Jusiiniana  ou  Giustendjil  elle  avait  sa 
station  dans  Malsouda.  Avançant  par  Verbonik  et  Doubnitza  ou  Duonitza 
ou  Bouzaïtza  jusqu'à  Samakov,  où  la  dernière  station  Bermania  se  place 
à  la  distance  de  Stobouni  (Iktiman),  quelque  part  près  d'une  crevasse  de 
la  montagne.  Le  nom  de  Bermania  répond  à  berzmania ,  birziminum , 
brezimenuem  de  la  langue  albanaise,  qui  désigne  en  albanais,  un  lieu 
voisin  des  précipices.  —  Que  de  monuments  à  découvrir  dans  ces  en- 
droits solitaires!  s'écria  justement  Malte-Brun  (se). 

La  carte  itinéraire  (Y ,  4)  ofl're  quelques  noms  de  Macédoine  qu'on  ne 
trouve  pas  dans  le  texte.  Non  loin  de  Formendos  elle  inscrit  s^  iIj  \ 
Ablandjor: c'est,  je  pense,  Bylazora,  aujourd'hui  Strazin.  Plus  au  sud, 
à  côté  de  Skobia,  se  trouve  ojjt  ou  ^t  Ilio  ou  Aîanio.  A  l'ouest  de 
Scopia  existait  Vellii  (où  est  aujourd'hui  Kalkandere).  Mais  on  pourrait 
renvoyer  Ilio  au  delà  des  montagnes  à  l'ancien  Gabuleum,  aujourdh'ui 
Ghilan  ou  Morava.  —  Entre  Okrhida  et  Toulili ,  au  sud  de  Boulgar,  on 
débrouille  y^^  ou  y.^\3  Kavolir  ou  Kavartir,  et  au  sud  d'Okhrida  et 
de  la  rivière  (Likostomi)  près  d'Astibes  (Thèbes),  aaj3  Katina,  Kaniua. 

La  route  de  Kortos  à  droite  se  dirige  par  des  villes  connues  jusqu'à 
Kbrisoboli  la  maritime,  par  Slrinaou  Stranissa,  aujourd'hui  Stromia  ou 
Ostroumia,  Stroumnitza  sur  le  fleuve  Stroumitza  ou  Radovit;  puis  par 
Raghoria,  aujourd'hui  Doîran,  ancien  Assoros,  parce  que  Raghoria  est 
nue  des  plus  anciennes  de  la  Remanie ,  elle  est  au  pied  des  montagnes 

(S7)  Malte-Brun ,  géogr.  éditée  par  HuAt,  livre  448,  p.  740,  747. 


i34  EDRISI. 

d*où  partent  quatre  rivières  pour  se  jeter  au  nord  dans  le  Vardar  (sa)  ; 
puis  la  route  passe  à  Seres,  puis  à  Rabua,  aujourd'hui  Drama;  enfin 
atteint  Khrisoboli,  grande  ville  située  sur  les  bords  du  détroit  de 
Gonstantinople  (p.  289, 290). 

Partant  d'Ochrida  à  droite,  on  arrive  à  Toutili,  aujourd'hui  Monastir 
ou  Bitolia;  après  à  Âberlis,  Berlis,  aujourd'hui  Florîna;  puis  à  Ostro- 
bon,  Ostrovo;  puisa  Boudiana,  aujourd'hui  Yodina.Vodena;  ensuite  à 
Salonik,  Thessalouika ,  Saioniki. 

Salonik  est  située  sur  le  détroit  de  Gonstantinople  (p.  âOOy.  De  Salo- 
nik  à  Rendina,  Rentina  des  byzantins,  aujourd'hui  Rendino  on 
Yastra  (39). 

De  Rentina  on  vient  enfin  à  ,  ij«^^f  Akbrisoboli  la  maritime, 
grande  ville  située  sur  les  bords  du  détroit  de  Gonstantinople,  agréable, 
remarquable  par  la  beauté  de  ses  marchés  et  par  Fimportance  de  aon 
commerce;  auprès  de  ses  murs  coule  une  rivière  connue  sous  le  nom  de 
^•L»^  Marmari. 

De  Khrisoboli  à  ^Jb^^  .ô.  t  Khristobelis  on  compte  25  milles  (40}. 

41.  Ârrétons-nous  un  moment  dans  ce  canton  arrosé  par  Marmari» 
car  notre  géographe  nous  donne  des  renseignements  précieux  sur  cette 
portion  de  l'empire  byzantin ,  laquelle ,  à  ce  que  je  vois  par  quantité  de 
cartes,  est  obscure.  Des  portulans  italiens  fournissent  peut-être  des 
données  explicites.  Je  ne  les  ai  pas  à  ma  disposition,  mais  les  cartes  de 
Mercalor  et  des  postérieurs  me  préviennent  qu'on  n'en  a  pas  tiré  Tavan- 
tage  désiré,  et  le  canton  nommé  littoral  de  la  Macédoine,  restait  pour 
la  connaissance  des  géographes  modernes  plongé  dans  les  ténèbres.  « 
La  comparaison  des  cartes,  et,  en  leur  absence,  du  littoral  connu ^ 
peuvent  convaincre  qu'un  désordre  y  était  à  débrouiller.  Je  ne  me  pro~ 
pose  pas  d'y  faire  paraître  toute  la  lumière,  je  veux  comprendre  c» 
qu'Edrisi  relate,  ot,  à  cet  effet,  je  commence  par  la  comparaison 
cartes.  Nous  y  suivons  le  littoral ,  et  ce  qui  est  dans  l'intérieur  du 
nous  le  mettons  entre  parenthèse. 


(S8]  La  version  française  d'Edrisi  dit  :  an  nord  de  cette  vill« ,  coulent  quatre  riviènts. 

(39)  Sandino  par  erreur  dans  la  carte  de  Castaldo  ;  ensuite  reproduite  par  plusieurs  autres. 

(40)  Sur  plusieurs  points  de  mon  explication ,  je  ne  suis  pas  d'accord  avec  Jaubert ,  car  cott' 
J'i  n*ai  pas  jugé  à  propos  de  voir  Bermania  dans  Vrania  :  de  même,  je  n'accepte  le  rapprocbem 
des  Bouighar,  Rbagoria,  Toutili,  à  Pologos,  Ropelia»  Tonrboli,  ni  la  conrusioa  de  la  rivière  1 
avec  Maritza;  ni  de  Christopolis  avec  CbrjsopoHs.  —  Le  traducteur  y  dit  :  «  évidemment  il  y 
quelque  confusion  »  :  non ,  dans  le  texte  d'Edrisi  il  n'y  a  aucune. 


Atlas  ecMan 
de  1378. 

Golfo  di  contessa 
Carcala 


Lastromola 

Crisopolli 

Locrero 

Christopolli 


MàKBDOMIA,  41. 

André  Benincasa 
1467  (ii). 

g.  de  confessa 

nicalidi 

radino 

Lastromola 

Grixopoli 

Leeteropoli 

Castopoli 

Langistro 

g.  aurilli 

g.  de  Asperosa 

Asperosa 


iU 


Carti  publiée 
en  1513  (it). 

g.  de  contessa 


Langistrum 

(Seres) 

emboucb.  de  Strumon 

(Philippi) 

Grisopol 

Lesteropol 

Christopol 

Langistro 

Asperosa 


Ce  sont  les  indicaiions  directes  des  portulans  que  nous  avons  derant 
nous.  Insuffisantes  mais  intactes,  qui  ne  subirent  aucune  défiguration  ni 
altération.  L*acceptation  des  cartes  Ptoléméennes  embrouilla  les  con- 
naissances des  portulans  ou  les  fit  négliger  et  oublier.  Le  piémontais 
Jacq  Gastaido ,  entre  autres,  dressa  une  carte  de  la  Grèce  ou  delà 
Turkie  européenne;  pour  le  littoral  il  ne  s'écarta  pas  des  portulans , 
mais  bientôt  Gérard  Mercator,  voulant  les  étudier,  mit  le  comble  à  la 
confusion,  qu'ion  ne  s'est  avisé  de  ramener  à  Tordre.  Cartes  de 


Castàldo  (is). 

Saodino 

(Philippi) 
(Carcala) 


embouchure. 
Contesta 


Mercator  {n), 

Sandino 

(Philippi) 

(Agastidi) 


emb.  d*un  bras 

Strimon 
Contessa 


Intermédiaires  {à  s)  .    Modernes  (i  o) . 

Rondino 


de 


Christopoli  et  mines 
d'Ëmboli  (47). 

(Ceres  ou  Marmara) 

emb.  de  Marmara 
ou  Veratasar. 

Contessa 

(Seres  on  Mairmara) 
(Tricala) 


ruines  d'Eione 
(Orsova) 
emb.  de  Strouma 

ou  Radovitz. 
ruines  d*Amphi- 
polis  et  Contessa 
(Seres) 
(lenitsavi) 


(41)  La  carte  Bâuiiqtie  publiée  en  4648»  sous  le  titre  de  TEarope  maritime  par  G.  Blaeuir  »  chez 
Berey,  h  Paris»  est  conforme  arec  Beoincasa»  sans  les  variantes  et  les  erreurs  :  voyet  notre  portulan 
gënërale»  16,  à  la  fin  de  Tatlas. 

(45)  Dans  Téditiou  de  Ptolémée,  d'Essler  et  d'Ubelin,  à  Strasbourg. 
(43)  Reproduit  en  4870,  par  Ortelius. 

J44)  Mercator  était  suivi  et  copié  par  Hend ,  Janson»  Blaeuw;  et  il  est  suivi  sur  ce  point  par  les 
etries  de  la  Grèce  moderne,  anonyme  publiée  à  Paris,  chez  Pierre  Mariette  ;  et  par  celle  de  Philippe 
de  la  Rue,  publiée  en  1631 ,  chez  le  même. 

(48)  Witt,  Delisle,  Vaugondy ,  Horoman  et  ses  successeurs  etc.»  dérangent  l'ancien  ordre  chacun 
à  son  tour  :  il  y  a  donc  chez  eux  assez  de  discordance. 

(46)  La  Pie  et  Lameau  sont  assez  conformes  sur  ce  point  :  en  a  plus  de  détails  dais  le  premier. 
(42^  Christopoli'  suivant  Delisle. 


i36 


EDRISI. 


Arethosa 

emb.  de  Fautre  bras 
du  Striinon. 


(Amphipolis) 

Rofini 

Orfano 

CaTala 

Cavalla 

Cavalla 

Cavalla,  ancienne 

(Iraiûocastro) 

(Iraniocastro) 

Neapolis 

embouchure 

erob.  de  Carisso 

Langistro 

Langistro 

(Anghista) 

(Phillppi) 

(Pbilippi) 

(Drama) 

(Drama) 
(Prahoasta) 

Neapolis 

La  Ca?alla  («s) 

La  Cavalla 

Gisopoli  (49). 

Grisopoli 

Lesteropoli 

Sevastopolî 

Christopoli 

Cristopoii 

(Lesterocori) 

(Macedonia) 

(Boni) 

(GumuUza  ou 

(Comergena) 

Gumulzina) 

(Rusio) 

(Rousio) 

Castropoli 

embouchure 

Sarpente 

Saramont 

cap  Asperosa 

(Rusio) 

Sarizahan. 

(Nicopolis) 

(Rousio) 

(Topyros) 

(Tschanglalk) 

embouchure 

emb.    de   fiume 

emb.  de  Mestro. 

emb.  de  Nestos 

LaDgista 

de  Marmara. 

(Nicopolis) 

(Nicopolis) 

Gauriii 

Abdera 

ruines  d*Abdeia. 

Asperosa 


Asperosa  Asperosa  (50) 


Sans  s*arréier  sur  la  répétitioQ  et  la  irausposition  de  rivage  en  rivage 
d*Angisla,  de  Philippi,  de  Seres  et  Marmara  et  d*autres,  on  se 
demande  d*où  vient  cette  foule  de  polis?  Neapoli ,  Grisopoli ,  Lesteropoli 
Savastopoli,  Christopoli ,  Castropoli ,  entassés  entre  Cavalla  et  Sarpento 
où  il  n'y  a  pas  de  place.  Ces  noms  grecs  sont  de  Tempire  byzantin,  an- 
térieurs à  rinvasion  des  Latins.  Du  temps  de  Mercator,  ils  n'avaient  plas 
de  distance.  Les  géographes  retrouvant  ces  noms  dans  les  portulans  des 
marins,  dans  Edrisi,  fesaient  des  conjectures  et  souvent  ne  savaient  pas 
indiquer  leur  emplacement. 

42.  A  une  journée  ou  25  milles  de  Rondino ,  Edrisi  nous  mène  à 
l^embouchure  de  la  rivière  Marmara ,  aujourd'hui  appelée  Stroamitia, 

(48)  DeVavgoady. 

(49)  Gisopoli  au  lieu  de  Grisopoli ,  erreur  depuis  répétée.  —  Ruscelli  et  Moletins ,  dans  lecm 
éditions  de  Ptolémée  1561,  lS6f,  laissent  en  confusion  Grisopolis,  Pliilippe  et  Neapolis  cranidei 
«■omne  identiques. 

(50)  J.  Laureuberg(dans  Tatlas  de  ^'itt  1671) ,  donne  une  toute  autre  suite  de  lieux  et  de  0 
du  golfe  Strymonicus  di  Contessa.  Embouchure  sud  de  Strimcna,  Stagira,  Eion  »  Aretnsa  i  au 
«mboucliure  nord  (venant  d'Anipbipolis ,  baignant  Strimena);  rivière  Ganga,  Çavala,  rit* 
Zrgiatus,  Neopnlis,  Pastus,  fleuve  Ncssus ,  Abdera. 


MAKE]>ONIA,  42.  157 

Rarason,  Radovitz,  dans  rantiqnité  Ponlus,  qui  entre  près  du  bourg 
marmara  dans  le  lac  Kerkineou  Takiuos,  qualifié  aussi  Marmara,  et  sot- 
tani  de  ce  lac  ,  se  jeiie  dans  la  mer  au  midi  des  ruines  d'Ampbipolis. 
Cest  ici  tout  à  côté  des  décombres  de  cette  antique  ville,  qu'était  debout 
Âkhrisoboli  la  maritime  Xpu<ro7coJL^,  Grisopoli,  ville  d*or,à  laquelle  les 
Latins  donnèrent  le  nom  de  Gontessa,  Inquelle,  déplacée  par  difTérents 
désastres,  conserve  son  nom  dans  Orfano. 

De  Chrysoboli  à  Rhana  (Drama)  dans  Tintérieur  de  la  terre ,  il  y  a  une 
journée  (p«  289),  et  de  Chrysoboli  à  Akbristoboli ,  Xpi^ronoXiçy  25  milles 
(p.  297).  Sa  situation  est  indiquée  par  la  description  tout  près  de  Pra- 
kousta  (si).  Ëdrisi  dit  que  yis-à-vis  de  Ghrislopoli  et  dans  son  voisinage 
est  une  montagne  (Pouubardagh ,  ancien  Pangeus)  (5â),  au  delà  de 
laquelle  est  un  pays  connu  sous  le  nom  de  ^^-U  Filibes  (Philippi), 
où  il  y  a  beaucoup  d'industrie  et  de  commerce ,  soit  d'exportation ,  soit 
d'importation.  Ce  pays,  couvert  de  vignes  et  de  plantations  de  toute 
espèce,  est  situé  sur  une  éminence  à  8  milles  de  la  mer.  (Distance  ainsi 
donnée  entre  les  ruines  de  Philippi  et  la  Cavale  nouvelle  d'aujourd'hui). 

Entre  Christopolis  et  Philippi  coule  une  rivière  connue  sous  le  nom 
de  ç^^Ju»  Magrobolami  Uaxpono^oc/xoi  rivière  la  grande.  De  la 
rivière  en  question  à  Christopolis  on  compte  12  milles  (p.  297).  Cette 
petite  rivière,  qualiliée  de  grande,  qui  traverse  les  plaines  de  Philippi, 
prend  ses  sources  près  de  Prahousta  et  baigne  s«{s  murs,  mais  elle  se 
jette  dans  le  fleuve  Anghisla^  juste  12  milles  de  Prahousta  ,  prenani  la 
proportion  de  la  grandeur  de  8  milles  qui  séparent  Filibes  de  la  mer. 
Lès  25  milles  de  la  même  grandeur  conduisent  de  Prahousta ,  CJuis- 
lopolis ,  aux  ruines  de  Contessa,  Chrysopolis. 

fie  Filibes  à  Kalah  ville  maritime ,  fort  jolie,  25  milles  (p.  297).  Ce 
Kalah  n'est  point  Cavala  d'aujourd'hui,  mais  Eski  Cavala,  vieille  Cavalla, 
située  près  de  Telfere,  a  l'est  de  Prahousta  (»3). 

De  Kalah  k  j^j^  wU*-  Sant.  Djordji,  ville  importante,  avec  de 

magnifiques  bazars,  de  larges  rues,  de  belles  maisons,  peuplée,  riche 

et  commerçante,  25  milles  (p.  297).  Cette  distance  placerait  cette  ville 

importante  à  la  place  de  Saritschouban  ou  Serizaham ,  non  loin  de 

l^embouchure  de  Mesto  ou  Nestos ,  vis-à-vis  de  Thasos  {$*), 


"(M)  Prahousta  offre  sans  aucun  douto  une  appellation  slave,  boalgaro-slave.  Pra,  antéricHr 
^*aieax,de  siècles;  h99t,  gott ,  logement,  gîte,  hospitalière. 
(K2)  .Delisle  place  ici  mont  Malaca ,  où  il  y  a  des  mines  d'argent. 

(53}  Voyez  la  carte  de  La  Pie.  —  Il  paraît  doue  que  le  nom  de  Cavala  existe  sur  ce  point.  Castaldo 
^-t  Mercator  Tout  déplacé  vers  l'ouest. 

{9A\  A  l'époqne  d'Edrisi  il  y  avait  grande  quantité  de  places  du  nom  de  S.  George,  qui  disparurent 
■•  M  retrouvent  pins  dans  les  cartes  postérieures.  U  «st  probable  qa«  l'appellation  de  S.  George 
III.  9. 


1 

\ 


P*^"  *'J^rU'^«''*''''o«s  donnons  «<>«;^;Sp%*OV  i,.du 

S^sUuée  sur   «s^^  ^„,  ve  d^^He  «v  deMacédojneé^"^    ^*ç,,  ^ 
de  »»è««  ''m-S  de  laKo»'»",*!  Coust^nVinop  «•  f''  \o„siaotiooî 


MAKEDOmA,  43.  159 

tn  dehors  dô  cette  gorge,  parce  qu^elle  est  à  rentrée  du  détroit 
(p.  296).  En  résument  Tidée  d*Edrisi  sur  la  parole  de  sa  description* 
on  douterait  peut-être  de  ravoir  bien  saisie,  si  l'image  de  la  table  itiné- 
raire ne  venait  ostensiblement  confirmer  Tindolente  conception ,  cal- 
quée sur  la  qualification  donnée  à  une  portion  de  la  mer  par  les  marins 
et  les  voyageurs. 

La  rivière  Âkhlioun  prend  ses  sources  dans  les  montagnes  de 
i^y^jA^S  el  Lakoudemounia  (appellation  dérivant  du  mont  Lakmon, 
séparant  Epire  de  Macédoine  et  dominant  au  nord  le  mont  Parnasse). 
Âkhlioun  prend  son  origine  là  où  ces  montagnes  s'embranchent,  venant 
du  midi  de  Larissa  et  de  Test  de  Zagoria.  Ligolgho  (Rodoïl),  ville  con- 
sidérable et  importante ,  se  trouve  au  sommet  d'une  montagne  située 
non  loin  de  la  rivière  Âkhlioun  (et  de  ses  sources)  (p.  293,  285).  Cette 
rivière  descend  de  Ligolgho  à  Karvi,  ville  au  pied  d'une  montagne  et 
sur  la  rivière  d'Âkhlioun.  Les  montagnes  du  nord  dominent  la  ville,  et 
la  montagne  qui  va  du  nord  au  midi  (et  réunit  les  chaînes  de  Zagoria  et 
de  Lakoadcmounia),  est  à  20  milles  de  Karvi  (là  est  le  défilé  de 
Stobouoi).  Celle  qui  se  prolonge  du  nord  au  midi  (là  où  elle  touche  une 
autre  branche  à  l'est  de  la  montagne  de  Doubnitza,  au  delà  de  Rodoïl), 
est  à  la  distance  de  40  milles  de  Karvi  et  ^Jli  125  (lisez  isS  185)  de 
Constantinople.  Cependant  de  cette  montagne  de  Lakoudemounia  à  la 
montagne  la  plus  voisine  (de  la  chaîne  de  Zagoria)  on  compte  50  milles. 
(C'est  l'espace  où  est  le  défilé  de  Slobouni ,  entre  les  monts  Rilo  el 
Tourdjan,  où  commence  la  chaîne  de  Zagoria).  D'ici  les  deux  cliatnes 
sont  séparées  par  la  rivière  Âkhlioun  (p.  294).  Pour  comprendre  celte 
séparation  fluviale,  il  faut  savoir  que  la  montagne  Lakoudemounia  se 
croise  évidemment  avec  l'embranchement  qui  vient  de  Lesso  vers 
l'orient,  passe  au  nord  de  Kastoria  et  se  termine  à  50  milles  d'Âdri- 
nople  (p.  286).  Ce  point  est  éloigné  de  120  milles  de  Constantinople 
^p.  291).  La  rivière  Âkhlioun  sépare  les  montagnes;  au  nord  s'étend  la 
chaîne  de  Zagoria  (Balkan);  au  sud  les  chaînes  de  Lakoudemounia  et 
Lesso  (Rhodope).    * 

Âkhlioun  coule  non  loin  de  Ligolgho  (Rodoïl),  près  de  Karvi  (ancienne 
Bessapara,  aux  environs  de  Tatarbazardjik,  ou  peut-être  Birva)  et  du 
nord  au  midi  passe  dans  le  voisinage  de  Filiboboli  et  baigne  Âdriuoboli. 
Elle  passe  à  12  milles  de  Filiboboli  (p.  294,  585).  Ces  12  milles  s(n)t 
probablement  la  distance  de  Karvi  à  Filiboboli. 

Une  autre  branche  de  la  rivière  Âkhlioun  vient  de  Sorlova  (Tschor- 
lou,  ancien  Turulus);  elle  passe  de  Sorlova  vers  Ârkadioboli  (p.  295, 
58i),  ainsi  qu'on  la  traverse  pour  aller  à  Âdrinoboli  (p.  292).  Les  deux 
branches  réunies  ensemble  prennent  le  nom  de  ^^ jL»  Mariso  (Marîtza), 


celle  "Mcti^ 


l'  SECTIO''   "'' 


MaKEDONIA,   44.  m 

44..  Heureusement  la  table  itinéraire  vient  confirmer  ces  étranges 
coDceptions  d'Edrisi,  que  nous  avons  débrouillé,  consultant  les  cartes 
postérieures  et  modernes.  On  voit  qu*it  y  a  un  véritable  tourment  pour 
comprendre  celle  relation  et  sa  version  française.  Ce  près  de  Kbriso- 
boli,  signifie  dans  le  même  canal  sur  lequel  est  silué  Khrisoboli.  Les 
appellaiions  du  détroit  de  Constantinople  ou  d'Âbydos,  des  courants  de 
rivières  et  des  détroits  qualifiés  de  Marmari,  sont  devenues  génériques. 
On  a  Marmari  sous  les  murs  de  Grizoboli ,  à  Tembouchure  de  Maritza , 
dans  le  détroit  d'Abydos  ou  Gallipoli ,  et  sur  toute  la  mer  Marmara 
(Propontide)  jusqu'à  Constantinople. 

Quelques  renseignements  peu  exactes,  corroborés  ou  influencés  par 
la  croyance  dans  Ptolémée,  ont  suggéré  aux  géographes  Tidée  de 
placer  Tscborlou  sur  une  rivière  qui  verse  ses  eaux  dans  la  mer  Mar- 
mara. La  rivière  appelée  par  Ptolémée  Arzos,  reçut  chez  eux  le  nom  de 
la  ville  en  question  :  mais  ils  ne  purent  s'accorder  sur  le  point  de  son 
embouchure.  Gastaldo  Tassigne  à  Ghiurlich,  à  Touest  de  Selimbria,  près 
de  Congerbo;  plusieurs  autres  cartes  italiennes  font  perdre  leur 
Ghorelich  dans  la  mer  entre  Heractée  et  Rodosto;  Mercator  l'introduit 
dans  la  mer  près  de  Selymbria;  Delisle  place  la  même  rivière,  nommée 
Chivourli  ou  Tourzoul,  à  Touest  de  Rodosto,  près  de  Gora;  Sanson  et 
Vaugondy  rapprochent  leur  Tschourlou  à  Selyvria;  D'Anville  place 
Turullus  sur  la  rivière  qui  se  perd  près  de  Heraclea;  La  Pie  lui  donne 
le  nom  Tschourlou  et  la  fait  entrer  dans  la  mer  près  de  Rodosto  ;  Lameau 
donna  enfin  congé  à  cet  embouchure  inconstante,  ce  qui  est  conforme 
à  la  relation  d'Edrisi. 

Le  nom  d'AkhIioun  est  donc  donné  aux  deux  rivières  des  anciens,  à 
Contadesdus  et  Agrianes  d'un  côté,  et  à  une  partie  de  Hebrus  de  l'autre 
côté.  C'est  une  appellation  singulière,  qui  n'a  aucune  analogie  avec  les 
noms  qui  sont  propres  à  ces  rivières.  Des  appellations  toutes  spéciales, 
inconnues,  extraordinaires,  toutes  inattendues,  se  présentent  fréquem- 
ment dans  la  description  d'Edrisi  >  surtout  pour  les  rivières.  Elles  sont 
Souvent  une  conséquence  de  l'écriture  du  caractère  arabe;  il  y  en  a 
d^autres  qui  dérivent  du  langage  populaire  des  indigènes  et  des  corn- 
Qierçants.  Leur  origine  est  nécessairement  latine  ou  grecque,  quelque- 
fois dérivant  des  idiomes  des  indigènes  :  jamais  de  l'arabe,  qui  n'a  pas 
(pénétré  dans  les  régions  de  notre  analyse.  Quant  à  l'appellation 
extraordinaire  d'Akhioloun ,  le  mol  est  sans  doute  grec  et  l'énigme 
Mï'esi  pas  difficile  à  résoudre.  Dans  la  description  d'Edrisi,  l'ancienne 
Anchiale  est  nommée  Akhiolou.  Or,  le  nom  du  fleuve  Akhiiou, 
Akhiolou  est  le  même  AyyixXoi  le  maritime  en  grec,  Marmara  en 
latin ,  Maritza  en  vulgaire  du  latin. 


i4i  EDRISI. 

45.  Le  pays  entre  le  DaDul>e  et  la  mer,  ^ers  remliouchare  do  Ûémiê 
nommé  Berdjan,  plus  tard  appelé  du  slavon  Dobroudje,  offre  une  un* 
filière  illusion  étymologique.  Dans  le  langage  des  marins,  bord, 
bordage ,  jouent  un  rôle  très-varié.  De  bord  a  pu  chez  eux  se  former 
Bordjan,  pays  maritime,  littoral,  qui  borde  la  mer,  plein  d^abords,  où  se 
concentrait  un  mouvement  commercial  très-considérable,  où  nombre 
de  navires  abordaient  continuellement.  On  peut  déduire  ée  même  le 
nom  de  Berdjan  du  Slavon,  ce  qui  reviendrait  au  même,  k  la  même 
signiAcaiion  de  pays  littoral.  Bcreg  en  slavon  est  le  bord,  la  rive.  Le 
défilé  d*£mineb  portait  le  nom  de  Beregava,  parce  quMi  toudiait  le 
bord  de  la  mer.  Aussi  le  pays  de  Berdjan  bordant ,  bordain  en  slaven, 
serait  Beregan,  Berezan,  Berejan ,  Brejan.  —  Mais  cette  apparence 
illusoire  s'évanouit  quand  on  voit  dans  Tappellation  de  ^j^-T^jf  Bi*r- 
djan,  nommé  également  .i--^j^  Borschan,  un  nom  de  la  tradition 
ancienne  et  obscure  qui  se  perpétua  chez  les  arabes.  Borsdian  ou  Ber- 
djan figure  toujours  chez  les  géographes  arabes.  Nommé  d*abord 
en  835  dans  le  rasm  du  khovarezmien  ,  ensuite  en  950  par  Ibn  Kelir, 
en  1008  par  Ibn  lounis,  en  1050  par  Âbou  Rihan,  vers  1250  par  le 
géographe  persan,  en  1274  par  Ibn  Saîd,  en  1551  par  Aboalféda, 
en  1597  par  le  Bakouin  et  par  les  autres.  Son  extension  est  très-con- 
sidérable, il  couvre  Toccident  et  le  nord  du  Roum  byzantin ,  ainsi 
qu*au  sud  il  traversait  le  vi«  climat  et  au  nord  le  vu"**  et  an  delà,  n  a 
une  capitale  du  même  nom ,  dont  la  position  est  fixée  par  les  géogra- 
phes en  longitude  et  latitude  géographiques  à  Toccident  de  Constanti- 
nople.  Aboulféda  savait  que  Texistence  de  ce  pays  ne  durait  pas  tou- 
jours, qu'il  était  conquit  par  les  Allemands  :  cependant  le  Bakouin 
relate  que  les  Bordjaniens  ressemblent  aux  Franks  et  combattent  les 
Slaves  leurs  voisins.  Toutes  ces  répétitions  ne  sont  que  la  reproduction 
d*un  nom  traditionnel,  dontTorigine  se  perd  dans  Tignorance,  et  qui 
fourni  l'appellation  arabe  à  un  coin  très-restreint  de  Fempire  b3rzantiD,. 
aux  géographes  de  Sicile,  ou  plutôt  à  Edrisi  lui-même,  qui  Ta  tir^ 
des  écrivains  de  sa  langue.  Cependant,  mieux  instruit  que  fous  les 
autres  mahomraédans  sur  l'état  des  pays  byzantins  et  danubiens ,  n* 
trouvant  plus  de  Berdjan,  n'imposa  ce  nom  qu'à  un  canton  de  Tempi 
à  l'embouchure  du  Danube.  L'emplacement  assigné  au  vaste  Borscba 
du  IX*  siècle,  répond  à  la  position  des  Bouighars  danubiens  qui  y  étaiei 
déjà  étaf)lis  :  on  pourrait  donc  supposer  que  Berdjan  n'est  rien  que 
défiguration  de  Bourgar  (5$).  Mais  les  écrivains  arabes  semblent  to 

(S8)  Borgao,  bos  crédit  dMIerbelot ,  p.  1 18,  SI  1 ,  217,  SS6,  majores  Burgiiodionum  esM.  Sed 
Bulgari  (dit  Reiske] ,  aut  Bargari  :  sic  enim  olim  diccbantur.  Le  sire  de  Vïllerval,  dans  ses  to; 
/apud  du  CaDgium  ad  Joinvillc)  «  nominal  la  Bonrgdrie  nbi  Cangius  addit  esse  BulgariaiB.  "  L* 


MAK£DONIA,   46.  143 

distinguer  leur  Berdjau  de  Boulghar  {5«).  Au  ix*  siècle  la  domina- 
avares  était  encore  formidable.  Ebranlée  par  des  soulèvements 
Tes  des  Slaves,  elle  succomba  sous  le  glaive  Allemand  lorsque 
>  détruisit  leur  camp.  Cet  événement  ne  devait  point  rester 
rabes,  et  probablement  ce  sont  les  Avares  qui  portent 
n  de  Borschau,  Berdjau.  Les  Slaves  appelaient  les 
Obrjinieiis;  les  Arabes,  instruits  par  leurs  relations 
"^  >om  d'Obrzin,  Obrzan,  Borschan. 

lalification  de  oL>*j.!:k  Djerraanie,  Germania,  paraît  plus 
.uaire  et  vraiment  étrange.  Qui  a  pu  porter  ce  nom  et  Tlmposer 

.ue partie  de  Tempire  grec  jusqu*aux  portes  de  la  capitale?  qui  aurait 
pu  faire  croire  aux  Siciliens  et  à  un  écrivain  de  Sicile,  tout  arabe  qu'il 
était,  queTempercur  grec  de  Byzance  avait  sa  Germanie?  Certes,  cette 
Djermanie  n'est  pas  des  Germains  allemands ,  et  je  ne  conçois  guère 
qu'on  penserait  d'extraire  ce  nom  de  quelques  établissements  des  Ger- 
mains Golhs.  Cette  appellation  ne  dérive  d'aucune  érudition.  On  a  cer- 
tains géographes  italiens ,  comme  Mauro,  qui  semblent  enclaver  tout  le 
Itanabe  dans  l'Allemagne.  Mais  les  Italiens  appellent  les  Allemands 
Tedesco,  Allemano,  et  leur  érudition  ne  se  permettrait  point  de  caser 
Fantique  Germania  sur  les  rivages  de  la  mer  noire.  Mauro  place  les 
Gothes  qui  vinrent  s'établir  en  Italie  à  l'emboucbure  du  Dniepr,  quand 
Ojçrmania  d'Ëdrisi  est  le  Berdjan  et  la  Bomania  jusqu'à  Conslantinople. 
Il  £iut  donc  chercher  une  autre  issue  avec  cette  appellation  étrange. 
Si  on  lirait  ^  ''-^j^  Djerhania?  Celte  leçon ,  je  pense ,  n'offenserait 
point  l'épigraphe  de  la  carte  itinéraire,  elle  donnerait  l'appellation  slave 
ûe  tzarania,  tscharania,  pays  césarien,  tzarien,  royal,  impérial,  où 
réside  le  tzar,  l'empereur.  Le  peuple  a  pu  donner  ce  nom  au  saint 
empire,  et  spécialement  à  la  Remanie,  comme  il  donnait  le  nom  de 
Tzarc^rod,  de  la  ville  du  tzar,  à  la  capitale  Constantinople. 

Nous  avons  observé  l'importance  de  la  remarque  d'Ëdrisi,  que  les 

«tatalMk  éê  iS77,  iMorîTit  au  sud  du  Danube  Bulgaria  et  au  nord  Bnrgaria.  —  Schafarjik  dans  ses 
iwtii|nitnt  slaves  DI,  99,  4»  feurait  plus  d'exemples  d'identité  do  Boi^ian  et  des  Bouliers  par  la 
tnaailiou  de  consonnances.  Fraehu,  Ibn  Fozlan,  p.  236,  237. 

(BiQ  i<e  roi  des  fionlgars,  dit  Massoudi  (cbap.  15),  et  les  autres  16  répètent  :  à  la  tète  de  cinquante 

'■nttl*  iKMBties,  it  une  iaTasioa  dane  l'empire  romain  et  poussa  ses  ravages  jusqu'au  pays  de  Bordjan, 

de  France,  etc. — LesBoulgars,  voisins  de  Kiev,  sont-ils  ceux  du  Volga  ou  du  Danube;  on  discute 

(^rtebn,  Ibn  Fozlan,  p.  iS4, 246).  —  Bakoui  explique  admirablement  la  double  situation  des  Boul- 

firt?  jBtfd[f(tii  diti),  est  très  au  nord  où  le  jour  n'est  que  de  4  heures,  ils  sont  madjoos,  et  font  la 

g«eft«  aat  Seklabs  ;  ils  ressemblent  à  bien  d'égards  aux  Franks,  ont  de  l'intelligence  pour  les  arts  et 

eontrttisent  des  vaisseaux  (VU,  2}.  C'est  l'espèce  méditerranée  assise  sur  Voiga  :  et  les  autres. 

Boiter,  ville  sur  la  mer  Nitascb,  environnée  des  tourks.  Ily  a  deux  mois  de  chemin  à  Kostantinich  ; 

»  IMM  te  fMrrè  «  KostatttUiick  ;  la  toagoear  do  jMf  y  tH  de  to  heortt  (Vil ,  *).  ReiattoM  arabes. 


144  BDRisr. 

habilanls  dWfraiikbila  (de  FraiikaTîlla),  étaient  nomades,  peu  iéden- 
taires  (p.  577).  1/cuipirc  i;rec  éiuit  plein  de  hordes  errantes,  cherchant 
des  piUuragesavec  leurs  iroupeauxsur  les  uionlaf;ncs  ou  dans  les  plaines. 
Boulgars,  Vabks,  Serbiens  et  ditl'érentes  peuplades  slaves  rodaient 
pacifiquement ,  avec  sécurité ,  dans  la  Komanic  et  jusqu'au  fond  de  la 
Grèce,  avec  leui-s  moutuns  et  leur  bétail,  de  façon  qn*ils  tournoyaient 
au  delà  du  Danube.  Ils  aimaient  mieux  s'enfoncer  dans  les  pays  cul- 
tivés et  peuplés,  où  il  avait  assez  de  pâturages,  panuï  que  dans  ces  pays 
il  leur  était  plus  facile  do  se  procurer  des  vêlements  et  de  uiodesies 
commodités  de  la  vie.  Le  thème  de  Thessalonik  ne  discontinuait  point 
d'être  qnaliiié  par  les  byzantins  eux-i|icme  de  thème  Serbe.  Les  monta- 
gnes au  nord  de  Justiniana,  sont  Serbes.  Les  Serbiens  surtout  grandis- 
saient alors  en  force,  se  fesaieut  remarquer  plus  distinctement  par  iear 
disposition  mobile.  Leur  propre  pays  entre  la  Drave  et  la  Morava,  où 
résidait  toute  leur  force  vitale,  paraît,  d'après  la  description  d'Edrisi, 
sans  villes,  comme  un  désert.  L'hû^toirc  civile  et  ecclésiastique  y 
connaît  quantité  de  villes  et  paroisses  :  mais  elles  semblent 
ignorées  par  les  relations  commerciales.  Cependant,  de  ce  pays,  U 
populations  se  répandaient  et  ménagaient  les  pnrrrTJnnr  limntinnri  mi 
aux  environs  de  la  Morava,  d*où  les  frontières  de  l'empire  demeaf  ^:mu 
reculer  à  tout  jamais,  perdant  jusqu'au  simulacre  d'autorité.  Getltt^.v.AI 
population  Serbe,  Serve,  qualifiée  par  excellence  de  nomades,  obtin^iH^if 
le  nom  érudit  des  africains  getulcs,  qui  était  chez  les  latins  ideDtiqu.K^^a 
avec  la  qualification  de  nomades,  numides  :  il  ne  restait  à  Edrisi  qvm^m ^n 
de  le  répéter  et  d'appeler  les  Serbiens  :  Getulcs,  Djetouli.  Je  pense  qicv  j^n 
cette  explication  est  incontestable  et  qu'on  ne  voudrait  pas  iaiv  M  min 
dériver  les  Serbiens  Getoules  de  là  dénomination  des  anciens  Getea. 


•47.  Il  est  vraiment  curieux  d*obser^'er  dans  la  narration  d' 
comment  on  distinguait  dans  les  villes  littorales  de  l'Adriatique, 
populations  kroates,  slaves,  dalmatcs.  Elles  devaient  se  distinguer 
quelque  extérieur.   Ce  mélange  de  populations  rend  les  frontièi 
des  pays  incertaines.  Dans  le  golfe  d'Istrie,  les  îles  sont  kroates  el 
pays  contigue  est  kroatic  :  mais  on  l'appelle  aussi  Dalmatie.  La 
se  termine  avec  Kaguse;  cependant,  en  commençant  de  Sonna  (SignS. 
dans  les  villes  maritimes,  partout  la  population  dalmate  est  prédoi 
nante  encore. 

Les  relations  apportées  aux  géographes  de  Sicile,  prennent  1« 
source,  ou  de  l'usage  invétéré  du  vulgaire,  ou  de  la  vue  de  la  popiil 
tion  qui  prévalait  les  autres  en  nombre  ou  en  activité;  déplaçaient  sii 
gulièrement  les  frontières  des  pays  et  des  états  connus  par  Thistoi 


MAKEDOHU,  47.  145 

Les  Serbiens,  à  cette  époque,  formaient  un  état  indépendant,  puissant, 
grandissant.  Leur  domination  s'étendait  depuis  Gradiska ,  au  sud  de  la 
Save,  jusqu'à  rÂdrîatique;  ils  possédaient  tout  jusqi^'au  delà  de  Lesso; 
à  Test  les  possessions  ne  dépassaient  pas  encore  Ibar  et  Morava  :  ce  n'est 
que  quelques  années  plus  tard,  vers  1180,  qu'ils  avancèrent  leurs  fron- 
tières dans  l'empire  grec,  occupèrent  Nisa  et  les  cantons  voisins.  Cepen- 
dant la  description  d'Edrisi  ne  connaît  pas  de  Djetoules  Serbes  dans  le 
pays  traversé  par  le  grand  iQeuyeDrin,  elle  l'emplit  par  la  population  des 
Sklavons,  et  elle  peuple  de  Djetoules  la  moitié  de  la  Boulgarie  jusqu'au 
delà  d'Osma.  C'est  parce  que  les  commerçants  voyaient  une  muliiiude 
de  pasteurs  nomades  des  Djetoules  Serbiens ,  errer  dans  l'empire  aux 
environs  d'Iskraî,  de  Yoda,  d'Osma,  qui  offusquaient  les  indigènes 
Grées,  Boulgares,  Valaks  (s7). 

Par-ci  par-là  Edrisi  (ait  sentir  cette  différence  des  limites  et  glisse 
des  renseignements  sur  les  possessions  des  états.  Il  ne  nomme  ni 
les  Boulgars,  ni  les  Yalaks,  parce  qu'ils  étaient  trop  soumis  à  la  tcba- 
nnia,  à  l'empire,  et  n'avaient  aucun  terrain  d'indépendance.  H  sait  que 
Ribna,  Nîssa  et  les  autres  ville  à  l'est  de  la  Morava,  n'appartenaient 
point  à  la  domination  des  Serbiens ,  qu'elles  fesaient  partie  de  la  Make- 
donla ,  parce  qu'elles  restaient  encore  sous  la  domination  des  tzars  ou 
des  empereurs  de  Coustaniinople,  de  la  Remanie.  Les  noms  de  Remania 
et  de  Makedonia  n'ont  aucune  limite  déterminée.  Les  Grecs  sont  les 
Graîkbioun.  Le  littoral  oriental  de  la  Djermania  ou  de  la  Remanie  est 
aussi  le  littoral  oriental  de  la  Makedonia ,  traversé  par  les  montagnes 
La^oudemonnia. 

De  même  Edrisi  fait  connaître,  qu'il  sait  très-bien  que  la  Sklavonie, 

dans  laquelle  les  Vénitiens  avançaient  profondément  leurs  Irruptions, 

appartenait  aux  Hongrois.  11  sait  que  la  plus  grande  partie  de  la 

Karintie  et  des  pays  qualifiés  Boemia ,  Noemia ,  composaient  l'état  de 

doDgrie.  Mais  il  parie  de  la  Hongrie ,  Oukaria ,  comme  d'un  pays  séparé 

<3e  la  Karintie ,  qualifiant  cette  dernière  de  dépendance  de  l'état  des 

.ItloDgrois.  Cette  distinction  des  pays  du  domaine  des  Hongrois  demande 

€Jles  considérations  spéciales,  pour  la  Karintie,  pour  la  Hongrie  et  pour 

la  Bohême.  Nous  avons  déjà  traité  la  question  karintienne,  restent 

^i^Ues  de  Hongrie  et  de  Bohême.  En  revenant  à  cet  effet  sur  nos  pas 

le  Danube,  entrons  d'abord  dans  Onkaria. 


(S7)  Pour  mieux  compreudre  cette  observation  et  cette  différence  des  frontières  des  états  avec  les 

Wontières  des  pays  édrisicns,  je  joins  à  mon  atlas  une  carte  historique  de  l'année  1144,  par  consé* 

^oent  de  l'époque  du  roi  Roger.  Qu'on  nous  pardonne  qn'ellç  est  en  polonais.  Elle  était  préparée  il 

^  a  Tingt  ans  pour  une  publication  polonaise  qui  ne  paraîtra  plus.  Si  les  cartes  de  Tatla*  offrent 

«l«ellqwsi  inexactitudes,  lé  texte  de  mon  ouvrage  indique,  eiq[>UqBe  et  corrige  en  dernier  lieu. 

III.  10 


i46  EDRISI. 

Hongrie. 

48.  On  range,  dit  Edrisi,  au  nombre  des  dépendances  de  la  Hongrie, 
les  villes  suivantes  : 
y^  Montir,  Montiour  ou  ^^^  Manbou. 
^j^^uii,  Schent. 
^jûxi  Baghs. 

ijlJii^  ajIJu*^  HerngrabaouDjertgraba. 
I •  ; ,  .'J  ;  t  *L3  Kavorz  ou  Kavorzova. 
,yj^\M  Kalgradoun,  plutôt  jjj^'jÂb  Bclgradoun. 
LL..^^!  Akridiska,  Agradiska. 
^^-»*^*  jL^*>o*  Tensinou  ou  Tensibou. 
iljlj  Zanla  (VI,  3,  p.  575,  577,  579.  580). 
tr*'!i^  Titlous  est  aussi  une  ville  de  Hongrie  (p.  578),  comme  nous 

Fa  vous  dit,  et  ce  nombre  se  grossit  encore  par^jj  i!  Arinia,  comme 

nous  allons  le  voir. 

La  ville  de  Baghs  est  certainement  Baks  d'aujourd'hui,  située  non  loin 
des  rives  du  Danube ,  vis-à-vis  de  Youkovar,  parce  que  la  Hongrie 
d'Edrisi,  du  côté  de  Touest,  touche  le  Danube. 

Nous  avons  fixé  les  positions  des  villes  de  Bclgradoun  (Belgrad),Baii8- 
sin  (Brandiz) ,  Akridiska  (Gradiska),  Kavorz  (Koutschaî)  sur  les  rives 
méridionales  du  grand  fleuve;  c'était  pour  nous  d'importance,  parée 
que  Banssin  et  Kavorz  sont  les  points  de  départ  pour  les  distances  qai 
déterminent  la  position  des  villes  restantes  de  la  Hongrie. 

On  compte  160  milles  de  Kavorz  directement  à  Agra  :  en  se  dirigeant 
d'Agra  vers  le  sud  et  en  inclinant  cette  direction  vers  Torient  il  y  a  ^ 
80  milles  (plutôt  ^  100);  d'Agra  jusqu'à  une  petite  ville  Arinia,  et 
d' Arinia  à  Banssin  60  milles  (p.  577).  Par  ces  distances  nous  sommes 
conduits  et  arrêtés  à  Arad,  d'où  sort  un  embranchement  de  Marosdi 
appelé  Aranka,  pour  se  jeter  par  un  autre  lit  dans  la  Teisse. 

Deux  passages  dans  Edrisi  donnent  la  description  du  courant  de  la 
Teisse.  Nous  les  mettrons  en  regard ,  pour  les  mieux  confronter. 

àlap,  579,  580.  à  la  p.  590. 

La  majeure  partie  de  la  Hongrie  Les  rivières  principales  de  la 

est  arrosée  par  le  o^JJ^  Boutent  Pologne  «u>^  (de  la  Hongrie  sor- 

et  par  la  L*Jj  Tissa.  Ces  rivières  tant  des  frontières  de  la  Pologne), 

prennent  l'une   et  l'autre    leurs  sont  la  vj:^.^^  Butent  et  la  i^ 

sources  dans  les  montagnes  de  dS  Tessia.  Elles  prennent  leurs  sour- 


HONGRIE,   49.  147 

IKard  qui  séparent  la  Hongrie  de  la  ces  dans  les  montagnes  (de  Kard), 
Pologne  à^^  et  du  pays  des  qui  séparent  la  Pologne  de  la  Rus- 
Byfj^Lt  Madjous;  elles  coulent  sie  (Hongrie)  du  nord  an  sud. 
vers  le  couchant.  Parvenues  à  8  Elles  coulent  vers  Toccident ;  puis 
journées  de  distances  de  leurs  se  réunissent  et  ne  forment  plus 
sources,  elles  ne  forment  plus  qu'un  seul  cours  d'eau,  qui  se 
qu'un  seul  cours  d'eau  qui  se  jette  dans  le  Danube  à  Toccident 
dirige  vers  le  midi  et  finit  par  se  de  Kavorz. 
jeter  dans  le  Danube  entre  Kavorz 
et  Banssin. 

La  différence  et  les  méprises  des  deux  relations  ne  nous  paraissent 
pas  élever  quelque  embarras  ou  incertitude.  Comme  Fembouchure 
entre  Banssin  et  Kavorz  est  une  méprise  dans  la  première,  aussi  la 
position  des  montagnes  entre  la  Russie  et  la  Pologne  dans  la  seconde , 
est  une  confusion  d'idées.  Peut-être  Tarabe  a  voulu  dire  que  les  mon- 
tagnes séparent  la  Pologne  et  la  Russie  (madjous)  de  la  Hongrie.  En 
attendant ,  coAime  la  Russie  placée  avec  la  Pologne  au  delà  des  monta- 
gnes, se  présente  séparée,  de  même  Banssin,  situé  avec  Kavorz  au  delà 
de  l'embouchure,  sont  séparés.  Ces  méprises  sont  analogues.  Dans  la 
seconde  relation  ,  ces  fleuves  hongrois  sont  en  Pologne.  La  vue  de  la 
carte  itinéraire  a  pu  donner  occasion  à  cette  méprise ,  en  rejettant  les 
fleuves,  leurs  sources  et  les  montagnes  de  Kard  au  delà  des  montagnes 
Balavat  (Karpates),  dans  les  espaces  où  se  suivent  les  villes  de  Pologne. 

Les  Kard  sptft  évidemment  les  chaînes  des  Karpates,  qui  pénètrent 
vers  le  sud  Bans  la  Transylvanie.  Le  nom  de  Boutent  pourrait  être 
uppuyé  et  justifié  par  quelques  appellations  consonnantes  de  localité  ou 
lie  rivière  de  la  partie  orientale  de  la  Hongrie;  mais  il  est  mieux  d'ob- 
^rver  que  ce  nom  *de  Boutent  n'est  rien  autre  que  le  nom  réel 
lie  la  Teisse ,  appelée  Tibiscus.  De  cette  appellation  latine,  par  la  trans- 
position des  lettres,  ou  plutôt  par  la  transposition  des  points  diacri- 
Uques,  s'est  formé  Bitisk,  Boutent.  Ainsi,  quand  il  est  dit  que  la  Teisse 
tombe  dans  Boutent,  c'est  une  branche  de  Tissa  qui  perd  ses  enux  dans 
Tibiscus. 

49.  De  Kavorz  à  Schent ,  lieu  situé  sur  la  rive  occidentale  du  fleuve 
(Bâtent),  4  journées  (p.  580).  II  n'y  a  que  Zent  qui  peut  répondre  à  cette 
condition. 

De  Schent  à  Djertgraba  ou  Herengraba ,  ville  considérable  et  commer- 
çante ,  par  eau  5  journées.  En  montant  la  Boutent  nous  devons  abso- 
lument nous  arrêter  à  Ksongrad,  et,  changeant  la  ppnctuatioi^  arabe , 
rétablir  le  nom  de  la  Ville  en  ^IJuiâ.  ou  àj\jijy^  Elle  est  presque 


i  48  EDRISI. 

à  l^emboucliure  de  Koros  dans  la  Teisse,  Or,  par  cette  rivière*  aussi 
par  eau,  à  5  journées  ou  120  milles  (sur  le  Koros),  se  trouve  Tensinova, 
ville  agréable,  offrant  d'abondantes  ressources  et  située  au  midi  de  la 
rivière  Tissia  (Koros).  À  Tépoqued^Edrisi,  Waradin  ou  Warasdin  sur  le 
Koros  était  déjà  considérable.  Ce  Koros  est  qualifié  de  Tissia ,  mais  d^où 
vient  le  nom  de  Tensibou  Tensinou  ?  je  ne  levlevine  pas. 

Il  est  possible  de  se  rendre  de  Kzongrad  à  Zanla  en  5  journées , 
savoir  :  de  Kzongrad  à  Temboucbure  de  la  Teisse  une  forte  journée. 
Cette  embouchure  est  celle  d'un  bras  de  Koros,  embranché  da 
côté  du  nord.  Puis  en  remontant  la  Boutent  à  Zanla  4  journées.  Cette 
ville  est  florissante,  peuplée  et  située  sur  les  bores  dans  la  partie 
septentrionale  de  Boutent  (Teisse).  Zanla  est  donc  Zatmar.  De  là  à 
Tensinon  (Warasdin),  en  se  dirigeant  vers  le  sud ,  4  fortes  journées, 
en  traversant  des  contrées  cultivées  et  fertiles,  situées  entre  les  deux 
rivières,  la  Boutent  et  la  Tissia  (Tibiscus  et  Koros). 

De  Zanla  (Zatmar)  à  Montir  ou  Mombou,  grande  ville  sur  les  fron- 
tières de  Pologne ,  en  se  dirigeant  vers  Toccident ,  5  journées  (p.  380, 
575).  Voici  un  point  en  apparence  difficile.  Toute  la  difficulté  réside 
dans  rincertitude  du  nom  de  la  ville.  L9  variante  trop  forte  de  son 
appellation  prévient  que  nous  ne  le  possédons  pas  dans  sa  pureté. 
L'écriture  de.  la  carte  itinéraire  présente  encore  une  variante  «^ 
excessivement  discordante  avec  les  deux  autres.  Elle  donnerait  j-tf 
y^  Fouhbon,  Foukhbar,  et  répondrait  à  Voukovar,  seule  Tille 
avancée  sur  ce  point,  capable  de  remplir  les  conditions  de  frontières 
aux  pieds  de  Kard  ,  située  entre  les  rivières  Tissa ,  Bodrog  et  Tsepla, 
dans  un  coin  reculé  de  la  Hongrie,  que  nous  allons  bientôt  reconnattre 
en  particulier ,  en  parcourant  la  Bohême, 

BOEMIA. 

50.  Il  est  connu  que  les  appellations  de  Bavaria  et  de  Boemia, 
Bohemia,  tirent  leur  origine  commune  du  nom  du  Gaulois  Bo!.  Edrisi 
nomme  l'un  Baïr,  Bafir  ou  Babir  (p.  246,  557,  568,  570),  l'autre  a^!^ 
Noamia,  qu'on  écrit  aussi,  dit-il,  par  6,  a^Uj  Boemia,  province 
très-vaste,  très-peuplée,  très-fertile  (p.  571). 

Les  peuplades  Slaves  s'étaient  établies  dans  la  Bohême;  Lemouzes, 
Loutitsches,  Sedlitzans,  Psovans,  Mokropsi,  Datzanes,  Doudlebes, 
qualifiées,  comme  la  masse  des  autres,  des  noms  génériques  de  Tendes, 
Kroates,  Chrabates  ou  Serbes.  Avec  le  temps,  le  nom  de  Tschekh  pré- 
valut entre  elles  et  depuis  l'introduction  du  christianisme,  toutes  se 
qualifiaient  de  Tschekh.  La  dénomination  des  Tschekhs,  d'abord  res- 


BOEtfIA,50.  149 

treinte,  prenait  de  temps  en  temps  des  dimensions  extraordinaires, 
ÀTorisée  par  la  propagande  de  Févangile.  Le  doc  Boléslav  II ,  en  999, 
déclara  sur  son  lit  de  mort,  qa*il  conquit  les  pays  au  delà  de  l'Oder, 
.  jnsqn^aux  frontières  des  Russes,  avec  les  villes  Yrotslav  et  Krakov 
(Gosmas  prag.  hoc  anno).  Malgré  celte  étendue  de  son  domaine,  il 
dépendait  de  Tempire ,  comme  membre  du  royaume  d'Allemagne. 

Après  la  mort  de  Boleslav  II ,  prévalut  chez  les  Tschekhs  le  parti 
polonais,  qui  songeait  à  l'indépendance ,  à  l'existence  indépendante 
d'Allemagne.  Le  roi  de  Pologne,  Boleslav-le-grand ,  s'empara  de  Krakov, 
de  Yrolslav  et  de  toutes  les  conquêtes  éphémères  des  Tschekhs ,  et  sem- 
blait devenir  l'arbitre  de  leur  sort,  s'établissant  momentanément,  en 
1002,  dans  leur  capitale  comme  souverain.  A  la  suite  de  cette  extension 
de  l'état  de  la  Pologne,  Boleslav-le-grand  se  trouva  voisin  et  limitrophe 
des  Hongrois ,  fixant  ses  frontières  au  delà  des  monls  Karpates,  sur  les 
rives  du  Danube  (chron.  polon.  mixta  ungar.  cap.  iâ). 

Les  ducs  régnants  en  Bohême ,  ne  manquèrent  pas  de  tirer  une  ven- 
geance épouvantable  de  la  Pologne  dès  que  l'occasion  favorable  s'en 
présenta.  Sans  songer  à  reconquérir  les  pertes,  ils  ravagèrent  en  1058 
la  Pologne,  et  y  mirent  tout  à  feu  et  à  sang,  s'emparant  des  captifs, 
d'an  butin  immense  et  du  corps  de  St-Adalbert,  qui  fut  solennellement 
transporté  de  Gnezne  à  Praga  (Cosm.  prag.  II,  p.  2017;  anonym  inter 
script.  Menken.  t.  III,  cap.  55;  chronogr.  Saxo,  s.  a.  1054,  édit.  Leibnilz. 
in  access.  historicar.  t.  I,  p.  244;  annal.  Saxo,  s.  a.  1059,  in  corp. 
historicor.  Eckhardi  1. 1,  p.  471). 

Cette  translation  des  dépouilles  mortelles  de  l'apôtre ,  suggéra  certai- 
nement une  singulière  invention ,  à  cause  que  l'apôtre  Adalbert  était 
évéque  de  Praga.  On  a  dit  que  l'empereur  Otto,  ami  de  Tévêque,  avait 
kmdé  l'évêché  de  Praga  avant  de  mourir ,  et  lui  assigna  un  immense 
diocèse  par  le  diplôme  de  Tannée  975,  fabriqué  à  cet  effet.  Ce  diplôme 
4Qrait  été  Inventé  à  l'époque  de  la  susdite  translation,  sans  aucun 
doute,  parce  qu'il  est  connu  par  Othlo,  qui,  entre  1057  et  1052, 
écrivait  la  vie  de  Saint  Wolfkang,  évêquede  Ratisbonne,  et  dans  sa 
^lation  fait  sonner  les  expressions  du  diplôme  même  (cap.  29,  t.  IV, 
>.  558,  édit.  Perlz)  (ss). 

Ge  privilège,  contraire  aux  événements  historiques,  fut  bientôt  consi- 
lërée  comme  authentique.  Il  a  été  déposé  en  1086  à  l'empereur  Henri  lY, 
l\ÈÏ  Ta  confirmé,  et  l'historien  Kosmas  de  Praga,  en  1125,  l'inséra 
jOiH  entier  dans  sa  chronique  (lib.  II,  p.  42;  in  Lunigii,  teutschen  Reichs 
^Tchiv,  Continuât.  1. 1,  p.  250). 

(8É|  Parodûa  eztitit,  episoc^tnm  (Otto) ,  efficit  :  cumque  peragendi  coBcambii  tempos  tenisset , 
•^nU  tviil  alacritute,  nt  ipse  privilegiam  componertt. 


i50  EDRISK 

Ce  priTilége  contient  pour  la  géc^apbie  deux  parties.  Dans  la 
première,  il  foit  un  dénombrement  des  districts  ou  paroisses,  oh  des 
peuplades  de  la  Bohême  |eUe-méme  et  de  ses  possessions ,  qui ,  par 
rirruption  récente  de  1058,  restaient  encore  en  possession  des  Tschekhs, 
aux  environs  de  TOder.  Dans  la  seconde  partie ,  le  diplôme  désigne 
retendue  de  la  province  de  Krakov,  à  laquelle  Téglise  de  Boliéme 
acquit  un  certain  droit  par  son  apostolat  antérieur  et  par  l'occupa- 
tion de  la  Moravie.  Parce  que  le  clergé  bohème  y  prêchait  Tévangile, 
révéque  Adalbert ,  diaprés  la  tradition ,  ne  négligeait  point  les  ouailles 
de  ce  pays  éloigné.  Depuis  la  chute  de  la  grande  Moravie  et  la  dépré- 
dation des  Hongrois ,  Farchevéché  de  Moravie  et  Févéché  de  Neutni 
disparurent,  et  les  premières  étincelles  du  christianisme  pouvaient 
s'éteindre,  si  le  nombre  modique  des  convertis,  privés  de  leur  pasteur, 
n'avaient  cherché  l'intervention  des  évêques  limitrophes.  Us  s'adres- 
saient aux  évêques  de  Juvavum  ou  Salzburg,  de  Passau  et  de  Praga. 
Chacun  y  avait  sa  part,  ses  prétentions.  Aux  environs  des  Karpates  le 
clergé  de  Bohème  était  le  plus  actif  et  ne  discontinuait  pas  de  servir 
les  fidèles. 

51.  Le  diplôme,  en  déterminant  l'étendue  du  diocèse  de  Bohème, 
après  avoir  détaillé  son  intérieur,  continue  :  tnde,  ad  orientem  koi 
fluvios  habet  lerminos  :  Bug  scilicel  et  Ztir,  cum  Cracoua  civilaU ,  pro- 
vineiaque  cui  Wag  nomen  est ,  cum  omnibus  ad  prœdictam  urbem  perU- 
nentibus ,  quœ  Craeova  est  ;  inde ,  Ungarorum  limitibtu  addilis  tuque  ad 
montes  qnibus  nomen  Tritri,  dilalata  procedit;  deinde,  in  ea  parte  qum 
meridiem  respicit  addita  regione  Moravia,  usque  ad  fluvium  cui  nome» 
est  Wag  et  ad  mediam  silvam  cui  nomen  est  Mure  et  ejusdem  monltf 
eadem  paroekia  tendit ,  qua  Bavaria  limitalur  (Cosm.  et  Lunig.  H.  ee). 
Or,  à  l'extérieur  de  Bohême ,  son  diocèse  s'étendait  des  deux  côtés  des 
Karpates;  au  midi  sur  la  province  Wag,  et  au  nord  sur  celle  de  Krakov 
jusqu'aux  deux  rivières  de  Volynie ,  Boug  et  Stir.  C'est  aussi  i'élendae 
de  la  conquête  éphémère  du  duc  Boleslav  II. 

Cette  invention,  attachée  à  la  mémoire  de  Saint  Adalbert,  donna  ori- 
giue  à  un  antre  conte  qui  se  transforma  en  tradition.  On  a  cm  que 
Saint  Adalbert  inîervint  dans  les  contestations  qu'avait  la  Pologne  avec 
Saint  Etienne,  roi  de  Hongrie  ,  et  qu'il  détermina  les  frontières  de  ces 
deux  pays,  en  leur  indiquant  le  mont  Tatour,  les  montagnes  Tairi, 
pour  limite  commune  (anon.  iater  script,  ver.  hungar.  t.  I,  p.  37).  Les 
Hongrois  et  les  Polonais  d'accord ,  observaient  religieusement  cette 
décision  du  saint  évéque.  Leur  traité,  en  1191,  se  relatait  à  la  disposi- 
tion des  saints,  c'est-à-dire  du  bienheureux  roi  Etienne  et  du  très-saint 


BOBIIU,  SI.  iëi 

patron  de  la  Pologne  Âdalbert  (foedus  a.  il91 ,  apud  Vincent.  Kadlub. 
cap.  18 ,  p.  797).  Les  Hongrois  ont  gagné  par  cette  croyance 
inotoelle,  étant  en  possession  de  la  province  de  Wag,  et  les  écrivains, 
ennmérant  les  conquêtes  de  Boleslav-le-grand,  disaient  qu'il  avait 
conquis  une  portion  de  la  Hongrie  (Gall.  I,  6  ;  Matth.  II,  15). 

L*étendue  de  cette  conquête,  faite  entre  999  et  1000  sur  les  Tschektis 
(et  non  pas  sur  les  Hongrois),  est  déterminée  géograpliiquement  par 
une  légende  ou  chronique  écrite  vers  lâiO,  comme  suit  :  nam  termini 
PoUmorum  ctd  liUus  Danubii  ad  civitatem  Sirigoniensem  lerminabantur  ; 
dein,  Magriensem  (lisez  in  Agriensem)  civitatem  ibant  ;  dein  in  fluvium 
qui  Cepla  nuncupatur  usque  ad  castrum  Galis  ;  ibique  inter  Ungaros , 
Ruthenos  et  Polonos  finem  datant  (vita  S.  Steph.  vel  cronica  ungaror. 
mîxta  pplonor.  cap.  7,  p.  554  du  mscr).  Or,  ce  sont  les  limites  de  la  pro- 
vince Wag  qui  passaient  près  de  Strigonium  ou  Cran,  touchaient  et 
enclavaient  le  canton  de  la  ville  Magria,  c'est-à-dire  Agra;  ensuite 
montaient  les  rivières  Teisse ,  Bodrog,  jusqu'à  Gepla  ou  Toplia ,  où  elles 
se  perdaient  dans  les  Karapates,  au  delà  desquelles  le  district  de  Galis 
ou  Halitsch  regardait  le  contact  des  frontières  de  trois  états.  Là  Boies- 
lav-le-bardi,  roi  de  Pologne,  faisant  ses  grandes  chasses  aux  environs 
de  Galis,  surveillait  à  la  fois  les  affaires  de  la  Hongrie  et  de  la  Russie 
(chron.  pol.  mixta  ungar). 

La  province  de  Wag  portait  encore  une  autre  appellation,  celle  de 
Ruhia,  Ruzzia,  Rusia,  Rugia,  qui  lui  était  donnée  dans  la  grande  Mora- 
vie ,  à  cause  de  quelques  débris  des  anciens  Rugs  ou  Ruhs  qu'on  y  dis- 
tinguait (telon.  bavar.  de  a.  876,  906,  ap.  Oefel.  monum.  boica  ,  28, 
II,  105;  Aventin.  annal,  boior.  IV,  p.  188;  Goldast.  rer.  boic.  script, 
p.  698,  718).  La  popuisrtion  slave ,  slavake  y  était  différente  de  celle  de 
Pologne ,  formait  une  province  à  part,  limitrophe  de  la  Hongrie.  Otton 
Bezbraïm ,  fils  d'une  princesse  hongroise ,  éloigné  de  la  succession  du 
trône  de  Boleslav-le-grand  son  père,  fut  en  1025  relégué  in  Ruhhiam 
provineiam,  in  Russiam  (Wlppo,  vita.  com.  salici,  p.  470,  477,  édil. 
iMsterii,  1751 ,  t.  III).  Il  paraît  que  la  province  était  destinée  à  la  Hon- 
grie ,  parce  que  son  frère,  cousin  Emerik,  fils  du  roi  Etienne,  portail 
le  titre  duds  Auûorum  (annal,  hildesh.  ap.  Pertz,  III.  98).  Après  la 
«tiort  d'Emerik  (1051)  et  de  Bezbraïm  Ollo  (1052),  le  fils  de  ce  dernier 
tioinan  prit  possession  de  la  province  et  de  la  principauté  Russia  comme 
apanage  (Wippo,  p.  578;  Bogufal.  inter.  ser.siles.  Sommersb.  1. 11,26). 
^près  sa  mort,  la  province  Wag,  Ruhia,  entra  en  possession  des  Hon- 
grois ,  sans  contestations  connues ,  et  les  montagnes  Tritri ,  Tatri  et  les 
ICarpates  séparaient  la  Pologne  de  la  Hongrie. 

La  possession  de  la  province  de  Wag  par  la  Hongrie ,  n'était  pas  de 


152  EDRISl. 

longue  durée  ;  cependant  une  tradition  se  conserve  dans  le  peuple  jus- 
qu'aujourd'hui. Surtout  aux  environs  d'Orava  ou  Ârva ,  qui  perd  ses 
eaux  dans  le  Wag,  la  population  la  répète.  La  possession  antérieure  des 
Tscbekhs  était  plus  courte,  mais  elle  héritait  de  la  grande  Moravie;  son 
influence,  par  Tactivité  ecclésiastique,  continuait  d'être  plus  durable; 
ridiome  bohème  jusq'aujourd'hui  y  est  Tidiome  liturgique  :  les  livres  de 
prières  bohèmes  et  la  poésie  bohème  y  sont  généralement  répandus  et  re- 
cherchés avec  prédilection.  Allez-y  sonder  les  pensées  de  la  population  et 
vous  apprendrez  jusqu'à  quel  point  elle  sympathise  avec  les  Tscbekhs, 
comment  elle  compte  sur  Tavenir  des  Tscbekhs ,  qui  sera  le  sien. 

J'espère  que  cette  longue  déduction  ne  paraîtra  guère  déplacée, 
quand  nous  nous  proposons  d'expliquer  la  description  de  la  Bobcme 
d'Ëdrisi. 

52.  Il  compte  au  nombre  des  villes  de  Bohême,  les  suivantes  : 

yjX^y^S^  ^^  J'^CT^  ^^\iL\r^  Djikelbourka,  Djikelbourgo,  Dji- 

kelbourg. 
jjjk^  Schbrouna. 

aSI )3  A.^t  ^LjLJ  Diana,  Abia,  Dbiana. 

y^h»  vob  Bassau,  Massau. 

^flj^  iT*^  iT^^  Bilhs ,  Neilhs ,  Bis. 

UratJ)  5^t  Agra, Agrakta. 

JL«L^    i\^\j*    akU/i    jJL*^    Mesla,  Maschela,   Maschesala,   (qu'il 

compte  aussi  à  la  Saxe). 
ij^y^\  Eslergona,  Ostrikouna ,  Ostrigoun. 

t  ^•bJy^MW  Sinolavs  (VI,  %  p.  371;  5,  p.  575).  Schebronna,  Ustrikonn 
et  Sinolavs,  sont  aussi  mises  au  nombre  des  villes  de  Karintic.  La  der- 
nière avec  raison ,  ce  n'est  que  par  méprise  qu'elle  s'est  égarée  dans  ce 
nombre,  sa  position  orientale  est  déterminée  très  au  midi  et  même  en 
dehors  de  la  Kroatie ,  dans  la  Slavonie.  Quant  à  Schebrouna ,  c'est  tout 
le  contraire  :  ce  n'est  que  par  erreur;  elle  est  donnée  pour  la  ville  de 
Karintie  parce  qu'elle  n'est  pas  au  sud  mais  au  nord  du  Danube.  Djikel- 
bourga  a  donné  peut-être  occasion  à  cet  erreur  si  elle-même  ferait  par- 
tie de  Karintie,  dont  nous  observerons  la  probabilité.  Dans  cette  énu- 
mération  des  villes  de  Bohème  il  ne  pouvaît  pas  manquer  d'erreurs  de  ce 
genre,  qui  sont  assez  familières  à  la  description  d'Ëdrisi ,  comme  nous 
l'avons  signalé ,  indiquant  les  causes.  Au  nombre  de  ces  erreurs  il  faut 
encore  ranger  l'oubli  de  ^J^^  Neitrem,  qu'Edrisi  veut  enclaver  dans 
la  Karintie,  contrairement  à  toute  sa  relation. 


BOEMU,  S3.  i55 

Biana,  Vienne  et  Ostrikoon,  sont  situées  sur  le  Danube  au  sud. 
Biana  est  à  60  ou  40  milles  à  Torient  de  la  ville  de  Bavière  Garmaîscha 
(p.  570,  571);  et  de  Biana  à  Ostrikoun,  vers  le  sud,  on  compte  50  milles. 
De  toutes  les  villes  de  Bohême ,  Oslrîkoun  est  la  plus  vaste  et  la  plus 
populeuse;  elle  est  la  capitale  et  le  chef-lieu  du  gouvernement  (p.  571). 

Gran,  Strigonium  en  latin,  Esziergon  chez  les  Hongrois  et  Ostrihom 
chez  les  Slaves,  est  considéré  pour  la  capitale  (59).  Cest  près  de  cette 
ville  que  les  rois  Boleslav-le-grand  et  Etienne  ont  eu  une  entrevue 
(cron.  hung.  mixta  pol.  cap...);  c*est  la  frontière  de  la  Bohême,  éloignée 
30  milles  d*une  autre  capitale  Belgraba  (Âlba  regia). 

D'Ostrihom,  à  50  milles  vers  le  nord,  sont  situées  deux  villes  :  Sche- 

l)ronna  et  Djikelbourga.  De  Bouza  à  ces  deux  villes  aussi  vers  le  nord,  on 

compte  ^  5  journées,  et  de  Biana,  encore  vers  le  nord,  à  Schebronna 

Il  y  a  40    milles.  Ces  deux  villes  au  noi*d  de  Bouza,  d'Ostrihom  et  de 

Tienne,  sont  donc  au  nord  du  Danube,  à  la  distance  Tune  de  l'autre  de 

60  milles.  Schebrouna  est  une  ville  remarquable,  dont  les  dépendances 

sont  cultivées  et  fertiles,  les  marchés  fréquentés,. les  maisons  hautes  et 

les  agréments  renommés.  Elle  est  située  dans  une  belle  plaine  à  âO 

milles  du  fleuve  (p.  571,  575).  Ce  fleuve  innommé  ne  peut  pas  être  le 

Danube,  parce  que  Biana,  située  sur  le  fleuve  Danube,  est  éloignée  40 

milles  :  c'est  donc  un  autre  fleuve  plus  rapproché. 

55.  Les  distances  données  de  Biana  et  d'Oslrikoun ,.  dirigent  vers  le 
nord  sur  Brun  ou  Berna  en  Moravie  et  je  pense  qu'elles  sont  assez  puis- 
santes pour  y  fixer  la  position  de  Schebrouna.  Cet  emplacement  de 
Sefaebrouna  étant  déterminé ,  il  devient  presque  impossible  d'indiquer 
à  Djikelbourga  la  situation  en  Mdravie,  et  même  au  nord  du  Danube. 
Il  me  semble  très-présumable  que  Djikelbourga  n'est  autre  chose  ^e 
Salzbourg  de  Karintie.  Il  est  vrai  qu'à  cette  présomption  la  distance  de 
80  milles  s'oppose,  car  elle  ne  suffirait  pas  pour  celle  d'Ostrihom  à 
Salzbourg.  Cependant  il  faut  observer  que  presque  toutes  les  mesures, 
milles  ou  journées,  se  présentent  d'une  grandeur  excessive  partout, 
depuis  la  Bavière  jusqu'à  l'embouchure  de  la  Drava.  Aussi  les  journées 
de  Bouza,  que  nous  avons  fixée  sur  Petz  ou  Gin-qéglises ,  sont  exces- 
sives et  demandent  150  milles  :  chaque  journée  double  de  50  milles. 
Mais  quant  à  ces  dernières  distances  de  5  journées,  on  pourrait 
présumer  que  l'exorbitance  des  journées  prend  peut-être  sou  origine 
dans  rincertitude  de  la  lecture  des  chiffres  :  car,  si  on  lirait  au 
lieu  de  ^  5  journées,  ^  Sjournées^on  n'aurait  à  compter  que  de 

(59)  L*appelIatiou  est  purement  ilate  :  ostri-bom,  sommet  fortifié,  oo  monticule  pointue. 


154  EDRIST. 

petites  journées,  des  journées  ordinaires  de  20  milles,  pour  avoir  de 
Bouza  à  Schebrouna  et  à  Djikelbourga  les  160  milles  nécessaires. 

Schebrouna  (Brun,  situé  presque  au  confluent  de  deux  rivières)  est 
éloigné  40  milles  du  Danube  et  20  milles  d'un  autre  fleuve  de  la 
Bohème.  Ce  fleuve ,  auquel  Edrisi  relate  la  situation  de  la  ville ,  doit  se 
trouver  désigné  par  sa  description.  En  effet,  ailleurs  Edrisi  raconte  que 
deux  rivières  prennent  leur  source  dans  la  Bohême,  et  après  avoir 
coulé  vers  le  sud-ouest,  vont  se  jeter  dans  le  Danube.  Elles  descendent 
des  montagnes  sJl^'^^  Balavat,  qui  séparent  la  Bohême  delà  Pologne. 
Après  avoir  coulé  séparément,  elles  se  réunissent  et  versent,  comme 
nous  rindiquons,  leurs  eaux  dans  le  Danube.  Les  villes  d'Agra  et  de 
Biths  sont  bâties  sur  leurs  bords  (p.  576).  Réellement  la  rivière  Arva, 
Orava,  Oraviiza,  descend  de  la  montagne  karpatienne,  nommée  lalovek, 
Balavat  {yZ^\Jj  lalavat),  qui  sépare  la  Pologne  de  la  province  bohème 
Yag.  Elle  coule,  de  même  que  la  rivière  Vag,  vers  le  sud-ouest  et  se 
réunit  à  cette  dernière  qui  porte  ses  eaux  dans  le  Danube.  Cette  rivière, 
ce  fleuve  important,  donnant  son  nom  de  Vag  à  toute  la  province,  se 
rapproche  à  20  milles  de  Brûu. 

C'est  juste.  Mais  la  conception  d'Edrisi  est  évidemment  confuse  sMl 
range  Biths  et  Agra  sur  les  bords  de  ce  fleuve.  Il  est  contrarié  par  la 
carie  itinéraire  dont  il  donne  la  description.  Elle  place  ces  villes  avec 
Neitrem  entre  les  rivières  venant  de  Balavat  (Karpates),  vers  le  Danube, 
par  conséquent  dans  Tintérieur  d'une  mésopotamie.  Il  y  a  en  effet 
plusieurs  rivières  :  Neitra,  Cran,  Ipola  qui  coulent  dans  la  même  direc- 
tion que  le  fleuve  Vag  ;  c'est  entre  ces  rivières  qu'il  faut  chercher  la 
situation  de  plusieurs  villes.  Mais  la  confusion  d'Edrisi  va  plus  loin  et 
ne  s'accorde  guère  avec  la  carte  itinéraire;  car  ces  villes  nommées 
soiR  assez  éloignées  de  Vag  et  trop  dispersées  dans  la  mésopotamie 
pour  se  trouver  ensemble  entre  les  rivières  de  la  direction  sud-ouest. 
11  est  probable  qu'il  nous  serait  impossible  de  sortir  de  toutes  ces  diva- 
gations, si  les  noms  de  Neitrem  et  d'Agra  ne  nous  rassuraient  que  l'un 
est  Nitria ,  Neuira,  l'autre  Erlau ,  en  latin  Agria,  chez  les  Slaves,  lager, 
et  chez  les  Hongrois  Eger. 

54.  Neitrem ,  suivant  Edrisi,  est  à  40  milles  au  sud  d'Agra  (p.  576), 
quoique  ces  deux  villes  sont  presque  à  la  même  hauteur  :  Nitria  à 
l'occident ,  quelque  peu  plus  septentrional.  De  Neitrem  à  Bouzana  et 
à  Bedhvara,  également  70  milles  en  se  dirigeant  vers  le  nord  ou  nord- 
est  (p.  578).  C'est  tout  le  contraire.  Bouzana  (Boudzin,  Bouda)  sur  le 
Danube ,  à  55  milles  de  Belgraba  (Alba  regalis),  est  au  sud-est  de 
Neitrem;  et  Bedhvara  (Voukovar),  placée  sur  le  Danube,  à  double 
distance,  de  même  au  sud-est. 


BOEMU,    54.  455 

Sur  le  Danube  ^  trouve  Bassan  ou  Massan ,  à  80  milles  vers  le  sud- 
ouest  d*Âgra  (p.  577)  ;  80  milles  vers  le  sud-est  de  Scbebrouna  et  40  vers 
Torient  d*Ostribom  (p.  572)  qui  est  à  80  milles  au  sud  de  Scbebrouna. 
Prenons  ici  partout  le  sud  pour  le  nord,  et  Forient  pour  Toccidcnt,  et 
nous  nous  trouverons  avec  Bassan  à  Presbourg ,  cbez  les  Slaves  Prespo- 
rek  et  cbez  les  Hongrois  Poson,  situés  sur  le  Danube.  Je  ne  vois  pas 
d^autre  issue  à  tant  de  farfouillement. 

Quant  à  Bitbs ,  la  question  est  encore  plus  obscure.  Bitbs  est  située  à 
40  milles  vers  le  sud-est  de  Neitra,  sur  le  même  fleuve  qu*Agra  (p.  576, 
577).  Il  en  résulterait  que  Bilhs  est  dans  le  même  canton  qu^Agra , 
rapprocbée  aux  mêmes  rivières  qui  se  perdent  dans  le  Danube ,  placée 
presque  à  la  même  distance  de  Neitren  comme  Agra.  On  pourrait  pro- 
poser une  multitude  d'hypotbèses  pour  cette  position ,  parce  quUl  ne 
manque  pas  sur  tous  les  points  de  la  Hongrie ,  des  noms  analogues  à 
Bitbs.  Mais  aucun  de  ces  Bitbs  ne  répondrait  aux  deux  conditions 
relatives  à  Neitra  et  Agra.  La  petite  rivière  Agria,  qui  se  jette  dans 
Teisse,  n^offre  aucune  place  pour  une  autre  ville;  il  faut  absolument 
écarter  cette  condition  du  même  fleuve  pour  Agra  et  Bitbs. 

Agra  et  Bitbs  se  trouvent  tous  deux  (de  même  que  Neitra)  dans  un 
pays  où  les  rivières  coulent  dans  la  même  direction ,  et  les  villes  de  ce 
pays  se  trouvent  sur  les  mêmes,  c'est-à-dire  entre  les  mêmes  rivières. 
Ainsi ,  je  pense  qu'à  40  milles  sud-est  de  Neitra ,  nous  nous  trouvons 
très-bien  avec  Bitbs,  sur  les  bords  du  Danube,  dans  Voczen,  Yazia 
Waitzen  et  insula  Yizze,  non  loin  à  Test  de  Temboucbure  d'ipola.  La 
rivière  Zagyva  roule  ses  eaux  vers  le  midi,  à  égale  distance  d'Agra  et  de 
Bitbs.  Ainsi  Bitbs  comme  Agra  se  trouve  sur  les  frontières  de  Bobéme. 

Tout  cela  est  la  Bobéme,  la  province  Vag,  dépendance  et  possession 
hongroise,  dont  Osiribom  est  la  capitale;  séparée  de  la  Hongrie  par 
Teisse ,  Bodrog  et  Toplia,  frontière  avancée  vers  la  ville  Ungwar  (Mon- 
tir,  Manbou),  qui ,  dans  le  point  d'Onkaria  culminant  au  nord ,  toucbe 
la  limite  scabreuse  de  la  Pologne  et  de  la  Russie.  Pologne ,  Russie , 
Hongrie,  Bobéme  s'appointent  entre  les  villes  frontières  Ungwar  et 
Galis. 

De  Bassan  (Poson),  voisine  d'Ostrihom ,  et  de  Bitbs  voisine  de  Nei- 
trem,  également  vers  le  nord,  à  5  journées  ou  150  milles,  se  trouve 
Masela,  Mascbela,  Mascbesala,  ville  agréable,  entourée  de  vastes  et  fer- 
tiles dépendances  et  ceinte  de  fortes  murailles  (p.  577  ,  578).  Elle  est 
rapprocbée  à  la  Saxe,  à  l'Allemagne,  considérée  même  pour  une  ville 
de  Sasonia,  éloignée  de  Halla  80  milles,  et  de  Kazlaza  (Saalfeld) 
100  milles  (p.  575,  581  ).  Ces  distances  nous  poussent  forcément  dans 
le  centre  de  Bobéme  proprement  dite. 


456  EDRISI. 

55.  Daos  la  description  éparpillée  des  tableaux  coupés  par  sections, 
Edrisi  reprend  sans  cesse  ses  courses  interrompues ,  pour  continuer 
ou  achever  ce  qu'il  avait  commencé;  il  se  répète  et  s'égare  dans  ce 
dédale  de  routes,  au  point  d'oublier  les  provinces  et  les  places  les  plus 
importantes.  C'est  ainsi  qu'il  parle  des  Iles  de  mer ,  des  possessions, 
des  conquêtes  des  Vénitiens ,  qu'il  travarse  en  observations  les  localités 
de  leur  lagune,  et  la  ville  capitale  elle-même,  Venise,  se  dérobe  à  sa 
diction.  Il  serait  probable  qu'en  parlant  de  la  Bohême ,  content  du 
chef-lieu  d'une  des  provinces,  il  a  passé  sous  silence  sa  capitale  Praga. 
Cependant ,  les  quatre  distances  «opposées  s'appointant ,  nous  ont  en- 
foncé dans  le  centre  de  la  Bohême  proprement  dite,  qui  relevait  de  la 
Saxe  ou  du  royaume  d'Allemagne,  et  nous  enferment  dans  une  ville 
bohème  -saxe ,  ceinte  de  fortes  murailles.  Nous  sommes  donc  forcés 
d'assigner  à  Masla  l'emplacement  dans  la  Bohême,  et  à  cet  effet,  à  mon 
avis,  aucune  ville  ne  répond  mieux  que  la  capitale  Praga.  Pourquoi  son 
nom  est-il  remplacé  par  un  autre,  par  celui  de  Masla  ?  je  ne  saurais  le 
dire,  je  ne  sais  former  aucune  hypothèse  géographique  pour  l'expli- 
quer, mais  je  n'y  vois  rien  qui  conviendrait  à  Masla,  que  la  seule  Praga. 
Cette  capitale  était  forte  et  commerçante,  avait  des  marchés,  de 
grandes  foires;  en  allemand  jahrmark,  messe,  messel.  Peut-être  que  les 
marchands ,  qui  donnaient  des  renseignements,  étaient  habitués  de 
nommer  Praga  par  ses  messe  (eo). 

Edrisi,  en  parlant  de  Bohême,  s'était  écrié  avec  une  certaine  indigna- 
tion :  tout  ce  pays  appartient  à  l'Allemand.  C'est  lui  qui  perçoit  les  im- 
pôts, qui  veille  à  la  sûreté  publique,  qui  gouverne  à  sa  volonté ,  duquel 
émanent  les  ordres  suprêmes ,  qui  nomme  et  dépose  les  agents  de  son 
autorité,  sans  que  personne  ose  s'y  opposer  ni  enfreindre  ses  lois  (p.  571). 
A  rinstant  même  il  s'occupe  d'Ostrihom ,  chef-lieu  de  la  Bohême  qui 
était  le  siège  du  gouvernement  des  Hongrois  Magyars.  Il  y  aurait  donc 
en  apparence  de  doutes,  qu'il  avait  l'intention  de  signaler  la  sujétion 
des  Magyars  à  l'Allemagne.  Serait-il  possible  pour  nous  d'y  consentir? 

On  sait  que  depuis  cent  ans  la  Hongrie  s'était  émancipée  de  l'in- 
fluence directe  de  l'Allemagne,  qui  lui  a  d'abord  imposé  le  christia- 
nisme de  l'empire.  Anno  1055  romana  respublica  subejctionem  regni 
hungariœ  perdidit  (Wibert,  vita  scti  Leonis,  II,  4).  Depuis,  la  Pologne 
sous  Boleslav-le-hardi ,  veillait  à  l'indépendance  de  la  Hongrie.  Le 

(60)  On  a  dans  la  haute  Sflésie  an  Tillage  Hassel ,  Maslova ,  situé  ;à  i  milles  de  Bresla^.  On  y 
trouTe  dans  son  terrain  sablonneux  quantité  de  dépouilles  humaines  et  des  antiquités ,  de  menues 
reliques  qui  s'y  rattachent.  Pas  de  doute  que  ce  lieu  avait  quelque  importance  |du  temps  anti'Chié- 
Uen  ;  mais  aucune  de  temps  postérieurs  connus  par  Thistoire ,  ni  commerce ,  ni  murailles,  ni  quel* 
que  qualité  que  ce  soit  qui  répondrait  à  Masela  édrisienne. 


POLOMUy   56.  157 

pape  Grégoire  YH,  en  1074,  fulmine  le  roi  Salomon  :  tu  a  regia  virtute 
et  moribus  longe  diicedens  jm  et  Iwnorem  a  rege  teutonico  in  beneficium 
skut  audivimus  suscepisti  (epitr.  II,  13).  Salomon  fut  en  effet  dépouillé 
du  trône  par  Boleslav-le-hardi,  occupé  ensuite  par  des  rois  indépen- 
dants. L'écrivain  de  la  légende  hongroise  ,»traçant  Tapologie  de  Boles- 
lav-Ie-bardi  (assassin  d'un  évéque),  et  plein  de  colère  contre  la  noblesse 
remuante  de  Pologne ,  termine  sa  narration  par  Paveu  suivant  :  et 
lieet  essel  lenendum,  tamen,  ne  veritcis  gestorum  obnubilaretur,  Magaro^ 
nés  hoc  est  Ungari  totam  suam  potentiam  (leur  indépendance),  à  Polonis 
habebant  et  extrahebant  et  robore  eorum  semper  pugnarent  (chron.  un- 
gar.  mixta  polon.  cap.  II). 

Edrisi  donne  la  description  de  deux  Bohèmes ,  de  celle  qui  formait 
une  province  de  la  domination  Magyare ,  dont  le  chef-lieu  était  Ostri- 
houn  (de  la  province  Yag  ou  Buhia),  et  de  Ta utre  proprement  dite 
(Tschekhie),  intimement  liée  avec  la  Saxe,  c'est-à-dire  avec  TAllemagne 
dont  il  connaissait  la  ville  Masla  ,  ceinle  de  fortes  murailles.  C'est  de 
cette  autre  que  les  marchands  et  les  voyageurs  pouvaient  relater  à 
Cdrisi  de  quelle  façon  l'Allemand  y  dispose  de  tout.  Lui ,  dans  sa  diction 
embrouillée  ne  les  a  pas  distingué  et  semble  dire  des  Hongrois,  lors- 
que parle  de  la  Bohème  proprement  dite,  où  était  située  la  ville  for- 
tifiée Masla  ou  la  capitale  Praga.  De  Masla  à  Krakov,  ville  de  Pologne , 
il  y  a  150  railles  (p.  581). 

POLONIA.  '^ 

56.  Un  écrivain  de  cette  époque  (1110-1140),  ecclésiastique  en 
Pobgne,  appelé  Gallus,  certainement  arrivé  de  France,  considérant 
^pwd  regio  Polonorum  ab  itineribus  peregrinorum  est  remota  et  nisi 
iranseuntibus  in  Russiam  pro  mercimonio,  paucis  nota  :  entreprend  de 
donner  sa  description  ,  croyant  qu'une  courte  description  ne  sera  pas 
réprouvée  :  si  brevUer  inde  disseratur,  nuUi  videeUur  absurdum. 

Cette  description  est  en  effet  extrêmement  laconique.  Il  y  dit  que 
la  Pologne  compose  la  partie  septentrionale  de  la  Slavonie  ;  touche  à 
Forieut  la  Russie,  au  midi  la  Hongrie,  du  sud-ouest  la  Moravie,  de 
l'occident  la  Saxe  et  le  Danemark;  au  nord,  trois  peuples,  des  pays 
barbares  et  sauvages  la  séparent  de  la  mer;  les  Seleuciens  (Lutices), 
les  Poméraniens  et  les  Prussiens.  Il  ajoute  qu'au  delà  de  la  mer,  d'autres 
pays  barbares  possèdent  les  golfes  et  autres  sinuosités,  où  enfin 
sont  les  îles  inhabitées,  couvertes  de  neiges  et  de  glaces  perpétuelles. 
Il  divise  toute  la  Slavonie  en  trois  zones  ;  septentrionale  (Pologne), 
çui  6*éteQd  dès  Sarmaticos  ou  Getes  (Prussiena)  jusqu'à  la  Dace  (Dane- 


158  EDRISI. 

mark)  et  la  Saxe  ;  Taulre  depais  la  Trace  (Romanie) ,  traverse  la  Hon- 
grie, où  les  Huns  Hongrois  Toccupent,  puis  par  la  Karintie,  et  se  ter- 
mine sur  la  Bavière  ;  méridionale  (la  troisième)  touche  la  méditerran- 
née  (Adriatique),  commençant  de  TEpire,  passe  par  la  Dalmatie,  ta 
Kroatie  et  T (strie  jusqu'à  la  On  de  la  mer  Adriatique ,  où  sont  Venise  et 
Aquilée,  et  l'Italie  la  clore. 

Enfin  cette  région  peu  connue ,  visitée  seulement  par  la  traverse  des 
marchands ,  quoique  silveuse ,  est  suffisamment  pourvue  d'or  et  d'ar- 
gent, de  pain  et  de  viande,  de  poisson  et  de  miel,  et  supérieure  aux 
autres,  ce  qu'étant  entourée  de  sus-mentionnés  peuples  chrétiens  ou 
payens,  et  par  tous  ces  peuples  conjointement  ou  séparément,  bien  de 
fois  attaquée,  elle  n'a  éié  subjuguée  par  aucun.  Pays,  patrîa,  où  l'air 
est  salubre ,  le  sol  fertile ,  les  forêts  mieilleuses ,  les  eaux  poisson- 
neuses, les  guerriers  belliqueux,  les  paysans  laborieux ,  les  chevaux 
durables,  les  bœufs  labourables,  les  vaches  laiteuses,  les  brebis  lai- 
neuses (Gallus,  cliron.  Polon.  proem.  p.  14-17). 

Voici  à  quoi  se  réduit  toute  la  tirade  de  Gallus.  Il  dit  que  la  Pologne 
n'était  connue  à  cette  époque  que  de  peu  de  gens  qui  la  traversaient; 
mais  il  y  a  quelque  chose  à  redire  contre  cette  assertion.  Admise  par  le 
baptême  a  la  société  des  états  chrétiens,  elle  se  faisait  connaître ,  lors- 
qu'on 992  les  princes  expulsés  avec  leur  mère ,  allaient  offrir  au  pape 
le  pays  qu'ils  ne  possédaient  plus  (Murator.  antip.  fiai,  medii  sévi ,  t.  V, 
p.  851)  ;  lorsque  les  émissaires  de  Boleslav-le-grand  circulaient  en  Lor- 
raine, en  Italie,  fomentant  le  marquis  d'Ivrea  au  pied  des  Alpes  et  le 
pape  à  Rome  contre  l'empereur  roi  d'Allemagne  (Ditmar,  VI,  56,  et 
passim);  lorsque  le  même  Boleslav-le-grand  en  1018 ,  forçait  l'empire 
à  conclure  la  paix  honteuse  à  Bautzen  et  se  fit  donner  un  contingent  à 
TAllemagne  contre  ses  ennemis  (Ditm.  VIII,  1,  16,  p.  861;  annal, 
quedlimb.  sub.  a.  1029  ,  t.  III,  p.  81,  édit.  Pertz);  lorsque  Boleslay-le- 
hardi,  secondé  par  Grégoire  VII,  assura  l'indépendance  de  la  Hongrie 
(epist.  Gr^.  VII  pape,  11 ,  15, 65,  70;  chron.  Ungaror. mixta  Polonor), 
et  les  moines  de  St -Gilles  en  Provence ,  recevaient  de  Vladislav  Herman 
en  1084,  les  statuettes  d'or  fabriquées  en  Pologne  (Gall.  1 ,  50,  p.  4^). 

Gomment  un  pays  néophyte  pouvait-il  être  aussi  peu  connu?  Quantité 
considérable  d'apôtres,  multitude  d'ecclésiastiques  inondaient  laPologne; 
voir  les  suites  des  évêques  pour  la  plupart  Italiens  ou  Français,  les 
légats  des  papes;  l'écrivain  Gallus  lui-même  a  vu  eu  1105  l'évéque  de 
Beauvais  venant  en  cette  qualité  (Gallus,  II,  âl,  p.  188);  lui-même  a  va 
un  autre  Gallus ,  constructeur  de  places  fortes  (Gall.  II,  59,  p.  214). 

L'empereur  Otton  III  visita  dans  l'année  1000  la  cour  de  Boleslav- 
le-grand ,  accompagné  d*une  foule  de  ligueurs  (Ditm.  IV,  20;  Gall.  I, 


POLONIA,  57.  i5d 

6,  p.  58-43).  Plusieurs  reines  en  Pologne  étaient  allemandes,  dont  une 
passa  ses  dernières  années,  jusqu^en  i0â5,  à  S.  Gall  en  Suisse  (annal, 
quedlimb.  t.  III ,  p.  88,  édit.  de  Pertz)  ;  Tautre ,  fameuse  par  son  règne 
et  ses  donations,  morte  en  i068  à  Brunviller,  aux  environs  du  Rhin 
(vita  Ezonis  et  Richezae  cap.  5,  etc;  annal,  brumvillar.  t.  II,  p.  100, 
édit.  Pertzi;  Lacomblet  Urkunden  ,  p.  18i,  186.  189,  192,  244,  457). 
Des  seigneurs  allemands  mécontents,  trouvaient  un  abri  en  Pologne , 
des  ambassadeurs  et  envoyés  de  l'empereur  Henri  II  y  allaient  traiter; 
les  irruptions  des  Polonais  pénétraient  dans  le  cœur  de  la  Saxe ,  et  la 
renommée  porta  leur  nom  jusque  vers  Aix-la-Chapelle  et  la  Lorraine 
(interpolator  Ademari,  ad  III,  51,  t.  IV,  p.  150,  édit.  Pertz).  Dans 
toute  cette  étendue  de  Tempire,  à  Korvei,  Merzebourg,  Quedlimbourg, 
Hildesheim ,  Fulda ,  des  événements  arrivés  en  Pologne  étaient  insérés 
dans  des  cartulaires  le  jour  même  que  la  nouvelle  arrivait;  des  nécrolo- 
guesqu*on  y  soutenait  dans  les  couvents,  la  Pologne  apprend  ses  faits 
d'armes  de  Tépoque.  Elle  était  assez  connue ,  du  moins  en  Allemagne 
et  en  Italie.  Il  faut  cependant  convenir,  que  noyée  dans  la  qua- 
lification générale  des  Slaves,  elle  est  rarement  nommée  dans  de  mai- 
gres monuments  géographiques.  Ses  événements  sont  rapportés  par  de 
courtes  notices,  et  comme  ces  siècles  ne  s'adonnaient  guère  aux 
descriptions  des  pays,  elle  est  négligée  plus  qu'aucun  pays. 

57.  Des  Allemands  qui  s'entretenaient  de  l'histoire  de  la  Pologne, 
^dam  de  Brème (hist.  eccles.),  notifia  sa  position,  et  Helmold  deBozov 
«n  1175,  reproduisant  les  paroles  de  son  prédécesseur,  déplore  la  dis- 
position des  Polonais  à  la  rapine  (chron.  Slav.  1 .  1 ,  §  9 ,  10).  Vers  le 
même  temps.  Benjamin  de  Tudèle ,  dans  son  voyage  fictif  entre  1160 
et  1175  ne  Ta  pas  nommé.  Il  connaît  le  pays  de  Otx^2  Bohême  appelé 
nSK'lB  Praga,  qui  est  le  commencement  de  x^^n^p^^N  l'Esklavonie, 
^ue  les  juifs  qui  y  habitaient  appelaient  ]y^^  Kanaan,  à  cause  que  les 
habitants  vendaient  leurs  fils  et  leurs  filles  à  toutes  les  nations,  de 
même  que  ceux  de  x^d^"^  Russie,  qui  est  un  grand  royaume,  s'étendant 
depuis  la  porte  de  Prague  jusqu'à  la  porte  de  ^^  Pin  ou  Fin ,  cette 
^ande  ville  (citée ,  état),  qui  est  à  l'extrémité  du  royaume.  C'est  jusque 
là  que  s'étend  le  royaume  de  Russie  (p.  246  de  l'édit.  de  Baratier). 
La  Russie  s'étendait  donc  depuis  la  porte  ou  les  frontières  de  Bohème 
(Praga),  jusqu'aux  portes  ou  frontières  des  Finnois,  de  la  race  finnoise. 
En  effet ,  nous  l'avons  vu  :  la  Bohème  s'étendant  avec  sa  province  Yag» 
au  sud  des  Karpates,  touchait  aux  environs  des  sources  de  Cepla,  à  la 
province  russienne  où  était  Galis  et  Przemisl,  rapproché  aux  sources  du 
Dniester,  comme  nous  le  verrons. 


1 60  BDRISI. 

11  De  faut  pas  s'étonner  que  Benjamin  et  ses  co-religionnaires  savaient 
da  commerce  des  esclaves.  Lorsque  les  Bohèmes  vendaient  les  prison- 
niers qu'ils  emmenaient  de  Pologne,  lorsqu'on  1160,  les  Pomoraniens 
vendaient  aux  Polonais,  aux  Sorabes  et  aux  Bohèmes  les  malheureux 
Obotriles  qui  cherchaient  chez  eux  un  refuge,  fuyant  le  joug  allemand 
(Helni.  Il ,  5),  c'était  un  véritable  trafic  des  enfants  slavons.  Les  juifs,  • 
regardant  Tunité  de  la  race ,  ne  pouvaient  dire  autrement,  et  ne  pas 
négliger  d'en  tirer  leur  profit.  La  mère  de  Boleslav-bouche-torse,  la 
reine  Judith,  morte  en  1085,  racheta ,  autant  que  ses  moyens  le  lui 
permettaient,  grand  nombre  de  chrétiens  de  la  servitude  juive  (Gall. 
II,  1 ,  p.  151),  puisque  les  juifs  profitaient  de  ce  trafic,  et  rien  ne  les 
empêchait  encore  d'eu  tirer  tous  les  avantages. 

La  même  année  qui  termine  la  narration  du  voyage  de  Benjamin  1 1 73, 
un  autre  juif,  Petakhia  deRatisbonne,  se  mit  en  route  vers  l'orient. 
Il  vint  en  premier  lieu  à  n^dhid  jH^^B  P'^^ig  ^^  Bohemia,  d'où  (dit  le 
narrateur  de  son  voyage  louda  Khasid)  x\3lSlDb  JJDi  HfiOBpi  il  va  en 
^X^D1")3K^  DVdS  X^^I^pIBDI  îl  va  en  Pologne ,  et  de  la  Pologne  à  Riior 
(sibbub  h'oiam ,  public  par  Garmoly,  p.  9). 

Les  juifs  et  les  Allemands,  voyageant  à  leur  aise  dans  tonte  la 
Pologne,  s'y  casaient  avec  sécurité,  mais  les  avenues  furent  difficiles 
par  les  armes  des  Allemands. 

En  1109,  inspiré  par  Zbigniev,  l'empereur  Henri  Y  entreprit  une 
expédition  eu  Pologne.  Il  remua  toutes  les  armées  de  l'Allemagne.  Les 
Bohèmes  étaient  leur  guide  (Gall.  III,  3,  p.  257)  et  le  conduirent  en 
Silésie  vers  Glogov;  ensuite  il  pénétra  jusqu'à  Yrotsiav,  d'où  s'évadant 
de  son  camp  de  chiens  (llundsfeld),  il  retourna  par  la  Bohème  dans  ses 
foyers  (Gall.  111,2-15). 

Cinquante  ans  après,  en  1157,  non  sans  difficulté ,  avançait  vers 
l'Oder  avec  sa  puissante  armée ,  Frédéric  Barberousse.  On  savait  par 
tradition ,  que  les  armées  de  l'empire  passaient  jadis  ce  fleuve ,  mais  le 
souvenir  s'en  était  perdu.  En  Mfet,  Frédéric  pénétra  dans  le  diocèse  de 
Poznan  et  à  la  grande  allégresse  de  ses  guerriers ,  recula  à  pas  préci- 
pités (Frederici  eptla  ad  Wibald.  abbat.  in  momum.  vet.  Idart.  et  Du- 
vandi,  t.  H,  p.  393;  Radevici  vita  Frider.  I,  1-5).  Ces  expéditions 
furtivement  terminées ,  ne  pouvaient  suffisamment  faire  connaître  la 
Pologne  aux  étrangers,  leur  séjour  paisible  était  plus  à  même  de  don- 
ner les  renseignements  nécessaires  à  Roger  roi  de  Sicile  et  à  ses 
géographes. 

58.  Edrisi  revient  deux  fois  sur  la  Pologne  (p.  580 ,  389).  La  Pologne, 
dit-il ,  est  un  pays  remarquable  par  le  nombre  des  savants  qu'il  ren- 


POLONU,  58.  161 

ferme.  Beaucoup  de  ^^\  Romains  (ei),  amateurs  des  sciences,  y  sont 
irenus  de  toutes  parts.   Ce  pays  est  florissant  et  peuplé,  ceint  de  tous 
côtés  par  des  montagnes ,  qui  le  séparent  de  la  ^|y  Bohême,  de  la 
6^yA^  Sassonia  et  de  la  fwji  Roussie.  L'une  de  ces  villes  les  plus 
importantes  est  JitJ  Krakal  (Krakov),  remarquable  par  le  nombre  de 
fies  édifices  et  de  ses  marchés,  de  ses  vignobles  et  de  ses  jardins  (p.  9^). 
—  Pologne,  pays  de  la  science  et  des  savants  Roums,  est  fertile,  sillonné 
de  cours  d'eau ,  couvert  de  villes  et  de  villages.  La  vigne  et  Tolivier  y 
croissent,  ainsi  que  toute  espèce  d'arbres  à  fruits.  Ses  villes  principales 
sont  toutes  belles,  florissantes  et  célèbres,  particulièrement  en  ce 
qu'elles  sont  habitées  par  des  hommes  versés  dans  la  connaissance  des 
sciences  et  de  la  religion  roum,  et  par  des  ouvriers  habiles  autant 
qu'intelligents.  Krakal,  Djenazia  et  les  autres  villes  sont  remplies 
d'habitations  contigues ,  présentent  beaucoup  de  ressources  et  se  res- 
semblent singulièrement  entre  elles,  sous  le  rapport  de  l'étendue  et 
de  l'aspect;  les  objets  qu'on  y  fabrique  sont  à  peu  près  tous  de  même 
nature.  Cette  contrée  est  séparée  de  la  Saxe ,  de  la  Bohême  et  de  la 
Aussie,  par  des  montagnes  qi/i  Tenvironnent  de  toutes  parts  (p.  589). 
Il  ne  manquait  pas  d'instruction  à  la  Pologne  de  celte  époque  reculée. 
Cent  ans  auparavant,  vers  1030,  Karimir  fut  placé  par  Mieczislav  II  et 
iiixa  ses  parents,  dans  un  couvent  poury  recevoir  Tinstruction  (Gallus, 
1 ,  21 ,  p.  98),  avant  d'aller  continuer  ses  éludes  à  Liège ,  d'où  il  sortit 
<«n  homme  lettré  ou  savant,  h(ymo  litteralus  (Gall.  I,  19,  p.  92).  Le 
clergé  était  appelé  à  soutenir  les  écoles.  Un  autre  prince  royal,  Zbigniev, 
adulte,  fréquenta  l'école  à  Krakov,  in  Craeovia  lileris daltts  /utï,  ensuite 
«sa  marâtre  l'envoya  dans  un  couvent  de  Saxe  (Oall.  H,  4,  p.  139),  où  il 
-se  forme  en  bon  rhétoricien,  ul  lUeratus  rheiorice  coloravU  (GaJl.  II,  16, 
p.  163).  Des  étrangers  lettrés  venaient  s'y  établir  :  Mirzva,  anglo-saxon, 
TerslOS5,  apportant  les  historiens  de  son  pays  (Dlugoss.  clcnod.  msclpi. 
p.  5;  Paprocki  gniazdo  enoty,  p.  506,    herby  rycerstwa,  p.   462); 
iîallus  arrivait  pour  écrire  l'histoire  des  événements  dont  il  était  té- 
moin. A  la  cour  on  aimait  la  lecture.  A  cet  efiet,  on  rédigeait  en  latin 
tes  événements  du  jour,  pour  les  translater  oralement  en  langue  vul- 
gaire (Gall.  m,  p.  243),  et  au  nombre  du  clergé  de  la  cour,  nous 
voyons  l'écrivain  Gallus  que  nous  avons  mentionné ,  dont  l'ouvrage 


(€1)  le  ne  comprends  pas  pourquoi  le  savant  traducteur  s*cst  décide  de  rendre  les  Roumc  >a. 
par  Grecs.  Pourquoi  ne  s*cst-il  rappelé  comment  Edrisi  qualifia  quelques  pages  précédentes  '  les 
«tants  résidants  à  Banssin,  qui  sont 
Pologne  soia  les  iatins.  Ils  y  sont  veous 
«eax-ci  aous  avons  Texplication  ,  mais  pour  les  Grecs  aucune. 

