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HiSTOïRE
FOULQUES FITZ-WARIN
PUBLIÉE
d'après un manuscrit bu musée britannique
t'RANQISQUË MICHEL
PARIS
SILVESTRE LIBBAIBE RUE DES BONS-ENFANS 30
M DCGG XL
PARIS. — MAULDB ET BENOU, IMPRIMEURS»
KUI BAIU.BVI., 9*11.
MONSIEUR DE SALYA.NDY
A
ANCIEN MINISTRE PE L'INSTRUCTION PtlBLlQUE^
JMEMBRB DE L* ACADÉMIE FRANÇOISE BT DE LA CHAMBRE DES DÉPUTÉS
GRAND-OPI^ICIER DE LA LÉGION-|>* HONNEUR ,' ETC.
HOMMAGE DE RECONNOISSANCE
Bordeaux, 1*^ janvier 1840.
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HARVARD
UNIVERSITY
LIBRARY
XiOir«ll Meaortil ïSbtÈ^^
Umék
INTRODUCTION.
L'ouvrage que nous publions ici pour la pre-
mière fois ^ est assez important pour que l'on
soit en droit de s'étonner qu il n'ait pas été im-
primé depuis long-temps. Il retrace les &its et
gestes d'un puissant baron» dont la vie turbu-
I Lors de notre premier voyage en ÀDgleterre, en 1838, nous oom-
menc&mes à transcrire cet ouvrage, d'après le manuscrit du Musée
Britannique, coté Ms. Reg. 12. c. xii, qui le contient, et nous en
citâmes deux passages dans les notes de notre Roman éPEuitache le
Moine, p. 96-99 ; mais bientôt, instruit que M. Thomas DufTus Hardj,
l'un des employés des archives de la Tour de Londres, avoit l'intention
de faire de THistoire de Foulques Fitz-Warin l'objet d'une monogra-
phie, que ses études et les ressources résultant de sa position ne pou-
voient manquer de rendre intéressante, nous abandonnâmes ce travail.
Plus tard, ne voyant rien parottre, et craignant que l'Histoire de Foul-
ques ne retombât dans l'obscurité dont nous avions commencé à la
tirer, nous adievâmes notre transcription. Nous croyons cependant
savobr que la copie , exécutée pour M. Hardy par M. A. Berbrugger,
actuellement bibliothécaire d'Alger, a été imprimée â Londres , cbez
Samuel Bentley, par les soins de notre compatriote; mais nous igno-
rons les raisons qui engagent M. Hardy, aux frais duquel cet ouvrage
a été imprimé, à le garder en charte privée.
Il INTRODCCTION.
lente se passa dans une lutte presque continuelle
contre son souverain légitime. Comme cet état
de révolte fut» plus ou moins, celui de la plu-
part des grands vassaux anglois sous le règne
orageux de Jean-Sans-Terre, on doit accueillir
avec le plus vif intérêt un ouvrage écrit sous
rinfluence des traditions populaires de Tépoque,
que négligent assez ordinairement les chroni-
ques monastiques, et qui devient ainsi la for-
mule d*après laquelle Ton peut reconstituer par
la pensée Texistence d'un baron anglo-normand
au treizième siècle.
Voyons maintenant conmient les matériaux
les plus authentiques de Thistoire, c*est-à-dire
les actes publics, s*accordent avec le récit du
biographe ». Les rôles des lettres-patentes con-
* Dans la crainte «faloiiger cette préface, qui poorroit faire à elle
seule plus cTun Toluine in-S'', nous ne répéteront pas ce qu'a dit
Dugdale, le plus souTent d'après John Leland. Noos noos bornerons
à renvoyer à tke Banmage ofEngkmd... London : printed bj Thomas
Newcomb, etc., 1675 et 1676, in-folio, t. I, p. 343-345. Ce savant
commence sa série des Fiix-Warinê par Guarine de Meez, Fouke I,
mort sous Richard Gœnr-de-Lion, et Fouike //, mort nojé pendant la
bataille de Lewes, Tan 1265, la quarante-huitième année du règne de
Henri III.
INTRODUCTION. IMr
servées à la Tour de Londres nous fourniront
les renseignemens les plus anciens et les plus
détaillés relativement à Foulques Fitz-Warin.
La troisième aiinée de son règne, Jean» étant
au Pont-de-rArche en Normandie, 6t dresser
des lettres-patentes par lesquelles il déclaroit
qu*il pardonnoit à Eustache de Kivilly sa com-
plicité avec Foulques Fitz-Warin dans divers
crimes que cette pièce spécifie :
Rex,etc., justiciariis, vîcecomitibiis et omnibus ballivis
et fidelibus suis Anglie, elc. Sciatis nos, quantum ad nos
pertinet, perdonasse Eustacio de Kiviily l'ugam quam
fecit, et ullagariam in eum promulgatam occasione Ful-
conis filii Guarini, cujus socius fuit; et concessimus ei
quod in terram nostram Anglie redeat et pacem nostram
ibi habeat. Ita tamen quod pacem faciat cum illis quibus
malum iniuiit et propter quos fugam iliam Tecît^ vel stel
recto si quis erga ipsum loqui voluerit, vel libère et sine
impedimento terram nostram Aoglie egrediatur, si hoc
facere noluerit. Teste H. Gantuariensîarchiepiscopo,can-
cellario nostro, apud Pontem Archarum, xxx. die aprilis > .
» RottUi litterarum paterUium in Turri iMhdinenti a$$ervati.
Aecuran(e Thoma DuffiM Hardy... Vol. I. Pars i. ab anno MGGI.
ad anDum MGCXVI. (Londini :) MDCCGXXXV, in-fo, an. S» Johaan.
À. D. 1302, l. I, p. 10, col. i.
QuMA à FcNdqHs Mmirn Ê t , 3 pvoil qaU
é}ir uB ia beaoooop plos de dîlficsilés pour ren-
trer en grâce anprés de son sonwnin : cest ce
qalndiqiienl les trois sanf-coodnits que le roi
Jean Im aoconb b mtee année:
Bel, etc., ofluûbw, etc. Scûcis qaad |iifHi— i Fal-
coai flioGaariai etiociis sus salraa et iiii— coa-
dactaai ia veaieado ad aot et redeawio, a <fie Jotîs, die
scOicet Decolbcioats saacti Johaaais Baptiste, aaao* etc.
qaiatOt asqae ia xr. dies seqaeates. Et ideo Tobis fr-
aiiter prohibeaos ae eoa iateriai saper boc laipedia-
lis, aot qaioqaam aïolestie ioferiatis. Teste ne ipso
apod, etc. '.
Bex» elc.y omnibus fiddibos sois, etc. Scialis qood
eoDcessioms Falconi filio Goarini et BaMewino de Ho-
denet et biis qoos secom duceot salviini et seconun
coadoctom Teniendi ad nos et redeondi, a Dominica
proxima post Natiritatem beaie Marie in Tiij**". dies. Et
in bnjns rei, etc. Teste me ipso apad Herbertot, xij. die
septembris '.
Rexy etc., omnibus, etc. Sciatis quod concessimns
Falconi filio Guarini et biis quos secum ducet salvum
* Rot. lut. patent. An. &> Johinn. A. D. 1303, 1. 1, p. 33, col. 2.
• Ihid., an. 6o Johann. A. D. 1203, 1. 1, p. 34, col. 1.
INTRODUCTION. V
conduclum veniendo ad nos et redeundo. Durabit con-
diiclus ille a die sancti Dionisii in xv. dies, anno, etc.»
qtrinto '.
Enfin, le pardon arriva à Foulques et à ses
complices ; il étoit conçu en ces termes :
Rex, etc., justiciariis, vicecomitibus, etc. Sciatis quod
nos recepimus in graciam et benivolentiam nostram Ful-
conem filiuin Guarini, ad peticionem venerabilis patris
nostri J. Norwicensis episcopi , et comitis W. Saresbe-
riensis, fratris nostri, rémittentes ei excessus quos fecit»
eique perdonantes fugam et utlagariam in eum promul-
gatam. Et ideo vobis mandamus et firmiter precipimus
quod in firmam pacem nostram habeat ubicumque vene-
ril. Teste, etc.
Rex, etc., justiciariis, vicecomitibus, etc. Sciatis quod
nos, ad peticionem venerabilis patris nostri J. Norwicensis
episcopi, et comitis W. Sarresberiensis, fratris nostri,
quantum ad nos pertinet, perdonavimus Viviano de
Prestecotes 'fugam et utlagariam in eum promulgatam
pro roberia et pace nostra infracta, unde Jorvet de
Hultonia eum appellavit, et pro consortio Fulconis filii
Gnarini. Et ideo vobis mandamus et firmiter precipimus
quod in firmam pacem nostram habeat. Teste me ipso,
apud Rothomagum, xj. die novembris.
« Rot. un. patent. An. 5<' Johann. A. D. 1203, 1. 1, p. 34, col. 2.
VI INTEODUCTION.
[Isti fuerjunl uUagali [pro consorJUo Fulconis filii
[Guarini], et inlagali sunt [per pelitionjein domini J.
[Norwicensis episcopi], el comitis [W. Sarresberiensis],
fratris domini régis :
Badwinus de Hodenet. \
Wiiielmus fiiias Fulconis.
Johannes de Tracy.
Rogenis de Prestona.
Phiiippus fiiius Gaarini.
Ivo fiiius Guarini.
Raduifus Gras.
Stephanus de Hodenet.
Henricus de Pontesbiria.
Herbertus Branche.
Henricus le Norreis.
Wiiielmus Malveisstn.
Raduifus fiiius Willelmi.
Abraliam Passavant.
Matlieus de Dulvustiria.
Hugo RufTus.
Wiiielmus Gernun.
Walierus de Alwestana.
Johannes de Prestona.
Ricardus de Prestona.
Phiiippus de Hanewuda.
HamodeWikefelda.
Arfin Marnur.
(Pro servicio Fulconis filii
Guarini.
INTRODUCTION. VII
Adan de Greckefergus.
Walter le Sumt'.
Gilbertus de Dovre.
Willelmus de Egg^mundia. j
Johannes de Lamborna.
HenricusWaleng*.
Johannes Descunsit. l Pro servicio Fiilconis filii
Willelmus Fet. / Gnarini.
Willelmus Gocus.
Gaufredus, filius ejus.
Philippus de Wemma.
Ricardus Scott.
Thomas de Lidetuna.
Henricus Gloc'.
Isti fuerunt ullagati pro excessibus suis, et postea
venerunt ad ipsum Fulconem, et inlagati sunt ad peti-
cionem domioi Norwicensis episcopi, et comilis W. Sar-
resberiensis, fratris domini régis :
Hugo Fressellus.
Or un', de Prestecotes.
Rogerus de Waletona.
Reinerus filius Reineri.
Willelmus filius Willelmi.
Willelmus filius Ricardi de Rertona.
Ricardus de Wakefelda.
Henricus filius Roberti le Kinge de Uffiuton.
Tlll INTRODUCTION.
Johannes filius Toke.
HenricQS le Franceis.
Wallerus Godric.
Thomas, frater ejus.
Rogerus de Ooderoude.
Rogeras de la Hande.
Wîllelmus filius Johannis '.
Ce ne iîit que Tannée suivante que Jean, con-
tinuant son œuvre de clémence, restitua à Foul-
ques Fitz-Warin une partie de ses fiefs, qu'il
avoit tenus en séquestre depuis le moment où
ce baron s'étoit révolté contre lui. Voici Tor-
dre qu*il adressoit à ce sujet au vicomte de
Shrewsbury :
Rex, etc., vicecomiti Salopesbirie , etc. Scias qnod
reddidimus Fulcooi filio Gwarini castellum de Wuitin-
tona cum omnibus pertinenciis suis, sicut jus et hère-
ditatem. Et ideo, etc. Et in hujus rei, etc. *.
Dès cet instant. Foulques se montra dévoué
au service de son souverain ; et celui-ci, désireux
I RoL lut, patent,, «nno 5o Johannis, A. D. 1303-4, 1. 1, pan i,
p. 36.
* Ibid,, an. 6"* Johannis, A. D. 1204, 1. 1, pare i , p. 46, col. 2.
INTRODUCTION. IX
de ne pas être en reste avec son vassal, ne
borna point ses faveurs à la restitution de
Witinton. C'est ce qui résulte des pièces sui-
vantes :
RexWillelmo de Breos», etc. Mandamiis vobis qiiod
sine dilacione faciatis habere Fulconi filio Warini et
Malilde , que fuit uxor Theobaldi Walteri , vel certo
nuncio suo» racionabilem dotem ipsius Matilde que eam
contingit: scilicet terciam partem de liberis tenementis
que ipse Th. Walterus de nobis tenuit in Hibernia; quia
reddidimus predictis Fulconi et Matilde maritagium et
dotem ipsius Matilde intègre, sicut ea concesseramus
. prius Roberto Yavasur, patri ipsius Matilde. Teste G.
filio Pétri, apudWintoniam, .j. die octobris. Sub eadem
forma scribitur Waltero de Lascy. Sub eadem forma
scribitur comiti W. Marescallo. Idem Fulco habet lit-
teras ad justiciarium Hibernie, sub eadem forma quam
habuit Theobaldus Walteri ad eundem justiciarium.
Idem Fulco et Matilda habent litteras ad vicecomitem
Lancastrie , sub tali forma quam Theobaldus Walteri
ad eundem vicecomitem.
Rex vicecomiti Norfolcensi, etc. Precipimus tibi quod,
de omnibus terris que fuerunt Theobaldo Walteri in
balliva tua, facias habere Fulconi filio Warini, et Malilde
uxori ejus, que fuit uxor ipsius Theobaldi Walteri, suum
b
X INTRODUCTION.
terciam sine dilacione. Teste G. filio Pétri, apud Win-
toniaiDy .j. die octobris '.
Rex Roberto deVeteri Ponte, etc. Mandamus vobîs
quod prisonem, qui captus fuit apud Witintoû ab homi-
nibus Fuiconis fiiii Warini, et quem ipsi vobis libéra ve-
runt, habere faciatis ipsi Fulconi» nisi miles fuerit; et si
positos fuerit ad redempcionem , eidem Fuiconi habere
faciatis redempcionem iilam. Teste ut supra *.
Rex Phiiippo de Rintoô, etc. Precipimus tibi quod
habere faciatis Fuiconi fiiio Warini gistas et trabes,
paonos et tigna, de foresta Leircestrie, ad domum suam
de Norburet'. et unum taiamum constr , in foresta
ista bis in septimana. Teste rege, ut supra. Per W. de
Kantilupo ^.
Foulques ne tarda pas à se rendre à la cour
de Jean, qu il suivit dans le voyage que ce sou-
verain fit dans le nord de l'Angleterre. En effet,
on trouve ce baron nommé comme témoin d'une
> Rotuli litterarum clausarum in Turri I/mdinensi aaervati,
Accurante Thoma DuffUs Hardy Vol. I, ab anno MCCIV, ad an-
num MCCXXIV. (Loodini, MDCCCXXXIII) in-folio. Au. 90 Johann.
A. D. 1207, p. 92, col. 2.
» Rot. m. elaus. An. 14« Johann. A. D. 1212, vol. I, p. 126, col. 1.
3 Rot. Htt. claut. An. ÎA^ Johann. A. D. 1213, 1212, vol. I, p. 129,
col. 2.
INTRODUCTION. XI
charte de donation accordée par le roi aux
nonnes de Saint-Léonard de Brewood, et datée
d'AUerton, le l^'* septembre de la quatorzième
année de son règne (Fan de Jésus-Christ 1212) >.
Trois jours aprèsj Jean avoil quitté le comté
d'York et se trouvoit à Durham, d'où il datoit
une charte dans laquelle Foulques figure comme
témoin. Elle est du 3 septembre de la quator-
zième année de son règne (1212) \
L'année suivante, le roi, se trouvant à Corfe,
adressa au connétable de Bristol une lettre-close,
de la lecture de laquelle il résulte que Foulques
étoit toujours en possession de la faveur de son
maître :
Rex constabulario BristoUie, etc. MaadaniQs vobis
quod sine dilacione habere faciatis dilecto et fideli nostro
Fulconi filioWarini, yel certo nuncio suo, galiam que
fuit Henrici filii Com'. et armamenta yeteris galie de
Norwegia. Teste me ipso apud Corfs', xxij. die junii ^.
> Voyez RotuU chartarum in Turri Londinenti asservati, Âeeu-
rame Thomas IhtffiM Bardy. Vol. I, pars i. ab anno BfGXGIX. ad an-
num MCGXVI. (Londini, MDCCCXXXVII) in-folio, p. 187, col. 2.
a Rot, chart., vol. 1, pars i, p. 188, col. I.
3 Rot. lut. claut. An. i5« Johann. A. D. 1213, vol. I, p. 136, col. 2.
Xfl INTEODCCTION.
Au reste, il n'avoit pas quitté la cour; car
nous retrouvons son nom parmi ceux des té-
moins d'une charte du roi Jean, datée de Bere
Régis, le 27 juin de la quinzième année de son
règne (Tan de Jésus-Christ 1213)'. Il y étoit
encore le 2 juillet de Tannée suivante, ainsi que
cela résulte d'une charte du même roi, donnée
à la Roche-aux-Moines,et où le nom de Foulques
se voit parmi ceux des témoins *, La pièce qu'on
va lire nous montre que Jean n'avoit pas cessé
de répandre sur lui ses faveurs les plus parti-
culières :
Rex vicecomiti Leycestrensi, etc. Precipimus tibi quod
permittas Fulconi filio Warini capere v. bissas in foresta
nostra Leicestrensi. Teste me ipso apudTheok*, xxviij''.
die Dec. ^
C'est à la même époque environ que, parmi
« Rot. chart,, yoI. I, pars i, p. 193, col. î .
• Ihid., p. 199, col. 2.
3 Rot. lut. claus. An. 16» Johann. A. D. 1215, vol. I, p. 182, col. 1.
rtons lisons, auparavant, dans le même recueil, une charte relative
à Guarin fils de Foulques: nom qui peut-être n'est que le résultat d'une
erreur de rédaction. Voyez vol. I, p. 157, col. 2.
INTRODUCTION. XIII
les Scutagia^ Pictav., nous rencontrons les noms
suivans, qui se retrouvent dans notre texte :
Walier de Lascy.
Johaones Extraneus, quia filium suum habet in
Piclavia.
Fulco filius Guarini \
Les deux pièces qui suivent n'ont d'autre im-
portance que de continuer la série des actes
relatifs à notre héros, et de prouver qu'à l'épo-
que de leur date il ne s'étoit encore élevé aucun
nuage entre le roi Jean et son vassal :
Rex dilectis et fidelibus suis Fulconi filio Warini et
Henrico de Gray salutem. Sciatis quod pacari fecimus
Nigello filio Johanuis, venatori nostro, et duobus homi*
nibus suis et uni bernario et duobus equis suis et xxviij.
canibus uostris de niota qui sunt in custodia vestra eis
liberaciones suas, a die lune in octabf s sancti Hillarii
usque in crastinum purificacionis sancte Marie, ipso
die lune coniputato;ipsumqueNigellum nobiscum cum
I « EscuAGB^ service militaire, quelquefois évalué en argeni, que
doivent certains fiefs. Voyez Scutagium. » D. Carpentier.
> Rot. lut, claus. An. 16o Johann. A. D. 1214, vol. 1, p. 200, col. 2,
p. 201, col. 1.
XIT INTHODUCTION.
canibus illuc Iransfreiare Taciatis, Teste me ipso apiid
Ganeford, xx. die januarii '.
Rex vicecomiti Lancastrie salntem. Precipimus tibi
quod habere facias Fulconi filio Warini et Matillide
uxori ejus racionabilem dotem ipsius Matillide, que eam
contingit de terra quam Theobaldus Walteri babuit in
Amundernessa, et est in mann nostra. Teste ut supra *.
En cette même année 1215, Foulques^ par
une raison que nous devons rechercher ailleurs
que dans des actes authentiques^, cessa d*étre
en paix avec son roi, et attaqua ses voisins.
C'est ce qui semble résulter du Mémorandum
suivant :
Mémorandum quod in garderoba liberata fuerit con-
vencio facta inter Willelmum marescallum et alios ba-
rones Marchie ex upa parte, et Fulconem filium Warini
< Rot, Utt. claus. An. l5o Johann, k. D. 1214, Yol. I^ pars i» p. 161,
col.l.
» Ibid., an. 17° Johann. A. D. 1216, yoI. I, p. 223, col. 2.
3 11 figure parmi les barons qui, au rapport de Matthieu Paris, se
réunirent en armes à Stamford, dans la semaine do Pâques de l'an 1215,
et il fut l'un des meneurs d'une ligue qui aToit pour objet l'obtention
de certains privilèges. Voyez VHUioria Major, édit. de Londres, 1640,
in-foiiOj p. 254, 1. 5.
INTRODUCTION. XV
et alios imprisios ex altéra, de treuga scilicet in ter ipsos
facta usque, etc. '
Foulques ne fut pas le plus fort. Aussi le roi,
après l'avoir dépouillé de ées fiefs, disposa de
l'un d'eux en faveur d'un étranger. Voici Tordre
qu'il adressoit à ce sujet à Piiilippe d'Aubîgny :
Mamiaium est Philippo de Atbiniaco quod habere fa-
cial Theodorico TeiUonico terram que fuit R(vgeri de
Ilodeng' et Thome Malesmains, et Villam de Ahvestania
que fuit Fulconis ûlii Warinij cum pertÎDcntifs habentlam
quafndiu doniîiio régi placuerjt. Apud Corf, xxx* die
jtmii '.
Henri IIF, fils et successeur de Jean, continua
à faire des largesses a ses adbérens avec les
biens ^ du baron rebelle. Voici un ordre adressé
■ RûL tut. dam. An. 17° Jobann. à. D. i2îB, yoL I, p.37Û, coJ, f .
* ïbid.> atî* IS'' Johann. A, D. 12i6, vol î, p. 276, col. f ,
^ Noire intention n'ef^t pas de donner Ici la nomenclainre de ces fief^r
bien que cela ne soit peut-^^tre pas fûTl dlfCcile» Voici quelques indîca-
lions qui È*y rapportent « tirées d'une des publications de ta Meeorti$
Commission:
Fnïco filîus Warini unum feodum in Aldebur. ( Testa de Nevill, co-
mitatus Salopie et StaHordie^ p. 15^ coL 2, baroniâ Thome Corbet.)
Fulco fiiius VViînnL unum retxlum in Âlbcrbur. (Ibid., p, 48, id.
comitatuSj baron îa Thome Corbai.)
Xyi INTRODUCTION.
au vicomte de Leicester, dans lequel il traite
Foulques d^ennemi déclaré :
Rex vicecomili Leyceslrie. Precipimus tibi quod sine
dilacione plenam habere facias saysinam dilecto ei Bdeli
nostro H. comili Warewic de manerio de Norburgo cum
omnibus perlinenciis suis, quod Fulco Blîus Warini, qui
manirestus inimicus noster est, de eo tenuil in bayllia
tua, et est de feodo ipsius comitis. Teste comité apud
Certes', x. die septembris *.
En 1246, Foulques fut envoyé au Temple neuf,
à Londres, auprès d'un clerc du pape, nommé
Martin, espèce d*oiseau de proie que son maî-
tre avoit lâché sur 1* Angleterre pour en saisir
les richesses et les lui rapporter. Ce baron s'ac-
quitta si bien de sa commission , que le suppôt
Falco filius Warini unum feodam in Albesbur', (Ibid,, p. 49, col. 2,
Salop'., Teoda Thome^Corbet.)
Fulco filius Warini tenet in capite de domino rege pro servicio .j.
militis, et terra sua valet .x. libras. {Ibid., com. Salop., p. 55.)
Wrenocus filius tenet viij libras terre de ballia domini J. pro xxtî in
escambia de Witinton quod Fulco filius Warini tenet, et débet esse de
servicio latimarius inter Angliam et Walliam. (IsH sunt qui ienent de
dominieis Régis a tempore H, régis patris domini J. régis. — Testa
deNevill, p.56.)
« Rot. litt. clans. An. 1° Hen. III, A. D. 1217, vol. I, p. 321, col. 1.
INTUODUCTION. XVI
du Saint-Siège, épouvanté (trepidus et anhelus),
se hâta de s'embarquer à Douvre '.
Enfin, après une vie des plus agitées, conune
on le voit. Foulques mourut noyé pendant la
bataille de Lewes, Tan 1265, en combattant dans
les rangs de Tarmée royale co^tre les barons
anglois révoltés ».
Tels sont les détails auxquels nous nous bor*
nerons relativement à Foulques Fitz-Warin.
Sans doute, il nous eût été facile^ ainsi que nous
l'avons déjà dit, d'alonger cette préface jusqu'à
en former un volume in-8® ; et les recueils dont
sont tirées les pièces que nous avons rappor-
tées, nous en auroient fourni un très grand
nombre d'autres qui éclairent d'une vive et cu-
rieuse lumière la vie des frères 4^ Foulques, de
Walter de Lacy, en un mot, de tous les person-
nages de notre Histoire; mais nous avons cru
devoir nous en tenir aux actes qui se lioient
plus intimement avec Fexistence orageuse de
notre baron, surtout dans l'espoir où nous som-
mes que M. Thomas Wright, reprenant en sous-
« Maitkmi Paris Hisioria Mûjùr^ p. 659, 1. 16.
> Ibid., p. 996, i. 7. i
XVIII INTRODUCTION.
œuvre le travail de son père *, ne manquera pas
de traiter in extenso cette partie de Thistoire de
son pays \
I 7^0 Hittory and ÂrUiquities of the Toum of Ludlow, and iU
ancient Castle,,, Second Edition with Additions. By Thomas Wright.
Ludlow : printed and sold by Procter and Jones... 1826, post-S^. La
partie relative aui Fitz-Warin est d'après lohn Leland^ et s'étend de
la page 28 à la page 33,
» Voici le prospectus publié, à la date de jauTier 1840, par R. Jones,
imprimeur-libraire, Broad Street, Ludlow :
The History of Ludlow ànd Us Neighbourhood, compiled in a
great measure from original and inedited Documentt, by Thomas
Wright, Esq., etc.
It is proposed to publish this work in four parts, or divisions, at 4s.
each, which will appear at as short intenrals as possible, and will form
together a handsome volume in octavo. The contents of thèse several
parts will be arranged nearly as follows.
