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HISTOIRE
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CHARLES XII
ROI DE SUEDE.
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HISTOIRE
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C H ARLES XIL
ROIDESUEDEj
Fm m. de voltaire.
NOUVELLE ÉDITION STéRÉOTVPJE,
iOIGXBUlIMBNT KEYUB ET ÇORRIGSE SUR LES MEILLEURES IMPRStflIOIfS>
Par m. CATTY,
* rR£MI£R MAÎTRE DE LAKGUE FRANÇOISE A L'ACADÉMIS ROYALE
ET MUJTAIRE, DE WOOLWICH.
A LONDRES^
Imprimée avec des Planches solides par A. Wilsen,
Duke Strett, Uncotn^s-hm PieUlif
cr tE.taouvs çhsx messrs. vernor, hood btshakpe, fovi.trt.
1808.
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TABLE DÈS CHAPITRES.
TUmqrç[Uê$ èuî^ Vt^tt^e. 4. ««..é». ..»•.. j
Nouveiies Cimsidérations êur VHtstoire. • • • n
De l VHUté de l 'Histoire. xi
Pyrrh^meme de THiëiêire^ •• ..../» « xiii
DkcmrseurVHiêMredfCharUeKIL •• •• sx
Anecdotes sur le Czar Pierre-le-Grand. • • • i • xxr
LIVRE PREMIER.
AR6UM£NT.-«ffivfi^Ve aUégh de la Smedejmqn'à
Ch^léè XIL San éduct^ioH: ses enneUds. €a^
ractm mi mr ^hr9^ AlMoiPih. Pari&miariiêè
ttèe tuHeuses' sur ce prince et sur là natim màèe.
La Moscovie, la Pologne et le î)anemarck se ré»
missent contre Charles XIL • • 1
LIVRÉ SÉCÔNt).
^^ov)AmHT.'^€haiêgement prodigieux et subit dams
le oaractéte^de ChaHes XIL . A Végé de dù^uit
<ww> U sautiem là guette eaktre k Dmàmarck, lu .
PokgihMet IttMosgiome: termine là guerre delkme-
«Mfrrifc m sim seiuainÊèi défait quatte-vingt mille
Moscssites awec huit milh Suédois, et passe eu Po-
logne, Description de la Pologne et de son gom^
vememeut. Charles gagne plusieurs batailles, et est
'^trs ds la Polo^^ ojé il se prépare à nommer
M rw. . • P » •.••.•.•••.•••••• oK
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TABLE DES CHAPITRES.
LIVRE TROISIEME. .
' Pag»
Argument. — Stanislas Leczinsky élu rai de Pologne,
Mort du cardinal primat. Belle retraite du générât
Schulembourg. Exploits du czar. Fondation de
j,, fietersbourg. Bataille de' Frauenstad, Charles
- entrée en Saxe, Paix d'Altranstad. Auguste abdique
la couronne, et la cède à Stanislas, Le générai
PatkuU plénipotentiaire duczar, est roué et écàrtelê.
^ Charles reçoit^ eh Sàxé des ambassadeurs de tous les
princes. Il vu seul à Dresde voir Auguste avant
départir, ••^..^.••.........••â ••m» •••♦•• 69
LIVRE QUATRIEME.
Argument.' — Charles victorieux quitte la Saxe:
poursuit le czar: s'enfonce dans l'Ukraine, Ses
pertes: sa blessure. Bataille dePuitava: suite de
cette bataille, Charles réduit à fuir en Jïtrquie.
Sa réception en Bessarabie, .♦•••••••••••#•••• lOS
LIVRE CINQUIEME.
Argument. — Etat de la Porte ottomane. Charles
S^ourne près de Bender. Seè occupations : ses in-
trigues à la Porte: ses desseins^ Auguste iremmUe
êurson irâne. Le roi de DànemarekfaU une descenie
. en Suéde, Tous les autres états de Charles s&nt
attaqués. Le czœr triomphe dans Moscou, 'Affajire
du Pruth, Histoire de la czarine^ despaysanne de*
venue impératrice.' ..••....•....••• 135
LIVRE SIXIEME.
ARGUM£NT.---7nfrtgftie« â là Porte ottomane. Le fcàn
desTartdres et le pacha de Bender veulent forcer*'
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TABLÉ DES CHAPITRES.
Figt
<Jkarl€s de partir. Il se défend avec quarante
dàmeaiiques contre une armée. Il est pris et traité
en prisonnier ••• •• ....• i67
LIVRE SEPTIEME.
Argument. — Les Turcs transfèrent Charles à Dé-
mirtash. Le roi Stanislas est pris dans le même
temps. Action hardie de M, de Villelongue. Ré"
volutions dans le serrait. Bataille donnée en Po^
méranie. Altena brillé par les Suédois. Charles part
et^n pour retourner dans ses états. Sa manière
étrange de voyager. Son arrivée à Stralsund.
Disgrâces de Charles. Succès de Pierre-le-Grand :
son triomphe dans Petersbourg. •••••••••••••• 195
LIVRE HUITIEME.
Argument.— CAflrfc* marie la princesse sa soeur au
prince de Hesse. Il est assiégé dans Stralsund, et se
sauve en Suéde. Entreprise du baron de Gortz, son
premier ministre. Projets d'une réconciliation avec
te czary et d'une descente en Angleterre. Charles
assiège Fréderickshall en Norvège. Il est tué: son
caractère. Gortz est décapité. ....•.••.. 225
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REMARQUÉS SUR L'HISTOIRE
Ne cessera-t-on jamais de nous tromper sur Tavenif,'
le présent et le passé ? II faut que Thorame soit bien né
pour Terreur, puisque dans ce siede éclairé on prend tant
de plaisir à nous débiter les fables d*^Hérodote, et les fables
encore qu'Hérodote n auroit jamais osé conter, même à des
Grecs.
. Que gagne-t-on à nous redire que Menés étoit petit-fib
de Noé ? Et par quel excès dinjustice peut-on se moquer
des généalogies de Moréri, quand on en fabrique de pa-
reilles ? Certes, Noé envoya sa famille voyager loin ; son
petit-fils Menés en Egypte, son autre petit4ils à la Chine,
je ne sais .quel autre petit-fils en Suéde, et un cadet en
Espagne! Les voyages alors formoient les jeunes gens bien
mieux qu'aujourd'hui : il a fallu chez nos nations modernes
des dix ou douze siècles pour s'instruire un peu de la géo-
métrie ; mais ces voyageurs, dont on parle, étoient à peine
arrivés dans desi pays incultes, qu'on y prédisoit les éclipses-.
Oh ne peut douter au moins que l'histoire authentique de
la Chine ne rapporte dés éclipses calculées, il y a environ
^atre raille ans. Confucius en cite trente-six, dont les
missionnaires mathématiciens ont vérifié trente-deux. Mais
ces faits ^'embarrassent point ceux qui ont fait Noé grand-
pee de Fohi ; car rien ne les embarrasse.
D'autres adorateurs de l'antiquité nous font regarder les
Egjrptiens comme le peuple le plus sage de la terre ; parce
pe, dit-oui les prêtres arvoient chez eux beaucoup d'auto-
lifcs; et il se trouve que ces prêtres si sages, ces légblateurs
^IHi peuple sage^ adoroient des singes, des chats et de»
a 3
.^ ' Digitizedby VjOOQIC
& REMARQUES SUR L'HISTOIRE.
oignons. On a beau se récrier sur la beauté des anciens
ouvrages égyptiens: ceux qui nous sont restés sont des
masses informes ; la plps l^Ue statue de l'ancienne E^pte
n'approche pas de celle du plus médiocre de nos ouvriers.
Il a fallu que les Grecs enseignassent aux Egyptiens la
sculpture^ il n'y a jamais eu en Egypte aiicun bon ouvrage
que dç la main des Grecs. Quelle prodigieuse connois-
sance, nous dit-on, les Egyptiens avoient de l'astronomie !
Les quatre côtés d'une grande pyramide sont exposés aux
quatre régions du monde ; ne voilà-t-il pas un grand effort
d'astronomie ? Ces Egyptiens étoient-ils autant de Cassini,
de Halley, de Kepler, de Ticho-Brahé ? Ces bonnes gens
racontoient froidement à Hérodote, que le soleil en onze
mille ans s'étoit couché deux fois où il se levé : c'étoit là
leur astronomie.
Il en coûtoit, répète M. Rollin, cinquante mille écus
pour ouvrir et fermer les écluses du lac Mœris. M. Rollin
est cher en écluses, et se mécompte en arithmétique. IL
n y a point d'écluse qui ne doive s'ouvrir et se ïermer pour
'jii écu, à moins qu'elle ne soïl très mal faite. Il en coûtoit,
dit-il, cinquante talens pour ouvrir et fermer ces écluses.
Il faut savoir qu'on évalua lestaient, du temps de Colbert,
à trois mille livres de France. Rollin ne songe pas que,
depuis ce temps, la valeur numéraire de nos espèces est
augmentée presque du double, et qu'ainsi la peine d'ouvrir
les écluses du lac Mœris auroit dû coûter, selon lui, environ
trois cent mille francs: ce qui est, à-peu-près, deux cent
quatre-vingt-dix-neuf mille, neuf cent quatre-vingt-dix-sept
livres de plus qu'il ne faut. Tous les calculs de ses treize
tomes se ressentent de cette inattention. Il répète encore/
après Hérodote, qu'on entretenoit d'ordinaire en Egypte,
c'est-à-dire, dans un pays beaucoup moins grand que ht
France, quatre cent mille soldats ; qu'on donnoit à chacun
cinq livres de pain par jour, et deux livres de viande. C'est
donc huit cent mille livres de viande par jour pour les seuls
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lt£MA|U»îFBS SPH^S^^SIWOntl^. Si
soldats, dans im pays où Foiiiii'eftiB^i^^e^iitpreMfue^pjDiiltii
D'ailleurs, à qui appartenoient^tes quatre cent mille s<Mat3»
quand l'Egypte étoit divisée en plusieurs petites prjacipautés?
On ajoute que chaque soldat avoit six arpens francs de cqi^t
tribution ; voilà donc d|eux millions quatre cent mille arpeiiSt
qui ne paient riien à Tétat. C*est cependant ce. petit état
qui entretenoit plus de soldats que n'en a aujourd'hui 1^
gnmd seigneur, maître de l'Egypte et de dix fois plus de
pays que l'Egypte n'en contient. Louis XIV a eu quatre
' cent mille hommes sous les armes pendant quelques années *
mais c'étoit uo effort, et,cet effort a ruiné la France.
Si l'on vouloit faire usage de sa raison au lieu de sa
mémoire^ et examiner plus que transcrire, on ne mutôplie-
roit pas à Thiflui les livr^ et lés erreurs; il fajiidroit n'écrire
que des choses neuves et vraies. Ce qui manque d'ordinaire
à ceux qui compilent l'histoire, c'est Fesprit philosophique :
la plupart, au lieu- de discuter des faits avec les hommes,
font des contes à des enfans» Faut-il qu'au siècle où noua
vivons, on imprime. encore le conte des oreilles de Çmerdis,
et de Darius, qui. fut déclaré roi par son cheval, lequel
hennit le premier; et de Sanacharib, ou Sennakérib, ou
Sennacabon, dont l'arniée fut détruite miraculeusement par
des rats? Quaàd on veut répéter ces contes, il faut du moins
ks donner pour ce qu'ils so|it.
£st-il permis à un homme de bon sens, né dans le dix-
huitieme siècle, de nous parler sérieusement de l'oracle de
Delphes ; tantôt de nous répéter» que cet oracle devina que
Crésus faisoit cuire une tortue et du mouton dans une tour-
tière; tantôt de nous dire, que des batailles furent gagnées
suivant la prédiction d'Apollon, et d'en donner pour raison
le pouvoir da diable. M. Rollin, dans sa compilation de
Wiistoire anciemie, prend le parti des oracles contre Mes-
sieurs Van Dale, Fontenelle et Basnage : " Poi^r M. de Fon-
" tenelle," dit-il," il ne faut regarder que comme un ouvrage
** de jeunesse^ son livre contre les oraçlçs^ tiré d^ Van Dale."
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w mniAitQfms SUR L'HisTQmt.
JTai Men peur que «et «rrèt de la vieiHeflse de RoBm contf«
le jëmiesee de Fentenelle» ne sok cassé au tribunal de la
raben ; les rhéteurs n'y gagnent guère leurs causes contre
les pKîiosf^es. Il n'y a qu^à voir ce que dit HolHn dans
•oii dîtieme tome, où il veut parler de physique : il pré-
tend qu^Archimede, voulant ftiirc voir à son bon ami, le roi
de Syracuse, ht puissance des mécaniques, fit mettre à tetife
une galère, la fit charger cbublement, et la remit douce*
ment à flot en remuatit un doigt, sans sortir de dessus sa
chaise. On* sent bien que c'est là le rhéteur qui parle : s^îl
avoit été un peu phâosophe, il auroit vu l'absurdité ^e ce
qu'il avance.
It me semble que, si on vouloit mettre à profit le temps
présent, on ne passeroit point sa vie à s'infatuer des fables
anciennes. Je cônseillerois à un jeune homme d'avoir une
légère teinture de ces temps reculés ; mais je voudrois qu'on
commençât une étude sérieuse de lliistoire au temps où elle
' devient véritablement intéressante pour nous ; 'û'vde semble
que c'est vers la fin du quinzième siècle. L'imprimerie,
qu'on inventa en ce temps-là, commence à la* rendre moins
incertaine. L'Europe change de face; les Turcs, qui s'^
répandent, chassent les lielles^lettres de Constantinople ;
elles fleurissent en Italie '^ elles s'établissent en France ; elles
vont polir l'Angleterre, l'Allemagne et le Septentrion. Une
nouvelle religion sépare la moitié de l'Europe, de l'obéis-
sance du pape. Un nouveau système de politique s'établit;
on fait, avec le secours de la boussole, le tour de l'Afrique,
et l'on commerce avec la Chme plus aisément que de Faris
â Madrid. L'Amérique est découverte; on subjugue un
nouveau monde, et le nôtre est presque tout changé. L'Eu-
rope chrétienne devient une espèce de république immense,
où la balance du pouvoir est établie mieux qu'elle ne le fut
en Grèce. Une correspondance perpétuelle en lie toutes
l'es parti'es, malgré les guerres que l'ambition des rois suscite,
et même malgré les guerres de religion encore plus destruc-
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REMARQUES SUR L'HISTOIRE. v
tires. Les arts qui font la gloire des états, sont portés à
un point que la Grèce et Rome ne connurent jamais. Yoilà
lliisloke qa*il &ut que touthothme sadhé ; c'^st là Icfb'oii ne
trouve ni prédicHons chimériques, ni oracles- menteurs, ni
faux miracles, ni iables insensées ; tout y est vrai, aux pe-
tits détails près, dont-il n'y a que les petits espi:its qui se
soucient^ beaucoup. Tout nous regarde, tout est fait pour
nous ; Targent sur lequel nous prenons nos repas, nos meu-
bles, nos besoins, nos plaisirs nouveaux, tout nous fait sou-
venir cbaqne jour, que l'Amérique et les grandes Indes, et
par conséquent toutes les parties du monde entier, sont ré^
unies depuis environ deux siècles et demi par Tindustrie de
nos pères. Nous ne pouvons faire un pas qui ne nous aver-
tisse du changement qui s'est opéré depuis daus le monde.
Ici, ce sont cent villes qui obëissoieut au pape, et qui sont
devenues libres: là, on a fixé pour un temps, les privilèges
de toute l'Allemagne. Ici, se forme la plus belle des ré»-
pul^iques, dans un terrain que la mer menace chaque jour
d'engbutir; l'Angleterre a réuni la vraie liberté avec la
Toyaiité: la Suéde l'imite, et le Danemarck n'imite pcHut la
Sttivie. Que je voyage en ÀUenHtgne, en France, en Espagne,
pav^omt je trouve les traces de cette longue querelle, qui a
sabsisté entre les maisons d'Autriche et de Bourbon, urnes
par tant de traités, qui ont tous produit des guerres funestes.
Il n'y a point de particulier en Europe, sur ht fortune du-
^aei tous ces changemens n'aient influé. Il sied bien, après
cela, de s'occuper de Salmanazar et de Mardokempad, et
dé rechercher les anecdotes du Persan Cayamarrat, et de
Saba<H> Mét6j»hi$ ! Un homme mûr, qui a des affaires séri^
tme% ne répète point les contes de sa nourrice.
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NOUVELLES CONSIDERATIONS
SUR L'HISTOIRE.
Peut-^tre arrivera-t-il bieàtèt dans la manière d'é»
crire rkistoire, <e qui est arrivé dans la physique.. Les «ou*
velles découvertes ont fait proscrire les anciens systèmes.
On voudra connoitre le genre humain dans ce. détail inté-
ressant, qui fait aiyourd'hui la base de la philosophie na-^
turelle.
On commence à respecter très peu l'aventure de Curthis^
qui referma un gouffre en se précipitant au fond, lui et son
cheval. On se moque des boucliers descendus du ciel, et
de 'tous les beaux talismans dont les dieux fàfêoient présent
si .libéralement aux hommes ; et des vestales qui mettoient
un vaisseau à flot avec leur- ceinture ; et de toute cette ^ule
de sottises célèbres, dont les anciens historiens regorgent
On n'est guère plus content que, dans son histoire ancienne,
M. RoUin nous parle sérieusement du roi Nabis, qui faisoit
embrasser sa femme par ceux qui lui apportoicnt de T^argent,
et qui mettoit ceux qui lui en refusoient dans les bras d'une
belle poupée, toute semblable à la reine, et^ armée de pointes
de fer sous son corps de jupe. On rit, quand on voit tant
d'auteurs répéter les uns après les autres, que le fameux
Othon, archevêque de Mayeiice, fut assiégé et mangé par
une armée de rats en 698 ; que des pluies de sang inondè-
rent la Gascogne en 1017 ; que deux armées de serpens se
battirent près de Tournay en 1059. Les prodiges, les pré-
dictions, les épreuves par le feu, &c. sont à présent- dans
le même rang que les contes d'Hérodote.
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^OUVELOS CONSIDERATIONS, 6ct. vu
Je veux parler ici de Thistoire moderne, dans laquelle
op ne trouve ni poupées qui embrassent les courtisans, ni
évéques mangés par les rats.
On a grand soin de dire, quel jour s'est donnée une
bataille, et on a raison. On imprime les traités, on décrit
la pompe d'un couronnement, la cérémonie de la réception
d'une barrette, et même l'entrée d'un ambassadeur, dans
laquelle on n'oublie ni son suisse, ni ses laquais. Il est bon
qu'il y ait des archives de tout, afin qu'on puisse les con-
sulter dans le besoin ; et je re^rde à présent tous les gros
livres comme des dictionnaires. Mais après avoir lu trois
ou quatre mille descriptions des batailles, et la teneur de
quelques centaines de traités, j'ai trouvé que je netois guère
plus instruit aii fond. Je n'apprenois là que des événemens.
Je ne connois pas plus les François et les Sarrasins païf la
bataille de Charles Martel, que je ne coDubis les Tartares
et les Turcs par la victoire que Tamerlan remporta sur
Bajazet. J'avoue que, quand j'ai lu les mémoires du car^
dinal de Retz et de madame de Motteville, je sais ce que
la reine mere^a dit mot pour mot à M. de Jersay ; j'ap-
prends comment le coadjuteur à contribué aux barricades ;
je peux me faire un précis des longs discours qu'il tenoit à
madame de Bouillon. C'est beaucoup pour ma curiosité;
<^est pour mon instruction très peu de chose. H y a des
livres qui m'apprennent les anecdotes vraies ou fausses d'une
cour. Quiconque a vu les cours, ou a eu envie de les voir,
est aussi avide de ces illustres bagatelles, qu'une femme de
province aime à savoir les nouvelles de sa petite ville.
C'est au fond la même chose et le même mérite. On s'en-
treteuoit, sous Henri IV, des anecdotes de Charles IX.
On parloit encore de M. le duc de-Bellegarde dans les pre-
mières années de Louis XIV. Toutes ces petites miniatures
se conservent une génération ou deuv, et périssent ensuite
pourjamab.^
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YÎii " NOtlVËtlES 'éONéA)EitA^ONè
On né^figé cependant pour elFes des connorîssances d'une
utiffté pTus sensible et plus durab]'^ Je roiVd rois apprendre
quelles étoient les forces d'un pays avant une guerre, et si
cette guerre les a augmentées ou diminuées! L'Espagne
a-l-efîe été plus riche, avant la conquête du nouveau monde,
3ù'aùjourd1iui? De combien étoit-elle plus peuplée du temps
è Charlés-Quint, que sous^Pbili'ppe lV> Pourquoi Amster-
dam cou(enoit-elle à peine vingt m'dle âmes, il y a deux cents
ans? pourquoi' a-t-elle aujourd'hui deux cent quarante mille
habitans ? et commenf le sait-on positivement ? De combien
TAngleterre est-elle plus peuplée qu'elle ne réloit sous
Henri VIII ? Seroit-il vrai ce qu'on dît dans les Lettres Per-
sannes, que les hominés manquent à la terre, et qu'elle est
dépeuplée en comparaison de ce qu'elle étoit il y a deux
mille ans? Rome, ii est vrai, avoit^lors plus de citoyens
qu'aiyourd'hui. J'avoue qu'Alexandrie et Carthagc étoient
de grandes villes ; mais Paris, Londres, Constantinople, le
Grand-Caire, Amsterdam, Hambourg, n'existoient pas. Il
y avoit trois cents nations dans les Gaules ; mais ces trois
cents nations ne valoient la nôtre, ni en nombre d'hommes,
ni en industrie. L'Allemagne étoit une forêt ; elle est cou-
verte de cent villes opulentes. Il semble que l'esprit de cri-
tique, lassé de ne persécuter que des particuliers, ait pris
Jpour objet l'univers. On crie toujours, que ce monde dé-
génère, et 1 on veut encore qu'il se dépeuple. Quoi donc !
nous faudra-t-il regretter les temps où il n'y avoit pas de
grand chemin de Bordeaux à Orléans, et où Paris étoit une
petite ville dans laquelle on s'égorgeoit ? On a beau dire,
l'Europe a plus d'hommes qu'alors, et les hommes valent
mieux. On pourra savoir dans quelques années, combien
FEurope est en effet peuplée ; car dans presque toutes les
grandes villes, on rend public le nombre des naissances au
bout de Tannée ; et sur la règle exacte et sûre que vient de
donner un Holiandois au)ssi habile qu'infatigable, on saitlt
Digitized by VjOOQ IC
iOR VHtfftOÏÉÉ. ' Ix
wonknèé ^'fia'bittnM par ëeltri de» naimUces. ' t<Aii déji on
des <d>jets de la cnriosîté de quiconque Veiit life llristôii'e
en Citoyen et en philosophe. Il sera bien loin de s'en tenfar
k cette coRAoissancé; il recherchera quel a été le vice radical
ei la vertu dominatite d'nne nation ; pourquoi elle a été
puissante ou foible snr la mer ; comment et jusque quel
point elle s'est enrichie depuis un siècle. I^s registres des
exportations peuvent rapprendre. Il voudra savoir com-
ment les arts, les manufactures, se sont établb; il suivra
lear passage et leiir retour d'un pays dans un autre. Les
chaogemens dans les mœurs et dans les lois seront enfin son
grand objet. On sauroit ainsi Thlstoire des hommes, au-
lieu de savoir une foible partie de Thbtoire des rois et des
cours.
£n vain je lis les annales de France ; nos hbtoriens 8#
taisent tous sur ces détails. Aucun n'a eu pour devise:
Homo sUm, humant nil à me alienum puto. Il foudroit
donc, ce me semble, incorporer avec art ces connoissances
utiles dans .le tissu de» événeniens.. Je crois que c'est la seule
naniere d'écrire l'histoire moderne en vrai politique et en
Tiai philosophe. Traiter l'histoire ancienne, c'est compiler,
ce me semble quelques vérités avec mille mensonges.
Cette histoire n'est peut-être utile que de la même manière
dont l'est la fable, par de grands événemens, qui font le
>njet perpétuel de nos tableaux, de nos poèmes, de nos
couvemtions, et dont on tire des traits de morale. Il faut
lavoir les exploits d'Alexandre, comme on sait les travaux
d'Hercule. Enfin, cette histoire ancienne me semble, à
fégard de la moderne, ce que sont les vieilles médailles en
eemparaison des monnoies courantes ; les premières restent
dans les cabinets, les secondes circulent dans l'univers pour
lé commerce des hommes.
Mais pour entreprendre un tel ouvrage, il faut des
Wnunes qui connoissent autre chose que les livres ; il faut
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X NOUVELLES CONSIDÉRATIONS, &c.
, qu'ils ^soient encouragés par le gouvementeot autant au
moins^ pour ce qu'ils feront, que le furent les Boileau, les
Racine, les Valincourt, pour ce qu'ils ne firent point; et
qu'on ne dise pas d'eux ce que disoit de ces messieurs an
commis du trésor royal, honune d'esprit: '* Nous n'ayons
** vu encore d'eux que leur signature.''
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DE L'UTILITÉ DE L'HISTOIRE.
Obt avantage consisté surtout dans la comparaison
qu'un homme d'état, un citoyen peut faire des lois et des
mœurs étrangères avec celles de son pays ; c'est ce qui ex-
cite Fémulation des nations modernes dans les arts, dans
ragriculture, dans le commerce.
Lei grandes fautes passées servent beaucoup en tout
genre. On ne sauroit trop remettre devant les yeux les
crimes et les mallieurs. On peut, quoiqu'on en dise^ pré-
venir les uns et les autres. . L'histoire du tyran Christiem
peut empêcher une nation de confies le pouvoir absolu à
un tyran ; et le désastre de Charles XII devant Pultava,
avertit un général de ne pas s'enfoncer dans rUkraine san»
avoir des vivres.
Cest poiir avoir lu les détails des batailles de Crécy, de
Poitiers, d'Azincourt, de Saint-Quentfn, de Gravelines^ &c.
que le célebire maréchal dé Saxe se «L^^mûnoît «i xsiiArçhec.
autant qu'il pouvoît, ce qu*il ajppeloit des affaires de poste.
Les exemples font un grand effet sur l'esprit d'un prince
(pii lit avec attention. Il verra que Henri IV n'entrepre-
noit sa grande guerre, qui devoit changer le systj^me de
fEurope, qu'après s'être assez assuré du nerf de la guerre
pour la pouvoir soutenir plusieura années sans aucun nou'^
Tcau secours de finances..
Il verra que la rehië Elisabeth, par Tés seules ressources
du commerce et d'une sage économie, résista au puissant
Philippe II, et que de cent vaisseaux qu'elle mit en mer
contre la flotte invincible, les trois quarts étoient fournis par
les villes commerjrantes d'Angleterre.
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xîl DE LTJTILITÈ DE L'HISTOIRE.
La France» non entamée sous Louis XIV, après neuf
ans de la guerre la plus malheureuse, montrera évidemment
Futilité des places Irontiererqo'il construisit* ^i vain l'au-
teur des causes de la chute de l'empire romain blâme^-il
Justinien d'avoir eu la même politique; il ne devoit blâmer
que les empereurs qui négligèrent ces places frontières, et
qui ouvrirent les portes de l'empire aux barbares. ^
Un avantage que Fhistoire moderne a sur Tânci^hne,
«st d'apprendre à tous les potentats, que depuis lie qtihi^lcfitiif
siècle on s'est toujours réuni contre une pui^nce trop pré-
pondérante. Ce système d'équilibre a toujours été inconfhu
des anciens, et c'est la raison deà succès du peuple rbthain»
qui, ayant formé une milice supérieure à Celle' des 'autres
peuples, lès subjugua l'un après l'autre, Su Tibre jûsqtA
fEupbrate. ' .
Il est nécessaire de remettre souvent sons ïés yeut tel
usurpations des papes, les scandaleuses discordés de léiiï^
schismes, la démence des disputes de controverse, les' j[>er-
sécutions, les guerres enfantées par cette démence, et lel
horreurs qu'elles ont produites.
Si on ne rendoit pas cette connoissance . familière aux
jeunes gens, s'il n'j avoît qu'un p«»it nombre d*^ savâxiih'în-
siruits de ces ïaftSj le pubUc seroit aussi imbécile qu'A l*éfoh
du temps de Grégoire VIL Les calamités de ces temps
d'ignorance rènaitroient infailliblement, parce ^u'on ne pren*
droit aucune précaution pour leaf prévenir. Tout le monde
sait à Marseille par quelle inadvertence la j>esté fut ap«
portée du Levant, et on s'en préserve. '
Anéantissez l'étude de l'histoire ; yôus verrez ^eut^Cré
des Saint-Barthélemi en Franpe, et des Cromwell en Angle-
terre.
I: »
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j - :
PYRKONHlSME DE UmStOlIUE.
tie toute sageflee'jbelonArîstotc. CeHe maxime ert éori bdno^
poiuF qui Kl riiietolre et sortoul liiistoke andenoe.
Que de faits absurdes, quel amas de fables qui fhnqiiMÉ
W aens cemmuu ! £b bien, nW ereyes rie». . ■
H y a eu des rois « Reme, ées teusuis, des déeemyÎKi»
le peuple rwaàià af détruit Carthaflt, Césav a vaineu fitm^
pée ; tout cela est rrai. Mais quand on vous dit/que Caato»
et VoH^ïK ont coinba4«a pour ce peuple ; qu'une vcMtale^
ftee sa cetiitorey a mis à flot vm vaisseau eitgravé; qiAn
g»ttflre i/^dt fderroé quand CuitiM s'y est je^ ; ^ea cregFH*
ri». Tous lisez partout des prodiges, des prédit^ii» •••
c^pIié», des guérisoiis mireculeuses opérées dam^ les'tiefii*
ptes d^^ulepe; n^en ero^ez rien; roais^cei* téfsoîiiè' oa|
signé le procès verbalile ces roiraele» 8»r des tables-dlUrMav
mb le»1eti^e»éloietiti rentplls dVjMwét», qui attitstoîept'kb
périseï»; Croyez qu^l' y a eu dee iuiMciles: el des MpoM
infontattctité cèquffIsrtt'ofitpoiRt vu; ert^s^qH'Hy W et
<b- dévot» qni ont fMfdes-prÔBensauv pr^rr#s d'Estutopé^
^nd leurs enfants ont été guéris #Un f#iunie*/mài8 fdUr
ksmtntelés é^ciÀitpt, n^en eroyea i4en. ^ Mi li^ sont paa
fkàitm que eètl» dii Jésuîfe-X<â^ier, à qui^ nnciliKire vîÉl
npporter son efueiff» du léaâ'ét^mer^ ef qui se troum
i te foir MIT deux vaisseaux.
Mlds lès -l^ltti^ égyptiens efoiënt tous Mrdei^ 9k
Hérodote admire la sêiendfr'prôfende qu'ifs avoient de li
iiMcrie: iite eroyts fW W éè qtte^^tti^^ IMrddeitr.
• - ^ __ Digitizedby VjOOQIC
xif PYRRHONISME DE L'HISTOIRE.
Je me défierai de tout ce qui est prodige : mais doîs-je|
porter l'incrédulité jusqu'aux faits qui, étant dans l'ordre
ordinaire de$ choses bui|ia|neS| manquent pourtant d'une
Tmîseroblance morale ?
Par exemple» Plutarque assure que César tout armé
jeta dans la mer d'Alexandrie tenant d'une niaiu en l'air'
des papiers qu'il ne vouloit pas mouiller, et nageaut de
l'autre main. Ne croyez pas un mot de ce conte que voiu
ftiil Plutarque: croyez i plutôt César qui n*en dit mot daoi
tes Commentaires, et soyez bien sûr que quand on se jetM
dans la mer et qu'on tient des papiers à la main, on l(
mootfleJ „
Vous trouverez dans Quinte-Curte qu'Alexandre et ses
féttéraux furent tout étonnés quand Jls. virent le flu^ et le
fdfaii de .Focéaui auquel ils ne s'atte^do.ifent pi3; p'en
croyez rien.
il est bien vraisemblable qu'Alexandre étalât ivre ait tué
CMlus, qu'il ait aimé Ephestion comme Socrate aimoit Alci-
biade i màb il ne l'est point du tout que le diseiple d'Aristote
ignorât le flux et le reflux de l'océan: il y 9 voit 4^ philo*
•ophes: dans son armée: c'éloit, ;a$sez d'avoir été sur.rEU'
pfarate, qui a des marées à son «mbpuchure, pour ètie
înstruiC de ce phénomène... : Alexandre avpit voyages .en
Afrique, dont les côtes sont baigné^ par l'océan. Son
•mirai Néarqué pouvoit-il' être assçz ignorant pour ne pas
Eoir ce que savoient tons les enfans sur le rivage du fleuve
\mî £|e pfireîUe8.,ffotti8es^répétées dans ^n^ d'auteuis
^écrértiteiittrpp.jesjn^oriens/ . ; ,, ..'i, , ,.
»,<. t^ pece Mainibourg vous redit «prè^.^^t m^^ V^
4eiix,^if^ prpmipefit l'empire à Léon lll^urien» à <;oQfiitîon
^ue» quand, ^ seroi|t,enipece^f» iliabattroît les images. Qufl
intérêt, je vous prie, avoient ces deux juifs à empèd^eiir que
les cbcétiens n^eussent des tableaux ? Comment ces deux
/Sûis^rableâ pouvoient^l^. . ps^ipeltrie l'empirf^ ? , N'e^icç, pu
insirijIgTjik ,19s }f|ct^i^Xy ^t c^ iMi.;^^^' de t^les.f^^ijki ^
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PYRRHONISME DÉ L'HISTOIRE. »t
n làot avouer que Mézerai, dans son stylé dur» bas»
inégal, mêle aux fsdts mal «digérés qu'il rapporte, bien^des
tbsordités pareilles : ùuit6t c'est Henri V, roi d'Angleterre»
cooronné roi de France à Paris, qui meurt des hémorroïdes,
pour fl^étre, dit-il, assb sur le trône de nos rois : tantôt c'est
Samt Midiel qui apparoit à Jeanne d'Arc.
Je ne croM psis mÀmp U><« témôîn.s ornlaîres, ■ quand ils
me disent des choses que le sens commun désavoue. Le
sire de Joinville, ou plutôt celui qui a traduit son iiistoi^'e
gtoloise en ancien' françois, a beau m'assnrer que les éml^
, «tTgypte, après avoir assassiné leur Soudan, offrirent la
couronne à Saint Louis leur prisonnier: j'aimerois autant
qu'on me dit que nous avons offert la couronne de France
à un Turc. Quelle apparience que des mahoihétans aient
pcosé à faire leur souverain d'un hoiùme qu'ils ne pbùvoiént
regarder que comme un chef^e barbares qu'ils avôient pris
I dans une bataille, qui ne connoissoit ni leurs lob ni leur
bogue, qui étoit l'endemi capital de leur religion ?
Je n'ai pas plus de foi au sire de Joinvilte, quaud il me
' tut ce conte, que quand il me dit que le Nil se déborde à ,
kSaint-Remy, au commencement d'octobre. Je révoquerai
9m hardiment en doute l'histoire du Vieux de là Montagne»
qù, sur le bruit de la croisade de Saint Louis, dépèche
iÀx assassins à Paris pour le tuer ; et, sur le bruit de sa
vttttt, fait partir le lendemain deux couriers pour contre-
nânler les autres. Ce trait a trop l'air 'd'un conte aràbé.'
' /Je dirai hardiment à Mézerai, au père Daiiiet, et à tous
Ul Idstoiîeni^, qU^e'jé né croîs point qu'un orage de j^ifùïé et
itfjtëé ait fsdt tentret Edouard III en lui-même, et ait ptà-
ctféla pâîx à Ptfflippe dé Valois. Les (ionquéràns ne sont
pM'dêvOts, et né font pdint là paix pour dé la |[)luie.
Bien' n'est assurément plus vraisemblable que lés crimes ;
ttil fàtttt dà mobà qùlls »02éht constatée. Voùsvtoyes
4t» HéjBerai plus de seixahte jMnces à qui " on a donné
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%yf PXRttUQNISME DE yBfSTOIB^
'' ICf boiicoiiy m-ais il le ,dit. satis. pfeuve ; . et ui;i bcuH p^^pu^
laire oe^^oit se rapporter que comme ^b f>ruît. , -
Je ne CEoiraî |>ai| ménaç Tlte-jUve,, qiîaiia i) pf% ^i'^
le mîédecin de Pvrrhus offrit au^ Romains d'efnpoisEoôtter
apit maître moyennant une rècompenge.. A .peine \^^
mains avoient-ils alors de largieiit monnoyé ;, et Fyo^li
«voit 4e, quoi acheter la république, ^\ elle avpit youjija fle
▼jKodré^ la place de premier médecm de '^rrhus itoi^fius
lAi|Br^ti>ie,pjrobafilem^nt que oe]|e dfs çpns^l. Je n'^o^ilenâ
loi à uja te) coute^ que ^uand on i^e prouyem q|uiç V^<^
Iffei^c médecin d'^n de nos rois aura proposé ^ un-owlfi
«Ûlffç^de le p^ci* poiiur empoiisonner sqn malatfe^
J>é|rionsroou8 aussi de tout ce qui pardt exagéra Vm
frwée,if)iff»fnbrable de Perses, arrêtée par tv^is ceat»^|^'
^jtes au p,assage fies Tl^çrmopyles» ne me Kévôlte jK^ot;
l'as^ttte fbi tevrain re^d l'aventure croyable. . Ç)iadi^^>
4vec ifuit, 9iiUe hoipiues ugjaerris, d^f^it ik Nerva e^iùi^Qi
quatre-vingt mille pa3i6an^ moscpvite^ niai armés ; je Fad*
mr^ et je. le croîs» ^aîs ^uand je .lis que Simon ; de BfoDt^
fort battit cent nulle boromes avee iieuf cents sordats 4if^tti
^ t;roi4 cor|», je répète Mors» '^ je n'en qrois rien** On
ne dit que c'est un ntrade ;. mai^' e8t-U< bien vrai- ^e Diett
«it iait ce miiaele pour ^Simon de Montfprt? , ■
^ révoquecois en doute le, combat ^e Charles XI]I i
Bender» s'il ne m'avoit été attesté par plusieurs témoiiii
oculaires, et si lecaractere de Charles XII ne rendoit vnu-
seçiblabie <ette héroïque extravagance. Cette défiaace qrï
^ut a^oir sur les faitis particuliers» ayons-b encore fur Uf
nuiieiura de^ peuples étrangers; refusons notre croyanoe,^
loiit historien ancien et rooflemei qui ikms rappoite 4tf
dioses contraires à la nature et à la trempe du coeur liuipû*
Toutes les premières relatioQi de l'Amérique oepurioi^
fllCr4'Antfaropopbages ; il sembloit, à les enténdrei ^^^
^jWtrJTtfws maiMDeasienI des ^ K^*pm fs aussi
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(|\té iâiiis û^^ài^ des moutons'. Le fait, mieux éclsiîrGi,
se réduit à un petit nombre de prisonmeirs qui ont éïé màn*
g(!l']|)l^ leurs vainqueurs, au lieu d'être mangés des vei9.
té nouveau Puffendorff, aussi fautif que rancien, ditv
«jQ^en Tan 15S9, un Anglois et quatre femmes, échappées
dPbil naufrage sur la route de Madagascar, abordèrent dans
oitt'isle déserte, et que TAnglois travailla si bîeii, qu'en Fan
1^ 00 trouva cette isie, nommée Fines, peuplée de douze
ndle beaux protestans anglois.
Lél anciens, et leui^à innombrables et crédules compila»
îtàufs, nous répètent sans cesse quii Babylonè, la ^ille dé
foaivers la mieux policée, toutes les femmes et les «filles se
iMlihioient dans le tenàple de Vénus une fois l^an. Je n'ai
pfl de peine à penser qu'à- Babylonè, comme ailleurs, on
|Mî( quelquefois dU plaisir pour de l'argent; mab je ne me
^SSIadetài jamais ^iiê dans la ville la mieux policée qui
niafors dans' TuniVerd, tous les pères et tous les maris en*
amusent leurs fiUes et leurs femmes à un marché de pro-
dftKdiÉ* pubHquè, et que les législateurs (Hrdonnassent ce
rai tiafîc. .On imprime tous les jours cent sottises s^n-
Umà sûr les «outumés des orientaux ; et pour uû voyageur
cttiàe Cbàrdin, que de voyageurs comme Paul Lucas,
2(e Sitiaï Struys, et comme le jésuite Avril, qui baptisoit
(Itàtomiès par jour chez les Persans, dent il u'enten-
4ik*|às là langue, et qui vous dit que lés càntvaiies russes
^Biàl'à ia Chiiie, et revenoient en trbiâ mob !
tl if en est pas ainû de rHbtoiré de CBtârles itlï. Je
M^itorer que, sijanîàb hbtolre'a mérité la croyance du
Vtnfi <^^ céllè-d. Jie la composai d'abord, comme on
4jteir1â inéiûbîrèis de IKÏ. Fabrice, de MlVtl dé Villelongne
^KÎNèivàlé, et sur le rapport' dé beaucoup de témoins
^Hub^ iààîé coiàmé lés témoins ne voient pas tout, et
VAl vment quelquefob mal, je tombai dans plus d'une
<9Hlfî iM^surlci^'fài^ edsâitielsy lâab sur quelques anec-
b
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xYÎii PYRRHONÏSMI^ DE L'HISTOIRE.
dotes, qui sont assez iodiff^rentes en elles-niêroes, mais sur
lesquelles les petits crîtiijues triomphent.
J'ai depuis réformé cette histoire sur le journal militaire
de M'. Adlerfeld, qui est très exact, et qui a servi à rectifier
quelques faits et quelques dates.
' J'ai même fait usage de l'histoire écrite par Norberg,
chapelain et confesseur de CIrarles Xïl. Il est vrai que c'est
un ouvrage bien mal digéré et bien mal écrit, dans lequel
on trouve trop de petits faits étrangers à son sujet, et où les
grands événemens deviennent petits, tant ils sont mal rap-
portés. C'est un tissu de rescrits, de déclarations, de publi-
cations qui se font d'ordhiaire au nom des rois quand ils
font en guerre ; elles né servent jamais à faire counoître le
- fond des événemens ; elles sont inutiles au niilitàire et au
politique, et sont ennuyeuses pour le lecteur: un écrivain
peut seulement les consulter quelquefois dans le besoin poyr
en tirer quelque lumière, ainsi qu'un architecte emploie des
décombres, dans un édifice. , ; ^.
Parmi les pièces puljliques dont Norberg a surchafg^
sa malheureuse histoire, il s'en trouve nriênie de fausses et
d'absurdes^ comme la lettre d'Aclu^iet, empereur des X^ijc^
que cet historien appelle sultan Bassa par la grâce de Dieu.
Ce même Norberg fait dire au roi de Suéde ce qu^ ce
inoiiarque n'a jamais dit, ni pu dire au sujet du roi Stanislas.
11 prétend que Charles XII, eii répondant aux objections
du primat, lui dit que Stanislas avoit acquis beaucoup d'am^
dans son voyage d'Italie. Cependant il est très certain,, que
jamais Stanislas n'a été en Italie, ainsi que ce monarqqc me.
l'a confirmé lui-niême. Qu'impqrte, après tout, qu'un Po-
lonois, dans le dix-huitieme siècle, ait voyagé, où noO; ^
Italie pour son plaisir? Que de faits inutiles il faut retran,c)ier
de l'histoire, et que je me sais bon gré. d'avoir resserré celle
de Charles XII !
"Norberg n'avoit ni lumières, ni esprit, ni connçiww*
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PYRRHONISME DE L'HISTOIRE. x\%
des affaires du monde, et c'est peut-être ce qui détermina
Charles XII à le cbqijsir.pofir son confesseur; je ne sais s'il
a kit de ce prince un b6h chrétien ; mais assurément il n'en
a pas fait un héros ; et Charles XII seroit ignoré, s'il u'étoit
connu que par Norberg*
Il est bon d'avertir ici, que |'<fn a imprimé, il y a quel-
ques années, une petite brocliure intitulée : " Remarques
"historiques et critiques sur l'Histoire de Charles XI l, par
" M. de Voltaire." Ce petit ouvrage est du comte Ponia-
towski ; ce sont des réponses qu'il avoit faites à de nouvelied
qoestions- de ma part dans son dernier voyage à Paris ;
01^ :sop seq^étaire. en ayant fait xme double; copie, elle
tomba entre leâ mains d'un libraire, qui ne manqua pas
de l'imprimer, et un correcteur d'hnprimerie de Hollande
iatitala " Critique" cette instruction de M. Poniatowski,
pour la mieux débiter. .C'est un des moindres brigandages
qui s'exercent dans la librairie.
La n^fa^ye» domestique de M. Fabrice, avoit aussi im-
primé quelques. rem^M^quies sur cette histoire* Parmi les
erreurs et les petitesses dont cette critique de la Motraye
est remplie, il ne laisse pas de se trouver quelque chose de
irei et d'utile, et j'ai eu soin d'en faire usage dans les der-
nières éditions, et surtout dans celle de 173^ : car, en fait
dli^stoire, rien n'est à négliger, et il faut consulter, si l'on
peut, les rois et les valets die chambra.
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DISCQUE&
VHISTOtRB d)ë CHARLES XIT^^
Il y a bien peu dé souveraim- dont on dAt écriie wid
bbtoire particutiere. £a vam la maH^oité oo la Aittevi»
s^ exercée sur presqae teu» les- prince» : Wt^y en a qu'on
tgè» pelit nombre dont la inémoire-ge ^o w ei- v e ; ctoenorabrr
seroit encore- plas petite m Fon ne sesouvenoil que de cei»
qoi ont été justes» '
Les princes qui ont le plus de drokià Hmmortalitéy aoat
ceux qui ont fait quelque bien aux: bomoMS. Amsî' tant que
la France subsistera» on 9?y seuviendradeja tendresse que
/ Loui»XII avoit pour* son peuple; en excusera' 1er grandes*
fautes de Françob I» en faveur des art» el des sciences clont>
il- a été le père ; on béaif^ la mémoire de Henri IV,_qoi
conquit son béritage à forée de vaincre et de pardonner;
en louera la reagniffceiice de Louis XiV, qui a protégeriez
arts que François I avoit failnsâtre.
Par une raison contraire, on garde le souvenir des maur
vais princes, comme on se souvient des inondations, des
incendies et des pestes.
Entre les tyrans et les bons rois sont les conquérans»
. mais plus approcbans des premiers : ceux-ci ont une répo-
tation éclatante; on est avide de connoitre les moindres
particularités de leur vie. Telle est la misérable foiblesse
^ des hommes, qu'ils regardent avec admiration ceux qui ont
• C% iKscearB ét«tt aa-dcrast 4c la premiers éditieB.
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DItCOUSS SaVL LUISrOIBS, &c. uî
MAiJMlidWiMMMtefanllii^ «I ilttHs parleront «m-
ml flm ▼•bntkri dtt 4csUmctc«r <d%»i wapîgtj que 4m
Four iMit Ift ttiMns pmieef, ^ a'miI été ilU^trc» oi^a
ptix m ai^gueffiiey et ^ aVMrt été owiiius ai par ^e frands
vkes, ni par de gfaades reitii^» eoBMne k«r vie se fearul;
«■OHB eaensqple ai à kniter ai A. ^«ir, elle a^eit pas digne
fi'oa^ensoa?îeaae. De tant d'empereurs de Rome, d'Aile-
nmffte, de Mosoavîe; de taitf de suHans, de califes, de
p^|^ de reÎB, combiea y en a4-il dont le tMMn mérite de
it troaver a^ws %ue daas les tables chronologiques, où
ilf ae sont que poor servir d'épeques ?
tt y a aa valgaîia parmi les princes comme parmi les
MlmlioaiNKs; «epeadaat la furear d'éciîre est venue an
paiat fft'à peîae «a »MiveiPala eesse de vivre, i|ae le publie
eitîaaÔ4é4e veliaaes^ sous Je aoai de atéauâias» d'histoife
de sa .m, d'anecdotes de sa cour. Par là les livres se mal*
H |i| <nt de teUe sorte» qu'aa honaue qui vivroît cent ans,
ctfaiies ea^iMecoit k im, a'auroit pas le leaips de fta*
ceoiir ee. qui s'est faapnmé sar 1 -bisloîre seule depuis deu«
liifllas en Europe. ^
Cette démangeaison de transmettre à la postérité des
4Mk> iauliles, et d'arrêter les yeux des siecka k venir sur
àm évéoemeas commuas, vieal d'une f oiblesse très ordinaire
àewn qui ont vécu dans quelque cour, et qui ont eu le nral-
htm d'avoir quelque part aux affaires pid^iques. Us re-
;ila cour où ils oat vécu, conane la plus belle qui wiî
\éiéi le roi qu'ils ont vu, comme le plus grand nM>*
%i les affaiires dont ils se sont mêlés, comme ce qui a
jimhi (\i( de plus impoitant daas Je monde, ib iTimagiaenl
9^,1» poslérîîé veita tout cela avec les mêmes yeux.
•(riQuTaa prince entreprenne une guerre, que sa cour soit
IHrihUii tf intrigaes^ qirïl acheté l'amitié d'un de ses voisins»
tl^pfl veMe la sieiaé à an aitfre ; qu'il fasse enfin la paix
Mieêai eaneaiis^ après qaelques victoires ^ quelques dé*
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xm DISCOURS SUR L'«!STOIRt î
faites ; ses sujets, échauffés par la viyàdté de ces évéïietiieiié
préiens, pensent être dans l'époque la plos.sîoguKere depns
la création. Qu'arrive-t-îl ? Ce prince meurt; on prend
après lui des mesures toutes différentes; on oublie 'et les
intrigues de sa cour, et ses maîtresses, et ses -ministres, et
ses généraux, et ses guerres, et lui-même.
Depuis le temps que -les princes chrétiens tâchent de se
tromper les uns les autres, et font des guerres et des aliî»
ances, on a signé des milliers de traités, et donné autant de
batailles^ et les belles ou infâmes actions sont innombrables.
Quand toute cette foule d*événemens et de détails se pré-
sente devant la postérité, ils sont presque tous anéantis les
uns par les autres ; les seuls qui restent sont ceuk qui ont
produit de grandes révolutions, ou ceux qu^ ayant été dé-'
crits par quelque écrivain excellent, se sauvent de b' foule,
comme des portraits d'hommes obscurs peints par de grands
maîtres.
On ne seroit donc bien donné de garde d'ajouter cette
histoire particulière de Charies XII, roi de Suéde, à la mul^
titude des livres dont le public est accablé, si ce prince et
son rival Pierre Alexiovipts, beaucoup pk» grand homme
que lui, n'avoient été, du consentement de toute la terr^
les personages les plus singuliers qui eussent paru depuis
plus de vingt siècles. Mais on n'a pas été déterminé seule-
ment à donner cette vie, par la petite satisfaction d'écrire
de3 faits extraordinaires ; on a pensé que cette lecture pour*
roit être utile à quelques princes, si ce livre leur tomlie par
hasard entre les mains. Certainement il n'y a point d#
souverain qui, en lisant la vie de Charles XII, ne doive être
guéri de la folie des conquêtes. Car odk est le souveraio.
qui pût dire : j'ai plus de courage et de vertus, une ame,
plus forte, un corps plus robuste, j'entends mieux k guerre,j
j'ai de meilleures troupes que Charles Xli ? Que si, lÈvei
tous ces avantages, et aprèé tant de victoires, ce roî a été
si malheureux, que dévroient eq[)érer les autres princes qol
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DE CHARLES Xtî. mM
lonrient lir même ambîtîon arec moins ^detalens et de re*-
sotutes? . ,,
On a composé cette histoire snr des récits de per-
sonnes comiues, qui ont passé plusieurs années auprès^ ék
Charles Xfî et de Pierre-le^rand, empereur de Moscovie»
et qui, s'étant rétirées dans un pays Hbre, long^tebips apMi
ianiortdeces princes^ n'avoient aucun intérêt 'de déguiser
la Térité. M. Fabrice, qui a vécu sept années dans la fami^
liarité de Charles XIT, M. de Fierville, envoyé de Frâneer
M. de Villelongue, colonel au service de Suéde, M. Ponia-
bwski ttiêmé, ont foumr les. mémoires.
On n'a pas avancé un seul fait sur lequel oif n'ait con-
sulté des témoins oculaires et irréprochables. C'e^ pteur-
quoi on trouvera cette histoire fort différente des gazettef
t|ui ont paru jusqu'ici sôus le nom de la Vie de Charles XIL
Si Fon a omis pbisieurs petits combats donnés entre les offe*
cien suédois et moscovites, c'est qu'où n'a pomt prétendu
écrire rhistoire dé ces officiers, ma» seidement celle du roi
de Suéde; même parmi les événemens de sa vie, ou n'a
choisi que les plus intéressans. On est persuadé que Thb-
toire d'un prince nest pas tout ce qu'il a fait, mab ce qu'il a
iait de digne d'être transmis à la postérité.
On est obligé d'avertir que plusieurs choses qui étoient
vraies lorsqu'on écrivit cette histoire (en 1728), cessent déjà
cle l'être aujourd'hui (en 1739). I-e commerce commence,
par exemple, à être moins négligé en Suéde. L'infanterie
poloBoise est mieux disciplinée, et a des habits d'ordon*
nance qu'elle n'avoit pas alors. Il faut toujours, lorsqu'on
IH une histoire, songer au temps où l'auteur a écrit. Un
homme qui ne liroit que le cardinal de Retz,, prendroit les
François pour des forcenés qui ne respirent que la guerre
civile, la faction et la folie. Celui qui ne liroit que l'histoire
«les belles années de Louis XIV, diroit : Les François sont
nés pour obéir, pour vaincre et pour cultiver les arts. Un
«tttre qui verroit les. mémoires des premières années de
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mollesse, une a^dilé extrême de s'enrichir, et trop439<yfr
mr^ f^^mmëWFf d<# ï^^ome e^ pepjjée, v^e r^egm-
t4fff| m^ SW^- if? np ^s ^ les ^^f is poiy^oîç"^
s^l9^ (tpujt d*^ icpup ^es tr^vpes 9f^m l^rfla^a^^» ^t"ï«
c«Me$ .4? plwk? Xlf • , Pn <iil d'un J^ç^»»»^ = V ^t<^ Jt"»^
un tel jour ; il laudrojt .4jgre, en paf lan^ d'une oat$jP)Q : Elle
p^rgisff9>H te^ ^us un tel gouvernement, f^ en telle a^n^.
.. Si <|u^ue p^mqe et quelque pin^tfe ^uvoiei^ dam
^ myi-ag» (jkf >éxîtés (jUsa^ab^es, gfx'il| «$ ço^yiepnei^
qi/Maot bpjnm^ ppWci, .^^ .do^i^ conipjte ai| publjbc df
I^UISSCticn:; 4;^;^ ^i^ à Âiv prix qu'iU J^hl4^ i^W gl9Q^
d€Br ; q|ie FlijptoiEe «st un ténipin; et non nn 8at|euv« 4Sl
fiie'it stai «uayeà d'obliger ks &<»»tte6 à dire du biea de
nous, c'esl d^cn iaine.
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ANECDOTES
, SUR
LE CZAR PIERRE'LUGRAKT),
xiEBEB jpremîer a été surnommé Le-.Grand, |»ajrce
fuH a enUeprls et fait de très grandes choses dont nulle
ne s'était présentée à re9prit d'aucup de ses prédécesseurs.
SoD peuple avant lui se bomoit à ces premiers arts enseignés
ptr la nécessité. L'habitude a tant de pouvoir chez les
bommes, ils désirent si peu ce qu'ils ne coonoissent pas, le
génie se développe si difficilement^ et s'étouffe si aisément
HHB les obstacles, qu'il y a grande apparence que toutes les
nitioos sont demeurées grossières pendant d^ milliers de
^^ jusqu'à ce qu'il soit venu des hommes teb que le czar
Pierre, précisément dans le temps qu'il falloit qu*îb vinssent
Le hasard fit qu'un jeune Genevois» nommé Le Fort»
étoit à Moscou chez un ambassadeur danob, vers Fan 1695.
U czar Pierre avoît alors dix-neuf ans ; il vit ce Genevois»
qui avoit appris en peu de temps la langue russe, et qui par-
Mt presque toutes celles de r£urope. Le Fort plut beau-
coup au prince ; il entra dans son service, et bientôt après
^hos sa familiarité. Il lui fit comprendre qu'il y avoit une
>tttre manière de vivre et de régner, que celle qui étoit mal-
Wurçasement établie de tous les temps dans son vaste empire ;
^ims ce Genevois, la Russie seroit peut-être encore barbare.
U Moit être né avec ime àme bien grande pour écouter
^ fan coup un étran^r, et pour se dépouiller des pré*
JH(^ du tfèae et de sa patrie. Le czar sentit qu'il avoit à
(t^noçr une nation et un empire: mab il n'avoit aucun
*<cottrs autour de lui. 11 conçut dès lors le dessein de
b3
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xxvi ANECDOTES SUR PIERRE-LE-GRAND.
^ sortir de ses états, et d'aller, comme Prométbée, emprunter
le feu céleste pour animer ses compatriotes. Ce feu divin,
fl Talla chercher chez les Hollandois, qui étoient, il y a trois
^siècles, aussi dépour^'us d'une telle flamme que les Mosco-
vites. Il ne put exécuter son dessein aussitôt qu'il ('auroit
voulu. Il fallut soutenir une guerre contre les Turcs, ou
plutôt contre les Tartares, en 1696; et ce ne fut qu'après
les avoir vaincus, qu'il sortit de ses états pour aller s'instruire
lui-même de tous les arts qui étoient absolument inconnus
en Russie. Le maître de l'empire le plus étendu de la terre
alla vivre près de deux ans à Amsterdam, et dans le village
dé Sardam, sous le nom de Pierre Michaeloff. On Tap-
peloit communémeut Peter-Bas. Il se fit inscrire dans le
catalogue des charpentiers de ce fameux village, qui fournit
de vaisseaux presque toute l'Europe. Il manîoit la' hache
et le compas ; et quand il avoit travaillé dans son attelier
à la construction des vaisseaux, il étudioit la géographie, la
géométrie et l'histoire. Dans les premiers temps, le peuple
s'attroupoit autour de lui. Il écûrtoit quelquefois les im-
portuns d'un^ manière un peu rude, que ce |)cuple souffroil,
lui qui souffre si peu de chose. La première langue qull
apprit, fut le hollandois ; il s'adonna depuis à l'allemand,
qui lui parut une langue douce, et qu'il voulut qu on parlât
à la cour.
Il apprit aussi un peu d'angloîs dans son voyage à
Londres ; mais il ne sut jamais le françois, qui est devenu
depuis la langue de Pelersbourg sous l'impératrice Elizabetb,
à mesure que ce pays s'est civilisé.
Sa taille étoit haute, sa physionomie fîere et majestueuse,
mais défigurée quelquefois par des convulsions qui alté^oient
les traits de son visage. On attribuoit ce vice d'organes à
f effet d'un poison, qn'on disoit que sa sœur Sophie lui avôit
donné. Mais le véritable poison étoit le vin et l'eau-de-vie,
dont il fil souvent des excès, se fiant trop à son tempéra-
ment robuste.
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ANECDQTES SU|lPI£RREiL&*OBAND. . xrai
n coiiT«rsoit ég^liéraeBt avee un aHifeanstavec iui'géBéràl
^9tmée. Ce n'étoil . ni cdmme un» barbare^ >qui* ue .met
point dé distinctiott entre les hommes, nlKsommé tio ptiuoe
populaire, qui 'veut plaire à .to(ut le. monde; c'étoit mi
homme qui vouloit s'instruire < Il aimoit les femmes autant
que le roi. de Suéde son rival les craigooit, et tout kii étoit
également bon en amour comme à table*' .11 se piquoit de
boire beaucoup, plutôt que de goûter des vins délicnis.
Oa dit que les législateurs «t les rojs ue doivent point ,
se mettre en colère : mais il u j en eut jamais de plus e|n-
porté que Pierre- le-Grand, ni de plus impitoyable. Ce
défaut, dans un roi, n'est pas de ceux qu'on répare en les
avouant; mais enfin il en c9nvenoit, et il dit niêpie à un
nagistrat de H<^ande, à son second voyage : ^^ J'ai réformé
" ma nation, et je n'ai pu me réformer inoi*raème/' 11 est
vtai que W^ cruautés' qu'on lui reproche, étoient un usage
de la cour de Moscou» comme de celle de Maroc. 11 n'étoit
point extraordinaire de voir un czar appliquer de sa main
royale cent coups de nerf de bœuf sur les épaules nues d'un
premier officier de lacourx)irae, ou d'une dame. du palais,
pour avoir manqué à leur service étant ivres, ou d'essayer
son sabre en faisant voler la tèle d'un crmiinel. Pierre
.tt^it fait quelques unes de ces cérémonie^ de son pays. Le.
Fort eut. assez d'autorité sur lui pour l'arrêter quelquefois
surlep^nt de frapper; mais il n'eut pas^ toujours Le Fort
Wprès de lui.
Son voyage en Hollande, et surtout son. goût pour les
' Vis, qui se jdév^loppoit, adoucirent un peu si^s mœurs ; car
c^est le privilège de tous les arts de rendre les hommes plus
l^aitables. Il alloit souvent déjeuner chez un géographe,
>vec lequel il faisoit des cartes mariues. Il passoit des jour*
ntes entières chez le célèbre Ruysch» qui le premier trouva
Xnt de faire ces belles injections qui ont perfectionné l'ana-
tei^y et qui lui ètent son dégoût. Ce prince se donnoit
U»mè9ie»à Tàge de vingt-deux ans» l'éducation qu'un djli^aaft
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brikodob donnerait à un fflt dans leqiQtl'il tioiiveroit da
génie, et cette espèce d'éducation étek au-dessus de eeUe
qu'on avoît jamais reçue sur le IfAne de Russie. Dans k
même temps il envoyoît de jeunes Moscovites voyager et
i^instruire dans tous les pays de l'Europe. Ses premières
tentatives ne furent pas heureuses. Ses nouveaux disciples
n'imitoiënt point leur maitre. Il y en eut même un qui,
étant envoyé à Venise, ne sortit jamais de sa chambre, pow
n'avoir pas à se reprocher d'avoir vu un auti*e pays que la
Russie. Cette horreur pour les pays étrangers leur étolt
inspirée par des prêtres Moscovites, qui prétendoient que
e'étoit un crime horrible à un chrétien de voyager, par la
nâon que dans Fancien testament, il avoit été défendu aux
habitans de la Palestine de prendre les mœurs de leurs voi-
sins, plus riches qu'eux et plus adroits.
En 1698 il aUa d'Amsterdam en Angleterre, non plus
en qimlité de charpentier de vaisseau, non pas aussi en ceHe
de sobveram, mab sous le nom d^in boyard russe, qui
voyageoit pour s^nstruire. Il vît tout, et même il alla à la
comédie angloise, où il n'entendoît rien ; mais iV y tr<$uva
mie actrice nommée Mlle. Croft, dont il eut les faveurs, et
dont il ne fit pas la fortune.
Le rôt Guillaume lui avoit fait préparer une maison
logeable ; c^est beaucoup à Londres ; les palais ne sont pas
communs dans cette ville immense, où Von ne voit guerés
que des maisons basses, sans cour et sans jardin, avec de
petites portés, filles que celles de nos boutiques. Le czar
trouva sa maison encore trop belle : il alla loger dans le
quartier des matelots, peur être plus à portée de se perfec-
tionner danîi la marine. Il sliabilloit même souvent en
matelot, et il se servoît^de ce déguisement pour engager
idusieurs gens de mer à son service.
Ce fut à Londres qull dessina kû-inême le projet de te
communication du Volga et du Tanaïs : il vouloit mèlSse
leur joindre te Duina par^un canal, et réunir ainsi YOté»n$^
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Aiq^CPOT&S SUR PIERRK^E^RAND. xxU
k vm Nwe fi 1^ 91er ÇaspiiçnQf*^ Pf9 Ajoiglots q^H «m-
n^ ^yeç liq le servirent m»l daiui c« grand dessçip, «t kf
Twi» qui lui prir^t A^ph m 17)^> s'oppcNNsrenft eneone
(dus à cette vast« entreprise.
Il manqim d'argent^ ^ Londr^ ; cle$ marcbaodf vinrent
Igi «rfiàr çept mille éca9 pour avoir la pen^issiou de por^r
4» trtwç çp )PLii«aje : c'^t^it une grande nouveauté en ce
Pî»y«t^ et 1» raliffon m^pie y étoit intérefsée. Le pa-
triarche avoit excommunié quiconque lumeroit du tabac,
fdrçeque If^ Twrc3, leurg eiweniis» ftunoicnt; et le clergé
fegar^it cçuiine un d^ se« grands privilèges d'empècber la
^nAm rusoe de fun^er* l^ czar prit les cent mille écus» et
Ht cliargea de iair<9 fumer le «clergé lui-même. Il lui pré-
IMroit bien d'uutrep innovations .
les rois fi>nt des pré^p^ à d^ tels voyageurs. Le pré-
sent de Guilta^ne à Pierre lut une galanterie digne de tous
(«eox. Il lui donna un yacht de vingt-cinq pièces df canons»
k meilleur voilier de la mer» doré ««omnie un aut^l de Rome,
avee des provisions de toute espèce» et tooa les gens de
l'équipage voulurent bien se laisser donner aus^i. Pierre,
wr son yacht, dont il se fit le premier pilote, retouriia en
Hollîmde revoir ses charpentiers, et de là il alla à Vienne
vers le milieu de l'an ^^.99, où il devoit rester moins de
tops qn'^ Londi^s, parce qu'à la cour du grave. Léopold
ly avoit.l>eaucoup plus de cérémonies à e&niyer, et moin»
^ cho^s à apprendre. Aprè^ avoir vu Vienne, il devc^
9Uer à Venise, et équité à ]^qm/|^; fuais U fu^ abl%é de
rf venir en. h^e, à Moscou, sur la nouv^e 4^une guerre
^iie causée par son ab^nce et pa^ la p^rm^ioa de fumer*
Ici ^eUtz, ancienne milice .des cz^mtSi. pfU'eiUui 4 celle den
jiiÂ^res, aussi turbulente, aussi indisciplinée, aa#in3 çoi^
ilgeiise et non moins barbare, furent e^citéa à la, tévolfa
|IM linéiques abbés et moines, moitié Greca» moUîé Russes»
^lfpf^si;ntereut combien Dieu étoii jrrij^ qpfon prit i|i
t^ ^ Mo|covie, et qui mirfnjb V^ en 'Çftinbustioa p^^
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^xx ANECDOTES SUR PïERRE-LE-GRAND.
cette grande querelle. Pierre, qui aVoît préfu'ce que poxiX"
roieut des moines et des strélttz, avbit prî^ ses mesùreis.
Il avoit une armée disciplinée, composée presque toute
d'étrangers bien payés, bien armés, et qui famoient, sous
les ordres du générai Gordon, lequel enténdoit bien la guerre,
'et qxii n'airiioit pas les moines. ' C'étoit à quoi tivoit manqué
le sultan Osman, qui, voulant comme Pierre réformer ses
janissaires, et n'ayant pu leur rien opposer, ne les réforma
point, et fut étranglé par eux.
Alors ses armées furent mises sur le pied de celles des
pririces européens. Il fit bâtir des vaisseaux par ses Anglois
et ses Holiandois à Véronitz, sur le Tauaifs, à quatre cents
lieues dé Moscou. H embellit les vllks, pourvut à leur
sûreté, fit des grands chemins de cinq cents lieues^ établit
éts manufactures dé toute espèce ; et, ce qui prouve k pro-
fonde ignorance 01V vivoient les Russes, la première manu^
facture fut d^épîngks. On fait actuellement des velours
ciselés et des étoffes d'or et d'argent à Moscou. Tant est
paissante l'influence d'Cm seut homme, quand i) est maître
et qu'il sait voutoTP.
La giterre^u'il fit à Charles XII pou? recouvrer lés pHH
vinces que les Suédois avoient autrefois conquises sur les
Russes, he l'empêcha pas, toute malheureuse qu'elle fut
d'abord-, de contiiiuer ses réformes dans l'état et dans l'église;,
il déclara à la fin die iS^, que l'année suivante commençoît
au mois de janvièf, et non au mois de septembre. Les
Russes, qui pensoient que Dieu avoit créé îe monde en sep*
tembre, furent étonnée que leur czar fût assez puissant pour «
changer ce que Dieu avoit fait. Cette fiéferme commença
avec le siedé en 1700, par un^ grand jubilé que le czar
îadiqua h»-mème. Il aveît supprimé la dignité de patriarche^
et il eu- faisoit les fonctions; Il n'est pas vrai- qali eût,
comme on Ta dit, mis son patriarche aux petites maisons 'de
Moscou. Il avoit coutihne, quand il voUloit se réjouir en
j^issant, dé ditt à cehii qufit thàttoit ainsi : *' Je te lais fou;**
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ANECDOTE* «U|LfIERRB:L&jG«A»©. xmî
et celui à q^i il donuoit ce bcaâ titre étoit obligé, fûl-il le
plus grand seigneur du royaume, de porter une marotte,
une jaquette et des grelots, et de divertir la cour en qualité
de fou de sa majesté czarieune. Il ne donna point cette
charge au patriarche ; il se contenta de supprimer un em-
ploi, dont ceux qui en avoieot été revêtus avx>ient abusée
au point qu'ils avoient obligé les czars de marcher devsml
,eux une fois Tan, en tenant la bride du cheval patriarchal ;
cérémonie dont un homme tel que Pierre-le-Graud s*étoit
d'abord dispensé.
Pour avoir plus de sujets, il voulut avoir moins de
moines, et. ordonna que dorénavant on |ie pourroit entrer
dans un cloître qu'à cinquapte ans ;. ce qui fit que de son
temps son p^ys fut, de tous ceusL qui ont des moines, celjUÎ
où -il y en eut le moins. Mais après lui, celte graine, qu'il
déracinoit, a repoussé, par cette foiblesse naturelle qu'opt
tous les. religieux, de vouloir augmenter leur nombre, et par
cette autre foiblesse qu'ont les gouvernemens de le souffrir.
Il fit d'ailleurs des lob fort sages pour les, desservans des
église^, et pour la réforme de leurs mœurs, quoique Içs
siennes fussent assez déréglées ; sachant très bien que ce
qui est permis à un souverain, ne doit pas Tètre à un curé*
Avant lui les femmes vivoient toujours séparées des hommes^
il étoit inoui qu'un mari eût jamais vu 1^, fille qu'il épousoit«
Il ne faisoit connoissaiice avec elle qu'à l'église. Parmi les
présens de noces étoit une grosse poignée de; verges, que le
futur envoyoit à la future, pour l'avertir qu'à la premier^
occasion elle devoit s'attendre à une petite correction mari-
tale ; les maris même pouvoient tuer leurs femmes impuné-»
meut, et l'on enterroit vives celles qui usurpoient ce même
droit sur leurs maris.
Pierre abolit les poignées de verges» défendit aux maris
de. tuer leurs femmes; et pour rendre les mariages moin&
malheureux et mieux assortis, il mtrodui^it l'usage de faire
aanger les hommes avec elles> et de présenter les prétendus
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x%m AMSeDOTES^ SUR mRR&L&GRAND.
auxiilles airant 1» célébration ; en un mot, il établit et fit
naître tout dais ses états, jusqu'à la société. On eonuoît le
règlement qu'il fit tui-mème pour obliger ses boyards et ses
bo^rardes à tenir des assemblées, où les fautes que l'on com-
mettoft contre la civilité russe, étoient punies d'mi grand
verre d'eau-de-vie qu'on faisoit boire au délinquant; <ie
façon que toute Thonorable compagnie s'en retoumoit fort
ivre, et peu corrigée. Mais c*étoit beaucoup dinfroduire
une espèce de société chez un peuple qui n'en connoissoit
point. On alla même jusqu'à donner quelquefois des spec-
tacles dramatiques. La princesse Natalie, une de ses sœurs,
fit des tragédies en langue russe, qui ressembloient assez
aux pièces de Shakespeare, .dans lesquelles des tyrans et
des arlequins faisoient les premiers rôles. Uorchestre étoit
eomposé de violons russes, qu'on faisoit jouer à coups de
nerf de bœuf. A présent on a dans Petersbourg des comé-
diens françois et des opéras italiens. La magnifîcence et le
goût même ont en tout succédé à la barbarie. Une des
plus difficiles entreprises du fondateur, fut d'accourcir les
robes, et de faire raser les barbes de son peuple. Ce fut
là l'objet des plus grands mui-mures. Comment apprendre
à toute une nation à faire des habits à raltemande, et à
manier le rasoir? On en vint a bout en plaçant aux portes
des villes des tailleurs et des barbiers ; les uns coupoient les
robes de ceux qui entroient, les autres les barbes : les ob-
ifinéa payoient quarante sous de notre mpnnoie. Bientôt,
on aima mieux perdre sa barbe ^^ue son argent. Les femtnes
servirent lUilément le czar dans cette réforme ; elles préfé-
roient les mentons rasés; elles lui eurent r4>bngatioR de
n'être plus fouettées, de vivre en société avec les hommes^
et d'avoir à baiser des visages plus honnêtes.
Au milieu de ces réformes, grandes et petites» qui fai-
soient les amusemens du czar, et de la guerre teVribtè qiii
Foccupoit contre Charles XII, il jeta les fondement de i*iin-
portante ville et du port de Petersbourg eu 1704, d^ im.
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AHBODOTCS Ktt FIIlftErCE4l»iâlD.
jAîiwfj «fflilfMt «neMbaac Kern tHMfdlla.dc
è l« pramière ■piaoB>; noi wt le «elMÉta ; àt$
fwsexà .feicés dk vti^r aiur «t èond dt jki m w Bal*
lîfse, des froi^ierat cPAilimeiiit dts ibprds de la m&u Noiat
itd^ la aaar Caspienne. Il |i6rpt pltis de ecnl nûile hmamee
éua les toavif x qu'il fattut kire, et dan^ ks ktî^aes let la
èsette ^'oa essaya; hmiîs e^^ la ville «râte. Les|»ofts
fibchangely d'Astracan, d'Aaopfa, de Véronita lurent €<»*
itmiU.
Pour àôre tan^ de gnuids établîsseaMns, pour avoir des
lol^daiu la mer Balliqueyel cent aille boaMoes de tnmpes
foliées, l'état ne posiédoit alors quVnTÎren vingt de «os
nSions de revenu. J'en m vu le eompte entre les mains
fan homme qidavoit été ambassadeur à Peter^iourg. Mats
kpaye des ouvriers étoit proportionnée à l'argent du roy-
aaaie. Il faut se souvenir, qu'il n'en coûta que des oignons
sas rob d'Egypte pour bâtir tes pyramides. Je le répète,
sa n'a qu'à vouloir ; on ne veut pas asisez.
Quand H eut créé sa dation, il crut qu'il lui étoit bien
pends de sàlis^re son goût en épousant sa maîtresse, et
Me araltresse qui mérftôit d'être sa femme. Il fit ce maiiage
pMqneraent en 1712. Cette célèbre Catherine, orpheline
aée-dans le viflaçe de Ringen en £stonie, nourrie par cha-
rilé diez un vicaire, mariée à un soldat Livonien, prise par
OB parti deux jours après ee premier mariage, avoit passé
da service des généraux Bauer et Czéremettoff, à celui de
Ifcnzikoff, garçon pâtissier, qui devint prince, et le premier
^lomme de l'empire ; enfin, elle fut fêpouse de Pierré-le-
Grand^ et ensuite impératrice, souveraine après la mort du
€ttt> et digne de r*ètre. Elle adoucit beaucoup les mœurs
de son mari, et sauva beaucoup plus de dos du knoutf et
b^vcoup plus de tètes de la hache, que n'avoit fait le gé-
'ai|Ml le F^rt. On Tsùma, on la révéra. Un baron aile*
Buuid, un écuyer d'un abbé de Fulde n'eût point épousé
Cadierine ; mais Fïerre-le-Grand ne pensott pas que le mérite
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7
eût auprès de M be8iHii:^iâeitreot]p-^^i» /^udrtîëv8.>.'.'ijêi
souverains pessent Yotontiers qafibii^ a.d'avitne giiandeiv
^que celle 4^ilsi donnent, et ^oe' tout'' est égal devant eui^
Il est bien certain que la naissance ne met pas plus 'de dif-
férence ^itre les hoinnés qu'eptre un àhon dont le père
portoît du fumier, et iIb ânon doid le père portoit dës/ re-
liques :.Kédu€a€ion^ fait la grande différence; les talens la
font prodigieuse^: ia fortune encore plus. Catherine avoH
eu une éducation tout aussi bonne pour le moins chee son
çitté d'fistonie^ que toutes tes boyardes de Moscou et d'Arch-
angel, et elle étoit née avec plus- de talens et une âme plus
grande; «II0 ay:oit réglé la maison du général Bauer çt celte
du prince Menzikoff, sans savoir jiijire ni écrire. Qui-
conque sait trè5 bien gouverner une grande raai^odi, peut
gouverner un royaume ; cela peut paroitre un paradoxe^
mais certainement c'est, avec le même esprit d'ordrç, de sa-
gesse et de fermeté, que^ 1-on coipii^ande à cent personnel
et à plusieurs milliers, .
Le czarow'itz Alexis, fils du ca^r^ qui , épousa, dîtron,
çpmme lui, une esclave, et qui, comme lui, quitta seçrète-
racnt la ItM^aîr, n*Mut pas uu succès pareil dans ces dew^
entreprises, et il en coûta la. vie iau fils, pour avoir iimté
mal-à-propos le père. Ce fut un des plus terribles exemples
de sévérité que jamais on ait donnés du haut d'un trône;
mais ce qui est bien honorable pour la mémoire de l'impé-
ratrice Catherine, c'est qu'elle n'eut point de parf.au mal-
heur de ce prince, né d'un autre lit, et qui n'aimoit rien de
ce que son père aimoil : on ^'accusa point Catherine d'avoir
a^ en marâtre cruelle; le grand crime <;lu malheureux
Alexis étoit d'être trop Russe, de désapprouver tout, ce que
Ipn ppre faisoit de gfand et d[immortel pour la gloire de la
nation. Un jour entemiant les Moscovites qui se plaignoi^nt
des .travaux ii^ppprtables qu^l falloit çndurer pour bâtijc
Petersbourg : «*. Çonsolezrvous," dit-il, -" cette vîîlç ne du-
« rff^, pps. jôngTtemps." Quand il fallpit imïvr^ ^çou pec^
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âNÇCPOTES mR PI«aRE-I*^RANB. xw
(i2ni$ccs.;^yages^de jcifiq à six ceû^ lieues> que teiczar
eotreprenoit^souyeii^, Je. prince feigaoU d'kire maMe; jon
le purgeoit ^dçny^ol ppur la maladie qu'il n'uvoit pas.
Tai^ 4e .m^fl^çioes^ jpioj^.^^be^^oup d'eau'^-vie, alté-
rei:€at sa sapté £t, sou, esprit^ ;. jl avoit eu d'abord. de Tio-
dÎQation pour s'inspire: il savoit la géoi^étrLe, Tlûstoire;
avoil s^pris raliemaod; renais il n'aimoit point la .gaerrej
ne vouloit pp^nt vrapprendre, et c*est ce que so|i père lui
leprochoit le plus. On l'avoit mariée eadîH, à la pria^
cesse de. Woifenbuttel, sœur de l'impératrice, iemme de
Charles VI. Ce mariage fut malheureux, (^a princesse
éteit souvent, abandonnée pour d^ débauches d'«au-de-vîe,
et pour Airosine, filje f iulandoisei grande, bien; faite» • et
kt^'dwtfs»» Ou prétend que. la pnucea^ mourut, de cha-
grin^ si le chagrin peut donner la mort;, et que le czarowiti
épousa ensuite secrètement Afrosine en 1713, lorsque Tim-
pératrice Catherine venoit de, lui donner nu frère doutil st
leroit bien passé. . _
Les.jiiécontet)teroens, entfe 1^ père et le fils ^devmrenl
de jour en joii^ plus sérieux, jusque-là que Pierre, dès Tan
lT\6f raeo^fa le p^nce 4e le déshériter* et le prince lui dit
qu'il vouloit: se faire nioiue. ^ . ,
Le, C2arj en 1717t renouvela ses voys^;^ par politique
et par curiosité; il alla enfin en France. Si son fils avoit
voiiln se révolter, s'il y avoit eu en effet un parti formé en
la faveur, c'étojt là le temps de se déclarer ; mai^.au lieu
de rester en Russie, et de s'y faire des créatures, il alla voy<r
Iger de son c6té, ayant eu bien de la peine à rassembler
quelques millierS; de ducats, r qu'il avoit secrètement em-
(nmtés. 11 se jeta entre les bras de l'empereur Charles VI,
betu-^frere de sa défunte femme. Ou le garda quelque
ten^. très incpgnit^,>^ Vîeime; de Jàou le fit passer à
Kaplent où^^il resta prè^ d*un {ap, sans que ut le ci^r, >î
personne en Russie, sût le lieu dç sa *ctcaifce^ ., >_;■ ^i ,
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lufi AMECBOTES SUR PmR&LB-CaiAll».
P^ndtml que le fls é(ml mmi ^^elié, le pcfe ét#k I
P»rU «où il fut reçu mmt les flitews respecte qu'alHettii;
mais ftTee une- galmilene qa'il ne psvfoil fronrer •qv'ài
ï#Mce. S^H «tleit veîr «me ma n ni s c tu re, et qu'iiii ouvrage
attirât plus «es regards qo^in autre, eu Im «a laisoil préseat
le lendeoiaiii ; it alla ékttr à Pèli^eurg» chez M. le dac
d^Autb «t la première chose qiÉll iFit, lut son poitrait ea
^ad, avec le hiéme halnt qu'il poftoit, Quand il alfai ^m
hi moaneie rojaie àe» nédaifles!, on en frappa devait lai
4e tovie espace, et on les lui pféscntok ; enfin, on enfrappa
une qti*on laissa «xprès tomlier à ses pieds, et qu'oa fui
hissa ramasser. Il s^ vit gravé d'une naaiere parfaite,
avec ces mots: Pfm&B-i.E-GsANB. Le reven éloit uae
renommée, et ia légende, visas AcgoiRiT eubdo; al-
légorie ^nissi juste que flatteuse pou; un prmce qui aug-
mentoit «n effet son mérite par ses i^oj^ages.
En voyant le tombeau du carcRmd'ltidMfiea et la statue
de ce ministre, ouvrage digne de celui qui! ireprés^nte, le
czar ieâssa parottre an ^ «es tran^potts, et dit une de ces
choses qui ne peuvent patfir que de ceux qui soi^ nés pour
être de grands? hommes. Il monta sur le tombeau, em»
brassa ta statue : ** Grand ministre,'' dit-fl, '^ que îfes-tu ié
^ de mon tehips ! Je te donnerob la moitié de mon empire
*^ pour mVq^{irendre à gouverner Tautre.'' Un homme qid
avoît moins d'enthoushisme que le czar, s'étant fait expfiquer
ces' ^strcffes', pfànoncéeè' en laa^ russe, répondit t ** SU
**.'aVoit donifé cette moitié; if ti'auft>it j^aà long-temps gardé
râotre."^ '-- " ';-
' Le cwir, tiprhs aVoir ain^i «parbdûru la Fhmce, oè tout
dispose lés mœurs à la douceur et à Undùlgence^ retourna
dans sa patrie, et y reprît sa séviêrité. Il a;è6it enfin engagé
son fils à revenir de Naples à PétersboOrg; ce jeune pmeé
fut de là* condu^ à Mosdoù *dèvattt le on^ son perè qoi
tommenpa par le prit er de là succession aiu tr6ae» et lui iil
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«allier mi acte solen&ei de renon«kti<yn^ i'itf'fei ëtt Bioiir dc^
janfieff 1718 ; et en eomkiêratieni âe cet acte, le pefe* pif>c^
nil'à son fils de im hnsKr lap vie.
Il n^oit pas hors de vraisemblance^ qu'un tel Me semflf
un jour annuité. Le czar; pour lui donner plus de force;
ovUîaot quH étoit père, et se sourenant seulenienf qu^
éfdt fondatieuit d'un empire- que son filk pouVoR repibnger
dtns la barbarie, fit instruire pubfiquement léprotès de ce-
prince înfbHiiné, sur quelques* réticences qu^bn lui reprochoît^
dttw Faveu qu'on avoît d'abord exigé dé lui.
Or assembla des évèques, des abbe» et dèr professeurs,
q&i trouvèrent dans l^incien testament, que cetlx qui mau^
<i2ss»it leur père et letir mère» doivent être mis à mort;
ffA la vérité David avoit pardonné à son fîte Âl>sal6n, ré*
voltê contre lui, mais que Dieu n'avoit pas* pardonné à Ab**
arfen. Tel fut leur avis sans rien conclure ; mais c^étâk en
dfer signer un arrèt^ de mort; Alexis n'àvoit; à la vérité»
jtnmismaudh' son père; ilne-s'étoit point révolté commr
Atealenr'M nlivoît point couché publiquement avec les*
cofleobines du roi^ il avoit voyagé sans la permission pater*
oeUe, et il avoit écrit des lettres à ses amb, par lesquelles
9 «arquoit seulement; qu'il espéroit qu'on se souvîendroil
QB jètff* dë-tei euRtissie. Cependant de cent vingts-quatre^
jttgei 8éenttei%'qu*on lui donna^ il ne s^en troova pas^un qui^
i»MMiAt:à'Ili mort <; et ceux qui ne savoient pas écrire^'
8teÉft< s^;ner lesiaut^es* pour eux. On^a dit-danar PEurope».
w a< souvent- imprimé; que le ozar s^étoit fait' traduire
dVspàgnol en- russe te procès- criminel de Don»éario», ce>
pHfteinfoftuné,' que Philippell. son pere^avoif fait mettreî
élm une prison, oô mourut cet héritier d^ine grande moi-
oaMrie^ ifiin§ jamais iln'y eut de procès fait à' Don Carios/-
etjÉmais^Hi n'a .su lir^ manière, soit violenté^ soRnatmeUe^
«h^ee^priôcemeàrut Pierre; té plifeB' despotique 4«K
princes, n^avoit pas besoin d'exemples. Ce qui est cevtiki^
^«que^MH âU uèvim 4«m^4Km4ft?lé«liMétilBii^ IWrH
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JOOivm AI«ÏEODOT£S SUR PIËRR£-LE-GRAND.
elque k p2^r:avoit^ à Moseou une^deA plus belles apotbi-
caireri^ de l'Europe. Cependant il est 4>rpb.il>le que le
prince Alexis, héritier de fa plus vaste nsouarchiedu monde,
cûpdAïuné onanirq^ment, j)^r les sujets d^ son: père, ;qui
dévoient être un jour les siens, put mourir de la révolution
que fit dans son corps un arrêt si étrange et si funeste^ Le
père alla voir sons Hh expiiant, et on dit qu'il versa des
iarraes ; infelîjr, utcumque ferent m fatn lupoîe^. .>-^aîs
malgré ses larmes,, les rou^fur/^t couvertes des mc^l^r^
rompus des amis de son fris; Ji fit couper la tê^ à son
prçpre Joe^u-lçer^ le cpnite Lapuchip, ir^re de sa femme
Ottotke^a.Lapuchin, qu'il avoit r^pudié^, et pncle du prince
Alexis. I^e confesseur du prince eut aussi la tète coupée
Si la Mpscoviç a été civilisée, il faut avouer que cette poli-
t^9e jiui a coûté| cher.' ; ;
;t; liiejr^te de la vie d^ çzar ne fut qu'une suite de ses
g«|p|d^ f^ies^eiiis,, de ^s. travaux et de ses exploits, qui seoi*
Uoieut,eSffcer4'eQL<:ès de ses sévérilés, peut-êtr^ nécessaires.