III,  ii 


eie  commeni,  carisi  quaiiua  quelques  pages  preceaenies  '  les 

..••^  j^l  (p.  577],  Graïkioun  ,  Grecs.  Or,  les  Ronm«  ea 

us  de  toutes  parts,  de  Tltalie,  de  France,  d'Allemagae.  Pour 


4^3  BDRISI. 

historique ,  décoré  de  la  verbosité  poétique ,  enduit  de  la  couleur  apo* 
iogétique ,  est  un  des  plus  remarquables  entre  autres  contemporains. 
Otton,  ensuite  évéque  de  Bamberg,  apprit  la  langue  vulgaire  pouf 
diriger  une  école  à  Krakov  (Sefridi  vita  Scli  Otlonis,  cap.  7). 

A  Amalfi ,  dans  les  domaines  du  roi  Roger,  on  avait  fait  avec  grand 
fracas  la  découverte  des  digestes  romains  :  en  quelques  années,  leor 
copie  se  trouva  en  Pologne  et  empoula  Térudition  extraordinaire  de 
rbistorien  Matthée,  évéque  de  Krakov  (voyez  sa  chronique,  liv.  II  et  Itif. 
Ce  sont  quelques  exemples,  que  les  études  du  siècle  furent  cultivées 
en  Pologne  et  que  les  Italiens  pouvaient  informer  la  curiosité  du  roi 
Roger  et  d'Edrisi. 

La  Pologne,  bien  que  pleine  de  forêts,  possède  des  villes  renommées , 
bien  bâties,  commerçantes,  industrieuses,  où  les  arts  et  les  métiers 
sont  cultivés  avec  plein  succès.  Nous  nous  entretiendrons  plus  bas 
sur  cette  industrie  et  spécialement  sur  le  commerce.  Quant  à  la  culture 
du  pays  et  aux  produits  des  jardins,  il  y  a  peu  de  motifs  de  s'y  arrêter 
longtemps.  Edrisi  parle  de  la  culture  de  vignes  et  d'oliviers.  En  effet, 
dans  le  pays  nouvellement  baptisé  on*  s'efforçait  à  planter  les  vignes. 
Le  clergé  encourageait  ces  efforts  pour  qu'il  ne  manquait  à  l'autel  du  vin 
pur  cultivé  sur  le  lieu  même.  Otlofn  de  Bamberg ,  ayant  converti  les  Po- 
méraniens,  planta  les  vignes  sur  les  bords  de  la  Baltique  (Siefr.  vita  scti 
Otton).  En  Pologne,  jusqu'au  xV"  siècle,  on  rencontre  des  mentions  de 
vin  fabriqué  des  vendanges  du  pays ,  vin  très-acidulé ,  qualifié  dans 
les  documents  de  vin  aigre.  11  est  bon  de  remarquer  cependant,  q«e 
vignes  et  vignobles  sont  si  familières  à  la  description  d'Edrlsi  et  repa- 
raissent si  souvent  dans  différents  pays,  à  tel  point  au  nord,  qu'il  est 
difficile  de  se  rendre  compte  de  ce  qu'il  s'imaginait  par  leur  prétendue 
culture.  Quelque  tiges  de  raisin  remarquées  dans  un  jardin  par  des 
voyageurs,  suifireul  peut-être  à  convaincre  la  curiosité  des  géographes 
de  la  cour  de  Roger,  sur  la  culture  du  vin.  Quant  à  l'olivier,  dans  de       ^ 
jardins  de  Pologne,  une  observation  analogue  pouvait  assez  facile-     — 
ment  égarer  l'imagina  tion  des  Siciliens,  qui,  avant  tout,  accablaient.^^ 
chaque  voyageur  de  questions  comparatives  avec  ce  qu'ils  connaissaient.^^ . 
et  possédaient  dans  leur  propre  pays.  Au  reste ,  il  suffît  de  remarquecsK:  i 
que  les  informations  qu'Edrisi  avait  des  produits  de  la  Pologne,  viennenir^  ^i 
de  jardins  visités  par  des  étrangers ,  et  la  relation  de  Gallus  voit 
campagnes,  la  culture  et  l'abondance  du  pays  entier  qu'il  avait  sou 
ses  yeux. 

59.  Tous  les  deux,  Gallus  et  Edrisi,  s'accordent  que  la  Pologne  es/ 
entourée  par  la  Saxe,  la  Bohême  et  la  Russie;  Gallus  spécifie  encore  /^ 


Hongrie  et  k  Danemark;  Edrisî  sait  aussi  que  h  Hongrie  atteint  les 
frontières  de  Pologne  et  sa  carte  itinéraire  étend  la  PoI<^e  jusqu^au 
Danemark.  Gaiius,  ses  contemporains  d'Allemagne  et  les  historiens 
postérieurs  de  Pologne,  nous  expliquent  ce  Toisinage  immédiat  de  la 
Polc^e  avec  lé  Danemark.  Après  la  sujétion  de  la  Pomeranie,  Bi^eslav- 
bouche-torse,  vers  l'an  ilâi,  prit  possession  de  tout  le  littoral  des 
Lntices,  qui  s'éclipsèrent  à  tout  jamais  ;  il  se  mit  à  la  fois  en  possession 
de  nie  de  Roughia  (Sefridi  vita  scti  Ott.  40;  Otto  fresing.  Yfl,  19; 
Dregeri,  cod.  pomer.  1. 1,  i,%,  Lunig,  t.  II,  Anhang,  p.  4).  Par  mer  et 
|>ar  terre  il  devenait  voisin  des  Danois ,  car  ces  derniers  occupaient  sur 
le  continent  le  royaume  des  Obotriies.  Les  géographes  du  siècle ,  infor- 
més de  cette  extension,  traçaient  les  limites  de  la  Pologne  sur  les 
[Vootière  du  Danemark,  et  le  nom  de  Pomorania,  englobé  dans  ces 
limites ,  leur  était  inconnu. 

On  chercherait  eb  vain  des  Prussiens,  des  PomoraniensdansEdnsi(ei); 
ceci  n'offre  aucune  difficulté  :  la  Pomoranie  formait  une  dépendance  de 
la  Pologne;  mais  sur  ce  point  d'autres  circontances  fâcheuses  pour 
notre  curiosité  se  présentent.  Regardant  la  carte  itinéraire  (clim.  vu, 
sec.  5,  4),  on  remarque  une  connaissance  de  la  Baltique  peu  commune 
pour  cette  époque,  mais  en  même  temps  une  cruelle  confusion. 
LA  Suède  n'est  pas  placée  à  côté  de  la  Norvège,  mais  vis-à-vis,  sur  le 
<!ontinent ,  ayant  à  la  suite,  vers  l'orient,  la  Finland  et  la  Livonie,  for- 
■nnt  tout  au  sud  de  la  mer  un  parage  continu  sans  golfes.  La  Suède 
tient  la  place  des  Prussiens ,  sépare  la  Pologne  de  la  mer,  située  elle- 
néme  sur  les  bras  du  fleuve  Katlou,  ou  Kalcrlou  qui  sort  de  la  Pologne, 
et»  divisée,  rend  ses  eaux  à  la  mer  par  deux  branches  très-cioignées. 

Un  fleuve  semblable,  sorti  de  la  Pologne,  répond  à  la  Yistule.  Le 
nom  de  jlJaii  Katlou  ou  ^  J33  Katerlou  pouvait  se  former  très-facile- 
ment de  ^JLkd  jLâd  Fisslou ,  Yisla ,  ou  de  JU23  Fitzlou ,  Yisiula,  et  il 
«''y  à  pas  de  doute  que  ce  fleuve  est  réellement  la  Vistulc  :  seulement 
lâ  Suède  est  déplacée  et  ses  rivières  confondues  avec  la  Yistule.  Nous 
y  Ireviendrons  dans  son  lieu. 

Les  villes  de  la  Pologne  de  cette  époque  sont  connues  par  les  événe- 
ments historiques  et  par  dificrentes  chartes.  Les  événements  de  plu- 
sieurs années,  sont  racontés  par  le  témoin  occulaire  GalIus,  souvent 
avec  de  minutieux  détails.  De  sa  narration  résulte  que  la  Pologne  était 

(<6S)  Le  traducteur,  dans  une  variaute  de  la  p.  368,  à^  ]  ^3  Berania,  voulut  reconnaître  le  nom 
de  Poaiërania  :  mais  une  simple  réflexion,  que  dans  renumération  des  provinces  sar  cette  page  SCS, 
la  Bohème  manquerait,  petft  convaincre,  que  ce  n'est  qu'une  variante  erronée  de  à^  '  aJ  Boemia. 
Dajif  la  même  ^umcratioa,  Karantai-ia  offre  une  variante  erronée  dans  Kaktnkurin 


i64  EDRISI. 

formée  de  plusieurs  régions  distinctes,  dont  la  division  tirait  son  origine 
de  différentes  relations  qui  rapprochaient  anciennement  plusieurs  peu* 
pies.  Les  pays  des  Polauiens  formaient  le  noyau  de  Télat ,  y  compris  les 
pays  de  Sieradz ,  de  Lentschitza ,  Lucia ,  et  de  Kouiavia.  Les  autres 
régions  composaient  des  provinces  à  part.  Mazovie,  administrée  par  on 
gouverneur  ou  duc  ;  Krakovie  avec  toutes  les  terres  appuyées  sur  les 
Karpates,  constituait  une  province  à  part  ;  Yrotslav,  érigée  eu  province, 
tout  le  long  de  FOder,  administrée  par  un  duc  ;  enGn  la  nouvelle  acqui- 
sition de  Pomeranie ,  à  laquelle  il  fallait  bientôt  donner  des  gouver- 
neurs-ducs. En  outre,  quelques  territoires  séparés,  divisés  en  castel- 
lanies,  comme  la  Luzace  et  Lubousch. 

GO.  Quoique  le  pays  des  Polaniens  était  le  noyau  de  Tétat ,  les  deux 
principales  capitales  furent   cependant  choisies  dans  une  province 
extérieure,  plus  considérable  que  la  Pologne,  autant  par  son  étendue, 
que  par  sa  population.  Les  deux  capitales  furent  Krakov  et  Sandomir, 
duœ  sedes  regni  principales  (Gall.  II,  8, 16,  21,  p.  151,  167, 178). 
Chaque  province  avait  aussi  une  capitale  spéciale,  un  chef-lieu  :  Yroti- 
lav  pour  la  province  odérane  (II,  8,  p.  151;  III,  10,  15,  p.  271,  S80); 
Plotzk  pour  Mazovie  (II,  21,  p.  177);  Belgrad  ou  Âlba,  ur6«  r«<)r{ael 
egregia,  quoH  centrum  terrœ  repulalur  chez  les  Pomoraniens  (II,  22, 39, 
p.  179,  215).  Mais  bientôt,  à  la  suite  de  la  réunion  de  la  Pomoranîe 
avec  la  Pologne,  elle  céda  sa  prééminence  à  deux  autres  :  à  Schtschet- 
sine  ou  Stettin ,  et  à  Gdansk  ou  Dantzik.  En  Pologne ,  le  pays  Polanien 
avait  pour  chef-lieu  Gniezno  Gnezdno  sedes  (II,  58,  p.  212);  Tautre 
Krouschvitza,  déchue  de  sa  puissance  (II,  4,  5,  p.  144, 146);  Loutziti 
(Lucie),  ou  Lèntschitz,  sedes  (II,  58,  p,  212),  et  sans  aucun  doute 
Sieradz,  était  du  nombre  des  chef -lieux  de  la  province. 

Edrisi  retouche  quatre  fois  le  dénombrement  des  villes  de  Pol(^ne. 
D*abord  il  en  compte  cinq  (p.  575),  puis  détermine  la  position  de  trois  par 
leurs  distances  (p.  581);  pour  la  troisième  fois  il  en  nomme  six  (p.  589), 
enfin,  parcourant  les  itinéraires,  il  y  ajoute  quelques  autres  (p.  589, 590). 
Il  en  résulte  qu*il  compte,  au  nombre  des  villes  de  Pologne,  les 
suivantes  : 

Jiiji  Krakal,  hj^  Djenazia, 

^bUfiit  ao^lUlij  Benklaîaou  Anklaîa, 
Tijhj^  Serdava,  »j|^  Negrada, 

j:uL  Schitov,  j^]\  Zamiou, 

^^j^  Sermeli ,  Hj  [j^  Soubara , 

A^wttÉ^lg  Galisia, 


POLOHIA,  €0.  465 

Eufin  Js-«y  ^yy^  ^yji  ^^yji  LT^yt  Barmos,  Barmonsa, 
Bermova ,  Barinounia ,  Barmouni ,  (ces  trois  dernières  sont  encore 
mentionnées  (YI,  6,  p.  597). 

La  division  politique  des  états  n*entrait  point  dans  le  plan  des 
géographes  de  Sicile:  cependant  Edrisi  savait,  que  les  villes  princi- 
pales de  la  Pologne  étaient  Krakov  et  Gnezno,  Krakal  et  Djenazîa, 
distantes  de  80  à  100  milles  Tune  de  Tautre,  vers  Forient  (Y[,  3,  4, 
p.  571,  589)  (63). 

Krakov  est  à  100  mille  de  Masla,  à  100  milles  également  de  Hala  et 
de  Nieuzbourg  (Magdebourg)  (p.  581).  Ces  deux  distances  de  100  milles 
méritent  évidemment  d'être  au  moins  doublées;  en  même  temps  elles 
nous  préparent  à  ne  pas  retrouver  des  villes  intermédiaires  entre  Hala 
et  Krakov,  abîmées  dans  ces  distances.  Aussi  nous  ne  remarquons  dans 
la  description  d'Edrisi,  aucune  ville  dé  la  province  étendue  le  long  de 
l*Oder,  niBreslau  même,  ou  son  chef-lieu  Vrolzlav,  ni  Glogov,  ni  Opolé, 
mi  rien  qu'on  rencontre  dans  la  direction  de  Krakov  à  Hala  et  Magde- 
liourg.  Les  relations  des  commerçants  y  ont  passé  outre.  Ces  relations 
apportaient  maintes  fois  de  petits  détails,  des  noms  moins  célèbres  et 
abandonnaient  de  plus  considérables  à  Toubli. 

Serdava  ou  Seradava,  est  évidement  Seraz,  Seradz,  sur  la  roule  de 
Krakov  à  Gnezno. 

Negrada  offre  le  nom  de  Novogrod,  inconnu  à  la  Pologne.  La  Pomo- 
ranie  seule  fournit  ce  nom  dans  une  ville  de  peu  d'importance,  mais 
située  près  de  deux  autres  qui  furent  renommées  par  leur  commerce 
continental  et  maritime.  11  est  bon  de  remarquer  que  Negrada  a 
pu  se  former  très-facilement  de  Belgrada ,  qui  désignerait  la  capitale 
pomoranienne  de  Belgrad,  Âlbaurbs  egregia. 

Schitoa  est  une  des  villes  remarquables  de  la  Pomoranie,  et  il  est 
probable  qu'il  faut  lire  dans  Edrisi  ^^y^  Schitin  ou  ^^y:^  Stsitin , 
Schtscbetzin ,  Stettin. 

61.  Zamiou.  Sans  admettre  le  changement  on  plutôt  la  suppression 
et  la  disparition  de  quelques  lettres  ou  syllabes,  il  est  impossible  de 
donner  une  explication  à  ce  nom.  Cependant  cette  ville  devait  être  assez 
considérable ,  puisqu'elle  se  présente  avant  les  autres.  On  trouve  peut- 
être  ailleurs  sa  variante ,  au  lieu  de  Zamiou,  nommée  y^\\  Zamir,  qui 
confirmerait  que  c'est  le  nom  tronqué  et  contracté  de  Sa-ndo-mir. 

(SS)  Noas  sommes  d'accord  sur  ces  points  avec  le  savant  tradactcur  :  mais  nous  ne  pouvons 
admettre  ses  antres  explications.  Zami/im ,  n'est  pas  Zamosc,  qu'on  a  fondé  dans  le  xvi*  siècle  ; 
SekUkou,  n'est  pas  Eiiov,  car  il  est  ailleurs  nommé  Kev  ;  Benklata,  ne  répond  pas  i  Doukia,  ni  Sou- 
baro,  à  Sievier.  Quant  à  GaUMia,  d'accord,  c'est  Halitsdi,  Galicia. 


166  EDRISl»  6i» 

Benklaîa  el  ses  variantes  Anklaîa  (plutôt  Ab-klaîa),  est  à  60  milles  de 
GnezDO  et  à  100  milles  de  Sermeli  (p.  581 ,  589).  Sans  hésiter,  je  vois 
dans  Nklaïa,  Bklaïa,  Pklaîa,  la  capitale  de  Mazovie  Plotzk  (q4).  Tontes 
les  lettres ,  tontes  les  consonnes  répondent  et  les  distances  de  Gnezno  et 
de  Premisl  à  Plotzk  sont  d'accord  et  me  confirment. 

Sermeli  est  non-seulement  réunie  par  la  distance  avec  Bklaîa 
(Plotzk),  mais  rattachée  par  des  dislances  à  d'autres  localités,  et  sa 
situation  est  bien  déterminée  parce  qu'il  est  dit,  qu'elle  est  la  ville  de  la 
province  a.Lj^  Soubara  (p.  581)  et  située  sur  le  Dniestr  s.i^*.*JJ 
dans  la  partie  septentrionale  du  cours  de  ce  fleuve,  qui  coule  vers 
l'orient  (p.  590).  Or,  dans  le  canton  de  Sambor,  le  Dniestr,  sorti  de  ses 
sources,  prend  la  direction  de  Torient.  Quelques  lieues  au  nord  de  ce 
fleuve  est  la  ville  de  la  province  Presmil,  Prjemisl,  située  sur  la  rivière 
San,  et  c'est  la  ville  nommée  Sermeli,  dans  la  description  d'Ëdrisi. 

De  Sermeli  (Prjemisl),  la  route  de  12  jours  conduit  à  Zaka,  Zana  ou 
Zala  (il  y  a  tant  de  variantes),  ville  située  sur  le  Dniestr,  près  de  son 
emboucbiire ,  puisque  ce  fleuve  des  environs  de  Sermeli  court  12  jours 
jusqu'à  Zana  (VI,  4,  p.  589,  590). 

Zana  ou  Zala ,  avec  le  Dniestr  s'avance  dans  le  pays  où  l^  mpntagoe 
Kard  (Karpate)  tournant  sa  chaîne  vers  le  sud ,  donne  le  commence- 
ment au  fleuve  Tissa  et  sépare  la  Hongrie  de  la  Pologne  (p.  580,  589). 

La  carte  itinéraire  place  Zaka  loin  de  l'embouchure  du  Dniestr  : 
mais  sa  discordance  sur  ce  point  avec  notre  induction,  n'a  aucune 
valeur,  parce  qu'elle  sème  les  villes  de  toutes  ces  régions,  que  noas 
allons  parcourir,  dans  un  désordre  qui  ne  s'accorde  guère  avec  la 
description.  Douze  journées  suflisent  pour  le  cours  entier  du  Dniestr; 
l'emplacement  de  la  ville  Zaka  est  près  de  son  embouchure.  Eniin  de 
trois  variantes  qu'ofl're  le  nom  de  la  ville ,  la  seule  Zaka  peut  trouver 
un  appui  et  certaine  confirmation  par  la  relation  ancienne  de  Constan- 
tin porphyrogenète ,  qui  nomme  parmi  les  villes,  que  possédaient  les 
Patzinaks,  dans  les  ruines  vers  l'embouchure  du  Dniestr,  la  ville  de  Souia 
ou  laxa-iLoLprK  (de  admin.  imp.  57). 

La  carte  itinéraire  place  non  loin  de  Zaka,  au  snd  de  Dniestr,  la  ville 
de  ^^t JC-  Seklasi  (VI,  5).  C'est  la  ville  de  ^Ij^  Seklabî  du 
texte  (p.  597),  qui  ne  donne  aucun  autre  renseignement  de  sa  position. 
La  ressemblance  extrême  de  ce  nom  avec  la  ville  de  Moldavie  Szegalaz, 

(64}  Sur  la  porte  de  bronze  ,  fabriquée  en  illîi,  et  suspendue  dans  la  tzerkicv  de  sainto  Sophie  a 
Novogorod  la  grande  ,  i'créque  de  Plotzk  Alexandre  y  est  représenté  nommé  et  intitulé  episcopas 
de  Blueieh  (Frid.  Adelung,  korsunisclie,  Thiiren,  Berlin,  1833).  Dans  la  confirmation  d'un  couveafc 
ea  115S,  du  pape  Adrien  iV,  Plotzk  est  appelé  Plotiea.  Plus  tard  les  Italiens,  fur  leurs  cartes 
géographiques  écrivaient  ce  nom  PloUAo  (Plotko),  on  Nocenza  du  latin,  plooeiuis. 


rOLONU»  69.  167 

située  au  sud  du  Dnieslr,  sur  le  Kouialnik,  suffit  à  mon  avis  pour  déter- 
miner remplacement  de  Seklahi.  Tout  ce  pays,  sous  la  domination  de 
Pelzeneh»  abandonné  par  les  indigènes  Slaves  Tivertz  ou  Tirivetz,  était 
tin  désert  presque  inhabité  pendant  150  années.  Depuis  que  la  horde 
de  Petzeneh  était  détruite  et  que  la  Polovtzi  se  tenaient  à  Técart  de  ce 
pays,  il  commençait  à  se  repeupler.  L'histoire  connaît  déjà  la  ville  Berlad 
dans  ce  pays  et  sait  que  tout,  jusqu'aux  embouchures  du  Dniestr  et  du 
Danube,  était  sous  la  domination  du  duché  de  Halilsch. 

Galisia ,  nommée  dans  le  texte  (p.  389,  390,  397),  est  placée  sur  la 
carte  itinéraire  au  nord  du  Dniestr,  plus  rapprochée  à  son  embouchure. 
Cependant,  malgré  ce  déplacement,  il  est  évident  que  c'est  Galis, 
Halitsch,  capitale  du  duché. 

62.  Par  la  description  des  montagnes  Kard  et  du  fleuve  Dnieslr, 
Edrisi  prouve  que  les  Italiens  savaient  par  des  relations  de  voyageurs, 
que  le  nom  de  Pologne  s'étend  jusqu'à  la  mer  noire.  Ils  savaient  en 
outre,  que  de  Zaka  à  Bermova,  il  y  avait  180  milles,  de  Bermova  à 
Galisia  200  ;  ils  remarquaient  que  les  deux  pays,  de  Zaka  et  de  Bermova 
appartenaient  à  la  Russie;  ils  avisent  qu'il  faut  mettre  au  nombre  des 
villes  de  la  Russie,  les  villes  de  Sermeli,  Zaka,  Barmounia  et  Galisia 
(p.  389, 390).  En  effet,  dans  le  dénombrement  des  villes  de  Russie,  ils 
nomment  :  Zaka ,  Barmonsa  et  Galisia  (YI,  5,  p.  397),  réservant  Sermeli 
pour  la  Pologne  (p.  375,  381).  Plus  tard  cependant,  Edrisi  mentionne, 
que  Sermeli  est  appelée  ^^  Touia  par  les  Grecs,  observant  que 
même  cette  ville  appartient  à  la  Russie  (VII ,  4,  p.  433)  (es). 

Cette  incertitude,  dans  ce  qui  appartient  à  la  Pologne  ou  à  la  Russie, 
rapportée  par  les  commerçants,  annonce  une  opinion  vulgaire,  popu- 
laire, qui  est  de  la  plus  haute  valeur  pour  l'histoire  et  tient  aune 
quantité  de  données  historiques  antérieures  et  postérieures. 

Sitôt  que  Boleslav-le-grand ,  en  1018,  mit  en  fuite  Jaroslav,  il  fut 
salué  par  tous  les  indigènes  et  honoré  de  leur  hommage;  sitôt  qu'il  entra 
^  Kîioy,  il  donna  congé  aux  contingents  d'Allemagne ,  de  la  Hongrie, 
des  Petzenegs,  préférant  compter  sur  la  fidélité  des  indigènes  (Ditm. 
Vin>  16).  Il  avait  donc  dans  ces  pays  de  nombreux  partisans,  comme  il 
ea  avait  en  Bohême. 

Depuis  ce  temps  là  s'ouvrit  une  luUe  entre  les  Lekhites  et  les  Russes 
(d'origine  Varègue)  dans  toute  cette  étendue  des  terres,  jusqu'au  delà 
du  Dniepr.  Elles  restaient  sans  nom ,  sans  dénomination  arrêtée.  Les 

< 

(<Mi)  Les  grecs  ont-ils  ioterprélé  le  nom  de  Prjemisl  par  leur  Soxi^oSf  ^otaÇ'^i,  délibère  ?  ou 
par  iatoç  pmdens,  pehtusY   . 


i  68  EDRISI. 

étrangers  les  appelaient  Roussia  ;  sur  le  lieu  même,  elles  étaient  distin- 
guées de  la  Russie  et  les  chroniques  russiennes  sont  pleines  de  cette 
distinction.  Halitsch  spécialement  est  excepté  de  la  Roussie  (lietopis 
kiievska,  sous  Tannée  1045,  ap.  Karamzin,  p.  48,  49;  sofiîski  vremian. 
p.  219).  Le  nom  de  Roussia,  apporté  par  la  race  princîère  de  Rourik* 
ne  se  naturalisa  pas,  ni  s'enracina  sitôt  sur  le  lieu  même,  comme  on 
se  Fimaginait  à  Textérieur,  chez  les  étrangers.  Le  nom  de  Roussia  était 
spécialement  attribué  à  celte  partie  on  Ton  voyait  la  résidence  de  la 
race  des  Rousses.  On  accorda  de  plus  bonne  heure  la  qualification  de 
Roussia  aux  environs  de  Kiiov.  Comme  la  province  de  Halitsch,  de 
même  celle  de  Novogrod  la  grande  et  même  les  colonies  qui  allaient 
s'établir  vers  Klazma  cl  Volga ,  ne  portaient  point  le  nom  de  Roussia 
(voyez  Â.  Feodotov,  dans  le  journal  :  ruskii  istoritscheski  sobornik, 
Moskva  1838,  t.  L).  Mais  au  loin  les  étrangers  qualifiaient  tout  de 
Roussie  et  par  un  contraste  singulier,  les  Polonais  appelaient  Rous, 
les  cantons  de  Prjemisl,  de-  Halitsch,  de  Volyn,  quand  Tannaliste  de 
Kiiov,  Nestor  (contemporain  d'Edrisi),  nomme  ces  cantons  lekhites 
(polonais).  En  efiet,  quand  le  roi  Roger,  en  Sicile,  scrutait  Tétat  de  ces 
pays ,  il  a  pu  apprendre  que  Trembovla ,  Halitsch ,  Prjemisl  dans  la 
terre  de  Sambor  avaient  des  ducs  spéciaux  de  la  race  russe ,  mais  que 
la  nationalité  lekhite  y  fesait  des  progrès  et  les  métamorphosaient  en 
Pologne. 

Roussia,  méridionale, 

65.  Le  nom  de  Russie ,  Roussia ,  jouissait  d'une  grande  renommée^ 
Depuis  un  siècle  il  est  connu  aux  Byzantins,  aux  Boulgars,  aux  Mahom- 
médans ,  sur  les  bords  de  la  Caspienne  et  aux  environs  du  Kaukase. 
Aussi  Edrisi  est  informé,  que  Roussia  est  limitrophe  de  Hongrie  et  de 
Djetoulia  (Serbie);  qu'elle  chassa  de  leurs  pays  respectifs,  les  Bartas, 
les  Boulgars  et  le  Khozares  (en  1016);  elle  s'est  emparée  de  leurs  pos- 
sessions, en  sorte,  qu'aux  yeux  des  autres  peuples  il  ne  reste  d'eux  sur 
)a  terre  absolument  rien  que  leur  nom  (YI,  6,  p.  404).  Or,  la  Russie  est 
une  vaste  contrée  qui  s'étend  beaucoup ,  soit  en  longueur,  soit  en  lar- 
geur (VII,  4,  p.  445);  où  les  villes  sont  peu  nombreuses  et  les  habitan 
éparses,  en  sorte  que  pour  aller  d'un  pays  à  l'autre  il  faut  parcourir 
d'immenses  dislances  à  travers  des  lieux  inhabités.  Les  Russes  sont  e 
guerre  et  en  dispute  continuelles,  soil  entre  eux,  soit  avec  leurs  voisi 
(VI,  4,  p.  390).  La  Russie  s'étendait  depuis  les  portes  de  Bohême  ju 
qu'aux  portes  des  Finois  (Benjamin  de  Tudèle,  p.  245,  24G).  Dans 
description  d'Edrisi  elle  revient  continuellement  sous  sa  plume;  sur 


ROUSIA,  64.  469 

carte  ilînéraire,  elle  n'a  trouvé  que  très- peu  d'espace  pour  ses  grandes 
distances,  et  ses  villes  y  sont  péle-méle  placées  en  désordre.  On  peut 
présumer  qu'Edrisl  connaissait  plus  de  dislances  et  négligea  de  les 
indiquer,  en  sorte  que  sa  description  est  maintes  fois  insuffisante  à 
débrouiller  le  désordre  de  la  carte. 

Une  seule  fois  il  fit  le  dénombrement  des  villes  de  Fimmense  Russie. 
Il  en  compte  18,  comme  appartenant  à  la  5*  section  du  vi*  climat 
(p.  597),  ce  qui  n'est  pas  exact  comme  on  le  voit,  tant  par  l'immensité 
dn  pays,  que  par  différents  passages  de  sa  description.  Les  villes  de  la 
Russie  sont  les  suivantes  : 

i^^  Lonsa  (Loubetsch). 

Jlj  ^tj  Aj\j  Zana,  Zaka,ZaIa. 
jb^SL,  ^^^^SL,  Seklasi ,  Seklahi  (Szegalah). 

à^^^mJ^  Galisia  (Halilscba). 

yX>y^  Sinoboli ,  possédée  par  les  Komans. 

d^y»^    try*y^      ^yy    ^j^y    \SyA   Bermova,Rarmounia, 
Barmouni,  Barmos,  Barmonsa  (Smolensk). 

^.\  Ârmen,  (^^Ij  Zamiou  de  Pologne). 

AM0L.L9  ^««JLmLj  Barasansa ,  Narasansa ,  (Percsopnitza). 

&xx^  Loudjaga  (Loutzk). 
'    iiw!^  Saska,     ^^^.^.t  Âvsia. 

^  ^  Kiiev,  Kav,  (Kiiev,  Kiiov). 

AJjjy  Berizoula. 

^\yi  Berizlav  (Periaslav). 

^li  Kano  (Kaniov),     ^^  Tiver  (Tourov,  Tivrov). 
JCJ!  Âleska  (Olesche,  Alaki). 
jiCw  J^    jlC-  Sekni,  Seknimil,  (Kalamila  en  Krimée). 

uJSy  ^y  Moules,  Molsa  (Cherson). 

Les  communications  entre  ces  villes  étaient  sans  doute  bien  organi- 
sées, de  sorte  que  les  commerçants  connaissaient  et  savaient  relater 
les  distances  et  les  itinéraires.  (Voyez  la  petite  carte  à  la  page  177.) 

64.  Barmon,  Barmos,  Barmonsa,  est  une  belle  ville,  bâtie  sur  les 
^rds  de  ^^^LJJ  Dnabros,  très-éloignée  des  autres,  car  pour  dcter- 
^uiner  sa  position  il  n'y  a  que  de  très-grandes  distances ,  et  il  y  en  a 
plusieurs  (VI,  5,  p.  598;  4,  p.  589,  598).  De  Barm,  en  descendant  le 


170  EDRISI. 

Dniepr  à  Kiiov 6  journées 

à  SÎDoboli  située  sur  le  Dniepr 6 

à  Galisia  près  de  Dniestr 200  milles 

à  Zaka  (à  Tembouch.  du  Dniestr) 180 

Or,  c^est  Smolensk,  appelé  par  les  Grecs  mx&Kneh  (Const.  porphyr. 
de  admin.  imp.  9).  D'où  vient  ce  nom  singulier  de  Barm  donné  à 
Smoleusk?  les  monuments  historiques,  autant  que  je  sache,  ne  le  diront 
pas  de  sitôt.  L'étymologic  de  la  langue  slave  peut  fournir  différentes 
explications.  Barm,  Barmon,  villes  des  portes  bram;  lieu  où.Fon  fait 
passer  le  fleuve  par  le  bac,  passe-bac,  porom^pram,  prom;  lieu  au 
fond  de  forêts  d'arbres  résineux  (bôr)  horma  ;  lieu  ouvert  dans  les  forêts 
par  la  hache,  coup,  poromb,  porom,  etc.,  etc.  (ee). 

Les  Grecs  de  Byzance  savaient  que  les  bacs  descendaient  par  le 
Dniepr  de  Miliniska,  de  Lioutza,  de  Tzernigoga  et  Youschgrada  et  arri- 
vaient à  Kiiov,  où  tout  le  monde  s'assemblait  dans  de  (ra/Agara^  (sovietas); 

xaarpo'/  ro  Kioitx,  rà  inofojjLOL^àjjLs^o^  ax/jL^xroi  (Constant,  porphyr,  de  adm. 
imp.  9).  Le  concours  de  la  mnhïiude sav' viel,  donnait  le  nom  aux  places 
où  elle  s'assemblait  pour  trafiquer  en  samvata,  sovieta. 

Edrisi  ne  connaît  de  Tzernigoga ,  il  mentionne  la  ville  t^^  Lobsa 
Loubsa,  Loubetsch,  située  sur  le  Dniepr,  où  les  knez  (princes),  à  cette 
époque,  avaient  leur  station  et  tenaient  leurs  conciliabules. 

KcoàSa,  Kiiov,  Kiicv,  aussi  sur  le  Dniepr,  cité  encore  splendide, 
concours  des  peuples  et  du  commerce.  Visitée  par  les  seuls  Lakhes 
(Polonais),  objet  d'envie  pour  les  princes  de  la  race  rousse  à  cause  de 
sa  suprématie;  considérée  comme  mère,  métropole  des  toutes  les  autres 
villes  possédées  par  les  princes  rousses,  cité  sainte. 

De  Kiiov  à  Berizoula ,  ville  au  nord  du  fleuve  Dniepr,  50  milles.  Ces 
milles  sont  d'une  petitesse  extrême.  Les  Grecs  savaient  que  les  mar- 
chands ,  arrivés  à  Kiiov  par  le  Dniepr,  abandonnaient  leurs  bacs  et 
transportaient  les  marchandises  à  /3<TeTÇè6>7,  où  ils  avaient  leurs 
bateaux  légers  (viiz,  vitzina)  pour  descendre  les  cataractes  (porohy). 
Yitelzev,  vitz,  vitzina,  vitzitza  (vitka,  vicinka,  et  autres  diminutifs), 
vi^zitschev  ou  préparative  de  vitzi,  était  donc  sur  les  rives  du  Dniepr. 
Berizoula  devait  être  voisine  ,  ville  du  bord,  berezna,  brjcjna,  du  petit 


(66)  Bârmon,  Barmos,  offre  nnc  singulière  homonymie  avec  Biarmie  sur  laquelle  on  a  donné  tant 
de  lumière  :  cependant  la  position  déterminée  ne  pourrait  jamais  atteindre  la  Biarmie.  Dans  tout 

ce  qn'on  a  dit  de  Biarmie,  no  se  trouverait-il  pas  quelque  chose  à  réclamer  pour  Smolensk? Les 

Krivitsch  qui  bâtirent  Smolensk,  prirent  leur  nom  de  leur  situation  boiseuse  ;  n*appeUient-ils  pas 
leurchef-Ueu  d'un  terrain  essarté ,  d'une  coupe?— Au  reste, Smolensk,  lieu  de  la  lysine,  de  la  poix, 
■éjour  de  cenx  qui  fabriquent  pu  vendent  de  la  poix,  tire  son  origio«  dfl'tmola,  résine,  poix. 


JI0U8IA»  65.  171 

bord  brjezoula  (vis-à-vis  de  Rjischev),d'où  s'embranchaient  les  chemins 
par  le  fleuve  vers  la  mer,  et  par  le  continent,  vers  Toccident. 

De  Berizoula  à  Âvsia,  petite  ville  bien  peuplée,  par  terre,  â  journées. 
De  Âvsia  à  Barasansa  par  terre,  â  journées. 

Le  nom  de  Âvsia  m'est  incompréhensible.  Je  ne  trouve  rien  d'analo- 
gue aux  environs  de  Zitomir,  vers  lequel  elle  est  dirigée  par  les  dis- 
tances. Barasansa  (Barasabsa)  est  sans  aucun  doute  Peresopnitza , 
aujourd'hui  village ,  à  l'époque  d'Edrisi  ville  assez  importante ,  connue 
dans  les  fastes  de  ce  pays. 

De  Barasansa  à  Loudjaga,  vers  le  nord,  2  journées.  Il  y  a  moins  de 
Peresopnitra  à  Loulzk  dans  la  direction  nord-ouest.  Ville  des  Loutza- 
niens,  appelée  par  les  Byzantins  Aev$ay?,vo«,  AevÇjv^vot  et  leur  ville 
AïowrÇa  (reXeouTÇa)  Communiquait  par  (Siir,  Pripetzet)  Dniepr  avec  Kiiov 
(Consl.  porphyr.  de  adm.  imp.  9,  57)(67);  ville  renommée  chez  les 
arabes  ^13^  Loudza'aïa  (Massoud,  ap.  d'Ohsson...).  D'où,  en  se  diri- 
geant vers  l'occident,  3  faibles  journées,  Ârmen.  Il  n'en  faut  pas  autant 
pour  arriver  à  Vladimir,  et  il  y  a  peu  pour  aboutir  jusqu'à  Sandomir, 
Zamiou  ou  Zamir.  Peut-être  au  lieu  de  5  on  pourrait  lire  8  journées, 
mais  ce  serait  presque  le  double  de  ce  qu'il  en  faut.  L'itinéraire  que 
nous  suivons,  est  de  la  route,  par  laquelle  on  allait  de  l'occident  d'Alle- 
magne, par  Krakov  à  Kiiov.  Dans  l'incertitude  des  frontières  qui  divi- 
saient les  Polonais  de  la  Russie ,  ceux  qui  traversaient  la  Pologne  pour 
se  rendre  en  Russie ,  pensaient  facilement ,  qu'entrant  à  Sandomir,  ils 
touchaient  le  sol  de  l'immense  Russie. 

65.  Revenant  à  Kiiov,  nous  y  apprenons  que  de  Berizoula  on  comp- 
tait une  journée  sur  le  Dniepr  pour  arriver  à  Berizlava.  Â  vrai  dire, 
ce  n'était  pas  la  ville  même  Periaslav,  éloignée  du  Dniepr,  mais  sa 
station  riveraine,  où  elle  avait  des  dépôts  et  le  point  d'expédition.  De 
cette  station ,  une  journée  et  demie  par  le  même  fleuve ,  est  située  la 
^illede  Kano,  Kaniov,  de  laquelle  à  Âleska ,  située  sur  l'embouchure 
du  Dniepr,  quatre  journées  (p.  598).  Âleska,  Olesche  est  bien  connue 
durant  plusieurs  siècles  comme  passage  du  Dniepr  toujours  pratiqué. 
Ce  passage  est  nommé  2a<va  par  les  byzantins  (Gonst.  porph.  de  adm. 

(87)  Scbafarjik,  daoi  son  éradit  et  profond  ouvrage  (starojitu.  slav.  H,  t ,  §  S8,  p.  S93)  oiaoireslc 
nne  autre  opiDion  sur  Lrntzanicns  des  byzantins  :  il  pense  le  retrouver  dans  Velikic  Louki,  ou 
grandes  Louki.  Hais  on  ignore  l'existence  de  cette  ville  à  cette  cpnqne,  elle  ne  se  fait  connaître  que 
trèt  tard  et  toujoura  peu  marquante  ;  elle  est  éloignée  du  Dniepr,  et  il  y  a  plus  de  dilBcuUéà  Tranchir 
la  distance  par  terre  et  par  eau  de  Veliki  Louki  à  Kiiov,  que  le  détour  fluvial  de  Loutzk  à  Kiiov- 
Les  Ttcbemigogiens  de  môme  déviaient  par  le  fleuve  Dùsna,  pour  entrer  dans  le  courant  du  Dniepr. 
A«sai  les  Lou4tanieos  de  Loutik  descendaient  par  SUr,  Pripetz,  avant  d'arriver  au  Dniepr.  Cette 
navigatioa  est  plus  facile  que  la  traverse  d«  Veliki  jLouM  à  Kiiov.  ~  Aussi  je  ne  saie  paa  pourqoui 
Liontza  de  ConftaDtin  est  expliquée  par  Loobettcb.  * 


172  EDRISl. 

imp.  9),  et  dans  les  temps  modernes,  avait  était  gardé  par  des  Tatars 
sous  le  nom  de  Tavan.  Aleska  était  située  vis-à-vis  de  Temboachure  de 
Ingouletz  iwyouX  et  de  la  petite  rivière  Tehinka ,  qui  donnait  le  nom  au 
passage  tatare ,  aussi  bien  que  la  ville  Tavan ,  située  au-dessus. 

La  descente  difficile  par  les  cataractes  du  Dniepr,  avait  été  connue 
aux  byzantins.  Edrisi  n*en  était  point  informé;  il  sait  cependant  qu'on 
allait  par  le  fleuve  en  6  jours  et  demideBerizoula  à  Aleska  (p.  598)  : 
lorsque  les  voyageurs  traversaient  de  Kiiov  au  passage  (d* Aleska)  par  le 
continent  6  journées  (Petakhia  p.  4).  De  Barasansa  (Peresopnitza)  par 
le  continent  à  Molsa  5  journées.  Molsa  est  aussi  située  à  Tembouchure 
du  Dniepr  (p.  598),  vis-à-vis  d' Aleska,  tout  près  de  Ingouletz ,  où  com- 
mence le  XifiTiv  de  Temboucbure  du  Dniepr. 

Le  littoral  de  la  mer  noire,  compté  à  la  Russie,  est  indiqué  de  la 
manière  suivante  : 

Akliba  ou  Akli  (Kilia) ,  située  à  une  mille  seulement  de  Fembouchure 
du  Dniestr  (p.  595).  Ce  mille  unique  1,  résulte  certainement  du 
chiffre  J  50.  Puis  à  ijJ  djJ  Karta ,  Krata  ou  Karia ,  50  milles. 
Kpûtxvaxarce  dcs  byzantins  (Gonst.  porph.  de  adm.  imp.  57).  A  Moules 
on  Molsa  50  milles.  Là  est  Fembouchure  de  sr**^^^  Dnabros.  Puis 
Seknimil  (Galamila  des  portulans  italiens).  Puis  à  ùy^^  Kersona 
(Cherson),  un  peu  moins  de  1  journée  de  navigation,  c'est-à-dire 
80  milles  (p.  595).  Tout  ce  passage  était  désert.  Dans  les  parties  rap- 
prochées, les  Ghersonites  avaient  des  salines.  Entre  le  Dniepr  et  le 
Danube,  toute  cette  côte  d'or  xp«><ro$  alycaAo^  est  dévastée.  On  y  voyait  les 
ruines  des  villes  anciennes.  Sur  les  décombres  des  églises,  brillaient 
les  croix,  manifestant  leur  origine  romaine  et  le  christianisme.  (Gonst. 
de  adm.  imp.  57 ,  42). 

Les  Petzeneh  tenaient  un  siècle  et  demi  le  littoral  et  connaissaient 
les  noms  de  ces  ruines.  Ges  noms,  au  nombre  de  six,  sont  conservés  par 
Goustantin  porphyrogenète(68).  Gomme  le  premier  offre  la  qualificatiOD 
de  Blanche  ^Aairpo^j  qui  répond  à  Bialigrod  (citée  blanche ,  Moncastro, 
Akerman)  :  il  est  évident  que  leur  énumération  est  sans  ordre.  Toug, 
Krakna,  Salma ,  Saka,  Ghiaîou,  privées  de  la  terminaison  petzeneh 
kataï,  pouvaient  se  conserver  dans  de  temps  postérieurs ,  ce  qui  nous 
autorise  à  rapprocher  auxdénominations  édrisiennes,  nonimément  à  Saka 

(68)  *IffTsov  ort  Êvô'fiv  ToD  AavâTT^ew;  icoray-ou  Tzpbç  rb  à.noQXenrO'f  f*-ipoç  tJ>» 
BovXyapix'/  elç  rx  irepâ/xaTa  tou  «wtoO  Ttoroc/JLOÎJ  «iaiv  ipififiôxocstpct.,  KaoTpov 
itp(âxori  x'o  ovofioLaâh  iiapcx.  tOv  IlaTÇtvaxtTûiv  *Aff7rpov,  cièt  rb  toùç  Xiâou^  auroû 
^atvea^at  y.xzocXsù).ovi.  KaaTjOOv  ^evTe/?ov.  ro  TouyyâTae.  Kaarpav  rptrov ,  xo 
kpaxvaxscrat ,  Kavrpo-t  réraÇTOv  t6  EaXfiaxxron.  K.a7T/90v  'Kéfinxov  xb^axeuxtac 
Kaarpov  îxrov  rcâtouxârae,  de  admin.  imper.  87. 


ROUSIA»  66.  173 

et  à  Karta  (Krakoa).  Après  la  destruction  de  la  horde  des  Pelscheneh, 
les  Komans,  retirés  vers  le  Dniepr,  ouvrirent  un  champ  libre  au 
rétablissement  des  populations,  d*abord  slaves,  ensuite  valakhes.  Aussi 
du  temps  d'Edrisi  sont  connus  :  Berlad,  où  naquit  Jean  Berladin,  fils  de 
Roscislav  II  duc  de  Prjemisl  ;  Seklahi,  Zaka,  Karta,  Molsa,  Olesche, 
toutes  dans  les  possessions  des  Slaves  de  la  Russie. 

66.  Au  nombre  des  villes  de  la  Russie,  sans  que  leur  position  serait 
indiquée  par  quelque  distance,  nous  trouvons  Ti  ver  et  Saska.  —  Userait 
probable,  que  Tiver  est  Tourov,  ville  de  la  Polisie,  à  cette  époque 
renommée,  épiscopale.  Il  n'y  a  rien  d'improbable  cependant,  que  c'est 
Tivrov,  située  sur  le  Boug,  Boh ,  ville  moins  importante  mais  connue 
à  cause  qu'elle  se  trouvait  sur  la  route  de  Barasansa  à  Molsa  (ee). 

Nous  ne  trouvons  aucun  nom  correspondant  à  iSL»L^  Saska  ;  Nassir- 
eddin,  en  4261,  connaît  une  ville  peu  éloignée  de  ioli^  Kouiaba , 
Kiiov,  appelée  ^^^S^  Saksin ,  et  lui  donne  une  position  occidentale 
éloignée  d'un  demi-degré  ou  d'une  douzaine  de  milles  de  Kiiov  (70).  — 
Ce  rapprochement  peut  être  contesté,  à  cause  que  suivant  les  écrivains 
latins  Rubriquis  et  Vincent  de  Beauvais,  un  peuple  Saxi  ou  Sacxi  ré- 
sista virilement  à  l'invasion  des  Tartars  et  sauva  son  indépendance  , 
tandis  que  les  orientaux  comptent  les  ^*.l^  Saksin  au  nombre  des 
subjugués  (71).  La  position  de  ces  Saksin  est  assignée  par  Bakoui,  qui 

(69)  Le  traducteur  se  transporte  avec  Tiver  sur  Tver.  Je  pense  que  l'enseinble  de  nos  explications 
démontre  l'impossibilité  de  se  porter  si  loin  dans  les  pays  ou  Edrisi  avouait  l'ignorance  des  dénomi- 
nation des  villes. 

(70)  Par  quelque  erreur  ou  inadvertance,  il  a  placé  la  Russie  sur  la  mer  kaspienne.  Oulougbeg 

l*a  copié  sans  rectification  ;  voici  de  quel  façon  : 

Balandjar longit.  88*  W  latit.  46*  80' 

Babelabvab(Derbent) —  85  0  —  43  0 

Kouiaba _  87  0  —  4S  0 

Saksin —  86  30  —  43  0 

^uo  ntvaxeç'b  fjnv  Naaaip  *E$âhOi  h  ik  Ovlovy  intii  iitifiiXelK  £iYi/JLtirpto\J  *AAe|av- 
^ptiov  1807  editae  per  firatr. Zozimades,  ad  calcem  Abulfedae,  Viennse  18i7,  in-8*,  p.  44, 16  ;  46, 48. 

(71)  Voici  ce  que  dit  le  savant  D'Avezac  (p.  876,  577).  Quant  aux  Saxi  ou  Sacxi,  l'homonymie  est  si 
complète  qu'il  semble  difficile  de  ne  les  point  identifier  avec  les  Sacsyn  des  auteurs  orientaux,  peuple 
voisin  des  Khazars  et  des  grands  Boulghârs,  et  probablement  d'origine  finnoise  comme  eux. 
D'Ohsson,  hist.  des  Mongols,  t.  I,  p.  346,  440,  t.  H,  p.  16, 113;  Abou  el  faragi,  hist.  compend. 
dynastiar.  p.  Î8S,  306;  Charmoy,  relation  de  Mas'oudy,  etc.,  dans  les  mémoires  de  Petersb.  sciences 
polit,  t.  n, p.  344,  555,  358, 359;  Baquoy,  dans  les  notices  et  extraits  des  mss.  de  la  bibl.  du  roi, 
1.  II,  p.  836;  Fraebn,  Ibn  Foscbl.  Bericbte,  p.  39;  Aboulfeda,  édit.  arabe  de  Reinaud  et  Slane, 
p.  SOS.  —  Mais  une  grande  difficulté  milite  contre  la  légitimité  de  cette  concordance ,  en  ce  que  let 
Sacsyn  sont  désignés  par  les  historiens,  comme  ayant  été  assujétis  par  les  Mongols;  il  faudrait  dèi 
lors  supposer,  qu'une  partie  au  moins  de  ce  peuple  était  parvenue  à  sauver  son  indépendance.  — 
Vincent  de  Beauvais  (XXX,  87,  f.  146,  de  l'hist.  orient,  de  Reineck)  répète,  peut  être  d'après  une 
autre  source  :  plurimis  itaqne  terris  i^  servitutem  eorum  (Tatarorum)  redactis ,  quaedam  viriliter 
rettiterunt  eis|  videlicet.....et  gens  Saxorum  :  quindam  «nim  eorum  ciuitatem,  Tartari  obsederunt ,  ' 
ted  cis  praeralere  non  potuerunt. 


il  A  EDRISI. 

copia  en  1415  les  longitudes  et  latitudes  de  Nassireddin,  dans  le  terri- 
toire des  Khozars  :  ^^'^^•â^  Saksin,  grande  ville  du  pays  des  Khbzars , 
la  plupart  musulmans;  il  y  a  un  fleuve  qui  gèle  (Bakou!  YI,  27).  Ce 
fleuve  qui  gèle  est  indiqué  dans  le  Don  par  Schemseddin  Dimcschki^ 
compilateur  dans  Tannée  1586.  Entre  Itil  et  Kourr,  il  connaît  un  flen|ts 
des  Seklab  et  Rous,  qui  vient  des  montagnes  de  ^.M»fl.>»  Saksin  et  de 
ik^bli5ol  Kelabia,  lequel  reçoit  les  eaux  des  autres  fleuves  venant  des 
^\^jt  ^bl)  pays  Sourdak  et  gèle  mieux  en  hiver  qu'ïtil  (p.  57  apud 
Fraehû,  Ibn  Foschl.  Berichte,  p.  59).  Est-ce  la  description  du  Don  ou 
du  Terek  ?  on  ne  sait  pas  :  en  attendant  il  faut  avouer  que  Saska  des 
Siciliens  reste  dans  Tobscurité. 

Edrisi  connaît  encore  une  ville  de  la  Russie ,  située  près  des  sources 
du  ^J:.-^^^  Dniestr,  qu'il  nomme  ^jjjy  Martori,  éloignée  4  journées 
de  Sermeli  (Prjemisl)  en  se  dirigeant  ver  le  sud  (VII,  4,  p.  455). 
La  carte  itinéraire  confirme  et  ne  laisse  ancun  doute  ,  qu'Edrisi 
rattache  Martori  et  Sermeli  (Prjemisl)  au  fleuve  Dniestr  (is).  Edrisi 
ajoute  que  Sermeli  porte  en  grec  le  nom  de  Touia  ainsi  que  Martori 
(VII,  4,  p.  455).  Or,  Martori  portant  aussi  le  nom  de  Touia,  on  pourrait 
présumer  qu'au  lieu  de  ^^  il  serait  mieux  de  lire  aj  J?  Tiria,  et  que 
les  grecs  appelaient  Martori  et  Prjemisl ,  à  cause  de  leur  situation, 
Tiria,  Tiras,  du  nom  de  fleuve  Tyrus,  Dniestr.  En  ce  cas  il  faudrait 
chercher  Martori  près  du  Dniestr,  non  pas  à  ses  sources  où  Sermeli  a 
déjà  pris  sa  place  (Edrisi,  VI,  4.  p.  590),  mais  à  4  journées  des  sources, 
où  (au  nord  de  Kamienielz  Podoiski),  sur  la  rivière  Smotritsch ,  eziste 
une  ville  Smotritsch ,  Martori. 

Mais  Edrisi  afiirme  positivement  que  Martori  est  au  nord  de  Sermeli, 
il  le  place  dane  le  vh°*^  climat  et  rapproche  aux  villes  septentrionales 
de  la  baltique  ;  il  trace  le  cours  de  Pripetz  comme  s'il  le  détournait 
vers  l'ouest,  pour  le  faire  entrer  dans  le  Dniestr  tout  près  de  Sermeli. 
Il  faut  donc  chercher  Martori  dans  les  parties  marécageuses  de  Pripetz. 
Les  quatre  journées  de  Prjemisl  au  nord,  conduisent  vers  la  Polisie  et 
le  Pripetz.  Divisez  les  points  réunis  sur  te  et  marquez  par  un  d'eux 
le  risch,  vous  transformerez  le  nom  de  la  ville  en  ySjyj^  Maznori„ 
Mozir.  Les  quatre  journées  de  Prjemisl  à  Mozir  paraîtront  insufiisantesr 
mais  elles  sont  juste  de  la  grandeur  de  cinq  qui  séparent  Barasansa  d* 
Molsa.  Près  de  Mozir  il  n'y  a  pas  de  sources  d'aucune  rivière ,  mais  ce  ^ 
sources  dérivent  de  la  confusion  de  celles  qui  accompagnent  Se: 
meli.  Mozir  est  sur  la  route  qui  conduit  de  Prjemisl  et  Halitsch, 

['i)  Cependait  le  traducteur  Jaubort  n'hésite  pas  à  expliquer  Doiest  ^ar  Pxma  H  «oppose  qfM^ 
qualification  grecque  Ae  Towia  pourrait  désigner  Toula. 


SKANDINAVIA,   67.  475 

Barmon  ou  Smolensk,  il  esta  peu  près  à  moitié  chemin,  donc  à  100 
milles  de  Halitsch  et  Prjemisl,  et  ces  100  milles  font  juste  les  l 
journées. 

Edrisi  se  montre  avec  de  meilleures  dispositions  pour  parler  de  la 
Russie  septentrionale.  En  effet  il  en  parle,  mais  sa  narration  est 
tellement  enlassée  dans  le  voisinage,  que  pour  la  suivre  avec  quelque 
succès,  nous  ferons  bien  en  commençant  par  Texamen  de  la  mer 
Baltique. 

.    Sk^ndinavia,  nord, 

67.  La  mer  Baltique  est  appelée  J,LyiJ!  ^y^t  ys:^\  mer  occi- 
dentale septentrionale.  Le  premier  coup-d'œil  sur  le  carte  et  le  premier 
aperçu  de  la  description ,  riche  en  noms  propres ,  où  Ton  remarque 
Saktouna  (Sigtoun),  Kalmar  avec  la  Sfada  (Svèdc),  Finmark,  Tebest, 
(Tavastia)  etc.,  (VU,  4,  p.  451 ,  452),  décèle  qu'on  avait  en  Sicile  des 
renseignements  peu  communs  sur  la  Baltique.  Les  Normands  Skandi- 
naves  les  ont  communiqués  aux  Normands  de  Sicile.  Dans  la  relation 
d'Edrisi,  il  n*y  a  rien  sur  les  Prussiens,  sur  les  Kourons,  rien  de 
déterminé  sur  les  Livons  ou  sur  Tembouchure  de  Dvina  ,  où  allaient 
s'établir  les  Allemands;  on  a  peu  ,  presque  rien  du  littoral  méridional  : 
mais  le  sinueux  littoral  au  nord,  possédé  par  les  Normands,  est  visité 
avec  soin. 

En  commençant  par  la  péninsule  Xi^jb  Darmarscha  (p.  427), 
Awj3  Dharmascha,  ^«^^  ^jij^  Danmarscha,  Danemark,  on  la 
voit  figurée  de  la  façon  comme  elle  était  figurée  sur  les  cartes  anglo- 
saxonnes.  Ronde,  réunie  avec  le  continent  par  un  col  étroit,  éloigné  60 
milles  de  Fembouchure  de  »jjj  Varze  (Vezer). 

Entrant  par  ce  col,  par  cette  gorge  (introitus),  on  a  à  25  milles  une 
ville  florissante,  nommée  ^JL^JI  Sila,  ou  Silia  (fie  Sylt), 

De  là  50  milles  à  »^^J?  Tordira  (Tonder,  Tounder),  port  abrité 
contre  tous  les  vents. 

De  là  100  milles  àj^^à^  Khav,  Khof,  port  également  sûr  (Kiôb, 
Ringkiôbing). 

De  là  200  milles  à  s^'JLJ^^!^  Yendilskada.  Cest  la  pointe  de 
Skagen  (windel,  windsel,  bande,  langue  de  terre),  qualiûé  encore 
de  port. 

De  là  200  milles  à  o^/Ar>^  Horschhont,  ville  peu  considérable 
(Horsens  près  d'Âarhus). 

De  là  80  milles  à  ^ j^  Landvina ,  fort  qbi  cherche  en  vain  sa 
position  aux  environs  de  Holding,  dans  le  détroit  entre  la  péninsule  et 


i  76  EiwiSf. 

rtle  Fionie,  Founeû,  Fyn,  dans  un  passage  étroit,  où  les  terres 
rapprochées  sont  séparées  par  un  flot  Fenux  (vina). 

De  là  100  milles  à  J^^^*»^  Sisaboli  ou  ^Ju^  Sisloî,  Sislova 
(Slesvih  sur  la  Slye)  (is). 

De  ce  dernier  lieu  à  Textrëmité  de  la  péninsule ,  12  milles.  —  La 
circonférence  totale  de  la  péninsule  est  de  750  milles  (p.  427,  428). 
.  La  A&LjJ  Norbega,  tjjy  Norbeza,  est  une  île  très^onsidérable, 
mais  en  majeure  partie  déserte.  Cette  île  a  deux  caps,  dont  Tun  occi- 
dental, touche  à  la  péninsule  ^j«j1^  Darmardja  (Dannemark)  et  fait 
face  au  port  nommé  Yendleskada,  situé  à  une  demi -journée  de 
navigation,  et  Tautre  touche  à  la  grande  côte  de  Finmark  (p.  429).  La 
carte  itinéraire  nomme  trois  villes  de  Norvège  :  ^  ^^  Berk-Ni,  Ber- 

kena  (Bergen)  ;  yJi  Ghinou  (Quins ,  baie ,  vallée  et  hauteur  de  Quins 
fiord,  Quiensdaal,  Quiens  heet);  la  troisième  ville  est  ^yU^  Scha- 
schouna ,  et  nous  devons  nous  contenter  de  remarquer  ses  traces  dans 
Schaerswik(VII,4). 

La  Norvège  est  accostée  de  plusieurs  îles  innommées.  Elles  sont  pour 
la  pluspart  désertes.  Il  y  en  a  cependant  deux  dans  Tocéan  ténébreux, 
qui  sont  habitées  et  qui  portent  le  nom  des  fies  /^^s-^t  tr^^j^\ 
Âmraines  -  madjous.  La  plus  occidentale  est  peuplée  d*bommes 
seulement  ;  Tautre  n*est  habitée  que  par  des  femmes  (YII,  4,  p.  455). 
Suivant  la  carte  itinéraire  JUa. Jt  iy\^  l*lle  des  hommes  est  File 

i^y?^  J'-^t"  CA^j^'  iî-j^  Amazonius,  des  hommes  infidèles. 
L'autre  est  sjj^ \  ï^^  l*île  al  banak ,  ou  Tile  d'entrevue  et  de 
commerce  des  Amazonios,  qui,  chaque  printemps,  allaient  cohabiter 
avec  les  femmes  tout  un  mois.  —  Cette  fable  antique  est  placée  sur  les      ^ 
îles  Aland  (ia), 

(75)  Bakoui  (en  UI8]  norome  dans  le  VI*  climat  une  grande  tille^)  ji»JLi»  SchelescliTik^siUiée  .^^ 

sur  la  mer  océan  ,  où  il  y  a  peu  de  chrétiens;  ils  mangent  du  poisson  et  ils  admettent  la  répudia — ^^^^ 
tion  (VI,  28). 
(74)  Je  pense  qu'à  TUe  de  Norvège  on  peut  rapporter  ce  que  Ibn  Saïd  relate  de  l'ile  ou  presqn'il^ur  jp 

slave  L»k^jj    L>^u&^  Bergadhma  ou  Bergarma.  On  sait  que  les  arabes  ne  distinguaient  ] 
toujours  les  pays  à  l'occident  de  la  Slavonie  qui  s'étendait  jusqu'à  l'océan.  Or  »  l'ile  Bergar( 
Norgar,  Norige,  longue  700  milles,  large  500,  habitée  vers  le  sud  par  une  race  d'hommes  (no < 
slaves)  avec  la  tète  attachée  tout-à-fait  aux  épaules,  qui  demeurent  ordinairement  dans   les  tro^ 

de  grands  arbres, a  pour  capiule  Bergarma  (Bergen)  dont  les  ♦  Lc  lJ  I   Baghara  (Bargars,  Nor»-- 
gicDs)  ont  pris  le  nom  :  on  l«s  suppose  en  effet  (les  Norvégiens)  originaires  de  cette  ville.  —  Si  n^c^^if 
explication  n'est  pas  acceptable,  il  est  au  moins  certain  qu'il  ne  s'agit  pas  ici  de  Boulgars,  mai^^        «^, 
Bargars ,  qui  habitaient  l'Ile  et  la  ville  capitale  ;  issus  d«  la  ville,  eux-mêmes  et  l'ile  sont  appelés        ~  pj^ 
le  nom  d«  la  capitale-  —  Bakou!  parle  des  Amazones  comme  suit  :   LmJj  t   AJJ  Jl^  la  ville  —  .1^49 
(des  femmes),  d'une  tl*  habitée  par  des  femmes  ;  elles  ont  des  esclaves  qui  passent  la  nuit  avec^  W/eg 
■uis  lorsqu'elles  accouchent  d'un  enfant  mâle,  elles  le  tuent  (VI,  38).  *  ' 


1 


SKANDIMÀVIA,   68.  177 

Jusqu'à  ce  point  nous  avons  suivi  avec  un  certain  succès,  je  pense, 
la  description  d'Edrisi  ;  la  suivante  ne  nous  offrira  pas  autant  de  satis- 
faction, elle  résiste  en  grande  partie  à  tous  nos  efforts. 

68.  Nous  avons  dit,  que  par  une  étrange  aberration,  Edrisi  pensait 
que  Svada  (Suède)  et  Fiumark  sont  situés  au  sud  de  la  mer,  sur  le 
continent  de  Pologne  et  de  Prusse.  Egaré  par  cette  idée,  il  ne  sait  pas 
distinguer  les  dislances  par  mer  ou  par  terre,  et  s'embrouille  dans  des 
contradictions;  ainsi  toutes  nos  ressources  pour  sortir  quelque  peu  de  ce 
dédale  se  réduisent  aux  noms  propres  et  à  quelques  distances  isolément 
prises.  Sa  description  est  comme  suit  : 

A  partir  de  la  gorge  de  Danmarscha,  en  suivant  la  côte  jusqu'à  ^'^sw 
Djartaou  ù*y^  Djesta  ou  aJjâ.  Djouna,  ville  maritime  bien  peuplée 
avec  marchés  florissants,  on  compte  200  milles. 

De  là  à  ^^y^JjJ  Landschouden ,  ville  considérable  et  florissante 

200  milles. 

De  cette  ville  à  Tembouchure  de  la  jJLLil  Kallou ,  sur  les  bords  de 
laquelle  est  bâtie  une  jolie  ville,  nommée  ji^ialw  Saktoun,  190 
milles. 

De  cette  ville  à  .1^1$  Kalmar,  en  se  dirigeant  vers  Toccident  (la 
carte  itinéraire  indique  à  Torient),  200  milles. 

De  Djerta  la  maritime  à  la  ville  v^\j\  Zouada  ou  ^^li;  Zfada,en  se 
dirigeant  vers  Torient,  on  compte  100  milles.  Cette  ville,  qui  est  consi- 
dérable et  peuplée,  donne  son  nom  à  toute  une  contrée,  remarquable 
par  son  peu  de  population  et  par  la  rigueur  de  son  climat. 

De  Zouada  à  iJ\  Ëlba,  en  se  dirigeant  vers  Torient,  100  milles. 

Et  delà,  en  suivant  la  même  direction,  à  <9^.wwi  Fimia  ou  ^L^^Ji 
Felmia,  ville  située  à  100  milles  de  la  mer,  100  milles. 

Elba  est  vis-à-vis  de  Landschouden ,  en  se  dirigeant  vers  le  nord  et 
vers  l'océan  ténébreux. 

De  l'embouchure  de  Kallou ,  rivière  dont  le  nom  se  prononce  aussi 
JLLS  Katerlou,  à  jLJlS  Kalmar,  on  compte  200  milles. 

Katerlou  est  également  le  nom  d'une  ville,  bâti^  sur  les  bords  de 
cette  rivière  qui  est  très-grande,  et  qui,  après  avoir  coulé  de  l'ouest  à 
l'est,  se  jette  dans  Tocéan  ténébreux  par  deux  embouchures,  distantes 
Tune  de  l'autre  de  500  milles.  De  Kalmar  à  la  seconde  des  embouchures, 
on  compte  80  milles 

Le  Finmark  sjS\l^:^  contient  beaucoup  de  villages,  d'habitations 
et  de  troupeaux  :  mais  on  n'y  remarque  pas  d'autres  villes  que  vXj^\ 
Abreza  et  Calmax,  qui  sont  l'une  et  l'autre  assez  grandes,  mais  mal 
lit.  iî 


p«vpléw  M  miiérakln.  L«  roi  de  Finnark  postèds  Ats  tisus  habilii 
dani  la  Nonr^  (Tll,  S,  p.  ItS,  «9;  4,  p.  431). 


Cette  description  noDB  conduit,  dn  premier coap-d'ϔl,  de  Djaita 
vers  l'est  par  deux  directions,  qui  par  conséquent  se  fourchent  quelque 
pen:  une  par  Landschouden  à  Saktoun(peB  éloignée  de  la  mer);  l'autre 
par  Zvada,  Elba,  Fimia,  jusqu'aux  rivages  de  la  mer  :  chacnoe  contiml 
MO  milles.  Landachouden  et  Elba  les  dÎTisent  par  moitié  ;'or,  Elbacsl 
Tifr-à-TÎE  de  Landschouden  ;  il  serait  difficile  de  décider  au  sud  on  as 
nord,  et  il  est  plus  difficile  encore  de  trouver  un  pays  dont  la  titoatiui 
répondrait  à  une  semblable  dispariiiion  des  positions. 

Il  est  probable  que  par  le  déplacement  et  par  la  conrusion  de  ti 
Suède  avec  le  littoral  de  la  Vislule,  parmi  les  villes  nommées,  les  dm* 
■ont  de  la  Suède ,  les  autres  du  littoral  méridional.  En  snpposant  la 
lectorcds  t^ja.  oo  ùya.  DJarU  ou  DjoooaoDpoDvaillfi«-G 


SKAMDtifATiA,  09.  179 

litHiver  ai  Ja;  Djlëana,  Gidanie,  GdaAsk,  Dantzik,  confirmer  par  eon- 
séquènt  Fanalogie  de  L)t  Elba  avec  Elbing  :  mai»  il  paraîtrait  que 
Svada  ou  Fimia,  intercalées  sur  cette  direction,  s*y  opposent. 

69.  Katlou,  nous  Tavons  admis,  est  un  nom  dégénéré  de  Yistule.  Mais 
cette  Yistule  Katlou ,  serait  donc  à  une  antre  embouchure ,  éloignée  de 
300  milles. 

De  Tembouchure  de  Katlou  (Yistule)  à  80  milles  (par  mer)  se  trouve 
Kalmar,  par  laquelle  nous  entrons  en  Suède.  De  Kalmar  on  compte  200 
milles  à  Saktoun ,  située  sur  Tautrc  embouchure  de  Katlou.  Cette  dis- 
tance nous  conduit  à  Sigtouna  ou  BIrka,  citée  encore  puissante, 
immense,  gigantesque  et  double  (7s).  Ville  de  la  plus  hante  antiquité, 
bâtie  sur  les  bords  du  lac  Màler.  Odin  y  éleva  un  temple ,  /uj^to  morem 
€uarum  (Snorro  Sturles,  1. 1,  p.  6;  Wallin,  p.  192,  199;  Langebek, 
p.  446).  Elle  devint  la  résidence  des  rois.  En  851,  S.  Ansgaire  y  prêcha 
l*éyangile ,  et  institua  Tévéque  Simon  pour  la  répandre  ;  le  culte  chré- 
tien [cependant  n*a  pris  de  racines  solides  que  vers  Tan  1000,  par  les 
«oins  de  Févéque  Sigurd. 

Avec  la  décadence  de  Tancienne  Sigtoune,  disparut  son  nom  de 
Birka.  La  nouvelle,  au  xn« siècle ,  s'étendit  de  Tautre  côté  du  lac  :  elle 
grandit  et  diminua  la  grandeur  de  Tanclenne ,  laquelle ,  avec  le  temps , 
^ut  réduite  à  un  village  qu'on  nomme  Fôr-Forn-Fornu-Sigtuna ,  anté- 
neore  ou  ancienne  Sigtouna. 

Au  commencement  du  xi**  siècle,  Tancienne  Sigtouna  ou  Birka  fut 
TQinée  par  Olaf-le-gros ,  unde  siô-konung  ou  rois-marins  de  Norvège. 
Hais  en  1055  et  1045 ,  les  rois  de  Suède  y  résidaient  encore ,  ainsi  que 
^Q  temps  d'Edrisi  existaient  à  la  fois  deux  grandes  villes  Sigtouna , 
la  nouvelle  gardée  par  une  place  forte  Almarstâck.  La  nouvelle 
devenant  plus  puissante ,  voyait  dans  son  port,  inaccessible  aux  pirates, 
les  navires  de  toutes  les  nations  dn  nord  ;  elle  avait  ses  flottes,  comptait 
iSyOOO  boui^eois  opulents  ;  ses  édifices  s'élevaient  avec  orgueil,  comme 
^attestent  les  ruines  gigantesques  dans  l'espace  de  plusieurs  lieues. 

(7S)  Sur  ellfloa  a  an  ouvrage  excetstvement  rare  de  George  Wallin ,  rédigé  en  six  mëmoiret  tct- 
déniqacA  «lepois  1729  jusqu'à  4732.  Ses  titres  sont  les  suivants  :  I,  urbs  antiqua  ruit  multos  domi- 
nata  perannos^hoc  est,  Sitguna  stau  et  cadens,  aetas  prima,  Upsaliae  1720;  H,  aetas  secunda  1729; 
ni,  antiqnae  Svionum  prolopoleosSigtnnae; aetas  tertia  1850;  IV,  aetatis  tfertiac  cootiDDatio,  1730; 
Y,  oriM  aitfiq.  etc.  aetas  quarta  et  nltima  1782;  VI,  aetatis  quartae  pars  ultimal752.  Ces  mémoires 
flMt  reproduits  dans  la  collection  non  moins  rare  des  œuvres  académiques  de  Wallio,  p.  187-4S6. 
—  Luigd)ek;  script,  rer.  danicar.  medii  aevi,  1. 1,  p.  448,  446,  a  inséré  dans  les  notes  les  plas  remar- 
^^■Uet  obserratiotts  d«  Wallin.  —  Wallin  et  Rasmusen  (de  orien.  commer.  p.  48),  relatent  le 
jUMmn  d'Edriai  sur  la  Tersion  latine  :  insula  Bicerko  (Landschuden  dans  Ra8mua.}.et  ab  bac  urba 
ad  oftiam  fluBinU  Catolo  (Gotbaelv  dans  Raamns.  Katlou],  cui  adiacel  urbs  Siktuaa,  ete.  H.  C,  Minu- 
te, tiipHr.  iVmidit  d«r  MHixt b,  p.  9,  par  BiipriM  ittribM  Imr  titatira  à  Ab«alfédt. 


180  EDRIM. 

Sous  le  règne  de  Knout  Erikson,  le  14  juillet  1187,  les  pirates  de 
différentes  nations,  pénétrant  dans  Tintérieur  du  pays»  s^emparèrem 
d*abord  d'Âlmarstâck,  ensuite  surprirent  la  citée  même,  la  saccagèrent 
et  emportèrent  un  butin  immense.  Après  cette  catastrophe ,  Sigtouna 
fut  rebâtie,  mais  négligée  et  successivement  abandonnée;  elle  déclina 
et  ne  compte  que  de  huttes  au  milieu  d'immenses  ruines.  Ici  se  décharge 
une  embouchure  de  Katlou  (du  lac  Mêler  où  est  Telga).  De  cette  embou- 
chure à  Kalmar  il  y  a  200  milles  et  de  Kalmar  à  Tautre  embouchure  de 
Katlou  (Vistule)  80  milles,  ainsi  entre  les  deux  embouchures  de  Katlou 
se  trouvent  500  milles. 

A  190  milles  de  Saktoun  est  situé  Landschouden,  composé  de  deux 
noms  dans  lesquels  on  distingue  Lounden  (Lund  ou  Land),  et  Schonen 
(sehouden),  de  la  Skanie. 

De  Landschouden  à  Djouna  (Dantzik)  200  milles,  et  de  Djounaà 
Zvada  (Suède)  100  milles.  La  ville  Zvada,  qui  donne  le  nom  au  pays,  est 
tout-à-fait  fictive.  Cest  la  Svede  et  de  Zvada  (Suède)  100  milles  vers 
Torient,  se  trouve  Elba  (Elblong),  Elbing.  Elblong  était  une  position 
depuis  longtemps  fréquentée.  Deux  cent  cinquante  ans  avant  Edrisi, 
Wulstan,  anglo-saxon,  visitant  les  embouchures  de  la  Yistule  occiden- 
tale, Weichselmûde,  orientale  Ilfing,  indiqua  la  situation  dllfing 
(Elbing)  ou  Trusa ,  sur  un  lac  de  ce  nom  (lac  Drausen).  Elba  est  vis-à- 
vis  de  Landschouden,  parce  qu'elle  est  de  Fautre  côté  de  la  mer. 

De  Elba  (Elblong)  à  Fimia  (Fellin)  vers  Torlent  100  milles.  La  carte 
itinéraire  rend  son  nom  très-distictement  Felmia.  Je  pense  que  c'est  la 
position  qui  est  nommée  dans  une  autre  section  (¥11,4,  p.  432)  Felmous. 
Il  est  vrai  que  dans  la  carte  itinéraire  (VIT ,  3,  4),  Felmia  et  Felmoos 
sont  inscrites  comme  deux  positions  différentes,  et  le  texte  d'Edrisi  ne 
nous  prévient  pas  de  l'identité  :  mais  cette  identité  décèlent  le  nom,  et 
l'indication  de  la  position.  Edrisi  dirige  continuellement  vers  Torient, 
il  dit  que  la  ville  Felmia  est  à  100  milles  de  la  mer,  sans  donner  sa  des- 
cription (Vn ,  3,  p.  429),  après  il  répète  que  le  fort  Felmous  est  situé  à 
une 'certaine  distance  du  rivage,  c'est-à-dire  100  milles,  qui  Téloignent 
de  Bernova  maritime,  et  il  y  donne  la  description  de  Felmous  (VII,  4, 
p.  432),  qui  manquait  à  la  première  mention  de  cette  position.  Les  lOC 
milles  sont  insu£Ssants  pour  la  distance  entre  Elblong  et  Fellin,  mai 
ils  marchent  dans  la  direction  indiquée. 

La  description  d'Edrisi,  confondant  les  deux  côtés  opposés  de 
Baltique,  confond  aussi  Suède  avec  Finmark ,  quand  il  dit  que  le  roi 
Finmark  possédait  Kalmars  et  une  portion  de  la  Norvège.  Cette  con 
sion  soulève  pour  nous  une  incertitude  quand  nous  voulons  débrouil 
là  position  d'Abreza,  ville  de  Finmark,  Arboga  ou  Abroga,  ville  anti> 


6KAlf DINÀYIA ,  70.  181 

de  Suède  porte  un  nom  analogue.  Mais  si  Ton  suit  récriture  de  la  carte 
itinéraire,  Abreza  porterait  le  nom  de  9jj}\  Aboura  ou  Abouza,qui 
répondrait  à  la  yille  Tourkou,  appelée  par  les  Suédois  et  les  indigènes 
Finnois,  Abo  ou  Aboé,  située  sur  la  rivière  Aûro,  Auroïaki. 

70.  A  Finmark  confine  la  Tavastie.  Edrisi  le  connaît.  Il  dit  que 
i^-,^it^  Tebest  est  un  pays  où  Ton  trouve  beaucoup  de  bourgs  et  vil- 
lages, mais  très-peu  de  villes.  De  ce  nombre,  il  nomme  la  ville  9^)j&!^ 
Dagvada,  considérable  et  très-peuplée,  située  sur  les  bords  de  la  mer. 
Ne  trouvant  rien  d^aualogue  qui  pourrait  expliquer  et  déterminer  la 
position  de  Dagvada,  Dagoada,  il  faut  accepter  la  relation  d*£drisi  à  la 
lettre.  Expliquer  Dagvada  par  Tile  Dago,  serait  accuser  notre  auteur 
d*une  nouvelle  confusion  :  à  moins  qu*on  se  convaincrait  qu'à  cette 
époque  Tlle  Dago  avait  été  en  possession  des  Tavastiens  et  fesait  partie 
de  Tebest.  Dagvada  est  éloigné  des  tles  des  Amazones  à  i  et  V*  journée 
(p.  433). 

A  croire  aux  chiffres  de  la  description,  Dagoada  et  Tebest  furent  très- 
éloignés  de  Estlanda  et  plus  rapprochés  à  Tembouchure  de  Katlou  : 
car  de  cette  dernière  la  distance  de  Dagvada  est  portée  seulement  à  100 
milles,  et  de  Dagvada  à  Anho,  ville  de  Estlanda,  elle  monte  à  300  milles 
(p.  431,  452)). 

Estlanda  sjj^l:^)  est  cependant  Estonie,  de  laquelle  Edrisi  avait 
des  relations  assez  abondantes,  un  peu  fantastiques,  qui  donnaient  une 
peinture  des  villes  dans  de  riantes  couleurs. 

Anho  ^  t  ville  de  Estlanda ,  remarquable  par  la  beauté  de  ses 
édifices  et  par  son  état  florissant,  200  milles  éloignée  de  Dagoada.  Cette 
distance  ne  nous  dit  rien ,  mais  les  autres  plus  déterminées  s'appoin- 
tent aux  environs  de  Revel ,  qui  portait  des  noms  variables  :  Linda- 
nissa,  Dani  pillis,  Danilin,  qui  n'ont  aucune  analogie  avec  Anho. 
Cependant  les  distances  de  6  journées  vers  Torient  à  Kalovri,  et  de  50 
milles  en  côtoyant  jusqu'à  l'embouchure  de  Bernova  et  à  la  ville  du 
même  nom,  fixent  Anho  dans  le  territoire  de  Revel. 

Kalovri  ^i^  lieu  de  l'Ëstland,  fortifié,  peu  important ,  dont  le$ 
habitants  se  livrent  aux  travaux  de  l'agriculture  avec  peu  d'avantage , 
mais  élèvent  de  nombreux  troupeaux.  C'est  Kexholm,  Kekkisari, 
Korelenborg,  Karelogrod,  Korelskojgrod  sur  Ladoga,  villes  des 
Kareliens. 

Bernova   I J^   près  de  l'embouchure   de  Bernov  yj}   Parnava 

(p.  432). 

D*i€i  eommencent  des  contes  toujours  plus  ei^travagants  et  plus  fabu- 


i8î  IMtlM. 

leux.  De  Beriiofa  (Parnaya)  à  tj^y^  Felmons  (Vilîende,  Fellin)  Kitaé 
aune  certaine  distance  da  rivage,  100  milles.  Ce  fort  est  ahandonné 
durant  l'hiver.  Dans  cette  saison  les  habitants  se  réfugient  dan»  des 
cavernes  éloignées  de  la  mer,  on  ils  allument  du  feu  qu'ils  ne  cessent 
d'entretenir,  tant  que  dure  la  rigueur  du  froid.  Quand  Tété  revient  et 
que  les  brouillards  épais  et  les  pluies  cessent  de  régner  sur  la  côte, 
ils  reviennent  à  leurs  demeures.  G*est  la  ville  Felmia  déjà  nommée 
(p.  4â9),  distante  100  milles  d'Elba  (Elblong). 

De  Feintons  à  aj^x*  Madsouna,  ville  considérable  et  très-peuplée, 
dont  les  habitants  sont  madjous,  c*cst-à-dire  infidèles  et  ignrcolés,  300 
milles  (Mesothen  en  Kaurlande ,  aujourd'hui  Mittau).  Je  pense  qu'il  n'y 
a  pas  d'erreur  quand  on  lira  la  distance  de  ^  500  milles  par  ^60. 

De  là  à  i^j^  Sounon ,  dépendance  des  Madjous ,  sur  la  cote  70 
milles.  Au  nombre  des  lieux  de  cette  contrée  les  plus  éloignés  de  la  mer 
il  faut  ranger  c^^  Kabi,  ville  qui  est  distante  de  6  journées  et I 
journées  de  Kalovri.  Sounon  est  une  position  maritime  ;  comme  £dri8i 
parle  en  continuité  de  la  distance  de  6  journées  de  la  mer  Kobi,  on 
en  peut  conclure  que  la  distance  de  6  journées  est  de  Sounon.  Pcéso- 
mant  la  position  de  Sounon  à  l'embouchure  de  Hasau  en  Kourlaode, 
on  aura  pour  Kobi  une  ville  assez  importante,  dans  son  temps  Kebela 
(des  cartes  d'Ortel),  Kobola,  à  Test  de  la  gorge  du  lac  Peypous  (où  les 
cartes  moins  détaillées  aiment  mieux  inscrire  Salatski).  Je  préfère 
cette  situation  à  celle  de  Copio  do  Savolax.  (On  a  un  Kobel  tout  prés 
de  Pskov,  c*est  une  petite  localité,  Smitniegorod  Gobel;  de  Faalre 
côté  de  la  rivière  on  a  Kambi).  Et  de  Kalovri  7  journées ,  vers  le  midii 
X^P^  Djintiar  (Ingria ,  et  Ischora  sur  Ischora)  ville  considérable  sar 
le  sommet  d'une  montagne  inaccessible ,  où  les  habitants  se  défendent 
contre  les  attaques  des  magiciens  de  Russie.  Cette  ville  n'est  sons  b 
domination  d'aucun  roi  (Vil,  4,  p.  452 ,  455).  Toutes  ces  villes  et  pays 
n'appartiennent  pas  à  la  Roussia. 

Roussi  A,  septentrionale. 

71.  La  Russie  septentrionale  est  une  vaste  contrée,  qui  s'étend 
beaucoup,  soit  en  longueur,  soit  en  largeur  (Vil,  4,  p.  455),  environii^ 
de  montagnes;  les  lieux  habiles  y  sont  rares  et  personne, dit Edrisi,  n*d 
pu  nous  indiquer  les  noms  avec  certitude.  (Les  trois  villes  sont  marquées 
dans  la  carte  itinéraire  (VII,  5),  mais  anonymes,  sans  qu'aucun  nom  y 
soit  inscrit).  L'extrémité  occidentale  de  l'océan  ténébreux  touche  à  la 
partie  septentrionale  de  la  Russie  et  s'étend  du  côté  du  nord ,  puis  se 
détourne  v^rs  l'occldeat.  Là  il  n'existe  aucun  liear^seeptible  d^tre 


trayersé  par  les  naTigaleurs  (TU,  â,  p.  454).  Un  grand  aemiirt  dt  cours 
d*eaux  découleot  dss  montagnes  el  vont  se  perdre  dans  le  lae    ^^ 
T^nnif  lao  très-considérable,  au  mlUieu  duquel  est  une  haute  mon- 
tagne,  peuplée  de  chèvres  sauvagps  et  d'autres  animaux  nouMoés  ferber 
ou  herber  (castor)  (76).  La  longueur  de  Test  à  Touest  est  de  2>00  milles 
et  la  largeur  de  100  milles  (VI,  6,  p.  405).  De  la  Tille  Boulgar,  située 
sur  Ithil,  à  la  frontière  orientale  de  cette  Russie,  il  y  a  iO  stations 
(p.  403).  Les  auteurs  postérieurs  ne  néglîgaient  point  de  s'entretenir  de 
ce  lac  avec  quelques  difiérence.  IbnSaid,  1276,  détermine  par  Ion- 
guitude  et  latitude  la  position  de  âjûU  iidî  château  fort  de  File  qui 
se  trouve  sur  le  lac  Uj^  Touma,  qui  est  long  630  milles  de  l'ouest  à 
Test,  et  large  à  peu  près  300  milles.  Au  millieu  de  ce  lac  il  y  a  Ttle  de 
babr  (castor)  de  presque  150  milles  en  long  et  70  en  large.  Un  château 
fort  est  bâti  sur  une  montagne  de  cette  tle  et  on  y  garde  les  trésors  du 
«iltan  des  régions  des  ^^L«^Ji  Toumaniens.  ANBihaki  parlait  de  nom- 
breuses rivières  qui  se  déchargent  dans  ce  lac  (Abulf.,  texte  arabi  p.  225). 
Nous  ne  nous  efforcerons  pas  de  rechercher  les  sources  de  tous  ces 
c2>ntes,  ni  ce  qui  a  pu  donner  Forigine  au  lac  Termi,  ou  Touma  ;  si 
c'est  Peipons,  Ladoga,  Onega,  ou  les  marais  de  la  Polisie;  nous  remar- 
querons seulement,  qu'Edrisi  se  plaint  du  manque  de  connaissance , 
avoue  son  ignorance  sur  toute  la  Russie  septentrionale.  En  effet,  il  n'y 
a  rien  d'étonnant  s'il  n'a  connu  Fexistence  de  formidables  colonies 
skivo-russes,  transsylvanlennes,  zaleskie,  qui  n'étaient  éloignées  que  dix 
stations  de  Boulgar;  mais  il  est  surprenant  que  ceux  qui  lui  ont  fourni 
des  renseignements  sur  la  mer  Baltique,  ne  Font  pas  instruit  de  Fexis- 
tence de  Novogrod.  Ces  renseignements  cependant  venaient  directe- 
ment de  la  mer  Baltique ,  où  Novogrod  soutenait  des  communications 
avec  les  Normands,  développait  son  commerce  là,  où  les  Normands- 
skandinaves  et  les  Pomoraniens  donnaient  Fhospitalité  à  ses  marchands  : 
yeiM  gTŒwmm  t'n  Julino  (Adami;  brem.  hist.  eccies.  Il,  12)»  Le  souvenir 
des  courses  des  Varègs,  Russes,  et  de  leurs  passages  par  la  Novogrod,. 
n'était  pas  encore  oublié. 

72.  Cependant  les  Arabes,  par  leur  chemin  ordinaire,  que  les  rela- 

(70)  JiqlMrt  traduisit  ^3  on  yj  tigre.  &  oftUM  que  te  tigre  est  appelé  berber  par  1»  Parsant* 

VaUii  Tarabo  empruntait  du  partan,  ii  empruotait  aussi  d'autres  idioitaes  pour  désigner  les  objets 
étrangers.  Dans  le  climat  de  Boussla  le  tigre  n'existe  pas.  Dana  ce  climat  les  Slates  connaissent  le 
k«ber,  bebr.  en  allitmand  Biber,  en  fiançait  bièvre,  du  grec  et  lalln  castor.  L'idiome  arabe  n*a  pas  is 
nom  pour  le  castor,  dit  Fraehn  (Um  Foesl.  Berkbte,  p.  87),  U  «e  sert  ou  de  l'appellation  tatare  Umn- 
éufu  oo  de  Mlle  dee  slates  Mr.  —  Abonlflida  relate  «ne  singulière  description  de  cet  animal,  il 
rwseabte,  dil-U.  an  Uoo  par  la  force  et  au  guépard  par  sa  faite,  aussi  dit-«B ,  «et  il  généré  par,  ces 
étox  espècis  d'animanx. 


i9à  EDRiSf. 

tioDS  commerciales  soutenaient  encore,  avaient  des  notions  plus  détail- 
lées sur  ces  parties  septentrionales,  comnïe  on  le  Voit  par  quelques 
mentions  subreptices.  Ainsi  Ibn  Saîd  raconte  que  le  prince  de  la  ville 
Ajti^  Maschqa,  était  Slave  et  qu'il  possédait  un  royaume  étendu  et 
une  armée  nombreuse,  (ap.  Âbnlf.)  et  d'après  la  longitude  et  la  latitude 
qu-il  donne  de  sa  position,  elle  est  pour  sûre  dans  Tintérieur  des  terres 
Slaves.  Bakou i  ajoute  que  Mascliaqa ,  ou  Maschafa,  est  une  grande  ville 
du  pays  des  Slaves  (le  pays),  sur  le  bord  de  la  mer ,  entre  des  Ifeui  que 
les  armées  ne  peuvent  traverser.  Il  y  a  beaucoup  des  vivres,  du  miel, 
de  la  viande,  des  poissons;  on  se  sert  d'hommes  au  lieu  de^chevanl. 
Il  faut  l'agrément  du  roi  pour  s'y  marier;  ce  prince  est  absolu  pour 
ses  sujets  (VII,  6).  —  Moskva,  Moskou,  fondée  en  1147,  était  déjà  une 
ville  considérable  du  temps  d'Ibn  Saïd,  mais  il  n'est  pas  croyable 
qu'elle  aurait  donné  alors  son  nom  au  prince  et  au  pays ,  n'étant  pas 
encore  résidence.  Les  Tatars  et  les  Arabes  orthographiaient  son  nom 
par  j'X*4/»  I^C^^^Cw»  Maskva,  Quel  est  donc  cet  empire  Slave 
Maschqa? 

La  même  incertitude  offre  jLs  Araz,  qu'Ibn  Saîd  place  prés  de 
l'Océan  :  nous  l'avons  cherchée  en  Servie: 

La  même  présente  Ja^^^  Sousith,  forteresse  dans  le  pays  des  Sklab, 
où  il  y  a  une  fontaine  salée  dont  on  tire  le  sel ,  et  une  source  de  mie! 
(Bakoui  VII ,  4).  Toutes  ces  relations  arabes,  au  lieu  de  fournir 
quelques  renseignements,  demandent  des  explications  hasardeuses. 

On  se  trouve  mieux  avec  ^^^  t^^j  Vaïsoua  ou  Valsou,  pays  situé 
au  delà  des  Boulgars,  distant  de  5  mois  de  chemin.  C'est  là  que  les 
Boulgars  font  un  échange  muet.  Les  peuples  Vaïsou  n'entrent  pas  dans 
le  pays  des  Boulgas ,  parce  qu'en  été  ils  y  périraient  (Bakoui  VII,  8)*  ^-^j. 
Ces  Vaisou  sont  les  Vess,  voisins  de  Novogorod. 

De  même  on  n'a  pas  d'embarras  avec  K^  loura  iL^  lahra ,  pays  der 
Tourks,  musulmans,  chrétiens,  juifs,  mages,  payens,  40 journées d 
marche,  près  de  la  mer  des  ténèbres.  Ils  ne  sèment  plus,  mais  ils  o 
beaucoup  de  forêts,  vivent  de  poisson  et  de  chasse;  on  dit  que  1g 
Boulgars  y  portent  des  sabres.  Ces  peuples  vont  vers  la  mer  des  ténèbr» 
pêcher  de  très- gros  poissons,  qui  sont  chassés  par  d'autres  enco 
plus  gros.  (Bakoui,  VI,  25,  VII,  10).  Les  loura  habitent  à  l'est  de  Peri 

Ves  et  loura  ne  sont  pas  de  la  race  Slave.  Ils  ne  sont  pas  nommés 
Edrisi,  il  semble  qu'ils  lui  sont  inconnus.  Mais  il  connaît  quelques  autr 
peut-être  par  des  relations  directes  avec  les  Komans,  mais  plus  certair 
meut  il  les  a  trouvés  dans  les  géographes  arabes,  au  moins  ce  qu'il 
desRouss,qui  ne  sont  pas  Rouss-slaves,  est  puisé  dans  les  ouvrages  ara 


^^s 


> 


ROUS-TOimK,   75.  i85 

Rous-tourfc,  NiBARU. 

75.  Le  fleave  Âthil,  Ithil,  venant  de  la  Russie  (inconnue)  et  passant  par 
les  pays  des  Boulgars,  déchaîne  ses  eaux  dans  la  merde  Kbozarou 
Dilem  (Caspienne).  La  source  de  ce  fleuve  est  vers  Torient,  dans  une 
contrée  déserte  et  fétide,  d*où  il  coule  vers  Toccident  et  vers  les 
Boulgars,  se  détourne  ensuite  vers  Torient,  traverse  la  Russie,  la 
Boulgarie  et  le  pays  de  Bartas ,  parvient  enfin  à  la  Khozarie,  où  il  se 
jette  dans  la  mer.  On  dit  qu'il  se  divise  en  plus  de  soixante  et  dix 
bras,  formant  ensemble  le  fleuve  qui  coule  en  Khozarie  (VI,  6.  p.  405). 
Le  fleuve  Sakir  dérive  du  fleuve  Ithil  et  se  dirige  séparément  vers  le 
Pont  (p.  400). 

De  Boulgar  à  la  frontière  de  Roussie,  iO  stations;  et  du  même 
Boulgar  à  Kokianah,  environ  20  stations. 

Kokiana  ^L^^  est  une  dépendance  du  pays  de  Boulgar,  habile  par 
des  Tourks,  connu  sous  le  nom  de  Lw«t  Roussa.  Ces  Rousas  sont  divisés 
en  trois  hordes,  dont  Tune  se  nomme  rr*^l;J  Beravs.  Son  roi  réside  à 
Kokiana.  La  seconde  horde  se  nomme  ^^j!^  Slavia,  et  son  roi  de- 
meure à  Hj^^  Slava,  ville  sur  le  sommet  d'une  montagne.  La  troi- 
sième est  àJUjI  Arlhania  ou  Arsania,  ou     c^Wï  al  Trania,  jolie 
ville  bâtie  sur  une  montagne  escarpée  entre  Slava  et  Kokianah ,  c'est- 
à-dire ,  à  4  journées  de  la  première  et  de  la  seconde  de  ces  villes.  Les 
marchands  musulmans  parviennent  à  Kokianah  :  quant  à  Ârthania 
(d'après  le  rapport  d'Ibn  Haoukal),  aucun  étranger  n'y  peut  pénétrer, 
car  les  habitants  mettraient  infailliblement  à  mort  quiconque  oserait 
s'introduire  dans  leur  pays.  On  en  tire  des  peaux  de  berber  (castor) 
noirs ,  de  renards  et  du  plomb.  Ce  sont  les  marchands  de  Kokianah  qui 
se  livrent  à  ce  commerce.  Les  Rouss  (Tourks)  brûlent  leurs  morts  et  ne 
les  enterrent  pas.  Quelques-uns  se  rasent  la  barbe ,  d'autres  la  réunis- 
sent et  la  tressent  à  la  manière  des  Arabes  du  Douab.  Leur  habille- 
ment est  court  et  de  l'espèce  de  ceux  qu'on  nomme  kourtak  :  tandis 
que  celui  des  Khozars,  des  Boulgars  et  des  Badjinaks  est  le  kourtak 
complet,  tissu  de  soie,  de  coton,  de  lin  ou  de  laine  (YI,  6,  p.  401,  402). 
Et  il  y  a  deux  espèces  de  Rouss.  Les  uns  sont  ceux,  dont  nous  traitons 
dans  la  présente  section  (les  Tourks);  les  autres  ceux  qui  habitent  dans 
le  voisinage  de  la  Hongrie  et  de  la  Djetoulie  (p.  404).  Les  Badjinaks  sont 
en    guerre   avec  les  Rouss,   quoiqu'ils  ont    les  mêmes  mœurs  et 
suivent  les  mêmes  coutumes  que  les  Rouss.  Ils  brûlent  leurs  morts, 
quelques-uns  se  rasent,  d'autres  se  tressent  la  barbe;  leur  vêtement 
consiste  en  manteaux  courts  (tout  comme  Rouss),«et  leur  langue  diffère 
tant  de  la  langue  rousse ,  que  de  celle  que  parlent  les  Basdjirt  (Bascb* 


186  BDBISI» 

kirs)  (VII,  p.  i57).  C'est  tout  ce  qu^drisi  relate  de  cette  espeee  des 
Rouss-Tourks.  En  les  plaçant  sur  une  distance  de  8  jouraées  sur  les 
confins  des  Bouigars,  il  leur  assigne  un  domicile  rapproché  à  Ithil  et  les 
^pare  des  Rouss  de  Kiiov  par  de  spacieuses  possessions  des  Komans. 
Edrisi  proteste  que  rien  n'a  été  admis  dans  sa  discriptioii  qui  ne  serait 
pas  attesté  à  Tunanimité  par  des  voyageurs.  Blende  fois  il  met  en  doute 
sa  déclaration,  et  cette  fois-ci  ce  doute  change  en  certitude  :  qu*il  ne 
relate  pas  ce  que  des  rapports  oraux,  lui  ont  apportés,  mais  il  foit  copier 
ce  qu'ont  dit  ses  devanciers,  et  lui-même  indique  Fauteur  copié  dans 
Ibn  Haoukal.  La  copie,  quant  aux  paroles,  est  fidèle,  mais  rendue  dans 
un  autre  sens  et  interprétée  d'une  manière  toute  différente.  Avant  de 
l'examiner,  nous  allons  résumer  l'histoire  de  la  marche  des  investiga* 
tiens  savantes,  pour  découvrir  les  sources  de  la  connaissance  de  trois 
souches  de  Rouss. 

74.  En  1800  )Villiam  Ouseley  publia  à  Londres  une  géographie  arabe, 
lui  donnant  pour  auteur  Ibn  Haoukal.  On  y  a  remarqué  les  trois  sou- 
ches des  Rouss.  Ewers  (kritische  verarbeilungen  zur  Geschichte  der 
Russen,  p.  78,  sq.)  se  mit  en  campagne  d'en  profiter  et  inventer  se^ 
vues.  En  1023,  Fràhn,  guidé  par  sa  parfaite  connaissance  de  l'idiome 
oriental,  analysa  les  textes ,  confrontant  les  passages  d'Ibn  al  Ouardi  et 
d'Bdrîsi.  Le  passage  de  ce  dernier  lui  était  connu  par  l'intermédiaire  de 
Schemseddin  de  Damaschk,  géographe,  grand  érudit,  mort  en  1^06, 
attestant  qu'Edrlsi  distinguait  quatre  sortes  de  Slaves. 

En  attendant,  du  fond  du  dépôt  de  Leyde,  Ibn  Haoukal  souleva  des 
réclamations.  On  s'était  persuadé  que  la  géographie,  publiée  par  Ouseley, 
était  quelque  peu  plus  ancienne  :  Ces  présomptions  furent  avérées 
quarante  ans  plus  tard.  La  publication  d'Ouseley  offre  une  géographie 
d'Abou  Ishak,  Persan  d'Istakhar,  vivant  vers  950.  Le  texte  arabe  de  cet 
auteur,  lithographie  en  1859  par  Môller,  fut  traduit  en  Allemand  par 
Mordtmann  à  Hambourg,  1845.  Préalablement  cependant  Fràhn  réussit 
à  donner  à  la  fin  de  ses  investigations  les  passages  en  question,  aussi 
bien  d'Istakhri  que  d*lbn  al  Ouardi.  —  En  même  temps,  1856-1840» 
paraissait  la  description  d'Ëdrisi ,  et  on  pouvait  se  convaincre  qu'Edrlsi 
n'a  jamais  dit  ce  que  lui  imputait  Schemseddin  dimeschki. 

Or,  dans  l'état  actuel  des  connaissances,  on  sait  que  la  pre- 
mière source  de  la  narration  de  différentes  souches  ou  hordes  de 
Rouss  se  trouve  dans  Abou  Ishak  d'Istakhar.  Dans  le  chaipitro  o&  il 
traite  de  la  mer  Khozar,  il  dit  que  sur  les  bords  d'Iihil  et  dans  les 
contrées  peu  éloignées,  habitaient  :  -Khozar,  Bartas  et  Rouss.  Des 
Rouss, dit-il ,  il  y  a  trois  ^U«o)  sortes  :  dont  une  estra^rocheeà 


ROUS-TOOAK,   7S.  187 

Doulgar,  son  roi  réside  à  AjbjS'  {^}^j^  ^}^»^  àiU^  Kouthaba , 
Kousaba,  Koalaba),  ville  plus  grande  que  Boulgar.  La  seconde,  la  plus 
considérable,  s'appelle  ^.j^  Salavia  (dont  le  roi  demeure  à  Slava y. 
La  troisième  population  porte  le  nom  de  IJIJy^l  Arthania ,  Ersauia 
et  son  roi  réside  à  bit  îj\jj\  {àjljj\)  Ersana,  Ârta(Ujt  Ersa).  Les 
marchands  parviennent  jusqu'à  Koutbaba  ;  aucun  d'eux  ne  va  à  Ârba 
(Ersa),  car  les  habitants  mettent  les  étrangers  à  mort  et  les  noyent. 
Par  consé<iuent  personne  ne  peut  dire  ce  qui  se  passe  là ,  car  il  n*y  a 
pas  de  communications.  De  Ârba  (Ersa)  on  tire  des  peaux  de  zibeline 
noire  et  du  plomb.  Les  Rouss  brûlent  leurs  morts  avec  le  mobilier, 
pour  le  salut  de  leurs  âmes.  Leur  habillement  est  court.  Ârba  (Ersa)  est 
située  entre  le  pays  des  Khozars  et  des  grands  Boulgars,  qui  confinent 
au  Roum ,  au  nord  de  ceux-ci.  Ces  Boulgars  sont  nombreux  et  à  tel 
point  puissants,  qu'ils  imposent  le  tribut  aux  provinces  limitrophes  du 
Roum.  Les  Boulgars  intérieurs  sont  chrétiens  (Istakhri,  version  de 
Mordtmann,  p.  106  ;  comparez  Frâhn ,  Ibn  Foszl.  Berichte,  p.  264  :  le 
passage  d'Ibn  Haoukal,  ibid.  p.  257,  258;  code  persan  de  la  bibl. 
de  Gotha,  ibid.  p.  265,  266;  etc.).  Âbon  Ishak  Istakhri  ajoute  que  de 
Tembouchure  dlthil  à  Boulgar,  il  y  a  deux  mois  de  chemin  parles 
déserts;  et  20  journées  en  descendant  le  fleuve.  De  Boulgar  aux 
premières  frontières  de  Roum  (Russie),  iO  stations;  et  de  Boulgar  à 
koutbaba,  20  stations;  et  à  Basdjird,  26  stations  (p.  107). 

Qui  sont  ces  Rouss,  d'après  cette  relation  primitive?  Quels  sont  leurs 
rois  aussi  distingués?  où  sont  leurs  résidences?  —  On  était  d'accord 
que  Koutaba  est  Kouiaba ,  Kiiov.  Outania  et  Ârba ,  reconnues  pour 
Âvtania  et  Ârta,  Ersania  et  Ersa,  décelaient  palpablement  les  Ersans, 
souche  de  Mordva.  Mais  Siavia,  Slava  et  non  Sklaba,  qu'indique-t-elle  ? 
offre-t-elle  les  Slaves,  les  Lithuaniens  ou  quelques  autres? 

75.  Koutaba  ou  Kouiaba  est  éloignée  20  stallous  de  Boulgar.  Istakhri 
indique  souvent  des  distances  par  mirhaba,  stations.  De  station  eu 
station  il  circule  dans  le  Mavaralnahar  ;  il  compte  10  stations  de  Balkh 
à  Bamian,  etc.  Les  stations  de  cette  mesure,  au  nombre  de 20,  pourraient 
à  peine  répondre  à  un  tiers  des  distances  entre  Boulgar  et  Kiiov.  Mais 
Istakhri  dit  aussi  qu'on  évaluait  toute  la  longueur  de  l'habitable  à  400 
stations,  équivalentes  par  conséquent  à  180  degrés,  à  chaque  degré  2,22 
stations.  Une  vingtaine  de  semblables  stations  ne  suffissent  pas  à  la 
distance  de  Boulgar  à  Kiiov,  mais  pourraient  la  représenter  en  dernière 
nécessité. 