Part I. — The earlier peripd of Border History, with the lives and
adventures of the Fitz-Warines, from the MS. History of that family
in Anglo-Norman in the Britbh Muséum ; this division will conclude
with the reign of King John.
Part IL — The History of the Baronial Wars on the Welsh Borders
during the 15th and 14th centuries^ and of the Wars of the Roses.
Part III. — The History of the Ck)uncilfor the Government of Wales^
and of the Lords Présidents.
Part IV. — A detailed account of the transactions in this neighbour-
hood during the civil wars between Charles I. and the Parliament, with
the later period of the history.
Each part will be illustrated by Engravings in copper and wood.
Subscribers' Names will be received by R. Jones, Bookseller, Ludlow.
IWTRODUCTION. XVI
<lu Saint-Siège, épouvanté [trepidus et cmhelus),
^ hâta de s'embarquer à Douvre ^
Enfin, après une vie des plus agitées, comme
on le voit. Foulques mourut noyé pendant la
bataille de Lewes, Tan 1265, en combattant dans
les rangs de l'armée royale contre les barons
anglois révoltés ».
Tels sont les détails auxquels nous nous bor-
nerons relativement à Foulques Fitz-Warin.
Sans doute, il nous eût été Êicile^ ainsi que nous
l'avons déjà dit, d'alonger cette préface jusqu'à
en former un volume in-8®; et les recueils dont
sont tirées les pièces que nous avons rappor-
tées, nous en auroient fourni un très grand
nombre d'autres qui éclairent d'une vive et cu-
rieuse lumière la vie des frères de Foulques, de
Walter de Lacy, en un mot, de tous les person-
nages de notre Histoire; mais nous avons cru
devoir nous en tenir aux actes qui se lioient
plus intimement avec Vexistence orageuse de
notre baron, surtout dans l'espoir où nous som-
mes que M. Thomas Wright, reprenant en sous-
< Matthœi Paris Historia Major, p. 659, 1. 16.
» Ibid,, p. 996, 1. 7.
XVIII INTRODUCTION.
œuvre le travail de son père \ ne manquera pas
de traiter in extenso cette partie de Thistoire de
son pays ».
I Th$ Hittory and Aniiquitiei of ihe Jowfi of iMdUm, and iu
aneimU Ca$tU„. Second Edition with Additiont. By Thomas Wright.
Ludloir : printed tnd lold by Procter tnd Jouet... IS26, post-8». La
partie relative aox Fitz-Wario est d'après John Leland, et s'étend de
la page 38 à la page 83.
» Voici le prospectus publié, à la date de janyier 1840, par R. Jones,
imprimeur-libraire, Broad Street, Lodiow :
Thé JBUtory of LudU>u> amd iU Neighbaurhood, ttmpHed in a
gréai fneoiure flwn original atkd inêdUed DocumenU, by Thomas
Wright, Esq., etc.
It is proposed to publbh this work in four parts, or di? isions, at 4s.
etdi, irhich irill appear at as short intenrals as possible, and irill form
together a handsome Yolnme in odavo. The contents of thèse several
parts will be arranged neariy as foUows.
Piik^ I. — The earller period of Border History, with the lives and
adventures of the Fitz-Warines, from the BfS. History of that family
in Anglo-Norman in the British Bfaseora; this division will cqpKinde
with the reign of King John.
Faut II. — The History of the Baronial Wars on the Welsh Borders
during the iSth and 14th centuries^ and of the Wars of the Roses.
Pakt III. —The History of the GonncM for the Govemment of Wales,
and of the Lords Présidents.
Part IY. — A detailed accoont of the transactions in this neighbour-
hood during the civil wars between Charles I. and the Parliament, with
the later period of the history.
Each part will be illnstrated by Engraviogs in oopper and wood.
Subscribers' Names will be received by R. Jorbs; Bookselier, Lodiow.
INTRODUCTION. XIX
Disons maintenant un mot des poèmes com-
posés dans le moyen âge sur les aventures de
Warin de Metz, de son fils, et principalement de
Foulques II, le plus célèbre de sa race.
Il résulte du témoignage de Leland > qu'il a
existé^ sur ce sujet, deux ouvrages en vers, l'un
en anglois, l'autre en françois; celui-ci sans
doute étoit l'original du premier et du récit en
prose que nous publions. Ce qu'il y a de certain,
c'est que ce récit est la traduction d'un poème
en langue romane, conune l'on peut s'en con-
vaincre en rétablissant en plusieurs endroits les
vers du texte primitif, que le translateur ano-
nyme s'est borné à mettre à la queue les uns
des autres, sans plus de cérémonies. Quoi qu'il
en soit, nous ne savons à laquelle de ces trois
rédactions se rapportent les vers suivans, où
Robert de Brunne fait mention des aventures de
Dan Waryn :
And wele I vnderstode, )>at ]>e kyng Robyn
Has dronken of )>at blode )>e drink of Dan Wary n .
Dan Waryn be les tounes )>at he held,
I Voyez plus loin, p. 101 et 111 .
\X UfTKODUCTIOlf.
With wrong; he mad a res» and misberyng of schekl.
Si|>en in to )>e forest he i^ede naked and wode,
Als a wilde beste ete of )>e grès ]>at stode;
fus of Dan Waryn m his loke men rede,
God 8y f ]>e kyng Robyn , ]>at aile his kynde se spede ' !
Peut-être est^il à propos, avant de terminer
cette introduction, de déclarer que, suirant
notre habitude, nous avons scrupuleusement
reproduit l'orthographe du manuscrit où s'est
conservée l'Histoire de Foulques Fitz-Warin,
et que les nombreuses irrégularités qui se re-
marquent dans le texte ^ sont du fait de Tépoque
ou de l'ancien copiste, et non pas de l'éditeur.
FIN DE l'iMTRODUCTION.
t Édition de Thomas Hearne, g. 335; manuscrit original» f> 193 verso.
> A défaut d'une meilleure place, nous insérons ici une note destinée
à combler la lacune qui se fait remarquer plus loin^ p. 20, 1. 20, et qui
existe pareillement dans le manuscrit.
Les évéques de Hereford^ du nom de Robert, pendant le règne de
Henri II, furent : 1° Robert de Melun, sacré le 22 mai 1164,, et mort
le 27 février 1166; 2» Robert Foliot, son successeur, sacré le 6 octo-
bre 1174, et mort le 9 mai 1186. Voyez Fasti Ecclesiœ Anglicanœ, etc,
By John le Neve. London. Printed by J. Nutt and sold by Hen. Clé-
ments, etc. MDCCXVI, in-folio, p. 108. Tout nous porte à croire qu'il
s'agit du premier de ces deux prélats.
INTRODUCTION. XIX
Disons maintenant un mot des poèmes com-
posés dans le moyen âge sur les aventures de
Warin de Metz, de son fils, et principalement de
Foulques II, le plus célèbre de sa race.
Il résulte du témoignage de Leland ^ qu'il a
existé, sur ce sujet, deux ouvrages en vers, l'un
en anglois, l'autre en françois; celui-ci sans
doute étoit Foriginal du premier et du récit en
prose que nous publions. Ce qu'il y a de certain,,
c'est que ce récit est la traduction d'un poème
en langue romane, comme l'on peut s'en con-
vaincre en rétablissant en plusieurs endroits les
vers du texte primitif, que le translateur ano-
nyme s'est borné à mettre à la queue les uns
des autres, sans plus de cérémonies. Quoi qu'il
en soit, nous ne savons à laquelle de ces trois
rédactions se rapportent les vers suivans, où
Robert de Brunne fait mention des aventures de
Dan Waryn :
And wele I vnderstode, )?at )>e kyng Robyn
Has dronken of )>at blode )>e drink of Dan Waryn.
Dan Waryn he les tonnes ]>at he held,
I Voyez plus loin, p. 101 et 111.
XX INTlilODUCTION.
With vfTong he mad a res, and misberyng of scheld.
Si|>eii in to l^e forest he ^eàe naked and wode,
Als a wilde beste ete of )>e g^res }>at stode;
fus of Dan Waryn in his boke men rede^
God ayf ]>e kyng Roby n , ]>at aile his ky nde so spede ' !
Peut-être est'il à propos, avant de terminer
cette introduction, de déclarer que, suivant
notre habitude, nous avons scrupuleusement
reproduit l'orthographe du manuscrit où s'est
conservée l'Histoire de Foulques Fitz-Warîn,
et que les nombreuses irrégularités qui se re-
marquent dans le texte * sont du fait de Fépoque
ou de l'ancien copiste^ et non pas de l'éditeur.
FIN DE l'introduction.
t Édition de Thomas Hearne, p. 385; manuscrit original, f> 193 verso.
a A défaut d'une roeillçure place, nous insérons ici une note destinée
à combler la lacmie qui se fait remarquer plus loin^ p. 20, 1. 20, et qui
existe pareillennent dans le manuscrit.
Les évèques de Hereford^ du nom de Robert^ ^ndant le règne de
Henri II, furent : !<> Robert de Melun, sacré le 22 mai 1164, et mort
le 27 février 1166; 2<> Robert Foliot, son successeur, sacré le 6 octo-
bre 1174, et mort le 9 mai 1186. Voyez Fasti EccUsiœ Anglieanm, etc«
By John le Neve. London. Printed by J. Nutt and sold by Hen. Clé-
ments, etc. MDGCXVI, in-folio, p. 108. Tout nous porte à croire qu'il
s'agit du premier de ces deui prélats.
HISTOIRE
DE
FOULQUES FITZ-WARIN,
En le temps de averyl e may^ quant les preés e les
herbes reverdissent, et chescune chose yiyaunte reco-
vre veitue, beauté e force, les mountz e les yaleys re-
tentissent des douce chauntz des oseylouns, e les cuers
de chescune gent, pur la beauté du temps e la sesone,
mountent en haut e s'enjolyvent ; donqe deit home
remenbrer des aventures e pruesses nos auncestres,
qe se penerent pur honour eh leauté quere, e de teles
choses parler qe à plusours purra yaler.
SeygnourSy vus avez oy eynz ces houres qe Willam
Bastard, duc de Normaundie, vynt ou grant gent e
pueple santz nounbre en Engleterre, e conquist à force
tote la terre, e ocist le roy Heraud, e se fist coroner à
Loundres, e si estably peés e leys à sa volenté, e dona
terres à diverse gentz qe ou ly vyndrent. En ycel temps
Yweyn Goynez fust prince de Gales, e si fîist vailaunt
HISTOIRE
e boa guerreour, e le roy le dota moût le plus. Cesty
Yweya out g^uasté tote la Marche, e tote fust voyde de
Cestre tanqe al mont Gylebert. Le roy se apparilla
moût richement, e vint ou grant ost en le counteé de
Saloburs, e trova tote les villes arses, de Cestre desqe
à Salobure ; quar le prince clama tote la Marche pur
la sue e aportenaunte à Powys. Le prince se retret,
quar yl ne osa attendre le roy. Le roy fust moût sages,
e pensa qu'il dorreit les terres de la Marche as plus
Taylauntz chevalers de tut le ost, pur ce qu'il deve-
reynt défendre la Marche de le prince à lur profit e al
honour lur seignur le roy. Ly roy apela Rogier de
Belehealme, si li dona tote la counté de Salobure moût
franchement; e si fust apelleé counte palay s. Rogier
funda dehors la Tylle de Salobure une abbeye de Seynt-
Piere, e la fefFa moût richement; e tint le counté à
tote sa vie. Si comcnça un chastiel à Brugge, e un
autre chastel comença en Dynan ; mes yl ne les parfist
poynt. Après qe Roger fust devyé, Robert, son fitz,
avoit tote la counteé de Salobure ; e Ernaud, son puysné
fitz, avoit Penebrok. Ceux furent gentz trop démesu-
rées e trop culvers; e grantment mespristrent countre
lur seignour le roy Henré, fitz Willam Bastard, frère
roy Willam le Rous; e parfirent le chastel de Brugge
contre la défense le roy Henré : dont le roy Henrie les
desheryta e fist exiler pur tous jours, et dona lur ter-
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 3
res as ces chevalers. Le chastel de Dynan e tut le
pays entour devers la ryvere de Corve ou tut Tonour
dona à monsire Joce, sun chevaler; e d'enaprès retint
le surnoun de Dynan e fust apelé par tut Joce de
Dynan. Cely Joce parfist le chastiel qe Roger de Bele-
healme en son temps a voit comencé, e si fust fort e
vaylaunt chevaler. E si fust la ville bien longement
apellé Dynan, qe or est apellée Ludelawe. Cesti Joce
fist fere, desouth la ville de Dynan, un pount de père
e chaus, outre la ryvere de Temede, en le haut chemyn
qe va par my la Marche e de Cestre desqe Brustut. Joce
fist son chastiel de Dynan de très baylles, e le envyrona
de double fosseé, une dedens e une dehors.
Le roy Willam Bastard aprocha les niountz e les vais
de Gales, si vist une ville moût large, close jadys de
hautz murs, qe tote fust arse e gastée; e par desouth
la ville, en une pleyne, fist tendre ces pavylons; e là
demorreit, ce dit, celé nuyt. Lors enquist le roy de
un Bretoun coment la ville avoit à noun e coment
fust ensi gaste. a Sire, fet le Bretoun, je vus dirroy.
Le chastiel fust jadys apelleé chastiel Bran; mes ore
est apelee la Vêle Marche. Jadys vindrent en ceste pays
Brutus, un chevaler moût vaylaunt , e Ck)ryneus, de
qy Cornewayle ad uncore le noun, e plusours autres
estretz du lignage troyene; e nul n'y habita ces par-
ties, estre trelede gentz, grantz geans, dount lur roy
HISTOIRE
fust apeleé Geomagog. Cyl oyerent de la venue Brutus,
e se mistrent en la voye à Tencountrc; e al dreyn
furent tous le geantz occys, estre Geomagog, qe fust
meryilous grant. Goryneus le vaylant dist que volen-
ters luttreyt ou Geomagog, pur esproTer la force Geo-
i^^^g^S* ^ géant à la premere venue enbraca Goryneus
si estroitement qu'il debrusa ces trois costeés. Gory-
neus se coroça, si fery Geomagog del peé qu'il chay
de un grant roche en la mer ; et si fust Geomagog
neyé. E un espirit del Deble meyntenant entra le cors
Geomagog, e vynt en ces parties, e defendy le pays
longement, qe unqe Bretoun n'osa habiter. E longe-
ment après, le roy Bran fitz Donwal fist réfère la
cité, redresser les murs, e afermer les grantz fossés ;;
e fesoit Burgh e Grant Marche; e le Deble vint de
nuyt, e oost quanqe leynz fust; e pus en sa unqe nul
n'y habita. »
Le roy s'en mervyla moût; e Payn Peverel, le fier
e hardy chevaler, cosyn le roy, ad tôt escoté, e dit
qu'il asayereit celé nuyt la merveille. Payn Peverel se
arma moût richement, e prist son escu lusant d'or ou
ime croys de asur endentée, e xv. chevalers e autres
sergauntz ; et s'en ala en le plus hait paloys, e se her-
berga yleqe. E quant fust anuyeteé, le temps devynt
si lede, neir, obscur, e tiele tempeste de foudre e
tonayre qe tous iceux qe là furent devyndrent si en-»
DE FOULQUES FITZ-WARIN. d
poiirys qu'il ne purreint, pur pottr, moyer pié ne
meyn; eynz cochèrent à la terre corne mortz. Payn le
fer fust moût poûry; mes s'en fia en Dieu, de qy yl
porta le signe de la croys, e vist qe nul aye n'ayereit
si de Dieu noun. Se cocha à la terre, e, ou bone deyo-
cioun, pria Dieu e sa mère Marie que ly defendreynt
celé nuyt del poer de Deble. A peyne out fyny sa
preere, Vynt le Malfeé en semblance Geomagog; e si
porta un graut masue en sa mayn, e de sa bouche
geta fu e fumée dont la yille fust tôt enluminée. Payn
ayoit bon espeir en Dieu, e se seigna de la croys, e
hardiment asayly le Malfeé. Le Malfeé hauça sa mace, si
rodra feryr Payn; mes yl guenchy le coup. Le Deble,
par yertu de la croys, fust tut enpoûry e perdy force ;
quar Jrl ne poeit adeser la croys. Payn le pursywy,
qu'il ly fery de l'espée qu'il comença crier, et chey tut
plat à terre, e se rendy mat. « Cheyaler, fet-yl, y us
m'ayez yencu, ne mie par force de yus-meismes ; eynz
avez par yertue de la croys qe yus portez. » — a Dy-
moy, fet Payn, yus, lede créature, quy yus estes e
quey fêtes en ceste yille ; je te conjur en le noun Dieu
et de seynte Croys. » Le Malfeé comença counter, de
mot en autre, come le Bretoun out eynz dit ; e si dit
qe, quant Geomagog fust mort, meintenaunt il rendy
l'aime à Belzebub, lur prince ; e si entrât le cors Geo^
magog, e yynt en semblance de ly en ces parties, pur
6 HISTOIRB
garder le grant trésor qe Geomagog aveit amassé e
mys en une mesone qe yl avoit fet desoulh la terre en
celé ville. Payn ly demaunda quele créature yl fust ;
e il ly dist qe jadys fust aungle, mes or est par son
forfet espirit de Deble. « Quel tresour, fet Payn, avoit
Geomagog? » — «Buefs, vaches, cygnes, poons, chevals
e totes autres bestes tregettés de fin or ; e si avoit un
tor d'or, qe parmy moy fust son devyn, e en ly fust tote
sa créance; e il ly dist ces aventures qe furent avenir.,
"^ E deus foyth par an soleynt .les geantz honorer lur
dieu; ce fust le tor d'or, dont tant or est amassée
q'a merveille. E pus avynt qe tote ceste countré fust
apellée la Blaunche Launde ; e moy e mes compaignons
enclosames la launde de haut mur e profounde fosse,
yssi qe nul entré fust, si noun par my ceste ville qe.
pleyne fust de mavoys espiritz ; e en la lande feymes
jostes e tornoyementz ; e plusours vindrent pur vere
les merveilles; mes unqe nul n'eschapa. A taunt vint
un disciple Jhesu qe apelé fust Augustyn ; e, par sa
prédication, nus toly plusors des nos, e baptiza gent,
e fist une chapele en son noun : dount grant encom-
brer nus avynt. » — a Ore me dirrez, fet Payn, oii est
le tresour dont avez dit ?» — « Vassal, fait-il, ne parlés
mes de ce ; quar yl /iestyné as autres ; mes vus serrez
seignour de tut cet honour, e ceux qe vendrount après,
vus le tendrount ou grant estrif e guère.
DE FOULQUES FlTZ-WARIN. 7
« £ de ta maunche issera
Ly loup qe merveilles fra,
Q'avera les dentz aguz,
E de tous serra conuz,
E serra si fort e fer
Qu'il enchacera le sengler
Hors de la Blaunche Launde :
Tant avéra vertue graunde !
Ly léopard le loup sywera,
E de sa cowe le manacera.
Ly loup lerra boys e montz,
Eu ewe meindra ou peschons,
E tresvoera la mer,
Environera cet y die enter.
Au dreyn veyndra le ieopart
Par son engyn e par son art ;
Pus en ceste lande vendra,
En ewe son recet tendra. »
Qant Tespirit ou dit ce, s'en issit du corps ; e tiel
puour avynt, dont Payn quida devyer. E qant passé
fust, la nuy t enclarsyst e le temps enbely ; e les che-
valers e les autres, qu'enpoilrys furent, s'enveylerent;
e moût s'en mervelerent de l'aventure qe lur aveit
avenu. Lendemeyn fust la chose mostré al roy e à tôt
l'ost. E le roy fist porter le cors Geomagog, e gittre en
un profond put dehors la ville ; e fit garder la mace, e
HISTOIRE
la mostra longemeut à plusours, pur la merveille q'ele
fiist si graunde.
Le roy s'en vet de yleque, e veut en une countré
joygnant à la Blanche Launde, qe jadys fust à un
Bretoun, Meredus fitz Beledyns; e deleés si est un
ohastelet q'est apelleé Arbre Oswald; mes or est apeleé
Osewaldestre. Ly roy apela un cheyaler, Aleyn fitz
Flaev, e ly dona le ohastelet ou tut l'onour qe apent.
E de cely Aleyn vindrent tous les grantz seignurs
d'Engleterre qe ount le soumoun de Fitz-Aleyn. Pus
cesti Aleyn fist enlarger moût le chastel.
Ly roys passa la ryvere de SaWerne, e vist le pays
entour bon e bel; e apela un chevaler qe fust neé en
Loreygne, en la cyté de Meés, qe moût fîist renomeé
de force e de bealté e de corteysic. E sa enseigne fust
de un samyt vermayl, à deus poons d'or. E ly dona
Alburburs ou tôt l'onour q'apent. E issi dona ly roys
à ces raeillour chevalers e plus afiez totes les terres,
chaces e feés de Cestre desqe à Brustut.
Ly roy apela Payn Peverel, ely dona la Blaunche
Launde e foreste, guastyne, chaces e tut le pays. E si
aveit une mote environée de marreis e de cwe ; e là fist
Payn un toiu* bel e fort ; e fust la mote apeléeWaybui s ;
e si court une ryvere deleés qe de Payn Peverel tint
le noun, e si est apelée Peverel. Mes pus fust apellée
Pevereyes. Le roy, qant issi aveyt establie ces terres,
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 9
retorna à Londres , et de Loundre à Normandie, e
yleqe roorust. Pus reigna en Engletere Willam le
R0US5 son fitz; e après ly Henré, son puysné frère,
qe pus détint Robert Courtheose, son eyné ffirere, en
prisone tote sa vye : l'enchespn ne tus serra ore dyte.
Puys ayynt que Payn Peyerel morust en son ch|^stel
en k Peeke; e Willam Peverel, le fitz sa soere, reçust
e avoit tut Teritage Payn. Pus cely Willam par coup
d'espée conquist tote la terre de Morelas tanqe à Tewe
de Dée, EUésmere, Maylour e Nauhendon. Cesty Wil-
lam fist en la Blanche -Launde un tour, e le apela
Blaunche-Tour; e la ville q'est en tour est uncore
apelée Blauncbe -Ville, en englois WhytytUone, En
Ëllesmere fist un autre tour, e sur l'ewe de Keyroc
un autre. Willam ayoit deus bêles neces : Eleyne, la
eynsné; e Melette, la puysné. E si maria Eleyne al
fitz Aleyn, e dona ou ly en mariage tote la terre de
Morlas desqe Keyroc. Melette d'assez fust la plus
faele ; e, pur sa bealté, fust moût desirrée. Mes nul ne
ly vynt à gréé. WiUam la enresona, e pria qe ele se
discoTcreit à ly, s'yl y avoit en la terre nul cbevaler
qe ele voleit prendre à baroun; e si nul tel y fust, yl
la eydereit à son poer. € Certes, sire, fet-ele, yl n'y a
chevaler en tôt le mound qe je prendroy pur richesse
e pur honour de terres; mes, si je jamès nul averoy,
yl serra bel, corteys e bien apris, e le plus vaylant de
10 HISTOIRE
son corps de tote la Cristieneté. De la richesse ne fas-
je force ; quar, je le pus bien dire» qe cely est riche qe
ad qe son cuer désire. » Willam» qant ce oy, surryst;
e dist: « Bêle nece, bien avez dit; e je vus ayderay à
mon poer de tel seignur purchacer. E si tus dorray
Blanche -Tour e qanqe apent ou tut l'onour; quar
femme que ad terre en feé serra d'assez plus desirrée. »
Lors fist Willam une crié en meynte terre» en meynte
citéy qe tous les chevalers de valours qe tomeier yeilent
pur amurS) à la feste Seint-Michel yienent à chastiel
Pererel, q'est en la Peeke; e le cheraler qe mieux
fra> e 1» tomoy venkera, avéra l'amour Melette de la
Blaunche-Tonr> e sire serra e seignour de Blanche-
Ville e de tôt l'onour. Geste criée fust tost depubliée
par plusors terres. Guaryn de Meez, le vaylaunt, ne
avoit femme ne enfant; mes manda à Johun, duc de
la Petite-Bretaigne, tôt l'afiFere de ceste crié, et ly pria
ayde e socours à celé bosoigne. L[e] duc fust moult
vaylant; sy avoit dys fitz chevalers» les plus beals e
plus vaylantz de corps qe furent en tote la Petite-
Bretaygne : Roger le eyné, Howel, Audwyn, Urien,
Thebaud, Bertrem» Amys, Gwychard, Gyrard e Guy.
Le duc maunda ces x. fitz e c. chevalers ou eux» bien
mountés e de totes apparillementz richement aprestez,
à son cosyn Garyn de Meés; e yl les reçust à grant
honour. Eneas, le fitz le roy d'Escoce, vint ou le conte
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 11
de Morrès e les Brutz, Donbars, Umfrevilles e deus
c. chevalers. Sweyu, le prince de Gales^ vint à deus
c. escus; le duc de Borgoyne ou m*^. chevalers. Ydro-
mor, fitz le rey de Galewey, vint ou c. e l. chevalers.
Les chevalers d'Engletere sunt nonbrez à iii^". Guaryn
de Meés e sa compaignie se herbigerent en tentes faitz
en la foreste deleés où le tomoiment serroit, bien ves-
tuz tôt à volenté de un samit vermayl ; e les destrés
furent covertz tôt à la terre au fuer de guère. Guaryn
meismes^ pur estre descpnuz des autres, avoyt un rest
de or. Lors resonerent le tabours, trompes, buysnes,
corns sarazynes, qe les valeyes rebonderent de le soun.
Lors comença le tomoy dur e fort. Là poeit-um vere
chevalers reverseez des destrers, e meynte dure coupe
doneé> e meynte colée. La damoisele e plusoiu^s dames
furent monteez une tour, e virent la bêle assemblé de
chevalers e cornent chescun se countynt. A descrivre
les coupes e continances je n'ay cure; mes Guaryn de
Meez e sa compaignie furent ce jour le meylours, plus
beals e plus vaylauntz tenuz, e sur tous si fust Garyn
le plus perysé en tous poyntz. Avynt qu'il avespry; e
le tornoy, pur la nuyl, ne purra outre durer. Les che-
valers s'en alerent à lur ostels. Guaryn e sa compaigne
se tornerent privément à lur tentes en la foreste, e se
desa[r]merent, e grant joie démenèrent. E nul des
autres grant seignours ne sa voient où yl devyndrent.