U.faisoit «cuvent des.liaraitgpes à sa cour et à son conseil.
Dans une de ces harangues il leur dij^ qu'il avoit. sacrifié
son fils au salut de ses états.
Après la paix glorieuse qu'il conclut enfm avec la Siie^le
en 17 ^h par laquelle on lui céda [^ Liv<mie, fSsUmîe^ Uln^
germanie, . la moitié de la Caréiie et du Vibourg, les états
de Rui^sie.lui défévereiit le. nom deQr^ind, de per^âe la
patrie, et d'empereur. - /Ces états étoient représentés 4>ark
sénats qtii.tui donna solennellement ces titres eii présence
du Qomte de Kinski, ministre de l'empereur, de M. de Cam-
predon, envoyé de France, des ambassadeurs de Prusse et
de, Hollande. Peu à peu les princes de l'Europe se sont
s^ccoutùmés . à donner aux souverains de Russie, ce tkre
^'empereur ; mats cette dignité n'empêche pas qi^e les .ara-
baliadeurs de France n'aient ptr-tput.le pas sur ceux: de
l^ilsaie.
Les Russes deivent c^rtaioeaiettt regarder le cnureomiM
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ANECDOTES SUR PIERRE-LE-GRAND. xxxix
le plus gr^nd des hommes. De la mer Baltique aux fron-
tières de la Chine, c'est un héros ; mais doit-il l'être parmi
nous } Etoit*il comparable pour la valeur à nos Coudés» à
nos Villars ; et pour les connoissauces, pour l'esprit, poiur
les mœurs, à une' foule d'honmies avec qui nous vivons?
Non : mab il étoit roi, et roi mal élevé ; et il a fait ce que
peut-être raille souverains à sa place n'eussent pas fait. Il
a eu cette force dans l'àme, qui met un homme au-dessus
des préjugés, et dé tout ce qui l'environne, et de tout ce
qui la précédé : c'est un architecte qui a bâti en brique, et
qui ailleurs eût bâti en marbre S'il eût régné en France,
il eût pris les arts au point où ils sont, pour les élever au
comble : on l'admiroit d'avoir vingt-cinq grands vaisseaux sur
la mer Baltique, il en eût eu deux cents dans nos ports.
A voir ce qu'il a fait de Petersbourg, qu'on juge ce qu'il
eflt fait de Paris. Ce qui m'étonne le plus, c'est le peu
d'espérance que devoit avoir le genre humain, qu'il dût
aaltre à Moscou mi homme tel que le czar Pierre. Il y
tfoit à parier un nombre égal à celui de tous les hommes
qui ont peuplé de tous les temps la Russie, contre l'unité,
qiie ce génie si contraire au génie de sa nation, ne seioit
dooiié à aucun Russe ; et il y avait encore à parier environ
nàet millions, qui faisoient les nombre des Russes d'alors,
centre un, que ce lot de la nature ne tomberoit pas au czar.
Cqpradant la chose est arrivée. Il a fallu un nombre pro-
dîfttox de combinaisons et de siècles, avant que la nature
HUudtre celui qui devoit inventer la charrue, et celui à qui
Dttt devons l'art de la navette. Aujourd'hui les Russes ne'
WÈL plus surpris de leurs progrès ; ils se sont, en moins de
rhfyaute ans, familiarisés avec tous les arts. On diroit
fM ces arts sont anciens chez eux. Il y a encore de vastes
cSuis en Afrique, où les hommes ont besoin d'un czar
Fiame; il viendra peut-être dans des millioiis d'années; car
to«t vient trop tard.
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HISTOIRE
CHARLES XII,
ROI DE SUEDE.
LIVRE PREMIER.
ARâUdiBNT.
Bidmre abrégée de lu Suéde jusqu'à Charles XII, Son éducation; ses
enemis. Caractère du czar Pierre AlexiovpJs. Particularités trèn
curieuses sur ce pririce et sur la nation ^^usse. La 3îoscovîe, la Pofsyg^^
et le Daneniarck se réunissent contre Charles XI L
Ltk Saede et la Fmlande composent on royaume uu ûtvs
pJtts grand que la France; mais bien moins iertiie> et a»*
JQord'hui jpoins peuplé. Ce pays, large de deux cents de nos
lieues, et long de trois cents, s'étend du midi au nord ; de*
pois le dnqnante-cinquieme degré, environ, jusqu'au soî&^te
et dixième, sous un climat rigoureux, qui n'a presque ni
privtemps, ni automne. Ufaiver y règne neuf lûois de
rtonée : ks chaleurs de l'été succèdent tout-à coup à un froid
excessif; et il y gelé dès le mois d'octobre, sans aucune de
ces gradations kisensibles qui amenait ailleurs les sakons et
cKfaideiil le changement phis do«x. La nature, en récora-
f9at, à donné à ce climat rude un eiel serein, un air pur.
Ulé, j^icsqne toujours échauffé par le soleil, y produit les
Ans <t les fruits en peu de temps. Les longues nuits de
Ww 7 «ont adoucies par des aurores et des crépuscules
foi dortttt à pToportkra que le soleil s'éloigne plus ^de la
B
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2 HISTOIRE DE CHARLES XII. Liv. i.
Suéde; et la lumière de la lune, qui n'y est obscurcie par
aucun nuage, augmentée encore par le reflet de la neige qui
couvre la terre, et très souvent par des feux semblables à la
lumière zodiacale, lait qu'on voyage en Suéde la nuit comme
le jour. Les bestiaux y sont plus petits que dans les pays
méridionaux de TEurope, faute de pâturage. Les bommes
y sont plus^ grands. La sérénité du ciej les rend sains; la
rigueur du climat les fortifie ; ils vivent même plus long-temps
que les autres bommes, quand ils ne s'affoiblissent pas par
Tusage immodéré des liqueurs fortes et des vins, que les na-
tions septentrionales semblent aimer d'autant plus que la na- !
ture les leur a refusés.
Les Suédois sopt bien faits, robustes, agiles, capables de
soutenir les plus grands travaux, la faim et la misère; nés
guerriers, pl'eiqs de fierté, plus braves qu'industrieux,^yant
iong-temps négligé et cultivant mal aujonrdliui le coinmercCi
qui seul pourroitleiir donner ce qui mapque à leur pays. Cest
principalement de la<SUede, dont une partie se nomme cn<
core Golhie, que se débordèrent ces multitudes de Goths
qui inondèrent l'Europe, et Tarracherènt à Terapire romain,
qui eu avoit été cinq cents années, l'usurpateur, le législateur
et le tyran.
Les pays septentrionaux étoient alors beaucoupq>Ius peu-
plés qu'ils ne le sont de nos jours, parceque la religion lais-
soit âux babitans la liberté de donner plus de citoyens à 1 état
par la pkiralité de leurs femmes : que ces femmes elles-mèiiies
ne connoissoient d'opprobre que la stérilité et l'oisiveté ; et
qu'aussi laborieuses et aussi robustes que les hoounes, elles
en étoient plutôt et plus long-temps fécondes.
LaSuedefut toujours libre jusqu'au milieu du quatorzième
siècle. Dans ce long espace de temps le gouvernement changea
plus d'une fois.; mais toutes les innovations furent en favienr
de la liberté. Leur premier magistrat eut le nom de jBoi;
titre qui, en dlfférens pays, se donne à des puissances bien
difiéreutes; car en France, eu E^gne, il signifie un liomme
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iiv. I. ROI DE SUEDE. »
absolu; et en Pologne, en Suéde, en Angleterre, rhomnie'AçL
la république. Ce roi ne pouvoit rien sans le sénat; et lé
sénat dependoit des états-généraux, que Ton convoquoît sou-
vent Les représentans de la nation dans ces grandes assem-
blées étoient les gentilshommes, les évèques, les députés des
TÎUes : avec le temps on y admit les paysans même, portion
du peuple injustement méprisée ailleurs, et esclave dans pres-
que tout le nord.
Environ Tan 1492, cette nation si jalouse de sa liberté^ et
qui est encore fiere aujourd'hui d'avoir subjugué Rome il y a
treize siècles, fut mise sous le joug par une femme et par un
peuple moins puissant que les Suédois.
Marguerite de Valdemar, la Sémiramis du nord, reine de
Dauemarck et de Norvège, conquit la Suéde par force et par
adresse, et fît un seul royaume de ces trois vastes états. Après
sa mort, la Suéde fut déchirée par des guerres civiles : elle*
secoua le joug des Dattois; elle le reprit ; elle eut des rois;
elle eut- des administrateurs. Deux tyrans l'opprimèrent
d'une manière horrible vers l'an 1520. L'un étoit Chris-
tiem II, roi de Danemarck, monstre formé de vices, sans
aucune vertu; l'autre un archevêque d'Upsal, primat du
royaume, aussi barbare que Christieni. Tous deux de
concert fîrent saisir un jour les consuls, les magistrats de
Stockholm, avec quatre-vingt-quatorze sénateurs, et les firent
mssacrer par des bourreaux, sous prétexte qu'ils étoient
exoommuniés par le pape, pour avoir défendu les droits de
rétet contre l'archevêque. Ensuite ils abandonnèrent Stock-
hohn au pillage, et tout y fut égorgé, sans distinction d'âge
m de sexe.
Tandis que ces deux hommes^ ligués' pour opprimer,
désmns quand il falloit partager les dépouilles, exerçoient ce
qoB le despotisme a de plus tyrannique, et ce que la ven-
eMCe a de plus cruel, un nouvel événement cliaiigea la face
Âmoftl.
Oastave Vaza, jeûne homme descendu des anciens roit
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4 HISTOIRE DE CHARLES XII. xîv. ï.
dtfpays, sortit du fond 4e$ forêts de la Dalécarlie, où il étoit
caché, et vint déKvrer la Suéde, Cétoit u«e de ces graïKles
amcs que la nature forme si rarement, avec toutes les qualités
nécessaires pour commander aux hommes : sa taille avanta-
geuse et son grand air lui faisoicnt des partisans dès qu'il se
montroit. Son éloquence, à laquelle sa bonne mine donnait
dé la force, étoit d'autant plus persuasive qu'elle étoît sans
art: son génie formoit de ces entreprises qne le vulgaire
croit téinéraires, et qm ne sont que hardies aux yeux des
grands hommes ; son courage infatigable les faisoit réus^.
Il étoit intrépide avec prudence, d'un naturel doux dans \m
siècle féroce, vertueux enfin, à ce que Ton dit, autant qu'un
chef de parti peut l'être.
Gustave Vaza avoit été otage de Christiem, et retenu
prisonnier centre le droit des gens. Echappé de sa prison,
il avoit erré, déguisé en paysan, dans les montagnes et dans
les bois de la Dalécarlie. Là il s'étoil vu réduit à la néces-
sité de travailler aux mines de cuivre pour vivre et potir se
cacher. Enseveli dans ces souterrains, il osa songer à
détrôner le tyran. Il se découvi'it aux paysans; il leur parut
«n homme d'une nature supérieure, pour qui les hommes
ordinaires croient sentir une soumission naturelle. 11 fit en \
peu de temps de ceà sauvages des soldats aguerris. Il atta-
qua Christiem et l'archevêque, les vainquit souvent ; le»
chassa tous deux de la Suéde, et fut élu avec justice, par les
états roi du pays dont il étoit le libérateur.
A peine affermi sur le trône, il tenta une entreprise pkis
difficile que des conquêtes. Les véritables tyrans de Ttot
étoient les évêques, qui, ayant presque toutes les richesses
de la Suéde, s'en servoient pour opprimer les sujets et pour
faire la guerre aux rois. Cette puissance étoit d'autant plui
terrible, que Fignorance des peuples Ta voit rendue sacrée.
Il punit la religion catholique des attentab de ^es minislies.
En moins de deux ans il rendit la Suéde luthérienne par h
tupéiiorité de sa politique, plus encore que par autorité.
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uv. I. ROi DE SUEDE. 5
AytHit ainsi coacpib ce rojfautue^ comme H le dîsoit, sur les
Danois et sur le clergé» U régna faeureuji el absolu jusqu'à
r%e de soixs&te et dîm ans, et moural pleîii de gloire, laissant
HT le tràne sa famille et sa religion .
L'un de ses descendans fut ce Gustave Adolphe» qu'on
oemiBe le grand Gostaire. €e roi conquit l'Ingriey la LÎYonie»
Brème» Verden, Y ismar, la Poméraiiie, sans compter plus de
cent places en Allema^iey rendues par la Suéde après sa
msrt. Il ébranla le trône de Ferdinaad II. Il protégea
les luthériens en AUeinag^, secondé ea cela par les
intrigues de Rome même, qui craignoit encore plus la
puissance de l'empereur que celle de l'hérésie. Ce fut lui
911 par ses victoires contribua alors en eUet à rabaissement
4e la maîsoB d'Autriche; entreprise dont on attribue touta
It gloire au cardinal de Richelieu, qui savoit Tart de se fair«
we réputation, tandis que Gustave se bornoit à faire et
gnuides choses. Il alkût porter la guerre aurd^là du Danube;
et peutrètre détrôner Fempei^ur, lorsqu'il fut lue, à l'âge de
Iftnte^sept ans, dans la bataillé de Lutzen, qu'il gagna contre
Viktein, emportant dans le tombeau le nom de grànét ^
>^|Rli du nord et l'e^ime de ses ennemis.
Sa fiBe Chrbtine, née avec un génie rare, aima mieux
(•mener s^ec des savant, que de régner sur un peuple qui
aeeonaoissoit que les armes. Elle se rendit aussi iUustare
ca quittant le Xxhw^t qae se» ancêtres l'étôieut poun l'avoir
GsiqiH» ou affermi. Les protestans l'ont déchirée, eomme
â#D ne pouvoit pas avoir de grandes vertus sana croire è
Lrihar, et ks papes triompèevent trop de la conversion d'une
fa^M qui n'étoit «yne philosophe. Elle se retira à Romd^
il aile passa le teste de ses ,iours dans le centre des arts
fMk atmoit, et; pouii lesquels elle avoit renoncé km^em*
piiV^e de vtfigt*wpt aii9.
Junak 4'abdiqucr, elb eMgageii les états de kk Suéde à
j^im 9A place son coori» Charles Gu^ave, dimeme de ce
B4Bb ib du conte palÉtài^ dut de Deux^Pmts. Ce roi
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6 HISTOIRE t)E CHARLES XII. uv. i.
ajouta de nouvelles conquêtes à celles de Gustave Addphe:
il porta d'abord ses armes en Pologne, où il gagna la célèbre
bataille de Varsovie, qui dura trois jours : il fit long-temps
la guerre heureusement contre les Danois, assi^ea leur
capitale, réunit la Scanie à. te Suéde, et fit assurer, du moins
pour un temps, la possession de Sleswick au.duc de Holstein. ,
Ensuite ayant éprouvé des revers et lait la paix avec ?ci
ennemis, il tourna son ambition contre ses sujets. H conçut
le dessein d'établir en Suéde la puissance arbitraire; mais il
mourut à Tâge de trente-sept ans, comme le grand Gustave,
avant d'avoir pu achever cet ouvrage du despotisme, que son
fils Charles XI éleva jusqu'au comble.
Charles. XI, guerrier comme tous ses ancêtres, fut plus
absolu qu'eux. Il abolit l'autorité du sénat, qui fut déclaré
le sénat du roi, et non du royaume. Il étoit frugal, vigilant,
laborieux, tel qu'on l'eût aimé, si son despotisme n'eût réduit
les sentimens de ses sujets pour lui à celui de la crainte.
Il épousa en 168O Uhique Eléonore^ fille de Frédéric IH,
roi de Danemarck, princesse vertueuse et digne de plus de
confiance que son époux ne lui en témoigna. De ce mari-
age naquit le 27 Juin l682 le roi Charles XIÏ, l'iiommc
le plus extraordinaire, peut-être, qui ait jan^is été sur la
terre, qui a réuni en lui toutes les grandes qualités de ses
aïeux, et qui n'a eu d'autre défaut, ni d'autre malheur, qu^
de les avoir toutes outrées C'est lui dont 00 se propose ici
d'écrire ce qu'on a appris de certain touchant sa personne et
ses actions.
Le premier livre qu'on lui fit lire, fut l'ouvrage de Samuel
Puffendorf, afin qu'il pût connoitre de bonne heure ses états et
ceux de ces voisins. 11 apprît d'abord l'allemand, qu'il p^
toujours depuis aussi bien, que sa langue naturelle. A l'âge d^
sept ans il savoit manier un cheval. Les exercices violens ou
il se plaisoit, et qui découvroient ses inclinations martiales, lui
formèrent de bonne heure une constitution vigoureuse, capwH*
de soutenir les fatigues où le portoil sqd tempérament*
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Liv. I. ROI DE SUEDE. 7
Quoique cbux daus son enfance, il avoit une opiniâtreté
insurmontable ; le seul moyen de le plier étoit de le piquer
d'booneur : avec le mot de gloire on ohtenoit tout de lui.
Il a?oit de l'aversion pour le latin ; mais dès qu on lui eut
dit que le roi de Pologne et le roi de Danemarck lentendoient,
H rapprit bien vite, et en retint assez pour le parler le reste
de sa ne. On s'y prit de la même manière pour l'engager
à entendre le Irançois ; mais il s'obstina, tant qu'il vécut, à
nejamab s'en servir, même avec des ambassadeurs françois,
qni nef savoient point d'autre langue.
Dès qu'il eut quelque connoissance de la langue latine,
on lui fit traduire Quinte-Curce; il prit pour ce livre un
go6t que le sujet lui inspiroit beaucoup plus encore que le
style. Celui qui lui expliquoit cet auteur, lui ayant deniandé
ce qu'il pensoit d'Alexandre: Je. pense, dit le prince, que je
^mirm lui ressembler. Mais, lui dit-on, il n'a vécu que
trente-deux ans. Ah! reprit-il, n'est-ce pas assez quand on
« tonquis des royaumes? On ne manqua pas de^ rapporter
<^ réponses au roi son père, qui s'écria : Voilà un enfant qui
voudra mieujc que moi, et qui ira pbis loin, que le grand
Gustuve, Un jour il s'amusoit dans l'appartement du roi à
regarder deux cartes géographiques; l'une d'une ville de
Hongrie prise par les Turcs sur l'empereur, et l'autre de
^ig>> capitale de la Livonie, province conquise par les
Suédois depuis un siècle. Au bas de la c^rte de la ville
'w>ngroise, il y avoit ces mots tirés du livre de Job ; Dieu
^ l*a donnée f Dieu me Va ôtée; le nom du Seignmr soit
w. Le jeune prince ayant lu ces paroles, prit sUr le
^hainp un crayon, et écrivit au bas de la carte de Riga ;
ft«¥ me Va donnée, le diable ne me Votera pas*. Ainsi
^^ les actions les plus indiUérenles de son enfance, ce
Odlurel indomptable laissoit souvent échapper des traits qui
* IHqx ambaisadenrt de France en Suéde m'ont conté ce fait.
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s . HISTOIRE DE CHARLES XO. liv. i.
earactérisetit hs âmes «B^terw, «t qui marquoîent ce qa'O
deroit être ua jour.
Il avoit oBse bbs loiisqi/n perdît sa mère. Cette prinoease
mouriit eu l69Sf h S août> d'une maladie causée par les
eliagrius que lui éMWoit son mari, et par les efforts qu'elle
feisoit pour les dissfaiittler. ; Cheurles XI avoit «ypouillé de
leurs biens ub grand ooknbre de ses sujets, par le nioyen
d'une espèce de cour de justice, nommée la chambre dei
liquidations, établie de son autotité s^le. Use ^oule de
citoyens ruinés par cette chMnhre, nobles, > marchands, fer
miers, veuves, orphelios» i^empÙssoient les rues de Stodkbolo),
et venaient tous les jours à Ja perte du palais |iousser des
cris inutiles. La reine saooutut ces BKilbeiireux de tout ce
qu'elle aviût. EHe leur domia son argent, ses pierreries, ses
meubles, ses hàbîts même. Quand eUe h'eut plus rien à
letfl* donner, ^e se .jeta en larmes aux pieds de so9i mari}
pour le plier d'a^r-eonnpassion denses sujets^ Le roi liU
répondit gravement: MadoÊM, nous voms avons prise fsm
nous dosifur des enfoÊsa, et nonpomr nsus damner des aws>
D^uis ce temps il k traita, dit-on, avec une dureté ^
avança ses jours.
Il mourut quatre ans après elle, le quinze d'avril X697i
dans la quarante-deuxième année de son âge, et dans b
trentè-s^ptteme de son règne, lorsque TEmpire, l'EspagnC)
la Hollande d'une c6té, et la France de l'autre, venoient de
remettre la décision de leurs querelles à sa médiatioa; ^
qu'il avoit déjà éntansé l'ouvrage de la paix eatfe cei
puissances.
Il laissa à son fils, âgé de quinze ans, un trÀne afiernu
et respeelé a» dehors, des sujets pauvres,' mais belliquftt* et
soumis, avec des finaccear en bon ordr^ mésagées par dtf
minisires habiles.
Charles XII, è soq avènement, non-seulement se trouva
maitre absolu et paisible de la Suéde et de la Finlande, mais
il régnoit encore sur la Livoniey la Çarélie, l'Ingrie; il p^»^
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HT. I. ROI DE SUEDE. 9
doit VkBHur 9 Vibourg> les îslcs de Rugen, tf Oetri» et ki ptei
belle partie de kk Pôsiéranie,. le dinèé de Brème et é* Vti^
dea; tentes coM}ttètcs de 8e& aaoètres^ isHirèt» èi sa eos-
romie par «ae loBgoe possession, et par ki k» des trailés
9olesBels de Munster et d'Oliva, aaottiMis de )« teneur des
ttmes suédoises. La pain de R^iswicli, cearaieBcée sous les
8us|»ces du père» fut coachie som ceux du fils: il fkl le
médiateur de l'Europe dès qofil conmetiça'à régner.
Les lois suédoises fnent la majorité des rois à quîue
ans. Mais Charies XI, absolu en tout, retarda par son tw-
tameut c«!le de son fils,insr|uf à dix-buit. Il favorisoit par
cette di$posithi>a les vuett ambitieuses de sa mère Edwige
Oéenore de Hobtein, iieuve de Charles X. Cette princesse
fut déclarée, par le rot son fils, tutrice du jeune roi son petil-
fils, et régente du royaume, conjoinftetteHt avec un conseil
de cinq personnes.
La régente avoiteapart^ aux affaires sous le règne du roi
ion fils. Elle étok. avancée en âge; mais, son ambittoa,
^us grande que ,ses forces et que son géirie, lui ^disoit
espérer de jouir long-temps des douceurs deTautorilé sous
h m son petit-fils. Elle l^éloignoit autant qti'elle pouvoit
des affaires. Le jeune prince passoit son temps à la chasse,
ou s'occupôit à faire la revue des loupes: il laisoit même
quriquefeis 4'exercice avec elles ; ces anmseniens ne sem-
biêieat que- Teflst naturel de la vivacité de son âge. Il ne
psroissoit dans sa conduite aucun dégoût qui pût alarmer la
t^nte ; et cette princesse se flattoit que les dissipations de
ces exercices le rendroient incapable d'application, et qu'elle
en gottvemeroit plus long-temps.
Un ,)our, au mob de novembre, ki même année de la
iBortson père, il venoitde faire la revue de plusieurs régireens ;
le conseiller d'élal Piper étoit auprès de lui : le roi paroissoit
abimé dans une rêverie profonde. Puis-je prendre la liberté,
lui dit Piper, de demander à votre nij^csté à quoi elle songe
fà sérieusement ? Je songe, répondit le prince, queje^me sens
B 3
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10 HISTOIRE DE CHARLES XIÏ. Liv.r.
agne de eammahder à ces braves geru ; et je voudrois^qUe
ni eux ni mai ne recussionê Vùrdre d'une femme. Pipter
faisH dans le moment roccasîon de faire une grande fortune.
11 n'avoit pas assez de crédit pour oser se charger lui-même
de Fenterprise dangereuse d^ter la régence à la reine, et
d'avancer la majorité du roi : il proposa cette négociation
au comte Axel Sf»arre, homme ardent, et qui cherchoit à se
donner de 4a considération : il le flatta de la confiance du
roi; Sparre le crut, se chargea de tout, et ne travailla que
pour Piper. Les conseillers de la régence furent hien-t6t
persuadés. C'étoit* à qui précipiteroit Texécution de ce
dessein, pour s'en faire un mérite auprès du roi.
Ils allèrent en corps en faire la proposition à la reine,
qui ne s'attendoit pas à une pareille déclaration. Les états-
généraux étoicnt assemblés alors. Les conseillers de la
régence y proposèrent l'affaire; il n'y eut pas- une voix
contre : la chose fut emportée d'une rapidité que rien ne
pouvoit arrêter. De sorte que Charles XII souhaita rég-
ner, et en trois jours les états lui déférèrent le gouvernement.
Le pouvoir de la reine et son crédit tombèrent en un instant.
Elle mena depuis une vie privée, plus sortable à son âge,
quoique moins à son humeur. Le roi fut couronné le 24
décembre suivant. Il fit son entrée dans Stockholm sur un
cheval alezan, ferré d'argent, ^ant le sceptre en mam et U
couronne en tète, aux acclamations de tout un peu|)le idôl'
âtre de ce qui est nouveau, et concevant toujours de grandes
espérances d'un jeune prince.
L'archevêque d'Upsal est en possession dé kire la céré*
monie du sacre et du couronnement : c'est, de tmit de droits
que ses prédécesseurs s'étoient arrogés, presque le seul qui
lui reste. Après avoir, selon Tusage, donné l'onction aa
pnnce, il tenoit entre ses mains la couronne ppur la lui mettre
sur la tète ; Charles l'arracha des mains de Farchevèque, se
couronna lui-même, en regardant fièrement le prélat. La
multitude, à qui tout air de grandeur en impose toujoun,
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iiv. I. ROI DE SUEDE. . . U
applaudit à l'actlpn du roL Ceux même qui avoîent le ptos
gémi sous le despotisme du père, ee iaêsereut entraîner à
louer dans le fils c^te fierté qui étoii Faugure de leur ser-
vitude. .
Dès que Charles fut maître, il donna sa confiance et le
maniement des affaires au conseiller Piper, qui fut Inentôt
«on premier ministre, sans en avoir le n«m. Peu de joui;^
après il le fit comte, ce qui est une qualité éminente en Suéde,
et non un vain titre qu'on puisse prendre sans conséquence,
comme en France. . . *
Les premiers tempsde Tadministration du roi ne donnèrent
point de lui<U*s idées favorables : il parut qu'il avoit été plus
impatient que digne de régner. Il n'avoit à la vérité aucune
passioa dangereuse ; mais on ne voyoit dans sa conduite
^ des'emportemens de jeunesse et de Topiniâtreté. 11
paroissoit inappliqué et hautain. Les ambassadeurs qui
étoient à sa cour le prirent même pour un génie médiocre,
et le peignirent tel à leurs maîtres*. La Suéde avoit de lui
la même opinion : personne ne connoissott son caractère :
ill'ignoroit lui-même, lorsque des orages, formés touK-^-coup
dans le nord, donnèrent à ses talens cachés occasion de se
^ployer. -
Trois puissans princes voulant se prévaloir de son ex-
trême jeunesse, conspirèrent sa ruine presque en même tenais.
I-e premier lut Frédéric IV, roi de Danemarck, son cousin:
fe second Auguste, électeur de Saxe, roi de Pologne : Pierre
J« Grand, czar de Moscovie, étoit le troisième, et le plus
dangereux. Il faut développer Forigine de ces guerres, qui
^t produit de si grands évéïiemens, et commencer par \^
' Danemarck.
De deux sœurs qu'avoit Charles XII, Taînée avoit épousé
le duc de Holstein, jeune prince plein de bravoure et de
* Les lettres originales en font foi.
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IS HISTOIRE DE CHAULES XII. Liv. i.
«feucenr. Le dac (^ipiiné par k roi de Dafiemarck, TÎHlà
Stockholm avee soa épowe,. se jeter eiit9« le» bras du roi,
ol lui d<»Baiider du socours, iio»*se«leaieBt coinme à son
beau-frere, mais, comme au roi d'une nation qui a pour ks
Danois une haine irréconciliable.
L'ancienne maison de Hokt^ fondue dans celle d'Ol-
denbourg, étoit «uantée sut le trône de Danemarck par
éleetion en 144^ Tous les royaumes du nord étoîënt alon
électifs. Celui dè'Danemarck devint bientèit hérédJAaire.
Un de ses rois, nommé Christiern III, eut pour aoa fsen
Adolphe une tendresse ou des ménag^en» dont on ne trouve
guère» d'exemples chez les princes. 11 ne vouloit point le
kôsser sans souveraineté ; mais il ne pouvoit démembrer ^es
propres étals. Il partagea avec lui, par un accord bigarre,
les duchés de Holstein-Gcottorp ^t de Sleswick, étaUiaaant que
.les deseéndaos d'Adolphe gouverneroientdésonnaia le Hoir
•toÎB, conjoÎDleBwnt: avec les^ rois de. Danemarck; que les-
deux duchés leur appartWdroient en commun, et que le
roi de Danemarck ne pourroît rien Innover dans le Holstein
sans le due, ni k duc sans le roL Une union si étrange,
4oat pourtant il y avoîk déjà eu un exemple dans la même
Boaison, pendant quelques années, étoit depuis prèa de
quatre-vingts sins une source de querelle& entre la branche
de Danemarck et celle de Holalein Gottorp.;^ les rois cher-
chant toujoi^rs à opprimer les ducs, et les ducs à être iode-
pendans. Il ai avoit coût^ la liberté et la souveraines^ au
deifnier duo» Il ayoit recouvré Tune et l'autre aux confé-
Bfnc^ d'Altena en \6S9r P^^ Fentreraise de la Suéde,
de l'Ai^leterre et de la Hollaude, garans de l'exécution du
traité. Mais comme un traité entre les souverains n'est
souvent qu'âne soura}$sion à la nécessité, jusqu'à ce que le
plus lortfpuisfie accabkr le plMs foible, la querelle renaisfioit
plus envenimée que jamais entre le nouveau roi de Dane-
marck et le jeune duc. Tandis que le duc étoit à Stock-
holm, les Danois ^isoieut déjà des actes d'hostilité dans le
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Liv. I. ROI DE SUEDE. 13
pays de H<^lsteio, et se liguoietit secrètement arec le rot de
Pologne pour accabkr le ro} tfe Suéde KH-mème.
Frédéric Auguste, lecteur de Saxe, que ni l'^oquence
et les négociations de Fabbé de RoHgnac, ni les grandes
qualités du prince de Conti, son concurrent au trène^
B*avoieut pu empêcher d*ètre élu depuis deux ans roi de
Pologne, étoit un prince moins connu encore par sa force
de corps incroyable,, que par sa bravoure et la galanterie de
ton esprits Sa cour étoit la plus brillante de l'Europe, après
celle de Louis XIV. Jamais pritice ne fut plus généreu?t,
ne donna plus, et n'accompagna ses dons dt tant de grâce.
Il avoit acheté la moitié des suffrages de la noblesse polonoise,
et forcé l'autre par rapproche d'une armée ^xonne. Il
crut avoir besoin de ces trou|>es pour se mieux affernnr sur
le trône; mais il falloit un prétexte pourries retenir en
Pologne. 11 les destina à attaquer le roi de Suéde- en Li<^
vonie, à l'occasion que Ton va tapporter.
La Livonie, ja plus belle et la plus fertile prevîace du nord,
avoit appartenu autrefois aux^bevaliers de l'ordre teuto nique.
Les Moscovites, les Polonois et les Suédois. s'en étoient dis-
puté la possession. La Suéde l'a voit enlevée depuis près de
cent années; et elle lui avoit été enfin cédée soleunellenïent
par la paix d'Oliva.
Le feu roi Ctiarles XI, da^f^ ses sévérités pour ses' sujets,
ft'avoit pas épargné les Livoniens : il les avait dépouillés de
leurs privilèges^ et d'une partie d^ leurs^ patrimoines. Patkul, .
nigdbeureusement célèbre depuis par sa mort tragique, fui
dé{mté de la noblesse livonieune pour porter au trône les
plaintes de la province. Il fit à son maître une harangue
Mspectueuse,. mais forte et pleine de cette éloquence mâk
qae doiuie la calamité, quand elle est jointe à la hardiesse*
Jliais les rois ne regardent trop souvent ces harangues pub*
lûfats que conune des-cérècuonies vaines, qu'il est djissige
.de «Miffrir, sans y. faire attention. ToutefcMs Charles XI
iléy quand il ne se livroit pas aux emporteœens de sa
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Ut "HISTOIRE DE CHARLES XÎI. liv. i.
colère, frappa doucement sur l'épaule de Patkul : Vousawz
parlé pour votre patrie en brave homme, lui dil-il :je vous en
estime^ continuez. Mais peu de jours après il le fit dé-
clarer coupable de lese-uiajesté, et coiiime tel, condamner
à la mort. Patkul, qui s'étoil caché, prit la fuite. 11 porta
dans la Pologne -ses ressentiniens. 11 fut admis depuis de-
vant le roi Augviste. Charles XI étott mort; mais la sen-
tence de Patkul et son hidignation subsistoieut.^ Il repré-
senta au monarque polonois la facilité de la conquête delà
Livonie ; des peuples désespérés, prêts à secouer le joug de
la Suéde ; un roi enfant, incapable de se défendre. Ces
sollicitations furent bien reçues d'un prince déjà tenté de
cette conquête. Auguste, à son couronnement, avoit promis
de faire ses efforts pour recouvrer les provinces que la
Pologne avoit perdues. 11 crut par son irruption en Livoni«
plaire à la république, et affermir son pouvoir ; mais il se
trompa dans ces deux idées quiparoissoient si vraisemblable».
Tout fut prêt bientôt pour une invasion soudaine, sans
même daigner recourir d'abord à la vaine formalité des
déclarations de guerre et des manifestes. Le nuage grossis-
soit en même-temps du côté de la Moscovie. Le monarque
qui la gouvernoit niérile l'attention de la postérité.
Pierre Alexiowits, czar de Russie, s'étoit déjà, rendu re-
doutable par la bataille qu'i^ avoit gagnée sur les Turcs en
l697> ^t par la prise d'Azoph, qui lui ouvroit l'empire de la
mer noire. Mais c'étoit par des actions plus étonnantes
que des victoires, qu'il cherchoit le nom de Grandi ^
Moscovie ou Russie embrasse le nord de l'Asie et celui àt
l'Europe, et depuis les frontières dé la Chine s'étend Icspace
dé quinze cents lieues jusqu'aux confins de la Pologne et de
la Suéde. Mais ce pays immense étbit à peine coimu de
l'Europe avant le czar Pierre. Les Moscovites étoient moins
civilisés que les Mexicains, quand îk furent découverts paf
Cortez : nés tous esclaves de maîtres aussi barbares qu'eox,
ils croupissoient dans Tignorauce, dans le besoin de tous 1^
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Liv. 1. ROI DE SUEDE. P5
arts, et dans rinseDsibiUté de ces besoins, qui étouffait toute
mdustrie. Une ancienne loi sacrée parmi eun leur défendoit,
sous peine de mort, de sortir de leur pays sans la permission
de leur patriarche. Cette loi faite pour leur 6ter les occa-
sions de connoître leur joug, plaisoit à une nation qui, dans
l'abyme de son ignorance et de sa misère, dédaignoit tout
commerce avec les nations étrangères.
L'ère des Moscovites commençoit à la création du mondes
ils comptoient 7207 ans au commencement du siècle pas^,
sans pouvoir rendre raison de cette date. Le premier jour
dp Icuf année revenoit au treize de notre mois de septembre,
lis alléguoient pour raison de cet établissement qu'il étoit
vraisemblable que Dieu avoit crée le monde en automne,
dans la saison où les fruits de ia terre sont dans leur ma^
twité. , Ainsi les seules apparences de connoissances qu'ils
eussent étoient des erreurs grossières ; personne ne se dou^
toit parmi eux que 1 automne de Moscovie pût être le
priotems d'un autre pays, dans les climats opposés.. II n^y
avoit pas long-temps que le peuple avoit voulu brûler à
Moscou le secrétaire d'un ambassadeur de Perse qui avoit
pr^it une éclipse de soleil, lis ignoroicnt jusqu'à Tusage
. dtô chiffres ', ils se servoient pour leurs caculs de petites
boules enfilées dans des fils d'archal. II n'y avoit pas d'autre
manière de compter dans tous les bureaux de recettes, et
dans le trésor du czar.
Leur religion étoit et est encore celle des chrétiens Grecs ;
mais mêlée de superstitions, auxquelles ils étoient d'autant .
plus fortement attachés, qu'elles étoient plus extravagantes
^ que le joug en étoit plus gênant. Peu de Moscovites
OBoient manger du pigeon, parce que le Saint-Esprit est
peint en forme de colombe. Ib observoicnt régulièrement
(piati^ carêmes par an ; et dans ces temps d ab^inençe ils
nWient se nourrir ni d'oeufs ni de lait. Dieu et saint Nicolas
Soient les objets dé leur culte, et immédiatement après eux
le czar et le patriarclie^ L'autorité de ce dernier étoit sans
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^6 HISTOIRE DE CHARLES XII. Liv. i.
bôrnet^ comme leur ignorance. U rendoit des arrêts de
mort, et Infttgeoit les supplices les plus cruels, sans qu'on pût
appeler cfe son tribunal. If se promenôit à cheval deux 11
fois Tan, suivi de tout son clergé en cérémonie. Le czar à ]
pied tenoil la bride du cbeval, et le peuple se prostemoît
dans lefr rues, comme les Tartares devant leur G rand^Lama.
La confession étoit pratiquée, mais ce n'étoit que dans le cas
d«s plus grands criknes. Alors Tabsolution leur paroissoit
nécessaire, mais non le repentir. Ib se croy oient purs de-
vant Dieu, avec la bénédiction de leurs papas. Ainsi ils
passoient sans, remords, de la confession au vol et à Thoroi-
dde ; et ce qui est un frdn pour d autres chrétiens, étoit
ehez eux un encouragement à Tiniquité. Ils^ faisoient scru-
pule de boire du lait un jour de jeûne ; mais les pères de
famille, les Prêtres, les femmes, leâ filles s'enivroient d*eau-
dc-vie les jours de fêtes. On disputoit cependant sur la
religion en ce pays, comme ailleurs ; la plus grande quereHc
étoit pour savoir si les laïques dévoient faire le signe de la
croix avec deux doigts ou avec trois. Un certain Jacob Nur-
suff, sous le précédent règne, a voit excité une sédition dans
Astracan au sujet de celte dispute. Il y ^ avoit même des
fanatiques, comme parmi ces nations policées, chez qui tout
le monde est théologien: et Pierre, qm poussa toujours
la justice jusqu'à la cruauté, fit périr par* le feu quelques*
uns de ces misérables qu'on nommoit Vosko-JêsuUeê^,
Le czar, dans son vaste empire,javoit beaucoup d'autres
sujets qui n'etoieut pas chrétiens. Les Tartares qui habilent
le bord occidental de la mer Caspienne et des Palus Méolides,
sont mabométans. Les Sibériens, les Ostiaques, les Sanioïedes
qui sont vers la mer Glaciale, étoient des sauvages, dont
les uns étoient idolâtres, les autres n'avoient pas même la
connoissance d'un Dieu ; et cependant les Suédois envoyés
prisonniers parmi eux ont été plus contens de lettre mœurs
que de cclhîs des anciens Moscovites.
Pierre Alcxiowils avoit reçu une éducation qui tendoit à
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hvr. 1. ROI TXé SÛËDE. 17
augmenter encore fat barbarie de cette p»ftie du monde.
Son naturel hii lit d'abord aimer ks étrange», arant qu'il
sàt à quel point ils peuvoient loi être utiles. UajeooeGéne-
fois nommé Le Fort ^ d'une anciemie iamîlie de Genève, fils
(fun mardiand droguiste, fut le premier insbtiment dont il
se senrit pour changer d^^ui&la facede la Moscovîe. Ce jeune
iiomme, envoyé par son père pour être facteur à Copenliagiie,
quitta son commerce, et suivit un ambassadeur dhuiok à
Moscou, par cette inquiétude d'esprit qu'éprouvent tot^ouit
mai qui se sentent au-dessus de leur état. Il lui prit envie
d'apprendre la langue russiéime. Les pvogrès nqNdef
qu'il y fit excitèrent la curiosité du czar, encore jeune.
Il en lut contiu : il s'indnua dans sa fafuiliarité, et passa
iHenkèt à son service. Il lui parloît souvent des avantages
dtt commerce et de la navigation ; il lui disoit commciU k
Hollande^ qui n'eût pas été la centième partie des états de la
Moscovie, faisoit, par le moyen du commerce seul, une aussi
grande figure dans l'Europe que les Ëspagnes, dont elle
avoît été autrefois une petite province inutile et méprisée,
il f entretenoit de la politique raffinée des princes de VËurope,
de la disdpHne de leurs troupes, de la police de leurs viltes,
da nombre infini des manufactures, des arts et des sciences
qui rendent les Européens puissans et heureux. Ces discours
éveillèrent le jeune empereur, comme d'une profonde lé-
thargie ; son puissant génie, qu'une éducation barbare avwt
retenu et n'avoit pu dé|niire, se développa presque tout à
eoiip. Il résolut d'être homme, de commander à des hom-
mes, et de créer une nation nouvelle, ^usîeurs princes
avoient avant lui renoncé à des couronnes, par dégoût pour
le poids des affaires ; mais aucun n'avott cessé d'èlre roi pour
apprendre mieux à régner: e'est-ce que fit PiOTre-le-Grand.
, n quitta la Moscovie en 1^, n^ayatit encore ré|»né que
deox années, et alla en Hollande, déguisé sous un nom vul-
gaire, comme s'il avoit été un domestique de ce.mème M.
le ForU quii- envoyoit ambassadeur extraoréiwûre auprèi.
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IS HISTOIRE DE CHARLES XII. liv. i
des états-généraux. Arrivé à Amsterdam, ii se fit iiiscrire
dans le rôle des charpentiers de Taniirauté des Indes, sous
le nom de Pierre Miehatlqf ; mms communément on Tapi-
peloit Peter^Bas, ou maître Pierre, Il travailloit dans le
jchantier comme les autres charpentiers. Dans les intervalles
de son travaR ii apprenoit les parties des msdliématiques qui
peuvent être utiles à un prince, les fortifications, la naviga-
tion. Fart de lever des plans* Il entroit dans ks boutiques
des ouvriers, exanûnoitHoutes les mamifactures ; rien u'échap-
poit à ses observations. Delà il passa en Angleterre, où il se
perfectionna dans lajacience de la construction des vaisseaux;
ii repassa en Hollande, vit tout ce qui pouvoit tourner à
l'avantage de son pays. Enfhi, aprè& deux ans de voyages
et de travaux, auxquels nul autre, homme que lui n*eût voulu
se soumettre, il reparut en Moscovie, amei^ant avec lui les
arts de l'Europe. Des artisans de toute espèce Ty suivirent
en fottk. On vit pour la première fois de grands vaisseaux
moscovites sur la mer Noire, dMns-laBaitiqife, eidans-FOcéan.
Pes lïâtimens d une architecture régulière et noble furent
élevés au milieu dés huttes russiennes. 11 établit des collèges,
des académies, des imprimeries, des bibliothèques ; les villes
furent policées, les habiilemens, les coutumes, changèrent
peu-àrpeu, quoiqu*avec difficulté. ' Les Moscorvites connu-
rent par degrés ce que c*est que la société. Le superstitions
mêmes furent abolies ; la dignité de patriarche fut éteinte;
te czar se déclara le chef de fa religion : et cette dernière
entreprise, qui auroit coûté le trône et la yie à \m prince
moins absolu, réussit presque sans contradiction, et lui as-
sura le succès de toutes les aulres nouveautés.
Après avoir abaissé un clergé ignorant et barbare, ii osa
essayer de l'instruire, et par là même il risqua de le rendre
redoutable ; mais il se croyoit assez puissant pour ne le
pas craindre. Il a fait enseigner dans le peu de cloîtres qui
restent la philosophie et la théologie. Il est vrai, que cette
théologie tient encore de ce temps wjvage dont Pierre
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Liv* I. ROI DE SUEDE. 19^
Ale^iowits a retiré Hiumanité. Un bomme digne de foi m'a
assuré qu'il avoit assisté à une thèse publique, où il s'agissoi t de
savoir si l'usage du tabac à fumer étoit un péché. Le répoii^
4ânt prétendoit qu'il étoit permis de s'enivrer d'eau*de-vie>
niais non de fumer, parceque la très sainte écriture dit que
ce qui sort de la boudiè de Fhonmie le souille, et que ce qui
y entre ne le souille point.
Les moines ne furent pas conteus de la réforme : à peine
le czar eut-il établi des imprimeries, qu'ils s'en servirent pour
le décrier; ils impÉmerent qu'il étoit TAntectarist; leurs
preuves étoient qu'il 6toit la barbe aux vivans, et qu'on fai-
soit dans son académie des dissections de quelques morts.
Mab lîn. autre moine, qut^ouloit faire fortune, réfuta ce
fî?re et démontra que Pierre n'étoit point l'Antéchrist,*
parceque le nombre 666 n'étoit pas dans son nom. L'auteur
du libelle fut roué, et celui de la réfutation fut fait évêque
de Rezan.
Le réformateur de la Moscovie a sur-tout porté une loi
sage, qui faîj bonté à beaucoup d'étals policés ; c'est qu'il
n^est permis à aucun homme au service de l'état, ni à un
bourgeois établi, ni sur tout à un mineur, de passer dans un
cloitre.
Ce prince comprit combien il importe de ne point con-
sacrer à l'oisiveté des siyets qui peuvent être utijes, et de ne
point permettre qu'on dispose à jamais de sa liberté dans un
âge où Ton ne peut disposer de la moindre partie de sa for-^
tune. Cependant l'industrie des moines élude tous les jours
cette loi faite pour le bien de l'humanité, comn>e si les
tooines gagnoient en effet à peupler les cloîtres aux dépens
de la patrie.
Le czar n'a pas assujetti seulement l'église à l'état, à
rexemple des sultans turcs ; mais plus grand politique, il^a
détrait une milice semblable à celle des janissaires ; et ce
que les Ottomans ont vainement tenté, il Ta exécuté en peu
de temps : il a dissipé les janissaires n>oscovites, nommé*
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to HISTOIRE DE CHARLES XII. lty. r.
gtrêUig, qai tenéient tes csars en Meftle. Cette milice, pfua
formidabte à ses malMs ^'à ses rfâmn», étoit comfXMéc
(feniiron trente imite hommes de pied, dont la mmtîé te*
«toit à Moscou, et l^tre étok téfmnûnt sm les frontierea.
Un strélîtz n'avoil que quatre r^iiriles par an de paye^ maia
des pritilegesy ou des nhm^ le déédHUiHigeoient amplement^
Pierre forma d'abord une compagnie d'étrangers, dans la
quelle il ^'enrôla lui-même, et ne déda^a pas de commen-
cer par être tambour, et d'en fasre les kinctions, tant la
nation avoit besoin d'exemple. , 1! fit petit-à^etit de nou-
veaux régi mens ; et enfin se sentant maître de troupes dis-
cipHnées, il cassa les strêlitz, qui n'osèrent désobéir.-
La caTalerie ètoît à peu près ce qu'est la cavalerie polo-
noise, et ce qu'étoit autrefois la françoise, quand le royaume
déFifancen'étoitqw^inassentblagedftfiefs. Les gentâsbommes
russes montoîent à cheval à kiirs dépens, et conibaitoient
sans discipline, quelquefois sans autres armes qu'un sabre
ou un carquois ; incapables d'être commandés, et par con-
séquent de vaincre.
Pierre- le-Grand leur apprit à obéir par son exemple «t
par les supplices. Car il servoit en qualité de soklat et
d'officier subalterne et punissoit rigoureusement en czar ks
boyards, c'est-à-dtne, les gentilshommes qui prétendoient que
le privilqge de la noblesse étoit de ne. servir l'état qu'à leur
volonté. Il établit un corps régulier pour servir rartîHerie,
et prit cinq cents cloches aux églises pour fondre des canons.
Il a eu treize mille canons de fonte en l'année 1714. lit
formé aussi des corps de dragons, milice très convenable
au génie des Moscovites, et à la forme de leurs chevaux qui
sont petits. La Moscovié avoit en 1738 trente régimens
de dragons, de mille hommes chacun, bien entretenus.
C'est lui qui a établi les houssards en Russie ; enfin il i
eu jusqu'à une école d'ingénieurs dans un pays oà personne
ne sa voit avant lui les élémens de la géométrie.
Il étoit bon Ingénieur hti-mème ; mais sur-tout il e^'
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T.1V. I. ROI DE SUEDE. . 21
celloit dans tous les arts de la marine : ho;i capitaine de
Tai«seau, habile pilote» bon matelot, aèroit charpentier, et
d'autant plus estimable dans ces arts,, qu'il étoit pé avec une
crainte extrême de Teau. Il ne ppuvoit dans sa jeunesse pas-
ser sur un pont sans frémir ; il faisoit fermer alors les volets .
de boi? de son carrosse ; le courage, et le génie doippterent
eo lui cette foibjksse machinale.
Il f^ coxistruire un beau port auprès d'Azophi à Terabou-
cbure d^i Tanv^s : il yoviloit y entretenir des galères ; et
dans la suite, croyant que ces vaisseaux, longs, plats et légers,
devoieat réussir dans h mer Baltique, il en a fait construire
plus de trois cents daçs sa ville favorite de Pelersbourg : il
a malgré à ses sujets Tart de les bâtir avec du simple sapin^
et cdui de les conduire. 11 avoit appris jusqu'à la chirurgie:
00 l'a vu dans un besoin faire la ponction ^ un hydi'opique ; il .
réussisoit dans les mécaniques, et instruisoit les artisans.
lues financer du czar étoient à la vérité peu de chose,
par rapport à Timmcnsité de ses états : il n'a jamais eu
vîogt-quatre millions de revenu, à compter le marc à prj^9
de cinquante livres, comme nous faisons aiyourd'hui, et
c&tame nous tte ferons peut-être pas der\iain : mais c'est être
tiès riche chez soi que de pouvoir faire de grandes choses.
Ce n'est pas la rareté de l'argent, mais celle des hommes et
écft takns qui rend un empire foiLle.
La nation russe n'est pas nombreuse, quoique les femmes
y soient fécondes et les hommes robustes. Pierre lui-même,
es polissant ses états, a malheureusement contribué ù leur
dépopulation. De fréquentes recrues dans des guerres long-
temps malheureuses, des nations transplantées d(;s bords de
la ner Caspienne à ceux de la mer Baltique, consumées dans
les travaux, détruites par les maladies ; )es trois quarts des en-
lus mourants en Moscovie de l^ petite-vérole, plus dange-
reuse eu ces climats qu'ailleurs; enfin les tristes suites d'un
gouvernement long-temps sauvage, et barbare même dans sa
police, sont cause que cette grande partie du continent a
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2$ HISTOIRE DE CHARLES XII. liv. i
encore de vastes déserts. Qn compte à présent en Russie
cinq cent mille familfes de gentilshommes, deux cent nulle
de gens de loi, un peu plus de cinq raiUions de bourgeois et
de paysans payant une espèce de taille, six cent mille hom-
mes dans les provinces conquises sur la Suéde : les Cosaques
de rUk raine et les Tartares, vassaux de la Moscovie, ne se
montent pas à plus de deux millions ; enfin on a trouvé que
ces pays immenses ne contiennent pas plus de quatorze
millions dMiommes, c'est-à-dire^ un peu f^us des deux
-tiers des h'abitans de la France.
Le czar Pierre en changeant les mœurs, les lois, la milice,
la face de son pays, vouloit aussi être grand par le com-
merce, qui fait à la fois la richesse d'un état et les avantages
du monde entier. Il entreprit de rendre la Russie.le centre
- du négoce de l'Asie et de l'Europe. Il vouloit joindre, par
des canaux dont il dressa le plan, la* Duina, le Volga, le
Tanai», et s'ouvrir des chemins nduveaux de la mer Baltique
au Pont-Euxiu et ù la mer Caspienne, et de .ces deux mers
à Tocéan septentrional.
Le port d'Archangel, fermé par les glaces neuf mois de
l'année, et dont l'atbord exigeoit un circuit long et dange-
reux, ne lui paroissoit pas assez commode. Il avoit dès l'an
1700 le dessein de bâtir, siur la mer Baltique un port qui de-
viendroit le magasin du nord, et une ville qui seroit la capi-
tale de son empire. ,
Il cherchoit déjà un passage par les mers du nord-est à
ia Chine, "et les manufactures de Paris et de Pékin dévoient
embellir sa nouvelle ville. »
Un chemin par terre de 754 rersies*, pratiqué à tra-
vers des marais qu'il falloit combler, devoit conduire, de
Moscou à sa nouvelle ville. La plupart de ses projets ont
été exécutés par ses mains ; et deux impératrices, qui lui
♦ Un verste est de 750 pas,
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Liv. f. ROI DE SUEDE. 23
<Mit succédé Tune apr^'J'autre, oui encare été au-delà de
ses vues, quand elles étoient praticables, et n'out abandonné
que rimpossible.
11 a voyagé toujours dans ses états autant que ses guerres
f eut pu permettre ; mais il a voyagé en législateur, et en
physicien, examinant par-tout la nature, cherchant à la cor- -
rig^r ou à la perfectionner, sondant lui-inème les profondeurs
des fleuves et des nvers, ordonnant des. écluses, visitant des
chantiers, faisant fouiller des raines', éprouvant les métaux,
disant lever des cartes exactes, et y travaillant de sa main,
il a bâti dans un lieu sauvage la ville impériale de
Petersbourg, qui contient aujourd'hui soixante mille maisons^
où s'est formée de nos jours une cour brillante, et où enfin
on cotinoit les plaisirs délicats. Il a bâti le port dé Croustad
SOT la Neva ; Sainte Croix sur les frontières de la Perse, des
forts dans l'Ukraine, dans la Sibérie ; des Amirautés à Arch-
angel, à Petersbourg, à Astracan, à Asoph; des arsenaux,
des hôpitaux. Il faisoit toutes ses maisons petites et de
mauvais goût ; mais il prodiguoit pour les maisons publiques
la magnificence et la grandeur.
Les sciences, qui ont été ailleurs lé fruit tardif de tant
de siècles, sont venues par ses soins dans ses états toutes
perfectionnées. Il a créé une académie sur le modèle des
sociétés fameuses de Paris et de Londres. Les Delisle, let
BulHnger, les Hermand, les Bernouiili, le célèbre Wolf,
homme excellent en tout genre de philosophie, ont été ap-
pdés à grands frais à Petersbourg. Cette académie subsiste
encore) et il se forme enfin des philosophes moscovites.
- 11 a forcé la jeune noblesse de ses états à voyager, à s m-
stroire, à rapporter en Russie la politesse étrangère ; j'ai vu
de jeunes Russes pleins d'esprit et de connoissances. C'est
3Û0» qu'un seul homme a changé le plus grand empire du
monde. Il est affreux qu'il ait manqué à ce reformateur
des hommes la principale vertu, l'humanité. De la brutalité
dans ses plaisirs, de la férocité dans ses mœurs, de la barbarie
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U HISTOIRE DE CHARLES Xlt. ^iv. l.
dans seê vengeance* se niê loîent à tant de vertus. Il perçoit
ses peuples «t il éloit sauvage; il 1^ sentôit. li dit à un
magistrat d'Amsterdam : je réforme mon pa^s et je ne pepus
me rêf0rnter-mai''même. Il a de ses propres .Boains été Texé-
cuteïir de ses sentences sur des-crimiiiels ; et dans une -dé-
^ bauclie de table il a ^it voir son adresse à couper des tètes.
Il y a dans l'Afrique des souverains qui versent fe sang dé
leurs sujets de leprs mains, mais ces mosarques passent pour
des barbares. La mort d'un liJs qu'il lalloit corriger ou jdéin
hériter, rendrolt la noémoire d^ Pierre odieuse, si le bien
qu'il a lait à ses sujets ne faismt presque pardonner sa cruauté
envers son propre sang.
Tel étoit le czar Pierre ; et ses graads desseins n'étoient
encore qu'ébauchés lorsqu'il se joignit aux roi^de Pologne
et dç Daneœarck contre un enfant qu'ils méprisoient tous.
Le fondateur de k Russie voidut être conquérant; il qrut
pouvoir le devenir 8aj>$ ])eioe» et qu'une guerre si bieu projetée
seroil utile à tous ses desseins : l'art de la guerre étoit un àxt
nouveau, qu^il falloit montrer à ses peuples.
D'ailleurs il a voit besoin d'un port à l'orient de la mer
JB^tique pour l'exécution de toutes ses ^ées. il avoit besoin
de la province de l'Ingrie, qui est au nord-est de la'Livc^iie*
Les Suédois en étoieîit maîtres, il falloit la leur arracher.
Ses ancêtres avbient eu des droits sur l'Ingrie, l'Estonie, la
Livonie : le temps sembloit propice pour faire revivre ces
droits perdus depuis cent ans, et anéantis par des traités^ Il
conclut donc une ligue avec le roi de Pologne pour enlever
au jeune Charles XII tous ces pays^ qui sont entre h golie
4e Finlande; la mer Baltique^ la Pologne, et la Moscovie.
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. : • "^ ' - ■ î' ^ - f ♦ ^'î- ';: ■ • 1 ' ■' ';
CkàMgff^nt prodigieux et subit dans le caractère de Charles XII, A l'Age
deâue-huit ansy il somment 2p ^ueirré contre Tte Danemarek, la Pologne
é là'^BÉoimit! * termiite kigûerré'^e Dunemarêk en six semâmes : di*
flâ^^UÊirMnk^KmUie^ Hoscotkes-^èakiat ^k Swédks, et, passe
•« P ê l ^g n $4 tDeteriptim de 4a ^^<tgne et ^ «m^ gomeruimeiU.
CJmles s^figtiê ^ftskftrs bat^jUl^ et est mdtre dfi la Pologne^ «là il se
prépare à^nommer un fhh l
* X^?s çmss^iii rbî^ mênaçoîeht tivisi l'enfance de
Cbarîes*XVl, î^'sW'mlscJè. ces préparatifs conslernoîerit la
Suéde, él jftiîi-ffioîetttlecoflSeil.^tes grands généraux étoieilt
morts ; on ^voîl râiâon dç tout craindre sous un jeune roi,
quîn'avoît encorJB donné de lui que de mauvaises impressions,
nn'assisloit presqiie jamais ilàris le conseil que pour croiser
les jambes sur la tâHe i.'disVait," indifférent, il* n'avoît paru
prendre part à rien. ' * * , '
Le conseil délibéra ^û^a'présièricè sur le danger où Ton .
étoit: quelques conseillers plo[5ûiSôiedt de détoHrnèf Ta teià*-
pétc p^rldes négociations ; tout dW<îOup le jeûner prince se
levé avec Vaîrde gravité et d'assurance d'un homme supérfetir,
9W ^ pris ion parti : •^ Messieurs, dit-il, j'ai résolu dé ne
"^ais faire une guerre injuste ; mais de n'en finir une légi-
" tttie que par la perte de mes ennemis. Ma résolution est
" prise : j'irai attaquer le premier qui se déclarera ; et quanH
"jeTaurdi vaincu, j'es|)ere ifaire quelque peur aux autres.**
Ces paroles étonnèrent tous ces vieux conseillers : ils se rè-
prderent sans oser répoudre. Enfin, étonnés d'avoir un tel
rot et faoriteux ïTespéï-er moins que lui, ils repurent avec ad^
^Iratiôn 'ses ordres pour la''guerre.
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'^ HISTOIRfc i>E CHARLES XII. itv. îi.
On fat bien plus surpris encore quand on le vît renoncer
tout d'un coup aux amusemens les plus innocens de la
Jeunesse. Du moment qu'il se^ prépara à la guerre, il com-
mença une yie toute nouvelle, ddnt 11 ne s'est jamab depuis
écarté un seul moment. Plein de l'idée d'Alexandre et de
César, il se |>roposa d'imiter tout de ces deux conquérans,
b^rs leurs, vices. Il ne connut plus ni màgnificeiîcèy ni jeux,
ni délassemens; il réduisit sa table à la frugalité la plus
grande. . llavoit aimé le faste dans les habits; il oefntipètu
depuis que comme un simple soldat. On Tavoit «oupçomié
d'avoir eu une passion pour une femnîe de sa cour; soit que
cette intrigue fût vraie ou non, il est certain qu'il renoi^
idorç aux femmes pour jamais^ non^seulement de prar d^eo
être gouverné, mais pour donner l'exemple ^ sesaolds^ ipifii
vouloit contenir dans la discipline la plus rigoureuse ; peut*
être encore par la vanité d'être le seul de tous les rois qui
domptât un penchant si difficile à surmonter. Il résolut de
s'abstenir de vin tout le reste de sa vie. Les uns m'ont dit
qu'il n'avoit pris ce parti que pour dompter en tout la nature,
et pour lyouter une nouvelle vertu à son héroïsme ; mais le
plus grand nombre m'a assuré qu'il voulut par-là se pwr
d'un excès qu'il avoit commis, et d'un affront qu*il avoit fait
à table à une femme, en présence même de la reine sa
œre.. Si cela est ainsi, cette condamnation, de soi-même,
^ cette privation qu'il s'imposa toute sa vie, sont une espèce
d'héroïsme non moins admirable.
Il commença par assurer des secours au duc de Holstqn
ion beau-frere. Huit mille hommes furent envoyés d'abord
•en Poméranie, province voisine du Hoistein, pour fortifier
le duc contre les attaques des Danois. Le duc en avoit be-
soin. Ses états et oient déjà ravagés, son château de Gottorp
pris, sa ville de Tonnîngue pressée par un siège opiniâtre^
où le roi de Danemarck étoit venu eu personne, pour joeir
d'une conquête qu'il cro\oit s&re. Cette étincelle conMneiH
f oit à embraser l'empire. D'un c6té les troupes saxonnes
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nv. II. ROI DE 9U£I>£. . .fr
' do roi de Pologne, celles de Braodelxmrg, de Wolfeid>tiHel,
de Hease-Cassel, marchoieni poor se joindre aax Dauoii ; de
reatre, les huit mille hommes du roi de Suéde, les troupes
de Hantfyer et de ZeH, et trois régimens de Hollande v<-
noient secourir le duc. Tandis que le petit pays de Hobteh
âoit ainsi le théâtre de la guerre, déa^ escadres, Fuœ
d'Angleterre, et l'autre de Hollande, parurent dans^ la mer
Baltique: ces deux états étoient garans du traité d'Âltena,
violé* pâtr les Danois. I/Angleterre et le^ états-généraux
«"oopressoient alors à seisoarir le duc de Holsiein opprimé,
pttveque Tiotérèlde feur commerce s'opposoit à l'agra^dissf*
ment du r6i de Danemarck. ' Ils savoient que le Danois, étant
mitre du passage do Sun$l, imposeroit des, ^o^ onéreuses
aaxnatioas^commerpanjtes, quand il seroit assez fort pour
en oser ainsi impib^éinent* Cet intérêt a long4ems engagé
les Angloîs et les Hollandôis à tenir, autant qu'ils Font pu,
k balance égale enire les princes: du noi^ : ils ce joignirent
ao jeune roi de Suedoi qin s^nbloit devoir èjtre accalmie par
tant dPennemts réunis, dt le 8eà>ururent'par-la mémt raison
poar laquelle on FaHaquQit, parcequW ne le croyoit pas
cajpoUe de se défende.
U était à la chasse aux ouïs quand ît reçut 'la nouveile
de Kmiption des Saxons en Livonie :. il laisoit cette chasse
d'âne manière aussi nouvelle, que dangereuse; «n n'avoit
d'stttres -armes que des bâtons {ourcbus deiriere un filet,
tendu à des arbres: un ours d'une -grandeur, démesurée
vint droit au roi, qui le terrassa, tqirès une longue lutte,
k Ytiàe <ltt filet et de son bâton. Cet excès de courage fit
^ ^ ce^ix qui Te^vironnoient quelle valeur il deploieroit
cortie ses ennemis.
il |>artit ppur sa4)reniiere campagne le 8 mai, nouveau
^34ê, de l'année 1700. Il quitta Stockholm^ù il ne levii^
jamais. Une foule innombrable de peuple l'accompogut
jnsqu*an port de Carelscroen, en faisant des voqux. pour lui,
^ viersant des larmes, et en l'admirant. Avant de sortir
i
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^^ \ HISTOtïlE Ï>E CHAULES XIÎ. Liv. îi,
de Soede il î^tablk à Stoekhoïm tin x^onseil <te défense, com-
pcè&4e plmleurs séfKiteBrs. CéHë comrAwsffin H^vcJît prcn-
Âfe^Soin de iOiil ce ^jui regardml la flotte, ks Irmipes et tes
^IdrrïBcAtîoiiB du pays. Le corp& tiu sénat devoît régler tofit
^#e i^ttè provlsionnelleiiient dans riiitérieur du toyaonie.
'Ayant^afÂsi nnlis un ordre xser{dSti\ dans ^% 'états, S€hi esprit
l^eUe t<mt autre aow, tie 8'<^c«pa plus (jiie de la guerre.
.Sailétte étoit c<ymp09ée de <|iiarante-trôi5 vaisseaux : celui
<{tt1l monta, nommé le roi Chàtlei, le plus gr«îd^ii*on eût
.jamab vu, éloit de cent vingt p<e<îés de canon. I> comte
Pîper, son premier minis^,'le géùéititReilschîrd et le comte
îdc Gefiieatd/'ambassadear de France en Suéde, s'y embar-
^èfeitt'Uvec lui. Il joignit lés eitttfrés^di^ tfflfés. La flotte
idafloise éi4ta le combat, et laissa là fibcfté-atix ttois flottes
loomblnées de s^appfocher assez prfes'de'Copcnhagtie pour y
jetcr^<iuel<tues bonàbes.
Il eèt eei^airi ijue ec fut le roi ' lui-même f[uî ' proposa
{^•rs 4u général Renschlhi de hktt une descente, ^t dHBsrSéger
Copenkigue pki^ téri%, tatldist}uAeUe^9erôlt4>l6quée par mer.
ReniebUd fut étdnfté <drtrite prop^êAfcM qui "tn^n^tpioit'antaDt
d'habileté que de courage dans une' jeunt );)rlncè sabs ex-
périence. 'Bientôt lotit fut prét*potir h descente rl^s ofdres
htvehX demies pour' faire embarquer dtiq mille boinmea/ qui
toieift'Sar les tiMes' de 'Suéde, et qui 'f&rent .{oints aux
troûpeè ^'on avoit à bord. Le roi quittarson grand vaisseau
et itooritaune fiiègale ^^ légère : on comtnençà par faire
partir trbia cen%S'gréna9ierk'dàn!s âe'p</tites di^loupes. Entre
eesttbal€ta{)es, de pètiés liteaux plats portoient des fascines,
^H eblf^vt^x di? frise, k les ^trbmens des )>ionnîers. Cmq
cents hommes d*élite suivoient dans d^autres chaloupes.
Afh^ venoîent les vaisseaux de guerre du roi, avec (feux
fi^égatétan^Oises et'deux hollaudoises, qui dévoient favoriser
laxiescente à coups de canon.'
Cd)|M?nbagne,' capitale du Dànehiarck, est située dans
VU\t éê Kéèland, au nuKeu d'âne belle plaine, avant au
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Liv.n. ROÎ DE SUEDE. 2^
Donkiiiesfe le Suncl, et à Tomni la mer Baltique, où étoit
alon k roi de Suéde. Au -mouvement iiii{irÉvu des vak^
sett? qui m^nafoieat d'une detcente, le»balntans coristernés
pirrbactioli de leur flotte^ et-parle mouvement des vaisseaui^
sttééeis, regardéieul avee crainte en quel endroit foUdroit
Tofagc: la flotte de Charles s'fùrèta vis-à^vis Hûmblebék;
ks^ milles de Copenhague. Aussitôt les Danois rassem-
blent eu cet endroit kur èavulerie. Des> mRkes lurent
placées derrierei d'épais retvanohemensi et^ r^rtillerie qii^on
|ttt ; couduhre fut tournée^ ddutre les^ Suédo&i
Le roi quitta alors sa frégate, pourt&'àllèrmettfe^ansr to
première chaloupe^ à la tète de ses gardes : i'ambai^adeu^
de Fmice étoil alors auprès de lui. Mûtksieurrambmdadeur^
Wilît-il en latin, (car il ifie vouloit jamais patler- ffrançoi^,)
^^n^ûves-rien à démêkr avec les DatUns^:^ vdus^ n'irez p&s
P^khf s'Uvau» pMt,' Sire^lm rét>on^ le èomte dé
^niicufé en fa^nçois, h rûi moft maitre m^n t/tdbwné iè
f^^é&iHprès'de votre mkfë^éi jt me flatte que tous ne me
^mi'0Lpg9:4nffêurd'hlû.ilé:fçtr€C<nir^ qui n'ttjafHais été si
^Hlbit^« Birdisant ces:;par0le9'il donna la nimn au roi^
<pi liata. daus la chaloupe, <ïb le èointe Piper et ramfesmsa*
far entrèrent. , . On i^âvatoçoit sous \ts coups^canon des
^'vhleiux^^qni favôrisoientia descente. Les ba1^1*deîdé^
^■ifttmentii'étoient encèVe qu'à trois fcent»^paS*>éh*Hv*^.
^^hàksXil, impatient de ne pas' lîboirder as^èz prè^, 'ni asses
^ 4e jette de sa chaloupe déns la mer» Tèpée à fé^ maiui
>jttt*fle Feau par delà la ceinture : ses ministres; l%mhassa'>
faiP^ France, les officiera, les soldats^ suîvênl iaussi tèt son
^^Mtlple, et marchent au rivage^ mal^ une grêle éemOU^
^iWM. ^ l^rèl'qui n*avqifjamaB entendu de' saÎFÎe de
^Mk^uet^irîe ë&àrgée à Im^v demanda au majoi'-généM
^^f qui se trouva auprès diè' lui, ce que c'étoit que Ce
JWsifRement qu'il éntendoit à ses ôreiHés. C'est le bruft
^ font les baltes de fusil qu'on vous tire, lui dit le major,
fi*^ dit le To\, ce sera ià dorénavant ma musique. Dans 1^
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30 HISTOIRE DE CHARLES Xlî. Uv. ii.
même noonient le tnaj'er» qui explrquôit le ))ruit (ks âUmsqiie-
fades, eu reçut iioe dans 1 épaule, et un lieutenaat tomba mort
à Fautre coté du roi II est ordinaire à des troupes attaquées
d^Dsleufs retranchemcos d'Mre battue»,, parceque ceux ^i
attaquent ont toujours une impétuosité que ne peuvent avoir
ceux qui se défendent, et qu'attendrie les ennemis dans se^
lignes, <:'est souveot un aveu de sa foibksse et de leur supé-
riorité. La cavalerie danoise et les milices s'enfuireet ^rès
une ioU)le réfiistance. Le roi, maître de leurs reimnchemens,
se jeta à genoux pour remercier Dieu du premien «ncc^ de
ses aipiie9. 11 fit sur Je champ élever des redouta .vers la
ville, et marqua lui-même un campement: en mêuie-teim
il renvoya ses vaisseaux en Scauie, partie de la Suéde, vo^ne
de Cppenl^lg^e, pour chercher neuf mille bompies de 4:eo-
fort. Tput cqnsptroit à servir la vivacité, de Charles. Les
Of^iif mille bonraies ^ient sur le rivage prêts j^^t'embaïquer
et, dès Je ,l(9iiden^ain^^u .vent lavoraUe les lui ^m^sip . , ,
, Tout cda â'étoit fait à la vue de la lipHe dsiuoise, qui
n'ayoit t)sé branler. Copenhague intimidée envoya aussi-tôt
des députés^ au roi pour le supplier ^de ne point bombarder
la viHe. 1^ les reçut à.fb€val à\]a tête 4^ «on irégiment
des gar4«S4>l^ députés se.mifent à geuoux devant lui:^ ti
fif payer, ^Ja ville quatre cent nûUe nsdales^ avec ordre de
fsvLrf yoi^iu'er.au^camp toutes sortes de provisions» q^'il.pro-
mit^e lairf payer fidè|e^Qt. Qu lui apporta des. vif^es,
p?tT^ ^'il f^Wt ^^\^,i ^^ 0.A ^ s'attepdoit ga^re que des
Tain^neji^ciaigliasseat payer: ceux qui les ai^orterei)|[fiineDt
|ii^jét<?uiii^ ll'êtr^ payéQ généxeusement èK fians délaijiai: ks
moî^reç ^I4stts ^ fairnée.' U régnpit .depuis Ipug^qqps
i|an9i|e|>ti;pMPf!9,8Pê4oij^ uoe* disciplina quir a'avoit pas §ett
«^tribuf ^:jl(^r^ viç^irfui ;!le jievniéroi «Oraugmenta^ei^onla
sâv^rife. Un ?ul({at n'eût pa% o^ reluser le .peyemi^ut de>ce
qu'il achel/>it, encore, mgins aller ,en ,^^^de,.«paif.,iu^
«ftrM» dii camp. IV voulut ^c pins, que dan? une victoire.^
Uoup^ ne dépouillassent les niôvts fyj^'après en savoir eu U
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ur.iu ; ROI DE SUEDE. 31
pcmMwni^'ebîà parvint asément jà tmt observer cette loL
Ob faisoii toiyours dans son camp la prière deiu fois par
'ym^ hmfH be^res.du matin<et4b quatre heurea^u soir. Il na
maqaajamakis^dy assister etde d^ner à ses soldats l'ex*
empSe de k pîété; comme dé la Ta&eiir. Son camp» bien
rsmx policé <}iie Copenhague» eut tout en abondance ; les
paysans aimoienl mieux vendre jeora denrées awc Suédois
kan eanenris» qtt'aux.Bân<^s, qui nales payoîent pasn bien*
Les iMMnsgeOîs liela^ville iutent.àême obl^ de venir plus
d^nMlds' chercher «u canip;du roi de Sqede des provisîoQS
qui éanqiioient dans leurs marchés.
Le roî de Danemarck étoit jilors dans le Hoktein, où il
semtiloit ne s'être rendu que. pour, lever le siège de Ton»
ningoe. 11 voyoit la mer BaJttique^couVerte de vaipseanx enne*
mis, ttDJen^e conquérant déjà maitre du Zédand et prêt à
s^emparer de sa; capitale. * Il fit publier dans ses états que*
ccQx qui piendroieot les armes contre les Suédois*, aument
l«Qr liberté. Cette déclaration étoit d'un grand poids dans
^ W^ autrefois libre, où tous le» paysans, et même beau^^
^ de bourgeois, sont esdaves aujourdliuL Charles fit.
^ an roi de Danemarck qu'il na faisoîtla guerrequè poAir
PoWger à faire la paix ; qu'il n'avoitqu% serésoudre à rendre
^is&e au doc de Hobteîé^ oo i voir Copeiihagoe détruite,
(^tonroyaumemisàfea^t à sang. Le I>aiiOtt.^it.trop
litiâeitx d'avoif alhiire knn vainqueur qui.sepîqaoit de jus*
"te, en asMoibla on congrèsdans ta ville de/Fcavendal sur
'•fcmiieres deJiolsteiB. Le roi de Sitedè ne souffrit pas que
^ 'éfs mÎHfis^. traMir let négociations en longueur : il
^''"■itt qaei le* traité s^^bevât auast^ rapidement qu'il éioit
^^ctemèi.eBgliiand. ElfectivemeAt i^ fuLcondti le ,cinq
^^^<^ à-Tawantag» du dnedeiHobteb» qui fut indemnisé^
'^teaa les* fraia de k guerre et délivré d'oppression. Iji
^^taede ne voulut rie» paiir lui-même, satisfait devoir
'^t^wn son aiKé» et bumil^ son ennemi, Ainri Charles XII»
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t^f HlSTOiae BE CHiffISS Xll. Ltv. î^
àidix'lliik cai9/ «omnbapa •etiîoil'Cette' gu^irera .iiMNHréil
i^jS«iiKiiii«m' - <: ' <••' '•> «V Mf.i. i'-*{ï-.M(\* îL-t : ^'J
s^Rmnçpitduieâaé d«iUvien«, à'ia tète de ptôs; di) c«it lîiîHe
liolnmc»^ > Eiga étMtf >déf0ifdue|iar le^vieax eqiaaé é'AXbet^'
gèi^vi^ Siuédois, qaf»> à l^Àgcp de quatre^ArinlfttiaMy jo^|BlQil}
laittt d'«nif.^u«ie«,lieimfae''à« i'exjpéiiéBoe^ dsosoixadrte ><nM^
ipagiiesi Le coèate ( FlMmnîngv àÊfvàAi miÉistre de ^iBMgfmi
§mod boipmi» dé'fuenre et'dêcfibitatt^ eb le: hmmiàieà IM^
kul pressoient tous deux le«ie||e.sofi» lé»^yKbx.du<roî.; raaii^
]ii;ilgrè piteéiàîrs>a«Miiag«» que les/assiégeaiifi»' arotent^rem-
poctés, Ke xi pièt ieBè e tki vieMiiK|dmtp dfMbei^Teaédt'îoiittte»'
leuœ ettM!te$< tôt 'ïk #09 de >Bo^^^ déseq^éneib dfef pvnMim
b ville. * htsaês^ntin «dâtK:Q3isà>a benpraMe 4e>leHcr. ki
ssq^; Rî^éleili^leiiibidf l|i^haQdia«i|eppQi%$ii90le9}aiii^
U0aasidoi&i>,lé»^tatt §élié»aQx QiidDBiiert«àà^k«ttfimbàs«ar
deitr}aîipri^s:dtt4:oi Augdste^de lut fàisë surkiëU des ripeb.
sentièieiid. . Le roi de Poio^ ne se.^'pas*]inér* Il co»*
sen^ àlèver k sii^e, plutôt qtte de' caus^le-nueiiid te ddne»
m»^ à*9es aUiéSr futile furent peinft:éi<iMMfâ^ éeîeet^xeèb.
clelconif^lassne^ deiitilsîiareht lâivérkàble^icausé. '
It ne scsloit.doDc plus à.Qba|iés Xir, petHr/fadte^seraî
ppeiniépexaiiipagiie^ue denwiEcllerjCitafreJsiiurMwider ^o iiit »
Pierre AleEiowHs. H étoit d&iutanl 'ptttftan»é.eoiilr«*laii;
qu'il y a voit encore à StoclliolnÉ trobantltaasadeumino^eovile»
(^ venoient de juf ei'le reiiouvelleaieiif d'eaièpidix îpfiiihiMev
II ne ponvoH comprendra 4ui qui :$é tpîqaOit dHme f lw iM l lj
sé^re^ qWun l%iélatemr; ^omnie le ester^ se-fit ii»*jea fi/^tm
qui floit être si saeré;^ ^Le jewlecfilnce» jAén tfhenMliut»- né
pemoitpas qu'ilj^eèl ude^orale^dtffé^iito t^oarleé rtâe^et
peur les particuTÎcTs. L'emperemr et Mosbovie fëaote dê>
fiHîre' pevoitra «tkmetiMeste, qirïlteAtmîeiMifBÎtde sii|n|MÎm«iw
UaHégttoit f<mv raison delà guerre, qu'on nekiir «voit fm
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iiv.it. ' miî>È «CEDE. V\ $5
rttdtt assez dlMHCffié^rs loiid({tiH( ^Tok pake tMr8Jffit/o>à Riga,
et qn^ aveit vendu le$ ^^itryeis trop cher à^es aiibiitoadeurs.
C^oietit4à les gnefs pèvn^ lesquels il râfvageoiti^fogrîé avec
qB|lie>-viiigt mille bonimes.
n psmit devant N^IrVa, à là tète' de e«fte grande' armée,
le fnremier octobre, dans un tems pKis rufde en ce climat que
ne Test le mois de janvier à Paris. Le czar, qui dans de^a*
Truies savons fâisèît quelc^oefois qwOre ceaili lku«és en poste
à cbeVal; polir aller visiter liti-iAèteë unen>ine ou quelque
cai«l, n'épai'gooit paà plu» seë troupesl qw^lai-^ièmei' Il
savoit d'ailleurs quelles Suédois, depuis le tetnps de Gustave
Adolphe, {aisbieiitf^à gtiérre au obeur de Thiver ébmtne daii^
i'^é: il voultU aeeoutumer aussi ses Moscovites, à ne point
cQ9Qoitre de saisons, et les rendre un jour pour le moid^
^x aux Suédois. Ainsi dans un ^mps où les* gls^Ces et
iet Qdges fc^cent les autres nations, dans des climats tem^
pcrêç, à si^spendre la guerre, le czar Pierre »assiégeoit Narvu
à trcote degréa du pôle, et Cliarles Xïl s'aVaiiçoil pour le
s^rir. Le czar ne ftit pas plutôt vrivé devant la place,
^d se hâta de mettre en pratique ce qu'il venoit d'apprendre
<feû» ses voyages. ' 11 tnkf a son cainp, le fit fortifier de tous
côlés,^ éleva des redoutes de distance en distance, et ouvrit
^û^me In tranchée. Il avoit donné le comnaandemeiit
<^Mn4irmée au duc de Croi, allemand, général habile, mais
poLtecondé alors par les officiers moscovites. Pour lui, il
^^^Mt éans ses propres troupes que le rang* de simple lieu-
^^iMi II avèit donné l'exemple de Fobéissanèe militaire h
>MioUéssè,jusque-là ftidisdplitiifbre, .laquelle étroit en possés-
"•^ de.cqndmrè sahs èxpérietice et eh tUrtmlté des c^avc^
M trmé^^ . H n^titit- pas étonnant què.cehii qui s'étoit fait
^'^'ipentîer à Amsterdam pour avoir des flottejs, f&t lieutenant
* Narvt jkmr enseigner à sa nation l'art de hi guerre. \
les Moscovites sont robustes^ îtifatlgables, ](>eut-ètre
•■•^ courageux que les Suédois; mab c'est au temps à
V^trir les troupes,.et à la discipline à les rendre invincibles.'
' C 5 '
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)« HISTOIRE jDÉ C»4RîfcB8 XIL WF-M-
çominaïuiés par des joÙicîeiis.ultemauds; mêî» îl&^oW^^eit,
peti^ iiûiiibrt. Le restç étoit d«3 biu^bares arracbés à |eui8
forêts, couverts de peaux de bètea sauvages ; les uns armés
de flèches, les autres de mass^ies : peu avoieiit des fusils :
suK^UQ n'avoU vu uu siège ^ régulier: il u*y avoit pas un. bot»
OLOïKiiDMîr dadstoiite l^armé<. Cent cinqu^pte caupns, qui
SMM4»îent dû sécUpie4t fietUe ville de Nacva. çii cendres» y
avoient à peine {^^bredie, iaudis que rartilleria .de la ville
renvçrsoi^ à tout confient des rang^entiers dans les trancltée^*
Narva. étoit pnïsque.sans fortilicatioBs: le baron de Hooro»
qui y €onin2|iidDÎty o*avoit pas miUe boiume de troupes
réglées^ cependant çettQ armée ûmovMbrabte u'avoit pu U
^MÎre «n di« s<iiMaines. .
On étoit déj^ au quinze de novembre qu^d le czar apprit
qufijo (oi de S^iede, ayant traversé la nier s^yeç dens cents vais-
i|eau.:i de transport! marcboit pour secpurir ,Narva. . Les
Suédois n'étoient que vingt mille. Le czar^n'avc^it que la
supériorité du^ nombre^ Loin donc de méprisée son ennemi»
il epjploya tout ce qu'il avoit d'art pour Taccabl^r. Noo-
coiUent de qnatre-vingt mille bonmies^ il se )>répara à lui
opposer encore une autrje arniée,^ et à i anèter à çliaque pas.
11 avoiitdéjà mandé près de quarante mille bon^mesqui s'a?aa-
çoieut de Pleskçw à gfa^des journées^ Il fit alors une dé^
■jarçlie qui l'eût rendu, méprisable, si un législateur qui^
^t 4^ si grandes^chose? pouvoit l'être. Il quitta sçi^ c^mp»
oi\ sajpréseace étoijb nécessaire, pqur aller cbfi;cc,h^ cetooii*
veau corps dj^^opp^ qui pouvoit très bien arri;irer saps luj^
^ sembla,, par œtt^ démarcbe^craindre de çomb^tjtre dans un
çajpp\re|rancbé jU9 J^uneprin^^ns expéi;ienqe, qui pouvoit
ijfcpr VjïUaqiier. ,
Quoi qu'il eo sQit« il. vouloit enfermer Charly XU entre
deux armées. , Ce n'étoit pas tout ; trente mil}e liommes,
détachés do camp devant Narva, étoient postés àamç ijeuft
de cette vi^e^, sur le chemin du roi de, Suéde»; vingt miUa
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ftiT. TU KOI DE SUEDE. $5
Sliélite étdeot pto lein swr le. mène cbcniB; cniq odfe
totres lusoienl une fpide ayaoeée. 11 Jriloit.pMur sur le^
irentre à toutes ces troupes avaat que d^armer devant le
can^ qoi étint moài &ua rempart et d'un double ioisé;
Le roi de Saede avcôt débarqué à P^mau» dass le geWe de
Riga, avec enyiron seize mille boanmes dinbmterie et ua peu
phis de quatre mUle dievaux» : De Pemau il avoit piéciptté
sa marche jusqu'à Revel, suivi de -toute sa cavalerie, et seu-
lement de qua^e mille taalassins. Il marcboit tôi^uis en
avant» sans attendre Je reste de ^s. troupes* Il se trouva
bîentM, avec- ees buit mUle hommest seulem«it, devant kê
premiers postes des ennemis^ 11 ne balança pas à les atta*
^r tousy les ta» après les autres ma» leur donner le temps
d'éprendre à quel petit nondnre ils aboient affaire. Les
MoBcovîles voyant arriver, les iJSuédoîs à eux, crurent avoir,
toatakunememée-àdonibattre. : La gaiide avancée, de emq
niileJiomHies^.qui gaxdeît^ entre, des roehf^rs» un poste où
ceatwàoB^ès résolus pouvoieni ^arrêter une «rniée entière»
j^enfuit'è la^remiere approcfaedes Suédois. Lps vin|^ mille.
iMmunes qutétoient derrière^ voyant fuir. feur^ çomp^gnoôs,
prirent l'épouvante et .trièrent porter le désordre .daqs 1$,
camp. Tous les postes lurent emporté» m de|iK j^iors» et
ce qui en étires occaisicms eût été •<!ompjté. pour trois vicr
tei^,^ ne retarda pas d'un^ beure la waircbe du roÊ.. 11
pacutdonc enfin avec ses buit mille bommes, fati^és d'une
Hioo§ue>marobe, devant un camp de quatre-vmgt mille
Mos$;ovites^bordé de ce»! .cuMiuf^nte canons. A peine ^es
troupes eiurent*eUes pris quelque. repo% q$ie, sans délibérer,.
iM^MUia ses çrdres )>Osur l'attaque» '
Le signal. étoit deux fusées, et le mot en allemand, aijfic-
l'aî4^ de Dieu, Un officier général lui a^ant reprjèsenté k.