Âbon  Ishak  témoignant  beaucoup  d'amitié  à  Ibn  Haoukal ,  favorisait 
ses  études  géographiques.  Ibn  Haonkal  réprouvant  hautement  l'habi- 


i88  EDRISI. 

tude  des  emprunts  littéraires,  a  dû  spécialment  estimer  Tourrige 
â*Aboa  Ishak,  parce  qu*il  Texploila  et  le  copia  dans  son  traité,  com- 
posé vers  977.  Le  passage  de  trois  espèces  de  Roass  y  est  introduit 
mot  à  mot  de  l'ouvrage  d'Abou  Ishak.  La  lecture  de  Kouthaba  (Kouiaba), 
de  Slavia  et  d*Artania  y  est  conflrmée  par  les  copies  plus  répandues 
et  plus  connues  que  celles  de  Fouvrage  de  son  prédécesseur. 

Edrisi,  en  1154,  puisa  dans  les  écrits  plus  connus  dlbn  Haoukal:  mais 
il  acommode  ses  paroles  à  quelque  autre  relation,  leur  donne  une 
interprétation  toute  différente  denosérudits  modernes,  et  distingue 
les  Rouss  autrement  que  ses  prédécesseurs. 

En  921,  Ibn  Foszlan  a  vu  de  ses  propres  yeux  les  Rouss  venant  dans 
le  pays  des  Khozars.  Ces  Rouss  certainement  n'étaient  pas  Slaves,  mais 
Skandinaves  Yarègs. 

En  947  Masoudi  semble  méconnaître  les  Rouss,  traitant  plus  soigneu- 
sement que  personne  les  affaires  des  Slaves. 

Vers  950  et  977,  Abou  Ishak  et  Ibn  Haoukal  connaissent  les  Sklabons 
et  les  trois  espèces  de  Rouss,  et  ne  les  confondent  point  avec  les 
Slaves.  D'accord  Ersania  est  de  la  souche  de  Mordva  :  or,  Koutaba  n*est 
pas  slave  (^^). 

Moukadessi  (le  jerosoliraîtain  Schemscddin  Abou  Abdallah  Moham- 
med, mort  1052),  rapporte  qu'ils  (les  Rouss)  habitent  une  île  (péninsule) 
malsaine ,  où  ils  sont  à  l'abri  de  toute  attaque.  Leur  population  est 
d'environ  cent  mille  âmes.  Us  n'ont  ni  maisons ,  ni  troupeaux.  Les 
Sklabes  font  des  incursions  dans  leur  pays  (à  l'abri  de  toute  attaque?) 
et  les  pillent  (apud  Iakoul).  —  Or,  ces  Rouss  ne  sont  pas  Slaves,  ne 
possèdent  rien  dans  la  Slavonie,  habitants  maritimes  des  îles,  sont 
Rouss  Yarègs. 

(77)  Mordva  est  an  ancien  peuple,  antrcfois  pins  important,  iordanos,  85«,  lea  appelle  Merdeiu. 
Constantin  porphyrogenètc ,  vers  945 ,  sait  que  le  pays  de  M.opSia  était  éloigné  10  journées  des 

Petschenegs.  Nestor  11  10, avertit  l'emplacement  de  Mordva  sur  le  fleuve  Oka.  lis  firent  face  en  4fSt 
et  iS83  au  grand  duc  de  Russie  George  Vscbevolodovitsch,  et  succombèrent  en  ifSO  sous  KinvaaioB 
des  Hongoux.  Les  Mokâcha  étaient  forcés  de  suivre  les  vainqueurs.  Plan tllarpin  iftW^conaait  la 
défaite  de  Morduins.  Rubriquis  4253,  connaît  le  sort  de  Moxel  situé  au  delà  du  Don.  Ad  aquilonen. 
sunt  silvae  maximae ,  quas  habitant  duo  gênera  hominum  Moxel  (Moxes)  scilicet  qui  sunt  sine  lege» 
puri  pagani.  ...  Post  istos  sunt  alii,  qui  dicuntur  Merda*  (Herclas)  quos  latinl  vocant  Merdmig 
(Merdues,  Mardes)  et  sunt  saraceni.  Post  istos  est  Etilla  fluvius  (Ruysbr.  p.  251,  152).  Marco  Polo 
avait  encore  nommé  Mordui  et  Josef  Barbare  Moxia  et  Moxii, —  Aucun  des  latins  n'a  connu  les  Er$ae. 
Les  investigations  faites  en  Russie  sur  le  lieu  (de  Rytschkov,  Pallas,  Lepecbin,  Georgi)  trouvent  à  la 
fois  Hokscha  et  Ersa  (Erse,  lersian,  au  pluriel  Ersad,  Erdsad)  qui  se  distinguaient  par  l'habillerneBl 
des  femmes  et  quelques  coutumes.  Les  Ersa  demeurent  sur  Piana.  Plusieurs  de  leurs  villages  se 
trouvent  sur  Mokscba  et  dans  la  partie  supérieure  de  Soura  oii  demeurent  les  Hokscha.  Le  long  ds 
Volga,  de  Sok,  de  Tscheremschan  et  aux  environs  des  parties  kazaniennes  et  orenbonrgiennes,  leàr 
colonisation  offre  un  mélangeKFraebn ,  Ibn  Foszl.  Berichte,  p.  468-161).  Arsamesan  tud  deN^ia 
Bovogrod  et  Mokschan  au  nord  de  Pensa,  sent  certainement  les  restes  de  leurs  ckeMieai.  —  Piv 
tettt  eipKeation  de  Enania,  Il  n'y  a  pas  de  place  pour  Kouthaba  A  Kakiaaa. 


ROUS-TOURX,    70.  i89 

76.  Enfiû  la  qualification  de  Rouss  s'est  solidement  établie  dans  la 
Slayonie  ;  les  renseignements  relatés  par  Edrisi  connaissent  une  im- 
mense Russie,  pays  Slave,  et  c'est  de  ces  Rouss -slaves  qu'Edrîsi 
distingue  les  trois  populations  d'autres  Rouss-tourks.  Et  il  y  a  deux 
espèces  de  Rouss,  les  uns  dans  le  voisinage  de  la  Hongrie ,  les  autres , 
dont  la  langue  diffère  tant  de  la  langue  rousse,  que  de  celle  que 
parlent  les  Basdjird  (Edrisi,  YH,  7,  p.  457).  Les  trois  populations  ou 
hordes  de  ces  Rouss  sont  :  Arlhani ,  Slava  et  Bervars,  qui  ont  pour  chef- 
lieu  Kokiana  (Koutaba ,  Kouiaba).  A  quelques  détails  inconnus  à  ses 
prédécesseurs,  il  applique  les  dislances  en  stations,  énumérées  par 
Abou  Isbak  et  Ibn  Haoukal. 

Iakout,  en  1229,  a  la  place  de  stations,  substitua  à  la  distance  de 
Kouiaba  à  Boulgar  les  20  journées  :  c'était  doubler  cette  distance  favo- 
rablement à  l'interprétation  de  Kouiaba  par  Kiiov. 

Ibn  al  Ouardi  en  1549,  relate  les  trois  s^l^  hordes  de  Rouss, 
conformément  à  ce  qu'il  a  trouvé  dans  les  anciens;  seulement  les  appel- 
lations se  défigurent  :  De  ces  trois  populations,  l'une  s'appelle  ^a^j^ 
Kerkian,  avec  sa  ville  àj^-^S  Kerkiana;  l'autre  i^)i^\  Atlava,avec 
sa  ville  JX  Talau  (|JLt  Talva);  la  troisième  J.l  Arani  (  ^j\ 
Arti),  et  la  ville  du  même  nom  (llyland,  Ausg.  part.  XVHI,  p.  150; 
Fràhn,  Ibn  Foszl.  Berichle,  p.  142). 

Le  changement  ou  la  défiguration  la  plus  grave  des  appellations,  est 
plutôt  l'ouvrage  des  auteurs  que  de  simples  copistes.  Les  manuscrits 
d'Abou  Ishak  et  d'ibn  Haoukal  offrent  ajIJ^  ajG^  Kounaïa,  Koutaba 
et  même  Àjb«^  Kouïaba:  ceuxd'Edrisi  &iL^(4>  Kokiana  ;  ceux  d'Ibn 
al  Ouardi  wLTJ^  Kerkiana;  enfin  Dimeschki  nomme  bJjS\S  Kera- 
kertia. 

Yoicl  ce  que  dit  Schems  eddin  dimeschki  dans  sa  très-érudite  cos- 
mographie (p.  155  verso)  :  Edrisi,  dit-il,  rapporte,  que  de  son  temps 
il  y  avait  quatre  genres  aJUUs)!  ^^..Uswt  de  Saklaba,  nommément  : 
Sj^bLo  Slavia ,  3L-oLj  Berasia  (Bervars),  6^^\S  Karakertia  (Ko- 
kiana) et  ^Uit  Ersania.  Tous  portent  les  noms  de  leurs  pays,  à  l'ex- 
ception de  Ersania.  Ceux-ci  dévorent  les  étrangers  qui  y  pénètrent , 
et  à  l'instar  des  animaux  sauvages,  ils  habitent  les  forêts  et  les  roseaux 
de  rivage  de  la  mer  environnante  (Fràhn.  Ibn  Foszl.  Berichte  p.  145) 
Tissu  de  niaiserie  de  l'invention  du  cosmographe,  quia  surpris  plus 
d*une  fois  la  confiance  du  savant  Fràhn. 

77.  Suivant  les  conceptions  qu'Edrisi  développe ,  au  delà  de  la  ville 
boulgare  ji^L?  Taboun,  qui  est  forte,  située  sur  le  sommet  d'une 


490 

montagne  et  entourée  de  champs  fertiles  et  d*liabitatioiis(Y8)«au  delà 
de  cette  ville,  sont  les  monts  bliJi  Kokaia,au  delà  desqoels  on  ne 
trouve  ni  habitations,  ni  être  animés ,  à  cause  de  la  rigueur  du  frokl 
(VU,  6,  p.  456).  Ces  montagnes  s'étendent  depuis  la  mer  ténébreuse 
jusqu'aux  extrémités  du  monde  habité;  elles  atteignent  et  dépassent 
les  pays  de  ladjoudj  et  Madjoudj  à  Textréme  orient ,  puis  se  prolongent 
du  côté  du  midi  jusqu'à  Nitasch  et  la  mer  ténébreuse,  connue  sous  le 
nom  de  poix  résine;  elles  sont  inaccessibles,  à  cause  de  l'excès  du 
froid  et  de  la  permanence  des  neiges  sur  leurs  sommets.  Les  vallées 
sont  habitées  par  le  peuple  dit  ajjjIJ  Nibaria,  qui  possède  six  places 
fortes  et  qui  sait  tellement  bien  se  défendre  dans  leurs  retraites , 
qu'ils  y  sont  inexpugnables.  Ils  ont  pour  coutume  constante  de  ne  point 
se  séparer  de  leurs  armes  et  sont  extrêmement  belliqueux.  Nous  en  re^ 
parlerons,  ajoute  Edrisi,  dans  la  description  du  septième  climat  (YI,  5, 
p.  396).  Mais  il  a  oublié  de  s'acquitter  de  son  engagement  et  il  n*en 
dit  rien  du  tout  dans  le  septième  climat.  La  carte  itinéraire,  n'ayant 
pas  négligé  de  marquer  la  position  do  pays  de  Nibaria  ;  fournit  les  noms 
de  six  places  fortes,  où  je  crois  débrouiller  : 


Tabarkoumouka  (Temnikov) , 
9^*j  lavosora  ou  lousara  (Insara), 
Aj^y  larovna  (Saransk), 
AS[y  Lovaka ,  ou  Louka  (Loukoîan) , 
0^Lw  Sarada  (Ârdatov), 
9^L«Jt  Anaada  ou  Âbaada. 

Toutes  ces  places  fortes  sont  placées  entre  les  branches  d'un  fleuve 
qui  vient  des  monts  Kokaïa  et  porte  le  nom  de  la  ville  située  sur  ses 
bords  A^M  Rousia  (tabl.  itin.  YII,  5,  6).  Dans  la  description  il  est  dit 
là  dessus ,  que  les  six  grandes  rivières ,  dont  les  sources  sont  dans  leç 
montagnes  Kokaïa,  mêlent  leurs  eaux  à  celles  du  fleuve  Rousia  (VI,  5, 
p.  596);  et  la  ville  Rousia,  ennemie  de  Matrakha,  qui  se  trouve  sur  la 
mer  Nitasch,  est  située  sur  les  bords  d'une  grande  rivière  provenant 
du  mont  Kokaïa  (YI,  6.  p.  400). 

Dans  un  autre  passage ,  Edrisi  rapporte  qu'à  70  milles  de  Trebizonde 
vers  l'orient ,  est  l'embouchure  de  ^^ jj  Rousio ,  qui  prend  sa  source 
dans  les  montagnes  i^t  Kabk,  coule  au  nord  (du  nord)  du  pays 
aJ^I  jaA  desAlanes.  Il  n'existe  sur  ses  rives  aucune  ville  célèbre, 

^71)  t«  inscrit  d*Awelin ,  porlt     c^jpLi  Vaa«uii,  tt  !•  Yirliei  latiHt  BtUna. 


MIBAIIA,  77.  194 

Mais  quantité  d«  villages  bien  peuplés  et  de  cultures  Ce  fleuve  se 
dirige  ensuite  vers  le  couchant,  puis  se  jette  dans  la  mer,  auprès  du 
lieu  ci-dessus  indiqué,  à  savoir^  Rousio,  à  70  milles  de  Treblzonde.  Il 
est  navigable  pour  les  petites  embarcations  et  sert  au  transport  des 
marchandises  de  peu  de  poids,  et  à  celui  des  objets  d*approvisionnement 
d'une  habitation  à  une  autre  (YI,  6,  p.  599).  Yis-à-vis  de  Trebizonde 
est  la  mer  i^jj  Rousia,  éloignée  à  5  journées  de  distance  (YI,  5, 
p.  394).  C'est  la  distance  de  70  milles  de  Fembouchure  de  Rousio  (79). 
Cette  notice  indique,  que  la  mer  Rousia  est  la  mer  Zabach  on  Âzof  ; 
le  fleuve  Rouss,  Rusia  ou  Rousio  est  le  Don,  et  son  embouchure  est 
déterminée  près  de  Matrakha,  où  la  mer  Zabach  entre  dans  le  Pont. 
Cette  embouchure  n'offre  aucune  difficulté.  Très -longtemps  le 
Bosphor ,  le  détroit  de  Kertsch,  étaient  considérés  comme  embouchure 
du  Tanaîs,  du  Don  :  la  mer  Zabach  ou  Âzof  n'était  qu'un  lac  qui  se  for- 
mait à  l'embouchure  ,  lac  impraticable  pour  les  grands  navires  (se). 
Quant  au  pay5  de  Nibaria ,  son  emplacement  est  forcément  renvoyé 
vers  le  haut  du  Don  à  côté  de  Tambov  (Taboun),   aux  environs  de 

(79)  Fraehn  (Ibn  Fonl.  Berichte,  p.  S9),  accepte  la  distinction  des  flsavet  ^>.»  ^ .  Rousi^ou 

..    -y 

/   M»*  t  Rouss  et  ft,jYv  .  t  Rousio,'  qu'on  remarque  dans  la  description  d'Edrisi ,  motive  par  difle* 

rentes  désinaisons.  Il  pense  que  le  dernier  Rousio  est  Fas,  Fasis,  que  les  indigènes  appellent  Roubia 
os  Rioni.  Si  Ton  voulait  admettre  l'assertion  d*Edrisi,on  n*a  pas  besoin  d'aller  si  loin,  on  trouve  près 
deT  rebizonde  un  fleuve  du  nom  plus  analogue  Risso,  Rizo,  Russo.  Ce  fleuve  induit  peut-être  les 
géographes  siciliens  et  Edrist  en  erreur  et  confusion,  que  nous  examinerons  bientôt.  —  Le  traduo- 
Unr  Jaubert  s'évertue  de  sa  part  de  distinguer  les  deux  fleuves  Rouss,  à  quoi  il  avait  raison ,  sur- 
toDtà  cause  qu'Edrisi  lui-même  conçut  cette  idée.  Jaubert  pense  que  le  mont  Kabk,  lequel  donne 
ici  l'origine  au  fleuve  (p.  399),  est  le  véritable  Kaukase,  et  Kikaîa  est  imaginaire  des  frimes  du  nord. 
Ia  version  certainement  est  scrupuleusement  exacte  et  rend  bien  l'aberration  d'EdrisI  :  mais  cette 
jexplic»Uon  de  Kabk  n'éclaircit  l'embrouillement  de  la  description  de  celui-ci.  L'origine  kaukasienne 
d'un  fleuve  Rouss  est  controuvée.  —  Ce  sont  les  obscurités  que  répand  la  description  edrisienne  ; 
d'un  autre  genre  sont  celles  qu'a  fourni  en  4S86,  l'érudition  du  très-savant  Scbems  eddin  dimescbki, 
«lir  une  certaine  rivière  Seklab  et  Rous  qui  coule  entre  iLliil  et  Kour  (voyez  ci  dessus  cbap  66).  — 
Il  j  «  encore  dans  la  description  qnelqaes  distances  as8«<  curieuses  entre  Trcbizond  et  l'embonehure 
de  Rousio.  Par  exemple  :  de  Uatrakha  à  l'ile  Saranba  une  journée  ;  de  Saranba  vers  le  sud  on  compte 
40  milles  à  l'j^e  Gftrdia  et  de  Gardia  à  Trebizond  8  journées  de  navigation  (c'est  iO  milles  et  7  jour- 
nées, l'ont  la  traverse  de  8  journées  ou  de  70  milles).  Hais  de  Gardia  à  l'Ile  Azela  il  y  a  tO  journées 
Ters  l'orient  et  Azela  est  située  à  mi-chemin  entre  Trebizonde  et  Matrakha,  et  il  est  nécessaire  de  la 
toodier  quand  on  se  rend  de  l'une  à  l'autre  de  ces  villes  (p.  396).  Or,  de  Trebizonde  à  llatrakha  on 
t%ait  au  moins  iO  journées  de  traverse.  Cette  traverie  n'est  pas  directement  par  la  haute  mer  :  mais 
en  cOtoyani  les  rivages  d'Âbassie  et  d'Imiretie,  où  sont  àchereher  les  prénommées  iles  on  presque 
net.  —La  largeur  du  Pont  300  ou  400. milles  (VI,  6,  p.  i05),  signale  la  partie  lai ge,  rapprochée  de 
Constantinople. 

(80)  Adorie&tem,  est  civitas,  qne  dicitur  Hatrica,  ubi  cadit  flnviusTanaisin  mare  Ponti,  per 
orifidum  habens  latitudinem  xn  railiariam.  lUe  enim  fluvins ,  ante  quam  ingrediatur  mare  PontI , 
boit  quoddam  mare,  versus  aquilonem .  habens  in  latitudine  et  longitudine  septingcnta  miliaria  ; 
Dusquam  habens  profùnditatem  ultra  sex  paasus  :unde,  magna  asasa  non  iogrediuntur  illud,  led 
niercatores  de  Constantinopolim  applicantet  ad  preedietam  eivitatem  Hatricam,  mittunt  barcas  suas 
«•que  ad  flumea  Ttaaim,  ut  emaat  piaeei  itoeatâi,  sUriones  sciUcêt  et  hosas  beebttât  et  alios  pitees 
iefliHt  aultltadliis  (Rnbriquis  en  ISH,  p.  SIS,  de  l'édit.  dt  Michel  «t  Wright.  —  Bt  flièao  p.  Hl. 


192  EDRisr. 

Vorooej,  Ycrs  Orel,  Toula,  Roslov,  où  les  prétendues  Kokaîa  coloriaient 
l'ignorance  par  ses  cimes  blanches.  Au  reste,  cherchant  dans  toute 
rimmensitéde  la  Russie  les  six  places  fortes  nibariennes,  on  ne  retrouve 
de  noms  quelque  peu  analogues,  à  la  fois  réunis  ensemble,  que  sur  les 
confins  de  la  goubernie  de  Penza.  Ces  noms  ^'éloignent  quelque  peu  du 
Don ,  mais  ils  indiquent  les  places  qui  couvraient  le  pays  nibarien  des 
incursions  des  Boulgars.  L'écriture  arabe ,  flexible  aux  changements 
imprévues,  livre  ^iLj»  Nibaria  à  des  conjectures.  Ajoutez  un  point 
diacritique  et  vous  y  trouvez  ajjLj  Benazia,  Penazia,  Penza.  Plus 
heureux  que  moi,  peut-être  un  jour  retrouvera  un  emplacement  plus 
convenable  pour  cette  curieuse  Nibaria. 

K  0  M  A  N  I  A. 

au  dire  d'Edrisi  et  de  Pelakhia. 

78.  Les  Kangly,  Kangars,nsTÇ«vàxo«,  narçtvaxot,  narçcvaxira*,  Petinei, 
Pincinati,  Piucinnaturi,  vjJ^Usf  Badjinak,  Pietschinghi,  partisans 
et  satellites  de  Boleslav-le-grand,  dominaient  cent  cinquante  ans  su 
les  stèpes  de  la  mer  noire.  Konstantin  porphyrogenète  nomma  lenr^ 
hordes  et  indiqua  leur  emplacement  depuis  le  Danube,  jusqu'au  delè^ 
du  Dniepr  vers  le  Don.  Elles  possédaient  à  elles  seules  des  espaces  ra 
vagées ,  remplies  de  décombres.  Il  n'y  avait  que  de  hordes  sans  vill 
sans  établissements  fixes.  La  domination  de  cette  nature,  mettait  de 
obstacles  à  la  communication  continentale.  Les  Russes,  pour  se  rende 
à  la  mer,  descendaient  le  Dniepr ,  forcés  mainte  fois  de  combattre  la 
mauvaises  dispositions  des  hordes.  Vers  Tannée  1050,  les  hordes  d» 
Komans  vinrent  combattre  leurs  confrères  Pietschings  et  détruisirer 
leur  domination.  Depuis  cette  époque  le  nom  de  Pietsching  ou  de  Ba» 
jinak  n'était  connu  que  dans  leur  camp  antique,  dans  leur  gite  pri 
tif,  dans  le  voisinage  des  Boulgars  et  des  Baschkirs,  au  delà  de  Vol 
éloigné  de  l'Europe.  Sur  les  stèpes  de  la  mer  noire,  à  leur  pi 
gagnèrent  la  renommée  les  Komans,  Koumans,  Polovtsi,  Pla'uci,  Pa 
ainsi  variablement  qualifiés. 

Les  Polovtsi  établis  sur  les  stèpes  du  Dniepr ,  faisaient  de  fréque 
excursions  en  Pologne.  Sur  trois  ou  quatre  points  éloignés  ils  exécu 
le  passage  nocturne  par  la  Vistule,  et,  pillant,  emportaient  le  butin 
leur   camp  (Gallus,  II,  19,  p,  74).  Boleslav-le-hardi  cberchait 
Polovtses  jusque  dans  leurs  stèpes,  pêne  transpartanis  (Mattb.  II, 
Sous  le  règne  de  Vladislav  Herman,  en  1190,  il  renouvelèrent 
incursion.  Le  jeune  Boleslav  -  bouche-'torse ,  à  peine  ceint  chevaV  1er, 
ilétruisit  leur  irruption  et  jeta  une  telle  épouvante  quMli  n'osèrervl  u 


KOMANIA,  79.  493 

montrer,  jusqu'à  la  mort  de  Boleslat  1139  (Gall.  II,  17,  p.  175;  Matth. 
II ,  29).  Après  on  les  revit  en  Pologne  à  la  suite  des  Russes,  quand 
ils  étaient  leurs  alliés  (Vinc.  Kadiubconides,  24,  p.  549).  Ils  étaient 
ennemis  des  Russes  et  secouraient  les  knezs  (princes)  dans  leurs  que- 
relles, ce  qui  était  de  mauvais  augure  pour  Kiiov. 

Les  Komans,  appelés  Polovtsi  et  Parti,  gagnèrent  une  certaine  célé- 
brité et  personne  n'a  porté  son  observation  sur  l'état  de  leur  élablisse- 
ment.  Un  seul,  Edrisi,  autant  que  je  sache,  en  a  dit  plus  que  les  autres. 
Sa  description  a  donné  l'impulsion  à  plusieurs  historiens  modernes, 
d'avancer  que  les  Polovtsi  étaient  plus  fixés  à  la  glèbe  que  les  autres 
hordes  et  qu'ils  ne  s'adonnaient  autant  au  brigandage  :  mais  leurs  pos- 
sessions restaient  indéterminées. 

Quand  on  entreprend  de  chercher  des  renseignements  dans  la  descrip- 
tion d'Edrisi ,  afin  de  les  déterminer,  deux  difficultés  ses  présentent  : 
l'une  c'est  la  manque  de  positions  indicatrices  et  le  vide  de  la  localité, 
l'autre,  la  confusion  et  l'erreur  dans  lesquelles  s'abîmèrent  Edrisi  et 
les  géographes  de  Sicile,  en  coordonnant  les  relations  qu'on  leur  avait 
fourni. 

Les  Komans  possédaient  les  terres  successivement  inondées  par  des 
hordes  qui  orninairement  ne  laissaient  aucun  nom,  aucune  trace  de  leur 
séjour  après  leurdisparitiou.  A  peine  quelques  fleuves  considérables  con- 
servaient leur  appellation  :  la  terre  sur  tous  les  points  restait  anonyme. 
Les  hordes  précédentes  n'ont  fixé  aucun  nom  au  sol  abandonné.  Pour- 
rait-on donc  espérer  que  quelques  dénominations  komanes  se  seraient 
eonservées  et  perpétuées  sous  la  domination  postérieure  des  Mongoux  ? 

79,  Edrisi  sait  que  trf^^^  Danabros  prend  ses  sources  au  nord 
du  lac  Termi  (ou  Touma);  au  delà  de  ce  lac  (VI,  6,  p.  405,  voyez  la 
carte  itinéraire)  (si).  De  l'autre  côte  du  lac,  c'est-à-dire  de  celui  du 
midi  (sa),  le  fleuve  Dnabros  prend  sa  source  au  milieu  de  prairies  et 
de  forêts,  et  là  il  porte  le  nom  de  ^jA)  Beltes  (VII,  5,  p.  454)  (ss). 
La  carte  itinéraire  ne  connaît  pas  des  sources  au  sud,  elle  trace  le 
conrs  du  Dnabros,  indiquant  les  sources  rapprochées  aux  monts  Kokaïa, 
Siccompagnées  de  l'épigraphe  ^ji^^^  j^^  ^^^  ^^^  ^^"^  *^"  fleuve 

(81)  Jaubert  traduisit  le  texte  :  fleuve  provenant  du  lac  Termi  :  la  carte  s'oppose  à  cette  interpré 

talion. 

(8î)  Le  traducteur  dit  :  de  l'autre  côté,  c'est  à-dire,  vers  le  midi  ;  la  carte  itinéraire  contrarie 

celte  version. 

(83)  On  peut  inventer  quantité  d'hypollièscs  sur  le  nom  de  Beltes^  rivière  plus  considérable ,  plus 
grande  boUchaia;  venant  du  côte  de  la  baltiqtie,  ou  de  la  Polisie,  Podlasie,  poliska;  sortant  ou  pas- 
sât par  des  marais  boueux,  (boue  bloto),  elle-mêaie  boueuse,  holotna,  blotna. 

III.  15 


494  EDRISI. 

Dnabros,  et  le  conduit  autour  du  lac  Tcrmi,  courbé  vers  le  sud-est 

(Yiï,  5,  Vï,  5). 

Edrisi  rapporte  que  la  Russie  avait  plusieurs  villes  sur  1er  rives  du 
Dniepr:  Barmos  (Smolensk),Kiiov,Berizoula,BerisIav  (Periaslav),  Kano 
(Kaniov);  il  sait  que  Zaka,  près  de  Tembouchure  du  Dniestr  et  du  Dnabros, 
Molsa  et  xVlcska ,  étaient  en  la  possession  de  la  Russie;  toutes  ces  villes 
n'appartenaient  point  aux  Komans  (84).  Dans  Tannée  1175,  Petakhia 
va  directement  de  Kiiov,  G  journées  par  le  continent  jusqu'au  passage 
du  Dniepr,  par  les  terres  russiennes  sans  rencontrer  un  Koman  (Tour 
du  monde  de  Pctakh.  par  Carmoly,  Paris  1851,  p.  8,  9).  C'est  la  distance 
donnée  par  Edrisi,  de  Kiiov  ù  Alcska.  En  attendant,  Edrisi  en  exami- 
nant le  cours  et  les  sources  du  Dnabros,  tracés  sur  la  carte  itinéraire 
rogéricnnc,  remarque  tout  au  nord ,  sur  ses  rives  rapprochées  au  lac 
Tcrmi,  deux  vill'^s  florissantes  des  Komans,  appelées  ^}jy^  Sinoboli 
et  àlt^j*  Mounischka,  et  il  décide  que  la  majeure  partie  du  lac  du  cété 
de  Torient,  dépend  de  la  Komanie  (VII,  5,  p.  45i).  L'histoire  ne  connaît 
aucune  Komanie  aussi  enfoncée  dans  le  nord  de  la  Russie,  le  lac  Termi 
n'a  aucune  existence;  or ,  toute  cette  exposition  des  géographes  de 
Sicile  s'évanouit,  manifeste  une  méprise,  une  erreur  qui  demande 
une  toute  autre  explication. 

La  diction  d'Edrisi  fournit  le  moyen  de  rectifier  le  malentendu.  Il 
avait  dit  que  de  Barmonsa,  qui  est  une  belle  ville,  bâtie  sur  les  bords 
du  Dnabros  ,  à  Sinoboli,  grande  ville,  bâtie  sur  la  rive  occidentale  du 
Danube  (Dnabros),  on  compte  6  journées  (VI,  5.  p.  597,  454)  (85).  Si- 
noboli ,  ville  russe  (p.  597) ,  située  sur  le  Dniepr  et  dépendante  de  U 
Komanie  (p.  45i) ,  avait  par  conséquent  son  emplacement  quelque 
pan  au  midi,  dans  une  position  peu  éloignée  de  Kiiov.  On  ne  saurait 
indiquer  aucun  autre  emplacement  plus  probable,  que  tout  de  suite  au 
delà  de  Berislav  ou  Periaslav.  A  la  suite,  en  descendant,  une  autre  ville 
Mounischka  sur  le  bord  occidental  du  niénie  fleuve. 

De  Kiiov  à  ^^U  Naï,  ville  de  Komanie,  G  journées  (VI,  5,  p.  598). 

De  Naï  à  5j^  Kirah  ou  Firah,  vers  l'orient,  25  milles. 

De  Kirah  à  /yjjL)  Narous,  vers  l'orient,  50  milles. 

8-i)  Si'kninnil.oncorn  en  Kriméo,  appartenait  aux  Rouss.  Kd  outre  ils  cnnsf'rTaîrnt  certainMBCBl 
lt>ur  oiablisscmcDt  vareg,  sur  les  langues  de  Tcudcr,  ancien  Dromos  Aiiiillcos  près  du  golfe  Segal- 
tM-liouk.  Les  (îrecs  appelaient  ces  Varegs  Dromites  (Simon  logotheta,  ap.  Stritter,  II,  958,  967};  le 
gol.e  ^•■gallscliouk  ,  sur  la  carte  de  1318,  se  nomme  rarangolimena,  de  même  sur  la  carte  catalane 
de  1577;  ensuite  cette  appellation  continuait  à  se  (aire  connaître  au  sud  de  la  pointe  Rosicoeo 
Krimée,  oii  l'on  voit  sur  la  carte  de  1497,  de  Fredutio,  Varangida;  de  même  sur  une  carte  de  151* 
(Scliafarjik  ,  slav.  slarojitn.  II,  2,  §27,  p.  50G,  note  G6];  les  certes  du  xvii*  siècle  continuaient  encore 
d'indiquer  dans  la  Tauridc  un  bourg  f'arangito  près  du  promontoire  Rosofar,  Rosico  ou  Eskiforoi. 
(8S)  L'erreur  de  l'api  ellation  du  Danube  au  lieu  du  Dnabroi  est  trop  évidente. 


KOMAICIA,   80.  '495 

De  Narous  à  jbL»  Slaya ,  ville  des  Rouss-toorks  (rapprochée  à 
Volga)  155  milles  (Vf,  6,  p.  401).  Il  est  évident  que  c'est  la  direction 
de  la  route  commerciale  de  Kiiov.  Dans  cette  direction,  le  nom  de  la 
ville  de  Kharkov  seul  sonne,  comme  s'il  conserverait  la  dénomina- 
tion deKirah.  £n  ce  cas  Naï  serait  Bielogrod  russe,  possédée  par  les 
Komans,  qui  tracèrent  jusqu'à  ce  point  là  leurs  limites. 

80.  Mais  dans  la  Komanie  intérieure  existaient  encore  deux  villes, 
savoir  :  Ljjji»  Troïa,  et  A^t  Akliba,  Tune  et  l'autre  florissantes  et 
comparables  entre  elles  sous  le  rapport  des  ressources  et  de  l'apparence; 
l'une  de  l'autre  éloignée  de  8  journées.  Âkliba  était  la  dernière  dépen- 
dance, (vers  le  nord -est)  des  Komans,  à  l'époque  d'Edrisi. 

De  Troïa  à  .jULo  Silan,  en  se  dirigeant  vers  le  sud,  à  travers  des 
plaines  désertes,  ou  du  moins  peu  habitées,  on  compte  100  milles  (VII 
6,  p.  455).  Si  Ton  admettait  que  Silan  reste  dans  le  nom  de  la  ville 
lelansk,  située  sur  le  Don,  les  frontières  septentrionales  de  la  Komanie 
se  dessineraient  suffisamment  (se). 

Dans  cette  partie  septentrionale  de  la  Komanie,  on  voit  (sur  la  carte 
itinéraire)  le  lac  ^^^  Ganoun,  dont  les  eaux  sont  gelées  à  leur 
surface  en  tout  temps ,  excepté  durant  un  petit  nombre  de  jours  d'été. 
Ce  lac  reçoit  les  eaux  de  huit  rivières,  dont  une,  la  ^jjt»  Scherva, 
n'est  susceptible  d'être  traversée  qu'en  été,  à  cause  de  l'extrême 
rigueur  du  froid  de  ses  eaux,  et  elle  nourrit  dans  son  sein  beaucoup  de 
poissons,  dont  on  extrait  une  grande  quantité  de  colle. 

Dans  les  forêts  environnantes  on  trouve  le  berber  (castor)  (p.  455). 
La  rivière  Scherva  répond  bien  à  Choper.  Quant  au  lac  Ganoun,  il  est 
l'œuvre  de  l'imagination,  qui  n'a  point  d'existence,  aussi  bien  que  la 
montagne  lojis  Tout ,  de  laquelle  coulent  les  rivières  vers  le  dit  lac 
(carte  itin.  VII,  6). 

Narous  est  une  ville  commerçante  quoique  petite  :  mais  vers  le  sud- 
est,  à  108  milles,  se  trouvait  ^y  Nouschi,  plus  considérable,  envi- 
ronnée de  cultures,  arrosséepar  une  rivière  et  située  à  100  milles  ou  4 
journées  de  ^^jlJ  Kiniov,  ville  considérable,  au  pied  d'une  haute  mon- 
moDlagne,  placée  vers  le  nord-est.  De  Nouschi  à  la  ^ys^Jl  vU^ 
Komanie  blanche,  vers  le  sud  50  milles  (VI,  6,  p.  401).  —  Assigner 
l'emplacement  à  tontes  ces  villes,  suivant  les  distances  données,  n'est 
pas  difficile,  parce  que  dégagé  de  toute  contrainte,  il  peut  prendre  de 
positions  commodes  sur  les  stèpes  déblayées  de  l'appellation  quel- 

(M^)  Cepeuilant  il  serait  impossible  d'avancer  avec  Troïa  jusqu'à  Troïtsk  ,  comme  le  tra  hicUur  i« 
-veut  :  impMfiblt  de  livrer  «ette  ville  dans  la  possession  d<.-8  libiuaDs. 


496  EDRISI. 

coDqa«.  Mais  pour  comprendre  et  expliquer  le  reste,  retrouver  les 
positions  des  places  suivantes,  s*élève  dans  la  confusion  et  dans  la 
déviation  des  géographes  de  Sicile  des  obstacles  difficiles  à  sormonter. 
Nous  avons  remarqué  une  mention  faite  à  Timproviste  de  la  mer 
Rousia,  appelée  anciennement  ^fJLJL»  Manitasch,  Maeotis,  plus  tard 
Ozak  ou  Âzof,  enfin  Zabach  (st).  Elleétait  vis-à-vis  de  Trebizond  (p.  394). 
Cependant  la  carte  itinéraire  ne  lui  assigne  aucune  place,  et  Edrisi  ne 
la  fait  connaître  par  aucun  renseignement  spécial ,  par  ancon  détail. 
En  entendant,  examinant  sur  la  carte  ^^^^j^  i<V^~^  renfoncement 
oriental  du  Nitasch,  le  dernier  coin  du  Pont,  on  y  voit  sur  les  côtes 
entre  Matrakha  et  Trcbizond  une  suite  de  noms  appertenants  aux  pays       ^ 
étendus  entre  les  mers  Zabach  et  Kaspienne ,  entre  les  fleuves  Don ,    ^^ 
Yolga  et  les  montagnes  Kaukase  :  comme  si  ces  pays  et  leurs  peoples^^ 
avaient  besoin  d'avoir  des  représentants  spéciaux  sur  ces  côtes ,  qo*oi 
ne  saurait  confirmer  ni  constater  par  aucune  donnée  historique.  Or,  L 
est  nécessaire  de   convenir  qu'ils  y  sont  mal  placés ,  qu'ils 
présentent  un  embrouillement  d'idées  des  géographes  de  Sicile,  et  qu* 
faut  absolument  les  replacer  aux  positions  qu'ils  avaient  réellement 

81.  De  l'embouchure  du  Dniepr,  Edrisi  passe  plus  de  80  milles 
cultivés ,  jusqu'à  ùy^S  Rersona.  De  ce  point  il  côtoyé  la  péninsu^^^ 
et  connaît  une  suite  de  localités  entassées   sur  un  court 
auquel  il  assigne  de  longues  distances. 

De  Kersona  à  ^iJUw  Djalita  (Jalta)  (ss)  dans  le  pays  des 
30  milles; 

A  ^j\^  Garzouni  (Goriam  de  Benincasa ,  Gorezus  (so) ,  ff3mf 
d'aujourd'hui),  ville  florissante  sur  le  bord  de  la  mer,  12  milles; 

A  ^^L^tf   Bertabiti  (Pagropol,  Nagropoli,  Pangropoli,  PairlB/l 
d'aujourd'hui),  ville  petite,  mais  bien  peuplée,  où  l'on  construit  dieg 
navires,  10  milles; 

A  ^w^L)  Lebadha,  Lebata  (Lambat),  jolie  ville,  8  milles; 

(87)  lam  ie  mari  Nitasch  et  adjacente  ei  palude  MaDiUscb,  quae  bodio  ol  Ozaki  appelbtar  ib  ol 
Ozak  urbe,  in  ejus  Htore  sepUntrionali  sita  (A.bulf.  latina  Reiskii  vcrsio,  in  BûscfaiogiIbliiîB, 
t.  IV,  p.  44S-4S0).  Tan  fluvius  ..  effunditur  in  illam  partcm  Nitasch,  quae  hodie  mare  Azak  appeUatir 
ab  Azak  quod  est  emporinm  (id.  ibid.  p.  173).  Ton  in  mare  azokensc,  quod  in  libris  antîqviSBMre 
Manitasch  appellatur  (id.  ibid.,  t.  V,  p.  363).  —  Reiske  par  méprise  dit  dans  une  note  (t.  IY,p*  l<ii 
ol  Ozak,  nostri  OtscbakoT  diount,  car  il  sait  partout  ailleurs  qu*Ozak  est  Azof.  —  Du  tenpidliàia 
cette  appellation  n'existait  pas  encore ,  mais  celle  de  Manitasch  lui  était  bien  connue  par  l'oniait 
de  Ptolémée. 

(88)  Laïa,  Lota,  Loîa,  Laïra,  de  différoots  portulans  ;  Lagyra  de  Ptolémée.  —  Voyez  Jean  Fotocki, 
périple  du  Pont-Euxin,  chap.  t,  p.  363,  de  Pédit.  de  Klaproth,  et  le  portulan  général  de  notre ^ 

(89)  Fortifié  du  temps  de  lustinien  (Procop.  de  tdificiis,ni,  7).  -  Voyez  I.  Potocki,péripi 
p.  863,  464. 


KOMAMIÂ,   8t.  497 

À  Jb^^Li:.  Schalousta  (Lasla,  Lusla ,  Lusiia,  Lastra,  Âlouchta)  (s9), 
tille  importante,  près  de  la  mer,  10  milles. 

A  ^iJULiL»  Scholtatia ,  Soldadia,  (Soldaïa»  Soudâk),  près  de  la  mer» 
SO  milles. 

^yy.  Bouter,  Bov/^ar  des  Byzantius)  (oi),  20  milles  ;  et  de  Bouter 
à  Tembouchure  du  fleuve  ^m  Rousia,  20  milles  (VI,  5,  p.  395). 
Toutes  ces  places,  comme  la  première,  sans  aucun  doute,  étaient  de  la 
possession  des  Komans,  dépendance  de  la  Romaine;  elles  prouvent  à 
quel  point  le  commerce  avait  été  animé  dans  cette  partie  de  la  mer. 
Bientôt  les  républiques  italiennes  convoitèrent  la  possession  de  ces  lieux 
et  y  trouvèrent  un  nombre  de  populations,  d*idiomes  différents. 

Près  de  cette  embouchure ,  à  20  milles ,  se  trouve  la  ville  ^  Ja^» 
Matrakha,  qu'on  appelle  aussi  et  qu'on  écrit  ^^^  Matrika,  située 
sur  les  bords  d'une  grande  rivière  nommée  wXw  Sakir,  qui  dérive  du 
fleuve  Ithil  (Volga).  C'est  une  ville  très-ancienne ,  on  ignore  le  nom  de 
son  fondateur;  elle  est  grande,  très-peuplée  et  très-florissante.  Il  y  a 
des  bazars  et  des  foires,  où  l'on  vient  de  toute  la  contrée  environnante , 
comme  aussi  des  pays  les  plus  éloignés.  Ses  dépendances  vastes,  entou- 
rées de  cultures  et  de  vignobles;  les  villages  sont  nombreux.  Ses  princes, 
connus  sous  la  dénomination  de  ir*^^jij\  Olou  Abbas  (grand  Abas) 
et  renommées  par  leur  force,  leur  courage  et  leur  ardeur  guerrière , 
se  sont  rendus  très-redoutables  à  leurs  voisins  (VI,  5,  p.  39S;  6,  p.  400). 
On  voit  par  ce  passage ,  que  cette  ville ,  appelée  TafAurapxK  par  les 
Byzantins  (Constant,  porphyr.  de  adm.  imp.  42),  Tmoutarakan,  par  les 
Russes,  qui  l'ont  visitée  et  possédée,  fut  depuis  peu  perdue  pour  eux  et 
entra  sous  la  domination  des  voisins  Abases  (9s). 

Non  loin  de  Matrakha,  à  l'autre  côté  de  l'embouchure  de  Rousia, 
entre  Matrakha  et  Bouter  (aux  environs  de  Kertsch),  se  trouve  une 
ville  ^jt  Rouschia,  Rousia,  dont  les  habitants  sont  en  guerre  conti- 
nuelle avec  ceux  de  Matrakha  (VI,  6,  p.  400,  et  tab.  îtiuér.  VII ,  6). 
D'où  l'on  pourrait  conclure  que  lesVarèg-rouss,  ayant  perdu  la  posses- 
sion de  Tmoutarahan,  soutenaient  encore,  vis-à-vis  de  cette  cité,  un 
poste  militaire. 


(90)  Fortifié  par  JustiDien  (Procop  de  edificiis  HI,  7). 

(91)  n  est  probable  qneCaffa  remplaça  Bouter.  C'est  la  seule  position  que  je  ne  puis  déterminer 
par  attcnne  sitaation  indiquée  sur  quelque  carte  du  moyen  âge  ou  moderne.  De  toutes  les  cartes 
modernes  celle  de  Dezaucbe  4788,  m'a  servi  le  mieux. 

(99)  Tmoutarakan  est  entré  sous  la  domination  des  Russes  965,  il  échut  en  partage  à  Mscislat  fils 
de  Vladimirle-grand.  Après  sa  mort  1034,  plusieurs  princes  s'emparèrent  successivement  de  la 
ville.  Le  dernier  d'entre  eux  fut  Roscislav  Izaslavitacb,  cousin  des  ducs  dePrjcmisl.  Vers  1011 
Taeniaurak»!!  ftit  perdu  pour  les  princes  russes,  les  ibases  y  dominaient. 


iOB  EDRISt. 

82.  De  Matrakha  à  à3jJaj>  Matlouka,  qui  porte  aussi  le  nom  de 
Lo^Jt  v'l^  Komania  la  blanche,  ville  considérable  et  peuplée,  une 
journée  de  navigation  ou  100  milles  (p.  400)  (93).  Or,  pour  arriver  à 
la  Komania  blanche,  il  faut  passer  la  mer,  et  de  cette  Komania  blanche 
on  traverse  par  terre  50  milles  au  nord,  pour  atteindre  Nouschi  (p.  401). 
Il  est  donc  indispensable  de  chercher  la  Komanie  blanche,  sur  les 
bords  septentrionaux  de  la  mer  Azov,  qui  s'étendait  entre  Matrakha  et 
Nouschi.  Les  cartes  du  moyen  âge,  de  Vesconle  1518,  et  toutes  les 
suivantes,  indiquent  constamment  remplacement  de  cette  Komania, 
sous  le  nom  de  Gomania,  Chumania,  au  nord  de  la  mer  d'Azov  et  à  peu 
près  aux  environs  du  lac  nommé  par  les  Russes  Molotschnoî-ozero, 
c'est-à-dire  (lacus,  lacteus,  lactearius,  lactans,  aquae  lactarise),  lac  au 
lait  ou  du  lait,  qualification  qui  répond  à  la  dénomination  de  la  blandie 
(Klaproth,  voyage  au  Caucase,  chap.  5, 1. 1,  p.  lOâ).  Les  cartes  posté- 
rieures, italiennes  et  autres,  du  xvi®  siècle,  et  les  cartes  de  Mercator 
continuaient  à  signaler  la  ville  de  Comanîa  dans  cette  position  et 
quelque  lois  une  autre  du  même  nom ,  que  nous  allons  voir  tantôt.  Or, 
la  position  de  la  Komanie  blanche  est  fixée  d'une  manière  possitive,  et 
elle  dirige  avec  certitude  la  détermination  d'autres  lieux. 

Cinquante  milles  de  la  Komanie  blanche  il  y  a  une  autre  Komanie, 
ville  qui  porte  le  nom  de  I^^aJI  LiUd  Komania  la  noire;  on  lui 
donne  ce  nom  de  noir,  parce  que  son  territoire  montueux  et  boisé,  est 
traversé  par  une  rivière  dont  les  eaux,  avant  d'arriver  à  la  mer,  sont 
noires  comme  la  fumée.  C'est  un  fait  connu  et  incontestable  (p.  400)(94). 

Une  montagne  escarpée  sépare  la  Komanie  noire  de  HjS  Kira,  qui 
n'est  éloignée  qu'à  25  milles.  Mais  de  Kira  à  la  ville  de  ^jU^  Khazarîa, 
25  milles.  La  ville  Khazaria  est  considérable ,  bien  arrosée  sur  le  bord 
d'une  rivière  et  d'où  dérive  le  nom  de  Khozars  (p.  400). 

Je  pense  qu'on  ne  réprouvera  pas,  si  nous  nous  portons  avec  Khozaria 
sur  Sarkcl,  possession  des  Khozars,  située  sur  le  Don.  Ils  l'appelaient 
Sarkel ,  ce  qui  signifiait  dans  leur  idiome,  auberge  la  blanche,  demeure 

blanche    de    l'hospitalité    :    Uapk  avroiç  rb  SapxeA  àffTcpov  ovntriov.    ElIc 

était  construite  entre  830  et  840.  Pour  la  bâtir,  à  la  demande  des 
Khozars,  l'empereur  Théophile  envoya  de  Byzant  l'architecte  Pétrone, 
dit  Kamateros  (le  laborieux)  (C.  porph.  de  a.  imp.  42).  Elle  était  assez 

(03)  Dans  Je  tourk  chez  Nogaï  Quaratschaï  Qoomouq  et  le  Tourk  do  Tobolk ,  pierre  à  fea  est  : 
Otlouk-atlouk-iitlyq-tascli  /    ^Lj        4*^3' 

(91)  La  carte  de  Piprre  Vesconte  et  quelques  autres  du  xyi*  siècle  doublent  le  nom  de  Comania» 
ainsi  Komania  la  noire  y  a  sa  part.  Mais  je  cherchais  en  vain  quelque  vestige  de  son  épitèthed* 
noire.  Près  de  Zacharievskaïa  deux  petites  rivières  noires ,  qualifiées  de  noires  Kara-touch  et  Kara- 
tjsch,  perdent  leurs  eaux  dans  laBerdi,  mais  sont  encore  trop  rapprochées  à  Molotscbnaïa. 


KOMAMIA,  83.  199 

éloignée  de  Fembouchure  du  Don,  car  celle  embouchure  restaii  en 
possession  dps  Alains ,  qui  pouvaient  inlercepler  les  communicalions 
desKhozars  avec  la  mer  el  Temboucbure  (id.  ibid.  cap.  II).  Les  Russes 
Tappelèrenl  Bialoviéja,  lour  la  blanche.  Elle  appartenait  toujours  aux 
Khozars.  Les  Petschenegs  ni  les  Komans  ne  Tont  jamais  occupée  (os). 
Partant  de  Tembouchure  de  Rousia  (Bospor)  à  k.^^LS^\  Âskisia, 
place  forte  du  pays  des  Âlaius,  on  compte  150  milles  (Eskoï,  Jeskoï,  sur 
la  Eia,  leia);  d'où  on  a  20  milles  à  J'JC^t  Askala,  ville  peu  considé- 
rable mais  bien  peuplée  du  même  pays  des  Âlains,  située  à  peu  près  de 
6  milles  de  la  mer  (p.  599). 

85.  Pour  retrouver  la  position  d' Askala ,  il  ne  faut  que  remonter  à 
peu  près  6  milles  le  Don,  six  milles  de  son  embouchure  dans  la  mer 
Rousia,  nous  nous  engagerons  entre  ses  deux  bras,  dont  un  est  le  fleuve 
Don,  Taulre  s'appelle  Oksaî  ou  Aksaï.  Il  s'échappe  de  la  droite  du  Don 
à  50  verstes  au  dessous  du  confluent  de  ce  fleuve  et  de  Sieviernoï 
Donietz  (le  petit  Don  septentrional);  il  coule  d'abord  au  nord  puisa 
Fouest  et  finit  par  se  réunir  au  Don  à  dix  verstes  au  dessous  de  Tscher- 
kask ,  à  dix  verstes  au  dessus  du  fort  S.  Dimitri  rostovski.  Il  y  a  sur  ce 
bras  à  15  verstes  de  Tscherkask  un  gros  bourg  Oksaïskaï  stanilza  ou 
station  d'Oxaï  (Klaproth,  voyage  au  Caucase,  chap.  5,  p.  51).  Or,  celle 
station  est  6  milles  de  la  mer  d'Azov,  parce  que  du  fort  S.  Dimitri ,  il  y 
a  encore  une  douzaine  de  verstes  jusqu'à  l'embouchure.  C'est  Aschka la, 
Askala  d'Edrisi.  Les  Allans  la  possédaient  avec  l'embouchure  du  Don  à 
tout  temps,  à  l'époque  des  Pielschings  ils  pouvaient  interrompre  les  com- 
municalions entre  Sarkel  et  Kherson,  plaçant  sur  la  roule  des  embus- 
cades, surprenant  les  traversants  :  xaiô^ous  hsSp&ùoiw,  xai  àfuXxxnoi  kùtou 

(desKhozars)  inn^i/xv^oa  6v  Tw  SdpXifs'^tx.i  Tzphi  te  tô  SapxeA  xai  toc  xX-rj/xarx  xolI 

T^v  yjpyù^oL  (C.  porp.de  a.  imp.  H).  De  même  les  Allans  tenaient  celte  posi- 
tion à  l'époque  des  Komans,  et  le  Don,  sous  le  nom  de  Rousia,  traverse 
le  pays  des  Allans,  dirigeant  son  cours  vers  le  couchant  entre  quantité 
de  villages  bien  peuplés  el  entre  des  cultures  :  n'était  navigable  que  pour 
de  petites  embarcations  :  déchargeant  ses  eaux  dans  la  mer  de  Rousia 
6  milles  dessous  Askala;  ensuite  dans  celle  de  Nitasch,  a  70  milles  vis- 
à-vis  de  Trebizond  (VI,  6,  p.  599).  Ni  les  Pietschings,  ni  les  Komans  ne 
possédaient  le  canton  de  sa  bouche,  il  était  toujours  aux  Allans. 

D' Askala  en  suivant  le  littoral  20  milles  à  &)j^::^l  Istiberia,  située  au 
bord  de  la  mer,  florissante  el  peuplée.  Ses  marchés  sont  fréquentés, 

(OS)  Jean  Polocki,  voyage  dans  les  slèpes  d'Astrakhan ,  I,  47;  Rararazin,  t.  r,  51,  00,  V,  135; 
Klaproth,  tableau  de  l'Asie  p.  Vli  ;  le  même  dans  le  nouveau  journal  asiatique ,  U,  413;  Fraelin, 
Magasin  ftkr  die  Littéral,  d.  Ausl.  1836,  N.  7U;  Scliafarjik,  sUroj.  slav.  U,i,  §  27,  p.  494. 


200  EDBISl. 

ses  rues  larges,  ses  maisoos  solidement  bâties,  ses  habitants  pour  la 
plupart  commerçants  et  riches  (p.  599,  400).  Magnifique  description, 
avec  laquelle  s'étant  engagé  dans  les  sinuosités  du  Don,  nous  n'avons  pas 
d'espérance  de  se  fixer  quelque  part  dans  les  stèpes  planes  et  désertes. 
En  suivant  le  littoral  du  Don  et  puis  du  fleuve  Mantisch ,  nous  arrivons 
au  lac  ou  à  la  mer  de  Manitsch,  le  Manitasch,  qui  est  aussi  le  nom  de  la 
mer  d'Azof  ou  Maeotis,  Manitasch.  Cest  sur  les  bords  de  cette  mer 
oblongue  que  devait  se  trouver  Istiheria,  Sliberia,  de  laquelle  une  route 
conduisant  à  ^^  I  Allania,  ville  d'où  les  Allans  ont  pris  leur  nom,  et 

M 

tellement  ancienne ,  qu'on  ignore  le  nom  de  son  fondateur  ;  distante  de 
Istiberia  2i  milles  et  de  Khozaria  (Sarkel)  45  milles  (p.  400). 

Quantité  d'orientaux  parlent  de  la  ville  Allania  :  cependant  leurs 
relations  ne  sufiisent  pour  déterminer  son  emplacement.  Elle  est  au 
delà  du  défilé.  Le  défilé  allan  ^^tw^b  baballan  est  évidemment  le 
défilé  Dariel ,  appelé  par  les  Arméniens  Tourn  Alanats ,  ou  porte  des 
Alains.  Masoudi  vers  l'an  947,  a  donné  sa  description  ;  Edrisi  en  1451, 
lacompteau  nombre  de  nombreux  défilés;  Alboufédaen  1551,  le  distin- 
gue des  autres  comme  le  plus  grand  des  passages.  La  ville  Allania  devait 
donc  se  trouver  au  nord,  à  l'issue  du  défilé»  sur  les  plaines  de  Terek. 
Les  Allans  qui  s'appelaient  eux-mêmes  Os,  As ,  ont  obtenu  le  nom  des 
Allans  de  la  ville  Allan,  très-ancienne,  qui  devait  être  assez  connue» 
parce  que  le  nom  d'AUans  est  connu  dans  l'antiquité  (96). 

Au  bout  du  compte  je  pense  avoir  prouvé  et  suffisamment  établi,  que 
sur  la  carte  itinéraire  des  géographes  de  Sicile ,  tout  le  littoral  de 
Nitasch ,  entre  Trebizonde  et  Matrakha ,  formant  un  recoin  de  la  mer, 
^c^f^  d'une  mer,  un  lieu  (remotus,  recessus,  dissitus)  retiré,  relégué 
(VI,  6),  est  tissu  de  relations  mal  entendues,  mal  comprises,  et  repré- 
sente pour  la  plupart  le  Manitasch,  la  mer  de  Zabach.  Les  géographes 
semblent  n'avoir  rien  pour  la  portion  littorale  entre  Matrakha  et  Trebi- 
zond ,  et  s'ils  en  ont  eu  quelque  chose ,  ils  ont  tout  divisé  en  îles.  Quel- 
ques, capes,  pointes,  presqu'îles ,  sur  leur  carte  se  sont  formées  en  îles 
Saranba,  Andiseran,  Gardia,  Azela  (97),  et  la  description  déroule  les 

(OG)  Edrisi  (p.  SiO,  S30)  compte  onze  défiles  fortifies  daos  le  Kaoukase  par  leurs  Doms,  maisso  * 
désordre.  La  carie  ilitiérariu  (Y,  6),  n'iudiqueque  huit  babs,  et  u'a  pas  inscrit  tous  les  noms.  La 
ville  d'AUan  s';  trouve  au  sud  de  bab,  du  défilé. 

(<J7)  I.a  confronlntiou  dos  noms  do  ces  îles  avne  les  noms  connus  à  difTércntes  époques  sur  ce 
parafe,  n'ofl'rc  de  résultats  satisfaisants.  Sarauba  (vis-à-vis  de  Kborson)  répondrait  à  Coreto  du 
moyen  <tgc,  à  peu  près  Auapa;  Andiseraix  renibuucliure  de  la  rivière  l'Audio  et  la  ville  continentale; 
«i/2  journée  Siousa,  à  Zikkia;  vient  ensuite  Gardia,  promontoire  Giro,  enfin  Azela  à  mi-chemin 
du  Trebizonde  n'a  pas  de  moindre  analogie.  Un  certain  temps  près  de  Seuastopol  figuraient  !<*» 
Apsiios.  —  C^uand  à  Anhala  et  la  fameuse  youneschka,  il  parait  qu'il  faut  les  chercher  dans  les  esux 
de  Manitasch. 


ROMANIA,   84.  201 

positions  komaoes ,  khozares  et  alanes.  L'examen  de  leur  description 
assure  que  les  komans,  possédant  de  vastes  terres  cultivées ,  ne  tou- 
chaient point  à  la  direction  occidentale  du  Don.  Si  leurs  possessions 
étaient  avancées  jusqu*au  Don,  c'est  plus  au  nord  où  ils  avaient  pour 
voisins  les  Rouss-tourks  et  les  Bartas. 

84.  Petakhia ,  dans  sa  langue  hébraïque ,  appelle  les  Komans  y^p 
Kedar.  Il  a  vu  ces  Kedariens,  demeurant  sous  des  tentes  dans  des  plaines 
cultivées  qui  exhalent  une  odeur  agréable.  Ils  ont  la  vue  perçante  et  de 
beaux  yeux,  non  seulement  ils  aperçoivent  des  objets  éloignés  d'une' 
journée  de  marche,  mais  encore  ils  les  reconnaissent.  Ils  sont  excellents 
archers ,  au  point  qu'ils  percent  de  leurs  flèches  les  oiseaux  en  vol. 

Ils  ne  mangent  point  du  sel  ni  du  pain ,  mais  du  riz  et  du  millet 
cuits  dans  du  lait,  ainsi  que  du  beurre  et  du  fromage.  Quant  à  la  viande, 
ils  la  découpent  en  morceaux,  la  placent  sous  leurs  selles,  puis  font 
galoper  leurs  chevaux  jusqu'à  les  mettre  en  sueur,  et,  ainsi  échauffée , 
ils  la  mangent  avidemment.  Ils  laissent  aux  femmes  déplorer  jour  et 
nuit  leurs  mères  et  leurs  pères  morts,  et  elles  continuent  ces  honneurs 
funèbres  jusqu'à  ce  que  quelqu'un  des  fils  ou  des  filles  ou  des  proches 
parents  soit  atteint  de  la  mort.  Ceux  qui  restent,  pleurent  ceux  qui  les 
premiers  sont  sortis  de  la  vie.  Les  mères  enseignent  des  élégies  à  leurs 
filles  et  la  nuit  elles  gémissent  et  se  lamentent.  Les  chiens  y  mêlent 
leurs  aboiements  et  leurs  hurlements.  Les  Kedariens  n'ont  pas  des  rois 
mais  des  princes  et  des  familles  nobles. 

Ils  n'ont  point  des  navires  :  ils  cousent  ensemble  une  dizaine  de  peaux 
de  cheval  étendus  et  passent  une  corde  tout  autour  du  bord.  Ils  se 
placent  au  milieu  avec  leurs  chariots  et  leurs  effets,  attachant  la  corde 
à  la  queue  (de  peaux)  de  plusieurs  chevaux  et  traversent  ainsi  le  fleuve 
(Dniepr). 

On  ne  peut  voyager  dans  ce  pays ,  qu'à  la  suite  d'un  guide.  Et  voici 
comment  le  Kedarien  se  lie  par  serment  :  il  se  pique  le  doigt  avec  une 
aiguille,  et  donne  son  sang  à  sucer  à  celui  qu'il  doit  conduire,  pensant 
ainsi  introduire  en  quelque  sorte  son  sang  et  sa  chaire  dans  le  corps 
de  l'étranger.  Ils  ont  encore  une  autre  manière  de  se  lier  par  serment  : 
on  remplit  de  lait  un  vase  d'airain,  en  forme  de  figure  humaine,  le 
guide  et  le  voyageur  y  boivent  ensemble  et  jamais  ils  ne  violent  la  foi 
ainsi  jurée.  Dans  le  pays  de  Kedar,  Petakhia  n'a  pas  trouvé  de  véri- 
tables juifs,  seulement  des  hérétiques  qui  n'avaient  jamais  entendu  dire 
ce  que  c'est  que  le  talmoud  (98). 

(98)  Les  juifs,  ou  plutôt  mosaïsaDS  saus  talmoud,  sont  tes  Karaïtcs,  qui  se  servcut  jusqu'aujour- 
d'hui de  la  langue  tourk-komane. 


202  EDRISI. 

Petâkhja  traversa  le  pays  de  Kedar  dans  toute  sa  largeur  en  seize 
jours  (y  comptant  le  repos,  ainsi  qu'il  restait  dans  le  pays  16  jours).  Â 
une  journée  de  marche  (du  passage  du  Dniepr)  dans  le  pays  de  Kedar, 
la  mer  s'avance  dans  les  terres  (c'est  la  mer  Zabach ,  Azov  ou  Rousia), 
et  sépare  ce  pays  de  la  Khazarie.  Il  y  a  (sur  la  route  traversée,  côtoyant 
celte  mer),  d'un  côté  une  mer  (un  lac)  qui  répand  au  loin  une  odeur 
fétide  (Gniîoïe  more),  et  de  l'autre  côté  il  y  a  une  seconde  qui  n'a 
point  d'exhalaison  méphitique.  Ces  deux  mers  (lacs)  sont  à  la  distance 
^  d'une  journée  de  marche.  Si  quelqu'un  essaye  de  traverser  la  mer 
putride,  il  meurt  sur-le-champ  et  beaucoup  sont  même  frappés  de 
mort,  quand  le  vent  souffle  seulement  de  cette  mer  vers  l'autre.  C'est 
pourquoi  l'on  ne  hasarde  aucune  traversée  sur  celle-ci ,  que  lorsque  le 
vent  souffle  du  côté  opposé  à  la  première.  Pour  traverser  le  pays  (du 
passage  du  Dniepr,  jusqu'à  l'extrémité  qui  touche  la  Khazarie)  Petakhia 
employa  8  jours.  A  l'extrémité  de  la  Khazarie  coulent  dîx-sept'rivières, 
qui  finissent  par  se  réunir  en  une  seule  (c'est  le  Don  ou  Rousia  qui  se 
forme  de  six  fleuves  au  dire  d'Edrisi).  C'est  ici  que  se  rassemblent  tous 
ceux  qui  veulent  partir  sur  des  vaisseaux  pour  les  régions  lointaines. 
De  la  x^'ii'îD  Khozaria,  Petakhia  se  rendit  dans  le  pays  de  Thogarma 
(Géorgie)  (Petakh.  Tour  du  monde,  publié  par  Carmoly,  p.  8-15). 

85.  A  peu  près  cent  ans  plus  tard ,  après  la  destruction  de  la  horde 
Komane  par  les  Mongoux,  en  1245,  parcourant  ces  stèpes,les  deux 
franciscains  Jean  Piano  di  Carpini,  Italien,  et  Benoît,  Polonais,  cd 
qualité  d'ambassadeur  à  la  grande  horde  de  la  part  du  pape  ,  et  bientôt 
en  1255,  le  Flamand  Guillaume  Ruysbroeck,  comme  ambassadeur  du 
roi  de  France,  ont  vu  les  restes  des  Komans,  et  en  font  mention. 
Ru ysbroeck,  frappé  de  la  quantité  de  monuments  tumulaires  disséminés 
sur  une  immense  étendue  du  pays,  construits  à  difl'érentes  époques, 
par  différentes  hordes,  s'imagina  qu'ils  étaient  tous  élevés  par  des 
Komans.  Cependant  il  a  vu  l'enterrement  d'un  mort,  sur  la  tombe 
duquel  les  Komans  suspendirent  seize  peaux  de  chevaux,  par  quatre  de 
chaque  côté  des  quatre  points  cardinaux,  et  ils  placèrent  sur  cette  tombe 
leur  boisson  et  leur  viande.  Il  apprit  qu'un  Koman  malade  s'enfermait 
avec  son  serviteur  dans  sa  lente  et  ne  laissait  y  entrer  personne.  Plus 
riches ,  ils  s'entouraient  de  gardes ,  pour  empêcher  à  qui  que  ce  soit  de 
se  rapprocher  à  la  demeure,  parce  qu'on  craignait,  qa'on  n'apporte 
l'esprit  malin  ou  un  mauvais  vent,  qui  nuirait  au  malade.  Ils  qualifient 
de  prêtre  leurs  enchanteurs  (Ruysb.  édit.  Francisci  Michel  et  Thoma 
Wright ,  de  la  société  géogr.  de  Paris,  4839 ,  p.  257.  258). 

Edrisi ,  au  nombre  des  hordes  de  l'intérieur  de  l'Asie ,  nomme 


KOMANIA,   88.  205 

celle  de  -:.L1â^  Khafschakh  (VI,  9,  p.  44 G).  Personne  ne  présume- 
merail  de  corrélation  de  ce  nom  avec  les  Komans,  s*il  n*était  devenu 
depuis  d'une  grande  renommée.  RuysBroeck  sait,  qu'on  a  de  Comani 
qui  dicuntur  Caplhac  (p.  245)  et  que  tout  le  pays  inhabilabatur  a  Com- 
manis  Capthac  eietiam  ultra  a  Tanaïs  usqueEliliam  (p.  246);  habitabant 
Commani  Capchac  »  aniequam  Tarlari  occuparenl  eas  (p.  255).  Les 
orientaux  parlent  beaucoup  à  cette  époque  de  »3*L«-:^  Kabtschak, 
Kiblschak  (Aboul  el  Faragi,  hist.  comp.  dynast.  orient,  p.  97,  577,  578, 
465,  467;  Abu  Arabellah,  hist.  de  Tamerl.  p.  76,  77,  80-84),  et  le  pays 
obtint  la  dénomination  de  decht  kiptscliak ,  ou  stèpes  de  Kaptschak 
(Aboulaghazi  bahadourcan,  hist.  généal.  des  Tatars,  p.  41,  85-89).  D'où 
on  a  conclu  que  les  Komans  portaient  le  nom  de  Kaptschak. 

Les  Petschenegs,  appelés  par  les  byzantins  Patzinatzi  Kangar,  et  par 
les  orientaux  Badjinak  Kangli,  parlaient  la  même  langue  que  les 
Komans  itpàaeiai  ^oiAxvotç  éii  ofxoyyoxToiç  (Anna  Komn.alexias  Vin,p.252). 
C'étaient  donc  deux  hordes  de  la  même  souche.  Kanghar  ou  Kangli, 
venant  vers  894  du  fond  de  l'Asie,  des  rives  de  laïÊ,  et  entrant  en 
Europe,  prirent  le  nom  de  Pelzings  (Const.  porphyr.  de  adm.  imp.  il). 
Leur  noyau  resta  dans  leur  patrie  primitive ,  au  delà  de  laïk ,  incipil 
terra  Kangilarum  (Piano  Carpioi  Viïl,  1,  §  15,  p.  749;  Bened.  Polon. 
5,  p.  277)  el  leur  parenté  avec  les  Komans  était  avérée  :  quidam 
Comani  qui  dicuntur  Cangle  ;  Cangle  quœdam  parentcla  Commanorum 
(Ruysbr.  p.  265,  274)  (99). 

(99)  L'idiome  koman-tourk ,  peut  ôtrc  coddu  sufiisamraeut,  parce  qu'on  a  de  lai  un  monument 
littéraire,  parce  qu'il  répandit  sa  semence,  tX  il  est  probable  qu'il  n'est  pas  tout  à  fait  éteint.  Du 
temps  de  l'indépendance  des  Komans,  les  Italiens  l'étudiaient,  l'intérêt  du  commerce  demandait  sa 
connaissance.  On  connaît  les  éléments  de  cet  idiome  et  un  petit  vocabulaire  composé  de  plus 
de  2500  mots,  arrange  sans  doute  à  l'usage  des  marchands  „le  choix  des  mots  du  Yocabolaire  y  est  à 
leur  avantage), réiligés  en  iSOS.  Ces  éléments  et  vocabulaire  Turent  la  propriété  de  PetrarcUa,leqiieI, 
à  sa  mort,  i37i,  en  lit  don  à  la  république  de  Venise.  En  iSi-i  le  bibliothécaire  Salvi  communiqua 
leur  copie  à  Klaproth ,  lequel  les  publia  en  i828  (mémoires  relatifs  à  l'Asie,  t.  UI ,  p.  i2i-2S6).  l\ 
examina  soigneusement  le  vocabulaire,  indiquant  l'analogie  des  mots  avec  les  autres  dialectes  tourks. 
Un  nombre  considérable  sont  retrouvés  dans  les  dialectes  sil  ériens  :  mais  on  nombre  plus  considérable 
se  retrouve  dans  le  dialecte  constautinopolitain.  Cette  singulière  coïncidence  s'explique.  Forcés  de 
le«rt  camps  par  les  Uongoux»  multitude  innombrable  de  Komans  se  retira  dans  la  Gazarie  et  se 
dispersa  aux  environs  de  la  mer  Noire.  Une  portion  se  retira  en  Hongrie  oii ,  établie ,  elle  renonça  à 
son  idiome.  La  masse  de  la  population  séjournant  dans  la  Bulgarie  et  la  Romanie,  rencontra  les 
Tourks-ottomans  et  influença  la  formation  du  dialecte  qui  est  devenu  dialecte  de  la  capitale,  dès  que 
les  Ottomans  se  sont  emparés  de  Goustantinople.  L'influence  de  l'idiome  koman  se  décèle  dans  les 
langues  d'autres  souches.  Les  dialectes  slaves ,  russicn ,  polonais,  ont  pris  du  koroau  :  touman , 
tourbillon  de  poussière;  kart,  noir  ;maclaf,  pleine;  ftatofran  (faucon)  ficr-à-bras ;  6aifa,  hache  de 
guerre  etc.,  (réciproquement  le  koman  du  slave  :  ii^a,  chambre,  konon,  légal,  etc.,  de  l'italien  etc.). 
EnGn  on  peut  présumer  que  les  mozaïsans  karaïtes  venus  de  la  Komanie,  parlent  jusqu'aujourd'hui 
le  koman.  —  J'essayais  de  chercher  dans  le  vocabulaire  l'explication  des  noms  rapportés  dans  la 
description  d'Edrisi.  Ce  «vocabulaire,  sobre  en  n,  m,  n'offrit  de  grandet  chances  à  mes  perquisitions. 
l\  serait  trop  fort  de  proposer  un  changement  de  la  lecture  à  cet  effet,  de  lire  lulieu  de  Narotis 


904  EDRISI. 

Les  noms  de  Knngl  et  Kiptschah  sont  connus  jusqu*aujourd'iiiii 
parmi  les  hordes  Nogaï,  pour  les  distinguer  (Klaprolh  ,  voyage  du 
Caucase,  5,  p.  iOO). 

Depuis  que  les  Mongoux  étendirent  Tappellation  des  Kiplschaks  qui 
leur  étaient  voisins  sur  un  immense  pays,  les  Komans  devinrent 
Kaptschaks ,  bien  qu'avant  personne  ne  les  connaissait  sous  ce  nom  et 
eux-mêmes  ne  se  le  donnaient  point,  étant  seulement  de  la  même 
souche  avec  les  hordes  de  Kafschah  et  de  Kangli,  dont  une  partie  donna 
Torigineaux  Pietschings.  Les  possessions  des  Komans  et  de  leur  nom, 
quand  ils  étaient  indépendants  en  Europe,  s'étendaient  au  levant 
jusqu'au  Don  et  Volga  atteignant  du  couchant  aux  Russes.  Après  leur 
chute  leur  nom  s'étendit  immensément,  fut  imposé  (par  les  commen- 
çants de  l'Europe)  à  différentes  autres  hordes  apparentées  et  disséminées 
sur  la  surface  des  slèpes  Kaptschak.  Jean  Piano  de  Garpini  et  le  frère 
Benoit  Polonais,  voyaient  partout  les  Komans,  jusqu'à  laïk,  et  ils 
appellent  Gomania ,  tout  le  pays  depuis  Gazarie  jusqu'à  laïk  (Garpini 
hist.  Mongol,  p.  7t7-749:  Benoît  Polon.  4,  5,  p.  776,  777)  (lOo). 

^  A  ^!j  larous,  au  mojCD  de  quoi  ce  doid  donnerait  .  a  *  •  L>  laroak ,  Irig ,  lumière.  Je  irow* 

Cun      %S  jour;  cun  tusin,  orient,  Kan      y[3  sang,  peut-être  d'un  de  cet  mots  \ieni  a^JU9 

KinieT.  Je  trouve  Chirac  (Kirak)  ^  O   chaux,  peut-être  elle  a  créé  le  nom  de  9kO    Un.  Je 

trouve  karisurmcn  Je  défends,  karis     (/  r»i^)  défendez,  c'est  l'origine  peut-être  de  9  y>3  Kira 

^^         «   it  'f".,     „» 

comme  fortifié.— Tolamac,  sanctifié,  est  peut-être  ^  •JUbP  Uatlouka,  autre  nom  de  A^i)  L^  f  ^  ^ 

àkkomania  de  la  Komanie  blanche.  —  Pourrait-on  jamais  de  (jJL>v„.^Julw)  scninbila ,  teeum,  et 
de  monincfaibi  (monin  kibi]  taiw,  extraire  les  noms  de  SinoboH  et  de  Mounischka  (meaia,  meut, 
manegi,  Utius).  Avec  plus  de  succès  nous  traversons  bcspor  Bourlik  (bui^il,  torque,  bai^l  vade)  où 

dominaitOlu  abas  {yji  oulou.  magnus)  le  grand  Abas,  parce  qu'au  delà ,  quand  nous  séparons  U 
qualification  komane  de  sarr  ^^.«v  ville,  des  prétendues  îles,  nous  nous  trouvonscoafirmé  dans  notre 
emplacement  de  SarAnba  sur  le  point  d'Anapa,  et  de  Andi  sera,  Audi  ville  sur  la  rivière  de  TAndio. 
(100)  De  la  narration  de  Benoît  polonais,  on  ne  connaît  que  le  texte  du  code  colbcrtin  n*  t4T7  «de 
la  bibliot.  de  Pari».  U  n'y  avait  rien  à  corriger  on  l'éditant  :  tout  y  est  supportable ,  style  et  orthogra- 
phe. Le  savant  éditeur  d'Avezac  s'est  donné  trop  de  peine  en  entreprenant  de  le  rectifier.  Une  de 
ses  rectifications  est  la  conséquence  d'une  méprise.  La  narration  de  Benoît  avait  :  à  Baii  principe, 
post  duas  hehdomadas,  ingrcssi  sunt  Comaniam  (cap.  4,  p.  76).  L'éditeur  y  trouve  qdo  erreur  ei 
corrige  :  egresn  sunt  de  Comania.  Cependant  Benoit  continue  à  chevaucher  par  la  Comanie  jnsqn'à 
laïk,  cap.  6,  p.  477).  Il  faut  donc  absolument  restituer  :  ingressi  sunt  Comaniam  (interiorem,  nlte- 
riorem).  D'Avezac,  dans  sa  savante  et  profonde  notice  sur  les  anciens  voyages,  admirable  sous  tous 
les  rapports,  dit  p.  481  :  les  trois  missionnaires,  conduits  aux  frais  de  Boleslav,  arrivèrent  ^suite  à 
Cracovie  chez  Conrad  duc  de  Lenczy.  et  (p.  488),  il  désaprouve  avec  raison  l'assertion  de  Matbtas  de 
Micchov,  qui  substitua  Boleslav  le  pudique  à  Conrad  contre  le  témoignage  du  voyageur.  Cependant 
notre  judicieux  savant  ne  s'est  pas  tiré  de  ce  point  obscur  quand  il  dit  (p.  48t)  :  qu'il  en  résulte , 
que  Conrad  et  son  fils  Losko  étaient  alors  à  Cracovie  avec  la  duchesse  Grimislava.  Conrad  n'avait 
aucun  fils  du  uom  de  Lesko.  Si  la  vieille  Grimislava  était  encore  en  vie,  il  yavait  trois  duchesses  qui 
pouvaient  porter  le  litre  de  duchesse  de  Krakovie,  la  mère  Grimislava,  puis  la  belle  fille  Kunigoade, 
femme  de  Boleslav  le  pudique,  et  Agasie,  femme  do  Conrad,  qui  était  en  possession  de  Krakovie. 
Sous  le  rapport  de  ce  personnage  le  point  est  obscur.  Si  l'on  admet,  suivant  le  dire  de  Mathias  de 
Miechov,  que  Grimislava  se  trouvait  alors  à  Krakovie,  le  fils  de  Conrad  serait  Kazimir  ou  Ziemovtt. 
depuis  duc  de  llazovie. 


BARTAS,   8C.  S05 

B  ▲  R  T  4S. 

86.  Suivant  les  contes  sur  les  guerres  d*Âlexandr6-le-grand ,  relatés 
et  répétés  par  losef  Gorionide,  le  roi  de  Macédoine  soumit  les  susmen- 
tionnés Bartas.  Après  la  conquête  de  N'>02X  Absia  ,  il  alla  contre 
nx^k2l3  Bartiah  et  la  conquit.  Après,  ayant  renversé  Olynth,  il  alla 
dans  les  terres  de  Kanaan  (des  Slaves)  et  il  les  a  soumi.  Il  alla  dans  la 
terre  ]'>^ikq  Meotin  (près  de  TemlMnchure  du  Don)  et  l'occupa .  Dans 
celte  terre,  la  faim  fit  des  ravages  parmi  les  Macédoniens  ;  grande 
quantité  moururent,  ils  dévoraient  leurs  chevaux,  et  les  cavaliers, 
privés  de  leurs  montures ,  murmoraiem  hautement.  D*ici  il  se  portait 
de  pays  en  pays  jusqu'à  la  terre  de  QVp'^':)  LoukioUm  (Lucanie),  d*où 
iJ  passa  à  Akrakantus  en  Sicile  (losip  ben  Gorion,  cap.  9,  p.  G4).  C'est 
l'expédition  septentrionale  d'Alexandre. 

Le  nom  de  Bartiah ,  Bourtas ,  Bartas,  (Partes) ,  n'était  pas  ignoré  des 
écrivains  arabes,  avait  même  une  certaine  célébrité.  Istakhri,  Ibn 
Haoukal,  Masoudi,  Edirsi,  s'empressent  de  l'inscrire  ;  il  est  connu  dans 
les  fastes  de  Russie.  Istakhri  indique  leur  position  géographique.  Ils 
habitent ,  dit-il ,  dispersés  dans  des  maisons  de  bois  et  forment  deux 
hordes,  dont  l'une  habite  sur  les  frontières  de  Goz;  elle  ne  compte  que 
âOOO  âmes  et  personne  ne  peut  les  dompter;  ils  relèvent  des  Boulgars. 
L'autre,  assise  sur  les  plaines  d'Ithil,  voisine  des  Khozars,  touche  aux 
Badjinaks  qui  sont  voisins  des  Romains.  Leur  langue  ressemble  à  celle 
des  Boulgars  et  des  Khozars;  ils  sont  mahommédan&(versio  Mordtmann, 
p.  105 ,  106).  Le  fleuve  Atel,  rapproché  au  pays  des  Rouss ,  tourne  vers 
l'est,  et,  sorti  du  pays  des  Boulgars,  traverse  les  Bertas,  et  son  embou- 
chure principale  est  dans  le  pays  des  Khozars.  De  l'embouchure  aux 
Bertas,  il  y  a  20  journées;  de  ce  point  les  Bertas  l'occupent  dans 
l'espace  de  15  journées.  De  l'embouchure  d'Atel  on  compte  un  mois 
jusqu'aux  Badjinaks  (de  la  mer  noire)  et  des  frontières  des  Bertas  aux 
mêmes  Badjinaks  20  stations  (Istakhr.  p.  101, 106,  107).  Ibn  Haoukal 
répète  cette  relation  d'islakhri  n'y  ajoutant  rien  de  nouveau  (ap.  Garm. 
revue  orientale,  t.  III,  p.  260,  262;  itinér.  de  la  terre  sainte  p.  18, 20). 

Masoudi  connaît  une  rivière  Bourtas ,  qui  se  jette  dans  le  fleuve  des 
Khozars  (dans  Ithil),  par  laquelle  les  barques  des  Boulgars  et  des 
Khozars  descendent  et  remontent  sans  cesse.  (C'est  un  bras  du  Volga). 
Les  populations  tourks  y  sont  fixées.  Les  Bourtas  sont  un  peuple  tourk 
qui  demeure  sur  les  bords  de  cette  rivière ,  à  laquelle  il  a  donné  son 
nom  (ap.  Carmoly,  revue  orient,  p.  266,  itinér.  de  la  ter«s.  p.  28).  Dans 
Tannée  921  lesRouss-Yarègs,  après  leur  défaite  aux  environs  de  la 
Caspienne,  subirent  un  nouveau  désastre  en  passant  le  pays  des  Bourtas. 


206  EDBISI. 

Edrisi  (VI,  6,  p.  403),  quant  aux  distances,  reproduit  exactement  ce 
qu'Ibn  Haoukal  répétait  autre  fois.  Les  20  et  les  15  journées  par  IthzL 
ne  sont  pas  reprochabies  :  mais  un  mois  et  20  stations  pour  atteindre 
les  Badjinaks ,  sont  dirigés  par  Edrisi  dans  un  pays  perdu  :  il  n'y  avait 
plus  de  Badjinaks  sur  la  mer  noire,  ils  furent  remplacés  par  les  Komans: 
cependant  Edrisi  par  cette  répétition  copiste ,  commune  aux  écrivains 
arabes ,  déclare  les  Badjinaks  voisins  des  RoUss  même  au  vu*"  climat 
(p.  457).  Si  donc  on  voulait  détourner  ces  distances  d'un  mois  et  de  20 
stations  vers  les  Badjinaks  de  Test,  Badjinaks  intérieurs ,  il  faudrait  les 
refaire ,  les  régler  sur  une  autre  proportion.  —  Mais  à  la  suite  de  sa 
répétition,  Edrisi  ajoute  que  les  villes  des  /^LL>p  Bartas,  sont  au 
nombre  de  deux  ^jl^  t^Usy  Bartas  et  Sa  van,  et  qu'ils  parlent  une 
langue  qui  diffère  de  celle  des  Kbozars  et  des  Rouss  (VI ,  6,  p.  404). 
Sa  carte  itinéraire  (VI ,  6)  place  ces  deux  villes  également  le  long 
d'Ithil;  or,  toutes  les  deux  sont  de  la  horde  occidentale  assise  sur  Ithil; 
de  l'autre  aussi  inexpugnable  suivant  Istakhri,  assise  sur  les  frontières 
de  Goz,  il  n'y  a  plus  de  question.  En  effet,  Edrisi  remarque  que  les 
Rouss  (slaves)  qui  habitent  dans  le  voisinage  de  la  Hongrie,  subjuguèrent 
les  Rouss  (tourk),  les  Bartas,  les  Bulgars  et  les  Khozars,  les  ont  chassés 
de  leurs  pays,  se  sont  emparés  de  leurs  possessions,  en  sorte  qu'aux 
yeux  des  autres  peuples  il  ne  reste  d'eux  sur  la  terre  absolument  rien 
que  leur  nom. 

En  effet,  ces  noms  continuent  à  figurer  dans  les  répétitions,  et, 
dépaysés  qu'ils  furent  par  les  conquêtes  russes,  ils  figurent  décelant 
l'existence  des  hordes  après  leur  défaite.  Même  les  Bourtas  ne  dispa- 
rurent sitôt,  et  sont  comptés  au  nombre  des  peuples  conquis  par  les 
Mongoux  :  Brutachi  qui  sunt  judœi  (Piano  Carpini,  VII,  3).  Bakoui  (en 
4415),  ne  les  a  point  oublié  dans  sa^compilation  :  tÀ^j>  Barkas  (lisez 
^li?  j  du  pays  des  Khozars  le  long  du  fleuve  Athel;  ses  habitants  sont 
musulmans,  ont  une  langue  qui  diffère  des  autres.  Il  y  a  chez  eux  de 
beaux  renards,  des  ouabr  rouges  (VI,  7)  (loo). 

(401)  Ensoite  il  aoiiote  le  pays  ^jJ'Lsr^^jb  Bahbak  (lisez  s^>  Liarf  Badjinak),  race 
de  Tourks  qui  demeurent  près  du  pays  des  Seklabs.  Ces  peuples  outune  longue  barbe,  ne  payent 
de  tribut  à  personne  et  vivent  avec  leurs  femmes  comme  des  animaux  (VI,  8).  Ensuite  se  rengent 
.  cher  lui  à  la  long.  6S»  O',  et  à  la  latit.  42»  0'  le  pays  de  Bodja  qui  sont  T«urk  du  vi«  climat  (VI,  9),  et  il 
faut  les  retrouver  en  Afrique  comme  les  long,  et  latit.  l'indiquent.  —  Paul  Savelev  (dans  sa  topogra- 
phie des  fouilles  de  la  monnaie  arabe  en  Russie,  p.  61  66),  motivé  par  plusieurs  localités  qui  portent 
le  nom  de  Burtas  entre  Kazari,  Volga  et  la  rivière  Mokscha,  et  remarquant  que  les  arabes  ignoraient 
ies  Moksckans  sous  leur  propre  nom,  veut  conclure  que  les  Bartas  sont  les  Mokschans.  Il  est 
probable  que  les  localités  Burtas  sont  des  réminiscences  du  séjour  des  Bartas  à  Toucst  du  Volga. 
Istakhri  autorisa  de  le  croire,  car  il  indique  les  possessions  des  Bartas  assez  étendues ,  mais  il  les 
iiejid  aussi  à  l'ast  du  fleuve  jusqu'aux  Gozs  :  at  le  principal  siège  de  Bartas  était  sur  Volga  entre  les 


COMMERCE,    ÉTAT   SOCIAL,   87.  SOT 

En  effet ,  ces  petites  hordes  de  Bartas  avaient  quelque  retentissement 
qui  perçait  à  travers  les  Komans,  Polovtzi,  et  motivait  peut-être 
plusieurs  écrivains  latins  de  donner  aux  Polovtzi  le  nom  de  Partes. 

Ce  retentissement  était  plus  remarquable  en  orient,  et  c*est  à  cause 
des  peaux  de  renards  noirs  et  rouges,  qui,  sortant  des  pays  des  Bartas, 
portaient  Tappellation  de  bourtasiah ,  bourtasit.  Les  rouges  n'étaient 
pas  d'une  grande  valeur,  mais  les  noirs  étaient  préférés  aux  hermelines, 
aux  zibelines,  et  à  toute  sorte  de  fourrure.  On  les  payait  énormément  : 
recherchés  par  les  émirs  arabes  et  persans ,  afin  de  couvrir  Thabil- 
lemenl,  les  bonnets,  les  robes,  ainsi  qu'il  est  difficile  de  voir  un  émir 
qui  n'aurait  d'habillement  doublé  de  renard  bourtasien.  (Masoudi ,  ap. 
Carmoly,  ilinér.  de  la  terre  sainte,  p.  28). 

Commerce,  État  social. 

87.  Examinant  les  relations  d'Edrisi,  dans  le  but  de  déterminer  les| 
itinéraires,  les  emplacements  des  localités,  les  limites  des  pays,  nous 
avons  rencontré  à  chaque  pas  des  notices  sur  le  commerce.  Ces  relations 
venaient  en  effet  de  commerçants,  de  marchands  qui  observaient 
spécialement  les  objets  de  leur  vocation.  Certes,  nous  ne  pouvons  pas 
espérer  d'y  trouver  l'énumération  de  toutes  les  marchandises ,  mais  ce 
qu'on  annota  de  leurs  narrations  peut  former  l'idée  de  l'état  com- 
mercial de  différents  pays  et  des  changements  dans  le  négoce,  qui 
décidaient  de  la  prospérité  et  de  l'existence  des  états.  Nos  consi- 
dérations sur  Edrisi  se  bornaient  aux  vi*'  et  vu*  climats;  aussi 
l'examen  du  commerce  s'attache  presque  exclusivement  à  la  Russie  et 
à  la  Pologne. 

Chaque  pays  avait  son  industrie,  car  si  les  étoffes  demandaient  des 
fabricants,  les  fourrures  ne  pouvaient  entrer  dans  le  commerce  sans  une 
préparation  industrielle.  La  première  est  supérieure  et  par  excellence. 
Nous  pensons  que  nous  ne  tombons  pas  dans  l'erreur,  quand  nous 
avançons  qu'elle  doit  être  spécialement  réservée  à  l'empire  byzantin, 
le  seul  pays  dont  les  produits  de  l'industrie  et  des  arts  se  répandaient 
très-loin  de  tous  côtés.  Les  latins  fournissaient  des  objets  plus  communs, 
à  l'usage  plus  ordinaire,  et  ces  objets  ne  se  répandaient  pas  autant, 
pas  aussi  loin.  Les  fruits  de  la  terre  étaient  consommés  sur  le  lieu,  ou 

Khoxars  et  les  Boulgars.  Les  Mokschans  étaient-ils  là  et  au  delà  du  fleuve  ?  —  Peut-être  les  arabes 
u'ignoraient  pas  le  nom  de  Mokscha;  on  pourrait  le  retrouver  dans  leur  Maschaqa.  Au  reste,  les 
Bartas  firent  détruits  comme  les  autres  hordes.  —  Klaproth  (tableau  du  Caucase,  p.  92,  et  Asia 
polyglotta ,  p.  1S6),  distingue  les  Brutacbi  do  Piano  Carpini,  présumant  que  c'est  une  peuplade  du 
Kaukase. 


208  BDRI8I. 

dans  le  voisinage ,  car  bien  que  tout  le  pays  du  nord  n'était  pas 
surcharge  de  population,  les  pays  les  plus  peuplés  avaient  en  abondance 
de  quoi  vivre  chez  eux.  Les  métiers  seulement  avaient  Tavantage  de 
fournir  aux  peuples  plus  éloignés ,  les  vêtements ,  riiabillement  et 
quelques  commodités  plus  communes.  L'industrie  de  Torient  avait  pour 
elle  un  terrain  spacieux  en  Asie  même ,  cependant  ses  produits  péné- 
traient vers  Toccident  et  se  mêlaient  aux  byzantins.  Le  trafic  local  et 
limitrophe  consistait  en  céréales,  bétail,  commestibles ,  vêtements, 
ustensiles,  vases,  esclaves  (ios).  Et  le  grand  commerce,  le  négoce 
étendu,  était  du  luxe,  ses  marchandises  consistaient  en  objets  précieux, 
de  haute  valeur. 

Ce  luxe  siégeait  dans  les  églises,  dans  les  cours,  et  celles  des  rois  de 
Pologne,  des  deux  Boleslav  et  de  Miecislav  II,  surpassaient  toutes  les 
autres  :  incredibile,  ineffabile.  Il  y  a  peu ,  la  Pologne  lavée  de  l'eau 
baptismale,  encombra  les  sanctuaires  de  richesses,  comme  on  peut  le 
voir  par  le  fameux  pillage  de  Gnezne  par  les  Bohèmes.  Les  cloches  de 
bronze,  croix,  tables  coulées  d'or  et  d'argent,  les  apparats  (Cosm.  sub.  a 
4034,  edit.  Menken,  t.  II,  p.  2017).  Ces  objets  de  luxe  des  églises 
étaient  pour  la  plupart  fondus  et  fabriqués  en  Pologne.  Lorsque,  en 
1085,  Yladislav  Herman  envoyait  sa  pieuse  missive  à  S.  Gilles  eu 
Provence,  il  fit  battre  un  calice  d'or,  et  fit  fondre  une  statue  de  l'enfant 
en  or;  il  y  ajouta  les  apparats  de  l'église  d'or  et  d'argent  (brodés)  :  nec 
mora  puerilis  ymago,  cum  calice  de  auro  purissimo  fabricalur,  aurum 
argentum,  pallia,  sacrœ  vestes  prœperaiur  (Gallus,  I,  50);  admodum 
pueri  imaginem  fabricata  (id.  ibid.). 

La  pénitence  de  Boleslav  III  bouche-torse  (1117-1120),  enrichit 
l'église  de  S.  Adelbert  à  Gnezne.  Il  décora  l'église  et  ses  autels  ;  il  fit 
fabriquer  une  chasse  pour  les  reliques,  pour  le  chef  du  saint,  dont  les 
perles  etles pierres  précieuses  n'étaient  de  moindre  valeur  quel'or  pur 
de  80  marcs  :  per  ecclesiam  et  in  allaribus  ornamenta  prœsentavil . . . , 
in  illo  ferelro  auri  parissimi  80  marcœ  continenlur,  exceplis  perlis. 
gemmisque  prœciosis,  quœ  minoris  quam  aurum  prœcii  non  videnlur 
(Gai.  III,  25).  L'église  fut  décorée  par  une  porte  de  bronze  représentant 
dans  18  tableaux  l'histoire  du  saint,  encadrés  dans  des  châssis  d'une 

(iOa)  'AyopàÇouai  ef  aÙTtSv  ^ôkç  xai  Innouçy  xat  itpàëxraf  les  KiioTîiens  de  Pet- 
ïMielis  (Const.  porpb.  de  adm.  imp.  2);  de  même  auprès  des  Romans.  Les  Kbozars  achetaient  des 
Russes,  lenniel  et  la  cire  ;Ibn  Ilaoukal).  Le  sel  entrait  en  Pologne  de  Halitscli  :  conrerimns  eliam 
eidem  claustre,  singulis  annis,  tredecim  planstratas  salis  integraliter  sicut  de  Rnssia  ducuntnr,  de 
teloneo  in  Sandomiria  recipiendas  (donation  de  H76, 10  août  à  Soulciov  par  Kazimir  le  juste  ëdil4 
en  1845,  à  Varsovie,  n'  iv,  p.  42).  Les  environs  de  Krakov  avaient  leur  sel  (dipl.  (HOS)  UtO,  io 
iinecia  Szczygielscii  i  bulla  1I3C,  in  dipl.  mag.  pol.  Raczynscii).  —  Sur  l'achat  des  esclaves  nous 
••ut«xpliqiiotts  ailUurs  :  ta  traite  était  inconnue,  le  nord  n'était  pat  k  tel  point  de  ciTilisation. 


COMMBllCE,  ETAT  SOCUL,  88.  109 

rîehe  composition.  Les  deux  battants  longs  de  9  */t  pieds  de  Paris,  sont 
ehaque  d'une  seule  fonte  (ios). 

Il  est  probable  que  pour  confectionner  de  semblables  objets,  on  fesait 
venir  mainte  fois  des  artisans  étrangers,  surtout  allemands,  car  TÂlle- 
roagne  à  cette  époque  était  renommée  pour  ses  fonderies;  le  produit  des 
fonderies  allemandes  allaient  en  Italie  (104).  Ces  fonderies  exécutaient 
des  ouvrages  gigantesques: cloches,  statues,  portes  d*églises.  Mais  pour 
la  fabrication  des  battants  de  Gnèzne,  les  artistes  allemands  pour  sûr  n*y 
coopéraient  guère  :  car  la  Pologne  avait  en  même  temps  une  porte  de 
leur  ouvrage,  dans  le  style  et  le  goût  byzantino-allemand,  généralement 
pratiqué  enAUemagne,  et  les  battantsde  Gnèzne  soutd'un  tout  aulrcgenre. 

Alexandre,  évéque  de  Plotzk (vers  il 54), fit  venir  les  fondeurs  Riquin 
et  Waïsmulh  de  Magdebourg,  qui  lui  fabriquèrent  une  porte  de  bronze 
en  24  tableaux  de  Tbistoire  du  Christ ,  encadrés  sur  deux  battants  de 
bois  (ios).  En  même  temps  Otto,  évéque  deBamberg,  connaisseur  de 
Part  de  son  pays,  détruisit  (en  1124  et  1125)  les  idoles  des  Pomoraniens 
sculptoria  arte  ineredilnli  pulcritudine  celata, 

88.  A  côté  du  luxe  et  de  Topulence  siège  ordinairement ,  sinon  la 
misère  au  moins  la  pauvreté.  En  Pologne,  à  cette  époque ,  agricole , 
«ans  industrie,  il  n*y  avait  pas  de  misère,  d'indigence,  mais  la  pauvreté, 
la  modicité;  une  fortune  médiocre  mais  suffisante,  raillait  le  luxe 
opulent  qu'on  qualifiait  de  richesse. 

Les  marchands  et  les  voyageurs  qui  connaissaient  différentes  parties 
du  monde,  furent  d'accord  que  la  Pologne  est  un  pays  de  lait  et  de  miel; 
ils  y  virent  les  rues  des  villes  formées  par  des  maisons  contigues;  les 
terres  cultivées ,  des  jardins ,  des  arbres  fruitiers  :  la  nourriture  des 
liabitants  ne  demandait  rien  de  l'étranger.  Cependant  les  poissons 
étrangers  arrivaient  de  différents  pays  :  maritima  divitia,  opes 
equoreas  des  Pomoraniens  ;  l'huile  de  poisson  des  Komans ,  poisson  de 
Tolga  de  la  Khozarie  (ioe).  Sans  doute  on  aimait  à  assaisonner  les  plats 
âvec  des  épices  :  poivre  xcp^ov'^cdVTov/xcaôdv...  Tcencpcvxai  irc/^a  (Const. 


(lOT)  Voyez  la  figare  et  la  description  dans  mon  ouvrage  polonak:  la  Pologne  dn  moyen  âge, 
t.  IV,  p.  t96-Sâ9,  publié  à  Poscn  1851. 

(4<I4}/Quidquid  in  auri  argeoti  cupri  et  Terri,  lignoroni.  lapiduniTe  snbtilitate  solers  laudet  Ger- 
mania,  dit  le  moine  Theopbil.  —  0  Germania  gloriosi  !  tu  vasa  et  aarichako  ad  nos  subinde  miltis , 
chante  un  des  anciens  poètes  Fiorillo,  Gescb.  der  zeichnende  Kiinste  in  Deutscbland,  H,  p.  81). 

(405)  La  figure  et  la  description  de  cette  porte  étaient  publiées  par  Frcdcrik  Adelung  :  die  korsu- 
niacbe  Thttren  in  Kathedralkirche  lur  heil.  Sopbien  in  Novgorod,  Berlin,  18*5,  in-A*.  —  Celte  port 
était  donnée  comme  cadeau  ii  la  sointe  Sopbic  par  un  duc  de  litTanie ,  et  transportée  à  Novogrod 
Y«rt  4500.  Voyez  dans  ma  Pologne  du  moyen  âge ,  t.  IV,  p.  969  295. 

(405)  Noineschka  d'Edrisi,  VI,  5,  p.  404,  405. 

UI.  i* 


SfO  EDEI81. 

• 

porp.  de  adm.  iinp.  6),  gingembre,  oranges,  (conf.  Edrisi  VI,  6, p. 405). 
Le  vin  nécesaire  à  la  célébration  des  messes.  SulTant  toutes  les  appa- 
rences, on  était  pins  porté  à  Taprovisionnement  d'une  excellente  boisson, 
qu'à  Tamélioration  de  la  cuisine,  parce  qu'on  voit  de  bonne  beure  on 
échanson  parmi  les  dignitaires  de  la  couronne,  et  la  fonction  du  dignitaire 
de  la  table  ne  s'étendait  guère  à  la  cuisine,  seulement  à  la  couverture 
de  table.  (Le  dignitaire  de  la  cuisine  ne  parut  qu'au  xv*  siècle).  En 
effet,  quand  la  boisson  dans  les  festins  coulait  en  abondance,  les 
couvertures  des  tables  brillaient  de  luxe  et  de  magnificence. 

Lorsque  Gallus,un  des  chapelains  de  la  cour  de  Boleslav  III,  rappelle 
que  du  temps  de  Bolcslav-le-grand  vasa  et  supeUeclUiay  nullaligma 
habebalur  (I,  G,  p.  41),  il  est  évident  que  de  son  temps  la  table  ro^rale 
était  chargée  de  vases  et  d'ustensiles  de  bois,  et  ceux  du  temps  de 
Bolcslav-le-grand ,  n'étaient  que  d'or  ou  d'argent,  de  métal  ou  de 
corne  (ici).  Boleslav  III,  célébrant  huit  jours  le  festin  de  sa  noce,  distri- 
buait seulement  ceux  qui  étaient  en  or  ou  enargent(GaU.II,23,p.l8i). 

La  couverture  de  la  table  exigeait  différentes  marchandises  qui  dé- 
ployaient un  luxe  recherché  pour  éblouir  la  vue  ;  demandait  des  tapis  et 
des  tissus(t08).De  même  les  sièges,  les  planchers,  les  murs,  rentrée,  le 
vestibule  et  la  cour  brillaient  de  toutes  sortes  de  couleurs,  d*or  et  d'ar- 
gent (109).  Les  chevaux  harnachés,  rayonnaient  d'or  et  d'argent  (iio), 
et  le  cavalier  ne  négligeait  point  sa  propre  personne;  les  rangs  des 
guerriers  éblouissaient  par  la  couleur  de  différents  régiments  (lii). 

Du  temps  de  Boleslav-le-grand,  personne  n'osait  se  présenterai 
cour  habillé  simplement  eu  toile  de  lin  ou  de  laine;  personne  n'y 
allait  dans  sa  simple  pelisse  :  chacun  était  surchargé  d'habillement; 
la  pelisse  ou  la  fourrure  avaient  de  précieuses  couvertures,  brodées 
en  or  (tis).  Les  hommes,  chargés  de  la  chaîné  d'or  sur  le  cou,  mar- 
chaient dans  les  habits  royaux ,  car  le  roi  distribuait  diaque  jour  des      * 

(407)  Cet  Ttses  étaient  :  crpha ,  cappae,  lances,  scultells,  cornaa  mensae. 

(408)  Callut  (I,  6}  fit  une  apëcification  de  pallia  extensa ,  nappes  ;  cortinae  «  porte  as«iett«i  ;  tapéda^B  m 
et  slrata,  courte-poinlet  et  hou«a««  ;  mantilia  «t  mannteria,  serviettes  et  essnie»iiUHnt. 

(iOd)  Baldekioi  de  samnitis,  divcrsisqne  praeclosis  sericis  oroamentis,  coname  on  a  dëoftrë  près  d».^E3 
Gnèzne  le  ebemin  du  pèlerinage  nu-pieds  de  l'empereur  Otto  UI,  (miracula  scti  Adalb.  cap.  9,  édii^  .^m 
Pertx ,  t.  IV,  p.  61  S).  Les  étoffes  de  Bagdad ,  Baldak,  et  de  soie.  —  Bolealav  II,  tributa  ia  tapeC^Bi 
strata  prospectabat  (Gall.  I ,  fc,  p.  40S;.  Les  rois  tenaient  leurs  coaseils ,  donnaient  Ica avdieneai^^^si 
devant  leur  maison  sous  des  tentes. 

(i,10)  Frementium  equorum  auro  et  argento  futgentia  frena  (Joh.  canap.  vita  seli  Adalb.  «••p-         7 
edit.  Pertz,  t.  Iv,  p.  886). 

(441)  Acies,  divcrsitas  induraeutorum  discolor  yariavit  (Gall.  1, 6,  p.  30). 

(442)  Milites  et  Teminae curiales,  pro  lineis  vestibus  et  laneis  utebantur....  née  pelles  tiae  pallia» «| 
aurifrisio  portabatur  (Gall.  I,  6,  p.  89).  Pallium,  n'est  pas  un  menteau  mais  une  espèce  d'é 
pallia  Tont  partie  des  apparats  de  l'église  ;  les  pelisses ,  pelles  palUls  coopert»;  pallia  loat 
sur  les  tables,  pallia  exiensa;  pallia  répondent  aux  liueis  tt  laneii  Testibvf. 