12 BISTOIBE
ne qy yl furent, tant se coonlindrent coyement; mè»
de tons forent desoonnz. Lendemeyn crié fbst psr toi
une jo8te. A Utmt Tynt Garyn à joftes TesUi de foyle
de ère toi Tert hors de la fin^ste, OMne cely qe fbsi
aTenturous e tôt desocmo. Qoant le doc de Borgoyne
Tad Teo, meyntenant ly corost tor, e ly fiery grant
coop de une lance. Goaryn le refcry, cjo'il tribncha de
le chyral en my la place; pos un autre, pus le tierce.
Melette de la Blanche^Tour ly manda son gant, e pria
qu'il la defendist. Yl dit que si frat à son poer; e si se
repeira à la foreste, e se arma de ces armes Yermaik,
e Tint ou ces compaignons en le champ, e si yenqui
le tomoy, e purprist le champ pur totes les gentz qe
la Tyndrent : dount jugement se prist entre tous les
grantz seignours e herrautz e disours qe Guaryn, qe
fust le cheraler aventurous, à resoun avereit le pris
del tomoy e Melette de la Blaunche-Tour. E yl, à grant
joie» la pristy e la dammoysele ly. Si maonderent le
eresque de la countré; e, veaunt touz, le ad esposé.
Willam Peverel tint une feste moût riche à les espo-
sayles; e, quant la feste fust departy, Guaryn prist sa
mnlier e sa compagnie, e s*en alerent à Blaunche-Ville,
e demorj^ot yleque à grant joie quaraunte jours. Donqe
repeyrerent les dys frères ou lur c. chevalers à Ere-
taigne le Menure; mes Gwy, le puysné frère, remist en
Engletere ; e conquist par coup d'espëe meynlcs bêles
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 13
terres, e si fust apeleé Gwy le Estraungei et de ly vin-
drent tous les grantz seignurs de Engletere qe ount le
soumoun de Estraunge.
Gwaryn de Meez tint longement à grant honour la
seignurie de Blaunche - Vile ; mes Yerrardy le fitz
Yweyn, prince de Gales, ly fesoit grant damage, ocist
ces gentZy destruit ces terres. A tant asistrent jour de
bataylle, où meynt prodhome perdy la yye. Al dreyn,
toma la peite à Yervard; quar yl perdy plusours de
ces gentz, e guerpist le champ^ e s'en fuist à deshonour.
Lors mist Guaryn un cheyaler moût fort e yaylant,
Gwyi le fitz Gandelou de PorkyntonOi à garder l'onour
de Blaunche -Ville e ces autres terres.
Ayynt qe la dame enseynta. Quant fust delyyres,
al houre qe Dieu ordyna, apelerent l'enfaunt Fouke.
E quant l'enfant fust de set anz, si le mandèrent à Joce
de Dynan pur aprendre e noryr ; quar Joce fust che-
valer de bone aprise. Joce le resçust à grant honour e
grant cherté, le norry en ces chambres ou ces enfauntz ;
quar yl avoit deus fyles, dont la puysné fust de meyme
l'âge qe Fouke fust, e si fust apelée Hawyse. La eyns-
née fust apelée Sybille. A ycel temps grant descord
e guère fust entre sire Joce de Dynan et sire Water
de Lacy, qe donqe sojoma moût à Ewyas : pur quel
desco: d meint bon chevaler e meynt prodhome perdy
la vye; quar chescun corust sur autre, ardèrent lur ter-
] 4 HIftTOIHE
resy preierent e robberent lur gentz, e meinte autre
damage fyrent. Quant Fouke fust de xtiii. ans, moult
parfust bealsi fortz e g'rantz.
Un jour de esté, sire Joce leva matin. Si mouuta un
tour en my son chastiel, pur surrere le païs ; e regarda
vers la montaigne q'est apelée Whyteclyf ; e vist les
champs oovertz de chevalers, esquiers, serjauntz e
vadletZy les uns armés sur lur destrés, les uns à pié ;
e oyt les chyvals hynnyr, e vist les healmes relusantz.
Entre queux vist-yl la banere sire Water de Lacy, re-
flambeaunt novel d'or ou un fés de goules par my . Lors
escrie ces chevalers, e les comanda armeri e mounter
lur destrersy e prendre lur arblasters e lur archers,
e aler al pount desouth la vile de Dynan, e garder le
pount e le gué, qe nul n'y passast. Sire Water e sa
gent quiderent passer seurement; mes les gentz sire
Joce les unt ruashé arere, e plusours d'ambe partz
sunt naufrez e tuez. A tant vint sire Joce e sa banere
tote blaunche d'argent, à trois lyons d'asur passauntz,
coronez d'or; ou ly v"., qe chevalers, qe serjauntz à
chyval e à peé, estre les borgoys e lur serjantz qe bons
furent. Donqe à grant force passa Joce le pount ; e
hurterent les ostz corps à cors. Joce fery Godebrand,
qe porta la banere de Lacy, par my le cors de une
launce. Donqe perdy le Lacy sa banere. A tant la gent
s'entre-fer irent, e plusours sunt d'ambe partz occis.
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 15
Mes al Lacy avyiit le pys ; quar yl s'en vet fuaunt e des-
confitZ) e prent sa voie deleés la ryvere de Temede.
La dame, ou ces filles e ces autres d^miseles, fust mon-
tée une tour; si unt veu tôt l'estour, e prient Dieu
devoutement qu'il salve lur seignour e ces gentz de
anuy e de encombrementz. Joce de Dynan conust
Water de Lacy par ces armes, e le vist fuaunt tout
soûl; quar yl aveit grant pottr de perdre la vie. Si fert
son destrer des esperouns, passa mountz e vals^ e en
poy de oure ad ateynt le Lacy en une valée^ desouth le
boys, vers Ghamp-Geneste; si ly comaunda retomer.
Le Lacy nully ne vist, si sire Joce nouu; e se retorna
mult hardiement. Ë s'entre-ferirent durement; quar
nul n'out cure de autre esparnier. Grantz coupes e
fortz s'entre-donerent. Joce sembla qe la medlé dura
trop longement, hausa l'espée de maltalent; si fery le
Lacy al escu, qe tôt le porfendy par my, e ledement
le naufra par my le bras senestre. Joce l'assaut egre**
ment ; e a poy qu'il ne l'eust pris, quant sire Godard
de Bruyz e deus chevalers ou ly vindrent socoure le
Lacy. Sire Godard e ces compaignons moût hardie-
ment asaylent sire Joce de tote partz; e yl se defent de
eux come lyon. La dame e ces fyles en la tour veient
lur seignour si démené q'à poyne pussent ester, crient,
palment e grant duel demeynent; quar jamès ne qui-
dent ver lur seignour en vie. Fouke, le fitz Waryn,
1 6 HIATOIRE
fus! remys en le chastel; quar yl ne fust que xtiii. anz.
Si oy le cry en la tour; monta hastivement, si Tist sa
dame e tous les autres ploure[r]. Yl s'en ala à Hawyse,
e demaunda quey ly fust e pur quoy fesoit si moume
cbere. « Tès-tey, fet-ele. Poy resembles-tu ton père,
q'est si hardy e si fort; e vous estes coward, e tous
jours serrez. Ne Teiez-Tus là mon seignour, qe grant-
ment vus ad chery e suefment norry» est en peryl de
mort pur defaute de ayde ? e tus, maveys, alez sus e
jus seyntz, e ne donez jà garde. » Le yadlet, pur la
repreofe qe ele ayoit dyt, tôt enrouy de yre e de mal-
talent; e s'en Tala meintenant de la tour, e troya en
la sale un yiel roynous haubert, e le vesty meyntenant
à mieux qu'il savoit ; e prist une grose hasche denesche
en sa main. Si Tynt à une estable, qe ert deleés la
posteme par ount home Tet vers la ryvere; e trova
là un somer. Yl mounta meyntenant le somer, e s'en
issist par la postemei e passa bien tôt la ryvere, e vynt
al champ où son seignur fust abatu de son destrer e
en poynt de estre oeys» s'yl n'eust survenu. Fouke
aveit un healme lede, e ly covry à poy les espaudles;
e à sa premere venue fery Godard de Bruz, qe aveyt
saysy son seignour, de sa hasche, e ly coupa Teschyne
del dors en deus meytés, e remounta son seignour.
Fouke se torna vers sire André de Preez, sy ly dona
tde sa hache en le healme de blanc asser, qe tut le
DE FOULQUES FITZ-WAHlN. 17
purfendy desqe à dentz. Sire Ëmalt de Lyls veit bien
qu'il ne puet en nulle manere eschaper, quar yl fust
sorement naufré; e se rendy à sire Joce. Le Lacy se
defendy ; mes en poy de oure fust seysy.
Ore est sire Water de Lacy pris e sire Ëmalt de
Lyls, e sunt menez outre la ryvere vers le chastel de
Dynan. Donqe parla sire Joce : « Amys borgeis, moût
estes fort e vaylant; e, si vus n'eussez esté, j'eusse esté
pieçà mortz. Je vus su moût tenuz, e serroy pur tous
jours. Vus demorrez ou moy, e je ne vus faudrey
jamès, » Joce quida qu'il fiist borgeis; quar borgeys
releyient ont vestu les armes, e cens qe l'enfant avoit
furent roynous e ledes. Donqe respount l'enfant, e dit <
« Sire, je ne sui nul borgeys; e ne me conussez poynt?
je su Fouke, vostre norry. » — « Beal filz, fet-il, be-
neit seyt le temps que je vus unqe nory 1 quar jamès
son travayl ne perdra, qe pur prodhome fra. » A tant
amenèrent sire Water e sire Ërnalt en une tour, qe est
apelée Pendovre; e yleqe fist mediciner lur playes, e
garder à grant honour. £ la dame e ces fyles e lur
damoyseles, chescun jour, confortèrent e solacerent
sire Water e sire Ernalt de Lyls.
Sire Emald fust jeuene bachiler e bel, e grantement
fust suppris de l'amur Marioun de la Bruere, une mour.
gentile damoisele, e si fust la mestre chaunbrere la
dame del chastiel de Dynan. Sire Ernald e la damoi-
3
18 HISTOIRE
sele entre-parlerent soTent; quar ele soleil chescun
jour venir en la tour, ou sa dame, de conforter sire
Water de Lacy e sire Emald. Ayynt qe sire Emald,
quant veyt temps, aresona la damoysele; e dit qe ele
fust la chose qu'il plus ama, e qe tant est suppris de
s'amour qe repos ne puet avoir jour ne nuyt, si ele ne
se asente a ly ; quar ele ly puet socours fere de tous
ces anuys. E, si ele le voleyt fere, yl la fireit seureté
à sa volentë demeyne que jamès nulle autre û'amera,
sy ly noun; e, al plus tost qu'il serreit delyvres, yl la
prendreit à femme. La d^mmoisele oy la bêle pro-
messe , e ly graunta fere sa volenté en totes choses,
e prist seureté de ly qu'il la tendreit covenaunt de sa
promesse. La damoisele les promit qe ele les eydereit
en tous poyntz privément, qu'il fussent delyvres de
prisone. E prist towayles e lynceles; si porta en la
tour, e les fist contre ensemble, e par els avala sire
Water e sire Ernalt de la tour, e lur pria qu'il teny-
sent lur lealté e la promesse qe eux ly aveynt promys.
E yl la dysent qe lealment se contendreynt à ly sauntz
fauser nul covenaunt, e la comanderent à Dieu.
Sire Water e sire Ernalt tôt soûls alerent lur che-
myn à peé; e, al aube de jour, vindrent à Ewyas, à le
chastiel sire Water de Lacy. E quant les gentz virent
lur seignur seyn e heyté revenuz, ne fet à demaunder
si leés furent; quar yl le quiderent aver perdus pur
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 19
tous jours. Joce de Dynan leva matin; e s'en ala à sa
chapele dedenz son chastel, qe fust fet e dédié en
Tonour de la Magdaleyne, dount le jour de la dedica-
tion est le jour seynt Cyryac e lxx. jours de pardoun.
Si oy le service Dieu; e, quant avoit ce fait, mounta
le plus hait tour, q'est en la terce bayle del chas tel,
qe or est apelé de plusours Mortemer. E pur celé re-
soun ad le noun de Mortemer, qe uns des Mortemers
fust leynz bone pièce en garde. Joce survist le pays,
rien ne vist si bien noun. Descendy de la tour; si fist
corner à laver, e si maunda pur son prison, sire Water.
Quar tant honur ly feseit qe nul jour ne vodra laver
ne manger eynz ly. Les prisouns furent quis par tôt.
Ce fust nyent; quar eschapez erent. Sire Joce ne fist
nul semblant qu'il se repenty de lur aler, ne jà garde
ne dona.
Sire Water pensa qu'il se vengereit ou morreit:
maunda pur ces gentz d'Irlaunde, e prist souders,
chevalers e autres, issi qe fort estour e dur assaut
fust entre sire Water e sire Joce. Les countes e barons
d'Engletere virent la grant mortalité e damage qe fust
avenu, e uncore entre eux de jour en jour avynt:
pristrent un jour d'amour entre sire Water e Joce ; e
yleoqe furent totes grevances redressez, e les parties
accordeez; e, devant les grantz seignours, furent en-
tre-baysez.
20 HisToms
Joce de Dynan maunda ces letres à Warin de Meés
e Melette, sa bone dame, le piere Fouke. L'enfaunt
Fouke fiist auke brun; e, pur ce, fîist pus apelé de
plusours Fouke le Brun. Waryn e Melette e grantz
gentz yindrent al chastel de Dynan, e furent resçu
ileqe à grant honur e joie, e se enveiserent une sy-
maigne. Joce molt corteisement parla à Guarin, e ly
dit : « Sire, fet-yl, vus avez seynz un fitz que je vus ay
nory. J'espoir qu'il serra prodhome e vaylant; e serra
vostre heir, sy yl vus survist. E je ay deus files, qe
sunt mes heyrs; e, si vus plust, vodrey-je qe nus fus-
soms entre-aliez par mariage. E donqe ne doteroms
gueres nul grant seignur d'Engletere, qe nostre partie
ne serreit meintenu à dreit e à resoun. E, si vus le
volez graunter, je vueil qe Fouke le Brun espouse Ha-
wyse, ma puysné file, e qu'il seit heir de la meyté de
tote ma terre. » Guarin ly mercia molt de soun beal
profre, e dit qu'il le grantereit tôt à sa volenté de-
meyne. Lendemayn maunderent à Herford pur le
evesque Bobert de Le evesque vint; e, à
grant honour, fist les esposailles. Joce tint grant feste
XV. jours.
Quant la feste fust departy, sire Joce e sire Guarin
e lur meynés s'en alerent vers Hertlande; quar yleqe
vodreint sojorner une pièce. Marion de la Bruere se
feynist malade e se cocha en son lyt; e dit qe si ma-
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 21
lade fust qe ele ne se poeit mover, si noiin à graiit
peyne. E demora al chastel de Dynan. Joce comanda
qe ele fust guardé tôt à talent. E, pur doute de le
Lacy e autres gentz, soudea xxx. chevalers e lx. dis
serjantz e vadletz; e les bayla son chastel à garder,
tanqe à son repeyr en le pays. Quant Joce fust passé,
lendemein manda Marion son message à sire Emalt de
Lyls; e ly pria, pur la grant amisté qe entre eux fiist,
qu'il n'obliast les covenauntz qe entre eux sunt affer-
mez, e qu'il viegne hastivement parler ou ly à Je chas-
tel de Dynan. Quar le seignur e la dame e la force
de lur meynage sunt vers Hertlande. E qu'il vienge à
meisme le lu où dreyn s'en ala de le chastel. Quant
sire Ernald avoit oy le mandement sa amie, meynte-
nant remanda meisme le messager, e pria pur s'amur
qe ele mesurast la hautesse de la ffenestre par ount yl
issist dreyn de le chastel; e quele gentz e quantz e
quele meisnie lur seignour avoit lessé derere ly, si
remandast par le dit messager. La damoisele, qe nul
suspecioun de tresoun n'aveit, prist un fyl de say, e le
va la par m y la fenestre desqe la terre, e tôt l'estre del
chastiel maunda à sire Ernalt. Donqe remanda sire
Ernald à sa amie qe le quarte jour, avant houre de
mienuyt, serreit à ly à meisme la fenestre par out yl
passa ; e la pria qe ele ly atendist yleque.
Sire Ernald de Lyls fist fere une eschiele de quyr
23 HISTOIRE
de meisme la longure de le fyl de saye qe s'amie ly
maunda. Donqe s'en ala sire Ernald à soun seigaour,
sire Waler de Lacy, e ly counta que Fouke, le fiu
Waryn de Meés, avoit esposé liawyse, la fille sire Joce
de Dyiian, e qe sire Waryn e sire Joce aveyent lessé
garnesture en le chastel de Dynan, e furent alez vers
Hertlande pur quei^ souders e pur assembler yleqe
lur gentz e pur ailner host e pueple santz nombre.
« Ë, quant tut l'ost serra assemblé, meyutenaunt ven-
dront à Ewyas, e ardrount e prendront vos terres. £,
si yl poent vostre corps prendre, vus serrez detrenché
en menu pièces , e vous e les vos desherytez pur tous
jours. E ce me mand celé qe vus bien savez; quar ele
siet e ad oy la vérité. » Quant sire Water entendy la
novele, devynt tut pal pur angoise; e dit: « Certes, je
ne pus crere qe sire Joce me freit tiele deceyte, depus
qe nus sûmes acordeez, e, veantz plusoùrs, entre-
bayseez ; e je harrey moût qe nos piers diseynt qe le
acord serreit enfreynt endreit de moy, e sire Joce est
tenuz leal chevaler. » — «Sire, fet sire Emalt, vus
estes mon seignur : je vus garny de vostre damage ;
quar je say la vérité par celé qe ad oy le consayl. E ne
dites mie autre foyz qe je savoy vostre damage e ne le
vus vodray garny r, ne qe je vus ay menty ma fey. »
Sire Water devynt molt pensyf, e ne savoit nul bon
consayl sur celé bosoigne. A tant dit 'sire Ernald:
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 23
« Qei me loez-vus de fere ?» — « Sire, fel-il, créez mon
consayl, si frez bien. Je irroy meisme, ou ma com-
pagnie; si prendroy par engyn le chastiel de Dynan ;
e quant sire Joce avéra fayly de soun recet, il vus
grèvera le meynz e se retrerra de sa pensée ; e , par
tant, poez estre vengé de ly de le hounte qu'il nus ad
sovent fait. E, sire, pensez qe, seit ce à droit ou à tort,
home se deit de son enymy venger. » Sire Water del
tôt se mist en le consayl sire Ernalt, e quida qu'il ly
aveit dit veir de quanqu'il avoit dit; mes yl menti
corne faus chevaler.
Sire Ernald apparilla sa compaignie, qe grant fust ;
quar yl avoit en sa compagnie, qe chevalers, esquiers
e serjauntz, plus qe myl. E vynt al chastiel de Dynan
par nuy t ; e fist partie de sa compagnie demorer en le
boys près de Whyteclyf, e partie enbucher desouth le
chastiel en les gardyns. La nuyt fusf moût obscure ;
quar yl ne furent aparçu de gueyte ne de autre. Sire
Emald prist un esquier qe porta la eschiele de quyr,
e s'en alerent à la fenestre où Marion les attent. E
quant ele les vist, unqe ne fust si lée; si en vala jus
une corde, e traist sus la eschiele de quyr ; si la ferma
à un kernel de le mur. E Ernalt monta bien e légère-
ment la tour, e prist sa amye entre ces bras e la beysa ;
e firent grant joie, e s'en alerent en une autre cham-
bre, e soperent, e pus alerent cochier, e si lesserent
24 HISTOIRE
la eschiele peadre. L'esquier qe la porta ala por les
chevalers e la grant compaignée, qe furent enbuchez
en le jardyn le seygnur e aylours, e les amena à l'es-
chiele. Ë c. bornes bien armés mounterent par Tes-
chiele de quyr, e s'en avalèrent de la tour de Pendovre,
e s'en alereut par le mur derere la cbapele ; e troyerent
le geyte somoilant, quar yl devynt tut pesant contre
la mort; e ly pristrent meyntenant, e ly vodreynt aver
rueé jus de son tour en la profonde fosse. £ yl cria
mercy, e pria qu'il ly vodreynt soffryr sifler une note
avaunt qu'il morust. E yl ly granterent; mes yl le fist
pur ce qe les chevalers de leynz se devereynt garnyr.
Mes ce fust tut pur nient. Tant come il sifla, tut le
plus de les chevalers e serjauntz furent découpées;
brayerent e crièrent en lur lytz, qe Dieus poeit aver
pi té. Mes les compaignons sire Ëmalt furent santz
pieté; quar quanqe leynz fust mistrent à lede mort, e
meynte lyncele qe fust blanche à seyr tôt fust enrouy
de sang. Al dreyn ruèrent le gueyte en la profonde
fosse, e rompi le col.
Marion de la Bruere cocha deleez son amy sire Er-
nalt, e rien savoit de la treson qe sire Ernald avoit
fet ; si oy grant noise en le chastiel , leva del lit e re-
garda jus en le chastiel, oyt la noyse e le cry de
naufrez, e vist chevalers armeez e les blanks healmes
e hanbercz : meyntenant aparcust qe sire Ernald ly
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 25
avoit desçu e trahi ; si comença moût tendrement à
ploure[r], e dyt pytousement: « Alas, fet-ele, qe unqe
nasquy de mère ! quar, par mon forfet, ad mon sei-
gnûr, sire Joce, qe suef me norry, perdu son chastel
e sa bone gent ; e, si je ne usse esté, rien ne fust perdu*
Alas , qe je unqe cru cest chevaler ! quar, par son
losenge, m'ad-yl desçu, e mon seygnur, de cuy plus
me est. » Marion tote ploraunte saka l'espeye sire
Ernald, e dit: « Sire chevaler, esveyllez-vus ; quar
estrange compaignie avez amené en le chastiel mon
seignur santz congié. Mes qe vus, sire, e vostre es-
quier, fiissez par moy herbygez, les autres, qe seyntz
par vus sunt, ne furent mes. E, depus qe vus me
avez desçu, vus ne me poez à reson blâmer, si je vus
renke service après vostre désert ; mes jamès ne vus
avanterez à nulle amye qe vus avérez qe, par ma de-
ceyte, avez conquis le chastiel de Dynan e le pays. »
Le chevaler se dresça en estant. Marion, de la espeye
qe ele tynt trete en sa mayn, fery le chevaler par my
le cors; e si morust le chevaler meyntenant. Marion
savoit bien qe, si ele fîist prise, ele serreit ly vré à maie
mort, e ne savoit qe fere; mes se lessa cheier à une
fenestre devers Lyneye, si rompy le col.
Les chevalers qe furent en le chastel defermerent
les portes, e s'en alerent en la vyle, e overyrent la
porte de Dynan vers la ryvere, e firent tôt lur gentz
4
26 HISTOIRE
entrer. Si misireni au fyn de chescune rywe eu la
vyle grant nombre de gentz, e fyrent esprendre la
vile de fu; e, en chescune rywe, fyrent deus feus.
Les borgeys e les serjauntz de la vyle, quant vyrent
le feu, levèrent des lytz, les uns nuz, les uns vestuz ;
e ne saveint qe fere, quar tut furent à poy forsenez.
Les chevalers e les esquiers de Lacy les corurent sur,
si les découpèrent e ocistrent espessement. Les bor-
gois ne se poeynt, ne saveynt défendre; quar tous qe
trovez furent, furent detrenchez ou ars en le feu. Les
damoiseles alerent par les vendes, vyrent lur pieres e
lur frères gisir detrenchez par les rywes, s'engenule-
rent, prièrent mercy e pardon de vye. Ce fust pur
nient, à ce qe Testoyre dyt : homes, femmes ou en-
fauntz, jeounes e grantz, tous furent ocys, ou de arme
ou de feu. A taunt vynt le jour: donqe mandèrent à
lur seignur qu'il, ou tôt son poer, venist al chastel de
Dynan. E si fist-yl, e fist mètre sa banere sur le Pen-
dovre en signe de victorie qu'il aveit conquis, ce qu'il
eyns fust en prison mys; mes la vile e quanqe fust
leyns fust arse à neyrs charbouns.
Quant la novele vynt à sire Joce e Guarin de Meez,
moût dolent, triste e morne furent. Si mandèrent par
tôt à lur parentz, amys, e à lur gentz demeyne, issi
que yl aveient dedenz une moys set myl de bone gent
bien apparillez. E vindrent à chastel Key, qu'est fermé
DE FOULQUES FIT2-WARIN. 27
desuz un tertre, une liwe de voye de Dynan. Mes
chastel Key fust viel à ycel houre, e les portez furent
porrys; quar nulle gent ne le aveyent habitée c. ans
avaunt. Quar Key» le seneschal mon sire Arthur le
roy, le avoit fet, e tôt les pays à ly fust apendant, e
le noun de ly uneore tient; quar la gent du pays le
apelent Keyenhom. Joce e Garyn e Fouke le Brun, ou
lur gent, lendemeyn vont vers le chastiel de Dynan;
si le assailent moût egrement de tote partz. Sire Wa-
ter e ces chevalers défendent moût hardiement les
kernels e les murs. E pus sire Water e ces Irreis s'en
issirent de le chastel; e si rendirent fort e'stour à ceux
qe dehors furent. Joce, Garin e Fouke les assaylent
de totes partz e les ocient espessement. Les Irreis gi-
sent detrenchez par le prés e jardinz, issi qe à sire
Water e les suens î^vynt le pys; yl e sa gent se ra-
treyent e entrèrent le chastiel, e défendent les murs.
E, si yl ussent demoreé dehors, bien tost ussent oy
no vêles moût dures. Sire Joce e sire Warin se retor-
nerent à lur herberges e se désarmèrent; e, quant
urent mangée, s'entre-solacerent. Lendemeyn aysay-
lirent le chastel moût egrement de totes partz ; mes ne
le purreyent prendre. E quanqu'il purreyent encoun-
trer dehors, les detrencherent. Geste sege dura longe-
ment. Pus après avynt qe, par le assent de un roy
d'Engleterre, furent les portes de le chastel, qe tre-
28 HISTOIRE
blées erent, ars e espris par feu que fust illumeé de
bacons e de grece; e la tour sur la porte ars dedenz.
E le hait tour q'est en le tierce bayl de chastel» qe fort
e bien ovrée fust qe home ne saveit à celé houre nul
plus fort ne meylour, (ust de grant partie abatu, e celé
bayle à poy tote destruyt.