Snuidenir du péril: Quoi! tous .doutez^ dit-il, çu^avecmei
kuit mille brave» Suédois je ne fasse sm' h/corps à ptatre»,
iatgt imWe3f(}j^çoittïes?.Un momenj^.aprës, craig^^ant qu'ils
ft'j[^eût.unpev 4$ fanfarQpn^ dans^^^î^^^ol^, il.cqurut;
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9â HISTOlBJDf JBB^CHâRIOar XII. . u v.vn
ie^Ueu éémt'reaêm'êi levm graadinêm^ ne /itm fm l^imb
(mnnukbr^ ^kroimi^je* «endipéditmeMi flM. fiert ^gtinmA
U^m&tJ^éjApÊsà^ d'ètntKfttUi mère, mhii «i^Oftw^p^
situe Moscovites à midiic. 30 novenAneilfOCK - "".\- - 1 «^ t
.; Dès^qnetle cMion;jdeftiSii6(ioB.«uiiail'btef^;aositteti^
dKBitiiar' îk slAvàactiiei* la-bi^peniiette! au boni/dit f «iil; i
aw ckw ine deige luvkilse vpxi dotsioit au vÎMçtjde
Les Moscovites se firent >tuer pendant nue deait«èenre^ \
(}inlter ie reYens dés ioiste < Le i»rattaq»6it ilria tfaBstetlii
oaiàp, où étoit ie quavlltr du iCatr ; il espérai kil-çiwenlB»!^
ne^sacba^ pas 411e Veiapenm iuî aBÊti^et«v»it' éiiéi4:}ttre(K|B
co» quamnlë' nûUe borames ' ^ denowiiÉ arnwer ^<bM»^tt.
Awc prétnieres décbafgeâde la méliBqiietene'eamnefrk ni
)«put um >aile dans la gorge ( «naosctétoît une fatâèrniolie^
qui iStthxii àsma i<es plis de sa cravate noire, dt qi»'a&ivt
fitawcnn mal. Soir ebeval lut tuer g^s luL JMu dè.Spaar
ni^a^dit^ que le mû sauta légérewent sitir tntàittrecberai^cil
cKsaot: Ces gms-ci me foni faire tms exerHee&^tet eontînaat
de eoMbtitti^ et de dpiÛÉcr les ordres afecjatnêmeprésettee
d^espNt. ' Ap^s trois heures de comtet, les ^einimclianiem'
HRreût fèrcés de t^m côtés; Le rolpeoisuiritila droite de^
QUiemis jusqu'à ta rivière de Narva, avec son aile gancki% si
1^ peut »p]^ler , de ce 90m environ quatre -inîHe boAi«ui
qui en* poursuivoîent près dei quarante mille. Le p6nt roil^
pjl seus^ It» fuyard^^ ^ tgtiere futeh'un luotneirt coifvetté éé
morts. Les autres désespéréir rétourtièrent 'et lérti^' tampt'
sHtià^séf^ pô- fls' âlleient. Ils trom'crent queiquesbimique^
dtfrrié^'ksqueHésIIsse mn^enti Là'ii9 se délendirenleti-
cofe, parée qu^^ ne pouvoîent pas se sauver; maîst enfin
leurs géhéraux Dolgorouky, GoîloSHtin, Fédérowits, vinrent 9e
rendre aw roi, et mettre leurs armes à ses pieds. Pendant
€ji0ltB le^ tut- présentoir, arriva le due de QroK généitf
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Charles reçut tous ces piriseimiers d'imporUfic^ am; gqir
{ip)ik«sse.aifuû S|isée,et iin»ajyr,aussi.ii^^ qup a'Uliçivr eût
kit dans sa cç|ur les JlODneul«.dvlf^e i&t|^ Il ne vei^ ^r^CK
^ Ies.g^éifWi».^,./rp^is ^1^ offiwKf S||)i^nfC3^ I^ i^plt
tonner. (^ «Hii;^.,Çcq^^ |^i^«'pB|^IK]|c|i9^
peri»4îi^toei4g; bflttgiw^ .cU^- I m A mil l r» Moano«it«s..av0kirt
étMyéi^ d^«9. iei«r|r>ti^|lir^^ iio gpraod wiubK^ ^<Mt
iMj«ê;ilMeaiM*Q»»|^a)^^^^t|^ia9éV^ ^fi^il^^te^çQ^
Uaw iMtolito dtt.peii<dfii;î#iir'qni>refl|oài^^ «lisûr V»tt9krié
cMMitt' . Û se ptrtfii<>ya nlwg^M nwnl><»p|ré ieufrcarop^tt
itivilk : là il.dof tnit <)«el)|ii« beum>4iiti]at.^nc^ envtléppé
4»» ion ^ttoÉ^eaftH .an attftBitafil^'il|xûA^«iKif«f«ii fMâul «bi
joor fur Taile gaitdM^ des «aiMiaBiÂ^ qv!» a'^vok. |M>iBt eneoiè'
ttfttotià'jHt vttBpotk. Â>deuSiiieiiÎK«idhfeJHfilM Kk.géliéral
^îc|di J€oniiiwiid0k.](eltq .^mrlteif i^anl tit.*k! gpradietiz
*«atil;q«r le «bi Hwt tôt «ax wÉxtM g^iÉilXy«t comment
ivreit renvoyé tchiis:*fos olHcier» mibalteniefl et. les sotdi^^
A»«o^sappîitff de litiaccMsdee la oième graee. Le vain*
9M:)mî*fit^d»è>qii'iltji^YMt,^ sfapprodHer à la tète de
'o^h^ufies, ^et Tenir mettre jbas les armes et les drapeaux
âivatlèi. * Ce général parut bien^Àt après ave<£ sè»Mo^
ci^â»s^ ^ létK^ieat au /àMfmbÉé ' c^enviroor trente mUle. lié
'"'W iitmiiÉl tèteaiÉry séidats et ofiic|iera» à travers moins de
y^^wleSuééwaii Xes-bstdalii eaipatsairt ékyf&at le fol^
iàmak à tcielciiw kuik ^ lewyy ^es;* efcks ^ftders por*
*Mift à jfeB pîedèAtè>enic%nesie»to AJ y uH tou. Il-^t'pepaswf
biiivfeqr-'àoliMit^'celtlp Bnilfeîliidft>^taift)fiii Mtèvlr un sent
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in HIST01B£^ DE CffARt^ XII: dît. h.
soldât prisonnier. ' 911 fisi avbit gaVAés; le'ntfmbre des piU
sonniers eût été au moins cinq fois pins grand que cehi
des vainqueurs'. ' j .i ^ ■•*-«;/•, t .. .
Alors il eritia victorieux dans Narvd, àdeoito{âigné du
Aie* de Ciroii'et des autres officîërs-gënéraux tooé(rovtte^ : il
leur fit rendre à tous leurs é^es ; et sacKânt qulls nian*
quoient d^arg|lent; et ^lielês ttartifthidà de )fJilrva né Vouloient
pOiM leur èA jiréfter, il envo^ inillë dueafsrW d«e>tie€!rol,
et cinq cenb a cbaeuii des 'officiers moscovites, <pn'ntf fmi^
voient He iasser d'admher ce traiteménti dont* ils 'a^tfvoiâit
pas mèine d'idée. Onf dressa aussitôt à Narvli une ration
de la vidoiiiey pour Fenvè^fer à Stockhotm et aux allîétf^é la
Suéde; nais le roi reftafidm de 'sa lunu-tout ce qui étoit
Iro^ vrantirge^'lpémr'hif/^'fiiop' injutfettx pour le eaar.
Su^*iodè%ti« rie put^empècllèr'^^oérM frappât à' Stockholm
phtsieûré 'médiâlBs ^pbiB" fféi^^tuef Ju mémoire de ees
évéï^emens^t >>Efitreaim«i on:en lfa|ipa i^ne qùii-le riepré-
ientoit d'tui*e6lé«ur un jnédesud, où paroissoient eackatoés
wrMosoovîtenuv'Dftnob; utt'MÔRois; de l'antre éKVik ua
Hercule» «rmé de ^ mtoqe/ tenant sous ses pieds uvCer-
befe.^nréo cette légende : 3)re$wm tmtwiUè htu.
r t'Pa^ltBpdsdiBaieaslàil9àl»'jounié;e^ NaàFva^ Oftcb
vît4l^ijpii4toîl tm gfamt: exeinplè des i^volutions de^la^ior*
tune ^ il étvit fils tàné et Siâritîer du m dé Géorgien on 'le
nomévoit ôzarafis-Artschelou: ce titre de czarafk signifié
prince, bu ftU du scaâr, chez tous les Tartares^ comme ets
Moséôlîe ; car le roo^ de czar, ou tinr, voi^itdiré roi cbes
les «nptens Scythes, dont fous ces peuples sdnt.ttefeendps^
eliié vient peint de^ césars de Rome^si loag lânpa inconnue
àlfces.-UÉvbaen. ^n peie Mittetteskv jc:ter> et iin^e de hi
plusMbeUe^^paiikCdes -parj^ qui.soét . enlre^lés montagnes
d^Araraftjetles extrémités orienftales.de la^mer. Noire» avoii
ét^çhassé de son royaume- pai! ses prapfes »ijeti( ed mil-sik*
eeoAi^quatiie4Vingfe4haîil;'et jàvoit^miaiximiÉé' se 'jeter entré
kftbras éalteiperetmde Moscoeie que^t técourir i celui
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ut. tl. SOI DE SUEDE. 30
^s^Torcs. Le fils de ce roi, âgé de dix^neuf aii8> Touliit
suivre Pierre-Ie-grand dacASOirexpéditioii contre k|S Suédois.
et fut pris en coiubattant^ par quelques soldal53tblandol8,
qui 1 avoient déjà dépouillé, et qui alloient le massacrer. Le
comte Rehscliild l'arracha de leurs mains, lui fit donner 'uo
babit, çt le présenta k son maître; Charles l'envoya à Stod(f
bolm, où ce prince malheureux |aioifrut quelque^ anoj^
après. Le roi ne put s'empêcher, en le voyant partiTt de
faire tout haut devant ses officiers une réflexion naturelle sur^
Tétrange destinée d'un prince asîatiqujB, né au pied du m<^
Caucase, qui alloit vivre c^tif parmi les glaces de la Suéde,
Cest cpmme sifétah un jour prisonnier y dit il, chez Us Tar^ '
tares de Crimée* Ces paroles ne firent alors aucune^ impres*
sioD ; mais dans la suite on ne s'en souvint que trçp, lorsque
l'évéuemeut en' eut fait une prédation.
Le czar s'avançoit ù grandes journées avec l'armée dç
quarante mille Russes, comptant envelopper son ennemi d^
tous côités. 11 apprit à moitié chemin la hàtaille de Narva,
et la dispersion de tout son camp. Il ne s'obstins^ pas à vout
loir attaquer avec ses quarante mille hommes ^sans e^pé;ienci^
et sans discipline un vainqueur» qui^vejioit d'en .détruira
quatre-vingt mille dans un camp rel^anch.é; il retourna sm
ses pas, poursuivant ^ujours le dessein de discipliner ses^
troupes, pendant quil civilisait ses sujets. Je sais bien^ dîN
il) ;«f les Suédois nous, battront longtemps: f>^ àja Jim
ifs nous apprendront eùjç-mêmes à les ffM^çre, Moscou, sa
capitale, fut dans ^épouvante et dans K^désolatîon à la nou-
velle de cette^ défaite. Telle étoit la fierté et rigporance de
CCS peuples, qu'ils crurent avoir été vaîacus par un pouvoir
plus qu^huniain, et que les Suédois étoient de vrais magiciens*
Cetle opinion fut si générale, que l'on ordonna à ce siijet des
pneres publiques à Saint Nicolas, patron de la Moscovie.
Cette prière est trop singulière pour n'être pas rapportée ;
La voici : . .
^ O toi, qui es notre consolateur perpétuel dans toute»
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ia . HiSTOlRï: BE CHARLES XIC. Liv. ii.
**' -nos. advèrsîfé», grand Saint Nicolas, infiniment puissant,
*^par quel péché ravons*noiis offensé dans nos sacrifie^
*' géiiûflexions, révérçaces et ackions de grâces» que tu noas
^* aies ainsi abandonnés? Nous avions imploré toa assistance
^contre ces terribles, insoteus, enrages, éppuvnntuUes,
*^indon]ptabIès destructeurs, lorsque, conime des lions et
•*^ des onfs kjui ont perdu I^urs petits^ ifs nous ont attaqués,
^ effrayés, blessés/, tiiés par milliers, nous qui sommes Um
'* peuple. Comme il est impossible que cela soit arrivé sans
**'s6rtilege et ench^atiïefcnent, nous 'te supplions, 6 grand
" Saint. Nicolas, d*ètre notre champion et notre porle-élen-
'•^ dard, de riôus délîVrèi^'dé celte foule de sorciers, èl de les
" chasser bJeo loin de^ nos frontières, avecla récompense qui
«leur est dde.'^» ' ;
Tandb que les Moscovites se plaignoient àSaintNiçoIii
(le leur défaite, Charles XII faisoit rendre grâces à bieu^ et
ke prêparoit à de nouvelles victoires.
• ' Le roi de Pologne s'attendit bien que son ennemi, vain-
queur çlcs Danois et des Moscovites^ y iend roi t bientôt fondre
sur lui. 11 se lîeua plus étroitement que jamais avec le czar:
ce3 deux princes convinrent d'une entrevue pour prendre
leurs mesurés de concert.. Us se virent à Birzen, petite ville
de LUhuailie,, sans aucune de ces formalités qui ne serrent
qu*à retardet" les affaires, et qui ne convenoient m à le*
sitnation jii à leur humeur. Les princes du nord se voient
avec Hne familiarité qui n^cst point encore établie dans le
midi dé l'Europe. Pierre «et Auguste passèrent quinze jours
ensemble dans des plaisirs qui allèrent jusqu^à l'excès, carie
czâr, qrti vouloH réformer sa nation,, ne ppt jamais corripf
dans Ini-niêmê son, penchant dangereu^L povir la débauchie.
Le roi dé Pologne s'engagea à fournir au czar, cioqidoite
mille hommes de troupes aHeinandes, qu'on devoit achettr
4e divers princes, et que le czar devoit soudoyer. Celoi-cï
de son côté devoit envoyer cinquante mille moscovite;;» en
aligné, pour y apprendre Fart de la guerre ; et promcttoil
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m^ii C^taitéf #:Ur«â;t été ^c«t6, e^^^èfre^ fafi^ ai^ jro^
d6T*iedfl^,iq'€i|oii :)!« mp(yi^ ^<wp( e*.s0f d'ag^^H?^ kai
M<|scovit«9|,:«i^^k.peHtrèlfïft^rgev4e8 <(rs;à we>p«rtie;<k
CM^, Xil 8^r|ii^ m d^nroift d'enf^diet le. f?oi do
P«ihp«vd^.iW(Ci#f>llii te faH>î^Kd^^^<^'Ùg«c.r : A|^è9:avQir
P»»feVtov^ W|>i!j|#4^ If ;MEva,^,p«iljA M Uv^iiilN Aupfès d^
cette même ville de Riga que le roi Auguste avoît asd^ié^
i«lMfi|^ptH <> Le^tr^tiip^f^HouBe» éif^mk poaté^le* long de
iiiiiâere^chl P\Mi«i»*qui est fort iai^e^eja cDt^otiflmll; il fid^
^&pttt0r)la>|»awa^^ à Cinurl4$i^ quiéloilàt£a«tre:barddtt
ikwe; Ii«a^Stôoii4ii'étoieBt,||a9,^HiinfnKlé« par kttP forince»
^wintala^f^. iWam ils avoi^ à ieir *AtQ le ^mafvèçM à0
^MoBt, qui f;MMÎIr;k4;fo«cUoQ»;fk gé^mlî;.s<)ii$>li^. coi»i
aiad<Hfiiiril«b|Mto«i^ Eftrd^si«d, f^ de Qomûmii^h ^ce.
ii*)ie^R*ëm]»9qiiii(défei\d«it.6a>iNitriie^ e(NilPr<» Ctoile»^ Xl^
lléfféè^ à.:|aHkiifH9)sa|H?è3' en avoir sq^qu les droite p»r Isjw
plMQt^aiiipÉcU^ sa >vie, ,cotitie Clwk» %l^ he roi de;
^•«dci aiioiti&nlepmlruire de grands bateaux li'un^kwentim»
«iMi n dfcm fcqt léaiberd»»' b^a*»mH>/P>^ Jb»t»ts qtf^ i'wdin
^fiinaafloiéite^ksrar 'et (se i>ai9aer eomnH^idft} .i^ulAnlfviK
^i^liiiM4îife«Ptt!rB0ieiit les.- troupias .qii1l9':|^towntt eofc
^iMi^<^aelvMettlî dft pont f^^h dé|>a«^eijil«l^ Uk
xî^^aMe cnuaa^B un autee artifice: aya^.remairqaétqiift
^i'viilvoQflMt dn nocduoâb îiêèoàé an siûi o^ étMMtcaMpéa
^fi^iiiii, itfit nettre le feu à quantité, de païUennNiMKn
^ktiuaée.épiûstfei» «épandaat sur la: liniare». défoiiMl
M SittOBB là «vué-de ses tibi4>e»èl de ce t^*îh aUoil iâîfeu
^MMcnf de cenuage; il iiit 'avancer dès Iwucqiies reniplita
^«^ «oèiife ^ilte* fumante ; diir^orte )i|ne le/nuëget^feasisH
^tôiÔ^cs, et elmssé'par le vent dans les yeux dès emnsn
"%)tanMitttoit cbmrfittpbssibîMité desavoir-si lairotpaBsoiÉ
<^ujion. Cependant Ht cf^tidnisolt atuil Texécution clé 'Seii
'NAigfmi. ' StaniT'iiéfàiaruimiliaiide.la'iévieiie: Hê Uent
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4$ HISTOIRE DE CHARLES XII. mV. It;
dte^ab généràf Rei]s<^îldi 9à Dùmtt me- sera pas pktê té^
chante pte la mer et Capenhagvè r eroifèz-moi, générât nmta
hf Mfrànà. If arriva en uH <}oatt^'heuré à raàtre'>««i,
tî itA hiorlifié de né satitèr à tefte que le quatrième. Il fait
aus8i-t6t débarqMer son canon et forme sa bataille, stm que
les enneMis, otiusqués de la franée» puissent a^y o^ficisery
que psnr ^iielquèi^;««up» tlré^ aW hazat Lèvent ayatltiiiis^
âlpé, ee b^idlkird; leâ^ttHôns-viréi^t le r6i de «Stiede matcbaait
Le nmrèebat Stenéu-ne )|¥erdft pas vfn momeiil ; à peiœ
aperfu(-fl' tes Suédois, qti'tf^fo&dit sUr eux avéé la meilleure
partie de sa cavalerie. . Le cboc violent de cette troupe
tombât ïuk- les SuMoi» dans l'instant qudls formoiênt leurs
bataillons; Icë mit en désordre; Ils Couvrirent'; ils furent
rompu»» -et pourâuivtsr jusque dans la rivïert. I^ roi de
Suéde \tk rallia le mômeiA d'siprès^ aii mHleu de Keau, aussi
aisément que sH^^eÛt Mt une re^. Alors ses soldats mair»
ebant plus serrls qu^puftivant, repoussèrent le* baréchd
Stenau, et* s^avancéreiit dans la plaine, l^enan sentk que
ses troupes ^toîent' étonnées; U les fit retifier sa babâe
bomme dans un tieu sec, flanqué d^uii nvarais <t dTuii bois où
étoit Son artillerie. L'avantage du tersamy et le tempa qt^H
avoit donné aux Saxons tfe rèi«niiide leur première surprise,
leur rendît «out tethr courage. ' Cbarlès ne balança pas è ks
attaquer: il avott avec lui quînaie mille bommes; Stenau et
le duc deCourlan^ environ douze niille, nlayàrt pour toute
artillerie qu'un canon de fer, sans affûts La b al o iBe fut
ivdé et saugbmte^ le duc eût deux ebevani^ Hués sous lui:
il pénétra trois lois au miliea <|e la gardé^davoii maiaenfin^
«yant^é renversé de son cbevàl «d'un coup de croœ d#
fliousqueti le désordre te. mit dans sim^rméiv qui ne dHspulfr
plus la nctoire. Ses cuirassiers le retirèrent avec peine, tXNil
froissé et demi*-meft du milieu de la mêlée, et^de dttsMa
les cbevaux, qui le fouloient aUx pieds. ' «
Le (oi de Suéde, après sa.viet^ie^ court à BlittWt
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MV, u. ROI D£ $UÇD£. .. 4^
capitale de la Couilaïute. Toi^tea les viUes cM ce 4ttcbe «e
lendeot à lui à dkcretion : c'étoit ud voyi^ plutjM' qu'une
coaquète. 11 passa sans s'arrêter en Lijtbuanîe, souifu^tant
tout sur son passage. Il sentit une satisfaction flatteuse, et il
favoua lui-niènie, quand il entra en vainqueur dans cette
vSk de Birzen, où le rbi de Polo^e et le c^ar avoieni cqi^
s^ sa ruine quelques mois auparavant. . , .,
Ce fut dans cette place qu'il cooçut le desseii^dedétFÀner
le roi de Pol<^pe, par |es mains des Polonçb mêmes. M»
éUnt un jour à table« tout occupé de cette entiepiise, et
observant sa sobriété extrême» dans un silence profond^ pa-
roissant coçime enseveli dans ses grandes idées, ud colone}
alkmand» qui assistoit à son dSner^ dit assez haitt pour être
eitfenda, ^ que les repas que le czar et le roi de Pologne
'' a?oient ^ts au même emlroit étoient un peu différent de
'* €«ox de sa psaj^ê.'' Oui^ dit le roi en se levant, et fen
ui trovJbié plus ëisémmt leur digesHotL £n effet, mêlant
alors un peu.de politique à la force de ses armes, il ne tard»
P9»à prépqjcr révénement quHl Qiéditoit.
La Pologne, cette partie de Tancienne Sarmatie, est un
peu plus ^i^ude que la France, iroins peuplée qu'elle, mais
plus que la Suéde. Ses peuples Jie ^nt clurétiens que de«
puis environ sept cent cinquante ans. C'est une chose sia-
Sdiere que la langue d<^ Romains qui n'ont jamais j[>énétr6
(bas qes climats,. ne se parle atyourdliui communément
qu'en Pologne ; tout y parle latin jusqu'aux domestiques*
C$ grand* pays est très fertile; mais les peuples n'en sont
ifm moins industrieux. Les ouvriers et les marchands qu'on
toit en Pologne sont de» Ecossois, d^ Fn|i^oi9y sur-tout d^
Jttib» qui a^beten|t à vil prix les Ué^ le^ be^tjaux, kt deoa;
lées dd^pays, le» l^iqijient à Dantzick çt .en.A^einagnff^ ^t
i^adent etièrement aux nobles de quoi satisfanre l'espèce de
li^ qu'ils .connolssent et qu'ils aiment» lAinsi <ce . pays^ ar.^
rosé des pins belles rivières, riche en pâturages^ ^jDOÛnea
(k lel} et couvert de moy^^ons, reste pattYre». malgré son
. . ' DigitizedbyVjOOglC
44 HISTOIRE DE CHARLES XTI. , tiv. ii,
lahcûdàitce, parceque le plèiipié est escfavc, et" que la no^
Btes^ est ïiere et oisive.' ' -' ' •
^ Sou gouvernement est la plus fidèle image de l'ancien gou-
Paiement celte et gothique, corrigé ou altéré par-tout aîl-
Ifeuri. Cest le seul état qui ait consetvé le nom de république
avec la dignité royale. Chaque gentilhomme a le droit de
donner sa voix dans Péïecttoh d'un f o4, et de pouvoir Fétre
Mi-mème.' Cè^plus beau ^es droits est joinà au plus ^nd des
abus: letrôite est presque toujours à llsnclierè; et comme
un Pôlonois est rarement assez riche polir racheter^ il a été
vendu souvent aux étrangers. ' La noblesse et- le clergé
iléfendent leur liberté contre leur roi, et Tôtentau reàle de
la nation. Tout le peuple y e^ esclave ; tant la destinée des
hommes est que le phis grand nohibre soit par-tout, de façon
ou d^aUtre, subjugué ^r le plus petit. Là le paysau ne semé
f>oint pour iùt, ntab pour des seigneurs, à qui lui, son éhmifp
et le travail de ses ni^ains appaHtennent, et qui peuvent Je
tendre et TégOrger avec le bétail de la terre: tout ce q^iii est
gentilhomme ne dépend que de sot. if faut pour le juger
dans une affaire criminelle, une assemblée entière de ht na-
tion: il né petit être artèté qu'après avoir été condamié;
aînsi^îl'n^ presque 'jamais pùni« Il y en a beaucoup dfe
pauvres; ceux*-là-se mettent au service des plus pùissràs,- tsa
reçi^eiit ttn salàtre, forit tes fonctions les plus basses. Br
ornent mieux' servir leurs égaux que de s^enrichir par le corn-
merceV et en panant tes chevaux dé leurs maîtres^ ils sie don^
nent le titre d'éleetenrs des rob, et de destra^teurs destymœ*
' ^ui Verrott un'-roi de Pcrfogne dans la- pompe de la wm*
jèité royale, leèrèiroitie prince le plus absolu de FEuropé;
t'est cependant ceh^ cfitt Fest le^moins. , Les^l^olpnôb foot
réellement aVee Hir ce contrat qtf on suppose chez d^titteft
jiatièii^^ entre le souverain et le stijei. Lé roi de. Pélègiie à
Mm sacre nièniei\ et en jmrant les pàcim tonveiU^i dispeue
ses st^ets'du sermei^t «jTi^bréissauce, en cas qu'il viole k^ lois,
de la t^ufoliqué;.
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Uv. II. ROI D£ SUSDIT / ^
Il «omme à toutes k^xbat^e» ei: coaieve I6tis les iioi»*
neun. Rien ifest héréditaire en PoWgnei^tte les terres ei: le
nag de noble. Le fib d'un palatin et celui d'un roi o'oUt
m1 droit ann dignités- de leurs pcres; mais il y a cette
fnBide4itféienoe entre le roi et la rèpubli<|Me, qu'il ne peut
'èlér aucune «inùEge» après l'avoir doonn^e» el que la répub-
lique a le droit de luièter la couronne, s'il transgresse les
te de l'eiat. .
lia noblesse^ Jalouse de sa liberté» vend souvent ses su{-
inges^ et^rarenient ses afiedious. A peine ont-ils élu un
roi, qu'ils clnii|^«e»t son anàbition et lui opposent leurs
«Mes. LtS'^Raods^'il afait\ et qu'ils «e peut défaire,
dmaftënfcJoâTepiies edneaiiB» au-lleu de tester ses créulures.
Ceux qui fOi^ attachés à la cour sont.l'ofci^ de la btioe du
Ma «le UndMcsBe, ee^qui forme ton^îours deik partis, divi-
•âoB « i évitabl e-et «nèaie néœssaire dans les pi^ où Ton veut
aroir des rois etooaserver sa liberté.
Ce qui couceme la nation est réglé daas les états-^géné-
niB, iqu'oB appelle dictes. Ces élatosont coanposés du éorpn
du sénat, et 4e plusiearè gealilsboninws. Les sénateurs «ont
(espafaniasetiéséaèqafes: le second ovdre est composé «ks
dépêf es des dktès parti(Mdiel« de dmque palatinat 'A «as
gnadeë'assékubléespiséeiide f arebvèque de Gnesne, primat 4e
Pokigile,?iciÉredu foya«iiiied«nslesinterregnes,etlapreiyere
personne de ïêM aptes \e rsi.v Rarement y ^-M en Pologne
maatre-cai#M ^pietiil, paticeqiie lu pourpre istmaiae ne
AMttini>ttac«Mie pi^sésnMe'dtan»!^ séiflA, un évèque4|oisèroil
civdinal sereift dbli|4 ourde'^usseqir à son rang de sénatetir,
<Mi"de->pénotM«r aux *4ir«îtr: solide» de la digaité qaKI^
diiis«9»^i4i»^)paur aôatealr les ptétentions dtoi^hooneur
)€es 4iel«8 se d«lwetir4ènîr»i|kar les fois <ki it^ume, ai-
t«matlv«Ment en Pblo^ie; a 'en^itfauauie. Lei députés y
dérident souvent leurs affaires te sabre à la main, conraie les
^ens Surmates dont ifs saut descendus, et quelquefois
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^ HISTOIRE DE CHARLES XII. liv. u.
.même nu mifieu de f ivretse» vieé <|iie les Strinates IgnfM^ieot.
Cbaqiie gentilhomme dépitté à ces états^-généraux jouit lia
drok qH'ai^oiènt à Rome les tribaos da peuple» de s'opposer
aux lob du sén&t. Un seal geiifUliomme ^uk éà^je proteiH,
«frète pur ee mot seal 4es résolutions niianiiiies de teot le
Tedte^ et «'il part de Feiidroiioà se ti^t la diele, Hlattl alon
<|u*eU^' se sépare. ►-
On apporte aux désordres qui naissent de cette lot ofi
teméde pitis dangereux eneore. La Pologne est rarement
sans ^eax factions. ' L'unanimité dans les diètes étant alors
impossible, chaque parti forme des ooirfédérations, dans les-
quelles on décide à la pluralité des votx, sans ayoir égard aux
protestations du plus pkitnombie. Cesassemblées^iMégiâaies
aelott les l<ns) maÎB autorisées par l'osage» «e font au nom dt
^ roi, quoique souTent tontine son consentement «t coMre ses
inlérèts: à peu près comme la ligue se senroii en France da
nomxle Henri III pour TaccaUeri et oonune en Angletene
le parlement qui fit monrkr Charles I sur un échàiaudy com-
mença par mettre le nom de œ prinee à la tèle de tentes les
résoimtioiis qu'il preook pour le perdre. Lorsq^e^les troubiw
sont finis, alors c'est aux^diel^ générsriea à confinner oa à
casser les actes de ces confédéâtionsé Une diète mène
|ieut .changer tout ce qu'a bk la pséeédente» ivur la mèaie
raison que dans le» élats monarchiques un r<û «peut abok
les Ipis de son prédécesseur et les siennes propres.
La noblesse, qui fait ka lois de la répnbliquîe» en fait «tf«>
' la lorce. 01e monte à cheval dans les grandes oocasiow»
.eft peut composer un cc^ps de plus décent mille honuaes.
CMegiEande armée nomtnée^/Vspo^^'Se n»e«4 diflicileaieot^
secgonrctfoe maU la difficulté des mres -et des fourrages la
met dans l'impuissance de subsister long-temps assenbléa!
la discipline, hà subordinatioPf féapérîence, lui manqsteDt»
mais l'amour de la liherlé qai l'anime hi rend tw^oUia fsC"
niidable. " ' ^ '
^-pn peutla vaincre ou la dissiperi on la tenir vèniepoi^
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hPf.ti. '* aOlIWSOED*. î 41
ibf«e ooiii|»i«tit. eux;Qiltoéi> miE rpn^aMiL» q«e la. tempAte
couche p«r4éne9 etqui ae^retevêDt dès qiie.lev!e9l«e«oiifil9
pk». <€f«il pour, cette faisou qu'ilt n'ont point de plâ^ de
guerre: ib T^ntcntètre fei aetib vempftrls de leur répidN
ii|ii«;tilsjie aottffixnt jaQmis>(|ii^ leur roi k4t^ ^de? ferter
TcsMyido peur 411^ ne s'ien iierven^oîna ponr les défendiif
quepéuB ks opprimer» Xour pa^'est tout ourat» à h
réierue de deuli Ou ttoîa pincer Irootieres. Que si dl^»8leun
guerres» ou civiles, ou étrangères» ils s'obstinent à joutenir
ches eux quelque siège, il faut faire àja hAt^ des.fortifica-
tioBs de terre, réfarer .de vieilles murailles à demi-ruinées,
éhiftr des fossés presque oail i l és; e|la>viUe est prise avant
^ les retianchenieo» Ment achfi^.
-^La PétpMU n'est pas toujours à cheval pour garder le <
pqf»; elle «'5 n^e que .par Tordre des diete^ ou même
queiqueieis sur le simple ordre du roi dans les dangers
cKtrèmes. > ■ . .-
- La garde oedtoanne de la^ Pologne est une armée qui doit
toi^oun éuhiisler. aoz dépens de ia «uépublique, . Elle est
coaqKMée de deux corps iiidépeudans. Tvia do Tautfe, .sous
dea» gmnd'f^énéfmux difléieasi Lepremier corps est celui
^^•Poiogne, etdoitètre^e trente-rsix raille bomQv»; le
Keoad^ an nombre de douze mille; est celui de Lithuanie.
Us deux grand» généraux sont indépendans l'un de l'autre.
Quoique nommé» par le ^roi, ils ne rendent jamais compte
^knrs )opé«atién».qu'à bi rqiHibèiqiie» et ont une autorité
soprèmemr'kursetioupes. «JUs c^oneU sont les.ips^tr^
absolus de leurs régiment; c'est k eux à les faire subsister
ctameUs pefivent, et à leinr'payer leur solde^ Mais- étant
«mn e ni pactes eux^ièines, ils désolent le pa^s, et ruinent
ki faiboitrënrs» pour satisfaire leur avidité e^ celle de leurs .
BiUals. • Les se%n«ira pelonois paroissent dans ces «rmé^
tvcc pins dt magnifipence que dans les villes ; leurs tentes
Mt fdnt beUea quç Jâm^ttaisons. I^ .Ggtvalfrie, qui fait
Digitizedb, Google
4S HISTOntfi '0E SHiUMËS XH. uv.m
lë^étmi >âei%^iKe' l^mée, ««t |ir4!Afne4Milë^4Méin^<^
ge<tfffillH>iiibii&» ( «f fe M 'reta>ryiiiWtt|»r>lart U« ^ lii fb8aete
^Ux, «f ^ Ift-riélMkse des li«tôlleiii€Rn'étdtiilÉinM|is^> -
*' 4bè9'g(^dH^wei5%iir4«iit,'H|iie' fttiadUttingpetëipbèusMrà
€tfMAKte#tHte,^ tndt^hetit <fi^«c<»éipagbé«ée>|iilu9iéur»fsl«(i
^îf^Wèr^6u^<irat<jl!«M/ dê'SftNdt^oÉÉH ()'aipip9|td!éÉncn
tMik/kfÀ,ià lÀ^aiikrii>lê6:tJtom,fckiatile» Fobm^b «M
Aài^itii V«érte h^ahrUs til^tét et: «upnrbe, /mitait ^
fkMfttre-é^iâi>iÀots détàlwée, ^^véllre^ nuiiiaiwétt, ftesi»
éit^ ^dftMiMAddev'ii^' fkûdlMéifriw^^ ^€/eil^«ttsidhii«ato
c^u'elle fut jusque vers lyiQ/tOw^tattlttMnsyfciofct tiMO Mfckl t
h des TMfttH vag«bonds,aniipfH*teiit 1^ vakà^êemmtkt^:
iHRftè là faim,' lefr«M, lai fatigue^ 'et tout>lefMÎdBiie>ll^g)i«nq
Ofi^ voft «ticôre dans* le» 9oèdaCs^k>a0iar 4e €iMotefe<^
anciens »Sarinates, leurs ancêtres; aussi peu de dîieifiiaOt
la nièllie iurèur à attaquer, la méhiè pro«iptiliHlr àliiif ^^
revenir au ^mbâf», le mtkme aeàipitneimnt 4«B0{4e Mnijiffii
<}uand il»'Sént!iraâÉfc|ueiftr&;' : '; j. /; . -U '. :>|i:.:
' Le roi de' Pôldgn^ slètoit* flatté d'aboni^qwe^dans hikr
éom ces deux aftnées combattroient eii sa laNfcat": qtfe^b
'Pû8p&iitêp4A<m(Âlit s^hfieroit à ses ordres : «A iqiie MNi
tes forces jfoÎDtes attx Saxons ses siifets, et «ux Moscofiltf
ses alliés» c<tanpo8eroient une nrafttiÂiile:deiia«l/^ui ^if^
nbmbredes Suédois n'oi»evoît paroltre. H'sc^TÎtprtsqie
tout à coup privé-de ces secours, par 1^ sokis ■■fepa erf^qirtl
avoit pris pour tes afoîr tou» à la fois. - > /» j.
Accoutumer dan» «es paVsfférédit^e^'anrpoiiiNnrdbsoltf,
il crut trop peut-^fre qu'il pourvoit goureroer iaPoloi0^
comme la Saxe. Le coitimencémeiit de ^«m iiyw. tit é»
mécontens ; ses prvlmeri^s démanîltsimterettt.ie pMi^ifBi
s'étoit of posé à son électiOD> et aliéaiftriHilif>rMq«ie'lOiit'Ae
reste: La Pologne ÉiurmfiFa de vé(r^S9»yàbéà^i&K/^^^
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ftiT.il $S€Ï DE 5U£0S. 40
imiinii» B Ê MwmHB , et ses fnmtitres de trDitJ>«f . Celle
MlioÉi, Inès fdas jalouse et saintaiir sa liberté q^empuessée
i aUni«er «es voiâns, ne tegarda poiaA k guerre du tbî
Aiigiiste contre la Suede^ et fmuptioa en Livome, eoBMve
«le eatMprÎBe av àuteg euse à la république. On trbmpe .
MuikuiÉul une nation fibre sur ses vnds mténèls» Lu
Polonois senioieftit que si cette guene, entreprise sans leur
w^cjrtfcitu t, éMl flaidbëurbu«e> leulr fo^ oturert ée tous .
iMbaeroîtett^prae au id éeSueée; que si eile étt^it heii-
mue ils sèytiieiit subfi^és par four vei même, qui, WÊÛirt
émàéla livoMe^eonnHe de la Sirxfi, entlatefeil>l|i Pologne
«IM eesdenoc pa^ 0an» cette altertiative, outPètre esda^^
4i t»i qi^ un^eécÉt élu, ou d'èlre ravagés, par Chartes MH
JQÉnient outragé, ils ne formeieni qa^nn efi centre la
|imt, qu^ crurent déclarée à êux-mèmes plus qu'à la
teèew Ils regardèrent les Saxons et les Moscovites comme
tteÎBltranie&s de lews dMitnes. Bientèt voyanft que le rd
^i^iiiede srmt renversé tout ce qui â»it sur son passage, et
'««ifMtawBc uae armée victorieuse au cceur de la Utimanf e,
Mdhiterent contre leur sôuvertdn, avec d'autant plus de
fihoté qu'il étoit malheureux.
Btax partis divisoient aiorala Xithuânie, celui des plinces
et c^hû d'Oginsky; €^ deuot iictiaiis ament coB»-
par des querelles patticidieres» d^néï^ en gueri^
Le roi de Suéde s^altaeha tes piincesSapteha^ et Ogkh-
itKcoiirupar les Saxons, Vît sefnpàrtipresqueunémmâ»
litiiuanienne^ que ces tnmbles et le défaut d^igent
aftApiNmntà;Hn petit nomlive, éloiten partie dispersée par
leitttiqueuT, Le peu qui tenoit pour te rot de Peiogue
^HAmifut en petits corps de troupes fugitives^ quiètroient
^Mj^.cumfyagnet et siibsistment de rapines. Av^xAe ne
lithuaine que de Fimpoissance dans son parti, de
éum seS'Sujeto, et uae année ennemie eonduile pat
• wl «tarage, victorieux et implac^e.
'iiP94i90ll è>la félité en Pologne une armée; mais au
D
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S« HISTOIRE DE CHARLES XII. liy. ii.
lieu d'être de trente-six mille hommes, nombres, prescrittptr
Jes lois» elle n'étôit pas de dix-huit iniiié. 'Non-sëuleêieat
elle étoit mal payée et mal armée^ mais ses génénmx.tie sa-
vment encore quel parti prendre. . < .
La ressource du roi étoit d'ordonner à la noblesse de le
suivre ; mais il n'osoit s'exposer à un refus qui eût trop dé-
couvert et par conséquent augmenté sa foiblesse.
Dans cet état de trouble et d'incertitude, tous les pala-
tinats du royaume deniandoient au roi une diète, de même
qu'en Angleterre, dans les temps difficiles toiis les coips de
rétat présentent des adresses au roi pour le prier de convo-
quer un parlement. Auguste avoit plus besoin dlme armée
que d'une diète, où les actions des rois sont pesées. U fallut
l)ieu cependant qu'il la convoquât, pour ne point aigrir la
nation sans retour. Elle fut donc indiquée à Varsovie. pour le
2 de décembre 1701. Il s'aperçut bientôt que Cbarks XU
avoit pour le moins autant de pouvoir que lui dans cette
assemblée. Ceux qui te noient pour les Sapieha, les Lubo-
mirsky et leurs amis, le palatin Lecziusky, trésorier de la
couronne, et sur tout les -partisans «des ' princes Sobie^y,
étoient tous secrètement attachés au roi de Suéde.
Le plus considérable de ses partisans, et le plus dangereux
ennemi qu'eût le roi de Pologne, étoit. le cardinal Radjow-
•sky, archevêque de Gnesne^ primat'du royaume, et président
•de la diète. C'étoit un homme plein d'artifice et d'obscurité
.dans sa conduite, entièrement gouverné par une femme am*
bitieuse, que les Suédois appeloient madame la cardhmk^
laquelle ne cessoit de le pousser à l'intrigue et à la faction.
L'habileté du primat ronsistoit, dit-on, à profiter des con-
jonctures, sans chercher à les faire naître : il paroissoh socoreot
irrésolu ; car qui ne l'est pas dans une guerre civile ? L» roi
Jean Sobiesky, prédécesseur d'Auguste, Tavoit d'abord fait
évèque de Varmie» et vice-chancelier du royaume. Rad<
jbwsky n'étant encore qn'évèque, obtint le cardinalat |MUr k
laveur du même r<N. Cette d%mté lui ouvrit bieiÂftl h
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LIT. II. ROI DE SUEDE. 51
chemin à celle de primat ; ainsi réunissant dans sa personne
tOQt ce qui en impose aux hommes, il étoit en état d'entre-
prendre beaucoup impunéniient.
Il essaya son crédit après la hiôrt de Jean, pour mettre
le prince Jacques Sobiesky sur le trône i mais le torrent de
Il habe qu'on portoit au père, tout grand homme qu'il étoit,
en écarta le fils. Le cardinal-primat se joignit alors à l'abbé
de Polignac, ambassadeur de France, pour donner la cou-
roBDe au prince de Conti, qui en effet fut élu. Mais l'argent
et les troupes de Saxe triomphèrent de ses négociations. Il
K laissa enfin entraîner au parti qui couronna l'électeur de
Sue, et attendit avec patience l'occasion de mettre la divtsioii
cotre la nation et ce nouveau roi.
Les victoires de Charles XI!, protecteur du prince Jacquet
Sobiesky, la guerre civile de Lithuanie, le soulèvement
gèlerai de tous les esprits contre le roi Auguste, firent croire
n cardioal-primat que le temps étoit arrivé où il |)ourroit
leivoyer Auguste en Saxe, et rouvrir au fils du roi JeâU le
chemin du trône. Ce prince, autrefois l'objet innodent de
Il Inîne des Polonois, conmiençoit à devenir leurs délices
icfés que le roi Auguste étoit haï ; mais il n'osoit tonce-
' voir alors l'idée d'une si grande résolution, et cependant le
riliîiiiil en jetoit msensiblement les londémens.
D'abord il sembla vouloir réconcilier le roi avec la ré-
pièKque. Il envoya des lettres circulaires, dictées en appa-
raiee par l'esprit de concorde et par la charité ; pièges usés
deofoms, mais où les hommes sont toujours pris. 11 écri-
HIm roi de Suéde une lettre touchante, le conjurant, au
de celui que tous les Chrétiens adorent également, de
la paix à la Pologne et à son roi. Charles XII ré-
^Mit aux intentions du cardinal plus qu'à ses paroles. Ce-
il .restoit dans le grand duché de Lithuanie avec son
victorieuse, déclarant qu^il ne voùloit point troubler la
quH faisoit la guerre à Auguste et aux Saxons, non
ttsTMoiiois; et que loin d'attaquer la république, il yenoit
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M HISTOUtE DE ÇHARIXS XII. vr. ù.
b tîr^ d'oppression. Ces lettres et ces réponses étoient
l^our 4e public. Qes émissaires qui atloienjt et venoient con-
tinuelleraent de la part du cardinal au comte Piper, et des
assen^blées secrètes chez ce prélat, étoient les ressorts qui
iaisoient mouvoir la diète : elle proposa d'envoyer une am-
bassade à Charles XI f, et demanda unanimement au roi
qu'il n'appelât plus les Moscovites sur les frontières, et quil
xenvoyât ses troupes saxonnes.
La mauvaise fortune d'Auguste avoit déjà fait ce que hi
•diète exigeoit de lui. La ligue, conclue secrèleiuent à Bir-
gen avec le Moscovite, étoit devenue a.u8si inutile qu'elle avoit
|iaru d'abord formidable. Il étoit bien éloigné de pouvoir en-
voyer au cacar les cinquante mille Allemands qu'il avoit promis
de ^re lever dans Fempire. Le czar même, dangereux voisin
de la Pologne, ne se pressoit pas de secourir alors de toutes
les forces un royaume divisé, dont il espéroit reçneillîr quel-
^ques. dépouilles. Il se contenta d'envoyer dans la Lithuanie
TÎngt mille Moscovites, qui y firent plus de muai que les
Suédois ; fuyant par-tout devant le vainqueur, et ravageant
Ifs terres des Polonois, jusqu^à ce que poursuivis par les
généraux suédois, et ne trouvant plus rien à^ piller, ils ^en
xetoifiiierept par troupes dans leur pays. A l'égard des dé»
bris de l'armée saxo^ific battue à Riga, le roi Auguste les en-
voya hiverner et se recruter en Saxe, afip. qije ce sacnfice,
tout forcé qu'il étoit, pût ramener à lui \^ i^aUon Po|oiifHs^
irritée.
Alors, la guerre se changea enintriguf;^ La dieje ^toit
partagée en presqife sfutant de fartions qu'il y ^voit de pHb-
tins. Un jour les intérièts du roi Auguste y dotuînoieDl,, \p
lendemain ils y étoient proscrits. Tput le monde <;rioil p<|pir
la liberté et la justice; majs on ne savoit point ce que c*éj^
que d'être libre et juste. Le tenqps se p^rdoit à cabal^^a
secret et à haranguer en public. La diète ne savoit w ce
qu'elle vôulpit, ni ce qu'elle devoit faire. ](^es gra ides com-
pagnie a'^pf. pre^qne jajaais pris ^ l^ons cooj^ d^n Iqs
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uiT. m ROI DE SUEDR. 5$
troubles cîvHs» parceque les hommes hardis y sont facti^x^
et que les gens de bien y sont timides pour Tordinatre. La
dieté se sépara en tumuHe le 17 février de l'année IZOlf»
après trois mois de cabales et d'irrésolutions. Les sénateuriy
qui sont les palatiçs et les évêques, restèrent dans Varsovie;
Le sénat de Pologne a le droit de faire provisionnellement
des lois, que rarement les diètes infirment ; ce corps moins
nombreux, accoutumé aux affaires, fut bien moins tumul-
tueux, et décida plus vite. "
Ils arrètereat qu'on enverroit au roi de Suéde Tambas*
»dè proposée Aans la diète, que la Pospolite monteroft à
ciicval, et setiendroit prête atout événemetit : ib firent pl«H
oeurs régleuMfns pourappaiser les troubles de Litlraame, et
plos encore pour diminuer Tautorité de leur roi, quoique
BKnm à eramdre que celle de Charles.
Auguste aima mieux alors recevoir des lois dures dit
M» vaniqueur que de ses sujets* II se détermina à deroandaf
la paix au rot de. Suéde, et voulut entamer avec hii un traité
lecrel. Il falloit cacher cette démarche au sénat, qu'il re^
gardoit comme un ennemi encore plus intraitable. Uaffairt
élrà délicate ; il s'en reposa sur la comtesse deKonigsmark,
Sttédoise cFune grande naissance, à laquelle il étoMahiri
attecfaé. Cette femme eélebre dans le monde par Sùa tspri^
tlpar sa beauté, étoit plus capable qu'aucun ministre dé faire
lénasir une négecialfon. De plus, comme tUé avoit dd hkiti
dans les états de Charte» XII, et qu'elle avoit été long'^feinpë
àea cour> elle avoit une prétexte plausible d'aller trouver ee
pnoce^ Elle vint donc au camp des Suédois en Iithuani<|t
tt s'adressa d'abord au comte ^ef, qui lui promit trop^téu
gèoement uoe^ audience de son mainte. La eoiÉilesse, pamtf
ks perfections qui la rendoient une des^ plus aitinablés peif-
■Qpaetde FEuropê, avait le talent singulier de parler les
h ag aei de plu^urs pays qu'elle n*avoit jamais vai^ ikveë
t de délicafesse que si elle y étoit né^ ; die fl^anu^
qœlqutfe» à iure des veir fr|iifaâi^ qa'éti'eMK]^rll
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54 HISTOIRE DE CHARLES XII. liv. iï.
pour être d'une per$ooue née à Versailles. TÀle en
composa pour Charles XI f, que l'histoire ne doit point
omettre. Elle introduisoit lès dieux de la fable, qui tous
louoiént les différentes vertus de Charles. La piiece finis-
soit ainsi :
Enfin chacnn dos dieux diseoiurant à sa gloire.
Le plaçoit par avance an temple de Mémoire-;
Mais Vénus ni Bacchns p*en dirent pas un mot.
Tant d'esprit et d'agrément étoient perdus auprès d'un
honinie tel que le roi de Suéde. II refusa constamment de
la voir. Elle prit le parli de se trouver sur son chemin, dans
les fréquentes promenades cfu'il faisoit à cheval. Effective-
ment elle. le rencontra un jour dans yn sentier fort étroit:
elle descendit de carrosse dès qu'elle l'aperçut. Le roi la
salua, sans lui dire ain seul mot, tourna la bride de son che-
val, et s'en retourna dans l'instant : de sorte que la comtesse
de Konigsmark ne remporta de son voyage que la satis-
faction de pouvoir croit-e que le roi de Suéde ne redoutoit
qu'elle.
Il fallut encore que le roi de Pologne se jetât dans les
bras du sénat II lui fit faira deux propositions par le
palatin de Marlen'bourg ; Tune, qa on lui laissât la disposi-
tion de l'armée de la république, à laquelle il payeroit d«
fes propres deniers deux quartiers d'avance ; l'autre, qu'on
lui permît de faire revenir en Pologne douze mille Saxons.
Le cardinal primat iH une réponse aussi dure qu'étoit le re-
lus du roi de Suéde. 11 dit au palatin de Marienbourg, au
nom de l'assemblée : *^ qu'on avoit résolu d'envoyer à
t< Charles XII une ambassade, et qu'il ne lui coaseilloit pas
*^ de faire venir les Saxons,"
, : h^ roi, dans cette extrémité, voulut au moins conserver
les apparences de l'autorité royale. Un de ses cbambellaiis
alla de sa-.part trouver Charles, pour savoir de lui, où et
f omioeot la majes^ suédoise voudroit recevoir i'ambats^df
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wv. II. ROI J>Z SUEDE. 55
du roi son maitre et de la république;. On avoit oubliai
mâlbeureusement de demander un passe-port aux Suédois
pour ce chambellau. Le roi de Suéde le, fit mettre en pri-
800, au lieu de lui donner audience, en disant qu'il comptoit
recevoir une ambassade de la république, et rien du roi
Auguste. Cette violation du droit des gens n'étoit permise
que par la loi du plus fortt
Alors Charles ayant laissé derrière lui des garnisons dans
quelques villes de Lithuanie, s'avança au-delà de Grodno,
liile connue en Europe par les diètes qui s'y tiennent, mais
mal bâtie et plus mal fortifiée.
A quelques milles par de-là Grodno; il rencontra Tarn-
bissade de la république; elle étoit composée de cinq
aéniateurs : ils voulurent d abord faire régler un cérémonial
que le roi ne connoissoit guère; ils demandèrent qu'on
traitât la république de sérénis$ime, qu'on envoyât audevant
deux les carrosses -du roi et des sénateurs. On leur ré-
pondît que la république seroit appelée illustre, et non «I-
tùnssime ; que le roi ne se servoit jamais de carrosse ; qu'il
tTOtt auprès de lui beaucoup d'officiers, et point de sénateurs;
fi'on leur enverroit un lieutenant-général, et qu'ils arrive-
rojeat sur leurs propret chevaux.
Charles XII les reçut dans sa tente, avec quelque ap-
ppirdl d'une pompe militaire ; leurs discours furent pleins
ésnénagemens et d'obscurités. On remarquoit qu'ils craig-
■rient Charles XII, qu'ils n'aimoieiit pas Auguste ; mais
fslls étoîent honteux d'ôter,. par l'ordre d'un étranger, la
Cptroone pu roi qu'ils avoient élu. Rien ne se conclut, et
dprles XII leur fit comprendre enfin qu'il concluroit dans
l^fttl^ie. ..
j*.. Sfi marche fut précédée par un manifeste, dont le çardi-
ifl €t son . parti inondèrent la Pologne en huit jours.
(jj^es par cet écrit invitoit tous les Polouois à joindre
f^ vengeance à la sienne, et prétendoit leur faire voir que
"^ ^réls et les siens étoient les mêmes. Ils étoienl
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$6 HISTOIRE DE CHARLES XII. htr. n.
' cefiendant bien différens ; mais le manifeste,, soutenu par an
ipnd parti, par le trouble da sénat, et par rapproche du
] conquérant, fit de très fortes impressions. Il fallut recon-
noltre Charles pour protecteur, puisqu'il vouloit Fêtre, et
; qu'on étoit encore trop heureux qu'il se contenlÀt de ce
titre.
Les sénateurs, contraires à Auguste, publièrent haute-
ment l'écrit sous ses yeux mèines. Le peu qui lui étoient
' attachés demeurèrent dans le silence. Enfin, quand on ap-
; prit que Charles avançoit à grandes journées, tous se pré*
pirerent en confusion à partir : le cardinal quitta Varsovie
des premiers : la plupart précipitèrent leur fuite, les uns pour
; alleV attendre dans leurs terres le dénouement de cette af*
'. Iiire, les autres pon^ aller soulever leurs amis. Il ne demeura
auprès du rt)i que l'ambassadeur de lempereur, celui da
c«ar, le nonce du pape, et quelques évèqwes et palatins liés
à sa fortune. Il hlltUt fuir, et on n'avoit encore rien décidé
en sa faveur^ Il se hâta, avant de partir, d^ tenir un conseil
avec ce petit nombre de sénateurs, qui representoiênt encore
le sénat. Quelque zélés qu'ils fussent pour son service, ils
é oient Polonois : ils avoient tous conçu une si grande aver-
; ai on pour les troupes saxonnes, qu'ils n'osèrent pas lui ac-
corder la liberté d'en faire venir au-delà de six mille pour
; sa défense ; encore voterent-ils que ces six mille hommes se-
I TOJent commandés par le grand général de la Pologne, et
I renvoyés inraiédiatewient après la paix. Quant aux années
d^ la république, ilsj lui en laissèrent la disposition.
Après ce résultat le roi quitta Varsovie, trop foible confie
ses ennemis, et peu satisfait de son parti mèitie. Il fit aussi-
tôt publier ses uni versa ux, pour assembler la PospoHte et
les armées,» qui n'étoient guère que de vains noms: il 0*7
ayoit rien à espérer en Lithuanie, où étoient les Suédow.
' If armée de Pologpe, réduite à peu de troupes, manqnott
d armes, de provisions et de bonne volonté. La plus grande
p rtie de la noblesie, iatimidée, irrésoluci ou mal disposa^
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u?. n. ftOI DE SVSDI. if
ânneuni dan te» térrM. En ▼âiii le roi, aotoriié' paroles
bis lie Féttt> ordonne, sor peine de la vie, à tons les gtiilils^
hbnime» de rnootev/à chevaiêl de le^BuÎTre; il conmiençoit
à devenir problématique si:on devoit lui obéir. Sa graadtf
rtssooree étoit dans les troupes de son électorat, où la forme
du gouvernement^ entièrement absolue, ne lui> laissoit pas
crakidre une désobéissance. Il avoit déjà mandé secrète»
meatdouie mille Saxons, qui s'avançOient avec précipitation*
Ren faisoit encore revenir huit mille qu'il avoit ppomi» à
Fèmperenr dan» la guevre de l^empire avee la France, et
qu^'il lut obligé de rappeler par la nécessité où il étoit rédoîti
Introduire tant de Saisons en Pologne, c'étoit révolter contro
Im tous les esprits, et violer la loi laite par son parti mème^
qu ne lui en permettoit que six mille; mais il savoit bien
que s'il étoit vainqueur,^on n'oseroit pas se plaindre, et que s'il
étoit vaincu, on ne lui pardonneiH)it pas même d'avoir amené
les six mîlk homme». Pendant que ses soldatsarrtvoient par
tnmpes, et qu'il alloit de palatinnt en palatinat rassembler la
noblesse qui lui étoit attachée, le roi de Suéde arriva enfia
durant Varsovie le- 5 mai, 1702. A la première sommatioii
les portes lui. hirent ouvertes. Il teuvoya la garnison polo*
noise, congédia la garde bourgeoise, établit des corpstde^
garde par-tout^et ordonna aux. habitans de. venir remettre
toutes leurs^ armes ^ mais conteul de les désarmer, et ne vou^
lant pas les aigrir, il n'exigea d'eux qu'une contributioj» de
cent mille francs. Le roi Auguste assembloit alpm ses forcée
à Cracovie.: il fut bieu surpris d'y voir arriver le cardinal
primat. Cet homme prélendcdt peut-être garder jusqu'au
bout la décence d« son caractère : et chasser son roi avec
les dehors respectueux d'an, b^n styet : il lui fit entendra
que Je roi de Suéde paroissoit dispesé à un aceomaoodement
laisonable, et demanda luunblen eut la permission d'aller
le trouver. Le^roi Auguste accorda ce qu'il ne pouvoit rer
teer ; c'ert-^-d ire, la liberté de lui nuire.
LecardinalrpnnuitcQuruéincontîniuitvQiriQioîdeSHadt»
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5ê HISTOIRE DE CHARLES XII. liv. w
«iuqtieUr if avoit point encore osé se présenter. ' Il vit ce
prince à Praag, près de Varsovie, mab sans les cérémonie»
dont on avoit usé avec les ambassadeurs de la république. It
trouva ce conquérant vêtu d'un habit de gros drap bleu, avec
des boutotis de cuivre doré, de grosses bottes, des gants de
bulfie, qui lui venoient jusqu'au coude, dans une chambre
sans tapisserie, où étoient lexiuc de Holstein son heau-f rere,
le comte Piper aon premier minbtre^ et plusieurs officiers^
généraux. Le roi avança quelques pas au-devant du car-
dinal : ils eurent ensemble debout une conférence d'un quart-
d'heure que Charles finît en disant tout haut : Je ne don-
nerai point la paix om» Poionoia qy^its n'aient élu un autre
roi. Le cardinal, qui s'attendoit à cette déclaration, la fit
savoir aussi-tôt à tous lespalatinats, les assurant de l'extrême
déplaisir qu'il disoit en avoir, et en même temps de la né-
cessité oà Ton étoit de complaire au vainqueur.
À celte nouvelle le roi de Pologne vit bien qu'il fàlloil
perdre ou conserver son trône par u: e bataille. Il épuisa
ses ressources pour cette grande décision^ Toutes ses troupes
Saxonnes étoient arrivées des' frontières de Saxe ; la noblesse
du palatinat de Cracovie, où il étoit encore, venoit en fojiiie
lui offrir ses services. Il encourageoit lui-même chacun de
ces gentilshommes à se souvenir de leurs sermens : ils lui
promirent de verser pour lui jusqu'à la dernière goutte de
leur sang. Fortifié de leur secours et des troupes qui pour-
toient le nom de Varmée de la couronne^ il alla ponr la pre»
miere fois chercher en persoime le roi de Suéde. II le
trouva bientôt qui s'avançoit lui-même vers Cracovie.
Les deux rois parurent en présence le 1 3 juillet de cette
année 1702, dans une vaste plaine auprès de Clissau, entre
Varsovie et Cracovie. Auguste avoit près de vingt-quatre
mille, hommes. Charles XII n'en avoit que douze mille.
Le combat commença par des décharges d'artillerie. A la
première volée, qui lut tirée par les Saxons, le duc de Hol-
<teiu,'qin conunandoit la cavalerie 8uédoi$e^ Jeune pnooa
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lir. lu ROI DE SUra>E. êf^
plem de courage et de vertu, reçut un coup de canon dans
les reins> Le roi demanda s'il étoit mort; on lui dit que oui :
il ne répondit rien : quelques larmes tombèrent de ses yeux:
il se cacha un moment le visage avec les mains : puis tout à
coup poussant son cbeval à toute bride, il s'élança au milieu
des ennemis à la tête de ses gardes.
Le roi de Pologne fit toutce qu'on devoit attendre d'ua
prînce qui combattoit pour sa couronne. Il ramena lui-
même trois fois sçs troupes à la charge ; .mais il ne combat*
toit qu'avec ses Saxons ; les Polonois, qui formoient son aile
droite, s'enfuirent tous dès le commencement de la bataille,
les uns par terreur, les autres par mauvabe volonté. L'ascen-
dant de Charles XII l'emporta. Il gagna une victoire com-
plète. Le camp ennemi, les drapeaux, T^rtillerie, la caisse
militaire d'Auguste, lui demeurèrent. Il ne s'arrêta pas sur le
champ de bataille, et marcha. droit à Çracovie, poursuivant
Iç.roi de Pologne qui fuyoit devant lui.
Les bourgeois de Cracovie furent assez hardis pour fermer
leurs portes au vainqueur. Il les fit rompre: la garnison
n'osa tirer un seul coup ; on la chassa à coups de fouet et
de camte jusque dans le château, ^où le roi entra avec elle.
Un seul officier^ d'artillerie .osant se préparer à mettre le feu
à un canon^ Charles court à lui et lui. arrache la mèche ; le
commandant se j^e aui^. genoux, du roi. Trois régimens
•uédois. furent logés à discrétion chez les citoyens, et la ville
taxée à une contribution décent mille risdales.. Le comte
de Steinbock fait gouverneur de la ville> ayant ouï dire qu'on
îlvoit caché des trésors dans les tombeaux des rois de Po*
bgne, qui sont à Cracovie dans l'église de Saint Nicolas, les
fit ouvrir, on n'y trouva que des omemens d'or et d'argent qui
appartenoient aux églises; on en prit une partie, Charles XII
envoya niênie un calice d'or à une église - de Suéde, ce qui
tvroit soulevé contre lui les Polonois catholiques, si quelque
chose avoit pu prévaloir contre la terreur de ses armes.
ILjSQrtoit de Cracovie^ bien résolu de poursuivre le roi
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•» HlSTO«œ m CHARLES XIÎ. tir. n.
Aufruste sans felâche. A quelques milles de ta vitl^ son
cliefal'a*kbattit, et lui fracassa la cuisse. Il fallut le r^^bVter
à'Cracovie, où il demeura au lit six semaines entre fes ^uains
des chiitirgiens. Cet accident donna à Auguste lë loisir de
Bespirer. Il fit aussitôt répandre dans la Pologne et dans
l'empire, que Charles XII éiak mort de sa chute. Cette
fausse nouvelle, crue quelque temps, jeta tous les esprits
dans Tétonnement et dans l'incertitude. Dans ce petit in*
tervelle il assemble à-Marienbourg, puis à Lublin, tous les
ordres du royaume, d^à convoqués à Sendomif . ta foule
y fut grande : peu de imlatinats refusèrent d*j envoyer. Il
regagna. presque tous les esprits, par des largesses, par des
promesses, et par cette affabilité nécessaire aux rois absolos
^our Se faire aimer, et aux rois électifs pour se maintènîn
la diète fut bientôt détrompée tte la fausse nouvelle de là
mort du roi de Suéde; ma» le mouvement étoit déjà donné
à ce grand c^s : il se laissa emporter à l'impulsion quti
avek* reçue: tous ife -membres jurèrent de demeurer Mêles
à* leur souverain, tant les compiagnies sont sujettes aux
mriations. Le cardinal primat lui-même, affectant encore
tflHre attaché au roi Auguste, vint à la diète de LuWin : ïï
}^ baisa la main du roi, et ne'refusa point de prêter lescr;
netit'conmie les autres. Le serment consistoil à' jurer que
1^ n'wmt rien entrepris et qu'cm n'entreprendroit riçn con-
tre Auguste. Le roi dispensa le cardinal de 1» première parti<&
du serment, et le prélat jura le reste en rougissant. Lerér
sdtat de cette diète fui que la république de Pologne entr^
tiendroit une armée de cinquante miUe hommes à ses dépens
pour le service de son souverain; qu'on donneroit »t
semaines aux Suédois pour déclarer s'ils vouloienl la pa«
ou la guerre, et pareil terme aux princes de Sapieha, 1^
premiers auteurs, d^ troubles de LRhnaqie^ pour venir de*
jnander pardon s^n'toi de Pologne.
Mjus durant ces délibérations, Charles, XTJ, guéri d^ «a
Mes8ure> rc;nver8oît tout devant lui. Toujours, ferme dao»
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m. II. &OI lœ SOEDB.
k. dnsdn de> f<M^cer ks Polono» à délr6aer
leur, roîi il fît convoquer, par les t^triguei <hi, éstffdioal
pr»fit, une aouvelie^ assemblée à VarsoTie, pour fbppMérà
celle dt LubUn. Ses généraux lui représentoîent qte- celle
aihne pourroit encore avoir des loin^ni» el a^évanouir dan»
les délais ; que pendant ce temps les IMoscovitea s'aguerri»;
seient tous les jour» contre les tioupes qu'il ami bûasées ea
livoniè eà en- lii^i^ ; que les combels. qui se donooient
MUfenl dah& ceâ jprodnces entre les Suédois et les Russe»
o'éUMeot pas toufours à l'avantage des premiers ; et qu'enfui
n présmce y seroit peut^tre bientôt nécessaire* Cbarles^
aotti inébranlable dans ses pr^jets^ que vil daus^ses actions^
leur répondit. " Quand je devrois rester iei dnquant^
''«bs» je n!eii surûsai point, qfie je n'aie détrènéle roi de
*^PaI«gne.''
H laissa rassemblée de VajESOvie cftnJbattva psrémAhi^
mm et par. deà.écnls celk de LubUa, et cbeischer de^quos
JMtifier ses procéda daes lés lois du ropauie^ loistati|ott»
éqviKoquesy que.cbaque parti interprète. à. semblé, et que le
Sttcc^ seul vend incontestables. . Peur lui,. a^taug^acBl&
SCS troupes vietorieuses, de; six milles liowmes de 'cavalcsi%
et ik huit mille dlnisnterie, qu'il reçut de ^uede, il^mlrofae
ooito lea restes, de Fermée saxonne» qu'il avoit. battue ât
Cbsao, et qui avoit eu le temps âg se rallier et^deae giossie
Mdant que sa dmie de cheval: Tavoit retenu au. lit C3etle
msée éviteit ses approches» et se.retiroit vers laPrusse* au
BOid'Hmeatde Varsovie. La rivière de . Bug étoit entre M
tths ennemis. Charles passa à la, nage à la tète de se
cnakrie: rinfan^ie alla chercher eue gué liu-desaous. On
loin aux Saxons le premier mai 1703, dans un l^eu nommé
INiHesk. Le générai Stenau les commandoit au nombre
^environ dix mille. Le roi dé Suéde, dans sa marche pré*
%itée,. n'en avoit pas amené davantage, sûr. qu'un, moindre
loeibre lui sulfisoit. La terreur de ses annes étoit si grande
^ la moitié de l'année saxonne a'enfuit à son apprecbij^
^ Digitizedby Google "
«i HISTOIRE DE CHARLES XII. ,i.iv. ir.
aaasatto^re le c<HBbal. Le général Stenau fit ferme tin
lèotnent avec deux régiméns ; le moment d'après il fut Jai
ttème entraîné dan» la fuite générale de son armée, qui se
dispersa avant d'être vaincue. Les Suédois ne firent- pas
mille prisonnierSi et ne tuèrent pas six cents hommes, ayant
plus de peine à les poursuivre qu'à les défaire. •
• Auguste^ à qui il ne^ restôi^ plus, que les débi» de ses
Saxons liattus d^toiasuc6téfi,«€i retiia, en bâte dans Thom,
vieiiletviUe de la Fcifôse royale sur la Vistnley laquelle est
sous.la; protection des Bc^loaois. Xbarles se disposa 'aussitôt
à llassléger,* Le roide Pologne, qui ne js'y crut ps^ en sûreté
se retira et courut dans tous les endroits de la Pologne où il
pOttvoii rasseinblér encore quek|ues soldats, et où les courses
des Suédois, n'aybient pmnt pénétré^ . Cep^dant Charles,
dans tant de marches si vives, traversant les rivières à ia hage,
et courant avec^son mfanteri^ montée eli( croupe derrière ses
cavaliers, u^avoit {m ameuer* de canon devant Thom. 11 lai
fallut attendre qi^ii'lui en vint de Suéde par mer<
£n attendant il se posta à quelques milles de la yitle ; il
s'avançoit souvent trop près des remparts pour la recon*
noltre. L'habit simple qu'il portoit toujours lui étoit, dans
«es dangereuses promenades.^ d'une utilité à laquelle il n'isn^o^
jamais pensé? il l'empièchoitd^être remarqué et d'être choisi
par les ennemis,, qui. eussent ticé à sa personne. Un jour
«'étant ai^ncé fort près avec un de ses- généraux Wmtiié
Ueven^qui, étoit vêtu d'un habit* bleu, galonné d'or; il
craignit que ce général ne fût trop aperçu, il lui ordonna de
se mettre.derriere lui^ par un. mouvement' de cette magna*
nimité qui lui- étoit si naturelle, que même il nexfaisoit pas
l'éflexion qu'il jexposoit sa vie. à un dapger manifeste pouiP
* On avoit dans les premières éditioi» donné un habit d'écsr-
late à cet officier ; mais le chapelain ^'orberg a si bien démootré qat
i%abit étoit bleu, qu'on a corrigé cette faute.
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liv. II. HOI DE SUEDE. f^
sauver celle de son sujet. Lieven connoissant trop ^r4 sa
iiute d'avoir mis un habit remarquable, qui exposoit aussi
ceux qui étoient auprès de lui, et craignant également pou|:
kroi, en quelque place qu'il fût,^ hésitoit s'il devoit obéir;
dans le moment que duroit cette contestation, le ror le prend
par le bras, se met devant lui et le couvre ; au même instant
«ne volée de <:anon, qui. venoit en flanc, renverse le général
mort sur la place même que le roi quittoit à peine. La
mort de cet homme tué précisément au lieu de lui, et parce
qu'il Favoit vouln sauver, ne contribua pas peu à l'affermir
daps Fopinion où jl fut toute sa vie d'une prédestination ab-
solue, et lui fit croire que sa destinée, qui le conservoit
si singulièrement, le réserybit à l'exécution des plus grande»
Tout lui réussissoit,.et ses négociations et ses armes étoient
également heureuses. II étoit comme présent dans toute la
Pologne ; car son grand maréchal Renschild étoit au cœur
de cet état avec un grand corps d'armée. Près de trente
mille Suédois sous divers généraux, réps^ndus au nord et ^
l'orient sur les frontières de la Moscovie;. arrètoient les ef^
forts de tout Terapire des Russes, et Charles étoit à TocciT
d«nt„à l'autre bout de la Pologne, à la tète de ses troupes.
te roi de Danemarck, lié par le traité de Travendal^
que son impuissance l'empèchoit de rompre, demeuroit dan^
le «lence. Ce monarque, plein de prudence,, n'osoit faire,
édater son dépit de voir le roi de Sue.de si pfès de ses états.
Plus loin, en tirant vers le sud-ouest, entre l^s fleuves de
fElbe et du Veser, le duché de Brème, dernier territoire de&
anciennes conquêtes de la Suéde, rempli de. fort es garnisons»
Ottvroit encore à ce conquérant les portes de la Saxe et dô
l'Empire. Ainsi depuis l'océan Germanique jusqu'assez: prè»
de lembouchure du Borystheue, cç qui fait la largeur de.
l^rope, et jusqu'aux portes de Moscou, tout étoit dans la
consternation et dans l'attente d'une révolution entière. Se*
niasçaux, maîtres de la mer Baltique, étoieut employés ki
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fH ^ HISTOmE DE CHAMLÉS XII. tiv. !î,
tfUifppFter dans son paysr les prisonniers fsiits en Pologne.
' tM Suéde tranquille, au niîlleu, dç ses grands motivemenS,
goûtoit une paix profonde» et jouissoîtdé la gloire- de sOn^
roi, sans en porter le poids, puisque ses troupes victorieuses
étoient payées, et entretenues aux dépens des vaincus.
Dans ce silence général du nord devant les armes dé
Cbarles Xll, la ville de Dantzick osa lui déplaire. Quatorze
frégates el quarante vaisseaux de transport amenoieut au
roi un renfort de six mille hommes, avec du canon et des
inanitions, pour achever le siège de Tfaom. Il falloit qœ
ce secours reniontàt la Vistule. A l'embouchure de ce fleuve
est Dantzick, ville riche et libre, qui jouit avec Thom et
Elbii^g des mêmes privilèges eu Pologne, que les villes im-
périales ont dans l'Allemagne. Sa liberté a été attaquée
tout-^>tour par les Danois, la Suéde et quelques princes al-
lemands, et elle ne l'a conservée que par la jaloUsié qu'ont
ces puissances les unes des autres. Le comte de Steinbock,
un des généraux suédois, assembla le magistrat de la part
du roi, demanda le passage pour les troupes et quelques
munitions. Le magistrat, par une imprudence ordinaire à
ceux qui traitent avec plus forts qu'eux, n'osa ni le rehiser,
ni lui accorder nettement ses demandes. Le général Stein-
bock se fit donner de force plus qu'il n'avoit demandé : on
exigea même de la viite une contributiou de cent mille écus,
par laquelle elle paya son refus imprudent. Enfin les t|K>npe9
de renfort, le canon et les munitions étant arrivés devant
Ttiom, on commeit^a le siège le 22 septembre.
Robel, gouverneur de la place, la défendit un mois avée
cinq miHe hommes de garnison. Au bout de jcé temps il
fut forcé de se rendre à discrétion^ La garnison fut faite
prisonnière de guerre et envoyée en SiTede. Robel fut pré^
fente désarmé au roi. Ce prince, qui ne perdoit jamais VoC"
casidn d'honorer le mérite dans ses ennemis, lui donna une
épée de sa main, lui fit un. présent coiisidérable en argent,
tt le renvoya sur sa parole. Xilionneur qu'avait la ville àe^
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hW.iU ^ »«l DE S«ÊDB. M
%m ékmùt imctoîl^ aulrelob Cfepernk, \t {«R^iMitt^ dti
nti- ^^ém« dtt: nmidir, ne lui servit de mti «uprès d«ttti>
vtÎD^iiciir trop peuimtrwl de ces matières, el qui ne shvm»
entpreiPécompenser^ue la valeur. La viHe petite et pauvre,
te oottdfttmiée à payer- éÔjOOO^us ; contribution exceasiv»
poar^He.
Elbingi birtie sur un bra$ de la Vtetole, fondée par Ito
cto^rfkrs^ teutons, et annexée aussi à la Pologne, ne pto-
toa pas de la faute des Dantzickois; elle balao^ trop»
àdiwner passage^ aux troapes^ su^Ws^. Elle en fut pkift
aén^ment punie que Dantjsicfc. Charles y entra le 13 de
décembre^ à la tète de quatre mille hommes, la bay on-
nette au bout du fusil. Les habitans épouvantés, se jeté*
itBt à genoux dans les rues> et lui demandèrent raiséri-
wde. Il' les fit' tous désarmer, et logea ses soWats chea
1«» beui^eis^: ensuite ayant mandé le magistrat, il exî*
gea^ fe jouv n»èmev »«« contribution de deux cent soixante
niMe. écut» Il y avoit dans la ville deux cents pieceg
àéf omoB et qu<^re cent» milliers de poudre, qu'il saidté
Wiie bataille gagnée ne lui ^pas valu djs si grands avwi-^
tag». ^
'Pous oes' succès 'étoient les* avant-coureursr du délrènc^
OMQl du roi Auguste&
A^.peino k camUtal avoit jôré à spn roi de ne riei»
entreprendre contre lui, qu'il s'étoit rendu à Passembiée
de.yai8ovîe/ toujours smis le prétexte de- la'pisÛ3&.. Il
^nim, q|»'p9flaiit que* de' concorde ei chsbéissanca, nmià
Moompagné de soldats; levés, dan» ses; têfrea. BoHn il
W.le^ masque^ l«rf 4 février 1704^ il déclara^ au.. nMi|
4iraaseaiblé4|^ At^mié, êlutewr de SèMei %1duMl^è^pol^4èif^
^cémtn n e • âà JMogne, On y prononça, d'une eommuMi
^^i^que-le titef étoit vacaià« La volonté du md^Bucde^
^ptr' ooBséqaeUfe* celle do ^ cette diète, étoîl de ébomm^
i«|iriiic#-JlkK|M9$obie^ letrèna du-mleaiv a
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«fi HISTOIRE DE CHARLES XII. Liv. ii,
Jacques Sobiesky étoit alors à BresHia en Silésie, atten-
dant avec impalience la couronne qu'avoit portée son père.
Il en recevoit les complhnens, et quelques flatteurs lai
^voient même déjà donné le titre de miyesté en lui par-
lant. Il étoit un jour à la chasse, à quelques lieues de
Breslau» avec le prince Constantin, l'un de ses frères;
trente cavaliers saxons, envoyés secrètement par le roi
Auguste, sortent tout-à-coup> d'un bois vobioy entourent
les deux princes, et les enlèvent sans résistance. On avoit
préparé des chevaux de relais, sur lesquels ib furent sur le
4:hamp conduits à Leipsick, où on les enferma étroitement.
Ce coup dérangea les mesures de Charles, du cardinal et
•de rassemblée de Varsovie.
La fortune, qui se . joue des tètes couronnées^ mit
presque dans le même temps le roi Auguste sur le pont
d'être pris lui-même. Il étoit à table, à trois lieues de
Cracovie; se reposant sur une garde avancée» postée à
quelque distance, lorsque le général Rçnschiki . parut
«ubitement» après avoir enlevé cette garde. Le roi de
Pologne n'eut que le temps de monter à cheval, lui
onzième. Le général Renschild le poursuivit pendant
quatre jours, près de le sai^r à tout moment. Le roi
fuît jusqu'à Sendomir : le général suédpb l'y suivit encore^ i
et ce ne fut que par un bonheur singulier que ce prince
échappa.
Pendant tout ce temps le parti du roi Auguste trsW
toit celui du cafdinal, et en étoit traité récipioqvemeiiV
de tnrître à la patrie. L'armée de la courapne étoil
partagée entire les deux factions. Auguste, forcé eiU
d'accepter le secours des Moscovites» se repentit da a'^
pas avoir eu recours assez tÀt. Il coaroit, - taotM ei
Saxe» où ses ressoufces.. étoient épuisées, tantôt il rcteun
noit en Pologne, où l'on n'osoit le servir. D'un avti^
c^ le roi de Suéde» vietprieux et tianquiUei ttgffft
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imit. KOI DE SUEDE. 6t
ea Polo^e plus absQliHaent que n'avoit jamais lait
Auguste.
Le comte Piper, qui avoit dans l'esprit autant de
politique que son maître avoit de grandeur dans le sien»
proposa alors à Charles XII, de prendre pour lui-même
la couronne de Pologne. 11 lui représentoit combien
l'exécution en étoit facile avec une armée victorieuse,
et un parti puissant dans le cœur d'un royaume qui lui
étoit déjà soumis. Il le tentoit par le titre de défenseur
de la religion évangélique^ nom qui flattoit Tambitiou
de Charles. 11 étoit aisé, disoit-il, de faire en Pologne
ce que Gustave Vasa, avoit fait en Suéde, d'y établir.
le luthéranisme, et de rompre les chaînes du peuple,
esclave de la noblesse et du clergé. Charles fut tenté
UQ moment, mais la gloire étoit son idole. Il lui sacrifia
lOB intérêt, et le plaisir qu'il eût eu d'enlever la Pologne
au pape. II dit au comte Piper qu'il étoit plus flatté
de donner que de gagner des royaumes; il ajouta -en
souriant: voiw étiez fait pour être le ministre d'un jnrince
italien,
Charles éloit encore auprès de Thom, dans cette
partie de la Prusse royale qui appartient à la Pologne:
il portoit delà sa vue sur ce qui se pa^soit à Varsovie ;
et tenoit en respect les puissances voisines. I^ prince
Alexandre, frère des deux Sobiesky enlevés en Silésie,
vint lui demander vengeance. Charles la lui promit
datant plus qu'il la croyoit aisée, et qu'il se vengeoit
lui-même. Mab impatient de donner un roi à la Pologne,
il proposa au prince Alexandre de rfionter sur le trôn^
dont la fortune s'opiniâtroit à écarter son frère. Il ne
i*attendpit pas à un refus. Le prince Alexandre lui dé-
daia que rien ne pourroit jamais l'engager à profiter du
malheur de son aîné. Le roi de Suéde, le comte Piper,
tOM ses anris, et sur-tout le jeune palatb de Posnaaie»
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6i HÎSTOIRK DB CHARI^ XII. mti ni
Simikli» Leczimky, le |M«sier«nt d'aeceptêr \» t^nrOoDèi
Il fut iDébranlable : les princes voisins apprirent avec
étonnenieot ce refus iooui, et ne savoient qui ils det oient
admirer davantage, on un rai de Sitede^ quî^ à V^ de
vingt^rok ans, doimeit la couronne de Pologne ; oi le
fKRBce Alexandbe qui larefaioit.
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uv.iH^ «ai J)£ SDEDB. i$
LIVRE TROISIEME.
ARGUItBNT.
i Leezùduy Un rw de Pologne, Mort du eardm^frim^. Bédé
mroiU iM général Sçhulemboutg. ExpUné du czar, Fondtdion de
Fêtertbowg. « Bataille de frauenstad, Charles entre en Saxe,
Faix d^AUranstad» Auguste abdique la couronne^ et la cède à Stanislas,
Le général Patkul, pUnipotetttiaire du ezar^ est roué et écartdé,
Charles reçoit en Saxe des ambassadeurs de tous les princps, Uvu
•Mrf 4 Dresde fmr Auguste anoMt de pwrtir,
Lë jeune Sl^aoîdiitt Leczinsky étoit alors député de l'as*
lemblée de Vatrspvie, pour aller rendre compte au rx>i de
Suéde de plusieurs diiCéreus siurvenus dans le temps de
Tenlèvenijeut du prince Jacques, Stanislas avoit une pby-
ôoBoinie heureuse* pleine de hardiesse et de douceur, avec
«I air de prohHé et de f rauciiise, qui» de tous les avantages
ntéri^UiSf jcst sans dpute le plus grand, et qui donne plus
die pcrids aux paroles qfie l'éloquence même. La sagesse
•vec hiqii^le U parte du roi Auguste^ de rassemblée, du
mi^imi primat, et; des inlérèls diflérens qui divi^oient la
Pologne, fffi^ppa Charles. Le roi Stanislas m'a fait ^'hon-
wur de me raconter qu'il dit en l^iu au rpi de Suéde : Corn*-
mtué foum^nefiipu^ fyiire une électkfn^ si kedewp princes
JiOfUes ^t C^tÊstantêH Soki0ky s&ftt captifs? et que Charles
W répopdîl : Commwt d&Uvrer^^t'^fBtn: ^ république ^ si on ne
fmtpM m^élef^Um? Cette cQnv«r*^tian lut runique brigue
^ mit Stanislas sur 1^ tr6ne. Charles pcolon^ea exprès la
canférenee, powrniîeul sonder le génie du jeune député.
Après Vaudience, il dH tout haut qa'il n*ap<Ht jami^i^ v»
thoBime sf ptv^eà cêncilirr tous les partis. Une tarda p^
^ i^ormer du caractère du palatin Leczinsky. H sut qu*il
; Digitizedby VjOOQIC
>k HI^OIRE DE CHAELES XH. Lir. m.
étoit plein de bravoure, endurci à la fatigue : qu'il couclioit
toujours sur une espèce de paillasse, n'exigeant aucun ser-
vice de ses domestiques auprès de sa persouue : qu'il étoit
d'une tempérance peu commune dans ce climat : libéral avec
économie, adoré de ses vassaux, et le seul seigneur peut-ètrt
en Pologne qui eût quelques amis, dans un temps otî Ton ne
connoissoit de liaisons que celles de Tintérêt et de la faction.
Ce caractère, qui avoit eu beaucoup de choses du nppoti
avec le sien, le détermina entièrement. 11 dit tout haut après
la couféreuce : Voilà un homme qui sera toujours mon ami:
et on s'aperçut bientôt que ces mots siguif ioient : Voilât»
homme qui sera m.
Charles, qui^s'étoit déterminé en un moment, n'eût jamais
pu trouver en Pologne un homme plus capable de concilier
tous les partis que celui qu'il choisissoit; le fond de spn
caractère étoit Thumanité et la bienfaisance. Quand Stanislu
fut depuis retiré dans le duché de Deux>Ponts, des partisans
qui voulurent l'enlever, furent pris eu sa présence : que vous
ai'jefait, leur dit-il, pour vouloir me livrer à met ennamsî
De quel pays êtes-vousl Trois de ces aventuriers répondi-
rent qu'ils étoieiit François: eh bien! dit>il, ressemblez à
vos compatriotes, que f estime, et soyez incapables e^une mau-
vaise acHon. ' En disant ces mots, il leur donna tout ce
qu'il avoit sur lui, son argent, sa montre, sa botte d'or, et ils
partirent en pleurant et en l'admirant t voilà ce que je sais
de deux témoins oculaires.
Je puis dire avec la même certitude, qu'un jour, comme
il réglmt Kétat de sa maison, il mit sur la liste un officier
françois qui lui étoit attaché. En quelle qualité votre ma-
j^té veut-elle qu'il soit^ur la liste, lui dit le trésorier ? En
qualité de mon ami, répondit le prince. J'ai vu un long
ouvrage qu'il avoit composé, pour réformer, s'il se pouvoit,
les lois et les mœurs de son pays; il sacrifie dans cet écrit
les prérogatives de la noblesse dont il étoit membre, et de la
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\Vf. m. HOI DE SUEDE. fi
wym\é qu'on lui a voit donnée^ au bien public et aux beàoîof
du peuple : sacrifice qui vaut de» batailles gagnées.
Quand le primat de Pologne sut que Charles XII avoit
Domuié Je palatin Lecziusky , précisénient comme Alexandre
iToit nommé Abdolonime, il accourut auprès du roi de Suéde
poiD^ tâcher de faire changer celte résolution ; il vouloit faire
tomber la couronne à un Luboniirsky. Mais qu^avez-vouê è
Mégua* contre Sfanislag Letzinsky, dît le conquérant? Sire,
(fit le primat, il est trop jeune i Le roi répliqua sècbemeut, t7
eif à peu près de mon â^e^ tourna le dos au prélat, et ans»-
tôt envoya le comte de Hoorn signifier à rassemblée de Var-
lovie qu'il falloit élire un roi dans cinq jours et qu'il falloit
élire Stanislas Leczinsky. Le comte de Hoorn arriva le sept de
juillet ; il fixa le jour de l'élection au douze, comme il auroit
ordonné le décampement d'un bataillon. Le cardinal pri-
tnij frustré du fruit de tant d'intrigues, retourna à Tassem^
Uée, où il remua tout pour faire échouer une élection où il
n^veit point de part. Mais le roi de Suéde arriva lui-même
mogniio à Varsovie ; alors il fallut se taire. Tout ce que
p«t faire le primat, fut de ne point se trouver à l'élection; il
ae itduîsit à une neutralité inutile, ne pouvant s'opposer an
nioqueur, en ne voulant pas le seconder.