COMMERCE,  ÉTAT  SOCIAL,  88.  21  ( 

soubes  et  des  zoupans  (iis).  Les  dames  de  la  cour,  eouronnéès  d'or, 
ayant  à  leur  cou  des  colliers  et  des  boucles  enfilés;  des  bracelets  à 
leàrs  bras  ;  vêtues  de  robes  brodées  en  or,  décorées  d'agraphes ,  de  bou- 
tons, de  pierres  précieuses,  se  trouvaient  à  tel  point  surchargées  qu'on 
les  soutenait,  pour  qu'elles  puissent  se  tenir  debout  (114).  On  ne  peut 
pas  considérer  cette  relation  pour  une  trop  forte  exagération ,  pour  ce 
Siècle  d'or.  L'ecclésiastique  près  de  l'autel,  se  tournait  avec  peine, 
accablé  de  la  pesanteur  de  l'apparat;  le  guerrier  se  remuait  lourdement 
sous  son  armure  et  sous  sa  chaîne;  les  dames  se  courbaient  sous  le  poids 
des  pierreries  et  des  métaux  qui  décoraient  leurs  membres  et  leur 
coiffure.  Luxe  effréné,  incroyable  et  ineffable  pour  les  autres  cours. 
La  reine  Rixa  (en  1036)  fuyait  de  Pologne,  ennuyée  et  dégoûtée  de 
l'intolérable  faste  de  la  cour  et  de  la  barbare  étiquette  des  Slaves  (11s). 
Ce  luxe,  avec  le  temps,  déchut  de  sa  hauteur.  Le  chapelain  de  la  cour 
de  Boleslav  IIl  voyait  comme  milites  et  fcBminœ  ctiriales  lineis  veslibus 
'vel  laneis  utebantur  et  pelles  (1 ,  6,  p.  59);  il  a  vu  comme  le  roi,  aux  fes- 
tins de  huit  jo«irs  de  sa  noce ,  distribuait  de  son  vestiaire ,  à  la  manière 
antique,  les  zoupans  et  les  soubes  couverts  de  soierie  et  décorés  de 
])roderies  en  or  :  renoues  et  pelles  palliis  coopertas  et  aurifrisiis  delim» 
éatas  (n»23,  p.  181).  Ce  luxe  déclina  à  la  cour,  non  pas  qu'il  y  eut  moins 
^e  matières  dans  la  circulation  pour  le  satisfaire,  mais  parce  qu'il  n'y 
ayait  plus  de  ressources  à  disposer  de  ce  qui  se  divisait  et  se  dispersait 
parmi  les  hommes  qui  avaient  leurs  jardins  et  leurs  châteaux;  il  perdit 
son  éclat,  parce  qu'au  lieu  de  décorer  et  couvrir  la  grossièreté  d'une 
toile  ou  d'une  pelisse,  il  entra  dans  leur  confection  et  améliora  celle-ei 
en  loi  donnant  un  certain  lustre.  Il  y  avait  encore  d'autres  circonstances 
qui  changaient  la  nature  du  luxe,  que  nous  voulons  exposer. 

.  Les  métiers  de  Pologne  ne  pouvaient  point  fournir  tout  ce  que  deman-* 
dait  ce  luxe.  Il  fallait  acheter  chez  d'autres  à  l'étranger,  et  payer  argent 

(143)  Tordues  fuvefe  inmensi  ponderis  (GtU.  1,43, 40,  p.  6é,  83);  indumeutis  regalibus  ad«rnat 
(id.  I,  18,  p  70);  qui  Testes  (zoupany)  mutabatis  cottidio  (I.  46,  p.  83)  :  cenxde  la  Yeillf  étaient  pro- 
)MB^em«nt  roportés  dans  le  vestiaire. 

(414)  Mnlieres  Terocariales  coronibus  aureis,  monilibus,  marenolis,  bracbialibus ,  aurifrisiis  et 
gfinaûs  Ua  opust»  precedebant,  quod,  ai  sustentarentur  ab  aliis,  pondus  metalli  sustinere  nou  vale- 
Ikgg^l  (Cî^l.  I,  48,  p.  6i,  $K).  Vof  matronse,  que  coronas  gestabatis  anreas  et  quae  vestes  habebatis 
totas  aarifiriseay  (I,  49,  p.  83).  —  A  voir  Tbabilleraent  moins  clinquant  de  la  dame  Strjezislava, 
modeste  mère  de  saint  Adalbert,  eouchce  sur  sa  chaise-longue  dans  un  compartiment  de  la  porte  do 
Végliae  à  Gnèzne.  — Il  y  a  peu  de  temps,  en  ABU,  on  a  trouvé  dans  la  grande  Pologne  près  d'Obrjitzko, 
quantité  de  boutons,  d'agrapbes,  d'annelets,  de  boucles  et4'autres  pendants,  d'un  ouvrage  très-fin , 
enfouis  vers  980,  dont  on  voil  les  figures  dans  la  description  de  Jules  Friediander  :  Fund  von 
Obrzitzko,  Beilin,  4844,  in-4*.  On  retrouvait  déjà  de  semblables  en  Poméranie.  C'est  probablement 
ronvragebyaanttn,  ocHinm  aussi  en  orient.  Ce  qu'on  a  retrouvé  jusqu'aujourd'hui  est  tout  en  argent. 

(44S)  Dicta  incredibile,  m  ineffabile  (Ditm.  IV,  f»};  ntpote  fastn  ejus  intolerabiles,  simul  et  bar- 
baros  slavonim  pertasa  ritus  (vita  Eionis,  cap.  8,  inter  script,  brunsv.  Leibniizfl,  t.  1.<i>>  830). 


342  EDRISI. 

eempunt  bien  d'objets  des  fabriques  étraugères.  Non  loin  de  Rrakovie  et 
de  Biton,  près  de.Zwierszov  ou  Sieverz,  la  Pologne  possédait  des  mines 
d'argent(ii6).0n  ne  peut  pas  présumer  qu'elles  aient  données  une  suffi- 
sante quantité  de  métal  pour  payer  tout.  Les  ressources  à  cette  fin  exis- 
taient dans  les  cérales,  dans  Tabondance  des  produits  du  travail  et  dans 
Texportation  limitrophe.  Le  sol  était  fertile  et  cultivé,  les  villes  florissantes 
remplies  d'ouvriers  aussi  habiles  qu'intelligents  (Bdrisi ,  YI,  4,  p.  589). 

89.  L'or  et  l'argent  qui  donnait  tout  l'éclat  au  luxe  des  églises  et  de 
la  cour,  étaient  un  objet  de  commerce,  une  marchandise,  nécessaire  en 
partie  pour  le  vaste  négoce,  quand  il  était  acquis  par  échange  et  trans- 
porté en  lingots;  il  n'avait  pas  de  valeur  pour  le  petit  trafic.  Les  Prussiens 
n'y  attachaient  aucune  importance,  ils  ne  demandaient  que  des  tissus 
en  laine  (ni).  Les  insulaires  Roughiens  ne  voulaient  point  admettre  du 
numéraire,  ils  se  contentaient  de  la  valeur  des  toiles  (iis).  La  Poli^ne^ 
était  plus  accessible  à  la  circulation  de  la  monnaie ,  et  moyennant  ses 
ressources,  elle  achetait  des  masses  d'or.  On  avait  du  temps  de  Boleslav- 
le-grand,  super fluitatem pecuniœ,  aurum  commune;  c'est  avec  le  temps 
que  son  éclat  s'affaiblit  devant  la  luisante  pâleur  de  l'argent  (iio). 
C'était  la  conséquence  de  ce  changement  dans  le  commerce,  qù  l'or  et 
l'argent,  principale  marchandise ,  céda  la  place  aux  marchandises  d'in- 
dustrie, conséquence  de  ce  progrès  qui  dispersait  le  restant  des  métaux 
précieux  dans  des  mains  nombreuses,  dans  toutes  les  parties  du  pays. 

Pour  l'habillement,  les  garnitures  de  la  parure,  les  étoffes,  les  orfè- 
vreries venaient  longtemps  presque  exclusivement  de  la  Grèce,  de 
Byzance,  de  Rherson  (iso).  Là  étaient  les  manufactures  des  étoffes  de 
soie,  serici;  de  velours,  sammeta,  de  pourpre,  /SÀaTrta,  en  général  des 
étoffes  de  différente  couleur,  pallia;  là  on  brodait  en  or,  aurifrisia;  là 
on  fabriquait  tapis,  rideaux,  pavillons,  ceintures,  upav^w  ,  bracelets, 

(416)  Villa  ante  Biton  (dans  la  haute  Silisic)  quœ  ZnersoT  dicitor  cum  rusticis  argent!  fossoribas 
buila  lonoc.  papas  41S6 ,  in  cod.  maj.  pol.  Raczyn.  n'  é). 

(ii7)  Pruzi  auram  et  argentum  pro  minimo  ducunt...  pro  laiieis  indumentls  effarant  praecioios 
martures  (U«ln).  1,  i,  B). 

(448)  Apud  Banos  non  habetur  moneta,  née  est  in  comparandis  rebns  eonsuetudo  numerarani,  ted 
qulcquid  in  foro  mercari  voluerif,  panne  lineo  comparabis.  Aurum  et  argentum ,  qued  forte  per 
rapines  et  captiones  bomioum,  vcl  andecunquaeadepti  snnt,aut  uxbrum  cultibus  împendant,  ant 
in  srarium  dei  sui  conferunt  (Uelm.  I,  38,  7). 

(449)  Pecunia,  dans  la  relation  de  Gallus,  désigne  non  seulement  la  monnaie  conrante ,  maisea 
même  temps  des  lingots  d'or  et  d'argent. 

(180)  Xs^saovtTûi/  Tov  /xta&ov...  010 f  ^XàtTT ioc  y  7r^av^«a,  x^P^f"'^*  ffT^/*evT«... 
$ep/xarca  xXXri^ivà,  TzapiiKoc  iCeikiL  porph.  de  adm.  imp.  6).  Cela  passait  du  temps  de  Con- 
stantin par  les  possessions  des  Petscheneghs  ;  après  leur  destruction,  passait  de  Kherson  directemeni 
dans  les  terres  des  Russiens.  A  la  suite  de  ee  commerce,  les  Russes,  qualiièreat  d*«uyrag«  k»r«o«- 
Bien,  tous  les  monuments  et  ol^ets  artistement  élaborés. 


\ 


COMMERCE,   ÉTAT  SOCIAL,  90.  245 

xu^pia,  brachiales,  et  mullilude  de  parures  de  ce  genre  o^fjit>*rx,  qui 
s'attachaient  à  différentes  parties  du  corps,  à  tous  les  bords  d'habillement, 
franges,  annelets,  boucles,  boutons,  agraphes.  A  cette  époque,  les  fabri- 
cations exécutées  en  Perse,  en  Asie,  à  Timitation  des  Grecs,  ou  par  les 
Grecs  eux-mêmes,  restaient  encore  sur  le  lieu,  n'arrivaient  pas  à  une 
telle  quantité  aux  rivages  du  Volga  et  du  Don  comme  postérieurement , 
ne  se  mettaient  pasencore  en  concurrence  avec  les  manufactures  byzan- 
tines. Les  soieries  baldakines,  et  les  tissus  de  coton  de  Torient  eurent 
plus  de  fortune  plus  talrd.  Des  environs  du  Don  et  du  Volga  arrivaient 
pliltôt  les  poissons,  et,  ce  qui  était  plus  important,  For  et  la  fourrure. 
.  Byzance  a  pu  transmettre  de  l'Afrique  les  peaux  de  léopards  et  quelques 
dépouilles  des  animaux  du  sud;  mais  les  fourrures  de  martres,  de 
belettes,  de  zibelines,  de  renards  rouges  et  noirs,  heurtasses,  le  castor, 
sortaient  des  environs  du  Volga  et  du  Don,  pelles  prœciosas  {Gall.  I,  G, 
p.  36),  dont  l'aspect  et  l'odeur  furent  du  goûc  de  l'occident  (Helm.1, 1). 
Ces  fourrures  arrivaient  par  de  grands  chemins,  et  se  dispersaient 
par  des  chemins  particuliers.  Par  ce  dernier  moyen,  les  Prussiens 
pouvaient,  de  leurs  forêts  marécageux,  fournir  certaine  quantité  au 
monde  chrétien  :  pelles  abundanl,  peregrinis  offerunt,  tam  prœciosos 
marlures  (Helm.  I ,  i ,  8).  Sur  le  grand  chemin  se  trouvaient  les 
Klloviens  et  chez  eux  le  gros  du  commerce. 

90.  Dans  chaque  siècle  il  ne  manquait  pas  de  mouvement  commer- 
cial dans  ces  immences  distances  du  nord;  il  était  lent,  traînant,  mais 
il  rapprochait  les  peuples  éloignés.  L'invasion  du  mahométanisme  et 
les  perlustrations  des  Arabes  l'ont  animé  sans  doute;  mais  c'est  par 
l'activité  de  la  dynastie  sammanide  (890-1  OOi)  et  par  le  concours  de 
ces  événements,  qui  déplaçaient  les  situations  de  la  race  Slave,  qu'il 
prit  une  extension  considérable,  et,  grandissant,  coopéra  à  la  permu- 
tation de  l'état  social  et  politique  de  plusieurs  pays  et  nations.  Sur  les 
rives  du  Volga  ,  les  marchands  des  côtes  de  la  Baltique  se  rencontraient 
avec  les  marchands  des  côtes  de  la  mer  rouge  et  du  golfe  persique.  Les 
peuples  du  nord,  prenant  l'or  et  l'argent  des  mahommédans ,  donnaient 
en  échange  ces  précieuses  fourrures,  qui  émerveillaient  les  climats  plus 
échauffés.  D'un  autre  côté,  ces  précieuses  fourrures,  de  même  que  l'or 
et  l'argent ,  acquis  par  le  traûc ,  furent  échangés  avec  les  occidentaux , 
pour  le  vêtement  ordinaire,  pour  de  petites  commodités  de  la  vie,  qui 
manquaient  au  peuple  du  nord.  La  Slavonie  du  Dniepr,  où  les  Varèg- 
Rouss  se  sont  casernes ,  par  sa  situation  forma  bientôt  un  entrepôt, 
et  devint  l'intermédiaire  de  toutes  les  opérations  du  négoce  occidental. 
L'esprit  mercantiU  s'empara  des  peuples,  les  villes  et  les  cités  grandi- 


314  EDRISI. 

rent  rapidement  en  population,  en  métiers,  eo  trafic,  eo  extension;  9 
côté  des  chaumières,  pleines  de  nombreuses  familles,  les  architectes 
grecs  élevaient  des  édifices  en  pierre ,  d^épaisses  murailles  et  fortifica- 
tions, des  basiliques,  des  cerkievs,  décorées  de  mozaïque  la  plus  recher- 
chée.  Les  marchandises  étrangères  traversaient  continuellement,  s'arrê- 
taient sur  les  marchés  et  encombraient  les  dépôts;  les  marchandises 
principales  consistaient  en  sacsdefourrures,  en  or  et  enobjetsde  luxe  La 
soif  de  gain  animait  tout  le  monde,  mais  pour  jouir  de  la  surabondance! 
11  n'y  avait  aucune  inclination.  La  grossièreté  rustique,  regardant  les 
monceaux  d'or  accaparés,  n'avait  aucune  disposition  au  luxe,  ne  l'inventa 
point,  et,  guidée  par  l'avaricemercantile ,  ramassait  pour  garder  (iti). 

On  savait  que  la  Russie  était  riche,  surtout  sa  métropole  l^iiov. 
En  1018,  le  15  août,  Boleslav-le-grand  entra  dans  cette  capiule,  capui 
et  arx  regni,  Kiiov.  Â  l'instar  de  Byzance ,  elle  avait  ss)  porte  d'or,  civi- 
tatem  nutgnam  et  opukntam  vigrediens,  evaginato  gladio,  in  aurea  porta 
pereuliens  (Gall.  1 ,  7,  p.  44,  46).  Dans  G«(te  immens0  cité  on  comptait 
400  églises,  cerkievs,  huit  marchés  oa/^eaTa^ ;  une  population  innom- 
brable ,  car  l'affluence  dans  la  ville  et  vers  ses  environ»  était  énorme  ; 
des  indigènes,  des  esclaves  qui  y  trouvaient  leur  refuge,  des  étranger» 
et  spécialement  des  Danaens  ou  Grecs  (des  juifs),  et  de  dangereux 
voisins  Petschenehs.  L*incendie  avait  endommagée  l'année  précédeot^ 
la  principale  basilique,  la  cerkiev  de  sainte  Sophie  :  elle  fut  déjà  res- 
taurée. La  cité  entourée  d'une  muraille ,  capable  de  se  défendre  «  après 
une  courte  résistence  fut  prise.  On  y  montra  à  Boleslav  une  quantité 
ineffable  de  précieux  métaux ,  ineffabilis  pecunia  ostendilwr^  le  trésor 
ducal ,  avec  lequel  le  duc  ne  savait  que  faire.  C'est  ce  que  disent  les 
publicistes  de  l'époque,  ce  qu'ils  annotaient  avant  que  Boleslav  eut  Le 
temps  de  se  reconnaître  dans  sa  nouvelle  acquisition  (Ditm.  iX,  16)  (is«)- 

Boleslav-le^rand  prit  conseil,  s'il  devait  garder  avec  une  poignée  de 
guerriers  une  cité  aussi  vaste  et  populeuse,  urhem^  dilissimamj  regnum- 
que  ruthenorum  potentissimum.  Dans  ses  états  il  n'y  avait  aucune  com- 
parable. Il  se  décida  à  confier  son  administration  à  un  Russe  et  de 
Fabandonner  :  decem  mensibus  inde  pecuniam  in  Poloniam  trawmit- 

(491)  Du  temps  de  Boleslav-le-grand,  dans  la  poissante  et  opulente  Kiiov,  au  moment  de  sa  pins 
haute  splendeur  :  Rutenorum  rex ,  simplicitate  gentis  lllius,  s'amusaK  de  ta  pèche  ordinaire  de 
poisson.  1—  Avec  le  temps,  Kiiov  déclina  et  succomba  et  on  ne  connaît  aucun  luxe  des  duca  jrvs^ieiw. 
Le  luxe  se  tournait  vers  les  églises  et  les  édifices. 

(Iti)  In  magna  bac  civitate,  quœ  istius  regni  captit  est  et  plus  quam  quadringcnta  habentur 
eoelesiae  et  mercatns  octo  ;  populi  autem  ignota  mauus  :  quœ  sicut  omnis  bse  provincia,  Ajgitivorom 
robore  servorum,  hue  undiqne  affluentium  et  maxime  ex  velocibus  Panais,  multomquo  voceiktib^s 
Petin^is  bactenus  consistebat,  ei  alias  vincebat.  —  Boleslav  entra  dans  Kiiov  le  IS  août,  le  contin- 
gent allemand,  domum  remittebat  en  septembre  au  plus  tôt.  Ces  Allemands  pouvaient  donc  aa  mois 
d'oclebra  retouroer  «a  Allemagno  et  racoolcr  conme  Beirious  aiilea  incljFtus  ex  uostris  (allaa|uiM)i, 


COMMBRCB»  ÉTAT  SOCIAL,   9t.  215 

tendo,  le  onzièniô,  eum  thezauro  residno  Poloniam  remeabai  (Gall.  I,  7, 
p.  47).  Ex  eo  tempore  Russia  Poloniœ  vesligalis  diu  fuit  (ibid.  p.  51)  (fis). 
Cet  érénement  favorisa  le  fastueux  luxe  des  six  dernières  années  de 
Boieslav-le-gfànd,  ensuite  les  années  du  règne  de  sonfiIsMietschisIavII, 
fcutus  intolerabiles  el  barharos  rilus  qui  devenaient  insupportables  à  la 
reine  Rixa  allemande  (vita  Ëzonis,  cap.  3). 

Pendant  Tassaut  de  Kiiov,  mctgna  urbs  incendio  ftiinoratur  (Ditm. 
IX,  iO).  Cet  incendie  ne  diminua  pas  son  existence;  sa  prospérité  con- 
tinua ;  la  cité  fut  rebâtie  :  melropolis  Chive,  œmula  sceptris  Cotislanlino- 
politani,  clarisàimum  decus  Grobciœ,  de  Russie,  du  rit  grec  (Âdami  brem. 
hist.  eccles  (66)  II,  15).  La  Russie  est  toujours  ricbe  et  opulente  parce 
qu'elle  a  à  sa  disposition  nombre  de  sacs  de  fourrures  et  de  lingots  d'or. 
Elle  n'avait  point  de  monnaie,  elle  jettait  celle  de  byzaûce  ou  koufique 
dans  les  creusets  pour  avoir  des  lingots  d'or  et  d'argent.  En  1041,  le  roi 
Kazimir  épousa  Russianobilem  magnis  diuitiis  nxorem (Gall.  I, â0,p.92). 
Boleslav-ie-hardi  ou  libéral  contemplait  tributaRulenorum,  aliorumque 
veciigalium  in  tapetis  slrata  (I,  26,  p.  105);  pour  un  baiser  de  paix  et  la 
secousse  de  sa  barbe,  le  duc,  Vnei ,  comptitatis  largi  Boleslai  passibus 
equi,  de  slacione  ad  locum  conventions ,  lotidem  marûas  aureas  posuit 
(I,  25,  p.  101).  C'était  peu  de  chose  pour  le  duc  de  Russie  de  jeter  l'or 
avec  cette  profusion,  car  il  ne  connaissait  ni  le  charme  d'une  bonne  chère 
exquise ,  ni  l'attrait  du  luxe.  Cependant  le  trésor  commença  à  s'épuiser 
par  de  fréquentes  'visites.  Le  duc  porta  plainte  au  pape  Grégoire  YII , 
lequel  dans  sa  lettre  de  1075,  apostrophant  Boleslav,  exige  et  sollicite 
la  restitution ,  pecuniœ  quam  régi  Russorwn  abstulit  (epist.  II,  75)  (ii4). 

9i.  Le  trésor  du  knez  se  dispersa  et  se  vida;  en  attendant  Tor  dis- 
paraissait du  commerce  et  cédait  la  place  aux  lingots  d'argent;  ce  qui 
restait  d'or  se  disséminait  plus  facilement  dans  les  mains  particulières; 
le  commerce  des  autres  villes  commençait  en  même  temps  à  se  placer 
au  niveau  de  Kiiov  et  se  détournait  de  sa  direction  vers  cette  cité. 

oppetiit  dans  un  combat,  et  ils  narraient  tout£s  ces  choses  inimaginables  qu'ils  ont  tus  «t  qu'ils 
apprirent  de  inefibbili  pecunia  qa'on  avait  montré  à  Boleslav.  En  même  temps  arrivait  ad  imperato- 
rem  dilectns  Boleelavi  abbas,  cum  muneribus,  conditionnant  un  nouveau  contingent  impérial,  en  cas 
de  demande,  ut  suum  ampliusauxilium  acquireret. —  Tout  ceci  est  noté  par  l'évèque  de  Bferseburg 
Ditmar,  presque  à  l'instant  même,  sur  son  lit  de  mort,  car  il  mourut  le  4  décembre.  Boleslav-le-grand 
séjournait  encore  à  Kii«v.  Dans  cette  nouvelle  il  n'y  a  rien  d'exagéré.  Les  villes  de  Russie  devenaient 
un  refuge  de  la  liberté ,  foyer  de  franchises  et  du  lucre ,  grandissaient  oomrae  par  eachantement. 

(123)  Diu,  par  conséquent  dans  l'année  11 10,  dans  laquelle  écrivait  Gallus;  du  temps  de  Vladislav 
Hefman  et  de  Boleslav  la  Russie  n'était  plus  tributaire. 

{tu)  Inter  otfiàll  servanda  vobis  est  caritàs,  quam,  quod  inviti  diciiius,  iu  pecunia  <|ttam 
Russorum  régi  abstulisti s  violasse  videmini.  Quapropter,  condolentos  robis  multum  vos  rogamus  et 
admonemus,  ut  pro  aAort  dei  et  sancti  Pétri,  quidqnid  sibi  a  tobis  el  vestris  ablatum  eet,  restitui 
faelM»*. 


216  ^Risi. 

Cependant  Kiiov  continuait  encore  de  rester  le  centre  du  mouvement 
commercial,  qui  croisait  en  tout  sens  et  traversait  cette  cité. 

La  navigation  sur  le  Volga  était  utile  aux  peuples  reculés  vers  les 
déserts  nord-est;  celle  du  Don,  commode  à  tous  ceux  qui  bordaient  ce 
Oeuvc;  les  petits  bâtiments  de  son  embouchure  apportaient  des  trans- 
ports aux  grandes  constructions  de  Matrakha  ou  de  Bertabiti,  pour  être 
expédiés  par  la  mer  noire.  Mais  le  cours  du  Dniepr,  renforcé  par  de  nom- 
breux bras  navigables,  roulant  ses  eaux  par  les  pays  inspirés  du  génie 
mercantile,  favorisait  mieux  la  cité  Kiiov  par  les  communications  rive- 
raines. Il  fesait  descendre  les  marchandises  de  la  Slavonie  septentrio- 
nale, des  Pomoraniens,  des  Normands-skandioaves,  des  Anglo-saxons, 
marchandises  qui  venaient  de  la  mer  baltique  et  traversaient  Novo- 
gorod  et  Smolensk.  Tout  descendait  vers  Kiiov  pour  être  expédié  aux 
bâtiments  de  la  mer  noire,  d'où  les  marchandises  de  Byzance  et  de 
Kherson  remontaient  par  le  même  chemin  vers  Kiiov,  pour  être  dépo- 
sées jusqu'à  ce  qu'elles  aient  pu  se  disperser  dans  toutes  les  directions. 
Plusieurs  villes  des  rives  du  Dniepr  pouvaient  tirer  un  semblable  avan- 
tage ;  la  fortune  préféra  Kiiov,  elle  était  seule  qui  en  profita  parce  que 
les^grandes  communications  continentales  se  croisaient  avec  la  riveraine 
le  plus  commodément  dans  ses  environs. 

La  Pologne,  dans  sa  position,  était  privée  de  semblables  avantages. 
Ses  principaux  fleuves  roulaient  les  eaux  dans  un  sçns  contraire;  elle  ne 
possédait  pas  directement  le  littoral  de  la  Baltique.  La  Hongrie  était  plus 
rapprochécaux  objets  de  luxe  et  du  commerce  byzantin,  le  Danube  y  était 
à  donner  une  direction  au  négoce  ;  ses  rives  méridionales  et  ses  embou- 
chures furent  animées.  La  Pologne,  entourée  de  ce  grand  mouvement, 
sans  être  appelée  à  la  participation,  servait  de  passage  et  tenait  un  rang 
inférieur.  Ce  passage  se  frayait  cependant  différentes  routes  commer- 
ciales par  son  territoire.  De  Magdebourg  et  Halla  (par  Posen)  à  Gnèzne; 
de  Magdebourg  et  Halla  (par  Breslav)  à  Krakovie.  Dans  Tintérieur  du 
pays  elles  se  croisaient,  et  de  Gnèzne  et  de  Krakovie  elles  s'étendaient 
irès-loin.  De  Gnèzne  par  Sandomir,  à  Prjemisl,  Sambor,  à  Halitsch, 
d'où  l'on  descendait  avec  le  Dniestr  jusqu'à  la  mer  noire.  De  Krakovie 
par  Sandomir  jusqu'à  Kiiov.  Cette  dernière  était  le  chemin  du  grand 
commerce  et  son  principal  passage  qui  animait  Loutzk  et  Peresopnitza. 
De  ces  routes  nous  avons  les  distances  que  les  marchands,  vers  1154, 
rapportaient  aux  géographes  de  Sicile  et  à  Edrisi. 

Sur  les  immenses  plaines  de  la  Slavonie  russienne,  l'esprit  mercantile 
détermina  aussi  les  distances  pour  les  marchands.  De  Kiiov  on  passait 
le  continent  avec  sécurité  jusqu'à  l'embouchure  du  Dniepr,  et  on  remon- 
tait vers  Smolensk.  Barmon  ou  Smolensk  est  évidemment  un  point  très- 


COMMERCE,  ÉTAT  SOCIAL,  93.  217 

important  pour  le  commerce  da  nord ,  d^ôù  rayonnaient  les  commani- 
cations  continentales  dans  toutes  les  directions.  De  Test  par  les  pays  de 
Mordva  et  Mourom,  se  communiquaient  les  Boulgars  ;  du  nord,  Novogorod 
et  les  Kareliens.  Vers  Touest  deux  chemins  avançaient  jusqu'à  la  mer 
Baltique  :  un  par  Kabi  à  Ânho  (Reyel)  ;  Tautre  en  longeant  Dvina  vers 
Madsouna  et  Sounon  (125).  Vers  le  sud,  par  Mozir  et  Loutzk  versHalitsch 
et  Prjemisl,  s*embraucbant  de  Loutzk  et  de  Peresopnitza ,  par  Tiver,  le 
long  du  Boh  vers  leis  embçucbures  du  Dniepr  et  du  Dniestr;  croisant  le 
grand  chemin  le  plus  fréquenté,  qui  venait  de  Krakov  par  Sandomir  à 
Kiiov;  d'où  ce  chemin  avançait  par  les  plaines  dés  Komans  jusqu'au  Volga. 
Ainsi  les  communications  continentales  se  croisaient  à  Kiiov  avec  les 
communications  riveraines;  elles  facilitaient  ce  concours  des  quatre 
plages  du  monde  dans  un  point  central.  Les  géographes  de  Sicile  ne 
rignoraient  point  :  quoique  la  description  d'Edrisi  n'est  pas  assez  claire, 
elle  est  assez  explicite  pour  indiquer  les  positions  connues;  elle  confirme 
Texfstence  de  toutes  ces  avenues  qui  formaient  la  grandeur  et  la  pros- 
périté de  Kiiov.  Elle  en  a  profité  :  mais  il  ne  dépendait  d'elle,  quand 
l'aurore  des  autres  commença,  à  éteindre  la  lumière  de  son  astre. 

92.  Les  enfants  d'Israël  partageaient  avec  ferveur  l'activité  commer- 
ciale, surtout  ceux  d'Allemagne,  qui  inondaient  le  sol  hospitalier  de  la 
Slavonie.  Ils  retrouvaient  leurs  confrères  au  fond  de  l'Asie  et  soutenaient 
infatigablement  leurs  communications  lointaines^  Ils  étaient  nombreux 
dans  les  villes  des  Boulgars  et  Khozars,  sur  les  bords  du  Yolga;  les 
Khakans  des  Khozars  jusqu'à  la  chute  de  leur  empire  (990  et  1016)  sui- 
virent la  doctrine  de  Moïse.  Les  juifs  d'Allemagne  y  avaient  par  consé- 
quent un  point  d'appui.  Toute  la  route  jusqu'à  Kiiov  se  peupla  d'Israé- 
lites. Ils  n'avaient  pas  besoin  de  s'arrêter  en  Pologne ,  où  ils  étaient 
encore  peu  nombreux  ;  ils  la  passaient  pour  se  rendre  au  plus  tôt  dans 
le  point  central  de  Kiiov,  où  ils  trouvaient  tout  le  profil.  Les  indigènes 
étaient  contents  de  leur  coopération,  jusqu'à  Tépoque  où  se  déroulèrent 
les  circonstances  inattendues,  que  l'œil  le  plus  exercé  ne  sait  prévoir. 

Le  commerce  transitoire,  concentré  à  Kiiov^  commença  à  se  diviser  et 
à  tourner  par  différents  chemins.  Les  routes  multipliées  à  droite  et  à 
gauche,  pouvaient  déjà  agir  sur  celle  division  :  mais  de  plus  grandes 
diversions  à  cet  égard  commençaient  à  se  développer  de  deux  côtés  de  la 

(i2o)  Les  renseignements  d'Edrisi  offrent  ici  une  lacnnc,  une  interruption.  Elle  est  reraplic  non 
•culement  par  la  situation  des  lieux  sus-mentiouné»,  mais  avec  évidence  incontestable  par  les 
trouvailles  de  monnaies  kouGques.  La  monnaie  koufîqne  allait  ensuite  s'accumuler  dans  les  îles  de 
la  Baltique,  aux  environs  de  Sigtouna,  sur  les  rivages  des  Pomoraniens  et  dans  leur  voisinage,  près 
d'Elba  (Elblong),  visrà-vis  Landschouden  (Skanic],  et  chez  les  Vinules.  —  Voyez  la  carte  de  Savelov 
et  ce  qu'il  en  dit  p.  I3S-201,  et  comparez  avec  la  figure  ci-dessus  p.  178,  au  chap.  08. 

III.  IN 


3t8  BMUSI. 

direction  kiiOTienne.  D'an  côté  les  coionîes  rasftîennes^  établies  a«  ëeH 
des  forêts  «  uleskie,  fediltàient  et  aninaient  leseommiiuicationsdes 
bords  daTolga  paf  la  NoTogorod  vers  la  kner  Baltique»  oà  commençait  à 
percer  la  concurrence  allemande.  De  Tautre  côté,  les  Italiens  Mquen- 
laienl  plus  soutent  Gonstantinople  et  commençaient  à  animer  les  coa* 
manications  deremboucfanre  du  Don.  Par  d'autres  circonstances  encore 
le  mouTement  commercial  se  trouvait  dérangé  et  gravement  compromis. 

Les  conquêtes  ne  le  favorisent  pas  toujours.  L'extermination  des 
Boulgars,  Bartas,  Khozars  par  les  Russes,  dépouilla  les  mardiés  rus- 
siens  des  avantages  qu'ils  tiraient  des  hordes  et  peuples  dont  il  ne 
restait  que  le  nom.  La  dévastation  du  pays  des  Vinules  et  la  soumissioa 
des  Pomoraniens  portaient  une  semblable  atteinte  aux  marchés  du  nord» 
La  chute  des  Sammanides,  le  débordement  des  hordes  tourkes  du  fond 
de  l'Asie  dans  les  possessions  mahommédanes,  déchirait  ou  anéantissait 
les  communications  établies.  La  monnaie  arabe,  depuis  1013,  disparut 
de  la  circulation  dans  la  Slavonie;  peu  après,  vers  1050,  la  monnaie 
allemande  et  anglo-saxonne  cessa  d'inonder  ces  pa}'&,  ensuite  l'ordispafut 
du  commerce ,  on  ne  saurait  assex  expliquer  ce  déchet.  Tous  les  élé- 
ments du  transit  se  détournaient  des  marchés  russiens,  et  aucune  ville 
marchande  ne  se  ressentait  plus  de  ce  dérangement  que  l'opnlente  Kirov. 

Les  juifs  étaient  entraînés  dans  ce  délabrement  de  fortune,  mais 
meilleurs  spéculateurs  que  les  autres,  ils  savaient  se  tirer  d'affaire  :  les 
indigènes,  gênés,  s'en  irritaient  et  accusaient  les  opérations  juives  comme 
cause  du  malaise.  Les  esprits  s'envenimaient  ;  à  chaque  émeute,  le  peuple 
égorgeait  les  juifs;  pour  les  sauver  du  massacre,  Yladiroir  monomane, 
ordonna  aux  juifs  d'évacuer  Kiiov  (lli4)  :  le  peuple  bénit  le  knez  qui  le 
délivrait  de  ce  fléau  :  mais  le  malaise  ne  cessa  de  travailler  et  de  préparer 
le  triste  dénouement  (i  te).  Le  peuple  n'ayant  plus  d'objet  de  prévention, 
devenait  plus  inquiet ,  plus  mutin  dans  les  affaires  de  rintérleur.  Sa 
prospérité  disparut  :  agité  par  les  passions,  Kiiov  était  malheoreuse  et 
la  politique  hideuse  de  Sonzdal  éguisait  l'épée  meurtrier.  En  1467,  le  fils 
dégénéré  de  la  Russie,  Ândré-aimant-dieu  (bogolubski)  la  livra  au  pil-* 
lage.  Cette  cité  sainte,  respectée  par  les  siens  et  par  les  étrangers  qui  la 
visitaient ,  fut  victime  de  l'engeance  dénaturée.  Cinquante  ans  après, 
en  1204,  les  Romans  Polovtzi,  enhardis  par  le  forûiit  souzdalien,  sacca- 
gèrent et  dépeuplèrent  Kiiov.  Le  prestige  de  la  cité-mère  faiblit,  sa  gloire 
déclina  ;  Kiiov  ne  se  releva  plus.  Souzdal  se  réjouit;  Riga  et  Loubeka^ 


pas 

les 

tint  nombreuse  qu'était  la  popolati^-  j».. «.»..».,  «i»  »..«  «m..»  «.>•«.»■«,«»,  iuivv«r  utiT«ca«« 

Kiiov,  elle  retonrai  d'où  elle  était  veoue,  en  Allemagne  et  en  orient,  les  orientaax  étant  les  pim 

nombreux. 


^ 


COMMERCE,  ÉTAT  SOCIAL,  93.  2ld 

ft^élévaîent,  Novogôrod  gratidissoit  et  Géttes  atec  les  Yénitlens  allaient 
foire  des  établissements  de  leur^  comptoirs  sur  les  côtes  de  la  mer  noire. 

93.  Du  temps  de  Boleslav  III,  Tâge  d'or  était  passé  depuis  un  siècle; 
d'autres  relations,  une  autre  position  sociale  s'étaient  formées  par  la 
marche,  par  le  progrès  de  la  civilisation.  C'est  surtout  depuis  la  guerre 
intestine,  depuis  la  guerre  sociale  de  4080,  que  l'état  de  choses  se  déroula 
tout  différent  de  celui  qu'on  glorifiait  à  l'époque  de  Boleslav-le-grand. 

L'ancienne  coutume  et  l'ancien  ordre  cédèrent  au  nouveau.  Les 
objets  de  luxe  et  de  l'opulence  se  sont  dispersés  en  parcelles  et  cessè- 
rent de  constituer  ce  luxe  ;  ils  décoraient  et  couvraient  d'une  manière 
plus  commune.  Lorsque  Boleslav  III  distribuait  les  vêtements  festi- 
vaux ,  il  y  avait  des  particuliers  qui  en  étaient  investi  à  leurs  propres 
frais  et  pouvaient  les  distribuer  de  leur  part.  Boleslav-le-grand  séjourna 
dans  différentes  communes  et  tenait  des  tables  publiques  lui-même  ou 
par  ses  commis,  pour  engager  le  peuple  à  s'y  établir  (12?).  Boleslav  lll 
n'était  plus  à  même  de  l'imiter,  car  cette  ancienne  coutume  compensait 
les  villes  et  les  cités  pleines  de  rues  à  construction  continue.  Si  les 
premiers  Boleslav  pouvaient  entreprendre  d'innombrables  incursions 
et  expéditions  dans  des  pays  éloignés,  Boleslav  III  et  ses  successeurs 
ne  pouvaient  plus  s'engager  trop,  ni  en  Russie,  ni  en  Hongrie,  ni  en 
Bohême  ;  parce  qu'il  leur  était  plus  difficile  de  sortir  de  leur  propre  pays 
et  de  pénétrer  dans  les  états  voisins.  En  Pologne  et  chez  les  voisins ,  le 
pays  devenant  plein,  offrait  plus  d'entraves,  et  de  nombreuses  occupa- 
tions, multipliées  sur  le  lieu,  retenait  chacun  dans  ses  foyers. 

Les  constructions  de  tant  de  bâtiments,  entassés  ensemble,  les  murs 
et  les  fondations  des  églises  et  des  couvents ,  occupaient  quantité  de 
monde;  les  habitants,  rapprochés  et  concentrés,  développaient  l'activité 
des  métiers  et  des  fabriques,  qui  surpasse  beaucoup  l'activité  précédente. 
Partout  le  trafic,  l'achat  et  la  vente,  varia  et  prenait  un  surcrois;  de 
petites  nécessités  de  la  vie  se  multipliaient  partout.  Les  cours  des 
seigneurs,  tant  séculiers  qu'ecclésiastiques,  recherchaient  ce  que  jadis 
formait  exclusivement  le  luxe  royal.  La  monnaie  et  le  numéraire 
devenait  à  chacun  plus  nécessaire ,  et  sa  fabrication  locale  augmenta 
beaucoup.  Tout  cela  avait  lieu,  l'ensemble  des  événements  le  démontre. 

Du  temps  de  Mietschislav  on  construisit  à  la  hâte  quelques  églises  et 
chapelles  en  bois.  Les  cathédrales  de  St-Pierre  à  Posen,  de  la  Trinité 
à  Gnèzne,  le  couvent  sur  la  montagne  de  Sainte-Croix,  furent  construits 

(4i7)  BolesltY-le-grand ,  in  civitatibas  et  castris  frequentius  habitabat  (1 ,  12 ,  p.  63),  et  omni  die 
privato,  quadraginta  mensas  principales,  exceptis  minoribos  erigi  factebat(l,  ii,  p.  7i),  de  sait 
tvniliaribus ,  singulos  singulis  civitatibas  vel  castellis  deputabat,  qood  loco  sui,>cafclellani8  et  civi- 
tatibui  (M  est,  civibus  et  civitateosibus)  convivia  celebrarent  (1, 16,  p.  7S). 


ââO  EDRISI. 

en  pierre ,  par  Boleslav-le-grand  ;  à  Krakovie ,  Téglise  de  St-Venceslav, 
commencée  (llOâ)  par  Yladislav  Herman,  fut  achevée  par  Boleslay  III» 
en  1159.  Chaque  évêque  s'efforçait  à  fonder  une  église;  le  pécunier 
Pierre  Danois  en  fonda  un  grand  nombre  (iss).  Arrivaient  les  destruc- 
tions qui  déblayaient  Fancien  ordre,  pour  faire  place  au  nouveau. 
Les  villes,  plus  inclinées  au  nouveau,  prenaient  une  croîssanse  remar- 
quable; celles  qui  tenaient  plus  obstinément  à  Fancien,  succombaient 
et  s'épuisaient.  C'est  la  raison  de  la  destruction  de  la  florissante  et 
puissante  Krouschvitza ,  de  la  chûle  de  Bialigrod  et  d'Ioulin. 

La  culture  des  terres  subit  aussi  des  changements.  L'augmentation 
de  la  population  sédentaire  dans  les  villes ,  était  pour  cette  culture 
avantageuse.  Le  cultivateur  devenait  plus  assidu ,  plus  attaché  à  la 
glèbe,  moins  mobile;  sur  plusieurs  points  il  perdait  Finclination  à  la 
permutation  de  domicile,  et  la  culture  en  jachère  l'emportait  sur  oeHe 
en  friche.  Les  grands  propriétaires  prenaient  plus  de  soin  de  retenir 
dans  leurs  domaines  la  population  laborieuse.  Le  peuple  cultivateur, 
les  kmetons,  gagnaient  matériellement,  mais  son  civisme  y  trouvait  la 
mort.  Il  prit  la  nouvelle  coutume  en  aversion  et  ne  participait  pas 
à  Finstruction  latine  étrangère.  Le  progrès  du  nouvel  ordre ,  de  la 
civilisation ,  fut  immense  et  rapide ,  il  changeait  les  relations  sociales, 
ainsi  que  dans  un  intervalle  peu  éloigué ,  on  savait  que  le  temps  de 
Boleslav  III,  était  tout  différent  de  celui  de  Boleslav-le-grand.  Avant 
Fintroduction  du  christianisme,  hospitcditas  gentilium,  rapprochait  les 
conditions  sociales  :  neque  rusticosuo  dux  invitaluSfComcenderededignor 
tur:n(mdum  enim  princeps  tanto  fastu  superMe  tumescebat  (Gallus,  1,2, 
p.  â4).  —  Du  temps  des  deux  premiers  Boleslav,  quamvis  multis 
cuneis  magnalum  constipatus ,  rusticum  quasi  proprium  filium  adma^ 
nehat  (I,  7,  p.  55);  aurum  eo  tempore  commune  (I,  6,  p.  39)  ;  rex  fama 
vivit,  ditatus  pauper  ohivil  (I,  26,  p.  108);  et  le  roi  répétait  :  sine  plèbe 
quid  rex  erit.  —  Du  temps  de  Boleslav  II!  Fopulence  royale  se  montra 
octodies  avant  et  après  sa  noce ,  ou  quand  il  remplit  sa  pénitence 
(11,25,  HF,  25);  et  sapiens  et  nohilis  vir  inportabilia  exercebat,  dum 
ignobiles  nobilibus  prœponebat  (II,  4,  16,  p.  159,  160). 

(Voyez  les  derniers  chapitres  du  mémoire  précédent,  Slavia  du  xii*  siècle;  ensuite  eontidératioBS 
sur  l'état  politique  de  l'ancienne  Pologne  et  sur  l'histoire  de  son  peuple ,  d«ns  l'histoire  d«  Pologne» 
publiée  à  Lille ,  iStt). 

(i28)  En  4064,  gneznensis  ecclesia  consecratur  (annal,  monach.  in  cod.  gnezn.  santconis,  p.  3f8; 
dzirzv.  p.  101)  (décorée  1147,  par  une  porte);  1065,  moaasterium  mogilnousc  (Dingos,  p.  258);  IIM, 
ecclesia  in  Czerviensk  fundata;  1138,  cocnobium  trinitatis  sancti  Beiiedii.-ti ,  à  Sochatscbev  étaH  od« 
rérente  fondation  ;  1139  l'église  de  S.  Veuceslav  achevée  ;  1 140,  claustrum  iu  Andrzciov  edificalor; 
1143  ectlesja  kathedralis  piocrusis  consc<Tata  (1145  porte  de  l'église);  1154  in  Zagoszcz  fundata;  1155 
abbacia  de  Czcrvinsk;  1161  in  Lanrzic  conscrata  ;  1104,  rlaustrum  in  Lubcns  ediûiatur;  1176, dan- 
strum  Suleiov  edificatur;  1185  claustrum  Coprivnitza  edifiuntur,  etc.,  etc. 


CARTES 


DE  L'INDE  ET  DE  LA  CHINE, 


DRESSÉES 


D'APRÈS  LES  RELATIONS  DES  ARABES 


ET  LES  INVESTIGATIONS  DU  MOYEN  AGE. 


InUctis  opulentior 
Tliesauris  Arabum.  . .  —  tamen 
CurtaD  nescio  qiiid  semper  abest  ret, 
HoiiAT.  ode  xxnr. 


IV. 


CARTES 


DE  L'INDE  ET  DE  LA  CHINE. 


1.  Après  avoir  dressé  une  carte  de  Flnde  pour  la  relation  du  birou- 
nien;  après  avoir  construit  une  autre  pour  débrouiller  les  description^ 
confuses  d^Edrisi,  j'aurais  dû,  semble-t-il,  à  la  suite  de  ces  essais,  rendre 
un  compte  détaillé  et  étendu  de  mes  opérations.  Mais  ma  tâche  est  déjà 
trop  lourde  pour  m' engager  encore  dans  de  longues  considérations,  je 
serai  donc  succinct,  je  me  résumerai  dans  des  généralités  essentielles, 
ne  touchant  à  tous  les  détails,  n'arrêtant,  que  pour  surmonter  les  ob- 
stacles ou  les  Incertitudes.  De  toutes  les  observations  qui  ont  été  faites 
jusqu'aujourd'hui ,  je  ne  connais  que  l'opinion  de  Klaproth  sur  l'empla* 
cernent  de  Khanfou  ou  Gampou  et  les  explications  de  M.  Reynaud  qui 
accompagnent  la  version  de  la  relation  des  voyages  faits  par  les  Arabes 
dans  l'Inde  et  à  la  Chine,  et  sa  version  de  la  description  de  l'Inde  par 
Abou  Rihan.  La  lumière  de  ses  explications  me  guide,  elle  a  pu  cepen- 
dant m'écbapper  par  les  intervalles  de  temps  où  j'ai  été  privé  de  ces 
précieux  opuscules. 

Certainement,  des  temps  les  plus  reculés,  des  relations  ont  existé 
entre  les  occidentaux  de  l'Asie  et  les  Indiens  et  Chinois;  continentales 
et  maritimes,  animées  ou  ralenties,  ne  discontinuaient  jamais  :  dans 
aucun  siècle,  les  Arabes  n'ont  ignoré  l'existence  des  pays  de  l'Inde ,  des 
tles  et  de  la  Chine. 

Toutes  sortes  de  communications  devinrent  plus  fréquentes,  plus 
suivies  du  temps  des  khalifs;  des  explorations  furent  faites,  des  descrip^ 
tions  et  des  relations  sur  les  pays  éloignés  furent  rédigées. 

Le  marchand  Soleyman,  après  plusieurs  voyages  en  Chine,  racontait* 
en  851,  sa  longue  traversée  par  sept  mers.  Plus  tard,  907,  Aboûzeid  ou 
Jezid,  prépara  une  autre  narration.  Sortis  de  bahr  Fares,  ils  travcr- 

saieui  parla  mer  ^^j^^  Deiaravl  yj,^ji  Larevi  (près  des  côtes  de  la 
région  Lar).  Passant  Koulam  du  Malaï  JL>  J^  Koulam  Bfelli,  Mala- 
bar et  Quiloa),  ils  entraient  dans  la  mer  de  Herkend  (du  Kcnd).  L^îie 


CARTES   DE   L  INDE 


Serindib  est  sur  cette  mer.  On  remarque  dans  Tile  la  montagne  al  Ro- 
houn  sur  laquelle  on  voit  Tempreinle  du  pied  d'Adam.  Au  delà  com- 
mence la  qualrième  mer  appelée  Schelaliei.  Une  île     <;'»Ul  el  Rami 

ou  Rammy  était  baignée  à  la  fois  par  les  deux  mers;  elle  est  partagée 

entre  plusieurs  rois.  Parmi  les  îles  de  sa  dépendance  estTîle  j^L^l  al 
Neyan  (ou  Binani). 


2.  Soleyman  parle  ensuite  des  îles  nommées  /ri^L>^  Lendjeha- 

lous  (/^^b  uJ  Lenkhialous)  ;  il  fait  mention  de  deux  îles  qui  étaient 

séparées  des  précédentes  par  une  mer  qu'il  appelle    »L*!jj!  Andamân 

(   «L»Ljt  Abraman  de  la  mauvaise  leçon  de  Massoudi).  Ce  nom  de  la 

mer  vient  du  nom  des  îles  mêmes  d'Andaman  ,  et  les  îles  Lendjialous, 
sont  Langkevi. 
C'est  vers  celle  île  que  les  navires  se  dirigeaient  et  vers  le  lieu 

nommé  Kalahbar  où  se  trouve  l'empire  de  ^l>v  ^î<l''^<lj  résidant  dans 
l'île  Zabedj.  ^^ 

De  Koulam  Meli,  qui  est  un  mois  de  Maskate  à  Kalahbar,  il  y  a  un  mois 
de  navigation.  De  Koulam  les  navigateurs  se  rendent  dans  un  lieu 

nommé  ^^^Betoumah  (beit  Tou ma,  Saint-Thomas,  près  de  MelLapour), 
et  de  Betoumah  en  10  journées  on  arrivait  à  J^\^  Kedrendj  (Goda- 

veri,  Coringa).  Après  dix  autres  journées  les  navires  atteignaient  le  pays 
Senef  et  la  sixième  mer  Senef  où  se  trouve  l'île  Zabedj,  de  laquelleil  y  a 
un  mois  à  Sin ,  et  moins ,  quand  le  vent  est  favorable. 

De  Senef  les  bâtiments  se  rendaient  en  dix  journées  dans  une  île  ou 
presqu'île  nommée  Senderfoulat,  d'où  ils  mettaient  à  la  voile  par  la  mer 
Sandji  vers  Sin  el  arrivaient  à  Khanfou,au  bout  d'un  mois.  Sur  ce  mois 
sept  journées  sont  employées  à  franchir  les  portes  de  la  Chine,  mon- 
tagnes baignées  par  la  mer.  Entre  Senef  et  Sin,  il  n'y  a  que  Mabet 
(Habet)  séparé  de  Sin  par  des  montagnes. 

Admettant  que  Kedrendj  soit  aux  environs  de  Koringa'et  de  Tembou — 
chure  de  Godaveri  ;  que  Senef  soit  aux  environs  de  Martaban;  que  Sen — 
derfoulat,  par  conséquent,  se  trouve  aux  environs  de  Sinkapore  aubou^ 
de  la  péninsule  Malaï  :  on  se  demande  où  commence ,  où  se  termine  Ir 
mer  Senef?  baigne-t-elle  la  péninsule  Malaï  de  deux  côtés  ou  seul( 
ment  d'un  côté  à  l'ouest  ou  à  l'est?  où  sont  ces  frontières  de  Sin  au-de 
de  Mabed?  sont-ce  des  frontières  politiques  de  l'époque  ou  convenui 
et  acceptées  par  des  voyageurs  et  géographes?  Questions  à  résoud 
dans  le  vide  des  espaces.. 

Ce  qui  est  évident,  c'est  que  Sin  ne  commençait  guère  à  rerabocr^ff- 
chure  du  Gange,  mais  qu'il  était  séparé  par  Senef,  par  Djaba,  par        /^ 
rois  Mabed  qui  comptent  un  grand  nombre  de  villes,  dont  les  pos^^^. 
sions  s'étendent  jusqu'au  pays  des  Moudjah  blancs;  au-delà  de  Mab-^*ur 
il  n'y  avait  que  les  montagnes  qui  les  séparaient  de  la  Chine. 


ET   DB  LA   CHINE.  5 


) 


L*empîre  de  la  dynastie  Thang  tenait  à  cette  époque  presque  les 
mêmes  frontières  du  sud  qu*aujourd*hui.  Ngan  nan  ou  An  nam 
(Tonquiu)  était  en  sa  possession  ou  passait  dans  les  possessions  des 
rois  voisins  Nantschao.  C*était  au-delà  des  montagnes  qui  séparaient 

Sin  de  ,>jL>  Mabed(JjU  Habet,  jjL>  Mabar,  mauvaise  leçon,  Kambod). 

Yingt-cinq  ans  après  Soleyman,  en  876,  Ibn  vahab,  arrivant  à 
Khanfou,  se  rendait  dans  la  capitale  de  Thang  en  qualité  d'ambassa- 
deur du  khalif.  La  capitale  d'alors  portait  le  nom  de  Tschlian  ngan.  Les 
nestoriens  de  Syrie  qui  y  furent  établis  rappelaient  Khomdan.  Ce  nom 
passa  aux  Arabes  qui  qualifièrent  du  même  nom  le  fleuve  jaune.  Bientôt 
Tschban  ngan,  avec  la  chute  de  la  dynastie  de  Thaug ,  cessa  d'être  ca- 
pitale et  changea  de  uom  plusieurs  fois  (King  tschao,  Ngan  si ,  Singan). 

5.  C'est  presque  dans  la  même  année,  9i5  :  le  khalif  expédiait  une 
ambassade  en  Chine  délabrée;  Mas'oudi  retournait  de  son  voyage  au 
Siud  et  au  Hind  et  Ibn  Haoukal,  portant  avec  lui  les  descriptions  géo- 
graphiques de  Khordadbeh,  de  Kodama  et  les  renseignements  d'Ibu 
Ishak,  se  dirigeait  vers  le  Sind  afin  d'y  faire  une  perlustration  pour  son 
compte. 

Mas'oudi  connaissait  la  relation  de  Soleyman  et  d'autres  voyageurs  et 
il  a  pu  vérifier  et  compléter  sur  le  lieu  dans  le  Hind ,  ce  que  Soleyman 
relate  sur  l'intérieur  de  Illndouslan. 

Sous  la  dynastie  de  Brahman,   dit-il,  le  Hind  formait  un  état,  dont 

la  capitale  était  appelée  lijys^]  Houza  ou  au  centre.  Mais  cet  état 

8*est  divisé  à  la  fin,  en  607,  par  des  dissensions  intestines,  en  plusieurs 
royaumes.  Mas'oudi  apprit  qu'au  nord  était  située  Kaschmir,  tout  cerné 
de  montagnes.  Ensuite  Bourouh  ou  Kanoudj ,  un  des  plus  puissants 
royaumes  qui  résista  a  Moultan,  aux  musulmans  et  au  balhara. 

La  résidence  de  balhara,  qui  est  le  roi  des  rois,  était  à  Mankir  (Mon- 

ghir),  autrement  nommé  ^v^'  «jjs-Jl  Haouza  la  grande,  éloignée 

de  80  parasanges  de  la  mer  (t).  Ses  domaines  s'étendaient  vers  le  sud 
€t  l'ouest,  où  ils  louchaient  aux  possessions  musulmanes  dans  le  Siud. 

Au  nombre  des  autres  royaumes  de  l'Inde,  on  compte  les  suivants  : 

J  1^  Djiorz  Djiozr  (dans  le  Coromandel),  à  côté  duquel  est  Thafec  ^^^U» 

Taban,  j^Li>  Tafen,  j^l-i>    .jLsLL  Takan,  (la  meilleure  leçon  est 

Takan,  Dekan).    ^j  Rohmy;   ^^^j  Ouahman,  était  conligu  aux 

balhara,  Takan  et  Djiorz,  et  touchait  à  la  mer. 
Dans  l'intérieur  de  la  péninsule,  Soleyman  connaît  v^^^iL.!.^  Kaschîb, 

Raschibin,  que  le  manuscrit  de  Mas'oudi  rend  par  ^\SJ\  Alkameu , 

qui  parait  toucher  au  royaume  de  ^t^ll  Kirendj  ou  Firendj. 

Le  dernier  roi  du  continent  indien^est  SJlib  ^U  Hated  ou  Mabed. 

(1)  C*est  ainsi  que  disent  les  extraits  de  de  Gnignes  (p.  9\  Reiuatid  trouve  que  Kanodj,  suivant 
Has'oudi ,  fut  considéré  comme  Uaouza.  —  Abou  Ishak  istakhri  Tait  de  Balhara  le  nom  de  la  capitale. 
Les  villes  portant  ce  nom  se  trouvent  dans  l'Inde ,  mais  istakhri  parle  de  Kanodj. 


6 


CABTES  DE  L  IN DS 


L'Inde  (du  midi)  est  uu  vaste  pays,  entouré  de  mers,  il  confine  au 
royaume  de  Zanedj,  Zabedj ,  Ranab.  Celui-ci  est  couverné  par  un  roi 
qui  porte  le  titre  de  mih  radj  (maha-rala,  le  grand  roi).  11  possède  les 
lies  situées  entre  Finde  et  la  Chine.  Le  roi  Komar  est  en  guerre  avec  le 
mib  radj. 

L  Les  conquêtes  de  Mahmoud  deGazna,  ouvrirent  Tintérienr  du 
Hind  à  des  perlustrations  plus  approfondies.  L'astronome  birounîen 
Abou  Rihan,  après  un  long  séjour  dans  ce  pays,  à  la  suite  d'études 
sérieuses  du  sanskrit  et  de  longues  investigations,  rédigea,  en  i051, 
une  description  du  Sind  et  du  Hind.  Les  ouvrages  de  cette  époque  n'of- 
frent probablement  aucun  autre  produit  aussi  clair  et  correct  pour  la 
géographie  descriptive.  Huit  siècles  se  sont  écoulés  et  les  noms  des 
lieux  se  relrouveut  presque  tous  aux  distances  indiquées  tout  vivants. 
Dresser  une  carte  d'après  la  description  d'Abou  Rihan ,  est  une  tâche 
facile,  (planche  xvi  de  notre  atlas),  aussi  il  n'y  a  pas  lieu  pour  moi  d'en 
rendre  compte,  ce  qui  demanderait  une  répétition  de  la  description 
elle-même,  rendue  lucide  par  la  version  française  (s). 


(9)  Poar  prouver  ce  que  j'aTance ,  je  vais  repasser  quelques  routes  indiquées  par  Abou  Ribao ,  ci 
ajoutant  entre  parenthèses  les  noms  des  cartes  modernes. 


A  partir  de  Konodj  (Kanodj)  : 

Dyamon,                                  parasangcs.  10 

Gaty  (Gartolee  sur  le  Gange),  10 

Abar  '.Aliar  sur  le  Gange),  10 

Myrat  (Myrut ,  Merut  s.  Callee  Nnddee)»  40 

Paniput  (Paniput  au-delà  de  Jumna),  40 

Koutayl  (Kbythul],  40 

Sanani  ',Soonam),  40 

Adatbor,  9 

Hadjannyr,  6 
Maydahoukour,  capitale  de  Lalior,  sur  la 

rive  d'Iradlia  (Ravi),  g 
riviore  Djnndrabah  fCbnnab),  4S 
rivière  Djyinm  (Ihyluro),  qui  coule  à  l'oc- 
cident de  B<îyut  (Veyul),  8 
Ouaybend  (Vaïbcnd),  a  l'occid.  del'lndus,  SO 


Borscbaver  (Peyscbaver,  Pesbawar),  44 

Dinbour  (Odvnabpoor),  49 

Kaboul  (Kaboul),  li 

Gbasna  (Gazna),  47 

Vn  autre  chemin  de  Kanodj  : 
Schirscharbab  (Sirsanab  ou  Sirsawa,  près 

de  Seharumpoor),  80 
Pindjor  (Pindjor),  en  facedeTanaser  (Toa- 

nessour),  48 
Dabmala,  capitale  de  Djalandhar  (Jnltn- 

dour,  Jalendber),  48 

Baladara ,  40 

Lidda  (Latta ,  au-delà  de  Ravi),  43 

Radjakiry  (Radjour,  Rajawur),  8 

Cacbemir  (Kashcmir),  H 


Ces  doux  dernières  distances  compromettent  gravement  la  nomenclature.  Mais  la  montagne  à  pic 
Kclardjeli ,  située  au  nord  de  Radjakiry,  n'est  distante  de  Kaschmir  que  de  i  parasanges ,  et  à  S  pa- 
rasangcs de  Radjakiry  se  trouve  une  autre  place  forte  Radjady.  I.a  carte  des  ingénieurs  anglais  de 
Bombay  et  de  Bengal ,  dressée  et  publiée  en  4842  par  Jobn  Walker,  désigne  à  l'occident  de  Rajawar  : 
castle  of  Kambar,  Radjabdilian  singlis,  qui  répond  à  Radjadi.  Les  deux  distances  en  qncstion  sont 
probahlcmcnt  lésées.  —  La  carte  des  ingénieurs  indique  plusieurs  pics  rapprochés  de  Kaschmir , 
mai;;  aucun  ne  semble  répondre  aux  conditions  de  la  sus-mentionnée  Kelardjob. 

Il  faut  considérer  les  deux  journées  de  distance  de  Kasrbmir  à  la  montagne,  non  pas  de  lafroa- 
tière ,  mais  de  la  capitale  Addascblan  ;  en  ce  cas ,  la  montagne  Kelardjcb  serait  la  section  la  plus 
élevée  de  Panjal,  Pendjal ,  couvrant  Kascbmir  de  l'ouest,  sous  le  nom  de  Pir  Pendjal  et  s'élevant 
jusqu'à  43,500  pieds.  Dans  son  bout  méridional  s'ouvre  le  défilé  par  lequel  de  Radjakiri  on  entraiti 
daus  Kanclimir.  Le  premier  village  apn  s  la  descente  était  Bcberlian  (cnlrance  to  Kasbmir  by  tbe 
Bimburraad ,  sur  la  rivière  Huripur,  qui  s'y  embranche  en  Ramy  et  Rembeara).  Ce  vilhge  est  M 
égale  dislance  de  Sind  (Kascbuiiricn)  et  de  i)jilum  qui  descend  des  montagnes  Hazroakout  (Fut . 
Panj.il  oii  sont  les  sources  de  Jylum  ou  Vesbaa)  et  traverse  tout  le  Kascbmir.  De  ce  village  au  pou' 
construit  au  confluent  de  Kosury  (qui  passe  par  Kotybar)  et  Nabry  (Lidur)  8  parasanges.  (Le  pontes 
les  ruines  d'un  autre  pont  sont  assez  éloignés  du  confluent ,  on  les  voit  près  des  ruines  de  Lido'^ 
Après  avoir  quitté  les  montagnes  et  avoir  coulé  l'espace  de  deux  journées,  le  Djilum  trave 
AddnscliUm  ^Sirinagur),  capitale  du  Kaschmir.  A  4  parasanges  de  là,  il  entre  dans  un  étang  'b 
AViilur  <|ui  est  d'une  purasangc.  Sorti  de  l'étang  ,  il  traverse  la  ville  Ouscbkar  (Baramula),  qui  est 
\;lle  Haranioula ,  et  atteint  le  dctilé  oii  se  trouve  la  ville  Douar  el  morsad  ,  située  sur  les  deux  eût— 
de  la  rivière  (Bunihar  et  Scbcukbiir,  Sikb  forts)  >  vovez  planche  xvi  de  notre  atlas;. 

Je  pense  à  retrouver  .Mandari  (par  15*  0"  de  latit.),  Djatraour,  Radjaury,  Djandara,  Bhaîlesan ,  d» 
Mundogour  (par  15*  0'  de  latit. |,  Djittore,  Radjigonr,  Djendari,  Bbilsab.  Je  ne  trouve  rien  ponr      Je 

Srande  ville  Doadahy  et  pour  plusieurs  autres.  Quelques  autres  rapprocbomcnts  de  la  nomcndatLr^v 
'AbouRiban,  avec  celle  de  cartes  récentes  vont  faire  ressortir  dans  l'examen  que  nous  allons  entre- 
prendre ,  des  difficultés  dans  le  texte. 


—  M 
^  1 


ET  DE  L4  CmilB.  7 

robscrverai  seulettient  quelques  difficultés  ou  des  Incertitudes  eih- 
barrassantes,  qui  ne  sont  pas  Dombreuses. 

Lorsque  nous  trouvons  que  Tanasser  est  placé  à  environ  80  parasanges 
de  Kanodj  et  à-peu-près  50  de  Mahoura,  je  pense  que  nous  sortîmes  au- 
torisés d'y  voir  une  erreur  typographique  et  de  prendre  ces  chiffres  Fun 
à  la  place  de  Tautre.  En  effet,  ajoutant  la  distance  de  Kanodj  à  Mahoura 
qui  est  de  28  parasanges ,  aux  50,  ou  aux  environs  80  de  Mahoura  à  Ta- 
nasser (Kourouschetra)» 

A  partir  de  Kanodj  jusqu*à  Prayaga,  AbûuRihan  donne  en  détail  cinq 
distances  (12,  8,  8,  8, 12)  (|ul  font  48  parasanges,  et  il  dit  ailleurs  que 
de  Mahoura  (qui  est  vis-à^vis  de  Prayaga)  à  Kanodj  on  compte  28  para- 
sanges. Différence  trop  forte.  On  serait  tenté  d'opérer  une  certaine  ré- 
duction dans  le  chiffre  détaillé  afin  de  le  ramener  à  la  somme  de  28«  En 
effet,  si  les  trois  premiers,  jusqu'à  Hadjamava  (lisez  Dja^jamava),  Apha- 
pouri,  et  Karhah,  répondent  aux  distances  jusqu'à  Jaujemow,  Futteh- 
pour  et  Kurrah  sont  trop  forts  :  à  cause  qu'il  ne  reste  jusqu'Allahabad 
que  8  parasanges  de  la  môme  mesure,  or,  à  Barhamschal  (Alumchun) 
il  y  a  3  et  jusqu'à  Prayaga  (Allahabad)  5,  ce  qui  réduit  la  somme  totale 
à  56.  Ensuile  de  ce  nombre  56,  6lons  un  cinquième  pour  les  biais  de  la 
roule ,  c'est-à-dire  7,  on  oblieudra  pour  la  direction  directe  29  paras, 
de  Kanodj  à  Prayaga,  nombre  assez  conforme  à  28  de  Kanodj  à  Mahoura. 

5.  Mais  de  ce  point  se  présente  une  autre  incompatibilité  des  dis- 
tances, beaucoup  plus  grave  el  qui  retomberait  sur  Abou  Rihan  s^il  n'y 
avait  pas  d'issues  pour  en  sortir.  Il  aurait  dit  que  les  distances  entre 
Mahourah  et  Kanodj,  entre  Mahoura  et  Bazanah  sont  égales,  c'est-à-dire 
de  28  parasanges.  Je  ne  sais  pas  si  les  cartes  modernes  indiquent  la  po- 
sition de  Bazanah  :  mais  les  autres  distances  signalées  par  le  birou- 
nien  poussent  forcément  la  position  de  Bazanah  appelé  aussi  Naraïan , 
vers  Onearah,  Ouniara  et  même  vers  Agimere,  ce  qui  tient  Bazanah 
éloigné  de  Mahoura  au  moins  de  50  parasanges.  Il  y  a  donc  Une  erreur 
à  rectifier,  observant  qu'il  y  a  autant  de  Kanodj  (et  non  pas  de  Ma- 
houra) à  Bazanah  que  de  Mahoura  à  Kanodj. 

Je  ne  m'arrête  pas  sur  les  distances  du  Sind,  où  dans  tous  les  géo- 
graphes arabes  ou  rencontre  une  différence  assez  marquante  de  mesures; 
je  ferai  seulement  observer  que  la  distance  de  Dhar  à  la  rivière  Nimiah, 
7  parasanges  n'appartiennent  pas  à  cette  dernière.  Nimiah  est  incontes- 
taolement  la  rivière  Mhye  dans  toute  autre  direction.  Pour  la  distance 
indiquée  il  faut  absolument  à  Nimiah  substituer  le  nom  de  Narmada  (s). 
Au-delà  en  avançant  18  et  25  parasanges  on  arrive  par  Mahratdessa  à 

^^53^  iS^^  Koukan  ou  Kounaka ,  dont  la  capitale  Talah  la  maritime 
est  quelque  part  au  nord  de  Konkan  (Tullah  au  sud  de  Bombai).  Au  nord 
est  S^  Laran  ou  c^J^j^î  Lardessa  (Lar),  à  l'est  >»iXib  Danaka 
(Dekan)  (4). 

(3)  Une  semblable  méprise,  je  pense ,  est  admissible,,  quand  on  remarque  dans  le  texte  édité 
4*Aboii  Riban ,  une  autre  trop  palpable.  Ce  texte  p1a(^e  Sendan  au  nord  de  Soubara.  Cette  méprise 
est  aYérée  par  les  latitudes  géographiques  du  recueil  d'Aboulféda.  La  latitude  de  Sofara,  Soubara  y 
est  49*  S8;  de  Sendan  19*  50',  mais  il  y  eist  dit  de  suite  qu'ailleurs  Abou  Rihan  plaçait  Sendan  paf 
t9*  V  de  Ittrtude. 

(i)  Sans  m'arrôler  longtemps  sur  ce  point  de  Gouzcrat  et  de  Lar,  j'obsenre  qu'à  partir  de  Kambaye 


8  CARTES  DE  L*UfDE 

Des  distances  exorbitantes  se  présentent  entre  Bahroudj  et  Sindan, 
50  parasanges,  qu'on  pourrait  lire  10  parasauges.  Entre  Dhar  et  Nama 
(Narnavar  sur  Narmada,  vis-à-vis  de  Hindia),  trois  fois  âO  paras,  égale- 
raient la  longueur  du  cours  de  Nerboudda.  Pour  substituer  au  chiffre 
exorbitant  de  s.^âO,  n*y  aurait-il  pas  ^  4?  (k).  Le  chemin  passe  par 
Âlbospour  (Ellitschpour)  jusqu'à  Matdakar  (Maddapoour  sur  Godaveri. 

6.  Quand  Abou  Rihan  sort  de  Kanodj  vers  le  sud,  il  ne  suit  pas  la  rive 
occidentale  du  Gange ,  mais  il  parcourt  évidemment  les  régions  occi- 
dentales. Il  se  trouve  tout  d'abord  dans  le  royaume  Djadjahouty  (qui  est 
appelé  Kallindjer  dans  la  carte  de  Klaproth  pour  l'histoire  de  Chine  de 
Tannée  1000),  dont  la  capitale  est  nommée  Kadjouraha  (Kotrah?sur 
Betwa).  Âbou  Rihan  pasae  ensuite  à  Dhal  (Talinga),  dont  la  capitale  est 
Bitoura  (Beder). 

On  compte  de  là,  dit-il,  âO  parasanges  au  royaume  :fjSo  Kannakara, 

dont  la  position  indéterminée  est  quelque  peu  indiquée  lorsque  vien- 
nent ensuite  Oupsour(yisapour)et  Banouas  (Pounah)  qui  se  trouve  sur 
les  bords  de  la  mer. 

D'après  ses  investigations,  Abou  Rihan  avait  dressé  une  carte  dans 
laquelle  se  trouvaient  à  côlé  du  Hind,  les  lies  et  le  Sin,  et  il  a  laissé  des 
longitudes  et  latitudes,  de  plusieurs  localités  de  cette  immense  étendue 
de  pays.  Il  avait  levé  la  hauteur  du  pôle  de  plusieurs  lieux  du  Hind  et 
sut  lui  donner  une  position  déterminée.  Quant  aux  parties  océaniques  et 
de  la  Chine ,  les  renseignements  insuffisants  furent  fourrés  dans  des 
idées  ptoloméennes.  Le  littoral  de  l'Afrique  prolongé  vers  l'est  à  Tinfini, 
se  trouvait  au  sud  de  l'Inde,  peu  éloigné  de  ses  rivages,  et  les  Iles  de 
Djaba  ou  Zabadj,  possession  de  mihradj ,  et  celle  de  Kamroun  se  trou- 
vaient rapprochées  du  mystérieux  Vakvak ,  près  duquel  s'ouvrait  une 
issue  aux  sept  mers  dans  l'océan  qui  environne  l'habitable,  un  espace 
assez  étroit  se  formait  entre  les  rivages  et  fesait  descendre  les  échelles 
de  la  Chine  vers  le  sud  jusque  dans  le  premier  climat  par  H^  et  15®  de 
latitude  (Voyez  n°  43  de  notre  allas). 

7.  Edrisi  en  Sicile  n'a  pas  connu  les  dr^^ri-îptions  du  birounien,  mais 
il  en  connaissait  pluàlcuis  aalres  qui  reproduisaient  ces  conceptions 
ptoléméennes;  et  possédant  la  géographie  de  Ptolémée  elle-même,  il 
prit  à  tâche  de  la  corriger  d'après  des  renseignements  qui  ne  se  contre- 
disaient point  et  s'accordaient  incontestablement. 

Nous  avons  sa  carte  et  la  description  de  cette  carte.  Quelques  noms 
de  plus  ou  de  moins  ajoutés  ou  omis,  forment  cette  différence  entre  la 
carte  et  la  description,  qui  fournit  des  matériaux  pour  suppléer  ce  qui 
manque  à  l'une  ou  à  l'autre,  alin  de  remplir  les  lacunes  ou  de  rectifier 
réciproquement  les  erreurs.  Malgré  loules  ces  additions  que  la  descrip- 
tion peut  fournir,  la  carte  n'est  pas  assez  pleine ,  elle  resie  privée  d'une 

Asaoul  (est  Saowle),  JjUa^  Djenaoul  (Usez  JjLxdL  Koutaoul  est  Koudwaoul),  Doulka  (est 

TouUoukwarr  sur  Nerboudha]  conservent  leurs  noms  jusqu'aujourd'hui  {le  mont  Oundaran,  Vindias, 
ne  commence  qu'à  TouUoukwarr).  Soubara,  Sofara  (Sourate),  Sindan  (Soudjoun),  Seimour  ou  Dji- 
mour  (Jooneer,  Djunirc),Banvas  (Punab),  Talab ,  n'en  ont  pas  plus  perdu  les  leurs. 

(6)  Dans  cet  intervalle  Kondouhou  su  retrouve  probablement  dans  Choondoopoora»  Tschaandoa^ 
poura. 


BT  DE  LA  CaiNE. 


9 


quantité  de  nomenclatures  de  positions,  qui  prouvent  qu*Edrisi  avait  à 
sa  disposition  des  matériaux,  beaucoup  plus  amples,  que  pour  la  sienne 
il  n'a  fait  que  des  extraits  fracturés. 

Le  premier  coup-d'œil  jeté  sur  la  carte  décèle  qu'on  regarde  une  bi- 
zarrerie géographique ,  le  plus  léger  examen  découvre  que  c'est  une 
monstruosité  dont  on  a  peu  d'exemples.  Kandahar  est  à  l'orient  du 
Moultan;  Lahor  et  Nahrvara  sont  sur  le  Gange;  la  péninsule  Malaï  est 
une  île  touchant  aux  échelles  presque  les  plus  éloignées  de  la  Chine. 
Sa  carte  figura  ainsi  et  le  texte  de  la  description  l'affirme  positive- 
ment (e). 

Je  donne  la  copie  de  la  carte  (n®  45  de  notre  allas).  Elle  se  compose 
de  8  sections  du  I"'  et  II''  climat,  de  chaque  climat  quatre,  7  à  10,  cou- 
tenant  Sind,  Hind,  Sin  et  les  îles.  J'y  ai  marqué  les  distances,  inscri- 
vant quelques  noms  de  plus  qu'on  trouve  dans  le  texte  de  la  des- 
cription (7). 

Cet  extrême  gâchis  géographique  prit  sa  naissance  de  rapiècements 
incohérents  des  fragments  de  différentes  descriptions  affublés  dans 
l'image  ptoléméenne.  Koulam  melli  y  remplace  Simylla;  fleuve  Meso- 
lous,  mont  Kaukase,  Katigora,  Asfiria,  Sinia,  y  sont  à  leurs  places.  Pto- 
lémée  décoré  d'épigraphes  arabes  est  tacheté  d'une  multitude  d'îles  et 
cours  d'eaux  que  l'imagination  arabe  s'était  créés. 

8.  Pour  débrouiller  ce  pêle-mêle,  il  fallait  tout  d'abord  s'emparer  de 
positions  certaines  et  incontestables.  De  Kandahar,  de  Moultan,  de  Ka- 
nodi;  de  Kaleri,  Mansoura,  Biroun,  Daïbol,  Nahrvara,  de  Kanbaîet, 
Soubara,  Sendan,  Seimour,  Barouh,  etc.,  de  Serindib  et  de  quantité 
d'autres  dont  les  positions  sont  fixées  et  connues.  Nous  pouvons  compter 

dans  ce  nombre  lanasser  (Tanasser),  jl-J^L»   Madîar  (Mahoura,  Ma- 


(6)  On  a  dans  l'Inde  un  Kandahar  non  loin  du  golfe  Kambaïe;  an  dans  le  Dekan  et  probablement 
plusieurs  autres  :  mais  Edrisi  parle  uniquement  du  Kandabar  occidental  situé  non  loin  de  Hindmend, 
et  l'incorpore  à  THindoustau  aussi  bien  que  Kaboul. 

(7)  Dans  la  7*  section  se  trouve  tout  le  Mekrau  partie  du  Sind.  Je  ne  suis  pas  arrivé  à  fixer  ses 
positions  ;  je  me  borne  à  en  collationner  les  itinéraires  tracés  par  Abou  Isbak  et  Edrisi ,  d'après  les 
traductions  de  Hordtmann  et  Jaubert.        En  journées  : 


de  Tiz  à  Kis  . 
à  Firiun    .    . 

Darek    .    . 

Rasek    .    . 

Faba  mahuie 

Aszgafa  .    . 

Bend.     .    . 

Bah,Nah    . 

Kund  uf.     . 
de  Sirdjan 
à  Fardin   .    . 

Mahan  .  . 
de  Valasdjerd 
à  Surika  .    . 

Maserkan    . 

Djirakan 

Kesnian. 

Darin     . 

Tarom  . 
de  Kisnakh  à  Armatil 
à  Kabili 

Dibol. 

Mendiaheri 


paras 


8 
S 

3 
3 
3 

2 


de  Taïz  à  Kir . 
à  Firabouz     . 

Darck    .     . 

Rasek    .    . 

Fahlafahra . 

Asfaka   .    . 

Bend.     .    . 

Kasribend  . 

Kiira .    .    . 


Ferdan. 

Mebiak. 
de  Valasdjerd  Kerman, 
à  Suri. 

Hasourdjan. 


de  Ermaïl. 
à  Kanbeli. 

Dibal.    . 

Menhaberi 


de  Dibal  à  Tis ,  i  journées ,  dit  Abou  Ishak. 


de  Bedaha  à  Tiz . 

.  19 

de  Nedha  à  Taïz 

.  10 

de  Mansoura 

de  Mansoura 

à  Bedaba  .    .     . 

.     S 

à  Nedha    .     . 

.    .    6 

à  Turan    .     .     . 

.  18 

à  Touberan   . 

.  15 

à  Balis.     .    .    . 

.  10 

à  Candaïl  .    .    . 

.  10 

à  Kabul    .    .    . 

.     8 

à  Kandabar  .    . 

.     8 

de  Dibol  à  Birur. 

.     3 

de  Dibal  à  Biroun 

i     .     S 

à  Mansura.     .     . 

.     8 

à  Mansoura    . 

.     .     3 

Kalleri  .     .     . 

.     1 

Kaleri    .    . 

.     1 

Enneri.Atri    . 

.     2 

.     3 

Atri   .     .    . 

.   .   a 

Rud .... 

Dour .     .     . 

1 

Basmend    .     . 

Besmok ,  Semend.    3 

Multan  .     .    . 

.    3 

Moultan. 

Kandahar  .    . 

.  10 

Tuberan     .     . 

.  10 

de  Mansura 

de  Mansoura 

à  Babend.      .    . 

.     1 

à  Bania.     .    .    . 

.   .    s 

Famihol 

Mamehel 

.     6 

Kambaia    .    . 

.     4 

Kanbaîet     , 

.     5 

Suriana.     .    . 

.     i 

Soubara. 

.     5 

Sindan  .    .    . 

.     8 

Sendan  .    , 

.     .     5 

Szaimur.    .    . 

.     5 

Seimour. 

.     8 

de  Szaimur  à  Senndib  18  journées,  dit  Abou  Isbak 
et  n'avance  point  avec  les  itinér.  dans  le  Hind. 


10  CARTES  DE   L^INDE 

thoura)  (s),  Malva  (Dhar),  Monrides  (Mirout),  Atnsa  (Haïras),  Tata 
(Toda),  Dada  (Dotleah).  Les  autres  vont  se  découYiir  par  les  distances 
ou  par  quelques  autres  considérations. 

Toutes  ces  distances  sont  évaluées  en  journées.  Pour  former  le  Hin- 
doustan  elles  se  laissent  appointer  et  pousser  en  toute  direction  (n*  AA 
de  notre  atlas).  Les  seules  distances  :  celles  de  Kanbaïet  par  Aubkin  à 
Daïbol ,  et  celle  de  Nahrvara  à  Kandahar  sont  trop  insuffisantes.  Cette 

dernière  est  du  reste  une  erreur,  au  lieu  de  8  5,  il  faut  lire  L  9.  La 
plupart  des  distances  du  Sind,  sont  au  contraire  d'une  mesure  excessi- 
vement pelite.  De  Daïbol  à  Moultan  le  long  de  Mahran,  on  a  âO  jo^^ 
nées  où  il  n*y  a  au  compas  que  10;  de  Kambaïet  à  Seimour  il  ^  a  14  ou 
17  journées,  où  par  d'autres  distances  on  compte  à  peine  4  journées. 
Cette  anomalie  contradictoire  comme  ailleurs  contribua  à  la  bizarrerie 
de  la  conception  d'Edrisi.  Les  premières  20  journées  s'expliquent  par 
des  biais  de  ileuve;  les  autres  difficilement  par  des  stations  fréquentes 
et  courtes,  Abou  Rîhan  compte  de  Kambaïet  àSiudan  5  journées  et 
50 milles;  Istakhri  9  journées. 

9.  La  construction  de  la  carte  itinéraire  d'Edrisi  n'a  pas  d'échelle,  les 
dislances  y  sont  réglées  à  coup  de  main.  Si  Ton  voulait  les  coordonner 
à  l'aide  d'un  compas,  on  n'obtiendrait  aucune  explication  :  ce  serait 
élaborer  l'idée  vicieuse  que  le  géographe  s'était  formée;  l'idée  qu'il 
inventa  en  se  servant  des  relations  de  voyageurs  qui  examinaient  les 
formes  toutes  différentes  de  la  localité.  Or,  ann  d'obtenir  quelque  expli- 
cation, il  nous  faut  décomposer  l'idée  vicieuse  et  dresser  une  toute 
autre  composition ,  d'après  les  relations  que  le  géographe  avait  conser- 
vées, une  composition  qui  se  rapprocherait  des  formes  des  pays  et 
rivages  visitées  par  les  voyageurs.  Une  triangulation  tissue  dans  ce  sens 
ramènera  nécessairement  les  positions  indiquées  j)ar  des  voyageurs  à 
leur  véritable  emplacement. 

Mais  il  y  a  peu  d'éléments  pour  une  triangulation  réelle  dans  les  dis- 
tances énumérées  à  travers  l'Inde  et  la  Chine  par  Edrisi;  elles  n'offrent 
que  de  longues  chaînes  qui  se  croisent  quelquefois.  Pour  coordonner 
leur  croisement  dans  le  Hindoustan,  je  me  suis  servi  des  latitudes  géo- 
graphiques indiquées  par  Abou  Rihan  :  et  il  n'y  avait  pas  de  difficulté  à 
les  combiner  avec  les  distances  qui  se  pliaient  d'accord. 

Les  distances  du  circuit  de  la  péninsule  Hind,  à  partir  de  Seymour 
jusqu'à  l'embouchure  du  Gange,  se  montrent  ou  lésées  ou  mal  cueillies 
ou  mal  coordonnées  à  la  suite  de  ce  gâchis  qu'offrent  la  carte  et  le  texte 
sur  tout  ce  rivage. 


(8)  Dans  l'énuméralion  des  villes  du  Hind,  outre  Madiar,  Edrisi  nomme  5  «  Jl^  qui  pourrait  aussi 

Basser  pour  Hatboura ,  d'autant  plus  qu'elle  est  rangée  entre  Kasclimir  inférieur  (on  intérienr 
longliir)  et  Karmaut  :  mais  elle  est  privée  de  distances ,  sa  situation  est  inconnue  et  Matlioura  reste 
parfaitement  bien  occupée  par  Madiar.  —  Dans  l'énumération  des  villes ,  le  texte  donne  encore  le 

nom  de  Xsr^  Nidjeh ,  c'est  peut-être  Nuddea  ,  située  entre  Mourdjedabad  et  Kaikoutta.  —  La 
carte  fournit  aussi  le  nom  d'une  ville  JjJft  l    J.P  Melli  al  Hind  ou  JJLl)  1       X^  Klioulial 

Hind .  et  le  place  non  loin  et  dans  la  position  septentrionale  de  Kascbmir  intérieur  ou  iufcrienr  (de 
Monghir). 


l 


ET  DE  LA   CHINE.  41 

Le  texte  dit  qu*en  face  de  Koulam  Mely  se  trouve  Tîle     JL*   Mely 

grande,  produisant  le  poivre.  La  carte  lui  donne  le  nom  de  S^  Meud 
qui  n'est  éloignée,  au  dire  du  texte,  que  de  G  milles  de  Kanbaïet.  Le 
texte  reprenant  pour  la  seconde  fois  File  en  question,  la  trouve  vis-à-vis 
de  la  ville  maritime  de  fiarouh  à  deux  journées  de  Sindan  et  sous  le 

nom  de  ^U  Moulan,  elle  produit  le  poivre.  La  carte  est  d'accord  et  lui 

donne  le  nom  de  Meli.  Or  Tile  presque  unique  pour  la  production  du 
poivre  voyage  par  mer  jusqu*aux  ports  de  Barouh  et  de  Kanbaïet,  lors- 
qu'elle n'est  éloignée  des  fies  Balank  et  Serindib  que  de  2  journées.  Et 
Barouh  (voyez  la  carte,)  a  déserté  sa  place  pour  se  ranger  dans  le  Ma- 
nibar  vis-à-vis  de  Tile  au  poivre,  voisine  de  Balank  ou  Balab^k. 

Les  côtes  occidentales  du  Hind  sont  fâcheusement  désordonnées  : 
cependant  les  positions  dérangées  étant  connues,  se  laissent  coordonner 
par  leur  suite.  Sindapour,  à  moitié  chemin  de  Barouh  à  Banah,  répond 
à  Koundapour  d'aujourd'hui. 

10.  Quant  à  des  positions  ultérieures  jusqu'au  Gange,  il  serait  proba- 
blement bien  d'observer  leur  suite,  mais  les  distances  y  sont  corrom- 
pues. ÀJb  Banah  (Bounmad  d'aujourd'hui),  situé  vis-à-vis  de  Tile 
Balank  ou  Balabek  (îlolYalediva)  (9).  Vient  ensuite  *^>M  Fanderina 
ou  Kanderina  (Travankor)  bâtie  à  l'embouchure  d'une  rivière  qui  sort 
du  Manibar  (rivière  Kaveri  qui  vient  de  Malabar).  Puis  .j)^^j9^  Djer- 

batan(Drouradjapatan).  Enfin    ^s^^  Sandji  eijLySS  Keikasar  situés 

près  de  la  montagne  ^ y^  al  Omri  qui  monte  vers  le  nord  et  forme 

un  grand  rescif,  où  Mesolus  ptoléméen  se  décharge,  seraient  sur  les 
côtes  des  embouchures  de  Kistna  (Mesolus)  et  de  Godaveri,  et  des  monts 
Oroudi,  où  au-delà,  vis-à-vis  de  Vizagapatam ,  existe  un  récif  appelé 
Neptune;  rocks  of  Conar  or  Santapilly. 

Viennent  ensuite    tljl^lK^  Kalkaîan  qui  se  range  à  Gîcacola  ou  Ghi- 

cocol;  puis^^)  Loulou  ou  Loulova  et  àsr^  Kandjeh  ou  Gandjeh,  qui 
trouvent  leur  place  à  Ganjan;  enfin  .tj^.y^  Semindar  île  et  ville  con- 
tinentale à  l'embouchure  d'un  fleuve  qui  vient  de  Karamaut  des  envi- 
rons du  Kaschmir  extérieur  (Hougly  du  Gange),  d'où ,  de  Semindar  par 
Kaschmir  intérieur  (Monghir)  on  se  rend  à  Kanodj  duquel  dépend  ledit 
Semindar.  Il  figure  sous  le  nom  de  Mandarcm  dans  les  cartes  anciennes 

(9)  àlasnite  de  Hlo  Balank  sont  nommées:    Jlîlj  Jî*  Tervaklidj  cl    JL^m^  Mosnah.  Pour  sûr 
eUet  sont  voisines  des  Ilotes  qui  se  rangent  ^dans  la  baie  des  perles,  ^Mansou-dÎTa  est  Mosnab. 

La  carte  de  sa  part  offre  quelques  îles  à  Toccident  de  la  pcuiusulc  Hind.  ,^1,  XX^^O    Kisnekmad 

est  probablement  Okamoundel  à  rentrée  du  golfe  Kutsch.  Les  trois  îles  jL^A- 1  uJ  1  al  Nardjil , 

placées  à  l'oncst  de  Serindib  et  au  nord  des  Roïbahat ,  et  ^  fXJ  I  àJ  Jba)  i  al  Kotroba  Tocci- 
dcntale  lit*  ou  plutôt  92*  de  longitude  et  10*  de  latitude,  sont  des  énigmes  pour  moi. 


13  CARTES   DE   L*INDE 

de  Hond,  Blaeuw,  Sanson,  Witt;  Manderaw  d'Arraco-Sniith ,  situé  à 
Toucst  de  Chandernagor.  C'est  en  nous  conformant  à  cette  explication, 
que  nous  avons  formé  le  littoral  de  la  péninsule  du  Hind. 

Avec  Semindar,  les  distances  littorales  sont  interrompues.  Elles  re- 
prennent leur  suite  de  Tilc  et  de  la  ville  Aourschin,  de  laquelle  5  jour- 
nées à  Loukin  (Loukipour  à  Torient  du  Magna  de  Gange) ,  de  là  4  jou^ 

nées  à  ^^^j^^J^  Tarigourgan;  ensuite  6  journées  à  LjJL»  Katigora; 

puis  5  journées  à  n^âJL^  Seuf  ou  se  déclare  une  nouvelle  interruptioo 
des  dislances.  Ces  distances  conduisent  jusqu'à  Merghî  et  Tanasserim 
où  Ton  désignait  la  position  de  Senf  et  de  Kxmyopx  de  Ptoléiuée. 

11.  Il  y  a  beaucoup  plus  d'embarras  avec  le  reste  de  la  composition  : 
c'est-à-dire  avec  les  îles  et  la  Sinie. 

Quand  on  confronte  la  cçirte  avec  le  texte  on  remarque  que  c'est  sur- 
tout dans  le  dénombrement  des  îles  qu'il  y  a  ou  plus  ou  moins  sur  la 
carte  de  nombreuses  positions  restant  sans  épigraphes.  Dans  cette  partie 
de  la  carte,  nous  avons  eu  le  plaisir  d'insérer  une  quantité  de  noms 
que  nous  a  fourni  le  texte,  et  des  considérations  très-simples  nous  ont, 
je  pense,  préservé  de  l'erreur. 

L'île  Rami  éloignée  de  3  (lisez  8)  journées  de  Ceylan,  est  très-grande; 
sa  longueur  est,  à  ce  qu'on  dit,  de  700  parasanges;  elle  produit  le 
camphre.  De  l'autre  côté,  il  y  a  5  à  6  journées  de  Laukhialious  à 

l'île  àiS^  Keleh.  Celle-ci  est  très-grande,  son  roi  se  nomme  Djaba 
(mihradj);  elle  produit  d'excellent  camphre.  En  regardant  la  carte  il 
faut  comprendre  que  ces  deux  extraits  parlent  de  la  même  île  qui  por- 
tait le  camphre.  La  carte  le  veut  ainsi.  D'ailleurs  nous  savons  qu'à  Rami 
était  situé  Faufour  (Camper)  et  qu'au  sud  de  cette  île  se  trouve  Kalah 
(Ibn  Saïd,  Aboulféda,  etc.).  C'est  Sarira  d'Abou  Rihan,  la  plus  grande 
des  îles  Zabedj.  Aboulféda  la  distingue  de  Djaba  sans  nécessité  (lo).  Le 
roi  djaba  possédait  en  outre  les  îles  Djaba,  Selahet,  Heridj  et  Maït,  et 
toutes  étaient  Djaba. 

L'île  Malaï  est  grande;  elle  s'étend  de  l'occident  à  l'orient,  son  roi 
demeure  dans  une  ville  nommée  Melik  djezr  (Malaï  djezr).  La  carte  re- 
trace sa  figure  oblongue.  Un  autre  passage  de  la  description  porte  que 

l'île  dej^  Komor  est  éloignée  de  7  journées  des  îles  Roîbahat.  Elle  est 

longue;  son  roi  demeure  dans  la  ville  de  Malaï;  les  habitants  disent 
qu'elle  s'étend  en  longueur  de  4  journées  vers  l'est;  elle  commence 
auprès  des  îles  Roîbahat  et  se  termine  en  face  des  îles  de  la  Chine  du 
côté  du  nord.  Or  Komor  est  Malaï  et  Malaï  est  Komor;  c'est  évident  :  la- 
carte  le  dit  explicitement  en  inscrivant  sur  les  deux  bouts  de  la  longue 

île,  d'un  côté  près  de  la  ville  de  Malaï  ^LU  ^V  V?^  clT^^J^'  ^J^)^ 

et  au-delà  de  la  ville  Komar,  sur  les  à^Jù  extrémités  orientales,  que 
c'est  l'île  Komar  qui  est  Malaï.  Le  roi  Komor  qui  souvent  est  en  guerre 

(iO)  Toute  cette  île  est  inventée  de  la  portion  du  milieu  de  Soumatra  élancée  vers  l'est.  Kamperest 
Fanfour  à  roccident  des  autres  positions  ;  Ramorarao ,  Rami;  vient  ensuite  lambi ,  Lamri  (appelé 
Lameri,  par  Marco  Polo);  enfin  Kelek  trouvait  la  position  la  plus  méridionale  et  la  plus  orientale,  là 
où  le  rivage  tourne  plus  rapidement  au  sud  vers  Palcmbank. 


ET   DE   LA   CIIIKE.  15 

avec  mihradj  de  Djaba  claii  komor  de  Malaï.  C'est  Sendirfoulat  des  pre- 
miers navigateurs. 

Le  texte  signale  en  outre  Fîle  jL^i  Komar  à  3  milles  d'intervalle  de 
Scnf  et  la  carte  l'indique  toute  petite.  Il  y  a,  dans  cette  Ile  Komar,  un 
roi  qui  se  nomme  jj  ^  ranid,  de  la  famille  j.^^  semer.  Mais  ce  roi,  aussi 
bien  qu  son  île  Komar,  paraissent  avoir  quelque  intimité  et  une  certaine 
identité  avec  le  roi  Ju-j  resed,  plutôt  jJj  zenbid  (ranid),  roi  de  Sen- 

difoulat.  Faut-il  accuser  Edrisi  de  Tinadvertance ,  ou  admettre  Texis- 
tence  de  deux  îles  Komor,  Komar;  de  deux  îles  Sendifoulat;  de  deux 
rois  ranid  ou  zenbid?  Au  bout  du  compte  ce  roi  Komar  est  ce  petit  jeune 
étourdi  de  la  relation  soleimanienne,  qui  désirait  avoir  la  tête  de  Mah- 
radj  sur  son  plat.  Maradj  de  Djaba  par  10  journées  de  chemin  lui  rendit 
visite  en  montant  une  rivière  sur  laquelle  la  résidence  de  Komar  était 
située. 

12.  On  a  observé  que  les  positions  qualifiées  d'îles  peuvent  être  des 
péninsules,  pointes,  langues  de  terre,  à  cause  que  Tidiome  arabe  ne 
distingue  point  Tîle  de  la  péninsule.  Aussi  voit-on  de  nombreuses  posi- 
tions riveraines  qui  sont  accompagnées  d'îles  homonymes  :  Sendan , 
Sonbara,  Melli,  Aourschiu,  Semindar,  Senf,  marchent  en  compagnie 
de  leurs  homonymes.  La  grande  île  Malaï-Komor,  en  effet,  n'est  autre 
chose  qu'une  grande  péninsule  Malaï.  Décrite  et  représentée  comme  île, 
séparée  du  continent,  plus  rapprochée  des  rivages  imaginaires  de  Sofala, 
dont  elle  n'est  éloignée  que  d'une  journée,  que  du  continent  de  l'Indeou 
de  la  Chine  dont  on  ignore  l'éloignement.  Cependant  les  navigateurs  ne 
passaient  pas  son  isthme  Krah,  ils  côtoyaient  tout  au  long  de  l'immense 
Malaï  pour  apprendre  que  c'était  une  ^j^y^  péninsule.  Malaï  se  ratta- 
chait par  un  bout  au  continent.  Edrisi  ne  l'indique  point.  C'est  cepen- 
dant indispensable  de  sîivoir  pour  débrouiller  ses  relations  (ii). 

Par  le  détachement  de  la  péninsule  Malaï  une  rupture  des  distances 
riveraines  a  dû  se  déclarer.  La  carte  d'Edrisi  offre  deux  ruptures  :  une 
au-delà  de  Semindar,  l'autre  à  partir  de  Senf.  Mais  cette  dernière  est 
remplie  par  une  distance  marine  de  l'île  de  Senef  au  continent,  distance 
de  5  journées  seulement.  On  conçoit,  en  outre,  que  la  lacune  a  pu  être 

(11)  La  relation  d'un  Ihn  Fatliima,  qui  se  dit  voyageur  et  venant  de  Hic  Komr  Malaï,  fixe  la  po< 
sition  édrisienne  de  cette  île.  L'île  de  Komr  est  longue  et  large;  on  lui  attribue  4  mois  de  long  et 
SO  journées  de  large.  EIU>  commence  à  l'orient  de  Seyonnah.  On  cite  parmi  ses  villes  Leirane  qui 
e^an  pouvoir  des  musulmans,  aussi  bien  que  Makdaschou ,  Levrane  se  trouve  sur  les  bords  de  la 
mer  par  103'  0  de  longitude,  et  0  32'  de  lat.  A  5  degrés  au-delà  [à  l'est)  est  sous  la  même  latitude,  la 
ville  de  Malaï  (107"  0'  de  long.  0  32'  de  lat.)  où  réside  un  des  rois  de  l'île.  L'île  se  prolonge  à  l'est  : 
Komorie ,  qui  fut  jadis  la  capitale  de  la  plus  grande  partie  de  l'île ,  se  trouve  sous  le  184"  0'  de  long, 
et  le  3*  0'  de  lat.  sud.  Un  canal  sépare  cette  île  des  rivages  de  Sofala.  A  l'orient  de  la  ville  Seyounab, 
située  sous  99"  de  long,  et  2"  31'  de  latit.  sud,  commence  la  montagne  Almolattham.  (battue  p-ir  les 
vents  du  nord)  qui  s'ctond  à  SGO  milles  le  long  do  la  côte.  La  montagne  de  Komr  (de  1  autre  côté  du 
canal)  se  prolonge  dans  la  m^me  direction.  La  race  nègre  finit  au  midi  sous  le  100"  0'  de  lon^.  et 
le  16"  0'  de  latit.  sud.  Là  s'élève  la  montagne  Alnedara  (du  repentir  de  ceux  des  navigateurs  qui  s'y 
«ttgagent),  elle  s'étend  jusque  sous  le  117"  30'  de  long.  Sur  te  versant  de  cette  montagne,  du  côté  du 
nord  109*  0'  de  long,  et  13"  0  de  lat.  sud,  est  la  ville  Daghoutbah  la  plus  reculée  des  villes  de  Sofala; 
e*e6t  la  saillie  la  plus  avancée  du  continent  de  ce  côté.  Ainsi  le  canal  se  dirige  par  le  sud-est  et  se 
tormioe  à  la  montagne  du  repentir ,  large  en  cet  endroit  d'environ  300  milles.  C'est  ce  qu'a  relaté , 
l'ayant  vu  de  ses  propres  yeux  ,  Ibn  Fatbima ,  probablement  postérieur  à  Edrisi.  Ejçl  137<(  Ibn  Saïd 
répétait  sa  narration,  en  toute  confiance  (Roinaud ,  introd.  à  la  géogr.  d'AbimIf.  p.  317,  318).  (Voyez 
n*  19  de  notre  atlas).         « 


14  CARTES   DE   l'iNDE 

comblée  par  la  cooiposiiion  de  la  carte  et  que  le  géographe  a  pu  inventer 
une  distance  géographique  en  chiffre  d'échelle. 

Dans  celle  partie  de  la  carte  d'Edrîsi ,  il  y  a  trois  espèces  de  distances: 
Tune  des  distances  coniinenlales  d'itinéraires;  Tautre,  des  distances 
nautiques  relatées  par  des  navigateurs;  enfin,  la  troisième  espèce  des 
distances  géographiques  nécessaires  à  la  construction  de  la  carte,  résul- 
tant de  la  réduction  des  précédentes,  on  de  la  composition  de  la  carte-, 
qu'à  la  suilc  le  compas  levait  sur  l'échelle  et  dont  il  déterminait  le 
chiffre.  Edrisi  distingue  quelquefois  les  deux  premières  espèces  :  il  ne 
dislingue  pas  cette  dernière,  cependant  la  plupart  de  distances  sont  de 
cette  nature  géographique,  et  il  est  indispensable  de  les  accepter 
comme  telles  et  de  s'y  conformer  en  les. appointant  à  la  direction  que 
leur  ont  donné  les  géographes  de  l'époque,  par  l'inclinaison  à  la  ren- 
verse de  la  péninsule  Malaï  et  par  la  descente  jusqu'au  premier  climat 
du  principal  port  de  la  Chine.  Puisque  l'interruption  des  distances 
riveraines  a  pu  être  comblée  par  le  compositeur  de  la  carte,  il  faut 
donc  par  d'autres  conjectures  déterminer  l'endroit  sur  lequel  les  Arabes 
ont  perforé  l'isthme  Malaï  Krah.  A  cet  effet,  je  prends  eu  considération 
Kaltigora ,  Loukin  et  Senf. 

15.  Nous  avons  suivi  les  rivages  du  Hind  jusqu'à  Kattigora  et  Senf, 
qui  nous  ont  menés  jusqu^aux  environs  de  Tanasserim,  Senf,  Kattigora, 
Tarigourgan.  Edrisi  compte  à  la  Chine  Kattigora  situé  à  i'emboudnure 
d'une  rivière,  c'est  une  dépendance  de  la  Chine;  Senf  est  une  île  chi- 
noise :  ces  positions  ne  font  pas  partie  de  la  Chine,  mais  sont  du 
nombre  de  ses  dépendances;  elles  font  parlie  du  Hind,  beaucoup  plos 
spacieux  que  la  Chine,  séparés  par  les  montagnes.  Hind  s'étendait 
jusque-là,  y  compris  Zabedj,  Moudja,  Mobed  (dil  Soleyman).  Or, 

Loukin  ^^j^  (Loukipour),  à  l'embouchure  d'une  rivière  qui  vient  de 

Karamaut  ou  Kazamaut,  se  trouve  sur  les  côtes  de  l'Hindoustan ,  et  on 
compte  de  Loukin  jusqu'à  Senf  15  journées  de  dislance.  C'est  ce  qui  se 
passe  dans  le  second  climat  (11,  9,  p.  185, 188, 100). 

Dans  le  second  climat  (I,  9,  p.  84),  le  lexte  d'Ëdrisi  relate  que  de 
Senf  à  Loukin  il  n'y  a  que  trois  journées,  et  que  ce  Loukin  est  la 
mière  échelle  de  la  Chine,  d'où  l'on  se  rend  à  Khanfou.  Cet  apparente 
désaccord  est  levé  par  sa  carte.  Ce  Loukin  n'est  pas  celui  des  côtes». 

hindoustaniennes,  mais  JJLi^  (vtM^    Loukikin,  Loukiked  (Loui-. 

tscheou)  situé  au-delà  de  Kattigora  et  de  Senf. 

La  carie  donnant  une  solution  irréfutable  pour  le  double  Loukin  ov 
Loukikin,  se  met  cependant  en  désaccord  avec  le  texte  quand  elle  priv 
Loukin  du  second  climat  du  fleuve  qui  vient  de  Karamaut,  et 
Loukikin  sous  le  premier  climat  près  de  l'embouchure  d'un  fleuve  doi 
le  texte  n'a  fait  aucune  mention.  La  première  échelle  de  la  Chine  n*er 
plus  une  dépendance,  mais  une  partie  intégrante  de  l'empire. 

Du  temps  d'Ëdrisi  dominait  la  dynastie  de  Soung.  Ses  frontièr 
touchaient  an  sud  le  royaume  de  Kaotschi,  et  ne  dépassaient  point  ~ 
limites  de  la  Chine  propre,  déjà  fixées.  Edrisi  pouvait  avoir  quelq 
relations  orales,  toutes  récentes,  mais  transcrivant  les  passages  de 
prédécesseurs^  de  Soleiman,  de  Kordadbeh  et  d'autres,  etmétant 


£T    DE   LA  CHiriË.  15 

unes  avec  les  autres,  il  rapporlait  plutôt  les  connaissances  bien  anté- 
rieures et  probablement  des  premiers  navigateurs,  du  siècle  même  de 
la  dynastie  de  Thang  :  du  moins,  comme  il  confond  les  opinions  de 
Ptolémée  avec  celles  des  Arabes ,  de  même  il  ne  distin&ue  point  les 
anciens  des  postérieurs  :  cependant,  dans  ces  régions  éloignées,  les 
positions  cbangeaîent  de  nom  et  d'importance.  Loui-tscbeou  (Loukikin) 
ngure  avec  son  existence  et  son  importance  sur  les  cartes  de  Klaproth 
pour  les  temps  de  la  dynastie  Soung. 

ii.  Kattigora  est  un  nom  ptoléméen.  Sur  quel  point  en  orient  Ta 
retrouvé  Edrisi?  à  Fouest  ou  à  Fest  de  Malaï?  L'ingénieur  Bonne,  en 
indiquant  les  positions  de  Ptolémée ,.  place  Kattigora ,  même  sur  la 
carte  moderne,  au  sud  de  Cochinchin,  sur  les  rivages  de  Djampa. 
Klaproth,  par  des  combinaisons  érudites,  dans  ses  cartes  historiques, 
lui  indique  une  position  proche  de  Tembouchure  de  Maïkong  ou  Kam- 
boîa.  Je  ne  sais  si  c'était  l'opinion  d'Edrisi ,  mais  si  l'on  accepte  la  pre- 
mière échelle  chinoise  Loukikin,  à  Loui-tscbeou,  on  n^aura  rien  à 
objecter  contre  cette  position  de  la  dépendance  chinoise.  Edrisi  évalue 
à  six  journées  son  éloignement  de  Loukikin,  à  moitié  chemin  se  trou- 
vait Senf  ;  or,  Senf ,  d'après  Edrisi,  serait  sur  les  côtes  de  Gochinchine, 
où  se  trouve  le  port  Xouandry. 