Sire Waryn devynt malades, e prist congre de sire
Joce, e s'en ala à Albrebure soolement ou un esquier,
e morust. Fochun le Brun, quant son père fust mort,
vynt à Albrebure ; e prist homage e fealté de totes les
gentz qe tindrent de son père; e prist congié de Me-
lette, sa mère, e Hawyse, sa femme; e reyynt à sire
J6ce, e ly counta coment fust avenu de son père :
dount Joce fust moult dolent de la novele.
Sire Water fust dolent e irascu qu'il ayoit perdu sa
genty e moiU dota de estre mat e vencu, e se purpensa
moût estroytement. Si maunda une letre à Yervard
Droyndoun» prince de Gales, come à son seignur,
amy e parent; e li counta par letre qe sire Willam
Peverel, qe tint Maylour e Ellesmere, est mortz; e
dit qe ceus terres sunt de sa seignurie aportenauntz
à Powys, e sire Willam les tint de le doun le rey
d'Engleterre à tort, e le roy les seysera en sa meyn.
« E, si issi fait, il tus serra moût mal yeysyn ; quar il
ne vus ayme poynt. E, pur ce, sire, venez chalenger
vostre droit ; e, si vus plest, me vueil lez socours
DP FOULQUES FITZ-WARIW. 29
maunder, quar je su durement assegeé en le chastel
de Dynan.*»
Yeryard, quant oy avoit la novele, fist assembler
Galeys, Escoteys, Yrreys, plus qe vynt myl; e se hasta
vers la marche, ardy les vyles, robba le gentz, e tant
ayoit grant gent qe le pays ne les purra contre-ester.
Joce fust coin te e aparçust la venue Yarvard; e yl e
sa gent e Fouke se armèrent, e hardiement assaylerent
Roger de Pouwys e Jonas, son frère, qe vyndrent en
Pavant-garde de Tost Yervard; e ocistrent plusours
de lur. Roger e Jonas ne poyent durer l'estour, e stî
retrestrent arere. A taunt vynt Yervard armeé, dont
les armes furent de or e de goules quartylé, e en
chescun quarter un leopart ; e assayly sire Joce e
Fouke. E yl se defendyrent longement, e ocistrent
plusours de lur gent; mes yl avoient tant gent que
sire Joce ne purra meyntenir Festour, e se retorna
vers chastiel Key, à une lywe de Dynan. Mes molt ly
mesavynt; quar yl avoit perduz plusours de sa gent.
Yervard e ly Lacy, qe donqe leé fust, pursiwy sire
Joce e Fouke; e les assistrent en le chastelet, e les
assaylerent moût egrement. Joce, Fouke e lur cheva-
1ers, treis jours, santz beyvre ou manger, defenderent
lur feble e viel chastelet contre tut Tost. Al quart
jour, dit sire Joce qe greyndre honour serreit pur eux
de lessir le chastel e morir en le champ à honour, qe
«30 UISTOIKE
morir en ie chastel de feym à desouour; e meintenaiit
vindrent en le champ, e ocistrent à iur premer ayenue
plus qe treis cent, qe chevalers, esquiers e sergantz.
Yervard Droyndon e ly Lacy e Iur gent asaylerent
sire Joce e sa gent. E yl se défendirent corne leons ;
mes tant gent les assistrent entre eux qu'il ne poeynt
longement durer ; quar le cheval sire Joce fust ocys,
e yl-meismes durement naufré; e ces chevalers, les
uns pris, les uns ocys. Donqe pristrent sire Joce e
ces chevalers, e les mandèrent à prison à le chastel de
Dynan, là où il soleit estre seignur e mestre. Quant
Fouke vyst prendre e amener sire Joce, a poy qu'il
ne forsena de duel e de ire ; brocha le cheyal de espé-
rons, si fery un chevaler qe le mena d'une launce
par mi le cors. A tant vynt Ywein Keveylloke , un
chevaler hardy e fer, e de une launce de freyne
fery Fouke par my la voyde du corps, e la launce
debrusa, e le tronchoun remist en le cors ; mes les
entrayles ne furent rien entameez. Fouke se senty
fièrement blessé, e rien se poeit défendre ; se mist à
la fute, e les autres l'enchacerent deus lywes e plus.
E, quant ne le poeint ateindre, se retornerent e seisi-^ '^'^
totes les terres que Fouke aveyt. E pristrent Gyoun,
le fitz Candelou de Porkyntone, qe le conestable Fouke
esteit; e mandèrent à prison à Rothelam, e ces vu. filz
ou ly.
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 31
Fouke grant duel fet pur son seignour. Si ad en-
tendu qe le roy Henré est demoraunt à Gloucestre , e
s'en ya lauiidreit. Si corne yl approcha la ville, si fust
le roy après soper alaunt sey dedure en un preé. Si
vist Fouke venant armé al chyval, e moût poinouse-
ment chyvalchaunt; quar yl ert feble, e son destrer
las. « Atendoms, fet le roy, jà orroms noveles. » Fouke
vint tut à chyval al rey; quar yl ne poeit descendre.
Si counta le roy enterement tote la aventure. Le roy
rouly les oyls mou ferement, e dit qu'il se vengereit
de tels malfesours en son reaime. E ly demanda qu'il
fust e dount fust neé. Fouke counta le roy où ert neé
e de qele gent, e qu'il estoit le fitz Guarin de Meez.
« Beau fitz , fet le roy, vus estes bien venuz à moy ;
quar vus estes de mon sang, e je vus ayderoy. » Le
roy fist mediciner ces playes. E maunda pur Melette,
sa mère, e Hawyse, sa femme, e lur autre meyné ; si les
retynt ou ly, e fesoit Hawise e Melette demorer en
les chambres la reygne. Hawyse fust grosse enseinte;
e, quant terme vynt, fust delyvres de enfaunt. E firent
apeler Tenfaunt Fouke. Cely en son temps fust moût
renomeé, e ce fust à bon dreit; quar yl fust sauntz pier
de force, hardiesse e bounteé.
Quant Fouke le Brun fust seyn de sa playe, le roy
Henré maunda une letre à sire Water de Lacy, e co-
manda sur vie e menbre qu'il ly delyverast Joce de
32 HISTOIRE
Dynaiiy son chevaier, e ces chevalers qu'il tient à tort
en sa prisoun ; e, si yi ne le fet, yl les vendra quere
meymes, e fra tiele justice qe tote Engletere em par-
iera. Quant sire Water avoy t oy le maundement, niolt
fust enpoUry de le maundement; si delyvera sire Joce
e ces chevalers, e les vesty e monta honorablement, e
les amena par la posterne de vers la ryvere de Temede
e outre le gwé de Temede e outre Whyteclyf, tan qu'il
vyndrent en le haut chemyn ver Gloucestre. Quant
sire Joce vint à Gloucestre, le rdy le reçust moût lée-
ment, e ly promist ley e resoun. Joce sojoma ou le
roy tant corne ly plust ; pus prist congié e s'en ala à
Lambourne, e sojoma yleque ; e bien tost après mo«
rust, e fust enterrée yleoqe. Dieus eit merci de la
aime !
Le roy Henré apela Fouke e ly fist conestable de tut
son host; e ly comanda tote la force de sa terre, e qu'il
presist gent assez e qu'il alast en la marche, si en cha-
sast Yervard Droyndon e son poer hors de marche.
Issi fust Fouke fet mestre sur tous; quar fort ert e
coragous. Le rey remist à Gloucestre; quar yl fust
malengous, e gueres ne poeyt traviler. Yervard avoit
pris enterement tote la marche, de Cestre desqe Wyr-
cestre ; e si avoit tous les barouns de la marche dés-
héritée. Sire Fouke, ou l'ost le roy, meint fer assaut
fist à Yervard ; e à une batayle deleés Herford, à Wor-
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 33
meslowe, ly fist fuyr e guerpyr le champ. Mes ayant,
d'ambe partz, furent plusours ocys. La guère fiere e
dure dura entre sire Fouke e le prince quatre anz, à
tant qe à la requeste le roy de Fraunce fiist pris un jour
d'amur à Salobure entre le roy e Yervard le prince, e
furent entre-beysez e acordeez. E le prince rendy à les
barons de la Marche totes les terres c|u'il avoit de eux
prises, e al roy rendy Ëllesmere; mes Blanche-Ville e
Maylor ne vodra rendre pur nul or. « Fouke, fet le roy,
depus qe vus ayez perdu Blaunche-Ville e Maylor, en
lu de ce vus doyn-je Alleston e tut Tonour qu'apent, à
tenir perdurablement. » Ë Fouke le mercia chèrement.
Le roy Henré dona à Lewys, le fitz Yeryard, enfant
de yii. anz, Jonette, sa fyle; e en mariage lur dona
Ëllesmere e autres terres plusours ; si mena Lewis à
Loundre ou ly. Le prince Yeryard, ou sa meyné, prist
congié du roy, e s'en ala yers Gales ; si dona à Rogier
de Powis Blaunche-Ville e Maylour. Rogier pus dona à
Jonas, soun puysneé frère, Maylour. Ore ayez oy co-
rnent sire Joce de Dynan, Sibille, la eyné, e Hawyse,
le puisné, ces filles, iiirent déshéritez de le chastel e
Tonoui* de Dynan, qe sire Water de Lacy tient à tort;
mes pus fust la yille de Dynan reparillëe e refetée,
e si fust apellée Ludelowe. Ë si avez oy coment
sire Fouke, le fitz Warin de Meez, est desheryteé
de Blanche-Ville e Maylour. Sibile, la suere eyné,
5
34 ntsTomE
fust pus mariée à Payo, le fiu Johan, molt yailant
chevaler.
Fouke e Hauwyse tant ament demoré ou le roy,
qu'il ayoit synk fitz : Fouke, Willam, Phelip le Rous,
Joban e Alayn. Le roy Heure ayoit quatre fitz : Heure,
Richard Cuer-de-Lyon» Johan'i e Gaufré , qe pus fust
counte de Bretaigne le Menour. Heure fust coroueé
yiyant son père ; mes il morust ayant le piere. E après
la mort le père» Richard; e après Richard , Jehan ^
son frère, qe tote sa yie fust mayeys et contrarions e
enyyous. Fouke, le jeouene, fust norry ou les ini. fitz
Henré le roy, e moût amé de tous, estre de Johan;
quar yl soleit soyent medler ou Johan. Ayint qe Johan
e Fouke tut soûls sistrent en une chambre, juauntz à
eschekes. Johan prist le eschelker, si fery Fouke grant
coupe. Fouke se senti blescé, leva le pieé;. si fery
Johan en my le pys, qe sa teste vola contre la pareye,
qu'il devynt tut mat e se paljnea. Fouke fust esbay ;
mes leé fust qe nul fust en la chambre» si eux deus noun.
Si (îrota les oryles Johan, e reyynt de palmesoun. E s'en
ala al roy, son piere, e fist une grant pleynte. « Tès-tey,
mayeys, fet le roy; tous jours estes contgckaunt. Si
Fouke nulle chose si bien noun yus fist, ce fust par
vostre désert deiQ^yne. » E apela son mestre, e ly fist
batre fynement e bien pur sa pleynte. Johan fîist molt
coroceé à Fouke; quar unqe pus ne le poeit amer de cuer .
DE FOULQUES FITZ-WÀRIN. 35
Quant le roy Henré le père fust mort, donqe régna
rey Richard ; si avoit molt cher Fonke le Brun, le fitz
Warin, pur sa lealté; e fist apeler devant ly à Wyncestre
le V. fitz Fouke le Brun : Fokety Phelip le Rous» Wil-
lam, Johan e Aleyn, e lur cosyn, Baudwin de Hodenet ;
e les adubba molt richement e les fist chevalers. Sire
Fouke le jeouene e ces frères ou lur compagnie passè-
rent la mer, pur quere pris e los; e n'oierent parler de
nul tornoy ne joustes qu'il ne vodra estre là. Ë tant
fust preysé par tôt qe la gent diseient communément
que yl fust santz pier de force, bounté e hardiesse;
quar yl aveit tele grâce qu'il ne vynt en nul estour
qu'il ne fust tenuz e renomeë pur le meylour. Avynt
qe Fouke le Brun, lur piere, morust. Le rey Richard
maunda ces lettres à sire Fouke qu'il yenist en Engle-
tere à receyyre ces terres» quar son piere fust mort.
Fouke e ces frères furent moût dolent qe Fouke le
Brun, lur bon père» fut mort. Si revindrent à Londre
à le roy Richard , qe moût fust leé de eux. Si lur
rendy totes les terres dont Fouke le Brun morust
seysy. Le roy se apparilla vers la Terre-Seynte, e co-
manda tote la Marche à la garde sire Fouke. Le roy
l'ama moût e chery pur sa lealté e pur la grant renomée
qu'il aveit^ e Fouke fust molt bien de le roy tote la vie
le roy Richard.
Après cui mort, Johan, le frère le roy Richard, fust
36 HISTOlKB
coroiieé roy d'Engletere. Donqe maunda à sire FouLe
qu'il yenist à ly parler e treter de diverse bosoignes
qe toeboyent la Marche, e dist qu'il irreit visiter la
Marche. E s'en ala al chastiel Baudwyn, qe ore est
apeleé Mountgomery. E quant Morys le fitz Roger de
PowySySeignur deBlaunche-Ville,aparçust le roy Johan
aprocher la Marche, si manda au roy un destrer gras
e beal e un girfaut tut blano muer. Le roy le merda
moût de le présent. Donqe vint Moryz parler al rey;
e le roy le pria demorer ou ly e estre de son consayl,
e ly fist gardeyn de tote la Marche. Quant Morys vist
soun temps, si parla au roy e ly pria, si ly plust,
qe yl ly velsist confermer par sa chartre Tonour de
Blaunche- Ville, à ly e ces heyrs, corne le roy Henré,
soun père, Favoyt eynz confermé à Roger de Powys,
son père. Le roy savoit bien qe sire Fouke avoit dreit
à Blaunche-Ville, e se remenbra de le coupe qe Fouke
ly avoit eynz doneé, e se pensa qu'il se vengereit par
yleqe; e granta qe quanqe Morys voleyt fere escrivre,
yl le enselereyt. E, à ce fere, Morys ly promist c. livrez
d'argent.
Yl y avoit bien près un chevaler, qe tut aveit oy qe
le roy e Morys aveyent parlé; si vynt hastivement à
sire Fouke, e ly counta qe le roy confermereit par sa
chartre à syre Morys les terres à queux yl avoit dreyt.
Fouke e ces quatre frères vindrent devant le roy, e
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 37
prièrent qu'il puissent aver la commune ley e les ter-
res à queux yl aveyent droit e resoun, corne le héri-
tage Fouke ; e prièrent qe le roy velsist receyvre de lur
c. lyvres, à tieles que yl lur velsist graunter le award
de sa court de gayn e de perte. Le roy lur dist qe ce
qu'il avoit granteé à sire Morys, yl le tendreit, quy
qe se corocereit ou qy noun. A tant parla sire Morys
à sire Fouke, e dit : « Sire chevaler, molt estes fol, qe
vus chalengez mes terres. Si vus dites qe vus avez
dreit à Blaunche-Ville, vus y -mentez; e, s'il ne fust
devaunt le roy, je le proverey suz vostre corps. »
Sire Willam, le frère Fouke, sauntz plus dyre, sayly
avaunt; sy fery de le poyn en my le vys sire Morys,
qe tut devynt senglant. Chevalers s'entre -alerent,
qe plus damage ne fut fait. Donqe dit sire Fouke
al roy : « Sire roy, vous estes mon lige-seignour,
e à vus fu-je lié par fealté, tant corne je fu en
vostre service e tan come je tienke terres de vus;
e vus me dussez meyntenir en resoun, e vus me
faylez de resoun e commun ley; e unqe ne fiist
bon rey qe deneya à ces frankes tenauntz ley en
sa court : pur quoi je vus renke vos homages. »
E à celé parole s'en parti de la court, e vynt à son
hostel.
Fouke e ces frères se armèrent meyntenant, e Bau-
dwin de Hodenet ensement; e quant furent passez une
38 HISTOIRE
demie-luwe de U cilé, Tindrent après eux xt. cheva*
lars bien moalez e arméS) les jdus fortz e Talyantz de
tôle la meyné le roy, e les oomaunderent retomer.
E diseyent qu'il ayeyent promis al roy lur testes. Sire
Fouke retoma e dit: « Beau sires, molt fusiez fols
quant tus promistes à doner ce qe yus ne poez aver. »
A tant s'entre-ferirent de lances e de gleyres, issint
qe quatre de plus vaylanlz chevalers le roy meinte-
iiant furent ocis, e tous les autres naufrez au poynt
de mort, estre un qe vist le peryl e se mist à la fute.
Vynt à la cité; le roy ly demaunda si Goarin fîist
pris. « Nanil| fet^yl, ne rien nalmys; yl e tons ces
compaigpnons sunt aleez ; e nus fumes tous ocys, estre
rooy, qe, à grant peyne, su eschapez. • Fet le roy :
«Où est Gyrart de Fraunce, Pieres de Ayynoun, e
sire Amys le Marchys? • — « Sire, ocys. » A tant
vindrent x. cheTalers tut à peé, quar me Fouke
meyne les destrers. Les uns des chevalers aveyent
perdu la neés» les uns le menton ; e tut furent désolées.
Le roy jura grant serement qu'il se vengereit de eux
e de tote lur lignage.
Fouke vynt à Alberburs» e conta à dame Hawyse sa
mère cornent ayeyent erré à Wyncestre. Fouke prist
grant aver de sa mère; e s'en ala, ly e ces frères, à ces
cosyns en Bretaygne le Menur, e sojoma tant corne ly
plust. Le rey Johan seysy en sa meyn totes les terres
DE FOULQUES FIT2-WARIN. 39
qe Fouke ayeit en Ëngleterre» e fîst grant damage à
touz les suens.
Fouke e ces quatre frères, Audolf de Bracy, sou
cosyn, e Baudwyn de Hodenet, son cosyn, pristrent
congié de lur amys e oosyns de Bretaygne le Menur,
e yindrent en Engletere. Les jours se reposèrent en
boschages e en mores, e les nuylz errèrent e travile-
rent; quar yl n'osèrent attendre le roy, quar yl ne
aveyent poer contre ly. A tant vyndrent à Huggeford,
à mon sire Water de Huggeford , qe avoit esposeé
dame Vyleyne, file Warin de Meez ; mes son dreit
noun fust Emelyne» e fust la aunte sire Fouke. Pus
Fouke s'en va vers Alberburs; e quant vynt ileqe, la
gent du pays dient qe sa mère est enterrée : pur qy
Fouke fet grant duel, e prie mut pitousement pur sa
aime.
Sire Fouke e sa gent celé nuyt vont en une foreste
q'est apellée Babbyng, qe esta deleés Blaunche-Yille,
pur espier Morys, le fitz Rogier. A taunt vint un
vadlet de la meyné Morys ; si les aparçust, e s'en revêt
arere, e counta Morys ce qu'il avoit veu. Morys se
arma moût richement, e prent le vert escu à deus sen-
glers d'or batu; d'argent fust la bordure, ou flours de
glys d'asure. E si avoit en sa compagnie les nuef fitz
Guy de la Montaigne e les treys fitz Aaron de Cler-
fountaygne, issint qe xxx. y aveyent bien mounteez
40 HISTOIRE
e y*, de gent à peé. Quant Fouke Morys vist, hastive*
ment de la foresie issist. Entre eux fust comencé dur
estour, e yleqe fust Morys naufiré par my Fespaudle,
e pluflours cheralers e gentz à pié occis furent. E, au
dreyn, Morys s'enfui vers son chastel» e Fouke le
parsywy. Si li quida feryr en fuaunt en le healme ;
mes le coupe descendy sur le cropoun del destrer.
A tant vint Morgan, le fitz Aaron; si trayst de le
chastel» e fery Fouke par mi le jaunbe de un quarel.
Fouke fust molt dolent qe yl ne se poeit yenger à sa
volenté de sire Morys , e de sa playe en le jaunbe
ne dona jà garde. Sire Morys fist sa pleynte al roy
qe sire Fouke fust revenus en Engletere e ly avoit
naufiré par my le espaudle. Le roy devynt si corocé
qe a merveyle; e ordina c. chevalers ou lur meynie
d'aler par tôt Engletere, d'enquere e prendre Fouke
e ly rendre al roy vyf ou mort. E si averount totes lur
costages de^JÎ] roy; e s'il le puissent prendre, le i*oy
les dorreit terres e riche feez. Les chevalers vont par
tôt Engletere quere sire Fouke; mes là où yl entendy-
rent qe sire Fouke fust, là ne vodreient aler à nul fiier;
quar yl ly dotèrent à démesure, les uns pur amour
qu'il aveyent à ly, les autres pur doute de sa force e
de sa noble chevalerie, qe damage ne mort lur avensist
par sa force e sa hardiesse.
Sire Fouke e sa compagnie vindrent à la foreste de
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 41
Bradene; e demorerent yleqe privément, quar aper-
tement n'osèrent pur ly roy. Donqe vindrent de là
outre X. borgeys marchauntz, q'aveyent de les deners
le roy d'Engleterre les plus riches draps, pelures, es-
pèces e gy^ns pur le corps le roy e la reygne d'En-
gletere achatez; si l'amenèrent par desouth la foreste
vers le roy, e xxini. serjauntz armées syivyrent pur
garder^ le tresour le roy. Quant Fouke aparçust les
marchauntz, si apela Johan, son frère, e li dit qu'il
alast parler ou celé gent e qu'il encen^hast de quele
terre sunt. Johan fery le destrer de esperouns ; si vint
à les marchauntz, e demanda quele gent fuissent e de
quele terre. Un vauntparlour orgulous e fer sayly
avant, e demanda quey yl avoit à fere d'enquere
quele gent y fussent. Johan lur demanda en amour
venyr parler ou son seignur en la foreste, ou si noun
il vendreynt maugré lur. A tant sayly avant un ser-
jant, si fery Johan de un espée grant coupe. Johan
le refery en la teste, qu'il chay à terre palmeé. Donqe
vynt sire Fouke e sa compagnie, e assaylerent les
marchantz ; e yl se defendyrent moût vigerousement.
Au dreyn se rendirent, quar force lur fist ce fere.
Fouke les mena en la foreste, e yl ly contèrent qe
marchantz le roy erent; e quant Fouke ce entendy,
moût fu leé. Ë lur dist: « Sire marchantz, si vus
perdisez cest avoyr, sur qy tomereit la pierte? dite-
6
42 HiSTonic
moi le vejr. » — « Sire, fbnt-yl, si nus le perdisoms
par nostre ooardise oo par nostre mayeise garde de-
meyne, la pierte tomereit sur nus; e, si en autre
manere le perdisoms, en péril de mer ou par force
de genUi la pierte tomereit desuz le roy. » — « Ditez-
▼us le Toyr ? » — • OyI, sire, • fount-yl. Sire Fouke^
quant entendy qe la pierte serreit al roy, donqe fisi
mesurer le riche drap e riche pelure par sa launce;;
e si yesti tous ceux qe ou ly furent^ petitz e grantz,
de cel riche drap, e dona à diascun soloun ce qu'il
estoit ( mes mesure avoit cfaescun assez large. De l'au-
tre aver prist chescun à volenté. Quant il f ust ayesjHrér
e les marchaunU aveyent bien mangé» si les eomanda
à Dieu, e pria qu'il saluasent le roy de par Fouke fitz
Warin, qe ly mercia mont de ces bones robes. Fouke
ne nul de suens, de tôt le tens qu'il fnst exilée, unqe
ne voleint damage fere à nuUy, si noon al roy e à ces
cheyalers. Quant les marchantz e lur seijantz vindrent
naufrez e mayhayniés devant le roy, e counterent al
roy ce qe Fouke lur diarga e cornent Fouke aveit
son aver pris, a poy qu'il ne enraga de ire. £ fist fere
ime criée par mi le reaime, que oely qe ly amerreit
Fouke, vyf ou mort, yl ly dorreit myl lyrres d'argent;
e, estrc ce, yl ly dorreit totes le terres qe à Fouke fu-
rent en Engleterre.
De ylcqe vet Fouke, e vient en la foreste de Kent,
DE FOULQVES FITZ-WARIN. 43
e lessa ces chevalers en l'espesse de la foreste, e s'en
vet tôt soûl chyvakhant le haut chemyn. Si enoontra
ua messager trop jolyvemeot chauiOant^ e avoit vestu
la teste de un chapdet de rose yermayl. Fouke ly pria
pur amur qu'il ly donast le diapelet; e, si yl avoit à
fere de ly, yl ly readreit le double. « Sire, fet le voes^
sager, il est moût eachars de son aver, qe un chapelet
de rose ne vêle doner à la requeste de un cheTaler. »
E doua le chapelet à Fouke. E il ly dona xx. sols de
loer. Le messager le conust bien, quar yl le ayoit
sovent yen. Le messager vint à Canterbure; si encon-
tra les c. chevalers q'aveyent quis Fouke par mi toi
Engleterre, e lur dit: « Seignours, dont venez? Avez
trové ce qe vus avez quis par le comandement nostre
seignur le roy e pur vostre avancement? » — « Nanyl, »
fount-yl. « Qey me dorrez-vus? fet-il, e je vus amerroi
là où je ly vy huy e parlay. » Tant douèrent e pro-
mistrent al messager qu'il lur dit où yl ly avoit veu,
e cornent yl ly dona xx. sols pur le chapelet qu'il ly
dona de gréé.
Les c. chevalers firent somondre hastivement tôt le
pays, chevalers, esquiers e serjauntz, e enseggerent *-
tote la foreste tôt entour ; e mistrent tesours e rece- ^
vours, come fuifent venours ; e mistrent viele gent e ti^
autres par tôt le champ ou corns, pur escrier Fouke
e ces compaignous , quant furent issuz de la foreste.
44 HISTOIRE
Fouke fus! en la foreste, e rien ne savoit de cest afei^.
A tant oy un chevaler soner un gros bugle ; si avoit
suspecion, e comanda ces frères mounter lur destrers,
Willam, Phelip, Johan e Alayn. Ces frères montèrent
meyntenant. Audulf de Bracy e Baudwyn de Hodenet,
Johan Malyeysyn montèrent ensement. Les treis frères
de Gosham, Thomas, Pieres e Willam, furent bons ar-
blastersy e tote l'autre meyné Fouke furent tost apresteé
à le assaut.