Le samedi douze juillet, jour fixé pour Tétection, étaat
venu on s'assembla à trois heures' après-midi au Colo,
champ destiné pour cette cérémonie : Tévêque de Posnaiiie
W présider à Fassemblée à la place du cardinal primat.
H arriva suivi des gentilshommes du parti. Le comte de
Hoorn et deux autres officiers-généraux assistoient pub-
liquement à cette solemnité, comme ambassadeurs extraor-
binaires de Charles auprès de la république. La séance
(hifa jusqu'à neuf heures du soir; l'évêque de Posnanie la
fiait, en déclarant au nom de 4a diète ^Stanislas élu roi de
Pologne : tous les bonnets sautèrent en l'air, et le bruit des
tctthunations étouffa les cris des opposans.
U ne servit de rien au cardinal primat, et à ceux qui avoient
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^ HISTOIttfi DE CHARÏ.ËS XII. M¥. %it.
imii« demeurer neutres, de s'être aliseotéâ 4e l^éfteelieB:
il fallut que dès le lendemaki ils vikiasest t»«s rettife hoa-
Jkoege au nouveau rot ; il les reçut comme s'U^ftt été content
dWx. La plus grande mortification qu'ils eurent^ fut d^ètse
tiU^fés de le suivre au quartier du roi de Sue^. Ce ^maoe
MiÉiit au soaiveeftîn qu^tl venoit de faire t«rus les ^ooaeua
dès à-un rw de ^lôgne, et p^ir donner plus de pokU à«i
iBonveHe dignité, on loi assigna de Taigent et des troupes.
Cintrles XH partît aussitôt de Varsovie pour aller
4u^ver la conquête de la Pologne. Il avoit donné ceadea-
V0US à son année (levant i.éopoklV capitale du grand palati^
lami de Russie^ place importatite par elWMnème ; et plus an-
«ère pas les richesses dont elle étok neniplie. On croyait
^eHe-tîendmt quinee jours, à cause dm fortifications ^lae
^ roi ièuguste y avoit faites. Le eouquérant Hin^wMit le
S acpÉembffo» et le lendemain la pnt d-a«saut Toutxe qj^
osa* résister fui passé au fil de Tépée. Les troapa» ^ictia-
netnes, et makresses de la ville, ne se^ débandaient point
ipour courir au.pîlk^» malgré la l^ruit: des<trésars, qniétoient
dans Léopold. £11«8 se rangerenfc^n batailla dans i^^^^rande
ylaee. L^ oe qitt restoii de la ^aiuifion vint, se raftdi»fpit-
8onniet% de guerre^ Le rQi;fit publier à s^m de ttompa qjae
Mm œnx des faabitans qa» auroîent des. etfeta. appart^nans
%u roi Auguste, on à ses adhérensy'les appQiltas«enjt:eux^nièffles
mwmt la fin du jour, sur peine de la iie* Les mesocea forant
M bien prises cpie peu osèrent désobéir; on afi|H>rta au fai
^[uatre cents caisses remplies d^r et d'ai|^nt monnojfé» de
vaisselle et tie choses précieuses.
Le commencement du regrté do Stsmtsia». fut mUrqué
pyesque le même jour par un. événement bien difféMot.
Quelques affaires qiii demandoient abaolniiieut sa présence
l?avoient obligé de demeurer dans Varsovie* Il avoit aatc
Ibi sa mère, sa fenmfie et ses deux, filles. Le cardinal pri-
mat, Tévêque de PcMuanie, et quelques grands de Potogne,
«omposoîent ^ nouvelle cour. £Ue étail |;^«dé^.par six
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ur. îftï. fiOI M£ SUEDE. f3.
miHe Foloodis de rarmée de la eourame, depuis peM passés
i son ^«rvke, mab dotit la f^iélité i/avoît point cmom été
épotnrée. Le général Hoqni» gomrtmewr de la viiley vtwok
IfliilletiiB aveè kn que <}imwe œnls Saédois. On étMt à
Vi&fS(n^ dans nmttkmptAlké profonde, et Stanislas eomptok
«a partir dans pe« de .{ours p#iir aller à la conquèle ép
Léopold. TdQt à coup ilappiend qu'ine ^née noadnens^
«pprodw de lli viAè, <?Àoît fe soi Awywtft, qm, par im
aoiiyd eliofft, et par une des phis iMiks jna«ciies ^pK jannis
gioéisl ait luîtes, &ymt downé .le cbange «timi de Suéde,
venoit avec vingt nâlle bonnes iandae dm» Ywmmit et e»-
InefSMirâal. -
Varsodrie^oit lièBrwal {artjBée, eties tfoiipies polonoise^
]|0lfi4S{eiidoient^;peu«Ô8eft. A«iga6teaw)itdêsioteUig^ncei
1^9^ te îriUe^ si Stâai^ deN«eiir«iit il éjM jperdit. Il eor
«agtt sa famîUe eftâPosmoiie» mas la garde dee Icoupes pdoï-
au«qpiettfls il ^ Ifoitvie phia. Q en^ dans œ^Misordre
fevùi sa «e0ûB<fe ^le, Agée d -un an. £Ke fait ^née
^m «cttmiœ. 11 la lelxoavn dans une auge d'écurie, oà
4iâVQÎt,élé abandonnée dans un yiUage y^méa^ -C'est ce
fleîe>faiiai«Btenducoiifei^r» Oeiatcewèmeen&UBt^ete
.dliînéef «près de plus grandes vicissitudeat, lit di^puis reine
daJFaaBce* Le cardin^il primat s'enirà des.premîeissurl^
fciMrtietes de ^Prusse. PIti»eurs gentilshoiiiHnes prirent dea
dipÉn iSfféiÊe^ : le nonvean toi partit éni même pour
dar^omvr Cbarles XB, i^pwniint de iMVNieteuae i soulr
Ur^es^ïiîsgraGes, «t ^oé de qa^er sa 'Capîtaleeix saœa^Mas
•piii y avnir été jéia souvierain^ «L'évèqne 4e f^osnaoîe lut le
lîrt^Éd «emplit iuir^ «neonaiadie dfingereuse le «etint dans
Ms&k. Une partie des sit n»ilepolMK»s mtiwt'Stainslas,
«Mi«l9e-«9cortoit «i 4aniyié. On env0t|^a «n 'Posnanie ceux
<W> Tourne veidott point exposer ia f idéMé à la ovulation 4e
4ldM# an'MTvice^du roi Auguste, ^our 4e g^ral iioom,
^fHêMt g o u f om e U r 4e «Varsovie an nom 4u roi de ^uede,
^vec ses quinze cents "Suédois dans le ^iftteau.
E
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•r^ HISTOIRE DE CHARLES XII. nv. m.
Auguste entra dans la ci^itak eu souverain irrité et
victorieux. Les halntaos* déjà tançonnés par le roi de
Suéde, le furent encore davantage par Auguste. Le palais
du cardinal, et toutes les maisons des seigneurs confédérés^
tous leurs Inens, à la ville et à la campagne, furent livrés an
pillage. Ce qu^l y eut de plus étrange dans cette révolutioa
passagère, c'est qu'un nonce du pape, qui étoit venu avec k
roi Auguste, deauinda, au nom de son raaHre, qu'on lui li-
vfàt févèque de Posnanie, comme justiciable de la cour de
Rome, en qualité d'évèque et de fauteur d'un prince mis sur
k trône par les armes d'un luthérien.
La cour de Rome, qui a toujours songé à augmenter son
pouvoir temporel à la faveur du spirituel, avoit depuis très
long4emps établi en Pologne une espèce de jurisdietioD, à
la tète de laquelk est le nonce du pape. Ses ministres
n^avoknt pas manqué de profiter de toutes les conjonctures
favorables pour étendre leur pouvoir, révéré pair la moitié
lude, mais toujours contesté par les plus sages. Us s'étcriast
attribué le droit déjuger toutes les causes des eeclésiastiquei^
et avoient, surtout dans les temps de troubles, usurpé beaft-^
coup d'autres prérogatives, dans lesquelles ib se sont mttkh
tenus jusque vers Tannée 1728» où l'on a retranché ces âbu%
qui ne sont jamais réformés que lorsqu'ils sont devenus tool-
à-fait intolérables.
Le roi Auguste, bien aise de punir Févéqoe de Posnanie
avec bkiiséaoce, et de plaire à la cour de Rome, contre
laquelk il se seroit élevé en tout autre temps, remit le prékÉ
poibneis «entre les mains du nonce. L'évèque, après evoir
vu piller sa maison, fut porté par de? soldats chez le ministre
italien, et envoyé en Saxe, où il mourut Le comte de Hoont
essuya dans le château où il étoH reiîfeoné, le feu contîmcl
des ennemis; enfin la place n'étant pas tenable, il se rem^
prisonnier de guerre avec ses quinze cents Suédois* Ce fiilf
là k premier avantage qu'eut le roi Auguste, dans le torrent
de sa mauvaise fortune, contre les armes victorieuses de
^ennemi.
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liv.ni.. ROI DE SUEDE. 75
Ce dernier cKori étoit l'éclat cP un feu qui s'éteint. Ses
troupes assemblées à la faâte» étoîent des Polonois prêts à
l'abandonneiLà la première disgrâce ; des recrues de Saxons
qû n'avoient point encore tu de guerre; des Cosaques
T^abonds, plus propres à dépouiller des Vaincns, qifâ
nÎBcre : tous tremblotent au seul nom du roi de Suéde*
Ce conquérant, accompagné du roi Stanislas, alla cherr
dier son ennemi à la tête de TéHte de ses troupes. L'armée
moone fuyoît par-tout devant hii. Les villes lui envoyoient
hum clefs de trente milles à la ronde : il n'y avoit point de
joor qui ne fût signalé par quelque avantage. Les succès
deveooient trop familiers à Charles. Il disoit fue (fétok
ékr à la chaste, plutôt que faire la guerre^ et se j^aignoit
de se point acheter la victoire.
Auguste confia pour quelque temps le commandement
<ie son armée au comte de Schulembourg, général très^
I hhiBfi et qui avoit besoin de toute son expérience à la tète
année découragée. Il songea plus à conserver les
de son maître, qu'à vaincre : il faisoit la guerre avec
et les deux rois avec vivacité. Il leur d^oba des
occupa des passages avantageux, sacrifia qodque
pour donner le temps à son infanterie de se r^irer
«iireté.
Après bien des ruses et des contre'-marches, il se tixmva
f^jîm Punits, dans le pahitinat de Pdsnanie, croyant que
hwé^ Suéde et le roi Staai^as étoient à cinquante lieues
4kM# U apprend en arrivant que les deux rois avoient
cinquante lienes en neuf jours, et venoient Fit^uer
à douze mille chevaux. Schulembourg n'avoit p«&
flMHkinille cavali^s, et huit mille fantassins : il faUoit se
Miaiir contre une armée supérieure, contre le nom du roi
fcfceje, et contre la crainte naturelle que tant de défaites
iH|iléi0iit aux Saxon». Il avoit toiyours prétendu, malgré
Ml de» généraux allenaands, que Tinfanterie pouvoit résisfer
campt^e» même ^ns thevauX de f rise, à la cava-
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76 HISTOIRE DE CHARLES XII. liv. ni.
)erîe: il en osa faire ce jour là Texpérieiicc contre ^ette
cavalerie victorieuse, commandée par deux ro», et par Tél^
des généraux suédois. Il se posta si avantageusement qu'il
ne put être entouré. Son premier rang mit m\ genou en
ferre, il étoit armé de piques et de fusils: les soldats ex-
trêmement serrés, présentoient aux chevaux des ennemis
une espèce de renapart hérissé de piques et âe isfityonnettes ;
le second rang, un peu courbé sur les épaules du premier»
tiroit par dessus; et le troisième debout faisoît fen^ea
même temps derrière les éeux autres. Les Suédois foodi-
reai avec leur impétuosité ordinaire sur les Saxons» qui ks
Attendirent sans s'ébranler. Les coups de fusil, de pique et
<k bayoïmette efkiroucherent le$ chevaux, qui se cabroient,
au lieu d'avancer. Par ce moyen l^s Suédob n'attaquèrent
qu'en d^ordre, et les Saxons se défendirent en gardant leurs
Tangs. / '
Si Cbcurles avoit faiit mettre pied à terre à sa oavidene,
l'armée de Schulembourg étoft détruite sans tessoaree. Ce
gétiéral necraignoit rien tant : il s'attendoit à tout moBMDt
^[ike les emiemis alloient .prendre ce parti; mais ni le roî de
^uede, qui avoit si sonvent mis'en pratique toutes les nset
4e ia gueiVe, ni aucun de ses généraux n'eurent cette idée.
Ce combat inégal d'un corps de cavalerie contre des ianta»-
am, interrompu et recommencé à piusieurs iieprises, dura
trois heures. Les Suédois perdirent plus de cfaeva«K que
d'bonmes. Schiilembourg céda enfin ; mais ses troupes ne
lurent pas rompues. Il en fit «a bataiUon quarré long^; «1
quoique chm^é de cinqjblessures, il se retira en bon onhc^
•en cette forme, au milieu de la nuit, dans la petke ville 4k
Guraa, à trois lieiies du champ 'et bataille. A peine icenH
tnençoit^l à respirer dans eet endroit, que les deux xak
paroissent tout-à-coup denri«re lut.
Au-delà de Gurau» en tirant veis le fieave de l'Odert
étoit un bois épais, à travers lequel le général saxon mm
^son infanterie Jatignée. l^es âuédw» saos se febMÉcTi k
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wv. iri. ROI DE^ I^EDE* JT
poursuivirent par k bois même, avançant avec difficulté
dans des routes à peine praticables pour des gens de pied.
Les Saxons n'eurent' tfaversé le bois que cinq heures avant
ht cavalerie suédoise. Au sortir de ce lK>b coule la rivière
de Parts, au pied d'un villi^ nonmié Rut&en ; Scliutea»*
bourg avoit envoyé en diligence rassembler des bateaux : S
lait passer la rhiere à sa troupe, qui étok déjà dtmimiée de
jnoitié. Charles arrive dans le temps que Schulemboàrg
étoit à Tautre ^rd. Jamais vainqueur n'avoit poursuivi si
vivement son ennemi. La réputation de Schulerabourg dé-
pendoit cfécbapp^ au roi de Suéde: le roi de son côté,
croyoit sa gloire intéressée à prendre Schulembourg et le
reste de son armée : il ne perd point de temps, il fait passer
M cavalerie à la nage. Les Saxons se trouvoient enfermés
entre cette rivière de Parts et le grand fleuve de TOder, qui
prend sa source dans la Silésie^ et qui est déjà profond et
r^ide en cet endroit,
La perte de Schulembourg paroi^soit mévitable : il essaya
CBcore de se retirer de cette extrémité, par un de ces coupa
fc fart qui valent des victoires, et qui sont d'autant pluf
gkiieux que la fortune n'y a point de part. Il ne lui restoil
plos que quatre mille hommes ; un moulin, qu'il remplit de
gnaadiers, étoit à sa droite, un marais à sa gauche : il avoit
on fossé devant lui, et son arriere-garde étoit sur le bord de .
rOder. . H u'avoit point de pontons pour traverser ce fleuve ;
«lis dès la veille i) avoit commandé des radeaux. Cbfirie»
mbe, attaque aussi-tôt le moulin, persuadé qu'après l'avoir
piis il faudra que les Saxons périssent, ou dans le fleuve»
: oa kft armes à la main, ou que du moins ils se rendeal h,
^bcrétioa, avec leur général. Cependant les radeaux étoieat
Mu, les Saxons traversoient l'Oder à hi favey» de la nuit ;
^ quand Charles eut forcé le moulin, ^ ne trouva plus d'ar^
nèi ennemie. Les deux rois honorèrent par leur» éloges
' «iite retraitoy dont on parije encore avec admiratieii
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78 HISTOIRE DE CHARLES XH. Liv. m,
l'Empire ; et Charles ne put s'empèdier de dire : Ai^our-
d'hui Schulemhourg nous a vaincui.
Mais ce qui (aisoit la gloire de Schulembourg n'étoit
guère utile au roi Auguste. Ce prince abandonna encore
une lots la Pologne à ses ennemb ; il se retira en Saxe, et
fit réparer avec précipitation les fortifications de Dresde,
craignant déjà, non sans raison, pour la capitale de ses
états héréditaires.
Charles XH yoyoit la Pologne soumise ; ses généraux, à
son exemple, venoient de battre en Courlande plusieurs petits
corps Moscovites, qui, depuis la grande batdlle de Narva,
ne se montroient plus que par pelotons, et qui dans ces
quartiers ne faisoient la guerre que comme des Tartanes
vagabonds, qui pillent, qui fuient, et qui reparoissent ponr
fuir encore.
Par-tout où se trouvoient les Suédois, ib se croyoieot
sûrs de la victoire, quand ils étoient vingt contre cent.
Dans de si heureuses conjonctures Stanislas prépara son
couronnement. La fortune, qui Tavoit fait élire à Varsovie
et qui l'en avoit chassé, Ty rappela encore, aux acclamations
d'une foule de noblesse que le sort des ânnes lui attachoit.
Une diète y fut convoquée; tous les obstacles y fnreut
applanis ; il n'y eut que 1» cour de Rome seule qui le tra-
versa.
Il étoit naturel qu'elle se déclarât pout le roi Auguste,
qui de prote^nt s'étoit hit catholique pour monter survie
trène, et contre Stanislas, placé sur le même trône parle
grand ennemi de la religion catholique. Clément XI, alon
pape, envoya des hreh à tous les prélats de Pologne, et
surtout au cardinal primat, par lesquels il les menaçoh de
Fexconraaunication, s'ils osoient assister au sacre de âtanislas,
et attenter en rien contre les droits du roi Auguste.
Si ces hteh parvenoient aux évêques qui étoient à Var»
tovie, étoit à craindre que quelques nas n'obéissent par
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tiy. ni. ROI DE SUEDE. 79
ioMeaêe, et que la plupart ne s'en prévalussent pour se
rendre plus difficiles à mesure qulls seroient plus néces*
nires. Oa avoit donc pris toutes les précautions pour em*
pécher que les lettres du pape ne. fussent reçues dans Var-
sovie. Un franciscain reçut secrètement les brefs pour les
Mvrer en main propre aux prélats. Il en donna d'abord
m au suffragant de Chelm : ce prélat, très attaché, . à Sta-
nislas, le porta au roî-tout cacheté. Le roiJit venir le reli-
gieux, et lui demanda comment il avoit osé se charger d'une
Ulk' pièce. Le franciscain répondit que c'étoit par l'ordre
de son général. . Stanislas lui ordonna d'écouter désonnais
ks ordres de son roi préférablement à ceux du général des
irandscains, et le fit sortir dans le moment de la ville.
Le même jour on publia uu placs^rd du roi de Suéde,
par lequel il étoit défendu à tous écclésiasjbiques séculiers
et r^uliers dans Varsovie, sous des peines très grieves, de
se mêler des affaires d'état. Pour plus de sûreté, il fit
mettre des gardes aux portes de tous les prélats, et défendît
qu'aucun étranger entrât dans la ville. Il prenoit sur lui
ces petites sévérités, afin que Stanislas ne fût pôiiit brouillé
avec le clergé à sou avènement. Il disoit qu'il 3e délassoit
de se» fatigues militaires en arrêtant les intrigues de la cour
romaine, et qu'on se battoit contre elle avec du papier, au-
lieu qu'il falloit attaquer les autres souverains avec des
âmes véritables.
. Le cardinal primat étoit sollicité par Charjes et par
Stanislas de venir faire la cérémonie da couronneriient. Il
Be crut pas devoir quitter Dantzick pour sacrer un roi qu'il
n^avoit point voulu élire ; mais comme sa politique étoit de
ne jamais rien faire sans prétexte, il voulut préparer une
txcuse Intime à son refus. Il fit afficher pendant la nuit,
k bref du pape à la porte de sa propre maison. Le magi-
itrat de Dantzick indigné, fit chercher les coupables, qu'on
ne ^uva point. Le primat feignoit d'être irrité, et étdtt
feu content : il avoit une raison pour ne point sacrer le
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iO HISTO lAH Uë t ' tfAi r tt S XII. i^t. ifB.
llc»u¥«tH rd ; et il se méniigedt tm même tem|^ ttiFce
CBarles XH, Auguste, Stanislas et le pape. ,fl monnit
peu de jontH après, laissant son pa^ dans une eonfosiM
affreuse, et n'ayant réiHSi par toutes ses inti4gues c^u'à tm
Bfbuiiler à hi ims Avec les trois rois, Cbarifs, Auguslsè et
itâi^slas> arec la république, et aree le pape, qm lui af^
ordonné de tenir à Rome rendre coiàpte de sa condmte;
inaië comme Jes politiques même ont quelquefois des i«'>
llibrds dans leurs derniers momens, il écHvit au roi Augnit
ih mouiunt pour lui demander pardon.
Le sacre se fit tranquillement et avec pompe, le 4 oi^
tobre 1705, dans la ville de Varsovie, malgré Tusage oùroa
est en Pologne de couronner les rois à Craeovie^ Stanislas
Lec2insky, et sa femme Charlotte Opalinska, furent sacrés
toi et reine de Pologtte par les mains de Tarchevèque êlé
léopold, assisté de beaucoup d'autres prélat. ChtHea XII
vit celte céréntonie incognito: unique fruit qu'H reliroit de
ées €t)nquètes.
f Tandis qu'il donnoit ui> roi à la Pologne soumise, que le
t)anemarck n'osoit le trouMer, que le roi de Prusse redi«r«
efaoit son amitié, et que le roi Auguste se retiroh dans ses
états héréditaires, le car devenoit . de jow: en jour plos
redoutable. 11 avblt foiblement secouru Auguste en f^
logne ; mais il avoit fait de puissantes diversions en Ingrie.
Pour lui, non-seUlement il commençoit à être grand
homme de guerre, mah même à montrer Part à ses Mosco
vîtes ; la discipline /ëtablissoit dans ses troupes : il avoit de
bons ingénieurs, une artillerie bien servie, beaucoup de bons
Offiden; il savoît le grand art de faire subsister des armées.
Quelques uns de ses généraux avoient appris, et à. bien corn*
battre, et, sdon le besoin; à ne combattre pas : bien phis^
il tveit formé une marine ciqpable de faire tête aux 9uédob
dttns la mer Baltique.
Fort de tous ces avanti^es dûs à son seul génie, el do
rbbsettee èk roi de 9aede, Il prit Nami d'assaut le n aeél
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tvr. III. ROI DE SUEDE. Si
i^ rmuiée 1704» après uq sî^e réguli^er, et après avoir
«mpfecbé qu'elle ne À^t secourue par mer et par terre* Les
ipldttto maStres de la Tille coururent au pillage : ils s^aban^
donnèrent aux tNirbarîes les plus énormes. Le czar couroil
de tous côtés pour arrêter Le desordre et le massacre; il
ana<^ lui-même des femmes des mains des soldats, qui les
aUoient égorger, après les avoir violées* li fut même obligé
de tuer de sa main quelques Moscovites qui n'écootoient
point ses ordres. Ou montre enc<»re à Narva, dans l'hôtel-
de-ville, là table sur laquelle il posa son épée en entrant,
et pn s'y ressouvient encore des paroles qu'il adressa aux
citoyens qui s'y rassemblèrent : '^ Ce n'est point ,du sang
*' des babitans que cette épée est teinte, mab de celui des
'^ Moscovites, que j'ai répandu pour sauver vos vies.''
Si le czar avoit toujours eu cette humanité, c'étoit le
premier des hommes. Il aspiroit à plus qu'à détruire des
villes : il en fondoit une alors peu loin de Narva même, au
milieu de ses nouvelles conquêtes. C etoit la ville de Peters-
bourg, doi^t il fit depuis sa résidence et le centre de sou
poramerce. £Ue est située entre la Finlande et Tlngrie,
dans une isle marécageuse, autour de laquelle la Neva 9%
divise en plusieurs bras, avant de tomber dans le golfe da
Finlande ; lui-même traça le plan de la ville, de la forteresse^
do port, des quais qui renibellissent, €^ des forts qui en
distendent Tenlrée. Cette isle inculte et déserte, qui n'étoit
^'un amas de boue pendant le court été de ce» climats, e|
dans rbiver qu'un étang glacé, où Ton ne [>puyoit aborder
]^ terre qu'à travers des forêts sans route et des maraia
profonds, et qui n*avoit été jusqu'idors que le repaire det
loups et des ours, fut remplie en 1703 dé plus de trois
cent (nille hommes que le czar avoit rassemblés de ses états*
Les paysans du royaume d*Astracan, et ceux qui habitent
les .irontieres de la CJbine, furent transportés à Petersbourg»
11 Êillut percer des forêts, faire des chemins, sécher des
ii8>, ^ever diss di^ues^ avant de jeter les fondemeni d*
Ea
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«2 HÏSTÔÏHE DE CHARLES XII. tîV/iif.
là ville. La nature fut forcée psr-tout.' Le czar s^^bstm
à peupler un pays qui senibloit n'être pas destiné pour de»
•bomnies *, tii les inondations qui ruinèrent ses ouvrages, ni
la stérifité du terrain, ni l'ignorance des ouvriers, ni la mor-
talité même, qui fit périr deux cent mille hommes jdans Ces
commencemens, ne lui firent point changer de résolution.
La ville fut fondée parmi les obçtaclës que la nature, le
génie des peuples, et une guerre malheureuse y apportoieBt.
Petersbourg étoit d^à une ville en 1705, -et son port étoit
rempli de vaisseaux. L'empereur y attiroit le» étrangers
par des bienfaits, distribuant des terres aux uns, donnant
des maisons aux autres, et encourageant tous les arts qui
venôient adoucir ce climat sauvage. Surtout il avoit rendu
Petersbourg inaccessible aux efforts des ennemis: les géné-
raux suédois*, qui baltoient souvent ses troupes par-toat
aîHenrs, n'avoieot pu endommager cette colonie naissante.
Elle étoit tranquille au milieu de*ki guerre qui* Fenvironâoit.
Lé c2ar en se créant arasi de nouveaux états teridoit
toujours la main tu roi Auguste, qui perdoit les siens; il
lui persuada par le général Patkul, passé depuis pea an
service de MoscQvie, et alors ambassadeur du C2ar en Saxe,
de venir^i^ Ofoéno conférer encore une fob avec lur sur
Fétat' maâk«ureux ^ ses affaires. Le roi Auguste y vint
avec quelques troûp«s, accompagné du général Schnlem-
^bourg, quft son patsdgt de TOder avoil rendu iUiètre ^aos
le nord, ekcn qm iimettoit sa dernière espéraince^ Le -car
y arriva» fàisaiit marcher après lui une arniée de soixante et
dix niUle bamm^. Les deux monarques firent de nonveaus
plans «le guerre. Le loi Auguste détrôné ne citùgdoît plti»
dlrriter-les^olonois en abandonnant leurs pays aux troupes
moscovites. Il fut résolu que l'armée du czar se diviseroH
en plusieurs corps pour arvÀter le roi de Suéde à diaque pas*
Ce fut daqs le temps de^ cette entfevue qne le roi Augusl^
renouvela Tordre de l'aigle blane ; foible ressource pour
HÔacher à- lin quc^ues seigneurs polonoîs, j^ tfiid»
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uv. III. ROI DE SUEDE. SS
d^anntages réds que d'un viin honneuri qui dtvient ridi-
cule quand on le tient d'unprmce qui n'est r<]»i que de nom*
La conf^p^œ des deux rois iinit d'une manière çxtraordi-
oaire* Le czar partit soudainemmity et laissa ses troupes
Ison affié, pour courir éteindre, lui-niènie' une rébellion
dont il étoit menacé à Astxacan. Â.pdne étoil-il parti que
le loi Auguste ordonna que Patkul fAt arrêté à Dresde.
Tout ^Europe iftt surprise qu'il oaftt, contre le droit des
geps, et oi apparence contre ses mtérèts, mettre en prison
^ambassadeur du seul prince qui le protégeoit.
Voici le nœud secret de cet é^énementy selon ce qu'un
fis du roi Âii^ste mfa fait Hionneur de me dire. Patkul
proicrit en Suéde pour avoir soutenu les privilèges de la
livome, sa patrie; avoit été général du roi Auguste ; mais
ion esprit altier et vif s'accommodant mal des hauteurs du
géoéral Hemnûng, favori du roi» plus impérieux et plu3 vif
^ lui, il avoit passé au service du czar, dont il étoit alors
général et ambassadeur auprès d'Auguste. Cétoi^ un esprit
pénétrant; il avoit déinèlé que les vues de FlemmiDig et du
diancêlier d» Saxe étoient de proposer la paix au roi de
Sucde à quelque prix qae ce fût :. il forma aussitôt h dessein
de les prévenir, et de ménager un accommodement entre le
czar et la Suéde. Le chancelier éventa son projet, et^pbtint
qi^on se saisît de sa personne. Le roi Auguste dit au czar
pePiUkul étoit vm perfide qui les ttaht88<nt tfiua deux.
n'étoit pourtant coupable que d'avoir trop bien servi son
JpNiveau, maître ; mais un service rendu mal-à-prqpos est
9Hi?ent puni comme une trahison.
Cependant d'un côté les soixante et dix mille Moscovites,
divisés en plusieurs petits corps, brûloient et ravagçoient les
terres des partisans de Stanislas ; de l'autre Schulembourg
ijavançoit avec ses nouvelles troupes. La fortune des Suédois
dianpa ces deux armées en moins de deux mois. Charles XII
4,$ûuisja8 attaquèrent les corps séparés dea Moscovites l'wt
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HISTOlMt BB CMâRLKS XII. Alt. m
mçÊ^É VmtÊtt ; nmii «^ «ivMMnl; «pi'OQ généftiV
Itok bmtH «vmil ^^ «tlift défaite 4é wom wonaptigmm.
IM dbitadi n'anétoit le vtlfi^uwr : «^ s« IMomu rt l iMê
ffvîMe entre 1« eimeiw it k», Ciiariei Xli «t ses SuéMi
k pMmeat à la naf». Oa parti Miédok frit le bagagi
A'AiipNÉe, #è H y avoil deiu ûêêX nifle^eoi d'aifmt imb-
Myé : Siminiai wialt heil «ent milla diuKtt wf^^m^nam aa
p<ii^ Memikxilf, f éoéml inoac(Mi4l»* Cbarlee, à ki tété dt
i« «avaleria, it treiita Umeê mi lA^ghqml^hmteê, thmfàê
oivalier menait im dMval ta mmtï poer ie moiM^ ^iii wi rf k
lien serait tendu. Les Moseovkea épeufwHés et léduks
à ua petit nombiey i^Feèaiil an désordra aa^elà éi
loiystlvâie.
Tandis que Chailet «lunaoît devMt kti les HcÊeo^fiÊm
jinqu^n fond de la UdiiMMÎt, 9cfa«l6ittboiii|( wpaset ei^
VOder et vint à la tète de vingt mille faosnrita piéseiiter Ift
Ibatailk au grand marécbal Reasehild, qui passoit peur If
aneitleiu- génénd de Charles XII, et que fan appeloit k
Përméni^n de VAits^amâre éh n$ré. Ces 4euK iltostics
généraux, qai sembloieêt participer à la deslînéa de lears
aiakrês, se rencontrèrent assez pr^s de Funits, dans an Ut»
nemmé Pranenslad, territoire d^à fatal aux troupes d^Ao^
gusl». Rensehild n^avoit que trebe bâtaillom et ▼îngt-deox
escadrons, qui fiiisoîent en to«tfc près de dix mille hcmunes.
S<dittlembotirg en avait une lois autant. Il est à remaïqafir
qu'il y avdt dans son armée un corps de six à sept HDiQe
Moscovites que Ton avoit long-temps disciplinés en Saxe»
et sur lesquels on comptoit comme sur des soldats aguerris,
qui jeignoient la férocité russienne à la discipline allemande.
Cette. baAaiile de Frauenstad se donna le 12 février 170(f$
DiaÎB ce mènae général Schulembourg, qiû avec quatre mflle
bommea afaoit en quelque fafon trompé la fortune du rei
ée Suéde, ^v^îomba sous celle du général Renscbild. htj
aanibat ne 4lura pas. un ^uait-d'beure ^ lea Suens bc xi-
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inr. fu. ROI DE SUJEBOLi ê»
«steveorfasimnoneDl! i» Moacwrilw ji igi < m Ums mfmêB
4ès ifti'ifo vîféirt kt Suédcib; l^ifMHile fur flU tubi1% ef le
désordre si grand, que les vainqseùrs trouv^nnt wir le
ébzmf de bataille sept nfiile f osils tmis chargés qu'élu tivoit
jetés à terre sans tber. Jamais dérmite ne fnt plus prompte,
pin» complète et pkis honteuse ; et cependant jamais général
n'aroit fait une si belle disposition qnc Sehntembourg, et
Ymv^u de tous les officiera saxons «f suédois, qui virent th
«ctte jovriiée combien la prudence homatme est peu raat-
tresse des événeviens.
Parmi les prisonniers il se troum un régiment entier de
de Fnaiçois : ees infortunés arotent été pris par les troupes
4e Saxe fan 1704, à cette fameuse bataille de Hochstet, si
fcaeâle à la grandeur de Louis XIV. Ih avoient passé de-^
fHiiS'iitt servfee dw roi' Auguste, qui en avoit fait tin régiment
^ Ars^fOfis, et en avoit donné )e commandement à un Fran-^
foir de la maison de Jo^^euse. Le colonel fut tué â la pre-
e, 06 plutôt à la seule décharge des Suédois : le régi-
tout entier fût fait prisonnier de guerre. Dés le jour
ce» fVançois demandèrent à setvir Charles Xfî, et Hs.
fitréfitt f e^ è. son service, par une destîpée singulière qui
le» résewoit à changer encore èè vainqueur et de maître.
A l'égard des Moscovites, ils demandèrent la vie à ge*
nom ; mais on les massacra inhumainement plus de six
lieures après le combat, pour ptmir sur eux les violences
^ leurs compatriotes» et pour se débarrasser de ces pri-
somners, dont on n'eût su que faire.
Le roi, en revenant de Litfauanie, apprit cette nouvelle
victoire i- mais la satisfaction qu'il en reçut fnt troublée par
iQi'p^u de^ jalousie ; il ne put s'empêcher de dire : Renschild
MB voudra plus faire comparai8<m avec moi.
Auguste se vit alors sans ressources: il ne lui restoit
pku que Cracovie, où il s'étoit enfermé avec deux régimeiÀ
de Moscovites, deux de Saxons, et quelques troupes d^
f armée de la couronnci par lesquelles même il craignoft
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$S HÏSTOISE DE CHARLES XII. xnr. m.
d^ètre livré au ^n^nqueur ; mab son nudbeur fat au combk
quand il sut que Charles XII étoit enfin entré en Saxe ie
premier septembre 1706.
il avoit traversé la Siiésiey sans daigner seulement en
faire avertir la cour de Vienne. L'AMeniagne éloil con-
sternée ; la diele de Ratisbonue, qui représente rempirc,
mais dont les résolutions sont souvent aussi infructueuses
que solennelles, déclara le roi de Suéde ennemi- de fenn
pire» s'il passoit au-delà de TOdar avec :son armée: celt
même le détermina à venir plutôt en Allemagne.
A son approche, les villages furent déserts, les babîlaos
fuy oient de tous côtés. Charles en usa alors eomnie à^Co-
penhagiie : il fit afficher par-tout qu'il n'étok venu que pour
donner la pai>i; que tous ceux qui reviendroient' chez esx»
et qui payeroient les contributions qu'il ordonneroit, «•
roient traités comme ses propres sujets et les aulies pour-
suivis sans quartier. Cette déclaration d'mk prmce qu^oo
savoit n'avoir jamais manqué u sa parole; fit rcvcm'ren foule
tous ceux que la peur avoit écartés. 11 ehoisk son camp â
Altranstad,. près de la campagne de Lutzen^ diamp de 1»-
taille fameux par la victoire et par la mort de Gvévit
Adolphe. Il alla voir la place bù ce grand honnne âvoit
été tué. Quand on lent conduit sur le Uca: " J'ai tâdié,
" dit-il, de vivre comme lui : Dieu m'accordera peut-être
" un jour une mort aussi glorieuse."
De ce camp, il ordonna aux états de Saxe de s'aafcin-
blec et de lui envoyer sans délai les registres des finances de .
Féleclorat. Dès qu!\\ les. eut en son pouvoir, et ^u'ii ^'*
informé au juste de ce que la Saxe pouvoît fournir», il '•
taxa à six cent vingt^iuq mille risdales pajc mois» OutiV
cetie contributioii, les Saxons furent obligés^ de fournir à
ehaque soUlat suédois deux livres de viande, deux livres de
pain, deux pots de blere, et quatre sou3_ par jour, avec ott
fourrage pour la cavalerie. Les contributions ainsi réglées»
k. roi établit une nouvelle police pour g^iranitir les SaJwoû^
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[
Liv. m. . ROI DE SUEDE. «f
des ÎDSoltes de ses soldats ; il ordonna dans toutes les TiUes
où il mit garnison, que chaque hôte chez qui les soJdats
logeroient donneroit des certificats de leur conduite, faute
de quoi le soldat n'auroit point sa paye. De plus^ des in-
specteurs ailoient tous les quinze jours, de maison en mai-
800, s'informer si les Suédois u'avoient point commis de
dégiits.' Ils avoient soin de dédommager les hâtes» et de
punir les coupables.
On sait sous quelle discipline sévère viroient les troupes
de Charles XII ^ qufeUes ne pilloient pas les villes prises
d'assaut, avant d'en avoir reçu la permission; quVUes ai-
loient même au pillage avec ordre, et le quittoient au pre-
mier signal*. Les Suédois se vantent encore aiyounPhuî de
la discipline qu^il» observèrent en Saxe ; et cependant le»
Saxons se plaignent des dégâts affreux qu'ilry. commirent*;
eontradictions qu'il seroit impossible de condUeis si l'on né
savoit combien les honunes voient différemment les mêmes
objets. Il étoit bien diffidle que les vainqueurs n'abusassent
qoelquefob de leurs droits, et que les vaincus ne prissent
les fins légères lésions pour des brigandages barbares» Ub
jjtjtnr le roi se promenant à cheval près de Leipsick, un pay«
San saxon vint se jet«r à ses pieds, pour lui demander
jMîce d'un groiadier qui venoil de lui enlever ce qui étoit
destioé 'pour le dîner de sa famille. Le r<H fit venir le sol-
dat: *< Ëst-il vrai, dit-il d'un visage sévère, que vous avejs
*' volé cet homme r Sire, dit le soldat, j> ne lui ttLpa$fai$
jM de mal fue votre nu^estê en a fait âsim mO^re; wms
hdat^ôté «fi royotmf, et Je n'ai pm à ce manant fn'tcii
iBadpfi. Le roi donna .dÎK ducats de sa main au paysan^
et pardonna au soldat en faveur de laliardiessedu bon mo^
çn lui. disant: Souviene-tm, mon ami, fue et fat 6ti tifr
m/amne. em roi Angusie^ je n'en ai Hbt.prts pour moi.
. La grande foire de Leipsick. se tint comme à f ordinaire :
ks marchanda y vinrent avec une. sûreté entière ; on ne vil
t^ un soldat suédois d^us U foire ;. on eût dit que Pannes
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•a HISTOIRE DE CHARLES XII. LVi. m.
êii roi de Suéde n'étott en Saxe que pour veiller à la cob>
eervatioB du pays. Il commaudok dans tout Félectorat
«vec ua pouvoir aussi absolu et une tranquillité aussi pro-
fonde que dstns Stockholm.
Le roi Auguste errant dans la Pologne» prive à la fois
4e $tm royamne et de son éledorat, écrivit enfui une lettre
4e m vmm à Chaiies XXI pour loi demander la paix. H
chargea en secret le baron d'Imhof d'aller porter la lettre
fOÉyoÎptemeat awec M. Fingstein, référ^idaire du eonseil
pnvé ; il leur àoamfi à tous deux ses pleins pouvoirs et son
MmO'tigw^. AUez, leur dit^ en propres mots*, fichez de
wMtmir dt9€emiiiiofut rahonnables $t chr^iennes. Il étoit
fédutt à la nécessité de cacher ses démarches pour la paix,
ci) de ne feeoutîr à la médiation d'aucun prince ; car étant
fdMS eu Pologne, à la. merci des Moscovites; il craîgneit
mec fàlson que le dangereux allié qu^il abandonnoit ne se
vengeât sur kû de sa soumissicm au vainqueur. Ses deux
plàufMiteatiaires arrivèrent deouit an camp de Charles XII;
lit eurent une âidience secrète. Le roi lut la lettre'. ** Mes-
^ iieurs». St^, mx plénipetentùdres, vous aurez dans un
*^ j^omeut ma réponse/' Il se retira aus^tèt dans son ca-^
binet et 'éctivit oe c|ui suit :
Je êOTtetne à donner la paix aux eon^tions suivanitêp
UtÊX^ellee H ne font pas /attendre que je change rien,
1 . Que le roi Auguste renonce jfour jamais à la courênnu
ie Pologne; qu'il reconnoisse Stanislas pour légitime roi;-
et fu^il promette de ne jamais songer â remonter sur le trente
mime après la mort de Stanislas,
2. Qu'il renonce è tout autre traité, et particulièrement
i ceux qu'il a faits avec la Moscovie.
S. Qu'il renvoie avec honneur en mon camp les princeê^
Sobiesky, et tous ks prisonniers qu*il a pu faire.
4. Qu'il me livre tous les déserteurs qui ont passé à son
êisrmce, et nommément Jean Patkul, et qu'il cesse toute pfê^
\ contre ceux qui 4â «ou service ont fûné dane-lemien»,
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àtr. f IV ' %XA DE SUEEA. 9$
tt dam» u fO|>ierml oonite Piper, k (ès»f««it ie aé*^
fMÎer k i«»to «vee Ws plétiipo|eiitiaire$ du rq* Auguste, tt
furent épouvantés dé 1» dmeté de ces proposUioiis : ils mi'-
feot €B uiage k peu d^iift qu'on peut employer quand on
cel 9WBm pouvoir, pour tâoher k fléchir la ri§oeur du roi de
%mêm* Us eurent plu^eur» cooférences avec k comte Pip^,
G* HUBÎfl^ ne lépoBdit autte diose à toutes leurs- imùiiua^
tio«0» flÎMNi: THk tH h vol&mté du roi mon maître; U ne
ehmg0jiamaiÊ âH réselmHaiu^ «
Tandis que cette paÎK se négocioit sourdemeut ea Sa»%
la iortupe sembla mettre le roi Auguste en état d'en obtenir
une plus bonorabk, et de traiter avec son vainqueur sur un
pkd plus égal.
Le prince Menzikoff, généralissime des armées Moscor
v^y vint avec trente mille hommes k trouver en Pologne,
dans le temps que non-seulement il ne souhaitoit plus ces
•eeom% mais que même il les craiguoit ; il avoit avec lui
^elques troupes polonoises et ssuLonnes, qui faisoieut en
toat six milk hommes. Environné avec ce petit corps de
l'armée du prince Menzikoff, il avoit tout à redouter en caf
qi^on déeouvfit st négociation* Il se voyoit en n>èm6 temp^
détrôné par sou ennemi, et en danger d'être arrêté pri^oor
aior psur son allié. Dans cette circonstance délicate l'armée
te trouva en présence d'un des généraux suédois, nommé
Mc^caield, qui étoU à la tète de dix miUe hiimmes àC^Usi^
firèi du patelinat de Posnaoie. Le prinoe MmieifcoS^ presiu
k rai Auguste de donner batailk. Le roi très embarfaa^é
différa sous divers prétextes; car quoique ks* ennemkiiil^
sttt «vob fois moina krts que lui» il y avoît qnalre mille
teédois dan» l'armée die Meyei^eld; etc'^ éloîl a3SM|Mwr
stadre Iféi^émuoeot douteux. Donn^ ba^lk «u« Smé^
IKendaut k6 aé^oeiations et la perdre.« c'était «reuser l'âbgfme
«è il étoîl; H' prk.k parti dVnvoyar un bomme de «on-
fiÉaee au. génénd eaneau, paur hii donner part du seon^ d^
Uftk^ as lîar^rt» 4i m nÉkèri. bumi eèt avis cul untttet
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Jia HISTOIRE DE CHARLES XII. lit. iir.
tottt contndre à ce qu'il en altendoit. Le générai Meyer-
ield crut qu'on lui tendoit un piège pour llntimider; sur
cela seul il se résolut à risquer le combat.
Les Moscovites vainquirent ce jour là ks Suédois en
bataille rangée pour la première fois. Cette victoire, que
le roi Auguste remporta presque malgré lui, lut complète:
il entra triomphant^ au milieu de sa mauvaise fortime, dans
Varsovie^ autrefois sa capitale ; ville alors démantelée et
ruinée» prête à recevoir le vainqueur» quel quil Mt, et à
reconnoftre le plus fort pour son roi. Il fut tenté de saisir
ce moment de ^tospésnté, et d'aller attaquer en Saxe le
roi de Suéde avec l'armée moscovite. Mais ayant réflédii
que Charles Xll étoit la tète d'une armée suédoise Jusqu'-
alors invincible ; que les Moscovites rabandonneFoiênt au
premier bruit de son traité commencé ; qiie la Saxe, son
pays héréditaire, déjà épuisée d'argent et d'hommes, seroit
ravagée également par les Suédois et par les-MoscoWtes;
que Tempire» occupé de la guerre contre la France, ne
pouvoit le secourir ; qu'il demeureroit sans états, saaasat^^f
sans amis» il conçût qu'il falloit fléchir sous la loi qu'impo-
soit le roi de Suéde. Cette loi ne devint que plus àm
quand Charles eut appris que le roi Auguste avoit, attaque
ses troupes pendant la négociation. Sa colère et le pl^^ir
dliumilier davantage un ennemi qui venoît de le vain^r*»
le rendirent plus inflexible sur tous les articles du traité.
Ainsi la victoire du roi Auguste ne servit qu'à rendre ^
situation plus malheureuse ; ce qui peut-être n'étoit jamais
arrivé qu'à lui.
Il venoit de faire chanter le Te Deum dans Varsôvi*.
lorsque Fingstem» l'un de ses plénipotentiaires, arnVa *
Saxe avec ce traité de paix qui lui ôtoit la couronne. Au-
guste hésita; mais il s%na» et partit pour la Saxe, da0*^
^ne espérance que, sa présence pourroit fléchir le roi w
Suéde» et que son ennemi se souviendroit peut^tre àes ao-
fjennes alliances de leurs mais<»is^ et du^sang qui les uDtfioi^
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iiv. îii. ROI DE SUEDE. ^|
Ces deux princes se virent pour la preipiere lois dans us
lieu nommé Gutersdorfj au <j^uartier du comte Piper» saus
aucune cérémonie. Ciiarles XII étoit en grosses bottes,
ayant pour cravate un taffetas noir, qui lui serroit le coii ;
son habit étoit, comme à Tordmaire, d'un gros drap bleîi,
avec des boutons de cuivre doré. Il portoit au côté une
longue épée, qui lui avoit servi à la bataille de Narva, et
sur le pommeau de laquelle il s'appuyoit souvent.^ La con-
versation ne roula que sur ses grosses bottes. Charles XII
dit au roi Auguste qt^il ne les avait quittées depuis siv ans
que pour se coucher. Ces bagatelles furent le seul entretien
de deux rois, dont Tun ôtoit une courol^le à Taufre. Au-
guste sur-tout parloit avec un air de complaisance et de
satbfaction, que les princes et les hommes accoutumés aux
grandes affaires savent prendre au milieu des mortifications
ks plus cruelles. Les deux rois dînèrent deux foix en-
semble, Charles XII affecta toujours de donner la droite
,ao roi Auguste ; mais loin de rien relâcher de ses demandes,
il en fit encore de plus dures. C'étoit déjà beaucoup qu'un
souverain fût forcé à livrer un général d'armée, un miuistre
public : c'étoit un grand abaissement d'être obligé d'envoyer
)i son successeur Stanislas les pierreries et les archives de la
couronne ; mais ce fut le comble de cet abaissement d'être
réduit enfin à féliciter de son avènement au trône, celui qui
idloit s'y asseoir à sa place : Charles exigea une lettre d'Au-
guste à Stanislas. Le roi détrôné se le fit dire plus d'une
Ms; mais Charles vouloit cette lettre, et il falloit l'écrire.
La voici telle que je l'ai vue depuis peu copiée fidèlement
Nff Toriginsd que le roi Stanblas garde encore.
MONSIEUR ET FRERE,
Nous avions jugé qu'il n*étoit pas nécessaire d'entrer
iins un commerce particulier dr lettres avec votre majesté:
cependant pour faire plaisir à sa majesté suédoise^ et afin
fiim ne nom impute pas que nou% faisons difficulté desatis^
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ft HISTOIRE DE CHARLES XII. liy. m.
ySftrr â son deiir, nous v&us fêHcitons par ceffe-ct de votre
avènemeni à ht couronne, et nous souhaitons que vous trou-
wiez dans votre patrie des sujets plus jidiles que ceux que
iwUsy avons laissés. Tout le monde nous fera Injustice dt
croire que nous n'avons été payés que d'ingratitude pour
t<ms nos bienfaits, et que la plupart de nos sujets ne se sont
appliqués qv^à avancer notre mine. Nous souhaitons que
vous ne soyez pas exposé à de pareils malheurs, vous remet'
tant à la protection de Dieu.
Votre frère et voisin,
AUGUSTE, Roi.
A Dresde, le 8 Avril ITOT.
n fallut qu'Auguste ordonnât lui-même à tous ses offi-
ciers de magistrature de ne plus le qualifier de roi de Pologne,
et qu*il fit effacer des prières publiques ce titre, auquel il
renonçoit. Il eut moins de peine à élargir les Sobieskyt
ces princes, au sortir de leur prison,' refusèrent de le voir;
mais le sacrifice de Patkul fut ce qui dut lui coûter da?ao-
tage. D'un c6té, le czar le redemandoit^hautement comme
son ambassadeur ; de l'autre, le roi de Suéde exigeoit en
menaçant qu'on le lui livrât. Patkul étoit alors enfemié
dans le cbàteau de Kœnigstein en Saxe. Le roi Auguste
crut pouvoir satisfaire Charles XII et son hotmeur en même
temps. H envoya des gardes pour livrer ce malheureux
aux troupes suédoises ; mais auparavant il envoya au gou-
verneur de Kcenigsfein un ordre secret de laisser échapper
ton prisonnier. La mauvaise fortune de Patkul Remporta
sur le soin qu'on prenoit de le sauver. Le gouverneur,
sachant que Patkul étoit très riche, voulut lai faire acheter
sa liberté. Le prisonnier, comptant encore sur le droit des
gens, et informé des intentions du roi Auguste, refusa de
payer ce qu'il pensoit devoir obtenir pour rien. Pendant
cet intervalle les gardes commandés pour saisir le prisonnier
arrivèrent, et le livrèrent immédiatement à quatre capitaioef
Sttédbisi qui l'emmenèrent d'abord au quartier-général d'Aï*
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uv. ui. EOI X>£ SUËDË^ 9^
tntntUd, oà il demeura trois mois attaché à ua poteau avec
une grosse chatne de fer ; de-là il fut conduit à Casimir.
diarles Xl.r« oubliant que Patkui étoit ambassadeur du
eat» et se bou venant seulement qu'il étoit né son sujet, or*
fbaim au ceoseil de guerre de le jtiger avec la dernière
ngueur. il fut condamné à être r^impu vif, et à être mis
^« quartiers» Un ckapel^ vint lui annoncer qu'il Iblloît
moadr, ssSa» Im apprendre {e genre du supplice^ Alors
.tet homme, qui avait bravé la mort dans tant de batailles,
te trouvant seul avec un piélre, et son courage n'étant plus
soutenu par la gloire, ni par la colère, sources de Tintrépî*
ëàê des hommes, -répandit amèremcsit des larmes dans le
seu du chapelaîn. il étoit fiancé stvec une dame saxonne,
iianBttée madame d'£kisîedet qui avoit de la naissance* évL
isiiite et de la beautéyCt qu'il avoit compté d'épouser à*peu-
piès dans le temps néxae qu'on le j^ia au supplice. Il
vacoromaada au chapelain d'aller la trouver pour la cour
isler, tt de l'assurer qu'il mourait plein de tendresse pour
tfe. Quand en l'eut conduit au lieu^u supplice, ^ qu'il
«kJes roues -et les pieus Cessés, il tomba dans des convul*
sbns de frayeur, *^ se rejeta dans les bras du ministre, quî
^brassa eu k couvrant de se<i mai^eatt et eu pleurant.
Al«rs ua officier siiédaîs lut à haute voix un papier dans
bqud étoient ces parisles :
**4^n fiskjavoir que l'ordre très exprès de sa maje&lé;
^ «Dite seigneur teès dément, «st que cet homme, ^qui «st
'^tiekse à htpatne, skût roué etécarielé, pour réparation
^'tde SCS -crimes» etipour fenen^ple xles autres. Que chacun
*'se danne-dcfande de la trahisofi, «t serve son roi fidèle*
'^tmeot'' A ees Mots 4e prmse êrè^ cfémmt: Quelle clé^
4isace, dit Fatkul ! <A à ci^ux éeitaikie è k, f^tnt^ iJélas!
dit41, Je rl'ai foop bien «ervîe. U reçut seize coups, et souit-
Mt le supplice 4e plus long et le fHus afifieuA qu'on puisse
ifti^giner. Ainsi périt riufortaoé Jean Reinold Patkul» «m*-
ias9adeinr>^ jetterai Kte fempeseur de Mosctt^
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^i HISTOIRE DE CriÀRLÉS XII. lïv. itt.
Ceux qui ne Toyoieut en lui qu'un sujet révolté contre
son rbi, disoient qu'il avoit mérité la mort; ceux qui le
regardoient comme lin livonien, né dans une province,
laquelle avoit des privilèges à défendre, et qui se souvenoient
qu'il n'étoit sorti de la livonie que pour en avoir soutenu
les droits, Fappeloient le martyr de 'û liberté de son pays.
Tous convenoieut d'ailleurs que le âtre d'aml>a8sadeuT du
czar dev6it rendre sa personne sacrée. L« seul roi de Suede^
élevé dans les principes du despotbme, crut n'avoiriait qu*im
acte de justice, tandis que toute TËurope condamnoit ss
cruauté.
Ses membres coupés en quartiers restèrent exposés sur
des poteaux jusqu^en 1713, qu'Auguste étant remonté sur
son trône, fit rassembler ces témoignages de la nécessité où
il avoit été réduit à Altranstad : on les lui apporta à Var-
sovie dans une cassette, en présence de Buzenval, envoyé
de France. Le roi de Pologne montrant li^ cassette à ce
minbtre : VoUâ ! lui dit-il simplement, ha membres de Rat*
hd, sans rien ajouter pour blâmer ou pour plaindre sa
mémoire, et sans que personne de ceux qui étoient préseas
osât parler sur un sujet si délicat et si triste.
Environ ce temps-là, mx Livonien nommé Psûfeel, offi-
cier dans les ti^upes saxonnes fait prisonnier les armes à la
main, venoit d'être jugé à mort à Stockholm p»: arrêt d»
sénat: mais il n'avoil été condamné qv^k perdre la tète.
Cette différence de supplice dans le même cas taisoit trop
voir quç Charles, en faisant périr Patkul d'une mort m
crueHe, avoit plus songé à se venger qu'à punir. Quoiqull
en sok, Paikel, après sa condamnation, fit pmposer au sénit
de donner au roi le secret de kire de l'or, si ou vouloit lui
pardonner; il fît faire l'expérience de son secret dansk
prison, en présence du colonel Hamilton et des magistrats
de la ville ; et soit qu'il, eût en effet découvert quelqa'art
utile, soit qu'il n'eût que celui de tromper habilement, ce
qui est beaucoup plus vraisemblable, on porta à la monnoie
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tiv. m. ROI DE SUEDE. 95
de Storkiiolin For qui 8e trouva dans le creuset à la fin de
Féxpérience, et on en fit au sénat un rapport si juridique»
et qui parut si important que la reine, aïeule de Charles,
ordonna de suspendre Texécution jusqu'à ce que le roi, in-
formé de celte singularité, envoyât ses ordres à Stockholm.
Le roi répondit qu*U avait refusé à ses anUs la grâce du
criminel, et qu'il n'accorderait jamais à l'intérêt ce qu*il
n'avait pas doitné à l* amitié. Cette inflexibilité, eut quelque
chose, d'héroïque dans un prince qui d'ailleurs, croyoit le
secret possible. Le roi Auguste qui eç-fut informé dit : je
ne m'étonne pas que le roi de Suéde ait tant d'indifférence
pour la pierre philosophale ; il l'a trouvée en Saxe.
Quand le czar eut appris l'étrange paix que le roi Au-
^gnste, malgré. leurs traités, avoit conclue à Altrânstad, et
que Patkul, son ambassadeur plénipotentiaire, avoit été
livré au roi de Suéde, au mépris des lois des nations, il fit
éclater ses plaintes dans toutes les cours de l'Europe : il
écrivit à l'empereur d'Allemagne, à la reine d'Angleterre,
tox états-généraux des provinces-unies : il appeloit lâcheté
et perfidie la nécessité douloureuse sous laquelle Auguste
tTott succombé : il conjura toutes ces puissances d'inter-
poser leur médiation pour lui faire rendre son ambassadeur,
et pour prévenir Faffront qq'on alloif faire en sa personne à
toates les tètes couronnées; il les pressa, par le motif de
leur honneur, de ne pas s'avilir jusqu'à donner de la paix -
d*Altranstad une garantie» que Charles XII leur arrachoit en
menaçant. Ces lettre^ n'eorént d'autre effet que de mieux
fifae voir la puissance du roi de Suéde. L'empereur, FAn-
Sfelerre et la Hollande avoient alors à soutenir contre la
Aance une guerre mineuse : ils ne jugèrent pas à propos
<nmter Charles XII par le refus de la vaine cérémonie de
b garantie d'un traité* A Fégard du mallieureux Patkul, il
^*y eut pas une puissance qui interposât ses bons offices
en sa faveur, et qui ne fil voir combi^ peu un siget doit
compter sur des rois. .
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$6 HflSTOIRla DE CRAftLËS XII. tw.m
On proposa dans le cendeH dv «qu*^4iier àt i^éf
aaHifs envers les oKiciers 9«ié4oi8 ptisonnkrs à iiammàyU
czar ne voulut pejnt eonseMir à uœ lKii^«iie q«î iè|t ta da
suites si funestes : 41 y avoit plus de M »i C > fîka prataMn
en Suéde, que de Suédois en Moscévia.
14 cbercba une ^^ett^mnee pk» UlAp. La graada aooée
At «on ennemi étoit •«« Saxe saas agir. Leaeaiiaai^ ^
némâ du roi de Saede, €^ étoit iMké en Pologne à btèk
é'enfiroH vingt mille ëommes, ne poui^it garder les fv*
aages dans tm pays sans iarleresscs et 4>leiB de iictÎMif
tMairiflias ^kMt au cawp de Cluirks XII. L'empcaear m»
"covite saisk' oelte aavjanÉlure, ci iiaDlae «n Polagae m».
plos de soiiiante miUe homniea: ii ks a6pare enfdiaiiettn
MDOpps, et laaroiie avec un camp ^laat jna^'à Léopoi^i ^
41 n'y avoit point de garnison si^oîsé. — ^Toujks ks nttes
4fc P^ogne sont à eekiî qvâ se psétenle à leum poites avec
idies tMHipes. Il fit convoquer une assemblée à lÂ^ipM,
letle à peu près que celle qui avoit déirôné ApgV^ ^
Varsovie.
La Pologne avèit aiiira deux primats^ aussi liSaa '^I*^
'deux rois : Tun de 'la nomination d'Augustf^ l'autre de ^i^
de Stanislas. Le primat nommé par Augu&le, 40iHH»^
l'assendilée ^de Léop^M, où se Fendirent tous ceux que«^
INTÎnce «v«it 'abandonnés par la paix d'AHranstitd, -et oe»^
^ne l'aigent «du -caar avoit gagnés. On y proposa if^
im nouveau souverain. Il s'en kAsà ipeu que la Mffp^
'H^etA dfers tiKm-foiS) sans qu'on eût pu dire quel*eétéié k
"VéritaMe.
f^endant Us cohféveiices de Lénpoid, 4e niu, H ^^
^léiét avec l^iemperenr d'AHeniagne, fiar la ecaînte cofiMP*^
>e^ Ms étoient duYoi de Suéde/ ^^btûtf séet^ètement qu'a»^
«nvoySM beauemip d'oifiders aVaftnauds. Ceiw *tt ^ï*^'*^
de jour «n joar «augmenter «onsidéfabkmaiit ses fotf^ ^
apportant avec^eux la diadpline et i'e](périei»pe^ f^*^
engagçoit à son service par des libéralités; é^ipovf^"^
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iir.in: I^OIDESUËETE. PT
eircMAti^eir éë's proptes, trqiipes, il donna son portrait cn-
ilcfif'dè diamans aux olficiers généraux et aux colonels qui
miii^t'comttattù à la bataillé de Çalish : les ofiiciers sub-
dtètnek^eutént d(é^ inédaillès dW; lés sitnpTé» sol<fats en
eurènr d'argent. Ces^môniinienà de la Victoire dé Câlislî
bàïSt toUs fhipipés dans sa pouvelle ville de Petersbourg,
oftiàia^ts florissoiênt à mesure qu'il apprenoit à ses troupes
àconnoitre l'émulation et la gloire.
La'confnsion; la niultiplîéitê dkï {&ctioh9i les ravages
contitiuetâ en Pologne, empêchèrent la dktè de Léopold de^
prendre aucune résolution . Le czar la fit trausférer à
Ltibiin; Lé cb'angeitient de lieu ne diminua rien des troublés ^
et dfe l'îûcertitUdé où tout le mondé éloît : rassemblée se
contenta dé ne rêconnoître ni Auguste qui avoit abdiqué,
DÎ Manishi^ êïu malgré eûir ; mais ils ne furent ni assez unis *
ni âssé^ hardis pour nommer ub roi. Pendant ces délibéra- '
tiofts iaùtifesy le partîmes priiices Sapiéha, celui d'Oginskî,
ceai qui tenoient en secret pour le roi Auguste, les nou< '
veaux sujets dé Stanislas, se faisbient tous la guerre, pil-
loiént les terres les uns des autres, et acbevôientla ruine
<le leur pays. Les troupes suédoises, commandées par
Leve&haùpt, dont une partie éloit en Livonie, une autre
ea lithuanie, uûe autre en Pologne, chercboient par-tout
les troupe^ moscovites. Elles ibrûloieiit tout ce qui étott
efiâéiài de Stanislas. Les ISloscovites nifnoient égalemeilt
ainb et enâemis; on i^ voyoit t|ue des villes en cendrés^
et des troupes errantes de Fôlonois dépouillés de tout, qui
délaient ë^aleinent et leurs deux rois, et Cbarlés XII, et
kmt.
I^ Tol St&iislas partît drAltranstad le 15 juillet de Tan- ^
Déérl707> avec k général Rènsclnlcl, seize régimens suédois,
et'Sèaûcoup d'argent, pour appaiser tous ces troubles eh
Pob^piet et se faire rçcônnottre paisiblement. Il fut re-
çoit par tout où il passa: la discipline de ses troupes»
qttt^fûloit lAieilx sentir la barbarie' des Moscovites, lui
F '
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pg HISTOIRE DE CHARLES XII. liv. ur
•gagna les esprits ; son extrême t&bilHé lui réunit presque
toutes les factions* à mesure qu'elle fut connue ; 8<^n aigent
lui donna la plus grande partie de l'armée de ia couronoc.
Le czar craignant de manquer de vivres dans un pays que
ses troupes avoient désolé, m retira en Lithuanie, où étbit
le rendez-vous de ses corps d*arroées, et où il devoit éteblir
des magasins. Cette retraite laissa le roi Stanislas pfdsible
souverain de presque toute la Pologne.
Le seul qui le troublât alors dans ses étals, éloit le
comte Siniawsky» gr^nd général de la couFonne» de la no-
mination du roi Ai\guste. Cet homme» qui avoit d'asses
grands talens et beaucoup d'ambition, étoit à la tète d'ut
tiers-parti : il ne reconnoissoit ni Auguste, niStanidis; et
après ^voir tout tenté pour se faire éliro lui-mèoie, il se
coutentoit d'être thd d« parti, ne pouvant pas être foL
Les troupes de la couronne, qui étoient demeurées aous ses
ordres, n'avoient guère d?autre solde que la liberté de piller
impunément leur propre pays. T^us ceux qui craignoient
ces brigandages, ou qui en souffroient, se donnèrent bien-
tôt à Stanislas, dont la puissance s'affermîssoit de jour en
jour. ^
Le roi de Suéde recevoit alors dans son camp d'Altim-
stad les ambassadeurs de presque tous les princes de la
cbrétienté. Les uns venoient le supplier de quitter les
terres de l'empire ; les autres eussent bien voulu qu^ eût
tourné ses armes contre l'empereur: le bruit même /étoit
répandu par-tout qu'il devott se joindre à la France potar
accabler la maison d'Autriche. Parmi tous ces ambassa-
deurs vint le fameux Jean duc de Marlborough, de la part
d'Anne, reine de la Grande Bretagne. Cet homme qui n't
jamais assise de ville \{uï\ n'ait prise, ni donné de bataille
qu'il n'ait gagnée, étoit à Saïut-Janies un adroit courtîsui,
dans lé parlement unxbef de parti, dans les pays étraïq^en
le plus habile négociateur de son siècle. Il avoit fait w^tÊlA
de mal à la France par son esprit que par ses armes. Oa
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uv. III. ROI DE SUEDE. 99
a eotencltt dir^e au secrétaire des états-généraux, M. Fageli
homme d'un très grand mérite, que plus d'une fois les états-
généraux ayant résolu de s'èpposer à ce que le duc de
Mvilborougb devoit leur proposer, le duc arrivoit, leur
puloit en françois, langue dans laquelle il s'exprimoit très
oal, et les persuadoit tous. C'est ce que le lord Bolingbroke
m'a confirmé.
Il soutenoit avec le prince Eugène, compagnon de ses
victoires, et avec Heinsius, grand-pensionnaire de Hollande,
tout le poids des entreprises d^ alliés contre la France. 11
wnàt que Charles étoit aigri contre l'empire et contre l'emr
perear; qu'il étoit sollicité secrètement par les François;
et que si ce conquérant embrassoit le parti de ^ouis XIV»
ks alliés seroient opprimés.
Il est vrai que Charles avoit donné sa parole en 1700
d« DC( se mêler en rien de là guerre de Lojub XIV contre
les. tlUés; mais le duc de Marlborougb ne crojoit pa? qu'il
y «Il un prince assez esclave, de sa parole pour ue la pas
sacrifier à sa grandeur et à son intérêt. Il paitit donc de
la Haye dans le dessein d'aller souder les intentions du roi
de Suéde. M. Fabrice, qui étoit alors auprès de Charles XII,
m'a assuré que le duc de Marlborougb eu arrivant s'adressa
secxèlement, non pas au comte Piper, premier ministre,
nais- ao baron de Gortz, qui commençoit à partager avec
Pipet la confiance du roi. Il arriva même dans le carrosse
de ce baron au quartier de Charles XII, et il y eut des
bdideurs marquées entre lui et le chancelier Piper. Pré*
mH ensuite par Piper, avec Robinson, ministre d'Angle*
teàf, il parla au roi en françois; il lui dit, qu*il f^estU
•«nijl heureux de pouvoir apprendre, sous sa ordres ce
pSligncroit de Vart de la guerre. Le roi ne répondit à
cii ^{^pliment par aucune civilité, e^ parut oublier que
e'Jif^ )^àrlborougb qui lui parloit Je sais même qu'il
t|||va que* ce grand homme étoit vêtu d'un manière trop
itâîiidiée« et a^t l'air trop peu guerrier. Ia convem*
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lOe HISTOIRE DE CHARLES Xïl. liv. m.
tioti^'ftit fatigante et générale; CÎmrles XII s'exprimant en
suédois, et Robmson servant dlnterprete. Màrlborougb,
qm ne se faàtoit jamais de faîre ses propositions, et qui avoît
par une longue habitude acquis l'art dé démêler les hommi»,
et de pénétrer les rapports qui sont entre leurs plus secrètes*
pensées, leurs actions, leurs gestes, leurs discours, étudia
attentivement le roi. En )ui parlant de guerre en général,
U crut appercevoir dans Charles XII une aversion naturelle
pour la France ; il remarqua qu'il se plaiâoit à parler des
conquêtes des alliés. Il lui prononça le nom du csar, et
Tit que les yeux du roi s'allumoient toujours à ce noro,
malg^ la modération de cette conférence. Il apperput de
plus sur une table une carte de Moscovie. Il ne lui en
fallut pas davantage pour juger que le véritable dessein du
roi de Suéde et sa seule ambition étoient de détrôner le czar
après le roi de Pologne. H comprit que si ce prince i^oft
en Saxe, c^étoit pour imposer quelques conditions un peu
dures à Fempereur d'Allemagne. Il savoit bien que Tem-
p0reur ne résisteroit pas, et qu'ainsi les affiaires se tennt-
neroient aisément. Il labsa Charles XII à son penehant
naturel ; . et satisfait de Tavoir pénétré, il ne lui fît aucune
proposition. Ces particularités m'ont été confirmées par
madame la duchesse de JVIarlborough, sa veuve, étant en-
core vivante.
Comme peu de négociations s'achèvent sans argent, et
qu'on voit quelquefois des ministres qui vendent la haine~ott
la faveur de leur maître, on crut dans toute l'Europe que
le duc de Mariborough n'avoît réussi auprès du roi de
Suéde qu'en donnant à propos une grosse somme au comte
nper ; et la mémoire de ce Suédois en est restée ffêtrfe
jusqu'aujourd'hui. Pour, moi, qui al remonté autant qoH
m'a été possible à IK source de ce bruit, j'ai su que Piper
avoît reçu un présent médiocre de l'empereur, par les mains
dtt comte de Wratislau, avec le consentement du roi son
raattre; et rien du duc de Màilborough. It est certain qœ
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UT. Ui. ilOI Iffi SUEBE. 40^
Charles étdit inOexible iians le desscui d'aUer détvôner
Fenipemur des Russes: qu'il ne recevait alors conseil d#
pcreo^neyCt qu*il n'avoit pas besoin des avis du comte
Ijjjper pour, prendre de Pierre Alexiowitz une vengeanœ
fâi cherchait depuis si loug-temps.
^Ënfin cjB qui achevé de jusiiiier ce ministre, c'est Ybath»
aeur lemlu loug-temps après ^ù sa* mémoire p^ Charles XII,
qui, ayant appris que Piper étoit mort en Russie, fit trans^
porter soa corps à Stockholm, ^ lui ordon^ à ses dépens
des obsèques 'magnifiques.
Le roi, qui n'avoit point encore éprouvé de revers, ni
vaàme de retardement dans ses succès, croyok qu'une année
loi suffiroit pour détrèner le czar, et qu'ij .pourroit ensuite
tevenir sur ses .pas s'ériger «en arlHtre de l'Eurpipe ; mais il
va^it auparavant humttiér l'empierenr d'Allemagne.
le bairon de jStralbeiiti, .envoyé de Suéde à Viemie,
«pcftt eu dans un repas une querelle avec le comte deZoboi,
chambellan de l'empereur ; celui*ci ^yant refusé de boire à
h santé de Charles XH, et ayant dit durement «^ti« ce prince
m Uâoit trop mal mtec $<M inaUre, StraUieim lui avoit donné
«a démenti et un soufflet, et avoit osé, après c6tte insulte,
demander ^irépianÉtion à la cour impériale. La crainte de
déphiire au roi de Suéde avoit forcé l'empereur à bannir aoa
itôet^qu'el devoit venger. -Charles XII ne fut pas satisfait;
ilvoiAut qu'on lui livrât le 'comte de Zobor. La fierté de
k comr de Vienne fut. obligée de fléchir; un mit le copiite
catttt Jes mains -du i^ qi^i le renvoya, après Savoir. gardé
^(iâqae iemps tisonnier à Stétiu.
■il )demai^ de îplus, contré toutes les lois des nations^
^jikm 4ui Mvjit quinze cents malheureux Moscovites, qui,
ifiBtïêfcajf^ à ses armes, avoient fui jusque sur leb 4erres
de ibmfiire. U fallut encore que la cour de Vienne con*-
iiait à «dite létrange demande ; et si renvoyé.môseovi^
iVieiiae n'îivèit •drôitàuent4att'ëvllder ces mi^eureux par
diws chamins, ils élment tous livaés àieurs ennemis^
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lOf HISTOIRE DE CHARLES XII. tiv. xir.
La trobieme et la dernière de âe» demandes fut la plus
forte. Il se déclara le protecteur des sujets protestans de
Fempereur en Silésie» province appartenante à la maison
d'Autriche, non à Tempire. Il voulut que rempeîtur leur
accordât des libertés et des privilèges, établis à' la vérité
par les traités de Vestphalîe ; mais éteints, ou dti flioios
éludés par ceux de Risvick. L^empereur, qui ne cherehoit
qu'à éloigner un voisin dangereux, plia encore, et accorda
, tout ce qu'on voulut. LesJuthériens de Silésie eurent plus
de cent églises, que les catholiques furent obligés de leur
céder pair ce traité ; mais beaucoup de ces concessions, que
leur assuroit la fortune du roi de Suede^ leur furent rai^s
dès qn^il né fut plus en état d'imposer des lois.
Uempereùr, qui fit ces concessions forcées, et qui plia
en tout sous la volonté de Charles Xlf, s'appeloit Joseph t
il étoit fils atné de Léopôld, et frère de Charles VI, qui lui
âuécéda depuis. L'internonce du pape, qui résidoit alors
auprès de Joseph, lui fit des reproches fort vifs de ce qu'un
empereur catholique comme lui avoit fait céder llntérèt de
aa propre religion à ceux des hérétiques. Foui éttê ^
heureux^ lui répondit rempereur en riant, que le rai di
Suéde ne m'ait pas proposé de me faire luthérien, car i*U
Vaivoit voulu, je ne saie ce que four (ris fait.
Le comte de Wratislau, son ambassadeur auprès de
Charles XII, apporta à Leipsick le traité en faveur des Si-
lésiens, signé de la main de son maître. Alors Charles dit
qvtil était le meilleur ami de l'empereur: cependant il ne
vit pas sans dépit que Rome l'eût traversé autant qu'elle
Favoît pu. U regardoit avec mépris la foiblesse de cettt
court qui, ayant aufourd'hui la moitié de TEurôpe pour
ennemie irréconciliable, est toujours en défiance de l'autre,
et ne soutient sou crédit que par l'habileté des negocialions :
cependant 11 tongecMt à se venger d elle. H dit au ronti
de Wratislau que les Suédois 4tv0ient autrefois tuljfugui
Rome: et qu'ils n'awoieni pas dégénéré comme eUe. Il ^
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Liv.jH. ROI DE SUEDE. ' wi
avertir le pape qifil lui redemanderoit an jout les efief s que
la reine Christine avbit laissés à Rome. Ort ne sait jùsqu'oA
ce jeune conquérant eût porté ses ressentimens et ses armes,
si la fortune eût secondé ses desseins. Rien ne lui parois^
toit alors impossible: il avoit même envoyé secrètement
plusieurs officiers en Asie, et jusque dans l'Egypte, pour
leyer le plan des villes et Vinformer des forces de ces états.
Il est certain que si quelqu'un eût pu renverser l'empire
clés Persans et des Turcs, et passer ensuite en Italie, c'étoit
Charies XII. Il ^toit aussi jeune qu'Alexandre^ aussi guer-
rier, aussi entreprennant, plus infatigable, plus robuste et
plus tempérant: et les Suédois valoient peut-être mieux
que les Macédoniens: mais de pareils projets, qui sont
tnùtés de divins quand ils réussissent, ne sont regardés que
comme des chimères quand on est malheureux.
Enfin toutes les difficultés étoient applanies, toutes ses
volontés exécutées : après avoir humilié l'empereur, donné
la loi dans l'empire, avoir pfotégé la religion luthérienne
au milieu des catholiques, détrôné un roi, couronné un
autre ; se voyant la terreur de tous les princes, il se prépara
i partir. Les délices de la Saxe, où il étoit resté oisif
vue année, n'avoient en rien adouci sa manière de vivre.
11 montoit à cheval trois fois par jour, se levoît à quatre
ïïcarcs du matin, s'habilloit seul, ne buvoit point de vin,
De restoît à table qu'un quart d'heure, exerçoit ses troupes
tous les jours, et rie connoissoit d'autre plaisir que celui de
faire trembler l'Europe.
I^s Suédois ne savoient point encore où le roi vouloit
1^ mener. On se doutoit seulement dans l'armée que
Cbarles pourroit aller à Moscou. Il ordonna, quelques
jours avant son départ, âi son grand-maréchal-de.s-logis, de
N donner par écrit la route depuis Leipsick, ... Il s'arrêta
^ moment à ce mot ; et pour que le maréchal-des-logis
^ pût rien deviner de ses projets, il ajouta en riatit, JtM^^
f^^et /et capitalet de VÉuropê Le maréchal Im apporta
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1%^ HISTOIRE RE Cfï^W.^ XII. i^. i^.
«ne Ustje .de toi^^s.ijes routes» à fci tète 4e§tj»fillf5 iLasîpit
^fiecté .de mettre en «grosses lettres, tnmU 4e X^psUiH à
Stockholm. La plupart des Sùédob n!a9pkoie]^t qu'à y
retourner ; mfih k roi étoit biep éloigné de soi^ger ^ l^ur
faire revoir leur, patrie. ^\ Monsieur le maréclial, dit-il> jis
*1 vois bien oà vous ^voudriez me mener;, mais nous ^e re-
" tournerons pas à Stockhobp si^ôt."
L'armée étoit d^ en marche, et passojt aiyirè^ de
Dresde : Charles étoit à la tête, .courant loujp^r^ lelon.nt
coutume deux ou trois cents pas devant ses gardes. On le
perdit to.i^t d'un coup de vue : quelques pffîciers s'avait
<;ereiit à bride abattue pour savoir où il pouvoit être : op
courut de tous côtés, on ne le trouva point. Ualarme est
en un moment dfens toute l'armée; on fait halte, les géné-
raux s'assemblent: on étoit déjà dans là consternation; ofi
apprit en£in d un Saxon, qui passoit, ce .qu'étoit ide^veiva le
L'envie lui avoit pris, en passant si près de Dresde^
d'aller rendre une visite au roi Auguste. Jl était ^entré à
cheval dans la ville suivi de trois ou quatre ,officiers.gÊo^«
raux. On leur demanda leur nom à la barrière : X!h9fi^
dit qp'il s'appeloit Çarl, et qu'il étoit draban: chacun pdjt
lin nom supposé. Le cç^nte Flemming Içs ^voyapt p^i9^
dans la place n'eut que le temps de courir ay^ir ^son npmttKe.
^foiit ce qu'on poyivoit faire dans ^me occasion piarejl^»
s'étoit déjà piiésenté à IJdée 4u ;a;^ni.sli:e. ,11 ,en pi^loit/^
Auguste ; mais Charles entra tout bot^ d^s ia ^çb^futu^i
ayant qu'^nguste eût eu tnêjpe 1^ .^ins de ifueyi^iiir ^de sa
&mpri^e. U ébp^ ni^la^ s^r^ iejt i^ ;co\^ de diwf'^*
il s'bs^iiUa en l^. Chf^le^ 4i^j^^ ^vec ]^i, cpi^me ^o
voyageur 4ijm vjent prendi^e cpugé d^ ^son aipi : fismil» ^
iroulut voir les Içtii^/cêfio^p. Pen${^i^t ,4e peu i^ tejppyp^ 'tt*^
f^apfb>j(a à k^ pf,rçpujrir, ^ ^vpuien prp^crit en Smed^f
gui 9£cvQit dans J^ ti;oupe^ de 3^^, lan^lL q^ue januûs il t^
^(^ffîxjf^lt^f PÇWlfw* jM«» J^v^C|r?d^le <^'pb|(enhr «» fpmçfii ^
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conjura le roi Auguste de la demander à Charles, bien sûr
que ce roi ne reluseroit pas cette légère condescendance à
un prince à qui il venoit d'ôter une couronne, et entre les
mains duquel il étoil dans <*e iiloniènt. Auguste se chargea
ùsément de cette affaire. Il étoit un peu éloigné du roi
de Suéde, et s'entretenoit avec Hprd, général suédois. Je
wùiSf hà dit-ii en «omÎMit, qne vçtre tnàttrë ne me rëfii^tra
JN». ¥mi ne le eomioisse^ pas^ repartit le général Hptd,
9 v<»us refusera plutôt ici qtke par-tout ailleurs. Auguste ne
laissa pas de demander au roi en termes pressans la grâce
do livonien. Charles la refusa d'une manière à ne jp|s se
Il faire demander une seconde fois. Après avoir passé
quelques heures dans cette étrange visite» il embrassa le 9^
Auguste et partit.; 11 trouva, en rejoignant son umie, tous
tes généraux encore en alarmes; ils lui dirent qu'ils comp*
Ment assiéger Dresde, en cas qu'on eût retenu sa liiajesté
prisonnière. Bon ! dit le roi, an n'oseroU* Le lenden^aini
m la nouvelle qu'on reçut que le roi Auguste tenoit dopseil
eitraordiuaire à Dresde, vous verrez, dit le baron de Siral*
betm, qu'ils délibèrent sur ce qu'ils ^voient fyire hier^ A
^ques jours de là Renschild étant venu trouver 1^ roi,
loi paria avec étonnenient de ce voyage de Dresde. 'Je me
i»dsJU, dit Charles, sur ma bonne fortune. J'ai vucèpen"
iM un moment qui n'était pas bien net. Flemmifig H*avoit
fmUe envie que Je sortisse de Dresde si^tét.
Y 3.
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t06 HISTOIRE DE CHARLÎES XII. itv. iv
LIVRE QUATRIEME.
AEcuMiirr.
<?A«pIm vUf^riAu; fuitée ta SûX4: pêuarm^ le n»s t€9/ùiM dm
Vl/kndne. Ses ptrttêi $a bUstun. BaffiilU de FuU^m: mdk
de cette batmlU: Charles réduU à fiifr m Turquie. Sa réttf^
en Bessarabie,
Charles parlît enfin de Saxe eh septembre 1707,
•uivi d'une année de quarante-trois niilie bommes; aulrefoB
couterte de fer, et alors brillante d'or et d'argent, et en-
richie des dépouilles de la Pologne et de la Saxe. Cbaqoe
ioldat emportoit avec lui cinquante écùs d'argent coniptaut
Non seulement tous les réginiens étoient complets, mab il
y avoit dans chaque compagnie j^lusieurs surnuméraires qai
ftltendoient des places vacantes. Outre cette armée, H
comte Levenhaupt, Kun de ses meilleurs généraux, l'at*
tendoit en Pologne avec vingt mille hommes. Il ayoit
encore une autre armée de quinze mille hommes en Fin*
lande, et de nouvelles recrues lui venotent de Suéde. Avec
toutes ces forces on ne douta pas qu'il ne dût détrôner
k czar.
, Cet empereur étoit alors en Lithuanie occupé à ranimer
un parti auquel le roi Auguste sembloit avoir renoncé : sei
troupes, divisées en plusieurs corps, fuyoieut de tous cbiéSt
au premier bruit de rapproche du roi de Suéde. Il avoit
fecommandé lui-même à tous ses généraux de ne jamais
attendre ce conquérant avét des forces inégales ; et il éteit
bien ohéi.
Le roi de Suéde, au milieu de sa marche victorieuse,
reçut un ambassadeur de la part des Turcs. L'ambassadeur
eut son audience au quartier du comte Piper ; c'étoit tou-
jours chex ce mini||itre que «e faisoieut ks cérémonies d'éclat.
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Xiy.tf. ROI DE SUEDE. 10^
Il soutenoit la dignité de son mahfe par des dehors magni^
fiqiies ; et le roi, toujours plus mal logé, plus mal servi çt
plus simplement ^ètu que le moindre officier dé son armée»
dîsoit que son palais étoit le quartier de Piper. L'ambas*
sadeiir turc présenta à Charles cent soldats suédois, qui
ayant élé pris par dies Calmoiicks, et vendus eu Turquie»
avaient été raciietés par le grand seigneur, et que cet em-
pereur eovo^'oit au roi comme le présent le plus agréabk
qu'il pût lui faire ; non que la fierté ottomane prêtèèdtt
rendre homtnage à la gloire de Charles XII, mais parce*
que le snltan, ennemi naturel des empereurs de Môscovie
et d'Allemagne, toufoit se fortifier contre eux de Fâmilié dé
h Suéde et de ralliance de la Pologne. L'ambassadeur
fonipUmetitat- Stanislas sur son avènement: ainsi ce roi fut
teconnu en peu de temps par l'Allemagne, la France, TAn-
gleterre, f Espagne et là Turquie. Il n'y eut que le pape
qni voulut attendre, pour le reconnoître, que'lé temps eût
affermi sur sa tète cette couronne qu'une disgrâce pouvoit
Ure tomber.