Edrisi  dit  qu'à  trois  milles  de  Senf  résidait,  dans  une  ile,  le  roi 
Komar  ranid.  Tout  près  au  nord  de  Xouandri ,  on  voit  deux  îles  Kambir 
di  mar  et  da  terra  ;  non  loin ,  vers  le  sud,  se  trouve  la  baie  de  Romarin. 
Je  ne  prétends  pas  chercher  dans  cette  coïncidence  des  noms,  de  con- 
firmation pour  la  position  de  Senf  :  l'île  du  roi  Komar  ranid  est  assez 
douteuse  elle-même  :  mais  je  ferai  observer  qu'on  ne  trouverait  point 
de  semblable  analogie  dans  les  parages  où  les  premiers  navigateurs 
paraissent  avoir  touché  au  Senf. 

Ce  qui  est  indubitable,  c'est  que  la  première  échelle  de  la  Chine 
Loukin ,  Loukikin ,  n'étant  pas  une  dépendance ,  mais  située  dans  la 
Chine  même,  fut  éloignée  de  Khanfou  de  âO  journées  de  marche  par 
terre;  par  une  grossière  erreur,  le  texte  donne  la  même  distance, 
4  journées  par  mer.  Qu'elle  était  au-delà  de  Tarigourgan ,  de  Kattigora 
et  de  Senf»  qu'étant  éloignée  de  Senf  de  5  journées  (et  même  si  l'on 
voulait  de  8),  eUe  entraîne  Senf  d'Edrisi  sur  les  côtes  de  Cochinchine, 
à  Test  de  Malaka.  Enfin ,  que  File  Malaï  touchait  au  continent  par  son 
isthme  péninsulaire  sur  la  position  du  ptoléméen  Kattigora. 

La  situation  de  Senf,  fixée  ainsi,  facilite  à  Finfini  la  dispersion  des 
distances  qui  rayonnent  de  ce  point  par  toutes  les  directions.  Celle  de 

4  journées,  qui  se  dirige  par  le  continent,,  conduit  à  Lxtl^Kaschgora, 

qui  e^t  Ketschou  ou  Keskho  du  Tonquin,  qu4 était,  du  temps  d'Edrisi, 
capitale  du  royaume  Kaotscha,  d'où  plusieurs  chemins  se  répandent 
dans  Fintérieur  des  régions  du  nord. 

IS»  Les  distances  de  Siiûa  sont  tout  à  fait  isolées.  £Ues  forment  un 
réseau  distinct  et  séparé.  Partant  de  Sinia,  elles  se  dirigent  vers  le 
nordhiuest,.  avançant  très  profondément  dans  le  pays,  sans  se  commu- 
niquer afv>ee  aueune  autre  distance  sortant  de  FHindoustan  ;  car  on  ne 
peut  pas  considérer  pour  une  disUnce  giéograt»biiqtte  les  deux  mois  de 


\6  CARTES   DE   l'nDB 

marche  pour  arriver  de  Khanfou  à  Badja,  capitale  de  ^%^  Bagboug 

(ou  ,^ix3  Fagfour). 

Sinîa  est  située  à  l'extrémité  orientale  de  la  Chine.  C*est  ce  que  la  vingt- 
sixième  carte  de  Ptolémée  indique.  Ce  n*est  pas  la  capitale ,  seulement 
la  résidence  d'un  vassal.  Aucune  ville  ne  Tégale  et  elle  se  trouve  dans 
une  plaine  marécageuse.  Ne  serait-elle  donc  Hang,  Quinsay,  qui,  dans 
des  temps  très- reculés,  portait  le  nom  de  Tsian,  proche  de  Kanfou 
(Gampou)? 

La  capitale  de  la  dynastie  de  Soung  était  Pian  (Kaîfong),  située  sur  le 
fleuve  Khamdan.  Mais  Edrisi  donne  une  telle  distance  de  Sinia  ou  de 

rextrémité  de  la  Chine  à  la  capitale  io.b  Badja,  qu*il  est  impossible 

de  s'arrêter  à  Pian  et  de  ne  pas  avancer  jusqu'à  Khamdan  ou  rancienne 
capitale  des  Thangs ,  visitée  par  les  premiers  navigateurs.  Le  nom  de 
Badja  dérive  cependant  de  Pian,  appelé  Pian  tschéou  avant  qu'il  devint 

capitale;  il  est  écrit ysr^,  Pandjou  par  Nassir  Eddin  et  ses  copistes ,  et  il 

faut  convenir  que  cette  capitale  a  été  de  bonne  heure  connue  chez  les 
Arabes;  vers  958  Ibn  Ketir  la  plaçait  sous  le  nom  de  Melik  al  Sin  ou  la 
royale  de  Sin,  dans  le  premier  climat;  de  même  en  1005,  l'astronome 
égyptien  Ibn  lounis  déterminait  l'emplacement  de  Melik  al  Sin ,  par  la 
longitude  géographique  164<^  40'  et  la  latitude  18®  0',  lesquelles  résul- 
tent de  6  journées  de  distance  entre  la  royale  et  Khanfou. 

Quant  aux  autres  positions  littorales,  qui  sont  certainement  du 
nombre  de  douze  échelles,  leur  emplacement  flotte  entre  une  succession 

régulièrement  suivie  ou  dérangée  Jb  \^  ^y^  Kouanla  ou   Kivanla 

et  t^lJ  Lkili  Kaîtova  ou  Kabatova,  supposant  qu^elles  précèdent 

Khanfou,  seraient  l'île  Hai-lin  et  Kouangtoung  (Canton).  Si  l'on  voulait 
admettre  un  plus  ^rand  désordre  dans  les  positions  littorales,  Kouanla 
trouverait  Uou-lei  vis-à-vis  de  Fornose.  Si  l'on  avait  confiance  dans 
l'ordre  de  la  carte,  il  faudrait  renvoyer  ces  deux  échelles  au-delà  de 
Khanfou  (lâ). 

10.  Ma  composition  édrisienne  a  été  construite  lorsque  j'entrepris 
d'en  faire  la  confrontation  avec  les  grandes  cartes  de  KlaproUi,  delà 
Chine  et  du  Japon,  de  l'Asie  centrale  en  quatre  feuilles,  et  avec  plu- 
sieurs spéciales  d'autres  auteurs,  d'Âssem,  de  Himalaya,  etc.  Cette  con- 
frontation m'a  déterminé  la  leçon  de  plusieurs  épigraphes  qui  ne  se 
trouvent  pas  dans  le  texte  édrisien  ;  elle  confirma  la  situation  de  plu- 
sieurs positions  par  des  noms  analogues. 

A  partir  de  Tarigourgan  (Arakan)  et  de  Kaschgar  (Keshko),  les  dis- 
tances 4  au  lieu  de  7  et  8  s'appointent  sur  Asfira  (Cospur,  Khaspour). 

D'où  par  j^Uiat  Atragan  appelé  par  la  carte   ^IJU.!  Ahlaragan 

(qui  ofifre  ^  \X^  I  Adjalragan,  un  mot  assez  tibétain  Djal  ou  Dziang  la 
rzédzong!)  :  on  se  rend  à  Atraga  où  s'appointe  la  route  venant  de 

(It)  I^  leçon  de  Kivanla  et  de  phineors  autres  noms  de  localités  inconnues  est  arbitraire.  La  ctftfl 
-  qui  enrichit  la  nomenclature  édnsienne  force  à  des  conjectures  basiurdeusas.  Son  dessinateur  a  mine 
méconnus  plusieurs  dénominatioqs  ;  à  la  place  de  Khandfon  et  Kbanjon  il  a  substitué  des  appelli- 
tions  postiches  qu'on  ne  saurait  qualiier  de  variantes  :  Khanfou  n*a  plus  be8<^n  de  semblables. 


ET  DE  LA  CHINE.  17 

Loukîn  par  Kakela  sur  une  branche  de  Bahanek  (Brahmapoulra).  Kakela 
est  sur  le  chemin  de  Loukin  à  Khashmir,  sur  lequel  aucune  rivière  ne  se 
retourne  vers  Bahanek.  On  y  trouve  Coïlle  à  ceruine  distance  ouest  ô& 
Bogmuitty,  Bognautl.  CeUe  rivière  a  peut^tre  engendré  par  confusion 
Tappellation  de  la  rivière  qui  baigne  Âsfira. 

Bien  que   Boutbinkh   j^  sur  «;.L»^  Schcrmakh  (Batang  sur 

Briischou,  Mourous  oussou,  Kin-scha-kiang),  ait  conservé  son  nom, 
cependant  je  ne  puis  tirer  rien  de  satisfaisant  pour  le  Tibet,  où  les  prin- 
cipales positions  Oudj,  Bervan,  la  capitale  même  Tibet,  sont  attachées  à 
un  lac  de  40  parasanges,  alluvion  de  nombreuses  rivières,  appelé 
Bervan,  et  éloigné  de  5  journées  seulement  de  Bouthinkh  (is).  Bouthinkh 
est  le  point  par  lequel  on  entrait  du  Tibet  en  Chine;  or,  c*est  sur  cette 
route  que  se  trouve  Ihoutischer  (Ya,  Ya-stcheoufou)  d'Abou  Riban. 

Dans  le  pays  de  Tibet  se  placent  les  postes  avancés  des  Chinois 

Lk^Lw  1-Â.jL^  Siaoukha  ou  Saoukha  (Sok-dzoung,  ^sr^^^  Sokdjou 

du  Persan)  et  Lili  Kascfaa  (canton  Khâschi,^s^Uk  Khadjou  du  Persan). 

€e  dernier  éloigné  de  8  journées  de  jL^JLo  Beschiar  (Betschouan  ing, 

Pe-tcbuen-pou  sur  la  lisière  de  la  muraille  chinoise  près  de  Sining)« 
place  forte  érigée  sur  la  frontière  chinoise  contre  les  Turks  Bagargars. 

Ces  Turks  avaient  dressés  leurs  tentes  près  du  lac  s^jtj^  Kovareth 

(Koukou  noor).  Au  sud  se  trouvait  Ls^  Tokha  (canton  des  anciens, 
Touk  et  Toukan  des  cartes  historiques  de  Klaproth),  et  tout  près 

t^j!^  Darkhoun  (mont  Amui  ou  darghia),  dernière  dépendance  ûe 

Chin  sur  ce  point  (Edr«  III,  9). 

17.  Les  montagnes  Karamaut  (Hazmakout  d^'Abou  Rihan ,  Djamautri 
du  Himalaya)  sUnclinent  vers  le  sud  et  laissent  le  nord  à  l'appellation 
de  Karen  (Kharanggoui  tak,  à  partir  du  défilé  Karakoroum)  et  pour  Sin, 

la  carte  inscrivit  plusieurs  noms  de  montagnes:  ^:iJt  Zedanikh 
(Drloddzouk  tsien  toungra,  touche  Hoangho  au  nord  de^  Tibet);  JL^j^Ut 
Lonibarhat  (Lonibar  couvre  du  nord  la  langue  du  Tibet  qui  pousse 
vers  Test  dans  la  Chine);  »4j*^La.  Henûbrun  (ou  Djenli  tzun?  mon- 
tagne de  Neige  Sine-phei-schan  s'élève  tout  près  de  Tscliangtou).  Cette 
dernière  fixe  la  position  d'Askiria  ou  Asfiria  (Tschangtou  ?)  d'où  on  se 
rendait  par  ^^;:^  Khaïgoun  (ou  Djïgon ,  Tschinkiang)  a  Kascbgara 
(Kethso). 
De  Kascbgara  s^ouvre  encore  un  chemin  qui  se  dirige  vers  uy  Boura 

(Bhanmo,  Panmo,  Bhamno)en  tout  temps  lieu  de  traverse  de  Tlnde 
inférieure  dans  la  Chine  par  Mola ,  près  de  Santa ,  Tsanta  sivan  fu  szu, 

(f  s)  n  parait  qu'un  cofnpotitcur  de  cartcc  an  xvr*  siêde,  a  puisé  dans  l'ouvrage  d'Edrisi  pour  fa- 
briquer çertaioes  positions  de  l'Hindoustan  :  quand  il  placK  Lahor  et  Delli  près  d'un  grand  ilcuve 
Emdjesd'Edrisi,  chez  lui  Maodoua)  ;  quand  il  ran^e  Caboi ,  Tacan  (Touka),  Mojku  (Bora),  Ausuii 
laoud),  Cangigu  (Kanodj),  Àruagu  (\traga),  Calbaca  (Kakela],  Scoruita  (Karamant],  prè^du  fleuve 
geo«  Canton.  Cette  composition,  sous  le  titre  de  India  orientalie,  est  reproduite  par  Ortel 
(lOt*  carte  de  l'édition  i492).  Mercaior  l'a  accepté  ea  bloc,  la  modifiant  très  Icgèremeat. 

nr.  « 


i8  CARTES   DE  l'iNDE 

Mola  zanda  santa.  Les  montagnes  de  Kattigora  ^*^^  Kasa-kan,  comme 
la  nomme  Tcpigraphc  de  la  carte  (du  Casi  cassay  canton  d'Âva) ,  restent 
à  Toccident.  Vers  le  nord,  à  4  journées  par  terre,  2  journées  par  eau,  se 
trouve  Ld^^  Toukhaou  Ld;.v._Âl»Tarkha,  suivant  l'épigraphe  de  la  carte 
(à  Pouest  on  voit  non  loin  la  montagne  de  Takkah,  Tliikitaon,  Tukutkfaa; 
le  pays  d'Assam  porte  aussi  le  nom  de  Taeklia).  Boura  et  Toukha,  situés 

tous  deux  sur    ^^  Kaihy  (Iravadi  des  Birmans,  Kiang  nga,   Takin 

tscha,  Pinlang,  Yarou  tzaugbo  tsin  des  Chinois,  Sri  lohit  des  Assames, 
passe  au  nord-est  d*Assam  par  un  défilé  Singghian-Khial  (14). 

Enfin,  quoiqu'on  ne  puisse  pas  prétendre  retrouver  les  noms  chinois 
sous  Tenveloppe  arabe,  nous  remarquons  cependant  que  par  ce  triangle, 
qui  se  forme  des  distances  de  Sin,  plusieurs  noms  rencontrent  leurscon- 

sonnantes  :^3JL»Schedhkhour(Setschou);  l&jL  Taouga  (Tengan),*^^ 

Sola  (Tschelilou  appelé  Tou,  Tou-tscheou  dans  les  cartes  de  Kiaproth). 
Au  lieu  de  Askhara,  Aschtakhou,  Aschtakhak  qu'offrent  les  manuscrits  de 
Paris,  la  version  latine  propose  une  leçon  préférable  Asahda  et  Asanho 

^asT^— I  (Siking). 

C'est  tout  ce  que  nous  avons  pu  remarquer  dans  Tintérieur  de  TAsie 
centrale. 

48.  De  toutes  les  positions  littorales,  Khanfou  et  Djanfou  seules  sont 
déterminées  par  distances.  Entre  ces  deux  échelles,  il  y  avait  5  jour- 
nées, Djanfou  est  donc  Hoaïiigan  à  l'embouchure  de  Khamdao. 

De  Senf  et  de  son  île  contiguêRomar,  il  y  a  10  journées  à  Sendîfoulat, 
et  de  cette  fie  4  encore  à  Khanfou.  La  posilion  de  Sendifoulat  est  toute 
différente  de  celle  de  Sendirfoulat,  indiquée  par  les  premiers  navigateurs. 
Cette  position  édrisienne  conduit  vers  l'île  Formosa.  Peut-être  que  son 
nom  chinois  Manti  (Maïd)  n'était  pas  inconnu  aux  Arabes,  à  qui  il  fallait, 
à  partir  de  Maiaï  à  travers  les  îles  et  les  rochers  (qui  sont  nombreux  en 
pleine  mer),  un  mois  entier  avant  d'atteindre  Khanfou  :  mais  Edrisi 
confond  les  relations  de  différentes  époques  et  change  les  appellations. 

De  Senf  à  Malaî,  il  y  a  à  travers  les  îles  42  journées.  Ces  journées  sont^> 

spécifiées  de  la  manière  suivante.  De  Sent  4  à  l'île  J^Lw  SchameB 
(Kondor),  qui  est  une^tation  chinoise;  puis  4  (par  erreur,  au  lieu  de  7^ 
nécessaires  pour  évaluer  les  12)  à  l'île  Ij^^lc  Aaschoura  (Aor);  euûtm 
1  journée  jusqu'à  Malaï  (cap  Romania). 

Les  navigateurs  disaient  qu'à  partir  de  Malaï,  il  fallait  passer,  à  tra- 
vers les  îles  et  les  rochers,  un  mois  entier  pour  arriver  à  Khanfou.  Les 
géographes  ont  pris  au  sérieux,  et  géographiquement  à  la  lettre,  cette 
relation.  Abou  Riban  et  ses  successeurs,  ainsi  que  le  géographe  persan, 
comptaient  entre  Keleh  et  Khanfou  30  degrés  de  distance.  Ce  sont  les 
50  journées  dans  lesquelles  se  trouve  cette  traversée  d'un  mois.  Edrisi 

(r»)  Pcul-ôtrc  ce  Khial,  cache  le  nom  de  Kalhy  et  la  position  de  Toukha  sur  les  confins  da  Tibet. 
—  Je  dois  remarquer  qu'à  rexplication  des  positions  qui  se  présente  à  mes  examens ,  mainte  fois  les 
distances  ne  répondent  pas  sumsammcnt.  Je  pense  que  plusieurs  do  ces  distances  sont  engendréei 
par  la  composition  de  fa  carte,  déterminées  ensuite-sur  l'échelle  au  compas.  U  est  xum  remit- 
qnable  d  observer  en  Chine  et  au  Tibet,  un  singulier  concours  de  chiiTres  douteux*,  3,  *,  6, 7 ,  «, 
siiscpplibles  de  double  sens  et  de  la  leçon  dubitative. 


KT  DB  LA  CHINE.  19 

Ta  spécifié  par  42,  le  et  4  jouroéos  (en  somme  26)  par  Senf  et  Sendi- 
foulai  à  travers  les  îles  de  la  mer  Senf. 

19.  L*lie  du  camphre,  qui  avait  à  Poeeident  Fanfour  (Kamper)»  au  midi 
Keleh,  longue  du  nord  au  sud,  la  grande  Sarlra  (Djaba) ,  la  plus  grande 
des  Zabadj,  fut  ùiée  par  Âbou  Rihan  et  le  persan  à  6  et  8  d^rés  (ou 
fumées) ,  à  Test  de  Serindib.  Sa  partie  seplentrionMc  de  même  à  Test 
a  6  degrés  de  longitude  relative,  et  9*  de  latitude  nord;  enfin  la  par- 
tie méridionale  Keleh,  de  8  degrés  de  longitude  difiérettUelle  et  3 
degrés  de  latitude  nord.  Edrisî  relate  cette  position,  quand  il  dît  que  de 
Serindib  à  Keleh  il  y  a  3  (lisez  8)  journées. 

On  a  10  jou/nées  de  Serindib  à  (^jJLSci  Lankialîous  (Lankevî), 
qu*on  nomme  aussi  (^^Jlsr^  Landjalious  (Langkava),  et  de  Lankia- 
tous  Keleh,  5  ou  6  journées.  Ces  six  journées  sont  spécifiées  par  deux 
journées  à  File  s^^Ia  Djalous  (Djara),  ensuite  par  deux  journées  à 

«b^  Binan  ou  ^û^^  Binoman.  Cette  dernière  est  à  3  (lisez  8  journées) 

(de  la  distance  géographique  en  degrés)  de  Serindib,  et  avec  sa  grande 
ville  est  située  au  sud  de  Rami  (Keleh).  Or,  Binoman  est  éloignée  de 
Lankialious  autant  que  Keleh,  c'est-à-dire  de  6  journées.  L'une  des 
deux  distances  de  2  journées  est  lésée  et  c'est  la  seconde ,  au  lieu  de  v^ 

elle  doit  être  ^  4 ,  ou  j  6.  C'est  une  des  tics  adjacentes  à  Soumatrâ  : 
Bangkalis,  ou  Linga,  ou  Bangha. 

Le  mihradj  possède  la  grande  Rami  (Soumatrâ)  et  les  fies  du  voisi- 
nage qui  ne  sont  éloignées  Tune  de  l'autre  que  d'environ  â  parasauges. 

Ce  sont  ladbL»  Selahet  (Salanga,  Sejnbiiang,Djounkseylon),  qui  donne 
son  nom  à  la  mer  Selahet  (is);  ^  j»  Heridj  (un  tlot  Djardjak,  Djiradja 

situé  entre  Malaî  et  l'île  Pinang,  ^donnant  son  nom  à  cette  dernière), 
^jla.  Djaba  et  LjL»  Maîtou  LjU  Habet  (Bintang?). 

A  gauche  de  Maît  (au  nord),  à  1  journée  se  trouve  iajXj  Tenouma 
(Natouna),  éloignée  de  5  journées  de  l'île  jL^i  Komar  (probablement 
c*est  y^  Komor,  dont  le  roi  fesait  la  guerre  au  mihradj  de  Djaba  ;  si 
c*étalt  Komar  ranid,  la  distance  serait  censée  de  10  journées)  (ic). 

Les  possessions  de  mihradj  Djaba  sont  sur  les  rivages  de  la  mer  Senf, 
et  l'île  >b!  Âïam  ou  >Ut  Ânam  (Anamba)  se  trouve  à  l'entrée  de  cette 
mer  :  eJle  s'ouvre  à  l'est  de  Malal  jusqu'à  la  mer  de  Sin  et  sa 
partie  méridionale  porte  le  nom  de  ^j^^j^^  sS^y^J^^  ^^J^J^^ 


(4B)  Selat  en  Malaye  e«t  détroit.  Les  Malais  appellent  la  mer  aux  cnTÎrons  ée  Singapour»  Selat, 
c*est-à<dire  détroit.  Il  est  probable  que  l*ile  Selahet  est  l'île  dii  détroit  et  la  mer  Selahet  n'est  rien 
qoe  le  détroit  Malaî,  dont  les  Arabes  étendaient  là  dénomination  à  la  mer  entière  par  laquelle  ils  se 
rapprochaient  pour  entrer  dans  Selat  on  détroit. 

(46)  Je  pense  que  l'ouvrage  de  l'amiral  tourk  Sidi-Ali ,  qui  sous  le  titre  de  Mobyih,  traite  cii  4SSi« 
de  la  navigation  dans  les  mers  de  llnde,  n'offire  rien  de  contraire  aux  indications  que  je  viens  de 
donner,  au  contraire,  il  les  confirme.  Les  navires  arrivés  vers  Adicm  de  Soumatrâ,  montent  la  mer 

Sour  se  rapprodier  des  rivages  de  la  pâainsnle  et  ils  aiment  mieux  ta  côtoyer  q«c  la  tourner  le  long 
e  SoHaatra.  (Reiaaud,  introd.  à  la  géogr.  d'AboalC  p.  4S4-4SI4}. 


20  CARTES  DB  L^I«DE 

Darlazoui,  Darlaroui,  Darladeri  (mer  au  sud  de  Bornéo),  sur  laquelle  la 
situation  des  iles  est  indiquée  moins  positivement. 

20.  On  a  observé  les  pointes  et  les  langues  de  terre  se  métamorpho- 
sant en  iles;  de  même  une  île,  abordée  sur  plusieurs  points,  a  pu  se 
crevasser  en  plusieurs  îles  dans  les  descriptions  arabes.  Â  Hle  Ramî,  à 
File  Kelch  il  ne  manquait  pas  beaucoup  de  se  fendre  en  deux  îles  diffé- 
rentes. Ces  iles  sont  en  effet  des  sections  de  Souraatra  et  nous  allons  voir 
que  ces  sections  ne  forment  pas  encore  le  total  de  Soumatra  qui  produit 
du  camphre,  d'excellent  camphre,  du  camphre  supérieur  à  tout  autre. 

D'Anam  (Anamba),  qui  est  à  Feutrée  de  la  mer  Senf,  il  y  a  pari 
journées  à  File  ^fy^  Souma  ou  t^j^  Soborma  et  à  File  ^y 

Modja,  éloignées  de  2  journées  Fune  de  Fautre.  Quand  on  veut  disposer 
de  ces  distances  on  se  trouve  dans  une  perplexité  fâcheuse.  Cependant 
nous  sommes  forcés  d'entrer  encore  dans  Fîle  Soumatra,  divisée  en  plu- 
sieurs états  et  disséquée  en  plusieurs  îles  par  la  narration  des  Arabes. 
Souma  ou  Soborma,  Schoborna,  est  entourée  d'un  grand  nombre 
d'îles,  petites  mais  peuplées.  Son  roi  se  nomme  ^^y^  Kamroun.  Il 
existe  dans  quelques-unes  de  ces  îles  un  peuple  nommé  vJl.'ss^ 
Foundjet.  Les  montagnes  de  Souma  produisent  du  camphre  supérieur 
à  celui  de  tous  les  autres  pays  (de  Soumatra).  C'est  donc  la  partie  méri- 
dionale de  Soumatra  jusqu'à  la  baie  Samoun^ka,  possédée  par  le  roi  Kam- 
roun (Samang  et  Kavar,  cantons  du  sud),  qui  en  même  temps  tient  sous 

son  obéissance  les  îles  L^^^^  F^mousa  (Pana  itan  ou  du  Prince?)  et 
Ly^^  Lasma. 

A  l'extrémité  de  cette  mer  (Darlazonî),  qui  est  basse  sur  les  rivages, 
du  côté  de  la  Chine  (c'est-à-dire  de  Fest),  se  trouve  l'île  jjL»  Maïd 
(Java),  éloignée  de  Souma  de  4  journées.  Elle  contient  iiîn  grand 
nombre  de  villes,  formant  Fune  des  possessions  de  mihradj-djaba.  Les 
Chinois  y  ont  une  station.  Leurs  navires  venant  des  îles  chinoises 

(LieoukieoQ?  Formosa?  Kondor),  (ces  îles  sont 

Sahara),  s'y  rassemblent  et  c'est  de  celte  île^ 
dirigent  pour  se  rendre  ailleurs  (par  Sound  à  Keleh  (Galle)  de  Ceylon, 
dans  FInde  et  autres  lieux).  A  3  faibles  journées  de  Maïd  en  tirant  vers 
Fest,  on  a  l'île     éF^^  Sandji  (Celebes).  Au-delà  sont  encore  les  îles 

ir'ys:*^  de  brigands. 

De  cette  île  (Sandji)  on  peut  se  rendre  aux  îles  iLw  Siia  ou  Saïla  (la 
mer  Soulou  entre  Bornéo,  Celebes  et  Mindanao  et  l'archipel  de  162  îles 
Soulou),  lesquelles  sont  en  grand  nombre  et  se  rapprochent  les  unes 
des  autres.  11  y  existe  une  ville  5^5lil  Ankouah  (îlote  Nanka,  ou  du 
groupe  de  Tavi-tavi,  Nankaan). 

Moudja  (K'iematan,  Bornéo)  obéit  aux  rois  qui  sont  de  couleur  blan- 
che. Cette  île  touche  aux  lieux  où  le  soleil  se  lève.  De  Moudja  à  celle 
s^lssr*^  sahab,  des  nuages,  il  y  a  4  journées  et  plus. 
*  Nous  devons  faire  remarquer  que  la  carte  d'Edrisi  s'oppose  à  notre 
interprétation.  Elle  place  Maïd,  possession  du  roi  Djaba,  tout  près  du 


^;l^  Namandj,  y.Lw 
|C^  Maïd  (Java),  qu'ils  se 


ET  DE  LA  CHINE.  21 

rivage  de  la  Chine,  et  le  texte  dit  que  les  états  du  roi  Ramroun  (qui 
sont  enclavés  dans  les  possessions  de  mihradj  Djaba)  touchent  la  Chine. 
Le  rapprochement  de  la  Chine  en  est  la  cause  (17). 

Cette  opinion  prévalut  très  longtemps  parmi  les  géographes.  Il  est 
probable  que  le  géographe  persan  ne  rapprochait  plus  le  Yakvak  à  la 
Chine  :  mais  il  ne  savait  pas  élever  la  Chine  à  sa  hauteur.  Cependant  à 
cette  époque  on  a  compris  cette  erreur.  La  position  de  Khambaleh 
par  46®  de  latitude  étant  admise,  Khanfon  et  toute  la  Chine  remontent 
et  se  portent  vers  le  cinquième  climat,  ainsi  que  le  milieu  de  Sin,  est 
donné  50<*  de  latitude  par  l'astronome  marokain  Aboulhassan  en  i^50; 
la  Chine  s'étend,  par  plusieurs  climats,  de  14®  jusqu'à  4G°  de  latitude, 
et  Khanfon  se  trouvant  entre  les  i"  et  5^ climats,  est  placé  par  58®  55'  de 
latitude  suivant  Aboulféda;  Abou  al  akoul  fixait  une  autre  échelle 
Khansa  par  25®  50^  de  latitude  (1G4®  0'  de  longitude).  Au  xiv^"  siècle,  il 
n'y  avait  que  des  ignorants,  comme  Ibn  Ouardi,  qui  redressaient  les 
images  et  les  figurines  réprouvées  par  la  géographie. 

C'est  tout  ce  que  nous  voulions  dire  des  cartes  mahomédanes  ;  main- 
tenant nous  allons  examiner  les  cartes  chrétiennes. 

21.  Avant  l'incomparable  perlustration  de  Polo,  la  nomenclature 
géographique  de  l'intérieur  de  l'Asie  était  trop  maigre;  après  sa  perlus- 
tration, elle  devint  trop  abondante  et  sans  point  d'appui  pour  les  géo- 
graphes. La  connaissance  de  cette  perlustration  s'était  répandue  bientôt 
et  les  cartes  postérieures  décèlent  les  efforts  des  cartographes  pour 
composer  une  image  de  la  grande  perlustration.  Les  cartes  catalane,  de 
Mauro,  de  Behaîm ,  traçaient  le  continent  oriental  d'après  son  impul- 
sion, renseignées  par  quelques  nouvelles  investigations.  Pour  apprécier 
ces  compositions  géographiques,  il  faut  avant  tout  comprendre  la  nar- 
ration de  Polo.  Tâche  difficile,  heureusement  avancée  par  de  multiples 
observations  qui  sont  assez  connues  par  des  publications  populaires. 

A  l'exception  de  Sprengel  (chap.  28,  et  de  son  interprète  Malte 
Brun,  xx),  je  ne  connais  point  d'érudits  ouvrages  qui  se  sont  évertués  à 
expliquer  la  description  de  Polo,  et  par  des  indications  incomplètes  de 
publications  vulgaires,  je  ne  sais  pas  si  l'on  est  arrivé  à  l'explication  de 
tous  les  points.  Sprengel  observe  qu'il  reste  pour  la  Chine  tant  d'ob- 
scurité dans  la  narration  de  Polo,  que  des  missionnaires  comme  Gaubil 
et  Magalhaens,  sur  le  lieu  même,  ne  purent  donner  d'explication.  C'est 
donc  de  l'audace  à  vouloir  l'éclairer.  Cependant  la  carte  catalane  et 
toutes  les  suivantes,  jusqu'à  l'âge  des  missionnaires  et  des  premières 
découvertes  portugaises,  demandent  avant  tout  l'examen  de  la  narration 

(47)  Je  pense  guc  la  situation  du  roi  Kamroun  à  Souroatra ,  est  sufllsammeut  établie.  Ccpondant , 
si  l'on  voulait  réduire  sa  puissance  on  pourrait  lui  assigner  une  île  analogue  à  son  titre,  dans  les  îles 
Kariman  et  Karimata.  Si  1  on  voulait,  au  contraire,  en  faire  un  puissant  voisin  de  la  Chine ,  il  faudrait 
le  transporter  dans  les  iies  Philippines;  dans  l'ile  Samar  (Souma)  voisine  de  Kamariues  Kaniroun), 
partie  méridionale  de  Luzon  (I.asma)  où  l'on  retrouve  même  le  peuple  Fingnian  (Foundjct)  :  le  seul 
camphre  y  manque.  Comme  le  roi  Kamroun  est  voisin  de  Vakvak ,  il  prctcudruit  peut-être  prendre 

f»o3scssion  des  îles  komorines;  il  y  retrouverait,  près  des  rivages  de  Mozambique  et  Zauguebar, 
es  îles  Fourno  (Famousa)  et  Latham  (Lasma).  C'est  un  jeu  de  consonnance  qui  ne  se  prèle  pas  dans 
la  question  embrouillée  de  Moudja  et  Maïd.  Le  vague  de  la  narration  de  Soleiman  n'ompèclic  pas  du 
retrouver  Moudja  dans  Bornéo;  dans  cette  position  les  Moujahs  peuvent  être  appelés  voisins  des  Mo- 
bed  qui  sont  séparés  de  la  Chine  par  une  chaîne  de  montagnes.  Mais  la  station  chinoise  Maïd  paraît 
être  Mobed  du  continent.  C'est  diCBcile  pour  les  distances  qu'indique  Edrisi  ;  l'identité  apparente  y 
est  démentie.  ' 


23  CARTES  ms  L*inDB 

de  Polo,  pour  comprendre  ces  métamorphoses  et  transfigurations  varices 
par  lesquelles  passait  le  continent  oriental  dans  la  cartographie. 

22.  L*ouvrage  de  Polo  n'étant  pas  la  description  de  TAsie  entière, 
contient  le  récit  de  la  perlustralion  faite  par  tonte  FÂsie,  d'un  bout  à 
Fautre,  circulant  à  droite  et  à  gauche,  loin  de  pénétrer  ses  espaces 
démesurés.  Ce  qu'il  dit  des  expéditions  mercantiles  de  sa  famille 
(chap.  1-19,  version  latine  I,  i-10)  forme  une  introduction;  ce  qu'il 
raconte  de  guerres,  ce  sont  des  épisodes  de  sa  diction,  qui  revient  tou- 
jours à  la  description  des  pays.  Il  traverse  d'abord  (voyez  planche  xvn  de 
noire  atlas)  la  petite  Arménie  jusqu'à  lasdi  (Yezd)  et  Formosa,  €ar- 
mosa  (Ormuz,  c.  20-57;  I»  11-24);  ensuite  il  suit  l'itinéraire  de  Cormos, 
à  travers  la  haute  Asie ,  jusqu'au  bout  de  Tenduch  et  aux  portes  de 
Kataï,  biaisant  quelque  peu  et  déviant  par  deux  excursions,  l'une  de 
Khorassan  dans  l'Inde,  l'autre  du  Tangout  vers  les  régions  septentrio- 
nales (c.  57-82;  I,  24,  II,  8).  Après  avoir  examiné  Kambalou ,  capitale 
du  Kataï,  il  trace  son  propre  itinéraire  de  Kambalou  jusqu'à  Tibet;  il 
s'y  arrête  pour  donner  une  description  de  quelques  pays,  situés  au  sud 
et  revient  sur  ses  pasà  Kataî{c.  82-151;  H,  9-51).  Ces  itinéraires  sont 
soutenus  par  des  distances  en  journées  de  chemin  ou  milles.  La  des- 
cription ultérieure  de  la  Chine  indique  ordinairement  de  nombreuses 
distances  de  positions  rapprochées,  mais  la  marche  irrégulière  de  ses 
réminiscences  ne  leur  a  donné  aucun  nœud ,  a  laissé  dé  fâcheuses  inter- 
ruptions et  lacunes,  et  si  l'on  suivait  à  la  lettre  les  directions  indiquées 
par  ponente,  sirocco,  levante  et  autres  vents  de  la  boussole,  on  disper- 
serait les  positions  les  plus  rapprochées  dans  des  distances  démesurées. 
Polo  s'occupe  d'abord  de  la  description  de  Kataï  (c.  1 52-1 57;  1 1, 51-52]; 
ensuite  il  entre  dans  les  provinces  de  Mangi ,  où  il  pénètre  jusqu  à 
Nangui  (Nankin)  (c.  158-145;  II,  55-58) ,  d'où  il  jette  ses  regards  dans 
l'intérieur  de  la  Chine  et  indique  vaguement  quelques  positions  plus 
importantes  (c.  159-151;  II,  59-64).  Lui-même  il  a  passé  trois  années  à 
Mankin  et  il  le  quitte  pour  décrire  les  particularités  de  la  province  de 
Quinsaï  (c.  152-154;  II,  65,  67);  ensuite  de  celle  de  Foukin  (c.  155-157; 
II,  68-71).  Or,  il  n'a  donné  que  la  description  de  Katai  et  de  trois  pro- 
vinces de  Mangi ,  le  reste  de  la  Chine  est  un  espace  presque  vide. 

Dans  la  province  de  Foukin,  arrivé  à  Zaïton,  Polo  s'embarque  pour 
aller  dans  1  Inde,  qui  devait  terminer  sa  narration,  d'après  la  promesse 
qu'il  avait  faite  (c.  49:  156),  lorsque  son  récit  fesait  une  irruption  vers 
le  Gange.  Par  cette  expédition  maritime  il  exécute  une  revue  des  îles,  ne 
s'arrêtant  lui-même  qu'à  Java  (c.  158-175,  III 1-20).  Cependant  la  des- 
cription de  la  grande  Inde  et  de  la  petite  ou  de  Rasmacoran  (du  Mecran) 
(c.  174-189  ;  III,  21-58)  ne  termine  guère  son  récit  :  il  le  prolonge  pour 
s'entretenir  de  l'Abissinie ,  des  îles  africaines,  et  des  rivages  commer- 
çants de  l'Arabie  (c.  190-197);  IH,  59,  49);  enfin  de  la  Tarlarie  (Kap- 
tscbak)  et  du  septentrion  jusqu'à  la  Russie  (c.  210-227;  III,  50-64). 
Tout  le  monde  aujourd'hui  comprend  ainsi  les  relations  de  Polo,  mais 
les  cartographes  anciens  donnaient  d'autres  interprétations,  chacun 
à  sa  guise,  ils  s'efforçaient  d'en  faire  l'Asie  pleine,  ne  laissant  aucun 
espace  par  les  déserts  mêmes  qu'il  fallait  traverser  des  mois  entiers,  ni 
pour  les  régions  que  Polo  n'avait  ni  visitées  ni  mentionnées. 


ET  DE  LA  CHINE.  25 

25.  Je  vais  suivre  Marco  Polo  à  partir  de  Lop  et  je  TabaDdonnerai  dès 
qu'il  entrera  dans  llndouslan,  ou  plutôt  dès  qu'il  mettra  à  voiles, 
parce  que  sa  perlustralion  des  îles  se  trouve  dans  mon  portulan.  Je  me 
bornerai  à  la  nomenclature  et  aux  distances,  sans  vouloir  défendre  les  po- 
sitions arbitrairement  indiquées,  mais  je  ne  manquerai  point  d'affirmer 
mes  allégations  par  des  remarques  positionnaires ,  quand  elles  se  pré- 
senteront pour  guider  la  route  parcourue. 

Marco  Polo  de  Lop  se  rend  par  le  désert  (Gobi)  à  Sacchion 
(Schatscbeou),  provinces  situées  sur  les  confins  occidentales  de  Tangut 
d'où,  après  avoir  fait  une  excursion  vers  Gamul  (Hamil)et  Ghingilala 
(Âimalig,  Iligouidja),  il  retourne  dans  le  Tangut  par  une  autre  de  ses 
provinces  Sictin,  Suctam,  Suctang,  Suctur,  Suceur  (Soutschou).  Ensuite 
il  se  rend  à  Gampition  (Gamexu,  Kamtschik,  Ran,  Kantscbeou),  où  il 
passe  toute  une  année. 

Une  nouvelle  excursion  le  conduit  à  60  journées  vers  le  nord.  Il  tra- 
verse la  province  de  Tangut  appelé  Egina,  Ezina,  (Schitschona  situé 
sur  la  rivière  Edzine,  Etschine),  pour  se  rendre  a  Garacorum.  De 
retour,  il  part  de  Gampition  et  se  dirige  par  Er^imul,  Ergigul(Liang), 
province  de  Tangut,  voisine  de  Fingui,  Tingi,  Gingui,  Singui  (Sining), 
et  par  une  autre  province  du  Tangut,  appelée  Grigaïa,  Egigaïa,  longeant 
la  muraille  qu'il  passe  sous  silence  et  le  fleuve  Hoang,  (touchant  au 
monument  Tschagan,  Egigaïa?)  jusqu'à  la  grande  ville  Galatia  (un  bras 
de  Hoang,  porte  le  nom  de  Galooton  Ralotou).  Enfin  il  quitte  Tangut 
pour  entrer  dans  le  Tenduch  du  prêtre  Jean. 

Tenduch  s'étend  au  nord  de  la  Ghine  et  du  Kataï  et  ses  villes  se  sui- 
vent dans  la  direction  de  l'est  :  la  grande  ville  Tenduch  (Thian-te  de 
la  carte  1125, 1226,  des  tableaux  historiques  de  l'Asie  de  Klaproth); 
ensuite  on  atteint  en  7  journées  Sindatus,  Sindacui;  en  5  journées, 
Giagamor ,  Giangamor ,  Singamor  (on  a  Tschangoun  Khamar  près  de 
Tota,  mais  cette  localité  se  trouve  trop  rapprochée  de  Tenduch);  enfin 
en  5  journées  Giandu  (la  carte  1568  de  Klaproth  des  tableaux  historiques 
de  l'Asie,  place  Ghang-tousurGhang-tououSchampira  au  nord  de  Pékin 
près  du  lac  Dolon;  les  15  journées  de  Tenduch  peuvent  y  atteindre.  J'in- 
dique sur  ma  carte  deux  supputations  sur  les  quatre  positions  de  Ten- 
duch). Giandu  possédait  un  palais  de  plaisance  d'une  récente  construc- 
tion. La  montagne  Ydifu  fait  partie  de  la  chaîne  de  In,  de  In-schan. 

21.  A  Taîdu,  Gambalu  (Pékin),  Marco  Polo  reçoit  une  mission  au 
Tibet  et  nous  allons  suivre  son  itinéraire  de  4  mois.  Partant  directe- 
ment vers  le  couchant,  à  10  milles,  il  passe  le  fleuve  Pulizangin,  (le 
pont  Loukeou  Khiao  sur  Yang  ou  Sangkan),  ensuite,  à  50  milles, 
la  ville  Giogui,  Gin,  Gingui,  Quingui  (....);  puis,  à  10  journées, 
Taîanfu  (Taïyuen-fou;  puisa  7  journées  Païnfu,  Pianfu  (Pinyang);  à 
2  journées  un  château  Gaïcui  (Kie,  Ky-tscheou);  d'où  à  20  milles  passe 
le  fleuve  Garamoran  (nom  mongoux  de  Hoang,  Hwang,  du  fleuve  jaune). 

A  partir  de  ce  point  l'itinéraire  devient  embarrassé,  presque  sans  guide  : 
à  5  journées  se  présente  Gacianfu  (Fou  sur  Lo,.  au  sud  de  Kantsiouen), 
à  8  journées  se  trouve  Guingui,  Gingui,  Guenghian,  Quengian  (Kinyang), 
un  fou  et  capitale  de  la  province  du  même  nom ,  dont  les  frontières  à 
5  journées  touchent  la  province  Guucur  (la  rivière  Tao,  porte  le  nom 


24  CARtËS  DE  L^IMDE 

Coco  oussou  et  Courcorson,  d'après  la  carie  de  James  Wyld).  Etant  entré 
dans  cette  province,  Poio  traverse  20  journées  et  arrive  à  une  contrée 
de  la  province  achalech  Mangi  ou  des  confins  du  Mangi.  Cette  contrée, 
cet  achaiecli  n'a  que  deux  journées  d'étendue.  Elle  s*étend  du  versant 
orientai  de  Lonibar  vers  le  sud,  rasant  cette  langue  du  Sifan  ou  Tibet 
qui  se  prolonge  dans  Tintérieur  de  la  Chine.  Delà  à  20  journées,  Polo  se 
trouve  dans  une  grande  ville  de  la  province  Âuchota,  qui  est  aussi  aux 
extrémités  occidentales  du  Mangi.  La  grande  ville  porte  le  nom  de 
Sardanfu,Sindafu,Sindinfu,  Sindifu  (Tchang-tou-fou).  Un  fleuve  la 
traverse;  éloigné  de  la  mer  où  il  se  perd  de  80  à  100  milles,  appelé 
Quingia-fu,  Quian,  Kyam  (Kiang).  Par  Tschaugtou  Polo  passe  la  rivière 
Mahou,qui  verse  ses  eaux  dans  Kiang;  croyant  quMl  passe  le  grand  fleuve 
Kiang  même;  de  ce  point  en  5  journ.  (par  Batang)  il  entre  dans  le  Tibet. 

2o.  Des  nombreuses  positions  de  Fimmense  Tibet,  des  villes,  lacs, 
châteaux,  fleuves,  montagnes,  Polo  ne  donne  aucune  particularité.  Il  a 
traversé  20  journées  par  un  pays  ruiné,  avant  d'arriver  au  centre  pré- 
servé de  la  destruction.  11  quitte  le  Tibet  sans  dire  de  quel  côté  et  sans 
faire  connaître  de  combien  de  journées  il  s'est  éloigné  de  ses  frontières; 
il  parte  de  Ciandu,  Caindu ,  Gaindu ,  province  qui  est  vers  ponent.  Ce 
ponent  n'est  pas  au  couchant  do  Tibet,  mais  de  la  Chine  et  du  groupe 
des  provinces  qu'il  entreprend  de  passer  en  revue ,  qu'il  va  en  partie 
parcourir  lui-même  :  Qui  s'aviserait  de  suivre  ce  ponent  à  partir  du 
bout  occidental  du  Tibet,  arriverait  facilement  jusqu'au  centre  de 
l'Europe,  sous  les  murs  de  Paris  ou  de  Rome.  Aussi  cherchons  et  trou- 
vons-nous le  ponent  de  Caindu,  au  sud  d'Assam,en  fixant  nos  regards  sur 
la  plaine  spacieuse  de  Kunduyun^  (voyez  la  carte  de  l'Inde  au-delà  du 
Gange  de  Juste  Perthes) ,  plaine  limitrophe  de  la  Chine,  située  à  l'occi- 
dent. Elle  semble  conserver  le  nom  de  Caindu,  (Bisa  en  était  probable- 
ment la  capitale);  et  c'est  en  descendant  de  cette  plaine  que  nous  re- 
commençons à  compter  les  journées  de  Polo. 

A  10  journées,  sur  les  limites  de  Caïndu,  Polo  passe  un  fleuve  qui 
court  vers  l'océan  ;  son  nom  est  Brins,  Brunis  ou  Ligays  ^Iravaddi,  près 
de  Bhamo;  Kaungtoon,  Kountoung  et  Kountoun,  dernières  limites  de 
Caindu).  De  l'autre  côté  de  ce  fleuve,  Polo  trouve  la  province  Caracham, 
Caragian,  Caraian,  Karman  (Karaîayn  limitrophe  de  la  Chine).  Cette 
province  contient  sept  régions;  sa  capitale  est  lacin  (Ava) ,  il  s'y  trouve 
un  lac  de  cent  milles  de  longueur  (lac  Sandagando  au  nord  d'Ava  :  en 
vain  en  chercherait-on  un  autre).  En  avançant  10  journées  vers  l'occi- 
dent, on  rencontre  la  province  et  sa  capitale  Karacham  (Arakan)  et,  à 
5  journées  de  ce  point,  toujours  vers  l'occident,  la  province  Ardandan, 
Cardanda,  Zardandan  (Djatagom).  Il  parait  que  cette  dernière  est  assez 
voisine  de  Bengala ,  parce  que  Polo  parle  immédiatement  d'une  expé- 
dition que  les  rois  coalisés  de  Bengala  et  de  Mien  (Pegou)  firent  contre 
Yociam,  ville  de  Caraîan. 

En  descendant  de  Caraîan  vers  le  midi ,  on  entre  dans  la  province 
Anniz  (Siam)?  située  par  15  journées  sur  les  confins  de  l'Inde;  et  en 
parlant  de  cette  province,  à  15  journées  on  trouve  Mien  (Pegou).  Il  y  a 
là  au  bout  de  l'Inde  encore  une  province  très-méridionale  que  le  grand 
kau  mongoux  n'a  pas  conquise. 


ET  DB  LA  CHINE.  25 

A  Test  est  une  province  soumise,  appelée  Caigu ,  Ghangi ,  Cangigu  , 
Gagigu,  Gangiga,  Emugiuga,  Talugigia,  Galugigla,  Gaiigula  (telles  sont 
les  variantes,  choisissez!)  (Junzalaen  près  du  fleuve  Hululhaluen,  au  nord 
de  Martaban),  elle  fait  peu  d'aflaires  à  cause  de  son  éloigneraent  de  la 
mer  (les  provinces  précédentes  devaient  donc  être  plus  rapprochées  à 
la  mer). 

Encore  au  levant  est  la  province  Amu ,  Camu  (Kema-lataïn)  et  on 
compte  de  Camu,  15  journées  à  Gaiigula,  âO  à  Bengala,  et  8  à  Toloman 
(Tali).  De  cette  dernière  province  qui  est  orientale  (relativement  à  Tlnde, 
à  Karaîan,  etc.] ,  on  entre  dans  une  autre  orientale,  appelée  Gingui, 
Guingui,  Cagui,  Cugui,  par  laquelle,  longeant  12  journées  un  fleuve 
^Kinscha  Kiang),  on  arrive  à  Sinugul,  Fungul,  Sinulglu,  Funigul 
(Soutscbeou) ,  ville  considérable,  d*où,  par  le  même  fleuve  (Mahou)  on 
revient  à  Sindifu  (Tschiug-tou),  ville  jusqu*à  laquelle  Polo,  en  partant 
de  Cambula  et  Gingui,  avait  parcouru  70  journées  de  route  (les  jour- 
nées spécifiées  de  Guingui  jusqu^à  Sindifu ,  montent  en  somme  jusqu'à 
73  journées). 

26.  Ce  long  voyage  de  4  mois,  (autant  pour  se  rendre  au  lieu  de  la 
destination  et  plus  pour  retourner,)  étant  terminé,  la  relation  de  Polo 
fait  un  recensement  des  villes  du  Kata!,  dont  la  plus  grande  partie 
paraît  avoir  changé  de  nom.  Elle  indique  à  4  journées  au  sud  de  Guin- 
gui, qui  est  éloigné  de  40  milles  de  Cambalu,  la  position  d'une  ville 
considérable  Tacanfam,  Gacansu  (Hokien);  ensuite  les  deux  villes  Gin- 
glu,  GiangIu,Giunglu  (Kolan)  et  Siangli,  Ginamgli,  Giangli  (Yulin?)  éloi- 
gnées de  5  journées  Tune  de  Tautre;  leur  terrain  est  traversé  par  un  fleuve 
(Garamoran?).  Vient  ensuite  Singui,  Singuimatu  (Lintschin,  Lintein) 
dont  les  habitants  divisèrent  la  rivière  de  manière  qu'un  bras  se  dirige 
vers  le  levant  (canal  vers  Mangi) ,  l'autre ,  occiental,  vers  Kataï  et  vers 
Gambalu  (rivièreYuntiang)(i8).  A  3  journées  au  nord  est  située  Tadinfu, 
Godifu ,  Sindifu ,  Gondifu  (Tsching-fing?),  cité  puissante  qui  est  chef  de 
15  villes.  De  Singui  8  journées  vers  le  sud  à  Lingui  (Lou),  ensuite 
3  journées  à  Pingui  (Pi)  qui  est  situé  à  l'entrée  de  Mangi,  Manzi. 

En  entrant  dans  Mangi,  on  passe  le  fleuve  Garamoran,  lequel  a  une 
cité  deçà  et  une  delà  :  ce  est  en  contre  le  una  à  l'autre.  La  una  a  nom 
Goigangui  (Hoïaïngan)  et  l'autre  a  nom  Quanzu,  Gagui,  Gaigni  (Tsinho 
bien),  que  le  une  estgrant  cité  et  la  autre  est  pitete  et  desormes  quant  l'on 
passe  ceste  flum ,  adonc  entre  en  la  granl  province  de  Mangi,  La  grande 
province  est  composée  de  9  provinces.  Dans  cette  première,  une  à  une 
journée  de  Goigang,  par  Panchin  (Pao  in  hieou),  par  Gain  (Kaoîeou), 
par  Tingui,  Gongui  (Taï)  distante  de  3  journées  de  l'océan;  enfin,  par 
Langui ,  Yangui ,  (Yanstscheou)  qui  a  27  villes  sous  sa  dépendance,  on 
arrive  à  la  capitale  de  Ta  province  Manghin,  Naînghin,  Nanghin  (Nan- 
king).  Polo  demeura  3  années  à  Yangui  suivant  le  texte  vulgaire ,  ou  à 
Nanghi,  comme  le  dit  la  version  latine.  Les  textes  vulgaire  et  latin 
appellent  cette  première  province  du  Mangi  indifiëremment  Nanghi  et 
Manghi. 

(48|  Singni-matu  se  "retrouve  dans  la  relation  d'Oderich  :  Sunzotnaco ,  Sumacoto ,  Suzupato  et 
dans  le  resumé^de  Glaz ,  Sucumat  ;  dans  Manderille  on  a  :  Sugarmago,  Sugiomago. 


26  CARTES   DB  l'iMDB 

27.  Le  narraleur  profite  de  cette  pause  de  ses  pèlerinages,  et  entre- 
prend de  fournir  quelques  indications  sur  Fintérieur  du  spacieux 
Mangi  (c.  146-154).  Cette  partie  de  son  ouvrage  est  la  plus  obscure.  Le 
texte  vulgaire  et  la  version  latine  sont  en  désharmonie;  les  variantes  y 
sont  fâcheuses.  Tout  ce  qu'on  peut  discerner  avec  certitude ,  c'est  que 
sa  narration  revient  encore  une  fois  à  Guenghian,  d'où  à  5  ou  4  journées 
se  trouve  Gingliianfu,  Singianfu  (Singan),  où  les  nestoriens  avaient 
plusieurs  églises,  (c'est  leur  Khomdan). 

Celle  position  certaine  n'a  aucun  rapport  avec  les  autres,  si  ce  n'est  par 
la  remarque  que,  pour  se  rendre  à  Taygui,  Qucuî,  Caîgui  (Kieu,  Kiang), 
il  faut  passer  le  fleuve.  Caïgu  est  une  piteleciteet  a  ceste  cite  se  recuite 
grandisme  quantité  des  blés  et  se  porte  jusqua  Cambalu  a  la  cort  deou 
grant  kan  por  eive,  ne  entendes  por  mer,  mes  per  flus  et  por  lac.  Il  est 
donc  évident  que  cette  petite  ville  se  trouve  sur  le  rivage  méridional  du 
Quian,  et  il  cstprésumable  qu'elle  précède  le  lac  (Poyang) ,  situé  sur  la 
frontière  du  grenier  de  l'empire  (de  la  grande  province  de  Houkouang|. 

De  mémeSingui  est  placé  sur  le  Quian,  à  15  milles  d'Ângui  (cap.  147), 
(la  version  latine  supprime  ce  nom  et  laisse  croire  que  les  15  milles  se 
rapportent  à  Saïanfu).  Cette  ville  Singui,  ne  est  mie  trop  grant  mes  ele 
est  de  grant  naïves  et  de  grant  mercandies,  de  milliers  de  navires 
stationnent  sur  ses  rivages.  Le  fleuve  est  large,  passe  par  un  lac 
(Poyang),  ayant  plus  de  100  journées  de  cours;  elle  traverse  16  pro- 
vinces et  âOO  villes,  ses  eaux  sont  conduites  vers  la  capitale,  ainsi  qu'en 
suivant  ses  eaux  on  peut  se  rendre  à  Singui  (comme  de  Caîgui)  jusqu'à 
Cambalu,  à  la  cort  du  grant  kan.  Il  paraît  aussi  qu'avec  d'autres  posi- 
tions, la  narration  de  Polo  rôde  encore  près  du  Quian. 

Voici  une  autre  cité  (province)  Singui,  Tingui,  Sugui,  cité  immense 
de  40  milles  de  circuit,  dont  la  population  pourrait  conquérir  et  cou- 
vrir le  monde,  qui  a  1,600  ou  6,000  ponts  dominant  les  galées,  et  dont 
les  montagnes  produisent  la  rhubarbe  et  le  gingembre.  C'est  donc 
encore  une  cité  riveraine ,  le  gingembre  la  porterait  vers  le  sud ,  la 
rhubarbe  vers  le  nord.  Et  sachiez  qe  le  nom  de  ceste  cité  qui  est  apellé 
Sugui,  vaut  a  dir  en  franzois,  la  terre  et  un  autre  cité  que  est  près  de 
ci,  est  apelles  le  ciel,  et  cesti  non  ont  elles  par  lo  grant  nobililé.  Polo 
promit  de  s'entretenir  de  la  cité  du  ciel  et  s'il  ne  l'a  pas  oublié,  il  faut 
la  distinguer  dansSiangan,  Ciangan  (cap.  151,  p.  167)  cité  mont  grant 
etrige,  passée  sous  silence  dans  la  version  latine  (II,  64).  —  Honan, 
considérée  comme  centre  de  la  terre,  pourrait  prétendre  à  cette  insigne 
épithète  de  terre ,  mais  dans  toute  cette  province  rien  ne  répond  à  la 
grandeur  et  à  la  position  de  Singui,  Sugui.  Elles  ne  passent  qu'à  l'une 
des  200  villes  mouillées  par  le  Kiang  (Voutscheou  ?)  ;  et  la  ville  du  ciel , 
Ciangan  probablement,  n'est  pas  trop  éloignée  (Tengan?  une  montagne 
Thian-mu  et  un  hian,  Thianmen,  au  nord  et  au  sud  de  Tengan,  pa- 
raissent porter  le  nom  de  célestes).  A  une  journée  de  la  cité  terresti'e 
est  Yngui,  Yugui  (Hoang  tscheou),  et  il  y  a ,  en  outre,  Unghi,  Unghim, 
Yguin  (Nganking?). 

Enfin  on  trouve  encore  au  centre  de  la  Chine,  Cynfani,  Cianfu, 
Sianfu,  Saïanfu,  Sagianfa  (Siang  yang  fou?)  chef-lieu  de  12  villes  qui, 
repoussant  trois  années  les  attaques  des  Mongoux,  fut  à  la  lin  prise  à 
l'aide  de  la  machine  construite  par  les  Polo. 


ET  DE  LA  CHINE.  27 

28.  Dans  la  provioce  de  Quinsay,  se  trouvent  la  grande  capitale 
Quinsaï  (Hang-tscheou)  ;  le  port  Garapu,  Ganfu  (Kanpou).  A  i  journée 
de  Quinsa!,  Tarapini^ui,  Tapinzu  (  .  .  .  );  à  5  journées  Ungui 
(Ning  po?);  à  5  journées  Chengui,  Gengui,  Gbingui  (Kinhoa) ,  à  4  jour- 
nées, Ciansian,  Ciancian,  Ciangiara  (Koangsin,  Kouang  sin)  traversé  par 
une  rivière  située  sus  un  mont  (rivière  et  canal  Kouang,  au  nord  granit 
bills,  à  Test  Poulsching  mounts  et  pass);  à  5  journées  encore,  Cingui, 
Cagui  (Tschou  tscheou). 

Enfin,  à  partir  de  Cugui  royaume  de  Quinsay,  s*étend  de  6  à  7  jour- 
nées le  royaume  Fuchin  (Foukian)  ;  à  moitié  de  sa  longueur  se  trouve 
une  grande  ville  Qiielifu,Quenlifu  (Ting  tscheou  fou  près  des  montagnes 
Taïouling);  à  15  millesou  3  journées  est  une  fabrique  de  sucre  à  Unquen 
(Youn  tschoun  sur  Nanganan);  à  15  milles  de  ce  lieu  est  Fiigui  (Foul- 
scheou),  capitale  du  royaume  Concha,  Chonka  (Kiang-tsche  de  la  carte 
1290  de  Klaproth,  tableaux  histor.  de  TAsie),  située  sur  une  large 
rivière  (Min).  Une  fabrique  de  porcelaine  existe  à  Timigui  (Tong  mou 
koeu,  dans  les  montagnes  Sia  hialing,  près  de  Fun  shuey  kuon  pass); 
à  5  journées  de  Fugui  se  trouve  Féchelle  de  Zaîton  (Thsiuan  tscheou , 
Tseou  toung,  or  Chinchew  et  Harb). 

Qui  voudrait  examiner  ce  quanquan  chinois  serait  certainement  fati- 
gué. J*avoue  que  ma  fatigue  est  à  son  comble.  Peut-être  plusieurs 
positions  qui  m'ont  donné  tant  de  peines  infructueuses,  ont  été  depuis 
longtemps  déterminées  par  d'autres.  Je  Tignore,  et  j'étais  forcé  d'ana- 
lyser la  narration  de  Polo  pour  pouvoir  observer  les  compositions  pos- 
térieures. 

La  revue  de  la  situation  des  îles  se  trouve  dans  le  portulan;  les 
positions  de  l'Inde  ne  demandent  plus  d'examen  ;  le  reste  explique  la 
petite  carte  de  notre  atlas  et  plusieurs  passages  du  texte  ou  des  notes  de 
l'ouvrage  (lo). 

29.  Marco  Polo  n'était  pas  le  seul  qui  voyageait  et  fesait  ses  affaires 
au  fond  de  l'Asie.  D'autres,  en  grand  nombre,  suivaient  ses  chemins  en 
toute  direction,  et  plusieurs  de  ces  voyageurs ,  rendaient  compte  de  ce 
qu'ils  avaient  observés.  Oderich  de  Portenau  (mort  1531),  retrouvait 
dans  son  apostolat  les  positions  indiquées  par  Polo.  Sa  relation  était 
copiée  et  résumée  en  1340  par  Henri  Glaz.  En  même  temps,  l'aventu- 
reux Jean  Mandeville,  depuis  1327  voyageur,  composait  sa  narration  et 
la  terminait  en  1356.  Us  firent  route  par  l'Inde  jusqu'aux  Mangi  et  Ka- 
taï.  François  Balducci  Pegoletti,  en  1335,  prit  un  autre  chemin  vers  la 
Chine;  le  franciscain  Paschalis,  en  1338,  le  suivit  et  le  journal  de  leur 
route  fut  connu.  Ils  passaient  à  travers  l'immense  continent,  prenant 
une  direction  plus  au  nord  par  Almalik  et  Ramoul. 

La  relation  de  ces  derniers  touchait  des  positions  ignorées  de  Polo  ; 
celle  des  autres  suppléait  ses  connaissances  par  quelques  nouvelles  ob- 
servations, augmentait  la  variété  de  la  prononciation  et  de  l'orthographe 
des  noms ,  et  engendrait  l'incertitude  par  de  maladroites  répétitions. 
Mandeville,  ne  s'éloignanten  rien  de  la  relation  d' Oderich,  entreprit  de 

(19)  Voyez  plusieurs  notes  des  chap.  143-147  cartes  des  géographes  du  moyen  âge  ;  examen  géogr. 
de  Benj.  de  Tudele ,  etc. 


28  CARTES  DE  l'iMDE 

la  décorer  de  tout<s  sortes  de  contes  et  fables  populaires  pour  en  faire 
une  lecture  divertissante,  et  le  monde  de  cette  époque  goûtait  ces  mer- 
veilles fantastiques  et  peu  croyables. 

La  possession  du  prêtre  Jean,  Tendoucb,  se  changea,  dans  la  relation 
de  Mandeville  en  îles  et  provinces  de  Bacchus.  Il  y  nomme  le  fleuve 
Thebe  (de  sa  naissance),  les  villes  Nyse  et  Suse  (de  ses  tournées  par  le 
monde);  une  province  Milstorac,  du  dissipateur  de  la  mollesse  (à  ntXXoç 
mollis  et  vropiuç  strator);  et  les  îles  Taprobana ,  Bragman  et  Pentaxoire, 
de  cinq  chœurs  de  son  culte  (Tcsvraxopoç  ou  ««vraxw/soj  de  cinq  contrées. 

Les  compositeurs  des  cartes  étaient  souvent  embarrassés  pour  discer- 
ner ces  bijoux  populaires  de  ce  qui  était  essentiel  ;  il  leur  était  difficile 
de  renoncer  au  paradis,  aux  mages  visitant  le  Christ,  aux  pygmées,  à 
rhistoire  d'Âlexandre-le-Grand ,  à  Tante-Christ.  La  carte  catalane 
de  1377  ofire  un  beau  spectacle  sous  ce  rapport  :  mais  en  même  temps 
elle  offre,  comme  nous  Tavons  observé,  quantité  de  renseignements 
inconnus  aux  précédents  voyageurs.  Tana  disparut  dans  les  posses- 
sions du  roi  de  Delly.  Il  semble  que  le  nombre  de  13  puissants  royaumes 
s*était  réduit  à  un  nombre  très-inférieur.  Les  enfants  charnels  d'une 
mère  qui  calmait  leurs  dissentions,  ne  vivaient  plus  et  leur  postérité 
ne  rappelait  plus  ni  Yar,  ni  Coîl  :  un  roi  de  Colunbo  paraît  posséder 
Elly  et  tout  le  sud  de  la  péninsule.  Le  roi  Etienne  (de  Moabar), 
garde  le  Koromandel  et  le  tombeau  de  S.  Thomas.  La  carte  catalane  pos- 
sède des  renseignements  au  delà  de  Bengala ,  jusqu'au  finis  Indiae  et 
Katayo,  jusqu'au  Zayion,  où  la  narration  de  Polo  laissait  une  lacune 
vide  pour  tout  le  rivage  (20). 

30.  Nous  avons  remarqué  plus  d'une  fois,  dans  la  composition  du  ca- 
talan, un  désordre  et  des  doublures  de  positions.  Au  premier  cou p-d'œil 
son  Catayo  (Chine),  décèle  le  desordre.  La  question  relative  à  la  répé- 
tition des  noms  qui  se  ressemblent  tant  l'un  à  l'autre,  exigeait  donc 
la  plus  sérieuse  attention  dans  le  colla tionnement  avec  la  nomenclature 
de  Polo.  Le  résultat  que  je  réussis  à  obtenir  pour  le  portulan  et  pour  la 
carte  explicative  a  dispersé  pour  moi  toutes  les  apparences  de  répétitions 
et  débrouilla  quelques  nouveaux  renseignements. 

Pour  Tenduch,  les  quatre  positions  visitées  par  Polo,  sont  au  grand 
complet  et  il  semble  que  Zazaber  (Dourban?)  est  encore  une  cinquième 
position  de  Tenduch.  Pour  Tangut  elles  sont  incomplètes  :  mais  Camuell, 
Cigicalaf  (Gingitala)  et  Carachora  ne  sont  pas  oubliés,  bien  que  ce  der- 
nier soit  inscrit  entre  Emelecb,  Lop  et  Elbeit  (Eleut),  dans  un  péle-méle 
de  positions  placées  en  désordre. 

Les  connaissances  acquises  pour  Marco  Polo  furent  mongou-chinoises. 
C'est  par  leur  organe  qu'il  les  avait  acquise  et  communiquées  à  l'Eu- 
rope. Les  voyageurs  suivants  purent  facilement  les  retrouver  et  véri- 
fier un  certain  temps,  jusqu'à  la  dislocation  de  l'empire  du  grand  kan. 
Cet  empire  une  fois  en  ruine,  les  routes  centrales  cessèrent  d'être  pra- 
ticables, toute  l'attention  des  commerçants  se  porta  vers  l'Inde  et  ses 
épiceries.  On  cessa  de  pénétrer  jusqu'en  Chine.  Le  nouveau  langage 
hindou,  sinslallant  dans  la  géographie,  allait  se  rencontrer  avec  les 

(20)  Voyez  :  cartes  des  géogr.  du  moyen  âge,  chap.  145, 144, 145  ;  le  portulan  général  M,  51,  5f . 


ET  DE  LA  CHINE.  29 

connaissances  du  Vénitien ,  dont  le  langage  devenait  inintelligible.  Les 
renseignements  que  le  catalan  étala  sur  sa  carte,  offrent  ce  passage  des 
investigations  de  Forgane  mongou-chinois  à  celui  de  l'hindou. 

31.  Le  camaldolèse  Mauro  avait  des  renseignements  plus  nombreux 
encore  que  le  catalan,  plus  récents  et  plus  hindoux.  Il  était  érudit.  En 
rejettant  les  monstrueuses  proportions  de  Ptolémée,  il  tacheta  sa  carte 
moderne  des  noms  de  Citia  et  Sitia  de  mont  Imaus,  des  provinces  Sace, 
Serica ,  monts  Hyperboraei  et  Riphaei  :  mais  il  étudia  la  narration  de 
Polo.  Examinant  celte  suite  de  noms  qu*il  a  extraits  de  cette  narration, 
il  faut  avouer  qu'il  la  comprit  à  peu  d'exception  près,  quand  il  règle  les 
régions  maritimes  de  la  Chine' et  de  Tlnde  jusqu'à  Mahabar,  Tana  et 
Guzirat.  Seulement  les  provinces  intermédiaires  entre  Chine  et  Bengala, 
sont  singulièrement  déplacées.  Ghindu  (Caïndu),  Caraian ,  Charazan, 
(Carachan),  sont  portées  vers  levante;  Mihen,  (Mien),  vers  tramontana, 
et  Âmui  vers  le  sud.  Gelbacha  (Galigula)  reste  au  milieu,  mais  Siachene 
(lacin)  est  porté  vers  ponente. 

Dans  rintérieur  central  de  FÂsie,  règne  chez  lui  nn  désordre.  On 
marche  cependant  sur  les  traces  de  Polo,  par  Cremaïn  (  Kerman  et 
lago  Zera),  Thym'chian  (Tunacaïu,  Kouhestan),  Hera,  Tharse,  Balch, 
Jerchan,  et  vers  ponente?  Gothan  (Kothan)  au  nord  de  Samarcand,  à 
l'ouest  d'Otrar,  Otrar  au  nord  d'Insicol  (Issikol);  enfin,  on  arrive  à  Lop, 
Tangut,  Tenduch. 

De  nouveaux  renseignements,  et  les  plus  remarquables,  s'étalent  dans 
l'Inde.  Au  nord  de  Guzirat  par  le  désert  au  delà  de  l'indus,  on  passe 
Soltanfur  (Sultanpour  au  delà  de  Lahore),  ensuite  Thate  (Toda)  et  Deli. 
Autre  part,  au  delà  de  Chalecut,  Melibar  et  Mahabar,  on  voit  plusieurs 
places  de  Bisnagar  et  Talenga.  Bisenegal  (Bisnagar  ou  Narsiuga),  Tur- 
mili  (Trinomallij,  Peligondi  (Bellunconda),  Ordirgiri  (Gourlangerri). — 
Au  delà  de  Bengala,  paraissent  Pegu,  Ava,  Mognan  (Ayangama  au  nord 
de  Siam)  et  les  îles  Divi-amoal,  Sumatra. 

Pour  réunir  ces  nouveaux  renseignements  avec  les  précédents,  et 
surtout  avec  les  données  de  Polo,  il  fallait  bien  comprendre  les  situa- 
tions des  positions  qui  se  présentaient  maintes  fois  sous  différentes  dé- 
nominations, étant  réellement  les  mêmes.  Les  compositeurs  des  cartes, 
souvent  ne  savaient  pas  discerner  l'identité  entre  les  dénominations  trop 
variées.  Aussi  Marco  plaçant  sur  sa  carte  Pegu,  Ava,  Sumatra,  et  de 
nouveau  à  part,  Mien,  Caraian,  lava  maior,  doublait  les  mêmes  posi- 
tions. (Baluch  et  Balch  probablement  sont  le  même  Baikh).  Rapprochant 
etmetlant  en  contact  les  situations  très-éloignées,  il  inventaitdes  com- 
binaisons fabuleuses.  Il  détourna  le  fleuve  Amu  (Djihon),  vers  l'est  et, 
l'indentifiant  avec  la  rivière  Polisanchin,  il  en  fit  un  fleuve  qui  mouille 
les  murs  de  la  cité  maritime  Carabalech.  Par  Bengala ,  c'est  l'indus  qui 
verse  ses  eaux  dans  l'océan.  Le  fleuve  de  nouvelle  connaissance,  le 
Mandus  peguan,  s'interpose  entre  cet  Indus  et  le  Gange,  et  ce  der- 
nier s'échappe  dans  un  golfe  au  delà  de  Zampa.  (Prévenance  encou- 
rageant l'explication  prochaine  de  Ptolémée  (si). 

(t1)  La  disposition  de  ces  grands  fleures  dans  la  mappemonde  de  Mauro,  explione  la  position  de 
Calicut  à  l'ouest  de  l'indus  dans  la  carte  de  De  la  Cosa,  et  rin?ention  de  la  péninsule  Inde-Car- 
mania  par  Bemardo  SylTano. 


50  CARTES  DB   l'iNDE 

52.  Par  les  deux  exemples  du  catalan  et  de  Mauro,  on  voit  que  la 
narration  de  Marco  Polo  était  sujette  à  différentes  interprétations  qui  ser- 
vaient de  modèle  aux  cartographes  de  la  renaissance.  Mais  ees  carto- 
graphes étaient  plus  érudits  que  leurs  prédécesseurs,  ils  avaient  toute 
confiance  dans  leur  savoir,  parce  qu'ils  avaient  exhumé  Fantique  science 
des  sages  de  la  Grèce  ;  blâmant  Tignorance  de  leurs  prédécesseurs,  ils 
puisaient  k  cette  source  pour  produire  des  interprétations  de  leur  pro- 
pre création. 

Ils  comprirent  que  les  investigations  de  Polo  dépassaient  les  limites 
de  la  connaissance  antique,  fermée  par  le  méridien  de  180®  de  longi- 
tude du  calcul  de  Plolémée.  Par  conséquent,  Gataî  et  Mangî  sortirent 
de  leur  orbite  pour  se  placer  dans  un  autre  hémisphère  du  globe. 
Zipangu,  avança  par  240  à  250  degrés  de  longitude.  C'était  pardonnable 
quand  on  réfléchit  sur  les  matériaux  qu'ils  avaient  à  leur  disposition. 

Deux  inconnus  s'étaient  présentés  à  leur  examen.  L'un  ostensible  à 
la  vue,  à  la  face  hideuse,  plein  d'une  science  caduque,  d'une  sagesse 
éleiute;  l'autre  sans  physionomie  visible,  fruit  de  l'expérience,  se  fèsait 
entendre  dans  un  langage  presque  inintelligible.  Des  renseignements 
que  donnaient  ces  deux  inconnus  ils  essayèrent  de  tracer  les  vastes 
espaces  qu'il  fallait  de  nouveau  explorer.  Le  renvoi  des  séjours  de  Polo 
sur  un  autre  hémisphère  est  donc  une  conséquence  très  justifiable  à 
laquelle  la  narration  de  Polo  n'offrit  aucune  contradiction,  et  le  tableau 
de  Ptolémée  en  frayait  le  développement  démesuré. 

Mais  il  est  difficile  d'expliquer  comment  ces  érudits  de  la  renaissance 
réussirent  à  interpréter  la  narration  de  Polo,  jusqu'à  procréer  deux 
Moabar,  deux  Seylon,  deux  sépulcres  de  S.  Thomas,  deux  Indes,  dont 
une  est  transférée  au-delà  de  Sinia  et  Kattigara  du  divin  Plolémée.  La 
narration  de  Polo,  ayant  fait  irruption  dans  l'Inde  où  elle  mentionne 
Dilavar  (Delli)  et  Quesimur  (Kaschmir),  prévient  de  son  plan  :  je  ne  y 
voit  entrer  or  a  cestui  point,  dit-elle  (en  Yndie),  por  ce  que  au  retorner 
de  noslre  voie,  vos  conteron,  toutes  les  couses  d'Yndie  por  orde 
(chap.  49).  Or,  discedamus  bine  (ex  India),  quia  in  reditu  nostrse  via», 
computabimus  omnia  facta  Indîœ  per  ordinem  (1, 56|.  Or,  revenant  de  sa 
voie  et  de  son  séjour  en  Chine,  Polo,  conformément  a  sa  promesse,  avant 
de  rentrer  à  Ormuz  et  en  Perse ,  compte  par  ordre  à  partir  de  Moabar 
et  de  S.  Thomas,  treize  grandismes  roi  aumes  de  l'Yndie  gregnor 
(chap.  188, 192  ;  II,  55, 45),  tous  situés  entre  Bengala  et  la  mer  persane, 
et  se  touchant  l'un  à  l'autre.  Leur  situation  était  parfaitement  connue 
par  de  nombreux  voyageurs,  comme  on  le  voit  par  la  carte  de  Mauro 
de  1460.  Mais  les  érudits  de  la  renaissance  jugeant  autrement,  déchirè- 
rent la  continuité  de  l'Inde  par  des  espaces  figurées  sur  Favant-dernière 
carte  de  Ptolémée.  Telle  Inde  de  leur  invention  parut  dans  les  mappe- 
monde du  globe  de  Bebaïm  1492;  de  l'hydrographie  portugaise  1504;  dans 
les  cartes  de  Ruysch  1507,  de  Schener  1520,  de  Bordone  1520,  de 
Thomas  Aucuparius  1521,  et  de  quantités  d'autres. 

55.  Erreur  utile,  parce  qu'elle  donnait  l'impulsion  aux  découvertes 
du  côté  de  l'ouest  et  les  animait  en  fascinant  l'attention  antérieurement 
mieux  avisée.  Mais  ce  stimulant  ne  pouvait  pas  durer  ni  abuser  long- 
temps la  conscience  humaine.  Les  découvertes  de  Test  lui  apportaient 


ET   DE  LA   CniNE.  31 

chaque  année  de  nouveaux  démentis,  qui  lui  préparèrent  le  sort  des 
îles  nébuleuses.  Les  Portugais  passèrent  la  revue  de  tous  les  rivages  de 
rinde  et  tracèrent  bientôt  leur  forme  avec  exactitude.  Ils  arrivèrent 
en  1518  à  Kanton  en  Chine.  La  reconnaissance  de  ce  pays  n'allait  pas 
bien  vite,  les  exploits  d'un  Antoin  Faria  y  Suza  1540,  ne  firent  que  la 
ralentir  :  mais  la  création  de  la  renaissance  n'avait  plus  de  fond  dans  la 
géographie  et  s'abîma  dans  les  profondeurs  de  l'océan  et  dans  les  ténè- 
bres de  l'ignorance  présomptueuse. 

Les  Portugais,  avec  leur  idiome  et  l'accent  de  leur  prononciation , 
indiquaient  les  villes  chinoises  qu'ils  visitaient  successivement,  mais  ils 
y  cherchaient  en  vain  le  baragouinage  du  vénitien  :  ils  ne  retrouvaient, 
ni  Zaîton ,  ni  Quinsaï.  Us  ne  purent  reconnaître  Quinsaï  sur  le  lieu 
même,  cette  belle  espérance  pleine  de  prestige  pour  Colomb  qui  échoua 
de  la  retrouver  à  Temistetan  au  Mexique.  Les  investigateurs  portugais 
expliquèrent  leur  insuccès,  en  supposant  que  les  villes  indiquées  par 
Polo  n'existaient  plus.  La  civitas  antiqua  (Cambalou  innommé)  de  Man- 
deville  fut  portée  sur  Quinsaï,  laquelle  en  qualité  d'antiqua,  a  dû  être 
ou  submergée  ou  détruite  par  quelque  autre  accident.  Muiti  urbem 
Quinsay  bello  diruptam,  vel  alia  gravi  calamitate  destructam  esse 

f autant,  disent  les  cartes  de  Hond],  repète  le  dantzikois  Philippe  Cluver 
V,  6)  et  autres. 

54.  Les  découvertes  portugaises  ont  frappé  de  mort  les  deux  iuconnus 
qui  exerçaient  la  curiosité  des  compositeurs  de  cartes.  La  larve  difforme 
de  l'un  fut  brisée  et  mise  à  néant;  l'autre  fut  réduit  au  mutisme.  Ce- 
pendant les  découvertes  récentes  ne  pouvaient  contenter  les  érudits; 
les  renseignements  sur  l'intérieur  de  l'Inde  et  de  la  Chine  demandaient 
quelques  explications  des  deux  inconnus  et  les  compositeurs  de  cartes 
essayèrent  encore  leur  fortune,  en  conciliant  et  réglant  toutes  les  con- 
naissances antiques ,  du  bas-âge  et  récentes.  Us  tournaient  et  retour- 
naient les  fleuves  et  les  montagnes  de  l'intérieur  pour  les  coordonner 
dans  le  sens  ptoléméen;  ils  mirent  à  contribution  toute  la  nomenclature 
de  Polo  et  de  ses  successeurs,  ainsi  que  différentes  images  du  moyen 
âge;  il  paraît  même  qu'ils  puisèrent  dans  quelques  notices  arabes 
(d'Edrisi)  et  ils  amalgamèrent  le  tout  avec  les  relations  récentes;  des 
compositions  très-variées  furent  inventées,  mais  chacune  avait  le  défaut 
de  l'ignorance  complète  du  terrain  qu'on  voulait  remplir  par  une  no- 
menclature très  hétérogène  (ii). 

Les  yilles  de  Trapobana,  ou  Malaï  (de  la  carte  catalane)  parurent  au 
Japon  encore  inexploré;  le  fleuve  du  Kanton  fut  qualifié  d'olim  Ganges 
(porté  préalablement  sur  ce  point  par  Mauro),  parce  qu'on  croyait  que 
son  embouchure  était  par  145^  de  longitude ,  comme  les  embouchures 
du  Gange  de.  Ptolémée;  le  branchage  du  Gange  et  de  l'Indus  fut  em- 
prunté de  Ptolémée;  il  fallait  former  son  grand  golfe,  de  mare  Sin, 

(21)  Pour  faciliter  Texamen  de  ce  qnft  nous  allons  dire  et  de  ce  que  nous  avons  dit  dans  notre 
portulan  ,  nous  avons  donné  plusieurs  tableaux  gé(^^phiques  du  xvi*  siècle  dans  notre  atlas  :  deux 
sous  le  titre  Asia  aquilonaris  de  la  Tartario  et  de  la  Chine ,  reproduites  l'une  par  Ortel,  l'autre  par 
Mercator;  l'AUbozzo  de  Zurla  d'une  carte  vénitienne  ;  ensuite  deux  de  l'Inde,  l'une  de  l'Asia 
d'Ortel  (a*  S),  l'autre  de  son  India  orientalis  (n*  1<M)),  suivie  par  Mercator;  puis  la  Gbine  de  l'atlas 
de  Hond  (produit  de  la  composition  sino-portugaise),  enfin ,  «ne  double  carte  de  Hindostan  de 
I>elisle. 


53  CARTES  DB  L^INDB 

pour  les  embouchures  des  fleuves  ploléméens  tombant  dans  le  sinus 
magnus;  il  fallait  rcplièremcnt  faire  passer  les  montages  sous  la 
parallèle  de  ^Q"  de  latitude  pour  ne  pas  contrarier  Ptolémee.  Un  grand 
lac,  vomissant  de  grands  fleuves  devenait  partout  indispensable  au  nord 
de  Malaï,  pour  représenter  le  lac  de  100  milles  de  la  narration  du  vé- 
nitien ;  des  lacs  plus  ou  moins  nombreux ,  des  fleuves  prenaient  de  dif- 
férentes directions  inventées,  on  ne  sait  sur  quel  fondement  et  par 
quelle  impulsion.  Leur  singulier  ramage  et  tissu  variaient  les  compo- 
sitions. Deily  cherchait  une  place  sur  Nerboudda.  On  ne  sait  par  quelle 
inspiration  arabe  (edrisienne?)  Moultan,  Lahor,  Kandahar  marchaient 
d'accord  vers  le  golfe  gangétique. 

55.  Les  relations  de  Polo  n'ayant  plus  d'assiette  certaine  parmi  les 
nouveautés  portugaises  et  les  vieilleries  ptoléméennes ,  furent  pour  la 
plupart  expédiées  en  masse  à  tramontana  du  Tibet  et  de  la  muraille 
chinoise.  Quinsay,  Zayton,  Caraîan,  Cambalu,  avec  leurs  cortèges, 
composèrent  un  Catay  qui  ne  trouva  de  place ,  ni  dans  la  nouvelle 
Espagne,  ni  en  Chine.  Des  doubles  à  double  place  accablèrent  les  com- 
positions :  Xandu  et  Xandu,  Caindu  et  Gaindu  (Mercaior),  Mien  et  Pegu 
(partout),  Cambalu  et  Pékin  (abbozzo  zurl.)  etc.  Ces  répétitions  por- 
taient aussi  des  variantes  des  nombreuses  copies  de  la  narration  de  Polo. 

Les  variantes  avaient  leur  origine  dans  Torthographe  et  dans  la  mau- 
vaise leçon  des  noms.  L'échange  continuel  des  t  et  j^  ne  fait  pas  grand 
tort,  mais  les  opérations  orthographiques  avec  les  c  et  ^  ont  des  consé- 
quences fâcheuses.  L'insconstance  de  la  valeur  de  ces  deux  lettres,  dont 
une  valait  tantôt  k  tantôt  Iz  ou  s;  l'autre,  le  g  dur  ou  mol  ouji  les  mit 
à  la  merci  des  copistes  de  difierentes  nations.  L'italien ,  pour  désigner 
le  k,  écrivait  ch;  un  autre  essayait  de  le  rendre  par  q,  par  gh.  Pour 
rendre  une  autre  valeur  dec,  V>  certains  copistes  pensaient  mieux 
écrire  à  leur  guise  s  ou  x,  ou  remplaçaient  un  s  par  e,  ç.  De  même 
g  par  k,  servit  au  jeu  de  l'orthographe.  L'italien  le  fesait  accompagner 
de  h  ou  u;  gh,  gu,  pour  désigner  sa  valeur  dure,  par  conséquent  les  u, 
les  h,  se  remplaçaient  chez  les  copistes,  et  les  q,  ch^  prenaient  la  place 
de^/t,  gu  :  et  quand  le  g,  restant  seul,  devait  répondre  à  la  valeur 
de  dj  ou  ji  ;  un  tel  le  changeait  en  2,  un  autre  le  remplaçait  par  d  ou  s. 
Guin,  ghin,  quin,  chin,  çin,  sinfZin,  s'échangent,  rapprochant  jusqu'à 
l'identité  des  noms  tout  difierenls,  ou  créant  d'un  seul  et  même  nom 
plusieurs  noms  difl'érents.  Les  méprises  de  leçon  contribuèrent  immen- 
sément à  cet  embrouillement ,  quand  on  se  méprenait  dans  la  leçon  ou 
de  n,  u  ;  ou  de  c ,  ( ,  prenant  l'un  pour  l'autre  ;  quand  on  ne  distinguait 
pas  le  C  majuscule  du  G;  quand  on  ne  remarquait  point  l'élision  den 
par  abréviation;  quand  on  transposait  les  lettres  ou  élimait  les  syllabes. 
Enfin,  les  voyageurs  postérieurs  à  Polo  en  reproduisant  par  leur  propres 
prononciation  et  orthographe  les  mêmes  noms ,  secondèrent  puissam- 
ment la  multiplication  de  noms  et  de  positions,  lorsqu'ils  étaient  con« 
suites  et  mal  compris, 

36.  Toutes  les  compositions  du  xvi*  siècle  ofi*rent  pour  la  Chine  et  l'in- 
térieur de  l'Inde  et  de  l'Asie  centrale  ce  fatras  confus  et  inextricable. 
Parmi  les  cartes  republiées  par  Ortel  (1570-1592)  on  a  cinq  n<^  (1 ,  5, 


ET  DE  LA   CHINE.  55 

100,  iOi ,  iOâ,  de  redit.  159^),  où  Ton  voit  la  Chine,  seule  ou  conjoin- 
tement avec  rinde  ou  la  Tarlarie.  On  y  distingue  deux  différentes  com- 
positions pour  rinde  et  cinq  pour  la  Chine  (n<"  152,  153,  157  de  notre 
atlas),  auxquelles  on  peut  ajouter  une  sixième  :  celle  d'un  manuscrit  de 
Venise  (abbozzo  zurl.)  {u'*  151  de  notre  atlas)  et  une  septième  :  celle  qui 
est  empruntée  par  Mercator  et  qui  se  distingue  encore  (n^  156  de  notre 
atlas).  Dans  ce  nombre  on  débrouille,  outre  la  série  toute  nouvelle  de  po- 
sitions maritimes  (n°  101),  deux  systèmes  pour  les  rivagesdela  Chine,  où 
sont  intercalées  quelques  nouvelles  positions,  et  les  positions  antiques 
de  Plolémée,  parmi  celles  de  Polo.  L'un  de  ces  deux  systèmes  semble 
réclamer  la  priorité,  parce  que  le  Japon  y  est  garni  plutôt  de  positions 
hypothétiques  (édrisiennes)  que  de  ses  propres  positions.  11  est  dans  le 
orbis  lerrarum  d'Orlei  (n^  1),  dans  son  India  orientalis  (n<^  102)  et  dans 
la  composition  empruntée  jpar  Marcator  (a^'  155, 156  de  notre  allas).  Ce 
système  se  conforme  mieux  a  la  narration  de  Polo  que  Tautre,  déroulé  dans 
les  caries  ortéliennes  de  TAsieet  de  la  Tartarie(n°»5,100),(n°M52, 157 
de  notre  atlas),  où  le  Japon  est  délivré  de  positions  hypothétiques  et  dé- 
cèle des  investigations  avancées;  or,  la  création  de  ce  système  et  la  com- 
position de  ces  cartes  ont  eu  lieu  entre  1545  et  1570.  Quant  aux  régions 
intermédiaires  entre  la  Chine  et  Tlnde,  toutes  les  cartes  ortéliennes  se 
conforment  mieux  avec  la  relation  de  Polo  que  celle  de  Mercator  (22). 

Des  deux  compositions  de  Tlnde,  Tune  se  trouve  dans  TAsie  orté- 
lienue  (n<^  5) ,  (n°  152  de  notre  atlas);  Tautre  dan^  Tlndia  orientalis 
(n*  102),  (n*  153  de  notre  atlas);  Mercator  approuva  cette  dernière, 
Hond  aima  mieux  suivre  la  première.  Mais  bientôt  un  itinéraire  de  Sou- 
rate, par  firampour,  Dely,  Lahor,  jusqu'à  Kaboul,  força  à  changer  ou 
rectifier  Tintérieur.  On  voit  cette  rectification  dans  les  cartes  de  Hond, 
deSanson,  de  Blaeuw,  deWitt,  de  Duval  1682.  Delisle  se  modelait 
encore  sur  le  calque  de  ses  prédécesseurs  (voyez  sa  double  composition 
n?  155  de  notre  atlas)  et  fut  copié  par  Homman,  Seuter,  LoKer,  Mathieu 
Hase  1744,  Tobie  Mayer  17i8.  Enfin  les  caries  de  Bonne ,  de  d'Anville 
indiquent  la  direction  réelle  du  Gange. 

La  Chine  depuis  des  siècles,  pour  l'Europe  énigme  insaisissable,  dans 
le  crépuscule  de  l'aube  du  levant,  devenu  un  nouvel  énigme  par  la  re- 
lation de  Polo,  commença  enfin  à  prendre  sa  consistance  dans  la  car- 
tographie européenne  par  les  découvertes  portugaises.  Vers  le  milieu 
du  XVI*  siècle ,  Louis  Géorgie  (1570)  composa,  d'après  les  matériaux 
portugais,  une  carte  de  la  Chine  qui  servit  plus  d'un  siècle  de  type  aux 
géographes  et  sur  lequel  ils  purent  élaborer  leurs  amplifications  en  dé- 
gageant le  premier  modèle  de  quelques  noms  surannés  et  de  contes 
controuvés  qui  le  décoraient  d'abord.  Ce  t^pe,  ainsi  modifié  et  enrichi  de 
connaissances  chaque  jour  mieux  acquises,  se  trouve  dans  les  atlas  de 
Houd  (n°  154  de  notre  atlas),  Blaeuw,  Sanson  (avant  1654),  Witt  (1670), 
Duval  (1682).  H  paraît  que,  pour  la  composition  primitive,  une  carte 
chinoise  servit  de  modèle  (ts). 

(42)  Pour  qu'on  ptiisse  suivre  nos  observations ,  nous  avons  donne',  dans  notre  atlas  six  figures 
à  l'examen  des  curieux  :  {'  abbozzo  Znrlana  d*une  carte  de  Venise  ;  2*  Inde  de  l'Asie  orlélienne; 
y  Inde  de  India  orientalis  ortélienne  et  de  Mercator  ;  4°  Chine  de  Mercator  ;  8*  Chine  de  la  Tartaric 
oitélienne  ;  6'  Chine  de  l'atlas  de  Hond.  —  Voyez  le  portulan  général ,  3î. 

(Î5)  Cette  carte,  dont  on  connaissait  l'impprfftction  à  caus?  qu'on  continuait  les  investigations  diiTt 

IV.  3 


3i  CARTES  DB  l'iKDE 

57.  Mais  le  perfecUonnement  de  la  carte  de  la  Chine  devait  avancer 
par  les  études  faites  sur  les  lieux.  Des  cartes  et  des  atlas  furent  prépa* 
rés  sur  les  matériaux  antérieurement  inconnus,  sur  les  cartes  chinoises 
mieux  examinées  et  sur  les  investigations  et  les  renseignements  des 
missionnaires.  De  ceux  qui  furent  déposés  vers  1590  à  Rome,  Matheo 
Ncroni,  aidé  par  Michel  Ruggieri,  exécutait  un  atlas;  en  même  temps 
Marlinius  (mort  1651)  mettait  au  jour  16  caries  de  Tempire  chinois  et 
Bouyn  l'élaborait  à  sa  manière.  Sanson,  en  1656,  commença  à  popula- 
riser la  carte  de  Neroni  par  sa  publication  réduite.  Cette  carte  avança 
infiniment  la  connaissance  de  la  position  de  la  Chine  sur  le  globe  ter- 
restre; elle  élucida  son  intérieur,  ses  divisions  et  même  sa  nomencla- 
ture :  mais  elle  présentait  un  grand  défaut  en  ce  qu'elle  n'ayait  pas 
tout  à  fait  rompu  avec  les  cartes  précédentes  et  en  ce  qu'elle  avait 
inventé,  à  leur  exemple,  des  réseaux  de  fleuves  que  les  renseignements 
du  lieu  ne  pouvaient  confirmer.  Cette  carte  décèle  un  soin  tout  particu- 
lier des  compositeurs  dans  l'indicalion  des  rochers  et  des  montagnes 
(négligés  par  d'Ânville). 

La  Chine,  cependant,  était  sur  le  point  d'obtenir  la  plus  haute  posi- 
tion dans  la  géographie,  à  laquelle,  à  cette  époque,  aucune  portion  dv 
globe  terrestre  de  celte  étendue  n'a  pu  atteindre.  L'empereur  de  Chine 
Kanghi,  appela  les  jésuites  à  dresser  une  carte  de  l'empire  et  de  ses 
dépendances.  Bouvet,  Régis,  Jartoux,  Fridelli,  Cardoso,  Bonjours,  de 
Tartre,  Maïlia,  Headeres,  levaient  pendant  huit  années  (1708-1716),  les 
plans  de  ces  vastes  régions  et  (en  1716-1718),  sous  la  direction  de  Jar- 
toux ,  ils  élaborèrent  les  cartes  spéciales  et  une  carte  générale.  Le  fmit 
de  cet  immense  travail  parut  en  1757  dans  l'atlas  de  du  Halde,  dressé 
par  d'An  vil  le ,  et  ses  réductions  par  Jean  Mathias  Hase  et  par  Tobias 
Meyer  (1759,  1742, 1748),  chez  les  héritiers  de  Homman,  répandaient 
le  succès  heureusement  obtenu.  A  cette  époque ,  l'Europe  même  était 
loin  encore  d'offrir  à  la  géographie  un  tel  ensemble  et  un  plan  aussi 
achevé  que  la  carte  de  la  Chine. 

cilcs.étaitsujetteanxremaniementsàchaqucDouvene  publication.  Louis  G«oi|^o  donnait  les  latitndes: 
à  KaDtoD  23*  30';  à  Liampo  31*  30';  ci  Nanliin  3S"  0;  à  Pékin  18*  0',  et  au  delà  de  la  muraille  il  inscri- 
vait  de  Touest  à  l'est  la  nomenclature  de  nombreuses  stations  d'un  double  itinéraire.  C'était  trop 
fatigant  pour  ses  successeurs.  —  La  carte  de  Hond  (que  nous  donnons  n*  I3<l  dans  notre  aths), 
donnant  congé  à  cet  itinéraire,  inscrivit  à  sa  place  plusieurs  noms  de  Polo,  rapprocha  de  la  maraiHe, 
Lop,Pcim,  et  donna  unelautre  latitude  :  à  Kanton  S3*0',  à  Liampo  30*  0';  à  Nankin  35*  0';  à  Pékin  4S*  0'; 
élimina  les  quatre  positions  précédentes  :  Tenchco,  Cincheo,  Richeo  et-Liamto,  ajouta  la  Corée  et 
Xuutim  par  47*  0'  de  latit.  —  La  carte  de  Blaeuw  diffère  par  les  latitudes  de  Kanton  S3*  30';  Liampo 
%9*  0';  Nankin  34*  30';  Pékin  48*  30',  place  Xanlin  Samton  par  43*  30';  reprenant  les  quatre  positions 
éliminées,  elle  les  plaee  au  delà  de  la  muraille  et  de  la  Corée,  et  donnant  congé  à  la  nomenclatiire  de 
Polo,  retient  tout  près  de  la  muraille  Lop  avec  tout  son  cortège.  —  La  carte  publiée  par  Sanaoa 
dégage  le  tissu  des  rivières ,  donne  aux  rivages  un  contour  moins  raide  et  fait  descendre  les  latitudes 
de  Kanton  à  23*  0',  de  Liampo  à  S6*  30';  de  Nankin  à  33*  40';  de  Pékin  à  4S*  O'.  —  Ce  remanienent 
s'exécutait  sur  un  type  qui,  dès  son  origine ,  décèle  une  disposition  susceptible  de  tous  le*  redres- 
sements nécessaires;  c'est  ce  ^ui  me  fit  supposer  qu'une  grossière  carte  chinoise  avait  pu  lui  servir 
de  modèle.  Mes  présomptions  à  cet  égard  ont  été  raffermies  par  la  vue  d'une  carte  chinoise,  que  je 
possède,  fabriquée  récemment  à  Pékin  pour  le  vulgaire  :  tant  la  conformation  des  parties  y  est  eon- 
forme  à  la  composition  dressée  sur  les  matérieaux  portugais.  Les  parties  que  le  chinois  laisse 
empoulées  pour  ses  nombreuses  inscriptions  ;  les  fleuves  grosièrement  tournés  et  leur  ramage  bouffi 
pour  former  les  ilcs  continentales  ;  la  raideur  des  rivages  ;  la  Corée  couvrant  et  pressant  le  front 
allongé  de  la  Chine  jusqu'au  Japon ,  assimilent  singulièrement  le  type  européen  aux  traits  chinois. 
L'insuffisance  de  l'exactitude  et  les  vices  des  anciennes  cartes  chinoises,  offrit  certainement  une 
figure  plus  défeolueuse  que  celle  qui  se  présente  dans  la  composition  chinoise  actueUe. 


EXAMEN  6Ë06BAPHIQUË 


DES  COURSES  ET  DE  LA  DESCRIPTION 


DE 


BENJAMIN  DE  TUDÈLE, 


1160-1175. 


Plusieurs  lettres 
adressées  à  M,  Carmoly. 


AVANT-PROPOS. 


Une  tradition ,  relatée  vers  la  fin  du  xvi*  siècle  par  Abraham  Zakout, 
astronome  et  historiographe  du  roi  de  Portugal  (  juchasin,  fol.  151,  de 
l'édition  de  Cracovie),  fixe  le  voyage  de  BENJAMIN  DE  TUDÈLE  fils  de 
lonaj  entre  les  années  1160  et  1175.  Cette  tradition  fut  répétée  par  le 
premier  éditeur  du  voyage  en  1543;  par  Gedalia,  fils  de  Joseph  Jacchia 
(in  sehalschelet  hakobhala)  1587;  par  David  Gantz  (tsemat  David, 
fol.  59)  159â.  En  effet,  la  relation  du  vovase  ne  contient  rien  de  pos- 
térieur à  Tannée  1175;  elle  soutient  les  événements  et  les  positions  de 
cette  époque,  et  confirme  par  elle-même  qu'elle  a  été  rédigée  vers  1175, 
qui  est  aussi  Tannée  de  la  mort  de  Benjamin. 

11  y  avait  à  cette  époque  beaucoup  de  voyageurs,  mais  peu  d'entre 
eux  donnaient  une  description  de  leurs  courses.  G^le  de  Benjamin 
acquit  de  très-bonne  heure  une  certaine  vogue  parmi  ses  co-relîgion- 
nalres  ;  elle  fut  assez  répandue;  quelquefois  contrefaçonnée  par  d'autres 
et  défigurée,  comme  cela  eut  lieu  dans  une  relation  de  Gerson,  en  1650. 
Les  doutes  qu'on  a  soulevés  sur  la  réalité  du  voyage  de  Benjamin ,  qui , 
peut-être,  n'a  pas  bougé  de  sa  chambre,  tombent  devant  l'intérêt  qu'offre 
sa  narration  rédigée  sous  la  forme  d^un  voyage. 

Plusieurs  éditions  s'étaient  succédées  :  la  première  en  1515,  à  Con- 
stantinople,  chez  les  Soncini;  ensuite  en  1586,  à  Ferrare,  chez  Abra- 
ham Oschke;  en  1585,  à  Friboui^en  Brisgovie,  chez  Hetzfroni,  lorsque 
parut,  en  1575,  à  Anvers,  une  version  latine  de  Benoît  Arias  Montanus, 
reproduite  en  1656,  à  Helmstadt.  Cette  version  livra  Touvrage  aux 
études  des  chrétiens  ignorant  Thébreu  ou  versés  dans  cette  langue. 

Les  explications,  les  éditions  accompagnées  de  «otes  ou  sans  notes, 
se  multiplièrent  dans  le  courant  du  xvii*  siècle  :  surtout  en  Hollande 
et  en  Allemagne.  L'édition  de  Bâle  précéda  celles  de  Leyde,  qui  parti- 
rent en  1655,  au  nombre  de  trois,  accompagnées  d'une  nouvelle  version 
latine  et  de  commentaires  de  Constantin  L'Empereur,  qui  fut  ensuite 
commentée  par  d'autres.  La  version  hollandaise  de  Bara,  1666  et  1698, 
donna  origine  aux  versions  allemandes  1691 ,  1711 ,  et  française  1729. 
Le  voyage  devint  la  proie  de  différentes  opinions  et  son  texte  la  pâture  de 
commentateurs  :  Montanus,  Constantin  L'Empereur,  Buxtorf,  Renaudot, 
Richard  Simon,  Bergeron,  Wagenseil,  Eisenmenger,  Schutt,  Hottinger, 
Kircher,  de  la  Rocque,  Spanheim,  Gaspar  Barthius,  Reinesius  appré- 
cièrent Touvrage  chacun  à  sa  guise.  On  comptait  déjà  14  éditions,  dont 


40  BENJAMIN   DE  TUDÈLE. 

otlomau,  publiées  en  182:2,  à  Paris,  chez  Picquel,  par  Lapie,  d^api-ès 
les  matériaux  de  Guillemot  et  Tromelin;et  en  1827,  à  Paris,  par  Lameaa 
et  Dufour.  J'espère  que  vous  ne  désapprouverez  pas  le  choix  de  ces 
cartes,  dressées  par  d'habiles  officiers  et  ingénieurs  et  que  vous  y  verrez 
un  appareil  qui  doit  faire  frémir  Timposteur. 

Il  est  à  peu  près  admis  par  Baratier  que  Benjamin  confond  Salouski 
avec  Saloniki.  J'adhère  à  cette  confusion  et  je  prends  un  compas  dans 
la  main  pour  le  faire  promener  sur  les  cartes.  De  Thèbes  il  y  a,  suivant 
Benjamin,  une  journée  à  ]r)n^:iJ<  Egripont,  Negropont  :  voilà  une 
échelle  de  journée.  A  trois  journées  de  Corinthe  se  trouve ,  suivant  sa 
relation,  Thèbes  :  mon  compas  fait  trois  pas  et  l'échelle  est  constatée  : 
c'est  juste  (i). 

Maintenant  d' Egripont  à  SaUmski ,  je  compte  les  journées  données 
par  Benjamin  :  il  y  a  par  mer  et  par  terre  10  journées.  Je  marche 
avec  mon  compas  de  Negropont  par  la  Thessalie  et  par  mer  jusqu'à 
Saloniki  et  j'y  trouve  juste »ces  dix  journées.  Quant  à  la  distance  géné- 
rale je  ne  puis  donc  réprouver  cette  fois  la  relation  de  Benjamin  :  il  ne 
reste  qu'à  apprécier  les  lieux  indiquées  dans  sa  relation,  tenant  toujours 
l'inapp  réciable  compas  à  la  mains. 

Il  faut  observer,  que  depuis  l'invasion  des  barbares  dans  l'empire 
d'Orient,  dans  le  courant  des  siècles,  la  nomenclature  géographique  a 
subi  d'innombrables  changements.  Comparez  Janjah,  avec  l'antique 
Thessalie,  comparez  Morée  avec  l'ancienne  Péloponèse,  chaque  partie  de 
la  Grèce  d'aujourd'hui  avec  Tancienne  et  vous  serez  convaincu  qu'il 
s'est  accomplie  une  véritable  métamorphose  dans  cette  partie  du  globe. 
Les  dénominations  de  l'origine  slave  fourmillent  avant  tout  et  il  y  a 
tant  d'italiques,  de  romanes,  etc.  De  temps  à  autre ,  il  ne  manquait  pas 
de  dénominations  éphémères.  Lorsque  aux  environs  du  mont  Olympe, 
dominaient  les  Slaves,  les  Yalaches,  les  Bulgares,  les  Serviens,  enfin 
les  Franks  et  les  Turks,  chaque  fois  différentes  localités  changeaient  de 
nom  dans  le  vulgaire. 