Fouke e ces compagnouns issirent de la foreste;
si virent» devant tuz les autres, le c. chevalers qe les
aveynt quis par mi Engletere. Si se ferirent entre eux,
e ocistrent Gilbert de Mountferrant e Jordan de Gole-
oestre e plusours autres chevalers de la compaignie;
si passèrent outre par my les c. chevalers, e autres
foylh revyndrent par my eux, e les abatirent espes-
sement. A tant survyndrent tantz chevalers, equiers,
borgeys, serjantz e pueple santz nounbre, qe Fouke
aparçust bien qu'il ne poeit durer la batayle. Si se re-
torna à la foreste; mes Johan, son frère, fust naufré en
la teste par my le healme. Mes, eynz qu'il tomasent
à la foreste, meint bon chevaler, esquiers e serjantz
furent detrenchez. Fouke e ces compaignons ferirent
lesdestrers des esperouns, e fuyrent. Les gentz par
tut levèrent la menée sur eux, e les pursywyrent ou
menée par lut. A tant entrèrent en une veye, e ne vyrent
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 45
qe un lever la menée ou un corn. Un de la compaignie
le fery par mi le corps de un quarel : a tant lessa le cri
e la menée.
Fouke e ses compagnons lesserent lur chyvals, e tôt
à pié s'enfuyrent vers une abbeye qe lur fust deprès.
Quant le porter les vist, si corust fermer ces portes.
Alayn fust moût haut ; si passa meyntenant outre les
murs, e le porter comença fuyr. a Atendez, » fet Alayn.
Si ly corust après, e prist les clefs de ly; e fery de la
masuele dont les clefs pendyrent, un coup q'à resoun
ly grevereit pur sa fute. Alayn lessa tous ces frères
entrer. Fouke prist un abit de un viel moyne, e se
vesty meyntenaunt; e prist un grant potence en sa
mayn, e s'en ala hors à la porte. E fist clore la porte
après ly 9 e s'en vet ; vet clochaunt de le un peé, apuaut
tôt le cors à le grant potence. A tant vindrent cheva-
1ers e serjantz, ou grant pueple. Donqe dit un chevaler :
^ Daun veylard moyue, avez-vus veu nuls chevalers
armés passer par ycy ? » — « Oyl, sire; Dieu lur rende
le damage qe il ont fet ! » — a Qey vus ount-il fet ? » —
« Sire, fet-yly je su viels e ne me pus ayder : tant su
defet! E si vindrent vu. à chyvals, e entour xv. à pié.
Ey pur ce qe je ne lur pooy hastivement voider le
chemyn^ yl ne me esparnierent de rien ; mes firent lur
chyvals coure outre moy, e ce fust p^echié dont poy
lur fust. » — «Tès-tey, fet-il, vus serrez bien vengé
46 HISTOIHB
eynz huy. » Les chevalers e trestous les autres hastive-
meni passèrent ayant à pursy yre Fouke, e furent bien
tost esloygneez une ly we de le abbeye.
Sire Fouke estut en peés pur plus ver. A tant yynt
sire Gyrard de Malfeé e x. compaignons chevalers
Uen mcmteez» quar il furent yenuz de là outre; e
amenèrent ou eux chyvak de pris. Donqe dit Gyrard
en mokant : « Veiez-ci un moygne gros e grant; e si
ad le ventre bien large à herbiger deus galons de
chens. • Les frères Fouke furent dedenz la porte, e
aveyent oy e veu tote la continaunce Fouke. Fouke,
santz plus dire, leva le grant potence; si fery sire
Gyrard desouth l'oryle, qu'il chay tôt estoneé à terre.
Les frères Fouke , quant ce vyrent, saylerent ïkovs à
la porte ; si pristrent les x. chevalers e sire Gyrard
e tote lur herneys, e les lyerent moût ferm en la loge
le porter. E pristrent tote lur hemeys e lur bons des-
trers; e s'en alerent» qe unqe ne finerent de errer eynz
qu'il vindrent à Huggefbrd. E ileqe fust Johan saneé
de sa plaie.
Quant avmeni ileqe sojomé une pièce, dount vint
un messager qe avoit bien longement quis sire Fouke;
e ly dit salutz de par Hubert, l'ercevesque de Gaun-
terbure, e ly pria hastivement venir parler ou ly.
Fouke prist sa gent, e vynt deleez Canterbure, en la
foreste où eyntz avoit esteé; e lessa tote sa compagnie
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 47
ileqe, estre Willam son frère. Fouke e Willam se aty-
rerent come marcfaauntz, e vindrait à Gaunterbure à
le evesqe Hubert. Le ardteyesqe Hubert le Botiler lur
ditt « Beal fitz, fet-yl, tus estes bien venuz à moy.
Vus saTez bien qe sire Thebaud le Botiler, mon frère,
est à Dieu comandeé. E avoit esposeé dame Mahaud
de Caus, une moût riche dame e la plus bêle de tote
Engletere. E le roy Johan la désire taunt pur sa
bealtéy qe à peyne ele se puet garder de ly. E je
hk tienke seyntz, e vus la verrez. E je vus prie, cher
amy Fouke, e comant sur ma benoysoun qe vus la
prenez à espouse. » Fouke la vist ; e savoit bien qe
ele fust bele, bone e de bon los, e qe ele avoit en
Yrlaunde fortz chastels, cités, terres e rentes, e grantz
homages. Par assent Wiflam son frère, e par consayl
de le erchevesqe Hubert, esposa dame Mahaud de
Caus. Fouke demora deu jours yleqe; e pus prist
congié de Tevesqe, e lessa sa femme yleqe. E revynt
al boys à ces compaignouns, e lur conta quanqu'il
avoit fait. Yl ly eschamyerait e rierent, e le ape-
lerent hosebaunde ; e ly dananderent où il amerreit
la bele dame, le quel al ehastd ou à le boys ; e s'entre-
sotaserait. Mes grant damage firent à le roy par tôt;
e à nul autre, si noun à ceux qe furent overtement lur
enymys.
Un chevaler qe fust apeleé Robert le fitz Sampsoun
48 HISTOIRE
fust menaunt en la marche de Escoce^ e soleyt moût
soyent receyvre sire Fouke e sa gent e les herbiger à
grant honour; e si fust home de grant tresour. E sa
femme fust apelée dame Anable, e fust molt corteise
dame» En cel temps fust un chevaler en la contrée qe
fust apeleé Pieres de Bruvyle. Cely Pieres soleit as-
sembler tous les fitz de gentils homes de le pays qe
Yolagous erent, e autre rybaudayle; e soleynt aler par
le pays, e ocistrent e robberent lele gent, marchanz
e autres. Cely Pieres, quant yl ou sa compaignie ala
robber les gentz, se fesoit apeler Fouke le fitz Waryn :
pur quey Fouke e ces compaignons furent trop maie-
ment aloseez de ce qu'il n'aveyent coupe. Fouke» qe
trop longement, pur doute de le roy Johan, ne poeit
demorer en un lyu, yint par nuyt en la marche d'Es-
coce; e vynt moût près la court sire Robertz le fitz
Sampsoun. E vist grant lumere dedenz la court, e
oy parler leynz e sovent nomer son noun ; si fist ces
compaignons arester dehors. Fouke meismes hardie-
ment entra le court» pus la sal^; si Vist Pères de
Bruville e autres chevalers seantz à soper. E Robert
le fitz Sampsoun e sa bone dame e la meyné furent
lyez e juteez d'une part la sale. E sire Pieres [e] ces
compaignons trestouz furent vysureez; e trestous qe
servyrent leynz engenulerent devant sire Pieres, e le
apelerent lur seignur sire Fouke. La dame, qe just lyé
os FOULQUES FITZ-WARIft. 49
deleez son seignur en la sale, dit molt pitousement :
« Hay I sire Fouke> fet-ele, pur Dieu merci, je ne vus
unqe mefBs ; mes vus ay ameé à mon poer. » Sire
Fouke estut en peés, e avoit escoté quant qu'il aveyeut
dit; mes quant il avoyt oy la dame parler, qe grant
bounté ly avoit fait, pur nulle chose du mounde ne
se poeit plus déporter. Tut santz compaignon se mist
avant, e sa espeie trete en sa meyn. E dit: « Qre,
peésl je vus comand, trestous qe seynz voy, qe nul ne
se moeve tant ne quant. » E jura grant serement qe,
[si^ nul fîist tant hardy de sey mover, il le detrenche-
reit en menuz pièces. Pieres e ces compaignouns se
tindrent engyneez. « Ore, fet Fouke, qy de vus se fet
apeler Fouke? » — « Sire, fet Pieres, je ou chevaler;
si su apellé Fouke. » — « De par Deus, fet-yl, sire
Fouke, levez sus tost. Si liez bien e ferm tous vos corn-
paignons, ou si noun tut premer perderez le chief. »
Pieres fust molt enpoiirys de la manace, e leva sus;
e délia le seignour e la dame e tous les autres de la
meynée, e lya bien e ferm tous ces compaignouns.
E quant tous furent liez, Fouke ly fist couper les
testes de tous iceux qu'il avoit liez. E quant yl avoit
tous ceux compaignons decoleez : « Vus recréant che-
valer qe vus fêtez apeler Fouke, vus y mentez. Je su
Fouke, e ce saverez-vus bien; e je vus rendroy qe
faucement m'avez aloseé de larcyn. » E ly coupa la
7
M nsTonc
teste flKjniienaat; e ^m«I airoît ce fief, apeb oes eom-
pugnomift; e «ppere m &, e k fjTCot bteo aeesé. E isâ
tire Fouke tal^a sire Bobert e tôt soq tresoury qe riea
ne perdy.
Le roy fist grmt damage mont soient à sire Fouke.
E sire Fouke, lot fust-il fort e hardy^ yl (îist sages
e engynous; quar le roy e sa gent pursiwyrent moh
sorent sire Fouke par le esdolz des diyimls; e Fouke
molt soient fist ferrer ces diyrak e mettre les fers à
rererSy issint qe le roy de sa s^wte fost desçu e engy-
neé. Meynt dur estour soffry sire Fouke eynz qu'il
aToit conquis son héritage.
Sire Fouke prist congié de mounsire Robert, le fitz
Sampsoun, e se vynt à Alberburs; e fist fere sa loge
eu une foreste deleez sur la ryvere. Fouke apela
Johan de Raunpaygne: « Johau, fet-yl, tus savez
assez de menestralsie e de jogelerye. Estes-vus oseé
d'aler à Blanche-Ville, e juer devant Morys, le fitz
Roger, e d'enquere lur affere ?» — « Oyl, » fet Johan.
Yl fist tribler un herbe, e la mist en sa bouche; e sa
face comença d'engroser e emflyr moult gros, e tut
^ devynt si descolorée qe ces compaignons demeyne à
^ grant peyne le conurent. Johan se vesti asque povre-
ment, e prist sa maie ou sa jogelerie e un grant bas-
toun en sa meyn ; vynt à Blanche-Ville, e dit al porter
qu'il fust un jogelour. Le porter le mena devant sire
DE FOULQUES FITiZ-WARIN. 61
Moris, le fitz Roger ; e Morys ly demaunda où il fust
neé. « Sire^ fet-il, en la marche d'Escoce. » — « E
quele noveles? » — a Sire, je ne sai nulles, eslre de
sire Fouke, le fitz Waryn, q*est oeys à une roberye
qu'il fist à la mesone sire Robert, le fitz Sampson. •
— f Dites-! vus voir ?» — a Oyl, certes, fet-il ; ce dient
totes les gentz du pays. >? — aMenestral, fet-il, pur
yostre novele je vus dorroy ceste coupe de fyn argent. »
Le menestral prent la coupe, e mercia molt son bon
seignour. Johan de Rampaigne fust molt led de vys
e de corps ; e, pur ce, les rybaudz de leynz ly eschar-
niereht e defolerent e detrestreint par ces chevoyls e
par ces peés. Yl leva son bastoun; si fery un rybaud
en la teste, qe la cervele vola en my la place. « Malveys
rybaud, fet le seignur, qey as-tu fet? i? — « Sire,
fet-yl, pur Pieu mercy, je ne pus meez : j'ai une ma-r
ladie qe trop est grevouse, e ce poez vere par la face
qe j'ay si emflée. E celé maladie me leijit certeygnes
houres de jour tut le seen : dont je n'ay poer mey-
meismes à govemer. » Moris jura grant serement, s'il
ne fust pur la novele qu'il aveit porté, yl ly freit estre
décollé meintenant. Le jogelour se basta qu'il fust
passée de là, quar molt ly sembla long la demuere;
rçvynt à Fouke, e counta de mot en autre coment aveit
erré. E dit qu'il avoit oy en la court qe sire Morys e
ces XV. chevalers e sa meyné irreynt lendemayn al
52 msioiRB
chastel de Saloburs, quar il esteit gardeyn de tote la
Marche. Quant sire Fouke ce sayoit, molt fîist leé e ces
compai^oons ensement.
Lendemeyn leva Foukç matyn e fust armeé toi à
talent, e ces compaignons ensement. Morys yynt vers
Saloburs e quinze cheralers ou ly e le un. fitz Gwy
fit2 Candelou de Porkyntone e sa autre meyné. E
quant Fouke ly yist, molt fîist leé ; e molt fust irreé à
ly, pur ce qu'il ly détient à force son héritage. Morys
regarda yers le pas de Nesse; si yist un escu quartileé
de goules e d'argent endenteé, e par ces armes conust
qe ce fust Fouke. « Ore sai-je bien, fct Morys, qe jo-
gelers sunt mensungerç ; quar là voy Fouke. » Morys
e ces chevalers furent molt hardis; e hardiement asay-
lyrent Fouke e ces compaignouns , e les apelerent
larounSy e diseyent qe lur testes eynz la vesprée ser-
reient assi^ al haut tour de Salobure. Fouke e ces
frères se défendirent moU vigerousement; e yleqe fiist
sire Morys e ces xv. chevalers e les nii. fitz Gwy fitz
Candelou de Porkyntone ocys. E de à tant aveit Fouke
le meyns enymys.
Fouke e ces compaignons s'en alerent de yleqe vers
Rothelan déparier ou sire Lewys, le prince q'aveit
esposeé Johane, la fyle le roy Henré, sucre le roy
Johan; quar le prince e sire Fouke e ces frères furent
norys ensemble en la court le roy Henré. Le prince
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 53
fust molt leé de la yenue sire Fouke, e ly demanda
quel acord fust entre le roy e ly. « Sire^ fet Fouke,
nul, quar je ne pus ayer peés pur nulle chose ; e pur
ce, sire, su-je yenuz à tus e à ma bone dame pur
vostre peés aver. » — « Certes, fet le prince, ma peés.
je vus grant e doynz, e de moy bon resut avérez. Le
roy d'Engletere ne peés, ou vus ne moy ne autre, siet
aver.» — «Sire, fet Fouke, grant mercys; quar en
vus molt me affy e en vostre grant lealté. E, pus qe
vus me avez vostre peés grantée, je vus dirroy autre
chose : certes, sire, Morys le fis Roger est mortz ; quar
je l'ay ocys. » Quant le prince savoit qe Morys fust
mortz, molt fust irreé; e dit qe, s'il ne ly avoit sa peés
donée, yl ly freit trayner c pendre, pur ce qe Morys
fust son cosyn. Donqe vynt la bone dame; e fist acord
entre le prince e sire Fouke, issint qu'il furent entre-
bayseez e toutz malt«lentz pardoneez.
En icel temps grant descord fust entre le prince
Lewys e Guenonwyn , le filz Yweyn Keveyloc ; e à
cely Guenonwyn grant partie de le pays de Powys
apendeit. E si fust molt orgoylous, hauteyn e fer,
e ne vodra rien déporter le prince; mes fist grant ^
destruxion en sa terre. Le prince à force avoit tôt
abatu le chastel Metheyn, e avoit pris en sa meyn
Mochnant, Lannerth e autres terres qe furent à Gue-
nonwyn. Le prince comaunda la mestrie de tote sa
64 UlbTOIBE
terre à Fouke, e ly comaunda coure sur Guenonwyu
e destrure totes ces terres. Fouke fust sages e bien
avyseé, e savoyt bien qe le tort fust al prince ; si ly
dist eu bêle manere : « Sire, pur Dieu, fet-*ily mercy I
Si vus ce fêtez qe vus avez devyseé, vus serrez molt
blâmé en estrange regneez de totes gentz. E, sire, si
vus plest^ ne vus peyse qe je le vus dy, tote gent
dient qe vus avez peschié de ly. E, pur ce, sire, pur
Dieu, eiez mercy de ly; e yl se redressera à vus à
vostre volenté, e vus servira de gréé. E vus ne savez
quant vus avérez mester à vos barouns. » Tant prêcha
Fouke au prince e parla, qe le prince e Guenonwyu
furent entre-acordeez ; e le prince ly rendy totes ces
terres qe de ly eynz furent prisées.
Le roy Johan fust à Wyncestre. A taunt vynt la
novele à ly qe Fouke avoit ocys Morys, le fitz Roger, e
qu'il fust demoreé ou Lewys le prince q'aveit esposeé
Johane, sa suere; si devynt molt pensyf, e bone pièce
ne sona parole. Pus dit : « Hay, seinte Marie ! je
su roy, Englelere guye, duc su d'Angoye e de Nor-
maundye, e tote Yrland est en ma segnorie; e je
ne pus trover ne aver en tôt mourv poer, pur quanqe
je pus doner, nul qe me velt venger de le damage
e hontage qe Fouke m'ad fet. Mes je ne lerroy qe
je ne me vengeroy de le prince. » Si fist somoundre
à Salobure tous ces countes e barons e ces autres che-
DE FOULQUES FltZ-WARIN. 55
valers qu'il seient à un certeyn jour à Salobure ou toi
lur gent.
E quant furent^ yenuz à Salobure y Lewys fust
garny par ces dipys qe le roy Johan ly movereit grant
guère. E apela Fouke, si ly mostra tote le aventure.
Fouke fist assembler al chastel Balabam en Pentlyn
XXX. mil de bons boumes ; e Guenonwyn, le fitz Yweyn,
vynt ou ces gentz> qe fortz e bardys furent. Fouke
fust assez sage de guère, e conust bien tous les pas-
sages par out le roy Johan covenist passer. E le pas-
sage fust moût escars, enclos de boys e marreis, issi
qu'il ne poeit passer, si noun le haut chemyn. E le
passage est apelé le Gué Gymele. Fouk e Guenonwyn
ou lur gentz vindrent al passage, e fyrent fouer, ou-
tre le haut chemyn, une fosse long, profound e lée ; e
firent emplyr la fossée d'ewe, issi qe nul poeit passer,
quei pur le marreis, qei pur la fosse. E, outre la fosse,
firent un palys trè[s3 bien ba taillée; e uncore puet
home vere la fosse.
Ly roy Johan ou tôt son host vynt al gué, e là
quida passer seurement ; e vyst de là chevalers armés
plus qe dys mil, qe gardoient le passage. Fouke e
ces compaignons furent passez le gué par un privé
chemyn qu'il avoyent feit, e furent de celé part où le
roy fust, e Guenonwyn e plusours autres chevalers
ou eux. Le roy escria Fouke, e les chevalers le roy de
56 HISTOIRE
totes partz assailerent Fouke; mes molt lur raesavynt,
qu'il ne le poeynt avenyr si noun par my le frount
sur la cauce. Fouke e ces compaignons se défendirent '
com lyonsy e sovent furent demonteez e soyent re-
mounteez. E plusours des chevalers le roy furent ocys;
e Guenonwyn fust sorement naufreé par my le healme
en la teste. Quant Fouke veit qu'il ne sa gent ne
poeyat durer longement dehors lur fosse, si retorne-
rent par lur privé chemyn, e defendyrent lur palys
e la fosse ; e des quarels e autres dartz launcerent e
gitterent à les gentz le roy, e ocistrent grant gentz,
e naufrerent pueple à démesure. Geste fere e dure
medlé dura tanqe à seyr. Quant le roy vist tanlz de
ces gentz ocys e naufrez, tant fust dolent ne savoit qey
fere; mes se retorna vers Salobure.
Le roy Johan fust home santz conscience, mavois,
contrarions, e hay de tote bone gent, e lécherons; e,
s'yl poeit oyr de nulle bêle dame ou damoisele, femme
ou fyle de counte ou de baron e d'autre, yl la voleyt à
sa volenté aver ; ou par promesse ou par don engyner,
ou par force ravyr . E, pur ce, fust le plus hay ; e, pur
cele encheson, plusours grantz seignurs d'Engleterre
aveyent rendu al roy lur homages : dont le roy fust le
meynz doté d'assez.
Johan Lestraunge, seignour de Knokyn e de Ru-
tone, se tynt tous jours ou le roy, e fist damage as
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 57
gentz le prince. Ë> pur ce> le prince fist abatre le
chastel de Rutone e prendre ces gentz e les enpriso-
ner : dount Johan fust molt dolent. Le prince vynt al
chastel Balaham, et apela Foukc; si ly dona e rendy
tote Blanche-Ville, son herytage» e Estrat e Dynorben.
Fouke le mercia molt, e prist ceus qu'il voleyt e s'en
ala à Blanche-Vyle; e fist refermer e par tut amender
le chastiel.
Johan Lestrange vynt al roy, e ly conta qe Fouke
ly avoit fet grant damage de sa gent e abatu le chas-
tiel de Rutone. £ pria al roy (quar il fust bien de ly)
qe yl ly aydast de poer, e yl se vengereit bien de sire
Fouke e de ces gentz. Le roy apela sire Henré de Au-
deleé, qe fust seignour e premer conquerour de le
chastiel Rous e de l'onour; si ly comanda prendre x.
mil chevalers des plus vaylantz d'Ëngletere» e qu'il e
ces chevalers fuissent en totes choses entendauntz à
sire Johan Lestrange. Sire Henré e sire Johan e lur
chevalers s'aparillerent vers Blaunche^Ville; e, en che-
minant, quanqu'il troverent» homes e femmes> ocis-
trent, e robberent le pays. Le cry se leva par lot.
Fouke fust à Blanche-Ville e tynt yleqe bêle com-
paignée, pur ce qu'il avoy t donqe son novel entré en
ces terres. E furent ileqe de Gales vu*', chevalers , e
serjantz plusours. Quant la novele vynt à Fouke qe
sire Johan e sire Henré vindrent vers ces parties, se
8
58 HISTOIRE
armerenl meyntenant e s'en alereut privément al pas
de mudle. £ quant sire Johan vist sire Fouke, brocha
le destrer ; sy feri sire Fouke de sa lance, qe ele vola
en menu pièces. E sire Fouke i*eferi sire Johan en my
la face par my le healme» qe le coupe tote sa vie fust
aparisaunt; e sire Johan vola toi plat à terre. Sire
Johan futt molt vaylant; sayly tost en pies, e s'escria
molt hait: « Ore, seynours, à Fouke tous! » Fouke
respond cum orgoilous : « Certes, fet-il, e Fouke à tous ! i>
Donqe les chevalers d'ambe partz s'entre-feryrent ;
Fouke e sire Thomas Corbet e ces autres compaignons
plusours ocistrent. Aleyn, fitz Guaryn, e Phdip, son
frère, furent naufrez. Quant Fouke vist ces frères nau-
frez, a poy qu'il n'enraga d'yre. Sire Foukè se mist en
la presse, e quanqu'il ateynt ne puet avoir socours de
mort. Sire Fouke n'aveit à la jomé qe vn*'. chevalers,
e les autres furent x. myl e pluz : pur quoy Fouke ne
poeit veyndre l'estour; si se retoma vers Blanche-
Ville. Sire Audulf de Bracy fust démontée en mi la
presse, e molt se defendy hardiement; au dreyn, fust
pris e amenée vers Saloburs.
Sire Henré e sire Johan furent molt leez de la prise;
si vyndrent à Salobure devant le roy, e rendirent sire
Audulf al roy, qe ly aresona molt fièrement; e jura
grant serement qu'il ly freit trayner e pendre, pur ce
qu'il fust son traytour e son laroun e avoit ocys ces
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 59
cbevalersy ars ces cités, ces chasteb abaiuz. Audulf ly
respondy hardiement, e dit qe unqe ne fîist traytour»
ne nul de son lignage.
Fouke fust à Blaunche^Ville, e fist laver e medi-
ciner ces frères e ces autres genlz. A tant ly sovynt
de sire Audulf , e le fist quere partot; e quant ne
poeyt estre trovee» yl ne ly quida vere à nul jour.
Si démena si grant duel qe home ne poeit greynour.
A tant vynt Johan de Rampaygne, e vist Fouke fere
tiel duel : a Sire, fet-il, lessez estre ce duel ; e, si Dieu
plesty eynz demayn prime orrez boue novele de sire
Audulf de Bracy; quar je meismes irroy parler au
roy. »
Johan de Rampaygne savoit assez de tabour, harpe,
viele, sitole e jogelerie; si se atyra molt richement ,
auxi bien come counte ou baroun. Ë fist teyndre ces
chevoyls e tut son corps entièrement auxi neyr come
geet, issi qe rien ne fust blanke si ces dentz noun.
E fist pendre entour son col un molt beal tabour;
pus monta un beal palefroy, e chevalcha par m y la
yile de Salobure, desqe à la porte du chastiel ; e de
meynt un fust regardé. Johan vynt devant le rey,
e se mist à genoylouiiz, e salua le roy moût cortey-
sement. Le roy ly rendy ces salutz , e ly demanda
dont yl estoit. « Sire, fet-yl, je su un menestral éthio-
pien, neé en Ethiopie. » Fet le roy : « Sunt touz les
60 HISTOIRE
gentz de vostre terre de vostre colour ?» — « Oyl ,
mon seignur, home e femme. « — a Qei dient-yl en
estrange regneez de moy ? » — a Sire, fet-yl, vus estez
le plus renomeé roy de tote la cristieneté; e, pur
vostre grant renoun, vus su-je venu vere. » — a Bel
sire, fet le roy, bien viegnez. » — « Sire, mon seignur,
grant mercy. » Johan dist qu'il fust renomeé plus pur
mavesté qe bounté; mes le roy ne l'entendi point.
Johan fisl le jour meynte menestralsie de tabour e
d'autre instrumentz.