A peine Charles eut-il donné audience à rambassadeur
de la Porte ottomane, qu'il courut chercher les Moscovites.
tes troupes du czar et oient sorties de Pologne, et y
éloient rentrées phis de vingt fois pendaiit le cours de là
guerre: ce pays onvert de toutes parts, n'ayant point *de
plates fortes qui coupassent la retraite à une armée, laissoi^
wx^ Moscovites la liberté de reparoîlre souvent au même
tndroit oà ils avoient été battus, et même de pénétrer dans
le pays aussi avant que le vainqueur. Pendant le séjour de'
Charles en Saxe, le czar s'étoit avancé jusqu'à Léopold, ' S
l'extrémité Diéridionale de la Pblogne. Il étoit alors vers'
le nord, à Grodno en Lithuanie, à cent lieues de Léopold.' '
Chéries laissa en Pologne Stanblasj qui, assisté de cKx
«ille suédois et de ses nouveaux sujets, avoit à conserver
<0D nouveau royaume contre les ehnemis étrangers et dd- '
.mestiques* Pour lui il se mit à la tète de sa cavalerie, ei^
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^^ mSTOIIfP I>^ (fffA]^^ XII. ifir. fr-
|} aypit 4éj5t pas?|& Jf îj^ieff^cii, ^ nJeux lieu^ ^^ b| i^Hp J
ej 1^ c£^r ne ^ojj cpiçor^ rien f)|s ;»4 fmch^* A ia ^^ftr
ipi^re nouyelle que )ef Çi^écloif ^vf n^, l^ ç^^r s^ par |a
ttoxlf dp p^r^, ^t P^rlef enjbrp g^r ^Ite flu} |?sl f^ pp^i»
L^ roi n'^v.Qjt ^vec l^i qiip ^x p^n^ gî^rdes ; Je rej|l^ i^'s^vi^
p le suivre. Le ezar fuyoit i^e;; p)}|# d^ 4«hx mill^
Boinnips, d^ rppimp4 qije tpi?fe w»e a^ée ^fitrm^ 4liii|l
GrpdnQ. .Jl apprend le jp^r oiêm^ p^r un tr^Mge Polg^
npi^ qu'il n'a quitté la place qxfh ^x çienti hpinmef, et que
le gros de l'armée f^nneuiievéto^ ^9<^^ iloigaé de pli|9 <}e
cinq lieues. {1 nç piejrd pqîpt de temps, ^1 4ét?çhe qulpse
çepts chevaux de sa troupe, à l'ei^irée de la nuit, poqr aOer
surprendra le roi de Sue<|e dans 4a ville* les q^in9e c^Bt4
Moscovites j^r^iv^rent, à 1^ faveur de rpbscurité, jusqu!à ht
première garde suédoise^ sans être reconnus. Trente hçotaies
eomposoient cette garde ; ils soutinrent seuls un demi-quaurt-
d'heure l'effort des quinze cents hommes. Le ro$, qui éte||
i ('autre bout de la ville, i^pourul bieii-t6t avec Iç f^sle de
ses six cents gardes. Les Mpscqyites s'eultHf^t ai^pEf*
^ipitatiop. Spn ^rmée ne fqt pas lo|ig4^ipps sf^^s^ l^, re-
j^oindre, ni li^ sans poursuivre Feupeqù. . Tous les corpff
i(|]i9scovites répandus daus la Litbuanie se reUroiMut en b^ll^
dvLci^Xé ieYomnt, dans le palatinat de l^Iinsky, près (Ht|
potières de la Moscoyie^ où étoit leur rendez-vous- %^
Suédoi^ que le roi partagea aussi en divejcs cprps» ne oe^*
^ent de les suivre pendant plus de trente lieues de d^,
i^in. Ceux qui fuyoient et ceux qui poursuivoijent, f^iso^eal
^es marches forcées presque tous les jours^ quoiqu'on t|t
au milieu de l'hiver. Il y avoit déjà long temps que toute»
les saisons étoient dévenues égales popr les s<Mats de
Charles et pour ceux du czar ; la seules terreur quln^furoit
k nom du roi Charles, mettoit alpr^ d^ li% dtff4f^9^ ^^
kf Moscovites ei lea Suéjd^î^.
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iiy. IV. JROI DP SUEPJ^. jOjj
Depub Grodno jusqu'ajn Borys^hene, en ticant veiy
forient; ce sont des marais, dés déserts, des forêts immenses.
Dans ks cndroks qui sont cultivés on né trouve point de
livres; les paysans enfouissant dans la terre tous leurs
grainsy et tout c'e qui peut s'y conserver : il faut sonder la
terre avec de grandes perches ferrées, pour découvrir ces
magasins souterrains. Les Moscovites et les Suédois se ser- '
virent tour-à-tour de ces provisions ; mab on n'en trouvoit
pas toujours, et elles n'étoient pas suffisantes.
Le roi de Suéde, qui av^it prévu ces extrémités, avoit
fait apporter du biscuit pour la subsistance de son année :
rien ne Farrètoit dans sa marche. Après qu^l eut traversé
la forêt de Minsky, où il fallut abattre ^ tout moment des
arbres pour faire un chemin à ses troupes et à son bagage,
il se trouva le 25 juiQ 17O8 clivant la rivière d« Bérézine,
Tis-à-vis Borislou.
Le czar avoit rassemblé en cet endroit la plus gnindê
partie de ses forces ; il y étpit avaptageusement retranché.
Sou dessein étoit d'empêcher les Suédois de passer la rivière.
Charles posta quelques régimens sur le bord de la l^érézine,
à Topposite de Borislou ; comme s'il en avoit voulu tester
lé passage à la vue de rennenii. Dans le même temps il
remonte avec son armée, trob lieues au-delà, vers la source
de la rivière': il y fait jeter un pont, passe sur le ventre à
ttn corps de trois mille hommes qui défendoit ce poste, et
marche à l'armée ennemie sans s'arrêter. Les Moscovites
ne l'attendirent pas ; ib décampèrent, et se retirèrent vers
le Borysthene, gâtant tous les chemins et détruisant tout sur
leur route pour retarder au moins les Suédois.
Charles surmonta tous les obstacles, avançant toujours
▼ers le Borysthene. Il rencontra sur soà chemin vingt mill«
Moscovites, retranchés dans un lieu nommé Hollosin, der-
rière un marais, auquel on ne pouvoit aborder qu'en passant
une rivière. Charles n'attendit pas, pour les attaquer, que
k reste de son infanterie fût arnvé ^ Û se jette dans L'^au^. à
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1 \b HISTOÏRE DE CHARLES XII. lit. it.
la tète de ses gardes à pied : il traverse la rivière et le ma*
rais, ayant souvent de l'eau au-dessus <les épaules. Pen^tnt
qu'il alloit ainsi aux ennemis, il avoit ordonné à sa cavalerie
de faire le tour du marais poiir prendre les ennemis en flanc
Les Moscovites étonnés qu'aucune barrière ne pût les dé?
fendre, furent enfoncés en même-temps par le roi, qui kl
ftttaquoit à pied, et par la cavalerie suédoise.
Cette cavalerie, s'étant fait jour à travées les ennenûi,
joignît le roi au milieu de combat. Alors il monta à cheval,
nais quelque temps après il trouva dans la mêlée un jeune
gentilhomme suédois, nommé Cyllenstiern, . qu'il aimoit
beaucoup, blessé et hors d'état de marcher : il le força à
prendre son cheval, et continua de commander à pied à la
tète de son infanterie. De toutes les batailles .qu'il avoit
données, celle-ci étoit peut-être la plus glorieuse, celle où
il avoit essuvé les plus grands dan^eis et où il avoit montré
le plus d'habileté. On en conserva la mémoire par une
médaille, où on lisoit d'un c6té : Silva, paludea, ogSff'*i
hostes victi ; et de Tautre ce vers de Lucain; . Vktfktt
êopiaa alium laturus m orbem.
Les Moscovites, chassés par-tout» repassèrent le Bo-
rjsthene, qui sépare la Pologne de leur pays. Charles ne
tarda pas à les poursuivre : il passa ce grand fleuve aprèf
eux à Mohilou, dernière ville de la Polc^e, qui appartient^
tantôt aux Polonois, tantôt aux czars, destinée commune
aux places entières. '
Le czar, qui vit alors son empire, où il venoit de faire
naître les arts et le commerce, en proie à une guerre ca-
pable de renverser dans peu tous ses grande desseins et
peut-être son trône, songea à parler de paix. Il fit bar.
farder quelques piropositions par un gentilhomme polonois
qui vint à l'armée de Suéde. Charles XII, accoulumé à
n'accorder la paix à ses enn^emb que dans leurs capitale?,
répondit : Je iraittrai avec if czar à Moscou, Quand on
lïtpporta au czar cette réponse hautaine: " Mon frcre
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Mv.iv. : ROI DE SUEDE. *. m
•' Ch^rlci, dît-U. prétend jbire tpajo^ l'AIcundfe; niii
''je iB€ flatte qu'il ne trouvera pas «n moi un Darhiau''
De Mohilou, place où k roi traverwi le Borysthnee, ri
TOUS remontez au nord, le long de ce fleuve, toiyours tur
les frontières de Polqg^, et de Mpscovie,, vous trouverfaà
trente lieues le pays de Smolensko« par où passe la grande
route qui va de Pologne à Moscou. Le czar fwyoit par cf
chemin. Le roi le suivoit à grandes journées. Une partit
de l'arriére ga^de moscovite fut plus d une fois aux prises
avec les dragons de Tavant garde suédoise. L'avantage
demeuroit presque toujours à ces derniers ; mais ils s'aïf*.
foiblissoient à force de vaincre dans de petits combats qui
ne décid^içnt rien, et où ils perdoient toiyoui-s du monde «
Le 22 septembre de cette année 1708, le roi attaqua,
toprès de Sniolensko, un corps de dix mille hommes de^
civaleriê, et de six mille Calmoucks.
Ces Calmoucks sont des Tartares, qui habitent entrte le
royajinie'd'Àstracan, domaine du czar, et celui de Samar*
^de, pays des Tartares usbecks, et patrie de Timur coniii»;
ms le nom àe Tamerian. ^ pays des Calmoucks s'étend
à l'orient jusqu'aux montagnes qui séparept le Mogpl de
PAsié occidentale. Ceux qui habitent vers Astracan sont
tributaires du czar : il prétend sur eux un empire absolu ;
roais leur vie vagabonde l'empêche d'en être le maître^ et
to qu^l se conduit avec eux comme le grand seigneur ave*
1^ Arabes, tantôt souffrant leurs brigandages, et tantôt les
punissant. H y a toiiyours de ces .Calmoucks dans les
troupes de M oscovie. Le czar étoit même parvenu à les
disàpliner, comme le reste de ses soldats.
Le roi fondit sur cette a miée, , n'ayant avec lui que si^
^méns de cavalerie, et quatre mille fantassins. Il enfonça
d'abord les Moscovites à la tète de. son régiment d'Ostro-
Ç^hîe ; les ennemis se retirèrent. Le roi avança sur eux
P^r dés chemins creux et inégaux^ où les Calmoucks étoient,
^chés ; ils parurent alors, et se jetèrent entre le régiment
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lit HiSTOIlffe'Dlf CttARÊES XII. ilYv. vt.
46 fe Wi côirfwilioit et le «ste * Fàttiitt ifeédoiste. A Yior
stant, tt Mo5côvites elCalmoucks; cîntbûi^êrent ce r^îât^iit,
«I ftetverefil jfisqu'au tw. !b tueiierit' deux aides-de-càinp
«pi eonibttttoicnt wïpths de s^ pcrtentië; Le ctiêval du roî
ht ttté 90I1S ttit : «n êètijrigf lui ^d pHit'ntolt un autr<^, tnâu
Vtooy^ « le Ae^l futeat pèrté» de tcotiJ>s. Charles c6£f
hoLVàt kpM entouré de qudqtfW officidrs qui atcoiirùrèfit
iBeimtiiMidt autcmr de loi. ' '
Plusieurs furent pris, lilessés, ou tués, ^tt cnh^dûés loîtt
Âi roi pft# la foule qui se jetdt sur eux ; il se restôit qtié
cinq honnoes auprès de Charles. Il avoît tué plus de déu^e
MlBtBÀb de sa main, sans aVolr' reçu une seule Miessùré,
par ec bonheur inexprimable 'qui jn^qù*alôrs VàVTOît accdni-
pigné par-touî, et sur îeqitcl 11 dompla' toujoîirs. Enfin un
edlond nommé Dardôf ie h(k jour à travers les CaWopclûi
avec seulement une compagnie de son régiment, il anriVe' à
temps pour dégager le roi : le reste des Suédois fit mam-
baflse sur ces Tartares. L'armée reprit ses rangs : Charles
itoontft à cfaeVal, et tout fetigué qull étolt, il poursuive W
Ihédeovites pendant deux lieuei.
Le vainqueur étoit toujours dans le grand chemb et U
dq^lale de Moscovie. 11 y a de Smolensko, auprès duqqd
se donna ce combat, jusqu'à Moscou, environ cent de noi
lieues Irançoises : Farmée n'avoit presque phis de nvte$.
Le comte Piper pria fortement le roi d'attendre que k
général Levenhaufit, qui dévoit lui en ameUer stvec un reo*
fort de quinze mille faomhies, vint ie joindre. Non-sâiW-
nent h roi, ^tfi naïvement prenoit conseil, n'écouta ipoiol
cet avis judicieux, fiiàb, au grand étnnnement de toute far*
Mée, ii quitta le chenrin de Moscou, et fit marcher au i&îfii
vers rakraine, pays des Cosaques, situé entre la petite
Tartane, la Pologne et la Moscovie. Ce pays à envîrott*
cent de nos Keues du midi au septentrion,, et presque autant
de l'orient aii couchant. * II est partagé en deux parties à-
peu-près égalés par le Borysthene, qui le traverse eu coo-
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ur. iv« ROI DE SUEDE. liB
knt du nprdrauest au «ud-est; la priacipale ville est Ba-
tburiD, sur la petite rivière de Sem. La partie la plus
septentrionale de l'Ukraine est cultivée et riclie. La plus
méridionale, située par lé quarante-huitième degré, est un
des pays les plus fertiles du monde et les plus déserts. Le
maavab gouvernement y étouffe le bien que la nature s ef-
force xie faire aux hommes. Les habitans de ces cantons,
voisins de la petite Ta rta rie, ne sèment ni ne plantent, parce-
que les Tartares de Budziac, ceux de Précop, les Moldaves,
tous peuples brigands, viendroient ravager leurs moissons.
L'Ukraine a toujours aspiré à être libre ; mais étant entourée
de la Moscovie, des états du grand seigneur et de la Po-
logne, il lui a fcdlu chercher un protecteur, et par consé-
guent un maître, dans Tunde ces trois états. Elle se mit
d'abord sous la protection de la Pologne, qui la traita trop
tû sujette : elle se donna depuis au Moscovite, qui la gour
vema en esclave,, autant qu'il le put. D*abord les Ukrainiens
jopiceflt du privilège d'élire un prince soos le npiili de gé-
iiéi^; mais bien-tôt ils furent dqiouiliés de ce drprt; et
leor général fut nommé par la cour de Moscou.
Celui qui remplissoit alors cette pluce étoit un gentil-
homme polonois, nommé Mazeppa, ué dans le palatinatde
PodoUe ; il avoit été éleyé page du roi Jean Casimir, et
«voit pris .à sa cour quelque, teinture des belles-lettres. Une
intrigua qu!il eut dans sa jeunesse avec la femme d'un gen-
tiUiwime polonois, ^yant été découverte le mari le fitiouet-
ter de verges» ht fit lier tout nu sur un cheval fairoudie,
«t k laissa aller en cet .^tat. Le cheval, qui étoit du pays
de l'Ukraine, y retourna, et y porta M^eppa ^mi?mort d^
intîgDie et de foim. Quelques paysans le secoururent: il
ïîÊhi Jong^emps parmi eux, et se signala dans plusieurs
fi<WMrses cQotue les Tartares^ La supériorUé de ses lumières
ly 4oilOfiiunegraQde considération |mmt i^s Cpstiques : su
i^[iitf(^u s'au^nenlant 4e jouTiee jiHur# p)i%eia Jb «car ^
ieJrâe prince de rUtowe.
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ni HISTOIRE DE CHAttLES XII. tiv. ir.
Un jour, étant à tabfe ^ Moscou avec k czar, cet em-
pereur lui proposa de dtscîplioer les Cosaques, et de rendre
ces peuples plus dépendans. Mazeppa répondit que la
situation de l'Ukraine et le génie de cette nation étoient
des obstacles insurmontables. Le Czar, qui conunençoit à
être échauffé par le vin, et qui ne commandoît pas toujours
à sa colère, l'appela traître^ et le menaça de le faire em-
paler.
Mazeppa de retour en Ukraine forma le projet d'unt
révolte : l'armée de Suéde, qui parut bien-tôt après sur les
frontières, lui en facilita les moyens; il prit la résolution
d'être indépendant, et de se former un puissant royaume de
l'Ukraine et des débris de l'empire de Russie. Cétoit ub
homme courageux, entreprennant et d'un travail infatigable,
quoique dans une grande Vieillesse. Il se ligua secrètenieiit
avec le roi de Suéde, pour hôter la chute du czàr, et poiir
en profiter.
Le roi lui donna rendez- vous auprès de la rivière de
Desna. Mazeppa promit de s'y rendre avec trente miUt
hommes, des munitions de guerre, des provisions de bouche,
^ ses trésors, qui étoient immenses. L'armée suédoise
marcha donc de ce c5té, au grand regret de tous les offi-
ciers, qui ne savoient rien du traité du roi avec 1^ Cosaques.
Charles envoya ordre à Levenhaupt de lui amener en dili-
gence ses troupes et des provisions dans l'Ukraine, où il
projetait de passer l'hiver, afin que, s'étant assuré de ce
pays, il pût conquérir la Moscovie au printemps suivant i
et cependant il s'a.vança vers la rivière de Desna, qui totsbe
dans le Borysthene à Kiovie. '
Les obstacles qu'on avoit trouvés jusqu'alors dms la
route, étoient légers en comparaison de ceux qu'on wD*
contra dans ce nouveau chemin. U fallut traverser nat
forè^de cinquante lieues, pleine de marécages. Le génital
Lagercron, qui niarchoit devant avec dnq mille honmies et
4«s pionnierty égara l'armée ven l'orieiit, à trente fieties <!•
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UY.IT. ROI DE SUEDE,^ r Pf iM
h véritable roBte. Aptès^ quatre jours de tnaiicbe, le roi
reconnut la faute de Lagercron: on se remit avec peine
dans le chèmîù ; niais presque toute l'artillerie et tous les
chariots restèrent embourbés ou abymés dans les marais.
Enfin, après douze jours d'une marche si pénible, pen-
dant laquelle les Suédois avoieot consumé le peu de biscuit
qui leur réstoit, cette armée, exténuée de lassitude et de
faim, arrive sur les bords de la Desna, dans Fendrx^it où Ma-
zeppa avoit marqué le rendez-vous ; mais au lieu d'y trouver
ce priuce, on trouva un corps de Moscovites, qui avançoft
vers l'autre bord de la rivière. Le roi fut étonn)ê; mais il
résolut sur le champ de passer la Desna, et d'attaquer les
ennemis. Les bords de cette rivière étoierit si escarpés,
qu'on fut obligé de descendre les soldats avec des cordes.
11$ traversèrent là rivière selèn leur manière accoutumée'^
les uns sur des radeaux faits à la hâte, les autres à la nage.
Le corps des Moscovites, qui arrivoit dans ce temps^Ià même,
n'étoit que de huit mille hommes; il ne résista^ pas long-
temps, et cet obstacle fut encore surmonté. '
Charles avançoit da^s ces pays perdus, incertain de sa
route, et ée la fidélité dé Mazeppa : ce Cosaque parut en-
fin ; maïs plutôt comme un fugitif, que comme un allié puis-
sant. Les Moscovites avoient découvert et prévenu ses des-
seins. Ils étoieut venus fondre sur ses Cosaque», qîi'iU
avaient taillés en pièces : ses principaux amis, pris les armes
à la main, avoient péri' au nombre de trente par le supplice
delà roue; ses villes étoient réduites en cendrés, sestréso^
pittés, les provisiouis qu'il préparoit au roi de Suéde saisies :
à. peine avoit^il pu échapper, avec six mille hommes, él
çi^ues chevaux chargés d'or et d'argent. Toutefois il ap»
portoit au roi l'espérance de se soutenir par ses intelligencetj
dans ces pays inconnus, et l'affection de tous les Cosaqu^
qui, enragés contre les Moscovites» anivoient par troupes
aa camp, et le firent subsister^ ,., . -
Charles eapéroit au m^ins. que ton général Levtuliaftqpl
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llS HISTOIRE DE OHABEES XIL ViV.^.
Tieftdrok v^wrer œlte mauvaise fortune. U' devoH wooftâét
«nvtroD quûue miHe Suédois, <|ai «aloient mieiix qœ ttaà
MXie Cosaques, et appoittr dts ptovisioasée guerre et^
bouche. U antiva à^peu*près ^aas k même état qm
Il avoit déjà passé le)Borystbeiie«u«detsiiS'4e M^failoo,
4t s^étoit avaocé vingt de no9' lieues au-delà «sur le ^faeulia
.de llJfcraiDe. Il amenoit au rai un «ouvoi de bak roitte
«bariots, avec l'argent qu'il avott levé en Lîtfauanie suraa ^
route. Quand il fut vers k bouig de Lesno, prés de ÏHh
uroit où les rivières de Pronia et de Sossa se joignent,
aller tomber loin au-dessous dans le Borjstbeae, le
parut à la tète de près de quarante nuUe hommes.
Le général Suédois, qui n'^n avoit pas aeice mille <
pléits, ne voulut pas se retrancher. Tant de victoire
avoient donné aux Suédois une si grande conliaace, qu^
ne s'informoient jamais du nombre dé leurs enaera», am
feulement du lieu où ils étotent. Levenhaupt roaceha donc
à eux sans balancer, le 7 d'octobre 1708, après midi. Daab
le preniier choc les Suédois tiieFent quinze cents Moscoviia.
La confusion se mit dans l'armée du czar ; on ftiyolt detaoi
c^tés. L'empereur des Russes vit le moment où il alloît
jàtre entièrement délait. Il sentoit que le salut de ses ètiis
,ilépendoit de cette joumé<e, et qu'il étoit perdu si Leven-
baupt joignoît le roi de Suiçde avec une armée victorîease.
Dèjs qu'il vit que ses troupes cominenpoieiil à ncukr^
il courut à rarriere-g<irde, où étoient des Cosaques «t des
Çaln^oucks: Je vous ordomu^ leMr dit-il,; ëeimqr 9ur yd-
ç^n§Me Jmm, et de me tuer mei-iahitt^ m féMe ^msn Ùéh
p»ur me reiirer, De là il l«touma à ravant-^garde, et iriiUift
9<B« troupes lui-même, aBdéckitprmce Memtikoff 6t du friiice
GrallitaÎB. Leveidiaupt, qui «voit des ordres pressatis 4e
CiÛpinfb'e aon.makre, ajnm/içieux contis^ sa^j^rohe qu#
de recommencer le combat, cm^rant en avoir assez hât fottt
Mw iureunemis la résobition de te poursuivre. - :
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U¥. s^. B.OI DB SUBDR ' ' Hr
Dès k kddeBMttD» à anie betttes, lecnrfattaBk|QV*s»''
bofd d'un BBiais, et étesdit sott tentée ponir rtwreloppen
Lb8 Snérfeb firent f ace pav-toul : ota se bîit^ pendant ddut^
betu^ avec une opmî^refté^ale» Les Afoecwvto pei^
dirent trois fois plus de mmiëe? nuRsauemi ne 'lâcha' piad^
et k vicl)oîre fui indécise.
A quatre heures le général Bauer amena au czar un ren*
foitder treupes. La baiteîRe reooninwnça alevtf p*ur la t#oi-
tieae>ioi9 »?ec pks de fnrie et d'acfaïamettient ; elléduilÉ"
JQMpi'àlt^nttk: enfin le nombre remporta, les Suéffeifirluretit'
rompus/ enfoncés, et poussés jusqu'à leur bagage. ILe^en^*'
ba%t rallia ses troupes derrière ses chariots ; les Suédois
Mçnt Talscus^ mais ib ne s'enfuirent point. Ils étoient '
eofiffon neuf mille hommes, dont aucun ne sfécarta: k
géakal k» mît en ordre dé bataille aussi^ faeikment que
l'ÏMi'avoMBt point été ifainais. Le czar; dé l'autre cdlé>
piM^aditttt sous lésâmes; il défendit aux officiers; soua
pifaie>d'é(réca8séSj et aux s<d(fatS| sous peine dt mort» ât
^éetHer pour piller.
Le kndcmanr encore il commanda au puint du jour une
DSMdleattsque. Levenhaupt s'étoît retiré à quelques mitks',
àm un lien avantageux, apv^s avoir-eiidotté tme^partk diè'
soBcanon^ et mi» le leu è ses chariots.
Les MoieovHès^ arrivèrent assez à tempe ponr empêcher
lotttrk ciHivoi d'è^ consumé par k» flammes; 'ûà se sai^
>iMt de pk» de shc mille chariot» quils sauvèrent. Le
^^ qui vouloit achever la défaite de» Suédois, envoya ml
àt le» généraux^ nommé Phlng^ k» attaquer encore ponr
^Mquieme foi»: ce général leur offrit une capitulation '
bcwiable. Levenbampt la refusa et livra un cinquième comy
^ anssi sfmglant que les premiers. Dé neuf mille soldat»
qu'ï avoit encore, il en perdit environ la moitié ; l'antre ne
put (tiê forcée ; enfin la nuit surv^enant, Levenhatipt^ après
^voir soutenu cinq combat» coatve quarante mille hommeii»'
P**^ laSoissa avec environ cinq imlk combattans'^ lui'
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tu HISTOIRE 1>E CHARLES Xll. mw. iv.
rcfloiciit Le onr perdit près de dix mille hommes dtai
ees dnq combats, où ii eut la gloire de vaiocre les Suédois
elLeveabaupt celle de disputer trois jours la victoire» et
de se retirer sans avoilr été forcé dans son dernier poste. II
YÎnt donc au caaiip de son mattre avec l'honneur de s'être
si bien défendu ; niais n'amenant avec lui ni munkions m
armée.
Le roi de Suéde se trouva ainsi sans provisions et sans
communication avec la Pologne» entouré d'ennemis, au mî*
li^u d'un pays oà il n'avoit guère de ressource que son
connue.
Dans cette extrémité, le mémorable hiver de 17(]|9,
plus terrible encore sur ces frontières de l'Europe, que
nous ne l'avons, senti en France, détruisit une partie de son
armée. Charles vouloit buaver les saisons, comme â îmak
ses ennemis ; il osoit faire de longues marches de tmnpes
pendant ce froid mortel. Ce fut dans une de ces marchfs
que deux, mille hommes tombèrent morts de froid presque
^ ses yeux. Les cavaliers n'avoieut plus de bcittes; leshai-
tassii|s étoient sims souliers et presque sans habits. Us
étoient réduits à se faire des chaussures de peaux de bèlss
comme ils pouvoient : souvent ils roanquoient de pain* On
avoit été réduit à jeter presque tous les canons dans des
marais et dans des rivières, faute de chevaux pour les
traîner. Cette armée, auparavant si florissante, itoitrédoUe
à vmgt-quatre mille hommes près de mourir de faim. On
ne recevoit plus de nouvelles de la Suéde et on ne pouvoit
y en faire tenir. Dans cet état un seul officier se plaignit
" Eh quoi f lui dit le roi, vous eDnuyez-vous d'être loin de
" .votre femme I Si vous êtes un vrai *soldat .je vous lueftena
*• si loin» que vous pourrez à pekie recevoir des nôuveUei
" de Suéde une tois en trob ans.*'
Le marquis de Brancas, depuis ambassadeur en Suéde,
m'a conté qu'un soldat osa présenter au roi, avec murmure,
ei| présence de toute l'armée, un morceau de pain noir et
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ur.nr. :rOI DE SU£DE. 11^
i noin, fait (foige et d'avoine, seule nourriture qu'Hs troîent
tion, et dont 'ûs^ n'ayoient pas même suffisamment. Le
roi reçut le morceau de pain sans s'émouvoir, le mangea
tQBt entier, et dit ensuite froidement au soldat : // n'est pat
^; maù il peut u manger. Ce trait, tout petit qu'il est,
li ce qui augmente le respect et |a confiance peut être petit,
couUibua plus que tout le reste à faire supporter à l'armé^
nédoise des extrémités qui eussent été intolérables sous
tout autre général.
Dans cette situation il reçut enfin des nouvelles de
Stodholm 3 mais ce ne fut que pour apprendre la mort dç
hdochesse de Holstein sa sœur, que la petite-vérole enleva
ia mois de Tlécembre 1708, dans la vingt-septième année
<^ son. âge* C'étoit une princesse aussi douce et aussi com«
i^ttinante que son frère étoit impérieux dans sts volonté^
^tinplacable dans ses vengeances. Il avoit toijgoors eu
IMNff elle beaucoup de tendresse ; il fut d^autant plus affligé
<k ta perte, que commençant alors à devenir malheureu]^,
iieadevenoit un peu plus sensible.
, Il apprit ausd qu*on avoit levé des troupes et de Taisent
<tt exécution de ses ordres, mais rien ne pouvoît arriver
fiiKfA son camp, puisqu'entre lui et Stockbolm il y ftvoit
^ 4t cinq cents lieues à traverser, et des ennemis supé-
'i^Bis en nombre à combattre.
, Le C2ar, aussi agissant que le roi de Suéde, après avoir
^*^i de nouvelles troupes au secours des confédérés de
^^okigiie, réunis contre Stanislas, sous le général Siniawski»
^tiaBça bientôt dans l'Ukraine, an milieu de ce rude biver»
Fpir faire tète au roi de ^uede. Là il continua dans la
Hkfaïue d'affoiblir son ennemi par de petits combats, ju-
P9ÊA bien que Tatmée suédoise périroit entièrement à la
^|ae, puisqu'elle ne pouvoit être recrutée.
Il faUoit que le froid fût bien excessif, puisque les deui
furent contraints de s'accorder une suspenûoa
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150 HISTOIRE DE CWARLËS XII. lit. i^
d'armes. Mais dès le pretnier de février^ c/tt rttomtûetiiçi
à se battre au milieu des glace» et des lïetges.
Après plusieurs petits combats, et quelques détâno^
tages, le roi vit au mois d'avril quil ne lui restoit ph» que
dix-huit mille Suédois. Mazeppa ^eul, ce prince des Co-
saques, les faisoit subsister; sans ce secours Tannée eût péri
de faim et de misère. Le czar, dans cette conjoncture, &t
proposer à Mazeppa de rentrer soussa dominatlofi'. Mth
le Cosaque fut fidèle à son nouvel allié, soit que le «upplke
«ffféux dé là roue, dont avoîent péri &es amis, loi fît ctaindie
pour lui-même, soit qu'il voulût les venger.
Charles, avec ses dix-huit raille Suédois, n'aroit perèi
ni le dessein ni Tespérancé de pénétrer jusqu'à Moscou. H
alla vers là ffn de niai investir Puitàva, sur la irriere dt
Vorskta, à l'extrémité orientale dé lUkr^ne, à treize gnHHki
lieues du Borysthene : ce terrain est celui des Zaporavictt;
le plus étrange peuple qui soit sur la terre; Cest un radtti
d'anciens Russes, Polonob et Tartares, faisant tous profb^
sion d*uiie .espèce de chrbtianisme et d'bn brigandage séÉh"
blabie à celui des flibustiers. Ils élisent un chef, qiffli
déposent ou qu'ib égorgent souvent. Ils ne s6uffitnt point
de femmes chez eux ; mais ils vont enlever* tous lés etifiÉflS
à vingt et trente lieues à la ronde, et lés élèvent *dÂùs lêW
mœurs. L'été jls sont toujours en campagne; rtàfefflllM
couchent dans des granges spacieuses, qui contiennent 'qèâtit
ou cinq cents hpmmes. Ils ne craignent rien, ib vivHIt^
libres; iU affrontent la mort pour lé pitis léger butin, atet
là même intrépidité que Cliarles XII là bravoit pour dtfiùÉà
dés. couronnes. Le czar leur fit donner soit^ante nflt*
llôiins, dans Féspérance. qu'ils prendroient soïi p3ât!?'flN
prirent son argent et se déclarèrent pour Chartes XTI, ptf
les soins, de Mazeppa; m^s ils servirent tr^ peu, paitt*
qt^*ils trouvent ridicule de combattre pout autt-e chbie'qae
pour piller : c'étoit beaucoup qu'ib ne ncd^issetit pn^ Ây
i
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UT. iT. ROI DiL SUEDEi ISl
CD eut environ deux nùihe qui firent lé service. On pré-
senta dix de leurs chéfe un matin au roi; mais on eut bien
de la peine à obtenir 'd'eux qu'ils ue faissent point iyres ; car
e'est par là qu'ils commencent la journée. On les mena à
la tranchée; ils y firent paroitre leur adresse à tirer avec
de longues carabines ; car» ^ant montés sur le leven, ils
toôient à la distance de six ceits pas les «onemis qu'ik
eboisissoient. Charles ajouta à ces bandits quelques mille
Yalaques, que lui vendit le kan de la petite Tarlarie. 11 as^^
si%edt doue PuUava avec toutes ces troupes de Zaporaviehi,
de Cosaques, de Valaques, qui» joints à ses dix^huit mille
Suédois, laisoient une armée d'environ trente mille hommes;
nais une armée délabrée, manquant de tout* Le czar avoft
Ut de Pttitava un magasin. Si le roi le prènoit il se rouvroit
lethafiin de Moscou ; et pouvoît au moins attendre dana
Fabondance de toutes choses les secours qu'il espérott en-
coia de Suéde, de livonie, de Poméranie et de Pologne.
Sftjeule ressource étant donc dans la prise de PuHava, il en
pwna le siège avec ardeur. Mazeppa, qui avoit des intelr
ligcaces dans hi ville, Fassura qu'il en seroit bientôt le maître :
r^péfance rensdssoit dans l'armée. Les soldats regardoient
hprâe de Pultava eonime la fin de toutes leurs misères.
Le roi s'appei^ut, dès le commencement du siège, qu'il
aait enseigné Tart de la guerre à ses ennemis. Le prince
Uiigiki>tfy malgré toutes ses précautions, jeta du secours
ém Ui i^le. La garnison par ce moyen se trouva forte
dfti^Hèsr de cinq mille hommes.
Qfk faisoit des jiorties, et qttelijuefçb avec succès ; on
WlMt jouer des mines; mais ce qui rendoit la ville impre-r
ffH^ d'éloit l'approche du czar> qui s'avanç<Mt avec soixante
^•iit mille combatians. Charles XII aUa les reconnoitre
^'9 juin, jour de sa naissance, et battit un de leurs dé<*
^fJKimens ; nrns comme il retoumoit à son camp, il reçut
oa oonp de carabine qui lui perça k botte» et lui fracassa
l'os du talon. Oo ne remarqua pas sur son visage le moindfc
G
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:132 HISTOIHE DE CHARLES XII. Liv. iv.
. changement qui pût faire sôupçonoer qu'il étoit blessé: il
*Gôtttitiiia'à donner tsanquillement ses ordres^ et dememt
^encore près de six heures à cheval. Un de ses domestiques
s'aj^percevant que le soulier de la botte du prince étmttOQt
'sanglani, courut chercher des chirurgiens : la douleur du
i-roi c^nunençoit à être si cuisante^ qu'il feliut l'aider à des-
cenidre de cheval et l'emporter dans sa tente. Les chimr-
giens visiterept sa pkûe: ils furent d'avis de lui coupla
janibe.. La iconstemjEition de Varmée étoit ^inexprimable.
fUnichinirglèii,' nommé Keuman, plus habile ou pluslmrâi
que. les autres, assura qu'en faisant de profondes incisioDS,
il sauveroit la jambe au roi : Travaillez donc taût-à^'heun,
lui dit le rot ; tailUz hardiment, ne craignez rien. U tenoit
Juirmème sa jambe avec ses deux mains regardant les iaci-
flion8'X|b?on 4ui faisoit, comme si l'opération eût été iùk
-wr un autre.'
Dans le temps même qu'on lui mettoit tin appareil, il
ordonna un assaut pour le lendemain ; tuais à peipe avoil-il
donné cet ordre, qu'on vint lui apprendre que toute ramiée
ennemie s^vançôit sur lui. Il fallut alors prendre un antre
parti. Charics, blessé et incapable d'agir, se voyoit entre
le Borystliene et la rivière qui passe à Pultava, dans m
pays désert, sans places de sûreté, sans munitions, vis-à-vis
une armée qui lui coupoit la retraite et les vivres. Dans
cette extrémité Ml n'assembla point de conseil de goerfe,
comme tant d^autres relations Font débité ; mais la nuit du
7 au 8 de juillet il fit venir le feld-nuiréchal Renschild dans
Éa tente;' et lui ordonna sans délibération, comme sans m-
quiétude^ de tout disposer pour attaquer le czar le lende-
main. Henschild ne contesta point, et sortit pour obéir.
A la porte de la tente du roi il rencontra le comte Piper,
avec qui il étoit fort mal depuis long-temps, comme il ar-
rive souvent entre le ministre et le généraL Piper lai de-
manda f^U n*y aroit rien de nouveau: Non, dit le général
iniidenient, et passa outre pour aller donûer ses ordres.
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tiv.îT. hOI DE SUEDE. 123
Dès que le comte Piper fut entré dans la tente : Rensehild
tui voua a-t-^il rien appris, lui dit le roi? Rien, répondit
Fiper. Eh bien, je vous apprends donc, reprit le roi, que
demaiu nous dontuma bataille. Le comte Piper fut effrayé
d'une -résolution si désespéifée, mais il savoît^bien qu'on ne
Êusoit jamais changer son maître d'idée ; il ne marqua son
étonnement que par son silence, et laissa Charles dormir
JBsqu'à la pointe du jour. ,
Ce fut le 8 Juillet de i'smoée 1709 que se donna cette
bataille décisive de Pultava, entre les deux plus singuliers
nioBarqcies qui fussent alors dans le monde : Charles XII
illustre par neuf années de victoires ; Pierre Alexiowits par
ntuf années de peines prises pour former des troupes égales
•ux troupes suédoises : l'un glorieux d'avoir donné des états,
l'aotre d'avoir civilisé les siens : Charles aimant les dangers^
et ne combattant que powla gloire ; Alexiowils ne fuyant
point le péril, et ne faisant la guerre que pour ses intérêts ;
le monarque suédds libéral par grandeur d'âme ; le mos-
civite ne donnant jamais que par quelque vue : celui-là
4*Hnë sobriété et d'une continence sans exemple, d'un na-
Ittml magnanime^ et qui n'avoit été barbare qu'une fois ;
<%lni^ n'ayant pas dépouillé la rudesse de son éducation et
^ son p»ys, aussi terrible à ses sujets qu'admirable aux
^tafingers, et trop adonné à des excès qui ont même abrégié
SCS jours. Charles avoit le titre d'Invincible, qu'un moment
poavoit lui 6ter; les nations ayotent déjà donné à Pierre
Aiexîowits le nom de Grand, qu'une défaite ne pouvoit lui
Uitrperdre, parce qu'il ne le devoit pas à des victoires.
Pour avoir une idée nette de cette battaille, et du lieu
oft elle fut donnée, il faut se figurer Pultava ati nord, le
cimp du rôi de Suéde au sud, tirant un peu vers f orient,
«oii bagage derrière lui à environ un mille, et la rivière de
Wteva au nord de la ville, coulant de l'orient à l^occident.
Le czar avoit passé la rivière à une lieue de Pultava, du
^ de l'occident, et coramençoit à former son camp.
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m HISTOIRE DE CHARLES XII. liv. iv.
A la pointe du jour les Suédois parurent hors de leurs
tranchées avec quatre canons de fer pour toute artillerie;
le reste fut laissé dans le camp avec environ trois mille
hommes ; quatre mille demeurèrent au bagage. De sorte
que Tarmée suédoise marcha aux ennemis forte d'envifdn
vingt et un mille hommes, dont il y avoit environ seize
mille Suédois.
Les généraux Renschild, Roos, Levenhaupt, Slipenbak,
Hoorn, Sparre, Hamilton, le prince de Wiitembérg, parent
du roi, et quelques autres, dont la plupart avoient fu la
/bataille de Narva, faisoient tous souvenir les officiers sub-
alternes de cette journée, où huit mille Suédois avoient
détruit une armée de quatre-vingt mille Moscovites dans on
camp retranché. Les officiers le disoient aux soldats, tous
s'encourageoient en marchant.
Le roi conduîsoit la marché, porté sur un brancard, à
la tète de son infanterie. Une partie de la cavalerie ^Tavança
par son ordre pour attaquer celle des ennemis ; la bataille
commença par cet engagement à quatre heures et demie
du matin :. la cavalerie ennemie étoit à l'occident, à là droite
du camp moscovite ; le prince Menzikoff, et le comte Ool-
lowin, Favoient disposée par intervalles, entre des redoutes
garnies de canon. Le général Slipenbak, à la tète des
Suédois, fondit sut cette cavalerie. Tous ceux qui ont
servi dans les troupes suédoises savent qu'il étoit preiquc
impossible de résister à' la fureur de leur premier ctw^'
Les escadrons moscovites furent rompus et enfoncés. I^
czar accourut lui-même pour les rallier ; son cbapeaa M.
percé d'une balle de mousquet; Menzikoff eilt trois chevaux
tués sous lui : les Suédois crièrent victoire.
Charles ne douta pas que la bataille ne f6t gagnée; »
avoit envoyé au milieu de la nuit le général Greuts avec
cinq mille cavaliers ou dragons, qui dévoient prendre KS
ennemis en flanc, tandis quil les attaqueroit de front; taf»
son malheur voulut que Creuts s'égarât, el ne parut f(^
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Biv. IV. ROI DE SUEDE. 125
Le C2ar, qui s'étok cru perdu, eut le temps de rallier sa
cavalerie. 11 fondit à son tour sur celle du roi, qui, n'étant
point soutenue par le détachement de Creuts, fut rompu»
à son tour ; Slipenbak même fut fait prisonnier dans cet
CDgagement. En même temps soixante et douze canons
tiroieut du camp sur la cavalerie suédoise; et rinknterie
nissienne, débouchant de ses lignes, venoit attaquer celle
de Charles.
Le czar détacha alors le prince Menzikoff pour aller se
poster entre Pultava et les Suédois ; le prinice Menzikoff exé-
cuta avec habileté et avec promptitude Fordre de son maître ;
noH-seuleraent il coupa la communication entre l'armée sué*
doise et les troupes restées au camp devant Pultava ; mais
ayant rencontré un corps de réserve de trois mille hommes»
il Fenveloppa et le tailla en pièces. Si Menzikoff fît cette
manœuvre de lui-même, la Russie lui dut son salut ; si le
cmr Fordonna, il étoit un digne adversaire de Charles XII.
{qpàidant l'infanterie moscovite sortoit de ses lignes, et
s'avançoit en bataille dans la plaine. D'un autre côté, fa|
cavalerie suédoise se rallioit à un quart de lieue de l'armée
etmemie: et le roi, aidé de son feld-maréchal Rensdiiili),
otdonnoît tout pour un combat général.
Il rangea sur deux lignes ce qui lui restoit de troupes ;
9m infanterie occupant le centre, sa cavalerie les deux ailes.
I^'Czar dispôsoit son armée de même: il avoit l'avantage
da nombre et celui de soixante et douze canons, tandis que
les Suédois ne lui en opposoient que quatre et qu'ik com-
nençoient à manquer de poudre.
Uempereur moscovite étoit au centre de son armée,
lAiyaEut alors que le titre de major-général, et sembloit obéir
au général Czérémetoff. Mais il alloit, comme empereur,
de rang en rang, monté sur un cheval turc, qui étoit un
ptésent du grand seigneur, exhortant les capitaines et les
soldats, et promettant k chacun des récompenses.
A neuf heures du matin hi bataîUe ntommkaçsL; une
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126 HISTOIRE DE CHARLES XII. uv. iv.
dtê premières irolées du canou moscovite emporta les deux
chevaux du brancard du roi de Suéde ; il en fit atteler deux
autres : une seconde volée ie mit en pièces^ et renversa ie
roi. De vingt-quatre drabans qui se relayoient pour le
porter, vingt et un furent tués. Les Suédois eonsternéi
s'ébranlèrent, et le canon ennemi continuant à les écraser,
la première ligne se replia sur la seconde, et la seconde
s'enfuit. Ce ne fut dans cette dernière action qu'une ligne
de dix mille hommes de l'infanterie moscovite, qui mit en
-déroute Tarmée suédoise, tant les choses étoient changées.
Toiis les écrivains suédois disent qu'ils auroieut gagné la
bataille si on navoit point fait de fautes : mais tous les offi-
ciers prétendent que c'en étoit une grande de la donner, et
une plus grande encore de s'enfermer, dans ces pays perdus,
malgré l'avis des plus sages, contre un ennemi aguerri, trois
fois plus fort que Charles XII pat le nombre d'hommes,
et par les ressources qui manquoieut aux Suédois. Le sou-
venir de Narva fut la principale cause du malheur de Charles
à Pultava.
Déjà le prmce de Wirtemberg, le général l^enschild et
plusieurs officiers principaux étoient prisonniers, le camp
devant Pultava forcé, et tout dans une confusion à laqueBe
. il n'y avoit plus de ressource. Le comte Piper, avec quelques
officiers de la chancellerie, étoient sortb de ce camp, et ne
savoient ni ce qu'ils dévoient faûre ni ce qu'étoit devenu k
m : ils coiiroient de côté et d'autre dans la ptome, Vn
major, nommé Bere, s'offrit de les conduire au bagage:
mais les nuages de poussière et de fumée qui couvroient la
campagne, et l'égarement d'esprit naturel da«i8 cette désok-
tioiH les conduisirent droit sur la contrescarpe de la v31e
même, où ils furent tous pris par la garnison.
Le roi ne vouloit point fuir, et ne pouvoit se défendra*
Il avoit en ce moment auprès de lui le généraUPoniatowilû,
colonel de la garde polonoise du roi Stanislas, -homme
d^un mérite rare, qi^ son attachement pour la personne
DigitizeabyCiOOglC
iiv. IV. ROI DE SUEDE. 12f
de Charles avoit engagé à le suivre en Ukraine, sans aucun
ceminandement Cétoit un homme qui, dans toutes les
occurrences de sa vie et dans les dangers où les autres n'ont
tout au plus que de la valeur, prit toujours son parti sur \%
champ, et bien, et avec bonheur. Il fit signe à deux dra-
bans» qui prirent le roi par*des80us les bras, et le mirent à
cheval, malgré les douleurs extrêmes de sa blessure.
Pouiatowski, quoiqu'il n'eût point de commandement
dans Tarméot devenu en cette occasion général par néces-
sité, rallia cinq cents cavaliers auprès de la personne du roî,
les uns étoient des drabens, les autres des officiers, quelques
uns de simples cavaliers : cette troupe, rassemblée et rani-
lAée par le malheur de son prince, se fit jour à travers plus
de dix ré^mens moscpvites, et conduisit Charles, au milieu
des ennemis, l'espace d'une lieue, Jusqu'au bagage dé l'ar-
mée suédoise.
Le roi, fuyant et poursuivi, eut son eheval ti^é sous lui;
le colonel Giéta blessé, et perdant tout son sang, lui donna
le sien. Ainsi on remit deux fois à cheval dans sa fuite ce
conquérant, qui n'avoit' pu y monter pendant la bataille.
Cette retraite étonnante étoit lieaucoup dans un a grand ^
nalbeur ; mais il Salloit fuir plus lôm : on trouva dans le
hapge le carrosse du comte Piper ; car le roi n'en eut ja-
Bais depuis qu'il sortit de Stockholm. . On le mit dans
.tetle voiture, et l'on prit avec précipitation la route du
Borysthene. Le roi, qui, depuis le moment où on l'avoit
Siis à cheval, jusqu'à son arrivée au bagage, n'avoit pas dit
xok seul mot, demapda alors ce qu'étoit devenu le comte
jhper. . H est prù, av^c iaïUe la chancellerie^ lui répondit*
fitu Ei ie g^ènéral Rensekildi et. k duc de Wirtemberg,
^ÛOUta-t iLf Ils sont aussi prisonniers, lui dit Pouiatowski*
Prisonniers chez des Moscotntes, reprit Charles en haussant
k» épaides! Allons donc, ùUons plutôt chez les Turcs. Ou
M remarquoit. pourtant point d'abattement sur son visage;
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128 HISTOIRE DE CHARLES XH. liv. iv.
et quiconque l'eût vu alors, et é^t ignoré son état^ n'eût
point soupçonné qu'il étoit vaincu et blessé.
Pendant qu'il s'éloignoit, les Moscovites saisirent son
.artillerie dans le camp devant Pultava, son bagage, sa caisse
militaire, où ib trouvèrent six millions en espèces, dépouilles
des Polonois et des Saxons. Près de neuf mille hommes
Suédoi3 ou Cosaques furent tués dans la bataille^ environ
aîx mille furent pris. Il restoit encore environ seize mille
iiommes, tant Suédois et Polonois^ que Cosaques, qui fuy-
,oienl vers le Borystbene, sous la conduite du général Leven*
liaupt. Il marcha d'un c6té, avec ses troupes fugitives;
lé roi alla par mi autre chemin avec quelques cavaliers.
Lé carrosse où il étoit rompit dans la marche ; on le remît
à cheval. Pour comble de disgrâce, il s'égara pendant la
nuit dans un bois : là soin ^courage ne pouvant plus suppléer
à ses forces épuisées, les douleurs de sa blessure devenues
plus insupportables par la "fatigue, son cheval étant tombé
de lassitude; il se coucha ^nc&qnes heures au j[)ied^d'un arbre,
•■ danger d'être surpris à tout moment par les vainqueurs,
qui le cherdioient de tous côtés.
Enfin ia nuit du neuf au* dix juillet, il se trouva vis^à-vis
le Boi^sthene. Levenhaupt véooit d'arriver avec les débris
de.Fannée. Les Suédois revirehil^ avec un joie mêlée de
€loale<ir, leur roi, qu'ils croyoient mdrtl L'ennemi tp-
procluHt ; on n^voit ni pont pour passer le fleuve, ni temps
pour en faire, ni poudre pour se défendte, ni provisiou
pour empêcher de mourir de faim une armée, quin-avoil
BiaMfé depuis deux jo^rs. Cependant les restés de cette
•nrmée étoient dies Suédois et ce rm ^nca éttoit Charles XII«
Presque tous les officten cfOyokmt qii^oto attendrait là de
^ed ferme les Mioscoviles, el^^'on-périroit ou qu'on v«io*'
croit sur le bord du Borysthene. Charles eût pris siiiH
éfaaië cette résolution, s'il u^eàt été aecaMé de Mblessfe.
Sa plaie soppuroil; il avoir 1^ fièvre; et on. a remarqué que
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Liv. IV. ROI DE SUEDE. 199
Il plupart des hommes les plus intrépides perdent dans là
fièvre dé la suppuration cet instinct de Taleur, qui»
comme les autres vertus, demande une tète libre. Charles
ii'étoît plus lui-^mème; c'est-<e qu'on m'a assuré, et ee
qui est le plus vraisemblable. On Tentraina comme un
malade qui ne se connott plus. Il y avoit encore par bon* .
heur une mauvaise calèche, qu'on avoit amenéoà tout hasard
jusqu'en cet endroit : on Tembarqua sur un petit bateau ;
le roi se mit dans un autre avec le général Mazeppa. Ce»
loi-ci avoit sauvé plusieurs coffres pleins d'argent ; mais le
courant étant trop rapide, et un vent violent commençant
à souffler, ce Cosaque jeta plus des trois quarts de ses trésors
dans le fleuve pour soulager le bateau. Mullem, chance-
lier du roi, et le comte Poniatowski, homme plus que ja-
mais nécessaire au roi, par les ressources que son esprit lui
fouroissmt dans les disgrâces, passèrent dans d'autres barques,
avec quelques officiers. Trois cents cavalier? et un très- ^
grand nombre de Polonois et de Cosaques, se fiant Sur la
bonté de leurs chevaux, hasardèrent de passer le fleuve à
la nage. Leur troupe bien serrée résistoit au courant et
rompoit les vagues ; mais tous ceux qui s'écartèrent un peu
aiHlessous furent emportés et abymés dans le fleuVe. De
tons les fantassins qui risquèrent le passage, aucun n'arriva
àPautre bord.
Tandis q^e les débris de l'armée étoient dans cette ex-
trémité, le prince Menzikoff s'approchoit avec dix miii^
cavaliers, ayant chacun un fantassin en croupe. Les ca-
davres des Suédois morts dans le chemin, de leurs blessures,
de btigue et de faim, moutroient assez au prince Menzikoff
la route, qu'avoit prise le gros de l'armée fugitive. Le
pdnce envoya au général suédob un trompette pour lui
oBrir une capitulation, ^Quatre officiers généraux furei^t
awî-tôt envoyés par Levenhaupt pour recevoir la loi d^
^'ainqueur. Avant ce jour seize niille soldats du roi Cbsirles-
tiMMut aU^qvié toute? les forces de l'empire moscovite, itt
G 3.
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lUO HISTOmE DE CHARLES XII. lïv. rr.
eussent péri jusqu^au dernier plutÂt que de se Tendre ; maû
après unie bataillé perdue^ après avoir fui pendakit'detix
jourS^ne vojaAt plus leur prtfifce, qui étoît contraint de
<uîr lui-<iiièn^ les forces de chik|i*e- soldat étant épuisées,
leur eourage rt'êtant pirts s<)utefi if ^lar aucune espérance,
l^amour de ia vie j^nporla sur l'intrépidité. Il n'y eut qtie
le colonel Trouteféttei depuis gouvemeiat deStralsund, qai
voyant approcher les Moscovites s'ébrunla avec un batalilou
tmédoîs pour les charger, espérant entraîner le resté' dès
troupes. Mais Levenhau^^t fut obligé d'arrèter ce- mouve-
ment inutile. La capitulation fut aclievée^ et cette armée
entière fut faite prisonnière de guerre. Quelques sold&ts»
désçspérés de tomber entre les niams des Moscovites, se
précipitèrent dans lé Borysthcnc. Deux officiers du régi-
ment de ce- brave Troutefétte s'entre-tuerent, le reste fut
fait esclave. Ils déitlerent tous en présence du prince Men-
, zikoff, mettant les armes à ses pieds, comme trente mille
Moscovites avoient fait neuf ans auparavant devant le roi
de Suéde à Narva. Mais au lieu que le nii avoit alors ren-
voyé tous ces prisonniers moscovites, qu'il ne craignoit pas,
le czar retint les Suédois pri» à Pnllata.
Ces malheureux furent dispersés depuis dans les états
du Gzar; mais particulièrement en Sîbérte> vaste province
de la grande Tartarie, qui, du côté de Toriient, s%t«i4
jusqu'aux frontières de Tempire chinois. Dans ce pays bar-
bare, où Tusage du pain n'étoit pas même connu, les Suédois,
devenus ingénieux par le besoin, y exercèrent les métiers et
les arts dont ils pouvoient avoir quelque teinture. Alors
toutes les distinctions que la fortune met entre les hommes
furent bannies. L'officier qui ne put exercer aucun métier,
fut réduit à fendre et à porter le bob <hi soldai deveaa
tailleur, drapier, menubier, ou maçon, ou orfèvre> et qw
gagnoit de quoi subsister. Quelques officiers devhirent
peintres, d'autres architectes. Il y en eut qui enseignèrent
•les langues, les mathématiques; !b y établhept même des
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LIT. IV. ROI DE SUEDE. ASl
éoolea publique^y qui avec le temps éeviorent si utiles et ti
connues, qu^on y euvoyoît de» enfans de Moscou. «
,1^ comte Piper, premier ministre du roi de Sucfde, fat
long-temps enfermé à Petersbourg. Le czar étoit pex-
suadé, comme le reste deTEurope, que ce mmistre avmt
Tendu son maître au duc de Marlborough, et avoit attin^
sur la Moscovie les armes de la Suéde, qui^ auroient pii
pacifier l'Europe. Il lui rendit sa captivité plus dure. Cç
.ministre mourut quelques années après en Moscovie, peu
secouru par .ssl famille, qui vivoit à Stockbolm dans Topu-
lence, et, plaint inutilement par son roi, qui ne voulut ja-
mais s'abaisser à o^ir pour son ministre une rançon qu'il
craignoit que le czar n'acceptât pas ; car il n'y eut jamais
de cartel d'échange entre Charles et le czar.
L'cmipereur moscovite, pénétré d'une joie qu'il ne se met-
loit pas en peine de dissimuler,' recevoit sur le champ de ba-
taille les prisonniers qu'on lui amenoit en foule, et deman-
doit à tout moment lOù est donc mm frère Chartes?
Il fit aux généraux suédois Thoimenr de les inviter à sa
table. Entre autres questions qu'il leur fit, â demanda au
g^nér^l Renschild, à combien les troupes du roi son mattce
ppuvoient monter avant la bataille. Renschild répondit,
que. :1e roi seul en avoit la liste, qu'il ue commuiiiquoit à
personne; mais que pour lui il peïisoit que le tontponvxût
aller à environ trente mille hoipmes ; savoir dix-huit milk
Suédois, et le reste Cosaques. Le czar parut surpris,' et
demanda comment ils avoient pu hasarder de pénétrçr dans
un pays si reculé, et d'assiéger Pultava avec ce peu de
monde ? " Nous n'avons pas t^ujçurs 4té consultés, reprit
** le général Suédois ; mais comme fidèles serviteurs^ noiA
" avons obéi aux ordres de notre maître, sans jamais y coi»-
^ tredire." Le czar se tourna à cette i:éponse vers quelques-
uns de ses courtisans, autrefois soupçonnés d'avoir trempé
dans des conspirations contre lui ; Ah^ dit- il, voilà cotmne il
SttU servir son souverain* Alors, pfei^mt un. verre, de^vim:
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132 HISJOIRE JK CROILES XIL Kiv. Iv.
AiaêHmiêi àH^t éh n^iMUrw dm» V4irtl éè h gfiém,
Renscbild hn dèftiahdsi ^m étoielit ccm q^^ bi9ci«rieil'éte
li beau iHn: ^* V^H», messiewr» les gènérmttx msèàomf re-
pffk le CÉàr. Vcêft mojtM €9t émc bien ù^atr, rtptkle
camte^ d'avêir tant ,mttitrmté ses màkresf Le çzair, vfà^
lé repi^ fit rendre les épées à tous les officiers géiiértait,
et les tnha oeniDe no prince qui rouloit doinier à ses sujets
dés leçott de générosité, et de la politesse qu'il conncmsoit.
. Mais ce mènie prince, «fui traita si bien les généraux suédM,
fit rouèr tous les Cosaques qui tombèrent dras we» loainSr
Cependant e^te armée suédoise, sortie de la Saxe ti
triomphante, n^toit plus. La m<Mtié avoit péri de reisere ;
l'autre moitié étoit esclave ou massacrée. Charles XU avoit
perdu en un jour le fruit de neuf ans de travaux et de près
de cent combats. 11 fuyoit dans une méchfmle calèche,
«jrant à son c6té le major-général Hord, blessé dangereuse-
ment. Le reste de sa troupe suivojt, les uns à pied, les
autres à cheval, quelques uns dans des charrettes, à trav^
m» désert, oà ib^ie voyoient ni huttes, ni tentes, ni hommes,
ni animaux, ni chemins : tout y manquoit, jusqu'à Feau
iiième.< C'étoit dans le commencement de juillet Le pajfs
est situé au «[uarante septième degré: le sable aride di
désert rendoit là chaleur du soleil plus insupportable, les
dieraux tomboient, les hommes étoient près de mourir de
soif. Un ruisseau d'eau bourbeuse fut l'unique ressource
qu'on trouva vers la nuit ; on remplit des outres de cette
eau, qui sauva la vie à la petite troupe du roi de Suéde.
Après cinq jours de marche, il se trouva sur le rivage do
fleuve Hippanis, aujourd'hui nommé le Bogh par les bar-
teres, qui ont défiguré jusqu'au nom de ces pays que des
eolonies grecques i^nt fleurir autrefois. Ce fleuve se joiii|
à ^uel^ues milles delà au Borysthene, et tombe avec \^
dans la mer Noire.
Au-delà du Bogh, du cAté du midi, est la petite riD«
4M)€takeUr frontière de Ifènipire des Turcs. Les habîtan»
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uv. ir. ROI DE SUEDE. 13$
voyant venir à eux une trompe de gens de gwtfw» dent
riuibîllement et le langage leur étoieut incoonM, vffosêrant
de les passer à Ocxakou, sans un ordve de. Méhémtl inmIm^
gouverneur de la ville. Le roi envoya un efxprèa à ee gou-
verneur pour lui demander le passage ; ce turc îaecfrtsiin de
ce qu'il devoit hite, dans un pays où' une lausse dénarche
coûte souvent la vie, n'osa rien prendre sur luî^ sans avoir
auparavant la permission du sérasquier de la province, qui
réside à Bender dans la Bessarabie. Pendant qu'on atten-
doit cette permission, les Russes, qui avoient pris Tarmée
du roi prisonnière, avoient passé le Borysthene^ et appro-
choient pour le prendre lui-*mème. Enfin le pacha d'Ocza-
kou envoya dire au roi qu'il fourniroit une petite barque
pour sa personne et pour deux ou trois hommes de sa suite»
Dans cette extrémité les Suédois prirent de iorce ce qu'ils
ne pouvoient avoir de gré ; quelques uns allèrent à Fautre
bord, dans une petite nacelle, se saisirent de quelques ba-
teaux, et les amenèrent à leur rivage; ce fut leur salut;
car les patrons des barques turques craignant de perdre une
occasion de gagner beaucoup, vinrent en foule offrir leurs
services. Précisément dans le même-temps la réponse &-
vorable du sérasquier de Bender arrivoit aussi; mab ka
Moscovites se présentoient, et le roi eut la douleur de voir
cinq cents hommes de sa suite saisis par ses ennemis, dont
il entendoit^les bravades insultantes. Le pacha d'Oezakou
lui demanda, par 'un interprefe> pardon de ses retardemens,
qui étoient cause de la prise de ces cinq cents hommes, et
le supplia de vouloir bien ne point s'en plaindre au grand
seigneur. Charles le promit, non sans lui faire une répri*
maude, comme s'il eût parlé à un de ses sujets. •
Le commandant de Bender, qui étoit en même temps
sérasquier, titre qui répond à celui de général, et pacha de
la province, qui signifie gouverneur et intendant» envoya
€a hiSLte un aga complimenter le roi» et lui ofirir une tente
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154 HISTOIRE B£ CHARLES XIL i.iv. it>
fmgfàSqvttf avec les pvovisicms» le bagage, les chariots, ks
« commodités, les officiers, toute la suite oécessaire pour le
conduire avec splendeur jusqu'à Beoder; car tel est l'usage
' des Turcs» non seulement de défrayer les ambassadeon
jusqu'au lieu de leur résidence ; inais de fournir tout aboo-
damment aux princes réfugiés chez eux pendant le temps
- et leur s^iour»
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iiv. V. ROI DE SUEDEi • ' -135-
. LIVRE CÎNQUIR^IE. , . ,
ARGUM^MIV i
Etat de la Porte otpmane.' Charles s^oiOUX'jh^ de Bender. Si»
occupations : ses intrigues à la Porte: ses desseins, Auguste remonte
sur son trâne. Le roi de Danmarck fm/t une descente 0n Suéde,
Tous les autres états de Charles sont attaqués. Le çzar triomphe daasf
Moscou, Affaire du Pruth, Histoire de la czarme^ de paysanne
devenue impératrice.
ACHMET III gouvernoit alors l'empire de Turquie ;
H avoit été mis eo 1703 sur le trône» à la place de son ifrere
Mustapha, par une révolution semblaUe à ceHe qui avoH
donné en Angleterre la couronne def Jacques II à son gendre
Ouillaume. Mustapha, gouverné par son muphtî, que les
Turcs abboiToient, souleva tout Tempire. Son armée, avec
laquelle il comptoît punir les mécontensy se joignit à eux.
11 fut pris, déposé en eérémonie» et sou Irere tiré du serrail
pour devenir sultan, san» qu'il y eût presque une goutte de
sang de répandue. Achmet renferma le sultan déposé dans
le serrail de Constantinople, où U vécut encore quelques an<*
nées au grand étonnenfent de la Turquie, accoutumée à
voir la mort de ses princes suivre toujours leur détrène*»
ment.
Le nouveau sultan,, pour toute récompense d'une cou-
ronne qu'il devait aux ministres, aux généraux, aux offi-
ciers des japissaires ; enfin à ceux qui avoient eu. part à la
révolution, les fit tous périr les uns après les autres, de peur
qu'un jour ib n'en tentassent une seconde. Par le sacrifice
de tant de braves gens il affoiblit les forces de l'empila ;
mais il affermit son trône, du moins pour quelques années.
s'appliqua depuis à amasser des trésors : c'est le premiei
4«s Ottomans qui ait osé altérer un pea la monuoie,. ^
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1^ HISTOIRE D£ CHARLES XII. uv.r.
eUMir de nouveaux impôts; mais.ii a été obligé de s'ar-
rêter dans ces deux entreprises^ de crainte d'un soulève-
ment. Car la rapacité et la tyrannie du grand seigneur ne
s'étendent presque jamais qiie sur les officiers de l'empire,
qui, quels qu^ib soient, sont esclaves domestiques du sultan;
mab le reste des musulmans vit dans une sécurité profonde,
sans craindre ni pour leurs vies, ni pour leurs fortunes, ni
pour ieûr liberté.
Tel étoit l'emperem' des Turcs, cbez qui le roi de Suéde
iint chercher un asile.' Il lui écrivit dès qu'il fut sur ses
terres: la lettre est du 13 juillet, 170iî: il en courut plu-
sieurs copies différentes, qui toutes passent aujourd'hui pour
infidèles ; mais de toutes celles que j'ai vues, il n'en est au-
cune qui ne marquât de la hauteur, et qui ne fût plus con-
forme à son courage qu'à sa situation. Le sultan ne lui fit
réponse que vçrs la iio de septembre. La fierté de la Porte
ottoman^ fit sentir à, Charles XII la différence qu'elle met-
4Qit entre l'empereur turc/et un roi d'une partie de la Scan-
dinavie, .^chrétien,, vaincu et fugitif. Au reste, toutes, ces
lettres, que ks rois écrivent très rarement eux-mêmes, ne
sont que de vaines formalités, qui ne font connoitre ni le
car^ere des souverains ni leurs affaires.
'. Chartes XII en Turquie n'etok en effet qu'un captif
llon<Mmblef»ent traitée Cependant il concevoit le dessein
d'armçtt reRifE^ire ottoman contre ses ennemis* Il se flattoil
de ramener la Pologne sous le joug, et de soumettre la
Riissie. 11 avoit uu envoyé à Constantinople ; mais celui
qui le servit le plus dans ses vastes projets, fut le comte de
Popiatowslii, lequel alla à Constantinople sans missfon, et
se rendit bientôt nécessaine au: roi agréable à la Porte, et^
enfin dangereux aux grands visks menu»*.
• C'est de lui que je ticD$ non-seulement Icf remarquas qui ont été
imprimées, et dont le chapelain Norberg a fait usage, mais cocori^
hc&vtonp d'attiTM. BMmiueritf oencemant cette histoire..
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iiv.v. ROI DJE StiËDE. 137
IJn de ceux ^ui secondèrent plus âdroitenient ses des-
seins» fut le médecin Fonseca,. juif portugais établi à Coi|-
staotinople, homme savant et délié, capable d'affaires, et
le seul philosophe peut être de sa nation : sa profession lui
procuroit des entrées à la Porte ottomane, et souvent la
confiance des visirs. Je Tai fort connu à Paris ; il m'a
confirmé toutes les particularités que je vais raconter. Le
comte de Poniatowski m'a dit lui-même, et m'a écrit qu'il
avoit eu J'adresse de faire tenir des lettres à la sultane validé,
mère de l'empereur régnant, autrefois maltraitée par son
fils, m^ qui commeuçoit à prendre du crédit dans le serrai!.
Une Juive qui approchoit souvent de cette princesse ne ces-
soit de lui raconter les^xploits du roi de Suéde, et la char-
moit par ses récits. La sultane, par une secrète inclination,
dont presque toutes les femmes' se sentent surprises, en faveur
des hcHQmes extraordinaires, même sans les avoir vus, pre-
noit hautement dans le serrai! le parti de ce prince ; elle ne
Tappeloitque son lion : Quand voulez-vous donc, dïso\t-^ïie
quelquefois au suhan son fils, aider mon lion à dévorer cê
car. Elle passa mêâie par-dessus les lois austères du ser-
rail, au point d'écrire de sa main plusieurs lettres au comte
de Poniatoiyski, eijitre {es i^ains duquel elles sont encore au
temps qu'on écrit cette histoire.
Cependant on avoit condi^it le roi avec honneur à Ben-
d«^ par lé déseft qui s'appeloit autrefois la solitude des
Getes» Les Turcs eurent soin que rien ne manquât sur sa
rente de tout ce qui pouvoit rendre son voyage plus agré*
able. Beaucoup de Polonois, de Suédois, de Cosaques»
écbapjpés les wis après les autres des mains <jles Moscov^itef,
vcaoîçnlft par differens chemins» grossir sa suite sur la route.
U.a;voit i|vec l^i dix^buk cents bonunes qui^d.il se trouva à^
Bcnder ; tou^; ce monde ^tqî^ nourri,, logé, eux et leva»
4evattx, aux dépens du gr^nd seigneur.
Le ror. voulut camper, auprès de Bendef} au lieu de
^ tng t T ; tte» b ivilj#^,,; ;Le. j|ér»wpij||ç Ju3^ pa^^lui
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1Î8 HISTOIRE DE CHARLES XIL tir.r
lit dresser une lente magnitique ; et on en fournit à tous tes
seigneurs de sa suite. Quelque temps après/ le prince se
fît bâtir une maison dans cet endroit: ses officiers en firent
autant à son exemple ; les soldats dressèrent des baraques;
de sorte que ce camp devint insensiblement une petite yilfc.
Le roi n'étant point encore guéri de sa blessure, il fallut
lui tirer du pied un os carié; mais dès qu'il put monter i
cheval, il reprit ses fatigues ordinaires ; toujours se levant
avant le soleil, lassant trois chevaux par jour, faisant fiiit
Texercice à ses soldats. Pour tout amusement il jouoit
quelquefois aux échecs. Si ks petites choses peignent les
hommes, il est permis de rapporter qu^il fàisoit toujoan
inarcher le roi à ce jeu ; il s'en servoit plus que des autres
pièces, et par-là il perdoit toutes les parties.
Il se trouToit à Bender dans une abondance de toutes
choses, bien rare pour un prince vaincu et fugitS; àar
outre' les provisions plus que suffisantes, et les cinq cents
écus par jour qu*il recevoit de la magnificence ottomane, il
iiroit encore de l'argent de la France, et il empruntoit des
'marchands de Constautiiiople. Une partie de cet aigent
isérvit à ménager des intrigues dans le serrail, à' adicterla
feveur des visirs, ou à procurer leur peite. H- répaodoit
Tautnp partie avec profusion parmi ses offîciérs etles janiS-
iâiVes qui lui servoient de gardés à Bender. Grothusen,
son favori et trésorier, étoit 1^ dbpensateur de ses libéit-
lités : c^étoit un homme qui, contre l'usage de ceux qui sont
en cette place, aimoit autant à donner que son maître. U
lui apporta un jour un compte de soixante mille écns en
deux lignes: dix mille écus donnés auxSuédob et aot jt-
nissaires pér les ordres généreux de sa mi^îesté» etk reste
'mangé par moi. << Voilà' comme j'aime que mes uns m
'^rendent leurs^ comptes, dit te prince: Miilfern me Ut
<* lire des pages entières pour âes sommes de dix ttile
^ Ihincs. J'aime mieux le style laconique de GrothussB*"
' Vn de set Tieux officki^ sottpfoiuife dtètip m pe» ftiM
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Liv. V. ROI DE SUEDE. J39
se pkigait à lui de ce que &a majesté cton^ioîl tout à Qtq^
thuseu : /' Je ne donne de Targent, répondit le roi, qu'à
*^ ceux qui savent en faire usage/' Cette générosité le ré-
dubit souvent à n'avoir pas de quoi donner. Plus d'éco*-
noniie dans ses libéralités eût été aussi honorable, et plus
utile ; mais c*étoit le défaut de ce prince de pousser à l'ex-
cès toutes les vertus.
Beaucoup d!étrangefs acco^roient de Constantipople
pour le voir. Les Turcs, les Tartares du voisinage y ve*
Boient en foule; tous le r^ec^oient et l'adiairoient. Son
opiniâtreté à s'abstenir de vin, et sa régularité à assister
deux fois par jour aux prières publiques, leur faisoit dire :
C'est un vrai musulman. Ils brûloieut d'impatience de
marcher aveciui à la conquête de la Moscovie.
Dans ce loisir de Bender, qui fut plus long qu'il ne
pensoît, il prit insensiblement du goût pour la lecture. Le
i»»on Fabrice, gentilhomme du duc de Holstein^ j/eun«
homme aimable, qui avoit dans l'esprit, cette gaieté et ce
tour aisé qui plaît aux priiiceSy fut celui qui L'engagea à lire^
Il étoit envoyé auprès de lui à Bender pour y m^ager les
intérêts du jeune duc de Holsteinj et il y réussit en se leor
^t agréable. Il avoit lu tous le bons auteurs françms.
li fit lire au roi le$ tragédies de Pierre Corneille» celles de
^^icine, et les ouvrages de Despréaux. Le roi pe prit nul
fi^t aux satire»} de ce dernier, • qui en effet ne sont pas
^ meilleures pièces ; mais il aimoit fort ses autres écrits..
Qoand Dn lui lut ce trait de la satire huitième, où l'auteur
^niile Alexandre de fou et d'enragé, il déchira le feuillet.
De tputes les tr^g^ies françoises^,Mithridate étoit cell^
Qû loi plaisoit davai|t|ge ; parcei|ue.la si^ation de ,çe roi
v^cu et.r^pirant la vçngeance^ étoit conforme à la sienne.
Bmontroit avec le doigt à M. Fabr^cç les endroits qui le
^p<Meiit: mais il neu vouloit lire aucun tout haut, ni
'''(^er jamais un mot en françcHs. Même quand il vit
^fepub à Bender ,M^X>és^arS|. ambassadeur de Fwnçe à /
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140 HISTOIRE DE CHAULES XII. i,iv. v.
Ut Fone, homme d\iti mérite distingué, mais qui ne mmit
qae sa langue naturelle,, il i-épondit à cet ambassadeur en
latiii : et sur ce que Désaleurs protesta qu'il n^ntendoit pas
quatre mots de celte langue, le roi plutôt que de parier
françoîs, fit venir un interprète.
Telles étoient les occupations de Charles XII à Bender,
où il attendoit qu'une armée de Turcs vint à son secoura.
Son envoyé présentoit des mémoires en son nmon au grand
Visir, et Poniatowski les soutenoit par le crédit qu'il savoit
se donner. Uinsinuation réussit par4out : il ne paroisioit
vêtu qu'à la turque : il se procuroît toutes les entrées, te
grand seigneur lui fit présent d'une bourse de mille ducats,
et le grand visir lui dit : Je prendrai totre rot d'u»e mam,
et une épée dans l'autre, et je le mènerai à Moscou, ih
tête dé deux cent mille hùmmes. Ce grand visir, s'appelrà
ChourlouK Ali pacha ; il éloit fils d'un paysan du vilh^je de
Chourlou. Ce n'est point parmi les Turcs un reproche
qu'une telle extraction \ on n'y connoH point la noblesse,
soit celle à laquelle les emplois sont attachés, soit celle qui
lie consiste que dëns^des titres. Lès services seuls sont cen-
sés tout faire : c'est l'usage de presque tout l'orient, usage
très naturel et très bon, si les di^ités pouvoient n'être deo-
nées 'qu'au mérité ; mais les visirs ne sont d'ordinaii^ que
des créatures d'un eunuquenôir, ou d'une esclave favorite.
Le premier nimistrè changea biehtôt d%vis. Le roi ne
))ouvoit que négpcîek-, et le czar pouvoît donner de l'argent;
si en donna, et ce f lit de celui même de Charles XII qtfî
f|B servît. La caisse mîliraire prise à Pultava fournit de noo-
Veltés armes contre le vaincu ; il ne fut plus alors qucatioB
de tore la guerre àu)^ Russes. l>e crédit du czar fat IWt
puissant à la Porte : elle accorda à'îon envoyé des faonnenn
dont les ministj'eé moscovites n^avoient point encore jo«à
Constautinople : on lui permît d'avoir un serrait ; c'est^^ire
un palais dans le quartier des Francs, et de commumqner
avec les ministres étrangevi. Le czar crut même pouvoir
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Lîv.T. ROI DE SUEDE, Ut
demander qu'on lui livrât le général Mazeppa comme
Charles XII s'étoit fait livrer le malheureux Patkul. Chour'»
louli Ali pacha ne savoit plus rien refuser à un prince qui
demandoit, ^en donnant des uiiilions : ainsi ce même grand
visir, qui auparavant avoit promis solennellement de mener
le roi de Suéde en M oscovie avec deux cent mille honunes,
osa bien lui faire proposer de consentir au sacrifice du gé»
néral Mazeppa. Charles fut outré de cette demande. On
ne sait jusqu'où le visir eût poussé l'affaire, si Mazeppa, âgé
de soixante et dix ans, ne fût mort précisément dans cette
conjoncture. I^a douleur et le dépit du roi augmentèrent
quand il apprit que Tolstoy, devenu l'ambassadeur du czar
à la Porte, étoit publiquement servi par des Suédois faits
esclaves à Pultava, et qu'on vendoit tous les jours ces braves
soldats dans le marché de Constanlinopie. L'ambassadeur
moscovite dboit même hautement que les troupes musul-
nntieis qui étoient à Bender, y étoiept plus pour s'assurer
du roi que pour lui laire honneur. '
Charles abandonné par le grand visir, vaincu par Var^
gent du cz^r en Turquie, après l'avoir été par ses armes
dans l'Ukraine, se voyoit trompé dédaigné par la Porte,
presque pcisonuiet parmi des Tartares. Sa suite commen-
Çoit à se désespérer. Lui seul tint ferme et ne parut pas
^attu un moment; il crut que le sultan ignoroit les in<-
trigues de Cbourlouli Ali, son grand visir : il résolut de les
lui apprendre, et Poniatowski se chargea de cette commis'-
âou hardie. Le grand seigneur va tous les vendredis à la
mosquée entouré de ses solaks, espèce de gardes, dont les
hurbaps sont ornés de plumes si hautes qu'elles dérobent le
sultan à la vue du peuple. Quand on a quelque placet à pré*-
«nter au grand seigneur, on tâche de se mÊler purmi ces
ginies, et on lev« en haut le placet^ Quelquefois le sultan
daigne le prendre lui-même ; mais le plus souvent il ordonne
à 10^ aga de s'en charger, et se fait ensuite représenter les pla-
tels anr sortir 4t la mosquée. Il n'est pas à craindre qu'on ose
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\(i HÏStOIRE DE CHÀRÏEfe XIL lYv. t
Fitnportuner de mémoires inotiles, et de placets sor des
bagateHefl, puisqu'on écrit moins à Constantinople en t6ute
une année, qu'à Paris en un seul jour. On se liasarde en-
tore moins à présenter des mémoires contre le» ministres,
à qui pour l'ordinaire le sultan les renvoie sans les lire.
Pouiatowski n'avoît que cette voie pour faiœ passer jiisqu'an
grand seigneur les plaintes du roi lîe Suéde. li dressa mr
mémoire accablant contre le grand vîsir. M. de Fériol,
alors ambassadeur de France, et qui m'a conté le fail, fit
traduire le mémoire en tuVc. On donna quelqu'argent à
tm Grec pour le présenter. Ce Grec, s'étant mêlé parmi les
gardes du grand seigneur, leva le papier si haut, si long-
temps, et fit tant de bruit, que le sultan Tapperçat, tt prit
lui-même le mémoire.
*0n se 'servit plusieurs fois de cette voie pour pré-
senter au sultan des mémoires contre ses visîrs ; un Suédois,
nommé Leloing, en doima encore un autre bientôt après.
Charles XII, dans l'empire des Turcs, étoît réduit à em- |
ployer les ressources d'un sujet opprimé. Quelques jours
après le sultan envoya au roi dé Suéde, pour toute répons*
à ses plaintes, vingt-cinq chevaux arabes, dont l'un, qui
avoit porté sa bautésse, étoit couvert ^'rnie selle et d^m*
housse enricliies de pierreries, avet des élrîers d'or masrf.
Ce présent lut accompagné d'une lettre obligeante, »■«
conçue en termes généraux, et qui faisoient soupçonner qo*
le ministre n'avoit rien fait que du consentement du sollaD.
Chourlouli^ qui savôit dissimuler, envoyai aussi clnqcbetau»
très rares.au roi. Charles dît fièrement à cciûî qw ^
amenoit : Retournez vers voire maifre, et dîtfif 1m f» 3*
ne reçois point^de prtsens de mes eHriefnis.
M. Poniatowslii ayant déjà osé fanre préscntct un Bié-
moire contre le grand visir, conçut alors te hardi dcsscm de
le faire déposer, il savoit que ce visir déplaisait à la suttto*
mère, que le ki$lar-aga, chef des eunuques noirs, etf^l*
des janfôsaii^s le baïssoient : il Jes excita tons trclis à p**^
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htv.y. ROI DE SUEDE. 14^
contre lui. C'étoh une diose bien surprenante de voir ua
dirétien, un polonois, un agent, sans caractère, d'un roi
suédois réfugié chez les Turcs, cabaler presque ouvertement
à la Porte contre un viee-roi de Tenipire ottoman, qui de
plœ étoit utile et agréable à son maître. Poniatowski n'eût
jamais ^réussi, et Tidée seule du projet lui eût coûté la vie,
si une puissance plus forte que toutes celles qui étoieut
dans ses intérêts, n^t porté les derniers coups à la forjtune *
du grand visir Chourlooli.
Le sultan avoit un jeune favori, qui a depuis gou^rné
Fempire ottoman, et a été tué en Hongrie en 171 6, à la.
bataille de Péterviundin, ^guée sur les Turcs par le prince
Eugène de Savoie. Son nom étoit Coumourgi Ali padia*
Sa naissance n'étc^it guère différente de celle de Chourlouli :
il étoit fils d'un porteur de charbon, comme Coumourgi
signifie ; car coumour veut dire charbon en turc. Uem-r
pereur Achroetll, oncle d'Achmet 111, ayant rencontré dans
on petit bois, près d'Andrinople, Coumourgi encore enfant*
dont Vextrème beauté le frappa, le fit conduire dans son
serrail. 11 plut à Mustapha, fils aine et successeur . de
Mahomet. Acbmet III en fit son favori. Il n'avoit alors
que la charge de selietar*aga, porte-épée de la couronne*
Son extrême jeunesse ne lui permettoit pas de prétendre à
l'emploi de grand visir ; mais il aypit l'ambition d'en faircu
La faction de Suéde ne put jamais gagner l'esprit de ce
favori. Il ne fui en aucun temps l'ami de Charles, ni
^'aucun prince chrétien, ni d'aucun de leurs ministres;
mab en cette occasion il servoit le roi Charles XII, sans le
iFoulokr : il s'upit avec la sultane validé et les grands officiers
de la Porte, pour fane tomber Chourlouli, qu'ils haïssoient
tous. Ce vieux mhiistre, qui avoit long-temps et bien servi
son maître, fut la victime du caprice d'un enfant et des in-
trigues d'un étranger. On le dépouilla de sa dignité et de
ses richesses : on lui 6ta sa femme, qui étoit fille du dernier
«ultan Mustapha ; et il fut relégué à Cafta, autrefois Théo-
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H4, HISTOIRE DE CHARLES XIL lit. v.
dosîe, dans la Tartane Crimée. On donna le bul» 'c'e8t4*
dire le sceau de Tcropire, à Numan Couprougli, petit4b
du grand Couprougli qui prit Candie. €e nouveau fiiir
étoit tel que les chrétiens mai instruits ont peine à se Hgiucr
wn Turc, lH>mme d une vertu inflexible, scrupuleux obser*
vateur dé la loi ; il opposoit souvent la justice aux volontés
du sultan. Il ne voulut point entendre parler de la guerre
(îontre le Moscovite, qu'il traitoit d'injuste et d'inutile; ma»
le même attachement à sa loi qui Tempèchoit de kire'ia
guerre au czar, malgré la foi des traités, lui fit respecter les
devoirs de Fhospitalité envers le roi de Suéde. Il diseit à
«on maStre : *< La loi te défend d'attaquer le c2ar qui ne U
** point offensé ; mais elle f ordonne de s^ourir le roi et
** Suéde, qui est malheureux chez toi." Il fit tenir à ce
prince huit cents 4)ouises, une bourse vat^ ciniq cents écus,
et lui conseiQa de s'en retourner paistblemenl dans ses états
•par les terres de l'empereur d'Allemagne, ou par desv^
leaux françois, qui étoient alors au port de Cotiistaitfioople,
et que M. de Fériol, ambassadeur de France à la Poil^
«ffroît à Charles pour te transporter à Marseitte. Le cooite
Poniatowski négocia plus que jamais avec ce nmistre, et
'acquit dans les négociations une supériorité que l'or des
Moscovites ne pouvoit plus lui disputer auprès d'un nà
incorruptible. La faction russe crut que hi meilleure res-
source pour elle étoit d'empoisonner un négociateur si dao-
Igereùx. On gagna tin de ses domestiques, qui devoit loi
donner du poison dans du café; lé cnme fut découvert
avant l'exécution ; 6n trouva le poison entre les mains du
domestiqué dan.4 une petite fiole, • que Fon porta au grand
-seigneur. * L'empoisonneur fut jugé en plein divan, et cet*
^amné aux galères, parceque la justice des Turcs ne paait
jamais de mort les crimes qui n^ont pas été exécutés.
" Chartes XII, toujours persuadé que t6t ou tard il rém-
OToit à faire déclarer Fempire turc contre celui de Russie,
n'accepta aucune des propositions qai tendment à un retoor
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tiv. y. ROI DE SUEDE. 143
pusiUe ^kns ses états ; il se rassoit de repiéseoter eomme
fotfuidable aux Turcs ce iDéaie czar qu'il avoit si loug-leaq[)a
Buéfirisé : ses émîssaiMs iasÎQUoieDt saas cesse que Piene
Alexiowits vouloit se vendre maître de la navîgtUon de la
mer Noire; qu'après avoir su^ugué les Cosaques, il ea
wécit à la Tartarîe Crimée. Taatèt ces représeuftations
saimoient la Porte, tantôt les ministres russes les rendoient
lias effet.
Tandis que Charles XII faîsoit ainsi dépendre sa destinée
des vokuilés des visirs, qa'il reoevoit des bienfaits et des
afoeote d'une pnîssanoe étrangère, qu'il faisoit présenter des
piKels au sukan, qu'il subsistoît de ses libéralités dans uu
désert, tous ses ennemis réveillés altaquoîe&t ses états.
La bataille de Pultava lut d^abord k signal d'une révo-
krtioi^ dans la Pologne. Le roi Anguste y retourna, pro-
testant contre son abdication, contre la paix d'Altranstad*
et^ocnsant |nâ>lîquemait de brigandage .et de batbftifè«
Okides XII, qu'il ne craignoit ^lus. Il mit en prison
R^gstein et Imhof , ses plénipotentiaires, qui avoient signé
aia abdioatioD, conune s'ils avoient en cela passé leurs or-
ées et trahi leur maitre. Ses troupes -saRonnes, qui avoieut
été le prétexte de son détr6nement, le ramenèrent à Var-
sovie, accompagné de la plupart des pdatins poionois qui,
In ayant antrelois juré fidélité, avoient fait depuis les mènMS
mwijn s à Staaî^as, et revenoient «n faire de nouveaux à
Angoste. Siniawsky même rentra dans son parti, et per-^
ètot «l'ic^ de se fahre roi, se contenta de .rester grand
fèiéral de la couroMie% Fkmming, son jprewier ministre^
fn avoit été obligé de quitter pour un temps la Saxe, dç
pmff td'ètre livré avecPatkul, contribua alors par son adresse
à ramener à son maître une grande partie de la q<d)iesse:
polouoise.
Le pape releva ses peuples du isennent de fid^té qu'ils
iwoief^ fait à Stanislas. Cette démarche du saint père,
hite à fHTopos et appuyée des forces d'Augttste» fut d'un;
H
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ue HISTOIRE DE CHARLES XU. ltv. t.
•91» grand poids : elle aHenoit le crédit de la cour de
Rome eo Polc^ne» où Ton n'avoit nulle envie de contester
alors aux premiers pontifes le droit chimérique de se mèkr
du temporel des rois. Chacun retoumoit volontiers soiis li
domination d'Auguste, et recevoit sans répugnance une ab-
solution inutile, que le nonce ne manqua pas de faire valoir
comme nécessaire.