Après  avoir  prédisposé  votre  attention  à  des  dénominations  toutes 
inattendues,  j'avance  avec  mon  compas.  En  parlant  de  Negropont  à  une 
journée j  r\D^'^\û\^)Z'*  Jo,bouslerisa  répond  à  Proschina,  (sur  d'autres 
cartes  Proscina,  Frescîna).  Ce  nom  est  tout  à  fait  slave ,  désignant ,  sans 
changer  de  prononciation,  poudre,  une  toute  petite  parcelle  de  poudre; 
et  on  appelle  une  toute  petite  chose,  un  tout  petit  objet  proschina,  prous* 
china,  proszyna. — On  a  dans  les  possessions  slaves  de  Prosua,  Proschna, 
Prochnitza  et  analogues,  dont  la  dérivation  de  la  valeur  peut  varier. 
De  même  de  Jabousterisa ,  ôlez  Icjod  euphonique  et  vous  avez  un  nom 
purement  slave, Bystritza  (rapide,  pénétrante)  donné  aux  rivières,  aux 

(I)  Celle  (échelle  continentale  n'est  pas  en  défaut  pour  les  distances  prcccdcntes,  pas  plus  que 
l'cdiello  de  journées  par  mer.  D'Olranto  à  Q^^^^p  KrofoM,  Corfou  i  y,  èi  J^H^  Lebat,  Lenkate, 
Ducato,  santa  Maura,  î  j.;  à  ]1^>;;X  ''cAtton,  fl.  \chelous,  Aspropotanus,  1  j.;  à  ]>n^^l^J 
NatolUcon,  Actolikon,  Analolikon,  i/«  j  ;  à  n"lL}D  Patra,  Patras,  Patrae,  i  j.;  à  ^^^5*^  Upanto, 
Naiipklos,  Lepantoi/sj.;  n  ÎS^'^p  Kors,an  pied  du  mont  Parnasse,  Krisia,  i  i/«j.;  à  l^^^'lp 
Korinto,  Korinlh,  3  j.;  à  t^H*»^  Tibeé,  Thèbe  3  jmirnécs. 


€KfeCK. 

bourgs  et  villages,  aux  hommes  {i).  D*ici  une  journée  à  n'!5j^Dn  Robe- 
ni ka,  et  mon  compas  s'arrête  tout  près  de  Tornilza  (Marlitsa,'  Thronium); 
ensuite  une  journée  à  if2ir*D|iri5^  Sinon  polmo,  avec  lequel  j'arrive  à 
Boudounitza  ou  Modounîtza.  Je  ne  vous  entretiendrez  pas  de  la  termi- 
naison slave  t'fza,  {fca,  ni  de  Robenica  qui  pourrait  dériver  du  slave 
couper^  tailler,  où  Ton  se  battait,  où  Ton  a  abattu  les  arbres,  les  bois  (s); 
ni  de  Boudounitza,  Boudniiza,  Boudzin,  Bouda,  bouda,  hutte,  échoppe, 
noms  de  villes  et  villages  infiniment  nombreux  dans  les  possessions 
slaves.  En  ni*arrêtant  ici  je  dois  avoler  que  je  marchais  avec  mon 
convpasà  trop  petites  journées.  Je  puis  et  je  devais  avancer  plus  loin, 
pour  ne  pas  perdre  les  distances  :  mais  la  relation  suivante  de  Ben- 
jamin me  force  de  ralentir  mes  pas  (s). 

Ici  commence. la  XC^3  ^«^<*fe^î<ï»  Valakhia,  dit  Benjamin  et  cela 
révolterait  toutes  ces  conceptions  étroites  qui  se  borneraient  à  la  Vala- 
chie  d'aujourd'hui.  Mais  si  Ton  demande  l'histoire,  on  apprendra  qu'il  y 
avait  une  Valachie  sur  le  Niestr,  une  Valakhie  dans  l'intérieur  de  la 
Hongrie,  une  Yalakhie  en  Macédoine,  en  Remanie,  en  Thessalie  ,  et 
c'est  la  Grande  Valakhie.  Fouillez  les  écrivains  byzantins  et  vous  y 
trouverez  que  les  Valaches ,  en  descendant  de  Zagora  (nom  slave  des 
montagnes ,  d'au  delà  des  montagnes)  se  répandirent  aussi  bien  dans 
l'intérieur  de  la  Grèce ,  comme  vers  le  Danube  ;  que  leurs  bandes 
vagabondes ,  leurs  hordes  errantes  étaient  connues  en  Macédoine,  en 
Thessalie,  avant  qu'elles  ne  le  fussent  au  nord  de  Hemus,  Gora  , 
Zagora;  que  par  conséquent  on  appelait  le  pays  aux  environs  de  Zeitoun 
Grande  Valakhie,  Or,  en  partant  de  Boudounitza,  on  entrait  du  temps 
de  Benjamin  dans  la  grande  Valakhie. 

A  deux  journées  >:;ni;i  Gradigi,  ville  ruinée.  Vous  me  direz ,  à  quoi 
bon  chercher  une  ville  ruinée?  elle  n'existe  plus,  encore  portant  une 
dénomination  slave  :  Gradigi,  comme  Gradiska,  Grodziska,  Bellgrad, 
Nov-grad,  Vcli-grad,  Vyscho-grad,  et  mille  appellations  analogues. 
N'importe,  je  grimpe  les  montagnes  où  je  passe  le  défilé  de  Thermo 
pyle,  je  pénétre  dans  la  Thessalie  et  cherchant  des  ruines,  je  rencontre 
sur  les  cartes  tout  près  de  Zeitoun,  au  pied  de  l'antique  Othrys  aujour- 
d'hui Goura  (montagne  en  slave),  un  petit  village  Gardaki  et  je  suppose, 
non  sans  raison,  que  c'est  Gradigi  de  Benjamin.  Avant  d'aller  plus  loin, 
je  vous  ferai  remarquer  qu'on  trouve  sur  la  carte  des  indices  du  séjour 


{2)  Proscioa  est  Panoionnc  I.arymna.  Pv/j.vjy  impulsion,  impétuosilé  ;  pùjj.tyq  torrents,  ont  pu 
donner  origine  à  la  Bystritza  slavonu.  Dans  la  suite  les  interprétations  possibles  paraîtront  plus 
ostensibles. 

(3}  n  y  a  qaeique  analogie  entre  Rubcnîka  et  l'antique  nom  du  mont  et  ^u  cap  Kncmis  (xwj/iios, 
arduus,  salluosus)  qui  bordent  Tbrouium.  Kv^/;.{,  j'incise,  je  creuse,  je  racle,  je  Tends  ;  traduit  par 
Ruheuika. 

(4)  Voici  encore  pour  le  compte  de  rétymologie.  Boudounitza,  Vodonitza,  pourrait  dériver  du  slave 
voda,  eau  ;  Vod'nitza,  aquatique,  ce  qui  répondrait  à  potmos  norct/xoç»  —  M.  Reinaud  présume 
que  Sinon-potmo  indique  la  rivière  Sperchios,  et  propose  le  changement  des  lettres  de  Sinon.  Je  ne 
combattrai  pas  l'attribution  de  ce  nom  à  Sperchios,  mais  j'opposerai  à  la  proposition  de  changement 
trop  forcé,  la  remarque  que  Sinon-potmo  parait  être  tout  à  fait  grec,  qualification  de  circonstance  : 
rivière  de  désolation,  de  dévastation ,  de  ravage,  atvo^  ttotk/ao^,  traversant  le  pays  ravagé  par  les 
courses  slaves,  boulgars,valakhes;  ou  bien  rivière  extérieure,  ^îvoi,  |'«tvoj  TrOTa/xog,  frontière 
de  la  Grèce,  au  delà  de  laquelle  commence  la  Valakhie. 


A^  BENJAHIN   DE  TUDÈLE. 

Edrisi  (cliiii.  vi,  scct.  4,  p.  585,  58 i),  en  suivant  le  cours  de  Maritza, 
dit  qu'elle  passe  à  Adrinoplc,  puis  à  Sorlova,  puis  à  Arkadioboli,  puis 

se  jette  dans  le  canal  d*Abydos  vyj\  auprès  de  la  yille  Akhrisoboli  la 

maritime,  où  elle  porte  le  nom  de  Marmara.  Il  est  évident  que  dans  sa 
relation,  Edrisi  indique  à  la  fois  le  cours  de  deux  rivières,  de  Marilza  et 
de  Erkéné,  qui  se  réunissent  au  midi  d'Adrinople;  Tune  a  sa  source 
près  de  Ligolgo,  Tautre  près  de  Sorlova.  Il  manifeste  en  même  temps 
une  espèce  de  confusion  de  Maritza  avec  Marmara  qui  est  le  fleuve  Ro- 
dovitsch  (Strimon)  sur  lequel  est  situé  Seres  (Metressi).  Akhrisobpli  ou 
Ghrysopoli  est  loin  de  Maritza,  étant  à  Tembouclire  de  Marmara.  Nous 
discuterons  ailleurs  ces  questions  et  positions.  Pour  le  moment  il  nous 
suffit  d'alléguer  que  les  embouchures  de  Maritza  et  de  Marmara,  et  la 
ville  Chrysopolis  et  même  Saloniki  et  Armiro,  sont  toutes  sur  les  bords 
du  canal  de  Constantinople,  nommé  de  môme  canal  d'Abvdos.  Toute 
cette  mer,  depuis  Saloniki  jusqu'à  Gallipoli  et  Abydos  s  appelle,  au 
témoignage  d'Edrisi  :  canal  d* Abydos  ou  de  Consta'ntinople  (Edrisi,  vi,  4, 
p.  58d,  58i,  290,  291,  292).  Les  navigateurs  la  qualifiaient  ainsi.  Il  est 
donc  évident  que  le  nom  d' Abydos  était  connu  à  l'époque  de  Benjamin, 
à  l'embouchure  de  Maritza,  quatre  journées  de  Drama.  Benjamin,  pas- 
sant par  terre,  arrivé  au  bord  de  la  mer,  s'est  servi  du  nom  de  golfe 
pour  qualifier  sa  station  maritime.  De  l'embouchure  de  Maritza  on  peut 
se  rendre  très-facilement  à  Constantinople  en  cinq  journées. 

Enfin  nous  sommes  à  Constantinople  avec  notre  Benjamin.  Nous  y 
voyons  avec  lui  les  marchands  de  l'Orient,  du  Nord  et  de  l'Occident. 
Ceux  du  nord  sont  :  Canaan,  les  Slaves  en  général,  puis  ceux  des  pays 
Russiens,  de  la  Hongrie,  enfin  de  >pvD^5  Pasianke  et  de  X'^'^D  Bauria, 
La  Russie  est  plus  orientale  que  la  Hongrie;  Pasianke,  Fasianke  serait 
aussi  plus  orientale  que  Bouria ,  selon  Tordre  dans  lequel  Benjamin 
décrit  ici  les  peuples,  commençant  par  l'orient  et  finissant  par  l'occident, 
disent  ses  commentateurs.  En  admettant  cet  ordre  on  est  peu  consé- 
quent, à  mon  avis,  si  l'on  pense  à  retrouver  les  deux  dernières  popula- 
tions dans  les  anciennes  Liburnie  et  Pannonie,  et  on  s'embrouille  si  on 
a  recours  à  Joseph  ben  Gorion  pour  constater  une  semblable  assertion. 

A  propos  de  ben  Gorion,  dont  vous  avez  établi  l'époque,  vraiment  il 
ne  sert  que  de  prôte-nom  à  cette  histoire  judaïque  qui  est  connue  sous 
son  nom.  Le  premier  chapitre  ou  l'introduction  n'est  que  trop  suffi- 
sante pour  prouver  par  l'énumération  des  peuples  descendant  de  Noé , 
que  la  rédaction  de  l'ouvrage  est  du  xn«  siècle.  Cette  énumération  est 
curieuse  :  mais  les  explications  données  jusqu'aujourd'hui,  ne  sont  pas 
toutes  satisfaisantes ,  surtout  celles  de  Thogorma  et  de  Dodanim.  Sous 
ce  dernier,  ne  pourrait-on  pas,  au  lieu  de  Mekhba  et  Bardena,  ^'^Zll  et 
NH'^D  lire  et  distinguer  la  Skanie  et  les  Varègues?  nom  donné  aux 
Normands  Skandinaviens  de  la  Baltique.  Ce  nom  de  Varègues  éuit 
connu  à  l'occident,  même  depuis  un  temps  assez  reculé,  puisque  je 
trouve  que  Guido  de  Ravenne,  écrivain  de  la  fin  du  ix«  siècle,  lésa 
nommés.  Son  ouvrage  inédit  se  trouve  dans  une  copie  de  iH9,  entre 
les  manuscrits  de  la  bibliothèque  de  Bourgogne  à  Bruxelles. 

Le  prétendu  ben  Gorion  aime  mieux  qualifier  les  Slaves  Dodanim, 
que  Rhanaan.  II  en  fait  un  dénombrement.  Si  l'on  peut  admettre  qu'eu 


GRÈCE.  45 

les  éniiinéraut  sous  les  uoins  do  Letsphim  et  Livoiiim  il  a  voulu  com- 
prendre les  Lilvaniens  et  les  Livoniens,  il  serait  impossible  dans 
Khazaramin  de  soulever  la  Bessarabie,  ce  nom  étant  d'un  siècle  trop 
postérieur  :  j'aimerais  mieux  y  voir  une  répétition  de  Kbazars  ou 
mieux  supposer  une  défiguration  de  nom  inextricable.  Bczamin, 
Bohème  ou  Pozamin,  Poznan,  Posen;  comme  Charchar,  iTliarkar, 
Krakar,  Krakow;  Salaki  ne  serait-il  pas  mieux  Polaki,  Polonais,  au 
lieu  de  Valakbi  comme  on  a  supposé. 

Quant  à  Tbogarma,  ben  Gorion  dit  positivement  que  les  seuls  Ongar, 
Bulgar  et  Parsinaks,  établirent  leurs  tentes  sur  le  Danube,  tous  les 
autres  sont  sur  la  Volga.  Je  désirerais  donc  de  retrouver  des  emplace- 
ments convenables  dans  ces  régions-là  pour  Alikanus  (al  Ikanus),  Rag- 
bina,  Buz,  Zabukh  et  Tilmats,  sans  descendre  au  Danube;  de  les  trouver 
dans  ces  régions  où  Ton  connaît  les  Khozars  et  les  Tourks  près  du  fleuve 
Itel  ou  Alclach  (Wolga)  (n). 

Les  ^y^)i^  1:'-Î?"1D  Patzinakh,  Partzinakh,  appelés  par  les  Polonais 
Plelchinghi,  sont  les  s.*/Lirsr•^  Badjnaks  d'Edrisi  et  Phasiânke  de  Ben- 
jamin, la  Bourie,  serait  la  Boulgarie,  Boulgria,  Bougria,  Bouria,  établis 
toutes  deux  sur  le  Danube. 

Ces  Pielcbinghi  n'offrent  que  les  débris  des  anciennes  hordes  puis- 
santes sur  les  steppéâ  de  la  mer  Noire.  Elles  avaient  été  détruites 
vers  1050,  par  les  Komans  ou  Polovtzes:  les  débris  se  retrouvent  en 
partie  au  delà  du  Don,  signalés  par  Edrisi  sous  le  nom  de  Badjnaks;  en 
partie  ils  se  sont  réfugiés  vers  les  frontières  de  la  Boulgarie  et  de  la 
Hongrie,  où  ils  se  fondirent  avec  les  populations  locales. 

Pethakhia,  passant  en  1175  de  Kiov  vers  la  Tauride,  n*a  vu  dans  ce 
qu'il  appelle  Kcdar,  que  les  Polovtzi,  Komans,  habitants  très-paisibles 
à  cette  époque ,  vivant  sous  leurs  tentes  et  cultivant  le  pays.  Il  n'a  vu 
là,  ni  Patzihak,.ni  Khozars.  Ceux-ci  ont  été  déroutés  encore  vers  1016, 
quelques  hordes  de  Khàzars  existaient  aussi  au  delà  du  Don  et  dans  la 
Tauride,  à  laquelle  elles  ont  donné  le  nom  de  Ghazarie.  C'est  pourquoi 
Pethakhia  dit  que  la  mer  s'avance  dans  les  terres  et  sépare  Kédar  de  la 
Khazarie.  C'est  l'isthme  qui  reçut  postérieurement  le  nom  de  Perekop. 
La  Khazarie  de  Pethakhia  n'est  que  la  Tauride.  S'il  dit  qu'à  son  extré- 
mité coulent  dix-sept  rivières  qui  finissent  par  se  réunir  :  il  perd  de 
vue  l'espace  de  la  mer  Zabach  qui  sépare  la  Khazarie  de  l'embouchure 
véritable  du  Don,  et  il  répète  sur  cette  réunion  de  nombreuses 
rivières  un  conte  attaché  au  Don  ou  Tanais.  J'ai  ajouté  l'épithète  de 
véritable  à  l'embouchure  du  Don  près  d'Azof ,  ancien  Tana,  parce  que 
le  détroit  de  Jenikale,  qui  sépare  la  Krimée  de  l'Asie,  était  aussi 
considéré  comme  embouchure  du  Tanais  :  c'est  l'extrémité  de  la 
Khazarie.  Les  eaux  du  Tanais  roulent,  dit-on,  par  la  mer  Zabach  jusqu'à 
celte  embouchure.  De  même  on  distingue  sur  les  eaux  de  la  mer  Noire 
le  courant  de  plusieurs  fleuves.  Les  eaux  du  Danube  se  font  riemarquer 
jusqu'à  Consianiinople:  aussi  quelques  écrivains,  à  différentes  époques, 
considéraient  le  détroit  de  Conslantinoplc  comme  l'embouchure  du 
Danube. 

(11)  KUasdaï  énumérant  ces  enfanrts  de  Thogarma,  subslilue  Avar,  Aumin  el  Savour,  à  la  pince  de 
Ikanus,  Raghina  et  Xabucli. 


46  BENJAMIN   DE  TUDÉLE. 

Pardonnez-moi  celte  petite  excursion  qui  traverse  le  passage  de 
Petakhia  de  la  Khazarie  à  Thogorma  :  parce  que  je  ne  voulais  pas 
perdre  de  vue  votre  savante  publication  de  son  voyage,  que  vous  allez 
reproduire. 

Je  reviens  encore  à  Benjamin,  ou  plutôt  à  ses  commentateurs  qui 
Faccusent  dimposture,  de  fourberie,  et  qui,  avec  leur  colère  et  leur 
maladresse,  font  rire  quelquefois  le  bon  sens.  Voici  la  preuve. 

Benjamin  ayant  parlé  de  la  Bohême  qu*il  a  qualifiée  de  pays  de  y^^f) 
Praga,  remarque  que  la  Russie  est  un  grand  royaume,  qui  s*étend 
depuis  la  porte  de  Praga  jusqu'à  la  porte  de  p^  Pin  ou  Fin,  celte 
grande  ville  qui  est  à  Textrémité  du  royaume.  Les  commentateurs  se 
cassaient  la  tète  afin  de  retrouver  cette  porte  d'une  grande  ville  à 
l'extrémité  de  la  Russie  et  ils  i*ont  cherchée,  où?  dans  Pinga  ou  Pinko, 
dans  Pinsk  en  Litvanie,  dans  Saint-Nicolas  sur  la  Dvina;  ils  l'ont 
reconnue  dans  Pin ,  Pape  Nicolas  par  abréviation.  Sommes-noas  avec 
tous  ces  commentateurs  près  de  la  porte  d'une  grande  ville?  sommes- 
nous  à  l'extrémité  de  la-  Russie?  n'avons-nous  pas  le  droit  de  crier 
contre  l'imposture  qui  voudrait  nous  faire  voir  à  l'autre  extrémité  de 
la  Russie  ou  Pinsk  ou  un  pape  Nicolas  en  abrégé!  (li). 

La  ville  de  Praga ,  dans  le  langage  de  Benjamin ,  est  le  pays  de 
Bohème;  la  porte  de  Praga,  ce  sont  les  frontières  de  Bohême,  par 
conséquent  la  porte  de  la  grande  ville ,  de  la  cité  de  Fin ,  ce  sont  les 
frontières  du  pays  de  Fin,  de  Finois,  Finlandais,  Finland,  Finmark, 
situé  à  l'extrémité  de  la  Russie.  Au  reste ,  sans  toucher  à  la  porte  du 
génie  de  langues  orientales,  tournez  quelques  pages  de  Benjamin  et 
vous  trouverez  les  portes  de  provinces  persanes. 

Voici  les  réflexions ,  que  je  me  proposais  de  soumettre  à  votre  jnge- 
ment.  Approuvez-les,  ou  désapprouvez-les,  et  veuillez  conserver  dans 
vos  amitiés  inaltérables.  Votre  dévoué* 

(il)  Spreofel  (Gesch.  ùer  gëogr.  Entdekttngen  p.  S77,  S7S)  au  sujet  de  la  ville  de  Fin  lève  toute 
difficulté,  mit  einer  kleineo  Bucfaataben  veraeaderung,  et  la  change  en  V!3  Chive  on  Kiiov  capital 
aituëe  an  centre  des  pays  russiens.  —  S  Ificoks  (couvent)»  et  Pingo  situés  aux  environs  d'Ardian- 
gelsk,  ont  été  découverts  par  les  anglais  en  I5S3,  et  figureat  sur  toutes  les  cartes. 


ASIE. 


DEUXIÈME     LETTRE. 


Braielles ,  8  août  1847. 

En  demandant  mon  avis  sur  quelques  points  obscurs  de  Benjamin  de 
Tudèle,  vous  m^avez  provoqué  tout  d'abord  à  reprendre  de  nouveau  la 
lecture  de  son  ouvrage.  Ma  foi ,  je  ne  sais  pas  m*expliquer,  quelle  furie 
s^est  emparée  de  plusieurs  de  ses  commentateurs  qui ,  tout  en  puisant 
de  son  ouvrage  des  renseignements  importants  pour  celte  époque 
reculée,  s'acharnaient  à  ternir  sa  mémoire  et  la  sincérité  de  ses  témoi- 
gnages. Ma  lecture,  au  contraire,  me  faisait  croire  que  je  voyageais 
avec  lui,  que  sa  compagnie  me  frayait  le  chemin  à  travers  les  obstacles 
déversés  dans  l'espace  ;  qu'il  m'indiquait  à  regarder  ce  qu'il  avait  vu; 
qu'il  me  présentait  les  personnes  de  sa  connaissance.  Il  est  vrai  que  tout 
y  est  d'une  extraordinaire  insuffisance,  souvent  présenté  dans  un  vague 
ou  une  confusion  presque  inextricables,  mais  appuyé  sur  une  certaine 
connaissance  qui  exige  des  recherches.  On  a  dit  que  le  pèlerinage  n'était 
qu'une  forme  de  sa  narration.  C'est  indubitable.  Mais  quoiqu'il  n'in- 
dique ni  jour,  ni  mois  de  ses  traverses,  ni  direction  des  distances  et 
des  routes  :  on  se  voit  avec  lui  dans  un  voyage  réel,  quand  il  déclare 
avoir  vu  quelque  objet ,  ou  quelque  personne.  S'il  a  voyagé  et  vu  bien 
des  choses,  certainement  il  n'a  pas  visité,  ni  les  (echabites,  ni  le  pays 
de  Tzin,  ni  la  mer  Nikfat,  ni  l'intérieur  des  montagnes  Hallon.  Il  s'ar- 
rête obscurément  pour  nous,  dans  certains  lieux,  pour  entrer  dans  la 
description  des  environs  et  du  reste  du  monde,  pour  rapporter  quelque 
relation  véritable  ou  fabuleuse ,  afln  de  donner  uu  recensement  et  la 
situation  des  enfants  d'Israël  de  sa  connaissance.  C'était  son  but  essen- 
tiel. Partout  où  l'on  peut  constater  sa  présence  on  ne  saurait  lui  repro- 
cher rexagcraiion  dans  le  nombre.  Sur  sa  route  en  Europe  :  1,500  à 
Palcrme;  2,000  à  Thèbes;  â,500  à  Constantinople ,  sont  les  plus  hauts 
chiffres;  ailleurs  il  donne  des  chiffres  inférieurs  :  quelques  cents  ou 
dizaines,  en  tout  12,765.  Il  est  à  regretter  qu'il  n'ait  donné  aucun 
renseignement  sur  ceux  de  l'Espagne,  son  pays  natal ,  ni  sur  ceux  de 
Hongrie,  de  Pologne,  d'Allemagne,  où  il  n'alla  pas.  Ce  qu'il  relate  des 
populations  en  Asie,  est  certainement  fondé,  en  partie  seulement,  sur 
des  relations  positives,  eu  partie  sur  des  ouï  dire.  Le  nombre  le  plus 
considérable  à  Hamdan  et  à  Samarkand,  monte  dans  chacune  de  ces 


48  BENJAMIN    DE   TUDÈLE. 

villes  OU  de  leurs  cantons,  à  50,000  :  chiffre  assez  rond.  Il  y  en  a  autant 
à  Khebar  et  beaucoup  plus  de  rechabites. 

Vous  savez  retrouver  les  princes,  les  savants  de  la  connaissance  de 
Benjamin  qui  dominaient  par  leur  sagesse  les  enfants  dispersés,  et  vous 
avez  plus  d'une  fois  suivi  votre  voyageur  de  station  à  station  jusqu^à 
Ilaleb  et  au  delà  de  Tigre.  C'est  dans"  cette  description  ultérieure  que 
vous  me  signalez  quelques  difficultés  géographiques,  sur  lesquelles  vous 
êtes  curieux  d'avoir  mon  avis. 

Gomme  indicateur  de  ces  points  obscurs  vous  me  recommandez  ton- 
jours  par  préférence,  le  commentaire  de  Baratier.  Cet  enfant  précoce, 
qui,  avant  d'aboutir  à  Tàge  de  l'adolescence,  par  son  savoir,  par  ses 
connaissances  prématurées  avança  beaucoup  plus  que  ses  prédécesseurs 
l'explication  du  voyage  de  Benjamin,  répète  mainte  fois  :  ce  nom  m'est 
inconnu;  nous  imitons  volontiers  cet  aveu,  quand  les  renseignements 
ou  les  connaissances  nous  feront  défaut.  Mais  souvent  le  docte  adoles- 
cent de  onze  ans ,  entraîné  par  l'opinion  de  l'époque,  qui  guidait  sa 
conscience,  s'emporte,  vocifère  contre  l'inventeur,  le  menteur;  mal 
avisé  il  condamne  le  juif  errant.  Partant  avec  Benjamin  de  Haleb,  tout 
d*abord,  à  nos  premières  stations,  de  Balilz,  Kalah  gaber,  et  Rakka, 
nous  sommes  accablés  de  ces  injustes  déclamations.  Avec  Balitz  il  se 
porte  sur  Bira  ;  il  a  pu  cependant  trouver  sur  les  cartes  de  Sanson  et 
d*autres  de  son  temps  Baies  sur  l'Ëufrate.  Les  cartes  de  Sanson  dési- 
gnent Kalahgaber,  sous  le  nom  de  Dauser;  celles  de  Delisle  inscrivirent 
l'appellation  de  Giabar.  Le  docte  adolescent  ne  trouvant  pas  de  nom 
analogue  sur  la  place,  annote  en  passant  (note  15,  du  cbap.  yhi, 
page  lâ8)  que  l'appellation  de  Kalahgaber  répond  à  Krach  de  Montréal, 
et  examinant  ensuite  la  route  de  Tadmor  jusqu*à  Bagdad  (note  \  du 
chap.  xn,  p.  156  et  suiv.),  persifle  le  voltigeur  assez  ingénieusement, 
niais  avec  peu  de  prudence.  Je  ne  veux  pas  entrer  en  polémique  avec 
le  jeune  homme  de  mérite,  je  veux  simplement  vous  exposer  ce  que 
j'ai  remarqué. 

Balilz  ou  Fethora  n"linD  V^^NS  (wh''^  ^«^*«  chez  le  copiste  Gerson) 
est  Baies  d'aujourd'hui  et  j>JL^  des  écrivains  arabes.  Nommé  par 

Edrisi  (m,  7,  p.  555)  p«u  d'années  avant  Benjamin,  il  se  Ireuve  déterminé 
en  longitude  et  latitude  géographiques,  par  Kias,  ouvrage  du  xm*  siècle, 
cité  par  Aboulféda. 

L'auteur  de  Kias  détermine  de  même  la  position  de  y^DI  ll^iy'^p 

n'^21î2  Kalahgaber  ou  Selah  midbara,  de  Kelat  djebar  j^^^  a»1^  ; 

voici  ce  qu'en  dit  Aboulféda  :  Kalatdjabar,ou  le  fort  de  Djabar  s'appelait 
anciennement  Daousariah,  du  nom  de  Daouser,  employé  de  Noman  ben 
Mondjari,  roi  de  Hira,qui  le  fit  construire  quand  il  administrait  les  fron- 
tières de  la  Syrie.  Ensuite  il  s'empara  du  fort  Saboheddin  Djabar  le 
kaschirien  et  le  posséda  jusqu'à  sa  vieillesse  qui  le  priva  de  la  lumière. 
Depuis  ce  temps,  le  fort  changea  de  nom.  Les  deux  fils  du  dit  Djabar, 
dont  le  brigandage  causait  des  inquiétudes,  furent  dépossédés  par  le 
seldjonk  Melik  schah  (vers  1060).  Enfin,  ce  fort  abandonné,  tomba 
en  ruine.  Il  est  dans  le  Djezira  (diar  Bekr)  sur  les  rives  septentrionales 
de  l'Eufrat,  sur  un  rocher  inaccessible^  entre  Baies  et  Rakka.  Benjamin 


ASIE.  49 

a  pu  par  conséquent  connaître  le  nom  de  Djebcr.  Avant  lui ,  Edrisi 

n'en  avait  parlé  que  sous  le  nom  de  Daouser.  Pour  se  rendre  d'Aleppe 

à Rakka,  dit-il,  il  y  a  deux  chemins,  dont  un  passe  par  Khoschab,  Baies, 

j^^^  Daouser  à  Rakka  (IV,  5,  p.  156).  C'est  le  chemin  suivi  par  notre 

voyageur. 

Sur  la  gauche  du  voyageur  s'étend  le  désert  de  Khaschab  ou  Semava 
(Edrisi,  IV,  p.  555).  C'est  sur  les  plaines  de  ce  déserl  que  fut  mesuré  le 
degré  du  temps  de  Mamoun,  855  :  entre  Tadmor  et  Vasit,  comme  le  dit 
Ibn  lounis  (en  1007),  et  spécialement  entre  Tadmor,  (qui  est  entre 
Irak  et  Syrie)  et  Rakka,  comme  l'explique  Massoudi  (en  957),  où  Ton 
observa  le  soleil  dans  le  désert  de  Sandjar,  dépendant  de  diar  Rabia 
(notices  et  extraits,  t.  I,  p.  49,  52).  La  mesure  avait  été  exécutée, 
répète  Aboulféda  (eu  1551),  sur  la  plaine  de  Sandjar  (Reiskii  vcrsio, 
p.  156).  Or,  Rakka  est  à  l'entrée  de  la  terre  de  Sandjar,  dit  positive- 
ment Benjamin,  et  sépare  le  pays  de  Sandjar  du  royaume  des  Turks 
(chap.  VIII,  p.  128),  qui  dominaient  dans  le  Djezira. 

Deux  journées  de  Rakka  est  mn  Haran,  et  2  journées  de  ces  anciens 
Carres,  l'endroit  où  est  la  source  de  "i^^D^X  Alkhabor  ou  Chaboras,  d'où 
Ton  arrive  en  2  journées  à  ]'»2''î{;3  Nitzibin.  Cet  endroit  est  Ras-el-aïn 

j^-jul  ^«,tj  qui  est  unç  ville  considérable,  dit  Edrisi.  On  y  voit  près 

de  trois  cents  sources,  environnées  de  grillages  en  fer,  pour  qu'on  ne 

puisse  y  tomber.  Ces  eaux  forment  la  source  du  j^L=^  Khabour,  rivière 

qui  va  se  jeter  dans  l'Eufrate  auprès  de  Kirkesia  (IV,  6,  p.  150).  11  y  a, 
ajoute-l-il,  de  Harran  à  Ras-el-aïn,  5  journées  ,  et  de  Ras-el-aïn  à  JNis- 
sibin,  5  journées  (p.  155). 

Je  ne  saurais  vous  dire,  d'où  Benjamin  a  pu  tirer  l'assertion  bizarre, 
que  Khabor ,  après  avoir  traversée  le  pays  des  Mèdes ,  tombe  dans  la 
montagne  de  Gozan.  Certainement  elle  n'est  pas  le  produit  de  ses  pro- 
pres explorations,  mais  plutôt  d'une  érudition  mal  conçue  et  maladroi- 
tement appliquée.  La  montagne  Gozan  est  un  produit  biblique  :  du 
temps  de  David,  on  disait  que  Khabor  était  un  fleuve  du  pays  de  Gosan  ; 
Madaï  vient  d'un  autre  point  de  l'érudition,  où  au  nombre  des  terres  de 
l'exil,  Habor,  Gozan  et  Madaï  se  trouvent  dans  les  mômes  versets.  Le 
ravennate  du  ix**  ou  x«  siècle  dit  avoir  lu  dans  l'ouvrage  du  philosophe- 
cosmographc  romain,  du  vi*'  siècle,  nommé  Castorius,  que  Media  minor 
et  Gozar  (Gozan)  dicitur,  per  quara  plurima  transeunl  flumina,  inter 
caeleros  Nabor  (Chabor)  (anonym.  ravenn.  II,  10,  p.  29, 50).  Singulière 
consonnance  ! 

Nous  passons  sans  obstacle  par  Guezir  bcn  Omar,  par  Almolzal,  à 
travers  les  ruines  de  Ninive,  où  V ohscnve  Arbal,  à  1  parasange  de 
Ninive,  embrouille  notre  itinéraire.  Baratier  a  signalé  à  cet  effet  trois 
Arbal,  dont  une  grande  ville,  Arbelles,  estais  parasanges  de  Mo- 
soul,  au  midi,  située  effectivement  sur  la  route  de  Mosoul  à  Rehobot. 
Nous  ne  savons  pas  où  est  cette  grande  ville  dans  les  déserts,  ni  d'où 
Baratier  aurait  appris  son  existence.  J'ai  examiné  les  caries  publiées 
dans  les  Pays-Bas ,  et  celles  de  Sanson ,  de  Duval ,  De  la  Rue ,  Delisle 
et  quantité  de  postérieures,  d'Arrowsmilh ,  et  d'autres.  J'ai  fouillé  dans 
les  descriptions  de  Djezira  qui  me  sont  connues,  sans  pouvoir  rencontrer 
aucun  vestige  de  celle  ville.  Il  est  aussi  douteux ,  à  mon  avis,  si  Arbal, 

IV.  4 


50  BENJAMIN  DE  TUDÊLE. 

distante  i  parasange  de  Ninive,  serait  sur  le  chemin  de  Rehobot.  Ben- 
jamin la  nomme  accidentellement ,  l'indiquant  comme  proche  des  rui- 
nes. La  fameuse  Arbelle  n'est  pas  trop  éloignée.  Ensuite  il  retourne  à 
la  description  de  Niuive,  d'où  il  compte  5  journées  à  Rehobot, 

Je  ne  m'arrête  pas  sur  les  distances  qu'il  donne  ordinairement  insuf- 
fisantes. 11  n'exagère  pas.  Il  compte  de  Rohobot  à  Karkemis  i  journée; 
de  Karkemis  à  Poumbedilha  2  journées  seulement.  S'il  copiait  les 
descriptions  des  arabes,  il  a  pu  être  surpris  plus  d'une  fois  par  des 
chiffres  incertains  ou  erronés.  Quoique  moins,  les  chiffres  du  caractère 
hébreu  présentent  les  mêmes  surprises. 

Harda  rrnr\  distante  de  5  journées  de  Poumbeditha,  est  sans  doute 

j^^\  Alhathr,  Hatra.  Okbara  rTQp^V  |r^  située  sur  l'Eufrate,  déjà 

dans  l'Irak ,  2  journées  de  Hathra.  Ces  villes  peu  considérables  méri- 
taient d'être  signalées  par  le  voyageur,  si  elles  possédaient  une  popula- 
tion Israélite  l'une  de  15000  l'autre  de  iOOOO.  C'est  la  première  fois  que 
la  description  du  voyageur  offre  des  sommes  aussi  élevées. 

D' Okbara,  en  descendant  l'Eufrat,  nous  entrons  dans  Bagdad.  Je 
vous  abandonne  la  confrontation  de  la  description  avec  celle  des  écri- 
vains arabes  :  en  attendant  je  prendrai  en  considération  quelques 
pays  de  la  terre,  où  le  chef  de  la  captivité  donne  la  permission  d'éta- 
blir des  rabbins  et  des  chantres  (Denj.  chap.  XII,  p.  149, 150). 

La  Djezira  se  divisait  en  trois  diars  (habitations)  :  Rabiah ,  Modhar 
el  une  portion  de  Dekri.  Un  contemporain  de  Benjamin,  Ali  ben  Aladir 
le  djezirien  (mort  en  1255),  dit  dans  son  lobab  :  que  la  Djezira  com- 
prenait quantité  de  villes  et  toute  la  province  de  Diar-bekr  (Aboulf. 
Reiskii,  p.  257).  Or,  il  distingue  le  Diarbekr  de  Djezira ,  dans  laquelle 
il  était  inclus.  Aussi  Benjamin  sépare  Diarbekr  de  Mésopotamie  dans 
son  énumération  des  terres  où  le  chef  de  captivité  installait  les  rabbins. 
Les  cartes  modernes  négligent  d'inscrire  le  Diarbekr  comme  province. 
Les  cartes  des  xvi  et  xvn"  siècles,  tout  au  contraire,  donnaient  le  nom 
de  Diarbekr  à  toute  la  Mésopotamie  et  elles  passent  sous  silence  l'ap- 
pellation de  Djezira. 

La  terre  ^p  Kout,  dont  les  populations  habitent  le  mont  Ararat,  n'est 
autre  chose  qu'Imiret,  et  le  pays  jusqu'à  l'embouchure  du  Fas  dans 
la  mer  noire;  Imiret  appelle  Koutais,  qu'on  écrivait  anciennement 
Gotiana.  La  chaîne  de  montagnes  venant  du  pic  d'Ararat  s'y  pro- 
longe vers  le  nord ,  pour  se  rapprocher  par  différentes  branches  du 
Kaukase,  du  pays  de  ^''^b^<  Alania  (des  Os  ou  Ossetes),  pays  environné 
de  montagnes  qui  n'ont  d'autre  issue  que  par  les  portes  de  fer  nytfi' 

^nZ3  «w^l^^lw'l-^J  qu'y  a  fait  Alexandre,  où  est  la  nation  appelée 

Alains,  C'est  par  cette  porte  qu'on  se  rendait  anciennement  chez  les 
Khozars,  dont  le  khan  suivait  la  loi  de  Moïse. 

De  plus,  continue  Benjamin,  dans  les  synagogues  du  pays  de  Sikharia 
K''1D"'D  jusqu'aux  montagnes  ô'Assona  HjDN'  As-sona,  toutes  les  synago- 
gues reçoivent,  du  chef  de  la  captivité,  la  permission  d'avoir  des  rab- 
bins. Recardez  la  carte  du  Kaukase  de  Klaproth ,  vous  y  voyez  au  nord 
de  Kout  (Imiret),  à  l'ouest  du  défilé  de  Dariel,  une  immense  chaîne  de 
montagnes  Brouts  sabdseli  ou  Sekara,  où  le  fleuve  Terek  et  quantité 
d'autres  rivières  qui  coulent  vers  le  nord  et  vers  le  sud,  prennent  leurs 


ASIE.  51 

sources.  Massoudi ,  en  957,  avance  qu'il  y  avait  dans  le  Kaukase  300 
différents  idiomes;  Ibn  Haoukal  s'étant  rendu  en  977  dans  divers  villa- 
ges de  cette  chaîne ,  s'est  convaincu  de  la  vérité  de  cette  assertion  ; 
Alhassan  ben  Ahmed  le  mollabite ,  Tazzizieu  eu  980,  dit  que  cette  mon- 
tagne porte  le  nom  de  djebal  al  soni  ^^y**^^^  J^=^   djehal-assoni 

(mont  d'idiomes),  à  cause  de  cette  énorme  quantité  de  peuples  et  de 
langues  {Edrisi,  V,  6,  p.  530;  Abulf.  Reiskii ,  p.  179).  Al-soni , 
As-soni,  prononciation  connue. 

Le  texte  de  la  première  édition  de  Benjamin  donne  encore  après 
Sikaria  le  nom  du  pays  C^Dilinn  Halhorgamim,  Thogarma,  nom  bibli- 
que des  Géorgiens ,  qui  sont  nommés  de  suite  par  leurs  propres  déno- 
minations. 

Etaient  comprises  encore  dans  le  ressort  du  chef  de  la  captivité  les 
synagogues  du  pays  de  V^^y)^  Ghergheniens  y  jusqu^aux  fleuve  yijy^^ 

Ghihoun,  ce  sont  les  ]>t^;i'i;in  Ghergheséens,  Pour  rétablir  cette  phrase 
embrouillée,  il  n'y  a  qu'à  déplacer  et  échanger  les  deux  noms  de  peu- 
ples. Ghergheséens  sont  les  Thogarmim  Géorgiens,  et  Ghergheniens  les 
Djordjans  de  l'autre  côté  de  la  mer  kaspienne  rapprochée  à  Djihoun. 
Et  tout  relevait  du  chef,  jusqu'aux  ninDH  nyi^  portes  (limites, 
frontières)  des  provinces  et  aux  contrées  du  n'^^^tû  Toboth  ou  Tibet  et 
jusqu'au  n^n  hind. 

Ayant  heureusement  achevé  le  petit  tour  du  monde,  nous  nous  rejoi- 
gnons à  Bagdad,  où,  dans  cette  résidence  du  chef  de  la  captivité,  il  n'y 
a  que  1000  de  ses  fidèles,  tandis  que  tout  près,  à  2  Jouruées,  une  grande 
ville ,  Resen  ou  Ghehiagan,  en  possède  5000,  et  à  1  journée  de  là  Babel, 
2000,  et  à  5  milles  delà,  Hela,  10000,  et  peu  éloignée  Kou/a,  7000 
(chap.  Xni).Ce  pays  de  Babylonie  fut  peuplé  à  la  suite  des  discordes  et 
de  la  dispersion  des  séjournants  dans  le  pays  d'Ararat.  Petahhia  ne  fait 
monter  toute  cette  population  qu'à  6000  (p.  34)  et  les  jouruées  de 
chemin  de  Petahhia  sont  différentes  des  autres,  parce  qu'il  compte  1  i/a 
de  Bagdad  au  tombeau  d'Ezechiel  (p.  42);  â  de  Bagdad  à  Babylone 
(p.  70). 

Babel,  aussi  peuple,  n'est  cependant  qu'un  village  qui  remplace  une 
ville  importante,  dit  le  contemporain  Edrisi,  dont  les  édifices  royaux 
ont  subi  les  effets  des  révolutions  du  temps,  mais  il  en  subsiste  des 
vestiges  encore  debout,  qui  attestent  que  c'était  dans  les  temps  anciens 
une  ville  immense  (IV,  6,  p.  161).  Le  palais  ruiné  de  Naboukadnezar 
occupe  un  terrain  de  30  milles;  la  synagogue  est  éloignée  du  palais  de 
20  milles  :  tandis  qu'entre  HiUa  et  Babel ,  il  n'y  a  que  5  milles.  Ces 
milles  sont  évidemment  très-différents.  Un  semblable  désordre  dans  la 
différence  des  milles  obscurcit  les  descriptions  d'Edrisi  et  des  autres 
écrivains  arabes.  Peut-être  trouverez-vous  un  jour  une  variante  raison- 
nable, qui  donnera  au  palais,  au  lieu  de  o  30,  seulement  n  4  milles,  et 
à  la  place  de  n  ^0  d'éloignement  de  la  synagogue,  3  2  milles.  Ces 
variantes  feraient  disparaître  la  discordance  des  milles. 

Je  vous  laisse  étudier  la  carte  des  situations  spéciales  pour  les  environs 
du  tombeau  d'Ezechiel  :  je  ferai  seulement  remarquer  qu'on  ne  peut, 
en  aucune  manière,  se  porter  avec  la  rivière  ^2D  i^hober,  sur  quelque 
fleuve  ou  rivière  de  nom  identique,  ordinairement  éloigne  (Petahh. 


52  BENJAMIN    DE   TUDÉLB. 

note  54).  Cest  le  nom  d'une  petite  rivière,  d'un  canal  ou  d'un  ruisseau 
qui  mouille  le  sol  sépulcral  et  mêle  ses  eaux  avec  Maarsares ,  ancien 
bras  de  TEufrat.  Peut-être  c'est  le  Romyma  de  la  carte  d'Arrowsmith, 
qui  est  en  même  temps  un  embranchement  de  l'autre  bras  de  l'Eufrat. 

Benjamin  poursuit  sa  description  positive  ou  sa  course  par  Neardea 
jusqu'à  Elnahar  ou  Poumbedilha,  comme  s'il  allait  retourner.  Ce  pas 
rétrograde  mérite  d'être  observé  :  il  paraîtrait  que  Benjamin  termina 
ses  courses  vers  l'orient  et  rétrograda  pour  se  rendre  en  Egypte. 

De  Poumbeditha  il  a  déjà  parlé  ci-dessus  p.  135,  dit  Baratier,  (note, 27, 
p.  167),  mais  ce  récit  est  dilférent  :  les  deux  principales  contradictions 
qui  sautent  aux  yeux  sont:  1*  que  là  il  appelle  i:nv':>5<  Aljubar,  ici  "i33^î< 
Elnabar,  et  ^*»  ci-dessus  il  place  2000  juifs,  ici  3000;  on  aurait  bien 
dispensé  notre  savant  voyageur  de  faire  de  telles  répétitions  jointes  à 
des  contradictions.  A  mon  avis,  elles  ne  méritent  pas  tant  de  courroux. 
Benjamin  ne  suivit  pas  uniquement  les  narrations  orales  des  arabes, 
mais  il  puisa  plus  d'une  fois  dans  leurs  ouvrages.  S'il  n'y  trouvait  point 

de  nom  de  Poumbedilha,  il  y  trouvait  »  L  J  ,  LJ  !  »  L)  !  l'autre  nom  donne 

également  Jubar,  Anbar,  Nabar,  et  même  Ambar,  comme  il  est  presque 
accepté  dans  nos  cartes  récentes.  Nous  ne  sommes  que  trop  habitués  à 
ces  dédiacritisisations  arabes. 

Mais  vous  saurez  mieux  désarmer  l'humeur  de  notre  savant  commen- 
tateur, quand  vous  arriverez  à  établir  Torigine  de  cette  contradiction 
dans  la  dépravation  du  texte  par  le  copiste,  à  quoi  vous  possédez  une 
indication  certaine. 

Benjamin  sort  de  la  savante  Poumbeditha  et  s'engage  par  imagination 
dans  les  déserls  de  Seba,  ayant  au  nord  le  pays  de  Sinear,  au  sud  l'heu- 
reux Yemen,  qui  touche  aux  Indes  (à  leurs  mers).  Après  21  journées  de 
marche,  il  se  trouve  au  milieu  des  sables  et  des  déserts,  dans  le  pays 
fort  vaste  des  23'^  rechabiles,  où  il  y  a  40  villes,  200  villages;  des  villes 
de  15  milles  de  longueur  et  d'autant  de  largeur;  des  palais,  des  vergers; 
une  population  guerrière  de  450,000  âmes,  sans  compter  les  pillards 
arabes  :  le  tout  dans  le  désert  sablonneux  et  aride.  Il  rattache  cet 
empire  à  la  ville  arabe  -^^o  Khaïbar  j^^  peu  considérable,  à  la 

place  forte  UJ  Taïma  î<o^n  ^l  peut-être  à  à^)\  Thania  D''i<Jn 
Tannais,  qui  se  trouve  sur  la  route  de  Jamama  à  la  Mekke  (Edrisi,  II, 
6,  p.  155);  enfin  Tilimas  est  comparé  à  Salma  par  Baratier  (diss.  VI,  9). 
Certainement  le  conte  concernant  les  rechabites,  n'est  pas  de  son  inven- 
tion, losip  ben  Gorion  (II,  9)  l'avait  relaté  antérieurement.  Benjamin 
désigne  l'Arabie  comme  domicile  des  rechabites.  Pctahhia  qui  le  suivit, 
le  fait  habiter  dans  le  pays  de  Gog  et  Magog  au  delà  des  montagnes 
ténébreuses  (p.  76),  conformément  à  l'opinion  de  losip  ben  Gorion.  On 
voit  que  deux  opinions  divisaient  les  croyants  :  l'une  plaçait  les  recha- 
bites dans  le  désert  des  mystérieux  Themoudites,  les  autres  dans  les 
ténèbres  des  Tibétains,  descendant,  suivant  les  Arabes,  de  Toba 
d'Yemen ,  voisins  de  Gog  et  Magog ,  objet  de  la  prédilection  arabe.  Je 
présume  quelque  analogie  dans  celte  coïncidence  décentes  mystérieux, 
qui  aurait  pu  agir  dès  l'origine  sur  différentes  opinions. 

Mais  nous  nous  engageons  trop  légèrement  dans  ces  régions  fantas- 
tiques et  clûmériques,  sans  savoir  comment  en  sortir.  Benjamin  nous 


ASIE.  55 

conduit  à  la  rivière  Viray  où  se  baignent  environ  50,000  israélites; 
puis  en  7  journées  dans  la  ville  ^DXi  Nasl,  Nasel,  où  il  compte  10,000 
israélites.  Naset  est  évidemment  une  erreur  d'impression  ;  il  faut  lire 
tCDXI  Vaset,  d'où  en  5  journées  on  arrive  à  Basra. 

Vous  dites  (note  à  Petahliia,  p.  62)  que  dans  le  pays  de  Havizah,  vis- 
à-vis  de  Korna  et  près  de  la  rivière  de  Senne,  on  voit  encore  aujourd'hui 
un  vieux  bâtiment  qui  passe  pour  être  le  tombeau  du  prophète  Esdras. 
Cette  rivière  Senne  des  cartes  anciennes,  porte,  sur  les  cartes  récentes 
le  nom  de  Kerkhah.  Benjamin  rappelle  niiDD  Xl^D  ^Hj  wa/ir  Somra, 
Samoura.  Jehuda  Kharizi  explique  ces  différences  en  ajoutant  que  ce 
lieu  s'appellait  en  hébreu  Ahava  ou  Nahr-ahava  (fleuve  Hauweza).  En 
examinant  la  suite  de  nombreuses  cartes  de  différentes  époques,  on  peut 
remarquer  qu'on  lui  donnait  d'autres  noms  encore  :  Simiée,  Syennéie, 
Sahna,  Senne,  Tiritri,  Tiripari,  Zeymare,  Hawera,  Sous,  Schouz, 
Schousch,  Karouza,  enfin  Rarha,  Kerah,  Kerhia,  Kerkhah.  D'où  pro- 
viennent tant  de  noms?  les  uns  d'erreurs,  les  autres  (Sahna  ou  Senne) 
de  la  confusion,  les  autres  encore  de  l'appellation  locale  ou  d'une  ville. 
Quanta  Samoura  ou  Zeymare,  pour  retrouver  l'origine  de  ce  nom, 
Baraticr  a  eu  recours  à  une  ville  assez  considérable  de  Laurestan,  nom- 
mée Semira  ou  Semiran,  éloignée  de  15  milles  dlsbahan.  Ce  nom  se  fait 
connaître' sur  ce  point  avec  plus  de  certitude  dans  la  chaîne  de  la  mon- 
tagne ^j^^^A^  Samira,  qui  se  déroule  au  sud  d'Isbtihan  (Edrisi,  III,  7, 
p.  556).  Mais  le  fleuve  Kerkhah  ne  vient  pas  de  là.  Il  sort  en  plusieurs 
branches  des  monts  Ëlevend ,  non  loin  de  Hamdan  ;  roule  ses  eaux  près 
de  Sous  et  Havez,  traverse  ce  canton  et  tombe  dans  le  Tigre  non  loin  de 
Korne,  où  le  nom  Seimare  est  aussi  fréquent  que  l'appellation  de  Kerkhah. 
Les  marécages  de^amarga,  situés  au  sud  de  Tib,  louchent  Kerkhah  ;  la 
rivière  qui  baigne  Seimarra,  située  au  nord  de  Tib,  se  jette  dans  Kerkhah. 
Il  faut  chercher  ces  renseignements  sur  les  cartes  toutes  récentes. 

Les  dernières  explorations  ont  changé  l'intérieur  de  l'immense  Iran , 
elles  ont  trouvé  un  bien  différent  ordre  de  ses  viscères,  et  c'est  à  tel 
point  qu'il  est  dangereux  quelquefois  de  consulter  sans  réserve  les 
cartes  précédentes  et  plus  anciennes.  Si  j'ai  recours  à  la  carte  d'Ar- 
rowsmith,  c'est  que  je  n'en  ai  pas  de  plus  détaillée.  Elle  est  bonne  pour 
comprendre  le  cours  du  fleuve  Kouran  vers  lequel  nous  nous  approchons. 

Vous  savez  que  du  temps  de  Benjamin  et  de  Petahhia,  les  arabes, 
depuis  plus  de  deux  siècles  déjà,  répétaient,  qu'à  l'époque  de  la 
conquête,  après  la  prise  de  Touster  en  641,  Abou  Mousa  el  Akhari 
tpouva  le  cercueil  de  Daniel  au  fond  de  la  rivière  Zab  (Touster),  et  que 
l'ayant  transporté  par  le  canal  à  Sous,  il  le  ût  submerger  sous  les  eaux 
du  fleuve  (Kerkhah).  La  narration  la  plus  ancienne  diffère  dans  les 
circonstances  de  la  submersion,  assigne  Irak  comme  le  lieu  de  la  trou- 
vaille, Ischtakhri  en  950,  Ibn  Haoukal  en  977  (versio  Ouseley,  p.  76), 
Edrisi,  en  1154  (III,  6,  versio  Jauberti,  p.  582),  sont  unanimes  dans 
leurs  relations.  Jusqu'aujourd'hui  on  n'a  pas  élevé  de  doutes  :  on  croit 
que  le  corps  de  Daniel  repose  submergé  à  Sous,  où  une  construction 
moderne  de  peu  d'apparence  représente  le  tombeau  du  prophète. 

Touster,  où  pendant  un  certain  temps  le  cercueil  de  Daniel  resta 
expo^,  est  situé  sur  une  éminence  près  du  fleuve  Touster.  Les  ruines 
en  attestent  l'ancienne  magnificence;  celles  du  château  sont  surtout 


54  BENJAMIN  DE  TUDÈLE. 

remarquables.  Sous  est  aussi  en  ruine.  Ses  ruines  occupent  un  espace 
immense,  qui  ne  comprend  pas  moins  de  12  milles  de  longueur  et 
n'offrent  aucun  vestige  de  quelque  place  forte  ou  château  (Hammer, 
mémoire  sur  la  Perse,  dans  le  recueil  de  voy.  t.  II,  p.  535-539). 

Le  fleuve  qui  coule  près  de  Tousler  porte  des  noms  très-variés  : 
Touster,  Abischouster ,  Didjele  (Tigris),  Didjeleischouster,  Ahvaz, 
Didjele  ahvaz  (Abulf.  p.  ov,  oa,  versionis  Reiskii,  p.  171);  Karoum  et 
parfois  chez  les  écrivains  les  noms  de  ses  affluents  :  Mouschrikan, 
Mesirkan,  Abizal,  Dizfoul,  Zable,  etc.  (L'antiquité  rappelait  Choaspes, 
Euleus,  Pasitigris). 

Voyons  maintenant  ce  que  nous  disent  Benjamin  et  Petabbla.  Suivant 
le  premier,  du  tombeau  d'Ësdras  il  y  a  4  milles  (distance  qui  ne  peut 
servir  à  rien)  à  Khouzestan,  qui  est  Elam,  celte  grande  ville  ;  mais  elle 
n*e8t  pas  toute  habitée,  car  elle  est  déserte  et  ruinée  en  partie.  A  son 
extrémité,  au  milieu  de  ses  ruines ,  est  ]t^it^  Schouschan  ou  Soussan, 
château,  autrefois  palais  d'Assuerus;  il  y  a  encore  là  un  grand  et  bel 
édifice  dont  Torigine  remonte  aux  temps  anciens.  Le  Tigre  traverse  la 
ville,  et  c'est  là  que  se  trouve  le  tombeau  de  Daniel  (xv,  p.  172, 175). 
De  même  Petahhia  place  le  tombeau  au  dessus  du  fleuve  Tigre  ^nr^n 
(p.  64-67).  » 

En  admettant  que  Khousistan  qui  est  Elam,  qualifié  de  la  ville  ruinée, 
désigne  une  provitfce  ruinée,  il  serait  évident  à  mon  avis,  que  le 
château  Sousan,  situé  sur  le  Tigre  à  l'extrémité  des  ruines,  est  le  même 
qu'on  voit  aujourd'hui  dans  ses  restes  importants  sur  une  colline  située 
entre  les  ruines  de  Touster.  Or,  tous  les  deux.  Benjamin  et  Petahhia, 
parlent  de  l'antique  emplacement  du  tombeau ,  antérieur  à  l'invasion 
des  arabes. 

Touster  est  situé  à  l'est  du  Tigre.  Nos  deux  narrateurs  nous  disent 
que  dans  des  dissidences  qui  s'élevèrent  entre  les  habitants  Israélites, 
on  s'arracha  le  cercueil  et  qu'on  le  plaça  de  l'autre  côté  du  fleuve.  Ce 
propos  répond  à  la  translation  du  cercueil  à  Sous,  eflectuée  par  Abou 
Mousa;  et  il  pourrait  s'expliquer  par  la  confusion  d'idées  qui  enleva  de 
Touster  avec  le  cercueil  à  la  fois  et  le  nom  du  Tigre  et  le  château 
d'Ahasferus  en  les  transportant  à  Sous  sur  les  rives  de  Kerkhah. 

Mais  que  dire  de  pieux  voyageurs  qui  assurent  avoir  vu  le  cercueil 
submergé,  suspendu  au  dessus  du  pont?  L'un  assure  que  c'est  Sanigar- 
schah,  roi  régnant  alors  qui  ordonna  de  le  suspendre  et  de  bâtir  une 
synagogue  en  l'air;  l'autre  vit  le  cercueil  et  doutant  de  sa  piété,  ou  ne 
voulant  la  mettre  à  l'évidence,  n'osa  passer  sous  le  pont.  (Ben j.  xv, 
p.  174-175;  Petahh.  p.  64-67). 

Faudrait-il  donc,  afin  de  défendre  les  assertions  de  nos  voyageurs, 
supposer  qu'à  un  certain  temps,  on  ne  sait  quand,  le  cercueil  aurait  été 
de  nouveau  retiré  des  eaux  et  serait  resté  à  Sous,  qui  prospérant  sur  ses 
antiques  ruines  à  l'est,  aurait  souffert  une  pénurie  à  l'ouest  de  Kerkhah; 
qu'un  arrangement,  appaisant  les  dissensions  au  sujet  du  cercueil, 
aurait  soulagé  la  misère  d'outre-riverains,  jusqu'au  moment  où  Sanigar- 
schah  intervint  avec  ses  chaînes  de  suspension  ?  C'est  dur,  c'est  difficile. 
Tout  ce  qu'on  pourrait  dire,  c'est  :  qu'abusés  eux-mêmes,  ils  abusaient 
les  autres  en  donnant  une  forme  de  témoignage  occujaire  à  ce  qu'ifs 
n'avaient  jamais  vu.  Il  y  avait  encore  d'autres  contes  arabes  au  sujet 


ASIE.  B»5 

du  tombeau  de  Daniel,  comme  oo  le  voit,  par  ce  qu*en  1555,  relate  le 
persau  Ahmed  de  Tous  (Hammer,  mémoire  sur  la  Perse,  t.  H,  du  recueil 
de  voyages,  p.  555,  556).  Il  s'agit  toujours  de  la  submersion. 

Pardonnez,  mon  ami,  si  je  fouille  le  sol  où  votre  lumière  entreprend 
de  débrouiller  le  chaos.  Je  ne  Tai  fait  que  dans  Tespoir  de  fixer  ma 
plante  géographique  sur  les  décombres  de  Sous  ou  de  Touster.  Le 
terrain  y  est  scabreux  :  je  vais  courir  les  déserts  salés. 

La  domination  du  roi  de  Perse  (Sanigarschah  nxt^l^^DD)  s'étend 
depuis  Tembouchure  de  Samara  ou  Somra  (Kherkah),  jusqu'à  n3D"lDD 
Samarkand;  jusqu'à  la  province  ]^3D^i  T2D^^  T3D^^  Gisbor,  Nisbor, 
Nisbon  (Nisabor),  tout  le  long  du  fleuve  ]'\^^  Gozan.  Ce  nom  bliblique 
est  attaché  cette  fois-ci  au  fleuve  Atrok  (au  delà  duquel  est  le  désert 
Gazos).  Il  n'y  a  pas  de  motif  pour  attribuer  ce  nom  à  Oxus,  parce  que 
Benjamin  Ta  déjà  signalé  par  son  propre  nom  de  Djihoun,  et  Nischa- 
bour  est  trop  éloigné  d'Oxus  pour  s'étendre  tout  le  long  de  ce  fleuve. 

Dans  une  autre  direction,  la  longueur  de  l'empire  persan  s'étend  de 
l'occident  sur  Madaï,  au  centre  il  enferme  les  montagnes  de  ("insin 
Hafton;  à  l'orient  il  embrasse  les  provinces  de  niZ3lW  Tobol  C^ 

D'Elam  et  de  son  château  Sousan  (Toster),  il  y  a  5  journées  à  nDinn 
Roubadbar,  où  l'on  a  20,000  Israélites;  de  là  2  journées  à  la  rivière 
n3N3"ini  Vdnth;  de  celle-ci  4  journées  au  pays  de  nxn'PIO  Molhal,  où 
réside  le  vieillard  de  ]^t^>t^D^x  alkhaschischin,  des  assasins.  J'avoue  que 
je  ne  sais  point  quel  parti  prendre  au  sujet  delà  populeuse  Roubadbar. 
De  Toster  à  Roudbar  au  Dilem,  vers  lequel  on  a  voulu  diriger  l'itiné- 
raire mentionné,  on  n'arrivait  pas  en  trois  journées.  Essayant  cepen- 
dant cette  traverse ,  nous  remarquons  qu'Aboulféda  observe  qu'il  y  a 
plusieurs  Roudbar,  parmi  lesquels  un  village  du  canton  de  Ilamdan 
(Reiskii,  p.  550).  Mais  un  village  ne  convient  pas  à  une  population 
de  20,000  Israélites,  Il  est  bien  de  remarquer  que  la  relation  de  notre 
voyageur,  depuis  sa  visite  au  pays  des  rachabites,  trouve  partout  des 
populations  Israélites  surabondantes  :  ce  qui  est  suspect. 

Prenant  une  autre  direction  à  5  journées  vers  nord-est  de  Toster  on 
'  trouve  sur  la  carte  d'Arrowsraith ,  à  l'est  de  Kaschan, /{u(fa6ad,  qui 
pouvait  servir  de  station  et  de  lieu  de  conscription  des  Israélites  du 
canton  de  Kaschan.  Ensuite  vient  à  2  journées  la  rivière  Yanth ,  qui 
arrose  un  point  du  désert  entre  Yezd  et  Tubus;  la  carte  ofl*re  plusieurs 
eaux  du  désert.  Ce  désert  s'étend  à  4  journées  de  large,  il  est  appelé 

pays  de  Molhat,  ^^-JiPj^  c'est-à-dire  salé  (  JLy3!  sel  en  arabe).  Au 

bout  de  ce  pays, ^ sur  de  hautes  montagnes,  ^demeurent  les  ismaé- 
lites khaschischin  et  de  leurs  quatre  assemblées  on  compte  4  journées 

jusqu'à  n^nxj?  *Aria,  i\y>  Herat  et  les  montagnes  Hafton,  desquelles, 

vers  l'occident,  s'étend  la  Médie  (chap.  xv,  p.  177,  178),  Eldad  le  daniie 
appelait  la  ville  x"^"n  Hara  et  la  montagne  CD^nn  Theom,  l'abime 
(chap.  5,  p.  54,  verso  de  votre  édition)  (i5). 

(13)  Les  assasins  établirent  leur  domination  dans  les  montagnes  à  partir  de  Gbilan  jusqji'à  Herat. 
Leurs  chefs  résidaient  ordinairement  à  Roudbar  dans  le  Taberistan  et  à  Âlmout  dans  le  Gbilan.  Les 
déserts  étaient  limitrophes  surtout  de  Khouestan  Ils  étaient  appelés  ismaliens ,  batheniens,  molhe- 
donn  (ceux  qui  ont  renoncé  au  mo8lemisme),etalgebaI  (des montagnes).  Les  assassins  furent  détruite 
par  Houlagon  en  1S65. 


56  BENJAllIN  DE  TUDÈLE. 

Enfin  je  me  retourne  dans  mes  explorations  encore  plus  vers  le  midi. 
J'ai  cherché  la  situation  de  Roubadbar  d'après  les  distances  données 
par  Benjamin  :  mais  ces  distances  doivent  céder  aux  indications  posi- 
tives de  Marco  Polo,  lequel ,  contrariant  les  distances,  va  confirmer  les 
relations  antérieures  et  nos  explications.  Cent  ans  après  Benjamin, 
Polo  visita  ce  pays  et  traversa  le  chemin  de  molhat.  D'après  ses  ren- 
seignements les  deux  journées  de  Sousan  à  Roubadbar  sont  une  erreur; 
les  autres  distances  ne  sont  pas  suffisantes ,  mais  les  allégations  de 
Benjamin  sont  pleinement  confirmées. 

Marco  Polo  sait  qu'en  parlant  de  lasdie  (Yezd)  on  chevauche  7  jour- 
nées jusqu'à  Creman  (Kerman)  (chap.  54,  I,  21).  De  Creman  il  che- 
vaucha 7  autres  journées  à  travers  les  villes  jusqu'à  une  montagne,  de 
laquelle,  après  deux  journées  de  marche  descendante,  il  entra  dans  une 
grande  ville  Camadu  (Khomda  ou  Hemedan)  située  dans  une  plaine  qui 
s'appelle  Reorbales,  Reobarle,  Reobarbe,  Rebales  (chap.  55,  56, 
I,  22,  23).  A  Texlrémité  de  cette  plaine,  qui  s'étend  5  journées  vers  le 
midi,  on  se  trouve  dans  une  autre  plaine  Formosa,  où,  sur  les  bords  de 
l'océan,  est  situé  Carmos  (Hormouz  de  Mogistan)  (chap.  57,  I,  24). 

Il  dit  encore,  que  de  son  temps,  la  grandeur  de  Camadu  avait  été 
dégradée  par  les  incursions  fréquentes  desTartares;  que  les  habitants 
sont  des  sorciers,  qui  changent  des  jours  clairs  en  des  nuits  sombres, 
qu'une  fois  surpris  lui-même  par  un  semblable  sortilège,  il  n'échappa 
au  danger  de  l'obscurité  qu'en  se  réfugiant  dans  un  château  appelle 
Toloformis  ou  Conosalmi  (chap.  56,  I,  55)  (i4). 

Ajoutons  à  celle  narration  que,  selon  la  tradiiion  des  juifs,  le  tom- 
beau de  la  belle  Ester  et  du  sage  Mardochée  se  trouve  dans  ce  Hamedan 
ou  Khomda ,  rui»é  aujourd'hui  (Malle-Brun  cxx,  t.  vni,  p.  586),  appelé 
par  Marco  Polo  Camadu  du  pays  de  Reobarbe  (Roudbar  d'Edrisi),  et 
le  chiffre  de  20,000  Israélites  fixés  à  Roubadbar  sera  suffisamment 
expliqué. 

De  Roubadbar  (Camadu),  à  2  journées  (comptons  20)  se  trouve  la 
rivière  Vanth  ;  c'est  la  rivière  Debala  de  la  vallée  Bast  qui  traverse 
Yezd. 

A  partir  de  Kerman,  Marco  Polo  chevauche  7  journées  par  un 
chemin  Irès-mauvais,  et  arrive  à  Gobian,  Cobian  (Kubbis,  Khebis)  d'où 
il  continue  par  la  province  Thunacaim  (de  Kouhislau  où  est  Toun  et 
Kain)  le  long  de  8  journées  jusqu'à  la  montagne  Melete  où  se  trouvent 
le  vieux  de  la  montagne  et  les  assassins;  ensuite  il  voyage  7  journées 
encore  avant  d'arriver  à  Sapurgam  (Schibergan)  qui  est  à  l'ouest  de 
Balk  (chap.  M,  I,  50).  Or,  il  a  traversé  le  pays  salé,  molhat,  et  donne  à 
la  montagne  Haflon  le  nom  du  pays  molhat  en  la  qualifiant  Melete. 
*  De  ces  montagnes  (Ilafion),  à  travers  la  Médie  on  arrive  en  10  jour- 
nées à  Hamdan  (Ekbatana).  Delà  4  journées  à   ]xnT1Dl   Dabreztan 

tLxw^L  Taberistan,  où  sont  les  Israélites  sur  le  bord  de  Gozan 

[H]  Cependant  les  géographes  arabes  ne  font  pas  grand  cas  de  la  grandeur  de  Camadu.  Istakhri  , 
désignant  le  désert  Roudbar  au  nord  de  la  chaîne  de  Kofs,  signale  Koumin  situé  non  loin  de  Djirofl 
et  de  Honnouz  (p.  78;.  Edrisi  sur  la  route  de  Valasgherd  nomme  Kounein,  ville  de  moyenne  grrn- 
deur,  tres-bien  bâtie  et  trcsagréable,  éloignée  4  journées  de  Hormour  (IH,  7,  p.  428  sans  rappeler 
son  désert  Roudbar.  '  " 


ASIE.  57 

(Âtrok,  fleuve  qui  termine  le  Taberistan  :  est  inter  Gorgan  et  Cha- 
^arezim,  in  ultime  termine  Thabarestanae ,  dit  Aboulféda,  versionis 
Reiskii,  p.  554). 

De  Tabristan  à  ]i<nDDX  Isbahan  il  y  a  7  journées.  C'est  une  capitale 
de  12  milles  de  circuit;  on  y  compte  environ  15,000  Israélites. 
Isbahan,  à  cette  époque-là,  se  composait  de  deux  villes,  dont  une 

nommée  àj^j^\  el  lehoudia,  l'autre  Schehriana,  situées  à  la  distance 

de  2  milles  Tune  de  Taulre.  La  première  est  plus  grande  que  l'autre 
(Edrisi,  IV,  6,  p.  167).  Elle  porte  le  nom  de  Ichoudia,  à  cause  qu'elle 
est  peuplée  d'israélites  :  il  n'y  a  donc  rien  d'extraordinaire,  si  leur 
nombre  montait  à  15,000  :  ils  devaient  être  au  nombre  de  50,000 
à  Hamdau  et  Herat  et  les  arabes  semblent  l'ignorer. 

De  Isbaban,  on  se  rend  à  Samarkand  en  15  journées,  passant  par 
Ti^r^^i^  Schifaz,  qui  est  une  province  persane  éloignée  4  journées  seu- 
lement d'Isbahan.  Ces  quatre  journées  parcourues  par  cette  direction 
dans  le  désert  salé,  ne  pouvaient  faire  découvrir  aucune  province, 
aucun  canton.  Je  me  suis  avancé  d'avantage  jusqu'aux  montagnes.  En 
les  fouillant  de  même  que  leurs  alentours,  à  droite  et  à  gauche,  aucune 
trace  ne  s'est  montrée,  aucun  écho  ne  m'a  répondu.  Les  routes 
y  sont  incertaines,  dangereuses.  Sur  celle  qui  conduit  de  Kerman  vers 
Nisabor,  le  fort  ^jj^^  Sebvard  ruiné,  avait  été  délaissé  par  crainte 

des  voleurs  (Edrisi ,  lU ,  7,  p.  456).  La  route  d'Isbahan  a  Korin  vers 
Nischabour,  est  dangereuse  el  peu  fréquentée  à  cause  des  voleurs 
(Edrisi,  p.  459).  Au  delà  de  Nischabour,  je  voh,  comme  dépendance 

i^\s]^  Askaras  (Edrisi,  IV,  7,  p.  185,  186),  qui  pourrait  fournir  le 

nom  de  Schifaz.  Je  vous  signale  ce  nom,  parce  que  sa  lecture  peut 
changer  kaf  en  fe  :  cas  analogue  à  la  lecture  de  Aljubar  ou  Alnabar. 
Sur  la  route  de  Herat  à  Sedjestan,  dit  Edrisi  en  1154,  il  y  avait  à  5     t^ 

journées  de  Herat  dans  son  territoire    »!JL-I  Askaran  (IV,  7,  p.  185), 

ou    %Lft--»l  Asfaran  (IIÏ,  7,  p.  448).    Cette  ville   a  ses  dépendances 

comme  si  elle  était  chef-lieu  d'un  district. 

Le  géographe  persan  du  xui**  siècle  place  sur  ce  point  Asfezar,  Eu 
même  temps,  Ali  ben  Aladir  le  djezirien,  mort  1255,  dit  dans  son 
lobab  qu'entre  Herat  et  Sedjestan  sont  quatre  villes  voisines ,  toutes 

du  nomde  jtji*-|  Asfezar,  éloignées  entre  elles  tout  au  plus  d'une 

journée.  Aboulféda,  1551,  en  a  conclu  qu'elles  formaient  un  korah,  un 
canton  de  Herat  (versio  Reiskii,  p.  544).  Delisle,  qui  consultait  les  écrits 
arabes  et  avait  des  renseignements  sur  la  Perse ,  communiqués  par 
l'ambassade  européenne  à  Téhéran ,  en  fait  une  province  à  part  Esfe- 
rairij  mais  les  cartes  modernes  semblent  négliger  ou  méconnaître 
l'existence  de  ce  nom,  à  moins  qu'elles  ne  le  désignent  par  le  nom 
Sekher.  S'il  vous  plaisait  d'y  reconnaître  Schifaz  de  Benjamin ,  je  vous 
recommanderai  ce  groupe  de  villes  cantonales,  cousonnantes,  pouvant 
représenter  une  province. 

L'édifice  construit  avec  des  matériaux  fragiles ,  sur  des  bases  peu 
solides,  croule  au  premier  soufle;  aussi  ce  que  j'avance  sur  l'analogie 
de  Schifaz  et  Asfazar  peut  s'abîmer  à  la  voix  du  texte  de  la  première 


58  BENUmil  D£  TUDÈLE. 

édilion  de  Benjamin.  Cependant  Je  continue  hardiment.  Ce  texte  dh 
(ce  qui  manque  dans  la  traduction  de  Baralier) ,  que  de  Schifaz  les  7 
journées  conduisent  d'abord  à  n^^^  Ghina,  situe  sur  le  fleuve  Gozan,  et 
que  de  là  il  n'y  a  que  4  journées  à  Samarkand.  A  i  journée  au  nord 

de  Nischabour  se  trouve  j.^^jj  jl-s^  iîC^an-rovan  ou  zovan  (Edrisi,  IV, 

7,  p.  182,  184, 186),  il  n'est  pas  sur  le  fleuve  (Atrok),  mais  aussi  rap- 
proché au  nord  de  Nischabour;  il  est  dans  ces  parties  montagneuses 
où  sont  les  sources  du  fleuve;  il  est  dans  cette  province  qui  s'étend  le 
long  du  fleuve  Gozan.  Ces  conditions  rapprochent  et  identifient  l'ana- 
logie de  Khan  avec  Ghina.  Mais  le  fondement  de  la  narration  de  Ben- 
jamin est  si  peu  solide ,  qu'on  joue  au  hasard  en  voulant  pénétrer  ses 
mystères. 

Dans  l'hypothèse  que  nous  avons  lancée ,  la  distance  de  4  journées 
de  Ghina  jusqu'à  Samarkand,  ni  celle  de  7,  ni  cette  autre  de  4,  ni  en 
somme  celle  de  15  n'est  pas  de  nature  à  faire  d'obstacles.  Le  triple 
pour  les  chameaux  volants,  ne  suffirait  pas.  Ces  distances,  comme  celle 
de  Samarkand  à  Tibet,  qui  est  évaluée  à  4  journées,  sont  le  résultat  de 
la  leçon  erronée  des  chiff^res.  Ces  chiffres  déterminent  par  détours, 
d'Isbahan  à  Tibet,  19  journées,  tandis  que  de  Tibet  à  Nischabour, 
Benjamin  en  donne  28  en  ligne  directe  (chap.  XYIII,  p.  191). 

Vous  dites ,  dans  votre  savante  introduction  à  l'ouvrage  d'Eliah  de 
Ferrare  (p.  526),  que  l'opinion  du  talmoud  et  des  arabes  n'était  pas  tout- 
à-fait  d'accord  quand  à  l'emplacement  des  dix  tributs  conduits  par  le  roi 
d'Assyrie  à  Halah ,  à  Habor ,  à  Hara  et  à  nehar  Gozan  ou  montagne 
Gozan ,  aussi  bien  que  dans  celle  de  la  Médie  (H,  rois,  XVIl ,  6,  XYIH, 
Il  ;  I  chron.  V,  27).  La  différence  consiste  en  ce  que  les  traditions  du 
talmoud  enfermaient  toute  la  population  des  tributs  dans  la  Médie 
seule  et  une  partie  d'Adherbidjan  :  tandis  que  les  arabes  disloquent 
une  partie  dans  le  Khorassan ,  à  Herat  et  à  Balk.  Qu'elle  opinion 
Benjamin  a-t-il  suivi?  il  ne  s'explique  pas.  Il  semble  cependant  qu'il 
s'inclinait  davantage  à  celle  des  arabes ,  parce  qu'il  relate  que  les 
Israélites  du  pays  de  Nisbor  et  de  la  montagne  de  cette  province 
(mont  Tourok),  prétendaient  descendre  de  quatre  tributs  :  par  consé- 
quent le  fleuve  (Atrok)  qui  baigne  les  montagnes,  est  appelée  Gozan, 
répondant  à  l'exil  de  la  bible  dans  le  nahar  Gozan.  Les  traditions 
talmoudiques  paraissent  mériter  plus  de  confiance  que  les  assertions 
postérieures  des  arabes;  mais  la  dispersion  ultérieure  des  enfhnts 
d'Israël,  qui  ne  rentrèrent  pas  dans  la  terre  sainte,  a  dû  donner  origine 
à  d'autres  traditions  au  nombre  desquelles  est  celle  qu'avait  recueillie 
Benjamin  chez  les  Nischabouriens  avec  toutes  les  conséquences  qui  se 
présentent  dans  sa  narration. 

Je  ne  connais  pas  le  motif  qui  fit  décider  Rawlinson  à  placer  Hafton 
dans  la  chaîne  de  Zagros  et  à  retrouver  Amaria  dans  Ali-ilahis  holva- 
nien.  Je  ne  réfuterai  pas  les  déductions  contraires  de  Baratier,  je 
n'analyserai  pas  non  plus  ses  heureux  aperçus,  ni  sa  remarque  que 
Benjamin  est  ici  bien  meilleur  géographe  que  son  interprète  latin 
(dissert.  VI ,  1 1-45).  Mais  je  vois  que  toute  la  narration  de  Benjamin 
roule  sur  ce  qu'il  a  appris  des  Nischabouriens  et  se  rattache  à  ce 
point  ;  que  les  distances  de  pays  éloignés  sont  altérées  et  réduites  à  des 


ASIE.  59 

proportions  phlhîsiqnes:  mais  tout  ce  qui  se  rattache  à  Niscliabour  est  jus- 
tement resserré;  à  Nischabouretses  montagnes  septentrionales  Tourok, 
dont  la  chaîne,  qui  se  prolonge  vers  le  sud,  sous  le  nom  deHafion, 
se  dirige  (innommée  sur  les  cartes  modernes)  vers  Herat  (15).  Les 
Israélites  habitent  ces  montagnes  justiu'au  royaume  de  Perse,  touchent 
aux  frontières  de  la  Médie  et  sont  tributaires  (chap.  XY,  p.  478).  Les 
montagnes  de  Nisbor  (Tourok),  sont  sur  le  fleuve  Gozan  ei  les  guerriers 

Israélites  montagnards,  alliés  avec  les  infidèles  Tourks  y^.tSyi\  jH^ 

(^.c^ja>j  jJ^  kaferi  ou  infidèles)  (le),  font  la  guerre  aux  Kousch, 

aux  Persans  du  Farsistan,  traversant  le  désert  (salé,  molhat).  Les 
Persans,  arrivant  aux  montagnes  de  Nisbor,  se  trouvaient  auprès  des 
fontaines  qui  sont  le  long  de  Gozan  (XVUI,  p.  191,  196).  Toute  cette 
description  est  d'accord  avec  ce  que  Eldad  le  danite  avançait  trois 
siècles  antérieurement.  Il  savait  que  les  montagnards  des  montagnes 
d'abîme  ne  supportaient  aucunement  la  domination  de  goïm  (chap.  5, 
de  votre  édition,  p.  34,  5  verso). 

C'est  là,  dans  ces  contrées  que  David  el  Roï  d'Omaria  en  1155, 
souleva  les  Israélites  contre  le  roi  (Sanigar-schah).  La  ville  d'où  il 
naquit  n'est  éloignée  qu'une  journée  du  mont  Hafton  (XV,  p.  178). 
Les  montagnards  se  soulevèrent.  Leur  chef  Roi,  surpris  par  le  roi,  est 
mis  en  prison  dans  la  ville  de  ixplDD'l  t^abestan ,  sur  le  grand  fleuve 
Gozan.  Roi  reparaît  de  sa  prison  devant  le  roi  (la  scène  se  passe  près 
de  Dabestan,  sur  le  fleuve  Gozan)  :  à  la  vue  du  roi  il  traverse  le  fleuve 
et  dans  ce  même  jour  il  fait  le  chemin  de  dix  journées  jusqu'à  Amaria , 
située  à  1  journée  de  Hafton. 

Observons  maintenant  :  le  fleuve  Gozan  étant  Atrok  ,  Dabestan  est 

évidemment     4|j:«««a>^  Dahestan,  canton  entre  les  deux  fleuves  qui 

dépend  de  Âbeskoun,  situé  dans  le  Tabaristan ,  sur  les  bords  de  la 
kaspienne.  Dahistan  est  une  ville  ou  plutôt  un  village  (Edrisi,  Y,  7,  p. 
354)  chef-lieu  d'un  district  et  porte  le  nom  de  Achor  ou  Ashor, 
(non  loin  de  la  mer  kaspienne  au  confluent  de  Sumbor  avec  Atrok ,) 
sur  les  derniers  confins  de  Tabaristan  où  commence  le  Khovarezm. 
(Abulf.,  vers.  Reiskii,  p.  554). 

A  dix  journées  de  là  on  peut  se  rapprocher  du  mont  Hafton ,  en 
coupant  le  chemin  qui  conduit  de  Nischabour  à  Merv-schahdjan.  Sur 
ce  chemin,  à  55  milles  de  Nischabour  et  à  54  de  Merv,  se  trouve 

Lyar^!  el  Hamra  (Edrisi,  IV,  7,  p.  186),  d'où,  par  une  forte  journée 

ou  parvient  à  atteindre  le  versant  est  de  Hafton.  Cette  place  ne  se 
trouve  plus  sur  les  cartes  modernes.  On  y  remarque  plus  loin  que 
Nischabour,  un  peu  à  droite,  Mili-omari  :  mais  cet  emplacement  ne  se 
coordonne  pas  dans  les  distances  d'Amara.  Vous   m'objecterez  que 

l'orthographe  de  n^'ni<Dj;  ne  répond  pas  à  l'orthographe  de  \j^ss., 

(15)  Les  cartes  modernes  ne  nous  fournissent  aucune  dénomination  pour  cette  cliaine.  H  est 
probable  que  Haflon  est  le  nom  d'une  montagne  particulière  de  la  chaîne.  Sur  quelques  cartes  toutes 
récentes  on  remarque  un  nom  assez  analogue  à  HaFlon  dans  un  bouig  ou  localité  appelée  Huftan- 
seaub ,  située  sur  le  versant  est  entre  Herat  et  Nisabour. 

(16)  C'est  ainsi  dans  Aboulféda  Vlaki  kareri,  Kaptschakenses  kaferi.  —Le  Tourk  est  qualifié  de 
Kafer  pour  le  distinguer  des  fidèles  mahoroédans  Thogarmim  de  TAsie  mineure. 


60  BENJAMIN  DE  TUDÈLE. 

C'est  vrai,  mais  le  mal  n'est  pas  si  grand.  (Ali-ilahis  n'y  ressemble  plus). 
Tout  ce  que  dit  Benjamin  de  David  Roï ,  n'est  pas  copié  de  quelque 
ouvrage  orthographié ,  mais  vient  de  relations  orales  qu'il  n'a  su  régu- 
lièrement orthographier.  Peut-être  que  vous  trouverez  quelque  chose 
de  mieux )  en  attendant,  considérant  les  explications  qu'ocrent  à  la 
narration  de  Benjamin  les  emplacements  assignés,  vous  direz,  je 
l'espère  :  si  non  è  vero,  è  ben  trovato.  Et  s'il  vous  arrivait  de  repren- 
dre et  réfuter  quelques-unes  de  mes  assertions,  veuillez  vous  rappeler 
qu'elles  ne  cherchaient  qu'à  confirmer  voire  propre  opinion ,  que  vous 
avez  habilement  émise  en  4838,  dans  votre  première  édition  de  la 
relation  d'Eldad  le  danite  :  ce  souvenir  vous  dira  qu'au  fond  de  la 
question,  nous  sommes  d'accord. 

Avant  de  se  retirer  de  ces  montagnes  agitées,  je  vous  demande, 
que  veut  un  prêtre  ou  sacrificateur  des  idoles,  dans  ce  que  Benjamin 
dit  :  que  les  Persans  campés  près  des  fontaines  de  Gozan ,  s'informaient 
touchant  les  ]nDD  Comarins  enfants  de  Y*\^  Go/z ,  d'entre  les  kofr  al 
Torks?  où,  dans  les  comarins,  Constantin  l'Empereur  voyait  simple- 
ment les  idolâtres  (Baratier,  nota  7,  ad  Benj.  XVIIl,  p.  196,  197).  Ne 

s'agit-il  pas  ici  plutôt  de  Komans?  Les  Persans  s'informaient  de     ^l^ 

Komans  (peuples  tourks)  enfants  de  j&   Gozzes  (nation  tourke),  qui 

sont  d'entre  les  infidèles  Tourks  (qui  sont  de  la  race  to.yrke).  L'ortho- 
graphe s'y  oppose  de  nouveau.  En  ce  cas  je  vous  recommande  une  horde 

de  la  race  tourke  appelée  jL^  Kimar,  comme  elle  est  plus  tard 

nommée,  en  1415,  par  le  compilateur  Takout  ou  Bakouï  (notices  et 
extraits,  VI,  22).  En  effet,  Baratier  lui-même  dit  :  ajoutez  qu'il  y  a 
effectivement  là  des  peuples  de  ce  nom  (note  7,  p.  197]. 

Enfin,  fatigué  des  ces  explorations  continentales,  je  vais  retourner 
avec  Benjamin  à  Khousislan,  d'où  par  les  eaux  du  limpide  Choaspes 
j'aurai  le  plaisir  de  vous  rejoindre,  afin  de  vous  féliciter  tout  d'abord 
de  ce  que  vous  avez  eu  la  complaisance  de  purger  l'île  de  Kis  de  ce 
fatras  de  lettres,  qui  surchargeaient  sa  tête,  obstruaient  son  intérieur, 
tourmentaient  plusieurs  siècles  l'esprit  des  érudits.  J'espère  que 
votre  île  est  délivrée  du  brigand,  qui,  du  temps  d'Edrisi,  inquiétait 
les  voyageurs,  gênait  la  pêche  des  perles,  et  qu'ainsi  vous  regardez 
Kalifa  en  toute  sécurité.  Mais  avant  d'aller  nous  plonger,  comme  les 
deux  pêcheurs  katifiens,  laissez  boire,  je  vous  en  prie,  aux  huîtres 
l'eau  de  la  pluie,  et,  recevant  l'échange  de  paroles  d'une  amitié  sin- 
cère, permettez-moi  de  me  reposer. 


AFRIQUE,  EUROPE. 


TROISIÈME    LETTRE. 


Bruxelles,  30  août  1847. 

Amédée  Jaubert,  dans  sa  traduction  d'Edrisi,  dit  eu  poursuivant  la 
version  de  la  description  de  TÉgypte  :  notre  texte  contient  ici  une  anecdote 
fabuleuse  et  sans  intérêt,  que  nous  nous  abstenons  de  traduire  (p.  320). 
lia  laissé  quantité  de  semblables  lacunes  dans  le  gros  ouvrage  de  géogra- 
phie arabe,  en  donnant  son  texte  plein,  mais  incomplet.  Heureusement 
Benjamin  n'est  pas  aussi  purgé  par  ses  interprètes  :  nous  Tavons  en 
entier,  véridique  ou  relatant  des  fables  chimériques.  On  ne  s'est  pas 
abstenu  de  traduire  dans  sa  description  de  l'Egypte,  l'anecdote  fabu- 
leuse du  capitaine  Soteros,- qui  cassa  le  miroir  de  la  tour  alexandrinc; 
maison  peut  s'abstenir  de  toutes  exclamations  contre  lui,  quand  on 
réfléchit  qu'à  celle  époque  le  peuple  romain  comptait  parmi  ses  illustra- 
tions antiques  le  comte  Brutus,  et  se  gloriflait  de  son  fameux  capitaine 
Ânnîbal  :  et  il  ne  manquait  pas  de  savants  annalistes  qui  l'affirmaient 
tout  de  même. 

Le  pèlerin  Benjamin  n'était  pas  géographe  et  ne  pensait  pas  écrire 
une  géographie  ou  une  description  du  monde,  complète  et  bien  rangée. 
Il  entreprit  cependant  de  donner  à  la  lecture  de  ses  co-religionnaires 
une  notice  générale  sur  le  monde  de  leur  dispersion.  Dans  ce  qu'il  a 
parcouru  lui-même,  il  a  pu  donner  de  petites  distances  et  des  circon- 
stances vérifiables.  Je  présume  qu'il  courut  jusqu'au  tombeau  d'Ezechiel, 
d'où  il  rebroussa  chemin  par  l'Egypte.  C'est  de  ces  derniers  points, 
qu'il  s'avise  de  faire  un  aperçu  du  reste  du  monde,  ramassant  à  tort  et 
à  travers  difl'érenles  relations  sur  la  Perse,  sur  l'Inde,  sur  le  noir  Rousch 
ou  l'Afrique;  répétant  les  relations  orales  ou  écrites,  isolées,  incohé- 
rentes. Gare  de  supposer  son  invention,  il  reproduit  bonnement  les 
choses  comme  il  les  a  apprises.  La  relation  concernant  le  tombeau  de 
Daniel  pourrait  seule  être  accusée  d'invention,  mais  simultanément 
relatée  par  Pelnhhia,  toute  récente  qu'elle  paraisse,  elle  vient  évidem- 
ment d'une  autre  source  que  de  la  cervelle  de  quelque  voyageur.  Ne 
serait- il  pas  possible  que  la  turbulence  de  quelque  population  Israélite, 
mécontentant  le  conquérant  Seldjouk  rendait  dangereux  le  pèlerinage  au 
tombeau  de  Daniel,  à  la  suite  de  quoi  on  débita  de  fables,  émerveillant  les 
pèlerins  qui  les  répétaient  avec  empressement?  ce  que  Benjamin  dit  des 


62  BEKJAMIN  DE  TUDÈLE. 

rcchabiles,  du  tombeau  de  Daniel,  des  Nisbouriens,  ce  sont  des  contes 
de  ses  co-religîonnaires ,  placés  confusément  dans  TArabie  et  la  Perse. 
Ce  qu'il  dit  de  Tlnde  ce  sont  des  contes  arabes;  enfin,  ce  qu*il  avance 
de  TÂfrique  est  le  produit  des  commerçants. 

Il  est  incontestable  que  Benjamin  puisait  à  beaucoup  de  sources  arabes. 
En  qualité  d'Espagnol,  certainement  il  pouvait  connaître  la  langue  arabe  : 
mais  sa  continuelle  arabisation ,  si  je  puis  me  servir  de  cette  expres- 
sion ,  prouve  le  mieux  à  mon  avis,  qu'il  a  réellement  parcouru  Forient 
et  s'est  soulé  d'arabisme,  enfin  qu'il  raconte  souvent  sous  la  dictée  de 
l'idiome  arabe.  Lorsque  quantité  de  noms  de  localités  orientales  sont 
signalées  dans  la  forme  arabe,  cela  n'est  pas  ei^traordinaire,  mais  cette 
forme  se  retrouve  aussi  dans  des  noms  purement  bébreux,  dans  les 
appellations  de  ses  co-refigionnaires;  les  mots  arabes  sont  reproduits 
dans  kofer  al  Tourk,  alboula,  etc.,  comme  on  les  répète  en  orient.  Il  ne 
se  sépare  de  l'idiome  arabe ,  que  lorsque  les  arabes  lui  manquent.  En 
Sicile ,  à  Palerme ,  il  retrouve  encore  les  arabes  et  les  mots  :  de  perle , 
al-marga ,  de  bain,  al-behira.  Dix  années  plus  tard,  eh  1185,  l'espagnol 
Aboul  Hossein  Mohammed  ibn  Djobaïr  examinait  la  cour  de  Palerme , 
composée  à  moitié  de  mahommédans  avec  lesquels  Benjamin  a  dû  s'en- 
tretenir. Il  y  apprit  que  le  premier  dignitaire  de  la  couronne,  qu'il 
appelle  lui-même  gouverneur  ou  vice-roi ,  portait  à  la  cour  le  titre 
arabe  al-hezeina  (chap.  XX,  111)  trésorier  :  titre  connu  aujourd'hui  à|la 
la  cour  du  sultan  à  Gonstantinople  et  donné  aux  fonctionnaires  de  la 
trésorerie  :  hazua-agazi,  gardien  du  trésor,  hazna-krabaîasi,  vicaire  da 
gardien,  hazna-dar-baschi,  trésorier  en  chef;  titre  connu  dans  l'empire 
russe  :  kaznatschei,  receveur  du  fisc  dans  un  district,  le  fisc  étant  qua- 
lifié du  mot  arabe  ^ J^  kazn. 

On  a  fait  déjà  des  hypothèses  sur  ce  que  Benjamin  dit  de  l'Inde.  Je 
ne  veux  pas  trop  les  contrarier.  Je  ferai  seulement  remarquer ,  qu'évi- 
demment notre  pèlerin  y  avait  en  vue  de  tracer  une  esquisse  de  deux 
cultes  :  des  adorateurs  du  soleil  et  des  adorateurs  du  feu.  A  cet  effet  il  a 
choisi  deux  exemples  peu  connus,  ou  peut-être  inconnus  à  la  géographie 
positive,  extraits  probablement  de  quelque  obscur  ouvrage  arabe  trai- 
tant des  merveilles,  tissues  fantastiquement  pour  une  lecture  amusante. 
Pour  donner  à  ces  exemples  une  plus  spécieuse  apparence  de  réalité,  il 
a  choisi  quelques  noms  de  positions  géographiques  auxquelles  il  assigne 
les  distances  qui  augmentent  la  confusion  des  noms  défigurés.  Yoici 
comme  on  pourrait  les  expliquer,  nonobstant  les  profondes  observations 
des  commentateurs  précédents. 

De  Kalif,  7  journées  à  cblNH*?  hOulam,  qui  est  avec  son  poivre  Koulam 

dit  île.  Ensuite  22  journées  aux  îles  y^y^  Khinrag ,  dont  les  habitants 

sont  les  DOIin  Dogbims  :  ces  appellations  sont  engendrées  de  ^!»^^ 

^Uw  mihradj  djaba.  A  partir  de  ces  îles,  40  journées  jusqu'à  Tzin, 

au  delà  à  l'extrémité  de  l'orient,  la  mer  nikpha,  coagulée,  ou  sont  les 
griphons. 

C'est  de  Tzin  qu'on  compte  3  journées  par  terre  et  15  journées  par 
mer  à  rh^y^^  Ghingala,  d'où  7  journées  par  mer  à  Koulan.  Ghingala  est 
donc  sur  le  continent  :  serait-ce  Galigula  de  Marco  Polo,  situé  quelque 


AFRIQUE,  EUROPE.  63 

part  entre  Ava  et  Siam?  Toutefois  les  nombres  des  distances  offrent 
une  fâcheuse  désbarmonle.  Si  Ton  était  disposé  à  corriger  le  texte ,  on 
substituerait  à  ;i  3  journées  3  50,  de  même  à  1  7  journées  ^  50,  et  les 
amateurs  d'opérations  de  ce  genre  pourraient,  je  pense,  être  satisfaits. 

Vous  savez  que  Hind  et  Kousch ,  sont  des  généralités  nuageant  le 
lumineux  orient  et  Tardent  sud.  Aussi  Benjamin  place  Kousch  en 
Perse,  en  Arabie,  dans  les  Indes  et  dans  toute  retendue  de  l'Afrique 
méridionale  ;  il  fait  placer  Hind  sur  toutes  les  mers,  jusqu'au  Farsistan, 
TArabie  et  l'Afrique  :  en  effet,  ces  mers  portent  le  nom  de  la  mer  Hind 
chez  les  arabes  :  mais  à  la  suite  de  semblables  généralisations ,  le  récit 
de  Benjamin  est  confus,  ses  idées  confuses  :  et  il  les  embrouille  encore 
par  ses  réminiscences  bibliques,  n'ayant  aucun  rapport  avec  les  lieux 
et  les  circonstances. 

n  sait  qu'en  12  journées  on  se  rend  de  Koulam  à  ^^^i  Zabid  Juj; 

ville  de  Yemen.  Elle  est  grande,  dit  Edrisi,  très-peuplée,  très-opulente. 
H  y  a  un  grand  concours  d'étrangers  et  de  marchands  de  Hedjaz ,  de 
Habesch ,  de  l'Egypte  qui  y  arrivent  de  Djedda.  On  exporte  diverses 
espèces  d'aromates  de  Hind  et  diverses  marchandises  de  Sin  et  autres 
(ï,  6,  p.  49). 

De  Zabid  (on  traverse  la  mer  rouge  ou  le  golfe  de  la  mer  de  Hind , 
la  mer  Hind  encore)  en  8  journées  pour  arriver  (directement  ou  par 
Djidda)  à  p];^  Ba*dan  ^.^f  Bedja,  Bodja,  Badja,  Badjan  des  arabes. 
Benjamin  y  ajoute  plusieurs  explications.  D'abord,  c'est  suivant  lui, 
cette  partie  de  Hind  qui  est  en  terre  ferme  :  cela  se  comprend  que  c'est 
cette  partie  de  la  mer  Hind,  qui  forme  un  golfe  en  terre  ferme.  Ensuite 
il  ajoute  entre  paranthèses  :  c'est  ]H^]^  *Adan  qui  est  à  "itfi'X'Stû 
Telassar,  renseignement  biblique  confus  et  déplacé  :  cet  *Adcn  et 
Telassar  étant  du  pays  d'Aram,  Syrie  du  temps  du  roi  David. 

B'adan,  Badja,  est  un  pays  montagneux,  dit  très-bien  Benjamin;  un 
vrai  désert  entre  Habesch ,  Nubie  et  Saïd ,  qui  sert  de  passage  et  de 
réunion  pour  les  marchands.  Le  principal  bourg  à  cet  effet  est  dans  la 
vallée  de  cl  Alaki,  où  se  fait  le  commerce  entre  les  habitants  de  la  haute 
Egypte  et  ceux  de  Badja.  Dans  ses  montagnes  sont  les  mines  d'or.  Un 
autre  bourg  est  à  8  journées  au  nord,  Aïdhab,  situé  vis-à-vis  de  Djidda 
qui  est  le  port  delà  Mekke,  et  lieu  ou  reposent  les  restes  mortels 
d'Eve,  mère  de  la  race  humaine.  Par  Aîdab  traversent  les  pèlerins  qui 
vont  visiter  la  Mekke.  Edrisi  expose  tout  au  long  cette  situation  com- 
merciale et  de  passage  (I,  5,  H,  5;  Abulf.  Reiskii,  p.  196,  197).  Plus  tard 
dans  le  pays  de  Badja  acquit  de  la  renommée  Souakem  (Abulf.  p.  147). 

Les  israélites  domiciliés  à  Badan,  vont  en  Perse,  en  Egypte,  et 
descendent  dans  le  pays  de  Qi^yon  ^omma(om  appelé  x''^^S  tjmina. 
Cette  appellation  érudite  de  l'antiquité  grecque  désigne  l'Afrikia  des 
arabes.  Ces  israélites  se  rendaient  donc  à  Tounis,  où,  à  1  forte  journée, 

se  trouvait  c^L»L,^  Hamamat^  séparé  de  Tounis  parla  péninsule 
Bascheh,  pointée  vis-à-vis  de  la  Sicile  par  le  cap  Bon  (Edrisi,  111,  % 
p.  270;  Abulf.  p.  205).  Les  cartes  du  moyen  âge  appellent  :  Mameta, 
Mahometa,  Hammameta  (Sauson),  Hamamet,  et  ce  nom  s'est  conservé 
jus<iu'aujourd'hui.  Voilà  les  courses  que  font  les  israélites  de  Bedja. 
Pour  se  rendre  de  Badan,  d'Alalaki  à   |t(iDK   Assouan,  il  faut 


64  BENJAMIN  DE  TUDÈLB. 

traverser  le  désert  x!3tî'  Seba ,  ensuite  longer  le  pt^f^Q  Fison,  Nil  ;  la 
traverse  dure  20  journées.  On  peut  se  former  une  idée  de  cette 
traverse,  par  différents  passages  d'Edrisi,  et  comment  on  longeait  le 
Nil  depuis  les  cataractes  (I,  4,  p.  55).  Quand  on  allait  directement,  on 
arrivait  d'Alaki  à  Assouan  en  12  journées  (Abulf.  p.  196).  N'importe,  si 
le  nom  de  Seba  convient  au  désert,  tel  nom  lui  est  donné  par  ceux  qui 
nous  renseignent. 

D'Assouan  à  Yh*\r\  Holvan  il  y  a  12  journées;  de  Holvan  à  Kous 
13  journées,  dit  le  texte  de  Benjamin.  Erreur  évidente  d'un  chiffre.  Au 
lieu  de  ':}i  12  il  serait  mieux  :n^  22.  Il  y  a  d' Assouan  25  journées  à 
Fostat.  Holvan  est  un  bourg  à  Torient  du  Nil,  à  2  parasanges  de  Fostat 
(Abulf  p.  190).  De  ce  point  partaient  leskaravanes  dans  le  magreb. 

Ces  karavanes  traversent  en  50  journées  le  désert  de  xinîi  Tzahara, 
pour  se  rendre  à  t<S^*iT  Zouilaf  Zavila.  C'est  juste.  A  cette  distance 
dans  le  pays  de    Fezzan    (qu'on    nommait  aussi   Ferran,  Karran, 

Kazzan)  se  trouve   Jb^j  Zavila,  en  tout  temps  connue  des  arabes 

(Edrisi,  III,  5,  p.  289  ;  Abulf.  p.  212).  —  D'ici  les  karavanes  allaient 

dans  le  Soudan,  où  est  ^li  Gana.  Zavila  n'est  pas  encore  dans  la  terre 

<lc  r[)M  Gana,  elle  est  dans  le  désert  de  Llsc-^  Sahara,  tennis  h^ 

al  Tzahara,  qu'il  faut  traverser,  Gana  étant  au  delà  de  ce  désert. 
Benjamin  pense  que  Zavila  est  n'P^in  Havila  de  la  bible. 

Il  est  clair,  qu'étant  en  Egypte,  il  a  rencontré  les  Israélites  deBedja, 
les  marchands  venant  du  fond  de  Magreb,  mais  en  relatant  ce  qu'ils  lui 
ont  dit,  il  s'embrouille  et  enveloppe  leurs  renseignements  dans  ses 
explications  bibliques.  Ainsi  biblisant,il  donne  une  excessive  extension 
à  î^2n  Uabesch,  parce  qu'il  pense  que  c'est  Kousch;  Havila  et  Kousch 
étant  Soudan  où  est  Gana,  il  en  résulte  que  Habesch  s'étend  du  côté  de 
l'occident  (chap.  xx,  xxi). 

Kous  ^jo^  ville  considérable,  insalubre,  mais  commerçante,  la  plus 

considérable  après  Fostat,  avait  à  5  journées  de  distance  un  port  de 
mer  Koseïr  (Edrisi,  11,  4,  p.  127;  Abulf.  p.  195).  Ceux  qui  entraient  en 
Egypte  par  ce  port,  pouvaient  consciencieusement  rapportera  Benjamin 
que  Kous  se  trouvait  au  commencement  de  l'Egypte  et  lui  apprendre 
qu'elle  comptait  50,000  juifs  (cap.  XX,  p.  225). 
A  n  5  journées  de  Y^p  Koulz,  Kous,  est  Qi^D  Fioum,  autrefois 

D^n^D  Fitoum.  Puisque  Benjamin  ajoute  qu'on  y  voit  encore  les  restes 
des  anciens  édifices  bâtis  par  nos  pères,  il  n'y  a  donc  pas  de  raison  à 
chercher  quelque  autre  Fioum  ou  Fitoum,  que  la  grande  ville  bien 
connue  Faioum,  mais  il  faut  étendre  sa  dislance  de  Kous  :  au  lieu 
de  n  5  journées,  lire  p.  8  journées,  de  grandes  journées,  forcées,  telles 
que  les  trois  entre  Kous  et  Koseïr.  De  Fioum  à  Misr  il  y  a  4  (petites) 
journées  (xxxi,  p.  225). 

Nous  voilà  dans  cette  grande  et  multiple  capitale,  pleine  de  grands 
souvenirs  de  toute  époque  et  de  différents  peuples,  d'antiques  ruines  et 
de  constructions  modernes.  Vous  y  êtes  comme  chez  vous;  vous  m'indi- 
quez tout  ce  que  Benjamin  avait  vu  et  examiné.  Enfin  vous  me  con- 
duisez dans  le  pays  de  "^'^^^  Gosen,  où  Benjamin  trouve  une  grande 
ville,  qu'il  appelle  b^2^DTD^12  Bolsir-salbis.  Sans  doute  elle  n'est 


AFRIQUE,  EUROPE.  65 

autre  que  Gyzeh,  mais  pourquoi  lui  donne-t-il  un  nom  que  nous  ne 
retrouvons  pas  ailleurs?  Aussi  la  distance  de  Misr  monte  dans  son  texte 
à  n  ^  pàrasanges;  réduite  à  n  ^  elle  serait  encore  exorbitante,  puisque 
la  distance  réelle  excède  à  peine  une  parasange;  en  partant  même  de 
Boulak,  il  serait  difficile  de  compter  ^  â  pàrasanges.  Les  distances 
suivantes  offrent  aussi  plusieurs  diflicuUés  sous  le  rapport  de  Finsuffî- 
sance  ou  de  la  surabondance.  Je  ne  saurais  proposer  de  remède  pour 
toutes. 