Quant le roy fust aleé cocher, sire Henré de Au-
delée fist alcr pur le neyr mene^^tral , e le amena en
sa chambre. E fesoient grant melotïie ; e quant sire
Henré avoit bien beu, donqe dit à un vadiet; a Va
quere sire Audulf de Bracy, qe le roy velt ocyre de-
meyn ; quar une bone nutée avéra avant sa rnoiL » Le
vadlet bien tost amena sire Audulf en la chambre;
donqe parlèrent e juerent. Johan comença un chan^
son qe sire Audulf soleil chauntt^r; sire Audulf leva
la teste 9 si ly regarda eu ray le vys, e à grant peyne
le conust. Sire Henré demanda h l^eyvre; Johan fust
molt servisable : saily légèrement en pics, e devant
tous servy de la coupe. Johan fust coyuie; gitia un
poudre en la eoupe, qe nul ne le aparçust; quar yl
fust bon jogclcre. E tous qe burent devyndrent si
sommylous, qe bien tost après le beyre se cochèrent
DE FOULQUES FIT2-WARIN. 61
dorinyr. E quant tuz furent endormys, Johan prist
un fol qe le roy aveit; si ly mist entre les deus che-
\alers qe deyereynt garder sire Audulf. Johan e sire
Audulf pristrent les tua y les e lintheals qe furent en la
chambre ; e, par une fenestre devers Salverne, s'escha-
perent e s'en alerent vers Blanche-Ville, qe ert xn.
lywes de Salobure.
La chose ne poeit longement estre celée; quar len-
demeyn fust tote la vérité dite al roy, qe meut fust
coroceé pur Teschap. Fouke fust levé matyn lende-
meyn, quar poy aveit dormi la nuyt ; si regarda vers
Salobure, e vist sire Audulf e Johan venyr. Ne fet à
demaunder s'il fust leé quant il les vist; si les corust
enbracer e beysir. Il les demanda quele noveles; e sire
Audulf ly conta coment Johan se contynt e coment il
eschaperent : dont Fouke, qe eyntz dolent ert, iist de-
duyt e grant joye.
Ore lessum de Fouke e parloms de dame Mahaud
de Caus. Quant le roy, qe tant l'aveit desirrée, sa-
voit de vérité qele fust esposée à sire Fouke, son
enymy, par le consayl l'archevesqe Hubert, molt fist
grant damage à le archevesqe e à la dame; quar il la
voleit fere ravyr. E ele fuy à Moster, e yleqe fust
dely vre de une fyle ; e l'archevesqe la baptiza Hau-
wyse, qe pus fust dame de Wenune. Fouke e ces com-
paignonz vindrent une nuyetée à Caunterbure, e a me-
s
62 ■IftTCNRK
lièrent la dame de yleqe à lluggeforde. E demora
une pièce yleqe; pus avynt qe la dame fust eoceinle,
e fust prÎTémeot demorant a Albrebure. E le roy la
fiât espier, e ele s'en ala de yleoqe privément à Sa-
lobure; e ileqe fust espie, e ele fiist si grosse qe ele
de yleqe ne poeit traTiler. E s'en fuy à la egUse
Nostre-Dame à Salobnre; e ileq fiisl delyyre de une
file qe fust baptizé Johane» qe pus fust mariée à sire
Henré de Peuebrugge. Pus ayoit Mahaud un fitz, qe
fust neé sur un montaigne de Gales , e fust bapUzeé
Johan en une russele qe vyent de la fontaigne de
Puceles. La dame e l'enfant furent molt fiebles; quar
l'enfant nasquist deus moys ayaunt son terme. E
quant l'enfant fust confermé de evesqe, yl fust apeleé
Fouke. La dame e l'enfant, qe febles erent, furent
aporteez de la montaigne à une graunge, qe fust celle
à Carreganant.
Quant le roy ne se poeit en nulle manere venger de
Fouke, ne la dame bonyr e prendre , si fist une letre
al prince Lewys, q'avoit esposeé Johane» sa suere;
e ly pria par amour oster de sa meynée son mortel
enymy e son feloun (ce fust Fouke) ; e yl ly rendroit
tous les terres qe ces ancestres aveyent unqe prises
de sa seignurye, à teles^ qu'il ly fesoit avoir le cors
Fouke. Le prince apela en sa cambre Johane, sa feme,
e la mostra le letre qe le roy son frère ly avoit maun-
DE FOULQUES FlTZ-WAnif<. 63
(lée. Quant la dame avoii oy la letre, manda privé-
ment à sire Fouke tôt le tenour e qe le roy velt
acordeer à son seignur. Quant Fouke oy la novele,
molt fust dolent e se dota de tresoun ; si maunda dame
Mahaud par Baudwyn de Hodenet priyément à l'evesqe
de Canterbure, e assygna Baudwyn de venyr à ly à
Dovere. Fouke e ces quatre frère e Audulf e Johan
de Rampaygne se armèrent tôt à talent, e lur autres
gentz vindrent al chastiel Balaha devant le prince,
a Sire, fet Fouke, je vus ay servy à mon poer lealment;
mes ore, sire, ne siet-um à (j[y affyer; quar, pur la
gluant promesse le roy, me volez-vus gerpyr. E le roy
vus ad maundeé une letre, la quele, sire, vus avez
celée de moy : dount» sire, je me doute le plus. » —
« Fouke, fet le prince, demorez ou moy ; quar, certes,
ne le pensay de vus fere tresoun. » — « Certes, sire, fet
Fouke, je le crey molt bien ; mes, sire, je ne remeyn-
droy en nulle manere. » E prist congé de le prince e
de tous ces compaygnons. De yleqe tant erra nuyt e
jour qu'il vynt à Dovre; e yleqe encontra Baudwyn, qe
la dame mena à Tarchevesqe. E se mistrent en meer,
e aryverent à Whylsond.
Fouke e ces frères e ces autres compaignons , quant
vyndrent à Parys, si vyrent le roy Phelip de Fraunce,
qe fust venuz as champs pur vere ces chevalers de
Fraunce jostier. Fouke fust uncore mu, e ces com-
64 «STCHKC
paignons eiisemeai ; quant rrrent tant beal assemblé,
demorerent pur ^ere les jostes. Quant les Frainncoys
Tirent cberalers d'Englpterre, se penerent moh le plos
de bien fere. Donqe sire Dmz de Montbeno*, on molt
orgoilous^ Franceysy maunda à sire Fooke e ly pria
josler ou ly; si Fouke meyntenaunt ly granta sa re-
queste. Fouke e ces fireres se armèrent e montèrent
les bons destrers. Johan de Rampaigne fust molt ri-
chement atyreé e bien mounteé ; e si avoit un molt
riche tabour, e fery le tabour al entré des renks :
dont les montz e les Vais rebondyrent e les chyrals
s'enjolyverent. Quant le roy yist sire Fouke armeé, si
dist à sire Druz de Montbener : « Ayyseez-Yus bien;
quar cely chevaler engleys est molt pruz e yaylant,
e ce piert bien. » — « Sire, fet-yl, n'y a chevaler en
tôt le mond qe je n'osase bien encontrer al chyyal
ou à peéy cors contre cors. » — « De par Dieu ! » fet
le roy. Fouke e sire Druz brochèrent les destrers e
s'entre-feryrent. Fouke ly fery de sa launce par my
Teschu e pierça le bon hauberke, e par my l'espaudle,
qe la lance vola en pièces; e sire Druz chey tut plat
à terre. Fouke prist le chyval sire Druz ; sy l'amena
e le manda en présent à sire Druz, quar sire Fouke
n'avoit cure à détenir le chyval. A tant vynt un
chevaler français, qe à son vueyl voleit venger sire
Druz; sy fery Fouke de sa launce par my l'escu, qe sa
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 65
launce depessa. Fouke le refery en my le bealme» qe sa
lance tote defruscha; e le chevaler voida les arçons ,
volsist ou noun. Les frère Fouke e ces compaignons
furent preslz à joster; mes le roy ne le voleyt sofiryr.
Le roy vynt poignant à Fouke, e ly dit: « Chevaler
engleys , seiez benêt ; quar trop bien avez fet. » E ly
pria demorer ou ly. Fouke mercia molt le roy, e ly
granta de estre à sa volenté. Fouke le jour de meynt
un {îist regardée, alowé e preyseé par tôt. Fouke avoit
tele grâce qu'il ne vynt unqe en nul lyu où hardiesse,
chevalerie, prouesse ou bounteé fust, qu'il ne fîist tenuz
le meylour e santz pier.
Fouke demora ou le roy Phelip de Fraunce, e fust
ameé e honorée de l[e3 roy e la roigne e totes bone
gentz. Le roy ly demanda quel noun avoit; Fouke
dit qu'il fust apeleé Amys del Boys. « Sire Amys, fet
le roy, conussez-vus Fouke, le fitz Warin, de qy um
parle grant bien partut? » — o Oïl, sire, fet-il, je l'ay
sovent veu. » — a De quel estature est-il ?» — « Sire,
à mon entendement, de meisme Testature qe je suy. »
Fet le roy : « Yl puet bien, quar vaylantz estes ambe^
deus. » Fouke ne poeit oîr de nul tornoy ne jostes par
tote France qu'il ne voleyt estre; e par tôt fust prysé,
ameé e honorée pur sa proesse e sa largesse.
Quant le roy d'Engleterre savoit qe sire Fouke fust
demorant ou le roy Phelip de Fraunce, manda al roy
9
66 HI8TOIIIB
e ly pria, si iy plust, qu*il voUist oster de sa meynée
e de sa retenance Fouke, le fitz Guarin, son enymy
mortel. Quant le roi de France avoit oy la letre^ si
dist par seint Denys qe nul tiel cheTaler fust de sa
retenance; e tiele respounce manda al roy d'Ëngle-
tere. Quant sire Fouke ayoit oy tele novde, ^ynt al
roy de Fraunce e demanda congié de aler. Fet le roy :
« Ditez-*moy si nulle chose vus faut, e je hautement
fray fere les amendes pur quoy voies départir de
moy. m — a Sire» fet^yl» je ay oy teles noveles par out
me covyent partir à force. » E» par cde parole, en-
tendy le roy qu'il fust Fouke. Fet le roy : « Sire Amys
de Boys» je quid qe vus estes Fouke, le fitz Waryn. »
— « Certes, mon seignur, oyl. » Fèt le roy : « Vus
demorrez ou moy» e je vus dorroy plus riches terres
qe TUS unqe n'avyez en Engleterre. » — « Certes, sire,
fet-il, yl n'est pas digne de receyvre terres de autruy
doun, que les suens de dreit héritage ne puet tenir
à reson. »
Fouke prist congié de le roy, e vynt à la mer ; e
vist les ne& floter en la mer^ e nul vent fust vers
Engletere» e le temps fust assez heU Fouke vist un
maryner, qe sembla hardy e feer; e le apela à ly e
dit : « Bel sire, est ceste nef la vostre ?» — « Sire,
fet-il, oyL • — Q'est vostre noun ?» — « Sire, fet-il,
Mador del Moût de Russie» où je nasqui. » — « Nador»
DE FOULQUBS FITZ-WARIK. 67
fet Fouke» sayez-TUS bien oest mester e amener geniz
par mer en dÎTerse régions ?» — « Certes, sire, yl n'y
ad terrée renomée par la cristienetë qe je ne saveroy
bien e sainement mener nef. » — « Certes, fet Fouke,
molt aTez periknis mester. Dy-moi, Mador, bel douz
frère, de quel mort morust ton père ? » Mador ly res-
pond qe neyeez fust en la mer. « Coment ton ael? » —
« Ensement. » — « Coment ton besael? » — « En
meisme la manere; e tous mes pareniz qe je sache»
tanqe le quart degreé. » — « Certes, dit Fouke, molt
estes fol hardys qe vus osez entrer la mer. » — « Sire,
fet-il, pour quoy? Chescune créature ayera la mort
qe ly est destinée. Sire, fet Mador, si vus plest, res-
ponez à ma demaunde : Où morust ton père ?» —
« Certes, en son lyt. » — « Où son ael ? » •— « Emse-
ment. » — « Où vostre besael ?» — « Certes, trestous
qe je sai de mon lignage morurent en lur lytz. » —
« Certes, sire, fet Mador, depus qe tôt vostre lignage
morust en litz, j'ay grant merveille qe vus estes oseé
d'entrer nul lyt. » E donqe entendy Fouke qe ly ma-
riner ly out vérité dit, qe chescun home avéra mort
tiele come destinée ly est; e ne siet le quel, en terre
ou en ewe.
Fouke parla à Mador, qe savoit la manere des ne£s,
e ly pria pur amur e pur du suen qu'il ly volsist de-
vyser e ordyner une neef ; e il mettreit les costages.
68 HiftToims
Mador ly graau. La neef fust fête en une foreste de-
leez la mer, sohiin le deyys Mador en tous poyntz, e
totes cordes e autres herneis, quanqe apendeit, si bien
e si richement q'à merreille; e fust à démesure bien
Yitaillée. Fouke e ces fireres e sa meysné se mistrent
en la mer, e aoosterent Engleterre. Adonqe vist Mador
uue neef bien batailée venant vers eux; e quant les
neefs s'aprochierent, un cheyaler parla à Mador e dit :
« Danz maryner, à qy e dount est celé neef qe vus
guyez? quar nulle tiele n'est custumere de passer par
ycy. » — « Sire, fet Mador, c'est la moye. » — « Par
foy ! fet le chevaler, noun est : vus estes larounz, e je
le say bien par le veyl quartroneé q'est des armes
Fouke le fitz Warin; e il est en la neef, e eynz huy
rendroi-je son corps à roy Johan. » — « Par foy I fet
Fouke, noun freez; mes si rien desirrez de nostre,
vus le avérez volenters. » — o Je averei, fet-il, vus
tous e quanqe vus avez, estre vostre gréé. » — a Par
foy I fet Fouke, vus y menterez. » Mador, qe bon e
hardy maryner fust, lessa sa neef sigler; si trespersa
l'autre neef tôt par my, dont la mer entra. £ si fust
la neef pery ; mes eynz y out meint dur coupe doneé.
E quant la neef fust vencue, Fouke e ces compaignons
pristrent grant richesse e vitaille, e aporterent en lur
neef. A tant perist e enfoundry l'autre neef.
Fouke tôt cel an entier deinora costeant par Engle-
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 69
terre; e à nul home ne Toleit fere mal, si noun al roy
Johan ; e sovent prist son aver e quant qu'il poeit del
suen. Fouke comença sigler vers Escoce; à tant lur
yynt de le occident un vent fayonyn, e lur chaça treis
jorneez de là Escooe. A tant virent un yle molt de-
litable e bel, à ce qe lur fust avys; e se trestrent
laundreity e troverent bon port. Fouke e ces quatre
frères e Audulf e Baudwyn alereut en la terre pur
vere le pays e vitailler lur neef. A tant virent un ju-
ve[n3cel gardant berbis; e quant vist les chevalers,
s'en ala vers eux e les salua de un latyn corumpus.
Fouke ly demanda s'il savoit nulle viande à vendre
en le païs. a Certes^ sire, fet-il, nanil; quar c'est une
yle q'est habité de nule gent, si noun de poy ; e celé
gent vivent de lur bestes. Mes si vus plest venir ou
moy, tele viaunde come j'ay avérez volenters. » Fouke
le mercia e ala ou ly; le vadlet lur mena par une
caverne desoutz terre, qe fust molt bêle, e lur fist seer
e lur fist assez bel semblant. « Sire, fet le vadlet, j'ay
un serjant en la montaigne : ne vus peise si je come
pur ly ; e bien tost mangeroms. » — « De par Dieu ! »
fet Fouke. Le juvencel ala dehors le caverne, e corna
sys meotz, e revynt en la caverne.
Bien tost vindrent sis gros e grantz vilaynz e fers,
vestuz de grosse e vyls tabertz ; e chescun avoit en sa
meyn un gros bastoun dur e fort. E quant Fouke
60 HISTOIRE
gentz de voslre terre de vostre colour ?» — « Oyl ,
mon seignur, home e femme. » — a Qei dient-yl en
estrange regneez de moy ? » — « Sire, fet-yl, vus estez
' le plus renomec roy de loie la cristieneté ; e, pur
vostre grant reiiouii^ vus su-je venu vere- * — « Bel
• sirc, fet le roy, bien viegnez. » — « Sire, mon seignur,
I ^rant mcrcy- » Johau dist qu'il fust rcnonieé plus pur
mavesié cjc bountc ; mes le roy ne renlendi poinU
Johau fisi le jour meyuie meneslral&ie de tabour e
d'autre instnmienU.
Quant le roy fual aleà cocher, sire Heni-é de Au-
delée ihi aler pur le neyr menestral, e le amena en
sa chambre, E fesoieut grant mélodie; e quant sire
^ Heure avoit bien ï>eu , donqe dit à un vadlet : « Va
quere sire Audulf de Bracy, qe le roy vek ocyre de-
meyn; quar une bone nulée avéra avant sa mort* » Le
vadlet bien tost amena sire Audulf en la chambre;
donqe parlereni e juerent» Joban comenca un chan«
son qe sire Audulf solcit chaunter; sire Audulf leva
la teste, si ly regainia en my le vys, e à grant peyne
le coniist* Sire Heure demanda à Ijteyvre; Johan fust
molt servisable : saily légèrement en pies, e devant
tous servy de la coupe, Johan ftist coynte: gitta un
poudre en la coupe » qe nul ne le aparçust; quar yl
• fust bon jogelere. E tous qe burent devyndrent si
sommylons, qe bien tost après le beyre se cochèrent
DE FOULQUES FIT2-WARIN. 61
dormyr. E quant tuz furent endormys, Johan prist
un fol qe le roy ayeit; si ly mist entre les deus che-
'v alers qe devereynt garder sire Audulf . Johan e sire
Audulf pristrent les tuayles e lintheals qe furent en la
chambre ; e, par une fenestre devers Salverne, s'escha-
perent e s'en alerent vers Blanche -Ville, qe ert xn.
lywes de Salobure.
La chose ne poeit longement estre celée; quar len-
demeyn fust tote la vérité dite al roy, qe moût fust
coroceé pur Teschap. Fouke fust levé matyn lende-
meyn, quar poy aveit dormi la nuyt ; si regarda vers
Salobure, e vist sire Audulf e Johan venyr. Ne fet à
demaunder s'il fust leé quant il les vist; si les corust
enbracer e beysir. Il les demanda quele noveles; e sire
Audulf ly conta coment Johan se conlynt e cornent il
eschaperent : dont Fouke, qe eyntz dolent ert, fist de-
duyt e grant joye.
Ore lessum de Fouke e parloms de dame Mahaud
de Caus. Quant le roy, qe tant l' aveit desirrée, sa-
voit de vérité qele fust esposée à sire Fouke, son
enymy, par le consayl l'archevesqe Hubert, molt fist
grant damage à le archevesqe e à la dame; quar il la
voleit fere ravyr. E ele fuy à Moster, e yleqe fust
delyvre de une fyle; e l'archevesqe la baptiza Hau-
wyse, qe pus fust dame de Wenune. Fouke e ces com-
paignonz vindrent une nuyetée à Caunterbure, e ame-
^v
62 HISTOIRE
iieient la dame de yleqe à lluggeforde. E demora
une pièce yleqe; pus avyut qe la dame fust enceinle,
e fust privément demorant à Albrebure. E le roy la
fist espier, e ele s'en ala de yleoqe privément à Sa-
lobure; e ileqe fust espie, e ele fust si grosse qe ele
de yleqe ne poeit traviler. E s'en fuy à la église
Nostre-Dame à Salobure; e ileq fîist delyvre de une
file qe fust baptizé Johane, qe pus fust mariée à sire
Henré de Penebrugge. Pus avoit Mahaud un fitz, qe
fust neé sur un montaigne de Gales, e fust baptizeé
Johan en une russele qe vyent de la fontaigne de
Puceles. La dame e l'enfant furent molt fiebles; quar
l'enfant nasquist deus moys avaunt son terme. E
quant l'enfant fust confermé de evesqe, yl fust apeleé
Fouke. La dame e l'enfant, qe febles erent, furent
aporteez de la montaigne à une graunge, qe fust celle
à Carreganant.
Quant le roy ne se poeit en nulle manere venger de
Fouke, ne la dame honyr e prendre , si fist une letre
al prince Lewys, q'avoit esposeé Johane, sa suere ;
e ly pria par amour oster de sa meynée son mortel
enymy e son feloun (ce fust Fouke) ; e yl ly rendroit
tous les terres qe ces ancestres aveyent unqe prises
de sa seignurye, à teles^ qu'il ly fesoit avoir le cors
Fouke. Le prince apela en sa cambre Johane, sa feme,
e la mostra le letre qe le roy son frère ly avoit maun-
DE FOULQUES FlTZ-WARIPt. 63
dée. Quant la dame avoit oy la letre, manda privé-
ment à sire Fouke lot le tenour e qe le roy velt
acordeer à son seigimr. Quant Fouke oy la novele,
molt fust dolent e se dota de tresoun ; si maunda dame
Mahaud par Baudwyn de Hodenet priyément à l'evesqe
de Canterbure, e assygna Baudwyn de venyr à ly à
Dovere. Fouke e ces quatre frère e Audulf e Johan
de Rampaygne se armèrent tôt à talent, e lur autres
gentz vindrent al chastiel Balaha devant le prince.
« Sire, fet Fouke, je vus ay servy à mon poer lealment;
mes ore, sire, ne siet-um à Qy affyer; quar, pur la
gluant promesse le roy, me volez-vus gerpyr. E le roy
vus ad maundeé une letre, la quele, sire, vus avez
celée de moy : dount, sire, je me doute le plus. » —
« Fouke, fet le prince, demorez ou moy; quar, certes,
ne le pensay de vus fere tresoun. » — « Certes, sire, fet
Fouke, je le crey molt bien ; mes, sire, je ne remeyn-
droy en nulle manere. » E prist congé de le prince e
de tous ces compaygnons. De yleqe tant erra nuyt e
jour qu'il vynt à Dovre; e yleqe encontra Baudwyn, qe
la dame mena à Tarchevesqe. E se mistrent en meer,
e aryverent à Whylsond.
Fouke e ces frères e ces autres compaignons , quant
vyndrent à Parys, si vyrent le roy Phelip de Fraunce,
qe fust venuz as champs pur vere ces chevalers de
Fraunce jostier. Fouke fust uncore mu, e ces com-
64 HISTOIRE
paignons eiisement ; quant vyrent tant beal assemblé,
demorerent pur vere les jostes. Quant les Fraunçoys
virent chevalers d'Engleteire, se penerent molt le plus
de bien fere. Donqe sire Druz de Montbeaer, un molt
orgoilous^ Franceys, maunda à sire Fouke e ly pria
joster ou ly ; si Fouke meyntenaunt ly granta sa re-
queste. Fouke e ces frères se armèrent e montèrent
les bons destrers. Johan de Rampaigne fust molt ri-
chement atyreé e bien mounteé ; e si avoit un molt
riche tabour, e fery le tabour al entré des renks :
dont les montz e les ^als rebondyrent e les chyvals
s'enjolyverent. Quant le roy vist sire Fouke armeé, si
dist à sire Druz de Montbener : « Avyseez-yus bien ;
quar cely chevaler engleys est molt pruz e Taylant,
e ce piert bien. » — a Sire, fet-yl, n'y a chevaler en
tôt le mond qe je n'osase bien encontrer al chyval
ou à peé, cors contre cors. » — « De par Dieu ! » fet
le roy. Fouke e sire Druz brochèrent les destrers e
s'entre-feryrent. Fouke ly fery de sa launce par my
Teschu e pierça le bon hauberke, e par my l'espaudle,
qe la lance vola en pièces; e sire Druz chey tut plat
à terre. Fouke prist le chyval sire Druz ; sy l'amena
e le manda en présent à sire Druz, quar sire Fouke
n'avoit cure à détenir le chyval. A tant vynt un
chevaler franceis, qe à son vueyl voleit venger sire
Druz; sy fery Fouke de sa launce par my Tescu, qe sa
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 65
launce depessa. Fouke le refery en my le healme, qe sa
lance tote defruscha; e le chevaler voida les arçons,
volsist ou noun. Les frère Fouke e ces compaignons
furent prestz à joster; mes le roy ne le voleyt sofryr.
Le roy vynt poignant à Fouke, e ly dit: « Chevaler
engleys, seiez benêt; quar trop bien avez fet. » E ly
pria demorer ou ly. Fouke mercia molt le roy, e ly
granta de estre à sa Tolenté. Fouke le jour de meynt
un fust regardée, alowé e preyseé par tôt. Fouke avoit
tele grâce qu'il ne vynt unqe en nul lyu où hardiesse,
chevalerie, prouesse ou bounteé fust, qu'il ne fust tenuz
le meylour e santz pier.
Fouke demora ou le roy Phelip de Fraunce, e fust
ameé e honorée de l[e] roy e la roigne e totes bone
gentz. Le roy ly demanda quel noun avoit; Fouke
dit qu'il fust apeleé Amys del Boys. « Sire Amys, fet
le roy, conussez-vus Fouke, le fitz Warin, de qy um
parle grant bien partut? » — « Oïl, sire, fet-il, je l'ay
sovent veu. » — « De quel estature est-il ?» — o Sire,
à mon entendement, de meisme l'estature qe je suy. »
Fet le roy : « Yl puet bien, quar vaylantz estes ambe*-
deus. » Fouke ne poeit oïr de nul tornoy ne jostes par
tote France qu'il ne voleyt estre ; e par tôt fust prysë,
ameé e honorée pur sa proesse e sa largesse.