La puissance de Charles» et la grancleur de la Suéde,
touchèrent sdors à leur dernier période. Plus de dix téta
couronnées voyoient depuis long-temps, «vec crainte et avec
envie, la domination suédoise s'éteudant loin de aes bornes
naturelles, au-delà de la mer Baltique, .depuis la Duina
jusqu'à l'Elbe. La chAte de Charles et son absence réreil*
lerent les intérêts et les jalousies de tous ces princes, assoo-
pies long-temps par des traités et par llmpuissanoe de les
fompre.
Le czar, plus puissant qu'eux tous ensemble, profitant
d'abord de sa victoire, prit Vibooi^ et toute la Carélie^ in-
onda la Finlande de troupes, mit le siège devant Riga, et
envoya un corps d'armée -en Pologne pour aider Auguste à
remonter sur le trône. Cet empereur étoit alors ce que
Charles avoit été autrefois, l'arbitre de la Pologne et da
nord ; mais il ne consultoit que ses intérêts, au lieu qae
Charles u'avoit jamais écouté que ses idées de vengeance «t
de gloire. Le monarque suédois avoit secouru ses alliés,
et accablé ses ennemis, sans^exiger le moindre «fruit deaei
victoires : le czar se conduisant plus en prince, et moinrea
héros, ne voulut secourir le roi de Pologne qu'à conditiaa
qu'on lui céderoit la Livonie, et que cette province, pour
laquelle Auguste avoit allumé la guerre, resteroit aux Itfot^
covites pour toujours.
Le roi de Danemardc oubliant le traité de TravenM
comme Auguste celui d'Altranstad^ songea dès^ors à se
rendre maître des duchés de Holstein et de Brème, «r
4esquels il reoibuvda ses prétentions. Le roi de Prusse
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uv. V. ROI DE SUEDE. 14/
avoit d'anciens droits sur la Poméranie suédoise qu'il tou*
toit faire revivre. Le duc de Meckelbourg voyoit avec dé-
pit que la S^db possédoit encore Vismar, la plus belle ville
du duché : ce prince devoit épouser une nièce de Fempereur
moscovite; et le czar ùt demandoit qu'un prétexte pour
f^établir en Allemagne» à FeseBiple des Suédois. George,
électeur de Hanovre, cherchoit de don cAté à s'enrichir des
dépouilles de Charles. Uévèque de Munster nuroit bien
voulu faire aussi valoir quelques droits, s'il en avoit ^u le
pouvoir.
Douze à treize mille suédois défendoient la Poméranie
et les autres pays que Cbaries 'possédoit en Allemagne ;
c'étoit là que la guerre alloit se porter. Cet orage alarma
l^mpereur ^et ses aHiés. C'est une loi de l'empire que qui-
conque tittaquetine de ses'provmces, efit réputé rennemi de
tout le corps germanique.
Mais il y avoit encore un plus grand embarras; tous
ces princes, à la réserve du C2ar, étoient réunis alors contre
Louis XIV, dont la puissance avoit été. quelque temps aussi
redoutable à l'empire que celle de Charles.
L'Allemagne s*étoit trouvée au commencement du siècle
pressée du midi au nord, entre les armées de la France et
de la ^ede. Les Fi^ançois avoieiii passé le Danube, et les
Suédois l'Oder : si ieurs 'forces, alors 'victorieuses, s'étoient
jomtes, l'empire eût été perdu. Mais la même fatalité qui
accabla la Suéde, avoit aussi humilié la France : toutefois la
Suéde avoit encore des ressources, "et Louis XIV faisoit
la guerre avec vigueur, quoique malheureusement. Si la
Poméranie et le duché de Brème devenoient le théâtre de
la gueire, il étoit à craindre que fempire n'en souffrit, et
qu'étant affoibli de ce côté, il n'en fàt moins fort contre
Louis XrV. Pour prévenir ce danger, l'empereur, les
{mnces d'Allemagne, Anne, reine d'Angleterre, les états^
généraux des Provinces-Unies, conclurei^ à la Haie, sur la
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H8 HISTOIRE DE CHAULES Xn. liv.t.
fin de l'année I709f un des phis singuliers traités que janiab
on ait signés.
Il lut stipulé par ces puissances, que la guerre contre
les Suédois ne se leroit point en Poméranie, ni dans au-
cune des provinces de l'Allemagne, et que les ennemis de
Charles Xll pourroient l'attaquer par-tout ailleurs^ Le roi
de Pologne et le csar accédèrent eux-mêmes à ce traité ; ils
y firent insérer un article aussi extraordinaire que le traité
même ; ce fut que les douze mille Suédois qui étoient en
Poœéranie n'en pourroient sortir pour aller défendre leurs
autres provinces.
Pour assurer l'exécution de ce traité, onproposa d'as-
sembler une armée conservatrice de cette neutralité imagi-
naire. Elle devoit camper sur le bord de l'Oder : c'eût été
une nouveauté singulière qu'une armée levée pour em-
pêcher une guerre. Ceux mêmes qui dévoient la soudoyei^
avoient pour la plupart beaucoup d'intérêt à faire cette
guerre qu'on prétendoit écarter ; le traité portoit *' qi/elle
** seroit composée des troupes de l'empereur, du roi de
'' Prusse, de l'électeur de Hanovre, du landgrave de Hesie,
** de l'évêque de Munster."
Il arriva ce qu'on devoit naturellement attendre d*m
pareil projet : il ne fut peint exécuté ; les princes qui dé-
voient fournir leur contingent pour leve^r cette urmée ne
donnèrent rien ; il n'y eut pas deux régimens formés. On
parla beaucoup de neutralité, personne ne la garda : et-tous
les princes du nord, qui avoient des intérêts à démêler avec
le roi de Suéde, restèrent en pleine liberté de se disputer
les dépouilles de ce prince.
Dans ces couîonctures le cîar, après avoir laissé ses
troupes en quartier dans la Lithuanie, et atoir ordonné k
sie^e de Riga, s'en retourna à Moscou étaler à ses peuples
un appareil: aussi mluveau que tout ce qu'il avoit W
jusqu'alors dans ses états; ce fut un triomphe tel It^feor
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iiv. V. ROI DE SUEDE. 149
près que celui des ancieos Romains. Il fit son entrée dans
Moscou le {>reraier janvier 17 10, sous sept arcs triomphaux»
dressés dans les rues, ornés de tout ce que le climat peut
fournir^ et de ce que le commerce florissant par ses soins y
avoit pu apporter. Un régiment des gardes commençoit la
marche, suivi des pièces d'artillerie prises sur les Suédois
à Lesno et à Pultava ; chacune étoit traînée par huit chevaux
ceuverts de housses d'écarlate pendantes à terre: ensuite
venoient les étendards, les timbales, les drapeaux gagnés
k ces deux batailles, portés par les officiers et par les soldais
qui les. avolent pris : toutes ces dépouilles étoient suivies des
plus belles troupes du czai*. Après qu'elles eurent défilé,
on vit, sur un char fait exprès, paroltre le brancarcS^ '^h
Charles XII, trouvé sur te champ de bataille de Pidtava,
tout brisé de deux coups de canon: derrière ce brancard
marchoient, deux à deux, tous les prisonniers ; on y voyoit
le comte Piper, premier ministre de Suéde, le célèbre
maréchal Renscbild, le comte de Levenhaupt, les généraux
Slipenback, Stackelberg, Hamilton, tous les officiers et les
soldats qu'on dispersa depuis dans la grande Russie. Le
C2ar paroissoit immédiatement après, eux^ sur le même che-
val qu'il avoit monté à la bataille de Pultava: à quelques
pas de lui on voyoit les généraux qui avoient eu part au
succès de cette jouniée. Un autre régiment des gardes
venoit ensuite ; les chariots de munitions des Suédois fer-
moient la marche.
Cette pompe passa, au bruit de toutes les cloches de
Moscou, au son des tambours, des timbales, des trom*
pettes, et d'un nombre infini d'instniraens de musique, qui
se faisoient entendre par reprises, avec les salves de deu)£
cents pièces de canon, et les acclamations de cinq cent
* M. Norberg, confesseur de Charles XII, reprend ici l'àateiir, et
aiBiire que ce brancard étoit porté à la main. On s'en rapporte sar
•es dn^ODstances esseotiellos à cen^ qui les ont vues.
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150. HISTOIRE DE CHARLES XH. liv. t.
mille hommes, qui s'écrkHent: Vive ^empereur notre pen^,
à chaque pause que foisoit le czar dans cette entrée tmœ-
pbale.
Cet appareil imposaut augmenta la vénération de ses
peuples pour sa personne :. tout ce qu^il avoit lait d'utile en
leur faveur le rendoit peut-être moins grand à leurs yeux.
Il fit cependant continuer le blocus de Riga;, ses généraux
s'emparèrent du reste, de la Livonie, et d'un^ partie de la
Finlande.. En ménie temj)s lej-oi de Danemarck vmt^ avec
toute sa flotte,, fair^ une descente en Suéde:, il y débarqua
dix sept mille hommes, qu'il laissa» sous la cotnduile do
comte de Reventlau.
La Suéde étoit alors gouvernée par une régence com-
posée de quelques sénateurs, que le roi établit quand il
partit de Stockholm. Le corps du sénat, qui croyoit que
le gouvernement lui appartenoit de droit, étoit jaloux de la
régence : Tétat souffrit de ces divisious ; mais quand,' après
la bataille de Pultava, la.premiere npujrelle qa'on apprit daos
Stockholm, fut que le roi étoit à Bender à la merç^desTârr
tares et des Turcs, et que les Danois étoient descendus en
Scanie, où ils avoient pris la ville d'Helsinbourg, alors les
jalousies cessèrent; on ne songea qu'à sauver la. Suéde;
Elle coniraençoit à être épuisée de troupes réglées; car
quoique C]iarles eût toujpuEs fait ses grandes expédilioQS
à la tète de petites armées ; cependant Iqs cpmbatSiinnom*
brables qu'il avoit livrés pendant neuf années, la nécessité
de recruter continuellement ses. troupes, d'entretenir- ses
garnisons ; et les corps d'armées qu'il falloit toujours avoir
sur pied dans la Finlande, dans llngrie, la livonie, iaP<>^
méranie, Brème, Verden : tout cela avoit coûté ^ la Suffde»
pendant le cours de la guerre, plus de deux cent cinquai^
mille soldats ; il ne restoit pas huit mille hommes d'anciennes
troupes, qui, avec les milices, nouvelles, étoient les seules
ressources de la Suéde. i
La nation est née belliqueuse ; et tout peuple prend
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Liv. T. ROI DE SUEDE. 1^1
iosensiUement le géiiie dé son roi. On ne s'entretenoit cKiin
bout *du pays ' à Fautre que des actions prodigieuses de
Charles et de ses généraux, et des vieux corps qui avoient
combattu sous eux à Narva^ à la Duiua, à Clissau, à Pul-
tusk, à Hollosin. Les moindres Suédob en prenoient un
esprit d'émulation et de gloire. La tendresse pour le roi»
la pitié, la haine irréconciliable contre les Danois, s'y joigni«
rent encore. Dans bien d'autres pays les paysans sont
esclaves, ou traités comme tels: ceux-ci faisant un coips
dans l'état, se regardoient comme des citoyens, et se for«
moient des sentimens plus grands ; de sorte que ces milices
deyenoient en peu de temps les meilleures troupes du nprd.
Le général Steinbock se mit par ordre de la r%ence, à
la tète de huit mille hommes d'anciennes troupes, et d'en-
viron douze mille de ces nouvelles milices pour aller chasser
les Danois, qui ravageoiept toute la c6te d'Helsinbourg, et
qui étendoient déjà leurs contributions fort avant dans les
terres.
On n'eut ni le temps, ni les moyens de donner aux mi-
lices des habits d'ordonnance ; la plupart de ces laboureurs
lÛDreot vêtus de leurs sarraux de toile, ayant à leurs cein-
toes des pistolets attachés avec des cordes. Steinbock, à la
tète de cette armée extraordinaire, se trouva en présence
des Danois, à trois lieues d'Helsinbourg, le 10 Mars 17 10.
Il voulut laisser a ses troupes quelques jours de repos, se
retrancher et donner à ses nouveaux soldats le temps de
s'accoutumer à l'ennemi ; mais tous ces paysans demandè-
rent la bataille le même jour qu'ils arrivèrent.
Des ofiicîers.qui y étoient m'ont dit les avoir vus alors
presque tous écumer de colère, tant la haine nationale des
Suédob contre les Danois est extrèmel Steinbock profita
de cette disposition de» esprits, qui dans un jour de bataille
vaut autant que la disciplhie militaire ; on attaqua les Danois
et c'est la qu'on vit ce dont il n'y a peut-être pas deux ex-
pmfle^ de plus, des milices toutes nouvelles égaler dans le
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155 HISTOIKE DE CHARLES XIL Liv. v.
premier combat i'iotrépidité des vieux corps. Deux régi-
mens de ces paysans, armés à la hâte» taillèrent en pîëces le
régiment des gardes du roi de Danemarck, dont il ne resta
que dix hommes.
Les Danob entièrement défaits se retirèrent sous le canon
d'Helsinbourg. Le trajet de ^uede en Zéeland est si court,
que le roi de Danemarck apprit le même jour à Copenhague
la défaite de son armée en Suéde ; il envoj'a sa flotte pour
embarquer les débris de ses troupes. Les Danois quittèrent
la Suéde avec précipitation cinq jours après la bataille ; m^
' ne pouvant emmener leurs chevaux, et ne voulant pas les
laisser à Tennemi, ils les tuèrent tous aux environs d'Helsin-
bourg, et mirent le feu à leurs provisions, brûlant leurs
grains et leurs bagages, et laissant dans Helsinbourg quatre
mille blessés, dont la plijs grande partie moumt par l'infec-
tion de tant de chevaux tués^et par le défaut de provisions,
dont leurs compatriotes même les avoient privés, pour em-
pêcher que les Suédois n'en jouissent.
Dans le même temps, les paysans delà Dalécartie ayant
ouï dire, dans le fond de leurs forêts, que leur roi étoit pri-
sonnier chez les Turcs, députèrent à la régence de Stockholm,
et offrbrent d'aller à leurs dépens, au nombre de vingt miDff
délivrer leur maitre des mains de ses ennemis. Cette pr^
position, qui marquoit plus de courage et- d'affection qu'elle
n'étoit utile, fut écoutée avec plaisir, quoique rejetée, et od
ue manqua pas d'en instruire le roi, en lui envoyant le détail
4e la bataille d'Helsinbourg.
Cliarles reçitt dans son camp, près de Bender, ees nott*
velles consolantes au mois de juillet 17 IQ.. Peu de temp»
après un autre événement le confirma dans ses espérances.
Le grand vi^ Coaprongli, qui s'opposoit à ses dessans,
fi^ déposé après deux mois de ministère. La petite cour de
Charles XII, et ceux qui tenoient encore pour lui en Pologne»
publioient que Charles faisoit et défaisoitles visirs, et qu'il
gouvernoit l'eraiwe tare du fond de m retraite de Beûderi
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tiT.v. ' ROI DE SUEDE. lôh
il n'avoit aucune part à la disgrâce de ce favori. La
dgide probité du visir fut, dit-on, la seule cause de sa chute :
son prédécesseur ne payoit point les janissaires du trésor
impérial, mais de Pargent qu'il faisoit venir parses extor-
nons : Couprougli les paya de Targent du trésor. Achmet
lui reprocha qu'il préféroit l'intérêt des sujets à celui de
Fempereur. Tan prédécesseur Chaurlouli, lui dit-il, savait
bien trouver d^ntutres moyens de payer mes troupes. Le
grand visir rendit : ^U avait Fart étenrickir ta hautesse
par des rapines, if est un art que je fais gloire d'ignorer.
Le secret pfofond du serrait permet rarement que de
pareils discours transpirent dans le public; mais celui-ci
fut su avec la disgrâce de Couproi^gli. Ce visir ne paya
point sa hardiesse de sa tète, parceque la vraie vertu se fait
quelquefois respecter, lors même qu'elle déplaît. On lui
permit de se retirer dans l'isle tle Négrepont. J'ai su ces
particularités par des lettres de M. Bru, mon parent, premier
drogman à la Porte ottomane; et je les rapporte pour iAxtt
connoltre resprit de ce gouvernement.
Le grand seigneur fit alors revenir d'Alep Baltagi Méhé-
met, pacha de Syrie, qui avoit déjà été grand visir avant
Chourlouli. Les baltagis du serrait ainsi nommés de baUa^
qui signifie cognée, sont des esclaves qui coupent le bois
pour Tusage des princes du sang ottoman et des sultanes.
Ce visir avoit été baltagi dans sa jeunesse, et en avoit tou-
jours retenu le nom, selon la coutume des Turcs, qui pren^
iieiit sans rougir le nom de leur première profession, ou de
celle de leur père, ou du lieu de leur naissance.
Dans le temps que Bakagi Méhémet étoit valet dans le
terrait, il fut assez heureux pour rendre quelques petits ser-
vices au prince Achmet, alors prisonnier d'état sous l'empiré
de son frère Mustaf^a : on laisse aux princes du sang ot-
toman, pour leurs plaisirs, quelques femmes d'un âge ù ne
plus avoir d'enf ans (et cet âge arrive de bonne heure ed
Sttrquie>) mab assez belles encore pour polaire.. Achmet
aa.
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154 HISTOIRE DE CHARLES XH. tiv.f.
devenu sultan donna une de ces esclaves, qu*il avoit béaur
coup aimée, en mariage à Baltagi Méliémet. Cette femme,
par ses iiitrjgues fu son mari grand vbir: Une autre intrigué
le déplaça, et une troisième; le. fit encore grand visir.
Quand Baltagi. Méhéntet vint recevoir le but de Tenir
pire, il trouva, le . psarti. du roi. de Suéde dominant dans le
serrail., L» sultane validé, Ali Coumourgi, fsivori du grand
. seigneur, le kislar-aga, ckef des eunuques noirs» et Taga des
janissairesy vouloient la guerre contre le caai: le sultan y
étoit déterminé. Le premier ordre qu'il donn^.au grand
visir, fut d'aller combattre les. Moscovites av«c deux cent
mille hommes. Baltagi Méhémet n'avoit jamais fait la
guerre; mais ce n'étoit point unimbécille, comme les Suédois
Inécontens de lui l'ont représenté. Il dit au grand seigneur,
4en recevant de sa main un sabre i^nî de pierreries: ta
hautesse sait que fat été élevé à me servir d'une hache pùur
fendre du bonnet, i\if^ d'une^^l^ée j^awr comnufnder tes armkv
Je tâcherai de te bien servir*: mais si je «eréwmê paSySôU"
viens-toi que je fai supplia dé ne me le point inqntter. Le
sultan l'assura de son amitié, et le visir se prépara à obéir.
La première démarche de. la Porte ottomane fut de
mettre au château des sept- tours l'ambassadeur, moscovite*
La coutume des Turcs est dé comnsencer d'abord par.fave
arrêter les ministres des prin^ces auxquels ils, déclarent k
guerre. Observateurs: de l'hospitalité en tout le reste, ib
violent en cela le droit le plus sacré des nations. Ils conif
mettent cette injus|ice sous, prétexte d'équité, s'iniàgioasit,
ou voulant faire croire qu'ils n'entreprejunent jamais que dé
justes guerres, parce qu'elles sont consacrées, par l'approba»
tion de leur muphti. Sur ce principe ils se croient armés
pour châtier les violateurs de^ traités, que. souvent ils rom-
pent eux-i^èraes, et crojept punir les ambassadeurs des roii
leurs ennemis, comme, complices des infidélités de lenn
Oiaitres.
A cette, niison se joii^, le mépris,, ridicule quils affeetesl
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iiv. V. ROI DE SUEDE. ISS
pour les princes chrétiens, et pour les ambassadeurs» quib
ne regardent d'ordinaire que comme des consuls de mar-
chands.
Le lian des Tartares de Crimée, que nous nommons le
kan, reçut ordre de se tenir prêt avec quarante mille Tar-
tares. Ce prince gouverne le Nag»I, le Budziack, avec une
partie de la Circassie» et toute la Crimée, province connue
dans l'antiquité sous le nom de Chersonese taurique» où le^
Grecs portèrent leur commerce et leurs armes, et fondèrent
de puissantes villes, où les Génois pénétrèrent depub, lors#
qu'ils étoient les maîtres du conuneree de l'Europe* On voit
en ce pays des mines des villes grecques, et quelques monu»
mens des Génois, qui subsistent encore au nûlieu de la déso*
latipn et de la barbarie.
Le kao est appelé par ses siyets empereur; mais a^c
te grand titre il n'en est pas moins esclave de la Porte/^Le
sang ottoman dont les kans sont descendus, et le érdt<i^*i^
prétendent à Fempire des Turcs, au défaut de jfitzce du
grand seigneur, rendent leur famille respectai:;^ au sultan
même, et leurs personnes redoutables. Cefl^^r^^oi le
grand seigneur n'ose détruire la race des kap^rtares; mais
il ne laisse presque jamais vieillir ces pi^es sur le trône.
Leur conduite est toujours éclairée p^les pachas voisins,
leurs étals entoifrés de janissaires, Iç^^s volontés traversées
pair les grands visirs, leurs dessçîrts toujours suspects. Si
les Tartares se plaignent du kyl la Porte le dépose sur ce
prétexte; s'il en est trop ajiri'é, c'est un plus grand crimf,
dont il est plutôt puni: ^si presque tous passent de la
souveraineté à Texil, et /fuissent leurs jours à Rhodes, qui
est d'ordinaire leur.pri^n et leur tombeau.
Les Tartares, leu)/ siyets, sont les peuples les plus bri-
gands de la terre; s^en même temps, ce qui semble incon-
cevable, les plus b^pitaliers. Ils vont à cinquante lieues de
leur pays attaqi^ une caravane, détruire des villages; mais
c^'un étranger quel qu'il soit, passe dans leur pays, nour
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ISiS HISTOIRE DE CfUkLES XII. iiv. ▼.
seukOMOt il 6st jrepu par-tout, logé et défrayé; mais cbos
quelque lieu qu'il passer les habkao^ se disputent Ffaoniieiir
de l'avoir pour h6te: le maître de la maison, sa femme, les
filles^ le servent à fenvi. Les Scy&es, leurs ancêtres, leur
ont tranmiis ce respect iirriolal»te pour rhospitalilé, qu'ils
cwt conservé, parceque le peu d'^nmgers qui voyagent chez
aux» et le bas prnc de toutes les deiuées, Ée leur reodent
point cette vertu trop onéreuse.
Quand les Tartares vont à la guerre avec l'imnée oUo^
mane, ib sont nourris par le grand seigneur: le butki qu'ils
font est leur paye ; aussi sonl-^iis plus propres à piller qu^
combattre régulièrement.
Le kan, gagné par les prédens et par les intrigues du roi
de Suéde, obtint d'abord que le rendez-Vous général des
^pes seroit à Bender même, soos les yeux de Cterl« XIÏ,
*"*^de lui marquer mieux que c'étoit ponr lui qu'on faisoil
la gu^,
^ ^uveau Visit Baltagi Méhémet, n'ayant pas le*
Mdêmes eo^ragemens, ne vouloit paa flatter à ce point ««
prince étraaier. Il changea l'ordre, et ce fut à Andrinople
que s'assembK cette grande armée. Cest toujours dws les
vastes et fertile^ plaines d'Andrinoplë qu'est le rendeztôus
des arméeis turque, quand ce peuple fait la guerre aaï
chrétiens : les troupes Nrenues d'Asie et d'Afrique s'y r^eseat
et s'y rafraîchissent queh^s semâmes. Mais le grand visir,
fùur prévenir le czar, ne laissa reposer l'armée qm trois
jours, et marcha vers le ï)aniaie,et de là vers la Bessanbie,
Les troupes des Turcs nt sont plus aujourd'hui si
lonhidahies qu'autrefois, lorsqu'elks conquirent tant d*état»
dans l'Asie^ danis l'Afrique et dans l'Europe ; aloR 1»
force du corps, la valeur et le nombre dès Turcs trioro-
pUoient d'ennemis- moins robustes qu^^xet plus mal <Hs-
ciplin'és. Mais aujourd'hui que les chrétiens entefldeflt
mieux Tart de la guerre, ils battent presque toujours le»
Turcs en bitaille Tangée, même à forces inégutes. Si tf^
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Liv.T. ROI DE SUEDE. 1^7
pire oitomaa a depuis peu fût quelques cow|iiétes, ee nVst
que sur la république de Venise, csliiBée plus sage que |^uer-
iwe, défendue par des étrangers, et mal secourue par les
pnoce» chrétiens toijyottrs divisés entre eux.
Les janissaires et les spahis attaquent en désordre : in-
capables d'écouter le commandement et de se rallier, leur
cavalerie, qui devroît être excellente, attendu la bonté et la
légèreté de leurs chevaux, ne sauroit soutenir le dioc de la
cavalerie allemande : Finfanterie ne savoit point encore faire
un usage avantageux de la bayonnette au bout du fusil : de
plus, les Turcs n^ont pas eu un grand général de terre parmi
eux depuis Couprougli, qui conquit Fisle de Candie. Un
•sclave nourri dans Toisivelé et dans le silence du serrait,
faH visir par faveur, et général malgré hii, conduisoit une
armée levée à la hâte, sans expérience, sans discipline, contre
des troupes moscovites, aguerries par douze ans de guerres,
tX fieres d'avoir vaincu les Suédois.
Le czar, seldn toutes les apparences, devoit vaincre
Bahagi Méhémet ; mais il fit la même faute avec les Turcs que
le roi de Suéde aycHt commise avec lui: M méprba trop son
«miemî. Sur la nouvelle de Tarmement des Turcs, il quitta
Moscou, et ayant ordonné qu'on changeât le siège de Riga
«n blocus, il assembla sur les frontières de la Pologne*
quatre vingt mille hommes de ses- troupes. Avec cette
trmée il prit son chemin par la Moldavie et la Valachie,.
autrefois le pays des Daces,^ aujourd'hui habité par des-
ebrétiens grecs, tributaires du grand seigpeur.
La Moldavie étoit gouvernée alors ps» le prince Cantemir,.
Grec d'origine, qui réunissoit les talenk des anciens Grecs,.
la science des lettres -et celle des^urmes. On le faisoit des-
* Le cbapelsân Norberg prétend que le czar força le quatrième
^omme de sen sujets, capables de porter les armes, de le suivre à
^tie guerce. Si cela eût été vrai^ Tannée eût été au moins de deux
Hiflioasdeisoldats»
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>5S HISTOII^E DE CHARLES Xlf. £!▼.▼*
cendre du fameux Timur, coniiu sous le nom de Tameiliui.
Cette origine paroissoit plus belle qu'une grecque ; on prou-
voit cette descendance par le nom de ce conquérant. Tûntir,
dit-on, ressemble à Témir; le titre de kan que possédoit
Timur avant de conquérir l'Asie se trouve dans le nom de
Cantemir: ainsi le prince Canterair est descendant de Ta-
nfirlan. Voilà les fondemens de la plupart des généalogies.
De quelque maison que fût Cantemir, il devôit toute sa
fortune à la Porte ottomane. A peine àvoit-il reçu l'inves-
titure de sa principauté, qu'il trâbit l'empereur turc, son
bienfaiteur, pour le czar, dont il espérbit davantage. Il se
flattoit que le vainqueur de Charles XII triompherpit aisé-
ment d'un vbir peu estimé, qui n'avoit jamais fait la guerre,
et qui avoit choisi pour son kiaia, c'est-à-dire pour son
lieutenant, l'intendant des douanes de Turquie. Il compioît
que tous les Grecs se rangeroient de son. parti: les pa-
triarches grecs l'encouragèrent à cette défection* Le ezac
ayant d<Hic fait* un traité sAcret avec ce prince, eti'âyant
reçu dans son armée, s'avançât dans le <pays et arriva an
mois de juin 17 Ih sur le bord septentrional du fleure
Hiérase, aujourd'hiii^le . Fruth^ près dTassi, capitale de It
Moldavie.
Dès que lo grand visir eut s^prb que Piécre.Alexîowits
marchoit de ce côté^ il. quitta aussi-tôt son. camp, et suivant
le cours du Danube» il alla passer ce lieuvie.sur unpent de
bateaux, près d'un bourg nommé Saccia, au même endroit
où Darius fit construire autrefois l^-pont qui porta son nom.
L'armée turque fit tant de diligence qu'elle panit bien-tôt en
présence des Moscovites, la rivière de Pruth entre deux.
Le czar sûr du prince de Moldavie, n( s'attendoit pas
que les Moldaves dussent lui manquer. Mais souvent le
prince et ses sujets ont des intérêts très différens'. Ceux-
d aimoient ta domination^ (urqne, qui n'est jamais fatale
qii'àux grands, et qiii affecte de la douceur pour les peuples
tributaûres: ils redoutoient les chrétiens, et surtout*1es Mos^
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tiv. y. KOI DE SUEDE. 14$-
covites, qui les avomt toiyours traités avec kibttiDaiBté.
Us. portèrent- toutes leurs provisions a l'armée ottomane :
les entrepreneurs qui s'étoient engagés à fournir des vivres
aux Moscovites exécutèrent avec le grand visir le mardié
même qu'ils avoient fait avec le czar, Les^ Valaqués, voisins
des Moldaves, montrèrent aux Tures la même affection, tant
rancienne idée de la barbarie Moscovite avoit aliéné tous
les esprits.
Le çzac». ainsi trompé dans ses espérances, peutrêtre
trop légèrem^qt prises, vit tout d'un, coup son armée sans
Vivres et sans fou^rag^. L^ soldats désertoient par troupes,
et bientôt cette armée, s^ trouva, réduite à moins de trente
mille hommes^ près d^ périr, du niisere. Le czar éprouvoit
9ur le Prutb,|>our s'êijtre livré à Cantenûr, .ce qu^ Cbarles XII
;^voit éprouvé à Pujtava, pour avoir, trop compté suf
Mazeppa. Cq)endant les Turcs passent la rivière» enferr
ment le^ Russes et forment devant eux un camp.setcanchéw
Il est surprenant que le czar ne disputât point ie passage
de la rivière, ou du moins qu'il ne réparât pas cette faute
en livrant bataille aux Turcs immédia^ntent après le passage»
au lieu de leur donner le temps de faire périr son armée de
iaim et de fatigue. Il semble que ce prince fit dans cette
campagne tout ce qu'il falloit pour être perdu. Il se trouva
sans provisions^ ayant la rivière de Pruth derrière lui, cent .
cinquante n^ill^ Xurcs devant lui, et qua^nte mille Tartar>«s
qui le, harce.loiept cxmtinuellement à droite et à gauche.
Dans cette extrémité, il dit publiquement : Me voilà du moÎM
dMsn mai que monjfrere Charhs rétoit à Pultava,
Le comte Poniatowskj,. infatigable agent du roi de
Suéde, étoit dans l'armée du grand visir, avec quelq|ies Pa-
lonois et quelques Suédois,, qui. tous croypien.t. la perte du
Qzar inévitable.
Dès que. Poniatowsky vit que les années seroieut in«'
idilliblement en présence, il le manda au roi de Suéde, qui
Ijai^it aussitôt de, Bender, suivi de quarante officiers, jouisr
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^ffiO HISTOIRE DE CHAiRCJËS XII. liv. v.
•ÉBt par avaûee du plainr de combatlre l'empereur moscovite.
Apvès beaucoup de pertes et de marches ruineuses, le czar
poussé vers le Pruth, n'avoit pour tous retranehemens que
4es chevaux de frise et des chariots: qlieiques troupes de
janissaires et de spahis vinrent fondre sur son armée si mal
«retraachée; mais ils attaquèrent en désordre, et les Mos-
covites se défendirent avec une vigueur que la présence de
leur prince et le désespoir leur donnoient.
Les Turcs furent deux fois repoussés. Le lendemam
M. de Poniatowski conseilla au grand visk d'dfamer Tannée
moscovite, qui, manquant de tout, séroit obligée dans un
jour de se repdre à discrétion avec son em'pereW.
Le czar a depuis avoué plus d'ime fois qu'il n^avoîl
jamais rien senti de si cruel dans sa vie» que les inquiétudes
qui l'agitèrent cette nuit : il rouloit dans son esprit tout ce
qu'il avoit fait depuis tant d'années pour la gloire et le bon-
heur de sa nation : tant de grands ouvrages, toujours inter-
rompus par des guerres, alloient peut^tre périr avec loi
avant d'avoir été achevés; H falloit ou être détruit par la
laim, au attaquer p^ès de cent-quatre- vingt mille hommes '
avec des troupes languissantes, diminuées de plus de là
moitié, une cavalerie presque toute démontée, et des fan-
tassins exténués de faim et de fatigue.
Il appela le général Czérémetof vers le commencement
de la nuit, et lui ordonna^ sans balancer et sans prendre de
conseil, que tout fût prêt à la pointe du jour pour aller
'attaquer les Turcs la bayonnette au bout du fusiL
11 donna de plus ordre exprès qu'on brûlât tous le»
bagages, et que chaque officier ne réservât qu'un seul chariot;
tifin que, s'ils étoient vaincus, les ennemis ne pussent du
moins profiter du butin qufils espéroient.
Après avoir tout réglé avec le général pour la bataille,.
il se retira dans sa tente, accablé de douleur et agité de
convulsions, mal dont il étoit souvent attaqué, et qui re-
dotlbloit toujours avec violence quand il avoit quelque grande
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Lrv. V. ROI DE SUEDE. î6l
kqmétude. Il défendit que personne os&t de ia nuit entrer
dans sa tente, sous quelque prétexte que ce pût être, ne
voulant pas qu'on vint lui faire des remontrances sur une
résolution désespérée, mais nécessaire ; encore moins qu'on
f^ témoin du triste état où il se sentoit.
Cependant on brûla, selon son ordre, la plus grande
partie de ses bagages. Toute' Tarmée suivit cet exemple,
quoiqu'à regret ; plusieurs enterrerei^ ce qu'ils avoient df
plus précieux. Les officiers généraux ordonuoient déjà la
marche, et tâchoient dinspirer à Tarmée une confiance
qu*ils n'avoient pas eux-mêmes : chaque soldat, épuisé de •
fatigue et de faim, marchoit sans ardeur et sans espérance.
Les femmes^ dont Tarmée étoit trop remplie, po assoient
des cris qui énervpient encore les courages ; tout le monde
attendoit le lendemain matin la morf ou la servitude. Ce
n'est point une exagération, c'est à la lettre ce qu'on a
entendu dire à des officiers qui servoient dans cette armée.
Il y avojt alors dans le camp moscovite une femme
aussi singuh'ere peut-être que le czar même. Elle n^étolt
encore connue que sous le nom de Catherine. Sa mère
étoit une malheureuse paysanne, nommée Erb-Magden, du
village de Ringen en Estonie, province où les peuples sont
serb, et qui étoit en ce temps-là sous la domination de la
Suéde. Jamais elle ne connut son père ; elle fut baptisée
sous le nom de Marthe. Le vicaire de la paroisse l'éleva
par charité jusqu'à quatorze ans : à cet âge elle fut servante à
Marienbourg, chez un ministre luthérien de ce pays nommé
Gluk.
•En 1702, à rage de dix4)uit ans, elle époasa un dragon
suédois. Le lendemun de ses noces, un parti des troupes
de Suéde ayant été battu par les Moscovites, ce dragon, quî
avoit été à l'action, ne reparut plus, sans que sa femme pût
'savoir s'jl avoit été fait prisonnier, et sans même que depuis
ce temps elle en p4t jamais rien apprendre.^ t
Quelques jours après, faite piisonniere elte*mème par h
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lei HISTOIRE DE CHARLES Xll. tir. r.
I
général Baoer, elle servit che2 lui, ensuite chez le maréchal
Czeremetof: celui-ci la donna à MenzikofI, homme qui a
connu les plus extrêmes vicissitudes de la fortune^ a^^ant é^
de garçon pâtissier, général et prince, ensuite dépouillé de
tout et relégué en Sibérie, où il est mort dans la misère et
dans I^ désespoir.
Ce fut à un souper chez le prince Menzikoff querempeietir
la vit et en devint amoureux. Il Tépoilsa secrètement en
1707, non pas séduit par des artifices de femime, mais paitt
qu'il lui trouva une fermeté d'ame capable de seconder «es
entreprises, et même de' les continuer après lui. H avôit
déjà répudié depuis long-temps sa première femme Ottokesa,
fille d'un boyard, accusée de s'opposer aux changemens qol
faisoit dans ses états. Ce crime étoit le plus grand aux jeaz
du czan II ne vouloit daus sa famille que des penomies
qui pensassent comme lui. Il crut rencontrer dans cette
esclave étrangère les qualités d'une souveraine; quoiqu'elle
n'eût aucune des vertus de son sexe, il dédaigna pour eBe
ks préjugés qui eussent arrêté un homme ordinaire: illa
fit couronner impératrice. Le même génie qui la fit femne
de Pierre Âlexiowits, lui donna Fempire après la mort de son
mari. L'Europe a vu avec surprise cette femme, qui ne sut
jamab ni lire* ni écrire, réparer son éducation et ses foiblesses
par son courage et remplir avec gloire le trône d'un lé-
gblateur.
Lorsqu'elle épousa le czar elle quitta la religion lutbé-
• Le Sieur de la ^|obraye prétend qu'on loi avoit donné noe beft
édacatioo, qu'elle lisoit et écrivoit très bien. Le contraire est coih
de tout le monde ; on ne touffçe point en livonie qoerles yajwm
apprennent à lire et à écrire, à cause de Tanden privilège, nomia^ ^^
bénéfice des clercs, établi autrefois dhez les nooreaux chrétiens "barbait^
et subsistant dans ces pays. Les mémoires sur lesquels on rapporte ce
fait disent d'aiienrs que la princesse Elizabetb, depub impératrice
sigQoi( toujours pour sa mère, idés.ton enfance.
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jbiT. V. ROI DE SUEDE. t€^
rienne où elle étoît née» pour la moscovite. On la re^
baptisa, selop l'usage du n% tussien ; et au lieu du nom de
Marthe, elle prit le nom de Catherine, sous lequel elle
a été connue depuis. Cette femme étant donc au camp du
Proth, tint un conseil avec les officiers généraux et le vice-
chancelier Schaffirof, pendant que le czar étoît dans sa
tente.
On conclut qu'il klloi^ demander la paix aux Turcs, ef
engager le czar à faire cette démarche. Le vice-chancelîer
écrivit unç lettre au grand visir au nom de son maître: fai
czarine entr^, avec cette lettre, dans la tente du czar, malgré
la défense ; et ayant, après bien des prières, des contesta-
tions et des larmes, obtenu qu*il la signât,, elle rassembla sur
k champ toutes ses pierreries, tout ce qu'elle avoit de plus
prédeux, tout son argent; elle en emprunta même des
officiers généraux : et ayant composé de cet amas un présent
ccmsidérable, elle l'envoya à Osman aga, lieutenant du grand
visir, avec la lettre signée par l'empereur moscovite. Méhé-
met Baltagi conservant d'abord la fierté d'an visir et d'un
vainqueur, répondit : Que le czor m'envaU sofi premier mh'
nistre, et je verrai ce que jai à faire. Le vice-chanceUer
Sçhaffirof vint aussitôt, chargé de quelques» pisésens, qu'il
offrit publiquement lui même au grand vi^ir, asse^ con-
sidérables pour lui marquer qu'on avoit besoip de lui, mais
trop peu pour le corrompre.
I^ première deniande du visir fut que le czar se rendit
ayec toute son armée à discrétion. Le vice-chancelier ré-
pondit que son maître alloit l'attaquer dans un quart d'heure,
et que les Moscovites périroient jusqu'au dernier, plutôt que
de subir des conditions si infâmes. Osman ajouta ses ré^
montrances aux paroles de Schaffirof.
Mébémet Baltagi n'étoit pas guerrier : il voyoit que les
janissaires avoient été repoussés la veille; Osman lui per-
suada aisément de ne pas mettre au hasard d'une bataille
4çs avantages cert?uns. Il accorda doçc 4>bor4.. «um^
.-<^ '^i^zed by COOgle
1«4 HISTOmE DE CHARLES XH. liv. ?.
•Hspcnsion d^^nnes pour six heures, pédant la quelle o&
eoDvIéiidrolt des cenctitioiis div traité.
Pendant: que Ton parlementer^ il arrivn un pe^ acd-
, dent, ifai peut faire coniK^tre que les Tures sont souvent
pins jaloux de leur parole que nous ne le croyons. Deux
gentilshoi^iffies . italiens, parens de M. Brillo, lieutenant-
colonel d'un régiment de grenadiers au service du czar,
s'étant écartés pour cltereher quelque fourrage, furent pris
par âea Tartares, qui les emmenèrent à leur camp, et o^
frirent de les vendre à un ofâcier des janbsaires. Le Turc
indigné qnVni osât ainsi viofer la trêve, fît arrêter les Tir-
tares et les conduisit lui-même devant le grand visir avec
ces deux prisonniers.
Le visir renvoya ces deux gentilshommes au camp da
ezar, et lit trancher la tète aux Tartares qui avoient eu le
plus de part à leur enlèvement.
C^fiendant le kan des Tartares s'opposoit à la condosîoD
d'un traité qui lui ôtoit l'espérance du pillage ; Poniatowaki
seeondoit le kan par les raisons les plus pressantes. Msn
Osman l'emporta sur l'impatience tartare, et sur les insinua-
tions de Poniatowski.
Le visir crut faire assez pour le grand seigneur son
maHre de conclure une paix avantageuse. U exigea <iue
les Moscovites rendissent Azoph, qu'ils brûlassent les galères
qui étoient dans ce port, qu'ib démolissent des citqdefles
importantes bâties sur les Palus Méotides, et que tent le
canon et les munitions de ces forteresses demeurassent sa
grand seigneur ; que le czar retirât ses troupes -de la Bo-
logne, qu'il n'inquiétât plus le petit nombre de Cosaques
qui étoi^it sous la protection des Polonois, ni ceux qd
dépendoient de la Turquie, et qu'il payât dorénavant ai»
Tartares un subside de quarante mille sequins par ao;
tribut odieux imposé depuis iong<temps, mab dont le cflff
mvek afkanehi son pays.
Enfin le traité alloit être signé, sans qu'on e6t seulement
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iiv. V. Hqt DE SU£D£. 165
fait mention da roi- de Sj^de.. Tout .ce gue Poo^towski
put obtenir du visir, fut qu'on itérât un article par lequel
le Moscovite s eug^igeoit à ne point troubler le retour de
Cbarles XII ; et te qui est assez singulier^ il fut stipulé
dans cet article que le czar et le roi de Si^ede feroient la.
paix s'ils en avoient envie, et s'ils pouvoient s'accorder.
A ces conditions le ezar eut la liberté de se retirer avec
son armée^ son canon, son artiller^ ses drapeaux, son ba*-
gage. Les Turcs lui fournirent des vivres, et tout abonda
dans son camp deux heures s^près l^a signature du traité,
qui fut commencé, conclu et signé le 21 de juillet 171 !• ,
Dans le temps que le czar, ^happé de ce ms^uvais pas»
se retûroit tambour battant et enseignes déployées, arrive le
m de Suéde, impatient d« combattre et de voir son ennemi
txAie ses mains. Il avoit co^ru plus de cipquante lieues à
cheval, depuis Bender jusqu'auprès d'Yassi. Il arriva dans
le temps que les Russes commençoient à faire paisiblement
leur retraite. U falloit, pour pénétrer au camp des Turcs,
aller passer le Pruth sur un pont à trois lieues de là.
Charles XII, qui ne faisoit rien comme les autres hommes,
passa la rivière à la nage, au^risque de se noyer, et traversa
le camp moscovite, au hasard^ d'être pris : il parvint à Far-
mée turque, et descendit à la tente du comte de Poniatowski,
qui m'a conté et écrit ce fait. Le comte s'avança tristement
vers lui, et lui apprit comment il venoit de perdre une
occasion qu'il ne recouvreroit peut-être jamais.
Le roi, outré de colère, va droit à la tente du grand
▼inr: il lui reproche avec un visage enflammé le traité qu'il
vient de conclure. J'ai droit, dit le grand visir d'un ait
cahue, défaire la guerre et la paix, *^ Mais, sgoute le roi,
" n'avois-tu 'pas toute l'armée moscovite en ton pouvoir f*
Noire loi nous ordonne^ reprit gravement le visir, de don*
ner la paix à nos ennemis, quand ils implorent notre miséri"
corde, " Eh ! f ordonne-t-elle, insiste le roi en colère, de
** faire un mauVab traité, quand tu peux imposer telles lois
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m HISTOIRE DE CHARLES XII. tiV. y.
«* que tu veux} Ne dépendoit-il pas de toi d'amener le czar
" prisomiier à Constantiuople r
Le Turc, poussé à bout, répondit sèchement : EA! qm
g o uve r n erait son empire en son absence? Il ne faut pas que
ttms les rois soient hors de chez eux. Charles répliqua pstf
un sourire d'indignation : il se jeta sur un sofo» et reganknt
lé visir d'un air plein de cokre et 4e mépris, il étendit sa
jambe vers lui, et embarrassant eicprès son éperon dans la
robe du Turc, îi la lui déchira, se releva sur le champ^
remonta à cheval, et retourna à Bender le désespoir dans
le coeur.
Poniatowski resta encore quelque temps avec le grand
vbir, pour essayer par des voies plus douces de l'engager à
, tirer Im meilleur parti du czar, mais Theuré de k^ ]Hieie
étant venue, le Turc, sans répondre 4in seul mot, ^dfai se
hiver et" prier Dieu.
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X/ïT. VI. ROI DE SUEDE. l6^
LIVRE SIXIEME.
ARGUMENT.
Migues à la Porte ottomane, %ie kam des Tarêares et le paeha de
Bender veulent forcer Chartes ie partir. Il se défend^ avec qua-
rante domestiques, contre une armée, B est pris et traité en pri-
sommer» '^
La fortune du roî de Suéde, si changée de ce qu'elle
avoit été, le persécutoit dans les moindres choses. Il trouva
à son retdur son petit camp de Bender^ et tout le logement,
intMidé des eaux du Niester : il se retira à quelques milles,
près (Tnh village nommé Vamitza ; et comme s'il eût eu un
lecret pressentiment de ce qui devoit lui arriver, il fit bâtir
en cet endroit une large maison de pierres, capable en un
besoin de soutenir un -assaut. Il la meubla même magni-
fiquement, contre sa coutume, pour imposer plus de respect
aux Turcs.
Il en constnûsit aussi deux autres ; l'une pour sa chan-
cellerie, Fautre pour son favori Grothùsen, qui tenoit une
de ses tables. Tandis que le roi bâtissoit ainsi près de
Bender, comme s'il eAt vouki tester toujours en Turquie,
Baltagi Méhémet, craignant plus que jamais les intrigues et
les plaintes de ce prince à la Porte, avoit envoyé le résident
de l'empereur d'Allemagne demander lui-même à Vienne
an passage pour le roi de Suéde par les terres héréditaires
de la maison d'Autriche. Cet envoyé avoit rapporté en ^
trob semaines de temps une promesse de la régence impé-
riale, de rendre à Charles XII les honneurs qui lui étoient
dus, et de le conduire en toute sûreté en Poméranie.
On^ s'étoît adressé à cette régence de Vienne, parce
fo^alors Fémpereur d'Allemagne, Charles, successeur de
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is» Histoire de cHârles xii. liv. n.
Joseph I, étoit en Espagne, t)ù il disputoit la couronne à
Philippe V. Pendant que l'envoyé allemand exécutoit
à Vienne cette commission, le grand visir envoya trois pa-
chas au roi de Suéde pour lui signifier qu'il falloît quitter
ks terres de l'empire turc. .
Le roi, qui savoit Tordre dont ils étoient chargés, leur
fît d'abord dire que s'ils osoient lui rien proposer cmitre
son honneur, ^^ lui manquer de respect, il les feroit pendre
tous trois sur l'heure. Le pacha de Salonique, qui portoit
la parole, déguisa la dureté de sa commission sous les -termes
les plus respectueux. Charles finit l'audience sans daigner
senkment répondre ^ son chancelier Mulleni, qui resta avec
ces trcrfs pactois^ leur expliqua en peu de mots Je refus 4e
son inaitre^ qu'ils avoient assez comprb par «on silence.
Le grand visir ne se rebuta. pas: il ordonna à tanaël
pacha, nouveau sérasquier de Bender, de fuenacer k ^i
<k l'indignation du sultan, s'il ne se détermmoit pas «ans
défei. Ce sérasquier étoit d'un tempérament doux, «t d'un
esprit coadiiant, qui lui avoit attiré la bienveillance de
' Charles, et Famitié de tous les Suédois. Le roi entra ao
t;onférence avec lui ; mais ce fut pour lui dire qu'il ne par-
tiroit que quand Achmet lui auroit accordé deux choses';
la punition de son grand visir, et cent mïh hoaunes pour
ï^loumer en Pologne.
Baltagi Méhémet sentoit fokn -que Charks restoît tn
Turquie pour le perdre; il eut soin de faire mettre 4e8
gardes sur tontes les routes de Bender à Constuitinople»
pour intercepter les lettres du roi. 11 fit plus, il lui r^>
trancha son thalm ; c'ést-à-dire la provbion que k Po^
fbikmit aux princes à qui elle acccnrde un asile. CeHe do
roi de Suéde étoit immense, consistant en cinq cents éaai
par.four en argent, et en une profusion de 'tout ce qoî peat
contribuer à l'«ntretkn 4^u<i^ c^^i"» <^<u^ 1^ splendeur et
dans l'abrondance.
Dès que le roi sut que k visir avoit osé retrandKr flf
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ur. in. ROI DE SUEDE. ' iS§
4«taîrtancc, il se l^vrm ver» ton gmndHmiltre-dliàtel, et
lui dit: rams n'am eu que deux tMfê jUÊfttà pré9mi,j€
um cNbnm d'en tenir quatre dès demain.
Ua officiers de Charles XII étoîent accoutumés à ne
trouver rien. d'in^>ossible de ce qu'il ordonnoit: cependant
on o'avoit'iii provisions, ni argent; on lut obligé d^em-
planter à vingt, à trente, à quarante pour cent des officiers,
des domestiques et des janissaires, devenus riches par ks
profusions du roi. M. Fabrice, envoyé de Holstetn, Jefireys,
Qûnistre d'Angleterre, kurs secrétaires, leurs amis, don-
weat ce qu'ils avoient. Le roi, avec sa fierté ordinaire,
€tiians inquiétude du Icodemilin, subsistoit de ces dous, qui
B^saroient pas suffi long-iemps. Il fallut tromper la vigi-
lance 4je8 gardes, et envoyer secrètement à Ooastantinople
pour emprunter de rav^eot des négocians européens. Tous
refaisc»ent d'eu pi^er à un roi qui sembloit s'être mis hors
4'tet de Jamais ifendre, Unsenl-marcband anglois, nommé
Cmk, ^Ma enfin prêter environ quarante mille écus, satisfait
de ks perdire si k roi de Suéde venoit à mourir. On ap-
poiia «étalagent m petit camp du toi, -dans k leniqM qu'on '
€09mettçoit à manquer de ;tout» et à at jrius espérer de
ressource.
I^ms àA întervaUe M. FoniatowdU écrivit, du camp
oème du grand visir, imeiréklion de la campagne du Pruth,
dtas tequelle il accqsok Baltegi Méhéntet «k lâcbelé et de
perfidk. Un vkux janissaiK indigMé de k foîbksse di|
Tîdr, et de plus gagné par les piiÉsens de Pomatowski,' se
cliaif«ea de cette réktIoQ, et ayant ^ofatemi un coi^, il pr^
icola lui-même k lettre an «tttan.
Ponktowskl partit du camp qnetques >>urs après, et
•lia à la Porte ottomane ioffakr des iatr^ues contre k
graad visir, selon sa coutume.
Las circoastanoes étoient favondries: k czar en liberté
Be se pressoît pas d^acçomplîr ses promesses; ks ckli
^htofh ne venoînit pwflk^ k fsand vliir, qui en étoU
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ilfX) HISTOIRE ïœ CHARLES Xlî. Liv. vi.
jre9|idtisàble, - d^gtiant avec raisotf HftdîgDàtion de sou
'«naître» n'osciit s'aller prësèiîtir devint lai; ^^ ' •
Le serrail étoil aloirs plu» îtïmpli que jamafe dlntrigtws
•et de factions. Ces cabales, que l'on voit datis toutes les
'côàrs, et qui se terminent d'ordinaire dans les nôtres par
quelque déplacement de ministre, ou tout aii plus par quelque
.exil, font toujoim tomber à Constaritinople pte d^une tète.
«Il en coûta la vie ù l'ancien vi«3ir Cliourlouli.il à Osman,
.ce lieutenant de Baltargi Méhémét, ^i -étoit le principal
anieur de ia paix du Pnith, et qui depuis cette pare •«voit
(Obtenu une charge considérable à la Portel On t^DOva
'parmi les trésors d'Osman la bague de la czarine, vmgt
mille pièces d*or au coin de Saxe et. de Moscovie ; ce fut
'âne preuve que Targent seul a voit tnré le czar du piécîpiee
:et àvott ruiné la fortune de Charles Xil. Le vi^r Bsdtagi
Mébémet fut relégué dans l'isteide Lemnos, #ù11 noiirut
t trois ans après. > Le ^uhan i iie> *saisît son bien ni à son exil
ûû à sa mort : il n'étoit pas* riche,' «t sa •pauvreté justifia sa
-iHémoire. ... .-.
Lô^A çei grand visir succéda Jnssuf^ e'est-àrdire Josepb,
t^ntila f^rtauf éloit aussi* singulière que ^ celle de ses pré*
décesseurs. Né sur les frontières dç la Moscovie, et lut
prisonnier par les Tuvc9 à l'âge de six ans, avec sa famille,
itarv(âliété vendu'à un jahissaâre.* Iliuft long-temps valet dâm
I0 Àermiy et devint 'enfià la sëcdbde personne de Tempiie,
;oik il MUttt.été esclave; • mais «ce. n'^ok qu'un fant4itoe 4e
ministre* Le jeune sdictar Ali Çourmourgi l'élcva à ce
poate gli^ant, en attendant qu^il pàt.A^y placer ibirmènifi;
et Jussuf, sa créature, n'est, td'autreeropkli que d'af»|Hls^
ks^ceaax de renipimaux.voftontéStdu^SavpHL^.Ui peWquc
de ia'cQur ottomane -fiarat* toute chaude dès les ^renden
jours de ce visinat : les plénipotentiaires du.cz&r qui restaiefit
à CdiistantinopH et icomnie. mîni8tre& £li. comme ôtiigftB, y
furent mieux trwtét que jamais :> le gra^d visûr àm&ma
iMfc eux la> paix <lafFxuth«: Mai» 5e qtn mortifia 'le pl<o
î
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le roi de Suéde, ce fiit d'apprendre que les liaisons secrètes
j^d^i^ jgrei)o|t à CooffpntÎMopl^^ Hvec Iç pzïjr, éloicnt.le feuit
A(^j^4iajtioi|.4cs, ^iujl^as^adeurs d'Au^^terr.^ et.deHol*
koidei .* -
• CtfBStantiùiOpte,' depnis hi retraite de Charleà à Bend'er,
éloit devenue ce que Rome a été si souvenr, le centre des
l^ocUitlon^ de la <:hj|;étig^té. I^ comte pi^)e4u:s„ ^lubas-
s^djiifx dé F^?u}cey y appuyoit lest. intérêts dje^Qiarle» et ,de
Stanislas ; le mii^isfçç de Te^ipeçeut a^lem^uid l(çs fiffivefspH;
^^ liÇactiops, de, §uedejet .de Mos^o vie js'entreclioq noient,
comme on. a vu long-temps celles de Frayce et d'Espagne
agiter Ja cour de Rome.
^ . JL'Angletprfe et Ja. Hollande^, qui.parpissçient neutres,
np r^loicBj pasj; le, nouy.e^u com^prce. qije ,Jjd czar avoit
o^vfyt çlaqs Peter^bou^-jg attif oit i'atl^^ntiou de ces deux m-
Uo-n?^caçwnqrg^e&, ,, •• . < . r
l^s 4ngio^i ^t lea Hollandois sçront toujotiirs pour le
prince qui favorisera je. plu» leur trafic. U y avoit beaucoup
àj^agner avec le czar: il n'est donc pas étonnant que les
minist^p^ d'An^letfjrj*e ^t ,de Hplla^c(€,le ^servissent secrète^
mjBi)t ù. la Porte^ piloman^,; Une des ;/;ouditions de cette
noi^eUi|e amitié fut que l'o^ierçit âQrtir jnoessai^m^nt Charles
des terres de l'empereur turc, soit.,<j^e.lç czar espérât se
saisir.de s^ personne sur les chemins, soit qu'il crût Charles
moins redoutable dans ses états qu'en. Turquie, où il étoit
toujours sur le point d'armer les forces ottomanes contre
l'empire des Ru^s. i
; Le roi de Suçde soUicitoitt toiyours la Porte de ^e ren-
voyer par la PjOlogp^ avec uq^e^ nombreuse anàée. Lè^ divan
résolut i^n effet de le refivoyer, mais avec une: simple escorte
de sept à huit mille hommes, non plus comme un roi qu'on'
vooloit secourir^, mais comme up hMe dont on vouloit.se
défère. Pour ç^ effet le sûUau Achmet.lui écrivit en ces
tenùc^: .,.,-. , ., • v >
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17t HISTOIRE DE CHA&U» XII. lut. ti.
<< Trèipuimni enirt la rùii ûdâfétewH deJUêUBt nénmiKt àet Hrêê
•*et de$ it^mm, et protednr ée kt JuOke éâm ta paU» H Èm
« r^wMificet du tmdi €# eu septeutrwn: éelatmH en mejaU^ mi éê
^ Vkmmewr et éeHgUkrt^ H d^w^remMimcPêrUi ChmUhtÊiéâ
^ Suéde, d4mi Dieu caaroime k$ entreprisa de bonheur.
'^ AussitAt que le très ffluitre Achi^iety d-devant
** Oiiaoux pftdia» aura eu nioimeur de vous préaeitfer
*' cette lettre, ornée de notre sceau impérial, soyez per-
<< suadé et ÊouYaincu ^ la vérité de bos inteitf ons qui y
** sont contenues ; à savoir» que, quoique nous nous fassions
*' proposé de faire marcher de nouveau contre le czar nos
*' troupes toujours victorieuses, cependant ce prince, pour
" éviter le juste ressentiment que nous avoit donné son
** retardement à exéaiter le traité conda sur les bords du
'^ Pruth, et renouvelé depuis à potre sayinie Porte, infant
" reada â notre empire le château et la viBe d^Acoph, et
** cherché par la médiation des tanèassadeurs d'Ai^lalerre
" et de Hollande, nos anciens amis, à cultiver avec nous
** les liens d'une constante paix, nous ht iui avons accordée»
<' et donné à ses plénipotentiaires, qui nous restent pour
^ 6fages, notre ratiBcatibn impériale, après avoir reçu la
** sienne de leurs mains.
'< Nous avons donné an très honorable et vailhint Delvet
*^ Gherai, han dt Budziaek, de Crimée, de Naga! et de
^ CSrcassîe, et à notre très sage conseiller et généreux 9è>
<< rasquier de Bender, Israaël (que Dieu perpétue et aug^
** mente leur magnificence et prudence,) nos ordres invio-
^ laMes et salutahres pour votre retour par la Pélogne, sekni
** votre premier dessein, qui nous a été renouvdé de vdit
^ part. Vous devez donc vous préparer à partir sovs ka
^ auspices de la Providence, et avec une honorable escofii^
^ avant llnver prochain, ponr vous^ rendre dans vos pfo»
'< vibces, ayant soin de passer en ami par celles dé la
" Pologne.
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UV. VI. ROI DE $UED£. 179
. '' TmU ce qui stn néceanire pour votre voyage vout
^'icn ioarni iwr ma lublime Porte, tani en argent, qu'eo
** ]ioiiime% cbevaiUL et chariots. Nous vous eidiortens sur-
** tout» et vous recommaiidoiis de «feimer vos ordres les
*' 1^ positiiis et ks plus clairs à tous les Suédois et autres
** gtm qui se trouvent auprès de vous, de ne commettre
** aucun désordre, et de ne faire aucune actiou qui tende
" directement ou indirectement à violer cette paix et amitié.
** Vous conserverez par-là notre bienveillance, dont nous
^* diercherons à vous donner d'aussi grandes et d'aussi fré-
" queutes marques qu'il s'en présentera d'occasions. Nos
''troupes destinées pour vous accompagner recevront des
*' ordres conformes à nos intentions impériales.
'<^ Doimé à notre sublime Porte de Constantinopîe le lé de la lune
" de Rebyul Eurech 1214 j ce qui revient au 19 avrU 1712."
Cette lettre ne lit point encore perdre l'espérance au
nu de Suéde ; il écrivit au sultan : j' Qu'il seroit toute sa
"vie recomK)issant des laveurs dont sa hautesse Tavoit
" comblé ; mais qu'il croyoit le sultan trop juste pour le '
** renvoyer, avec la simple escorte d*un camp volant, dans
" un pays encore inondé des troupes du caar." En effet
l'empereur moscovite, malgré le premier article de la paix
du Pruth, par lequel il s'étoit engagé à retirer toutes set
troupes de la Pologne, y en ayoit lait encore passer de non*
velles ; et ce qui semble étonnant, c'est que le grand seigneur
n'en savoit rien.
La mauvaise politique de la Porte d'avoir toujours par
mnté des ambassadeurs des princes chrétiens à Constanti*
n^|>lo, et de ne pas entretenir un seul agent dans les cours
chrétiennes, lait que ceux-ci pénètrent et conduisent quelque*
fctts les résolutions les plus secrctes' du sultan, et quie le
divan est toujours dans une profonde ignorance de ce qui
se passe publiquement chez 4es chrétiens.
Le sultan, enlermé dai)S son serrail parmi ses lemmes
et sf 8 eunuques, ne voit que par le# yeux de son grand
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174 MISTOIftÉ DE- éBAÈfLÉS XII. hiirvV
ifWr: cemiàistrcj aûésî inâccil*1b!è (<w sôu.raftHi'è; ^occupé
des intrigues du SeVrafl, et sanl correspondance àù^ehoR,'
est d*ordinaire trompé, on trompe le sultan/qui fe'fl^e
pu le fait étrangler à la première faute pôrir en clèisir un
autre aussi ignorant ou aussi perfide, qui si conduit çofflwc
«es prédécesseurs, et qui tombe bientôt comtne eilitt' ' '
Telle est pour l'ordinaire l'imiclfen et ' H sécurité' ph)-
fonde de cette cour, que si les princes chrétiens se liguoieht
contre elle, leurs flottes seroient aux Dardanelles^ et leurs
armées de terre aux portes d'Ahdrinopfe, ai?^nt qiiè les
Turcs eussent songé à se défendre ; mais lès divers intérêts
qui diviseront toujours la chrétienté sauveront les Tares
d'une destinée que leur peu de poHti(}ùe et leur ignorance
dans la guerre et dans la marine semblent kur préparer
aujourd'hui.
' Achmet étoit si peu informé de ce qui Se passoit en
Pologne, qu'il y ienvoya un aga pour voir s*il étoit vrai qae
les armées du czar y fussent encore: deux secrétaires du
roi de Suéde, qui savoienl la langue turque, accompagncrcrt
Taga, afin de servir de témoins contre lui, en cas' qu'à K
un faux rapport.'
Cet aga vit par ses ycUx la vé'rité, et en vint tàAtt
compte au sultan même. Achmet indigné alloil faire étran-
gler le grand visir ; mais le favori qui le protégeoit, et qm
croyoit avoir besoin de lui, obtint sa grâce, et le soutint en-
core quelque temps dans le ministère.
Les Moscovites étoient protégés ouvertement par le vwir,
€t secrètement par Ali Coumourgi, qui avoit changé ce
parti ; mais le sultan étoit si irrité, l'infraction dtt tiailé
étoH si manifeste, et les janissaires, qui font trembler é^
vent les ministres; les favoris et les sultans, demandokiit si
hautement la guerre, que personne dans le serrail ti*(0
ouvrir un avis modéré. '
Aussi-tèt le gratid seigneur fit mettre aux Sept-Toors
les ambassadeurs moscovites, déjà aussi accoutumés à •lier
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ea prison qu'à Ta^dience. La gu^re est de nouveau déclarée /
contie le czar : les queues de cheval arborées ; les ordres ,
donnés à tous les pachas d'assembler une armée de deux t
cent mille combattans. Le sultan lui-même q^itta^ P9nr^
sUntinople» et vint établir sa cour à Aodrinople, pour être
moins éloigné du théâtre de la guerre.
Pendant ce temps une ambassade soleunc^Ue, envoyé^.
au grand seigneur de la part d'Auguste et dje la république^
de Pologne, s'avançoit sur le chemin d'Andrii|opl^ ; le pa-^
iatin de Mazovie étoit à la t^te de l'ambassade» avec une
suite de trois cents personnes. -•
Tout ce qui composoit l'ambassade fut arrêté et retena
prisonnier dans l'un des l^ubourgs de 1^ vi^le : jamais le
parti du roi de Suéde, ne s'étoit plus flalté que dans cette
occasion; cependant ce grand appareil devin^ encore inu«v
tile> et toutes ses espérances fureu^ t^ompéqs.
Si l'on en croit un minbtre public, homme sage et clair-
voyant^ qui résidoit alors à Constantinople, le jeune Cou-
raourgi rouloit déjà dans sa tète d'antres desseins que de
disputer des déserts au ica^ de Moscovie, dausj une guerre ,
douteuse. Il projetoit d'enlever aux Véniliçns le Pélopou-j
nese» nommé ai\jourd'hui la Morée, et de sereiiidre maître
de la Hongrie. . , . ^
11 n'attendoit pour exécuter ses grands desseins que
remploi de premier visir, dont sa jeunesse Técartoit encore.^
Dana cette idée il avoit plus besoin d'être Taillé que \\n^
nenii du czar, Son^ intrjêt ni sa volonté n'étoient p^^ d^
garder plus long-temps Iç.roi de Suéde, encore. moins dar*
mer la Turquie en sa kv^eifr. Non seulement il voulait,
renvoyer ce prince, mais iX disoit ouvertement qu'il ne f^Uloil^
plus souffrir désorjnais aucun ministre chrétien à Coostan-
timû|)]e ; que tous ces amj^ssadeijprs ordinaires n'étoient que
des espions honorable^, ^,gui ■ corrompoient ou qui trahis-
soient les visirs, eC doqjfOf^i^, depuis, tro]^ lonjg-lêmps le
mouvement ,^x intri^,S;€bi^&iemU ; ^tpa les Francs établis^
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176 HISTOIRE DE CItAieLES XII. liv. vi^
à Tétn, fA ém$ lès eeliell<» 4u Letaitl» mv cfci mwdumda
qo! uTont besoki tfae (fan consul, c^ mm cf sn aiMbasikdcIn^
Le gmnd visk, qui detott ioû étabHsMtttnl «t «a Vie MÉème'
SQ ftiTori, et qui de plus le jcraîgnoit, se eonformoit à de*
inteuftions, d'autant plus aisément qu'S s'étoil v^ida aus
Moscovites, et qu'il espéroit se venger du roi de Suéde,
qf avoft voulu! le perdre. Le Mupbki, créature cTAIi
Conmotirgi, éloit aussi Teselave de ses tdootés ; ii avoîl
comeiRé la guerre eontrie le czar^ quand le favori la vouloit,
et il la trouva injuste, dès que ce jeune homme eut changé
d'avis ; ainsi à peine Tannée fut assemblée qti'on écouta des
propositions d'accommodement. Le vke-ckancelier Sekaf-
firof et le jeune Câs6remetof, piénipotentîaîres éi 6tages du
cz!ir à la Porte, proifiârènt, après bien des négociations,
que ïe czar retireroit ses troupes de 1^ Pttlogne. Le graod
visir, qui savoit bien que le czar n'exécuterait pas ce traité»
ne laissa pas de le signer ; ' et le sultan, content d'avoir en
apparence imposé 4es lois aux Moscovites, re^à encore à
Andrinople. Ainsi on vit en moins de six mois la paix
jurée avec le czar, ensuite la guerre déclarée et la paix
renouyelée eAcore.
Le principal article de tous C€$ traités fut toujours quTon
fcroit partir lê roi de Suéde. Le sultan ne vouloit point
commettre son honneur et celui de Tempire (Momany en
exposant te roi à être pris sur la route par ses emiemîs.
11 fut stipulé quil partiroit ; mais que les ambassadeurs de
Pologne et de l^oscovie irépondroient de la sûreté de sa
personne ; ces ambassadeurs jurèrent au nom de letira
maîtres que ni lé czar, ni le roi* Augaste, ne troubleroiefit
ton passage, et que CTiarles de son eÂté ne tenteroit d^ex-
citer aucun mouvement en Pologne. Le divan ayant aion
réglé la destinée de Charles, hmaël, sérasquier de Bender»
se transporta à Vartiifza, oik lé ràï étoit campé, et Tint lui
rendre Compté dés résolution^ de ta Porte» en lia instmiaut
adroitement quil n'y avoil pitti \ cBttkt, cii|ii^ fflimpnithr
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uv. VI. HOÏ DE SUEDR ITf
Chiurks ^e répondit autre chose, mou ^fon le f^acMl
seigneur lui avoît promis une aa:inée, et non une etçortf«
et que Ie$ rois dévoient tenir leur parole.
Ce})endant le général Flemming, ministre et favori du
roi Auguste, entretenoit une correspondance secrète avec
le kap de Tartarie et Le sérasquier de Bender. La MarCf
geutilhomnie irançois, colonel au service, de Saxe, avoit iaii
plus d'un voyage de Bender à Dresdet^ et tous ces voyagsi
ék>ieiit suspects. ^
Précisétnent dans ce \einps le roi de Suéde fit wrr^ïpr^
sur les frontières de la Valachie/ un courier que Flemnûi^
eavo^'oit au prince de Tartarie. Les lettres lui furent a^
portées ; on les déchiffra : on y vit une intelligence marqv^
entre les Tartares al la cour de Dresde, mais elles étoieni
conçues^en termes si ambigus et si généraux» ^u'U étoit dif-
ficile de démêler si le but du roi Auguste étoit seulemenl
de détacher les Turcs du parti de la Suéde, ou s'il TouloH
<|ue le kan livrât Charles à ses Saxons en le reconduisant en
Pologne.
Il senibloit difficile d'ima^^r cptHin prince aussi gêné*
rei|x q[u'Auguste, voulAt, en saisissant la yeisonne di» roi de
Suéde, basarder la vie de ses ambassadeurs, et de trois
cents gentilshommes pplonois, qui étoient retenue dane
Andrinople comme des gages de la sûreté de Charles^
Mais d'un autre côté on savoit que Flemmiii^ ministre'
absolu d'Auguste» étoit très délié et pfiu scrupuleux. Le«
nutcages laits au rpi élecfeor par ie ^i de Suéde sei^bloieni
rendra toute vengeance excu&Ue; et on pottvi^t peueer
que si la cour de Eh-çsde «chetoit Charles du kan des Tar-
tares, elle pourroit acheter aisément delà conc ottomane
bk^^berté des^a^jM^ois^ ,^
Ces raisons furent egitéeaenineclét roi». MuKèfii «OU'
cbaKeliêr privé, et Grethusen son.âiiioiî. Ils iwretki et
reliMtenlies lettres; et fatioaU^enreiise dtaiat^ o%îkétoie&li
'ï.ir
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178 HISTOIRE DÉ CHÂkLÈS XII. Li?. vi.
lis rendant |^us soupçonneux, Us se déterminèrent à ct(»re
ce qu'il y avoit de plus triste.
Quelques jours après le roi fut confirmé dans ses ^up^
fons par te départ précipité d'un comte Sapiéba réfugié
auprès de lui, qui le quitta bru^lt^uement pour aller en Po-
logne se jeter entre les bra^ d'Auguste. Dans toute autre
CK!casion Sapiéha ne lui auroit paru qu'un mécontent ; mais
daiis ces conjonctures délicates il ne balança pas à le croire
un traître. Les instances réitérées, qu'on lui fit alors de
pifrtir changèrent ses soupçons en certitude. Lopini&treté
de son caractère se joignant à toutes ces vraisemblances, fl
demeura ferme dans l'opinion qu'on vouloit le trahir et ie
lÎTrer à ses ennemis, quoique ce complot n'ait janàais été
prouvé. ^
' Il pouvoit se tromper dans l'idée qu'il avoit que le roi
Auguste iivoit marchandé 'Sa perébû ne avec les Tartares;
mais il se trompoit encore davantage' èU comptant sur le
secours de lu cour ottoraaue. Quoiqu'il en soit, il résolut
de gagner du temps.
• lli dit M paébli de Bender qu'il ne pouvoit partir sans
a^ir huparaVant^ qùo» payer sesilette^; car, quoiqu^A
lui eût- rendu depuis long'teriips sort' thaïm, ses It^éraiifés
l'!avbieiff toujours forcé d'emprunter. Le ^acha lui demandl
ce qu*il voidoit; le roi répondit au hasard inille bourses^
qui font quinze 'cent mille franco ' de ' nètre argent 'eh nlou-
nw^ié forte. Le pachaî en écrivit à' la Porte ; le sultadi au
lieu de'Mrilfe^0nt8esl<]u'oii lui detotahdoit,''en' accorda douze
ceWs, et-écH^itaUpichâ la Icttîé suivante: • ' -î
^ . ^ /^ JUttre du Gran4 Sfigneiir jpt Pficha de Bander, .
" Lb but de cette lettre impéri^ifle est pckir vous lain
^«avoir.que.sur volitfe»«ûouinia«iiktkMr'et représentalk»,
*\ et ëur celle daj *^ noble DelVet Gherai Jian -à ootr^
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Ljv. VI. ^ . ROI J)E SUEDE. 179
** mille bourses au roi de Supde, qui seront envoyées à
" Bender sous la conduite et la charge du très illustre Mé-
" héniet pacha, ci-devant chiaoux pacha, pour rester sous
*'* votre garde jusqu au temps du départ du roi de Suéde,
" dont Dieu dirige les pas, et lui être données alors avec
•' deux cents bourses de plus, comme un surcroît de notre
** libéralité impériale, qui excède sa demande.
** Quant à la route de Pologne qu'il est résolu de pren-
" dre, vous aurez soin, vous et le han qui devez l'accdui-
" pagiier, de prendre des mesures si prudentes et si sages,*
" que pendant tout le passage hs troupes qui sont sous votre*
" commandement, et les gens du roi de Suéde, ne causent
" aucun donunage, et ne fassent aucune action qui puisse'
" être réputée contraire à la paix qui subsiste encore ciïtrei
" notre Sublime Porte et le royaume et la république de
" Pologne; en sorte que le roi passe 'comme ami sous notre
" protection.
" Ce que faisant (comme vous lui recommanderez bien
" expressément de faire) il recevra tous les honneurs et le^
** égards dûs' à sa majesté de la part des Polonais; ce donr
" nous ont fait assurer les ambassadeurs du roi Auguste et'
** de la république, eu s*offrant même à ctttu condition,
" aussi-bien que quelques autres nobles poïoiioîa, si ii<ïi:iÈ X^
** requérons, pour otages et sûreté de son passage. '^ *' ^ ^
" Lorsque le temps dont vous serez convenu ai^eii le
" tiès noble Delvet Gherai pour la marche, scrii vciiii^ tcîtjs
" vous mettrez à la tête de vos braves soldais, entre ksquf^Is
" seront les Tartares, ayant â leur tête le hyn, et votis ço'S-
** duirez. le roi de Suéde avec ses^ens.
** Qu'ainsi il plaise au seul Dieu tout-puissant de diriger
" vos pas et les leuî^ ; le pacha d*x\iilos restera à Bender
" pour le garder en votre absence, avec un corps de spahis
" et un autre de janissaires ; et en suivant nos ordres et nos
" intentions iippérîales en tous ces points et articles, vous
^ vous rendrez dignes de la coiitinuation de notre faveur.
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180 HISTOIRE DÉ CHARtÉS XII. Itir. Vf.
** impérial^, aussi-bien que des louanges et des rEcompenses
** dues à tout ceux qui les observent.
** Fait à noire rémtUnce impériale d'ÀndrincpU U t éiUihmii
« Cheval 1214 de VkégîreJ' ' ^
' Pendant qu'on aftendoit cette réponse du grand selgnenr^
le roi écrivît à la Porte^ pour se plaindre de la trahison *
dont il soupçonnoit le kan dès Tartsires ; mais les passages'
étoient bien gardés : de plus, le ministère lui étoit contraire,
les lettres ne parvinrent poinf au sultan; le visir empêcha
même M. Désaleurs de venir à Andrînople, oà étoit la
Porte, de peur que ce ministre, qui agissoit pour le roi de
Suéde, ne voulût déranger le dessein qu'on avoit de le faire
partir.
Charles indigné de se voir en quelque sorte chassé des
terres du grand seigneur, se détermina à ne ^oint partir do
tout.
Il pouvoit demander à s'en retourner par les terres
d^AUemagne, ou à s embarquer sur la mer Noire, pour se
rendre à Marseille par I^ Méditerranée ; mais il aima mieux
ne demander rien et attendre les événemens.
jj Quand les douze cents bourses furent arrivées, sod tré-
sorier Grothusen, qui avoit appris la langue turque dans ce
Tdng séjoiHs alfci voir le paeha sans interprète, dans le des-
sein de tirer de lui les douise cents bourses, et de former
ensuHe à la Porte quelque intrigue nouvelle, toujours sor
cette fausse suppbsrtiou que le |)^rti suédois armeroit enfin
l'empire ottoman contre le czair.
Grothusen dit au pacha que le roi ne pouvoit avoir ses
équipages prêts sans argent : " Mais, dît le pacha, c'est nous
" «qui ferons tous lès f i ais de votre départ ; votre raiître ns
*' rien à dépenser tant qu'il sera sous la protection du mien.
Oy-otliusen fépliqqa qu'il y avéit tant de différence entre les
équipages Turcs et ceux des Francs, qu'il Ealloit avoir recours
aux artisans suédois et polonois qui étoient à VamitZiii.
H rassura que fon maître étoit disposé à partir, et V^
Digitized'by VjOOQ le
Wf.n. ROI IM& SVKM. Itt
trap confiant» denim ks éimit cent» bowses : il irtel iputû
qves jdmrs aprè» demander an réi, d'une maniete très nnh
pcctueuse» les ordnes (mur le départ.
^ surprise fut exinlnie» quand le roi lui dit qu'il n'étoîl
^B prit à partir, et qu^il lui falloît encore mille bourses.
Le pacha« confondu à cette réponse, fut quelque temps sans
pouvoir parler. Il se letim ifvrs une fenêtre, où on le ^
«erser quelques larmes. Ensuite s'adressant au roi : // m'en
ààtera la tête, dit*il, pour avtir àhligé ta nu^Hé :f(n donnS
ks dauzi centg btmrses, mûlgré tordtt exprèi de mon souvc"
fom. Ayant dit ces paroles, il s*en retoumoil plein de
tristesse.
Le roi l'arrêta, et lui dit qu'il l'excusefiMt auprès du sultan.
Ak! repartit le Turc en s'en allant, mon iMâtre m tâSt
point excuser le$ fautes, il ne oait que fcs punir.
Ismaël paclia alla apprendre cc^te nouvelle au lan des
Tartares, lequel ayant reçu le même ordre que le padia de'
•e point souffrir que les doiu« cents bourses fussenl données
avant le départ du roi, et ayant consenti qu'on délivrât cet
sqgent, apprébendoit aussi bien que le pacba Tindignatîon
'du grand seigneur. Ils écrivirent tous deux à la Porte
pour se justifier: ils protestèrent qu'ils u'avotent donné tes
dpMIze cents bourses que sur les promesses positives dfàn
ministre du roi de partir sans détoî : ils supplièrent sa bautesst .
que le refus du roi ne fût point attribué à leur désdMBsance.
Charles persistant toujours dans Hdée que le kan et le
pacbâ vouloient le livrer à ses ennemis, ordonna i M. Fuidii
éon son envoyé auprès du grand seigneur, de porter contÉe
eux ses plaintes, et dt demander encore mille bourses. Soa
extrême générosité» et le peu de cas qu'il faisoit de Pai^gcnlty
l'émpêchoient de sentir qu'il y avoit de ^avilissement dans
celle proportion. Il ne la faisoit que pour sTattircr uu refus,
et pour avoir un nouveau prétexte de ne point-partir. Mais
c'éloH être réditit à d'étranges extiéatûlés que dTavair I
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I§^ HISTOI5tSrrjpS.(3IA»i:,lS XII. uv.m
efi^€|]f«9iant,:porU ^a lefUe à An^rinop^^» loalgré la sévéfitè
a^^ec^Jaquelle Le grand' visir faisok^rder les paasa^.
Funk fut ^obligé d'aller faire celte demande dangereuse.
Pour toute réponse on le fit mettre e^ prison. L« soltan
ij^d^^ fit assembler un divan extraordinaire, et y p&fia lui
inème, ce qu'il ne fait que trè^ rarement» Tel ftitsoq discours,
selon la traduction qu'on en iit alois:
" ^e n'ai presque cponii le roi de Swede que |>ar s»
^Vdéfaite de.Pultava, et par. la prière qu'il m'a faite de lui
V accorder un asile dans mon' empire : je n'ai, je crois^nwl
f besoin de lui, et n'ai sujet ni de l'aimer, ni de le craindre;
** cependant, sans consulter d'autres motifs que l'hospitalité
'^fl'uu musulman, et ma générosité, qui répand la rosée de
*î ws jfaveurs sur les grands comme sur les pejits, sur les
" étrangers comme sur mes sujets, je l'ai reçu et secouru de
'^^ut^ ^ui, ses ministres, ses officiers, ses soldats, et n'ai
".c€»sé pendant trob ans et demi de l'accabler de présens.
, /'Je }ui ai accordé une escorie considérable pour le
*{ conduire ^aus ses états. Il a demandé mille bourses pour
"^ payer quelques frais, quoique je les fasse tous; aoSe»
".4e piijle j'en aiaccordé, douze cents : après les. a voir tirées
.'l^e,la main du sérasquier ^ Bender, il en demande encore
" ?mll^ autres, i«t ne v^it point partir, sous prétexte qn«
" l'escortç ^st trop petite^, au lieu qu'elle n'est qu« 1*^
'! gW^^ 1^**? WP^^ P^^ ^9 P*ys ami.
^1 .", Je (rfepiaoj^e/lç^nç si c-çsj violer les loi&de l^liospitalite
**,flifcidf rmyojier c^ prince^ et, sii^s j)ms8ances étrange'**
"^4oiv^i|t<m'accuser.de violence et d'iojuslice, en.ca» 9i^^
*]^soit réduit à le faire partir par force." XouX le ^^
ré|:t9nditqiie le grand seigneur agissoit avec justice.
, I^e mujghti décL^rja que r)iqspita\ité nî'e^t.pfçUt^'^^
m^^Vçie aux, musubpans envers les infidèle^, 4|pr« »»^*"*
epy^re îes inq^^; ^l 11 donna son felfa, espe<;8^e m»""
^SRJFrt m^iV^ï^m&^M^^^^ tQ4fpurs* l<js . oéf^V^
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UT.. ru î/ «OI MElSUEDE- : r- It3
IlOi^aDs^du grand seigneur. Ces fetfa sont révél^égr^ôiûfi^
deîoracle$^4]iioîqAe«e«fx dont ils émanent soieni dèsesda^e»'
du sultan éOfnnie-F«9 autre». • J- ' - - '
L'ordre et le letfa forent portés à Bender par le Bouyouk
IniVaour, grand-maitre des écaries, et un cbiaoux pacha»
premier huissier* Le paohà de Bender reçut Tordi-e chez
lekafif <}es*Tartare8; aussi-têt 411 alla à Varnttaa demander
si le rài'vouloit partir cemme aibi,' oa.ie déduire à 'exécuter
Ifes ordres du sultan. i - . i ' .
Charles XII iiienaré n'étbit^pds maître" de sa 'Colere.' ^
Obéis à ton maître si tuf oses, lui dit-il, ef sors de ma présence.
Le pacha indigné s'en retourna au grahd ^alop, éontre Fusage
ordinaire desTurés: enVen retournant, il rencontra Fabrice,
et lui cria, toujours en codrant r le roi ne veut point écouter
la raison f tu vas voir des choses bien' étranges. Le jotrr
même il retrancha les Vivres au ^roi, et' lai ôta sa garde' de
janissaires, i! fit dire aux Polonois eVôEUx Cosaques qui
étoient à Varnilza, que s'ils vouloient avoir des vivres, il
failoit quitter le camp du roide Suefd^, et venîV se mettre dans
1» ville de Bender, sous la pnitection de la Porte. Toù^
dlbéirentet hiîssefrentie rôî réduit aux pffici<!rs de sa rnsfeoiî',' •
d'à irokt^ents'soldëts suédois, contre vmgt mille Tartàfe^
rt^ix mille Turcs. ' / * ' ' • - *
*^II'n^'tevoit plus 'de provisions dans le carnp pour leii
Iftmimes lii ^ur les chevaux.
Le roi ordonna' qo^W* 'tuât liors db camp, à coups de
fasiVVitfgl d«^s %^mi^ chèvatix arabes ^nè le grand sc^igneuif
la^afoltémt)jé9,'*fltlttttiJt : J^ncveusc M de leurs provkion»
iHitk'Iem^'9Hmfkàf. '^Oèié^^Mi^^ poùipW troupes tar^
t**es> q*t, ^coifiMe xA 9a»,*1t9bvéiît fa cfttiii- de dtevaî délJ-
«ense. C^^daritleâfTUiës. et les Tattàirfcs' investirent ^é
Ions côf\él k t)ètit cinfp du roî. * *
Ce^ pr ii)^» *^"2_ s'étonner, fit faire des retranchemens
réguliers par ses trois cents suédois : il y travailla lui même,
Son-vhttticelief^ sMi (lêsdtiergMsitcrélaîNSy scs^'vaiefts-de-
DigitizedbyVjOOglC .
IM HISTOIRE DE CHÀKLEl XIL UT. ti.
d»9ib««9 t^i 9CS dmi«sliq«es Soient à l'ouvr;^ het
«99 banâcadoîent 4es fienètreai» lt$ «utrct enfo]if<»)eiit d«9
solives derrière les portes en forme dWcs-boulans^ -
Quuid OB eut bien Irankadé U maison, et que le roi
eut fait le tour de ces prétendus retraiîchemens, il se mk à
jouer aux échecs tranquiltewent avec son favori GroUiuteiit
^oiOBict si tout eût été âana une sécurîté profonde. Heureuse»
ment Fabtrice, l^envo^ié de Holsteîn» ne s'étoit poiut logé à
Varnitza, mais dans (m petit village entre Vamitza et Bender,
où (temeiU'oit auasi M. Jeffreys* envoyé d'Angleterre auprès
du roi de Suéde. Ces deux ministres^ vo^rant Forage prH
à éclater, prirent sur eux de se reudre médiateurs entr« les
Turcs et le roi. Le kau» et sur-tout le pacba de Bender,
qui u'avoieut nulle envie de faire violence à ce monarque.
Déçurent avec empressement Jes oignes de ces deux minimes;
ils eurent ensemble à Bender deux oonférences^ où assistèrent
cet huissier du serrail et le grand-maltre des écuries» qui
avoient apporté Tordre du sultan et le fetfa du miiphti.