De  Gosen,  Gyzeh,  en  une  demi-joumce  on  arrive  à  ^x  ]^y  b^pVV 

DOIS'  ^-fefl^  «*'*  alschams,  c'est  juste,  ^r^^  ij-^^  Aïn  schams,  source 

du  soleil,  est  ainsi  appelée  de  Tancienne  "VLltoTtohi  Heliopolis  des  Grecs, 
dont  les  ruines  se  font  voir  près  de  Mataryeh,  de  façon  que  Benjamin, 
avec  les  autres,  a  pu  s*imaginer  de  remarquer,  parmi  les  cdilices  bûlis 
par  les  Israélites,  des  édifices  de  Rameses  et  qualifier  la  ville  de  ce  nom. 
Les  tours  de  briques  sont  appelées  éguiile  de  Faraon  par  les  arabes 
(Abulf.  p.  i99).  Quant  à  Izkal,  j'observerai  qu'Ibn  al  Ouardî  parle  d'une 

grande  ville  ^^^  Kalioub,  située  à  l'occident  d'Ain  Schems.  Elle 

comptait  1700  jardins,  et  il  n'en  reste  que  peu  et  son  nom  célèbre. 

Peut-être  celte  Kal  voisine,  parvenue  à  un  haut  degré  de  puissance  et 

de  grandeur  JiVft  a-t-elle  fourni  à  Benjamin  l'appellation  de  îzkal. 

Une  (petite)  journée  de  là  ;i^x^3')I}^i<  ^^  Aboubicg  aura  sans  doute 
ainsi  défiguré  le  nom  de  ^m^JU!  al  Belbcis,  Felbes  des  koptes,  nom- 
mée vicu«  jWeorum ,  entourée  de  ruines.  Défiguration  résultant  de  la 
prononciation  orale. 

A  une  demi-journée  de  là  j^'^^^c  ^^^^  Zifta,  Séparez  le  pléonasme 
arabe  y  de  i^'sj  et  vous  trouverez  Zifla  sur  la  branche  damiattine 
du  Nil,  d'où  ^  de  6::h\  Zifta,  on  traversait,  dit  le  texte  de  Benjamin, 
la  distance  de  ^  pàrasanges  pour  arriver  à  Bamira. 

C'est  insuffisant.  Corrigez  les  -;  i  pàrasanges  par  n  8  et  rr^^oi 
Ramira  par  ni^OI  Daiiura  et  vous  aurez  »^-^^  Damira,  fabrique 
d'étoffes  appelées  schoroubes,  éloignée  de  10  milles  de  Daraiat 
(Edrisi,  111,  5,  p.  520,  521,  525).  Nous  sommes  d'accord  que  ce  point 
est  bien  fixé. 

De  Damira,  il  y  à  n  5  journées  à  n^HD^  Lmahala ,  éloignée  ée^  ^ 
journées  d'Alexadrie  (XXII,  p.  252).  Il  y  a  en  Egypte  une' centaine  de 

Sls-^  Mahajats  (d'habitations),  dit  Aboulféda  (p.  201).  Aucune  de  celles 
de  la  basse  Egypte  n'a  besoin  de  5  journées  pour  arriver  de  Damira; 
plusieurs  de  ces  Mahalats  se  trouvent  à  la  distance  de  2  journées 
d'Alexandrie.  Du  temps  d' Aboulféda,  la  plus  renommée  était  Mahalat 
dakla,  aujourd'hui  c'est  Mahalat  al  kebir,  située  presque  sous  les  murs 
de  Damira.  Dans  celte  abondance  d'habitations  égyptiennes,  je  pense 
que  Mahalat  Meleh,  située  sur  le  bras  du  Nil  de  Bosetle,  en  suivant  le 
chemin  vers  Alexandrie,  est  préférable  à  toutes  les  autres.  Mais  en  ce 
cas  il  faut  absolument  corriger  les  5  journées  du  texte  en  n  8  pàra- 
sanges. A  la  suite  sont  les  2  (petites)  journées  jusqu'à  Alexandrie. 

IV.  5 


66  BENJAMIN  DE  TUDÈLE. 

Alexandrie,  rendez-vous  des  marchands  de  toutes  les  nations.  II  est 
diflicile  de  les  distinguer  tous  dans  la  foule.  Les  uns  viennent  des  pays 
chrétiens  de  Toccident,  d*autres  des  pays  moslemines  de  Torient;  il  en 
arrive  des  péninsules  apenine  et  pyrénéenne  et  du  fond  de  TEurope. 
Ceux  de  la  péninsule  apenine  sont  Toskans,  Lombards,  Génois, 
Pisans,  Fouilles;  ceux  de  la  péninsule  pyrénéenne,  de  Valence  X^D2^^2 

Balensia  ^u^^^Jl»  de  Malaga  ^n^^  Malkhi  d^SiL»  encore  sous  la  domi- 

••      • 

nation  des  ismaélites  ;  Aragon ,  Navarais ,  Espagnoles  x^^^DX  Esfania. 
Le  nom  de  oL^t  Asbania  se  bornait  alors  au  sud  de  la  montagne  de 
Sierra  et  de  Kastille  (Edrisi,  IV,  i,  p.  15).  Kordou  était  déjà  en  possession 
des  chrétiens  de  Toccidcnt,  mais  en  supposant  le  texte  inaltéré,  il 
serait  difficile  de  voir  dans  n^^lD  Karloïah  ^J  la  Kortouba, 
Kartoiah  pourrait-elle  convenir  à  Grotone  ou  Gortone ,  àjjjhs  Kotrona, 
J^  Ja5  Kotroni,  ville  de  Kalabre ,  dont  les  constructions  sont  ancien- 
nés,  retendue  vaste  et  la  population  considérable  (Edrisi,  IV,  5,  p.  118); 
ou  à  lY^j^  Kretes,  à  l'île  de  Grete,  Kredin?  je  n'oserai  le  décider. 
Choisissez  selon  votre  humeur,  si  rien  ne  se  présente  de  mieux.  Kar- 
toïah ,  aussi  bien  que  n^^lpl  Roukoufia  sont  à  chercher,  suivant  toutes 

les  probabilités,  dans  les  péninsules.  Dans  Rakoufiaon  a  voulu  retrouver 
Raguse,  en  ce  cas  Kartoîah  donnerait  les  Kroates?  Mais  non  :  Kartoïah 
est  Carta'ienia,  Gartagène  d'Espagne. 

Dans  la  liste  des  pays  de  Tintérieur  de  l'Europe  d'où  venaient  les 
marchands ,  se  distinguent  :  Rousia  ,  Allemagna ,  puis  ni<jtt^1t&^ 
Sosannah ,  sans  aucun  doute  jJ^^^aw  Sosania,  Saxe.  Ensuite  Danemark 
et  y^h^  Gelalz  qui  répond  à  Holsat,  figurant  de  bonne  heure  sur  les 

cartes  du  moyen  âge.  Ensuite  Flandre  et  ■nco'^n  Hiier  que  je  ne  connais 
pas.  On  supposait  y  distinguer  Artois  ou  Hainaut.  Si  l'arabisant  Ben- 
jamin consultait  les  ouvrages  arabes,  il  a  pu  de  J^  Haïno,  faire 

^^  HUer  :  mais  il  est  plus  probable  qu'il  écrivit  d'après  les  relations 
orales. 

Vient  ensuite  la  France  :  x^^3t<"nB  Frania,  île  de  France,  Poitou, 
Angou  (Anjou) ,  Bourgonia ,  Probintzia ,  qui  se  distinguent  suffisam- 
ment. Restent  :  n^X^D  3/cdtana ,  indubitablement  France  moyenne, 
centrale ,  Media,  Mediana,  appellation  karlovingienne encore  ineffacée, 
et  N>3?D"nS  Larmania,  qui  pourrait  donner  le  nom  de  Remania 
(de  l'Italie) ,  d'Armaniac  et  de  Normandie  ;  j'adhère  à  cette  ^dernière 
explication. 

De  ceux  qui  venaient  des  possessions  ismaélites  ou  de  l'orient,  les 
seuls  de  nny^tc  al  *Arva  ne  s'expliquent  pas  suffisamment;  cepen- 
dant placés  tout  à  côté  d'Andaiouse  ils  décèlent  le  nom  de  la  der- 
nière possession  mosleraine  en  Portugal,  appelée  al  Garbe,  Algarve. 

Benjamin  qui  va  bientôt  terminer  ses  courses,  avant  de  quitter 
l'Egypte  pour  ne  pas  assister  à  la  chute  fatale ,  déjà  trop  rapprochée 
de  la  domination  de  Fatemides,  appelle  notre  attention  sur  le  littoral 
et  la  course  au  mont  Sinaï.  Il  compte  4  embouchures  du  Nil.  D'abord 


AFRIQUE.  67 

le  Nil  se  divise  en  deux  branches  principales,  dont  une  va  à  Roscheid, 
Tautre  à  Damiat.  Toutes  les  deux  se  divisent  par  des  embranchements, 
parmi  lesquels  celui  de  ]^Dt2^x  A.smon  est  indiqué  par  Aboulféda 
(p.  161)  comme  versant  ses  eaux  dans  le  lac  tanitique.  La  quatrième 
embouchure,  qui  manque  dans  le  texte  de  Benjamin,  pourrait  être 
ou  alexandrine  dans  le  lac  maréotide ,  ou  orientale  dans  le  lac 
tanitique. 

Il  compte  d'Alexandrie  à  Damiat  2  énormes  journées.  On  en  comptait 
alors  3,  dont  une  à  Roscheid,  valait  GO  milles,  les  deux  autres 
jusqu'à  Damiat  plus  longues  (Edrisi,  ill,  4,  p.  515,  537).  —  Le  lac 
tanitique  contient  plusieurs  fies  industrieuses ,  dans  lesquelles  on 
remarque  beaucoup  de  ruines;  Benjamin  indique  très-bien  à  1  et  ^/s 
journée  de  Damiat,  D^i')^  Tounis  ou  o^n  Hanes,  île  sur  les  contins  de 
TEgyple.  (Test  ^j^'  Tennis  (Edrisi,  p.  517,  520;  Benj.  XXIIÏ,  p.  259). 

De  Damiat,  autrefois  Kaflor,  il  y  a  une  (grande)  journée  et  demie 
^  ^X2^1D  Sounbat,  dont  les  habitants  cultivent  le  lin,  se  livrent 
au  commerce  et  sont  fort  riches  (Edrisi,  III,  4,  p.  517;  Benj.  XXIII, 

p.  259).  De  Sounbat  LL:^  il  y  a  4  journées  à  la  station  de  ct^^'^^Elam, 
Aïlam,  dans  le  désert,*  sur  le  chemin  conduisant  au  mont  Sinaï.  Je 
remarque  dans  différentes  cartes  plusieurs  Elim  sur  les  rivages 
de  la  mer  rouge;  je  pense  que  c'est  une  de  celles-ci,  par  laquelle 
on  arrivait  en  2  journées  à  cn^Sl  Refidim,  village  situé  au  sud, 

presque  au  pied  du  mont  Sinaï,  appelé  par  les  arabes  %^  J^oi. 

djebel  Tour  (Edrisi ,  III ,  5 ,  p.  552;  Aboulféda,  p.  177).  Benjamin 
connaît  au  pied  d'une  montagne  un  bourg  >;i^Din  '^^^^  Sinaï,  ce 
bQurg  existe  toujours  sur  les  rivages  de  la  mer. 

Pardonnez-moi  si  je  me  suis  étendu  à  l'infini  dans  l'analyse  de 
l'itinéraire  suivi  par  le  tudélien  en  Egvpte.  Probablement  que  cet 
itinéraire  avait  déjà  été  expliqué  par  d  autres  élucubrations  qui  ne 
me  sont  pas  connues.  Baratier,  que  vous  m'avez  donné  pour  guider 
mon  observation  avait  dit  :  tous  ces  noms  de  villes  me  sont  inconnus  : 
or,  je  les  ai  cherchés,  n'ayant  que  peu  de  ressources.  Je  pense 
cependant  que  ces  indications,  qui  se  sont  présentées  assez  facile- 
ment, sont  conformes  à  ce  qui  a  été  dit  ailleurs,  qu'elles  seront 
constatées  dans  vos  études.  Le  respectable  Makrizi ,  avec  lequel 
vous  vous  entretenez  souvent,  ne  les  démentira  pas.  Son  démenti 
m'affligerait  beaucoup. 

Maintenant  nous  allons  partir  de  l'antique  possession  des  Faraons 
pour  la  Sicile.  Sicile,  puissante  encore  et  florissante,  où  tous  les 
points  sont  ouverts  et  faciles  à  traverser.  Arrivés  à  Messine,  nous 
regardons  yyh  VIonid,  la  ionide,  la  mer  ionienne,  dont  le  détroit 
sépare  la  Sicile  de  la  Kalabre.  Palerme,  Catane,  Syracuse  ou  Scala- 
graeca,  Mazara,  Trapani,  nX^l^^D  Pctalriah  ou  Petralia,  sont  des 
villes  connues. 

Ensuite  sur  le  continent  Roma  et  Louka  (XXIII,  p.  212)  (17),  d'où 

(17)  Puisque  nous  repassons  la  péninsule  Italique,  je  toucherai  à  deux  position  de  Benjamin,  dont 
l'une  est  passée  sous  silence  par  Baratier;  l'autre  examinée  par  un  peut-être.  A  partir  de  Bcnevent 
vers  Âscoli,  est  Makhi,  sans  aucun  doute  Mel0,  dans  Basilicata  sur  la  frontière  de  la  Fouille.  —  Dans 


68  BENJAMIN  DE  TUBÈLE. 

par  Morena,  par  les  passages  d'Itània  et  la  ville  de  Berden  ou  Bredîn, 
on  entre  en  Allemagne  (XXIY,  p.  242,  245). 

Vous  savez  que  j'ai  essayé  un  jour  de  contitiriek'  Teiplication  dis 
Constantin  TEmpereur^  en  s'efiorçant  de  pénétrer  en  Allema^e  par 
Meran,  aux  environs  dUdi ne.  Secondant  cette  idée,  vous  avez  suivi 
la  route  de  Tempereur  Lolbaire  II  et  vous  m'indi«iuez  Bredin,  ville 
où  cet  empereur  mourut  en  1157.  Cette  ville  n'existe  plus,  on  croît 
(pie  c*est  Rettenau ,  dans  Tlnnital  duTirol,  non  loin  de  Meran,  tout 
près  des  sources  du  Lech.  La  ville  a  pu  gagner  de  la  célébrité  ,  un 
certain  temps,  par  la  mort  de  Tauguste  persontiage  ;  entre  Meran  et 
la  ville  il  ne  manque  pas  de  passages,  dans  un  pays  montagneux  se 
trouve  cette  indication  ingénieuse,  mais  de  ma  part  j'avoue  que 
j'adhère  plutôt  à  l'explication  d'abord  contestée.  Pas  d'autre  issue  : 
ni^^XI^O  Moraena,  Moraîna  ou  Moriana  est  Maurienne;  x^;3to^Ç 
Ilania  est  le  petit  passage  saint  Bernard,  qualifié  Itania  de  lignes, 
village  qui  se  trouve  à  droite.  Enfin  la  ville  de  ]ni2  Berdin  indique 
le  grand  passage  du  mont  saint  Bernard  avec  son  hospice  qui ,  dans 
les  peintures  des  cartes  du  moyen  âge,  figure  comme  une  ville.  Benja- 
min n'y  est  pas  allé  ;  il  qualifie  de  ville  ce  qu'on  lui  disait  de  l'hospice. 
Ici  commence  l'Aschkenaz,  Allemagne  (is). 

Cologne  en  est  la  capitale  et  il  y  a  15  journées  jusqu'à  la  ville  de 
i"^^D3tt^p  Kassenbourg,  qui  est  aux  frontières  d'Aschkenaz.  A  mon 
avis  pas  d'autre  point  pour  cette  ville  de  frontière  que  Kutlenberg , 
Koulna-gora  en  Bohême,  lieu  renommé  par  ses  mines  d'argent ,  dont  la 
ville  était  une  des  plus  considérables  et  réellement  frontière,  la  Silésie 
ne  faisant  pas  encore  partie  de  l'Allemagne. 

Quant  à  quelques  autres  villes  d'Aschkenaz,  qui  voilent  leur  front, 
riant  de  nos  incertitudes ,  je  n'ai  en  général  qu'à  adhérer  à  ce  qui  a 
été  avancé  par  d'autres.  Le  texte  de  Benjamin  ofi're  des  noms  défigurés, 
ce  qui  est  trop  ordinaire  dans  les  ouvrages  géographiques.  Benjamin 
était  espagnol,  se  trouvant  en  Italie,  il  se  procurait  des  renseigne- 
ment auprès  des  Italiens.  Les  noms  se  défiguraient  sous  sa  plume, 
comme  ils  se  défiguraient  sous  la  plume  de  l'africain  Edrîsi.  Celui-là 
écrivit  le  nom  de  Worms  de  Wormacie,  ïw^ti   Kormiza,   celui-ci 

HD^OlIi  Garraisa.  Chez  l'un  Batisbone  eôt  ^jSj^  i_r^)  Binschbourg,  chez 
l'autre  :ii'^2:5îi^i  Baschenbourg.  L'un  et  l'autre  écrivaient  ^Jjliwt 
îs^^i^zbpli^X  Esklavonia  ,  le  nom  de  slavonie  voilé  par  l'élif  emphati- 
que. Souvent  pour  les  noms  qui  n'ont  pas  de  position  indiquée,  il  ne 
reste  que  des  hypothèses  hasardées,  ou  l'impossible. 

Mikilaa  de  Bcer,  il  n*y  a  rien  à  changer  :  c'est  Nicolas  Mikolaï  cbez  les  Busses,  les  Polonais,  etc. 
En  1087,  le  corps  de  S.  Nicolas  fat  transporté  de  Myra  (Asie  Mineure)  à  Bari  et  placé  dans  la  cathé 
dralc.  La  renommée  de  ces  reliques  attirail  les  pèlerins  des  pays  les  plus  éloignés  (Ugbelli  Italia 
sacra,  t.  VIU,  col.  598).  L'abbé  de  Tbingor,  Nicolas  fils  de  Saemundr  (mort  H59),  de  retour  de  son 
pèlerinage  de  la  terre  sainte,  narrait  en  ilS-i,  aux  Islandais  ses  compatriotes,  Nicholaus  i  Bar,  /txir 
hvilir  hann,  Nicolas  de  Bar,  qui  y  repose  (ap.  Werlauff,  symbola  ad  geogr.  ex  mnnumentis  islandicis, 
]i.  26,  i8,  49).  L'orbe  terrestre' du  musée  borgieu  à  Velletri,  gravé  et  émaillé  en  1452,  nommant 
Apulia ,  dit  expressément ,  au  lieu  de  Bar  :  hic  quiescit  corpu»  beati  Nicolai  de  Bar  (voyez  explicatio 
planiglobii  musei  borg.  Velit.  auctoretllecren,  commcntationes  goetting.  i804,  t.  XVI,  p.  268). 

(18)  C'est  le  passage  généralement  pratiqué  par  Frackar  (Frankais),  Flemingiar,  Valir  (Vallons), 
Englar,  Saxar,  Nordmcnn  (Skandinaves),  dit  en  1154,  l'Islandais  Nicolas  fils  de  Saemundr,  abbé  de 
Tbingor.  Mais  en  descendaut  de  Biarnads  Spitals  (Benlin),  il  ne  s'arrêta  en  Italie  qu'à  Tliraelathorp 
(Restopolis,  Estrouble)  :  (ap.  Werlauff,  symbola  ad  geogr.  ex  monum.  island.  p.  i8, 40). 


k 


.    ^uJi^çpiS.  69 

Bep|uxiiQ  offre  deux  groupes  de:  villes  d'A$c|ikenaz  qu'il  a  énumé- 
ré^,  J)9(o^  1^  premier  ^e  trouvent  les  villes  situées  aux  environs  de  la 
Moselle  et  du  Rhin.  Ce  sept  li^s  ^ujyaptçs .  ;  x>r.^p  Kolonia^  Cologne; 
Ifi^WSlp  Houfien9,  Konfl/sp^,  Confluensia,  Coblenu,  ro:m:N  Ander- 
tia^Àa>'Àndernach;  n^^p  ^pnaoun^p  Kob^,  ce  qui  est  mieux,  Caub, 
Caup ,  Cub  ;  É<>3fi0"*^p  ICroima  ou  ^^^îoip  Kolnia,  La  première  leçon 
donnerait  Kreutznach,  Vautre  Baltejâbeim  ou  Hattene  vis-à-vis  dln- 
gelheim;  :y^y2  ^iwô'a,  Bingen;  nD^D'liy  Garmisa,  Worms  (XXIY, 
p.  ?*3). 

L'autre  groupe  est  composé  des  villes  dispersées  par  tout  TÀschkenaz. 
Constantin  TEmpereur  en  a  donné  Texplication.  A  mon  avis,  il  faut 
l'accepter  et  retrouver  ce  qu'il  a  désigné.  Il  n'avait  pas  de  nom 
de  ]^(*>^t£^0  Maslran,  qui  est  certainement  Mastrakh,  Mastricht,  sur 
la  Meuse.  Suivent  encore  deux  villes  rhénanes,  l'une,  p'1^2DTn 
Douidsbourg^  Duisburg,  donl  l'origine  est  basée  sur  Teutoburg;  l'autre, 
pl")33"lt5ti'X  Astranbourg,  rectifiez  Âstrazbourg  et  vous  trouvez  le  nom 
'correct  de  Strasbourg.  Ensuite  nommées  :  "I^IjO  Mandrahh  ou 
'TnCCn^D  Mandlrahh,  Mantern. 

lî^HD^DD  Fesinges,  Freisingen;  p*)"^::^^  Banhourg,  Baraberg;  nxj  Tzor 

Zurich;  ensuite  :i"^'^33ti^n  Raschenhourg ,  ortographiée  Ueginaburg, 
Rexinaburg,  Regensburg,  Ratisbone  où  Petahbia  se  préparait  à  son 
voyage,  ville  située  aux  frontières  de  l'empire  (XXIV,  p.  245),  de  même 
que  Kassenbourg  ou  Kuttenberg ,  à  la  porte  de  Prague,  située  en  avant 
dans  le  pays  de  Bohême,  qui  est  le  commencement  de  l'Esklavonic, 
que  les  juifs,  qui  y  habitent,  appellent  pays  de  Khanaan. 

Tout  porte  à  croire  que  Benjamin  s'était  procuré  ses  renseignements 
sur  l'Allemagne  auprès  des  marchands  ou  voyageurs  qui  venaient  des 
environs  de  la  Moselle.  Ces  mêmes  marchands  lui  ont  narré  du  pays  de 
Tzofarad,  qu'ils  avaient  visité.  Il  s'élend  depuis  ^-iiD'^x  «^  Sodo,  le 
chemin  de  6  journées  jusqu'à  Paris.  Or,  les  mosellans  passaient  par 
Sedan  pour  se  rendre  dans  la  capitale. 

A  peine  sommes-nous  à  bout  de  nos  courses,  et  nous  avons  à  com- 
battre des  réclamations.  C'est  Mayance  en  premier  lieu  qui  se  présente 
avec  ses  prétentions.  Mais  il  est*  impossible  de  la  débrouiller  dans  la 
foule  de  noms  dictés  par  les  mosellans.  Benjamin  ne  Ta  pas  nommée. 
Sa  négligence  en  est-elle  la  cause?  ou  la  malveillance  des  mosellans? 
en  effet  ils  étaient  en  dissidence  avec  les  mayançois,  dissidence  com- 
merciale, industrielle,  de  synagogue?  n'importe,  Mayance  n'y  est  pas. 
Venise  non  plus;  l'Anglelerre  pas  plus;  Vienne  et  Joudenbourg  sont 
oubliés  ou  inconnus.  Mais  ce  qui  est  pis  encore,  Kordouba  et  Sefarad 
sont  évidemment  négligés  par  l'auteur  lui-même  qui  venait  de  là.  Et  la 
Pologne,  ce  paradis  des  enfants  d'israél  est  aussi  passée  sous  silence  : 
elle  ne  réclame  pas,  parce  qu'elle  comprend  que  Benjamin  de  Tudèle, 
en  donnant  la  description  des  routes  qu'il  a  parcourues,  ajoute  parfois 
à  grands  traits  quelques  contes  ou  notices  sur  les  pays  non  visités,  sans 
avoir  aucun  plan  arrêté  de  donner  en  géographe  la  description  du 
monde. 

Vous  m'avez  dit  plus  d'une  fois  qu'on  pourrait  former  loule  une 
bibliothèque  de  oe  qu'on  a  écrit  sur  Benjamin.  Les  Ganiz,  les  Grégoire 


70  BEN JÀXm  ra  TUDÈLB* 

et  ane  foule  d*aatres  Tont  commenté;  les  Gersons,  des  géographes 
da  xvn*  siècle  et  nombre  d*auteurs  se  sont  servis  des  renseignements 
de  notre  pèlerin.  Or,  ne  sachant  que  très-peu  de  ce  qui  a  été  expli- 
qué dans  Benjamin,  je  répète  sans  doute,  à  mon  insu,  dans  les  lettres 
Sue  je  vous  adresse ,  beaucoup  de  choses  qui  ont  déjà  été  dites  par 
'autres.  Vous-même  en  vous  jetant  avec  tant  de  bonheur  dans  cette 
arène  d*investigations ,  vous  donnez  un  nouveau  jour  à  ces  obscurités 
que  la  maladresse  de  multiples  perquisitions  avait  augmentés,  et 
malgré  moi,  je  répète  vos  idées  sur  plusieurs  points  de  mon  exposition. 
Pour  vous  communiquer  mon  avis  géographique,  je  n*ai  pu,  en  suivant 
Fensemble  de  la  description  du  pèlerin,  éviter  des  répétitions.  Vous  me 
comprenez  j'espère  et  m'excuserez. 

Achevant  enfin  cette  rapide  revue  épistolaire ,  j'aime  à  vous  réitérer 
mes  félicitations  sur  le  succès  de  vos  travaux  et  à  recommander  à  votre 
amitié  votre  tout  dévoué* 


N 


PALESTINE. 


QUATRlfeMR     LETTRE. 


Bruxelles,  1«  tO  août  1849. 

Vous  avez  voulu  soumettre  à  mon  géographique  examen  la  carte  de 
la  Palestine  qui  va  accompagner  votre  savant  ouvrage;  en  même  temps 
vous  me  communiquez  les  matériaux  qui  la  composent  et  vos  profondes 
élucnbrations  qui  dissipent  les  obscurités  et  les  incertitudes.  Je  doi» 
donc  vous  rendre  compte  de  ce  que  j'ai  remarqué. 

Les  matériaux  sont  extraits  des  narrations  de  pèlerins  de  différentes 
époques  qui,  pour  la  plupart,  étaient  sur  les  lieux.  Benjamin  de 
Tudèle,  1165;  Petahhia  de  Ratisbone,  1175;  Samuel  bar  Simson  de 
France,  1210;  Jakob  de  Paris,  1258;  Isbak  Khelo  de  Laresa  d'Ara- 
gon, 1554;  Eliah  de  Ferrare,  1458;  Gerson  fils  de  Moseh  Ascher  de 
Skarmela,  1561;  Ouri  de  Biel  (Biala  Pologne)  1564.  Huit  descriptions 
de  la  Palestine,  dont  les  deux  dernières  contiennent  une  liste  abondante 
de  tombeaux,  les  autres  de  précieux  renseignements;  mais  de  tous  ces 
pèlerins  aucun  n'a  réuni  de  dates  certaines  pour  la  construction  d'une 
carte  géographique.  Deux  seulement  d'entre  eux  se  dirigent  par  des  itiné- 
raire» :  Khelo,  qui  indique  plusieurs  routes  ordinairement  fréquentées» 
sans  s'occuper  de  leurs  distances  ou  de  leurs  directions;  et  le  plus 
ancien.  Benjamin,  qui  détermine  les  distances^  s'inquiétant  le  moins 
de  leur  direction. 

Il  ne  restait  donc  qu'à  confronter  les  descriptions  de  ces  pèlerins  avec- 
une  bonne  carte  de  la  Palestine,  bien  élaborée  par  de  nombreuses 
études.  A  cet  effet,  vous  avez  choisi  la  carte  de  Rîlter.  Choix  admirable. 
Cette  carte  est  inappréciable  et  abondante  en  indications  modernes. 
Cependant  elle  ne  peut  suffire  aux  exigences  du  cimetière  de  la  Galilée 
inférieure,  où,  faute  de  direction  et  de  distances,  l'emplacement 
de  quelques  tombeaux  ne  peut  être  désigné  qu'hypothéliquement  et 
au  hasard.  La  magnifique  carte  de  Ritter  n'a  pas  assez  circonstancié 
le  moyen  âge,  par  conséquent  elle  n'est  pas  en  état  d'expliquer  tout  ce 
que  nous  relate  Benjamin ,  qui  s'est  servi  plus  d'une  fois  de  dénomina- 
tions en  usage  parmi  les  croisés.  Le  temps  me  manque  pour  me 
procurer  les  sources  de  cette  époque  qui  seraient  à  même  de  corroborer 
ce  que  Benjamin  avance.  Sur  les  chemins  pour  nous  mieux  connus , 
son  itinéraire  est  d*une  exactitude  remarquable;  or,  sur  les  routes  moins 


72  BEKJAUIN  DE  TUDÈLE. 

connues,  W  convient  de  suivre  à  la  lettre  ses  allégations,  ses  rensei- 
gnements cl  ses  écarts.  Sur  les  points  où  son  itinéraire  s'embrouille, 
la  faute  souvent  n^est  pas  à  lui  :  la  corruption  du  texte  en  est  très- 
probablement  la  cause. 

Parlant  d'Antiocbie,  Benjamin  suit  le  chemin  du  littoral  jusqu'à 
Césarée,  d'où  il  se  dirige  vers  Samarie.  A  une  demi-journée  de  Césarée 
Ti^r'^T  Sézarié,  conformément  à  la  prononciation  des  croisés,  il  trouve 
\}pp  Kakon  ou  rh^'V?  ^^^^^^*  Kaïla.  La  carte  de  Ritter  nous  offre  juste 
Kaiion.  De  ce  point,  il  n'y  a  qu'une  autre  demi-journée  à  Samaria. 
Cependant  le  texte  nomme  à  une-demi  journée  Sargorg  Louz,  éloigné 
d'une  journée  entière  de  Saniaria  (Vlll,  p.  76,  77).  le  présume  que 
sur  ce  point  le  texte  est  interrompu.  Une  journée,  Sargorg  Louz  et  deux 
teinturiers  ne  sont  pas  à  leur  place.  Cette  présomption  grandit  et  se 
confirme  lorsqu'on  confronte  ce  passage  avec  la  corruption  de  l'autre, 
où  Segores  Loud  avec  1  journée  et  */2  et  d'autres  circonstances  aggra- 
vantes (X,  p.  105),  reparaissent  bien  misérablement. 

De  Samarie  Benjamin  compte  les  distances  en  parasanges,  qui  ne 
sont  que  les  lieues  des  croisés,  dont  25  a  peu  près  répondent  à  un  degré. 
Au  t^ommencement  de  son  ouvrage  il  a  donné  ce  nom  oriental  aux 
lieues  en  désignant  les  distances  entre  les  villes  en  France.  A  4  para- 
sanges de  Sicheni  il  se  trouve  au  monle  Gilboë,  Benjamin  se  conforme 
trop  souvent  à  une  étrange  version  de  la  bible  pour  qu'il  soit  nécessaire 
de  remarquer  qu'il  ne  s'agit  pas  ici  de  la  montagne  véritable  de  Gilboa 
(éloignée  de  8  parasanges  de  Sichem),  mais  de  quelques  hauteurs 
arides  du  mont  Efraim,  au  del;\  de  Libua,  qualifiée  quelquefois  de  Gibba. 
De  ces  hauteurs  arides.  Benjamin  trouve  5  parasanges  jusqu'à  Aïalan 
ou  Yala  située  sur  la  plaine  Val  de  luna,  A  1  parasange  il  passe  r^^'S)^ 
"in  ]N")y^^^ï^*^  9^^^  David,  qui  est  la  grande  ville  Ga6oan,  d'où  il  y 
à  5  parasanges  jusqu'à  Jérusalem. 

Notre  compas  observant  l'échelle  qu'il  a  trouvée  jusqu'à  Jérusalem, 
en  partant  de  ce  point  nous  conduit  d'abord  à  Bethléem,  ensuite  à  Hebron, 
d'où  se  tournant  vers  Belk  djebra  el  sans  s'arrêter  à  la  5°"  parasange 
il  se  trouve  à  Zanva  ou  Zanoah,  appelée  par  Benjamin  Sounem,  et  qui 
portait  aussi  le  nom  de  tr'"''^^'7D^  l^'î':'  ^1  ]"^*ùO  Toron  de  los  gabral 
larisch  ou  Toron  de  los  cavalleris.  De  ce  point  à  5  parasanges  il  est  à 
S.  Samuel  de  Silo,  qui  n'est  éloigné  de  Jérusalem  que  de  2  parasanges 
et  ^de  ni^^îî^î  Fasifoua  ou  mont  n'''^'^^  Moria,  qui  est  Gibeat,  Je  ne 
sais  ce  qu^on  a  dit  de  ce  point  embrouillé  dans  la  description  de  Benja- 
min, mais  les  distances  ramènent  à  Moria  grand  David  et  indiquent  que 
c'est  Moria  fasifua  S'il  l'a  bien  qualifié  de  Gabaon  la  première  fois, 
cette  fois-ci  il  s'égare  quand  il  veut  le  distinguer  par  Gibeah  qui  est 
éloigné  de  plus  d'une  parasange  vers  l'est. 

Ëcartanl  les  noms  bibliques  de  Sounem,  de  Gabaon,  de  Gibeab,  restent 
à  fixer  les  positions  des  appellations  latines  du  langage  des  croisés: 
de  la  tour  des  chevaliers  ;  de  la  place  morte  grand  David  ;  de  la  place 
morte  pacifiée  ou  autrement  qualifiée,  de  pacis  fuga,  par  exemple.  Nous 
suivons  les  distances  sans  savoir  confirmer  l'emplacement  par  quelque 
date  du  siècle  des  croisades.  Dans  le  xvu*  siècle  vers  1G50,  le  géographe 
Philippe  de  la  Rue  le  parisien,  qui  avait  hardiment  abordé  la  réforme 
de  la  monstrueuse  Palestine  de  ses  prédécesseurs,  aussi  bien  que  sos 


PALESTINE.  75 

copistes  ou  imitateurs,  comme  Nicolas  de  Fer,  eo  1707;  le  jeune 
Baratier  1752,  et  autres,  sans  avoir  égard  aux  distances,  suivirent  les 
qualifications  bibliques  :  Chez  eux  Sounem  d'Issakhar  est  Toron  de  Los 
Gabraleris;  Gabaon,  Garaan  dauid;  Gaboa  de  Saul  reste  pour  Pasifuah. 
Peut-être  eurent-ils  raison.  Votre  carte  offre  ces  deux  opinions  proba- 
blement pour  vos  recherches  ultérieures  (19). 

De  Moria  pasifuah  à  5  parasanges  est  >n''3  p.^n  Belh  Nobi,  Beîth 
Nuba ,  d'où  nous  passons  par  ^»;2-^.  Rames  ou  Ramleh,  Jafon,  Jafne  ou 
Eblin,  d'où  il  y  a  2  parasanges  à  nnifi'i^  D^?O^D  P(ilniis  Asdod,  Ce  point 
de  la  description  est  curieux  et  tout  ce  qui  suit.  Les  deux  parasanges 
ne  nous  emmènent  pas  de  Jafna  jusqu'à  Azot;  elles  nous  arrêtent  :\ 
plus  d'une  parasange  sur  le  chemin.  Or,  un  vieil  itinéraire  romain  (dit 
Baratier),  confirme  cette  position  en  comptant  deJafna20millesàPalmis 
et  dé  Palmis  12  milles  à  Azot.  De  Palmis  il  y  a  2  parasanges  à  Askalon 
la  nouvelle,  éloignée  de  l'ancienne  de  4  parasanges.  S'il  faut  qn  croire  la 
traduction ,  Benjamin  parlerait  comme  s'il  venait  dans  des  temps  très- 
rapprochés  d'Ësdras  le  sacrificateur,  qui,  à  la  place  de  Benibra  édifia 
Askalon  la  nouvelle,  plus  rapprochée  d'Azot,  ainsi  que  l'ancienne,  plus 
éloignée,  tomba  en  ruine.  11  semble  cependant  qu'il  faut  croire  tout  le 
contraire  :  considérer  celle  qui  est  à  À  parasanges  de  Jafna  pour  l'an- 
cienne ruinée,  laquelle  en  effet  est  détruite;  et  celle  qui  existe  à  8 
parasanges  de  Jafna  et  continue  de  former  une  grande  ville,  pour  la 
nouvelle.  C'est  ainsi  que  sont  inscrites  sur  la  carte  les  deux  Askalons  et 
je  pense  que  la  version  du  texte  peut  débrouiller  cette  confusion  et 
rectifier  la  relation  du  pèlerin. 

Ici,  dans  ce  qui  suit,  il  y  a  une  lacune  dans  le  texte  :  je  n'en  doute 
pas.  Nous  nous  y  trouvons  d'un  coup  déplacés  et  d'un  seul  bond  trans- 
portés à  50  parasanges  d' Askalon  à  lezreel;  Cette  lacune  est  d'autant 
plus  remarquable,  qu'elle  correspond  avec  la  corruption  d'un  autre 
endroit  du  texte,  signalé  ci-dessus  (VIlï,  p.  77).  En  premier  lieu  ;;-i'i:i'itî^ 
T*)^  Sargorg  Louz  (St-Georges  de  Lidda)  se  trouve  nommé  sur  le  chemin 
de  Césarée  à  une  parasange  de  Samaria.  En  second  lieu  (X,  p.  105), 
sur  le  chemin  d' Askalon,  san$  qu'aucune  distance  soit  indiquée,  ti^i'î^'o 
■"^S  Segoures  Loud  se  trouve  à  une  et  demi  parasange  de  lezreel. 

De  lezreel  les  distances  de  l'itinéraire  reconimencentde  mieux  con- 
duire à  travers  la  Galilée  inférieure.  Il  faut  cependant  se  tenir  en  garde 
pour  ne  pas  s'égarer.  D'abord  de  lezreel  à  pni  Zarzin  ou  nmS^K^ 
Sifourieh,  les  ^  5  parasanges  sont  à  corriger  en  ^  6.  Ensuite  viennent 
les  5  parasanges  à  Tiberias,  d'où  en  2  journées  on  arrivait  à  ]>D''tû 
TimiHy  Timmiu,  Timnatha,  qui  est  éloignée  1  journée  de  Giskala,  Ces 
dislances  fixent  la  position  de  Timin. 

De  Giskala  à  Kades-nefihali ,  on  passe  par  ]no  Meron  et  par  Aima. 
Mais  il  faut  corriger  les  )  6  parasanges  de  Giskala  en  ;;  5  (petites). 

(49)  Je  pense  qu*oii  peut  se  demander  k  jastc  titre  :  i*il  faudriiit  prendre  au  séricrax  toutes  ces 
interprétations  bibliques  que  donne  le  voyageur,  suffisamment  familiarisé  avec  les  appeUatiei^s  de 
son  époque;  on  plutôt  ne  convient-il  pas  de  les  considérer  comme  des  rêverie?  Jetées  quelquefois 
au  hasard  roênoe  dans  la  Palestine.  Aden  et  Telassar  transportés  en  AlHque,  ko  nom  de  Togorma  (qui 
est  l'appellation  do  Géorgie)  appliqué  aux  Tonrks  sedjouks ,  ne  sont-iis  pas  des  Qualifications 
capricieuses?  De  même  Sunem,  Gilboa,  Cibeali,  Gabaon,  contrariant  les  distances  positives,  lie  sont 
que  des  pi>ète-noms  improprement  empruntés,  qui  embi^euiHenl  et  déteufuent  l'atteatiofl ,  en  hisi 
nuant  de  fausses  indjcations. 


74  BfiKiAMUl  D£  TUDÈLE. 

De  même  y  6  autres  de  Meron  à  Âlma  en  ;i  3.  De  T\chy  A^**^  ^  Kades, 
il  y  a  une  demi  journée.  Benjamin  suscite  un  imbroglio  par  sa  mauvaise 
réminiscence.  Il  dit  que  Meron  s*appelait  autrefois  Vn^)^  Mdron,  où 
sont  les  grottes  de  Hillel  et  de  Schammai  :  il  semble  ainsi  confondre 
Meron  avec  Meiron.  Iakob,  voyageant  en  1258  (p.  184)  semble  adopter 
la  même  confusion.  Nonobstant  cette  obscurité,  l'itinéraire  de  Benjamin 
reste  utile  pour  la  construction  de  la  carte  et  indique  la  situation  de 
TImmin  et  de  Aima.  Cette  dernière  situation  est  encore  coordonnée  par 
la  suite  routière  donnée  par  Khelo,  qui  place  'Âlma  entre  Delata  et 
Kades  (p.  263). 

Les  indications  de  distances  ont  encore  servi  à  remplacement 
hypothétique  de  plusieurs  lieux.  Hères  est  entre  Havarta  et  Silo  à  2 
lieues  de  Sichem,  dans  les  montagnes  d'Efraîm  (p.  186,  212,  n<^99 
et  100).  Or,  Havarta  étant  à  deux  lieues  de  Sichem,  Hères  est  nécessai- 
rement à  la  hauteur  de  Havarta  déclinant  un  peu  au  sud. 

Ras  hen  amis  est  à  une  demi-parasange  de  Tabaria  (p.  385),  il  est 
évident  que  c'est  de  l'ouest ,  certainement  un  peu  au  nord  quand  on 
passe  par  ce  lieu  pour  entrer  dans  l'intérieur  de  la  Galice. — De  Tabaria 
le  pèlerin  Samouel  fait  l'excursion  d'une  journée  à  Hanouim  en  retour- 
nant par  Arbel  (p.  130)  :  or,  Hanouim  est  encore  plus  loin  vers  l'ouest, 
s*élevant  vers  le  nord. 

Aïn  el  zeitoun  est  à  un  terme  sabbatique  de  Tzafeth;  on  y  passe  pour 
se  rendre  au  sud  à  Arbel  (Akhbar,  Kadoumia)  (p.  185,  381,  427)  :  or, 
A!n  el  zeitoum  est  sud-est  de  Tzafeth.  Amouka  est  à  2  parasanges  de 
Faraam  (p.  394,  n«  53)  et  à  2  lieues  de  Tzafeth  (p.  394 ,  n»  57)  :  elle 
est  vers  le  nord  parce  qu'elle  est  toujours  rapprochée  de  Dalata,  de 
Fareh. 

Pour  les  emplacements  hypothétiques,  l'itinéraire  de  Samouel  bar 
Simson  donne  encore  quelques  indications.  Il  place  Kisma  sur  le  chemin 
de  Tzefad  à  Giskala  (p.  133).  En  partant  de  Tabarieh,  avant  d'arriver  à 
Hanania,  il  trouve  kefar  Houkok  ou  Iakouk  (p.  131).  Iakouk  reçoit  donc 
sa  situation  lorsqu'il  est  établi  que  ]^n  n^^\*l  Hanania ,  Hanan  est  le 
py  "^M  kefar 'Anan  (p.  131, 184, 151,  n«  74).  Samouel  partant  d'Anan 
passe  le  village  Loud  avant  d'arriver  à  Tzefad ,  d'où  il  se  dirige  par 
Bar*am,  Amouka  et  par  Neharla,  retournant  à  Tzefad  (p.  131, 132). 
Dans  une  autre  tournée,  de  Delata  il  entre  à  Bar'am,  pour  se  rendre 
de  là  à  Kades  (p.  135, 136). 

Iakob  est  moins  explicite  dans  ses  excursions  et  y  jette  parfois  du 
désordre.  Cependant,  en  descendant  d'Alma  vers  le  sud,  il  donne  une 
suite  de  noms  qui  se  succèdent  évidemment  sans  interruption  :  Aima, 
Delata,  Nebarta  (Tzefath?)  Aïn-elzeitoun,  Akhbar,  Iakouk,  Hiltin,  Arbel, 
Tiberias.  Cette  suite  coordonne  les  renseignements  que  nous  avons 
réunis. 

Gerson  et  Ouri  de  Biel,  dans  leurs  énumérations  de  tombeaux, 
copiant  ce  que  les  pèlerins  en  ont  relaté,  n'observent  point  de  suites 
itinéraires,  mais  sauf  quelque  distraction,  ils  groupent  les  places  plus 
rapprochées  de  la  Galilée  inférieure.  Leurs  relations  ne  sont  donc  pas 
aussi  utiles  que  les  autres  pour  l'emplacement  des  lieux.  Kadoumia 
seule  est  inscrite  au  hasard  dans  la  carte  sur  la  foi  de  leur  indication  : 
la  place  pour  cette  insertion  est  assez  serrée.  Quant  à  plusieurs  lieux 


PALESTINE.  75 


entre  Tiberias  et  Albon,  Tcspace  est  trop  vaste  et  Tîde  pour  profiter  à 
FaTenture  de  leurs  renseiguemenls. 

Vos  connaissances  sauront  perfectionner  ce  premier  essai  d'une  carte 
destinée  exclusivement  aux  pieux  pèlerinages  des  enfants  dlsraél;  en 
attendant  la  lumière  jaillit  à  beaux  traits  et  chaque  lecteur  judicieux 
vous  sera  sincèrement  obligé. 


*4^^ 


î: 


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TAVOLA  DI  NAVICARE 


Dl 


MCOLO  ET  ANTONIO  ZENI 

ET   LES   CARTES 

DES  RÉGIONS  SEPTENTRIONALES 
A  L'ÉPOQUE  DE  SA  PUBLICATION 

EN   1558. 


ORDRE  DES  MATIÈRES. 


I,  Possessions  des  Skandinaves,  2,  découvertes,  3,  destruction  du  Groen- 
land ;  4,  Zeni,  les  cartes,  5,  carte  de  Zeno,  Scocia  ;  6,  Dania  ;  7,  îles  de  la 
Baltique;  8,  Suède  et  Norvège  de  Zeno,  9,  Suède,  10,  Norvège  de  la  carte 
complémentaire;  11,  cartes  de  Flslande,  i2,  côtes  occidentales  et  septentrio- 
nales, 13,  îles  et  côtes  orientales  et  méridionales  ;  14,  Groenland  de  Zeno, 
15,  du  complément  collatlonné  ;  16,  couvent  de  S.  Thomas;  i7,  Scfaetland; 
i8,  Foeroe,  Frisland,  i9,  ses  localités  ;  20,  Estotiland,  21,  Drogeo,  Icaria, 
22 ,  leur  emplacement  ;  23,  Jean  de  Kolno,  Cabot,  Gortereal;24,  Labrador 
commence  à  figurer,  carte  de  Zeno  publiée,  25,  celle  de  regionum  septen- 
trionaiium  descriptio  ;  recherches. 


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TA  VOLA  DI  ZENI. 


CE  QUE  LES  ZENI  TROUVÈRENT  DE  CONNIT. 

'  1.  Les  cartes  des  parages  septentrionaux,  celle  des  Zeni  et  celle  du 
complément  de  Ptolémée ,  sont  assez  connues  par  les  fréquentes  publi- 
cations qu^on  en  a  faites.  On  a  discuté  beaucoup  sur  celle  des  Zeni. 
Traitée  de  pure  fantaisie  ou  d'imposture ,  elle  eut  ses  défenseurs  et  ses 
explicateurs.  Je  ne  sais  pas  si  Tautre  attira  autant  Taltention  des  investi- 
gateurs. Reproduisant  ces  deux  cartes  dans  mon  atlas  et  plusieurs  autres 
configurations  de  ces  froides  régions ,  je  pense  d'en  donner  quelques 
explications;  mais  avant  de  m'occuper  des  cartes  elles-mêmes,  il  me  faut 
résumer  les  événements  antérieurs  au  voyage  des  Vénitiens  (i). 

Les  populations  des  pays  septentrionaux  sortant  de  dessous  les 
neiges,  et  de  leur  fumée,  se  fesaient  connaître  aux  latins  par  des 
Irruptions  et  des  brigandages.  Elles  se  répandaient  au  delà  des  mers, 
établissant  des  colonies  en  Irlande,  en  Bretagne,  sur  le  continent,  dans 
les  îles  habitées  et  inhabitées.  Leur  piraterie  et  leurs  courses  aventu- 
reuses furent  suivies  de  découvertes  de  pays  inconnus  au  reste  du 
monde  baptisé. 

Une  des  plus  anciennes  découvertes  inhabitées  était  :  les  petites  îles 
Ferœr,  Fœrœr,  Fœroe,  où  un  navigateur  audacieux  arriva  par  hasard 
vers  Fan  861.  Cet  archipel  aussi  avancé  dans  les  mers,  semblait 
annoncer  d'autres  terres  dont  l'existence  était  confirmée  par  le  vol  de 
corbeaux.  En  effet,  l'Islande  fut  découverte  en  865,  par  Gardar,  danois 
d*on^ine  suédoise,  domicilié  en  Sélande.  Douze  ans  plus  tard,  875,  le 
norvégien  Ingolfr  s'établit  le  premier  sur  cette  grande  île,  pleine  de 
volcans  et  de  feu,  couverte  de  laves  et  de  neiges,  arrosée  par  des  eaux 
chaudes  et  bouillantes,  l'île  des  glaces,  Islandia,  La  nouvelle  colonie 
augmenta  bientôt  en  population,  n'ayant  à  combattre  que  le  climat  et 
ïes  ours  blancs;  prospérant  par  son  activité,  elle  étendit  bientôt  la 
connaissance  des  pays  plus  éloignés. 


(I)  Voyez  ce  que  nous  avons  dit  dans  notre  traité  de  la  cartographie  du  moyen  âge  sur  Zeno 
(chap.  161, 197)  et  sur  la  carte  complémentaire  (chap.  180»  193].  —  Différentes  configurations  des 
régions  glaciales  se  trouvent  dans  notre  atlas  sur  les  cartes  :  anglo-saxonne  du  x*  siècle,  de  plusieurs 
iipages  rondes,  d'EdrisI  llSi,  de  Sanuto  1320,  catalane  1577,  Mauro  1469,  du  globe  de  Bebaïm  li9S» 
Dorimbergeoise  ii93,  de  Thydrograpbie  portugaise  1501,  etc.  Leur  explication  est  donnée  pour  la 
plupart  dans  le  traité  de  la  cartographie  qui  raccompagne.  Ce  petit  mémoire  sur  Zeno  peut  sup- 
pléer nos  explications  précédentes.  —  Ce  que  nous  disons  des  événements  antérieurs  au  voy^e  ae 
Zeni  est  en  partie  extrait  de  la  géographie  de  Malte-Brun  (livre  xviii  et  lxxv  de  Tédit.  de  Huot), 
ensuite  augmenté  par  de  nouvelles  explications  de  Rafn  »  traduites  en  italien  par  le  savant  suédois 
Jacq  Gra'berg  de  Hemsoe ,  qui  a  rendu  de  grands  services  à  la  géographie  :  memoria  sulla  scoperta 
dell  America  nel  secolo  dezimo  dettata  in  Tingua  danese  da  Carlo  Christiano  Rafn,  Pisa  1839  ;  enfin 
complété  par  tout  ce  que  contient  la  grande  publication  :  antiquitates  American» ,  sive  scriptores 
septentrionales  rerum  ante  columbianarum  in  America ,  edidit  societas  regia  antiquariorum  septen- 
trionalium ,  Hafnise,  tipis  offic.  Schultzian»  1837, 4*  maj. 


80  CARTE  1300. 

Son  navigateur  Erik  rauda  (le  rouge)  fils  de  Thorvald,  ayant  heureu- 
sement en  982  doublé  une  pointe  verdoyante  de  la  mer  glaciale ,  s'éta- 
blit en  986  au  delà  et  donna  naissance  à  la  colonie  de  Groenland  (terre 
verte).  Il  s'établit  dans  le  Braltahlid,  et  son  compagnon  Heriulfr,  fils  de 
Bardo  et  parent  d'Ingolfr,  dans  une  autre  baie  un  peu  au  sud.  On  y 
fonda  deux  villes  Garda  et  Brallahlid.  Il  n'est  pas  dit  si  les  islandais  y 
trouvèrent  quelques  indigènes,  mais  postérieurement  ils  avaient  dans 
leur  voisinage  des  Kalalils  (Esquimaux),  répandus  sur  les  côtes  orien- 
tales du  spacieux  Groenland. 

Pour  se  rendre  au  Groenland,  les  islandais  évitaient  une  côte 
entourée  de  glaces,  vue  par  un  de  leurs  navigateurs,  Gunbiorn,  et  ils 
doublaient  la  pointe  verdoyante  de  Ilvarf,  faisant  ensuite  voile  au  nord- 
ouest  où  se  trouvait  la  colonie.  En  partant  de  Bergen  en  Norvège  pour 
aller  à  celte  pointe  de  Hvarf  on  naviguait  droit  à  l'ouest  en  vue  des  tles 
Schelland  et  Fœroer. 

Les  Normands  s'emparèrent  des  îles  Schctland,  lelland  ou  Hiallland, 
vers  l'année  961.  Ils  chassèrent  et  exterminèrent  les  anciens  habitants 
nommés  Peii  et  Papa  (s). 

La  province  la  plus  septentrionale  de  l'Ecosse,  nommée  Caithenes, 
formait  avec  les  Orcades  un  état  à  part,  qui  résista  aux  attaques  des 
Normands  et  ne  fut  englobé  dans  l'Ecosse  qu'en  1195. 

Les  Hebudes  furent  conquises  par  les  Normands  en  895  et  restèrent 
sous  la  dépendance  de  la  Norvège  jusqu'en  1266. 

Les  communications  entre  ces  îles  plus  rapprochées  étaient  animées, 
mais  avec  les  colonies  plus  éloignées,  difiiciles  et  moins  suivies.  On 
fonda  des  évcchés  en  Islande  et  au  Groenland,  à  cause  de  leur  éloigne- 
ment.  Des  années  se  passaient  sans  communication ,  sans  que  des  nou- 
velles arrivassent  à  la  mère  patrie  (s).  Les  découvertes  encore  plus 
éloignées  ne  se  conservaient  que  dans  les  souvenirs  de  tradition,  tom- 
baient dans  l'oubli  et  des  navigateurs  hardis,  après  un  laps  considérable 
de  temps,  allaient  à  la  recherche  des  pays  autrefois  connus. 

â.  En  985,  Biarne ,  fils  dé  Heriulf  Bardoen ,  cherchant  son  père  au 
Groenland,  fut  poussé  par  un  vent  du  nord  fort  loin  au  sud-ouest  et 
aperçut  un  pays  plat  tout  couvert  de  bois  et  revint  par  le  nord-est  au 
Groenland.  Son  récit  enflamma  Leifr  hinn  heppin  (le  fortuné),  fils 
d'Erik  le  rouge.  Tous  les  deux  équipèrent  ensemble  un  vaisseau  et  se 
dirigèrent  vers  la  côte  précédemment  remarquée.  Ils  donnent  le  nom 
de  Helleland  à  une  île  couverte  de  rochers;  et  celui  de  Markland  à  une 
terre  basse  sablonneuse,  couverte  de  bois.  Deux  jours  après,  ils  rencon- 
trèrent une  nouvelle  côte,   au  nord  de  laquelle  s'étendait  une  île; 

(2)  Ces  noms  se  sont  pcrpctncs  dans  les  appellations  do  plusieurs  localités  insulaires  de  Scbct- 
laud  ,  d'Orkneis,  d'Hébrides  et  même  d'Islande  -r  11  paraît  même  que  les  islandais  donnaient  à 
toute  l'Ecosse  le  nom  de  Pettoland.  —  Je  ne  sais  si  Ton  a  remarqué  une  singulière  analogie  de 
noms  de  deux  tributs  canadiennes  aux  environs  de  la  rivière  Snguenaï,  de  Pikouagamis  et  dePapi- 
nacbois.  —  Les  papas  (quelques  moines  irlandais)  qui  séjournaient  en  Islande,  se  retirèrent  lorsque 
les  Norvégiens  commencèrent  â  s'y  établir. 

(3)  Les  vojages  pour  aller  et  revenir  duraient  quelquefois  cinq  ans,  dit  Malte-Brnn.  En  1383  un 
bâtiment  apporta  en  Norvège  la  première  noi^Velle  de  la  mort  de  l'évêque  de  Groenland ,  décédé 
depuié  six  ans.  —  Cet  exemple  ne  prouve  pas  que  le  voyage  durait  cinq  ans ,  mais  que  depuis  six 
ans  on  n'avait  pas  eu  de  nouvelles  de  Groenland ,  et  que  ce  bâtiment  norvégien  faisait  ses  affaires 
pendant  cinq  ans  avant  de  retourner  dans  son  pays. 


DE  N.  ET  A.  ZEMI,   9.  81 

ensuite  ils  remontèrent  une  rivière ,  dont  les  bords  sont  couverts  de 
buissons  qui  portaient  des  fruits  très-agréables;  la  température  de  Taîr 
paraissait  douce  aux  Groenlandais ,  le  sol  semblait  fertile  et  la  rivière 
abondait  en  poissons,  surtout  en  beaux  saumons.  Parvenu  à  un  lac  d'où 
la  rivière  sortait,  les  voyageurs  résolurent  d*y  passer  Tbiver  et  ils  y 
construisirent  des  huttes  de  Leifr,  leifsbudhir.  Dans  le  jour  le  plus 
court,  ils  virent  le  soleil  rester  neuf  heures  sur  Tborizon  :  ce  qui  fait 
supposer  que  cette  contrée  devrait  être  à  peu  près  par  41<^  25'  de 
latitude.  Un  allemand  Tyrker,  qui  était  du  voyage,  y  trouva  des  raisins 
sauvages;  il  en  expliqua  Tusage  aux  navigateurs  skandinaves,  qui  en 
prirent  occasion  de  nommer  le  pays  Vinland,  ou  pays  de  vin.  (Les 
environs  du  fleuve  Tau  mon). 

Une  expédition  sous  la  conduite  de  Thorvaldr,  autre  fils  d'Erik  le 
rouge,  s'établit  en  1002  à  Leifsbudhir,  afîn  d*explorer  les  beaux  pays 
des  environs.  Le  troisième  été,  1004,  les  Normands  côtoyèrent  une 
langue  de  terre  qu'ils  appellèrentkialarnes  (cap  de  la  coquille);  ensuite 
avançant  leur  reconnaissance  au  delà  d'une  baie,  prirent  terre  près 
d'un  cap  et  virent  arriver  dans  des  bateaux  de  cuir  quelques  indigènes 
de  petite  taille,  qu'ils  nommèrent  Skroelings,  c'est-à-dire  nains  (4). 
Les  ayant  massacrés  ils  se  virent  attaqués  par  toute  la  tribu  qu'ils 
avaient  si  gratuitement  offensée.  Celle-ci  fut  forcée  à  la  retraite  :  mais 
Thorvaldr  mortellement  blessé  succomba,  et  le  cap  où  il  fut  enseveli 
reçut  le  nom  de  Krossanes  (de  la  croix)  (Gurnet  point  au  sud  de  Boston). 

Un  troisième  ûls  d'Erik  le  rouge,  Thorstcin ,  alla  à  Vinland  accom- 
pagné de  sa  femme  Gudridha,  fille  de  Thorbiarn  :  mais  il  mourut  avant 
d'être  arrivé  au  large. 

La  veuve  Gudridha  alla  se  marier  à  Thorfinnr  karlsefni  (à  devenir 
supérieur)  fils  de  Thordar.  Pendant  les  festins  de  la  noce,  célébrée  à 
Brattahlid,  on  s^entretinl  de  Vinland  et  on  arrêta  une  expédition,  à 
laquelle  s'assosièrent  le  père  Thorbiorn,  et  Freidisa  fille  naturelle 
d'Erik  le  rouge,  avec  son  mari  Thorvadr.  Celte  expédition  longea 
en  1007  Vestribygd  jusqu'à  Biarney  (Disco),  d'où  tournant  vers  autan, 
toucha  Helluland  où  l'on  vit  une  grande  quantité  de  loups,  et  à  deux 
journées  au  sud  parurent  les  forêts  de  Markland  remplies  d'animaux. 
  partir  de  Markland  on  côtoya  dans  la  direction  SO  les  rivages  à 
droite,  jusqu'à  Kialarnes  (Nausel  et  cap  Cod).  Ensuite  on  observa  des 
rivages  sauvages,  arides,  qui  reçurent  le  nom  de  Furdhustrandir. 
Au  delà  s'ouvrait  un  golfe.  Les  deux  Ecossais  Hake  et  Hakia  rais  à  terre, 
apportèrent  le  troisième  jour  des  grappes  de  raisin.  Après  on  rencon- 
tra une  masse  énorme  de  canards  (Egg)  et  un  violent  courant  de  mer; 
une  Ile  y  fut  appelée  Straumey  et  le  golfe  Straums  fiord.  Au  delà 
l'expédition  s'arrêta  dans  le  but  d'examiner  le  continent.  IMais 
l'islandais  Thôrhallr  Gamlason  de  Austfirdhir  se  sépara  avec  son 
navire  de  ses  compagnons,  et  près  de  Kialarnes,  emporté  par  un 
furieux  vent  de  l'est  vers  les  rivages  de  l'Irlande,  il  fut  saisi  et  réduit 
en  esclavage  par  quelques  marchands. 


(4)  La  petite  race  d'hommes  nains  n*existe  pins  dans  rAmériqua  :  mais  an  fond  du  continent,  tout 
le  long  du  Hississipi  on  retrouve  des  masses  de  leurs  squelettes  et  de  nombreuses  fortiflcations  qui 
témoignent  d'extraordinaires  capacités  de  cette  population. 

lY.  6 


83  CAATB  ISdO. 

L*expédition  8*établit  près  d*un  fleave  qui  formait  an  lac  à  son 
embouchure.  On  appela  le  pays  Hop  et  le  lac  HopsYatn  (Mont  baup 
bay  des  fleuves  Pocasset,  Gohannet,  Taunton);  on  y  bâtit  dés  buttes 
d^hiTcr.  Un  matin  parurent  en  grand  nombre  des  sauvages,  mais  ils 
partirent  en  paix.  Au  commencement  de  Tannée  i008  ils  arrivèrent 

{)lus  nombreux  et  avaient  ouvert  pacifiquement  un  trafic  d^éobange, 
orsque  par  basard  un  taureau,  écbappé  du  camp  normand,  jeta 
répouvante  parmi  eux  :  ils  s'enfuirent  (s).  Mais  à  l'entrée  de  Tbivcr 
ils  arrivent  en  ennemi.  Un  combat  s'engage ,  une  espèce  de  fronde 
gigantesque  des  Skrœlings,  répand  une  terreur  panique  dans  les  rangs 
Normands  :  le  courage  seul  de  Freidisa  empêcha  la  déroute;  la  vue 
d'une  femme  courageuse  arrêta  inopinément  les  Skrœlings  dans  leur 
poursuite.  Pour  ne  pas  s'exposer  à  de  semblables  algarades,  on  se 
décida  à  la  retraite  et  l'équipage  alla  passer  l'hiver  dans  l'Ile  Straumsey 
(€apawock),  avec  le  nouveau  né  Snorro  que  Gadridha  venait  de  mettre 
au  monde  à  Hop  et  dont  la  descendance  illustra  l'Islande  (s). 

Thorfinnr  karlsefni  retournant  à  Groenland,  longea  le  continent 
de  la  gauche,  continuellement  couvert  d'épaisses  forêts,  s'empara  à 
Markland  de  cinq  garçons  skrœlings,  et  entra  la  quatrième  année  au 
port  d'Eriks  fiord.  Les  garçons  skrœlings  instruits  en  langue  norde 
et  baptisés ,  racontaient  les  particularités  de  leur  pays. 

L'année  suivante,  1011,  parurent,  venant  de  Norvège,  les  deux 
islandais  d' Austfirdhir ,  les  frères  Helge  et  Finnboge.  Freidisa  les 
engagea  d'aller  en  Vinland.  L'orgueil  de  cette  femme  ayant  excité  des 
querelles,  les  islandais  furent  assassinés  et  l'expédition  ne  réussit 
point. 

Aucun  témoignage  positif^  aucun  fait  n'indiquent  que  ces  naviga- 
teurs aient  fondé  des  établissements  stables.  Gette  race  de  pirates, 
(alignée  de  ses  exploits  el  de  la  renommée ,  cherchait  la  paix  et  la 
sécurité  pour  son  trafic.  S'éloignant  du  bruit  du  vieux  monde,  elle 
se  dispersait  au  delà  des  mers  où  elle  trouvait  les  terres  très 
variées  ouvertes  au  premier  occupant  Elle  y  préferait  le  sol  plus 
ingrat  mais  inhabité  où  elle  n'avait  à  combattre  que  le  climat,  et 
fuyait  les  beaux  pays  où  elle  rencontrait  les  indigènes  qui  pouvaient 

(B)  Le9  Normands  (Mit  perpétaé  cette  scène  par  une  description  contemporaiae  et  de  suite  sur  le 
Heu  même  par  un  tableau  qu'ils  ont  taillé  sur  un  roc  d'Assone  ta  remboncbure  de  Smiths  creek  dans 
le  Taunton.  Ce  tableau  grossier,  encore  assez  préservé  de  la  destruction ,  présente,  conformément  à 
la  description,  la  figure  du  chef  Thorfinnr  et  de  son  nouveau  né  Snorro  distingué  par  un  S;  sons  une 
figure  indéterminée,  le  chiffre  CXXXI  (131),  nombre  d'équipage  et  NAH.  ORFINS,  possessions 
d'Orfins.  En  avant,  le  bouclier  blanc  qu'il  avait  suspendu  en  signe  de  paix,  et  le  taureau  qui  court 
vers  les  Skroelings  dont  on  voix  deux  figures  au  delà  de  quelques  traits  confus  représentants  proln- 
blement  les  objets  d'échange.  —  Sur  plusieurs  rochers  des  environs  on  remarque  de  nombreuses 
entailles  des  Normands  mais  endommagées  ou  ioachoTées.  Plusieurs  pierres  qui  étaient  chaînées 
de  leur  ouvrage  dans  le  Rhode  island,  sent  complètement  détruites. 

(0)  Thorfinnr  karlsefni  descendait  par  la  ligne  masculine  en  dixième  ^[énération  de  Sigurd  ring 


navie  380«  —  Thorfinnr  depuis  1015  s'établit  en  Islande  où  dans  la  terre  acquise  de  Glaumboc,  la 
■veuve  Gudridha  fonda  une  église.  Halfrida  fille  de  son  fils  Snorro  était  mère  du  savant  évèque 
Thorlakr  Runolfson,  né  en  i085,  qui  dota  l'Islande  d'un  code  canonique  en  1133.  Les  évèques  Biom 
et  Brand  étaient  de  la  quatrième  génération  de  Thorfinnr;  dans  la  neuTième,  -vers  l'année  1800,  le 
Juge  Hauk,  auteur  de  plusieurs  sagas  et  spécialement  de  bauks-bok  ou  annales  d'Island.  Le  prof. 
Finn  Magnusscn  et  le  sculpteur  Bertel  Thorvaldsen ,  oé  en  4770,  sont  da  nombre  de  la  descendanée 
de  karlsefni. 


DE  N.  ET  A.  ZENI.  2.  83 

rinquîétor.  Aussi  Yinland  et  tout  le  parage  des  environs  n'étaient 
que  visités  et  des  accidents  imprévus  rappellaieni  leur  existence. 

En  liai,  un  évéque,  Erik,  se  rendit  du  Groenland  au  Yinland  dans 
l'intention  de  convertir  au  christianisme  ses  compatriotes  encore 
payons  qui  y  séjournaient.  Quelques  inscriptions  runiques  sur  de 
roches ,  rappellent  ces  anciennes  excursions  des  enfants  du  nord. 

En  1547  une  expédition  allait  de  Groenland  à  Markland  comme 
dans  un  pays  connu  (?). 

Mais  on  avait  des  relations  sur  des  pays  plus  éloignés  que  Yinland. 
C'est  encore  un  chef  islandais  de  Reikianes,  Are  Marsson  qui,  en  983, 
découvrit  le  pays  Hvilramannaland;  ainsi  que  sa  connaissance  n'était 
pas  ignorée  à  la  fois,  ni  à  Limerick,  ni  dans  les  Orkades.  Are 
Marsson  trouva  à  Hvitramannaland  des  habitants  d'origine  irlandaise , 
qui  le  prirent  en  affection  et  l'empêchèrent  de  s'en  retourner. 

Biôrn  breidhvikingakappi  (lutteur  à  grande  échelle),  fils  d'Asbrand, 
célèbre  par  ses  exploits  dans  la  mer  Baltique  et  en  Suède,  à  la  suite 
d'aventures  amoureuses  en  Islande,  prenant  la  résolution  de  s'expa- 
trier, partit  en  999  de  Hraunhôfn-Sniofellsnes  ;  poussé  par  un  bon 
vent  NO,  il  aborda  une  terre  où,  reienu  par  les  indigènes,  il  s'éleva 
bientôt  au  rang  de  chef  du  pays  et  y  vécut  pendant  près  de  30  ans. 
Par  ce  temps  l'islandais  Gudhleifr  Gudhlaugson  (s)  revenant  en  i027 
de  Dublin,  où  il  fesait  des  affaires  de  commerce,  se  vit  emporté  par 
des  vents  contraires  et  jeté  sur  les  rivages  de  ce  pays.  Les  indigènes 
s'emparent  de  lui,  indécis  s'ils  le  mettraient  à  mort  ou  le  réduiraient 
en  esclavage  :  il  lui  semblait  qu'ils  parlaient  l'irlandais.  Heureusement 
leur  chef  Biorn  arrive,  il  s'entretient  avec  le  captif,  le  délivre  et  le 
charge  de  porter  une  bague  à  son  ancienne  amante  Thurida  et  une 
épée  à  son  fils  Kiartau  qu'il  avait  d'elle,  dissuadant  à  ses  compatriotes  de 
visiter  ce  pays ,  où  il  allait  déposer  bientôt  dans  la  tombe  ses  cheveux 
blanchis.  Gudhleifr  remplit  les  commissions  l'année  suivante  1028.  — 
C'est  encore  Hvilramannaland ,  ou  friand  it  mikla  (Albania). 

Le  manque  d'établissements  et  la  rareté  des  expéditions  chan- 
geaient les  abords  de  voyageurs  en  découvertes;  ainsi  les  deux 
ecclésiastiques  islandais  les  frères  Brandr  et  Thorvaldr  fils  de  Helge, 
crurent  faire  une  nouvelle  découverte  quand  ils  abordèrent  en  1285  à 
une  terre  située  à  l'ouest  d'Irlande. 

3.  Des  relations  plus  suivies  s'étaient  établies  vers  le  nord  du 
Groenland.  On  y  allait  chaque  année  à  la  chasse  et  à  la  pèche,  chaque 
Groenlandais  à  l'aise. avait  un  canot  à  cet  effet.  Les  habitants 
d'Eysturbygd ,  du  bout  méridional  de  Groenland ,  avaient  des  stations 
le  long  des  rivages  occidentales  de  Yestribygd  et  de  Nordhr  setur  qui 

(7)  Voici  une  position  postérieure  qui  se  rattache  à  la  situation  de  Markland.  En  descendant  par  le 
fleuve  Saint-Laurent,  nous  voyons  à  droite  une  contrée  bien  boisée,  bien  arrosée,  mais  assiégée  de 
brumes  maritimes ,  qui  seuls  en  dénaturent  la  température.  C'est  le  Gaspé  ou  la  Geupésie,  patrie 
ancienne  d'une  tribu  indienne,  remarquable  par  ses  mœurs  policées  et  parle  culte  qu'elle  rendait  au 
soleil.  Les  Gaspésiens  distinguaient  les  aires  de  vent,  connaissaient  quelques  étoiles  et  traçaient 
des  cartes  assez  justes  de  leur  pays.  Une  partie  de  cette  tribu  adorait  la  croix  avant  Tarrivée  des 
missionnaires  au  xvii*  siècle  et  conservaient  une  tradition  curieuse  sur  un  homme  vénérable ,  qui , 
en  leur  apportant  ce  signe  sacré,  les  avait  délivrés  du  fléau  d'une  épidémie  (nouvelle  relation  de  la 
Gaspésie  par  le  père  Leclercq,  Paris  1693,  —  Malte-Brun,  lxxvi,  p.  465,  édit.  Huot). 

(8)  Frère  de  Tborfinnr  duquel  descendait  l'historien  Snorro  bturlesop. 


84  CARTE   1S90. 

avançaient  jasqu^à  *7â^  55'  de  latitude,  où,  dans  l'île  Kingikiorsoak,  on 
a  trouvé  une  inscription  riinique  qui  dit  :  Erling  Sigualson ,  et  Biorn 
Hordeson,  et  Ëndride  Addon,  le  samedi  avant  gangday  (25  avril) 
élevèrent  cet  amas  de  pierres  et  nettoyèrent  cette  place  en  Tannée  4155. 
Si  Ton  se  donnait  la  peine  d*y  nettoyer  le  terrain ,  on  avait  soin  de  se 
servir  de  cette  partie  réculée  (9). 

Cependant  on  avançait  plus  au  nord  encore,  et  en  1266  Tévéque  de 
Gardar  envoya  quelques  prêtres  explorer  les  parties  les  plus  réculées. 
Ils  partirent  de  la  dernière  station  Kroksfiordhar  heidhi  et  bientôt 
ils  furent  entraînés  par  un  vent  du  sud  dans  un  golfe  où  ils  distinguaient 
des  îles,  des  rivages,  des  traces  de  Texistence  d'indigènes  et  partout 
glaces,  ours  et  phoques.  Le  jour  de  S.  Jacques,  ils  observèrent  la 
hauteur  du  soleil  et  toute  leur  narration  se  rapporte  aux  détroits  de 
Lankaster  et  Wellington ,  découverts  par  75°  de  latitude  par  Parry  et 
Ross. 

Les  côtes  orientales  du  Groenland,  hérissées  de  glaçons  moins  abor- 
dables, n'étaient  pas  tout-à-fait  négligées.  On  les  évitait  à  cause  des 
dangers  :  mais  la  curiosité  des  marins  et  des  apôtres  brava  maintefois 
les  périls.  Les  rivages  découverts  en  i  194  au  nord  de  Tlsland  reçurent 
le  nom  de  Svalbarde  (Scoresby  Liverpool  coast). 

Le  Groenland  grandit  et  prospéra  plusieurs  siècles  :  mais  sa  sécurité 
devenait  incertaine.  Inquiété  par  les  irruptions  des  Skrœlings 
(Esquimaux,  Kalalits),  il  n'a  pu  résister  suffisamment,  commençait  à 
subir  des  perles.  Il  lui  fallut  d'abord  abandonner  90  établissements  et 
quatre  églises  qu'on  avait  dans  le  vaste  Yesterbygd.  Ensuite  on  évacua 
un  canton  de  la  frontière  d'Austerbygd ,  et  l'église  Stensnes,  autre- 
fois cathédrale  de  l'évéché.  Les  Skrœlings  prirent  possession  de  toute 
cette  contrée.  Pour  les  chasser,  une  expédition  avait  été  faite,  vers  la  fin 
du  xiv*'  siècle ,  mais  ils  s'étaient  retirés  momentanément  et  l'expédition 
retourna,  n'apportant  que  moutons,  bétail  et  gibier,  dont  elle  put 
s'emparer  et  charger  ses  navires.  Ivar  Bardsen  à  partir  de  l'année  1540, 
administrateur  pendant  de  longues  années  de  l'évéché  de  Gardar , 
assistait  à  cette  infructueuse  campagne  (10). 

Ravagé  par  d'autres  calamités,  d'abord  affaibli,  ensuite  dépeuplé  par 
la  grande  peste  du  xiv"  siècle,  le  Groenland  se  rangea  en  1586  sous 
la  protection  de  la  reine  de  Skandinavie  Marguerite,  et  du  Danemark. 
C'était  presque  à  la  veille  de  sa  destruction.  Encore  en  1418  les  Groen- 
landais  payaient  à  Rome  leur  dîme  et  le  denier  de  saint  Pierre,  et 
dans  la  même  année  vint,  on  ne  sait  d'où,  une  flotte  de  pirates 
attaquer  la  colonie  déjà  débile  :  tout  fut  détruit  par  le  fer  et  le  feu  ; 

(9)  Voici  les  mots  de  Tidiome  d«  la  pierre  :  EHigr.  Siguajasson  :  r  :  ok.  Bianne.  Tortarson.  —  ok 
Enri]oi.  Odssoa  :  laukartak.  infyrir  gakndag —  blodu  vartate  okmdu  :  4l3f(. 

(10)  Ivar  Bardsen  lui-même  nous  avertit  de  cette  expédition,  dans  sa  description  du  Groenland. 
Inter  Osterbygd  et  Vesterbygd  12  milliaria  maritiroa  interjacent,  quod  totum  litoris  spatium  ab 
incolis  vacuum  est.  Et  protinus  in  Vesterbjgd ,  stat  magnum  templum  dietnm  Stensnes  quod 
aliquauto  tempore  cathédrale  sedesque  episcopalis  fuit.  Nunc  Skrellingi  totum  tractum  occidcntalem 
tencnt  ;  est  tamen  illic  affatim,  equorum,  caprarum,  boum,  ovium ,  quae  omnia  animalia  fera  sunt . 
nuUi  bomines,  neque  christiani,  ncque  pagani.  Ivar  Bardsen  Groenlandus,  qui  Gardorum,  sedis 
episcopalis  Groenlandie  procarator  multos  per  annos  fuit,  nobis  retulit,  unum  fuisse  ex  iis  qui  a 
praetore  delecti  erant,  ut  in  tractum  occidcntalem  profecti,  Skrelingos  inde  expellerent.  Quo  cnm 
Tsnissent,  nuUum  hominem,  ncque  christianum,  neqne  paganum  invenenint,  tantum  modo  fera 
pecora  et  oves  deprehenderunt,  ex  quibus,  quantum  naves  ferre  potcrant  in  has  deportato  domnm 
redirent  (Groenl.  descr.  in  antiquit.  àmeric.  édita,  p.  S4B). 


DE  rf.  ET  A.  ZENr.  4.  85 

les  indigènes  Kalalits  firent  main  basse  sur  ce  qui  restait  encore. 
Depuis  ce  temps-là  on  ne  connut  plus  d'établissement  européen 
dans  ce  parage  (ii).  Il  fallut  de  nouvelles  découvertes  et  des  investi- 
gations pénibles  pour  retrouver  les  vestiges  de  la  destruction.  Aujour- 
d'hui, entre  les  caps  Farevel  et  de  la  Désolation,  on  voit  les  restes  de 
sept  églises  et  de  beaucoup  d'édifices  de  l'ancien  Eysterbygd.  Plus  au 
nord,  un  peu  moins;  au  delà,  les  pierres  remuées  par  les  bras  d'une 
population  vigoureuse,  et  chez  les  indigènes  Kalalits  aucun  souvenir 
de  l'antique  existence. 

On  présume,  non  sans  raison,  que  le  pirate  destrucleur  était  Zicbmni 
ou  Zicno,  chez  lequel  séjournèrent  pendant  de  longues  années  les 
vénitiens  Zeni. 

4.  Nicole  Zeno,  dans  ses  investigations  de  la  mer  septentrionale, 
en  1580,  fut  poussé  par  une  tempête  vers  l'île  Frisland  où  régnait 
Zicbmni,  chef  de  pirates,  qualifié  de  roi.  Il  se  mit  en  familiarité  avec 
lui  et  s'attacha  à  sa  fortune,  appellant  en  1591  de  Venise  son  frère 
Antonio  pour  l'accompagner.  Pendant  de  longues  années,  tous  deux 
virent  et  apprirent  beaucoup.  Nicole,  plus  actif,  dressa  une  carte  ou 
portulan  des  pays  et  des  îles  qu'il  visita  lui-même  ou  dont  il  apprit 
l'existence,  et  en  rédigea  une  relation.  Antonio  vivait  dix  ans  encore 
après  la  mort  de  son  frère  et  restait  en  Frisland.  Avant  de  quitter  ce 
monde,  il  envoya,  en  HOS,  le  portulan  et  la  relation  de  Nicole  à  sou 
troisième  frère  Carlo,  à  Venise. 

Un  de  leurs  descendants,  vers  1555,  se  donna  la  peine  de  copier  le 
portulan  et  de  le  graduer.  Marcolini  le  publia  en  1558.  Réduit  sur  une 
moindre  échelle  ce  portulan  reparut  chez  Valgrisi  en  1561, 1562,  1574, 
attaché  aux  éditions  de  Ptolémée.  De  suite,  en  1588,  on  commença  à 
discuter  sur  ce  que  le  portulan  de  Zeno  offrait  d'inconnu  à  d'autres 
cartes  et  d'introuvable  en  apparence  pour  les  navigateurs,  à  savoir, 
sur  Frisland,  Estotiland,  Droceo,  etc.  (12)  (voyez  n°  95  de  noire  atlas). 

A  l'époque  de  la  graduation  de  Zeno,  vers  1550,  on  connaissait  deux 
différentes  cartes  des  régions  seplenlentrionales.  La  première,  en 
qualité  de  complément  à  l'atlas  de  Ptolémée,  connue  depuis  soixante- 
dix  ou  quatre-vingts  ans  (n°  96)  ;  l'autre  (Schonlandia  nuova),  attachée 
au  système  de  Ptolémée,  offrant  des  connaissances  plus  avancées  vers  le 
septentrion  (n**  98),  servit  de  base  à  d'autres  compositions  de  cette  époque. 
Chacune  offre  une  différente  configuration  des  régions  septentrionales. 
Suède,  Norvège,  Groenland,  Island  varient  dans  leurs  formes,  qui  ne 
ressemblent  point  aux  formes  données  par  le  portulan  de  Zeno,  et  sont 
différemment  coordonnées.  L'une  et  l'autre  méconnaissent  également 
les  Frisland ,  Estland ,  Droceo  et  autres  îles  que  Zeno  étala  dans  son 
portulan.  Or,  chacune  des  deux  cartes  est  composée  sur  d'autres  maté- 


(11)  Quoique  dans  la  série  des  évoques  du  Groenland  ou  n*en  nomme  pas  au  delà  de  l'année  1406, 
il  parait  pourtant  que  le  pape  Eugène  IV  en  avait  désigné  encore  en  1453.  On  a  même  trouvé  une 
lettre  de  Nicolas  V  à  un  évèque  ^roenlaudais  datée  de  l'année  1448  (Graab,  p.  8  et  7;  voyez  Hum- 
boldt,  examen  de  l'Iiist.  de  la  geogr.  du  n.  m.  t.  II,  p.  104}.  Ces  évèques  pouvaient  être  privés  de 
leur  diocèse,  du  nombre  de  ces  antres  in  partibns  infidelium. 

(13)  Viaggi  da  Persia  di  Catherine  Zeuo  et  dello  scoprlmento  de  laîsla  Frislanda ,  Estlanda ,  etc. 
Venise,  1888. 


86  CARTB  1590 

riâUK,  sur  d'aulres  renseignements  et  conceptions  étrangères  à  Zeno, 
aucune  n*a  puisé  à  son  portulan. 

Cette  observation  me  paraît  importante,  autant  pour  apprécier  le 
mérite  de  Zeno ,  que  pour  discerner  les  sources  des  cartes  postérieures. 
C'est  ainsi  qu'on  peut  avancer  avec  certitude,  que  la  carte  septentriona- 
liorum  regionum ,  copiée  dans  le  theatrum  d'Orlel  et  introduite  dans 
les  compositions  de  Mercator,  est  une  combinaison,  une  fusion  de  celle 
de  Schonlandise  novae,  avec  celle  de  Zeno  (is). 

5.  Chacune  de  ces  trois  différentes  compositions  a  ses  vices  autant 
dans  les  formes  de  pays  que  dans  Fensemble  et  les  positions  respectives 
des  parties. 

C'est  dans  la  composition  de  Zeno  que  ces  vices  sont  le  moins  cho- 
quants. Vouloir  la  graduer  serait  vouloir  Timpossible.  Il  suffît  de  remar- 
quer la  parallèle  du  60''  degré ,  également  pour  les  bouts  de  Groenland 
et  de  Scocia  et  pour  Pergeu  en  Norvège.  Nicolo  Zeno  était  peut-être  un 
bon  dessinateur;  si  on  lui  attribue  la  composition  des  formes,  bon  con- 
figurateur de  plusieurs  sections  de  sa  carte  :  mais  je  pense  plutôt  qu'il 
avait  les  portulans  de  ces  sections  (préparés  par  des  pilotes  islandais, 
danois  ou  norvégiens)  dont  il  disposait  la  situation  relative  à  coups  de 
main  sans  échelle,  sans  égards  suffisants  aux  distances  de  la  navigation 
hauturière.  Quant  aux  petits  détails  de  son  séjour  et  de  sa  résidence ,  il 
les  exagérait  monstrueusement,  donnant  des  proportions  vagues,  inéga- 
lement exorbitantes,  désordonnées,  qui  firent  reculer  et  déplacer  les 
pointes  de  l'Ecosse.  C'est  une  image  sans  échelle,  qui  réunit  les  grandes 
parties  bien  connues  par  les  autres ,  les  petites  de  l'imagination  gigan- 
tesque du  dessinateur  et  quelques  points  relatés  par  des  ouï  dire  mar- 
qués à  l'aveugle  (i4). 

Le  bout  septentrional  de  scocia  est  accompagné  de  quatre  îles  (Orcneis) 
et  de  quatre  épigraphes. 

Contanio  (Conlanit  de  Ruscelli),  est  Kaiihenes,  Catnes  écossais. 

lo  Papia,  réellement  l'île  Papa ,  Papalveslr. 

Ara,  Ro  sur  le  bord  septentrional  de  l'Ecosse. 

Teu ,  Tew ,  situé  en  Ecosse  sur  la  petite  rivière  Toungo,  au  dessus  de 
Tougeca  (m). 

(13)  Nous  avons  reproduit  dans  notre  atlas  le  portulan  de  Zeno;  ensuite  la  carte  complémentaire 
de  Ptoléméc  dont  nous  ignorons  l'auteur,  elle  se  manifeste  à  notre  connaissance  depuis  H70  jusqu'à 
1530  dans  toutes  les  publications,  exclusivement  seule.  EnGn  nous  donnons  (n"  98)  un  petit  spécimen 
de  la  troisième,  de  Scbonlandia  ouova,  attachée  au  système  de  Plolémée,  extraite  de  l'atlas  de  Ruscelli 
et  Molette,  chez  Valgrisi  1561, 1562.  Son  auteur  nous  est  inconnu.  Sa  composition  précéda  nécessaire- 
ment de  beaucoup  d'années  les  publications  de  Valgrisi ,  parce  que  à  cette  époque ,  sa  manière  est 
suivie  et  perfectionnée  par  d'antres  cartographes.  Je  vois  ses  formes  dans  les  compositions  de 
Castaido  mort  1557,  et  dans  la  composition  reproduite  par  Mercator  et  Ortel.  J'ignore  le  nom  de 
l'auteur  de  cette  dernière  qui  élabora  la  fusion  de  Zeni  tiré  de  l'oubhe  vers  1655,  1557.  —  La  Schon- 
landia  nuova  parait  grossièrement  sous  une  Ggure  plus  oblongue  en  1555  dans  l'ouvrage  d'Olaus 
Magnns  mort  1586.  Il  semble  que  ses  contours  étaient  alors  généralement  acceptés.  lenkinson 
s'accommodait  à  ses  contours;  de  même  Portantins  avec  sa  Livonie.  —  Les  cartes  de  Corneli  Ântoni, 
de  Monachi,  d'Algoet,  me  sont  inconnues. 

(U)  Excluant  l'Ecosse  mal  assise,  la  graduation  devient  moins  impossible.  Les  degrés  de  la  gra- 
duation de  Zeno  trop  petits,  répondent,  le  60  a  55,  le  62  à  56,  le  64  à  58,  le  67  à  60,  le  69  à  63.  Dans 
cette  évaluation,  l'Islande  fait  défaut,  mais  la  pointe  de  Groenland  ,  juste  à  l'ouest  de  Bergen ,  reste 
presque  sous  la  même  parallèle  ,  ce  que  les  compositeurs  des  cartes  du  xvi'  siècle  ne  savaient  pas 
observer. 

(15)  La  carte  complémentaire  contient  toute  la  figure  ptoléméenne  de  Scotia  et  des  îles  adjacentes  : 
substituant  aux  Uebrides  les  noms  modernes  de  cette  façon  :  à  Ricina  de  Ptolémée,  LevUt,  Levis;  à 
llalleos,  reisl,  Eust  ;  à  Ebuda,  Birie,  Barrakjloum  ;  à  l'autre  Ebuda,  Eg,  Egg  ;  à  Engaritan«  >  Y,  Yla  ; 


DB  N.  BT  A.  ZBMI.   5.  87 

DÂNU. 

6.  En  montant  vers  le  nord,  le  littoral  ouest  de  Dania,  se  rangent  les 
lies  suivantes  : 

Fuy,  Foehr,  Vour. 

Amere,  Amrom,  Ameron. 

Sali,  Sy\i. 

Ruin  (Ruit  de  Ruscelli),  Romeo,  Rem. 

Manu,  Man,Manoe. 

Famé  (Fanu  de  Ruse),  Fanoe ,  Panu. 

Ulhoe,  îlot  et  pointe  de  la  péninsule,  Dodebergh,  Doode-burg. 

Munit,  Numet  et  fie  ou  langue  de  terre,  landt  van  Numet,  étendue 
jusqu'à  Bomienhergen,  Bovensoerg  (te). 

Pour  le  reste  les  épigraphes  manquent ,  mais  de  Tautre  côté  de  la 
péninsule  Dania ,  on  distingue  les  îles  :  Lello,  Ânholt,  Funen,  Zeeland, 
Langeiand,  Laaiand;  les  petites  îles  qui  entourent  Funen,  à  savoir  : 
Hielm,  Wedderoe,  Samsoe,  Ebelo,  Alsen,  Arr  (i?),  Tussing;  près  de 
Zeeland  Ueselo,  toutes  à  leurs  places  quoique  innommées,  mais  coor- 
données dans  un  sens  raisonnable  et  harmonieux  pour  rœîl. 

Les  cartes  postérieures ,  tant  celle  qui  est  complémentaire  de  Ptolé- 
mée,  que  celle  de  Schonlandia  nuova,  sont  très-inférieures  à  la  confi- 
guration de  Dania  tracée  par  Zeno ,  parce  qu'elles  reproduisent  le 
malitorn  de  Ptolémée.  La  carte  complémentaire  le  remplit  des  épi- 
graphes suivantes  : 

Hanburg,  Hambourg. 

Otfacia,  Holsace. 

Socer  (Stade?  Stader  sand ,  à  Tembouchure  de  TElbe). 

Thicumer,  Ditmarsia. 

Frigie  liltus,  rivages  de  Strandefresen. 

Rupis,  Rvpen. 

Burgbra  nodie  litttu,  Bovenburg  et  au  delà  Uarbourg,  qualifié  fie  sur 
les  cartes  de  Delisle.  La  remarque ,  hodie  liltus ,  fait  croire  qu'à  cette 
époque  s'était  opéré  sur  ce  point  quelque  changement  sur  le  littoral. 

Calinge. 

Herl,  cap  Hanwit  ou  Hertberg. 

Sundesusel,  cap  Herlzhals  ou  Robsnout,  Robbeknuyt  deWensyssel.  — 
Sur  toute  cette  côte  il  n'y  a  d'îles  que  les  Saxones  et  Alocise  de  Ptolémée. 

Scane,  Skagen. 

Uiberg  (Niberg) ,  Viborg. 

Arus,  Aarhus. 

Candinga,  Golding. 

Oberlo,  Apenrade. 

promont.  Also,  île  d' Alsen. 

à  Bpidia,  Serra,  Barre  on  Ronft;  à  Vonaln»,  Duroff,  Turrie.  Entre  l'Ecosse  et  Tlrlando  :  à  Edri, 
Adreoêt  Àrran  ;  à  Mona ,  Mona»  Man.  Le  manuscrit  de  Bruxelles  place  les  80  Oreade»  en  pleine  mer 
les  éditions  lenr  assignent  strictement  la  place  ptoléméenienne»  donnant  les  noms  à  Dumna  Farat, 
à  Ocitis.  Herlant.  Au  dessus  des  Orcades  sur  le  rivage  de  Norvegia  est  Thyle  sur  laquelle  nous 
reviendrons. 

(16)  Cornélius  Antoni  avait  bonne  confiance  dans  la  carte  deSCeno,  car  il  lui  emprunte  toute  cette 
série  des  lies  pour  sa  carte  du  Danemark.  Voves  sa  reproduction  par  Ortel. 

(17)  Nommée  Eria  ou  Cria  dans  les  cartes  ou  moyen  âge. 


88  CARTB  1390 

Sirsehor ,  Sunderburg. 

Selesia ,  Sley ,  Slye  ou  SIesvîg. 

Jgenefiord,  Ekelforde,  Ekernforde. 

PUma,  Ploen  en  Holsace. 

Chors ,  Horsdorf ,  près  de  Lubek. 

Trauen,  Travemûnde. 

Lubich,  Lubeka. 

Sur  le  littoral  méridioDal,  vers  Test,  on  voit  Rosloch  (Roslok),  Stenin 
(Stettin),  Ileil  (Hela),  Dantzig  et  les  embouchures  des  fleuves  Calusus, 
Spre  (Pena?),  Viadus  (Odra),  Illusla  (Yistula),  Chronon,  ensuite  primum 
Prusie  lilus. 

LES  ILES. 

7.  Les  fies  de  la  carte  complémentaire  sont  assez  nombreuses  et  quel- 
quefois difficiles  à  distinguer. 

Tred,  Lesu,  Lessow  ou  Loessoe,  ainsi  nommée  à  cause  de  Trend , 
Trendei ,  sable  qui  se  trouve  au  nord. 

Anaol  et  Anhol,  deux  fois  nommée  Anholt. 

Idnagor,  probablement  Hasele;  Samsoe  reste  innommée. 

Feonia  (Teonia),  Funen ,  Fyn ,  Fionia,  sur  laquelle  Nuban  (Nyburg), 
Sunbors  (Svenborg),  Aspres  (Assens),  Fidel  far  (Middelfart),  Bergas 
(Bowens  ou  Bogones),  Aronia  (Huriua,  vis^à-vis  de  Tilot  Romps)  (is). 

Scandia  (Seeland),  sur  laquelle  on  remarque  les  places  suivantes  : 
Falsingar  (Elsingoer),  Cobenamenia ,  Cobenauia  (Copenhagen,  Kioben- 
haven),  Tonga  ou  Melonga,  lisez  couga,  Kuyl,  Keug,  Kogge,  Keug- 
boght),  An/î^  (inconnu),  F%(o^a  (dans  le  domaine  Steffens  on  voit 
quantité  de  localités  terminés  en  lof),  Anberg  Nauti,  dans  l'édition 
seulement  nardi,  dérive  de  Uardianberg  (Varding  borg),  Nestued 
(NestvedK  Rorsur,  korsur  (Casseur,  Corsoe),  Rolesing,  kolesing  (Cal- 
iumborç),  Holdoch,  beldoch  de  Tcdition  (Holbek),  Raslil  (Roskild). 

AU,  Alsen. 

Femercn,  Femeren,  Vemern. 

Rurà,  Rugia. 

Lalant,  Langeland. 

Lalant,  Laaland. 

Falsler,  deux  fois,  Falsler. 

Menb,  Môen. 

Sicholm,  Saltholm. 

Bornholen,  Bornholm. 

Berholen  Oelanth,  Oeland  et  sa  ville  Borgholm. 

Oxilia,  Oesel,  vis-à-vis  de  primus  Prussie  sinus.  Ensuite  une  île  sans 
nom  (Dago)  vis-à-vis  de  primus  Livonie  sinus.  La  Liuonia  s'étend  droit 
au  nord  avec  cinq  épigraphes  :  Rigri  (Riga),  Migardia,  Nugardia, 
(Morgedro  ou  Nargho  île  vis-à-vis  de  Revel,  à  Test  de  celte  île  les  sables, 
Middel  grond  et  Nieuwe  grond);  Nirona  Virona  (ressemble  au  nom  de 
la  province  Wiria,  mais  c'est  île  Wrango),  Flanlena  (ressemble  au  nom 

(18)  Aronia,  Oroma,  Orconia,mal  indiqué  dans  le  manuscrU  de  Bruxelles  est  mieux  placé  dans  les 
éditions. 


DEN.  ET  À*  ZEJNI,   8,  9.  89 

du  canton  Alentakia),  Roderin  (montagne  Rodenbcrg,  appelée  par  les 
Russes  Krasna  gorka,  la  belle;  vis-à-vis  vers  Test,  File  Retusari,  sur 
laquelle  est  bâti  Gronstadt). 

GoUia  (Goltland),  dont  je  puis  retrouver  la  seule  Wisbe  dans  les  cartes 
modernes,  les  autres  Segur,  Erig,  fl,  Miseg,  Terefer,  Alegerech,  fl,  Seu, 
Vulltty  fl.  porta  ou  porti,  Rumefalk,  Voleher,  ne  reparaissent  pas  dans  les 
cartes  ordinaires,  ni  dans  celles  des  atlas  marins,  de  Tancienne  publi- 
cation hollandaise.  Cober  est  un  écueil  situé  au  nord  de  Gotland. 

SUÈDE  ET  NORVÈGE. 

8.  Pour  la  Suède  la  carte  de  Zeno  ne  donne  que  les  noms  de  Svecia 
et  Gocia;  pour  la  Norvegia  dix-huit  appellations  du  littoral.  Les  con- 
tours qu'il  a  donnés  au  Danemark  nous  engagent  à  avoir  égard  à  ceux 
de  la  Suède  et  de  la  Norvège.  En  effet,  le  plus  léger  examen  saura 
convaincre  que  leurs  détours  ne  sont  pas  tracés  au  hasard.  G'est  en 
examinant  ces  détours ,  je  pense ,  que  : 

Geranes  est  File  Hitteroe.  Mais  les  noms  qui  se  suivent  en  montant 
vers  le  nord,  sont  introuvables  pour  moi  :  Tland,  Raceveit,  Esceset  (ou 
Escesct),  Gasendel  (i9). 

Seule  et  Sculenes,  île  de  ce  nom  Skutenes,  ainsi  nommée  Ftle  Garmen, 
de  sa  pointe  méridionale  Schutenes.  —  D'ici  sur  la  carte  de  Zeno  se 
perd  une  distance  assez  considérable,  jusqu'à  : 

Pergen,  Bergen. 

Slefont,  plutôt  Stesont,  Steensund,  Steersund. 

Slat,  Norre  udden  af  Stad,  Statland,  et  simplement  Stadt. 

Riue  ou  Rruc,  Breed-sund. 

Score,  Stor-dal  (Roemes  dal). 

Slopel,  Stoppel. 

Drulen,  Titteren. 

Trondej  Drontheim. 

Engal,  Engelvaer. 

Langaresj  Langenes,  sur  File  Langoen. 

Irons,  Trônes  sur  File  Hindoen.  D'ici  la  carte  marque  mare  et  terre 
incognite,  signalant  cette  croyance  assez  répandue  qui  admettait  une 
réunion  continentale  du  Groenland  avec  la  Norvège.  Cette  croyance  est 
fermement  acceptée  par  la  carte  complémentaire  de  Ptolémée  (se). 

9.  Cette  carte  complémentaire,  quant  à  la  figure  du  Danemark,  infé- 
rieure à  la  carie  de  Zeno,  est  même  très-inférieure  sous  le  rapport  de 
la  figure  de  Suède  et  de  Norvège.  Elle  forme  un  triangle  et  ressemble  à 
une  feuille  de  trèfle  dont  la  tige  sort  de  PhUappelanth  ou  Pilappelant, 

[i9)  On  retrouve  jusqu'à  de  "villages ,  tels  que  Gcuendél  ou  Giesdal,  dit  Malte-Brun,  sans  indiquer 
remplacement  de  ce  village  que  les  cartes  ordinaires  ne  donnent  pas.  11  ne  faut  pas  oublier  ^ue  la 
carte  de  Zeno  est  de  la  nature  des  portulans  qui  ne  s'occupent  que  du  littoral,  lequel  sur  ce  point  ne 
me  présente  rien  de  satisfaisant.  Tlant  peut  être  Haaiand,  ou  les  Lunde  près  de  Syre;  Raceveit  la 
petite  île  Bott  ;  Esceset  Stavanger,  Gasendel  Gestdal  à  l*est  de  Stavanger  (Gansendael  de  Mercat.). 

(20)  De  la  même  époque,  que  la  carte  supplémentaire,  est  la  mappemonde  de  Mauro  4460.  Elle  ne 
connaît  i)as  de  Groenland.  Au  dessus  de  Norvepia,  Mauro  place  IsUtnd,  pays  de  Salten,  ensuite 
Scand,  péninsule  Skonland  où  est  Ofoden ,  vis-à-vis  de  l'île  Hindoen.  Enfin  cavo  de  Rossia.  X  càié 
de  Norvège  on  y  voit  une  grande  ile  Ixlandia,  c'est  l'Island  ;  puis  StiUanda,  Schetland  ;  enfin  au 
nord  datât  Gisoen  au  sud  de  Bergen. 


90  GARTB  1390 

et  est  iuscrit  de  GoUia  orientcUis ,  à  quoi  rédîtioo  ajoute  FifUappelanL 
Celte  feuille  de  trèfle  abonde  eu  épigraphes,  les  voici  : 

Vermelant,  Yermeland. 

Emlanl ,  Upland ,  et  sa  ville. 

Arosia,  Oregrund. 

En  descendant  vers  le  sud ,  les  deux  fleuves  :  Trediena  et  Pierdena , 
ont  quelque  analogie  avec  les  noms  de  deux  cantons  Altundrîa  et 
Fiedrundria. 

Agaria,  Aker. 

Schokalna  ou  Scokalna,  Stokholm. 

Suivent  les  embouchures  de  deux  rivières ,  qui  sortent  du  lac  Seokoï, 
une  d'entre  elles  porte  le  nom  de  Sera  ou  Seta  (Am). 

Le  lac  Seokoï  est  le  lac  Weter  placé  dans  Tintérieur  de  GoUia  meri- 
dionalis,  reçoit  plusieurs  rivières,  dont  une  est  nommée  ft.  Alvena,  elle 
est  entre  : 

Alous,  Ols-hammer?  et 

Nascola,  Askersund?  vient  ensuite 

Scening,  Skcninge  ou  Schenninge.  Au  sud 

Sucricobirg  ou  Suericobing. 
Sur  les  bords  de  la  mer  Calmar,  Calmar. 

Aosia,  Abus. 
Dans  la  Scania  et  Dacia,  nous  trouvons  : 

fl.  Tursca,  Helge-an. 

Islrade,  Ystad  ou  Usteda. 

Falslerde,  Falsterbo. 

Sianock,  pointe  Skaner,  Schoner  oste,  ancien  Falsterbo. 

Lunda,  Lund. 

Elcehorgeir,  Ellebogen  (Mal  moe). 

Eria,  Raa,  Raboo. 

Elsiborg,  Helsingborg. 
Ensuite  commence  Gallandia  pleine  de  rivières  : 

fl.  Forsca,  Renne;  fl,  Anga  Nissa-an. 

Cimulis  ou  Amutis,  Halmstad? 

Oral,  les  îles  nord  et  sud  Hertô. 

fl,  For8l,fl.  Auga,  Astran  (il  semble  une  double  répétion  de  mêmes 
noms). 

fl,  Trodia,  Wiska. 

fl.  Sumorsan,  Monsterson  (Gotaelf,  Gothalbe). 

Lodesia,  ancienne  appellation  de  Gotheburg. 

Bahus ,  Bohus. 

fl,  Suslar  ou  Sunstar. 

Asco,  Askum. 

10.  Ensuite  Tembouchure  du  fleuve  lona  qui  vient  du  lac  lona  ou 
Serese  ou  Serefe.  Ce  lac  est  celui  de  Wener,  placé  dans  la  Suetia  que  et 
Gottia  ocidentalis.  Ce  lac  reçoit  plusieurs  rivières  dont  une  vient  de 

Ussalia,  Upsal;  Tautre  de 

Lincopia,  Linkoping;  et  au  sud  du  fleuve  lona ,  est  placé 

Farensis  ou  Faronis,  Skara? 

Une  grande  confusion  vient  enfin  embrouiller  quantité  de  noms 


DE  N.ET  A.  ZENI,   10.  91 

défigurés  ou  étrangers  à  Tusage  ordinaire,  comme  sont  les  noms  des  lacs 
et  de  presque  toutes  les  rivières.  Le  fleuve  lona  qui  devait  représenter 
le  Goia  elf,  dénote  le  Glommen  de  Norvège. 

Ici  commence  la  spacieuse  Norwegia,  Norbegia,  le  long  du  fleuve 
lona  (Glommen) ,  qui  s'étend 

(i(M*  Tumefror,  à  partir  de  Tune  sur  Hommen,  jusqu'au  Tonsberg, 
Tunsberg,  et  Tunsheim. 

Camorensis  ou  Damorengis,  Drammen ,  à  Tembouchure  de  Drammen 
au  nord  de  Tunsberg. 

fl.  Optenif  Louven  Lougen ,  Lôgr,  qui  vient  des  environs  d'Opdal. 

II.  Mita  ou  Nicta  (Nitta),  Nid,  qui  se  décharge  près  d'Arendal. 

Repuris,  Reperwyk,  mouillage. 

Lufle  Gi promont,  Lufte  mons  (lisez  Luste),  sont  Lister,  Lusterland  ou 
Listerland  (qui  couvre  l'île  Hitteroe ,  Geranes ,  d'où  commence  le  por- 
tulan de  Zeno). 

Slauargelenlis ,  Stavanger ,  stavangerensis ,  fleuve  qui  vient  se  jeter 
dans  la  mer,  vis-à-vis  d'une  île  plus  considérable  nommée  Thyle 
et  qui  sort  d'un  lac  nommé  lacus  Penarum,  L'île  au  nom  antique 
fourni  par  Ptolémée  est  Skute  (agrandie  dans  le  portulan  de 
Zeno)  et  le  fleuve  est  la  rivière  Longcn  elf,  qui  tombe  dans  Buken- 
fiord ,  sortant  près  de  Vennio  de  Roisdals  vatne  des  eaux  du  lac  Pena- 
rum, qui  est  entre  Roildal  et  Vennio  (Penio). 