Quant le roy d'Engleterre savoit qe sire Fouke fust
demorant ou le roy Phelip de Fraunce, manda al roy
9
76 HISTOIRE
ces powées. Ë meyot uu ad si aporteé e mangée y
dount vus poez là dehors vere les os. E pluz ayme
humayne char qe nul autre ; e quant sa hydouse face
e sa barbe sunt ensenglaunteez, donqe vient-il à moy
e me fet laver de clere ewe sa face e sa barbe e son
pys. E quant ad talent de dormyr, vet à sa couche qe
tôt est de fyn or ; quar il ad tele nature qu'il est trop
chaut à démesure, e or est molt freyd par nature; e,
pur se y refroidir, jl se couche en or. E quant vet à
m couche, il prenl uu gros piere, come vus poez vere
là ; si le met a[ us devant, pur doute de moy que je ne
le deveroy ocyre en dormant; quar il ad sen de homme
e me doute granlement. Ë, à drein^ je say bien qe il
ra'ociera, »> — « Par Deu I fet Fouke, si Dieu plest,
no un fra, »
Fouke prist la damoisele; si la bailla à sire Audulf
à garder, e s*eu issirent de la roche* E ne furent gères
issuz qu' il ne vyrent le dragoun vola un t en Teyr venyr
vers eux. Si gitta de sa bouche, qe chaut ert, fumée e
flambe molt oryble* E si fu&t trop lede beste ; si avoit
grosse ieslei dentz quarreezj fera les powés, long la
cowe* Le dragoun^ quant vist Fouke, si se fery à ly ; e,
de sa powe en volant, ly fery eu Teschu qu'il Tenracha
par my. Fouke leva Teapée, si ly fery le dragoun eu
la teste auxi durement come il poeit. E le coup ne ly
malmist de rien, ne il ne s'enmaya de rien pur le
•V
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 77
coup : tant eut dur Tescharde e Tesçlot devant! Le
dragoun preut son cours de loyns pur durement fe-
ryr; e Fouke, qe le coup ne puet endurer, guenchy
derire Tarbre q'est à utre la fontaygne. Fouke apar-
çust qu'il ne poeit le dragoun damager devaunt, si se
avysa à un retom qe le dragon fist; si ly fery bien del
corps sur la cowe, e la coupa en deus. Le dragon
comença crier e brayre ; saut à la damoysele, si la to-
leit prendre e porter aylours ; e sire Audulf la defendy .
Le dragon prist sire Audulf de sa powé si estroyte-
ment qe, si Fouke n'ust venuz plus hastivement, il le
ust afoleé. Donqe Tynt Fonke, si coupa la powé, e à
grant peyne delyvra sire Audulf; quar durement le
ayoit de sa powé encloeé par my le hauberc. Fouke
fery le dragoun en my la bouche de l'espée, e par
ileqe le oci^t. «
Fouke fust molt las, e se reposa une pièce; puis ala
à la couche le dragon, e prist le or quanqu'il yleqe
trova e fist aporter à sa galye. Johan de Rampaigne
tasta la plaie sire Audulf, e la medicina; quar bien
savoit de medicines. Mador retornd sa neef vers Car-
tage; e ariverent en la contrée, e rendyrent al duc sa
file, qe molt fust leé quant yl la vist. La damoisele
ad counté à son seignur quele vie ele ad démenée, e
coment Fouke ocist le dragoun. Le duc chay as peés
Fouke e le mercia de sa file; e ly pria, si li plust,
78 HISTOIRE
qy'il volsist demorer eu le pays, e il ly dorreit tote
Caitage ou sa file en mariage. Fouke ly mercia fine-
ment de cuer pur son bel profre, e dit qe volenters
prendreit sa file, si sa cristieneté le poeit sofTryr; quar
femme avoit esposée. Ce dit, Fouke demora ileqe tanqe
Audulf fust seyn de sa playe; e donqe pnst congié del
duc, qe molt fîist dolent pur le departyr. Le duc lur
dona meynt bon juel e bel, e destrers molt bels e
ygnels, e à chescuu dona ryche dons.
Fouke e ces compaignouns siglerent vers Engle-
terre. Quant vyndrent à Dovre, entrèrent la terre ; e
lesserent Mador ou la nef en un certeyn leu, là où il
ly porreyent trover quant vodreyent. Fouke c ces
compaignons avaient enquis des paissantz qe le roy
Johaii fust à Wyndesoure , e se mistrent privément
en la voie vers Wyndesoure. Les jours dormyrent e
se reposèrent, les nuytz errèrent tanqu'il vyndrent
à la foreste; e là se herbigerent en un certeyn lyw où
yl soleynt avant estre en la foreste de Wyndesoure ,
quar Fouke savoit yleqe tous les estres. Donqe oye-
rent veneours e bemers corner, e pur ce saveyent qe
le rey irroit chacer. Fouke e ces compaignons s'armè-
rent molt richement. Fouke jura grant serement qe
pur pour de moryr ne lerreit qu'il ne se vengeroit de
le roy, q'à force e à tort ly ad desheryteé, e qu'il ne
çhalengereit hautement ces dreytures e son herytage.
DE FOULQUES FITZ-WARIW. 79
Fouke fist ces compaigaons demorer yleqe; e il mey-
mes, ce dit, irreit espier aventures.
Fouke s'en ala, e cncontra un viel charboner por-
tant un trible en sa meyn ; si fust vestu tôt neir,
corne apert à charboner. Fouke ly pria par amour
qu'il ly velsist doner ces vestures e sa trible pur du
seon. a Sire, fet-il, volenters. » Fouke ly dona x.
besantz, e ly pria pur s'amour qu'il ùe le contast
à nuUy. Le charboner s'en va. Fouke remeynt, e se
vesty meyntenant de le atyr qe le charboner ly avoit
doneé, e vet à ces charbons; si comence de adresser
le feu. Fouke vist une grosse fourche de fer; si la
prent en sa meyn, e dresse saundreyt e landreyt ces
coupons.
A tant vynt le roy ou treis chevalers, tôt à peé, à
Fouke là où il fust adresaunt son feu. Quant Fouke
vist le roy, assez bien le conust; e gitta la fourche de
sa meyn, e salua son seignour, e se mist à genoyls
devant ly molt humblement. Le roy e ces trois che-
valers aveyent grant ryseye e jeu de la noreture e de la
porture le charboner ; esturent ileqe bien longement.
a Daun vyleyn, fet le roy, avez veu nul cerf ou bisse
passer par ycy ?» — a Oyl, mon seignour, pieca. » —
aQuele beste veitez-vus?» — «Sire, mon seignur,
une comuée; si avoit longe corns. » — « Où est-ele? »
— « Sire, mon seignur, je vus say molt bien mener
80 HISTOIRE
là OÙ je la vy. » — « Ore avant, daun vyleyn ! e nus
vus sîweroms. » — « Sire, fet le charboner, prendroy-
je ma forche eu meyn ? quar, si ele fiist prise, je en
averoy garant perte. » — « Oyl, vyleyn, si vus volez. »
Fouke prist la grosse fourche de fer en sa meyn, si
amoyne le roy pur archer; quar yl avoit un molt
bel arke. « Sire, mon seignur, fet Fouke, vus plest-il
attendre, e je irroy en Tespesse e fray la beste venir
cest chemyn par ycy ?» — « Oïl, » ce dit le roy.
Fouke hastyvement sayly en le espesse de la foreste,
e comanda sa meyné hastyvement prendre le roy
Johan : « Quar je Tay amenée sa, solement ou treis che-
valers; e tote sa meysné est de l'autre part la foreste. »
Fouke e sa meyné saylyrent hors de la espesse, e es-
crièrent le roy, e le pristrent meintenant. « Sire roy,
fet Fouke, ore je vus ay en mon bandon; tel jugement
froi-je de vus come vus vodrez de moy, si vus me
ussez pris. » Le roy trembla de pour, quar il avoit
grant doute de Fouke. Fouke jura qu'il morreit pur
le grant damage e la desheritesoun qu'il avoit fet à ly
e à meint prodhome d'Engleterre. Le roy ly cria
mercy, e ly pria pur amour Dieu la vie ; e yl ly ren-
dreyt enterement tou son héritage e quanqu'il aveit
tolet de ly e de tous les suens, e ly grantereit amour
e peès pur tous jours, e à ce ly freit en totes choses
tiele seureté come yl meysmes voleit devyser. Fouke
DB FOULQUES FITZ-WARIN. 81
iy granta bien tote sa demande à tieles^qu'il ly danast,
veantz ces chevalers^ ta foy de tenyr cest covenant.
Le roy ly plevy sa fey qu'il ly tendroit covenant , e
fust molt leé que issi poeit esckaper.
£ Veyynt à soun paleis, e fist fere assembler ces
cheyalers e sa meisné, e lur counta de mot en autre
cornent sire Fouke le avait desçu; e dit que par force
fist cel serement : pur quoy qu'il ne le vek tenyr; e
comaunda que tous se armassent hastivement à pren-
dre ces félons en le parke. A tant pria sire James de
Normandie, que fust cosyn le roy, qu'il poeit aver
l'avaunt-g^arde ; e dit qe les Engleis, à poy tous les
grantz, sunt cosyns à sire Fouke, e pur ce sunt trei-
tours al roy, e ces felouns ne vueillent prendre. Donqe
dit Rondulf, le counte de Cestre : « Par foy, sire
chevaler! sauve le honour nostre seigneur le roy,
noun pas vostre, vous y mentez. » E ly vodra aver
féru del poyn, si le counte mareschal ne ust este;
e dit qu'il ne sount ne unque furent treitours à le
roy ne à suens, mes bien dit que tous les grantz e
le rey meismes est cosyn al dit Fouke. Dont dit le
counte mareschal : « Aloms pursyvre sire Fouke :
d<mqe verra le roy qui se feyndra pur la cosynage. »
Sire James de Normandye e ces xv. compaignouns
chevalers se armèrent molt richement e lot de blaun-
che armure, e furent tous noblement mountez de blancz
83 HISTOIRE
destrers; e se hasta devant ou sa cofiupagnie, pur ayer
pris.
E tôt lur afîere avoit Johan de Rampaig^ne espieé^
e counté à sire Fouke qe ne poeit en nulle manere
eschaper si par bataille noun. Sire Fouke e ces com-
paignouns se armèrent molt richement^ e se mistrent
hardiement contre sire James^ e se défendirent Tlge-
rousement: e ocisterent tous ces compargnouns, estre
quatre que furent à poi naufrés à la mort; e sire James
fust pris. Sire Fouke e ces compaignouns se armèrent
meintenant de les armes sire James e des autres Nor-
mauntz; e mounterent lur bons destrers que blanks
erent^ quar lur destrers demeyne furent las e mesgres;
e armèrent sire James de les armes sire Fouke; e lye-
rent sa bouche, qu'il ne poeit parler; e mistrent son
helme sur sa teste, e chevalcherent vers le roy. E quant
yl les vist^ il les conust par les armes, e quida qe sire
James e ces compaignouns amenèrent sire Fouke.
Lors présenta sire Fouke sire James à le roy, e dist
que ce fust sire Fouke. Le counte de Cestre e le counte
mareschaly quant ce virent , moût furent dolentz. Le
roy, pur le présent, ly comaunda qu'il ly baysast; sire
Fouke dit qu'il ne poeit attendre de oster son healme,
quar yl ly covensist pursyvre les autres 6tz Warin.
Le roi descendy de soun bon destrer e comanda qu'il
le mounta, quar isnel ert à pursiwre ces enymys. Sire
DE FOULQUES FITZ-WARIM. 83
Fouke descendy, e mounta le désirer le roi, e s'en va
vers ces compaignouns, e s'en fuyrent bien sis lyws
de yleqe. E là se désarmèrent en un boschage^ e lavè-
rent lur playes; e benderent la playe Willam, son
frère, qe durement fust naufré de un de Normauntz,
e le tyudrent pur mort : dont tous fesoient duel à
démesure.
Le roy comaunda meyntenaunt pendre sire Fouke.
A tant vint Emery de Pyn, un Gascoyn, qe fust pa-
rent à sire James^ e dit qu'il le pendreit ; e le prist^
e le amena un poy de yleqe, e fist oster son healme ;
e mcyntenant vist qe ce fu James, e delya sa bouche.
E il ly conta quanqe avynt entre ly e sire Fouke.
Emery vint meinteoaunt au roy, e amena sire James,
qe ly conta coment sire Fouke ly avoit servy. E quant
le roy se aperçust estre issi desçu, molt fust dolent,
e jura grant serement qe jà ne se devestereit de son
haubreke avaunt qu'il avoit ces treytres pris. E de ce
ne sa voit sire Fouke rien.
Le roy e ces countes e barouns les pursierent par
le esclot des chivals, tant qu'il vindrent à poy à le
boschage là où Fouke fust. E quant Fouke les aper-
çust, plourt e weymente Willam, son frère, e se tient
perdu pur tous jours. E Willam lur prie qu'il cou-
pent sa teste e la emportent ou eux, issi qe le roy,
, quant irovee son cors, ne sache qui yl fust. Fouke
84 H18T011IK
dit qe ce ne freit pur le mounde, e prie molt tendre-
ment en ploraunt qe Dieu pur sa pieté lur seit en
eyde; e tiel duel^ come entre eux est, ne veistes unqe
greindre fere.
Rondulf^ le eounte de Gestre, vint en prime chef;
e quant aperçust sire Fouke, comaunda sa meisné
arestier ; si voit privément à sire Fouke, e li pria pur
le amour de Dieu rendre sei al roy^ e yl serroit pur
ly de vie e de raenbrei e qu'il serroit bien apeseé al
roy. Fouke redist que ce ne froit pur tut le aure du
mounde : « Mes, sire cosyn, pur l'amour de Dieu^ je
TUS prie qe moa frère qe là gist, quant il est mors>
qe Yus face^ enterrer son cors, qe bestes savages ne
le deroureut, e les nos, quant mort sûmes. E retomei
à vostre seignur le roy, e fêtes à ly vostre senrice sanj
feyntyse e saunz avoir regard à nus, qe sûmes de vustre
sang; e nus reccTeroms ore issi la destiné qe à iios
est ordinée. » Le eounte tôt em plorant.retoma à sa
meyné. Fouke remeint, qe molt tendrement plourt de
pieté pur son frère, qe ly covent à force ilecp lesser;
e prie à Dieu qu'il lur socourt e eyde.
Le eounte comande sa meisné e sa compaignie à
le asaut, e yl si ferirent vigerousement. Le eounte
meismes asayly sire Fouke ; mes à dreyn le jcounte
perdy son cbival, e sa meisné fiist grant partie ocys.
Fouke e ces frères se défendirent kardiement; e corne
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 8^
Fouke se defendy, sire Berard de Bleés ly Tynt derere
e ly feri de son espée en le flanc, e le quida aver ocis.
A taunt se retoma Fouke, e ly referi sur le espaiidle
senestre ou ambedeus les mayns, e ly coupa le cuer
e le pulmoun; e chei mort de soun désirer. Fouke
avoit taunt seigné qu'il palma sur le col de son destrer,
e le espeye chey de sa meyn. Donqe comença duel
à merreille entre les frères. Johan, son frère, sayly
derere Fouke sur le destrer e ly sustynt, qu'il ne poeit
cheyer ; e se mistrent à fuy te, quar poer ne aveient
de deiiK»rer. Le roy e sa meyné les pursiwyrent; mes
prendre ne les purreynt. Tote la nuit errèrent issi,
qe léndemayn matyn vindrent à la mer à Mador le
maryner. Donque reverci Fouke, e demaunda où il
fust e en qy poer ; e ces frères ly confortoyent à mieux
qu'il purroient, e ly cochèrent en la nef eq un molt
bel lit, e Johan de Rampayne medicina ces playes.
Le counte de Cestre avoit grantment perdu de sa
gent; e vist dejouste ly Willam le fitz Warin à poy
mort, e prist le cors e le maunda à une abbeye pur
medeciner. Au drein fust ileqe aparçu; e le roy le fist
venyr en litere devant ly à Wyndesoure, e la fist ruer
en profounde prisone, e molt fust corocé à le counte
de Cestre pur ce qu'il le cela. Fet le roy : « Fouke est
naufré à la mort, e cesti ay-je ore ici ; les autres averei-
je bien, où qu'il seient. Certes, m'en poise durement de
8€ HISTOIRE
le orgoil Fouke; quar si orgoîl ne fust, il ust unquore
vesqy. £, tant corne il fust en vie^ n'y eut tiel chevaler
en tôt le mounde rdont grant pierte est de perdre un
tel chevaler. »
En la raer de près Espaigne est une ysle tote close
de haut roche, e si n'est que une entré; si est apelée
Beteloye, une demie luwe de long e autretant de leé,
e là n'y avoit home ne beste habitaunt. Le sisme jour
vindrent à ce ysle. Fouke comença donqe dormyr,
quar sis jours devant ne avoit dormy. Ces frères e sa
meisné alerent à la terre; e yl meismes soulement
dormy en la nef, que fîist fermée à la roche. A taunt
survynt un hydous vent, e rompy le cordes de la nef,
e emporta la nef en haute mer : lors se enveilla Fouke,
e vist les estoilles e le firmament, apela Johan son
frère e ces autres compaignons ; e nuUy le respondy,
e vist qu'il fust soulement en haute mer. Donqe co-*
mença à plurer e maldire sa destiné, que ly fust si
dure; e regreta ces frères. Lors ly prist un somoil, e
bien tost ariva sa nef e[n3 la terre de Barbarie à la
cité de Tunes.
E yleqe adonqe estoit Messobryns, le roy de Bar-^
barie, ou quatre rois e sis admirais, qe tous furent
Sarazyns. Le roi se apua en un tour vers la mer, e
vist celé merveilleuse galye arivé en sa terre, e comanda
deus serjauntz aler e vere ce qe fust. Les deus serjauntz
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 87
"entrèrent la nef; rien ne troverent, si le cheyaler
noun, qe uncore fust endormy. Le un le bota de ces
pies e le comaunda esyeiller. Le cheyaler saut sus
come houme effraeé, si le fery de le poyn qu'il chay
outre bord en my la mer; le autre se mist à fuste, e
Tint counter le roi coment ly ayynt. Le roi comanda c.
chevalers aler prendre celé nef, e amener à ly le che-
yaler. Les c. cheyalers tôt armés yindrent à la nef, e le
assailerent de tote partz. Fouke se defent hardiement
countre tous; mes à drein se rendy, à tieles^ qu'il ne
ayeroit si bien noun. Yl le amenèrent deyant le roy, e
il comaunda qu'il fust bien seryi en une chaunbre.
Isorie, la suere le roy, le soleit soyent yisiter e con-
forter ; e si fust trebele e gentile damoisele. E aperçust
qu'il fust playé en la flanke, e ly pria pur amour que
yl la dist coment out noun e de quele terre fust e en
quele manere fust playé. Yl la respoundy qu'il ayoit
à noun Maryn le Perdu de Fraunce, e qu'il ama ten-
drement de cuer une damoisele file de un counte de
son païs, e ele ly refist grant semblaunt d'amour; mes
ele ama plus un autre. « E ayynt que ly e moy un
jour fumes assemblés par graut amour, e ele me tint
entre ces bras molt estroit : à taunt suryynt le autre qe
ama plus, e me feri issi de un espé ; e pus me mistrent
en une galye en la mer pur mort, e la galye me amena
en ices parties. » — ^ a Certes, dit Isorie, celé damoisele
88 HISTOIRE
ne fust gères cortois. » Isorie prist sa harpe, (fd molt
riche fust, e fist descaunz e notes pur solacer Fouke;
quar le vist bel e de oorieise poiture.
Fouke demaund à Isorie la bêle quei fust la noyse
qe fust deraunt le roi en la sale, «i Certes, fet-ele, je
le TUS dirroi. En la terre de Yberie a'voit un duc qe
fust apelé duc de Cartage; e avoit une très bêle fyle,
Ydoyne de Cartage. Celé yivaunt, le père sojorna en
un son chastiel de Cartage. A tant yint un dragoun,
qe la prist e emporta en un haut mount en la mer;
e la tynt plus qe sept aunz, si^là qe un chevaler de
Engletere, que fust apelé Fouke le fitz Warin de Meés,
vint sur cel mont e odst le dragoun, e la rendy à son
piere. Tost après le duc morust. Ele tient tote la du*
cheyse. Le roi mon frère maunda à ly messagers qu'il
la preudroit à femme, e ele le refusa; e pur yergoyne
qe le roi ayoit, fist assembler grant pueple e destruit
ces cités, abati ces chastiels. La damoisele s'en fui en
estraunge règne pur qerre sooours; mes ore est-ele re-
venue ou pueple saunz nonbre, e comence fièrement à
guerrer le roy, e si est preste de fere bataille countre
ost ou cheyaler countre cheyaler; issi que si le suen
seit yencu qe ele ayle vers sa terre, e si le nostre seit
yencu, qe le rey mon frère entièrement restore ces
damages. E sur ce yindrent huy en sale fieres messa-
gers; e plust à dieu Mahoun que y us fussez tiel qe la
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 89
bataille de par le roy mon frère ossasez preadre ! quar
grant honeur vus ayendreit. » — « Certes, ma damoy-
sele, je su grantment tenuz à mon seigneur le roy, e
nomément à y us; mes jamès bataille ne prendrei pur
Sarazyn countre Cristien, pur perdre la yie. Mes si le
roy vueille reneyer sa ley e devenyr Cristien e estre
baptizéy je prendroy la bataille, e salveroy sa terre e
ces gentz, e ly froi ayer celé damoysele dount me ayez
counté. » Isorie ya tôt counter Messobryn, son frère,
le roy de Barbarie, quanqe Fouke, qe se fet appeler
Maryn le Perdu de France, ly out promis. Le roy
graunta meyntenaunt qus^qe yodra ordyner, si yl
purra celle bosoigne issi acheyyr.
Le jour qe la bataille fust ordyné, le roy arma moût
richement sire Fouke, e Isorie meismes de bone yolenté
ly servy. Le roy e ces Barbaryns, ces admyrals e tous
ces autre gentz furent richement armés, e grant pueple
ou eux; e mistrent ayant sou cheyaler Fouke, que
deyereit fcre la bataille; e la duchesse mist ayant le
suen. Les cheyalers, que fiers furent, brochèrent les
chiyals des esperouns ; e fièrent de launces, que tron-
çounsyolent par les chauns; pus treient les espiés, e
si entre-fierent hardiement. Fouke fery le cheyal son
compaignon, que mort le abati ; mes à son yueil yl ust
féru le cheyaler. Quant le cheyaler fust à terre, dont
dit : « Mayeis payen, mayeis Sarazin de maie foy. Dieu
80 HISTOIRE
là OÙ je la vy. » — « Ore ayant , daun yyleyn I e nus
vus siweroms. » — « Sire, fet le charboner, prendroy-
je ma forche en meyn ? quar, si ele fust prise, je en
averoy grant perte. » — « Oyl, vyleyn, si vus volez. »
Fouke prist la g^rosse fourche de fer en sa meyn, si
amoyne le roy pur archer; quar yl avoit un molt
bel arke. « Sire, mon seignur, fet Fouke, vus plest-il
attendre, e je irroy en l'espesse e fray la beste venir
cest chemyn par ycy ?» — a Oïl, » ce dit le roy.
Fouke hastyvement sayly en le espesse de la foreste,
e comanda sa meyné hastyvement prendre le roy
Johan: «Quar je l'ay amenée sa, solement ou treis che-
valers; e tote sa meysné est de l'autre part la foreste. »
Fouke e sa meyné saylyrent hors de la espesse, e es-
crierent le roy, e le pristrent meintenant. a Sire roy,
fet Fouke, ore je vus ay en mon bandon ; tel jugement
froi-je de vus come vus vodrez de moy, si vus me
ussez pris. » Le roy trembla de pour, quar il avoit
grant doute de Fouke. Fouke jura qu'il morreit pur
le grant damage e la desheritesoun qu'il avoit fet à ly
e à meint prodhome d'Engleterre. Le roy ly cria
mercy, e ly pria pur amour Dieu la vie; e yl ly ren-
dreyt enterement tou son héritage e quanqu'il aveit
tolet de ly e de tous les suens, e ly grantereit amour
e peès pur tous jours, e à ce ly freit en totes choses
tiele seureté come yl meysmes voleit devyser. Fouke
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 81
ly granta bien tote sa demande à tieles^qu'il ly donast,
veantz ces chevalers, la foy de tenyr cesl coyenant.
Le roy ly plevy sa fey qu'il ly tendroit coyenant, e
fus! molt leé que issi poeit esckaper.
E Veyynt à soun paleb, e fist fere assembler ces
cbeyalers e sa meisné, e lur counta de mot en autre
cornent sire Fouke le ayôit desçu; e dit que par force
fist cel serement : pur quoy qu'il ne le yeli tenyr ; e
comaunda que tous se armassent hastiyement à pren-
dre ces félons en le parke. A tant pria sire James de
Normandie, que fust cosyn le roy, qu'il poeit ayer
l'avaunt-g^arde ; e dit qe les Engleb» à poy tous les
grantZy sunt cosyns à sire Fouke , e pur ce sunt trei-
tours al roy, e ces felouns ne vueillent prendre. Donqe
dit Bondulfy le counte de Gestre : « Par foy, sire
cheyalerl sauye le honour nostre seigneur le roy,
noun pas yostre, yous y mentez. » E ly yodra ayer
féru del poyn, si le counte mareschal ne ust esté;
e dit qu'il ne sount ne unque furent Ureitours à le
roy ne à suens, mes bien dit que tous les grantz e
le rey meismes est cosyn al dit Fouke. Dont dit le
counte mareschal : « Aloms pursyyre sire Fouke :
dcmqe yerra le roy qui se feyndra pur la cosynage. »
Sire James de Normandye e ces xy. compaignouns
cheyalers se armèrent molt richement e lot de blaun-
che armure, e furent tous noblement mountez de blancz
82 HISTOIRE
destrers; e se hasta deyant ou sa cofmpagnie, pur aver
pris.
E tôt lur affere avoit Johan de Rampaigne espieé>
e counté à sire Fouke qe ne poeit en nulle manere
eschaper si par bataille noun. Sire Fouke e ces com-
paignouns se armèrent molt richement, e se mistrent
hardiement contre sire James, e se défendirent yige-
rousement: e ocisterent tous ces compargnouns, estre
quatre que furent à poi naufrés à la mort; e sire James
fust pris. Sire Fouke e ces compaignouns se armèrent
meintenant de les armes sire James e des autres Nor^
mauntz; e mounterent lur bons destrers que blanks
erent, quar lur destrers demeyne furent las e mesgres;
e armèrent sire James de les armes sire Fouke ; e lye-
rent sa bouchei qu'il ne poeit parler ; e mistrent son
helme sur sa teste, e chey alcherent yers le roy. E quant
yl les yist, il les conust par les armes, e quida qe sire
James e ces compaignouns amenèrent sire Fouke.
Lors présenta sire Fouke sire James à le roy, e dist
que ce fust sire Fouke. Le counte de Oestre e le counte
mareschal, quant ce yirent, moût furent dolentz. Le
roy, pur le présent, ly comaunda qu'il lybaysast; sire
Fouke dit qu'il ne poeit attendre de oster son healme,
quar yl ly coyensist pursyvre les autres fitz Warin.