M, Fabrice^ leur avoua que. su mayesté «oédoise avrà
de justes raitions de croire qufon vouloit la livrer à ses ea-
ncmls en Potogue. Le kau, le pacba» et les autres Jurerenft
sur leurs tètes, prirent Dieu à timoin qu'ils détestoient ont
si horrible perfidie, qulls verseroient tout leur sang plulôl
que 4^ souffrir qu'on manquât seulement de respect a« roi
de Suéde. Ils dirent qulb avoienl entre leurs maim ks
ambassadeurr n^osoovitet et pcloMM^ ^doift la vie kuitré-
pondoit du moindre afiront qu'^ oseroîl faire an roi de
Suéde. Eafw» 'û^ ifi plaîji^rent amèrement des soupçons
Otttrsigeansquci le ^i c^ftcevoit sur des personnea qiiîi'avoiefll
si bien reçu et^ bieù traité. Quoique les sermens ne soient
souvent n^ le iaufi^ de la perfidie» M. Falirîc% se laiso^^
persuader par les Turcs: il crut voir dans lenrs- protesta^
. •' . 'r- "t I ,JiT m'i é ■ ,
• Twt «ç réeil est ra|i|i«Bié par M .T li^^Mce daas SCS leilNB.
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iuv. VI. ROI DE SUEDE* liS
tiofis 06t ftîr démérité que le neiBoiige n'imitê janmll qaliti-
parfaitement II savoit bien ^'U y avoft eu utie secrète
corfespondaoce entre le kaa tartare et le roi Auguste ; mids
3 denenra convaincu qu'il ne s'étoit agi dans leur négociatîmi
^ de feiire sortir Charles XI l des terres du grand seigneur.
$oit<iQè M. Fabrice se trompât ou non, il les assura quH
représeoteroit au roi f injustice de ses défiances. Maiê pré» .
ten^^vaua iefwcer à partir, ajouta-t-ii ? 0«/, dit le pacha,
tel est l'ordre de notre maître, • Alors il les pria encore une
fois de bien considérer si cet ordre éfoit de verser le sang
d'une tète couronnée. Oui, répliqua le kan en colère,
« cette tite couronnée désobéit au grand seigneur dans son
empire.
Cependant tout étant prêt pour l'assaut, la mort de
Charles XII paroissoit inévitable ; et Tordre du sultan n'étant
pas positivement de le tuer en cas de résistance, le pacha
engagea le kan à souffrir qu'on envoyât dans le moment un
exprès à Andrinople, où étoit alors le grand seigneur, pour
avoir les derniers ordres de sa hautesse.
M. Jeffreys et M. Fabrice, ayant obtenu ce peu de re-
lâche, coururent en avertir le roi : ils arrivèrent avec fem-^
pressement de gens qui appôrtoient une nouvelle heureuse ;
mais ils furent très froidement reçus : il les appela média-
teurs volontaires, et persista à soutenir qu^ l'ordre du sultan
€i le fetfà du'muphti^étoieut forgés, puisqu^on venoit d'en-
voyer deihander de nouveaux ordres à la porte.
Le mïhis^re Uiiglors se retira, bien'r^olu de ne se phu
mêler des aftaires d'un prince si inflexible. M. Fabrice,
aimé du roi, et plus accoutumé & son humeur que le ministre
ai^^ois, reM avec lui pour le conju)^ dé ne pas hasarder
une vie si précieuse dans une occasion si inutile.
Le roi, poî|r toute réponse» lui fit voir ses retr tn ehem c ns,
A le prit d'employer it méifialion seiilemeot pottr M (mre
ittfe dci fintt. Os obtkH àiiéiiieiit des Tum di. M»«r
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196 HISTOIRE DE CHARLES XII. wv. vi.
passer éo9 provisioos dans le ^^amp du roi, en^'Ettendant que
le 4H>uner Jât revenu d'Audrinople.
Le kan même avoit défendu à ses Tartarea, impatiens
du pillage, de rien attenter contre les Suédois jusqu'à nouvel
ordre : de sorte que Charles XII sortoit quelquefois de son
cauip avec quarante chevaux, et couroit au milieu des troupes
tartares,.qui lui lajssoient respectueusement le pas^ge libre:
il marcboil même droit à leurs rangs, et ils s'ouvroîent plut6t
que de. résister.
Enfin Tordre du grand seigneur étant venu de passer ao
fil de répée tous les Suédois qui feroient la moindre résistance,
et de ne pas épargner la vie du roi, le pacha eut la^com*
plaisance de montrer cet ordre à M. Fabrice, afin qu'il fit
un dernier effort sur l'esprit de Charles. Fabrice vint faire
aussitôt ce triste rapport. Avez-vam vu l'ordre dont vous me
pariez^ dit le roi ^ Oui, répondit Fabrice. Eh ^bkn ! diteS'
leur de ma part que c'est un second ordre qu'ils ont suppotét
et que je ne veux point partir, Fabrice se jeta à ses pieds,
5e mit en colère, lui reprocha son opiniâtreté : tout fut inutile. >
Retournez à vos Turcs, lui dit le roi en souriant ; sils mat-
taquetnttje saurai bien me défendre.
Les chapelains du roi se mirent aussi à genoux devant
lui, le conjuf/int de ne pas exposer à un massacre certaîo
les malheureux restes de Pultava, et sur-tout sa personne
sacrée, l'assurant de plus que cette résistance étoit injuste;
qu'il violoit les droits de l'hospitalité, en s'opiniâtrant à rester
pl^r force chez des étrangers qui Tavoient si longtemps et si
généreusement secouru. Le roi,. qui ne s'étoit point fâché
contre Fabrice, se mit en colère contre sçs prêtres, et leur
ditrqu'il les avoit pris pouç f$iire le§ prières,, et non pour lut
dire leurs avis» ,..,»,..
Léguerai Hord et l^e général Dardoff dont le sentiment
avoit tpujouri^ été de nc.pa^ tenter un combat dont la suite
uep(wivpitètf^«qi^,fujjjste«,i,my4^.yeg^>au a^^^ esto-
y Google
niafs coiivèrU de (lesiofés reçues' à s^ir seffeëé*] fef "Wfe*'
shranl qu'ih étoienf prêts à ttiouHr' pour lîfî; ils le àitp'pli^iriif
que ce fût au moins dans tme occasion phîs nécessaire: Je
sais par vos blessures et parles miennes, leur dit CharlesXIIi
que nous avons vaillamment combattu ensemble ; vous avez
fait votre devoir jusqu'à présent, il le faut faire encore auf-
jourd'hûî. Il ify'^uf plUs alors qu'à obéir; chacuh eut
bénte de rie pas dHerèhcr à mourir avec le roi. Ce prînc'e
préparé à l'assaut àe flattoit en secret du pTaisfi^ et de l'hon-
neur de soutenir, avec trois eeirts Suédois, les efforts deloule
une armée. H plaça chacun à son poste: son chancelier
Mullem, le secrétaire Empreus, et les clercs dévoient dé-
fendre la maison de la ch;jncellerie : le baron Fief, à la têle
des ofHcitrs de lii bbudhë, éfoit à un autre poste : les pale-
frei/iers, les cuisiniers avoîcnt un autre endroit à garder :
car -avec lui tout 'étoit soldat. II couroit à cheval* de ses
retranthemens à sa maison, prômettaW des récompenses à
tout le monde, créant des officiers, et assurant de faire capi-
taines les moindres valets qui combattrdient avec courage.
On- ne fut pas long-temps sans voir l'armée des Turcs
et desTartares, qui venoient attaquer le petit retranchement
avec dix pièces de canon et deux mortiers. Les queues de
cheval flbttoient en l'air; les clarions sonnoient, les cris de
Al/a, AUa'i se faisoient entendre de tous côtés. Le baron
de Grothusen remarqua que les Turcs ne mèloient dans
leurs cris aucune injure contre le roi, et qu'ils l'appeloient
seulement Demirbash, tête de fer. Auâsi-tôt il prend le
parti de sôi^ir seul sans armes des retrancKèmens ; il s'a-
vança dans les rangs des janissaires, qui a voient j^resque
toui reçu dô'l'brgçnt 'dé fui. C** Eli quoi! nies amîs, leur
" dît-îl en iprtS|3rés*raotà, 'vcnez-vôiis niassacrër trôisî cent*
** Suédois saris défense? Vousi braVe^ ;|aniksa ires, ' qui avez
'^ paraohné à dnquanfe' mille Mbscovires, qitàîid* Ils vous
^6ùt crié aàman, piàMbih avei-fdtrè oribHér Ws tiériftHt^
«' 4ué x6ix$ zvëz ttçtH^i^'tl6v»,^vmiei^àâ^?isifÉmi W
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)M HISTOI^ ,9B CHiUiJES XII. li¥. ifu
•« giMd rai de Smét quA» vobs wrm; tant, et qui vous a
^ fMl tant dtlibémliUft^ M«s a«Û9, i^ni^ é^rn^od^ ^|ue troU
«« Jours» «i ks okIms dtf ft|i)Uui4Mi s^i pv « sévères qu'on
** vous le fnt croîie.'^
CespaurokB ftcent unreliet que Girotiuifieii u'attendoiip^
liy-mème. Les janissan*^ j«urereo^ svr leurs barbes qu'ib
H'altaqueroient point le roî» et q^'il^,lui <lonneroienk les
trois^urs qu'il ctefuandoît.v Eu vain on donna le signal de
l'assaut; les janissaires, loin d'obéir,, menacèrent de se jeter
sur leurs cbels, si l'on n'accordoit' pas trds jours a» roi de
Suéde; ib vinrent en tumulte à la tente du paoha de Bender,
criant que les ordres du suUan étoîent supposés^ A cetio
séditioÀ inopinée, le pacba n'en! à op})Oser que la patience.
Il feignit d'être content de la généreuse résoli^on des
janissaires, et leur ordonna de se retirer à Benden Le kan
desTartares, homme violent, vouloit donner immédiatement
l'assaut avec ses troupes; mais le pacha, qui ne prétendoit
pas que les Tartares eussent seub l'honneur de prendre le
roi, tandb qu'il seroit puni peut-être delà désobéissance de
ses janissaires, persuada au kan d'attendre jusqu'au, l^uie-
niain,. :
Le pacba, de retour à Bender, assembla tous les offîders
des janissaires, et les plus' vieux soldats : il leifr lut et leur
fit voir Tordre positif du sultan et le letfa du mupbti.
Soixante des plus vieux, qui avoient des barbes blanehes
vénérables, et ^ui avoient rççu mille présens des mains, du
roi, proposèrent d'aller eux-mêmes le supplier de se re-.
mettre entre leurs mains, et de souffrir qu'ib lui servissent
de gardes.
' Le pacha k permit ; il n'y avoit point d'expédient qn'il
n'e&t pru, plutôt que d'être réduit à lair^Juer ce prince.
Ces soixante vieillards allèrent donc le leudemain matm ï
Vamitza, n'ayant dans leurs fiiains' qu^ de longs bitoni
blancs, seules armes des janbsa^r^, quand ils ne vont point
aufonrikat: carJctTi|iaie$ar4enlcfl^mel;a{b|Lreta
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Liy.vr. -' ftOl'Dfe SUEDE. 1^
tame éeê cbrétkfis de porter det fl f Uu en tehips diè piiit»
et dVntrer «miés diez leurs anh €t lÉnt leun églîsét:
Bi /adressèrent au baron de GroUiusen et an di^ceUer
Mullem : ib leur dirent quili venoieiit dans le dessein de
servir de fîdefes gardes au roi ; et que sH Tooldt, ih le con-
doînm^nt à Andrinople, où il pourroH parfer lui-même au
grand sefgneur. Dans le temps qu'As faisoient cette propo-
sHton, le roi Itsoit des lettres* qui anivoîent de Constant!-
npple, et que Fabrice, quiiie pouvoit plus le voir» lui avoit
fait tenir seer^tement par un janissaire. - 'iBileS étoien^ du
comte de Poniatow^i, qui ne pouvoit le servir à Bender,
ni à Andrinople, étant retenu à Constantinople par ordre
de la Porte, depuis Tindiscrete demande des mille bourses.
Il tfiandoit au tcm que les ordres du sultan pour saisir ou
massacrer sa personne royale, en cas de résbtance, n'é-
toieiit que trop réels ; qu% la vérité le sultan étoit trompé
par ses minklres; mais qne phis l'empereur étoit trompé
dans cette affaire, phis il vouloit être obéi; qu'il falloit
céder air temps et piler sous la nécessité : qu^t prenoit la
Hberté de lui conseiller de tout tenter auprès des ministres
par la Toie des négociations; de ne point mettre de Tin-
flètibillté 6h H né Mloît que de la douceur, et d'attendre
de la politique et du temps le remède à un mal que la
violence a^riiioit'sans ressource.
MiRs ni les propositions de ces vieux janissaires, ni les
lettres de Poniatowski, ne purent donner seulement au roi
ndée qn'H pouvoit fiécktr sans déshonneur. Il aimoit mieux
mourir de la mam desTiircs, que d'être en quelque sorte
leur prisonnier : il renvoya ces janissaires sans les vouloir
fér, et leur fit dire que-i^s ne se retiroient, il leur feroit
couper la barbe ; ce ^ui est dans FOrient le plus outrageant
de tons les aflroitts.
Les vieiRards, rcmpKs dé nndîgmrtion la pins vive, s'eaî
retournèrent, en criant: Jkf la tête ièfer! puisqu'il mm^
périTf pfUfiriêti^ Ih vinrent rendre compte an pacha de
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^ HlSTOmE A£ €ili;)^j^ES XII. lu. i^i.
l'étnîiigeK;ri^9q)y9P ^^oq. h^n^ %ysu^ i^iU^^/ff^ MfP^i
alm. d'^eîi; a^x^ V<Jp^. d«t J>?SJ^ ,^n? ^€^54^ (^ . e Wfi)^ au-
tant À*ia^atienee d*aij[ef à T^^saut qu'ils ep s^oi^oi eu rpeu
lejouïflrécédeut. |,. , - . ^
U.ordre pst donné daps ^e oioqneut ; les Turcs marc^ot
au^ retrsmç^emeps ; le» Tarlares les atteadoieut déjà, et ks
capoiis i^emn^e^^ieut ^ tirer. , :, •• .
..Lesjjanissaifes, d'un,côtp^, et^ de Ti^utce,
foj-cef-ent» ça «l^tf ^^^ *^9 P^^^^ fÇ^i^P > *^ pçine. vingt Suédois
tirèrent i'épée; les.tiois cents soldats^ îfureot enveloppés et
faits prisonnier» sans résistance.. JJe roi étoit alors à cheval^
^Ire sa nuiisonet son. camp a.ve^c Jes généraux Iford,
pardoff et Sparre; voyant;(j,ue tous, ses soldats s'étoient
laissé prendre en sa présepce».il di^ djX^ng frojd à ces trois
officiers: AUons défmdre la. nrni^m i\ j^qm cpmbatbrnUf
ajouta-t-ii en souriant, jQjro aris et/q(Çt&^ . !
Aussitôt il galoppe avec eu^ vpjf» cette maison» où il
avoit mis environ quarante domestiques en sentineile, et
qu'on avoit fortifiée du mieux. qu'oi} amt.pu^ j. .
Ces généraux, toutaccQutumés i(|tt'ils étoiefi^ ^^opipiàtit
intrépidité de leur paître,, ne^pqu^itnft se lasseï; d'adipiec
qu'il, voulût de sang froid» et, en, plaisant^, se dléfeodre
contré dix canons et toute une\ armée.; ils ^ apiveot^fvec
quelques gardes et quelques. domestiques, qui faisoieiil en
toift vingt persomies.; ^ . ,
M^ quai^d ils furj&nt à )a porte, il» la trouvei^nl jiiir-
gée,plejanis|$aires ;..^l^ ipèjpie pr^sdeioleux ceiit&.Tuni ou
Tîurtgres étoient cntf 4s ,p^ une fenêtre» et s'étoieiitiwidiis
i^^t^.dc ^1^ les app^itepqpc^^ à la ri3f:fyp^ d'une graqde
salle» f, où les dioQiestique& du roi s'étpi^t xe^irés,' CeOt
salle étoit heureusement près de la porte par où le foi
vonloit entrer avec sa petite troupe xie vingt personnes; il
<étQit jeté en bas de son clieva^» le pistolet .et Tépée à h
main» et sa suite en avoit lait autant,'
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liv. ^ï. ROI DE SUEDE, i . t|>i
Les janissaires 'tcmibeiil'fttir lui de tous cèté^r; Sis étbient
animés par' la i^romesse qa'avoit fette le pacha jdeliuit dii'-
cats d'or 'à chaciin de ceux q^f auroient'sei]^ment lôodlé
Mn iiabit, en cas^ quW pôt le> prendre. H bkssèit et il
fobit tous ceux qui s'tfpprochoient de «apensoDiie.' Un
janissairej qu'il fiToit blessé lui appuya son mousqueton
sur le visage: si le bras duTurc n'avoitfakun àiouvemea^
càvÊêè psir la-foule^ qui alloit'et qui vetioit couime dès i»|[ueSy
le rëi êtoit mort; la balle glissa sur sa jouev'hii en^ortaim
bout de Foreille et aHa casser le bras au général Hord,
dont la destinée étoit d*èlre toujours blessé à côté de son
maître. t • . .
Le roi enfonça sou épée dans i'e*slomac du janissaire t
en même temps sei domestiques, qui étoient ealenné&^daiis
la graude salle, en ouvrent la porte : le* roi eutire comnîe tui
trait, suivi de sa petite troupe, on' refel^ne la porte klans
Fittstïmt, et on'hi barricade avec tout de qu'on* peut troiwen .
Voilà Charles XI 1 dans celle salle, enfeimé avec toute
sa suite,' qui consistoit en prèsde soixante hommes, officiers^
gardes, secré^dres, valetst-de-chaimbrei domestiques de toute
es^e. "\ î_ f ,j - ^' • ' .r . '-
Les janissaires 'et^k^ fTaHHres^ pilloient le^ teste de la
maison, et relApHssoiéttt'Ies >9ppaiteDiens. Albn»* un pm
^^iasêèr^de èhez mi4* eeê bufbare9^'>^\i^iX : et se mettant à la
tète de son motùlé, il^ ouvrit 'luî-mème la' porte de la salle,
qufdonnoit dans *i^ «appartement à eoueher: il eutre, et
'ftik feu sur ceux ^ufrpllloie^t; • >
* Les' Turcs chargea 'de butin; « Ipou^àntés de^Ja sulHte
èppatition de liie roî, *^'ils étoieiH accoutumés à respectèf,
jetfedt kiirs antiesl sau^t f par la fjênètre^ 'ou se rethrent
jusque dans lés ctfves ;• 4e mi '|mifîlant*de leur'désordre, et
fes siens animés parie siicoès, pbursuivfent ' les Turcs de
chambre en diambf^,y tutul^oii bkssent ceux qui île f uitent
poiirt^ et en ^ qu^ «d'heure neHoientla^maison d'ennemis»
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ÎH HISTOIRE OB CUARUS XII. mv. >fi.
Le roi «ppetçaft» Amm k cMewr {lu fonbat, dmx jimls-
«ira qoite esd^oicnl som.aon fil : H ca tua un d'un coup
«Répée; r«tfK l«i demuMhi pardaa, en criaat mrumh,
•fe ie d ê tm e h vk^ dit le roi au Turc» i ctêtUtim fi^ Ht
èrâê/gêre tm paeha mm Jidek fikii de e$ fVf tu tt$ wm. Lt
Tttffc promit atsément ce qii*on veulot, «I oa lui perviit de
«anter par la fenêtre, comme les auties.
Las Snédoîf étant eafie m«itt«8 de la naitot^ refeaae^
«ont et barricadèrent encore les fenêtres. Us ne manquaient
point d'araKs: une chambre basse pleine de mousquets et
de poudre, afott échappé à hi recherche tumultueuse des
janissaires : on s'en servit à propos : les Siiédob tiroieot à
tmvets les fenêtres, {presque à bout portant, sur cette mul-
tihide de Tares, dont ils tuèrent deux^ cents en moins d^ua
demi-quart-d'heure*
Le canon tîroit contre la maison ; mais les pierres étant
fort molles, il ne laisoit que des trous et ne venversoit rien.
Le kan des Tartares et le pacha, qui vouloient prendre
le foi an Hit^ honteux de perdre du monde et d*oocttper
mut armée entière contre sèbanie perwnnes»^iserent A pro-
. pos de mettre le feu à la maison, pour obliger le roi de se
fendre: Ils firent lanc^ «ur le laît, contre les portes et
contre lealenétres» dea fleclics entortillées da médias allu^
mées. LamaisonfuteBflammesenimmmpettti letMttOHT-
.caAraiié^oitprèsdefondrtsnrlasSaédais. Leroidomsa
tranquillement aesordfespowrâehMlie le fctt: trouvant un
petit baril plein de liqueur, il prend W baril lui-même» al
«déde de«x Soédaia» » le jeUe j^rendroit o& le feu étoU le
pins iMeiit. 11 se traum qne ce baril étoît rampK d^aaisp
jdoHvie : raab la précipitation» mépambie d'un tel f mbanm^
tampèoha d^ penser. LVnArasement redoubla «vec ptaa
•de n^; Pappartenaenl du roi était eonsamé4 la gmade
aaUa où les Suédois sa lenoien^ éloil lemplie d'une bmée
afirense, milée de tonitiJani de fen fui
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m, vu KOI DR SUEDE. 19$
portes âe» apparfam^nt voisins ; la mmàé du t^it étoit, »by<'
mh dmi» ia maison même» Vmixt tpmbok en édtory^ lei
Uu gacd^ iHHimié Waibeif, qw 4Af}$ eetibs eiMiféioUé
crier ^^'il (siUiiit «e i^endre,- T^»^ |£i^ it^rmsfi kfimm^ 4it
que 4'it9?fi prmnm9* V# wtr^ gwclff p>(o«M»é H^s^
s'ayiga de difç Jlttg b maison de la cUancellerie, .qui n'étoit
qa'à cinquante pas, a voit iiu toit de pierre, et étoit à J'é-
preuve du feu; qu'il falloit kk^ une sojtie, gaguejr cette
m^m^ ejk ^*^ 4éfëadi^ Fi^i/^ i^» tirai Suéd^, &'icm Ut
ni : il «mlmaia «e furde, et k ciséa c«k>iiel sur le efaanp.
MUm, mes amis^ dit-il, prenez ùtec reus fe fèm de foudre
tt de plomb que vous pourrez^ et gagnons îa chançeUerie
^'épéç à la maîn.
JLes Turc^ gui cependant entourcient celte luaison toute
anhrasée, <voy<Hent avec une admiration mêlée d'épouvante,
que les Suédois n'en sortoieot point ; mais leur étonnement
fut encore plus grand, lorsqu'ils virent ouvrir les portes, et
le roi et les §iens fondre sur eux en désespérés. Charles et
ses principaux officiers étoient armés d'épées et de pistolets ;
chacun tira deux coups à la fois à l'instant que la porte
s'«uvril; et dans le même clin d'oeil jetant leurs pistolets,
€t s'arniant. de leurs épées, ils firent reculer les Turcs plus
<le cinquante . pas. , Mais le moment, d'après cette petite
troupe *f ut entourée ; le roi, qui étoit en bottes, selon sa
coutume, s'embarrassa dans se? éperons, et tomba : vingt-et-
un janissaires se jettent aussitôt sur lui : il jette en Tair son
épée, pour s'épargner la douleur de la rendre ; les Turcs
l'emmènent au quartier du pacha, les uns le tenant sous les
jambes, les autres sous les bras, comme on porte un malade
que l'on craint d'incommoder.
Au moment que le roi se vit saisi, la violence de son'
tempérament, et la fureur 6ù un combat si long et si ter-
rible avoient dû le mettre, firent place tout-à-coup à la
K
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194 HISTOIRE DE CHARLES XIl. uv. vi.
douceur et à la traoquillité. Il ne lui échappa pas an mot
d'impatience, pas un coiy> d'oeil de colère. Il regardoît 1^
janissaires en soiiriant» et ceux-ci le portoient, en cnuAj^lë,
avec ime indignation mêlée de respect. Ses officiers fuient
pris au même temps, et dépouillés par les Turcs et par les
Tartares; ce fut le 12 février de l'an 1713 qu'arriva œt
étrange événement» qui eut encore des suites singulières ^
* M. Norb«i|f, qni n'étott pas présent à cet évéoemeiit, nf a fait qm
suivre ici dans son histoire ceUe de M. de Vdtaire; ratis il 1^ tronqaéef
il en a sopprimé les drconstanoes intéressantes, et n*a p« justifier la
témérité de Charles XIL Tout ce qu'il a pn dire contre M. de Vol-
taire au sujet de cette affaire de Bender, se réduit à Vaventnre do
sieur Frédéric, valet-de-chambre du roi de Suéde, que quelqaes-UQB
prétendoient avoir été brûlé daus la maison du roi, et que d'antres
disoient avoir été coupé en deux par les Tartares. La Mottraye pré-
tend aussi que le roi de Su^ ne dit point ces paroles : Nmu eombdt'
trûHBy ff aria eifocis; mais M. Fabrice, qui étoit présent, assure que
le roi prononça ces mots, jqne la Mottraye n*étott pas plus à portée
d'écouter qu'il tt*éloit capable de les comprendre^ ne sadiant pas «i
mot de latin. ^
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Liv.vn. ROI DE SUEDE. Ip5
LIVRE SEPTIEME.
ARGUMENT.
Les Tttrca frangèrent Chailes à Démirtdsh. Le roi Stanislas est pris
daiu te même temps. Action hardù de M. de VtUélongue, Rétolu^
Hms dont le mrml. Battâlle donwie en Pométwde, AtUna frrW
par Uê Suédois, Charles part tnfin pour retourner dans ses états.
Sa manière étrange de voyager. Son arrivée à Stralsund, Disgrâces
de CA<ii^t. Succès de Pierre le Grand : son triomphe dans Peters»
bourg.
Le pacha de Bender atlendoit Charles gravement dans
sa tente, ïMpmt près de lui Marcou un interprète. Il reçut
ce prince avec un fNrofond respect, et le supplia de se re-
poser sur un sofa; mais le roi ne prenant pas seulement
garde aux civilités du Turc, se tint debout dans la tente.
** Le Tout-Puissant soit béni, dit îe pacha, de ce que ta
** majesté est en vie : mon désespoir i:st amer d'avoir été
^ réduit par ta majesté à exécuteir les ordres de ^a hdutesse.''
Le ^oi fâché seulement de de que ses trois cents soldats
s*étoient laissé prendre dans leurs retranchemens, dit au
pacha : Ah ! a'its s^étoieht défendus comme ils devaient, on
ne nous Ouroit pas forcés en dix jours, " Hélas ! dit le
*' Turc, voilà du courage bîèn mal employé." Il fit con-
duire le roi à Bender sur un cheval richement caparaçonné.
Ses Suédois étoient ou tués ou pris ; tout son équipage, ses
meubles, ses papiers, ses bardes les plus nécessaires^ pillés
ou brûlés; on voyoit sur les chemins les officiers suédois
presque nus, enchaînés deux à deux, et suivant à pied des
Tartares ou des janissaires. Le chancelier, les généraux,
n'avoient point un autre sort : ils étoient esclaves des soldats
auxquels ib étoient échus en partage.
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J96 HISTOIRE DE CHARUIS XIl. uv. vu.
Ismaël pacha avant conduit Charles XII dans son serniil
de Bender, lai céda son appartement, et le fit servir en roi,
non sans prendre la précaution de mcittre des janissaires en
sentinelle à la porte de la chambre. On lui prépara un lit,
mais il se jeta tout botté sur un sofa, et dormit profondé-
ment. Un officier, qui se tenott debout auprès de lui, lui
couvrit la tête d^in bonnet, que le roi jeta en se réveillant
de son' premier sommeil. Le Turc voyoit avec étoonemeat
on souverain qui coucboit en bottes et nu-tète. Lé leode-
aiaio matin Ismaël introduisit Fabrice dans la chambre da
roi. Fabrice trouVa ce prince avec ses habits déchirés, sn
bottes, ses mains, el toute sa personne couvertes de sang et
de poudre, les sourcils brûlés ; mais Tair serein dans cet
état affreux. Il se jeta à genoux devant lui, sans poaToir
proférer une parole: rassuré bientôt par la manière libre et
douce dont le roi lui parloit, il reprit avec lui aa familiirité
ordinaire, et tous deux s'entretinrent en riant du combat de I
Bender. " On prétend, dit Fabrice, que votre majesté a
«« tué vingt janissaires de sa main." Bon^ bâti, dit le n»,
&n augmente tot^oura les. chqses de la moitiii. Au milieo
de cette conversation le pacha présenta au roi son favori
Grothusen et le colonel Ribbins, qu'il avoit eu la générosité
' de racheter à ses dépens. Fabrice se chargea de la rançon
des autres prisoiiiiiers*
Jeffreys, Teuvoyé d'Angleterre, se joignit à Ini pour Saor-
nir à cette dépense. Un Franj^ois, que la curiosité ayoit
amené à Bender, et qui a écrit une partie des événeoKo»
que Ton rapporte, donna au^^si ce qu'il avoit; ces étrange»,
assistés des soins et même de l'argent du paeha, t^àuftamk
non-seulement les officiez», mab encore leurs hablby i»
mains des Turcs et des Tartares.
Dès le lendemain on conduisit le roi prisonnier, daM«
chariot couvert d'écarlate, sur le chemin d'Andrinople: m
trésorier Grothusen étoit avec lui : le chancelier Mallenf
et quelques officiers, suivoient dans un autre char : plttsieas
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Liv. VII. ROi DE SUEDE. ' 197~
étoient à chévàl» et loidqa'ils JBtoient les yeux sur le chariot
où étoit le roi, it^ ne pouvoient retenir leurs larmes. Le
pacha étoit à la tète de Fescorte ; Fabrice lui représenta
qu'il étoit honteux de laisser le roi sans épée, et le pria de
lui en donner une. " Dieu m'en préserve, dit le pacha, il
" voudroit nous en couper la barbe.'* Cependant il la lui
rendit (juelques heures après.
Comme on conduisoit ainsi, prisonnier et désarmé, ce
roi, qui peu d'années auparavant avoit donné la loi à tant
d'étals, fet qui s'étoit vu l'arbitre du nord et la terreur de
l'Europe, on vit au même endroit un autre exemple de la
fragilité des grandeurs humaines. Le roi Stanislas avoit été
arrêté sur les terres des Turcs, et oo Tamenôit prisoimier à
Bender, dans le temps même qu'on trànàférolt Charléâ XIL
Sbsuiislas n'étant piuâ soutenu )>ar lu main qui Tavott fait
roi, se tfouvant sand argent, et par conséquent sans pofti
en Pologne, s'étoit retiré d'abotd en ?bméranie ; et ne pou-
vant çias conserver son rovaume, il àvôit défetidu, autant
qu'il l'avoit pu, les états &e son bienfaiteur, tl avoit même
passé en Suéde pour prédpitei* les setôuk*^ dont On àvoit
besofti dans la Poméranie et dans la Lîvonie ; il avoit fait
tout ce qu'on devoit attendre de Tatni de Charles XH. En
ce temps le prenJîer roi de Pitisse, priiice très sage, s'inquié'^
tant avec raison du Voisinage des Moscovites, s'imagina de
se liguer avec Auguste et la république de Pologne, pour
renvoyer les Russes dans leur pays, et de faire entrer
Charles XII lui-même dans ce projet. Trois grands êvéne-
mens dévoient en être le fruit ; la paix du nord, le retour
de Charles dans ses états, et une barrière opposée aux
Russes, devenus formidables à l'Europe. Le préliminaire
de ce trahé, dont dépendoit la tranquillité publique, étoit
Tabdication de Stanislas. Non seulement Stanislas l'accepta
«Wis il se chargea d'être le négociateur d'une paix qui lui
eûlttvoit h couronne ; la fréees^té, lé bieii^ public^ la ^oir#
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19% HISTOIRE DE CHARLES XII. iiv. vu.
du sacrifice» et l'intérêt de Charles» à qui il devoit tout et
qu'il aimoit, le déterminèrent. Il écrivit à Bender; il ex-
posa au roi de Suéde Tétai des affaires^ les malheurs et Je
remède : il le conjura de ne point s'opposer à une abdica-
tion devenue nécessaire par leé conjonctures, et honorable
par les motifs ; il le pressa de ne point immoler les intérêts
de la Suéde à ceux d'un ami malheureux, qui s'unmoloit au
bien public sans répugnance. Charles XII reçut ces lettres
à Varnitza : il dit en colère au courier, en présence de plu-
sieurs témoins : Si mon ami ne veut pas être roi, je saurai
bien en faire un autre,
Stanblas Vobstina au sacrifice que Charles refusoit. Ces
temps étoienl destinés à des sentimens et à des actions ex-
traordinaires. Stanislas voulut aller lui-même fléchir Charles,
'et il hasarda» pour abdiquer un trône» plus qu'il n'avoitfait
pour s'en emparer. Il se déroba un jour, à dix heures du
soir» de l'armée suédoise qu'il commandoit en Poméranie,
et partit avec le baron Sparre, qui à été depuis ambassadeur
en Angleterre et en France, et avec un autre colonel. H
prend le nom d'un Françob nommé. Haran» alors won^^
service de Suéde, et qui est mort depuis peu commandant
de Dantzick : il cAtoie toute l'armée des ennemis. Arrêté
plusieurs fois» et relâché sur un passe-port obtenu au nom
de Haran, il arrive enfin après bien des périls aux fron-
tières de Turquie.
Quand il est arrivé en Moldavie» il renvcHe à son armée
le baron Sparre, en^re dans Yassy, capitale de la Moldavie »
se croyant en sûreté dans un pays où le roi de Suéde avoit
été si respecté, il étoit bien Wn de soupçonner ce qui se
passoit alors. • »»
On lui demande qui il est : il se dit major d'un régimes
au service de Charles XÏI; on Tarrète à ce seul n<>®'. "
est mené devant le hospodar de Moldavie» qui ^^^J^
' par les gazettes que Stanislas s'étoit échappé de son «nBW>
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tiv. Tii. ROI DE SUEDE. 199
coooevoit qudques soupçons de la vérité. On lui avok dé-
peint la l%urc du roi, très aisé a reconnoître à un visage
(dein et aimable» et à un air de douceur assez rare.
Le hospedar ^interrogea, lui fit beaucoup de questions
captieuses, et enfin lui demanda quel emploi il avoit dans
Fannée suédt>ise. Stanislas et le hospodar parloîent latin.
Mtffor sum, lui dit Stanislas : Imo maximtu es, lui répondit
le Moldave : et aussitôt lui présentant un fauteuil, il le. traita
m roi ; mais aussi il le traita en roi prisonnier, et on fit
une garde exacte autour du couvent grec, dans lequel il fut
obligé de rester jusqu'à ce qu'on eût des ordres du sultan.
Les ordres vinrent de le conduire à Bender, dont on faisoit
partir Charles.
La nouvelle en vint au pacha, dans le temps quil ac-
compagnoit le chariot du roi de Suéde. Le pacha le dit à
Fabrice: celui-ci s'approchant du chariot de Charles XII,
lui apprit qu'il n'étoit pas le seul roi prisonnier entre les
mains des Turcs, et que Stanislas étoit à quelques milles de
lui, conduit par des soldats. Courez à lui, mon cher Fa-
bricei lui djt Charles, sans se déconcerter d'un tel accident :
DiteS'iui bien qu^U nefasHejamais de paix avec le roi Auguste,
et assurezAt que dans peu nos affaires changeront. Telle
étoit rinflexibilité de Charles dans ses opinions, que tout
abandonné qu'il étoit en Pologne, tout poursuivi dans ses
propres états, tout captif dans une litière turque, conduit
prisonnier, sans savoir où on le menoit, il comptoit encore
sur sa. fortune, et eispéroit toujours un secours de cent mille
hommes de la Porte ottomane. Fabrice courut s'acquitter -
de sa commission, accompagné d'un janissaire, avec la per-
mission du pacha. 11 trouva à quelques milles le gros de
soldats qui conduisoit Stanislas : il s'adressa au milieu d'eux,
à un cavalier vêtu à la françoise, et assez mal monté, et lui
demanda en allemand, où étoit le roi de Pologne. Celui
à qui il parloit étoit Stanislas lui-même, qu'il n'avoit pas
reconnu sous ce déguisement. Eh quoi! dit Je roi; ne vou9
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âO# HISTOiltE DE CHARLES XII. mv. tis.
êmvmoHmut donc phiA dt mdî Alofs Fabrice^ h» af^nal
J$ triste état où^toit le roî de Suedie^ et la leraieté kiébrao-
lable, mais iniiUlf}, de ses desseins.
QtAand Staaisias Itft près de Bender, le faaeba, qui re-
veooit, après avoir accompagné Cbmies Xli à qoek^ics
railles, envoya au roi polonois un cheval arabe avec un
harnois maguiliqoe.
Il iat reçu dans Bender au bruit de l'artillerie» «t^ à la
liberté près qu'il n'eut pas d'abord, il n'eut point à se (dakidffo
4u traitement qu'on lui fk^. Cependant on oondui9<Mt
pbarks sur leebemin d'Aadiinople. Cette vMle éleit dlS^
remplie du bruit de son combat. Les Turcs le^ondanmoient
et Tadmiroient ; mais le divan irrité menacent dé^à de le
reléguer dans une isle de rArchipel.
Le roi de Pologne, Stanblas, qui m'a fait l'honneur de
ni'apprendre là plupart de ces particularités) m'a confirmé
aussi qu'il fut proposé dans le divan de le confiner liû-mème
dans une isle de la Grèce ; .maisi quelques mois après^ le
grand seigneur adouci le laissa partir*
M. Désaleurs, qui auroit pu prendre k parti de Chariet,
et empêcher qu'on ne fit cet affront aux rois cbrétienS) étoil
à Constant inople> aussi-bien que M. Pt>nialOwsk}, dont oir
craignoit toujours le génie fécond en ressources. Là phi»
part des Suédois restée dans Andrinople, étoient en prison ;
le trône du sultan paroissoit inaccessibk de tous côté» aux
plantes du rei de Suéde.
Le umrquis de FierviUé, envoyé secrètement de la part
de la France auprès de Charles à Bender, étoit pour tor»
k Andrinople, 11 osa imaginer de rendre servke à ce prinet
dans k temps que tout l'abandonnoit ou l'opprîmoit. Il lut
* Le bon chapelain Norberg prétend qo'oo se contredit idj, en
dbant que le roi Stanislas fat retenu prisonnier et servi en roi dan
Bender. Comment ce pauvre homme ne voyoit-H pas ^'6n peut
t^ à la foi» hcfBOfé et pritonoier ?
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LIT. vn. ROI DE SUEDE. £01
heinreusement stcondé dans ce dtsseki par on gentiHioiiiiiit
fninçois, d'une ancienne maison de Champagne, nommé de
Villelongue, homme intrépide, qui n'ayant pas alors une
fortune selon son courage, et charmé d'ailleurs de la répu-
tation du roi de Suéde, étoit venu chez les Turcs dans le
dessem de se mettre au service de ce prince.
M. de Fierville, avec Taide de ce jeune homme, écrivit
vn mémoire au nom du roi de Suéde, dans lequel ce mo-
narque demandoit vengeance au suUau de Tinsulte faite en
sa personne à toutes les têtes couronnées, et de la trahison,
vraire ou fausse, du kan et du pacha de Beoder.
On yuccusoit le visir et les autres minbtres d'avoir été
corrompus par les Moscovites: d'avoir trompé le grand
seigneur: d'avoir empêché les lettres du roi de parvenir
jusqu'à sa hautesse, et d'avoir, par ces artifices, arraché du
sultan cet ordre si contraire à l'hospitalité musulmane, par
lequel on aVoit violé le droit des nations, d'une manière si
indigne d'im grand empereur, en attaquant avec vingt mille
Jmmmes un roi, qui n'avoit pour se défendre que ses do-
mestiques, et qui comptoit mt la parole sacrée du sultan.
Quand ce mémoire fut écrit, il fallut le faire traduire en
turc et l'écrire d'une écriture particulière, sur un papier fait
exprès, dont on doit se servir pour tout ce qu'on présente
au sultan.
On s'adressa à quelques interprètes françois qui étoîent
dans la ville; nitiis les affaires dn roi de Suéde étoient si
désespérées, et le visir ^daré si ouvertement contre lui,
Îu'aucun interprète n'os^ seulement traduire l'écrit de M. de
iervifle. On trouva enfin un autre étranger, dont la main
a'étoit point connue à la Porte, qui, moyennant quelque
récompense, et Fassimint d'un secret profond, traduisit le
mémoire en turc, et l'écrivit, sur le papier convenable : le
baron d'Arvidson, officier des troupes de Suéde, contrefit la
signature du roi. FierviHe, qui avoit le sceau royale l'ap-
K3
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202 HISTOIRE DE CHAELES XII. liv. vil
posa à T/écrit, «t on cacheta le tout avec les armes de Suéde.
Villeloiigue se cbaigea de remettre lui-même ce paquet entre
les mains du grand seigneur, lorsqu'il iroit à la raosqaée,
selon sa coutume. Ou s'étoit déjà servi d'une pareille voie
pour présenter au sultau des mémoires contre ses ministres;
mais cela même rendoit le succès de cette entreprise plas
difficile, et le da^er beaucoup plus grand.
Iji visir, qui prévoyoit que les Suédois demanderoieofc
justice à son maître, et qui u'étoit que trop instruit par le
malheur de ses prédécesseurs, avoit expressément défendu
qu on laissât approcher personne du grand seigneur, et avoit
ordonné sur-tout qu'on arrêtât tous ceux qui se présenteroient
auprès de 1^ mosqi|ée avec des placets.
Villelongue savoit cet ordre, et n'ignoroit pas qa il y
alloit de sa tète. Il quitta son habit franc, prit \m vêtement
à la grecque, et ayant caché dans son sein Ja lettre qi^
vouloit présenter, il se proniena de bonne beure près de la
mosquée où le grand seigneur devoit aller. Il contrefit Tio-
sensé, s'avança en dansant au milieu de deux baies de janis^
saires, entre lesquelles le grand seigneur alloit passer; il
laissoit tomber exprès quelques pièces d'argent de s^ goches,
pour amuser les gardes.
Dès que le sultan approcha, on voulut iaire retirer Vilie-^
longue : il se jeta à genoux el se débattit entre les maiia^dfs
janissaires: son bonnet tomba; de grands cbeveox qu'il
portoit le firent reconnoitre pour un franc: il re^ut plusîeun^
coups, et fut très-nuiltraité. Le grand seigneur, qui étoit
déjà proche ; entendit ce tumulte et en demanda la cause»
Villelongue lui cria de toutes ses forces, Amman! amimm^t
miséricorde, en tirant la lettre de son sein. Le sultan com-
manda qu'on le laissât approcher. Villelongue court à Ini
dans le moment» embrasse son étrier et lui présente Fécrit,,
en lui disant : Sued crall dan ; c'est le roi de Suéde qui te
le donne. Le sultau mit la lettre dans son sein, et contiou&
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liv. yii. ROI DE SUEDE. «03
son chemm vers la mosquée. Cependant on s'assure de
Villelongue, et on le conduit en prison^ dans les bâtimens
extérieurs du serrail. ,
Le sultan, au sortir de la mosquée, après avoir lu la
lettre, voulut lui-même interroger le prisonnier. Ce que je
racontev^îci paroitra peut-être. pep croyable; mais enfin je
n'avance rien que sur Isi foi des lettres de M. de Villelongue
kû-mème : quand un si brave officier assure un fait sur son
donneur, il mérite quelque croyance. Il m'a donc assuré
que le sultan quitta Thabit impérial, comme aussi le turban
particulier qu'il porte, et se déguisa en officier des janis-
saires, ce qui lui arrïvoit assez souvent. Il amena avec lui
un vieillard de Tisle de Malte, qui lui servit d'interprète.
A la faveur de ce déguisement, Villelongue jouit d'un hon-
neur ^'aucun. ambassadeur chrétien n'a jamais eu : il eut
lèle-à-tète une conférence d'un quart-d'beure avec l'empereur
ttirc^ Il ne manqua pas d'expliquer les griefs du roi de
Suéde» d'accuser les ministres, et de dejnander vengeance,
avec d'auâint plus de liberté, qu'en pariant au sultan même,
îL étoit. censé ne parler qu'a son égal. Il avoit reconnu
aisément le grand seigneur, malgré l'obscurité de la prison,
et il n'en fut que plus hardi dans la conversation. Le pré-,
tendu officier des janissaires dit à Villelongue ces propres
paroles : <' Chrétien, assure toi que lé sultan mon maître
** a Taine d'un em^reur; et que si ton roi de Suéde a râî-
« son, il lui fera justice." Villdongue fut bientôt élargi.
On vit quelques semaines après un changement subit dans
le serrail, dont les Suédois attribuèrent la cause à cette
unique conférence. Le muphti lut déposé, le kan des Tar-
tares ekilé à Rhodes, et le âérasquier pacha de Bender re-
légué dons une isle de FArcbipe]. - '
La Porte ottomane est si sujette à de pareils orages,,
qu'il est bien difficile de décider si >en effet le sultan vouloit
appoîser le roi de Suéde par ces sacrifices, i La manière
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204 lilSTOlUE DE CitARLES XII. uv. vn.
fbnt ce prioce IvA tanké ne proure pas que la Pwte i^m*
pnflBfti beaucoup à lui plair«.
Le favori Ali Couoiourgt fut soupçonné ^moit Uk $gù
t«UB ces cbaagonens pour ses întérêÂs particuliers. Oa dit
qu'il fit exiler te kan de Tartane et le sérasquier de Beader,
sous prétexte qulb avoient délivré au roi les douze cents
bourses malgvé Tordre du grand së^ei^r. Il mit sur (e
trône desTartares le frère duiian déposé, jeune homme ib
son âge, qui atmoît peu son Irere^ et sur lequel Ait Cou*
moiirgi comploit beaucoup dans les guerres qu'il méii^oit.
A regard du grand Tisir Ju^ulf, il ne fut déposé qne quelques
semaines après ; et Soliinan pacba eut k titre de premier
vîsir.
Je suis oUigé de dire que M. de ViUeloogiie et pheiean
Sué<)ais m'ont assuré que la stropile lettre, présentée au sul-
tan au nom du roi, aviût causé tous ces grands cha n g cmc at
à la Porte -, mais M. de Fîervillc m'a de son câté assuré tout
le contraire. J'ai trouvé quekfttefôi» de pareilles coutra-
riéiés dans ks mémoires que l'oa «Ta confiés. £n ce cas,
tant ce que doit faire un bistorieti, c'est de conter iagàni-
ment le hii, sans voutonr p^éftrer les motifs, et de se bonwr
à dire précîséaMnt ce qn'I aatt, au Heu de devins ce quH
ne sak paa.
Cependant on avoit ooodoit Charles XII dans le petit
cbàteau de Démirtasb, auprès d'Andrinople. Une foiUe ia-
nombrable de Turcs Violent rendus en cet endroit pour voir
anif er ce prince : on Ib transporta de son cimriot au clià«
tean sur un sofa ; mais Cfaarles, pour n'être point vu de cette
multitude, se mit un carreau sur la tète,
La Porte se fit prier quelques jonrs de souffrir qa'i!^
habitât à Démotica, petite ville à six lieues d^Andfinople,
près du faaieax fleuve Hébrns, aujourd'hui appelé Marîzsa.
^Muiiourgi dit au grand vish* Soliman : ** Va, fais avertir fo
*« foi de Suéde qu'il peut icster à Démotica toute sa tie:
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uv. VII. EPI HE SUEDE. M5
*' je te féj^ùDà^ qu'avaoft im an il demeadura à tSm alkr de
*' lui-même ; mais sur tout ne lui bis poiirt tgmt ô'^agewàJ^
Ainsi, on transféra le, roî à U peâte viUe de Dénotica,
où la Porte lui assigna un thaïm çoQiidérabk de proWsîoBS
pour lui et pour sa suite ; on lui accorda seulement vingt-
ctpq écus par jour en argent pour acheter du cochon et é^
vin, deux sortes de provisions que les Turcs ae founmamt
pas ; mais la bourse de cinq cents écus par JMir» qufli avait
à Bender» lui fut retranchée.
 peine iut-il à Démotica avec sa pttito cour, qt^on
déposa le grand visir Soliman : sa place lut donnée à ïbra«~
him MoUa, iier, brave et grossier à rexcè** Il n'est pas
inutile de savoir son histoire, afin que Ton eonnoisse pins
particulièrement tous ces viee-rois de Tenip^e. ottoman,
dont la fortune de Charles a si loog-temps. dépendu.
Il avoit été simple matelot à ravénemeot du aidtan
Achmet HI. Cet empereur se déguisoit souvent en homme
privé, en imao, ou "en <lervis. Il se glissoit le soir dans
les cafés de Constantinople, et dans les lieux publics, pour
entendre ce. qu'on disoit de lui, et pour recueillir par lui-»
même les s^timens du peuple. U entendit un jour ce
matelot se plahidre de ce que les vaisseaux turcs ne rêve**
noient jamais avec des prises^ et qui jureît qae, s'il étoit
capitaine de vaisseau, il ne rentreroit jsenais dans le port de
Constantinople,~sans ramener avec hii quelque bâtiment des
infidèles. Le grand se^aeuv ordonna dès le lendemain
qu'on lui donnât un vaisseau à commander, et qu'fm Fenyoyàt
en course. JLe nouveau capitaine revmt quelques jonis
après avec une barque maltoiseï, et une galiote de Gènes*
An bout de deux ans on le fit capitaiae-general de la mer«
et enfin grat d visir. Dès qu'il fut dans ce poste» il crot
pouvoir se passer du favori ; et pour se rendre nécessaire,
il projeta de faire la guerre aux Moscovites: dans cet«o
iolention il ik dresser une te«te pr^ de l'endioît, oà die*
menvott le nâ de Sinsde.
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206 HISTOIRE DE CHARLES XII. lit. th.
Il limta ce prince à Vy venir trouver avec ié nouveau
kan des l^artarès dt l'ambaasadear de France. Le roi,
d'aiitfint plus altier qat'û éteit malheureux, regardoît comme
le plus sensible <les alf ronis qu'un sujet osàt-f envoyer cher-
cher: il ordonna à son chancelier MuUem d'y aller à sa
place; et de peur que les Turcs ne lui manquassent de
re^ct, et ne le forçassent à commettre sa dignité, ce prince,
extrême en tout, se mit au lit, et résolut de n'en pas sortir
tant qu'il seroit à Démotica. 11 resta dix mob couché;
feignant d'être malade: le chancelier Mullem, Grothtisen
et le colonel Dubens étoient les seuls qui mangeassent avec
lut Ib n*avoient aucune des commodités dbut les Francs
se servent, tout avoit été pillé à l'affaire de Bender ; de
sorte qtt^il s*&i îsàlùk bien quil y eût dans leur repas de ht
pompe et de la délicatesse. Ils se servoient eux mêmes^ et
ce fut le chancelier Mullem qui fit pendant tout ce temps
la fonction de cuisinier. '
Tandis que Charles XII passoit ^ vie dans son lit, il
apprit la désolation de toutes ses provinces situées hors de
laSciede.
Le général Stdnboek, illustre pour avoi^ chassé les
Danois de la Seuiie, et pour avoir vaincu leurs meiUeures
troupes avec des pfiysans, soutint encore quelque temps fai
réputation des armes suédoises. Il <lé{endit autant quil put
k Poméraniè et Brème, et ce que lé roi possédoit encore
en Allemagne, mais il ne put empêcher les Saxoi» et les
Danois réunis d'assiéger Ste^ie, vHle forte et considérable^
sitttéè près de l'Efbe, dans le duché de Brèqie. La vâle lot
bojyibarclée et réduite en cendres, et la garmson obligée de
se rendre à discrétion avant que Steinbeck pAt s'avancer
pour là secourir.
Ce général, qui avoit environ douze mille faomnieii dont
la moitié étoit cavalerie» |>oor8uivit les ennemis^ qui étoicot
une (ois plus forts, et les atte^it enfin dans le duché de^
Mecklenbourg, près d'un lieu nommé. Gadebusch, et d'u
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iiv. vu. ROI DE SUEDE* «07
petite rivière qui porte ce nom : il arriva vis-à-vis cfes Saxons
et des Danois le 20 décembre 1712. Il étoit séparé d eux
par un marais. Les ennemis,. campés derrière ce marais,
étoient appuyés à un bois : ils avoient Tavantage dû nombre
et du terrain, et on ne pouvoit aller à eux qu'en traversant
le marécage sous le feu de le^r artillerie.
Steinbock passe à la tète de ses troupes, arrive en ordte
de bataille, et engage un des combats les plus saiiglans et
les plus acharnés qui se fussent encore donnés entre ces
deux nations rivales. Après trois heures de cette mêlée si
vive, les Danois et les Saxons furent enfoncés, et quittèrent
le champ de bataille.
j Un fik du rqî Auguste et de la comtesse de Kooisg-
marek, connu^ ^qus le nom de cpnite dp Saxe, fit dans cette
bataille son apprenti^ssage de l'art de la guérite.' C'est ce
même comte de Saxe qui eut depuis Tbonneur d'être élu
duc de Courlande, et à qui il n'a manqué que la force pouf
jouir du droit le plus incontestable qu'un homme puisse
jamais avoir sur une souveraineté, je veux dire les suffrage^
unanipies du peuple. C'est lui qui s'est acquis depuis une
gloire plus réelle en sauvant la France à la bataille de f'on-
tenoy, en conquérant la Flandre, et en méritant la réputa-
tk>ii du pbis grand général de nos jours. Il commandoit
Un régiment à Gadebusch, et y eut un cheval tué sous lui.
Je, lui ai entendu dire que les Suédois gardoîent tpiyours
leurs rangs, et que même, aprèsque la victoire fut décidée,
les furemieres lignes de ces braves.troupcs ayaat à leurs pieds
leiu3 ennemis morts, il n'y eut pas un soldât suédois qui
osât seulement se baisser pour les d^ouiller, avant que la
prière e^ été faite sur. le. champ de bataille, tant ils étoient
inébranlables dans la discipline sévère à laquelle leur rot les
avoit accoutumé^.
Steinbock, après cette victoire, se souvenant que les.
Danois ayoient mis Stade en cendres, alla s'en venger sui;
Aligna», qui appartient au roi de Danemarck^^. Alteq^ <st
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909 HISTOIRS DE CHARLâS XII. htv. vu.
«ii^6S30tts dé Hambourg* sur le fkute 4e fElb^, qui petit
iq»porter 4«ns son port d'assez gros vaisseaux. . Le roi de
l>»eiiiarck ferorisoil eétte ville de beaucoup ck privOeges ;
ion dessein étoil d'^f établir un commerce florissant: déjà
même l'industrie des Akenaîs, encouragée par les sages
vues du roi, commençoit à mettre leur vDie au nombre de^
villes commerçantes et riches. Hambourg en coiicevoît de
la jalousie, et ne souttailoit rien tant que sa dè^ructiou.
Dès que Sieinbock lut à la vue <f Altena, it envoya dire par
on trompette aux habitans qu'ils eussent à se retirer avec ce
qu'ils pourroi^it emporter d'effets, et qu'on alioit détruire
leur ville de fond en comble.
Les.magmtiats vinrent se jeter à ses (neds et «ffrfrent
cent miUe écus de rançon. Stetnbock en demanda deux
cent mille. Les Altenais supplièrent qu'il leur fût permis au
moins d'envoyer à Hambourg où étoieat leurà correspon-
danciesv et assurèrent que le lendemain ils apporteroient
eette somme ; le général suédois répondit qu'il faHoit la don-
ner sur Fheure, ou qu'on alioit embraser Aliéna sans débû.
Ses loupes étoient dans le Jaubourg le flambeau à la
main : une fo^e porte de bois et un fbssé déjà comblé
étoient les seules défenses des Altenais. Ces malheureux
furent diligés de quitter leurs maisons avec précipitation,
au milieu de la nuit: c*étoit lé 9 janvier 1713. Il faisoit
un froid jîgoureux, augmenté par un vent de nord violent,
qui servît à étendre l'embrasement avec plus de promptitude
daiirla ville, et à 'rendre plus insupportables' les extrénHtés
ofi le peuple ^t réduit dans la campagne; Les hommes,
les ftMUrtes, courbés sous le fardeau des meubles qu'ils em-
portoiéDt, se réfugièrent en pleurant et en poussant des
harlemens^ sur les côteanx voisins, qui étoient couverts de
glace. On voyoit plusieurs jeunes gens qui poirtoient sur leurs
épairfes dès vieiUards paralytiques. Quelques femmes, non-
vetténVenl^ accouchées, emportèrent leurs enfàiis; et hiouru-
reitt de ïroid avec eux sur k colline,^ en regardant de foin
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Uu il^mnie^ qui consumoiejit leur patrie. Tous .les habit^nç
u'étoient pas encore sortis de la ville, lorsque J^s S uédpb
y mirent le feu* Altena brûla depuis minuit jusqu'à ^ix
heures du matin. Presque toutes le^ maisoqs étoiei^t de
bois: tout lut consumé; et il ne parut pas le lendemain
qu'il y eût eu upe ville en cet endroit.
Les vieillards, les malades, et les lemraes les plus déli»
cates, réfugiés dans les glaces pendant que leurs maisons
étoient en feu» se traînèrent aux portes de Hambourg, et
supplièrent qu'on kur ouvrit et qu'^n leur sauvât la vie;
mais on refusa de les recevoir parce qu*il régnoit dans Akena
quelques maladies contagieuses ; et t'es Hambourgeois n'ai-
nioient pas ass^ les Aliénais pour s'exposer^ en les recueii»^
lant, à infecter kur propre ville. Ainsi la plupart de ces
misérables expirèrent sous les murs de Hambourg, en pre-
nant le ckl à témoin de la barbarie des Suédois, et de'celle
des Hambourgeois, qui ne paroissoit pas moins inhumaine.
Toute TAllem^gne cria contre cette violence : les ministres
et les généraux de Pologne et de Danemarck écrivirent au
comte de Steinbock pour lui reprocher une cruauté si grandei
)§uî, faîte sans nécessité et demeurant s«^ls excuse, soukvoît
contre lui le ciel et la terre.
Steinbock répondit '' qu'il ne s'étoit pçfçté à ces e^ tré-
** mités que pour apprendre aux ennemis du roi son ms^r^
" kae plus faire une gueire de barbare^, et à respecter le
'' <iroit des gens : qu'ils avoient rempli la Poméranie de leurs
** cruautés, dévasté cette belk p^oviujce» et v^nd^ près 4^
** cent mille habitant aqx '3^wcs{; que ks fl^inlieaux q^i
" avoknt mis Altepa.en cendresy it^^ut les représaiilcii^des
'< boulets rouges par les quels Stpd^ s^voit éiie con^Hmée»^' -,
C'étoit avise cette fureur que Jes.Suéxiuis e| kurs eiw^
■lis se faisoknt la gutrc^ : si CiKirles XII av<Mt paru akri
ihns la Poméranie, il e«t à croire qu'il eût.pu reeoavrèr sa
première fortune. Sea m^^i i^vm^'éWgjt^étSté^ i9a»|M^
scDce^ élAkAtfenfiO|P^.Wii|é«s.d4^#o».f4^;i.i^ir4>ltoce
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ftlù HISTOIRE DE CHARLES XII. ttv. vit.
«lu chef est tmgours dangereuse aux affaires, et etnpèehe
qu'on ne profile des victoires. Steinbock perdit par les dé-
tails ce qu'il avoit gagné pa!r des actions signalées, qui en
un autre temps auroient été décisives.
Tout vainqueur qu'il étoit, il ne put empêcher lès Mos-
covites, les Saxons et les Danois, de se réunir; On lui en-
Jeva des quartiers ; il petKlît du monde dans plusieurs escar-
mouches : deux mille hommes de ses troupes scl noyèrent
en passant i'Eider, pour aller hiverner dans le Holsteîn;
tontes ces pertes étoient sans ressource dans un pays« où il
étoit entouré de tous côtés d'ennemis puissans.
Le Holsteîn avoit alors pour souverain le jeune duc
Frédéric, âgé de douze ans, neveu du roi de Suéde, et f3s
du duc qui avok été tué à la bataille de Clissau : f évèque
de Lubeck, son oncle, gouvernoit sous le nom d'administra-
teur ce pays malheureux, que ses souverains n'ont presque
jamais possédé paisiblement. L'évêque, qui craignoit pour
les états de son pupille, voulut conserver en apparence ht
neutralité ; mais il lui étoit impossible de rester neutre ent/e
Farmée du roi de Suéde, dont le duc de Holstein ponvoit
être l'héritier, et les armées des idllés prêtes à envahir cet
état.
Le comte de Steinbock, pressé par les é^memts, et ne
pouvant plus conserver sa petite armée, sémma Févêque-
administrateur de permettre qu'elle fût repue dans la forte-
resse dé Tonmngue. L'évêque se ti'euva rèduR, on à perdre
entièrement Farmée du rot, ou, s'il la sauvôtt» à attirer sur
le Holstein la vengeance du Danemarck;
n eut recours à. la fineise, ressource dangereuse des
ioifales: il ordonna au colonel Volf» comnianâa&t de Tdn-
niague, de' recevoir les troupes suédobet <fauis la pkce.
Mais en même tiemps il exigea de ee oottUMUMfant qu'il né
parlât jamaîr de cet m-dre: el Stembock de son côté fit
seméM de tenir la négociation secrète.
Il h|tt«|r4|aeLV^ pitt siv M defeoeteirVaiaée dm» st
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hiv. vu. ROI DE SUEDE. 411
place» comme de sa propre autorité» et de paroitre ii^dele'
aux ordres de son souverain. Tout cet artifice ne tourna
qu^au malheur du duc, du pays et de Steinbock. Le c«nv
le roi de Danemarck, le roi de Fivàse, bloquèrent Ton-
ningue : les provisions, qui dévoient venir à la petite ann^e,
manquèrent par la fatalité qui a toiyours ruiné dans cette
guerre les af^es de la Suéde.
Enfin Steinbock fut obligé de se rendre prisonnier du
roi de Danemarck avec ses troupes le 17 mars 17 13. Ainsi
lut dissipée sans retour cette armée qui avoit gagné le&deux
célèbres batailles d'Helsinbourg et de Gadebuscb» sons un
général dont on avoit conçu les plus grandes espérances ; et
le roi de Danemarck eut la satisfaction de tenir entre ses
mains celui qui avoit arrêté tous ses progrès, et qui avoit
mis sa ville d'Altena en cendres : Steinbock, en sortant de
Tonningue, assura le roi de Danemarck qu'il n'y étoit entré
que par stratagème, et qu'il avoit trompé le commandant.
Cet officier le jura de même, et auna mieux subir la honte
d'avoir été surpris.que de divulguer le secret de son maître.
Le duc de Holstein et révèque^administtateur protestè-
rent qu'ils avoient conservé la neutralité : ib implorèrent la
médiation du roi de Prusse et de l'électeur de Hanovre.
Toute cette politique, n'étant point soutenue par la force,
n'empêcha pas que le roi de Danemarck n'assiégeât Volf *
dans Tonningue, quelque temps après, avec ses troupes et
celles du czar. Ce commandant se rendit comme Steinbock»
et avoua enfin le secret dont les Danois ne se doutoient que
trop.
Ce fi^ un prétexte au hm de Danemarck pour* s'emparer
des états du duc de Holstein» dont on ne lui a rendu encore
aujourd'hui qn'iwe partie. Cfi même roi de Danemarck^
^i ravissoit sans scrupule le dudié de Holstein, avoit ce^
pendant la générosM de traiter Steinbock avec coosidérar
tioii» et faisoit voir que les rob sont souvent, plus Ofcupé^
de leurs inij^rêts que de leur vengeance, tt. laissa Vmwr
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t\Ji HISTOIltE DE CWARLÈS Xll. tiv. Vit.
dittiré d^Attena Wyré dans Copentiagâe» ^ sa péttiAt^ et
MetÙ #B Fdccabltfi* cle boiw h*âfitemeiir, jdsticJ% ce <|tlè
Sïèittbfoek, *yftW tonltt s^évadfct, eûMe ntefticnr Mtm-â»^
ffté, cl d*êlt« cbntamcu d'^voïf immqoé à sa parole. Alort
îf fut étroHettietit resserré et réduit à demander gnice au roi
de Dawértafck, quf !a kri accorda.
La Poméranie sans défense, à la réserve de SlTalsuad,
de rîsfe dte Riigcn, ^l cte fjtkel^es KetHt drcotmjfeius, devînt
la proie des alliés : elle lut aéqucstifée entre les mains du roi
dî; Prbsse. Les états de Brème lurent remplis de garnisons
danoises. An même temps les moscovites inoâdoient la
Plolande et y battotent les Suédois; que la confiance aban-
donnott, et qui, étant inférieurs en nombre, éommençôlent
h tfavoir plus sur leurs ennemis aguerris la supériorité de
ftkvalenr.
Pour aclrever les malheurs de la Suéde, son roi s^ob-
stiuoTt à rester à Démotica et se repàissoit encore de Tes-
pérance de ce secours turc^ sur lequel il ne devoit plus
compter.
Ibrahim Molla, ce visir si fier, qui s'ôbsllndît à la guerre
contre les Moscovites, maljgfré lesi^ues db: fbvori, fut étitm^^
entre deux port^. La place de vish- étoit devenue si dan-
gereuse que personne n'osoiit Tocctipcr: elle demeura va-
catite pendant six mois. Enfm le favori AH Coumourgi prit
le titre de grand visir. Alors toutes les- espérances du roi
de Suéde tombèrent, ircormoissoit Coumourgi d'autant
niieux qu'il en avôît été servi, qUatid'lesiîitéièb de ce favori
8*accordoient avec les siens..
If avoit été onze mdis à Béhiotîta enseveli dans fmac-
tion et dans l'onblr: <^ëtte oisiveté extrême s/âccédaAt tout
à c<btip aux plus violens exercises, hii avoit doniié enfin la
maladie qu'il feignoit. On le croyoit mort dans toute l'Eu-
rope. ^Le conseil de régence qu'il avmt établi à Stockbohiii
quantf4l pattit de sa capitale; u'éntendoitplns parler deittk
îe sénat viut eîi corps suppHer fa priucessc Uiric^è Eiééiioiei
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MV. VU. ROI DE Si[£D£. 51?
sœur du roi, de se chaîner de la régence, j|>ç9daDt cette
longue absence de son frère : elle l'accepta ; maû^ quand
elle vit que le sénat vouloit Tobliger à faire la paix avec le
czar et le roi de Danemarck, qui attaquoient la Suéde de
tous côtés, cette princesse jugeant bien que son frère ne
ratifieroit jamais la paix, se démit de la régence^ et envoya,
en Turquie un long detajl de cette affaire.
{^ roi reçut le paquet de sa ^ceur à Démotica. Le
deupotisme qu'il avoit sucé en.nâisj^afit, lui faisoit oublier
qu'autrefois la Suéde avoit été -libre, et que le sénat gou-
vemoit anciennement le royaume coiyoiptement avec les
lroi3.
Il ne regardoit ce corps que comme une troupe de
donieêtiques, qui vouloient commande^ dans la maison en
l'absence du maître; il leur écrivit que, s'ils prétendoient
gouverner^ il leur enver^oit une de ses bottes, et que ce
seroit d'elle qu'il faudroit qu'ils prissent les ordres.
Pour prévenir donc ces prétendus attentats eu Suéde
CQBtre son autorité, et pour défendre enfin son pays, n'es-
pérant plus rien de la Porte ottomane, et ne comptant plus
que sur lui seul, il fit signifier au grand visir quil souhaitait
partir et s'en retourner par l'i^llepiagnc.
M: Désaleurs, ambassadeur de France, qui s*étoit chargé
des affaires de la Suéde, lit la deniande de sa part. '< Hé
** bien ! dit le visir au comte Désa^ujrs, ^l'avois-je ^as bien
V dit que Tannée ne se passeroit pas sans que Ifi roi de Suéde
'* demandât à partir? Dites-lui qu'il est à son choix de s'en
<* aller ou 4e demeurer ; mais qu'il se détermine bien, et
*<.quil fixe le jour de son départ, afin qu'il ne nous jette
«« pas une seconde fois dans Tombarras de Bender."
Le comte Désaleurs adoucit au roi la dureté de ces pa-
roles. Le jour fut chqisi, mais Charles, avant que de quitter
la Turquie, voulut étaler la pompe d'un grand roi, qiioique
dao^ la juisere d'un fugitif: il donna à Grotbusen le titre
d'ambassadeur extraordinaire, et l'envoya prendre congé
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414 HISTOIRE DE CHARLES XIL uv. vir.
dans lés formes à Constantinople, suivi de qualre-Tiogts
personnes, toutes superbement vêtues. Les ressorts secreis
qu'il fallut faire jouer pour amasser de quoi fournir à cette
dépense, étoient plus humilianS que l'ambassade n'étoit pom-
peuse.
M. Désaleurs prêta au roi quarante mille é<^s ; Gro-
thusen avoit des agens à Constantinople qui emprunteteht
en son nom à cinquante pour cent d'intérêt, mille écus d'oo
Juif, deux cents pistoles d'un marchand anglbis, mille fraocs
d^un Turc. On amassa ainsi de quoi jouer en présence da
divan la brillaiite comédie de l'ambassade suédoise. Gro-
thusen reçut à Constantinople tous les honneurs que la
Porte fait aux ambassadeurs extraordinaires des rob lé jour
de leur audience : le but de tout ce fracas étoit d'obtenir
de l'argent du grand visir ; mais ce ministre fut inexorable.
Grothusen proposa d'emprunter un million de ht Forte.
Le visir répliqua sèchement que son maître savoit donner
quand il voutoit, et qu'il étoit au-dessous de sa dignité de
prêter ; qu'on foumiroit au roi abondamment ce qui étoit
nécessaire pour son voyage' d'une manière digne de celai
qui le renvoyoit ; que peut-être même la Porte lin feroît
quelque présent en or non monnoyé ; mais qu'on n'y devoft
pas compter.
Enfin le premier octobre 171 4, le roi de Suéde se uût
en route pour quitter Ja Turquie. Un capîgî pacha, avec
six chiaoux, le vinrent prendre au château de Demirtasb,
où ce prince demeuroit depuis quelqw^ jours : il lui pré-
senta de la part du grand seigneur une large tente d'écariate
brodée d'or, un sabre avec une poignée garme de pierreries,
et huit chevaux arabes d'une beauté parfaite, avec des sdles
superbes, dont les étriers étoient d'argent massif. ' ,
Il n'est pas indigne de l'histoire de dire qu'un écuycr
arabe, qui avoit soin de ces chevaux, donna au roi leàr
généalogie ; c*est un usage étebli depuis long-temps chez
ces peuples, qui semblent faire beaucoup plus d'attention
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Ltr.vn. ttôt DE SUEDE. nâ
à kl ttoblcMe des chevaux qu'à celle des bommes, ce qui
peut-être n'est pas si dérabonnable» puisque chez les ani-
maux les races dont on a soin, ef qui sont sans mélange,
ne dégénèrent jamais.
Soixante chariots chargés de toutes sortes de provbions^
et trms cents chevaux formoient le convoi. Le capigi pa-
dia, sachant que plusieurs Turcs avoient prêté de Fargent
«nx gens de k suite du roi, à un gros intérêt, lui dit que
Fusure étant contraire à la loi mahométane, il snpphoit sa
miyesté de liquider toutes ses dettes, et d'ordonner au rési-
dent qu'il laisseroit à, Constantinople, de ne payer que le
4;apital. ** Non, dit le roi, si mes domestiques ont donné
« des billets de cent écus, je veux les pajer quand ils n'en
** aaroiimt reçu que dix.''
Il fit proposer aux créanciers de le suivre, avecFassurance
d'être pa^fés de leurs frais et de leurs dettes. Plusieurs entre*
prirent le voyage 4e Suéde» et Grothusen eut som qu'ils
lussent payés.
Les Turcs, afin de montrer plus de déférence pour leur
hôte, le faisoient voyager à très petites journées ; mais cette
lenteur respectueuse gênoit FinpatitMiGe du roi. Il se levdt^
dans la route à trois heures du matin, selon sa coutume.
Dès qu*il étoît habillé, il éveiHott lui-même le oipigi et les
chiaoux, «t ordcmnoit la marche au milieu de la nuit noire :
la gravité turque étoit dérangée par cette manière nouvelle
de voyager; mais le roi prenoit plaisir à leur embarras, et
disoit qu'il se vengeoit un peu de l'affaire de Bender.
Tandis qvTû gagnoit les frontières des Turts» Stanislas
en sortoit par un autre chemin, et nlloit se retirer en Alle-
magne, dans le duché de Deux-Ponts, province qui confine
au palatmat du Rhin et à l'Alsace, et qui appartenoit aux
rob de Suéde, depuis que Charles X, successeur de Christine,
avmt joint cet héritage à la couronne, dmrles assigna à
Stanislas le revenu de ce duché, estimé alors environ soixante
et dix mille écus : re fut là qu'aboutirent pour lors tant de
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!tt6 HISTOIRE PE CHARUS XII. w. m
projets, tant de gnerr^i, tant d'espémaees. Sto«i8tii»i»U{
leît et aurok j>u faire un traité ai^at^ts^evx ^v^^Uméi^
gmtfi ; mais rincUmiptable opmàU^età (k Cbark» XU Itti il
perdre ses terres et ses biens réels en Poio^ae, p^itf U OKH^
^■rvtr k titie de roi
C^ {^Hiee resUi dans le dMcb4 de DeuxrFoaU» i^9qn% h
«MMt.de t^arl^i aW» f^tle proviace riet^uniant km^rlmi»
de la mw0n piMim, û /«boisit sa retraite à VejsseivtkotKii^
dans l^Alsace frjM»$#ise. M. $«im, eoM^yé du i^iAuiMfil^
en ponta «as piaînies au duc d'Orléans» i^gaot de FesMi
%e diic d'Odé^SMs «^oodit à M. &»m «es parties riM9arfMa-
Wm : '' MQ p fli e» r, maAdaa auroi votce maître fue la fiaw»
*' a làitjowrs été l'^le deitob mal^imy».''
Le roi de Suéde, étant arrivé suriiea floci&w dei'A^^
aaac«wf» afipiit qiw remp^ieaf 4iv«it; laodftaai.^n^ k v^
daw. toiles ks tefffepjile^ii^n obéisiaoce anee ^lae mgsiB'
censé eoaveoable.. Les vilhs et ba idUages oA les «are*
chaux-des-logis avoient par avance marqué sa route, iMffA
des préparatife po«ur le recevoir ; Uu» ces peuples atfeadeiait
aMrec tmpatieiMe de v&ir passer cet houoie eftlMuordinaim»
^tot Jes «t^letoiaes et les maUie«r$^ ks aieipdres acl^ns etls
rtpoa néine, avoieat iait tant .de i>ruit en Ear^pe et co
Asie* Mais Cbiuiea n'avoitauUe envie d'osawyer toate^eett»
pompe, ni de nioatrer eu spectacle te prisonnier de Bcackr;
il avott résoUi même de oe .jamais rentrer dans Stockbolia,
^'il n'eût auparavant réparé ses raalbemis par une aneiUeitf*
fortune. (
Quand il lot à Targowits, sur lé» lro«tierés de la Tran-
silvanie, apr^ avoir congétiié son escorte tim|»e, il asNMU*
n suite dans une grange : il leur dit à tous de ne ae.M^
point en p^ioe de sa personne, et de se trouver le ft^
qu'ils pourroient à Stralsund en PoméraDie» sur le èald de
la nier Baltique, environ à trois cents lieues de l'eadroit ei
Ss étoient.
il ne prit ^avec lui que ïhumg, et quitta tonli saivill
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Uv, vu. HOI DE SUEbE. ' 2lf
^tenietit, la laissaQi daiis rétonnement, dffiis fa crainte et
dans îa tristesse. Il prit «ne perruque noire pour àe déguiser;
car fl porloit toujours ses clieveux : luit un tehape^ bordé
d*t>r-, avec un babit gris d'épine, et Un intôteau bleu : prit
!e nom d un officier allemand, et courut la poste à cheval^
avec son compagnon de voyage.
Il évita dans sa route, autant qu'il le put, les tetres de
ses ennemis déclarés et secretâ, prit son chetnin par la Hon-
grie, la Moravie, rAutriche> la Bavière, le Virlemberg, le
Palatinat, la Yestphalre et le Meckienbourg ; ainsi il fit
presqtre le tour de rAllemagne, et alongea son chemin de
kl moitié. A la fin de la première journée, après avoir
coum sans telàche, le jeune During, quj n'étoit pas endurci
à ces fatigues excessives comme le roi de Suéde, s'évanouit
en descendant de cheval. Le roi, qui ne vouloit pas s'ar-
rêter un moment sur la route, demanda à During, quand '
celui-ci fut revenu à lui, eombien il al^oii d^argent : During
ayatit répondu qu'il avoit environ mille écus en or : " Donne-
*• m'en la moitié, dit le roi ; je Vois bren que tu n'es pas en
•' état de ftie suivre ; j'achèterai la roûtè tout seul." During
le supplia de daigner se reposer dû moiùs trois heures»
l'assurant qu'au bout de ce temps il seroit en état de re-
monter à cheval, et de suivre sa majesté ; il le conjura de
penser à tous les risques qu'il alloit courir. Le roi inexorable
se fit donner les cinq cents éèus, et demanda des chevaux, '
Alors During effrayé de la résolution du roi, s'avisa d'un
stratagème innocent : il tira à part le maUre de la poste, et
lui montrant le roi de Suéde : Cet homme, lui dit-ll, estinon
cousinj nous voyageons ensemble pour la même affaire ; il
vort que je suis malade, et ne veut pas seulement m'atténdre -
trois heures ; donnez-lui, je vous prie, le plus méchant che-
val de votre écurie, et cherchez-moi quelque chaise ou
quelque chariot de poste.
It ràtl^deux ducats dans la main du maître de la poste,
qui ââtti^ exactement à toutes ses demandes. On donna
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218 HISTOIRE DE CHARLfiS XII. liv.vil
au roi un cheval rétif et boiteux : ce monarque partit «eui,
à dix heures du soir, dans cet équipage, au milieu d'une nuit
noire, avec le vent, la neige et la pkiie. Son compagnon
de voyage, après avoir dormi quelques heures, se rail en
route dans un chariot trainé par de forts chevaux. A quelques
milles, il rencontra au point du jour le roi de Suéde, qui
ne pouvant plus faire marcher sa montiire, s'en alloit de son
pied gagner la poste prochaine.
11 fut forcé de se mettre sur le chs^riot deDnring; il
dormit sur de la paille : ensuite ils continuèrent leur route,
courant à cheval le jour, et dormant sur une charrette la
nuit, sans s'arrêter en aucwi lieu.
Après seize jours de course, non sans danger d'être ar-
rêtés plus d'une fois, ils arrivèrent ënfiu, le 21 novembre
de Tannée 17.14, aux portes de la ville de Stralsund à une
heure après minuit
Le roi cria à la sentinelle qu'il étoit un courier dépêché
de Turquie par le roi de Suéde, qu'il f alloit qu'on le fît
parler dans le moment au général Ducker, gouverneur de
la place. La sentinelle répondit qu'il étoit tard, que le
gouverneur étoit couché, et qu'il falloit attendre le point
du jour.
Le roi répliqua qu'il venoit pour des affaires importanteir
et leur déclara que s'ils n'alloient pas réveiller le gouverneur
sans délai, ils seroient tous punis le lendemain matin. Un
sergent alla enfin réveiller le gouverneur. Ducker s'ima-
gina que c'étoit peut-être un des généraux du roi de Sucdc^
on fît ouvrir les portes ; on introduisit ce courier dans sa
cliambre..
Ducker. à moitié endormi, lui demanda des nouvelle»
du roi de Suéde ; le roi le prenant par le bras : Eh furi'
dit-il, Ducher^ mes plusjldeles sujets m'ont-Us aubUéî, 1*
général reconnut le roi ; il ne pouvoit croire ses ycui ' "
se jette en bas du Ut, embrasse les genoux de son nrfto»
•n versant des larmes de joie. La nouvelle en lut répw**
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Liv.vii. ROIDE SUEPE. 21^
àTinsiant daas. la ^Hle.; tout }e monde de feta: içs soldas
vinrent entourer la inaisiQn du . gouverneur. Les rues se
remplirent d'habitans, qui se demafidoieMt les uns aux au-
tres : Estnl vrai que le roi eef ici? On fit des iltuiuinations
à toutes les fenêtres ;' le vin coula tlans les mes à la lumière
de mille flambeaux, et au bruit de Tarlillerie.
Cependant on mena Je roi auJit^f il y a voit seize jours
qu'il ne s'étoit couché; il fallut eo^ip^r ses bottes sur ^es
jambes, qui j s'étoient enflées par rej^trériite fatigue. > 11 n'^
voit ni linge, ni habit : on lui; fit une g^rderobe en l^te
de ce qu'on put trouver de plus, convenable dans la ville.
Quaod il eut doràii quelques, heures, il ne se leva qi^e pour
aller faire la revue de ses troupes, et visitpr les fortifications.
Le ijour meme> il^ envoya partout ses ordres pour recom-
mencer une guerre plus vive que jamais qdntre tQUs ses
ennemis. Au reste toutes ces particularités,: si conformes
au caractère extraordinaire de Charles XII,- m'ont été con-
firmées par le comte de Croissy, ambassadeur auprès de ce
prince, après m'avoir été apprises par M. Fabrice. .
L'Europe chrétienne étoit dors dans un état bien diffé-
rent de ceint où elle étoit quand ChaHes la quitta en 1709.
La guerre, qui avoit si long-temps déchiré toute la partie
méridionale, c'est-à-dire l'Allemagne, FAngteterr^, la Hoir
lande, la France, l'Espagne, le Portugal et l'Italie, étoit
éteinte.' Cette paix générale avolt été produite par des
brouilleries particulières arrivées à la cour d'Angleterre.
Le comte d'Oxford^ ministre habile, et le lard Bolingbroke>
un des plus brillans génies, et Thomme le plus éloqiient de
son siècle, prévalurent contre le fameux <luc. dé Marlbo-
TOOgh, et engagèrent la reine Anne à faire la paix avec
Louis XIV. La France, n'ayant plus ^Angleterre pour eK-
oemie, força bientôt les autres puissances à sfaccommpder.
, Philippe V, petit-fils de.Louis XIV, commençoit àrégn^r
jRûsibJejnent mr les débris dé la monarchie espagnol»^.
L^eiçpereiiT d'AU^magne, devenu miallre de Njiples,«;d^iJfi
Digitizedby VjOOQIC
ââO . HISTOIRE DE (CHARLES XÎI. lit. vu.
Flandre, s'afffennîssoit dnns ses vastes états; L<Mm XI T
^'aspiroH plus qu'à acberer en paix sa longue carrière.
Anr^e, rehie d'Angleterre, étoit morte le 10 août tri4<»
liaïe de la moitié de sa nation pour ai^ir doimé ia paix à
liant d^états. Sbn frère Jacques ^tuart, prince^ malheureux^
exclus du trène presque en naissant, n'ayant point para
\ilors cri Angleterre, pour tester de recueillir une succ^sion
'^ue de nouvelles lois hii auroleht donnée, si son parti eât
prévalu, t^eorge I, électeur de Hanovue, lut reconnu uua*
Hin^emeut roi delà Grande Bretagne. Le tràne appartenoit à
eet élecfeU!',^ non en vert^i du sang, quoiqu'il descendit d'une
fttle de Jacqûesr premier, mais en vertu d'nn acte du parle-
iweni de là hation.
' ^George, appelé dans un âge avancé à gouverner uii
peuple dont il n^enténdoil^ point la langue, et chez qui toikt
lui étoit et lianger, ^e regardoit comme l'électear de Hanovre,
-plttl6t que cotnniè^e roi d'Angleterre'. .Totïte son ambition
étoit d'agrandir ses états d'Allemagne. Il repassoit presqtie
tous les ans la mer pour revoir des sujets dont il étoit adoré.
Au reste iLte plaisoU^ plus à vivre en homme privé qu'en
mailre: la pompe de la 'rbyamté é10it pour lui un lardean
pesant. Il vivoit avec un petit nombre d'anciens courtisans,
-qti'M admettdit à» sa familiarité. Ce n'étoit pas le r#i €ke
'h&urope' <jiii eût le plus d'éclat ; mais il étoit un de» fhta
sages, le seul qui, connût sur le trène les douceurs de la vie
privée et de l'amitié.
Tels 'étt)ient les pfinctpaux monarques, et telle étoît Jb
âtaatîan du niidi de l'Europe.
Les changémens arrivés dans le nord étoient d'âne aulne
^wafture. Ses n>» étoient en guerre, et se réumssoieot conte
•fe roi de Suéde.
' 'Auguste étoit depais long^temps remonté sur le trène et
FoK>gne, ^vec l'aide du czar^ et du'consentemoil de l'em»
plëtieiir d'A^evnagne, d'^Anne d'Angleterre, et des EM»-Gé-
méài\i%, 4Mi> tous garnis du traité d'AHrénatad,
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lit. m. ROI DE SUEDE. Q^i
Chari^ft XII iflif)Q6oit d<& lois, se désistereal de leui; garantie
<|ttand ii ne lut plus à craindre.
Miîs Aaguate ne jouissent p» d!iin pouvoir trein(|uille.
La république de Pologne, ea reprenant soai roi^ reprit
.bientôt ses craintes du pouvoir arbitraire ; cUe et oit en 9jtmisê
pour Tobliger à se conlormer aux paeta canventat contrat
sacré entre les peuples et les rois, et senabioil n'avoir ra{>-
pelé sou niaitre que pour lui déclarer )a g«erre« Dans les
coHimencemens de ees troubks oo n'entendoit pas prononcer
le nom de Stanislas: son parti seisbloit anéanti; et oa ne
se ressouvenoit en Pologne du roi de Suéde que comme d'tta
torrent qui avoit changé Te coiirs de toutes, choses: pour un
temps dans son passage.
Pultava et Tabsence de Charles XII, en insant lomber
Stanislas» avoient aussi entraîné la chute du duc de liolste^
neveu de Cliarles, qui venoit d'être dépouillé, de ses états
jpar le roi de Daneroarck. Le roi de Snefk avoit aimé
ieodrement le per«> il étoit ])énétffé et humilié des malkevs
du iiis ; <k pkis, n'ayant rien fait .en sa vie que pour Im
gloire^ la chute des souverains qu'il avoit faits ou rétabli^
lut pour lui aussi sensible que lapette de lan* de ptfovîaces.
Cétoit à qui aenricbîroit de ses pevtes : Fiédéric»Oui^
kuiraey depuis pe» roi de Prnsse» qui paroisaoit avoilf a«alaait
•d'indmatioo à Ja guerre^ qiK son père avoit éfeé padiqufe^
commença p%r se iaîre livrer Stetin, et une partie de la
Poméranie, sur laquelle il avoit éts droits pom; quatre cisiit
HÛlIie écua psrpés au rw de Danemarck et au czav«
George, éhecteur de Hanovre, devenu roî d^Angletarra^
zv^t aussi séquestré entre ses nmins ks éuttb^ de BrènM et
de Verden, que le roi de DaaQmarck lui avoit mb tn dépât
fmxr siHxaete mille pistoles. Ainsi on disposo^ des dé*
pouilles de CiiarlesXII, et ccu% qui les avmnt e» garde
devenoient par leurs intérêts des emienûs auss» dBBgereua
que ceux qui lea avoient prises.