Bergensis,  Bergen,  bergensis. 

fl,  Buri,  fi,  Archeus,  sont  les  seuls  qui  se  présentent  dans  tout  l'es- 
pace jusqu'à  Drontheim.  Le  premier  serait  le  fleuve  Roemsdaal ,  ainsi 
appelé  de  Breesond  ou  Beeresond,  entre  lesquels  il  se  décharge  dans 
la  mer;  l'autre  serait  Golan  qui  débouche  près  d'Urkedal,  d'où  dérive 
son  nom  Archius? 

Nodrosia ,  Nidrosia  ou  Drontheim. 

Les  deux  îles  vis-à-vis  de  Nodrosia  Ferensis  et  Feinas,  sont  probable- 
ment à  diviser.  La  première  est  Froyen  située  vis-à-vis  de  Drontheim , 
l'autre ,  égarée  peut-être  si  loin  des  côtes  du  Danemark,  Fanoe. 

Se  suivent  sur  le  parage  sinueux  :  fl,  Nitis  (Namsen),  promont,  Oplena 
mons,  fOttenos  Mercatori),prow.  Nustre  (ou  Uustre,  Veslenfiord),/ï.  Selhi 
{S>iech) y  prom.  Selecros  ou  Selceros  (Salten,  Saltensfiord), /Z.  Trogue, 
fl.  Termœ  (Malangar  près  de  Tromsoe),  Tion,  fi,  Enog,  ces  trois  der- 
nières positions  forment  le  canton  d'Engronelant  (dont  le  nom  n'existe 
pas  dans  l'édition  d'Ubelin  et  Essler) ,  au  delà  duquel  est  un  autre 
nommé  Ventelant, 

Vis-à-vis  sont  placées  les  îles  Holcelanl  et  Margarester;  cette  dernière 
est  certainement  Mageroe ,  au  nord  de  Norvège. 

Le  géographe  constructeur  de  la  carte  complémentaire  s'imagine 
qu'un  golfe  étroit  sépare  la  Norvège  du  Groenland.  Le  Groenland, 
sous  la  forme  ovale,  se  développe  comme  un  fruit  au-dessus  de  la 
feuille  dont  nous  avons  examiné  les  épigraphes  abondantes.  Zeno  savait 
au  contraire  que  Groenland,  très-éloigné  à  l'ouest,  était  séparé  de 
Norvège  par  de  vastes  mers  et  par  l'île  Islande  (21).  Aussi,  avant  de 
nous  entretenir  du  Groenland,  nous  allons  examiner  cette  grande  île. 

(Si)  Puisque  nous  ayons  reproduit  dans  notre  atlas  (n*  98}  la  Schonlandia  nuova,  ou  la  carte  posté- 


92  GARTB  i39a 

ISLANDIA. 

il.  Vhlande,  dessinée  par  ZeDO  dans  une  pose  un  peu  Inclinée, 
figure  perpendiculairement  sur  la  carte  coropiémentaire.  L'arretino 
Thomasso  Porcacctii  da  Castiglione,  en  1572,  reproduisit  la  figure  de 
Zeno ,  enrichie  de  plusieurs  insertions  introduites  avec  une  certaine 
connaissance  de  positions  (ââ).  Le  géographe  qui  opéra  la  fusion  de  la 
carte  de  Zeuo  avec  la  carte  des  régions  septentrionales  ou  de  Schonlandia 
nuova  recliOa  par  ses  connaissances  quelques  points  de  la  composilion 
de  Zeno,  comme  on  peut  le  voir  en  observant  les  reproductions  de  sa 
carte,  vers  1570  par  Ortel  et  Mercator.  Mais  les  caries  nautiques  bataves 
publiées  en  1585,  1589, 1599,  par  Luc  Jans  Waghenacr  (Aurigarius) , 
donnaient  à  flslande  une  forme  toute  ronde  ou  ennéagonale  chargée  de 
la  nomenclature  de  seize  noms  étranges,  la  plupart  ignorés  par  toutes  les 
autres  connaissances  (23).  A  cette  époque  cependant,  parut  une  carte 
spéciale  d'André  Velleius,  reproduite  de  même  vers  1570  par  Ortel  et 
Mercator.  Elle  servit  de  base  pour  les  compositions  postérieures;  rectifiée 
elle  reparut  chez  Blaeuw  et  dans  différentes  autres  fabriques  de  cartes 
ainsi  que  dans  les  études  de  Sanson.  Les  cartes  marines  publiées 

rieure  à  la  carte  complémentaire  au  Ptolëmëe  :  nous  allons  faire  une  revue  de  ses  épigraphes,  qui  au 
fond  n'offrent  pas  de  difficultés ,  sauf  quatre  positions  à  observer. — Taveutia»  Tavastie  ;  Nov.  castr. 
Nysliantzou  Nie;  Viburg,  Viburg;  Àho,  Abo;  CtMto  (transposé)  Kasto,  dont  les  ruines  existent  au 
iud  d'Abo  ;  Korsholm,  Korsnas  ou  Cornis  ;  Chimen,  Kimi ,  Kemi  ;  Gefle,  Gaefle  ;  Upsalia,  Upsal  ; 
Suderkopia,  Suderkocping,  au  sud;  SteckhoUn,  Stokholm.auuord  (transposition);  Cannar,  Calmar; 
Mabnogia,  Malmoe  ;  HeUenburg,  Helsinborg  ;  Kongelle,  Eongel  au  sud ,  Salsburg,  Elsboi^  on  Gotten- 
burg  au  nord  (transposition);  ^<iota,  Obslo  ou  Christiania;  Stafanger,  Stavauger;  prom.  Scane, 
Scutenes;  ata  Brigitta  ....  ;  Bergù,  Bergen;  fiyr«en,  Beersend;  Mendelhu»,  lAeilhnjs  ou  Melhus; 
Ncu,  Naes  au  uorà»  Nidrosia,  Drontheim  au  sud  (transposition);  Skongen,  prom.  Schonien  ;  Brynnia, 
Bronoe;  Rodboo,^Rodoei  SaUen,  Salten;  RoUm,  Rollen;  RodheUe,  Rodhelle;  Fnagh,  Kynnes? 
Hanoniz,  Onmegan^?  Matkur,  Matkorf  ;  yharhug,  Wardhuus.  —  Les  îles  :  Stappen,  Stappen  près  de 
Mageroe;  RodeshoUm,  Rindo  et  Holmoe;  Sanyion,  Senyen;  Vcutral,  Wcsrol;  Londina,  Luudland; 
f^aro,  Varoe.  —  Oaeu,  Uns,  Hettand,  Maïnland ,  Farenaist  Faire,  ces  trois  de  Schetland.  —  j^locie  etc. 
de  Ptolémée.  Nerpia,  Biorko  ou  Herpen  ou  Querken  etc.  —  Le  t^pe  de  cette  carte  servit  longtemps 
de  modèle  aux  géographes  dans  leurs  compositions.  La  première  carte  de  Suède  et  de  Norvège , 
supérieurement  élaborée,  est  sans  doute  celle  d'André ^ureus,  suédois,  du  commencement  du 
XVII*  siècle,  vers  46fO. 

(S2|  L'isolo  piu  famose  del  mondo  descritte  da  Thomaso  Porcacchi  da  Castiglione  arretino  a 
intagliate  da  Girolamo  Porro  padovano,  in  Venetia,  apprcsso  Simon  Galignani  et  Girolamo 
Porro  4572,  petit  folio,  p.  77,  78.  Les  positions  ajoutées  à  celles  de  Zeno  sont  les  suivantes  :  mons 
sanctus  ou  abatia  Hegeitl,  le  lac  Borghem,oripto  orticus,  mons  crncis,  mons  Helafiel  au  centre  de 
l'île,  Vestrabord  tout  à  fait  au  sud  ;  le  nom  de  Cenesol  est  doublé ,  Aisel ,  négligé.  —  Porcaccbi  lui- 
même  n'est  pas  un  ignorant,  il  cherchait  de  bonnes  informations  et  semble  suivre  un  écrivain  la 
mieux  renseigné  à  Venise.  A  part  sa  discussion  sur  Tbile ,  Tule',  il  reconnaît  l'insuffisance  de  ses 
connaissances  :  ne  diro  quel  poco  chen  ho  trouato ,  certiGcando  ogniuno  cbe  legge,  ch  'io  piu  ne 
tratterei,  se  piu  ne  sapessi.  L  Isola  Islanda  è  dunque  posta  fra  P.  et  T.  di  la  dalle  Orcadi  nel  grande 
oceano  aggbiaciato,  cento  uenti  miglia  oltra  il  circolo  artico  :  et  di  lunghezia  dicono  ch'  c  fra  TA.  e'I 
B  :  intorno  a  seicento  miglia  :  ben  che  io  trouo  alcuni,  che  con  molto  gran  disuano  non  uogliono, 
ch'  ella  sia  luoga  piu  che  ccnto  uenti  miglia  uerso  T  :  et  di  circuito  dicono  che  non  passa  280.  Ë'  isola 
montuosa,  et  con  moltifiumi.  —  Ora  dell*  Islanda  si  seriuono  moite  marauiglie  :  fra  le  quali  dicono 
esscrui  una  balza,  che  chiamano  Hegleberg ,  che  da  questa  escono  pcrpetui  fuochi  et  pensano,  cbe  sia 
una  prigione  d'animé  immonde.  Dicono,  che  ui  si  trouano  aochora  spiriti,  i  quali...  Quest'  isola  non 
produce  grano,  uino,  ne  olio  :  mt  in  cambio  di  uino  usano  ceruogia  et  dal  grasso  de'  pesci  fanno  olio 
per  abbruciare.  Ha  intorno  alcuni  scogli  :  ma  di  tanto  uil  pregio,  che  non  son  nominati  dagli  auttori. 

(23)  La  moitié  appartient  à  la  partie  septentrionale  de  1  île  et  se  laisse  comprendre  un  peu.  Le 
point  le  plus  déterminé  est  Langenet,  h  partir  de  ce  point  vers  l'ouest,  Roemhoek  répond  à  Oudcman 
des  cartes  bataves  postérieures;  Seueroart  change  eu  Swanswyck,  ensuite  en  Sutungswick ,  déjà  de 
l'autre  côté  du  golfe  Pistils  (golfes  Lons  et  Tbiful);  t.  Grinae  et  vis-à-vis  d'elle-même  Grinsa  (Grim); 
Rouhoeck,  figure  dans  les  cartes  postérieures  dans  Roohoeck  et  change  ensuite  en  Roodehoeck 
(Raudarhofo);  Windal  (district  de  Vadle);  Haddestrant  (des  golfes  Eya  et  Ilicdins);  Scage  (golf 
Skagar  et  Skagastrand);  Bere  atrant  (au  fond  du  golfe  Houtray,  Baer,  dans  le  district  de  Strand).  Sur 
tout  ce  parage  les  Bataves  avaient  probablement  leur  pêche.  En  tournant  vers  le  sud ,  vient  t.  Sleto, 
ensuite  Srenich,  Robena,  Midal  (Medalland),  Side  (Sida  près  de  Kirkioubae),  vis-à-vis,  l'île  ff^ibeni 
(ainsi  nommée  Westmanna).  A  l'est  sont  Bergvoél  et  Ooaterhoeck,  formant  les  angles  de  cette  Island 
ennéagonale. 


D£  N.  ET  A.  ZEKI,  1S.  Oi» 

par  van  Kealen  élaboraient  toutes  les  sinuosité  des  rivages.  Assujettie  à 
Tarpentage  des  ingénieurs,  terminée  en  1754,  elle  avait  toutes  ses 
formes  sinueuses  et  hérissées  suffisamment  déterminées,  reproduites 
par  différents  fabricants  de  caries  et  spécialement  par  les  héritiers 
de  Homman.  Il  lui  manquait  cependant  une  position  fixée  par  des 
observations  astronomiques.  Il  paraît  par  la  carte  publiée  par  Horrebow 
qu'elles  étaient  levées  par  les  Anglais.  Mais  les  observations  mieux 
connues  par  la  pratique  géographique  sont  dues  aux  français  Borda, 
Pingre  et  Verdun  de  la  Crenne,  quf  les  ont  levées  en  1778.  De  nom- 
breuses descriptions,  nous  ne  mentionnerons  que  celle  du  voyage  en 
Island  fait  par  ordre  du  roi  de  Danemark,  publiée  en  1802,  parce  que 
nous  y  avons  eu  à  notre  disposition  une  carte  très-détailléc  (24). 

12.  Notre  allas  a  réuni  les  trois  petites  figures  de  Tlsland  :  celle  de 
Zeno,  celle  de  la  carte  complémentaire  et  celle  de  la  carte  reproduite 
par  Mercator  et  Orlel ,  qui  opéra  la  fusion  des  connaissances  de  Zeno 
avec  la  Schonlandia  nuova.  Nous  allons  collationner  ces  trois,  consul- 
tant les  cartes  précitées,  pour  expliquer  la  situation  de  leurs  positions  : 
comme  nous  les  avons  tracées  dans  notre  atlas,  et  que  nous  résumons 
en  commençant  par  Skalhold  et  se  portant  de  suite  à  Anafiord  pour 
faire  le  tour  de  l'île  (as). 

Scalodin,  Scaloldin  (de  Porcacchi),  Scalhodin  (de  la  repr.  de  0.  et  M.) 
Skalholt  résidence  de  l'évêque. 

Anaford ,  Anafiord  (repr.  de  0.  et  M.)  Hanefiord  baie  sur  lequel  était 
situé  Hanar. 

Tuchosy  Tirchos  (de  la  carte  complém.),  Tulios  (de  Porcacchi  et  de  la 
repr.  d'O.  et  M.),  ne  se  retrouve  pas  dans  aucune  carte  postérieure,  ni 
dans  celle  de  la  division  républicaine  du  X^  siècle,  composée  par  Biôrn 
Gcumloegson,  géographe  d'Islande,  Finn  Magnusen  et  plusieurs  autres 
savants  d'Islande. 

lovel  ou  louci,  de  la  leçon  de  Ruscelli  et  de  Porcacchi;  lokelei 
Snaueliokel ,  de  la  reprod.  d'O.  et  M.  Snebels-hokel  of  ïokuls-berg , 
Snabels  hokel  ou  Sneffîaeldness. 

louci,  de  0.  et  M.  est  une  répétition  du  précédant,  dérivant  de  la 
différente  leçon  des  épigraphes  de  la  carte  de  Zeno. 

Volrabor,  Westrabord  (de  0.  M.),  rivages  du  district  Bardestrand , 
faisant  partie  de  Westlendinga  fiordung,  ou  Westland,  quartier  occi- 
dental. 

Wilsare  mons  (0.  M.) ,  écueil  dans  la  mer  vis-à-vis  de 

Ifafiord  (0.  M.) ,  Isafiord  et  canton  de  ce  nom. 


(24)  L'exécution  de  cette  carte  est  assez  plaisante.  Elle  indique  nombre  considérable  de  positions 
•ans  épigraphes  :  ce  défaut  est  commun,  par  un  singulier  hasard  à  la  publication  dos  cartes  anté- 
rieures :  mais  ce  qui  est  plus  curieux  et  spécial  à  la  carte  du  voyage  par  ordre  de  sa  majesté ,  que 

vous  n'y  trouvez,  ni  mont  Hecla,  ni  Skalholt,  ni  Holura,  ni la  carte  u'a  prison  considération, 

que  de  nombreux  glaciers,  les  noms  d'innombrables  petits  fiords  (qu'elle  qualifie  de  golfes)  et  d'insi- 
gnifiantes petites  positions. 

(25)  Le  nom  d'IsUtnd^  pays  de  glaces,  n*C8t  pas  nouveau  dans  cette  partie  du  monde.  La  carte 
auglo-saxone  du  x*  sicele»  le  donne  à  une  partie  de  Norvège,  qu'elle  représente  entière  comme  île. 
Cette  appellation  d'une  partie  de  la  Norvège  confirme  la  carte  de  Mauro  1460.  L'île  même  d'Island 
•st  signalée  en  4184  dans  la  carte  rogerienne  par  Edrisi;  cette  tie  porte  le  nom  de  Ixeland  dans  h 
carte  de  Mauro. 


94  CARTE  1390 

prom.  Rag  (0.  M.),  cap  Nord;  à  son  ouest  Rakbaay  entre  Rakhal 
et  cap  Nord,  indiquent  les  cartes  maritimes  des  van  Keulen  (âo). 

Klesol  (du  complément)  ne  se  trouve  nulle  part.  Peut  être  (Rlesol) 
Relis  bool,  au  fond  du  golf  Hounan. 

Nicole  Zeno  ignore  Texislence  de  cette  portion  de  Tlslande  qui 
s'étend  entre  Votrabor  et  Honos. 

fi,  Honos,  Hanos  (du  corapl.),  rivière  de  Hounavals,  qui  tombe 
dans  Yalsdals  ou  rivière  de  la  vallée  Vats,  nommée  aussi  Hounan  ;  elle 
donne  son  nom  au  golfe  Houna. 

Cenesol,  Fuesol  (du  complem.),  Tindasfoll? 

abalia  Hegeial,  mens  sanctus  (de  la  carte  de  Porcaccbi),  couvent  de 
Reinestadr ,  Reniestad. 

Canesol  (de  Porcac.  certainement  n'est  qu'une  répétition). 

Cackerfier  (0  M),  golfe  de  Skagar,  Skagafiord  dans  lequel  se  perd,  par 
deux  bras,  le  fleuve  Vestra  ou  Horats  formant  une  île  ou  le  delta  Krip. 

Olensis ,  Holensis  (de  Porc),  Hollesis  (du  compl.),  Holen  (placé  au 
fond  de  l'île  dans  la  reprod.  de  0  et  M) ,  Holi  ou  Halar,  résidence  de 
révêque,  cpiscopi  holensis. 

Hauis,  Hauos  (de  Porc.)  (Hanesco  de^  anciennes  caries  bataves),  île 
Heis  ou  Huisley,  à  l'embouchure  de  plusieurs  rivières  dans  le  golfe 
Eya ,  vis-à-vis  de  Modrouval. 

Macre  (du  compléro.),  Mokrufeld  de  la  carte  de  Velleius,  à  l'est  de 
la  rivière  qui  perd  ses  eaux  dans  le  golfe  Eya.  La  carte  des  explora- 
tions royales  d'accord ,  donne  sur  ce  point  Moedrafell,  au  sud  du  cou- 
vent Mounkeaa,  appelé  Munketuere  par  Yelleins,  et  Mankapuera  dans 
les  anciennes  cartes  bataves. 

Noder,  Nadar  (du  compl.) ,  Moder ,  Modurvaller ,  Modruveller , 
Modrouval  couvent  (au  nord  du  couvent  Mounkeaa).  Porcaccbi  fait  de 
Noder  un  grand  district  et  le  place  à  l'est. 

Du  lac  Sor^/icm,  duquel  un  fleuve  s'enfourche  vers  le  nord  et  par 
ses  deux  embouchures  forme  une  grande  île.  Ce  lac  est  Kalfborga  ou 
Vatnbregge,  qui  communique  avec  le  fleuve  de  la  vallée  Reike, 
lequel  avec  un  autre  très-rapproché ,  étreint  une  presqu'île  élancée 
entre  les  golfes  de  Skalfanda  et  d'Eya ,  où  Modrouval  se  trouve  à 
l'ouest. 

Mane,  ou  Manedos  (mais  il  faut  séparer  Dos),  Minotu  de  la  carie  de 
Blaeuw;  Myvatr  de  la  carie  des  explorations  i*oyales;  non  loin  de 
Myvaln,  du  lac  My  ou  des  mouches,  inscrit  Mynotn  dans  la  carte  de 
Velleius.  —  Porcaccbi  de  Mane  fait  une  leçon  de  Marie  et  place  à  son 
côté  ouest  cripto  orlicus,  un  eclos  probablement  de  quelque  culture 
remarquable,  au  sud  mons  crucis,  près  de  Dos.  Cette  montagne  de  la 
croix  est  indiquée  Cruisberg,  dans  une  position  incertaine^  dans  la 
carte  reproduite  par  Ortel  et  Mercator. 

Os  de  la  carte  complémentaire  est  certainement  Dos  de  Zeno,  qu'elle 
répète  elle-même. 

(26)  Island  dressée  par  les  père  et  fils  van  Kealcn ,  se  trouve  répétée  plusieurs  fois  dans  l'atlas 
maritime  de  4780,  de  nieuWe  groote  lichtende  Zee-fakkel,  eerste  deel,  publiée  par  Gérard  Hulst,  van 
Keulen,  à  Amsterdam.  Le  mieux  élaboré  par  le  père  Wylem  Johan  van  Keulen  et  gravé  par 
A.  Trysz  ITiff,  offre  dans  la  nomenclature  littorale,  quantité  de  noms  inconnus  sur  les  autres  cartes, 
ces  noms  furent  en  usage  chez  les  marins  des  Pays-l^s,  ignorés  par  les  autres. 


DE  N.  ET  A.  ZENI,  15.  95 

Dos  (Os  et  I>os  du  complément) ,  Do$  comme  grand  district  chez 
Porcacchi ,  Aas  sur  le  fleuve  d'Oxanrdi ,  ou  Axar ,  ou  Sand. 

15.  En  face  de  ce  rivage  septentrional  on  distingue  vers  le  nord 
plusieurs  îles. 

Grimse  (de  0.  M.),  Grim»  lancée  dans  la  mer»  les  autres  tout  près 
du  riva  ce. 

Tscip(0.  M.),  Fiat,  Platey. 

Donbart,  Denboot  (de  0.  M.)  Lounden,  Lundey,  ou  peut-être  le 
rivage  même. 

Mimant  ou  Munant  ou  Minant  (de  Porc),  les  îles  Meinaar,  ou 
peut-être  Tîle  Moisen  lancée  dans  la  mer.  Mimant  seule  de  la  carte  de 
Zeno  doit  être  considérée  comme  une  île  réelle  :  les  autres  sont  plutôt 
formées  par  des  courants  supposés  des  fleuves.  La  carte  reproduite 
par  Ortel  et  Mercator  le  confirme;  le  lac  renommé  Lagar,  où  fut  situé 
le  couvent  Skrida  ou  Skirda,  donna  origine  à  celte  supposition.  La 
revue  des  cartes  modernes  explique  ces  îles  par  les  noms  des  fleuves 
et  des  golfes  du  rivage  oriental ,  très-faiblement  connus  par  les  cartes 
de  Blaeuw  et  Yelleius.  Les  appellations  de  ces  îles  sont  passées  sous 
silence  dans  le  complément  de  Ptolémée. 

pr,  Langnes  (de  0.  M.),  Langenes. 

Bres,  embouchure  des  fleuves  Brou  ou  Brou  isekul  et  Lagar,  sur  le 
lae  de  ce  dernier  Bersa-stadr  situé  au  nord  du  couvent  Skrida. 

Tala,  lalas  (de  Porc),  Dala  Tangoe. 

Watlinckfier  (de  0.  M.),  Yeltanes  situé  entre  les  deux  positions  sui- 
vantes, transposées  dans  les  épigraphes  de  Zeno. 

Iscant  au  sud ,  est  au  nord  golfe  Eski ,  Eskafiord. 

Brous  au  nord-est  au  sud  golfe  Berou ,  Beroufiord  et  Berounes. 

prom,  depoorte  (de  0.  M.)  est  le  port  du  golfe  de  Berou  ou  Beroufiord. 

Irons,  Trans  (de  Porc.)  ne  se  trouve  pas. 

Bergen  (situé  dans  Tinlérieur  de  la  reprod.  d'Ort.  et  Merc.)  Borgar. 

Waluisch  (de  0.  M.)  île  de  la  baleine,  est  Tîle  de  poisson  Tvisker. 

Aisel,  ïïarscl  (du  compl.)  Oroeso. 

Valen,  Uelonit  (du  comp\.),Vallen  (O.M.)  place  du  district  RanaaYalla. 

Helgfial  (de  0.  M.),  nom  connu  ailleurs  ne  se  trouve  pas  sur  le  point 
indiqué.  Cest  sans  doute  (Helafiel,  montagne  embrasée  et  ardente, 
placée  au  centre  de  Tîle  par  la  carte  de  Porcacchi  (volcan  Hekla). 

Les  six  positions  suivantes  de  Zeno ,  y  compris  Skalhold ,  sont 
passées  sous  silence,  de  même  que  la  côte  orientale  dans  la  carte 
complémentaire  à  Tallas  de  Ptolémée. 

Westmone  (0.  M.)  île  de  Westman.  La  même  portait  le  nom  de 

Grislada,  Grislanda,  (0.  M.)  d'où  la  carte  reproduite  par  Ortel  et 
Mercator  inventa  deux  îles  difierentes,  sachant  peut-être  qu'au 
nord  de  Grislanda  (Westman)  se  trouve  une  autre  Yoomula ,  à  laquelle 
elle  attribua  le  nom  de  Westmone. 

Westrabord  de  Porcacchi ,  sont  les  rivages  vis-à-vis  de  Grislada  ou 
Westmone,  les  environs  de  Thorlaks  ou  Porlaks  hafien  des  cartes 
bataves.  Cette  dénomination  n'est  réinscrite  nulle  part. 

Sleloth,  slelocth  (de  Porc.),  Selvoge  ensuite  Sildvog  des  cartes  mari- 
nes bataves,  Siglavuk  du  district  de  Ranaa  près  des  sables  de  Rangaar. 


96  CARTB  1390 

Flogoêcer,  Fuglastcr,  Gucirfurglaster,  île  d'oiseau 

Ochos ,  Aas  ? 

Ostrabord  (0.  M.)  côte  orientale. 

Rok,  Roeck,  île  (0.  M.),  île  on  sables  de  Rangaar  à  l'embouchure  de 
Raoc  dont  un  bras  est  oricnlal ,  l'autre  occidental. 

Wespeno  (0.  M.)  du  couchant. 

prom,  Hekelfort  (0.  M.)  indique  évidemment  Reikianes. 

Foglasler  (0.  M.)  île,  le  dernier  îlot  des  écueils  des  oiseaux  nommés 
YOgelschaaren ,  Geie  fuelasker,  Geye  puglasker,  Gueir  fougla.  Suit 
Ânafiord  et  Skalhol ,  d'où  nous  avons  commencé  notre  tour  de  l'Is- 
lande. 

GROENLAND. 

14.  Jusqu'à  ce  moment  nous  avons  marché  sur  un  terrain  connu, 
qui  explique  ce  que  Nicolo  Zeno  voulut  signaler,  et  nous  fait  com- 
prendre ses  connaissances;  ce  terrain  était  vivant,  plein  du  langage 
constant,  ininterrompu.  Les  explications  qu'il  nous  a  données  sont, 
je  pense,  de  nature  à  inspirer  confiance  dans  ce  que  Zeno  relate.  Un 
semblable  terrain  nous  manque  pour  examiner  le  Groenland.  Ce 
pays  après  lui  disparut  bientôt,  échappant  pour  longtemps  aux  inves- 
tigations des  marins.  Retrouvé  par  Forbischer,  Davis,  en  1586,  1607, 
Mank,  1619,  Bylot  et  Baffîn  en  1622,  jusqu'aujourd'hui,  sur  sa  côte 
orientale  insufBsamment  examinée,  offrirait  un  terrain  muet,  mort,  si 
les  indigènes  n'avaient  indiqué  dans  son  temps,  quantité  de  positions 
par  leurs  noms  anciens  et  n'avaient  conservé  es  souvenir  des  anciens 
établissements.  Mais  cette  vie  qui  animait  les  indigènes  échappe 
aux  scrutateurs  de  la  carte  contemporaine  de  Zeno.  Les  descriptions 
islandaises  qui  sont  connues,  indiquent  les  iiords,  la  situation  et 
les  possessions  des  églises,  les  îles,  les  lacs,  les  provinces  et  les 
districts,  les  couvents  et  les  domaines;  elles  indiquent  aussi  leur 
position  topographique  et  fournissent  leur  nomenclature;  à  peine  y 
trouve-t-on  une  rivière  ou  un  promontoire.  Aucune  carte  dressée 
pour  servir  à  ces  descriptions  ne  s'est  conservée  (î7).  Zeno,  au 
contraire,  donne  une  carte,  un  portulan  peint,  qui  indique  les  rivières 
et  les  promontoires ,  trace  leur  position  riveraine.  Les  groenlandais 
et  les  islandais  devaient  avoir  des  cartes  semblables,  mais  aucune 
ne  s'est  conservée.  Pour  expliquer  les  positions  indiquées  par  les 

(27)  On  a  trois  notices  ou  descriptions  du  Groenland,  toutes  les  trois  reproduites  dans  les  anti- 
quitatcs  americanse ,  Hafnia:  4837,  pp.  284-318.  L'une  fait  un  compte  des  églises  ;  l'autre  contient 
une  abondante  nomenclature  de  fiords;  la  troisième,  la  plus  étendue,  dont  l'auteur  est  Ivar  Bardson, 
rédigée  vers  la  un  du  xnr*  siècle,  traite  une  description  d'Oestribygd  seul.  Les  deux  autres  sont 
indubitablement  plus  anciennes,  que  cette  dernière ,  parce  qu'elles  traitent  avec  le  même  intérêt 
Veslraby^d  et  Seta ,  tandis  que  ces  parages  sont  indifférents  pour  Ivar,  à  cause  qu'ils  n'étaient  plus 
fréquentes  comme  jadis.  —  Je  ne  sais  pas  si  les  savants  Skandinaves  ont  réussi  de  déterminer  toutes 
les  positions  qu'indiquent  ces  trois  notices.  Une  bonne  connaissance  de  ruines  et  du  terrain,  pourrait 
diriger  dans  ce  qu'elles  offrent  d'incertain  et  d'obscur.  Elles  diffèrent  entre  elles  dans  plusieurs 
occasions;  il  est  clair  que  certains  fiords  et  positions  portaient  plusieurs  noms  ;  aussi  les  cantons 
adjacentes  à  ces  fiords  sont  qualifiés  de  même,  fiord.  —  On  a  retrouvé  les  ruines  de  Gardar,  Brat- 
tablid ,  Vogar,  Foss,  et  autres.  J'ignore  si  la  carte  d'Oestribygd  est  déjà  dressée  ;  la  toute  récente  de 
Graah  ne  désigne  pas  assez  clairement  ces  ruines  reconiaus.  A  l'aide  de  ces  ruines  l'illustration 
d'Oestribygd  devient  très-positive  ;  celle  de  Vestribygd  est  dans  un  vague  que  les  distances  littoras 
des  journées  ne  peuvent  applanir  pour  indiquer  les  positions  de  trois  églises  nommées  par  une  autre 
notice. 


DE  N.  ET  A.  ZEMI,   i5.  97 

chorograpbîes,  se  présentent  à  la  fois  et  les  situations  du  pays  et 
les  ruines,  les  débris  encore  palpitauts  de  la  description.  Pour  com- 
prendre le  portulan  il  n'y  a  que  les  rivages  inanimés  de  la  décou- 
verte assez  récente. 

NicoloZeno  passa  de  longues  années  sous  le  climat  de  Groenland; 
dans  ses  courses,  il  aborda  rislande  et  toucha  on  ne  sait  à  quel  point 
du  Groenland  même;  il  a  vu  ce  pays  de  ses  propres  yeux  et  les 
marins  lui  communiquèrent  les  renseignements  de  toute  leur  con- 
naissance. 

Deux  siècles  environ ,  on  ne  savait  mieux  faire  que  copier  le 
dessin  de  Zeno;  ensuite  ou  ne  cessait  de  soulever  des  doutes  : 
conséquences  inévitable  de  Tignorance  qui  se  prolongeait  trop.  Enfin 
le  progrès  des  explorations  nouvelles,  déterminèrent  la  figure  du  pays 
et  rétablirent  les  formes  connues  antérieurement,  il  y  a  cinq  siècles, 
par  le  vénitien  Zeno.  Si  Ton  est  satisfait  de  ses  contours,  de  Fembou- 
chure  de  TEIbe  jusqu'au  delà  de  Drontbeim,  on  est  plus  frappé  de  la 
conformité  de  son  Groenland  avec  le  Groenland  déterminé  par  l(ss 
explorations  récentes.  Gertes ,  ce  n'est  <pas  un  hasard  aveugle  qui 
aurait  pu  créer  une  semblable  conformité,  mais  une  bonne  connais- 
sance des  Skandinaves,  des  Normands.  On  peut  suivre  de  promontoire 
en  promontoire  ,  de  rivière  ou  baie  en  rivière  ou  baie ,  la  côte 
occidentale  plus  accessible ,  mieux  connue,  et  y  retrouver  ces  cour- 
bures et  sinuosités  qu'indique  le  portulan  de  Zeno.  Le  même  succès 
offre  la  côte  orientale  moins  accessible  et  jusqu'aujourd'hui  imparfaite- 
ment parcourue. 

i5.  A  part  de  ce  que  Zeno  fournit,  il  y  a  cinq  cents  ans,  aux  géogra- 
phes de  Venise,  une  autre  description  du  Groenland  s't«t  postérieure- 
ment trouvée  dans  les  mains  des  géographes,  comme  on  le  voit  par  la 
carte  complémentaire  à  la  géographie  de  Plolémée.  Cette  description 
contenait  un  portulan  écrit  mais  privé  du  portulan  dessiné.  Le  compo- 
siteur de  la  carte  complémentaire  ne  l'a  pas  bien  compris,  il  traça  sur 
sa  carte  une  figure  bombée,  fausse  et  déplacée.  Daus  la  suite  des  pro- 
montoires et  des  rivières,  sur  seize  positions,  onze  répondent  à  la  suite 
indiquée  par  Zeno,  cinq  autres,  dont  deux  aux  noms  variés,  sont  dépla- 
cés (28). 

Nous  les  collationnons  en  ajoutant  Findication  de  leur  position  par 
les  noms  de  la  carte  moderne;  signalant  aussi  quelques  positions  des 
descriptions  islandaises,  qui  semblent  reparaître  dans  le  portulan  de 
Zeno. 

(Les  trois  descriptions  ou  notices  islandaises  sur  le  Groenland,  se 
trouvent  à  la  fin  de  notre  article). 

(28)  J'insiste  sur  cette  difiFcrence  d'emplacement  et  de  forme  du  Grnouland ,  qui  distingue  les 
cartes  de  Zeno  et  du  complément.  Les  reproductions  nombreuses  du  la  carte  complémentaire, 
conservent  cette  fausse  différence,  à  l'exception  de  l'hydrograpbie  portugais(>.  de  laOi,  qui  varie  par 
la  configuration  du  Groenland  cxccssivcrocnt  prolonger,  ce  ijui  la  rapproche  plutôt  de  l'idée  de 
Zeno. 

IV.  7 


98 


CARTE  1390 


Zeno  (<9) 

pr.  Neum. 

pr.  Vlia,  Nlia ,  Nà. 

pr.  Sadi. 

fl.  Diuer. 

fl.  Peder,  Feder. 


pr.  Hit. 

fl.  Fiste,  Eleste. 

pr.  Diauer. 
fl.  Han. 
pr.  Hoen. 
fl.  Nice, 
pr.  Ar. 
tt.  Aver  (se). 

pr.  Tin,  Trin  (57). 

fl.  Han. 

pr.  Munder. 

fl.  Lande. 

pr.  Giii,  Giu  («s). 

pr.  Hian. 

fl.  Nuf. 

pr.  €han,  Chon. 

fl.  Boîer. 

pr.  Thoï,  Thor. 
cenob.  s.  Thomas. 


carte  complévMn- 
taire  (so). 

Na. 
Sadi. 

(Aver). 

fl.  Fieste. 

pr.  Mirdum. 

Hic. 

(Fieste). 

fl.  Aver. 

Cauer. 

Han. 


Af  (s»). 

fl.  Spichbod. 


Mundi. 
Sade. 
Ji. 
(Hien). 


Boïer  (39). 
pr.  Hien. 
Ther. 


noms  modernes, 

cap  Seddon. 

cap  Svartehuk  (si). 

cap  BlackhulL  ou  cap 

Cranstown  (ss). 
dans  la  baie  lacob. 
dans  la  baie  Sud-est(s5). 


cap  Chidley. 
fleuve  Baal  (34). 

cap  Comfort. 

Bearsund. 

cap  Christian. 

Frideriksiiord. 

cap  Désolation. 

Tessermiut  (Ketilsfiord 

plein  de  rivières), 
cap  Farewel. 

cap  Discord. 
Eriksfiord. 
Rams  hoogde. 
Heriolfsnes. 
côte  inconnue, 
cap  Galesland. 
Scoresby  sund. 

cap  Parry. 
golfe  au  delà  de  Fîle 
Bonieko. 


Je  pense  que  dans  cette  suite  de  noms  on  en  remarque  quelques-uns 
analogues  avec  la  suite  de  noms  des  descriptions  islandaises,  dont  la 
position  est  suffisamment  déterminée. 


1^ 
(3 


f29)  Les  noms  doublei  Tiennent  de  la  leçon  variée  de  Ruscelli  et  de  Zurla. 

(30)  Les  noms  entre  parenthèse  sont  les  positions  rétablies  à  leur  ordre. 

(3i  I  Les  Islandais  appelaient  les  dernières  stations  de  Nordhr-seta  :  Aedanes  et  Eysnnes,  on  les  toi  l 
dans  Neum  et  Na. 

(32)  En  se  tournant  vers  le  détroit  Waygat  qui  sépare  l'île  Disco  d*Oumenaksland  dans  la  spacieuse 
baie  lacob.  C'est  le  spacieux  parage  Biarne,  chez  les  islandais,  Biarne-seta  de  North-seta,  Sadi. 

(38)  Davis  donnait  aux  rivières  de  cette  baie  les  noms  de  Fisce  et  Boss. 

(84)  Ou  bien  LysuGord  des  islandais,  aujourd'hui  Isertok, dans  le  district  Sukkertop, an  nord  de 
Baais  river. 

(85)  Haf-grims-fiord.  —  Mercator,  collationnant  les  découvertes  de  Davis  avec  la  carte  de  Zeno, 
explique  aussi  le  cap  Désolation,  par  Af;  mais  il  avance  avec  pr.  Hoen  jusqu'au  cap  Chidley  et 
suppose  que  pr.  Hit  est  le  cap  Sanderson  on  Hope. 

(36)  Harjoirsnes  sed  Hvarrsgnipa  proxime  versus  occidentcm,  ibi  fluxus  maris  (vertex)  est  Hafliverf 
dictus,  dit  une  ancienne  notice  in  per  vetusto  libello. 

(37)  Huit  serkr  des  islandais?  Trin  pourrait  être  un  mot  italien  :  trina,  crépine  du  continent. 


(38)  GuBnbiarnarskcr,  les  îles  qu'on  évitait? 

(39)  Dans  Obygdhir  des  islandais. 


DE  N •  ET  A.  ZEMI ,  16,  09 

16.  Zeno  a  donné  dans  sa  description  de  grandes  proportions  et  quel- 
que peu  fantastiques  à  ce  couvent  de  Saint  Thomas.  Des  moines  de 
Norvège,  de  Suède  et  d'autres  pays,  mais  principalement  d'Islande,  se 
rendent  à  ce  monastère.  On  y  trouve  toujours  en  été  et  en  hiver,  un 
grand  nombre  de  petits  navires ,  venant  de  Trondan  (Droniheim),  des 
iles  voisines  et  du  cap  qui  est  au-dessus  de  la  Norvège,  chargés  de 
toutes  sortes  d'objets  d'agrément  ou  d'utilités,  destinés  pour  les  moines. 
C'est  un  commerce  suivi.  Ces  moines  donnent  de  peaux  d'animaux  et 
de  poissons,  et  reçoivent  en  échange  du  bois  pour  le  chauffage  et  des 
ustensiles  de  bois  très-ingénieusement  sculptés,  avec  différents  grains 
et  du  drap  pour  se  vêtir.  Ils  sont  très-respeclés  par  les  indigènes. 

Un  volcan  et  une  source  d'eau  bouillante  fout  merveille  dans  leurs 
constructions,  dans  leurs  jardins,  dans  réchauffage  et  dans  tout  I6  ménage 
du  monasière  (4o). 

C'est  Tunique  établissement  relaté  avec  une  singulière  prédilection 
par  Zeno^  inconnu  par  les  fastes  du  nord,  qui  appellent  cette  contrée 
Svalbarde,  visitée  au  moins  eu  1194.  Le  compositeur  de  la  carte  des 
régions  septentrionales  (copiée  par  Ortel  et  Mercator),  en  réunissant  les 
données  de  Zeno  avec  Schonlandia  nuova ,  assez  instruit  pour  tracer 
une  meilleure  composition  d'Islande,  savait  qu'entre  le  promontoire 
Thor  et  le  fleuve  Boïer,  non  loin  du  couvent  à  l'ouest,  existait  un  autre 
établissement,  une  ville  considérable,  qu'il  appelle  Alba, 

Zeno  n'indique  parmi  les  principaux  endroits  du  point  le  plus  habité, 
ni  Gardar,  ni  Brattahlid  ;  il  n'a  devant  lui  que  le  portulan  général,  qui 
n'a  point  tracé  les  petites  sinuosités  des  rivages  d'Austerbygd  :  mais  il  a 
formulé  le  corps  entier  de  la  grande  péninsule,  comme  il  est  enfin 
déterminé  par  les  investigations  récentes.  Ce  portulan  lui  était  fourni 
par  des  pirates  du  roi  Zichuini. 

Les  terres  et  les  mers  entre  Norvège  et  Groenland  lui  sont  inconnues. 
Il  doute  de  la  réunion  du  Groenland  avec  le  continent  de  l'Europe,  il 
connaît  cependant  cette  opinion,  qui  paraît  être  généralement  acceptée 
chez  les  Islandais,  lis  rattachaient  le  Groenland  à  Biarmaland  et  Gar- 
darik,  et  plusieurs  d'entre  eux  présumaient  que  les  rivages  ultérieurs  de 
Vinland  et  de  Huitraraannaland  se  prolongeaient  jusqu'à  leur  jonction 
avec  les  rivages  de  l'Afrique  (^i). 


(40)  On  ne  connaît  atijourd*hni  dans  le  Groenland  occidental  que  les  source*  thermales  de  Tile 
Ooartok  (Egede,  tagebuch  ,  p.  64,  et  Giescke,  dans  brewster's  encyclop.  X,  p.  489).  Leur  tempéra- 
ture n*e8t  que  de  40*  centigrades.  Plus  au  nord,  entre  les  69*  et  70*  de  latitude,  le  Groenland  occi- 
dental est  presque  entièrement  basaltique,  mais  aussi  dépourvu  d'eaux  thermales  ^e  toute  la 
Scandinavie.  —  Oa  dirait  que  le  couvent,  décrit  si  minutieusement  par  les  frères  Zeni,  a  si^rvi  de 
prototype  aux  grands  ëtaulissements  de  chauiïage  exécutés  dans  la  petite  ville  de  Chaudes-aigles, 
dans  le  département  du  Gantai.  Aux  bains  de  Toepiitz  en  Bohème ,  le  jardinage  commence  aussi  i 
profiter  de  rinfluence  des  eaux  souteraines  qui  ont  40*  à  47*  de  dialeur  (voyez,  Humboldt,  examen 
de  Thist.  de  la  géogr.  du  n.  m.  t.  H,  p.  425-i27]. 

(4i)  A  borea  Noreg  (Norvège)  est  Finmark  :  in  de  flectitur  litus  versus  euroaquilonom ,  ac  deinde 
ad  orientera,  priusquam  tangatur  Biarmalands  quas  Gardakonung  (Russiœ,  uni  sunt  Holmgard, 
Pallteskia,  Smalenskia)  est  tributaria.  A  Biarmalandi  extenduntur  terrae  ad  déserta,  borealem 
plagam  versus,  usque  ad  Groenland  terminos.  Ulterius  quam  Groenland! ,  meridiem  versos  est 
Helluland,  deinde  Markland ,  inde  non  longuro  iter  ad  Vinland,  quam  nnnnulli  horoines  ab  AfTrica 
exporrigi  opinantur  (Orbis  tcrrar  in  fine  XUI  sacculi  descrip.  in  capsula  756  servata.  —  item  ^Verlauff 
syrabola  etc.). 


100  GARTB  1390 

SCHETLAND. 

i7.  Nous  alloQS-nous  porter  maintenant  d'île  en  fl6,  qui  sont  nom- 
breuses dans  la  carte  de  Zeno.  Dispersées  par  toutes  les  mers ,  elles 
remplissent  le  vide  par  leur  enflure,  car  le  premier  coup-d'œil  prévient 
que  leur  grandeur  est  disproportionnée.  Les  Orcades  n'intéressaient 
poiftt  le  navigateur  vénitien ,  à  peine  les  a-t-il  indiquées  par  quelques 
tlots.  Mais  les  lies  Schetiand,  Hialtland,  Hitland^  letland,  dont  il 
inscrivit  le  nom  Illand,  reçurent  une  position  respectueuse,  et  la 
grande  Maïnland,  appellée  EstlarU,  n'a  pas  perdu  sa  figure.  En 
confrontant  les  situations  des  lies  qui  l'entourent  et  les  noms  des 
localités  avec  ce  que  relatent  les  caries  modernes,  on  peut  établir 
l'explication  suivante  : 

Ploch  (Piolh),  île  Fellar. 

Lonibies  ou  Lombies,  péninsule  Lunna,  du  canton  Lunes-ting  de 
Maïnland;  vLw-vis  de  la  péninsule,  au  nord  un  îlot  Lunnabolm,  au 
sud  Luninghead  de  Lunesiing  (*%). 

Briituna,  Brassasund,  entre  Maïnland  et  l'île  Brassa. 

Scaluogi,  Skailoway,  ville  occidentale  de  Maïnland,  à  la  hauteur  de 
Brassasund;  marquée  par  Zeno,  au  centre  d'Estland. 

S.  Magnus^  baie  de  St-Magne.  Cette  baie  se  trouve  réellement  à 
l'occident  de  l'île  Maïnland. 

Sumbercauil  (Sumber  hovt),  le  point  le  plus  méridional  de  Maïnland; 
Swenburg  ou  Sumburg  head  ou  Symburger  hoft,  tête  de  Sumburg. 

A  partir  de  ce  point  et  côtoyant  vers  le  nord-ouest  de  Maïnland , 
règne  une  grande  obscurité  ;  à  peine  de  faibles  analogies  de  noms  se 
présentent,  a  mon  avis  plus  satisfaisantes  dans  les  appellations  de  firth 
et  voe,  de  petites  baies  et  rades,  que  dans  les  appellations  des  villes 
dont  les  signes  chargent  i'Estland  de  Zeno. 

Eledere  serait  le  nom  des  îles  situées  à  l'occident  de  Maïnland  : 
Colsay,  S.  Ravens  (Ninian),  Havery,  House,  Burra,  Tondra  (ces  trois 
les  plus  considérables),  Green,  Papa,  Oxua,  Chaness,  Longa,  Heldazoo. 
Aucune  ne  répond  au  nom  de  Eledere,  si  ce  n'est  quelque  peu  la  der- 
nière, située  entre  Skailoway  et  Skelde  ness  de  Sands  ling. 

Elesford  ou  Oloford,  suivant  l'emplacement  de  l'épigraphe,  répon- 
drait à  Valey  sund  de  l'île  Valey  à  l'ouest  de  Skelde  ness;  et  par  son 
appellation  à  la  ville  Ylesbourg. 

Onlefort,  rade  d'Onsifirt. 

Incafort  (Hamna  voe  de  l'île  Papa,  où  l'on  mouille;  Youvefiord 
off'rent  certaines  cartes). 

Sonverat,  Sandwik  de  Nord  Maven,  au  nord  de  S.  Magnus  baie. 

Incafort  (Hamna  voe,  de  Nord  Maven,  mouillage  en  sortant  de  la  baie). 

Sanderal  ou  Sandevie  (suivant  la  leçon  de  Ruscelli),  Sand  voe,  mouil- 
lage de  Nord  Maven  près  de  la  pointe  septentrionale  de  Maïnland  (ou 
Sandowit,  Sandwliot,  ville  de  l'île  Yell). 

(43)  De  deux  côtés  de  ce  canton  péninsulaire,  se  trouvent  deux  tlots  Linga,  un  SE,  près  de 
Whalsey,  Tautre  NO,  sur  la  côte  de  Maïnland  ;  en  avançant  vers  NO,  on  voit  dans  Yell-sand ,  Tilot 
Lamba.  —  Différentes  cartes  défigurent  ces  noms  et  en  font  confusion.  Nous  avons  consulté  en 
dernier  lieu  la  carte  marine  de  Uitland,  de  Murdocb  Nakenzie,  copiée  à  Amsterdam  en  4764,  par 
Jean  van  Keulen. 


DE  M.  ET  A.  ZEMI,  18.  iOi 

Podalida,  tle  Faire,  Feril,  Fayerhill,  au  sud  de  Matnland. 
Neome,  île  Foula,  Foelo,  Fulo,  à  Touest  de  Maïnland  (45). 

FOEROE. 

18.  A  Touest  de  Schelland,  nord-ouest  de  TEcosse,  à  mi-chemin  de 
Norvège  au  Groenland ,  par  conséquent  dans  la  vaste  mer  au  sud  de 
rislande,  est  une  immense  île,  Frisland,  distante  de  vingt  journées 
de  navigation  du  cap  méridional  de  Engroenland;  domaine  et  rési- 
dence du  roi-pirate  Zichmni.  Sur  cette  vaste  mer,  il  n'y  a  pas  d'autres 
fies  que  Tarchipel  des  petits  îlots  Foeroe.  Or,  Frisland  avec  son  entou- 
rage, sont  les  Foeroe,  Fereysland,  Frees-land,  Frisland.  Mais  si  Far- 
chipel  des  Schetland  a  pris  sur  la  carte  un  emplacement  démesuré, 
Frisland,  avec  ses  proportions  eitraordinairement  exorbitantes,  allour- 
dit  monstrueusement  la  carte  du  Vénitien  (a*). 

C'était  la  résidence  de  Zichmni.  Zeno  y  passa  plus  de  vingt  ans  ;  on 
peut  donc  croire  qu'il  connaissait  les  moindres  situations  de  l'archipel , 
ses  promontoii*es,  ses  détroits,  ses  pointes,  ses  écueils,  ses  villes,  ses 
villages.  En  voyant  l'exorbitance  de  l'île,  on  peut  présumer  qu'il  a 
voulu  l'agrandir,  aGn  de  donner  un  ample  développement  à  tous  les 
détails  à  sa  connaissance.  En  effet ,  les  détails  ne  manquent  pas  : 
58  épigraphes  demandent  leur  explication.  Mais  au  lieu  de  trouver  une 
gradation  douce  d'une  vingtaine  d'îles  et  îlots  de  l'archipel  Foeroe,  nous 
voyons  l'immense  Frisland,  entouré  d'un  nombre  considérable  d'îles, 
toutes  petites,  dont  sept  ou  huit  seulement  offrent  quelque  importance. 

On  suppose  que  la  carte  dessinée  vers  1590,  ayant  été  extraite  des 
archives  delà  iimnlle,  cent  cinquante  ans  plus  tard,  était  lésée  sur 
ce  point,  que  les  divisions  des  îles  intérieures  de  rarchipel  disparu- 
rent et  formèrent  celte  immensité  de  Frisland ,  qu'avaient  publié 
Zeno  postérieur  et  Marcolini  eu  1558.  C'est  très- probable. 

Les  Foeroe  se  composent  d*un  groupe  d'îles  très-rapprochées, 
divisées  et  frangées  par  les  sund  et  les  fiords,  délroils  et  petits  golfes^ 
très-étroits,  ressemblant  plutôt  à  des  canaux  et  gorges,  à  des  fissures, 
que  le  vénitien  n'a  peut-être  pas  voulu  indiquer;  il  n'indique  que  deux 
golfes  qui  sont  en  effet  les  deux  sunds  plus  larges  que  les  autres. 

Les  vesliges  de  la  supposition  ou  de  la  juxtaposition  de  ces  fiords 
et  sund ,  disparurent  de  la  carte  de  Zeno  ou  ne  fui*ent  jamais  tracés 

(43)  Les  appellations  étranges  de  Ncomo  et  Podalida  ne  trouvent  anonn  Tcstigc  dans  les  dénomi- 
nations locales  et  ne  s'adaptent  pas  aux  idiomes  germaniques.  On  povrrait  donc  supposer  qu'elles 
sont  une  interprétation  des  noms  en  usa^e.  Neo,  netH),  eu  italien,  est  une  tâche,  une  ninucbe  sur 
la  peau,  sur  quelque  partie  du  corps  Aussi  en  hollandais  vuil,  sale,  mal-propre,  plein  d'ordure  ;  en 
allemand,  FtM,  fauve,  Fe/i/,  Taute,  font  présumer  dans  Foulo  une  signification  analogue  (vIck, 
vlak,  plek,  Fleck,  flecken].  —  En  italien  :  pedtile,  semelle;  pedata,  tran?,  vestige,  suivre  les  traces; 
pedoto  pedetto,  pilote  guide  (singulier  piéton  de  la  marine,.  En  hollandais  voeren,  voiturer  par  eau 
on  par  terre  ;  'f  voeren,  cliariage  ;  voerman,  Fuhrman,  charretier  en  allemand  ;  FAhrer,  conducteur  ; 
Fvhre,  charriage;  fahren^  aller  en  voiture  ou  en  bateau  ,  Fahre,  bac;  fahrbar^  vaurbar^  navigable; 
Fahrt^  vcutrt^  navigation,  vogue,  échelle;  Fàhr  hali^  Fahr-heil,  salut  do  passage.  —  L'idiome  nord 
créa  peut-être  par  d'autres  racines  les  ippcllations  de  Pair  et  Fulo  :  mais  le  vénitien  a  pn 
caramboler  sur  les  autres  pour  inventer  ses  interprétations,  comme  nous  le  présumons. 

(44)  Le  nom  de  Fresland,  Frisland  puraît-ètrc  connu  en  Italie  plus  de  deux  siècles  avant  Zeno.  Edrisi 
en  iiS4,  entre  Skosia  et  Islanda,  au  nord  de  Skosia,  plaçait  une  lie  Retlanda,  qui  n'est  certaine- 
ment quelque  autre  que  Fresland,  Foorocr.  —  De  même  l'image  du  monde  qui  accompagne  le  polv- 
cbronicon  du  moine  Ranulf  de  Hyggeden,  mort  4360,  nomme  an  sud  de  Tile  (Toula),  fP'riêlad,  qui 
est  évidemment  Frisland  située  entre  Dacia  (Danemark)  et  Islanda. 


103  CARTE  1900 

par  le  dessinateur;  il  faudrait  diviser  Frisland  au  moins  en  cinq  lies , 
restituant  et  redressant  les  gorces,  les  sund  et  flord  qui  sé[>arent 
les  ties.  D*al>ord  de  Sudero  colfo  au  golfe  de  Godmee,  tracez  ie 
Suderoe^und  ou  Snriafiôrur  le  plus  lai^e.  Ensuite  de  colfo  nordero 
d'au  delà  de  Bondendea ,  tirez  un  autre  qui  serait  West  manna  sund  et 
Skopinafiorur.  Divisez  cette  section  par  nne  ouvenure  vers  sudero 
colfo  qui  séparerait  Sanestol  de  Banar  et  Bondendea  et  représenterait 
VAafiérur.  Enfln  la  portion  septentrionale  restante,  exigerait  encore 
nne  division  par  un  long  passage  depuis  Cabaria  jusqu'à  Doffais  et 
Godmee  :  ce  passage  représenterait  le  sund  le  plus  étroit  (uj  Sundinun) 
qui  sépare  Osteroe  de  Stromoe. 

19.  Nous  allons  parcourir  maintenant  les  58  épigraphes,  pour  les 
confronter  avec  les  appellations  modernes  autant  qu'elles  sont  con- 
nues (45).  Â  partir  du  sud  : 

Monaco,  Munknrin,  le  moine,  rocher  au  sud  de  rarchipel. 

Porlanda,  Holmarin,  Ilot  à  l'entrée  de  Sumba ,  ville  de  Suderoe. 

Sorand ,  Suroj ,  Suthrey,  Sudro,  Suderoe,  Suydroe,  tle  considérable, 
méridionale  de  Tarcbipel.  —  Spirige  ou  Sputige,  Porkieri,  Porcbyre; 
AneseSf  pointe  méridionale  Mavan^;  (kibor,  éravujik?;  c.  Cunala.^ 
lisez  Cnuala ,  Kwala ,  répondant  à  Kwalba ,  Kvalbja  aji ,  baie  de 
l'ouest  de  Kvalbiaiiérur;  VenaX,  pointe  la  plus  occidentale  Willemes,  sont 
les  positions  de  Suderoe. 

Sudero^olfo,  Surjatiôrur,  Suderoe  sund,  sépare  cette  tle  de 

SanesUÀ  (ou  Sane-scol),  Sandoj,  Sandey,  Sandoe,  qui  a  entre  autres 
deux  villes  Sand  et  Skala-vujk. 

Ledeuo,  lisez  l'Edeuo  (THedcuo)  tle,  et  vous  trouvez  un  îlot 
Trôdl-hoddi  ou  TroUo  baven,  séparé  de  Sandoe  par  un  Hôdda-sund , 
sund  de  tête. 

Jlofe  fie,  petite  île,  serait  Koltir. 

c.  Deria,  Dràa-sund  qui  sépare  deux  flots  de  Yaagoe.  —  Banar, 
inconnue. 

Bondendera  porii,  lisez  Bou  de  Udera,  B6  sur  un  fiorur,  ville  de 
l'île  Vaojdj ,  Wage,  Waargœ,  Yaagoe. 

eolfo  Nordero,  baigne  les  côles  de  Yaagoe. 

Avant  d'entrer  dans  Stromoe  et  Osteroe  faisons  une  revue  des 
petites  fies,  qui  s'avancent  au  nord;  à  l'est  il  y  |cn  a  six  et  elles  s'ap- 
pellent Norderoe ,  Norlhr  eyjar  Iles  du  nord. 

Pigiu,  la  plus  orientale  Fugloj,  Piglu,  Fulo,  Fugloe.  —  Irbini  ou 
Ibini,  sa  pointe  Bispurin,  Bispen. 

Vâdin ,  Sle  Yiojdj ,  Windeœre ,  Yideroe  et  sa  ville  Yiaraje. 

(.48)  Roasavons  consatté  trae  carte  danoise  (Kort  over  Fseroeroe),  d'one  demi  fenille  assez  détaillée. 
Les  noms  y  sont  en  dialecte  foeroe  (navocne  cre  i  den  faeroiske  dialect)  ;  dont  qnelqncs-ans  sont 
nccompagnés  de  noms  entre  parenthèse  dans  la  langoc  ancienne  du  nord  (de  indklarorefd  ère  garnie 
■ordiweT.  — Ces  noms  différent  des  noms  acceptés  par  les  publications  géc^rapbiqnes  ;  l'orthographe 
et  la  prononciation  sont  la  caose  des  différences.  Et  quelle  est  l'orthographe  de  Zeno,  qnelle  est  sa 
prononciation  ?  —  Observons  qne  la  prononciation  doace  de  d,  de  r,  les  fit  à  peine  sentir  ou  dispa- 
raître; les  nombreuses  Toyelles  on  dîphthongnes  :  â,à,6,Ô,é,è,Ù,  sont  nne  sonrce  abondante 
pour  toutes  sortes  de  variations;  le  g,  le  j,  le  oe,  le  j  ont  quelque  fois  la  même  valeur  suivant 
l'orthographe  et  la  prononciation.  —  Nous  avons  aussi  collationné  tontes  les  positions  avec  la  carte 
maritime  de  ces  îles,  de  l'atlas  hollandais  de  Gerhard  Hulst  van  Kenlen»  de  nicnwe  groole  lichtende 
Ze»  fakkel,  eerste  deel,  Amsterdam,  4780. 


DE  N.  ET  ▲•  ZENI,   20.  i03 

DuUoj  Deble  ou  Ditele,  ville  de  Tile  Foreati  ou  ForcUi,  Boroj, 
Bordoe,  qui  est  la  plus  considérable  de  Norderoe,  Northreyjar. 

Rane,  lisez  Kane?  tle  Kunoj ,  avec  sa  ville  Kuni. 

Longastlos,  lisez  Longosclos,  Blaokskala,  ville  au  sud  de  Tile  Kadisoj  » 
Calsoo.  —  Dolfor,  présume  Dol-fiord ,  sund  près  de  Mikla-dàl ,  située 
au  nord  de  Kadisoj. 

Streme  près  d*une  petite  île.  Gomme  ce  nom  de  la  carte  de  Zeno 
répond  à  Tappellation  de  la  grande  tle  Stremoe,  je  supposais  que  ce 
Streme  appartient  à  la  ville  marquée  sur  la  grande  ile,  et  que 

Godmee  est  Tépigraphe  de  la  petite  tle  qui  est  Nôlsoj ,  Mulso , 
Nolsoe.  Ma  supposition  se  confirme  sans  réplique  :  la  côte  ouest  de 
Noisoe,  qui  regarde  la  côte  de  Stroemoe  en  face  de  Thorsiiaven 
s'appelle  Kjôdunnès  (Godmee,  Godinec,);  Quidenes,  nom  de  la  pointe 
méridionale  d'Ostrœ,  qui  se  dirige  vers  Nolsoe.  Or  : 

Streme,  est  Stremoj,  Straumsey,  Stromoe,  et  spécialement  sa  ville, 
toujours  une  des  plus  considérables,  Thorshôfn. 

Reste  à  diviser  quelques  appellations  que  nous  n^avons  pas  encore 
examinées ,  entre  les  fies  Streme  et  Osteroe.  Heureusement  les  indica- 
tions ne  manquent  pas. 

DoffaiSf  lisez  Doftais,  offre  Tofiir,  ville  méridionale  de  Estroj, 
Austroj,  Oestroe,  Osteroe,  et  Tétang  Toftvatn,  eau  de  Toft,  qui 
débouche  à  Test  et  au  nord  dans  la  mer,  formant  de  Tofiir  une 
espèce  d*ne  attachée  au  sud  de  Tile  Ostroe. 

Frisland,  ville  (probablement  résidence  de  Zichmni)  serait  donc 
située  tout  à  côté  au  nord,  (où  sont  Glifrar,  Lambba,  Sôhnundafer) 
dans  rtle  de  Oestroe.  Les  explications  positives  me  manquent  pour 
Rouea  (Larvujk?),  Rifu  (Rutewik?),  Campa,  Alanco  (Lambba?);  mais  : 

Andeford  est  Andafer  situé  au  nord-est  d'Oslroe.  Pour 

Aqua  anonyme,  il  ne  manque  pas  d'eau. 

c.  Vidil,  lisez  Kvidil,  représenterait  Kadlurin,  pointe  septenlrionaic 
d'Ostroe. 

Spagia,  Svujnajir,  encore  de  Tilc  Ostroe,  laquelle  comme  princi- 
pale et  résidence  est  plus  spécifiée  que  les  autres. 

Caharia,  inconnue. 

c.  Bouet  répond  à  la  pointe  Mujlingur,  la  plus  septentrionale  de 
Stromoe.  Je  pense  que  Texplication  que  nous  avons  pu  donner  aux 
positions  de  la  grande  ile  Frislanda,  suffit  pour  se  convaincre  qu'elle 
est  composée  du  groupe  de  Foeroe  (46). 

ESTOTILAND,  DROGEO. 

âO.  Une  barque  de  pêcheurs  de  Frisland,  jelée  par  une  tempête  très- 
loin  à  Fouest ,  atterrit  à  une  île  nommée  E$lotiland,  dont  les  habitants 
conduisirent  les  frislandais  dans  une  ville  bien  bâtie  et  peuplée,  où  de- 

(46)  Baache  (mem.  sur  Tile  de  Frisland ,  Paris  1787,  dans  l*bist.  de  l'acad.  des  sciences  pour  1784), 
fut  le  premier  peut-être ,  qui,  d'après  la  position  expliqua  Frislaod  par  l'archipel  Foeroe.  Eggers 
(mem.  sur  Tanaenne  Groenland,  couronné  en  179t  par  la  société  économique  de  Copenbaguel,  s'est 
plus  attaché  (dit  Malte-Brun,  XVHI,  p.  40t,  ëdit.  de  Huot),  à  dànontrer  l'identité  des  noms  tels  que 
Monaco  ou  le  Moine,  rocher  au  sud  de  cet  archipel  ;  Sorand  on  Sorrev,  pour  Sudereyan,  Tile  la  plus 
méridionale  ;  Sudero  golfo,  encore  aujourd'hui  appelée  détroit  de  Suderoc  ;  Andeford  ou  AndefionJ , 
baie  des  canards  et  d'autres  ressemblances  moins  évidentes. 


104  CARTE  1300 

meorait  le  souverain.  Un  interprète  qui  parlait  kitin  et  qui  avait  égale-' 
ment  été  jeté  par  hasard  sur  celte  côte,  se  it  comprendre  des  naufragés 
et  leur  intima  l'ordre  de  rester  dans  nie.  Ils  apprirent  la  langue  du  pays. 
L'an  deux,  ayant  pénétré  dans  Tintérieur,  s'assura  que  Tile,  moins 
étendue  que  rislande,  était  beaucoup  plus  fertile,  qu'elle  abondait  en 
toutes  sortes  de  denrées  et  que  le  centre  était  occupé  par  une  haute 
montagne,  d'où  sortaient  quatre  rivières.  Les  habitants  exerçaient 
divers  arts  et  métiers;  ils  avaient  des  caractères  d'écriture*  qui  leur 
étaient  particuliers.  Dans  la  bibliothèque  du  roi  se  trouvaient  des  livres 
latins  qu'ils  n'entendaient  point.  Le  commerce  avec  l'Engroenland  leur 
fournissait  du  soufre,  de  la  poix  et  des  fourrures.  Ces  insulaires  se- 
maient du  blé,  buvaient  de  la  bière,  demeuraient  dans  des  maisons 
de  pierre  et  naviguaient,  quoique  sans  le  secours  de  la  boussole. 

Le  voilà!  à  l'ouest,  très-loin  à  l'ouest,  les  habitants  d'une  île  émi- 
nemment civilisés  qui  faisaient  un  commerce  avec  le  Groenland,  situé 
au  nord  de  leur  île.  Ils  avaient  une  bibliothèque  dans  laquelle  les 
ouvrages  latins  leur  étaient  incompréhensibles  :  mais  cette  bibliothè- 
que était  composée  d'ouvrages  de  leur  propre  idiome ,  qui  avait  sa 
propre  écriture.  L'île  porte  un  nom  skandinave,  normand,  cast-out- 
land ,  en  anglais  signifierait  :  terre  extérieure  d'est.  Mais  l'idiome  des 
habitants  était  incompréhensible  aux  Normands  de  Frisland  et  ils 
n'ont  remarqué  aucune  affinité  avec  leur  langue,  quoique  ils  l'appri- 
rent. La  possibilité  d'une  population  d'insulaires  s'explique  cepen- 
dant par  ces  relations  que  les  Groenlandais  soutenaient  depuis  deux 
siècles  avec  Viuland  et  plus  encore  avec  Markland  et  les  environs  de 
l'embouchure  du  fleuve  Saint-Laurent  et  de  Gaspe.  Une  population 
d'indigènes  d'Anticosti  ou  de  l'Ile  Gap  Breton,  qui  est  Ëstotiland, 
pays  situé  à  l'est  du  continent,  a  pu,  dans  le  courant  de  deux  siècles, 
s'instruire  par  l'impulsion  des  Islandais  et  Groenlandais  et  conserver 
quelques  volumes  latins,  apportés  par  l'évéque  Erik  en  liât,  par 
les  fils  de  Helge  iâ85,  ou  par  quelque  autre  apôtre  de  l'évangile.  Les 
Frislandais  apprirent  que  l'île  s'appellait  Ëstotiland. 

21.  Le  roi  d' Ëstotiland ,  voyant  que  les  Frislandais  se  servaient  de 
boussole,  les  engagea  dans  une  expédition  maritime  vers  un  pays  situé 
au  sud,  et  nommé  Drogeo  ou  Droceo.  Le  malheur  les  fit  tomber  entre 
les  mains  d'une  nation  d'anthropophages;  un  seul  frislandais,  épargné 
à  cause  de  son  habileté  dans  la  pèche ,  devint  un  sujet  de  guerre 
entre  les  chefs  de  ces  sauvages;  chacun  voulut  posséder  un  esclave 
aussi  utile;  transféré  d'un  maître  à  l'autre ,  il  fut  à  même  de  connaître 
toute  cette  contrée.  II  assura  que  c'était  un  pays  fort  étendu  et  comme 
un  nouveau  monde.  Les  habitants ,  ignorants  et  grossiers ,  ne  savaient 
pas  même  se  couvrir  avec  les  peaux  des  bêles  qu'ils  tuaient  à  la 
chasse.  Armés  d'un  arc  et  d'une  lance  de  bois,  ils  se  livraient  des  com- 
bats continuels.  Le  vainqueur  dévorait  le  vaincu.  Plus  loin,  au  sud- 
ouest,  des  peuples  un  peu  plus  civilisés,  connaissaient  l'usage  des 
métaux  précieux,  bâtissaient  des  villes  et  des  temples,  offraient 
cependant  des  sacrifices  humains  à  leurs  affreuses  idoles. 

Drogeo  était  donc  un  continent  connu  aux  insulaires  estotilandais, 
où  ils  allaient  combattre  les  habitants  sauvages.  En  supposant  que 


DE  N.  ET  A.  ZENI,  32,  ^3.  105 

rîle  Estoliland  est  une  de  remboucluire  deSahit-Laiirenl,  il  ify  a  pas 
d'hypothèse  pour  Drogeo  :  c'est  la  Nouvelle  Ecosse  ,  i'Âcadia ,  la 
Nouvelle  Angleterre ,  etc.  (47). 

Après  de  longues  années  Taventureux  frislandais  retourna  dans  son 
pays  au  Foeroe;  il  le  trouva  assujelli  au  roi  Zichmni  qui  s'était  emparé 
en  son  absence  de  l'autorité  et  exerçait  son  métier  de  piraterie 
certainement  de  longues  années.  Le  récit  du  frislandais  stimula 
l'entreprenant  chef  à  visiter  ces  terres  occidentales  aussi  éloignées. 
II  équipa  une  expédition  qui  découvrit  une  île  nommée  Icaria  et  fut 
ensuite  poussé  vers  les  parages  d'Engroenland. 

22.  Il  n'y  a  d'autre  île  dans  ces  espaces  que  les  îles  situées  à  l'em- 
bouchure du  fleuve  Saint-Laurent,  et  Terre-Neuve  se  présente  en 
premier  lieu  pour  l'expédition  de  ceux  qui  furent  ensuite  poussés 
vers  les  parages  du  Groenland.  Au  lieu  de  trouver  la  résidence  dn 
roi  d'Estotiland  ,  ils  touchèrent  le  point  d'une  autre  île.  Elle  ne 
pouvait  être  spacieuse  s'ils  comprirent  par  eux-mêmes  que  c'était  une 
Ile;  si  elle  était  grande  et  spacieuse  ils  purent  l'apprendre  des  indigè- 
nes, mais  plutôt  cherchant  une  île,  ils  qualifièrent  d'île  le  point  de 
terre  qu'ils  atteignirent.  Nous  ignorons  par  qui  cette  fie  fut  nommée 
et  de  quelle  portée  elle  parut  à  l'équipage  et  au  chef  Zichmni,  attendu 
que  la  suite  de  la  relation  de  Zeno  n'a  pu  être  retrouvée.  Sa  carte 
semble  nous  assurer  que  la  chose  est  .restée  à  ce  point  et  n'a  pas 
avancé.  Estoliland,  Drogeo,  Icaria  étaient  des  pays  connus  par  des 
oui-dires  d'un  pécheur  et  des  marins,  dont  l'expédition  prit  une 
fâcheuse  issue.  Zeno  les  a  placés  sur  sa  carte  dans  la  direction 
occidentale,  au  hasard ,  sans  se  soucier  des  distances  (as), 

Zichmni  s'empara  de  l'archipel  Foeroer  avant  l'arrivée  de  Zeno, 
antérieurement  à  1380,  d'où  il  exerça  son  métier  de  longues  années,  un 
demi-siècle  si  on  lui  attribue  la  destruction  du  Groenland  après  1418. 
Dans  cette  hypothèse  on  pourrait  admettre,  qu'ensuite  il  a  dépisté 
Estotiland ,  qui  avait  ses  relations  avec  le  Groenland  ,  et  l'ayant 
trouvé  affaibli  par  les  mêmes  calamités  qui  aflaiblirent  le  Groenland  , 
il  détruisit  l'Estotiland  de  fond  en  comble.  On  peut  attribuer 
tout  à  un  pirate  passé  sous  silence  dans  les  fastes  du  nord,  et 
qui  serait  resté  inconnu  à  la  renommée  de  l'histoire  si  les  frères  Zeni 
ne  l'avaient  éventé  fortuitement  (49). 

Recherches. 

25.  Peut-être  la  destruction  du  Groenland  fut  à  l'instant  même 
connue  en  Norvège  et  en  Danemark.  Mais  Tinierruption  de  toute 

(il)  Si  Estotiland  n'était  pas  qualifiée  d'ile  par  l'exploration  de  ceux  qui  y  passaient  desannées,  on 
serait  tenté  de  retrouver  Estotiland  dans  la  Gaspésie  civilisée  sur  le  continent.  Hais  an  cas  semblable 
de  la  civilisation  normande  a  pu  se  déclarer  dans  son  temps  dans  une  population  insulaire  voisine. 


assez  < 

convenir 

mais  elles  donnent  assez  de  petites  îles ,  Belle-ilc,  Ficot,  Ronge ,  des  oiseaux ,  Bacalao,  trcs-rappro  ■ 

ehécs  au  rivage  de  Terre-neuve  :  et  la  péninsule  Avalon  pourrait  passer  pour  Icaria. 

(49)  Un  comte  Sinclair,  possesMur  des  Orcades  vers  la  fin  du  xiv*  siècle,  n'a  rien  de  commun  avec 
le  possesseur  de  Foeroe  ;  Forster  (découvertes  faites  au  Nord,  U,  3,  sect.  iS),  a  tort  de  les  confondre. 
La  carte  de  Zeno  ne  connaît  pas  d'Orcades  qui  seraient  en  possession  de  Zichmni. 


106  CARTB  1S90 

communication  depuis  cinquante  ans  devait  remplir  la  mère-patrie 
d'anxiétés  sur  le  sort  de  sa  fille,  le  silence  de  la  mort  appelait  au 
moins  à  retrouver  son  gîte  glacé.  Dans  ce  but  le  roi  de  Danemark , 
Christiern  II ,  fit  équiper  en  1476  un  navire  norvégien  et  le  confia 
au  pilote  polonais  Jean  Scolnus,  z  Kolna,  de  Kolno  (so),  lequel,  en  se 
dirigeant  vers  Fouest ,  reconnut  les  côtes  septentrionales  du  spacieux 
continent,  et  du  détroit  qu'elles  fesaient  avec  une  terre  étendue  au 
nord.  On  ne  sait  pas  s'il  a  baptisé  sa  découverte  par  quelque  appel- 
lation :  mais  ce  n'était  ni  Groenland,  ni  Yinland,  mais  le  Labrador 
et  le  détroit  Auiau  (Hudson)  qu'il  parcourut.  La  nouvelle  de  cette 
découverte  s'était  répandue  dans  le  monde;  elle  fut  bientôt  connue 
en  Espagne  et  en  Portugal. 

L'Islande  avait  son  commerce  avec  l'Angleterre.  Les  navires  de 
Bristol  se  rendaient  aussi  souvent  dans  son  Tborlaks-bafn,  comme 
dans  le  port  de  Lisbonne,  d'où  Christophe  Colomb,  avant  de  décou- 
vrir le  nouveau  monde ,  fesait  de  nombreuses  courses  dans  les  mers 
connues.  L'an  1477,  au  mois  de  février,  je  n'aviguais,  dit-il,  dans 
son  traité  des  cinq  zôues  habitables  (cinco  zonas) ,  (à  une  tie)  plus 
de  cent  lieues  au  delà  de  Tile  (Frisland,  Feroe);  dont  la  partie 
méridionale  (de  l'Islande)  est  éloignée  de  l'équateur  de  75  degrés  et 
non  de  63.  comme  le  prétendent  quelques  géographes ,  et  Tile 
(Frisland,  Foeroc)  u'cst  pas  placé  en  dedans  de  la  ligne  (sur  la  ligne) 
qui  enclave  (encluic)  l'occident  de  Ptolémée.  Les  Anglais,  princi- 
palement ceux  de  BrisloI,  vont  avec  leurs  marchandises  à  cette  île 
(Islande) ,  qui  est  aussi  grande  que  l'Angleterre.  Lorsque  je  m'y 
trouvais ,  la  mer  n'était  pas  gelée ,  quoique  les  marées  y  fussent  si 
fortes  qu'elles  y  montaient  à  26  brasses  et  descendaient  autant. 
Il  est  aussi  vrai  que  le  Tile  dont  parle  Ptolémée,  se  trouve  là  où  il 
la  place  et  se  nomme  aujourd'hui  Frislande  (Feroe).  Ce  voyage  de 
Colomb  n'avait  d'autre  but  que  de  se  convaincre  que  la  parallèle  de 
Tile  n'était  pas  une  ligne  qui  clôturait  le  monde  habitable,  comme  le 
prétendaient  Ptolémée  et  quelques  géographes  (si). 

D'autres  navigateurs  allèrent  à  la  reconnaissance  des  terres  de 
l'ouest,  dont  l'existence  était  confirmée  par  des  marins  qui  aimaient 
à  rappeler  les  courses  anléricnres.  Vingt  ans  après  l'expédition  de 
Jean  de  Kolno,  1476,  Jean  et  Sébastien  Cabot,  en  1497,  sur  une  flotte 
anglaise  allaient  à  la  reconnaissance  de  ces  terres. 

Pour  trouver  le  passage  aux  Indes  par  le  nord  de  l'autre  hémisphère, 
Gaspar  Cortereal ,  navigateur  portugais,  en  1500,  se  rendit  à  Terre 
Neuve  (Estotiland,  Icaria),  examina  le  fleuve  Saint-Laurent  (Markland), 

(sol  Les  marins  polonais  de  Kolno  forent  au  service  de  la  république  de  DanUik.  Jean  de  cette 
famille  passa  comme  pilote  en  Norvège.  Kolno,  leur  lieu  natal,  est  un  petit  bourg  de  MazoTie  sur  les 
frontières  de  Pmsse.  —  Dans  maintes  publications  nouvelles,  italiennes,  allemandes,  danoises 
mêmes,  le  nom  de  Scolnus  se  trouve  défiguré  jusqu'à  le  méconnaître. 

(51)  Colomb  parle  d'une  seule  Tile-Frislande,  et  passe  la  grande  île  (Islande)  innommée.  —  A  mon 
anSt  c  est  aussi  clair  que  la  date  de  sa  course  aventureuse.  Je  ne  sais  pourquoi  la  mettre  en  doute 
comme  on  le  fait.  Celte  course  ne  fut  pas  de  longue  durée;  s'il  a  pu  aller  'mncbas  veccs)  plusieurs 
fois  de  Lisbonne  en  Guinée,  il  a  eu  le  temps,  en  U77,  par  une  seule  course,  de  se  convaincre  que 
Frisland-Tile  n'était  pas  l'enclavure  de  l'habitable.  —  Son  pilote  Jean  De  la  Cosa,  dessinant  sa  carte 

I  nord  de  l'Ecosse  ysla  de  Estelanda  (Schetland), 
grande  Frislanda  décorée  du  pavillon  d'Ecosse  ; 


en  iSOO,  donne  à  Islande  le  nom  de  isia  Tille,  place  au  nord  de  l'Ecosse  ysla  de  Estelanda  (Schetland), 
et  pousse  sur  l'océan  septentrional  vers  l'ouest  la  grande  Frislanda  décoréi 


ignorant  la  figure  et  le  nom  de  Groenland 


DE  tf.  ET  A.  ZENI,  îi.  107 

et  côtoya  le  contiueut  (Helleland) ,  qu*il  appella  Terra  de  Labrador , 
c'est-à-dire  terre  de  laboureur,  <les  agriculteurs,  jusqu'au  détroit 
(visité  par  Jean  de  Koino),  auquel  il  imposa  le  Dom  d'Anian  (aujour- 
d'hui Hudson).  Il  retourua  en  Portugal  pour  annoncer  la  découverio 
du  passage,  qui  semblait  ouvrir  une  route  nouvelle  aux  Indes  :  mais 
dans  un  second  voyage,  il  périt  ou  disparut.  L'un  de  ses  frères, 
Michel,  étant  allé  à  sa  recherche,  éprouva  le  même  sort.  Le  trosième 
frère  voulut  se  sacrifier  à  la  gloire  nationale  et  à  la  piété  fraternelle, 
lorsque  le  roi  de  Portugal,  par  une  défense  formelle,  rendit  soa 
dévouement  inutile  (ss). 

24.  Labrador,  Terra  Laboratoris,  commença  à  figurer  dans  les 
cartes  depuis  1500,  comme  une  île  qualifiée  par  les  géographes  alle- 
mands de  terra  Corterealis  ;  accompagnée  maintefois  de  traces  d'un 
continent  inconnu,  elle  se  trouvait  isolée  seule,  dans  un  vaste  océan. 
De  cette  façon  on  la  voit  dans  l'hydrographie  portugaise  de  1504,  dans 
le  Ptoléméede  Sylvanus  1511,  sur  le  globe  de  Schôner  1520.  Mais 
en  même  temps  il  ne  manquait  pas  de  géographes  hardis  qui  réuni- 
rent la  terre  Lauoradore  à  Temistetan  (au  Mexiq),  comme  on  le 
voit  en  1521  dans  l'isolario  de  Bordone.  Cette  réunion  fut  constatée 
par  les  découvertes  qui  ne  cessaient  de  se  succéder,  tout  le  long  du 
Mexique  jusqu'au  Labrador  (voyez  la  carte  de  De  la  Gosa  1500).  Mais 
au  delà,  vers  le  nord,  depuis  le  malheur  des  Cortereal  on  ne  connaît 
pas  un  seul  marin  assez  hardi  pour  s'engager  jusqu'à  Forbischer  et 
Davis. 

En  attendant,  d'innombrables  hypothèses  et  inventions  accablaient 
et  tourmentaient  le  nord  de  l' Amérique  et  tout  le  climat  glacial.  La 
carte  de  Zeno  contribua  beaucoup  à  ces  aberrations.  Elle  était  graduée 
vers  1555,  et  jusqu'à  ce  moment  enfouie  dans  les  archives  de  la 
famille,  elle  fut  rendue  publique  1558. 

Je  ne  sais  si  quelque  monument  géographique  existe  qui  prouve- 
rait on  ferait  présumer  sa  connaissance  antérieure  dans  les  composi- 
tions cartographiques.  Mauro  Bianco,  De  la  Cosa  ne  la  connaissaient 
pas;  la  carte  complémentaire  à  Ptolémée  non  plus;  ni  les  nombreux 
cartographes  qui  la  copiaient,  ni  le  compositeur  de  la  Schonlandia 

(Si)  Tiena  de  Labrado  En  esta  ticrra  pncs  rislas  audan  ▼  viuon  Bretoncs,  qnc  conforman  muclio 
COB  su  tierra  ;  y  estan  en  nna  mcsma  altura  y  temple.  TambicD  au  idi  alla  ombres  de  Nnrvega  con  el 
pilote  Joan  Scolno,  Einglescs  con  Sébastian  Gaboto  :  disait  en  1So3,  l'espagnol  Gomara  (p.  SO, 
bistoria  de  las  ludias  en  Saragoca,  fol.).  —  La  terre  da  Labour  et  d'EstotlIandia.  Crste  dcruière 
partie  de  la  terre  indienne  Tut  la  première  découverte  1390  (par  les  pécheurs  fï'islandais  et  seconde- 
ment à  Jean  Scolne  Polonais,  qui  navigeant  outre  la  Norvège,  Groenland  et  Islande  Tan  4477,  quatre- 
vingt-six  ans  après  ceste  première  navigation  entre  ceste  mer  septentrionale  qui  est  mise  directe 
ment  sous  le  cercle  arctique  et  vient  abordes  a  ces  terres  d'Estotilundc.  Apres  liiy  Ton  n'y  a  guerres 
navigé  durant  le  cours  de  quelques  années  a  cause  de  l'asprc  froidure  et  de  continuelles  tempcstes 
qui  en  détournent  les  mariniers  :  dit  vers  4600,  le  lovanien  Cornélius  Wytfiiet  (descriptionis  ptole- 
maicae  aogmentum,  Lovanii ,  4599,  p.  488;  version  française  histoire  des  Indes,  à  Donay,  4604,  460S, 
p.  S5).  De  même  Pontanus;  George  Hom  (Ulyssea,  Lugd.  batav.  4673}.  —  Les  notices  dos  voyages 
des  Cortereal,  se  trouvent  dans  Ant.  Galvano,  discovcries  or  the^'orld  unts  the  year  4685  in  thc 
earl  of  Oxfords  collection,  t.  II,  p.  575;  Jobst  Rncliamers,  Sammlung  van  Reiscn,  Nurnberg,  4508, 
Abscbn.  4S6  ;  Purchas,  pilgrims,  Londre  46S5,  t.  IV,  p.  809.  —  Voyez  à  ce  sujet  Fleurieu,  voyage  de 
Marchand,  introd.  p.  iii;  Sprengel,  35,  p.  il3, 444;  Malte-Brun, 'livre  XXIU,  p.  6i4,  6fS,  cdit.  de 
lluot  ;  eufin  ce  qu'à  dit  :  Alexandre  Humboldt  (Kritische  Untersuchungen  der  geogr.  Kcnntnisse  von 
der  neun  Welt^  aus  dem  franzos  ûbersctzt  v.  Jul.  L.  Idoler,  t.  I.  p.  395),  à  l'occasion  de  ce  que 
j'avais  resuscite  la  mémoire  du  pilote  polonais  Jean  de  Kolno  dans  ma  publication  polonaise  en  4844, 
traduite  en  allemand  par  Karl  Neu,  en  4836. 


i08  CARTE  1390,  DE  N.  ET  A.  ZENI,  35. 

nuova,  ni  Schoner,  ni  Âpianus,  ni  Munster,  ni  Gemma  Frisius,  instruc- 
teurs dans  la  géographie  (ss). 

25.  Dès  que  la  carte  de  Zeno  parut,  elle  fit  beaucoup  de  bruit,  elle 
décela  aux  cartographes  d'autres  formes,  de  positions,  appellations, 
pays,  dont  ils  ignoraient  Texistence.  Frisland  ,  Icaria  ,  Ëstotiland, 
Droceo  parurent  comme  une  lumière  éteinte  qu'il  fallut  rallumer.  Un 
cartographe  s'empressa  d'introduire  toutes  les  anciennes  connaissan- 
ces de  Zeno  dans  sa  composition  de  la  carte  des  régions  septentrionales, 
septentrional ium  rcgionum  descriptio  :  Ortclius  Ta  copié  en  1570  et 
Mercalor  Taccepla  sans  réserve. 

Ce  compositeur,  connaissant  bien  la  position  des  fies  Schetland  et 
Foeroe  n'a  pu  concevoir  que  ces  lernières  se  seraient  métamorphosées 
en  une  région  insulaire;  or,  il  recula  vers  l'ouest  de  Foeroe,  les  îles 
Neome,  Podalida,  Frisland,  Icaria,  Ëstotiland,  Drc^eo,  ne  préjugeant 
rien  de  leur  existence;  seulement  il  a  cru  réduire  le  grand  continent 
Drogeo  en  une  île  médiocre  (s4)  et  étendre  l'île  Ëstotiland  en  un  conti- 
nent qui  n'est  antre  que  terra  Laboratoris,  Labrador  de  la  découverte 
récente.  Le  compositeur  de  la  carte  savait  retoucher  Estland  et 
Island  de  la  carte  de  Zeno,  et  laissa  intact  le  Groenland,  dont  il  n'a  pu 
avoir  de  meilleurs  renseignements. 

L'imagination  des  géographes  postérieurs  donnant  des  attitudes  fan- 
tastiques aux  régions  arctiques,  sévit  longtemps  sur  Groenland  en  le 
trafisfigurant ,  tantôt  en  un  feston  qui  réunit  le  nouveau  monde  avec 
l'ancien,  tantôt  en  un  archipel,  jusqu'à  ce  que  de  nouvelles  découvertes 
restituassent  son  existence ,  dans  toutes  la  forme  et  l'étendue  que  lui 
assignait  la  carie  de  Zeno. 

Il  n'en  était  pas  ainsi  avec  Frisland,  devenu  pays  de  mystère, 
insaisissable.  On  allait  à  sa  recherche,  comme  on  recherchait  les 
Antilles,  Cattigara,  les  détroits  crayonnés  d'avance,  comme  on  s'était 
efforcé  à  retrouver  le  Niger  et  les  sources  du  Nil  dans  les  proportions 
et  la  position  que  leur  assigna  Ptolémée.  Ailleurs,  à  la  place  de  l'objet 
cherché  on  a  rencontré  quelque  autre  chose  :  mais  Frisland  déplacée 
échappait  aux  navigateurs ,  elle  se  submergea  comme  l'Atlantide 
platonique  :  il  n'en  resta  ni  vestige,  ni  le  moindre  atome;  seulement 
la  tache  assez  difficile  de  la  réduire  à  Téchelle  de  Foeroe.  Bien  qu'elle 
fût  encore  connue  du  temps  de  Colomb  et  son  pilote  De  la  Cosa  lui 
assigna  la  même  position  que  la  carte  de  Zeno  :  on  remonta  avec  la 
date  de  la  submersion  d'une  île  de  cette  position  :  insula  baec  anno 
1456  fuit  totaliler  combustà,  dit  en  1507  la  carte  de  l'Allemand  Jean 
Ruysch.  Les  caries  marines  bataves  répétèrent  longtemps  :  't  versonken 
land  van  Bus,  is  heedendaags  al  brandinge  ^/4  myl  langmethol  water. 
Dit  is  veele  iaren  een  groot  eyland  geweest  en  was  genaamt  Freesland, 
en  besloeg  wel  100  myl  int  rond,  waar  op  verschyde  dorpen  lagen. 

(53)  So  findct  sich ,  dit  Spreiigol  (Gosch.  der  geogr.  Entdek.  20,  p.  220),  auf  dcr  sicbcnten  Cliartc, 
de  Biaiico,  Aveldic  die  Nordisclien  Roiclie  Island,  iind  das  von  Zcdo  in  dicsc  Gegond  gerabeltc 
Frisland  vorstellt,  die  loscl  SlockTiscIi.  Cela  fairait  croire  que  Bianco  copia  la  carte  de  Zono  :  mais  il 
suffît  de  voir  la  mappemonde  de  Uianco  pour  se  convainere  qu'élit  ignore  l'existence  des  Zeui. 

(54)  Enjoignant  Texplication  :  Dus  Cimes  Gallis. 


TROIS  NOTICES  DES  1S[,ANDAIS 


SUR  GROENLAND. 


T.  Tôt  sunt  Gronlaudiac  templa  :  in  Herjolvsneso ,  quod  longissime  in 
orientem  vergit,  templum  est  in  Herjolvs  Qôrdo  (éros);  alterum  Vatsdali  in 
KetilsQôrdo;  tertium  Vikae  (monasterii?)  quoaue  in  KetilsQôrdo,  quartum 
Vogis  in- Sigluljordo;  quintum  sub  Hôfdio  (Foss)  in  OEstfjôrdo,  sextum 
templum  cathédrale  Gardis  in  Einarsljôrdo;  septimumad  Hardsteinabergum; 
octayuni  firattabiidae  quoque  in  EiriksQôrdo;  nonum  sub  SoiarQaliis,  in 
Isafjôrdo  et  decimum  ;  undecimum  in  HvalseyarQôrdo  (Hvalsoer);  duodecimum 
Gardanesi  in  Midijôrdo.  —  Haec  puntin  prov.  occidentali  :  umim  Sandnesi  in 
LysuQôrdo;  alterum  Hopi  Agnafjôrdo;  tercium  Anavikae  in  Rangafjôrdo. 

II.  Grœnlandia  libanotum  spectat,  maxime  australe  est  Herjolvsnesum  sed 
Hvarfsgnipa  proxime  versus  occidentem  (eo  pervenit  Eirekus  rufus.  longis- 
sime, atquese  tumputavit  intimumEiriksQôrdi  recessum  superasse),  ibi  fluxus 
maris  (currens  v.  vertex)  est  Hafhverf  dictus,  ad  orientale  terrae  litus,  deinde 
Spalsundum,  deinde  Drangeya,  deinde  Sôlvadalus,  qui  ex  tractibus  habitatis 
orientaiissimus  est,  tum  Tovafjôrdus,  lum  Melrakkanesum,  tum  templum 
HerjolvsQôrdi  {Aros\  tum  Helliseya  et  Helliseyarfjordus ,  tum  KetilsQôrdus 
(ubi)  duo  templa  {Fatsdal  et  Fikn),  lum  Hrakbjarnareya ,  Lundeya,  Syllcnda 
ex  EireksQôrdo,  tum  AIplaQôrdus,  Siglufjôrdus,  (ubi)  templum  (Fogi)^  Rafns- 
Ijôrdus;  tum  SlettuQôrdus  procedit  ex  RafnsQôrdo,  HornaQôrdus,  Ofundinn- 
tjôrdus,  ubi  sedes  est  eppalis  {Garda);  lum  templum  Eireksfjôrdi  (BrailahUd), 
ex  illo  procedit  OEstkarsQôrdus  (ubi)  templum  {Solarfiall?),  HafgrimsQôrdus, 

HvalseyarQôrdus  (teniplum  Ilvalsœr) f....  f....  (templum  Dyurenes),.,  f... 

ex  Dyrneso,  tum  IsaQôrdns;  inde  procedit  UtibliksQôrdus  (isthmi);  tum 
Strandaijôrdus,  tum  MidQôrdi  proxime  habitati  sunt,  deinde  unus  dicitur 
KoUufjôrdus,  aller  DyraQôrdus,  tum  Thorvalds  Qôrdus,Steinsfjôrdus  (templum 
Stensnes),  Berghthorsfjôrdus ,  deinde  viris,  bumerim  agitantibus,  sex  dierum 
remigatio  est  in  Vestbygdam  (tum  ibi  sinus  recensentur);  deinde  ex  Vestbygda; 
terminis  ad  LysuQôrdum  sex  dierum  remigatio  est,  inde  sex  dierum  remi- 
gatio ad  Karlsbudas,  tum  trium  dierum  remigatio  ad  Bjarneyam,  duodecim 
dierum  remigatio  circa  Bjarneyam ,  Eysunesum ,  Aedanesum  a  borea.  Sic 
numeralum  est  centum  nonaginta  villas  esse  in  OËstbygda,  nonaginta  in 
Vestbygda. 

III.  IvARi  Bardi  FH.n,  Groenlandiae,  descriptio,  p.  502t-518. 

Sic  dicunt  viri  perili,  qui  in  Groenlandia  nati  sunt  et  nuperrime  ex  Groen- 
landia  advenerunt,  ex  boreali  parte  Stadi  Norvegiae  septem  dierum  nauiga- 
tionem  esse,  recta  versus  occidentem  ad  Hornum,  inorientali  Islandiae  litore 
situm. 

Ab  Snefelsneso  Islandiae  qua  brevissimus  in  Groenlandium  trajectus  est , 
duorum  dierum  et  duarum  noctium  spatio  navigandum  est  recto  cursu  versus 
occidentem ,  ibiquc  Gunnbjôrnis  scopulos  invenies,  inler  Grôniandiam  et 


iiO  NOTICES 

Islandiam  medio  situ  inicrjaccntes.  Hic  cursus  antiquus  frequentabatur, 
nunc  verro  glacies  ei  recessu  oceani  euroaquilonari  delata  scopulos  ante 
memoratas,  tani  prope  atligit,  ut  neino  sine  vitaî  discrimine  antiquum 
cursum  tenere  possit. 

Ab  Langaneso  qiiod  in  Islandia  maxime  septentrionem  versus  juxta  Homum 
situm  est,  diioruni  dierum  et  duanim  noctium  navigatio  est  ad  Svalbardum 
in  llavsbotnis. 

Qui  Uergis  recto  cursu  in  Groenlandiam  navigare,  ncque  ad  Islandiam 
api)ellere  volunt,  tiis  recta  versus  occidentem  navigandum  est  donec  venerint 
e  regione  Reylcencsi  australis  Islandix  promontorii,  ita  ut  duodecim  miilia- 
ria  maritima  ab  australi  parte  bujus  promontorii  absint,  atque  ita  cursu, 
ut  modo  dictum.  occidentem  versus  continuato  ad  altam  Grôniandiae  terram 
qu£  tharvum  dicitur  pervenient.  Pridie  qiiam  ante  dictum  Hvarvum  cons- 
pexeris,  alium  excelsum  montem  qui  lividserkns  api>ellatus  conspexisse 
debes.  Sed  sub  ante  dictis  dnob  montibus  Hvarvum  et  Hvidserlius ,  promon- 
toriumjacet,  llerjnlvsnesuni  dictum,  cui  adjacet  portus  nomine  Sandtis  Nor- 
vegis  ac  mercatoribus  communis. 

Si  quis  ab  islandia  navigat,  ab  Snefelsneso,  qui  12  milliaribus  maritimis 
longius  versus  occidentem  in  Islandia  jacet  quam  antedictum  Reykenesum 
cursum  dirigere  del)et  et  recta  versus  occidentem  navigare  une  die  etuna 
nocte,sed  postea  in  libanotum  cursum  dirigere,  ut glaciemscopulis  GunnbjÔr- 
nis  adhaerentem  evitet,  deindeque  uno  die  etuna  nocte  recta  versus  iapygem; 
sic  recto  cursu  ad  altum  terram  Grôniandiuî,  Hvarvum,  sub  qua  antedictum 
Herjulfsnesujn  et  Sandhavnia  sita  sunl,  perveniet. 

Tractus  habitatus  Grôniandie  maxime  in  orientem  vergens,  Herjulfsneso 
proximus  ab  oriente  est  Skagcfiordus  dictus,  qui  locus  magnopere  frequen- 
tatus  est. 

Longo  ab  Sliagetiordo  spatio  versus  orientem  sinus  est  nullis  coloniîs 
frequentatus,  dictus  Berefjordus  in  cujus  sinus  ostio  longae  syrtes  intransver- 
sum  patent,  ut  nnlla  majora  navigia,  nisi  niaximis  xstibus,  ingredipossint; 
maximo  vero  xstu  incidente,  inimensa  cetorum  multitudo  in  sinum  incurrit: 
eodem  Berefjordo  copia  piscium  nunquam  deest.  Est  in  eodem  sinu  publica 
cetorum  captura,  tamen  cum  venia  eppi,  nam  sinus  teniplo  cathedrali  proprius 
est.  In  hoc  si  nu  ingeus  est  vorago,  cetorum  dicta,  inquam  ceti  recedente  îBsttt 
incurnint. 

Longius  versus  orientem  ab  antedicto  Berefjordo  alius  sinus  est  dictus 
Ollumtengri  (omnium-longissimus)  qui  ab  anguslo  aditu  in  vastius  spatium 
di£fusus,  tantum  in  longitudinem  patet,  ut  finem  ejus  nemo  noverit.  Hicnullo 
sestu  agitatus,  parvis  insulis  scatet,  magna  avium  et  ovorum  abundantia 
utrinque  planities  campestris,  quae  quantum  progrediare  viridi  gramine 
vestita  est. 

Longius  versus  orientem  ad  molem  usqne  glacialem  portus  est,  dictus 
Finnsbudœ,  ita  dictus,  quod  jam  xtate  Olavi  sancti  navis  aliqua  eo  loco 
naufragium  fecit  qua  navi  vectum  sancti  Olavi  ministrum,  cum  nonnulUs  aliis 
mari  perilsse  vulgata  adhunc  in  Grônlandia  fama  refert,  superstites  vero 
mortuos  sepelivisse  et  super  horumsepulcriscruces  magnas  lapineas  erexisse, 
quae  bodieque  ibi  stant.  (Fuga  probabiliter  Finni  parvi  famuli  régis  Roereki 
ab  Olavo  1017  cxcœcati  in  Islandia  deportati). 

Longius  orientem  versus  proficiscenti  ad  molem  glacialem  obvia  est  magna 
insula,  dicta  Korsôa,  ubi  publica  est  alborum  ursorum  captura,  permissu 
tamen  eppi,  quod  ea  insula  peculium  est  sedis  cathedralis.  Longius  versus 
orientem  nihil  praeter  glaciem  et  nivem  terra  marive. 

Ut  ad  rem,  de  coloniis  Grôniandiae  redeamus,  jam  supra  provinciarum 
Grôniandiae  mentionem  facientes  indicavimus,  Skagefjordum,  ab  orientali 
latere  Heijulvsncsi  situm,  ex  habitatis  tractibus  orienti  esse  proximum. 


SUR   GROENLAND.  111 

Ab  occidentâli  latere  Heijulvsnesi  est  Kelilsfjord  totus  coloniîs  refertus, 
Sinum  ingredienti  a  dextra  ingens  ostium  situm  est  in  quod  magni  fluvii  se 
exonérant.  Prope  ab  hoc  ostio  templum  est,  Ârosi,  sacrai  crucis  consecratnm, 
quod  templum  ab  exteriori  parte  omnia  ad  Heijulfsnesum  usque  possidet, 
insulas,  scopulos,  marisque  ejactamenta,  ab  interiori  parte  omnia  ad  sinum 
usque  Pétri. 

Ad  sinum  Pétri  {Peilers  vig)  tractus  habitatus  est  Fatsdalus,  prope  quem 
amplus  lacus,  piscibus  abundans,  la  tus  duo  miiliaria  maritima.  Templum 
Pétri  totum  tractum  Vatsdalensem  possedit. 

Haud  procul  ab  hoc  tractu  ingens  monastcrium  situm  est  a  canonicis  regu- 
larlbus  habitatum,  5.  Olavo  cl  S.  Jugmtino  consecratum.  Monasterium  a  parte 
interiori  omnia  ad  finem  sinus,  omniaqiieexteriusab  opposite  latere  possidet. 

Proximus  KetilsQordo,  est  Rafnsfjord  (Ranipnesf.  Ranipnesf.  Rampef. 
Rumpeyarf.),  in  cujus  interiori  recessu  cœnobium  sororum  ordinis  sti 
Benedicti  situm  est.  Quod  coenobium  a  parte  interiori  omnia  possidet  ad 
finem  usque  sinus,  a  parte  exteriore  ab  templo  usque  Vogensi  quod  scto  régi 
Olavo  sacrum  est.  Templum  Vogense  omnem  terram  ab  exteriori  sinus  parte 
possidet.  Insinu  interiori,  multaesunt  parvse  insulae,  quarum  omnium  partem 
dimidiam  caenobium,  alteram  dimidiam  templum  cathédrale  possidet.  Hse 
parvse  insulae  calida  aqua  abundant  quse  hycmeadeo  fervent,  ut  nemini  prope 
accedere  fas  sit;  aestatse  temperatse  sunt,  ut  lavacri  usum  prsestent,  multiquc 
sanitati  restituantur  et  eae  morbis  convalescant. 

Proximus  huic  si  tus  est  Einars  fjord,  inter  qiiem  et  antedictum  Rafns- 
fjordum,  magna  jacet  villa  principalis,  quae  régi  est;  ei  villx  nomen  Foss. 
Hic  splendidum  templum  (Hofdio),  stat,  scto  Nicolao  sacrum,  cui  rex 
sacerdotes  praeficit.  Jacet  ibi  in  vicinia  ingens  lacus,  piscibus  abundans,  qui 
cum  sestu  marine  et  imbre  restagnavit,  aqua  refluente  et  decrescente  magna 
piscium  copia  in  arena  remanet. 

Einarsfjordum  ad  sinislrumingredientibusbrachium  maLTÏsesiT/iorvaldsvig; 
adhuc  magis  introrsum  ad  idem  sinus  latus  promontorium  jacet,  dictum 
Klining;  inde  magis  introrsum  brachium  se  inscrit,  dictum  Grauevig  intra 
quam  aliquanto  spatio  magna  villa  est,  dicta  Dater  (vallis),  templi  cathédrale 
possessio.  Sinum  ingredienti  pelentique  templum  cathédrale  (Garda),  in 
intime  sinus  recessu  situm  a  dextra  est  ingens  sylva,  acdi  cathedrali 
propria,  in  qua  sylva  omnia  templi  cathedralis  pecora  pascuntur.  Templum 
cathédrale  totum  Einarsljordum  possidet,  item  ingentem  illam  insulam 
que  EinarsQordum  prœjacet,  diclam  Rensfie  (rangiferorum),  quod  tem pore 
autumnali  multi  eo  maclides  concurrant;  ibidem  venatio  communis;  neque 
tamen  nisi  permittente  eppo.  In  eadam  insula  sunt  saxa  sectilia  omnium 
quse  Groenlandia  fert  prsestantissima ,  tam  sequaci  materia,  ut  inde  oUœ 
et  canthari  conficiantur,  tamque  durabili  natura,  ut  injuriam  ignis  contem- 
nant  ;  ex  une  tali  saxo  canthari,  decem  velduodecim  doliorum  capaces  confici- 
untur.  Longius  versus  occidentem  insula  contineutem  praejacet  dicta  LangÔe 
(longa),  in  qua  octo  grandia  prsedia  rusticana  sunt.  Templum  cathédrale 
totum  insulam  possidet,  exceptis  decimis  quae  templi  Hvalsôensis  sunt. 

Proximus  EinarsQordo  est  Mvatsôerfjord  (sin.  insulae  ceti),  in  quo  templum 
est  hvalsôefjordense,  quod  totum  hoc  sinum,  totumque  qui  proxime  adjacet 
Kambstadefiord  possidet.  In  hoc  sinu  magnum  jacet  praedium  regium  dictum 
Thjodhildestad  (sica  nomine  uxoris  Erici  rufi  vocatum). 

Huic  proximus  est  Eriksfjord,  in  cujus  ostio  iusula  qusedam  sita  est,  dicta 
Eriksôe,  cujus  pars  dimidiae  templo  cathedrali,  altéra  dimidia  templo  Dyur- 
nesensi  subjacet.  Csetuum  sacrorum  qui  in  Grônlandia  sunt,  templi  Dyurenes 
(promont,  animalium)  frequentissimus  est,  quod  templum  ab  sinistro  latere 
Eriksfiordum  ingredienti  situm  est.  Templo  Dyurnesensi ,  omnia  Mitlfjord 
(médius  sin.)  ex  EriksQordo  recta  in  japygem  infunditur.  Longius  inde  in 
EriksQordo  situm  est  templum  Solefjellds ,  cui  totus  Mittfjord  subjectus  est.