Le roi descendy de soun bon destrer e comanda qu'il
le mounta, quar isnel ert à pursiwre ces enymys. Sire
DE FOULQUES FITZ'WÀRIN. 83
Fouke descendy, e mounta le désirer le roi, e s'en va
yers ces compaignouns, e s'en fuyrent bien sis lyws
de yleqe. E là se désarmèrent en un boschage, e lavè-
rent lur playes; e benderent la playe Willam, son
frère, qe durement fust naufré de un de Normauntz,
e le tyndrent pur mort : dont tous fesoient duel à
démesure.
Le roy comaunda meyntenaunt pendre sire Fouke.
A tant vint Emery de Pyn, un Gascoyn, qe fust pa-
rent à sire James, e dit qu'il le pendreit ; e le prist,
e le amena un poy de yleqe, e (ist oster son healme ;
e meyntenant vist qe ce fu James, e delya sa bouche.
E il ly conta quanqe avynt entre ly e sire Fouke.
&nery vint meintenaunt au roy, e amena sire James,
qe ly conta coment sire Fouke ly avoit servy. E quant
le roy se aperçust estre issi desçu, molt fust dolent,
e jura grant serement qe jà ne se devestereit de son
haubreke avaunt qu'il avoit ces treytres pris. E de ce
ne savoit sire Fouke rien.
Le roy e ces countes e barouns les pursierent par
le esclot des chivals, tant qu'il vindrent à poy à le
boschage là où Fouke fust. E quant Fouke les aper-
çust, plourt e weymente Willam, son frère, e se tient
perdu pur tous jours. E Willam lur prie qu'il cou-
pent sa teste e la emportent ou eux, issi qe le roy,
, quant trovee son cors, ne sache qui yl fust. Fouke
94 HISTOIRE
granta entièrement tôt lur héritage. Quant Hubert le
erehevesqe ce oy, molt fust leé; e maunda meynte-
naunt ces letres à Fouke e al counte de Gloucestre e à
Rondulf le counte de Cestre e à Hue counte mareschal,
qu'il yenissent hastiyeinent î\lyk Caunterbery;e quant
furent venuz, ordinerent qe Fouke e ces frères se reii-
dreynt à Loundres à le roy. Fouke e ces frères e les
trois countes ou lur poer se apparillerent auxi riche-
ment come yl saveient e poyeynt; si vindrent par mi
Londre ou noble apparail, e s'engenoillerent al roy à
Westmoster, e se rendirent à ly. Le roy les reçust, e
lur rendy quanqe lur fust en Engleterre, e les co^o
maunda demorer ou ly ; e si firent-yl un mois entier.
Puis prist Fouke congîé, e demora ou le counte mares*
chai; e le counte ly dona sur Asshesdoune, Wantynge
e autres terres. Fouke e ces frères se armèrent à talent,
e vindrent à Abyndone^ e remuèrent de ileqe quanqu'il
purreynt trover à vendre, e les firent porter e carier
à Wantynge; e fist feyre yléque ^ ville marchande, que
pus en sa ad este tenu e uncore est.
Fouke prist coungé de le counte mareschal, e s'en
ala à le counte Rondulf de Cestre, que se apparilla ou
grant pueple vers Yrlaunde pur défendre ces droitz
yleque. Quant il furent arivez, si virent grant assem^
blé de lur enymy. Le counte comaunda qe tous se ar-
massent; e le counte avoit ou ly trois juvencels frères,
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 95
qe furent genl de grant valour e force e furent armés
e bien inountés> e ou eux fust Fouke. A taunt virent
un hiclous géant entre lur enimys, que fust bien armé
tôt à pié, hidous» neir e orrible, plus long que nul autre
de xn. pies; e crieout : « Counle de Cestre, maundez-
moy le plus yailant chevaler qe tus avez pur dereyner
vostre dreit. » Les treis juvencels, que le oyrent^ se
mistrent à ly chescun après autre; e il les ocist meyn-^
tenaunt de sa hasche qu'il tynt. A tant lest Fouke
coure le destrer, e ly vodra a ver féru de sa launce; e
le géant gwencha un poy, e fery à Fouke qu'il le ust à
poy afoleé. Fouke le dota grantment e le avysa bien,
issi qe de sa launce le fery par mi le cors ; yl chay à
terre, e en gisant fery le cheval Fouke e ly coupa les
deus pies. Fouke chay à terre e resailly, e saka l'espée
e coupa sa teste; e emporta sa hasche à Blaunche-Ville,
où Fouke avoit fet fermer en marreis un chastel fort e
bel. E issi conquist le counte tous ces terres e chastiels
en Irlaund. £ quant avoit ileqe demorreé^ e restorré
ces terres, pus relorna en Engleterre.
Fouke vint à Blaunche-Ville, e trova ileque Mahaud,
sa femme, e ces enfaunz, qe molt furent leé de sa venue;
e grant joye entre-firent. Donqe fîst Fouke aporter ces
tresours e ces richesses; terres, chivals, dona à ces
serjauntz e amis molt largement, e meintint sa terre à
grant honour. Fouke se purpensa qu'il avoit grantment
96 HISTOIRE
meserré couutre Dieu, corne en occisioun des gentz
e autres grauntz mefTelz ; e, en remissioun de ces
peschiés, founda une priorie en le honour de Nostre-
Dame seinte Marie de le ordre de Grantmont près de
Alberburs, en le boschag^e, sur la riyere de Sauyerne ;
e si est appelée la Noyele-Abbeye. E n'i a gères après
morust dame Mahaud de Caus, sa femme, e fust enterrée
en celé priorie. E, bone pièce après qe celé dame fust
deyyé, Fouke esposa une molt gentile dame, dame
Clarice de Auberyille ; e de la une e l'autre dame
engendra biais enfauntz e molt yaillauntz. Quaunt
dame Johane, la femme Lowis le prince de Walys, que
fust la file le roi Henré de Engleterre, fust deyyée,
pur le graiit renoun de prowesse e de bounté que sire
Fouke ayeit, yl maunda à ly pur Eye sa file; e il la
graunta, e à grant honour e solempneté furent es-
poseé. Mes Lowis ne yesqui que un an e demi après :
morust, e fust enseyely à Aberconewey, saunz heir
engendré de Eye. E pus fust-ele esposc à ly sire de
Blanc-Mostiers, que fust cheyaler de grant aprise, co-
ragous e hardy.
Fouke e dame Clarice . sa femme , une nuit choche-
rent ensemble en lur chaunbre; la dame dormy, e
Fouke yeilla e se purpensa de juyente, e molt se re-
penti de cuer de son trespeis. A taunt yist en la chaun-
bre si grant clareté que a meryeille, e se pensa que ce
DE FOULQUES FITZ-WARIN. 97
poeil estre. Donque oy une vois corne ce fust de tonayre
en le heir, e disoit: «Vassal^ Dieu te ad graunté ta
penaunce, que mieux valt ci qe aillours. » A celé parole,
la dame enveilly e yist la grant claretë, e mussa sa face
de pour. A taunt enyanist celé clareté. E, pus celé
claretéi unque ne poeit Fouke yere plus; mes fust
veogle pur tous jours.
Cesti Fouke fust bon viaundour e large; e fesoit
tumer le real chemyn par mi sa sale à soun maner de
Alleston^ pur ce que nul estraunge y dust passer s'il
n'avoit viaunde ou herbergage ou autre honour ou bien
du suen. Merlyn dit que
En Bretaigne la Graunde
Un lou vendra de la Blaunche-Launde;
xu. dentz avéra aguz,
Sys desouz e sis desus.
Cely avéra si fer regard
Qu'il enchacera le léopard
Hors de la Blaunche-Launde :
Tant avéra force e vertue graunde !
Mes nus le savom qe Merlyn
Le dit pur Fouke le fitz Waryn;
Quar cbescun de vus deit estre ensur
Qe en le temps le roy Arthur
La Blanche-Launde fiist appelée,
Qe ore est Blaunche-Vile nomée.
i3
9g HISTOIRE
Quar en cel pays fust la chapelc
De Seint-Austyn, que fust bek,
Où Kahuz le fitz Yweyn sounga
Qu'il le chaundelabre embla,
£ qe il a un home acountra
Qe de un cotel le naufra
E en la coste le playa ;
E il en dormaunt si haut cria
Qe roi Arthur oy le a,
E de dormir esTeilla.
E quant Kahuz fus esveilleé,
Si mist sa meyn à son costeé;
Le cotel yleqe ad trovec
Qe par mi ly out naufré.
Issi nus counte le Graal,
Le lyvre de le seint Vassal.
Yleqe recovery ly reis Arthur
Sa bounté e sa valur,
Quant il avoit tôt perdu
Sa chevalerie e sa vertu.
De cel païs le lou issist,
Come ly sage Merlyn dist,
E lea xu. dentz aguz
Par son escu avom conuz.
Yl porta l'escu endenteé,
Come les disours ont deviseé;
DB FOULQUES FITZ-WARIN. 99
En l'escu sunt xii. deniz
De goules e de argentz.
Par le leopart puet estre conuz
Le roy Johan e bien entenduz ;
Quar il porta en son escu
Les leopartz de or batu.
Cesti Fouke remist sept aunz veogle, e soffri bone-
nient sa penaunce. Dame Clarice morust, e fust ensevely
à la NoTele-Abbeye; après qi mort, Fouke ne vesqui
qe un an, e morust à Blaunche-Vyle. E à grant honour
fust enterré à la Novele-Abbeye ; de la aime de oui
Dieus eit merci ! Joste le auter gist le cors. Deus eit
merci de tous, yifs e mortz ! Amen 1
V
THE
GESTES OF GUARINE
AND HIS SUNNES •.
Thinges excerptid owte of an old Engligch boTse yn Byme
of the Ge$te$ of Guarine, and his Sunne$.
William Cooqueror toke couosel of Corbet and Morti-
mer for strenkethiag of his Marches aboute the Quarters
of Shropshire agayn the Walschmen.
The Burge of Shrobbesbyri was committid to the cure
of Roger de Belesme, where he made a Casiel.
o ^ u
Alburbyri and Aileston was committid to Guarine de
Mees.
Alan Fleilsone had gyven to hym Oswaldestre.
Payne Peverel that lovid welle hunting had Wbitington
with al the Lordship.
Payne Peverel had no Issue. But his Sister had a
Sunne cauUid William, a worthy Knight, that wan the
Hundredes of Ellesmere^ and Meilor, and other mo.
This William in this Enterprises was wondid so sore that
I Johannis lêlandi aniiquarii de rehus Britcmnicis CoUecianea,
éd. Tkoma Beainio, Oxonii, e Theatro Sbeldoniano, MDGGXY, six
Yolumes in-8«», yol. I, p. 230.
102 TUE GESTES OF GUARINfi
no man beheighi hym life : yet by eating of a sheclde of
a wilde bore he got an appeiiie, and afier recoverid.
3
This William made ihre Chirclies, as iesiifieth the book
of the Romance.
This William had Issue ii. Daughters, whereof Hélène
was maried to Alane's Heyre. And Mellet the secundo
wold hâve none but a Knight of very nobil Hardines,
Wherefore her Father promisid by crye that noble
young Men should meate at Pevereirs Place in the
Peke, and he that provid hym- Peke. Loke wither he
self yn feates of Armes should mené not Kilpek, about
haveHellethisDoughterywith the Quarters of Hère-
the Castel of Whitington . ford Est.
Guarine cam to this Enter- Guarine caullid the
price, and there faute with a redde Knight.
Sunne of the King of Scotland, and aiso with a Baron
of Burgoyne, and vanquisch'd them bothe.
Guarine had a Sheld of Sylver and a proude Pecok
apon bis heualme creste.
Guarine weddid Hellet.
Guarine warrid apon the Walsch men, and they on
him.
O J
After the death of Iweynes, Gereuerd was prince of
that part ofWales.
One Roger, a stoute Knight, and a great Owner in
Powis lande, counselid Jereuerde to warre apon Guarine,
and the Marches there aboute.
ANt> HIS SUNNBS. 103
Syre Gioun Gaudeline kept This Skirmouche was
WhitingtOD, Guarines Castel, by the Maiden welle,
and when Jereuerd wilh Syr and in ihe Maiden frîthe.
Roger was prikking ihilher
warde, lie watchid in a marisck and wodde, firste hur-
ting Roger, and then Jereuerd. Gioun Gaudeline sent
one Morgan for help to Albourbyri.
Guarine cam to the Walsch mennis campe, and ther
Jonas, brolher to the aforesaide Roger, prikid againe
hym. But at the conclusion Jereuerde was discomfilid,
and fledde wilh his Hosle.
Guarine after this foundid ihe abbay by Albourbyri,
caullid the new Abbay.
Guarine had a sunne caullid Fulco.
Joos a Knight was lefte as a Governer to yong Fulco.
Guarine and he defendid his Landes agayne one Walter,
the greatest of the Marche lorde owt of Lacy and Ludiow.
They mette at a bent by Bourne at a bridge ende a litle
from Ludlowe.
Joos bare a sheeld of sylver wilh ihre blew lyons co-
ronid with gold.
Joos had a Doughler caullid Hawise, whom Fulco Gua-
rine enlirely lovid, and seyng her in great dolour, askid
ihe cause of her sorow, and she answerid that it was no
matier for an Hauker lo amende : And he apon that toke
his Horse and Spere to rescow Joos her Faiher, as one
Godarde was aboute to slreke of his hede ; so ihat Godarde
was slayne of hym, and Gualter Lacy dryven away.
104 THE GESTES OF GUARINE
Then Joos recovered a Horse, and sore woundid syr
Arnold ihai did hym miich hurte.
Ther Fulco killid one Andrew a Knight longging to
Walter Lacy.
Gualter Lacy aud syr Arnold were taken Prisoners»
and put in tbe caslel of Ludiow in a Prison caullid Peu-
douer.
A Gentil woman, cauUid Marion, deliverid booth thèse
Knighttes by treason owle of Pendouer, for the Love of
Syr Arnold de Lis, one of them that promisid her falsely
mariage.
Fulco Guarrine weddid Hawise, Dougbier to Joos, ai
Ludiow castelle.
Joos and Fulco Guarine toke a Yourney into Ireland.
Marion taried, faining Sikenes, behinde, and Write a
Lettre to her Love Sir Arnold de Lis, to cum secretely to
her up înlo the Cnstel with a Lader of leder and cordes.
Owen of Cornewaie.
Arnold cam acording to Marions desier, and had bis
pleasure of her : and sone afier cam bis bande, and se-
cretely scalinge the Walles killid the Castellanes. Then
Hariane, seing this treason, lept owte of a Toure, and
brake her Nek : And Arnold killid after many of the Bur-
geses of Ludiow Toune, sparing nother Wife, Widow,
nor Childe.
Walter Lacy, hering that the Castel and Tonne of
Ludiow was won, cam with his Band thither, and man-
nid and vitailid Ludiow, keping it as his owne.
A^D HkS SUNNëS. loi
ïhis Tidinges was tolde to Joos lying at Lamboume.
Joos, and Fulco, and his Father Guarine cam to rescae
Ludiowy and in assaulting of it killid many of Lacys Men.
Then Lacy with a band of Hén cam oute to fight with
them : but he lesing many Men was fayne to recoyie into
tbe Town. Sone aFter tbis Guarine de Meese waxid yery
sike, and so goyng to Albourby dyed there withîn vii.
Dayes» and was buried in the new Abbay» Fulco his
Sunne and Mellet his Wife being présenta
Fulco returnid to help Joos.
Gualter Lacy sent to the Prince of Wales for Help, and
he cam wynning by the Way Whitington » the which
Gioun Gaudelines Sunne had kept a while, but after he
was taken Prisoner, and sent to the Rulheland.
u
Deonoan a Place aboute Ludlo, wilher the Prince of
Wales with his Men resortid to help Lacy.
Fulco Guarine hurte tbe Prince of Wales in tbe Shoul-
der, and drave hym to aCastelle cauUidCayhome^ where
Cay had be Lorde, and there asseging by 3. Days parte
of the Princes Men killid many of them at a cerlen Issue»
Fulco was woundidy and yet roode lo mete King Henry
by Glocestre, of whom he was welle interteynid as his
Kinnesman, and there had his Wounde that Arnoldes
Brother gave hym yn the Waste welle helid.
King Henry made Fulke a Knight, and Steuard of his
House, and Lorde, and Governor of ihos Marchis.
This Fulco Guarine had a Sunne by his Wife Hawis
likewise caullid Fulco.
'4
106 THE GESTES OF GUARINE
Jooé by King Henry's Lettre wns delyverd from Cap-
tivité of tlie Prince of Wales.
Fulco primus faiight with the Prince of Wales by
Hereford, and had Victory of hym.
Johan, Doughter toKing Henry» was maried to Lewys,
Heire to Drowedones.
The Prince of Wales restorid the Lordes of the Marches
to their Landes. But he kept Meilor and Whitington
hymself, and afier gave yt to Sir Roger, and Syr Roger
gave it to his Brother.
King Henry gave to Fulco for losse of Parte of his
Landes the Honor of Âlston.
syx
Fulco primus had foure Sunnes, Fulco, William, Ga-
rine, Philip, John and ÂÎane.
John, Sun to King Henry, and t'ulco felle atVariance
at Chestes, and John brake Fulco Hed with the Chest
Borde: and then Fulco gave hym such a Blow that he
had almost killid hym.
King Henry dubbid Fulco, and 3. of his Bretherne
Knightes at Winchester, and also Balduine with them.
Fulco the secundo was warring yn Lombardy at such
tyme as hys Father died.
Fulco the first byried at New Abbay by Alborbyry.
King Richarde the first goyng into the Holy Lande left
Fulco the secunde to kepe the Marches of Walys.
Morîce, Sunne to Roger that had Whitington Castel
gyven hym by the Prince of Wales, was made Governer
of the Marchis by King John that yu no wise lovid Fulco
Guarvne.
AND HIS SUNNES. 107
Moryce desirid io bave ihe Title of Whilington con-
fermed to hym by ihe Brode Seale of King John, to whome
he sent a cursore welIe trappid to Balduines Gastel, and
obteinid bis Purpose.
Fiilco and bis Brethern witb Balduine desired Justes
of King Jobn for Whilington. But he could bave no gra-
lius Answer. Wberfore he and bis Bretherne forsakid
their Homage to King John, and went from Winchester.
King Jobn sent one Gérard a Lorde of Fraunec, and
XV. Knightes witb hym to recounter witb Fulco and bis
(retherne. But Gérard was slayn of tbem, and the
Knighttes discomfitid.
Hawise counselid Fulke and the Residew of her Sun-
nes to flee into Lille Britane, and so they did taking
Bawdewine and Bracy witb ihem.
King Jobn seasid Fulco's Landes.
In the meane Season Hawise their Mother died for
Thought. And they after sbortely returnid intoEngland,
cumming to Hugforde, and to Sir Gualter, and Emelinc
their Aunte.
Syr Maurice bare in a Grene Shild thre Bore of Golde,
and borderid of Sylver witb Asure Floures fulle faire.
Fulco and bis Brethern put Morice to dite.
Bracy did burt Maurice in the Sboldre.
King John caussid a Hunderith Knightes to seke Fulco
and bis Brethern, and apon that they fled to Holt Woode,
and there got a greate Pray of Sylkes and Baudekins pre-
parid for King Jobn.
108 THE GESTES OF GUARINE
King John sent ouie many Knigbtes to take Fulco,
and made Gilbert de Mount Frerraunt Iheire Captaine,
rrhom Fulke and bis Bretherne did kille.
Fulco and bis Brethern sore weried witb figbting fledde
to an Abbay.
Fulco çifter killid Gérard de Maunce, an aunciente £n-
nemye of bis, and one tbat rode witb olber Knigbtes to
seke bym,
Fulco and bis Bretbern fled to Hugforde.
Hubert Arcbebissbop of Cauntorbyri willid Fulco pri-
vely to resort to bym to mary one Maude^ tbat was bis
Brotber*s Wife, tbat descendid of Caurs Blode.
But after be bad maried ber, be taried but 2. Dayes,
and was fayne yet to escue and fly the Kinges Displeasure,
Fulco fledde to Robert Sampson, and yn tbose Quar*
ters one Pers Bromeville, a perilous l^nigbt, soqte bim :
And yet at tbe laste Fulco forcid Pers Bromeville lo smite
of tbe Hedes of certen of bis owne Company : And tbeq
Fulco did smite of Pers Qedde bymself.
Fulco resortid to one Jobn of Raumpayne, a Sotbsayer,
and jocular, and minstrelle, and made bym bis Spy tq
Morice at Whitington.
Fulco and bis Brelberne laide waîte for Morice as be
went toward Salesbyri ; and Fulco tber woundîd bym :
And Bracy eut of Morice Hedde. The Sunnes of Gaude*'
line were witb Fulco at Ibis Skirmouche.
Fulco fledde to Balahames caslelle.
Syr Iweine Kandelokes Sunnes,
AND HIS SUNNE8. 109
MouDlcler adversary to Fulco.
The Prince of Walcs Morice being deade restorid Fiilk
(0 Whitingion.
Leugen, Lewis,and Slraunge Gcmilmen of iheMarchis.
Fulco had robbid Ruyton aCastel longging to Straunge,
Henry an hanly Knight was Lord of Heley.
Syr Bracy was sore woundid, and token, and brouglit
by Audeleghe to King John.
Slraunge was sore woundid, and brought to Blakmer.
John Rampaynë founde thc meanes to caste them that
keple Bracy into a deadely siepe, and so he and Bracy
cam to Fulco to Whitington.
Maude had by Fulco a Doughter caullid Hawise, and
she was weddid to
Maude had after a nother Doughter, whom the Erle
of Pembrok weddid.
After Maude had a Sunne chrislenid in the Maiden
Frilhe, and caullid John, aud at Confirmation namid
Fulco.
Mawde was ever much welcum to Johan Sister toKing
John, and Wife to Lewys Prince of Wales.
King John prively sent to Prince Lewys that he should,
by sum Polycie, take Fulco, and his Bretherne, and hed
them. But Johan, Wife to Lewys, caussid Maude to waren
Fulco and his Brelherne of this, and apon that they fled
intoFraunce, wher Fulco did get much honor yn Justes,
and namid hymself Syr Amice.
But after that King John had wryten to the King of
liO THE GESTB8 OF GUARIMË
FrauDce that he kepi Fulco bis Rebelle, he mîsdemid
siraite that Syr Amice was this Fulke, and knowiDg tbe
Trueth, be promisid a Barony in Fraunce to Fulco: but
be refusid it, desiring to départ, and so cam to Madour
of (be Mounte, a joly Capitain by Se, and tbere with
Fulco preparid a stronge Shyp, and saylid into the Cost
of flqgland, wber be siew a Knight tbat in Sbippe layd
watch ' from bym. And thens be saylid înto Orkany, and
tbere be wonne tbe Hauberk of barde Steele tbat be beld
ever, and ryd cerlaync Ladies owt of Prison , wbereof
one was Amfloures Heire, and brougbt tbem to Bagote's
Castel , and after bow be and bis were long tyme Se
dryven witb Tempestes into StraungeCountereis,and to
Cartbage, and after long tyme bow be landid at Doyer,
and cam to a Woodde by Windesore Parke, and because
tbat be berde tbat (be King wold bunte in tbat Place,
for Fere of knowing be chaungid bis Clotbes witb a
Colyar, and sone after tbe King cam by, and askid bym if
be saw any Game, ai\d be answerid ye, and so ledde bym
to bis Tente, wbere is Bretberne as bis Company were
in Covert, and tbere bavyng bym manacid bym for bis
3aniscbment witb Deatb: But tbe King grauntid tbem
al Pardone apon bis Honor and Trueth, and gave bym
Fre Hunting from tbe Holt onto bis Castel. But be after
resoriing lo Windesore fortbougbt bym of bis Pardon and
Graunt to Fulco, and sent 15. Knightes to lake tbem,
« Sic.
AMD HIS SUNNES. 111
wherof one was caullid James of Normandy. But Fulco
and his over cam iheni. '
King John sent after Randol Erle of Chester to take
Fulco : but he fled to Se; and at the last by Tempest was
dryven ynto Barbary.
William Fulcos Brother was sore woundid, lefte be-
hynd, taken, and put in a Doungeon.
Fulco was taken by the Soldanes Men and brought
onto hym.
Hère lakMd a Quayre or tu in the olde Englisch Boo^e of
the nobile Actes ofthe Guarines. And thèse thinges that
folow 1 tramlalid owle of an olde French Historié yn
Rime of the Actes of the Guarines onto the Death of
Fulco the 2.
Fulco after that he had bene longe aboute the Quarters
of Cartage, and Barbary, and ther had the Love of a nobile
Ladie caullid Idonie, he repayrid agayn to the Quarters of
England, and there hering that his Brother William was
alyve,hefoundemeanestohaveKingJohn'sPerdone,good
Wylle, and Restitution of hisCastelle of Whitington : and
also Perdon for his Bretherne by the meanes of Randol
Erle of Chester, the Erle of GIocestre,Hughe Bigot Erle
Harescal, and Hubert Archebisshop of Gantorbyri.
After this Hugh the Erle Mareschal for Love that he
bare to Fulco gave hym the Lordship and Landes of
Waneting : where the Village by Fulco's Meane was
after made a Market Toune.
112 THE GESTES OP GUAKINB AND HIS SUNNES.
ThenwentfortheFuIcooDWarfarewithRandolCoiinte
orchestre into Ireland, and ihere did noble Féales.
Aflter Fulco foundid the As I remember ihe En-
new Abbay a Prîory in the glisch Historié of ihe Fiz-
Honor of owr Ladie in a warines attributilb Ihis (o
Wood by Albourbyri. Fiilco ihe firste.
Fulco the seconde maried Clarice of Albourville.
a Wife caullid Clarice.
This Fulco for Nobiliie was communely caullid Proud-
home«
After that Johnn the Sister of King John was dead,
Lewys Prince of Wales maried Eva Doughter to Fulco
the Secunde at Blauncheville. Lewys lyvid a Yere and
a half after that he maried Eva, and ihen dying wiih
owte Issue of her was buryed at Aberconwey.
Eva was afier maried to a noble Knighl of Blanche-
minslre.
Fulco lyvid seven Yere devotely with Clarice his Wife,
and yn his latter Dayes was striken with Blyndenes.
Clarice died afore Fulco, and was byried yn the New
Minslre or Abbay.
Fulco after dying was also with mucb Honour enterred
ut the New Abbay.
FIN.
I>ABIS. - IMPRIMERIB ET LITHOGRAPHIE DE MAULDE ET RENOU»
aOS BAIl.Ltt-1, 9*1 1.
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