Quant au czar^ il étoit sans doute k phia à erandre ;
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5^2 HISTOIRE DE CHARLES XII. hiv. vu.
ses micieiineft défaites, ses victoires, ses fautes même, sa
persévérance à s'instruire et à montrer à ses sujets ce qu'il
avoit^ppris, ses travaux continuek, en avoîent lait un grand
homme en tout genre. Déjà Riga étoit pris, laLivonie,
ringrie» le Carélie, la moitié de la Finlande, tant de pro-
vinces qu'avoient conquises les rob ancêtres de Charles,
étoient sous k joug moscovite.
Pierre AlexkAvits qui, vingt ans auparavant u'avoit pas
une barque dans la mer Baltique, se voyoit alors maUre de
cette mer, à la tète d'une flotte de trente grands vaisseaux
de ligne.
Un de ces vaisseaux avoit été construit de ses propres
mains ; il étoit le meilleur charpentier, le meilleur amiral,
le meilleur pilote du nord. 11 n'y avoit point de passage
difficile qu'il n'eût sondé lui-même, depuis le fond du golfe
de Bothnie jusqu'à l'océan, ayant joint le -travail d'un ma*
lelot aux expériences d'un philosophe et aux desseins d'un
empereur, et étant devenu amiral par degrés et à force de
Gloires, comme il avoit voulu parvenir au généralat sur
lerre.
. Tandis que le prince Gallitsin, général formé par lui,
et. i'un de ceux qui secondèrent le mieux ses entreprises,
ndievoit la conquête de la Finlande, prenoit la ville de Vasa,
A battoit les Suédois, cet empereur se nût en mer pour
aller conquérir Fisie d'Aland, située dans la met Baltique,
à douze lieues de Stockholm.
Il partit pour cette expédition au oommencement de
juillet 1714, pendant que soo rival Charles XII se tenoit
' dans son lit à Démotica. 11 s'en^sutjua au port de Cronslot,
qu'il avoit bâti depais 'quelques années à quatre milles de
Petersboorg. . Ce nouveau port, la flotte qu'il contenoit,
les officiers et les matelots qui la montoient, tout cela ét<Ht
jKiniOttvrage; et de quelque côté qu*il .jetàt les yeux, il ne
voyoit rien qu'il n'eût créé eu quelque sorte.
i-i lÀ:.ftofte iqsae se trouva le quinze juillet à la hau*
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tiv. VII. ROI DE SUEDE. 223
tcur d'Aland; elle étoit composée de trente vaisseaux de
ligne, de quatre-vingts galères, et de cent demi-galeres. Elle
portoit vingt mille soldats : l'amiral Apraxin la coramandoit ;
Tempereur moscovite- y servoit en qualité de contre-amiral.
La flotte suédoise vint le seize à sa rencontre, commandés
par le vice-amiral Erinchild ; eUe étoit moins forte des deux
tiers, cependant elle se battit pendant trois heures. Le
czar s'attacha au vaisseau d'Erinchild, et le prit après un
combat opiniâtre.
Le jour de la victoire il débarqua seize mille hommes
dans Aland, et ayant pris plusieurs soldats Suédois, qui n'a-
voient pu encore s'embarquer s)ir la flotte d'Erinchild, il les
amena prisonniers sur ses vaisseaux. 11 rentra dans son port
de Cronslot avec le grand vaisseau d'Erinchild, trois autres
de moindre grandeur, une frégate et six galères, dont il
s'étoit rendu maître dans ce combat.
De Cronslot il arriva dans le port de Petersbourg, suivi
de toute sa flotte victorieuse et des vaisseaux pris sur les
ennemis. 11 fut salué d'une triple décharge de cent cinquante
canons, après quoi il fit une entrée triomphale, qui le flatta
encore davantage que celle de Moscou, parce qu'il recevoit
ces honneurs dans sa ville favorite, en un lieu où dix ans
auparavant il ' n'y avoit pas une cabane, où il voyoit alors
irente^quatre mille cinq cents fuaisons ; enfin parce qu'il se
trouvoit non seulement à la tète d'une marine victorieuse,
mais de la première flotte russe qu'on eût jamais vue
dans la mer Baltique, et au milieu d'une nation à qui le nom
de flotte n'étoit pas même connu avant lui.
On observa à Petersbourg à-peu-près les mêmes céré-
monies qui avoient décoré le triomphe à Moscou. Le vice-
amiral suédois fut le principal ornement de ce triomphe
nouveau. Pierre Alexiowits y parut en qualité de contre-
amiral. Un boyard russe, nommé Romanodovysky, lequel
représentoit le czar dans les occasions solennelles, étoit assis
sur un trône, ayant à ses côtés douze sénateurs. Le contre-
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224 HISTOIRE D© eHARLES XII. liv. vu.
sunîraj^ Ivu pféseuta la içla^ion d^ sa victoire» et on le déclara
vic^-amiral, tu GOiisiclération de ses si^rvices: cérémonies
bizarre», iii^is uU^s» d^s uu pays où la subordination mili-
taire étoit un^ d^s nouveautés ci^e le czar avoit introduites.
L'empereur nioscovite enfin victorieux dscs Suédois sur
mer et sur terre, et ayaut af/lé à tes chasser d^ U Pologne,
y doniinoit à son tour.' 11 s'étoit rendu médiateur entre la
république et Auguste ; gloire aussi flatteuse peut-être que
d'y avoir fait un roi. Cet éclat, et toute la fortune de
Charles avoient passé au czar: il en jouissoit même plus
utilement que n'avoit fait sou rival : car il faisoit servir tou^
ses succès à l'avantage de sou pays. S'il prenoit une ville,
les principaux artisaiis alloient porter à Petersbourg leur in»
dustrie; il transportoit en Moscovie les manufactures^ les
arts, les sciences dts provinces conquises sur la Suéde ;^ ses
états s'enrichissoient par ses victoires, ce qui de tous, les con-
quéraus le rendoit le pl\is excusable.
La Suéde, au contraire, privée de presque toutes ses
provinces au-delà de k mer, n'avoit plus ni commerce, ni
axgent, ni crédit. Ses vieilles troupes si redoutables avoient
péri dans les bataiHès, ou de misère. Plus de cent mille
Suédois étoient esclaves dans les vastes états du czar, et
presque autant avoient été vendus aux Turcs et aux Tartares-.
L'espèce dliommes manquoit sensiblement : mais l'espéraBce
renaquit dès qu'on sut le roi à Stralsund,
Les impressions de respect et d'admiration pour loi
étoient encore si fortes dans l'esprit de ses sujets, que la
jeunesse des campagnes se présenta en foule pour s'encrer»
quoique les terres n'eussent pas assez de mcôns pouv les
«ïuUivei:^ ** x
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hir.yju. ROI DE SUEDE. f25
LIVRE fnJITIEMÉ.
ARCrMElfT
Çkivka marie Uprweesse «« sœur w prime de Heutk II eH aeetégé
damStraUMnd, et se eawoe en Suéde, Entregnse tUtbai'Qn 4e Gwtlh
son premier ministre. Projets ^une réconciliation at7C<? ie, ezar, eê
âkune descente en Angleten'e, Charles assiège . Frédêrickshail en
Norvège, Il est tué : son caractère, Gortz et décapité.
Le roi, au milieu de ces préparatifs, donna la sœur
qui lui . restoit, , Ulrique Eléonore, en mariage au prince
Frédéric de Hesse-Cassel.
La reine douairière, grand'mere de Charles XII et de
la princesse, âgée de quatre-vingts ans, fit les honneurs de
cette fête le 4 avril, 1715, dans le palais de Stockholm, et
mourut peu de temps après.
Ce mariage ne fut point honoré de la présence du roi ;
il resta dans Stralsund, occupé à achever les fortifications de
cette place importante, menacée par les rois de Danemarck
et de Prusse. Il déclara cependant son beau-frere géné-
ralissme de ses armées en Suéde. Ce prince avoit servi les
Etats-Généraux dans les guerres contre la France : il étoit re-
gardé comme un bon général; qualité qui n'avoit pas peu
contribué à lui faire épouser une sœur de Charles XII.
Les mauvais succès se suivoient alors aussi rapidement
qu'autrefois les victoires. Au mois de juin de celte année
1715, les troupes allemandes du roi d'Angleterre, et celles
de Danemarck, investirent la forte ville de Vismar; le»
Danois et les Saxons, réunis au nombre de trente-six mille,
marchèrent en même temps vers Stralsund, pour en former
le siège. Les rois de Danemarck et de Prusse coulèrent à
fond près de Stralsund cinq vaisseaux suédois. Le czar
éïoit alors sur là mer Baltique avec vhigt grands vaisseaux
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226 HISTOIRE DE CHARLES XII. liv. vin,
de guerre, et cent cinquante de transport, sur lesquels, il y
avoit trente mille hanimes. Ils inenapoit la Suéde d'une
descente ; tantôt il s'avançoit jusqu'à la côte d'Helsiubourg,
tantôt il se présentoit à la hauteur de Stockliolm. Toute la
Suéde étoit en amies sur les côtes, et n^attendoit que le
moment de cette invasion. Dans ce même temps ses troupes
de' terre chassoient de poste en poste les Suédois des places
«^i'tls pbssédôient encore dans la Finlandei vers le goUe de
Bothnie ; mais le czar ne poussa pas plus loin ses entreprises.
A l'embouchure de TOder, fleuve qui partage en deux
la Poméranie, et qui, après avoir coulé sous Stetin, tombe
dans la mer Baltique, est la petite isle d'Usedom : cette place
est très importante par sa situation, qui commande TOder à
droite et à gauche ; celui qui en est le ^naître Test aussi de
la navigation du fleuve. Le roi de Prusse avoit délogé les
Suédois de cette isle, et s'en étoit faisi, aussi bien que de
Stetin, qu'il gardoii en séquestre ; h touty disoit-il, pour Va-
motir de la paix. Les Suédois avoient repris l'isle d'Usé»
dom au mois de mai 1715. Ils y avoient deux forts; l'un
étoit le fort de la Suine sur la branche de l'Oder qui porte
ce nom ; l'autre, de plus de conséquence, étoit Peunamonder,
sur l'autre cours de la rivière. Le roi de Suéde u'avoit,
pour garder ces de«x forts et toute l'isle, que deux cents cin-
quante soldats poraéraniens, commandés par un vieil officier
suédois, nommé Kuze du Slerp, dont le nom mérite d'être
conservé.
Le roi de Prusse envoie le 4 août quinze cents hommes
dé pied, et huit cents dragons pour débarquer dans l'isle :
ils arrivent et mettent pied à terre sans opposition du côté
du fort de la Suine. Le commandant suédois leur aban-
donna ce fort comme le moins important; et ne pouvant
partager le peu qu'il avoit de monde, il se retira dans le
château de Peunamonder, avec sa petite troupe, résolu de
se défendre jusqu'à la dernière extrémité.
Il fallut donc l'assiéger dans les fozmes ;• on embarqut
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uv. viii. ROI DE SUEDE. ai7
pour cet effet de Fartillerie à Stetin : on renforce les troupes
prussiennes de mille fantassins et de quatre cents cavaliers.
Le dix-buit août on ouvre la tranchée en deux endroits, et la
place est vivement battue par le canon et par les mortiers.
Pendant le siège, un soldat suédois, cbargé en secret d'une
lettre de Charles XI f, trouva le moyen d'aborder dans Tisle,
et de s'introduire dans. Pennamonder: il rendit la lettre au
commandant; elle étoit conçue en ces termes:
" Ne faites aucun feu que quand les ennemis seront lau
" bord du fossé. Défendez- vous jusqu'à la dernière goutte
" de votre sang. Je vous recommande à votre bonne
" fortune. Charles."
Du SIerp ayant lu ce billet, résolut d'obéir et de mourir,
comme il lui étoit ordonné, pour le service de son maître.
Le vingt-deux, au point du jour, les ennemis donnèrent
Tassant: les assiégés n'ayant tiré que quand ils virent les
assiégeans au bord du fossé, en tuèrent un grand nombre ;
mab le fossé étoit comblé, la brèche large, le nombre des
assiégeans trop supérieur : on entra dans le château par deux
endroits à la fois ; le commandant ne songea alors qu'à vendre
chèrement sa vie, et à obéir à la lettre. Il abandonne les
brèches par où les ennemis entroient: il retranché près
d'un bastion sa petite troupe, qui a Taudace et la fidélité de
le suivre: il la place de façon qu'elle ne peut être entourée.
Les ennemis courent à lui étonnés de ce qu'il ne demande
point quartier. Il se bat pendant une heure entière, et après
avoir perdu la moitié de ses soldats, il est tué enfin avec son
lieutenant et son major. Alors cent soldats qui restoient avec
un seul officier, demandèrent la vie, et furent faits prison-
niers. On trouva dans la poche du conmiandant la lettre
de son maître qui fut portée au roi de Prusse.
Pendant que Charles perdoit l'isle d'Usedom, et les isles
voisines, qui furent bientôt prises, que Vismar étoit' près de
9e rendre, qu'il n'avoit plus de flotte, que la Suéde étoit
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-ns HISTOIRE DE CHARLES XII. lif. viij.
loenacée, il étiût dans la vUlis de Sirahuûd, et cette pbee
étoit déjà as&iégée par trente-six raille hommes.
StraUuud, ville devenue fameuse eu Europe pas le siège
qii'y soutînt le roi de Suéde, est la plus fonte place cb la
Poméraoie. Elle est bâtie enire l'a mer Baltique et le lac
de Frankeuy sur le détroit de G^ila ; ou n'y peut aniver
de terre que sur. une cliau^ée étroite,, d^ieodue par une
citadelle et par de& letraqcbemeBS qu'oji, croyoit inacces*
si blés. Elle a voit une garnison de près de neuf mille
hommes, et de plus, le roi de Suéde lui-même. Les roi9
de Dauemarck et de Prusse entreprirent ce siège avec une
armée de trçnte-six mille hommes, composée, de Prussiens,
de Danois et de Saxons.
L'honneur d'assiéger; Charles XJI étoit un motjl si pres-
sant, qu'on passa par-dessus tous les obstacles, et qu'on
ouvrit la tranchée la nuit djii 19 a« 20 octobre, de cette
année 1715.
Le roi de Suéde, dans le commencement du. siège, disoit
qu'il ne comprenoit pas comment^ une place sbien fortifiée,
et munie d'une garnison suffisante, pouvo^t ê^ire prise. C^
n'esjt pas que dans le cours de ses conquêtes passées il n'eût ^
pris plusieurs places, mais presque jamais par un siège régu^
lier: la terreur de ses armes avoit alors tout emporté;
d'ailleurs il ne jugeoit pas des autres par lui-même, et n'esti-
moit pas assez ses ennemis. Les assiégeans pressèrent leu»
ouvrages avec une activité et des efforts qui furent secondés
par un hasard très singulier. . w '
On sait que la ^ler Baltique n'a ni flux ni reflux» X.e rer
trancfrement qui couvroit la ville,. et qui étoit appuyé du
côté de l'occident à un marais impraticable, et du côté de
Fonent à la mer, sembloit hors' de toute insulte. Personne
ji'avoit fait attention que, lorsque les vents d'occideut souf*
floient avec quelque violence, ils refouloient les. eaux- de la
mer Baltique vers l'orient, et ne leur laissoient que trois
l^ieds de profondeur vers ce retranchenuent^ q^u'ou pùX, cru
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Ltv. VIII. ROI D£ SUSDE. 3889
bojrdé cl'uue xner iiupraticable. Un soldât s'étesri lamé
tomber du haut du retrsMicbçniient d9n& la. mer fut toaaé
de trouvck- ioud : il conçut que cette déoowieitte pouriiwt
faire- sa fortune ; il déserta et alla ajii qu^er du ocmét
dé Wukerbarth, général des troupes saxonnes». iotm»s 9fk
qu'où pou voit passer la mer à gué, et pénétrer satt»peiBe
au retrancbeuieut des Suédois. Le roi de Prussis ne t^rdli
pas. 4 profiter de l'a vis-
Le kodemam donc à minuit, le vent d'oeddent soiifflaiil
encore, le lieutenant-colonel Koppen entra dap» Teau, suivi
de dix-huit cents hommes: deux mille s'fivançoien^en ntême-
temps sur la chaussjée qui conduisoit à ce retranchement :
toute ràrtillerie des PruHsi^ns tiroit, et les Prussiens et les
Danois dounoient l'alarme d'un autre; côté.
Les Suédois se crurent sûrs de renverser ces deux iniU«
homtnes qu'ils vo^^oient venir si témérairement en apparence
sur la chaussée ; mais tout à coup Koppen, avec ses dix*
huit cents honuiies, entre dans le retranchement du côté de
■la nier. Les Suédois entourés et surfiris ne purent, résister :
lé poste fut enlevé après un grand carnage. Quelques Suédob ,
s'enfuirent vers la ville; les assiégeans les y poursuivirent:
^s entrèrent pèle-mèle avec les fuyards: deux officiers et
quatre soldats saxons étoieht déjà sur le pont-levis; mais on
eut le temps dé le lever : ils furen^ pris, et la ville fut sauvée
pour telle fois.
On trouva dans ces retranchemena vingt-quatre- canons,
que Ton tourna contre Stralsund. Le siège fut poussé avec
lopiniâtreté et la confiance que devoit donner ce premier suc-
cès. On cannona £t on bombarda la ville presque sans relâche.
Vis-à-vis Stralsund, dans la mer Baltique est l'isle de
Rugeo, qui sert .de rempart à cette plac^ et où la garnison
et les bourgeois auroient pu se retirer s'ils avoient en des .
barques pour les transporter. > Cette isle étoit d'une consé-
quence extrême pour Charles : il voyoit hi&a que si les
ennemis en étaient lea maîtres, il se troaveroit assiégé p'4r
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3S0 HISTOIRE DE CHARLES Xll. nv. viii.
terre et par mer, et qae» selon toutes les apparences, il seroit
réduit, ou à s'eusevdir sous les ruines de Stmlsund, ou à se
▼oir pôsonnier de ces mêmes ennemis qu il avoit si long-
temps méprisés, et auxquels il avoit imposé des lois si dures.
Cependant le malheureux état de ses affaires ne lui avoit
pas permis de mettre dans Rugeu une garnison suffisante.
Il n'y avok pas plus deux mille hommes de troupes.
Ses ennemis faisoient depub tr(Ms mois toutes les disposi-
tions nécessaires pour descendre dans cette isle, dont Tabord
est très difficile : enfin, ayant fait construire des barques, le
prince d'Anhalt, à l'aide d'un temps favorable, débarqua
dans Rugen, le 15 novembre, avec douze mille hommes.
Le roi, présent ^r-tout, étoit dans cette isle ; il avoit
joint ses deux mille soldats, qui étoient retranchés près d'un
petit port, à trois lieues de l'endroit où Tennemî avoit
abordé; il se met à leur tête, et marche au milieu de la
nuit dans un s^ence profond. Le prince d'Anhalt avoit déjà
retranché ses troupes, par une précaution qui sembloit
inutile. Les officiers qui commandoient sous lui ne s'atten-
doient pas d'être attaqués la nuit même, et croyoient
Charles Xll à Stralsund ; mais le prince d'Anhalt, qui savoit
de quoi Charles étoit capable, avoit fait creuser un fossé pro-
fond, bordé de chevaux de frise, et prenoit toutes ses sûre-
tés, comme s'il eût eu une armée supérieure en nombre à
combattre.
A deux heures du matin Charles arrive aux ennemis,
sans faire le moindre^ bruit. Ses soldats se disoient les uns
aux autres : Arrachez les chevaux de frise. Ces paroles
furent entendues des sentinelles : l'alarme est doimée aussitôt
dans. le camp; les ennemis se mettent sous les armes: le
roi ayant ôté les chevaux de frise, vit devant lui un large
fossé. Ah! dit-il, est-il possible? je ne vrty attendais /wrj.
Cette surprise ne le découragea point : il ne savoit pas com-
Ineii^de troupes étoient débarquées; ses ennemis ignoraient»
de leur côté, à quel petit nombre ils avoient affaire* L'ob--
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Liv. VIII. ROI DE SUEDE. 2Si
sciirité de la nuit sembloit favorable à Charles ; il prend son
parti sur le champ. 11 se jette daiis le fossé, accompagné
des plus hardis, et suivi en un instant xle tout le reste :
les chevaux de frise arrachés» la terre éboulée, les troncs
et les branches d'arbres qu'on put trouver, les soldats
tués par les coups de mousquet tirés au hasard» ser*
virent de fascines. Le roi, les généraux qu'il avoitavec lui, les
officiers et les soldats les plus^ iivtrépides, montent sur l'épaule
les uns des autres comme à un assaut : le combat s'engage
dans le camp ennemi.' L'impétuosité suédoise mit d'abord
le désordre parmi les Danois et les Prussiens; mais Le nom-
bre étoittrop inégal: les Suédois furent repoussés après un
quart d'heure de combat ; et repassèrent le fo>ssé. Le
prince d'Anhalt les poursuivit alors dans la plaine; il ne sa-
voit pas que daus ce moment c'étoit Charles XII lui-même
qui fuyoit devant lui. Ce roi malheureux rallia sa troupe
eu plein champ, et le combat recommença avec une opiniâ-
treté égale de part et d'autre. Grothusen, le favori du roi,
et le général Dardoff, tombèrent morts auprès de lui.
Charles en combattant passa sur le corps de ce dernier, qui
respiroit encore. During, qui l'avoit seul accompagné dans
s^n voyage de Turquie à Slralsund, fut tue à ses yeux.
Au milieu de cette mêlée, un lieutenant danois, dont je
n'ai jamais pu savoir le nom, reconnut Charles, et lui saisis-
sant d'une main son épée, et de l'autre le tirant avec force
par les cheveux: Rendez-vouSy aire, lui dit-il, ou je vous tue,
Charles avoit à sa ceinture un pistolet ; il le tira de sa main
gauche sur cet officier, qui en mourut le lendemain matin»
Le nom du roi Charles, qu'avoit prononcé ce Danois, attira
en un instant une foulé d'ennemis. Le roi fut entouré : il
reçut un coup dé fusil au-dessous de la mamelle gauche.
Le coup, qu'il appeloit une contusion, enfonçoit de deux
doigts. Le roi étoit à pied, et près d'être tué ou pris. Le
comte de Poniatowski combattoit en ce moment auprès de
^a personne. Il lui avoit sauvé la vie à Pultava, il eut le
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«2 HISTOIRE DE CHARtES XII. Lir. viii.
bonheur de la lui sauver encore dans ce combat de Rugen^
lit le remk à che^l.
Les Suédois se retirevent vers un endroit de l'isle nommé
Alteierre, où il y avoîl un fort dont ils étdent encore nraîtres.
De là le roi repassa à Stralsund, obligé d'abandonner les
braves troupes qui l'avotent si bien secondé dans cette^ntre-
prise : elles furent faites prisonmeres de guerre deux jours
«qpvès.
Paruii ces prisonniers se trouva ce n»ilbeureux régiment
françois, composé des débris de la bataille d'I^ochstet, qui
avoit passé au service du roi Auguste, et delà à celui du roi
de Suéde: la plupart des soldats furent incorporés dans un
nouveau régiment d'uu fiU du prinee d^Aiihalt, qui fut leur
quatrième maître. Celui qui commandoit dans Rugen ce
régiment errant, étoxt alons ce même comte de Villelongue,
qui avoit si généreusement exposé sa vie à Andrinople pour
* le service de Charles XIL II fut pris avec sa troupe, et ne
fut ensuite que très mal récompensé de tant de services, de
fatigues et de malheurs.
Le roi, après tous ces prodiges de valeur, qui ne servoient
qu'à affoiblir ses forces, renfermé dans Stralsund, et près â*j
être forcé, étoit tel qu'on l'avoit vu à Bender. Il ne i»'étoii^
noit de rien : le jour il faisoit faire des coupures et des re-
tranchemens derrière les murailles: la nuit il faisoit âes
sorties sur rennemi. Cependant Stralsund étoit Isattit en
brèche : les bombes pleuvoient sur les maisons, la moitié de
la ville étoit en cendres ; les bourgeois, loin de murmurer^
plehis d'admiiration pour leur maître, dont les fatigues, la
sobriété et le courage les étonnoient, étoient tons devenus
soldats^ sous lui. Ils Taccompagnoient dans toutes ses sorties ;
ils étoient poiu* lui une seconde garnison.
Un jour que le roi dictoit des lettres pour la Suéde à un
aeorétaire, une bombe tomba sur la maison, perça le toit, et
vint, éclater près de la daambre même du roi. . La moitié
d^ plamîher tomba ea pièces ; le cabinet, où le roi dictoit».
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1-iY. Ylii. ROI DE SUEDE. 253
étant pratiqué en partie dans une grosse muraille, ne souffrit
point de Tébranlement ; et par un bonheur étonnant, m^
des éclats qui sautoient en l'air n'entra dans ce cabinet^ dont
ht porte étoit ouverte. Au bruit de la bombe et au fracas
de la maison, qui sembloit tomber^ la plume échappa ùes
mains du secrétaire. Quj/ a-t-U donc, lui dit le roi d^un
atr tranquille ? pourquoi nùcrivez-vou» pas ? Celui-ci ne
put répondre que ces mots : " Eh î sire, la bombe V* EH
bienl reprit le roi, qu'a de commun h bombe avec la lettre
que je vous dicte ? continuez.
Il y avoit alors dans Stralsund un ambassadeur de France
enfermé avec le roi de Suéde. Cét©i^^ M. Colbert, comte
de Croissy, lieutenant-général des armées tfe France, ft'ere
du marquis de Torcy, célèbre ministre d^étât, et parent de
ce fameux Cplbeii, dont le nom doit être imnH>rteI en
France. Envoyer ^n liomme à la tranchée, ou en anibas-
sade auprès de Charles XII, c'étoit presque la même chose.
Le roi entretenoit Croissy des heures entières dans les en-
droits les plus exposés, pendant que le canon et les bombes
Soient du monde à eèté et derrière enx, sans que le roi
B'appercâlt du danger, ni que l'ambassadeur voulût \\3l\ faire
seulement soupçonner qu'il y avoit des endroit» plus con-
venables pour parler d^affaires. Ce rotnislre fit ce qu'il
put avant le siège, peur mélia^r un accctfamodefflent entre
les rois de Suéde et ée Prusse : mais celui-ci demandoii trop,
et Charles XPI ne voidoîl rien céder. Le comte de Croissy
n'eut donc dan» son ambassade d^autre satisfaction que eeMe
de jouir de la fàmitîarfté de cet bonmie siagutier. H eonehok
sourent auprès de lui, sur le même manteau^: il aveit, en
partageant se» dangers et ses fatigue», acquis- le dteit ék lui
parler avec liberté. Chartes encotirageoit eette hardiesse
dans ceux qi^ aiknoil ;' il disoit' quelquefois au eemle de
Croissy r Vhiif mahdieawms et rrge : Allons, disons un- peu
et mat de Cffar le» XH» C'est ce que eet atubassadeui! m'a
raconté.
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23* HISTOIRE DE CHARLES XH. liv. vin.
Croissy resta jusqu'au l6 décembre dans la viUe; et
enfin ayant obtenu des ennemis permission de sortir avec ^es
bagages, il prit congé du roi de Suéde, qu'il laissa an milieu
des ruines de Stralsund, avec une garnison dépérie des deux
tiers, résolu de soutenir un assaut.
En effet on en dopiia un deux jours après à Touvrage
à corne. Les ennemis s*en emparèrent deux fois et en furent
deux fois chassés. Le roi y combattit toujours parmi les
grenadiers. Enfin le nombre prévalut, les assiégeans ea
demeurèrent les maîtres. Charles resta encore deux jours
dans la ville, attendant à tout moment un assaut général.
Il s'arrêta le 1 9 jusqu'à minuit sur un petit ravelin, tout
ruiné par les bombes et par le canon: \e jour d'après, les
officiers principaux le conjurèrent de ne plus rester dans
une place qu'il n'étoit plus question de défendre; mais la
retraite étoit devenue aussi dangereuse que la place même.
La mer Baltique étoit couverte de vaisseaux moscovites et
danob. Ou n'avoit dans le port de Stralsund qu'une petite
barque à voiles et à rames. Tant de périls, qui reodoient
cette retraite glorieuse, y déterminèrent Charles. Il s'em-
barqua la nuit du 20 décembre 1715, ayec dix personnes
seulement. Il fallut casser la glace dont la mer étoit cou-
verte dans le port; ce travail pénible dura plusieurs heures
avant que la barque pût voguer librement. Les amiraux
ennemis avoient des ordres précis de ne point laisser sortir
Charles de Stralsund, et de le prendre mort ou vif. Heu-
reusement ils étoient sous le vent et ne purent l'aborder ; il
courut un danger encore plus grand en passant à la vue de
Fisle de Rugen, près d'un endroit nommé la Barbette^ où
les Danois avoient élevé une batterie de douze canons. Ils
tirèrent sur le roi : les. matelots faisoient force de voiles et
de rames pour s'éloigner; un coup de canon tusi deux
hommes à côté de Charles» up autre fracassa le mât de l«
barque. Au milieu de ces dangers, le roi arriva vers deux
de ses vabseaux qui croboient dans la mer Baltique: dès
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Liv. VIII. ÏIOI DE SUEDE. 235
le ieiidemain Stralsund se rendit ; la garnison lut faite pri-
soDiiiere de g^errey et Ctiarles aborda à Isted en Scanie,
et delà se rendit à Carelscroon, dans un état bien autre qne
quand il en partit, quinzj^ ans auparavant^ sur un vaisseau
de cent vingt canons, pour aller donner des lois au nord.
Si près de sa capitale, on s'attendoit qu'il la reverroit
après cette longue absence; mais son dessein n'étoit d'y
rentrer qu'après des victoires. 11 ne pouvoit se résoudre
d'ailleurs à revoir des peuples qui Tainioieut et qu'il étoit
forcé d'opprimer pour se défendre contre ses ennemis. Il
voulut seulement voir sa sœur: il lui dotma rendez-vous sur
le bord du lac Weter en Ostrogotliie ; il s'y rendit en poste,
suivi d'un seul domestique, et s'en retourna, après avoir
resté un jour avec elle.
De Carelscroon, o^ il séjourna l'hiver, il ordonna de
nouvelles levées d'hommes dans son royaume. Il croyoit
que tous ses sujets n'étoient nés que pour le suivre à la
guerre, et il les avoit accoutumés à le croire aussi. On
enrôloit des jeunes gens de quinze ans: il ne resta dans
plusieurs villages que des vieillards, des enfans et des femmes;
on voyoit même en beaucoup d'endroits les femmes seules
labourer la terre.
Il éloit encore plus difficile d'avoir une flotte. Pour y
suppléer, on donna des commissions à des armateurs, qui,
mo^^nnant des privilèges excessifs et ruineux pour le pays,
équipèrent quelques vaisseaux ; ces efforts étoient les der-
nières ressources de la Suéde. Pour siibvenir à tant de frais
il fallut prendre la substance des peuples. Il n'y eut pohit
d'extorsion que l'on n'inventât, sous le nom de taxe et d'im-
pôt. On fit la visite dans toutes les maisons, et on en tira
la moitié des provisions pour être mises dans les magasins
du roi; on acheta pour son compte tout le fer qui étoit
dans le royaume, que le gouvernement paya en billets, et
qu'il vendit en argent. Tous ceux qui portoient des habits
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ftSfl HISTOIRE DE OiARLES XII. ht. yhi.
•ù il eiifr<>il de la soie, qui aveient des perruques, et des
épées dorées, hireat taxés. On mit des impôts excessif» sur
ks cbeminées: le peuple, aecaUé de tant d'exactions, se
lût révolté sous touf autre roi; niais le paysan le plus niai*
heureux de la Suéde savoit que son ni^tre menoit ime vie
encore plus dure et plus Iri^le que lui ; ainsi tous se S9u-
œettoient saDS-raurmure, à des rigueurs que le roi enduroil
k premier^
Le danger public fit nt^ine oublier les misères paitîeo-
lieres : on s'attendoit à tout motaent à voiv les Moscovites,
les Danois, les Prussiens^ les Saxons, les.Angk>is même, de*
scendre en Suéde. Cette crainte étoit si bien fondée et si
forte, qtie ceux qui avoient de l'argent ou des. nieubitts pré-
cieux les enfouissoient dans la terre. En effet une flotte
angloise av^it déjà paru dan» la mer Baltique, sans qu'on
sût quels étoiçnt ses ordres: et le roi de Danemarck avoit
la parole du czar que les Moscovites joints aux Danois fon^
droient eA Suéde au printemps de 171Ç»
Ce fut une surprise extrême pour toute l'Europe, at*
tcntive à la fortune de Charles XII, quand, au lieu de dé*
lendre son paya nM»ae4 par tant de princes, il passa ea
Norvège au m'ois de mars 1716, avec vinjgt mille hommes.
Depuis Ânnibal, on n'avoit poiot encore vu de général
qui, ne pouvant se soutenir cliez lui-nîême contre ses en<
nemis, fût allé leur fake la pierre au cœur de leurs états.
Le prince de Hessc, sotk beau-irere, l'accompagna dans
eet^ expédition.
On ne peut aUer de Suéde en Norvège que. par des
défilés assez dangereux : et quand on les a passés, on ren*
eOBtre, de distance en distance, des fkiques d'eau que la
mer y forme entre des rochers; il falloit faire des ponts
chaque jour. Un petit nombre de Danois auroit pu arrêter
^armée suédoise ; mai& on n*avoit pas prévu cette invasion
umbite. L'Eui^ope fut encore plus étonnée que le czar d%-
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I.IT. Tin. ROI DE SUEDK. C57
meuràt Maquille au milîeu de ces événemem, "et ne ^t pas
luie descente en Suéde» coimne il en étoit convenu avec
•es alli^.
La rakon de cette inaction étoit un dessein des plu*
.grands, mais 'Cn même temps dés plus difficiles à exécuter»
qu'ait jamais formés t'ima^nation humaine.
Le baron Henri de Gortz, né eu Franconie, et baron
immédiat de l'empire, ayant rendu des services importans
«Il roi de Suéde pendant le s^onr de ce monarque à Ben*
der, éloit depuis devenu son favori et son premier ministre.
Jamais homme ne fut si souple et si audacieux à la fois^
9t plein de ressources dans les disgrâces, si vasie dans ses
desseins, ni si actif dans ses démarches : nul projet ne Tef-
frayoit, nul moyen ne lui coûtoit: il prodiguoit les dous,
les promesses, les sermens, la vérité ek le mensonge.
11 alloit de Suéde en France, en Angleterre, en Hollande,
^sayer lui-même les ressorts qu il vouiok faire jouer. Il etft
été capable d'ébranler i^urope ; et il en avott conçu l'idée.
Ce que son maitre étoit à La tête d'une armée, il 1 etoit dans
le cabinet ; aussi pnt4l sur Charles Xll tra ascendant qu'au-
cun ministre n'avoit eu avant lui.
Ce roi qui, à Vàge de vingt ans, n*avoit donné que des
ordres nu comte Piper, reeevoit alors des leçons du baron
de Oortz : d'autant plus soumis à ce ministre, que le mal^
heur le mettoit dans la nécessité d'écouter des conseils, et
que Gortz ne lui en donnoit que de conlorraes à son tovh
rage. 11 remarqua que de tant de princes réunis contre la
Suéde, George, électeur de Hanovre, roi d'Angletehre, étok
celui contre lequel Charles étoit le plus piqué, parcequt
e'étoit le seul que Charle» n'eût point offensé ; que George
étoit entré dans la querelle, sous prétexte de Fappaiser, et
«niquement pour garder Brème et Verden, auxquels il sem»
bloit n'avoir d^utre droit que de les avoir achetés à vît prix
du roi de Danemarek, à qui ils n'appartenoient pas.
H entrevit aussi, de Inmne heure, que le canr étok «e^
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t38 HISTOIRE DE CHARLES XII. Xiir.vut.
crètement mécontent des allié»; qui tous Favoieiit emjpèché
d'avoir un établissement dans l'empire id' Allemagne, où ce
monarque, , devenu trop dangereux, n'aspiroit qu'à mettre
le pied. Vismaf, la seule ville qui restât encore aux Suédois
sur les côtes d'Allemagne, venoit enfin de se rendre aux
Prussiens et aux Danois le 14 février 171 6. Ceux-ci ae
voulurent pas seulement souffrir que les troupes moscovites,
qui étoient dans le MecklenbOurg, parussent à ce siège.
De pareilles défiances, réitérées depuis deux ans, avoient
aliéné Fesprit du czar, et avoient peut-être empêché la ruine
de la Suéde. Il y a beaucoup d'exemples d'états alliés con-
quis par une seule puissance; et il y en a bien peu d'un
grand empire conquis par plusieurs alliés. Si leurs forces
réunies l'abattent, leurs divisions le releveut bientôt.
Dès Tannée 1714 le czar eût pu faire une descente ea
Suéde; mais soit qu'il ne s'accordât pas avec les rois de
Pologne» d'Angleterre, de Danemarck et de Prusse, alliés
justement jaloux, soit qu'il ne crût pas encore ses troupes
assez aguerries pour attaquer sur ses propres foyers cette
même nation, dont les seuls paysans avoient vaincu l'élite
des troupes danoises, il recula toujours cette entreprise.
Ce qui Tavoit arrêté encore étoit le besoin d'argent. Le
czar étoit un des plus puissans monarques du monde; mais
\m des moins riches : ses revenus^ ne montoient pas alor» à
plus de vingt-quatre millions de nos livres. 11 avoît décou-
vert des mines d'or, d'argent, de fer, de euîvre; mais le
profit en étoit 'encore incertain, et le travail ruineux. Il
itablissôit un grand commerce ; mais les commencemens ne
lui apportoient que des espérances. Ses provinces nouvelle-
meut conquises aiigmenloient sa puissance et sa gloire, sans
accroître encore ses revenus. Il ialloit du temps pour fer-
-mer les plaies de la Livonie, pays abondant, mais désolé par
quinze ans de guerre, par le fer, par le feu et par la conta-
gion, vide dliabitans, et qui étoit alors à charge à son vain-
•queur. Les flottes qu'il entretenait, les nouvelles jentrepriseï
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feiv.Yiii. ROI DE SUEDE. ^9
qu'il faisait tous les jours, épuisoient ses li&ances. li «voit
été réduit à la mauvaise ressource de hausser les monuoies ;
remède qui ne guérit jatfiais les uiaux d'un état^ et qui est
sur-tout préjudiciable à un pays qui reçoit des étrangers
plus de marchandises qu'il ne leur en fournit.
Voilà en partie les fonde mens sur lesquels Oortz bâtît le
dessein d^uiie révolution. Il osa proposer au roi de Suéde
d'acheter la paix de l'empereur moscovite à quelque prix
que ce pût être lui fanant envisager le czar irrité contre lei
rois, de Pologne et d'Angleterre ; et lui donnant à entendre
que Pierre Alexmwits et Charles XII réuqis, pourroient faire
trembler le reste de l'Europe.
Il n'y avoitpas moyen de faire la paix avec 2e czar, sans
céder une grande partie des provinces qui sont à l'orient et
«u nord de la mer Baltique ; mais il lui fit considérer qu'en
cédant ces provinces, que le czar possédoit déjà, et qu'on
ne ppuvoit reprendre, le roi pou^roit avoir la gloire de
remettre à la fois Stanislas sur le trône de Pologne, de re-
placer le fils de Jacques II sur celui d'Angleterre, et de
rétablir le duc de Holstein dans ses états.
Charles flatté de ces grandes idées, sans pourtant y
compter beaucoup, dotma carte blanche à son* ministre :
Gortz partit de Suéde muni d'un plein pouvoir, qui Fauto-,
rîsoit à tout sans restriction, et le rendoit plénipotentiaira
auprès de tous les princes avec qui il jugeroit à-propos de
négocier. Il fit d'abord sonder la cour de Moscou par le
iiH>yen d'un Ecossois nommé Areskins, premier médecin du
czar, dévoué au parti du prétendant, ainsi que fétoient
presque tous les Ecossois qui ne subsistoient pas des faveurs
de la cour de Londres.
Ce médecin fît valoir au prince Menzikoff l'importance
et la grandeur du projet, avec toute la vivacité d'un homme
'<]ui y étoit intéressé. Le prince Menzikoff goûta ces ouver-
tures ; le czar les approuva. Au lieu de descendre en Suéde,
«omise il en étoit convenu avec ses alli s, il fit Kvcruer ses
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t4ê HISTOIRE DE CHABLËS XIL Liy.viii.
é^oupêâ dam le Mecklettbourg, et il y vmt lui-même, sous
{yrétekte de tennikier les querelles qui commençoient à naHré
«Ati^ le duc de Meckleubourg et la noblesse de ce paya ;
fBUis poursuhritnt eti effet son desscm fttvon d'avoir une
principauté en AUenrragne, et comptant engager le duc de
Mèckienbourg à lui vendre sa souveraineté.
Les alliés furent irrités de celte démarche ; ils ne vou-
loient point d'un voisin si terrible, qui, ayant iwe fois des
terres enr Allettiagne, pourroit un jour s'en faire élire em*
pereur, et en opprimer les souverairis. Plus ils étoient ir-
rités, plus le 'gt^nâ projet du baron de Gortz s'avançoit vers
le succès. 11 négoctoit cependant avec tous les princes con^
fédérés, po^r mieux c»éber ses intrigues secrètes* Le czar
les amusoit tous aussi par des espérances. Charles XII ce*
pendant étoit en Nor\ege, avec son beau-frere le pr&ice de
Hesse, à la tète de vingt mille hohnmes ; la province n*éloit
gardée que par onze mil^ Danois, divisés en plusieurs corps,
que le roi et le prince de Hesse passèrent au fif de Kêpée.
CharleÀ avança jusqu'à Cbrislianiai capitale du royaume:
la fortune recomnicnçoit à lui devenir favorable dans ce coia
du monde ; mais jamais le roi ne prit assez de précautions
pour hiïre subsister des troupes. Une armée et une flotte
danoise approcftoi^nt pour défendre la Norvège: Charfes»
-qui manquoit de vivres, se retira en Suéde, attendant Tissuè
des vastes entreprises de son ministre.
Cet ouvrage demandoit un profond secret, et des pré-
paratifs immenses, deux choses assez incompatibles. Gorte
fit chercher jusque dans les mers de l'Asie un secours qui,
tout odieux qu'il parotssdil, n'en eût pas été moins utile
pour une descente en Ecosse, et qui du moins eût apporté
en Suéde de Fargent, des honmies et des vaisseaux.
Il y avoit long-femps que des pirates de toutes les natioiis,
et particulièrement des Anglois, avant fait entre eux iMe
association, infestoient les mers de f Europe et de T Amérique.
Poursuivis partout sans quartier, Hs îrenoient de se Ktirei
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Lit.viiK ROI D£ SUEDE. S4i
sur les c6t€â de Madagaicur^ fraude iale à l'orient de PAfrkiue.
Cétoîent des hommes désespérés, presque tous connus par
d(|s actions SMU<)Uelte» il ne manquLOÎt que de la justice pour
ètm héroï^pier. Ils chepdioiènt un prûice qui voulût les re^
çejNiîr ma% sa proteictiov ; mais les lois des nations leur fer*
moient tous les pdirts du monde.
Dè& qU'ils^surent que Charles XII étoit retourné en Suéde,
ils espévai eut que ee prince, passionné pour la guerre, obligé
do la f^Mie, et inanquant de flotte et de soldats, leur feroit
une bonne coniposilio»^ i^ lui envoyèrent un député^ qui
viniiei^ Eiifope sur un vsHsseau boHandois, et qui alla pro*
poser au baron de Gortz de les recevoir dans le port de
G^ttebl^niiift où iU> s*oKroient de se rendre avec soixante.
vaisMPUx cbacgés'de riohesses»
: Le bavoa jit agr4er au rpi la proposition: on envoya,
naiine Ti^nnée suivante deu?t gentilslM>unnes suédois, Tua
DfiUMmé Kroiustromr et l'autre Menda), pour con^mmer la.
néiifiGi^ioii avec cefieorsaires de. Madagascar.
On tjrouva dépuiS'Uai^cours^plus noble et plus important
dans le cardinal Albéroni ; puissant génie,^ qm à gouverné
r£spagnft asflea long4eiBpB pour sa gloire, et trop peu pour
la graodfaat de eet état.
; Il entm< awc ardeur dans le projet de mettre le fils de
Jsieqlies U sur le trône d'Angleterre. Cependant comme
îi ne vettoît que de mettre le pied dans le ministère, et qu'il
a¥0it rSapagne à ^ablir avant que de songer à bouleverser
d^aulires ro^umes, il sembloit qu'il ne pouvoity de plusieurs
.Mttéea, mettre la main à cette grande machine; giais en^
moiaa de deux ans on le vit changer la face de FEspagpef
luâ rendre son crédit dans r£urope, engager, à ce qu'on
prétèdd^ k^Ti»«s à attaquer l'empereur d'Allemagne, et
t^frter en< mâve temps^ d'éter ht régence de France au dw
dHDriéanf» et la couronne de la Grande-Bretagne au roi
l'f tant un seul homme est dwigereux» quand il est
M
t
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U^ HISTOIRE DE CBABLES XIL Ltr. Tin.
abaohi daos un puissant étal; et quil a de la grandeur cl ch
courage dans Fesprit
GortZy ayant ainsi dispersé à la eour de-Mosoovie et à
celle d'Espagne les premières étincelles de Pembrasemcat
qu'il méditoît, alla secrèten^ent en France, et. delà en Hol*
lande, où il vit les adbérens du prétendant.
Il s'informa plus particulièrement de leurs forces» da
nombre et de la dbpo&ttion des mécontens d'Angldcrref de
l'argent qu'ils pouvoient fournir, et des troupes qifik pou*
voient mettre sur pied. Les mécontens ne «kmandoicat
qu'un secours de dix mille hommes et hisoient envisager une
révolution sûre avec Taide de ces troupes*
Le comte de Gyllembourg, ambassadeur de Suéde en
Angleterre, instruit par le baron de Gorti, eut frfnsiean
conférences à Londres avec les principaux mécontens: H
les encouragea, et leur promit tout ce qu'ils vonlmrenL Li
parti du prétendant alla jusqu'à fournir des «cnaunes cob«
ôdérables, que Gortz toucha en Hollande : il négocim FacMt
de quelques vaisseaux, et ea acheta six en Bretagne avec
des armes de toute espèce.
Il envoya alors secrètement en Fnmce plusieun officient
entre autres le chevalier de Folard, qm, ayant fut trente
campagnes dans les années f rançoises, et y ayant fait peu
de fortimé, a voit été depuis peu^^Rrir ses services au roi de
Sued^, moins par des vues intéressées, que par le desôr dt
servir ^oûs«n roi qui-avoit^me réputation si étonnante.' Li'
chevalier de Folard espéroit d'ailleurs faire goAter à ce prince '
les nouMlIles idées qu'il avoit sur la guerre; iiuvoft étadié
toute sa vie cet art eu philosophe, et il a<lepuîs comnra*
niqdé ses^ découvertes au public dans a^s commentniet ior
Polybe. Ses vues durent -goiftfées de Chartes XH, qui loi»'
iiièiiie aivoit fait la guerre d'une maniei^ nouvelle tetq»
ne se baissait conduire en rien psrr ta coutume^ ii dcstÎMle
chéirakier de Folard à être uâ d^ {nitrumen*iâonta v^oMl
t
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XjrviTiif*' . ROr DE SUEDE. «43>
MîSffvin^^ans'Ia deseeiite'i préjetée en Edcuse. Ce géutii-
hotaiBié^ exécuta en France ks ordres secrets du liaron de
Gottsi Beauedàpid-ii^ckurs fraoçois, ub plus grand nom-
bret d^Irkuldeèi^e&irereiit <tans cette conjuration dHine e&pcce
neuvcUe, q^ï se tranoit^ en même-temps en Angleterre, en
FfSiice^ «B ' Mo8covk> et dont les^ branches s'étendoient
HKrèlemeftt 4'ùo bout de rfidrope à Kautre.
^iCesprépairatîfs ;él<Ment encore peu de chose pour, le
baiOià/dlï Gortzt; maisr^'étok beaucoup d'avoir commencée.
Lei point le plus impor^ty et sans lequel rien ne pouvoit :
rtelMJiîr^ît d'aebeveff la* pux entre le czar et Charles: il .
restoit beaucoup de di{^ultés à applanir. Le baron Oster-
matf» mîÉîstre -d'état e&Moscorie^ ne s'étoit point laissé eti-
trirfnit d*Ali€ird-aiiK vues. de Gortz ; il étoit aussi <îirconspect
que ltt{i9Û»8tt)ef de Ghiâ-l^étéit entreprenant Sa politique
leitt^etsneMwée^0iiloijt laisser' toc^inûcir; le génie impatient
fl^'Alutcé préteadoit recueillir imraédiatenient après avoir
Wttév ; Qstetmatt i^igùoit ipie. Tempereur son maître^
ébloui par L'écto de cett||r«ntrepri$e„ n'accoirdât à la Suéde
uae paix trop avantageuse; il retacdoitj.par ses longueurs et
]Àr sea obstaiïles, la conclusion de cette affaire.
. Héureusaaeat pour le baron de Gôrts^ le czar lui-même
nnt.en HoUande açi conmi^ncemeot^e 4^717^ Son dessein
éloîC de ^asid^ eiisttîte< en^ France : H iui mainquoit d'avoir vu
cette nation c^kbfe9.*qttieatdq»uis plus de c4nt ans censurée,
ettviée et Joùlée pur^temâes: voisin»; il vojuloit y satisfaire
ia.ciiri0flilâiAiatiabl6,de.vok,et <l'dpprend«'e) et exercer en
ittliMi4eiiips aapiriîtiqiie..
.'€tortc vit deux kÔM à la Haïe cet^wpereur: il avança
plus ^bris' ces deux œnféreoces, <]u'il nfeûtfait^en six mois
âvte 4n ptiDipolètiBa»es. Tout ^prenoît un tour favorable :
•«i*graiidt^deiKiii»fMioîs80iciitk)ouvèrt8 d'un secret impéné-
trable ^il se-flattok^ifte^l^uvopeiie les apprendroit que par
Yinécutàùn, •' H ne fMrloit cq)endant à là Haie que de paix :
il^M$t ha«Uiiie|kt4tafil vcNiloit regarder le roi d'Angleterre
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di4 HISTOIRE KE CHARtBS XII. Lnr.Tiat
coBloie le pacilieat««r du a^nîjfc; il |M»«oft nÊne €n IwpptL^
rencc la tenue (fou congrès^à Bb-ioisvndc, où /Ite-inléiW dt'
la Suéde et de s^ emeam àhkiioai èbnéémàêtiiAmitéh,^
Le premier qui déG<>utrà'ceyjntl%aes,liuié»iii«èidH>r^'
léans, régent de Fraece: H ami dta* «fjiioiis dnn» tmilec
l'Europe. Ce genre d'homm^sv éoàè IrMédef ^ést de iwmM'^
le secré\ de leurs amis, et qui subnste de'détatiôfisirt^«CNiV«M''
même de caiomnies, s'étojt teiieaoeitr iiM4li(^w#«^cv«éus
sdn gouvernement, que la mmliéde la natiofliwélièil dëvetUM^-
respion de l'autre. Le duc d'XMéaikts^ lié' -êv^ ïë tà^
d'Angleterre par des «igagemeiis personne^ lui dMkaw wi i ' -
les menées qui se trarooient contre laiî.
Dans le nl^me-tenips les HoUandois, qui' p wii rt i Bt dii>
ombrages de la conduite de (^rtiz, oommiuiî^vemni Immv
soupçons au ministre anglms. Gortz* et OyllenitMMngipoatii» .
skivoient leur dessein avec chaleur, lo^u^to fuMot» akrMr
tous deux» run à Deventer en Gueldre» el UaiiKtreilf £îOiidtès;i"
4 Comme Gyilemboui^, ambasiùideur de Smde, v^mt yMÊ^*
le droit des gens, tn consptraot ccmtpe k prince aiqpvètf 4li^
quel il étoit envoyé, on viote sans scrupule leJtièRie dioit ea
sa personne. Mais ou s'étonna que le» états^générunc^ pov
une complaisance inouïe pour le r#i: de Mngleleffre, flmènt
en prison lé baron de Oortz. Ib chargèrent «teie^le^ownie
de Welderen de l'interroger. Cetle^ formalité ne Iqtfqu^Éai
outrage de plus^^lequel devënatl imitile, ne twtfoacpi^'foiir
confusioné GorUt demanda au comte de Welderen^: *^ ftt^
'<ét(Mtconmidelui? Qi9h ménskàr.itéifmMiétt UMm é mé
** Hé bien, dit le baron de GortZf.'St vftef lat nntmêkmêéu
<< VOUS devez savejr qOe je n^ dii qiM ee ^ jeviOBUK/'
L'interrogatoire ne hilrguere.pooasépiiis loiaa t«i»i«É>aiBK
bassadeurs, mais partioutièaemedt le«ÉtifniSfd|^rMo niii^ Oi i *.
ministre d'Espagne. en AiBj^eltarié^ proteptanol'tog^
tentât conunis enveis leé persepweàîdeïGbMta^îde O ylho
bourg. Les HoUandbi^ éfeaitnfe smulatcnae} lîlA avoiciÉ mm\
seri|neBlvMéittn'dnâ>s«99é 4tt>mMÊUI^famiÊÊi
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^ rn^i fie.Siie4e,/)ni n'avoU. lâen niaolûné contre eux, ms^is
4ls i^^sspi^t dirçctemoBt^çontre les principes de cette liberté
jiv^eqme. qui a. attiré c|iez^^i»Ui^t d'étnl^gersy et qui a été
Je^oiideinfiat de leur grandçuri
A i'^rd du roi d'Aogleierre, il n'avoit rien fait que de
jusie eo arrêtant prisonnier un ennemi. Il fit pour sa jqs-
ftîfkatioa in^irimer les lettres du baron dis Gortz et du
«<;o{9te GyHembour^ trouvées dans les papiers du dernier.
Le roi de Siiede étoit alors dans la provmce de Scanie : ou
lui apporta. e^s letjtres imprimées, avec la nouvelle de Ten-
lèvement de ses deux ministres. Il demanda, en Souriant» si
oa n*avoit pas aussi imprimé les siennes. 11 ordonna aussî-
tol qu'oa arrêtait à Stockholm le résident anglois avec toute
ja fsumlle et se^ domestiques ; il défendit sa cour au résident
HoUandois» qu'il fit,|;arder à vue. Cepend^t il n^avoua ni
ne désavoua, le b^rpo de Gortz ;, trop fier pour nier une eti'
^ifcreprîse .^^ avoit approuvée, et trop sage pour convenir
^'un dessein évsenté presqiie dans sa naissance^ il se tint dans
Ua silence dé(^igneux avec l'Angleterre et la Hollande.
Le ezar prit tout un autre parti. Comme il n'étoit point
Aomniéy «niais obscuréraent impliqué dans les lettres de
,<a^Wmho\J^rg et de Gortz, il écrivit au roi d'Angleterre une
.ip9gû/^ Ic^e, pleine de coniplimens sur la conspiration et
/i4^siH:«lKe .4'Mne amitié sincère; le roi George reçut ces
.iproilestation» $ans les croire» ^t feignit de se laisser tromper.
Uae conspiration tramée par des particuliers, quand elle est
. idôeottverie» lest ^^léantie ; m.ais une conspiration de rois n'en
'4>i3CBid ji}<n <^; iv>^yel)es forces. Le czar arriva à Paris au
Aipis^jiie.iwai de krmême aimée 1717. H ue s'y, occupa pas
myqiieni^Bt'^à^Yoir les beautés de Tart et de.la jiature,- à
visiter les a/cadémies, les bibliotUeques publiques, les cabinets
4left cujdeii^x,. les maisons rQyales; il proposa au duc d'Or*
Jeans» régent de Frauce, un traité dout Tacceptation eût pu
.ttiettre le coinble à la grandeur moscovite. Son dessein
j^ii. de .-se F^unir avec. )e roi de Suéde, qui lui cédoit de
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24ff HISTOmE DE teHARLES XII. AlW. vïiir
grandes provinces, d'àtér eh^rehietit kiix Battôs Vtm^Hit
de la mer Baltique» d'affniblh* les Angloi^ par ude giièi^e
civile, et d'attirer à la'MoscovIe'totit le commerce 'eu hiord.
11 ne s'éloignoit pas même de' l'émettre le M ^tfnfTshts àùx
prises avec le roi Auguste/ afin que le feu étant allniké de
tous côtés il pût courir pciùr Tattiser ou pour rélemdre,
aclon qu'il y trouveroît ses avantages. * Dans ces wei 11
proposa au régent de France b médiation entre ISi^ ^liëdë lît
. la Moscovie, et de plus, une alliance offensive et défenSh^
avec ces couronnes et celle d'Espagne. "€3e traité, ^ià
paroissoit si naturel, si utile à ces nations, et qui m^tok
dans leurs mains la. balance de l'Europe, he'fàl cependant
pas accepté du duc d'Orléans; Il ptèfioit i^iféiël^ilte'nf dans
ce temps des engagemenïs tout contraires i 11 se liguât avec
l'empereur d'Allemagne et GeoVge roi d'Àtiglêterre.' La
raison d'état châiigeoit alors daris Ttispritdètôus les- princes,
au point que lé czar étoit prêt à se déclarer clôntre sxm. an-
cien allié le roi Auguste, et à' embrasser les quere^ed de
Charles, son mortel ennemi ; pendant que la Frante allok,
en faveur des Allemands et dfes Angloîs, faire Itt guerre au
petit-fils de Louis XIV, après l'avoît soutenu st long-tecnps
contre ces mêmes ennemis, aiix dépens de tant de trésors
et de sang. Tout ce que le c2ar obtint par ééi voies in-
directes, fut que lé régent ihterposât ses bon offices poor
l'élargissement du baron de Go'rtz et dn comte dé Gylleiii-
bourg. Il s'en retourna dans ses états àiafin déjuin, après
avoir donné à la France le spectacle rare &ûn em^^ereiur
qui voyageoit pour s'instruire; mais trop de François oc
virent en lui que lés dehors grossiers, qàe sa inauvatse édu-
cation lui avoit laissés, et le législateur, le créateur d'une
nation nouvelle, le grand bomâie, leur échappa.
Ce qu'il chercboit dans le duc d^Orléàn», il le trouva
bientôt dans le cardinal Albéronî, devenu tout puissant en
Espagne. Albéroni ne souhattoit rien tant que le rétabUsae-
ment du prétendant, et comme ministre de l'Espagne, <|a€
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Liv. VU. ROI DE SUEBE. 247
•FAngleterre avoit sî maltraitée, et comme ennemi per-
sonnel du duc d'Orléans, lié avec l'Angleterre contre
TEspague, et enfin comme prêtre d'une église pour laquelle
le père du prétendant avoit si mal à-propos^ perdu sa
couronne.
Le duc d'Ormond, aussi aimé en Angleterre que le duc
de Marlborongh y étoit admiré, avoit quitté son pays^ à
l'avènement du roi George, et s'étoit alors retiré à Madrid :
il alla, muni de pleins-pouvoirs du roi d'Espagne et du
prétendant, trouver le czar sur son passage à Mittau en
Courlande, accompagné d'Irnegan, autre Anglois, homme
habile et. entreprenant. 11 demanda la princesse Anna
Pétrowna, fille du czar, en mariage, pour le fils de
Jacques II*, espérant que cette alliance attacherbit plus
étroitement le czar aux intérêts de ce prince malheureux.
Mais cette proposition faillit à reculer Içs affaires pour un
temps, au lieu de les avancer. Le baron de Gortz avoit dans
ses projets destiné depuis long-temps cette princesse ^u duc
de Holstein, qui en effet l'a épousée depuis. Dès qu'il sut
cette proposition du duc d'Ormond, il en fut jaloux, et
^'appliqua à la traverser. 11 sortit de prison au mois d'août,
fiussi-bieii que le comte de Gyllembourg, sans que le roi de
Suéde eût daigné faire la moindre excu.<;e au roi d'Angle*
terre, ni montrer le plus léger mécontentement de la con-
duite de son ministre. > «t
En mème-ten^s on élargit à Stockholm le * résident
anglois et toute sa famille, qui avoient été traités avec.béau-
• Le cardinal Albéroni lui-même à certifié la vérité de tous ces
récits, daûs une lettre de remcrcijnent à l'auteor. An reste, M. Nor-
befg, aussi mal instruit des affaires de TËorope, qne mauvais écrivain,
prétend que le duc d^Omond ne quitta pas l'Angleterre à t'avéneraettt
da iDÎ George mais immédiatement après^a mort de la reine Amne.
.Comme si George I n'avoit pas, été le successeur immédiat de cctta
reine.
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^48 HISTOIRE DE CHAMLES XII. Ltv. viit.
conp plus -de tévénié que Gyllemboui^ ne Favoit été ^
Londres,
Gortz en liberté fut un ennemi déchainé» qui, outre les
pufssaus motifs qui Fagitpient, eut encore celai de la ven-
geance. Il se rendit en poste auprès du czar ; et ses insinna-
iions prévalurent pins que janmis auprès de ce prince.
D'abord il l'assura qu'en moins de trois mots il leveroit, av^c
un seul plénipotentiaire de Mosco^e, tous les obstades qui
Tetardoient la conclusion de la paix avec la Suéde. Il pritentre^
ses mains une «arte géographique que le czar avoit dessinée
lui-même, et tirant une ligne depub Vîbourg jusqu'à la mer
■Glaciale, en passant par le lac Ladoga, il se fit fort de
porter son maître à céder, ce qui étoit à Forient de cette
ligne, aussi-bien que la Carélie, FI ngrie et la Livonie. En-
suite il jeta des propositions de mariage entre la fîlie de sa
majesté czarîenne et le duc de Holstein, le flattant que ce
duc lui pourroit céder ses états moyennant un équivalent;
que par-là il seroit membre de Fempire ; lui montrant de
loin la couronne impériale, soit pour quelqu'un de ses des-
cendans, soit pour lui-même. Il flattoit ainsi les vues ambi-
tieuses du monarque moscovite, ètoit au prétendant la
prineesse czarîenne, en même-temps quil lui ouvroîtle chemin
'de FAngleterre ; et il remplissoit toutes ses vues à la fb».
Le czar nomma Fisle d'AIand pour les conférences que
son minbtre d'état Osterman devoit avoir avec le baron de
Gortz. On pria le duc d'Ormond de s'en retourner, pour
se pas donner de trop violet» ombrages à FAngleterre, avec
laquelle le czar ne voulait rompre que sur le point de Finva-
rion ; on retint seulement à Petersbourg Irnegau, le confident
du duc d'Ormond, qui fut chargé des intrigues, et qui
logea dans la ville avec tant de précaution^ quil ne sortoit
que de nuit, et ne voyoit jamais les ministres du czar, que
déguisé, tantôt en paysan, tantôt en Tartare.
' Dès que le duc d'Ormond fut parti, le czar fit valoir au
roi d'Angleterre sa complaisance d'avoir renvoyé le pins
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X,iv. VIII. , ^J BE SPSDE. . 349
gi^nd partjsaii du,,prétqi^aat ; çt le, Ji^ron. 4e Gortz, plein
d'e^érance, retourua,ep Çi^^e.
11 retrouva j^on maître à la tète de trei^^e-cinq mille
JipniDies de troupes réglées, et les cotes bordées de milices.
îl ne manquoit au roi qvie de l'argent ;.^le crédit éloit épuisé
en dedans et en dehors du royaume. La France, qui lui
avoit fourni quelques subsides dans les dernières années
de Louis XIV, n en donnoitj)lus sous la régence du d*ic
d'Orléans, qui se conduisoit par des vues toutes contraires.
L'Espagne eii proniettoit ; mais elle n'étoit pas encore en
état d'en fournir beaucoup. Le baron deGortz donna alors
une libre étendue à un. projet qu'il avoit déjà essayé avant
d'aller en France et en Hollande; c'étoit de donner au
cuivre la même valeur qu'à l'argent, de sorte qu'une pièce
de cuivre, dont la valeur intrinsèque est un demi-sou, passoit
pour quaraiite sous, avec la marque du prince; à-peu-près
comme dans une ville assiégée les gouverneurs ont souvent
payé les soldats et les bourgeois avec de la monnoie de
cuir, en attendant qu'on pût avoir des espèces réelles. Ces
monnoies factices, inventées par la nécessité, et auxquelles
la bonne foi. seule, peut donner un crédit durable, sont
cofnme des billets de change, dont la valeur imagi^iaire peut,
excéder aisément 1^ s fonds qui sont dans Un état^
-Ces ressources sont d'un excellent usag^^dans un 'paysi
libre :. elles ont quelquefois sauvé une^ république ; mais
elles ruinent presque sûrement une^ monarchie. Car leg
peuples manquant .bient<>t de confiance, le muiislre est réduit
à manquer, de bonne foi;, les monooies idéales se multi-
pliant avec excès, les particuliers enfouissent leur argent, et
la machine se détruit avec une confusion accompagnée sou-
%'ent des plus grands malheurs. . C'est ce- qui arriva au
royaume de Suéde.
Le baron de Gortz «yant» d'abord répandu avec discret
tion dans le public lç& nouvelles espèces, fut entraîné en peu
de temps au-delà, de ses mesures par la rapidité du mouve-
V^ Digitizedby Google *
t50 HISTOIRE DE CH ARIeS XII. lxv. viii.
meut» qnll ne pouvoit pitïs conduire. Toutes les marchau*
dises et toutes les denrées tL^^ni indnté kiin prix excessif, il
fut forcé d'augmenter le nombre «des espèces de cuivre.
Pins elles se multiplièrent, plus elles furent décréditées ; la
Suéde inondée de cette fausse monnoie, ne forma qu'un cri
contre le baron de Gortz. Les peuples, toujours pleins de
vénération pour Charles XII, n'osoient presque le hàir, et
faisoient tomber le poids de leur aversion sur un ministre
qui, comme étranger, et comme gouvemaîit les finances,
étoit doublement assuré de la haine publique.
Un impôt qu'il voulnt mettre sur le clei^é, acheva de le
rendre exécrable à la nation ; les prêtres, qui trop souvent
joignent leur cause à celle de Dieu, rappelèrent puî>lique-
ment athée, parce qu'il leur demândoit de l'argent. Les
nouvelles, espèces de cuivre avoient rempr'êinte de quelques
dieux de Tanliquité, on en prit occasion rfappeler ces pièces
de monnaie les dieux du baron de GoVtz.
A la haine publique contre lui se joignit la jalousie des
ministres, implacable à mesure qu'eiJe éîoit alors impuis-
sante. La sœur du roi et le prince son inari le criâignoîent
comme un homme attaché par 'sa naissance au duc de Hol-
stein, et capable de lui mettre un Jour là couronne de iSuede
sur la tète. Il n'avoit plu dans le royauttié qu'à Charfes Xll
mais celte aversion générale ne servoit c[u'à confirmer Tamitié
du roi, dont les seutimens s'affermissoïent toujours par les
contradictious. 11 marqua alors au baron une confiance qui
alloit jusqu'à la soumission : il lui laissa un pouvoir absohi
dans le gouvernement intérieur du royaume, et s'en remit
à lui sans riêserve sur tout ce qui regardait lés négociations
avec le czar : il lui recommanda sur-tout"de presser les con-
férences de l'isle d'Aland.
En effet, dès que Gortz eut achevé à Stockholm les ar-
rangemens des fiimnccs qui demaridoient sa présence, il par-
tit pour aller consommer avec le ministre du czar le grand
ouvrage qu'il avoit entamé.
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Liv.viii. ROI DE SUEDE. ^ îJ5i
Voici lès conditions préliininaires de cette silliance^ qui
devolt changer la face de TEuropc, telles qu'elles furent
trouvées dans les papiers de Goriz après sa mort.
Le czar, retenant pour lui toute la Lîvonie et une partie
de ringrie et de la Carélie, rendoit à la Suéde tout le reste;
il s'unissoit avec Charles XII dans le dessein de rétablir le
roi Stanislas sur le trône de Pologne, et s'engageoit à rentrer
dans ce pays avec quatre-vingt mille moscovites, pour dé-
trôner ce même roi Auguste, en faveur duquel il avoit fait
dix ans la guerre. Il fournissoit au roi de Suéde les vais-
seaux nécessaires pour transporter dix mille Suédois en
Angleterre, et trente mille en Allemagne : les forces réunies
de Pierre et de Charles dévoient attaquer le roi d'Angleterre
dans ses états de Hanovre, et sur-tout dans Brème et Verden ;
les mêmes troupes auroient servi à rétablir le duc de {iol-
stein, et forcé le roi de Prusse à accepter un traité, par lequel
on lui ôtoit une partie de ce qu'il avoit pris. Charles en usa
dès-lors comme si ^ armes victorieuses, renforcées de celles
du czar» avoient déjà exécuté tout ce qu'on méditoit. Il fit
demander hautement à l'empereui^ d'Allemagne l'exécution
du.traité d'Altraostad* A peine la cour de Vienne daigna-
t-elle répondre à la proposition d'un prince dont elle crôyoit
A'avoir rien à craindre.
Le roi de Pologne eut moins de séairité: il vit l'orage
qui grossissoit de tous les côtés. La noblesse polonoise étoit '
confédérée contre lui; et depuis son rétablissement il lui
{alloH toujours, ou combattre ses sujets, «ou traiter avec eux.
Le czar, médiateur à craindre, avoit cent galères auprès de
Dantzick, et quatre-vingt mille hommes sur les frontières de
Bologne. Tout le nord étoit en jalousie^ et en alarme.
Flemming, le plus défiant de tous les hommes; et celui dont
les puissances voisines dévoient le plus se défier, soupçonna
le premier les desseins clu czar, et ceux du roi de Suéde en
faveur de Stanislas. Il voulut le faire enlever dans le duché de
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t5C HISTOIRE DE CHARLES XII. Liv. vni.
Deia-P^MitSy cotmiie on avôît saisi Jacques Sobieski en Sllésie.
Saissaoy un de ces François eatrtprenans et inquiets, qui vont
tenter la fortune dans les pays étrangers, ayoit amené depub
peu quelques partisans^ franco» comme lui, au service du
roi de P<^ogne* Il communiqua au ministre Flemming un
projet par lequel il répoudoit d'aller, avec trente officiers
françois déterminés, enlever Stanislas dans sou palais, et
ramener pris6nnier à Dresde. Le projet fut approuvé.
Ces entreprises étoient alors assez communes.^ Quelques-uns
de ceux qu'en lUdie on appelle braves, avoient fait des coups
pareils dans le Milanois durant la dernière guerre entre
l'Allemagne et la France. Depuis même, plusieurs Françob
réfugiés en Hollande avoient osé pénétrer jusqu'à Versailles,
dans le dessein d'enlcYer le Dauphin, et s'étoient saisis de la
personne du premier écuyer, presque sous les fc^^res au
château de Louis XIV.
Saissan disposa donc ses hommes et ses relais pour sur-
prendre et pour enlever Stanislas. L'entrepnse fut décou-
verte la veille de l'exécution. Plusieurs se sauvèrent; quel-
ques-uus furent pris. Ils ne dévoient point s'attendre à être
trailés comme des prisonniers de guerre, mais comme éts
bandits. Stanislas, au lieu de les punir, se contenta de
leur faire quelques reproches pleins de bonté; il leurdtmna
niènie de Targent pour se conduire, et montra par cette
boulé généreuse qu^n effet Auguste, son rival, avoit ranon
de le craindre^,
Cepetidant Charles partit une seconde fois pour la con-
quête de la Norvège, au mois d^octobre 17 18. Il avoit si
bien pris toutes ses mesures, qu'il espéroit se rendre maître
en six mois de ce royamne. Il aima mieux aller conquérir
• Voilà ce que Norberg appelle manquer de respect aux tête»
cotirounées, comme si ce récit véritable conteuoit une injure, et coname
ai çn devait aux rois qui sont morts iuitre chose que la vérité.
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LIT. VIII. ROI DE SUEiœ. «5
des rocbers, au milieu des neiges et des glaces, daiisTâ{yvefté
de riiiver, qui tue les animaux en Suéde même, où Tair est
moins rigoureux, que d'aller reprendre ses belles provinces
d'Allemagne des mains de ses ennemis. C'est qu'il espéroit
que sa nouvelle aliiatKe avec le czar le mettroit bientôt «n
état de ressaisir toutes ces provinces ; bien plus sa gloire
étoit flattée d'enlever uuf royaume à son enikmi victorieux.
A ^embouchure du fle»ye Tistendall, près de la manche
de Danemarck, entre les villes de Bahus et d'Anslo, est située
Fréderickshall, place forte et importante, qu'on regardoit
comme la clef du royaume. Ciiarles en forma le nege au
mois de novembre. Le soklat, transi de froid, pouvoit à
peine remuer la terre endurcie sous la glace ; c'étoit ouvrir
la tranchée dans une e^ce de roc; mais les Suédois ne
pouvoient se rebuter en voyant à leur tète un roi qui par-
tageoit leurs fatigues. Jamais Charles n^en essuya de plus
grandes. Sa consjitution éprouve par dix-huit ans de tra-
vaux pénibles, s'étoit fortifiée au point quil dormoît en plein
champ eu Norvège, au cœur de l'hiver, sur de la paille ou
sur une planche, enveloppé seulement d'un manteau, sans
que sa santé eu fût altérée. Phisieurs de ses soldats tom-
boient morts de frmd dans leurs postes; et les autres,
presquç gelés, voyant leur roi qui souffroit comme eux,
n'osoient proférer une plainte. . Ce fut quelque temps avant
cette expédition, qu*iayant entendu parler en Scanie d'une-
femmenomméé Johns Dolter, qui avoît vécu plusJeius mois,
sans prendre d^àutre nourriture que de l'eau; lui qui s'étoît
étudié toute sa vie à supporter les plus extrêmes rigueurs
que la nature humaine peut soutenir, voulut essayer encore
combien de temps il pourrok supporter la fiaim sans en être
abattu. 11 passa cinq jours entiers sans manger ni boire ;
le sixième au matin, il courut deux lieues à cheval, et des-
cendit chez le prince de Hesse, son beau-frere, où i! man-
gea beaucoup, sans que ni une abstinence de cinq jours Teùt
#.'•<' ^ Digitizedby VjOOQIC
954 HISTOIRE PE CHARLES XII. liv.viii.
«battu, ni qu'un grand repas à la ^ite d'un si long jeûne
rincommodàt*.
Avec ce corps de fer, gouverné par une âme si hardie
et si inébranlable dans quelque état qu'il put être réduit, il
o'avoit point de voisin auquel il ne fût redoutable.
Le 50 novembre» jour de S. André, il alla sur les neuf
heures du soir visiter la tranchée, et ne trouvant pas la
parallèle assez avancée à son gré, il parut très mécontent.
M. Mégret, ingénieur fraiiçois, qui condukoît le siège, Fas-
sura que la place seroit prise iTans huit jours< Nous verrons^
dit le isoi, et continua de visiter les ouvrages avec l'ingénieikr.
Il s'arrêta dans un endroit où le boyau faisoit un angle
avec la parallèle : il se mit ft geno^ix sur le talus intérieur,
et appuvant ses coudes sur le parapet, resta quelque temps
à considérer les travailleurs, qui contiuuoient ks tranchées
à la lueur des étoiles. '
Les moindres^irconstances deviennent essentielles quand
il s'agit de la mort d'un homme tel que Charles XII : ainsi
je dois avertir que toute la conversation que tant d'écrivains
ont rapportée eiitre le roi et riogénieur Mégret, est absolu-
ment fausse. Voici ce que je sais de véritable sur cet
événement.
Le roi étoit exposé, presque àdemi-corps,. à une-batterie
de canon, pointée vis-à-*vis l'angle où il. étoit II n'y avoît
alors auprès de ^a peroonne que deux Irançois ; l'un étoit
M.Si(juier, son aide-de-camp^ homme de tète et d'exécu-
Uon^ qui s'étoit mis à son service en Turquie, et qui étoit
particulièrement attaché au. prince de Uesse; l'autre étoit
cet ingénieur. Le canon tiroit sur eux à cattouche ; mais ^
le roi, qui se découvroit davantage,, étoit le plus exposé.
* Norberg prétend ciue ce fat pour se guérir d'un mal dé poîtrioe
que Charles XII essa^ cette étrange abstinence. Le^eonféasevr
Norberg est assurément un maarais méUeciiu
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Liv.vili. ROI DE SUEDE. SA5
A quelques pas derrière étoit le comte Swerîn, qui com-
mandoit la tranchée. Le comte Posse, capitaine àuk gardes,
et un aide-de*camp, nommé Kulbert, recev'oient des ordres
de lui. Siquîer et Mégret virent dans ce moment le roi 4e
Suéde qui tomboit smr le parapet, en faisant un grand sou-
pir ; ils s'approchèrent : il étoit déjà mort. Une balle pesant
une demi-livre Favoit atteint à la tem[fe droite, et avoit fait
un trou dans lequel on pouvoit enfoncer trois doigts ; sa tète
étoit renversée sur le parapet, Toeil gauche étoit enfoncé, et
le droit entièrement hors de son orbite. L'instant de sa
blessure avoit été celui de sa mort ; cependant il avoit eu la
force, en expirant d'une manière si subite, de mettre, par
UD mouvement naturel, la main sur la garde de son épée,
et étoit encore dans cette attitude. A; ce spectacle, Mégret,
liomme singulier et indifférent, ne dit autre chose, sinon:
Voilà la pièce finie, allons souper. Siquier court sur le
champ àveilir le comte Swerin. Ils résolurent ensemble de
dérober la connoissanee de cette mort aux soldats, jusqu'à
ce que le prince de Hesse en pût être informé. On enve-
loppa le corps d'un nfianteau gris. Siquiér mit sa perruque
et son chapeau sur la tête du roi: en cet état on transporta
Charles, sous le nom du capitaine Carlsberg, au travers des
troupes, qui voyoient passer leur roi mort^ sans se douter
que ce fût lui.
Le prince ordonna à Tinstant que personne né sortit dm
camp, et fit garder tous les chemins de la Suéde, afin d'avoir
le temps de prendre ses mesures pour faire tomber la cou-
ronne sur la tète de sa femme, et pour en exclure le duc de
Ifolstem, qui pouvoit y prétendre.
Ainsi périt, à l'âge de trente-six ans et demi, Charhs XI I,
roi de Suéde, . après avoir éprouvé ce que la prospérité a de
plus grand, et ce que Tadvei^ité a de plus cruel, sana avoir
été amolli par Tune, ni ébranlé un moment par l'autre.
Presque toutes ses actions, jusqu'à celle» de sa vie privée et
unie, ont été bien loin au-delà. du vraisemblable. C'e^t
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ft&6 HISTOIRE DE CPiUltES XIÎ. mv.vih.
peut-être le seul de tous les hipiçra^s, et jusqu'ici le^seul de
tous les rois, qui ait vécu saus ioiblesse ; il a p<>rté toutes
les vertus des liéros à un ex<;ès, où elles «sont uusai dan-
.|fereuses que les vices op^osé^. Sa fermeté, devenue opi-
niâtreté, lit ses malheurs dans TUluniiiie, et ie. retint cinq
'9m en Turquie; m liliéralité, dégéuénut en profunon^ a
rui«é la Suéde ; , son courage, poussé jusqu'à la tâuérité, a
causé ^ mort ; sa, justice a été quelquefois jusqu'à la cru-
auté ; et dan» ses dernières années, lei maintien de son au-
torké approc^oit de la tyrtuiuie. $e^ grandes qualités, dont
une, seule eût. pu immortaliser un. autre prince, ont lait le
.malbeur de son pays. , 11 n's^ttaqua jamais persoime; mais
il ne Sut pas aussi prudent qu'implacable dans ses vengeances-
II a été le premier qui ait eu rambitioti d'hêtre conquévaitf, .
:saiis avoir Teiwie d'agrandir «es états: il vouloit gaguer dies^
<mpires peur les donner. Sa pasi^n pour la gloire, pour
la guerr« et pour la vengeance, l'ëmpédia d'être bon poli-
tique ; qualité saus laquelle on n'a jamais vu de conquérant* .
^vant tobataïUe, et af^ès la victoire, il n'àvoit que de la-
«modestie; :a|>rès la défaite, que de la fermeté: dur pour>
(les autres comme pour lui*même, comptant pour rien la
fieine et la vie de ses styets, aussi-bien que la tienne ; htamme-
unique,, plutôt que. grand bomme, et admirable plutôt qu'à
imiter. Sa vie doit apprendre aux rois combien un/ gou-
vernement pacifique et heureux est ai^idessus de tant de
gloire.
Charles XII étoit d'une tailk^ avantageuse et noble; â'
avoit un très beau front, de grands ^wuk l>leus> remplis de
douceur, un nez bien formé; n^is /le, has«du visage désa-
gréablej, trop souvent défigUré par un rire fféqueut qui ne
partoit que des levres,^ presque point de barbe xû de dieveux,
U parloit très peu, et ne répondoit souvent que par ce rire
dont il avoit pris l'habitude. On observoit < à sa table ua
#ilence profond. Il avoit conserv^xlans.riuflexibilité de son
«iractera cette timidité qu'on nomme- mauvaise honte« Il
^ V DigitizedbyCjOOÇlC
vpr.^mu iMn DE suEDC (sisr
^t été «mbarrasié dans mie crniverattion; pitûsque if.ê^$mlt,
éonné tout entier ai» travaux et à la guêtre, il n'avait j/$r
mais eotimi la secîélé. il «'avoît la, jusqu'à son loisir dieis
les Turcs» que les Commentaires de César «t l'histoire
é^lexandre ; mais il «voit écrit quelques r^lexions sur la
guerre et sur ses campagnes, depuis 1700 jusqu'à ] 709. il
l'avo^ au chevalier de Folard, et lui dit quei :ce manuscrit
avoit été perdu à la malheureuse journée de Pultava.
<i«elques personnes ont voulu faire passer ce prince >pOâr
un bon mathématicien : il avoit sans doute beaucoup de
pénétration dans l'esprit ; mais hi preuve que l'on donne de
aes connoissahces en mathématiques n*est pas bien conclu-
ante : il voutoit changer k manière de compter par dixain^,
«t O proposoit à la place le nombre soixante-^quatre, parce-
que ce nombre contenoit à la ^>is un cube et un quarré, et
qu'étant divisé par deux, il étmt enfin réductible à l'unité.
Cette idée prouvoit seulement qu'il aimoit en tout l'extra-
ordinaire et le difficile.
À Ifégard de sa religion, quoique les sentiniens d'un
prince ne doivent pas influer sur les autres hommes, et que
rojNnicHi d'an monarque, aussi peu instruit que Charles, ne
8oit d'aucun poids dans ces matières, cependant il faut satis-
faire jur ce point, comme sur le reste, la curiosité des
hommes, qui ont eu les yeux ouverts sur tout ce qui regarde
ce prince. Je sais de celui qui m'a confié les principaux
mémoires de cette histoire, que Cliarles XII fut luthérien
•de bonne foi jusqu'à l'année 1707 ; il vit alors à Leipsick le
fameux philosoplie M. Leibnitz, qui pensoit et parloit libre-
ment, et qui avoit déjà inspiré ses sentimens libres à plus,
d^un prince. Je ne crois pas que Charles XII puisa, comme
on me Tavoit dit, de l'indifférence pour le luthéranisme dans
la conversation de ce philosophe, qui n'eut Jamais l'iionneui"
de l'entretenir qu'un quart d'heure ; mais M. Fabrice, qui
approcha de lui famUièreinent sept années de suite, m'a dit
que dans son loisir chex les Turcs, s^ant va plus de diverses
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858 HISTOIRE DE CHARLES XIL uy.ym.
ndigtons, il élendk plus loin soii indifférenee. La MoUraye
même dans^ ses voyages coaf irme cette idée. Le comte de
Croissy pense de mème> et m'a dit plusieurs fois que ce
prince ne conserva de ses premiers principes que celui
d^une prédestination absolue ; dogme qui favôrîsoit sou cou*
rage, et qui justifioit.ses témérités. Le czar avoit les mêmes
sentimens que lui sur la religion et sur la destinée ; mais il
en parloit plus souvent; car il s'entretenoit familièrement
de tout avec ses favoris, et avoit par-dessus Charles l'étude
de la philosophie et le don de l'éloquence.
Je ne puis me défendre de parler ici d'une calomnie,
renouvelée • tnip souvent à' ia itiort des princes, que les
hommes malins et crédules prétendent toujours avoir été ou
empoisonnés ou assassinés. Le bruit se répandit alors en
Allemagne que c'étoifr M. Siquier lui^nèrae qui avoit tué le
roi de Suéde. Ce brave officier fut long-temps désespéré
de cette calomnie : un jour en m'en parlant il me dit ces
propres paroles : J'aurois pu tuer le roi de Suéde ; mais Ul
êfoit mon respect pour ce héros, que si je ravois touiut Je
n'aurois pas osé.
Je sais bien que Siquier lui-même avoit donné lieu à
cette fatale accusât ion^ qu'une partie de la Suéde croit
encore ; il m'avoua lui-même qu'à Stockholm, dans uQe fièvre
chaude, il s'étoit écrié qu'il avoit tué lé roi de Suéde ; que
même il avoit dans sou accès ouvert sa fenêtre .et demandé
publiquement pardon de ce parricide. Lorsque, dans sa
guérispn, il eut appris ce qu'il avoit dit dans sa maladie» il
fut sur le point de mourir de douleur. Je n'ai point voulu
révéler cette anecdote pendant sa vie. Je le vis quelque
temps avant sa mort, et je peux assurer que» loin d'avoir
tué Charles XII, il se seroit fait tuer pour lui mille fois.
S'il avoit été coupable d'un tel crime, ce n'auroit pu être
que pour servir quelque puis^nce qui l'eu auroit sans doute
bien récompensé : il est mort très pauvre eu France ; et
-diktat il y a eu besoin de mes secours. Si ces raisons ne
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Civ. vin. ROI DE SUEDE, 259
suffisent pas> que l'on considère que la balle qui frappa
Charles XII, ne pouvoit entrer dans un pistolet, et que
Siquîern'auroit pu faire ce coup détestable qu'avec un pis«
tolet caché sous son habit.
Après la mort du roi, on leva le siège de Fréderîckshall ;
tout changea dans un moment ; les Suédois, plus accablés,
que flattés de la gloire de leur prince, ne songèrent qu'à
faire la paix avec leurs ennemis, et à réprimer chez eux la
puissance absolue dont le baron de Gortz leur avoit fait
éprouver Texcès. Les états élurent librement pour leur
reine la prin^iresse sœur de Charles XI F, et l'obligèrent solen-
nellement de renoncer à tout droit héréditaire sur la cou*
ronne, afin qu'elle ne la tint que des suffrages de la nation.
Elle promit par des sermens réitérés «{u'elle ne tentcroit
jamais de rétablir le pouvoir arbitraire : eHe sacrifia depuis
la jalousie dé la royauté à la tendresse conjugale, en cédant
la couronne à son mari ; et elle engagea les états à élire ce
prince, qui monta sur le trÀne aux mêmes conditions qu'elle.
Le baron de Gortz, arrêté immédiatement après la mort
de Charles, fut condanmé par le sénat de Stockholm à avoir
la tète tranchée au pied de la potence de la ville : exemple
de vengeance, peut être encore plus que de justice, et af-
front cruel à la némoire d'un roi que la Suéde admire
<^icore.
FIN.
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